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(Dix heures huit minutes)
Le Président: Alors, Mmes et MM. les
députés! Mmes et MM. les députés, s'il vous
plaît!
Nous allons nous recueillir quelques instants. Je vous remercie.
Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes
Alors, nous allons procéder aux affaires courantes.
Il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je vous
demanderais d'appeler l'article a de notre feuilleton.
Projet de loi 101
Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le
ministre de l'Environnement présente le projet de loi 101, Loi sur
l'établissement et l'agrandissement de certains lieux
d'élimination de déchets.
Alors, M. le ministre.
M. Pierre Paradis
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, ce projet
de loi prévoit qu'à compter de la date de sa présentation
à l'Assemblée nationale tous les projets d'établissement
ou d'agrandissement d'un lieu d'enfouissement sanitaire ou de
dépôt de matériaux secs, y compris les projets soumis au
ministre avant cette date et pour lesquels un certificat n'a pas
été délivré, seront soumis à la
procédure d'évaluation environnementale prévue par la Loi
sur la qualité de l'environnement.
De plus, ce projet permet au gouvernement, lorsqu'il délivre un
certificat autorisant un tel projet, de fixer des normes différentes de
celles prévues par le Règlement sur les déchets solides.
Enfin, le projet de loi prévoit à quel moment ces dispositions
cesseront d'avoir effet. (10 h 10)
Le Président: Merci, M. le ministre.
Mise aux voix
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet
de loi? Adopté? Adopté.
M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je vous
demanderais d'appeler l'article b de notre feuilleton.
Projet de loi 103
Le Président: Alors, à l'article b du feuilleton,
M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et
de la Formation professionnelle présente le projet de loi 103, Loi
modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite.
Alors, M. le ministre.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Merci, M. le Président.
Ce projet de loi modifie la Loi sur les régimes
complémentaires de retraite afin de permettre au gouvernement de
soustraire un régime de retraite à l'application de la
totalité ou d'une partie de cette loi dans certains cas particuliers
qu'il précise.
Ce projet de loi permet à la Régie des rentes du
Québec d'obliger par règlement un comité de retraite
à fournir, selon les modalités prescrites par règlement,
une garantie qui devra prémunir la caisse de retraite contre les pertes
qu'elle pourrait subir à la suite d'un vol ou d'un détournement
et protéger les personnes chargées de l'administration du
régime contre la responsabilité qu'elles peuvent encourir en
raison de leurs fonctions.
Enfin, le projet de loi prévoit que la Loi sur les régimes
supplémentaires de rentes s'applique au Régime
supplémentaire de rentes des employés de l'industrie de la
construction du Québec, et ce, jusqu'à l'entrée en vigueur
d'un décret énonçant les règles
particulières applicables à ce régime.
Mise aux voix
Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte
d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, je
vous demanderais d'appeler l'article e de notre feuilleton.
Projet de loi 261
Le Président: À l'article e du feuilleton, j'ai
reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de
loi 261, Loi sur l'Association de villégiature de la station Mont
Tremblant.
Le directeur de la législation a constaté que les avis ont
été faits et publiés conformément aux règles
de
fonctionnement des projets de loi d'intérêt
privé.
Je dépose donc ce rapport et, en conséquence, M. le
député des îles-de-1 a-Madeleine présente le projet
de loi 261, Loi sur l'Association de villégiature de la station Mont
Tremblant.
Mise aux voix
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet
de loi? Adopté.
Alors, M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'économie et
du travail
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je fais
donc motion pour que ce projet de loi d'intérêt privé soit
déféré à la commission de l'économie et du
travail pour étude détaillée et pour que le ministre du
Tourisme en soit membre.
Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?
Adopté.
Alors, maintenant, dépôt de documents.
Dépôt de rapports de commissions.
Dépôt de pétitions.
Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de
privilège ou sur un fait personnel.
Questions et réponses orales
Alors, nous allons maintenant procéder à des
périodes de questions et réponses orales des
députés et je reconnais en première question principale
Mme la députée de Chicoutimi.
Contestation du milieu de l'éducation
quant à la mise en place de classes
d'immersion en langue anglaise et
modalités de leur implantation
Mme Blackburn: Merci, M. le Président.
Après la CEQ, après l'ensemble des intervenants de la
Commission des écoles catholiques de Montréal, voilà
maintenant qu'une coalition de commissaires d'écoles de la région
de Montréal dénonce avec véhémence le projet de loi
86 qu'ils qualifient de coup de force linguistique. Les commissaires
d'écoles dénoncent particulièrement le message ambigu
envoyé aux enfants d'immigrants qui ne sauront plus, du français
ou de l'anglais, quelle langue appronfondir.
Ma question au ministre responsable de l'application de la Charte de la
langue française: Le ministre ne conclut-il pas que le volet langue
d'enseignement de son projet de loi 86 est carrément
désavoué par ceux et celles qui, en cette matière, sont
les plus aptes et compétents à évaluer la portée et
l'impact de la mise en place des classes d'immersion en anglais?
Le Président: M. le ministre responsable de l'application
de la Charte de la langue française.
M. Ryan: M. le Président, j'étais en tournée
dans la région de l'Outaouais en fin de semaine. Il m'est justement
arrivé de rencontrer par hasard un professeur d'anglais langue seconde
à la Commission des écoles catholiques de Montréal.
Savez-vous ce qu'il m'a dit? Il m'a dit: Ne vous fiez pas à l'opinion
des ténors de notre syndicat.
Des voix: Oh!
M. Ryan: Vous avez raison et vous devez persévérer
parce que, pour le bien des enfants, pour le bien des enfants et la
qualité de l'apprentissage de la langue seconde, ce qui est
proposé dans le projet de loi est rempli de bon sens. Maintenant,
ça, c'est le premier point.
Je souligne à l'attention de la députée de
Chicoutimi que les personnes qui se sont exprimées en fin de semaine
à titre de commissaires d'école, au nombre de 18, si j'ai bien
compris, ne représentent qu'une minorité parmi l'ensemble des
commissaires d'école de l'île de Montréal. Allons
vérifier ce que pensent les autres.
Le Président: En question complémentaire, Mme la
députée de Chicoutimi.
À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, Mmes et MM. les
députés, s'il vous plaît! Oui, s'il vous plaît! Je
demande aux députés de respecter le droit de parole de
chacun.
Votre question complémentaire.
Mme Blackburn: M. le Président, est-ce que l'avis d'un
professeur vaut l'avis de 20 commissaires élus au suffrage
universel?
Au ministre, toujours: Est-ce que le ministre, à qui une
éditorialiste reproche la méconnaissance du peuple qu'il devrait
servir, l'autoritarisme d'un autre âge, la suffisance, entend se rendre
à l'avis d'intervenants nombreux, nombreux et diversifiés du
monde de l'éducation et renoncer à la mise en place
généralisée de classes d'immersion ou entend-t-il toujours
imposer sa volonté, tel un véritable décret revenchard,
alors qu'il n'a aucun mandat pour apporter les modifications qu'il est en train
de vouloir apporter?
Le Président: M. le ministre.
M. Ryan: Déjà, il y a quelque temps, le Parti
québécois, à défaut d'arguments sur le fond, avait
commencé à s'en prendre à la personne du messager. Je
remarque que la journaliste à laquelle on fait allusion fait la
même chose, n'ayant pratiquement rien à dire sur le contenu du
projet de loi...
Des voix: Oh!
M. Ryan: ...et j'ai pu le vérifier, parce que je suis
allé faire une visite à ce journal, une visite d'explication
où nous avons pu parler du contenu du projet de loi. On s'attaque
à la personne du messager, mais je pense que tous les gens
sérieux au Québec, tous les gens sérieux, voudront s'en
tenir au contenu du projet de loi. Aussi longtemps qu'on discutera du contenu
de manière objective et impartiale, nous sommes prêts à
entendre des critiques et même à ajuster notre tir, si la
démonstration nous en était faite. Mais, jusqu'à ce jour,
aucune des critiques entendues sur ce point précis du projet de loi n'en
a affaibli la teneur et la justification en aucune manière.
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
Mme Blackburn: Le ministre ne reconnaît-il pas qu'en
matière de classes d'immersion il procède sans aucune
étude lui permettant d'aller dans cette direction? Et ne
reconnaît-il pas qu'avec ces classes d'immersion il fait par le biais ce
qu'il n'a pas réussi à faire de façon directe,
c'est-à-dire ouvrir les écoles anglaises aux enfants qui ont
l'anglais comme langue maternelle, tel qu'était son voeu en 1977 et
qu'il continue d'essayer de mettre en place?
Le Président: M. le ministre.
M. Ryan: La députée de Chicoutimi déforme
radicalement, déforme radicalement la signification et la portée
de cet article du projet de loi qui traite de l'apprentissage de la langue
seconde. Le projet de loi dit tout simplement... Il ne parle même pas
d'immersion. Le projet de loi dit tout simplement que l'on pourra enseigner
l'anglais langue seconde en se servant d'autres disciplines au besoin, suivant
des modalités et des conditions qui devront être définies
dans le régime pédagogique. Que la députée de
Chicoutimi attende donc que la ministre de l'Education, en temps utile, propose
des changements au régime pédagogique; alors on pourra discuter.
Tout ce qu'on dit dans le projet de loi a une portée infiniment plus
limitée que les interprétations alarmistes et catastrophistes
qu'on essaie d'en tirer pour la mauvaise information de la population.
Le Président: Alors, en question principale... M.
Brassard: Additionnelle.
Le Président: ...additionnelle, M. le député
de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Est-ce que la ministre de l'Éducation
pourrait obtenir l'autorisation de la part du commissaire du peuple aux langues
officielles et du premier ministre de facto l'autorisation de se
présenter en commission parlementaire et de déposer le projet
d'amendement au régime pédagogique de même que des
études qui justifient un pareil virage sur le plan pédagogique?
Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.
Mme Robillard: M. le Président, il me semble que c'est
clair que, quand on regarde l'apprentissage d'une langue seconde au
Québec, on doit identifier les différents facteurs qui favorisent
cet apprentissage-là: premièrement, la formation des
maîtres; deuxièmement, la durée qu'on accorde, le temps
d'enseignement qu'on accorde à l'apprentissage de la langue et,
troisièmement, l'environnement dans lequel ça se passe. Trois
facteurs que tous et chacun au Québec sont capables de reconnaître
comme essentiels quand on apprend une autre langue, quelle qu'elle soit. (10 h
20)
C'est dans ce sens-là, présentement, M. le
Président, que nous travaillons, à partir de l'article 22 du
projet de loi qui propose une pratique pédagogique et, donc, ça
se situera, les balises, à l'intérieur du régime
pédagogique, M. le Président. Et nous sommes en train de faire
les analyses nécessaires et, d'ici quelque temps, nous serons en mesure
de faire des consultations officielles, formelles, publiques avant d'arriver
à une décision dans le règlement, qui est le régime
pédagogique.
Le Président: Pour une autre question
complémentaire.
M. Brassard: M. le Président, est-ce que la ministre
compte venir en commission parlementaire qui étudie présentement
le projet de loi 86, venir en commission présenter, déposer les
projets d'amendement au régime pédagogique qu'elle compte
apporter? Est-ce qu'elle entend venir en commission parlementaire? Est-ce
qu'elle entend suivre l'exemple du boss des langues officielles qui, lui, au
moins, a déposé des projets de règlement en
commission?
Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.
Mme Robillard: La ministre de l'Éducation entend suivre le
processus régulier au niveau des décisions du régime
pédagogique, à savoir: premièrement, consulter les
partenaires du réseau de l'éducation; deuxièmement,
demander un avis formel au Conseil supérieur de l'éducation et,
après ça, déposer un projet de règlement, M. le
Président. C'est dans ce cadre-là qu'on ne précipitera pas
les choses et qu'on va se maintenir aux objectifs que nous avons de donner un
outil pédagogique supplémentaire aux commissions scolaires pour
que nos enfants, dans le Québec, non seulement maîtrisent bien le
français, parce que ça, c'est un des objectifs dont j'entends peu
parler, mais c'est notre objectif important au Québec, mais puissent
aussi être capables de maîtriser l'anglais comme langue
seconde.
Le Président: Pour une autre question
complémentaire.
M. Brassard: M. le Président, comment la ministre
peut-elle accepter un amendement de cette nature aussi important à la
Charte de la langue française alors qu'elle est en train de nous dire
qu'elle ne connaît pas du tout, d'aucune façon, les impacts d'une
pareille mesure sur le plan pédagogique, qu'elle avoue elle-même
qu'elle est en train de faire des études? Comment peut-elle accepter
qu'on modifie de façon aussi substantielle la Charte de la langue
française alors qu'elle est en plein brouillard?
Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.
Mme Robillard: Non seulement la ministre de l'Éducation
est bien placée pour accepter cet amendement, mais c'est elle qui l'a
proposé.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Alors, pour une dernière question additionnelle, M. le
député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: M. le Président, triste aveu parce que, si je
comprends bien, la ministre est en train de nous dire qu'elle a demandé
un amendement formel à la Charte de la langue française, ne
sachant d'aucune façon quels seront les impacts de cette mesure,
d'aucune façon, en particulier concernant le processus tellement fragile
de la francisation des immigrants. Bravo!
Le Président: Alors, Mme la ministre. S'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!
Alors, Mme la ministre de l'Éducation.
Mme Robillard: M. le Président, quand la ministre de
l'Éducation apporte une telle proposition, elle pense à
l'ensemble des jeunes du Québec, à l'ensemble des
Québécois qui, à l'heure actuelle, se doivent
d'améliorer la maîtrise de leur langue, de leur langue maternelle
d'abord, mais aussi de leur langue seconde. Il s'agit seulement
d'écouter les parents, M. le Président, non seulement dans la
région de Montréal, mais dans toutes les régions du
Québec, qui veulent que leurs fils et leurs filles soient bien
armés pour le Québec du XXIe siècle. Nous allons continuer
à y travailler au plan pédagogique, M. le Président.
Le Président: Alors, pour une question principale,
maintenant, M. le député d'Anjou.
Situations pouvant justifier l'effet rétroactif
d'une loi
M. Bélanger (Anjou): Merci, M. le Président.
Réunis en assemblée générale vendredi
dernier, les membres du Barreau du Québec ont adopté une
résolution dénonçant l'adoption par l'Assemblée
nationale de toute loi avec effet rétroactif qui ne comporterait pas des
dispositions protégeant les cause pendantes. Par cette
résolution, le Barreau visait particulièrement le projet de loi
55 sur la fiscalité municipale, proposé par le ministre des
Affaires municipales, Claude Ryan, ainsi que les mesures contenues dans le
dernier budget du ministre des Finances.
Ma question au ministre de la Justice: Comment le ministre de la
Justice, en tant que président du Comité de législation du
gouvernement du Québec, peut-il laisser son gouvernement adopter ces 2
mesures qui violent de façon manifeste le principe fondamental de
non-rétroactivité des lois?
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Rémillard: M. le Président, j'ai eu l'occasion
d'assister au congrès du Barreau. C'était un congrès
historique de par le nombre d'avocats et d'avocates qui y participaient, plus
de 3000, et c'était le début des cours sur le nouveau Code civil
que nous avons accepté ici à l'unanimité, M. le
Président, un véritable contrat social, les consensus de notre
société que nous retrouvons, donc, dans notre droit civil, et
j'ai mentionné ? je me permets de le redire en cette Chambre, M. le
Président; le député d'Anjou était là,
était présent, d'ailleurs ? qu'il y a peu de
sociétés dans le monde qui ont eu la possibilité de
réformer leur droit civil comme nous l'avons fait aussi
substantiellement, et peu l'ont fait avec autant d'harmonie et de
concertation.
J'ai eu l'occasion de discuter avec le nouveau bâtonnier, Me
Paradis, que j'accueille avec beaucoup de plaisir, comme ministre de la
Justice, et les questions de rétroactivité des lois, M. le
Président, il faut tout simplement se référer au fait que
l'intérêt public est le premier des objectifs qu'on doit
poursuivre comme parlementaires.
J'ai déjà dit en cette Chambre, je le
répète, qu'on doit être extrêmement prudent lorsqu'on
utilise l'effet rétroactif d'une loi. On peut le faire en accord avec
tous les membres d'une Assemblée, on peut le faire à la suite
d'une discussion substantielle, mais on doit s'assurer que, lorsqu'on utilise
la rétroactivité des lois, et cette Assemblée l'a
déjà fait, on le fait d'une façon très directe et
très claire, entre autres dans une loi comme la Loi sur la protection du
territoire agricole. Je pourrais vous donner d'autre exemples.
Le Président: En conclusion, M. le ministre.
M. Rémillard: Alors, en conclusion, M. le
Président, je répète ce que j'ai déjà dit en
cette Chambre, on doit être extrêmement prudent, mais notre
objectif premier, comme c'est l'objectif de tous les parlementaires, c'est
l'intérêt de la population, l'intérêt public.
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Bélanger (Anjou): M. le Président, est-ce que le
ministre reconnaît au moins...
Le Président: Sur un appel au règlement, M. le
leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, vous avez
sans doute entendu, comme le leader du gouvernement, les mots prononcés
par le leader de l'Opposition officielle à l'endroit du ministre de la
Justice. Je considère que ce sont des termes antiparlementaires, et
j'invite le gentilhomme qui siège en face de nous à les retirer
immédiatement.
Le Président: M. le député de Lévis,
s'il vous plaît! Alors, évidemment, j'ai toujours demandé
aux parlementaires d'éviter tout commentaire d'un côté ou
de l'autre. En tout cas, il y a des propos qui ont pu être
énoncés. Le député en question n'avait pas la
parole. L'infraction, c'est justement d'interpeller quelqu'un quand on n'a pas
la parole. Alors, je vous prierais de respecter le règlement.
M. le député d'Anjou, pour une question
complémentaire.
M. Bélanger (Anjou): Merci, M. le Président.
Est-ce que le ministre a pris connaissance de la résolution du
Barreau du Québec? Est-ce qu'au moins il peut reconnaître que le
projet de loi 55 et le dernier budget du gouvernement du Québec violent,
de façon fondamentale, le principe de non-rétroactivité
des lois? Est-ce qu'il reconnaît ça au moins?
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Rémillard: M. le Président, j'ai dit qu'il faut
être prudent, qu'il faut regarder ce que la rétroactivité
peut signifier tout d'abord en ce qui regarde des droits acquis et en ce qui
regarde ensuite, bien sûr, l'intérêt public. Mais c'est
ça qui commande toute notre réflexion ici! Si on en arrive
à la conclusion que l'intérêt public, parce qu'on doit
faire face à une situation qui nous oblige à agir d'une
façon rétroactive ? je ne parle pas d'une rétroaction
en matière pénale, évidemment, on met ça de
côté, je vous dis en matière civile ? lorsqu'on arrive
à une conclusion qu'on doit avoir un effet rétroactif pour
protéger la société, pour respecter l'intérêt
public, c'est la conclusion qui s'impose, M. le Président. Mais le
principe de la rétroactivité des lois doit être reconnu,
doit être analysé d'une façon particulièrement
minutieuse et doit être l'exception dans nos travaux parlementaires, une
exception qui ne peut que se justifier par l'intérêt public.
Le Président: Toujours en question complémentaire.
(10 h 30)
M. Bélanger (Anjou): M. le Président, est-ce que le
ministre admet que c'est acceptable, le principe de rétroactivité
des lois en matière fiscale? Est-ce qu'il trouve ça acceptable,
lui? Est-ce qu'il reconnaît qu'en tant que président du
Comité de législation et juriscon- sulte du gouvernement du
Québec il a le devoir de bloquer les projets de loi qui ne respectent
pas les principes fondamentaux et règles de justice naturels, comme
celui de non-rétroactivité des lois?
Le Président: M. le ministre.
M. Rémillard: Mais, M. le Président, s'il fallait
s'en tenir au mot à mot de ce que vient de dire... S'il fallait s'en
tenir à ce que vient de dire le député d'Anjou, ça
voudrait dire qu'il y a beaucoup de projets de loi dans cette Chambre, dans les
dernières années, qui n'auraient jamais eu lieu. Je vous ai
cité la Loi sur la protection du territoire agricole. Je vous en cite
une. Si voulez d'autres exemples, je pourrai vous en donner, d'autres exemples.
Mais, dans ces cas-là comme dans tous les autres cas, M. le
Président, il s'agit de prendre en considération
l'intérêt public. Et j'ai déjà dit que c'est
l'Assemblée nationale qui est souveraine. C'est à nous de prendre
nos responsabilités comme parlementaires, en fonction de
l'intérêt public.
Le Président: Pour une autre question
complémentaire.
M. Bélanger (Anjou): M. le Président, comment le
ministre de la Justice peut-il s'attendre que les citoyens du Québec
respectent ses lois, alors que son propre gouvernement, lui-même, ne
respecte pas les principes fondamentaux du droit?
Le Président: M. le ministre.
M. Rémillard: Comment le député d'Anjou
peut-il dire une chose pareille, qu'on ne respecte pas les principes
fondamentaux du droit? On respecte les principes fondamentaux des lois, mais
c'est nous ici, comme parlementaires, qui les faisons, les lois. Et le principe
de la rétroactivité, comme le principe de respecter les droits et
les libertés fondamentales... On doit utiliser, par exemple, une clause
«nonobstant», que je n'aime pas personnellement ? je l'ai dit
à plusieurs reprises ? mais on va utiliser cette clause
«nonobstant» ou dérogatoire que dans la mesure où on
voit que l'intérêt public est en cause.
La même chose en ce qui regarde la rétroactivité. La
rétroactivité, on va l'utiliser dans des cas où vraiment
on ne voit pas d'autre solution comme parlementaires ici, M. le
Président. Mais, dans l'un et dans l'autre cas, il s'agit, pour nous,
d'utiliser nos responsabilités pour que l'intérêt public
soit notre premier objectif, respectant les principes de législation
d'une société de liberté, démocratie comme la
nôtre. Et c'est ce qu'on fait.
Le Président: Pour une autre question
complémentaire, M. le député de Lévis.
M. Garon: M. le Président, est-ce que le ministre
peut faire une distinction entre les lois qui agissent
rétroactivement, une fois adoptées, à la date du
dépôt de la loi, et les lois qui rétroagissent au moment du
dépôt, mais plusieurs mois avant la date du dépôt de
la loi? Il y a une grande distinction entre les deux. La loi fiscale qui
rétroagit au discours du budget, c'a toujours été comme
ça, on n'a pas le choix. Mais, quand une loi rétroagit plusieurs
mois avant le dépôt, c'est très différent. Et je
pense que le ministre devrait faire au moins cette distinction-là parce
que les gens...
Le Président: M. le député...
M. Garon: On rétroagit à une loi qui a
été adoptée et qui rétroagit avant qu'elle existe
seulement, même avant que les gens la connaissent!
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Rémillard: M. le Président, je vois que j'ai
touché, du moins, l'intérêt du député de
Lévis lorsque j'ai parlé de la Loi sur la protection du
territoire agricole.
M. le Président, il vient de soulever un autre problème
qui, aussi, est un problème de taille pour un parlementaire. Adopter une
loi et dire que cette loi s'applique du moment de la présentation de
cette loi en travaux parlementaires, c'est de la rétroactivité.
Je ne dis pas qu'il ne faut pas le faire, mais je vous dis que vous venez de me
donner un autre exemple qui démontre que, comme parlementaires, il faut
prendre nos responsabilités, et c'est ce que vous avez fait dans le cas
de la Loi sur la protection du territoire agricole, dans les circonstances que
vous avez appréciées. Alors, vous n'avez pas de leçons
à nous faire.
Le Président: Un instant! Oui. Un instant! À
l'ordre, s'il vous plaît!
Pour une dernière question complémentaire, M. le
député de Lévis.
M. Garon: M. le Président, est-ce que le ministre de la
Justice, qui a déjà enseigné le droit et qui a
déjà enseigné qu'il ne fallait pas faire de loi
rétroactive ou très exceptionnellement, fait la distinction, est
capable de faire la distinction entre des lois qui rétroagissent
plusieurs mois avant leur dépôt à l'Assemblée
nationale, comme c'a été le cas cette année avec la loi
fiscale qui rétroagit au 1er janvier, alors qu'elle a été
déposée le 20 mai, par rapport à une loi qui est
déposée le 20 mai mais qui s'applique à partir du 20 mai,
même si elle est adoptée plusieurs mois plus tard?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président! Le
Président: M. le ministre de la Justice.
M. Rémillard: M. le Président, s'il y a un membre
de cette Chambre qui ne devrait pas se lever sur ce sujet, ce serait le
député de Lévis. Des voix: Oh! Oh!
M. Rémillard: Ce serait le député de
Lévis. Quand vous pensez que dans les circonstances, quand cette Loi sur
la protection du territoire agricole a été votée, tous les
gens qui avaient gardé leurs fermes, qui étaient prêts
à les vendre, jusqu'à la dernière minute, ils sont
arrivés puis ils ont dit qu'une loi s'applique du moment de sa
présentation. Vous n'appelez pas ça de la
rétroactivité, vous! Comment vous appelez ça? Je n'ai pas
de leçons à recevoir de vous.
Le Président: Pour une question principale maintenant, M.
le...
Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît!
S'il vous plaît!
Hausse des frais de scolarité
à l'université et
accessibilité
aux études supérieures
Pour une question principale, M. le député de
Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition.
M. Brassard: M. le Président, dans son discours du budget,
le ministre des Finances a indiqué son intention de hausser à
nouveau les frais de scolarité à l'université.
Après les avoir fait tripler ? et je vous rappelle que c'est le
premier ministre, de facto, qui a présidé à cette hausse,
à l'époque ? depuis le dégel de 1990, il s'agirait
maintenant de les aligner sur la moyenne canadienne, ce qui les ferait passer
de 1500 $ à plus de 2250 $, une surtaxe de quelque 800 $.
Lors de l'étude des crédits de son ministère, la
ministre déclarait pourtant, et je la cite: «Vous savez
très bien qu'on a des défis à relever qui sont propres au
Québec. On a encore des objectifs d'accessibilité, ce qui n'est
peut-être pas le cas pour d'autres provinces canadiennes, de façon
particulière chez les francophones, et c'est pour ça que nous
agissons avec prudence en la matière.» «En la
matière», c'est-à-dire en matière de frais de
scolarité.
À ce moment-là, M. le Président, tout le monde
avait compris, les leaders étudiants qui étaient présents
en commission et nous-mêmes aussi, qu'il y avait comme une pause, un
répit dans le rythme d'augmentation des frais de scolarité, qu'on
se contentait d'à peine 2 % d'augmentation.
Alors, ma question à la ministre de l'Enseignement
supérieur: Pourquoi a-t-elle changé d'avis? Comment peut-elle
être d'accord avec une hausse de 800 $ des frais de scolarité et,
en même temps, dire oui aux objectifs d'accessibilité très
ambitieux fixés par le Conseil supérieur de l'éducation
qui fixe à 35 % l'accès à l'université, alors qu'on
est seulement à 28 %? Comment peut-elle concilier ces objectifs
d'accessibilité et une hausse de 800 $ des frais de
scolarité?
Le Président: Mme la ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science.
Mme Robillard: m. le président, le gouvernement a toujours
poursuivi une politique d'accessibilité aux études
supérieures, depuis longtemps, au québec et, à chaque fois
qu'il a fixé le niveau des droits de scolarité à
l'université, il a toujours tenu compte de cet objectif de base que plus
de jeunes accèdent non seulement à l'université, mais
aussi au collégial. dans ce sens-là, m. le président, on
sait tous qu'en 1990 on a eu une hausse fort importante de 350 $. on en a eu
une autre de 350 $ en 1991. mais, en 1992, on a eu une hausse de seulement 6 %
et, en 1993, une hausse de seulement 1,9 96, une hausse qui était
liée à l'indice des prix à la consommation. et, en
même temps, quand on regarde les taux d'augmentation de la
clientèle universitaire, on s'aperçoit qu'au fil des
années où nous avons connu ces hausses nous avons connu, en
même temps, une hausse de la clientèle aux universités.
même l'an dernier, m. le président, on a augmenté de 2,3 %
le nombre des étudiants. il n'y a eu aucune diminution au niveau de
l'accessibilité. et c'est dans ce sens-là qu'on va poursuivre le
même objectif.
Le Président: Alors, pour une question
complémentaire.
M. Brassard: M. le Président, alors, ça signifie
quoi, concrètement? Est-ce qu'on doit comprendre que la ministre nous
indique que, hausser de 800 $ les frais de scolarité des
étudiants à l'université, ça n'affectera en rien
les objectifs d'accessibilité qu'elle s'est fixés, qu'elle a
assumés, ceux déterminés et proposés par le Conseil
supérieur de l'éducation? Il n'y aura pas d'effet. C'est
ça qu'elle nous dit, là? 800 $ de hausse des frais de
scolarité, puis ça n'aura pas d'effet sur l'accessibilité?
Bravo!
Le Président: Mme la ministre.
Mme Robillard: M. le Président, il faudrait
peut-être que le député de Lac-Saint-Jean relise le
discours du budget et le comprenne. C'est très bien indiqué.
Notre intention est de les aligner sur la moyenne de ceux payés au
Canada. Notre intention, notre objectif est de les aligner. Est-il question
d'une augmentation subite de 800 $? Est-il question de la durée de
l'étalement? L'objectif est fixé... (10 h 40)
Le Président: Je vais demander la collaboration des
collègues pour éviter, s'il vous plaît, les
interpellations. S'il vous plaît! Poursuivez, madame.
Une voix: ...
Le Président: M. le député!
Mme Robillard: M. le Président, l'objectif est
fixé. Il s'agit maintenant de regarder les modalités et de voir
en combien de temps nous allons atteindre cet objectif. Relisons très
clairement le discours du budget, M. le Président, et n'extrapolons pas
au-delà de l'écrit.
Le Président: Pour une autre question
complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: M. le Président, est-ce que la ministre
pourrait justement nous préciser les modalités d'application de
cette nouvelle hausse de 800 $? Ça va être quoi, là?
Qu'est-ce que vous avez à dire aux étudiants qui vont être
admis à l'université en septembre? Ça va être quoi,
comme augmentation? Et sur combien d'années vous allez augmenter de 800
$ les frais de scolarité? Bien, quelle nous le dise! C'est comme pour
les...
Le Président: Très bien. D'accord. M. le
député! À l'ordre, s'il vous plaît! Oui. Alors,
votre question est posée. Très bien.
Oui, M. le député.
M. Brassard: Est-ce qu'elle pourrait au moins, contrairement
à ce qui se passe pour l'immersion anglaise, dissiper le brouillard sur
cette question-là?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Robillard: M. le Président, il y a seulement le
député de Lac-Saint-Jean qui est dans la confusion par rapport
aux droits de scolarité, surtout pour ceux de septembre 1993 où
il est très clair que l'augmentation est de 1,9 %. Et, donc, on regarde
à partir de l'année 1994, M. le Président, et vous allez
me permettre de me laisser le temps de discuter avec les étudiants et
les représentants des universités avant qu'on décide de la
durée de l'étalement de ce nouvel objectif du gouvernement.
Le Président: En question principale, maintenant, Mme la
députée de Taillon.
Enquête générique du Bureau
d'audiences
publiques sur l'environnement quant aux
impacts des projets de
cogénération
Mme Marois: Merci, M. le Président.
Au moment où se déroule une première audience
publique sur un projet de cogénération de la firme In-deck dans
l'Outaouais, le ministre de l'Environnement n'a toujours pas mandaté le
Bureau d'audiences publiques sur l'environnement pour se pencher sur les
aspects techniques du procédé de cogénération et il
ne semble pas, malheureusement, que le gouvernement soit
intéressé à tracer clairement et d'une façon
systématique les lignes directrices de cette nouvelle politique en
matière de cogénération. De nombreux groupes ont
demandé au ministre de procéder à une enquête
générique et lui-
même s'était engagé à le faire, M. le
Président. Or, la crainte que nous avons actuellement c'est qu'un grand
nombre de projets sont en demande un peu partout à travers le
Québec et qu'on risque de s'engager dans ce processus sans avoir
procédé à cette audience générique. Ce que
je voudrais savoir de la part du ministre, c'est s'il est toujours convaincu,
d'abord, qu'une enquête générique d'un type que nous
connaissons, faite par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement,
soit engagée avant que l'on ne procède à la pièce,
comme on semble vouloir le faire actuellement, M. le Président.
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je pense
que c'est à l'occasion de sa dernière tournée dans
l'Outaouais que Mme la députée a eu l'occasion,
pratiquement? j'exagère peut-être un peu ? de
féliciter le ministre de l'Environnement d'avoir soumis le projet Indeck
à des audiences publiques. Je tiens... Non, mais on peut retourner
? il y a avait une couverture de presse ? aux écrits, et vous
verrez ce que vous avez dit, et je souhaite que vous le mainteniez.
Maintenant, en ce qui concerne l'aspect technique de ce
procédé, je tiens à rassurer Mme la députée
que c'est inclus dans le mandat d'audiences publiques et que l'aspect technique
sera soumis au BAPE.
Le Président: Alors, question complémentaire.
Mme Marois: Je pense que le ministre n'a pas compris ma question
ou il l'a très bien comprise et c'est ça qui m'inquiète.
Ce que je demande au ministre, avant que ça ne
dégénère en pressions de la part de groupes qui vont
être en désaccord avec des projets précis...
Le Président: Un instant!
Mme Marois: ...avant que les tensions n'augmentent...
Le Président: Mmes, MM. les députés, s'il
vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!
Allez-y, Mme la députée, pour votre question.
Mme Marois: Alors, M. le Président, avant que ça ne
dégénère, qu'on se retrouve dans une situation comme celle
à laquelle est confronté le ministre en matière de gestion
des déchets, ce que je lui demande, c'est de procéder à
une enquête générique concernant l'ensemble de la question
de la cogénération. Quand va-t-il le faire? Quand va-t-il
mandater le BAPE pour le faire avant de procéder à la
pièce, M. le Président?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Je sais que Mme la
députée de Taillon est relativement nouvelle dans toute la
question du processus d'évaluation environnementale comme tel. Le
député de La Prairie, lui, savait très bien qu'avant de
procéder à ce type d'étude ça prend ce que l'on
appelle un promoteur qui produit une étude d'impact qui est, par la
suite, soumise au bureau d'audiences publiques en matière
environnementale. Dès qu'un promoteur s'affichera, le ministre
l'obligera et confiera le mandat au BAPE.
Le Président: En question complémentaire.
Mme Marois: Est-ce que je dois comprendre que le ministre a
renoncé à ses responsabilités et à ses pouvoirs au
profit de sa collègue, la ministre de l'Énergie et des
Ressources, qui a gagné sur toute la ligne dans ce dossier-là,
comme pour le reste, M. le Président?
Le Président: M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, moi, je ne
comprends absolument pas la question de Mme la députée de
Taillon. Je tiens à la rassurer. Je tiens à indiquer que je suis
au service de l'ensemble des collègues du gouvernement. Si le ministre
des Forêts souhaite une étude générique dans la
forêt, je vais être au service du ministre des Forêts. Si le
ministre de l'Agriculture souhaite une étude générique en
ce qui concerne l'utilisation des pesticides en matière agricole, je
suis au service du ministre de l'Agriculture. Si quelque autre ministre
souhaite une étude générique dans son domaine, le ministre
de l'Environnement est là pour lui rendre service, faire participer les
groupes environnementaux, impliquer le public. Et c'est la même chose
pour Mme la vice-première ministre. Je suis également, comme
ministre de l'Environnement, si elle souhaite une étude
générique, à son service. Le ministre de l'Environnement,
l'environnement est au service de l'ensemble du gouvernement et de la
population du Québec.
Le Président: En question principale maintenant, M. le
leader de l'Opposition et député de Joliette.
Critères gouvernant la fermeture de lits, dans
certains hôpitaux, pour la période estivale
M. Chevrette: Oui, M. le Président. On commence à
constater de plus en plus d'annonces de fermeture de lits pour la
période estivale. On dit que, dans certains hôpitaux, ce sera 1
lit sur 8, dans d'autres, 1 lit sur 6. Je voudrais savoir de la part du
ministre de la Santé et des Services sociaux s'il y a une règle,
des directives, ou si c'est laissé au soin de chacun des hôpitaux
ou des centres hospitaliers du Québec de déterminer le nombre de
lits qui doivent fermer.
Le Président: M. le ministre de la Santé et des
Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président.
Vous me permettrez très certainement, en premier lieu, de saluer
des représentants des clubs de l'âge d'or des comtés de
Lévis et des Chutes-de-la-Chaudière qui sont dans les galeries et
qui font suite à des olympiades des aînés tenues sur la
rive sud de Québec, auxquelles j'ai assisté. Il me fait
plaisir...
Des voix: Bravo!
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, ce
qu'il y a d'extraordinaire dans ces initiatives, c'est qu'on veut briser
l'isolement des gens qui sont à domicile et c'est ce qu'on a
réussi avec une journée comme celle-là, souhaitant qu'un
peu partout à travers le Québec s'organise ce genre de
manifestation très positive qui permet aux gens de se sociabiliser et de
progresser dans la vie. C'est très intéressant.
Quant à la question du député de Joliette, M. le
Président, nous sommes à une période où,
effectivement, un certain nombre de lits sont fermés un peu partout
à travers le Québec pour différentes raisons dont
principalement celle de l'été, la période estivale,
où plusieurs décident de prendre des congés, et c'est
à peu près normal. Dans chacun des cas de fermeture de lits, la
directive est très claire. Ça prend au préalable
l'autorisation du ministère de la Santé et des Services sociaux
quant à la fermeture des lits, y compris pour des périodes
estivales, ou qui, dans d'autres cas, pourrait permettre à certains
hôpitaux d'équilibrer leur budget, ce qui n'est pas une situation
isolée, disons-le, au cours de la période estivale, puisque
certains hôpitaux profitent de la période d'été pour
fermer des lits ? auparavant, c'était 2 semaines, 3 semaines,
maintenant pour une période un peu plus longue ? ce qui, à
l'occasion, permet aux établissements d'équilibrer leur budget.
Mais ce n'est pas la raison principale, la raison principale étant un
personnel qui prend des vacances, et c'est tout à fait normal.
Le Président: Pour une question complémentaire.
M. Chevrette: Oui. Vous me permettrez également de saluer
ces clubs de l'âge d'or qui ont des olympiades, je crois que c'est leurs
quatrièmes, dans leur cas. Et j'invite le ministre dans la région
de Lanaudière qui les aura prochainement, et eux aussi en sont à
leurs quatrièmes.
De plus, M. le Président, je voudrais tout d'abord demander au
ministre, qui admet, je pense, candidement, que certains hôpitaux le font
pour boucler leur budget, puis les périodes sont différentes,
mais je voudrais savoir s'ils doivent obtenir au préalable
l'autorisation du ministère pour faire un tel geste. Et est-ce qu'il y a
des critères sur le nombre de lits? À partir de quels
critères ils ont le droit de fermer combien de lits, etc? Ou bien si
c'est laissé au bon vouloir de chacun des centres hospitaliers du
Québec? (10 h 50)
Le Président: M. le ministre de la Santé et des
Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
c'est d'abord, depuis avril 1993, par l'entremise des régies
régionales que ces autorisations-là viennent, y compris sur le
plan du contrôle budgétaire, qui est remis aux régies
régionales qui, par la suite, informent le ministère. Quant aux
équilibres financiers, il est évident que, dans chacun des cas
où les centres hospitaliers décident de fermer des lits, ils
devaient, au préalable, avant avril 1993, recevoir l'autorisation du
ministère, depuis avril 1993, recevoir l'approbation de la régie
régionale, et ça doit répondre à des
critères, bien sûr, qui existent.
M. Chevrette: M. le Président...
Le Président: Toujours en complémentaire.
M. Chevrette: Mais, à ce que je sache, même dans la
réforme, à partir de la loi 120, le ministre demeure responsable
de la qualité des services de santé à chaque citoyen,
d'autant plus que son objectif, c'était les citoyens avant toute chose.
Donc, il a placé le citoyen comme premier bénéficiaire, et
premier acteur principal dans la réforme.
Est-ce que le ministre se garde le pouvoir véritablement de bien
contrôler ces fermetures? Il y en a eu, dans le passé, je le
reconnais. Mais est-ce qu'il se garde le pouvoir d'intervenir dans le cas
où une population peut être prise en otage d'un budget ou d'un
équilibre budgétaire?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, M. le Président,
c'a été le cas sans pour autant que la population ait
été prise en otage pour équilibre budgétaire. Mais
certaines difficultés vécues à l'Hôpital du
Sacré-Coeur de Montréal, quant à l'offre de services pour
l'ensemble des régions au nord des Laurentides, nous ont fait ouvrir 32
lits, à l'année, 12 mois par année. Donc, le ministre se
garde cette possibilité-là, et c'est sa responsabilité
ultime. C'est lui qui doit répondre devant cette Chambre, comme on fait
ce matin.
Le Président: En question principale, M. le
député de D'Arcy-McGee.
Raisons présidant aux modalités
d'accès aux écoles anglaises
M. Libman: M. le Président, juste avant d'ajourner pour la
fin de semaine, le ministre responsable de l'application de la Charte de la
langue française a déposé à la commission de la
culture une série de statistiques sur les prévisions des
effectifs scolaires étudiants en anglais de 1993 à l'an 2002. Il
maintient qu'une très légère augmentation ? de 111
000 à 117 000 au cours
des 10 prochaines années ? justifie son refus
d'élargir l'accès, même légèrement, aux
écoles anglaises au Québec, ce qui aiderait le déclin
rapide de la communauté anglaise à se renouveler.
Malheureusement, ces statistiques ne sont pas rassurantes. Si
l'augmentation des inscriptions aux écoles d'une communauté
minoritaire n'est pas proportionnelle à l'augmentation des inscriptions
au réseau de la majorité, la masse critique de la minorité
n'augmente pas assez rapidement en proportion à la majorité, et
ceci amène la fermeture de plus en plus d'écoles.
Ma question au ministre responsable de l'application de la Charte de la
langue française: Est-ce qu'il croit vraiment que cette
légère augmentation ? moins de 1 % par année au cours
des 10 prochaines années ? est suffisante pour avoir le moindre
impact positif pour insuffler une nouvelle vie au réseau scolaire
anglais au Québec?
Le Président: M. le ministre responsable de l'application
de la Charte de la langue française.
M. Ryan: Les statistiques que nous avons déposées
viennent, à tout le moins, nuancer singulièrement les verdicts et
les pronostics très pessimistes qu'on entend habituellement de la part
de porte-parole de la communauté anglophone. Je pense qu'à la
lumière des données contenues dans le document que nous avons
déposé vendredi en commission on ne peut plus dire qu'il y a
déclin inexorable des inscriptions dans les écoles anglaises. Que
le degré d'augmentation ne soit pas satisfaisant pour le
député de D'Arcy-McGee et de nombreux leaders de la
communauté anglophone, je le conçois très bien.
Le gouvernement établit clairement sa politique dans le projet de
loi 86, et je remercie le député de D'Arcy-McGee de voter
très fréquemment avec le Parti québécois contre
plusieurs dispositions de ce projet, ce qui montre l'équilibre foncier
qu'il y a dans le projet comparé aux positions extrêmes qu'on
trouve dans le milieu.
Le Président: Alors, en question complémentaire.
M. Libman: Is...
Le Président: Un instant, M. le député.
Alors, pour une question complémentaire, M. le député de
D'Arcy-McGee.
M. Libman: M. le Président, a third of English schools in
Québec have closed for the passed 20 years. Does the Minister not
recognize the seriousness of the situation, and how can he claim that a less
than 1 % increase a year over the next 10 years can help this declining school
system improve itself? What can he do to help this serious situation once and
for all?
Le Président: Alors, M. le ministre.
M. Ryan: Nous avons indiqué dans le projet de loi 86 les
intentions du gouvernement, M. le Président, et j'espère que
là où les articles du projet de loi témoignent d'une
compréhension responsable du gouvernement, nous pourrons compter sur
l'appui du député de D'Arcy-McGee.
Le Président: Alors, pour une autre question
complémentaire.
M. Libman: Pour avoir l'appui du député de
D'Arcy-McGee, c'est facile, M. le Président: ouvrir les portes.
Le Président: Votre question.
M. Libman: How can the minister continue to justify the very
serious situation of English schools in Québec? Why is he not willing to
recognize that this is a serious, serious problem that needs immediate
attention? It is not a question of politics, it is a serious question about the
future of English schools in Québec. When is he going to do something
concrete to help the situation?
Le Président: Alors, M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, j'ai indiqué à
plusieurs reprises, dans la mesure où je suis concerné, la
politique du gouvernement concernant la langue de l'enseignement et de
l'admissibilité à l'école anglaise. Certaines
modifications sont proposées dans le projet de loi 86. Je ne pense pas
que le gouvernement envisage d'autres modifications pour l'avenir
prévisible.
Le Président: En question additionnelle, M. le
député de D'Arcy-McGee.
M. Libman: Does the minister not admit at least that some of the
recommandations put forward, such as the Chambers Report, will have a
negligible impact, a negligible impact on the majority school system? Does he
not at least adknowledge that reality?
Le Président: M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, j'ai indiqué à
plusieurs reprises les arguments qui empêchent de retenir la
première recommandation du rapport Chambers. Si nous allions retenir la
recommandation selon laquelle l'accès à l'école anglaise
devrait être ouvert aux enfants d'immigrants de langue anglaise qui nous
parviennent d'autres pays, à ce moment-là, il y aurait 2
conséquences: on créerait 2 catégories d'immigrants,
certains qui auraient une liberté de choix, soit d'aller à
l'école anglaise ou à l'école française, parce que
ceux à qui on donne le droit d'aller à l'école anglaise,
on leur reconnaît en même temps le droit d'aller à
l'école française, et, deuxièmement, on créerait 2
catégories au Québec même parce que les
Québécois francophones n'ont pas
le droit d'envoyer leurs enfants à l'école anglaise. Ils
acceptent, de manière très générale, cette
règle qui les contraint à envoyer leur enfants à
l'école française afin justement de donner l'exemple aux enfants
d'immigrants et de leur montrer qu'ils ne sont pas traités
différemment des enfants de la très grande majorité de la
population du Québec.
Alors, si vous avez des réponses à ces objections
fondamentales, vous pourrez les formuler en commission parlementaire, quand
nous arriverons à l'examen de ces dispositions du projet de loi qui
traitent de l'admission à l'école, mais j'ai énoncé
ces raisons de fond à maintes reprises au cours des derniers mois.
Le Président: Alors, pour une toute dernière
additionnelle, M. le député de D'Arcy-McGee.
M. Libman: Does the minister not recognize that there are other
ways to formulate this access question, such as allowing section 23(l)a of the
Canadian Charter to apply in Québec, since Québec is the only
province that is exempt, as well as allowing children of immigrants who have
been educated in English anywhere in the rest of the world? Does he not
recognize there are other ways to still open the doors to English education
without creating 2 classes of immigrants?
Le Président: Alors, M. le ministre.
M. Ryan: Le député de D'Arcy-McGee, dans sa
question, réfère au premier article de l'article 23 de la Loi
constitutionnelle de 1982. Cet article prescrit qu'un enfant d'une
communauté linguistique minoritaire peut fréquenter
l'école de sa langue, si c'est sa langue maternelle. Nous avons
essayé ce critère-là au Québec pendant plusieurs
années. Étant donné le mouvement d'immigration qui se
produisait au Québec et le choix que faisaient les foyers d'immigrants
sous ce régime, il a été décidé de
l'abandonner il y a déjà plusieurs années. J'ai
indiqué clairement, nonobstant toutes les calomnies qu'on s'emploie
à répandre du côté de l'Opposition, qu'il n'est pas
question de revenir à ce critère-là, étant
donné les difficultés d'application auxquelles il a donné
lieu, à l'époque. C'est pour ça que nous avons retenu le
critère de la fréquentation scolaire des parents pour
décider de l'inscription scolaire des enfants. Alors, il n'est pas
question de revenir à ça. Je comprends le député de
l'invoquer, c'est de bonne guerre, mais la position du gouvernement est
très claire là-dessus, et elle ne sera pas modifiée dans
un avenir prévisible. (11 heures)
Le Président: Alors, c'est la fin de la période des
questions. Un instant, s'il vous plaît!
Question de directive, Mme la députée de Johnson.
Mme Juneau: M. le Président, compte tenu que je me suis
levée à plusieurs reprises avant la fin de la période de
questions et que vous aviez mentionné au député de
D'Arcy-McGee que c'était sa dernière question
complémentaire, est-ce que c'est possible que je puisse poser ma
question, M. le Président?
Le Président: Ça me prendrait, Mme la
députée de Johnson, le consentement de l'Assemblée pour
poursuivre. Est-ce que... S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, il y a consentement à
ce que Mme la députée de Johnson puisse avoir la première
question demain.
Le Président: II n'y a pas de vote reporté. Motion
sans préavis.
Avis touchant les travaux des commissions
En demandant l'attention, s'il vous plaît, de tous les
collègues, je vais reconnaître M. le leader du gouvernement pour
les avis touchant les travaux des commissions.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président.
J'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, de 12 heures à 13 heures,
de 15 heures à 18 heures, et si nécessaire de 20 heures à
24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine, la commission de
l'éducation procédera à l'étude
détaillée du projet de loi 72, Loi modifiant le Code des
professions et la Loi sur les infirmières et les infirmiers.
De 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures
à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de la culture poursuivra
l'étude détaillée du projet de loi 86, Loi modifiant la
Charte de la langue française.
Je tiens, par ailleurs, à informer cette Assemblée
qu'aujourd'hui, après les affaires courantes, selon l'horaire des
séances des commissions, la commission de l'économie et du
travail procédera à des auditions publiques quant aux raisons
motivant l'impossibilité de parvenir à une entente relativement
aux modifications à apporter au décret de la construction
conformément à l'article 51 de la Loi sur les relations du
travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans
l'industrie de la construction.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vos avis sont
déposés.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le leader.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. On me demande d'indiquer
l'endroit où se tiendra la commission pour entendre les
intéressés de l'industrie de la construction. Sauf avis
contraire, au salon rouge.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est au... conseil
législatif.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée; aucun
renseignement. Ceci termine les affaires courantes.
Affaires du jour
Nous passons maintenant aux affaires du jour. M le leader du
gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je
vous demanderais d'appeler l'article 15 de notre feuilleton.
Projet de loi 87
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 15,
l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission
des institutions sur le projet de loi 87, Loi modifiant la Loi sur l'aide
juridique.
Y a-t-il des interventions sur ce rapport?
M. le ministre de la Justice.
M. Gil Rémillard
M. Rémillard: M. le Président, on sait que ce
projet de loi 87, dont l'étude en commission des institutions a
été complétée le 8 juin dernier, vise à
modifier la Loi sur l'aide juridique de manière à permettre le
partage entre le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec des
déboursés de cours et des droits d'enregistrement assumés
actuellement par le ministère de la Justice pour les
bénéficiaires de l'aide juridique en matière civile.
Or, M. le Président, actuellement, lorsqu'il y a une cause d'aide
juridique, il n'y a pas de frais de cour qui est payé. Quand on va
enregistrer une procédure en cour, normalement, on paie des frais pour
enregistrer une procédure. Donc, quand il s'agit d'une procédure
en matière d'aide juridique, jusqu'à présent, on ne
faisait pas payer ces frais. Mais, M. le Président, on se trouvait
à perdre du côté québécois parce qu'il y a
une entente avec le gouvernement fédéral qui nous permet de
récupérer une grande partie de ces frais. Par conséquent,
M. le Président, ce projet de loi vient donc faire en sorte que l'on
puisse profiter, par une entente que nous faisons avec le gouvernement
fédéral, de ces sommes d'argent qui nous échappaient
jusqu'à présent, et ça d'une façon aussi
rétroactive, c'est-à-dire que l'entente prend effet
auparavant.
M. le Président, j'ai eu l'occasion pendant la fin de semaine
dernière, et vendredi dernier plus précisément, de parler
avec plusieurs membres du Barreau, avocats, avocates qui étaient
présents à ce congrès du Barreau, un congrès qui
était très important, M. le Président, de par le nombre
d'avocats et d'avocates qui s'y trouvaient, plus de 3000 inscriptions, qu'on
m'a rapporté, et aussi, et en premier lieu, je devrais dire, important
parce qu'il s'agissait du début des cours sur le nouveau Code civil, M.
le Président. Et dans ce contexte-là j'ai eu l'occasion, comme
c'est la coutume pour le ministre de la Justice, de m'adresser au Barreau pour
parler de certains sujets qui sont particulièrement d'actualité,
dont, entre autres, la réforme de l'aide juridique.
M. le Président, le projet de loi que nous avons aujourd'hui, le
projet de loi 87, vient régler un aspect important, puisqu'il s'agit
d'aller récupérer de l'argent que nous n'avions pas du
gouvernement fédéral; on le récupère. Mais j'ai eu
l'occasion d'aborder, je dois dire bien brièvement, évidemment,
au niveau du congrès, dans mon discours au congrès, dans quelle
optique je vois, comme ministre de la Justice, la réforme de l'aide
juridique. J'ai dit qu'il fallait qu'on puisse aider les plus démunis
à avoir accès à la justice et j'ai mentionné aussi,
M. le Président, à quel point je suis préoccupé par
la situation du citoyen à revenus moyens qui n'a pas plus les sous
nécessaires, l'argent nécessaire pour, lui aussi, aller devant
les tribunaux. J'ai eu l'occasion de mentionner, M. le Président, que,
dans ces circonstances, on se retrouvait très souvent dans un contexte
qui est inéquitable, dans le sens que, oui, celui qui est
défavorisé a le secours de l'État pour faire valoir ses
droits ou répondre de ses obligations devant les tribunaux, mais celui
ou celle qui gagne juste un petit peu plus, lui, elle, ils n'ont pas la
possibilité d'avoir recours aux tribunaux, avec tout ce que ça
peut amener d'inéquité entre les 2 situations.
M. le Président, je pense, entre autres, à toutes ces
familles monoparentales qui, en très grande partie, sont dirigées
par des femmes, des femmes qui peuvent gagner, en très grande partie, de
18 000 $ à 28 000 $, selon les statistiques que nous avons, et qui, par
le fait même, ne sont pas sujettes à avoir l'aide juridique. C'est
une situation, M. le Président, qui peut être vraiment
inéquitable lorsqu'elles sont confrontées, par conséquent,
à une situation où d'autres personnes ont l'aide juridique et
lorsqu'elles sont poursuivies ou qu'elles veulent poursuivre quelqu'un qui a
l'aide juridique, ou lorsqu'elles ont des droits et qu'elles ne peuvent pas les
faire valoir parce qu'elles n'ont pas les moyens d'aller devant les cours de
justice.
Alors, M. le Président, j'ai mentionné qu'il fallait qu'on
trouve une solution et j'ai mentionné aussi qu'il fallait que les
avocats et les avocates retrouvent le sens de la contribution sociale. On ne
réglera pas le problème de l'aide juridique seulement en montant
les seuils d'admissibilité. Non, M. le Président. On ne
réglera pas le problème de l'aide juridique en
réorganisant son administration. Non, M. le Président.
Essentiellement, on va régler le problème de l'aide juridique
dans la mesure où les avocates et les avocats vont retrouver leur sens
de la contribution sociale et ne verront plus l'aide juridique comme un
gagne-pain ou comme un soutien financier
important pour leur bureau d'avocats, mais qu'ils puissent le voir comme
une contribution à la société.
M. le Président, lorsque j'ai commencé ma pratique en
1969, ici, à Québec, où j'ai mon bureau de ministre des
Affaires intergouvernementales canadiennes, il y avait, avant, ces magnifiques
résidences victoriennes et, dans une de ces résidences, il y
avait un bureau d'avocats. Dans ce bureau d'avocats où je
commençais comme jeune stagiaire, nous avions, comme tous les autres
bureaux d'avocats...
C'était le bureau d'avocats d'un grand juriste de Québec
à qui je veux rendre hommage, M. Désilets, qui a fondé le
bureau que dirigent maintenant les associés de Me Grondin, M. Grondin,
ancien bâtonnier du Québec, et ses associés, Grondin et
Poudrier, qu'on connaît bien.
Alors, M. le Président, il y avait une contribution de chaque
bureau d'avocats pour faire en sorte que les plus démunis de la
société puissent avoir droit à la justice, et
c'était le Barreau qui nous les référait, et on devait
s'en occuper. C'était la contribution sociale de l'avocat. Je ne veux
pas, M. le Président, qu'on revienne à cette philosophie. Ce
n'est pas ça que je demande. Tout simplement ce que je dis, c'est:
N'oublions pas que, fondamentalement, dans tout le système de l'aide
juridique, il y a, comme premier objectif, d'aider les plus démunis et
n'oublions pas que ce système ne peut pas, non plus, être
inéquitable face aux citoyens à revenus moyens.
C'est dans ce contexte-là, M. le Président, que nous
aurons notre commission parlementaire probablement à l'automne prochain.
Le document de préparation est presque terminé maintenant, dans
toute cette phase de préparation qui est nécessaire. Un document
que je veux qui soit étudié par tous les comités
pertinents du Conseil des ministres. Je veux que ce document reflète
quand même toutes les possibilités que nous avons, et se fasse
dans le cadre des limites de la capacité de payer de l'État.
M. le Président, comme je l'ai fait lors du Sommet de la justice
en février 1992, où j'étais allé au Conseil des
ministres sur toutes les questions qui étaient abordées,
où je voulais présenter des projets, des solutions, je fais la
même chose en ce qui regarde ce document, qui sera un document de
référence pour ceux qui viendront, les groupes qui viendront se
présenter devant nous en commission parlementaire, pour nous parler de
l'aide juridique.
Alors, M. le Président, ce projet de loi 87 est une contribution
significative sur le plan administratif en ce qu'il permet au Québec de
récupérer des sommes d'argent qui sont importantes pour qu'on
puisse assurer ce service de l'aide juridique dans les meilleures conditions
possibles.
Je vous remercie, M. le Président. (11 h 10)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de
la Justice.
Alors, un simple rappel que nous en sommes à la prise en
considération du rapport de la commission des institutions sur le projet
de loi 87, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique. Je cède la parole
à Mme la députée de Terrebonne.
Mme la députée.
Mme Jocelyne Caron
Mme Caron: Merci, M. le Président.
Alors, à titre de porte-parole de l'Opposition pour le dossier de
l'aide juridique, je profiterai donc de cette prise en considération du
rapport, que vous rappeliez à juste titre, M. le Président, pour
exprimer un peu à la population ce qui s'est passé lors de nos
travaux sur l'étude article par article du projet de loi 87.
Donc, ce projet de loi provient d'une entente entre le gouvernement
fédéral et le gouvernement provincial. Il faut rappeler, M. le
Président, qu'il y avait eu entente de principe en décembre 1991,
et nous sommes, aujourd'hui, en juin 1993. Donc, il y a eu un délai
extrêmement long, les négociations ont été longues
et périlleuses entre le gouvernement fédéral et le
gouvernement provincial. C'est toujours un peu le cas, M. le Président,
vous me permettrez de le souligner. Donc, entente de principe en
décembre 1991, et, évidemment, on se retrouve avec le projet
uniquement en juin 1993.
Dans le projet de loi 87, il y a une clause de
rétroactivité qui remonte à janvier 1992, puisqu'il y
avait déjà eu cette entente de principe. Au niveau des montants,
nous avons questionné à savoir les montants qui étaient en
cause: pour 1991-1992, le budget total de ce programme était de 457 568
$, dont la partie du gouvernement fédéral sera de 215 056 $, et,
1992-1993, on se parle d'un budget global de 2 026 220 $, et la partie du
gouvernement fédéral sera de 954 100 $.
Nous en avons évidemment profité pour questionner
concernant une autre entente qui n'est toujours pas réglée, M. le
Président, et cette entente touche l'immigration. On sait que mon
collègue d'Anjou, qui avait le dossier auparavant, avait
questionné longuement le ministre de la Justice, l'an dernier, lors de
l'étude des crédits, concernant toute cette négociation
concernant l'immigration. Malheureusement, on doit se dire qu'à ce jour
le ministre n'a toujours pas réussi à régler cette
entente. Ses dernières informations, lors de l'étude article par
article du projet de loi 87, étaient à l'effet que les
négociations ne portaient que pour 1992, qu'il n'y aurait pas de
rétroactivité, qu'ils en étaient toujours à la
première étape de négociation, que la dernière
série de lettres remontait au 28 janvier 1991, que c'était une
lettre du ministre de la Justice qui demandait de poursuivre les
négociations, et un accusé réception en février
1993. Depuis, le silence complet de part et d'autre, et le ministre, en
commission parlementaire, nous a dit qu'il était pour réactiver
ce dossier, mais il faut rappeler que c'est un dossier qui traîne depuis
plusieurs années, M. le Président.
Il y avait également des questions, vous le comprendrez, sur la
fameuse réforme de l'aide juridique. Le ministre en a parlé un
peu. Il faut rappeler que, depuis l'adoption du projet de loi sur l'aide
juridique en 1972,
on avait reconnu, dans la Loi sur l'aide juridique, que les personnes
démunies avaient droit à l'assistance judiciaire. C'était
un droit qui était reconnu pour toute personne démunie et pour
l'ensemble du territoire du Québec; donc, dans toutes les régions
du Québec.
En 1981, on a eu la dernière hausse du seuil
d'admissibilité de l'aide juridique pour une personne seule et, depuis
1981, ce montant est toujours de 170 $ brut, par semaine, M. le
Président, ce qui est en deçà du seuil de la
pauvreté; mais vraiment en deçà. Quand on se dit qu'une
loi doit offrir un service aux démunis, à 170 $ brut par semaine,
on est resté aux chiffres de 1981 pour une personne seule.
Du côté des familles monoparentales ? le ministre y
faisait référence tantôt ? la dernière hausse
du barème remonte à 1985. Pour un couple ou pour une personne
seule avec un enfant, le seuil d'admissibilité est de 210 $ brut par
semaine; et lorsqu'on parle d'un couple avec un enfant, de 230 $, M. le
Président. Donc, les taux n'ont pas été
réactualisés depuis 1981, dans le cas des personnes seules, et
depuis 1985, lorsqu'il y a enfant et couple.
Donc, M. le Président, si on avait à réactualiser
les chiffres, on se retrouverait avec des chiffres passablement
différents aujourd'hui. Donc, on ne peut même plus dire que l'aide
juridique est accessible aux familles à faibles revenus, ni aux
personnes seules à faibles revenus. Et le ministre, depuis quelques
années, nous donne sa belle théorie... Elle est très belle
en théorie, mais on n'arrive pas à obtenir l'argent au niveau du
Conseil du trésor en nous disant que les familles à revenus
moyens n'obtiennent pas de services d'aide juridique. Et c'est réel, M.
le Président. Mais non seulement les familles à revenus moyens
n'obtiennent pas des services de l'aide juridique, mais les familles à
faibles revenus n'obtiennent plus de services de l'aide juridique. C'est
ça, la réalité, présentement.
Nous avons donné un exemple, M. le Président, la semaine
dernière, à la période des questions. Mardi dernier, le 8
juin, nous avons questionné le ministre concernant les mandats d'aide
juridique dans le cas de mandats confiés à des notaires. Nous
avons bien démontré au ministre de la Justice que, dans certaines
régions du Québec, il n'y a plus de notaires qui acceptent de
mandat. Et pourquoi? Le ministre faisait appel, tantôt, aux avocats,
à la bonne conscience des avocats, à leur participation aux
causes sociales. M. le Président, depuis l'adoption de la loi, en 1972,
le tarif des avocats a été révisé à 3
reprises. Du côté des notaires, le tarif n'a jamais
été révisé depuis l'adoption de la Loi sur l'aide
juridique. Ce qui fait qu'actuellement, au Québec, un notaire qui
obtient un mandat d'aide juridique pour un testament, par exemple, obtient 35
$, ce qui fait que ça lui coûte plus d'argent pour faire
compléter les formulaires par sa secrétaire et les envoyer
à l'aide juridique que de décider de le faire
bénévolement. C'est ça, la réalité, M. le
Président. Lorsqu'on se parle au niveau des prêts
hypothécaires, on se parle d'un tarif de 120 $.
Donc, les notaires n'ont plus eu de hausse de tarif depuis la loi, donc,
depuis 1977, et ils refusent dans certains cas, évidemment, d'offrir les
services. Donc, dans certaines régions du Québec actuellement il
n'y a plus de mandat d'aide juridique pour les notaires. Et dans certaines
régions ? là, je pense particulièrement à la
couronne de Montréal et à Montréal ? ça
devient de plus en plus difficile d'obtenir des mandats d'aide juridique dans
le cas des notaires.
Suite à notre question en Chambre, M. le Président, le
ministre avait fait certaines vérifications. Le coût total de
l'enveloppe au niveau des services juridiques, qui coûtent 110 000 000 $,
il n'y a que 800 000 $ finalement qui ont été accordés en
frais pour des remboursements de mandat à des notaires. Ce qui prouve
qu'effectivement il y a très peu de gens qui ont eu recours aux
services, parce que les services ne sont plus accessibles.
Le ministre nous a annoncé, au cours de l'étude article
par article, que, suite à notre question, il avait enfin obtenu du
Conseil du trésor son mandat de négocier. Et comme c'est un
mandat qu'il tentait d'obtenir depuis 3 ans, M. le Président, nous
sommes très heureux, du côté de l'Opposition, que notre
question ait servi à enfin faire comprendre au président du
Conseil du trésor qu'il était peut-être temps d'accorder ce
mandat pour négocier avec les notaires et, finalement, de
répondre à l'objectif premier de la Loi sur l'aide juridique, qui
est d'offrir l'accessibilité, et partout sur le territoire du
Québec. (11 h 20)
M. le Président, évidemment, ce mandat ne viendra pas
régler l'ensemble des problèmes de l'aide juridique. La
réforme doit toucher non seulement sur les seuils
d'admissibilité, mais sur la gestion, aussi. Le ministre, lors de
l'étude des crédits d'avril 1993, nous a déposé un
document qui est une étude du réseau d'aide juridique qui a
été faite par des conseillers en administration, donc, par la
firme Raymond, Chabot, Martin, Paré. Dans ce document, on
démontre que, du côté de la gestion des services
juridiques, il y a beaucoup de travail à faire, qu'il n'y a pas une
gestion uniforme partout, dans tous les bureaux, que le système de
comptabilité est quelque peu déficient, M. le Président,
et que le ministre de la Justice se retrouve dans l'impossibilité de
faire des prévisions à long terme, et même pas à
court terme, M. le Président, pour présenter ça au budget,
au moment du conseil... quand il présente son budget. Donc, il se
retrouve, à chaque année, à être obligé de
demander des crédits supplémentaires pour venir combler le
déficit qu'on retrouve du côté de l'aide juridique. Donc,
problème de gestion, problème du côté des seuils
d'admissibilité, mais aussi le besoin de réformer
entièrement notre système d'aide juridique pour qu'enfin le
principe de l'accessibilité ne soit plus un principe uniquement
théorique.
Concernant son échéancier, M. le Président, le
ministre nous disait tantôt que le document de consultation était
presque terminé. Lors de l'étude article par article, le 8 juin
dernier, le ministre nous a dit que son
premier document était à l'étude au Conseil du
trésor, qu'il entendait réviser ce document parce qu'il avait
d'autres informations et qu'il voulait changer certains principes; que ce
document-là retournerait à nouveau en étude au Conseil du
trésor. Nous espérons toujours une commission parlementaire
à l'automne pour étudier le document et souhaiter arriver,
finalement, à un projet de loi qui pourrait vraiment modifier
l'accessibilité au niveau de l'aide juridique.
Mais nous avons des doutes, M. le Président. Parce que, si on
regarde le cheminement de ce dossier de réforme de l'aide juridique
jusqu'à maintenant, je vous avoue que nous avons des raisons de, quand
même, nous inquiéter un peu. Il faut rappeler que c'est le 20 mars
1992 que le ministre nous disait... et même, ça remonte avant, M.
le Président.
Le 31 mars 1989, le ministre de la Justice avait présenté
un premier mémoire au Conseil du trésor, dans lequel il demandait
une révision complète de la structure des critères
d'admissibilité. Il récidivait au Conseil du trésor en
février 1990 et, cette fois-ci, il recommandait une révision
partielle, espérant sans doute qu'en diminuant ses demandes il pourrait
obtenir gain de cause. À nouveau, il avait essuyé un
échec. Le 20 mars 1992, le ministre nous mentionnait qu'il était
en train de préparer son document de consultation. Donc, il nous dit
toujours que le document est en préparation, qu'il est presque
terminé maintenant, mais il nous disait déjà ça en
mars 1992, et qu'il y aurait une consultation publique. Le 29 avril 1992, lors
de l'étude des crédits, le ministre nous mentionnait à
nouveau qu'il était à travailler son document de consultation et
qu'il pensait, là, pouvoir nous donner ce document à très
brève échéance. Le 5 juin 1992, il nous disait: Nous
sommes à mettre la dernière main à un document de
consultation. Le 5 juin 1992, M. le Président, l'année est
dépassée, là. «Je devrais en avoir une copie dans
les prochains jours»; ça, c'était le 5 juin 1992. Le 23
juin: «J'ai promis un document d'information. Ce document d'information
sera prêt dans les prochaines semaines.» Nous sommes toujours, M.
le Président, à ce moment-là, en 1992, 23 juin 1992. Le 11
décembre, lors de l'étude des crédits
supplémentaires, là, le ministre avait un élément
de report. C'était la fameuse étude qu'il avait commandée,
dont je vous ai parlé tantôt, sur le réseau d'aide
juridique, donc, l'étude de Raymond, Chabot, Martin, Paré.
M. le Président, lorsque nous avons requestionné le
ministre, à l'étude des crédits, il nous a dit que le
document était pratiquement prêt, qu'il devait se rendre au
Conseil des ministres, et qu'il serait étudié au Conseil du
trésor, et qu'on devrait avoir ce document-là dans les plus
brèves échéances. M. le Président, même
chose: au moment de l'étude article par article, le ministre nous a
rappelé que son document de consultation n'était pas tout
à fait terminé, qu'il était rendu au Conseil du
trésor, mais qu'il devait revenir, qu'il devait le réviser, le
retourner au Conseil du trésor; et tantôt, dans ses remarques, il
nous disait que le document était à nouveau presque
terminé et qu'on pouvait souhaiter avoir des audiences et une commission
parlementaire.
Un dernier élément à rappeler peut-être, M.
le Président. En mars dernier, l'adjoint parlementaire, le
député de Chapleau, me consultait pour ce fameux document qui
devait être déposé au printemps, et nous devions même
avoir une commission parlementaire au printemps, M. le Président. Donc,
vous comprendrez que du côté de l'Opposition, suite à
toutes ces déclarations qui sont à peu près dans les
mêmes termes depuis plus de 2 ans, les promesses qui ont
été faites au Sommet de la justice, autant au niveau des
changements des seuils d'admissibilité que pour l'ensemble de la
réforme de l'aide juridique, nous en sommes toujours à
l'état de promesses, M. le Président. Compte tenu que,
jusqu'à maintenant, nous n'avons toujours pas en main ce fameux document
de consultation, nous ne pouvons que demander au ministre de la Justice
d'accélérer et que ces promesses finissent par se
réaliser, M. le Président.
Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Terrebonne.
Vous avez droit à 5 minutes d'intervention...
M. Rémillard: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...suite à
l'intervention de Mme la députée.
M. Gil Rémillard
M. Rémillard: M. le Président, j'ai la chance
d'avoir avec moi un adjoint parlementaire de grande expérience juridique
et de grande expérience parlementaire, le député de
Chapleau, qui est avec moi, M. le Président. Le député de
Chapleau, depuis que je suis ministre de la Justice, travaille avec moi dans
tous les projets que nous avons mis en place. Entre autres, en ce qui regarde
le nouveau Code civil, le député de Chapleau a joué un
rôle très important. Ça a été toujours un
très grand plaisir et une grande efficacité de travailler avec le
député de Chapleau. Et le député de Chapleau, M. le
Président, a la responsabilité de mener toutes ces consultations
en ce qui regarde l'aide juridique.
Et, entre autres, tout à l'heure, M. le Président, nous en
parlions, le député de Chapleau et moi, on se disait: II va
falloir aussi que le Barreau prenne ses responsabilités en ce qui
regarde certains bureaux d'avocats où les honoraires reçus par
l'aide juridique sont pour le moins surprenants. Lorsqu'on parle de 200 000 $,
lorsqu'on parle de 300 000 $, lorsqu'on me dit qu'on parle de 400 000 $ pour
des avocats qui reçoivent des mandats de l'aide juridique, ça
fait beaucoup. Je ne dis pas qu'ils font mal leur travail. Je ne mets pas en
question leur compétence professionnelle. Ce que je dis se
réfère à ce que je mentionnais au tout début
lorsque j'ai présenté ce projet de loi, M. le Président,
disant qu'il va falloir qu'on voit l'aide juridique non pas comme un moyen pour
les avocats de faire de l'argent, mais
comme une contribution sociale avant tout.
Alors, M. le Président, dans ce contexte-là, je sais que
je peux aussi compter sur la collaboration de l'Opposition. Je sais que
l'Opposition ne peut pas être contre cette façon de voir l'aide
juridique. Au Sommet de la justice, j'ai présenté un
modèle, et on nous a fait part de certaines critiques. Très bien,
j'ai dit, je vais retravailler. C'est ce que je vais faire, M. le
Président, en représentant un document de consultation plus
complet. Lors de l'étude des crédits, j'ai déposé,
donc, l'étude de cette firme comptable de grande réputation,
Raymond, Chabot, qui est là aussi pour nous donner des pistes, des
indications quant à l'administration du système d'aide juridique.
Entre autres, on pourrait certainement sauver beaucoup d'argent si on pouvait
mettre en place un mécanisme d'expertise, c'est-à-dire les
experts qui vont témoigner devant les cours, si on pouvait mettre un
moyen, mettre en place, dis-je, un moyen d'expertise qui coûterait moins
cher, qui serait acceptable par tout le monde, par toutes les parties.
Actuellement, les experts qui viennent en cour coûtent une fortune, M. le
Président, et, au niveau de l'aide juridique, ça signifie
beaucoup, beaucoup d'argent. Alors, M. le Président, j'aimerais bien
mieux prendre cet argent pour aider les plus démunis.
Alors, il y a comme ça des points bien précis que je veux
qu'on puisse analyser. Je sais que je peux compter sur la collaboration de
l'Opposition. On poursuit des objectifs, je pense, qui sont communs. Reste
à voir les modalités d'application. Et je sais surtout, M. le
Président, que j'ai la chance de compter sur la grande collaboration,
l'expertise et la compétence du député de Chapleau qui
aura l'occasion de parler sur ce projet de loi et de parler de l'aide juridique
dans la prochaine étape d'adoption de ce projet de loi, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de
la Justice.
Est-ce qu'il y a d'autres interventions?
Mise aux voix
Alors, le rapport de la commission des institutions portant sur le
projet de loi 87, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique, est-il
adopté?
Adopté.
M. le ministre de la Justice. (11 h 30)
M. Rémillard: Oui, M. le Président. Je vous demande
d'appeler l'article 16 de notre feuilleton, prise en considération du
rapport sur le projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur les substituts du
procureur général.
Projet de loi 88
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, l'arti- cle 16,
l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission
des institutions sur le projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur les
substituts du procureur général.
Est-ce qu'il y a des interventions sur ce rapport?
M. le ministre de la Justice.
M. Gil Rémillard
M. Rémillard: Oui, M. le Président.
Le projet de loi 88, intitulé Loi modifiant la Loi sur les
substituts du procureur général, dont l'étude en
commission des institutions a été complétée le 7
juin dernier, poursuit 3 objectifs.
Ce projet de loi vise, en premier lieu, à remplacer le processus
de nomination des substituts occasionnels du Procureur général
actuellement prévu par décret du gouvernement en attribuant au
Procureur général le pouvoir de les nommer suivant le processus
applicable actuellement aux substituts permanents.
En deuxième lieu, M. le Président, le projet de loi
prévoit, par cohérence législative, étendre aux
substituts occasionnels l'obligation prévue, dans la loi pour les
substituts permanents, d'exercer leur fonction de façon exclusive.
Et, en troisième lieu, M. le Président, le projet de loi
prévoit les règles visant à préserver la
neutralité politique des substituts du Procureur général
tout en restreignant aussi peu que possible l'exercice du droit à
l'éligibilité électorale.
M. le Président, il s'agit, en ce qui regarde cette
dernière question qu'on a eu l'occasion de discuter d'une façon
toute particulière en commission parlementaire, d'une part, de
protéger des droits et des libertés fondamentales à
l'effet que, dans une démocratie, notre droit premier, c'est de voter,
et ce droit de voter implique le droit d'être informé.
Ce droit de voter implique aussi le droit de pouvoir se présenter
à une élection. M. le Président, c'est dans ce contexte,
donc, qu'il faut situer ce projet de loi qui fait du rôle du substitut
une situation particulière. Pourquoi? Parce que le substitut du
Procureur général, c'est lui qui décide de poursuivre ou
de ne pas poursuivre. C'est lui qui apprécie la preuve qui lui est
apportée par les policiers. C'est lui qui l'étudié et, en
son âme et conscience, décide s'il doit poursuivre ou pas.
Souvent, M. le Président, on lit dans les journaux: Le Procureur
général poursuit. Mais ces causes-là ne viennent pas sur
mon bureau, M. le Président. Vous comprendrez fort bien que je ne
pourrais pas étudier toutes ces causes et décider moi-même
quand il faut poursuivre dans toutes les causes qui peuvent arriver tous les
jours. Ce sont les substituts du Procureur général qui prennent
ces décisions.
Pour ma part, M. le Président, je suis informé. On me
consulte. Ça vient sur mon bureau pour décision dans des cas qui
présentent une situation exceptionnelle. Mais, dans la très,
très grande majorité des cas, ces
décisions sont prises par les substituts.
C'est donc dire la très grande importance du rôle des
substituts dans notre société, M. le Président. Et je veux
rendre hommage à ces substituts qui font un travail remarquable. J'ai eu
l'occasion de les rencontrer, de rencontrer les substituts chefs. J'ai eu
l'occasion de discuter avec eux encore dernièrement au niveau du
ministère de la Justice, et je suis particulièrement fier de la
façon dont ils s'acquittent de leur fonction.
Il y a place pour amélioration et on en a discuté
ensemble. On va mettre en place des mécanismes pour les
améliorer, améliorer leur façon de procéder pour
qu'ils puissent être encore plus capables d'exercer leurs
compétences dans les domaines qui sont, pour eux, d'une extrême
importance, puisqu'il appert que leurs décisions ont des
conséquences extrêmement importantes pour les citoyens.
Alors, dans ce contexte-là, M. le Président, il s'agissait
de permettre à des substituts de pouvoir faire de la politique active au
niveau fédéral, au niveau provincial, au niveau d'un conseil
municipal, par exemple, d'une commission scolaire, donc, de s'impliquer. Mais,
à ce moment-là, pour qu'il n'y ait d'aucune façon de
conflit d'intérêts ou qu'on puisse penser qu'il puisse y avoir,
à un moment donné, conflit quelconque, on dit: Le substitut
demande donc, à ce moment-là, au sous-chef du ministère
qui est le sous-ministre, qui est le sous-Procureur général et il
est à ce moment-là déterminé qu'il demeure en
congé sans solde et, quand il revient à ses fonctions, il revient
dans un domaine de ses fonctions juridiques, comme avocat, mais à un
niveau qui lui garantit la même condition de travail au niveau, par
exemple, monétaire, mais, évidemment, qu'il ne se situe pas
nécessairement au niveau du substitut. Il peut revenir substitut
ensuite; s'il y a un concours qui s'ouvre et s'il fait application, il
redevient substitut. Mais, M. le Président, toute notre démarche
est faite pour que la justice se fasse d'une façon la plus transparente
possible, pour qu'il y ait non seulement justice qui est rendue, mais qu'il y
ait aussi apparence que la justice est rendue.
C'est dans ce contexte-là, M. le Président, qu'il faut
situer ce projet de loi dans son aspect ici qui est particulièrement
important. On sait qu'on doit vivre des élections
fédérales dans les prochains mois. On sait qu'il y a des
élections au niveau municipal aussi qui peuvent être
annoncées pour l'automne prochain. Alors, dans tout ce contexte, il faut
permettre à ceux et celles qui veulent s'impliquer activement en
politique de le faire, mais, à ce moment-là, on dit: II doit y
avoir une coupure avec vos fonctions de substitut et, par conséquent,
vous ne devez pas, par contre, être pénalisé. Alors, quand
vous reviendrez, vous retrouverez un poste de même niveau, mais ça
ne sera pas comme substitut. Vous pourrez redevenir substitut lorsque vous vous
présenterez à un concours, lorsqu'on ouvre un concours; si le
jury considère que vous pouvez faire le travail, vous redeviendrez
substitut, mais il faut qu'on protège cette qualité
première de la justice, son impartialité et le fait que les
citoyens doivent être assurés que la justice est rendue et qu'elle
est rendue selon toutes les normes de la transparence, M. le
Président.
Alors, voilà les objectifs poursuivis par ce projet de loi, M. le
Président, qui a été étudié en commission
parlementaire.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je rappelle aux membres
de cette Assemblée que nous en sommes à la prise en
considération du rapport de la commission des institutions sur le projet
de loi 88, Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur
général. Et je cède la parole à M. le
député d'Anjou.
M. le député, la parole est à vous.
M. Pierre Bélanger
M. Bélanger (Anjou): Je vous remercie, M. le
Président.
L'étude de ce projet de loi sur les substituts du Procureur
général a donné lieu à un débat vraiment
intéressant sur la condition des sous-procureurs du bureau de la
couronne. En effet, M. le Président, le ministre a eu l'amabilité
de permettre qu'il y ait eu un débat, un débat sur toute la
situation qui prévaut présentement dans le département de
la couronne. En effet, récemment, on apprenait qu'il y avait une coupure
d'environ 1 600 000 $ dans ce département et que certaines mises
à pied, à la fois de procureurs de la couronne et de personnel de
soutien, allaient avoir lieu. Lors, déjà, de questions en Chambre
et lors de l'étude des crédits, l'Opposition avait fait part de
son inquiétude face aux conséquences de ces coupures.
Particulièrement, nous avons fait référence, lors de
l'étude de ce projet de loi, à un article qui est paru le 5 juin
dernier dans La Presse et qui faisait part que, dans 2 districts en
particulier, il semblait y avoir une situation de crise. C'étaient les
districts... On faisait référence aux districts de Hull et de
Trois-Rivières. On parlait même que, dans le district de
Trois-Rivières, la situation était telle qu'un stagiaire de la
couronne avait dû traiter dans une journée 150 dossiers. Alors,
vous comprendrez, M. le Président, que cet état des choses qui
était rapporté nous inquiétait. Cela a permis un
échange que je crois constructif et qui nous a permis de constater que
la situation semblait tout au moins sous contrôle. Le ministre a
d'ailleurs fait part que, grâce aux mesures de déjudiciarisation
qui sont depuis longtemps demandées et qui commencent à peine
à être appliquées, on assiste, semble-t-il, à une
diminution des causes qui se retrouvent présentement devant la Cour des
sessions de la paix et devant la Cour du Québec.
Donc, c'était une situation qui nous préoccupait, surtout,
comme nous l'avons mentionné lors de la commission parlementaire, M. le
Président, nous avions fait part... nous avions fait l'éloge des
mesures adoptées par le ministère de la Justice pour, justement,
revaloriser le travail des procureurs de la couronne. On avait aussi fait part
qu'on appréciait les mesures qui avaient été adop-
tées pour rendre plus humaine la justice au niveau du droit
criminel. On n'a qu'à penser maintenant à l'instauration des
poursuites verticales, c'est-à-dire un procureur qui, saisi d'un dossier
au moment... au début du dossier, reste saisi du dossier jusqu'à
la fin. On regarde aussi quant à un meilleur traitement des victimes
d'actes criminels, des témoins d'actes criminels. On regarde aussi la
conception, maintenant, d'équipes spéciales qui doivent
travailler au niveau du bureau du procureur de la couronne relativement
à la lutte contre la drogue. Alors, toutes ces choses-là. (11 h
40)
II y a eu un effort considérable qui a été fait
dans le passé et on avait peur, M. le Président, suite aux
coupures qui étaient annoncées, qu'on remette en cause ces
dispositions. Alors, le ministre de la Justice nous a fait part qu'il n'en
était pas question, que ces mesures allaient continuer de bon train et
qu'elles n'étaient nullement remises en cause. Je pense que c'est
très important, M. le Président.
Il nous a fait part aussi qu'au niveau des ententes qui sont à
prévoir entre les municipalités et le gouvernement du
Québec pour le transfert de certaines causes vers les cours municipales,
on nous a fait part qu'une cinquantaine de villes avaient présentement
signé le protocole d'entente et qu'on procédait
déjà à cette relocalisation, à ce transfert des
causes. Alors, c'est une situation qui nous réjouit. Nous
espérons cependant que de plus en plus de villes signeront ce protocole
d'entente pour, justement, qu'on assiste rapidement à un
désen-gorgement de la Cour du Québec.
Dans ce projet de loi, M. le Président, le ministre a fait un
survol des différentes dispositions qui y étaient contenues, la
première étant la nomination des substituts. Je pense qu'on ne
peut pas être contre le fait que, maintenant, on va simplifier le
processus de nomination des substituts du procureur général. Je
pense que ça va dans l'ordre des choses, dans une meilleure gestion de
l'appareil judiciaire.
Maintenant, le point qui a peut-être donné lieu à un
débat le plus ? comment je pourrais dire ? non pas
agité, mais le plus long, a été la question des
activités politiques permises maintenant aux substituts du Procureur
général. On sait que depuis l'arrêt de la Cour
supérieure dans l'affaire Tremblay, la Cour supérieure avait
déclaré invalide la constitution de l'article 8 de la Loi sur les
substituts du procureur général qui empêchait tout
procureur d'avoir des activités politiques, à défaut de
quoi il était carrément démis de ses fonctions.
Alors, suite à cette disposition, à ce jugement de la Cour
supérieure, on a cru bon légiférer ? à juste
droit, je pense ? pour, justement, encadrer la possibilité
d'activités politiques des procureurs. La première question qu'on
a eu à se poser, M. le Président, c'est: Qu'est-ce qu'une
activité politique? J'ai eu quelques réticences, quant à
moi, à reconnaître que le simple fait de donner une contribution
monétaire à un parti politique sans en être membre
était une activité politique. Surtout, pour moi, ce qui
était difficile à admettre, c'est le fait que c'est tellement
facile de contourner cette disposition; votre conjointe ou votre conjoint peut
tout simplement donner à votre place, un ami peut donner à votre
place. Alors, comment faire la vérification de ces choses? Et c'est
quand même priver les procureurs de la couronne d'une certaine mesure
fiscale de déduction pour un don à un parti politique. Alors,
j'avais un petit peu de difficulté quand même à ce qu'on
considère cette activité. J'étais d'accord avec le fait
que d'être membre d'un parti politique constituait une activité
politique, mais pour la question du financement j'émettais certaines
réserves.
Cependant, je me suis rallié à l'idée
proposée par le ministre, vu le fait, quand même, qu'il est
important que les procureurs de la couronne affichent une impartialité.
C'est important surtout dans les petites municipalités où ils
sont peu nombreux, où ils peuvent facilement être
identifiés. C'est important que quand le citoyen se présente
devant la cour, il ait confiance que la personne n'a pas réellement
quelque chose contre lui, qu'elle ne va pas s'acharner impunément sur
lui. Alors, je pense qu'on ne peut pas être contre cette image
d'impartialité que se doivent d'afficher les substituts du Procureur
général.
Maintenant, où on a eu un petit peu de difficulté à
s'entendre, c'est sur le fait maintenant qu'on ne permette pas à un
substitut du Procureur général de financer un parti politique,
mais on lui permet cependant d'assister à une assemblée publique.
Cependant, s'il assiste à une assemblée publique où il y a
des discours de candidats, il ne doit pas montrer sa partisanerie; ce qui est
pour moi difficile à concilier, évidemment. On doit donner
préséance au fait qu'un citoyen, donc un substitut du Procureur
général, a le droit d'avoir toute l'information nécessaire
pour pouvoir voter, mais, à partir du moment où il rentre dans
une assemblée nettement partisane, même sans s'afficher,
même sans porter de macaron, est-ce qu'on ne doit pas reconnaître
que ce fait d'assister ainsi à une assemblée publique ne
constitue pas en soi une activité politique? Alors, M. le
Président, ça a donné lieu à un débat
intéressant et, encore là, finalement, nous nous sommes
ralliés à cette disposition, pensant que, de toute façon,
le droit de retenue que s'imposent en général les substituts du
Procureur général allait faire en sorte qu'il n'y aurait pas abus
de cette disposition.
Maintenant, un autre des points qui étaient pour nous important,
c'était la sanction. Quelle sanction devait-on appliquer au substitut
qui décidait de s'adonner à une activité politique? On a
décidé que la sanction... malgré qu'on ne devrait pas
parler de sanction, on devrait plutôt parler de procédure qui va
suivre, parce que ce n'est pas réellement une sanction, on ne punit pas
le substitut, on le reclasse tout simplement, comme l'a expliqué le
ministre. Auparavant, c'était carrément une destitution,
c'est-à-dire que le substitut qui voulait se présenter comme
candidat était carrément démis de ses fonctions.
Maintenant, il est reclassé. Je pense que le ministre a très bien
expliqué quelle est la
portée de ce reclassement.
Cependant, tout en admettant que le reclassement est une mesure
appropriée pour quelqu'un qui veut se présenter en politique,
est-ce que ce même reclassement est acceptable quand uniquement le
substitut du Procureur va donner 50 $? Il donne 50 $ à un parti
politique, ou même 10 $ à un parti politique, et automatiquement,
en vertu de la disposition qui a été adoptée, il va
être obligé d'en aviser le Procureur général, et il
va être reclassé, déplacé carrément de
ministère. Alors, on peut demander si c'est vraiment proportionné
comme sanction; le fait que la personne qui se présente en politique et
qui donne un montant, quel qu'il soit, à un parti politique, la sanction
est la même. Encore là, on a dû se rendre compte qu'il
était difficile de doser les sanctions et de trouver une sanction autre
que celle-là. Malgré le fait que, dans certains cas, on peut
trouver que ce soit excessif, je crois qu'on n'avait pas le choix, finalement,
pour une question de bonne administration et de bonne gestion de la mesure, de
se rallier à cette chose.
Maintenant, on avait constaté dès le début,
l'Opposition, quant à elle, avait constaté dès le
début qu'il y avait un problème dans ce projet de loi. On ne
prévoyait absolument rien quant à la réintégration
d'un substitut qui, après s'être adonné à une
activité politique, veut rentrer dans le bureau des substituts du
Procureur. Finalement, ça a donné lieu à un
échange, et le ministre nous a proposé un amendement qui a
été accepté et qui, je pense, rencontre nos exigences,
c'est-à-dire que le substitut, comme le ministre l'a expliqué,
pourra postuler et, à partir du moment où il aura vraiment
satisfait à tous les prérequis, dont un examen, dont le fait
qu'il ne veut pas se représenter en politique, il pourra être
réintégré.
Maintenant, une autre question, M. le Président, aussi, qui nous
dérangeait, c'était au niveau de la sanction, c'est le fait que
nous aurions peut-être préféré qu'il y ait
possibilité uniquement de congé sans solde plutôt qu'un
reclassement. En tout cas, c'est une question qu'on s'est posée en
commission, on a fait le tour de la question: Est-ce qu'il n'aurait pas
été préférable de donner à un substitut du
Procureur général un congé sans solde, s'il veut se
présenter en politique, plutôt qu'un reclassement? Quant à
nous, nous pensions que cette mesure ferait en sorte que le droit à la
réintégration serait beaucoup plus facilement
protégé de cette façon-là. Alors, le sous-ministre
associé nous a fait part que, pour lui, cette mesure était
très difficile à administrer, surtout dans les endroits où
on possède peu de substituts du Procureur de la couronne. Donc, c'est
uniquement pour cette raison que cette modalité, qui est le congé
sans solde, peut être difficilement retenue. Encore là, nous nous
sommes ralliés à ce raisonnement. Et il ne faut jamais oublier
que, quand, justement, des projets de loi comme celui qui nous a
été présenté font l'objet d'un débat, ce qui
doit être notre priorité, c'est finalement l'administration de
notre système de la justice. C'est pour cette raison que nous nous
sommes ralliés à la position telle que
présentée.
Donc, pour toutes ces raisons, M. le Président, je pense que ce
projet de loi représente un compromis tout à fait acceptable
entre le droit d'un procureur à vouloir exercer des activités
politiques et le souci pour le gouvernement de faire en sorte que les
substituts affichent une image de complète impartialité. Je pense
que c'est un compromis qui est intéressant, qui est acceptable, et c'est
pourquoi les membres de l'Opposition voteront en faveur de ce projet de loi.
(11 h 50)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député.
Est-ce qu'il y a des interventions? Vous avez une intervention
suite...
M. Rémillard: Oui.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre.
M. Gil Rémillard
M. Rémillard: Oui, M. le Président. M. le
Président, vous me permettrez de remercier les membres de la commission
parlementaire sur les institutions qui ont étudié ces projets de
loi que nous étudions ce matin et, d'une façon toute
particulière, je veux remercier le député d'Anjou pour sa
contribution. Par ses commentaires, de fait, il nous a permis de voir tous les
aspects de ce problème que nous avions et que nous solutionnons, je
pense, de la meilleure façon avec ce projet de loi. En travaillant tous
en fonction du même objectif, pour une justice la plus transparente
possible, je crois que nous pouvons maintenant avoir une solution qui est
très, très acceptable sur le plan du principe des droits et des
libertés fondamentales, comme sur celui aussi de l'indépendance,
qu'on doit trouver chez les substituts.
M. le Président, je voudrais le mentionner, j'ai eu l'occasion
d'en parler avec plusieurs criminalistes, lors du congrès du Barreau en
fin de semaine dernière, qui me disaient à quel point ils
étaient satisfaits des différentes mesures que nous avons prises
pour rendre la justice plus humaine en ce qui regarde le droit criminel. Nous
avons maintenant une politique d'encadrement pour l'utilisation, par exemple,
des délateurs, des témoins collaborateurs avec la police, avec
les procureurs, pour poursuivre des criminels. Nous avons aussi, M. le
Président, maintenant, des directives à l'effet que tout ce qui
regarde ce que nous appelons la négociation de plaidoyers, le
«plea bargaining» qu'on appelait, puisse se faire dans la
transparence, avec l'information à la victime. Nous avons la poursuite
verticale qui rend plus humaines et plus sensibles toutes ces questions de
poursuite où la victime peut se sentir mal à l'aise; elle est
soutenue par le même avocat dans tous les éléments de la
procédure.
M. le Président, il y a aussi et surtout, dans les cas qui nous
préoccupent, un dévoilement, un dévoilement complet de la
preuve de la part de la poursuite.
Donc, quand le substitut décide de poursuivre, il rencontre la
défense, il dit: Voici ma preuve. Aucune cachette, c'est clair, ce qui
va nous permettre, M. le Président, probablement de nous pencher, avec
probablement aussi plus de possibilités, sur l'utilisation de
l'enquête préliminaire. Je ne dis pas, M. le Président,
qu'il faut éliminer systématiquement l'enquête
préliminaire de tous les cas où on peut avoir une enquête
préliminaire présentement, mais je dis qu'avec le
dévoilement de la preuve, comme on le fait maintenant, et les
résultats qu'on peut avoir, je crois qu'on peut en arriver à la
conclusion, dans bien des cas, que nous n'avons plus besoin de l'enquête
préliminaire. Ce qui veut dire, M. le Président, des effets
considérables sur la poursuite d'un procès, sur
l'évolution de la procédure qui mène à un
procès.
Alors, c'est l'un des sujets qui seront discutés dans les
prochaines semaines, M. le Président, pour que nous puissions trouver un
moyen, pour en avoir une solution en ce qui regarde, donc, l'utilisation de ces
enquêtes préliminaires.
Aussi, M. le Président, comme le député d'Anjou le
mentionnait, il y a toutes ces ententes que nous faisons avec les
municipalités pour l'application de la partie XXVII, c'est-à-dire
les poursuites sommaires, et, là aussi, ça va contribuer
grandement à rendre la justice plus humaine au niveau des cours
municipales et à alléger considérablement le processus
devant les cours formelles de justice, tout ça dans le même souci
de rendre la justice accessible et plus humaine.
Donc, M. le Président, je remercie la commission pour son travail
sur un sujet qui n'était pas facile et je remercie le
député d'Anjou pour sa collaboration.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de
la Justice.
Mise aux voix
Le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de
loi 88, Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur
général, est-il adopté?
M. Bélanger (Anjou): Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
ministre de la Justice.
M. Rémillard: M. le Président, je vous demande
d'appeler l'article 17 de notre feuilleton.
Projet de loi 93
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 17,
l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission
des institutions sur le projet de loi 93, Loi modifiant le Code de
procédure civile et la Charte des droits et libertés de la
personne.
Y a-t-il des interventions sur ce rapport?
M. le ministre de la Justice.
M. Gil Rémillard
M. Rémillard: Oui, M. le Président. Le projet de
loi 93 intitulé Loi modifiant le Code de procédure civile et la
Charte des droits et libertés de la personne et dont l'étude en
commission des institutions a été complétée le 8
juin dernier propose diverses modifications en matière de
procédure civile.
Ce projet de loi propose d'abord de modifier la règle actuelle
concernant le huis clos en matière familiale afin de permettre la
présence des journalistes lors des audiences à moins que le
tribunal ne juge que leur présence cause un préjudice à
une personne dont les intérêts peuvent être touchés
par instance.
M. le Président, cette nouvelle orientation devrait permettre
d'assurer la publicité nécessaire du débat judiciaire tout
en préservant le caractère général du huis clos en
matière familiale, et ce, dans le respect du droit à la
liberté d'expression prévu à l'article 2b de la Charte
canadienne des droits.
Je tiens toutefois à rappeler, M. le Président, que ce
projet de loi n'a pas pour effet d'écarter la règle de l'article
815.4 du Code de procédure civile qui prescrit l'anonymat des parties et
des enfants concernés par les demandes en matière familiale.
Cette règle est maintenue, est maintenue fermement.
M. le Président, en effet, puisqu'une telle ouverture au principe
du huis clos ne devait pas se faire au détriment du droit à la
vie privée, il était essentiel de maintenir intactes, même
à l'égard des journalistes, les règles spécifiques
interdisant la publication et la diffusion d'informations permettant
d'identifier une partie ou un enfant dont l'intérêt est en jeu
dans une instance en matière familiale.
M. le Président, ce projet de loi propose, en deuxième
lieu, de modifier le Code de procédure civile en vue d'améliorer
l'administration de la justice en ce qui a trait au délai dans lequel un
jugement doit être rendu. À cette fin, ce projet de loi consacre
le principe général suivant lequel un
délibéré ne pourra excéder 6 mois tout en
réservant la possibilité que ce délai puisse être
prolongé.
M. le Président, suivant un amendement qui a été
adopté lors de l'étude détaillée de ce projet de
loi en commission des institutions, le pouvoir de prolonger le délai de
6 mois pourra être exercé non seulement par le juge en chef, mais
également à sa demande par le juge en chef associé
personnellement. En outre, le juge en chef ou le juge en chef associé
aura, avant de prolonger le délai de 6 mois ou de dessaisir le juge qui
a fait défaut de rendre jugement dans les délais requis, à
tenir compte des circonstances et de l'intérêt des parties.
M. le Président, l'objectif que nous avons dans ce projet de loi
en ce qui regarde ces dispositions d'un
délai de 6 mois est en fonction de l'intérêt des
parties. C'est donc cet objectif qui doit nous guider et guider d'une
façon toute particulière le juge en chef et le juge en chef
associé qui doivent prendre la décision s'ils demandent que le
juge, qui a maintenant dépassé les 6 mois, puisse continuer ou
bien s'il doit être dessaisi de ce dossier pour que le dossier soit
confié à un autre juge. C'est donc l'intérêt des
parties qui est la première référence, M. le
Président, qui doit nous guider et guider le juge.
Par ailleurs, c'est au juge appelé à continuer une affaire
qui lui sera confiée ou à entendre une cause remise au rôle
qu'il reviendra de disposer des dépens en tenant compte des
circonstances, y compris les dépens, dans un tel cas, lorsque le juge
s'en tiendra à la traduction des notes sténographiques avec le
consentement des parties. Le gouvernement assumera les frais de traduction de
ces notes, à moins que le juge ne l'ordonne autrement, tel lorsque le
recours lui apparaîtra manifestement mal fondé, frivole ou abusif.
Cette mesure devrait permettre, M. le Président, de minimiser les
inconvénients causés aux parties en raison de la remise au
rôle de leur cause.
Les autres modifications concernent la juridiction de la Cour d'appel et
la procédure devant cette Cour. La plupart des modifications
proposées dans le projet de loi 93 s'inscrivent dans les suites du
Sommet de la justice et reprennent les suggestions du groupe de travail
tripartite ? ministère de la Justice, Barreau et magistrature
? portant sur l'encombrement des rôles de la Cour d'appel. (12
heures)
En premier lieu, M. le Président, le projet de loi propose de
porter de 10 000 $ à 15 000 $ le seuil pécuniaire de l'appel de
plein droit, ce qui correspond à l'indexation de ce seuil depuis 1982.
De plus, certains appels qui sont actuellement de plein droit deviendront des
appels sur permission. C'est le cas des jugements rendus à
l'égard des requêtes en annulation d'une saisie avant jugement et
des jugements rendus en matière non contentieuse. Cependant, M. le
Président, certains jugements en matière non contentieuse
continueront de faire l'objet d'un appel de plein droit. Ce sont ceux ayant
trait à l'état et à la capacité des personnes
comme, par exemple, les jugements rendus en matière de tutelle ou de
régime de protection du majeur. Cette exception demeurerait afin de
tenir compte des situations d'urgence qui sont souvent liées à ce
type de recours et qui ont trait à l'intégrité de la
personne, à la dignité de la personne.
Par ailleurs, le projet de loi contient des mesures visant à
accélérer le déroulement de l'instance et à inciter
les parties à mieux se préparer pour l'audition devant la cour.
Ainsi, M. le Président, le code fera désormais obligation
à l'appelant ou à son procureur de produire au greffe, dans un
délai déterminé, une attestation certifiant qu'il a
mandaté un sténographe de traduire les notes
sténographiques. Et cette mesure devrait avoir pour effet
d'accélérer la mise en état de la cause.
Une autre mesure importante, M. le Président, visant à
éliminer les appels dilatoires ou les appels frivoles, est
proposée au niveau de la formation de l'appel. En effet, M. le
Président, l'énoncé sommaire actuel des moyens que
l'appelant prévoit utiliser sera remplacé par un
énoncé détaillé qui devra mieux cerner les motifs
d'appel.
En matière de délais, le projet de loi propose de porter
celui de production du mémoire de l'appelant à 120 jours, afin de
procurer à ce dernier le temps nécessaire pour obtenir la
traduction des notes sténographiques et pour rédiger son
mémoire. Toutefois, le projet de loi prévoit un mécanisme
devant assurer le respect de ce délai. Ainsi, si l'appelant ne
produisait pas son mémoire dans le délai, l'intimé pourra
le sommer de le produire dans un délai additionnel de 30 jours, ou
d'adresser une requête à un juge de la Cour d'appel pour en faire
prolonger le délai. À l'expiration de ce délai
additionnel, l'appel pourra être déclaré
déserté avec dépens. De plus, le projet de loi adapte
à l'intimé des nouvelles règles régissant la
production du mémoire.
M. le Président, enfin, ce projet de loi apporte une modification
importante en ce qui concerne l'exécution provisoire. Ainsi, il y a
aura, désormais, exécution provisoire automatique du jugement de
première instance, malgré l'appel, dans certaines
matières, comme par exemple, en matière de pension alimentaire,
de garde d'enfant ou de réparation urgente.
Cependant, le tribunal conservera la discrétion, M. le
Président, de suspendre l'exécution provisoire. Pour les autres
cas, le projet de loi propose de maintenir l'exécution provisoire sur
ordonnance du tribunal, s'il y a urgence exceptionnelle, tout en
étendant cette règle lorsque des raisons spéciales sont
invoquées. Les nouvelles règles en matière
d'exécution provisoire visent à éviter les appels
dilatoires, des appels qui ne servaient qu'à retarder l'application du
jugement de première instance.
Je voudrais signaler que divers amendements ont été
apportés lors de l'étude détaillée du projet de
loi, donc, en commission parlementaire. La plupart sont d'ordre technique, et
ces amendements visent à bonifier le projet de loi. M. le
Président, permettez-moi d'en signaler 2 d'une façon toute
particulière. Le premier amendement apporté à l'article 13
du projet de loi a pour effet de permettre au tribunal, sur demande, de
subordonner l'exécution provisoire à la constitution d'une
caution, non seulement lorsque c'est le tribunal qui ordonne l'exécution
provisoire, mais également dans les cas où l'exécution
provisoire a lieu par l'effet de la loi.
Et le deuxième amendement, M. le Président, introduit une
disposition transitoire qui préserve le droit d'appel de plein droit,
quant aux causes pendantes dont le jugement a été rendu avant
l'entrée en vigueur du projet de loi, mais dont les délais
d'appel ne sont pas expirés. Et cet amendement reprend une règle
similaire adoptée en 1982, lors de l'augmentation du seuil
pécuniaire d'appel de plein droit devant la Cour d'appel.
En terminant, M. le Président, je voudrais souligner que le
projet de loi 93 a fait l'objet d'une large consultation auprès des
intervenants concernés. Je remercie les membres de la commission des
institutions pour leur précieuse collaboration, lors de l'étude
détaillée du projet de loi 93, dont les amendements
apportés en commission ont permis d'en bonifier le contenu. Je remercie,
M. le Président, les juges en chef des Cours du Québec, sous la
direction du juge en chef de la Cour d'appel et juge en chef, par le fait
même, du Québec, le très honorable Claude Bisson. Je les
remercie pour leur collaboration, pour que ce projet de loi puisse les aider
à ce que la justice puisse se faire de la façon la plus
accessible possible et dans les meilleurs conditions possibles.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de
la Justice.
Un simple rappel aux membres de cette Assemblée que nous en
sommes à la prise en considération du rapport de la commission
des institutions sur le projet de loi 93. Et je cède la parole à
M. le député d'Anjou.
M. Pierre Bélanger
M. Bélanger (Anjou): Je vous remercie, M. le
Président.
Encore là, je pense que ça a été un projet
de loi qui a donné lieu à des débats très
intéressants parce qu'il touchait plusieurs aspects de notre Code de
procédure civile sur des questions délicates, sur des questions
qui avaient fait l'objet, récemment, d'inquiétudes de la part de
certaines personnes.
Premièrement, la question du huis clos. Évidemment, quand
on a déposé ce projet de loi, il y avait eu quelques
réactions de la part de regroupements ou de gens
préoccupés, justement, par la protection de la vie privée
des gens. En particulier, le Protecteur du citoyen avait fait part, dans une
lettre du 19 mai, de certaines préoccupations qu'il avait. En effet, il
ne voulait pas maintenant, du fait qu'on admette les journalistes lors
d'audition de causes matrimoniales en matière familiale, que ça
résulte finalement à faire en sorte que le huis clos ne
s'applique pas. Alors, il voulait... le Protecteur du citoyen voulait que cette
ouverture soit encadrée d'une façon stricte.
C'a donné lieu à un débat intéressant, et on
a pu constater que les dispositions qui prévalent actuellement dans le
Code de procédure civile font en sorte que l'information qui peut sortir
d'une telle audition est protégée considérablement et
suffisamment pour faire en sorte que le huis clos continue à
s'appliquer.
Comme je l'ai mentionné lors d'une intervention
précédente, j'ai pu vivre, moi, la situation avant que le huis
clos ne soit imposé pour les causes en matière matrimoniale, et
je dois dire dans certains cas, dans certaines cours, c'était rendu
quasiment du vaudeville. On voyait M. Untel ou Mme Unetelle, de telle rue, qui,
tous les lundis, venait assister aux divorces de sa municipalité, pour
connaître pourquoi monsieur voulait se séparer de madame. Et puis,
c'en était rendu tout simplement du vrai vaudeville, M. le
Président. Donc, cette disposition de huis clos est une disposition que
tous et chacun considèrent maintenant essentielle pour faire en sorte
que nos cours de justice ne servent pas, finalement, à une espèce
de parodie de la justice.
La deuxième disposition qui, je pense, était attendue
depuis longtemps, quand même, c'était le fait de pouvoir
contrôler le retard que prenaient certains juges, il faut le dire, une
infime minorité. Quand on a vu les tableaux qui nous ont
été présentés par le ministre de la Justice,
ça touche en tout, M. le Président, même pas 100 causes
où il y avait des retards de plus de 6 mois entre la prise du
délibéré et le moment du jugement.
Donc, M. le Président, il y avait un problème, il y avait
un malaise relativement à ce que certains juges prennent beaucoup de
temps pour rendre jugement. Donc, il y avait lieu de se demander quelle
était la mesure appropriée, justement, qu'on pouvait adopter pour
régler cette situation.
Ma première réflexion, quand on m'avait fait part du
problème, c'était de voir ça comme un problème
déontologique. J'étais assez réticent à faire en
sorte qu'on impose de par une loi un délai maximum pour un juge de
rendre jugement. Ça m'indisposait un peu, et j'en ai fait part au
ministre de la Justice qui, à ce moment-là, a fait
témoigner un expert en droit constitutionnel. Finalement, on s'est rendu
compte qu'il était difficile, au niveau constitutionnel, de donner plus
de pouvoir au juge en chef pour justement discipliner ses juges, car, à
ce moment-là, on pourrait dire qu'il y a entrave au bon fonctionnement
des cours de justice. Quant à moi, c'était un peu la formule que
je privilégiais.
Alors, finalement, on s'est rendu compte que cette disposition, qui
prévoit un délai maximal de 6 mois, était la seule
applicable dans les limites et dans les contraintes constitutionnelles que nous
avons. Cependant, en procédant à l'étude de cette
disposition, il y a une préoccupation, je pense, qui nous a
frappés là-dedans, c'est le droit des parties. Finalement, les
parties ne sont nullement responsables du fait qu'un juge prenne plus de temps
pour rendre jugement.
Donc, pour nous, ce qui était fondamental, et je pense que le
ministre partage tout à fait cette préoccupation, c'était
que les parties ne subissent aucun préjudice financier dû au
retard d'un juge et dû au fait que leur dossier, finalement, soit
transféré à un autre juge pour une nouvelle audition, ou
encore qu'un second juge rende jugement sur la foi des notes stenographiques
seulement. Car on sait ce que ça coûte, un deuxième
procès, il faut payer en double nos avocats. Les notes
sténographiques, ça peut représenter jusqu'à 1000 $
ou plus par jour d'audition, si on procède à la retranscription
des notes sténographiques. Donc, tout ça, ça nous
préoccupait. (12 h 10)
Finalement, le ministre est arrivé avec un amende-
ment intéressant qui, suite à notre suggestion...
C'est-à-dire que pour nous il était essentiel, avant que le juge
prenne sa décision de dessaisir un juge du dossier, que les parties
soient avisées, que les parties soient convoquées afin que leur
intérêt soit pris en cause. Et justement, maintenant, l'article a
été modifié et il prévoit qu'avant de prolonger un
délai ou de dessaisir le juge qui a fait défaut de rendre
jugement dans les délais requis le juge en chef doit tenir compte des
circonstances et de l'intérêt des parties.
Je pense que cet amendement, cette disposition va faire en sorte que,
justement, les droits des parties soient respectés. Parce qu'on peut
facilement imaginer le cas où une partie désire tout simplement
que le délai du premier juge soit prolongé si cette
partie-là n'est pas en mesure d'assumer aucuns frais
supplémentaires. À ce moment-là, elle peut décider:
oui, pour moi, 1 mois ou 2 avant que le jugement ne soit rendu, pour moi, ce
n'est pas un drame. Je préfère que le premier juge reste saisi du
dossier.
Alors, c'est important qu'on sente qu'il y ait cette obligation que les
parties aient le droit d'être entendues, et je pense que ça s'est
reflété dans l'amendement. Une autre chose, aussi. L'article, tel
que présenté originalement, prévoyait que ça
prenait des circonstances exceptionnelles avant que le juge ne prolonge le
délai de 6 mois. On a tout simplement changé cette disposition
pour la rendre moins exorbitante. Maintenant, le juge en chef a une plus grande
latitude pour, justement, prolonger le délai pour rendre jugement.
Alors, je pense que cette disposition répond à nos
préoccupations. Elle devrait régler le problème, je le
crois. On doit faire, je pense, confiance à notre système de
justice, à nos juges en chef et aussi à nos juges qui oeuvrent
dans l'intérêt de la justice, et nous sommes confiants qu'ils
pourront s'autodiscipliner avec ces mesures parce que je pense que ça
porte un discrédit vraiment assez considérable à toute
l'administration de la justice quand on voit, comme on a vu, il y a quelques
mois, le nom de juges dans les journaux, disant que tel juge prend tant
d'années à rendre jugement, que tel juge prend tant de mois
à rendre jugement. Je pense que ce n'est vraiment pas une façon
acceptable, dans notre système de justice, de voir ainsi nos magistrats
discrédités de la sorte pour quelques ? il faut le dire,
quelques seulement ? juges qui étaient récalcitrants ou
retardataires.
Je pense que c'était tout à fait inacceptable, et on se
devait de réagir aussi parce qu'on a vu plus d'une fois, M. le
Président, des personnes, des parties obtenir jugement après 2
ans, 3 ans, 4 ans même d'attente. Et ce jugement, une fois rendu
après un tel délai, est tout à fait artificiel, illusoire.
La personne ne peut même plus, souvent, l'appliquer puisque la personne,
la défenderesse est des fois décédée, a fait
faillite. Alors, on peut comprendre le tort considérable subi, à
ce moment-là, par les personnes à cause de cette situation.
Le deuxième point, le ministre en a fait part, on a
modifié d'une façon assez substantielle le processus d'aller en
appel. Je pense, encore là, que ça s'imposait puisque certains
bureaux d'avocats, certains plaideurs ? encore là, il ne faut pas
généraliser et dire que c'est vraiment
généralisé ? mais certains, il faut le dire,
profitaient des moyens d'appel pour finalement être un genre d'outil de
négociation dans les procès. On allait en appel sachant tout
à fait qu'on n'irait pas en appel, qu'on se retirerait, qu'on se
désisterait de notre appel, tout simplement pour mettre une pression,
pour négocier suite à l'obtention d'un jugement
défavorable.
Alors, je pense qu'avec les dispostions qu'on a maintenant mises en
place par ce projet de loi le processus d'appel va être simplifié
quant au délai qui passe de 75 à 120 jours pour pouvoir
déposer le mémoire, mais, d'un autre côté, avec
l'énoncé détaillé, la partie qui désire
aller en appel devra énoncer d'une façon claire tous les moyens
qu'elle veut invoquer pour aller en appel. Il n'y aura plus de surprises,
finalement, et ça démontrera, en même temps, que cet appel
est sérieux. Donc, d'une façon beaucoup plus évidente,
beaucoup plus facile, la partie intimée pourra faire rejeter un appel
qu'elle jugera dilatoire ou abusif.
Alors, ça, je pense que c'est tout à fait
intéressant et que ça s'imposait, une telle disposition,
c'est-à-dire ne pas brimer le droit d'appeler, mais, d'un autre
côté protéger les parties contre des appels abusifs.
La dernière disposition qui a fait l'objet de ce projet de loi,
c'est le fait qu'on étende le nombre de jugements qui feront maintenant
l'objet d'une exécution provisoire. Encore là, c'est tout
à fait souhaitable et acceptable. Le Protecteur du citoyen avait
réagi demandant à ce qu'on étende la disposition qui
prévoit qu'on puisse exiger une caution de la part d'une partie qui
exécute provisoirement un jugement s'il peut y avoir un préjudice
de subi. Alors, on a eu un amendement en ce sens-là qui répondait
à cette préoccupation du Protecteur du citoyen et qui nous a
pleinement satisfaits.
Encore là, je dois le dire, les débats et les
échanges qui ont eu lieu lors de cette commission ont été
constructifs. Je pense que tous les membres de cette commission ? autant
l'Opposition que le gouvernement ? voulaient faire en sorte que ces
dispositions, finalement, facilitent l'administration de la justice. Et je ne
peux m'empêcher, M. le Président, de me poser des questions,
à savoir: Comment se fait-il que, lors de ces commissions, lors de ces
projets de loi, justement, les débats sont si constructifs? Le ministre,
d'une façon systématique, fait preuve d'une très grande
rigueur dans l'examen des principes de droit qui doivent être
appliqués, des règles de justice naturelle qui doivent
s'appliquer, et, pourtant, quand on arrive relativement à d'autres
projets de loi, à d'autres dispositions comme le principe de la
non-rétroactivité des lois, le ministre, en tant que
jurisconsulte et président du Comité de législation, ne
semble plus faire preuve de toute cette rigueur. Où sont les principes
qui, pourtant, nous sont chers lors de l'étude des projets de loi en
commission? Et on a des échanges ? tout le monde, je pense, va
l'admettre ? intéressants, que ce sont les principes de droit
qui
doivent gouverner l'appareil législatif du Québec. Comment
se fait-il, M. le Président, que, quand on parle de
non-rétroactivité des lois, les principes semblent
oubliés? Et ce n'est pas uniquement relativement à ce projet de
loi. Il y a aussi toute la question du projet de loi 91, où, maintenant,
on crée une présomption de réception d'un avis qui suspend
le permis de conduire. Encore là, c'est la présomption
d'innocence qui est mise en cause par cette disposition.
M. le Président, je ne comprends pas. Le ministre de la Justice
est président du Comité de législation. Comment peut-il
laisser passer de tels projets de loi, qui violent d'une façon flagrante
nos principes fondamentaux de droit? Je ne le comprends pas, M. le
Président. Tous les projets de loi passent par le Comité de
législation. Il en est le président. Il peut les bloquer et il
doit faire en sorte que tous les projets de loi de ce gouvernement ? ou de
n'importe quel gouvernement, finalement ? reflètent une certaine
homogénéité, un certain respect des principes de justice
naturelle. Comment se fait-il que le ministre qui, comme je le dis, lors de
l'étude de nos projets de loi, fait preuve d'une telle rigueur dans ses
principes ? et je le souligne ? comment se fait-il que, quand il
porte le chapeau de jurisconsulte et de président du Comité de
législation, il laisse passer de tels projets de loi comme le dernier
budget, comme, justement, le projet de loi 91, comme le projet de loi 55, qui a
été adopté en juin dernier suite, finalement, à la
demande du ministre des Affaires municipales, le ministre Ryan. Ça a
été décrié par le Barreau. Le Barreau l'a
condamnée, cette façon de procéder. C'est
inacceptable.
Je peux comprendre que, dans des circonstances tout à fait
exceptionnelles, on puisse avoir recours à un mode de législation
par rétroactivité. Cependant, les règles
élémentaires de justice naturelle font en sorte qu'on se doit de
faire en sorte que les tiers ne subissent aucun préjudice suite à
cette rétroactivité, et ce n'est pas le cas dans toutes les
dispositions que je vous ai mentionnées: le projet de loi 55 et le
dernier budget de ce gouvernement.
Et je pense qu'on doit, en tant que parlementaires... Et, moi, en tant
que porte-parole de la Justice, ça m'inquiète de voir cette
nonchalance. Je ne parle pas de mauvaise foi, M. le Président. Je ne
peux pas parler de mauvaise foi. Je connais le ministre pour avoir, avec lui,
étudié plusieurs projets de loi. Je sais qu'il tient à ces
principes de droit. Mais pourquoi ? en tant que président du
Comité de législation, en tant que jurisconsulte du gouvernement
du Québec ? ne dit-il pas à ses collègues qu'il y a
certains principes fondamentaux qu'on se doit de respecter, qu'on ne peut pas
être nonchalant, qu'on ne peut pas ignorer, sous peine de
discréditer, finalement, tout l'ensemble de l'appareil
législatif, pour faire en sorte que les gens se disent: Si notre
gouvernement ne respecte pas ses propres principes de droit fondamentaux,
pourquoi, moi, en tant que citoyen, devrais-je respecter mes droits, mes lois?
(12 h 20)
C'est tout ça qui est en cause. C'est pour ça que c'est
tellement important. C'est pourquoi le Barreau, qui, normalement... Maintenant,
on a un nouvau Bâtonnier, Me Paradis. On se doit, d'ailleurs, de le
souligner. J'espère ? je suis persuadé, d'ailleurs ?
qu'il fera un très bon travail. On voit, d'ailleurs, qu'il est
très actif dans ses dossiers et qu'il va rappeler à l'ordre ce
gouvernement quand celui-ci s'écartera du bon chemin. Je me dois de le
souligner, M. le Président. D'ailleurs, je dis au nouveau
bâtonnier qu'il aura toute ma collaboration pour qu'on puisse travailler
ensemble, justement, pour faire une critique constructive du ministère
de la Justice et de ce gouvernement.
Alors, M. le Président, c'est pourquoi, depuis 2 ou 3 semaines,
l'Opposition talonne le ministre de la Justice et le Procureur
général du Québec qui est jurisconsulte sur ces questions
qui sont, pour nous, fondamentales. Évidemment, c'est difficile en
période de questions de bien faire comprendre aux citoyens ce qui est en
jeu ici, mais je pense qu'on doit le dire, on doit le souligner: des principes
fondamentaux sont en jeu, et le ministre, en tant que président du
Comité de législation, doit réagir. Il ne peut plus
laisser passer de tels projets de loi entre ses mains. Il a les pouvoirs de les
bloquer et il doit les bloquer.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le ministre de
la Justice.
M. Rémillard: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): En vertu du
règlement, pour un maximum de 5 minutes.
M. Gil Rémillard
M. Rémillard: Oui. Alors, M. le Président, le
député d'Anjou vient de faire des commentaires sur un sujet que
nous avons discuté en commission parlementaire, sur la question de la
rétroactivité des lois.
Je veux simplement dire, M. le Président, que, comme
président du Comité de législation qui voit à tous
les projets de loi, comme membre du gouvernement, j'ai à faire valoir
mes opinions comme ministre de la Justice et comme président du
Comité de législation, et des opinions, M. le Président,
qui sont conformes à ce que je pense. Je pense comme juriste, comme
citoyen. Je crois que nous vivons dans une société de
démocratie, de liberté et, par conséquent, les droits et
les libertés fondamentales doivent être un des
éléments les plus importants de référence pour nous
lorsque nous avons à étudier un projet de loi.
La même chose, M. le Président, en ce qui regarde des
droits qui sont acquis par des citoyens. On ne peut pas se servir de la
souveraineté de cette Assemblée législative pour en
abuser, mais bien dans l'intérêt public. M. le Président,
j'ai fait une relation, ce matin, dans ma réponse en ce qui regarde les
droits et les
libertés fondamentales, à l'utilisation de ce qu'on
appelle la clause dérogatoire ou «nonobstant».
C'est-à-dire lorsque nous en arrivons à la conclusion que
l'intérêt public commande que nous puissions limiter, sous
certains aspects, l'application de certains droits, on en arrive à la
conclusion qu'on utilise cette clause dérogatoire. Pour ma part, je ne
l'aime pas, M. le Président, cette clause. Je l'ai dit. Je l'ai toujours
dit depuis qu'on l'a mise dans la Constitution, en 1982. J'étais contre.
Je n'aime pas cette clause-là. Quand il faut l'appliquer, à ce
moment-là, on regarde ce qu'on doit faire.
Mais, en ce qui regarde la rétroactivité des lois, M. le
Président, je me dis: Attention! Il faut qu'on comprenne bien le sens de
la rétroactivité d'une loi. Le député de
Lévis, M. le Président, qui s'est levé pour me poser une
question pendant la période des questions, alors qu'il a
été le père de la Loi sur la protection du territoire
agricole... Or, s'il y a une loi qui a touché, qui a fait mal dans son
aspect rétroactif, c'est bien cette loi-là, et je dois dire, M.
le Président, que je le comprends d'avoir mis un effet rétroactif
dans cette loi sur le territoire agricole. Pourquoi? Parce que si on n'avait
pas eu cet effet rétroactif, eh bien, on peut penser qu'il y aurait eu
de la spéculation. Et pour éviter la spéculation, au nom
de l'intérêt public, il a dit: Très bien, la loi s'applique
du moment de son dépôt. Il y avait des gens, M. le
Président, qui attendaient pour vendre leur ferme et c'était pour
eux ce qu'ils voulaient laisser à leurs enfants, et qui attendaient
parce qu'ils voyaient qu'ils pouvaient avoir de meilleurs prix. Plus le temps
avançait, plus ils croyaient qu'ils pourraient avoir de meilleurs prix
parce que ça se développait tout autour. Et, tout à coup,
paf! le projet de loi est déposé et, à partir de son
dépôt, peu importent les débats parlementaires, on en
arrive à la conclusion que dès que le dépôt de la
loi s'applique, la loi va s'appliquer.
C'est un effet rétroactif, M. le Président,
extrêmement sévère, extrêmement sévère
parce qu'il touche au coeur même de l'institution parlementaire parce
qu'il présume des débats qu'il doit y avoir en cette Chambre. Je
dois dire, M. le Président, que dans le cas de cette Loi sur la
protection du territoire agricole, je crois qu'on peut dire que
l'intérêt public, dans de telles circonstances, faisait en sorte
qu'il fallait procéder de cette façon.
Alors, ce que je veux dire, M. le Président... Je l'ai dit au
député d'Anjou: Attention! Oui, respectons les principes de
droit. Oui, soyons.capables de dégager l'intérêt public et,
dans ce cas-là, M. le Président, regardons chaque cas. Chaque cas
est un cas d'espèce.
C'est dans ce contexte, M. le Président, que je reçois les
commentaires du Barreau, de son bâtonnier, Me Paradis, qui est le nouveau
bâtonnier, et c'est dans ce contexte que je veux faire mon travail comme
ministre de la Justice et comme président du Comité de
législation.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
ministre.
Mise aux voix
Le rapport de la commission des institutions portant sur le projet 93,
Loi modifiant le Code de procédure civile et la Charte des droits et
libertés de la personne, est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je
vous demanderais d'appeler l'article 18 de notre feuilleton.
Projet de loi 94
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 18,
l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission
des institutions sur le projet de loi 94, Loi modifiant la Loi sur les
tribunaux judiciaires.
Est-ce qu'il y a des interventions sur ce rapport? M. le ministre de la
Justice.
M. Gil Rémillard
M. Rémillard: Oui, M. le Président.
Le projet de loi 94 propose une modification à l'article 224 de
la Loi sur les tribunaux judiciaires visant à octroyer au gouvernement
le pouvoir d'établir, par règlement, des frais judiciaires et des
droits de greffe en matière civile qui pourront être
différents, selon qu'ils seront exigibles d'une personne physique ou
d'une personne morale, c'est-à-dire d'une compagnie.
Vous vous souviendrez, M. le Président, qu'une telle approche a
été adoptée dans le cadre de la Loi modifiant le Code de
procédure civile concernant le recouvrement des petites créances,
loi que nous avons adoptée en décembre dernier.
L'adoption d'une telle tarification différente entre les
personnes physiques et les personnes morales permettra, M. le Président,
d'assurer un plus grand équilibre entre ces personnes. Notamment, en
regard de leurs moyens d'exercer les recours judiciaires et d'adopter une
tarification tenant compte de cette réalité. Nous croyons que les
compagnies ont plus de moyens, tant sur le plan administratif que très
souvent sur le plan financier, pour assumer ces coûts de justice.
Je tiens à remercier, M. le Président, les membres de la
commission des institutions pour leur collaboration lors de l'étude
détaillée de ce projet de loi 94 dont nous procédons
aujourd'hui à la prise en considération du rapport.
M. le Président, j'ai eu l'occasion, lors de mon discours au
Barreau, que je mentionnais tout à l'heure,
vendredi dernier, de mentionner cette loi sur les petites
créances que nous avons modifiée pour que le seuil
d'admissibilité passe à 3000 $; il était auparavant
à 1000 $. Donc, c'est-à-dire que ceux qui ont des créances
de 3000 $ et moins peuvent s'adresser aux petites créances. Je crois, M.
le Président, qu'éventuellement ça devrait monter à
5000 $.
Nous avons aussi modifié la loi pour que les petites compagnies
de 5 employés et moins puissent avoir accès aussi aux petites
créances. Je pense aux petits dépanneurs qui s'étaient
incorporés, je pense aux garagistes, je pense aux nettoyeurs, je pense
à tous ces commerces; et on sait à quel point il y en a, de ces
petits commerces, M. le Président, partout au Québec, où
les gens se sont incorporés pour administrer leur commerce. C'est donc
une compagnie qui est propriétaire. Il n'y avait pas possibilité,
donc, pour ces commerçants incorporés, donc, une compagnie,
d'avoir accès aux petites créances. Maintenant, avec la nouvelle
loi, ils peuvent le faire.
En plus, M. le Président, nous avons instauré à la
grandeur du Québec, partout sur le territoire du Québec, la
médiation en ce qui regarde ces petites créances. Ce qui
signifie, M. le Président, qu'avant d'aller devant le juge il sera
possible à ceux qui s'adressent aux petites créances de pouvoir
se référer à un médiateur pour régler leur
cas avant d'aller devant le juge. On a procédé à une
opération-pilote dans 5 villes, M. le Président, dont ici,
à Québec, et on s'est aperçu que lorsque la
médiation était choisie, on avait un taux de réussite de
règlement de près de 85 %. (12 h 30)
Et à mon sens, la médiation, la conciliation, l'arbitrage
sont les voies de l'avenir pour l'administration de la justice. J'envisage, M.
le Président, dès l'automne prochain, de présenter un
projet de loi où il pourra y avoir médiation dans toutes les
cours de justice: Cour du Québec, Cour supérieure, Cour d'appel
même, où les parties pourront avoir recours à un
médiateur avant de s'adresser au juge. M. le Président, je suis
convaincu qu'on va pouvoir, avec un tel système, rendre la justice plus
accessible et encore plus humaine.
Alors, M. le Président, c'est ce que nous avons fait pour les
petites créances. Et ce que nous disons, nous disons que ceux qui seront
médiateurs seront des avocats et des notaires de la pratique
privée. M. le Président, vous me permettrez de dire que ce n'est
pas parce que nous n'avons pas confiance aux avocats et aux notaires
fonctionnaires que nous avons dans notre système public. Bien au
contraire, M. le Président, j'ai pu le constater comme ministre de la
Justice. Je suis ministre de la Justice depuis presque 5 ans ? une
question de jours, M. le Président ? et j'ai pu constater la
très grande compétence de nos fonctionnaires. J'ai pu le
constater en faisant le Code civil, j'ai pu le constater en faisant tous les
projets de loi que nous avons faits ensemble dans cette Chambre, M. le
Président, et j'ai pu le constater à tous les niveaux de
l'administration de la justice, avec beaucoup de fierté, comme ministre
de la
Justice. J'ai pu vérifier cette compétence de nos avocats,
de nos notaires qui travaillent pour l'État.
M. le Président, la décision que j'ai prise de nous
référer à des avocats et des notaires de la pratique
privée se réfère essentiellement à cet objectif que
nous partageons au niveau du gouvernement d'alléger l'appareil de
l'État. Et si nous pouvons faire exercer ce service, offrir ce service
en ayant recours au secteur privé, M. le Président, pourquoi on
ne le ferait pas? Pourquoi on ne le ferait pas? On sauve des coûts. C'est
évident, M. le Président, les chiffres sont là, et
ça nous coûte en moyenne un tiers de moins. Ça ne veut pas
dire que c'est dans tous les cas la même chose. Ça ne veut pas
dire qu'à chaque fois qu'on prend le système privé
ça nous coûte moins cher. Ce n'est pas ça que je dis,
absolument pas. Et dans certains aspects de l'administration de la justice, le
secteur public, les avocats et notaires fonctionnaires doivent continuer leur
travail, et même l'intensifier, le développer. Mais en ce qui
regarde cette médiation au niveau des petites créances, M. le
Président, en nous référant au secteur privé, je
crois que nous rendons service à l'administration de la Justice.
D'ailleurs, c'est la même philosophie que nous allons retrouver
dans l'administration de la loi sur la médiation familiale. J'ai eu
l'occasion aussi, M. le Président, de parler de cette loi dans mon
discours aux membres du Barreau, de leur dire à quel point j'ai
confiance que ce projet de loi sur la médiation familiale, qui,
dès que la procédure est déposée, M. le
Président, en cours de divorce ou de séparation, permet au juge
de demander qu'il y ait médiation, va rendre la justice tellement plus
humaine et plus accessible. Pensons, M. le Président, à des cas
de séparation, en ce qui regarde la séparation du patrimoine
familial. Ce n'est pas facile. Avec un médiateur, ça va se
passer, j'en suis convaincu, beaucoup mieux. Pensons, M. le Président,
à la garde des enfants. C'est souvent tellement pénible;
pénible pour les enfants, pénible pour les parents d'être
dans le système judiciaire et décider qui aura la garde des
enfants: Est-ce que tu veux aller avec papa ou tu veux aller avec maman? J'ai
vu, moi, poser cette question-là en pleine cour, M. le Président,
et je disais: Mais ça n'a pas de bon sens. Ça n'a pas de bon sens
pour les parents, comme ça n'a pas de bon sens pour les enfants,
même pas devant le juge, même si c'est le juge en Chambre. Il faut
qu'on puisse régler ça d'une façon beaucoup plus humaine,
et la médiation va le permettre, M. le Président.
Pensons aux pensions alimentaires aussi. J'en parlais avec des avocats
et des avocates qui pratiquent le droit familial, en fin de semaine, pendant ce
congrès du Barreau, et ils me parlaient du problème des pensions
alimentaires, que les pensions alimentaires puissent être payées.
Il y a 55 % des pensions alimentaires où il faut intervenir pour
qu'elles soient payées, et ça me préoccupe. Ça me
préoccupe comme ministre de la Justice, j'ai déjà eu
l'occasion de le mentionner publiquement à plusieurs reprises, parce
qu'il y a toute une chaîne
d'effets dans la mesure où la pension alimentaire n'est pas
payée, en ce qui regarde la pauvreté de la famille monoparentale
et les conséquences chez les enfants, les enfants qui abandonnent
l'école, les enfants qui se retrouvent dans la rue, la
délinquance, la criminalité. Alors, M. le Président,
ça me préoccupe comme ministre de la Justice, mais je me dis que,
si la pension alimentaire peut être déterminée avec l'aide
d'un médiateur, on a beaucoup plus de chances que la pension alimentaire
soit vue comme une responsabilité et non pas comme une
pénalité. Dans la mesure, M. le Président, où, dans
toutes ces conditions de séparation, de divorce, une partie voit qu'elle
est pénalisée parce que le juge vient de décider: voici ce
que vous aurez à payer, voici comment ça va se passer, la
séparation, elle a l'impression, souvent, que, oh! elle s'est fait
avoir, on lui a imposé le jugement, et elle est moins portée, si
vous voulez, à voir ces dispositions d'une séparation d'une vie
en commun comme la responsabilité qu'elle doit assumer. Et c'est
là que le rôle du médiateur va pouvoir s'exercer. C'est
là que le médiateur, avec tout ce que ça comprend, M. le
Président, le travail de médiateur... Parce que là aussi
j'ai été agréablement surpris d'entendre parler mes
collègues avocats et avocates pendant la fin de semaine, qui me
disaient: Bien, moi, j'ai suivi des cours pour être médiateur.
Beaucoup de Barreaux régionaux, M. le Président, ont
organisé des cours de médiation pour leurs membres. On ne
s'improvise pas médiateur. Ce n'est pas parce qu'on est avocat, qu'on
est notaire ou qu'on est psychologue qu'on devient, par le fait même,
médiateur. Etre médiateur, M. le Président, c'est une
façon de faire qui appelle à des connaissances de comportements
qui doivent être apprises. Et j'ai été agréablement
surpris de voir que mes collègues avocates et avocats sont très
sensibles à cet aspect-là et suivent des cours de
médiateur, de conciliateur, suivent des cours pour devenir arbitre. Et,
M. le Président, je l'ai mentionné tout à l'heure, pour
moi, ce sont les voies de l'avenir en ce qui regarde notre justice, surtout en
ce qui regarde l'aspect civil. C'est notre voie de l'avenir, M. le
Président, parce que, même si on construit des palais de justice
partout, même si on ajoute encore des juges, M. le Président, on
ne pourra jamais en arriver d'une façon satisfaisante à offrir
une administration de la justice qui garantisse l'accessibilité à
la justice si on n'est pas capable de prévoir des mécanismes
moins formels qui permettent aux citoyens de se sentir responsables.
Et, M. le Président, de ce Sommet de la justice de février
1992, il est sorti une grande conclusion que tout le inonde a partagée:
la justice n'est plus la responsabilité exclusive de l'État.
C'est une responsabilité à partager. Et c'est à chacun,
à chacune d'entre nous à prendre ses responsabilités.
M. le Président, peut-être que dans les dernières
années de l'après-guerre, avec ce développement de la
technologie d'une façon phénoménale, et avec le
développement économique aussi, on a mis l'accent beaucoup plus
sur le sens de l'État que sur le sens de la personne. Il faut revenir
à ce sens de la personne. Il faut responsabiliser le citoyen. Il faut
l'emmener, dans le cadre de l'administration de la justice, à pouvoir
trouver des solutions à ses litiges par lui-même, avec l'aide
d'une tierce partie qui se situe à l'extérieur du processus
formel de l'administration de la justice. Et, M. le Président, je ne dis
pas ça pour discréditer le processus formel d'administration de
la justice. Bien au contraire, les projet de loi que nous étudions en
cette Chambre, entre autres, en ce qui regarde les délais, avec un
délai maximum de six mois, avec toutes les nouvelles procédures
que nous allons établir au niveau de la Cour d'appel, pour aussi mettre
fin à des délais très considérables au niveau de la
Cour d'appel, nous améliorons de beaucoup l'administration de la justice
au niveau de nos cours de justice. Et il faut continuer à le faire. Mais
ce que je dis, M. le Président, c'est: Trouvons des moyens pour
permettre aux justiciables d'avoir accès à la justice en dehors
du processus formel parce que le processus formel coûte trop cher. Le
processus formel offre une accessibilité limitée. (12 h 40)
M. le Président, c'est la réalité des choses. Si on
veut pouvoir y remédier, nous n'avons que cette solution de la
médiation, de la conciliation et de l'arbitrage. M. le Président,
je présente donc ce projet de loi 94 sur les tribunaux judiciaires avec
beaucoup de plaisir. Je remercie la collaboration que nous avons reçue.
Je remercie donc la commission des institutions et l'Opposition pour apporter
son soutien à ce projet de loi. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de
la Justice. Nous en sommes à l'étape de la prise en
considération du rapport de la commission sur le projet de loi 94, Loi
modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires. Je cède la parole
à M. le député d'Anjou, porte-parole de l'Opposition
officielle en cette matière. M. le député.
M. Pierre Bélanger
M. Bélanger (Anjou): Je vous remercie, M. le
Président. Il ne s'agit que de mentionner ou d'effleurer le Sommet de la
justice pour que le ministre nous en fasse part et nous parle de cet
événement qui a marqué considérablement son
existence et, nous devons le dire, l'existence de beaucoup de gens. Nous
espérons que ça va continuer à marquer les gens et qu'il y
aura plus de retombées que celles que nous voyons présentement,
qui sont, on doit l'admettre, tout à fait louables, mais malheureusement
peu nombreuses.
M. le Président, pour en venir à ce projet de loi, qui,
vous en conviendrez avec moi, avec 3 articles, ne suscitent pas
énormément de débats, je dois vous dire quand même
que nous avons été un peu déçus de ne pas voir,
avec ce projet de loi qui, maintenant, prévoit un tarif spécial,
quant aux frais judiciaires, entre les personnes physiques et les personnes
morales... On s'atten-
dait à voir, donc, avec ce projet de loi, un tarif qui nous
permettrait d'évaluer de quelle façon serait gérée
cette différence de tarifs entre les personnes morales et les personnes
physiques. On a toujours un problème avec les personnes morales, c'est
qu'on a plusieurs sortes de personnes morales. On a des personnes morales qu'on
pourrait appeler compagnies familiales, où vous avez papa, maman et
l'oncle qui sont administrateurs et actionnaires, et vous avez, de l'autre
côté, des multinationales qui sont aussi des personnes morales et
qui vont être traitées sur un pied d'égalité. On
peut comprendre que ces 2 compagnies n'ont pas les mêmes capacités
de paiement. Alors, il va falloir, je pense, faire attention quant au tarif qui
va être imposé à ces personnes morales. On s'attend
à ce que ce tarif soit plus élevé. Évidemment, les
personnes morales ont une capacité de pouvoir déduire, d'une
façon fiscale, le coût de leurs procédures judiciaires,
chose que de nombreuses personnes physiques n'ont pas. Donc, comme je vous le
disais, M. le Président, nous aurions voulu voir cette grille de tarifs
pour pouvoir, à ce moment-là, se faire une idée.
Le ministre a parlé aussi de la médiation à la Cour
des petites créances. Je veux bien souscrire à un appel à
la pratique privée pour ce qui a trait à la médiation des
petites créances. Cependant, on devra me faire la démonstration
que, vraiment, il en coûte moins cher d'envoyer à la pratique
privée la médiation de causes à la Cour des petites
créances par rapport à envoyer cette même cause en
médiation dans le système public de la médiation.
En effet, M. le Président, on peut inventer des chiffres, on peut
parler de chiffres. On peut émettre des hypothèses. Mais, tant
que ce débat ne se fera pas d'une façon concrète, à
savoir le coût relativement à une médiation dans la
fonction publique versus une médiation dans le secteur privé,
tant qu'on n'aura pas des chiffres, tant qu'on n'aura pas un réel
débat là-dessus, ça laisse toujours une drôle
d'impression de déresponsabilisation du gouvernement. Et je pense qu'il
faut faire attention, surtout quand je regarde, M. le Président, le
tarif qu'on veut offrir aux avocats de la pratique privée pour faire de
la médiation. On parle d'environ 75 $ par dossier qui va passer en
médiation ? 75 $ ? alors qu'on sait qu'une médiation,
c'est au minimum ? au minimum des minimum ? 1 heure, voire même
2 heures. Alors, la crainte que j'ai dans tout ça, c'est qu'on profite
d'une dépression profonde présentement dans le domaine de la
pratique privée du droit où on a des collègues, des
confrères qui sont dans une situation vraiment dramatique, relativement
aux difficultés financières qu'ils rencontrent. Je pense que le
ministre était présent au congrès du Barreau. C'a
été une des principales préoccupations de nos
collègues, à savoir que faire pour remonter la pratique du droit,
pour donner de meilleures conditions de pratique aux jeunes
collègues.
Donc, ma crainte, M. le Président, c'est que, finalement, on
profite du fait que certains de mes collègues, de mes consoeurs seraient
prêts à prendre un petit peu n'importe quoi pour pouvoir
travailler, pour pou- voir joindre les deux bouts, pour leur offrir ainsi un
tarif qui, de prime abord, semble très bas pour le travail qu'il y a
à faire. Parce que, pour qu'elle soit bien faite, une médiation,
il faut qu'on y mette du temps, il faut qu'on passe du temps. Donc, je pense
que c'est très important, avant, vraiment, que des décisions
comme celle d'envoyer à la pratique privée la médiation
des causes aux petites créances, qu'on fasse un débat sur le
coût de tout ça.
Et ce même débat pourrait se faire, aussi, quant à
l'aide juridique. On semble constater une tendance, encore, à vouloir
privatiser de plus en plus, à faire appel de plus en plus à la
pratique privée pour les causes d'aide juridique. Encore là, on
va devoir, d'après moi, pour faire un réel débat, pour ne
pas montrer qu'on est en train de faire tout simplement du pelletage vers
l'avant, on se devra de faire un réel débat sur les coûts
reliés à tout ça et sur la qualité des services,
aussi, reliée à ces coûts. Je pense que ça, c'est
important, et on doit le faire d'une façon constructive si on est
vraiment préoccupé par la saine gestion et l'administration de la
justice.
Le ministre a aussi parlé de la perception des pensions
alimentaires. Il me semble tout à fait sincère quand il dit qu'il
est très préoccupé par cet aspect. Cependant, je me dois
de constater, malheureusement, qu'après 5 ans, une loi qui, justement,
visait à donner plus de dents à la loi, présentement, sur
la perception des pensions alimentaires... Donc, 5 ans que cette loi a
été adoptée et elle n'est pas encore en vigueur ?
elle n'est pas encore en vigueur. Donc, je pense qu'il faudrait ?
concrètement, sur le terrain ? qu'on voit une démonstration
concrète de ce principe et de ce souci que semble démontrer le
ministre.
Et je pense qu'il a raison quand il dit qu'une pension alimentaire ce
n'est pas une punition, ce n'est pas une amende. C'est tout simplement quelque
chose qu'on se doit de payer en toute justice naturelle parce qu'on a une
certaine responsabilité vis-à-vis des mineurs, vis-à-vis
des enfants qu'on a mis au monde. Et on ne doit pas considérer le
paiement d'une pension alimentaire comme une pénalité. Et
j'aimerais que le ministre montre une ouverture vis-à-vis du
système de perception automatique des pensions alimentaires, tel qu'il
existe en Ontario.
En effet, brièvement, M. le Président, en Ontario, une
pension alimentaire est déduite directement du salaire d'un
débiteur de pension alimentaire, de la même façon qu'une
retenue à la source. Et c'est l'employeur qui prélève ce
montant et l'envoie au système central de perception des pensions
alimentaires, qui l'envoie directement à la personne qui est
créancière de cette obligation. Je pense que c'est quelque chose
de tout à fait acceptable.
Ce n'est pas une punition de payer une pension alimentaire. De toute
façon, les gens qui paient d'une façon assidue leur pension
alimentaire ne seront pas brimés de voir, justement, ce montant
prélevé automatiquement sur leur chèque de paie. De toute
façon, ils la
payaient bien, ils vont la payer de la même façon. Il n'y a
pas de frais rajoutés, et ça réglerait
énormément de litiges qu'on a relativement au paiement de
pensions alimentaires. Moi, ça me préoccupe
énormément de voir beaucoup de femmes en particulier qui
attendent après la réception de ces montants qui leur permettent
tout simplement de joindre, souvent, les deux bouts. Et, à cause d'un
retard d'une semaine ou deux, ça peut être tout à fait
dramatique quant aux conséquences. Et ces femmes sont obligées de
s'endetter pour, tout simplement, avoir le montant auquel elles ont droit
à titre de pension alimentaire. Ça le dit: ce n'est pas du luxe,
c'est une pension alimentaire, c'est pour les besoins essentiels de la vie.
Donc, je pense qu'il faudrait regarder d'une façon
immédiate des mesures visant, d'une façon rapide, à
régler ce problème ? qui est presque, je le dirais, un
fléau ? qui est le non-paiement ou le retard de paiement dans les
pensions alimentaires. Et on se doit de regarder l'expérience en cours.
Ça fait à peu près 1 an que c'est en cours dans la
province de l'Ontario. On se doit de regarder attentivement les
résultats et de voir jusqu'à quel point ce mode de perception ne
correspondra pas à un besoin de justice qu'on a. Et je pense que c'est
fondamental qu'on fasse ça, parce que ça répond à
une préoccupation. (12 h 50) pour terminer, m. le président,
encore tout à l'heure, le ministre a parlé de ces principes
fondamentaux qui lui sont chers. il a expliqué, je pense, de
façon éloquente, pourquoi le gouvernement du parti
québécois avait l'obligation, quand il a promulgué sa loi
sur le zonage agricole, d'y aller par effet rétroactif, pour
empêcher un problème de spéculation. j'aimerais, m. le
président, que le ministre, à un moment donné, me fasse
cette démonstration du caractère essentiel de
rétroactivité, de l'aspect essentiel de
rétroactivité pour le projet de loi qui est présentement
sous étude... c'est-à-dire le budget du gouvernement
libéral, et pour le projet de loi 55 qui, lui, a déjà
été adopté. qu'il me fasse cette démonstration
comme quoi le gouvernement n'avait pas le choix d'y aller par
rétroactivité. j'ai bien hâte de voir cette
démonstration, parce qu'on sait que, pour le budget, on avait le choix.
au lieu de mettre une surtaxe de 5 % et 10 % sur 1 an, mais
rétroactivement, on pourrait en mettre une de 10 % et 20 % sur 6 mois.
c'était facilement pensable, réalisable. mais non, on a fait un
choix politique. plutôt que de mettre une surtaxe de 10 % et 20 %, on
dit: on va en faire une de 5 % et de 10 %, mais rétroactivement. on
avait le choix, c'est un choix politique qui s'est fait, pas un choix
juridique, pas un choix d'absolue nécessité.
Alors, je pense qu'il faut que les choses soient dites clairement. S'il
y avait caractère essentiel ou nécessité essentielle d'y
aller par rétroactivité, eh bien, le ministre de la Justice, en
tant que jurisconsulte, se devait de nous l'expliquer en Chambre. Il a une
certaine responsabilité vis-à-vis de tous les membres de
l'Assemblée nationale en tant que jurisconsulte, en tant que
président du Comité de législation. Pourquoi ne l'a-t-il
pas fait? Pourquoi a-t-il refusé systématiquement de
répondre à nos questions là-dessus, comme si
c'était faire preuve de mépris envers l'institution qu'est le
poste de jurisconsulte et président du Comité de
législation? Donc, cette démonstration est totalement absente. On
ne nous a pas démontré qu'il était essentiel d'agir de la
sorte, et je pense qu'à juste titre le Barreau a fait part de ses vives
protestations relativement à cette façon de
légiférer qui apporte un discrédit total et vraiment
injustifiable à tout notre système de législation.
Pour conclure, M. le Président, sur le projet de loi qui fait
l'objet du présent débat, l'Opposition, quant à elle, va
voter en faveur de ce projet de loi, parce que nous pensons qu'il est
justifiable dans une saine gestion de notre appareil judiciaire. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. M. le ministre, en vertu du règlement, une
intervention d'un maximum de 5 minutes.
M. Gil Rémillard
M. Rémillard: Alors, M. le Président, simplement,
c'est que le député d'Anjou parlait tout à l'heure de la
possibilité de fournir certains chiffres pour déterminer, du fait
que nous faisions appel au secteur privé pour les médiateurs au
niveau des petites créances, si, vraiment, on sauve de l'argent. On va
alléger l'appareil gouvernemental, oui, c'est vrai, mais, en plus,
ça nous coûte moins cher.
Je veux simplement, M. le Président, en guise de conclusion,
donner les chiffres que j'ai de mon ministère, ici, je cite: «En
termes d'honoraires pour les médiateurs du secteur privé, on
prévoit un coût de 825 000 $, moins une récupération
des services actuels de 264 000 $.» C'est ce que ça nous
coûte actuellement, 264 000 $. Ce qui veut dire que ça va nous
coûter 681 000 $. Il aurait fallu, M. le Président, selon
l'étude que j'ai ici, 24 postes de médiateurs dans la fonction
publique, donc un coût de 1 152 000 $, plus 240 000 $ pour le personnel
de soutien et tout ce que ça comprend, pour un total de 1 800 000 $.
Alors, comparez 681 000 $, en faisant affaire avec le privé, à 1
800 000 $, si on avait continué notre système au niveau du
public. Alors, pour moi, les chiffres parlent par eux-mêmes. Ce sont les
chiffres qu'on m'a fournis au niveau du ministère de la Justice. Je vous
remercie, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, le rapport de la
commission des institutions portant sur le projet de loi 94, Loi modifiant la
Loi sur les tribunaux judiciaires, est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, je
vous demanderais d'appeler l'article 25 de notre feuilleton.
Projet de loi 99 Adoption
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 25,
M. le ministre du Tourisme propose l'adoption du projet de loi 99, Loi sur la
Société du Centre des congrès de Québec. Y a-t-il
des intervenants? Il n'y a pas d'intervenants.
Mise aux voix
Alors, le projet de loi 99, Loi sur la Société du Centre
des congrès de Québec, est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président,
compte tenu de l'heure, je vous demanderais de suspendre nos travaux
jusqu'à 15 heures.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, suite à
votre demande, les travaux de cette Assemblée sont suspendus
jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 55)
(Reprise à 15 h 5)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mmes et MM. les
députés, je vous demande de vous asseoir, s'il vous plaît.
Nous continuons les travaux de l'Assemblée nationale, à
l'étape des affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement, avec
quel article du feuilleton, s'il vous plaît?
M. Bélisle: L'article 14, M. le Président.
M. Chevrette: M. le Président, je demanderais le quorum,
s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): II y a quorum.
Demande de directive
Fonctionnement de l'Assemblée nationale
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, sur la question du
fonctionnement de l'Assemblée nationale, j'ai des ques- tions à
poser. À 12 h 55, cet après-midi, au moment où il y a un
marathon de petites lois, il est de coutume que la présidence,
d'elle-même, demande qu'on puisse attendre, le temps que le critique de
l'Opposition quitte une commission parlementaire pour s'en venir en cette
Chambre. C'est la coutume, c'est la tradition, et la présidence le fait
d'elle-même. Je comprends que ce n'était pas vous qui étiez
sur le trône, M. le Président, mais la présidence a une
prolongation, un prolongement, quelle que soit la personne. D'autant plus que
M. Bissonnet, présidant à votre place, l'a toujours fait. Et
cette fois-ci, ce n'est pas le leader adjoint qui est là, c'est le
leader du gouvernement lui-même qui, en plein besoin de collaboration et
de participation au déroulement correct de nos travaux, nous en passe
une petite vite, et il se fait plaisir, M. le Président, en appelant une
législation à 12 h 55, sans demander, sans prendre le temps
d'attendre que le critique de l'Opposition soit ici pour demander s'il peut
prendre la parole ou pas.
En l'occurrence, M. le Président, c'était le
député de Lévis qui était en commission
parlementaire sur le décret de la construction, de l'autre
côté, qui remplaçait le député de Masson qui
n'est pas ici aujourd'hui pour des raisons de travaux dans sa propre
circonscription électorale. À 12 h 55, M. le Président,
à 5 minutes de la fin de nos travaux, le ministre du Tourisme est dans
l'Assemblée, le leader du gouvernement est dans l'Assemblée et la
présidence qui, par tradition, demande précisément au
changement quand une législation... Parce qu'on a passé 5
à 6 lois cet avant-midi et on sait que, à cause des travaux des
commissions, quand un projet de loi est terminé, on va chercher notre
critique et il s'en vient faire son travail ici. Ça n'a même pas
été demandé, M. le Président. Je considère,
personnellement, que ce n'est pas correct, à tous les niveaux, à
part ça, qu'on n'ait pas pris, au niveau de la présidence, le
temps de demander si le critique de l'Opposition était ici. Une
suspension des travaux pour 30 secondes, le temps d'une vérification,
ça se fait, ça. C'est le minimum qu'on peut faire quand on veut
une collaboration en cette Chambre. C'est un minimum, surtout de la part du
leader du gouvernement. Je considère ça, M. le Président,
couillon, antiparlementaire et, si je ne me retenais pas, je vous dirais, M. le
Président, que c'est bien évident... Sans faire du chantage, je
vous dirai tout de suite que, d'ici la fin des travaux, on n'a aucune
indication à donner sur la longueur, sur le nombre d'intervenants de
notre côté, et nous allons agir comme bon nous semble. Si c'est de
même que le gouvernement veut fonctionner, M. le Président ?
en couillon ? on ne marche pas. C'est clair?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Jean-Pierre Bélisle
M. Bélisle: M. le Président, je pense qu'il y a des
termes qui ne sont définitivement pas parlementaires et
je ne veux pas les utiliser, parce que je n'étais pas là,
moi, ce matin. Je ne sais pas du tout ce qui s'est... Non, je n'étais
pas là. Je viens d'arriver. Je peux parler? M. le Président, je
ne pense pas que c'a été fait de mauvaise foi, d'aucune
façon.
Une voix: Voyons! Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Un
instant! Un instant! Alors, je vous demanderais, si vous voulez, effectivement,
répondre aux commentaires du leader de l'Opposition officielle, de le
faire et de vous adresser à la présidence, et je vais vous
écouter. Je vais vous écouter.
M. Bélisle: Je veux bien, M. le Président,
m'a-dresser à la présidence et je pense que c'est ce que j'ai
toujours fait. J'ai toujours été et j'ai toujours tenté...
J'ai toujours tenté de collaborer le plus possible avec l'Opposition. Il
peut arriver, à certains moments donnés, dans cette
Assemblée, que, pour une raison ou pour une autre il y a des choses,
effectivement, qui ne fonctionnent pas des deux côtés. Je ne pense
pas qu'on doive piquer et être un petit peu fâché et
excédé, là, parce qu'il y a eu quelque chose qui ne s'est
pas passé. Autant la présidence ne l'a pas soulevé de son
propre chef, autant le leader, possiblement, étant donné qu'il
était rendu à quelques minutes avant et que l'autre personne
n'était pas là, le projet de loi a été
appelé. Je ne pense pas que c'est dans l'intérêt de
l'Assemblée nationale, pour les projets de loi qu'on va débattre
cette semaine, de commencer avec un climat semblable le lundi.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader.
M. Chevrette: M. le Président, quand on ne veut pas
provoquer un climat, là, on s'arrange pour ne pas le faire. Ça ne
se fait pas. Ça ne se fait pas. Il a beau jouer à la vierge
offensée. Il n'était pas ici, premièrement. Comment il
peut juger lui-même de la bonne foi quand, de par tradition, ça ne
s'est jamais fait? Et, ce n'est pas un leader adjoint qui a fait ça,
là, c'est votre «ti-coune», votre leader en chef.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député de Joliette et leader de l'Opposition officielle, je vous
demanderais de retirer le dernier commentaire, là. Vous savez
très bien que vous ne pouvez qualifier aucun parlementaire de la
façon que vous venez de le faire. Si vous voulez... Si vous voulez... Si
vous voulez, et c'est ce que vous souhaitez, que les travaux cette semaine se
déroulent de la façon la plus harmonieuse possible, je vous
demanderais de retirer ce dernier propos-là.
(15 h 10)
Décision du président
Alors, M. le député de Joliette, vous décidez de
quitter l'Assemblée. Je vais quand même commenter la suggestion
que vous m'avez faite, ou l'attitude de la présidence. La
présidence, à partir du moment où un projet de loi lui est
soumis, est liée, et de toute façon constamment est liée
par les règles de procédure prévues dans nos
règlements et également prévues par la Loi sur
l'Assemblée nationale. On a soumis à l'étude de
l'Assemblée le projet de loi 99. On m'indique qu'il n'y avait pas
d'intervenant du côté de l'Opposition officielle et la
présidence n'a pas d'autre choix, à ce moment-là, que
d'appeler l'adoption du projet de loi à l'étape... À ce
moment-là, c'était l'étape de l'adoption comme telle du
projet de loi.
M. le leader de l'Opposition officielle prétend que la
présidence pourrait tenir compte de l'absence ou du fait que le
critique, en l'occurrence M. le député de Lévis, si c'est
à la connaissance de la présidence et si on demande à la
présidence de suspendre les travaux pour quelques minutes parce que le
critique est absent, ou même un autre parlementaire qui voudrait
intervenir, effectivement, la présidence pourrait en tenir compte,
même si le leader du gouvernement n'était pas d'accord. Mais,
à partir du moment où la présidence est dans l'ignorance
de ce fait-là, elle n'a d'autre choix que de vérifier s'il y a
des intervenants. Selon ce qu'on m'indique, ça a été fait,
ou il n'y avait pas d'intervenant qui s'annonçait, ni du
côté de l'Opposition officielle ni du côté du
gouvernement, de sorte que l'étape de l'adoption a été
appelée et on a voté, sans qu'il y ait d'opposition du
côté de l'Opposition officielle, l'adoption du projet de loi
99.
Là, vous le savez, les dispositions qui peuvent ? et je me
réfère à l'article 186, particulièrement le
paragraphe 2° ? il appartient au leader du gouvernement... S'il
faisait une motion pour exercer le retrait de l'adoption du projet de loi 99,
la présidence s'y soumettrait, mais ce n'est pas à moi de
décider d'aller dans ce sens-là. M. le leader adjoint de
l'Opposition officielle.
M. Gendron: M. le Président, j'aimerais ça quand
même que... Dans cette espèce d'avis que vous venez de donner,
vous dites: Ce fait-là, le fait qu'il n'y avait pas de porte-parole de
l'Opposition, ne m'était pas connu. Je prends vos propres propos. Mais
il y en a un qui était connu de votre siège: le fait qu'il
était 12 h 55. 11 me semble que ce fait-là a toujours
été pris en considération par la présidence.
à 12 h 55, combien de fois la présidence a fait le choix
d'ajourner la séance parce que ce n'est pas pour 3 ou 4 minutes
d'ajournement, surtout en fin de session... il me semble que, ça, c'est
un fait qui était connu, qui, en règle générale, a
toujours été pris en considération par la
présidence.
Alors, j'aimerais ça que vous me commentiez un peu cet
aspect-là. Comment se fait-il que le fait qu'à 12h 55 aujourd'hui
on appelle un nouveau projet de loi
et qu'il n'y ait aucun porte-parole de l'Opposition n'a pas ? entre
guillemets ? fait surgir dans votre esprit une quelconque indication
à l'effet que ce serait probablement préférable, à
ce moment-là, de suspendre et de vous enquérir comment il se fait
qu'il n'y avait personne? Je le sais qu'il nous appartient d'être ici;
ça, je sais ça. Mon propos est strictement sur le fait, la
connaissance qu'à 12 h 55 un leader du gouvernement qui appelle un
nouveau projet de loi, sans le leader ou un membre de l'Opposition qui en est
le porte-parole, il me semble que c'est un fait inhabituel, un peu inopportun,
un peu inadéquat. Dans ce sens-là, il me semble que ça
aurait dû être pris en considération par la
présidence pour proposer et suggérer une suspension.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, à 12 h 55,
on a amplement le temps et on est encore à l'intérieur de la
période prévue pour les travaux de l'Assemblée. À 5
minutes de la fin des travaux, on a amplement le temps d'appeler l'étape
d'un projet de loi, s'il n'y a pas de débat ? et c'est ce qui s'est
produit à 12 h 55. Le leader du gouvernement décide d'appeler
l'étape du projet de loi, parce qu'il est 12 h 55, parce qu'on est
à l'intérieur de la période prévue pour cette
séance des travaux jusqu'à 13 heures. La présidence n'a
pas le choix, et si la présidence ne le faisait pas, on lui en ferait
reproche.
Alors, la présidence n'a pas d'autre choix que d'appeler
l'étape du projet de loi correspondant à l'article 25, c'est ce
qui a été fait. Je me répète. La présidence
non seulement ne doit pas, mais ne peut pas, à moins que ce soit
à sa connaissance, tenir compte du fait qu'il n'y a pas d'intervenant
qui décide de parler sur l'étape.
M. Gendron: Oui, mais, M. le Président, est-ce que
ça n'a pas été porté à votre connaissance,
le fait qu'au moment où le leader du gouvernement a appelé,
à 12 h 55, un nouveau projet de loi, le ministre responsable du projet
de loi, profitant sans doute de l'absence du leader et de l'absence du
critique, n'a pas dit un mot? Ça, c'est un nouveau fait qui a
été porté à votre connaissance. Il n'a pas dit un
mot sur le projet de loi. Pourquoi vous pensez qu'il n'a peut-être pas
dit un mot sur le projet de loi?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je vous réponds,
M. le leader adjoint de l'Opposition officielle. Vous savez, ce n'est pas une
première qu'il n'y ait pas d'intervention. C'est même relativement
fréquent, en fin de session, qu'il n'y ait pas d'intervention ni d'un
côté ni de l'autre. C'est déjà arrivé que le
leader du gouvernement appelle un projet de loi et que la présidence
vérifie s'il y a des intervenants, après le parrain du projet de
loi. Constatant qu'il n'y pas d'intervenant, la présidence n'a pas
d'autre choix que de demander si l'étape sur laquelle on intervient,
à ce moment-là, l'étape du projet de loi est
adoptée. La présidence n'a pas le choix. Autrement dit, la
présidence est liée par les décisions du leader du
gouvernement. Et je me répète, à moins qu'on lui
représente, à la présidence, qu'un parlementaire absent
voudrait intervenir, la présidence ne peut pas présumer, elle n'a
pas le droit de présumer. Je reconnais cependant ce que vous dites, que
votre critique, pour une raison ou pour une autre, voulait intervenir et a
été pris un peu par surprise. Mais la présidence, et je me
répète, je l'ai dit tout à l'heure, à moins que le
leader du gouvernement lui tende la perche et l'indique, la présidence
ne peut pas corriger la situation.
M. Gendron: M. le Président, vous avez fait remarquer,
avec raison, qu'il est arrivé fréquemment que la
présidence s'est levée de son siège et elle a
demandé, de part et d'autre, s'il y avait des intervenants sur un projet
de loi, et vous avez dit qu'il est arrivé que, de part et d'autre, on
avait indiqué qu'il n'y avait pas d'intervenants. Ça, je n'ai pas
de trouble avec ça. Mais, dans le présent cas, le leader du
gouvernement savait très bien que nous avions 3 intervenants de
prévus sur le projet de loi. Le leader du gouvernement, il le savait,
ça. Lui, il le savait comme leader du gouvernement. Et au moment
où il a décidé d'appeler ce projet de loi là,
comment voulez-vous que la présidence exerce ce qui s'appelle au moins
la tradition et la coutume de demander d'un côté s'il y a des
intervenants et, après ça, de demander de l'autre
côté s'il y a des intervenants? Là, ça aurait
fonctionné. Parce que vous avez raison qu'il y a une coutume qui fait
que, sur certains projets de loi, de part et d'autre, nous consentons à
ne pas dire un mot. Mais, comment voulez-vous exercer cette pratique lorsque le
porte-parole n'est pas ici et que le leader du gouvernement, lui, il appelle le
projet de loi, alors qu'il sait qu'il y a 3 intervenants de notre
côté? Et là, il me semble que, dans ce sens-là, la
présidence aurait été sage de suspendre pour les quelques
minutes qui restaient.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader, et
ça sera mon dernier commentaire, si vous m'informez qu'à 12 h 55
il n'y avait, à ce moment-là ? pour une raison ou pour une
autre, encore une fois, ça pourrait être possible ? aucun
membre de l'Opposition officielle, compte tenu qu'il était 12 h 55, si
ça avait été le cas, je pense que la présidence,
à ce moment-là, aurait probablement jugé sage de suspendre
jusqu'à 15 heures. Mais on m'indique qu'il y avait des membres de votre
formation, à 12 h 55, qui auraient dû, à ce
moment-là, suggérer à la présidence, informer la
présidence que le critique de votre côté en cette
matière, M. le député de Lévis, voulait intervenir.
Si ce n'est pas fait, la présidence n'a pas le choix.
(15 h 20)
M. Gendron: M. le Président, vous avez dit que vous
concluriez, je vais conclure moi aussi. Je constate que le leader du
gouvernement, en connaissance de cause, a décidé d'appeler un
projet de loi en sachant très bien que, nous, nous avions des
intervenants. Et que le leader du gouvernement veuille faire ça... C'est
pour ça
que le leader de l'Opposition officielle a, avec raison, je pense, et
d'une façon tout à fait correcte, dénoncé cette
situation en connaissance de cause. En fin de session, 5 minutes avant
l'ajournement d'une séance, ce n'est quand même pas ce qu'il y a
de plus régulier puis de correct comme procédure que le leader du
gouvernement appelle un projet de loi, sachant que le porte-parole n'est pas
là et qu'il y a 3 intervenants de notre côté, sachant
très bien qu'on ne pouvait pas faire les interventions à 12
heures 55. Alors, moi, de toute façon, M. le Président, je
reconnais que la présidence pouvait ne pas savoir ces faits-là,
mais il m'appartenait de les rappeler, et on va fonctionner en
conséquence.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci.
M. Chevrette: Demande de directive.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader de
l'Opposition officielle, je vous ai rappelé tout à l'heure que je
ne pouvais pas accepter le propos que vous avez tenu à l'égard du
leader du gouvernement, et je vous demande encore une fois de retirer ce
propos-là, puis on va pouvoir continuer nos travaux en toute
quiétude.
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Bien, tant et aussi
longtemps que vous ne vous pliez pas à une directive qui
m'apparaît... Pardon?
Alors, M. le leader du gouvernement, nous continuons nos travaux
à quel article du feuilleton, s'il vous plaît?
M. Cannon: L'article 14, M. le Président.
Projet de loi 68
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 14 de
notre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport
de la commission de la culture sur le projet de loi 68, Loi sur la protection
des renseignements personnels dans le secteur privé. Alors, M. le
ministre des Communications, je vous cède la parole.
M. Lawrence Cannon
M. Cannon: Merci, M. le Président. Le projet de loi 68, M.
le Président, sur la protection des renseignements personnels dans le
secteur privé, en est maintenant à la dernière
étape avant son adoption par cette Assemblée. La prise en
considération du rapport de la commission est le résultat d'un
travail de longue haleine, un travail qui a commencé il y a de
nombreuses années, M. le Président. Et, comme j'ai eu l'occasion
de le rappeler souvent en commission et ici, en cette Chambre, plusieurs
commissions ont étudié la possibilité d'étendre au
secteur privé les principes de la loi sur l'accès aux documents
et la protection des renseignements personnels dans le secteur public.
D'ailleurs, on se rappellera qu'à l'occasion de la présentation
du rapport Paré, qui a donné lieu précisément
à la création de la Commission d'accès à
l'information et à la protection des renseignements dans le secteur
public, il y avait une recommandation qui proposait l'extension au secteur
privé. Or, 10 ans plus tard, les membres de l'Assemblée nationale
sont saisis d'un projet de loi qui a fait l'objet de nombreuses consultations
et qui aujourd'hui, à l'occasion de la prise en considération,
devrait normalement trouver son adoption.
Plusieurs doutaient de la volonté du gouvernement de
légiférer dans cette matière, mais jamais, M. le
Président, cette chose ne m'a effleuré l'esprit. D'ailleurs, je
vous dirai que c'est grâce à la grande complicité ? je
le dis tout fort et tout haut ? que ce projet de loi a réussi
à se rendre jusqu'à l'étape que nous connaissons
précisément aujourd'hui. Grande complicité entre le
critique de l'Opposition et celui qui vous parle, de même que les membres
de la commission de la culture et tous ceux qui ont eu l'occasion de suivre ce
projet de loi et les débats l'entourant.
Alors, nous avons, comme je l'ai mentionné, M. le
Président, non seulement à congratuler, à remercier,
à féliciter les parlementaires dont nous sommes, mais aussi les
gens du milieu, tant les associations de citoyens, les entreprises de
cueillette de renseignements, les bureaux de crédit, le monde bancaire,
les gens qui ont travaillé à la première commission
parlementaire, qui ont permis de rédiger un projet de loi qui, somme
toute, reflétait, à ce moment-là, des besoins
élémentaires qui nous concernent à l'égard de la
protection des renseignements privés.
Pour sa part, la commission parlementaire que nous venons tout juste de
terminer, à l'occasion de l'étude article par article, nous a
permis de bonifier le projet de loi 68. Plusieurs modifications ont
été apportées au projet initial et la plupart de ces
modifications sont, en fait, ce que nous pourrions considérer comme
étant des améliorations. Je voudrais donc remercier, bien
sûr, les intervenants qui ont participé aux différentes
commissions parlementaires et rappeler encore une fois que leur contribution
nous a été grandement bénéfique dans la
précision et la formulation de notre projet de loi.
Cette loi, M. le Président, qui est devant nous aujourd'hui
profitera à tous les citoyens et citoyennes du Québec. Au terme
de la première commission parlementaire, à l'automne de 1991, je
déclarais que mon objectif était bien simple: il s'agissait de
redonner à l'individu et au citoyen le contrôle de l'information
qui le concerne. Je suis convaincu que le projet de loi 68 viendra
améliorer la situation actuelle dans ce domaine. M. le Président,
comme société moderne et responsable, nous nous
devions, dès 1984, d'adopter une telle loi puisque, en 1984, le
gouvernement canadien a adhéré aux lignes directrices
régissant la protection des renseignements et la vie privée des
individus, particulièrement avec les lignes directrices des flux
transfrontières des données à caractère personnel
qui ont été émises par l'Organisation de
coopération et de développement économiques, l'OCDE.
Je rappelle, M. le Président, pour ceux qui nous écoutent
et les membres qui sont ici, avec nous, aujourd'hui, à
l'Assemblée, quelques grands principes qui gouvernent, somme toute,
l'adoption de ce projet de loi ou la prise en considération de ce projet
de loi. Essentiellement, et je le rappelle en termes historiques, le projet de
loi fait suite à de nombreuses représentations qui
découlaient de l'adoption de notre nouveau Code civil,
particulièrement les articles 35 à 41 qui traitent
précisément de la vie privée. On se rappellera que la
Charte québécoise des droits et libertés a
enchâssé un grand principe qui est celui du respect de la vie
privée. Donc, il fallait, à travers cette idée, cette
notion et ce concept, trouver une façon d'appliquer ces
choses-là, cette notion-là. Donc, le Code civil, dans les
articles 35 à 41, touche ces aspects-là, touche les aspects
d'accessibilité, touche les aspects de finalité. Et, dans le
fond, le projet de loi 68 vient effectivement baliser, vient encadrer, vient
donner une dimension d'application à ce principe qui était celui
du respect de la vie privée.
Or, le projet de loi, qui s'inscrit dans ce droit qu'on crée
aujourd'hui, comme je l'ai mentionné, s'inspire de la Charte des droits.
Et, je dirais, il y a un autre principe que l'on a pu rencontrer tout au long
des délibérations et tout au long des séances que nous
avons tenues, comme parlementaires, c'était de faire en sorte que nous
puissions contrer les abus. Mon collègue, le député de
Pointe-aux-Trembles, en a mentionné à l'occasion de ses
interventions. J'ai eu l'occasion d'en mentionner quelques-uns. Je me permets,
par exemple, de vous citer le cas où il y a des gens qui, sollicitant,
M. le Président, la possibilité d'avoir un logement dans la
région de Montréal ou dans la région de Québec,
devaient obligatoirement fournir des renseignements, qui étaient
peut-être pertinents entre les mains du propriétaire du logement,
mais qui n'étaient pas nécessaires à une prise de
décision. Et ça pouvait amener à des abus de nature
discriminatoire contre les individus. (15 h 30)
Que faire, M. le Président, lorsque vous sollicitez un logement?
Quel serait votre comportement si vous deviez fournir, par exemple, votre
nationalité, le numéro de permis de conduire, votre numéro
d'assurance sociale? Ce sont là un certain nombre
d'éléments qui sont des renseignements de nature personnelle qui
vous touchent, vous, et qui n'ont pas besoin de faire l'objet, pour fins
d'analyse de solvabilité, à savoir si, oui ou non, vous
êtes en mesure de pouvoir payer, si vous êtes en mesure de pouvoir
rencontrer, sur une base mensuelle, les frais de location. Ce qui est
important, c'est que vous soyez en mesure d'être un bon citoyen,
d'être un bon locataire et de rencontrer les paiements et les obligations
auxquels vous vous êtes engagé.
M. le Président, des cas comme ceux-là, d'autres cas
d'abus, de confusion au niveau des individus se sont présentés
tout au long de cette commission. Je pense à des gens qui ont
effectivement des comptes auprès des agents de crédit ou des
bureaux de crédit et qui demeurent dans la même
municipalité, voire dans la même rue et, pour une raison ou pour
une autre, l'individu est mis en situation avec un autre individu qui a le
même nom et, effectivement, il se voit refuser un prêt à une
institution bancaire parce qu'on s'est trompé sur l'individu. Il y a des
cas comme ça qui nous ont été relatés.
Alors, c'est clair qu'il fallait que nous puissions intervenir. Il faut
dire aussi que le citoyen, M. le Président, n'avait pas
nécessairement des recours qui lui permettaient très rapidement
de se réajuster. Or, ce sur quoi nous avons travaillé, à
l'intérieur de notre projet de loi, c'était de faire en sorte que
nous puissions donner accès à l'individu, au niveau, par exemple,
des renseignements qui le concernent. Qu'il s'agisse d'une demande d'emploi, ou
qu'il s'agisse, par exemple, d'un prêt bancaire, ce projet de loi permet
à l'individu d'avoir immédiatement accès aux
renseignements de crédit qui le concernent.
Autrement dit, nous permettons, par ce projet de loi, à un
individu de se rendre, soit à sa caisse, soit à son institution
financière, à sa banque ou autre, et demander à l'agent de
crédit ou à l'agent de renseignements une copie, un exemplaire de
son dossier de crédit, puisque, autrement, il aurait été
obligé de se référer à celui ou à celle, en
termes d'entreprise, qui détenait les renseignements. Nous avons donc
décentralisé, à toutes fins pratiques, cette
possibilité, dis-je bien, pour l'individu d'aller chercher les
renseignements, en voyant, par exemple, cette liste de crédit
personnelle qui contient des erreurs, parce que, ne vous trompez pas, ça
se produit souvent.
À maintes reprises, on nous l'a souligné en commission, et
ce n'est pas fait d'une façon méchante, ce n'est pas fait
nécessairement d'une façon bête, mais il se peut
très bien, comme j'ai mentionné la confusion au niveau des noms,
qu'il y ait à travers tout cela des erreurs cléricales qui se
sont glissées. Donc, et ce n'est pas à tous les jours qu'on pense
à protéger nos renseignements. Ce n'est pas à tous les
jours qu'on a cette préoccupation de dire: Bien, ah, ce matin, il
faudrait que je puisse vérifier si mon compte bancaire est à jour
et si, effectivement, ma carte Visa, Mastercard, etc., si tout ça est
payé et voir c'est quoi l'élément et l'image que l'on me
donne au niveau de ma référence de crédit. Ce n'est pas
à tous les jours qu'on fait ça, mais, lorsqu'on le fait, au
moment où on le fait, il est important qu'on puisse avoir accès
très rapidement à ces renseignements-là, ce que nous
n'avions pas. Donc, le projet de loi vient corriger ça et, en plus,
lorsqu'on constate qu'il y a une erreur qui s'est glissée, volontaire ou
involontaire, peu importe, lorsqu'on constate qu'il y a une erreur, il est donc
du devoir de l'agent de crédit ou
de renseignements d'indiquer aux consommateurs ou aux consommatrices
quelle voie suivre pour apporter les corrections..
Je vous avoue bien humblement, M. le Président, que j'aurais
peut-être souhaité, comme je l'avais mentionné à
l'intérieur du projet de loi, au tout début, que ceux qui
détiennent des renseignements sur la personne s'emploient à
être en mesure de fournir instantanément à ces
individus-là tous les renseignements qui les concernent, mais je
comprends qu'on ne peut pas tout avoir du premier coup. Je comprends que notre
projet de loi, c'est une base. C'est une nouveauté. C'est une
nouveauté en ce sens que ça touche plusieurs
éléments. Contrairement, par exemple, à d'autres provinces
canadiennes et à d'autres États qui se sont penchés sur
cette question, nous avons adopté une approche qui se veut d'abord et
avant tout globale, c'est-à-dire découlant de la Charte, comme je
l'ai mentionné plus tôt, qui dit que oui, vous avez le droit
à la vie privée. Découlant de ça, ça nous a
permis de bâtir autour de ça un certain nombre
d'éléments. Tantôt, ça touche des renseignements
financiers. Ça peut également toucher des renseignements de
nature médicale. Ça peut toucher des renseignements, que sais-je,
tous les renseignements, M. le Président, qui vous concernent et qui
vous touchent. Donc, notre approche, c'était une approche globale.
Le projet de loi offre un plancher, établit, je dirais, des
normes, permet à la Commission d'accès à l'information,
qui a, comme vous le savez, depuis 10 ans, une expertise, une expertise
reconnue au niveau d'abord de la médiation, mais au niveau de sa
façon d'intervenir pour protéger les renseignements dans le
secteur public. Nous avons confié à la Commission d'accès
à l'information cette responsabilité précise. Or, nul
doute que la Commission pourra intervenir et créer sa forme de
jurisprudence. Nous devons donc, compte tenu évidemment que ce projet,
qui crée des obligations...
Mais ce projet, il est évolutif, il est dynamique. Pourquoi il
est dynamique? Nous y avons incorporé une disposition qui est semblable
à la disposition que nous retrouvons avec la loi qui couvre le secteur
public, disposition qui fait qu'à tous les S ans les membres de cette
commission fournissent à l'Assemblée nationale un rapport. Et
c'est à l'aide de ce rapport que nous, comme parlementaires, comme
députés, nous allons pouvoir juger de l'évolution de ce
projet. Il y a des cas, bien sûr, qui ont retenu notre attention, et je
pense très sincèrement que nous avons, de bonne foi,
été capables de répondre à ces
problèmes-là, à ces préoccupations. Mais, je ne
crie pas victoire. Je dis: II reste encore beaucoup de chemin à faire.
Mais nous avons, tout au moins comme parlementaires, fait un pas dans la bonne
direction.
En terminant, M. le Président, je le répète, et je
le répète à tous ceux qui voudront m'entendre sur ce
sujet: S'il y a un projet de loi en cette Assemblée nationale qui
retient ? et je le souhaite ? l'unanimité, c'est bien ce
projet de loi. Oui, il y a eu des petits différends, mais je pense que
ce projet de loi n'est pas un projet de loi partisan. Ce projet de loi est un
projet de loi qui doit être le reflet fidèle de ce que nous sommes
en 1993, individus au-delà des partis politiques, au-delà des
étiquettes que tout le monde voudrait bien nous mettre. C'est un projet
de loi qui est un projet de loi de la société dans laquelle nous
vivons. (15 h 40)
Encore une fois, je suis très heureux d'être celui qui a eu
l'honneur de le piloter à l'intérieur de cette Assemblée,
sachant très bien que tout le monde y a participé. Et je termine
en félicitant encore une fois très chaleureusement, très
chaleureusement, les membres de la commission parlementaire, mais en
particulier mon collègue député de Pointe-aux-Trembles,
qui a travaillé avec acharnement, avec conviction, mais avec
l'engagement que nous étions en train de faire quelque chose qui
était combien essentiel pour notre société. Il restera
peut-être des petites modifications. Il restera peut-être des
amendements à apporter au niveau des structures. On me parlait de la
CSN, qui a une structure confédérale qui ressemble un peu ?
et je le dis sans méchanceté?à une institution
financière en soi. Il faut permettre à la CSN la
possibilité, entre ses différentes constituantes, de transmettre
des renseignements, donc, comme nous l'avons fait dans le cas de l'article
88.1, permettre à la CSN de faire les mêmes choses.
On a aussi une petite erreur technique à corriger au niveau de la
reconnaissance de la jurisprudence, à l'article 17, quatrième
alinéa. Et une autre modification qui donnera aussi aux banques la
même possibilité que nous voulons donner à la CSN, que nous
avons donnée aussi à la Fédération des caisses,
c'est-à-dire de pouvoir transmettre des renseignements afin
d'éviter de la fraude. Et c'est fort simple, ce n'est pas
compliqué. Il arrive, dans notre société, qu'il y ait des
individus qui fraudent par voie de «kiting» et tout autre
mécanisme que nous connaissons. Il faut absolument que les institutions
bancaires puissent communiquer des renseignements lorsqu'elles le jugent
opportun, mais surtout lorsque c'est justifié, afin d'éviter des
situations qui, elles, seraient délinquantes.
Alors, en gros, M. le Président, il s'agit de mes propos dans le
cadre de cette prise en considération. Et, comme je l'ai
mentionné précédemment, c'est avec beaucoup de
fierté que je vous présente ce rapport. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre des
Communications. Je cède la parole à M. le député de
Pointe-aux-Trembles. Vous êtes critique de l'Opposition officielle dans
ce dossier-là, vous avez donc droit à une intervention de 30
minutes.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, l'Opposition officielle a
fait savoir dès le départ qu'elle était d'accord avec le
principe du projet de loi qui est devant nous,
puisqu'il s'agit d'appliquer au secteur privé des règles
qui existent depuis nombre d'années dans le secteur public. Chacun,
chacune connaît maintenant la Commission d'accès à
l'information, qui garantit à la fois l'accès par les citoyens ou
même par les journalistes aux renseignements publics détenus dans
le secteur public, et qui, en même temps, assure de préserver ce
qui, dans le secteur public, constitue des renseignements confidentiels sur les
personnes.
M. le Président, il y a peu de projets de loi dans l'histoire de
l'Assemblée nationale qui auront fait l'objet d'une discussion à
la fois longue et d'où était absente la partisanerie, comme le
ministre le répétait à bon droit. Qu'on soit
libéral, péquiste ou du Parti Égalité, il n'y a pas
de divergences fondamentales sur le droit des personnes dans notre
société de protéger les renseignements personnels qui
circulent à leur sujet. Et on sait, M. le Président, que, ces 20
dernières années, le développement de la science
informatique a fait que la transmission de renseignements se fait quasi
instantanément et que les ordinateurs permettent d'en emmagasiner, c'est
quelque chose d'effarant.
Donc, M. le Président, il fallait, il faut que l'État
québécois garantisse les droits des personnes. Le ministre a
mentionné des exemples d'abus. On en a tous en mémoire. Je pense
qu'il y a un certain nombre d'années ? ça touche le secteur
public, mais ça montre comment, des fois, une chose peut se
développer ? un hôpital de Montréal avait jeté
aux vidanges tous les dossiers médicaux qui étaient maintenant
sur ordinateur. Alors, les enfants, dans la ruelle, jouaient avec les dossiers
médicaux. C'est évident qu'il y avait là une absence de
jugement de la part d'une personne, mais les citoyens qui voyaient la photo
dans le journal de milliers de dossiers médicaux avec lesquels les
enfants s'amusaient étaient inquiets des renseignements personnels les
concernant.
À cet égard, M. le Président, la Commission
d'accès à l'information a pu, au cours de la décennie
écoulée, accumuler une expertise inestimable sur les
problèmes d'accès et de protection des renseignements personnels.
Le projet de loi qui est devant nous prévoit que la Commission
d'accès à l'information s'occupera de la mise en vigueur du
projet de loi. À cette fin, le nombre de commissaires sera
augmenté de 3 à 5, ce qui, M. le Président, est
parfaitement justifié. En étendant des dispositions qui
protègent les citoyens à l'ensemble du secteur privé, on
aura besoin de plus de personnes pour gérer la loi et aussi pour
siéger, parce que la Commission va siéger pour entendre les
plaintes que les citoyens pourraient lui faire. On est loin, M. le
Président, du projet de loi sur l'alcool et les jeux de hasard,
où là, on en prévoit 13 pour faire ce que 15 faisaient
auparavant. Et j'ai dit, dans cette Chambre, que le danger, c'est qu'un
gouvernement ait trop d'amis, et en période de restriction le goût
de plaire aux amis peut aller à rencontre du besoin de réduire le
déficit. Mais on n'en est pas là-dessus sur le projet de loi 68,
puisque la clause qui prévoit que le nombre de commissaires à la
Commission d'accès à l'information va passer de 3 à 5 est
parfaitement justifiée dans les circonstances.
Il y a un amendement que le ministre a retenu, qu'il a fait
rédiger, qui vient de l'Opposition officielle, c'est celui de mettre fin
à la situation qu'on vivait auparavant, où la loi de la
protection des consommateurs donnait au citoyen accès à son
dossier de crédit chez une agence de renseignements. On a
étudié ça en commission. Équifax, qui est la plus
grosse agence installée au Québec, a son siège social
à ville d'Anjou. Il fallait qu'une personne de Montréal perde
presque une demi-journée de travail pour aller réclamer son
rapport de crédit chez Équifax. Résultat, M. le
Président, l'ancienne loi de protection du consommateur, qui
dorénavant ne s'appliquera plus parce que 68 règle le cas,
était utilisée par 3 % des personnes sur lesquelles on
détient ce qu'on appelle des rapports de crédit. 3 %, M. le
Président: c'étaient vraiment les personnes malheureuses dans
leur recherche d'un crédit, parce qu'il fallait avoir une motivation
considérable pour perdre une couple d'heures de travail pour aller
chercher un rapport.
Par ailleurs, M. le Président, la première disposition de
Favant-projet de loi qui prévoyait que des millions de lettres seraient
mises à la poste par toutes les agences de renseignements pour informer
les personnes qu'on détenait un renseignement à leur sujet
était lourde, coûteuse et bureaucratique à l'excès,
d'où la suggestion de l'Opposition officielle, M. le Président,
que le ministre a retenue, que les utilisateurs fournissent le renseignement
aux personnes. Il y a 1300 caisses populaires au Québec, il y a des
centaines de succursales de banque. C'est plus simple, c'est plus rapide. Ce
sont des institutions qui ont déjà des rapports avec les
consommateurs et qui, sur demande, fourniront non seulement le renseignement
? le ministre le rappelait ? mais fourniront les renseignements sur
la manière de corriger au besoin le rapport de crédit qui
concerne les personnes. Les banquiers, les caisses populaires et d'autres ont
fait observer vers la fin que certaines modalités pourraient être
assouplies. Le ministre et l'Opposition y ont consenti d'emblée.
L'idée n'est pas d'être tatillon, l'idée n'est pas
d'être abusif; l'idée, c'est de protéger les personnes sur
lesquelles des renseignements sont détenus. Et, dans nos
sociétés modernes, les renseignements dits de crédit
occupent une place importante, et c'est normal. (15 h 50)
Par ailleurs, M. le Président, nous avons tenu compte des
représentations d'agences de renseignements comme Équifax et
d'autres, qui disaient: Écoutez, ne nous imposez pas par la loi d'avoir
des rapports avec les consommateurs. Nos entreprises vivent des renseignements
que nous fournissons à des entreprises qui les utilisent pour louer des
choses, vendre des choses, prêter de l'argent ou à d'autres fins,
d'où l'idée, je pense correcte, de dire que les utilisateurs de
renseignements vont les fournir à ceux sur lesquels les renseigne-
ments sont constitués.
Il y avait une autre difficulté, M. le Président, qu'on a
appelée, là ? vous savez comment, de nos jours, on aime
avoir un terme pour chaque chose ? les flux transfrontaliers. Il n'y a
rien de militaire là-dedans. C'est que, dans nos sociétés,
une firme de Québec ou de Montréal peut maintenant, par
ordinateur, transmettre ou recevoir un renseignement d'à peu près
n'importe où dans le monde.
Pour le ministre, il y avait une difficulté d'éviter la
question des frontières, parce que le Québec est une province, le
fédéral est jaloux de ses juridictions et, j'ajoute,
l'Association des banquiers canadiens aime toujours invoquer le
fédéral contre une province. Donc, il fallait trouver une
façon, M. le Président, où on empêcherait un citoyen
ou une entreprise du Québec de faire, en passant par un pays
étranger, quelque chose que la loi empêche. Et les juristes du
ministère, avec le ministre, ont trouvé un texte qui satisfait
à ça, puisque ça dit qu'une entreprise ou un individu du
Québec qui communique un renseignement à l'étranger doit
le faire d'une façon conforme à la loi et qu'une entreprise ou un
individu du Québec qui reçoit de l'étranger un
renseignement doit s'en servir, conformément à la loi. Donc, on a
évité tout le problème et la question des
frontières. La loi s'applique à tous les citoyens et toutes les
entreprises du Québec, quels qu'ils soient et indépendamment du
biais, du support, du moyen par lequel on le donne ou on l'obtient de
l'étranger.
Dans ce sens, M. le Président, je pourrais faire observer au
ministre que voilà un exemple ? ce n'est pas souvent ?
où l'Opposition officielle et le gouvernement trouvent un moyen de
passer ensemble à côté d'un traquenard constitutionnel, que
l'Association des banquiers canadiens aurait pu utiliser à son profit.
À cet égard-là, je pense que l'ABC, l'Association des
banquiers canadiens... Le ministre se rappelle peut-être qu'en commission
parlementaire, suite à leur mémoire, je leur avais dit: Ce qui
respire de votre mémoire, c'est que vous êtes infaillibles et
parfaits. J'en déduis que ce que j'ai lu dans les journaux, les
milliards que vous avez prêtés à Olympia & York est de
la pure invention de journaliste, puisque les banquiers canadiens sont à
la fois parfaits et infaillibles. Dans ce sens-là, M. le
Président, peut-être ont-ils trop fréquenté le
ministre responsable de la loi 101, et que, de quelque manière, il leur
aurait transmis son infaillibilité largement reconnue dans cette
Chambre.
M. le Président, la loi qu'on a devant nous est la loi
d'application des dispositions des articles 35 à 41 du Code civil, qui
protègent la vie privée et, donc, les renseignements personnels.
Je me permets de souligner au passage que la loi amendant le Code civil, qui
comportait quelque 3000 articles, a, elle aussi, fait l'objet du même
processus que 68. C'est-à-dire que, quand il s'agit du Code civil,
libéraux comme péquistes oublient leurs allégeances, et la
députée de Terrebonne et la députée de
Hochelaga-Maisonneuve, entre autres, ont collaboré là aussi avec
le ministre...
M. Holden: Et moi.
M. Bourdon: ...et le député de Westmount... Ils ont
collaboré avec le ministre de la Justice pour qu'on ait un Code civil
renouvelé. Ça faisait 30 ans que ça se discutait.
Ça devait faire 5 ans qu'on parlait de la protection des renseignements
personnels qui va maintenant être faite par la loi 68.
M. le Président, il y a une question qu'on pourrait poser: Le
projet de loi, que gouvernement et Opposition ont contribué ensemble
à élaborer, est-il parfait? Non, M. le Président. Non,
parce que le porte-parole de l'Opposition en matière d'accès
à l'information et le ministre des Communications n'ont pas, comme un
autre ministre, le privilège de l'infaillibilité. La seule chose,
le ministre le rappelait avec raison, c'est qu'un projet de loi qui peut
comporter un certain nombre de lacunes est préférable à
l'absence de loi où, en pratique, n'importe quoi pouvait se faire. On a
eu des exemples, M. le Président, de ce que l'absence de loi permettait.
Par exemple, Équifax fournissait à ses clients ? environ 60
000 ? nos numéros de cartes de crédit que les entreprises
qui émettent les cartes se tuent à nous dire de garder
strictement pour nous, y compris notre carte d'appel, en disant: Dans un
aéroport, votre voisin peut avoir de longues oreilles et entendre ce que
vous dites. Il y a eu d'autres exemples où Equifax, par exemple, avec un
ministère, achetait ou échangeait des renseignements
personnels.
Donc, on a fait consensus pour adopter un projet de loi qui donne
à la Commission d'accès à l'information autorité
pour recevoir toutes les plaintes. On l'a fait d'une manière souple, la
moins coûteuse possible, la moins bureaucratique possible, pour que
ça soit une mécanique efficace et qui protège le citoyen.
Mais, comme pour toute autre législation, M. le Président, le
temps va faire son oeuvre. L'information va se donner, les gens vont prendre
conscience de leurs droits, les institutions financières, entre autres,
vont informer leurs clients et sociétaires de leurs droits, les gens
vont les exercer, et la Commission d'accès va venir à la
rescousse du citoyen qui aurait à se plaindre.
Une autre chose qu'on a faite, M. le Président, c'est de dire que
les 240 000 professionnels du Québec qui, pour la plupart, ont des
mécaniques déjà prévues par la loi sur les ordres
professionnels, vont être quand même assujettis à la loi,
mais vont d'abord appliquer la leur; et la Commission d'accès va venir
en appel, ou en révision, ou à la place, si un ordre
professionnel ne fait pas son travail ou le fait d'une façon où
le citoyen se sent lésé. Ce qui va nous donner, M. le
Président, à la longue, dans les rapports annuels de la
Commission d'accès, une idée de comment ça marche du
côté des 240 000 professionels. Et si ça pose des
problèmes qu'on n'a pas prévus, bien, la loi pourra toujours
être amendée pour y pourvoir.
Je pense donc, M. le Président, qu'on a devant nous un projet de
loi qui protège les citoyens contre les abus possibles. On a devant nous
un projet de loi qui
donne à la Commission d'accès à l'information le
pouvoir d'entendre les plaintes et d'en décider. Et, à cet
égard, des intervenants ont fait valoir que la Commission pouvait
être, à l'occasion, juge et partie et que... Il y a eu un
débat. Est-ce qu'on ne devrait pas donner au Tribunal des droits de la
personne le soin d'intervenir quand il y a des plaintes? M. le
Président, pour un certain nombre de raisons, le ministre a maintenu, a
bon droit, je pense, que ça serait la Commission d'accès à
l'information qui le ferait, quitte à revoir ça aussi au cours
des années, si le problème se pose. Et, à cet
égard, le ministre a fait en sorte que le ministère des
Communications, et non pas la Commission d'accès, exerce la fonction de
conseil auprès des ministères, des organismes, des
sociétés d'État, et non pas la Commission d'accès.
(16 heures)
M. le Président, des intervenants ont dit, avec raison: Quand la
Commission d'accès conseille à HydroQuébec, par
hypothèse, de faire telle ou telle chose, si un citoyen se plaint, elle
peut être mal à l'aise pour aller à rencontre d'une
décision d'un ministère ou d'une société
d'État qui se seraient contentés d'appliquer son conseil. Donc,
le ministère va exercer la fonction de conseil ? s'il survit, le
ministère, à la vague de coupures qui déferle; mais,
ça, c'est une autre question. Mais, donc, le ministère ou le
ministère qui y sera substitué, si c'est ça qui est
décidé, va s'occuper de la fonction de conseil, pour ne pas
confondre la Commission d'accès, qui peut avoir à juger en
dernière ligne, avec une fonction de conseil où on peut dire
à un ministère: Faites-ça, c'est légal; ne faites
pas ça, ça n'est pas légal. La Commission d'accès
est autonome, puis, à l'occasion, pourra même renverser une
décision ou retenir une plainte, même si le ministère
s'était dit d'avis que c'était légal, parce que la
Commission, elle, en sera saisie selon le mandat que la loi lui accorde.
En terminant, M. le Président, je voudrais remercier le ministre
de sa collaboration. Il n'a pas retenu tous les amendements que l'Opposition
lui donnait. On ne s'attendait pas à ce qu'il les retienne tous, mais il
a quand même retenu des suggestions que nous avons faites. Le fait qu'il
y ait un consensus dans cette Chambre pour adopter le projet de loi nous met
relativement à l'abri de certains lobbies puissants qui, encore, il y a
une semaine ? je pense au Conseil du patronat du Québec ?
disaient qu'il ne fallait rien faire parce qu'il y a des gens au Québec
qui disent: Ne rien faire, c'est toujours meilleur que de faire quoi que ce
soit. Mais je viens de nouveau assurer le ministre que les lobbies sont moins
puissants que le Parlement; que, quant à nous du Parti
québécois, qui avons fait la première moitié du
chemin, la loi qui touche le secteur public, on est d'accord pour mettre la
partisanerie de côté et voter celui qui va toucher le secteur
privé. Parce que privé comme public, les citoyens ont le droit de
voir garantis et protégés les renseignements personnels qui les
concernent, et dans ce sens-là, le projet de loi 68 qui est devant nous
est un grand pas en avant.
Dans 5 ans, s'il faut le revoir, il va être revu automatiquement
par une commission parlementaire. Si d'autres ajustements devenaient
nécessaires, eh bien, ils se feront à ce moment-là, mais
je pense que les grands vainqueurs du projet de loi, ce n'est pas le
gouvernement, ce n'est pas l'Opposition, ce sont les citoyens que nous
représentons. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. Est-ce qu'il y a d'autres
intervenants? M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de
l'Opposition officielle, je vous cède la parole.
M. François Gendron
M. Gendron: Oui, M. le Président. Je ne peux pas ne pas
intervenir sur un projet de loi comme ça, parce qu'il semble que c'est
un fait presque unique en cette Chambre que le gouvernement et l'Opposition
auront réussi à contrer tous les lobbies, qu'ils soient bons ou
mauvais, contre certaines orientations dans ce projet de loi. Le ministre
lui-même, dans son commentaire, suite à l'adoption du rapport,
indiquait à cette Chambre qu'il s'agit d'un projet de loi qui aurait
reçu la pleine, entière et totale unanimité de tous les
parlementaires, ce qui serait un fait sans précédent.
Je sais, pour en avoir jasé avec notre collègue
responsable du dossier des communications, que, dans les faits, le ministre
responsable du projet de loi a donné suite à plusieurs
revendications, à plusieurs suggestions. Dans certains cas, il
s'agissait d'amendements proposés par l'Opposition officielle. Mais,
dans un projet de loi, l'important, ce n'est pas l'endroit d'où viennent
les suggestions, c'est de s'assurer que les parlementaires, les gens qui ont
à ratifier dans toutes ses étapes un projet de loi conviennent
qu'il s'agit là d'un projet de loi qui a reçu l'assentiment du
plus grand nombre de parlementaires quant à sa conformité, quant
à l'aspect de répondre aux volontés et aux besoins du
milieu.
Je veux juste rappeler qu'il s'agissait quand même d'un sujet
fragile. On sait que, dans l'opinion publique, il n'est quand même pas
facile de traiter de cette question-là, à savoir toute la
confidentialité, toute la pertinence concernant les renseignements
personnels. Juste une image, quand on regarde un titre, par exemple, comme
celui qu'on voit ce matin, dans Le Devoir: «Les renseignements
personnels exportés seront protégés», bien, c'est
une bonne nouvelle. C'est une bonne nouvelle d'apprendre que les renseignements
personnels exportés seront protégés, mais c'était
juste pour illustrer comment le sujet est fragile, comment les attentes des
concernés sont grandes, parce qu'on veut absolument avoir toutes les
garanties, parce que c'est un secteur très susceptible et très
particulier. Il y a également énormément d'avis
d'éthique, mais il y a également énormément de
questions d'éthique concernant un projet de loi de cette nature.
Lorsqu'on voit, par exemple... Si je reviens à l'article du Devoir,
on laisse voir que dorénavant une entreprise qui communiquera
à l'extérieur du
Québec des renseignements personnels sur des résidents
québécois devra, au préalable, s'assurer que ces
renseignements seront utilisés selon le consentement donné par
les personnes en cause. Alors, il s'agit là d'une garantie
intéressante qui offre un minimum de protection pour éviter que
les informations que le monde moderne peut obtenir d'une façon
très rapide et très facile, compte tenu de l'évolution
absolument sans précédent dans ce monde fascinant et
extraordinaire des communications... Ce n'est pas parce que c'est facile, M. le
Président, qu'on ne doit pas prendre les garanties nécessaires
pour s'assurer que l'ensemble des informations concernant des hommes et des
femmes, des individus, deviennent objet public, compte tenu de la force de la
médiatisation et des moyens modernes de communication.
Il y a des amendements qui avaient été demandés par
plusieurs intervenants. Je voudrais juste en rappeler quelques-uns. Quand on
pense, par exemple, que, dans le futur, une banque devra communiquer à
la personne concernée le rapport de crédit sur lequel elle s'est
fondée pour lui accorder ou lui refuser un prêt, bien, c'est
important, mais il faut sécuriser cette information-là. C'est
important de savoir que dorénavant on pourra en
bénéficier, mais je ne pense pas que, si on avait
procédé sans précaution dans ce projet de loi là et
qu'on n'avait pas tout mis en oeuvre pour éviter les écueils...U
y en avait tout un là, un écueil, à savoir que ce type
d'information puisse circuler librement quand on connaît l'ensemble des
informations qu'une institution financière, avec raison, va exiger pour
porter un jugement ? qualitatif dans certains cas, quantitatif dans
d'autres ? dépendamment des sommes qui sont en cause, c'est quand
même une disposition intéressante de constater qu'elle sera
protégée.
Les entreprises seront requises de prendre les moyens pour que les
renseignements qu'elles utilisent soient à jour et exacts lorsqu'elles
les utilisent pour prendre une décision sur un citoyen. Bien, c'est
encore un aspect important, parce qu'on sait que, par la rapidité de la
capacité d'emmagasiner l'information, de la colli-ger et de l'utiliser,
si en plus on n'a pas de garantie que ce type d'information demeurera ce que
j'appelle la réalité quotidienne ? parce qu'il n'est jamais
intéressant que des informations confidentielles ou personnelles '
coulent, mais c'est encore moins intéressant quand elles sont inexactes
? quand, en plus, ces renseignements-là sont sur la place publique,
bien, on souhaite au moins qu'ils correspondent aux faits. Ça peut ne
pas être intéressant, mais il y a au moins l'aspect que c'est
conforme à la vérité objective des faits, et, dans ce
sens-là, je pense que c'est une disposition intéressante.
Il y avait eu toutes sortes de craintes, toutes sortes de
réserves. Moi, je ne suis pas le porte-parole de ce dossier-là,
mais je me rappelle avoir lu les appréhensions du monde de la presse,
les journalistes, qui prétendaient que le projet de loi pourrait
éventuellement les handicaper quant à leur rôle, disent-ils
ou disent-elles, quand c'est des journalistes féminins, de toujours
souscrire à leur responsabilité professionnelle qui est de
s'assurer que le public, au sens large du terme, ait ce droit
démocratique à l'information publique. Alors, nous en convenons,
on est complètement d'accord avec ça. Cependant, c'est important
de s'assurer que ces gens qui ont la responsabilité de divulguer
l'information puissent avoir l'assurance que la loi ne vient pas
interférer ou intervenir dans leur travail pour s'assurer qu'ils
puissent faire adéquatement leur boulot.
Il y a également des pouvoirs, des nouveaux pouvoirs
donnés à la Commission d'accès à l'information,
qui, comme il se doit... Parce qu'on aura beau faire toutes les
unanimités possibles, on aura beau faire tous les ajustements possibles
et viser à une plus grande bonification du projet de loi, je connais peu
de projets de loi qui, dans leur application, ne suscitent pas ou ne
soulèvent pas des zones grises, des imperfections ou des zones
d'interprétation. Il est toujours requis d'avoir un tiers qui puisse
porter des jugements sur les litiges qu'un projet de loi peut soulever, et la
Commission, d'accès à l'information arbitrera les
mésententes et veillera à l'application de la loi. Cependant, on
ne veut pas que le législateur pose des gestes qui auraient comme
conséquence de nous conduire constamment à la Commission
d'accès, et c'est pour ça que c'est important, M. le
Président, d'avoir une législation qui est la plus claire
possible, la plus objective possible et qui ne permet pas constamment de la
remettre en question, peu importent les bons motifs qui pourraient lui donner
suite. (16 h 10)
Les entreprises ont fait pression jusqu'à la dernière
minute pour que le ministre dilue le projet de loi. Le 3 juin dernier, les
principales associations de gens d'affaires du Québec, incluant la
Chambre de commerce, le Conseil du patronat et l'Association des banquiers,
avaient réclamé une vingtaine d'amendements. Ils sont même
allés jusqu'au premier ministre, prétextant que ces
amendements-là étaient ultimement requis, majeurs. L'information
qu'on a de notre porte-parole, c'est que le ministre a tenu compte d'un certain
nombre de leurs revendications, qui, selon la façon de voir de notre
porte-parole, étaient légitimes, étaient convenantes,
étaient normales. Et l'information qu'on a aujourd'hui, c'est que le
ministre en a pris bonne remarque et qu'il a assoupli certaines règles
relatives à la communication de renseignements personnels afin de
faciliter l'application.
Il a également tenu compte des représentations faites par
les banquiers, les marchands ou les compagnies d'aviation de manière
à ce que la loi n'empêche pas les transactions
téléphoniques par cartes de crédit, parce que, là,
il y avait danger de mettre en péril un certain nombre de ces
institutions-là. C'est leur fonction. Imaginez, si elles ne peuvent pas
véhiculer quelque information que ce soit... Quand, moi, qui ai à
voyager très souvent, compte tenu de la région que j'aime bien et
où j'habite, c'est important que mon agence de voyages puisse avoir un
minimum d'information pour les réservations, et ainsi de suite; et on
nous indique que le
projet de loi a permis de faciliter ce type d'information afin que ces
compagnies-là puissent exercer leurs responsabilités
professionnelles et s'assurer qu'en même temps elles rendent service au
consommateur. Parce que ce n'est pas tout d'avoir les balises requises du
projet de loi; il faut quand même que le consommateur, en bout de ligne,
y trouve son compte. Il n'y a pas beaucoup de légitimité, M. le
Président, à faire une législation pour protéger
les renseignements personnels si, effectivement, l'ensemble des contribuables
qui auront toujours à assumer, d'une façon ou d'une autre, les
coûts de l'application des projets de loi ne s'y retrouvaient pas.
Et le projet de loi a permis d'apporter ces améliorations. C'est
un projet de loi qui vise à appliquer, comme mon collègue le
mentionnait, les dispositions qui sont déjà prévues dans
nos lois depuis plusieurs années au secteur public, de pouvoir les
transférer au secteur privé afin que ce type d'information puisse
également bénéficier d'un minimum de règles, de
balises pour que ça se fasse correctement et convenablement. Parce que,
je l'ai mentionné tantôt, dans une société
démocratique comme la nôtre, il s'agit quand même d'une
question d'éthique. Il s'agit d'une dimension tout à fait
fragile, et ça serait absolument impossible d'envisager un
fonctionnement au niveau de la communication des renseignements personnels sans
un maximum de protection. Et c'est ce que le projet de loi vise.
Et, à l'adoption du rapport, M. le Président, les
parlementaires, règle générale, ont à constater si
la commission parlementaire, qui devait travailler d'une façon un petit
peu plus ? entre guillemets ? bénédictine ou
jésuite, s'est assurée que les modifications ont
été apportées aux différents articles du projet de
loi, pour tenir compte des remarques qui ont été faites par une
multitude d'intervenants. Entre ce qui est habituel dans nos projets de loi,
à savoir adopter le principe d'une chose et, après ça,
aller voir d'une façon beaucoup plus détaillée comment les
modalités du projet de loi, par l'étude article par article,
peuvent véhiculer correctement et convenablement le principe dudit
projet de loi... L'information que j'ai, moi, comme parlementaire, de ce
côté-ci de cette Chambre, c'est qu'effectivement la commission a
fait correctement son travail ? la commission parlementaire ? et au
niveau de chacun des articles il y a un travail très, très,
très, très précis d'analyse qui a été fait.
Et le porte-parole de l'Opposition officielle nous dit que nous n'avons aucune
réticence à collaborer et à donner notre consentement et
notre assentiment à l'adoption de ce projet de loi là, et c'est
ce que je voulais faire par ma courte intervention, M. le Président.
Merci.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci. Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest. Je cède la parole à M. le
député de Westmount.
M. Richard B. Holden M. Holden: Thank you, Mr. Speaker. This is a
bill which has a lot of its source in the general statement of the law which
comes out of the amendments to the new Civil Code, which all of the lawyers,
judges and notaries are studying right now and which comes into effect on the
1st of January 1994. As the bill says, the object of the bill is to establish
the exercise of rights and obligations resulting from the provisions of the
Civil Code concerning the protection of personal information.
There are very few articles in the Code, but they are the general
statement of privacy, article 35 to article 41. When we were studying the Civil
Code, it was always understood that the details of the protection of those
rights would be contained in the legislation which we are discussing today. In
particular, the article which comes out of the Civil Code is article 24:
«Every person carrying on an enterprise who holds a file on another
person must, at the request of the person concerned, confirm the existence of
the file and indicate its purpose. He must also inform the person of the
provisions of law concerning the consultation and rectification of personal
information contained in the file...».
All of the problems that we had in the past relating to credit bureaus
and getting our credit reports have been dealt with in the law, and it is going
to be a great relief to a large number of people, as the Member from
Pointe-aux-Trembles was saying. Right now, you have to go very far down, past
his riding, into ville d'Anjou in order to go to an office where you will find
? and I have done it myself, Mr. Speaker ? a large number of people
waiting in line. You take a number and you wait, and you wait, and you wait,
and then you go into a little booth and you talk to one of the people in the
company and they look at you as though you are not a hundred percent legit
because you are asking for a copy of your own credit report, and finally, and
almost reluctantly, they give it to you.
Well now, Mr. Speaker, we have got something really solid here where we
can get credit reports, and I think it is going to make a lot of people happy.
I, for one, find it extremely helpful. In my riding, there is the Reader's
Digest company. It is one of the few industries that really operates in my
riding and there are lot of people employed there. The legal council for the
Reader's Digest, Mme Robins, is also very active in the association, the
Canadian Direct Marketing Association. And they had serious concerns which I
think they raised both with the Minister and with the Opposition, very
legitimate concerns about direct mailing. Of course, under the bill, there is
something very new in the law of Québec. I think it is the first time in
the history of legislation of this kind in North America that the idea of
negative consent has been put into the law. I know that the Direct Marketing
people ? and there are many of them, it is a big industry ? have
studied the legislation around the world, and I am told by them that this is
the best legislation they have seen. (16 h 20)
So, I think all the people who worked on this legislation can take a
certain amount of pride in the fact
that this legislation is the most modern legislation in the world, and
in particular this idea of negative consent, which appears in articles 20, 21
and 22. It is an interesting concept because, as it says: «A person
carrying on an enterprise may [...] communicate a nominative list ? that
is a list of names, of addresses and telephone numbers ? or information to
be used for the establishment of such a list...» They sell these lists. I
am sure the public knows that these lists are sold. You get this flood of mail
in your mailbox and a lot of times you throw it away and you wish you had not
gotten it in the first place.
Well, now, under this legislation, you can notify the sender of this
type of literature by sending him a note saying you do not want to receive
their handouts and their mailings. And that is what they refer to in the
industry as a negative consent, so that it is assumed that you will take it
until you tell them the contrary. Well, it is not so surprising that this is
acceptable also to the industry that does the mailing, because if I do not want
to get that mail, surely to God it is in their interest not to send it to me
and waste the time, and the money and the paper sending me something I did not
want in the first place. So, this coincides with the wishes of the people who
do not want to get it and the wishes of the people who are sending it.
And so, it is an extremely important and reasonable principle that has
been put into our law, and I think it is going to be extremely helpful. We all
get this incredible volume of mail ? you call it mail, that is dignifying
it ? these things that come in the mail that you really wish... And we, I
guess, as members of the National Assembly, probably get more of it than almost
anybody in the country, but I do not suppose many in the National Assembly are
going to send their name into the various organizations saying they do not want
to get it. But those who do not want to get it, Mr. Speaker, can now say so.
This is a big, big plus in this legislation. It has also been done, I gather,
by long discussions, and amendments and agreements between the industry and the
Government, and now everybody seems to be happy. So, I think if everybody can
be happy with a piece of legislation, including the Opposition, then I think we
have gone a long way in legislating, and probably the people that are listening
to us and watching us are rather pleased to see that for once we can all agree
on something.
The other elements that have been spoken about having to do with various
aspects of who can refuse to give out information and the lengthy list of
persons who may give out information, it is of great interest. I have not been
involved in the study of the law in detail, but looking at it today I see that,
for instance, a person carrying on any kind of a business and who wants to
communicate personal information contained in a file may do so, even without
the consent of that person if it is information to a person to whom the
information must be communicated for legal purposes, for public body, for
instance, under the protection of personal informa- tion through a
representative that collects such information; a person having the power to
compel communication ? that would be, I presume, under a form of subpoena;
a person to whom the information must be communicated by reason of urgency of a
situation that threatens the life, health or safety of a person; a person who
is authorized to use the information for study and research or for statistical
purposes; a person with whom he is bound by an information service contract and
who is authorized by law to collect debts, that is a collection agency; and, of
course, all of the people that are mentioned in the case of the sale and
sending of nominative lists, Direct Marketing, for example. And, an interesting
paragraph: «A detective or security agency holding a permit issued under
the Act respecting detective or security agencies may, without the consent of
the person concerned, communicate personal information it holds on another
person to its principal or its authorized representatives.» It would have
been rather interesting if somebody who had consulted a detective agency was
not then allowed to find out the information that his or her detective had
discovered in the course of their examination.
Of course, all this, if there are problems with it, will end up in the
access to information commission ? la Commission d'accès ?
which, Mr. Speaker, I understand is a highly respected commission, even though
it has not been in existence for a long time. I guess their work will increase
substantially as a result of the provisions of this legislation. But it is good
to know that an act like this, which is reasonable, which is acceptable, mostly
to, I guess, the population in general, certainly to the Government and to the
Opposition, nevertheless, if there are problems, it will be open to the
citizens or open to the businesses, open to all those who are concerned in this
legislation, it will be open to them to go to the Commission d'accès,
which I understand and I am lead to believe is a highly competent and highly
serious organization. And I am glad to see that the Government has not
legislated a document which would end up in the courts, because I do not think
that this is the kind of item which should end up as an argument in court. Even
though I may be limiting the ability of some lawyers to get involved in legal
suits which will go on and become lengthy precedents, I do not think this is
the kind of situation that we want to spend our time arguing about in
court.
So, in general, Mr. Speaker, as the Member for Pointe-aux-Trembles said
and as a number of Opposition spokepeople have said, this is a law which
everybody is satisfied with, which has been worked on. It may well be the last
law adopted under the title of Minister of Communications, so we certainly want
to congratulate the Minister as this is his swan song, as it were. But it is a
swan song which everybody is singing together, Mr. Speaker.
M. Cannon: I thought you were going to say the ugly duckling.
M. Holden: No, no, it is a swan song that everybody is singing
together, Mr. Speaker. We want to congratulate the Minister and congratulate
the Opposition spokesman, and we want to say that we are certainly waiting for
the vote to come so that we can acknowledge our agreement to this legislation.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Westmount. Oui, M. le député de
Lévis, sur le projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements
personnels dans le secteur privé. Nous sommes à l'étape de
la prise en considération du rapport. Allez-y.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, c'est un domaine dans lequel,
à plusieurs reprises, j'ai eu à intervenir dans les années
passées parce que j'ai toujours pensé que le gouvernement du
Québec n'était pas assez sévère avec les
renseignements privés. Et le principal coupable, c'est le gouvernement
lui-même, parce que, en réalité, quand on voit actuellement
le gouvernement qui demande à toute minute aux gens de remplir toutes
sortes de formulaires avec un maximum de renseignements, dans les trois quarts
des cas dont il n'a pas besoin, en réalité, il crée le
problème. Il met en marche des processus qui font en sorte que le
Québec est candidat pour le prix «Big Brother» dans le monde
actuellement, parce que, justement, on établit des listes, des fiches
sur tout le monde dans notre société, à tel point, M. le
Président, qu'aujourd'hui le gouvernement considère comme une
source de revenus de diffuser ces renseignements-là. (16 h 30)
Nous avons étudié, par exemple, actuellement, le projet de
loi 91 sur le Code de la sécurité routière, où le
ministre des Finances, qui fait flèche de tout bois, regarde partout
où il peut siphonner de l'argent. Vous voyez, à l'article 31 de
cette loi 91, on dit, au paragraphe 18°: «fixer les frais payables
pour l'échange électronique de données relatives à
l'application du code avec toute personne morale de droit public ou de droit
privé.» Qu'est-ce que ça veut dire, M. le Président,
au fond? Ça veut dire que le ministre des Finances dit à la
Société de l'assurance automobile du Québec: On devrait
charger des frais pour les renseignements qu'on communique, de sorte que
ça va devenir une source de revenus pour le gouvernement. Et on sait
comment, actuellement, les institutions gouvernementales peuvent charger cher
pour donner accès à certains documents.
Je donne l'exemple de quelqu'un qui devait aller, la semaine
dernière, au palais de justice de Québec, et qui me disait qu'il
avait dû payer 2 $ la page pour une photocopie, M. le Président;
50 pages, ça fait 100 $. Dans ce sens-là, les documents auxquels
les gens ont droit parce que ce sont des documents publics, ils sont
difficilement accessibles parce qu'on charge cher. Par ailleurs, des
renseignements auxquels les entreprises ne devraient pas avoir accès, ou
même les organismes gouvernementaux, ils sont facilement accessibles, et
on fait obligation aux gens de les fournir.
M. le Président, on se retrouve devant une situation,
actuellement, où on est obligé de légiférer, pour
faire quoi? Pour protéger la vie privée des gens. Sauf que, M. le
Président, on a une belle loi. J'ai remarqué tantôt que...
Vous avez remarqué que même les députés de
l'Opposition ont dit qu'il y avait une loi qui ajoutait des choses au point de
vue de la protection des droits privés, sauf une chose ? on n'en a
pas pas parlé actuellement ? c'est le coût de son
application. Pourquoi? Pour protéger les gens contre toutes sortes de
renseignements qui vont être compilés sur leur compte et, pour se
protéger, il faudra faire appel à un organisme public, la
Commission d'accès à l'information, pour laquelle, M. le
Président, avec les pouvoirs qu'on vient de lui donner dans cette loi,
ça va prendre beaucoup de personnel additionnel, si on veut que les
droits veuillent dirent quelque chose. Or, on sait qu'au Québec
actuellement, quand vous appelez un organisme, ça prend des fois des
jours d'attente avant d'avoir une ligne. Des jours d'attente avant d'avoir une
ligne.
Il y a quelqu'un qui me disait récemment qu'il a mis le
numéro sur le pilote automatique et il a pesé sur le piton pour
que ça sonne tout le temps. Il a sonné toute la journée
et, à 16 h 30 ou 17 heures, je ne me rappelle pas, on lui a dit que le
monde était parti, que ça reviendrait à demain. Oui. C'est
le cas. Et, de plus en plus de gens se rendent compte que, actuellement,
l'économie que le gouvernement fait se fait souvent sur le dos des
gens.
Dans ce cas-ci, quand on voit les Règles de preuve et de
procédure à l'application de la loi, à la page 19 et
suivantes, on se rend compte que la Commission d'accès à
l'information va avoir un rôle considérable pour donner de
l'information, pour enquêter. Puisque je regarde les... Remarquez bien
que ces éléments-là arrivent seulement, M. le
Président, aux articles 73 et suivants. Parce qu'avant les articles 73
et suivants on a un nombre de dispositions, de choses qu'il faudra surveiller,
qu'il faudra éviter, contre lesquelles les gens pourront se
prémunir. Sauf que, la façon de le faire, ça sera par la
Commission d'accès à l'information.
On dit, premièrement ? regardez bien ? Information,
article 74: «La Commission est chargée de renseigner le public sur
les droits et obligations résultant des dispositions de la
présente loi et sur toute matière relative à la protection
des renseignements personnels.» Ça va prendre du monde pour donner
des renseignements aux gens! Article 75: «La Commission peut
élaborer et proposer aux personnes qui exploitent une entreprise et
recueillent, détiennent, utilisent ou communiquent à des tiers
des renseignements personnels, des modèles de codes de conduite internes
favorisant l'application de la présente loi. Elle peut de plus
prêter assistance aux personnes qui désirent adopter ces
codes.» M. le Président, ça va prendre beaucoup de monde
pour appliquer ça également.
Enquête ? il n'y a rien de plus long qu'une en-
quête ? article 76: «La Commission peut, de sa propre
initiative ou sur la plainte d'une personne intéressée, faire
enquête ou charger une personne de faire enquête sur toute
matière relative à la protection des renseignements personnels
ainsi que sur les pratiques d'une personne qui exploite une entreprise et
recueille, détient, utilise ou communique à des tiers de tels
renseignements.» Donc pouvoir d'enquête assez considérable.
Ça prend du monde pour appliquer ça également. Article 77:
«Au terme d'une enquête sur les pratiques d'une personne en
matière de collecte, de conservation, de communication ou d'utilisation
de renseignements personnels, la Commission peut, après lui avoir fourni
l'occasion de présenter ses observations, lui recommander ou lui
ordonner l'application de toute mesure corrective propre à assurer la
protection des renseignements personnels ou à permettre leur
accès par les personnes concernées. Elle peut fixer des
délais pour l'exécution des mesures qu'elle ordonne.» Il
faut beaucoup de monde aussi pour appliquer ça, M. le Président.
Autrement, on est dans le domaine des voeux pieux. Si on n'a pas le personnel
pour appliquer les lois qu'on fait adopter à l'Assemblée
nationale, on est dans le domaine des voeux pieux.
C'est pourquoi j'aimerais ça savoir, au point de vue de l'impact
financier de l'application de cette loi, quel budget on a prévu cette
année. Pour appliquer cette loi, quel budget, en 1994, en 1995? Parce
qu'on peut voter toutes les plus belles lois au monde, M. le Président,
sauf qu'il n'arrive rien si on ne les applique pas. Dans combien de cas, M. le
Président, nous avons des lois magnifiques avec des principes
mirobolants, mais qui ne sont jamais appliquées, qui ne sont jamais
appliquées!
Personne n'aurait pensé, par exemple... Personne n'aurait
pensé, M. le Président, lorsqu'on a voté la Loi sur
l'assurance automobile en cette Chambre, que le principal sinistré
serait le ministre des Finances, qui a collecté, depuis 1986, 2 400 000
000 $ à lui tout seul, alors que tous les assurés, ensemble, ont
collecté seulement 2 280 000 000 $. Le ministre des Finances a
décidé de prendre l'argent du monde, M. le Président.
Aujourd'hui, on serre les gens, on tord les gens pour essayer de donner de
l'argent au ministre des Finances. Aujourd'hui, quand on voit toutes les
dispositions qu'il y a pour l'application de la loi qui concerne la Commission
d'accès à l'information, j'aimerais que le ministre des
Communications nous dise quels sont les budgets, en termes de personnel, qu'il
a prévus pour appliquer sa loi, avec tous les articles...
Principalement, les articles 73 et suivants - 73, 74, 75, 76, 77, 78, 79, 80,
81, 82, 83 ? bien, 83, ce n'est pas nécessairement la Commission,
mais ça pourrait être la Commission ? 84, 85: toutes les
dispositions qui nécessitent une application, qui vont coûter
normalement beaucoup d'argent. Parce que ça va prendre beaucoup de
monde, parce que l'organisme, la conception du mécanisme a
été faite de telle façon que ça sera une
administration bureaucratique, administrative par la Commission d'accès
à l'informa- tion. Donc, nécessité de beaucoup de
personnel pour faire le travail. Ça, c'est une conception qu'on a faite
comme ça dans les projets de loi. Mais ça, ça peut
marcher, M. le Président, à condition qu'il y ait les budgets qui
vont avec l'application.
A ce moment-là, j'aimerais que le ministre nous dise quelles sont
les sommes d'argent qui ont été prévues, non seulement
pour cette année, mais pour les années à venir. Autrement,
si on nous dit qu'on n'a pas prévu de budget pour appliquer puis
administrer la loi, on est dans le domaine des voeux pieux, on est dans le
domaine de la théorie. Puis on sait, avec le ministre de la Justice,
à quel point c'est souvent le ministre de la théorie, puisque son
piédestal est tellement élevé, M. le Président,
que, quand il est debout sur son piédestal, la tête est dans les
nuages. C'est pour ça qu'il faut voir à quel point, dans
l'application de cette loi, on a adopté les mesures et les budgets en
conséquence, pour être capable d'appliquer la loi. Il ne s'agit
pas seulement de dire: II faudrait ci, puis avoir 73 articles de dispositions
pour protéger les gens, si on n'a pas prévu une cent pour
l'appliquer.
J'aimerais savoir, M. le Président, du ministre des
Communications, les montants d'argent qui sont nécessaires et qui sont
prévus à son ministère, d'autant plus qu'actuellement,
pour économiser, il est prévu dans le discours sur le budget que
son ministère va disparaître! Vous comprenez que l'application ne
sera pas forte, M. le Président, si on prévoit même que le
ministère des Communications disparaîtra et que le chant du cygne,
ça soit d'avoir à voter un ensemble de dispositions de voeux
pieux, mais sans budget pour les appliquer. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Lévis. M. le député de Laprairie,
je vous cède la parole. Vous avez droit à une intervention de 10
minutes.
M. Denis Lazure
M. Lazure: De combien de minutes, M. le Président?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): De 10 minutes.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Alors, je voudrais
profiter de ces quelques minutes pour faire certains commentaires sur ce projet
de loi 68, qui est un peu le pendant de la loi sur l'accès à
l'information, qui touchait le secteur public, loi qui avait été
adoptée par le gouvernement du Parti québécois, il y a une
dizaine d'années. (16 h 40)
Quand on regarde le fonctionnement actuel des ministères, des
organismes publics, on se rend compte que, de plus en plus, la loi
d'accès à l'information est mal utilisée par les
ministères, par les ministres autant
que par les fonctionnaires, en ce sens que, trop souvent, on invoque la
loi d'accès à l'information, non pas pour faciliter la
circulation de l'information au grand public, mais pour limiter l'accès
à l'information de la part du grand public. Combien de fois voit-on dans
les journaux que telle ou telle demande d'une information tout à fait
publique est refusée par le ministère en question ou l'organisme
d'État en question et que la personne doit aller devant les tribunaux
pour plaider sa cause? On l'a vu, au ministère de l'Environnement,
à maintes et maintes reprises, M. le Président.
Avant de clore ce débat sur le projet de loi 68, je voudrais
qu'on s'assure que, d'une part, l'individu, le particulier verra sa vie
privée respectée, et moi, je souhaiterais que cette loi et
l'application de la loi mettent le citoyen et la citoyenne au centre des
préoccupations. Dans le domaine médical, il y a une vieille
tradition qui veut que le médecin ou le professionnel de la santé
puisse être relevé de son secret avec le consentement du patient,
du malade, si bien que toute information concernant un malade ne se transmet
à un autre médecin ou à un hôpital que par le
consentement écrit du malade. Cependant, avec le développement de
l'informatique, on se rend compte que l'information circule de façon
très libre, actuellement, l'information qui touche l'individu dans ce
qu'il a de plus intime, souvent dans son corps, dans sa santé, dans ses
maladies et que cette information circule d'un hôpital à un autre,
de l'hôpital au ministère.
M. le Président, je voudrais aborder la discussion sur le projet
de loi 68 dans cette optique du respect à l'intimité au
caractère privé de la vie de chacun et de chacune. Dans
l'ensemble, ce projet de loi va recevoir le concours de l'Opposition. Le
député de Pointe-aux-Trembles a participé aux
débats, en commission parlementaire. Il a apporté des suggestions
qui ont bonifié le projet de loi. Plusieurs groupes ont apporté
des suggestions qui ont amélioré ce projet de loi. Mais il reste
que, sur certains points particuliers, entre autres l'article 17 du projet de
loi, l'Opposition n'a pas eu satisfaction. L'Opposition a demandé de
restreindre l'article 17. L'article 17, c'est celui qui dit ceci: Communication
à des tiers. Une personne qui exploite une entreprise peut, sans le
consentement de la personne concernée, communiquer un renseignement
personnel contenu dans un dossier qu'elle détient sur autrui... Et
là, il y a toute une liste d'exceptions: il y a 9 circonstances
où on ne demandera pas à la personne concernée le
consentement pour que des informations privilégiées, qui
apparaissent dans son dossier, soient transmises à d'autres
personnes.
Dans le secteur de la sécurité du revenu, de l'aide
sociale, par exemple, depuis l'infâme loi 37 du gouvernement actuel, il y
a systématiquement des enquêtes qui sont faites auprès des
tiers. Alors, le tiers, ça peut être un gérant de caisse
populaire, ça peut être un gérant de banque, comme
ça peut être un dépanneur, mais disons que c'est un
gérant de caisse populaire ou un gérant de banque, de par cet
article, l'article 17... Le gérant de caisse populaire peut très
bien, sans le consentement de son client qui a un compte à cette caisse,
transmettre des renseignements confidentiels qui apparaissent au dossier
à un agent vérificateur de l'aide sociale. C'est un exemple que
je vous donne.
Cette manière de procéder, en allant puiser chez des tiers
des renseignements qui touchent un individu ? la personne assistée
sociale ? crée un climat de suspicion, de méfiance, si bien
que l'Assemblée des évêques s'est vue obligée, en
conscience, c'est le cas de le dire, de dénoncer la loi 37, de
dénoncer tout le caractère de délation qui existe dans la
loi 37. Je me rends compte, M. le Président, que l'article 17 de ce
projet de loi 68 qui, dans l'ensemble, est un bon projet de loi, l'article 17
est trop large. Il ouvre la porte à ces abus, il ouvre la porte à
la violation du caractère privé des individus par des tiers.
M. le Président, je sais que le ministre a tenu compte des
représentations qui lui ont été faites par plusieurs
groupements et que, dans l'ensemble, je pense qu'il y a 2 améliorations
importantes qui ont été apportées. C'est justement ce dont
je parlais tantôt: le consentement. Nous sommes parfaitement satisfaits
que le consentement, dans la plupart des cas, devra être exigé de
la personne concernée. Mais, là où nous ne sommes pas
d'accord, c'est quand, par un article, l'article 17, le ministre fait une
enumeration de 9 situations où il pourra procéder, où
l'entreprise privée pourra procéder sans demander ce
consentement.
Je pense que le ministre a aussi tenu compte des objections des
entreprises qui se plaignaient à bon droit que, dans le projet initial,
il y avait trop de paperasse, il y avait trop de bureaucratie impliquée.
On a simplifié les procédures, et je pense que ça, c'est
une amélioration intéressante, M. le Président.
Je pense que, dans une période où, de plus en plus,
l'individu est devenu victime de l'informatique, de la bureaucratie, il y a
nécessité de resserrer l'application de cette loi qui, dans
l'ensemble, peut être remplie de bons principes, mais si on n'a pas les
moyens nécessaires pour exercer une surveillance, je pense que les bons
principes demeureront des voeux pieux.
Mon collègue de Lévis a fait remarquer tout à
l'heure, avec raison, que la Commission d'accès à l'information
devra se voir donner les moyens pour surveiller l'application de cette loi. La
Commission d'accès à l'information devra être vigilante
pour que l'esprit de protection du droit à la vie privée soit
maintenu et pour éviter les abus qu'on voit maintenant dans le secteur
public. À l'inverse, dans le secteur public, on se rend compte, comme je
le disais au début de mes remarques, que, de plus en plus, on se sert
d'une excellente loi, la loi d'accès à l'information, pour couper
l'information, pour empêcher le citoyen d'avoir accès à
l'information. Il faut craindre l'inverse dans le secteur privé. Il faut
craindre que, par manque de surveillance, les entreprises privées
utilisent à tort et à travers des renseignements
privilégiés qui sont dans le dossier de chaque individu pour
rendre la vie plus facile aux entreprises commerciales.
M. le Président, je vous répète que l'Opposition,
tout en déplorant que certains amendements n'aient pas été
retenus par le ministre, nous concluons, dans l'ensemble, que c'est une loi qui
doit retenir notre assentiment, et c'est avec plaisir que nous le donnerons,
tout en maintenant cette mise en garde. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de La Prairie. Sur la même motion, je cède la
parole à M. le député de
Rouyn-Noranda?Témiscamin-gue.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Oui, M. le Président. À cette
étape de la prise en considération du rapport de la commission
qui a étudié le projet de loi 68, il est important que nous
puissions intervenir, un certain nombre de députés de
l'Opposition, parce qu'il y a un très grand nombre de dimensions dans ce
projet de loi qui touchent, évidemment, plusieurs ministères ou
plusieurs dimensions de la vie publique, cela va de soi,
québécoise et des secteurs d'activité collectifs. (16 h
50)
Si nous avons montré, dès le départ, un
intérêt extrêmement favorable pour ce projet de loi 68, qui
touche la protection des renseignements personnels dans le secteur
privé... Parce qu'il faut se rappeler, M. le Président, donc, que
nous avions déjà, depuis un moment, une loi qui encadrait les
renseignements nominatifs dans le secteur public et pour les organismes
publics, mais nous n'avions pas de loi, nous n'avions pas de texte
législatif qui encadrait les renseignements personnels dans le secteur
privé. Alors, nous nous sommes associés, M. le Président,
à cette démarche dès le départ. Nous avons, au
niveau de la commission parlementaire, effectivement suggéré un
bon nombre d'amendements, en tout cas, tout en offrant notre collaboration la
plus entière au gouvernement, parce que nous n'avons pas le droit ?
nous le constations et nous le constatons toujours, M. le Président
? de rater notre coup dans ce secteur de la protection des renseignements
personnels dans le secteur privé.
Comme il s'agit d'un secteur d'activité qui touche de plus en
plus d'individus, de plus en plus fréquemment et d'une façon de
plus en plus marquée, il existe, chez nos concitoyens et nos
concitoyennes, à n'en pas douter, une espèce de crainte, souvent
justifiée, que soient utilisés, en fait, contre eux des
renseignements qui sont strictement nominatifs, c'est-à-dire qui sont
strictement personnels. On a probablement tous eu ici, comme membres de
l'Assemblée nationale, quelqu'un qui s'est présenté, soit
à notre bureau, quelqu'un de notre environnement, quelqu'un dans notre
entourage qui a été ou s'est senti, un jour ou l'autre, victime
de l'espèce de collection de données, de renseignements, dont on
ne savait pas qu'ils étaient consignés dans une banque et, tout
à coup, on s'aperçoit que tout ça est interrelié,
qu'il y a une espèce de «Big Brother» qui se promène
dans le décor, que des compagnies, parce que vous avez
décidé de donner 50 $ à une bonne oeuvre comme la Croix
Rouge du Québec, eh bien, vous recevez, dans la même année,
une publicité de telle entreprise ou de telle autre entreprise, et vous
vous demandez comment ça se fait que le Reader's Digest a
décidé, tout à coup, de vous faire gagner 1 000 000 $.
Parce que vous avez tous reçu ça chez vous, là, les
gens qui nous écoutent aussi, vous avez reçu ça, un beau
matin, un beau petit dépliant tout en couleurs, et vous avez
été choisi, vous êtes millionnaire depuis ce matin. Vous ne
le saviez pas, parce que vous aviez ouvert la porte seulement après
dîner, mais, dans les faits, vous étiez millionnaire depuis le
matin, parce que votre numéro avait été tiré, mais
complètement au hasard. Vous n'aviez rien demandé. Vous n'aviez
rien acheté. Vous n'aviez rien dépensé, mais tout à
coup, on vous annonce que vous avez gagné 1 000 000 $.
Il y a une légère condition, M. le Président, c'est
qu'il faut généralement que vous receviez un représentant
de l'entreprise qui, par grandeur d'âme, vient vous porter votre million,
hein! Ah, c'est un léger détail de rencontrer la personne, mais
vous vous apercevez rapidement qu'il y a généralement des
conditions évidemment intenables pour que vous puissiez gagner, qu'il
s'agit d'un objet de rêverie, qu'il s'agit d'abord de
pénétrer chez l'individu et, pour peu que vous connaissiez des
gens de votre environnement ou des gens dans votre comté qui ont ouvert
leur porte ou entrouvert leur porte à ces représentants, bien,
ils se sont mis à vous vendre rapidement, qui une encyclopédie,
qui des produits assez fantastiques pour vos enfants, qui des produits assez
fantastiques pour votre maison, pour votre jardin, etc.
Et là, on est embarqué dans un processus de vente à
pression et, finalement, pour des personnes qui creusent un peu le dossier, on
s'aperçoit, M. le Président, qu'il y a eu à la base
même un trafic d'informations, c'est-à-dire que votre nom, qui
s'était retrouvé dans une banque de données ? et je
ne dis pas la banque de la Croix-Rouge, je le donnais à titre
illustratif seulement, ici, M. le Président ? mais bon nombre
d'entre nous, parce que nous sommes reconnus comme tels, les
Québécois, nous contribuons à des oeuvres humanitaires,
à des oeuvres de charité assez fréquemment pendant
l'année, et tout ça constitue ce qu'on appelle
généralement dans le jargon des «belles ventes», des
gens qui, bon, possèdent un certain revenu et qui sont possiblement des
consommateurs à convoiter de belle façon. Et, dans un
deuxième temps, eh bien, on sait qu'il y a des entreprises qui vont
aller offrir, qui vont acheter ces listes-là, parce que ce sont des
listes qualifiées. Ce n'est pas des listes pris au hasard. On sait que
c'est des gens qui ont un certain revenu, qui ont déjà fait
l'objet d'un examen de crédit.
Alors, on s'aperçoit donc, M. le Président, que ces
banques de données sont convoitées, qu'elles font l'objet, ces
banques de données, de trafic au sens
d'achat, de revente, de prêt, de location, parce que ça
constitue de bonnes sources pour aller chercher des montants d'argent pour des
oeuvres humanitaires, souhaitables, charitables, qui sont pour de bonnes
causes. Mais aussi, M. le Président, elles constituent également
ou elles pourraient constituer de bonnes bases pour de la vente sous pression
et également représenter éventuellement, par cumul des
renseignements, des dangers pour l'espèce de liberté,
l'espèce de libre arbitre qu'on doit laisser à la personne qui
exerce sa personnalité dans la société d'aujourd'hui.
Alors, qu'on ait une loi, M. le Président, la loi 68, pour
encadrer cela, pour encadrer les renseignements à caractère
privé, c'était une urgence au Québec, c'était
nécessaire, et nous n'avons pas hésité à collaborer
pour bonifier le projet de loi. Nous aurions aimé en avoir davantage,
avoir l'article 17, par exemple, beaucoup plus serré que ce que nous
avons dans le projet de loi actuellement, mais on dit souvent que «le
mieux est l'ennemi du bien». Et, bon, devant l'effort, devant un certain
nombre de concessions et de compréhensions et d'attitudes ? oui, il
faut le noter ? dans ce dossier-là, dans ce projet de loi 68, de la
part du gouvernement, bien, nous avons décidé que nous
appuierions, quitte à ce que nous puissions bonifier...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, Mme la
députée de Verchères. Je m'excuse, M. le
député.
Mme Dupuis: M. le Président, je trouve un petit peu
navrant que, sur un projet de loi ? c'est tout de même important
? qu'on n'ait pas le quorum à l'Assemblée.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, vous demandez le
quorum? Demandez le quorum. Il y a quorum. Il y a tout juste quorum. Allez-y,
M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue.
M. Trudel: Je suis heureux, M. le Président, de constater
qu'il y a un intérêt assez immense pour ce projet de loi. Vous
constatez aussi qu'il y a quorum, comme le député de Beauce-Sud,
qui comptait alentour de lui. Ouf! On a failli l'échapper, Mme la
députée de Groulx... Mais, cependant, oui, il faut noter qu'il y
a beaucoup de personnes qui assistent au débat.
Alors, M. le Président, donc je disais: Ce qui est
inquiétant, c'est la connexion, c'est l'interconnexion entre les banques
de données, qui rend les consommateurs nerveux, qui les rend inquiets,
qui rend les gens dans la population assez inquiets par rapport à ce
phénomène-là, et avec raison. Alors, on aurait aimé
que, dans l'article 17 du projet de loi, qui permet d'obtenir des
renseignements sans l'autorisation de la personne concernée ou
auprès de la personne concernée, le nombre de situations dans
lesquelles on peut procéder de telle manière soit le plus petit
possible, la liste la plus rapetissée possible. Parce que, M. le
Président, parfois, il y a des gens qui nous disent: Ah! Vous n'avez
rien à craindre. Vous vous faites des peurs pour rien. Vous n'avez pas
à... Écoutez, on rassemble ces informations, c'est pour votre
bien, c'est pour vous donner de meilleurs services.
M. le Président, moi, je suis le porte-parole de l'Opposition en
matière de santé et de services sociaux, et nous avons ce
phénomène-là en santé et services sociaux. Et c'est
pourquoi il y a eu une coalition la semaine dernière qui, devant le
projet ? je dis bien le projet ? de règlement
déposé au Conseil des ministres quant au nombre de renseignements
qu'il faudra obtenir de quelqu'un qui se fera hospitaliser, enfin des
établissements hospitaliers... C'est un nombre tellement
élevé, M. le Président, qu'il y a une coalition qui
craint, elle, pour la confidentialité.
Encore une fois, et je conclus là-dessus, M. le Président,
peut-être pas sur le moment immédiat, mais en pareille
matière, dans le secteur public, ici ? on ne voudrait surtout pas
que ça se produise dans le secteur privé ? il faut toujours
craindre le pire et il faut prendre toutes les précautions
nécessaires. Nous allons nous associer au projet de loi 68, nous allons
l'appuyer. Nous aurions aimé qu'il soit beaucoup plus corsé,
qu'il soit davantage resserré au niveau des renseignements que l'on peut
obtenir sans la permission de la personne, mais, M. le Président, je
conclus en disant, encore une fois, que le mieux est l'ennemi du bien, et nous
allons tenter de faire le mieux possible dans notre cas pour, encore une fois,
inciter le ministre, à la dernière étape du processus
d'adoption du projet de loi, à bonifier encore le projet de loi 68.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue. Je suis
prêt à reconnaître... Oui, M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, M. le Président, à ce moment-ci,
je vous demanderais la suspension des travaux pour 1 minute ou 2.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je suspends les
travaux de l'Assemblée pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 17 heures)
(Reprise à 17 h 4)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, nous reprenons les
travaux de l'Assemblée nationale. Nous sommes à débattre
le rapport de la commission de la culture sur le projet de loi 68, Loi sur la
protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Je suis
prêt à reconnaître le prochain intervenant... Oui.
M. Gendron: M. le Président, il n'y a pas d'autre
intervenant. On demanderait, à ce moment-ci, l'appel nominal.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, est-ce que le
rapport de la commission de la culture sur le projet de loi 68, Loi sur la
protection des renseignements personnels dans le secteur privé, est
adopté?
M. Bélisle: On va faire reporter le vote.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je comprends que vous
demandez le report du vote nominal.
M. Bélisle: On va faire reporter le vote à la
période des affaires courantes.
Vote reporté
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, le vote est
reporté à demain. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Alors, M. le Président, nous en sommes
rendus à l'article 22 de notre feuilleton.
Projet de loi 80 Adoption
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 22 de
notre feuilleton, M. le ministre des Approvisionnements et Services propose
l'adoption du projet de loi 80, Loi modifiant la Loi sur l'administration
financière, la Loi sur le ministère des Approvisionnements et
Services et d'autres dispositions législatives. M. le ministre, je vous
cède la parole. Vous avez droit à une intervention de 60
minutes.
M. Robert Dutil
M. Dutil: Merci, M. le Président. M. le Président,
le projet de loi 80, je le rappelle, avait pour objectif, prévoyait que
le gouvernement pourrait exempter, aux conditions qu'il détermine,
certains organismes publics de l'application de l'ensemble de la
réglementation gouvernementale portant sur les conditions des contrats
faits par les organismes publics et sur l'acquisition et les fournitures de
biens et services par de tels organismes. Un organisme ainsi exempté
devra adopter une politique sur ces sujets et la rendre publique.
Le projet de loi avait également quelques autres dispositions
d'ordre mineur qui ont été discutées et qui n'ont pas
été amendées lorsque nous avons procédé
à l'analyse article par article de ce projet de loi en commission
parlementaire.
Je rappelle, M. le Président, que nous avons déposé
à la commission parlementaire la liste des organismes et la
catégorie dans laquelle chacun de ces organismes devrait se retrouver.
Je pense que ça a eu pour effet de clarifier le débat. Nous
avions dans cette liste-là les organismes assujettis,
c'est-à-dire ceux qui étaient dans la catégorie I du
groupe A. Nous avions également les organismes qui étaient
partiellement assujettis, identifiés dans la catégorie I, groupe
B. Nous avions, de plus, les organismes exemptés avec conditions, dans
la catégorie II, groupe C. Et, finalement, les organismes
exemptés sans conditions dans la catégorie III, groupe D. Ces
divers organismes-là étaient présentés d'une
façon exhaustive. C'est le classement des organismes le plus bas qu'il
puisse y avoir. Il peut arriver que certains organismes qui sont
classés, par exemple, dans la catégorie II, soient placés
par le gouvernement dans la catégorie C, c'est-à-dire que les
organismes exemptés sans conditions, on peut décider de les
amener dans les organismes exemptés avec conditions, de telle sorte que
la décision gouvernementale ne pourra pas être autrement que plus
sévère que celle que nous avons présentée en
commission parlementaire. Et je pense qu'effectivement, suite au débat
que nous avons eu à ce moment-là, nous nous sommes bien compris,
et ça a eu pour effet de nous permettre d'adopter en commission
parlementaire le projet de loi, avec très peu de modifications.
C'est le dernier morceau législatif pour l'application du rapport
du Groupe de travail sur le processus d'octroi des contrats du gouvernement. Ce
rapport est mieux connu sous le nom du rapport Bernard. Il était
intitulé «L'efficacité dans la transparence». La
partie que nous avons touchée par ce projet de loi-là, la plus
importante, est celle que l'on retrouve à la page 12 du rapport, et
où on mentionnait, au niveau des organismes assujettis: «Par
conséquent, la règle actuelle qui veut qu'un organisme ne soit
assujetti que s'il est désigné serait remplacée par la
règle que tout organisme est assujetti à moins qu'il ne soit
exclu spécifiquement.»
Alors, ça complète la partie du rapport Bernard qui
touchait cette problématique-là et qui touchait ces
recommandations-là. Alors, je suis très heureux et très
fier, M. le Président, de pouvoir dire que cette pièce
législative, ce dernier point, ce dernier ajustement ? puisqu'il
s'agissait d'un projet de loi relativement petit, de quelques articles ?
met fin à notre processus législatif.
Quant au processus réglementaire, il est également presque
complètement en place, et l'entrée en vigueur de ce projet de loi
étant le 1er novembre 1993, nous pourrons dire, à cette
date-là, que ce rapport-là a été respecté
pour 43 des 45 recommandations. Les 2 recommandations qui ne sont pas
respectées, nous avons expliqué les raisons qui nous ont
amené à ne pas accepter les 2 recommandations en question. Alors,
j'en suis particulièrement fier M. le Président, et je vous
remercie beaucoup.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Mme la députée de Verchères, je vous cède la
parole. (17 h 10)
Mme Luce Dupuis Mme Dupuis: Merci, M. le Président.
Effective-
ment, le projet de loi 80 a trait aux attributions de contrats et aux
acquisitions de fournitures et de biens et services pour les organismes
gouvernementaux. Effectivement, comme le mentionnait le ministre, cette loi
conserve ou va dans le sens de l'esprit du rapport Bernard. Cependant, elle
vient modifier des erreurs qui s'étaient glissées aux lois 180 et
45, qui avaient pour effet que certains organismes se trouvaient à
changer de catégorie.
Au niveau de l'interprétation, ce n'était pas très
clair. Finalement, certains organismes, comme je vous dis, ça les
amenait à passer, par exemple, d'une catégorie où ils
n'étaient pas assujettis à une réglementation
gouvernementale, et là, ça pouvait devenir un petit peu
embêtant pour ces organismes-là qui se trouvaient pris dans une
sorte de carcan. Dans ce sens-là, la loi 80, oui, vient alléger
et libérer ces organismes-là, tout en conservant l'esprit du
rapport Bernard.
M. le Président, il a eu aussi pour effet, je pense,
côté positif, de clarifier les catégories. Bon, par
exemple, quand on parle de catégories, c'est des groupes qui sont
assujettis à une réglementation gouvernementale, d'autres qui
sont partiellement assujettis et d'autres qui ne le sont pas.
Bon, un exemple. Par exemple, dans la catégorie I, le groupe A,
ce sont des organismes qui sont assujettis à une réglementation
gouvernementale; ils sont au nombre de 77. Par exemple, la Commission des biens
culturels du Québec fait partie de cette catégorie. Dans la
catégorie I, groupe B, là, ce sont des organismes qui sont
partiellement assujettis: un exemple, la Commission des normes du travail. Et,
dans l'autre catégorie, dans la catégorie II, le groupe C, ce
sont des organismes qui sont exemptés de la réglementation
gouvernementale, mais, par contre, qui doivent rendre publique leur politique:
par exemple, Hydro-Québec, la Société des parcs
industriels. Il y a un autre groupe, qui est la catégorie III, le groupe
D; ce sont des organismes qui sont tout à fait exemptés de la
réglementation, sans aucune condition. Ensuite, il y a le groupe D, qui,
lui... la liste se continue. Maintenant, M. le Président, ça a eu
pour effet de clarifier. Ce n'est pas tout à fait les mêmes
groupes. Les titres changent un peu par rapport au rapport Bernard, mais
ça va dans le même esprit.
Ce projet de loi dit aussi qu'il reporte du mois d'avril au mois de
novembre 1993. Tous les organismes se doivent de respecter cette date et de
suivre le projet de loi, ou de se donner une réglementation, ou de
suivre la réglementation gouvernementale, ceux qui sont partiellement ou
tout à fait assujettis. Là, j'espère, M. le
Président, que ce ne sera pas reporté comme date, parce que les
organismes qui ne suivent pas la règle, au 1er novembre, devront
automatiquement tomber dans une catégorie plus sévère. Par
exemple, les partiellement assujettis tombent automatiquement dans le groupe
des organismes tout à fait assujettis à la
réglementation.
Cependant, je pense que ce serait important de s'assurer que ces
organismes ont toute l'information nécessaire, pour ne pas qu'ils
plaident l'ignorance, s'ils sont négligents, en disant: Nous n'avons pas
eu toutes les informations nécessaires. Je pense que ce serait pertinent
que le ministre voie à ce que ces organismes soient bien informés
et qu'on conserve la date du mois de novembre, qu'on ne la reporte pas une fois
de plus, et que ces organismes suivent ces règles-là. Je trouve
que c'est important, puisque ça va dans le sens du rapport Bernard.
Comme le disait le ministre, tantôt, nous sommes à l'application
de la 43e recommandation sur 45.
J'espère aussi que la loi 180 et la loi 45 ne nous obligeront pas
à passer une autre loi, en plus de la 80, pour corriger des erreurs de
parcours, mais que là, effectivement, ce sera la dernière fois
qu'on aura à corriger par des lois ? à cause des effets
secondaires qui n'avaient pas été prévus ou de
l'implication, au moment de l'application de la loi, de choses qui n'avaient
pas été prévues, et qui obligent à établir
une autre loi pour corriger les autres.
Ceci étant dit, M. le Président, effectivement, nous avons
apporté de légères modifications lors de l'étude
article par article, mais l'Opposition a l'intention d'approuver le projet de
loi et de donner son consentement. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée de Verchères. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions?
Mise aux voix
Est-ce que le projet de loi 80, Loi modifiant la Loi sur
l'administration financière, la Loi sur le ministère des
Approvisionnements et Services et d'autres dispositions législatives,
est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: L'article 52 de notre feuilleton, M. le
Président, s'il vous plaît.
Projet de loi 244 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Lefebvre): L'article 52 de notre
feuilleton. M. le député de Hull propose l'adoption du principe
du projet de loi 244, Loi concernant la compagnie de chemin de fer de
l'Outaouais. M. le député de Hull, je vous cède la
parole.
M. Chevrette: Compte tenu, M. le Président, que j'aurai un
minimum de 2 intervenants, et qu'ils sont en commission...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député
de Joliette, je vous ai demandé à 2 reprises, tout
à l'heure, de retirer vos propos relativement à l'incident qu'on
a vécu tout à l'heure. Tant et aussi longtemps que vous ne le
ferez pas, je ne peux pas vous céder la parole, je m'excuse. Alors si
vous... Très bien. M. le député de Hull, je vous
cède la parole.
M. Robert LeSage
M. LeSage: Merci, M. le Président. Le projet de loi 244,
intitulé originalement Loi concernant le Conseil de développement
touristique Hull-Chelsea-La Pêche inc., qui est devenu par la suite, avec
certaines modifications en commission parlementaire, Loi concernant la
compagnie de chemin de fer de l'Outaouais, a reçu l'assentiment des
membres de la commission de l'aménagement et des équipements
à la suite de 2 rencontres avec les intervenants de la région de
l'Outaouais québécois.
M. le Président, il faut se rappeler l'objectif de ce projet de
loi, qui est, grosso modo, de permettre ou d'accorder un statut de compagnie
ferroviaire à la compagnie de chemin de fer de l'Outaouais, qui a
été formée et autorisée par les
municipalités de Hull, Chelsea et La Pêche. Tout ça, M. le
Président, parce que le train, qui est déjà en
opération depuis quelques années, emprunte un tronçon de
la compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique et que cette dernière
autorise la compagnie Choo-Choo, qui opère présentement ce petit
train, à utiliser 1,9 km de sa ligne de chemin de fer. Mais, la
compagnie Canadien Pacifique avait déjà avisé les
autorités municipales de la ville de Hull qu'elle ne pouvait plus
consentir à cette autorisation à cause des assurances et des
poursuites qu'il pouvait y avoir sur ce petit tronçon de 1,9 km.
M. le Président, la ville de Hull et les municipalités
concernées ont donc jugé à propos de demander à
notre Législature d'autoriser la compagnie à opérer un
chemin de fer sur le réseau Hull-Wakefield. Pourquoi est-ce que les
autorités municipales de Hull voulaient tant et tenaient tant à
avoir un train touristique dans l'Outaouais? M. le Président, depuis
plusieurs années, les autorités locales tentent de diversifier
l'économie. Nous savons que Hull ? et l'Outaouais
québécois ? est située à proximité de
l'Ontario, plus précisément tout près d'Ottawa. La ville
d'Ottawa reçoit annuellement de 3000000à4000000de visiteurs.
Alors, ce que les autorités municipales veulent ? elles
réussissent assez bien ? c'est de tenter, dans la mesure du
possible, d'attirer le plus grand nombre de ces visiteurs du côté
québécois, dans l'Outaouais québécois, pour, bien
sûr, apporter un essor économique plus fort que ce que nous avons
présentement. Alors, les autorités municipales, avec l'ATO, ont
fait en sorte qu'une partie de ces touristes viennent à Hull. (17 h
20)
On sait que nous avons à Hull, présentement, le
Musée canadien des civilisations qui attire une bonne clientèle.
Nous avons également le ruisseau de la Bras- serie, qui est très
beau, l'ancien château d'eau, qui pourrait devenir un
théâtre, si jamais le monde artistique venait à s'entendre
avec la ville de Hull. En tout cas, M. le Président, ce que je peux vous
dire, c'est que la ministre des Affaires culturelles avait déjà
accordé une subvention pour le développement du château
d'eau, mais, pour des raisons que je ne connais pas plus à fond, c'est
que le domaine culturel a dit à la ministre qu'il
préférait attendre et qu'elle laisse de côté cette
subvention, parce que le maire du temps, peut-être qu'il n'était
pas trop, trop entiché à développer pour le moment
château d'eau. À tout événement, M. le
Président, mon gouvernement avait promis de l'argent, et je pense que,
si on s'entend avec les municipalités, bien, on pourra le regarder
à nouveau.
Les infrastructures dans la ville de Hull, M. le Président, il en
manque. On ne peut pas dire que les gens vont être attirés de
venir à Hull, demain matin, pour voir autre chose que ce qu'ils peuvent
voir, ailleurs dans la province. Comme je vous l'ai mentionné, nous
avons le Musée canadien des civilisations, mais lorsque les gens
arrivent à Ottawa, ils traversent le pont interprovincial, ou le pont du
Portage, puis ils peuvent retourner dans leur patelin, de l'autre
côté, sans même s'en rendre compte. Ce que l'on veut, c'est
que les gens qui viennent visiter le Musée canadien des civilisations
soient attirés par autre chose, pour faire en sorte qu'ils demeurent du
côté québécois. Le petit train de Hull-Wakefield, sa
gare de départ est située sur la rue Mont-calm. La ville de Hull
et l'ATO veulent y développer des infrastructures qui feraient en sorte
qu'on pourrait y construire prochainement un hôtel, un terrain de jeu. Il
y a déjà un golf qui y est installé. Il pourrait y avoir
un théâtre, il pourrait y avoir des marchés. La ville de
Hull a certaines idées, mais je peux vous dire que, présentement,
le petit train fonctionne à plein. Je discutais, récemment, avec
son directeur général, qui me disait que, pour les mois de
juillet et août, c'était vendu, complet, avec les tours
touristiques qui viennent à Ottawa.
Pourquoi Hull-Wakefield, M. le Président? C'est un trajet qui
longe la rivière Gatineau. C'est de toute beauté de voir ce
paysage qui suit la route de la voie ferrée. Si vous voyiez ce
décor féerique durant l'automne avec les couleurs, c'est de toute
beauté! Je vous invite, M. le Président, il faut que vous veniez
faire un petit tour sur le train touristique Hull-Wakefield au mois de
septembre, début octobre.
M. le Président, ce projet de loi a subi quelques modifications
en commission parlementaire, j'en conviens. Ce que j'ai de la misère
à comprendre, toutefois, c'est que, lorsque les intervenants sont venus
pour la première fois expliquer l'objet du projet de loi, le
député de Lévis et le député de
Jonquière s'acharnaient à poser certaines questions qui, à
mon point de vue, M. le Président, n'avaient pas leur raison
d'être. J'ose espérer, M. le Président, d'abord, que le
député de Lévis, que l'on connaît pour être un
défenseur du développement régional, et le
député de Jonquière, un ancien
maire, président de l'UMQ, qui a toujours pourfendu l'autonomie
municipale... J'ose espérer que c'était pour des raisons autres
que le petit train. Ça peut être des raisons politiques, ça
peut être des raisons de stratégie politique, ça peut
être quoi que ce soit, M. le Président, mais, de grâce,
j'espère que ce petit train va voir le jour et j'espère qu'il
aura l'assentiment des députés de l'Opposition.
M. le Président, moi, je fais confiance aux édiles
municipaux. J'y ai travaillé pendant de nombreuses années et je
sais pertinemment bien que le conseil municipal de Hull ne ferait jamais une
demande à la Législature provinciale ou à
l'Assemblée nationale pour faire du «fun». Je l'ai
mentionné tantôt, on parle d'une distance 1,9 km et c'est la
raison pour laquelle le projet de loi a été
présenté, pour permettre à la ville de Hull et aux 3
municipalités concernées de pouvoir circuler sur cette
artère de 1,9 km. Ce n'est pas la fin du monde, mais, M. le
Président, avec ce projet de loi, la compagnie qui est formée
présentement, la compagnie de chemin de fer de l'Outaouais, pourra, en
vertu de ce projet de loi, extensionner dans les limites territoriales de
l'Outaouais québécois d'autres chemins de fer, pour faire en
sorte que les touristes qui viennent dans l'Outaouais québécois
puissent visiter d'une autre façon qu'ils le font présentement
les beautés de l'Outaouais québécois et, surtout, y
demeurer et activer l'économie de notre région.
Alors, c'est ce que je voulais vous mentionner, M. le Président,
sur ce projet de loi, et je vous remercie de votre attention.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Hull. Sur le même sujet, M. le
député d'Abitibi-Ouest, leader adjoint de l'Opposition
officielle.
M. Gendron: Non, M. le Président, ce n'est pas sur le
même sujet, mais...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous ne voulez pas
intervenir là-dessus?
M. Gendron: ...c'est pour vous indiquer que, sur le même
sujet, oui, on a un intervenant, qui est le porte-parole de l'Opposition
officielle, qui s'en vient dans quelques minutes. Alors...
Une voix: II faut suspendre.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous demandez une
suspension?
M. Gendron: ... je demande une suspension.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je suspends les
travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 17 h 25)
(Reprise à 17 h 38)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, Mmes et MM. les
députés, nous sommes à discuter de la motion proposant
l'adoption du principe du projet de loi 244, Loi concernant la compagnie de
chemin de fer de l'Outaouais. M. le député de Lévis, on
m'a indiqué que vous vouliez intervenir. Je vous cède la
parole.
M. Jean Garon
M. Garon: Alors, M. le Président, c'est difficile
d'être à 2 endroits en même temps. J'étais en
commission parlementaire pour étudier les mémoires des gens qui
travaillent dans le domaine de la construction concernant le gel de leur
salaire ou une prolongation possible du décret de la construction, alors
qu'on m'a avisé que le député de Hull était en
train de parler sur le projet de loi 244 qui venait d'être
appelé.
En prenant mes notes rapidement dans mon bureau, la
télévision étant ouverte, j'ai entendu les derniers
commentaires du député de Hull et je me suis étonné
des commentaires du député de Hull, parce que je me serais
attendu à ce qu'il soit au courant des débats qu'il y a eu en
commission parlementaire. Essentiellement, il y a beaucoup d'aspects dans ce
projet de loi là et, quand le député, dont les propos sont
consignés aux débats, dit: «La ville n'aura jamais besoin
du gouvernement. C'est elle qui est en cause et c'est rien que la ville qui va
assumer les coûts», très bien, c'est dit. Ce qui est dit est
dit. Sauf que, M. le Président, quand vous regardez le projet de loi
244, c'est une boîte à surprises. En termes de coûts pour
l'avenir, il n'y a pas grand-chose de réglé là-dedans,
mais il y a beaucoup de factures à venir, puisque les emprunts ne sont
pas réglés, qu'on loue temporairement une voie ferrée et
que les factures vont venir dans l'avenir, et les factures peuvent être
considérables et être de plusieurs millions de dollars. (17 h
40)
Aujourd'hui, les gens se font mettre le bras dans le tordeur. Je disais,
tout à l'heure, qu'il y a plusieurs aspects. Mon collègue, le
député de Jonquière, traitera de l'aspect affaires
municipales davantage plus tard. Il a assisté aux débats
entièrement. Je dois vous dire, M. le Président, qu'il y a
l'aspect affaires municipales, puisque les villes sont impliquées, il y
a l'aspect transports et il y a l'aspect touristique. Que le projet soit
intéressant, c'est une affaire, mais qu'il soit attaché, c'est
une autre affaire.
Nous n'avons pas voulu empêcher l'adoption du projet de loi,
même si nous avons voté contre, parce qu'il y a beaucoup de choses
qui ne sont pas attachées dans ce projet de loi là. Pour vous
donner rien qu'un exemple, il a fallu changer à peu près tous les
articles et même les notes explicatives, ce qui est très
spécial. Vous savez, c'est rare qu'on change dans un projet de loi
même les notes explicatives d'un projet de loi ? parce que
même les notes explicatives avaient besoin de changements.
On a changé l'article 1, Particle 2, l'article 3, l'article 4,
l'article 5, l'article 6, l'article 7, l'article 8, l'article 9, l'article 10
et même les notes explicatives, M. le Président, et même le
titre. Seul le numéro n'a pas changé. Comme projet de loi qui
était attaché, là, moi, c'est la première fois que
je vois un projet de loi où on change tout, de a à z, même
le titre et même les notes explicatives. On a gardé le
numéro 244, à toutes fins pratiques.
Alors, M. le Président, les gens qui ont travaillé
à cette commission parlementaire, qui ont fait leur travail, ont
aidé la ville de Hull... Et ceux qui ont voulu donner l'absolution sans
confession, là, je vais vous dire une chose, eux n'ont pas aidé
leur ville, même s'ils l'aiment. Parce que le projet de loi, il
n'était pas attaché. Plus que ça, il y avait même
des articles qui n'étaient pas constitutionnels, M. le Président,
parce que, dans le projet de loi initial que nous avons eu devant nous, on
amendait même des compagnies à charte fédérale, on
amendait même des lois fédérales. Vous savez, en termes de
droit, là, un étudiant qui nous présenterait un projet de
loi comme ça, il bloquerait son examen. C'est ça qu'on a eu,
essentiellement.
M. le Président, nous avons voulu faire le travail justement pour
protéger les citoyens de Hull. Nous avons demandé des documents.
Au lieu de prendre tout pour du cash, on a demandé des documents, parce
qu'il y a des gens qui sont venus devant nous, qui ont pensé qu'un
projet de loi, c'était adopté automatiquement. Ce n'est pas
adopté automatiquement.
Deuxièmement, dans le cas que nous avons étudié,
c'était la première fois qu'une municipalité devenait
opérateur d'une compagnie de chemin de fer, qu'elle opérait un
chemin de fer. Ça peut être payant, sauf que nous avons
demandé aux gens quels avaient été les rendements par
rapport à la première année et ceux qu'ils anticipaient
cette année. Cette année, ils avaient prévu un surplus de
370 000 $. J'ai cru comprendre, d'après ce qu'ils nous ont dit en
commission parlementaire, que, s'ils ne perdent pas d'argent, ils vont
être contents cette année. S'ils arrivent juste, ils vont
être contents. Les prévisions que nous avons devant nous, parce
qu'il s'agit d'engager les citoyens là-dedans... On peut bien les
engager inconsidérément parce qu'on aime mieux les promoteurs que
les citoyens, sauf qu'un Parlement qui est responsable doit être prudent
dans l'engagement des contribuables dans une loi privée comme
celle-là, parce qu'il déroge au droit public normal du droit
municipal.
Ce n'est pas arrivé souvent dans le passé. C'est
arrivé. Ça arrive actuellement également dans le
comté de Duplessis, à Port-Cartier. On verra dans l'avenir ce que
ça fait, parce que des municipalités entrepreneurs, qui prennent
des risques, ou, à ce moment-ci... Une municipalité,
normalement... Dans le droit commun, le droit public que nous avons, une
municipalité, c'est un organisme public qui rend des services aux
citoyens, qui enlève la neige, qui arrange les routes, qui fait des
routes ou des rues, qui dispose des vidanges, qui rend des services. Mais une
municipalité entrepreneur, on verra. On verra ce que ça fera dans
l'avenir quand une municipalité, à un moment donné, sera
obligée de demander des millions de dollars à ses concitoyens
parce que l'entreprise qu'elle a décidé d'assumer ne va pas bien.
parce que tous les gens que j'ai vus, moi, venir pour des entreprises, ont
toujours assumé que l'entreprise marchait bien. on voit aujourd'hui
unigesco, ou univa, si vous voulez, c'était un de ceux qui n'avaient pas
voulu vendre des parts, dans le temps, de soquia, qui n'ont jamais
été vendues quand j'ai été ministre de
l'agriculture, mais que les libéraux, eux, ont décidé de
vendre. aujourd'hui, on voit ce que ça a donné. j'avais dit
exactement la raison pourquoi je n'avais pas voulu dire oui. c'est exactement
ce qui arrive aujourd'hui. j'avais dit, quand on voulait vendre à bertin
nadeau les actions de soquia ? 8 % des actions de provi-go ? que, si
ça allait bien, il n'y avait pas de problème mais que, si
ça allait mal et qu'il fallait mettre la main dans ses poches, je
n'étais pas certain que m. nadeau aurait assez d'argent dans ses poches.
j'étais même convaincu qu'il n'en avait pas assez. c'est
arrivé. exactement. quand il est venu pour mettre la main dans ses
poches, il n'avait pas assez d'argent pour les besoins d'unigesco, qui est
devenue univa.
Parce que je ne crois pas à ce capitalisme moderne où il
s'agit, dans des grandes entreprises comme ça, d'avoir un actionnaire
principal. Je pense que c'est différent. J'avais dit non dans le temps,
craignant que ça ne puisse arriver. On disait que j'étais
pessimiste. Et je disais même qu'il faudrait sans doute vendre aux
Américains, c'est-à-dire que M. Nadeau serait obligé de
vendre aux Américains si ça allait mal, parce qu'il n'y aurait
pas grand investisseur qui trouverait les capitaux nécessaires pour
Provigo, sauf la Caisse de dépôt. Bien, il arrive exactement ce
que j'avais craint.
Dans le domaine des municipalités également, il faut faire
des distinctions. Et le gouvernement du Québec, à mon avis,
opère avec imprudence quand il commence à accepter que des
municipalités soient des entrepreneurs, sans étudier le statut
légal que devrait avoir la municipalité entrepreneuse. Et quand
on opère normalement, en donnant des garanties d'emprunt dans le domaine
de l'entreprise, sans savoir ce qui va arriver de l'avenir, il y a des risques.
Il y a des risques considérables, et on ne peut pas faire prendre des
risques par n'importe qui, dans n'importe quelles conditions. Demain matin, les
municipalités qui prennent des risques vont être bien mal prises
et, après ça, elles vont arriver devant leurs concitoyens et
dire: On est obligé de vous charger 1000 $, 2000 $, 3000 $, ou
peut-être quelques milliers de dollars de plus, peut-être par
année, pendant quelque temps, pour rencontrer les paiements qu'on doit
rencontrer; autrement il y aura des problèmes.
On n'a pas vu, ici, de municipalités qui sont tombées en
faillite, mais on en a vu aux États-Unis. Hein? Mais, qu'est-ce qui
arrivera? Parce qu'on est dans un domaine de droit totalement nouveau, que le
gouver-
nement n'a pas étudié ? je vous le dis bien
franchement ? que le gouvernement n'a pas étudié, pour
lequel il n'a pas fait les analyses nécessaires et qui est un projet qui
est arrivé devant nous, qui n'était pas au point, pour dire le
moins. Et, demain matin, quand il arrivera des difficultés, si
l'entreprise ne rencontre pas les objectifs financiers qu'elle a
indiqués, je me demande ce qui va arriver. Qui va assumer la facture?
Ah! Je sais que la tendance normale sera de passer la facture à un
autre.
Et le député de Hull a pris des engagements, il a dit que
la municipalité ne demanderait pas d'argent au gouvernement. Vous
remarquerez que, dans le financement en cours, il y a très peu d'argent
qui vient des promoteurs privés. L'argent, en grande partie, vient du
gouvernement. La grande partie des investissements vient du gouvernement
fédéral, provincial, d'un engagement municipal, mais la somme
d'argent qui vient des promoteurs est très petite par rapport à
l'argent que fournit le gouvernement provincial par ses différents
ministères, à l'argent que mettent le gouvernement
fédéral ou le gouvernement municipal. La partie qui vient des
promoteurs n'est pas grosse, de sorte que c'est plus facile de prendre des
risques quand on les prend avec l'argent des autres. Sauf qu'actuellement il y
a beaucoup d'épées de Damoclès qui sont dans l'avenir,
parce que la situation financière est loin d'être
réglée ? loin d'être réglée ? et
les factures importantes sont pour l'avenir. (17 h 50)
Je vais vous dire bien franchement, nous avons voté contre ce
projet de loi, comme nous allons voter en troisième lecture. Cependant,
c'est le gouvernement qui gouverne et c'est la municipalité qui a pris
des risques. J'ai fait ce que j'ai pu pour avertir et mettre la puce à
l'oreille lors de la présentation du projet de loi en commission
parlementaire pour la première fois. Même localement, c'est sorti
un peu dans les journaux ? et je ne l'ai pas fait pour des raisons
électorales, parce que vous allez me dire qu'il n'y avait pas grand vote
là-dedans.
Sauf que, plus tard, si ça va mal, il y a des gens qui diront que
le député de Lévis nous avait dit qu'il y avait des
risques et que les factures, normalement, sont assumées par ceux qui
prennent les risques, pas par ceux qui ne les prennent pas, et que les risques,
en l'occurrence, peuvent représenter beaucoup d'argent. Pas un peu
d'argent, beaucoup d'argent. Et non seulement ça, mais je me demande ce
qui va arriver lorsqu'il faudra aller chercher l'argent dont on aura besoin
pour remplacer le contrat de location, pour acheter les équipements.
Lorsqu'il faudra aller en règlement d'emprunt pour plusieurs millions de
dollars, je me demande ce qui va arriver. Est-ce que les citoyens vont dire
oui? Est-ce qu'ils vont dire non? Je ne le sais pas. Parce que,
éventuellement, il devrait y avoir un règlement d'emprunt
important pour des sommes importantes. À ce moment-là, le
financement qui n'est pas prévu immédiatement devra être
réalisé dans l'avenir. Là, on verra, à ce
moment-là, qu'il y a beaucoup de gens qui auront déjà le
bras dans le tordeur. Alors, on aurait pu prendre le temps, et on aurait
dû prendre le temps nécessaire, à mon avis, dans ce projet
de loi-là, pour assurer le financement, pour que les gens qui font
partie d'une municipalité puissent réagir comme ils doivent
réagir normalement, comme ils ont le droit de le faire lorsque la
municipalité s'implique financièrement.
Là, actuellement, on signe des choses, on s'embarque dans un
projet, on fait marcher des appareils. On achète les équipements,
ou encore on les loue avec obligation de les acheter dans l'avenir. Mais,
après ça, quand les véritables factures vont arriver, plus
tard, si ça va bien, ce sera peut-être plus facile, mais si
ça va mal... Je me rappelle toujours une vieille devise qui dit ?
M. le Président, que vous devez connaître, dans votre sagesse
? que la victoire a une nombreuse paternité et la défaite
est orpheline. Quand ça va mal, on cherche après les gens
responsables. Il n'y en a pas beaucoup. Quand ça va bien, tout le monde
veut avoir le crédit. Moi, je n'ai pas d'objection à ce que le
gouvernement dise, à un moment donné: On veut que les
municipalités jouent un rôle d'entrepreneur. Mais dans quelles
conditions? En assumant quels risques? Et en limitant le risque de quelle
façon?
Je me rappelle le ministre du premier mandat du gouvernement actuel,
lorsqu'il parlait des institutions financières et parlait de la
démutualisation des compagnies d'assurance, il devait y avoir un
chapitre. Finalement, on a commencé avec 1, il n'y a jamais eu de
chapitres 2, 3, toujours dans les bills privés. Et, finalement, une des
premières est disparue, à toutes fins pratiques, Les
Coopérants. Une deuxième demande de changer son statut. Pourquoi?
Parce que les difficultés sont commencées. Il n'est pas certain
que les autres qui n'ont pas annoncé leurs difficultés n'ont pas
des problèmes elles aussi. Pas toutes, mais quasiment. Sauf qu'on n'a
jamais eu de régime de démutualisation, et on est en train de
scrapper par des lois privées nos principales institutions
financières, M. le Président, qui nous ont appartenu et
auxquelles les gens ont adhéré pour qu'on ait des institutions
financières d'ici.
Aujourd'hui, on est en train de changer la nature des
municipalités, de changer les pouvoirs des municipalités. Pas
toutes les municipalités, mais une par une. Tantôt, les gens se
demanderont comment ça se fait qu'ils se sont embarqués dans des
choses comme celles-là, de cette façon-là, sans prendre
toutes les précautions nécessaires. M. le Président, dans
le domaine de l'entreprise, il y a des risques. Que vous soyez bon ou pas bon,
il y a des risques.
Vous vous rappelez, quand il y a eu la crise financière du
début des années quatre-vingt, il n'y avait pas beaucoup d'hommes
d'affaires qui avaient prévu que les taux d'intérêt
seraient, à un moment donné, à 21 %. Pourtant, c'est
ça qu'on a connu au mois de juillet 1981. Il y en a qui ont fait
faillite et qui avaient pris toutes les précautions nécessaires.
Quelle va être la situation économique l'an prochain ou dans 2
ans? Si on
vit la crise économique, comme plusieurs commencent à en
parler, des années trente, le tourisme sera peut-être bien moins
fort. À ce moment-là, les gens qui ont basé des millions
de financement sur un train touristique, peut-être qu'ils trouveront
ça plus difficile. À ce moment-là, les risques qu'ils vont
assumer... C'est facile, quand ce sont les pouvoirs publics qui assument les
risques; ils sont capables de faire porter les risques aux contribuables.
Mais le rôle du Parlement, ici, quand il fait des lois, c'est de
faire en sorte de protéger les citoyens. Que les citoyens ne soient pas
seulement les cautions des promoteurs qui assument peu de risques en argent
privé par rapport à l'argent public qui est investi dans leur
projet. C'est trop facile de partir en affaires avec l'argent des autres. C'est
trop facile aussi de trouver des gens en politique qui aiment bien couper des
rubans, mais qui ne sont pas là quand les difficultés arrivent.
C'est trop facile!
Je pense que c'était plus difficile, M. le Président, de
faire le travail que nous avons fait en commission parlementaire, le
député de Jonquière et moi, pour faire en sorte que le
projet soit plus circonscrit, bien qu'il ne soit pas entièrement
circonscrit. Plus circonscrit, parce que, pour le circonscrire
entièrement, il aurait fallu que le financement qui était
anticipé soit davantage sûr, réalisé, alors
qu'actuellement le financement n'est pas vraiment assuré. La
première année d'opération, on n'a pas rencontré
les objectifs qui étaient anticipés, et la deuxième ne
rencontrera pas ? au mieux, ce que nous ont dit les promoteurs ? les
bénéfices qu'ils anticipaient pour leur deunième
année, qui est l'année 1993 d'opération, de sorte que,
lorsque les difficultés... On ne sait pas l'avenir. S'il y a des
difficultés ? ce que je ne souhaite pas; au contraire, je souhaite
le plus grand succès possible ? si des difficultés arrivent,
bien là, on se demandera pourquoi, à ce moment-là, les
organismes ou les représentants, dont la seule tâche devait
être de préserver les gens, de protéger les citoyens, qui,
eux, ne sont pas là, mais qui sont embarqués sans même le
savoir, et qui, un jour, auront leur mot à dire, lorsqu'il faudra verser
de l'argent et qu'il faudra trouver l'argent nécessaire, qui est
considérable, et qui, là, à ce moment-là, pourront
manifester leur opinion en demandant que le règlement d'emprunt soit
passé au référendum. Là, les citoyens se
retrouveront devant une réalité, avec des factures à
payer. Si les citoyens se disent, à ce moment-là: Bien nous, on
n'a pas été dans le coup, au point de départ, on ne veut
pas payer ces factures-là. Qu'est-ce qui va arriver au projet? Qu'est-ce
qui va arriver au projet, d'autant plus que, si le projet marche difficilement,
à plus forte raison, les citoyens ne voudront pas continuer. S'ils
rencontrent des difficultés, ils ne voudront pas continuer le
financement et voudront que leur municipalité continue le
financement.
M. le Président, je sais que vous montrez l'heure qui approche,
mais comme mon droit de parole n'est pas épuisé, je
préfère vous demander l'ajournement du débat, pour pouvoir
poursuivre plus tard le droit de parole, pour que le droit de parole de
l'Opposition soit maintenu pour la prolongation de ce débat, plus
tard.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous demandez
l'ajournement du débat. Est-ce que cette motion d'ajournement du
débat est adoptée?
M. Bélisle: M. le Président, je dois comprendre, de
la part du député de Lévis, qu'il veut reprendre à
20 heures? C'est bien ça?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Ça veut dire que
ce sera à vous, M. le leader, de décider si, à 20 heures,
vous reprenez avec ce débat-là.
M. Bélisle: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui. Alors, la motion
d'ajournement du débat est adoptée. Il est, effectivement,
presque 18 heures, et je suspends donc les travaux jusqu'à 20
heures.
M. Bélisle: À titre d'information, M. le
Président, pour le député de Lévis...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le
député.
M. Bélisle: ...pour lui permettre d'agencer sa
cé-dule, à 20 heures, nous reprendrons avec le même
débat.
M. Garon: Pardon?
M. Bélisle: À 20 heures, nous reprendrons avec le
même sujet.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, les travaux de
l'Assemblée sont suspendus jusqu'à 20 heures ce soir.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
(Reprise à 20 h 12)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si vous voulez
prendre place. Je vous remercie.
Nous poursuivons le débat sur la motion de M. le
député de Hull proposant l'adoption du principe du projet de loi
244, Loi concernant la compagnie de chemin de fer de l'Outaouais. Je suis
prêt à reconnaître un prochain intervenant, M. le
député de Jonquière.
M. Francis Dufour M. Dufour: Oui, merci, M. le Président.
Je tenais
à intervenir sur ce projet de loi qui a subi beaucoup de
changements à partir de sa conception jusqu'à la prise en
considération ou presque jusqu'à l'adoption de ce projet.
Il est sûr que, durant l'étude de ce projet, nous avons
constaté que le gouvernement du Québec est en train
d'établir une politique qui est nouvelle, qui va à rencontre un
peu de la volonté des municipalités qui nous disent toujours,
régulièrement: On n'a pas de revenus, on n'a pas suffisamment de
revenus. Et, dans le cas qui nous préoccupe, donc, dans ce projet de loi
244, 3 municipalités se sont unies avec l'entreprise privée pour
mettre sur pied un train à caractère touristique. Ce que les
municipalités peuvent retirer de ce projet, c'est d'abord un renom avec
un produit nouveau qui permet à la ville de Hull, à Chelsea et La
Pêche d'avoir leur nom dans un dépliant touristique. Ça
leur permet de penser faire compétition avec la région
d'Ot-tawa-Carleton au point de vue des activités touristiques. Il n'y a
pas d'intérêt monétaire particulier à l'effet que ce
train va amener des montants d'argent intéressants qui vont permettre
aux municipalités d'avoir plus d'argent dans leurs poches. C'est
vraiment l'intérêt général. Les gouvernements
supérieurs ont investi quelque peu d'argent dans le projet, mais pas
suffisamment pour justifier une mise de fonds aussi considérable.
Donc, c'est un peu le phénomène qu'on vit actuellement:
les municipalités prennent le relais des gouvernements, puisque ces
mêmes gouvernements n'ont pas réussi à donner suffisamment
de vigueur à l'économie pour la création d'emplois. Donc,
c'est un constat, au départ, d'une faillite gouvernementale concernant
la création d'emplois.
Deuxième phénomène qu'on a constaté, et
là c'est un peu spécial, c'est que, à travers cette
démarche, différents intervenants, en s'impliquant, ont
essayé de nous faire la preuve que les actions entreprises
étaient les seules susceptibles de produire ou de créer cet
achalandage ou cette attraction touristique. Et l'Opposition a
été excessivement vigilante concernant ce projet de loi. Pendant
une journée, on a essayé d'obtenir certains chiffres, certains
renseignements. Et, après une journée de débat, même
si c'était la volonté politique du ministre des Transports et
même si c'était la politique de différents intervenants,
même s'il n'y avait pas de contestation, l'Opposition a joué son
rôle de chien de garde des deniers publics, ce qui a eu pour effet,
à la fin de la journée, que le projet de loi a été
retourné sine die, mais avec une commande bien précise de la part
de l'Opposition qui exigeait d'avoir les états financiers de la
corporation, d'avoir les règlements d'emprunt de ces mêmes
municipalités et, en même temps, l'état réel de la
situation.
Donc, ça a créé un certain remous et une certaine
déception puisqu'on avait fixé comme échéancier le
1er mai, si mon souvenir est exact. Et le fait que le projet de loi n'a pas
été accepté dans la même journée, ça
créait une certaine difficulté puisqu'il y avait
différents intervenants qui étaient en négociations, dont
le CN, qui n'est pas le moindre, mais qui avait des intérêts
très forts et qui avait des exigences très fortes pour que ce
dossier se termine au plus vite. Ça a causé des émois et
une certaine déception de la part des intervenants, ce qui faisait dire
au député de Hull ? c'est ça qui m'a donné un
peu le goût d'intervenir ? que l'Opposition avait posé des
questions plus ou moins pertinentes, qu'on avait un peu, en fait, niaise le
projet. Mais ça, j'ai trouvé ça malheureux; j'ai
trouvé ça malheureux parce que ce sont des choses qui ne se
disent pas. D'abord, si on n'avait pas été justifiés de le
faire, on se serait tenus tranquilles. Je ne pense pas que l'Opposition aurait
été aussi mesquine et aussi méchante.
Mais ce n'est pas parce qu'un projet vient de la région de
l'Outaouais que, forcément, il doit recevoir notre aval, puis notre
accord immédiatement. Là comme ailleurs, on a le droit de poser
des questions, et on l'a fait, on ne s'en est pas privé. Et heureusement
qu'on l'a fait, parce que, à la deuxième reprise du projet de
loi, j'ai eu l'occasion, bien sûr, de considérer ou de voir les
échanges qui ont eu lieu avec le porte-parole de l'Opposition, le
député de Lévis, concernant le projet de loi. Il avait en
main, à ce moment-là, certains dossiers que, nous, comme
parlementaires, on avait exigés. Que ça a été
difficile d'avoir les chiffres! Que ça a été difficile de
faire dire les choses qu'il était normal qu'on dise, comme si on avait
joué au plus fin pendant... Je n'ai pas regardé le nombre
d'heures que la commission parlementaire a siégé. Ce que je peux
vous dire, c'est que le compte rendu de ces discussions a été
très ardu et très long.
Le député de Lévis a fait un travail, à mon
point de vue, extraordinaire, un travail de parlementaire aguerri, qui a fait
qu'on a fini par savoir l'état réel du dossier. D'abord, les
coûts; on a su aussi de quelle façon les municipalités
s'étaient engagées et quelle était la nature des
engagements des différents intervenants. Tout ça, c'était
le minimum que nous pouvions exiger. Mais ce n'est pas parce que les
intervenants de la région de l'Outaouais avaient certaines
considérations pratiques à l'effet que c'était un dossier
urgent, que c'était un dossier qu'on devait régler parce que
c'était un dossier important pour toute cette région-là
que, nous, on devait succomber à cette tentation de ne pas faire notre
travail. (20 h 20)
On l'a fait, et ça a donné le résultat que
l'Opposition a pu se rendre à terme dans l'étude de ce dossier
qui est unique au Québec. C'est quelque chose de nouveau, M. le
Président, que des organismes gouvernementaux municipaux s'impliquent
aussi largement et aussi coûteusement dans des programmes de promotion
touristique qui, même avec la meilleure considération du monde, ne
sont pas voués à un succès certain sans qu'il y ait
aucunement de risque. Il faut bien s'entendre là-dessus. Même si
c'est un projet ou une attraction intéressante, ce n'est pas
nécessairement rentable. Et, parce que c'est de l'argent qui provient de
l'administration publique, on n'a pas le droit d'en faire ce qu'on veut. Alors,
les questions qu'on a posées, on s'en réjouit et
on trouve que c'est normal que ça ait pris le temps que ça
a pris parce qu'il y avait des éléments ou des décisions
qui ont été prises où on n'est pas sûrs que tout
avait été fait selon les normes.
Mais, vous voyez, il y a d'autres considérations qu'on pourrait
apporter, puisqu'on a vu d'autres cas où le gouvernement ? je
disais que le gouvernement se désengageait de plus en plus ? ne
voyant rien de sûr, rien de concret, rien de réaliste, accepte
quand même que les municipalités s'endettent pour faire des
projets, pour signer des projets pour créer de l'emploi. Voyez-vous, il
y a, là, quelque chose de pas sain dans les administrations publiques
actuellement, et le gouvernement donne un mauvais signal. Tantôt, il dit
aux municipalités: Vous pouvez emprunter pour faire du
développement, c'est à vos risques. On croit relativement au
succès du projet. Dans d'autres cas, dans le cas de Port-Cartier, le
gouvernement, par la voix de son ministre, dit: On ne croit pas du tout au
projet, mais on permet pareil aux municipalités de s'endetter.
Voilà 2 attitudes qui sont difficiles à comprendre et à
concilier, et je souhaite, un jour, M. le Président, que le gouvernement
du Québec donne des signaux beaucoup plus clairs aux
municipalités en ce qui concerne l'administration publique.
Voilà les quelques remarques que j'avais à faire
concernant ce projet de loi.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Jonquière, de votre intervention.
Mise aux voix
Le principe du projet de loi 244, Loi concernant la compagnie de chemin
de fer de l'Outaouais, est-il adopté?
Adopté.
Adoption
M. le député de Hull propose l'adoption du projet de loi
244, Loi concernant la compagnie de chemin de fer de l'Outaouais.
M. le député de Hull.
M. Robert LeSage
M. LeSage: Merci, M. le Président. Alors, je suis heureux
que ce projet de loi va finalement trouver son adoption, pour permettre aux
municipalités de Hull, Chelsea et La Pêche de développer
leur essor économique avec ce train touristique.
M. le Président, vous me permettrez de reprendre certains propos
du député de Lévis, cet après-midi, de même
que ceux du député de Jonquière, et je serai bref. Le
député de Lévis, cet après-midi, nous disait que
tout n'était pas attaché dans le projet du train touristique. Il
faisait allusion au fait que nous devions louer encore une partie du chemin de
fer. Bien sûr, M. le Président.
C'est pour ça qu'on a adopté le projet de loi, pour
permettre qu'on ait un statut de chemin de fer et que la compagnie en question
puisse circuler sur le 1,9 km. C'était ça, l'objet du
règlement, puis on va continuer à le louer. Les villes, à
ce que je sache, n'ont pas le pouvoir d'exproprier un chemin de fer; alors, il
faut le louer.
On s'inquiète parce que c'est la première fois qu'on
apporte un projet semblable. M. le Président, moi, là, je peux
comprendre pourquoi le député de Lévis a dit, cet
après-midi, qu'il était pour voter contre le projet de loi. Mon
gouvernement, celui que je représente avec mes collègues et les
ministres, écoute les gens du municipal, écoute les gens du
milieu. Il nous disait, le député de Lévis, que les gens
de l'Outaouais n'avaient pas été consultés sur ce dossier.
M. le Président, c'était la première priorité
«priorisée» par le sommet socio-économique, le petit
train de Hull-Wakefield. Alors, qu'on ne vienne pas nous dire que les
intervenants, dans le sommet socio-économique, qui représentent
tout le milieu, n'ont pas été consultés.
Là, le député de Jonquière vient de nous
dire: C'est un nouveau produit. Bien voyons! S'il connaissait un peu
l'Outaouais, M. le Président, il conviendrait avec moi que ce n'est pas
un produit nouveau; il existait avant. La municipalité de Hull et les
autres municipalités s'en sont portées acquéreurs pour
redémarrer ce produit touristique, pour faire en sorte que les touristes
qui viennent à Ottawa ? je vous l'ai dit, cet après-midi,
ilyena3000000à4000 000 ? puissent venir de ce côté-ci,
au Québec, dépenser de l'argent, stimuler l'économie.
Ce qu'ils nous disent, les députés du Parti
québécois, et ce qu'ils disent aux maires ou aux conseillers et
conseillères du Québec: Ne soyez pas innovateurs, ne soyez pas
entrepreneurs. Puis il nous l'a dit, cet après-midi: Eux autres,
là, ils devraient s'occuper, puis je vais le répéter, des
rues, des services, égouts, aqueduc et des vidanges. M. le
Président, mon gouvernement a une plus haute considération des
conseils municipaux au Québec et mon gouvernement sera toujours
là et prêt à écouter n'importe quel conseil
municipal au Québec pour discuter avec lui de nouveaux projets qui
pourraient stimuler l'économie au Québec, puis j'en suis
très fier. Je vous remercie, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a
d'autres intervenants sur cette motion d'adoption? Il n'y a pas d'autres
intervenants.
Mise aux voix
M. le député de Hull propose l'adoption du projet
de loi 244, Loi concernant la compagnie de chemin de fer de l'Outaouais. Est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Oui, M. le Président, l'article 24,
s'il vous plaît.
Projet de loi 83 Adoption
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 24,
Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science propose
l'adoption du projet de loi 83, Loi sur la Commission d'évaluation de
l'enseignement collégial et modifiant certaines dispositions
législatives.
Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, et
de l'Éducation.
Mme Lucienne Robillard
Mme Robillard: M. le Président, à maintes reprises
au cours de mon mandat comme ministre de l'Enseignement supérieur et de
la Science, j'ai souligné l'importance primordiale de
l'évaluation dans l'action menée en enseignement
collégial, la désignant même comme ma priorité de
l'année 1991-1992. L'enjeu m'apparais-sait évident: nous devions
démontrer au vu et au su de tous que les programmes que nous dispensions
étaient solides et adéquats, et que les diplômes de
l'enseignement collégial que nous décernions étaient
pleinement fiables.
Le présent débat sur la motion d'adoption du projet de loi
83, Loi sur la Commission d'évaluation de l'enseignement
collégial et modifiant certaines dispositions législatives, me
fournit l'occasion de témoigner de la maturité de l'ensemble des
partenaires du milieu collégial: le Conseil des collèges, le
Conseil supérieur de l'éducation, les collèges
eux-mêmes, les universités, les milieux de l'entreprise, les
associations étudiantes et d'autres qui, très massivement, ont
recommandé au cours du débat public récent que nous
instaurions un dispositif d'évaluation rigoureux et crédible au
collégial, notamment en créant un organisme externe
d'évaluation.
On se rappellera, M. le Président, que, lors de la
création des cégeps en 1967, nous avions fait des choix de
systèmes difficiles et risqués, mais aussi sains et exigeants. Il
s'agissait de sortir des limites pédagogiques et sociales d'un mode
d'évaluation trop axé sur les quelques jours de bachotage et
d'examens uniformes que plusieurs d'entre nous avions connus à
l'époque. Nous voulions responsabiliser les établissements et
rapprocher l'évaluation de l'ensemble de la démarche
d'apprentissage des étudiants. Nous avions quand même tenu
à ce que les diplômes collégiaux soient des diplômes
d'État et que les programmes d'études et l'ensemble des
dispositions du régime pédagogique soient aussi sous la
responsabilité du ministère.
En 1979, constatant que le défi n'était pas pleinement
relevé, nous avons créé le Conseil des collèges
avec une commission d'évaluation, chargée de faire l'examen des
politiques institutionnelles d'évaluation des apprentissages et d'offrir
des services d'évaluation. Les collèges furent obligés
d'établir de telles politiques institutionnelles d'évaluation. Si
l'on reconnaît que la création du Conseil des collèges et
de sa commission d'évaluation ont permis des progrès importants,
on admet aussi que ces progrès, aujourd'hui, plafonnent et qu'un
mécanisme plus rigoureux s'impose maintenant. (20 h 30)
II faut que cessent les perplexités et les doutes dans l'opinion
publique qui a manifesté beaucoup d'intérêt pour toutes
sortes d'évaluations et de classements, malgré des
méthodologies parfois très douteuses. Des chiffres
inquiétants concernant les taux de diplomation et la durée des
études ont circulé et semé l'inquiétude dans la
population, qui a souhaité clairement des actions énergiques et
appropriées en ce domaine. On veut pouvoir compter sur des
collèges aptes à répondre aux besoins de formation et
aptes à répondre de la qualité de leur enseignement.
Sur cette question, les parlementaires et les observateurs ont
été à même de constater la nette convergence des
positions présentées et débattues au cours des travaux de
la commission de l'éducation...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la
députée de Taillon. Question de règlement?
Mme Marois: Oui, s'il vous plaît, M. le Président,
je pense que ce sujet est tellement important qu'il serait utile qu'il y ait
quorum en cette Assemblée.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, à votre
demande, Mme la députée, je vais vérifier, et qu'on
appelle les députés. (20 h 31 ?20 h 35)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre
place. Nous poursuivons l'étude en vue de l'adoption du projet de loi
83, Loi sur la Commission d'évaluation de l'enseignement
collégial et modifiant certaines dispositions législatives, et je
cède la parole à Mme la ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science et je lui permets de poursuivre son
intervention. Mme la ministre.
Mme Robillard: Je disais donc, M. le Président, que sur
cette question, les parlementaires et les observateurs ont été
à même de constater la nette convergence des positions
présentées et débattues au cours des travaux de la
commission de l'éducation sur l'avenir de l'enseignement
collégial. Le thème de l'évaluation a figuré parmi
les thèmes les plus abondamment abordés dans les mémoires
et lors des audiences publiques de l'automne 1992, et celles plus
récentes du mois de mai dernier.
La visée de fond du renouveau proposé le 6 avril dernier
découle directement des consensus exprimés lors de ces
commissions parlementaires. Il s'agit, dans un
contexte mondial de plus en plus compétitif, d'assurer aux jeunes
et à l'ensemble de la population du Québec un enseignement
collégial d'un calibre et d'une qualité qui leur permette de se
mesurer aux meilleurs standards de compétence. Le projet gouvernemental
propose que cet objectif soit atteint par un ensemble de mesures axées
sur les 4 grandes cibles suivantes: un nouveau défi
d'accessibilité basé sur la réussite des études;
des programmes d'études cohérents, exigeants et adaptés
aux besoins; des responsabilités académiques accrues pour les
établissements et, corrélativement, un dispositif
d'évaluation plus rigoureux et des partenariats renouvelés et
resserrés.
Je m'attarderai, M. le Président, sur la troisième cible,
et, ce faisant, sur l'institution d'une Commission d'évaluation de
l'enseignement collégial. Il s'agit d'un ajustement majeur d'un
dispositif à 3 partenaires, à savoir les collèges, le
ministère et le Conseil des collèges, qui prévalait
jusqu'à maintenant. Les dispositions contenues dans le projet de loi
concernent essentiellement 3 objets de décision: premièrement, le
statut et le mandat de la nouvelle Commission; deuxièmement, les impacts
sur la fonction consultative en enseignement collégial; et,
troisièmement, la consolidation, au sein du Conseil supérieur de
l'éducation, de l'ensemble de la fonction consultative en
éducation.
En effet, le statut proposé pour la nouvelle Commission rompt
explicitement avec la structure familière d'un groupe-conseil de type
représentatif. Il confie plutôt l'organisme à 3
commissaires, nommés par le gouvernement sur la recommandation du
ministre responsable, et clairement mandatés pour évaluer,
c'est-à-dire porter un jugement formel de qualité sur l'exercice
des responsabilités académiques des collèges. La
Commission exercera ainsi un pouvoir déclaratoire de caractère
essentiellement public assorti d'un pouvoir de recommandation à
l'adresse des collèges concernant des changements à des
politiques institutionnelles ou à des manières de dispenser des
programmes; un pouvoir de recommandation aussi, à l'adresse du ministre,
pour des changements aux objectifs mêmes de certains programmes, et une
délégation possible du pouvoir de décerner le
diplôme d'État.
Ainsi, la Commission aura pour mission d'évaluer dans chacun des
collèges d'enseignement général et professionnel et dans
chacun des établissements d'enseignement public ou privé auxquels
s'applique le régime des études collégiales, les
politiques institutionnelles d'évaluation des apprentissages, y compris
les procédures de sanction des études et la mise en application
effective de ces politiques et procédures, les politiques
institutionnelles d'évaluation relatives aux programmes d'études
et la mise en application effective de ces politiques, la mise en oeuvre des
programmes d'études établis par le ministre, compte tenu des
objectifs et des standards qui leur sont assignés, et, enfin, les
objectifs, les standards et la mise en oeuvre des programmes d'études
établis par le collège ou l'établissement, compte tenu des
besoins qu'ils ont pour fonction de satisfaire.
Comme je le mentionnais précédemment, la création
de la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial oblige
à réaménager l'exercice de la fonction consultative en
enseignement collégial, plus spécifiquement, à abolir le
Conseil des collèges et le Conseil des universités pour
consolider au sein du Conseil supérieur de l'éducation l'ensemble
de la fonction consultative en éducation.
Ainsi, M. le Président, nous reviendrons à la situation
qui a déjà prévalu alors que le Conseil supérieur
de l'éducation était le seul organisme consultatif pour tous les
ordres d'enseignement. Comme plusieurs intervenants l'ont souligné, je
crois que cela contribuera à nous donner une vision plus globale du
système d'éducation au Québec. Je citerai même un
extrait du mémoire de mai dernier de la Conférence des recteurs
et des principaux des universités du Québec qui mentionnait: Le
regroupement des diverses fonctions consultatives pourrait favoriser la
coordination interordres.
Je voudrais profiter de cette occasion, M. le Président, pour
remercier toutes celles et tous ceux qui, à un moment ou à un
autre, ont dirigé ou travaillé au Conseil des collèges ou
au Conseil des universités. Je tiens à leur rendre hommage pour
avoir permis à ces deux organismes consultatifs de jouer un rôle
important dans l'évolution du système québécois
d'enseignement supérieur. Par des avis éclairés, ils ont
souvent influencé profondément les décisions
ministérielles et même gouvernementales.
Je tiens à souligner l'excellente et la fructueuse collaboration
que m'ont offerte, depuis mon entrée en fonction, en octobre 1990,
l'actuelle présidente du Conseil des universités, Mme Christiane
Quérido, et l'actuel président du Conseil des collèges, M.
Yvon Morin, ainsi que leurs collaboratrices et collaborateurs. Merci à
celles et ceux qui ont accepté de participer aux travaux des deux
conseils. (20 h 40)
M. le Président, il serait inexact de croire que toute
l'expertise, le talent et l'expérience de toutes ces personnes seront
perdus. Il y aura continuité dans le renouveau, je vous l'assure, M. le
Président. Tant la ministre que le gouvernement poseront, dans les
prochaines semaines, des gestes qui concrétiseront cette volonté
très ferme. Quand on sait, M. le Président, combien
l'évaluation a été au centre névralgique de
l'histoire des collèges depuis leurs débuts, combien elle a
marqué ces tournants et ces moments de crise, on ne peut qu'estimer
extrêmement significatif et prometteur l'accueil très ouvert et
très large que reçoivent l'idée de pratiques plus
serrées d'évaluation et celle de la création de la
Commission de l'évaluation.
Il faut voir là, M. le Président, l'expression d'une
assurance nouvelle, celle du réalisme et de îa maturité et
d'une nette volonté de répondre à une attente sociale de
plus en plus pressante. Les collèges en tireront, j'en suis convaincue,
une nouvelle crédibilité et une image plus forte de
compétence et de valeur. Faut-il rappeler que, lorsque j'utilise
l'expression «les collèges», j'entends,
bien évidemment, les populations étudiantes, les membres
des personnels et les gestionnaires, des personnes engagées ensemble
autour de buts communs, ayant une dynamique et une culture qui
révèlent un projet éducatif commun.
Le projet du collège québécois du XXIe
siècle, le vaste chantier qui commence maintenant sera le projet de ces
personnes d'abord, le projet des collèges. Nous devons nous faire un
devoir et un point d'honneur, M. le Président, de traduire en action le
momentum sans précédent qui a été
créé par la vaste réflexion collective des derniers mois,
et le projet de loi qui est devant nous, M. le Président, est une des
pièces essentielles à ce renouveau collégial. C'est ce que
fait mon gouvernement en créant cette Commission de l'évaluation
de l'enseignement collégial par le projet de loi 83 dont nous sommes
très fiers puisqu'il s'agit là de la disposition la plus
importante de tout le projet du renouveau, une assise fondamentale à ce
renouveau collégial, un outil essentiel basé sur la
qualité publiquement reconnu.
Cette décision, M. le Président, nous la prenons pour les
jeunes du Québec en particulier. Nous la prenons pour ces jeunes, nous
la prenons pour celles et ceux qui sont venus nous demander, avec force et
vigueur, une formation collégiale de qualité, plus exigeante et
surtout, plus crédible. Et, dans ce sens-là, la Commission de
l'évaluation aidera sûrement à rehausser la qualité
des programmes d'études en enseignement collégial.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, Mme la
ministre de l'Enseignement supérieur.
Sur ce même sujet, je reconnais M. le député de
Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition officielle.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Alors, M. le Président, on le sait ? la
ministre le rappelait à juste titre ? le projet de loi 83 vise
essentiellement 2 objectifs. D'abord, comme son nom l'indique, il s'agit de
mettre en place, de créer une commission d'évaluation qui aura
pour fonction et pour rôle d'évaluer, pour chaque
établissement d'enseignement collégial, les politiques
institutionnelles d'évaluation des apprentissages, mais également
celles d'évaluation relatives aux programmes d'études et la mise
en oeuvre, aussi, des programmes d'études. En même temps, on le
sait, on abolit 2 conseils consultatifs qui existaient depuis un bon nombre
d'années, celui des collèges et celui des universités, et
on transfère une partie seulement des fonctions de ces 2 conseils au
Conseil supérieur de l'éducation.
Je rappelle, de nouveau, que nous avons voté en faveur du
principe du projet de loi 83. Donc, nous étions d'accord et nous le
sommes toujours pour mettre en place une commission d'évaluation et
faire en sorte qu'il y ait ce que certains ont appelé un regard externe
qui soit porté sur les apprentissages et les programmes d'études
du réseau collégial. Nous aurions souhaité, cependant,
voir corrigées, par le biais de modifications ou d'amendements,
certaines lacunes du projet de loi, lors de l'étude
détaillée. Ces lacunes ont trait, d'abord, à la
composition de cette Commission, de même qu'aux mandats qui lui sont
confiés. On sait que le nombre de membres de la Commission, qui est de 3
commissaires, aurait eu, selon nous ? plusieurs intervenants l'ont
également signalé ? avantage à être
augmenté, à être accru, afin de favoriser une
pluralité des opinions ? c'était le motif invoqué par
plusieurs ? et aussi une meilleure qualité des débats, et
éviter, possiblement, de tomber dans le piège de l'arbitraire. Le
gouvernement s'en est tenu aux 3 commissaires, tel que prévu à
l'origine.
Une autre lacune également. On aurait souhaité que la
nomination des commissaires se fasse après consultation des principaux
groupes concernés par l'enseignement collégial. Ce n'est pas une
innovation en soi, ça existe dans beaucoup de cas où la
nomination de membres de commissions ou de régies ou
d'organismes-conseils se fait après avoir procédé
préalablement à une consultation du milieu concerné ou des
principaux intervenants du milieu concerné. Plusieurs auraient
souhaité que la nomination de ces commissaires soit
précédée d'une consultation auprès des groupes
concernés par l'enseignement collégial. Ça aurait permis,
à ce moment-là, au gouvernement de nommer des personnes sans
doute plus crédibles et aussi, évidemment, plus
agréées par le milieu. Ça aussi, ça a
été refusé.
Nous avons également souhaité, à la suite de
plusieurs intervenants... La plupart ont réclamé que soit
élargi le mandat de l'organisme, le mandat de la Commission
d'évaluation pour que lui soit confié, également, le
mandat de prendre en compte, dans ses évaluations, l'effet qu'ont les
politiques, les règlements, les directives et les autres mesures
administratives du ministère de l'Enseignement supérieur et de la
Science sur la gestion des programmes dans le réseau, dans les
collèges. Ça, quand on lit le rapport du Conseil des
collèges à ce sujet-là, ça faisait partie des
objets d'évaluation de la Commission comme proposition du Conseil des
collèges. Il fallait non seulement évaluer les apprentissages et
les programmes d'études, mais aussi, il fallait que l'évaluation
soit faite également de ce qu'on appelle les grands encadrements
nationaux, c'est-à-dire les politiques, les directives et les
règlements du ministère, pour ne pas que le ministère
lui-même échappe à l'évaluation. Ce n'est pas
normal. Ce n'est pas normal qu'on évalue dans les collèges les
apprentissages et les programmes d'études, et qu'au ministère les
politiques, les directives et les règlements échappent à
l'évaluation, soient soustraits à l'évaluation.
Nous avons souhaité, avec plusieurs également, que soit
éliminée la possibilité donnée à la
Commission d'évaluation de recommander au ministre d'habiliter un
établissement d'enseignement à décerner le diplôme
d'études collégiales. C'est très controversé dans
le milieu; c'est très controversé. Il y a pas mal plus d'op-
position dans le milieu qu'il n'y a d'acceptation de cette mesure, pour
une raison très simple: la plupart sont venus nous dire que
l'enseignement collégial est constitué en réseau. Il y a
des établissements, mais c'est un réseau, et le diplôme qui
est décerné dans ce réseau est un diplôme
d'État, donc, décerné par la ministre de l'Enseignement
supérieur.
Là, le projet de loi prévoit que la Commission pourrait
recommander à la ministre, à la suite de l'évaluation d'un
établissement collégial, d'autoriser tel ou tel collège
à décerner le diplôme. Alors, ça créerait une
sorte de tableau d'honneur, ça créerait deux classes de
collèges, les bons collèges, les collèges qui ont le
privilège de décerner des diplômes, parce qu'ils se sont
bien classés, parce qu'ils ont été bien
évalués par la Commission, et puis les collèges moins
bons, les collèges de deuxième classe, qui continueront de voir
leurs diplômes décernés par la ministre. (20 h 50)
On devine un peu ce que ça va créer. Ça va
créer une sorte de compétition malsaine entre les
collèges, et les étudiants nous faisaient remarquer que, lorsque
l'étudiant aura terminé ses études collégiales,
aura en main son diplôme, ça pourra lui créer des
difficultés lorsqu'il sera à la recherche de l'emploi. Il pourra
se présenter devant une entreprise, nous disaient les étudiants,
il va se présenter devant une entreprise, et le réflexe premier
de l'entreprise, ça va être de regarder dans le tiroir, là,
la liste des collèges, les collèges qui ont été
bien cotés, qui ont la médaille d'honneur, qui peuvent
décerner les diplômes, et ceux qui n'ont pas ce
privilège-là, pour voir si l'étudiant vient d'un des
collèges de la première ou de la deuxième classe.
C'est comme ça que ça va fonctionner, et c'est
évident, nous disaient les étudiants, qu'à partir du
moment où on crée ces deux classes de collèges, c'est
clair que celui qui vient d'un collège de la deuxième classe va
avoir moins de chances de se trouver un emploi sur le marché du travail.
Il va avoir moins de chances, c'est évident. Ça tombe sous le
sens, c'est clair. C'est pour ça que cette mesure-là n'aurait pas
dû apparaître, qu'on aurait dû la retirer du projet de loi
sur la Commission d'évaluation. Malheureusement, la ministre n'a pas
voulu entendre raison. Elle a maintenu cette mesure et cette
possibilité, et on va se retrouver, au fil des ans, avec un
réseau collégial à deux classes, à deux classes de
cégeps, ce qui, à mon avis, ne sera pas très sain dans le
réseau.
D'autre part, on abolit deux conseils, le Conseil des collèges et
le Conseil des universités. On aurait souhaité, nous et plusieurs
intervenants aussi, que, par cette abolition, on transfère totalement et
complètement les mandats, les fonctions des conseils qu'on abolit, qu'on
supprime. Ça n'a pas été le cas. Là, le
gouvernement en a profité, a profité de l'opération, a
profité de la mise à mort de deux Conseils, celui des
universités et celui des collèges, pour réduire les
mandats et les fonctions du Conseil supérieur de l'éducation dans
le domaine de l'enseignement collégial et de l'enseignement
universitaire.
Plusieurs objets d'avis actuellement sollicités auprès du
Conseil des collèges et du Conseil des universités par la
ministre ne feront plus partie des mandats et des fonctions du Conseil
supérieur de l'éducation élargi. Je pense, notamment, aux
avis touchant les projets de création de nouveaux collèges et
universités ou de nouveaux programmes d'études établis par
la ministre, le plan de répartition par collège des programmes,
les politiques d'allocation entre les collèges, de même qu'entre
les universités, la répartition du montant global des
crédits annuels accordés pour l'enseignement collégial,
l'enseignement universitaire, tout ce qui concerne le budget et la
répartition budgétaire dans les deux réseaux, tout
ça, le plan, les règles de répartition entre les
collèges et les universités des budgets d'investissement, tout
ça a été enlevé. C'étaient des mandats, des
fonctions, et du Conseil des collèges, et du Conseil des
universités. Dans le transfert, ça disparaît. Alors, le
Conseil supérieur de l'éducation, qui est le seul conseil aviseur
qui va rester, qui va subsister, verra cependant ses fonctions réduites,
diminuées.
Alors, M. le Président, c'étaient là les lacunes
qu'on avait signalées à l'occasion de l'étude
détaillée avec plusieurs intervenants qui sont venus
témoigner, à l'occasion des audiences particulières.
Malheureusement, il nous faut constater que, pour l'essentiel, ces lacunes
n'ont pas été corrigées par des amendements
apportés par la ministre. La ministre s'en est tenue, pour l'essentiel,
à son projet de loi original. Elle a apporté des amendements de
détail, des amendements peu substantiels, de sorte que nous maintenons
notre accord au projet de loi tout en regrettant, cependant, que la ministre
n'ait pas entendu, n'ait pas donné suite à nos requêtes et
à celles, également, de plusieurs acteurs du milieu
collégial.
Nous continuons, donc, d'appuyer le projet de loi parce que, pour
l'essentiel, nous sommes d'accord avec la mise en place d'une telle institution
d'évaluation externe, donc, une institution indépendante,
crédible également, qui aura pour effet, je pense, au fur et
à mesure qu'elle va fonctionner, opérer, ça aura pour
effet, nous en sommes persuadés, même s'il y a toujours ces
lacunes que j'ai signalées tout à l'heure, d'améliorer la
qualité de l'enseignement collégial et surtout ? une
question un peu symbolique dans tout ça ? de lever des doutes qui
planent sur la qualité de la formation collégiale.
Parce que c'est le cas. Il ne faut pas être aveugle, dans la
population, dans la société québécoise, il y a
beaucoup de monde qui met en doute, même remet en question la
qualité de la formation dans les établissements
collégiaux, qui n'est pas convaincu que la formation qu'on reçoit
dans nos collèges est une formation de grande qualité et que, par
conséquent, les diplômes qu'on y décerne à la fin
sont des diplômes de valeur incontestable. Il y a ces doutes qui
persistent. Et je pense qu'un des bons moyens de lever ces doutes et de faire
en sorte que les Québécois et les Québécoises
retrouvent une confiance à l'égard de la qualité de
la formation qui est dispensée dans les établissements
collégiaux, c'est justement la mise en place d'une commission
d'évaluation indépendante, externe, qui va, je pense, faire en
sorte que l'on va de nouveau être convaincu que la formation qui est
dispensée dans nos collèges est une formation de
qualité.
Remarquez bien, il ne faut pas non plus dramatiser puis en faire une
tragédie, ce l'est déjà. La formation qui est
dispensée dans nos collèges est quand même une formation de
bonne qualité. On ne peut pas dire que c'est la perfection, mais c'est
quand même une formation de bonne qualité. Cependant, la
Commission d'évaluation... La mise en place de politiques
institutionnelles d'évaluation des apprentissages et des programmes
d'études dans chacun des établissements collégiaux, avec
ce regard externe qui va venir de la Commission d'évaluation, tout cela
va faire en sorte, je pense, que les doutes sur la qualité de la
formation vont disparaître et qu'on va se retrouver, finalement, au bout
du compte ? je l'espère; du moins, c'est l'objectif du projet de
loi, et c'est pour cette raison qu'on est d'accord avec le projet de loi ?
avec une formation collégiale de meilleure qualité et un
Diplôme d'études collégiales de meilleure valeur. M. le
Président, je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le
député de Lac-Saint-Jean.
Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur ce sujet?
Mise aux voix
Est-ce que le projet de loi 83, Loi sur la Commission
d'évaluation de l'enseignement collégial et modifiant certaines
dispositions législatives, est adopté?
M. Chevrette: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Oui, M. le Président. Nous en sommes
maintenant rendus à l'article 23 de notre feuilleton.
Projet de loi 82 Adoption
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 23,
Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science propose
l'adoption du projet de loi 82, Loi modifiant la Loi sur les collèges
d'enseignement général et professionnel et d'autres dispositions
législatives.
Alors, Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de la
Science, je vous cède la parole.
Mme Lucienne Robillard Mme Robillard: Merci, M. le
Président. M. le Président, c'est avec beaucoup de fierté
et d'émotion que j'interviens aujourd'hui, comme ministre responsable de
l'Enseignement supérieur et de la Science, à l'étape du
débat sur la motion d'adoption du projet de loi 82, la Loi modifiant la
Loi sur les collèges d'enseignement général et
professionnel. Fierté, en effet, de présenter les
résultats de la démarche gouvernementale qui fut initiée,
vous vous en souviendrez, M. le Président, il y a plus d'un an, à
l'Assemblée nationale, lors du discours inaugural de mars 1992. (21
heures)
On se souviendra qu'à l'occasion du 25e anniversaire de la
réforme de l'enseignement collégial et de la création des
premiers cégeps, le gouvernement a convenu de demander à la
commission parlementaire de l'éducation de tenir une consultation
générale sur l'avenir de l'enseignement collégial
québécois. Il s'agissait d'instituer ainsi un large débat
public sur l'ensemble des questions soulevées à propos de
l'enseignement collégial, y compris sur l'opportunité même
de le maintenir dans sa structure actuelle. Ce faisant, le gouvernement
entendait renforcer significativement les actions d'évaluation conduites
au cours des dernières années et favoriser la convergence de
nombreuses opérations de réflexion envisagées à
l'occasion de cet anniversaire. Il entendait aussi créer un vaste forum
où puissent être traitées les questions touchant à
la fois les besoins nouveaux de formation supérieure et les critiques,
explicites ou diffuses, dont faisait l'objet l'enseignement collégial
québécois.
Le gouvernement a voulu une discussion ouverte et libre, la moins
polarisée possible par la confirmation ou le rejet d'une position
gouvernementale préalablement exprimée. C'est pour cela qu'il
s'est limité à définir, dans le libellé du mandat
confié à la commission parlementaire, les grandes balises du
débat. De concert avec les organismes concernés, il a cependant
établi le calendrier de ses travaux de manière à mettre
à profit les avis de 3 conseils consultatifs: d'abord, l'avis sur
l'enseignement collégial de demain préparé par le Conseil
des collèges et rendu public en mai 1992; ensuite, l'avis sur les
objectifs et la structure de l'enseignement supérieur
québécois, préparé par le Conseil supérieur
de l'éducation à ma demande et rendu public en octobre 1992; et,
enfin, l'avis sur les jeunes et l'enseignement collégial,
préparé par le Conseil permanent de la jeunesse à la
demande du premier ministre et rendu public en novembre 1992. Deux cent
vingt-deux mémoires ont été soumis à cette
commission parlementaire, qui a siégé du 4 novembre au 18
décembre 1992, tenant 105 heures d'audiences et accueillant 109 groupes
et organismes. Une consultation qui a permis, M. le Président, de
dégager des consensus clairs et de prendre des décisions qui ont
été exposées dans le projet gouvernemental de renouveau
dévoilé le 6 avril dernier.
Afin de permettre aux principaux groupes concernés ? une
vingtaine environ ? de réagir à ces propositions
gouvernementales, nous tenions, du 11 au 14 mai derniers, une seconde
consultation, restreinte celle-là,
mais non moins significative puisqu'elle nous a permis d'apporter des
bonifications substantielles au projet initial.
C'est donc avec beaucoup de fierté, M. le Président, que
je constate que nous avons réussi à traiter de tout le dossier
collégial au grand jour et à atteindre aujourd'hui l'étape
de l'adoption finale par l'Assemblée nationale d'une pièce
législative majeure à l'égard de cet ordre d'enseignement.
Émotion aussi en raison du fait que nous arrivons au seuil d'une
nouvelle ère de la vie des collèges au Québec, ces
collèges qui occupent dans notre dispositif de formation, faut-il le
rappeler, M. le Président, une place charnière des plus
importantes, un centre névralgique du système d'éducation
au Québec.
Au terme de ces 15 mois de réflexion, de dialogue et de travaux
parlementaires, nous avons collectivement décidé de refaire le
choix des collèges tout en leur apportant des changements en profondeur.
Nous savons les collèges capables de ces changements, capables d'un
partenariat renouvelé avec la société
québécoise. Nous en sommes donc à une étape que je
qualifie de déterminante pour l'avenir de l'enseignement
collégial québécois. Sous le thème «Des
collèges pour le Québec du XXIe siècle», le
renouveau de l'enseignement collégial, rendu public le 6 avril dernier,
nous confrontera tous à de nouveaux défis. Il s'agit
essentiellement de bâtir, au Québec, une société
formée de gens instruits, compétents, responsables et ouverts sur
le monde. Oui, des défis importants nous attendent à partir de
maintenant, mais il s'agit de défis que je nous crois capables
collectivement de relever.
En adoptant le projet de loi 82, je mise avec grande confiance sur la
capacité des collèges d'assumer des responsabilités plus
déterminantes vis-à-vis de ce qui définit leur mission
même, c'est-à-dire le projet de formation que constitue, pour les
étudiants, les enseignants et les gestionnaires, chacun des programmes
d'études et, à l'échelle de l'établissement,
l'ensemble des programmes d'études.
Le renouveau n'indique pas d'autres voies plus essentielles de
développement. Il réaffirme sans détour la mission de
formation des collèges, et il y subordonne toutes les autres
activités, si utiles et légitimes soient-elles. Il renforce,
élargit et adapte les visées du fond commun de formation
générale. Il entend en resserrer les contenus, la
cohérence, l'équilibre, l'insertion dans chacun des programmes
d'études. Il opte pour des approches axées sur l'exigence par le
resserrement des conditions d'admission, par la confirmation du statut
d'enseignement supérieur, par l'attention accordée aux standards,
par l'alourdissement de certains programmes préuniversitaires, par le
renforcement de pratiques d'évaluation, par l'instauration
d'épreuves synthèses, par la création d'une commission
externe d'évaluation. Il donne aux collèges des
responsabilités plus immédiates dans la mise en oeuvre des
programmes d'études, voire dans l'élaboration de programmes
d'établissements. Il instaure même une dynamique permettant aux
collèges d'assumer progressivement une responsabilité qui, en
enseignement supérieur, est le symbole même de l'âge adulte
académique: il s'agit du pouvoir éventuel de décerner
eux-mêmes les diplômes d'études.
Il est clair, M. le Président, que lorsqu'il est ici question de
collèges il est question des divers personnels qui y oeuvrent, de ces
acteurs de première ligne qui sont directement interpellés par le
renouveau de l'enseignement collégial. Un collège, c'est
toujours, concrètement, des personnes, des équipes de personnes
engagées ensemble autour de buts communs. Quand nous entendons
reconnaître plus pleinement les responsabilités académiques
des collèges, nous visons très directement les divers personnels
qui auront à prendre en main ces responsabilités, que ce soit au
sein du conseil d'administration, de la Commission des études, à
l'accueil et à l'encadrement des étudiants, à
l'évaluation des apprentissages, à la gestion des programmes
d'études et, bien sûr, à l'enseignement. Des
responsabilités de divers ordres, en somme, que vous me permettrez, M.
le Président, de cerner davantage.
Il y a, bien sûr, les tâches de ce qu'on pourrait appeler
une gestion académique renouvelée dans les collèges: la
mise en place d'une commission des études forte, centrée sur les
politiques d'évaluation et sur les programmes d'études; le
développement de l'approche programme dans l'enseignement, et enfin
l'encadrement des étudiants et des enseignants.
D'autres tâches ont trait au contenu même des enseignements:
la participation à l'établissement des objectifs et des standards
des programmes; la définition d'une proportion accrue des
activités d'apprentissage; la présentation institutionnelle aux
étudiantes et aux étudiants des programmes effectivement offerts
dans l'établissement; l'élaboration d'épreuves
synthèses dans les programmes d'études; l'élaboration ou
la détermination des programmes d'établissement, et enfin
l'enrichissement des politiques d'évaluation des programmes
d'études dispensés.
D'autres tâches concernent l'organisation de la vie
pédagogique elle-même, principalement tout ce qui concerne
l'accueil, l'intégration et l'encadrement des étudiantes et des
étudiants. D'autres, enfin, touchent à des partenariats qui sont
appelés à se renforcer. On peut penser ici aux liens avec le
monde du travail et les commissions scolaires en formation technique, avec les
universités dans les projets conjoints en formation
préuniversitaire, avec les autres collèges dans des
collaborations nouvelles autour des diverses tâches du renouveau. Plus
globalement, on peut penser aussi aux nouveaux rapports de transparence et
d'imputabilité que les collèges seront amenés à
entretenir avec une instance comme la Commission d'évaluation de
l'enseignement collégial, et, plus largement, avec l'ensemble de la
collectivité. (21 h 10)
Le discours ambiant désigne ces tâches, ces
responsabilités comme nouvelles et porteuses d'exigences nouvelles,
voire nécessitant même des ressources nouvelles. Il y a
effectivement, par rapport à ce qui a été pratiqué
depuis 25 ans, une nouveauté que l'on serait
mal venu de minimiser ou de nier, en même temps qu'il faut bien
nous dire, cependant, que ce sont là des responsabilités normales
pour des établissements et des personnels ayant atteint la
maturité et pleinement convaincus de pouvoir l'exercer. Les
collèges privés et publics du Québec, qui ont parlé
haut et fort d'autonomie institutionnelle, allant même jusqu'à
réclamer le pouvoir de décerner eux-mêmes leurs
diplômes, avaient sûrement pris la mesure de ces tâches et de
leurs exigences; les universités et d'autres intervenants aussi, qui y
ont vu la voie de développement la plus prometteuse pour
l'amélioration de la qualité de la formation collégiale et
le renforcement de son calibre et de sa reconnaissance.
Nouvelles, quant à leur intensité et quant à
l'économie du système en place, ces tâches ne sont tout de
même pas nouvelles quant à leur nature et à leur fondement.
En effet, les collèges n'ont jamais été voués
à autre chose qu'à la formation, aux études et à
l'enseignement. Ils n'ont jamais eu d'autres raisons d'être que les
étudiantes et les étudiants. Il n'est pas nouveau pour eux de
mettre en oeuvre des programmes d'études et d'encadrer les
étudiants avec des visées explicites de réussite,
d'évaluer les apprentissages et d'en garantir la qualité. Ou
encore d'être engagés dans un partenariat avec les entreprises,
les universités et l'ensemble de leur communauté
d'appartenance.
La nouveauté des tâches proposées s'inscrit donc
dans une évidente continuité. Les divers personnels des
collèges devront assumer cette plus grande autonomie dont il est
question ici, assumer ces responsabilités plus déterminantes dont
je parlais précédemment. Je n'entretiens aucun doute sur leur
capacité à relever ces importants défis et sur le fait que
le renouveau proposé devienne leur renouveau et, donc, le renouveau des
collèges du Québec. J'ajouterai, M. le Président, que nous
pouvons compter pour ce faire sur des personnels et des directions qui n'en
sont plus à leurs débuts et dont les preuves ne sont plus
à faire. Le travail déjà accompli est une source de
fierté et un stimulant pour l'étape cruciale que nous devons
entreprendre ensemble.
Le projet de loi 82, qui en est à l'étape de son adoption
à l'Assemblée nationale, constitue un élément
important, un dispositif législatif majeur qui permettra le virage vers
l'excellence. Nous devons le réussir, ce virage, M. le Président,
pour les jeunes du Québec et pour l'ensemble de la population du
Québec.
Mes derniers mots, M. le Président, seront pour remercier les
membres de la commission de l'éducation. D'abord, mon adjoint
parlementaire et député de Sherbrooke, et mes collègues de
la formation gouvernementale, la députée de Bourget, ceux de
Charlevoix, de LaFontaine, de Rimouski, de Sauvé, de Verdun et de
Vimont, les remercier d'abord pour leur préparation studieuse et leur
participation active et assidue à l'ensemble de l'opération.
Remercier aussi les porte-parole officiels de l'Opposition, celui
d'Abitibi-Ouest, jusqu'en mars 1993, et de Lac-Saint-Jean, depuis 4 mois, et
les membres aussi de l'Opposition, en particulier les députées de
Terrebonne et des Chutes-de-la-Chaudière, pour leur volonté
manifeste de dépasser les intérêts partisans et pour leur
contribution à la discussion des questions de fond débattues ici
depuis un an. Si l'adoption du principe du projet de loi 82 n'a pas
été faite à l'unanimité en cette Chambre, M. le
Président, il faut souligner que, lors de l'étude
détaillée en commission, au-delà de 70 % des articles
qu'il contient furent adoptés à l'unanimité.
Merci aussi, M. le Président, à la présidence de la
commission de l'éducation, surtout personnifiée par la
députée de Matane qui, avec tact et doigté, a su mener
à bon port nos travaux en commission. Merci, également, à
M. Christian Comeau et à l'équipe du secrétariat de la
commission, à la Direction du Journal des débats et
à la Direction de la radiotélévision des débats
pour leur disponibilité et leur soutien compétent tout au long
des travaux.
Un très grand merci sutout à toutes celles et à
tous ceux, et ils sont très nombreux, M. le Président, qui ont
déposé des mémoires et qui ont accepté nos
invitations à venir présenter leurs points de vue et à en
discuter avec nous en toute franchise et en grande lucidité. Un merci
spécial aux groupes de jeunes étudiantes, étudiants et
diplômés des collèges, qui nous ont constamment
rappelé la raison d'être même de nos travaux et de tout ce
qui se fait en enseignement collégial. Merci aussi aux directions et aux
personnels des collèges, enfin, qui ont conduit des démarches
majeures de réflexion, de remise en question, de prospective et
d'engagement.
Merci à toutes celles et à tous ceux ? et ils sont
largement répandus dans la population québécoise ?
qui nous ont fait part de leur appui et de leurs attentes. Des appuis et des
attentes auxquels, maintenant, M. le Président, nous avons à
répondre.
Finalement, des remerciements particuliers à l'équipe du
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science,
dirigée par M. Pierre Lucier, assisté de M. Jacques Lanoux, pour
m'avoir secondée avec grande compétence tout au long de cette
vaste et stimulante démarche.
M. le Président, l'heure est maintenant venue de passer à
l'action et d'agir concrètement. Si l'avenir des sociétés
se joue sur leur aptitude à relever le défi de la
compétence et de la connaissance, nous aurons des collèges pour
le Québec du XXIe siècle. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre
de l'Enseignement supérieur et de la Science. Je rappelle aux membres de
cette assemblée que nous en sommes à l'adoption du projet de loi
82, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement
général et professionnel et d'autres dispositions
législatives. Je cède la parole à M. le whip en chef de
l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean. M. le
député, vous avez la parole.
M. Jacques Brassard M. Brassard: Merci, M. le Président.
Je ne vous
apprendrai rien en vous disant que nous avons voté contre le
principe. Également, nous avons voté contre la prise en
considération du rapport, et nous allons voter contre l'adoption du
projet de loi 82. C'est clair que, quand on regarde le projet de loi, ça
ne couvre pas toutes les propositions concernant ce que la ministre se
plaît à appeler le renouveau de l'enseignement collégial.
Il y a bien des éléments et il y a bien des dimensions de ces
propositions de renouveau qui ne se retrouvent pas dans le projet de loi, qu'on
retrouve plus précisément dans le projet de régime
pédagogique. Toute la question de l'agencement des cours de formation
générale ? le jeu de blocs, les trois blocs proposés
par la ministre ? tout ça, ça ne se retrouve pas, ça
n'apparaît d'aucune façon dans le projet de loi 82. C'est dans le
projet de règlement du régime pédagogique, ce qui fait
que, quelqu'un qui, à brûle-pourpoint, regarderait le projet de
loi 82, et à qui on dirait: Voici, c'est le projet de réforme de
l'enseignement collégial, bien, il serait un peu perdu, parce qu'il y a
bien des éléments qui manquent.
Il y a quand même des éléments essentiels dans le
projet de loi 82, et plusieurs avec lesquels nous avons exprimé notre
désaccord le plus profond, parce que, pour nous, plusieurs des
éléments de ce projet de loi, de même, d'ailleurs, que
plusieurs des éléments du projet de règlement sur le
régime des études collégiales, tout aussi important que le
projet de loi, mais qui échappe à l'Assemblée nationale et
qui échappe à la commission parlementaire, parce que ça
ressort du pouvoir réglementaire du gouvernement... On a pu le regarder,
on a pu en prendre connaissance, mais on n'a aucun pouvoir, comme Parlement,
d'amender, de modifier ce projet de règlement sur les études
collégiales. C'est un règlement. Donc, c'est le Conseil des
ministres qui l'adopte. (21 h 20)
II y en a plusieurs des éléments de ce projet de
règlement, cependant, qui sont pour nous inacceptables. Nous les avons
maintes et maintes fois indiqués, signalés, identifiés,
ces éléments à la fois du projet de loi et du projet de
règlement, qui sont, pour nous, inacceptables, rejoignant en cela
plusieurs intervenants du milieu collégial. Il ne faut pas s'imaginer
que l'Opposition officielle est solitaire, est toute seule, isolée dans
son coin. Pas du tout. Ce qu'on trouve inacceptable dans ce projet de loi
là, on n'est pas tout seuls à le penser. Il y a plusieurs
intervenants, et surtout plusieurs intervenants du milieu même de
l'enseignement collégial, qui ont adopté le même point de
vue, la même position. Comme je le disais, ça a déjà
été maintes et maintes fois indiqué. Je me permets,
cependant, de vous rappeler que plusieurs de ces irritants viennent du fait
qu'il y a eu comme une espèce de dérapage qui s'est fait entre
les consensus qui se sont dégagés à l'occasion de la
commission parlementaire de l'automne et la législation, le projet de
loi lui-même, de même que le projet de règlement sur les
études collégiales, une espèce de distanciation ou de
fossé qui s'est créé entre les consensus et la
façon de les incarner ou de les concrétiser dans un projet de
loi, dans une pièce législative.
Je me permets, de nouveau, de donner quelques exemples de ces
dérapages par rapport aux consensus qui se sont dégagés.
L'un des consensus, très net, qui faisait l'unanimité,
c'était que tout le monde était d'accord pour dire qu'il fallait
accroître et qu'il fallait favoriser la réussite et la
persévérance dans les études. Ça, ça veut
dire quoi? Ça veut dire, d'abord, augmenter l'accès,
c'est-à-dire faire en sorte qu'il y ait plus d'étudiants venant
du secondaire qui accèdent aux études collégiales,
augmenter le taux d'accessibilité. Ça veut dire aussi augmenter
le taux de diplomation, c'est-à-dire qu'il y ait plus d'étudiants
qui réussissent, qui obtiennent un diplôme. Et puis, ça
veut dire aussi faire en sorte que les étudiants terminent leurs
études dans un temps plus court, donc que ça ne s'éternise
pas. C'est ça que ça veut dire, favoriser la réussite et
la persévérance dans les études collégiales. Tout
le monde était d'accord là-dessus; c'était un consensus.
Tout le monde est d'accord avec la vertu; c'était un peu la vertu.
Mais là, voilà que, quand on regarde le projet de
règlement et qu'on regarde le projet de loi, il y a des
éléments là-dedans qui vont en contradiction avec ce
consensus et qui vont même, je dirais, empêcher, entraver
l'atteinte de ces objectifs, soit un plus haut taux de réussite et une
plus grande persévérance aux études. Ça va les
empêcher. Évidemment, la taxe à l'échec, c'est
l'élément le plus visible, qui a retenu le plus l'attention, et
on comprend pourquoi. C'est clair que la taxe à l'échec,
ça va être loin de favoriser l'accessibilité aux
études collégiales. Au contraire, ça va avoir pour effet
d'expulser du réseau un plus grand nombre d'étudiants. Ça
va même, aussi, avoir pour effet ? ça a été
signalé par beaucoup de monde ? d'allonger la durée des
études, parce que ? les étudiants nous le disaient, les
enseignants aussi nous le disaient ? c'est clair que, pour éviter
d'atteindre le niveau d'échec au-delà duquel la taxe joue, les
étudiants vont s'inscrire à moins de cours. Donc, ils vont
prendre plus de temps pour compléter leurs études
collégiales, pour éviter de payer la taxe à
l'échec. C'est donc dire que la durée des études va
être allongée. Alors, c'est contraire à l'objectif qu'on
poursuit.
D'autre part, quand on regarde les mesures concrètes pour venir
en aide aux étudiants en matière d'orientation, d'aide
pédagogique individuelle, d'un meilleur encadrement, c'est loin
d'être évident que les ressources vont être au rendez-vous.
C'est loin d'être évident que le gouvernement va débloquer
les crédits, parce que là, il faut parler d'argent. C'est bien
beau de dire qu'on procède à un renouveau de l'enseignement
collégial, il y a des choses qui peuvent se faire sans ajouter un sou,
j'en conviens, mais il y a des dimensions de cette réforme-là qui
ne peuvent pas être concrétisées sans qu'on ajoute des
ressources, et particulièrement en matière de services aux
étudiants. Que ce soit en matière d'orientation, d'aide
pédagogique, de meilleur encadrement pour les étudiants, c'est
évident que ça va exiger de nouvelles ressources et c'est loin
d'être assuré.
Deuxième exemple. Il y a un consensus qui s'était
dégagé également, c'est qu'il fallait renforcer la
formation générale commune. Bon. Tout le monde était
d'accord là-dessus. Il fallait que la formation générale
commune soit améliorée, enrichie, approfondie, renforcée.
Parfait! Très bien! C'est quoi, la solution de la ministre? Là,
elle nous arrive avec ce que j'appelle son jeu de blocs, le jeu de 3 blocs.
Elle joue avec ça, et ça a pour effet de diminuer les cours de
philosophie et de diminuer de façon substantielle les cours
d'éducation physique. Les fondements pédagogiques de ce jeu de
blocs sont loin d'être clairs, en tout cas perceptibles. On a de la
misère à les identifier facilement. Il y a même
passablement d'arbitraire là-dedans. C'est clair qu'elle coupe dans des
cours parce qu'elle veut faire de la place à autre chose. C'est
l'évidence. Elle veut faire de la place à l'enseignement de
l'anglais langue seconde. Bon. Ça, c'est sûr. Alors, pour ce
faire, elle coupe ailleurs, elle coupe en philosophie et elle coupe en
éducation physique. Mais, sur le plan pédagogique, ce n'est pas
plus justifiable que ça. Ce n'est pas plus justifié non plus. Il
y a donc une grande part d'arbitraire dans son jeu de blocs.
Nous, notre réaction, c'était de dire: Attention, ce n'est
pas évident que c'est dans cette voie-là qu'il faut s'engager. Et
particulièrement en ce qui a trait à la philosophie, j'ai
signalé à maintes reprises que, s'il y a une discipline qui est
propre à l'ordre de l'enseignement collégial, c'est la
philosophie. C'est uniquement là que les étudiants abordent cette
discipline et fréquentent cette discipline dans le but d'acquérir
et de maîtriser certaines compétences de nature intellectuelle.
Curieusement, on décide de couper les cours de cette discipline qui est
propre à l'enseignement collégial. C'est un peu aberrant. Les
professeurs de philosophie sont venus le signaler en commission parlementaire.
Leur mémoire est tout à fait très étoffé,
bien articulé, bien documenté aussi à ce sujet-là.
Ça n'a pas semblé convaincre la ministre.
C'est la même chose pour les cours d'éducation physique.
Alors que ce gouvernement, par le biais de son ministère de la
Santé et des Services sociaux, proclame qu'il faut améliorer la
santé des Québécois et des Québécoises, que
c'est là un objectif majeur du gouvernement dans sa politique de la
santé, et que, pour ce faire, il faut mettre l'accent sur la
prévention, donc l'acquisition de meilleures habitudes de vie,
s'habituer également aux activités physiques, on voit, de l'autre
côté, un autre ministre de ce même gouvernement qui
décide de couper de 50 % les cours d'éducation physique au niveau
collégial. C'est comme difficile à concilier. Il y a comme une
sorte d'incohérence au sein du gouvernement.
Alors, devant tout ça, nous, on a trouvé très sage,
très prudente et très appropriée la proposition de la CEQ,
de Mme Pagé, quand elle venue devant la commission parlementaire. Elle a
dit: Écoutez, il me semble qu'il faudrait s'arrêter un peu,
prendre un peu plus de temps pour réfléchir à tout
ça, et surtout ne pas uniquement regarder un seul ordre d'enseignement,
celui qui est pris en sandwich entre les 2 autres, entre le primaire-secondaire
et l'universitaire, puisqu'on sait que, dans le système
d'éducation dans son ensemble, les 3 ordres d'enseignement sont
intimement interreliés. Il y a des arrimages nombreux entre les 3 et ce
qu'on fait dans un a généralement et presque toujours des
répercussions dans les autres. Donc, Mme Pagé, comme plusieurs
autres, d'ailleurs, comme la grande amie de la ministre aussi, Mme Bissonnette,
une amie intime qu'elle admire beaucoup... Mme Bissonnette disait la même
chose: II faut procéder à une réflexion globale qui porte
sur l'ensemble du système et sur l'harmonisation des 3 ordres
d'enseignement. Avant de toucher au curriculum, aussi bien au collégial
qu'au secondaire primaire, faisons une réflexion globale et voyons, de
façon à ce que tout ça soit marqué par la
cohérence. (21 h 30)
Et la proposition de Mme Pagé, c'était: Pourquoi pas un
moratoire là-dessus? Prenons un bout de temps, quelques mois, et
demandons au Conseil supérieur de l'éducation, dont c'est la
tâche, demandons-lui un avis. Il est là pour ça, il est
créé pour ça, c'est ça, sa fonction, le Conseil
supérieur de l'éducation, puis, généralement, vous
prendrez connaissance de tous les avis du ministère de
l'Éducation, puis vous constaterez que c'est toujours des avis
très, très fortement étoffés, toujours très
pertinents, toujours raisonnables et toujours avec un souci et une
préoccupation constante, je dirais, du caractère
pédagogique des choses, parce que ça concerne le système
d'éducation. Prenez n'importe quel avis, là, publié par le
Conseil supérieur de l'éducation, et on voit qu'il y a là
une pensée profonde sur l'éducation, sur la finalité de
l'éducation et toujours un souci pédagogique constant, dans tous
ses avis.
Alors, l'idée proposée par Mme Pagé,
c'était: Demandons donc au Conseil supérieur de
l'éducation, dont c'est la tâche, la fonction, le rôle,
demandons-lui un avis sur le curriculum, la sanction des études de
l'ensemble du système d'éducation, pas uniquement de l'ordre
d'enseignement collégial, mais l'ensemble du système, de
façon à concilier tout ça. Puis, là, à
partir de là, on sera pas mal mieux éclairés, mieux en
mesure de prendre une décision quant à la formation
générale commune dans l'ordre collégial.
Je donne juste un exemple: l'ajout de 2 cours d'anglais obligatoires au
collégial. Je ne suis pas opposé à ça en soi,
là, sauf que je me dis: Au secondaire et même au primaire ?
ça commence en quatrième année ? ils ont fait combien
d'heures d'enseignement de l'anglais, d'apprentissage de l'anglais langue
seconde? Ils ont fait des centaines et des centaines d'heures. Et ce qu'on
constate, à leur entrée au collégial, c'est que ce n'est
pas très, très bon comme résultat.
La solution... Est-ce que c'est la bonne solution, d'ajouter 2 cours
d'enseignement de l'anglais obligatoires au collégial? Est-ce que c'est
ça, la bonne solution? La bonne solution, ce n'est pas plutôt de
regarder ce qui se fait au secondaire, puis de dire: C'est là que
ça ne marche pas, là, c'est là qu'il faudrait agir, c'est
là qu'il
faudrait corriger les choses, améliorer l'apprentissage de
l'anglais, et on est d'accord avec ça, même si on est en
désaccord avec la ministre sur les cours d'immersion, là, qu'elle
veut généraliser, à partir d'un amendement à la
Charte de la langue française.
Ça ne veut pas dire qu'on est contre l'apprentissage de l'anglais
langue seconde. Au contraire, on pense qu'il y a lieu de l'améliorer
nettement au niveau primaire, secondaire, parce qu'il y a des lacunes majeures
au niveau de l'apprentissage de l'anglais langue seconde, au primaire et au
secondaire.
Mais, si on corrige, aux niveaux primaire et secondaire, peut-être
qu'on arrivera à la conclusion que ce n'est pas utile de rendre
obligatoire l'enseignement de l'anglais langue seconde, au collège.
Ça ne veut pas dire qu'il n'y aura pas de cours d'anglais langue seconde
au niveau collégial. Il y en a actuellement, puis il continuera d'en
avoir, mais peut-être qu'on dira: Ce n'est pas nécessaire de les
rendre obligatoires. C'est sûr que ça va donner une
réflexion globale sur le système d'éducation. Et, avec une
réflexion partielle, parcellaire, comme celle qu'on a faite, bien, on
arrive à des aberrations comme le jeu de blocs, où on coupe, on
réduit, on enlève, on ajoute, sans justification
pédagogique très évidente, très forte.
C'est la même chose pour les seuils d'entrée, les seuils
d'admission. Ça aussi, le moratoire proposé par la CEQ devrait
normalement porter là-dessus aussi, parce que là, on se trouve
à dire aux jeunes: À partir de 1994, si vous avez votre
diplôme d'études secondaires, ne pensez pas que vous allez avoir
accès aux études collégiales. Non, non, non, ce n'est pas
sûr, ça, ce n'est pas sûr. Détenir un diplôme
d'études collégiales, à partir de 1995, ce n'est plus une
condition d'entrée unique au collégial. Il faut plus que
ça, il faut plus que ça, de sorte qu'on se trouve ainsi à
dévaloriser le diplôme d'études secondaires et à
créer, en quelque sorte, 2 diplômes d'études secondaires:
un qui donne accès aux études collégiales, l'autre pas,
qui conduit à une espèce de cul-de-sac, là, de no man's
land éducatif ou scolaire. L'étudiant est perdu, là, il ne
sait pas où aller, puis il n'a pas d'endroit où aller.
Alors, la proposition d'un moratoire, c'était de dire: En
même temps qu'on regarde le curriculum, pour ce qui est des disciplines,
de la formation, des cours, regardons ça aussi pour ce qui est de la
sanction des études. Si on veut valoriser le diplôme
d'études secondaires, prenons les moyens pour ce faire, mais soyons
cohérents, et surtout, évitons que l'accessibilité soit
réduite. Évitons qu'on se retrouve avec encore un plus grand
nombre d'exclus du système, que l'exclusion soit accrue. Alors,
voilà, je dirais, un autre fossé qui est apparu entre un
consensus qui était très clair et les mesures, les façons
choisies par la ministre pour, prétendument, concrétiser ce
consensus. On ne peut pas dire qu'elle a très bien réussi. En
tout cas, c'est très fortement controversé.
Un autre consensus... je donne un dernier exemple en ce qui a trait au
consensus. On parlait de mettre l'accent sur les compétences
pédagogiques et la fonction d'enseignement. Ah, ça, on regarde le
livre jaune, on peut l'appeler comme ça, maintenant. Ah! C'est
extraordinaire, l'appel émouvant qu'on fait au personnel. Ah! Il faut
que le personnel participe, s'implique. On compte sur lui,
particulièrement les enseignants. Si les enseignants ne sont pas
là, s'ils ne participent pas, s'ils ne s'impliquent pas, c'est clair
que, là, il y a des dangers, des risques que tout échoue.
Bien, en même temps, on regarde le projet de loi. On réduit
la représentativité des personnels au sein des instances
décisionnelles. On ne leur garantit aucune ressource additionnelle pour
se perfectionner, puis Dieu sait que la dimension perfectionnement du personnel
a été mise en relief à l'occasion des consultations
publiques. Le monde est venu dire: II faut absolument mettre davantage de
ressources pour perfectionner les compétences du personnel. Pas du tout.
Ce n'est d'aucune façon garanti ou assuré. On est même
allé plus loin. Heureusement, on a amendé le projet de loi, parce
que le projet de loi, à l'origine, c'est que les représentants
des personnels au conseil d'administration étaient nommés par le
conseil d'administration. Les représentants des enseignants
n'étaient même pas nommés par leur pairs. Alors, on
prévoyait que les étudiants se réunissaient en
assemblée générale pour désigner leur
représentant, mais les enseignants n'avaient pas ce droit.
C'était complètement absurde. On a, heureusement, corrigé
cette lacune insensée.
Alors, c'est clair qu'en commission parlementaire, à
l'étude détaillée, on a exigé, on a
réclamé plusieurs modifications majeures, entre autres, le
retrait de la taxe à l'échec. Écoutez, tout a
été dit, à peu près, sur cette fameuse taxe
à l'échec. C'est une punition de nature financière qui a
été jugée injuste et discriminatoire par le Conseil
permanent de la jeunesse et par à peu près tout le monde. Les
alliés de la ministre, à ce sujet, sont très peu nombreux,
très peu nombreux. Il y a très peu de monde, très peu
d'intervenants, à part la Fédération des cégeps.
Mais à part ça, la plupart des intervenants ont manifesté
leur désaccord au sujet de la taxe à l'échec.
En commission parlementaire, on a présenté un amendement
à cet effet. Il a été jugé malheureusement
irrecevable parce que, nous disait-on, il était de nature
financière, il impliquait des ressources financières. Aussi,
parce qu'on nous a dit que ça faisait partie du principe du projet de
loi. C'est la raison qu'on invoquait pour juger irrecevable notre proposition
de supprimer la taxe à l'échec. On a été
déçu que ce soit jugé irrecevable, mais, en même
temps, c'était intéressant parce qu'on a appris que
c'était partie prenante, partie intégrante du principe du projet
de loi, la taxe à l'échec. Alors, ce n'est pas une mesure
anodine, ce n'est pas une mesure connexe, ça fait partie du principe
même du projet de loi 82. Évidemment, le gouvernement y tient
fermement. (21 h 40)
Sur le conseil d'administration, on a également
tenté de rééquilibrer la
représentativité des intervenants, sans beaucoup de
succès. Pour ce qui est des parents, par exemple, on ne voit pas
pourquoi on n'aurait pas maintenu la présence de 4 parents au conseil
d'administration. Ce sont là des partenaires importants,
intéressants dans le milieu collégial, intéressants parce
qu'ils sont à la fois externes et internes, d'une certaine façon.
Us sont externes parce que ce ne sont pas des intervenants du milieu
collégial, et, en même temps, ils ont un lien direct avec ce qui
se passe à l'intérieur parce que ce sont leurs propres enfants
qui étudient dans l'établissement. Alors, on trouvait
intéressant ce partenariat des parents et on pensait que, pour que ce
partenariat soit utile, porte fruit, il fallait à tout le moins le
maintenir à 4. On l'a réduit malheureusement à 2. Pour ce
qui est des enseignants, on aurait, quant à nous, souhaité qu'on
maintienne le statu quo, c'est-à-dire 3 enseignants. On n'a pas
donné suite à notre requête et c'est 2 enseignants
seulement qui vont siéger au conseil d'administration.
La commission des études, on a proposé également un
amendement qui a été malheureusement rejeté. On a
proposé un amendement à l'effet qu'il y ait de prévue une
majorité d'enseignants. Pour ce qui est de la composition comme telle,
chaque établissement, chaque conseil d'administration peut adopter un
règlement quant à la composition de la commission des
études, mais que, à tout le moins, on prévoit dans la loi
qu'il y ait une majorité d'enseignants siégeant à la
commission des études. Ça nous apparaissait essentiel parce c'est
là le coeur, c'est l'institution par excellence sur le plan
pédagogique, la commission des études. Même si c'est une
commission à caractère consultatif, c'est là que se
discutent les programmes, c'est là que se discute l'approche programme
qu'on veut implanter, qu'on veut généraliser, donc une
institution majeure sur le plan pédagogique. Ça nous apparaissait
essentiel, à partir de ce moment-là, que s'y retrouvent une
majorité d'enseignants, comme c'est actuellement le cas dans les
commissions pédagogiques. La majorité d'enseignants,
actuellement, dans les commissions pédagogiques, on trouvait normal
qu'on maintienne cette représentativité au niveau de la
commission des études. Là aussi, il faut dire malheureusement
qu'on a échoué dans notre tentative d'apporter un amendement de
cette nature.
Alors, M. le Président, on regarde tout ça. On regarde non
seulement le projet de loi, mais on regarde aussi le projet de règlement
concernant les études collégiales, le projet de règlement
de régime pédagogique. Parce qu'il y a des éléments
aussi importants dans le projet de règlement, qui échappent
évidemment à l'Assemblée nationale, que dans le projet de
loi lui-même. On regarde tout ça dans son ensemble, on regarde les
intentions du gouvernement, on regarde ses objectifs, on se rappelle, on garde
en mémoire aussi les consensus qui sont apparus puis qui se sont
dégagés à l'occasion de 2 commissions parlementaires,
celle de l'automne puis celle du printemps, et on ne peut pas changer notre
position. C'est clair qu'on ne peut pas changer notre position parce qu'il y a
trop d'éléments là-dedans avec lesquels on est en
désaccord. Et comme le gouvernement n'a pas jugé utile de les
enlever, ces éléments-là, ou de les changer en profondeur,
bien, notre position ne peut pas non plus changer.
Je conclus, M. le Président, sur un aspect majeur de cette
proposition dite de renouveau de l'enseignement collégial, c'est la
participation des divers intervenants dans le milieu collégial. Quand
Mme Pagé de la CEQ est venue en commission, je lui ai moi-même
posé une question sur le climat qui prévalait actuellement dans
les établissements. Parce que je savais qu'elle venait de
compléter une tournée dans les cégeps, elle avait
visité plusieurs établissements collégaux. Et je voulais
savoir, je voulais être bien certain du climat qui existait dans les
cégeps. Et Mme Pagé n'a pas été très tendre
à l'égard de la ministre et de l'attitude du gouvernement parce
que, nous dit-elle, le climat dans les cégeps actuellement est un climat
de tension, je dirais, presque de découragement et de
démoralisation. Alors que, à l'occasion de la commission
parlementaire de l'automne, à laquelle je n'ai pas vraiment
participé, mais ma collègue de Terre-bonne y a participé
pleinement, ma collègue, également, des
Chutes-de-la-Chaudière a participé à toute cette
consultation, et elles sont en mesure d'en témoigner... Et je voudrais,
d'ailleurs, moi aussi, comme la ministre, féliciter, remercier mes 2
collègues pour leur travail extrêmement positif, très
fructueux, en commission. Mais elles ont participé à cette
commission de l'automne, ce qui n'a pas été mon cas, parce que
j'ai été nommé, désigné, comme porte-parole
en matière de l'éducation et d'enseignement supérieur
après, et elles me faisaient remarquer que, à ce
moment-là, le climat était excellent dans les cégeps,
était très bon, il était très bon, parce que tous
les intervenants des cégeps, les enseignants, les professionnels non
enseignants, les cadres, tout le monde était content qu'on soit
arrivé à dégager des consensus, puis il y avait un grand
espoir, un immense espoir que ces consensus-là seraient, correctement,
correctement, convenablement traduits dans les pièces
législatives et les règlements.
C'était ça, le climat qui prévalait. Très
bon climat, et une volonté de participer et de s'impliquer, et puis est
arrivé le projet de loi 82 et le projet de règlement, le livre
jaune, et puis, évidemment, les décisions du Conseil du
trésor en matière de gel des salaires, de
récupération de gains de productivité. Bon, enfin, bref,
le climat s'est très rapidement détérioré parce
qu'on s'est rendu compte que les consensus n'étaient pas vraiment
respectés, on s'est rendu compte que la confiance n'existait pas, qu'on
ne faisait pas confiance aux personnels et aux intervenants du milieu
collégial. Ça s'est détérioré, et c'est ce
que Mme Pagé nous avait dit en commission parlementaire, elle a dit: Le
climat est pourri dans les cégeps, pourri, et je ne vois pas comment le
gouvernement peut procéder à une réforme dans
l'enseignement collégial dans un pareil climat, alors que les
enseignants, les autres personnels sont carrément
découragés et ont le sentiment très
désagréable d'avoir été bernés, d'avoir
été floués, trompés, d'avoir été
trompés, et c'est un grand espoir qui s'est
dégonflé et qui est mort, Et ça, évidemment,
ça ne contribue pas à améliorer le climat. Alors, sur la
participation des enseignants, je lui souhaite bonne chance, à la
ministre, je lui souhaite bonne chance, mais c'est loin d'être certain
que la participation et l'implication des intervenants sont assurées.
Malheureusement, le climat n'est pas bon actuellement dans le réseau
collégial.
Et pour toutes ces raisons, M. le Président, nous maintenons
notre opposition au projet de loi 82, et nous allons continuer, à
l'occasion de cette dernière étape législative,
c'est-à-dire l'adoption, nous allons continuer de maintenir notre
position ferme, sans équivoque et, je dirais même,
déterminée à ce projet de loi et aux intentions
gouvernementales en matière de changement à l'enseignement
collégial.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le whip
en chef de l'Opposition officielle et député de
Lac-Saint-Jean.
Alors, je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en
sommes à la motion de Mme la ministre de l'Enseignement supérieur
et de la Science proposant l'adoption du projet de loi 82, Loi modifiant la Loi
sur les collèges d'enseignement général et professionnel
et d'autres dispositions législatives, et je cède la parole
à M. le président du caucus du parti du gouvernement et
député de Sauvé.
M. le député, la parole est à vous.
M. Marcel Parent
M. Parent: Merci, M. le Président.
Il y a déjà 7 mois, 7 mois que l'équipe du
gouvernement, l'équipe plus précisément impliquée
dans le dossier de l'éducation, s'est penchée sur ce projet de
réforme de l'enseignement collégial au Québec.
Après moult rencontres, moult discussions, commissions parlementaires,
audiences publiques, en 2 séquences, nous en sommes rendus au moment
d'adopter cette réforme importante dans le domaine de
l'éducation. (21 h 50)
II y a 25 ans, M. le Président, naissaient les cégeps au
Québec, les cégeps qui étaient le prolongement de ce que
nous connaissions, nous, sous le nom des collèges classiques, des
collèges classiques qui n'admettaient en général que les
bien nantis, parce que les collèges classiques au Québec, on s'en
souviendra tout le monde, n'étaient pas gratuits. Les collèges
classiques étaient réservés à l'élite, et
personne au Québec... et aux garçons aussi, pas partout, mais en
général. Et la majorité des jeunes
Québécoises et des jeunes Québécois qui voulaient
accéder à l'université ne pouvaient pas réaliser
leur rêve. Ceux qui avaient les moyens de se payer l'internat
continuaient leurs études à l'université. Ceux qui n'en
avaient pas les moyens se dirigeaient vers ce qu'on appelait, à ce
moment-là, l'école supérieure. Le seul accès qu'ils
avaient aux études universitaires, c'était soit Polytech, avec
une année supplémentaire en sciences au collège Mont
Saint-Louis pour les gens de la région de Montréal, ou
accès à l'École des hautes études commerciales.
Ceux qui voulaient accéder au droit, au notariat, à la
médecine ne pouvaient pas y avoir accès parce que l'accès
à l'enseignement universitaire était contingenté par le
système de collèges classiques, qui était le canal normal
pour accéder aux études universitaires.
Pendant 25 ans, nous avons vécu l'expérience des
cégeps. Nous avons rodé l'expérience, et il était
rendu temps, aujourd'hui, en 1992-1993, de l'actualiser, de faire en sorte que
l'enseignement collégial au Québec réponde aux besoins des
étudiants d'aujourd'hui et les rende prêts à affronter les
défis du XXIe siècle. Et le 26 avril dernier, le quotidien Le
Droit, quotidien d'Ottawa, disait à propos de ce renouveau
collégial qu'il constituait un premier pas vers le XXIe siècle.
Et dans ce même article, on résumait bien la philosophie de toute
cette réforme en une seule phrase: Un étudiant doit d'abord
réussir ses études. Cette seule phrase résume bien, M. le
Président, non seulement la philosophie de toute cette réforme au
niveau collégial apportée par la ministre responsable mais
également un véritable défi de société.
Donc, on parle ici d'un défi collectif, soit celui d'une
société qui réussit ce qu'elle entreprend, mais
également un défi individuel et personnel, en ce sens que
l'étudiante ou l'étudiant qui entreprend des études doit
viser à ce même succès, conformément à cette
philosophie de la qualité totale prônée par le gouvernement
québécois dans le domaine économique.
Vous vous en apercevez, M. le Président, mon idée
n'était pas seulement de résumer dans une seule phrase l'ensemble
de la réforme. Cette réforme contient plusieurs objectifs et
amène des changements substantiels dans notre réseau
d'enseignement collégial. Mais en citant cette phrase importante que
l'étudiant doit réussir ses études, j'ai
résumé un contentieux qui s'était créé lors
de la présentation ? et même avant ? de cette vaste
réforme concernant les droits de scolarité collégiale.
Et c'est ici que le mythe est crevé. Oui, M. le Président,
le mot n'est pas trop puisqu'on a essayé, dans certains milieux, de
faire croire à la population que le gouvernement avait l'intention
d'abolir ou de freiner cette accessibilité des jeunes au niveau
collégial. Or, rien n'est moins vrai, et on le voit bien à la
lecture du projet de loi 82 où l'obligation de réussite est
imposée aux étudiants, ce qui va plaire à beaucoup
d'enseignants fatigués de voir certains étudiants étirer
leur temps d'apprentissage.
Les frais de scolarité obligatoires dont on a parlé comme
taxe à l'échec après 5 échecs au
préuniversitaire ou 7 au secteur professionnel, ça constitue
simplement, M. le Président, un rappel aux responsabilités de
base de tout étudiant. Lorsqu'un étudiant, M. le
Président, a vécu 5 échecs au préuniversitaire, je
pense qu'il est temps de lui faire penser qu'en plus d'avoir des droits
à l'étude il a aussi des responsabilités de
réussir. Et ce que l'Opposition appelle une taxe à
l'échec, moi, j'ap-
pelle ça un moyen incitatif pour aider l'étudiant à
se reprendre en main et à réussir.
Cette responsabilité, il s'agit d'abord de réussir ses
études, c'est clair, et surtout cela représente un défi de
taille pour chacun et chacune des étudiants. N'est-ce pas là le
but que tout étudiant doit se fixer avant de commencer des études
de niveau collégial ou universitaire? Lorsque l'étudiante ou
l'étudiant entre au cégep, je pense que l'objectif à
atteindre, c'est sa diplomation dans les meilleurs délais. Quant aux
parents, M. le Président, ils veulent que leurs jeunes
réussissent et investissent dans des études, de manière
à agir en citoyens responsables, de manière à
accélérer leur période d'apprentissage, pour qu'ils
puissent à leur tour se tailler une place sur le marché du
travail.
De leur côté, les collèges se voient contraints
d'adopter une attitude de renouveau au chapitre de l'administration et des
programmes pédagogiques en général. Ce renouveau annonce
une rationalisation des objectifs d'apprentissage entre le secondaire, le
collégial et l'universitaire et un partenariat renouvelé avec le
monde des affaires.
Cette idée a fait son chemin depuis bon nombre d'années au
Québec, mais c'est une des rares fois où un gouvernement prend le
temps d'imprégner cet objectif dans une politique concrète et
applicable à court, moyen et long termes.
Je rappelle également, M. le Président, que, lors de la
création du réseau collégial au Québec, cet
objectif d'un trait d'union plus serré entre le monde scolaire et le
marché du travail constituait un objectif à atteindre. Dans
certains cas, il l'a été ? notamment, dans le secteur
professionnel. Dans d'autres, les succès furent plus mitigés, en
ce sens qu'il y a eu abondance, malheureusement, de finissants dans certains
secteurs qui ne correspondaient plus à la demande du marché.
C'est là que le chaos est survenu, dans quelques secteurs
d'activité où on a retrouvé alors une vision pessimiste et
empreinte de négativisme à l'égard du marché du
travail. L'initiative prise dans le cadre de cette réforme
apportée par notre gouvernement devait porter des fruits à moyen
terme, car elle propose une nouvelle dynamique entre les différents
partenaires de la société.
Un autre volet essentiel à ce renouveau concerne la gestion
moderne des collèges. Mais, avant d'aborder ce sujet, je rappelle une
des lignes principales de cette réforme, qui concerne le principe de la
gratuité scolaire qui est maintenue pour l'enseignement collégial
public. La gratuité sera étendue aux personnes inscrites à
temps plein dans un programme menant à une attestation d'études
collégiales. Là où on parle des droits de
scolarité, on fait allusion à ceux se chiffrant à 50 $ par
cours, qui seraient toutefois perçus, comme je le disais tout à
l'heure, après 7 ou 5 échecs.
De plus, M. le Président, j'aimerais vous rappeler qu'on
évalue à 52 600 000 $ par année, en vitesse de
croisière, les coûts entraînés par l'ensemble des
mesures proposées par la réforme de l'enseignement
collégial.
M. le Président, d'autres détails fort importants sont
contenus dans cette réforme de niveau collégial, et sur lesquels
j'aimerais m'attarder quelques instants. Par exemple, la langue seconde. Deux
cours seront introduits, ce qui répondrait à des besoins
pressentis comme pressants, autant par les étudiants anglophones,
francophones qu'allophones. Pour ce qui est des cours d'éducation
physique, qui sont réduits de moitié, M. le Président, il
ne faut pas oublier que, dans ces cours d'éducation physique, il y avait
l'enseignement magistral en éducation physique, mais aussi une partie
des cours était consacrée aux sports libres. Le sport libre est
encore accessible aux étudiants après les heures de classe en
vertu des protocoles d'entente signés entre les collèges et les
municipalités.
M. le Président, je vois que mon temps se termine, mais c'est
dans cette perspective d'une meilleure qualité de notre vie
pédagogique que le gouvernement propose cette réforme majeure au
niveau collégial, et je suis persuadé du succès de cette
entreprise, car dans l'ensemble de la société, on y trouve cette
volonté de réussite.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Sauvé, de votre intervention.
Alors, je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en
sommes à l'adoption du projet de loi 82, et je cède la parole
à Mme la députée de Terrebon-ne.
Mme Jocelyne Caron
Mme Caron: Merci, M. le Président.
Alors, M. le Président, j'ai suivi avec beaucoup
d'assiduité tous les travaux de la commission de l'éducation
concernant cette réforme des cégeps, pour 2 raisons principales:
évidemment, à titre d'ex-enseignante, les questions
d'éducation me préoccupent toujours au plus haut point; et aussi,
à titre d'ex-diplômée des cégeps, puisque
contrairement au député de Sauvé, j'ai participé,
j'ai été étudiante dans les cégeps avant de faire
mes études universitaires, M. le Président. (22 heures)
Donc, j'ai vécu ce système des cégeps. Vous
comprendrez bien qu'à titre a"ex-enseignante, contrairement au
député de Sauvé, le premier principe qu'on doit
établir, c'est qu'on ne peut pas imposer la réussite. On peut
imposer des revenus ? et ce gouvernement le fait amplement ? mais
imposer la réussite, ça ne se fait pas. On ne peut pas imposer la
réussite à un étudiant et à une étudiante,
et on ne peut pas imposer non plus la réussite d'une réforme.
Pour qu'une réforme réussisse, il faut que les partenaires soient
partie prenante et il faut que les partenaires décident volontairement
d'embarquer dans une réforme et de donner du 100 % pour qu'elle
réussisse. Ça ne s'impose pas, la réussite. Et de penser
que ça s'impose, c'est déjà antipédagogique, M. le
Président.
M. le Président, pour réussir, il fallait donc que
les partenaires embarquent. Dans les audiences de cet automne et les
audiences de ce printemps, ils sont venus dire qu'il y avait une
insatisfaction. On peut faire beaucoup d'heures en commission parlementaire,
mais si on ne retient pas les demandes de nos intervenants, bien, ces
heures-là ont perdu un petit peu de leur sens. Et, malheureusement, il
faut dire que, dans le projet de loi 82 que nous avons devant nous, il y a des
partenaires oubliés. Et je parlerai de 3 grands partenaires
oubliés: les étudiants et les étudiantes, dans un premier
temps, les étudiants et les étudiantes adultes et,
évidemment, les enseignants et les enseignantes.
Alors, M. le Président, du côté des étudiants
et des étudiantes, il a été clairement
démontré... Et là-dessus, il y a eu une coalition
parfaite: les jeunes du Parti québécois, les jeunes du Parti
libéral ? le député de Sauvé l'avait
oublié ? et aussi les jeunes de la fédération des
étudiants des collèges du Québec sont venus dire qu'une
taxe à l'échec c'est antipédagogique et que, lorsqu'on
décide d'axer une réforme sur la réussite des
étudiants, on doit donner aux étudiants une chance de
réussir. Et ça ne se fait pas par une mesure financière.
Un problème pédagogique, ça se règle par des
mesures pédagogiques. C'est un principe de base, et toute personne qui a
travaillé le moindrement au niveau de l'enseignement vous le dira, M. le
Président, lorsqu'il y a un problème pédagogique, il faut
trouver une solution pédagogique. Contrairement à ce que disait
le député de Sauvé, il ne faut pas attendre que nos jeunes
aient 5 échecs avant d'agir. Sa philosophie? On attend que les jeunes
aient 5 échecs; lorsqu'ils auront 5 échecs, on impose un ticket,
on leur impose donc la réussite. M. le Président, lorsque des
jeunes ont des difficultés d'apprentissage, on n'attend pas qu'ils aient
5 échecs. On fait ce que proposaient les jeunes du Parti libéral,
les jeunes du Parti québécois et la fédération des
étudiants et des étudiantes des collèges: on donne,
dès le début, dès la première session, des mesures
de soutien à ces jeunes-là, on fait du parrainage, du marrainage,
on leur propose un plan de réussite. C'est ça qu'on fait, M. le
Président, dès que les jeunes ont des difficultés. On
n'attend pas qu'ils aient 5 échecs pour leur imposer un ticket. C'est ce
qu'il y a de plus antipédagogique.
On a aussi oublié nos jeunes sur l'élément majeur
qu'est la pédagogie. Plusieurs jeunes sont venus dire qu'il fallait
qu'au niveau de la formation on s'attarde aussi à la formation des
enseignants et que, pour les futurs enseignants ? évidemment pas
ceux qui sont présentement dans nos écoles, mais les futurs
? on tienne compte d'une formation au niveau de la pédagogie, qu'on
exige cette formation pédagogique au niveau de l'enseignement
collégial. Et, dans le projet de loi, la ministre s'est enlevé le
pouvoir de réglementer sur la qualification du personnel. Elle s'est
complètement dérobée à cette responsabilité
qu'elle avait dans l'ancienne loi sur les collèges.
Il y avait aussi un autre élément important,
évidemment, en tout ce qui a trait aux lacunes qui avaient
été annoncées, lacunes, évidemment, au niveau de
l'en- seignement de la langue française, lacunes du côté de
la culture. Et tout ce qui avait trait aux seuils d'admission et à la
formation générale, bien, on ne retrouve rien, M. le
Président, dans le projet de loi 82, concernant ces 2 mesures
essentielles qui ont fait la majeure partie de nos discussions en commission
parlementaire, lors des audiences de cet automne et lors des audiences du
printemps. Sur toute cette formation générale, ces seuils
d'admission, la ministre nous a dit qu'elle était en réflexion,
qu'elle poursuivait ses études et qu'elle ne pouvait pas nous donner, au
moment de l'étude article par article, sa proposition finale pour ce
régime pédagogique. Donc, M. le Président, toutes les
audiences que nous avons eues, qui ont tourné autour de ces
éléments majeurs, nous n'avons toujours pas de réponse au
moment de l'adoption du projet de loi 82.
L'autre élément, les partenaires oubliés, ce sont,
évidemment, les étudiants adultes. On ne retrouve strictement
rien du côté des étudiants adultes; ils ont même
perdu 1 poste qu'ils avaient avant. Au niveau du conseil d'administration, on
exigeait que des 2 étudiants à temps complet qui se retrouvaient
au collège il y en ait 1 qui soit inscrit à titre
d'étudiant adulte. On a fait disparaître cette mesure-là et
on se retrouve avec 2 étudiants, sans préciser s'il y aurait 1
étudiant adulte.
Donc, dans les mémoires... Et, là aussi, les adultes sont
venus nous dire: Les adultes, ces oubliés de la réforme, ce
qu'ils souhaitaient, c'est que l'État confie aux collèges une
mission claire, en éducation des adultes, qui soit inscrite dans la loi
des collèges, que ce soit sous ce terme ou sous celui de
«formation continue». Ils nous avaient demandé de
répondre à des objectifs opérationnels bien précis,
parce qu'ils sont venus nous dire que, finalement, les adultes qui sont dans
les cégeps ont des besoins différents. Ils nous ont
demandé des services adaptés aux caractéristiques des
adultes ? et ils sont de plus en plus nombreux au cégep, il ne faut
pas l'oublier, M. le Président ? de leur reconnaître une
place dans les structures, dans la définition de leur projet de
formation; assurer un équilibre dans l'offre de formation à temps
plein, à temps partiel; des programmes complets, des programmes courts;
des formations créditées, non créditées; leur
fournir une formation de qualité, adaptée à leurs besoins;
planifier la réponse aux besoins diversifiés de formation des
adultes; rendre accessible la formation à tous les adultes, la
scolarisation, ce qui n'est pas le cas, actuellement; mettre en oeuvre, pour
les adultes, une priorité à la formation qualifiante et
transférable; assurer l'accès à la reconnaissance des
acquis et des compétences des adultes; assurer l'accès
réel des adultes aux ressources des établissements; utiliser le
potentiel des nouvelles technologies de communication pour favoriser
l'accès à l'information; renouveler les pratiques
pédagogiques; développer la formation à distance. Les
adultes ont besoin de choses différentes des étudiants qui sont
dans nos cégeps, nos jeunes. Ils sont venus nous dire, à deux
reprises, de ne pas les oublier. Dans le projet de loi 82, on les oublie
complètement. On enlève même le seul article où on
les retrouvait, sur
le conseil d'administration. Donc, eux aussi, ce sont des partenaires
oubliés.
Les troisièmes partenaires oubliés, ce sont,
évidemment, les enseignants. On peut faire appel, dans le projet de
renouveau de la ministre, aux enseignants, aux enseignantes, au personnel, aux
membres du personnel des cégeps, pour assurer une belle réforme.
Cependant, ce qu'on retrouve dans le projet de loi 82, dans plusieurs articles
bien précis, c'est un recul des enseignants. Je vous donnerai 3 exemples
avec 3 articles: l'article 4, l'article 6 et l'article 7. Alors, à
l'article 4, M. le Président, qui vient remplacer l'article 8 de la loi,
on retrouve la composition du conseil d'administration. S'il y a un endroit
où on aurait pu maintenir, au moins ? on ne dit même pas
«augmenter», M. le Président ? la place des
enseignants, c'est bien sur le conseil d'administration. Alors, dans l'ancienne
loi des collèges, les enseignants étaient 3 sur le conseil
d'administration. Dans le projet de loi 82, les enseignants seront 2, M. le
Président. Donc, une diminution de leur rôle et, en même
temps, on leur demande d'assurer la réussite de la réforme. C'est
par ces mesures-là qu'on voit la place qu'on leur accorde.
Le député de Sauvé nous parlait tantôt
d'économie, de réussite d'entreprise. Une entreprise qui veut
réussir, sa réussite, elle dépend, d'abord et avant tout,
des personnes qui travaillent dans cette entreprise et, sur le conseil
d'administration, la ministre a décidé d'inverser les proportions
qui existaient avant. On se retrouve avec 11 personnes à l'externe et 8
personnes à l'interne, comme si c'étaient les agents
extérieurs qui vont venir réaliser la réforme qui doit se
faire, elle, à l'intérieur des cégeps. C'est un
changement, un virage qui est tout à fait inacceptable, à mon
point de vue.
L'article 6 amène aussi un recul du côté des
enseignants. On leur dit qu'ils devront évidemment se retirer lorsqu'il
y aura des sujets qui vont les toucher. On a essayé d'apporter un
amendement, M. le Président, de demander à ce qu'ils puissent au
moins avoir l'occasion de présenter leur point de vue et de ne pas
voter, mais, au moins, présenter leur point de vue, ce qui se fait un
peu partout. Non. On leur demande de se retirer complètement sans
même avoir exprimé leur point de vue sur un point. Et l'article
7... (22 h 10)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): S'il vous plaît,
Mme la députée, je vous demande de conclure.
Mme Caron: Oui, M. le Président, ça ne sera pas
très long. Et l'article 7 vient évidemment constituer la
Commission des études. S'il y a un endroit où les enseignants
auraient dû être majoritaires, c'est sur cette Commission des
études, puisque la Commission des études, c'est de décider
de tout l'acte pédagogique, M. le Président. Alors, la
réussite, ça ne s'impose pas; et si un gouvernement pense que
ça s'impose, je vous avertis, M. le Président, qu'ils vont avoir
de sérieuses surprises au cours des mois qui viennent, parce que la
réussite, c'est d'abord de faire confiance à ses partenai- res et
de donner des outils pour réussir, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée de Terrebonne. Sur la même motion, je cède
la parole à Mme la députée du comté des
Chutes-de-la-Chaudière.
Mme Denise Carrier-Perreault
Mme Carrier-Perreault: Oui. Je vous remercie, M. le
Président. C'est sûr qu'à l'instar de mes collègues
? la députée de Terrebonne vient de le mentionner ?
j'ai assisté à l'ensemble des travaux en commission
parlementaire, à l'automne. C'est vrai que ce projet avait
suscité beaucoup d'espoir chez les intervenants; ils sont venus en grand
nombre. En tout cas, plusieurs ont présenté des mémoires.
Ils n'ont pas tous été entendus, bien sûr, mais une bonne
partie des mémoires ont été retenus, puis la commission a
pu discuter avec les intervenants.
Oui, il y avait des espoirs. Les gens escomptaient beaucoup de ces
rencontres, de cette commission, et, moi aussi, je pense que les gens sont
très déçus. Ils sont très déçus,
comme nous, on est très déçus. J'entendais la ministre qui
nous disait qu'elle était émue de présenter son renouveau
collégial. Eh bien, M. le Président, moi, je pense, pour ma part,
que c'est encore une fois un projet de réforme qui a été
manqué, qui a été raté, qui est
inachevé.
Ça fait plusieurs fois, ici, dans cette Chambre, M. le
Président, qu'on nous propose des réformes. Depuis 1989, on a eu
droit à la réforme de la santé et des services sociaux, on
a eu droit à la réforme des affaires municipales. En fait, on a
eu droit à plusieurs projets de ce type et, à chaque fois, j'ai
été assez étonnée du genre de définition, si
on veut, que le gouvernement peut avoir de ce que c'est qu'une
réforme.
Dans le cas de la santé et des services sociaux, la
réforme s'est faite au niveau des structures. On a changé la
composition des conseils d'administration, on a créé une
régie régionale. On nous parlait, au départ, de
véritable décentralisation, mais il s'est avéré,
à la fin de l'étude du projet de loi, que pour ce qui est de la
véritable décentralisation, bien, ce n'était pas du tout
le cas. Donc, ça a été...
M. Morin: M. le Président, s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le
député de Dubuc.
M. Morin: J'invoquerais le quorum, à ce moment-ci, s'il
vous plaît.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les
députés. Mme la députée, si vous voulez continuer
votre intervention.
Mme Carrier-Perreault: Oui. Je vous remercie,
M. le Président. Alors, j'en étais au genre de
réformes que le gouvernement nous a présentées depuis
1989. La réforme de la santé, donc, une réforme de
structure, tout simplement, M. le Président.
La réforme au niveau des affaires municipales, communément
appelée «la réforme Ryan», où on disait que
c'était le partage des responsabilités, bien, on a vu ce que
c'était. Dans les faits, c'est devenu le transfert des
responsabilités ou le pelletage de responsabilités sans les
mesures financières, sans les crédits qui accompagnent ce
transfert.
On arrive avec la réforme de l'enseignement collégial.
Normalement, M. le Président, une réforme... En tout cas, moi,
dans mon esprit, j'avais toujours pensé qu'une réforme
c'était un changement en profondeur d'un système dans le but,
bien sûr, de l'améliorer. Mais, pour en arriver à effectuer
un changement en profondeur, c'est évident que ça
nécessite une vision globale, une vision d'ensemble du système
comme tel et, bien sûr, une analyse exhaustive et avec des études
d'impact des différentes mesures qu'on veut y apporter.
Dès le départ, M. le Président ? mon
collègue d'Abitibi le mentionnait en commission parlementaire, l'automne
dernier ? compte tenu qu'on arrive avec un projet de réforme, c'est
dommage de ne pas vérifier l'ensemble du système
d'éducation parce que, au niveau de l'éducation, on parle
uniquement de l'enseignement collégial ici, ce soir, mais tout le monde
sait que les niveaux, les paliers au niveau éducation, que ce soit le
primaire, le secondaire, le collégial ou universitaire, ces
différents secteurs sont interdépendants: l'un dépend de
l'autre. Les objectifs à atteindre pour passer à l'autre palier
devraient être définis, clairs, et tout le monde devrait
s'entendre là-dessus. Or, pour avoir une vision d'ensemble, il aurait
fallu vraiment faire une étude, faire une analyse de ce qui se passait
dans l'ensemble du système d'éducation.
Ça a été mentionné à plusieurs
reprises, des intervenants sont venus nous le dire aussi. Je veux bien
comprendre, par exemple, M. le Président, que lorsque la ministre a
commandé cette commission parlementaire, a invité les
différents intervenants, elle n'était évidemment pas
ministre de l'Éducation; elle était, à ce
moment-là, ministre de l'Enseignement supérieur. Or, ce n'est
qu'ensuite qu'elle est devenue aussi ministre de l'Éducation.
Peut-être aurait-elle eu l'idée de le faire plus tôt ou,
encore, elle aurait peut-être pu s'entendre aussi avec son
collègue, préalablement à ce genre de commission
là.
Il reste que, dans les faits, M. le Président, on se ramasse avec
une réforme faite à partir de l'étude de seulement un des
secteurs, c'est-à-dire le secteur collégial, où les gens
sont venus nous dire ce qui n'allait pas et ce qui allait au collégial,
mais, par ailleurs, où on n'a pas de vue d'ensemble du système
d'éducation. Alors, c'est une réforme à la pièce et
les correctifs qu'on apporte avec ce projet de loi là au niveau du
collégial, disons que, pour ce qui est des résultats, on peut
effectivement s'interroger. On parlait tout à l'heure du bloc de
formation générale où tout ce qu'on fait, en fait... Et
ça, on n'a pas de précisions; la ministre n'a pas réussi
à nous donner les précisions lors de la commission parlementaire.
Mais tout ce qu'on fait, c'est qu'on enlève des heures de cours pour
remplacer par des cours de français et des cours de langue seconde.
Est-ce que c'est normal d'arriver au cégep et d'avoir autant de
difficulté à parler et à écrire sa langue
maternelle? On peut s'interroger. Est-ce que c'est vraiment au cégep
qu'il faut mettre des cours de français supplémentaires? Pourquoi
ce ne serait pas des cours bonifiés ou différents, des objectifs
différents à atteindre au niveau du primaire et du secondaire?
Mon collègue faisait état aussi des cours de langue seconde. On
commence en quatrième année. Alors, est-ce qu'il y a un
problème aussi du côté des objectifs à atteindre au
niveau du primaire et du secondaire?
Alors, c'est pour ça qu'on se ramasse avec des mesures où
on n'est pas sûr qu'elles sont appliquées à la bonne place
parce qu'on n'a pas de vue d'ensemble du système. Ce que l'on
déplore, M. le Président, d'autres l'ont déploré
aussi, ils sont venus nous le dire. La CEQ s'est exprimée très
clairement sur le sujet et, pourtant, la CEQ, elle intervient aussi au niveau
du primaire et du secondaire, c'est bien évident. Les enseignants du
primaire et du secondaire sont aussi avec la même organisation syndicale.
Alors, peut-être qu'ils ont, eux aussi, une idée d'ensemble du
problème un petit peu plus claire, si on veut, se posent les mêmes
questions, ont ces mêmes inquiétudes que, nous, on a.
C'est bien sûr, M. le Président, que si on est
déçu, ça ne veut pas dire que tout est mauvais dans le
projet de loi. Et ça, je pense que ça été
mentionné tout à l'heure aussi par mon collègue de
Lac-Saint-Jean. Il y a des choses intéressantes dans le projet de loi,
mais, par ailleurs, on ne peut vraiment pas y souscrire parce que les points
fondamentaux, les objectifs majeurs que nous avions au départ, les
inquiétudes profondes, on parlait de la taxe à l'échec,
entre autres, de ces coupures au niveau de la formation collégiale,
coupures dans certains cours pour donner des cours de français ou des
cours d'anglais, bon, bien, disons que ces objections, les objections que nous
avions au départ, bien, écoutez, on ne peut pas faire autrement
que de les avoir toujours parce que rien n'est changé à ce
niveau-là.
La taxe à l'échec est toujours là, même si,
bien sûr, l'Opposition a essayé de faire enlever du projet de loi
l'article 24.1. Ça a été discuté longuement, bien
sûr, M. le Président, mais la ministre n'a rien voulu entendre et
nous a dit, effectivement, que c'était dans le principe, dans les notes
explicatives du projet de loi, qu'il n'y avait rien à faire avec
ça, que ça faisait partie intégrante. Donc, c'était
un objectif visé. Il n'était pas question de pouvoir enlever
ça. (22 h 20)
Alors, non, M. le Président, pour nous de l'Opposition
officielle, une taxe, comme ça, à l'échec, faire payer des
frais de scolarité après S échecs, on ne croit pas que
ça va favoriser l'accessibilité. On croit que c'est
une mesure qui peut avoir des effets pervers, des effets pervers dans le
sens que, oui, les étudiants, pour éviter ce genre de taxes, ce
genre de frais de scolarité, bon, bien, coudon, vont prendre un peu
moins de cours à chacune des sessions pour être sûrs de
pouvoir les réussir. Donc, au contraire, on pourra, à ce
moment-là, allonger, jusqu'à un certain point, la durée
des études au collégial.
Il y a eu pourtant des propositions intéressantes. J'entendais
tout à l'heure le député de Sauvé ? et ma
collègue de Terrebonne l'a repris ? qui a dit: C'est un incitatif.
Un incitatif. Une taxe à l'échec, c'est un incitatif à la
réussite ? pour imposer, qu'il disait, la réussite,
effectivement. Mais, écoutez, ce n'est pas un incitatif, une taxe
à l'échec, c'est une mesure qui, dans mon esprit, est
profondément coercitive, c'est une punition. Si tu manques 5 cours, si
tu fais un échec à 5 reprises, 5 cours différents, tu vas
être puni, tu vas payer 50 $ après pour tes cours. Alors, c'est
une mesure coercitive. Et pourtant, il y avait eu des suggestions
intéressantes disant: Plutôt que d'y aller par le biais de ce
genre de mesures coercitives, peut-être qu'il y aurait moyen en y allant
par des mesures incitatives, en faisant des rabais à un moment
donné, ou en enlevant des frais à certains niveaux. Mais
ça, ça n'a pas été retenu. On a vraiment
préféré, ça a été très clair,
la mesure coercitive. Alors, dans ce sens-là, c'est bien évident
que nous, de l'Opposition officielle, on ne pouvait vraiment pas, et on ne peut
vraiment pas aller dans le même sens que le gouvernement sur ce genre de
mesures là.
Lors de la commission parlementaire, on a vu aussi que, par ce projet de
loi là, et la ministre nous l'a expliqué, d'ailleurs, on donnait
un peu plus d'autonomie aux cégeps, aux collèges comme tels.
Alors, différentes mesures, effectivement, viennent donner plus
d'autonomie, plus de pouvoir aux administrations collégiales, et, pour
ce faire, M. le Président, on a procédé par harmonisation.
Harmonisation, et je m'explique. On harmonise, à plusieurs
égards, les règles qui régissent les études
collégiales aux règles qui régissent les études
universitaires. La ministre nous a dit: Bien, écoutez, c'est de
l'enseignement supérieur, c'est de l'ordre de l'enseignement
supérieur; alors, dans ce sens-là, on va donner aux
collèges les mêmes règles d'autonomie que celles que les
universités ont. Par ailleurs ? et les raisons sont obscures ?
on n'a comme eu pas de réponse là-dessus. À d'autres
égards, on donne moins d'autonomie aux collèges; là, les
règles d'autonomie ne s'appliquent plus de la même façon.
Bref, il y a des questions qui sont restées sans réponse, les
objections majeures que nous avions au départ, on les a toujours, et
c'est dans ce sens-là, M. le Président, qu'on ne peut vraiment
pas aller dans le même sens que le gouvernement et que nous voterons
contre le projet de loi.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Est-ce que la
motion proposant l'adoption du projet de loi 82, Loi modifiant la Loi sur les
collèges d'enseignement général et professionnel et
d'autres dispositions législatives, est adoptée?
M. Bélisle: Vote nominal, M. le Président, et je
vous...
Une voix: Vote enregistré.
M. Bélisle: Bon, on s'entend bien. Ha, ha, ha!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, qu'on appelle les
députés!
M. Bélisle: Non, M. le Président...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non?
M. Bélisle: ...j'aimerais faire reporter le vote à
la période des affaires courantes de demain.
Vote reporté
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, le vote sur cette
motion que je viens d'appeler est reporté à demain. M. le leader
adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Maintenant, M. le Président, nous
appellerons l'article 2 de notre feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 95 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 2 de
notre feuilleton, Mme la ministre déléguée aux Finances
propose l'adoption du principe du projet de loi 95, Loi sur la publicité
légale des entreprises individuelles, des sociétés et des
personnes morales. Mme la ministre, je vous cède la parole, vous avez
droit à une intervention de 60 minutes.
Mme Louise Robic
Mme Robic: Merci. M. le Président, c'est avec plaisir que
je propose aujourd'hui l'adoption du projet de loi 95 intitulé Loi sur
la publicité légale des entreprises individuelles, des
sociétés et des personnes morales. Dans un climat de
déréglementation, ce projet de loi présente un nouveau
régime de publicité légale qui répond à
notre souci d'efficacité en effectuant une réduction importante
de la réglementation, tout en créant un système accessible
et libre d'irritants tels que les dédoublements tout à fait
inutiles. Il offre de plus, M. le Président, une protection accrue pour
le public consommateur, de même que pour les entreprises qui sont
visées.
M. le Président, je rappellerais à cette Chambre que le
Code civil du Québec, adopté par l'Assemblée nationale le
18 décembre 1991, oblige, à partir du 1er
janvier 1994, les sociétés en nom collectif, les
sociétés en commandite à se déclarer de la
manière prescrite par les lois relatives à la publicité
légale des sociétés. Autrement, elles sont
réputées être des sociétés en participation,
sous réserve des droits des tiers.
Le régime juridique régissant la divulgation des
sociétés en nom collectif ou en commandite est actuellement
partagé entre le Code civil du Bas-Canada et la Loi sur les
déclarations des compagnies et sociétés. Or, le premier
est remplacé par le Code civil du Québec, et ce dernier ne
reprend qu'une partie des règles comprises dans le code actuel,
notamment en ce qui concerne les sociétés en commandite. Quant
à la Loi sur les déclarations, qui date de 1849, ses
règles doivent être modifiées de façon importante
pour répondre aux besoins modernes de fiabilité et de protection
nécessaires à un milieu économique sain, tant pour les
sociétés que pour toutes les autres formes d'entreprises.
Le projet de loi sur la publicité légale des entreprises
individuelles, des sociétés et des personnes morales que j'ai
l'honneur de proposer au nom du gouvernement à l'Assemblée
nationale vise à moderniser le cadre législatif existant dans ce
domaine. Actuellement, M. le Président, notre régime de
publicité légale est basé sur une multiplicité de
sources d'information qui ne sont pas nécessairement coordonnées.
La Loi sur les déclarations des compagnies et sociétés,
datant de 1849, la Loi sur les compagnies étrangères, datant de
1904, et la Loi concernant les renseignements sur les compagnies, datant de
1930 sont doublées par plusieurs autres lois ? dont la Loi sur les
compagnies ? qui contiennent également des règles de
publicité légale.
En plus, M. le Président, toutes ces lois sont également
doublées d'une réglementation aussi importante. Il existe
plusieurs registres distincts relevant de différentes autorités
gouvernementales. La multitude de tels registres, des règlements et des
lois rend le système de publicité légale inefficace et
moins accessible, autant pour les entreprises et le gouvernement que pour les
individus qui ont à s'en servir. On remarque aussi que les informations
contenues au registre officiel gagneraient à être plus exactes et
plus à jour. Cette information, qui a une valeur légale, se doit
d'être plus conforme à la réalité. L'information
contenue au fichier central des entreprises, M. le Président, même
si elle n'a aucune valeur légale, reflète souvent mieux la
réalité grâce à des mises à jour et à
des échanges avec les fichiers de la Commission de la santé et de
sécurité du travail et de la Commission des normes du
travail.
C'est pourquoi le gouvernement propose que toutes ces activités
de cueillette, de traitement et de diffusion des informations relatives aux
entreprises individuelles, aux sociétés et aux personnes morales
relèvent principalement d'un seul organisme, soit l'Inspecteur
général des institutions financières. Il n'y aura donc
qu'un guichet unique, régi par un seul texte de loi. Il maintient
cependant le rôle du protonotaire de la Cour supérieure ?
maintenant appelé greffier ? pour l'immatriculation des entreprises
individuelles et des sociétés.
Ce choix permettra de respecter les habitudes des clientèles
concernées, tout en assurant un accès décentralisé
aux informations contenues dans le registre.
M. le Président, ce gouvernement a voulu, en proposant le projet
de loi 95, régler plusieurs problèmes occasionnés par le
système actuel de publicité légale relative aux
entreprises individuelles, aux sociétés et aux personnes morales.
Ce projet de loi, pour régler ces problèmes, propose la
création d'un registre central où devront s'inscrire les
assujettis suivants: les personnes physiques exploitant une entreprise
individuelle sous un nom d'emprunt, les sociétés et les personnes
morales.
Premièrement, le nouveau registre assurera une plus grande
sécurité des transactions entre le public et les entreprises. Les
principales informations qu'a intérêt à connaître
toute personne établissant une relation économique avec une
entreprise individuelle, une société ou une personne morale
seront publiques, fiables et accessibles et permettront, entre autres, au
public et aux entreprises de connaître les responsables des entreprises
avec lesquelles ils contractent. (22 h 30)
L'utilisation efficace de l'informatique, de la
télématique et du microfilm aidera le gouvernement à
actualiser le fonctionnement du système d'enregistrement des entreprises
individuelles, des sociétés et des personnes morales. Par
ailleurs, les entreprises individuelles, les sociétés et les
personnes morales seront elles-mêmes protégées par le fait
que les informations qu'elles déclareront au registre seront opposables
aux tiers. Ces derniers ne pourront en plaider l'ignorance. Ils auront
généralement à consulter le registre avant de conclure un
contrat important.
Deuxièmement, le nouveau registre permettra de publier la
création et l'existence des sociétés en nom collectif ou
en commandite et des personnes morales constituées au Québec.
À ce sujet, le projet de loi modifie une quarantaine de lois relatives
aux personnes morales. Il prévoit que la formation des
sociétés en nom collectif ou en commandite, de même que la
constitution des personnes morales seront désormais publiées
à ce registre. Les procédures seront simplifiées par
l'application d'un système unique et par la disparition des publications
à la Gazette officielle du Québec.
Troisièmement, grâce au nouveau registre, le gouvernement
et les entreprises auront à leur disposition un ensemble de
données importantes qui pourront être utilisées à
des fins de planification.
M. le Président, l'approche parcellaire du régime de
publicité actuel ne répond plus aux besoins du public et des
entreprises dans ce monde moderne qui continue d'évoluer constamment
suite à la globalisation, au décloisonnement des institutions
financières et aux avances continuelles dans l'informatique. D'ailleurs,
certaines études ont démontré que le système actuel
de publicité était dépassé. Le gouvernement a donc
décidé d'instituer un véritable registre des entreprises
individuelles, des sociétés et des personnes morales.
M. le Président, l'utilité réelle d'un tel
registre
pour les entreprises est évidente. En ayant un seul registre, on
pourra plus facilement obtenir une information fiable, complète et mise
à jour sur toutes les entreprises individuelles, les
sociétés ou les personnes morales qui exercent une
activité au Québec. Cette information est souvent indispensable
comme, par exemple, pour connaître le nom du propriétaire d'une
entreprise. Le registre, en divulguant les dénominations et raisons
sociales, les noms commerciaux et les marques de commerce utilisés par
les entreprises individuelles, les sociétés et les personnes
morales au Québec, permettra de choisir plus facilement un nom qui
n'entre pas en confusion avec un nom déjà utilisé.
Cette recherche d'un nom sera facilitée par la nature
décentralisée du nouveau système, car l'ensemble des
informations qui seront contenues dans le registre seront disponibles non
seulement dans les bureaux de l'Inspecteur général des
institutions financières à Mont-tréal et à
Québec, mais aussi dans les bureaux des greffiers de la Cour
supérieure au Québec. Il sera aussi possible d'y accéder
à l'aide d'un réseau de télécommunications.
Il convient de souligner, M. le Président, que le projet de loi
prévoit aussi la possibilité d'ententes
interministérielles et intergouvernementales afin de transférer
des informations, alléger les obligations des assujettis et ainsi mettre
à jour le registre.
Par ailleurs, on pourra s'enquérir du fait que le projet de loi
entraîne une nouvelle obligation, celle de produire une
déclaration annuelle pour les entreprises individuelles et les
sociétés assujetties.
Réaffirmons, dans un premier temps, que le projet de loi vise
d'abord et avant tout à assurer la protection du public, mais
également celle des assujettis. En cela, il cherche à assainir le
milieu économique en assurant la sécurité juridique des
transactions. Pour cela, il propose la règle de l'authenticité de
l'information propre à assurer la protection du public, plus
spécialement des tiers qui établissent une relation juridique et
généralement économique avec une entreprise individuelle,
une société ou une personne morale. D'un autre côté,
il établit l'opposabilité des principales informations à
des tiers, qui vise à assurer la protection des assujettis telle
qu'établie par le Code civil du Québec.
Pour atteindre ces objectifs, M. le Président, les informations
importantes doivent être constamment mises à jour afin qu'elles
soient fiables. Le projet de loi propose un moyen propre à assurer la
double protection: la mise à jour continue et gratuite. Par ailleurs, ce
moyen seul n'est pas suffisant. L'expérience de la loi sur les
déclarations le démontre.
Aussi, le projet de loi propose une mesure de protection globale
gérée par l'administration et qui vise à assurer la
fiabilité du registre. Il s'agit de la déclaration annuelle.
Cette mesure permet aux entreprises individuelles et aux sociétés
de profiter de la sécurité juridique actuellement offerte aux
personnes morales. En effet, ce rappel cherche à éliminer les
conséquences négatives pour un assujetti d'un défaut de
mise à jour courante.
Mentionnons seulement quelques exemples propres à illustrer ce
que l'on tente de viser: coûts et tracas pour un individu pour faire
écarter une poursuite relative à une entreprise vendue, mais dont
il apparaît toujours propriétaire au registre; perte de droits
possible en raison de la signification d'une poursuite à l'adresse
indiquée au registre et qui n'est plus la bonne; poursuite contre une
personne indiquée comme associée au registre, mais qui ne l'est
plus.
La déclaration annuelle permet une telle protection, en plus
d'assurer une plus grande fiabilité des informations sur les entreprises
et d'assouplir le fonctionnement du système judiciaire.
Les renseignements que les entreprises individuelles, les
sociétés et les personnes morales doivent fournir sont à
la fois essentiels pour protéger le public et faciles à obtenir
pour les entreprises. Même dans le cas des personnes morales qui sont
actuellement obligées de déposer auprès de l'Inspecteur
général des institutions financières une
déclaration annuelle, les informations requises seront sensiblement
réduites. Les personnes morales, dès l'adoption du nouveau
régime, n'auront plus besoin de fournir les informations sur la
capitalisation, les bureaux de transfert d'actions, les bons et les
obligations, ainsi qu'un état détaillé des immeubles. Ceci
facilitera d'une manière importante le travail des responsables qui,
chaque année, complètent ces déclarations.
M. le Président, j'aimerais mentionner quels renseignements
seront indiqués dans le nouveau registre. L'entreprise devra fournir des
informations sur son nom et tout nom qu'elle utilise; sa forme juridique et la
loi qui la régit; son domicile; son fondé de pouvoir; l'adresse
de ses établissements au Québec; les associés, les
administrateurs et les dirigeants ainsi que les 3 actionnaires principaux, le
cas échéant; l'objet poursuivi; la fusion, la scission ou autre
transformation; la dissolution ou la liquidation et la date de la cessation
d'existence.
M. le Président, si je prends le temps de décrire toutes
les informations que le gouvernement exigera périodiquement de nos
entreprises, c'est pour démontrer clairement que celles-ci sont des
informations essentielles pour le public, mais faciles à obtenir pour
nos entreprises.
L'utilisation des déclarations périodiques est souple, peu
contraignante et peu coûteuse pour l'assujetti. Ce dernier recevra le
formulaire de déclaration déjà complété. Il
n'aura qu'à indiquer les changements, le cas échéant, le
signer et le retourner. Une opération de quelques minutes à
peine, puisque les informations requises par la loi sont limitées.
Le projet de loi limite le contrôle administratif a priori sur le
nom constitutif des personnes morales, de même que sur les noms
déclarés par les assujettis au registre aux seuls critères
d'intérêt public. Actuellement, ce contrôle s'étend
aux critères d'intérêt privé, notamment en
matière de confusion de noms et de concur-
rence déloyale. Nous savons que ce n'est pas Fenregis trement
d'un nom qui crée le droit au nom, mais que ce droit dépend de
l'usage qu'on fait du nom. Comme nous aurons tous facilement accès
à toute l'information contenue dans le registre, il est normal que
chacun prenne soin de faire ses propres vérifications avant d'utiliser
un nom, plutôt que de contrôler l'accès à ce nom.
Le projet de loi maintient la règle du contrôle
administratif a posteriori actuellement appliqué par l'Inspecteur
général des institutions financières aux seules
dénominations sociales des compagnies et des corporations sans but
lucratif. Il étend ce contrôle à tous les noms
déclarés par l'ensemble des assujettis et le fonde sur tous les
critères, tant d'intérêt public que d'intérêt
privé, proposés par le projet de loi. Un tel choix
présente les avantages de la rapidité et de la souplesse. Les
droits du public sont cependant protégés par la
possibilité d'appel au système judiciaire.
Par ailleurs, M. le Président, le projet de loi applique aux noms
constitutifs de l'ensemble des personnes morales, de même qu'à
tous les noms déclarés au registre les normes juridiques
actuellement applicables aux seules dénominations sociales de compagnies
et de corporations sans but lucratif. Un tel choix fondé sur des
principes d'équité permettra d'assurer une protection identique
au public et aux assujettis, quelle que soit la forme juridique choisie par ces
derniers.
Le projet de loi constitue également un exercice de
déréglementation bénéfique tant pour
l'administration que pour les citoyens. Il réduit, d'ailleurs, les
contrôles et les règles de droit, tout d'abord en abolissant la
nécessité pour les compagnies étrangères d'obtenir
un permis avant de faire affaire au Québec. Le projet de loi
réduit aussi les contrôles et les règles de droit en
éliminant l'obligation de déposer une déclaration dans
chacun des districts judiciaires dans lesquels une entreprise exerce son
activité. Il restreint le contrôle administratif a priori des
noms, notamment en abandonnant le contrôle de la confusion des noms des
compagnies québécoises. (22 h 40)
À ce sujet, le projet de loi propose, comme solution de
remplacement, des recours administratifs conformes à la Charte
canadienne des droits et libertés, ainsi qu'à la Charte des
droits et libertés de la personne du Québec. Ainsi, le projet de
loi réduit le nombre de règles de droit en remplaçant 2
lois, soit la Loi sur les déclarations des compagnies et
sociétés et la Loi concernant les renseignements sur les
compagnies. Il en abroge aussi une, la Loi sur les compagnies
étrangères.
Le projet de loi diminue donc le nombre de règlements en faisant
disparaître ceux qui perdent leur objet par le remplacement ou
l'abrogation de la loi en vertu de laquelle ils étaient adoptés.
C'est notamment le cas de ceux adoptés en vertu de la Loi concernant les
renseignements sur les compagnies et de la Loi sur les compagnies
étrangères. La quasi-totalité de ces règles sont
reprises dans le projet en quelques dispositions simples et
compréhensibles qui seront complétées par un régime
complémentaire beaucoup plus accessible et facile à
comprendre.
Comme vous pouvez le constater, M. le Président, le projet de loi
95, Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles,
des sociétés et des personnes morales, permettra au Québec
de posséder un registre de publicité légale comprenant
tous les assujettis qui y sont constitués ou qui y exercent leurs
activités. S'ajoutant au registre des droits civils, au registre foncier
et au registre des droits personnels et réels mobiliers, le registre des
entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales
vient compléter les mesures permettant la mise en application
complète du régime de publicité légale prévu
au Code civil du Québec.
En conclusion, M. le Président, ce nouveau régime de
publicité légale saura apporter au Québec une meilleure
protection du public et des entreprises, tout en réduisant la
complexité du système actuel, et c'est donc avec grand plaisir,
M. le Président, que je propose l'adoption du projet de loi 95. Je vous
remercie.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
ministre.
Sur la même motion, je cède la parole à M. le
député de Westmount.
M. Richard B. Holden
M. Holden: Merci, M. le Président. Vous êtes avocat,
M. le Président, et vous comprendrez qu'on est tellement heureux de voir
une loi qui réorganise et modernise tous les endroits, vu les
difficultés de rechercher toutes sortes de noms et de
désignations de compagnies. Je me souviens, M. le Président, que,
quand j'étais stagiaire au bureau de mon oncle, dans les années
cinquante, on m'a envoyé chercher le nom d'un établissement. Dans
le temps, on les appelait «les personnes seules». Je suis
allé à la bibliothèque du Barreau. Il y avait un
énorme classeur avec toutes sortes de tiroirs et, malheureusement, M. le
Président, je ne savais pas dans quel tiroir se trouvait telle
catégorie de corporations ou de personnes seules. Alors, j'arrive au
bureau après une journée de recherches avec le mauvais nom et
avec un nom de corporation qui n'était pas le nom dont se servait la
personne seule, et mon oncle s'est fâché contre moi. Heureusement,
j'ai finalement appris où chercher tel genre de compagnie. Je vois que
le député de Cha-pleau est ici. Lui aussi, il est passé
par là, chercher dans les différents registres les personnes
seules, les corporations sous d'autres lois.
Je vois, M. le Président, qu'on amende plusieurs lois, y compris
la Loi sur les cercles agricoles, la Loi sur les clubs de
récréation, la loi sur la cruauté des animaux. Tout
ça, M. le Président, c'était absolument un fouillis
impossible. Alors, là, on arrive avec une loi qui va centraliser et
organiser tous ces problèmes de noms et de recherches dans ce domaine.
Je vois, M. le Président, que l'une des lois date d'il y a 144 ans. Je
crois que c'est même plus loin dans notre système que le Code
civil qu'on vient d'amender. Ça me dépasse,
M. le Président. Pendant 144 ans, on a opéré avec
un système que, franchement, il fallait changer.
D'ailleurs, si je comprends bien la situation, M. le Président,
ce projet de loi est en quelque sorte une reprise du projet de loi 54, qui
était une loi sur le registre des associations et entreprises, qui avait
été présenté en 1987 par le
prédécesseur du ministre actuel, le ministre
délégué aux Finances, M. Fortier. On se rappellera que,
suite au dépôt du projet de loi 54, le ministre Fortier avait tenu
une consultation. Pendant cette consultation, plusieurs éléments
du projet de loi avaient suscité certaines controverses, certaines
interrogations et le projet de loi 54 n'a alors franchi que l'étape de
l'adoption de principe.
Alors, 6 ans plus tard, M. le Président, le gouvernement revient
à l'Assemblée nationale avec le projet de loi 95, dont les
similitudes avec le défunt projet de loi 54 sont évidentes.
Certaines corrections ont également été apportées
au premier projet, qui semblent aller dans le sens souhaité à
l'époque par divers organismes. Il y avait plusieurs organismes qui
avaient présenté des vues et une liste nous a été
fournie par le ministre actuel, qu'on apprécie énormément.
Le projet de loi 95, c'est donc l'aboutissement d'un long processus
amorcé à l'époque où le Parti
québécois était au pouvoir. Le projet de loi semble donc
une version améliorée du projet de loi 54 et, comme à
l'époque, il appert que l'Opposition officielle donnera son appui au
principe dudit projet de loi.
Je vois qu'il y a plus de 500 articles, M. le Président. Je ne
crois pas qu'on soit en état d'examiner en commission tous ces 500
articles d'ici la fin de la session, mais, assumant ou prenant pour acquis
qu'il n'y aura pas d'élections d'ici la session d'octobre, on se
réunira en commission pour examiner en détail tous ces articles.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Westmount.
Est-ce qu'il y a d'autres interventions?
Mise aux voix
Est-ce que la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi
95, Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles,
des sociétés et des personnes morales, est adoptée?
M. Holden: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté.
Alors, nous continuons les travaux et je demande à M. le leader
du gouvernement de m'indiquer avec quel article du feuilleton, s'il vous
plaît.
Renvoi à la commission du budget et de
l'administration
M. Béïisle: Tout d'abord, M. le Président, je
vais faire motion pour que ledit projet de loi 95 soit
déféré à la commission du budget et de
l'administration pour étude détaillée.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée?
M. Holden: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du
gouvernement. (22 h 50)
M. Béïisle: Article 32, M. le Président.
Projet de loi 198 Adoption
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 32, M.
le député de Verdun propose l'adoption du projet de loi 198, Loi
sur la réduction du personnel dans les organismes publics et
l'imputabilité des administrateurs d'État et des dirigeants d'un
organisme public. Je cède la parole immédiatement au parrain du
projet de loi, M. le député de Verdun.
M. Henri-François Gautrin
M. Gautrin: Merci, M. le Président. Brièvement, M.
le Président, je voudrais d'abord rappeler l'historique qui est à
l'origine de ce projet de loi, le situer dans la perspective de l'action
gouvernementale et arriver à débattre de quelques points majeurs.
Et, en conclusion, M. le Président, j'annonce tout de suite qu'on aura
un certain nombre de suggestions d'amendement à faire, de manière
qu'on puisse se transformer à ce moment-là en commission
plénière.
M. le Président, ce projet de loi est issu d'un travail de
réflexion qui avait été mené par l'ensemble des
députés libéraux pour arriver à un assainissement
des finances publiques et arriver assez rapidement, dans un horizon de 5 ans,
à l'équilibre du solde des opérations courantes,
c'est-à-dire faire en sorte qu'on cesse d'emprunter pour payer
l'épicerie. m. le président, ce projet de loi, à
l'intérieur de la logique de ce projet de loi, a été
structuré de 3 manières différentes, avec 3
éléments différents. d'une part, il distinguait entre les
éléments de la fonction publique proprement dits. ensuite, il
discutait sur ce qui touchait les réductions de personnel dans le grand
réseau de l'enseignement et le secteur de la santé. et, enfin, il
approchait les réductions de personnel aussi dans tout le secteur des
sociétés d'état. m. le président, ce projet de loi
se donnait, à l'intérieur du secteur de la fonction publique, un
objectif de réduction, dans un horizon de 5 ans, de 12 % de l'ensemble
du personnel, ce qui correspond exactement à l'attrition,
c'est-à-dire au départ normal des personnes en retraite, et de 20
% du personnel cadre.
Pour ce qui touchait le secteur de l'éducation et le secteur de
la santé, sans préciser le quota réellement, il arrivait
à demander des réductions aussi, à savoir de suivre
l'effort de réduction de personnel qui pouvait avoir lieu dans ces
secteurs-là, étant bien conscient qu'il n'était pas
opportun, ni justifié de couper ou de diminuer les gens en
première ligne, que ce soit les infirmières, les enseignants ou
les gens qui, réellement, sont en première ligne.
En troisième lieu, en ce qui touchait, à ce
moment-là, les sociétés d'État, ce projet de loi
voulait aussi amener une réduction du personnel d'encadrement et du
personnel qui n'était pas un personnel de première ligne, pour ce
qui était des sociétés d'État.
La structure du projet de loi était telle que, pour tenir compte
de tous les cas particuliers, il existait une clause qui permettait au Conseil
du trésor d'exclure, en tout ou en partie, des catégories de
personnel de l'application dudit projet de loi.
Pour faire pendant, réellement, à cette approche d'effort
de réduction était incluse une dimension où on s'assurait
de Pimputabilité, c'est-à-dire de l'obligation des gestionnaires
de rendre des comptes devant les élus.
Alors, ça, M. le Président, c'était à peu
près ce qui avait été débattu à
l'intérieur de la commission parlementaire. Je vais brièvement,
ici, soulever ou aborder avec vous quelques problèmes qui ont
été apportés et qui ont été soulevés,
qui ont amené et qui justifient, à l'heure actuelle, quelques
amendements. Et c'est pour ça que je ferai, tout à l'heure, la
motion que nous nous transformions en commission plénière, de
manière à pouvoir les étudier.
M. Léonard: D'accord.
M. Gautrin: Bien sûr, et je vois avec plaisir le
député de Labelle qui est prêt à recommencer le
même exercice, une fois de plus.
M. le Président, le premier problème qui a
été perçu, c'est que, dans le secteur de l'enseignement
? et on pouvait avoir une certaine lecture de certains articles ? on
traitait le réseau universitaire sur la même base que l'ensemble
du réseau d'éducation. Or, vous savez que les liens traditionnels
sont différents dans ce qui touche le réseau de
l'éducation et le réseau universitaire. Le gouvernement n'a pas
la responsabilité, à l'intérieur du réseau
universitaire, de fixer ou de négocier les conventions collectives.
Donc, dans un des amendements qu'on apportera, il y avait lieu de mieux
préciser les liens qui existaient et de faire la distinction naturelle
entre le secteur collégial et de l'enseignement secondaire et le secteur
universitaire.
Deuxième élément, deuxième type de
problème qui aurait pu arriver: une certaine lecture aurait pu nous
amener à penser qu'on ne respectait pas, à l'intérieur de
ce projet de loi, des principes assez fondamentaux, comme le principe de
l'autonomie des corps constitués, c'est-à-dire l'autonomie des
commissions scolaires ou l'autonomie des établissements
collégiaux. Donc, il a été nécessaire de mieux
préciser et de respecter à l'intérieur du projet de loi
les questions touchant l'autonomie des commissions scolaires ou des
collèges d'enseignement professionnel et général,
c'est-à-dire les cégeps.
En dernier lieu, M. le Président, on a abordé dans ce
projet de loi une question bien importante qui touchait Fimputabilité
des gestionnaires de l'État. L'impu-tabilité, on pourra en
débattre longtemps, c'est l'obligation de devoir rendre compte devant
les élus. Il est clair, dans tout ce qui touche aussi bien la gestion ou
le fonctionnement des différents ministères qu'en ce qui touche
les sociétés d'État, qu'il y a une imputabilité
interne, c'est-à-dire l'obligation des différents gestionnaires,
sous-ministres en particulier, de devoir rendre compte à leur ministre,
c'est-à-dire rendre compte devant l'exécutif.
Parallèlement à cela, on veut établir, à
l'intérieur de ce projet de loi, une forme d'imputabilité
externe, c'est-à-dire amener ces gestionnaires à devoir aussi
rendre compte à l'ensemble des élus et, en particulier, à
l'Assemblée nationale par le biais des commissions parlementaires. Une
lecture des articles portant sur l'imputabilité pourrait amener à
penser qu'on aurait remis en question le lien naturel qui doit exister entre le
ministre et le sous-ministre. Ce que nous voulons, ce n'est pas remettre en
question ces liens entre le ministre et le sous-ministre, mais bien
réintroduire quelque chose de plus et ramener ces gestionnaires à
devoir rendre compte aussi de leur gestion quotidienne devant les élus
du peuple et devant les commissions parlementaires. 11 a donc été
nécessaire, M. le Président, d'amener à cet effet un
certain nombre d'amendements. Vous me permettrez aussi de dire que, si on
changeait cette question des responsabilités ministérielles, il a
fallu, par concordance aussi, modifier légèrement l'ensemble des
autres articles pour tenir compte aussi de cette nécessité ou de
cette volonté de bien exprimer la responsabilité
ministérielle. Donc, en peu de mots, M. le Président, dans ce
qu'on va proposer à ce projet de loi comme amendements, on veut,
premièrement, mieux préciser l'autonomie des différents
corps constitués, on veut mieux préciser aussi ou séparer
les questions qui touchent aux universités et on veut aussi bien tenir
compte des responsabilités ministérielles en ce qui touche les
questions d'imputabilité.
Alors, M. le Président, j'ai transmis à mon ami de
l'Opposition l'ensemble des amendements. Je pense qu'il faut, en termes de
procédure actuellement, faire motion pour que l'Assemblée se
transforme en commission plénière... Oui?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député de Verdun, je m'excuse, je vous arrête tout de
suite. Avant que vous soumettiez votre motion afin de transformer
l'Assemblée en commission plénière, je vais, dans un
premier temps, délibérer à savoir si c'est le
président de l'Assemblée qui décide de la
recevabilité de vos amendements ou si c'est le président de la
commission plénière. Alors, vos amendements sont
déposés. Je
vais me retirer et délibérer sur les amendements. Si ce
n'est pas déjà fait, je vous demande de déposer vos
amendements, mais n'allez pas plus loin quant à votre motion pour
transformer l'Assemblée en plénière, s'il vous
plaît.
Amendements déposés
M. Gautrin: Alors, M. le Président, sans en faire
réellement lecture, comme je viens d'exprimer l'ensemble des questions
qui touchent ces amendements, je tiens donc à déposer ces
amendements. Si je comprends bien, c'est la procédure à
suivre...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui.
M. Gautrin: ...de déposer ces amendements à
l'ensemble des articles dont je viens d'exprimer les grandes lignes et,
ensuite, je serai amené à pouvoir faire une motion pour
transformer l'Assemblée en commission plénière. C'est bien
cela?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui. M. Gautrin: Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, tel que je viens
de l'indiquer, je suspends les travaux de l'Assemblée nationale pour
quelques minutes.
(Suspension de la séance à 23 heures)
(Reprise à 23 h 38)
Décision du président en vertu de
l'article 198 du règlement
Le Vice-Président (M. Lefebvre): MM. les
députés, nous reprenons les travaux de l'Assemblée. Je
vais rendre la décision sur la question que j'ai prise en
délibéré il y a une quinzaine de minutes. L'auteur du
projet de loi 198, M. le député de Verdun, s'est prévalu
de l'article 257, lors de son droit de parole sur ledit projet de loi 198, pour
proposer l'étude d'amendements qu'il a déposés avant la
suspension. La question que la présidence devait décider est la
suivante: la recevabilité d'amendements présentés en vertu
de l'article 257 doit-elle être décidée par le
président de l'Assemblée ou le président de la commission
plénière?
La règle générale codifiée à
l'article 198 de notre règlement est à l'effet que «tout
amendement doit, au moment où il est proposé, sur motion sans
préavis, être transmis au président. Celui-ci décide
de sa recevabilité». Dans les circonstances, il appartient au
président de l'Assemblée de statuer sur la recevabilité
des amendements, et ce, dans le but d'éviter de confier à la
commission plénière qui doit s'ensuivre un mandat portant sur des
amendements irrecevables et conséquem- ment inexistants. Il m'appartient
donc de décider de la recevabilité des amendements du
député de Verdun.
Est-ce que vous voulez faire des représentations ? et je
m'adresse à M. le député de Verdun et au
représentant de l'Opposition officielle ? sur les amendements en
question? J'ai déjà évalué les amendements, mais je
vous permets d'intervenir si vous voulez le faire. (23 h 40)
M. Gautrin: Brièvement.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Très
brièvement, effectivement.
Débat sur la recevabilité des
amendements M. Henri-François Gautrin
M. Gautrin: Brièvement, M. le Président, je
rappellerai que ces amendements sont à l'intérieur de l'esprit du
projet de loi. Ils viennent préciser certaines modifications
d'application et tiennent un meilleur compte du rôle du ministre dans le
processus d'imputa-bilité. Dans ce cadre-là, parce qu'ils sont
dans l'esprit du projet de loi, d'après moi, ils sont recevables, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député le Labelle, si vous voulez intervenir. De votre banquette,
s'il vous plaît, M. le député de Labelle. Allez-y.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: M. le Président, j'ai eu l'occasion de
participer en commission parlementaire à l'étude de ce projet de
loi. Nous en avons fait aussi l'étude ici, l'étude de principe,
la deuxième lecture, et je dois vous dire ceci. Premièrement,
nous avons fait des discours en deuxième lecture sur le projet de loi
initial, original. En commission parlementaire, nous l'avons pratiquement
réécrit. Il y a, je crois, seulement deux articles qui n'ont pas
été modifiés; nous l'avons pratiquement
réécrit. Et cet après-midi, M. le Président, nous
recevons encore une liasse d'amendements qui consistent finalement à
réécrire le projet de loi. Alors, de quoi avons-nous parlé
en deuxième lecture? Et de quoi parlons-nous ce soir? Il s'agit
pratiquement d'un autre projet de loi.
Je vous dis ça parce que, peut-être, sur chacun des
articles, un article en lui-même pourrait être receva-ble, mais,
sur l'ensemble, on peut se poser des questions. C'est une
réécriture complète du projet de loi.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député de Joliette, je vais vous rendre la même
décision que j'ai rendue cet après-midi, à 3 reprises. Si
vous voulez retirer les propos qui s'adressaient au leader adjoint du
gouvernement, qui venaient de vous, je vais vous reconnaître
immédiatement.
M. Chevrette: M. le Président, je n'ai jamais rien
dit au leader adjoint du gouvernement.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Au leader du gouvernement
? le leader du gouvernement. Alors, est-ce que vous retirez vos
propos?
M. Chevrette: Je ne t'ai jamais rien dit, toi.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Au leader du
gouvernement.
M. Bélisle: M. le Président, sur la
recevabilité du projet de loi...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non, non, un instant,
non, ce n'est pas ça, là. J'ai demandé au
député de Joliette, s'il veut intervenir, de retirer les propos
auxquels j'ai fait référence cet après-midi. M. le leader
sait très bien de quoi je parle. Alors, si vous retirez vos propos, je
vais immédiatement vous permettre d'intervenir, M. le
député de Joliette, leader de l'Opposition officielle.
M. Chevrette: J'ai le goût d'intervenir, c'est pas
croyable. Donc, vous devez en conclure que je peux parler.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je conclus que vous
retirez les propos auxquels je fais référence?
M. Chevrette: Bien sûr, bien sûr.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, allez-y. Je vais
vous écouter.
M. Chevrette: Merci, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais, dans un
premier temps, savoir quelles sont les motions d'amendement qui ont
été déposées, puisque je ne les ai pas. Je pourrais
vous parler de la recevabilité en autant que je les aie, parce qu'on en
a reçu en deux morceaux. On voudrait savoir ce qui a été
déposé.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Les amendements ont
été déposés au secrétariat, à la
table, et vous les avez sous les yeux.
M. Chevrette: Oui, mais vous comprendrez qu'il y a une liasse.
Vous, vous vous êtes retiré pour les avoir. Moi, comme leader, je
ne les ai pas eus, sauf que...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, vous me demandez
une suspension?
M. Chevrette: Non. Pour éviter la suspension, je voudrais
savoir si ça, ça comprend tous les amendements qu'on a
reçus sur l'heure du midi et qu'on retrouvait sous cette forme, plus
l'amendement qu'on a reçu vers 21 h 15 ce soir, en plus. Est-ce que
ça comprend les deux?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! Un instant!
Un instant! Je suspends les travaux pour quelques minutes, de sorte que le
leader de l'Opposition officielle et le député de Verdun pourront
peut-être prendre quelques minutes pour vérifier les amendements
qui ont été déposés tout à l'heure et si
ça répond à votre question, M. le leader de l'Opposition
officielle. Je suspends les travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 23 h 45)
(Reprise à 23 h 50)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, Mmes et MM. les
députés, je vous rappelle que nous sommes toujours à
l'Assemblée nationale et non pas en commission plénière.
M. le député de Joliette et leader de l'Opposition officielle, je
vous écoute.
M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je n'ai pas...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur la
recevabilité.
M. Chevrette: Oui, oui. Je n'ai pas l'intention de faire une
grande guerre sur la recevabilité. Mais, étant donné que
l'Assemblée nationale, ici, a voté des articles, des pouvoirs et
des droits et a enchâssé d'une certaine façon, au niveau de
l'adoption de principe, des clauses qui donnaient des pouvoirs réels,
des droits réels de contrôle, et que le député de
Verdun, parrain de la loi, les modifie au niveau de la troisième
lecture, est-ce qu'en vertu... Vous allez m'expliquer, en vertu de nos
règlements, de nos règles, de nos traditions parlementaires,
comment on peut, au niveau d'une troisième lecture, aller soustraire des
droits, des devoirs qui étaient imputés dans un projet de loi,
des obligations de faire à des ministres, et qu'on arrive en
troisième lecture: article supprimé, article supprimé,
article supprimé.
Expliquez-moi ça, comment on peut jouer au fou avec des
parlementaires... Puis je dis «jouer au fou», ce n'est pas
péjoratif, là. Comment on peut, au niveau du Parlement, faire
discuter du monde pendant de longues heures, en plénière, ici, au
niveau des principes, amener ces mêmes personnes-là en commission
parlementaire discuter sur ces principes et arriver ici, au Parlement, en
troisième lecture, au moment de l'adoption du tout fini,
du tout, d'un produit sur lequel on a travaillé, puis, là,
ça n'existe plus, ces droits-là, ces devoirs-là n'existent
plus? M. le Président, franchement là, on peut bien amuser
certains députés du pouvoir. On ne s'amusera pas aux
dépens de nous autres à l'Assemblée nationale.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, la question que
vous me soulevez, le point que vous soulevez, M. le député de
Joliette, c'est la conséquence de l'amendement, ce à quoi vous
faites référence. À partir du moment où la
présidence décide que l'amendement est recevable ?
évidemment, un amendement, ça a des conséquences ?
à partir du moment où l'amendement ou les amendements ne
modifient pas l'essence même du projet de loi, ils sont recevables, mais
avec, évidemment, des conséquences. Et vous pouvez avoir des
réserves, effectivement, sur les amendements en question. Ce qu'il
restera à faire à votre formation, c'est de voter contre
l'amendement, et vous pouvez même voter contre tout le projet de loi
comme tel.
M. Chevrette: Vous me permettrez d'ajouter, M. le
Président, qu'en troisième lecture un ministre ou le parrain
d'une loi a des prérogatives d'apporter des amendements. Mais il n'est
plus question de retirer des articles. Il peut modifier des articles. Il peut
changer des articles. Il peut apporter des amendements à certains
articles. Mais là, si j'ai bien compris, le projet de loi, on vient de
lui amputer à peu près la moitié de ce qu'il avait au
départ. Moi, je pense qu'ils doivent voter contre, s'ils ne sont pas
d'accord avec certains articles. Mais on ne peut pas les supprimer en vertu de
la jurisprudence, M. le Président. Sinon, ça veut dire quoi,
légiférer? Ça veut dire que tout le processus normal de
discussions qu'on force, qu'on oblige en vertu de l'étude du principe et
qu'après cela on va étudier... Et en commission parlementaire,
vous le savez très bien qu'on n'a aucun droit de modifier le principe
d'une loi ou les principes compris dans une loi.
Je me souviens, il y a eu des cas de jurisprudence extraordinaires dans
ce Parlement. Je me souviens, au niveau de l'assurance automobile, quand on a
voulu ajouter des principes au niveau de la commission, c'était
Jean-François Bertrand, à l'époque, qui était
président de commission, et ça a fait jurisprudence dans le
Parlement. Il n'était plus question d'ajouter ou de soustraire des
principes déjà votés au niveau de l'adoption de principe
en deuxième lecture.
Là, ce soir, M. le Président, à l'heure du crime
dans quelques minutes, on vient nous dire: II y aura 5, 6 articles
d'amputés. On modifie en profondeur ? et je prends à
témoin le député de Vanier ? on modifie en
profondeur, par l'article 10, le rôle même du ministre. Si ce
n'était pas un principe, ça, qu'on a discuté en
deuxième lecture, moi, j'en perds mon latin. On vient de donner un
pouvoir à l'article 10, par exemple, et je le donne à dessein
comme exemple. En vertu de l'article 10, «le ministre peut»,
n'importe quand, quand il le veut, à sa guise, à sa
volonté. Il vient donc de détruire tout le principe qu'on a
étudié du contrôle par l'Assemblée nationale, par
les membres de l'Assemblée nationale et du principe même de
l'imputabilité. Minute, s'il vous plaît. Je veux bien jouer, moi,
le rôle, mais je ne veux pas qu'on s'amuse au détriment, par
exemple, des parlementaires. Et j'ajouterai... Je vous référerai
à l'article 244, M. le Président, en ce qui regarde le Recueil
des décisions concernant la procédure parlementaire, et vous
pourrez y voir des décisions: une motion d'amendement ne visant
qu'à supprimer un article est irrecevable. Et ça, M. le
Président, c'est le 13 juin 1985, par Claude Lachance, en commission
? 244.3.
M. le Président, je pourrais également, en tout cas, vous
donner d'autres exemples qui se font présentement, même, dans une
commission parlementaire, au niveau de la loi 86, puis on a
empêché, on a jugé irrecevables des amendements visant
à supprimer des articles. Et là, on en est rendu non pas en
commission, en plus. Pour montrer comment le processus est encore plus fou,
c'est qu'au niveau même d'une commission, article par article, de l'autre
côté, on nous dit que c'est irrecevable, des amendements visant
à supprimer un article, puis ce soir, ici, après que
l'étude eut été faite article par article, on nous arrive
ici, puis il en supprime 3 ou 4. Franchement, là! Je comprends que
ça a été...
Et je pourrais plaider sur un autre point, M. le Président. Ce
midi, voici ce qu'on a reçu. Ça serait bon de le montrer à
tout le monde qui a le courage de nous écouter. Des amendements
écrits à la main. Des amendements écrits à la main
à quasiment tous les articles, M. le Président. Des gros cercles,
des flèches, un amendement dans le titre. Regardez-moi ça, les
beaux petits carreaux. Ça paraît bien, légiférer de
même. Ça me fait penser à la loi 178, quand le ministre
délégué à la langue française, à
l'époque, le député de Rosemont, je crois, était
arrivé avec un amendement sur un bout de papier, au crayon de mine. Je
pense que... Franchement, là! Ça, on va garder ça dans les
archives: Comment légiférer de façon improvisée! Il
y a des limites.
M. le Président, je ne voulais pas plaider plus qu'il faut sur la
recevabilité. Je vous fais confiance sur le respect des
règlements, mais je vous réitère que ce n'est pas
là une façon de légiférer, à mon point de
vue, qui est bien, bien noble. Ça ne ressemble pas à du
sérieux comme on doit en avoir ici, quand on légifère.
Décision du président
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, M. le leader de
l'Opposition officielle, vous avez fini par plaider sur la recevabilité.
C'est ce que je vous avais invité à faire, si vous vouliez le
faire.
J'ai indiqué tout à l'heure que, pour évaluer la
recevabilité d'un amendement ou d'amendements au pluriel, la
présidence ? je vais vous reconnaître après, M. le
député de Vanier ? doit vérifier si les amendements
respectent le principe ou les principes du projet de loi original. C'est ce qui
doit guider la présidence. Et
Et je n'ai pas le choix. La jurisprudence, la doctrine est dans ce
sens-là, et même les règlements sont dans ce
sens-là. À partir de ce moment-là, M. le leader de
l'Opposition officielle, je n'ai pas le choix, je dois les déclarer
recevables. Je l'ai indiqué tout à l'heure, vous aurez à
décider si vous votez pour ou contre ? et c'est le privilège
et le pouvoir que vous avez ? les amendements que j'ai
déclarés recevables. M. le député de Vanier.
M. Lemieux: M. le Président, j'aimerais seulement ajouter
cette nuance au niveau de l'exposé du porte-parole, je dirais, de
l'Opposition officielle, le député de Joliette. Au niveau des
principes, lorsque le député de Joliette a cité l'article
10, j'aimerais vous faire remarquer que le principe de Fimputabilité
existe toujours. Par contre, il se peut qu'il soit différent dans son
application. Mais ce qui est important, au niveau comme tel du texte juridique
et de l'article de loi, c'est que le principe, lui, demeure, même si,
dans son application et dans ses modalités, il peut être
différent. Et, sur le plan, je dirais, pratique comme tel, comme nous
sommes en troisième lecture et comme le projet de loi appartient
à celui qui l'a présenté, soit le député de
Verdun, celui-ci est en droit, s'il le veut, de faire en sorte d'y apporter des
amendements qui, non seulement ne font pas disparaître le principe comme
tel qui peut être modifié, je dirais, dans son existence ou dans
son application, il peut aussi faire en sorte, s'il le veut, de retirer des
articles qu'il a déjà déposés. C'est son
privilège, et la jurisprudence est à cet effet-là,
(minuit)
M. Chevrette: Une question bien précise de
règlement.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le
leader.
M. Chevrette: Pouvons-nous présenter un amendement qui a
pour effet de retirer, de supprimer un article? Est-ce qu'on peut? Ou si le
seul moyen, en vertu de nos règlements, n'est pas de voter contre undit
article qui a pour effet de le supprimer? Ma question est très
précise, et je n'ai pas eu de réponse, à mon point de vue,
à cette question. N'est-il pas exact qu'en vertu de nos règles de
procédure et de règlement on ne peut pas présenter un
amendement qui a pour objectif de supprimer un article, mais qu'on invite les
parlementaires à voter contre ledit article, ce qui a pour effet de le
supprimer? Mais on ne peut pas, à ce stade-ci, demander la suppression
d'un article par amendement. Et c'est ça, ma question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Ce que vous dites
pourrait être vrai en étude détaillée, ce qui est
différent lorsqu'on en arrive à l'étude du rapport du
même projet de loi. Et il y a une nuance entre retirer un article,
retirer purement et simplement un article, et proposer un amendement qui va
à rencontre du même article ou qui le modifie. C'est
différent.
Alors, s'il n'y a pas d'autres présentations, j'ai eu, au moment
où je délibérais sur la première question, à
savoir s'il appartenait à la présidence de décider de la
recevabilité, j'ai, en même temps, étudié et
examiné des amendements, amendements que je déclare
recevables.
M. le député de Verdun.
Renvoi à la commission
plénière
M. Gautrin: M. le Président, puisque vous déclarez
les amendements recevables, je vais faire motion, en vertu de l'article 257:
Que cette Assemblée se transforme en comité plénier pour
étudier les amendements.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, il peut y avoir de
brefs commentaires sur cette motion-là. S'il n'y a pas de commentaires
d'un côté ou de l'autre, je vais mettre aux voix la motion en
question.
Est-ce que la motion proposant de transformer l'Assemblée
nationale en commission plénière est adoptée?
Une voix: Adopté.
M. Chevrette: Non, M. le Président. Le
Vice-Président (M. Lefebvre): Oui. M. Chevrette: Vote
nominal.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, qu'on appelle les
députés! (0 h 3 - 0 h 9)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, Mmes et MM. les
députés, nous allons mettre aux voix la motion de M. le
député de Verdun.
Mise aux voix
Alors, M. le député de Verdun propose que
l'Assemblée nationale se transforme en commission
plénière.
Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se
lever. (0 h 10)
Le Secrétaire adjoint: M. Ryan (Argenteuil), M. Elkas
(Robert-Baldwin), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Cu-sano (Viau), M.
Picotte (Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M. Houde (Berthier), M.
Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), M. Philibert (Trois-Rivières),
M. Beaudin (Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), M. Doyon
(Louis-Hébert), Mme Bégin (Bellechasse), M. Leclerc (Taschereau),
M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M.
Williams (Nelligan), M. Dauphin (Marquette), M. Lemieux (Vanier), M.
Charbonneau (Saint-Jean), M. Bradet (Charle-voix), M. Gauvin
(Montmagny-L'Islet), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M. LeSage
(Hull), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M.
La-frenière (Gatineau), Mme Boucher Bacon (Bourget), M.
Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M.
Camden (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), M. Khelfa (Richelieu),
M. MacMillan (Papineau).
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Que ceux et celles qui
sont contre cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme
Blackburn (Chicoutimi), M. Biais (Masson), Mme Marois (Taillon), M. Garon
(Lévis), Mme Harel (Ho-chelaga-Maisonneuve), Mme Juneau (Johnson), Mme
Caron (Terrebonne), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle),
M. Paré (Shefford), Mme Dupuis (Verchères), Mme Carrier-Perreault
(Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélanger (Anjou).
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a des
abstentions?
Le Secrétaire: pour: 37 contre: 14 abstentions: 0
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, la motion est
adoptée, et, à partir de maintenant, l'Assemblée se
transforme en commission plénière pour l'étude du projet
de loi 198.
(0 h 12 ? 0 h 20)
Commission plénière
M. Bissonnet (président de la commission
plénière): À l'ordre, s'il vous plaît! Si vous
voulez prendre place.
M. Chevrette: M. le Président.
Le Président (M. Bissonnet): Oui.
M. Chevrette: Est-ce qu'on pourrait connaître, avant que ne
débutent les travaux, les personnes-ressources du député
de Verdun?
M. Gautrin: M. le Président, vous voulez poser quoi, comme
question?
M. Chevrette: C'est quoi, la question? C'est qu'on voudrait
connaître l'identité de vos personnes-ressources.
M. Gautrin: Les personnes qui sont derrière moi sont les
juristes de l'Assemblée nationale...
M. Chevrette: Leur nom?
M. Gautrin: ...à savoir, M. Pierre Jacques et Claude
Rioux.
M. Chevrette: Pardon?
M. Gautrin: Pierre Jacques et Claude Rioux.
M. Chevrette: Puis la madame?
M. Gautrin: Carole Mardi, attachée politique. Est-ce que
je peux savoir qui vous accompagne?
M. Chevrette: Oui.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Ça me fait plaisir. M. André Rivest
et M. Charles Grenier, qui est mon chef de cabinet et avocat.
Des voix: Oh!!!
Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Chevrette: Et un économiste, M. Rivest. Le
Président (M. Bissonnet): La commission... Une voix: Ce n'est
pas Jean-Claude. M. Chevrette: C'est parent avec.
Étude des amendements proposés par le
député de Verdun
Le Président (M. Bissonnet): Vu que vous vous êtes
présentés de chaque côté, nous allons entreprendre
les travaux de la commission plénière selon le mandat qu'elle
avait reçu de l'Assemblée en ce qui a trait au projet de loi 198,
Loi sur la limitation de l'embauche dans les organismes publics et
l'imputabilité des administrateurs d'État et des dirigeants d'un
organisme public. Il s'agit d'étudier les amendements qui ont
été déclarés recevables par la présidence.
Alors...
M. Chevrette: Est-ce qu'on a droit à des remarques
préliminaires, M. le Président?
Le Président (M. Bissonnet): C'est une bonne question, M.
le député de Joliette, mais je tiens à vous dire que nous
sommes ici sur un mandat, en vertu de l'article 257, où nous
étudions les amendements qui ont été
déclarés recevables, et je tiens à vous dire qu'en vertu
de l'article 245 chaque député peut parler 20 minutes sur chacun
des amendements qui est proposé, tel qu'il est conforme au
règlement en vertu de l'article 245 dont...
M. Chevrette: Non, mais étant donné qu'il y a un
amendement au titre.
Le Président (M. Bissonnet): Nous sommes à
l'article 1. Alors, je vais permettre des interventions de 20 minutes de chaque
côté. Chaque membre de l'Assemblée peut intervenir 20
minutes, en commençant par l'auteur, et l'auteur peut toujours revenir
en vertu de l'article 246 pour utiliser un droit de 5 minutes après
chaque intervention.
Alors, M. le député de Verdun, sur l'article 1.
M. Gautrin: Merci, M. le Président.
Les amendements que l'on présente à l'article 1 sont des
amendements purement techniques. La rédaction de l'article 1.2 aurait eu
pour effet de transférer, de couvrir dans 1.2 un certain nombre
d'organismes gouvernementaux qui sont prévus à l'annexe C de la
loi 37. Et le 1.3 doit couvrir, tel qu'en la logique de ce projet de loi,
l'ensemble des organismes gouvernementaux qui ne sont pas du secteur de la
santé ou du secteur de l'éducation.
Dans ce cadre de logique, on a, dans les amendements,
retransféré les organismes qui étaient couverts par 1.2
dans 1.3, c'est-à-dire de les traiter comme organismes gouvernementaux,
et c'est le but des amendements qui sont présentés actuellement,
c'est-à-dire d'ajouter «établissements et», de
supprimer les mots «les organismes gouvernementaux» et d'ajouter au
paragraphe 3 «tout organisme gouvernemental visé par la Loi sur le
régime de négociation des conventions collectives dans les
secteurs public et parapublic ainsi que».
Donc, essentiellement, ce sont les organismes gouvernementaux qui sont
prévus à l'annexe C de la loi 37, qui, au lieu d'être
inclus dans l'article 1.2, sont inclus dans l'article 1.3.
Il faut comprendre dans quelle logique ceci est fait, c'est de
manière à pouvoir les traiter dans l'article 5, et non pas dans
l'article 4.
M. Chevrette: As-tu de quoi à dire pour justifier
ça, là?
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Quelle est la différence entre des
organismes, tout autre organisme visé par la Loi sur le régime de
négociation des conventions collectives dans les secteurs public et
parapublic, et tout autre organisme dont le personnel est
rémunéré selon les normes et barèmes qui sont, en
vertu de la loi, déterminés et approuvés par le
gouvernement ou stipulés dans une convention collective
négociée et agréée avec l'accord du gouvernement?
C'est la même chose. Quelle est la différence exactement?
M. Gautrin: C'est dans la première partie. Vous touchez
les organismes qui sont prévus à l'article c de la loi 37.
M. Chevrette: Hydro-Québec.
M. Gautrin: En particulier, Hydro-Québec, la Commission de
la construction du Québec, la commission des droits de l'homme, la
Commission de formation professionnelle, la Commission des services juridiques,
la Régie des installations olympiques, la Régie des alcools, la
Société des lotos, la radiotélévision du
Québec, et quelques autres...
M. Léonard: Ils vont être touchés par cette
loi-là?
M. Gautrin: Pardon?
M. Chevrette: La Sûreté du Québec?
M. Gautrin: La Sûreté du Québec aussi, oui,
la Société des traversiers du Québec.
M. Léonard: L'Assemblée nationale n'est pas incluse
là-dedans?
M. Gautrin: Vous savez parfaitement que l'Assemblée
nationale, puisque vous avez fait l'étude... article, n'est pas conclue
à cet endroit-là, et on le traite dans un autre article du projet
de loi.
Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a d'autres
remarques sur l'article 1?
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, sur l'article
1.
Mme Harel: Oui, M. le Président.
Sur l'article 1, je recevais, en date du 17 mai dernier, copie d'une
lettre signée par Jacques Mongeau, le président du Conseil
scolaire de l'île de Montréal, qui était adressée au
premier ministre. Et cette lettre, qui était également transmise
à la ministre de l'Éducation, Mme Lucienne Robillard, au ministre
délégué à l'Administration et à la Fonction
publique et président du Conseil du trésor, à la
présidente de la Fédération des commissions scolaires du
Québec, Mme Drouin, au président de l'Association des commissions
scolaires protestantes du Québec, M. Peter Riordon, et à chacun
et chacune des présidents des commissions scolaires de l'île de
Montréal.
Cette lettre, M. le Président, j'aimerais en faire rapidement
lecture, si vous me le permettez, parce qu'elle permet de comprendre
l'extrême mécontentement qui a surgi dans le milieu scolaire
montréalais à la suite du dépôt du projet de loi
198. Je rappelle qu'elle est signée par l'actuel président du
Conseil scolaire de l'île, qui était, en 1981, candidat
libéral dans le comté de Sauvé, à Montréal,
et qui, je crois, a des arguments qui auraient dû faire
réfléchir le député de Verdun et ses
collègues qui soutiennent le dépôt de ce projet de loi
198.
Le président du Conseil scolaire de l'île, M. Mongeau,
écrivait ceci: Je ne puis croire que le gouvernement veuille aller de
l'avant avec un tel projet sans avoir au moins eu un minimum de concertation
avec ses
partenaires. Il ajoutait: D m'apparaît qu'un minimum
d'informations et de concertations préalables auraient permis
d'éviter les problèmes qui, à mon point de vue, disait-il,
découleront inévitablement de l'application de cette loi si elle
n'est pas modifiée.
Et il ajoutait: Je m'étonne également que le gouvernement,
qui répète sans cesse qu'il faut décentraliser
l'administration gouvernementale pour la rapprocher des administrés,
procède avec un projet de loi qui nie aux organismes publics, et au
milieu scolaire en particulier, la responsabilité locale en
matière d'embauché et de gestion des personnels.
Et Me Mongeau ajoute: II m'apparaît que cette attitude
gouvernementale révèle un profond mépris pour les
gouvernements locaux que sont les commissions scolaires et le Conseil scolaire
de l'île de Montréal. Peut-on imaginer critique plus
sévère?
Au lieu de rechercher la concertation de ses partenaires, ajoute M.
Mongeau, le gouvernement garde entre ses mains des décisions majeures
concernant la gestion des commissions scolaires et du Conseil scolaire de
l'île de Montréal.
Ce n'est donc pas un projet de décentralisation, de
dévolution de pouvoir, de dévolution de compétences, de
redistribution du pouvoir de décider pour augmenter le sens des
responsabilités. Ce n'est pas de ça dont il est question ici.
À l'inverse, on assiste à une hypercentrali-sation, à une
hypertrophie de la centralisation entre les mains de la bureaucratie
gouvernementale. C'est exactement l'envers de l'effet qui est recherché
qui, finalement, est celui qui va résulter de l'adoption du projet de
loi 198.
Et Me Mongeau ajoutait: Ce projet de loi ne permet vraiment pas, au
niveau local, de prendre les mesures les plus adéquates pour
répondre aux besoins particuliers de chaque organisme. La loi ne tient
aucun compte des coupures qu'auraient déjà pu faire les
organismes au niveau local et encore moins des nouvelles exigences qui leur
sont par ailleurs imposées par le gouvernement ou par les lois. (0 h
30)
C'est un projet de loi qui est complètement artificiel, M. le
Président, en regard des défis que ces organismes ont à
relever compte tenu des coupures successives, à
répétition, qui leur ont été imposées depuis
quelques années.
Et le président, M. Mongeau, ajoutait: On préfère
remettre entre les mains du Conseil du trésor une évaluation de
la situation de chacune des commissions scolaires et ne pas reconnaître
que les commissions scolaires, que le Conseil scolaire de l'île sont
redevables à leurs commettants. Ce sont là des organismes
démocratiques dont les élus sont redevables par suffrage
universel aux citoyens qui les ont choisis.
Et il terminait en ajoutant: Redevables à leurs commettants, et
ils sont les mieux placés pour évaluer leur situation propre. Je
ne comprends pas qu'après avoir subi des compressions budgétaires
à répétition on veuille encore forcer à
réduire leur personnel en mettant en danger la qualité même
de l'éducation que nous voulons défendre. Je souhaite que le
gouvernement révise sa position et qu'il suspende l'adoption du projet
de loi avant d'en avoir évalué tout l'impact pour les organismes
visés et en collaboration avec ceux-ci.
Alors, M. le Président, je comprends que l'article 1 au
paragraphe 2, qui prévoit assujettir le Conseil scolaire de l'île
de Montréal aux dispositions de ce projet de loi, n'a pas
été modifié, que l'appel de Me Mongeau n'a pas
été entendu, que, finalement, le gouvernement décide de
poursuivre en appuyant le projet de loi du député de Verdun dans
la voie où il s'est engagé, qui est une voie de
bureaucratisation, qui est une voie de centralisation, et je dois dire que l'on
trouve ça extrêmement déplorable.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Verdun, sur cette...
M. Gautrin: Brièvement, je pense qu'on pourra reprendre ce
débat lorsqu'on abordera les propositions d'amendements que nous
apportons à l'article 4, qui est beaucoup plus pertinent que le remarque
la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Je voudrais lui faire remarquer qu'il n'est pas question, qu'il n'a
jamais été question, dans ce projet de loi, de se substituer aux
organismes locaux pour faire la gestion du personnel. Ce qui, dès le
début, a été demandé, il s'agissait simplement
d'avoir une vision réseau et une vision globale pour évaluer
l'évolution des effectifs, pour mieux préciser ce qui aurait pu
laisser... Je comprends les inquiétudes de certaines personnes qui,
d'après moi, étaient injustifiées. Pour mieux
préciser, on a été amenés, et c'est la raison
pourquoi on est réunis ici aujourd'hui, à présenter
certains amendements, amendements que vous allez retrouver à l'article
4.
Le Président (M. Bissonnet): Mme la députée
de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, ce que l'article 4
prévoit, en l'occurrence, là, si on en fait l'application en
regard du Conseil scolaire de l'île de Montréal, c'est que la
ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de la
Science, en l'occurrence, la même personne actuellement, doit soumettre
au Conseil du trésor pour approbation, avant le 30 septembre 1993, un
plan de réduction qui devra couvrir la période du 1er avril 1993
au 1er avril 1998, du personnel des organismes publics visés au
paragraphe 2, donc du personnel du Conseil scolaire de l'île de
Montréal et des commissions scolaires, sur la base du personnel en place
le 1er avril 1993.
C'est un amendement de pure technicalité puisque, pour
l'application du projet de loi, les ministres, en l'occurrence, la ministre de
l'Éducation, pour ce qui concerne les organismes relevant de sa
compétence, devra soumettre au Conseil du trésor, pour
approbation, un plan de réduction pour 5 années, de 1993 à
1998,
qui va lui avoir été transmis par le Conseil scolaire de
l'île. Alors, on assujettit tout autant les organismes comme le Conseil
scolaire à l'application d'une loi qui va centraliser... Imaginez-vous
la paperasse, M. le Président. Imaginez-vous la bureaucratie, le
coût d'une loi comme celle-là.
Moi, je croyais que des bills privés, des lois
présentées par des députés ne pouvaient
l'être que dans la mesure où ils n'engageaient pas de fonds
publics. Je suis convaincue qu'une étude la moindrement sérieuse
nous démontrerait que cette loi va coûter cher, M. le
Président, pour le peu de services qu'elle va rendre à notre
société.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Verdun.
M. Gautrin: M. le Président, d'une part, je voudrais
rappeler à la députée de Hochelaga ? je ne sais pas
quel amendement elle lit ? que l'amendement qui a été
déposé ne fait pas référence pour
approbation...
Pardon? Vous ne comprenez pas? Alors, je vais parler plus fort. C'est
rare que les gens ne me comprennent pas. L'amendement qui vous a
été déposé tenait compte ? est-ce que vous
comprenez? merci ? à ce moment-là, non pas de la date de
1993, mais de 1994, premièrement, et ne fait pas référence
à l'approbation par le Conseil du trésor; d'autre part, parle non
pas de plan par institution, mais d'un plan sectoriel, c'est-à-dire pour
l'ensemble du secteur de l'éducation, du secteur de l'enseignement
supérieur, du réseau collégial et du secteur de la
santé.
Le Président (M. Bissonnet): Mme la députée
de Taillon.
Mme Marois: Merci, M. le Président.
Essentiellement, mes propos rejoignent ceux de ma collègue de
Hochelaga-Maisonneuve, parce que je ne crois pas que l'amendement
apporté à l'article 4 vienne changer essentiellement l'esprit
qu'on retrouve dans le projet de loi.
Ma question est cependant assez précise et ça concerne les
régies régionales. Si je comprends bien, on va ajouter cette
notion de régie régionale qui serait concernée par le
deuxième alinéa de l'article 1. C'est le même raisonnement
qui peut s'appliquer aux régies régionales, évidemment,
avec des nuances, je l'admets, assez importantes, parce qu'on ne fait pas
référence à des gens qui sont imputables au même
titre que les commissaires dans les commissions scolaires, mais, cela
étant dit, l'objectif du ministre de la Santé et des Services
sociaux lorsqu'il a implanté des régies, c'était d'assurer
qu'il y ait une autonomie plus grande de la part des responsables des
régies régionales. Alors, je m'étonne quand même
qu'on les inclue dans cet alinéa 2 de l'article 1.
D'autre part, j'ai une question plus pointue et plus précise. On
parle des régies régionales et des conseils régionaux.
Ça, c'est dans le corps de la loi: les conseils régionaux de la
santé et des services sociaux. Est-ce qu'ils ne sont pas assimilables
aux régies régionales, les conseils régionaux, parce
qu'ils ont simplement conservé le nom et qu'on est tenu de le mettre
à ce moment-là nommément dans l'article de loi?
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Verdun.
M. Gautrin: Mme la députée de Taillon, les
régies régionales, bien sûr, ont été
amenées en débat en commission parlementaire parce qu'au moment
où la loi avait été déposée, la loi 120
n'avait pas encore été adoptée; donc, il était
nécessaire de l'inclure. Quant aux conseils régionaux de la
santé et des services sociaux, ils sont maintenus; parce qu'il en reste
encore quelques-uns, si mon information est exacte. Je pense que c'est celui
des Attikameks et des Cris. Il reste 1 ou 2 conseils régionaux de la
santé et des services sociaux.
Mme Marois: D'accord.
M. Gautrin: C'est-à-dire, l'instauration des régies
régionales n'a pas totalement supprimé les conseils
régionaux de la santé et des services sociaux, bien que, dans la
majeure partie des cas, elles se sont substituées aux conseils
régionaux de la santé et des services sociaux.
Mme Marois: Bon. Je remercie le député de
l'information plus précise. Cependant, très brièvement, il
sait que c'est essentiellement ce que j'ai défendu depuis les
débuts de nos travaux sur ce projet de loi. J'ai toujours imaginé
qu'il y avait quelque chose d'incompatible dans les objectifs poursuivis par le
projet de loi qui étaient, d'une part, de rendre imputables des
gestionnaires, des administrateurs, de les rendre davantage responsables des
gestes qu'ils posent et de devoir en rendre compte soit à
l'Assemblée nationale ou autrement, selon ce que prévoit la loi,
et en même temps qu'on impose des règles strictes en
matière de réduction des personnels. Là, on constate bien
que ce n'est pas de la limitation d'embauché, mais c'est de la
réduction de personnel. On change essentiellement les fins de la loi
parce que, en changeant le titre ? on y viendra plus tard;
malheureusement, ça ne vient qu'à la fin à cause des
modalités que l'on utilise pour adopter nos lois, ça ne va venir
seulement qu'à la fin ? on va constater qu'on change l'objectif du
projet de loi. (0 h 40)
Alors, je reste convaincue que c'est, à mon point de vue,
contradictoire: on ne peut pas, d'un côté, dire aux gens ce qu'ils
vont faire, ce qu'ils doivent faire, comment ils doivent le faire et, en
même temps, prétendre qu'on les rend davantage responsables.
Alors, c'est ce qu'on retrouve aux amendements qui sont apportés
à la section I, pour tout simplement préciser que ça
s'adresse encore à un plus grand nombre
de personnes que dans le projet initial.
M. Gautrin: L'objectif, si vous me permettez, quand même,
et on pourra en débattre beaucoup plus à fond lorsqu'on abordera
l'article 4, parce que je comprends que vos remarques portent principalement
sur les amendements à l'article 4... l'objectif, si vous remarquez,
c'est ne pas se substituer, même dans le réseau de la
santé, puisque vous avez abordé la question du réseau de
la santé, c'est ne pas se substituer aux gestionnaires, mais de suivre
quand même ce qui se passe en termes d'effectifs dans l'effort qui est
poursuivi de ce côté-ci de réduire les dépenses de
l'État. Et, là-dedans, on demande aux gestionnaires, tout en
respectant leur autonomie, de soumettre un plan, de manière qu'il y ait
un plan global, pour l'ensemble du réseau, qui soit déposé
et soit suivi année après année.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Oui, M. le Président.
Je voudrais, quant à l'article 1, simplement exprimer 2 points de
vue. Le premier m'a été transmis par le recteur de
l'Université de Montréal. Je le donne simplement comme point de
vue, parce que j'aurai l'occasion de revenir, dans un article ultérieur,
sur les universités. Mais je vous lis sa lettre qui est datée du
14 mai. «Je vous fais parvenir ci-joint une lettre que le
président de la Conférence des recteurs et des principaux des
universités du Québec, M. Michel Gervais, adressait au premier
ministre du Québec le 7 mai dernier. Elle exprime la consternation du
milieu universitaire devant le projet de loi 198, Loi sur la limitation de
l'embauche du personnel dans les organismes publics et Fimputabilité des
administrateurs d'État et des dirigeants d'un organisme public, qui,
à notre avis, constitue un précédent dangereux en ce qu'il
intervient directement dans la gestion des ressources humaines des
universités. J'ose espérer que vous serez sensible aux arguments
que contient la lettre du président Gervais et que vous interviendrez
afin que des solutions réalistes et praticables soient trouvées
aux problèmes que tente de solutionner le projet de loi 198.»
Je veux juste insister, revenir sur une phrase que je viens de vous lire
et qui dit «constitue un précédent dangereux en ce qu'il
intervient directement dans la gestion des ressources humaines des
universités». Je sais que le député de Verdun
connaît le milieu universitaire et connaît l'importance en
particulier de la liberté académique, et dont il est question
lorsqu'il s'agit de la gestion des ressources humaines dans les
universités. C'est une tradition qui remonte même au Moyen
Âge et sur laquelle il veut revenir ce soir. Alors, je veux simplement
dire que, lorsque les recteurs des universités interviennent dans ce
dossier, ils le font en raison d'un certain passé.
Deuxièmement, M. le Président, j'aurais pensé que,
suite à la commission parlementaire, le gouverne- ment ou le
député de Verdun, ministre d'un soir, se raviserait, qu'il
proposerait que cette loi ne s'applique pas seulement à tous les
organismes, pour être de bon compte, mais qu'elle s'applique aussi aux
députés de l'Assemblée nationale. Si on propose de couper
tout le monde, de couper les effectifs, de réduire les effectifs de 20
%, pourquoi pas à l'Assemblée nationale? C'est une proposition
que nous lui avions faite en commission parlementaire, j'aurais pensé
qu'il aurait pu l'amener ici.
Alors, M. le Président, à ce stade-ci, je veux simplement
rappeler que ce projet de loi est un projet de loi insensé. Nous avons
voté contre pratiquement tous ses articles, puis nous maintenons ce
point de vue présentement. Alors, c'est ce que je voulais dire sur
l'article 1.
Le Président (M. Bissonnet): Avez-vous quelque chose
à ajouter, M. le député de Verdun?
M. Gautrin: M. le Président, je ne referai pas le
débat qu'on a fait longuement en commission parlementaire avec le
député sur la question de l'Assemblée nationale. Je
reviendrai sur la question qui touche les recteurs, la lettre de Gilles
Cloutier, que M. le député de Labelle vient de lire.
Je rappellerai que, suite aux remarques de la Conférence des
recteurs, j'ai pu rencontrer Michel Gervais, Gilles Cloutier et David Johnson,
d'ailleurs, et c'est dans ce cadre-là qu'on a été
amené à amener un amendement en 7 de ce projet de loi, qui sera
étudié ultérieurement, amendement qui, bien que,
d'après moi, initialement, le projet de loi étudié en
commission ne remettait aucunement en question le lien traditionnel des
universités avec le gouvernement, vient préciser ce qui aurait pu
être des craintes qui auraient pu être soulevées par ledit
projet de loi.
M. Léonard: M. le député va
reconnaître que ce qui est dit dans la lettre du président de la
CREPUQ va exactement dans le sens de l'argumentation que nous avons
soulevée en commission parlementaire et depuis le début du projet
de loi. Les recteurs d'université interviennent à ce moment-ci,
mais, en réalité, depuis longtemps, c'est exactement
l'argumentation qu'a servie l'Opposition au député de Verdun.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Verdun.
M. Gautrin: Je m'excuse, je pense et je maintiens que
l'interprétation, même initiale, de la Conférence des
recteurs, d'après moi, était une lecture erronée du projet
de loi, mais, pour clarifier les choses, on a amené ici un amendement
qui va, à mon sens, clarifier les choses et satisfaire l'ensemble de la
Conférence des recteurs.
Le Président (M. Bissonnet): M. le leader de l'Opposition
officielle et député de Joliette, la parole est à
vous.
M. Chevrette: Étant donné que le
député de Verdun est issu du monde universitaire, qu'il a
rencontré les recteurs, est-ce qu'il a demandé à sa
collègue de rencontrer les commissions scolaires pour apporter un
correctif?
M. Gautrin: De quelle collègue voulez-vous parler?
M. Chevrette: Celle qui est supposée avoir le chapeau de
l'Éducation.
M. Gautrin: Bien sûr que la ministre de l'Éducation
rencontre les commissions scolaires. D'ailleurs, elle était
présente au congrès de la Fédération des
commissions scolaires.
M. Chevrette: Non, mais sur ce sujet bien précis,
là. Je ne voudrais pas que vous commenciez à jouer, même au
ministre, à la période des questions. On est en étude
article par article, et je vous pose une question. Est-ce que vous avez
rencontré les commissions scolaires concernant ce projet de loi?
M. Gautrin: Oui, j'ai échangé avec le
président des commissions scolaires.
M. Chevrette: Puis? Ils ne vous ont pas convaincu, eux autres. M.
le Président, moi, je voudrais intervenir sur le point des commissions
scolaires en particulier. Vous savez pertinemment que les commissions
scolaires, c'est souvent par des directives administratives, des plans de
gestion qu'on attribue des subventions aux commissions scolaires. À
supposer qu'on décide de changer le calendrier scolaire des
étudiants, par exemple ? on sait qu'au Québec, ce n'est pas
nécessairement l'endroit, dans le monde, qui a le plus de minutes de
classe ? et qu'on décide de faire en sorte que les étudiants
québécois aient plus d'heures de classe/semaine et qu'on
négocie un ratio différent qui irait complètement à
rencontre non pas d'une diminution d'enseignants, mais d'une augmentation assez
radicale... Ça pourrait aller jusque-là, dépendant de ce
qu'on veut repenser ou retoucher au niveau du système scolaire.
Moi, je lis le projet de loi. Peut-être que je l'interprète
mal, et il semble bien que tous ceux qui sont en désaccord ont fait une
mauvaise lecture, c'est toujours embêtant. Depuis quelque temps, c'est la
réponse qu'on a: Quand on n'est pas d'accord avec un article, c'est
parce qu'on n'a pas compris l'article. Vous tenez ça de Dieu le
Père, qui vous donne ce réflexe de dire qu'on ne comprend jamais
rien quand on n'est pas d'accord. Je dois vous dire que vous parlez des 2
côtés de la bouche en même temps, dans votre projet de loi.
Vous émettez un principe puis vous ouvrez la porte pour ne pas le faire
respecter, à peu près à tous les articles.
Dans le fond, ne croyez-vous pas que c'est un amuse-gueule qu'on a voulu
faire avec vous? On a voulu vous donner l'opportunité d'aller vous
pencher, d'aller travailler. Quand ça a été le temps
d'arriver avec des principes, on vous a suggéré toutes sortes
d'amendements jusqu'à aujourd'hui, pour que ça ne veuille rien
dire. Vous aurez eu la consolation d'avoir passé une belle soirée
à la T.V., à une heure tardive, malheureusement, sans une trop
grosse cote d'écoute, mais votre projet de loi ne dira plus rien, rien,
rien, à la fin. C'est ça, fondamentalement, que vous ne voulez
pas reconnaître. Puis, nous autres, on a l'air un petit peu fou de se
prêter à ce jeu-là du ministre d'un soir. On participe avec
vous, vous avez supprimé un paquet d'articles.
Je lisais l'article 10, tantôt, M. le Président, et je
pense que ça vaut la peine de juste montrer l'article 10 pour vous
montrer où on s'en va. Deuxième alinéa: «La
commission parlementaire compétente de l'Assemblée nationale
? ça part bien, par exemple, deuxième paragraphe ?
entend, au moins une fois par année, le ministre, si celui-ci le juge
opportun.»
On va faire des enfants forts, ça, avec une loi, «si
celui-ci le juge opportun». Voyons! Nous faire dépenser du temps,
à 0 h 50 du matin, un projet de loi qui était supposé
revaloriser le rôle du Parlement, contrer, si vous voulez, les folies
furieuses, faire en sorte que les gens soient imputables, puis il y a un bel
amendement, à la dernière minute, qui dit: si le ministre le juge
opportun. Bon Dieu! Voulez-vous rire de nous autres? C'est quoi, ça?
Où vous vous en allez avec ça?
Moi, je veux bien faire mon travail très sérieux, mais
rendu à 0 h 50 du matin, arriver avec des amendements quétaines
de même, qui défont tout l'esprit du projet de loi, je vous avoue
que la réunion ne sera pas trop longue. Vous vivrez avec votre folie
furieuse et vous aurez fait dépenser du temps, de l'argent
épouvan-tablement aux parlementaires pour en arriver à des
quétaineries du genre. (0 h 50)
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Verdun.
M. Gautrin: M. le Président, si le leader de l'Opposition
avait lu l'article un peu plus long, il aurait compris simplement que l'article
qu'il lisait faisait obligation aux sous-ministres et aux dirigeants
d'organismes de venir témoigner ou rendre compte aux commissions
parlementaires et laisser la possibilité au ministre de les accompagner.
Il s'est limité simplement au premier élément de
l'alinéa.
M. Chevrette: Bien, voyons! Voyons!
Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'article 1?
M. Chevrette: Adopté sur division.
Le Président (M. Bissonnet): Alors, l'amendement à
l'article 1...
Une voix: Vote nominal.
M. Chevrette: Puis vote nominal.
Le Président (M. Bissonnet): Le vote nominal est
demandé. Que les pages se rendent aux portes, s'il vous plaît!
immédiatement. Si vous voulez vous rendre aux portes, les pages, s'il
vous plaît! S'il vous plaît! immédiatement. Alors, je mets
aux voix... Woop! Woop! Si vous voulez, un autre page, être aux portes
pour ne pas que personne entre maintenant.
Alors, je mets aux voix la motion du député de Verdun,
à l'article 1: 1° remplacer, dans la première ligne du
paragraphe 2°, ce qui suit: «établissements», par ce qui
suit, «établissements et»; 2° supprimer, dans la
troisième ligne du paragraphe 2°, les mots «et les organismes
gouvernementaux»; 3° insérer, au début du paragraphe
3°, les mots, «tout autre organisme gouvernemental visé par la
Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans
les secteurs public et parapublic ainsi que».
Alors, que tous les députés qui sont en faveur de cette
motion veuillent bien se lever et, suite à l'appel de votre nom,
veuillez vous asseoir. Ceux qui sont en faveur, veuillez vous lever.
Le Secrétaire: M. Benoit (Orford), M. Lafrenière
(Gatineau), M. Houde (Berthier), Mme Robillard (Chambly), Mme Bélanger
(Mégantic-Compton), M. Picotte (Maskinongé), M. Camden
(Lotbinière), M. Gautrin (Verdun), M. Lemieux (Vanier), M.
Bélisle (Mille-Îles), M. Philibert (Trois-Rivières), M.
Beaudin (Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), M. Dauphin (Marquette), M.
Williams (Nelligan), M. Thérien (Rousseau), Mme Hovington (Matane), Mme
Boucher Bacon (Bourget), Mme Bégin (Bellechasse), M. Forget
(Prévost), M. Parent (Sauvé).
Le Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui sont
contre cette motion veuillent bien se lever, et, M. le secrétaire,
veuillez les identifier.
Le Secrétaire: Mme Marois (Taillon), M. Garon
(Lévis), M. Léonard (Labelle), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel
(Hochelaga-Maisonneuve), Mme Caron (Terrebonne), Mme Carrier-Perreault (Les
Chutes-de-la-Chaudière), Mme Dupuis (Verchères).
Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des
députés qui s'abstiennent? Qu'ils veuillent bien se lever. Aucune
abstention.
Le Secrétaire: Pour, 21; contre, 8.
Le Président (M. Bissonnet): Alors, l'amendement est
adopté.
Nous en sommes maintenant à l'amendement à l'article 3.
Est-ce qu'il y a des députés qui veulent intervenir sur
l'amendement à l'article 3, que je lis comme ceci, proposé par le
député de Verdun:
Modifier, à la fin des paragraphes 1 et 2 de l'article 3,
remplacer ce qui suit: «en place le 1er avril 1993», par ce qui
suit: «autorisés au 31 mars 1993».
Est-ce qu'il y a des interventions?
M. le député de Labelle.
M. Léonard: Oui. M. le Président, juste sur le sens
de cet article-là, il y a un gros changement, à mon sens.
«Les effectifs en place le 1er avril 1993» remplacé par
«autorisés au 31 mars 1993». Le mot
«autorisés» implique des postes qui sont comblés et
des postes qui sont vacants, alors que «les effectifs en place le 1er
avril 1993» sont des postes comblés.
M. Chevrette: C'est un peu différent, hein?
M. Léonard: c'est très différent. c'est, en
effet, très différent. en d'autres termes, comme il y a toujours
un certain pourcentage de la fonction des postes qui sont vacants pour cause de
déplacement, de démission, de retraite, etc., qui est de l'ordre
de 2 %, 3 %, au fond, cette année en particulier, si le gouvernement
disait qu'on coupe les effectifs de x %, bien, justement, ce ne serait pas
exact. par exemple, de 7 %, les cadres, si le taux des postes vacants est de
l'ordre de 3 %, en réalité, il y a juste 4 %.
Bon. Maintenant, «autorisés» et «en
place». J'aimerais que le député nous réponde sur ce
qu'il a en tête et pourquoi la différence entre le 1er avril et le
31 mars?
M. Chevrette: Ou le Trésor a en tête.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Verdun.
M. Léonard: Ou le Trésor, oui, c'est...
M. Gautrin: Deux questions...
M. Chevrette: Plutôt le Trésor, parce que...
Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, la
parole est au député de Verdun.
M. Gautrin: ...entre «en place» et
«autorisés»; deuxième question: entre 1er avril et 31
mars.
Alors, ne nous cachons pas la réalité, le
député de Labelle l'a bien expliqué, il est clair qu'entre
les effectifs en place et les effectifs autorisés, on inclut l'ensemble
des postes non comblés, c'est-à-dire les postes vacants,
c'est-à-dire que les coupures se calculent sur la base des postes, en
incluant les postes vacants et non pas... les postes autorisés. Donc, on
inclut la différence entre les postes autorisés et les postes en
place, c'est les postes qui sont à combler. Donc, à ce
moment-là, ils
sont inclus à l'intérieur de l'objectif de
réduction, premier élément.
Le changement d'une journée entre le 31 mars et le 1er avril
semble mineur, mais ce n'est pas si mineur que ça puisse paraître
parce que, compte tenu des années budgétaires, les postes
autorisés sont autorisés pour une année en date du 1er
avril, ce qui veut dire que lorsqu'on met le 31 mars 1993 ? et je suis
parfaitement conscient de ce qu'on fait ? on retarde, on recule d'une
année par rapport à l'objectif. On aurait pu aussi bien mettre
les postes autorisés le 1er avril 1993, mais ça fait plus beau de
mettre le 31 mars 1993. Les 2 effets qui sont là actuellement, c'est un
effet de faciliter, de retarder, c'est-à-dire d'étendre la base
de compressions et d'inclure dans la base de compressions les postes non
comblés.
Le Président (M. Bissonnet): Alors, M. le
député de Labelle.
M. Léonard: Mais, M. le Président, je n'appellerai
pas ça une précision d'ordre technique, n'est-ce pas, parce que
au-delà de la précision d'ordre technique, il y a une
signification très importante par rapport au projet de loi.
Le projet de loi, il me semble, avait été débattu
avec tambour et trompette à l'effet qu'on réduisait les effectifs
gouvernementaux sur une période de 3 ans. Là, il vient de nous
dire que c'est sur 4 ans. C'est ça que ça veut dire. En plus,
c'étaient les effectifs en place, là on parle des effectifs
autorisés.
M. Chevrette: L'année d'élection.
M. Léonard: Alors, merci. Ça veut dire qu'en fait
il recule son objectif d'un an. Cette année, il n'aura pas d'effet, son
projet de loi. C'est ça que ça veut dire.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Verdun, si vous voulez répliquer, vous avez le choix.
M. Gautrin: M. le Président, en effet, on étend la
période, ne le cachons pas. Je peux faire un débat actuellement
sur si c'est un truc technique ou pas. C'est évident qu'il y a une
modification importante. D'un côté, on étend la
période d'application du projet de loi, et on étend aussi les
postes sur lesquels s'appliquent ces compressions, c'est-à-dire que
ça s'applique aussi sur les postes laissés vacants, ce qui
facilite l'obtention de l'objectif. Je suis parfaitement conscient de ce qui
est écrit là.
Le Président (M. Bissonnet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: Oui, je voudrais savoir quels sont les motifs qui
vous font repousser d'un an? Est-ce que c'est une directive du Trésor,
une suggestion du Trésor ou si c'est vos objectifs personnels qui ont
changé?
J'aimerais savoir quels sont les motifs qui vous ont amené
à changer de date, vous.
M. Gautrin: La question que vous me posez, c'est en question...
Est-ce que c'est le Trésor? Ce projet de loi, et je voudrais revenir
là-dessus, est l'effet d'une réflexion de l'ensemble du caucus de
notre deputation.
M. Chevrette: Quels sont les motifs... M. Gautrin: Quels
sont les motifs?
M. Chevrette: ...qui vous ont amenés, comme caucus,
à...
M. Gautrin: La facilité et l'opérationalisation des
quantums qui ont été mis à l'intérieur du projet de
loi.
M. Léonard: Mais c'est combien des postes comblés
qui vont être coupés par le projet de loi, disons, pour
l'année 1993-1994, l'année budgétaire 1993-1994?
Combien?
M. Gautrin: Alors, vous comprenez mal le projet de loi parce que
le projet de loi n'est pas de coupures annuelles. Il se donne un objectif de
coupures sur un horizon de 3 ans ou de 5 ans, n'imposant pas des coupures
annuelles.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Mettons-le sur S ans. Combien? Vous revenez
à 20 % et à 12 %?
M. Gautrin: Je reviens à 20 % par rapport aux postes
autorisés, oui.
M. Chevrette: Par rapport aux postes autorisés. Ça
veut dire combien d'enseignants de moins, au bout de 5 ans? (1 heure)
M. Gautrin: Alors, vous ne comprenez... Je m'excuse,
là-dedans, si vous revenez sur le projet de loi, vous devez savoir que
cet article ne s'applique pas sur l'article 1.2, mais sur l'article 1.1°,
donc, ne touche pas, à l'heure actuelle, l'ensemble du secteur de
l'éducation.
M. Chevrette: Ça touche quels secteurs,
précisément?
M. Gautrin: Alors, ça touche essentiellement les secteurs
couverts par l'article 1.1°, qui sont ? et je vais vous les rappeler
si vous permettez ? «le gouvernement, ses ministères et les
organismes du gouvernement dont le personnel est nommé et
rémunéré selon la Loi sur la fonction publique».
M. Chevrette: Ça veut dire combien de fonctionnaires de
moins au bout de 5 ans, autorisés?
M. Gautrin: Vous me posez quoi comme question, exactement?
M. Chevrette: Bien, je pense que je vous l'ai posée assez
claire.
M. Léonard: Combien de fonctionnaires? La fonction
publique, à l'heure actuelle, par suite de l'augmentation de 5000
fonctionnaires, est maintenant de l'ordre de...
Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, un
instant. Un instant. Il n'y a plus de...
M. Chevrette: II n'y a plus rien qui marche?
Le Président (M. Bissonnet): Non, non. M. le
député de Labelle, la parole est à vous, mais là,
je regarde... Ça va? C'est parce que la lumière rouge n'est pas
allumée. Bon, allez-y, M. le député de Labelle.
M. Chevrette: Combien il y a de fonctionnaires ? c'est
ça qu'il vous pose ? dans la fonction publique, actuellement, suite
à l'augmentation de 5000 qu'il y a eu dernièrement. Ça
fait 68, quoi?
Une voix: 68 000?
Le Président (M. Bissonnet): Un à la fois, parce
qu'on ne peut pas vous prendre tous les 2 en même temps.
M. Gautrin: vous voulez savoir si je suis capable de calculer 12
% de ce qui est là? c'est ça?
M. Léonard: Quand on calcule 12 % de la main-d'oeuvre et
20 % du personnel d'encadrement, bon, ça donne combien de postes au bout
de 5 ans, quand l'opération sera terminée? Combien de postes?
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Verdun, vous avez la parole.
M. Gautrin: Ça dépend. L'un est sur une base de 3
ans, l'autre est sur une base de 5 ans. Alors, vous faites 12 % du nombre; vous
êtes capable de le calculer, vous prenez le nombre, vous mettez 12 %
dessus et vous obtenez votre résultat.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: On ne peut pas calculer 12 % sur 68 000, puis
20 % sur 68 000. Il y a un certain nombre de cadres et...
M. Gautrin: II y a un certain nombre de cadres; vous mettez 20 %
et vous obtenez le résultat. Je ne ferai pas le calcul pour vous.
M. Léonard: Vous l'avez calculé, vous?
M. Gautrin: Je ne ferai pas le calcul pour vous, ici.
Une voix: Combien y en a-t-il?
Le Président (M. Bissonnet): Un instant.
M. Gautrin: vous prenez le nombre de cadres et vous appliquez 20
%. bon dieu! c'est un calcul trivial et élémentaire!
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Joliette.
M. Chevrette: Oui, mais, écoutez, là. Vous avez
pensé un projet de loi. M. le Président, j'espère que le
député n'a pas fait comme certains ministres qu'on a vus au cours
de la semaine: avoir proposé des amendements à des
législations sans savoir où ils s'en allaient.
Combien y a-t-il de cadres dans la fonction publique?
M. Gautrin: Vous le savez ou vous ne le savez pas? Combien y
a-t-il de cadres dans la fonction publique?
M. Chevrette: Je vous pose la question, c'est vous qui
répondez. Vous êtes parrain de la loi. Combien y a-t-il de cadres
dans la fonction publique?
M. Gautrin: Je ne vous répondrai pas là-dessus.
M. Chevrette: Vous ne le savez pas. Vous ne le savez pas?
M. Gautrin: Je vais vous dire qu'à l'heure actuelle
l'objectif est de réduire de 20 % l'encadrement.
M. Chevrette: Oui, mais ça fait combien de cadres de
moins, dans 5 ans?
M. Gautrin: Moins 20 %, c'est tout.
M. Chevrette: moins 20 % de quel montant de cadres?
une voix: 100 %.
M. Gautrin: Bien, écoutez, c'est...
Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
M. Chevrette: Pardon, de combien? Quand on
propose quelque chose, il faut répondre aux questions. combien y
a-t-il de cadres dans la fonction publique? vous n'avez pas proposé
ça en l'air, 20 %. c'est 20 % de combien?
M. Gautrin: Je ne répondrai pas à votre
question.
M. Chevrette: M. le Président, je m'excuse, il est parrain
de la loi.
M. Gautrin: Je pense qu'à l'heure actuelle... Non, mais
sérieusement...
Une voix: II y a à peu près 4352 cadres.
Le Président (M. Bissonnet): Je m'excuse, M. le
député. En vertu de l'article 246, le député...
M. Chevrette: Ça fait quétaine, ça,
là!
Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Le
député peut intervenir. Alors, il a répondu à votre
question.
Mme la députée de Taillon.
M. Chevrette: M. le Président, je m'excuse. Je n'ai pas
terminé, j'ai droit à 20 minutes.
Le Président (M. Bissonnet): Non, je n'ai pas dit que vous
aviez terminé. M. le député de Joliette, si vous voulez
poursuivre.
M. Chevrette: M. le Président, je suppose que l'arrogance,
à cette heure-là, elle doit tomber un peu. Vous avez
proposé un projet de loi, que vous voulez voir adopté par
l'Assemblée nationale. Notre rôle, c'est d'informer la population
par notre questionnement. Vous n'avez pas posé des gestes en l'air, je
suppose. Vous, un type d'université, député de Verdun,
aspirant ministre, ministre d'un soir, vous avez sans doute pris la
précaution... Vous n'avez pas voté n'importe quoi. Vous avez
voté 12 % des employés. Ça représente quoi sur 3
ans? Et 20 % des cadres, ça représente quoi?
Une voix: C'est du monde, ce n'est pas des chiffres.
M. Chevrette: Ce n'est pas des chiffres en l'air, c'est du monde,
ça, là. On veut savoir combien ça représente de
personnes. Est-ce que vous pourriez me répondre, s'il vous
plaît?
M. Gautrin: Alors, vous prenez 20 % de 4000 et vous faites le
calcul.
M. Chevrette: Ça fait 830.
M. Gautrin: Vous prenez 12 % de 60 000, et vous faites le
calcul.
M. Chevrette: Donc, ça fait quelque chose comme 7000.
M. Lemieux: Aux environs de 4441.
Le Président (M. Bissonnet): Alors, M. le
député de Vanier, si vous voulez intervenir.
M. Chevrette: 12 % de 60 000, c'est plus que 4000.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Vanier, si vous voulez intervenir.
M. Lemieux: J'allais seulement ajouter pour le
député de Joliette: aux environs de 4300. Entre 4300 et 4400, pas
plus que ça, et y incluant les cadres intermédiaires.
M. Chevrette: 12 % de 68 000?
M. Lemieux: Non. On parle de cadres. Je vous parle au niveau des
cadres, les cadres intermédiaires et les cadres... Quand je parle de
cadres intermédiaires et de cadres réguliers, je parle d'admin. V
à admin. II. D'accord?
M. Chevrette: Donc, ça fait quelque 800 cadres.
M. Lemieux: Environ.
M. Chevrette: Mais, au niveau des employés, 12 % de 68
000...
M. Gautrin: 64 000.
M. Chevrette: De 64 000, vous avez dit? O.K. Donc, c'est quelque
chose comme 7000.
Le Président (M. Bissonnet): Ça va, M. le
député de Joliette?
M. Chevrette: 7600 employés.
M. Léonard: C'est 8000 employés en tout.
M. Chevrette: 8000 employés en tout, grosso modo.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Joliette, si vous voulez poursuivre votre intervention.
M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je voudrais savoir le
plan d'opérationalisation, s'il y a eu des évaluations de faites
pour mettre ça en opération. Est-ce qu'il y a des coûts qui
ont été évalués pour mettre ça en
opération? Qui va faire cette fonction au niveau de... C'est le
Trésor qui va réaliser ça?
M. Gautrin: Bien sûr.
M. Chevrette: C'est le Conseil du trésor.
M. Gautrin: Le Conseil du trésor.
M. Chevrette: Est-ce qu'il a été interrogé
sur le projet de loi?
M. Gautrin: Oui.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Verdun.
M. Gautrin: Absolument.
M. Chevrette: Est-ce qu'ils ont proposé des amendements?
Est-ce que le Conseil du trésor a proposé des amendements?
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Verdun.
M. Gautrin: Le Conseil du trésor n'a pas proposé
d'amendements. Ils n'ont pas été entendus ou quoi que ce
soit.
M. Chevrette: Est-ce que le Conseil du trésor a
été entendu par la commission parlementaire, pour le
bénéfice de nos auditeurs ici?
M. Gautrin: Absolument pas.
M. Chevrette: Quel est le motif pour lequel vous avez
refusé que le Conseil du trésor soit entendu au niveau de la
commission parlementaire?
M. Gautrin: Le Conseil du trésor n'a pas été
demandé à être entendu.
M. Chevrette: Comment ça se fait...
Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, un
à la fois.
M. Gautrin: Je voudrais savoir...
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Joliette.
M. Chevrette: Non, mais...
M. Gautrin: Le Conseil du trésor comme tel n'a pas
été demandé à être...
M. Chevrette: ...reconnaissez-vous que le député de
Labelle, à plusieurs reprises, vous a demandé d'entendre le
président du Conseil du trésor?
M. Gautrin: Pas que j'aie comme souvenance qu'une motion ait
été faite. Est-ce qu'il y a une motion qui a été
faite...
Une voix: M. le Président...
Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, un
instant! Je vais vous donner la parole bientôt, madame.
M. Gautrin: Je voudrais savoir, au début, est-ce qu'il y a
une motion qui a été faite ou pas? On va chercher.
M. Chevrette: Vous ne vous en souvenez pas?
M. Gautrin: Y a-t-il une motion qui a été faite
à cet effet?
M. Chevrette: Je pensais que vous étiez le parrain de la
loi. Je vais laisser parler mes collègues.
M. Gautrin: Je veux savoir: Y a-t-il eu une motion? Il y a
peut-être une motion qui a été faite et qui a
été battue. Vous en avez fait un certain nombre comme mesures
dilatoires. C'est possible qu'il y ait eu celle-là en plus.
Le Président (M. Bissonnet): Alors, Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Pour rappeler, pour les fins de...
Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, un
instant, là, juste pour la coordination ici, il faut
«coordiner». Mme la députée de Taillon, vous avez la
parole.
Mme Marois: Merci. Alors, pour les fins de notre discussion, j'ai
devant moi le procès-verbal de la commission du budget et de
l'administration, et je peux vous le dire parce que je l'ai faite
moi-même, cette motion. Je peux vous dire que j'ai fait motion,
dès le début de nos travaux, soit le 15 décembre, pour que
nous entendions le président du Conseil du trésor, M. Daniel
Johnson. Je n'ai pas besoin de la relire. Je pense, M. le Président, que
ça porte essentiellement sur ça. On s'inquiétait du fait
qu'on ait souhaité ou pas la présence du président du
Conseil du trésor. Or, ma proposition a été
défaite, n'est-ce pas, parce que le parrain du projet de loi, de
même que ses collègues à la commission parlementaire
refusaient que nous entendions le président du Conseil du trésor.
Ça nous apparaissait pertinent parce que, justement, le type de question
qui est soulevé ce soir par mes collègues quant à l'impact
réel du projet de loi devait, à notre point de vue, être
évalué par les membres de la commission avant qu'on ne s'engage
dans l'adoption du projet de loi.
Le plus bel exemple de ça, c'est la discussion
qu'on vient d'avoir, M. le Président, sur le fait qu'on ne sait
pas exactement le nombre de personnes qui vont être touchées.
C'est quand même assez inquiétant, ça. Rappelons-nous,
d'autre part, que, ne sachant pas combien de personnes on touche, constatant
qu'on arriverait quelque part autour de 4000 ou 6000, on ne le sait pas trop,
il faudrait juste se dire aussi que le président du Conseil du
trésor, qui s'était fixé ça au nom du gouvernement,
de réduire le personnel de la fonction publique, a réussi
à peu près à l'augmenter du même nombre entre 1988
et 1992, c'est bien cela, en 4 ans, a réussi à l'augmenter du
même nombre. Alors, on avait comme un petit peu raison, M. le
Président, de souhaiter que le président du Conseil du
trésor vienne participer à nos travaux et qu'on puisse le
questionner. La preuve en est faite d'une façon un peu pénible,
d'ailleurs, ce soir, quand on pense qu'on est en train d'adopter les derniers
amendements, on est à la fin du processus, et on ne sait pas encore
combien de personnes ça va toucher. (1 h 10)
Cela étant, je veux revenir sur une question plus technique, M.
le Président, et qui m'embête. J'ai lu les amendements qui nous
ont été déposés ce soir, dans un ensemble de
feuillets, et nulle part, dans les feuillets des amendements, on n'a fait
référence à la modification des titres de la loi et des
sections de la loi. Je sais que, normalement, on étudie cela à la
fin du projet de loi. Cela étant dit, il n'est pas dedans. Ça ne
se retrouve pas, là.
Or, l'article qu'on étudie actuellement est l'article 3 et le
titre de la section II est modifié avec d'autres notes que j'ai ici, et
j'essaie de trouver des références aux amendements. La loi disait
que nous souhaitions adopter des «règles concernant l'embauche
dans un organisme public». Et là, on modifie profondément
la loi de par son titre même parce qu'on le change en disant: On parlera
de la «réduction du personnel dans les organismes publics».
Donc, dans un cas, on parle des règles concernant l'embauche, ce qui
peut être tout à fait positif, permettre qu'on fasse ça
d'une façon saine et correcte, mais, là, on dit: Ce n'est pas
ça. On change le titre pour dire «réduction du personnel
dans les organismes publics».
Ce que je veux savoir de vous, M. le Président, c'est: Si nous ne
les avons pas comme projets d'amendement, est-ce qu'on va les recevoir pour
pouvoir les étudier ou pas?
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Verdun.
M. Gautrin: Mme la députée de Taillon, si vous
regardez les amendements qui ont été déposés,
à la fin, les derniers amendements vont toucher le titre du projet de
loi, donc répondre à votre questionnement à ce
sujet-là.
Mme Marois: Est-ce que vous permettez, M. le
Président?
Le Président (M. Bissonnet): Mme la députée,
vous avez la parole.
Mme Marois: On pourra procéder à l'étude des
autres amendements, mais je vous dis que le dernier amendement dit tout
simplement qu'on change les mots «administrateur d'État» par
les mots «sous-ministre», etc., mais on ne fait pas
référence aux modifications des titres des sous-sections. Et,
généralement, c'est à la fin d'un projet de loi que l'on
procède à ces modifications-là.
Alors, on va procéder à l'étude article par
article. Moi, je n'ai pas d'objection, sauf que je veux bien savoir ce que
j'adopte, si j'adopte une loi qui concerne l'embauche ou si j'adopte une loi
qui concerne la réduction du personnel. Mais, là, ça a
l'air que j'adopte une loi qui concerne la réduction du personnel, sauf
que ce n'est dit nulle part.
M. Gautrin: M. le Président...
Le Président (M. Bissonnet): Oui, M. le
député de Verdun, je vous écoute.
M. Gautrin: ...pour clarifier la position par rapport à la
députée de Taillon, on travaille formellement, à l'heure
actuelle, sur le rapport qu'on amende actuellement, le rapport de la commission
parlementaire, et dans l'amendement, à la commission parlementaire, les
modifications au titre avaient été faites.
M. Chevrette: Sur division, M. le Président.
Le Président (M. Bissonnet): Alors, est-ce que
l'amendement proposé à l'article 3 est adopté?
M. Chevrette: En leur disant qu'ils vivront avec. Vote
nominal!
Le Président (M. Bissonnet): Vote nominal? Le vote nominal
est appelé.
Si les pages veulent se diriger aux portes, s'il vous plaît. Si
vous voulez vous diriger aux portes, nous allons mettre aux voix la motion de
M. le député de Verdun à l'article 3 que je lis: À
la fin des paragraphes 1 et 2 de l'article 3, remplacer «le 1er avril
1993» par ce qui suit «autorisés au 31 mars 1993».
Que tous ceux qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se
lever. Que les députés qui sont en faveur de cette motion
veuillent bien se lever.
M. le secrétaire, si vous voulez bien appeler les membres qui se
sont levés en faveur de la motion.
Le Secrétaire: Mme Robillard (Chambly), M. Gobé
(LaFontaine), M. Houde (Berthier), M. Philibert (Trois-Rivières), M.
Benoit (Orford), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Parent
(Sauvé), M. Picotte (Maskinongé), M. Camden (Lotbinière),
M. Gautrin (Verdun), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Forget
(Prévost),
M. Lemieux (Vanier), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Beaudin
(Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), M. Mac-Millan (Papineau), M. Dauphin
(Marquette), M. Williams (Nelligan), M. Tremblay (Rimouski), M. Thérien
(Rousseau), Mme Hovington (Matane), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Gauvin
(Montmagny-L'Islet), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bradet (Charlevoix), M.
Brouillette (Champlain).
Le Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui sont
contre cet amendement veuillent bien se lever.
M. le secrétaire, si vous voulez appeler les
députés qui sont debout.
Le Secrétaire: Mme Marois (Taillon), M. Garon
(Lévis), M. Léonard (Labelle), M. Chevrette (Joliette), Mme Caron
(Terrebonne), M. Bélanger (Anjou), Mme Carrier-Perreault (Les
Chutes-de-la-Chaudière), Mme Dupuis (Verchères).
Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des
députés qui s'abstiennent? Aucune abstention.
Le Secrétaire: pour: 27 contre: 8 abstentions: 0
Le Président (M. Bissonnet): Alors, l'amendement est
adopté.
Nous en sommes maintenant à l'amendement à l'article 4,
proposé par M. le député de Verdun. Remplacer l'article 4
par le suivant: «Le ministre de la Santé et des Services sociaux,
le ministre de l'Éducation et le ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science doivent, pour leur secteur respectif,
soumettre au Conseil du trésor, avant le 15 décembre de chaque
année, un plan tenant compte de la réduction des effectifs
prévue à l'article 3 et applicable à l'ensemble des
organismes publics visés au paragraphe 2° de l'article 1. L'ensemble
de ces plans couvre la période du 1er avril 1994 au 31 mars 1998, ou,
selon le cas, du 1er juillet 1994 au 30 juin 1998. «Chacun de ces
ministres dépose à l'Assemblée nationale les plans qu'ils
ont soumis dans les 15 jours de leur transmission au Conseil du trésor
ou, si l'Assemblée ne siège pas, dans les 15 jours de la reprise
de ses travaux. «La commission parlementaire compétente de
l'Assemblée nationale convoque au moins une fois par année chacun
de ces ministres afin qu'il fasse rapport de l'état de
réalisation de ces plans.»
Est-ce qu'il y a des interventions sur l'amendement à l'article
4? M. le député de Verdun.
M. Gautrin: M. le Président, je voudrais quand même
essayer d'expliquer, quitte à ce qu'on refasse les débats...
Une voix: Rouvrez les portes.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Verdun, la parole est à vous.
M. Gautrin: L'important qui est à remarquer à
l'intérieur de cet amendement, c'est qu'il est structuré en 3
morceaux. En premier lieu, il est clair qu'on parle d'un plan sans lui fixer
d'objectifs et un plan pour l'ensemble des organismes publics.
C'est-à-dire qu'on prend un plan par secteur. D'ailleurs, il ne s'agit
pas de faire les plans de réduction pour chacun des
éléments des commissions scolaires ou du réseau de la
santé. Donc, vous avez un secteur de l'éducation, un secteur de
l'enseignement supérieur couverts par ça et un secteur de la
santé. Le deuxième élément, c'est qu'on a voulu
reprendre un des articles qu'on avait trouvés plus tard et qu'on a
inclus ici, la question du dépôt de ces plans à
l'Assemblée nationale. Et, le troisième élément,
c'est que la commission parlementaire concernée convoque, une fois par
année, chacun de ces ministres afin qu'il fasse rapport de l'état
de réalisation de ses plans. Donc, 3 éléments: d'un
côté, les plans; deuxièmement, le dépôt;
troisièmement, l'étude de la réalisation du plan.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Verdun. M. le député de Labelle.
M. Léonard: Moi, M. le Président, je trouve
qu'on est devant pratiquement un autre article. Même s'il va piger ici et
là, il reste quand même que c'est sensiblement différent.
Je voudrais d'abord souligner une chose. Lorsque j'ai proposé que ces
plans de réduction des effectifs soient transmis à une commission
parlementaire idoine, la commission du budget et de l'administration, j'ai
été battu dans la commission parlementaire. Mon amendement a
été battu, parce que les députés
ministériels s'y sont opposés, et le député de
Verdun en particulier, alors que, maintenant, tout à coup, il le
ramène ce soir. Ceci ne nous empêche pas d'être contre le
fond même de l'article, mais, au moins, je pense que, là, on
assiste à la description, dans le nouvel article 4, de tout le processus
de centralisation qui est effectué par ce projet de loi.
Au fond, c'est le ministre de l'Éducation, le ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science, le ministre de la
Santé et des Services sociaux, donc, les réseaux de la
santé et les réseaux de l'éducation qui sont
touchés par le projet de loi, qui doivent présenter un plan
d'effectifs. Et cela veut dire que cela s'adresse à chacun des
organismes, à chacune des unités de tous ces
réseaux-là, qui vont devoir venir présenter, discuter,
négocier avec le président du Conseil du trésor ou avec le
Conseil du trésor, lequel va déposer les plans de
réduction des effectifs à l'Assemblée nationale. Ce sera
des pijes de plans, parce qu'il y en a. Cela touche les 400 000 ou, disons,
dans ces cas-là, les 300 000 syndiqués de ces réseaux de
santé et de l'éducation. Et puis, après, on va s'amener en
commission parlementaire. Nous avons fait le débat en commission
parlementaire. On avait refusé, d'ailleurs, cette commission
parlemen-
taire. Mais, là, j'ai vu qu'on se ravisait. Il reste, M. le
Président, que le tout est proprement insensé. (1 h 20)
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Labelle. M. le député de Verdun.
M. Gautrin: M. le Président, brièvement, il y a, de
fait, 3 plans et non pas 500 plans. Il faut bien qu'on se comprenne. Il y en a
par secteur pour l'ensemble des organismes; donc, on ne parle pas, à
l'heure actuelle, de plans qui sont pour chaque institution où,
là, votre argumentation serait tout à fait pertinente. Il s'agit
de plans sectoriels qui s'inspirent des conditions prévues à
l'article précédent et qui sont déposés à
l'Assemblée. Donc, on demande strictement de suivre l'évolution
des effectifs à l'intérieur des différents secteurs.
M. Léonard: M. le Président...
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: ...avec la réponse du
député de Verdun, je pense que cela nous fait toucher du doigt
une modification très substantielle du projet de loi. Dans la
première rédaction, celle que nous avions vue en commission
parlementaire, il s'agissait d'un plan de réduction du personnel des
organismes publics visés, et il semble qu'à l'époque nous
avions discuté des plans de chacun de ces organismes, ce qui est
nécessairement obligatoire, parce que, si le ministre prépare ou
présente un plan de réduction des effectifs, il est obligé
de se baser sur des données de chacun des organismes visés. Bon.
Tandis qu'ici, dans le nouvel article, c'est un plan applicable à
l'ensemble des organismes publics; c'est beaucoup plus vague et cela indique
ici qu'il y a un seul plan pour l'ensemble. Donc, on est dans une modification
très substantielle du projet de loi.
M. Gautrin: Excusez-moi, qui correspond, et on vient le
préciser à l'heure actuelle, à ce dont vous parliez au
début, l'énorme centralisation. À l'heure actuelle,
justement, on essaie de combler cette énorme centralisation et de
répondre en partie aux interrogations des personnes venant des
commissions scolaires.
M. Léonard: Qu'est-ce que ça signifie, un plan,
alors?
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Verdun.
M. Gautrin: Je n'ai pas compris, excusez-moi, la question.
M. Léonard: Non, mais qu'est-ce que signifie ce
plan-là? C'est un plan qui tient en 4 lignes. Ça pourrait
très bien être ça aussi.
M. Chevrette: Bien, voyons! Vous savez que ça n'a pas
d'allure.
M. Léonard: Ça veut dire quoi, là?
(Consultation)
M. Chevrette: Je vais y aller, moi. M. le Président...
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Joliette.
M. Chevrette: ...pour permettre, peut-être, au
député de Verdun de se trouver un petit bout de réponse,
je vais lui donner un exemple. Il n'y a pas un centre hospitalier qui a le
même taux d'encadrement. Il n'y a pas un centre hospitalier qui,
nécessairement, a la même vocation. Il n'y a pas un centre
hospitalier qui a les mêmes clientèles. Il y en a que c'est en
gériatrie, et c'est déjà défini par certaines
normes. Au niveau des hôpitaux spécialisés pour enfants,
c'est d'autres barèmes; en pédiatrie, en obstétrique.
Quand vous tombez dans les centres hospitaliers de soins aigus, c'est un autre
encadrement. Allez-vous me dire que le ministre va décider d'un objectif
personnel, parce qu'il n'y a pas d'objectif précis en santé?
D'accord? On se comprend? Il n'y a pas d'objectif précis, mais, à
chaque année, il faut qu'il y en ait un. Il va être fixé
par qui, son objectif? Première question: II va être fixé
par qui, son objectif, au ministre de la Santé? Il faut qu'il en
présente un, parce qu'on l'oblige, à chaque année, au 15
décembre, à présenter un plan de réduction de
personnel. Si on l'oblige, à chaque année, à
présenter un plan de réduction, c'est donc dire qu'on va lui
fixer des objectifs. Sinon, il va bâtir un plan sur quoi? Il me semble
que la petite logique de la méthodologie... En enseignement, on appelle
ça la méthodologie du travail intellectuel, dirait le
député de Maskinongé. Donc, il faut bien comprendre
ça, là, pour suivre ça logiquement.
Deuxième chose, pour bâtir un plan correspondant à
des objectifs qu'on lui aura fixés, je ne sais pas qui, je suppose qu'il
est obligé de tenir compte des effectifs dans chacun de ces centres.
Peut-être que le taux d'encadrement est trop élevé à
Notre-Dame, il va dire: Bien, là, je pourrais en récupérer
8; je pourrais en récupérer 10 à Lanaudière; je
pourrais en récupérer 7 à Saint-Jérôme. Puis
il va présenter un plan au mois dé décembre en disant:
Moi, au niveau des cadres, j'ai un objectif de 300 cadres au niveau du centre
hospitalier et, au niveau des employés d'hôpitaux, des soins
infirmiers, j'aurais peut-être 250 infirmières à sauver. Et
j'ai un plan d'effectifs pour baisser mes infirmiers et infirmières
auxiliaires de 400, etc. Il va falloir qu'il se base sur quelque chose. Il va
falloir qu'il fasse du travail.
C'est ça qu'il vous disait, le député de Labelle:
le sens pratico-pratique des choses. Vous ne demanderez pas au ministre de la
Santé de se présenter ici, vous, puis de dire: J'ai un objectif
de tant, tant, tant, tant.
Puis, vous dites: II va venir à l'Assemblée nationale
après, puis il va venir nous rendre compte de comment il a
appliqué son plan. Bien, il va être obligé de dire: J'avais
des objectifs à Notre-Dame, mais il m'est arrivé une catastrophe,
puis j'ai été obligé d'ouvrir des lits additionnels, puis
je n'ai pas réussi.
Bien, il faut qu'il identifie un peu ses cibles pour aller les chercher.
Voyons, M. le député de Verdun! Ça n'est pas le fruit de
la spontanéité, un plan d'effectifs en fonction de la
réduction. Il faut tenir compte des situations réelles de fait
dans chacun des centres hospitaliers. Voyons! N'importe qui qui a
administré une petite boîte, si petite soit-elle, il faut qu'il
connaisse ce qui se passe à l'intérieur, ce qui bouge à
l'intérieur. Voyons. Moi, moi... Ça tient de l'imaginaire, cette
affaire-là, quand vous nous répondez ça, un plan
sectoriel. Si vous m'aviez dit, encore: Le ministre devra, à partir de
l'état de la situation dans son réseau, nous présenter des
effectifs par région, par exemple, bien, il aurait fait travailler ses
régies pour aller chercher au moins ce qu'il... Les régies
auraient pu lui dire: Sur le plan régional, on peut sauver à peu
près tant dans telle catégorie, telle catégorie de
personnel.
Vous dites: Ça prend rien qu'un plan, ce n'est pas gros de
travail. Voyons! N'importe quel ministre de la Santé... Puis j'aimerais
ça qu'il soit ici, je lui dirais: Comment vous allez faire pour
confectionner votre plan, M. le ministre? M. le député de
Charlesbourg, le ministre de la Santé, dirait: Bien, écoute, je
vais appeler mes régies. Je vais appeler mes directeurs de centres
hospitaliers. Je vais faire faire le tour. Peut-être avec l'AHPQ,
l'Association des hôpitaux, je vais essayer de faire quelque chose. Je
vais présenter un plan si vous m'y obligez par loi.
Mais, pensez-y, là. Moi, ça ne me dérange pas trop,
ça, là. Mais il ne faut pas accoucher sur papier pour le plaisir
d'accoucher sur du papier, puis répondre au député de
Labelle comme vous l'avez fait: Ce n'est pas gros d'ouvrage, ça; ce
n'est pas trop de paperasse, ça. Bien, je m'excuse, là. On peut
avoir des directives à certains centres hospitaliers qui, eux, ont le
fardeau de présenter un plan d'effectifs à partir d'une directive
ministérielle.
Mais, là, vous créez une obligation à un ministre
de vous présenter un plan unique sectoriel. Puis vous dites: Ça
ne sera pas d'ouvrage pour tout le monde. Voyons, voyons! Moi, je peux vous
dire que j'y ai été un petit peu de l'autre bord, là.
Puis, une affaire de même, là, je peux vous dire une chose,
c'était tout un branle-bas dans le réseau, ça. S'il y a
quelqu'un qui sait comment ça fonctionne... C'est tout un branle-bas
dans le réseau, ça. Et un autre branle-bas, 15 jours avant de
l'entendre, le ministre. Vous avez décidé, rendu au mois de juin,
de l'entendre. Bien, il repart le tam-tam pour aller voir ce qu'il vous a
déposé au mois de décembre. Il repart le tam-tam pour
aller voir si c'a été efficace. Puis, là, il s'en vient
devant nous autres, puis on lui demande: «Ç'a-tu»
été efficace?
Là, il y a un hôpital qui a dit qu'il en avait
enlevé 14, supposons. Puis, dans les faits, on sait que c'est de la
frime. C'était des postes vacants. Vous savez toute l'histoire. Moi, je
veux bien qu'on s'amuse par des projets de loi de même. Mais il y a des
objectifs qui auraient pu être atteints de façon bien plus
précise, puis qui voulaient dire quelque chose de plus concret que
ça. C'est concret, quand vous arrivez aux fonctionnaires, puis que vous
fixez des objectifs de nombre: 15 %, 20 %.
Mais, dans le domaine de l'éducation ? je vais vous donner
un autre exemple; je donnais tantôt l'exemple ? on décide de
mettre plus d'heures d'école pour nos enfants. Ça ne sera pas un
objectif de réduction que vous allez avoir, ça va être de
l'augmentation réelle. Si, par exemple, vous décidez, je ne sais
pas, moi, qu'il y a une prématernelle obligatoire au Québec
dorénavant, eh bien, qu'est-ce qui vous dit que ça ne prendra pas
600 profs de plus? Des objectifs non quantifiés de même, à
quoi on s'amuse? Quand on sait...
Une voix: Le rapport Pagé.
M. Chevrette: Oui, le rapport Pagé, par exemple. Oui,
justement, c'est un bel exemple. Je ne sais pas où on s'en va quand on
fait cela, moi. Mais, je trouve que... «C'est-u» de s'amuser pour
légiférer, là? Mais, vous savez très bien que,
d'abord, les commissions scolaires sont subventionnées. Sur quelle base,
vous le savez. Les hôpitaux doivent justifier, maintenant, leur budget.
Je ne sais pas ce qu'on cherche. Puis, vous le savez quel passe-passe ils font?
Ils décident de fermer des lits pour boucler des budgets. Moi, je ne
sais pas vraiment ce qu'on recherche. J'aimerais ça qu'on sache plus
précisément ce que l'on vise. (1 h 30) «c'est-u» des
objectifs de réduction de personnel? si on disait, par exemple, le taux
d'encadrement en éducation, il est de 1,12 %, mettons, puis notre
objectif sur 5 ans est d'en arriver à 1,8 %, bien, là, ce serait,
en éducation, qu'au niveau des cadres on vise un objectif... au niveau
des centres hospitaliers, tu peux avoir des objectifs bien différents,
dépendant de la nature, de la vocation du centre. on sait qu'en
gériatrie, par exemple, il y a du personnel qui peut s'occuper de 8 ou
10 patients; dans des centres hospitaliers de soins aigus, l'encadrement est
beaucoup plus grand et, en pédiatrie, c'est encore plus grand.
ça, il me semble que c'est... je comprends, mais, là, vous
demandez un travail de moine... je m'excuse d'être un peu long, mais
c'est pour démontrer, là, franchement, le pratico-pratique... je
suis certain que je prendrais chacun des ministres, ici, qui sont responsables
d'un réseau, en éducation, en santé, puis l'autre, c'est
lequel? vous en avez mis 3...
Une voix: Enseignement supérieur.
M. Chevrette: Enseignement supérieur... Bien, enseignement
supérieur, vous avez rencontré vos confrères, vos
ex-confrères et vous avez semblé régler leurs
problèmes...
M. Gautrin: Et ça inclut le réseau des
collèges.
M. Chevrette: Mais, dans les commissions scolaires et dans la
santé, je ne pense pas que vous ayez réglé grand-chose. Je
trouve que c'est de l'utopie.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Joliette. M. le député de
Lotbinière.
M. Camden: Je vous remercie, M. le Président. Ce à
quoi fait référence, ici, l'article 4, c'est, bien sûr,
qu'il y a un plan qui devra être déposé, qui doit, comme on
le dit dans l'article, tenir compte des objectifs de réduction des
effectifs qui sont prévus à l'article 3. Ça signifie, M.
le Président, en fait, que les... Et je pense que les ministres
responsables à cet égard, tant du ministère de la
Santé et des Services sociaux que du ministère de
l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de la Science, ont
à préparer un plan, et, quant à eux, un plan, ça
m'apparaît très significatif.
On vient de nous en faire une description, laquelle description est
largement connue dans l'ensemble du système. Il ne faut pas de grandes
notions d'administration publique pour savoir qu'on établit des ratios,
on établit des calculs, on les fait en référence à
des institutions, à des établissements, qu'on les comptabilise
et, dans l'ensemble, on arrive à une donnée finale, et c'est
à partir de cette donnée qu'elle est communiquée.
M. le Président, annuellement, on a l'occasion d'entendre les
différents ministres en commission parlementaire,
particulièrement lors de l'étude des crédits
budgétaires, venir nous indiquer quel est l'état de leur
ministère, comment ils dépenseront l'argent qui leur est
octroyé via les crédits. Également, les
députés, à ce moment, formulent des questions, à
savoir: Combien y a-t-il de fonctionnaires? Quels sont les effectifs? Combien y
en a-t-il en disponibilité? Combien de postes sont vacants? Alors, M. le
Président, ce qui est objectivement visé ? ce qui
était recherché par les députés et, initialement,
par le groupe de travail sur la rationalisation des finances qu'on appelle
«le groupe Poulin» ? ce qu'on souhaite, c'est que,
périodiquement, les ministres viennent faire rapport, et c'est ce qu'on
indique également dans l'alinéa 2. On donne des périodes,
on donne des délais d'une façon bien précise dans la loi,
auxquels les ministres doivent faire rapport à l'Assemblée
nationale, donc faire rapport à l'ensemble des élus qui sont
mandatés, eux, par la population. La préoccupation,
évidemment, des élus, c'est celle de se préoccuper non
seulement des ministères, mais également de l'ensemble des
organismes. C'est une préoccupation qui est valable et c'est celle que
notre population aussi souhaite. Je vais vous dire, peut-être qu'ici nous
sommes sensibles à faire des distinctions entre les centres
hospitaliers, les régies régionales, les commissions scolaires,
mais pour la population, les gens ne font pas toujours ces subtiles
références aux administrations qui ont ce mandat soit par pouvoir
délégué, soit par le cadre législatif. Alors, M. le
Président, ce qu'on définit aujourd'hui, c'est un cadre
général; la voie réglementaire viendra le préciser,
sans doute, et le Conseil du trésor, par voie de conséquence, il
va de soi.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Lotbinière. Alors, sur la même question,
M. le député de Labelle.
M. Léonard: M. le Président, en lisant cet article
et en écoutant les explications des gens d'en face, je me pose la
question à savoir ce que la loi change. Ou ça change quelque
chose ou ça ne change rien. Le Conseil du trésor joue un
rôle central dans l'administration publique et il a beaucoup de pouvoirs.
Il pourrait, de par la législation actuelle, intervenir, demander un
plan applicable à l'ensemble, comme c'est rédigé à
l'heure actuelle, et les ministres viennent défendre leurs
crédits, une fois par année, à l'Assemblée
nationale, dans les commissions parlementaires. Qu'est-ce que le projet de loi
change, à l'heure actuelle, si on s'en tient à un plan
général, applicable à l'ensemble? Ou bien le projet de loi
veut dire quelque chose et, là, il s'agit d'un plan précis de
chacune des unités; ça c'est neuf, ça pourrait être
neuf. Mais c'est inapplicable, je le pense. C'est une montagne à faire
et c'est du dirigisme, sur le plan de l'administration publique, c'est
évident. Mais, au fond, qu'est-ce que le Conseil du trésor va
avoir qu'il n'a pas déjà à l'heure actuelle? J'entends le
Conseil du trésor en termes d'organisme central de l'administration
publique.
M. Gautrin: M. le Président, je pense qu'à l'heure
actuelle, et je pense que le député de Labelle va accepter cela,
le Conseil du trésor a probablement déjà ces informations.
Mais, pour moi, l'important, c'est que ces plans soient déposés
à l'Assemblée nationale, premier élément.
M. Léonard: Est-ce qu'il y en a déjà des
plans, au Conseil du trésor?
M. Gautrin: À l'heure actuelle, on amène, par ce
biais, le contrôle des élus, le contrôle des parlementaires.
C'est la réalisation des objectifs de contrôle des effectifs dans
le réseau de la santé et dans le réseau de
l'éducation. Il y en a, M. le député de Labelle, à
un point, je pense, que vous devriez partager, qui est l'importance du
contrôle des élus sur l'ensemble des plans.
Le Président (M. Lefebvre): Mme la députée
de Taillon.
Mme Marais: M. le Président, si vous permettez, je vais
aller dans le même sens que mes collègues. Pour avoir
siégé un bon moment au Conseil du trésor, je pense que
tout ce que ça peut amener comme processus, c'est de fixer
aveuglément, tel que la loi le prévoit d'ailleurs, un quota
à atteindre, et aussi aveuglément,
qu'on reçoive le résultat à savoir si le quota a
été atteint ou pas. Je ne vois pas comment on peut arriver
à atteindre un objectif de gestion fine et de responsabilisation des
administrateurs et des gestionnaires sur le terrain, tel que cela est dit au
projet de loi.
Et le député de Lotbinière nous dit: On
procédera par voie réglementaire. D'abord, je pense qu'il le
sait, il n'y a aucun règlement qui est prévu aux projets de loi
qui sont là. Alors, évidemment, ce sera par voie administrative,
ce qui est autre chose, mais le projet de loi ne prévoit pas de moyens
de type réglementaire.
Je ne veux pas revenir sur ce que mes collègues ont dit, je suis
essentiellement d'accord avec eux. Je voudrais juste vous souligner cependant,
M. le Président, que, lorsqu'on amende l'article 4, on part
évidemment de l'article 4 original. Des fois, je me dis: On se retrouve
avec un projet de loi qui est complètement différent de celui qui
a été soumis à l'Assemblée nationale, et je me
demande même ? et je pense qu'on pourrait le soulever comme question
de procédure ? s'il était recevable, cet article ? s'il
est recevable. Vous avez statué sur la recevabilité. Mais
regardez l'article 4 de départ. Je trouve qu'il faut le dire, parce que
c'est ça qu'on nous a présenté: «Les personnes dont
l'emploi prend fin par l'échéance du terme prévu lors de
leur embauche peuvent être réembauchées malgré
? une référence qu'on fait ? l'article 3.»
Là, ici, on ne parle plus de réembauche, on ne parle plus
du bassin de personnes disponibles pour qu'elles soient réintroduites,
ces personnes-là, dans l'ensemble des services publics ou parapublics,
ou de santé ou de services sociaux, ou d'éducation, on parle
essentiellement de la réduction des effectifs, point. Alors, on change
l'esprit même de la loi, à mon point de vue. Et je resterai
toujours convaincue, à cet égard, du travail qu'on fait, qui
passe à côté des objectifs initiaux que s'était
fixés la loi.
Le Président (M. Lefebvre): Madame... M. Gautrin:
M. le Président...
Le Président (M. Lefebvre): Oui, M. le
député de Verdun.
M. Gautrin: ...si vous me permettez une remarque, simplement pour
éclairer la députée de Taillon. La discussion que nous
avons est sur la base du rapport de la commission parlementaire. L'article 4,
tel qu'il est sorti après le rapport de la commission parlementaire,
puisqu'il a été renuméroté, se lisait: «Le
ministre de la Santé et des Services sociaux, le ministre de
l'Éducation et le ministre de l'Enseignement supérieur et de la
Science doivent soumettre au Conseil du trésor, pour approbation, avant
le (indiquer la date qui suit de six mois la date d'adoption du projet) un plan
de réduction pour la période du 1er avril au 1er
avril.»
Donc, réellement, on est dans le même type d'article, si on
se fie à l'article 4 tel que sorti de la commis- sion parlementaire.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Verdun. Mme la députée de Terrebonne. (1
h 40)
Mme Caron: Merci, M. le Président. M. le Président,
moi, ce que j'ai de la difficulté à comprendre, c'est qu'on vient
complètement à rencontre du principe même d'une bonne
administration, je pense, d'un gouvernement ou d'un ministre, quand on
détermine à l'avance que, du 1er avril 1994 au 31 mars 1998, ou,
selon le cas, du 1er avril 1994 au 30 juin 1998 ? indépendamment de
ce que le ministre de la Santé et des Services sociaux ou le ministre de
l'Éducation et de l'Enseignement supérieur va se donner comme
objectifs, va se donner comme réforme, va considérer comme
besoins pour la population, indépendamment des besoins de
prévention au niveau de la santé, indépendamment des
besoins du côté de l'éducation, d'une réforme qui
s'en vient aux différents paliers au niveau de l'éducation, du
décrochage scolaire ? indépendamment des mesures, on va se
limiter en s'obligeant à diminuer le nombre d'effectifs.
C'est possible qu'on ait besoin de réduire, une année,
mais c'est possible qu'on ait besoin d'augmenter, et on va tenir compte
uniquement des deux dernières réformes qui ont été
déposées. La réforme de la santé et des services
sociaux amène des changements majeurs. Les CLSC vont devenir le lieu de
première ligne. Il va y avoir besoin d'une augmentation d'effectifs,
c'est évident.
Si on veut des mesures pour contrer le décrochage scolaire, comme
le rapport Pagé, si on veut améliorer au niveau de
l'éducation, au niveau du système primaire ? la ministre a
annoncé qu'il y aurait une réforme au niveau du primaire et du
secondaire et on a la réforme au niveau des cégeps ? c'est
évident qu'on va avoir besoin d'ajouter du personnel. Et là, une
loi vient dire: On réduit les effectifs, peu importent les objectifs. Je
pense que ce qu'un ministre doit faire en premier, c'est d'avoir des objectifs
qui touchent les personnes, et non un objectif au niveau de la réduction
d'effectifs, qui ne tient aucunement compte de ces
réalités-là.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée de Terrebonne. M. le député de Verdun.
M. Gautrin: M. le Président, si vous me permettez de
répondre, il s'agit d'un plan qui est un plan global pour le
réseau, premièrement, et donc, qui tient compte des
répartitions à l'intérieur même du
réseau.
Deuxièmement, s'il y a des politiques particulières dans
certains secteurs, le projet de loi prévoit aussi la possibilité
d'exempter de l'application du projet de loi certains secteurs ou certaines
catégories de personnes. On le verra lorsqu'on arrivera à
l'article 7 ou l'article 8.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Verdun.
M. Chevrette: Sur division.
Le Président (M. Lefebvre): Alors, l'amendement à
l'article 4 est adopté sur division. Nous allons maintenant discuter de
l'amendement à l'article 5, qui se lit comme suit: Remplacer l'article 5
par le suivant: «Un organisme visé au paragraphe 3 de l'article 1
doit, avant telle date, transmettre au ministre de qui il relève, un
plan de réduction, pour la période du 1er avril 1993 au 31 mars
1998, de son personnel, sur la base du personnel en place le 31 mars 1993.
«Le ministre soumet dans les 30 jours un tel plan au Conseil du
trésor pour approbation et le dépôt à
l'Assemblée nationale dans les 15 jours de cette approbation, ou, si
l'Assemblée ne siège pas, dans les 15 jours de la reprise de ses
travaux. La commission parlementaire compétente de l'Assemblée
nationale convoque au moins une fois par année le ministre de qui
relève l'organisme afin qu'il fasse rapport de l'état de
réalisation de ce plan.»
M. le député de Verdun, on vous écoute.
M. Gautrin: Merci, M. le Président. Cet amendement,
à l'heure actuelle, vient reprendre deux articles et
réécrire à l'intérieur d'un seul article ce qui
était prévu à l'article 10.2 du document qui est sorti de
la commission parlementaire. De plus, il précise le rôle
d'intermédiaire que le ministre doit avoir entre l'organisme ou le
dirigeant d'organisme et l'Assemblée nationale. Dans ce cadre, on a
introduit le rôle du ministre: l'organisme transmet au ministre de qui il
relève un plan et le ministre va déposer ce plan à
l'Assemblée nationale.
Donc, les deux amendements viennent faire ici dans le même
article, l'article 10.2, qui était la question qui touchait les
commissions parlementaires, et de plus viennent préciser le rôle
du ministre par rapport aux organismes visés au paragraphe 3.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Verdun.
M. le député de Labelle.
M. Léonard: Deux questions. La première, pourquoi
utilisez-vous l'expression «en place le 31 mars 1993», alors que,
dans l'autre, c'était «autorisés au 31 mars
1993»?
M. Gautrin: C'est-à-dire...
M. Léonard: Bien, la concordance. Vous avez fait une
modification à l'article 3, qui est applicable à l'article 4,
pour changer l'expression «en place le 1er avril 1993» par
«autorisés au 31 mars 1993». Là, vous utilisez,
à l'article 5, l'expression «en place le 31 mars 1993».
Pourquoi?
M. Gautrin: Parce qu'il n'y a pas le concept d'«effectifs
autorisés», dans certains organismes.
M. Léonard: Bon. La deuxième question: II y a
combien d'organismes touchés par l'article 5?
M. Gautrin: II y en a 54.
M. Léonard: Très bien, 54.
M. Chevrette: Sur division.
Le Président (M. Lefebvre): Alors, adopté.
M. Léonard: On vérifiera.
M. Chevrette: Ils vont vivre avec ça.
Le Président (M. Lefebvre): L'amendement à
l'article 5 est adopté sur division.
Nous allons maintenant procéder à la discussion sur
l'amendement suggéré à l'article 5.1. Alors, l'article 5.1
est supprimé. Je m'excuse. L'article 5.1 est supprimé. L'article
5.2.
Une voix: ...
Le Président (M. Lefebvre): Oui, oui, oui.
M. Gautrin: Comme c'est un amendement... Ça a
été la base de votre argumentation... C'est-à-dire, on
propose de supprimer l'article 5.1...
Le Président (M. Lefebvre): C'est un amendement. Est-ce
que l'amendement est adopté?
M. Gautrin: ...puisque le concept de ce qui était dans
l'article 5.1...
M. Chevrette: Oui, on l'a retrouvé dans 5.
M. Gautrin: ...a été retrouvé dans les
articles 4 et 5.
M. Chevrette: On a bien compris ça.
Le Président (M. Lefebvre): C'est adopté?
M. Chevrette: Surdivision...
Le Président (M. Lefebvre): Sur division.
M. Chevrette: ...M. le Président.
Le Président (M. Lefebvre): L'amendement
suggéré à l'article 5.2 se lit comme suit: Insérer,
après l'article 5.1, l'article suivant: «Jusqu'au 30 septembre
1998, un organisme visé au paragraphe 5° de l'article 1 doit, au
plus tard le 30 septembre de chaque année, transmettre au ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science un rapport sur l'implication
des règles budgétaires annuelles sur le
niveau de ses effectifs. Le ministre dépose à
l'Assemblée nationale ce rapport dans les 15 jours de sa
réception ou, si l'Assemblée ne siège pas, dans les 15
jours de la reprise de ses travaux. La commission parlementaire
compétente de l'Assemblée nationale convoque au moins une fois
par année le dirigeant de chacun de ces organismes afin de discuter de
ce rapport...»
M. Chevrette: Juste sur le plan technique, est-ce que ce n'est
pas, dans nos règlements... Est-ce que c'est commun dans un projet de
loi d'insérer dans un article de projet de loi que le ministre
siège d'office à une commission? Ce n'est pas plutôt
lorsqu'il y a avis en Chambre, que le leader dit «et que le ministre en
soit menbre»?
Le Président (M. Lefebvre): En principe, le ministre est,
d'office, membre de la commission, sauf exception. Le principe, c'est que le
ministre est membre d'office de la commission.
M. Chevrette: Je comprends, mais...
Le Président (M. Lefebvre): Ça, c'est le
principe.
M. Chevrette: ...c'est comment dans nos lois? C'est ça que
je veux savoir.
Le Président (M. Lefebvre): C'est le principe. Et si vous
permettez, je vais lire la dernière phrase de l'amendement.
M. Chevrette: Ah! elle n'était pas lue?
Le Président (M. Lefebvre): «Le ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science est d'office membre de la
commission.»
M. Chevrette: Oui, mais c'est ça. Le Président
(M. Lefebvre): Oui. M. Chevrette: Est-ce que c'est commun?
Le Président (M. Lefebvre): En fait, c'est plus que
moins.
M. Chevrette: Non, mais «c'est-u» commun dans nos
lois?
Le Président (M. Lefebvre): C'est une question,
là... Moi, je vous réponds, M. le leader de l'Opposition
officielle, en partant de ce qui existe dans le règlement de
l'Assemblée nationale qui dit, à l'article 125, un peu comme je
viens de l'indiquer: «Le ministre ou le député qui
présente un projet de loi est membre de plein droit de la commission qui
l'étudié.»
M. Chevrette: Ah oui! Mais ce n'est pas ça que je vous
suggère. Ce n'est pas un projet de loi... C'est un projet de loi
d'imputabilité devant les députés. C'est un projet de loi
? si j'ai bien compris l'esprit, et je me le suis assez fait dire ?
pour responsabiliser les parlementaires face à la gestion publique. Au
moment où on veut revaloriser les parlementaires, on dit: Les ministres
sont imputables, les sous-ministres sont imputables et les dirigeants
d'organismes sont imputables. Puis, là, devant la commission, vous
dites: D'office, le ministre est là. Ça ne me semble pas cadrer
avec les discours que j'ai entendus. Je ne sais pas si je me fais comprendre,
là?
Le Président (M. Lefebvre): M. le leader, comme vous le
savez...
M. Gautrin: M. le Président...
Le Président (M. Lefebvre): ...un membre de
l'Exécutif n'est membre d'aucune commission parlementaire, sauf,
d'office, de la commission qui va étudier son propre projet de loi
à titre, à ce moment-là, de parrain du projet de loi.
M. Chevrette: Oui, mais ce n'est pas... Non, non, ce n'est pas un
projet de loi, là, c'est d'aller étudier
l'imputabilité...
Le Président (M. Lefebvre): Je comprends.
M. Chevrette: ...d'un groupe ou d'un organisme.
Le Président (M. Lefebvre): Je comprends ce que vous
voulez dire. (1 h 50)
M. Chevrette: Si je pose la question, c'est parce que ça
ne m'apparaît pas courant, moi, même dans nos lois, puis en
particulier pour celle-ci, parce que le député de Verdun disait
que c'était pour valoriser le rôle du député de
contrôler le pouvoir exécutif de ces... On parlait de ces bonzes
de l'État qui ne paradaient pas devant nous et qui avaient des pouvoirs
sur le plan de l'administration publique.
Donc, il arrive un président d'organisme ici, devant une
commission formée de députés. Ordinairement, pour qu'un
ministre aille siéger sur une commission, c'est sur une motion du
leader, parce qu'il devient celui qui répond de la loi ? quand
c'est un bill privé par exemple. On voit la ribambelle des ministres qui
vont... Si ça relève de la justice, c'est le ministre de la
Justice qui est nommé; si ça relève du monde municipal, si
c'est une charte de cités et villes, c'est le ministre... Mais ici,
devant l'imputabilité, on fait donc du ministre sectoriel, lui aussi, un
membre de la commission, et ce, d'office, alors que ce même ministre
pourrait avoir donné des directives... Il pourrait avoir donné
des directives dans ses plans d'action et dans ses plans d'effectifs. Et
là, vous le mettez sur la commission, d'office.
Moi, je trouve ça drôle.
M. Gautrin: M. le Président...
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Verdun.
M. Gautrin: ...voici la différence qu'il y a, et on est
actuellement dans un rapport différent de celui qu'il y a entre les
universités et la ministre de l'Enseignement supérieur: il n'y a
pas un rôle d'autorité directe entre la ministre de l'Enseignement
supérieur et les recteurs d'université ou l'ensemble des
universités. Pour ça, il n'y a pas lieu de dire que la
ministre... L'esprit de cet article-là, c'est que les universités
ne feront pas rapport au ministre qui transmet un rapport ou quoi que ce soit.
Il fait rapport directement à l'Assemblée. Dans ce
cadre-là, on a pensé qu'il était important, pour
écouter et recevoir ce rapport, que la ministre de l'Enseignement
supérieur soit aussi présente dans la commission.
Le Président (M. Lefebvre): L'article 5.2, adopté
sur division. Nous allons... Nous passons à l'amendement
suggéré à l'article 6. L'article 6 est supprimé.
Est-ce que cet amendement est adopté?
M. Léonard: Un instant. Moi, je voudrais, pour le
bénéfice de cette commission plénière, quand
même revenir à cet article 6 qui a donné lieu à une
saga en commission parlementaire. Alors, je lis le procès-verbal de la
commission: «M. Gautrin (Verdun) propose ce qui suit: L'article 6 est
modifié par le remplacement [...] ? je vous passe les
détails ? et un débat s'engage. À 15 h 45,
après une suspension de 15 minutes, la séance reprend. À
la demande de M. Gautrin (Verdun), il est convenu de retirer l'amendement.
Alors, M. Gautrin (Verdun) propose ce qui suit: L'article 6 du projet de loi
198 est modifié par ce qui suit [...]; l'article 5, par ce qui suit la
présente section [...]. Un débat s'engage. À 16 heures,
après une suspension de 6 minutes, la séance reprend. À la
demande de M. Gautrin (Verdun), il est convenu de retirer
l'amendement...»
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Léonard: Alors, il en propose un autre. Il en propose
un autre parce qu'il estimait que les objections que je faisais, elles
étaient fondées. Alors, après le débat sur sa
nouvelle proposition, «il est convenu de suspendre l'étude de
l'article 6 et de l'amendement proposé. Et, à 16 h 51,
après une suspension de 11 minutes, la séance reprend
[...]». Et, finalement, on s'attaque à l'article 7, en suspendant
l'article 6 pour jusqu'à la prochaine séance. Quelques jours
après, on reprend l'article 6 et, à 17 h 17, après un
débat, encore une fois, «après une suspension de 3 minutes,
la séance reprend à nouveau, et puis M. Gautrin (Verdun) propose
de retirer l'amendement».
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Léonard: Enfin, finalement, «l'article 6 est
remplacé par le suivant: "Tout organisme public doit communiquer
à tout autre organisme public qui lui en fait la demande le nom des
personnes mises en disponibilité et tous les autres renseignements
requis en regard de ces personnes pour les fins de l'application de la
présente section." Un débat s'engage et puis, à la demande
de M. Gautrin et avec la permission de la commission, M. Rioux apporte des
précisions». Alors, j'ai moi-même proposé un
sous-amendement parce qu'il y avait une faute à l'intérieur
même de l'amendement: le mot «tout» devait être au
pluriel, il était au singulier. Bref, il y a un débat qui
s'engage, nous n'avons pas réglé la question. «À 18
h 2, la commission ajourne ses travaux sine die.» Et, ce soir, M. le
Président, on propose de retirer l'article 6. Ha, ha, ha!
M. Gautrin: Reconnaissez à quel point le
député de Labelle est éloquent et a pu nous
convaincre.
M. Léonard: II est inutile, paraît-il. Ha, ha,
ha!
M. Chevrette: Et bravo pour le ministre d'un soir!
Le Président (M. Lefebvre): Des .commentaires, M. le
député de Verdun.
M. Gautrin: Aucun commentaire.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: J'espère...
Le Président (M. Lefebvre): L'amendement proposé
est-il adopté?
M. Chevrette: Sur division profonde.
Le Président (M. Lefebvre): Adopté...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Lefebvre): Adopté sur
division.
L'amendement à l'article 7 se lit comme suit: Remplacer l'article
7 par le suivant: «Le Conseil du trésor peut, à la demande
du ministre concerné, prendre une décision pour exempter, dans la
mesure qu'il détermine, de l'application de tout ou partie de la
présente section, un organisme public ou une catégorie
d'organismes publics, une catégorie de personnes à l'emploi d'un
organisme public. Le ministre qui a formulé la demande dépose
à l'Assemblée nationale toute décision prise par le
Conseil du trésor dans les 15 jours de son adoption ou, si
l'Assemblée ne siège pas, dans les 15 jours de la reprise de ses
travaux. Le Bureau de l'Assemblée nationale exerce, par
règlement,
le pouvoir du Conseil du trésor prévu au premier
alinéa à l'égard des personnes que l'Assemblée
nationale désigne pour exercer une fonction qui en relève.»
M. le député de Verdun, on vous écoute.
M. Gautrin: M. le Président, par rapport à ce qui a
été adopté en commission parlementaire, je ne referai pas
ici le débat de la commission parlementaire, on ajoute «à
la demande du ministre concerné» et on précise qui
dépose les décisions à l'Assemblée nationale.
C'est: «Le ministre qui a formulé la demande dépose
à l'Assemblée nationale...» Cet article était un
article pour permettre de la souplesse et faire en sorte qu'on ne soit pas
engoncés et qu'on soit en mesure de pouvoir exempter, en tout ou en
partie, certaines catégories ou certains organismes publics de
l'application de la loi, justement pour tenir compte des remarques de la
députée de Terre-bonne. Là, on ne fait simplement qu'en
préciser l'opéra-tionalisation, en précisant le rôle
du ministre concerné.
M. Chevrette: Juste une minute, là. On va le regarder,
parce que...
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Verdun. M. le député de Labelle.
M. Léonard: oui. m. le président, là, on
vient de se rendre compte que... d'abord, pour expliquer, encore une fois, la
saga de l'article 7, le premier article avait trois lignes. il a
été remplacé et adopté en commission par un autre
article, lequel, cet après-midi, a été remplacé par
un autre article 1...
M. Chevrette: Puis, ce soir, il y en a un autre.
M. Léonard: ...et, ce soir, dans un autre amendement, il y
a encore des modifications dans l'amendement par rapport à l'amendement
qu'on a reçu cet après-midi.
M. Chevrette: C'est vrai. Une voix: Ah oui?
M. Léonard: C'est ça, la réalité.
Dans ce projet de loi, on travaille comme ça depuis le début.
J'ai lu, tout à l'heure, la saga de l'article 6. On fait pareil pour
l'article 7. Bien oui!
M. Chevrette: C'est vrai ou c'est faux?
M. Gautrin: Bien, écoutez, sérieusement, l'article
7, en substance, à l'heure actuelle, est modifié
légèrement et, reconnaissez-le, pour strictement rajouter...
M. Chevrette: Un détail! «d'office»! oui!
M. Gautrin: Oui, oui.
M. Chevrette: Oui. Vous appelez ça un détail, sur
le plan législatif?
M. Gautrin: Initialement, si vous me permettez, initialement,
c'était inclus dans le rapport.
M. Chevrette: Non. M. Léonard: Non. M. Gautrin:
Bien oui... Des voix: Non.
M. Gautrin: ...puisqu'on ne précisait pas «peut,
dans la mesure qu'il détermine».
M. Léonard: Qu'il détermine.
M. Gautrin: Donc, c'est celui qui prenait. Donc, il le prenait
d'office. À l'heure actuelle...
Une voix: Oui, mais c'est le rapport qu'on étudie.
M. Gautrin: Bien oui. Maintenant, on précise:
«à la demande du ministre».
M. Léonard: Non, non, on dit les deux: «peut,
d'office» ou «à la demande du ministre
concerné».
M. Gautrin: Je m'excuse.
M. Chevrette: C'est quoi qui est arrivé entre midi et 5
heures pour qu'on enlève le mot «d'office»?
M. Léonard: Ah oui! on a enlevé le mot
«d'office».
M. Chevrette: Est-ce qu'on pourrait m'expliquer ça?
M. Gautrin: Ce qui est arrivé entre midi et 5 heures?
Beaucoup de choses.
M. Léonard: Pourquoi? Les coulisses sont muettes?
M. Chevrette: À part des grands sourires dans les
corridors, qu'est-ce qui justifie, entre midi et 5 heures, le
dépôt d'un amendement qui enlève le mot
«d'office»?
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Joliette.
M. Chevrette: Expliquez-moi donc vos raisons!
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Verdun.
M. Gautrin: Oui, je pense qu'initialement on
avait réajouté le mécanisme de «à la
demande du ministre concerné». Donc, en rajoutant «à
la demande du ministre concerné», on rajoutait les 2
possibilités et, donc, il y avait la possibilité
«d'office», c'est-à-dire de lui-même, ou
«à la demande du ministre concerné». Il semblerait
qu'il serait préférable, à la réflexion, qu'on
passe tous par le même canal, c'est-à-dire que le Conseil du
trésor n'ait pas à initier le processus, mais qu'il vienne,
à la demande du ministre responsable du secteur...
Une voix: ...
(2 heures)
M. Chevrette: On va lui demander. Si le ministre ne le demande
pas, est-ce que le Trésor peut agir?
M. Gautrin: À l'heure actuelle, tel que
rédigé, si le ministre ne le demande pas, le Trésor ne
peut pas prendre de décision.
M. Chevrette: Puis vous trouvez ça correct.
M. Gautrin: La réponse est oui.
M. Léonard: Ah, bien non!
Une voix: Ils ne sont pas ministres.
M. Gautrin: Si je trouve ça...
M. Chevrette: Mais il faut bien comprendre, là. Je vais
vous retendre une perche.
M. Gautrin: Attendez un instant, là. Est-ce que je trouve
correct? La réponse est oui.
M. Léonard: Bien, M. le Président, ça n'a
pas de sens. Le Conseil du trésor est une émanation du Conseil
des ministres. Ça veut dire que le Conseil des ministres se met à
la remorque d'un seul ministre.
M. Chevrette: D'un seul ministre. Ça n'a pas d'allure!
M. Léonard: C'est un non-sens absolu sur le plan
exécutif. Ça n'a pas de bon sens.
M. Chevrette: Est-ce qu'on a le droit... M. le Président,
je vais y aller sur une question plus...
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Joliette, vous avez le droit de poser des questions.
M. Chevrette: ...directe à vous, là. Est-ce qu'on a
le droit, comme membre de l'Assemblée nationale, de subordonner un
Conseil des ministres à un ministre?
Le Président (M. Lefebvre): Ça n'appartient pas
à la présidence de l'Assemblée de répondre à
cette question. Vous me demandez une opinion. Posez la question à M. le
député de Verdun.
M. Chevrette: Mais est-ce que ce projet de loi a fait l'objet
d'une discussion au Conseil des ministres, dans son libellé final, en
acceptant comme principe qu'un ministre... C'est important pour nous autres,
avant de voter, là. Est-ce que le parrain du projet de loi peut nous
dire que le Conseil des ministres actuel a accepté qu'un ministre puisse
placer l'ensemble du Conseil à sa remorque?
M. Gautrin: Ce projet de loi est un projet de loi qui
émane du caucus des députés, donc, n'a pas
été discuté par le Conseil des ministres.
M. Chevrette: Mais est-ce que le parrain du projet de loi peut
nous dire que le caucus était bel et bien au courant, lorsqu'il a
voté, qu'un seul ministre peut empêcher son gouvernement
d'agir?
M. Camden: M. le Président.
M. Chevrette: Est-ce que le conseil des députés
savait ça?
Le Président (M. Lefebvre): M. le
député...
M. Gautrin: Je pense, M. le Président, que les demandes
d'exclusion sont présentées par le ministre concerné.
M. Chevrette: Pardon?
M. Gautrin: Les demandes d'exclusion sont
présentées à la demande du ministre concerné, tel
que rédigé ici.
M. Chevrette: Ça n'a pas de bon sens.
M. Camden: M. le Président, si vous permettez.
Le Président (M. Lefebvre): Oui, M. le
député de Lotbinière.
M. Camden: Simplement rappeler aux gens, peut-être, le
libellé de l'article qu'on a devant nous. On dit: Le Conseil du
trésor peut. On ne dit pas: Le président du Conseil du
trésor. Et rappelons-nous qu'il y a 5 membres, il y a 5 ministres, au
Conseil du trésor, et qu'il ne s'agit pas du président du...
M. Chevrette: Non, non. Il ne peut pas, s'il n'y a pas de
demande.
M. Camden: C'est-à-dire qu'il ne s'agit pas... Non, non.
Il faut bien rappeler... Ce qu'on vient de
mentionner, de l'autre côté, M. le Président, c'est
qu'un seul ministre peut prendre le contrôle et prendre les
décisions au nom du Conseil des ministres, ce qui n'est pas le cas.
M. Léonard: Non.
M. Chevrette: Bien oui, mais le parrain de la loi m'a
répondu.
M. Camden: L'article est bien spécifique, M. le
Président. On dit: Le Conseil du trésor peut. Et le Conseil du
trésor est composé de 5 ministres du Conseil des ministres.
Alors, il y a une distinction qui est importante. Il ne s'agit pas, dans le
libellé qu'on a devant nous, du président du Conseil du
trésor. C'est toute une nuance.
M. Chevrette: Oui, mais le parrain du projet de loi m'a
carrément dit, à ma question très précise: La
réponse, c'est oui. Il n'a pas été équivoque.
Là, vous vous contredisez. C'est qui qui a raison? L'adjoint du parrain
ou le parrain?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Camden: M. le Président...
M. Chevrette: Ou bien le ministre d'un soir et son adjoint
parlementaire d'un soir.
M. Camden: M. le Président, on aura beau banaliser sur le
rôle des députés, il reste que fondamentalement, c'est un
projet de loi qui a connu des étapes et qui a fait l'objet d'un travail
incessant de la part des députés. Et je dois vous indiquer que ce
qu'on lit, ce que le député ? mon collègue de Verdun
? a mentionné... Il a dit oui au libellé qu'il y avait
là. Et le libellé dit: C'est le Conseil du trésor. Il n'y
a pas d'ambiguïté, ni dans mon esprit, ni dans celui du
député de Verdun. Il faut lire ce qui est écrit...
M. Chevrette: O.K.
M. Camden: ...et ne pas lire ce qui n'est pas écrit et ce
qu'on souhaiterait voir lire.
Le Président (M. Lefebvre): Mme la députée
de Terrebonne, vous voulez intervenir?
Mme Caron: Le député de Verdun a fait part que
l'article 7 venait répondre aux objections que j'avais
présentées tantôt concernant l'article 4. Alors, simplement
pour lui dire que ça ne répond aucunement à mes
objections, puisqu'un ministre pourrait avoir des objectifs de réforme
qui demanderaient une augmentation d'effectifs, pourrait demander au Conseil du
trésor d'être exempté, mais c'est le Conseil du
trésor qui, lui, prend la décision d'exempter et peut très
bien décider qu'il ne veut pas. Et c'est dans la mesure qu'il
détermine, en tout ou en partie. Donc, le ministre concerné,
malgré ses objectifs de réforme, peut se trouver devant une
décision du Conseil du trésor qui va aller à l'encontre de
ses objectifs. Et il ne faut pas oublier que ce projet de loi, dans l'article
4, dit bien qu'on se parle de 1994 à 1998; donc, pourrait se voir
empêcher de faire ces réformes pour une grande période.
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Verdun.
M. Gautrin: Mme la députée de Terrebonne, pour vous
répondre, 2 éléments. Premièrement, vous savez que
le Conseil du trésor, comme l'a rappelé le député
de Labelle, est une émanation du Conseil des ministres et que, dans les
cas des réformes dont vous parlez, ça ne serait pas une
réforme d'un ministre, mais, en général, c'est une
politique gouvernementale, donc, une décision de l'ensemble du
gouvernement. Donc, je verrais mal l'ensemble du gouvernement aller contre une
décision de l'ensemble du gouvernement.
Mme Caron: Ça s'est déjà vu, M. le
député.
Le Président (M. Lefebvre): D'autres interventions?
M. Chevrette: Oui, M. le Président, je vous annonce un
amendement pour au moins permettre...
Le Président (M. Lefebvre): Vous voulez amender
l'amendement? Un sous-amendement?
M. Chevrette: Un sous-amendement, excusez, oui.
Le Président (M. Lefebvre): Oui.
M. Chevrette: Pour permettre au moins au projet de loi de ne pas
avoir l'air dérisoire à sa face même, là. Quand un
ministre peut paralyser un gouvernement, là, je pense bien que...
Le Président (M. Lefebvre): Je vous indique, et je
m'adresse à M. le député de Verdun, qu'un sous-amendement
est recevable.
M. Chevrette: Oui. C'est le mot «d'office», M. le
Président. «Le Conseil du trésor, d'office...» Et je
vais vous remettre le sous-amendement pour au moins le rendre cohérent
par rapport à la gestion de l'État. Dans quelques secondes, vous
aurez le texte, parce que d'abord...
Le Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a...
M. Chevrette: ...il fallait clarifier si on pouvait ou pas
présenter...
Le Président (M. Lefebvre): Voulez-vous le lire, votre
sous-amendement, M. le député de Joliette?
M. Chevrette: Oui.
Le Président (M. Lefebvre): Alors, vous proposez
d'amender...
M. Chevrette: je propose, m. le président, que l'article
1... l'amendement, tel que proposé, est modifié par l'insertion,
dans la première ligne, après les mots «conseil du
trésor peut», des mots «d'office ou».
Le Président (M. Lefebvre): Je m'excuse, M. le
député de Joliette. Pour le procès-verbal, le
sous-amendement de M. le député de Joliette est
déposé.
M. Chevrette: Est-ce qu'il est recevable, M. le
Président?
M. Gautrin: Si vous me permettez, avant de commencer par votre
gauche, le député de Joliette, si le député de
Joliette fait un tel amendement, il doit, par concordance, j'imagine,
prévoir que si le Conseil du trésor prend une décision
d'office, c'est quelqu'un comme le président du Conseil du trésor
qui dépose la décision à l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Lefebvre): Le sous-amendement est
recevable. Merci.
M. Gautrin: Non, non, mais, est-ce que je...
Le Président (M. Lefebvre): Non, non, mais je veux, dans
un premier temps, au niveau strictement de la procédure...
M. Chevrette: Non, non, mais, écoutez...
Le Président (M. Lefebvre): ...indiquer que le
sous-amendement est recevable.
M. Chevrette: ...s'il faut y avoir de la concordance...
Le Président (M. Lefebvre): Maintenant, discutez, allez-y.
Allez-y.
M. Chevrette: S'il doit y avoir concordance, M. le
Président, on va la faire, la concordance. Mais ce qu'on veut, nous,
là, c'est que le projet de loi, là, à sa face même,
ait l'air au moins à ne pas subordonner un Conseil des ministres en
entier à un ministre. Donc, s'il faut faire les concordances, on va les
faire.
Nous, «d'office», au moins, on dit: Bon, bien, voici, il y a
un moyen d'action. Maintenant, l'autre... Là, je suppose que si le
Conseil du trésor agit d'office, il doit être déposé
par son président, effectivement, ou bien par un membre du Conseil du
trésor. Ce n'est pas restrictif, vous avez dit vous-même
tantôt qu'il y avait 5 membres, 5 ministres sur le Conseil du
trésor. Alors, on peut marquer dans la législation que ça
peut être le président du Conseil du trésor ou un des
membres du Conseil du trésor, ça ne me dérange pas. Ou
bien on peut remettre le libellé exactement comme il était.
Quand on nous l'a transmis, à 17 heures, là... Oui, il
faut aller plus rapidement, je comprends mais... Quand vous nous l'avez
transmis cet après-midi, la concordance y était. M. le
Président, est-ce que je peux suggérer au député de
Verdun que le sous-amendement soit exactement l'amendement qu'il m'a
envoyé cet après-midi, de sorte que toutes les concordances
étaient dedans puis il y avait le mot «d'office»? Et
ça pourrait être une façon de régler le litige.
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Lotbinière.
M. Camden: M. le Président, est-ce que vous allez nous en
faire distribuer une copie pour qu'on puisse en prendre connaissance?
M. Chevrette: Prenez exactement le texte que vous nous avez
envoyé après-midi, vous en avez une copie.
M. Camden: C'est le libellé. Vous comprendrez bien qu'on
voulait voir s'il avait été dactylographié, puisqu'on nous
a reproché au début qu'il y avait une note qui avait
été manuscrite.
M. Chevrette: Bien oui, mais on vient de découvrir que
vous subordonnez tout votre Conseil des ministres à un seul.
Imaginez-vous bien qu'on vous aide à ne pas avoir l'air trop fou.
M. Camden: Alors, M. le Président, évidemment.
..
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Lotbinière.
M. Camden: ...dans tous ces mots de remerciement au leader de
l'Opposition...
M. Chevrette: Merci. Bienvenue. (2 h 10)
M. Camden: Je voudrais simplement lui rappeler très
brièvement qu'il n'est pas possible que le gouvernement soit
subordonné à un seul ministre, puisque celui qui assume la
présidence du Conseil du trésor, et je rappelle que, dans le
libellé de l'amendement à l'article 7 que nous avons devant nous,
on parle du Conseil du trésor. On ne signifie pas qu'il s'agit du
président, de celui qui assume la présidence du Conseil du
trésor, mais bien de l'ensemble des membres du Conseil du trésor,
soit S membres, 5 ministres qui sont membres du Conseil du trésor. Et je
vous rappelle, M. le Président,
que ces 5 membres du Conseil du trésor et, lui-même, comme
organisme, le Conseil du trésor, n'est pas un ministère en soi,
mais est bien un organisme relevant du Conseil exécutif, soit du premier
ministre.
Il faut bien se rappeler ça. Techniquement, M. le
Président, ça a une importance toute particulière, parce
que ça nous permet de bien situer, et loin de notre esprit, comme
membres de la commission du budget et de l'administration, de voir le
président du Conseil du trésor avoir la responsabilité
totale et entière, mais bien l'ensemble des membres du Conseil du
trésor.
Le Président (M. Lefebvre): Vote sur le
sous-amendement.
L'article 7 proposé est modifié par l'insertion, dans la
première ligne, après les mots le «Conseil du trésor
peut» des mots «d'office ou». Est-ce que le sous-amendement
est adopté?
Des voix: Non.
M. Chevrette: Bon, bien, c'est rejeté sur division.
Le Président (M. Lefebvre): Alors, le sous-amendement
proposé...
M. Chevrette: Rejeté sur division.
Le Président (M. Lefebvre): ...est rejeté sur
division.
M. Chevrette: M. le Président, l'amendement est
rejeté sur division.
Le Président (M. Lefebvre): Est rejeté. Le
sous-amendement est rejeté.
M. Camden: Le sous-amendement est rejeté. Le
Président (M. Lefebvre): L'amendement... M. Chevrette: Vous
allez vivre avec ça.
Le Président (M. Lefebvre): ...proposé est-il
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Lefebvre): L'amendement proposé
à l'article 7 est adopté.
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Lefebvre): Adopté. Sur
division?
M. Chevrette: Tabarouette, de tabarouette, de tabarouette!
Le Président (M. Lefebvre): Adopté.
M. Chevrette: Sur division.
Le Président (M. Lefebvre): Sur division.
M. Chevrette: Ça, ça va faire une loi du
tonnerre!
Le Président (M. Lefebvre): Nous procédons
maintenant...
M. Chevrette: Les ministres vont frémir.
Le Président (M. Lefebvre): ...à l'amendement
proposé à l'article 10, qui se lit comme suit: Remplacer
l'article 10 par le suivant: «10. Un sous-ministre ou une personne
exerçant les pouvoirs que la Loi sur la fonction publique attribue
à un sous-ministre et à un dirigeant d'un organisme public
visé aux paragraphes 1 et 2 de l'article 4 de la Loi sur le
vérificateur général sont, conformément à la
loi, notamment en regard de l'autorité et des pouvoirs du ministre de
qui chacun d'eux relève, imputables devant l'Assemblée nationale
de leur gestion administrative. La commission parlementaire compétente
de l'Assemblée nationale entend au moins une fois par année le
ministre, si celui-ci le juge opportun et, selon le cas, le sous-ministre ou le
dirigeant d'organisme, afin de discuter de leur gestion administrative et, le
cas échéant, de toute autre matière de nature
administrative relevant de ce ministère ou organisme, et signalée
dans un rapport du Vérificateur général.»
M. le député de Verdun, on vous écoute.
M. Gautrin: M. le Président, par rapport à
l'article initial adopté en commission parlementaire, on vient essayer
de préciser, par ces amendements, les rôles et fonctions du
ministre dans ses liens avec ses sous-ministres ou les dirigeants de
l'organisme de qui ils relèvent. L'amendement principal se trouve dans
les mots «conformément à la loi, notamment en regard de
l'autorité et des pouvoirs du ministre de qui chacun d'eux
relève». Donc, on vient préciser que cette loi ne venait
pas reperturber ou modifier les liens d'autorité naturelle qui existent
entre le ministre et les sous-ministres.
Par concordance, lorsqu'on entend en commission parlementaire, pour
discuter de leur gestion administrative, le sous-ministre ou le dirigeant
d'organisme, le ministre, s'il le juge opportun, peut se joindre à eux
pour pouvoir témoigner en commission parlementaire.
M. Chevrette: M. le Président.
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Joliette.
M. Chevrette: Moi, je pense, en tout cas, que je peux vous
annoncer tout de suite qu'on est contre, et le
ministre devrait être là. Il y en a déjà qui
sont là dans notre régime actuel, puis, quand les messieurs qui
enregistrent là sont obligés de prendre le nom du sous-ministre,
parce que c'est le sous-ministre qui répond tout le temps, ça,
c'est de donner carrément, c'est de sauver le visage de quelqu'un qui
n'a pas la compétence pour être à sa place, et moi,
personnellement, je ne marche pas dans ça. Le ministre peut être
là avec son équipe, je suis d'accord avec ça, mais s'il le
veut bien. Ce n'est pas ça qui était l'objectif de vos beaux
discours, c'était l'impu-tabilité: II faut que le pouvoir
exécutif vienne s'asseoir devant nous autres et qu'il réponde.
Rappelez-vous de vos beaux discours. Là, c'est rendu que c'est: S'il
veut bien venir, selon le cas.
M. Léonard: S'il le juge opportun.
M. Chevrette: Ça, ça va démasquer ceux qui
sont faits forts, hein? Vous allez conserver toutes vos colonnes Fix-O-Flex,
ceux qui plient à tout. Vous savez qu'est-ce que ça veut dire, un
bracelet Fix-O-Flex? Si vous ne savez pas ce que je veux dire, moi, je peux
vous l'expliquer.
L'objectif de toute la loi, c'était de rendre imputables les
individus, ce n'était pas d'arriver avec un sous-ministre pour venir
répondre. Pensez-vous que les ministres ont une colonne
vertébrale? Ils ne viendront pas répondre de leur
ministère? Mais ceux qui ne sont même pas capables de
répondre à un projet de loi, qu'est-ce qu'ils font? Ils
amènent quelqu'un qui parle à leur place. Dans le Journal des
débats, par exemple, c'est marqué que c'est le ministre qui
parle. Franchement!
C'est ça, le renouveau dans la gestion de l'État que vous
nous proposez? Vous avez pris combien d'heures pour étudier ça,
cette affaire-là, cet amendement-là? Voyons, selon le cas et s'il
le veut bien! Ce serait d'abord le ministre et, s'il veut être
accompagné, bien sûr. Puis, s'il a posé des gestes dans ses
fonctions d'administrateur, ça, le ministre peut dire: Ça a
été pris au niveau de mon sous-ministre, et il va vous
répondre sur cette question précise. C'est de même qu'on
gère. On n'est pas là pour...
Il y a les présidents de société d'État que
je fais la différence, parce que le ministre, c'est un ministre de
tutelle puis il n'est pas là nécessairement; ça, je
comprends ça. Par exemple, le président de la SAQ, de la
Société des alcools, ou de la Société de
l'assurance automobile du Québec, ou de la SEPAQ, ce sont des
sociétés qui ont des budgets, qui gèrent et qui doivent
répondre de leur... Et quand ils viennent d'ailleurs, ils sont
questionnés, et le ministre les laisse répondre; c'est normal,
ils viennent répondre de leur gestion.
Mais, des sous-ministres... Il n'y en a pas gros, de sous-ministres, qui
agissent de leur chef, sans en parler à leur ministre, parce qu'il n'est
pas longtemps sous-ministre; il passe plutôt dans les paliers
inférieurs. Ils connaissent des mutations tragiques et tangibles et
concrètes et immédiates. Franchement, il faut savoir ce que
c'est. Je ne sais pas ce que...
En tout cas, moi, je trouve que ça a l'air un petit peu nuage,
vent. Vous savez, on veut déplacer beaucoup d'air avec ça,
là. On dit: Si le ministre veut bien venir. Imaginez-vous! Ça
fait une grosse contrainte, ça? Si vous en avez un qui n'est pas capable
d'aligner 3 mots et 3 phrases une en arrière de l'autre, qui va
répondre? Le sous-ministre, s'il vous plaît. Et ces messieurs qui
enregistrent vont dire: Le sous-ministre pour... Non, c'est marqué que
ce sera M. le ministre ou Mme la ministre X qui répond. Franchement.
Franchement! On est contre.
M. Gautrin: M. le Président...
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Verdun.
M. Gautrin: ...le député de Joliette devrait
revenir à la position initiale dans le projet de loi. On parlait, dans
ce projet de loi, de l'imputabilité des sous-ministres ou des
administrateurs d'État. Donc, on ne parlait pas de l'imputabilité
des ministres.
Ce que vient faire l'amendement, ici, c'est de dire que, compte tenu du
lien d'autorité naturelle qui existe entre le sous-ministre et le
ministre, lorsque le sous-ministre sera appelé à venir rendre
compte de sa gestion devant la commission parlementaire, le ministre, s'il le
désire, pourra accompagner son sous-ministre. Le point qui est
important, c'est de bien comprendre que, par ce projet de loi, on est en train
de changer quelque chose et de rendre imputable les administrateurs
d'État, c'est-à-dire les dirigeants d'organismes et les
sous-ministres devant les élus. L'amendement vient dire que si le
ministre veut accompagner ou être présent lorsque son
sous-ministre est présent, il peut venir. Le principe est un principe de
l'imputabilité des gestionnaires d'État et des
sous-ministres.
M. Chevrette: Sur division.
Le Président (M. Bissonnet): L'amendement à
l'article 10 est adopté sur division.
Le titre de la section IV. Amendement proposé dans le titre de la
section IV.
M. Gautrin: Attendez, il y a les articles 10... Les articles 10.1
et 10.2 sont supprimés par concordance.
Le Président (M. Bissonnet): Non, mais, là,
écoutez.
M. Chevrette: Sur division, les articles 10.1, 10.2, 10.3,
10.4.
Le Président (M. Bissonnet): Un instant, là. Je
n'ai pas la même feuille que vous autres, là. Est-ce que c'est le
titre de la section IV, l'amendement suivant?
M. Gautrin: M. le Président, après les articles
10.1 et 10.2, par concordance, parce qu'ils ont été repris dans
les autres articles...
Le Président (M. Bissonnet): Non, ça va, c'est
parce qu'il y avait une feuille, là... Ça va.
M. Gautrin: ...sont supprimés.
Le Président (M. Bissonnet): Alors, il est proposé
que les articles 10.1 et 10.2 soient supprimés.
Une voix: Adopté.
M. Chevrette: Sur division.
Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur
division.
M. Gautrin: Sur division.
Le Président (M. Bissonnet): L'article... Attendez un
instant.
M. Gautrin: Que l'article 11 soit supprimé...
Le Président (M. Bissonnet): Un instant, un instant!
M. Gautrin: Excusez-moi. (2 h 20)
Le Président (M. Bissonnet): C'est moi qui...
Écoutez, il faut signer parce que, si ce n'est pas signé,
là... Il n'a pas été adopté encore, lui.
L'article 11, l'article 11 est supprimé.
M. Chevrette: Sur division.
Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur
division.
Bon. Le titre du projet de loi... Il est proposé de modifier le
titre du projet de loi... l'amendement... l'amendement, qui est ceci...
M. Gautrin: M. le Président, l'amendement qui vient avant
est: Changement du titre de la section 4, où on remplace le titre
«administrateurs d'État et dirigeants de l'organisme» par
«sous-ministres et dirigeants de l'organisme», pour être
cohérent avec ce qu'on vient de dire.
Le Président (M. Bissonnet): Alors, pour être
conforme, il est proposé d'amender, à l'étude de la
section 4... de remplacer les mots «administrateurs d'État et des
dirigeants d'un organisme public» par les mots «sous-ministres et
des dirigeants de l'organisme public».
Adopté sur division.
M. Chevrette: Sur division.
Le Président (M. Bissonnet): Alors, le titre du projet de
loi. Il est proposé d'amender dans le titre du projet de loi... de
remplacer «administrateurs d'État»... c'est la même
chose.
M. Chevrette: En sous-amendement, je proposerais loi Gautrin,
ministre d'un soir.
Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Mais
c'est la même chose, là.
M. Gautrin: Non, M. le Président, il s'agit d'un
amendement au titre, alors que, tout à l'heure, c'était un
amendement au titre de la section 4.
Le Président (M. Bissonnet): Alors... ça va. Alors,
dans le titre du projet de loi, remplacer les mots «administrateurs
d'État et des dirigeants d'un organisme public» par les mots
«sous-ministres et des dirigeants de l'organisme public».
M. Chevrette: M. le Président, il y en a un qui m'a
souligné une farce, puis je ne peux pas empêcher de faire rire mes
collègues à cette heure-ci: On aura eu les culottes à
Vautrin, puis la loi à Gautrin.
Une voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bissonnet): Alors, adopté sur
division, si je comprends bien.
M. Gautrin: Merci.
Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur
division.
M. Chevrette: Sur division.
M. Gautrin: Est-ce qu'on peut faire une motion de
renumérotation, M. le Président?
M. Chevrette: Ah, c'est très important, ça,
à cette heure-là? Adopté.
Une voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bissonnet): Alors, une motion de
numérotation des articles, est-ce que c'est adopté?
M. Chevrette: Bien sûr, celle-là, la
renumérotation, je vous la donne. Mais, la loi au complet: contre. Elle
va être sanctionnée quand?
Le Président (M. Bissonnet): Alors, tous les amendements
ont été adoptés sur division, sauf l'amendement de
numérotation.
Donc, la commission de l'étude plénière a
complété son mandat, et je suspends quelques instants pour
permettre à ceux qui accompagnent les députés de bien
vouloir se retirer. Pardon?
(Suspension de la séance à 2 h 22)
(Reprise à 2 h 26)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le président
de la commission plénière.
Prise en considération du rapport de la
commission plénière et des amendements
déposés
M. Camden (président de la commission plénière):
M. le Président, j'ai l'honneur de vous aviser que la commission
plénière a étudié les amendements proposés
par le député de Verdun, en vertu de l'article 257, au projet de
loi 198 et qu'elle les a adoptés sur division.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que le rapport de
la commission plénière est adopté?
Une voix: Sur division.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur
division.
Reprise du débat sur l'adoption
Nous poursuivons le débat sur la motion du député
de Verdun proposant l'adoption du projet de loi 198, Loi sur la
réduction du personnel dans les organismes publics et
Fimputabilité des administrateurs d'État et des dirigeants d'un
organisme public.
Je cède la parole à M. le député de
Labelle.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: Merci, M. le Président.
Le projet de loi 198 a été déposé à
l'automne 1991, donc, ça fera maintenant presque 2 ans qu'il
traîne sur nos tablettes et sur nos tables. C'est un projet de loi qui a
été qualifié de tous les noms et, je pense, avec raison.
C'est l'oeuvre d'un député désoeuvré qui voulait se
faire remarquer, qui visait des postes et qui a été, ce soir,
ministre d'un soir.
M. le Président, je voudrais simplement parler de 3 thèmes
qui touchent ce projet de loi, d'abord sur cette question de centralisation.
Tout le mécanisme qui était apporté dans ce projet de loi
vise ou aura pour effet de centraliser l'administration publique, quoi qu'on en
dise. Les organismes, les réseaux que nous avons, de la santé, de
l'éducation, des universités, de l'enseignement supérieur,
sont des organismes qui jouissent d'une assez large autonomie administrative,
d'une autonomie décisionnelle, qui ont des conseils d'administration,
qui ont des responsabilités dévolues de par les lois, et ce que
ce projet de loi vient faire, c'est d'intervenir dans la gestion des ressources
humaines. Alors, M. le Président, quand on parle de santé, quand
on parle de l'éducation, les ressources humaines sont les ressources
majeures. Et si l'on permet au Conseil du trésor d'intervenir dans la
gestion des ressources humaines, effectivement, inévitablement, on
opère une centralisation considérable.
M. le Président, si jamais ce projet de loi arrivait à
s'appliquer, ce serait une catastrophe sur le plan de la responsabilisation de
toute une série de personnes en charge des unités de ces
réseaux, c'est évident. Je pense que le projet de loi a
été amené par des parlementaires qui ignoraient,
finalement, le rôle qu'ils jouent ici, qui veulent s'arroger, en quelque
sorte, un rôle d'exécutif, et qui pensent qu'en amenant un tel
projet de loi devant l'Assemblée nationale... pas un tel projet de loi,
mais de tels plans de réduction des effectifs devant l'Assemblée
nationale, on va faire un contrôle efficace, alors que, dans le fond, il
n'y a personne qui peut amener ici, devant nous, la gestion des ressources
humaines qui, elle, doit se faire dans le champ, dans chacune des
unités. l'objectif du projet de loi, c'est de couper le personnel
d'encadrement, de réduire le personnel d'encadrement de 20 %, et de
réduire le personnel syndiqué ou autre, mais non-cadre, de 12 %.
l'objectif a été établi pour la fonction publique
directement: moins 20 %, moins 12 %.
Mais, par ailleurs, on sait ? et il a été dit en
commission parlementaire ? que le véritable objectif qu'on
poursuivait pour les réseaux de la santé et de
l'éducation, c'était aussi une réduction de 20 % du
personnel d'encadrement et de 12 % pour les autres personnels. (2 h 30)
objectif standard accordé, attribué, obligé pour tous et
qui fait qu'on ne tient pas compte des situations particulières, qu'on
ne tient pas compte d'organismes qui devraient connaître une expansion
pour différentes raisons qu'on ignore, qu'on pourrait imaginer, sur
lesquelles on pourrait faire des hypothèses, en même temps qu'on
pourrait faire l'hypothèse que des organismes, dont on veut couper le
personnel de 20 % et de 12 %, devraient tout simplement disparaître.
alors, au lieu de prendre, de faire, de porter un jugement d'évaluation
sur chacun des organismes, sur chacun des réseaux, on prend une
décision générale: moins 20 %, moins 12 %. ça,
c'est une gestion de paresseux.
Comme dans le dernier dépôt des crédits du
gouvernement, le président du Conseil du trésor a fait une
gestion de paresseux en gelant les salaires pour tout le monde, au lieu de se
poser des questions sur la réorganisation de l'appareil de
l'État, ce qu'il n'a pas fait ? ce qu'on ne fait pas, encore ici
? parce que la seule chose qu'on est capable de faire, c'est d'imposer une
coupure uniforme, universelle, bête et méchante.
M. le Président, on apporte aussi... On a tenté et
on veut amener ce qu'on appelle le principe de l'imputa-bilité.
Nous avons eu l'occasion d'en débattre à différentes
reprises lors de la commission parlementaire sur l'administration... la
fonction publique, pardon, en 1990-1991, et nous avons eu l'occasion de nous
exprimer là-dessus. Le principe de l'imputabilité, il est
d'abord, il réside d'abord chez les ministres. C'est le sens, c'est le
fondement du parlementarisme britannique. C'est le fondement du parlementarisme
britannique.
C'est le ministre, partie de l'Exécutif, qui répond devant
les parlementaires, devant l'Assemblée nationale. Et l'on fait une
distinction très nette entre un élu qui porte une
responsabilité, qui est membre de l'Exécutif, et des
fonctionnaires, qui exécutent des ordres et des directives
données par leur supérieur, qui est le ministre. Mais
l'imputabilité réside là, et, si un fonctionnaire doit
venir, c'est avec la permission du ministre.
Mais je comprends que ce gouvernement aimerait bien venir faire parader
les fonctionnaires ? et les hauts fonctionnaires en particulier ?
parce qu'ils sont incapables eux-mêmes de défendre leurs dossiers.
Ils sont incapables de donner les bonnes réponses aux parlementaires qui
leur posent des questions. Alors, ils amènent des sous-ministres. J'ai
vu, depuis mon retour à l'Assemblée, cette parade des hauts
fonctionnaires. Avant, c'était le ministre qui répondait des
projets de loi, qui répondait des crédits, et le ministre devait
les étudier, ses crédits.
Or, on sait très bien qu'aujourd'hui quand on pose des questions,
par exemple, au ministre des Finances, si c'est lui qui doit répondre,
il se réfugie dans les généralités. Mais, si on
veut avoir des réponses précises, correctes, effectivement, il
faut s'adresser à son sous-ministre. Quelle est la conclusion? La
conclusion obligatoire, c'est que le ministre ne connaît pas ses
dossiers. 11 est en vacances, en commission parlementaire. Son seul objectif,
c'est d'éviter les attaques, c'est simplement, comme on dit, de passer
le pas. C'est son seul objectif.
Et c'est ça que cela produit lorsque des parlementaires acceptent
que des subordonnés viennent répondre à la place de ceux
qui prennent les décisions qui impriment les orientations à
l'action du gouvernement. M. le Président, je sais qu'il est de bon ton
de prétendre à l'imputabilité des hauts fonctionnaires,
oui, mais, encore une fois, lorsqu'ils viennent, c'est sous l'autorité
directe du ministre. Moi, il me semble qu'on ne doit pas accepter qu'un
ministre passe la responsabilité à son sous-ministre. Non, ce
n'est pas du tout le sens de nos institutions.
M. le Président, juste en terminant, ce projet de loi a
donné lieu à une saga en commission parlementaire. Nous avons
réécrit complètement le projet de loi en commission
parlementaire. Ce soir, nous avons encore réécrit le projet de
loi. Ça n'a pas de sens. C'est un projet de loi, d'ailleurs, où
l'on voit très bien que l'Exécutif, les ministres, se sont
réfugiés derrière des députés pour
débattre de sujets qu'eux-mêmes ne veulent pas aborder en public.
Il n'y en avait pas, pratiquement, ce soir, des ministres, sauf quelques-uns.
Le président du
Conseil du trésor, le premier impliqué dans toute cette
question, ne s'est jamais présenté en commission parlementaire,
pas plus qu'il n'était ici ce soir. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, nous en sommes
à l'étape de l'adoption du projet de loi 198, et je cède
la parole à Mme la présidente de la commission des affaires
sociales et députée de Taillon.
Mme la députée, la parole est à vous.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président.
Évidemment, je vais le faire, comme à chaque fois, parce
que je trouve toujours inadmissible que l'on procède ainsi. Il est 2 h
37 exactement, mais du matin, non pas de l'après-midi. Alors, je ne sais
pas si c'était pour camoufler le travail que nous faisons ici que l'on
procède ainsi à cette heure du matin, mais je pense que, dans ce
cas-ci, on n'a peut-être pas tort, parce que je crois qu'on n'assume pas
correctement notre responsabilité de parlementaires en travaillant comme
on l'a fait à l'égard du projet de loi 198, M. le
Président. Mon collègue a terminé son intervention avec
cela, je vais commencer avec cela.
Pour avoir été présente dès le moment du
dépôt du projet de loi et pour avoir participé à la
commission parlementaire, me retrouver ce soir à l'Assemblée
nationale où nous avons étudié en plénière
un projet d'amendement qu'on nous a présenté cet
après-midi, mais qui a été modifié entre le moment
où on nous l'a fait parvenir et le moment où on a
étudié les amendements ici, à l'Assemblée
nationale, M. le Président, c'est carrément inadmissible dans
notre processus législatif, et je pense que n'importe quel membre de
l'Assemblée nationale le sait très bien. En fait, si nous avions
voulu être tatillons... Mais nous sommes tellement en profond
désaccord avec le projet qui est devant nous que c'était un peu
faire perdre le temps des membres de cette Assemblée que de nous
arrêter, dans le détail, à la moindre chose qui avait
été changée. Mais, normalement, et vous le savez
très bien, vous qui êtes gardien de nos règles, une fois
qu'on a étudié un projet de loi en commission parlementaire,
qu'on a retenu des amendements, même si l'Opposition était en
désaccord avec ces amendements-là, il est absolument inadmissible
qu'on revienne devant l'Assemblée avec des modifications, sur
l'initiative du groupe parlementaire majoritaire. C'est inadmissible, M. le
Président. Or, cela s'est très bien passé. La preuve en
est qu'on a proposé un sous-amendement pour corriger certains articles
du projet de loi qui avaient justement été modifiés entre
le moment où on nous en a fait état ici et le moment où on
les a étudiés, M. le Président. Je crois que jamais on ne
devrait accepter qu'un tel processus se reproduise. (2 h 40)
Deuxièmement, venons-en au fond de la loi, M. le
Président. Quand on nous a déposé le projet de loi, il
était intitulé, et j'y reviens, Loi sur la limitation de
l'embauche dans les organismes publics et l'imputabilité des
administrateurs d'État et des dirigeants d'un organisme public.
Savez-vous quelle loi nous adoptons actuellement, quelle loi nous risquons
d'adopter ? sûrement pas nous, en tout cas? Mais le libellé
du titre est complètement changé. On ne veut plus limiter
l'embauche, on dit: Loi sur la réduction du personnel dans les
organismes publics, et on revient avec la notion d'impu-tabilité. Mais
il faut voir comment on a charcuté l'article qui concerne
l'imputabilité pour qu'il n'ait plus aucun sens, M. le Président.
D'une loi avec laquelle nous n'étions pas d'accord, mais qui, au moins,
disait: II est prévu que, dans la fonction publique, nous puissions,
évidemment, selon les nouveaux programmes, les mesures à mettre
en place, selon les départs, procéder à l'embauche de
personnel nouveau. Une façon d'éviter d'intervenir à
l'intérieur de la fonction publique, c'est de dire: Nous allons
éviter de procéder à l'embauche pour une proportion
significative de postes, de telle sorte que l'effet à moyen et à
long terme sera effectivement qu'il y ait une diminution ? parce que
c'était ça, l'objectif, même si on le camouflait bien,
déjà à l'époque ? une diminution réelle
du rythme d'augmentation du personnel dans la fonction publique.
Cependant, évidemment, et peut-être est-ce plus
honnête dans un sens, on a jugé que ce n'était pas
satisfaisant, que ça ne rencontrait pas les objectifs qu'on
s'était fixés, et là on a avoué le véritable
objectif. Le véritable objectif, c'est de réduire le nombre de
personnes dans la fonction publique, tant chez les fonctionnaires que chez les
professionnels embauchés dans les organismes parapublics, de la
santé, des services sociaux, etc., que chez les administrateurs et que
dans l'encadrement. Quand on veut faire ça, M. le Président, il
faut savoir exactement, lorsqu'on se fixe des objectifs... Parce que la loi,
elle est très précise, elle fixe des objectifs de 20 %, de 15 %,
etc. J'imagine qu'on doit évaluer minimalement, sinon on est des
irresponsables, M. le Président, quel va être l'impact de la loi
que nous adoptons et de chacun des articles que nous adoptons.
Lorsque nous avons voulu, en personnes responsables, comme membres de
l'Opposition, souhaiter la présence du président du Conseil du
trésor, membre de l'Exécutif, pour qu'au moins il nous apporte
les chiffres, les données, qu'il nous signifie exactement ce que
ça aura comme impact dans les processus de prise de décision, les
membres de la majorité parlementaire ont refusé,
littéralement refusé. On a eu un vote auquel je faisais
référence, d'ailleurs, ce soir, M. le Président. On a eu
un vote pour s'opposer à la venue du président du Conseil du
trésor. Cependant, ce soir, on a eu l'air ridicule, ridicule, parce
qu'on n'a pas su répondre aux questions simples que posait l'Opposition.
On ne demandait pas combien de postes vont disparaître dans les centres
hospitaliers, dans les centres locaux de services communautaires, dans les
commissions scolaires. On disait: Globalement, sur la masse des personnes
concer- nées, combien de postes vont disparaître. Cela a pris 10
minutes avant d'obtenir une réponse, et à partir d'un calcul sur
le bord du pupitre, M. le Président. Est-ce que c'est comme ça
qu'en personnes responsables on va légiférer dans cette
Assemblée? Quant à moi, M. le Président, je m'y refuse
complètement. troisièmement, si on pense que c'est de
l'imputabilité, de la responsabilisation de gestionnaires que de leur
dire, dans le même souffle, dans un projet de loi: voilà la
commande, vous réduisez votre taux d'encadrement de 20 % puis vous
réduisez votre personnel de 15 %; mais nous considérons que vous
êtes des gens très responsables et nous considérons que
nous ne sommes pas centralisateurs pour un sou, et on vous laisse le pouvoir de
faire ce que vous voulez faire, oui, à condition que vous respectiez les
ordres qu'on vous donne... bien, moi, je n'ai jamais compris que c'était
de la responsabilisation, m. le président. alors, qu'on cesse de se
gargariser en disant qu'on veut rendre imputables les gestionnaires, les
administrateurs de l'état si, dans une loi qu'on adopte ici, les
premiers articles qu'on retient, c'est ceux qui ordonnent aux administrateurs
de se conformer aux voeux des élus de l'assemblée nationale
à partir d'un chiffre arbitraire. parce que personne ne nous a
démontré ici, ce soir, ni pendant tout le temps de nos travaux,
m. le président, le rationnel sur lequel s'appuyaient les 25 %, 20 %.
est-ce que notre taux d'encadrement est à ce point élevé,
est à ce point important que c'est 20 % qu'on doit remettre en question?
bien, moi, ça m'inquiète, hein. si c'est 20 % qu'il faut sabrer
dans le taux d'encadrement, on doit avoir de drôles de mauvaises
performances en termes de gestion des ressources humaines, m. le
président.
Alors, dans ce sens-là, je vous avouerai que ni sur le processus,
ni sur le fond, ni sur les résultats attendus... d'abord, je pense que
nous ne les obtiendrons pas, mais, d'autre part, sur le processus et sur le
fond, je suis essentiellement en désaccord avec le projet de loi qui
nous a été présenté et sur lequel nous avons eu
à débattre, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée.
Nous en sommes à l'étape de l'adoption du projet de loi
198, et je cède la parole à M. le député de...
Une voix: Lotbinière.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...Lotbinière, et
je lui indique que son droit de parole est d'un temps maximum de 10
minutes.
M. Lewis Camden
M. Camden: Je vous remercie, M. le Président.
Brièvement, vous rappeler l'origine de ce projet de loi. Suite,
évidemment, à des rencontres de députés
libéraux, soit de députés ministériels, qui,
sensibles et préoccupés par la situation financière qui
perdurait et qui existait au début de notre deuxième mandat, nous
avons décidé de nous réunir périodiquement pour
faire le point sur la situation et identifier des pistes de solutions qui nous
permettraient de faire des économies et, par le fait même, de
rencontrer les obligations et les objectifs pour lesquels la population nous
avait mandatés.
M. le Président, une longue liste, évidemment, de choses a
été établie, couchée sur papier et transmise,
évidemment, au premier ministre et aux membres du gouvernement. Dans cet
esprit, un des objectifs était celui de la réduction du personnel
pour faire en sorte, évidemment, qu'on puisse procéder à
certaines économies, et, à cet égard, on s'est
inspiré, à bien des égards, de ce qui se passe
déjà dans bon nombre d'entreprises. Je n'en citerai qu'une seule,
la Banque Nationale, qui a enlevé, soustrait un certain nombre de
paliers ? 9 ? entre la caissière et le caissier au comptoir,
d'une part, et le président. Ils en ont soustrait 3, M. le
Président, ce qui la ramène donc à 6 niveaux. cet objectif
est partagé par bon nombre d'entreprises, et nous avons cru bon d'y
souscrire, après avoir pesé le pour et le contre de l'ensemble de
cette approche. nous en sommes donc venus à la conclusion qu'il
était important de procéder à une réduction
importante du nombre d'employés de l'état. un des objectifs:
moins 20 % d'encadrement, moins 12 % de fonctionnaires, après avoir
entendu et consulté à huis clos bon nombre d'invididus qui
oeuvrent au sein du gouvernement du québec, tant auprès de
ministères que d'organismes publics. c'est la grande conclusion à
laquelle nous sommes arrivés et à laquelle nous avons
travaillé à convaincre les gens tout au long du processus. une
rationalisation, m. le président, qui part, non pas par la mise à
pied de gens qui ont un statut de permanence, mais bien par la voie de
fattrition. et, à cet égard, l'attrition... 3,2 % à 3,9 %
de gens quittent, bon an, mal an, la fonction publique, soit suite à un
décès, soit suite à une préretraite, une retraite,
un accident, une maladie et, si on ne renouvelle qu'une partie de ce 3,2 %
à 3,9 % de gens, nous assurons le renouvellement à
l'intérieur de l'appareil. mais nous atteignons également
l'objectif de réduire l'appareil administratif.
Jointe à cet objectif que nous nous étions donné,
il y avait également Fimputabilité. Sensibles et
préoccupés par le fait que seuls les ministres devaient
répondre de l'action de l'ensemble des gens dans le ministère qui
prenaient des décisions, des actions sur lesquelles le ministre n'avait
manifestement pas de contrôle quotidien à exercer. Il est
impensable, M. le Président ? 68 000 personnes dans le
système ? de croire que 30 ministres vont exercer un contrôle
absolu sur tous ces gens. Il devenait important pour nous de concevoir, de
coucher sur papier, de donner suite et de faire en sorte, également, que
ces gens qui ont la responsabilité de la gestion administrative soient
également responsables, soient imputables et viennent répondre de
leurs gestes, de leur gestion devant les membres du Parlement, ceux qui ont
été élus par l'ensemble de la population. Donc, c'est le
rôle du député, le rôle de contrôle des
élus sur l'appareil. C'est là un des mandats que la population
nous donne, soit directement, d'une façon implicite, ou
explicitement.
Donc, Fimputabilité à laquelle on réfère
souvent, on réfère au fond, au fondement, on nous a dit, du
parlementarisme britannique. C'est tout à fait vrai et fondé, M.
le Président. Mais le parlementarisme britannique, c'est 700 ans
d'évolution. Ce qu'on vient de faire, ce qu'on a fait au cours des
derniers mois et ce qu'on a fait ce soir, c'est qu'on est venu ajouter à
ces 700 ans d'évolution du parlementarisme, dans une voie qui fera en
sorte que le parlementarisme se renouvelle d'une façon constante. Et
cette imputabilité qui était propre, strictement, au ministre,
devient une imputabilité partagée, où celle du ministre
demeure toujours présente, mais dans laquelle celle du fonctionnaire,
face aux élus, prendra de plus en plus d'importance à
l'égard de l'avenir. (2 h 50)
M. le Président, on aura beau nous avoir reproché d'avoir
déposé des amendements et que l'on ait apporté des
corrections à ces amendements tout au cours de la journée et
même au cours des derniers mois, ça caractérise les travaux
de notre commission, soit ceux d'une manifestation d'ouverture. Nous
étions disposés à considérer chacun des
éléments qui pouvaient être apportés par les membres
tant ministériels que de l'Opposition, c'est ce que nous avons fait, et
c'est de cette façon que les travaux dans nos commissions parlementaires
devraient fonctionner.
M. le Président, je dois vous dire que j'ai été un
peu surpris de l'attitude de l'Opposition. Je pense qu'ils n'ont pas
livré une grande bataille. Je pense que certains souscrivent à
certains volets, d'autres ont des réserves, mais je dois vous dire que
ce que je constate, pour les connaître et les côtoyer, c'est qu'il
y a un doute qui subsiste dans leur esprit, un doute. Et, un de ceux-là,
évidemment, c'est que les députés libéraux, ils
sont bien étonnés qu'on ait fait cheminer ce projet et qu'on
l'ait fait accepter également par le gouvernement, et que le premier
ministre y ait également souscrit.
M. le Président, je dois vous dire, c'est là la
manifestation concrète d'un cheminement non seulement dans la
pensée des députés ministériels, mais
également de l'aile ministérielle, des ministres qui composent le
gouvernement, et ça s'inscrit dans la foulée de ce que souhaite
la population au Québec de plus en plus, c'est que les élus
assument et jouent le rôle véritable de contrôleurs sur
l'appareil administratif et puissent être là pour
représenter l'ensemble de la population de laquelle ils ont obtenu un
mandat.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Lotbinière.
Nous sommes toujours à l'étude du projet de loi 198, et je
cède la parole à M. le député de Joliette qui agit
comme porte-parole de l'Opposition officielle dans ce dossier.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, étant donné
que j'ai 1 heure, je voudrais donc commencer par situer un peu d'où
ça vient, ça, ce comité dit Gautrin qui a
préparé ce projet de loi là; comme, par exemple, le
député de Saint-Louis qui a présenté un projet de
loi pour se rendre compte qu'il n'avait pas le droit de le déposer;
comme le député de Beauce-Sud a déposé un projet de
loi sur la construction; comme le député Poulin, le rapport
Poulin, qui a déposé un projet de loi toujours avec comme
sous-entendu ou comme objectif l'économie des deniers publics.
M. le Président, il faut reconnaître beaucoup ?
comment dirais-je ? de doigté au premier ministre: il amuse ses
gars et ses filles de son côté. Il les amuse. Faites-vous aller,
«effervescez-vous» dans des comités de travail,
siégez de nombreuses heures, amusez-vous les petits gars et les petites
filles parce que, dans quelques semaines, dans quelques mois ce seront les
élections, puis vous aurez eu l'impression que vous avez fait
beaucoup.
Ça fait 8 ans et demi qu'ils sont au pouvoir, M. le
Président, 8 ans et demi! Ils commencent à se rendre compte qu'il
fallait qu'ils coupent à quelque part. Ils commencent à se rendre
compte que ça prenait quelques piastres dans les coffres du
gouvernement. Ils commencent à comprendre après 8 ans et demi,
à la toute veille d'une échéance électorale, qu'ils
auraient dû gérer différemment.
Et puis le petit Poulin... Excusez, le député de
Chauveau... Excusez, le rapport Poulin; c'est ce que je voulais dire, M. le
Président. Il était supposé proposer 10 ministres de
moins. Ça fait 1 an, ça! Avez-vous vu un ministre de moins?
Aucun. Avez-vous vu de ses suggestions, M. le Président,
concrètement adoptées par ce gouvernement-là? Aucune.
Pensez-vous, demain matin, que ce qui est proposé, c'est assez
brillant... Le président du Conseil du trésor est assez brillant,
il est allé dire à notre ami de Verdun: Mets donc
«1994». Et lui a mis «1994» et puis ça reporte
de 1 an. Mais c'est une économie d'argent que ça prend tout de
suite. Avez-vous remarqué avec quelle vigueur il a défendu ce
report de 1 an, M. le Président, à la veille d'une
échéance électorale?
Nous prenez-vous pour des imbéciles, des naïfs? Voyons! Ils
se sont amusés avec vous autres. Ils vous ont fait travailler; de bonne
foi, je pense que vous l'avez fait. J'écoutais le député
de Lotbinière. Je pense que, de bonne foi, effectivement, ils ont
travaillé, mais, bonne mère du ciel! j'espère que vous
n'êtes pas naïfs assez pour croire qu'ils vous ont pris au
sérieux! Il n'y avait plus un ministre à la fin, ici, ce soir.
Ils vous font mettre des affaires... Je suis convaincu que le Conseil des
ministres, quand il aura vu le projet de loi qui subordonne le Conseil du
trésor à une décision d'un ministre, voyons! M. le
Président, ils vont se bidonner, je suis sûr de ca!
Soyez sans crainte, le rapport Poulin, c'est ce qui aura marqué
sa carrière politique, lui, là. Il aura eu un rapport. Mais, ce
sera un report. Vous comprendrez. Il n'y aura rien qui se fera dans ça.
La même chose, le député de Beauce-Nord, comité de
la construction, comité des 5 ou des 7, je ne le sais pas, ils ont
produit un rapport. M. le Président, avez-vous remarqué, le
premier geste de ce gouvernement que le ministre du Travail... Qu'est-ce qu'il
a fait? Il s'est dissocié du rapport de ces 5 députés qui,
de bonne foi, ont travaillé. Imaginez-vous! Puis, un beau petit
document, très bien relié. Vous l'avez vu. Avec un petit
résumé puis des communiqués de presse qui
résumaient. Ils ont tout donné ça à la presse. Le
soir même, à la T.V., vous aviez le très ronflant ministre
du Travail qui disait: Je n'accepte pas ça. Je me dissocie de ça.
Ça fait tout un effort, ça.
Vous parliez de réforme parlementaire, mais entre vous autres.
Vous n'avez pas compris que réforme parlementaire, ce n'est pas entre
vous autres pour vous complaire dans des études de 15 heures, de 20
heures, de 30 heures ou de 50 heures, puis dans des recherches. Puis que
ça n'aboutit pas après. Parce que le Conseil des ministres ne
bouge pas. Voyons! On vous a amusés. J'espère que vous allez le
comprendre. J'espère que vous n'êtes pas naïfs à ce
point de ne pas vous rendre compte que vous êtes tout simplement,
à mon point de vue, M. le Président, un petit peu candides sur
les bords.
Ça doit être intéressant, par exemple. Quand je
pense au député de Verdun. Ça doit être
intéressant d'être ministre d'un soir, avoir l'impression qu'il a
beaucoup de pouvoirs, à refuser un amendement ou un sous-amendement.
Ça peut donner un certain... en anglais, on dit un
«feeling». Mais, ça va s'arrêter là. Ça
ne sera pas applicable, puis ils ne l'appliqueront pas. Comme ils n'ont pas
appliqué le rapport Poulin. Comme ils se sont distancés du
rapport Audet. Comme ils se sont distancés... Puis, ils n'ont même
pas ramené la loi, la loi du député de Saint-Louis.
Rappelez-vous, ils ne l'ont même pas ramenée. Ils ont
travaillé fort, ces jeunes hommes, de bonne foi, ces jeunes filles
aussi, de leur côté. Mais ils s'en vont où? Naïfs,
naïfs, M. le Président. Enlevez vos culottes courtes puis mettez
vos pantalons, pour les garçons, bien sûr. Ça n'a pas de
bon sens, M. le Président. Moi, je n'en reviens pas d'être
candides et d'être naïfs de cette façon-là.
Je les regardais faire, ce soir. Puis, ce n'est pas la bonne foi qui
n'était pas là. Mais je lisais ça puis je disais: M. le
Président... Aïe! je vois le président du Conseil du
trésor qui va prendre le projet de loi de M. le député de
Verdun. Savez-vous où il se met ça le rapport, lui, ce projet de
loi là? Aïe! «c'est-u» loin de ses objectifs!
M. le Président, si le ministre du Travail est
capable de faire ça, à 7 de ses collègues, dans un
contexte où il est obligé de reporter le décret de la
construction pour une deuxième fois, si le député de
Chauveau, plein de bonne volonté... Vous savez, il voulait même
fermer les écoles l'hiver pour ne pas payer de chauffage pour sauver une
piastre.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Rappelez-vous. Ce n'est pas moi qui le dit,
là, c'a été écrit noir sur blanc ça. Vous
pouvez douter de ce que je dis, mais c'a été écrit,
ça, noir sur blanc: Fermer les écoles aux mois de janvier puis
février, 2 mois trop froids. On va sauver tout ce chauffage dans les
écoles. «C'était-u» brillant à votre
goût? Les écoles sont toujours ouvertes, M. le Président.
Les professeurs sont toujours à l'école, M. le Président.
Il y a toujours 29 ministres, M. le Président.
Y a-t-il de quoi de changé en vertu du rapport Poulin, M. le
Président? Rien. Absolument rien, comme on dit par chez nous. Rien. Puis
il n'y a rien qui va changer. C'est des «discoureux». Sauf que
l'échéance électorale arrive, très bientôt.
Et là vous allez voir le député, le valeureux Richard
Coeur de Lion de Chauveau, se promener, puis le rapport Poulin en main.
Ça ne sera pas un poulin, M. le Président, qui va prendre
l'épouvante, certain, parce qu'il n'y aura rien de
réalisé. Rien.
Vous allez avoir le député de Verdun qui va se promener
avec sa loi, la loi à Gautrin. Ils vont dire: Est-il allé loin
avec ça lui? Vous allez voir le député de Beauce-Nord qui,
lui, va peut-être décider de ne pas y aller du tout, parce qu'il
n'a même pas eu le temps de se lever avec son rapport. Le ministre s'est
assis dessus avant même qu'il se lève pour le montrer. Puis, comme
il est un peu plus lourd que lui, le rapport a disparu. Il n'y en avait plus.
(3 heures)
M. le Président, je compatis, ce soir, c'est-à-dire ce
matin, 3 heures du matin, avec les députés qui, de bonne foi, ont
travaillé quelques heures. Puis, j'écoutais, surtout le
député de Lotbinière tantôt, il y avait beaucoup de
volonté et de sincérité. C'est vrai, ça. Je le
reconnais, moi. Puis, je trouve ça malheureux. C'est peut-être
l'expérience parlementaire de 17 ans qui me fait dire qu'un gouvernement
se modifie non seulement par la solidarité de quelques
éléments de son caucus, mais quand il accepte de s'associer au
processus. Un gouvernement qui est placé ? qu'il soit, rouge, bleu,
péquiste ? devant un état de fait de sa deputation a des
réactions tout à fait contraires alors que, s'il participe au
processus, on a des chances de changement.
Comment en est-on arrivé, ici, à modifier le
parlementarisme, à l'intérieur de cette enceinte? C'est quand le
Conseil des ministres ? autant que les députés ? en
1984, a décidé d'endosser le nouveau règlement, M. le
Président, puis de le vendre à l'Opposition en même temps.
Non pas se donner des petits titres de gloire: Je suis membre d'un
comité ministériel libéral.
Bien, vous allez mourir avec votre petit rapport libéral sous le
bras et vous n'aurez rien changé au parlementarisme. Le parlementarisme,
M. le Président, c'est quand il y a une volonté, à
l'intérieur de toute l'enceinte, des deux côtés de la
Chambre, y compris du Conseil des ministres, quand on sent que la deputation,
autant ministérielle que de l'Opposition, veut vraiment des changements
en profondeur et quand vous acceptez de vous associer, comme l'ont fait
certains députés en commission parlementaire. Je crois beaucoup
plus, si vous voulez modifier quelque chose, aux mandats d'initiative dans les
commissions qui regroupent les deux formations politiques qu'à vos
petits comités internes, partisans et libéraux. Vous ne changerez
rien dans cela, alors que, dans les commissions parlementaires, vous associez
l'ensemble de la deputation. On a beaucoup plus de chances, quand on place tous
les députés ensemble, de faire bouger un gouvernement parce que
c'est une volonté des législateurs et non pas des partisans.
Ça, moi, c'est ma conviction profonde et je ne pense pas qu'on puisse
modifier grand-chose.
C'est là qu'on voit l'impuissance, et je reconnais, parce que
j'ai été sur les deux côtés... J'ai occupé
les banquettes du pouvoir et j'ai occupé les banquettes de l'Opposition.
Je peux vous dire que c'est beaucoup plus frustrant d'être sur une
banquette du pouvoir, effectivement, parce que tout le monde dit: Mais, il est
au pouvoir. Vous avez moins de pouvoirs qu'on ne peut en avoir dans
l'Opposition. On a au moins le pouvoir, nous autres, de se contenter et de se
défouler. Vous n'avez même pas ça. Vous n'avez même
pas le pouvoir de vous défouler et de dire ce que vous pensez. Vous
n'avez même pas le pouvoir d'être discordants alors que vous avez
profondément la conviction que votre propre gouvernement est dans
l'erreur. Vous n'avez même pas le pouvoir de vous lever. La seule chose
que vous pouvez faire, c'est aller vous cacher, si vous n'êtes pas
d'accord. Ça fait toute une manifestation de divergence, ça,
être obligé de se cacher, de se dissimuler pour un vote, quand on
n'est pas d'accord. C'est là que le parlementarisme devrait changer
fondamentalement.
Mis à part le budget et mis à part le discours du
trône, qui sont des orientations politiques, si les parlementaires, ici,
de quelle que allégeance politique que ce soit, pouvaient voter selon
leur conscience, au-delà des lignes de partis, là, on modifierait
le Parlement, là, on pourrait dire au pouvoir qu'il va être
exécuté en fonction des idées maîtresses qui
émergent de la majorité des législateurs. Mais ce n'est
pas le cas, M. le Président. On vous fait gober n'importe quoi, et c'est
le cas de le dire, M. le Président, n'importe quoi et, par
solidarité ministérielle, vous savez ce qui arrive. Et, bien
souvent, on se rencontrerait, j'en suis sûr. C'est ce qui fait dire
à certains députés, dans les corridors: Je voterais bien
avec vous autres, si je n'étais pas au pouvoir. Ça veut donc
dire, «je voterais bien avec vous autres si je n'étais pas au
pouvoir», que je vais être obligé de voter contre ce que je
pense, M. le Président. Puis, ce soir, on a vu une manifestation, de
bonne foi, mais qui devient, à
toutes fins pratiques, pour moi, M. le Président, quelque chose
d'un petit peu farfelu ? je m'excuse de le dire. C'est un projet de loi
rempli de bonne volonté, je n'en doute pas, mais ne venez pas me dire,
M. le Président, qu'on vient de marquer de grands pas vers une plus
grande démocratie. Au contraire, M. le Président, ça va
continuer comme c'est le cas parce qu'on n'aura pas réussi à
s'arrêter. J'en ai parlé plusieurs fois avec le leader adjoint du
gouvernement. Je pense seulement à la question des règlements
où il disait, encore hier: Je suis prêt à modifier ma
position, moi, demain matin. Oui, mais qui va nous convoquer? Qui va prendre
l'initiative d'en arriver à modifier les règlements? Qui va
prendre l'initiative, de part et d'autre, parce que, vous savez, ce n'est pas
nous, dans l'Opposition, qui pouvons prendre cette initiative-là. Nous,
on peut le souhaiter, mais ça va être au pouvoir de
démontrer sa volonté. Je vous le dis très
honnêtement, c'est là qu'on comprendra peut-être, M. le
Président, que, sur plusieurs sujets, on est beaucoup plus près
qu'on le pense effectivement, et il y a peut-être beaucoup plus de
volonté qu'on pense de contrôler de la part du législateur,
et surtout dans l'Opposition, c'est bien clair. Mais, tant et aussi longtemps
qu'on ne le fera pas, M. le Président, puis qu'on n'en arrivera pas
à changer le patron de gestion ou le mode parlementaire de gestion, on
peut bien dire, on pourra vous illusionner, on pourra continuer à vous
créer des comités, mais, de grâce! je «peux-tu»
vous donner un conseil? Ne vous essoufflez pas trop, vous le faites pour rien.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): En droit de
réplique, je cède la parole à M. le député
de Verdun, pour son droit de réplique, qui n'excède pas 20
minutes. M. le député, la parole est à vous.
M. Henri-François Gautrin
(réplique)
M. Gautrin: Merci. À cette heure tardive, M. le
Président, je ne prendrai pas les 20 minutes, mais je voudrais
simplement rappeler au leader de l'Opposition que, évidemment on ne
connaît pas le futur, c'est bien sûr, mais on a fait aujourd'hui,
je ne dirais pas nécessairement un grand pas, parce que, dans le fond,
on ne le sait pas, mais on a fait un certain nombre de mesures, en termes de
permettre de déposer certains rapports à l'Assemblée
nationale, d'amener les administrateurs de l'État, c'est-à-dire
les dirigeants d'organismes et les sous-ministres à devoir
témoigner devant les commissions parlementaires. Bien sûr, vous
auriez probablement aimé que ça se fasse sans le ministre; le
député de Labelle aurait voulu que ce soit le ministre seulement,
sans les sous-ministres. Il y a un certain pas. Ne pensons pas qu'on va... Et
je ne prétends pas qu'on révolutionnera demain le parlementarisme
britannique en ayant passé cette loi, je ne suis pas naïf à
ce point-là, mais je pense... Et je pense que, malgré tout, et on
le verra à l'usage, ce sera la responsabilité de l'ensemble des
parlementaires, et je suis heureux que vous tendiez la main aujourd'hui pour
dire que vous êtes prêts à y participer, pour faire en sorte
que ce qu'on a fait comme petits pas dans le sens d'une meilleure
démocratie s'applique réellement et donne des
résultats.
M. le Président, je vais terminer là-dessus. Je crois
qu'à mon sens on s'est donné certains outils et on verra à
la pratique la manière dont on pourra les utiliser pour atteindre nos
meilleurs objectifs, à savoir une imputabilité et une plus grande
clairvoyance de l'activité gouvernementale.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Verdun. Alors, est-ce que le projet de loi 198 est
adopté?
M. Chevrette: Vote enregistré.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote enregistré.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Je vais demander de reporter le vote, M. le
Président, à la prochaine période des affaires
courantes.
Vote reporté
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À votre demande
et conformément au règlement, le vote sur le projet de loi 198
est reporté aux affaires courantes de la séance du 16 juin. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Je fais motion pour ajourner nos travaux
à ce matin, 15 juin, à 10 heures, M. le Président.
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse, le vote est
reporté, à la période des affaires courantes, à
mardi, le 15 juin. Est-ce que la motion d'ajournement de nos travaux est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Donc, les
travaux de cette Assemblée sont ajournés à aujourd'hui,
mardi, le 15 juin, à 10 heures.
(Fin de la séance à 3 h 9)