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Version finale

34th Legislature, 2nd Session
(March 19, 1992 au March 10, 1994)

Monday, June 14, 1993 - Vol. 32 N° 112

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

(Dix heures huit minutes)

Le Président: Alors, Mmes et MM. les députés! Mmes et MM. les députés, s'il vous plaît!

Nous allons nous recueillir quelques instants. Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes

Alors, nous allons procéder aux affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article a de notre feuilleton.

Projet de loi 101

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le ministre de l'Environnement présente le projet de loi 101, Loi sur l'établissement et l'agrandissement de certains lieux d'élimination de déchets.

Alors, M. le ministre.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, ce projet de loi prévoit qu'à compter de la date de sa présentation à l'Assemblée nationale tous les projets d'établissement ou d'agrandissement d'un lieu d'enfouissement sanitaire ou de dépôt de matériaux secs, y compris les projets soumis au ministre avant cette date et pour lesquels un certificat n'a pas été délivré, seront soumis à la procédure d'évaluation environnementale prévue par la Loi sur la qualité de l'environnement.

De plus, ce projet permet au gouvernement, lorsqu'il délivre un certificat autorisant un tel projet, de fixer des normes différentes de celles prévues par le Règlement sur les déchets solides. Enfin, le projet de loi prévoit à quel moment ces dispositions cesseront d'avoir effet. (10 h 10)

Le Président: Merci, M. le ministre.

Mise aux voix

Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté? Adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article b de notre feuilleton.

Projet de loi 103

Le Président: Alors, à l'article b du feuilleton, M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle présente le projet de loi 103, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite.

Alors, M. le ministre.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président.

Ce projet de loi modifie la Loi sur les régimes complémentaires de retraite afin de permettre au gouvernement de soustraire un régime de retraite à l'application de la totalité ou d'une partie de cette loi dans certains cas particuliers qu'il précise.

Ce projet de loi permet à la Régie des rentes du Québec d'obliger par règlement un comité de retraite à fournir, selon les modalités prescrites par règlement, une garantie qui devra prémunir la caisse de retraite contre les pertes qu'elle pourrait subir à la suite d'un vol ou d'un détournement et protéger les personnes chargées de l'administration du régime contre la responsabilité qu'elles peuvent encourir en raison de leurs fonctions.

Enfin, le projet de loi prévoit que la Loi sur les régimes supplémentaires de rentes s'applique au Régime supplémentaire de rentes des employés de l'industrie de la construction du Québec, et ce, jusqu'à l'entrée en vigueur d'un décret énonçant les règles particulières applicables à ce régime.

Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article e de notre feuilleton.

Projet de loi 261

Le Président: À l'article e du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi 261, Loi sur l'Association de villégiature de la station Mont Tremblant.

Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de

fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé.

Je dépose donc ce rapport et, en conséquence, M. le député des îles-de-1 a-Madeleine présente le projet de loi 261, Loi sur l'Association de villégiature de la station Mont Tremblant.

Mise aux voix

Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.

Alors, M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je fais donc motion pour que ce projet de loi d'intérêt privé soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour étude détaillée et pour que le ministre du Tourisme en soit membre.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Alors, maintenant, dépôt de documents.

Dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Questions et réponses orales

Alors, nous allons maintenant procéder à des périodes de questions et réponses orales des députés et je reconnais en première question principale Mme la députée de Chicoutimi.

Contestation du milieu de l'éducation

quant à la mise en place de classes

d'immersion en langue anglaise et

modalités de leur implantation

Mme Blackburn: Merci, M. le Président.

Après la CEQ, après l'ensemble des intervenants de la Commission des écoles catholiques de Montréal, voilà maintenant qu'une coalition de commissaires d'écoles de la région de Montréal dénonce avec véhémence le projet de loi 86 qu'ils qualifient de coup de force linguistique. Les commissaires d'écoles dénoncent particulièrement le message ambigu envoyé aux enfants d'immigrants qui ne sauront plus, du français ou de l'anglais, quelle langue appronfondir.

Ma question au ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française: Le ministre ne conclut-il pas que le volet langue d'enseignement de son projet de loi 86 est carrément désavoué par ceux et celles qui, en cette matière, sont les plus aptes et compétents à évaluer la portée et l'impact de la mise en place des classes d'immersion en anglais?

Le Président: M. le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française.

M. Ryan: M. le Président, j'étais en tournée dans la région de l'Outaouais en fin de semaine. Il m'est justement arrivé de rencontrer par hasard un professeur d'anglais langue seconde à la Commission des écoles catholiques de Montréal. Savez-vous ce qu'il m'a dit? Il m'a dit: Ne vous fiez pas à l'opinion des ténors de notre syndicat.

Des voix: Oh!

M. Ryan: Vous avez raison et vous devez persévérer parce que, pour le bien des enfants, pour le bien des enfants et la qualité de l'apprentissage de la langue seconde, ce qui est proposé dans le projet de loi est rempli de bon sens. Maintenant, ça, c'est le premier point.

Je souligne à l'attention de la députée de Chicoutimi que les personnes qui se sont exprimées en fin de semaine à titre de commissaires d'école, au nombre de 18, si j'ai bien compris, ne représentent qu'une minorité parmi l'ensemble des commissaires d'école de l'île de Montréal. Allons vérifier ce que pensent les autres.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Chicoutimi.

À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, Mmes et MM. les députés, s'il vous plaît! Oui, s'il vous plaît! Je demande aux députés de respecter le droit de parole de chacun.

Votre question complémentaire.

Mme Blackburn: M. le Président, est-ce que l'avis d'un professeur vaut l'avis de 20 commissaires élus au suffrage universel?

Au ministre, toujours: Est-ce que le ministre, à qui une éditorialiste reproche la méconnaissance du peuple qu'il devrait servir, l'autoritarisme d'un autre âge, la suffisance, entend se rendre à l'avis d'intervenants nombreux, nombreux et diversifiés du monde de l'éducation et renoncer à la mise en place généralisée de classes d'immersion ou entend-t-il toujours imposer sa volonté, tel un véritable décret revenchard, alors qu'il n'a aucun mandat pour apporter les modifications qu'il est en train de vouloir apporter?

Le Président: M. le ministre.

M. Ryan: Déjà, il y a quelque temps, le Parti québécois, à défaut d'arguments sur le fond, avait commencé à s'en prendre à la personne du messager. Je remarque que la journaliste à laquelle on fait allusion fait la même chose, n'ayant pratiquement rien à dire sur le contenu du projet de loi...

Des voix: Oh!

M. Ryan: ...et j'ai pu le vérifier, parce que je suis allé faire une visite à ce journal, une visite d'explication où nous avons pu parler du contenu du projet de loi. On s'attaque à la personne du messager, mais je pense que tous les gens sérieux au Québec, tous les gens sérieux, voudront s'en tenir au contenu du projet de loi. Aussi longtemps qu'on discutera du contenu de manière objective et impartiale, nous sommes prêts à entendre des critiques et même à ajuster notre tir, si la démonstration nous en était faite. Mais, jusqu'à ce jour, aucune des critiques entendues sur ce point précis du projet de loi n'en a affaibli la teneur et la justification en aucune manière.

Le Président: Toujours en question complémentaire.

Mme Blackburn: Le ministre ne reconnaît-il pas qu'en matière de classes d'immersion il procède sans aucune étude lui permettant d'aller dans cette direction? Et ne reconnaît-il pas qu'avec ces classes d'immersion il fait par le biais ce qu'il n'a pas réussi à faire de façon directe, c'est-à-dire ouvrir les écoles anglaises aux enfants qui ont l'anglais comme langue maternelle, tel qu'était son voeu en 1977 et qu'il continue d'essayer de mettre en place?

Le Président: M. le ministre.

M. Ryan: La députée de Chicoutimi déforme radicalement, déforme radicalement la signification et la portée de cet article du projet de loi qui traite de l'apprentissage de la langue seconde. Le projet de loi dit tout simplement... Il ne parle même pas d'immersion. Le projet de loi dit tout simplement que l'on pourra enseigner l'anglais langue seconde en se servant d'autres disciplines au besoin, suivant des modalités et des conditions qui devront être définies dans le régime pédagogique. Que la députée de Chicoutimi attende donc que la ministre de l'Education, en temps utile, propose des changements au régime pédagogique; alors on pourra discuter. Tout ce qu'on dit dans le projet de loi a une portée infiniment plus limitée que les interprétations alarmistes et catastrophistes qu'on essaie d'en tirer pour la mauvaise information de la population.

Le Président: Alors, en question principale... M. Brassard: Additionnelle.

Le Président: ...additionnelle, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Est-ce que la ministre de l'Éducation pourrait obtenir l'autorisation de la part du commissaire du peuple aux langues officielles et du premier ministre de facto l'autorisation de se présenter en commission parlementaire et de déposer le projet d'amendement au régime pédagogique de même que des études qui justifient un pareil virage sur le plan pédagogique? Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Robillard: M. le Président, il me semble que c'est clair que, quand on regarde l'apprentissage d'une langue seconde au Québec, on doit identifier les différents facteurs qui favorisent cet apprentissage-là: premièrement, la formation des maîtres; deuxièmement, la durée qu'on accorde, le temps d'enseignement qu'on accorde à l'apprentissage de la langue et, troisièmement, l'environnement dans lequel ça se passe. Trois facteurs que tous et chacun au Québec sont capables de reconnaître comme essentiels quand on apprend une autre langue, quelle qu'elle soit. (10 h 20)

C'est dans ce sens-là, présentement, M. le Président, que nous travaillons, à partir de l'article 22 du projet de loi qui propose une pratique pédagogique et, donc, ça se situera, les balises, à l'intérieur du régime pédagogique, M. le Président. Et nous sommes en train de faire les analyses nécessaires et, d'ici quelque temps, nous serons en mesure de faire des consultations officielles, formelles, publiques avant d'arriver à une décision dans le règlement, qui est le régime pédagogique.

Le Président: Pour une autre question complémentaire.

M. Brassard: M. le Président, est-ce que la ministre compte venir en commission parlementaire qui étudie présentement le projet de loi 86, venir en commission présenter, déposer les projets d'amendement au régime pédagogique qu'elle compte apporter? Est-ce qu'elle entend venir en commission parlementaire? Est-ce qu'elle entend suivre l'exemple du boss des langues officielles qui, lui, au moins, a déposé des projets de règlement en commission?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Robillard: La ministre de l'Éducation entend suivre le processus régulier au niveau des décisions du régime pédagogique, à savoir: premièrement, consulter les partenaires du réseau de l'éducation; deuxièmement, demander un avis formel au Conseil supérieur de l'éducation et, après ça, déposer un projet de règlement, M. le Président. C'est dans ce cadre-là qu'on ne précipitera pas les choses et qu'on va se maintenir aux objectifs que nous avons de donner un outil pédagogique supplémentaire aux commissions scolaires pour que nos enfants, dans le Québec, non seulement maîtrisent bien le français, parce que ça, c'est un des objectifs dont j'entends peu parler, mais c'est notre objectif important au Québec, mais puissent aussi être capables de maîtriser l'anglais comme langue seconde.

Le Président: Pour une autre question complémentaire.

M. Brassard: M. le Président, comment la ministre peut-elle accepter un amendement de cette nature aussi important à la Charte de la langue française alors qu'elle est en train de nous dire qu'elle ne connaît pas du tout, d'aucune façon, les impacts d'une pareille mesure sur le plan pédagogique, qu'elle avoue elle-même qu'elle est en train de faire des études? Comment peut-elle accepter qu'on modifie de façon aussi substantielle la Charte de la langue française alors qu'elle est en plein brouillard?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Robillard: Non seulement la ministre de l'Éducation est bien placée pour accepter cet amendement, mais c'est elle qui l'a proposé.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, pour une dernière question additionnelle, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, triste aveu parce que, si je comprends bien, la ministre est en train de nous dire qu'elle a demandé un amendement formel à la Charte de la langue française, ne sachant d'aucune façon quels seront les impacts de cette mesure, d'aucune façon, en particulier concernant le processus tellement fragile de la francisation des immigrants. Bravo!

Le Président: Alors, Mme la ministre. S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Alors, Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Robillard: M. le Président, quand la ministre de l'Éducation apporte une telle proposition, elle pense à l'ensemble des jeunes du Québec, à l'ensemble des Québécois qui, à l'heure actuelle, se doivent d'améliorer la maîtrise de leur langue, de leur langue maternelle d'abord, mais aussi de leur langue seconde. Il s'agit seulement d'écouter les parents, M. le Président, non seulement dans la région de Montréal, mais dans toutes les régions du Québec, qui veulent que leurs fils et leurs filles soient bien armés pour le Québec du XXIe siècle. Nous allons continuer à y travailler au plan pédagogique, M. le Président.

Le Président: Alors, pour une question principale, maintenant, M. le député d'Anjou.

Situations pouvant justifier l'effet rétroactif d'une loi

M. Bélanger (Anjou): Merci, M. le Président.

Réunis en assemblée générale vendredi dernier, les membres du Barreau du Québec ont adopté une résolution dénonçant l'adoption par l'Assemblée nationale de toute loi avec effet rétroactif qui ne comporterait pas des dispositions protégeant les cause pendantes. Par cette résolution, le Barreau visait particulièrement le projet de loi 55 sur la fiscalité municipale, proposé par le ministre des Affaires municipales, Claude Ryan, ainsi que les mesures contenues dans le dernier budget du ministre des Finances.

Ma question au ministre de la Justice: Comment le ministre de la Justice, en tant que président du Comité de législation du gouvernement du Québec, peut-il laisser son gouvernement adopter ces 2 mesures qui violent de façon manifeste le principe fondamental de non-rétroactivité des lois?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Rémillard: M. le Président, j'ai eu l'occasion d'assister au congrès du Barreau. C'était un congrès historique de par le nombre d'avocats et d'avocates qui y participaient, plus de 3000, et c'était le début des cours sur le nouveau Code civil que nous avons accepté ici à l'unanimité, M. le Président, un véritable contrat social, les consensus de notre société que nous retrouvons, donc, dans notre droit civil, et j'ai mentionné ? je me permets de le redire en cette Chambre, M. le Président; le député d'Anjou était là, était présent, d'ailleurs ? qu'il y a peu de sociétés dans le monde qui ont eu la possibilité de réformer leur droit civil comme nous l'avons fait aussi substantiellement, et peu l'ont fait avec autant d'harmonie et de concertation.

J'ai eu l'occasion de discuter avec le nouveau bâtonnier, Me Paradis, que j'accueille avec beaucoup de plaisir, comme ministre de la Justice, et les questions de rétroactivité des lois, M. le Président, il faut tout simplement se référer au fait que l'intérêt public est le premier des objectifs qu'on doit poursuivre comme parlementaires.

J'ai déjà dit en cette Chambre, je le répète, qu'on doit être extrêmement prudent lorsqu'on utilise l'effet rétroactif d'une loi. On peut le faire en accord avec tous les membres d'une Assemblée, on peut le faire à la suite d'une discussion substantielle, mais on doit s'assurer que, lorsqu'on utilise la rétroactivité des lois, et cette Assemblée l'a déjà fait, on le fait d'une façon très directe et très claire, entre autres dans une loi comme la Loi sur la protection du territoire agricole. Je pourrais vous donner d'autre exemples.

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Rémillard: Alors, en conclusion, M. le Président, je répète ce que j'ai déjà dit en cette Chambre, on doit être extrêmement prudent, mais notre objectif premier, comme c'est l'objectif de tous les parlementaires, c'est l'intérêt de la population, l'intérêt public.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Bélanger (Anjou): M. le Président, est-ce que le ministre reconnaît au moins...

Le Président: Sur un appel au règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, vous avez sans doute entendu, comme le leader du gouvernement, les mots prononcés par le leader de l'Opposition officielle à l'endroit du ministre de la Justice. Je considère que ce sont des termes antiparlementaires, et j'invite le gentilhomme qui siège en face de nous à les retirer immédiatement.

Le Président: M. le député de Lévis, s'il vous plaît! Alors, évidemment, j'ai toujours demandé aux parlementaires d'éviter tout commentaire d'un côté ou de l'autre. En tout cas, il y a des propos qui ont pu être énoncés. Le député en question n'avait pas la parole. L'infraction, c'est justement d'interpeller quelqu'un quand on n'a pas la parole. Alors, je vous prierais de respecter le règlement.

M. le député d'Anjou, pour une question complémentaire.

M. Bélanger (Anjou): Merci, M. le Président.

Est-ce que le ministre a pris connaissance de la résolution du Barreau du Québec? Est-ce qu'au moins il peut reconnaître que le projet de loi 55 et le dernier budget du gouvernement du Québec violent, de façon fondamentale, le principe de non-rétroactivité des lois? Est-ce qu'il reconnaît ça au moins?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Rémillard: M. le Président, j'ai dit qu'il faut être prudent, qu'il faut regarder ce que la rétroactivité peut signifier tout d'abord en ce qui regarde des droits acquis et en ce qui regarde ensuite, bien sûr, l'intérêt public. Mais c'est ça qui commande toute notre réflexion ici! Si on en arrive à la conclusion que l'intérêt public, parce qu'on doit faire face à une situation qui nous oblige à agir d'une façon rétroactive ? je ne parle pas d'une rétroaction en matière pénale, évidemment, on met ça de côté, je vous dis en matière civile ? lorsqu'on arrive à une conclusion qu'on doit avoir un effet rétroactif pour protéger la société, pour respecter l'intérêt public, c'est la conclusion qui s'impose, M. le Président. Mais le principe de la rétroactivité des lois doit être reconnu, doit être analysé d'une façon particulièrement minutieuse et doit être l'exception dans nos travaux parlementaires, une exception qui ne peut que se justifier par l'intérêt public.

Le Président: Toujours en question complémentaire. (10 h 30)

M. Bélanger (Anjou): M. le Président, est-ce que le ministre admet que c'est acceptable, le principe de rétroactivité des lois en matière fiscale? Est-ce qu'il trouve ça acceptable, lui? Est-ce qu'il reconnaît qu'en tant que président du Comité de législation et juriscon- sulte du gouvernement du Québec il a le devoir de bloquer les projets de loi qui ne respectent pas les principes fondamentaux et règles de justice naturels, comme celui de non-rétroactivité des lois?

Le Président: M. le ministre.

M. Rémillard: Mais, M. le Président, s'il fallait s'en tenir au mot à mot de ce que vient de dire... S'il fallait s'en tenir à ce que vient de dire le député d'Anjou, ça voudrait dire qu'il y a beaucoup de projets de loi dans cette Chambre, dans les dernières années, qui n'auraient jamais eu lieu. Je vous ai cité la Loi sur la protection du territoire agricole. Je vous en cite une. Si voulez d'autres exemples, je pourrai vous en donner, d'autres exemples. Mais, dans ces cas-là comme dans tous les autres cas, M. le Président, il s'agit de prendre en considération l'intérêt public. Et j'ai déjà dit que c'est l'Assemblée nationale qui est souveraine. C'est à nous de prendre nos responsabilités comme parlementaires, en fonction de l'intérêt public.

Le Président: Pour une autre question complémentaire.

M. Bélanger (Anjou): M. le Président, comment le ministre de la Justice peut-il s'attendre que les citoyens du Québec respectent ses lois, alors que son propre gouvernement, lui-même, ne respecte pas les principes fondamentaux du droit?

Le Président: M. le ministre.

M. Rémillard: Comment le député d'Anjou peut-il dire une chose pareille, qu'on ne respecte pas les principes fondamentaux du droit? On respecte les principes fondamentaux des lois, mais c'est nous ici, comme parlementaires, qui les faisons, les lois. Et le principe de la rétroactivité, comme le principe de respecter les droits et les libertés fondamentales... On doit utiliser, par exemple, une clause «nonobstant», que je n'aime pas personnellement ? je l'ai dit à plusieurs reprises ? mais on va utiliser cette clause «nonobstant» ou dérogatoire que dans la mesure où on voit que l'intérêt public est en cause.

La même chose en ce qui regarde la rétroactivité. La rétroactivité, on va l'utiliser dans des cas où vraiment on ne voit pas d'autre solution comme parlementaires ici, M. le Président. Mais, dans l'un et dans l'autre cas, il s'agit, pour nous, d'utiliser nos responsabilités pour que l'intérêt public soit notre premier objectif, respectant les principes de législation d'une société de liberté, démocratie comme la nôtre. Et c'est ce qu'on fait.

Le Président: Pour une autre question complémentaire, M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, est-ce que le ministre

peut faire une distinction entre les lois qui agissent rétroactivement, une fois adoptées, à la date du dépôt de la loi, et les lois qui rétroagissent au moment du dépôt, mais plusieurs mois avant la date du dépôt de la loi? Il y a une grande distinction entre les deux. La loi fiscale qui rétroagit au discours du budget, c'a toujours été comme ça, on n'a pas le choix. Mais, quand une loi rétroagit plusieurs mois avant le dépôt, c'est très différent. Et je pense que le ministre devrait faire au moins cette distinction-là parce que les gens...

Le Président: M. le député...

M. Garon: On rétroagit à une loi qui a été adoptée et qui rétroagit avant qu'elle existe seulement, même avant que les gens la connaissent!

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Rémillard: M. le Président, je vois que j'ai touché, du moins, l'intérêt du député de Lévis lorsque j'ai parlé de la Loi sur la protection du territoire agricole.

M. le Président, il vient de soulever un autre problème qui, aussi, est un problème de taille pour un parlementaire. Adopter une loi et dire que cette loi s'applique du moment de la présentation de cette loi en travaux parlementaires, c'est de la rétroactivité. Je ne dis pas qu'il ne faut pas le faire, mais je vous dis que vous venez de me donner un autre exemple qui démontre que, comme parlementaires, il faut prendre nos responsabilités, et c'est ce que vous avez fait dans le cas de la Loi sur la protection du territoire agricole, dans les circonstances que vous avez appréciées. Alors, vous n'avez pas de leçons à nous faire.

Le Président: Un instant! Oui. Un instant! À l'ordre, s'il vous plaît!

Pour une dernière question complémentaire, M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, est-ce que le ministre de la Justice, qui a déjà enseigné le droit et qui a déjà enseigné qu'il ne fallait pas faire de loi rétroactive ou très exceptionnellement, fait la distinction, est capable de faire la distinction entre des lois qui rétroagissent plusieurs mois avant leur dépôt à l'Assemblée nationale, comme c'a été le cas cette année avec la loi fiscale qui rétroagit au 1er janvier, alors qu'elle a été déposée le 20 mai, par rapport à une loi qui est déposée le 20 mai mais qui s'applique à partir du 20 mai, même si elle est adoptée plusieurs mois plus tard?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président! Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Rémillard: M. le Président, s'il y a un membre de cette Chambre qui ne devrait pas se lever sur ce sujet, ce serait le député de Lévis. Des voix: Oh! Oh!

M. Rémillard: Ce serait le député de Lévis. Quand vous pensez que dans les circonstances, quand cette Loi sur la protection du territoire agricole a été votée, tous les gens qui avaient gardé leurs fermes, qui étaient prêts à les vendre, jusqu'à la dernière minute, ils sont arrivés puis ils ont dit qu'une loi s'applique du moment de sa présentation. Vous n'appelez pas ça de la rétroactivité, vous! Comment vous appelez ça? Je n'ai pas de leçons à recevoir de vous.

Le Président: Pour une question principale maintenant, M. le...

Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Hausse des frais de scolarité

à l'université et accessibilité

aux études supérieures

Pour une question principale, M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition.

M. Brassard: M. le Président, dans son discours du budget, le ministre des Finances a indiqué son intention de hausser à nouveau les frais de scolarité à l'université. Après les avoir fait tripler ? et je vous rappelle que c'est le premier ministre, de facto, qui a présidé à cette hausse, à l'époque ? depuis le dégel de 1990, il s'agirait maintenant de les aligner sur la moyenne canadienne, ce qui les ferait passer de 1500 $ à plus de 2250 $, une surtaxe de quelque 800 $.

Lors de l'étude des crédits de son ministère, la ministre déclarait pourtant, et je la cite: «Vous savez très bien qu'on a des défis à relever qui sont propres au Québec. On a encore des objectifs d'accessibilité, ce qui n'est peut-être pas le cas pour d'autres provinces canadiennes, de façon particulière chez les francophones, et c'est pour ça que nous agissons avec prudence en la matière.» «En la matière», c'est-à-dire en matière de frais de scolarité.

À ce moment-là, M. le Président, tout le monde avait compris, les leaders étudiants qui étaient présents en commission et nous-mêmes aussi, qu'il y avait comme une pause, un répit dans le rythme d'augmentation des frais de scolarité, qu'on se contentait d'à peine 2 % d'augmentation.

Alors, ma question à la ministre de l'Enseignement supérieur: Pourquoi a-t-elle changé d'avis? Comment peut-elle être d'accord avec une hausse de 800 $ des frais de scolarité et, en même temps, dire oui aux objectifs d'accessibilité très ambitieux fixés par le Conseil supérieur de l'éducation qui fixe à 35 % l'accès à l'université, alors qu'on est seulement à 28 %? Comment peut-elle concilier ces objectifs d'accessibilité et une hausse de 800 $ des frais de scolarité?

Le Président: Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

Mme Robillard: m. le président, le gouvernement a toujours poursuivi une politique d'accessibilité aux études supérieures, depuis longtemps, au québec et, à chaque fois qu'il a fixé le niveau des droits de scolarité à l'université, il a toujours tenu compte de cet objectif de base que plus de jeunes accèdent non seulement à l'université, mais aussi au collégial. dans ce sens-là, m. le président, on sait tous qu'en 1990 on a eu une hausse fort importante de 350 $. on en a eu une autre de 350 $ en 1991. mais, en 1992, on a eu une hausse de seulement 6 % et, en 1993, une hausse de seulement 1,9 96, une hausse qui était liée à l'indice des prix à la consommation. et, en même temps, quand on regarde les taux d'augmentation de la clientèle universitaire, on s'aperçoit qu'au fil des années où nous avons connu ces hausses nous avons connu, en même temps, une hausse de la clientèle aux universités. même l'an dernier, m. le président, on a augmenté de 2,3 % le nombre des étudiants. il n'y a eu aucune diminution au niveau de l'accessibilité. et c'est dans ce sens-là qu'on va poursuivre le même objectif.

Le Président: Alors, pour une question complémentaire.

M. Brassard: M. le Président, alors, ça signifie quoi, concrètement? Est-ce qu'on doit comprendre que la ministre nous indique que, hausser de 800 $ les frais de scolarité des étudiants à l'université, ça n'affectera en rien les objectifs d'accessibilité qu'elle s'est fixés, qu'elle a assumés, ceux déterminés et proposés par le Conseil supérieur de l'éducation? Il n'y aura pas d'effet. C'est ça qu'elle nous dit, là? 800 $ de hausse des frais de scolarité, puis ça n'aura pas d'effet sur l'accessibilité? Bravo!

Le Président: Mme la ministre.

Mme Robillard: M. le Président, il faudrait peut-être que le député de Lac-Saint-Jean relise le discours du budget et le comprenne. C'est très bien indiqué. Notre intention est de les aligner sur la moyenne de ceux payés au Canada. Notre intention, notre objectif est de les aligner. Est-il question d'une augmentation subite de 800 $? Est-il question de la durée de l'étalement? L'objectif est fixé... (10 h 40)

Le Président: Je vais demander la collaboration des collègues pour éviter, s'il vous plaît, les interpellations. S'il vous plaît! Poursuivez, madame.

Une voix: ...

Le Président: M. le député!

Mme Robillard: M. le Président, l'objectif est fixé. Il s'agit maintenant de regarder les modalités et de voir en combien de temps nous allons atteindre cet objectif. Relisons très clairement le discours du budget, M. le Président, et n'extrapolons pas au-delà de l'écrit.

Le Président: Pour une autre question complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, est-ce que la ministre pourrait justement nous préciser les modalités d'application de cette nouvelle hausse de 800 $? Ça va être quoi, là? Qu'est-ce que vous avez à dire aux étudiants qui vont être admis à l'université en septembre? Ça va être quoi, comme augmentation? Et sur combien d'années vous allez augmenter de 800 $ les frais de scolarité? Bien, quelle nous le dise! C'est comme pour les...

Le Président: Très bien. D'accord. M. le député! À l'ordre, s'il vous plaît! Oui. Alors, votre question est posée. Très bien.

Oui, M. le député.

M. Brassard: Est-ce qu'elle pourrait au moins, contrairement à ce qui se passe pour l'immersion anglaise, dissiper le brouillard sur cette question-là?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Robillard: M. le Président, il y a seulement le député de Lac-Saint-Jean qui est dans la confusion par rapport aux droits de scolarité, surtout pour ceux de septembre 1993 où il est très clair que l'augmentation est de 1,9 %. Et, donc, on regarde à partir de l'année 1994, M. le Président, et vous allez me permettre de me laisser le temps de discuter avec les étudiants et les représentants des universités avant qu'on décide de la durée de l'étalement de ce nouvel objectif du gouvernement.

Le Président: En question principale, maintenant, Mme la députée de Taillon.

Enquête générique du Bureau d'audiences

publiques sur l'environnement quant aux

impacts des projets de cogénération

Mme Marois: Merci, M. le Président.

Au moment où se déroule une première audience publique sur un projet de cogénération de la firme In-deck dans l'Outaouais, le ministre de l'Environnement n'a toujours pas mandaté le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement pour se pencher sur les aspects techniques du procédé de cogénération et il ne semble pas, malheureusement, que le gouvernement soit intéressé à tracer clairement et d'une façon systématique les lignes directrices de cette nouvelle politique en matière de cogénération. De nombreux groupes ont demandé au ministre de procéder à une enquête générique et lui-

même s'était engagé à le faire, M. le Président. Or, la crainte que nous avons actuellement c'est qu'un grand nombre de projets sont en demande un peu partout à travers le Québec et qu'on risque de s'engager dans ce processus sans avoir procédé à cette audience générique. Ce que je voudrais savoir de la part du ministre, c'est s'il est toujours convaincu, d'abord, qu'une enquête générique d'un type que nous connaissons, faite par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, soit engagée avant que l'on ne procède à la pièce, comme on semble vouloir le faire actuellement, M. le Président.

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je pense que c'est à l'occasion de sa dernière tournée dans l'Outaouais que Mme la députée a eu l'occasion, pratiquement? j'exagère peut-être un peu ? de féliciter le ministre de l'Environnement d'avoir soumis le projet Indeck à des audiences publiques. Je tiens... Non, mais on peut retourner ? il y a avait une couverture de presse ? aux écrits, et vous verrez ce que vous avez dit, et je souhaite que vous le mainteniez.

Maintenant, en ce qui concerne l'aspect technique de ce procédé, je tiens à rassurer Mme la députée que c'est inclus dans le mandat d'audiences publiques et que l'aspect technique sera soumis au BAPE.

Le Président: Alors, question complémentaire.

Mme Marois: Je pense que le ministre n'a pas compris ma question ou il l'a très bien comprise et c'est ça qui m'inquiète. Ce que je demande au ministre, avant que ça ne dégénère en pressions de la part de groupes qui vont être en désaccord avec des projets précis...

Le Président: Un instant!

Mme Marois: ...avant que les tensions n'augmentent...

Le Président: Mmes, MM. les députés, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Allez-y, Mme la députée, pour votre question.

Mme Marois: Alors, M. le Président, avant que ça ne dégénère, qu'on se retrouve dans une situation comme celle à laquelle est confronté le ministre en matière de gestion des déchets, ce que je lui demande, c'est de procéder à une enquête générique concernant l'ensemble de la question de la cogénération. Quand va-t-il le faire? Quand va-t-il mandater le BAPE pour le faire avant de procéder à la pièce, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Je sais que Mme la députée de Taillon est relativement nouvelle dans toute la question du processus d'évaluation environnementale comme tel. Le député de La Prairie, lui, savait très bien qu'avant de procéder à ce type d'étude ça prend ce que l'on appelle un promoteur qui produit une étude d'impact qui est, par la suite, soumise au bureau d'audiences publiques en matière environnementale. Dès qu'un promoteur s'affichera, le ministre l'obligera et confiera le mandat au BAPE.

Le Président: En question complémentaire.

Mme Marois: Est-ce que je dois comprendre que le ministre a renoncé à ses responsabilités et à ses pouvoirs au profit de sa collègue, la ministre de l'Énergie et des Ressources, qui a gagné sur toute la ligne dans ce dossier-là, comme pour le reste, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, moi, je ne comprends absolument pas la question de Mme la députée de Taillon. Je tiens à la rassurer. Je tiens à indiquer que je suis au service de l'ensemble des collègues du gouvernement. Si le ministre des Forêts souhaite une étude générique dans la forêt, je vais être au service du ministre des Forêts. Si le ministre de l'Agriculture souhaite une étude générique en ce qui concerne l'utilisation des pesticides en matière agricole, je suis au service du ministre de l'Agriculture. Si quelque autre ministre souhaite une étude générique dans son domaine, le ministre de l'Environnement est là pour lui rendre service, faire participer les groupes environnementaux, impliquer le public. Et c'est la même chose pour Mme la vice-première ministre. Je suis également, comme ministre de l'Environnement, si elle souhaite une étude générique, à son service. Le ministre de l'Environnement, l'environnement est au service de l'ensemble du gouvernement et de la population du Québec.

Le Président: En question principale maintenant, M. le leader de l'Opposition et député de Joliette.

Critères gouvernant la fermeture de lits, dans certains hôpitaux, pour la période estivale

M. Chevrette: Oui, M. le Président. On commence à constater de plus en plus d'annonces de fermeture de lits pour la période estivale. On dit que, dans certains hôpitaux, ce sera 1 lit sur 8, dans d'autres, 1 lit sur 6. Je voudrais savoir de la part du ministre de la Santé et des Services sociaux s'il y a une règle, des directives, ou si c'est laissé au soin de chacun des hôpitaux ou des centres hospitaliers du Québec de déterminer le nombre de lits qui doivent fermer.

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président.

Vous me permettrez très certainement, en premier lieu, de saluer des représentants des clubs de l'âge d'or des comtés de Lévis et des Chutes-de-la-Chaudière qui sont dans les galeries et qui font suite à des olympiades des aînés tenues sur la rive sud de Québec, auxquelles j'ai assisté. Il me fait plaisir...

Des voix: Bravo!

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, ce qu'il y a d'extraordinaire dans ces initiatives, c'est qu'on veut briser l'isolement des gens qui sont à domicile et c'est ce qu'on a réussi avec une journée comme celle-là, souhaitant qu'un peu partout à travers le Québec s'organise ce genre de manifestation très positive qui permet aux gens de se sociabiliser et de progresser dans la vie. C'est très intéressant.

Quant à la question du député de Joliette, M. le Président, nous sommes à une période où, effectivement, un certain nombre de lits sont fermés un peu partout à travers le Québec pour différentes raisons dont principalement celle de l'été, la période estivale, où plusieurs décident de prendre des congés, et c'est à peu près normal. Dans chacun des cas de fermeture de lits, la directive est très claire. Ça prend au préalable l'autorisation du ministère de la Santé et des Services sociaux quant à la fermeture des lits, y compris pour des périodes estivales, ou qui, dans d'autres cas, pourrait permettre à certains hôpitaux d'équilibrer leur budget, ce qui n'est pas une situation isolée, disons-le, au cours de la période estivale, puisque certains hôpitaux profitent de la période d'été pour fermer des lits ? auparavant, c'était 2 semaines, 3 semaines, maintenant pour une période un peu plus longue ? ce qui, à l'occasion, permet aux établissements d'équilibrer leur budget. Mais ce n'est pas la raison principale, la raison principale étant un personnel qui prend des vacances, et c'est tout à fait normal.

Le Président: Pour une question complémentaire.

M. Chevrette: Oui. Vous me permettrez également de saluer ces clubs de l'âge d'or qui ont des olympiades, je crois que c'est leurs quatrièmes, dans leur cas. Et j'invite le ministre dans la région de Lanaudière qui les aura prochainement, et eux aussi en sont à leurs quatrièmes.

De plus, M. le Président, je voudrais tout d'abord demander au ministre, qui admet, je pense, candidement, que certains hôpitaux le font pour boucler leur budget, puis les périodes sont différentes, mais je voudrais savoir s'ils doivent obtenir au préalable l'autorisation du ministère pour faire un tel geste. Et est-ce qu'il y a des critères sur le nombre de lits? À partir de quels critères ils ont le droit de fermer combien de lits, etc? Ou bien si c'est laissé au bon vouloir de chacun des centres hospitaliers du Québec? (10 h 50)

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, c'est d'abord, depuis avril 1993, par l'entremise des régies régionales que ces autorisations-là viennent, y compris sur le plan du contrôle budgétaire, qui est remis aux régies régionales qui, par la suite, informent le ministère. Quant aux équilibres financiers, il est évident que, dans chacun des cas où les centres hospitaliers décident de fermer des lits, ils devaient, au préalable, avant avril 1993, recevoir l'autorisation du ministère, depuis avril 1993, recevoir l'approbation de la régie régionale, et ça doit répondre à des critères, bien sûr, qui existent.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président: Toujours en complémentaire.

M. Chevrette: Mais, à ce que je sache, même dans la réforme, à partir de la loi 120, le ministre demeure responsable de la qualité des services de santé à chaque citoyen, d'autant plus que son objectif, c'était les citoyens avant toute chose. Donc, il a placé le citoyen comme premier bénéficiaire, et premier acteur principal dans la réforme.

Est-ce que le ministre se garde le pouvoir véritablement de bien contrôler ces fermetures? Il y en a eu, dans le passé, je le reconnais. Mais est-ce qu'il se garde le pouvoir d'intervenir dans le cas où une population peut être prise en otage d'un budget ou d'un équilibre budgétaire?

Le Président: M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, M. le Président, c'a été le cas sans pour autant que la population ait été prise en otage pour équilibre budgétaire. Mais certaines difficultés vécues à l'Hôpital du Sacré-Coeur de Montréal, quant à l'offre de services pour l'ensemble des régions au nord des Laurentides, nous ont fait ouvrir 32 lits, à l'année, 12 mois par année. Donc, le ministre se garde cette possibilité-là, et c'est sa responsabilité ultime. C'est lui qui doit répondre devant cette Chambre, comme on fait ce matin.

Le Président: En question principale, M. le député de D'Arcy-McGee.

Raisons présidant aux modalités d'accès aux écoles anglaises

M. Libman: M. le Président, juste avant d'ajourner pour la fin de semaine, le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française a déposé à la commission de la culture une série de statistiques sur les prévisions des effectifs scolaires étudiants en anglais de 1993 à l'an 2002. Il maintient qu'une très légère augmentation ? de 111 000 à 117 000 au cours

des 10 prochaines années ? justifie son refus d'élargir l'accès, même légèrement, aux écoles anglaises au Québec, ce qui aiderait le déclin rapide de la communauté anglaise à se renouveler.

Malheureusement, ces statistiques ne sont pas rassurantes. Si l'augmentation des inscriptions aux écoles d'une communauté minoritaire n'est pas proportionnelle à l'augmentation des inscriptions au réseau de la majorité, la masse critique de la minorité n'augmente pas assez rapidement en proportion à la majorité, et ceci amène la fermeture de plus en plus d'écoles.

Ma question au ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française: Est-ce qu'il croit vraiment que cette légère augmentation ? moins de 1 % par année au cours des 10 prochaines années ? est suffisante pour avoir le moindre impact positif pour insuffler une nouvelle vie au réseau scolaire anglais au Québec?

Le Président: M. le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française.

M. Ryan: Les statistiques que nous avons déposées viennent, à tout le moins, nuancer singulièrement les verdicts et les pronostics très pessimistes qu'on entend habituellement de la part de porte-parole de la communauté anglophone. Je pense qu'à la lumière des données contenues dans le document que nous avons déposé vendredi en commission on ne peut plus dire qu'il y a déclin inexorable des inscriptions dans les écoles anglaises. Que le degré d'augmentation ne soit pas satisfaisant pour le député de D'Arcy-McGee et de nombreux leaders de la communauté anglophone, je le conçois très bien.

Le gouvernement établit clairement sa politique dans le projet de loi 86, et je remercie le député de D'Arcy-McGee de voter très fréquemment avec le Parti québécois contre plusieurs dispositions de ce projet, ce qui montre l'équilibre foncier qu'il y a dans le projet comparé aux positions extrêmes qu'on trouve dans le milieu.

Le Président: Alors, en question complémentaire. M. Libman: Is...

Le Président: Un instant, M. le député. Alors, pour une question complémentaire, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Libman: M. le Président, a third of English schools in Québec have closed for the passed 20 years. Does the Minister not recognize the seriousness of the situation, and how can he claim that a less than 1 % increase a year over the next 10 years can help this declining school system improve itself? What can he do to help this serious situation once and for all?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Ryan: Nous avons indiqué dans le projet de loi 86 les intentions du gouvernement, M. le Président, et j'espère que là où les articles du projet de loi témoignent d'une compréhension responsable du gouvernement, nous pourrons compter sur l'appui du député de D'Arcy-McGee.

Le Président: Alors, pour une autre question complémentaire.

M. Libman: Pour avoir l'appui du député de D'Arcy-McGee, c'est facile, M. le Président: ouvrir les portes.

Le Président: Votre question.

M. Libman: How can the minister continue to justify the very serious situation of English schools in Québec? Why is he not willing to recognize that this is a serious, serious problem that needs immediate attention? It is not a question of politics, it is a serious question about the future of English schools in Québec. When is he going to do something concrete to help the situation?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, j'ai indiqué à plusieurs reprises, dans la mesure où je suis concerné, la politique du gouvernement concernant la langue de l'enseignement et de l'admissibilité à l'école anglaise. Certaines modifications sont proposées dans le projet de loi 86. Je ne pense pas que le gouvernement envisage d'autres modifications pour l'avenir prévisible.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Libman: Does the minister not admit at least that some of the recommandations put forward, such as the Chambers Report, will have a negligible impact, a negligible impact on the majority school system? Does he not at least adknowledge that reality?

Le Président: M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, j'ai indiqué à plusieurs reprises les arguments qui empêchent de retenir la première recommandation du rapport Chambers. Si nous allions retenir la recommandation selon laquelle l'accès à l'école anglaise devrait être ouvert aux enfants d'immigrants de langue anglaise qui nous parviennent d'autres pays, à ce moment-là, il y aurait 2 conséquences: on créerait 2 catégories d'immigrants, certains qui auraient une liberté de choix, soit d'aller à l'école anglaise ou à l'école française, parce que ceux à qui on donne le droit d'aller à l'école anglaise, on leur reconnaît en même temps le droit d'aller à l'école française, et, deuxièmement, on créerait 2 catégories au Québec même parce que les Québécois francophones n'ont pas

le droit d'envoyer leurs enfants à l'école anglaise. Ils acceptent, de manière très générale, cette règle qui les contraint à envoyer leur enfants à l'école française afin justement de donner l'exemple aux enfants d'immigrants et de leur montrer qu'ils ne sont pas traités différemment des enfants de la très grande majorité de la population du Québec.

Alors, si vous avez des réponses à ces objections fondamentales, vous pourrez les formuler en commission parlementaire, quand nous arriverons à l'examen de ces dispositions du projet de loi qui traitent de l'admission à l'école, mais j'ai énoncé ces raisons de fond à maintes reprises au cours des derniers mois.

Le Président: Alors, pour une toute dernière additionnelle, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Libman: Does the minister not recognize that there are other ways to formulate this access question, such as allowing section 23(l)a of the Canadian Charter to apply in Québec, since Québec is the only province that is exempt, as well as allowing children of immigrants who have been educated in English anywhere in the rest of the world? Does he not recognize there are other ways to still open the doors to English education without creating 2 classes of immigrants?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Ryan: Le député de D'Arcy-McGee, dans sa question, réfère au premier article de l'article 23 de la Loi constitutionnelle de 1982. Cet article prescrit qu'un enfant d'une communauté linguistique minoritaire peut fréquenter l'école de sa langue, si c'est sa langue maternelle. Nous avons essayé ce critère-là au Québec pendant plusieurs années. Étant donné le mouvement d'immigration qui se produisait au Québec et le choix que faisaient les foyers d'immigrants sous ce régime, il a été décidé de l'abandonner il y a déjà plusieurs années. J'ai indiqué clairement, nonobstant toutes les calomnies qu'on s'emploie à répandre du côté de l'Opposition, qu'il n'est pas question de revenir à ce critère-là, étant donné les difficultés d'application auxquelles il a donné lieu, à l'époque. C'est pour ça que nous avons retenu le critère de la fréquentation scolaire des parents pour décider de l'inscription scolaire des enfants. Alors, il n'est pas question de revenir à ça. Je comprends le député de l'invoquer, c'est de bonne guerre, mais la position du gouvernement est très claire là-dessus, et elle ne sera pas modifiée dans un avenir prévisible. (11 heures)

Le Président: Alors, c'est la fin de la période des questions. Un instant, s'il vous plaît!

Question de directive, Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: M. le Président, compte tenu que je me suis levée à plusieurs reprises avant la fin de la période de questions et que vous aviez mentionné au député de D'Arcy-McGee que c'était sa dernière question complémentaire, est-ce que c'est possible que je puisse poser ma question, M. le Président?

Le Président: Ça me prendrait, Mme la députée de Johnson, le consentement de l'Assemblée pour poursuivre. Est-ce que... S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, il y a consentement à ce que Mme la députée de Johnson puisse avoir la première question demain.

Le Président: II n'y a pas de vote reporté. Motion sans préavis.

Avis touchant les travaux des commissions

En demandant l'attention, s'il vous plaît, de tous les collègues, je vais reconnaître M. le leader du gouvernement pour les avis touchant les travaux des commissions.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. J'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, de 12 heures à 13 heures, de 15 heures à 18 heures, et si nécessaire de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine, la commission de l'éducation procédera à l'étude détaillée du projet de loi 72, Loi modifiant le Code des professions et la Loi sur les infirmières et les infirmiers.

De 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de la culture poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 86, Loi modifiant la Charte de la langue française.

Je tiens, par ailleurs, à informer cette Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes, selon l'horaire des séances des commissions, la commission de l'économie et du travail procédera à des auditions publiques quant aux raisons motivant l'impossibilité de parvenir à une entente relativement aux modifications à apporter au décret de la construction conformément à l'article 51 de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vos avis sont déposés.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le leader.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. On me demande d'indiquer l'endroit où se tiendra la commission pour entendre les intéressés de l'industrie de la construction. Sauf avis contraire, au salon rouge.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est au... conseil législatif.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée; aucun renseignement. Ceci termine les affaires courantes.

Affaires du jour

Nous passons maintenant aux affaires du jour. M le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler l'article 15 de notre feuilleton.

Projet de loi 87

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 15, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 87, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique.

Y a-t-il des interventions sur ce rapport?

M. le ministre de la Justice.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: M. le Président, on sait que ce projet de loi 87, dont l'étude en commission des institutions a été complétée le 8 juin dernier, vise à modifier la Loi sur l'aide juridique de manière à permettre le partage entre le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec des déboursés de cours et des droits d'enregistrement assumés actuellement par le ministère de la Justice pour les bénéficiaires de l'aide juridique en matière civile.

Or, M. le Président, actuellement, lorsqu'il y a une cause d'aide juridique, il n'y a pas de frais de cour qui est payé. Quand on va enregistrer une procédure en cour, normalement, on paie des frais pour enregistrer une procédure. Donc, quand il s'agit d'une procédure en matière d'aide juridique, jusqu'à présent, on ne faisait pas payer ces frais. Mais, M. le Président, on se trouvait à perdre du côté québécois parce qu'il y a une entente avec le gouvernement fédéral qui nous permet de récupérer une grande partie de ces frais. Par conséquent, M. le Président, ce projet de loi vient donc faire en sorte que l'on puisse profiter, par une entente que nous faisons avec le gouvernement fédéral, de ces sommes d'argent qui nous échappaient jusqu'à présent, et ça d'une façon aussi rétroactive, c'est-à-dire que l'entente prend effet auparavant.

M. le Président, j'ai eu l'occasion pendant la fin de semaine dernière, et vendredi dernier plus précisément, de parler avec plusieurs membres du Barreau, avocats, avocates qui étaient présents à ce congrès du Barreau, un congrès qui était très important, M. le Président, de par le nombre d'avocats et d'avocates qui s'y trouvaient, plus de 3000 inscriptions, qu'on m'a rapporté, et aussi, et en premier lieu, je devrais dire, important parce qu'il s'agissait du début des cours sur le nouveau Code civil, M. le Président. Et dans ce contexte-là j'ai eu l'occasion, comme c'est la coutume pour le ministre de la Justice, de m'adresser au Barreau pour parler de certains sujets qui sont particulièrement d'actualité, dont, entre autres, la réforme de l'aide juridique.

M. le Président, le projet de loi que nous avons aujourd'hui, le projet de loi 87, vient régler un aspect important, puisqu'il s'agit d'aller récupérer de l'argent que nous n'avions pas du gouvernement fédéral; on le récupère. Mais j'ai eu l'occasion d'aborder, je dois dire bien brièvement, évidemment, au niveau du congrès, dans mon discours au congrès, dans quelle optique je vois, comme ministre de la Justice, la réforme de l'aide juridique. J'ai dit qu'il fallait qu'on puisse aider les plus démunis à avoir accès à la justice et j'ai mentionné aussi, M. le Président, à quel point je suis préoccupé par la situation du citoyen à revenus moyens qui n'a pas plus les sous nécessaires, l'argent nécessaire pour, lui aussi, aller devant les tribunaux. J'ai eu l'occasion de mentionner, M. le Président, que, dans ces circonstances, on se retrouvait très souvent dans un contexte qui est inéquitable, dans le sens que, oui, celui qui est défavorisé a le secours de l'État pour faire valoir ses droits ou répondre de ses obligations devant les tribunaux, mais celui ou celle qui gagne juste un petit peu plus, lui, elle, ils n'ont pas la possibilité d'avoir recours aux tribunaux, avec tout ce que ça peut amener d'inéquité entre les 2 situations.

M. le Président, je pense, entre autres, à toutes ces familles monoparentales qui, en très grande partie, sont dirigées par des femmes, des femmes qui peuvent gagner, en très grande partie, de 18 000 $ à 28 000 $, selon les statistiques que nous avons, et qui, par le fait même, ne sont pas sujettes à avoir l'aide juridique. C'est une situation, M. le Président, qui peut être vraiment inéquitable lorsqu'elles sont confrontées, par conséquent, à une situation où d'autres personnes ont l'aide juridique et lorsqu'elles sont poursuivies ou qu'elles veulent poursuivre quelqu'un qui a l'aide juridique, ou lorsqu'elles ont des droits et qu'elles ne peuvent pas les faire valoir parce qu'elles n'ont pas les moyens d'aller devant les cours de justice.

Alors, M. le Président, j'ai mentionné qu'il fallait qu'on trouve une solution et j'ai mentionné aussi qu'il fallait que les avocats et les avocates retrouvent le sens de la contribution sociale. On ne réglera pas le problème de l'aide juridique seulement en montant les seuils d'admissibilité. Non, M. le Président. On ne réglera pas le problème de l'aide juridique en réorganisant son administration. Non, M. le Président. Essentiellement, on va régler le problème de l'aide juridique dans la mesure où les avocates et les avocats vont retrouver leur sens de la contribution sociale et ne verront plus l'aide juridique comme un gagne-pain ou comme un soutien financier

important pour leur bureau d'avocats, mais qu'ils puissent le voir comme une contribution à la société.

M. le Président, lorsque j'ai commencé ma pratique en 1969, ici, à Québec, où j'ai mon bureau de ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes, il y avait, avant, ces magnifiques résidences victoriennes et, dans une de ces résidences, il y avait un bureau d'avocats. Dans ce bureau d'avocats où je commençais comme jeune stagiaire, nous avions, comme tous les autres bureaux d'avocats...

C'était le bureau d'avocats d'un grand juriste de Québec à qui je veux rendre hommage, M. Désilets, qui a fondé le bureau que dirigent maintenant les associés de Me Grondin, M. Grondin, ancien bâtonnier du Québec, et ses associés, Grondin et Poudrier, qu'on connaît bien.

Alors, M. le Président, il y avait une contribution de chaque bureau d'avocats pour faire en sorte que les plus démunis de la société puissent avoir droit à la justice, et c'était le Barreau qui nous les référait, et on devait s'en occuper. C'était la contribution sociale de l'avocat. Je ne veux pas, M. le Président, qu'on revienne à cette philosophie. Ce n'est pas ça que je demande. Tout simplement ce que je dis, c'est: N'oublions pas que, fondamentalement, dans tout le système de l'aide juridique, il y a, comme premier objectif, d'aider les plus démunis et n'oublions pas que ce système ne peut pas, non plus, être inéquitable face aux citoyens à revenus moyens.

C'est dans ce contexte-là, M. le Président, que nous aurons notre commission parlementaire probablement à l'automne prochain. Le document de préparation est presque terminé maintenant, dans toute cette phase de préparation qui est nécessaire. Un document que je veux qui soit étudié par tous les comités pertinents du Conseil des ministres. Je veux que ce document reflète quand même toutes les possibilités que nous avons, et se fasse dans le cadre des limites de la capacité de payer de l'État.

M. le Président, comme je l'ai fait lors du Sommet de la justice en février 1992, où j'étais allé au Conseil des ministres sur toutes les questions qui étaient abordées, où je voulais présenter des projets, des solutions, je fais la même chose en ce qui regarde ce document, qui sera un document de référence pour ceux qui viendront, les groupes qui viendront se présenter devant nous en commission parlementaire, pour nous parler de l'aide juridique.

Alors, M. le Président, ce projet de loi 87 est une contribution significative sur le plan administratif en ce qu'il permet au Québec de récupérer des sommes d'argent qui sont importantes pour qu'on puisse assurer ce service de l'aide juridique dans les meilleures conditions possibles.

Je vous remercie, M. le Président. (11 h 10)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de la Justice.

Alors, un simple rappel que nous en sommes à la prise en considération du rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 87, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique. Je cède la parole à Mme la députée de Terrebonne.

Mme la députée.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président.

Alors, à titre de porte-parole de l'Opposition pour le dossier de l'aide juridique, je profiterai donc de cette prise en considération du rapport, que vous rappeliez à juste titre, M. le Président, pour exprimer un peu à la population ce qui s'est passé lors de nos travaux sur l'étude article par article du projet de loi 87.

Donc, ce projet de loi provient d'une entente entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial. Il faut rappeler, M. le Président, qu'il y avait eu entente de principe en décembre 1991, et nous sommes, aujourd'hui, en juin 1993. Donc, il y a eu un délai extrêmement long, les négociations ont été longues et périlleuses entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial. C'est toujours un peu le cas, M. le Président, vous me permettrez de le souligner. Donc, entente de principe en décembre 1991, et, évidemment, on se retrouve avec le projet uniquement en juin 1993.

Dans le projet de loi 87, il y a une clause de rétroactivité qui remonte à janvier 1992, puisqu'il y avait déjà eu cette entente de principe. Au niveau des montants, nous avons questionné à savoir les montants qui étaient en cause: pour 1991-1992, le budget total de ce programme était de 457 568 $, dont la partie du gouvernement fédéral sera de 215 056 $, et, 1992-1993, on se parle d'un budget global de 2 026 220 $, et la partie du gouvernement fédéral sera de 954 100 $.

Nous en avons évidemment profité pour questionner concernant une autre entente qui n'est toujours pas réglée, M. le Président, et cette entente touche l'immigration. On sait que mon collègue d'Anjou, qui avait le dossier auparavant, avait questionné longuement le ministre de la Justice, l'an dernier, lors de l'étude des crédits, concernant toute cette négociation concernant l'immigration. Malheureusement, on doit se dire qu'à ce jour le ministre n'a toujours pas réussi à régler cette entente. Ses dernières informations, lors de l'étude article par article du projet de loi 87, étaient à l'effet que les négociations ne portaient que pour 1992, qu'il n'y aurait pas de rétroactivité, qu'ils en étaient toujours à la première étape de négociation, que la dernière série de lettres remontait au 28 janvier 1991, que c'était une lettre du ministre de la Justice qui demandait de poursuivre les négociations, et un accusé réception en février 1993. Depuis, le silence complet de part et d'autre, et le ministre, en commission parlementaire, nous a dit qu'il était pour réactiver ce dossier, mais il faut rappeler que c'est un dossier qui traîne depuis plusieurs années, M. le Président.

Il y avait également des questions, vous le comprendrez, sur la fameuse réforme de l'aide juridique. Le ministre en a parlé un peu. Il faut rappeler que, depuis l'adoption du projet de loi sur l'aide juridique en 1972,

on avait reconnu, dans la Loi sur l'aide juridique, que les personnes démunies avaient droit à l'assistance judiciaire. C'était un droit qui était reconnu pour toute personne démunie et pour l'ensemble du territoire du Québec; donc, dans toutes les régions du Québec.

En 1981, on a eu la dernière hausse du seuil d'admissibilité de l'aide juridique pour une personne seule et, depuis 1981, ce montant est toujours de 170 $ brut, par semaine, M. le Président, ce qui est en deçà du seuil de la pauvreté; mais vraiment en deçà. Quand on se dit qu'une loi doit offrir un service aux démunis, à 170 $ brut par semaine, on est resté aux chiffres de 1981 pour une personne seule.

Du côté des familles monoparentales ? le ministre y faisait référence tantôt ? la dernière hausse du barème remonte à 1985. Pour un couple ou pour une personne seule avec un enfant, le seuil d'admissibilité est de 210 $ brut par semaine; et lorsqu'on parle d'un couple avec un enfant, de 230 $, M. le Président. Donc, les taux n'ont pas été réactualisés depuis 1981, dans le cas des personnes seules, et depuis 1985, lorsqu'il y a enfant et couple.

Donc, M. le Président, si on avait à réactualiser les chiffres, on se retrouverait avec des chiffres passablement différents aujourd'hui. Donc, on ne peut même plus dire que l'aide juridique est accessible aux familles à faibles revenus, ni aux personnes seules à faibles revenus. Et le ministre, depuis quelques années, nous donne sa belle théorie... Elle est très belle en théorie, mais on n'arrive pas à obtenir l'argent au niveau du Conseil du trésor en nous disant que les familles à revenus moyens n'obtiennent pas de services d'aide juridique. Et c'est réel, M. le Président. Mais non seulement les familles à revenus moyens n'obtiennent pas des services de l'aide juridique, mais les familles à faibles revenus n'obtiennent plus de services de l'aide juridique. C'est ça, la réalité, présentement.

Nous avons donné un exemple, M. le Président, la semaine dernière, à la période des questions. Mardi dernier, le 8 juin, nous avons questionné le ministre concernant les mandats d'aide juridique dans le cas de mandats confiés à des notaires. Nous avons bien démontré au ministre de la Justice que, dans certaines régions du Québec, il n'y a plus de notaires qui acceptent de mandat. Et pourquoi? Le ministre faisait appel, tantôt, aux avocats, à la bonne conscience des avocats, à leur participation aux causes sociales. M. le Président, depuis l'adoption de la loi, en 1972, le tarif des avocats a été révisé à 3 reprises. Du côté des notaires, le tarif n'a jamais été révisé depuis l'adoption de la Loi sur l'aide juridique. Ce qui fait qu'actuellement, au Québec, un notaire qui obtient un mandat d'aide juridique pour un testament, par exemple, obtient 35 $, ce qui fait que ça lui coûte plus d'argent pour faire compléter les formulaires par sa secrétaire et les envoyer à l'aide juridique que de décider de le faire bénévolement. C'est ça, la réalité, M. le Président. Lorsqu'on se parle au niveau des prêts hypothécaires, on se parle d'un tarif de 120 $.

Donc, les notaires n'ont plus eu de hausse de tarif depuis la loi, donc, depuis 1977, et ils refusent dans certains cas, évidemment, d'offrir les services. Donc, dans certaines régions du Québec actuellement il n'y a plus de mandat d'aide juridique pour les notaires. Et dans certaines régions ? là, je pense particulièrement à la couronne de Montréal et à Montréal ? ça devient de plus en plus difficile d'obtenir des mandats d'aide juridique dans le cas des notaires.

Suite à notre question en Chambre, M. le Président, le ministre avait fait certaines vérifications. Le coût total de l'enveloppe au niveau des services juridiques, qui coûtent 110 000 000 $, il n'y a que 800 000 $ finalement qui ont été accordés en frais pour des remboursements de mandat à des notaires. Ce qui prouve qu'effectivement il y a très peu de gens qui ont eu recours aux services, parce que les services ne sont plus accessibles.

Le ministre nous a annoncé, au cours de l'étude article par article, que, suite à notre question, il avait enfin obtenu du Conseil du trésor son mandat de négocier. Et comme c'est un mandat qu'il tentait d'obtenir depuis 3 ans, M. le Président, nous sommes très heureux, du côté de l'Opposition, que notre question ait servi à enfin faire comprendre au président du Conseil du trésor qu'il était peut-être temps d'accorder ce mandat pour négocier avec les notaires et, finalement, de répondre à l'objectif premier de la Loi sur l'aide juridique, qui est d'offrir l'accessibilité, et partout sur le territoire du Québec. (11 h 20)

M. le Président, évidemment, ce mandat ne viendra pas régler l'ensemble des problèmes de l'aide juridique. La réforme doit toucher non seulement sur les seuils d'admissibilité, mais sur la gestion, aussi. Le ministre, lors de l'étude des crédits d'avril 1993, nous a déposé un document qui est une étude du réseau d'aide juridique qui a été faite par des conseillers en administration, donc, par la firme Raymond, Chabot, Martin, Paré. Dans ce document, on démontre que, du côté de la gestion des services juridiques, il y a beaucoup de travail à faire, qu'il n'y a pas une gestion uniforme partout, dans tous les bureaux, que le système de comptabilité est quelque peu déficient, M. le Président, et que le ministre de la Justice se retrouve dans l'impossibilité de faire des prévisions à long terme, et même pas à court terme, M. le Président, pour présenter ça au budget, au moment du conseil... quand il présente son budget. Donc, il se retrouve, à chaque année, à être obligé de demander des crédits supplémentaires pour venir combler le déficit qu'on retrouve du côté de l'aide juridique. Donc, problème de gestion, problème du côté des seuils d'admissibilité, mais aussi le besoin de réformer entièrement notre système d'aide juridique pour qu'enfin le principe de l'accessibilité ne soit plus un principe uniquement théorique.

Concernant son échéancier, M. le Président, le ministre nous disait tantôt que le document de consultation était presque terminé. Lors de l'étude article par article, le 8 juin dernier, le ministre nous a dit que son

premier document était à l'étude au Conseil du trésor, qu'il entendait réviser ce document parce qu'il avait d'autres informations et qu'il voulait changer certains principes; que ce document-là retournerait à nouveau en étude au Conseil du trésor. Nous espérons toujours une commission parlementaire à l'automne pour étudier le document et souhaiter arriver, finalement, à un projet de loi qui pourrait vraiment modifier l'accessibilité au niveau de l'aide juridique.

Mais nous avons des doutes, M. le Président. Parce que, si on regarde le cheminement de ce dossier de réforme de l'aide juridique jusqu'à maintenant, je vous avoue que nous avons des raisons de, quand même, nous inquiéter un peu. Il faut rappeler que c'est le 20 mars 1992 que le ministre nous disait... et même, ça remonte avant, M. le Président.

Le 31 mars 1989, le ministre de la Justice avait présenté un premier mémoire au Conseil du trésor, dans lequel il demandait une révision complète de la structure des critères d'admissibilité. Il récidivait au Conseil du trésor en février 1990 et, cette fois-ci, il recommandait une révision partielle, espérant sans doute qu'en diminuant ses demandes il pourrait obtenir gain de cause. À nouveau, il avait essuyé un échec. Le 20 mars 1992, le ministre nous mentionnait qu'il était en train de préparer son document de consultation. Donc, il nous dit toujours que le document est en préparation, qu'il est presque terminé maintenant, mais il nous disait déjà ça en mars 1992, et qu'il y aurait une consultation publique. Le 29 avril 1992, lors de l'étude des crédits, le ministre nous mentionnait à nouveau qu'il était à travailler son document de consultation et qu'il pensait, là, pouvoir nous donner ce document à très brève échéance. Le 5 juin 1992, il nous disait: Nous sommes à mettre la dernière main à un document de consultation. Le 5 juin 1992, M. le Président, l'année est dépassée, là. «Je devrais en avoir une copie dans les prochains jours»; ça, c'était le 5 juin 1992. Le 23 juin: «J'ai promis un document d'information. Ce document d'information sera prêt dans les prochaines semaines.» Nous sommes toujours, M. le Président, à ce moment-là, en 1992, 23 juin 1992. Le 11 décembre, lors de l'étude des crédits supplémentaires, là, le ministre avait un élément de report. C'était la fameuse étude qu'il avait commandée, dont je vous ai parlé tantôt, sur le réseau d'aide juridique, donc, l'étude de Raymond, Chabot, Martin, Paré.

M. le Président, lorsque nous avons requestionné le ministre, à l'étude des crédits, il nous a dit que le document était pratiquement prêt, qu'il devait se rendre au Conseil des ministres, et qu'il serait étudié au Conseil du trésor, et qu'on devrait avoir ce document-là dans les plus brèves échéances. M. le Président, même chose: au moment de l'étude article par article, le ministre nous a rappelé que son document de consultation n'était pas tout à fait terminé, qu'il était rendu au Conseil du trésor, mais qu'il devait revenir, qu'il devait le réviser, le retourner au Conseil du trésor; et tantôt, dans ses remarques, il nous disait que le document était à nouveau presque terminé et qu'on pouvait souhaiter avoir des audiences et une commission parlementaire.

Un dernier élément à rappeler peut-être, M. le Président. En mars dernier, l'adjoint parlementaire, le député de Chapleau, me consultait pour ce fameux document qui devait être déposé au printemps, et nous devions même avoir une commission parlementaire au printemps, M. le Président. Donc, vous comprendrez que du côté de l'Opposition, suite à toutes ces déclarations qui sont à peu près dans les mêmes termes depuis plus de 2 ans, les promesses qui ont été faites au Sommet de la justice, autant au niveau des changements des seuils d'admissibilité que pour l'ensemble de la réforme de l'aide juridique, nous en sommes toujours à l'état de promesses, M. le Président. Compte tenu que, jusqu'à maintenant, nous n'avons toujours pas en main ce fameux document de consultation, nous ne pouvons que demander au ministre de la Justice d'accélérer et que ces promesses finissent par se réaliser, M. le Président.

Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Terrebonne.

Vous avez droit à 5 minutes d'intervention...

M. Rémillard: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...suite à l'intervention de Mme la députée.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: M. le Président, j'ai la chance d'avoir avec moi un adjoint parlementaire de grande expérience juridique et de grande expérience parlementaire, le député de Chapleau, qui est avec moi, M. le Président. Le député de Chapleau, depuis que je suis ministre de la Justice, travaille avec moi dans tous les projets que nous avons mis en place. Entre autres, en ce qui regarde le nouveau Code civil, le député de Chapleau a joué un rôle très important. Ça a été toujours un très grand plaisir et une grande efficacité de travailler avec le député de Chapleau. Et le député de Chapleau, M. le Président, a la responsabilité de mener toutes ces consultations en ce qui regarde l'aide juridique.

Et, entre autres, tout à l'heure, M. le Président, nous en parlions, le député de Chapleau et moi, on se disait: II va falloir aussi que le Barreau prenne ses responsabilités en ce qui regarde certains bureaux d'avocats où les honoraires reçus par l'aide juridique sont pour le moins surprenants. Lorsqu'on parle de 200 000 $, lorsqu'on parle de 300 000 $, lorsqu'on me dit qu'on parle de 400 000 $ pour des avocats qui reçoivent des mandats de l'aide juridique, ça fait beaucoup. Je ne dis pas qu'ils font mal leur travail. Je ne mets pas en question leur compétence professionnelle. Ce que je dis se réfère à ce que je mentionnais au tout début lorsque j'ai présenté ce projet de loi, M. le Président, disant qu'il va falloir qu'on voit l'aide juridique non pas comme un moyen pour les avocats de faire de l'argent, mais

comme une contribution sociale avant tout.

Alors, M. le Président, dans ce contexte-là, je sais que je peux aussi compter sur la collaboration de l'Opposition. Je sais que l'Opposition ne peut pas être contre cette façon de voir l'aide juridique. Au Sommet de la justice, j'ai présenté un modèle, et on nous a fait part de certaines critiques. Très bien, j'ai dit, je vais retravailler. C'est ce que je vais faire, M. le Président, en représentant un document de consultation plus complet. Lors de l'étude des crédits, j'ai déposé, donc, l'étude de cette firme comptable de grande réputation, Raymond, Chabot, qui est là aussi pour nous donner des pistes, des indications quant à l'administration du système d'aide juridique. Entre autres, on pourrait certainement sauver beaucoup d'argent si on pouvait mettre en place un mécanisme d'expertise, c'est-à-dire les experts qui vont témoigner devant les cours, si on pouvait mettre un moyen, mettre en place, dis-je, un moyen d'expertise qui coûterait moins cher, qui serait acceptable par tout le monde, par toutes les parties. Actuellement, les experts qui viennent en cour coûtent une fortune, M. le Président, et, au niveau de l'aide juridique, ça signifie beaucoup, beaucoup d'argent. Alors, M. le Président, j'aimerais bien mieux prendre cet argent pour aider les plus démunis.

Alors, il y a comme ça des points bien précis que je veux qu'on puisse analyser. Je sais que je peux compter sur la collaboration de l'Opposition. On poursuit des objectifs, je pense, qui sont communs. Reste à voir les modalités d'application. Et je sais surtout, M. le Président, que j'ai la chance de compter sur la grande collaboration, l'expertise et la compétence du député de Chapleau qui aura l'occasion de parler sur ce projet de loi et de parler de l'aide juridique dans la prochaine étape d'adoption de ce projet de loi, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de la Justice.

Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Mise aux voix

Alors, le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi 87, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique, est-il adopté?

Adopté.

M. le ministre de la Justice. (11 h 30)

M. Rémillard: Oui, M. le Président. Je vous demande d'appeler l'article 16 de notre feuilleton, prise en considération du rapport sur le projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général.

Projet de loi 88

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, l'arti- cle 16, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général.

Est-ce qu'il y a des interventions sur ce rapport?

M. le ministre de la Justice.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Oui, M. le Président.

Le projet de loi 88, intitulé Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général, dont l'étude en commission des institutions a été complétée le 7 juin dernier, poursuit 3 objectifs.

Ce projet de loi vise, en premier lieu, à remplacer le processus de nomination des substituts occasionnels du Procureur général actuellement prévu par décret du gouvernement en attribuant au Procureur général le pouvoir de les nommer suivant le processus applicable actuellement aux substituts permanents.

En deuxième lieu, M. le Président, le projet de loi prévoit, par cohérence législative, étendre aux substituts occasionnels l'obligation prévue, dans la loi pour les substituts permanents, d'exercer leur fonction de façon exclusive.

Et, en troisième lieu, M. le Président, le projet de loi prévoit les règles visant à préserver la neutralité politique des substituts du Procureur général tout en restreignant aussi peu que possible l'exercice du droit à l'éligibilité électorale.

M. le Président, il s'agit, en ce qui regarde cette dernière question qu'on a eu l'occasion de discuter d'une façon toute particulière en commission parlementaire, d'une part, de protéger des droits et des libertés fondamentales à l'effet que, dans une démocratie, notre droit premier, c'est de voter, et ce droit de voter implique le droit d'être informé.

Ce droit de voter implique aussi le droit de pouvoir se présenter à une élection. M. le Président, c'est dans ce contexte, donc, qu'il faut situer ce projet de loi qui fait du rôle du substitut une situation particulière. Pourquoi? Parce que le substitut du Procureur général, c'est lui qui décide de poursuivre ou de ne pas poursuivre. C'est lui qui apprécie la preuve qui lui est apportée par les policiers. C'est lui qui l'étudié et, en son âme et conscience, décide s'il doit poursuivre ou pas.

Souvent, M. le Président, on lit dans les journaux: Le Procureur général poursuit. Mais ces causes-là ne viennent pas sur mon bureau, M. le Président. Vous comprendrez fort bien que je ne pourrais pas étudier toutes ces causes et décider moi-même quand il faut poursuivre dans toutes les causes qui peuvent arriver tous les jours. Ce sont les substituts du Procureur général qui prennent ces décisions.

Pour ma part, M. le Président, je suis informé. On me consulte. Ça vient sur mon bureau pour décision dans des cas qui présentent une situation exceptionnelle. Mais, dans la très, très grande majorité des cas, ces

décisions sont prises par les substituts.

C'est donc dire la très grande importance du rôle des substituts dans notre société, M. le Président. Et je veux rendre hommage à ces substituts qui font un travail remarquable. J'ai eu l'occasion de les rencontrer, de rencontrer les substituts chefs. J'ai eu l'occasion de discuter avec eux encore dernièrement au niveau du ministère de la Justice, et je suis particulièrement fier de la façon dont ils s'acquittent de leur fonction.

Il y a place pour amélioration et on en a discuté ensemble. On va mettre en place des mécanismes pour les améliorer, améliorer leur façon de procéder pour qu'ils puissent être encore plus capables d'exercer leurs compétences dans les domaines qui sont, pour eux, d'une extrême importance, puisqu'il appert que leurs décisions ont des conséquences extrêmement importantes pour les citoyens.

Alors, dans ce contexte-là, M. le Président, il s'agissait de permettre à des substituts de pouvoir faire de la politique active au niveau fédéral, au niveau provincial, au niveau d'un conseil municipal, par exemple, d'une commission scolaire, donc, de s'impliquer. Mais, à ce moment-là, pour qu'il n'y ait d'aucune façon de conflit d'intérêts ou qu'on puisse penser qu'il puisse y avoir, à un moment donné, conflit quelconque, on dit: Le substitut demande donc, à ce moment-là, au sous-chef du ministère qui est le sous-ministre, qui est le sous-Procureur général et il est à ce moment-là déterminé qu'il demeure en congé sans solde et, quand il revient à ses fonctions, il revient dans un domaine de ses fonctions juridiques, comme avocat, mais à un niveau qui lui garantit la même condition de travail au niveau, par exemple, monétaire, mais, évidemment, qu'il ne se situe pas nécessairement au niveau du substitut. Il peut revenir substitut ensuite; s'il y a un concours qui s'ouvre et s'il fait application, il redevient substitut. Mais, M. le Président, toute notre démarche est faite pour que la justice se fasse d'une façon la plus transparente possible, pour qu'il y ait non seulement justice qui est rendue, mais qu'il y ait aussi apparence que la justice est rendue.

C'est dans ce contexte-là, M. le Président, qu'il faut situer ce projet de loi dans son aspect ici qui est particulièrement important. On sait qu'on doit vivre des élections fédérales dans les prochains mois. On sait qu'il y a des élections au niveau municipal aussi qui peuvent être annoncées pour l'automne prochain. Alors, dans tout ce contexte, il faut permettre à ceux et celles qui veulent s'impliquer activement en politique de le faire, mais, à ce moment-là, on dit: II doit y avoir une coupure avec vos fonctions de substitut et, par conséquent, vous ne devez pas, par contre, être pénalisé. Alors, quand vous reviendrez, vous retrouverez un poste de même niveau, mais ça ne sera pas comme substitut. Vous pourrez redevenir substitut lorsque vous vous présenterez à un concours, lorsqu'on ouvre un concours; si le jury considère que vous pouvez faire le travail, vous redeviendrez substitut, mais il faut qu'on protège cette qualité première de la justice, son impartialité et le fait que les citoyens doivent être assurés que la justice est rendue et qu'elle est rendue selon toutes les normes de la transparence, M. le Président.

Alors, voilà les objectifs poursuivis par ce projet de loi, M. le Président, qui a été étudié en commission parlementaire.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à la prise en considération du rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général. Et je cède la parole à M. le député d'Anjou.

M. le député, la parole est à vous.

M. Pierre Bélanger

M. Bélanger (Anjou): Je vous remercie, M. le Président.

L'étude de ce projet de loi sur les substituts du Procureur général a donné lieu à un débat vraiment intéressant sur la condition des sous-procureurs du bureau de la couronne. En effet, M. le Président, le ministre a eu l'amabilité de permettre qu'il y ait eu un débat, un débat sur toute la situation qui prévaut présentement dans le département de la couronne. En effet, récemment, on apprenait qu'il y avait une coupure d'environ 1 600 000 $ dans ce département et que certaines mises à pied, à la fois de procureurs de la couronne et de personnel de soutien, allaient avoir lieu. Lors, déjà, de questions en Chambre et lors de l'étude des crédits, l'Opposition avait fait part de son inquiétude face aux conséquences de ces coupures. Particulièrement, nous avons fait référence, lors de l'étude de ce projet de loi, à un article qui est paru le 5 juin dernier dans La Presse et qui faisait part que, dans 2 districts en particulier, il semblait y avoir une situation de crise. C'étaient les districts... On faisait référence aux districts de Hull et de Trois-Rivières. On parlait même que, dans le district de Trois-Rivières, la situation était telle qu'un stagiaire de la couronne avait dû traiter dans une journée 150 dossiers. Alors, vous comprendrez, M. le Président, que cet état des choses qui était rapporté nous inquiétait. Cela a permis un échange que je crois constructif et qui nous a permis de constater que la situation semblait tout au moins sous contrôle. Le ministre a d'ailleurs fait part que, grâce aux mesures de déjudiciarisation qui sont depuis longtemps demandées et qui commencent à peine à être appliquées, on assiste, semble-t-il, à une diminution des causes qui se retrouvent présentement devant la Cour des sessions de la paix et devant la Cour du Québec.

Donc, c'était une situation qui nous préoccupait, surtout, comme nous l'avons mentionné lors de la commission parlementaire, M. le Président, nous avions fait part... nous avions fait l'éloge des mesures adoptées par le ministère de la Justice pour, justement, revaloriser le travail des procureurs de la couronne. On avait aussi fait part qu'on appréciait les mesures qui avaient été adop-

tées pour rendre plus humaine la justice au niveau du droit criminel. On n'a qu'à penser maintenant à l'instauration des poursuites verticales, c'est-à-dire un procureur qui, saisi d'un dossier au moment... au début du dossier, reste saisi du dossier jusqu'à la fin. On regarde aussi quant à un meilleur traitement des victimes d'actes criminels, des témoins d'actes criminels. On regarde aussi la conception, maintenant, d'équipes spéciales qui doivent travailler au niveau du bureau du procureur de la couronne relativement à la lutte contre la drogue. Alors, toutes ces choses-là. (11 h 40)

II y a eu un effort considérable qui a été fait dans le passé et on avait peur, M. le Président, suite aux coupures qui étaient annoncées, qu'on remette en cause ces dispositions. Alors, le ministre de la Justice nous a fait part qu'il n'en était pas question, que ces mesures allaient continuer de bon train et qu'elles n'étaient nullement remises en cause. Je pense que c'est très important, M. le Président.

Il nous a fait part aussi qu'au niveau des ententes qui sont à prévoir entre les municipalités et le gouvernement du Québec pour le transfert de certaines causes vers les cours municipales, on nous a fait part qu'une cinquantaine de villes avaient présentement signé le protocole d'entente et qu'on procédait déjà à cette relocalisation, à ce transfert des causes. Alors, c'est une situation qui nous réjouit. Nous espérons cependant que de plus en plus de villes signeront ce protocole d'entente pour, justement, qu'on assiste rapidement à un désen-gorgement de la Cour du Québec.

Dans ce projet de loi, M. le Président, le ministre a fait un survol des différentes dispositions qui y étaient contenues, la première étant la nomination des substituts. Je pense qu'on ne peut pas être contre le fait que, maintenant, on va simplifier le processus de nomination des substituts du procureur général. Je pense que ça va dans l'ordre des choses, dans une meilleure gestion de l'appareil judiciaire.

Maintenant, le point qui a peut-être donné lieu à un débat le plus ? comment je pourrais dire ? non pas agité, mais le plus long, a été la question des activités politiques permises maintenant aux substituts du Procureur général. On sait que depuis l'arrêt de la Cour supérieure dans l'affaire Tremblay, la Cour supérieure avait déclaré invalide la constitution de l'article 8 de la Loi sur les substituts du procureur général qui empêchait tout procureur d'avoir des activités politiques, à défaut de quoi il était carrément démis de ses fonctions.

Alors, suite à cette disposition, à ce jugement de la Cour supérieure, on a cru bon légiférer ? à juste droit, je pense ? pour, justement, encadrer la possibilité d'activités politiques des procureurs. La première question qu'on a eu à se poser, M. le Président, c'est: Qu'est-ce qu'une activité politique? J'ai eu quelques réticences, quant à moi, à reconnaître que le simple fait de donner une contribution monétaire à un parti politique sans en être membre était une activité politique. Surtout, pour moi, ce qui était difficile à admettre, c'est le fait que c'est tellement facile de contourner cette disposition; votre conjointe ou votre conjoint peut tout simplement donner à votre place, un ami peut donner à votre place. Alors, comment faire la vérification de ces choses? Et c'est quand même priver les procureurs de la couronne d'une certaine mesure fiscale de déduction pour un don à un parti politique. Alors, j'avais un petit peu de difficulté quand même à ce qu'on considère cette activité. J'étais d'accord avec le fait que d'être membre d'un parti politique constituait une activité politique, mais pour la question du financement j'émettais certaines réserves.

Cependant, je me suis rallié à l'idée proposée par le ministre, vu le fait, quand même, qu'il est important que les procureurs de la couronne affichent une impartialité. C'est important surtout dans les petites municipalités où ils sont peu nombreux, où ils peuvent facilement être identifiés. C'est important que quand le citoyen se présente devant la cour, il ait confiance que la personne n'a pas réellement quelque chose contre lui, qu'elle ne va pas s'acharner impunément sur lui. Alors, je pense qu'on ne peut pas être contre cette image d'impartialité que se doivent d'afficher les substituts du Procureur général.

Maintenant, où on a eu un petit peu de difficulté à s'entendre, c'est sur le fait maintenant qu'on ne permette pas à un substitut du Procureur général de financer un parti politique, mais on lui permet cependant d'assister à une assemblée publique. Cependant, s'il assiste à une assemblée publique où il y a des discours de candidats, il ne doit pas montrer sa partisanerie; ce qui est pour moi difficile à concilier, évidemment. On doit donner préséance au fait qu'un citoyen, donc un substitut du Procureur général, a le droit d'avoir toute l'information nécessaire pour pouvoir voter, mais, à partir du moment où il rentre dans une assemblée nettement partisane, même sans s'afficher, même sans porter de macaron, est-ce qu'on ne doit pas reconnaître que ce fait d'assister ainsi à une assemblée publique ne constitue pas en soi une activité politique? Alors, M. le Président, ça a donné lieu à un débat intéressant et, encore là, finalement, nous nous sommes ralliés à cette disposition, pensant que, de toute façon, le droit de retenue que s'imposent en général les substituts du Procureur général allait faire en sorte qu'il n'y aurait pas abus de cette disposition.

Maintenant, un autre des points qui étaient pour nous important, c'était la sanction. Quelle sanction devait-on appliquer au substitut qui décidait de s'adonner à une activité politique? On a décidé que la sanction... malgré qu'on ne devrait pas parler de sanction, on devrait plutôt parler de procédure qui va suivre, parce que ce n'est pas réellement une sanction, on ne punit pas le substitut, on le reclasse tout simplement, comme l'a expliqué le ministre. Auparavant, c'était carrément une destitution, c'est-à-dire que le substitut qui voulait se présenter comme candidat était carrément démis de ses fonctions. Maintenant, il est reclassé. Je pense que le ministre a très bien expliqué quelle est la

portée de ce reclassement.

Cependant, tout en admettant que le reclassement est une mesure appropriée pour quelqu'un qui veut se présenter en politique, est-ce que ce même reclassement est acceptable quand uniquement le substitut du Procureur va donner 50 $? Il donne 50 $ à un parti politique, ou même 10 $ à un parti politique, et automatiquement, en vertu de la disposition qui a été adoptée, il va être obligé d'en aviser le Procureur général, et il va être reclassé, déplacé carrément de ministère. Alors, on peut demander si c'est vraiment proportionné comme sanction; le fait que la personne qui se présente en politique et qui donne un montant, quel qu'il soit, à un parti politique, la sanction est la même. Encore là, on a dû se rendre compte qu'il était difficile de doser les sanctions et de trouver une sanction autre que celle-là. Malgré le fait que, dans certains cas, on peut trouver que ce soit excessif, je crois qu'on n'avait pas le choix, finalement, pour une question de bonne administration et de bonne gestion de la mesure, de se rallier à cette chose.

Maintenant, on avait constaté dès le début, l'Opposition, quant à elle, avait constaté dès le début qu'il y avait un problème dans ce projet de loi. On ne prévoyait absolument rien quant à la réintégration d'un substitut qui, après s'être adonné à une activité politique, veut rentrer dans le bureau des substituts du Procureur. Finalement, ça a donné lieu à un échange, et le ministre nous a proposé un amendement qui a été accepté et qui, je pense, rencontre nos exigences, c'est-à-dire que le substitut, comme le ministre l'a expliqué, pourra postuler et, à partir du moment où il aura vraiment satisfait à tous les prérequis, dont un examen, dont le fait qu'il ne veut pas se représenter en politique, il pourra être réintégré.

Maintenant, une autre question, M. le Président, aussi, qui nous dérangeait, c'était au niveau de la sanction, c'est le fait que nous aurions peut-être préféré qu'il y ait possibilité uniquement de congé sans solde plutôt qu'un reclassement. En tout cas, c'est une question qu'on s'est posée en commission, on a fait le tour de la question: Est-ce qu'il n'aurait pas été préférable de donner à un substitut du Procureur général un congé sans solde, s'il veut se présenter en politique, plutôt qu'un reclassement? Quant à nous, nous pensions que cette mesure ferait en sorte que le droit à la réintégration serait beaucoup plus facilement protégé de cette façon-là. Alors, le sous-ministre associé nous a fait part que, pour lui, cette mesure était très difficile à administrer, surtout dans les endroits où on possède peu de substituts du Procureur de la couronne. Donc, c'est uniquement pour cette raison que cette modalité, qui est le congé sans solde, peut être difficilement retenue. Encore là, nous nous sommes ralliés à ce raisonnement. Et il ne faut jamais oublier que, quand, justement, des projets de loi comme celui qui nous a été présenté font l'objet d'un débat, ce qui doit être notre priorité, c'est finalement l'administration de notre système de la justice. C'est pour cette raison que nous nous sommes ralliés à la position telle que présentée.

Donc, pour toutes ces raisons, M. le Président, je pense que ce projet de loi représente un compromis tout à fait acceptable entre le droit d'un procureur à vouloir exercer des activités politiques et le souci pour le gouvernement de faire en sorte que les substituts affichent une image de complète impartialité. Je pense que c'est un compromis qui est intéressant, qui est acceptable, et c'est pourquoi les membres de l'Opposition voteront en faveur de ce projet de loi. (11 h 50)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député.

Est-ce qu'il y a des interventions? Vous avez une intervention suite...

M. Rémillard: Oui.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Oui, M. le Président. M. le Président, vous me permettrez de remercier les membres de la commission parlementaire sur les institutions qui ont étudié ces projets de loi que nous étudions ce matin et, d'une façon toute particulière, je veux remercier le député d'Anjou pour sa contribution. Par ses commentaires, de fait, il nous a permis de voir tous les aspects de ce problème que nous avions et que nous solutionnons, je pense, de la meilleure façon avec ce projet de loi. En travaillant tous en fonction du même objectif, pour une justice la plus transparente possible, je crois que nous pouvons maintenant avoir une solution qui est très, très acceptable sur le plan du principe des droits et des libertés fondamentales, comme sur celui aussi de l'indépendance, qu'on doit trouver chez les substituts.

M. le Président, je voudrais le mentionner, j'ai eu l'occasion d'en parler avec plusieurs criminalistes, lors du congrès du Barreau en fin de semaine dernière, qui me disaient à quel point ils étaient satisfaits des différentes mesures que nous avons prises pour rendre la justice plus humaine en ce qui regarde le droit criminel. Nous avons maintenant une politique d'encadrement pour l'utilisation, par exemple, des délateurs, des témoins collaborateurs avec la police, avec les procureurs, pour poursuivre des criminels. Nous avons aussi, M. le Président, maintenant, des directives à l'effet que tout ce qui regarde ce que nous appelons la négociation de plaidoyers, le «plea bargaining» qu'on appelait, puisse se faire dans la transparence, avec l'information à la victime. Nous avons la poursuite verticale qui rend plus humaines et plus sensibles toutes ces questions de poursuite où la victime peut se sentir mal à l'aise; elle est soutenue par le même avocat dans tous les éléments de la procédure.

M. le Président, il y a aussi et surtout, dans les cas qui nous préoccupent, un dévoilement, un dévoilement complet de la preuve de la part de la poursuite.

Donc, quand le substitut décide de poursuivre, il rencontre la défense, il dit: Voici ma preuve. Aucune cachette, c'est clair, ce qui va nous permettre, M. le Président, probablement de nous pencher, avec probablement aussi plus de possibilités, sur l'utilisation de l'enquête préliminaire. Je ne dis pas, M. le Président, qu'il faut éliminer systématiquement l'enquête préliminaire de tous les cas où on peut avoir une enquête préliminaire présentement, mais je dis qu'avec le dévoilement de la preuve, comme on le fait maintenant, et les résultats qu'on peut avoir, je crois qu'on peut en arriver à la conclusion, dans bien des cas, que nous n'avons plus besoin de l'enquête préliminaire. Ce qui veut dire, M. le Président, des effets considérables sur la poursuite d'un procès, sur l'évolution de la procédure qui mène à un procès.

Alors, c'est l'un des sujets qui seront discutés dans les prochaines semaines, M. le Président, pour que nous puissions trouver un moyen, pour en avoir une solution en ce qui regarde, donc, l'utilisation de ces enquêtes préliminaires.

Aussi, M. le Président, comme le député d'Anjou le mentionnait, il y a toutes ces ententes que nous faisons avec les municipalités pour l'application de la partie XXVII, c'est-à-dire les poursuites sommaires, et, là aussi, ça va contribuer grandement à rendre la justice plus humaine au niveau des cours municipales et à alléger considérablement le processus devant les cours formelles de justice, tout ça dans le même souci de rendre la justice accessible et plus humaine.

Donc, M. le Président, je remercie la commission pour son travail sur un sujet qui n'était pas facile et je remercie le député d'Anjou pour sa collaboration.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de la Justice.

Mise aux voix

Le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général, est-il adopté?

M. Bélanger (Anjou): Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le ministre de la Justice.

M. Rémillard: M. le Président, je vous demande d'appeler l'article 17 de notre feuilleton.

Projet de loi 93

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 17, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 93, Loi modifiant le Code de procédure civile et la Charte des droits et libertés de la personne.

Y a-t-il des interventions sur ce rapport?

M. le ministre de la Justice.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Oui, M. le Président. Le projet de loi 93 intitulé Loi modifiant le Code de procédure civile et la Charte des droits et libertés de la personne et dont l'étude en commission des institutions a été complétée le 8 juin dernier propose diverses modifications en matière de procédure civile.

Ce projet de loi propose d'abord de modifier la règle actuelle concernant le huis clos en matière familiale afin de permettre la présence des journalistes lors des audiences à moins que le tribunal ne juge que leur présence cause un préjudice à une personne dont les intérêts peuvent être touchés par instance.

M. le Président, cette nouvelle orientation devrait permettre d'assurer la publicité nécessaire du débat judiciaire tout en préservant le caractère général du huis clos en matière familiale, et ce, dans le respect du droit à la liberté d'expression prévu à l'article 2b de la Charte canadienne des droits.

Je tiens toutefois à rappeler, M. le Président, que ce projet de loi n'a pas pour effet d'écarter la règle de l'article 815.4 du Code de procédure civile qui prescrit l'anonymat des parties et des enfants concernés par les demandes en matière familiale. Cette règle est maintenue, est maintenue fermement.

M. le Président, en effet, puisqu'une telle ouverture au principe du huis clos ne devait pas se faire au détriment du droit à la vie privée, il était essentiel de maintenir intactes, même à l'égard des journalistes, les règles spécifiques interdisant la publication et la diffusion d'informations permettant d'identifier une partie ou un enfant dont l'intérêt est en jeu dans une instance en matière familiale.

M. le Président, ce projet de loi propose, en deuxième lieu, de modifier le Code de procédure civile en vue d'améliorer l'administration de la justice en ce qui a trait au délai dans lequel un jugement doit être rendu. À cette fin, ce projet de loi consacre le principe général suivant lequel un délibéré ne pourra excéder 6 mois tout en réservant la possibilité que ce délai puisse être prolongé.

M. le Président, suivant un amendement qui a été adopté lors de l'étude détaillée de ce projet de loi en commission des institutions, le pouvoir de prolonger le délai de 6 mois pourra être exercé non seulement par le juge en chef, mais également à sa demande par le juge en chef associé personnellement. En outre, le juge en chef ou le juge en chef associé aura, avant de prolonger le délai de 6 mois ou de dessaisir le juge qui a fait défaut de rendre jugement dans les délais requis, à tenir compte des circonstances et de l'intérêt des parties.

M. le Président, l'objectif que nous avons dans ce projet de loi en ce qui regarde ces dispositions d'un

délai de 6 mois est en fonction de l'intérêt des parties. C'est donc cet objectif qui doit nous guider et guider d'une façon toute particulière le juge en chef et le juge en chef associé qui doivent prendre la décision s'ils demandent que le juge, qui a maintenant dépassé les 6 mois, puisse continuer ou bien s'il doit être dessaisi de ce dossier pour que le dossier soit confié à un autre juge. C'est donc l'intérêt des parties qui est la première référence, M. le Président, qui doit nous guider et guider le juge.

Par ailleurs, c'est au juge appelé à continuer une affaire qui lui sera confiée ou à entendre une cause remise au rôle qu'il reviendra de disposer des dépens en tenant compte des circonstances, y compris les dépens, dans un tel cas, lorsque le juge s'en tiendra à la traduction des notes sténographiques avec le consentement des parties. Le gouvernement assumera les frais de traduction de ces notes, à moins que le juge ne l'ordonne autrement, tel lorsque le recours lui apparaîtra manifestement mal fondé, frivole ou abusif. Cette mesure devrait permettre, M. le Président, de minimiser les inconvénients causés aux parties en raison de la remise au rôle de leur cause.

Les autres modifications concernent la juridiction de la Cour d'appel et la procédure devant cette Cour. La plupart des modifications proposées dans le projet de loi 93 s'inscrivent dans les suites du Sommet de la justice et reprennent les suggestions du groupe de travail tripartite ? ministère de la Justice, Barreau et magistrature ? portant sur l'encombrement des rôles de la Cour d'appel. (12 heures)

En premier lieu, M. le Président, le projet de loi propose de porter de 10 000 $ à 15 000 $ le seuil pécuniaire de l'appel de plein droit, ce qui correspond à l'indexation de ce seuil depuis 1982. De plus, certains appels qui sont actuellement de plein droit deviendront des appels sur permission. C'est le cas des jugements rendus à l'égard des requêtes en annulation d'une saisie avant jugement et des jugements rendus en matière non contentieuse. Cependant, M. le Président, certains jugements en matière non contentieuse continueront de faire l'objet d'un appel de plein droit. Ce sont ceux ayant trait à l'état et à la capacité des personnes comme, par exemple, les jugements rendus en matière de tutelle ou de régime de protection du majeur. Cette exception demeurerait afin de tenir compte des situations d'urgence qui sont souvent liées à ce type de recours et qui ont trait à l'intégrité de la personne, à la dignité de la personne.

Par ailleurs, le projet de loi contient des mesures visant à accélérer le déroulement de l'instance et à inciter les parties à mieux se préparer pour l'audition devant la cour. Ainsi, M. le Président, le code fera désormais obligation à l'appelant ou à son procureur de produire au greffe, dans un délai déterminé, une attestation certifiant qu'il a mandaté un sténographe de traduire les notes sténographiques. Et cette mesure devrait avoir pour effet d'accélérer la mise en état de la cause.

Une autre mesure importante, M. le Président, visant à éliminer les appels dilatoires ou les appels frivoles, est proposée au niveau de la formation de l'appel. En effet, M. le Président, l'énoncé sommaire actuel des moyens que l'appelant prévoit utiliser sera remplacé par un énoncé détaillé qui devra mieux cerner les motifs d'appel.

En matière de délais, le projet de loi propose de porter celui de production du mémoire de l'appelant à 120 jours, afin de procurer à ce dernier le temps nécessaire pour obtenir la traduction des notes sténographiques et pour rédiger son mémoire. Toutefois, le projet de loi prévoit un mécanisme devant assurer le respect de ce délai. Ainsi, si l'appelant ne produisait pas son mémoire dans le délai, l'intimé pourra le sommer de le produire dans un délai additionnel de 30 jours, ou d'adresser une requête à un juge de la Cour d'appel pour en faire prolonger le délai. À l'expiration de ce délai additionnel, l'appel pourra être déclaré déserté avec dépens. De plus, le projet de loi adapte à l'intimé des nouvelles règles régissant la production du mémoire.

M. le Président, enfin, ce projet de loi apporte une modification importante en ce qui concerne l'exécution provisoire. Ainsi, il y a aura, désormais, exécution provisoire automatique du jugement de première instance, malgré l'appel, dans certaines matières, comme par exemple, en matière de pension alimentaire, de garde d'enfant ou de réparation urgente.

Cependant, le tribunal conservera la discrétion, M. le Président, de suspendre l'exécution provisoire. Pour les autres cas, le projet de loi propose de maintenir l'exécution provisoire sur ordonnance du tribunal, s'il y a urgence exceptionnelle, tout en étendant cette règle lorsque des raisons spéciales sont invoquées. Les nouvelles règles en matière d'exécution provisoire visent à éviter les appels dilatoires, des appels qui ne servaient qu'à retarder l'application du jugement de première instance.

Je voudrais signaler que divers amendements ont été apportés lors de l'étude détaillée du projet de loi, donc, en commission parlementaire. La plupart sont d'ordre technique, et ces amendements visent à bonifier le projet de loi. M. le Président, permettez-moi d'en signaler 2 d'une façon toute particulière. Le premier amendement apporté à l'article 13 du projet de loi a pour effet de permettre au tribunal, sur demande, de subordonner l'exécution provisoire à la constitution d'une caution, non seulement lorsque c'est le tribunal qui ordonne l'exécution provisoire, mais également dans les cas où l'exécution provisoire a lieu par l'effet de la loi.

Et le deuxième amendement, M. le Président, introduit une disposition transitoire qui préserve le droit d'appel de plein droit, quant aux causes pendantes dont le jugement a été rendu avant l'entrée en vigueur du projet de loi, mais dont les délais d'appel ne sont pas expirés. Et cet amendement reprend une règle similaire adoptée en 1982, lors de l'augmentation du seuil pécuniaire d'appel de plein droit devant la Cour d'appel.

En terminant, M. le Président, je voudrais souligner que le projet de loi 93 a fait l'objet d'une large consultation auprès des intervenants concernés. Je remercie les membres de la commission des institutions pour leur précieuse collaboration, lors de l'étude détaillée du projet de loi 93, dont les amendements apportés en commission ont permis d'en bonifier le contenu. Je remercie, M. le Président, les juges en chef des Cours du Québec, sous la direction du juge en chef de la Cour d'appel et juge en chef, par le fait même, du Québec, le très honorable Claude Bisson. Je les remercie pour leur collaboration, pour que ce projet de loi puisse les aider à ce que la justice puisse se faire de la façon la plus accessible possible et dans les meilleurs conditions possibles.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de la Justice.

Un simple rappel aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à la prise en considération du rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 93. Et je cède la parole à M. le député d'Anjou.

M. Pierre Bélanger

M. Bélanger (Anjou): Je vous remercie, M. le Président.

Encore là, je pense que ça a été un projet de loi qui a donné lieu à des débats très intéressants parce qu'il touchait plusieurs aspects de notre Code de procédure civile sur des questions délicates, sur des questions qui avaient fait l'objet, récemment, d'inquiétudes de la part de certaines personnes.

Premièrement, la question du huis clos. Évidemment, quand on a déposé ce projet de loi, il y avait eu quelques réactions de la part de regroupements ou de gens préoccupés, justement, par la protection de la vie privée des gens. En particulier, le Protecteur du citoyen avait fait part, dans une lettre du 19 mai, de certaines préoccupations qu'il avait. En effet, il ne voulait pas maintenant, du fait qu'on admette les journalistes lors d'audition de causes matrimoniales en matière familiale, que ça résulte finalement à faire en sorte que le huis clos ne s'applique pas. Alors, il voulait... le Protecteur du citoyen voulait que cette ouverture soit encadrée d'une façon stricte.

C'a donné lieu à un débat intéressant, et on a pu constater que les dispositions qui prévalent actuellement dans le Code de procédure civile font en sorte que l'information qui peut sortir d'une telle audition est protégée considérablement et suffisamment pour faire en sorte que le huis clos continue à s'appliquer.

Comme je l'ai mentionné lors d'une intervention précédente, j'ai pu vivre, moi, la situation avant que le huis clos ne soit imposé pour les causes en matière matrimoniale, et je dois dire dans certains cas, dans certaines cours, c'était rendu quasiment du vaudeville. On voyait M. Untel ou Mme Unetelle, de telle rue, qui, tous les lundis, venait assister aux divorces de sa municipalité, pour connaître pourquoi monsieur voulait se séparer de madame. Et puis, c'en était rendu tout simplement du vrai vaudeville, M. le Président. Donc, cette disposition de huis clos est une disposition que tous et chacun considèrent maintenant essentielle pour faire en sorte que nos cours de justice ne servent pas, finalement, à une espèce de parodie de la justice.

La deuxième disposition qui, je pense, était attendue depuis longtemps, quand même, c'était le fait de pouvoir contrôler le retard que prenaient certains juges, il faut le dire, une infime minorité. Quand on a vu les tableaux qui nous ont été présentés par le ministre de la Justice, ça touche en tout, M. le Président, même pas 100 causes où il y avait des retards de plus de 6 mois entre la prise du délibéré et le moment du jugement.

Donc, M. le Président, il y avait un problème, il y avait un malaise relativement à ce que certains juges prennent beaucoup de temps pour rendre jugement. Donc, il y avait lieu de se demander quelle était la mesure appropriée, justement, qu'on pouvait adopter pour régler cette situation.

Ma première réflexion, quand on m'avait fait part du problème, c'était de voir ça comme un problème déontologique. J'étais assez réticent à faire en sorte qu'on impose de par une loi un délai maximum pour un juge de rendre jugement. Ça m'indisposait un peu, et j'en ai fait part au ministre de la Justice qui, à ce moment-là, a fait témoigner un expert en droit constitutionnel. Finalement, on s'est rendu compte qu'il était difficile, au niveau constitutionnel, de donner plus de pouvoir au juge en chef pour justement discipliner ses juges, car, à ce moment-là, on pourrait dire qu'il y a entrave au bon fonctionnement des cours de justice. Quant à moi, c'était un peu la formule que je privilégiais.

Alors, finalement, on s'est rendu compte que cette disposition, qui prévoit un délai maximal de 6 mois, était la seule applicable dans les limites et dans les contraintes constitutionnelles que nous avons. Cependant, en procédant à l'étude de cette disposition, il y a une préoccupation, je pense, qui nous a frappés là-dedans, c'est le droit des parties. Finalement, les parties ne sont nullement responsables du fait qu'un juge prenne plus de temps pour rendre jugement.

Donc, pour nous, ce qui était fondamental, et je pense que le ministre partage tout à fait cette préoccupation, c'était que les parties ne subissent aucun préjudice financier dû au retard d'un juge et dû au fait que leur dossier, finalement, soit transféré à un autre juge pour une nouvelle audition, ou encore qu'un second juge rende jugement sur la foi des notes stenographiques seulement. Car on sait ce que ça coûte, un deuxième procès, il faut payer en double nos avocats. Les notes sténographiques, ça peut représenter jusqu'à 1000 $ ou plus par jour d'audition, si on procède à la retranscription des notes sténographiques. Donc, tout ça, ça nous préoccupait. (12 h 10)

Finalement, le ministre est arrivé avec un amende-

ment intéressant qui, suite à notre suggestion... C'est-à-dire que pour nous il était essentiel, avant que le juge prenne sa décision de dessaisir un juge du dossier, que les parties soient avisées, que les parties soient convoquées afin que leur intérêt soit pris en cause. Et justement, maintenant, l'article a été modifié et il prévoit qu'avant de prolonger un délai ou de dessaisir le juge qui a fait défaut de rendre jugement dans les délais requis le juge en chef doit tenir compte des circonstances et de l'intérêt des parties.

Je pense que cet amendement, cette disposition va faire en sorte que, justement, les droits des parties soient respectés. Parce qu'on peut facilement imaginer le cas où une partie désire tout simplement que le délai du premier juge soit prolongé si cette partie-là n'est pas en mesure d'assumer aucuns frais supplémentaires. À ce moment-là, elle peut décider: oui, pour moi, 1 mois ou 2 avant que le jugement ne soit rendu, pour moi, ce n'est pas un drame. Je préfère que le premier juge reste saisi du dossier.

Alors, c'est important qu'on sente qu'il y ait cette obligation que les parties aient le droit d'être entendues, et je pense que ça s'est reflété dans l'amendement. Une autre chose, aussi. L'article, tel que présenté originalement, prévoyait que ça prenait des circonstances exceptionnelles avant que le juge ne prolonge le délai de 6 mois. On a tout simplement changé cette disposition pour la rendre moins exorbitante. Maintenant, le juge en chef a une plus grande latitude pour, justement, prolonger le délai pour rendre jugement.

Alors, je pense que cette disposition répond à nos préoccupations. Elle devrait régler le problème, je le crois. On doit faire, je pense, confiance à notre système de justice, à nos juges en chef et aussi à nos juges qui oeuvrent dans l'intérêt de la justice, et nous sommes confiants qu'ils pourront s'autodiscipliner avec ces mesures parce que je pense que ça porte un discrédit vraiment assez considérable à toute l'administration de la justice quand on voit, comme on a vu, il y a quelques mois, le nom de juges dans les journaux, disant que tel juge prend tant d'années à rendre jugement, que tel juge prend tant de mois à rendre jugement. Je pense que ce n'est vraiment pas une façon acceptable, dans notre système de justice, de voir ainsi nos magistrats discrédités de la sorte pour quelques ? il faut le dire, quelques seulement ? juges qui étaient récalcitrants ou retardataires.

Je pense que c'était tout à fait inacceptable, et on se devait de réagir aussi parce qu'on a vu plus d'une fois, M. le Président, des personnes, des parties obtenir jugement après 2 ans, 3 ans, 4 ans même d'attente. Et ce jugement, une fois rendu après un tel délai, est tout à fait artificiel, illusoire. La personne ne peut même plus, souvent, l'appliquer puisque la personne, la défenderesse est des fois décédée, a fait faillite. Alors, on peut comprendre le tort considérable subi, à ce moment-là, par les personnes à cause de cette situation.

Le deuxième point, le ministre en a fait part, on a modifié d'une façon assez substantielle le processus d'aller en appel. Je pense, encore là, que ça s'imposait puisque certains bureaux d'avocats, certains plaideurs ? encore là, il ne faut pas généraliser et dire que c'est vraiment généralisé ? mais certains, il faut le dire, profitaient des moyens d'appel pour finalement être un genre d'outil de négociation dans les procès. On allait en appel sachant tout à fait qu'on n'irait pas en appel, qu'on se retirerait, qu'on se désisterait de notre appel, tout simplement pour mettre une pression, pour négocier suite à l'obtention d'un jugement défavorable.

Alors, je pense qu'avec les dispostions qu'on a maintenant mises en place par ce projet de loi le processus d'appel va être simplifié quant au délai qui passe de 75 à 120 jours pour pouvoir déposer le mémoire, mais, d'un autre côté, avec l'énoncé détaillé, la partie qui désire aller en appel devra énoncer d'une façon claire tous les moyens qu'elle veut invoquer pour aller en appel. Il n'y aura plus de surprises, finalement, et ça démontrera, en même temps, que cet appel est sérieux. Donc, d'une façon beaucoup plus évidente, beaucoup plus facile, la partie intimée pourra faire rejeter un appel qu'elle jugera dilatoire ou abusif.

Alors, ça, je pense que c'est tout à fait intéressant et que ça s'imposait, une telle disposition, c'est-à-dire ne pas brimer le droit d'appeler, mais, d'un autre côté protéger les parties contre des appels abusifs.

La dernière disposition qui a fait l'objet de ce projet de loi, c'est le fait qu'on étende le nombre de jugements qui feront maintenant l'objet d'une exécution provisoire. Encore là, c'est tout à fait souhaitable et acceptable. Le Protecteur du citoyen avait réagi demandant à ce qu'on étende la disposition qui prévoit qu'on puisse exiger une caution de la part d'une partie qui exécute provisoirement un jugement s'il peut y avoir un préjudice de subi. Alors, on a eu un amendement en ce sens-là qui répondait à cette préoccupation du Protecteur du citoyen et qui nous a pleinement satisfaits.

Encore là, je dois le dire, les débats et les échanges qui ont eu lieu lors de cette commission ont été constructifs. Je pense que tous les membres de cette commission ? autant l'Opposition que le gouvernement ? voulaient faire en sorte que ces dispositions, finalement, facilitent l'administration de la justice. Et je ne peux m'empêcher, M. le Président, de me poser des questions, à savoir: Comment se fait-il que, lors de ces commissions, lors de ces projets de loi, justement, les débats sont si constructifs? Le ministre, d'une façon systématique, fait preuve d'une très grande rigueur dans l'examen des principes de droit qui doivent être appliqués, des règles de justice naturelle qui doivent s'appliquer, et, pourtant, quand on arrive relativement à d'autres projets de loi, à d'autres dispositions comme le principe de la non-rétroactivité des lois, le ministre, en tant que jurisconsulte et président du Comité de législation, ne semble plus faire preuve de toute cette rigueur. Où sont les principes qui, pourtant, nous sont chers lors de l'étude des projets de loi en commission? Et on a des échanges ? tout le monde, je pense, va l'admettre ? intéressants, que ce sont les principes de droit qui

doivent gouverner l'appareil législatif du Québec. Comment se fait-il, M. le Président, que, quand on parle de non-rétroactivité des lois, les principes semblent oubliés? Et ce n'est pas uniquement relativement à ce projet de loi. Il y a aussi toute la question du projet de loi 91, où, maintenant, on crée une présomption de réception d'un avis qui suspend le permis de conduire. Encore là, c'est la présomption d'innocence qui est mise en cause par cette disposition.

M. le Président, je ne comprends pas. Le ministre de la Justice est président du Comité de législation. Comment peut-il laisser passer de tels projets de loi, qui violent d'une façon flagrante nos principes fondamentaux de droit? Je ne le comprends pas, M. le Président. Tous les projets de loi passent par le Comité de législation. Il en est le président. Il peut les bloquer et il doit faire en sorte que tous les projets de loi de ce gouvernement ? ou de n'importe quel gouvernement, finalement ? reflètent une certaine homogénéité, un certain respect des principes de justice naturelle. Comment se fait-il que le ministre qui, comme je le dis, lors de l'étude de nos projets de loi, fait preuve d'une telle rigueur dans ses principes ? et je le souligne ? comment se fait-il que, quand il porte le chapeau de jurisconsulte et de président du Comité de législation, il laisse passer de tels projets de loi comme le dernier budget, comme, justement, le projet de loi 91, comme le projet de loi 55, qui a été adopté en juin dernier suite, finalement, à la demande du ministre des Affaires municipales, le ministre Ryan. Ça a été décrié par le Barreau. Le Barreau l'a condamnée, cette façon de procéder. C'est inacceptable.

Je peux comprendre que, dans des circonstances tout à fait exceptionnelles, on puisse avoir recours à un mode de législation par rétroactivité. Cependant, les règles élémentaires de justice naturelle font en sorte qu'on se doit de faire en sorte que les tiers ne subissent aucun préjudice suite à cette rétroactivité, et ce n'est pas le cas dans toutes les dispositions que je vous ai mentionnées: le projet de loi 55 et le dernier budget de ce gouvernement.

Et je pense qu'on doit, en tant que parlementaires... Et, moi, en tant que porte-parole de la Justice, ça m'inquiète de voir cette nonchalance. Je ne parle pas de mauvaise foi, M. le Président. Je ne peux pas parler de mauvaise foi. Je connais le ministre pour avoir, avec lui, étudié plusieurs projets de loi. Je sais qu'il tient à ces principes de droit. Mais pourquoi ? en tant que président du Comité de législation, en tant que jurisconsulte du gouvernement du Québec ? ne dit-il pas à ses collègues qu'il y a certains principes fondamentaux qu'on se doit de respecter, qu'on ne peut pas être nonchalant, qu'on ne peut pas ignorer, sous peine de discréditer, finalement, tout l'ensemble de l'appareil législatif, pour faire en sorte que les gens se disent: Si notre gouvernement ne respecte pas ses propres principes de droit fondamentaux, pourquoi, moi, en tant que citoyen, devrais-je respecter mes droits, mes lois? (12 h 20)

C'est tout ça qui est en cause. C'est pour ça que c'est tellement important. C'est pourquoi le Barreau, qui, normalement... Maintenant, on a un nouvau Bâtonnier, Me Paradis. On se doit, d'ailleurs, de le souligner. J'espère ? je suis persuadé, d'ailleurs ? qu'il fera un très bon travail. On voit, d'ailleurs, qu'il est très actif dans ses dossiers et qu'il va rappeler à l'ordre ce gouvernement quand celui-ci s'écartera du bon chemin. Je me dois de le souligner, M. le Président. D'ailleurs, je dis au nouveau bâtonnier qu'il aura toute ma collaboration pour qu'on puisse travailler ensemble, justement, pour faire une critique constructive du ministère de la Justice et de ce gouvernement.

Alors, M. le Président, c'est pourquoi, depuis 2 ou 3 semaines, l'Opposition talonne le ministre de la Justice et le Procureur général du Québec qui est jurisconsulte sur ces questions qui sont, pour nous, fondamentales. Évidemment, c'est difficile en période de questions de bien faire comprendre aux citoyens ce qui est en jeu ici, mais je pense qu'on doit le dire, on doit le souligner: des principes fondamentaux sont en jeu, et le ministre, en tant que président du Comité de législation, doit réagir. Il ne peut plus laisser passer de tels projets de loi entre ses mains. Il a les pouvoirs de les bloquer et il doit les bloquer.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le ministre de la Justice.

M. Rémillard: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En vertu du règlement, pour un maximum de 5 minutes.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Oui. Alors, M. le Président, le député d'Anjou vient de faire des commentaires sur un sujet que nous avons discuté en commission parlementaire, sur la question de la rétroactivité des lois.

Je veux simplement dire, M. le Président, que, comme président du Comité de législation qui voit à tous les projets de loi, comme membre du gouvernement, j'ai à faire valoir mes opinions comme ministre de la Justice et comme président du Comité de législation, et des opinions, M. le Président, qui sont conformes à ce que je pense. Je pense comme juriste, comme citoyen. Je crois que nous vivons dans une société de démocratie, de liberté et, par conséquent, les droits et les libertés fondamentales doivent être un des éléments les plus importants de référence pour nous lorsque nous avons à étudier un projet de loi.

La même chose, M. le Président, en ce qui regarde des droits qui sont acquis par des citoyens. On ne peut pas se servir de la souveraineté de cette Assemblée législative pour en abuser, mais bien dans l'intérêt public. M. le Président, j'ai fait une relation, ce matin, dans ma réponse en ce qui regarde les droits et les

libertés fondamentales, à l'utilisation de ce qu'on appelle la clause dérogatoire ou «nonobstant». C'est-à-dire lorsque nous en arrivons à la conclusion que l'intérêt public commande que nous puissions limiter, sous certains aspects, l'application de certains droits, on en arrive à la conclusion qu'on utilise cette clause dérogatoire. Pour ma part, je ne l'aime pas, M. le Président, cette clause. Je l'ai dit. Je l'ai toujours dit depuis qu'on l'a mise dans la Constitution, en 1982. J'étais contre. Je n'aime pas cette clause-là. Quand il faut l'appliquer, à ce moment-là, on regarde ce qu'on doit faire.

Mais, en ce qui regarde la rétroactivité des lois, M. le Président, je me dis: Attention! Il faut qu'on comprenne bien le sens de la rétroactivité d'une loi. Le député de Lévis, M. le Président, qui s'est levé pour me poser une question pendant la période des questions, alors qu'il a été le père de la Loi sur la protection du territoire agricole... Or, s'il y a une loi qui a touché, qui a fait mal dans son aspect rétroactif, c'est bien cette loi-là, et je dois dire, M. le Président, que je le comprends d'avoir mis un effet rétroactif dans cette loi sur le territoire agricole. Pourquoi? Parce que si on n'avait pas eu cet effet rétroactif, eh bien, on peut penser qu'il y aurait eu de la spéculation. Et pour éviter la spéculation, au nom de l'intérêt public, il a dit: Très bien, la loi s'applique du moment de son dépôt. Il y avait des gens, M. le Président, qui attendaient pour vendre leur ferme et c'était pour eux ce qu'ils voulaient laisser à leurs enfants, et qui attendaient parce qu'ils voyaient qu'ils pouvaient avoir de meilleurs prix. Plus le temps avançait, plus ils croyaient qu'ils pourraient avoir de meilleurs prix parce que ça se développait tout autour. Et, tout à coup, paf! le projet de loi est déposé et, à partir de son dépôt, peu importent les débats parlementaires, on en arrive à la conclusion que dès que le dépôt de la loi s'applique, la loi va s'appliquer.

C'est un effet rétroactif, M. le Président, extrêmement sévère, extrêmement sévère parce qu'il touche au coeur même de l'institution parlementaire parce qu'il présume des débats qu'il doit y avoir en cette Chambre. Je dois dire, M. le Président, que dans le cas de cette Loi sur la protection du territoire agricole, je crois qu'on peut dire que l'intérêt public, dans de telles circonstances, faisait en sorte qu'il fallait procéder de cette façon.

Alors, ce que je veux dire, M. le Président... Je l'ai dit au député d'Anjou: Attention! Oui, respectons les principes de droit. Oui, soyons.capables de dégager l'intérêt public et, dans ce cas-là, M. le Président, regardons chaque cas. Chaque cas est un cas d'espèce.

C'est dans ce contexte, M. le Président, que je reçois les commentaires du Barreau, de son bâtonnier, Me Paradis, qui est le nouveau bâtonnier, et c'est dans ce contexte que je veux faire mon travail comme ministre de la Justice et comme président du Comité de législation.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre.

Mise aux voix

Le rapport de la commission des institutions portant sur le projet 93, Loi modifiant le Code de procédure civile et la Charte des droits et libertés de la personne, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler l'article 18 de notre feuilleton.

Projet de loi 94

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 18, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 94, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires.

Est-ce qu'il y a des interventions sur ce rapport? M. le ministre de la Justice.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Oui, M. le Président.

Le projet de loi 94 propose une modification à l'article 224 de la Loi sur les tribunaux judiciaires visant à octroyer au gouvernement le pouvoir d'établir, par règlement, des frais judiciaires et des droits de greffe en matière civile qui pourront être différents, selon qu'ils seront exigibles d'une personne physique ou d'une personne morale, c'est-à-dire d'une compagnie.

Vous vous souviendrez, M. le Président, qu'une telle approche a été adoptée dans le cadre de la Loi modifiant le Code de procédure civile concernant le recouvrement des petites créances, loi que nous avons adoptée en décembre dernier.

L'adoption d'une telle tarification différente entre les personnes physiques et les personnes morales permettra, M. le Président, d'assurer un plus grand équilibre entre ces personnes. Notamment, en regard de leurs moyens d'exercer les recours judiciaires et d'adopter une tarification tenant compte de cette réalité. Nous croyons que les compagnies ont plus de moyens, tant sur le plan administratif que très souvent sur le plan financier, pour assumer ces coûts de justice.

Je tiens à remercier, M. le Président, les membres de la commission des institutions pour leur collaboration lors de l'étude détaillée de ce projet de loi 94 dont nous procédons aujourd'hui à la prise en considération du rapport.

M. le Président, j'ai eu l'occasion, lors de mon discours au Barreau, que je mentionnais tout à l'heure,

vendredi dernier, de mentionner cette loi sur les petites créances que nous avons modifiée pour que le seuil d'admissibilité passe à 3000 $; il était auparavant à 1000 $. Donc, c'est-à-dire que ceux qui ont des créances de 3000 $ et moins peuvent s'adresser aux petites créances. Je crois, M. le Président, qu'éventuellement ça devrait monter à 5000 $.

Nous avons aussi modifié la loi pour que les petites compagnies de 5 employés et moins puissent avoir accès aussi aux petites créances. Je pense aux petits dépanneurs qui s'étaient incorporés, je pense aux garagistes, je pense aux nettoyeurs, je pense à tous ces commerces; et on sait à quel point il y en a, de ces petits commerces, M. le Président, partout au Québec, où les gens se sont incorporés pour administrer leur commerce. C'est donc une compagnie qui est propriétaire. Il n'y avait pas possibilité, donc, pour ces commerçants incorporés, donc, une compagnie, d'avoir accès aux petites créances. Maintenant, avec la nouvelle loi, ils peuvent le faire.

En plus, M. le Président, nous avons instauré à la grandeur du Québec, partout sur le territoire du Québec, la médiation en ce qui regarde ces petites créances. Ce qui signifie, M. le Président, qu'avant d'aller devant le juge il sera possible à ceux qui s'adressent aux petites créances de pouvoir se référer à un médiateur pour régler leur cas avant d'aller devant le juge. On a procédé à une opération-pilote dans 5 villes, M. le Président, dont ici, à Québec, et on s'est aperçu que lorsque la médiation était choisie, on avait un taux de réussite de règlement de près de 85 %. (12 h 30)

Et à mon sens, la médiation, la conciliation, l'arbitrage sont les voies de l'avenir pour l'administration de la justice. J'envisage, M. le Président, dès l'automne prochain, de présenter un projet de loi où il pourra y avoir médiation dans toutes les cours de justice: Cour du Québec, Cour supérieure, Cour d'appel même, où les parties pourront avoir recours à un médiateur avant de s'adresser au juge. M. le Président, je suis convaincu qu'on va pouvoir, avec un tel système, rendre la justice plus accessible et encore plus humaine.

Alors, M. le Président, c'est ce que nous avons fait pour les petites créances. Et ce que nous disons, nous disons que ceux qui seront médiateurs seront des avocats et des notaires de la pratique privée. M. le Président, vous me permettrez de dire que ce n'est pas parce que nous n'avons pas confiance aux avocats et aux notaires fonctionnaires que nous avons dans notre système public. Bien au contraire, M. le Président, j'ai pu le constater comme ministre de la Justice. Je suis ministre de la Justice depuis presque 5 ans ? une question de jours, M. le Président ? et j'ai pu constater la très grande compétence de nos fonctionnaires. J'ai pu le constater en faisant le Code civil, j'ai pu le constater en faisant tous les projets de loi que nous avons faits ensemble dans cette Chambre, M. le Président, et j'ai pu le constater à tous les niveaux de l'administration de la justice, avec beaucoup de fierté, comme ministre de la

Justice. J'ai pu vérifier cette compétence de nos avocats, de nos notaires qui travaillent pour l'État.

M. le Président, la décision que j'ai prise de nous référer à des avocats et des notaires de la pratique privée se réfère essentiellement à cet objectif que nous partageons au niveau du gouvernement d'alléger l'appareil de l'État. Et si nous pouvons faire exercer ce service, offrir ce service en ayant recours au secteur privé, M. le Président, pourquoi on ne le ferait pas? Pourquoi on ne le ferait pas? On sauve des coûts. C'est évident, M. le Président, les chiffres sont là, et ça nous coûte en moyenne un tiers de moins. Ça ne veut pas dire que c'est dans tous les cas la même chose. Ça ne veut pas dire qu'à chaque fois qu'on prend le système privé ça nous coûte moins cher. Ce n'est pas ça que je dis, absolument pas. Et dans certains aspects de l'administration de la justice, le secteur public, les avocats et notaires fonctionnaires doivent continuer leur travail, et même l'intensifier, le développer. Mais en ce qui regarde cette médiation au niveau des petites créances, M. le Président, en nous référant au secteur privé, je crois que nous rendons service à l'administration de la Justice.

D'ailleurs, c'est la même philosophie que nous allons retrouver dans l'administration de la loi sur la médiation familiale. J'ai eu l'occasion aussi, M. le Président, de parler de cette loi dans mon discours aux membres du Barreau, de leur dire à quel point j'ai confiance que ce projet de loi sur la médiation familiale, qui, dès que la procédure est déposée, M. le Président, en cours de divorce ou de séparation, permet au juge de demander qu'il y ait médiation, va rendre la justice tellement plus humaine et plus accessible. Pensons, M. le Président, à des cas de séparation, en ce qui regarde la séparation du patrimoine familial. Ce n'est pas facile. Avec un médiateur, ça va se passer, j'en suis convaincu, beaucoup mieux. Pensons, M. le Président, à la garde des enfants. C'est souvent tellement pénible; pénible pour les enfants, pénible pour les parents d'être dans le système judiciaire et décider qui aura la garde des enfants: Est-ce que tu veux aller avec papa ou tu veux aller avec maman? J'ai vu, moi, poser cette question-là en pleine cour, M. le Président, et je disais: Mais ça n'a pas de bon sens. Ça n'a pas de bon sens pour les parents, comme ça n'a pas de bon sens pour les enfants, même pas devant le juge, même si c'est le juge en Chambre. Il faut qu'on puisse régler ça d'une façon beaucoup plus humaine, et la médiation va le permettre, M. le Président.

Pensons aux pensions alimentaires aussi. J'en parlais avec des avocats et des avocates qui pratiquent le droit familial, en fin de semaine, pendant ce congrès du Barreau, et ils me parlaient du problème des pensions alimentaires, que les pensions alimentaires puissent être payées. Il y a 55 % des pensions alimentaires où il faut intervenir pour qu'elles soient payées, et ça me préoccupe. Ça me préoccupe comme ministre de la Justice, j'ai déjà eu l'occasion de le mentionner publiquement à plusieurs reprises, parce qu'il y a toute une chaîne

d'effets dans la mesure où la pension alimentaire n'est pas payée, en ce qui regarde la pauvreté de la famille monoparentale et les conséquences chez les enfants, les enfants qui abandonnent l'école, les enfants qui se retrouvent dans la rue, la délinquance, la criminalité. Alors, M. le Président, ça me préoccupe comme ministre de la Justice, mais je me dis que, si la pension alimentaire peut être déterminée avec l'aide d'un médiateur, on a beaucoup plus de chances que la pension alimentaire soit vue comme une responsabilité et non pas comme une pénalité. Dans la mesure, M. le Président, où, dans toutes ces conditions de séparation, de divorce, une partie voit qu'elle est pénalisée parce que le juge vient de décider: voici ce que vous aurez à payer, voici comment ça va se passer, la séparation, elle a l'impression, souvent, que, oh! elle s'est fait avoir, on lui a imposé le jugement, et elle est moins portée, si vous voulez, à voir ces dispositions d'une séparation d'une vie en commun comme la responsabilité qu'elle doit assumer. Et c'est là que le rôle du médiateur va pouvoir s'exercer. C'est là que le médiateur, avec tout ce que ça comprend, M. le Président, le travail de médiateur... Parce que là aussi j'ai été agréablement surpris d'entendre parler mes collègues avocats et avocates pendant la fin de semaine, qui me disaient: Bien, moi, j'ai suivi des cours pour être médiateur.

Beaucoup de Barreaux régionaux, M. le Président, ont organisé des cours de médiation pour leurs membres. On ne s'improvise pas médiateur. Ce n'est pas parce qu'on est avocat, qu'on est notaire ou qu'on est psychologue qu'on devient, par le fait même, médiateur. Etre médiateur, M. le Président, c'est une façon de faire qui appelle à des connaissances de comportements qui doivent être apprises. Et j'ai été agréablement surpris de voir que mes collègues avocates et avocats sont très sensibles à cet aspect-là et suivent des cours de médiateur, de conciliateur, suivent des cours pour devenir arbitre. Et, M. le Président, je l'ai mentionné tout à l'heure, pour moi, ce sont les voies de l'avenir en ce qui regarde notre justice, surtout en ce qui regarde l'aspect civil. C'est notre voie de l'avenir, M. le Président, parce que, même si on construit des palais de justice partout, même si on ajoute encore des juges, M. le Président, on ne pourra jamais en arriver d'une façon satisfaisante à offrir une administration de la justice qui garantisse l'accessibilité à la justice si on n'est pas capable de prévoir des mécanismes moins formels qui permettent aux citoyens de se sentir responsables.

Et, M. le Président, de ce Sommet de la justice de février 1992, il est sorti une grande conclusion que tout le inonde a partagée: la justice n'est plus la responsabilité exclusive de l'État. C'est une responsabilité à partager. Et c'est à chacun, à chacune d'entre nous à prendre ses responsabilités.

M. le Président, peut-être que dans les dernières années de l'après-guerre, avec ce développement de la technologie d'une façon phénoménale, et avec le développement économique aussi, on a mis l'accent beaucoup plus sur le sens de l'État que sur le sens de la personne. Il faut revenir à ce sens de la personne. Il faut responsabiliser le citoyen. Il faut l'emmener, dans le cadre de l'administration de la justice, à pouvoir trouver des solutions à ses litiges par lui-même, avec l'aide d'une tierce partie qui se situe à l'extérieur du processus formel de l'administration de la justice. Et, M. le Président, je ne dis pas ça pour discréditer le processus formel d'administration de la justice. Bien au contraire, les projet de loi que nous étudions en cette Chambre, entre autres, en ce qui regarde les délais, avec un délai maximum de six mois, avec toutes les nouvelles procédures que nous allons établir au niveau de la Cour d'appel, pour aussi mettre fin à des délais très considérables au niveau de la Cour d'appel, nous améliorons de beaucoup l'administration de la justice au niveau de nos cours de justice. Et il faut continuer à le faire. Mais ce que je dis, M. le Président, c'est: Trouvons des moyens pour permettre aux justiciables d'avoir accès à la justice en dehors du processus formel parce que le processus formel coûte trop cher. Le processus formel offre une accessibilité limitée. (12 h 40)

M. le Président, c'est la réalité des choses. Si on veut pouvoir y remédier, nous n'avons que cette solution de la médiation, de la conciliation et de l'arbitrage. M. le Président, je présente donc ce projet de loi 94 sur les tribunaux judiciaires avec beaucoup de plaisir. Je remercie la collaboration que nous avons reçue. Je remercie donc la commission des institutions et l'Opposition pour apporter son soutien à ce projet de loi. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de la Justice. Nous en sommes à l'étape de la prise en considération du rapport de la commission sur le projet de loi 94, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires. Je cède la parole à M. le député d'Anjou, porte-parole de l'Opposition officielle en cette matière. M. le député.

M. Pierre Bélanger

M. Bélanger (Anjou): Je vous remercie, M. le Président. Il ne s'agit que de mentionner ou d'effleurer le Sommet de la justice pour que le ministre nous en fasse part et nous parle de cet événement qui a marqué considérablement son existence et, nous devons le dire, l'existence de beaucoup de gens. Nous espérons que ça va continuer à marquer les gens et qu'il y aura plus de retombées que celles que nous voyons présentement, qui sont, on doit l'admettre, tout à fait louables, mais malheureusement peu nombreuses.

M. le Président, pour en venir à ce projet de loi, qui, vous en conviendrez avec moi, avec 3 articles, ne suscitent pas énormément de débats, je dois vous dire quand même que nous avons été un peu déçus de ne pas voir, avec ce projet de loi qui, maintenant, prévoit un tarif spécial, quant aux frais judiciaires, entre les personnes physiques et les personnes morales... On s'atten-

dait à voir, donc, avec ce projet de loi, un tarif qui nous permettrait d'évaluer de quelle façon serait gérée cette différence de tarifs entre les personnes morales et les personnes physiques. On a toujours un problème avec les personnes morales, c'est qu'on a plusieurs sortes de personnes morales. On a des personnes morales qu'on pourrait appeler compagnies familiales, où vous avez papa, maman et l'oncle qui sont administrateurs et actionnaires, et vous avez, de l'autre côté, des multinationales qui sont aussi des personnes morales et qui vont être traitées sur un pied d'égalité. On peut comprendre que ces 2 compagnies n'ont pas les mêmes capacités de paiement. Alors, il va falloir, je pense, faire attention quant au tarif qui va être imposé à ces personnes morales. On s'attend à ce que ce tarif soit plus élevé. Évidemment, les personnes morales ont une capacité de pouvoir déduire, d'une façon fiscale, le coût de leurs procédures judiciaires, chose que de nombreuses personnes physiques n'ont pas. Donc, comme je vous le disais, M. le Président, nous aurions voulu voir cette grille de tarifs pour pouvoir, à ce moment-là, se faire une idée.

Le ministre a parlé aussi de la médiation à la Cour des petites créances. Je veux bien souscrire à un appel à la pratique privée pour ce qui a trait à la médiation des petites créances. Cependant, on devra me faire la démonstration que, vraiment, il en coûte moins cher d'envoyer à la pratique privée la médiation de causes à la Cour des petites créances par rapport à envoyer cette même cause en médiation dans le système public de la médiation.

En effet, M. le Président, on peut inventer des chiffres, on peut parler de chiffres. On peut émettre des hypothèses. Mais, tant que ce débat ne se fera pas d'une façon concrète, à savoir le coût relativement à une médiation dans la fonction publique versus une médiation dans le secteur privé, tant qu'on n'aura pas des chiffres, tant qu'on n'aura pas un réel débat là-dessus, ça laisse toujours une drôle d'impression de déresponsabilisation du gouvernement. Et je pense qu'il faut faire attention, surtout quand je regarde, M. le Président, le tarif qu'on veut offrir aux avocats de la pratique privée pour faire de la médiation. On parle d'environ 75 $ par dossier qui va passer en médiation ? 75 $ ? alors qu'on sait qu'une médiation, c'est au minimum ? au minimum des minimum ? 1 heure, voire même 2 heures. Alors, la crainte que j'ai dans tout ça, c'est qu'on profite d'une dépression profonde présentement dans le domaine de la pratique privée du droit où on a des collègues, des confrères qui sont dans une situation vraiment dramatique, relativement aux difficultés financières qu'ils rencontrent. Je pense que le ministre était présent au congrès du Barreau. C'a été une des principales préoccupations de nos collègues, à savoir que faire pour remonter la pratique du droit, pour donner de meilleures conditions de pratique aux jeunes collègues.

Donc, ma crainte, M. le Président, c'est que, finalement, on profite du fait que certains de mes collègues, de mes consoeurs seraient prêts à prendre un petit peu n'importe quoi pour pouvoir travailler, pour pou- voir joindre les deux bouts, pour leur offrir ainsi un tarif qui, de prime abord, semble très bas pour le travail qu'il y a à faire. Parce que, pour qu'elle soit bien faite, une médiation, il faut qu'on y mette du temps, il faut qu'on passe du temps. Donc, je pense que c'est très important, avant, vraiment, que des décisions comme celle d'envoyer à la pratique privée la médiation des causes aux petites créances, qu'on fasse un débat sur le coût de tout ça.

Et ce même débat pourrait se faire, aussi, quant à l'aide juridique. On semble constater une tendance, encore, à vouloir privatiser de plus en plus, à faire appel de plus en plus à la pratique privée pour les causes d'aide juridique. Encore là, on va devoir, d'après moi, pour faire un réel débat, pour ne pas montrer qu'on est en train de faire tout simplement du pelletage vers l'avant, on se devra de faire un réel débat sur les coûts reliés à tout ça et sur la qualité des services, aussi, reliée à ces coûts. Je pense que ça, c'est important, et on doit le faire d'une façon constructive si on est vraiment préoccupé par la saine gestion et l'administration de la justice.

Le ministre a aussi parlé de la perception des pensions alimentaires. Il me semble tout à fait sincère quand il dit qu'il est très préoccupé par cet aspect. Cependant, je me dois de constater, malheureusement, qu'après 5 ans, une loi qui, justement, visait à donner plus de dents à la loi, présentement, sur la perception des pensions alimentaires... Donc, 5 ans que cette loi a été adoptée et elle n'est pas encore en vigueur ? elle n'est pas encore en vigueur. Donc, je pense qu'il faudrait ? concrètement, sur le terrain ? qu'on voit une démonstration concrète de ce principe et de ce souci que semble démontrer le ministre.

Et je pense qu'il a raison quand il dit qu'une pension alimentaire ce n'est pas une punition, ce n'est pas une amende. C'est tout simplement quelque chose qu'on se doit de payer en toute justice naturelle parce qu'on a une certaine responsabilité vis-à-vis des mineurs, vis-à-vis des enfants qu'on a mis au monde. Et on ne doit pas considérer le paiement d'une pension alimentaire comme une pénalité. Et j'aimerais que le ministre montre une ouverture vis-à-vis du système de perception automatique des pensions alimentaires, tel qu'il existe en Ontario.

En effet, brièvement, M. le Président, en Ontario, une pension alimentaire est déduite directement du salaire d'un débiteur de pension alimentaire, de la même façon qu'une retenue à la source. Et c'est l'employeur qui prélève ce montant et l'envoie au système central de perception des pensions alimentaires, qui l'envoie directement à la personne qui est créancière de cette obligation. Je pense que c'est quelque chose de tout à fait acceptable.

Ce n'est pas une punition de payer une pension alimentaire. De toute façon, les gens qui paient d'une façon assidue leur pension alimentaire ne seront pas brimés de voir, justement, ce montant prélevé automatiquement sur leur chèque de paie. De toute façon, ils la

payaient bien, ils vont la payer de la même façon. Il n'y a pas de frais rajoutés, et ça réglerait énormément de litiges qu'on a relativement au paiement de pensions alimentaires. Moi, ça me préoccupe énormément de voir beaucoup de femmes en particulier qui attendent après la réception de ces montants qui leur permettent tout simplement de joindre, souvent, les deux bouts. Et, à cause d'un retard d'une semaine ou deux, ça peut être tout à fait dramatique quant aux conséquences. Et ces femmes sont obligées de s'endetter pour, tout simplement, avoir le montant auquel elles ont droit à titre de pension alimentaire. Ça le dit: ce n'est pas du luxe, c'est une pension alimentaire, c'est pour les besoins essentiels de la vie.

Donc, je pense qu'il faudrait regarder d'une façon immédiate des mesures visant, d'une façon rapide, à régler ce problème ? qui est presque, je le dirais, un fléau ? qui est le non-paiement ou le retard de paiement dans les pensions alimentaires. Et on se doit de regarder l'expérience en cours. Ça fait à peu près 1 an que c'est en cours dans la province de l'Ontario. On se doit de regarder attentivement les résultats et de voir jusqu'à quel point ce mode de perception ne correspondra pas à un besoin de justice qu'on a. Et je pense que c'est fondamental qu'on fasse ça, parce que ça répond à une préoccupation. (12 h 50) pour terminer, m. le président, encore tout à l'heure, le ministre a parlé de ces principes fondamentaux qui lui sont chers. il a expliqué, je pense, de façon éloquente, pourquoi le gouvernement du parti québécois avait l'obligation, quand il a promulgué sa loi sur le zonage agricole, d'y aller par effet rétroactif, pour empêcher un problème de spéculation. j'aimerais, m. le président, que le ministre, à un moment donné, me fasse cette démonstration du caractère essentiel de rétroactivité, de l'aspect essentiel de rétroactivité pour le projet de loi qui est présentement sous étude... c'est-à-dire le budget du gouvernement libéral, et pour le projet de loi 55 qui, lui, a déjà été adopté. qu'il me fasse cette démonstration comme quoi le gouvernement n'avait pas le choix d'y aller par rétroactivité. j'ai bien hâte de voir cette démonstration, parce qu'on sait que, pour le budget, on avait le choix. au lieu de mettre une surtaxe de 5 % et 10 % sur 1 an, mais rétroactivement, on pourrait en mettre une de 10 % et 20 % sur 6 mois. c'était facilement pensable, réalisable. mais non, on a fait un choix politique. plutôt que de mettre une surtaxe de 10 % et 20 %, on dit: on va en faire une de 5 % et de 10 %, mais rétroactivement. on avait le choix, c'est un choix politique qui s'est fait, pas un choix juridique, pas un choix d'absolue nécessité.

Alors, je pense qu'il faut que les choses soient dites clairement. S'il y avait caractère essentiel ou nécessité essentielle d'y aller par rétroactivité, eh bien, le ministre de la Justice, en tant que jurisconsulte, se devait de nous l'expliquer en Chambre. Il a une certaine responsabilité vis-à-vis de tous les membres de l'Assemblée nationale en tant que jurisconsulte, en tant que président du Comité de législation. Pourquoi ne l'a-t-il pas fait? Pourquoi a-t-il refusé systématiquement de répondre à nos questions là-dessus, comme si c'était faire preuve de mépris envers l'institution qu'est le poste de jurisconsulte et président du Comité de législation? Donc, cette démonstration est totalement absente. On ne nous a pas démontré qu'il était essentiel d'agir de la sorte, et je pense qu'à juste titre le Barreau a fait part de ses vives protestations relativement à cette façon de légiférer qui apporte un discrédit total et vraiment injustifiable à tout notre système de législation.

Pour conclure, M. le Président, sur le projet de loi qui fait l'objet du présent débat, l'Opposition, quant à elle, va voter en faveur de ce projet de loi, parce que nous pensons qu'il est justifiable dans une saine gestion de notre appareil judiciaire. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. M. le ministre, en vertu du règlement, une intervention d'un maximum de 5 minutes.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Alors, M. le Président, simplement, c'est que le député d'Anjou parlait tout à l'heure de la possibilité de fournir certains chiffres pour déterminer, du fait que nous faisions appel au secteur privé pour les médiateurs au niveau des petites créances, si, vraiment, on sauve de l'argent. On va alléger l'appareil gouvernemental, oui, c'est vrai, mais, en plus, ça nous coûte moins cher.

Je veux simplement, M. le Président, en guise de conclusion, donner les chiffres que j'ai de mon ministère, ici, je cite: «En termes d'honoraires pour les médiateurs du secteur privé, on prévoit un coût de 825 000 $, moins une récupération des services actuels de 264 000 $.» C'est ce que ça nous coûte actuellement, 264 000 $. Ce qui veut dire que ça va nous coûter 681 000 $. Il aurait fallu, M. le Président, selon l'étude que j'ai ici, 24 postes de médiateurs dans la fonction publique, donc un coût de 1 152 000 $, plus 240 000 $ pour le personnel de soutien et tout ce que ça comprend, pour un total de 1 800 000 $. Alors, comparez 681 000 $, en faisant affaire avec le privé, à 1 800 000 $, si on avait continué notre système au niveau du public. Alors, pour moi, les chiffres parlent par eux-mêmes. Ce sont les chiffres qu'on m'a fournis au niveau du ministère de la Justice. Je vous remercie, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi 94, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 25 de notre feuilleton.

Projet de loi 99 Adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 25, M. le ministre du Tourisme propose l'adoption du projet de loi 99, Loi sur la Société du Centre des congrès de Québec. Y a-t-il des intervenants? Il n'y a pas d'intervenants.

Mise aux voix

Alors, le projet de loi 99, Loi sur la Société du Centre des congrès de Québec, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, compte tenu de l'heure, je vous demanderais de suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, suite à votre demande, les travaux de cette Assemblée sont suspendus jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 55)

(Reprise à 15 h 5)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mmes et MM. les députés, je vous demande de vous asseoir, s'il vous plaît. Nous continuons les travaux de l'Assemblée nationale, à l'étape des affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement, avec quel article du feuilleton, s'il vous plaît?

M. Bélisle: L'article 14, M. le Président.

M. Chevrette: M. le Président, je demanderais le quorum, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): II y a quorum.

Demande de directive

Fonctionnement de l'Assemblée nationale

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, sur la question du fonctionnement de l'Assemblée nationale, j'ai des ques- tions à poser. À 12 h 55, cet après-midi, au moment où il y a un marathon de petites lois, il est de coutume que la présidence, d'elle-même, demande qu'on puisse attendre, le temps que le critique de l'Opposition quitte une commission parlementaire pour s'en venir en cette Chambre. C'est la coutume, c'est la tradition, et la présidence le fait d'elle-même. Je comprends que ce n'était pas vous qui étiez sur le trône, M. le Président, mais la présidence a une prolongation, un prolongement, quelle que soit la personne. D'autant plus que M. Bissonnet, présidant à votre place, l'a toujours fait. Et cette fois-ci, ce n'est pas le leader adjoint qui est là, c'est le leader du gouvernement lui-même qui, en plein besoin de collaboration et de participation au déroulement correct de nos travaux, nous en passe une petite vite, et il se fait plaisir, M. le Président, en appelant une législation à 12 h 55, sans demander, sans prendre le temps d'attendre que le critique de l'Opposition soit ici pour demander s'il peut prendre la parole ou pas.

En l'occurrence, M. le Président, c'était le député de Lévis qui était en commission parlementaire sur le décret de la construction, de l'autre côté, qui remplaçait le député de Masson qui n'est pas ici aujourd'hui pour des raisons de travaux dans sa propre circonscription électorale. À 12 h 55, M. le Président, à 5 minutes de la fin de nos travaux, le ministre du Tourisme est dans l'Assemblée, le leader du gouvernement est dans l'Assemblée et la présidence qui, par tradition, demande précisément au changement quand une législation... Parce qu'on a passé 5 à 6 lois cet avant-midi et on sait que, à cause des travaux des commissions, quand un projet de loi est terminé, on va chercher notre critique et il s'en vient faire son travail ici. Ça n'a même pas été demandé, M. le Président. Je considère, personnellement, que ce n'est pas correct, à tous les niveaux, à part ça, qu'on n'ait pas pris, au niveau de la présidence, le temps de demander si le critique de l'Opposition était ici. Une suspension des travaux pour 30 secondes, le temps d'une vérification, ça se fait, ça. C'est le minimum qu'on peut faire quand on veut une collaboration en cette Chambre. C'est un minimum, surtout de la part du leader du gouvernement. Je considère ça, M. le Président, couillon, antiparlementaire et, si je ne me retenais pas, je vous dirais, M. le Président, que c'est bien évident... Sans faire du chantage, je vous dirai tout de suite que, d'ici la fin des travaux, on n'a aucune indication à donner sur la longueur, sur le nombre d'intervenants de notre côté, et nous allons agir comme bon nous semble. Si c'est de même que le gouvernement veut fonctionner, M. le Président ? en couillon ? on ne marche pas. C'est clair?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Jean-Pierre Bélisle

M. Bélisle: M. le Président, je pense qu'il y a des termes qui ne sont définitivement pas parlementaires et

je ne veux pas les utiliser, parce que je n'étais pas là, moi, ce matin. Je ne sais pas du tout ce qui s'est... Non, je n'étais pas là. Je viens d'arriver. Je peux parler? M. le Président, je ne pense pas que c'a été fait de mauvaise foi, d'aucune façon.

Une voix: Voyons! Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Un instant! Un instant! Alors, je vous demanderais, si vous voulez, effectivement, répondre aux commentaires du leader de l'Opposition officielle, de le faire et de vous adresser à la présidence, et je vais vous écouter. Je vais vous écouter.

M. Bélisle: Je veux bien, M. le Président, m'a-dresser à la présidence et je pense que c'est ce que j'ai toujours fait. J'ai toujours été et j'ai toujours tenté... J'ai toujours tenté de collaborer le plus possible avec l'Opposition. Il peut arriver, à certains moments donnés, dans cette Assemblée, que, pour une raison ou pour une autre il y a des choses, effectivement, qui ne fonctionnent pas des deux côtés. Je ne pense pas qu'on doive piquer et être un petit peu fâché et excédé, là, parce qu'il y a eu quelque chose qui ne s'est pas passé. Autant la présidence ne l'a pas soulevé de son propre chef, autant le leader, possiblement, étant donné qu'il était rendu à quelques minutes avant et que l'autre personne n'était pas là, le projet de loi a été appelé. Je ne pense pas que c'est dans l'intérêt de l'Assemblée nationale, pour les projets de loi qu'on va débattre cette semaine, de commencer avec un climat semblable le lundi.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader.

M. Chevrette: M. le Président, quand on ne veut pas provoquer un climat, là, on s'arrange pour ne pas le faire. Ça ne se fait pas. Ça ne se fait pas. Il a beau jouer à la vierge offensée. Il n'était pas ici, premièrement. Comment il peut juger lui-même de la bonne foi quand, de par tradition, ça ne s'est jamais fait? Et, ce n'est pas un leader adjoint qui a fait ça, là, c'est votre «ti-coune», votre leader en chef.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Joliette et leader de l'Opposition officielle, je vous demanderais de retirer le dernier commentaire, là. Vous savez très bien que vous ne pouvez qualifier aucun parlementaire de la façon que vous venez de le faire. Si vous voulez... Si vous voulez... Si vous voulez, et c'est ce que vous souhaitez, que les travaux cette semaine se déroulent de la façon la plus harmonieuse possible, je vous demanderais de retirer ce dernier propos-là.

(15 h 10)

Décision du président

Alors, M. le député de Joliette, vous décidez de quitter l'Assemblée. Je vais quand même commenter la suggestion que vous m'avez faite, ou l'attitude de la présidence. La présidence, à partir du moment où un projet de loi lui est soumis, est liée, et de toute façon constamment est liée par les règles de procédure prévues dans nos règlements et également prévues par la Loi sur l'Assemblée nationale. On a soumis à l'étude de l'Assemblée le projet de loi 99. On m'indique qu'il n'y avait pas d'intervenant du côté de l'Opposition officielle et la présidence n'a pas d'autre choix, à ce moment-là, que d'appeler l'adoption du projet de loi à l'étape... À ce moment-là, c'était l'étape de l'adoption comme telle du projet de loi.

M. le leader de l'Opposition officielle prétend que la présidence pourrait tenir compte de l'absence ou du fait que le critique, en l'occurrence M. le député de Lévis, si c'est à la connaissance de la présidence et si on demande à la présidence de suspendre les travaux pour quelques minutes parce que le critique est absent, ou même un autre parlementaire qui voudrait intervenir, effectivement, la présidence pourrait en tenir compte, même si le leader du gouvernement n'était pas d'accord. Mais, à partir du moment où la présidence est dans l'ignorance de ce fait-là, elle n'a d'autre choix que de vérifier s'il y a des intervenants. Selon ce qu'on m'indique, ça a été fait, ou il n'y avait pas d'intervenant qui s'annonçait, ni du côté de l'Opposition officielle ni du côté du gouvernement, de sorte que l'étape de l'adoption a été appelée et on a voté, sans qu'il y ait d'opposition du côté de l'Opposition officielle, l'adoption du projet de loi 99.

Là, vous le savez, les dispositions qui peuvent ? et je me réfère à l'article 186, particulièrement le paragraphe 2° ? il appartient au leader du gouvernement... S'il faisait une motion pour exercer le retrait de l'adoption du projet de loi 99, la présidence s'y soumettrait, mais ce n'est pas à moi de décider d'aller dans ce sens-là. M. le leader adjoint de l'Opposition officielle.

M. Gendron: M. le Président, j'aimerais ça quand même que... Dans cette espèce d'avis que vous venez de donner, vous dites: Ce fait-là, le fait qu'il n'y avait pas de porte-parole de l'Opposition, ne m'était pas connu. Je prends vos propres propos. Mais il y en a un qui était connu de votre siège: le fait qu'il était 12 h 55. 11 me semble que ce fait-là a toujours été pris en considération par la présidence. à 12 h 55, combien de fois la présidence a fait le choix d'ajourner la séance parce que ce n'est pas pour 3 ou 4 minutes d'ajournement, surtout en fin de session... il me semble que, ça, c'est un fait qui était connu, qui, en règle générale, a toujours été pris en considération par la présidence.

Alors, j'aimerais ça que vous me commentiez un peu cet aspect-là. Comment se fait-il que le fait qu'à 12h 55 aujourd'hui on appelle un nouveau projet de loi

et qu'il n'y ait aucun porte-parole de l'Opposition n'a pas ? entre guillemets ? fait surgir dans votre esprit une quelconque indication à l'effet que ce serait probablement préférable, à ce moment-là, de suspendre et de vous enquérir comment il se fait qu'il n'y avait personne? Je le sais qu'il nous appartient d'être ici; ça, je sais ça. Mon propos est strictement sur le fait, la connaissance qu'à 12 h 55 un leader du gouvernement qui appelle un nouveau projet de loi, sans le leader ou un membre de l'Opposition qui en est le porte-parole, il me semble que c'est un fait inhabituel, un peu inopportun, un peu inadéquat. Dans ce sens-là, il me semble que ça aurait dû être pris en considération par la présidence pour proposer et suggérer une suspension.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, à 12 h 55, on a amplement le temps et on est encore à l'intérieur de la période prévue pour les travaux de l'Assemblée. À 5 minutes de la fin des travaux, on a amplement le temps d'appeler l'étape d'un projet de loi, s'il n'y a pas de débat ? et c'est ce qui s'est produit à 12 h 55. Le leader du gouvernement décide d'appeler l'étape du projet de loi, parce qu'il est 12 h 55, parce qu'on est à l'intérieur de la période prévue pour cette séance des travaux jusqu'à 13 heures. La présidence n'a pas le choix, et si la présidence ne le faisait pas, on lui en ferait reproche.

Alors, la présidence n'a pas d'autre choix que d'appeler l'étape du projet de loi correspondant à l'article 25, c'est ce qui a été fait. Je me répète. La présidence non seulement ne doit pas, mais ne peut pas, à moins que ce soit à sa connaissance, tenir compte du fait qu'il n'y a pas d'intervenant qui décide de parler sur l'étape.

M. Gendron: Oui, mais, M. le Président, est-ce que ça n'a pas été porté à votre connaissance, le fait qu'au moment où le leader du gouvernement a appelé, à 12 h 55, un nouveau projet de loi, le ministre responsable du projet de loi, profitant sans doute de l'absence du leader et de l'absence du critique, n'a pas dit un mot? Ça, c'est un nouveau fait qui a été porté à votre connaissance. Il n'a pas dit un mot sur le projet de loi. Pourquoi vous pensez qu'il n'a peut-être pas dit un mot sur le projet de loi?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je vous réponds, M. le leader adjoint de l'Opposition officielle. Vous savez, ce n'est pas une première qu'il n'y ait pas d'intervention. C'est même relativement fréquent, en fin de session, qu'il n'y ait pas d'intervention ni d'un côté ni de l'autre. C'est déjà arrivé que le leader du gouvernement appelle un projet de loi et que la présidence vérifie s'il y a des intervenants, après le parrain du projet de loi. Constatant qu'il n'y pas d'intervenant, la présidence n'a pas d'autre choix que de demander si l'étape sur laquelle on intervient, à ce moment-là, l'étape du projet de loi est adoptée. La présidence n'a pas le choix. Autrement dit, la présidence est liée par les décisions du leader du gouvernement. Et je me répète, à moins qu'on lui représente, à la présidence, qu'un parlementaire absent voudrait intervenir, la présidence ne peut pas présumer, elle n'a pas le droit de présumer. Je reconnais cependant ce que vous dites, que votre critique, pour une raison ou pour une autre, voulait intervenir et a été pris un peu par surprise. Mais la présidence, et je me répète, je l'ai dit tout à l'heure, à moins que le leader du gouvernement lui tende la perche et l'indique, la présidence ne peut pas corriger la situation.

M. Gendron: M. le Président, vous avez fait remarquer, avec raison, qu'il est arrivé fréquemment que la présidence s'est levée de son siège et elle a demandé, de part et d'autre, s'il y avait des intervenants sur un projet de loi, et vous avez dit qu'il est arrivé que, de part et d'autre, on avait indiqué qu'il n'y avait pas d'intervenants. Ça, je n'ai pas de trouble avec ça. Mais, dans le présent cas, le leader du gouvernement savait très bien que nous avions 3 intervenants de prévus sur le projet de loi. Le leader du gouvernement, il le savait, ça. Lui, il le savait comme leader du gouvernement. Et au moment où il a décidé d'appeler ce projet de loi là, comment voulez-vous que la présidence exerce ce qui s'appelle au moins la tradition et la coutume de demander d'un côté s'il y a des intervenants et, après ça, de demander de l'autre côté s'il y a des intervenants? Là, ça aurait fonctionné. Parce que vous avez raison qu'il y a une coutume qui fait que, sur certains projets de loi, de part et d'autre, nous consentons à ne pas dire un mot. Mais, comment voulez-vous exercer cette pratique lorsque le porte-parole n'est pas ici et que le leader du gouvernement, lui, il appelle le projet de loi, alors qu'il sait qu'il y a 3 intervenants de notre côté? Et là, il me semble que, dans ce sens-là, la présidence aurait été sage de suspendre pour les quelques minutes qui restaient.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader, et ça sera mon dernier commentaire, si vous m'informez qu'à 12 h 55 il n'y avait, à ce moment-là ? pour une raison ou pour une autre, encore une fois, ça pourrait être possible ? aucun membre de l'Opposition officielle, compte tenu qu'il était 12 h 55, si ça avait été le cas, je pense que la présidence, à ce moment-là, aurait probablement jugé sage de suspendre jusqu'à 15 heures. Mais on m'indique qu'il y avait des membres de votre formation, à 12 h 55, qui auraient dû, à ce moment-là, suggérer à la présidence, informer la présidence que le critique de votre côté en cette matière, M. le député de Lévis, voulait intervenir. Si ce n'est pas fait, la présidence n'a pas le choix.

(15 h 20)

M. Gendron: M. le Président, vous avez dit que vous concluriez, je vais conclure moi aussi. Je constate que le leader du gouvernement, en connaissance de cause, a décidé d'appeler un projet de loi en sachant très bien que, nous, nous avions des intervenants. Et que le leader du gouvernement veuille faire ça... C'est pour ça

que le leader de l'Opposition officielle a, avec raison, je pense, et d'une façon tout à fait correcte, dénoncé cette situation en connaissance de cause. En fin de session, 5 minutes avant l'ajournement d'une séance, ce n'est quand même pas ce qu'il y a de plus régulier puis de correct comme procédure que le leader du gouvernement appelle un projet de loi, sachant que le porte-parole n'est pas là et qu'il y a 3 intervenants de notre côté, sachant très bien qu'on ne pouvait pas faire les interventions à 12 heures 55. Alors, moi, de toute façon, M. le Président, je reconnais que la présidence pouvait ne pas savoir ces faits-là, mais il m'appartenait de les rappeler, et on va fonctionner en conséquence.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci.

M. Chevrette: Demande de directive.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader de l'Opposition officielle, je vous ai rappelé tout à l'heure que je ne pouvais pas accepter le propos que vous avez tenu à l'égard du leader du gouvernement, et je vous demande encore une fois de retirer ce propos-là, puis on va pouvoir continuer nos travaux en toute quiétude.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Bien, tant et aussi longtemps que vous ne vous pliez pas à une directive qui m'apparaît... Pardon?

Alors, M. le leader du gouvernement, nous continuons nos travaux à quel article du feuilleton, s'il vous plaît?

M. Cannon: L'article 14, M. le Président.

Projet de loi 68

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 14 de notre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de la culture sur le projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Alors, M. le ministre des Communications, je vous cède la parole.

M. Lawrence Cannon

M. Cannon: Merci, M. le Président. Le projet de loi 68, M. le Président, sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, en est maintenant à la dernière étape avant son adoption par cette Assemblée. La prise en considération du rapport de la commission est le résultat d'un travail de longue haleine, un travail qui a commencé il y a de nombreuses années, M. le Président. Et, comme j'ai eu l'occasion de le rappeler souvent en commission et ici, en cette Chambre, plusieurs commissions ont étudié la possibilité d'étendre au secteur privé les principes de la loi sur l'accès aux documents et la protection des renseignements personnels dans le secteur public. D'ailleurs, on se rappellera qu'à l'occasion de la présentation du rapport Paré, qui a donné lieu précisément à la création de la Commission d'accès à l'information et à la protection des renseignements dans le secteur public, il y avait une recommandation qui proposait l'extension au secteur privé. Or, 10 ans plus tard, les membres de l'Assemblée nationale sont saisis d'un projet de loi qui a fait l'objet de nombreuses consultations et qui aujourd'hui, à l'occasion de la prise en considération, devrait normalement trouver son adoption.

Plusieurs doutaient de la volonté du gouvernement de légiférer dans cette matière, mais jamais, M. le Président, cette chose ne m'a effleuré l'esprit. D'ailleurs, je vous dirai que c'est grâce à la grande complicité ? je le dis tout fort et tout haut ? que ce projet de loi a réussi à se rendre jusqu'à l'étape que nous connaissons précisément aujourd'hui. Grande complicité entre le critique de l'Opposition et celui qui vous parle, de même que les membres de la commission de la culture et tous ceux qui ont eu l'occasion de suivre ce projet de loi et les débats l'entourant.

Alors, nous avons, comme je l'ai mentionné, M. le Président, non seulement à congratuler, à remercier, à féliciter les parlementaires dont nous sommes, mais aussi les gens du milieu, tant les associations de citoyens, les entreprises de cueillette de renseignements, les bureaux de crédit, le monde bancaire, les gens qui ont travaillé à la première commission parlementaire, qui ont permis de rédiger un projet de loi qui, somme toute, reflétait, à ce moment-là, des besoins élémentaires qui nous concernent à l'égard de la protection des renseignements privés.

Pour sa part, la commission parlementaire que nous venons tout juste de terminer, à l'occasion de l'étude article par article, nous a permis de bonifier le projet de loi 68. Plusieurs modifications ont été apportées au projet initial et la plupart de ces modifications sont, en fait, ce que nous pourrions considérer comme étant des améliorations. Je voudrais donc remercier, bien sûr, les intervenants qui ont participé aux différentes commissions parlementaires et rappeler encore une fois que leur contribution nous a été grandement bénéfique dans la précision et la formulation de notre projet de loi.

Cette loi, M. le Président, qui est devant nous aujourd'hui profitera à tous les citoyens et citoyennes du Québec. Au terme de la première commission parlementaire, à l'automne de 1991, je déclarais que mon objectif était bien simple: il s'agissait de redonner à l'individu et au citoyen le contrôle de l'information qui le concerne. Je suis convaincu que le projet de loi 68 viendra améliorer la situation actuelle dans ce domaine. M. le Président, comme société moderne et responsable, nous nous

devions, dès 1984, d'adopter une telle loi puisque, en 1984, le gouvernement canadien a adhéré aux lignes directrices régissant la protection des renseignements et la vie privée des individus, particulièrement avec les lignes directrices des flux transfrontières des données à caractère personnel qui ont été émises par l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE.

Je rappelle, M. le Président, pour ceux qui nous écoutent et les membres qui sont ici, avec nous, aujourd'hui, à l'Assemblée, quelques grands principes qui gouvernent, somme toute, l'adoption de ce projet de loi ou la prise en considération de ce projet de loi. Essentiellement, et je le rappelle en termes historiques, le projet de loi fait suite à de nombreuses représentations qui découlaient de l'adoption de notre nouveau Code civil, particulièrement les articles 35 à 41 qui traitent précisément de la vie privée. On se rappellera que la Charte québécoise des droits et libertés a enchâssé un grand principe qui est celui du respect de la vie privée. Donc, il fallait, à travers cette idée, cette notion et ce concept, trouver une façon d'appliquer ces choses-là, cette notion-là. Donc, le Code civil, dans les articles 35 à 41, touche ces aspects-là, touche les aspects d'accessibilité, touche les aspects de finalité. Et, dans le fond, le projet de loi 68 vient effectivement baliser, vient encadrer, vient donner une dimension d'application à ce principe qui était celui du respect de la vie privée.

Or, le projet de loi, qui s'inscrit dans ce droit qu'on crée aujourd'hui, comme je l'ai mentionné, s'inspire de la Charte des droits. Et, je dirais, il y a un autre principe que l'on a pu rencontrer tout au long des délibérations et tout au long des séances que nous avons tenues, comme parlementaires, c'était de faire en sorte que nous puissions contrer les abus. Mon collègue, le député de Pointe-aux-Trembles, en a mentionné à l'occasion de ses interventions. J'ai eu l'occasion d'en mentionner quelques-uns. Je me permets, par exemple, de vous citer le cas où il y a des gens qui, sollicitant, M. le Président, la possibilité d'avoir un logement dans la région de Montréal ou dans la région de Québec, devaient obligatoirement fournir des renseignements, qui étaient peut-être pertinents entre les mains du propriétaire du logement, mais qui n'étaient pas nécessaires à une prise de décision. Et ça pouvait amener à des abus de nature discriminatoire contre les individus. (15 h 30)

Que faire, M. le Président, lorsque vous sollicitez un logement? Quel serait votre comportement si vous deviez fournir, par exemple, votre nationalité, le numéro de permis de conduire, votre numéro d'assurance sociale? Ce sont là un certain nombre d'éléments qui sont des renseignements de nature personnelle qui vous touchent, vous, et qui n'ont pas besoin de faire l'objet, pour fins d'analyse de solvabilité, à savoir si, oui ou non, vous êtes en mesure de pouvoir payer, si vous êtes en mesure de pouvoir rencontrer, sur une base mensuelle, les frais de location. Ce qui est important, c'est que vous soyez en mesure d'être un bon citoyen, d'être un bon locataire et de rencontrer les paiements et les obligations auxquels vous vous êtes engagé.

M. le Président, des cas comme ceux-là, d'autres cas d'abus, de confusion au niveau des individus se sont présentés tout au long de cette commission. Je pense à des gens qui ont effectivement des comptes auprès des agents de crédit ou des bureaux de crédit et qui demeurent dans la même municipalité, voire dans la même rue et, pour une raison ou pour une autre, l'individu est mis en situation avec un autre individu qui a le même nom et, effectivement, il se voit refuser un prêt à une institution bancaire parce qu'on s'est trompé sur l'individu. Il y a des cas comme ça qui nous ont été relatés.

Alors, c'est clair qu'il fallait que nous puissions intervenir. Il faut dire aussi que le citoyen, M. le Président, n'avait pas nécessairement des recours qui lui permettaient très rapidement de se réajuster. Or, ce sur quoi nous avons travaillé, à l'intérieur de notre projet de loi, c'était de faire en sorte que nous puissions donner accès à l'individu, au niveau, par exemple, des renseignements qui le concernent. Qu'il s'agisse d'une demande d'emploi, ou qu'il s'agisse, par exemple, d'un prêt bancaire, ce projet de loi permet à l'individu d'avoir immédiatement accès aux renseignements de crédit qui le concernent.

Autrement dit, nous permettons, par ce projet de loi, à un individu de se rendre, soit à sa caisse, soit à son institution financière, à sa banque ou autre, et demander à l'agent de crédit ou à l'agent de renseignements une copie, un exemplaire de son dossier de crédit, puisque, autrement, il aurait été obligé de se référer à celui ou à celle, en termes d'entreprise, qui détenait les renseignements. Nous avons donc décentralisé, à toutes fins pratiques, cette possibilité, dis-je bien, pour l'individu d'aller chercher les renseignements, en voyant, par exemple, cette liste de crédit personnelle qui contient des erreurs, parce que, ne vous trompez pas, ça se produit souvent.

À maintes reprises, on nous l'a souligné en commission, et ce n'est pas fait d'une façon méchante, ce n'est pas fait nécessairement d'une façon bête, mais il se peut très bien, comme j'ai mentionné la confusion au niveau des noms, qu'il y ait à travers tout cela des erreurs cléricales qui se sont glissées. Donc, et ce n'est pas à tous les jours qu'on pense à protéger nos renseignements. Ce n'est pas à tous les jours qu'on a cette préoccupation de dire: Bien, ah, ce matin, il faudrait que je puisse vérifier si mon compte bancaire est à jour et si, effectivement, ma carte Visa, Mastercard, etc., si tout ça est payé et voir c'est quoi l'élément et l'image que l'on me donne au niveau de ma référence de crédit. Ce n'est pas à tous les jours qu'on fait ça, mais, lorsqu'on le fait, au moment où on le fait, il est important qu'on puisse avoir accès très rapidement à ces renseignements-là, ce que nous n'avions pas. Donc, le projet de loi vient corriger ça et, en plus, lorsqu'on constate qu'il y a une erreur qui s'est glissée, volontaire ou involontaire, peu importe, lorsqu'on constate qu'il y a une erreur, il est donc du devoir de l'agent de crédit ou

de renseignements d'indiquer aux consommateurs ou aux consommatrices quelle voie suivre pour apporter les corrections..

Je vous avoue bien humblement, M. le Président, que j'aurais peut-être souhaité, comme je l'avais mentionné à l'intérieur du projet de loi, au tout début, que ceux qui détiennent des renseignements sur la personne s'emploient à être en mesure de fournir instantanément à ces individus-là tous les renseignements qui les concernent, mais je comprends qu'on ne peut pas tout avoir du premier coup. Je comprends que notre projet de loi, c'est une base. C'est une nouveauté. C'est une nouveauté en ce sens que ça touche plusieurs éléments. Contrairement, par exemple, à d'autres provinces canadiennes et à d'autres États qui se sont penchés sur cette question, nous avons adopté une approche qui se veut d'abord et avant tout globale, c'est-à-dire découlant de la Charte, comme je l'ai mentionné plus tôt, qui dit que oui, vous avez le droit à la vie privée. Découlant de ça, ça nous a permis de bâtir autour de ça un certain nombre d'éléments. Tantôt, ça touche des renseignements financiers. Ça peut également toucher des renseignements de nature médicale. Ça peut toucher des renseignements, que sais-je, tous les renseignements, M. le Président, qui vous concernent et qui vous touchent. Donc, notre approche, c'était une approche globale.

Le projet de loi offre un plancher, établit, je dirais, des normes, permet à la Commission d'accès à l'information, qui a, comme vous le savez, depuis 10 ans, une expertise, une expertise reconnue au niveau d'abord de la médiation, mais au niveau de sa façon d'intervenir pour protéger les renseignements dans le secteur public. Nous avons confié à la Commission d'accès à l'information cette responsabilité précise. Or, nul doute que la Commission pourra intervenir et créer sa forme de jurisprudence. Nous devons donc, compte tenu évidemment que ce projet, qui crée des obligations...

Mais ce projet, il est évolutif, il est dynamique. Pourquoi il est dynamique? Nous y avons incorporé une disposition qui est semblable à la disposition que nous retrouvons avec la loi qui couvre le secteur public, disposition qui fait qu'à tous les S ans les membres de cette commission fournissent à l'Assemblée nationale un rapport. Et c'est à l'aide de ce rapport que nous, comme parlementaires, comme députés, nous allons pouvoir juger de l'évolution de ce projet. Il y a des cas, bien sûr, qui ont retenu notre attention, et je pense très sincèrement que nous avons, de bonne foi, été capables de répondre à ces problèmes-là, à ces préoccupations. Mais, je ne crie pas victoire. Je dis: II reste encore beaucoup de chemin à faire. Mais nous avons, tout au moins comme parlementaires, fait un pas dans la bonne direction.

En terminant, M. le Président, je le répète, et je le répète à tous ceux qui voudront m'entendre sur ce sujet: S'il y a un projet de loi en cette Assemblée nationale qui retient ? et je le souhaite ? l'unanimité, c'est bien ce projet de loi. Oui, il y a eu des petits différends, mais je pense que ce projet de loi n'est pas un projet de loi partisan. Ce projet de loi est un projet de loi qui doit être le reflet fidèle de ce que nous sommes en 1993, individus au-delà des partis politiques, au-delà des étiquettes que tout le monde voudrait bien nous mettre. C'est un projet de loi qui est un projet de loi de la société dans laquelle nous vivons. (15 h 40)

Encore une fois, je suis très heureux d'être celui qui a eu l'honneur de le piloter à l'intérieur de cette Assemblée, sachant très bien que tout le monde y a participé. Et je termine en félicitant encore une fois très chaleureusement, très chaleureusement, les membres de la commission parlementaire, mais en particulier mon collègue député de Pointe-aux-Trembles, qui a travaillé avec acharnement, avec conviction, mais avec l'engagement que nous étions en train de faire quelque chose qui était combien essentiel pour notre société. Il restera peut-être des petites modifications. Il restera peut-être des amendements à apporter au niveau des structures. On me parlait de la CSN, qui a une structure confédérale qui ressemble un peu ? et je le dis sans méchanceté?à une institution financière en soi. Il faut permettre à la CSN la possibilité, entre ses différentes constituantes, de transmettre des renseignements, donc, comme nous l'avons fait dans le cas de l'article 88.1, permettre à la CSN de faire les mêmes choses.

On a aussi une petite erreur technique à corriger au niveau de la reconnaissance de la jurisprudence, à l'article 17, quatrième alinéa. Et une autre modification qui donnera aussi aux banques la même possibilité que nous voulons donner à la CSN, que nous avons donnée aussi à la Fédération des caisses, c'est-à-dire de pouvoir transmettre des renseignements afin d'éviter de la fraude. Et c'est fort simple, ce n'est pas compliqué. Il arrive, dans notre société, qu'il y ait des individus qui fraudent par voie de «kiting» et tout autre mécanisme que nous connaissons. Il faut absolument que les institutions bancaires puissent communiquer des renseignements lorsqu'elles le jugent opportun, mais surtout lorsque c'est justifié, afin d'éviter des situations qui, elles, seraient délinquantes.

Alors, en gros, M. le Président, il s'agit de mes propos dans le cadre de cette prise en considération. Et, comme je l'ai mentionné précédemment, c'est avec beaucoup de fierté que je vous présente ce rapport. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre des Communications. Je cède la parole à M. le député de Pointe-aux-Trembles. Vous êtes critique de l'Opposition officielle dans ce dossier-là, vous avez donc droit à une intervention de 30 minutes.

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: M. le Président, l'Opposition officielle a fait savoir dès le départ qu'elle était d'accord avec le principe du projet de loi qui est devant nous,

puisqu'il s'agit d'appliquer au secteur privé des règles qui existent depuis nombre d'années dans le secteur public. Chacun, chacune connaît maintenant la Commission d'accès à l'information, qui garantit à la fois l'accès par les citoyens ou même par les journalistes aux renseignements publics détenus dans le secteur public, et qui, en même temps, assure de préserver ce qui, dans le secteur public, constitue des renseignements confidentiels sur les personnes.

M. le Président, il y a peu de projets de loi dans l'histoire de l'Assemblée nationale qui auront fait l'objet d'une discussion à la fois longue et d'où était absente la partisanerie, comme le ministre le répétait à bon droit. Qu'on soit libéral, péquiste ou du Parti Égalité, il n'y a pas de divergences fondamentales sur le droit des personnes dans notre société de protéger les renseignements personnels qui circulent à leur sujet. Et on sait, M. le Président, que, ces 20 dernières années, le développement de la science informatique a fait que la transmission de renseignements se fait quasi instantanément et que les ordinateurs permettent d'en emmagasiner, c'est quelque chose d'effarant.

Donc, M. le Président, il fallait, il faut que l'État québécois garantisse les droits des personnes. Le ministre a mentionné des exemples d'abus. On en a tous en mémoire. Je pense qu'il y a un certain nombre d'années ? ça touche le secteur public, mais ça montre comment, des fois, une chose peut se développer ? un hôpital de Montréal avait jeté aux vidanges tous les dossiers médicaux qui étaient maintenant sur ordinateur. Alors, les enfants, dans la ruelle, jouaient avec les dossiers médicaux. C'est évident qu'il y avait là une absence de jugement de la part d'une personne, mais les citoyens qui voyaient la photo dans le journal de milliers de dossiers médicaux avec lesquels les enfants s'amusaient étaient inquiets des renseignements personnels les concernant.

À cet égard, M. le Président, la Commission d'accès à l'information a pu, au cours de la décennie écoulée, accumuler une expertise inestimable sur les problèmes d'accès et de protection des renseignements personnels. Le projet de loi qui est devant nous prévoit que la Commission d'accès à l'information s'occupera de la mise en vigueur du projet de loi. À cette fin, le nombre de commissaires sera augmenté de 3 à 5, ce qui, M. le Président, est parfaitement justifié. En étendant des dispositions qui protègent les citoyens à l'ensemble du secteur privé, on aura besoin de plus de personnes pour gérer la loi et aussi pour siéger, parce que la Commission va siéger pour entendre les plaintes que les citoyens pourraient lui faire. On est loin, M. le Président, du projet de loi sur l'alcool et les jeux de hasard, où là, on en prévoit 13 pour faire ce que 15 faisaient auparavant. Et j'ai dit, dans cette Chambre, que le danger, c'est qu'un gouvernement ait trop d'amis, et en période de restriction le goût de plaire aux amis peut aller à rencontre du besoin de réduire le déficit. Mais on n'en est pas là-dessus sur le projet de loi 68, puisque la clause qui prévoit que le nombre de commissaires à la Commission d'accès à l'information va passer de 3 à 5 est parfaitement justifiée dans les circonstances.

Il y a un amendement que le ministre a retenu, qu'il a fait rédiger, qui vient de l'Opposition officielle, c'est celui de mettre fin à la situation qu'on vivait auparavant, où la loi de la protection des consommateurs donnait au citoyen accès à son dossier de crédit chez une agence de renseignements. On a étudié ça en commission. Équifax, qui est la plus grosse agence installée au Québec, a son siège social à ville d'Anjou. Il fallait qu'une personne de Montréal perde presque une demi-journée de travail pour aller réclamer son rapport de crédit chez Équifax. Résultat, M. le Président, l'ancienne loi de protection du consommateur, qui dorénavant ne s'appliquera plus parce que 68 règle le cas, était utilisée par 3 % des personnes sur lesquelles on détient ce qu'on appelle des rapports de crédit. 3 %, M. le Président: c'étaient vraiment les personnes malheureuses dans leur recherche d'un crédit, parce qu'il fallait avoir une motivation considérable pour perdre une couple d'heures de travail pour aller chercher un rapport.

Par ailleurs, M. le Président, la première disposition de Favant-projet de loi qui prévoyait que des millions de lettres seraient mises à la poste par toutes les agences de renseignements pour informer les personnes qu'on détenait un renseignement à leur sujet était lourde, coûteuse et bureaucratique à l'excès, d'où la suggestion de l'Opposition officielle, M. le Président, que le ministre a retenue, que les utilisateurs fournissent le renseignement aux personnes. Il y a 1300 caisses populaires au Québec, il y a des centaines de succursales de banque. C'est plus simple, c'est plus rapide. Ce sont des institutions qui ont déjà des rapports avec les consommateurs et qui, sur demande, fourniront non seulement le renseignement ? le ministre le rappelait ? mais fourniront les renseignements sur la manière de corriger au besoin le rapport de crédit qui concerne les personnes. Les banquiers, les caisses populaires et d'autres ont fait observer vers la fin que certaines modalités pourraient être assouplies. Le ministre et l'Opposition y ont consenti d'emblée. L'idée n'est pas d'être tatillon, l'idée n'est pas d'être abusif; l'idée, c'est de protéger les personnes sur lesquelles des renseignements sont détenus. Et, dans nos sociétés modernes, les renseignements dits de crédit occupent une place importante, et c'est normal. (15 h 50)

Par ailleurs, M. le Président, nous avons tenu compte des représentations d'agences de renseignements comme Équifax et d'autres, qui disaient: Écoutez, ne nous imposez pas par la loi d'avoir des rapports avec les consommateurs. Nos entreprises vivent des renseignements que nous fournissons à des entreprises qui les utilisent pour louer des choses, vendre des choses, prêter de l'argent ou à d'autres fins, d'où l'idée, je pense correcte, de dire que les utilisateurs de renseignements vont les fournir à ceux sur lesquels les renseigne-

ments sont constitués.

Il y avait une autre difficulté, M. le Président, qu'on a appelée, là ? vous savez comment, de nos jours, on aime avoir un terme pour chaque chose ? les flux transfrontaliers. Il n'y a rien de militaire là-dedans. C'est que, dans nos sociétés, une firme de Québec ou de Montréal peut maintenant, par ordinateur, transmettre ou recevoir un renseignement d'à peu près n'importe où dans le monde.

Pour le ministre, il y avait une difficulté d'éviter la question des frontières, parce que le Québec est une province, le fédéral est jaloux de ses juridictions et, j'ajoute, l'Association des banquiers canadiens aime toujours invoquer le fédéral contre une province. Donc, il fallait trouver une façon, M. le Président, où on empêcherait un citoyen ou une entreprise du Québec de faire, en passant par un pays étranger, quelque chose que la loi empêche. Et les juristes du ministère, avec le ministre, ont trouvé un texte qui satisfait à ça, puisque ça dit qu'une entreprise ou un individu du Québec qui communique un renseignement à l'étranger doit le faire d'une façon conforme à la loi et qu'une entreprise ou un individu du Québec qui reçoit de l'étranger un renseignement doit s'en servir, conformément à la loi. Donc, on a évité tout le problème et la question des frontières. La loi s'applique à tous les citoyens et toutes les entreprises du Québec, quels qu'ils soient et indépendamment du biais, du support, du moyen par lequel on le donne ou on l'obtient de l'étranger.

Dans ce sens, M. le Président, je pourrais faire observer au ministre que voilà un exemple ? ce n'est pas souvent ? où l'Opposition officielle et le gouvernement trouvent un moyen de passer ensemble à côté d'un traquenard constitutionnel, que l'Association des banquiers canadiens aurait pu utiliser à son profit. À cet égard-là, je pense que l'ABC, l'Association des banquiers canadiens... Le ministre se rappelle peut-être qu'en commission parlementaire, suite à leur mémoire, je leur avais dit: Ce qui respire de votre mémoire, c'est que vous êtes infaillibles et parfaits. J'en déduis que ce que j'ai lu dans les journaux, les milliards que vous avez prêtés à Olympia & York est de la pure invention de journaliste, puisque les banquiers canadiens sont à la fois parfaits et infaillibles. Dans ce sens-là, M. le Président, peut-être ont-ils trop fréquenté le ministre responsable de la loi 101, et que, de quelque manière, il leur aurait transmis son infaillibilité largement reconnue dans cette Chambre.

M. le Président, la loi qu'on a devant nous est la loi d'application des dispositions des articles 35 à 41 du Code civil, qui protègent la vie privée et, donc, les renseignements personnels. Je me permets de souligner au passage que la loi amendant le Code civil, qui comportait quelque 3000 articles, a, elle aussi, fait l'objet du même processus que 68. C'est-à-dire que, quand il s'agit du Code civil, libéraux comme péquistes oublient leurs allégeances, et la députée de Terrebonne et la députée de Hochelaga-Maisonneuve, entre autres, ont collaboré là aussi avec le ministre...

M. Holden: Et moi.

M. Bourdon: ...et le député de Westmount... Ils ont collaboré avec le ministre de la Justice pour qu'on ait un Code civil renouvelé. Ça faisait 30 ans que ça se discutait. Ça devait faire 5 ans qu'on parlait de la protection des renseignements personnels qui va maintenant être faite par la loi 68.

M. le Président, il y a une question qu'on pourrait poser: Le projet de loi, que gouvernement et Opposition ont contribué ensemble à élaborer, est-il parfait? Non, M. le Président. Non, parce que le porte-parole de l'Opposition en matière d'accès à l'information et le ministre des Communications n'ont pas, comme un autre ministre, le privilège de l'infaillibilité. La seule chose, le ministre le rappelait avec raison, c'est qu'un projet de loi qui peut comporter un certain nombre de lacunes est préférable à l'absence de loi où, en pratique, n'importe quoi pouvait se faire. On a eu des exemples, M. le Président, de ce que l'absence de loi permettait. Par exemple, Équifax fournissait à ses clients ? environ 60 000 ? nos numéros de cartes de crédit que les entreprises qui émettent les cartes se tuent à nous dire de garder strictement pour nous, y compris notre carte d'appel, en disant: Dans un aéroport, votre voisin peut avoir de longues oreilles et entendre ce que vous dites. Il y a eu d'autres exemples où Equifax, par exemple, avec un ministère, achetait ou échangeait des renseignements personnels.

Donc, on a fait consensus pour adopter un projet de loi qui donne à la Commission d'accès à l'information autorité pour recevoir toutes les plaintes. On l'a fait d'une manière souple, la moins coûteuse possible, la moins bureaucratique possible, pour que ça soit une mécanique efficace et qui protège le citoyen. Mais, comme pour toute autre législation, M. le Président, le temps va faire son oeuvre. L'information va se donner, les gens vont prendre conscience de leurs droits, les institutions financières, entre autres, vont informer leurs clients et sociétaires de leurs droits, les gens vont les exercer, et la Commission d'accès va venir à la rescousse du citoyen qui aurait à se plaindre.

Une autre chose qu'on a faite, M. le Président, c'est de dire que les 240 000 professionnels du Québec qui, pour la plupart, ont des mécaniques déjà prévues par la loi sur les ordres professionnels, vont être quand même assujettis à la loi, mais vont d'abord appliquer la leur; et la Commission d'accès va venir en appel, ou en révision, ou à la place, si un ordre professionnel ne fait pas son travail ou le fait d'une façon où le citoyen se sent lésé. Ce qui va nous donner, M. le Président, à la longue, dans les rapports annuels de la Commission d'accès, une idée de comment ça marche du côté des 240 000 professionels. Et si ça pose des problèmes qu'on n'a pas prévus, bien, la loi pourra toujours être amendée pour y pourvoir.

Je pense donc, M. le Président, qu'on a devant nous un projet de loi qui protège les citoyens contre les abus possibles. On a devant nous un projet de loi qui

donne à la Commission d'accès à l'information le pouvoir d'entendre les plaintes et d'en décider. Et, à cet égard, des intervenants ont fait valoir que la Commission pouvait être, à l'occasion, juge et partie et que... Il y a eu un débat. Est-ce qu'on ne devrait pas donner au Tribunal des droits de la personne le soin d'intervenir quand il y a des plaintes? M. le Président, pour un certain nombre de raisons, le ministre a maintenu, a bon droit, je pense, que ça serait la Commission d'accès à l'information qui le ferait, quitte à revoir ça aussi au cours des années, si le problème se pose. Et, à cet égard, le ministre a fait en sorte que le ministère des Communications, et non pas la Commission d'accès, exerce la fonction de conseil auprès des ministères, des organismes, des sociétés d'État, et non pas la Commission d'accès. (16 heures)

M. le Président, des intervenants ont dit, avec raison: Quand la Commission d'accès conseille à HydroQuébec, par hypothèse, de faire telle ou telle chose, si un citoyen se plaint, elle peut être mal à l'aise pour aller à rencontre d'une décision d'un ministère ou d'une société d'État qui se seraient contentés d'appliquer son conseil. Donc, le ministère va exercer la fonction de conseil ? s'il survit, le ministère, à la vague de coupures qui déferle; mais, ça, c'est une autre question. Mais, donc, le ministère ou le ministère qui y sera substitué, si c'est ça qui est décidé, va s'occuper de la fonction de conseil, pour ne pas confondre la Commission d'accès, qui peut avoir à juger en dernière ligne, avec une fonction de conseil où on peut dire à un ministère: Faites-ça, c'est légal; ne faites pas ça, ça n'est pas légal. La Commission d'accès est autonome, puis, à l'occasion, pourra même renverser une décision ou retenir une plainte, même si le ministère s'était dit d'avis que c'était légal, parce que la Commission, elle, en sera saisie selon le mandat que la loi lui accorde.

En terminant, M. le Président, je voudrais remercier le ministre de sa collaboration. Il n'a pas retenu tous les amendements que l'Opposition lui donnait. On ne s'attendait pas à ce qu'il les retienne tous, mais il a quand même retenu des suggestions que nous avons faites. Le fait qu'il y ait un consensus dans cette Chambre pour adopter le projet de loi nous met relativement à l'abri de certains lobbies puissants qui, encore, il y a une semaine ? je pense au Conseil du patronat du Québec ? disaient qu'il ne fallait rien faire parce qu'il y a des gens au Québec qui disent: Ne rien faire, c'est toujours meilleur que de faire quoi que ce soit. Mais je viens de nouveau assurer le ministre que les lobbies sont moins puissants que le Parlement; que, quant à nous du Parti québécois, qui avons fait la première moitié du chemin, la loi qui touche le secteur public, on est d'accord pour mettre la partisanerie de côté et voter celui qui va toucher le secteur privé. Parce que privé comme public, les citoyens ont le droit de voir garantis et protégés les renseignements personnels qui les concernent, et dans ce sens-là, le projet de loi 68 qui est devant nous est un grand pas en avant.

Dans 5 ans, s'il faut le revoir, il va être revu automatiquement par une commission parlementaire. Si d'autres ajustements devenaient nécessaires, eh bien, ils se feront à ce moment-là, mais je pense que les grands vainqueurs du projet de loi, ce n'est pas le gouvernement, ce n'est pas l'Opposition, ce sont les citoyens que nous représentons. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Pointe-aux-Trembles. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition officielle, je vous cède la parole.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. Je ne peux pas ne pas intervenir sur un projet de loi comme ça, parce qu'il semble que c'est un fait presque unique en cette Chambre que le gouvernement et l'Opposition auront réussi à contrer tous les lobbies, qu'ils soient bons ou mauvais, contre certaines orientations dans ce projet de loi. Le ministre lui-même, dans son commentaire, suite à l'adoption du rapport, indiquait à cette Chambre qu'il s'agit d'un projet de loi qui aurait reçu la pleine, entière et totale unanimité de tous les parlementaires, ce qui serait un fait sans précédent.

Je sais, pour en avoir jasé avec notre collègue responsable du dossier des communications, que, dans les faits, le ministre responsable du projet de loi a donné suite à plusieurs revendications, à plusieurs suggestions. Dans certains cas, il s'agissait d'amendements proposés par l'Opposition officielle. Mais, dans un projet de loi, l'important, ce n'est pas l'endroit d'où viennent les suggestions, c'est de s'assurer que les parlementaires, les gens qui ont à ratifier dans toutes ses étapes un projet de loi conviennent qu'il s'agit là d'un projet de loi qui a reçu l'assentiment du plus grand nombre de parlementaires quant à sa conformité, quant à l'aspect de répondre aux volontés et aux besoins du milieu.

Je veux juste rappeler qu'il s'agissait quand même d'un sujet fragile. On sait que, dans l'opinion publique, il n'est quand même pas facile de traiter de cette question-là, à savoir toute la confidentialité, toute la pertinence concernant les renseignements personnels. Juste une image, quand on regarde un titre, par exemple, comme celui qu'on voit ce matin, dans Le Devoir: «Les renseignements personnels exportés seront protégés», bien, c'est une bonne nouvelle. C'est une bonne nouvelle d'apprendre que les renseignements personnels exportés seront protégés, mais c'était juste pour illustrer comment le sujet est fragile, comment les attentes des concernés sont grandes, parce qu'on veut absolument avoir toutes les garanties, parce que c'est un secteur très susceptible et très particulier. Il y a également énormément d'avis d'éthique, mais il y a également énormément de questions d'éthique concernant un projet de loi de cette nature. Lorsqu'on voit, par exemple... Si je reviens à l'article du Devoir, on laisse voir que dorénavant une entreprise qui communiquera à l'extérieur du

Québec des renseignements personnels sur des résidents québécois devra, au préalable, s'assurer que ces renseignements seront utilisés selon le consentement donné par les personnes en cause. Alors, il s'agit là d'une garantie intéressante qui offre un minimum de protection pour éviter que les informations que le monde moderne peut obtenir d'une façon très rapide et très facile, compte tenu de l'évolution absolument sans précédent dans ce monde fascinant et extraordinaire des communications... Ce n'est pas parce que c'est facile, M. le Président, qu'on ne doit pas prendre les garanties nécessaires pour s'assurer que l'ensemble des informations concernant des hommes et des femmes, des individus, deviennent objet public, compte tenu de la force de la médiatisation et des moyens modernes de communication.

Il y a des amendements qui avaient été demandés par plusieurs intervenants. Je voudrais juste en rappeler quelques-uns. Quand on pense, par exemple, que, dans le futur, une banque devra communiquer à la personne concernée le rapport de crédit sur lequel elle s'est fondée pour lui accorder ou lui refuser un prêt, bien, c'est important, mais il faut sécuriser cette information-là. C'est important de savoir que dorénavant on pourra en bénéficier, mais je ne pense pas que, si on avait procédé sans précaution dans ce projet de loi là et qu'on n'avait pas tout mis en oeuvre pour éviter les écueils...U y en avait tout un là, un écueil, à savoir que ce type d'information puisse circuler librement quand on connaît l'ensemble des informations qu'une institution financière, avec raison, va exiger pour porter un jugement ? qualitatif dans certains cas, quantitatif dans d'autres ? dépendamment des sommes qui sont en cause, c'est quand même une disposition intéressante de constater qu'elle sera protégée.

Les entreprises seront requises de prendre les moyens pour que les renseignements qu'elles utilisent soient à jour et exacts lorsqu'elles les utilisent pour prendre une décision sur un citoyen. Bien, c'est encore un aspect important, parce qu'on sait que, par la rapidité de la capacité d'emmagasiner l'information, de la colli-ger et de l'utiliser, si en plus on n'a pas de garantie que ce type d'information demeurera ce que j'appelle la réalité quotidienne ? parce qu'il n'est jamais intéressant que des informations confidentielles ou personnelles ' coulent, mais c'est encore moins intéressant quand elles sont inexactes ? quand, en plus, ces renseignements-là sont sur la place publique, bien, on souhaite au moins qu'ils correspondent aux faits. Ça peut ne pas être intéressant, mais il y a au moins l'aspect que c'est conforme à la vérité objective des faits, et, dans ce sens-là, je pense que c'est une disposition intéressante.

Il y avait eu toutes sortes de craintes, toutes sortes de réserves. Moi, je ne suis pas le porte-parole de ce dossier-là, mais je me rappelle avoir lu les appréhensions du monde de la presse, les journalistes, qui prétendaient que le projet de loi pourrait éventuellement les handicaper quant à leur rôle, disent-ils ou disent-elles, quand c'est des journalistes féminins, de toujours souscrire à leur responsabilité professionnelle qui est de s'assurer que le public, au sens large du terme, ait ce droit démocratique à l'information publique. Alors, nous en convenons, on est complètement d'accord avec ça. Cependant, c'est important de s'assurer que ces gens qui ont la responsabilité de divulguer l'information puissent avoir l'assurance que la loi ne vient pas interférer ou intervenir dans leur travail pour s'assurer qu'ils puissent faire adéquatement leur boulot.

Il y a également des pouvoirs, des nouveaux pouvoirs donnés à la Commission d'accès à l'information, qui, comme il se doit... Parce qu'on aura beau faire toutes les unanimités possibles, on aura beau faire tous les ajustements possibles et viser à une plus grande bonification du projet de loi, je connais peu de projets de loi qui, dans leur application, ne suscitent pas ou ne soulèvent pas des zones grises, des imperfections ou des zones d'interprétation. Il est toujours requis d'avoir un tiers qui puisse porter des jugements sur les litiges qu'un projet de loi peut soulever, et la Commission, d'accès à l'information arbitrera les mésententes et veillera à l'application de la loi. Cependant, on ne veut pas que le législateur pose des gestes qui auraient comme conséquence de nous conduire constamment à la Commission d'accès, et c'est pour ça que c'est important, M. le Président, d'avoir une législation qui est la plus claire possible, la plus objective possible et qui ne permet pas constamment de la remettre en question, peu importent les bons motifs qui pourraient lui donner suite. (16 h 10)

Les entreprises ont fait pression jusqu'à la dernière minute pour que le ministre dilue le projet de loi. Le 3 juin dernier, les principales associations de gens d'affaires du Québec, incluant la Chambre de commerce, le Conseil du patronat et l'Association des banquiers, avaient réclamé une vingtaine d'amendements. Ils sont même allés jusqu'au premier ministre, prétextant que ces amendements-là étaient ultimement requis, majeurs. L'information qu'on a de notre porte-parole, c'est que le ministre a tenu compte d'un certain nombre de leurs revendications, qui, selon la façon de voir de notre porte-parole, étaient légitimes, étaient convenantes, étaient normales. Et l'information qu'on a aujourd'hui, c'est que le ministre en a pris bonne remarque et qu'il a assoupli certaines règles relatives à la communication de renseignements personnels afin de faciliter l'application.

Il a également tenu compte des représentations faites par les banquiers, les marchands ou les compagnies d'aviation de manière à ce que la loi n'empêche pas les transactions téléphoniques par cartes de crédit, parce que, là, il y avait danger de mettre en péril un certain nombre de ces institutions-là. C'est leur fonction. Imaginez, si elles ne peuvent pas véhiculer quelque information que ce soit... Quand, moi, qui ai à voyager très souvent, compte tenu de la région que j'aime bien et où j'habite, c'est important que mon agence de voyages puisse avoir un minimum d'information pour les réservations, et ainsi de suite; et on nous indique que le

projet de loi a permis de faciliter ce type d'information afin que ces compagnies-là puissent exercer leurs responsabilités professionnelles et s'assurer qu'en même temps elles rendent service au consommateur. Parce que ce n'est pas tout d'avoir les balises requises du projet de loi; il faut quand même que le consommateur, en bout de ligne, y trouve son compte. Il n'y a pas beaucoup de légitimité, M. le Président, à faire une législation pour protéger les renseignements personnels si, effectivement, l'ensemble des contribuables qui auront toujours à assumer, d'une façon ou d'une autre, les coûts de l'application des projets de loi ne s'y retrouvaient pas.

Et le projet de loi a permis d'apporter ces améliorations. C'est un projet de loi qui vise à appliquer, comme mon collègue le mentionnait, les dispositions qui sont déjà prévues dans nos lois depuis plusieurs années au secteur public, de pouvoir les transférer au secteur privé afin que ce type d'information puisse également bénéficier d'un minimum de règles, de balises pour que ça se fasse correctement et convenablement. Parce que, je l'ai mentionné tantôt, dans une société démocratique comme la nôtre, il s'agit quand même d'une question d'éthique. Il s'agit d'une dimension tout à fait fragile, et ça serait absolument impossible d'envisager un fonctionnement au niveau de la communication des renseignements personnels sans un maximum de protection. Et c'est ce que le projet de loi vise.

Et, à l'adoption du rapport, M. le Président, les parlementaires, règle générale, ont à constater si la commission parlementaire, qui devait travailler d'une façon un petit peu plus ? entre guillemets ? bénédictine ou jésuite, s'est assurée que les modifications ont été apportées aux différents articles du projet de loi, pour tenir compte des remarques qui ont été faites par une multitude d'intervenants. Entre ce qui est habituel dans nos projets de loi, à savoir adopter le principe d'une chose et, après ça, aller voir d'une façon beaucoup plus détaillée comment les modalités du projet de loi, par l'étude article par article, peuvent véhiculer correctement et convenablement le principe dudit projet de loi... L'information que j'ai, moi, comme parlementaire, de ce côté-ci de cette Chambre, c'est qu'effectivement la commission a fait correctement son travail ? la commission parlementaire ? et au niveau de chacun des articles il y a un travail très, très, très, très précis d'analyse qui a été fait. Et le porte-parole de l'Opposition officielle nous dit que nous n'avons aucune réticence à collaborer et à donner notre consentement et notre assentiment à l'adoption de ce projet de loi là, et c'est ce que je voulais faire par ma courte intervention, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci. Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Je cède la parole à M. le député de Westmount.

M. Richard B. Holden M. Holden: Thank you, Mr. Speaker. This is a bill which has a lot of its source in the general statement of the law which comes out of the amendments to the new Civil Code, which all of the lawyers, judges and notaries are studying right now and which comes into effect on the 1st of January 1994. As the bill says, the object of the bill is to establish the exercise of rights and obligations resulting from the provisions of the Civil Code concerning the protection of personal information.

There are very few articles in the Code, but they are the general statement of privacy, article 35 to article 41. When we were studying the Civil Code, it was always understood that the details of the protection of those rights would be contained in the legislation which we are discussing today. In particular, the article which comes out of the Civil Code is article 24: «Every person carrying on an enterprise who holds a file on another person must, at the request of the person concerned, confirm the existence of the file and indicate its purpose. He must also inform the person of the provisions of law concerning the consultation and rectification of personal information contained in the file...».

All of the problems that we had in the past relating to credit bureaus and getting our credit reports have been dealt with in the law, and it is going to be a great relief to a large number of people, as the Member from Pointe-aux-Trembles was saying. Right now, you have to go very far down, past his riding, into ville d'Anjou in order to go to an office where you will find ? and I have done it myself, Mr. Speaker ? a large number of people waiting in line. You take a number and you wait, and you wait, and you wait, and then you go into a little booth and you talk to one of the people in the company and they look at you as though you are not a hundred percent legit because you are asking for a copy of your own credit report, and finally, and almost reluctantly, they give it to you.

Well now, Mr. Speaker, we have got something really solid here where we can get credit reports, and I think it is going to make a lot of people happy. I, for one, find it extremely helpful. In my riding, there is the Reader's Digest company. It is one of the few industries that really operates in my riding and there are lot of people employed there. The legal council for the Reader's Digest, Mme Robins, is also very active in the association, the Canadian Direct Marketing Association. And they had serious concerns which I think they raised both with the Minister and with the Opposition, very legitimate concerns about direct mailing. Of course, under the bill, there is something very new in the law of Québec. I think it is the first time in the history of legislation of this kind in North America that the idea of negative consent has been put into the law. I know that the Direct Marketing people ? and there are many of them, it is a big industry ? have studied the legislation around the world, and I am told by them that this is the best legislation they have seen. (16 h 20)

So, I think all the people who worked on this legislation can take a certain amount of pride in the fact

that this legislation is the most modern legislation in the world, and in particular this idea of negative consent, which appears in articles 20, 21 and 22. It is an interesting concept because, as it says: «A person carrying on an enterprise may [...] communicate a nominative list ? that is a list of names, of addresses and telephone numbers ? or information to be used for the establishment of such a list...» They sell these lists. I am sure the public knows that these lists are sold. You get this flood of mail in your mailbox and a lot of times you throw it away and you wish you had not gotten it in the first place.

Well, now, under this legislation, you can notify the sender of this type of literature by sending him a note saying you do not want to receive their handouts and their mailings. And that is what they refer to in the industry as a negative consent, so that it is assumed that you will take it until you tell them the contrary. Well, it is not so surprising that this is acceptable also to the industry that does the mailing, because if I do not want to get that mail, surely to God it is in their interest not to send it to me and waste the time, and the money and the paper sending me something I did not want in the first place. So, this coincides with the wishes of the people who do not want to get it and the wishes of the people who are sending it.

And so, it is an extremely important and reasonable principle that has been put into our law, and I think it is going to be extremely helpful. We all get this incredible volume of mail ? you call it mail, that is dignifying it ? these things that come in the mail that you really wish... And we, I guess, as members of the National Assembly, probably get more of it than almost anybody in the country, but I do not suppose many in the National Assembly are going to send their name into the various organizations saying they do not want to get it. But those who do not want to get it, Mr. Speaker, can now say so. This is a big, big plus in this legislation. It has also been done, I gather, by long discussions, and amendments and agreements between the industry and the Government, and now everybody seems to be happy. So, I think if everybody can be happy with a piece of legislation, including the Opposition, then I think we have gone a long way in legislating, and probably the people that are listening to us and watching us are rather pleased to see that for once we can all agree on something.

The other elements that have been spoken about having to do with various aspects of who can refuse to give out information and the lengthy list of persons who may give out information, it is of great interest. I have not been involved in the study of the law in detail, but looking at it today I see that, for instance, a person carrying on any kind of a business and who wants to communicate personal information contained in a file may do so, even without the consent of that person if it is information to a person to whom the information must be communicated for legal purposes, for public body, for instance, under the protection of personal informa- tion through a representative that collects such information; a person having the power to compel communication ? that would be, I presume, under a form of subpoena; a person to whom the information must be communicated by reason of urgency of a situation that threatens the life, health or safety of a person; a person who is authorized to use the information for study and research or for statistical purposes; a person with whom he is bound by an information service contract and who is authorized by law to collect debts, that is a collection agency; and, of course, all of the people that are mentioned in the case of the sale and sending of nominative lists, Direct Marketing, for example. And, an interesting paragraph: «A detective or security agency holding a permit issued under the Act respecting detective or security agencies may, without the consent of the person concerned, communicate personal information it holds on another person to its principal or its authorized representatives.» It would have been rather interesting if somebody who had consulted a detective agency was not then allowed to find out the information that his or her detective had discovered in the course of their examination.

Of course, all this, if there are problems with it, will end up in the access to information commission ? la Commission d'accès ? which, Mr. Speaker, I understand is a highly respected commission, even though it has not been in existence for a long time. I guess their work will increase substantially as a result of the provisions of this legislation. But it is good to know that an act like this, which is reasonable, which is acceptable, mostly to, I guess, the population in general, certainly to the Government and to the Opposition, nevertheless, if there are problems, it will be open to the citizens or open to the businesses, open to all those who are concerned in this legislation, it will be open to them to go to the Commission d'accès, which I understand and I am lead to believe is a highly competent and highly serious organization. And I am glad to see that the Government has not legislated a document which would end up in the courts, because I do not think that this is the kind of item which should end up as an argument in court. Even though I may be limiting the ability of some lawyers to get involved in legal suits which will go on and become lengthy precedents, I do not think this is the kind of situation that we want to spend our time arguing about in court.

So, in general, Mr. Speaker, as the Member for Pointe-aux-Trembles said and as a number of Opposition spokepeople have said, this is a law which everybody is satisfied with, which has been worked on. It may well be the last law adopted under the title of Minister of Communications, so we certainly want to congratulate the Minister as this is his swan song, as it were. But it is a swan song which everybody is singing together, Mr. Speaker.

M. Cannon: I thought you were going to say the ugly duckling.

M. Holden: No, no, it is a swan song that everybody is singing together, Mr. Speaker. We want to congratulate the Minister and congratulate the Opposition spokesman, and we want to say that we are certainly waiting for the vote to come so that we can acknowledge our agreement to this legislation. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Westmount. Oui, M. le député de Lévis, sur le projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Nous sommes à l'étape de la prise en considération du rapport. Allez-y.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, c'est un domaine dans lequel, à plusieurs reprises, j'ai eu à intervenir dans les années passées parce que j'ai toujours pensé que le gouvernement du Québec n'était pas assez sévère avec les renseignements privés. Et le principal coupable, c'est le gouvernement lui-même, parce que, en réalité, quand on voit actuellement le gouvernement qui demande à toute minute aux gens de remplir toutes sortes de formulaires avec un maximum de renseignements, dans les trois quarts des cas dont il n'a pas besoin, en réalité, il crée le problème. Il met en marche des processus qui font en sorte que le Québec est candidat pour le prix «Big Brother» dans le monde actuellement, parce que, justement, on établit des listes, des fiches sur tout le monde dans notre société, à tel point, M. le Président, qu'aujourd'hui le gouvernement considère comme une source de revenus de diffuser ces renseignements-là. (16 h 30)

Nous avons étudié, par exemple, actuellement, le projet de loi 91 sur le Code de la sécurité routière, où le ministre des Finances, qui fait flèche de tout bois, regarde partout où il peut siphonner de l'argent. Vous voyez, à l'article 31 de cette loi 91, on dit, au paragraphe 18°: «fixer les frais payables pour l'échange électronique de données relatives à l'application du code avec toute personne morale de droit public ou de droit privé.» Qu'est-ce que ça veut dire, M. le Président, au fond? Ça veut dire que le ministre des Finances dit à la Société de l'assurance automobile du Québec: On devrait charger des frais pour les renseignements qu'on communique, de sorte que ça va devenir une source de revenus pour le gouvernement. Et on sait comment, actuellement, les institutions gouvernementales peuvent charger cher pour donner accès à certains documents.

Je donne l'exemple de quelqu'un qui devait aller, la semaine dernière, au palais de justice de Québec, et qui me disait qu'il avait dû payer 2 $ la page pour une photocopie, M. le Président; 50 pages, ça fait 100 $. Dans ce sens-là, les documents auxquels les gens ont droit parce que ce sont des documents publics, ils sont difficilement accessibles parce qu'on charge cher. Par ailleurs, des renseignements auxquels les entreprises ne devraient pas avoir accès, ou même les organismes gouvernementaux, ils sont facilement accessibles, et on fait obligation aux gens de les fournir.

M. le Président, on se retrouve devant une situation, actuellement, où on est obligé de légiférer, pour faire quoi? Pour protéger la vie privée des gens. Sauf que, M. le Président, on a une belle loi. J'ai remarqué tantôt que... Vous avez remarqué que même les députés de l'Opposition ont dit qu'il y avait une loi qui ajoutait des choses au point de vue de la protection des droits privés, sauf une chose ? on n'en a pas pas parlé actuellement ? c'est le coût de son application. Pourquoi? Pour protéger les gens contre toutes sortes de renseignements qui vont être compilés sur leur compte et, pour se protéger, il faudra faire appel à un organisme public, la Commission d'accès à l'information, pour laquelle, M. le Président, avec les pouvoirs qu'on vient de lui donner dans cette loi, ça va prendre beaucoup de personnel additionnel, si on veut que les droits veuillent dirent quelque chose. Or, on sait qu'au Québec actuellement, quand vous appelez un organisme, ça prend des fois des jours d'attente avant d'avoir une ligne. Des jours d'attente avant d'avoir une ligne.

Il y a quelqu'un qui me disait récemment qu'il a mis le numéro sur le pilote automatique et il a pesé sur le piton pour que ça sonne tout le temps. Il a sonné toute la journée et, à 16 h 30 ou 17 heures, je ne me rappelle pas, on lui a dit que le monde était parti, que ça reviendrait à demain. Oui. C'est le cas. Et, de plus en plus de gens se rendent compte que, actuellement, l'économie que le gouvernement fait se fait souvent sur le dos des gens.

Dans ce cas-ci, quand on voit les Règles de preuve et de procédure à l'application de la loi, à la page 19 et suivantes, on se rend compte que la Commission d'accès à l'information va avoir un rôle considérable pour donner de l'information, pour enquêter. Puisque je regarde les... Remarquez bien que ces éléments-là arrivent seulement, M. le Président, aux articles 73 et suivants. Parce qu'avant les articles 73 et suivants on a un nombre de dispositions, de choses qu'il faudra surveiller, qu'il faudra éviter, contre lesquelles les gens pourront se prémunir. Sauf que, la façon de le faire, ça sera par la Commission d'accès à l'information.

On dit, premièrement ? regardez bien ? Information, article 74: «La Commission est chargée de renseigner le public sur les droits et obligations résultant des dispositions de la présente loi et sur toute matière relative à la protection des renseignements personnels.» Ça va prendre du monde pour donner des renseignements aux gens! Article 75: «La Commission peut élaborer et proposer aux personnes qui exploitent une entreprise et recueillent, détiennent, utilisent ou communiquent à des tiers des renseignements personnels, des modèles de codes de conduite internes favorisant l'application de la présente loi. Elle peut de plus prêter assistance aux personnes qui désirent adopter ces codes.» M. le Président, ça va prendre beaucoup de monde pour appliquer ça également.

Enquête ? il n'y a rien de plus long qu'une en-

quête ? article 76: «La Commission peut, de sa propre initiative ou sur la plainte d'une personne intéressée, faire enquête ou charger une personne de faire enquête sur toute matière relative à la protection des renseignements personnels ainsi que sur les pratiques d'une personne qui exploite une entreprise et recueille, détient, utilise ou communique à des tiers de tels renseignements.» Donc pouvoir d'enquête assez considérable. Ça prend du monde pour appliquer ça également. Article 77: «Au terme d'une enquête sur les pratiques d'une personne en matière de collecte, de conservation, de communication ou d'utilisation de renseignements personnels, la Commission peut, après lui avoir fourni l'occasion de présenter ses observations, lui recommander ou lui ordonner l'application de toute mesure corrective propre à assurer la protection des renseignements personnels ou à permettre leur accès par les personnes concernées. Elle peut fixer des délais pour l'exécution des mesures qu'elle ordonne.» Il faut beaucoup de monde aussi pour appliquer ça, M. le Président. Autrement, on est dans le domaine des voeux pieux. Si on n'a pas le personnel pour appliquer les lois qu'on fait adopter à l'Assemblée nationale, on est dans le domaine des voeux pieux.

C'est pourquoi j'aimerais ça savoir, au point de vue de l'impact financier de l'application de cette loi, quel budget on a prévu cette année. Pour appliquer cette loi, quel budget, en 1994, en 1995? Parce qu'on peut voter toutes les plus belles lois au monde, M. le Président, sauf qu'il n'arrive rien si on ne les applique pas. Dans combien de cas, M. le Président, nous avons des lois magnifiques avec des principes mirobolants, mais qui ne sont jamais appliquées, qui ne sont jamais appliquées!

Personne n'aurait pensé, par exemple... Personne n'aurait pensé, M. le Président, lorsqu'on a voté la Loi sur l'assurance automobile en cette Chambre, que le principal sinistré serait le ministre des Finances, qui a collecté, depuis 1986, 2 400 000 000 $ à lui tout seul, alors que tous les assurés, ensemble, ont collecté seulement 2 280 000 000 $. Le ministre des Finances a décidé de prendre l'argent du monde, M. le Président. Aujourd'hui, on serre les gens, on tord les gens pour essayer de donner de l'argent au ministre des Finances. Aujourd'hui, quand on voit toutes les dispositions qu'il y a pour l'application de la loi qui concerne la Commission d'accès à l'information, j'aimerais que le ministre des Communications nous dise quels sont les budgets, en termes de personnel, qu'il a prévus pour appliquer sa loi, avec tous les articles... Principalement, les articles 73 et suivants - 73, 74, 75, 76, 77, 78, 79, 80, 81, 82, 83 ? bien, 83, ce n'est pas nécessairement la Commission, mais ça pourrait être la Commission ? 84, 85: toutes les dispositions qui nécessitent une application, qui vont coûter normalement beaucoup d'argent. Parce que ça va prendre beaucoup de monde, parce que l'organisme, la conception du mécanisme a été faite de telle façon que ça sera une administration bureaucratique, administrative par la Commission d'accès à l'informa- tion. Donc, nécessité de beaucoup de personnel pour faire le travail. Ça, c'est une conception qu'on a faite comme ça dans les projets de loi. Mais ça, ça peut marcher, M. le Président, à condition qu'il y ait les budgets qui vont avec l'application.

A ce moment-là, j'aimerais que le ministre nous dise quelles sont les sommes d'argent qui ont été prévues, non seulement pour cette année, mais pour les années à venir. Autrement, si on nous dit qu'on n'a pas prévu de budget pour appliquer puis administrer la loi, on est dans le domaine des voeux pieux, on est dans le domaine de la théorie. Puis on sait, avec le ministre de la Justice, à quel point c'est souvent le ministre de la théorie, puisque son piédestal est tellement élevé, M. le Président, que, quand il est debout sur son piédestal, la tête est dans les nuages. C'est pour ça qu'il faut voir à quel point, dans l'application de cette loi, on a adopté les mesures et les budgets en conséquence, pour être capable d'appliquer la loi. Il ne s'agit pas seulement de dire: II faudrait ci, puis avoir 73 articles de dispositions pour protéger les gens, si on n'a pas prévu une cent pour l'appliquer.

J'aimerais savoir, M. le Président, du ministre des Communications, les montants d'argent qui sont nécessaires et qui sont prévus à son ministère, d'autant plus qu'actuellement, pour économiser, il est prévu dans le discours sur le budget que son ministère va disparaître! Vous comprenez que l'application ne sera pas forte, M. le Président, si on prévoit même que le ministère des Communications disparaîtra et que le chant du cygne, ça soit d'avoir à voter un ensemble de dispositions de voeux pieux, mais sans budget pour les appliquer. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Lévis. M. le député de Laprairie, je vous cède la parole. Vous avez droit à une intervention de 10 minutes.

M. Denis Lazure

M. Lazure: De combien de minutes, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): De 10 minutes.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Alors, je voudrais profiter de ces quelques minutes pour faire certains commentaires sur ce projet de loi 68, qui est un peu le pendant de la loi sur l'accès à l'information, qui touchait le secteur public, loi qui avait été adoptée par le gouvernement du Parti québécois, il y a une dizaine d'années. (16 h 40)

Quand on regarde le fonctionnement actuel des ministères, des organismes publics, on se rend compte que, de plus en plus, la loi d'accès à l'information est mal utilisée par les ministères, par les ministres autant

que par les fonctionnaires, en ce sens que, trop souvent, on invoque la loi d'accès à l'information, non pas pour faciliter la circulation de l'information au grand public, mais pour limiter l'accès à l'information de la part du grand public. Combien de fois voit-on dans les journaux que telle ou telle demande d'une information tout à fait publique est refusée par le ministère en question ou l'organisme d'État en question et que la personne doit aller devant les tribunaux pour plaider sa cause? On l'a vu, au ministère de l'Environnement, à maintes et maintes reprises, M. le Président.

Avant de clore ce débat sur le projet de loi 68, je voudrais qu'on s'assure que, d'une part, l'individu, le particulier verra sa vie privée respectée, et moi, je souhaiterais que cette loi et l'application de la loi mettent le citoyen et la citoyenne au centre des préoccupations. Dans le domaine médical, il y a une vieille tradition qui veut que le médecin ou le professionnel de la santé puisse être relevé de son secret avec le consentement du patient, du malade, si bien que toute information concernant un malade ne se transmet à un autre médecin ou à un hôpital que par le consentement écrit du malade. Cependant, avec le développement de l'informatique, on se rend compte que l'information circule de façon très libre, actuellement, l'information qui touche l'individu dans ce qu'il a de plus intime, souvent dans son corps, dans sa santé, dans ses maladies et que cette information circule d'un hôpital à un autre, de l'hôpital au ministère.

M. le Président, je voudrais aborder la discussion sur le projet de loi 68 dans cette optique du respect à l'intimité au caractère privé de la vie de chacun et de chacune. Dans l'ensemble, ce projet de loi va recevoir le concours de l'Opposition. Le député de Pointe-aux-Trembles a participé aux débats, en commission parlementaire. Il a apporté des suggestions qui ont bonifié le projet de loi. Plusieurs groupes ont apporté des suggestions qui ont amélioré ce projet de loi. Mais il reste que, sur certains points particuliers, entre autres l'article 17 du projet de loi, l'Opposition n'a pas eu satisfaction. L'Opposition a demandé de restreindre l'article 17. L'article 17, c'est celui qui dit ceci: Communication à des tiers. Une personne qui exploite une entreprise peut, sans le consentement de la personne concernée, communiquer un renseignement personnel contenu dans un dossier qu'elle détient sur autrui... Et là, il y a toute une liste d'exceptions: il y a 9 circonstances où on ne demandera pas à la personne concernée le consentement pour que des informations privilégiées, qui apparaissent dans son dossier, soient transmises à d'autres personnes.

Dans le secteur de la sécurité du revenu, de l'aide sociale, par exemple, depuis l'infâme loi 37 du gouvernement actuel, il y a systématiquement des enquêtes qui sont faites auprès des tiers. Alors, le tiers, ça peut être un gérant de caisse populaire, ça peut être un gérant de banque, comme ça peut être un dépanneur, mais disons que c'est un gérant de caisse populaire ou un gérant de banque, de par cet article, l'article 17... Le gérant de caisse populaire peut très bien, sans le consentement de son client qui a un compte à cette caisse, transmettre des renseignements confidentiels qui apparaissent au dossier à un agent vérificateur de l'aide sociale. C'est un exemple que je vous donne.

Cette manière de procéder, en allant puiser chez des tiers des renseignements qui touchent un individu ? la personne assistée sociale ? crée un climat de suspicion, de méfiance, si bien que l'Assemblée des évêques s'est vue obligée, en conscience, c'est le cas de le dire, de dénoncer la loi 37, de dénoncer tout le caractère de délation qui existe dans la loi 37. Je me rends compte, M. le Président, que l'article 17 de ce projet de loi 68 qui, dans l'ensemble, est un bon projet de loi, l'article 17 est trop large. Il ouvre la porte à ces abus, il ouvre la porte à la violation du caractère privé des individus par des tiers.

M. le Président, je sais que le ministre a tenu compte des représentations qui lui ont été faites par plusieurs groupements et que, dans l'ensemble, je pense qu'il y a 2 améliorations importantes qui ont été apportées. C'est justement ce dont je parlais tantôt: le consentement. Nous sommes parfaitement satisfaits que le consentement, dans la plupart des cas, devra être exigé de la personne concernée. Mais, là où nous ne sommes pas d'accord, c'est quand, par un article, l'article 17, le ministre fait une enumeration de 9 situations où il pourra procéder, où l'entreprise privée pourra procéder sans demander ce consentement.

Je pense que le ministre a aussi tenu compte des objections des entreprises qui se plaignaient à bon droit que, dans le projet initial, il y avait trop de paperasse, il y avait trop de bureaucratie impliquée. On a simplifié les procédures, et je pense que ça, c'est une amélioration intéressante, M. le Président.

Je pense que, dans une période où, de plus en plus, l'individu est devenu victime de l'informatique, de la bureaucratie, il y a nécessité de resserrer l'application de cette loi qui, dans l'ensemble, peut être remplie de bons principes, mais si on n'a pas les moyens nécessaires pour exercer une surveillance, je pense que les bons principes demeureront des voeux pieux.

Mon collègue de Lévis a fait remarquer tout à l'heure, avec raison, que la Commission d'accès à l'information devra se voir donner les moyens pour surveiller l'application de cette loi. La Commission d'accès à l'information devra être vigilante pour que l'esprit de protection du droit à la vie privée soit maintenu et pour éviter les abus qu'on voit maintenant dans le secteur public. À l'inverse, dans le secteur public, on se rend compte, comme je le disais au début de mes remarques, que, de plus en plus, on se sert d'une excellente loi, la loi d'accès à l'information, pour couper l'information, pour empêcher le citoyen d'avoir accès à l'information. Il faut craindre l'inverse dans le secteur privé. Il faut craindre que, par manque de surveillance, les entreprises privées utilisent à tort et à travers des renseignements privilégiés qui sont dans le dossier de chaque individu pour rendre la vie plus facile aux entreprises commerciales.

M. le Président, je vous répète que l'Opposition, tout en déplorant que certains amendements n'aient pas été retenus par le ministre, nous concluons, dans l'ensemble, que c'est une loi qui doit retenir notre assentiment, et c'est avec plaisir que nous le donnerons, tout en maintenant cette mise en garde. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de La Prairie. Sur la même motion, je cède la parole à M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamin-gue.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Oui, M. le Président. À cette étape de la prise en considération du rapport de la commission qui a étudié le projet de loi 68, il est important que nous puissions intervenir, un certain nombre de députés de l'Opposition, parce qu'il y a un très grand nombre de dimensions dans ce projet de loi qui touchent, évidemment, plusieurs ministères ou plusieurs dimensions de la vie publique, cela va de soi, québécoise et des secteurs d'activité collectifs. (16 h 50)

Si nous avons montré, dès le départ, un intérêt extrêmement favorable pour ce projet de loi 68, qui touche la protection des renseignements personnels dans le secteur privé... Parce qu'il faut se rappeler, M. le Président, donc, que nous avions déjà, depuis un moment, une loi qui encadrait les renseignements nominatifs dans le secteur public et pour les organismes publics, mais nous n'avions pas de loi, nous n'avions pas de texte législatif qui encadrait les renseignements personnels dans le secteur privé. Alors, nous nous sommes associés, M. le Président, à cette démarche dès le départ. Nous avons, au niveau de la commission parlementaire, effectivement suggéré un bon nombre d'amendements, en tout cas, tout en offrant notre collaboration la plus entière au gouvernement, parce que nous n'avons pas le droit ? nous le constations et nous le constatons toujours, M. le Président ? de rater notre coup dans ce secteur de la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Comme il s'agit d'un secteur d'activité qui touche de plus en plus d'individus, de plus en plus fréquemment et d'une façon de plus en plus marquée, il existe, chez nos concitoyens et nos concitoyennes, à n'en pas douter, une espèce de crainte, souvent justifiée, que soient utilisés, en fait, contre eux des renseignements qui sont strictement nominatifs, c'est-à-dire qui sont strictement personnels. On a probablement tous eu ici, comme membres de l'Assemblée nationale, quelqu'un qui s'est présenté, soit à notre bureau, quelqu'un de notre environnement, quelqu'un dans notre entourage qui a été ou s'est senti, un jour ou l'autre, victime de l'espèce de collection de données, de renseignements, dont on ne savait pas qu'ils étaient consignés dans une banque et, tout à coup, on s'aperçoit que tout ça est interrelié, qu'il y a une espèce de «Big Brother» qui se promène dans le décor, que des compagnies, parce que vous avez décidé de donner 50 $ à une bonne oeuvre comme la Croix Rouge du Québec, eh bien, vous recevez, dans la même année, une publicité de telle entreprise ou de telle autre entreprise, et vous vous demandez comment ça se fait que le Reader's Digest a décidé, tout à coup, de vous faire gagner 1 000 000 $.

Parce que vous avez tous reçu ça chez vous, là, les gens qui nous écoutent aussi, vous avez reçu ça, un beau matin, un beau petit dépliant tout en couleurs, et vous avez été choisi, vous êtes millionnaire depuis ce matin. Vous ne le saviez pas, parce que vous aviez ouvert la porte seulement après dîner, mais, dans les faits, vous étiez millionnaire depuis le matin, parce que votre numéro avait été tiré, mais complètement au hasard. Vous n'aviez rien demandé. Vous n'aviez rien acheté. Vous n'aviez rien dépensé, mais tout à coup, on vous annonce que vous avez gagné 1 000 000 $.

Il y a une légère condition, M. le Président, c'est qu'il faut généralement que vous receviez un représentant de l'entreprise qui, par grandeur d'âme, vient vous porter votre million, hein! Ah, c'est un léger détail de rencontrer la personne, mais vous vous apercevez rapidement qu'il y a généralement des conditions évidemment intenables pour que vous puissiez gagner, qu'il s'agit d'un objet de rêverie, qu'il s'agit d'abord de pénétrer chez l'individu et, pour peu que vous connaissiez des gens de votre environnement ou des gens dans votre comté qui ont ouvert leur porte ou entrouvert leur porte à ces représentants, bien, ils se sont mis à vous vendre rapidement, qui une encyclopédie, qui des produits assez fantastiques pour vos enfants, qui des produits assez fantastiques pour votre maison, pour votre jardin, etc.

Et là, on est embarqué dans un processus de vente à pression et, finalement, pour des personnes qui creusent un peu le dossier, on s'aperçoit, M. le Président, qu'il y a eu à la base même un trafic d'informations, c'est-à-dire que votre nom, qui s'était retrouvé dans une banque de données ? et je ne dis pas la banque de la Croix-Rouge, je le donnais à titre illustratif seulement, ici, M. le Président ? mais bon nombre d'entre nous, parce que nous sommes reconnus comme tels, les Québécois, nous contribuons à des oeuvres humanitaires, à des oeuvres de charité assez fréquemment pendant l'année, et tout ça constitue ce qu'on appelle généralement dans le jargon des «belles ventes», des gens qui, bon, possèdent un certain revenu et qui sont possiblement des consommateurs à convoiter de belle façon. Et, dans un deuxième temps, eh bien, on sait qu'il y a des entreprises qui vont aller offrir, qui vont acheter ces listes-là, parce que ce sont des listes qualifiées. Ce n'est pas des listes pris au hasard. On sait que c'est des gens qui ont un certain revenu, qui ont déjà fait l'objet d'un examen de crédit.

Alors, on s'aperçoit donc, M. le Président, que ces banques de données sont convoitées, qu'elles font l'objet, ces banques de données, de trafic au sens

d'achat, de revente, de prêt, de location, parce que ça constitue de bonnes sources pour aller chercher des montants d'argent pour des oeuvres humanitaires, souhaitables, charitables, qui sont pour de bonnes causes. Mais aussi, M. le Président, elles constituent également ou elles pourraient constituer de bonnes bases pour de la vente sous pression et également représenter éventuellement, par cumul des renseignements, des dangers pour l'espèce de liberté, l'espèce de libre arbitre qu'on doit laisser à la personne qui exerce sa personnalité dans la société d'aujourd'hui.

Alors, qu'on ait une loi, M. le Président, la loi 68, pour encadrer cela, pour encadrer les renseignements à caractère privé, c'était une urgence au Québec, c'était nécessaire, et nous n'avons pas hésité à collaborer pour bonifier le projet de loi. Nous aurions aimé en avoir davantage, avoir l'article 17, par exemple, beaucoup plus serré que ce que nous avons dans le projet de loi actuellement, mais on dit souvent que «le mieux est l'ennemi du bien». Et, bon, devant l'effort, devant un certain nombre de concessions et de compréhensions et d'attitudes ? oui, il faut le noter ? dans ce dossier-là, dans ce projet de loi 68, de la part du gouvernement, bien, nous avons décidé que nous appuierions, quitte à ce que nous puissions bonifier...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, Mme la députée de Verchères. Je m'excuse, M. le député.

Mme Dupuis: M. le Président, je trouve un petit peu navrant que, sur un projet de loi ? c'est tout de même important ? qu'on n'ait pas le quorum à l'Assemblée.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, vous demandez le quorum? Demandez le quorum. Il y a quorum. Il y a tout juste quorum. Allez-y, M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue.

M. Trudel: Je suis heureux, M. le Président, de constater qu'il y a un intérêt assez immense pour ce projet de loi. Vous constatez aussi qu'il y a quorum, comme le député de Beauce-Sud, qui comptait alentour de lui. Ouf! On a failli l'échapper, Mme la députée de Groulx... Mais, cependant, oui, il faut noter qu'il y a beaucoup de personnes qui assistent au débat.

Alors, M. le Président, donc je disais: Ce qui est inquiétant, c'est la connexion, c'est l'interconnexion entre les banques de données, qui rend les consommateurs nerveux, qui les rend inquiets, qui rend les gens dans la population assez inquiets par rapport à ce phénomène-là, et avec raison. Alors, on aurait aimé que, dans l'article 17 du projet de loi, qui permet d'obtenir des renseignements sans l'autorisation de la personne concernée ou auprès de la personne concernée, le nombre de situations dans lesquelles on peut procéder de telle manière soit le plus petit possible, la liste la plus rapetissée possible. Parce que, M. le Président, parfois, il y a des gens qui nous disent: Ah! Vous n'avez rien à craindre. Vous vous faites des peurs pour rien. Vous n'avez pas à... Écoutez, on rassemble ces informations, c'est pour votre bien, c'est pour vous donner de meilleurs services.

M. le Président, moi, je suis le porte-parole de l'Opposition en matière de santé et de services sociaux, et nous avons ce phénomène-là en santé et services sociaux. Et c'est pourquoi il y a eu une coalition la semaine dernière qui, devant le projet ? je dis bien le projet ? de règlement déposé au Conseil des ministres quant au nombre de renseignements qu'il faudra obtenir de quelqu'un qui se fera hospitaliser, enfin des établissements hospitaliers... C'est un nombre tellement élevé, M. le Président, qu'il y a une coalition qui craint, elle, pour la confidentialité.

Encore une fois, et je conclus là-dessus, M. le Président, peut-être pas sur le moment immédiat, mais en pareille matière, dans le secteur public, ici ? on ne voudrait surtout pas que ça se produise dans le secteur privé ? il faut toujours craindre le pire et il faut prendre toutes les précautions nécessaires. Nous allons nous associer au projet de loi 68, nous allons l'appuyer. Nous aurions aimé qu'il soit beaucoup plus corsé, qu'il soit davantage resserré au niveau des renseignements que l'on peut obtenir sans la permission de la personne, mais, M. le Président, je conclus en disant, encore une fois, que le mieux est l'ennemi du bien, et nous allons tenter de faire le mieux possible dans notre cas pour, encore une fois, inciter le ministre, à la dernière étape du processus d'adoption du projet de loi, à bonifier encore le projet de loi 68. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue. Je suis prêt à reconnaître... Oui, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, M. le Président, à ce moment-ci, je vous demanderais la suspension des travaux pour 1 minute ou 2.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je suspends les travaux de l'Assemblée pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 17 heures)

(Reprise à 17 h 4)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, nous reprenons les travaux de l'Assemblée nationale. Nous sommes à débattre le rapport de la commission de la culture sur le projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant... Oui.

M. Gendron: M. le Président, il n'y a pas d'autre intervenant. On demanderait, à ce moment-ci, l'appel nominal.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, est-ce que le rapport de la commission de la culture sur le projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, est adopté?

M. Bélisle: On va faire reporter le vote.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je comprends que vous demandez le report du vote nominal.

M. Bélisle: On va faire reporter le vote à la période des affaires courantes.

Vote reporté

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, le vote est reporté à demain. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Alors, M. le Président, nous en sommes rendus à l'article 22 de notre feuilleton.

Projet de loi 80 Adoption

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 22 de notre feuilleton, M. le ministre des Approvisionnements et Services propose l'adoption du projet de loi 80, Loi modifiant la Loi sur l'administration financière, la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et d'autres dispositions législatives. M. le ministre, je vous cède la parole. Vous avez droit à une intervention de 60 minutes.

M. Robert Dutil

M. Dutil: Merci, M. le Président. M. le Président, le projet de loi 80, je le rappelle, avait pour objectif, prévoyait que le gouvernement pourrait exempter, aux conditions qu'il détermine, certains organismes publics de l'application de l'ensemble de la réglementation gouvernementale portant sur les conditions des contrats faits par les organismes publics et sur l'acquisition et les fournitures de biens et services par de tels organismes. Un organisme ainsi exempté devra adopter une politique sur ces sujets et la rendre publique.

Le projet de loi avait également quelques autres dispositions d'ordre mineur qui ont été discutées et qui n'ont pas été amendées lorsque nous avons procédé à l'analyse article par article de ce projet de loi en commission parlementaire.

Je rappelle, M. le Président, que nous avons déposé à la commission parlementaire la liste des organismes et la catégorie dans laquelle chacun de ces organismes devrait se retrouver. Je pense que ça a eu pour effet de clarifier le débat. Nous avions dans cette liste-là les organismes assujettis, c'est-à-dire ceux qui étaient dans la catégorie I du groupe A. Nous avions également les organismes qui étaient partiellement assujettis, identifiés dans la catégorie I, groupe B. Nous avions, de plus, les organismes exemptés avec conditions, dans la catégorie II, groupe C. Et, finalement, les organismes exemptés sans conditions dans la catégorie III, groupe D. Ces divers organismes-là étaient présentés d'une façon exhaustive. C'est le classement des organismes le plus bas qu'il puisse y avoir. Il peut arriver que certains organismes qui sont classés, par exemple, dans la catégorie II, soient placés par le gouvernement dans la catégorie C, c'est-à-dire que les organismes exemptés sans conditions, on peut décider de les amener dans les organismes exemptés avec conditions, de telle sorte que la décision gouvernementale ne pourra pas être autrement que plus sévère que celle que nous avons présentée en commission parlementaire. Et je pense qu'effectivement, suite au débat que nous avons eu à ce moment-là, nous nous sommes bien compris, et ça a eu pour effet de nous permettre d'adopter en commission parlementaire le projet de loi, avec très peu de modifications.

C'est le dernier morceau législatif pour l'application du rapport du Groupe de travail sur le processus d'octroi des contrats du gouvernement. Ce rapport est mieux connu sous le nom du rapport Bernard. Il était intitulé «L'efficacité dans la transparence». La partie que nous avons touchée par ce projet de loi-là, la plus importante, est celle que l'on retrouve à la page 12 du rapport, et où on mentionnait, au niveau des organismes assujettis: «Par conséquent, la règle actuelle qui veut qu'un organisme ne soit assujetti que s'il est désigné serait remplacée par la règle que tout organisme est assujetti à moins qu'il ne soit exclu spécifiquement.»

Alors, ça complète la partie du rapport Bernard qui touchait cette problématique-là et qui touchait ces recommandations-là. Alors, je suis très heureux et très fier, M. le Président, de pouvoir dire que cette pièce législative, ce dernier point, ce dernier ajustement ? puisqu'il s'agissait d'un projet de loi relativement petit, de quelques articles ? met fin à notre processus législatif.

Quant au processus réglementaire, il est également presque complètement en place, et l'entrée en vigueur de ce projet de loi étant le 1er novembre 1993, nous pourrons dire, à cette date-là, que ce rapport-là a été respecté pour 43 des 45 recommandations. Les 2 recommandations qui ne sont pas respectées, nous avons expliqué les raisons qui nous ont amené à ne pas accepter les 2 recommandations en question. Alors, j'en suis particulièrement fier M. le Président, et je vous remercie beaucoup.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Verchères, je vous cède la parole. (17 h 10)

Mme Luce Dupuis Mme Dupuis: Merci, M. le Président. Effective-

ment, le projet de loi 80 a trait aux attributions de contrats et aux acquisitions de fournitures et de biens et services pour les organismes gouvernementaux. Effectivement, comme le mentionnait le ministre, cette loi conserve ou va dans le sens de l'esprit du rapport Bernard. Cependant, elle vient modifier des erreurs qui s'étaient glissées aux lois 180 et 45, qui avaient pour effet que certains organismes se trouvaient à changer de catégorie.

Au niveau de l'interprétation, ce n'était pas très clair. Finalement, certains organismes, comme je vous dis, ça les amenait à passer, par exemple, d'une catégorie où ils n'étaient pas assujettis à une réglementation gouvernementale, et là, ça pouvait devenir un petit peu embêtant pour ces organismes-là qui se trouvaient pris dans une sorte de carcan. Dans ce sens-là, la loi 80, oui, vient alléger et libérer ces organismes-là, tout en conservant l'esprit du rapport Bernard.

M. le Président, il a eu aussi pour effet, je pense, côté positif, de clarifier les catégories. Bon, par exemple, quand on parle de catégories, c'est des groupes qui sont assujettis à une réglementation gouvernementale, d'autres qui sont partiellement assujettis et d'autres qui ne le sont pas.

Bon, un exemple. Par exemple, dans la catégorie I, le groupe A, ce sont des organismes qui sont assujettis à une réglementation gouvernementale; ils sont au nombre de 77. Par exemple, la Commission des biens culturels du Québec fait partie de cette catégorie. Dans la catégorie I, groupe B, là, ce sont des organismes qui sont partiellement assujettis: un exemple, la Commission des normes du travail. Et, dans l'autre catégorie, dans la catégorie II, le groupe C, ce sont des organismes qui sont exemptés de la réglementation gouvernementale, mais, par contre, qui doivent rendre publique leur politique: par exemple, Hydro-Québec, la Société des parcs industriels. Il y a un autre groupe, qui est la catégorie III, le groupe D; ce sont des organismes qui sont tout à fait exemptés de la réglementation, sans aucune condition. Ensuite, il y a le groupe D, qui, lui... la liste se continue. Maintenant, M. le Président, ça a eu pour effet de clarifier. Ce n'est pas tout à fait les mêmes groupes. Les titres changent un peu par rapport au rapport Bernard, mais ça va dans le même esprit.

Ce projet de loi dit aussi qu'il reporte du mois d'avril au mois de novembre 1993. Tous les organismes se doivent de respecter cette date et de suivre le projet de loi, ou de se donner une réglementation, ou de suivre la réglementation gouvernementale, ceux qui sont partiellement ou tout à fait assujettis. Là, j'espère, M. le Président, que ce ne sera pas reporté comme date, parce que les organismes qui ne suivent pas la règle, au 1er novembre, devront automatiquement tomber dans une catégorie plus sévère. Par exemple, les partiellement assujettis tombent automatiquement dans le groupe des organismes tout à fait assujettis à la réglementation.

Cependant, je pense que ce serait important de s'assurer que ces organismes ont toute l'information nécessaire, pour ne pas qu'ils plaident l'ignorance, s'ils sont négligents, en disant: Nous n'avons pas eu toutes les informations nécessaires. Je pense que ce serait pertinent que le ministre voie à ce que ces organismes soient bien informés et qu'on conserve la date du mois de novembre, qu'on ne la reporte pas une fois de plus, et que ces organismes suivent ces règles-là. Je trouve que c'est important, puisque ça va dans le sens du rapport Bernard. Comme le disait le ministre, tantôt, nous sommes à l'application de la 43e recommandation sur 45.

J'espère aussi que la loi 180 et la loi 45 ne nous obligeront pas à passer une autre loi, en plus de la 80, pour corriger des erreurs de parcours, mais que là, effectivement, ce sera la dernière fois qu'on aura à corriger par des lois ? à cause des effets secondaires qui n'avaient pas été prévus ou de l'implication, au moment de l'application de la loi, de choses qui n'avaient pas été prévues, et qui obligent à établir une autre loi pour corriger les autres.

Ceci étant dit, M. le Président, effectivement, nous avons apporté de légères modifications lors de l'étude article par article, mais l'Opposition a l'intention d'approuver le projet de loi et de donner son consentement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée de Verchères. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Mise aux voix

Est-ce que le projet de loi 80, Loi modifiant la Loi sur l'administration financière, la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et d'autres dispositions législatives, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: L'article 52 de notre feuilleton, M. le Président, s'il vous plaît.

Projet de loi 244 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Lefebvre): L'article 52 de notre feuilleton. M. le député de Hull propose l'adoption du principe du projet de loi 244, Loi concernant la compagnie de chemin de fer de l'Outaouais. M. le député de Hull, je vous cède la parole.

M. Chevrette: Compte tenu, M. le Président, que j'aurai un minimum de 2 intervenants, et qu'ils sont en commission...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député

de Joliette, je vous ai demandé à 2 reprises, tout à l'heure, de retirer vos propos relativement à l'incident qu'on a vécu tout à l'heure. Tant et aussi longtemps que vous ne le ferez pas, je ne peux pas vous céder la parole, je m'excuse. Alors si vous... Très bien. M. le député de Hull, je vous cède la parole.

M. Robert LeSage

M. LeSage: Merci, M. le Président. Le projet de loi 244, intitulé originalement Loi concernant le Conseil de développement touristique Hull-Chelsea-La Pêche inc., qui est devenu par la suite, avec certaines modifications en commission parlementaire, Loi concernant la compagnie de chemin de fer de l'Outaouais, a reçu l'assentiment des membres de la commission de l'aménagement et des équipements à la suite de 2 rencontres avec les intervenants de la région de l'Outaouais québécois.

M. le Président, il faut se rappeler l'objectif de ce projet de loi, qui est, grosso modo, de permettre ou d'accorder un statut de compagnie ferroviaire à la compagnie de chemin de fer de l'Outaouais, qui a été formée et autorisée par les municipalités de Hull, Chelsea et La Pêche. Tout ça, M. le Président, parce que le train, qui est déjà en opération depuis quelques années, emprunte un tronçon de la compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique et que cette dernière autorise la compagnie Choo-Choo, qui opère présentement ce petit train, à utiliser 1,9 km de sa ligne de chemin de fer. Mais, la compagnie Canadien Pacifique avait déjà avisé les autorités municipales de la ville de Hull qu'elle ne pouvait plus consentir à cette autorisation à cause des assurances et des poursuites qu'il pouvait y avoir sur ce petit tronçon de 1,9 km.

M. le Président, la ville de Hull et les municipalités concernées ont donc jugé à propos de demander à notre Législature d'autoriser la compagnie à opérer un chemin de fer sur le réseau Hull-Wakefield. Pourquoi est-ce que les autorités municipales de Hull voulaient tant et tenaient tant à avoir un train touristique dans l'Outaouais? M. le Président, depuis plusieurs années, les autorités locales tentent de diversifier l'économie. Nous savons que Hull ? et l'Outaouais québécois ? est située à proximité de l'Ontario, plus précisément tout près d'Ottawa. La ville d'Ottawa reçoit annuellement de 3000000à4000000de visiteurs. Alors, ce que les autorités municipales veulent ? elles réussissent assez bien ? c'est de tenter, dans la mesure du possible, d'attirer le plus grand nombre de ces visiteurs du côté québécois, dans l'Outaouais québécois, pour, bien sûr, apporter un essor économique plus fort que ce que nous avons présentement. Alors, les autorités municipales, avec l'ATO, ont fait en sorte qu'une partie de ces touristes viennent à Hull. (17 h 20)

On sait que nous avons à Hull, présentement, le Musée canadien des civilisations qui attire une bonne clientèle. Nous avons également le ruisseau de la Bras- serie, qui est très beau, l'ancien château d'eau, qui pourrait devenir un théâtre, si jamais le monde artistique venait à s'entendre avec la ville de Hull. En tout cas, M. le Président, ce que je peux vous dire, c'est que la ministre des Affaires culturelles avait déjà accordé une subvention pour le développement du château d'eau, mais, pour des raisons que je ne connais pas plus à fond, c'est que le domaine culturel a dit à la ministre qu'il préférait attendre et qu'elle laisse de côté cette subvention, parce que le maire du temps, peut-être qu'il n'était pas trop, trop entiché à développer pour le moment château d'eau. À tout événement, M. le Président, mon gouvernement avait promis de l'argent, et je pense que, si on s'entend avec les municipalités, bien, on pourra le regarder à nouveau.

Les infrastructures dans la ville de Hull, M. le Président, il en manque. On ne peut pas dire que les gens vont être attirés de venir à Hull, demain matin, pour voir autre chose que ce qu'ils peuvent voir, ailleurs dans la province. Comme je vous l'ai mentionné, nous avons le Musée canadien des civilisations, mais lorsque les gens arrivent à Ottawa, ils traversent le pont interprovincial, ou le pont du Portage, puis ils peuvent retourner dans leur patelin, de l'autre côté, sans même s'en rendre compte. Ce que l'on veut, c'est que les gens qui viennent visiter le Musée canadien des civilisations soient attirés par autre chose, pour faire en sorte qu'ils demeurent du côté québécois. Le petit train de Hull-Wakefield, sa gare de départ est située sur la rue Mont-calm. La ville de Hull et l'ATO veulent y développer des infrastructures qui feraient en sorte qu'on pourrait y construire prochainement un hôtel, un terrain de jeu. Il y a déjà un golf qui y est installé. Il pourrait y avoir un théâtre, il pourrait y avoir des marchés. La ville de Hull a certaines idées, mais je peux vous dire que, présentement, le petit train fonctionne à plein. Je discutais, récemment, avec son directeur général, qui me disait que, pour les mois de juillet et août, c'était vendu, complet, avec les tours touristiques qui viennent à Ottawa.

Pourquoi Hull-Wakefield, M. le Président? C'est un trajet qui longe la rivière Gatineau. C'est de toute beauté de voir ce paysage qui suit la route de la voie ferrée. Si vous voyiez ce décor féerique durant l'automne avec les couleurs, c'est de toute beauté! Je vous invite, M. le Président, il faut que vous veniez faire un petit tour sur le train touristique Hull-Wakefield au mois de septembre, début octobre.

M. le Président, ce projet de loi a subi quelques modifications en commission parlementaire, j'en conviens. Ce que j'ai de la misère à comprendre, toutefois, c'est que, lorsque les intervenants sont venus pour la première fois expliquer l'objet du projet de loi, le député de Lévis et le député de Jonquière s'acharnaient à poser certaines questions qui, à mon point de vue, M. le Président, n'avaient pas leur raison d'être. J'ose espérer, M. le Président, d'abord, que le député de Lévis, que l'on connaît pour être un défenseur du développement régional, et le député de Jonquière, un ancien

maire, président de l'UMQ, qui a toujours pourfendu l'autonomie municipale... J'ose espérer que c'était pour des raisons autres que le petit train. Ça peut être des raisons politiques, ça peut être des raisons de stratégie politique, ça peut être quoi que ce soit, M. le Président, mais, de grâce, j'espère que ce petit train va voir le jour et j'espère qu'il aura l'assentiment des députés de l'Opposition.

M. le Président, moi, je fais confiance aux édiles municipaux. J'y ai travaillé pendant de nombreuses années et je sais pertinemment bien que le conseil municipal de Hull ne ferait jamais une demande à la Législature provinciale ou à l'Assemblée nationale pour faire du «fun». Je l'ai mentionné tantôt, on parle d'une distance 1,9 km et c'est la raison pour laquelle le projet de loi a été présenté, pour permettre à la ville de Hull et aux 3 municipalités concernées de pouvoir circuler sur cette artère de 1,9 km. Ce n'est pas la fin du monde, mais, M. le Président, avec ce projet de loi, la compagnie qui est formée présentement, la compagnie de chemin de fer de l'Outaouais, pourra, en vertu de ce projet de loi, extensionner dans les limites territoriales de l'Outaouais québécois d'autres chemins de fer, pour faire en sorte que les touristes qui viennent dans l'Outaouais québécois puissent visiter d'une autre façon qu'ils le font présentement les beautés de l'Outaouais québécois et, surtout, y demeurer et activer l'économie de notre région.

Alors, c'est ce que je voulais vous mentionner, M. le Président, sur ce projet de loi, et je vous remercie de votre attention.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Hull. Sur le même sujet, M. le député d'Abitibi-Ouest, leader adjoint de l'Opposition officielle.

M. Gendron: Non, M. le Président, ce n'est pas sur le même sujet, mais...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous ne voulez pas intervenir là-dessus?

M. Gendron: ...c'est pour vous indiquer que, sur le même sujet, oui, on a un intervenant, qui est le porte-parole de l'Opposition officielle, qui s'en vient dans quelques minutes. Alors...

Une voix: II faut suspendre.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous demandez une suspension?

M. Gendron: ... je demande une suspension.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je suspends les travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 25)

(Reprise à 17 h 38)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, Mmes et MM. les députés, nous sommes à discuter de la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 244, Loi concernant la compagnie de chemin de fer de l'Outaouais. M. le député de Lévis, on m'a indiqué que vous vouliez intervenir. Je vous cède la parole.

M. Jean Garon

M. Garon: Alors, M. le Président, c'est difficile d'être à 2 endroits en même temps. J'étais en commission parlementaire pour étudier les mémoires des gens qui travaillent dans le domaine de la construction concernant le gel de leur salaire ou une prolongation possible du décret de la construction, alors qu'on m'a avisé que le député de Hull était en train de parler sur le projet de loi 244 qui venait d'être appelé.

En prenant mes notes rapidement dans mon bureau, la télévision étant ouverte, j'ai entendu les derniers commentaires du député de Hull et je me suis étonné des commentaires du député de Hull, parce que je me serais attendu à ce qu'il soit au courant des débats qu'il y a eu en commission parlementaire. Essentiellement, il y a beaucoup d'aspects dans ce projet de loi là et, quand le député, dont les propos sont consignés aux débats, dit: «La ville n'aura jamais besoin du gouvernement. C'est elle qui est en cause et c'est rien que la ville qui va assumer les coûts», très bien, c'est dit. Ce qui est dit est dit. Sauf que, M. le Président, quand vous regardez le projet de loi 244, c'est une boîte à surprises. En termes de coûts pour l'avenir, il n'y a pas grand-chose de réglé là-dedans, mais il y a beaucoup de factures à venir, puisque les emprunts ne sont pas réglés, qu'on loue temporairement une voie ferrée et que les factures vont venir dans l'avenir, et les factures peuvent être considérables et être de plusieurs millions de dollars. (17 h 40)

Aujourd'hui, les gens se font mettre le bras dans le tordeur. Je disais, tout à l'heure, qu'il y a plusieurs aspects. Mon collègue, le député de Jonquière, traitera de l'aspect affaires municipales davantage plus tard. Il a assisté aux débats entièrement. Je dois vous dire, M. le Président, qu'il y a l'aspect affaires municipales, puisque les villes sont impliquées, il y a l'aspect transports et il y a l'aspect touristique. Que le projet soit intéressant, c'est une affaire, mais qu'il soit attaché, c'est une autre affaire.

Nous n'avons pas voulu empêcher l'adoption du projet de loi, même si nous avons voté contre, parce qu'il y a beaucoup de choses qui ne sont pas attachées dans ce projet de loi là. Pour vous donner rien qu'un exemple, il a fallu changer à peu près tous les articles et même les notes explicatives, ce qui est très spécial. Vous savez, c'est rare qu'on change dans un projet de loi même les notes explicatives d'un projet de loi ? parce que même les notes explicatives avaient besoin de changements.

On a changé l'article 1, Particle 2, l'article 3, l'article 4, l'article 5, l'article 6, l'article 7, l'article 8, l'article 9, l'article 10 et même les notes explicatives, M. le Président, et même le titre. Seul le numéro n'a pas changé. Comme projet de loi qui était attaché, là, moi, c'est la première fois que je vois un projet de loi où on change tout, de a à z, même le titre et même les notes explicatives. On a gardé le numéro 244, à toutes fins pratiques.

Alors, M. le Président, les gens qui ont travaillé à cette commission parlementaire, qui ont fait leur travail, ont aidé la ville de Hull... Et ceux qui ont voulu donner l'absolution sans confession, là, je vais vous dire une chose, eux n'ont pas aidé leur ville, même s'ils l'aiment. Parce que le projet de loi, il n'était pas attaché. Plus que ça, il y avait même des articles qui n'étaient pas constitutionnels, M. le Président, parce que, dans le projet de loi initial que nous avons eu devant nous, on amendait même des compagnies à charte fédérale, on amendait même des lois fédérales. Vous savez, en termes de droit, là, un étudiant qui nous présenterait un projet de loi comme ça, il bloquerait son examen. C'est ça qu'on a eu, essentiellement.

M. le Président, nous avons voulu faire le travail justement pour protéger les citoyens de Hull. Nous avons demandé des documents. Au lieu de prendre tout pour du cash, on a demandé des documents, parce qu'il y a des gens qui sont venus devant nous, qui ont pensé qu'un projet de loi, c'était adopté automatiquement. Ce n'est pas adopté automatiquement.

Deuxièmement, dans le cas que nous avons étudié, c'était la première fois qu'une municipalité devenait opérateur d'une compagnie de chemin de fer, qu'elle opérait un chemin de fer. Ça peut être payant, sauf que nous avons demandé aux gens quels avaient été les rendements par rapport à la première année et ceux qu'ils anticipaient cette année. Cette année, ils avaient prévu un surplus de 370 000 $. J'ai cru comprendre, d'après ce qu'ils nous ont dit en commission parlementaire, que, s'ils ne perdent pas d'argent, ils vont être contents cette année. S'ils arrivent juste, ils vont être contents. Les prévisions que nous avons devant nous, parce qu'il s'agit d'engager les citoyens là-dedans... On peut bien les engager inconsidérément parce qu'on aime mieux les promoteurs que les citoyens, sauf qu'un Parlement qui est responsable doit être prudent dans l'engagement des contribuables dans une loi privée comme celle-là, parce qu'il déroge au droit public normal du droit municipal.

Ce n'est pas arrivé souvent dans le passé. C'est arrivé. Ça arrive actuellement également dans le comté de Duplessis, à Port-Cartier. On verra dans l'avenir ce que ça fait, parce que des municipalités entrepreneurs, qui prennent des risques, ou, à ce moment-ci... Une municipalité, normalement... Dans le droit commun, le droit public que nous avons, une municipalité, c'est un organisme public qui rend des services aux citoyens, qui enlève la neige, qui arrange les routes, qui fait des routes ou des rues, qui dispose des vidanges, qui rend des services. Mais une municipalité entrepreneur, on verra. On verra ce que ça fera dans l'avenir quand une municipalité, à un moment donné, sera obligée de demander des millions de dollars à ses concitoyens parce que l'entreprise qu'elle a décidé d'assumer ne va pas bien. parce que tous les gens que j'ai vus, moi, venir pour des entreprises, ont toujours assumé que l'entreprise marchait bien. on voit aujourd'hui unigesco, ou univa, si vous voulez, c'était un de ceux qui n'avaient pas voulu vendre des parts, dans le temps, de soquia, qui n'ont jamais été vendues quand j'ai été ministre de l'agriculture, mais que les libéraux, eux, ont décidé de vendre. aujourd'hui, on voit ce que ça a donné. j'avais dit exactement la raison pourquoi je n'avais pas voulu dire oui. c'est exactement ce qui arrive aujourd'hui. j'avais dit, quand on voulait vendre à bertin nadeau les actions de soquia ? 8 % des actions de provi-go ? que, si ça allait bien, il n'y avait pas de problème mais que, si ça allait mal et qu'il fallait mettre la main dans ses poches, je n'étais pas certain que m. nadeau aurait assez d'argent dans ses poches. j'étais même convaincu qu'il n'en avait pas assez. c'est arrivé. exactement. quand il est venu pour mettre la main dans ses poches, il n'avait pas assez d'argent pour les besoins d'unigesco, qui est devenue univa.

Parce que je ne crois pas à ce capitalisme moderne où il s'agit, dans des grandes entreprises comme ça, d'avoir un actionnaire principal. Je pense que c'est différent. J'avais dit non dans le temps, craignant que ça ne puisse arriver. On disait que j'étais pessimiste. Et je disais même qu'il faudrait sans doute vendre aux Américains, c'est-à-dire que M. Nadeau serait obligé de vendre aux Américains si ça allait mal, parce qu'il n'y aurait pas grand investisseur qui trouverait les capitaux nécessaires pour Provigo, sauf la Caisse de dépôt. Bien, il arrive exactement ce que j'avais craint.

Dans le domaine des municipalités également, il faut faire des distinctions. Et le gouvernement du Québec, à mon avis, opère avec imprudence quand il commence à accepter que des municipalités soient des entrepreneurs, sans étudier le statut légal que devrait avoir la municipalité entrepreneuse. Et quand on opère normalement, en donnant des garanties d'emprunt dans le domaine de l'entreprise, sans savoir ce qui va arriver de l'avenir, il y a des risques. Il y a des risques considérables, et on ne peut pas faire prendre des risques par n'importe qui, dans n'importe quelles conditions. Demain matin, les municipalités qui prennent des risques vont être bien mal prises et, après ça, elles vont arriver devant leurs concitoyens et dire: On est obligé de vous charger 1000 $, 2000 $, 3000 $, ou peut-être quelques milliers de dollars de plus, peut-être par année, pendant quelque temps, pour rencontrer les paiements qu'on doit rencontrer; autrement il y aura des problèmes.

On n'a pas vu, ici, de municipalités qui sont tombées en faillite, mais on en a vu aux États-Unis. Hein? Mais, qu'est-ce qui arrivera? Parce qu'on est dans un domaine de droit totalement nouveau, que le gouver-

nement n'a pas étudié ? je vous le dis bien franchement ? que le gouvernement n'a pas étudié, pour lequel il n'a pas fait les analyses nécessaires et qui est un projet qui est arrivé devant nous, qui n'était pas au point, pour dire le moins. Et, demain matin, quand il arrivera des difficultés, si l'entreprise ne rencontre pas les objectifs financiers qu'elle a indiqués, je me demande ce qui va arriver. Qui va assumer la facture? Ah! Je sais que la tendance normale sera de passer la facture à un autre.

Et le député de Hull a pris des engagements, il a dit que la municipalité ne demanderait pas d'argent au gouvernement. Vous remarquerez que, dans le financement en cours, il y a très peu d'argent qui vient des promoteurs privés. L'argent, en grande partie, vient du gouvernement. La grande partie des investissements vient du gouvernement fédéral, provincial, d'un engagement municipal, mais la somme d'argent qui vient des promoteurs est très petite par rapport à l'argent que fournit le gouvernement provincial par ses différents ministères, à l'argent que mettent le gouvernement fédéral ou le gouvernement municipal. La partie qui vient des promoteurs n'est pas grosse, de sorte que c'est plus facile de prendre des risques quand on les prend avec l'argent des autres. Sauf qu'actuellement il y a beaucoup d'épées de Damoclès qui sont dans l'avenir, parce que la situation financière est loin d'être réglée ? loin d'être réglée ? et les factures importantes sont pour l'avenir. (17 h 50)

Je vais vous dire bien franchement, nous avons voté contre ce projet de loi, comme nous allons voter en troisième lecture. Cependant, c'est le gouvernement qui gouverne et c'est la municipalité qui a pris des risques. J'ai fait ce que j'ai pu pour avertir et mettre la puce à l'oreille lors de la présentation du projet de loi en commission parlementaire pour la première fois. Même localement, c'est sorti un peu dans les journaux ? et je ne l'ai pas fait pour des raisons électorales, parce que vous allez me dire qu'il n'y avait pas grand vote là-dedans.

Sauf que, plus tard, si ça va mal, il y a des gens qui diront que le député de Lévis nous avait dit qu'il y avait des risques et que les factures, normalement, sont assumées par ceux qui prennent les risques, pas par ceux qui ne les prennent pas, et que les risques, en l'occurrence, peuvent représenter beaucoup d'argent. Pas un peu d'argent, beaucoup d'argent. Et non seulement ça, mais je me demande ce qui va arriver lorsqu'il faudra aller chercher l'argent dont on aura besoin pour remplacer le contrat de location, pour acheter les équipements. Lorsqu'il faudra aller en règlement d'emprunt pour plusieurs millions de dollars, je me demande ce qui va arriver. Est-ce que les citoyens vont dire oui? Est-ce qu'ils vont dire non? Je ne le sais pas. Parce que, éventuellement, il devrait y avoir un règlement d'emprunt important pour des sommes importantes. À ce moment-là, le financement qui n'est pas prévu immédiatement devra être réalisé dans l'avenir. Là, on verra, à ce moment-là, qu'il y a beaucoup de gens qui auront déjà le bras dans le tordeur. Alors, on aurait pu prendre le temps, et on aurait dû prendre le temps nécessaire, à mon avis, dans ce projet de loi-là, pour assurer le financement, pour que les gens qui font partie d'une municipalité puissent réagir comme ils doivent réagir normalement, comme ils ont le droit de le faire lorsque la municipalité s'implique financièrement.

Là, actuellement, on signe des choses, on s'embarque dans un projet, on fait marcher des appareils. On achète les équipements, ou encore on les loue avec obligation de les acheter dans l'avenir. Mais, après ça, quand les véritables factures vont arriver, plus tard, si ça va bien, ce sera peut-être plus facile, mais si ça va mal... Je me rappelle toujours une vieille devise qui dit ? M. le Président, que vous devez connaître, dans votre sagesse ? que la victoire a une nombreuse paternité et la défaite est orpheline. Quand ça va mal, on cherche après les gens responsables. Il n'y en a pas beaucoup. Quand ça va bien, tout le monde veut avoir le crédit. Moi, je n'ai pas d'objection à ce que le gouvernement dise, à un moment donné: On veut que les municipalités jouent un rôle d'entrepreneur. Mais dans quelles conditions? En assumant quels risques? Et en limitant le risque de quelle façon?

Je me rappelle le ministre du premier mandat du gouvernement actuel, lorsqu'il parlait des institutions financières et parlait de la démutualisation des compagnies d'assurance, il devait y avoir un chapitre. Finalement, on a commencé avec 1, il n'y a jamais eu de chapitres 2, 3, toujours dans les bills privés. Et, finalement, une des premières est disparue, à toutes fins pratiques, Les Coopérants. Une deuxième demande de changer son statut. Pourquoi? Parce que les difficultés sont commencées. Il n'est pas certain que les autres qui n'ont pas annoncé leurs difficultés n'ont pas des problèmes elles aussi. Pas toutes, mais quasiment. Sauf qu'on n'a jamais eu de régime de démutualisation, et on est en train de scrapper par des lois privées nos principales institutions financières, M. le Président, qui nous ont appartenu et auxquelles les gens ont adhéré pour qu'on ait des institutions financières d'ici.

Aujourd'hui, on est en train de changer la nature des municipalités, de changer les pouvoirs des municipalités. Pas toutes les municipalités, mais une par une. Tantôt, les gens se demanderont comment ça se fait qu'ils se sont embarqués dans des choses comme celles-là, de cette façon-là, sans prendre toutes les précautions nécessaires. M. le Président, dans le domaine de l'entreprise, il y a des risques. Que vous soyez bon ou pas bon, il y a des risques.

Vous vous rappelez, quand il y a eu la crise financière du début des années quatre-vingt, il n'y avait pas beaucoup d'hommes d'affaires qui avaient prévu que les taux d'intérêt seraient, à un moment donné, à 21 %. Pourtant, c'est ça qu'on a connu au mois de juillet 1981. Il y en a qui ont fait faillite et qui avaient pris toutes les précautions nécessaires. Quelle va être la situation économique l'an prochain ou dans 2 ans? Si on

vit la crise économique, comme plusieurs commencent à en parler, des années trente, le tourisme sera peut-être bien moins fort. À ce moment-là, les gens qui ont basé des millions de financement sur un train touristique, peut-être qu'ils trouveront ça plus difficile. À ce moment-là, les risques qu'ils vont assumer... C'est facile, quand ce sont les pouvoirs publics qui assument les risques; ils sont capables de faire porter les risques aux contribuables.

Mais le rôle du Parlement, ici, quand il fait des lois, c'est de faire en sorte de protéger les citoyens. Que les citoyens ne soient pas seulement les cautions des promoteurs qui assument peu de risques en argent privé par rapport à l'argent public qui est investi dans leur projet. C'est trop facile de partir en affaires avec l'argent des autres. C'est trop facile aussi de trouver des gens en politique qui aiment bien couper des rubans, mais qui ne sont pas là quand les difficultés arrivent. C'est trop facile!

Je pense que c'était plus difficile, M. le Président, de faire le travail que nous avons fait en commission parlementaire, le député de Jonquière et moi, pour faire en sorte que le projet soit plus circonscrit, bien qu'il ne soit pas entièrement circonscrit. Plus circonscrit, parce que, pour le circonscrire entièrement, il aurait fallu que le financement qui était anticipé soit davantage sûr, réalisé, alors qu'actuellement le financement n'est pas vraiment assuré. La première année d'opération, on n'a pas rencontré les objectifs qui étaient anticipés, et la deuxième ne rencontrera pas ? au mieux, ce que nous ont dit les promoteurs ? les bénéfices qu'ils anticipaient pour leur deunième année, qui est l'année 1993 d'opération, de sorte que, lorsque les difficultés... On ne sait pas l'avenir. S'il y a des difficultés ? ce que je ne souhaite pas; au contraire, je souhaite le plus grand succès possible ? si des difficultés arrivent, bien là, on se demandera pourquoi, à ce moment-là, les organismes ou les représentants, dont la seule tâche devait être de préserver les gens, de protéger les citoyens, qui, eux, ne sont pas là, mais qui sont embarqués sans même le savoir, et qui, un jour, auront leur mot à dire, lorsqu'il faudra verser de l'argent et qu'il faudra trouver l'argent nécessaire, qui est considérable, et qui, là, à ce moment-là, pourront manifester leur opinion en demandant que le règlement d'emprunt soit passé au référendum. Là, les citoyens se retrouveront devant une réalité, avec des factures à payer. Si les citoyens se disent, à ce moment-là: Bien nous, on n'a pas été dans le coup, au point de départ, on ne veut pas payer ces factures-là. Qu'est-ce qui va arriver au projet? Qu'est-ce qui va arriver au projet, d'autant plus que, si le projet marche difficilement, à plus forte raison, les citoyens ne voudront pas continuer. S'ils rencontrent des difficultés, ils ne voudront pas continuer le financement et voudront que leur municipalité continue le financement.

M. le Président, je sais que vous montrez l'heure qui approche, mais comme mon droit de parole n'est pas épuisé, je préfère vous demander l'ajournement du débat, pour pouvoir poursuivre plus tard le droit de parole, pour que le droit de parole de l'Opposition soit maintenu pour la prolongation de ce débat, plus tard.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous demandez l'ajournement du débat. Est-ce que cette motion d'ajournement du débat est adoptée?

M. Bélisle: M. le Président, je dois comprendre, de la part du député de Lévis, qu'il veut reprendre à 20 heures? C'est bien ça?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Ça veut dire que ce sera à vous, M. le leader, de décider si, à 20 heures, vous reprenez avec ce débat-là.

M. Bélisle: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui. Alors, la motion d'ajournement du débat est adoptée. Il est, effectivement, presque 18 heures, et je suspends donc les travaux jusqu'à 20 heures.

M. Bélisle: À titre d'information, M. le Président, pour le député de Lévis...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le député.

M. Bélisle: ...pour lui permettre d'agencer sa cé-dule, à 20 heures, nous reprendrons avec le même débat.

M. Garon: Pardon?

M. Bélisle: À 20 heures, nous reprendrons avec le même sujet.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, les travaux de l'Assemblée sont suspendus jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise à 20 h 12)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si vous voulez prendre place. Je vous remercie.

Nous poursuivons le débat sur la motion de M. le député de Hull proposant l'adoption du principe du projet de loi 244, Loi concernant la compagnie de chemin de fer de l'Outaouais. Je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant, M. le député de Jonquière.

M. Francis Dufour M. Dufour: Oui, merci, M. le Président. Je tenais

à intervenir sur ce projet de loi qui a subi beaucoup de changements à partir de sa conception jusqu'à la prise en considération ou presque jusqu'à l'adoption de ce projet.

Il est sûr que, durant l'étude de ce projet, nous avons constaté que le gouvernement du Québec est en train d'établir une politique qui est nouvelle, qui va à rencontre un peu de la volonté des municipalités qui nous disent toujours, régulièrement: On n'a pas de revenus, on n'a pas suffisamment de revenus. Et, dans le cas qui nous préoccupe, donc, dans ce projet de loi 244, 3 municipalités se sont unies avec l'entreprise privée pour mettre sur pied un train à caractère touristique. Ce que les municipalités peuvent retirer de ce projet, c'est d'abord un renom avec un produit nouveau qui permet à la ville de Hull, à Chelsea et La Pêche d'avoir leur nom dans un dépliant touristique. Ça leur permet de penser faire compétition avec la région d'Ot-tawa-Carleton au point de vue des activités touristiques. Il n'y a pas d'intérêt monétaire particulier à l'effet que ce train va amener des montants d'argent intéressants qui vont permettre aux municipalités d'avoir plus d'argent dans leurs poches. C'est vraiment l'intérêt général. Les gouvernements supérieurs ont investi quelque peu d'argent dans le projet, mais pas suffisamment pour justifier une mise de fonds aussi considérable.

Donc, c'est un peu le phénomène qu'on vit actuellement: les municipalités prennent le relais des gouvernements, puisque ces mêmes gouvernements n'ont pas réussi à donner suffisamment de vigueur à l'économie pour la création d'emplois. Donc, c'est un constat, au départ, d'une faillite gouvernementale concernant la création d'emplois.

Deuxième phénomène qu'on a constaté, et là c'est un peu spécial, c'est que, à travers cette démarche, différents intervenants, en s'impliquant, ont essayé de nous faire la preuve que les actions entreprises étaient les seules susceptibles de produire ou de créer cet achalandage ou cette attraction touristique. Et l'Opposition a été excessivement vigilante concernant ce projet de loi. Pendant une journée, on a essayé d'obtenir certains chiffres, certains renseignements. Et, après une journée de débat, même si c'était la volonté politique du ministre des Transports et même si c'était la politique de différents intervenants, même s'il n'y avait pas de contestation, l'Opposition a joué son rôle de chien de garde des deniers publics, ce qui a eu pour effet, à la fin de la journée, que le projet de loi a été retourné sine die, mais avec une commande bien précise de la part de l'Opposition qui exigeait d'avoir les états financiers de la corporation, d'avoir les règlements d'emprunt de ces mêmes municipalités et, en même temps, l'état réel de la situation.

Donc, ça a créé un certain remous et une certaine déception puisqu'on avait fixé comme échéancier le 1er mai, si mon souvenir est exact. Et le fait que le projet de loi n'a pas été accepté dans la même journée, ça créait une certaine difficulté puisqu'il y avait différents intervenants qui étaient en négociations, dont le CN, qui n'est pas le moindre, mais qui avait des intérêts très forts et qui avait des exigences très fortes pour que ce dossier se termine au plus vite. Ça a causé des émois et une certaine déception de la part des intervenants, ce qui faisait dire au député de Hull ? c'est ça qui m'a donné un peu le goût d'intervenir ? que l'Opposition avait posé des questions plus ou moins pertinentes, qu'on avait un peu, en fait, niaise le projet. Mais ça, j'ai trouvé ça malheureux; j'ai trouvé ça malheureux parce que ce sont des choses qui ne se disent pas. D'abord, si on n'avait pas été justifiés de le faire, on se serait tenus tranquilles. Je ne pense pas que l'Opposition aurait été aussi mesquine et aussi méchante.

Mais ce n'est pas parce qu'un projet vient de la région de l'Outaouais que, forcément, il doit recevoir notre aval, puis notre accord immédiatement. Là comme ailleurs, on a le droit de poser des questions, et on l'a fait, on ne s'en est pas privé. Et heureusement qu'on l'a fait, parce que, à la deuxième reprise du projet de loi, j'ai eu l'occasion, bien sûr, de considérer ou de voir les échanges qui ont eu lieu avec le porte-parole de l'Opposition, le député de Lévis, concernant le projet de loi. Il avait en main, à ce moment-là, certains dossiers que, nous, comme parlementaires, on avait exigés. Que ça a été difficile d'avoir les chiffres! Que ça a été difficile de faire dire les choses qu'il était normal qu'on dise, comme si on avait joué au plus fin pendant... Je n'ai pas regardé le nombre d'heures que la commission parlementaire a siégé. Ce que je peux vous dire, c'est que le compte rendu de ces discussions a été très ardu et très long.

Le député de Lévis a fait un travail, à mon point de vue, extraordinaire, un travail de parlementaire aguerri, qui a fait qu'on a fini par savoir l'état réel du dossier. D'abord, les coûts; on a su aussi de quelle façon les municipalités s'étaient engagées et quelle était la nature des engagements des différents intervenants. Tout ça, c'était le minimum que nous pouvions exiger. Mais ce n'est pas parce que les intervenants de la région de l'Outaouais avaient certaines considérations pratiques à l'effet que c'était un dossier urgent, que c'était un dossier qu'on devait régler parce que c'était un dossier important pour toute cette région-là que, nous, on devait succomber à cette tentation de ne pas faire notre travail. (20 h 20)

On l'a fait, et ça a donné le résultat que l'Opposition a pu se rendre à terme dans l'étude de ce dossier qui est unique au Québec. C'est quelque chose de nouveau, M. le Président, que des organismes gouvernementaux municipaux s'impliquent aussi largement et aussi coûteusement dans des programmes de promotion touristique qui, même avec la meilleure considération du monde, ne sont pas voués à un succès certain sans qu'il y ait aucunement de risque. Il faut bien s'entendre là-dessus. Même si c'est un projet ou une attraction intéressante, ce n'est pas nécessairement rentable. Et, parce que c'est de l'argent qui provient de l'administration publique, on n'a pas le droit d'en faire ce qu'on veut. Alors, les questions qu'on a posées, on s'en réjouit et

on trouve que c'est normal que ça ait pris le temps que ça a pris parce qu'il y avait des éléments ou des décisions qui ont été prises où on n'est pas sûrs que tout avait été fait selon les normes.

Mais, vous voyez, il y a d'autres considérations qu'on pourrait apporter, puisqu'on a vu d'autres cas où le gouvernement ? je disais que le gouvernement se désengageait de plus en plus ? ne voyant rien de sûr, rien de concret, rien de réaliste, accepte quand même que les municipalités s'endettent pour faire des projets, pour signer des projets pour créer de l'emploi. Voyez-vous, il y a, là, quelque chose de pas sain dans les administrations publiques actuellement, et le gouvernement donne un mauvais signal. Tantôt, il dit aux municipalités: Vous pouvez emprunter pour faire du développement, c'est à vos risques. On croit relativement au succès du projet. Dans d'autres cas, dans le cas de Port-Cartier, le gouvernement, par la voix de son ministre, dit: On ne croit pas du tout au projet, mais on permet pareil aux municipalités de s'endetter. Voilà 2 attitudes qui sont difficiles à comprendre et à concilier, et je souhaite, un jour, M. le Président, que le gouvernement du Québec donne des signaux beaucoup plus clairs aux municipalités en ce qui concerne l'administration publique.

Voilà les quelques remarques que j'avais à faire concernant ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Jonquière, de votre intervention.

Mise aux voix

Le principe du projet de loi 244, Loi concernant la compagnie de chemin de fer de l'Outaouais, est-il adopté?

Adopté.

Adoption

M. le député de Hull propose l'adoption du projet de loi 244, Loi concernant la compagnie de chemin de fer de l'Outaouais.

M. le député de Hull.

M. Robert LeSage

M. LeSage: Merci, M. le Président. Alors, je suis heureux que ce projet de loi va finalement trouver son adoption, pour permettre aux municipalités de Hull, Chelsea et La Pêche de développer leur essor économique avec ce train touristique.

M. le Président, vous me permettrez de reprendre certains propos du député de Lévis, cet après-midi, de même que ceux du député de Jonquière, et je serai bref. Le député de Lévis, cet après-midi, nous disait que tout n'était pas attaché dans le projet du train touristique. Il faisait allusion au fait que nous devions louer encore une partie du chemin de fer. Bien sûr, M. le Président.

C'est pour ça qu'on a adopté le projet de loi, pour permettre qu'on ait un statut de chemin de fer et que la compagnie en question puisse circuler sur le 1,9 km. C'était ça, l'objet du règlement, puis on va continuer à le louer. Les villes, à ce que je sache, n'ont pas le pouvoir d'exproprier un chemin de fer; alors, il faut le louer.

On s'inquiète parce que c'est la première fois qu'on apporte un projet semblable. M. le Président, moi, là, je peux comprendre pourquoi le député de Lévis a dit, cet après-midi, qu'il était pour voter contre le projet de loi. Mon gouvernement, celui que je représente avec mes collègues et les ministres, écoute les gens du municipal, écoute les gens du milieu. Il nous disait, le député de Lévis, que les gens de l'Outaouais n'avaient pas été consultés sur ce dossier. M. le Président, c'était la première priorité «priorisée» par le sommet socio-économique, le petit train de Hull-Wakefield. Alors, qu'on ne vienne pas nous dire que les intervenants, dans le sommet socio-économique, qui représentent tout le milieu, n'ont pas été consultés.

Là, le député de Jonquière vient de nous dire: C'est un nouveau produit. Bien voyons! S'il connaissait un peu l'Outaouais, M. le Président, il conviendrait avec moi que ce n'est pas un produit nouveau; il existait avant. La municipalité de Hull et les autres municipalités s'en sont portées acquéreurs pour redémarrer ce produit touristique, pour faire en sorte que les touristes qui viennent à Ottawa ? je vous l'ai dit, cet après-midi, ilyena3000000à4000 000 ? puissent venir de ce côté-ci, au Québec, dépenser de l'argent, stimuler l'économie.

Ce qu'ils nous disent, les députés du Parti québécois, et ce qu'ils disent aux maires ou aux conseillers et conseillères du Québec: Ne soyez pas innovateurs, ne soyez pas entrepreneurs. Puis il nous l'a dit, cet après-midi: Eux autres, là, ils devraient s'occuper, puis je vais le répéter, des rues, des services, égouts, aqueduc et des vidanges. M. le Président, mon gouvernement a une plus haute considération des conseils municipaux au Québec et mon gouvernement sera toujours là et prêt à écouter n'importe quel conseil municipal au Québec pour discuter avec lui de nouveaux projets qui pourraient stimuler l'économie au Québec, puis j'en suis très fier. Je vous remercie, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur cette motion d'adoption? Il n'y a pas d'autres intervenants.

Mise aux voix

M. le député de Hull propose l'adoption du projet de loi 244, Loi concernant la compagnie de chemin de fer de l'Outaouais. Est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Oui, M. le Président, l'article 24, s'il vous plaît.

Projet de loi 83 Adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 24, Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science propose l'adoption du projet de loi 83, Loi sur la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial et modifiant certaines dispositions législatives.

Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, et de l'Éducation.

Mme Lucienne Robillard

Mme Robillard: M. le Président, à maintes reprises au cours de mon mandat comme ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, j'ai souligné l'importance primordiale de l'évaluation dans l'action menée en enseignement collégial, la désignant même comme ma priorité de l'année 1991-1992. L'enjeu m'apparais-sait évident: nous devions démontrer au vu et au su de tous que les programmes que nous dispensions étaient solides et adéquats, et que les diplômes de l'enseignement collégial que nous décernions étaient pleinement fiables.

Le présent débat sur la motion d'adoption du projet de loi 83, Loi sur la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial et modifiant certaines dispositions législatives, me fournit l'occasion de témoigner de la maturité de l'ensemble des partenaires du milieu collégial: le Conseil des collèges, le Conseil supérieur de l'éducation, les collèges eux-mêmes, les universités, les milieux de l'entreprise, les associations étudiantes et d'autres qui, très massivement, ont recommandé au cours du débat public récent que nous instaurions un dispositif d'évaluation rigoureux et crédible au collégial, notamment en créant un organisme externe d'évaluation.

On se rappellera, M. le Président, que, lors de la création des cégeps en 1967, nous avions fait des choix de systèmes difficiles et risqués, mais aussi sains et exigeants. Il s'agissait de sortir des limites pédagogiques et sociales d'un mode d'évaluation trop axé sur les quelques jours de bachotage et d'examens uniformes que plusieurs d'entre nous avions connus à l'époque. Nous voulions responsabiliser les établissements et rapprocher l'évaluation de l'ensemble de la démarche d'apprentissage des étudiants. Nous avions quand même tenu à ce que les diplômes collégiaux soient des diplômes d'État et que les programmes d'études et l'ensemble des dispositions du régime pédagogique soient aussi sous la responsabilité du ministère.

En 1979, constatant que le défi n'était pas pleinement relevé, nous avons créé le Conseil des collèges avec une commission d'évaluation, chargée de faire l'examen des politiques institutionnelles d'évaluation des apprentissages et d'offrir des services d'évaluation. Les collèges furent obligés d'établir de telles politiques institutionnelles d'évaluation. Si l'on reconnaît que la création du Conseil des collèges et de sa commission d'évaluation ont permis des progrès importants, on admet aussi que ces progrès, aujourd'hui, plafonnent et qu'un mécanisme plus rigoureux s'impose maintenant. (20 h 30)

II faut que cessent les perplexités et les doutes dans l'opinion publique qui a manifesté beaucoup d'intérêt pour toutes sortes d'évaluations et de classements, malgré des méthodologies parfois très douteuses. Des chiffres inquiétants concernant les taux de diplomation et la durée des études ont circulé et semé l'inquiétude dans la population, qui a souhaité clairement des actions énergiques et appropriées en ce domaine. On veut pouvoir compter sur des collèges aptes à répondre aux besoins de formation et aptes à répondre de la qualité de leur enseignement.

Sur cette question, les parlementaires et les observateurs ont été à même de constater la nette convergence des positions présentées et débattues au cours des travaux de la commission de l'éducation...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée de Taillon. Question de règlement?

Mme Marois: Oui, s'il vous plaît, M. le Président, je pense que ce sujet est tellement important qu'il serait utile qu'il y ait quorum en cette Assemblée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, à votre demande, Mme la députée, je vais vérifier, et qu'on appelle les députés. (20 h 31 ?20 h 35)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre place. Nous poursuivons l'étude en vue de l'adoption du projet de loi 83, Loi sur la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial et modifiant certaines dispositions législatives, et je cède la parole à Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science et je lui permets de poursuivre son intervention. Mme la ministre.

Mme Robillard: Je disais donc, M. le Président, que sur cette question, les parlementaires et les observateurs ont été à même de constater la nette convergence des positions présentées et débattues au cours des travaux de la commission de l'éducation sur l'avenir de l'enseignement collégial. Le thème de l'évaluation a figuré parmi les thèmes les plus abondamment abordés dans les mémoires et lors des audiences publiques de l'automne 1992, et celles plus récentes du mois de mai dernier.

La visée de fond du renouveau proposé le 6 avril dernier découle directement des consensus exprimés lors de ces commissions parlementaires. Il s'agit, dans un

contexte mondial de plus en plus compétitif, d'assurer aux jeunes et à l'ensemble de la population du Québec un enseignement collégial d'un calibre et d'une qualité qui leur permette de se mesurer aux meilleurs standards de compétence. Le projet gouvernemental propose que cet objectif soit atteint par un ensemble de mesures axées sur les 4 grandes cibles suivantes: un nouveau défi d'accessibilité basé sur la réussite des études; des programmes d'études cohérents, exigeants et adaptés aux besoins; des responsabilités académiques accrues pour les établissements et, corrélativement, un dispositif d'évaluation plus rigoureux et des partenariats renouvelés et resserrés.

Je m'attarderai, M. le Président, sur la troisième cible, et, ce faisant, sur l'institution d'une Commission d'évaluation de l'enseignement collégial. Il s'agit d'un ajustement majeur d'un dispositif à 3 partenaires, à savoir les collèges, le ministère et le Conseil des collèges, qui prévalait jusqu'à maintenant. Les dispositions contenues dans le projet de loi concernent essentiellement 3 objets de décision: premièrement, le statut et le mandat de la nouvelle Commission; deuxièmement, les impacts sur la fonction consultative en enseignement collégial; et, troisièmement, la consolidation, au sein du Conseil supérieur de l'éducation, de l'ensemble de la fonction consultative en éducation.

En effet, le statut proposé pour la nouvelle Commission rompt explicitement avec la structure familière d'un groupe-conseil de type représentatif. Il confie plutôt l'organisme à 3 commissaires, nommés par le gouvernement sur la recommandation du ministre responsable, et clairement mandatés pour évaluer, c'est-à-dire porter un jugement formel de qualité sur l'exercice des responsabilités académiques des collèges. La Commission exercera ainsi un pouvoir déclaratoire de caractère essentiellement public assorti d'un pouvoir de recommandation à l'adresse des collèges concernant des changements à des politiques institutionnelles ou à des manières de dispenser des programmes; un pouvoir de recommandation aussi, à l'adresse du ministre, pour des changements aux objectifs mêmes de certains programmes, et une délégation possible du pouvoir de décerner le diplôme d'État.

Ainsi, la Commission aura pour mission d'évaluer dans chacun des collèges d'enseignement général et professionnel et dans chacun des établissements d'enseignement public ou privé auxquels s'applique le régime des études collégiales, les politiques institutionnelles d'évaluation des apprentissages, y compris les procédures de sanction des études et la mise en application effective de ces politiques et procédures, les politiques institutionnelles d'évaluation relatives aux programmes d'études et la mise en application effective de ces politiques, la mise en oeuvre des programmes d'études établis par le ministre, compte tenu des objectifs et des standards qui leur sont assignés, et, enfin, les objectifs, les standards et la mise en oeuvre des programmes d'études établis par le collège ou l'établissement, compte tenu des besoins qu'ils ont pour fonction de satisfaire.

Comme je le mentionnais précédemment, la création de la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial oblige à réaménager l'exercice de la fonction consultative en enseignement collégial, plus spécifiquement, à abolir le Conseil des collèges et le Conseil des universités pour consolider au sein du Conseil supérieur de l'éducation l'ensemble de la fonction consultative en éducation.

Ainsi, M. le Président, nous reviendrons à la situation qui a déjà prévalu alors que le Conseil supérieur de l'éducation était le seul organisme consultatif pour tous les ordres d'enseignement. Comme plusieurs intervenants l'ont souligné, je crois que cela contribuera à nous donner une vision plus globale du système d'éducation au Québec. Je citerai même un extrait du mémoire de mai dernier de la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec qui mentionnait: Le regroupement des diverses fonctions consultatives pourrait favoriser la coordination interordres.

Je voudrais profiter de cette occasion, M. le Président, pour remercier toutes celles et tous ceux qui, à un moment ou à un autre, ont dirigé ou travaillé au Conseil des collèges ou au Conseil des universités. Je tiens à leur rendre hommage pour avoir permis à ces deux organismes consultatifs de jouer un rôle important dans l'évolution du système québécois d'enseignement supérieur. Par des avis éclairés, ils ont souvent influencé profondément les décisions ministérielles et même gouvernementales.

Je tiens à souligner l'excellente et la fructueuse collaboration que m'ont offerte, depuis mon entrée en fonction, en octobre 1990, l'actuelle présidente du Conseil des universités, Mme Christiane Quérido, et l'actuel président du Conseil des collèges, M. Yvon Morin, ainsi que leurs collaboratrices et collaborateurs. Merci à celles et ceux qui ont accepté de participer aux travaux des deux conseils. (20 h 40)

M. le Président, il serait inexact de croire que toute l'expertise, le talent et l'expérience de toutes ces personnes seront perdus. Il y aura continuité dans le renouveau, je vous l'assure, M. le Président. Tant la ministre que le gouvernement poseront, dans les prochaines semaines, des gestes qui concrétiseront cette volonté très ferme. Quand on sait, M. le Président, combien l'évaluation a été au centre névralgique de l'histoire des collèges depuis leurs débuts, combien elle a marqué ces tournants et ces moments de crise, on ne peut qu'estimer extrêmement significatif et prometteur l'accueil très ouvert et très large que reçoivent l'idée de pratiques plus serrées d'évaluation et celle de la création de la Commission de l'évaluation.

Il faut voir là, M. le Président, l'expression d'une assurance nouvelle, celle du réalisme et de îa maturité et d'une nette volonté de répondre à une attente sociale de plus en plus pressante. Les collèges en tireront, j'en suis convaincue, une nouvelle crédibilité et une image plus forte de compétence et de valeur. Faut-il rappeler que, lorsque j'utilise l'expression «les collèges», j'entends,

bien évidemment, les populations étudiantes, les membres des personnels et les gestionnaires, des personnes engagées ensemble autour de buts communs, ayant une dynamique et une culture qui révèlent un projet éducatif commun.

Le projet du collège québécois du XXIe siècle, le vaste chantier qui commence maintenant sera le projet de ces personnes d'abord, le projet des collèges. Nous devons nous faire un devoir et un point d'honneur, M. le Président, de traduire en action le momentum sans précédent qui a été créé par la vaste réflexion collective des derniers mois, et le projet de loi qui est devant nous, M. le Président, est une des pièces essentielles à ce renouveau collégial. C'est ce que fait mon gouvernement en créant cette Commission de l'évaluation de l'enseignement collégial par le projet de loi 83 dont nous sommes très fiers puisqu'il s'agit là de la disposition la plus importante de tout le projet du renouveau, une assise fondamentale à ce renouveau collégial, un outil essentiel basé sur la qualité publiquement reconnu.

Cette décision, M. le Président, nous la prenons pour les jeunes du Québec en particulier. Nous la prenons pour ces jeunes, nous la prenons pour celles et ceux qui sont venus nous demander, avec force et vigueur, une formation collégiale de qualité, plus exigeante et surtout, plus crédible. Et, dans ce sens-là, la Commission de l'évaluation aidera sûrement à rehausser la qualité des programmes d'études en enseignement collégial.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, Mme la ministre de l'Enseignement supérieur.

Sur ce même sujet, je reconnais M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition officielle.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Alors, M. le Président, on le sait ? la ministre le rappelait à juste titre ? le projet de loi 83 vise essentiellement 2 objectifs. D'abord, comme son nom l'indique, il s'agit de mettre en place, de créer une commission d'évaluation qui aura pour fonction et pour rôle d'évaluer, pour chaque établissement d'enseignement collégial, les politiques institutionnelles d'évaluation des apprentissages, mais également celles d'évaluation relatives aux programmes d'études et la mise en oeuvre, aussi, des programmes d'études. En même temps, on le sait, on abolit 2 conseils consultatifs qui existaient depuis un bon nombre d'années, celui des collèges et celui des universités, et on transfère une partie seulement des fonctions de ces 2 conseils au Conseil supérieur de l'éducation.

Je rappelle, de nouveau, que nous avons voté en faveur du principe du projet de loi 83. Donc, nous étions d'accord et nous le sommes toujours pour mettre en place une commission d'évaluation et faire en sorte qu'il y ait ce que certains ont appelé un regard externe qui soit porté sur les apprentissages et les programmes d'études du réseau collégial. Nous aurions souhaité, cependant, voir corrigées, par le biais de modifications ou d'amendements, certaines lacunes du projet de loi, lors de l'étude détaillée. Ces lacunes ont trait, d'abord, à la composition de cette Commission, de même qu'aux mandats qui lui sont confiés. On sait que le nombre de membres de la Commission, qui est de 3 commissaires, aurait eu, selon nous ? plusieurs intervenants l'ont également signalé ? avantage à être augmenté, à être accru, afin de favoriser une pluralité des opinions ? c'était le motif invoqué par plusieurs ? et aussi une meilleure qualité des débats, et éviter, possiblement, de tomber dans le piège de l'arbitraire. Le gouvernement s'en est tenu aux 3 commissaires, tel que prévu à l'origine.

Une autre lacune également. On aurait souhaité que la nomination des commissaires se fasse après consultation des principaux groupes concernés par l'enseignement collégial. Ce n'est pas une innovation en soi, ça existe dans beaucoup de cas où la nomination de membres de commissions ou de régies ou d'organismes-conseils se fait après avoir procédé préalablement à une consultation du milieu concerné ou des principaux intervenants du milieu concerné. Plusieurs auraient souhaité que la nomination de ces commissaires soit précédée d'une consultation auprès des groupes concernés par l'enseignement collégial. Ça aurait permis, à ce moment-là, au gouvernement de nommer des personnes sans doute plus crédibles et aussi, évidemment, plus agréées par le milieu. Ça aussi, ça a été refusé.

Nous avons également souhaité, à la suite de plusieurs intervenants... La plupart ont réclamé que soit élargi le mandat de l'organisme, le mandat de la Commission d'évaluation pour que lui soit confié, également, le mandat de prendre en compte, dans ses évaluations, l'effet qu'ont les politiques, les règlements, les directives et les autres mesures administratives du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science sur la gestion des programmes dans le réseau, dans les collèges. Ça, quand on lit le rapport du Conseil des collèges à ce sujet-là, ça faisait partie des objets d'évaluation de la Commission comme proposition du Conseil des collèges. Il fallait non seulement évaluer les apprentissages et les programmes d'études, mais aussi, il fallait que l'évaluation soit faite également de ce qu'on appelle les grands encadrements nationaux, c'est-à-dire les politiques, les directives et les règlements du ministère, pour ne pas que le ministère lui-même échappe à l'évaluation. Ce n'est pas normal. Ce n'est pas normal qu'on évalue dans les collèges les apprentissages et les programmes d'études, et qu'au ministère les politiques, les directives et les règlements échappent à l'évaluation, soient soustraits à l'évaluation.

Nous avons souhaité, avec plusieurs également, que soit éliminée la possibilité donnée à la Commission d'évaluation de recommander au ministre d'habiliter un établissement d'enseignement à décerner le diplôme d'études collégiales. C'est très controversé dans le milieu; c'est très controversé. Il y a pas mal plus d'op-

position dans le milieu qu'il n'y a d'acceptation de cette mesure, pour une raison très simple: la plupart sont venus nous dire que l'enseignement collégial est constitué en réseau. Il y a des établissements, mais c'est un réseau, et le diplôme qui est décerné dans ce réseau est un diplôme d'État, donc, décerné par la ministre de l'Enseignement supérieur.

Là, le projet de loi prévoit que la Commission pourrait recommander à la ministre, à la suite de l'évaluation d'un établissement collégial, d'autoriser tel ou tel collège à décerner le diplôme. Alors, ça créerait une sorte de tableau d'honneur, ça créerait deux classes de collèges, les bons collèges, les collèges qui ont le privilège de décerner des diplômes, parce qu'ils se sont bien classés, parce qu'ils ont été bien évalués par la Commission, et puis les collèges moins bons, les collèges de deuxième classe, qui continueront de voir leurs diplômes décernés par la ministre. (20 h 50)

On devine un peu ce que ça va créer. Ça va créer une sorte de compétition malsaine entre les collèges, et les étudiants nous faisaient remarquer que, lorsque l'étudiant aura terminé ses études collégiales, aura en main son diplôme, ça pourra lui créer des difficultés lorsqu'il sera à la recherche de l'emploi. Il pourra se présenter devant une entreprise, nous disaient les étudiants, il va se présenter devant une entreprise, et le réflexe premier de l'entreprise, ça va être de regarder dans le tiroir, là, la liste des collèges, les collèges qui ont été bien cotés, qui ont la médaille d'honneur, qui peuvent décerner les diplômes, et ceux qui n'ont pas ce privilège-là, pour voir si l'étudiant vient d'un des collèges de la première ou de la deuxième classe.

C'est comme ça que ça va fonctionner, et c'est évident, nous disaient les étudiants, qu'à partir du moment où on crée ces deux classes de collèges, c'est clair que celui qui vient d'un collège de la deuxième classe va avoir moins de chances de se trouver un emploi sur le marché du travail. Il va avoir moins de chances, c'est évident. Ça tombe sous le sens, c'est clair. C'est pour ça que cette mesure-là n'aurait pas dû apparaître, qu'on aurait dû la retirer du projet de loi sur la Commission d'évaluation. Malheureusement, la ministre n'a pas voulu entendre raison. Elle a maintenu cette mesure et cette possibilité, et on va se retrouver, au fil des ans, avec un réseau collégial à deux classes, à deux classes de cégeps, ce qui, à mon avis, ne sera pas très sain dans le réseau.

D'autre part, on abolit deux conseils, le Conseil des collèges et le Conseil des universités. On aurait souhaité, nous et plusieurs intervenants aussi, que, par cette abolition, on transfère totalement et complètement les mandats, les fonctions des conseils qu'on abolit, qu'on supprime. Ça n'a pas été le cas. Là, le gouvernement en a profité, a profité de l'opération, a profité de la mise à mort de deux Conseils, celui des universités et celui des collèges, pour réduire les mandats et les fonctions du Conseil supérieur de l'éducation dans le domaine de l'enseignement collégial et de l'enseignement universitaire.

Plusieurs objets d'avis actuellement sollicités auprès du Conseil des collèges et du Conseil des universités par la ministre ne feront plus partie des mandats et des fonctions du Conseil supérieur de l'éducation élargi. Je pense, notamment, aux avis touchant les projets de création de nouveaux collèges et universités ou de nouveaux programmes d'études établis par la ministre, le plan de répartition par collège des programmes, les politiques d'allocation entre les collèges, de même qu'entre les universités, la répartition du montant global des crédits annuels accordés pour l'enseignement collégial, l'enseignement universitaire, tout ce qui concerne le budget et la répartition budgétaire dans les deux réseaux, tout ça, le plan, les règles de répartition entre les collèges et les universités des budgets d'investissement, tout ça a été enlevé. C'étaient des mandats, des fonctions, et du Conseil des collèges, et du Conseil des universités. Dans le transfert, ça disparaît. Alors, le Conseil supérieur de l'éducation, qui est le seul conseil aviseur qui va rester, qui va subsister, verra cependant ses fonctions réduites, diminuées.

Alors, M. le Président, c'étaient là les lacunes qu'on avait signalées à l'occasion de l'étude détaillée avec plusieurs intervenants qui sont venus témoigner, à l'occasion des audiences particulières. Malheureusement, il nous faut constater que, pour l'essentiel, ces lacunes n'ont pas été corrigées par des amendements apportés par la ministre. La ministre s'en est tenue, pour l'essentiel, à son projet de loi original. Elle a apporté des amendements de détail, des amendements peu substantiels, de sorte que nous maintenons notre accord au projet de loi tout en regrettant, cependant, que la ministre n'ait pas entendu, n'ait pas donné suite à nos requêtes et à celles, également, de plusieurs acteurs du milieu collégial.

Nous continuons, donc, d'appuyer le projet de loi parce que, pour l'essentiel, nous sommes d'accord avec la mise en place d'une telle institution d'évaluation externe, donc, une institution indépendante, crédible également, qui aura pour effet, je pense, au fur et à mesure qu'elle va fonctionner, opérer, ça aura pour effet, nous en sommes persuadés, même s'il y a toujours ces lacunes que j'ai signalées tout à l'heure, d'améliorer la qualité de l'enseignement collégial et surtout ? une question un peu symbolique dans tout ça ? de lever des doutes qui planent sur la qualité de la formation collégiale.

Parce que c'est le cas. Il ne faut pas être aveugle, dans la population, dans la société québécoise, il y a beaucoup de monde qui met en doute, même remet en question la qualité de la formation dans les établissements collégiaux, qui n'est pas convaincu que la formation qu'on reçoit dans nos collèges est une formation de grande qualité et que, par conséquent, les diplômes qu'on y décerne à la fin sont des diplômes de valeur incontestable. Il y a ces doutes qui persistent. Et je pense qu'un des bons moyens de lever ces doutes et de faire en sorte que les Québécois et les Québécoises

retrouvent une confiance à l'égard de la qualité de la formation qui est dispensée dans les établissements collégiaux, c'est justement la mise en place d'une commission d'évaluation indépendante, externe, qui va, je pense, faire en sorte que l'on va de nouveau être convaincu que la formation qui est dispensée dans nos collèges est une formation de qualité.

Remarquez bien, il ne faut pas non plus dramatiser puis en faire une tragédie, ce l'est déjà. La formation qui est dispensée dans nos collèges est quand même une formation de bonne qualité. On ne peut pas dire que c'est la perfection, mais c'est quand même une formation de bonne qualité. Cependant, la Commission d'évaluation... La mise en place de politiques institutionnelles d'évaluation des apprentissages et des programmes d'études dans chacun des établissements collégiaux, avec ce regard externe qui va venir de la Commission d'évaluation, tout cela va faire en sorte, je pense, que les doutes sur la qualité de la formation vont disparaître et qu'on va se retrouver, finalement, au bout du compte ? je l'espère; du moins, c'est l'objectif du projet de loi, et c'est pour cette raison qu'on est d'accord avec le projet de loi ? avec une formation collégiale de meilleure qualité et un Diplôme d'études collégiales de meilleure valeur. M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le député de Lac-Saint-Jean.

Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur ce sujet?

Mise aux voix

Est-ce que le projet de loi 83, Loi sur la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial et modifiant certaines dispositions législatives, est adopté?

M. Chevrette: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Oui, M. le Président. Nous en sommes maintenant rendus à l'article 23 de notre feuilleton.

Projet de loi 82 Adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 23, Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science propose l'adoption du projet de loi 82, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et d'autres dispositions législatives.

Alors, Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, je vous cède la parole.

Mme Lucienne Robillard Mme Robillard: Merci, M. le Président. M. le Président, c'est avec beaucoup de fierté et d'émotion que j'interviens aujourd'hui, comme ministre responsable de l'Enseignement supérieur et de la Science, à l'étape du débat sur la motion d'adoption du projet de loi 82, la Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel. Fierté, en effet, de présenter les résultats de la démarche gouvernementale qui fut initiée, vous vous en souviendrez, M. le Président, il y a plus d'un an, à l'Assemblée nationale, lors du discours inaugural de mars 1992. (21 heures)

On se souviendra qu'à l'occasion du 25e anniversaire de la réforme de l'enseignement collégial et de la création des premiers cégeps, le gouvernement a convenu de demander à la commission parlementaire de l'éducation de tenir une consultation générale sur l'avenir de l'enseignement collégial québécois. Il s'agissait d'instituer ainsi un large débat public sur l'ensemble des questions soulevées à propos de l'enseignement collégial, y compris sur l'opportunité même de le maintenir dans sa structure actuelle. Ce faisant, le gouvernement entendait renforcer significativement les actions d'évaluation conduites au cours des dernières années et favoriser la convergence de nombreuses opérations de réflexion envisagées à l'occasion de cet anniversaire. Il entendait aussi créer un vaste forum où puissent être traitées les questions touchant à la fois les besoins nouveaux de formation supérieure et les critiques, explicites ou diffuses, dont faisait l'objet l'enseignement collégial québécois.

Le gouvernement a voulu une discussion ouverte et libre, la moins polarisée possible par la confirmation ou le rejet d'une position gouvernementale préalablement exprimée. C'est pour cela qu'il s'est limité à définir, dans le libellé du mandat confié à la commission parlementaire, les grandes balises du débat. De concert avec les organismes concernés, il a cependant établi le calendrier de ses travaux de manière à mettre à profit les avis de 3 conseils consultatifs: d'abord, l'avis sur l'enseignement collégial de demain préparé par le Conseil des collèges et rendu public en mai 1992; ensuite, l'avis sur les objectifs et la structure de l'enseignement supérieur québécois, préparé par le Conseil supérieur de l'éducation à ma demande et rendu public en octobre 1992; et, enfin, l'avis sur les jeunes et l'enseignement collégial, préparé par le Conseil permanent de la jeunesse à la demande du premier ministre et rendu public en novembre 1992. Deux cent vingt-deux mémoires ont été soumis à cette commission parlementaire, qui a siégé du 4 novembre au 18 décembre 1992, tenant 105 heures d'audiences et accueillant 109 groupes et organismes. Une consultation qui a permis, M. le Président, de dégager des consensus clairs et de prendre des décisions qui ont été exposées dans le projet gouvernemental de renouveau dévoilé le 6 avril dernier.

Afin de permettre aux principaux groupes concernés ? une vingtaine environ ? de réagir à ces propositions gouvernementales, nous tenions, du 11 au 14 mai derniers, une seconde consultation, restreinte celle-là,

mais non moins significative puisqu'elle nous a permis d'apporter des bonifications substantielles au projet initial.

C'est donc avec beaucoup de fierté, M. le Président, que je constate que nous avons réussi à traiter de tout le dossier collégial au grand jour et à atteindre aujourd'hui l'étape de l'adoption finale par l'Assemblée nationale d'une pièce législative majeure à l'égard de cet ordre d'enseignement. Émotion aussi en raison du fait que nous arrivons au seuil d'une nouvelle ère de la vie des collèges au Québec, ces collèges qui occupent dans notre dispositif de formation, faut-il le rappeler, M. le Président, une place charnière des plus importantes, un centre névralgique du système d'éducation au Québec.

Au terme de ces 15 mois de réflexion, de dialogue et de travaux parlementaires, nous avons collectivement décidé de refaire le choix des collèges tout en leur apportant des changements en profondeur. Nous savons les collèges capables de ces changements, capables d'un partenariat renouvelé avec la société québécoise. Nous en sommes donc à une étape que je qualifie de déterminante pour l'avenir de l'enseignement collégial québécois. Sous le thème «Des collèges pour le Québec du XXIe siècle», le renouveau de l'enseignement collégial, rendu public le 6 avril dernier, nous confrontera tous à de nouveaux défis. Il s'agit essentiellement de bâtir, au Québec, une société formée de gens instruits, compétents, responsables et ouverts sur le monde. Oui, des défis importants nous attendent à partir de maintenant, mais il s'agit de défis que je nous crois capables collectivement de relever.

En adoptant le projet de loi 82, je mise avec grande confiance sur la capacité des collèges d'assumer des responsabilités plus déterminantes vis-à-vis de ce qui définit leur mission même, c'est-à-dire le projet de formation que constitue, pour les étudiants, les enseignants et les gestionnaires, chacun des programmes d'études et, à l'échelle de l'établissement, l'ensemble des programmes d'études.

Le renouveau n'indique pas d'autres voies plus essentielles de développement. Il réaffirme sans détour la mission de formation des collèges, et il y subordonne toutes les autres activités, si utiles et légitimes soient-elles. Il renforce, élargit et adapte les visées du fond commun de formation générale. Il entend en resserrer les contenus, la cohérence, l'équilibre, l'insertion dans chacun des programmes d'études. Il opte pour des approches axées sur l'exigence par le resserrement des conditions d'admission, par la confirmation du statut d'enseignement supérieur, par l'attention accordée aux standards, par l'alourdissement de certains programmes préuniversitaires, par le renforcement de pratiques d'évaluation, par l'instauration d'épreuves synthèses, par la création d'une commission externe d'évaluation. Il donne aux collèges des responsabilités plus immédiates dans la mise en oeuvre des programmes d'études, voire dans l'élaboration de programmes d'établissements. Il instaure même une dynamique permettant aux collèges d'assumer progressivement une responsabilité qui, en enseignement supérieur, est le symbole même de l'âge adulte académique: il s'agit du pouvoir éventuel de décerner eux-mêmes les diplômes d'études.

Il est clair, M. le Président, que lorsqu'il est ici question de collèges il est question des divers personnels qui y oeuvrent, de ces acteurs de première ligne qui sont directement interpellés par le renouveau de l'enseignement collégial. Un collège, c'est toujours, concrètement, des personnes, des équipes de personnes engagées ensemble autour de buts communs. Quand nous entendons reconnaître plus pleinement les responsabilités académiques des collèges, nous visons très directement les divers personnels qui auront à prendre en main ces responsabilités, que ce soit au sein du conseil d'administration, de la Commission des études, à l'accueil et à l'encadrement des étudiants, à l'évaluation des apprentissages, à la gestion des programmes d'études et, bien sûr, à l'enseignement. Des responsabilités de divers ordres, en somme, que vous me permettrez, M. le Président, de cerner davantage.

Il y a, bien sûr, les tâches de ce qu'on pourrait appeler une gestion académique renouvelée dans les collèges: la mise en place d'une commission des études forte, centrée sur les politiques d'évaluation et sur les programmes d'études; le développement de l'approche programme dans l'enseignement, et enfin l'encadrement des étudiants et des enseignants.

D'autres tâches ont trait au contenu même des enseignements: la participation à l'établissement des objectifs et des standards des programmes; la définition d'une proportion accrue des activités d'apprentissage; la présentation institutionnelle aux étudiantes et aux étudiants des programmes effectivement offerts dans l'établissement; l'élaboration d'épreuves synthèses dans les programmes d'études; l'élaboration ou la détermination des programmes d'établissement, et enfin l'enrichissement des politiques d'évaluation des programmes d'études dispensés.

D'autres tâches concernent l'organisation de la vie pédagogique elle-même, principalement tout ce qui concerne l'accueil, l'intégration et l'encadrement des étudiantes et des étudiants. D'autres, enfin, touchent à des partenariats qui sont appelés à se renforcer. On peut penser ici aux liens avec le monde du travail et les commissions scolaires en formation technique, avec les universités dans les projets conjoints en formation préuniversitaire, avec les autres collèges dans des collaborations nouvelles autour des diverses tâches du renouveau. Plus globalement, on peut penser aussi aux nouveaux rapports de transparence et d'imputabilité que les collèges seront amenés à entretenir avec une instance comme la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial, et, plus largement, avec l'ensemble de la collectivité. (21 h 10)

Le discours ambiant désigne ces tâches, ces responsabilités comme nouvelles et porteuses d'exigences nouvelles, voire nécessitant même des ressources nouvelles. Il y a effectivement, par rapport à ce qui a été pratiqué depuis 25 ans, une nouveauté que l'on serait

mal venu de minimiser ou de nier, en même temps qu'il faut bien nous dire, cependant, que ce sont là des responsabilités normales pour des établissements et des personnels ayant atteint la maturité et pleinement convaincus de pouvoir l'exercer. Les collèges privés et publics du Québec, qui ont parlé haut et fort d'autonomie institutionnelle, allant même jusqu'à réclamer le pouvoir de décerner eux-mêmes leurs diplômes, avaient sûrement pris la mesure de ces tâches et de leurs exigences; les universités et d'autres intervenants aussi, qui y ont vu la voie de développement la plus prometteuse pour l'amélioration de la qualité de la formation collégiale et le renforcement de son calibre et de sa reconnaissance.

Nouvelles, quant à leur intensité et quant à l'économie du système en place, ces tâches ne sont tout de même pas nouvelles quant à leur nature et à leur fondement. En effet, les collèges n'ont jamais été voués à autre chose qu'à la formation, aux études et à l'enseignement. Ils n'ont jamais eu d'autres raisons d'être que les étudiantes et les étudiants. Il n'est pas nouveau pour eux de mettre en oeuvre des programmes d'études et d'encadrer les étudiants avec des visées explicites de réussite, d'évaluer les apprentissages et d'en garantir la qualité. Ou encore d'être engagés dans un partenariat avec les entreprises, les universités et l'ensemble de leur communauté d'appartenance.

La nouveauté des tâches proposées s'inscrit donc dans une évidente continuité. Les divers personnels des collèges devront assumer cette plus grande autonomie dont il est question ici, assumer ces responsabilités plus déterminantes dont je parlais précédemment. Je n'entretiens aucun doute sur leur capacité à relever ces importants défis et sur le fait que le renouveau proposé devienne leur renouveau et, donc, le renouveau des collèges du Québec. J'ajouterai, M. le Président, que nous pouvons compter pour ce faire sur des personnels et des directions qui n'en sont plus à leurs débuts et dont les preuves ne sont plus à faire. Le travail déjà accompli est une source de fierté et un stimulant pour l'étape cruciale que nous devons entreprendre ensemble.

Le projet de loi 82, qui en est à l'étape de son adoption à l'Assemblée nationale, constitue un élément important, un dispositif législatif majeur qui permettra le virage vers l'excellence. Nous devons le réussir, ce virage, M. le Président, pour les jeunes du Québec et pour l'ensemble de la population du Québec.

Mes derniers mots, M. le Président, seront pour remercier les membres de la commission de l'éducation. D'abord, mon adjoint parlementaire et député de Sherbrooke, et mes collègues de la formation gouvernementale, la députée de Bourget, ceux de Charlevoix, de LaFontaine, de Rimouski, de Sauvé, de Verdun et de Vimont, les remercier d'abord pour leur préparation studieuse et leur participation active et assidue à l'ensemble de l'opération. Remercier aussi les porte-parole officiels de l'Opposition, celui d'Abitibi-Ouest, jusqu'en mars 1993, et de Lac-Saint-Jean, depuis 4 mois, et les membres aussi de l'Opposition, en particulier les députées de Terrebonne et des Chutes-de-la-Chaudière, pour leur volonté manifeste de dépasser les intérêts partisans et pour leur contribution à la discussion des questions de fond débattues ici depuis un an. Si l'adoption du principe du projet de loi 82 n'a pas été faite à l'unanimité en cette Chambre, M. le Président, il faut souligner que, lors de l'étude détaillée en commission, au-delà de 70 % des articles qu'il contient furent adoptés à l'unanimité.

Merci aussi, M. le Président, à la présidence de la commission de l'éducation, surtout personnifiée par la députée de Matane qui, avec tact et doigté, a su mener à bon port nos travaux en commission. Merci, également, à M. Christian Comeau et à l'équipe du secrétariat de la commission, à la Direction du Journal des débats et à la Direction de la radiotélévision des débats pour leur disponibilité et leur soutien compétent tout au long des travaux.

Un très grand merci sutout à toutes celles et à tous ceux, et ils sont très nombreux, M. le Président, qui ont déposé des mémoires et qui ont accepté nos invitations à venir présenter leurs points de vue et à en discuter avec nous en toute franchise et en grande lucidité. Un merci spécial aux groupes de jeunes étudiantes, étudiants et diplômés des collèges, qui nous ont constamment rappelé la raison d'être même de nos travaux et de tout ce qui se fait en enseignement collégial. Merci aussi aux directions et aux personnels des collèges, enfin, qui ont conduit des démarches majeures de réflexion, de remise en question, de prospective et d'engagement.

Merci à toutes celles et à tous ceux ? et ils sont largement répandus dans la population québécoise ? qui nous ont fait part de leur appui et de leurs attentes. Des appuis et des attentes auxquels, maintenant, M. le Président, nous avons à répondre.

Finalement, des remerciements particuliers à l'équipe du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, dirigée par M. Pierre Lucier, assisté de M. Jacques Lanoux, pour m'avoir secondée avec grande compétence tout au long de cette vaste et stimulante démarche.

M. le Président, l'heure est maintenant venue de passer à l'action et d'agir concrètement. Si l'avenir des sociétés se joue sur leur aptitude à relever le défi de la compétence et de la connaissance, nous aurons des collèges pour le Québec du XXIe siècle. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science. Je rappelle aux membres de cette assemblée que nous en sommes à l'adoption du projet de loi 82, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et d'autres dispositions législatives. Je cède la parole à M. le whip en chef de l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean. M. le député, vous avez la parole.

M. Jacques Brassard M. Brassard: Merci, M. le Président. Je ne vous

apprendrai rien en vous disant que nous avons voté contre le principe. Également, nous avons voté contre la prise en considération du rapport, et nous allons voter contre l'adoption du projet de loi 82. C'est clair que, quand on regarde le projet de loi, ça ne couvre pas toutes les propositions concernant ce que la ministre se plaît à appeler le renouveau de l'enseignement collégial. Il y a bien des éléments et il y a bien des dimensions de ces propositions de renouveau qui ne se retrouvent pas dans le projet de loi, qu'on retrouve plus précisément dans le projet de régime pédagogique. Toute la question de l'agencement des cours de formation générale ? le jeu de blocs, les trois blocs proposés par la ministre ? tout ça, ça ne se retrouve pas, ça n'apparaît d'aucune façon dans le projet de loi 82. C'est dans le projet de règlement du régime pédagogique, ce qui fait que, quelqu'un qui, à brûle-pourpoint, regarderait le projet de loi 82, et à qui on dirait: Voici, c'est le projet de réforme de l'enseignement collégial, bien, il serait un peu perdu, parce qu'il y a bien des éléments qui manquent.

Il y a quand même des éléments essentiels dans le projet de loi 82, et plusieurs avec lesquels nous avons exprimé notre désaccord le plus profond, parce que, pour nous, plusieurs des éléments de ce projet de loi, de même, d'ailleurs, que plusieurs des éléments du projet de règlement sur le régime des études collégiales, tout aussi important que le projet de loi, mais qui échappe à l'Assemblée nationale et qui échappe à la commission parlementaire, parce que ça ressort du pouvoir réglementaire du gouvernement... On a pu le regarder, on a pu en prendre connaissance, mais on n'a aucun pouvoir, comme Parlement, d'amender, de modifier ce projet de règlement sur les études collégiales. C'est un règlement. Donc, c'est le Conseil des ministres qui l'adopte. (21 h 20)

II y en a plusieurs des éléments de ce projet de règlement, cependant, qui sont pour nous inacceptables. Nous les avons maintes et maintes fois indiqués, signalés, identifiés, ces éléments à la fois du projet de loi et du projet de règlement, qui sont, pour nous, inacceptables, rejoignant en cela plusieurs intervenants du milieu collégial. Il ne faut pas s'imaginer que l'Opposition officielle est solitaire, est toute seule, isolée dans son coin. Pas du tout. Ce qu'on trouve inacceptable dans ce projet de loi là, on n'est pas tout seuls à le penser. Il y a plusieurs intervenants, et surtout plusieurs intervenants du milieu même de l'enseignement collégial, qui ont adopté le même point de vue, la même position. Comme je le disais, ça a déjà été maintes et maintes fois indiqué. Je me permets, cependant, de vous rappeler que plusieurs de ces irritants viennent du fait qu'il y a eu comme une espèce de dérapage qui s'est fait entre les consensus qui se sont dégagés à l'occasion de la commission parlementaire de l'automne et la législation, le projet de loi lui-même, de même que le projet de règlement sur les études collégiales, une espèce de distanciation ou de fossé qui s'est créé entre les consensus et la façon de les incarner ou de les concrétiser dans un projet de loi, dans une pièce législative.

Je me permets, de nouveau, de donner quelques exemples de ces dérapages par rapport aux consensus qui se sont dégagés. L'un des consensus, très net, qui faisait l'unanimité, c'était que tout le monde était d'accord pour dire qu'il fallait accroître et qu'il fallait favoriser la réussite et la persévérance dans les études. Ça, ça veut dire quoi? Ça veut dire, d'abord, augmenter l'accès, c'est-à-dire faire en sorte qu'il y ait plus d'étudiants venant du secondaire qui accèdent aux études collégiales, augmenter le taux d'accessibilité. Ça veut dire aussi augmenter le taux de diplomation, c'est-à-dire qu'il y ait plus d'étudiants qui réussissent, qui obtiennent un diplôme. Et puis, ça veut dire aussi faire en sorte que les étudiants terminent leurs études dans un temps plus court, donc que ça ne s'éternise pas. C'est ça que ça veut dire, favoriser la réussite et la persévérance dans les études collégiales. Tout le monde était d'accord là-dessus; c'était un consensus. Tout le monde est d'accord avec la vertu; c'était un peu la vertu.

Mais là, voilà que, quand on regarde le projet de règlement et qu'on regarde le projet de loi, il y a des éléments là-dedans qui vont en contradiction avec ce consensus et qui vont même, je dirais, empêcher, entraver l'atteinte de ces objectifs, soit un plus haut taux de réussite et une plus grande persévérance aux études. Ça va les empêcher. Évidemment, la taxe à l'échec, c'est l'élément le plus visible, qui a retenu le plus l'attention, et on comprend pourquoi. C'est clair que la taxe à l'échec, ça va être loin de favoriser l'accessibilité aux études collégiales. Au contraire, ça va avoir pour effet d'expulser du réseau un plus grand nombre d'étudiants. Ça va même, aussi, avoir pour effet ? ça a été signalé par beaucoup de monde ? d'allonger la durée des études, parce que ? les étudiants nous le disaient, les enseignants aussi nous le disaient ? c'est clair que, pour éviter d'atteindre le niveau d'échec au-delà duquel la taxe joue, les étudiants vont s'inscrire à moins de cours. Donc, ils vont prendre plus de temps pour compléter leurs études collégiales, pour éviter de payer la taxe à l'échec. C'est donc dire que la durée des études va être allongée. Alors, c'est contraire à l'objectif qu'on poursuit.

D'autre part, quand on regarde les mesures concrètes pour venir en aide aux étudiants en matière d'orientation, d'aide pédagogique individuelle, d'un meilleur encadrement, c'est loin d'être évident que les ressources vont être au rendez-vous. C'est loin d'être évident que le gouvernement va débloquer les crédits, parce que là, il faut parler d'argent. C'est bien beau de dire qu'on procède à un renouveau de l'enseignement collégial, il y a des choses qui peuvent se faire sans ajouter un sou, j'en conviens, mais il y a des dimensions de cette réforme-là qui ne peuvent pas être concrétisées sans qu'on ajoute des ressources, et particulièrement en matière de services aux étudiants. Que ce soit en matière d'orientation, d'aide pédagogique, de meilleur encadrement pour les étudiants, c'est évident que ça va exiger de nouvelles ressources et c'est loin d'être assuré.

Deuxième exemple. Il y a un consensus qui s'était dégagé également, c'est qu'il fallait renforcer la formation générale commune. Bon. Tout le monde était d'accord là-dessus. Il fallait que la formation générale commune soit améliorée, enrichie, approfondie, renforcée. Parfait! Très bien! C'est quoi, la solution de la ministre? Là, elle nous arrive avec ce que j'appelle son jeu de blocs, le jeu de 3 blocs. Elle joue avec ça, et ça a pour effet de diminuer les cours de philosophie et de diminuer de façon substantielle les cours d'éducation physique. Les fondements pédagogiques de ce jeu de blocs sont loin d'être clairs, en tout cas perceptibles. On a de la misère à les identifier facilement. Il y a même passablement d'arbitraire là-dedans. C'est clair qu'elle coupe dans des cours parce qu'elle veut faire de la place à autre chose. C'est l'évidence. Elle veut faire de la place à l'enseignement de l'anglais langue seconde. Bon. Ça, c'est sûr. Alors, pour ce faire, elle coupe ailleurs, elle coupe en philosophie et elle coupe en éducation physique. Mais, sur le plan pédagogique, ce n'est pas plus justifiable que ça. Ce n'est pas plus justifié non plus. Il y a donc une grande part d'arbitraire dans son jeu de blocs.

Nous, notre réaction, c'était de dire: Attention, ce n'est pas évident que c'est dans cette voie-là qu'il faut s'engager. Et particulièrement en ce qui a trait à la philosophie, j'ai signalé à maintes reprises que, s'il y a une discipline qui est propre à l'ordre de l'enseignement collégial, c'est la philosophie. C'est uniquement là que les étudiants abordent cette discipline et fréquentent cette discipline dans le but d'acquérir et de maîtriser certaines compétences de nature intellectuelle. Curieusement, on décide de couper les cours de cette discipline qui est propre à l'enseignement collégial. C'est un peu aberrant. Les professeurs de philosophie sont venus le signaler en commission parlementaire. Leur mémoire est tout à fait très étoffé, bien articulé, bien documenté aussi à ce sujet-là. Ça n'a pas semblé convaincre la ministre.

C'est la même chose pour les cours d'éducation physique. Alors que ce gouvernement, par le biais de son ministère de la Santé et des Services sociaux, proclame qu'il faut améliorer la santé des Québécois et des Québécoises, que c'est là un objectif majeur du gouvernement dans sa politique de la santé, et que, pour ce faire, il faut mettre l'accent sur la prévention, donc l'acquisition de meilleures habitudes de vie, s'habituer également aux activités physiques, on voit, de l'autre côté, un autre ministre de ce même gouvernement qui décide de couper de 50 % les cours d'éducation physique au niveau collégial. C'est comme difficile à concilier. Il y a comme une sorte d'incohérence au sein du gouvernement.

Alors, devant tout ça, nous, on a trouvé très sage, très prudente et très appropriée la proposition de la CEQ, de Mme Pagé, quand elle venue devant la commission parlementaire. Elle a dit: Écoutez, il me semble qu'il faudrait s'arrêter un peu, prendre un peu plus de temps pour réfléchir à tout ça, et surtout ne pas uniquement regarder un seul ordre d'enseignement, celui qui est pris en sandwich entre les 2 autres, entre le primaire-secondaire et l'universitaire, puisqu'on sait que, dans le système d'éducation dans son ensemble, les 3 ordres d'enseignement sont intimement interreliés. Il y a des arrimages nombreux entre les 3 et ce qu'on fait dans un a généralement et presque toujours des répercussions dans les autres. Donc, Mme Pagé, comme plusieurs autres, d'ailleurs, comme la grande amie de la ministre aussi, Mme Bissonnette, une amie intime qu'elle admire beaucoup... Mme Bissonnette disait la même chose: II faut procéder à une réflexion globale qui porte sur l'ensemble du système et sur l'harmonisation des 3 ordres d'enseignement. Avant de toucher au curriculum, aussi bien au collégial qu'au secondaire primaire, faisons une réflexion globale et voyons, de façon à ce que tout ça soit marqué par la cohérence. (21 h 30)

Et la proposition de Mme Pagé, c'était: Pourquoi pas un moratoire là-dessus? Prenons un bout de temps, quelques mois, et demandons au Conseil supérieur de l'éducation, dont c'est la tâche, demandons-lui un avis. Il est là pour ça, il est créé pour ça, c'est ça, sa fonction, le Conseil supérieur de l'éducation, puis, généralement, vous prendrez connaissance de tous les avis du ministère de l'Éducation, puis vous constaterez que c'est toujours des avis très, très fortement étoffés, toujours très pertinents, toujours raisonnables et toujours avec un souci et une préoccupation constante, je dirais, du caractère pédagogique des choses, parce que ça concerne le système d'éducation. Prenez n'importe quel avis, là, publié par le Conseil supérieur de l'éducation, et on voit qu'il y a là une pensée profonde sur l'éducation, sur la finalité de l'éducation et toujours un souci pédagogique constant, dans tous ses avis.

Alors, l'idée proposée par Mme Pagé, c'était: Demandons donc au Conseil supérieur de l'éducation, dont c'est la tâche, la fonction, le rôle, demandons-lui un avis sur le curriculum, la sanction des études de l'ensemble du système d'éducation, pas uniquement de l'ordre d'enseignement collégial, mais l'ensemble du système, de façon à concilier tout ça. Puis, là, à partir de là, on sera pas mal mieux éclairés, mieux en mesure de prendre une décision quant à la formation générale commune dans l'ordre collégial.

Je donne juste un exemple: l'ajout de 2 cours d'anglais obligatoires au collégial. Je ne suis pas opposé à ça en soi, là, sauf que je me dis: Au secondaire et même au primaire ? ça commence en quatrième année ? ils ont fait combien d'heures d'enseignement de l'anglais, d'apprentissage de l'anglais langue seconde? Ils ont fait des centaines et des centaines d'heures. Et ce qu'on constate, à leur entrée au collégial, c'est que ce n'est pas très, très bon comme résultat.

La solution... Est-ce que c'est la bonne solution, d'ajouter 2 cours d'enseignement de l'anglais obligatoires au collégial? Est-ce que c'est ça, la bonne solution? La bonne solution, ce n'est pas plutôt de regarder ce qui se fait au secondaire, puis de dire: C'est là que ça ne marche pas, là, c'est là qu'il faudrait agir, c'est là qu'il

faudrait corriger les choses, améliorer l'apprentissage de l'anglais, et on est d'accord avec ça, même si on est en désaccord avec la ministre sur les cours d'immersion, là, qu'elle veut généraliser, à partir d'un amendement à la Charte de la langue française.

Ça ne veut pas dire qu'on est contre l'apprentissage de l'anglais langue seconde. Au contraire, on pense qu'il y a lieu de l'améliorer nettement au niveau primaire, secondaire, parce qu'il y a des lacunes majeures au niveau de l'apprentissage de l'anglais langue seconde, au primaire et au secondaire.

Mais, si on corrige, aux niveaux primaire et secondaire, peut-être qu'on arrivera à la conclusion que ce n'est pas utile de rendre obligatoire l'enseignement de l'anglais langue seconde, au collège. Ça ne veut pas dire qu'il n'y aura pas de cours d'anglais langue seconde au niveau collégial. Il y en a actuellement, puis il continuera d'en avoir, mais peut-être qu'on dira: Ce n'est pas nécessaire de les rendre obligatoires. C'est sûr que ça va donner une réflexion globale sur le système d'éducation. Et, avec une réflexion partielle, parcellaire, comme celle qu'on a faite, bien, on arrive à des aberrations comme le jeu de blocs, où on coupe, on réduit, on enlève, on ajoute, sans justification pédagogique très évidente, très forte.

C'est la même chose pour les seuils d'entrée, les seuils d'admission. Ça aussi, le moratoire proposé par la CEQ devrait normalement porter là-dessus aussi, parce que là, on se trouve à dire aux jeunes: À partir de 1994, si vous avez votre diplôme d'études secondaires, ne pensez pas que vous allez avoir accès aux études collégiales. Non, non, non, ce n'est pas sûr, ça, ce n'est pas sûr. Détenir un diplôme d'études collégiales, à partir de 1995, ce n'est plus une condition d'entrée unique au collégial. Il faut plus que ça, il faut plus que ça, de sorte qu'on se trouve ainsi à dévaloriser le diplôme d'études secondaires et à créer, en quelque sorte, 2 diplômes d'études secondaires: un qui donne accès aux études collégiales, l'autre pas, qui conduit à une espèce de cul-de-sac, là, de no man's land éducatif ou scolaire. L'étudiant est perdu, là, il ne sait pas où aller, puis il n'a pas d'endroit où aller.

Alors, la proposition d'un moratoire, c'était de dire: En même temps qu'on regarde le curriculum, pour ce qui est des disciplines, de la formation, des cours, regardons ça aussi pour ce qui est de la sanction des études. Si on veut valoriser le diplôme d'études secondaires, prenons les moyens pour ce faire, mais soyons cohérents, et surtout, évitons que l'accessibilité soit réduite. Évitons qu'on se retrouve avec encore un plus grand nombre d'exclus du système, que l'exclusion soit accrue. Alors, voilà, je dirais, un autre fossé qui est apparu entre un consensus qui était très clair et les mesures, les façons choisies par la ministre pour, prétendument, concrétiser ce consensus. On ne peut pas dire qu'elle a très bien réussi. En tout cas, c'est très fortement controversé.

Un autre consensus... je donne un dernier exemple en ce qui a trait au consensus. On parlait de mettre l'accent sur les compétences pédagogiques et la fonction d'enseignement. Ah, ça, on regarde le livre jaune, on peut l'appeler comme ça, maintenant. Ah! C'est extraordinaire, l'appel émouvant qu'on fait au personnel. Ah! Il faut que le personnel participe, s'implique. On compte sur lui, particulièrement les enseignants. Si les enseignants ne sont pas là, s'ils ne participent pas, s'ils ne s'impliquent pas, c'est clair que, là, il y a des dangers, des risques que tout échoue.

Bien, en même temps, on regarde le projet de loi. On réduit la représentativité des personnels au sein des instances décisionnelles. On ne leur garantit aucune ressource additionnelle pour se perfectionner, puis Dieu sait que la dimension perfectionnement du personnel a été mise en relief à l'occasion des consultations publiques. Le monde est venu dire: II faut absolument mettre davantage de ressources pour perfectionner les compétences du personnel. Pas du tout. Ce n'est d'aucune façon garanti ou assuré. On est même allé plus loin. Heureusement, on a amendé le projet de loi, parce que le projet de loi, à l'origine, c'est que les représentants des personnels au conseil d'administration étaient nommés par le conseil d'administration. Les représentants des enseignants n'étaient même pas nommés par leur pairs. Alors, on prévoyait que les étudiants se réunissaient en assemblée générale pour désigner leur représentant, mais les enseignants n'avaient pas ce droit. C'était complètement absurde. On a, heureusement, corrigé cette lacune insensée.

Alors, c'est clair qu'en commission parlementaire, à l'étude détaillée, on a exigé, on a réclamé plusieurs modifications majeures, entre autres, le retrait de la taxe à l'échec. Écoutez, tout a été dit, à peu près, sur cette fameuse taxe à l'échec. C'est une punition de nature financière qui a été jugée injuste et discriminatoire par le Conseil permanent de la jeunesse et par à peu près tout le monde. Les alliés de la ministre, à ce sujet, sont très peu nombreux, très peu nombreux. Il y a très peu de monde, très peu d'intervenants, à part la Fédération des cégeps. Mais à part ça, la plupart des intervenants ont manifesté leur désaccord au sujet de la taxe à l'échec.

En commission parlementaire, on a présenté un amendement à cet effet. Il a été jugé malheureusement irrecevable parce que, nous disait-on, il était de nature financière, il impliquait des ressources financières. Aussi, parce qu'on nous a dit que ça faisait partie du principe du projet de loi. C'est la raison qu'on invoquait pour juger irrecevable notre proposition de supprimer la taxe à l'échec. On a été déçu que ce soit jugé irrecevable, mais, en même temps, c'était intéressant parce qu'on a appris que c'était partie prenante, partie intégrante du principe du projet de loi, la taxe à l'échec. Alors, ce n'est pas une mesure anodine, ce n'est pas une mesure connexe, ça fait partie du principe même du projet de loi 82. Évidemment, le gouvernement y tient fermement. (21 h 40)

Sur le conseil d'administration, on a également

tenté de rééquilibrer la représentativité des intervenants, sans beaucoup de succès. Pour ce qui est des parents, par exemple, on ne voit pas pourquoi on n'aurait pas maintenu la présence de 4 parents au conseil d'administration. Ce sont là des partenaires importants, intéressants dans le milieu collégial, intéressants parce qu'ils sont à la fois externes et internes, d'une certaine façon. Us sont externes parce que ce ne sont pas des intervenants du milieu collégial, et, en même temps, ils ont un lien direct avec ce qui se passe à l'intérieur parce que ce sont leurs propres enfants qui étudient dans l'établissement. Alors, on trouvait intéressant ce partenariat des parents et on pensait que, pour que ce partenariat soit utile, porte fruit, il fallait à tout le moins le maintenir à 4. On l'a réduit malheureusement à 2. Pour ce qui est des enseignants, on aurait, quant à nous, souhaité qu'on maintienne le statu quo, c'est-à-dire 3 enseignants. On n'a pas donné suite à notre requête et c'est 2 enseignants seulement qui vont siéger au conseil d'administration.

La commission des études, on a proposé également un amendement qui a été malheureusement rejeté. On a proposé un amendement à l'effet qu'il y ait de prévue une majorité d'enseignants. Pour ce qui est de la composition comme telle, chaque établissement, chaque conseil d'administration peut adopter un règlement quant à la composition de la commission des études, mais que, à tout le moins, on prévoit dans la loi qu'il y ait une majorité d'enseignants siégeant à la commission des études. Ça nous apparaissait essentiel parce c'est là le coeur, c'est l'institution par excellence sur le plan pédagogique, la commission des études. Même si c'est une commission à caractère consultatif, c'est là que se discutent les programmes, c'est là que se discute l'approche programme qu'on veut implanter, qu'on veut généraliser, donc une institution majeure sur le plan pédagogique. Ça nous apparaissait essentiel, à partir de ce moment-là, que s'y retrouvent une majorité d'enseignants, comme c'est actuellement le cas dans les commissions pédagogiques. La majorité d'enseignants, actuellement, dans les commissions pédagogiques, on trouvait normal qu'on maintienne cette représentativité au niveau de la commission des études. Là aussi, il faut dire malheureusement qu'on a échoué dans notre tentative d'apporter un amendement de cette nature.

Alors, M. le Président, on regarde tout ça. On regarde non seulement le projet de loi, mais on regarde aussi le projet de règlement concernant les études collégiales, le projet de règlement de régime pédagogique. Parce qu'il y a des éléments aussi importants dans le projet de règlement, qui échappent évidemment à l'Assemblée nationale, que dans le projet de loi lui-même. On regarde tout ça dans son ensemble, on regarde les intentions du gouvernement, on regarde ses objectifs, on se rappelle, on garde en mémoire aussi les consensus qui sont apparus puis qui se sont dégagés à l'occasion de 2 commissions parlementaires, celle de l'automne puis celle du printemps, et on ne peut pas changer notre position. C'est clair qu'on ne peut pas changer notre position parce qu'il y a trop d'éléments là-dedans avec lesquels on est en désaccord. Et comme le gouvernement n'a pas jugé utile de les enlever, ces éléments-là, ou de les changer en profondeur, bien, notre position ne peut pas non plus changer.

Je conclus, M. le Président, sur un aspect majeur de cette proposition dite de renouveau de l'enseignement collégial, c'est la participation des divers intervenants dans le milieu collégial. Quand Mme Pagé de la CEQ est venue en commission, je lui ai moi-même posé une question sur le climat qui prévalait actuellement dans les établissements. Parce que je savais qu'elle venait de compléter une tournée dans les cégeps, elle avait visité plusieurs établissements collégaux. Et je voulais savoir, je voulais être bien certain du climat qui existait dans les cégeps. Et Mme Pagé n'a pas été très tendre à l'égard de la ministre et de l'attitude du gouvernement parce que, nous dit-elle, le climat dans les cégeps actuellement est un climat de tension, je dirais, presque de découragement et de démoralisation. Alors que, à l'occasion de la commission parlementaire de l'automne, à laquelle je n'ai pas vraiment participé, mais ma collègue de Terre-bonne y a participé pleinement, ma collègue, également, des Chutes-de-la-Chaudière a participé à toute cette consultation, et elles sont en mesure d'en témoigner... Et je voudrais, d'ailleurs, moi aussi, comme la ministre, féliciter, remercier mes 2 collègues pour leur travail extrêmement positif, très fructueux, en commission. Mais elles ont participé à cette commission de l'automne, ce qui n'a pas été mon cas, parce que j'ai été nommé, désigné, comme porte-parole en matière de l'éducation et d'enseignement supérieur après, et elles me faisaient remarquer que, à ce moment-là, le climat était excellent dans les cégeps, était très bon, il était très bon, parce que tous les intervenants des cégeps, les enseignants, les professionnels non enseignants, les cadres, tout le monde était content qu'on soit arrivé à dégager des consensus, puis il y avait un grand espoir, un immense espoir que ces consensus-là seraient, correctement, correctement, convenablement traduits dans les pièces législatives et les règlements.

C'était ça, le climat qui prévalait. Très bon climat, et une volonté de participer et de s'impliquer, et puis est arrivé le projet de loi 82 et le projet de règlement, le livre jaune, et puis, évidemment, les décisions du Conseil du trésor en matière de gel des salaires, de récupération de gains de productivité. Bon, enfin, bref, le climat s'est très rapidement détérioré parce qu'on s'est rendu compte que les consensus n'étaient pas vraiment respectés, on s'est rendu compte que la confiance n'existait pas, qu'on ne faisait pas confiance aux personnels et aux intervenants du milieu collégial. Ça s'est détérioré, et c'est ce que Mme Pagé nous avait dit en commission parlementaire, elle a dit: Le climat est pourri dans les cégeps, pourri, et je ne vois pas comment le gouvernement peut procéder à une réforme dans l'enseignement collégial dans un pareil climat, alors que les enseignants, les autres personnels sont carrément découragés et ont le sentiment très désagréable d'avoir été bernés, d'avoir été floués, trompés, d'avoir été

trompés, et c'est un grand espoir qui s'est dégonflé et qui est mort, Et ça, évidemment, ça ne contribue pas à améliorer le climat. Alors, sur la participation des enseignants, je lui souhaite bonne chance, à la ministre, je lui souhaite bonne chance, mais c'est loin d'être certain que la participation et l'implication des intervenants sont assurées. Malheureusement, le climat n'est pas bon actuellement dans le réseau collégial.

Et pour toutes ces raisons, M. le Président, nous maintenons notre opposition au projet de loi 82, et nous allons continuer, à l'occasion de cette dernière étape législative, c'est-à-dire l'adoption, nous allons continuer de maintenir notre position ferme, sans équivoque et, je dirais même, déterminée à ce projet de loi et aux intentions gouvernementales en matière de changement à l'enseignement collégial.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le whip en chef de l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean.

Alors, je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à la motion de Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science proposant l'adoption du projet de loi 82, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et d'autres dispositions législatives, et je cède la parole à M. le président du caucus du parti du gouvernement et député de Sauvé.

M. le député, la parole est à vous.

M. Marcel Parent

M. Parent: Merci, M. le Président.

Il y a déjà 7 mois, 7 mois que l'équipe du gouvernement, l'équipe plus précisément impliquée dans le dossier de l'éducation, s'est penchée sur ce projet de réforme de l'enseignement collégial au Québec. Après moult rencontres, moult discussions, commissions parlementaires, audiences publiques, en 2 séquences, nous en sommes rendus au moment d'adopter cette réforme importante dans le domaine de l'éducation. (21 h 50)

II y a 25 ans, M. le Président, naissaient les cégeps au Québec, les cégeps qui étaient le prolongement de ce que nous connaissions, nous, sous le nom des collèges classiques, des collèges classiques qui n'admettaient en général que les bien nantis, parce que les collèges classiques au Québec, on s'en souviendra tout le monde, n'étaient pas gratuits. Les collèges classiques étaient réservés à l'élite, et personne au Québec... et aux garçons aussi, pas partout, mais en général. Et la majorité des jeunes Québécoises et des jeunes Québécois qui voulaient accéder à l'université ne pouvaient pas réaliser leur rêve. Ceux qui avaient les moyens de se payer l'internat continuaient leurs études à l'université. Ceux qui n'en avaient pas les moyens se dirigeaient vers ce qu'on appelait, à ce moment-là, l'école supérieure. Le seul accès qu'ils avaient aux études universitaires, c'était soit Polytech, avec une année supplémentaire en sciences au collège Mont Saint-Louis pour les gens de la région de Montréal, ou accès à l'École des hautes études commerciales. Ceux qui voulaient accéder au droit, au notariat, à la médecine ne pouvaient pas y avoir accès parce que l'accès à l'enseignement universitaire était contingenté par le système de collèges classiques, qui était le canal normal pour accéder aux études universitaires.

Pendant 25 ans, nous avons vécu l'expérience des cégeps. Nous avons rodé l'expérience, et il était rendu temps, aujourd'hui, en 1992-1993, de l'actualiser, de faire en sorte que l'enseignement collégial au Québec réponde aux besoins des étudiants d'aujourd'hui et les rende prêts à affronter les défis du XXIe siècle. Et le 26 avril dernier, le quotidien Le Droit, quotidien d'Ottawa, disait à propos de ce renouveau collégial qu'il constituait un premier pas vers le XXIe siècle. Et dans ce même article, on résumait bien la philosophie de toute cette réforme en une seule phrase: Un étudiant doit d'abord réussir ses études. Cette seule phrase résume bien, M. le Président, non seulement la philosophie de toute cette réforme au niveau collégial apportée par la ministre responsable mais également un véritable défi de société. Donc, on parle ici d'un défi collectif, soit celui d'une société qui réussit ce qu'elle entreprend, mais également un défi individuel et personnel, en ce sens que l'étudiante ou l'étudiant qui entreprend des études doit viser à ce même succès, conformément à cette philosophie de la qualité totale prônée par le gouvernement québécois dans le domaine économique.

Vous vous en apercevez, M. le Président, mon idée n'était pas seulement de résumer dans une seule phrase l'ensemble de la réforme. Cette réforme contient plusieurs objectifs et amène des changements substantiels dans notre réseau d'enseignement collégial. Mais en citant cette phrase importante que l'étudiant doit réussir ses études, j'ai résumé un contentieux qui s'était créé lors de la présentation ? et même avant ? de cette vaste réforme concernant les droits de scolarité collégiale.

Et c'est ici que le mythe est crevé. Oui, M. le Président, le mot n'est pas trop puisqu'on a essayé, dans certains milieux, de faire croire à la population que le gouvernement avait l'intention d'abolir ou de freiner cette accessibilité des jeunes au niveau collégial. Or, rien n'est moins vrai, et on le voit bien à la lecture du projet de loi 82 où l'obligation de réussite est imposée aux étudiants, ce qui va plaire à beaucoup d'enseignants fatigués de voir certains étudiants étirer leur temps d'apprentissage.

Les frais de scolarité obligatoires dont on a parlé comme taxe à l'échec après 5 échecs au préuniversitaire ou 7 au secteur professionnel, ça constitue simplement, M. le Président, un rappel aux responsabilités de base de tout étudiant. Lorsqu'un étudiant, M. le Président, a vécu 5 échecs au préuniversitaire, je pense qu'il est temps de lui faire penser qu'en plus d'avoir des droits à l'étude il a aussi des responsabilités de réussir. Et ce que l'Opposition appelle une taxe à l'échec, moi, j'ap-

pelle ça un moyen incitatif pour aider l'étudiant à se reprendre en main et à réussir.

Cette responsabilité, il s'agit d'abord de réussir ses études, c'est clair, et surtout cela représente un défi de taille pour chacun et chacune des étudiants. N'est-ce pas là le but que tout étudiant doit se fixer avant de commencer des études de niveau collégial ou universitaire? Lorsque l'étudiante ou l'étudiant entre au cégep, je pense que l'objectif à atteindre, c'est sa diplomation dans les meilleurs délais. Quant aux parents, M. le Président, ils veulent que leurs jeunes réussissent et investissent dans des études, de manière à agir en citoyens responsables, de manière à accélérer leur période d'apprentissage, pour qu'ils puissent à leur tour se tailler une place sur le marché du travail.

De leur côté, les collèges se voient contraints d'adopter une attitude de renouveau au chapitre de l'administration et des programmes pédagogiques en général. Ce renouveau annonce une rationalisation des objectifs d'apprentissage entre le secondaire, le collégial et l'universitaire et un partenariat renouvelé avec le monde des affaires.

Cette idée a fait son chemin depuis bon nombre d'années au Québec, mais c'est une des rares fois où un gouvernement prend le temps d'imprégner cet objectif dans une politique concrète et applicable à court, moyen et long termes.

Je rappelle également, M. le Président, que, lors de la création du réseau collégial au Québec, cet objectif d'un trait d'union plus serré entre le monde scolaire et le marché du travail constituait un objectif à atteindre. Dans certains cas, il l'a été ? notamment, dans le secteur professionnel. Dans d'autres, les succès furent plus mitigés, en ce sens qu'il y a eu abondance, malheureusement, de finissants dans certains secteurs qui ne correspondaient plus à la demande du marché. C'est là que le chaos est survenu, dans quelques secteurs d'activité où on a retrouvé alors une vision pessimiste et empreinte de négativisme à l'égard du marché du travail. L'initiative prise dans le cadre de cette réforme apportée par notre gouvernement devait porter des fruits à moyen terme, car elle propose une nouvelle dynamique entre les différents partenaires de la société.

Un autre volet essentiel à ce renouveau concerne la gestion moderne des collèges. Mais, avant d'aborder ce sujet, je rappelle une des lignes principales de cette réforme, qui concerne le principe de la gratuité scolaire qui est maintenue pour l'enseignement collégial public. La gratuité sera étendue aux personnes inscrites à temps plein dans un programme menant à une attestation d'études collégiales. Là où on parle des droits de scolarité, on fait allusion à ceux se chiffrant à 50 $ par cours, qui seraient toutefois perçus, comme je le disais tout à l'heure, après 7 ou 5 échecs.

De plus, M. le Président, j'aimerais vous rappeler qu'on évalue à 52 600 000 $ par année, en vitesse de croisière, les coûts entraînés par l'ensemble des mesures proposées par la réforme de l'enseignement collégial.

M. le Président, d'autres détails fort importants sont contenus dans cette réforme de niveau collégial, et sur lesquels j'aimerais m'attarder quelques instants. Par exemple, la langue seconde. Deux cours seront introduits, ce qui répondrait à des besoins pressentis comme pressants, autant par les étudiants anglophones, francophones qu'allophones. Pour ce qui est des cours d'éducation physique, qui sont réduits de moitié, M. le Président, il ne faut pas oublier que, dans ces cours d'éducation physique, il y avait l'enseignement magistral en éducation physique, mais aussi une partie des cours était consacrée aux sports libres. Le sport libre est encore accessible aux étudiants après les heures de classe en vertu des protocoles d'entente signés entre les collèges et les municipalités.

M. le Président, je vois que mon temps se termine, mais c'est dans cette perspective d'une meilleure qualité de notre vie pédagogique que le gouvernement propose cette réforme majeure au niveau collégial, et je suis persuadé du succès de cette entreprise, car dans l'ensemble de la société, on y trouve cette volonté de réussite.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Sauvé, de votre intervention.

Alors, je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à l'adoption du projet de loi 82, et je cède la parole à Mme la députée de Terrebon-ne.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président.

Alors, M. le Président, j'ai suivi avec beaucoup d'assiduité tous les travaux de la commission de l'éducation concernant cette réforme des cégeps, pour 2 raisons principales: évidemment, à titre d'ex-enseignante, les questions d'éducation me préoccupent toujours au plus haut point; et aussi, à titre d'ex-diplômée des cégeps, puisque contrairement au député de Sauvé, j'ai participé, j'ai été étudiante dans les cégeps avant de faire mes études universitaires, M. le Président. (22 heures)

Donc, j'ai vécu ce système des cégeps. Vous comprendrez bien qu'à titre a"ex-enseignante, contrairement au député de Sauvé, le premier principe qu'on doit établir, c'est qu'on ne peut pas imposer la réussite. On peut imposer des revenus ? et ce gouvernement le fait amplement ? mais imposer la réussite, ça ne se fait pas. On ne peut pas imposer la réussite à un étudiant et à une étudiante, et on ne peut pas imposer non plus la réussite d'une réforme. Pour qu'une réforme réussisse, il faut que les partenaires soient partie prenante et il faut que les partenaires décident volontairement d'embarquer dans une réforme et de donner du 100 % pour qu'elle réussisse. Ça ne s'impose pas, la réussite. Et de penser que ça s'impose, c'est déjà antipédagogique, M. le Président.

M. le Président, pour réussir, il fallait donc que

les partenaires embarquent. Dans les audiences de cet automne et les audiences de ce printemps, ils sont venus dire qu'il y avait une insatisfaction. On peut faire beaucoup d'heures en commission parlementaire, mais si on ne retient pas les demandes de nos intervenants, bien, ces heures-là ont perdu un petit peu de leur sens. Et, malheureusement, il faut dire que, dans le projet de loi 82 que nous avons devant nous, il y a des partenaires oubliés. Et je parlerai de 3 grands partenaires oubliés: les étudiants et les étudiantes, dans un premier temps, les étudiants et les étudiantes adultes et, évidemment, les enseignants et les enseignantes.

Alors, M. le Président, du côté des étudiants et des étudiantes, il a été clairement démontré... Et là-dessus, il y a eu une coalition parfaite: les jeunes du Parti québécois, les jeunes du Parti libéral ? le député de Sauvé l'avait oublié ? et aussi les jeunes de la fédération des étudiants des collèges du Québec sont venus dire qu'une taxe à l'échec c'est antipédagogique et que, lorsqu'on décide d'axer une réforme sur la réussite des étudiants, on doit donner aux étudiants une chance de réussir. Et ça ne se fait pas par une mesure financière. Un problème pédagogique, ça se règle par des mesures pédagogiques. C'est un principe de base, et toute personne qui a travaillé le moindrement au niveau de l'enseignement vous le dira, M. le Président, lorsqu'il y a un problème pédagogique, il faut trouver une solution pédagogique. Contrairement à ce que disait le député de Sauvé, il ne faut pas attendre que nos jeunes aient 5 échecs avant d'agir. Sa philosophie? On attend que les jeunes aient 5 échecs; lorsqu'ils auront 5 échecs, on impose un ticket, on leur impose donc la réussite. M. le Président, lorsque des jeunes ont des difficultés d'apprentissage, on n'attend pas qu'ils aient 5 échecs. On fait ce que proposaient les jeunes du Parti libéral, les jeunes du Parti québécois et la fédération des étudiants et des étudiantes des collèges: on donne, dès le début, dès la première session, des mesures de soutien à ces jeunes-là, on fait du parrainage, du marrainage, on leur propose un plan de réussite. C'est ça qu'on fait, M. le Président, dès que les jeunes ont des difficultés. On n'attend pas qu'ils aient 5 échecs pour leur imposer un ticket. C'est ce qu'il y a de plus antipédagogique.

On a aussi oublié nos jeunes sur l'élément majeur qu'est la pédagogie. Plusieurs jeunes sont venus dire qu'il fallait qu'au niveau de la formation on s'attarde aussi à la formation des enseignants et que, pour les futurs enseignants ? évidemment pas ceux qui sont présentement dans nos écoles, mais les futurs ? on tienne compte d'une formation au niveau de la pédagogie, qu'on exige cette formation pédagogique au niveau de l'enseignement collégial. Et, dans le projet de loi, la ministre s'est enlevé le pouvoir de réglementer sur la qualification du personnel. Elle s'est complètement dérobée à cette responsabilité qu'elle avait dans l'ancienne loi sur les collèges.

Il y avait aussi un autre élément important, évidemment, en tout ce qui a trait aux lacunes qui avaient été annoncées, lacunes, évidemment, au niveau de l'en- seignement de la langue française, lacunes du côté de la culture. Et tout ce qui avait trait aux seuils d'admission et à la formation générale, bien, on ne retrouve rien, M. le Président, dans le projet de loi 82, concernant ces 2 mesures essentielles qui ont fait la majeure partie de nos discussions en commission parlementaire, lors des audiences de cet automne et lors des audiences du printemps. Sur toute cette formation générale, ces seuils d'admission, la ministre nous a dit qu'elle était en réflexion, qu'elle poursuivait ses études et qu'elle ne pouvait pas nous donner, au moment de l'étude article par article, sa proposition finale pour ce régime pédagogique. Donc, M. le Président, toutes les audiences que nous avons eues, qui ont tourné autour de ces éléments majeurs, nous n'avons toujours pas de réponse au moment de l'adoption du projet de loi 82.

L'autre élément, les partenaires oubliés, ce sont, évidemment, les étudiants adultes. On ne retrouve strictement rien du côté des étudiants adultes; ils ont même perdu 1 poste qu'ils avaient avant. Au niveau du conseil d'administration, on exigeait que des 2 étudiants à temps complet qui se retrouvaient au collège il y en ait 1 qui soit inscrit à titre d'étudiant adulte. On a fait disparaître cette mesure-là et on se retrouve avec 2 étudiants, sans préciser s'il y aurait 1 étudiant adulte.

Donc, dans les mémoires... Et, là aussi, les adultes sont venus nous dire: Les adultes, ces oubliés de la réforme, ce qu'ils souhaitaient, c'est que l'État confie aux collèges une mission claire, en éducation des adultes, qui soit inscrite dans la loi des collèges, que ce soit sous ce terme ou sous celui de «formation continue». Ils nous avaient demandé de répondre à des objectifs opérationnels bien précis, parce qu'ils sont venus nous dire que, finalement, les adultes qui sont dans les cégeps ont des besoins différents. Ils nous ont demandé des services adaptés aux caractéristiques des adultes ? et ils sont de plus en plus nombreux au cégep, il ne faut pas l'oublier, M. le Président ? de leur reconnaître une place dans les structures, dans la définition de leur projet de formation; assurer un équilibre dans l'offre de formation à temps plein, à temps partiel; des programmes complets, des programmes courts; des formations créditées, non créditées; leur fournir une formation de qualité, adaptée à leurs besoins; planifier la réponse aux besoins diversifiés de formation des adultes; rendre accessible la formation à tous les adultes, la scolarisation, ce qui n'est pas le cas, actuellement; mettre en oeuvre, pour les adultes, une priorité à la formation qualifiante et transférable; assurer l'accès à la reconnaissance des acquis et des compétences des adultes; assurer l'accès réel des adultes aux ressources des établissements; utiliser le potentiel des nouvelles technologies de communication pour favoriser l'accès à l'information; renouveler les pratiques pédagogiques; développer la formation à distance. Les adultes ont besoin de choses différentes des étudiants qui sont dans nos cégeps, nos jeunes. Ils sont venus nous dire, à deux reprises, de ne pas les oublier. Dans le projet de loi 82, on les oublie complètement. On enlève même le seul article où on les retrouvait, sur

le conseil d'administration. Donc, eux aussi, ce sont des partenaires oubliés.

Les troisièmes partenaires oubliés, ce sont, évidemment, les enseignants. On peut faire appel, dans le projet de renouveau de la ministre, aux enseignants, aux enseignantes, au personnel, aux membres du personnel des cégeps, pour assurer une belle réforme. Cependant, ce qu'on retrouve dans le projet de loi 82, dans plusieurs articles bien précis, c'est un recul des enseignants. Je vous donnerai 3 exemples avec 3 articles: l'article 4, l'article 6 et l'article 7. Alors, à l'article 4, M. le Président, qui vient remplacer l'article 8 de la loi, on retrouve la composition du conseil d'administration. S'il y a un endroit où on aurait pu maintenir, au moins ? on ne dit même pas «augmenter», M. le Président ? la place des enseignants, c'est bien sur le conseil d'administration. Alors, dans l'ancienne loi des collèges, les enseignants étaient 3 sur le conseil d'administration. Dans le projet de loi 82, les enseignants seront 2, M. le Président. Donc, une diminution de leur rôle et, en même temps, on leur demande d'assurer la réussite de la réforme. C'est par ces mesures-là qu'on voit la place qu'on leur accorde.

Le député de Sauvé nous parlait tantôt d'économie, de réussite d'entreprise. Une entreprise qui veut réussir, sa réussite, elle dépend, d'abord et avant tout, des personnes qui travaillent dans cette entreprise et, sur le conseil d'administration, la ministre a décidé d'inverser les proportions qui existaient avant. On se retrouve avec 11 personnes à l'externe et 8 personnes à l'interne, comme si c'étaient les agents extérieurs qui vont venir réaliser la réforme qui doit se faire, elle, à l'intérieur des cégeps. C'est un changement, un virage qui est tout à fait inacceptable, à mon point de vue.

L'article 6 amène aussi un recul du côté des enseignants. On leur dit qu'ils devront évidemment se retirer lorsqu'il y aura des sujets qui vont les toucher. On a essayé d'apporter un amendement, M. le Président, de demander à ce qu'ils puissent au moins avoir l'occasion de présenter leur point de vue et de ne pas voter, mais, au moins, présenter leur point de vue, ce qui se fait un peu partout. Non. On leur demande de se retirer complètement sans même avoir exprimé leur point de vue sur un point. Et l'article 7... (22 h 10)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): S'il vous plaît, Mme la députée, je vous demande de conclure.

Mme Caron: Oui, M. le Président, ça ne sera pas très long. Et l'article 7 vient évidemment constituer la Commission des études. S'il y a un endroit où les enseignants auraient dû être majoritaires, c'est sur cette Commission des études, puisque la Commission des études, c'est de décider de tout l'acte pédagogique, M. le Président. Alors, la réussite, ça ne s'impose pas; et si un gouvernement pense que ça s'impose, je vous avertis, M. le Président, qu'ils vont avoir de sérieuses surprises au cours des mois qui viennent, parce que la réussite, c'est d'abord de faire confiance à ses partenai- res et de donner des outils pour réussir, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée de Terrebonne. Sur la même motion, je cède la parole à Mme la députée du comté des Chutes-de-la-Chaudière.

Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Oui. Je vous remercie, M. le Président. C'est sûr qu'à l'instar de mes collègues ? la députée de Terrebonne vient de le mentionner ? j'ai assisté à l'ensemble des travaux en commission parlementaire, à l'automne. C'est vrai que ce projet avait suscité beaucoup d'espoir chez les intervenants; ils sont venus en grand nombre. En tout cas, plusieurs ont présenté des mémoires. Ils n'ont pas tous été entendus, bien sûr, mais une bonne partie des mémoires ont été retenus, puis la commission a pu discuter avec les intervenants.

Oui, il y avait des espoirs. Les gens escomptaient beaucoup de ces rencontres, de cette commission, et, moi aussi, je pense que les gens sont très déçus. Ils sont très déçus, comme nous, on est très déçus. J'entendais la ministre qui nous disait qu'elle était émue de présenter son renouveau collégial. Eh bien, M. le Président, moi, je pense, pour ma part, que c'est encore une fois un projet de réforme qui a été manqué, qui a été raté, qui est inachevé.

Ça fait plusieurs fois, ici, dans cette Chambre, M. le Président, qu'on nous propose des réformes. Depuis 1989, on a eu droit à la réforme de la santé et des services sociaux, on a eu droit à la réforme des affaires municipales. En fait, on a eu droit à plusieurs projets de ce type et, à chaque fois, j'ai été assez étonnée du genre de définition, si on veut, que le gouvernement peut avoir de ce que c'est qu'une réforme.

Dans le cas de la santé et des services sociaux, la réforme s'est faite au niveau des structures. On a changé la composition des conseils d'administration, on a créé une régie régionale. On nous parlait, au départ, de véritable décentralisation, mais il s'est avéré, à la fin de l'étude du projet de loi, que pour ce qui est de la véritable décentralisation, bien, ce n'était pas du tout le cas. Donc, ça a été...

M. Morin: M. le Président, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le député de Dubuc.

M. Morin: J'invoquerais le quorum, à ce moment-ci, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les députés. Mme la députée, si vous voulez continuer votre intervention.

Mme Carrier-Perreault: Oui. Je vous remercie,

M. le Président. Alors, j'en étais au genre de réformes que le gouvernement nous a présentées depuis 1989. La réforme de la santé, donc, une réforme de structure, tout simplement, M. le Président.

La réforme au niveau des affaires municipales, communément appelée «la réforme Ryan», où on disait que c'était le partage des responsabilités, bien, on a vu ce que c'était. Dans les faits, c'est devenu le transfert des responsabilités ou le pelletage de responsabilités sans les mesures financières, sans les crédits qui accompagnent ce transfert.

On arrive avec la réforme de l'enseignement collégial. Normalement, M. le Président, une réforme... En tout cas, moi, dans mon esprit, j'avais toujours pensé qu'une réforme c'était un changement en profondeur d'un système dans le but, bien sûr, de l'améliorer. Mais, pour en arriver à effectuer un changement en profondeur, c'est évident que ça nécessite une vision globale, une vision d'ensemble du système comme tel et, bien sûr, une analyse exhaustive et avec des études d'impact des différentes mesures qu'on veut y apporter.

Dès le départ, M. le Président ? mon collègue d'Abitibi le mentionnait en commission parlementaire, l'automne dernier ? compte tenu qu'on arrive avec un projet de réforme, c'est dommage de ne pas vérifier l'ensemble du système d'éducation parce que, au niveau de l'éducation, on parle uniquement de l'enseignement collégial ici, ce soir, mais tout le monde sait que les niveaux, les paliers au niveau éducation, que ce soit le primaire, le secondaire, le collégial ou universitaire, ces différents secteurs sont interdépendants: l'un dépend de l'autre. Les objectifs à atteindre pour passer à l'autre palier devraient être définis, clairs, et tout le monde devrait s'entendre là-dessus. Or, pour avoir une vision d'ensemble, il aurait fallu vraiment faire une étude, faire une analyse de ce qui se passait dans l'ensemble du système d'éducation.

Ça a été mentionné à plusieurs reprises, des intervenants sont venus nous le dire aussi. Je veux bien comprendre, par exemple, M. le Président, que lorsque la ministre a commandé cette commission parlementaire, a invité les différents intervenants, elle n'était évidemment pas ministre de l'Éducation; elle était, à ce moment-là, ministre de l'Enseignement supérieur. Or, ce n'est qu'ensuite qu'elle est devenue aussi ministre de l'Éducation. Peut-être aurait-elle eu l'idée de le faire plus tôt ou, encore, elle aurait peut-être pu s'entendre aussi avec son collègue, préalablement à ce genre de commission là.

Il reste que, dans les faits, M. le Président, on se ramasse avec une réforme faite à partir de l'étude de seulement un des secteurs, c'est-à-dire le secteur collégial, où les gens sont venus nous dire ce qui n'allait pas et ce qui allait au collégial, mais, par ailleurs, où on n'a pas de vue d'ensemble du système d'éducation. Alors, c'est une réforme à la pièce et les correctifs qu'on apporte avec ce projet de loi là au niveau du collégial, disons que, pour ce qui est des résultats, on peut effectivement s'interroger. On parlait tout à l'heure du bloc de formation générale où tout ce qu'on fait, en fait... Et ça, on n'a pas de précisions; la ministre n'a pas réussi à nous donner les précisions lors de la commission parlementaire. Mais tout ce qu'on fait, c'est qu'on enlève des heures de cours pour remplacer par des cours de français et des cours de langue seconde. Est-ce que c'est normal d'arriver au cégep et d'avoir autant de difficulté à parler et à écrire sa langue maternelle? On peut s'interroger. Est-ce que c'est vraiment au cégep qu'il faut mettre des cours de français supplémentaires? Pourquoi ce ne serait pas des cours bonifiés ou différents, des objectifs différents à atteindre au niveau du primaire et du secondaire? Mon collègue faisait état aussi des cours de langue seconde. On commence en quatrième année. Alors, est-ce qu'il y a un problème aussi du côté des objectifs à atteindre au niveau du primaire et du secondaire?

Alors, c'est pour ça qu'on se ramasse avec des mesures où on n'est pas sûr qu'elles sont appliquées à la bonne place parce qu'on n'a pas de vue d'ensemble du système. Ce que l'on déplore, M. le Président, d'autres l'ont déploré aussi, ils sont venus nous le dire. La CEQ s'est exprimée très clairement sur le sujet et, pourtant, la CEQ, elle intervient aussi au niveau du primaire et du secondaire, c'est bien évident. Les enseignants du primaire et du secondaire sont aussi avec la même organisation syndicale. Alors, peut-être qu'ils ont, eux aussi, une idée d'ensemble du problème un petit peu plus claire, si on veut, se posent les mêmes questions, ont ces mêmes inquiétudes que, nous, on a.

C'est bien sûr, M. le Président, que si on est déçu, ça ne veut pas dire que tout est mauvais dans le projet de loi. Et ça, je pense que ça été mentionné tout à l'heure aussi par mon collègue de Lac-Saint-Jean. Il y a des choses intéressantes dans le projet de loi, mais, par ailleurs, on ne peut vraiment pas y souscrire parce que les points fondamentaux, les objectifs majeurs que nous avions au départ, les inquiétudes profondes, on parlait de la taxe à l'échec, entre autres, de ces coupures au niveau de la formation collégiale, coupures dans certains cours pour donner des cours de français ou des cours d'anglais, bon, bien, disons que ces objections, les objections que nous avions au départ, bien, écoutez, on ne peut pas faire autrement que de les avoir toujours parce que rien n'est changé à ce niveau-là.

La taxe à l'échec est toujours là, même si, bien sûr, l'Opposition a essayé de faire enlever du projet de loi l'article 24.1. Ça a été discuté longuement, bien sûr, M. le Président, mais la ministre n'a rien voulu entendre et nous a dit, effectivement, que c'était dans le principe, dans les notes explicatives du projet de loi, qu'il n'y avait rien à faire avec ça, que ça faisait partie intégrante. Donc, c'était un objectif visé. Il n'était pas question de pouvoir enlever ça. (22 h 20)

Alors, non, M. le Président, pour nous de l'Opposition officielle, une taxe, comme ça, à l'échec, faire payer des frais de scolarité après S échecs, on ne croit pas que ça va favoriser l'accessibilité. On croit que c'est

une mesure qui peut avoir des effets pervers, des effets pervers dans le sens que, oui, les étudiants, pour éviter ce genre de taxes, ce genre de frais de scolarité, bon, bien, coudon, vont prendre un peu moins de cours à chacune des sessions pour être sûrs de pouvoir les réussir. Donc, au contraire, on pourra, à ce moment-là, allonger, jusqu'à un certain point, la durée des études au collégial.

Il y a eu pourtant des propositions intéressantes. J'entendais tout à l'heure le député de Sauvé ? et ma collègue de Terrebonne l'a repris ? qui a dit: C'est un incitatif. Un incitatif. Une taxe à l'échec, c'est un incitatif à la réussite ? pour imposer, qu'il disait, la réussite, effectivement. Mais, écoutez, ce n'est pas un incitatif, une taxe à l'échec, c'est une mesure qui, dans mon esprit, est profondément coercitive, c'est une punition. Si tu manques 5 cours, si tu fais un échec à 5 reprises, 5 cours différents, tu vas être puni, tu vas payer 50 $ après pour tes cours. Alors, c'est une mesure coercitive. Et pourtant, il y avait eu des suggestions intéressantes disant: Plutôt que d'y aller par le biais de ce genre de mesures coercitives, peut-être qu'il y aurait moyen en y allant par des mesures incitatives, en faisant des rabais à un moment donné, ou en enlevant des frais à certains niveaux. Mais ça, ça n'a pas été retenu. On a vraiment préféré, ça a été très clair, la mesure coercitive. Alors, dans ce sens-là, c'est bien évident que nous, de l'Opposition officielle, on ne pouvait vraiment pas, et on ne peut vraiment pas aller dans le même sens que le gouvernement sur ce genre de mesures là.

Lors de la commission parlementaire, on a vu aussi que, par ce projet de loi là, et la ministre nous l'a expliqué, d'ailleurs, on donnait un peu plus d'autonomie aux cégeps, aux collèges comme tels. Alors, différentes mesures, effectivement, viennent donner plus d'autonomie, plus de pouvoir aux administrations collégiales, et, pour ce faire, M. le Président, on a procédé par harmonisation. Harmonisation, et je m'explique. On harmonise, à plusieurs égards, les règles qui régissent les études collégiales aux règles qui régissent les études universitaires. La ministre nous a dit: Bien, écoutez, c'est de l'enseignement supérieur, c'est de l'ordre de l'enseignement supérieur; alors, dans ce sens-là, on va donner aux collèges les mêmes règles d'autonomie que celles que les universités ont. Par ailleurs ? et les raisons sont obscures ? on n'a comme eu pas de réponse là-dessus. À d'autres égards, on donne moins d'autonomie aux collèges; là, les règles d'autonomie ne s'appliquent plus de la même façon. Bref, il y a des questions qui sont restées sans réponse, les objections majeures que nous avions au départ, on les a toujours, et c'est dans ce sens-là, M. le Président, qu'on ne peut vraiment pas aller dans le même sens que le gouvernement et que nous voterons contre le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Est-ce que la motion proposant l'adoption du projet de loi 82, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et d'autres dispositions législatives, est adoptée?

M. Bélisle: Vote nominal, M. le Président, et je vous...

Une voix: Vote enregistré.

M. Bélisle: Bon, on s'entend bien. Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, qu'on appelle les députés!

M. Bélisle: Non, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non?

M. Bélisle: ...j'aimerais faire reporter le vote à la période des affaires courantes de demain.

Vote reporté

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, le vote sur cette motion que je viens d'appeler est reporté à demain. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Maintenant, M. le Président, nous appellerons l'article 2 de notre feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi 95 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 2 de notre feuilleton, Mme la ministre déléguée aux Finances propose l'adoption du principe du projet de loi 95, Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales. Mme la ministre, je vous cède la parole, vous avez droit à une intervention de 60 minutes.

Mme Louise Robic

Mme Robic: Merci. M. le Président, c'est avec plaisir que je propose aujourd'hui l'adoption du projet de loi 95 intitulé Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales. Dans un climat de déréglementation, ce projet de loi présente un nouveau régime de publicité légale qui répond à notre souci d'efficacité en effectuant une réduction importante de la réglementation, tout en créant un système accessible et libre d'irritants tels que les dédoublements tout à fait inutiles. Il offre de plus, M. le Président, une protection accrue pour le public consommateur, de même que pour les entreprises qui sont visées.

M. le Président, je rappellerais à cette Chambre que le Code civil du Québec, adopté par l'Assemblée nationale le 18 décembre 1991, oblige, à partir du 1er

janvier 1994, les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite à se déclarer de la manière prescrite par les lois relatives à la publicité légale des sociétés. Autrement, elles sont réputées être des sociétés en participation, sous réserve des droits des tiers.

Le régime juridique régissant la divulgation des sociétés en nom collectif ou en commandite est actuellement partagé entre le Code civil du Bas-Canada et la Loi sur les déclarations des compagnies et sociétés. Or, le premier est remplacé par le Code civil du Québec, et ce dernier ne reprend qu'une partie des règles comprises dans le code actuel, notamment en ce qui concerne les sociétés en commandite. Quant à la Loi sur les déclarations, qui date de 1849, ses règles doivent être modifiées de façon importante pour répondre aux besoins modernes de fiabilité et de protection nécessaires à un milieu économique sain, tant pour les sociétés que pour toutes les autres formes d'entreprises.

Le projet de loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales que j'ai l'honneur de proposer au nom du gouvernement à l'Assemblée nationale vise à moderniser le cadre législatif existant dans ce domaine. Actuellement, M. le Président, notre régime de publicité légale est basé sur une multiplicité de sources d'information qui ne sont pas nécessairement coordonnées. La Loi sur les déclarations des compagnies et sociétés, datant de 1849, la Loi sur les compagnies étrangères, datant de 1904, et la Loi concernant les renseignements sur les compagnies, datant de 1930 sont doublées par plusieurs autres lois ? dont la Loi sur les compagnies ? qui contiennent également des règles de publicité légale.

En plus, M. le Président, toutes ces lois sont également doublées d'une réglementation aussi importante. Il existe plusieurs registres distincts relevant de différentes autorités gouvernementales. La multitude de tels registres, des règlements et des lois rend le système de publicité légale inefficace et moins accessible, autant pour les entreprises et le gouvernement que pour les individus qui ont à s'en servir. On remarque aussi que les informations contenues au registre officiel gagneraient à être plus exactes et plus à jour. Cette information, qui a une valeur légale, se doit d'être plus conforme à la réalité. L'information contenue au fichier central des entreprises, M. le Président, même si elle n'a aucune valeur légale, reflète souvent mieux la réalité grâce à des mises à jour et à des échanges avec les fichiers de la Commission de la santé et de sécurité du travail et de la Commission des normes du travail.

C'est pourquoi le gouvernement propose que toutes ces activités de cueillette, de traitement et de diffusion des informations relatives aux entreprises individuelles, aux sociétés et aux personnes morales relèvent principalement d'un seul organisme, soit l'Inspecteur général des institutions financières. Il n'y aura donc qu'un guichet unique, régi par un seul texte de loi. Il maintient cependant le rôle du protonotaire de la Cour supérieure ? maintenant appelé greffier ? pour l'immatriculation des entreprises individuelles et des sociétés.

Ce choix permettra de respecter les habitudes des clientèles concernées, tout en assurant un accès décentralisé aux informations contenues dans le registre.

M. le Président, ce gouvernement a voulu, en proposant le projet de loi 95, régler plusieurs problèmes occasionnés par le système actuel de publicité légale relative aux entreprises individuelles, aux sociétés et aux personnes morales. Ce projet de loi, pour régler ces problèmes, propose la création d'un registre central où devront s'inscrire les assujettis suivants: les personnes physiques exploitant une entreprise individuelle sous un nom d'emprunt, les sociétés et les personnes morales.

Premièrement, le nouveau registre assurera une plus grande sécurité des transactions entre le public et les entreprises. Les principales informations qu'a intérêt à connaître toute personne établissant une relation économique avec une entreprise individuelle, une société ou une personne morale seront publiques, fiables et accessibles et permettront, entre autres, au public et aux entreprises de connaître les responsables des entreprises avec lesquelles ils contractent. (22 h 30)

L'utilisation efficace de l'informatique, de la télématique et du microfilm aidera le gouvernement à actualiser le fonctionnement du système d'enregistrement des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales. Par ailleurs, les entreprises individuelles, les sociétés et les personnes morales seront elles-mêmes protégées par le fait que les informations qu'elles déclareront au registre seront opposables aux tiers. Ces derniers ne pourront en plaider l'ignorance. Ils auront généralement à consulter le registre avant de conclure un contrat important.

Deuxièmement, le nouveau registre permettra de publier la création et l'existence des sociétés en nom collectif ou en commandite et des personnes morales constituées au Québec. À ce sujet, le projet de loi modifie une quarantaine de lois relatives aux personnes morales. Il prévoit que la formation des sociétés en nom collectif ou en commandite, de même que la constitution des personnes morales seront désormais publiées à ce registre. Les procédures seront simplifiées par l'application d'un système unique et par la disparition des publications à la Gazette officielle du Québec.

Troisièmement, grâce au nouveau registre, le gouvernement et les entreprises auront à leur disposition un ensemble de données importantes qui pourront être utilisées à des fins de planification.

M. le Président, l'approche parcellaire du régime de publicité actuel ne répond plus aux besoins du public et des entreprises dans ce monde moderne qui continue d'évoluer constamment suite à la globalisation, au décloisonnement des institutions financières et aux avances continuelles dans l'informatique. D'ailleurs, certaines études ont démontré que le système actuel de publicité était dépassé. Le gouvernement a donc décidé d'instituer un véritable registre des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales.

M. le Président, l'utilité réelle d'un tel registre

pour les entreprises est évidente. En ayant un seul registre, on pourra plus facilement obtenir une information fiable, complète et mise à jour sur toutes les entreprises individuelles, les sociétés ou les personnes morales qui exercent une activité au Québec. Cette information est souvent indispensable comme, par exemple, pour connaître le nom du propriétaire d'une entreprise. Le registre, en divulguant les dénominations et raisons sociales, les noms commerciaux et les marques de commerce utilisés par les entreprises individuelles, les sociétés et les personnes morales au Québec, permettra de choisir plus facilement un nom qui n'entre pas en confusion avec un nom déjà utilisé.

Cette recherche d'un nom sera facilitée par la nature décentralisée du nouveau système, car l'ensemble des informations qui seront contenues dans le registre seront disponibles non seulement dans les bureaux de l'Inspecteur général des institutions financières à Mont-tréal et à Québec, mais aussi dans les bureaux des greffiers de la Cour supérieure au Québec. Il sera aussi possible d'y accéder à l'aide d'un réseau de télécommunications.

Il convient de souligner, M. le Président, que le projet de loi prévoit aussi la possibilité d'ententes interministérielles et intergouvernementales afin de transférer des informations, alléger les obligations des assujettis et ainsi mettre à jour le registre.

Par ailleurs, on pourra s'enquérir du fait que le projet de loi entraîne une nouvelle obligation, celle de produire une déclaration annuelle pour les entreprises individuelles et les sociétés assujetties.

Réaffirmons, dans un premier temps, que le projet de loi vise d'abord et avant tout à assurer la protection du public, mais également celle des assujettis. En cela, il cherche à assainir le milieu économique en assurant la sécurité juridique des transactions. Pour cela, il propose la règle de l'authenticité de l'information propre à assurer la protection du public, plus spécialement des tiers qui établissent une relation juridique et généralement économique avec une entreprise individuelle, une société ou une personne morale. D'un autre côté, il établit l'opposabilité des principales informations à des tiers, qui vise à assurer la protection des assujettis telle qu'établie par le Code civil du Québec.

Pour atteindre ces objectifs, M. le Président, les informations importantes doivent être constamment mises à jour afin qu'elles soient fiables. Le projet de loi propose un moyen propre à assurer la double protection: la mise à jour continue et gratuite. Par ailleurs, ce moyen seul n'est pas suffisant. L'expérience de la loi sur les déclarations le démontre.

Aussi, le projet de loi propose une mesure de protection globale gérée par l'administration et qui vise à assurer la fiabilité du registre. Il s'agit de la déclaration annuelle. Cette mesure permet aux entreprises individuelles et aux sociétés de profiter de la sécurité juridique actuellement offerte aux personnes morales. En effet, ce rappel cherche à éliminer les conséquences négatives pour un assujetti d'un défaut de mise à jour courante.

Mentionnons seulement quelques exemples propres à illustrer ce que l'on tente de viser: coûts et tracas pour un individu pour faire écarter une poursuite relative à une entreprise vendue, mais dont il apparaît toujours propriétaire au registre; perte de droits possible en raison de la signification d'une poursuite à l'adresse indiquée au registre et qui n'est plus la bonne; poursuite contre une personne indiquée comme associée au registre, mais qui ne l'est plus.

La déclaration annuelle permet une telle protection, en plus d'assurer une plus grande fiabilité des informations sur les entreprises et d'assouplir le fonctionnement du système judiciaire.

Les renseignements que les entreprises individuelles, les sociétés et les personnes morales doivent fournir sont à la fois essentiels pour protéger le public et faciles à obtenir pour les entreprises. Même dans le cas des personnes morales qui sont actuellement obligées de déposer auprès de l'Inspecteur général des institutions financières une déclaration annuelle, les informations requises seront sensiblement réduites. Les personnes morales, dès l'adoption du nouveau régime, n'auront plus besoin de fournir les informations sur la capitalisation, les bureaux de transfert d'actions, les bons et les obligations, ainsi qu'un état détaillé des immeubles. Ceci facilitera d'une manière importante le travail des responsables qui, chaque année, complètent ces déclarations.

M. le Président, j'aimerais mentionner quels renseignements seront indiqués dans le nouveau registre. L'entreprise devra fournir des informations sur son nom et tout nom qu'elle utilise; sa forme juridique et la loi qui la régit; son domicile; son fondé de pouvoir; l'adresse de ses établissements au Québec; les associés, les administrateurs et les dirigeants ainsi que les 3 actionnaires principaux, le cas échéant; l'objet poursuivi; la fusion, la scission ou autre transformation; la dissolution ou la liquidation et la date de la cessation d'existence.

M. le Président, si je prends le temps de décrire toutes les informations que le gouvernement exigera périodiquement de nos entreprises, c'est pour démontrer clairement que celles-ci sont des informations essentielles pour le public, mais faciles à obtenir pour nos entreprises.

L'utilisation des déclarations périodiques est souple, peu contraignante et peu coûteuse pour l'assujetti. Ce dernier recevra le formulaire de déclaration déjà complété. Il n'aura qu'à indiquer les changements, le cas échéant, le signer et le retourner. Une opération de quelques minutes à peine, puisque les informations requises par la loi sont limitées.

Le projet de loi limite le contrôle administratif a priori sur le nom constitutif des personnes morales, de même que sur les noms déclarés par les assujettis au registre aux seuls critères d'intérêt public. Actuellement, ce contrôle s'étend aux critères d'intérêt privé, notamment en matière de confusion de noms et de concur-

rence déloyale. Nous savons que ce n'est pas Fenregis trement d'un nom qui crée le droit au nom, mais que ce droit dépend de l'usage qu'on fait du nom. Comme nous aurons tous facilement accès à toute l'information contenue dans le registre, il est normal que chacun prenne soin de faire ses propres vérifications avant d'utiliser un nom, plutôt que de contrôler l'accès à ce nom.

Le projet de loi maintient la règle du contrôle administratif a posteriori actuellement appliqué par l'Inspecteur général des institutions financières aux seules dénominations sociales des compagnies et des corporations sans but lucratif. Il étend ce contrôle à tous les noms déclarés par l'ensemble des assujettis et le fonde sur tous les critères, tant d'intérêt public que d'intérêt privé, proposés par le projet de loi. Un tel choix présente les avantages de la rapidité et de la souplesse. Les droits du public sont cependant protégés par la possibilité d'appel au système judiciaire.

Par ailleurs, M. le Président, le projet de loi applique aux noms constitutifs de l'ensemble des personnes morales, de même qu'à tous les noms déclarés au registre les normes juridiques actuellement applicables aux seules dénominations sociales de compagnies et de corporations sans but lucratif. Un tel choix fondé sur des principes d'équité permettra d'assurer une protection identique au public et aux assujettis, quelle que soit la forme juridique choisie par ces derniers.

Le projet de loi constitue également un exercice de déréglementation bénéfique tant pour l'administration que pour les citoyens. Il réduit, d'ailleurs, les contrôles et les règles de droit, tout d'abord en abolissant la nécessité pour les compagnies étrangères d'obtenir un permis avant de faire affaire au Québec. Le projet de loi réduit aussi les contrôles et les règles de droit en éliminant l'obligation de déposer une déclaration dans chacun des districts judiciaires dans lesquels une entreprise exerce son activité. Il restreint le contrôle administratif a priori des noms, notamment en abandonnant le contrôle de la confusion des noms des compagnies québécoises. (22 h 40)

À ce sujet, le projet de loi propose, comme solution de remplacement, des recours administratifs conformes à la Charte canadienne des droits et libertés, ainsi qu'à la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Ainsi, le projet de loi réduit le nombre de règles de droit en remplaçant 2 lois, soit la Loi sur les déclarations des compagnies et sociétés et la Loi concernant les renseignements sur les compagnies. Il en abroge aussi une, la Loi sur les compagnies étrangères.

Le projet de loi diminue donc le nombre de règlements en faisant disparaître ceux qui perdent leur objet par le remplacement ou l'abrogation de la loi en vertu de laquelle ils étaient adoptés. C'est notamment le cas de ceux adoptés en vertu de la Loi concernant les renseignements sur les compagnies et de la Loi sur les compagnies étrangères. La quasi-totalité de ces règles sont reprises dans le projet en quelques dispositions simples et compréhensibles qui seront complétées par un régime complémentaire beaucoup plus accessible et facile à comprendre.

Comme vous pouvez le constater, M. le Président, le projet de loi 95, Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales, permettra au Québec de posséder un registre de publicité légale comprenant tous les assujettis qui y sont constitués ou qui y exercent leurs activités. S'ajoutant au registre des droits civils, au registre foncier et au registre des droits personnels et réels mobiliers, le registre des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales vient compléter les mesures permettant la mise en application complète du régime de publicité légale prévu au Code civil du Québec.

En conclusion, M. le Président, ce nouveau régime de publicité légale saura apporter au Québec une meilleure protection du public et des entreprises, tout en réduisant la complexité du système actuel, et c'est donc avec grand plaisir, M. le Président, que je propose l'adoption du projet de loi 95. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la ministre.

Sur la même motion, je cède la parole à M. le député de Westmount.

M. Richard B. Holden

M. Holden: Merci, M. le Président. Vous êtes avocat, M. le Président, et vous comprendrez qu'on est tellement heureux de voir une loi qui réorganise et modernise tous les endroits, vu les difficultés de rechercher toutes sortes de noms et de désignations de compagnies. Je me souviens, M. le Président, que, quand j'étais stagiaire au bureau de mon oncle, dans les années cinquante, on m'a envoyé chercher le nom d'un établissement. Dans le temps, on les appelait «les personnes seules». Je suis allé à la bibliothèque du Barreau. Il y avait un énorme classeur avec toutes sortes de tiroirs et, malheureusement, M. le Président, je ne savais pas dans quel tiroir se trouvait telle catégorie de corporations ou de personnes seules. Alors, j'arrive au bureau après une journée de recherches avec le mauvais nom et avec un nom de corporation qui n'était pas le nom dont se servait la personne seule, et mon oncle s'est fâché contre moi. Heureusement, j'ai finalement appris où chercher tel genre de compagnie. Je vois que le député de Cha-pleau est ici. Lui aussi, il est passé par là, chercher dans les différents registres les personnes seules, les corporations sous d'autres lois.

Je vois, M. le Président, qu'on amende plusieurs lois, y compris la Loi sur les cercles agricoles, la Loi sur les clubs de récréation, la loi sur la cruauté des animaux. Tout ça, M. le Président, c'était absolument un fouillis impossible. Alors, là, on arrive avec une loi qui va centraliser et organiser tous ces problèmes de noms et de recherches dans ce domaine. Je vois, M. le Président, que l'une des lois date d'il y a 144 ans. Je crois que c'est même plus loin dans notre système que le Code civil qu'on vient d'amender. Ça me dépasse,

M. le Président. Pendant 144 ans, on a opéré avec un système que, franchement, il fallait changer.

D'ailleurs, si je comprends bien la situation, M. le Président, ce projet de loi est en quelque sorte une reprise du projet de loi 54, qui était une loi sur le registre des associations et entreprises, qui avait été présenté en 1987 par le prédécesseur du ministre actuel, le ministre délégué aux Finances, M. Fortier. On se rappellera que, suite au dépôt du projet de loi 54, le ministre Fortier avait tenu une consultation. Pendant cette consultation, plusieurs éléments du projet de loi avaient suscité certaines controverses, certaines interrogations et le projet de loi 54 n'a alors franchi que l'étape de l'adoption de principe.

Alors, 6 ans plus tard, M. le Président, le gouvernement revient à l'Assemblée nationale avec le projet de loi 95, dont les similitudes avec le défunt projet de loi 54 sont évidentes. Certaines corrections ont également été apportées au premier projet, qui semblent aller dans le sens souhaité à l'époque par divers organismes. Il y avait plusieurs organismes qui avaient présenté des vues et une liste nous a été fournie par le ministre actuel, qu'on apprécie énormément. Le projet de loi 95, c'est donc l'aboutissement d'un long processus amorcé à l'époque où le Parti québécois était au pouvoir. Le projet de loi semble donc une version améliorée du projet de loi 54 et, comme à l'époque, il appert que l'Opposition officielle donnera son appui au principe dudit projet de loi.

Je vois qu'il y a plus de 500 articles, M. le Président. Je ne crois pas qu'on soit en état d'examiner en commission tous ces 500 articles d'ici la fin de la session, mais, assumant ou prenant pour acquis qu'il n'y aura pas d'élections d'ici la session d'octobre, on se réunira en commission pour examiner en détail tous ces articles. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Westmount.

Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Mise aux voix

Est-ce que la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 95, Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales, est adoptée?

M. Holden: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté.

Alors, nous continuons les travaux et je demande à M. le leader du gouvernement de m'indiquer avec quel article du feuilleton, s'il vous plaît.

Renvoi à la commission du budget et de l'administration

M. Béïisle: Tout d'abord, M. le Président, je vais faire motion pour que ledit projet de loi 95 soit déféré à la commission du budget et de l'administration pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion de déférence est adoptée?

M. Holden: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du gouvernement. (22 h 50)

M. Béïisle: Article 32, M. le Président.

Projet de loi 198 Adoption

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 32, M. le député de Verdun propose l'adoption du projet de loi 198, Loi sur la réduction du personnel dans les organismes publics et l'imputabilité des administrateurs d'État et des dirigeants d'un organisme public. Je cède la parole immédiatement au parrain du projet de loi, M. le député de Verdun.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Brièvement, M. le Président, je voudrais d'abord rappeler l'historique qui est à l'origine de ce projet de loi, le situer dans la perspective de l'action gouvernementale et arriver à débattre de quelques points majeurs. Et, en conclusion, M. le Président, j'annonce tout de suite qu'on aura un certain nombre de suggestions d'amendement à faire, de manière qu'on puisse se transformer à ce moment-là en commission plénière.

M. le Président, ce projet de loi est issu d'un travail de réflexion qui avait été mené par l'ensemble des députés libéraux pour arriver à un assainissement des finances publiques et arriver assez rapidement, dans un horizon de 5 ans, à l'équilibre du solde des opérations courantes, c'est-à-dire faire en sorte qu'on cesse d'emprunter pour payer l'épicerie. m. le président, ce projet de loi, à l'intérieur de la logique de ce projet de loi, a été structuré de 3 manières différentes, avec 3 éléments différents. d'une part, il distinguait entre les éléments de la fonction publique proprement dits. ensuite, il discutait sur ce qui touchait les réductions de personnel dans le grand réseau de l'enseignement et le secteur de la santé. et, enfin, il approchait les réductions de personnel aussi dans tout le secteur des sociétés d'état. m. le président, ce projet de loi se donnait, à l'intérieur du secteur de la fonction publique, un objectif de réduction, dans un horizon de 5 ans, de 12 % de l'ensemble du personnel, ce qui correspond exactement à l'attrition, c'est-à-dire au départ normal des personnes en retraite, et de 20 % du personnel cadre.

Pour ce qui touchait le secteur de l'éducation et le secteur de la santé, sans préciser le quota réellement, il arrivait à demander des réductions aussi, à savoir de suivre l'effort de réduction de personnel qui pouvait avoir lieu dans ces secteurs-là, étant bien conscient qu'il n'était pas opportun, ni justifié de couper ou de diminuer les gens en première ligne, que ce soit les infirmières, les enseignants ou les gens qui, réellement, sont en première ligne.

En troisième lieu, en ce qui touchait, à ce moment-là, les sociétés d'État, ce projet de loi voulait aussi amener une réduction du personnel d'encadrement et du personnel qui n'était pas un personnel de première ligne, pour ce qui était des sociétés d'État.

La structure du projet de loi était telle que, pour tenir compte de tous les cas particuliers, il existait une clause qui permettait au Conseil du trésor d'exclure, en tout ou en partie, des catégories de personnel de l'application dudit projet de loi.

Pour faire pendant, réellement, à cette approche d'effort de réduction était incluse une dimension où on s'assurait de Pimputabilité, c'est-à-dire de l'obligation des gestionnaires de rendre des comptes devant les élus.

Alors, ça, M. le Président, c'était à peu près ce qui avait été débattu à l'intérieur de la commission parlementaire. Je vais brièvement, ici, soulever ou aborder avec vous quelques problèmes qui ont été apportés et qui ont été soulevés, qui ont amené et qui justifient, à l'heure actuelle, quelques amendements. Et c'est pour ça que je ferai, tout à l'heure, la motion que nous nous transformions en commission plénière, de manière à pouvoir les étudier.

M. Léonard: D'accord.

M. Gautrin: Bien sûr, et je vois avec plaisir le député de Labelle qui est prêt à recommencer le même exercice, une fois de plus.

M. le Président, le premier problème qui a été perçu, c'est que, dans le secteur de l'enseignement ? et on pouvait avoir une certaine lecture de certains articles ? on traitait le réseau universitaire sur la même base que l'ensemble du réseau d'éducation. Or, vous savez que les liens traditionnels sont différents dans ce qui touche le réseau de l'éducation et le réseau universitaire. Le gouvernement n'a pas la responsabilité, à l'intérieur du réseau universitaire, de fixer ou de négocier les conventions collectives. Donc, dans un des amendements qu'on apportera, il y avait lieu de mieux préciser les liens qui existaient et de faire la distinction naturelle entre le secteur collégial et de l'enseignement secondaire et le secteur universitaire.

Deuxième élément, deuxième type de problème qui aurait pu arriver: une certaine lecture aurait pu nous amener à penser qu'on ne respectait pas, à l'intérieur de ce projet de loi, des principes assez fondamentaux, comme le principe de l'autonomie des corps constitués, c'est-à-dire l'autonomie des commissions scolaires ou l'autonomie des établissements collégiaux. Donc, il a été nécessaire de mieux préciser et de respecter à l'intérieur du projet de loi les questions touchant l'autonomie des commissions scolaires ou des collèges d'enseignement professionnel et général, c'est-à-dire les cégeps.

En dernier lieu, M. le Président, on a abordé dans ce projet de loi une question bien importante qui touchait Fimputabilité des gestionnaires de l'État. L'impu-tabilité, on pourra en débattre longtemps, c'est l'obligation de devoir rendre compte devant les élus. Il est clair, dans tout ce qui touche aussi bien la gestion ou le fonctionnement des différents ministères qu'en ce qui touche les sociétés d'État, qu'il y a une imputabilité interne, c'est-à-dire l'obligation des différents gestionnaires, sous-ministres en particulier, de devoir rendre compte à leur ministre, c'est-à-dire rendre compte devant l'exécutif.

Parallèlement à cela, on veut établir, à l'intérieur de ce projet de loi, une forme d'imputabilité externe, c'est-à-dire amener ces gestionnaires à devoir aussi rendre compte à l'ensemble des élus et, en particulier, à l'Assemblée nationale par le biais des commissions parlementaires. Une lecture des articles portant sur l'imputabilité pourrait amener à penser qu'on aurait remis en question le lien naturel qui doit exister entre le ministre et le sous-ministre. Ce que nous voulons, ce n'est pas remettre en question ces liens entre le ministre et le sous-ministre, mais bien réintroduire quelque chose de plus et ramener ces gestionnaires à devoir rendre compte aussi de leur gestion quotidienne devant les élus du peuple et devant les commissions parlementaires. 11 a donc été nécessaire, M. le Président, d'amener à cet effet un certain nombre d'amendements. Vous me permettrez aussi de dire que, si on changeait cette question des responsabilités ministérielles, il a fallu, par concordance aussi, modifier légèrement l'ensemble des autres articles pour tenir compte aussi de cette nécessité ou de cette volonté de bien exprimer la responsabilité ministérielle. Donc, en peu de mots, M. le Président, dans ce qu'on va proposer à ce projet de loi comme amendements, on veut, premièrement, mieux préciser l'autonomie des différents corps constitués, on veut mieux préciser aussi ou séparer les questions qui touchent aux universités et on veut aussi bien tenir compte des responsabilités ministérielles en ce qui touche les questions d'imputabilité.

Alors, M. le Président, j'ai transmis à mon ami de l'Opposition l'ensemble des amendements. Je pense qu'il faut, en termes de procédure actuellement, faire motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière... Oui?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Verdun, je m'excuse, je vous arrête tout de suite. Avant que vous soumettiez votre motion afin de transformer l'Assemblée en commission plénière, je vais, dans un premier temps, délibérer à savoir si c'est le président de l'Assemblée qui décide de la recevabilité de vos amendements ou si c'est le président de la commission plénière. Alors, vos amendements sont déposés. Je

vais me retirer et délibérer sur les amendements. Si ce n'est pas déjà fait, je vous demande de déposer vos amendements, mais n'allez pas plus loin quant à votre motion pour transformer l'Assemblée en plénière, s'il vous plaît.

Amendements déposés

M. Gautrin: Alors, M. le Président, sans en faire réellement lecture, comme je viens d'exprimer l'ensemble des questions qui touchent ces amendements, je tiens donc à déposer ces amendements. Si je comprends bien, c'est la procédure à suivre...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui.

M. Gautrin: ...de déposer ces amendements à l'ensemble des articles dont je viens d'exprimer les grandes lignes et, ensuite, je serai amené à pouvoir faire une motion pour transformer l'Assemblée en commission plénière. C'est bien cela?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui. M. Gautrin: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, tel que je viens de l'indiquer, je suspends les travaux de l'Assemblée nationale pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 23 heures)

(Reprise à 23 h 38)

Décision du président en vertu de l'article 198 du règlement

Le Vice-Président (M. Lefebvre): MM. les députés, nous reprenons les travaux de l'Assemblée. Je vais rendre la décision sur la question que j'ai prise en délibéré il y a une quinzaine de minutes. L'auteur du projet de loi 198, M. le député de Verdun, s'est prévalu de l'article 257, lors de son droit de parole sur ledit projet de loi 198, pour proposer l'étude d'amendements qu'il a déposés avant la suspension. La question que la présidence devait décider est la suivante: la recevabilité d'amendements présentés en vertu de l'article 257 doit-elle être décidée par le président de l'Assemblée ou le président de la commission plénière?

La règle générale codifiée à l'article 198 de notre règlement est à l'effet que «tout amendement doit, au moment où il est proposé, sur motion sans préavis, être transmis au président. Celui-ci décide de sa recevabilité». Dans les circonstances, il appartient au président de l'Assemblée de statuer sur la recevabilité des amendements, et ce, dans le but d'éviter de confier à la commission plénière qui doit s'ensuivre un mandat portant sur des amendements irrecevables et conséquem- ment inexistants. Il m'appartient donc de décider de la recevabilité des amendements du député de Verdun.

Est-ce que vous voulez faire des représentations ? et je m'adresse à M. le député de Verdun et au représentant de l'Opposition officielle ? sur les amendements en question? J'ai déjà évalué les amendements, mais je vous permets d'intervenir si vous voulez le faire. (23 h 40)

M. Gautrin: Brièvement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Très brièvement, effectivement.

Débat sur la recevabilité des amendements M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Brièvement, M. le Président, je rappellerai que ces amendements sont à l'intérieur de l'esprit du projet de loi. Ils viennent préciser certaines modifications d'application et tiennent un meilleur compte du rôle du ministre dans le processus d'imputa-bilité. Dans ce cadre-là, parce qu'ils sont dans l'esprit du projet de loi, d'après moi, ils sont recevables, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député le Labelle, si vous voulez intervenir. De votre banquette, s'il vous plaît, M. le député de Labelle. Allez-y.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, j'ai eu l'occasion de participer en commission parlementaire à l'étude de ce projet de loi. Nous en avons fait aussi l'étude ici, l'étude de principe, la deuxième lecture, et je dois vous dire ceci. Premièrement, nous avons fait des discours en deuxième lecture sur le projet de loi initial, original. En commission parlementaire, nous l'avons pratiquement réécrit. Il y a, je crois, seulement deux articles qui n'ont pas été modifiés; nous l'avons pratiquement réécrit. Et cet après-midi, M. le Président, nous recevons encore une liasse d'amendements qui consistent finalement à réécrire le projet de loi. Alors, de quoi avons-nous parlé en deuxième lecture? Et de quoi parlons-nous ce soir? Il s'agit pratiquement d'un autre projet de loi.

Je vous dis ça parce que, peut-être, sur chacun des articles, un article en lui-même pourrait être receva-ble, mais, sur l'ensemble, on peut se poser des questions. C'est une réécriture complète du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Joliette, je vais vous rendre la même décision que j'ai rendue cet après-midi, à 3 reprises. Si vous voulez retirer les propos qui s'adressaient au leader adjoint du gouvernement, qui venaient de vous, je vais vous reconnaître immédiatement.

M. Chevrette: M. le Président, je n'ai jamais rien

dit au leader adjoint du gouvernement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Au leader du gouvernement ? le leader du gouvernement. Alors, est-ce que vous retirez vos propos?

M. Chevrette: Je ne t'ai jamais rien dit, toi.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Au leader du gouvernement.

M. Bélisle: M. le Président, sur la recevabilité du projet de loi...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non, non, un instant, non, ce n'est pas ça, là. J'ai demandé au député de Joliette, s'il veut intervenir, de retirer les propos auxquels j'ai fait référence cet après-midi. M. le leader sait très bien de quoi je parle. Alors, si vous retirez vos propos, je vais immédiatement vous permettre d'intervenir, M. le député de Joliette, leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: J'ai le goût d'intervenir, c'est pas croyable. Donc, vous devez en conclure que je peux parler.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je conclus que vous retirez les propos auxquels je fais référence?

M. Chevrette: Bien sûr, bien sûr.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, allez-y. Je vais vous écouter.

M. Chevrette: Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais, dans un premier temps, savoir quelles sont les motions d'amendement qui ont été déposées, puisque je ne les ai pas. Je pourrais vous parler de la recevabilité en autant que je les aie, parce qu'on en a reçu en deux morceaux. On voudrait savoir ce qui a été déposé.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Les amendements ont été déposés au secrétariat, à la table, et vous les avez sous les yeux.

M. Chevrette: Oui, mais vous comprendrez qu'il y a une liasse. Vous, vous vous êtes retiré pour les avoir. Moi, comme leader, je ne les ai pas eus, sauf que...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, vous me demandez une suspension?

M. Chevrette: Non. Pour éviter la suspension, je voudrais savoir si ça, ça comprend tous les amendements qu'on a reçus sur l'heure du midi et qu'on retrouvait sous cette forme, plus l'amendement qu'on a reçu vers 21 h 15 ce soir, en plus. Est-ce que ça comprend les deux?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! Un instant! Un instant! Je suspends les travaux pour quelques minutes, de sorte que le leader de l'Opposition officielle et le député de Verdun pourront peut-être prendre quelques minutes pour vérifier les amendements qui ont été déposés tout à l'heure et si ça répond à votre question, M. le leader de l'Opposition officielle. Je suspends les travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 23 h 45)

(Reprise à 23 h 50)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, Mmes et MM. les députés, je vous rappelle que nous sommes toujours à l'Assemblée nationale et non pas en commission plénière. M. le député de Joliette et leader de l'Opposition officielle, je vous écoute.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je n'ai pas...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur la recevabilité.

M. Chevrette: Oui, oui. Je n'ai pas l'intention de faire une grande guerre sur la recevabilité. Mais, étant donné que l'Assemblée nationale, ici, a voté des articles, des pouvoirs et des droits et a enchâssé d'une certaine façon, au niveau de l'adoption de principe, des clauses qui donnaient des pouvoirs réels, des droits réels de contrôle, et que le député de Verdun, parrain de la loi, les modifie au niveau de la troisième lecture, est-ce qu'en vertu... Vous allez m'expliquer, en vertu de nos règlements, de nos règles, de nos traditions parlementaires, comment on peut, au niveau d'une troisième lecture, aller soustraire des droits, des devoirs qui étaient imputés dans un projet de loi, des obligations de faire à des ministres, et qu'on arrive en troisième lecture: article supprimé, article supprimé, article supprimé.

Expliquez-moi ça, comment on peut jouer au fou avec des parlementaires... Puis je dis «jouer au fou», ce n'est pas péjoratif, là. Comment on peut, au niveau du Parlement, faire discuter du monde pendant de longues heures, en plénière, ici, au niveau des principes, amener ces mêmes personnes-là en commission parlementaire discuter sur ces principes et arriver ici, au Parlement, en troisième lecture, au moment de l'adoption du tout fini,

du tout, d'un produit sur lequel on a travaillé, puis, là, ça n'existe plus, ces droits-là, ces devoirs-là n'existent plus? M. le Président, franchement là, on peut bien amuser certains députés du pouvoir. On ne s'amusera pas aux dépens de nous autres à l'Assemblée nationale.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, la question que vous me soulevez, le point que vous soulevez, M. le député de Joliette, c'est la conséquence de l'amendement, ce à quoi vous faites référence. À partir du moment où la présidence décide que l'amendement est recevable ? évidemment, un amendement, ça a des conséquences ? à partir du moment où l'amendement ou les amendements ne modifient pas l'essence même du projet de loi, ils sont recevables, mais avec, évidemment, des conséquences. Et vous pouvez avoir des réserves, effectivement, sur les amendements en question. Ce qu'il restera à faire à votre formation, c'est de voter contre l'amendement, et vous pouvez même voter contre tout le projet de loi comme tel.

M. Chevrette: Vous me permettrez d'ajouter, M. le Président, qu'en troisième lecture un ministre ou le parrain d'une loi a des prérogatives d'apporter des amendements. Mais il n'est plus question de retirer des articles. Il peut modifier des articles. Il peut changer des articles. Il peut apporter des amendements à certains articles. Mais là, si j'ai bien compris, le projet de loi, on vient de lui amputer à peu près la moitié de ce qu'il avait au départ. Moi, je pense qu'ils doivent voter contre, s'ils ne sont pas d'accord avec certains articles. Mais on ne peut pas les supprimer en vertu de la jurisprudence, M. le Président. Sinon, ça veut dire quoi, légiférer? Ça veut dire que tout le processus normal de discussions qu'on force, qu'on oblige en vertu de l'étude du principe et qu'après cela on va étudier... Et en commission parlementaire, vous le savez très bien qu'on n'a aucun droit de modifier le principe d'une loi ou les principes compris dans une loi.

Je me souviens, il y a eu des cas de jurisprudence extraordinaires dans ce Parlement. Je me souviens, au niveau de l'assurance automobile, quand on a voulu ajouter des principes au niveau de la commission, c'était Jean-François Bertrand, à l'époque, qui était président de commission, et ça a fait jurisprudence dans le Parlement. Il n'était plus question d'ajouter ou de soustraire des principes déjà votés au niveau de l'adoption de principe en deuxième lecture.

Là, ce soir, M. le Président, à l'heure du crime dans quelques minutes, on vient nous dire: II y aura 5, 6 articles d'amputés. On modifie en profondeur ? et je prends à témoin le député de Vanier ? on modifie en profondeur, par l'article 10, le rôle même du ministre. Si ce n'était pas un principe, ça, qu'on a discuté en deuxième lecture, moi, j'en perds mon latin. On vient de donner un pouvoir à l'article 10, par exemple, et je le donne à dessein comme exemple. En vertu de l'article 10, «le ministre peut», n'importe quand, quand il le veut, à sa guise, à sa volonté. Il vient donc de détruire tout le principe qu'on a étudié du contrôle par l'Assemblée nationale, par les membres de l'Assemblée nationale et du principe même de l'imputabilité. Minute, s'il vous plaît. Je veux bien jouer, moi, le rôle, mais je ne veux pas qu'on s'amuse au détriment, par exemple, des parlementaires. Et j'ajouterai... Je vous référerai à l'article 244, M. le Président, en ce qui regarde le Recueil des décisions concernant la procédure parlementaire, et vous pourrez y voir des décisions: une motion d'amendement ne visant qu'à supprimer un article est irrecevable. Et ça, M. le Président, c'est le 13 juin 1985, par Claude Lachance, en commission ? 244.3.

M. le Président, je pourrais également, en tout cas, vous donner d'autres exemples qui se font présentement, même, dans une commission parlementaire, au niveau de la loi 86, puis on a empêché, on a jugé irrecevables des amendements visant à supprimer des articles. Et là, on en est rendu non pas en commission, en plus. Pour montrer comment le processus est encore plus fou, c'est qu'au niveau même d'une commission, article par article, de l'autre côté, on nous dit que c'est irrecevable, des amendements visant à supprimer un article, puis ce soir, ici, après que l'étude eut été faite article par article, on nous arrive ici, puis il en supprime 3 ou 4. Franchement, là! Je comprends que ça a été...

Et je pourrais plaider sur un autre point, M. le Président. Ce midi, voici ce qu'on a reçu. Ça serait bon de le montrer à tout le monde qui a le courage de nous écouter. Des amendements écrits à la main. Des amendements écrits à la main à quasiment tous les articles, M. le Président. Des gros cercles, des flèches, un amendement dans le titre. Regardez-moi ça, les beaux petits carreaux. Ça paraît bien, légiférer de même. Ça me fait penser à la loi 178, quand le ministre délégué à la langue française, à l'époque, le député de Rosemont, je crois, était arrivé avec un amendement sur un bout de papier, au crayon de mine. Je pense que... Franchement, là! Ça, on va garder ça dans les archives: Comment légiférer de façon improvisée! Il y a des limites.

M. le Président, je ne voulais pas plaider plus qu'il faut sur la recevabilité. Je vous fais confiance sur le respect des règlements, mais je vous réitère que ce n'est pas là une façon de légiférer, à mon point de vue, qui est bien, bien noble. Ça ne ressemble pas à du sérieux comme on doit en avoir ici, quand on légifère.

Décision du président

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, M. le leader de l'Opposition officielle, vous avez fini par plaider sur la recevabilité. C'est ce que je vous avais invité à faire, si vous vouliez le faire.

J'ai indiqué tout à l'heure que, pour évaluer la recevabilité d'un amendement ou d'amendements au pluriel, la présidence ? je vais vous reconnaître après, M. le député de Vanier ? doit vérifier si les amendements respectent le principe ou les principes du projet de loi original. C'est ce qui doit guider la présidence. Et

Et je n'ai pas le choix. La jurisprudence, la doctrine est dans ce sens-là, et même les règlements sont dans ce sens-là. À partir de ce moment-là, M. le leader de l'Opposition officielle, je n'ai pas le choix, je dois les déclarer recevables. Je l'ai indiqué tout à l'heure, vous aurez à décider si vous votez pour ou contre ? et c'est le privilège et le pouvoir que vous avez ? les amendements que j'ai déclarés recevables. M. le député de Vanier.

M. Lemieux: M. le Président, j'aimerais seulement ajouter cette nuance au niveau de l'exposé du porte-parole, je dirais, de l'Opposition officielle, le député de Joliette. Au niveau des principes, lorsque le député de Joliette a cité l'article 10, j'aimerais vous faire remarquer que le principe de Fimputabilité existe toujours. Par contre, il se peut qu'il soit différent dans son application. Mais ce qui est important, au niveau comme tel du texte juridique et de l'article de loi, c'est que le principe, lui, demeure, même si, dans son application et dans ses modalités, il peut être différent. Et, sur le plan, je dirais, pratique comme tel, comme nous sommes en troisième lecture et comme le projet de loi appartient à celui qui l'a présenté, soit le député de Verdun, celui-ci est en droit, s'il le veut, de faire en sorte d'y apporter des amendements qui, non seulement ne font pas disparaître le principe comme tel qui peut être modifié, je dirais, dans son existence ou dans son application, il peut aussi faire en sorte, s'il le veut, de retirer des articles qu'il a déjà déposés. C'est son privilège, et la jurisprudence est à cet effet-là, (minuit)

M. Chevrette: Une question bien précise de règlement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le leader.

M. Chevrette: Pouvons-nous présenter un amendement qui a pour effet de retirer, de supprimer un article? Est-ce qu'on peut? Ou si le seul moyen, en vertu de nos règlements, n'est pas de voter contre undit article qui a pour effet de le supprimer? Ma question est très précise, et je n'ai pas eu de réponse, à mon point de vue, à cette question. N'est-il pas exact qu'en vertu de nos règles de procédure et de règlement on ne peut pas présenter un amendement qui a pour objectif de supprimer un article, mais qu'on invite les parlementaires à voter contre ledit article, ce qui a pour effet de le supprimer? Mais on ne peut pas, à ce stade-ci, demander la suppression d'un article par amendement. Et c'est ça, ma question de règlement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Ce que vous dites pourrait être vrai en étude détaillée, ce qui est différent lorsqu'on en arrive à l'étude du rapport du même projet de loi. Et il y a une nuance entre retirer un article, retirer purement et simplement un article, et proposer un amendement qui va à rencontre du même article ou qui le modifie. C'est différent.

Alors, s'il n'y a pas d'autres présentations, j'ai eu, au moment où je délibérais sur la première question, à savoir s'il appartenait à la présidence de décider de la recevabilité, j'ai, en même temps, étudié et examiné des amendements, amendements que je déclare recevables.

M. le député de Verdun.

Renvoi à la commission plénière

M. Gautrin: M. le Président, puisque vous déclarez les amendements recevables, je vais faire motion, en vertu de l'article 257: Que cette Assemblée se transforme en comité plénier pour étudier les amendements.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, il peut y avoir de brefs commentaires sur cette motion-là. S'il n'y a pas de commentaires d'un côté ou de l'autre, je vais mettre aux voix la motion en question.

Est-ce que la motion proposant de transformer l'Assemblée nationale en commission plénière est adoptée?

Une voix: Adopté.

M. Chevrette: Non, M. le Président. Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui. M. Chevrette: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, qu'on appelle les députés! (0 h 3 - 0 h 9)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, Mmes et MM. les députés, nous allons mettre aux voix la motion de M. le député de Verdun.

Mise aux voix

Alors, M. le député de Verdun propose que l'Assemblée nationale se transforme en commission plénière.

Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever. (0 h 10)

Le Secrétaire adjoint: M. Ryan (Argenteuil), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Cu-sano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M. Houde (Berthier), M. Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), M. Doyon (Louis-Hébert), Mme Bégin (Bellechasse), M. Leclerc (Taschereau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Dauphin (Marquette), M. Lemieux (Vanier), M. Charbonneau (Saint-Jean), M. Bradet (Charle-voix), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M. LeSage (Hull), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. La-frenière (Gatineau), Mme Boucher Bacon (Bourget), M.

Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), M. Khelfa (Richelieu), M. MacMillan (Papineau).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Biais (Masson), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Ho-chelaga-Maisonneuve), Mme Juneau (Johnson), Mme Caron (Terrebonne), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), M. Paré (Shefford), Mme Dupuis (Verchères), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélanger (Anjou).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: pour: 37 contre: 14 abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, la motion est adoptée, et, à partir de maintenant, l'Assemblée se transforme en commission plénière pour l'étude du projet de loi 198.

(0 h 12 ? 0 h 20)

Commission plénière

M. Bissonnet (président de la commission plénière): À l'ordre, s'il vous plaît! Si vous voulez prendre place.

M. Chevrette: M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Chevrette: Est-ce qu'on pourrait connaître, avant que ne débutent les travaux, les personnes-ressources du député de Verdun?

M. Gautrin: M. le Président, vous voulez poser quoi, comme question?

M. Chevrette: C'est quoi, la question? C'est qu'on voudrait connaître l'identité de vos personnes-ressources.

M. Gautrin: Les personnes qui sont derrière moi sont les juristes de l'Assemblée nationale...

M. Chevrette: Leur nom?

M. Gautrin: ...à savoir, M. Pierre Jacques et Claude Rioux.

M. Chevrette: Pardon?

M. Gautrin: Pierre Jacques et Claude Rioux.

M. Chevrette: Puis la madame?

M. Gautrin: Carole Mardi, attachée politique. Est-ce que je peux savoir qui vous accompagne?

M. Chevrette: Oui.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Ça me fait plaisir. M. André Rivest et M. Charles Grenier, qui est mon chef de cabinet et avocat.

Des voix: Oh!!!

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Chevrette: Et un économiste, M. Rivest. Le Président (M. Bissonnet): La commission... Une voix: Ce n'est pas Jean-Claude. M. Chevrette: C'est parent avec.

Étude des amendements proposés par le député de Verdun

Le Président (M. Bissonnet): Vu que vous vous êtes présentés de chaque côté, nous allons entreprendre les travaux de la commission plénière selon le mandat qu'elle avait reçu de l'Assemblée en ce qui a trait au projet de loi 198, Loi sur la limitation de l'embauche dans les organismes publics et l'imputabilité des administrateurs d'État et des dirigeants d'un organisme public. Il s'agit d'étudier les amendements qui ont été déclarés recevables par la présidence. Alors...

M. Chevrette: Est-ce qu'on a droit à des remarques préliminaires, M. le Président?

Le Président (M. Bissonnet): C'est une bonne question, M. le député de Joliette, mais je tiens à vous dire que nous sommes ici sur un mandat, en vertu de l'article 257, où nous étudions les amendements qui ont été déclarés recevables, et je tiens à vous dire qu'en vertu de l'article 245 chaque député peut parler 20 minutes sur chacun des amendements qui est proposé, tel qu'il est conforme au règlement en vertu de l'article 245 dont...

M. Chevrette: Non, mais étant donné qu'il y a un amendement au titre.

Le Président (M. Bissonnet): Nous sommes à l'article 1. Alors, je vais permettre des interventions de 20 minutes de chaque côté. Chaque membre de l'Assemblée peut intervenir 20 minutes, en commençant par l'auteur, et l'auteur peut toujours revenir en vertu de l'article 246 pour utiliser un droit de 5 minutes après chaque intervention.

Alors, M. le député de Verdun, sur l'article 1.

M. Gautrin: Merci, M. le Président.

Les amendements que l'on présente à l'article 1 sont des amendements purement techniques. La rédaction de l'article 1.2 aurait eu pour effet de transférer, de couvrir dans 1.2 un certain nombre d'organismes gouvernementaux qui sont prévus à l'annexe C de la loi 37. Et le 1.3 doit couvrir, tel qu'en la logique de ce projet de loi, l'ensemble des organismes gouvernementaux qui ne sont pas du secteur de la santé ou du secteur de l'éducation.

Dans ce cadre de logique, on a, dans les amendements, retransféré les organismes qui étaient couverts par 1.2 dans 1.3, c'est-à-dire de les traiter comme organismes gouvernementaux, et c'est le but des amendements qui sont présentés actuellement, c'est-à-dire d'ajouter «établissements et», de supprimer les mots «les organismes gouvernementaux» et d'ajouter au paragraphe 3 «tout organisme gouvernemental visé par la Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic ainsi que».

Donc, essentiellement, ce sont les organismes gouvernementaux qui sont prévus à l'annexe C de la loi 37, qui, au lieu d'être inclus dans l'article 1.2, sont inclus dans l'article 1.3.

Il faut comprendre dans quelle logique ceci est fait, c'est de manière à pouvoir les traiter dans l'article 5, et non pas dans l'article 4.

M. Chevrette: As-tu de quoi à dire pour justifier ça, là?

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Labelle.

M. Léonard: Quelle est la différence entre des organismes, tout autre organisme visé par la Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic, et tout autre organisme dont le personnel est rémunéré selon les normes et barèmes qui sont, en vertu de la loi, déterminés et approuvés par le gouvernement ou stipulés dans une convention collective négociée et agréée avec l'accord du gouvernement? C'est la même chose. Quelle est la différence exactement?

M. Gautrin: C'est dans la première partie. Vous touchez les organismes qui sont prévus à l'article c de la loi 37.

M. Chevrette: Hydro-Québec.

M. Gautrin: En particulier, Hydro-Québec, la Commission de la construction du Québec, la commission des droits de l'homme, la Commission de formation professionnelle, la Commission des services juridiques, la Régie des installations olympiques, la Régie des alcools, la Société des lotos, la radiotélévision du Québec, et quelques autres...

M. Léonard: Ils vont être touchés par cette loi-là?

M. Gautrin: Pardon?

M. Chevrette: La Sûreté du Québec?

M. Gautrin: La Sûreté du Québec aussi, oui, la Société des traversiers du Québec.

M. Léonard: L'Assemblée nationale n'est pas incluse là-dedans?

M. Gautrin: Vous savez parfaitement que l'Assemblée nationale, puisque vous avez fait l'étude... article, n'est pas conclue à cet endroit-là, et on le traite dans un autre article du projet de loi.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a d'autres remarques sur l'article 1?

Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, sur l'article 1.

Mme Harel: Oui, M. le Président.

Sur l'article 1, je recevais, en date du 17 mai dernier, copie d'une lettre signée par Jacques Mongeau, le président du Conseil scolaire de l'île de Montréal, qui était adressée au premier ministre. Et cette lettre, qui était également transmise à la ministre de l'Éducation, Mme Lucienne Robillard, au ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor, à la présidente de la Fédération des commissions scolaires du Québec, Mme Drouin, au président de l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec, M. Peter Riordon, et à chacun et chacune des présidents des commissions scolaires de l'île de Montréal.

Cette lettre, M. le Président, j'aimerais en faire rapidement lecture, si vous me le permettez, parce qu'elle permet de comprendre l'extrême mécontentement qui a surgi dans le milieu scolaire montréalais à la suite du dépôt du projet de loi 198. Je rappelle qu'elle est signée par l'actuel président du Conseil scolaire de l'île, qui était, en 1981, candidat libéral dans le comté de Sauvé, à Montréal, et qui, je crois, a des arguments qui auraient dû faire réfléchir le député de Verdun et ses collègues qui soutiennent le dépôt de ce projet de loi 198.

Le président du Conseil scolaire de l'île, M. Mongeau, écrivait ceci: Je ne puis croire que le gouvernement veuille aller de l'avant avec un tel projet sans avoir au moins eu un minimum de concertation avec ses

partenaires. Il ajoutait: D m'apparaît qu'un minimum d'informations et de concertations préalables auraient permis d'éviter les problèmes qui, à mon point de vue, disait-il, découleront inévitablement de l'application de cette loi si elle n'est pas modifiée.

Et il ajoutait: Je m'étonne également que le gouvernement, qui répète sans cesse qu'il faut décentraliser l'administration gouvernementale pour la rapprocher des administrés, procède avec un projet de loi qui nie aux organismes publics, et au milieu scolaire en particulier, la responsabilité locale en matière d'embauché et de gestion des personnels.

Et Me Mongeau ajoute: II m'apparaît que cette attitude gouvernementale révèle un profond mépris pour les gouvernements locaux que sont les commissions scolaires et le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Peut-on imaginer critique plus sévère?

Au lieu de rechercher la concertation de ses partenaires, ajoute M. Mongeau, le gouvernement garde entre ses mains des décisions majeures concernant la gestion des commissions scolaires et du Conseil scolaire de l'île de Montréal.

Ce n'est donc pas un projet de décentralisation, de dévolution de pouvoir, de dévolution de compétences, de redistribution du pouvoir de décider pour augmenter le sens des responsabilités. Ce n'est pas de ça dont il est question ici. À l'inverse, on assiste à une hypercentrali-sation, à une hypertrophie de la centralisation entre les mains de la bureaucratie gouvernementale. C'est exactement l'envers de l'effet qui est recherché qui, finalement, est celui qui va résulter de l'adoption du projet de loi 198.

Et Me Mongeau ajoutait: Ce projet de loi ne permet vraiment pas, au niveau local, de prendre les mesures les plus adéquates pour répondre aux besoins particuliers de chaque organisme. La loi ne tient aucun compte des coupures qu'auraient déjà pu faire les organismes au niveau local et encore moins des nouvelles exigences qui leur sont par ailleurs imposées par le gouvernement ou par les lois. (0 h 30)

C'est un projet de loi qui est complètement artificiel, M. le Président, en regard des défis que ces organismes ont à relever compte tenu des coupures successives, à répétition, qui leur ont été imposées depuis quelques années.

Et le président, M. Mongeau, ajoutait: On préfère remettre entre les mains du Conseil du trésor une évaluation de la situation de chacune des commissions scolaires et ne pas reconnaître que les commissions scolaires, que le Conseil scolaire de l'île sont redevables à leurs commettants. Ce sont là des organismes démocratiques dont les élus sont redevables par suffrage universel aux citoyens qui les ont choisis.

Et il terminait en ajoutant: Redevables à leurs commettants, et ils sont les mieux placés pour évaluer leur situation propre. Je ne comprends pas qu'après avoir subi des compressions budgétaires à répétition on veuille encore forcer à réduire leur personnel en mettant en danger la qualité même de l'éducation que nous voulons défendre. Je souhaite que le gouvernement révise sa position et qu'il suspende l'adoption du projet de loi avant d'en avoir évalué tout l'impact pour les organismes visés et en collaboration avec ceux-ci.

Alors, M. le Président, je comprends que l'article 1 au paragraphe 2, qui prévoit assujettir le Conseil scolaire de l'île de Montréal aux dispositions de ce projet de loi, n'a pas été modifié, que l'appel de Me Mongeau n'a pas été entendu, que, finalement, le gouvernement décide de poursuivre en appuyant le projet de loi du député de Verdun dans la voie où il s'est engagé, qui est une voie de bureaucratisation, qui est une voie de centralisation, et je dois dire que l'on trouve ça extrêmement déplorable.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verdun, sur cette...

M. Gautrin: Brièvement, je pense qu'on pourra reprendre ce débat lorsqu'on abordera les propositions d'amendements que nous apportons à l'article 4, qui est beaucoup plus pertinent que le remarque la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Je voudrais lui faire remarquer qu'il n'est pas question, qu'il n'a jamais été question, dans ce projet de loi, de se substituer aux organismes locaux pour faire la gestion du personnel. Ce qui, dès le début, a été demandé, il s'agissait simplement d'avoir une vision réseau et une vision globale pour évaluer l'évolution des effectifs, pour mieux préciser ce qui aurait pu laisser... Je comprends les inquiétudes de certaines personnes qui, d'après moi, étaient injustifiées. Pour mieux préciser, on a été amenés, et c'est la raison pourquoi on est réunis ici aujourd'hui, à présenter certains amendements, amendements que vous allez retrouver à l'article 4.

Le Président (M. Bissonnet): Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: M. le Président, ce que l'article 4 prévoit, en l'occurrence, là, si on en fait l'application en regard du Conseil scolaire de l'île de Montréal, c'est que la ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de la Science, en l'occurrence, la même personne actuellement, doit soumettre au Conseil du trésor pour approbation, avant le 30 septembre 1993, un plan de réduction qui devra couvrir la période du 1er avril 1993 au 1er avril 1998, du personnel des organismes publics visés au paragraphe 2, donc du personnel du Conseil scolaire de l'île de Montréal et des commissions scolaires, sur la base du personnel en place le 1er avril 1993.

C'est un amendement de pure technicalité puisque, pour l'application du projet de loi, les ministres, en l'occurrence, la ministre de l'Éducation, pour ce qui concerne les organismes relevant de sa compétence, devra soumettre au Conseil du trésor, pour approbation, un plan de réduction pour 5 années, de 1993 à 1998,

qui va lui avoir été transmis par le Conseil scolaire de l'île. Alors, on assujettit tout autant les organismes comme le Conseil scolaire à l'application d'une loi qui va centraliser... Imaginez-vous la paperasse, M. le Président. Imaginez-vous la bureaucratie, le coût d'une loi comme celle-là.

Moi, je croyais que des bills privés, des lois présentées par des députés ne pouvaient l'être que dans la mesure où ils n'engageaient pas de fonds publics. Je suis convaincue qu'une étude la moindrement sérieuse nous démontrerait que cette loi va coûter cher, M. le Président, pour le peu de services qu'elle va rendre à notre société.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, d'une part, je voudrais rappeler à la députée de Hochelaga ? je ne sais pas quel amendement elle lit ? que l'amendement qui a été déposé ne fait pas référence pour approbation...

Pardon? Vous ne comprenez pas? Alors, je vais parler plus fort. C'est rare que les gens ne me comprennent pas. L'amendement qui vous a été déposé tenait compte ? est-ce que vous comprenez? merci ? à ce moment-là, non pas de la date de 1993, mais de 1994, premièrement, et ne fait pas référence à l'approbation par le Conseil du trésor; d'autre part, parle non pas de plan par institution, mais d'un plan sectoriel, c'est-à-dire pour l'ensemble du secteur de l'éducation, du secteur de l'enseignement supérieur, du réseau collégial et du secteur de la santé.

Le Président (M. Bissonnet): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président.

Essentiellement, mes propos rejoignent ceux de ma collègue de Hochelaga-Maisonneuve, parce que je ne crois pas que l'amendement apporté à l'article 4 vienne changer essentiellement l'esprit qu'on retrouve dans le projet de loi.

Ma question est cependant assez précise et ça concerne les régies régionales. Si je comprends bien, on va ajouter cette notion de régie régionale qui serait concernée par le deuxième alinéa de l'article 1. C'est le même raisonnement qui peut s'appliquer aux régies régionales, évidemment, avec des nuances, je l'admets, assez importantes, parce qu'on ne fait pas référence à des gens qui sont imputables au même titre que les commissaires dans les commissions scolaires, mais, cela étant dit, l'objectif du ministre de la Santé et des Services sociaux lorsqu'il a implanté des régies, c'était d'assurer qu'il y ait une autonomie plus grande de la part des responsables des régies régionales. Alors, je m'étonne quand même qu'on les inclue dans cet alinéa 2 de l'article 1.

D'autre part, j'ai une question plus pointue et plus précise. On parle des régies régionales et des conseils régionaux. Ça, c'est dans le corps de la loi: les conseils régionaux de la santé et des services sociaux. Est-ce qu'ils ne sont pas assimilables aux régies régionales, les conseils régionaux, parce qu'ils ont simplement conservé le nom et qu'on est tenu de le mettre à ce moment-là nommément dans l'article de loi?

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Mme la députée de Taillon, les régies régionales, bien sûr, ont été amenées en débat en commission parlementaire parce qu'au moment où la loi avait été déposée, la loi 120 n'avait pas encore été adoptée; donc, il était nécessaire de l'inclure. Quant aux conseils régionaux de la santé et des services sociaux, ils sont maintenus; parce qu'il en reste encore quelques-uns, si mon information est exacte. Je pense que c'est celui des Attikameks et des Cris. Il reste 1 ou 2 conseils régionaux de la santé et des services sociaux.

Mme Marois: D'accord.

M. Gautrin: C'est-à-dire, l'instauration des régies régionales n'a pas totalement supprimé les conseils régionaux de la santé et des services sociaux, bien que, dans la majeure partie des cas, elles se sont substituées aux conseils régionaux de la santé et des services sociaux.

Mme Marois: Bon. Je remercie le député de l'information plus précise. Cependant, très brièvement, il sait que c'est essentiellement ce que j'ai défendu depuis les débuts de nos travaux sur ce projet de loi. J'ai toujours imaginé qu'il y avait quelque chose d'incompatible dans les objectifs poursuivis par le projet de loi qui étaient, d'une part, de rendre imputables des gestionnaires, des administrateurs, de les rendre davantage responsables des gestes qu'ils posent et de devoir en rendre compte soit à l'Assemblée nationale ou autrement, selon ce que prévoit la loi, et en même temps qu'on impose des règles strictes en matière de réduction des personnels. Là, on constate bien que ce n'est pas de la limitation d'embauché, mais c'est de la réduction de personnel. On change essentiellement les fins de la loi parce que, en changeant le titre ? on y viendra plus tard; malheureusement, ça ne vient qu'à la fin à cause des modalités que l'on utilise pour adopter nos lois, ça ne va venir seulement qu'à la fin ? on va constater qu'on change l'objectif du projet de loi. (0 h 40)

Alors, je reste convaincue que c'est, à mon point de vue, contradictoire: on ne peut pas, d'un côté, dire aux gens ce qu'ils vont faire, ce qu'ils doivent faire, comment ils doivent le faire et, en même temps, prétendre qu'on les rend davantage responsables.

Alors, c'est ce qu'on retrouve aux amendements qui sont apportés à la section I, pour tout simplement préciser que ça s'adresse encore à un plus grand nombre

de personnes que dans le projet initial.

M. Gautrin: L'objectif, si vous me permettez, quand même, et on pourra en débattre beaucoup plus à fond lorsqu'on abordera l'article 4, parce que je comprends que vos remarques portent principalement sur les amendements à l'article 4... l'objectif, si vous remarquez, c'est ne pas se substituer, même dans le réseau de la santé, puisque vous avez abordé la question du réseau de la santé, c'est ne pas se substituer aux gestionnaires, mais de suivre quand même ce qui se passe en termes d'effectifs dans l'effort qui est poursuivi de ce côté-ci de réduire les dépenses de l'État. Et, là-dedans, on demande aux gestionnaires, tout en respectant leur autonomie, de soumettre un plan, de manière qu'il y ait un plan global, pour l'ensemble du réseau, qui soit déposé et soit suivi année après année.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Labelle.

M. Léonard: Oui, M. le Président.

Je voudrais, quant à l'article 1, simplement exprimer 2 points de vue. Le premier m'a été transmis par le recteur de l'Université de Montréal. Je le donne simplement comme point de vue, parce que j'aurai l'occasion de revenir, dans un article ultérieur, sur les universités. Mais je vous lis sa lettre qui est datée du 14 mai. «Je vous fais parvenir ci-joint une lettre que le président de la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec, M. Michel Gervais, adressait au premier ministre du Québec le 7 mai dernier. Elle exprime la consternation du milieu universitaire devant le projet de loi 198, Loi sur la limitation de l'embauche du personnel dans les organismes publics et Fimputabilité des administrateurs d'État et des dirigeants d'un organisme public, qui, à notre avis, constitue un précédent dangereux en ce qu'il intervient directement dans la gestion des ressources humaines des universités. J'ose espérer que vous serez sensible aux arguments que contient la lettre du président Gervais et que vous interviendrez afin que des solutions réalistes et praticables soient trouvées aux problèmes que tente de solutionner le projet de loi 198.»

Je veux juste insister, revenir sur une phrase que je viens de vous lire et qui dit «constitue un précédent dangereux en ce qu'il intervient directement dans la gestion des ressources humaines des universités». Je sais que le député de Verdun connaît le milieu universitaire et connaît l'importance en particulier de la liberté académique, et dont il est question lorsqu'il s'agit de la gestion des ressources humaines dans les universités. C'est une tradition qui remonte même au Moyen Âge et sur laquelle il veut revenir ce soir. Alors, je veux simplement dire que, lorsque les recteurs des universités interviennent dans ce dossier, ils le font en raison d'un certain passé.

Deuxièmement, M. le Président, j'aurais pensé que, suite à la commission parlementaire, le gouverne- ment ou le député de Verdun, ministre d'un soir, se raviserait, qu'il proposerait que cette loi ne s'applique pas seulement à tous les organismes, pour être de bon compte, mais qu'elle s'applique aussi aux députés de l'Assemblée nationale. Si on propose de couper tout le monde, de couper les effectifs, de réduire les effectifs de 20 %, pourquoi pas à l'Assemblée nationale? C'est une proposition que nous lui avions faite en commission parlementaire, j'aurais pensé qu'il aurait pu l'amener ici.

Alors, M. le Président, à ce stade-ci, je veux simplement rappeler que ce projet de loi est un projet de loi insensé. Nous avons voté contre pratiquement tous ses articles, puis nous maintenons ce point de vue présentement. Alors, c'est ce que je voulais dire sur l'article 1.

Le Président (M. Bissonnet): Avez-vous quelque chose à ajouter, M. le député de Verdun?

M. Gautrin: M. le Président, je ne referai pas le débat qu'on a fait longuement en commission parlementaire avec le député sur la question de l'Assemblée nationale. Je reviendrai sur la question qui touche les recteurs, la lettre de Gilles Cloutier, que M. le député de Labelle vient de lire.

Je rappellerai que, suite aux remarques de la Conférence des recteurs, j'ai pu rencontrer Michel Gervais, Gilles Cloutier et David Johnson, d'ailleurs, et c'est dans ce cadre-là qu'on a été amené à amener un amendement en 7 de ce projet de loi, qui sera étudié ultérieurement, amendement qui, bien que, d'après moi, initialement, le projet de loi étudié en commission ne remettait aucunement en question le lien traditionnel des universités avec le gouvernement, vient préciser ce qui aurait pu être des craintes qui auraient pu être soulevées par ledit projet de loi.

M. Léonard: M. le député va reconnaître que ce qui est dit dans la lettre du président de la CREPUQ va exactement dans le sens de l'argumentation que nous avons soulevée en commission parlementaire et depuis le début du projet de loi. Les recteurs d'université interviennent à ce moment-ci, mais, en réalité, depuis longtemps, c'est exactement l'argumentation qu'a servie l'Opposition au député de Verdun.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je m'excuse, je pense et je maintiens que l'interprétation, même initiale, de la Conférence des recteurs, d'après moi, était une lecture erronée du projet de loi, mais, pour clarifier les choses, on a amené ici un amendement qui va, à mon sens, clarifier les choses et satisfaire l'ensemble de la Conférence des recteurs.

Le Président (M. Bissonnet): M. le leader de l'Opposition officielle et député de Joliette, la parole est à vous.

M. Chevrette: Étant donné que le député de Verdun est issu du monde universitaire, qu'il a rencontré les recteurs, est-ce qu'il a demandé à sa collègue de rencontrer les commissions scolaires pour apporter un correctif?

M. Gautrin: De quelle collègue voulez-vous parler?

M. Chevrette: Celle qui est supposée avoir le chapeau de l'Éducation.

M. Gautrin: Bien sûr que la ministre de l'Éducation rencontre les commissions scolaires. D'ailleurs, elle était présente au congrès de la Fédération des commissions scolaires.

M. Chevrette: Non, mais sur ce sujet bien précis, là. Je ne voudrais pas que vous commenciez à jouer, même au ministre, à la période des questions. On est en étude article par article, et je vous pose une question. Est-ce que vous avez rencontré les commissions scolaires concernant ce projet de loi?

M. Gautrin: Oui, j'ai échangé avec le président des commissions scolaires.

M. Chevrette: Puis? Ils ne vous ont pas convaincu, eux autres. M. le Président, moi, je voudrais intervenir sur le point des commissions scolaires en particulier. Vous savez pertinemment que les commissions scolaires, c'est souvent par des directives administratives, des plans de gestion qu'on attribue des subventions aux commissions scolaires. À supposer qu'on décide de changer le calendrier scolaire des étudiants, par exemple ? on sait qu'au Québec, ce n'est pas nécessairement l'endroit, dans le monde, qui a le plus de minutes de classe ? et qu'on décide de faire en sorte que les étudiants québécois aient plus d'heures de classe/semaine et qu'on négocie un ratio différent qui irait complètement à rencontre non pas d'une diminution d'enseignants, mais d'une augmentation assez radicale... Ça pourrait aller jusque-là, dépendant de ce qu'on veut repenser ou retoucher au niveau du système scolaire.

Moi, je lis le projet de loi. Peut-être que je l'interprète mal, et il semble bien que tous ceux qui sont en désaccord ont fait une mauvaise lecture, c'est toujours embêtant. Depuis quelque temps, c'est la réponse qu'on a: Quand on n'est pas d'accord avec un article, c'est parce qu'on n'a pas compris l'article. Vous tenez ça de Dieu le Père, qui vous donne ce réflexe de dire qu'on ne comprend jamais rien quand on n'est pas d'accord. Je dois vous dire que vous parlez des 2 côtés de la bouche en même temps, dans votre projet de loi. Vous émettez un principe puis vous ouvrez la porte pour ne pas le faire respecter, à peu près à tous les articles.

Dans le fond, ne croyez-vous pas que c'est un amuse-gueule qu'on a voulu faire avec vous? On a voulu vous donner l'opportunité d'aller vous pencher, d'aller travailler. Quand ça a été le temps d'arriver avec des principes, on vous a suggéré toutes sortes d'amendements jusqu'à aujourd'hui, pour que ça ne veuille rien dire. Vous aurez eu la consolation d'avoir passé une belle soirée à la T.V., à une heure tardive, malheureusement, sans une trop grosse cote d'écoute, mais votre projet de loi ne dira plus rien, rien, rien, à la fin. C'est ça, fondamentalement, que vous ne voulez pas reconnaître. Puis, nous autres, on a l'air un petit peu fou de se prêter à ce jeu-là du ministre d'un soir. On participe avec vous, vous avez supprimé un paquet d'articles.

Je lisais l'article 10, tantôt, M. le Président, et je pense que ça vaut la peine de juste montrer l'article 10 pour vous montrer où on s'en va. Deuxième alinéa: «La commission parlementaire compétente de l'Assemblée nationale ? ça part bien, par exemple, deuxième paragraphe ? entend, au moins une fois par année, le ministre, si celui-ci le juge opportun.»

On va faire des enfants forts, ça, avec une loi, «si celui-ci le juge opportun». Voyons! Nous faire dépenser du temps, à 0 h 50 du matin, un projet de loi qui était supposé revaloriser le rôle du Parlement, contrer, si vous voulez, les folies furieuses, faire en sorte que les gens soient imputables, puis il y a un bel amendement, à la dernière minute, qui dit: si le ministre le juge opportun. Bon Dieu! Voulez-vous rire de nous autres? C'est quoi, ça? Où vous vous en allez avec ça?

Moi, je veux bien faire mon travail très sérieux, mais rendu à 0 h 50 du matin, arriver avec des amendements quétaines de même, qui défont tout l'esprit du projet de loi, je vous avoue que la réunion ne sera pas trop longue. Vous vivrez avec votre folie furieuse et vous aurez fait dépenser du temps, de l'argent épouvan-tablement aux parlementaires pour en arriver à des quétaineries du genre. (0 h 50)

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, si le leader de l'Opposition avait lu l'article un peu plus long, il aurait compris simplement que l'article qu'il lisait faisait obligation aux sous-ministres et aux dirigeants d'organismes de venir témoigner ou rendre compte aux commissions parlementaires et laisser la possibilité au ministre de les accompagner. Il s'est limité simplement au premier élément de l'alinéa.

M. Chevrette: Bien, voyons! Voyons!

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 1?

M. Chevrette: Adopté sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, l'amendement à l'article 1...

Une voix: Vote nominal.

M. Chevrette: Puis vote nominal.

Le Président (M. Bissonnet): Le vote nominal est demandé. Que les pages se rendent aux portes, s'il vous plaît! immédiatement. Si vous voulez vous rendre aux portes, les pages, s'il vous plaît! S'il vous plaît! immédiatement. Alors, je mets aux voix... Woop! Woop! Si vous voulez, un autre page, être aux portes pour ne pas que personne entre maintenant.

Alors, je mets aux voix la motion du député de Verdun, à l'article 1: 1° remplacer, dans la première ligne du paragraphe 2°, ce qui suit: «établissements», par ce qui suit, «établissements et»; 2° supprimer, dans la troisième ligne du paragraphe 2°, les mots «et les organismes gouvernementaux»; 3° insérer, au début du paragraphe 3°, les mots, «tout autre organisme gouvernemental visé par la Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic ainsi que».

Alors, que tous les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever et, suite à l'appel de votre nom, veuillez vous asseoir. Ceux qui sont en faveur, veuillez vous lever.

Le Secrétaire: M. Benoit (Orford), M. Lafrenière (Gatineau), M. Houde (Berthier), Mme Robillard (Chambly), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Picotte (Maskinongé), M. Camden (Lotbinière), M. Gautrin (Verdun), M. Lemieux (Vanier), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), M. Dauphin (Marquette), M. Williams (Nelligan), M. Thérien (Rousseau), Mme Hovington (Matane), Mme Boucher Bacon (Bourget), Mme Bégin (Bellechasse), M. Forget (Prévost), M. Parent (Sauvé).

Le Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, et, M. le secrétaire, veuillez les identifier.

Le Secrétaire: Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), M. Léonard (Labelle), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Caron (Terrebonne), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), Mme Dupuis (Verchères).

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des députés qui s'abstiennent? Qu'ils veuillent bien se lever. Aucune abstention.

Le Secrétaire: Pour, 21; contre, 8.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, l'amendement est adopté.

Nous en sommes maintenant à l'amendement à l'article 3. Est-ce qu'il y a des députés qui veulent intervenir sur l'amendement à l'article 3, que je lis comme ceci, proposé par le député de Verdun:

Modifier, à la fin des paragraphes 1 et 2 de l'article 3, remplacer ce qui suit: «en place le 1er avril 1993», par ce qui suit: «autorisés au 31 mars 1993».

Est-ce qu'il y a des interventions?

M. le député de Labelle.

M. Léonard: Oui. M. le Président, juste sur le sens de cet article-là, il y a un gros changement, à mon sens. «Les effectifs en place le 1er avril 1993» remplacé par «autorisés au 31 mars 1993». Le mot «autorisés» implique des postes qui sont comblés et des postes qui sont vacants, alors que «les effectifs en place le 1er avril 1993» sont des postes comblés.

M. Chevrette: C'est un peu différent, hein?

M. Léonard: c'est très différent. c'est, en effet, très différent. en d'autres termes, comme il y a toujours un certain pourcentage de la fonction des postes qui sont vacants pour cause de déplacement, de démission, de retraite, etc., qui est de l'ordre de 2 %, 3 %, au fond, cette année en particulier, si le gouvernement disait qu'on coupe les effectifs de x %, bien, justement, ce ne serait pas exact. par exemple, de 7 %, les cadres, si le taux des postes vacants est de l'ordre de 3 %, en réalité, il y a juste 4 %.

Bon. Maintenant, «autorisés» et «en place». J'aimerais que le député nous réponde sur ce qu'il a en tête et pourquoi la différence entre le 1er avril et le 31 mars?

M. Chevrette: Ou le Trésor a en tête.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verdun.

M. Léonard: Ou le Trésor, oui, c'est...

M. Gautrin: Deux questions...

M. Chevrette: Plutôt le Trésor, parce que...

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, la parole est au député de Verdun.

M. Gautrin: ...entre «en place» et «autorisés»; deuxième question: entre 1er avril et 31 mars.

Alors, ne nous cachons pas la réalité, le député de Labelle l'a bien expliqué, il est clair qu'entre les effectifs en place et les effectifs autorisés, on inclut l'ensemble des postes non comblés, c'est-à-dire les postes vacants, c'est-à-dire que les coupures se calculent sur la base des postes, en incluant les postes vacants et non pas... les postes autorisés. Donc, on inclut la différence entre les postes autorisés et les postes en place, c'est les postes qui sont à combler. Donc, à ce moment-là, ils

sont inclus à l'intérieur de l'objectif de réduction, premier élément.

Le changement d'une journée entre le 31 mars et le 1er avril semble mineur, mais ce n'est pas si mineur que ça puisse paraître parce que, compte tenu des années budgétaires, les postes autorisés sont autorisés pour une année en date du 1er avril, ce qui veut dire que lorsqu'on met le 31 mars 1993 ? et je suis parfaitement conscient de ce qu'on fait ? on retarde, on recule d'une année par rapport à l'objectif. On aurait pu aussi bien mettre les postes autorisés le 1er avril 1993, mais ça fait plus beau de mettre le 31 mars 1993. Les 2 effets qui sont là actuellement, c'est un effet de faciliter, de retarder, c'est-à-dire d'étendre la base de compressions et d'inclure dans la base de compressions les postes non comblés.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, M. le député de Labelle.

M. Léonard: Mais, M. le Président, je n'appellerai pas ça une précision d'ordre technique, n'est-ce pas, parce que au-delà de la précision d'ordre technique, il y a une signification très importante par rapport au projet de loi.

Le projet de loi, il me semble, avait été débattu avec tambour et trompette à l'effet qu'on réduisait les effectifs gouvernementaux sur une période de 3 ans. Là, il vient de nous dire que c'est sur 4 ans. C'est ça que ça veut dire. En plus, c'étaient les effectifs en place, là on parle des effectifs autorisés.

M. Chevrette: L'année d'élection.

M. Léonard: Alors, merci. Ça veut dire qu'en fait il recule son objectif d'un an. Cette année, il n'aura pas d'effet, son projet de loi. C'est ça que ça veut dire.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verdun, si vous voulez répliquer, vous avez le choix.

M. Gautrin: M. le Président, en effet, on étend la période, ne le cachons pas. Je peux faire un débat actuellement sur si c'est un truc technique ou pas. C'est évident qu'il y a une modification importante. D'un côté, on étend la période d'application du projet de loi, et on étend aussi les postes sur lesquels s'appliquent ces compressions, c'est-à-dire que ça s'applique aussi sur les postes laissés vacants, ce qui facilite l'obtention de l'objectif. Je suis parfaitement conscient de ce qui est écrit là.

Le Président (M. Bissonnet): M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Oui, je voudrais savoir quels sont les motifs qui vous font repousser d'un an? Est-ce que c'est une directive du Trésor, une suggestion du Trésor ou si c'est vos objectifs personnels qui ont changé?

J'aimerais savoir quels sont les motifs qui vous ont amené à changer de date, vous.

M. Gautrin: La question que vous me posez, c'est en question... Est-ce que c'est le Trésor? Ce projet de loi, et je voudrais revenir là-dessus, est l'effet d'une réflexion de l'ensemble du caucus de notre deputation.

M. Chevrette: Quels sont les motifs... M. Gautrin: Quels sont les motifs?

M. Chevrette: ...qui vous ont amenés, comme caucus, à...

M. Gautrin: La facilité et l'opérationalisation des quantums qui ont été mis à l'intérieur du projet de loi.

M. Léonard: Mais c'est combien des postes comblés qui vont être coupés par le projet de loi, disons, pour l'année 1993-1994, l'année budgétaire 1993-1994? Combien?

M. Gautrin: Alors, vous comprenez mal le projet de loi parce que le projet de loi n'est pas de coupures annuelles. Il se donne un objectif de coupures sur un horizon de 3 ans ou de 5 ans, n'imposant pas des coupures annuelles.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Labelle.

M. Léonard: Mettons-le sur S ans. Combien? Vous revenez à 20 % et à 12 %?

M. Gautrin: Je reviens à 20 % par rapport aux postes autorisés, oui.

M. Chevrette: Par rapport aux postes autorisés. Ça veut dire combien d'enseignants de moins, au bout de 5 ans? (1 heure)

M. Gautrin: Alors, vous ne comprenez... Je m'excuse, là-dedans, si vous revenez sur le projet de loi, vous devez savoir que cet article ne s'applique pas sur l'article 1.2, mais sur l'article 1.1°, donc, ne touche pas, à l'heure actuelle, l'ensemble du secteur de l'éducation.

M. Chevrette: Ça touche quels secteurs, précisément?

M. Gautrin: Alors, ça touche essentiellement les secteurs couverts par l'article 1.1°, qui sont ? et je vais vous les rappeler si vous permettez ? «le gouvernement, ses ministères et les organismes du gouvernement dont le personnel est nommé et rémunéré selon la Loi sur la fonction publique».

M. Chevrette: Ça veut dire combien de fonctionnaires de moins au bout de 5 ans, autorisés?

M. Gautrin: Vous me posez quoi comme question, exactement?

M. Chevrette: Bien, je pense que je vous l'ai posée assez claire.

M. Léonard: Combien de fonctionnaires? La fonction publique, à l'heure actuelle, par suite de l'augmentation de 5000 fonctionnaires, est maintenant de l'ordre de...

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, un instant. Un instant. Il n'y a plus de...

M. Chevrette: II n'y a plus rien qui marche?

Le Président (M. Bissonnet): Non, non. M. le député de Labelle, la parole est à vous, mais là, je regarde... Ça va? C'est parce que la lumière rouge n'est pas allumée. Bon, allez-y, M. le député de Labelle.

M. Chevrette: Combien il y a de fonctionnaires ? c'est ça qu'il vous pose ? dans la fonction publique, actuellement, suite à l'augmentation de 5000 qu'il y a eu dernièrement. Ça fait 68, quoi?

Une voix: 68 000?

Le Président (M. Bissonnet): Un à la fois, parce qu'on ne peut pas vous prendre tous les 2 en même temps.

M. Gautrin: vous voulez savoir si je suis capable de calculer 12 % de ce qui est là? c'est ça?

M. Léonard: Quand on calcule 12 % de la main-d'oeuvre et 20 % du personnel d'encadrement, bon, ça donne combien de postes au bout de 5 ans, quand l'opération sera terminée? Combien de postes?

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verdun, vous avez la parole.

M. Gautrin: Ça dépend. L'un est sur une base de 3 ans, l'autre est sur une base de 5 ans. Alors, vous faites 12 % du nombre; vous êtes capable de le calculer, vous prenez le nombre, vous mettez 12 % dessus et vous obtenez votre résultat.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Labelle.

M. Léonard: On ne peut pas calculer 12 % sur 68 000, puis 20 % sur 68 000. Il y a un certain nombre de cadres et...

M. Gautrin: II y a un certain nombre de cadres; vous mettez 20 % et vous obtenez le résultat. Je ne ferai pas le calcul pour vous.

M. Léonard: Vous l'avez calculé, vous?

M. Gautrin: Je ne ferai pas le calcul pour vous, ici.

Une voix: Combien y en a-t-il?

Le Président (M. Bissonnet): Un instant.

M. Gautrin: vous prenez le nombre de cadres et vous appliquez 20 %. bon dieu! c'est un calcul trivial et élémentaire!

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Oui, mais, écoutez, là. Vous avez pensé un projet de loi. M. le Président, j'espère que le député n'a pas fait comme certains ministres qu'on a vus au cours de la semaine: avoir proposé des amendements à des législations sans savoir où ils s'en allaient.

Combien y a-t-il de cadres dans la fonction publique?

M. Gautrin: Vous le savez ou vous ne le savez pas? Combien y a-t-il de cadres dans la fonction publique?

M. Chevrette: Je vous pose la question, c'est vous qui répondez. Vous êtes parrain de la loi. Combien y a-t-il de cadres dans la fonction publique?

M. Gautrin: Je ne vous répondrai pas là-dessus.

M. Chevrette: Vous ne le savez pas. Vous ne le savez pas?

M. Gautrin: Je vais vous dire qu'à l'heure actuelle l'objectif est de réduire de 20 % l'encadrement.

M. Chevrette: Oui, mais ça fait combien de cadres de moins, dans 5 ans?

M. Gautrin: Moins 20 %, c'est tout.

M. Chevrette: moins 20 % de quel montant de cadres?

une voix: 100 %.

M. Gautrin: Bien, écoutez, c'est...

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Chevrette: Pardon, de combien? Quand on

propose quelque chose, il faut répondre aux questions. combien y a-t-il de cadres dans la fonction publique? vous n'avez pas proposé ça en l'air, 20 %. c'est 20 % de combien?

M. Gautrin: Je ne répondrai pas à votre question.

M. Chevrette: M. le Président, je m'excuse, il est parrain de la loi.

M. Gautrin: Je pense qu'à l'heure actuelle... Non, mais sérieusement...

Une voix: II y a à peu près 4352 cadres.

Le Président (M. Bissonnet): Je m'excuse, M. le député. En vertu de l'article 246, le député...

M. Chevrette: Ça fait quétaine, ça, là!

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Le député peut intervenir. Alors, il a répondu à votre question.

Mme la députée de Taillon.

M. Chevrette: M. le Président, je m'excuse. Je n'ai pas terminé, j'ai droit à 20 minutes.

Le Président (M. Bissonnet): Non, je n'ai pas dit que vous aviez terminé. M. le député de Joliette, si vous voulez poursuivre.

M. Chevrette: M. le Président, je suppose que l'arrogance, à cette heure-là, elle doit tomber un peu. Vous avez proposé un projet de loi, que vous voulez voir adopté par l'Assemblée nationale. Notre rôle, c'est d'informer la population par notre questionnement. Vous n'avez pas posé des gestes en l'air, je suppose. Vous, un type d'université, député de Verdun, aspirant ministre, ministre d'un soir, vous avez sans doute pris la précaution... Vous n'avez pas voté n'importe quoi. Vous avez voté 12 % des employés. Ça représente quoi sur 3 ans? Et 20 % des cadres, ça représente quoi?

Une voix: C'est du monde, ce n'est pas des chiffres.

M. Chevrette: Ce n'est pas des chiffres en l'air, c'est du monde, ça, là. On veut savoir combien ça représente de personnes. Est-ce que vous pourriez me répondre, s'il vous plaît?

M. Gautrin: Alors, vous prenez 20 % de 4000 et vous faites le calcul.

M. Chevrette: Ça fait 830.

M. Gautrin: Vous prenez 12 % de 60 000, et vous faites le calcul.

M. Chevrette: Donc, ça fait quelque chose comme 7000.

M. Lemieux: Aux environs de 4441.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, M. le député de Vanier, si vous voulez intervenir.

M. Chevrette: 12 % de 60 000, c'est plus que 4000.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Vanier, si vous voulez intervenir.

M. Lemieux: J'allais seulement ajouter pour le député de Joliette: aux environs de 4300. Entre 4300 et 4400, pas plus que ça, et y incluant les cadres intermédiaires.

M. Chevrette: 12 % de 68 000?

M. Lemieux: Non. On parle de cadres. Je vous parle au niveau des cadres, les cadres intermédiaires et les cadres... Quand je parle de cadres intermédiaires et de cadres réguliers, je parle d'admin. V à admin. II. D'accord?

M. Chevrette: Donc, ça fait quelque 800 cadres.

M. Lemieux: Environ.

M. Chevrette: Mais, au niveau des employés, 12 % de 68 000...

M. Gautrin: 64 000.

M. Chevrette: De 64 000, vous avez dit? O.K. Donc, c'est quelque chose comme 7000.

Le Président (M. Bissonnet): Ça va, M. le député de Joliette?

M. Chevrette: 7600 employés.

M. Léonard: C'est 8000 employés en tout.

M. Chevrette: 8000 employés en tout, grosso modo.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Joliette, si vous voulez poursuivre votre intervention.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je voudrais savoir le plan d'opérationalisation, s'il y a eu des évaluations de faites pour mettre ça en opération. Est-ce qu'il y a des coûts qui ont été évalués pour mettre ça en opération? Qui va faire cette fonction au niveau de... C'est le Trésor qui va réaliser ça?

M. Gautrin: Bien sûr.

M. Chevrette: C'est le Conseil du trésor.

M. Gautrin: Le Conseil du trésor.

M. Chevrette: Est-ce qu'il a été interrogé sur le projet de loi?

M. Gautrin: Oui.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Absolument.

M. Chevrette: Est-ce qu'ils ont proposé des amendements? Est-ce que le Conseil du trésor a proposé des amendements?

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Le Conseil du trésor n'a pas proposé d'amendements. Ils n'ont pas été entendus ou quoi que ce soit.

M. Chevrette: Est-ce que le Conseil du trésor a été entendu par la commission parlementaire, pour le bénéfice de nos auditeurs ici?

M. Gautrin: Absolument pas.

M. Chevrette: Quel est le motif pour lequel vous avez refusé que le Conseil du trésor soit entendu au niveau de la commission parlementaire?

M. Gautrin: Le Conseil du trésor n'a pas été demandé à être entendu.

M. Chevrette: Comment ça se fait...

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, un à la fois.

M. Gautrin: Je voudrais savoir...

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Non, mais...

M. Gautrin: Le Conseil du trésor comme tel n'a pas été demandé à être...

M. Chevrette: ...reconnaissez-vous que le député de Labelle, à plusieurs reprises, vous a demandé d'entendre le président du Conseil du trésor?

M. Gautrin: Pas que j'aie comme souvenance qu'une motion ait été faite. Est-ce qu'il y a une motion qui a été faite...

Une voix: M. le Président...

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, un instant! Je vais vous donner la parole bientôt, madame.

M. Gautrin: Je voudrais savoir, au début, est-ce qu'il y a une motion qui a été faite ou pas? On va chercher.

M. Chevrette: Vous ne vous en souvenez pas?

M. Gautrin: Y a-t-il une motion qui a été faite à cet effet?

M. Chevrette: Je pensais que vous étiez le parrain de la loi. Je vais laisser parler mes collègues.

M. Gautrin: Je veux savoir: Y a-t-il eu une motion? Il y a peut-être une motion qui a été faite et qui a été battue. Vous en avez fait un certain nombre comme mesures dilatoires. C'est possible qu'il y ait eu celle-là en plus.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Pour rappeler, pour les fins de...

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, un instant, là, juste pour la coordination ici, il faut «coordiner». Mme la députée de Taillon, vous avez la parole.

Mme Marois: Merci. Alors, pour les fins de notre discussion, j'ai devant moi le procès-verbal de la commission du budget et de l'administration, et je peux vous le dire parce que je l'ai faite moi-même, cette motion. Je peux vous dire que j'ai fait motion, dès le début de nos travaux, soit le 15 décembre, pour que nous entendions le président du Conseil du trésor, M. Daniel Johnson. Je n'ai pas besoin de la relire. Je pense, M. le Président, que ça porte essentiellement sur ça. On s'inquiétait du fait qu'on ait souhaité ou pas la présence du président du Conseil du trésor. Or, ma proposition a été défaite, n'est-ce pas, parce que le parrain du projet de loi, de même que ses collègues à la commission parlementaire refusaient que nous entendions le président du Conseil du trésor. Ça nous apparaissait pertinent parce que, justement, le type de question qui est soulevé ce soir par mes collègues quant à l'impact réel du projet de loi devait, à notre point de vue, être évalué par les membres de la commission avant qu'on ne s'engage dans l'adoption du projet de loi.

Le plus bel exemple de ça, c'est la discussion

qu'on vient d'avoir, M. le Président, sur le fait qu'on ne sait pas exactement le nombre de personnes qui vont être touchées. C'est quand même assez inquiétant, ça. Rappelons-nous, d'autre part, que, ne sachant pas combien de personnes on touche, constatant qu'on arriverait quelque part autour de 4000 ou 6000, on ne le sait pas trop, il faudrait juste se dire aussi que le président du Conseil du trésor, qui s'était fixé ça au nom du gouvernement, de réduire le personnel de la fonction publique, a réussi à peu près à l'augmenter du même nombre entre 1988 et 1992, c'est bien cela, en 4 ans, a réussi à l'augmenter du même nombre. Alors, on avait comme un petit peu raison, M. le Président, de souhaiter que le président du Conseil du trésor vienne participer à nos travaux et qu'on puisse le questionner. La preuve en est faite d'une façon un peu pénible, d'ailleurs, ce soir, quand on pense qu'on est en train d'adopter les derniers amendements, on est à la fin du processus, et on ne sait pas encore combien de personnes ça va toucher. (1 h 10)

Cela étant, je veux revenir sur une question plus technique, M. le Président, et qui m'embête. J'ai lu les amendements qui nous ont été déposés ce soir, dans un ensemble de feuillets, et nulle part, dans les feuillets des amendements, on n'a fait référence à la modification des titres de la loi et des sections de la loi. Je sais que, normalement, on étudie cela à la fin du projet de loi. Cela étant dit, il n'est pas dedans. Ça ne se retrouve pas, là.

Or, l'article qu'on étudie actuellement est l'article 3 et le titre de la section II est modifié avec d'autres notes que j'ai ici, et j'essaie de trouver des références aux amendements. La loi disait que nous souhaitions adopter des «règles concernant l'embauche dans un organisme public». Et là, on modifie profondément la loi de par son titre même parce qu'on le change en disant: On parlera de la «réduction du personnel dans les organismes publics». Donc, dans un cas, on parle des règles concernant l'embauche, ce qui peut être tout à fait positif, permettre qu'on fasse ça d'une façon saine et correcte, mais, là, on dit: Ce n'est pas ça. On change le titre pour dire «réduction du personnel dans les organismes publics».

Ce que je veux savoir de vous, M. le Président, c'est: Si nous ne les avons pas comme projets d'amendement, est-ce qu'on va les recevoir pour pouvoir les étudier ou pas?

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Mme la députée de Taillon, si vous regardez les amendements qui ont été déposés, à la fin, les derniers amendements vont toucher le titre du projet de loi, donc répondre à votre questionnement à ce sujet-là.

Mme Marois: Est-ce que vous permettez, M. le Président?

Le Président (M. Bissonnet): Mme la députée, vous avez la parole.

Mme Marois: On pourra procéder à l'étude des autres amendements, mais je vous dis que le dernier amendement dit tout simplement qu'on change les mots «administrateur d'État» par les mots «sous-ministre», etc., mais on ne fait pas référence aux modifications des titres des sous-sections. Et, généralement, c'est à la fin d'un projet de loi que l'on procède à ces modifications-là.

Alors, on va procéder à l'étude article par article. Moi, je n'ai pas d'objection, sauf que je veux bien savoir ce que j'adopte, si j'adopte une loi qui concerne l'embauche ou si j'adopte une loi qui concerne la réduction du personnel. Mais, là, ça a l'air que j'adopte une loi qui concerne la réduction du personnel, sauf que ce n'est dit nulle part.

M. Gautrin: M. le Président...

Le Président (M. Bissonnet): Oui, M. le député de Verdun, je vous écoute.

M. Gautrin: ...pour clarifier la position par rapport à la députée de Taillon, on travaille formellement, à l'heure actuelle, sur le rapport qu'on amende actuellement, le rapport de la commission parlementaire, et dans l'amendement, à la commission parlementaire, les modifications au titre avaient été faites.

M. Chevrette: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, est-ce que l'amendement proposé à l'article 3 est adopté?

M. Chevrette: En leur disant qu'ils vivront avec. Vote nominal!

Le Président (M. Bissonnet): Vote nominal? Le vote nominal est appelé.

Si les pages veulent se diriger aux portes, s'il vous plaît. Si vous voulez vous diriger aux portes, nous allons mettre aux voix la motion de M. le député de Verdun à l'article 3 que je lis: À la fin des paragraphes 1 et 2 de l'article 3, remplacer «le 1er avril 1993» par ce qui suit «autorisés au 31 mars 1993».

Que tous ceux qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever. Que les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

M. le secrétaire, si vous voulez bien appeler les membres qui se sont levés en faveur de la motion.

Le Secrétaire: Mme Robillard (Chambly), M. Gobé (LaFontaine), M. Houde (Berthier), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Benoit (Orford), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Parent (Sauvé), M. Picotte (Maskinongé), M. Camden (Lotbinière), M. Gautrin (Verdun), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Forget (Prévost),

M. Lemieux (Vanier), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Beaudin (Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), M. Mac-Millan (Papineau), M. Dauphin (Marquette), M. Williams (Nelligan), M. Tremblay (Rimouski), M. Thérien (Rousseau), Mme Hovington (Matane), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bradet (Charlevoix), M. Brouillette (Champlain).

Le Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui sont contre cet amendement veuillent bien se lever.

M. le secrétaire, si vous voulez appeler les députés qui sont debout.

Le Secrétaire: Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), M. Léonard (Labelle), M. Chevrette (Joliette), Mme Caron (Terrebonne), M. Bélanger (Anjou), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), Mme Dupuis (Verchères).

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des députés qui s'abstiennent? Aucune abstention.

Le Secrétaire: pour: 27 contre: 8 abstentions: 0

Le Président (M. Bissonnet): Alors, l'amendement est adopté.

Nous en sommes maintenant à l'amendement à l'article 4, proposé par M. le député de Verdun. Remplacer l'article 4 par le suivant: «Le ministre de la Santé et des Services sociaux, le ministre de l'Éducation et le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science doivent, pour leur secteur respectif, soumettre au Conseil du trésor, avant le 15 décembre de chaque année, un plan tenant compte de la réduction des effectifs prévue à l'article 3 et applicable à l'ensemble des organismes publics visés au paragraphe 2° de l'article 1. L'ensemble de ces plans couvre la période du 1er avril 1994 au 31 mars 1998, ou, selon le cas, du 1er juillet 1994 au 30 juin 1998. «Chacun de ces ministres dépose à l'Assemblée nationale les plans qu'ils ont soumis dans les 15 jours de leur transmission au Conseil du trésor ou, si l'Assemblée ne siège pas, dans les 15 jours de la reprise de ses travaux. «La commission parlementaire compétente de l'Assemblée nationale convoque au moins une fois par année chacun de ces ministres afin qu'il fasse rapport de l'état de réalisation de ces plans.»

Est-ce qu'il y a des interventions sur l'amendement à l'article 4? M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, je voudrais quand même essayer d'expliquer, quitte à ce qu'on refasse les débats...

Une voix: Rouvrez les portes.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verdun, la parole est à vous.

M. Gautrin: L'important qui est à remarquer à l'intérieur de cet amendement, c'est qu'il est structuré en 3 morceaux. En premier lieu, il est clair qu'on parle d'un plan sans lui fixer d'objectifs et un plan pour l'ensemble des organismes publics. C'est-à-dire qu'on prend un plan par secteur. D'ailleurs, il ne s'agit pas de faire les plans de réduction pour chacun des éléments des commissions scolaires ou du réseau de la santé. Donc, vous avez un secteur de l'éducation, un secteur de l'enseignement supérieur couverts par ça et un secteur de la santé. Le deuxième élément, c'est qu'on a voulu reprendre un des articles qu'on avait trouvés plus tard et qu'on a inclus ici, la question du dépôt de ces plans à l'Assemblée nationale. Et, le troisième élément, c'est que la commission parlementaire concernée convoque, une fois par année, chacun de ces ministres afin qu'il fasse rapport de l'état de réalisation de ses plans. Donc, 3 éléments: d'un côté, les plans; deuxièmement, le dépôt; troisièmement, l'étude de la réalisation du plan.

Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Verdun. M. le député de Labelle.

M. Léonard: Moi, M. le Président, je trouve qu'on est devant pratiquement un autre article. Même s'il va piger ici et là, il reste quand même que c'est sensiblement différent. Je voudrais d'abord souligner une chose. Lorsque j'ai proposé que ces plans de réduction des effectifs soient transmis à une commission parlementaire idoine, la commission du budget et de l'administration, j'ai été battu dans la commission parlementaire. Mon amendement a été battu, parce que les députés ministériels s'y sont opposés, et le député de Verdun en particulier, alors que, maintenant, tout à coup, il le ramène ce soir. Ceci ne nous empêche pas d'être contre le fond même de l'article, mais, au moins, je pense que, là, on assiste à la description, dans le nouvel article 4, de tout le processus de centralisation qui est effectué par ce projet de loi.

Au fond, c'est le ministre de l'Éducation, le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, le ministre de la Santé et des Services sociaux, donc, les réseaux de la santé et les réseaux de l'éducation qui sont touchés par le projet de loi, qui doivent présenter un plan d'effectifs. Et cela veut dire que cela s'adresse à chacun des organismes, à chacune des unités de tous ces réseaux-là, qui vont devoir venir présenter, discuter, négocier avec le président du Conseil du trésor ou avec le Conseil du trésor, lequel va déposer les plans de réduction des effectifs à l'Assemblée nationale. Ce sera des pijes de plans, parce qu'il y en a. Cela touche les 400 000 ou, disons, dans ces cas-là, les 300 000 syndiqués de ces réseaux de santé et de l'éducation. Et puis, après, on va s'amener en commission parlementaire. Nous avons fait le débat en commission parlementaire. On avait refusé, d'ailleurs, cette commission parlemen-

taire. Mais, là, j'ai vu qu'on se ravisait. Il reste, M. le Président, que le tout est proprement insensé. (1 h 20)

Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Labelle. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, brièvement, il y a, de fait, 3 plans et non pas 500 plans. Il faut bien qu'on se comprenne. Il y en a par secteur pour l'ensemble des organismes; donc, on ne parle pas, à l'heure actuelle, de plans qui sont pour chaque institution où, là, votre argumentation serait tout à fait pertinente. Il s'agit de plans sectoriels qui s'inspirent des conditions prévues à l'article précédent et qui sont déposés à l'Assemblée. Donc, on demande strictement de suivre l'évolution des effectifs à l'intérieur des différents secteurs.

M. Léonard: M. le Président...

Le Président (M. Lefebvre): M. le député de Labelle.

M. Léonard: ...avec la réponse du député de Verdun, je pense que cela nous fait toucher du doigt une modification très substantielle du projet de loi. Dans la première rédaction, celle que nous avions vue en commission parlementaire, il s'agissait d'un plan de réduction du personnel des organismes publics visés, et il semble qu'à l'époque nous avions discuté des plans de chacun de ces organismes, ce qui est nécessairement obligatoire, parce que, si le ministre prépare ou présente un plan de réduction des effectifs, il est obligé de se baser sur des données de chacun des organismes visés. Bon. Tandis qu'ici, dans le nouvel article, c'est un plan applicable à l'ensemble des organismes publics; c'est beaucoup plus vague et cela indique ici qu'il y a un seul plan pour l'ensemble. Donc, on est dans une modification très substantielle du projet de loi.

M. Gautrin: Excusez-moi, qui correspond, et on vient le préciser à l'heure actuelle, à ce dont vous parliez au début, l'énorme centralisation. À l'heure actuelle, justement, on essaie de combler cette énorme centralisation et de répondre en partie aux interrogations des personnes venant des commissions scolaires.

M. Léonard: Qu'est-ce que ça signifie, un plan, alors?

Le Président (M. Lefebvre): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je n'ai pas compris, excusez-moi, la question.

M. Léonard: Non, mais qu'est-ce que signifie ce plan-là? C'est un plan qui tient en 4 lignes. Ça pourrait très bien être ça aussi.

M. Chevrette: Bien, voyons! Vous savez que ça n'a pas d'allure.

M. Léonard: Ça veut dire quoi, là? (Consultation)

M. Chevrette: Je vais y aller, moi. M. le Président...

Le Président (M. Lefebvre): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: ...pour permettre, peut-être, au député de Verdun de se trouver un petit bout de réponse, je vais lui donner un exemple. Il n'y a pas un centre hospitalier qui a le même taux d'encadrement. Il n'y a pas un centre hospitalier qui, nécessairement, a la même vocation. Il n'y a pas un centre hospitalier qui a les mêmes clientèles. Il y en a que c'est en gériatrie, et c'est déjà défini par certaines normes. Au niveau des hôpitaux spécialisés pour enfants, c'est d'autres barèmes; en pédiatrie, en obstétrique. Quand vous tombez dans les centres hospitaliers de soins aigus, c'est un autre encadrement. Allez-vous me dire que le ministre va décider d'un objectif personnel, parce qu'il n'y a pas d'objectif précis en santé? D'accord? On se comprend? Il n'y a pas d'objectif précis, mais, à chaque année, il faut qu'il y en ait un. Il va être fixé par qui, son objectif? Première question: II va être fixé par qui, son objectif, au ministre de la Santé? Il faut qu'il en présente un, parce qu'on l'oblige, à chaque année, au 15 décembre, à présenter un plan de réduction de personnel. Si on l'oblige, à chaque année, à présenter un plan de réduction, c'est donc dire qu'on va lui fixer des objectifs. Sinon, il va bâtir un plan sur quoi? Il me semble que la petite logique de la méthodologie... En enseignement, on appelle ça la méthodologie du travail intellectuel, dirait le député de Maskinongé. Donc, il faut bien comprendre ça, là, pour suivre ça logiquement.

Deuxième chose, pour bâtir un plan correspondant à des objectifs qu'on lui aura fixés, je ne sais pas qui, je suppose qu'il est obligé de tenir compte des effectifs dans chacun de ces centres. Peut-être que le taux d'encadrement est trop élevé à Notre-Dame, il va dire: Bien, là, je pourrais en récupérer 8; je pourrais en récupérer 10 à Lanaudière; je pourrais en récupérer 7 à Saint-Jérôme. Puis il va présenter un plan au mois dé décembre en disant: Moi, au niveau des cadres, j'ai un objectif de 300 cadres au niveau du centre hospitalier et, au niveau des employés d'hôpitaux, des soins infirmiers, j'aurais peut-être 250 infirmières à sauver. Et j'ai un plan d'effectifs pour baisser mes infirmiers et infirmières auxiliaires de 400, etc. Il va falloir qu'il se base sur quelque chose. Il va falloir qu'il fasse du travail.

C'est ça qu'il vous disait, le député de Labelle: le sens pratico-pratique des choses. Vous ne demanderez pas au ministre de la Santé de se présenter ici, vous, puis de dire: J'ai un objectif de tant, tant, tant, tant.

Puis, vous dites: II va venir à l'Assemblée nationale après, puis il va venir nous rendre compte de comment il a appliqué son plan. Bien, il va être obligé de dire: J'avais des objectifs à Notre-Dame, mais il m'est arrivé une catastrophe, puis j'ai été obligé d'ouvrir des lits additionnels, puis je n'ai pas réussi.

Bien, il faut qu'il identifie un peu ses cibles pour aller les chercher. Voyons, M. le député de Verdun! Ça n'est pas le fruit de la spontanéité, un plan d'effectifs en fonction de la réduction. Il faut tenir compte des situations réelles de fait dans chacun des centres hospitaliers. Voyons! N'importe qui qui a administré une petite boîte, si petite soit-elle, il faut qu'il connaisse ce qui se passe à l'intérieur, ce qui bouge à l'intérieur. Voyons. Moi, moi... Ça tient de l'imaginaire, cette affaire-là, quand vous nous répondez ça, un plan sectoriel. Si vous m'aviez dit, encore: Le ministre devra, à partir de l'état de la situation dans son réseau, nous présenter des effectifs par région, par exemple, bien, il aurait fait travailler ses régies pour aller chercher au moins ce qu'il... Les régies auraient pu lui dire: Sur le plan régional, on peut sauver à peu près tant dans telle catégorie, telle catégorie de personnel.

Vous dites: Ça prend rien qu'un plan, ce n'est pas gros de travail. Voyons! N'importe quel ministre de la Santé... Puis j'aimerais ça qu'il soit ici, je lui dirais: Comment vous allez faire pour confectionner votre plan, M. le ministre? M. le député de Charlesbourg, le ministre de la Santé, dirait: Bien, écoute, je vais appeler mes régies. Je vais appeler mes directeurs de centres hospitaliers. Je vais faire faire le tour. Peut-être avec l'AHPQ, l'Association des hôpitaux, je vais essayer de faire quelque chose. Je vais présenter un plan si vous m'y obligez par loi.

Mais, pensez-y, là. Moi, ça ne me dérange pas trop, ça, là. Mais il ne faut pas accoucher sur papier pour le plaisir d'accoucher sur du papier, puis répondre au député de Labelle comme vous l'avez fait: Ce n'est pas gros d'ouvrage, ça; ce n'est pas trop de paperasse, ça. Bien, je m'excuse, là. On peut avoir des directives à certains centres hospitaliers qui, eux, ont le fardeau de présenter un plan d'effectifs à partir d'une directive ministérielle.

Mais, là, vous créez une obligation à un ministre de vous présenter un plan unique sectoriel. Puis vous dites: Ça ne sera pas d'ouvrage pour tout le monde. Voyons, voyons! Moi, je peux vous dire que j'y ai été un petit peu de l'autre bord, là. Puis, une affaire de même, là, je peux vous dire une chose, c'était tout un branle-bas dans le réseau, ça. S'il y a quelqu'un qui sait comment ça fonctionne... C'est tout un branle-bas dans le réseau, ça. Et un autre branle-bas, 15 jours avant de l'entendre, le ministre. Vous avez décidé, rendu au mois de juin, de l'entendre. Bien, il repart le tam-tam pour aller voir ce qu'il vous a déposé au mois de décembre. Il repart le tam-tam pour aller voir si c'a été efficace. Puis, là, il s'en vient devant nous autres, puis on lui demande: «Ç'a-tu» été efficace?

Là, il y a un hôpital qui a dit qu'il en avait enlevé 14, supposons. Puis, dans les faits, on sait que c'est de la frime. C'était des postes vacants. Vous savez toute l'histoire. Moi, je veux bien qu'on s'amuse par des projets de loi de même. Mais il y a des objectifs qui auraient pu être atteints de façon bien plus précise, puis qui voulaient dire quelque chose de plus concret que ça. C'est concret, quand vous arrivez aux fonctionnaires, puis que vous fixez des objectifs de nombre: 15 %, 20 %.

Mais, dans le domaine de l'éducation ? je vais vous donner un autre exemple; je donnais tantôt l'exemple ? on décide de mettre plus d'heures d'école pour nos enfants. Ça ne sera pas un objectif de réduction que vous allez avoir, ça va être de l'augmentation réelle. Si, par exemple, vous décidez, je ne sais pas, moi, qu'il y a une prématernelle obligatoire au Québec dorénavant, eh bien, qu'est-ce qui vous dit que ça ne prendra pas 600 profs de plus? Des objectifs non quantifiés de même, à quoi on s'amuse? Quand on sait...

Une voix: Le rapport Pagé.

M. Chevrette: Oui, le rapport Pagé, par exemple. Oui, justement, c'est un bel exemple. Je ne sais pas où on s'en va quand on fait cela, moi. Mais, je trouve que... «C'est-u» de s'amuser pour légiférer, là? Mais, vous savez très bien que, d'abord, les commissions scolaires sont subventionnées. Sur quelle base, vous le savez. Les hôpitaux doivent justifier, maintenant, leur budget. Je ne sais pas ce qu'on cherche. Puis, vous le savez quel passe-passe ils font? Ils décident de fermer des lits pour boucler des budgets. Moi, je ne sais pas vraiment ce qu'on recherche. J'aimerais ça qu'on sache plus précisément ce que l'on vise. (1 h 30) «c'est-u» des objectifs de réduction de personnel? si on disait, par exemple, le taux d'encadrement en éducation, il est de 1,12 %, mettons, puis notre objectif sur 5 ans est d'en arriver à 1,8 %, bien, là, ce serait, en éducation, qu'au niveau des cadres on vise un objectif... au niveau des centres hospitaliers, tu peux avoir des objectifs bien différents, dépendant de la nature, de la vocation du centre. on sait qu'en gériatrie, par exemple, il y a du personnel qui peut s'occuper de 8 ou 10 patients; dans des centres hospitaliers de soins aigus, l'encadrement est beaucoup plus grand et, en pédiatrie, c'est encore plus grand. ça, il me semble que c'est... je comprends, mais, là, vous demandez un travail de moine... je m'excuse d'être un peu long, mais c'est pour démontrer, là, franchement, le pratico-pratique... je suis certain que je prendrais chacun des ministres, ici, qui sont responsables d'un réseau, en éducation, en santé, puis l'autre, c'est lequel? vous en avez mis 3...

Une voix: Enseignement supérieur.

M. Chevrette: Enseignement supérieur... Bien, enseignement supérieur, vous avez rencontré vos confrères, vos ex-confrères et vous avez semblé régler leurs

problèmes...

M. Gautrin: Et ça inclut le réseau des collèges.

M. Chevrette: Mais, dans les commissions scolaires et dans la santé, je ne pense pas que vous ayez réglé grand-chose. Je trouve que c'est de l'utopie.

Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Joliette. M. le député de Lotbinière.

M. Camden: Je vous remercie, M. le Président. Ce à quoi fait référence, ici, l'article 4, c'est, bien sûr, qu'il y a un plan qui devra être déposé, qui doit, comme on le dit dans l'article, tenir compte des objectifs de réduction des effectifs qui sont prévus à l'article 3. Ça signifie, M. le Président, en fait, que les... Et je pense que les ministres responsables à cet égard, tant du ministère de la Santé et des Services sociaux que du ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de la Science, ont à préparer un plan, et, quant à eux, un plan, ça m'apparaît très significatif.

On vient de nous en faire une description, laquelle description est largement connue dans l'ensemble du système. Il ne faut pas de grandes notions d'administration publique pour savoir qu'on établit des ratios, on établit des calculs, on les fait en référence à des institutions, à des établissements, qu'on les comptabilise et, dans l'ensemble, on arrive à une donnée finale, et c'est à partir de cette donnée qu'elle est communiquée.

M. le Président, annuellement, on a l'occasion d'entendre les différents ministres en commission parlementaire, particulièrement lors de l'étude des crédits budgétaires, venir nous indiquer quel est l'état de leur ministère, comment ils dépenseront l'argent qui leur est octroyé via les crédits. Également, les députés, à ce moment, formulent des questions, à savoir: Combien y a-t-il de fonctionnaires? Quels sont les effectifs? Combien y en a-t-il en disponibilité? Combien de postes sont vacants? Alors, M. le Président, ce qui est objectivement visé ? ce qui était recherché par les députés et, initialement, par le groupe de travail sur la rationalisation des finances qu'on appelle «le groupe Poulin» ? ce qu'on souhaite, c'est que, périodiquement, les ministres viennent faire rapport, et c'est ce qu'on indique également dans l'alinéa 2. On donne des périodes, on donne des délais d'une façon bien précise dans la loi, auxquels les ministres doivent faire rapport à l'Assemblée nationale, donc faire rapport à l'ensemble des élus qui sont mandatés, eux, par la population. La préoccupation, évidemment, des élus, c'est celle de se préoccuper non seulement des ministères, mais également de l'ensemble des organismes. C'est une préoccupation qui est valable et c'est celle que notre population aussi souhaite. Je vais vous dire, peut-être qu'ici nous sommes sensibles à faire des distinctions entre les centres hospitaliers, les régies régionales, les commissions scolaires, mais pour la population, les gens ne font pas toujours ces subtiles références aux administrations qui ont ce mandat soit par pouvoir délégué, soit par le cadre législatif. Alors, M. le Président, ce qu'on définit aujourd'hui, c'est un cadre général; la voie réglementaire viendra le préciser, sans doute, et le Conseil du trésor, par voie de conséquence, il va de soi.

Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Lotbinière. Alors, sur la même question, M. le député de Labelle.

M. Léonard: M. le Président, en lisant cet article et en écoutant les explications des gens d'en face, je me pose la question à savoir ce que la loi change. Ou ça change quelque chose ou ça ne change rien. Le Conseil du trésor joue un rôle central dans l'administration publique et il a beaucoup de pouvoirs. Il pourrait, de par la législation actuelle, intervenir, demander un plan applicable à l'ensemble, comme c'est rédigé à l'heure actuelle, et les ministres viennent défendre leurs crédits, une fois par année, à l'Assemblée nationale, dans les commissions parlementaires. Qu'est-ce que le projet de loi change, à l'heure actuelle, si on s'en tient à un plan général, applicable à l'ensemble? Ou bien le projet de loi veut dire quelque chose et, là, il s'agit d'un plan précis de chacune des unités; ça c'est neuf, ça pourrait être neuf. Mais c'est inapplicable, je le pense. C'est une montagne à faire et c'est du dirigisme, sur le plan de l'administration publique, c'est évident. Mais, au fond, qu'est-ce que le Conseil du trésor va avoir qu'il n'a pas déjà à l'heure actuelle? J'entends le Conseil du trésor en termes d'organisme central de l'administration publique.

M. Gautrin: M. le Président, je pense qu'à l'heure actuelle, et je pense que le député de Labelle va accepter cela, le Conseil du trésor a probablement déjà ces informations. Mais, pour moi, l'important, c'est que ces plans soient déposés à l'Assemblée nationale, premier élément.

M. Léonard: Est-ce qu'il y en a déjà des plans, au Conseil du trésor?

M. Gautrin: À l'heure actuelle, on amène, par ce biais, le contrôle des élus, le contrôle des parlementaires. C'est la réalisation des objectifs de contrôle des effectifs dans le réseau de la santé et dans le réseau de l'éducation. Il y en a, M. le député de Labelle, à un point, je pense, que vous devriez partager, qui est l'importance du contrôle des élus sur l'ensemble des plans.

Le Président (M. Lefebvre): Mme la députée de Taillon.

Mme Marais: M. le Président, si vous permettez, je vais aller dans le même sens que mes collègues. Pour avoir siégé un bon moment au Conseil du trésor, je pense que tout ce que ça peut amener comme processus, c'est de fixer aveuglément, tel que la loi le prévoit d'ailleurs, un quota à atteindre, et aussi aveuglément,

qu'on reçoive le résultat à savoir si le quota a été atteint ou pas. Je ne vois pas comment on peut arriver à atteindre un objectif de gestion fine et de responsabilisation des administrateurs et des gestionnaires sur le terrain, tel que cela est dit au projet de loi.

Et le député de Lotbinière nous dit: On procédera par voie réglementaire. D'abord, je pense qu'il le sait, il n'y a aucun règlement qui est prévu aux projets de loi qui sont là. Alors, évidemment, ce sera par voie administrative, ce qui est autre chose, mais le projet de loi ne prévoit pas de moyens de type réglementaire.

Je ne veux pas revenir sur ce que mes collègues ont dit, je suis essentiellement d'accord avec eux. Je voudrais juste vous souligner cependant, M. le Président, que, lorsqu'on amende l'article 4, on part évidemment de l'article 4 original. Des fois, je me dis: On se retrouve avec un projet de loi qui est complètement différent de celui qui a été soumis à l'Assemblée nationale, et je me demande même ? et je pense qu'on pourrait le soulever comme question de procédure ? s'il était recevable, cet article ? s'il est recevable. Vous avez statué sur la recevabilité. Mais regardez l'article 4 de départ. Je trouve qu'il faut le dire, parce que c'est ça qu'on nous a présenté: «Les personnes dont l'emploi prend fin par l'échéance du terme prévu lors de leur embauche peuvent être réembauchées malgré ? une référence qu'on fait ? l'article 3.»

Là, ici, on ne parle plus de réembauche, on ne parle plus du bassin de personnes disponibles pour qu'elles soient réintroduites, ces personnes-là, dans l'ensemble des services publics ou parapublics, ou de santé ou de services sociaux, ou d'éducation, on parle essentiellement de la réduction des effectifs, point. Alors, on change l'esprit même de la loi, à mon point de vue. Et je resterai toujours convaincue, à cet égard, du travail qu'on fait, qui passe à côté des objectifs initiaux que s'était fixés la loi.

Le Président (M. Lefebvre): Madame... M. Gautrin: M. le Président...

Le Président (M. Lefebvre): Oui, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: ...si vous me permettez une remarque, simplement pour éclairer la députée de Taillon. La discussion que nous avons est sur la base du rapport de la commission parlementaire. L'article 4, tel qu'il est sorti après le rapport de la commission parlementaire, puisqu'il a été renuméroté, se lisait: «Le ministre de la Santé et des Services sociaux, le ministre de l'Éducation et le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science doivent soumettre au Conseil du trésor, pour approbation, avant le (indiquer la date qui suit de six mois la date d'adoption du projet) un plan de réduction pour la période du 1er avril au 1er avril.»

Donc, réellement, on est dans le même type d'article, si on se fie à l'article 4 tel que sorti de la commis- sion parlementaire.

Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Verdun. Mme la députée de Terrebonne. (1 h 40)

Mme Caron: Merci, M. le Président. M. le Président, moi, ce que j'ai de la difficulté à comprendre, c'est qu'on vient complètement à rencontre du principe même d'une bonne administration, je pense, d'un gouvernement ou d'un ministre, quand on détermine à l'avance que, du 1er avril 1994 au 31 mars 1998, ou, selon le cas, du 1er avril 1994 au 30 juin 1998 ? indépendamment de ce que le ministre de la Santé et des Services sociaux ou le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur va se donner comme objectifs, va se donner comme réforme, va considérer comme besoins pour la population, indépendamment des besoins de prévention au niveau de la santé, indépendamment des besoins du côté de l'éducation, d'une réforme qui s'en vient aux différents paliers au niveau de l'éducation, du décrochage scolaire ? indépendamment des mesures, on va se limiter en s'obligeant à diminuer le nombre d'effectifs.

C'est possible qu'on ait besoin de réduire, une année, mais c'est possible qu'on ait besoin d'augmenter, et on va tenir compte uniquement des deux dernières réformes qui ont été déposées. La réforme de la santé et des services sociaux amène des changements majeurs. Les CLSC vont devenir le lieu de première ligne. Il va y avoir besoin d'une augmentation d'effectifs, c'est évident.

Si on veut des mesures pour contrer le décrochage scolaire, comme le rapport Pagé, si on veut améliorer au niveau de l'éducation, au niveau du système primaire ? la ministre a annoncé qu'il y aurait une réforme au niveau du primaire et du secondaire et on a la réforme au niveau des cégeps ? c'est évident qu'on va avoir besoin d'ajouter du personnel. Et là, une loi vient dire: On réduit les effectifs, peu importent les objectifs. Je pense que ce qu'un ministre doit faire en premier, c'est d'avoir des objectifs qui touchent les personnes, et non un objectif au niveau de la réduction d'effectifs, qui ne tient aucunement compte de ces réalités-là.

Le Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée de Terrebonne. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, si vous me permettez de répondre, il s'agit d'un plan qui est un plan global pour le réseau, premièrement, et donc, qui tient compte des répartitions à l'intérieur même du réseau.

Deuxièmement, s'il y a des politiques particulières dans certains secteurs, le projet de loi prévoit aussi la possibilité d'exempter de l'application du projet de loi certains secteurs ou certaines catégories de personnes. On le verra lorsqu'on arrivera à l'article 7 ou l'article 8.

Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Verdun.

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Lefebvre): Alors, l'amendement à l'article 4 est adopté sur division. Nous allons maintenant discuter de l'amendement à l'article 5, qui se lit comme suit: Remplacer l'article 5 par le suivant: «Un organisme visé au paragraphe 3 de l'article 1 doit, avant telle date, transmettre au ministre de qui il relève, un plan de réduction, pour la période du 1er avril 1993 au 31 mars 1998, de son personnel, sur la base du personnel en place le 31 mars 1993. «Le ministre soumet dans les 30 jours un tel plan au Conseil du trésor pour approbation et le dépôt à l'Assemblée nationale dans les 15 jours de cette approbation, ou, si l'Assemblée ne siège pas, dans les 15 jours de la reprise de ses travaux. La commission parlementaire compétente de l'Assemblée nationale convoque au moins une fois par année le ministre de qui relève l'organisme afin qu'il fasse rapport de l'état de réalisation de ce plan.»

M. le député de Verdun, on vous écoute.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Cet amendement, à l'heure actuelle, vient reprendre deux articles et réécrire à l'intérieur d'un seul article ce qui était prévu à l'article 10.2 du document qui est sorti de la commission parlementaire. De plus, il précise le rôle d'intermédiaire que le ministre doit avoir entre l'organisme ou le dirigeant d'organisme et l'Assemblée nationale. Dans ce cadre, on a introduit le rôle du ministre: l'organisme transmet au ministre de qui il relève un plan et le ministre va déposer ce plan à l'Assemblée nationale.

Donc, les deux amendements viennent faire ici dans le même article, l'article 10.2, qui était la question qui touchait les commissions parlementaires, et de plus viennent préciser le rôle du ministre par rapport aux organismes visés au paragraphe 3.

Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Verdun.

M. le député de Labelle.

M. Léonard: Deux questions. La première, pourquoi utilisez-vous l'expression «en place le 31 mars 1993», alors que, dans l'autre, c'était «autorisés au 31 mars 1993»?

M. Gautrin: C'est-à-dire...

M. Léonard: Bien, la concordance. Vous avez fait une modification à l'article 3, qui est applicable à l'article 4, pour changer l'expression «en place le 1er avril 1993» par «autorisés au 31 mars 1993». Là, vous utilisez, à l'article 5, l'expression «en place le 31 mars 1993». Pourquoi?

M. Gautrin: Parce qu'il n'y a pas le concept d'«effectifs autorisés», dans certains organismes.

M. Léonard: Bon. La deuxième question: II y a combien d'organismes touchés par l'article 5?

M. Gautrin: II y en a 54.

M. Léonard: Très bien, 54.

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Lefebvre): Alors, adopté.

M. Léonard: On vérifiera.

M. Chevrette: Ils vont vivre avec ça.

Le Président (M. Lefebvre): L'amendement à l'article 5 est adopté sur division.

Nous allons maintenant procéder à la discussion sur l'amendement suggéré à l'article 5.1. Alors, l'article 5.1 est supprimé. Je m'excuse. L'article 5.1 est supprimé. L'article 5.2.

Une voix: ...

Le Président (M. Lefebvre): Oui, oui, oui.

M. Gautrin: Comme c'est un amendement... Ça a été la base de votre argumentation... C'est-à-dire, on propose de supprimer l'article 5.1...

Le Président (M. Lefebvre): C'est un amendement. Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Gautrin: ...puisque le concept de ce qui était dans l'article 5.1...

M. Chevrette: Oui, on l'a retrouvé dans 5.

M. Gautrin: ...a été retrouvé dans les articles 4 et 5.

M. Chevrette: On a bien compris ça.

Le Président (M. Lefebvre): C'est adopté?

M. Chevrette: Surdivision...

Le Président (M. Lefebvre): Sur division.

M. Chevrette: ...M. le Président.

Le Président (M. Lefebvre): L'amendement suggéré à l'article 5.2 se lit comme suit: Insérer, après l'article 5.1, l'article suivant: «Jusqu'au 30 septembre 1998, un organisme visé au paragraphe 5° de l'article 1 doit, au plus tard le 30 septembre de chaque année, transmettre au ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science un rapport sur l'implication des règles budgétaires annuelles sur le

niveau de ses effectifs. Le ministre dépose à l'Assemblée nationale ce rapport dans les 15 jours de sa réception ou, si l'Assemblée ne siège pas, dans les 15 jours de la reprise de ses travaux. La commission parlementaire compétente de l'Assemblée nationale convoque au moins une fois par année le dirigeant de chacun de ces organismes afin de discuter de ce rapport...»

M. Chevrette: Juste sur le plan technique, est-ce que ce n'est pas, dans nos règlements... Est-ce que c'est commun dans un projet de loi d'insérer dans un article de projet de loi que le ministre siège d'office à une commission? Ce n'est pas plutôt lorsqu'il y a avis en Chambre, que le leader dit «et que le ministre en soit menbre»?

Le Président (M. Lefebvre): En principe, le ministre est, d'office, membre de la commission, sauf exception. Le principe, c'est que le ministre est membre d'office de la commission.

M. Chevrette: Je comprends, mais...

Le Président (M. Lefebvre): Ça, c'est le principe.

M. Chevrette: ...c'est comment dans nos lois? C'est ça que je veux savoir.

Le Président (M. Lefebvre): C'est le principe. Et si vous permettez, je vais lire la dernière phrase de l'amendement.

M. Chevrette: Ah! elle n'était pas lue?

Le Président (M. Lefebvre): «Le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science est d'office membre de la commission.»

M. Chevrette: Oui, mais c'est ça. Le Président (M. Lefebvre): Oui. M. Chevrette: Est-ce que c'est commun?

Le Président (M. Lefebvre): En fait, c'est plus que moins.

M. Chevrette: Non, mais «c'est-u» commun dans nos lois?

Le Président (M. Lefebvre): C'est une question, là... Moi, je vous réponds, M. le leader de l'Opposition officielle, en partant de ce qui existe dans le règlement de l'Assemblée nationale qui dit, à l'article 125, un peu comme je viens de l'indiquer: «Le ministre ou le député qui présente un projet de loi est membre de plein droit de la commission qui l'étudié.»

M. Chevrette: Ah oui! Mais ce n'est pas ça que je vous suggère. Ce n'est pas un projet de loi... C'est un projet de loi d'imputabilité devant les députés. C'est un projet de loi ? si j'ai bien compris l'esprit, et je me le suis assez fait dire ? pour responsabiliser les parlementaires face à la gestion publique. Au moment où on veut revaloriser les parlementaires, on dit: Les ministres sont imputables, les sous-ministres sont imputables et les dirigeants d'organismes sont imputables. Puis, là, devant la commission, vous dites: D'office, le ministre est là. Ça ne me semble pas cadrer avec les discours que j'ai entendus. Je ne sais pas si je me fais comprendre, là?

Le Président (M. Lefebvre): M. le leader, comme vous le savez...

M. Gautrin: M. le Président...

Le Président (M. Lefebvre): ...un membre de l'Exécutif n'est membre d'aucune commission parlementaire, sauf, d'office, de la commission qui va étudier son propre projet de loi à titre, à ce moment-là, de parrain du projet de loi.

M. Chevrette: Oui, mais ce n'est pas... Non, non, ce n'est pas un projet de loi, là, c'est d'aller étudier l'imputabilité...

Le Président (M. Lefebvre): Je comprends.

M. Chevrette: ...d'un groupe ou d'un organisme.

Le Président (M. Lefebvre): Je comprends ce que vous voulez dire. (1 h 50)

M. Chevrette: Si je pose la question, c'est parce que ça ne m'apparaît pas courant, moi, même dans nos lois, puis en particulier pour celle-ci, parce que le député de Verdun disait que c'était pour valoriser le rôle du député de contrôler le pouvoir exécutif de ces... On parlait de ces bonzes de l'État qui ne paradaient pas devant nous et qui avaient des pouvoirs sur le plan de l'administration publique.

Donc, il arrive un président d'organisme ici, devant une commission formée de députés. Ordinairement, pour qu'un ministre aille siéger sur une commission, c'est sur une motion du leader, parce qu'il devient celui qui répond de la loi ? quand c'est un bill privé par exemple. On voit la ribambelle des ministres qui vont... Si ça relève de la justice, c'est le ministre de la Justice qui est nommé; si ça relève du monde municipal, si c'est une charte de cités et villes, c'est le ministre... Mais ici, devant l'imputabilité, on fait donc du ministre sectoriel, lui aussi, un membre de la commission, et ce, d'office, alors que ce même ministre pourrait avoir donné des directives... Il pourrait avoir donné des directives dans ses plans d'action et dans ses plans d'effectifs. Et là, vous le mettez sur la commission, d'office.

Moi, je trouve ça drôle.

M. Gautrin: M. le Président...

Le Président (M. Lefebvre): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: ...voici la différence qu'il y a, et on est actuellement dans un rapport différent de celui qu'il y a entre les universités et la ministre de l'Enseignement supérieur: il n'y a pas un rôle d'autorité directe entre la ministre de l'Enseignement supérieur et les recteurs d'université ou l'ensemble des universités. Pour ça, il n'y a pas lieu de dire que la ministre... L'esprit de cet article-là, c'est que les universités ne feront pas rapport au ministre qui transmet un rapport ou quoi que ce soit. Il fait rapport directement à l'Assemblée. Dans ce cadre-là, on a pensé qu'il était important, pour écouter et recevoir ce rapport, que la ministre de l'Enseignement supérieur soit aussi présente dans la commission.

Le Président (M. Lefebvre): L'article 5.2, adopté sur division. Nous allons... Nous passons à l'amendement suggéré à l'article 6. L'article 6 est supprimé. Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Léonard: Un instant. Moi, je voudrais, pour le bénéfice de cette commission plénière, quand même revenir à cet article 6 qui a donné lieu à une saga en commission parlementaire. Alors, je lis le procès-verbal de la commission: «M. Gautrin (Verdun) propose ce qui suit: L'article 6 est modifié par le remplacement [...] ? je vous passe les détails ? et un débat s'engage. À 15 h 45, après une suspension de 15 minutes, la séance reprend. À la demande de M. Gautrin (Verdun), il est convenu de retirer l'amendement. Alors, M. Gautrin (Verdun) propose ce qui suit: L'article 6 du projet de loi 198 est modifié par ce qui suit [...]; l'article 5, par ce qui suit la présente section [...]. Un débat s'engage. À 16 heures, après une suspension de 6 minutes, la séance reprend. À la demande de M. Gautrin (Verdun), il est convenu de retirer l'amendement...»

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Léonard: Alors, il en propose un autre. Il en propose un autre parce qu'il estimait que les objections que je faisais, elles étaient fondées. Alors, après le débat sur sa nouvelle proposition, «il est convenu de suspendre l'étude de l'article 6 et de l'amendement proposé. Et, à 16 h 51, après une suspension de 11 minutes, la séance reprend [...]». Et, finalement, on s'attaque à l'article 7, en suspendant l'article 6 pour jusqu'à la prochaine séance. Quelques jours après, on reprend l'article 6 et, à 17 h 17, après un débat, encore une fois, «après une suspension de 3 minutes, la séance reprend à nouveau, et puis M. Gautrin (Verdun) propose de retirer l'amendement».

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Léonard: Enfin, finalement, «l'article 6 est remplacé par le suivant: "Tout organisme public doit communiquer à tout autre organisme public qui lui en fait la demande le nom des personnes mises en disponibilité et tous les autres renseignements requis en regard de ces personnes pour les fins de l'application de la présente section." Un débat s'engage et puis, à la demande de M. Gautrin et avec la permission de la commission, M. Rioux apporte des précisions». Alors, j'ai moi-même proposé un sous-amendement parce qu'il y avait une faute à l'intérieur même de l'amendement: le mot «tout» devait être au pluriel, il était au singulier. Bref, il y a un débat qui s'engage, nous n'avons pas réglé la question. «À 18 h 2, la commission ajourne ses travaux sine die.» Et, ce soir, M. le Président, on propose de retirer l'article 6. Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Reconnaissez à quel point le député de Labelle est éloquent et a pu nous convaincre.

M. Léonard: II est inutile, paraît-il. Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Et bravo pour le ministre d'un soir!

Le Président (M. Lefebvre): Des .commentaires, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Aucun commentaire.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: J'espère...

Le Président (M. Lefebvre): L'amendement proposé est-il adopté?

M. Chevrette: Sur division profonde.

Le Président (M. Lefebvre): Adopté...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lefebvre): Adopté sur division.

L'amendement à l'article 7 se lit comme suit: Remplacer l'article 7 par le suivant: «Le Conseil du trésor peut, à la demande du ministre concerné, prendre une décision pour exempter, dans la mesure qu'il détermine, de l'application de tout ou partie de la présente section, un organisme public ou une catégorie d'organismes publics, une catégorie de personnes à l'emploi d'un organisme public. Le ministre qui a formulé la demande dépose à l'Assemblée nationale toute décision prise par le Conseil du trésor dans les 15 jours de son adoption ou, si l'Assemblée ne siège pas, dans les 15 jours de la reprise de ses travaux. Le Bureau de l'Assemblée nationale exerce, par règlement,

le pouvoir du Conseil du trésor prévu au premier alinéa à l'égard des personnes que l'Assemblée nationale désigne pour exercer une fonction qui en relève.» M. le député de Verdun, on vous écoute.

M. Gautrin: M. le Président, par rapport à ce qui a été adopté en commission parlementaire, je ne referai pas ici le débat de la commission parlementaire, on ajoute «à la demande du ministre concerné» et on précise qui dépose les décisions à l'Assemblée nationale. C'est: «Le ministre qui a formulé la demande dépose à l'Assemblée nationale...» Cet article était un article pour permettre de la souplesse et faire en sorte qu'on ne soit pas engoncés et qu'on soit en mesure de pouvoir exempter, en tout ou en partie, certaines catégories ou certains organismes publics de l'application de la loi, justement pour tenir compte des remarques de la députée de Terre-bonne. Là, on ne fait simplement qu'en préciser l'opéra-tionalisation, en précisant le rôle du ministre concerné.

M. Chevrette: Juste une minute, là. On va le regarder, parce que...

Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Verdun. M. le député de Labelle.

M. Léonard: oui. m. le président, là, on vient de se rendre compte que... d'abord, pour expliquer, encore une fois, la saga de l'article 7, le premier article avait trois lignes. il a été remplacé et adopté en commission par un autre article, lequel, cet après-midi, a été remplacé par un autre article 1...

M. Chevrette: Puis, ce soir, il y en a un autre.

M. Léonard: ...et, ce soir, dans un autre amendement, il y a encore des modifications dans l'amendement par rapport à l'amendement qu'on a reçu cet après-midi.

M. Chevrette: C'est vrai. Une voix: Ah oui?

M. Léonard: C'est ça, la réalité. Dans ce projet de loi, on travaille comme ça depuis le début. J'ai lu, tout à l'heure, la saga de l'article 6. On fait pareil pour l'article 7. Bien oui!

M. Chevrette: C'est vrai ou c'est faux?

M. Gautrin: Bien, écoutez, sérieusement, l'article 7, en substance, à l'heure actuelle, est modifié légèrement et, reconnaissez-le, pour strictement rajouter...

M. Chevrette: Un détail! «d'office»! oui!

M. Gautrin: Oui, oui.

M. Chevrette: Oui. Vous appelez ça un détail, sur le plan législatif?

M. Gautrin: Initialement, si vous me permettez, initialement, c'était inclus dans le rapport.

M. Chevrette: Non. M. Léonard: Non. M. Gautrin: Bien oui... Des voix: Non.

M. Gautrin: ...puisqu'on ne précisait pas «peut, dans la mesure qu'il détermine».

M. Léonard: Qu'il détermine.

M. Gautrin: Donc, c'est celui qui prenait. Donc, il le prenait d'office. À l'heure actuelle...

Une voix: Oui, mais c'est le rapport qu'on étudie.

M. Gautrin: Bien oui. Maintenant, on précise: «à la demande du ministre».

M. Léonard: Non, non, on dit les deux: «peut, d'office» ou «à la demande du ministre concerné».

M. Gautrin: Je m'excuse.

M. Chevrette: C'est quoi qui est arrivé entre midi et 5 heures pour qu'on enlève le mot «d'office»?

M. Léonard: Ah oui! on a enlevé le mot «d'office».

M. Chevrette: Est-ce qu'on pourrait m'expliquer ça?

M. Gautrin: Ce qui est arrivé entre midi et 5 heures? Beaucoup de choses.

M. Léonard: Pourquoi? Les coulisses sont muettes?

M. Chevrette: À part des grands sourires dans les corridors, qu'est-ce qui justifie, entre midi et 5 heures, le dépôt d'un amendement qui enlève le mot «d'office»?

Le Président (M. Lefebvre): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Expliquez-moi donc vos raisons!

Le Président (M. Lefebvre): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Oui, je pense qu'initialement on

avait réajouté le mécanisme de «à la demande du ministre concerné». Donc, en rajoutant «à la demande du ministre concerné», on rajoutait les 2 possibilités et, donc, il y avait la possibilité «d'office», c'est-à-dire de lui-même, ou «à la demande du ministre concerné». Il semblerait qu'il serait préférable, à la réflexion, qu'on passe tous par le même canal, c'est-à-dire que le Conseil du trésor n'ait pas à initier le processus, mais qu'il vienne, à la demande du ministre responsable du secteur...

Une voix: ...

(2 heures)

M. Chevrette: On va lui demander. Si le ministre ne le demande pas, est-ce que le Trésor peut agir?

M. Gautrin: À l'heure actuelle, tel que rédigé, si le ministre ne le demande pas, le Trésor ne peut pas prendre de décision.

M. Chevrette: Puis vous trouvez ça correct.

M. Gautrin: La réponse est oui.

M. Léonard: Ah, bien non!

Une voix: Ils ne sont pas ministres.

M. Gautrin: Si je trouve ça...

M. Chevrette: Mais il faut bien comprendre, là. Je vais vous retendre une perche.

M. Gautrin: Attendez un instant, là. Est-ce que je trouve correct? La réponse est oui.

M. Léonard: Bien, M. le Président, ça n'a pas de sens. Le Conseil du trésor est une émanation du Conseil des ministres. Ça veut dire que le Conseil des ministres se met à la remorque d'un seul ministre.

M. Chevrette: D'un seul ministre. Ça n'a pas d'allure!

M. Léonard: C'est un non-sens absolu sur le plan exécutif. Ça n'a pas de bon sens.

M. Chevrette: Est-ce qu'on a le droit... M. le Président, je vais y aller sur une question plus...

Le Président (M. Lefebvre): M. le député de Joliette, vous avez le droit de poser des questions.

M. Chevrette: ...directe à vous, là. Est-ce qu'on a le droit, comme membre de l'Assemblée nationale, de subordonner un Conseil des ministres à un ministre?

Le Président (M. Lefebvre): Ça n'appartient pas à la présidence de l'Assemblée de répondre à cette question. Vous me demandez une opinion. Posez la question à M. le député de Verdun.

M. Chevrette: Mais est-ce que ce projet de loi a fait l'objet d'une discussion au Conseil des ministres, dans son libellé final, en acceptant comme principe qu'un ministre... C'est important pour nous autres, avant de voter, là. Est-ce que le parrain du projet de loi peut nous dire que le Conseil des ministres actuel a accepté qu'un ministre puisse placer l'ensemble du Conseil à sa remorque?

M. Gautrin: Ce projet de loi est un projet de loi qui émane du caucus des députés, donc, n'a pas été discuté par le Conseil des ministres.

M. Chevrette: Mais est-ce que le parrain du projet de loi peut nous dire que le caucus était bel et bien au courant, lorsqu'il a voté, qu'un seul ministre peut empêcher son gouvernement d'agir?

M. Camden: M. le Président.

M. Chevrette: Est-ce que le conseil des députés savait ça?

Le Président (M. Lefebvre): M. le député...

M. Gautrin: Je pense, M. le Président, que les demandes d'exclusion sont présentées par le ministre concerné.

M. Chevrette: Pardon?

M. Gautrin: Les demandes d'exclusion sont présentées à la demande du ministre concerné, tel que rédigé ici.

M. Chevrette: Ça n'a pas de bon sens.

M. Camden: M. le Président, si vous permettez.

Le Président (M. Lefebvre): Oui, M. le député de Lotbinière.

M. Camden: Simplement rappeler aux gens, peut-être, le libellé de l'article qu'on a devant nous. On dit: Le Conseil du trésor peut. On ne dit pas: Le président du Conseil du trésor. Et rappelons-nous qu'il y a 5 membres, il y a 5 ministres, au Conseil du trésor, et qu'il ne s'agit pas du président du...

M. Chevrette: Non, non. Il ne peut pas, s'il n'y a pas de demande.

M. Camden: C'est-à-dire qu'il ne s'agit pas... Non, non. Il faut bien rappeler... Ce qu'on vient de

mentionner, de l'autre côté, M. le Président, c'est qu'un seul ministre peut prendre le contrôle et prendre les décisions au nom du Conseil des ministres, ce qui n'est pas le cas.

M. Léonard: Non.

M. Chevrette: Bien oui, mais le parrain de la loi m'a répondu.

M. Camden: L'article est bien spécifique, M. le Président. On dit: Le Conseil du trésor peut. Et le Conseil du trésor est composé de 5 ministres du Conseil des ministres. Alors, il y a une distinction qui est importante. Il ne s'agit pas, dans le libellé qu'on a devant nous, du président du Conseil du trésor. C'est toute une nuance.

M. Chevrette: Oui, mais le parrain du projet de loi m'a carrément dit, à ma question très précise: La réponse, c'est oui. Il n'a pas été équivoque. Là, vous vous contredisez. C'est qui qui a raison? L'adjoint du parrain ou le parrain?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Camden: M. le Président...

M. Chevrette: Ou bien le ministre d'un soir et son adjoint parlementaire d'un soir.

M. Camden: M. le Président, on aura beau banaliser sur le rôle des députés, il reste que fondamentalement, c'est un projet de loi qui a connu des étapes et qui a fait l'objet d'un travail incessant de la part des députés. Et je dois vous indiquer que ce qu'on lit, ce que le député ? mon collègue de Verdun ? a mentionné... Il a dit oui au libellé qu'il y avait là. Et le libellé dit: C'est le Conseil du trésor. Il n'y a pas d'ambiguïté, ni dans mon esprit, ni dans celui du député de Verdun. Il faut lire ce qui est écrit...

M. Chevrette: O.K.

M. Camden: ...et ne pas lire ce qui n'est pas écrit et ce qu'on souhaiterait voir lire.

Le Président (M. Lefebvre): Mme la députée de Terrebonne, vous voulez intervenir?

Mme Caron: Le député de Verdun a fait part que l'article 7 venait répondre aux objections que j'avais présentées tantôt concernant l'article 4. Alors, simplement pour lui dire que ça ne répond aucunement à mes objections, puisqu'un ministre pourrait avoir des objectifs de réforme qui demanderaient une augmentation d'effectifs, pourrait demander au Conseil du trésor d'être exempté, mais c'est le Conseil du trésor qui, lui, prend la décision d'exempter et peut très bien décider qu'il ne veut pas. Et c'est dans la mesure qu'il détermine, en tout ou en partie. Donc, le ministre concerné, malgré ses objectifs de réforme, peut se trouver devant une décision du Conseil du trésor qui va aller à l'encontre de ses objectifs. Et il ne faut pas oublier que ce projet de loi, dans l'article 4, dit bien qu'on se parle de 1994 à 1998; donc, pourrait se voir empêcher de faire ces réformes pour une grande période.

Le Président (M. Lefebvre): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Mme la députée de Terrebonne, pour vous répondre, 2 éléments. Premièrement, vous savez que le Conseil du trésor, comme l'a rappelé le député de Labelle, est une émanation du Conseil des ministres et que, dans les cas des réformes dont vous parlez, ça ne serait pas une réforme d'un ministre, mais, en général, c'est une politique gouvernementale, donc, une décision de l'ensemble du gouvernement. Donc, je verrais mal l'ensemble du gouvernement aller contre une décision de l'ensemble du gouvernement.

Mme Caron: Ça s'est déjà vu, M. le député.

Le Président (M. Lefebvre): D'autres interventions?

M. Chevrette: Oui, M. le Président, je vous annonce un amendement pour au moins permettre...

Le Président (M. Lefebvre): Vous voulez amender l'amendement? Un sous-amendement?

M. Chevrette: Un sous-amendement, excusez, oui.

Le Président (M. Lefebvre): Oui.

M. Chevrette: Pour permettre au moins au projet de loi de ne pas avoir l'air dérisoire à sa face même, là. Quand un ministre peut paralyser un gouvernement, là, je pense bien que...

Le Président (M. Lefebvre): Je vous indique, et je m'adresse à M. le député de Verdun, qu'un sous-amendement est recevable.

M. Chevrette: Oui. C'est le mot «d'office», M. le Président. «Le Conseil du trésor, d'office...» Et je vais vous remettre le sous-amendement pour au moins le rendre cohérent par rapport à la gestion de l'État. Dans quelques secondes, vous aurez le texte, parce que d'abord...

Le Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a...

M. Chevrette: ...il fallait clarifier si on pouvait ou pas présenter...

Le Président (M. Lefebvre): Voulez-vous le lire, votre sous-amendement, M. le député de Joliette?

M. Chevrette: Oui.

Le Président (M. Lefebvre): Alors, vous proposez d'amender...

M. Chevrette: je propose, m. le président, que l'article 1... l'amendement, tel que proposé, est modifié par l'insertion, dans la première ligne, après les mots «conseil du trésor peut», des mots «d'office ou».

Le Président (M. Lefebvre): Je m'excuse, M. le député de Joliette. Pour le procès-verbal, le sous-amendement de M. le député de Joliette est déposé.

M. Chevrette: Est-ce qu'il est recevable, M. le Président?

M. Gautrin: Si vous me permettez, avant de commencer par votre gauche, le député de Joliette, si le député de Joliette fait un tel amendement, il doit, par concordance, j'imagine, prévoir que si le Conseil du trésor prend une décision d'office, c'est quelqu'un comme le président du Conseil du trésor qui dépose la décision à l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Lefebvre): Le sous-amendement est recevable. Merci.

M. Gautrin: Non, non, mais, est-ce que je...

Le Président (M. Lefebvre): Non, non, mais je veux, dans un premier temps, au niveau strictement de la procédure...

M. Chevrette: Non, non, mais, écoutez...

Le Président (M. Lefebvre): ...indiquer que le sous-amendement est recevable.

M. Chevrette: ...s'il faut y avoir de la concordance...

Le Président (M. Lefebvre): Maintenant, discutez, allez-y. Allez-y.

M. Chevrette: S'il doit y avoir concordance, M. le Président, on va la faire, la concordance. Mais ce qu'on veut, nous, là, c'est que le projet de loi, là, à sa face même, ait l'air au moins à ne pas subordonner un Conseil des ministres en entier à un ministre. Donc, s'il faut faire les concordances, on va les faire.

Nous, «d'office», au moins, on dit: Bon, bien, voici, il y a un moyen d'action. Maintenant, l'autre... Là, je suppose que si le Conseil du trésor agit d'office, il doit être déposé par son président, effectivement, ou bien par un membre du Conseil du trésor. Ce n'est pas restrictif, vous avez dit vous-même tantôt qu'il y avait 5 membres, 5 ministres sur le Conseil du trésor. Alors, on peut marquer dans la législation que ça peut être le président du Conseil du trésor ou un des membres du Conseil du trésor, ça ne me dérange pas. Ou bien on peut remettre le libellé exactement comme il était.

Quand on nous l'a transmis, à 17 heures, là... Oui, il faut aller plus rapidement, je comprends mais... Quand vous nous l'avez transmis cet après-midi, la concordance y était. M. le Président, est-ce que je peux suggérer au député de Verdun que le sous-amendement soit exactement l'amendement qu'il m'a envoyé cet après-midi, de sorte que toutes les concordances étaient dedans puis il y avait le mot «d'office»? Et ça pourrait être une façon de régler le litige.

Le Président (M. Lefebvre): M. le député de Lotbinière.

M. Camden: M. le Président, est-ce que vous allez nous en faire distribuer une copie pour qu'on puisse en prendre connaissance?

M. Chevrette: Prenez exactement le texte que vous nous avez envoyé après-midi, vous en avez une copie.

M. Camden: C'est le libellé. Vous comprendrez bien qu'on voulait voir s'il avait été dactylographié, puisqu'on nous a reproché au début qu'il y avait une note qui avait été manuscrite.

M. Chevrette: Bien oui, mais on vient de découvrir que vous subordonnez tout votre Conseil des ministres à un seul. Imaginez-vous bien qu'on vous aide à ne pas avoir l'air trop fou.

M. Camden: Alors, M. le Président, évidemment. ..

Le Président (M. Lefebvre): M. le député de Lotbinière.

M. Camden: ...dans tous ces mots de remerciement au leader de l'Opposition...

M. Chevrette: Merci. Bienvenue. (2 h 10)

M. Camden: Je voudrais simplement lui rappeler très brièvement qu'il n'est pas possible que le gouvernement soit subordonné à un seul ministre, puisque celui qui assume la présidence du Conseil du trésor, et je rappelle que, dans le libellé de l'amendement à l'article 7 que nous avons devant nous, on parle du Conseil du trésor. On ne signifie pas qu'il s'agit du président, de celui qui assume la présidence du Conseil du trésor, mais bien de l'ensemble des membres du Conseil du trésor, soit S membres, 5 ministres qui sont membres du Conseil du trésor. Et je vous rappelle, M. le Président,

que ces 5 membres du Conseil du trésor et, lui-même, comme organisme, le Conseil du trésor, n'est pas un ministère en soi, mais est bien un organisme relevant du Conseil exécutif, soit du premier ministre.

Il faut bien se rappeler ça. Techniquement, M. le Président, ça a une importance toute particulière, parce que ça nous permet de bien situer, et loin de notre esprit, comme membres de la commission du budget et de l'administration, de voir le président du Conseil du trésor avoir la responsabilité totale et entière, mais bien l'ensemble des membres du Conseil du trésor.

Le Président (M. Lefebvre): Vote sur le sous-amendement.

L'article 7 proposé est modifié par l'insertion, dans la première ligne, après les mots le «Conseil du trésor peut» des mots «d'office ou». Est-ce que le sous-amendement est adopté?

Des voix: Non.

M. Chevrette: Bon, bien, c'est rejeté sur division.

Le Président (M. Lefebvre): Alors, le sous-amendement proposé...

M. Chevrette: Rejeté sur division.

Le Président (M. Lefebvre): ...est rejeté sur division.

M. Chevrette: M. le Président, l'amendement est rejeté sur division.

Le Président (M. Lefebvre): Est rejeté. Le sous-amendement est rejeté.

M. Camden: Le sous-amendement est rejeté. Le Président (M. Lefebvre): L'amendement... M. Chevrette: Vous allez vivre avec ça.

Le Président (M. Lefebvre): ...proposé est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Lefebvre): L'amendement proposé à l'article 7 est adopté.

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Lefebvre): Adopté. Sur division?

M. Chevrette: Tabarouette, de tabarouette, de tabarouette!

Le Président (M. Lefebvre): Adopté.

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Lefebvre): Sur division.

M. Chevrette: Ça, ça va faire une loi du tonnerre!

Le Président (M. Lefebvre): Nous procédons maintenant...

M. Chevrette: Les ministres vont frémir.

Le Président (M. Lefebvre): ...à l'amendement proposé à l'article 10, qui se lit comme suit: Remplacer l'article 10 par le suivant: «10. Un sous-ministre ou une personne exerçant les pouvoirs que la Loi sur la fonction publique attribue à un sous-ministre et à un dirigeant d'un organisme public visé aux paragraphes 1 et 2 de l'article 4 de la Loi sur le vérificateur général sont, conformément à la loi, notamment en regard de l'autorité et des pouvoirs du ministre de qui chacun d'eux relève, imputables devant l'Assemblée nationale de leur gestion administrative. La commission parlementaire compétente de l'Assemblée nationale entend au moins une fois par année le ministre, si celui-ci le juge opportun et, selon le cas, le sous-ministre ou le dirigeant d'organisme, afin de discuter de leur gestion administrative et, le cas échéant, de toute autre matière de nature administrative relevant de ce ministère ou organisme, et signalée dans un rapport du Vérificateur général.»

M. le député de Verdun, on vous écoute.

M. Gautrin: M. le Président, par rapport à l'article initial adopté en commission parlementaire, on vient essayer de préciser, par ces amendements, les rôles et fonctions du ministre dans ses liens avec ses sous-ministres ou les dirigeants de l'organisme de qui ils relèvent. L'amendement principal se trouve dans les mots «conformément à la loi, notamment en regard de l'autorité et des pouvoirs du ministre de qui chacun d'eux relève». Donc, on vient préciser que cette loi ne venait pas reperturber ou modifier les liens d'autorité naturelle qui existent entre le ministre et les sous-ministres.

Par concordance, lorsqu'on entend en commission parlementaire, pour discuter de leur gestion administrative, le sous-ministre ou le dirigeant d'organisme, le ministre, s'il le juge opportun, peut se joindre à eux pour pouvoir témoigner en commission parlementaire.

M. Chevrette: M. le Président.

Le Président (M. Lefebvre): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Moi, je pense, en tout cas, que je peux vous annoncer tout de suite qu'on est contre, et le

ministre devrait être là. Il y en a déjà qui sont là dans notre régime actuel, puis, quand les messieurs qui enregistrent là sont obligés de prendre le nom du sous-ministre, parce que c'est le sous-ministre qui répond tout le temps, ça, c'est de donner carrément, c'est de sauver le visage de quelqu'un qui n'a pas la compétence pour être à sa place, et moi, personnellement, je ne marche pas dans ça. Le ministre peut être là avec son équipe, je suis d'accord avec ça, mais s'il le veut bien. Ce n'est pas ça qui était l'objectif de vos beaux discours, c'était l'impu-tabilité: II faut que le pouvoir exécutif vienne s'asseoir devant nous autres et qu'il réponde. Rappelez-vous de vos beaux discours. Là, c'est rendu que c'est: S'il veut bien venir, selon le cas.

M. Léonard: S'il le juge opportun.

M. Chevrette: Ça, ça va démasquer ceux qui sont faits forts, hein? Vous allez conserver toutes vos colonnes Fix-O-Flex, ceux qui plient à tout. Vous savez qu'est-ce que ça veut dire, un bracelet Fix-O-Flex? Si vous ne savez pas ce que je veux dire, moi, je peux vous l'expliquer.

L'objectif de toute la loi, c'était de rendre imputables les individus, ce n'était pas d'arriver avec un sous-ministre pour venir répondre. Pensez-vous que les ministres ont une colonne vertébrale? Ils ne viendront pas répondre de leur ministère? Mais ceux qui ne sont même pas capables de répondre à un projet de loi, qu'est-ce qu'ils font? Ils amènent quelqu'un qui parle à leur place. Dans le Journal des débats, par exemple, c'est marqué que c'est le ministre qui parle. Franchement!

C'est ça, le renouveau dans la gestion de l'État que vous nous proposez? Vous avez pris combien d'heures pour étudier ça, cette affaire-là, cet amendement-là? Voyons, selon le cas et s'il le veut bien! Ce serait d'abord le ministre et, s'il veut être accompagné, bien sûr. Puis, s'il a posé des gestes dans ses fonctions d'administrateur, ça, le ministre peut dire: Ça a été pris au niveau de mon sous-ministre, et il va vous répondre sur cette question précise. C'est de même qu'on gère. On n'est pas là pour...

Il y a les présidents de société d'État que je fais la différence, parce que le ministre, c'est un ministre de tutelle puis il n'est pas là nécessairement; ça, je comprends ça. Par exemple, le président de la SAQ, de la Société des alcools, ou de la Société de l'assurance automobile du Québec, ou de la SEPAQ, ce sont des sociétés qui ont des budgets, qui gèrent et qui doivent répondre de leur... Et quand ils viennent d'ailleurs, ils sont questionnés, et le ministre les laisse répondre; c'est normal, ils viennent répondre de leur gestion.

Mais, des sous-ministres... Il n'y en a pas gros, de sous-ministres, qui agissent de leur chef, sans en parler à leur ministre, parce qu'il n'est pas longtemps sous-ministre; il passe plutôt dans les paliers inférieurs. Ils connaissent des mutations tragiques et tangibles et concrètes et immédiates. Franchement, il faut savoir ce que c'est. Je ne sais pas ce que...

En tout cas, moi, je trouve que ça a l'air un petit peu nuage, vent. Vous savez, on veut déplacer beaucoup d'air avec ça, là. On dit: Si le ministre veut bien venir. Imaginez-vous! Ça fait une grosse contrainte, ça? Si vous en avez un qui n'est pas capable d'aligner 3 mots et 3 phrases une en arrière de l'autre, qui va répondre? Le sous-ministre, s'il vous plaît. Et ces messieurs qui enregistrent vont dire: Le sous-ministre pour... Non, c'est marqué que ce sera M. le ministre ou Mme la ministre X qui répond. Franchement. Franchement! On est contre.

M. Gautrin: M. le Président...

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: ...le député de Joliette devrait revenir à la position initiale dans le projet de loi. On parlait, dans ce projet de loi, de l'imputabilité des sous-ministres ou des administrateurs d'État. Donc, on ne parlait pas de l'imputabilité des ministres.

Ce que vient faire l'amendement, ici, c'est de dire que, compte tenu du lien d'autorité naturelle qui existe entre le sous-ministre et le ministre, lorsque le sous-ministre sera appelé à venir rendre compte de sa gestion devant la commission parlementaire, le ministre, s'il le désire, pourra accompagner son sous-ministre. Le point qui est important, c'est de bien comprendre que, par ce projet de loi, on est en train de changer quelque chose et de rendre imputable les administrateurs d'État, c'est-à-dire les dirigeants d'organismes et les sous-ministres devant les élus. L'amendement vient dire que si le ministre veut accompagner ou être présent lorsque son sous-ministre est présent, il peut venir. Le principe est un principe de l'imputabilité des gestionnaires d'État et des sous-ministres.

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): L'amendement à l'article 10 est adopté sur division.

Le titre de la section IV. Amendement proposé dans le titre de la section IV.

M. Gautrin: Attendez, il y a les articles 10... Les articles 10.1 et 10.2 sont supprimés par concordance.

Le Président (M. Bissonnet): Non, mais, là, écoutez.

M. Chevrette: Sur division, les articles 10.1, 10.2, 10.3, 10.4.

Le Président (M. Bissonnet): Un instant, là. Je n'ai pas la même feuille que vous autres, là. Est-ce que c'est le titre de la section IV, l'amendement suivant?

M. Gautrin: M. le Président, après les articles 10.1 et 10.2, par concordance, parce qu'ils ont été repris dans les autres articles...

Le Président (M. Bissonnet): Non, ça va, c'est parce qu'il y avait une feuille, là... Ça va.

M. Gautrin: ...sont supprimés.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, il est proposé que les articles 10.1 et 10.2 soient supprimés.

Une voix: Adopté.

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

M. Gautrin: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): L'article... Attendez un instant.

M. Gautrin: Que l'article 11 soit supprimé...

Le Président (M. Bissonnet): Un instant, un instant!

M. Gautrin: Excusez-moi. (2 h 20)

Le Président (M. Bissonnet): C'est moi qui... Écoutez, il faut signer parce que, si ce n'est pas signé, là... Il n'a pas été adopté encore, lui.

L'article 11, l'article 11 est supprimé.

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

Bon. Le titre du projet de loi... Il est proposé de modifier le titre du projet de loi... l'amendement... l'amendement, qui est ceci...

M. Gautrin: M. le Président, l'amendement qui vient avant est: Changement du titre de la section 4, où on remplace le titre «administrateurs d'État et dirigeants de l'organisme» par «sous-ministres et dirigeants de l'organisme», pour être cohérent avec ce qu'on vient de dire.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, pour être conforme, il est proposé d'amender, à l'étude de la section 4... de remplacer les mots «administrateurs d'État et des dirigeants d'un organisme public» par les mots «sous-ministres et des dirigeants de l'organisme public».

Adopté sur division.

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, le titre du projet de loi. Il est proposé d'amender dans le titre du projet de loi... de remplacer «administrateurs d'État»... c'est la même chose.

M. Chevrette: En sous-amendement, je proposerais loi Gautrin, ministre d'un soir.

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Mais c'est la même chose, là.

M. Gautrin: Non, M. le Président, il s'agit d'un amendement au titre, alors que, tout à l'heure, c'était un amendement au titre de la section 4.

Le Président (M. Bissonnet): Alors... ça va. Alors, dans le titre du projet de loi, remplacer les mots «administrateurs d'État et des dirigeants d'un organisme public» par les mots «sous-ministres et des dirigeants de l'organisme public».

M. Chevrette: M. le Président, il y en a un qui m'a souligné une farce, puis je ne peux pas empêcher de faire rire mes collègues à cette heure-ci: On aura eu les culottes à Vautrin, puis la loi à Gautrin.

Une voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bissonnet): Alors, adopté sur division, si je comprends bien.

M. Gautrin: Merci.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

M. Chevrette: Sur division.

M. Gautrin: Est-ce qu'on peut faire une motion de renumérotation, M. le Président?

M. Chevrette: Ah, c'est très important, ça, à cette heure-là? Adopté.

Une voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bissonnet): Alors, une motion de numérotation des articles, est-ce que c'est adopté?

M. Chevrette: Bien sûr, celle-là, la renumérotation, je vous la donne. Mais, la loi au complet: contre. Elle va être sanctionnée quand?

Le Président (M. Bissonnet): Alors, tous les amendements ont été adoptés sur division, sauf l'amendement de numérotation.

Donc, la commission de l'étude plénière a complété son mandat, et je suspends quelques instants pour permettre à ceux qui accompagnent les députés de bien vouloir se retirer. Pardon?

(Suspension de la séance à 2 h 22)

(Reprise à 2 h 26)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le président de la commission plénière.

Prise en considération du rapport de la commission plénière et des amendements déposés

M. Camden (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de vous aviser que la commission plénière a étudié les amendements proposés par le député de Verdun, en vertu de l'article 257, au projet de loi 198 et qu'elle les a adoptés sur division.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que le rapport de la commission plénière est adopté?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

Reprise du débat sur l'adoption

Nous poursuivons le débat sur la motion du député de Verdun proposant l'adoption du projet de loi 198, Loi sur la réduction du personnel dans les organismes publics et Fimputabilité des administrateurs d'État et des dirigeants d'un organisme public.

Je cède la parole à M. le député de Labelle.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: Merci, M. le Président.

Le projet de loi 198 a été déposé à l'automne 1991, donc, ça fera maintenant presque 2 ans qu'il traîne sur nos tablettes et sur nos tables. C'est un projet de loi qui a été qualifié de tous les noms et, je pense, avec raison. C'est l'oeuvre d'un député désoeuvré qui voulait se faire remarquer, qui visait des postes et qui a été, ce soir, ministre d'un soir.

M. le Président, je voudrais simplement parler de 3 thèmes qui touchent ce projet de loi, d'abord sur cette question de centralisation. Tout le mécanisme qui était apporté dans ce projet de loi vise ou aura pour effet de centraliser l'administration publique, quoi qu'on en dise. Les organismes, les réseaux que nous avons, de la santé, de l'éducation, des universités, de l'enseignement supérieur, sont des organismes qui jouissent d'une assez large autonomie administrative, d'une autonomie décisionnelle, qui ont des conseils d'administration, qui ont des responsabilités dévolues de par les lois, et ce que ce projet de loi vient faire, c'est d'intervenir dans la gestion des ressources humaines. Alors, M. le Président, quand on parle de santé, quand on parle de l'éducation, les ressources humaines sont les ressources majeures. Et si l'on permet au Conseil du trésor d'intervenir dans la gestion des ressources humaines, effectivement, inévitablement, on opère une centralisation considérable.

M. le Président, si jamais ce projet de loi arrivait à s'appliquer, ce serait une catastrophe sur le plan de la responsabilisation de toute une série de personnes en charge des unités de ces réseaux, c'est évident. Je pense que le projet de loi a été amené par des parlementaires qui ignoraient, finalement, le rôle qu'ils jouent ici, qui veulent s'arroger, en quelque sorte, un rôle d'exécutif, et qui pensent qu'en amenant un tel projet de loi devant l'Assemblée nationale... pas un tel projet de loi, mais de tels plans de réduction des effectifs devant l'Assemblée nationale, on va faire un contrôle efficace, alors que, dans le fond, il n'y a personne qui peut amener ici, devant nous, la gestion des ressources humaines qui, elle, doit se faire dans le champ, dans chacune des unités. l'objectif du projet de loi, c'est de couper le personnel d'encadrement, de réduire le personnel d'encadrement de 20 %, et de réduire le personnel syndiqué ou autre, mais non-cadre, de 12 %. l'objectif a été établi pour la fonction publique directement: moins 20 %, moins 12 %.

Mais, par ailleurs, on sait ? et il a été dit en commission parlementaire ? que le véritable objectif qu'on poursuivait pour les réseaux de la santé et de l'éducation, c'était aussi une réduction de 20 % du personnel d'encadrement et de 12 % pour les autres personnels. (2 h 30) objectif standard accordé, attribué, obligé pour tous et qui fait qu'on ne tient pas compte des situations particulières, qu'on ne tient pas compte d'organismes qui devraient connaître une expansion pour différentes raisons qu'on ignore, qu'on pourrait imaginer, sur lesquelles on pourrait faire des hypothèses, en même temps qu'on pourrait faire l'hypothèse que des organismes, dont on veut couper le personnel de 20 % et de 12 %, devraient tout simplement disparaître. alors, au lieu de prendre, de faire, de porter un jugement d'évaluation sur chacun des organismes, sur chacun des réseaux, on prend une décision générale: moins 20 %, moins 12 %. ça, c'est une gestion de paresseux.

Comme dans le dernier dépôt des crédits du gouvernement, le président du Conseil du trésor a fait une gestion de paresseux en gelant les salaires pour tout le monde, au lieu de se poser des questions sur la réorganisation de l'appareil de l'État, ce qu'il n'a pas fait ? ce qu'on ne fait pas, encore ici ? parce que la seule chose qu'on est capable de faire, c'est d'imposer une coupure uniforme, universelle, bête et méchante.

M. le Président, on apporte aussi... On a tenté et

on veut amener ce qu'on appelle le principe de l'imputa-bilité. Nous avons eu l'occasion d'en débattre à différentes reprises lors de la commission parlementaire sur l'administration... la fonction publique, pardon, en 1990-1991, et nous avons eu l'occasion de nous exprimer là-dessus. Le principe de l'imputabilité, il est d'abord, il réside d'abord chez les ministres. C'est le sens, c'est le fondement du parlementarisme britannique. C'est le fondement du parlementarisme britannique.

C'est le ministre, partie de l'Exécutif, qui répond devant les parlementaires, devant l'Assemblée nationale. Et l'on fait une distinction très nette entre un élu qui porte une responsabilité, qui est membre de l'Exécutif, et des fonctionnaires, qui exécutent des ordres et des directives données par leur supérieur, qui est le ministre. Mais l'imputabilité réside là, et, si un fonctionnaire doit venir, c'est avec la permission du ministre.

Mais je comprends que ce gouvernement aimerait bien venir faire parader les fonctionnaires ? et les hauts fonctionnaires en particulier ? parce qu'ils sont incapables eux-mêmes de défendre leurs dossiers. Ils sont incapables de donner les bonnes réponses aux parlementaires qui leur posent des questions. Alors, ils amènent des sous-ministres. J'ai vu, depuis mon retour à l'Assemblée, cette parade des hauts fonctionnaires. Avant, c'était le ministre qui répondait des projets de loi, qui répondait des crédits, et le ministre devait les étudier, ses crédits.

Or, on sait très bien qu'aujourd'hui quand on pose des questions, par exemple, au ministre des Finances, si c'est lui qui doit répondre, il se réfugie dans les généralités. Mais, si on veut avoir des réponses précises, correctes, effectivement, il faut s'adresser à son sous-ministre. Quelle est la conclusion? La conclusion obligatoire, c'est que le ministre ne connaît pas ses dossiers. 11 est en vacances, en commission parlementaire. Son seul objectif, c'est d'éviter les attaques, c'est simplement, comme on dit, de passer le pas. C'est son seul objectif.

Et c'est ça que cela produit lorsque des parlementaires acceptent que des subordonnés viennent répondre à la place de ceux qui prennent les décisions qui impriment les orientations à l'action du gouvernement. M. le Président, je sais qu'il est de bon ton de prétendre à l'imputabilité des hauts fonctionnaires, oui, mais, encore une fois, lorsqu'ils viennent, c'est sous l'autorité directe du ministre. Moi, il me semble qu'on ne doit pas accepter qu'un ministre passe la responsabilité à son sous-ministre. Non, ce n'est pas du tout le sens de nos institutions.

M. le Président, juste en terminant, ce projet de loi a donné lieu à une saga en commission parlementaire. Nous avons réécrit complètement le projet de loi en commission parlementaire. Ce soir, nous avons encore réécrit le projet de loi. Ça n'a pas de sens. C'est un projet de loi, d'ailleurs, où l'on voit très bien que l'Exécutif, les ministres, se sont réfugiés derrière des députés pour débattre de sujets qu'eux-mêmes ne veulent pas aborder en public. Il n'y en avait pas, pratiquement, ce soir, des ministres, sauf quelques-uns. Le président du

Conseil du trésor, le premier impliqué dans toute cette question, ne s'est jamais présenté en commission parlementaire, pas plus qu'il n'était ici ce soir. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, nous en sommes à l'étape de l'adoption du projet de loi 198, et je cède la parole à Mme la présidente de la commission des affaires sociales et députée de Taillon.

Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président.

Évidemment, je vais le faire, comme à chaque fois, parce que je trouve toujours inadmissible que l'on procède ainsi. Il est 2 h 37 exactement, mais du matin, non pas de l'après-midi. Alors, je ne sais pas si c'était pour camoufler le travail que nous faisons ici que l'on procède ainsi à cette heure du matin, mais je pense que, dans ce cas-ci, on n'a peut-être pas tort, parce que je crois qu'on n'assume pas correctement notre responsabilité de parlementaires en travaillant comme on l'a fait à l'égard du projet de loi 198, M. le Président. Mon collègue a terminé son intervention avec cela, je vais commencer avec cela.

Pour avoir été présente dès le moment du dépôt du projet de loi et pour avoir participé à la commission parlementaire, me retrouver ce soir à l'Assemblée nationale où nous avons étudié en plénière un projet d'amendement qu'on nous a présenté cet après-midi, mais qui a été modifié entre le moment où on nous l'a fait parvenir et le moment où on a étudié les amendements ici, à l'Assemblée nationale, M. le Président, c'est carrément inadmissible dans notre processus législatif, et je pense que n'importe quel membre de l'Assemblée nationale le sait très bien. En fait, si nous avions voulu être tatillons... Mais nous sommes tellement en profond désaccord avec le projet qui est devant nous que c'était un peu faire perdre le temps des membres de cette Assemblée que de nous arrêter, dans le détail, à la moindre chose qui avait été changée. Mais, normalement, et vous le savez très bien, vous qui êtes gardien de nos règles, une fois qu'on a étudié un projet de loi en commission parlementaire, qu'on a retenu des amendements, même si l'Opposition était en désaccord avec ces amendements-là, il est absolument inadmissible qu'on revienne devant l'Assemblée avec des modifications, sur l'initiative du groupe parlementaire majoritaire. C'est inadmissible, M. le Président. Or, cela s'est très bien passé. La preuve en est qu'on a proposé un sous-amendement pour corriger certains articles du projet de loi qui avaient justement été modifiés entre le moment où on nous en a fait état ici et le moment où on les a étudiés, M. le Président. Je crois que jamais on ne devrait accepter qu'un tel processus se reproduise. (2 h 40)

Deuxièmement, venons-en au fond de la loi, M. le Président. Quand on nous a déposé le projet de loi, il

était intitulé, et j'y reviens, Loi sur la limitation de l'embauche dans les organismes publics et l'imputabilité des administrateurs d'État et des dirigeants d'un organisme public. Savez-vous quelle loi nous adoptons actuellement, quelle loi nous risquons d'adopter ? sûrement pas nous, en tout cas? Mais le libellé du titre est complètement changé. On ne veut plus limiter l'embauche, on dit: Loi sur la réduction du personnel dans les organismes publics, et on revient avec la notion d'impu-tabilité. Mais il faut voir comment on a charcuté l'article qui concerne l'imputabilité pour qu'il n'ait plus aucun sens, M. le Président. D'une loi avec laquelle nous n'étions pas d'accord, mais qui, au moins, disait: II est prévu que, dans la fonction publique, nous puissions, évidemment, selon les nouveaux programmes, les mesures à mettre en place, selon les départs, procéder à l'embauche de personnel nouveau. Une façon d'éviter d'intervenir à l'intérieur de la fonction publique, c'est de dire: Nous allons éviter de procéder à l'embauche pour une proportion significative de postes, de telle sorte que l'effet à moyen et à long terme sera effectivement qu'il y ait une diminution ? parce que c'était ça, l'objectif, même si on le camouflait bien, déjà à l'époque ? une diminution réelle du rythme d'augmentation du personnel dans la fonction publique.

Cependant, évidemment, et peut-être est-ce plus honnête dans un sens, on a jugé que ce n'était pas satisfaisant, que ça ne rencontrait pas les objectifs qu'on s'était fixés, et là on a avoué le véritable objectif. Le véritable objectif, c'est de réduire le nombre de personnes dans la fonction publique, tant chez les fonctionnaires que chez les professionnels embauchés dans les organismes parapublics, de la santé, des services sociaux, etc., que chez les administrateurs et que dans l'encadrement. Quand on veut faire ça, M. le Président, il faut savoir exactement, lorsqu'on se fixe des objectifs... Parce que la loi, elle est très précise, elle fixe des objectifs de 20 %, de 15 %, etc. J'imagine qu'on doit évaluer minimalement, sinon on est des irresponsables, M. le Président, quel va être l'impact de la loi que nous adoptons et de chacun des articles que nous adoptons.

Lorsque nous avons voulu, en personnes responsables, comme membres de l'Opposition, souhaiter la présence du président du Conseil du trésor, membre de l'Exécutif, pour qu'au moins il nous apporte les chiffres, les données, qu'il nous signifie exactement ce que ça aura comme impact dans les processus de prise de décision, les membres de la majorité parlementaire ont refusé, littéralement refusé. On a eu un vote auquel je faisais référence, d'ailleurs, ce soir, M. le Président. On a eu un vote pour s'opposer à la venue du président du Conseil du trésor. Cependant, ce soir, on a eu l'air ridicule, ridicule, parce qu'on n'a pas su répondre aux questions simples que posait l'Opposition. On ne demandait pas combien de postes vont disparaître dans les centres hospitaliers, dans les centres locaux de services communautaires, dans les commissions scolaires. On disait: Globalement, sur la masse des personnes concer- nées, combien de postes vont disparaître. Cela a pris 10 minutes avant d'obtenir une réponse, et à partir d'un calcul sur le bord du pupitre, M. le Président. Est-ce que c'est comme ça qu'en personnes responsables on va légiférer dans cette Assemblée? Quant à moi, M. le Président, je m'y refuse complètement. troisièmement, si on pense que c'est de l'imputabilité, de la responsabilisation de gestionnaires que de leur dire, dans le même souffle, dans un projet de loi: voilà la commande, vous réduisez votre taux d'encadrement de 20 % puis vous réduisez votre personnel de 15 %; mais nous considérons que vous êtes des gens très responsables et nous considérons que nous ne sommes pas centralisateurs pour un sou, et on vous laisse le pouvoir de faire ce que vous voulez faire, oui, à condition que vous respectiez les ordres qu'on vous donne... bien, moi, je n'ai jamais compris que c'était de la responsabilisation, m. le président. alors, qu'on cesse de se gargariser en disant qu'on veut rendre imputables les gestionnaires, les administrateurs de l'état si, dans une loi qu'on adopte ici, les premiers articles qu'on retient, c'est ceux qui ordonnent aux administrateurs de se conformer aux voeux des élus de l'assemblée nationale à partir d'un chiffre arbitraire. parce que personne ne nous a démontré ici, ce soir, ni pendant tout le temps de nos travaux, m. le président, le rationnel sur lequel s'appuyaient les 25 %, 20 %. est-ce que notre taux d'encadrement est à ce point élevé, est à ce point important que c'est 20 % qu'on doit remettre en question? bien, moi, ça m'inquiète, hein. si c'est 20 % qu'il faut sabrer dans le taux d'encadrement, on doit avoir de drôles de mauvaises performances en termes de gestion des ressources humaines, m. le président.

Alors, dans ce sens-là, je vous avouerai que ni sur le processus, ni sur le fond, ni sur les résultats attendus... d'abord, je pense que nous ne les obtiendrons pas, mais, d'autre part, sur le processus et sur le fond, je suis essentiellement en désaccord avec le projet de loi qui nous a été présenté et sur lequel nous avons eu à débattre, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée.

Nous en sommes à l'étape de l'adoption du projet de loi 198, et je cède la parole à M. le député de...

Une voix: Lotbinière.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...Lotbinière, et je lui indique que son droit de parole est d'un temps maximum de 10 minutes.

M. Lewis Camden

M. Camden: Je vous remercie, M. le Président. Brièvement, vous rappeler l'origine de ce projet de loi. Suite, évidemment, à des rencontres de députés

libéraux, soit de députés ministériels, qui, sensibles et préoccupés par la situation financière qui perdurait et qui existait au début de notre deuxième mandat, nous avons décidé de nous réunir périodiquement pour faire le point sur la situation et identifier des pistes de solutions qui nous permettraient de faire des économies et, par le fait même, de rencontrer les obligations et les objectifs pour lesquels la population nous avait mandatés.

M. le Président, une longue liste, évidemment, de choses a été établie, couchée sur papier et transmise, évidemment, au premier ministre et aux membres du gouvernement. Dans cet esprit, un des objectifs était celui de la réduction du personnel pour faire en sorte, évidemment, qu'on puisse procéder à certaines économies, et, à cet égard, on s'est inspiré, à bien des égards, de ce qui se passe déjà dans bon nombre d'entreprises. Je n'en citerai qu'une seule, la Banque Nationale, qui a enlevé, soustrait un certain nombre de paliers ? 9 ? entre la caissière et le caissier au comptoir, d'une part, et le président. Ils en ont soustrait 3, M. le Président, ce qui la ramène donc à 6 niveaux. cet objectif est partagé par bon nombre d'entreprises, et nous avons cru bon d'y souscrire, après avoir pesé le pour et le contre de l'ensemble de cette approche. nous en sommes donc venus à la conclusion qu'il était important de procéder à une réduction importante du nombre d'employés de l'état. un des objectifs: moins 20 % d'encadrement, moins 12 % de fonctionnaires, après avoir entendu et consulté à huis clos bon nombre d'invididus qui oeuvrent au sein du gouvernement du québec, tant auprès de ministères que d'organismes publics. c'est la grande conclusion à laquelle nous sommes arrivés et à laquelle nous avons travaillé à convaincre les gens tout au long du processus. une rationalisation, m. le président, qui part, non pas par la mise à pied de gens qui ont un statut de permanence, mais bien par la voie de fattrition. et, à cet égard, l'attrition... 3,2 % à 3,9 % de gens quittent, bon an, mal an, la fonction publique, soit suite à un décès, soit suite à une préretraite, une retraite, un accident, une maladie et, si on ne renouvelle qu'une partie de ce 3,2 % à 3,9 % de gens, nous assurons le renouvellement à l'intérieur de l'appareil. mais nous atteignons également l'objectif de réduire l'appareil administratif.

Jointe à cet objectif que nous nous étions donné, il y avait également Fimputabilité. Sensibles et préoccupés par le fait que seuls les ministres devaient répondre de l'action de l'ensemble des gens dans le ministère qui prenaient des décisions, des actions sur lesquelles le ministre n'avait manifestement pas de contrôle quotidien à exercer. Il est impensable, M. le Président ? 68 000 personnes dans le système ? de croire que 30 ministres vont exercer un contrôle absolu sur tous ces gens. Il devenait important pour nous de concevoir, de coucher sur papier, de donner suite et de faire en sorte, également, que ces gens qui ont la responsabilité de la gestion administrative soient également responsables, soient imputables et viennent répondre de leurs gestes, de leur gestion devant les membres du Parlement, ceux qui ont été élus par l'ensemble de la population. Donc, c'est le rôle du député, le rôle de contrôle des élus sur l'appareil. C'est là un des mandats que la population nous donne, soit directement, d'une façon implicite, ou explicitement.

Donc, Fimputabilité à laquelle on réfère souvent, on réfère au fond, au fondement, on nous a dit, du parlementarisme britannique. C'est tout à fait vrai et fondé, M. le Président. Mais le parlementarisme britannique, c'est 700 ans d'évolution. Ce qu'on vient de faire, ce qu'on a fait au cours des derniers mois et ce qu'on a fait ce soir, c'est qu'on est venu ajouter à ces 700 ans d'évolution du parlementarisme, dans une voie qui fera en sorte que le parlementarisme se renouvelle d'une façon constante. Et cette imputabilité qui était propre, strictement, au ministre, devient une imputabilité partagée, où celle du ministre demeure toujours présente, mais dans laquelle celle du fonctionnaire, face aux élus, prendra de plus en plus d'importance à l'égard de l'avenir. (2 h 50)

M. le Président, on aura beau nous avoir reproché d'avoir déposé des amendements et que l'on ait apporté des corrections à ces amendements tout au cours de la journée et même au cours des derniers mois, ça caractérise les travaux de notre commission, soit ceux d'une manifestation d'ouverture. Nous étions disposés à considérer chacun des éléments qui pouvaient être apportés par les membres tant ministériels que de l'Opposition, c'est ce que nous avons fait, et c'est de cette façon que les travaux dans nos commissions parlementaires devraient fonctionner.

M. le Président, je dois vous dire que j'ai été un peu surpris de l'attitude de l'Opposition. Je pense qu'ils n'ont pas livré une grande bataille. Je pense que certains souscrivent à certains volets, d'autres ont des réserves, mais je dois vous dire que ce que je constate, pour les connaître et les côtoyer, c'est qu'il y a un doute qui subsiste dans leur esprit, un doute. Et, un de ceux-là, évidemment, c'est que les députés libéraux, ils sont bien étonnés qu'on ait fait cheminer ce projet et qu'on l'ait fait accepter également par le gouvernement, et que le premier ministre y ait également souscrit.

M. le Président, je dois vous dire, c'est là la manifestation concrète d'un cheminement non seulement dans la pensée des députés ministériels, mais également de l'aile ministérielle, des ministres qui composent le gouvernement, et ça s'inscrit dans la foulée de ce que souhaite la population au Québec de plus en plus, c'est que les élus assument et jouent le rôle véritable de contrôleurs sur l'appareil administratif et puissent être là pour représenter l'ensemble de la population de laquelle ils ont obtenu un mandat.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Lotbinière.

Nous sommes toujours à l'étude du projet de loi 198, et je cède la parole à M. le député de Joliette qui agit comme porte-parole de l'Opposition officielle dans ce dossier.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, étant donné que j'ai 1 heure, je voudrais donc commencer par situer un peu d'où ça vient, ça, ce comité dit Gautrin qui a préparé ce projet de loi là; comme, par exemple, le député de Saint-Louis qui a présenté un projet de loi pour se rendre compte qu'il n'avait pas le droit de le déposer; comme le député de Beauce-Sud a déposé un projet de loi sur la construction; comme le député Poulin, le rapport Poulin, qui a déposé un projet de loi toujours avec comme sous-entendu ou comme objectif l'économie des deniers publics.

M. le Président, il faut reconnaître beaucoup ? comment dirais-je ? de doigté au premier ministre: il amuse ses gars et ses filles de son côté. Il les amuse. Faites-vous aller, «effervescez-vous» dans des comités de travail, siégez de nombreuses heures, amusez-vous les petits gars et les petites filles parce que, dans quelques semaines, dans quelques mois ce seront les élections, puis vous aurez eu l'impression que vous avez fait beaucoup.

Ça fait 8 ans et demi qu'ils sont au pouvoir, M. le Président, 8 ans et demi! Ils commencent à se rendre compte qu'il fallait qu'ils coupent à quelque part. Ils commencent à se rendre compte que ça prenait quelques piastres dans les coffres du gouvernement. Ils commencent à comprendre après 8 ans et demi, à la toute veille d'une échéance électorale, qu'ils auraient dû gérer différemment.

Et puis le petit Poulin... Excusez, le député de Chauveau... Excusez, le rapport Poulin; c'est ce que je voulais dire, M. le Président. Il était supposé proposer 10 ministres de moins. Ça fait 1 an, ça! Avez-vous vu un ministre de moins? Aucun. Avez-vous vu de ses suggestions, M. le Président, concrètement adoptées par ce gouvernement-là? Aucune.

Pensez-vous, demain matin, que ce qui est proposé, c'est assez brillant... Le président du Conseil du trésor est assez brillant, il est allé dire à notre ami de Verdun: Mets donc «1994». Et lui a mis «1994» et puis ça reporte de 1 an. Mais c'est une économie d'argent que ça prend tout de suite. Avez-vous remarqué avec quelle vigueur il a défendu ce report de 1 an, M. le Président, à la veille d'une échéance électorale?

Nous prenez-vous pour des imbéciles, des naïfs? Voyons! Ils se sont amusés avec vous autres. Ils vous ont fait travailler; de bonne foi, je pense que vous l'avez fait. J'écoutais le député de Lotbinière. Je pense que, de bonne foi, effectivement, ils ont travaillé, mais, bonne mère du ciel! j'espère que vous n'êtes pas naïfs assez pour croire qu'ils vous ont pris au sérieux! Il n'y avait plus un ministre à la fin, ici, ce soir. Ils vous font mettre des affaires... Je suis convaincu que le Conseil des ministres, quand il aura vu le projet de loi qui subordonne le Conseil du trésor à une décision d'un ministre, voyons! M. le Président, ils vont se bidonner, je suis sûr de ca!

Soyez sans crainte, le rapport Poulin, c'est ce qui aura marqué sa carrière politique, lui, là. Il aura eu un rapport. Mais, ce sera un report. Vous comprendrez. Il n'y aura rien qui se fera dans ça. La même chose, le député de Beauce-Nord, comité de la construction, comité des 5 ou des 7, je ne le sais pas, ils ont produit un rapport. M. le Président, avez-vous remarqué, le premier geste de ce gouvernement que le ministre du Travail... Qu'est-ce qu'il a fait? Il s'est dissocié du rapport de ces 5 députés qui, de bonne foi, ont travaillé. Imaginez-vous! Puis, un beau petit document, très bien relié. Vous l'avez vu. Avec un petit résumé puis des communiqués de presse qui résumaient. Ils ont tout donné ça à la presse. Le soir même, à la T.V., vous aviez le très ronflant ministre du Travail qui disait: Je n'accepte pas ça. Je me dissocie de ça. Ça fait tout un effort, ça.

Vous parliez de réforme parlementaire, mais entre vous autres. Vous n'avez pas compris que réforme parlementaire, ce n'est pas entre vous autres pour vous complaire dans des études de 15 heures, de 20 heures, de 30 heures ou de 50 heures, puis dans des recherches. Puis que ça n'aboutit pas après. Parce que le Conseil des ministres ne bouge pas. Voyons! On vous a amusés. J'espère que vous allez le comprendre. J'espère que vous n'êtes pas naïfs à ce point de ne pas vous rendre compte que vous êtes tout simplement, à mon point de vue, M. le Président, un petit peu candides sur les bords.

Ça doit être intéressant, par exemple. Quand je pense au député de Verdun. Ça doit être intéressant d'être ministre d'un soir, avoir l'impression qu'il a beaucoup de pouvoirs, à refuser un amendement ou un sous-amendement. Ça peut donner un certain... en anglais, on dit un «feeling». Mais, ça va s'arrêter là. Ça ne sera pas applicable, puis ils ne l'appliqueront pas. Comme ils n'ont pas appliqué le rapport Poulin. Comme ils se sont distancés du rapport Audet. Comme ils se sont distancés... Puis, ils n'ont même pas ramené la loi, la loi du député de Saint-Louis. Rappelez-vous, ils ne l'ont même pas ramenée. Ils ont travaillé fort, ces jeunes hommes, de bonne foi, ces jeunes filles aussi, de leur côté. Mais ils s'en vont où? Naïfs, naïfs, M. le Président. Enlevez vos culottes courtes puis mettez vos pantalons, pour les garçons, bien sûr. Ça n'a pas de bon sens, M. le Président. Moi, je n'en reviens pas d'être candides et d'être naïfs de cette façon-là.

Je les regardais faire, ce soir. Puis, ce n'est pas la bonne foi qui n'était pas là. Mais je lisais ça puis je disais: M. le Président... Aïe! je vois le président du Conseil du trésor qui va prendre le projet de loi de M. le député de Verdun. Savez-vous où il se met ça le rapport, lui, ce projet de loi là? Aïe! «c'est-u» loin de ses objectifs!

M. le Président, si le ministre du Travail est

capable de faire ça, à 7 de ses collègues, dans un contexte où il est obligé de reporter le décret de la construction pour une deuxième fois, si le député de Chauveau, plein de bonne volonté... Vous savez, il voulait même fermer les écoles l'hiver pour ne pas payer de chauffage pour sauver une piastre.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Rappelez-vous. Ce n'est pas moi qui le dit, là, c'a été écrit noir sur blanc ça. Vous pouvez douter de ce que je dis, mais c'a été écrit, ça, noir sur blanc: Fermer les écoles aux mois de janvier puis février, 2 mois trop froids. On va sauver tout ce chauffage dans les écoles. «C'était-u» brillant à votre goût? Les écoles sont toujours ouvertes, M. le Président. Les professeurs sont toujours à l'école, M. le Président. Il y a toujours 29 ministres, M. le Président.

Y a-t-il de quoi de changé en vertu du rapport Poulin, M. le Président? Rien. Absolument rien, comme on dit par chez nous. Rien. Puis il n'y a rien qui va changer. C'est des «discoureux». Sauf que l'échéance électorale arrive, très bientôt. Et là vous allez voir le député, le valeureux Richard Coeur de Lion de Chauveau, se promener, puis le rapport Poulin en main. Ça ne sera pas un poulin, M. le Président, qui va prendre l'épouvante, certain, parce qu'il n'y aura rien de réalisé. Rien.

Vous allez avoir le député de Verdun qui va se promener avec sa loi, la loi à Gautrin. Ils vont dire: Est-il allé loin avec ça lui? Vous allez voir le député de Beauce-Nord qui, lui, va peut-être décider de ne pas y aller du tout, parce qu'il n'a même pas eu le temps de se lever avec son rapport. Le ministre s'est assis dessus avant même qu'il se lève pour le montrer. Puis, comme il est un peu plus lourd que lui, le rapport a disparu. Il n'y en avait plus. (3 heures)

M. le Président, je compatis, ce soir, c'est-à-dire ce matin, 3 heures du matin, avec les députés qui, de bonne foi, ont travaillé quelques heures. Puis, j'écoutais, surtout le député de Lotbinière tantôt, il y avait beaucoup de volonté et de sincérité. C'est vrai, ça. Je le reconnais, moi. Puis, je trouve ça malheureux. C'est peut-être l'expérience parlementaire de 17 ans qui me fait dire qu'un gouvernement se modifie non seulement par la solidarité de quelques éléments de son caucus, mais quand il accepte de s'associer au processus. Un gouvernement qui est placé ? qu'il soit, rouge, bleu, péquiste ? devant un état de fait de sa deputation a des réactions tout à fait contraires alors que, s'il participe au processus, on a des chances de changement.

Comment en est-on arrivé, ici, à modifier le parlementarisme, à l'intérieur de cette enceinte? C'est quand le Conseil des ministres ? autant que les députés ? en 1984, a décidé d'endosser le nouveau règlement, M. le Président, puis de le vendre à l'Opposition en même temps. Non pas se donner des petits titres de gloire: Je suis membre d'un comité ministériel libéral.

Bien, vous allez mourir avec votre petit rapport libéral sous le bras et vous n'aurez rien changé au parlementarisme. Le parlementarisme, M. le Président, c'est quand il y a une volonté, à l'intérieur de toute l'enceinte, des deux côtés de la Chambre, y compris du Conseil des ministres, quand on sent que la deputation, autant ministérielle que de l'Opposition, veut vraiment des changements en profondeur et quand vous acceptez de vous associer, comme l'ont fait certains députés en commission parlementaire. Je crois beaucoup plus, si vous voulez modifier quelque chose, aux mandats d'initiative dans les commissions qui regroupent les deux formations politiques qu'à vos petits comités internes, partisans et libéraux. Vous ne changerez rien dans cela, alors que, dans les commissions parlementaires, vous associez l'ensemble de la deputation. On a beaucoup plus de chances, quand on place tous les députés ensemble, de faire bouger un gouvernement parce que c'est une volonté des législateurs et non pas des partisans. Ça, moi, c'est ma conviction profonde et je ne pense pas qu'on puisse modifier grand-chose.

C'est là qu'on voit l'impuissance, et je reconnais, parce que j'ai été sur les deux côtés... J'ai occupé les banquettes du pouvoir et j'ai occupé les banquettes de l'Opposition. Je peux vous dire que c'est beaucoup plus frustrant d'être sur une banquette du pouvoir, effectivement, parce que tout le monde dit: Mais, il est au pouvoir. Vous avez moins de pouvoirs qu'on ne peut en avoir dans l'Opposition. On a au moins le pouvoir, nous autres, de se contenter et de se défouler. Vous n'avez même pas ça. Vous n'avez même pas le pouvoir de vous défouler et de dire ce que vous pensez. Vous n'avez même pas le pouvoir d'être discordants alors que vous avez profondément la conviction que votre propre gouvernement est dans l'erreur. Vous n'avez même pas le pouvoir de vous lever. La seule chose que vous pouvez faire, c'est aller vous cacher, si vous n'êtes pas d'accord. Ça fait toute une manifestation de divergence, ça, être obligé de se cacher, de se dissimuler pour un vote, quand on n'est pas d'accord. C'est là que le parlementarisme devrait changer fondamentalement.

Mis à part le budget et mis à part le discours du trône, qui sont des orientations politiques, si les parlementaires, ici, de quelle que allégeance politique que ce soit, pouvaient voter selon leur conscience, au-delà des lignes de partis, là, on modifierait le Parlement, là, on pourrait dire au pouvoir qu'il va être exécuté en fonction des idées maîtresses qui émergent de la majorité des législateurs. Mais ce n'est pas le cas, M. le Président. On vous fait gober n'importe quoi, et c'est le cas de le dire, M. le Président, n'importe quoi et, par solidarité ministérielle, vous savez ce qui arrive. Et, bien souvent, on se rencontrerait, j'en suis sûr. C'est ce qui fait dire à certains députés, dans les corridors: Je voterais bien avec vous autres, si je n'étais pas au pouvoir. Ça veut donc dire, «je voterais bien avec vous autres si je n'étais pas au pouvoir», que je vais être obligé de voter contre ce que je pense, M. le Président. Puis, ce soir, on a vu une manifestation, de bonne foi, mais qui devient, à

toutes fins pratiques, pour moi, M. le Président, quelque chose d'un petit peu farfelu ? je m'excuse de le dire. C'est un projet de loi rempli de bonne volonté, je n'en doute pas, mais ne venez pas me dire, M. le Président, qu'on vient de marquer de grands pas vers une plus grande démocratie. Au contraire, M. le Président, ça va continuer comme c'est le cas parce qu'on n'aura pas réussi à s'arrêter. J'en ai parlé plusieurs fois avec le leader adjoint du gouvernement. Je pense seulement à la question des règlements où il disait, encore hier: Je suis prêt à modifier ma position, moi, demain matin. Oui, mais qui va nous convoquer? Qui va prendre l'initiative d'en arriver à modifier les règlements? Qui va prendre l'initiative, de part et d'autre, parce que, vous savez, ce n'est pas nous, dans l'Opposition, qui pouvons prendre cette initiative-là. Nous, on peut le souhaiter, mais ça va être au pouvoir de démontrer sa volonté. Je vous le dis très honnêtement, c'est là qu'on comprendra peut-être, M. le Président, que, sur plusieurs sujets, on est beaucoup plus près qu'on le pense effectivement, et il y a peut-être beaucoup plus de volonté qu'on pense de contrôler de la part du législateur, et surtout dans l'Opposition, c'est bien clair. Mais, tant et aussi longtemps qu'on ne le fera pas, M. le Président, puis qu'on n'en arrivera pas à changer le patron de gestion ou le mode parlementaire de gestion, on peut bien dire, on pourra vous illusionner, on pourra continuer à vous créer des comités, mais, de grâce! je «peux-tu» vous donner un conseil? Ne vous essoufflez pas trop, vous le faites pour rien. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En droit de réplique, je cède la parole à M. le député de Verdun, pour son droit de réplique, qui n'excède pas 20 minutes. M. le député, la parole est à vous.

M. Henri-François Gautrin (réplique)

M. Gautrin: Merci. À cette heure tardive, M. le Président, je ne prendrai pas les 20 minutes, mais je voudrais simplement rappeler au leader de l'Opposition que, évidemment on ne connaît pas le futur, c'est bien sûr, mais on a fait aujourd'hui, je ne dirais pas nécessairement un grand pas, parce que, dans le fond, on ne le sait pas, mais on a fait un certain nombre de mesures, en termes de permettre de déposer certains rapports à l'Assemblée nationale, d'amener les administrateurs de l'État, c'est-à-dire les dirigeants d'organismes et les sous-ministres à devoir témoigner devant les commissions parlementaires. Bien sûr, vous auriez probablement aimé que ça se fasse sans le ministre; le député de Labelle aurait voulu que ce soit le ministre seulement, sans les sous-ministres. Il y a un certain pas. Ne pensons pas qu'on va... Et je ne prétends pas qu'on révolutionnera demain le parlementarisme britannique en ayant passé cette loi, je ne suis pas naïf à ce point-là, mais je pense... Et je pense que, malgré tout, et on le verra à l'usage, ce sera la responsabilité de l'ensemble des parlementaires, et je suis heureux que vous tendiez la main aujourd'hui pour dire que vous êtes prêts à y participer, pour faire en sorte que ce qu'on a fait comme petits pas dans le sens d'une meilleure démocratie s'applique réellement et donne des résultats.

M. le Président, je vais terminer là-dessus. Je crois qu'à mon sens on s'est donné certains outils et on verra à la pratique la manière dont on pourra les utiliser pour atteindre nos meilleurs objectifs, à savoir une imputabilité et une plus grande clairvoyance de l'activité gouvernementale.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Verdun. Alors, est-ce que le projet de loi 198 est adopté?

M. Chevrette: Vote enregistré.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote enregistré. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Je vais demander de reporter le vote, M. le Président, à la prochaine période des affaires courantes.

Vote reporté

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À votre demande et conformément au règlement, le vote sur le projet de loi 198 est reporté aux affaires courantes de la séance du 16 juin. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Je fais motion pour ajourner nos travaux à ce matin, 15 juin, à 10 heures, M. le Président.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse, le vote est reporté, à la période des affaires courantes, à mardi, le 15 juin. Est-ce que la motion d'ajournement de nos travaux est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Donc, les travaux de cette Assemblée sont ajournés à aujourd'hui, mardi, le 15 juin, à 10 heures.

(Fin de la séance à 3 h 9)

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