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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Thursday, December 8, 2016 - Vol. 44 N° 220

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Remercier les conjointes et conjoints qui facilitent la conciliation travail-famille

M. André Fortin

Féliciter M. Patrick Lavoie, membre de l'équipe du Rouge et Noir d'Ottawa, gagnante de
la coupe Grey

M. Pascal Bérubé

Souhaiter de joyeuses fêtes aux citoyens de la circonscription de Côte-du-Sud

M. Norbert Morin

Remercier les familles des hommes et des femmes politiques pour leur appui

M. Mathieu Lemay

Rendre hommage à M. Littorio Del Signore, artiste peintre

M. Robert Poëti

Remercier les familles des hommes et des femmes politiques pour leur appui

M. Sylvain Roy

Féliciter l'école Curé-Antoine-Labelle, lauréate du prix Développement pédagogique

M. Jean Habel

Souligner le 35e anniversaire des Voltigeurs de Drummondville

M. André Lamontagne

Rendre hommage à Mme Dominique Maltais pour sa carrière en planche à neige

Mme Caroline Simard

Souligner le 35e anniversaire du Conseil économique & Tourisme Haut-Richelieu

M. Dave Turcotte

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 121 — Loi augmentant l'autonomie et les pouvoirs de la Ville de Montréal,
métropole du Québec

M. Martin Coiteux

Mise aux voix

Dépôt de documents

Documents intitulés Consolider le Régime pour renforcer l'équité intergénérationnelle
et Constats sur la retraite au Québec, et évaluation actuarielle du Régime de rentes du
Québec au 31 décembre 2015

Réponses à des questions inscrites au feuilleton

Lettre du premier ministre demandant que l'Assemblée se réunisse en séances extraordinaires

Dépôt de rapports de commissions

Auditions et étude détaillée du projet de loi n° 220 — Loi concernant la Ville de
Saint-Augustin-de-Desmaures

Mise aux voix du rapport

Consultations particulières sur le processus ayant mené à la vente des actions de RONA
par Investissement Québec

Auditions et étude détaillée du projet de loi n° 222 — Loi permettant la conversion de
L'Assurance Mutuelle de l'Inter-Ouest et de l'Assurance mutuelle des fabriques de
Montréal et leur fusion

Mise aux voix du rapport

Dépôt de pétitions

Refuser l'émission des permis et des autorisations de forages exploratoires et d'exploitation
des hydrocarbures sur le territoire de la zec Bas-Saint-Laurent

Implanter des services d'hémodialyse supplémentaires en Gaspésie

Interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel

Décision de la présidence sur la recevabilité des questions de droit ou de privilège
soulevées les 26 et 27 octobre 2016 à l'égard de Mme Dominique Savoie et de
M. Michel Boulard

Document déposé

Questions et réponses orales

Appui au secteur forestier

M. Jean-François Lisée

M. Philippe Couillard

M. Jean-François Lisée

M. Philippe Couillard

M. Jean-François Lisée

M. Philippe Couillard

M. Jean-François Lisée

M. Philippe Couillard

Financement des ressources intermédiaires

M. Dave Turcotte

Mme Lucie Charlebois

M. Dave Turcotte

M. Gaétan Barrette

M. Dave Turcotte

M. Gaétan Barrette

Réforme du programme Éthique et culture religieuse

M. Alexandre Cloutier

M. Sébastien Proulx

M. Alexandre Cloutier

M. Sébastien Proulx

M. Alexandre Cloutier

M. Sébastien Proulx

Financement des élections scolaires

M. François Legault

M. Philippe Couillard

M. François Legault

M. Philippe Couillard

M. François Legault

M. Philippe Couillard

Révision de la politique d'évaluation des apprentissages à l'école

M. Jean-François Roberge

M. Sébastien Proulx

M. Jean-François Roberge

M. Sébastien Proulx

M. Jean-François Roberge

M. Sébastien Proulx

Exigence de la connaissance de l'anglais pour un emploi de bureau à la ville de Gatineau

M. Stéphane Bergeron

M. Luc Fortin

M. Stéphane Bergeron

M. Luc Fortin

M. Stéphane Bergeron

M. Luc Fortin

Nomination de M. Pietro Perrino à titre de secrétaire général associé au ministère du
Conseil exécutif

M. Amir Khadir

M. Jean-Marc Fournier

M. Amir Khadir

M. Jean-Marc Fournier

M. Amir Khadir

M. Jean-Marc Fournier

Construction d'un aéroport à Mascouche

M. Mathieu Lemay

Mme Stéphanie Vallée

M. Simon Jolin-Barrette

M. David Heurtel

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Stéphanie Vallée

Compensation aux détenteurs de permis de taxis

Mme Martine Ouellet

M. Laurent Lessard

Mme Martine Ouellet

M. Laurent Lessard

Mme Martine Ouellet

M. Laurent Lessard

Directive à l'entreprise Anacolor de réduire ses émissions polluantes

M. Éric Caire

M. David Heurtel

Motions sans préavis

À l'occasion du 40e anniversaire des relations entre le Canada et l'Union européenne,
souligner les liens profonds historiques et culturels ainsi que les valeurs que partagent
le Québec et l'Europe

Mise aux voix

Dénoncer l'autorisation de la construction d'un aéroport à Mascouche et demander au
gouvernement d'intervenir pour empêcher ce projet

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Affaires du jour

Projet de loi n° 87 — Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles dans les organismes publics

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et
de l'amendement de la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques

M. Carlos J. Leitão

Mme Nicole Léger

Mme Manon Massé

Mise aux voix de l'amendement

Mise aux voix du rapport

Projet de loi n° 114 — Loi modernisant la gouvernance des musées nationaux

Reprise du débat sur l'adoption

Mme Martine Ouellet

Mise aux voix

Projet de loi n° 109 — Loi accordant le statut de capitale nationale à la Ville de Québec
et augmentant à ce titre son autonomie et ses pouvoirs

Adoption

M. Martin Coiteux

Mme Agnès Maltais

M. Éric Caire

Mme Véronyque Tremblay

M. Martin Ouellet

Mise aux voix

Projet de loi n° 125 — Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires

Commission plénière

Remarques préliminaires

Mme Stéphanie Vallée

Mme Véronique Hivon

M. Simon Jolin-Barrette

Étude détaillée

Document déposé

Document déposé

Prise en considération du rapport de la commission plénière qui en a fait l'étude détaillée

Mise aux voix du rapport

Adoption

Mme Stéphanie Vallée

Mme Véronique Hivon

M. Simon Jolin-Barrette

Mise aux voix

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante et une minutes)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, bon jeudi à tous et toutes! Vous pouvez prendre place.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Alors, nous allons débuter notre séance avec la rubrique des déclarations de députés. Et je vais céder la parole à M. le député de Pontiac.

Remercier les conjointes et conjoints qui
facilitent la conciliation travail-famille

M. André Fortin

M. Fortin (Pontiac) : Merci, Mme la Présidente. Dans mon comté, en janvier et en septembre, il y a des centaines d'hommes et de femmes qui quittent leur famille pendant des semaines et des mois pour travailler dans les mines du Nord ou les chantiers de l'Ouest. Pendant ce temps, leurs conjoints tiennent le fort. Ils s'occupent des enfants, leur font faire les devoirs, vont les chercher à la garderie, préparent les lunchs. Ce sont eux qui paient les factures, eux qui font le ménage, eux qui déblaient la cour.

Et, dans tous nos comtés en janvier et en septembre, à l'aube de la rentrée parlementaire, nos propres conjoints se préparent à faire la même chose, car du lundi au jeudi, pendant des semaines et des mois, ce sont aussi eux qui sont responsables de la maison et des enfants, et ce, en jonglant leur propre carrière.

Alors, permettez-moi, Mme la Présidente, à l'aube des fêtes et après des semaines et des mois d'absence, de saluer ma conjointe, nos conjoints, nos conjointes et ceux et celles des travailleurs et, au nom de tous ceux ici, en cette Assemblée, de leur dire un grand merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député. Maintenant, je vais céder la parole à M. le député de Matane-Matapédia.

Féliciter M. Patrick Lavoie, membre de l'équipe du
Rouge et Noir d'Ottawa, gagnante de la coupe Grey

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Mme la Présidente, la semaine dernière, le joueur de football originaire de Sainte-Flavie, M. Patrick Lavoie, a remporté les grands honneurs de la LCF avec son équipe, le Rouge et Noir d'Ottawa.

Premier choix des Alouettes de Montréal au repêchage de 2012, Patrick avait déjà fait sa marque au sein du prestigieux programme de football de l'Université Laval en remportant la coupe Vanier à deux reprises. La finale les opposant aux Stampeders de Calgary a été chaudement disputée, se terminant en prolongation par la marque de 39-33.

L'athlète, maintenant âgé de 29 ans, a fait preuve de beaucoup de rigueur et de discipline pour atteindre les plus hauts niveaux. Il est un modèle pour plusieurs jeunes sportifs non seulement dans notre région, mais également dans l'ensemble du Québec. En entrevue avec la journaliste Sonia Lévesque, Patrick n'a pas manqué de souligner l'importance et la qualité du programme de football de l'école secondaire du Mistral de Mont-Joli, avec qui il a fait ses débuts. Notons que l'équipe juvénile du Mistral a une fois de plus atteint la finale du Bol d'or cette année. Il va sans dire, les athlètes de notre région performent très bien dans ce sport.

En terminant, j'offre toutes mes félicitations à M. Lavoie pour cette saison exceptionnelle, pour cette victoire en finale et pour l'ensemble du travail accompli jusqu'à maintenant. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député de Matane-Matapédia. Maintenant, je vais reconnaître M. le député de Côte-du-Sud pour sa déclaration d'aujourd'hui.

Souhaiter de joyeuses fêtes aux citoyens
de la circonscription de
Côte-du-Sud

M. Norbert Morin

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Je profite de l'occasion qui m'est donnée de prendre la parole une dernière fois en 2016 pour adresser à tous mes concitoyennes et concitoyens du comté de Côte-du-Sud mes meilleurs voeux de bonheur et de prospérité à l'aube du temps des fêtes.

En famille et avec les amis, nous entamerons bientôt une période de réjouissances qui permettra de démontrer, bien au-delà des présents que nous offrirons, nos valeurs profondes de fraternité et notre attachement aux valeurs humanitaires qui doivent être au coeur de notre société pour le mieux-être de toutes et de tous.

Mes pensées vont aussi aux personnes démunies ou malades. Je leur souhaite toute la force qu'il faut pour surmonter les épreuves, trouver la santé et la sérénité. J'invite d'ailleurs la population de mon comté à donner généreusement aux organismes de bienfaisance qui oeuvrent pour les démunis et les causes en lien avec la santé.

Mme la Présidente, et je fais mienne la déclaration de mon collègue de Pontiac pour ce qu'il nous a dit... je fais mienne. Donc, là-dessus, joyeux Noël à tout le monde et bonne et heureuse année!

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Côte-du-Sud. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Masson.

Remercier les familles des hommes et des
femmes politiques pour leur appui

M. Mathieu Lemay

M. Lemay : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais aujourd'hui prendre le temps de saluer toutes ces femmes et tous ces hommes qui, comme moi, ont fait le choix de l'engagement politique pour améliorer notre Québec.

Je voudrais aussi dire à toutes ces conjointes et tous ces conjoints qui ont aussi appuyé ce choix, qui sont là au jour le jour pour prendre soin de leur famille, un immense merci. Je salue tous ces enfants qui attendent le retour de maman et papa à la maison afin de juste passer un peu de temps avec eux. Quitter notre famille pour quelques jours peut parfois être difficile, mais les retours sont d'autant plus agréables, de là l'importance du soutien de notre famille et de leur compréhension.

J'aimerais exprimer toute ma reconnaissance à ma conjointe Nancy et mon fils Félix-Antoine de bien vouloir me donner leur support dans cette belle aventure qu'est la politique. Je suis passionné par ce que je fais, je vous aime. Nancy, Félix-Antoine, merci de m'appuyer. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. Merci, M. le député de Masson. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, la parole est à vous.

Rendre hommage à M. Littorio Del Signore, artiste peintre

M. Robert Poëti

M. Poëti : Merci, Mme la Présidente. Je désire rendre hommage à un homme exceptionnel, M. Littorio Del Signore, un artiste peintre talentueux et prolifique mais surtout un homme de coeur qui a marqué l'histoire picturale de notre époque. Originaire de Sulmona, en Italie, il a immigré avec sa famille à LaSalle, où ils vivent depuis 1978.

M. Del Signore peint d'une façon magistrale des paysages urbains, classiques et des scènes typiques où la ruelle, tout à coup, se transforme en patinoire de hockey. Son don et sa passion pour la peinture lui ont donné l'occasion de progresser et de se hisser parmi les meilleurs peintres contemporains.

«Caro» Littorio, à titre de député de Marguerite-Bourgeoys, je vous remercie pour votre talent, votre générosité et votre précieuse contribution au rayonnement de notre circonscription et de notre pays à travers vos oeuvres reconnues internationalement. (S'exprime en italien).

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député. Maintenant, je vais céder la parole à M. le député de Bonaventure.

Remercier les familles des hommes et des
femmes politiques pour leur appui

M. Sylvain Roy

M. Roy : Merci, Mme la Présidente. En tant que députés, nous avons l'honneur de rendre régulièrement hommage à des personnes significatives issues de nos communautés. Par contre, une catégorie de personnes est rarement mise en valeur et honorée dans cette enceinte, ce sont nos partenaires de vie et nos enfants. Ils sont les acteurs de l'ombre qui doivent vivre quotidiennement avec nos absences répétées aux événements importants de la vie de famille que sont les devoirs, les repas à la maison ou des activités avec les enfants. Souvent, ils doivent subir notre fâcheuse tendance à vouloir être au centre du monde et, parfois, ils doivent composer avec un discours peu flatteur sur notre travail. Ils bousculent souvent leurs priorités et projets de vie pour nous accompagner dans cette aventure politique. Ce sont les héros du dévouement et de la fidélité qui étaient là avant, qui sont là pendant notre vie politique et surtout qui seront là après.

Joanne, Nicolas et Samuel, merci pour tout. Merci de me ramener sur terre lorsque je le mérite. Merci de me rappeler les vraies valeurs des choses. Et sachez qu'un jour je vais rentrer à la maison.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député de Bonaventure. Maintenant, je reconnais M. le député de Sainte-Rose pour sa déclaration.

Féliciter l'école Curé-Antoine-Labelle, lauréate
du prix Développement pédagogique

M. Jean Habel

M. Habel : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais souligner la performance de la commission scolaire de Laval et plus particulièrement l'école Curé-Antoine-Labelle, qui a remporté le prix Développement pédagogique aux Prix de reconnaissance Essor. Ce gala souligne le travail passionné des pédagogues et des responsables scolaires qui, avec les jeunes, réalisent des projets novateurs, imaginatifs et de qualité. Ces actions favorisent la persévérance scolaire en suscitant l'engagement et la réussite des élèves.

Les Prix de reconnaissance Essor ont reconnu la réalisation d'une oeuvre à la fois sculpturale et numérique qui a permis aux élèves de se livrer à des réflexions sur leur rapport aux espaces réels et virtuels. Félicitations à tous les élèves et tout le personnel qui a travaillé à la réalisation de ce beau projet! Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député. Et maintenant je reconnais M. le député de Johnson.

Souligner le 35e anniversaire des Voltigeurs de Drummondville

M. André Lamontagne

M. Lamontagne : Mme la Présidente. Les Voltigeurs de Drummondville jouent cette année leur 35e saison dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec. Leur nom rappelle le célèbre corps des Voltigeurs canadiens dont les soldats démobilisés ont été à l'origine de Drummondville en 1815. L'admission de l'équipe au sein de la Ligue de hockey junior majeur en 1982 a été le fruit des efforts du milieu des affaires de la région drummondvilloise. À l'époque, 80 citoyens ont investi 1 000 $ chacun pour acheter la concession qui, depuis maintenant 35 ans, fait rayonner la ville aux quatre coins du Québec et des Maritimes.

Les Voltigeurs sont source de fierté et de grande vitalité pour leur communauté. Ils comptent plus de 100 bénévoles, emploient 21 personnes, attirent plus de 80 000 spectateurs par saison et génèrent des retombées économiques annuelles de 2,5 millions de dollars. Tout le monde aime aller voir jouer Les Voltigeurs, autant les grands que les tout-petits. Ils sont une inspiration pour de nombreux jeunes.

C'est donc avec fierté que je souligne aujourd'hui le 35e anniversaire des Voltigeurs de Drummondville. Merci, Mme la Présidente.

• (9 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Johnson. Et, pour sa déclaration d'aujourd'hui, je cède la parole à Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.

Rendre hommage à Mme Dominique Maltais pour sa carrière en planche à neige

Mme Caroline Simard

Mme Simard : Merci, Mme la Présidente. Il va de soi pour moi de rendre un hommage des plus mérités à la plus grande athlète de l'histoire de Charlevoix, Mme Dominique Maltais. La fierté de Petite-Rivière-Saint-François a annoncé sa retraite mardi, à l'âge de 36 ans, après une carrière prolifique de 11 ans en planche à neige. Et quel palmarès pour elle! Deux médailles olympiques, deux podiums aux championnats du monde, cinq globes de cristal et 38 médailles en Coupe du monde, dont 15 victoires.

Dominique Maltais laisse un héritage inestimable, mais c'est aussi ses qualités humaines que je retiens, tels sa gentillesse, sa générosité, son charisme et sa résilience. Avec sa personnalité attachante, elle a été, est et demeurera une ambassadrice de premier plan sur la scène internationale.

Je joins ma voix à tous celles et ceux qui l'admirent et l'apprécient pour lui souhaiter une bonne retraite et la réalisation de ses projets les plus chers, dont celui de poursuivre sa carrière de pompière à Petite-Rivière-Saint-François et auprès des jeunes des programmes sport-études du collège des Hauts-Sommets. Merci et bravo, Dominique!

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, Mme la députée. Et, pour clore cette rubrique, je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saint-Jean.

Souligner le 35e anniversaire du Conseil
économique & Tourisme Haut-Richelieu

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Je tiens à souligner le 35e anniversaire de fondation du Conseil économique & Tourisme Haut-Richelieu. Établi depuis 35 ans maintenant, le Conseil économique & Tourisme Haut-Richelieu a su, au fil de ces années, stimuler et soutenir le développement économique de Saint-Jean-sur-Richelieu et de la MRC du Haut-Richelieu. Que ce soit par l'aide aux entrepreneurs, aux entreprises de la région, par sa participation dans différentes missions économiques ou par la mise en place d'initiatives prometteuses, les activités du conseil sont parsemées de succès.

À vous tous qui travaillez chaque jour, d'hier à aujourd'hui, au sein du conseil pour offrir des services essentiels d'accompagnement et de soutien technique ou financier, vous êtes des acteurs incontournables pour tous les entrepreneurs de notre région. Je tenais ainsi à vous rendre hommage ici, à l'Assemblée nationale, pour votre contribution exceptionnelle qui a permis au conseil d'être reconnu comme la référence du développement économique de notre région.

Merci à toute l'équipe!

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député de Saint-Jean. Ceci met fin à la rubrique des déclarations de députés, et je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 53)

(Reprise à 10 h 2)

Le Président : Alors, mesdames messieurs, nous allons nous recueillir quelques instants.

Merci. Veuillez vous asseoir... enfin, peut-être pas tous. Sauf erreur, le 8 décembre il y a 10 ans, quelques-uns d'entre nous avions été élus pour une première fois.

Une voix : ...

Le Président : Huit ans, huit ans. Je m'excuse. En voilà deux de passés déjà, ça va bien. Quels sont ceux qui ont été élus ici il y a huit ans? Levez-vous, levez-vous.

Une voix : ...

Le Président : La première fois, la première fois.

Une voix : ...

Le Président : 2008. On en a-tu d'autres, 2008?

Une voix : ...

Le Président : O.K. Bien, je vous remercie. Je vous félicite. Je voudrais vous féliciter pour vos premiers huit ans. Je ne veux pas être sarcastique, mais vous avez tous dépassé déjà d'un an la durée moyenne d'une vie d'un parlementaire au Québec. Ça fait que c'est déjà beau. Ça fait que je vous félicite encore une fois.

Alors, nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

À la rubrique Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : Oui. Merci, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler l'article a si c'est possible.

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 121

Le Président : Tout à fait possible. Bien demandé, poliment.

Alors, à l'article a du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire présente le projet de loi n° 121, Loi augmentant l'autonomie et les pouvoirs de la Ville de Montréal, métropole du Québec.

M. le ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Oui. Merci, M. le Président. Alors, ce projet de loi augmentant l'autonomie et les pouvoirs de la ville de Montréal, métropole du Québec, propose diverses modifications législatives concernant la ville de Montréal.

Le projet de loi modifie la Charte de la Ville de Montréal afin qu'elle soit dorénavant désignée sous le titre de Loi sur la métropole du Québec. Le projet de loi permet au maire de la ville de désigner le président et le vice-président du comité exécutif et accorde à ce comité exécutif de nouveaux pouvoirs en matière d'octroi de subventions et d'acquisition et d'aliénation d'immeubles. Le projet de loi fixe le quorum au conseil de la ville à la majorité de ses membres, incluant le maire, et permet l'utilisation de moyens technologiques pour la convocation des séances spéciales. Le projet de loi supprime de la Charte de la Ville de Montréal des dispositions créant expressément certains organismes consultatifs, laissant toutefois à la ville le pouvoir de les maintenir en fonction. Il autorise la ville, relativement à tout domaine relevant de sa compétence, à constituer tout organisme à but non lucratif ayant pour objet de fournir des services, avis, matières, matériaux et équipements ou d'administrer des programmes.

Le projet de loi prévoit que la ville contribue, conformément aux orientations et aux politiques gouvernementales, par son offre de service d'accompagnement des personnes immigrantes sur son territoire, à leur pleine participation, en français, à la vie collective de la métropole ainsi qu'à la consolidation de relations interculturelles harmonieuses.

Le projet de loi accorde à la ville tous les pouvoirs nécessaires pour donner effet à une entente qu'elle a conclue avec le gouvernement et lui permet d'adopter des programmes d'aide aux entreprises et lui octroie des pouvoirs élargis concernant les sociétés de développement commercial. Le projet de loi diminue de 25 000 mètres carrés à 15 000 mètres carrés la superficie au-delà de laquelle le conseil de la ville peut permettre la réalisation d'un projet malgré un règlement d'arrondissement. Il accorde à la ville la possibilité d'exercer, à certaines conditions, un droit de préemption sur l'acquisition d'immeubles mis en vente sur son territoire et lui permet de prendre des mesures visant à favoriser la construction de logements abordables ou familiaux. Il précise également certains pouvoirs lui permettant d'intervenir concernant l'entretien des immeubles détériorés.

Le projet de loi revoit le rôle de la Commission de la sécurité publique prévu dans la Charte de la ville de Montréal en y supprimant notamment l'obligation pour le conseil de la ville d'obtenir l'avis de la commission préalablement à l'exercice de certains pouvoirs. Il supprime également l'obligation qui est faite à la ville de prévoir à son budget une somme d'au moins 1 % du budget pour couvrir les dépenses imprévues, le règlement des réclamations et le paiement des condamnations judiciaires.

Le projet de loi permet à la Commission des services électriques de la ville d'exercer ses compétences à l'égard de certains conduits souterrains situés sur le territoire d'une municipalité reconstituée. Le projet de loi accorde à la ville le pouvoir d'appliquer, à la suite d'une entente de délégation conclue avec le ministre de la Culture et des Communications, la politique d'intégration des arts à l'architecture et à l'environnement des bâtiments et des sites gouvernementaux. Il modifie également la Loi sur le patrimoine culturel pour prévoir l'exercice par la ville de certains pouvoirs d'autorisation du ministre de la Culture et des Communications prévus par cette loi.

Enfin, le projet de loi permet à la ville de déterminer, sur son territoire, des périodes légales d'admission pour les établissements commerciaux ainsi que des heures d'exploitation des permis autorisant la vente ou le service de boissons alcooliques pour consommation sur place. Merci.

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition.

M. Bérubé : M. le Président, je note que ce projet de loi est déposé malgré la grève des juristes de l'État, mais nous souhaiterions avoir des consultations particulières.

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : Bien sûr, consultations particulières il y aura, M. le Président.

Mise aux voix

Le Président : Alors, est-ce que c'est adopté? Adopté.

Dépôt de documents

À la rubrique Dépôt de documents, M. le ministre des Finances.

Documents intitulés Consolider le Régime pour renforcer l'équité intergénérationnelle
et Constats sur la retraite au Québec, et évaluation actuarielle du
Régime de rentes du Québec au 31 décembre 2015

M. Leitão : Bien sûr, M. le Président. Alors, il me fait plaisir de déposer, à titre de ministre responsable de Retraite Québec, les documents suivants : la consultation publique sur le Régime de rentes du Québec Consolider le régime pour renforcer l'équité intergénérationnelle; la consultation publique sur le Régime de rentes du Québec Constats sur la retraite au Québec; et finalement l'évaluation actuarielle du Régime de rentes du Québec au 31 décembre 2015.

Le Président : Ces documents sont déposés. M. le leader.

M. Fournier : ...pour informer cette Chambre que nous aurons des échanges avec les oppositions concernant la tenue de consultations prévues par la loi sur la Régie des rentes du Québec. D'ailleurs, une proposition à cet effet, là, sera acheminée durant la journée, M. le Président.

• (10 h 10) •

Le Président : M. le leader, c'est encore à vous la parole.

Réponses à des questions inscrites au feuilleton

M. Fournier : Merci. Je voudrais déposer la réponse du gouvernement aux questions inscrites au feuilleton le 4 octobre par la députée de Gouin et le 23 novembre 2016 par la députée de Mirabel.

Lettre du premier ministre demandant que l'Assemblée
se réunisse en séances extraordinaires

Le Président : Alors, ces documents sont déposés.

Pour ma part, je dépose la lettre que m'a adressée M. le premier ministre me demandant de prendre les dispositions nécessaires pour que l'Assemblée se réunisse en séances extraordinaires à compter de 15 heures ce vendredi 9 décembre 2016, selon le calendrier et l'horaire qui seront déterminés par l'Assemblée, afin de compléter le processus d'étude du projet de loi n° 106, Loi concernant la mise en oeuvre de la Politique énergétique 2030 et modifiant diverses dispositions législatives.

Dépôt de rapports de commissions

À la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission de l'aménagement du territoire et député de Champlain.

Auditions et étude détaillée du projet de loi n° 220

M. Auger : M. le Président, je dépose le rapport de la Commission de l'aménagement du territoire qui a siégé le 7 décembre 2016 afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 220, Loi concernant la Ville de Saint-Augustin-de-Desmaures. La commission a adopté le texte de ce projet de loi avec un amendement.

Mise aux voix du rapport

Le Président : Bon, c'était un projet de loi privé. Ce rapport est-il adopté? Adopté.

Mme la présidente de la Commission de l'économie et du travail et députée de Duplessis.

Consultations particulières sur le processus ayant mené à la vente
des actions de RONA par Investissement Québec

Mme Richard : Merci, M. le Président. Je dépose le rapport de la Commission de l'économie et du travail qui, le 25 août 2016, a tenu des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur le processus ayant mené à la vente des actions de RONA par Investissement Québec. La commission s'est également réunie en séance de travail les 7 et 9 juin, le 25 août, les 15 et 22 septembre, les 4 et 19 octobre, les 9, 16 et 24 novembre ainsi que le 6 décembre 2016 relativement à ce mandat. Et je dépose le rapport.

Le Président : Alors, merci. Ce rapport est déposé. M. le vice-président de la Commission des finances publiques et député de Beauce-Nord.

Auditions et étude détaillée du projet de loi n° 222

M. Spénard : Merci, M. le Président. Je dépose le rapport de la Commission des finances publiques qui, le 7 décembre 2016, a procédé à l'audition des intéressés et à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 222, Loi permettant la conversion de L'Assurance Mutuelle de l'Inter-Ouest et de l'Assurance mutuelle des fabriques de Montréal et leur fusion. La commission a adopté le texte du projet de loi sans amendement.

Mise aux voix du rapport

Le Président : Bon, ça aussi, c'était un projet de loi privé. Donc, le rapport est-il adopté? Adopté.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt de pétitions, M. le député de Matane-Matapédia.

Refuser l'émission des permis et des autorisations de forages
exploratoires et d'exploitation des hydrocarbures sur
le territoire de la zec Bas-Saint-Laurent

M. Bérubé : M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 558 pétitionnaires. Désignation : citoyennes et citoyens du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant qu'une compagnie d'exploration pétrolière désire faire des forages dans le secteur du lac des Chasseurs pour valider la présence d'un réservoir conventionnel de pétrole ou de gaz dans le but d'en faire l'exploitation;

«Considérant que le site identifié pour le forage fait partie de l'immense bassin versant de la rivière Patapédia;

«Considérant que la rivière Patapédia communique avec la rivière Ristigouche pour se déverser dans la baie des Chaleurs;

«Considérant que ces deux rivières importantes abritent une population de saumon atlantique reconnue mondialement;

«Considérant que le bassin versant de la rivière Patapédia est une zone d'intérêt pour l'établissement d'une aire protégée;

«Considérant qu'il y a des risques de contamination de l'environnement lors de ces différentes opérations prévues et que l'on retrouve également une concentration de chalets dans ce secteur;

«Considérant [...] la protection et la conservation du patrimoine faunique sont incompatibles avec les activités d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons au ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles et au ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques de refuser l'émission des permis et autorisations nécessaires pour effectuer les forages exploratoires et l'exploitation des hydrocarbures sur le territoire de la zec Bas-Saint-Laurent.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé. M. le député de Matane-Matapédia, vous avez aussi fait une demande pour le dépôt d'une pétition qui est non conforme.

Est-ce que j'ai un consentement pour le dépôt de la pétition? Oui. Alors, M. le député, je vous écoute.

M. Bérubé : Bien, merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 1 325 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Attendu qu'une compagnie d'exploration pétrolière désire faire des forages dans le secteur du lac des Chasseurs pour valider la présence d'un réservoir conventionnel de pétrole et/ou de gaz dans le but d'en faire l'exploitation;

«Attendu que le site identifié pour le forage fait partie de l'immense bassin versant de la rivière Patapédia;

«Attendu que la rivière Patapédia communique avec la rivière Ristigouche pour se déverser dans la baie des Chaleurs;

«Attendu que ces deux rivières importantes abritent une population de saumon atlantique reconnue mondialement;

«Attendu que le bassin versant de la rivière Patapédia est une zone d'intérêt pour l'établissement d'une aire protégée;

«Attendu qu'il y a des risques de contamination de l'environnement lors de ces différentes opérations et que l'on retrouve également une concentration de chalets dans ce secteur;

«Attendu que la protection et la conservation du patrimoine faunique sont incompatibles avec les activités d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures;

«Attendu que plusieurs partenaires fauniques appuient notre démarche;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons au ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles du Québec et au ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques de refuser l'émission des permis et autorisations nécessaires pour effectuer les forages exploratoires et l'exploitation des hydrocarbures sur le territoire de la zec Bas-Saint-Laurent.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.

J'ai reçu de la part de M. le député de Gaspé une demande pour le dépôt d'une pétition qui est non conforme. Est-ce que j'ai un consentement? Consentement. M. le député de Gaspé.

Implanter des services d'hémodialyse supplémentaires en Gaspésie

M. Lelièvre : Oui. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que l'hémodialyse est un traitement vital pour plusieurs Gaspésiens et que certains doivent vivre dans une situation de grande précarité, voire inacceptable;

«Considérant que certains patients hémodialysés gaspésiens, en plus d'être affaiblis par la maladie, doivent parcourir jusqu'à six heures[...], trois fois par semaine — 1 500 kilomètres [par] semaine — ou déménager loin de leur famille pour recevoir un traitement essentiel à leur survie;

«Considérant que l'absence de services adéquats en matière d'hémodialyse en Gaspésie occasionne des inconvénients majeurs tant aux patients qu'à leur entourage — [soit] obligation de déménagement à l'extérieur de la région, éloignement de leur famille, épuisement physique et psychologique;

«Considérant que la recommandation 11 des orientations ministérielles recommande un temps de déplacement maximal de trois heures aller-retour pour accéder aux services d'hémodialyse et que celle-ci n'est pas respectée partout [sur le territoire gaspésien];

«Considérant que plusieurs patients et intervenants ont dénoncé publiquement le niveau inadéquat des services d'hémodialyse en Gaspésie pour trouver une solution à leur situation respective — M. Jean Lapointe, de Gaspé, initiateur d'une pétition signée par 8 489 pétitionnaires, déposée le 29 octobre 2015; M. Cyril Gibeault, de Sainte-Anne-des-Monts, et M. Cyril Gibeault fils, de Granby;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous soussignés demandons au gouvernement du Québec, par l'entremise du ministère de la Santé et des Services sociaux, de mettre fin à cette situation inadmissible en implantant l'une ou plusieurs des alternatives suivantes, notamment, mais non limitativement : un service d'hémodialyse dans les centres hospitaliers de Gaspé et de Sainte-Anne-des-Monts; un service d'hémodialyse mobile sur le territoire; le service d'hémodialyse à domicile adéquatement subventionné.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions.

Interventions portant sur une violation de droit
ou de privilège ou sur un fait personnel

Décision de la présidence sur la recevabilité des questions de droit ou de
privilège soulevées les 26 et 27 octobre 2016 à l'égard de
Mme Dominique Savoie et de M. Michel Boulard

À la rubrique Interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel, eh bien, j'ai une décision à vous rendre concernant la violation de droit ou de privilège que j'ai reçue de M. le leader adjoint du deuxième groupe d'opposition et député de La Peltrie le 26 octobre 2016 et de M. le leader de l'opposition officielle et député de Matane-Matapédia le 27 octobre 2016. Alors, ceux qui nous écoutent, n'ajustez pas votre appareil, parce que vous allez me voir pendant un certain temps.

Alors, je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur la question de violation de droit ou de privilège soulevée à l'égard de Mme Dominique Savoie, ancienne sous-ministre au ministère des Transports, de la Mobilité durable et de l'Électrification des transports, et de M. Michel Boulard, ex-directeur aux Enquêtes et Audit interne de ce ministère.

Compte tenu de la complexité de cette décision, je vous avise que sa lecture sera passablement longue. Néanmoins, en plus d'expliquer en partie le délai qu'elle a nécessité pour sa rédaction, sa longueur témoigne du sérieux avec lequel la présidence a tenu à analyser cette importante question, qui touche tant aux droits des députés qu'à ceux des tiers qui viennent témoigner en commission parlementaire.

Je vous remercie donc à l'avance de votre indulgence et vous annonce d'emblée que, pour plus de clarté, je déposerai à la fin le texte de la décision ainsi qu'un document analysant les disparités entre les différents rapports dont elle traite et dont je vous parlerai plus tard. Je tiens à remercier les trois leaders, qui m'ont fait part avec éloquence de leurs points de vue respectifs sur ces questions lors de la séance du 27 octobre dernier. Passons maintenant au rappel des faits.

Un article paru le 17 mai 2016 faisait état de plusieurs problématiques au sein du ministère des Transports. Le lendemain, en réponse à une question à ce sujet, le premier ministre a déposé, lors de la période des questions et réponses orales, une liasse de documents contenant, entre autres, un rapport intitulé Rapport d'audit — Audit des professionnels en conformité des processus,de décembre 2014. Ce document lui avait été transmis par le bureau de Mme Dominique Savoie, alors sous-ministre aux Transports. Pour les fins de la présente décision, ce rapport sera désigné comme étant le rapport n° 1.

Ce même jour, en après-midi, Mme Savoie a comparu devant la Commission de l'administration publique, ci-après «la commission», dans le cadre de l'audition sur la gestion administrative et les engagements financiers du ministère des Transports du Québec en suivi d'un rapport du Vérificateur général. Son témoignage, qui était prévu de longue date, a néanmoins porté en grande partie sur le rapport n° 1 déposé plus tôt par le premier ministre.

Alors qu'elle était questionnée par les membres de la commission quant à l'intégrité de ce premier rapport, dans lequel il semblait, à sa face même, manquer des pages, Mme Savoie a déposé un deuxième rapport portant le même titre. Pour les fins de cette décision, ce rapport, également de décembre 2014, sera désigné comme étant le rapport n° 2. Lors du dépôt de celui-ci, elle a notamment mentionné, et je cite, entre guillemets : «On va vous déposer le même rapport, mais bien paginé. Il ne manque rien...»

• (10 h 20) •

Des voix : ...

Le Président : Je vais vous demander le silence, s'il vous plaît.

«Il ne manque rien. Ce que vous avez eu ce matin était le bon, mais était mal paginé. Vous [allez] pouvoir le remarquer puis le vérifier, c'est les mêmes choses. Il était juste mal paginé. Il ne manque pas de pages.» Fin de la citation.

Un peu plus loin, elle ajoutait, et je cite : «Je le répète, c'est le même contenu. Il n'y a pas de pages qui sont ajoutées ni retirées. Vous allez voir, même en le lisant, là, dans l'ancien, qu'il n'y a pas d'arrêt, il n'y a pas de phrases qui ne se suivent pas, là.» Fin de la citation.

Au cours du témoignage de Mme Savoie, les membres de la commission ont constaté des disparités entre les deux rapports. Le lendemain, une note ministérielle a été produite par M. Michel Boulard, alors à la Direction des enquêtes et audit interne du ministère. Cette note avait pour objet d'informer le ministre des problématiques survenues relativement au dépôt du rapport sur les PCP. Elle n'était donc pas destinée aux membres de la commission. Cette note mentionnait notamment que le rapport n° 1 a été — entre guillemets — «envoyé à l'Assemblée nationale par erreur — fermez les guillemets», qu'il constituait — ouvrez les guillemets — «une version préliminaire — fermez les guillemets» du rapport n° 2 et qu'il «n'a fait l'objet d'aucune altération — entre guillemets». Elle concluait également que le rapport n° 2 déposé à la commission constituait — entre guillemets — «bel et bien la dernière version du rapport d'audit de décembre 2014». À l'initiative du bureau de la sous-ministre, cette note a, par la suite, été transmise le 24 mai 2016 à la commission, a été déposée en séance de travail le 31 mai 2016.

Le mercredi 8 juin 2016, toujours dans le cadre du même mandat, la commission a entendu Mme Louise Boily, ancienne directrice des Enquêtes et Audit interne du ministre des Transports, et Mme Annie Trudel, enquêteuse. Lors de son témoignage, Mme Boily a notamment mentionné, et je cite : «Il y a eu des documents qui ont été déposés le 18 mai en [après-midi], à la période des questions à l'Assemblée nationale, et en après-midi, lors de la séance de travail de la Commission de l'administration publique. Alors, j'ai pris connaissance de ces documents une fois qu'ils ont été rendus publics. Alors, les documents qui portent mon nom présentent des caractéristiques de manipulation, [de] ce qui, pour moi, représente deux faux — fermez les guillemets.»

Mme Boily a alors déposé dans un autre rapport intitulé — ouvrez les guillemets — Projet de rapport final d'audit  Audit des travaux des professionnels en conformité de processus — fermez les guillemets — de mai 2015. Pour les fins de cette décision, le rapport sera identifié comme étant le rapport n° 3. Concernant la note ministérielle produite par M. Boulard, Mme Boily affirmait un peu plus loin, et je cite : «Pour moi, la note ministérielle déposée à la CAP — la Commission de l'administration publique — le 31 mai 2016, sur votre site Internet, est un faux, il sert à justifier deux faux.» Fin de la citation.

Le lendemain, soit le 9 juin 2016, une question de violation de droit ou de privilège était soulevée par le leader de l'opposition officielle alors concernant le rapport n° 1 déposé par le premier ministre le 18 mai 2016. Dans la décision que je rendais plus tard cette même journée, je concluais que rien dans les faits qui m'étaient soumis ne me permettait de conclure que le premier ministre avait l'intention de tromper l'Assemblée et ses membres en déposant ces documents. Je mentionnais aussi alors ce qui suit, et je me cite : «[À] la lumière du témoignage de Mme Boily, on peut raisonnablement penser qu'à première vue un document faux, contrefait, falsifié ou altéré a été déposé à l'Assemblée nationale. Cela semble être le cas — fermez les guillemets.»

Le 10 juin 2016, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et présidente de la Commission de l'administration publique déposait à l'Assemblée son 34e rapport sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics, mettant ainsi fin au mandat de la commission. Ce rapport, auquel ont souscrit l'ensemble de ses membres, comportait différentes recommandations, dont la recommandation 8.5, qui se lit comme suit, et je cite : «Que la présidente de la Commission de l'administration publique soit mandatée pour signaler une violation de droit ou de privilège de l'Assemblée relativement au témoignage rendu par Mme Dominique Savoie le 18 mai 2016 et aux documents déposés à cette occasion.» Fin de la citation.

L'Assemblée a ensuite ajourné ses travaux parlementaires pour la période estivale. Peu avant leur reprise cet automne, j'ai reçu copie d'une lettre du 13 septembre 2016 adressée à la présidente de la commission, signée par Mme Dominique Savoie. Cette lettre était accompagnée d'une déclaration solennelle de Mme Savoie, visait, aux dires de cette dernière, à offrir un éclairage plus complet aux parlementaires en lien avec la recommandation 8.5 du rapport de la commission.

Puis, le 22 septembre 2016, la présidence a reçu un avis de violation de droit ou de privilège de la part de Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, alors présidente de la commission. Or, puisque cet avis a été retiré depuis, comme je l'ai indiqué lors de la séance du 1er décembre dernier, cet aspect de la question est clos.

Par ailleurs, le 26 octobre 2016, le leader adjoint du deuxième groupe d'opposition et député de La Peltrie a envoyé à la présidence un avis de violation de droit ou de privilège concernant Mme Savoie et le ministère des Transports. Dans sa demande, le député allègue que Mme Savoie aurait contrevenu aux paragraphes 2°, 3°, 4° de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale notamment en produisant — entre guillemets — «[des] documents non conformes aux originaux — fermez les guillemets», en n'offrant pas une «collaboration pleine et entière — fermez les guillemets» aux membres de la commission et en ne respectant pas — ouvrez les guillemets — «[son] obligation de dire toute la vérité et de donner une version complète des faits — fermez les guillemets». Dans son avis, le leader adjoint du deuxième groupe d'opposition n'a pas référé à la déclaration solennelle de Mme Savoie. Selon lui, cette déclaration assermentée ne devait pas être considérée par la présidence, puisque Mme Savoie avait déjà eu l'occasion de s'expliquer lors de sa comparution devant la commission le 18 mai 2016. Elle n'aurait donc pas à bénéficier d'un droit de réplique.

Enfin, le lendemain, le 27 octobre 2016, la présidence a reçu, de la part du leader de l'opposition officielle et député de Matane-Matapédia, un avis de violation de droit ou de privilège concernant Mme Savoie et M. Boulard. Dans sa demande, le député allègue que Mme Savoie aurait commis un outrage au Parlement en y produisant deux copies falsifiées d'un rapport, soit les rapports nos 1 et 2, et en rendant un faux témoignage lors de sa comparution devant la commission le 18 mai 2016, contrevenant ainsi aux paragraphes 2°, 3° et 4° de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale.

De plus, selon lui, M. Boulard aurait aussi commis un outrage au Parlement en validant une note ministérielle concernant la validité de ces deux rapports, induisant ainsi délibérément en erreur la commission. Dans son avis, il traite de la déclaration assermentée de Mme Savoie, qui ne fait, selon lui, que mettre en lumière les contradictions de son témoignage du 18 mai 2016 en commission, ce qui militerait donc en faveur de la reconnaissance qu'un outrage a été commis. Voilà pour le rappel des faits.

Les questions auxquelles doit maintenant répondre la présidence sont les suivantes : Premièrement, est-ce que M. Michel Boulard a, à première vue, commis un outrage au Parlement en induisant délibérément en erreur la commission et en validant une note ministérielle concernant les rapports nos 1 et 2 produits devant l'Assemblée nationale et la commission le 18 mai 2016? Deuxièmement, est-ce que Mme Dominique Savoie a, à première vue, commis une atteinte aux droits de l'Assemblée au sens des paragraphes 2°, 3° et 4° de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale, notamment en produisant de faux documents, soit les rapports nos 1 et 2, et en rendant un témoignage faux ou incomplet lors de sa comparution devant la commission le 18 mai 2016?

Avant d'entrer dans l'analyse de ces questions, j'aimerais traiter du rôle de la présidence quant à l'appréciation de la lettre et de la déclaration assermentée transmises par Mme Savoie le 13 septembre 2016. En somme, la présidence doit-elle en tenir compte ou non dans le cadre de l'actuelle décision?

Comme l'a mentionné à plusieurs reprises la jurisprudence parlementaire, à ce stade-ci, le rôle de la présidence n'est pas de déterminer s'il y a eu ou non un outrage au Parlement, mais plutôt de déterminer si les faits soumis peuvent constituer, à première vue, un outrage au Parlement. La présidence doit alors déterminer si les faits sont suffisamment probants pour permettre, le cas échéant, à la Commission de l'Assemblée nationale et à l'Assemblée de poursuivre le processus afin de déterminer s'il y a eu ou non un outrage. Seule l'Assemblée a le pouvoir de décider s'il y a effectivement eu atteinte au privilège ou outrage du Parlement.

Toutefois, il faut rappeler l'importance que revêt le caractère probant des faits pour évaluer la recevabilité, à première vue, des violations de droit ou de privilège dans notre Assemblée.

• (10 h 30) •

En effet, contrairement à la majorité des assemblées parlementaires du type britannique, si une question de privilège est jugée recevable, la décision du président entraîne ici directement l'ouverture d'une enquête devant la Commission de l'Assemblée nationale. Ailleurs, cette décision de la présidence donne plutôt ouverture à la présentation d'une motion de renvoi à un comité pour étudier l'affaire plus en détail. Cette motion est ensuite mise aux voix, contrairement à ce qui se passe dans notre Assemblée. C'est donc à la suite d'une décision de la Chambre et non de la présidence que l'affaire est renvoyée au comité pour examen.

Il ressort de cela que la preuve soumise au soutien d'une telle question doit être complète et tenir compte de tous les éléments disponibles, puisque le caractère probant doit ressortir des faits à leur face même.

Dans le cadre d'un système démocratique comme le nôtre, le président a, bien entendu, le devoir de protéger les droits des députés. Il s'agit en fait de son premier rôle. En d'autres mots, la présidence doit tout faire pour s'assurer que les députés disposent des moyens appropriés pour exercer pleinement leur rôle parlementaire. Cela dit, elle ne doit pas ignorer les droits des tiers qui pourraient être affectés par un geste commis par l'Assemblée. Compte tenu des pouvoirs extraordinaires dont dispose l'Assemblée en vertu de ses privilèges parlementaires, il importe, lorsqu'un tiers est visé par une question de privilège, comme en l'espèce, de tenir compte de tous les éléments disponibles afin de rendre une décision équilibrée et respectueuse de tous. C'est dans cette optique que la présidence a tenu compte dans son analyse des documents transmis par Mme Savoie.

Avant de traiter la question concernant Mme Savoie, j'entends d'abord disposer de celle concernant M. Michel Boulard.

Le leader de l'opposition officielle allègue que M. Boulard aurait commis un outrage au Parlement en validant la note ministérielle du 19 mai 2016. Selon lui, par cette note, M. Boulard visait délibérément à induire en erreur la commission.

Rappelons que, tel qu'elle l'indique, cette note ministérielle a été rédigée le lendemain de la comparution de Mme Savoie devant la commission pour — et je cite, entre guillemets — «informer le ministre des problématiques survenues relativement au dépôt du rapport sur les PCP». Fin de la citation. La note n'était donc pas destinée, lors de sa rédaction, aux membres de la commission. Elle a été transmise à la commission lors de l'envoi par le bureau de la sous-ministre des documents que Mme Savoie s'était engagée à lui transmettre au cours de son témoignage.

Dans cette note, M. Boulard explique que les incohérences dans la numérotation des pages du rapport n° 1 découleraient d'un problème avec le logiciel du traitement de texte Word. Il y affirme également que, malgré les apparences résultant de ce problème de numérotation, le rapport n° 1 n'a subi aucune altération. Enfin, il affirme que le rapport n° 1 constitue une version préliminaire du rapport n° 2 et confirme que ce dernier constitue bel et bien la dernière version du rapport qui a été envoyé à l'unité administrative auditée.

De ces affirmations, nous pouvons donc tirer les constats suivants : en aucun temps la note ne se penche spécifiquement sur les différences entre les rapports n° 1 et n° 2, pas plus qu'elle ne réfère au rapport n° 3.

La jurisprudence parlementaire a bien établi que le fait d'induire sciemment la Chambre ou ses commissions en erreur peut constituer un outrage au Parlement. Cette même jurisprudence a aussi établi qu'il faut démontrer le caractère intentionnel de l'acte dénoncé afin de conclure qu'un individu a sciemment induit la Chambre en erreur.

Dans le cas d'un député, la jurisprudence parlementaire rappelle de plus le principe fondamental selon lequel il faut accepter la parole d'un député. Cette présomption en faveur d'un député ne peut être renversée que si le député lui-même, lors d'une intervention, induit l'Assemblée en erreur et par la suite reconnaît l'avoir délibérément trompée. Rappelons que, dans une telle situation, on doit à tout le moins être en présence de deux versions clairement contradictoires dans le cadre de débats parlementaires.

Comme le mentionnait à juste titre le leader de l'opposition officielle dans sa plaidoirie, cette présomption ne peut toutefois s'appliquer aux tiers qui viennent témoigner en commission. Ainsi, dans un tel cas, il devient nécessaire d'évaluer plus en détail le critère de l'intention spécifique de vouloir induire l'Assemblée ou une commission en erreur.

À cet égard, la jurisprudence parlementaire néo-zélandaise précise que, pour qu'un outrage puisse être établi à partir d'un témoignage d'un tiers, entre guillemets, «l'intention de tromper la commission doit être très claire — fermez les guillemets».

En l'espèce, il est impossible pour la présidence de conclure à l'intention de M. Boulard d'induire la commission en erreur sur la base du témoignage de Mme Boily, qui prétend que la note a servi à valider deux faux.

Je rappelle, d'une part, que M. Boulard n'a pas été entendu par la commission et n'a fait que signer la note ministérielle qui vise à fournir des éclaircissements sur les versions des rapports n° 1, n° 2. D'autre part, cette note n'était pas destinée aux membres de la commission, mais bien au ministre, tel qu'elle l'indique.

Ainsi, les faits qui m'ont été soumis ne me permettent pas de conclure que M. Boulard a rédigé cette note dans le but d'induire délibérément la commission en erreur. Une différence d'interprétation peut certes être constatée entre ce que la note de M. Boulard présente à l'égard des rapports nos 1 et 2 et ce que Mme Boily a affirmé dans son témoignage. Cependant, on ne peut conclure, sur la base de ces versions contradictoires, à l'existence d'une telle intention de tromper la commission. Pour cette raison, la question soulevée à l'égard de M. Boulard n'est pas recevable, à première vue.

Mme Dominique Savoie. J'en viens maintenant aux questions... Je vais prendre un peu d'eau, ça va finir par... je vais finir par avoir besoin de ça, moi. Je viens maintenant aux questions qui concernent Mme Dominique Savoie.

Dans les deux avis reçus par la présidence, on soumet qu'elle aurait contrevenu aux paragraphes 2°, 3°, 4° de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale. Je vous rappelle que l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale dit ceci... Je disposerai d'abord du quatrième paragraphe de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale, qui prévoit que constitue une atteinte aux droits de l'Assemblée le fait de — et je cite — «contrefaire, falsifier ou altérer, dans le dessein de tromper, un document de l'Assemblée, d'une commission ou d'une sous-commission ou un document présenté ou produit devant elles». Fin de la citation.

En d'autres mots, cet article vise spécifiquement les cas où les documents officiels émanant de l'Assemblée ou de l'une de ses commissions auraient été faussés dans le dessein de tromper, ou encore que les documents déposés ou produits devant l'Assemblée ou l'une de ses commissions auraient été faussés dans le même but, postérieurement à leur dépôt ou production.

Ce paragraphe de l'article 55 n'est pas applicable dans le cas présent puisque les documents concernés ne sont pas des documents qui émanent de l'Assemblée ou de l'une de ses commissions. Ils sont plutôt des documents provenant du ministère des Transports. De plus, il ne s'agit pas ici de cas où des documents déjà déposés à l'Assemblée ou en commission auraient été, à la suite de leur dépôt, contrefaits, falsifiés ou altérés dans le dessein de tromper.

Je vais maintenant traiter de l'application du troisième paragraphe de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale, qui prévoit que constitue une atteinte au droit de l'Assemblée le fait de — et je cite — «présenter à l'Assemblée [ou] à une commission ou à une sous-commission un document faux dans le dessein de tromper».

Peu de décisions ont traité de la question de la présentation de faux documents devant l'Assemblée ou ses commissions. Toutefois, l'une d'elles est venue préciser, en 1994, que le troisième paragraphe de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale «ne peut être soulevé pour le [simple] motif qu'un document est incomplet» et que «seule la présentation d'un document faux dans le dessein de tromper [...] peut être sanctionnée sur la base de cet article».

Tel que je viens de le mentionner, ce paragraphe de l'article 55 contient de surcroît l'expression «dans le dessein de tromper», qui, encore récemment dans la jurisprudence, a été assimilée à la notion «d'induire sciemment en erreur». L'inclusion de cette expression signifie clairement qu'une intention fautive doit être démontrée pour qu'il y ait effectivement atteinte aux droits de l'Assemblée.

Il faut donc, d'une part, que soit posé le geste de présenter à l'Assemblée ou à une commission un document faux et, d'autre part, que cela soit fait avec l'intention de tromper.

Qu'en est-il à l'égard des trois rapports dont il est question en l'espèce? Rapport n° 1 versus le rapport n° 2. Le rapport n° 1, déposé par le premier ministre le 18 mai 2016, est un document qui semble, à sa face même, être une version-projet du rapport n° 2 présenté par Mme Savoie devant la commission ce même jour, ce que Mme Savoie a d'ailleurs affirmé dans son témoignage devant la commission, puis confirmé dans son affidavit. À titre illustratif, le rapport n° 1 contient de multiples coquilles et fautes d'orthographe qui sont corrigées dans le rapport n° 2. De plus, le rapport n° 1 émane de la Direction de l'audit et de l'évaluation des programmes du ministère des Transports, alors que le rapport n° 2 porte le nom de la nouvelle dénomination de cette direction, soit la Direction de l'audit interne et de l'évaluation des programmes.

Mis à part les documents accompagnant le rapport n° 1 qui, selon Mme Savoie, ne faisaient pas partie intégrante de ce dernier, mais qui ont été déposés en liasse avec celui-ci à sa demande afin de permettre une meilleure compréhension des enjeux, le contenu des rapports nos 1 et 2 est, quant au fond, très similaire. On remarque toutefois que l'ordre et le libellé des recommandations à la fin du rapport sont modifiés. Selon Mme Savoie, ces modifications dans la sémantique et l'ordonnancement des recommandations n'ont aucun impact sur leur contenu. De même, pour ce qui est des annexes 1 et 2, leur contenu est, à l'exception de quelques coquilles, correctifs ou différences dans leur mise en page, très similaire d'une version à l'autre du rapport.

• (10 h 40) •

L'une des deux seules différences notables entre les deux rapports est la présence d'une annexe 3 intitulée Recommandations — de la direction des audits, soit dit — au plan d'action de la DGT qui se trouve uniquement dans le rapport n° 2. Soulignons cependant que cette annexe, qui ne compte qu'une seule page, ne fait que reprendre intégralement les mêmes six recommandations contenues au rapport n° 2 et n'y ajoute absolument rien de nouveau.

Pour ce qui est du rapport n° 2, déposé par Mme Savoie, en comparaison avec le rapport n° 3, déposé par Mme Boily, leur contenu principal, qui se trouve aux pages 1 à 50, est, à l'exception de quelques petites modifications, encore plus similaire.

Premièrement, tout comme le rapport n° 2, le rapport n° 3 provient de la direction des audits du ministère des Transports.

Et, en ce qui concerne les trois premières annexes de ces deux rapports, elles sont quasi identiques. Cependant, une différence notable distingue les rapports nos 2 et 3 : dans le rapport n° 3, un document intitulé Analyse sommaire  Rapport d'audit des professionnels en conformité des processus a été joint à l'annexe 3. Ce document, qui porte la date du 22 mai 2015, constitue à lui seul un rapport distinct, soit la réponse de la Direction de la programmation, des ressources territoriales au rapport de décembre 2014. Soulignons que ce rapport comporte sa propre table des matières et ses propres annexes, et sa mise en page est différente du reste du rapport.

De plus, le rapport n° 3 comporte, aux pages 92 à 96, une annexe 4 intitulée Réponse de la direction des audits aux commentaires et plan d'action de la DGT. Cette annexe, qui ne se retrouve pas dans le rapport n° 2, se veut une réponse de la direction des audits aux commentaires fournis par la Direction générale des territoires dans le document joint à l'annexe 3 du rapport n° 3.

En somme, nous pouvons donc résumer les distinctions entre les rapports nos 2 et 3 comme suit : il s'agit à la base principalement du même rapport. Cependant, le rapport n° 3 comporte deux éléments supplémentaires, soit la réponse de mai 2015 de la Direction de la programmation et des ressources territoriales à la suite du rapport de décembre 2014, de même que la réponse de la direction des audits à ces commentaires et le plan d'action de la Direction générale des territoires.

Maintenant, la question qui se pose est la suivante : Lequel du rapport n° 2 ou 3 constitue la version finale de ce rapport?

Selon Mme Savoie, ce devrait être le rapport n° 2 parce que, comme elle l'explique dans son affidavit — et je cite — «les documents produits ultérieurement à un rapport : réponse [à] la direction vérifiée, plans d'action, etc., ne devraient pas être considérés comme partie intégrante du rapport puisqu'ils sont en fait des documents faisant état du suivi donné au rapport lui-même. [...]Dans mon esprit, le rapport qui devrait être soumis [aux parlementaires] est celui posant un diagnostic [...] en concluant à des recommandations.» Fin de la citation. Soit le rapport n° 2, évidemment.

Selon Mme Boily, ce serait plutôt le rapport n° 3 qui constitue le rapport final parce que, comme elle l'a expliqué lors de son témoignage devant la commission — et je la cite — «ce qui est important, c'est le rapport final qu'on a déposé le 26 mai 2015 au comité d'audit et qui constitue le rapport d'audit officiel, parce qu'il a été déposé au comité d'audit interne et d'évaluation des programmes.» Fin de la citation.

Mme Boily n'explique pas pourquoi le rapport n° 3, bien qu'étant le rapport final selon elle, débute par les mots «projet de rapport final d'audit», pas plus qu'elle ne mentionne la raison pour laquelle l'entête des pages du rapport comporte la mention «rapport d'audit, projet».

De même, elle n'explique pas pourquoi, bien que la première page du rapport n° 3 comporte la date de mai 2015, l'entête des pages du rapport indique «décembre 2014».

Quant au rapport joint à l'annexe 3, Mme Boily n'explique pas non plus la différence de mise en page, pas plus qu'elle n'explique pourquoi sa pagination a été modifiée manuellement, de sorte que sa page couverture devienne la page 52 du rapport n° 3, sa page 2 est la page 53 du rapport, etc., et ainsi de suite, jusqu'à la page 90.

Dans la décision que je rendais le 9 juin dernier concernant le dépôt du rapport n° 1 à l'Assemblée, j'affirmais qu'à la lumière du témoignage de Mme Boily on pouvait raisonnablement penser qu'à première vue un document faux, contrefait, falsifié ou altéré a été déposé à l'Assemblée nationale. Cependant, à la suite d'une analyse approfondie de ces rapports, on constate que la mésentente sur ce qui constitue le vrai rapport parmi ces trois documents résulte d'une différence d'interprétation quant à ce qui en constitue la version finale. Comme le rapport n° 2, déposé par Mme Savoie, et le rapport n° 3, déposé par Mme Boily, sont pratiquement identiques dans leur corps, pour déterminer que le rapport n° 2 est un faux, il faudrait démontrer que les ajouts à l'annexe 3 et que l'addition d'une annexe 4 au rapport n° 3 faisaient partie intégrante du rapport et qu'ils ont été délibérément tranchés par Mme Savoie.

À la lumière des éléments soumis à la présidence, si l'un des documents était effectivement un faux, ce que je ne suis pas en mesure d'affirmer, il serait ainsi difficile de déterminer qu'il s'agit du rapport n° 2 déposé par Mme Savoie ou du rapport n° 3 déposé par Mme Boily.

Puisque nous ne sommes pas ici en présence d'une preuve probante qui démontre que le rapport n° 1 ou le n° 2, pas plus que le rapport n° 3 ne constituent de faux documents, la question de privilège sous cet angle n'est donc pas recevable à première vue.

Au surplus, pour porter atteinte au troisième paragraphe de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale, il faut que soit démontrée l'intention de tromper. Après analyse, rien ne permet de conclure qu'il y a eu ici une intention de tromper l'Assemblée nationale.

Il me reste maintenant à analyser la présente question sous l'angle du deuxième paragraphe de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale. Je vous rappelle que ce paragraphe prévoit que constitue une atteinte aux droits de l'Assemblée le fait, et je cite, «de rendre un témoignage faux ou incomplet devant l'Assemblée, une commission ou une sous-commission».

Notre jurisprudence a confirmé en 2013 que «le fait — pour un témoin — de fournir des réponses fausses ou incomplètes aux questions posées par les députés peut constituer, à première vue, une entrave à l'exercice des fonctions de l'Assemblée de même qu'une atteinte à son autorité et à sa dignité». Je reviendrai un peu plus loin sur ce précédent.

Afin qu'une question soulevée en vertu de l'article 55.2° de la Loi sur l'Assemblée nationale soit déclarée recevable, à première vue deux éléments sont nécessaires.

Premièrement, une preuve probante doit démontrer que le témoin a bel et bien rendu un témoignage faux ou incomplet.

Deuxièmement, bien que, contrairement aux paragraphes 3° et 4° de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale, le deuxième paragraphe ne comporte pas l'expression «dans le dessein de tromper», il demeure essentiel de constater que, dans le témoignage faux ou incomplet allégué, une certaine intention d'induire en erreur ou de nuire au bon déroulement des travaux parlementaires doit être... En effet, il importe de différencier l'erreur de bonne foi ou témoignage inexact de l'omission volontaire de fournir des renseignements devant une commission ou la Chambre. Ainsi, pour que la présidence déclare recevable une question de privilège sur la base de ce paragraphe, elle doit à tout le moins pouvoir déduire clairement des faits soumis une intention fautive du témoin. Autrement dit, il faut plus qu'un témoignage non préparé et malhabile, car un témoignage faux ou incomplet implique une intention sous-jacente qui doit être démontrée.

En effet, le fait de présenter de faux documents ou de rendre un témoignage faux ou incomplet devant l'Assemblée ou une commission sont des gestes qui transposent, en droit parlementaire québécois, la notion d'induire délibérément en erreur, ce qui est reconnu dans d'autres Parlements du type britannique.

À cet égard, nous avons trouvé un précédent au Parlement néo-zélandais qui illustre bien la nécessité de déceler une intention fautive afin de constater, à première vue, une violation de droit ou de privilège en pareille situation. Dans cette décision de 1998, il était question d'un témoin qui avait donné une version des faits en commission sur des actions qu'il détenait dans une entité. Par la suite, il avait écrit à la commission pour donner une autre version des faits. La présidence de ce Parlement avait alors précisé que, dans tous les cas, une question de privilège vise un témoin qui aurait délibérément induit la Chambre ou un comité en erreur. Il doit être démontré que toute inexactitude est délibérée, puisqu'une tromperie, entre guillemets, innocente ne remplit pas les critères de l'outrage. Après avoir mentionné que les erreurs factuelles sont fréquentes à la Chambre et dans les comités, la présidence a alors affirmé que, bien qu'elles devraient être corrigées, personne ne devrait être tenu responsable d'un outrage au Parlement pour avoir fait une erreur de bonne foi.

De même, au Québec, dans le cas de 2013 auquel je faisais référence précédemment et qui constitue la seule occasion dans notre jurisprudence où une violation de privilège a été jugée recevable relativement à un témoignage effectué par un témoin en commission parlementaire, ces mêmes critères ont été appliqués. En effet, alors que le témoin avait nié à maintes reprises devant la commission avoir été informé d'une rémunération additionnelle versée par une fondation au directeur général d'un centre hospitalier, des copies de courriels transmis à la commission le lendemain de son audition démontraient qu'il était bel et bien informé de cette rémunération additionnelle. Ainsi, les faits soumis au soutien de la question de privilège soulevaient un doute non équivoque quant à la véracité du témoignage alors rendu et de la volonté du témoin de se soustraire de l'information aux parlementaires.

Qu'en est-il du cas de Mme Savoie? Débutons d'abord avec le premier volet de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale, soit le fait d'avoir rendu un témoignage faux. On soutient que Mme Savoie aurait rendu un faux témoignage devant la commission, d'une part, en regard de ce qu'elle y a dit sur le fractionnement de contrats au ministère des Transports et, d'autre part, en affirmant devant la commission que le rapport n° 1 et le rapport n° 2 étaient les mêmes et qu'il n'y avait pas de page qui y avait été ajoutée ou retirée.

• (10 h 50) •

Le fractionnement de contrats. Concernant les allégations de fractionnement de contrats, Mme Boily, lors de son témoignage, répondit au leader adjoint du deuxième groupe d'opposition qu'elle en avait constaté dans certains dossiers, et que ce fractionnement était documenté dans les rapports de vérification, et qu'elle en avait fait part, de cette situation, à Mme Savoie.

Les affirmations sont donc contradictoires avec celles de Mme Savoie, selon laquelle il n'y a pas eu, à sa connaissance, de fractionnement de contrats au ministère des Transports. Lorsque questionnée par le leader adjoint du deuxième groupe d'opposition sur cette question, Mme Savoie lui a affirmé n'avoir jamais fait de fractionnement de contrats. Elle lui a également répondu que le ministère avait procédé à l'analyse de ces contrats et avoir — entre guillemets — «eu des explications pour justifier ce qui donnait [une] apparence du fractionnement — fermez les guillemets».

En définitive, il s'agit donc de la parole de l'une contre celle de l'autre, et, à défaut d'avoir d'autres éléments probants permettant de prouver que Mme Savoie aurait menti dans le cadre de son témoignage sur le fractionnement de contrats, il est impossible d'établir qu'à sa face même ce témoignage serait faux. La question de privilège sur ce sujet n'est donc pas recevable à première vue.

Quant aux différences dans le contenu du rapport n° 1 et n° 2, les témoignages de Mme Boily et Savoie font état d'une divergence d'opinions entre ce qui pourrait constituer le vrai rapport et concernant la nature des différences entre les versions.

Certes, Mme Savoie a affirmé devant la commission que les rapports n° 1 et n° 2 étaient le même rapport, et qu'il s'agissait du même contenu, et qu'aucune page n'avait été ajoutée ou retirée. Est-ce que ces affirmations sont exactes? Comme l'a expliqué un peu plus tôt la présidence, il existe bien quelques différences entre ces deux rapports, le premier étant, comme il l'a été démontré, vraisemblablement une version préliminaire du second et dont la transmission au cabinet du premier ministre aurait été faite par erreur. Néanmoins, il ne saurait être question ici de faux témoignage. Les déclarations de Mme Savoie illustrent davantage un manque de rigueur dans ses réponses. Rappelons que Mme Savoie semble avoir réalisé en cours de témoignage que le rapport n° 1 était probablement une version préliminaire. Elle est par la suite venue préciser ses déclarations concernant les rapports n° 1 et n° 2 dans son affidavit.

Nous ne sommes donc pas en présence d'une preuve probante qui démontre que Mme Savoie aurait rendu un faux témoignage avec une action de tromper les députés à l'égard des différences constatées entre le contenu des rapports n° 1 et n° 2. De plus, rien dans son affidavit du 13 septembre 2016 ne contredit le contenu de son témoignage du 18 mai 2016 devant la commission. Mme Savoie clarifie principalement certaines affirmations de son témoignage et détaille son point de vue sur certains éléments sur lesquels elle était contredite par Mme Boily. Elle ne formule pas d'affirmation qui serait contradictoire avec le contenu de son propre témoignage devant la commission. La question de privilège n'est donc pas recevable, à première vue, sur cette base.

J'en viens maintenant au deuxième volet du deuxième paragraphe de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale, qui concerne le fait de rendre un témoignage incomplet.

C'est clair et il est clair que le témoignage de Mme Savoie aurait pu être plus précis à l'égard des distinctions entre le rapport n° 1 et le rapport n° 2. Si elle n'était pas en mesure de répondre plus en détail aux questions des membres de la commission au moment de sa comparution, elle aurait pu leur dire, leur demander un peu de temps pour faire ou s'engager à faire des vérifications plus poussées afin de s'assurer que toute l'information soit remise aux parlementaires. Mme Savoie a plutôt préféré répondre, comme elle le mentionne d'ailleurs dans son affidavit — entre guillemets — «sur-le-champ et de mémoire» — fermez les guillemets — aux parlementaires et, ce faisant, s'est contentée d'insister sur le fait que les deux versions du rapport étaient identiques.

De plus, les explications de Mme Savoie nous permettent de mieux prendre la mesure des différences entre les versions du rapport... n'ont été transmises à la commission que plusieurs mois après sa comparution. Or, pendant tout ce temps, une confusion concernant les différentes versions du rapport a été maintenue, ce qui a entraîné plusieurs répercussions. En effet, un débat d'urgence a eu lieu en raison des révélations faites en commission par Mme Boily à ce sujet. La présidence s'est prononcée sur un avis de violation de droit ou de privilège à l'égard du dépôt allégué d'un faux document par le premier ministre, et la commission a déposé son rapport recommandant qu'une violation de droit ou de privilège soit signalée à l'égard de Mme Savoie. L'attitude désinvolte de cette dernière a donc mené à beaucoup de questionnements et de débats qui auraient possiblement pu être évités si elle avait fait preuve de plus d'exactitude et de célérité.

Cependant, comme je l'expliquais précédemment, pour qu'une question de privilège soit déclarée recevable, à première vue et sous l'angle du deuxième paragraphe de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale, deux éléments sont essentiels : non seulement il faut démontrer une preuve probante à l'effet qu'un témoignage incomplet a bel et bien été rendu, mais une intention d'induire en erreur ou de nuire au bon déroulement des travaux parlementaires en soustrayant volontairement de l'information aux parlementaires... qui doivent aussi être démontrés.

On retiendra certainement que Mme Savoie a rendu un témoignage non préparé et malhabile devant la commission. Cependant, à la lumière des critères que je viens de mentionner, je ne peux arriver à la conclusion qu'elle a, à première vue, rendu délibérément un témoignage incomplet au sens de l'article 55 de la Loi de l'Assemblée nationale.

Ainsi, je ne peux conclure, en l'espèce, qu'il y a eu de la part de Mme Savoie une violation des paragraphes 2°, 3° et 4° de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale. La présidence n'est pas en train de dire ici qu'il ne s'agit pas d'une affaire troublante, elle dit simplement qu'on n'a pas démontré que le rapport n° 2 était un faux document et que le rapport n° 3 était un vrai document. La présidence constate également qu'on n'a pas démontré un élément intentionnel de tromper les membres de la commission ou de soustraire volontairement de l'information à ces derniers.

Ce n'est pas parce que la Commission de l'Assemblée nationale ne peut être saisie de l'affaire sous l'angle de la question de privilège qu'une autre commission ne pourrait pas s'y intéresser sous l'angle du contrôle parlementaire. Dans ce cas, les députés pourraient alors bénéficier de l'ensemble de l'analyse des rapports faite par la présidence, laquelle analyse sera déposée à la fin de la décision.

Cela dit, il est clair que, dans le cas en l'espèce, un cafouillage administratif a eu lieu dans la transmission des documents. D'ailleurs, Mme Savoie a admis elle-même qu'il y avait eu «des erreurs — et je cite, entre guillemets — dans la transmission des documents tant à l'Assemblée qu'à la Commission de l'administration publique» — fermez les guillemets — et que le ministère n'a pas disposé du temps nécessaire pour fournir des réponses les plus rigoureusement complètes. La présidence considère qu'il y a quelque chose de déplorable quant à la manière dont cette affaire a été gérée par les parties impliquées et le ministère des Transports.

Lorsqu'on occupe un poste dans la fonction publique, de surcroît lorsqu'il s'agit de la fonction de sous-ministre, il est impératif de s'assurer que l'information que l'on transmet à l'Assemblée nationale et à ses membres soit rigoureusement précise. On ne peut pas prendre à la légère la production d'un document à l'Assemblée nationale ou en commission, pas plus qu'un témoignage qu'on rend devant celles-ci.

Les mandats visant spécifiquement la reddition des comptes de ministères sont essentiels pour le bon fonctionnement de l'État québécois. Il est donc nécessaire que les fonctionnaires invités à s'exprimer dans le cadre de ce type de mandats soient parfaitement préparés pour leur témoignage et qu'ils soient conscients, qu'ils soient conscients de l'importance des informations qu'ils vont communiquer à l'Assemblée et à ses commissions dans de telles occasions.

Dans ce contexte, lorsqu'on témoigne devant une commission et qu'on n'est pas en mesure de fournir une information précise, il vaut mieux le dire clairement aux membres de la commission et par la suite s'engager à fournir les informations demandées dans les plus brefs délais. Or, c'est justement ce qui a fait défaut dans le présent cas.

Si l'envoi d'une lettre et d'un affidavit pour s'expliquer sur de tels événements est possible en droit parlementaire, cela aurait dû, selon la présidence, se faire beaucoup plus tôt. Rappelons qu'il s'est écoulé trois mois entre les événements et l'envoi de la lettre et de l'affidavit.

En tant que gardien des droits et privilèges de l'Assemblée et de ses membres, je tiens à lancer un message clair : Les élus du Québec occupent la charge ultime de veiller aux intérêts de la population. Bien entendu, pour exercer ce rôle, ils doivent pouvoir compter sur la collaboration essentielle des membres de la fonction publique. J'en profite d'ailleurs pour rappeler le profond respect que je porte et que l'ensemble des parlementaires portent aux employés de l'État.

Il est évidemment primordial que les gens qui viennent témoigner en commission, ou qui doivent s'y rendre, ou qui doivent y rendre des comptes agissent de manière respectueuse envers les députés et les importantes fonctions de contrôle parlementaire qui leur sont confiées.

Document déposé

En terminant, comme je m'y étais engagé, je dépose maintenant le texte de la décision ainsi qu'un document analysant les disparités entre les différents rapports, et je vous remercie de votre attention. L'annexe et l'analyse ont à peu près 200 et quelques pages. Si vous préférez, je peux ne pas le lire.

Est-ce qu'il y a des commentaires? M. le leader de l'opposition.

• (11 heures) •

M. Bérubé : M. le Président, nous accueillons votre décision. Elle est lourde de conséquences. Il est clair, à son écoute exhaustive, qu'elle représente une somme de travail importante pour vous et votre équipe.

Je retiens positivement que, si Mme Savoie n'a pas, à vos yeux, commis un outrage au Parlement, votre décision est sévère sur le comportement que doivent adopter les personnes qui témoignent devant les parlementaires. Je rappelle votre décision du 9 juin 2016, qui indiquait que «toute personne qui travaille pour l'État a l'obligation de respecter l'Assemblée nationale, son rôle, ses membres, et [ce] n'est pas négociable». Évidemment, nous souscrivons à cette vision.

S'il est évident pour tous les parlementaires qu'une erreur de bonne foi ne peut être considérée comme un outrage au Parlement, votre décision indique qu'une tromperie innocente — et ce sont vos termes — ne remplit pas non plus les critères d'un outrage. Nous aimerions obtenir la définition d'une tromperie innocente à vos yeux.

Vous dites plus loin que, pour prouver un outrage, les députés doivent démontrer de manière très claire l'intention de tromper. Vous fixez la barre très haute pour déterminer une violation de droit ou de privilège lorsque les parlementaires estiment se retrouver devant un faux témoignage ou une production d'un faux document, d'autant plus qu'un témoin peut, par affidavit, d'une certaine façon, réenligner son témoignage, et ce, plusieurs mois après les faits. N'y a-t-il pas lieu de questionner nos façons de faire lorsque des parlementaires reçoivent un affidavit recontextualisant un témoignage? Nous pourrions songer, dans ces cas, à réentendre le témoin ayant soumis un affidavit. Comment savoir dorénavant si un témoignage est le bon témoignage ou s'il sera suivi plus tard d'un affidavit reprécisant la pensée de la personne?

En lien avec votre décision, je dois vous avertir qu'il est de notre intention, et ce, en concordance avec la recommandation 8.2 du 34e rapport de la CAP, de redemander à ce que la Commission des transports et de l'environnement poursuive un mandat afin de faire l'examen de la gestion interne du ministère des Transports, de la Mobilité durable et de l'Électrification des transports. L'action de l'opposition officielle, en cette matière et en toute autre circonstance, est guidée par la recherche de la vérité. Nous poursuivrons ce travail, M. le Président.

Le Président : Merci. M. le leader adjoint du deuxième groupe d'opposition.

M. Caire : Merci, M. le Président. Je tiens d'abord à souligner le travail de moine qui a été fait par la présidence, par les gens de la table dans cette longue et documentée décision que vous venez de rendre.

Rappel de quelques faits. Dans votre décision, M. le Président, vous rappelez celle du 9 juin 2016, dans laquelle vous disiez, et je vous cite : «...à la lumière du témoignage de Mme Boily, on peut raisonnablement penser qu'à première vue un document faux, contrefait, falsifié ou altéré a été déposé à l'Assemblée nationale. Cela semble être le cas.» L'affidavit que vous soulignez vous-même comme étant extrêmement tardif, et tellement tardif qu'il est arrivé après la recommandation de la Commission de l'administration publique, dans sa recommandation 8.5, de soulever une question de droit ou de privilège, semble expliquer, à votre satisfaction, ces éléments-là. Ceci étant dit, je réitère qu'il s'agissait, pour Mme Savoie, d'un droit de réplique, droit de réplique dont n'ont jamais disposé Mmes Trudel et Boily. Je le souligne comme ça.

M. le Président, vous amenez aussi un autre élément qui est essentiel, vous nous dites : «En définitive, il s'agit donc de la parole de l'une contre [...] l'autre. [...]à défaut d'avoir d'autres éléments probants permettant de prouver que Mme Savoie aurait menti dans le cadre de son témoignage sur le fractionnement [de contrats], il est impossible d'établir [à] sa face même ce témoignage serait faux.»

Ce que la présidence nous dit, c'est que vous n'affirmez pas que Mme Savoie n'a pas menti, vous dites : J'ai deux témoignages contradictoires, je ne peux pas départager, faute d'autres preuves, lequel de ces deux témoignages est le vrai. Je pense que, dans sa quête de vérité, l'Assemblée nationale doit investiguer cet élément-là qui est soulevé par la présidence de façon très claire. Tellement claire, M. le Président, que vous en arrivez, dans vos conclusions, à dire : «Ce n'est pas parce que la Commission de l'Assemblée nationale — donc, la suite à donner, si vous en étiez arrivé à une autre conclusion — ne peut être saisie de l'affaire sous l'angle de la question de privilège qu'une autre commission ne pourrait pas s'y intéresser sous l'angle du contrôle parlementaire.»

Vous nous invitez, M. le Président, très clairement, à poursuivre le travail parce que vous en arrivez vous-même à la conclusion que tout ça est troublant et que les conclusions sont celles-là, non pas parce qu'il n'y aurait pas eu de violation de droit ou de privilège, mais parce qu'il n'y a pas de preuve probante pour vous d'arriver à cette conclusion-là. Je vous souligne donc, M. le Président, que le deuxième groupe d'opposition va poursuivre ce travail de recherche de vérité.

Le Président : M. le député de Mercier.

M. Khadir : M. le Président, j'aimerais d'abord obtenir, de votre part, une assurance que... Moi, je vais intervenir en tout respect, mais avec franchise. Je voudrais avoir, de votre part, une garantie que j'ai au moins le même temps que mes collègues, qui était environ deux minutes, 2 min 30 s, et que je ne serai pas interrompu.

Le Président : Allez-y, mais...

M. Khadir : Très bien.

Le Président : Bien, oui...

M. Khadir : M. le Président, la jurisprudence, c'est un peu comme les statistiques, on peut en faire une... (Interruption) Excusez-moi. On peut en faire une utilisation qui dépend largement de la volonté de celui ou celle qui doit les interpréter.

Entre la parole de Mme Savoie et de Mme Boily, vous avez eu de la difficulté, malgré un travail remarquable et de moine, comme ça a été dit, pour départager qui dit vrai, qui dit faux. Je comprends très bien qu'il vous est impossible, dans les circonstances, de trancher la question de la violation de privilège, mais, dans l'interprétation tout au long de votre argumentaire, que je comprends quand même, entre la parole de l'une et de l'autre, vous avez choisi de privilégier, en ne remettant pas en cause sa véracité, la version d'un haut fonctionnaire nommé par le bureau du premier ministre libéral, qui doit loyauté, qui doit loyauté à son gouvernement et à son premier ministre, c'est une question de solidarité gouvernementale, et les éléments que vous connaissez mieux que moi, plutôt que la version... Parce que, si vous aviez adhéré à la version de Mme Boily, qui est un lanceur d'alerte, dont la version est largement corroborée par le reste, le faisceau de témoignages révélés par une enquêtrice indépendante nommée par le ministre des Transports lui-même... Autrement dit, entre une personne qui doit loyauté au gouvernement et l'autre qui est une lanceuse d'alerte, vous avez choisi de privilégier la première.

C'est sûr que ça relève encore une fois la faiblesse de nos capacités, de la capacité de nos institutions, au lendemain de la décision du Commissaire à l'éthique, donc de la présidence de l'Assemblée nationale, à rendre responsables et imputables ceux et celles qui sont en position de commande et de décision. Je regrette...

Le Président : Bon, bien, je vous suggère une relecture. M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : Je suis un peu heureux, en fait, d'intervenir après le collègue de Mercier, parce que dans son argumentation, justement, il vient exprimer la limite que cette Assemblée peut avoir dans la capacité de déclarer justice. Je ne lui enlève pas le fait qu'il pense ce qu'il dit, il a bien le droit, en démocratie les gens ont droit à avoir leurs opinions. Ce que je regrette, c'est qu'il ne respecte pas l'opinion des autres qui peuvent être contraires. Et c'est un des problèmes que nous avons en cette Assemblée, forum partisan s'il en est, bien sûr, c'est normal, les partis politiques font partie de la démocratie, mais on doit accepter à la base que nous ne partagerons pas tous la même idée. Et, lorsqu'on s'écarte de ce respect essentiel de l'idée des autres, on s'écarte, je crois, de la démocratie. Je le dis en tout respect.

Je ne commenterai pas plus sur le travail qui a été fait par la table. Le qualificatif de la minutie que vous y avez mise est certainement bien approprié, et je vous en remercie grandement du travail que vous avez fait. Je retiendrai un élément, en fait, de votre décision. Je cite, à la page 29, vous dites : «J'en profite d'ailleurs pour rappeler le profond respect que je porte et que l'ensemble des parlementaires portent aux employés de l'État.»

Vous ajoutez : «Il est évidemment primordial que les gens qui viennent témoigner en commission ou qui doivent y rendre des comptes agissent de manière respectueuse envers les députés et [leurs] importantes fonctions de contrôle parlementaire qui leur sont confiées.»

• (11 h 10) •

Je veux vous dire que je partage entièrement votre opinion. Les gens qui viennent témoigner, comme nous tous, en commission parlementaire, nous avons un devoir de faire notre travail au mieux, avec le plus de rigueur, et c'est normal que les députés et, bien sûr, les députés d'opposition, qui ont un travail particulier dans l'opposition de voir au contrôle de la gouverne, de s'assurer de l'imputabilité, un mandat qui n'est pas si aisé que ça, c'est normal que cette question-là soit soulevée et que les gens qui viennent contribuer à nos travaux et à nos compréhensions le fassent au meilleur de leurs connaissances et de façon rigoureuse. Ils doivent, vous le dites, respecter notre travail de parlementaires. Je vous seconde et vous appuie. Nous devons la réciproque. Nous, comme parlementaires, devons aussi respect à ces gens dont vous dites que vous-même et plaidez ensuite que l'ensemble des parlementaires portent aux employés de l'État ce respect que vous avez et que vous nous appelez... en fait, que vous constatez que nous avons tous à l'égard des employés de l'État. Je veux vous dire que ce respect doit nous animer en tout temps. Il y a une réciproque là-dessus.

J'ai entendu mes collègues sur les intentions qu'ils voudront manifester, et ils auront tout le loisir de le faire dans le respect de notre règlement, personne ici ne va le nier. Je veux simplement ajouter certains éléments qui, jusqu'à un certain point, vont dans la même direction qu'eux. En ce moment, il y a déjà, sur des faits similaires ou plus largement que ceux qui ont été mentionnés, il y a déjà une enquête de l'UPAC qui est en cours, et, le 24 mai dernier, le président du Conseil du trésor a mandaté la Vérificatrice générale pour faire la lumière sur tous ces travaux, tous ces faits qui ont été révélés, et touchant notamment la gestion des contrats au ministère des Transports. Et le mandat, je tiens à le rappeler, le mandat a été accepté par la vérificatrice. On a donc, en ce moment, au nom de cette Assemblée et de ses parlementaires, deux institutions créées par cette Assemblée, soit le Vérificateur général et l'UPAC, qui sont à faire des enquêtes.

D'entrée de jeu, je prenais à la volée le commentaire du collègue de Mercier pour constater que nous avons les capacités et les moyens de poser des questions. Je ne crois pas que nous soyons devenus un tribunal, et je laisse aux enquêteurs, que nous avons mandatés dans des institutions créées par nos lois, le travail de faire la lumière et si tant est qu'il y ait un tribunal qui pose des jugements. Merci, M. le Président.

Le Président : Je vous remercie, tous les quatre orateurs, sur cette question-là. Je vais conclure et clore en disant ceci : Effectivement, vous avez eu raison puis vous l'aviez tout à fait constaté, c'est probablement le jugement le plus complexe qu'a été appelé à rendre la présidence pour les, peut-être, 25, 30, 40 dernières années. Ça a été un peu plus long que je l'aurais souhaité, mais je n'ai pas pu faire autrement que de prendre tout le temps nécessaire. Vous avez vu probablement la douzième version du premier jet que nous avons fait.

Ceci étant dit, il y a des questions qui ont été soulevées par notre collègue le leader de l'opposition, et on va tenir compte de cette question-là. Vous avez soulevé — d'ailleurs, je le soulève moi-même dans le jugement —qu'il y a possibilité qu'une commission puisse s'attarder et compléter le travail s'il y a lieu. Et, dans ce cas-là, je le dis : Les documents que nous avons déjà traités sont à la disposition des parlementaires qui voudraient pouvoir travailler avec. Il y a, comme j'ai dit tout à l'heure, au-delà de 200 quelques pages de travaux supplémentaires qui ont été faits pour bâtir le jugement que j'ai rendu ce matin.

Alors, puisque nous en sommes là, nous allons continuer.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période des questions et réponses orales. Et je cède la parole... et vous m'en excuserez, M. le chef de l'opposition officielle, c'était un peu plus long, ce matin, que peut-être prévu...

Une voix : ...

Le Président : Mais vous êtes patient. Bon, on a étiré votre patience un peu, mais on va vous permettre, aujourd'hui, de vous donner la parole. En principale, M. le chef de l'opposition officielle.

Appui au secteur forestier

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : M. le Président, il n'y a pire danger pour l'emploi, au Québec, que la nouvelle salve du U.S. Lumber Coalition contre l'emploi forestier. Dans toutes les régions — 5 000 emplois en Abitibi, 5 000 au Saguenay, il y en a en Gaspésie, Chaudière-Appalaches, 5 000 dans la métropole — il n'y a pire danger que celui-là.

La dernière fois qu'ils se sont attaqués à notre industrie, il y avait, au Québec, 90 000 emplois dans notre industrie forestière; il n'y en a plus que 60 000, et 60 000 fragilisés par les salves précédentes. C'est la cinquième fois en 20 ans qu'ils nous font le coup. Et ils ont une aide collatérale, celle du gouvernement canadien, qui jamais n'a défendu franchement le régime forestier québécois.

Des réformes ont été introduites par le parti qui forme le gouvernement pour faire en sorte que notre régime forestier soit en tous points inattaquable, et donc la seule réponse, ce serait de demander au gouvernement canadien d'exclure le Québec, de demander l'exclusion du Québec des droits compensateurs que les fédéraux vont demander.

Est-ce que c'est ce que le premier ministre a demandé à Justin Trudeau lorsqu'il l'a vu, il y a 10 jours, à Madagascar?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : M. le Président, mon collègue essaie désespérément d'avoir un relevé des moments et des contenus précis de mes conversations avec le premier ministre du Canada. Ça n'arrivera pas ici ni ailleurs.

Ce que je vais lui dire, cependant, c'est que, d'une part, ce qu'il indique, ce qu'il indique quant à la situation aux États-Unis confirme le risque du protectionnisme. Et je l'amène à méditer ça, compte tenu des possibilités qu'il a lui-même évoquées au cours des derniers jours. Les politiques protectionnistes des deux côtés de la frontière nuisent à l'emploi et de la prospérité.

D'autre part, effectivement, parmi les demandes fondamentales que nous faisons, c'est la prise en compte du caractère spécifique du régime forestier du Québec qui a été adopté ici, mis en place et qui comprend un mécanisme de fixation des prix selon un libre marché, et je pense qu'on va le réaffirmer et le demander. On demande également que notre part de marché soit maintenue et on demande une considération spécifique pour les installations frontalières, qui, bien sûr, sont très près de la frontière du Maine, par exemple. Alors, ces demandes sont bien connues.

Pour s'assurer, pour s'assurer que le point de vue du Québec est bien représenté à la table de négociation — bien sûr, dans cette période d'intérim de la présidence américaine, tout ça est un peu instable — nous avons demandé à M. Raymond Chrétien de se rendre lui-même à titre de notre représentant, rémunéré par le Québec, de façon à veiller à ce que les intérêts du Québec soient non seulement défendus, mais qu'on en fasse la promotion, de ce régime forestier.

Maintenant, pour indiquer au collègue l'ampleur, je dirais, du défi devant nous, la cible continue à s'éloigner du côté américain, parce que, bien sûr, on commence par dire que l'industrie est subventionnée; quand on leur démontre que ce n'est pas vrai, on change de tactique. Maintenant, le simple fait que l'exploitation forestière a lieu sur des terres publiques est, pour certains Américains, certains industriels américains...

Le Président : En terminant.

M. Couillard : ...une mesure protectionniste. Alors, c'est difficile, mais on va...

Le Président : Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : On le sait, on gagne toujours à la fin, mais on a perdu des dizaines de milliers d'emplois, et c'est encore à risque maintenant. Alors, je lui demande à lui, le premier ministre : Qu'a-t-il dit à Justin Trudeau, Justin Trudeau qui a affaibli la position de négociation du Canada et du Québec encore plus en acceptant le principe de quotas, des quotas qui signifieraient une réduction de notre production, donc de l'emploi?

Lui a-t-il dit que c'était inacceptable? Lui a-t-il demandé de changer de position? Que lui dit-il lorsqu'il le voit?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Alors, ces conversations regardent les deux protagonistes de la conversation, mais ce que je dirais, M. le Président...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! La question a été posée parfaitement et dans l'ordre, je voudrais entendre la réponse avec le même ordre.

M. Couillard : Alors, M. le Président, ce que je vais répéter d'abord, c'est que la préoccupation pour les emplois, les familles forestières, elle est au coeur de ma préoccupation, de notre préoccupation. C'est vrai dans le dossier du bois d'oeuvre, c'est vrai dans le dossier du caribou forestier. C'est vrai dans tous les horizons où, actuellement, on voit des menaces se profiler pour notre industrie forestière. Alors, effectivement, nous, on demande à ce que le caractère spécifique du régime forestier québécois soit pris en compte dans les négociations et, évidemment, dans le résultat final des négociations.

Maintenant, un jour viendra de deux solutions, de deux choses, l'une, ou on aura un accord négocié et on verra à ce que les intérêts du Québec y soient bien représentés, ou il n'y aura pas d'entente négociée...

Le Président : En terminant.

M. Couillard : ...et là on est devant une perspective de poursuite...

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Alors, je n'ai pas entendu le premier ministre dire qu'il était inacceptable que notre négociateur fédéral Justin Trudeau ait affaibli notre position de négociation. Je ne l'ai pas entendu publiquement, je voulais savoir s'il le lui avait dit privément. Il ne veut pas nous le dire. J'en conclus que ce n'est pas le cas.

Je veux savoir maintenant... Dans deux mois, les tarifs compensatoires vont commencer à s'appliquer. Garantit-il qu'il y aura des garanties de prêt à hauteur de 300 millions pour l'industrie forestière québécoise?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Alors, c'est une autre remarque que j'ai faite à plusieurs reprises, de plusieurs façons. Bien sûr, on souhaite une issue plus positive, on souhaite qu'il y ait un accord qui soit satisfaisant, avec lequel l'industrie peut continuer à progresser au cours des prochaines années. Mais, comme je le disais à la fin de ma réponse précédente, l'alternative, malheureusement, s'il n'y a pas d'accord, c'est une suite ininterrompue de poursuites judiciaires et de droits compensatoires. Même si on gagne toujours et on a toujours gagné, les droits s'appliquent.

Alors, effectivement, M. le Président, nous demandons à ce que le gouvernement fédéral lui-même, et le gouvernement du Québec prendra sa part de responsabilité, établisse un programme de garantie de prêt pour soutenir nos entreprises du domaine forestier. Nous le demandons avec insistance et nous le répéterons. Et le gouvernement du Québec participera à cet effort parce que ce qui compte, pour nous...

• (11 h 20) •

Le Président : En terminant.

M. Couillard : ...c'est l'emploi partout.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Le premier ministre dit qu'il le demandera. Moi, ce que je lui demande, là, c'est : Peut-il dire aujourd'hui que, quelle que soit la conclusion de ses discussions avec le fédéral, le Québec sera présent pour une garantie de prêt à la hauteur de ce qui est nécessaire? C'est ça qu'ils veulent savoir.

Est-ce qu'il peut garantir ça pour qu'on ne perde pas 30 000 emplois comme la dernière fois?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Alors, je vais répéter que, oui, on sera là. On sera là à la hauteur requise pour les dommages réels constatés, et on verra s'il y a des dommages, et on espère qu'il y en aura peu. Parce qu'encore une fois travaillons pour qu'on ait, des deux côtés de la frontière, le réalisme de constater qu'un accord négocié est beaucoup mieux qu'une ambiance de poursuites continuelles. Même si nous, on gagne toujours, de notre côté de la frontière, même si on gagne toujours les causes, on sait l'effet déstabilisant que ça a pour nos employés, nos travailleurs forestiers et leur famille. Alors, oui, on sera là. On sera là à la hauteur requise, mais, avant d'arriver là, continuons nos efforts, avec l'accord de tous les partis ici, pour défendre le régime forestier québécois et son caractère spécifique, protéger nos installations frontalières et protéger notre part de marché. C'est ça qu'il faut continuer à faire, M. le Président.

Le Président : Complémentaire, M. le député de Saint-Jean?

M. Turcotte : ...principale.

Le Président : Principale, M. le député de Saint-Jean.

Financement des ressources intermédiaires

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Pour tenter de régler son échec cuisant de réduire les temps d'attente dans les urgences, le ministre de la Santé s'appuie sur les ressources intermédiaires, ces ressources privées entre les soins à domicile et les CHSLD. Mais il y a un problème : avant de créer de nouvelles places en RI, il faut financer adéquatement celles déjà existantes. L'association des RI du Québec dit : C'est bien correct de vouloir ouvrir de nouvelles places, mais, nous, ce qu'on demande, c'est d'abord de consolider les places existantes. Ce qu'on veut, c'est des investissements pour avoir du personnel qualifié, pour pouvoir garder nos employés et pour garantir la qualité des services et la sécurité des usagers. Mais, du côté du ministère, c'est le silence radio.

Le ministre va-t-il régler les problèmes de sous-financement des ressources intermédiaires déjà existantes avant d'en ouvrir de nouvelles?

Le Président : Mme la ministre déléguée à la Réadaptation.

Mme Lucie Charlebois

Mme Charlebois : Merci, M. le Président. L'occasion m'est prêtée, ce matin, pour dire à quel point ces ressources sont importantes pour nous et que les ressources doivent donner les services pour les citoyens sur... les services qui correspondent aux besoins de la population, finalement. Et, vous le savez, M. le Président, j'en ai déjà parlé en cette Chambre, on est en négociation en ce moment. Il y a cinq ententes de négociation qui ont déjà été conclues à ce moment-ci.

Je sais que mon collègue le ministre de la Santé a annoncé des sommes, hier, pour justement ouvrir davantage de places, et ce qu'on souhaite faire, M. le Président, c'est servir davantage de population. Les négociations n'ont rien à voir avec l'annonce de mon collègue d'hier. Plutôt que de se buter à ce genre de question, moi, j'aimerais beaucoup qu'on parle de l'ensemble des services à donner à l'ensemble de la population. Il faut, à ce moment-ci... si on a signé avec cinq... on a fini par avoir cinq ententes de principe, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas arriver au reste des négociations avec un résultat positif. Il faut s'asseoir à la table, il faut vouloir négocier, et tout ça, M. le Président, c'est dans le but de servir davantage de gens, c'est dans...

Le Président : En terminant.

Mme Charlebois : ...le bien-être de l'ensemble de la population que nous travaillons.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Saint-Jean.

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : M. le Président, le négociateur n'a même pas demandé de négocier à la table, c'est n'importe quoi. M. le Président, ce que fait le ministre, c'est prendre l'argent économisé sur le dos des personnes qui résident actuellement dans les ressources intermédiaires pour créer de nouvelles places pas mieux financées. Les RI ont les mains liées, ils ne peuvent pas faire de moyen de pression. Ce sont des personnes travaillantes qui oeuvrent à chaque jour, au quotidien, pour des personnes vulnérables dans des conditions extrêmement difficiles, et le ministre profite de ça.

Est-ce qu'ils vont régler la question?

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, manifestement, le député de Saint-Jean est probablement la seule personne au Québec qui n'a pas compris qu'on investissait 100 millions de dollars pour apporter de nouvelles ressources, 2 100 places supplémentaires offertes au réseau pour désengorger les urgences parce que les patients restent à l'urgence parce qu'ils ne peuvent pas monter à l'étage, parce qu'il n'y a pas de ressource intermédiaire à l'extérieur de l'hôpital. Et c'est ce qu'on a annoncé hier, et ce que le député de Saint-Jean vient de nous annoncer, c'est que ce n'est pas une bonne affaire. Il est la seule personne, M. le Président, qui ne comprend pas cette mécanique simplement arithmétique.

Le Président : En terminant.

M. Barrette : Alors, 2 100 places, incluant des places en ressource intermédiaire. 100 millions de dollars. Qu'est-ce qu'il y a de plus...

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Saint-Jean.

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : M. le Président, le ministre se croit tellement bon qu'il est capable de faire deux choses à la fois, il est capable de créer de nouvelles ressources intermédiaires et en même temps régler le cas de celles déjà existantes.

Pour qu'il y ait du personnel formé, du personnel en nombre suffisant pour répondre aux besoins et s'assurer que ce personnel-là reste dans les ressources intermédiaires, c'est simple, M. le Président, qu'il règle la question.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Une voix : ...

Le Président : M. le ministre de la Santé, je vous donne la parole, mais prenez-la pas avant que je vous l'offre. M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Merci, M. le Président. M. le Président, c'est la nouvelle politique du Parti québécois, la politique de la mauvaise humeur, de la mauvaise nouvelle quand il y a une bonne nouvelle. Nous développons, M. le Président, une politique qui d'ailleurs était celle du Parti québécois en 2013 — voulez-vous que je cite la 2013, le Parti québécois? — qui disait : «Avec les lits qu'on a actuellement, on est capables de répondre aux besoins de la population pour les 10 à 15 prochaines années sans avoir besoin d'en construire.» Et il continue en disant : «Il faut développer le maintien à domicile et des ressources intermédiaires.» Ce que nous avons annoncé, M. le Président, 100 millions de dollars pour faire ça. Et la seule réponse de l'opposition, M. le Président...

Le Président : En terminant.

M. Barrette : ...est de venir demander à l'Assemblée nationale de s'ingérer dans une négociation qui suit son cours.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! M. le député de Lac-Saint-Jean, en principale.

Réforme du programme Éthique et culture religieuse

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : M. le Président, hier, le Conseil du statut de la femme a rendu un avis qui est dévastateur sur l'égalité des sexes en milieu scolaire. Il conclut que l'école participe au maintien de l'inégalité entre les hommes et les femmes. Le rapport est particulièrement cinglant sur le cours d'éthique et culture religieuse. Le conseil constate que le problème avec le cours... et je cite, est l'absence de «critique [sur le] caractère sexiste des récits fondateurs des religions, la marginalisation du rôle des femmes dans l'histoire religieuse», les nombreuses «inégalités entre les femmes et les hommes dans les règles et pratiques religieuses». Et le rapport conclut que «rien ne remet en question — dans le cours — les pratiques sexistes existant au sein des religions».

Alors, le Conseil du statut de la femme recommande qu'une réforme du programme soit menée. Le Parti québécois réclame, depuis des semaines, de revoir le cours. Est-ce que le ministre entend collaborer avec l'opposition et revoir le cours d'éthique...

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui, M. le Président. Je remercie le collègue pour sa question. Je n'ai pas eu l'occasion de prendre connaissance de l'ensemble du rapport, mais j'ai eu les grandes lignes du rapport du Conseil du statut de la femme. D'abord, il y aura bien sûr une analyse de mon côté. Deuxièmement, vous dire que, dans le cadre des consultations, on parle également des rapports égalitaires et de l'importance, pour nos jeunes justement, de les comprendre, de les apprendre et de les vivre par la suite.

En ce qui a trait aux cours sur l'éthique et culture religieuse, j'ai déjà dit, M. le Président, que c'est un cours qui était en révision auprès du ministère. Il y a une réflexion qui se fait à l'égard de ça. C'est un cours qui est là depuis de nombreuses années et on va travailler en ce sens pour voir comment on peut améliorer les choses, comme on va le faire pour l'ensemble, M. le Président, des travaux et des cours qui ont cours, dans nos écoles, au Québec.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : Oui, bien, M. le Président, je vais collaborer à la connaissance du ministre. Page 73 du rapport : «L'analyse des manuels d'éthique et culture religieuse [...] ne permet [pas] aux élèves de comprendre que les religions [...] ont été et demeurent responsables d'un grand nombre de violences envers les femmes, ainsi que du maintien de pratiques et de représentations inégalitaires et patriarcales...»

L'avis est dévastateur, M. le Président. Est-ce que le ministre reconnaît qu'il y a un problème? Est-ce qu'il entend le corriger?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui. M. le Président, j'ai eu l'occasion d'exprimer, il y a quelques instants... On va prendre connaissance de l'avis. La page, là, qu'il a lue a été portée à ma connaissance, je l'ai lue. En ce qui a trait au cours d'éthique et de culture religieuse, je viens de le dire, M. le Président, dans le cadre de nombreuses réflexions qu'on fait à l'égard de l'éducation, il y a une réflexion, à l'égard du cours d'éthique et culture religieuse, qui va se faire, M. le Président. Mais, à ce que je sache, ce n'est pas nous, ici, qui allons réécrire le programme. Alors, on aura l'occasion, j'imagine, d'en rediscuter dans un autre forum que celui de la période de questions, M. le Président.

• (11 h 30) •

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : Oui, bien, M. le Président, est-ce qu'il peut justement avoir un regard critique envers le cours, s'assurer qu'il soit revu à la lumière des différents avis? Le chef de l'opposition officielle, pas plus tard que la semaine dernière, a déposé une pétition signée par des milliers de Québécois. Le Conseil du statut de la femme demande une intervention du gouvernement. Le Parti québécois tend la main au gouvernement pour que le cours soit revu afin que tous les aspects de la vie démocratique soient inclus, incluant la citoyenneté.

Est-ce qu'il entend agir pour s'assurer qu'en septembre prochain la situation soit réglée?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : M. le Président, je l'ai dit, je peux l'écrire maintenant. Ce que j'ai dit, M. le Président, c'est la chose suivante. Nous allons revoir l'ensemble... et on va faire une réflexion à l'égard de la vie, comme on le fait pour la réussite éducative, pour notre système d'éducation. Et, en ce qui a trait au cours d'éthique et de culture religieuse, je viens de le dire, M. le Président, au ministère, il y a une réflexion, j'entends que nous y participions, et tant mieux si on sera capables d'améliorer les choses. Mais ce qu'il vient de demander, M. le Président, j'ai répondu oui à trois occasions.

Le Président : Principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

Financement des élections scolaires

M. François Legault

M. Legault : Il y a un an presque jour pour jour, l'ancien ministre de l'Éducation libéral déposait un projet de loi pour abolir les élections scolaires, faisait le constat que plusieurs gens dans le milieu de l'éducation font, c'est-à-dire qu'un taux de participation de 5 %, ce n'est pas vraiment de la démocratie scolaire, et donc les élections scolaires ne fonctionnent pas. Malheureusement, le nouveau ministre de l'Éducation a reculé, il a fait adopter un autre projet de loi qui garde les élections scolaires. Les élections scolaires, ça coûte 20 millions de dollars. Puis ça ne s'arrête pas là, depuis deux ans, on a eu une vingtaine d'élections partielles qui ont coûté un demi-million avec des taux de participation ridicules, par exemple, commission scolaire des Découvreurs, 2,5 % de taux de participation.

Est-ce que le premier ministre ne croit pas que cet argent serait mieux utilisé pour financer des services aux élèves plutôt que pour faire des élections bidon?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : M. le Président, un bref rappel, on vient de confirmer l'injection de 1,3 milliard de dollars sur deux ans dans le réseau de l'éducation, oui, les infrastructures, mais aussi près de 900 personnes supplémentaires pour aider nos élèves, notamment les élèves en difficulté. Alors, ce n'est pas vrai qu'on n'investit pas dans le réseau de l'éducation, on investit des sommes considérables qui sont disponibles grâce au retour à l'équilibre budgétaire puis au fait qu'on a dégagé des marges de manoeuvre.

Maintenant, il nous arrive parfois de nous inspirer de suggestions de mon collègue. Et je lui suggère de continuer à nous faire des suggestions, mais, quand on trouve que c'est une mauvaise idée, on dit non. Alors, pourquoi on a décidé de conserver les élections scolaires? Parce qu'on croit que la démocratie, même si elle ne s'exprime pas aussi fortement qu'on le voudrait, la démocratie est un bien acquis excessivement fragile et précieux pour les sociétés et que plusieurs communautés... Là, il a cité le cas de la commission scolaire des Découvreurs, mais il y a d'autres communautés, d'autres commissions scolaires, d'autres régions — et c'est plus vrai en région, même — où ils disent, ces parents : Nous voulons avoir la possibilité de nous exprimer sur le choix des commissaires scolaires, particulièrement lorsqu'il y a des enjeux spécifiques qui se posent, par exemple, la survie d'une école de rang ou, dans le cas de certaines communautés comme la communauté des Québécois de langue anglaise, sur le caractère profondément, je dirais, important de ces institutions pour cette communauté et leur appartenance au Québec.

Alors, ce n'est pas une bonne idée, ce n'est pas une bonne idée de diminuer la démocratie dans notre société. On devrait toujours plutôt viser à l'améliorer. Est-ce qu'on peut trouver des façons d'améliorer toujours la participation? Oui, mais on note que, lorsqu'il y a des enjeux spécifiques, les gens y vont, voter aux élections scolaires, et ils veulent s'exprimer. Et je crois que c'est un bien, encore une fois, un bien très précieux qui nous distingue d'autres sociétés moins démocratiques, et il ne faudrait pas reculer là-dessus.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, j'invite le premier ministre à continuer à lire le programme de la CAQ. Entre autres, il verrait que ce qu'on propose, c'est que les conseils d'établissement des écoles nomment les représentants à la commission scolaire. 20 millions de dollars.

Je répète ma question : Est-ce que le 20 millions ne serait pas mieux utilisé dans les services aux élèves que pour des élections où on a un taux de participation de seulement 5 %?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Je répète encore une fois qu'on investit actuellement des sommes beaucoup plus considérables que celle qu'il mentionne dans les services aux élèves, pas juste dans les infrastructures, la construction de nouvelles classes. J'en parlais en Mauricie hier, mais ailleurs, en Lanaudière également, qu'il connaît bien, il y a, je crois, une centaine de nouvelles classes qui vont être disponibles, mais des nouveaux professeurs, des nouveaux professionnels pour accompagner nos élèves en difficulté et une politique de la réussite éducative, je crois, qui sera à la fois innovante et audacieuse. Alors, en tout respect, là, je ne crois pas que l'enjeu doit être posé comme ça. Je pense qu'il faut reconnaître que les acquis démocratiques d'une société sont des éléments fragiles, importants et qu'avant d'y toucher et de reculer on doit être excessivement prudents. Et je crois qu'il est nécessaire de conserver, pour les parents du Québec, pour les citoyens du Québec, la possibilité...

Le Président : En terminant.

M. Couillard : ...de s'exprimer démocratiquement sur leur réseau scolaire.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : Il y a un an, le premier ministre voulait abolir les élections scolaires. Aujourd'hui, il ne veut plus les abolir.

Qu'est-ce qui s'est passé dans sa tête entre les deux? Est-ce que ça se peut que le lobby des commissions scolaires passe avant le bien des élèves?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Bien, quiconque ferait passer quelque lobby que ce soit avant le bien des élèves commettrait une erreur grave, et ce n'est pas une erreur qu'on commet. C'est avant tout l'intérêt de l'enfant à partir de la petite enfance, avant même l'école, jusqu'à plus tard dans la vie et tout au long de la vie, c'est cet intérêt-là qui nous préoccupe et qui doit nous guider. Alors, effectivement, on réfléchit, puis il faut considérer les conséquences de ce qu'on veut faire ou de ce dont on parle.

Je remarque au passage que notre collègue ne parle plus d'abolir les commissions scolaires. Est-ce qu'il a abandonné cette idée? Peut-être, nous l'annoncera-t-il. Mais je crois, encore une fois, M. le Président, qu'il faut être excessivement prudents et même respectueux, respect et prudence, quant aux phénomènes démocratiques dans nos sociétés. Même si on trouve que leur intensité n'est pas suffisante, ce n'est pas une raison de reculer sur la démocratie dans une société.

Le Président : Principale, M. le député de Chambly.

Révision de la politique d'évaluation
des apprentissages à l'école

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, la mission de nos écoles, c'est de développer le plein potentiel de nos élèves, il faut viser haut. Mais, malheureusement, ce n'est pas ça qui se passe, parce que, pour gonfler artificiellement leurs statistiques de réussite, au moins trois commissions scolaires — en Beauce, en Montérégie, en Estrie — mettent de la pression, veulent forcer les enseignants à n'enseigner qu'une fraction du programme et à baser leur enseignement sur des tests.

Je résume, là, ce qu'on leur demande de faire : un, choisir ce qu'ils veulent enseigner dans le programme — déjà, on est mal parti; deux, préparer le test; et trois, finalement, n'enseigner que la matière qui sera dans le test. Ça, M. le Président, là, c'est ça qui arrive quand on laisse les commissions scolaires se mêler de pédagogie puis dire quoi faire aux directions puis aux profs.

Est-ce que le ministre peut ramener le réseau à l'ordre, donner une directive claire aux commissions scolaires qu'il n'y aura plus aucune mesure de nivellement par le bas qui sera tolérée au Québec?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui, M. le Président. Si le collègue de Chambly était venu en consultation régionale, il m'aurait entendu régulièrement répéter ceci : On passe vraisemblablement beaucoup trop de temps à préparer des examens plutôt que d'être en apprentissage. Et, à la fin, passer des examens, réussir des examens, ce n'est pas la finalité à tout prix. L'apprentissage, l'instruction, c'est la première mission de notre école, M. le Président. Et, dans ce contexte, j'ai dit à plusieurs occasions que je souhaitais qu'on revoie la politique d'évaluation pour faire en sorte que ça n'arrive plus, des situations comme celle-là.

Deuxièmement, ce que j'ai entendu à plusieurs occasions, c'est des professeurs, des enseignants qui, effectivement, disaient subir de la pression. On ne la souhaite pas, et il ne faut pas qu'il y en ait à cet égard-là. Et, là-dessus, il y aura, bien entendu, une réflexion dans le cadre de la politique sur la réussite éducative pour s'assurer qu'effectivement on respecte l'autonomie des gens, on respecte les façons d'enseigner et qu'on vise à instruire, socialiser et qualifier, qui sont les missions de l'école québécoise, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Chambly.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, le ministre fait rire de lui. Il donne des consignes, personne ne s'en occupe. En votant le projet de loi n° 105, ce gouvernement-là a cautionné un système qui ne fonctionne pas. Le système continue, mais il se pose en victime. C'est eux, les responsables.

Voici la consigne de la direction de la commission scolaire. Là, ça dit aux profs : Voici ce qu'il ne faut pas faire. J'essaie de couvrir tout le programme, ça, là, c'est ce qu'il ne faut pas faire au Québec. Deuxième chose à ne pas faire, je planifie mon cours à partir du programme. Il faut que...

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui. M. le Président, j'ai entendu précédemment la Coalition avenir Québec dire qu'il fallait mettre de côté les commissions scolaires, et là, à l'instant, il me demande de leur faire des recommandations puis de leur faire entendre raison, selon ce qu'il dit. M. le Président, il va falloir qu'il se branche. S'il pense que c'est en se choquant après le monde qu'il va leur faire comprendre quoi que ce soit, il se trompe. S'il pense qu'on peut, avec de l'autorité, c'est vrai, du leadership et de la collaboration, travailler, et il y travaille avec moi, ça va fonctionner, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Chambly.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Je vais continuer à lire ce document des consignes aux enseignants parce que c'est savoureux. Voici maintenant ce qu'il faut faire, là, aux enseignants, ce qu'il faut faire: Je crée la tâche d'évaluation sommative afin de planifier l'enseignement. Bon, c'est sûr que les taux de réussite sont bons dans ce temps-là, si on crée l'examen puis, après ça, on planifie tout l'enseignement pour l'examen. Après ça, le gouvernement se pète les bretelles parce que, oh! le taux de diplomation augmente peut-être un peu. Il aurait fallu changer le système, on vient de perdre l'occasion cet automne.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : M. le Président, ce qu'il faut revoir, c'est la politique sur l'évaluation. Il y aura toujours des interventions ministérielles à l'égard des examens. Pourquoi? Parce qu'on fait des évaluations ministérielles. Ce qu'il faut revoir, c'est la façon dont on travaille. Et, là où je serai d'accord avec les collègues et avec le collègue, et avec l'ensemble des gens que j'ai rencontrés dans les consultations, M. le Président, c'est qu'on ne doit pas mettre de la pression pour travailler plus à préparer des examens pour les réussir qu'à apprendre, M. le Président.

• (11 h 40) •

Le Président : Principale, M. le député de Verchères.

Exigence de la connaissance de l'anglais pour un
emploi de bureau à la ville de Gatineau

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron : M. le Président, depuis près de 40 ans, la Charte de la langue française a fait l'objet de multiples recours judiciaires. Le plus récent, le syndicat des cols blancs contre la ville de Gatineau. L'affaire remonte à 2009 alors que la ville avait affiché un poste de commis aux finances comportant une exigence à l'effet de pouvoir communiquer en anglais. En se basant sur l'article 46 de la Charte de la langue française, le syndicat a déposé un grief indiquant qu'il n'était pas nécessaire de faire de ce poste un poste bilingue. En effet, l'article 46 de la charte stipule qu'il est interdit à un employeur d'exiger, pour l'accès à un emploi ou à un poste, la connaissance ou un niveau de connaissance spécifique d'une langue autre que la langue officielle, à moins que l'accomplissement de la tâche ne nécessite une telle connaissance. Le débat s'est donc transporté devant les tribunaux. Le Procureur général du Québec peut intervenir devant la Cour suprême et défendre son interprétation des articles 1, 4 et 46 de la Charte de la langue française.

Compte tenu des implications possibles de cette cause pour l'avenir, le Procureur général entend-il intervenir?

Le Président : M. le ministre de la Culture.

M. Luc Fortin

M. Fortin (Sherbrooke) : Oui. Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Alors, la question du député de Verchères me permet de réitérer que la langue de travail au Québec, c'est le français. Et, dans le cas des cols blancs de Gatineau, le député n'est pas sans savoir que la cause pourrait être portée encore une fois devant les tribunaux, alors il faut être très, très prudents dans nos commentaires. Et l'office pourrait être appelé également à agir à titre de médiateur en vertu de l'article 47 de la charte. Alors, ça, c'est des possibilités.

Mais je veux également réitérer ce que l'on fait pour promouvoir la langue française, M. le Président. Au Québec, nous avons ajouté 11,5 % dans le budget de francisation et de promotion de la langue française dans le dernier budget. Nous avons adopté un nouveau règlement sur l'affichage des marques de commerce. Nous aurons une nouvelle stratégie partenariale pour les petites et moyennes entreprises de la région du Grand Montréal, et le français sera au coeur de notre nouvelle politique culturelle, M. le Président. Alors, nous sommes en action pour la langue au Québec.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Verchères.

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron : On peut bien réitérer que le français est la langue de travail, M. le Président, mais le fait est qu'en 2012 six employeurs sur 10 exigeaient la connaissance de l'anglais, ce qui illustre que le français, comme langue de travail, recule partout au Québec. La Charte de la langue française établit pourtant deux principes qui tiennent lieu de droits fondamentaux pour les Québécoises et Québécois. Article 1 : «Le français est la langue officielle du Québec.» Article 4 : «Les travailleurs ont le droit d'exercer leurs activités en français.» Le gouvernement du Québec doit intervenir pendant ce débat...

Le Président : Monsieur...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! M. le ministre de la Culture.

M. Luc Fortin

M. Fortin (Sherbrooke) : M. le Président, et même le député le soulève, l'article 46, il est clair, pour que l'exigence de l'anglais soit exigée pour un poste, il doit être démontré, et la loi, elle est là pour être appliquée. Alors, les gens qui se sentent lésés ont des recours. Et, dans le cas des cols blancs, ils ont le loisir de les exercer, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Verchères.

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron : M. le Président, j'entends ce que le ministre nous dit, mais, si c'est vrai, qu'attend le gouvernement pour plaider cette cause devant la Cour suprême? Est-ce que le Procureur général défendra l'interprétation que vient de livrer le ministre devant la Cour suprême?

Le Président : M. le ministre de la Culture.

M. Luc Fortin

M. Fortin (Sherbrooke) : M. le Président, je pense avoir été clair, pour nous, la priorité, c'est la langue française. Le français, c'est la langue de travail au Québec, on la défend, on va continuer de la défendre, M. le Président. On n'a pas de leçons à recevoir du Parti québécois en cette matière.

Le Président : Principale, M. le député de Mercier.

Nomination de M. Pietro Perrino à titre de secrétaire
général associé au ministère du Conseil exécutif

M. Amir Khadir

M. Khadir : M. le Président, après Marc Bibeau, Pietro Perrino, Pietro Perrino, qu'on voit ici dans un encart du Journal de Montréal après une entrevue, a été organisateur en chef de Gilles Vaillancourt, qui, selon la commission Charbonneau, utilisait massivement les prête-noms pour financer son parti. Pietro Perrino a aussi été, dans les mêmes années, organisateur du Parti libéral du Québec sous Jean Charest, qui est, après tout, le principal responsable de tout le scandale des prête-noms, toute la corruption qui a été occasionnée.

C'est le premier ministre qui l'a nommé, sachant très bien à quel point, comme l'a mentionné Renaud Lachance... En fait, le financement du parti — même Renaud Lachance est prêt à reconnaître ça — le financement du Parti libéral, des partis politiques permettait à ceux qui appuyaient ces partis-là d'avoir une influence sur des décisions économiques. Or, Pietro Perrino a été nommé par le premier ministre, et il agit actuellement au secrétariat...

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : J'ai lu l'article de journal, et il n'y a rien dans cet article de journal, M. le Président, qui ferait en sorte que M. Perrino devrait mériter la culpabilité par association, et même par anticipation, que le collègue de Mercier, dans tout son grand respect de la démocratie et de nos institutions, fait encore une fois la démonstration. Rien dans cet article-là.

Je comprends bien qu'il a sa version de la vie et qu'il nous l'expose ici, mais, honnêtement, dans ce qu'il y a dans cet article, il n'y a rien qui amène à la conclusion qu'il veut amener. Alors, je lui suggère peut-être de regarder la dernière décision du commissaire à l'éthique dans une autre affaire, où le commissaire disait : «Les personnes et les entreprises interpelées peuvent être totalement sans moyens face à des déclarations publiques d'un membre de l'Assemblée nationale.» C'est exactement ce à quoi on assiste ici.

Puis-je lui suggérer de contacter le commissaire à l'éthique pour qu'ils fassent une lecture commune de notre code d'éthique, M. le Président?

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Mercier.

M. Amir Khadir

M. Khadir : Évidemment, le leader du gouvernement nie. C'est exactement ce qu'on voyait durant toutes les années Charest, des dénégations, avant, évidemment, que la commission Charbonneau tranche autrement. Pietro Perrino nie également, mais, connaissant le fonctionnement des nominations par le Parti libéral, il est impossible, aujourd'hui, d'écarter tout ça du revers de la main. M. Perrino a pris du galon sous Daniel Johnson, il a été très proche de Jean Charest. Actuellement, ces premiers ministres...

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Alors, si je comprends bien, M. Perrino a participé dans des formations politiques qui sont des outils de la démocratie. Mais ça, maintenant, le député de Mercier nous dit que participer dans un parti politique, c'est impossible. On ne peut pas faire ça, c'est antidémocratique. On ne devrait, personne dans cette Assemblée, siéger ici parce qu'on a déjà participé à un parti politique. Pire que ça, on est encore dedans aujourd'hui. Pire que ça, lui-même est dans un parti politique. Mais lui, c'est correct. Il choisit, et là il nous dit : Bien, lui, il est coupable. Lui, il n'est pas coupable. Ça dépend, je l'aime, je ne l'aime pas. Il est dans mon groupe, il ne l'est pas. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne dans une démocratie, M. le Président. Je le convie, encore une fois, à regarder le dernier rapport du commissaire à l'éthique et à juger...

Le Président : En terminant.

M. Fournier : ...de l'effet qu'ont ses propos sur des personnes qui ne sont pas dans...

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Mercier.

M. Amir Khadir

M. Khadir : Je ne m'attendais pas à autre chose de la part d'un ministre à 100 000 $ de l'époque de Jean Charest.

La réalité, c'est que M. Perrino a été très proche de Daniel Johnson, de Jean Charest. Ces deux ex-premiers ministres travaillent pour la firme McCarthy Tétrault, qui est impliquée dans des volumes de contrats de 47 milliards de dollars dans l'industrie pétrolière, et on sait les orientations de développement économique de ce gouvernement.

Comment peuvent-ils nier le rôle qu'ils jouent dans cette orientation qui est déplorable...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Ça va. M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Dans notre code d'éthique, on dit que les valeurs de l'Assemblée sont les suivantes, entre autres le respect envers les membres de l'Assemblée nationale, les fonctionnaires de l'État et les citoyens. Ça fait partie des valeurs. Ce n'est pas moi, là. Je le sais que vous ne m'aimez pas beaucoup, c'est correct. Moi, je vous apprécie, mais... J'espérerais, un jour, un peu de réciprocité, mais je n'y arriverai probablement jamais.

Je respecte le fait que nous n'ayons pas la même opinion, ça fait partie de la démocratie. Je suis heureux du fait que vous puissiez faire valoir vos opinions, vous, comme tous les autres. Mais est-ce nécessaire, toujours, toujours, que ce soient des détours qui soient pris où on mélange le pétrole, les firmes d'avocats? Franchement, M. le Président...

Le Président : En terminant.

M. Fournier : ...est-ce qu'on pourrait appliquer nos valeurs et que tout le monde les respecte?

Le Président : Principale, M. le député de Masson.

Construction d'un aéroport à Mascouche

M. Mathieu Lemay

M. Lemay : M. le Président, l'aéroport de Mascouche touche des milieux humides. Depuis le mois de novembre, le ministre est au courant parce qu'il a fait deux inspections sur le terrain. Le ministre nous a dit cette semaine en Chambre, et je le cite : «On regarde l'ensemble de nos recours disponibles et nous allons tout faire pour faire respecter nos lois en matière d'environnement.» Hier, il y avait une injonction à la Cour supérieure. Le Procureur général du Québec et le ministère de l'Environnement étaient absents pour défendre l'application de la Loi sur l'environnement.

M. le Président, est-ce que le ministre peut nous dire pourquoi il n'y avait pas de représentant du Procureur général du Québec hier, lors de l'injonction, pour défendre nos lois sur l'environnement?

Des voix : ...

• (11 h 50) •

Le Président : S'il vous plaît! Mme la ministre de la Justice.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : M. le Président, je comprends la question du collègue. C'est une question qui est tout à-propos. Vous n'êtes pas sans savoir que les juristes de l'État sont en moyens de pression, et l'un des moyens de pression a été de ne pas se présenter à l'audience, ni par vidéoconférence. On a dû s'adresser, pour faire respecter les services essentiels... La décision est rendue, on va s'assurer d'un suivi parce que, vous savez, ce dossier-là... Et mon collègue et moi sommes en lien constant parce que le respect et la protection de nos lois environnementales, c'est un enjeu. La protection de notre environnement, c'est un enjeu. Et le dossier est un dossier qui doit être traité de manière urgente, et nous mettrons tout ce qu'il est nécessaire de mettre de l'avant pour assurer le respect de nos lois ici, sur le territoire du Québec.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Borduas?

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, la ministre de la Justice laisse la ville de Mascouche à elle-même concernant les procédures pour assurer le respect d'une loi provinciale. Ça devrait être les avocats du Procureur général de la ministre de la Justice qui devraient intervenir et piloter le dossier.

La ministre de la Justice réalise-t-elle le préjudice, pour l'intérêt public, de laisser les juristes en grève? M. le Président, la ministre nous parle d'urgence. Une injonction provisoire, c'est justement une situation d'urgence. La place des juristes de l'État, ça devrait être au palais de justice, ça devrait être à la cour pour défendre l'intérêt public, l'intérêt des Québécois. Vous ne le faites pas, vous les laissez sur la rue.

Le Président : M. le ministre de l'Environnement.

M. David Heurtel

M. Heurtel : Les résidentes et les résidents de Mascouche doivent savoir que le ministère de l'Environnement est sur le dossier. Le 2 décembre, on a appris qu'il y avait un déboisement sur le terrain. Le 2 décembre, nous avons envoyé une lettre à l'entreprise leur ordonnant de cesser. Le 3 et le 5 décembre, il y a eu des inspections du ministère. Et, ce matin, nous avons envoyé un avis de non-conformité à l'entreprise. Alors, nous appliquons notre loi, nous agissons et nous allons continuer d'agir en respect des lois québécoises en matière d'environnement.

Le Président : Deuxième... S'il vous plaît! Je vais vous demander que ce soit un peu moins bruyant. M. le député de Borduas, en deuxième complémentaire.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, si le dossier est si important, comment ça se fait que personne, au Procureur général, n'a été délégué à la cour pour faire les représentations puis pour piloter le dossier? Vous avez l'information au ministère de l'Environnement depuis le mois de novembre dernier, vous n'avez pas pris action. Lorsqu'il y a une situation d'urgence en matière d'application des lois provinciales, ça se passe à la cour, ça se passe par le biais d'une injonction provisoire. La ville de Mascouche a pris son injonction, vous, vous êtes restés assis. Vous ne défendez pas l'intérêt public, vous ne respectez pas les lois provinciales qui doivent s'appliquer. Réglez la situation avec les juristes de l'État.

Le Président : S'il vous plaît! Mme la ministre de la Justice.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : Je vais m'adresser à vous, contrairement à notre collègue. M. le Président, dans ce dossier-là, qui est un dossier extrêmement important, nous avons délégué un juriste, qui, en raison des moyens de pression actuels, ne s'est pas présenté devant le tribunal. Nous avons dû avoir recours au tribunal afin de faire assurer le respect des services essentiels. Le respect des lois environnementales est un des services essentiels qui doit être respecté, et j'en appelle à la responsabilité de ceux et celles qui sont appelés sur ces dossiers, M. le Président.

Le Président : Principale, Mme la députée de Vachon.

Compensation aux détenteurs de permis de taxis

Mme Martine Ouellet

Mme Ouellet : Oui. Merci, M. le Président. Avec Uber, qui fait de la concurrence déloyale, ce que tout le monde avait prédit se produit : les permis de taxis, qui sont exigés obligatoirement par le gouvernement, sauf pour Uber, qui a eu son passe-droit, les permis de taxi, donc, perdent de leur valeur. On parle déjà de 30 % de perte. Ça, ça veut dire, M. le Président, là, 55 000 dollars de pertes pour un propriétaire de taxi. C'est leur retraite qui est en train de fondre au soleil à cause de la complicité du premier ministre avec Uber.

Après avoir donné des privilèges indus à Uber au détriment des propriétaires de taxi, le gouvernement libéral va-t-il prendre ses responsabilités et compenser à leur pleine valeur les permis des propriétaires de taxi qui les ont achetés de bonne foi et en respectant les lois?

Le Président : M. le ministre des Transports.

M. Laurent Lessard

M. Lessard : Oui, M. le Président. Donc, nous avons eu la chance, ici, donc, en Chambre, de déposer un projet de loi et de permettre une entente possible pour un projet pilote avec Uber. J'avais cru entendre que le parti de l'opposition était d'accord avec ce projet pilote là.

Deuxièmement, on a aussi considéré le fait que nous allons mettre en place, donc, deux comités : un pour s'assurer que les chauffeurs de taxi... quelles sont leurs conditions de vie pendant ce projet pilote là; de l'autre côté, le volet de l'appréciation de la valeur ou la valeur des permis pour ceux qui seraient impactés. Donc, on met en place, donc, ces deux comités-là qui... Pendant la même période d'expérimentation qu'Uber aura au Québec, nous pourrons essayer de voir si on est capables de dégager des pistes de solution concernant soit le rachat ou la compensation par rapport à ceux qui détiennent des permis dans les mêmes agglomérations.

Donc, les travaux sont en cours, et ils seront invités à y participer. On est sensibles à cet aspect-là et on verra comment, dans les meilleures pratiques internationales, peuvent émerger, donc, des propositions qui pourraient, donc, répondre aux besoins de ceux qui, à tous les jours, ont acheté des permis.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Vachon.

Mme Martine Ouellet

Mme Ouellet : M. le Président, c'est assez incroyable. Je pense que le ministre en a perdu des bouts au printemps passé parce qu'il y a eu un bâillon sur le projet de loi juste avant à cause du projet pilote. Un projet pilote, le gouvernement libéral a renié sa parole à la dernière minute. C'est clair qu'on était contre le projet pilote, M. le Président.

Et là, là, la perte de la valeur, c'est documenté, la Commission des transports du Québec, là, a toute l'information. Là, tout ce que fait le ministre, là, c'est de perdre le temps, perdre l'argent des propriétaires de taxi. Il a eu tellement de zèle à donner tout de suite en arrivant... à son arrivée, là, donner le projet...

Le Président : M. le ministre des Transports.

M. Laurent Lessard

M. Lessard : Bien, écoutez, je pense que même les utilisateurs et les organisations contredisent votre point parce qu'ils m'ont demandé de considérer le plus rapidement possible l'aspect d'une compensation ou d'un rachat. Alors, je ne sais pas, mais, eux, c'est ce qu'ils me disent de faire, et c'est ce qu'on est en train de considérer, est-ce que, dans les meilleures pratiques internationales, il a pu y avoir des propositions qui peuvent émerger pour regarder ceux qui détiennent des permis? On s'est engagés à le faire, on va le faire avec eux autres. Puis on travaille aussi sur la modernisation, M. le Président, de l'industrie du taxi, qui en a bien besoin.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Vachon.

Mme Martine Ouellet

Mme Ouellet : Bien oui, M. le Président, c'est certain, c'est ce qu'on demande, une compensation, mais pas que ça se fasse comité, après comité, après comité. Ça fait déjà trois ministres qu'on a. On a eu un comité, deux commissions parlementaires. L'information est déjà disponible, qu'attend le ministre pour faire la compensation pour les chauffeurs de taxi suite à leur décision de répondre aux caprices d'Uber en changeant les lois, M. le Président?

Le Président : M. le ministre des Transports.

M. Laurent Lessard

M. Lessard : M. le Président, on est identifiés, de ce côté-ci, qu'on était pour la modernisation de l'industrie du taxi, on était aussi un gouvernement ouvert sur l'international dans les meilleures pratiques technologiques, autant les taxis verts, hein, pour le service à la population, l'amélioration du service à la population via de nouvelles technologies qui, dans un univers ouvert, a des conséquences.

Dans les conséquences, on est en train de documenter au Québec et à l'international quels ont été les meilleures pratiques pour faire en sorte que, s'il y a des impacts sur ceux qui possèdent déjà des permis... puisse avoir des solutions qui peuvent émerger au gouvernement pour qu'on puisse répondre aux besoins. Ça, c'est assez facile, ils l'ont compris, ils vont y participer, M. le Président.

Le Président : Principale, M. le député de La Peltrie.

Directive à l'entreprise Anacolor de
réduire ses émissions
polluantes

M. Éric Caire

M. Caire : Merci, M. le Président. L'entreprise de la peinture industrielle Anacolor pollue, pollue de façon tellement importante que le ministère de l'Environnement lui a demandé de réduire ses émissions de 90 %, avis que l'entreprise conteste. Le problème, c'est que, dans son environnement immédiat, il y a une école primaire et un service de garde, et ce service de garde et cette école primaire ont reçu un avis de la direction de la santé publique leur demandant de confiner les enfants aux bâtiments lorsque les émissions sont particulièrement intenses. M. le Président. On dit aux enfants : N'allez pas jouer dehors, c'est trop pollué. M. le Président, les délais moyens dans les tribunaux pour ces causes-là sont de 15 mois. Donc, il n'y aura aucun avis d'un tribunal d'ici 2018 concernant cette question-là si on suit les délais moyens.

Alors, d'ici là, qu'est-ce que le gouvernement entend faire pour permettre à ces enfants-là d'oeuvrer dans un milieu qui est sain?

• (12 heures) •

Le Président : M. le ministre de l'Environnement.

M. David Heurtel

M. Heurtel : M. le Président, la question que soulève le député est très importante et très préoccupante, et c'est pour ça que, dès que nous avons été avisés de la situation au ministère de l'Environnement, on a pris toutes les mesures à notre disposition pour agir. On a mesuré la qualité de l'air, on a été en contact constant avec l'entreprise pour essayer de trouver des façons de réduire les émissions. Il a fallu même qu'on intervienne pour forcer l'entreprise à réduire ses émissions. Et c'est ce que nous avons fait, nous avons émis une directive à l'effet qu'il fallait que l'entreprise réduise ses émissions de 90 %, M. le Président. Alors, nous avons agi, mais l'entreprise a décidé de contester cette décision-là devant les tribunaux. Alors, au lieu de respecter notre ordre de réduire ses émissions de 90 %, elle décide de contester cette décision-là devant les tribunaux. Alors, nous devons suivre le processus judiciaire devant les tribunaux, M. le Président.

Le Président : Alors, cela met fin à la période de questions et de réponses orales.

Motions sans préavis

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, puisqu'il n'y a pas de vote reporté, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. Et, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation, je vais céder la parole à un membre du groupe formant le gouvernement. Mme la ministre des Relations internationales et de la Francophonie.

À l'occasion du 40e anniversaire des relations entre le Canada et l'Union européenne,
souligner les liens profonds historiques et culturels ainsi que les
valeurs que partagent le Québec et l'Europe

Mme St-Pierre : Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député de Verchères et le député de Deux-Montagnes :

«Qu'à l'occasion du 40e anniversaire des relations entre le Canada et l'Union européenne, l'Assemblée nationale du Québec souligne les liens profonds historiques et culturels ainsi que les valeurs que partagent le Québec et l'Europe; qu'elle célèbre l'amitié et la collaboration qui unissent le Québec et l'Union européenne;

«Que les membres de l'Assemblée nationale du Québec témoignent de l'importance qu'ils accordent aux relations politiques, économiques, culturelles, éducatives, scientifiques et aux échanges entre les populations du Québec et des États membres de l'Union européenne.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, Mme la ministre. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Tanguay : Mme la Présidente, nous proposons des interventions d'une durée maximale de deux minutes par intervenant et selon l'ordre suivant : d'abord, la ministre des Relations internationales, suivie des collègues de Verchères, Deux-Montagnes et Mercier.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie. Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme St-Pierre : Merci, Mme la Présidente. En déposant cette motion, j'invite l'Assemblée nationale du Québec à souligner l'amitié entre le Québec et l'Europe à l'occasion du 40e anniversaire des relations entre le Canada et l'Union européenne.

Il y a 40 ans fut signé l'Accord-cadre de coopération commerciale et économique entre le Canada et les communautés européennes. La même année, la délégation de la Communauté européenne fut officiellement ouverte à Ottawa. Quant aux relations entre le Québec et l'Europe, elles sont ancrées dans l'histoire. De plus, nous partageons avec l'Europe l'idée de ce que doit être une société moderne, démocratique et pacifique fondée sur le pluralisme linguistique, la diversité culturelle, le développement durable et le progrès social.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : ...Mme la ministre. J'aimerais, s'il vous plaît, un peu plus de silence afin de permettre à Mme la ministre de compléter son intervention. Je vous remercie.

Mme St-Pierre : Le Québec est présent sur la scène européenne depuis plus d'un demi-siècle. Il déploie un réseau de représentations à Bruxelles, Paris, Londres, Munich, Berlin, Rome et Barcelone. Nous y avons ensemble fait éclore une riche relation économique, culturelle et scientifique. Ces relations font écho aux enjeux du siècle : croissance et prospérité économiques, environnement et développement durable, intégration des immigrants, diversité culturelle, recherche et innovation, mobilité des étudiants et de la main-d'oeuvre.

Le commerce et l'investissement entre les deux côtés de l'Atlantique représentent une proportion croissante de nos échanges. La tendance est là pour rester, ne serait-ce qu'en raison de l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne. Déjà, le Québec est plus intégré à l'économie européenne que le reste du Canada. Permettez-moi de vous rappeler que le Québec a d'ailleurs joué un rôle actif pour initier la négociation de l'AECG et que nous sommes toujours très actifs dans la promotion de cet accord, à la fois en Europe et au Québec.

Le premier ministre du Québec a par ailleurs assisté au Sommet Canada-Union européenne et à la cérémonie de signature. Maintenant que cet accord historique est signé, le Québec appelle à une mise en oeuvre rapide afin de multiplier les échanges avec l'Europe dans le cadre de l'accord.

Et, si l'Europe est notre second partenaire économique, elle est aussi le premier marché international de nos créateurs. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Et maintenant je cède la parole à M. le député de Verchères.

M. Bergeron : Alors, Mme la Présidente, nous soulignons donc aujourd'hui le 40e anniversaire de la Délégation de l'Union européenne au Canada, ouverte dès 1976. Mais il faut noter que cette relation privilégiée a débuté en 1959 et qu'elle a d'emblée constitué la première relation formelle entre l'Union européenne et un pays industrialisé. Encore aujourd'hui, l'Union européenne n'entretient de liens semblables au partenariat stratégique avec le Canada qu'avec neuf autres pays, ce qui témoigne de l'importance de cette relation non seulement pour le Québec et le Canada, mais aussi pour l'Union européenne.

L'Union européenne porte en elle un projet inspirant, celui de nations souveraines réunies afin de faire valoir leurs intérêts et de promouvoir des valeurs communes, un modèle qui, à plusieurs égards, fait école et suscite l'intérêt et l'envie.

Pour le Québec, les relations avec l'Union européenne et les pays qui la composent constituent évidemment un puits d'opportunités et une source d'enrichissement mutuel. D'un point de vue culturel, le Québec peut compter plusieurs alliés en Europe pour défendre, à ses côtés, des principes comme celui de la diversité culturelle, telle que reconnue par l'UNESCO en 2002, notamment grâce à l'influence et la détermination de l'ex-ministre du Parti québécois Louise Beaudoin, et de la diversité linguistique. De plus, les artistes québécois trouvent en Europe, notamment dans les pays francophones, un public toujours très désireux d'apprécier leurs talents exceptionnels.

D'un point de vue économique, les relations avec l'Union européenne ouvrent des perspectives très encourageantes tant il est important, voire vital, pour le Québec de diversifier ses exportations. Il ne fait aucun doute que l'accord de libre-échange qui vient d'être conclu entre le Canada et l'Union européenne fait naître des perspectives prometteuses.

Il conviendra cependant de nous assurer, et je profite de cette occasion pour le réitérer, que le Canada prenne les mesures indispensables pour assurer une juste compensation des pertes que pourraient encourir les producteurs de fromage québécois.

Cela dit, Mme la Présidente, nous pourrions énumérer encore longtemps les exemples des bénéfices de cette relation privilégiée entre l'entité supranationale que constituent encore le Canada et l'Union européenne. C'est donc tout naturellement qu'au nom de ma formation politique je joins ma voix à celle de tous nos collègues pour souhaiter que cette relation demeure fructueuse dans l'avenir et que la relation directe avec le Québec s'en trouve toujours davantage renforcée. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député de Verchères. Et je cède la parole à M. le député de Deux-Montagnes.

M. Charette : Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir de prendre la parole ce matin à l'occasion du 40e anniversaire des relations entre le Canada et l'Union européenne.

Il y a 40 ans, le Canada et l'Union européenne signaient un premier accord majeur, l'Accord-cadre de coopération commerciale et économique entre le Canada et les communautés européennes. La même année s'établissait à Ottawa la mission diplomatique de l'Union européenne. En 1976, le Canada et l'Union européenne ont coulé ensemble les fondations d'une collaboration qui s'avérera, pour les années à suivre, féconde, dynamique et combien profitable!

Au fil des années, une profonde relation d'amitié et d'échange à la fois culturels et commerciaux s'est tissée entre le Canada et l'Union européenne, avec qui nous partageons les valeurs de démocratie et de liberté, une relation essentielle. 40 ans plus tard, un nouvel accord vient la consolider et l'approfondir encore davantage.

Notre relation, en cette année anniversaire, entre dans une toute nouvelle phase. Sans conteste, l'Accord économique et commercial global ouvre un nouveau chapitre. La signature de cet accord est une bonne nouvelle pour les économies canadienne, québécoise et européenne. Je salue le leadership québécois à l'origine de cette signature historique. Voici un exemple éloquent, pour n'en nommer qu'un, que le Québec est un acteur central et incontournable de la relation Canada-Europe. Faisons en sorte, pour les années à venir, que le Québec sache tirer le meilleur de cet accord et qu'il se taille une place encore plus importante sur le Vieux Continent.

Ma formation politique et moi-même avons énormément d'ambitions pour le Québec. Une présence plus importante du Québec en Europe pour nos entrepreneurs et nos créateurs s'inscrit dans cette ambition. L'Europe est un partenaire économique et culturel fondamental pour le Québec et un vecteur de développement pour notre avenir.

On dit du Québec qu'il est un bout d'Europe en Amérique. Soyons dignes de cet héritage et continuons d'oeuvrer pour l'avenir de cette collaboration à la fois fondatrice et porteuse d'avenir.

Bravo et merci aux bâtisseurs de cette relation dont nous récoltons et récolterons les fruits encore longtemps! Le Québec est et sera toujours au coeur de la relation Canada-Europe. Assumons le leadership qui nous revient et, pour 40 ans encore, allons plus loin. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Deux-Montagnes. Et je vais céder la parole à M. le député de Mercier.

• (12 h 10) •

M. Khadir : Merci, Mme la Présidente. C'est avec enthousiasme et honneur de la part de Québec solidaire, un parti humaniste pour qui les principes de bonne entente, de relations solidaires, de coopération, et non de confrontation et de concurrence, sont la base des relations entre les nations, des relations pacifiques empreintes de relations à tous les échelons, politique, commercial, culturel, comme c'est dit dans la motion à laquelle on adhère parfaitement...

Cependant, ces relations doivent servir l'intérêt des peuples, pas l'intérêt des élites d'affaires, qui, malheureusement, en Europe comme ici, comme on l'a vu dans la période de questions, comme je l'ai mentionné, ont pris le contrôle des partis au pouvoir et qui font en sorte que Paul Magnette, le président de la Wallonie, le 2 décembre, il y a quelques jours, a adressé un avertissement à la présidence de la Commission européenne pour dire : Il faut savoir, ce commerce, à qui il profite réellement. Si ce commerce sert seulement à éroder, à diminuer les normes politiques, les normes sociales, les normes de travail, les normes environnementales, surtout les normes environnementales, les normes de protection de nos produits de terroir, de notre capacité, de notre souveraineté comme peuple, comme nation, d'assurer que notre développement correspond à nos besoins, notamment le développement de nos régions qui a besoin de circuits courts, de circuits de proximité pour permettre à nos produits de prendre l'essor qui leur revient, bien, tout ça, si ce n'est pas garanti par le CETA, ce n'est pas dans notre intérêt.

Cependant, on peut très bien reconnaître que c'est dans l'intérêt de grandes firmes d'avocats qui sont sur...

Des voix : ...

M. Khadir : Laissez-moi parler! Mme la Présidente, je ne m'entends même pas. Je ne m'entends pas, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Vous pouvez poursuivre, M. le député. Et j'aimerais...

M. Khadir : Alors, je sais que ça dérange des intérêts économiques puissants. Je rappelle que celui qui était mandaté par le Québec pour négocier pour nous est à la tête d'une firme d'avocats qui est parmi les principales firmes bénéficiaires d'avocats qui sont dans le droit commercial, qui sont heureux qu'il y ait des échanges de ce type, mais ce n'est pas nécessairement dans l'intérêt des producteurs agricoles, les producteurs laitiers du Québec.

Donc, oui à la Communauté européenne, non à des échanges commerciaux qui sont au détriment des populations d'Europe et du Québec.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Mercier. Et maintenant, pour la... Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Voilà.

Pour la prochaine motion sans préavis, je vais reconnaître un membre du groupe formant l'opposition officielle et je cède la parole à M. le député de Terrebonne.

Dénoncer l'autorisation de la construction d'un aéroport à Mascouche
et demander au gouvernement d'intervenir pour empêcher ce projet

M. Traversy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec le député de Masson et la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale dénonce la volonté du gouvernement fédéral de permettre la construction d'un aéroport à Mascouche [et ce] malgré la Loi sur la qualité de l'environnement [du Québec] et l'opposition de la communauté.   «Qu'elle demande au gouvernement du Québec d'intervenir pour empêcher la construction de [cet] aéroport.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Tanguay : Nous proposons de l'adopter sans débat, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, est-ce que cette... Oui, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Bérubé : Nous demandons le vote par appel nominal.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, c'est très bien. Alors, que l'on appelle les députés. Je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 12 h 13)

(Reprise à 12 h 15)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous rappelle que nous allons voter sur la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale dénonce la volonté du gouvernement fédéral de permettre la construction d'un aéroport à Mascouche malgré la Loi sur la qualité de l'environnement et l'opposition de la communauté.

«Qu'elle demande au gouvernement du Québec d'intervenir pour empêcher la construction de l'aéroport.»

Et que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Lisée (Rosemont), M. Bérubé (Matane-Matapédia), Mme Hivon (Joliette), M. Marceau (Rousseau), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Maltais (Taschereau), Mme Lamarre (Taillon), M. LeBel (Rimouski), M. Bergeron (Verchères), Mme Richard (Duplessis), M. Rochon (Richelieu), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Therrien (Sanguinet), M. Gaudreault (Jonquière), M. Pagé (Labelle), M. Cousineau (Bertrand), M. Ouellet (René-Lévesque), M. Villeneuve (Berthier), Mme Ouellet (Vachon), M. Traversy (Terrebonne), M. Kotto (Bourget), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Roy (Bonaventure).

M. Couillard (Roberval), M. Fournier (Saint-Laurent), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Blais (Charlesbourg), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Leitão (Robert-Baldwin), Mme David (Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Huot (Vanier-Les Rivières), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vallée (Gatineau), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Barrette (La Pinière), M. Morin (Côte-du-Sud), M. Blanchette (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), Mme Charlebois (Soulanges), M. Heurtel (Viau), M. Arcand (Mont-Royal), Mme Vien (Bellechasse), M. Billette (Huntingdon), M. Fortin (Sherbrooke), Mme St-Pierre (Acadie), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Reid (Orford), Mme Nichols (Vaudreuil), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Ménard (Laporte), M. Tanguay (LaFontaine), Mme Boulet (Laviolette), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Carrière (Chapleau), M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys), M. Girard (Trois-Rivières), M. Drolet (Jean-Lesage), Mme Vallières (Richmond), M. Rousselle (Vimont), M. Iracà (Papineau), M. Simard (Dubuc), M. Matte (Portneuf), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine), M. Auger (Champlain), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Boucher (Ungava), M. Bourgeois (Abitibi-Est), M. Fortin (Pontiac), M. Giguère (Saint-Maurice), M. Habel (Sainte-Rose), M. Hardy (Saint-François), M. Merlini (La Prairie), Mme Montpetit (Crémazie), M. Plante (Maskinongé), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. St-Denis (Argenteuil), Mme Tremblay (Chauveau), M. Busque (Beauce-Sud), Mme Sauvé (Fabre).

M. Legault (L'Assomption), M. Bonnardel (Granby), M. Caire (La Peltrie), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy (Montarville), Mme Samson (Iberville), M. Roberge (Chambly), M. Laframboise (Blainville), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme D'Amours (Mirabel), M. Lemay (Masson), Mme Lavallée (Repentigny), M. Lamontagne (Johnson), M. Surprenant (Groulx), Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), M. Spénard (Beauce-Nord), M. Paradis (Lévis), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Jolin-Barrette (Borduas).

M. Khadir (Mercier), Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques).

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Y a-t-il des députés contre cette motion? Des abstentions? Alors, M. le secrétaire général pour le résultat du vote.

Le Secrétaire : Pour :  107

                     Contre :               0

                     Abstentions :       0

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, cette motion est adoptée. Et je cède la parole à M. le leader de l'opposition officielle.

M. Bérubé : Mme la Présidente, nous aimerions que cette motion soit envoyée à l'ensemble des députés fédéraux du Québec, au gouvernement fédéral, au maire de Mascouche et au maire de Terrebonne.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, c'est très bien. Ce sera fait.

Nous en sommes maintenant toujours à la rubrique des motions sans préavis, et je vais céder la parole à Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : ...avant, Mme la députée, je vous invite à un peu de silence, s'il vous plaît, si vous devez quitter le salon bleu, afin de nous permettre de poursuivre nos travaux dans l'ordre. Mme la députée.

Mme Massé : Merci, Mme la Présidente. Je demande le consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante conjointement avec le député de Richelieu et la députée de Saint-Hyacinthe :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de scinder le projet de loi 106, Loi concernant la mise en oeuvre de la Politique énergétique 2030 et modifiant diverses dispositions législatives, en retirant le chapitre 4 pour en faire un nouveau projet de loi.»

• (12 h 20) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, Mme la députée. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Tanguay : Pas de consentement.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, il n'y a pas de consentement. Y a-t-il d'autres motions sans préavis? Il ne semble pas y en avoir.

Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous en sommes à la rubrique des avis touchant les travaux des commissions, et je vais céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'avise cette Assemblée que la Commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 112, Loi donnant suite principalement à des mesures fiscales annoncées à l'occasion du discours sur le budget du 17 mars 2016, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et de 19 h 30 à 22 h 30, à la salle du Conseil législatif.

Également, Mme la Présidente, la Commission des transports et de l'environnement poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement afin de moderniser le régime d'autorisation environnementale et modifiant d'autres dispositions législatives notamment pour réformer la gouvernance du Fonds vert, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 19 h 30 à 22 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, M. le leader adjoint du gouvernement.

Maintenant, il y aurait la rubrique des renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Affaires du jour

Et, s'il n'y a pas de demande de renseignements, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. Et je recède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Oui, Mme la Présidente, je vous prierais d'appeler l'article 25.

Projet de loi n° 87

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait
l'étude détaillée et de l'amendement de la députée
de Sainte-Marie
—Saint-Jacques

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, à l'article 25 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la Commission des finances publiques sur le projet de loi n° 87, Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles dans les organismes publics, ainsi que l'amendement de Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, transmis en vertu de l'article 252 de notre règlement. Cet amendement est déclaré recevable.

Maintenant, je vais tout de suite céder la parole à M. le ministre des Finances, c'est bien ça? Alors, allez-y, M. le ministre.

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Bon, merci, Mme la Présidente. Alors, chers collègues parlementaires, il me fait plaisir de procéder aujourd'hui à la prise en considération du projet de loi n° 87, Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles dans les organismes publics.

Ce projet de loi résulte de travaux réalisés dans la plus grande rigueur. L'étude détaillée s'est déroulée du 31 mai au 6 décembre 2016 sur 27 séances, totalisant plus de 60 heures de travaux. Quatre séances de consultations publiques ont eu lieu en février 2016.

Je tiens à remercier sincèrement toutes les personnes qui ont collaboré à ces travaux, notamment les partis de l'opposition ainsi que les personnes ou groupes qui ont pris part aux discussions ou déposé un mémoire dans le cadre des consultations.

La loi, je le rappelle, viendra établir un mécanisme favorisant la divulgation d'actes répréhensibles à l'égard des organismes publics tout en assurant une protection aux divulgateurs contre de possibles mesures de représailles. L'ensemble des travaux auxquels ont pris part les intervenants ont permis de bonifier le projet de loi n° 87, ce qui nous a permis, entre autres, d'élargir le champ d'application de la loi, de viser les actes répréhensibles commis à l'égard d'un organisme public, c'est-à-dire en lien contractuel, d'accroître les pouvoirs du Protecteur du citoyen pour faciliter l'exécution de son nouveau mandat, d'assurer une rétro-information plus importante auprès des divulgateurs en imposant des délais de suivi aux entités responsables du traitement des divulgations, d'offrir des protections aux divulgateurs lorsque les représailles ne sont pas liées à l'emploi ou aux conditions de travail, d'offrir un service de consultation juridique aux divulgateurs et finalement d'imposer une reddition de comptes annuelle plus importante aux organismes visés par le projet de loi.

Je tiens à réitérer que le secteur municipal sera éventuellement couvert dans un projet de loi distinct. Je suis convaincu que ce projet de loi nous fournira les moyens de répondre efficacement aux volontés de tous les intervenants, faciliter la divulgation, contribuer à protéger les lanceurs d'alerte, favoriser une saine gestion des finances publiques et renforcer la confiance des citoyens envers leurs institutions. Encore une fois, Mme la Présidente, je remercie toutes les personnes ayant collaboré aux travaux. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le ministre. Et maintenant je vais céder la parole à Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.

Mme Nicole Léger

Mme Léger : Merci, Mme la Présidente. Alors, je suis heureuse d'intervenir au projet de loi n° 87, Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles dans les organismes publics, qu'on peut aussi dire la loi sur les lanceurs d'alerte. On aurait voulu modifier davantage le projet de loi, comme opposition officielle. Le ministre a voulu garder ce projet de loi là. Une petite modification qui a été faite quand même à l'égard d'actes répréhensibles.

J'ai beaucoup de choses à dire, Mme la Présidente, sur ce projet de loi là. Comme je l'ai dit publiquement, c'est un projet de loi nécessaire mais nettement insuffisant. Nécessaire, d'une part, parce que ça va favoriser la divulgation et ça va dénoncer les actes répréhensibles. Donc, c'est aider les personnes, les gens, les employés de l'État qui veulent dénoncer des actes répréhensibles qui peuvent s'avérer dans nos organismes publics. On parle de corruption, collusion, malversation, toute forme d'actes qui sont nommés répréhensibles. Et ce projet de loi va permettre, un, de favoriser cette divulgation-là mais aussi protéger les personnes contre des actes de représailles. Les actes de représailles peuvent être congédiement, peuvent être d'être tassé, bon, toutes sortes de formes de représailles que peut prendre un supérieur, une autorité ou un collègue face à une personne qui veut dénoncer.

Je dois rappeler, Mme la Présidente, devant la Commission de l'administration publique, on a eu quelques témoignages de différents autres dossiers, particulièrement ceux de Mme Annie Trudel et Mme Boily, qui ont dit des propos particulièrement sur les lanceurs d'alerte et la culture du secret suite particulièrement aux difficultés qu'avait le ministère des Transports du Québec, qu'on souhaite corriger, évidemment.

Alors, je cite Mme Trudel, elle dit : «[Je suis] devant vous, mesdames et messieurs — à la Commission de l'administration publique à l'époque, c'est au mois de juin dernier — j'assure un lien entre les dénonciateurs et les parlementaires, et, à ce sujet, je me dois de vous glisser un mot. Les sonneurs d'alerte sont habituellement des travailleurs banals avec tout ce que ça sous-entend : une famille, un conjoint, des enfants, des collègues mais surtout un gagne-pain à protéger. La réflexion d'un dénonciateur est longue. Il doit certifier de la véracité de ce qu'il espère dénoncer, il doit s'assurer d'être factuel, il doit vérifier s'il a des collègues qui vont confirmer, il doit aussi mesurer la réception de sa dénonciation, s'il y a une ouverture, s'il risque de mettre ses collègues dans une mauvaise position, s'il risque de se mettre dans une position précaire.» Un peu plus loin, elle dit toutefois : «Lorsque son choix d'aller de l'avant avec la dénonciation est fait, s'ensuivent des conséquences. Idéalement non seulement une ouverture, mais un remerciement suivi d'une prise d'action immédiate est souhaitable.

«Toutefois, la réalité est tout autre. Les dénonciateurs vivent des moments très angoissants. On doute de leurs allégations et on tente rapidement de les minimiser, on met des bâtons dans les roues en ralentissant leur travail, en modifiant leurs responsabilités, en diminuant la quantité des dossiers qu'on leur remet, en les ignorant, à la limite en les tablettant. Ils peuvent subir du harcèlement en se faisant discréditer de multiples façons quant à leurs compétences, quant à leurs qualifications, en faisant courir de fausses rumeurs, en transmettant de fausses informations aux médias, allant même jusqu'à les pousser à changer d'emploi.

«Nous aurons compris que les dommages collatéraux que vivent les dénonciateurs sont fort importants. Certains amis se sauvent, certains employeurs ferment la porte. En ce qui me concerne — ce que dit Mme Trudel — ma présence ici me permet de parler au nom de tous ceux qui m'ont fait confiance, de tous ceux qui n'ont pas pu dénoncer. Ils ont des attentes, ils souhaitent que je dise tout haut ce qu'ils pensent tout bas. En ce sens, je souligne l'importance du projet de loi n° 87. Je souhaite sensibiliser les partenaires face aux multiples difficultés des sonneurs d'alerte.»

• (12 h 30) •

Alors, voilà, Mme la Présidente, un témoignage important de la nécessité d'un projet de loi que nous avons devant nous.

Alors, ce n'est pas sans difficulté qu'on a cheminé tout au fil de ces derniers mois. Le ministre a pu voir chez sa collègue qui est moi-même... où j'ai déposé énormément d'amendements parce que je voulais renforcir le projet de loi, améliorer le projet de loi. Nous avons fait certains gains, mais plusieurs éléments restent quand même en suspens. Il y a quand même des grands manques, j'y reviendrai un petit peu plus loin, mais ce qui est important aussi, c'est d'avoir donné le message au gouvernement.

Et la commission Charbonneau est un élément important du fait que ce projet de loi là est déposé aujourd'hui, parce que ça fait partie d'une des recommandations de la commission Charbonneau. La commission Charbonneau disait... La ministre devrait relire la commission Charbonneau, devrait relire la commission Charbonneau, ce que je lui soumettais. La recommandation 8, qui est intitulée Mieux soutenir et protéger les lanceurs d'alerte, c'est «d'améliorer le régime de protection des lanceurs d'alerte pour garantir :

«La protection de l'identité de tous les lanceurs d'alerte, peu importe l'instance à laquelle ils s'adressent;

«L'accompagnement des lanceurs d'alerte dans leurs démarches; et

«Un soutien financier, lorsque requis.»

«L'analyse des normes proposées par des organismes internationaux crédibles et de nombreux témoignages entendus dans le cadre des audiences ont toutefois démontré qu'il présente des limites.»

«L'expérience internationale tend en effet à [démontrer] que, lorsqu'ils ne sont pas suffisamment protégés, les lanceurs d'alerte sont davantage victimes de représailles : harcèlement, menaces, stagnation professionnelle, rétrogradation, perte d'emploi, poursuites judiciaires, etc.»

«Par contraste, le champ d'application des lois de nature générale est plus large et la réglementation qui en découle s'applique à la fois au secteur public [comme] au secteur privé.»

«Aussi, parce [que les lois de ce type] — sectoriel — définissent [des] actes répréhensibles dans le contexte précis du secteur visé, ces lois laissent le lanceur d'alerte sans protection lorsqu'il signale un problème réel d'ordre plus général.»

«[...]la commission est d'avis qu'un régime général de protection des lanceurs d'alerte s'impose.»

Alors, c'est ce que j'ai fait valoir en commission parlementaire, à l'étude détaillée, au ministre, Mme la Présidente, d'avoir un régime général. Le ministre a déposé ce projet de loi là, d'autres types de projets de loi viendront. Là, on a un n° 108 qui s'en vient, qu'on a commencé, on a fait les consultations. Le projet de loi n° 108, c'est d'instaurer l'Autorité des marchés publics, qui est une autre démarche qui vient répondre aux recommandations de la commission Charbonneau. Mais ce que je vois, c'est ce que je dénonçais, c'est que les choses se font à la pièce, et on n'a pas la vision globale du gouvernement ni sa volonté vraiment de s'assurer des recommandations de la commission Charbonneau, mais de voir les choses d'une approche plus générale et plus globale.

Il y a des recommandations, M. le Président... Mme la Présidente, pardon, il y a des recommandations que nous avons faites. Je relance, je lance le texte qu'a fait Josée Boileau, du Devoir, en 2015, qui préparait, dans le fond, le projet de loi qui est déposé ici aujourd'hui, elle disait entre autres : «Les avis divergent déjà alors que le scepticisme des citoyens, manifeste depuis le dépôt du rapport [de la commission Charbonneau], oblige à faire mieux.

«En matière de santé démocratique, protéger les lanceurs d'alerte est devenu un principe de base. Pour faire voir les manquements légaux, éthiques ou déontologiques, pour dénoncer des abus, de la corruption, des gestes dangereux, il faut que quelqu'un parle, qu'il s'agisse d'un témoin ou d'un participant à l'infraction. Sinon, pas d'enquête possible, qu'elle soit administrative, journalistique ou policière.

«Mais oser parler est dangereux, et les représailles peuvent prendre bien des formes, comme on l'a constaté lors des audiences de la commission Charbonneau. D'ailleurs, selon les données recueillies en Europe et relatées par Pierre Bernier, professeur de l'École nationale d'administration publique spécialiste du dossier des dénonciateurs, "75 % à 99 % des salariés se taisent si aucune législation spécifique ne protège les lanceurs d'alerte".

«Il allait donc de soi que la présidente de la commission, France Charbonneau, ouvre son rapport en remerciant nommément ces lanceurs d'alerte.»

Alors, c'est ce qu'on voit aujourd'hui, que le ministre, le président du Conseil du trésor, nous dépose le projet de loi des lanceurs d'alerte, projet de loi qui facilite la divulgation, et c'est pour ça que nous l'accueillons, évidemment.

Des recommandations que j'aurais voulu qu'on puisse apporter. Particulièrement, il y a des grands manquements. Les municipalités ne sont pas incluses, ce qui est, à mon avis, majeur. Les municipalités, ce sont des organismes qui, pour le ministre, dans le projet de loi, ne font pas partie des organismes publics visés. Qui peut dire aujourd'hui que les municipalités, ce ne sont pas des organismes qui sont importants, qui sont des entités importantes où il faut favoriser la divulgation de ces lanceurs d'alerte là et les protéger? Le projet de loi ne les inclut pas.

Le ministre m'a fait presque un chèque en blanc, a dit que le projet de loi viendra sur les lanceurs d'alerte... sur les municipalités. On l'attend toujours, ça fait depuis le mois d'août qu'il nous parle que les municipalités y seront. Il n'a pas encore... Son collègue le ministre des Affaires municipales ne l'a pas encore déposé. Alors, le projet de loi qu'on a devant nous n'inclut pas les municipalités, ce qui est un manque flagrant et un manque important au projet de loi.

L'autre élément, Mme la Présidente, c'est un fonds d'aide. Alors, la commission Charbonneau le disait entre autres dans les recommandations, il faut aider, accompagner les lanceurs d'alerte. Alors, on ne peut pas les laisser tout seuls. Le ministre instaure un nouveau mandat au Protecteur du citoyen, j'y reviendrai dans quelques instants, mais j'aurais aimé avoir des mesures provisoires, des mesures de réparation à l'instant même où il y a un dénonciateur, où on divulgue, dans le fond, un acte répréhensible. Alors, au moment qu'on divulgue un acte répréhensible, bien, le seul moyen que le ministre a mis sur la table, c'est qu'il fasse appel à des recours... les tribunaux s'il voit qu'il a perdu son emploi, etc., et c'est particulièrement les employés de l'État qui peuvent, aux normes du travail, aller faire valoir leurs droits.

Mais on connaît les listes d'attente et les délais importants qu'on peut dire au niveau des tribunaux. Alors, la personne, pendant qu'elle fait la dénonciation, il y a un temps, Mme la Présidente, où il n'y a pas de mesure de réparation, il n'y a pas de mesure provisoire pour aider la personne. Ce n'est que le temps qu'elle sera écoutée lorsque de... la possibilité qu'un tribunal l'écoute. Alors, j'aurais voulu qu'on puisse amender pour obliger... à l'instant même qu'une personne dénonce, avoir la présomption d'innocence, on peut dire, tout le temps que la procédure, l'enquête se fait... puisse se faire, et le ministre a refusé mon amendement à ce niveau-là.

Donc, pas de mesure provisoire ou réparation, le temps que la divulgation... à moins qu'il ait été vu dans... qu'il ait eu recours à un tribunal puis que le délai a été... que la personne a pu être reçue au tribunal puis faire valoir sa situation. Alors, ce délai-là, ce temps-là est, pour moi, important que... il n'y a pas de fonds d'aide... L'aide qu'on aurait pu apporter, c'est d'avoir un fonds d'aide en attendant que la personne puisse faire valoir ses droits tout au long du processus. Alors, le fonds d'aide était, pour moi, important, important que le projet de loi puisse avoir ce fonds d'aide là.

Le ministre m'a quand même ouvert la porte en disant qu'il y a peut-être possibilité, il y a un budget qui s'en vient, qui viendra au fil de l'année 2017. Alors, je souhaite que le ministre... Je le redis : Il a dit que peut-être ça peut être cette voie-là de passage d'avoir un fonds qui peut être annoncé au prochain budget. Alors, c'est sûr que, s'il fait ce geste-là, on a à attendre au prochain budget. Mais j'incite fortement les collègues d'en face, Mme la Présidente, à ce qu'un fonds d'aide soit vraiment dédié pour les lanceurs d'alerte. C'est primordial pour vraiment les accompagner, que ce ne soit pas qu'une intention de mettre un protecteur du citoyen ou un responsable de suivi dans un ministère qui va écouter les lanceurs d'alerte et qui va l'accompagner.

On a réussi à ajouter la consultation juridique, un service juridique au Protecteur du citoyen. C'est un avancement qu'on a pu faire par l'amendement que j'ai pu apporter. Le ministre a accepté cet amendement-là. Le Protecteur du citoyen aura les services juridiques pour aider, mais le Protecteur du citoyen devra avoir ce nouveau mandat qu'on lui donne. Alors, toute personne au Québec, peu importe qu'elle est employée de l'État ou pas, toute personne au Québec pourrait s'adresser au Protecteur du citoyen pour faire une divulgation d'un acte répréhensible.

• (12 h 40) •

Alors, c'est ce que je dis aux citoyennes, aux citoyens : Ce projet de loi là vous permettra de dénoncer et d'être protégés aussi contre les représailles, mais à différents niveaux. Les employés de l'État le sont assurément, puis tant mieux, mais les personnes auront à démontrer... les personnes qui ne sont pas employées de l'État auront quand même à faire la démonstration. J'aurais aimé qu'il n'y ait pas de deux poids, deux mesures, que tout le monde au Québec puisse avoir cette protection-là immédiatement. L'employé de l'État, lui, aura le renversement de la preuve, donc c'est à l'employeur à démontrer, à apporter les preuves, tandis qu'une personne qui n'est pas un employé de l'État a lui-même à démontrer le bien-fondé. Alors, il y a une différence qui est, pour moi, importante. J'aurais aimé que cette différence-là n'y soit pas.

Il faut donner au Protecteur du citoyen les ressources financières, ressources humaines, parce qu'il va avoir besoin, pour s'attaquer à cette nouvelle mission, de demander que le projet de loi soit le plus rapidement adopté, dans le sens qu'il soit mis en application. J'aurais aimé pour le mois de janvier, mais le ministre a accepté qu'il y ait une date, vraiment, parce que, dans le projet de loi initial, il n'y avait pas de date... quand le gouvernement sera prêt. Et le président du Conseil du trésor a ramené quand même que ça va être au 1er mai si on l'adopte. Si on l'adopte, là, ça sera au 1er mai que la loi va s'appliquer. Mais ça demande au Protecteur du citoyen ces ressources-là. On aurait voulu des ressources encore plus importantes, un peu plus de pouvoir encore au Protecteur du citoyen, particulièrement s'il a à faire enquête et il veut pénétrer dans des locaux, veut aller... bon. Le ministre a quand même limité, mais disons qu'on verra au fil de l'application de la loi, au fil des prochaines années.

L'autre élément important qui n'est pas là — le ministre a rejeté mes amendements — c'est concernant les journalistes eux-mêmes, les médias. Une personne qui veut dénoncer publiquement peut le faire, peut le faire, mais, au préalable, doit l'avoir dénoncé à un corps de police. Alors, assurément, ça, c'est, pour moi, inacceptable que la personne doit absolument passer par un corps de police. Si elle ne voulait pas, c'est important que la personne puisse avoir droit d'aller directement dénoncer à un journaliste ou à un média quelconque. Là, le projet de loi ne la protégera pas si elle n'a pas été au préalable été voir un corps de police. Alors, j'aurais voulu enlever «au préalable», enlever ce mot-là. Le ministre n'a pas accepté. J'avais l'amendement «peut également». J'ai essayé d'aller... «peut également aller à un corps de police», ça a été aussi rejeté par le gouvernement. Donc, vous voyez, c'est toutes des petites mesures ou des termes, parfois... qui peut faciliter la divulgation puis aider à accompagner le divulgateur.

Le ministre m'a souvent répondu que souvent il y a des éléments qui étaient pour alourdir, bon, alors j'ai même dit au ministre parfois qu'il était têtu, qu'il aurait pu ouvrir davantage, mais là on a eu plusieurs discussions à différents endroits dans le projet de loi pour s'assurer qu'il soit davantage bonifié, le projet de loi que nous avons.

Toute personne... Évidemment, aussi, l'autre élément... Je veux revenir, là, aux journalistes. «Peut également communiquer», ça aurait été intéressant, parce que là il n'a pas le choix, là. La personne doit absolument aller à un corps de police lorsqu'il y a urgence d'une situation. J'y reviendrai un petit peu tout à l'heure pour l'urgence de la situation, mais c'est sûr que vous ne facilitez pas la divulgation. Il ne faut jamais oublier que l'intérêt public est celui qui devrait être priorisé.

On a eu beaucoup de discussions entre le devoir de loyauté des fonctionnaires de l'État et l'intérêt public, où il y a parfois énormément de littérature à ce niveau-là, Mme la Présidente, beaucoup de chercheurs, beaucoup de professeurs d'université qui ont beaucoup écrit sur qu'est-ce que le devoir de loyauté, quand c'est de l'intérêt public, qu'on doit divulguer ou pas, qu'est-ce qui appartient... parce que je suis employé de l'État, je dois avoir cette loyauté-là envers mon employeur, et qu'est-ce qui devrait... si je vois quelque chose, un acte répréhensible, entre autres, d'être capable de le divulguer. Les actes répréhensibles ne devraient pas être acceptables nulle part. C'est interdit, les actes répréhensibles dans la loi. Il y a une interdiction formelle. Je m'attendais à ce que le ministre puisse en parler tout à l'heure, parce que c'est quand même son projet de loi, ce n'est pas à moi à vanter tout son projet de loi.

L'autre aspect que je voudrais apporter, c'est toute l'accréditation syndicale. Certains syndicats auraient aimé qu'ils puissent avoir le droit de donner des conseils, qu'ils puissent avoir le droit d'accompagner la personne qui veut divulguer. Alors, tous les amendements à cet effet ont été refusés. Un syndicat représente quand même ses membres et a déjà élu même des conseillers, des conseillers juridiques, et aurait pu accompagner le divulgateur dans sa démarche, puisque c'est un de ses rôles, malgré tout, à une accréditation syndicale, de pouvoir faire cette démarche-là avec ses membres. Ça, ce bout-là a été refusé. Même si l'ensemble des syndicats du Québec appuient, dans le fond, le projet de loi, ont été ouverts au projet de loi, là, d'une façon plus précise — je vais le dire — ont été ouverts à ce projet de loi des lanceurs d'alerte, mais cette partie-là évidemment en irrite plusieurs.

Il y a d'autres amendements. Je veux revenir à celui où le gouvernement insiste que, lorsqu'il y a urgence d'une situation qui touche la santé, sécurité et environnement, là il faut aller tout de suite... une urgence, une fin de semaine, un samedi soir, on voit quelque chose qui a un risque environnemental ou un risque de santé et sécurité puis de malversation, la personne qui voit ça, là, une situation d'urgence, doit absolument aller au corps de police. J'aurais aimé ajouter si ça a atteinte à la vie, si ça a atteinte à la sécurité publique, le ministre a refusé mes amendements à ce niveau-là. Ça aurait été comme dans d'autres types de lois : parce qu'on a fait des comparaisons, on a demandé au ministre de voir les comparaisons des autres provinces canadiennes, du régime fédéral, au Royaume-Uni, en Afrique, on a fait quelques recherches pour faire des comparaisons, parce que c'est quand même une première de faire un projet de loi sur les lanceurs d'alerte, d'une part. J'aurais aimé mieux définir le lanceur d'alerte; disons qu'on s'en est restreints à ce qui est là devant nous.

Il y avait des questions aussi sur comment on va informer la personne qui divulgue aussi, dans le processus. S'il y a enquête, quand est-ce qu'elle est informée ou pas? Alors, on a eu beaucoup de discussions à ce niveau-là aussi. On a eu quand même des discussions importantes. Tout ce qui était le secret professionnel, le secret professionnel liant particulièrement les avocats et notaires, on a eu aussi des discussions assez arides à ce niveau-là; arides, dans le sens d'assez intenses, je pourrais dire.

En même temps, Mme la Présidente, il y a des améliorations quand même, parce que le Protecteur du citoyen aura, à chaque année, à déposer son rapport annuel. Alors, dans sa première année qu'elle va faire son mandat, elle aura à déposer... Donc, j'ai demandé à avoir plusieurs données, d'autres types de données : le type d'actes répréhensibles, de quelles sortes, pour qu'on puisse avoir des éléments. Surtout les premières années d'application de cette loi-là, il va falloir faire des modifications. J'imagine qu'il y a plusieurs modifications que j'ai déjà apportées pour faire un amendement qui a été refusé, qui vont revenir quelque part, à un moment donné, dans la pratique quotidienne. Alors, le Protecteur du citoyen aura à améliorer probablement ses propres données. Alors, on verra, par la Protectrice du citoyen, dans son rapport, quel type de données elle va fournir aux membres de l'Assemblée nationale pour avoir un recul et comment mieux appliquer cette loi-là et comment mieux l'ajuster et l'amender, s'il y a lieu, au fil des prochaines années. Et même une commission parlementaire qui puisse étudier le rapport de la Protectrice du citoyen, le ministre a accepté cet amendement-là. Alors, ça, ça peut être intéressant. Les membres de l'Assemblée nationale aussi n'étaient pas inclus, ils vont l'être par le biais du Bureau de l'Assemblée nationale évidemment, mais c'est un amendement qui a été apporté.

On a beaucoup parlé d'intérêt public, ce sont des éléments qui sont beaucoup plus larges dans le projet de loi : C'est quoi, l'intérêt public? Alors, c'est le devoir de loyauté, comme j'ai parlé. Les motifs raisonnables, c'est toujours des termes juridiques parfois qu'on peut discuter : Qu'est-ce qu'un motif raisonnable? Qu'est-ce qui est de bonne foi ou pas de bonne foi? Pourquoi l'inclure? Pourquoi ne pas l'inclure? Pourquoi, des fois, c'est de bonne foi puis, des fois, ça ne l'est pas? Est-ce que le lanceur d'alerte, naturellement, s'il est de bonne foi... J'ai voulu faire enlever «parfois». Ce terme-là, on a eu quand même certaines discussions. Toujours les mêmes termes entre «peut» et «doit», «doit» ou «peut» : ça, ça fait partie de notre quotidien de législateur, régulièrement, de ces types de mots là.

Je vois, entre autres, Mme la Présidente, là, des éléments qui étaient, pour nous, je pourrais dire... ont été rejetés aussi. Toute la confidentialité, la préservation de la confidentialité, il y a des éléments dedans. Évidemment, quelqu'un qui divulgue, il faut qu'il ait une confidentialité. J'ai voulu ajouter... amender quelques éléments que je trouvais davantage importants. Dans les actes répréhensibles, entre autres, il y avait tout ce qui était des menaces ou des tentatives de, ou une omission préjudiciable à l'intérêt public, tous des termes qui auraient pu être ajoutés au projet de loi, qui n'ont pas été nécessairement ajoutés.

• (12 h 50) •

Je vois, entre autres, Mme la Présidente... Je regarde le temps pour que j'arrive dans mon temps aussi. Ça passe quand même vite, j'ai beaucoup de choses à dire. Le ministre n'est pas surpris, sûrement, que j'aie beaucoup de choses à dire, parce qu'on a cheminé tout le long du projet de loi. Des fois, il soupirait un peu d'impatience, mais on a été quand même capables d'aller jusqu'au bout du projet de loi. Puis je pense qu'il peut être content que je veux quand même donner mon appui au projet de loi malgré toutes les nuances que j'apporte, des grosses nuances.

Mais l'importance, Mme la Présidente, qui m'a guidée, c'est au plus vite qu'on puisse protéger les lanceurs d'alerte, qu'on puisse favoriser la divulgation. Même s'il est imparfait, il est insuffisant, nettement insuffisant à différents endroits, si, comme députée, comme législateur, je me mets dans la peau des citoyens du Québec, des citoyennes du Québec qui ont vu passer devant eux toute la commission Charbonneau, qui ont vu passer devant eux plein de malversations, qui ont vu que parfois la justice... qu'on n'a pas réparé les choses, en me mettant dans leur peau je me dis qu'à tous les jours il faut être capable, dans l'intérêt public, de divulguer et de dénoncer des actes de corruption, de malversation, des actes de collusion.

Et ça, c'est l'élément porteur pour l'opposition officielle, d'adopter ce projet de loi là malgré que les municipalités n'y sont pas, malgré qu'il n'y a pas de fonds, malgré qu'il faut passer par un corps de police avant de passer devant les journalistes, malgré des éléments qui sont essentiels, malgré tout, j'ai hésité. J'ai hésité et même dit à mes collègues : Est-ce qu'on dit non au ministre puis on l'adopte... que nous allons voter contre? Mais je pense que c'est la personne d'abord qui est importante, qu'on puisse la protéger, qu'on puisse la protéger d'actes de représailles, que des gens ne soient pas congédiés parce qu'ils veulent divulguer, parce qu'ils ont l'intérêt public, parce qu'ils ont l'intérêt de leur organisation qui est un organisme, un ministère, un organisme public de l'État.

On aurait aimé que le privé soit dedans aussi. Il ne l'est pas. Alors, vous voyez qu'il y a quand même beaucoup de lacunes. Mais, outre ces lacunes-là, cet élément, ce guide, le phare qui m'a guidée, c'était celui de protéger vraiment les personnes.

Alors, j'espère vraiment... C'est le ministre, c'est le président du Conseil du trésor qui va être garant de cette loi-là, qui aura à l'améliorer en temps et lieu. Je souhaite un bon mandat, lorsqu'il sera adopté, un bon mandat au Protecteur du citoyen — la protectrice actuellement, c'est une femme. Le Protecteur du citoyen a ce nouveau mandat-là, que le ministre puisse lui donner les ressources nécessaires pour qu'il puisse accomplir correctement son mandat. C'est un gros mandat qui va être devant lui, mais c'est à l'avantage de toute la population du Québec pour dénoncer ces actes-là qui irritent énormément la population du Québec.

Et c'est un élément de recommandation de la commission Charbonneau, même si je ne sens pas du gouvernement qu'il a tout l'esprit, dans le fond, d'une vision globale de l'intérêt public dans le sens de divulgation d'actes, dans le sens des recommandations de la commission Charbonneau. On y va beaucoup à la pièce. J'attends impatiemment du ministre, le ministre des Affaires municipales, qu'il dépose son projet de loi. C'est sûr que nous sommes actuellement... Les grévistes... Les juristes de l'État sont dehors, donc ils n'aident pas le gouvernement à faire le projet de loi. Je souhaite que le gouvernement puisse vraiment régler le conflit des juristes de l'État, qui permettraient que le projet de loi concernant les municipalités, que les lanceurs d'alerte soient protégés dans les municipalités, ce qui n'est pas le cas, et qu'il y ait un fonds dédié, évidemment, un fonds dédié pour aider les dénonciateurs, aider les divulgateurs. Parce que c'est ça qu'on veut. On veut un État, une administration saine, et ça passe aussi par permettre aux personnes du Québec, aux citoyens du Québec de vouloir dénoncer dans l'intérêt public du Québec.

Alors voilà, Mme la Présidente, ce projet de loi là qui en est à sa première... C'est un nouveau projet de loi, en fait, du droit nouveau. Et ce projet de loi là va permettre de mieux favoriser les divulgateurs et les actes répréhensibles.

Alors, nous allons voter pour, en ayant apporté toutes ces nuances-là. Je vais suivre de très près le président du Conseil du trésor pour la suite des choses. On va attendre son budget pour savoir si le fonds va y être. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. Et je vais maintenant reconnaître Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Oui, madame.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Vous voulez intervenir?

M. Tanguay : Oui, puis rapidement. Par respect pour ma collègue, il y a entente pour terminer au-delà. Alors, je ne veux pas la couper dans le milieu de son intervention; donc, pour elle, d'aller au-delà, quant à son intervention sur ce qui nous occupe présentement.

Et également il y aura entente, Mme la Présidente, on le constatera, pour le second article que l'on appellera tout à l'heure pour finir au-delà. Alors, on va y aller selon les étapes, mais je voulais vous en informer.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, avant de vous céder la parole, si je comprends bien, là, il y a consentement pour terminer, là, l'adoption pour le projet de loi n° 87 et aussi le projet de loi n° 114. Alors, très bien.

Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, je vous rappelle que vous disposez d'un temps de parole de 10 minutes.

Mme Manon Massé

Mme Massé : De combien, Mme la Présidente, 10?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : 10.

Mme Massé : Bien. J'avais le même chiffre. Merci beaucoup. Bien, je suis contente de pouvoir intervenir à cette étape-ci du projet de loi n° 87, Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles dans les organismes publics. La raison pour laquelle je suis contente d'y intervenir, c'est que, tout au long de nos échanges, on emploie, à mon sens, un raccourci, on dit : La loi sur la protection des lanceurs d'alerte.

Alors, dans le 10 minutes qui m'est imparti, je vais vous dire comment, pour nous, dans ma formation politique, on se rend compte qu'en bout de ligne le projet de loi protège certes une partie des gens, particulièrement la fonction publique, mais malheureusement il met en danger une autre partie de la population, et c'est pourquoi je voulais absolument intervenir durant cette prise en considération.

Je nous rappelle que, depuis plusieurs mois, nous avons été confrontés à ce que le Québec a de plus laid, c'est-à-dire lorsque son élite politique se met les deux mains dans ce que nous pouvons qualifier de corruption, collusion. Et nous avons dépensé plusieurs millions de dollars pour permettre à la juge Charbonneau, ainsi que l'ensemble de son équipe, d'essayer de nous éclairer sur qu'est-ce qu'il était en train de se passer au Québec.

Je ne veux pas m'étendre sur cette question-là, mais vous comprendrez, Mme la Présidente, que, dans une société démocratique, la transparence, le fait que nos dirigeants et dirigeantes, nos élus soient plus que transparents, mais voire même des gens qui sont au-dessus de tout doute, la commission Charbonneau est venue jeter une douche d'eau droit là-dessus. Et c'est elle qui, assez rapidement, nous a rappelé l'importance de protéger les lanceurs d'alerte parce que les lanceurs d'alerte sont les personnes qui, dans toute société démocratique, pas seulement ici, au Québec, permettent de découvrir pas nécessairement des actes répréhensibles, mais des systèmes qui soutiennent des actes répréhensibles.

La commissaire, Mme Charbonneau, nous rappelait que la pire façon d'adopter des projets... la pire façon d'adopter une façon de protéger nos lanceurs d'alerte, c'est de le faire en silo. Et c'est ce que le gouvernement, avec le projet de loi n° 87 et les autres qui viendront, a décidé d'adopter comme position, c'est-à-dire de le prendre par petits bouts. Et je nous rappelle que Mme Charbonneau disait, ainsi que M. Lachance : «De tels types de lois ont l'avantage d'être relativement simples à concevoir — dont notamment celle du projet de loi n° 87 — puisqu'elles visent un secteur [assez] bien délimité. Elles tendent cependant à s'accumuler, puisque chaque secteur génère une loi spécifique, ce qui est susceptible de créer un cadre juridique complexe et difficile à comprendre et peut à terme décourager les personnes de s'en prévaloir.»

• (13 heures) •

Alors, Mme la Présidente, nous avons, durant cette étude détaillée, tenté de ramener le ministre à l'ordre. Nous avons... bien, les ministres, puisqu'il y en a eu trois pour cette période du projet de loi n° 87. Tout ça avait bien commencé, Mme la Présidente, puisqu'à l'article 1, le ministre du Trésor avait accepté d'intégrer un amendement important, bien, en fait, plus qu'un, mais un très important qui est celui de parler d'actes commis à l'égard des organismes publics. Donc, on était en train de recadrer la loi, mais aussi et surtout c'est les tribunaux qui nous diront, dans le futur, l'importance de cet article où on a intégré la dimension de l'intérêt public, qui peut tomber sous le sens pour le commun des mortels, que, lorsqu'on emploie régulièrement le terme «la loi qui protège les lanceurs d'alerte», «qui protège les divulgateurs», c'est sûr qu'on peut croire que tout ça est fait dans l'intérêt public, alors que, comme je le disais d'entrée de jeu, puisque la loi vise à faciliter la divulgation d'actes répréhensibles, son premier objectif n'est pas nécessairement de protéger les lanceurs d'alerte et, qui plus est, peut-être protéger l'intérêt public.

Alors, je suis heureuse quand même d'avoir réussi à faire intégrer cette dimension-là, mais par contre, après ça, tout a été juste de plus en plus difficile, alors que nous avions eu des alignements très importants qui nous avaient été apportés par les groupes que nous avions entendus en commission parlementaire lors d'auditions, des groupes qui venaient, de façon très unanime, nous dire l'importance que les municipalités soient intégrées dans ce projet de loi là, l'importance de ne pas contraindre, à l'article 6, les personnes à aller voir la police avant de se mettre en contact avec les médias, l'importance de tenir compte qu'un divulgateur il ne faut pas que ce soit compliqué parce que, si c'est compliqué, s'il n'est pas certain à 100 % qu'il ou elle est protégé, bien, cette personne-là va se protéger dans un premier lieu. Donc, ça veut dire qu'elle ne va pas divulguer et ça veut donc dire que, dans notre intérêt public, nous manquons des belles occasions de pouvoir savoir ce qui se passe.

Je vous ai... et vous l'avez reconnu comme étant recevable, je vous ai ramené un amendement qui a été déposé dans le cadre de l'étude. Et je l'ai ramené parce que je vais prendre les quelques minutes qu'il me reste pour vous parler de l'article 6, qui est majeur.

Ce que nous remarquons, c'est que ce que nous savons, au Québec, des stratagèmes de tout ordre qui sont pris dans le cadre de la collusion, de la corruption. C'est grâce à des lanceurs d'alerte, c'est grâce à des citoyens et citoyennes responsables qui nous ont éveillés, et souvent c'est par le biais des médias que ces personnes-là ont eu confiance de pouvoir divulguer. L'article 6, Mme la Présidente, tel que libellé, désormais obligera, obligera, les lanceurs d'alerte à aller voir dans un premier temps la police, cette police qui ne s'est pas gênée pour aller chercher des mandats pour pouvoir écouter des journalistes d'enquête. Elle devra absolument — c'est écrit «doit» — communiquer ces renseignements à un corps policier. Nous avons essayé autant comme autant de changer le «doit» pour le «peut» en disant : Le «doit», c'est que vous mettez des citoyens en péril. Les citoyens ne sauront pas s'ils sont protégés ou non. Alors, s'il vous plaît, M. le ministre, au moins, changez le «doit» pour «peut», «peut au préalable communiquer». Fin de non-recevoir, même ça. Pour protéger. C'est de ça qu'on parle ici, pour protéger.

Je recevais une note de l'ancienne présidente de la Fédération professionnelle des journalistes qui me disait : «Je considérerais dès lors — au moment des audiences — périlleux d'adopter cette loi imparfaite qui, loin de faciliter, ne ferait que poser une cloche de verre sur nos institutions sans véritablement permettre aux sonneurs d'alerte, informateurs, sources, divulgateurs d'obtenir de véritable protection supplémentaire et surtout sans faire en sorte que le public en soit informé.» Les exemples ont été nombreux et s'accumulent de mois en mois. Et je ne parle pas ici des journalistes placés sous écoute mais bien des travailleurs, des employés, des cadres, des fonctionnaires qui n'en... plus de constater des failles et cas de malversations, osent parler mais doivent en subir les conséquences.

Alors, Mme la Présidente, à Québec solidaire, nous partageons cette préoccupation puisque les gens du privé... Imaginez, un enseignant dans une école publique va être protégé; un enseignant dans une école privée ne le sera pas. C'est problématique. Et vous comprendrez que, si les gens ne peuvent plus, de par leur jugeote, dire : Je m'en vais voir les journalistes parce que je pense que c'est eux autres qui vont mieux me protéger, bien, on pense que ce projet de loi là ne protège pas tout le monde. Et soyez assurée que nous avons confiance en la Protectrice du citoyen, mais nous allons voter malheureusement contre ce projet de loi.

Mise aux voix de l'amendement

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Y a-t-il d'autres interventions? Alors, je constate qu'il n'y en a pas. Est-ce que l'amendement de Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques et adopté?

Des voix : Rejeté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Rejeté. Alors, cet amendement est rejeté.

Mise aux voix du rapport

Alors, le rapport de la Commission des finances publiques portant sur le projet de loi n° 87, Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles dans les organismes publics, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Des voix : Sur division.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Il est adopté sur division. Maintenant, pour la suite des choses, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Oui, Mme la Présidente. Je vous demanderais, s'il vous plaît, d'appeler l'article 27.

Projet de loi n° 114

Reprise du débat sur l'adoption

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : À l'article 27 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 6 décembre 2016 sur la motion de M. le ministre de la Culture et des Communications proposant l'adoption du projet de loi n° 114, Loi modernisant la gouvernance des musées nationaux. Et je suis prête à reconnaître le premier intervenant, et je cède la parole à Mme la députée de Vachon.

Mme Martine Ouellet

Mme Ouellet : Merci, Mme la Présidente. Donc, un projet de loi qui a été travaillé en collaboration avec le ministre de la Culture, avec aussi la deuxième opposition.

Vous me permettrez, Mme la Présidente, peut-être aussi, dans un premier temps, de remercier les leaders pour les accommodements pour que je puisse parler, donc, aujourd'hui. Donc, merci, là, aux différents leaders pour cette possibilité-là. Permettez-moi aussi de remercier les groupes qui sont venus nous rencontrer. Donc, Musée de la civilisation du Québec — si vous n'avez pas visité, vraiment des belles expositions, on a des musées d'extrêmement grande qualité — Musée national des beaux-arts du Québec, qui tient toujours des belles expositions, qui a des activités également pour les enfants pendant la relâche scolaire — j'ai eu l'occasion dans le passé, quand les enfants étaient plus jeunes, d'en profiter — donc, des activités extrêmement intéressantes et culturelles, c'est le cas de le dire, et le Musée d'art contemporain de Montréal, qui sont venus nous faire des présentations.

Malheureusement, Mme la Présidente, je dois aussi mentionner qu'il y a des groupes qui n'ont pas pu être entendus. Donc, particulièrement l'institut sur la gouvernance des organisations publiques, et ça aurait été vraiment pertinent de les entendre parce que les trois musées sont des gens qui sont directement visés par la loi. Avec l'institut, on aurait eu un avis un peu plus indépendant. Et, comme c'est une loi sur la gouvernance des musées, ça aurait été vraiment pertinent de pouvoir les entendre.

Et aussi de faire, encore une fois, le commentaire : Entre le moment où les gens ont été convoqués et le moment où les auditions se sont tenues, des auditions particulières, un très, très court laps de temps. Donc, il y a la société des musées du Québec qui a finalement décliné l'invitation faute de temps pour se préparer. Je pense que ce serait important, dans nos pratiques, de pouvoir laisser aux intervenants le temps de préparer leur mémoire parce que je pense que leur expertise, leur contribution vient vraiment ajouter à nos travaux et à nos connaissances. Donc, pour les travaux futurs, si c'est possible de faire un petit peu attention pour permettre au maximum d'intervenants de pouvoir venir nous rencontrer.

Donc, une loi sur la gouvernance des musées, en fait, principalement sur les conseils d'administration de ces trois musées-là, sur le fonctionnement des conseils d'administration. Une loi qui a été mise en place pour répondre à la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, donc avoir une meilleure gouvernance avec plus de membres indépendants sur les conseils d'administration et sur le fonctionnement. Une loi aussi qui fait suite à d'autres lois qui ont été adoptées au ministère de la Culture concernant les autres sociétés d'État, dont banque et archives, là, nationales du Québec, qui ont été faites précédemment. Donc, je vous dirais que, dans la majorité des cas, là, c'était beaucoup de la concordance, et il y a eu beaucoup d'ouverture de la part du ministre pour faire des ajustements. On a fait plusieurs amendements, ça s'est fait de collaboration.

• (13 h 10) •

Un trait à souligner toutefois, Mme la Présidente, c'est qu'il y a un accroc qui a été fait, dans cette nouvelle loi sur les musées nationaux par rapport à la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, c'est l'indépendance, l'indépendance du président. On a été, je vous dirais, ouverts à ce que... Normalement, dans les sociétés d'État, c'est deux tiers de membres indépendants. Dans le cas des musées, à cause de la philanthropie, ça a été la majorité. On a été d'accord avec ça. Toutefois, la présidence du conseil d'administration...

Et c'est assez évident que le projet de loi était prévu pour que la présidence soit indépendante parce qu'il est exigé que la vice-présidence, qui remplace la présidence, soit indépendante parce qu'elle remplace la présidence. Donc, c'est assez évident qu'il y a eu un petit accroc qui a été fait pour que la présidence ne soit pas indépendante, et ça, c'est dommage parce que... je comprends toutes les questions de philanthropie, mais il y a beaucoup de philanthropie également dans les hôpitaux et, dans les hôpitaux, il y a des fondations, comme on a dans les musées, et les présidences de conseils d'administration sont indépendantes.

Des discussions qu'on a eues en commission parlementaire, ce serait le seul cas de l'ensemble des sociétés d'État au Québec, et je crois que cet accroc-là n'était vraiment pas nécessaire. Il aurait été largement préférable de garder la présidence indépendante pour permettre une meilleure gouvernance, étant donné que la philanthropie se fait dans les fondations également au niveau des musées, des trois musées nationaux.

Donc, voilà. Mais, pour l'ensemble, nous serons donc d'accord avec le projet de loi n° 114, nous allons l'appuyer. Et donc je pense que les gens des trois musées vont pouvoir maintenant fonctionner avec la nouvelle loi. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie, Mme la députée. Et maintenant, s'il n'y a pas... Vous n'avez pas besoin de votre réplique, M. le ministre?

Mise aux voix

Alors, est-ce que le projet de loi n° 114, Loi modernisant la gouvernance des musées nationaux, est adopté?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Alors, pour la suite des choses, je crois que, compte tenu de... Vous vouliez intervenir, M. le ministre?

M. Fortin (Sherbrooke) : Bien, tout simplement, Mme la Présidente, pour vous demander de suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures afin de permettre le débat sur l'adoption du projet de loi n° 109.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, on s'entend là-dessus, M. le ministre. Je vais suspendre les travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 13)

(Reprise à 15 h 1)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, veuillez vous asseoir. On vous souhaite un bon après-midi. Et, Mme la leader adjointe du gouvernement, pour votre nouvelle. C'est quoi?

Mme Vien : Bonjour, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : ...

Mme Vien : Ça va très bien. Vous-même?

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui.

Mme Vien : Seriez-vous assez gentil pour appeler l'article 26, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Gendron) : Pourquoi vous me demandez ça? Vous le savez, que je suis gentil.

Projet de loi n° 109

Adoption

Alors, à l'article 27, il faut se rendre à la dernière page, alors c'est M. le ministre... Ce n'est pas vrai. 26, ce n'est pas ça, c'est 27 que vous avez dit, hein? 26? Ah! on est à la bonne page. C'est M. le ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire qui propose l'adoption du projet de loi n° 109, Loi accordant le statut de capitale nationale à la Ville de Québec et augmentant à ce titre son autonomie et ses pouvoirs. Et je reconnais M. le ministre pour son intervention. À vous, M. le ministre.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, évidemment, je suis très heureux que nous soyons rendus à cette étape-ci du processus législatif concernant le projet de loi n° 109, Loi accordant le statut de capitale nationale à la Ville de Québec et augmentant à ce titre son autonomie et ses pouvoirs.

Je vous rappelle que c'est un projet de loi qui reconnaît la ville de Québec comme étant la capitale nationale de tous les Québécois et qui donne un sens à cette désignation, notamment que Québec soit reconnue comme le lieu privilégié et prioritaire des grandes rencontres politiques et des négociations importantes de toute nature auxquelles prend part le gouvernement du Québec, de l'accueil des dignitaires étrangers en visite au Québec, des rencontres diplomatiques et des sommets gouvernementaux, et aussi comme lieu de résidence de fonction du premier ministre du Québec, et d'autres dispositions aussi qui font partie de la reconnaissance de ce statut.

C'est une ville patrimoniale, la ville de Québec, notre capitale nationale est une ville patrimoniale. Son patrimoine, d'ailleurs, est reconnu par l'UNESCO, et nous souhaitons qu'elle puisse avoir les pouvoirs nécessaires pour préserver et faire valoir ce patrimoine tout à fait unique.

On souhaite qu'elle puisse aussi... Il y a une bonne partie du projet de loi qui vise à la doter d'outils, je dirais, de gestion, qui va lui permettre d'offrir de meilleurs services aux citoyens en simplifiant tout le processus de prise de décision, notamment à l'égard de la gestion des ressources humaines au service des citoyens de la ville de Québec.

C'est un moment historique aujourd'hui, M. le Président. Vous savez, avec le dépôt des projets de loi reconnaissant les municipalités comme des gouvernements de proximité et le projet de loi sur le statut de métropole de Montréal, c'est un triplet de lois qui reconnaissent que les villes sont des gouvernements de proximité et que certaines d'entre elles ont des responsabilités particulières à l'égard de l'ensemble de la population et ont des besoins spécifiques qui doivent être reconnus. Et c'est un moment historique puisque le premier de ces projets de loi que nous avons déposés, c'était celui de notre capitale nationale, et on arrive maintenant, après nos travaux parlementaires, après l'étude détaillée, après les amendements que nous avons apportés... on arrive à l'étape, maintenant, de l'adoption. Alors, c'est pour ça que c'est important, ça, aujourd'hui.

Alors, comment est-ce qu'on en est arrivés là? Évidemment, on en est arrivés là parce qu'on a travaillé avec les collègues, on a travaillé avec le président de la commission, évidemment, il fait toujours... Je ne le vois pas à l'heure actuelle, mais je le salue quand même, le député de Champlain, qui fait toujours un travail remarquable à la Commission de l'aménagement du territoire, qui permet aux échanges de se dérouler dans le climat le meilleur possible. Et évidemment ça ne se serait pas fait de cette façon-là non plus s'il n'y avait pas eu une collaboration très grande entre moi, et mes collègues du côté gouvernemental, et l'opposition officielle, et la deuxième opposition. Je l'ai dit au moment de la prise en considération, le départ a été un petit peu plus laborieux, mais quand même, assez rapidement, on a vu, là, on avait tous la même intention de reconnaître ce statut de capitale nationale, de donner à Québec les pouvoirs et d'offrir aux résidents, aux citoyens de la ville de Québec ce statut avant l'ajournement de nos travaux, avant l'année 2017. Donc, on a travaillé ensemble, et je tiens donc à saluer la grande collaboration de mes collègues de l'opposition officielle et de la deuxième opposition là-dessus.

Alors donc, on reconnaît par ce projet de loi que la capitale nationale est le berceau de la francophonie en Amérique du Nord et que son arrondissement historique est reconnu par l'UNESCO en tant que bien culturel du patrimoine mondial, pas seulement québécois.

On simplifie la gouvernance de la ville en revoyant les règles qui lui sont applicables en matière de gestion des ressources humaines et en réorganisant le partage des responsabilités, dans certains domaines, entre le conseil exécutif et les arrondissements. On accorde plus d'autonomie à la ville en matière de limites de vitesse. En fait, on enlève la tutelle du ministère des Transports sur l'établissement des limites de vitesse à l'intérieur du territoire de la ville.

On crée un fonds de la capitale nationale et de sa région, qui aura pour but de contribuer au dynamisme, à la vitalité, au développement, à l'essor économique et au rayonnement de la région de la Capitale-Nationale, donc pas seulement la ville de Québec, les villes liées de son agglomération, bien entendu, mais aussi Charlevoix et Portneuf.

On accorde à la ville un pouvoir général de taxation ainsi que le pouvoir d'exiger des redevances réglementaires, et ça ne doit pas être assimilé à un outil qui permettrait d'augmenter les impôts. Ce n'est pas de ça qu'il s'agit. C'est beaucoup plus de reconnaître qu'une fois qu'on a fait la liste des champs de taxation qui sont déjà occupés par le gouvernement, la ville de Québec pourra diversifier ses sources de revenus de la meilleure façon possible en fonction des objectifs qu'elle va poursuivre. On prévoit une nouvelle modulation du régime de contribution pour fins de parc.

Aussi, puisque c'est une ville patrimoniale, une ville qui nous donne... qui a un apport incommensurable à la culture au Québec, on lui accorde le pouvoir d'appliquer, dans le cadre d'une entente de délégation conclue avec le ministre de la Culture et des Communications, la Politique d'intégration des arts à l'architecture et à l'environnement des bâtiments et des sites gouvernementaux. On modifie la Loi sur le patrimoine culturel pour prévoir l'exercice par la ville de certains pouvoirs d'autorisation qui, autrement, seraient mis en application par le ministre de la Culture et des Communications. Donc, il y a une dévolution là aussi. On accorde à la ville des pouvoirs lui permettant de protéger davantage son patrimoine bâti et on renforce ses capacités d'intervention en ce qui a trait à l'aménagement et l'urbanisme.

Alors, il y a eu quelques amendements, je ne vais pas tous les nommer, mais ils sont importants. Peut-être le plus important, par rapport au projet de loi qui avait été soumis à l'Assemblée nationale en juin dernier, c'est qu'on a décidé de retirer les dispositions qui touchaient aux approbations référendaires dans le cadre du projet d'urbanisme, d'aménagement, pour faire le débat plutôt dans le projet de loi sur les gouvernements de proximité. Donc, ça, ça a été un amendement important, ça touchait plusieurs articles.

J'ai mentionné tout à l'heure le lieu de résidence de fonction du premier ministre. C'est un amendement, celui-là a été présenté par la deuxième opposition.

Nous avons, de notre côté, apporté des amendements afin qu'un membre du conseil d'administration de la Commission de la capitale nationale du Québec soit nommé sur sa recommandation, la recommandation de la nation huronne-wendat. Effectivement, lors des consultations, avant de commencer l'étude article par article, on a reçu les représentants de la nation huronne-wendat qui nous ont sensibilisés à l'importance de les inclure dans ce statut de capitale nationale. Alors, on l'a fait notamment en prévoyant qu'un membre du conseil d'administration de la Commission de la capitale nationale soit nommé sur sa recommandation et en prévoyant qu'un résident de Wendake puisse siéger au conseil des arts de la ville de Québec. Et d'ailleurs on a pris un engagement en même temps à tenir compte de l'implication de la nation huronne-wendat et de la promotion de sa culture dans l'entente de dévolution qui sera conclue entre le ministère de la Culture et de la ville de Québec dans le cadre de la Politique d'intégration des arts à l'architecture et à l'environnement des bâtiments et des sites gouvernementaux et publics.

• (15 h 10) •

Il y a eu des amendements qui ont été proposés par l'opposition officielle, notamment celui d'augmenter le nombre de représentants des usagers dans la composition du conseil d'administration du Réseau de transport de la Capitale, amendement qu'on a tous bien reçu également. On a aussi, sur un amendement de l'opposition officielle... On souhaitait tous une reddition de comptes appropriée, mais on l'a inscrit formellement dans l'article de loi touchant le fonds, qu'on aurait la reddition de compte appropriée pour qu'on puisse faire nos travaux notamment lors de l'étude des crédits. Donc, c'est un autre amendement qui a été apporté.

Alors, projet de loi important, donc, projet de loi historique, le premier d'un triplet de lois sur l'autonomie municipale qui donne à toutes les villes du Québec le statut de gouvernement de proximité et qui leur donne des nouveaux outils, mais qui reconnaît — qui reconnaît — que la ville de Québec, c'est notre capitale. Il y en a une seule, et elle a donc besoin de certains outils qui lui sont spécifiques. Tout comme avec le dépôt du projet de loi sur le statut de métropole, aujourd'hui on reconnaît qu'il y a une seule métropole et on lui donne des outils qui correspondent à ses besoins, à sa réalité et à ses politiques en matière de développement économique et social.

Alors, voilà, M. le Président. On en est rendus là, et je vais écouter évidemment les interventions de mes collègues pour la suite des choses, et j'espère qu'on va pouvoir adopter aujourd'hui même, je souhaite, ce projet de loi important pour les citoyens de la ville de Québec, mais important pour l'ensemble des Québécoises et des Québécois. Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, on vous remercie, M. le ministre des Affaires municipales, de votre intervention. Et, pour l'adoption finale de ce projet de loi, je cède la parole maintenant à la porte-parole de l'opposition officielle en ces matières, Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Alors, on a jasé ici, dans l'Assemblée nationale, après les auditions en commission parlementaire, de l'adoption de principe — le «on», ici, inclut les oppositions, puisqu'on n'a pas beaucoup entendu à l'époque le ministre — adoption de principe où il fallait établir les principes et ce qui était à changer dans la loi. Ensuite, on a fait l'étude article par article. On a fait la prise en considération, où on a regardé chacun des amendements pour voir si on était d'accord ou pas, ce que ça avait donné comme résultat. Et aujourd'hui c'est l'adoption finale. J'explique comme ça les différents votes qu'on fait, les différents... pour les gens qui ont moins... qui comprennent moins bien à quel point ce mécanisme est important à chaque étape.

Alors, bien sûr, on va adopter cette loi-là, on va voter pour. On a travaillé un texte de loi avec lequel, au départ, sur le principe, on était d'accord. J'ai expliqué hier, à la prise en considération du rapport, quels étaient les amendements qu'on avait amenés, que l'autre opposition avait amenés, que le ministre avait apportés, qui faisaient qu'on était satisfaits du texte.

Maintenant, je ne pensais pas jaser un peu plus, mais là je viens d'entendre «caractère historique», «importance capitale», et tout ça. On va ramener la loi à ce qu'elle est : la loi qui consacre, dans une loi, le statut de capitale nationale, qui était déjà reconnu par tous les gouvernements jusqu'ici. On l'a inscrit dans une loi, c'est bien. De là à dire que c'est historique... Quand c'est historique, c'est que c'est un fait nouveau dans l'histoire. Là, on n'est pas dans le fait nouveau dans l'histoire du Québec, on est dans l'application dans une loi d'un principe reconnu et partagé par tous les gouvernements, qu'ils soient libéraux ou péquistes, jusqu'ici, donc... et par toutes les oppositions jusqu'ici. Quel que soit le parti qui était dans l'opposition, on s'est toujours entendus là-dessus. Donc, c'est bien. De là à dire le mot «historique», je crois qu'il y a une légère enflure verbale.

Je comprends que le ministre est très content parce qu'il est en train de déposer plusieurs lois qui concernent les villes. Ça, je le comprends. Mais cette loi-là n'est pas une loi historique. C'est une loi... même, je dirais qu'elle a peut-être un peu manqué le bateau, ou, en tout cas, elle n'a pas la grandeur qu'on lui attribue ou qu'on lui a attribuée dans le passé. C'est une loi qui revoit, à l'intérieur du gouvernement... pas à l'intérieur du gouvernement, à l'intérieur de la municipalité de Québec, les pouvoirs entre les arrondissements et la ville. Puis c'est bien, on est d'accord avec ça. C'est bien fait, bien attribué. Donc, ça, ce côté-là... mais ce n'est pas historique de revoir l'intérieur... les pouvoirs entre la municipalité et les arrondissements, là, ce n'est pas ça qui fait une loi historique. Ce n'est pas ça non plus...

Et ça ne devient pas une loi historique parce qu'il y a un fonds de développement de la Capitale-Nationale qui est créé, il existait. Il existait, et même qu'à l'époque il était géré par la région. Là, maintenant, il va être géré par le maire de Québec, en collaboration avec le forum régional des élus, parce qu'il y a des élus qui ont... d'autres élus que le maire de Québec qui ont dit : Ça n'a pas de bon sens que ça ne soit géré que par le maire de Québec. Donc, ce n'est pas historique, il y avait un fonds de développement. C'est bien.

On a introduit, là, la reddition de comptes, la gestion du fonds. Je ne considère pas, moi, que d'avoir ajouté, par exemple, mon amendement... notre amendement, qui était d'avoir la reddition de comptes, c'est un fait historique. Bien, ça, c'est une nouveauté, parce qu'il y en avait peu avant sur les fonds de développement économique de la ville de Québec, mais, ceux du Québec, on avait une certaine reddition de comptes, qu'on va retrouver maintenant là-dedans.

Ce n'est pas très historique que la ville maintenant puisse gérer les biens ou services à caractère érotique, les bars de danseuses. Ce n'est pas historique, il était temps qu'on le fasse. Qu'il y ait que le ministère des Transports... les réglementations de vitesse, ce n'est pas historique, c'est quelque chose qu'il était temps de faire. Je ne pense pas qu'on puisse parler de caractère historique des choses là-dedans, mais de bonnes choses, de belles et bonnes choses. De la dévolution de pouvoirs qui est intéressante, pas capitale, pas historique, mais intéressante et qu'il était temps de faire, je crois. Les villes ont acquis une maturité, au fil du temps, qu'il est nécessaire de reconnaître. Et donner aux maires les pouvoirs de gérer leurs territoires de façon raisonnée puis de répondre plus rapidement aux besoins des citoyens et citoyennes du Québec, c'est une bonne chose, pas une chose historique, mais c'est une bonne chose.

C'est pour ça, M. le Président, que nous allons voter avec plaisir cette loi, on va voter en faveur de cette loi, non pas parce qu'elle est historique, mais parce qu'elle fixe des choses qu'il était important de fixer, qu'elle donne plus de liberté au maire de Québec de répondre aux besoins des citoyens et des citoyennes de son territoire, et ça, c'est une bonne chose. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : On vous remercie, Mme la députée de Taschereau. Et, pour la poursuite du débat, je cède maintenant la parole à M. le député de La Peltrie pour son intervention. M. le député de La Peltrie, à vous.

M. Éric Caire

M. Caire : Merci, M. le Président. C'est, je pense, un privilège pour moi aujourd'hui d'intervenir sur cette adoption finale. Et, M. le Président, ce sera sans doute une journée à marquer au calendrier, parce que, là, je vais presque défendre le ministre des Affaires municipales par rapport à ce que j'ai entendu de ma collègue. Presque. Je vais quand même me garder une petite gêne.

Est-ce que cette loi-là est historique? Je ne pense pas qu'on va se lancer dans un grand débat. Mais elle est très certainement beaucoup plus que symbolique, M. le Président. Est-ce que la ville de Québec était reconnue par tout le monde comme notre capitale nationale? Oui. Ceci étant dit, le dire était une chose, mais agir en conséquence en était une autre.

Juste quelques points, M. le Président, pour étayer ce que je viens de dire. À partir de maintenant, la loi dit que le territoire de notre Capitale-Nationale est le lieu privilégié et prioritaire pour l'accueil des dignitaires étrangers. M. le Président, combien de fois les gens de Québec se sont-ils enragés d'entendre qu'on accueillait des dignitaires à Montréal, qu'ils ne venaient même pas à Québec? Combien de fois a-t-on vu ça? Le parcours : Montréal-Ottawa. Québec n'était pas là. On n'était pas sur le chemin. C'était trop compliqué de venir à Québec. Combien de fois? La loi va faire que ça va changer. Combien de fois a-t-on entendu parler de négociations très importantes? Le gouvernement est ici, les ministères sont ici, et la négociation se faisait à Montréal. On en a discuté avec le ministre, il nous l'a garanti : sauf exception, ce ne sera plus possible.

Donc, M. le Président, c'est plus que symbolique. Cette loi-là vient consacrer Québec comme la capitale nationale, notamment dans la présence du gouvernement, dans les actions du gouvernement et dans la représentation que l'on fera autant pour les dignitaires étrangers que dans les actions du gouvernement. Et, par amendement, on s'est entendus que les grands événements politiques, toutes les rencontres qui sont orchestrées à l'initiative du gouvernement se feront à Québec, dans notre capitale nationale.

• (15 h 20) •

Un autre débat — et le député de Jean-Lesage pourra très certainement en témoigner — qui a fait rage trop longtemps était à savoir : Est-ce qu'il devrait y avoir à Québec une résidence pour le chef de notre gouvernement? Tantôt oui, tantôt non, tantôt sur la rue des Braves, oups! non, on ne garde plus ça, il n'y en a plus. Pour moi, pour nous... Puis ce que je comprends, c'est que, pour l'ensemble des collègues, ce n'était même plus un sujet de discussion. Mais aujourd'hui, M. le Président, par un amendement... Puis le ministre disait que je l'avais déposé, mais il faut rendre à César ce qui est à César. J'ai amené l'idée, mais la résultante est quand même suite à des discussions avec le député de Louis-Hébert, qui a eu une participation significative à cette discussion-là, ma collègue de Taschereau, le ministre et moi. Ça a donné un libellé qui a, je pense, rallié tout le monde sur ce principe que, dans notre capitale nationale, il devait y avoir une résidence de fonction pour notre premier ministre, c'était naturel. Donc, je suis, moi, très fier, très heureux de voir qu'il y a une loi qui consacre ça et qu'à partir de maintenant ce ne sera pas laissé à la décision de tout un chacun que ces événements-là, que cette résidence-là, que ce comportement-là se fasse ou non, c'est une loi qui vient le consacrer. Et nous, élus de Québec, le maire de Québec en a parlé, mais tous les députés de l'Assemblée nationale, sur la base de cette loi-là, pourrons nous assurer que la capitale nationale est traitée en tant que telle.

Donc, c'est beaucoup plus qu'un symbole, M. le Président, la loi qu'on adopte aujourd'hui. Est-elle historique? Je ne sais pas, mais elle est très significative et elle est très marquante pour Québec, pour notre capitale nationale, et pour son histoire. Ça, il n'y a aucun doute.

M. le Président, dans les interventions que j'ai faites, j'avais expliqué au ministre qu'il y avait des écueils dans la loi. Et là je veux le remercier, je veux le remercier de son ouverture. Ça n'a pas été facile, ça a donné lieu à des discussions intenses, mais je pense que c'est le propre d'un Parlement où chacun défend son point de vue. Quelquefois, il y a des positions qui semblent irréconciliables, puis, avec le temps, les discussions, les mains tendues, les propositions, ce qui est irréconciliable finit pas se réconcilier. C'est ce qui est arrivé dans ce cas-ci, et je veux remercier le ministre de son ouverture puis de sa collaboration, parce que, grâce à ça, aujourd'hui nous allons unanimement adopter un beau, un bon projet de loi pour notre capitale nationale.

Mais il était fondamental pour moi que ces écueils-là soient retirés de notre parcours, puis je pense que j'ai eu l'occasion de l'expliquer en commission parlementaire, je ne referai pas l'ensemble des débats que j'ai déjà faits, mais c'était fondamental, c'était une question d'équité, c'était une question de justice et c'était une question aussi de doter Québec d'outils dont Québec a besoin, mais de ne pas aller jouer dans des endroits qui n'avaient rien à voir avec le statut de capitale nationale, qui étaient, je pense, des détours vers d'autres problématiques dont on devra discuter un jour, j'en conviens, mais qui n'avaient pas leur place là. Et, dans ce sens-là, je suis heureux du travail qu'on a fait, je suis fier du travail qu'on a fait et je suis très satisfait des compromis qui ont été faits de part et d'autre. Je pense que ça se fait au bénéfice de tout le monde.

M. le Président, il y a aussi dans cette loi-là toute la notion de confiance, ma collègue et le ministre en ont parlé. Puis c'est un débat sur lequel, je dois dire, personnellement j'ai évolué, c'est sur l'organisation administrative de Québec. Le ministre l'a dit, la capitale doit avoir l'ensemble des pouvoirs pour s'administrer, pour assumer ce rôle-là. Et, comme l'a déjà dit le maire de Québec, il y avait une organisation administrative, à Québec, qui peut se défendre sur le plan de l'efficacité, ce n'est pas... mon propos n'est pas de juger est-ce que c'est la bonne ou pas la bonne organisation administrative, mais simplement que, de l'imposer à la ville par une loi, quand on sait que c'est un vestige de tout le processus, essentiellement, qui nous a conduits vers les fusions qui ont amené la nouvelle ville de Québec à exister, je pense qu'on devait maintenant se poser la question : Est-ce que la ville de Québec a cette maturité, maintenant, pour organiser l'administration de ses services sur son territoire? Et est-ce qu'il revient aux élus de la ville de Québec d'en décider? Et la réponse à cette question-là, pour moi, fondamentalement, c'est oui. Nonobstant ce que je peux penser de ladite organisation, est-ce que je pense qu'elle est plus efficace ou non, comme citoyen j'ai droit à mon opinion comme tout le monde, mais, comme législateurs, si on est sérieux dans notre volonté de reconnaître aux municipalités et notamment, dans ce cas-ci, à notre capitale nationale cette autonomie nécessaire à sa gestion, on n'avait pas le choix que de revoir ce modèle-là, qui était, comme je le dis, un héritage d'un processus de création de la nouvelle ville et qui n'était pas nécessairement motivé par l'efficacité mais plutôt sur la façon dont on allait accepter ce processus-là. Et aujourd'hui on est rendus ailleurs, aujourd'hui on est rendus ailleurs, et la ville de Québec a très certainement besoin de ces outils-là.

Sur le pouvoir général de taxation, j'ai émis des réserves dans mes commentaires. J'ai les mêmes réserves, mais je dois être cohérent avec ce que je viens de dire, M. le Président. Le ministre nous a dit : On a adopté un modèle, donc de permettre tout ce qui n'est pas interdit plutôt que de permettre spécifiquement. Est-ce que le modèle va fonctionner? Bien, encore là, si on pense que les villes ont cette maturité-là, on peut penser que oui. À l'usage, on verra, de toute façon. Il n'y a rien comme l'essayer pour le savoir. Et c'est certain aussi que la reddition de comptes fait en sorte que, si les élus municipaux imposent des nouvelles taxes, bien sûr — et là-dessus je me rallie à l'argument du ministre — que ces mêmes élus municipaux auront à en rendre compte devant leurs électeurs. Donc, évidemment, j'imagine qu'une élémentaire prudence électorale va faire en sorte qu'on peut en user, mais peut-être qu'on ne sera pas tenté d'en abuser. Donc, encore là, je me suis rallié, même si j'avais des réserves, je me suis rallié et d'autant plus facilement que les a priori que j'avais par rapport à l'organisation politique que représente l'agglomération n'étaient pas impactés par cette mesure-là. Ça, pour moi, c'était important. Ce n'est pas le cas, on a eu toutes les validations nécessaires là-dessus. Donc, c'était d'autant plus simple pour moi d'adhérer à cette position-là.

Et même chose pour les redevances, tout le système de redevances. J'ai toujours, peut-être, une crainte, que je partage avec le ministre, sur l'utilisation des redevances et la formulation légale. Le ministre me dit qu'il n'est pas possible de se servir de ces fonds-là à d'autres fins que ce pour quoi ils ont été perçus. Et je prends la parole du ministre, j'imagine que les vérifications d'usage ont été faites, mais j'avoue que je serai très vigilant par rapport à cette question-là. D'abord, j'ai un double intérêt, M. le Président : à titre de législateur qui adopte la loi, mais à titre de citoyen de la ville de Québec, qui va peut-être contribuer à ces redevances-là. J'aurai, comme mes autres collègues, une attention particulière à s'assurer que le régime de redevances va véritablement aider Québec à solutionner des problèmes et non pas à permettre de collecter des fonds qui serviraient à d'autres choses. Mais, sinon, encore une fois, M. le Président, les impacts de ça sont limités à la ville de Québec. Et ce sera aux élus de Québec, à ce moment-là, de rendre des comptes dans le cadre d'une élection d'un conseil municipal. Il y a différents mécanismes pour s'assurer que ce pouvoir-là qui leur est donné est utilisé à bon escient. De toute façon, j'ai cru comprendre que, dans la pièce législative que le ministre a déposée sur les gouvernements de proximité, c'est une possibilité qui serait donnée à l'ensemble des municipalités du Québec. C'est une bonne chose. Je le salue, soit dit en passant, avec les réserves que je viens d'exprimer, toutefois.

• (15 h 30) •

J'avais aussi des réserves sur l'article 22, puis on a eu une bonne discussion avec le ministre, qui a, je pense, bien répondu à ces attentes-là, s'assurer que, sur la gestion des contrats, encore une fois, ce pouvoir, cette autorité-là nouvelle qu'on donnait à la ville de Québec ne s'appliquait qu'à la ville de Québec. Parce qu'il y a un équilibre qui est, je dirais, très, très fragile au niveau de l'agglomération, pour lequel, à mon avis, c'était dangereux d'aller jouer là-dedans.

M. le Président, sur le conseil d'administration du RTC, on a eu des discussions plutôt, cette fois-là, avec ma collègue de Taschereau. Parce que, personnellement, j'aurais souhaité qu'il y ait une meilleure représentation territoriale. Puis ma collègue de Taschereau disait, puis elle a tout à fait raison, que ce que je proposais, c'est-à-dire que, sur les élus, il y en ait deux qui viennent nécessairement des villes liées... J'aurais souhaité aussi qu'il y ait un membre de la nation huronne-wendat qui siège sur le conseil d'administration. Ça n'a pas été possible. Mais, sans refaire le débat, M. le Président, parce qu'on l'a déjà fait, je souhaite que le conseil d'administration nouvellement formé du RTC entende peut-être cet argument-là de représentation territoriale. Parce que, d'abord, je pense qu'on souhaite tous que notre transport collectif à Québec fonctionne bien, augmente la qualité de son service, offre une alternative valable aux automobilistes. Et je pense que c'est son principal défi, au-delà de tous les autres débats qu'on peut avoir, d'être une alternative valable. Vous savez, M. le Président, il n'y a personne qui va aller se lancer dans le trafic quand il peut aller plus vite et mieux avec l'autobus. Il n'y a personne qui fait ça. Si les gens ne le font pas, c'est parce que l'alternative n'est pas jugée valable. Donc, il faut travailler, il faut se pencher là-dessus dans les prochaines années, M. le Président. Parce que, comme j'ai dit, le RTC a perdu 100 000 usagers. Alors que le nombre d'habitants de la ville de Québec augmente, le nombre d'usagers diminue. Ça, M. le Président, ça doit allumer une lumière rouge.

Et, quand je parlais de représentation territoriale au ministre, c'était sincèrement parce que je pense que, si le RTC est bien ancré non seulement chez les usagers... Puis ça, l'amendement de ma collègue de Taschereau le reflétait bien, c'était, je pense, une bonne chose à faire, mais il faut aussi se préoccuper du transport en commun en périphérie de Québec parce que, je le dis en tout respect, on a une belle volonté de l'améliorer dans les zones centrales, mais on oublie qu'il y a des banlieues, et, généralement, les usagers du transport en commun sont aussi et surtout dans les banlieues. En tout cas, je pense, sans vouloir m'avancer, là, puis sur un domaine que je connais moins, mais sur lequel je peux constater que le niveau de service est peut-être moins adéquat, et c'est dans ce sens-là où je proposais l'amendement. Ceci étant dit, ce qui a été adopté ne l'empêche pas. Il ne l'oblige pas, mais il ne l'empêche pas. Donc, ce sera, de ma part, un message d'intérêt général au conseil d'administration du RTC de dire : Pensez à ça parce que l'objectif au final, c'est d'offrir un meilleur service.

Sur le fonds d'aide, j'en ai parlé dans les... c'est-à-dire le fonds de développement — pardon, ce n'est pas une bonne appellation — le fonds de développement pour la capitale et sa région, j'avais l'a priori de voir comment on va dépenser cet argent-là, puis, au final, je pense que la même logique va s'appliquer, c'est-à-dire qu'il y a un ministre qui est responsable. L'amendement que ma collègue a apporté, je pense, répond à plusieurs interrogations qu'on pouvait avoir, à savoir qu'il n'y aura pas simplement un montant global sur une ligne des crédits qui dit : On a dépensé tant. Donc, avec l'amendement de ma collègue, oui, on va savoir qu'on a dépensé tant, mais pour qui, pour quoi et combien. Donc, il y aura une ventilation qui va se faire qui va permettre d'avoir une meilleure reddition de comptes.

Ceci étant dit, j'ose croire qu'il n'y aura pas de déresponsabilisation du ministre responsable du budget. Ce que je veux dire, M. le Président, c'est que, si des investissements sont faits, bien, il ne faudra pas que la réponse aux parlementaires soit : Écoutez, ce n'est pas moi, ce sont les élus qui ont fait ça. Dans le cas de deniers publics, il y aura toujours, il devra toujours... Deniers publics du provincial, s'entend, je vais le préciser, M. le Président. Donc, dans le cas de budgets qui émanent du gouvernement provincial, il devra toujours y avoir un ministre qui répond aux questions, qui est responsable non seulement du budget, mais de ses attributions, des investissements qui sont faits et des résultats. Puis je sais que ça, c'est un discours qui résonne chez le ministre, quand on parle de résultats, je pense que c'est quelqu'un qui est assez à l'aise avec ce genre de concept là. Ce sera important que ce budget-là donne des résultats et qu'on puisse avoir des investissements, oui, probablement majoritairement dans notre capitale, mais dans sa région aussi, ce sera important de ne pas oublier la région. Et de savoir qu'il y aura un ministre qui répondra à ces questions-là à l'Assemblée nationale, pour moi, c'est rassurant. Puis, pour le reste, comment le ministre décide d'impartir la gestion du fonds, bien, à partir de là, ça devient sa prérogative.

M. le Président, je ne veux pas prendre beaucoup plus de temps, mais, compte tenu du fait qu'hier j'avais fait des commentaires plus restreints, je me suis dit qu'aujourd'hui je pourrais en prendre un petit peu plus. Je serai très fier de dire, M. le Président, que j'ai participé au projet de loi qui a fait de Québec de façon officielle — et non pas de façon implicite, mais de façon officielle — notre capitale nationale. Vous savez, je suis un fier citoyen de Québec, un fier résident de notre capitale, et qu'on puisse, aujourd'hui, voter pour un tel projet de loi avec l'ensemble des pouvoirs que ça représente, avec la prérogative, maintenant, que ça donne quant à des événements à caractère politique, culturel, social, de savoir que, maintenant, un diplomate étranger, bien, ce ne sera pas simplement un article dans un journal, puis ce n'est pas de cette façon-là qu'on va apprendre qu'il est ici, mais bien parce qu'il sera venu ici, qu'il aura été reçu ici, bien, pour moi, c'est un objet de fierté. Et c'est un long combat de la part des gens de la ville de Québec, et, aujourd'hui, je leur dis, en votant pour ce projet de loi là, que c'est mission accomplie. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, on vous remercie, M. le député de La Peltrie, de votre intervention. Et, toujours sur le principe de ce projet de loi là, je cède maintenant la parole à Mme la députée de Chauveau. À vous.

Mme Véronyque Tremblay

Mme Tremblay : Merci beaucoup, M. le Président. Eh bien, je suis très heureuse de prendre la parole aujourd'hui pour l'adoption du projet de loi n° 109, Loi accordant le statut de capitale nationale à la Ville de Québec et augmentant à ce titre son autonomie et ses pouvoirs.

Depuis juin 2015, je représente fièrement mes concitoyens de Chauveau, et je trouve important de rappeler qu'une partie d'entre eux habite la ville de Québec, qui est directement touchée par ce projet de loi là. Mes autres concitoyens se trouvent dans des municipalités qui font partie de la Communauté métropolitaine de Québec, et qui est également touchée par certains éléments du projet de loi. J'ai aussi dans mon comté Wendake, une communauté autochtone dont je vous parlerai un peu plus tard également.

J'aimerais, d'abord, rappeler à ceux qui nous écoutent tout le chemin parcouru par notre gouvernement pour arriver où on en est aujourd'hui. En septembre 2015, notre collègue de Châteauguay, qui était alors ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire, a signé l'accord de partenariat avec les municipalités, qu'on appelle aujourd'hui le pacte fiscal. Les signataires, en plus du premier ministre, du ministre des Affaires municipales et du ministre des Finances, étaient les présidents de la Fédération québécoise des municipalités, la FQM, de l'Union des municipalités du Québec, l'UMQ, et les maires de Montréal et de Québec, et cette signature scellait une entente qui reconnaît, entre autres, que les municipalités sont des partenaires importants dans l'offre de service aux citoyens et de viser une plus grande autonomie dans leur gestion. L'ensemble des municipalités seront bientôt reconnues comme des gouvernements de proximité grâce au projet de loi n° 122, loi qui accorde aux municipalités le statut de gouvernements de proximité et qui augmente à ce titre leur autonomie et leurs pouvoirs. C'est un geste de confiance envers les municipalités et la plus grande décentralisation des pouvoirs de l'histoire du Québec.

Parlons maintenant du projet de loi qui nous concerne aujourd'hui, donc celui sur le statut de capitale nationale pour la ville de Québec. Nous offrons à la ville de Québec plus de pouvoirs en matière de transport, d'aménagement, d'urbanisme, en matière d'arts, de culture, de patrimoine. Sur le tourisme aussi, nous lui offrons de nouveaux outils de gouvernance. Son statut de capitale nationale va positionner la ville de Québec comme le berceau de la francophonie nord-américaine avec un arrondissement historique inscrit au patrimoine de l'UNESCO et comme lieu de rassemblement privilégié pour l'accueil de dignitaires et de dirigeants lors d'événements protocolaires, sommets ou négociations importantes. C'est donc majeur pour la ville de Québec et, je dirais, pour la région de Québec, également pour le tourisme, l'industrie de la région de Québec.

Je vous ai signalé au début de mon intervention que ma circonscription de Chauveau comptait sur son territoire la communauté autochtone de Wendake, qui réunit un petit peu plus de 2 000 personnes. Et je suis heureuse de pouvoir dire que le projet de loi n° 109 intègre des éléments qui donnent une place plus importante à la communauté huronne-wendat.

Un premier élément concerne la Commission de la capitale nationale, qui remplit trois rôles importants. Donc, ses rôles sont de contribuer à l'aménagement et à l'embellissement de la Capitale-Nationale, d'en faire, deux, la promotion de... notamment d'activités, et, troisièmement, d'être un conseiller sur la mise en valeur du statut de capitale nationale. La commission est administrée par un conseil d'administration composé de 13 membres qui représentent différents milieux de la société québécoise, et je suis fière de dire que l'un de ces membres sera désormais issu de la communauté huronne-wendat, la nation huronne-wendat. C'est un gain pour cette communauté d'avoir un siège à la commission parce qu'elle va pouvoir maintenant faire partie intégrante — encore plus qu'auparavant — des discussions sur la mise en valeur de son territoire et de sa communauté, qui est une part de l'ADN de la capitale nationale.

Comme mentionné précédemment, le projet de loi n° 109 donne plus de pouvoirs à la ville de Québec en termes de culture et d'art. Et, à cet effet, la ville de Québec va pouvoir dorénavant se doter d'un conseil des arts qui aura pour mission, entre autres, de soutenir et d'accompagner les artistes locaux. C'est d'ailleurs inscrit dans la loi qu'un résident de Wendake aura la possibilité de siéger au conseil des arts, dans l'optique où la ville décide d'en créer un. C'est une très bonne nouvelle parce que ceux qui, comme moi, ont eu l'occasion de se plonger dans la culture de la nation huronne-wendat auront certainement remarqué qu'elle est très riche et que l'art en est l'un des éléments-phares.

• (15 h 40) •

Toujours dans le domaine des arts, le ministre de la Culture et des Communications va déléguer à la ville de Québec l'application de la politique d'intégration des arts à l'architecture sur son territoire, et cette nouvelle compétence va permettre à la ville de réaliser et d'intégrer des oeuvres à ses lieux publics. Et, relativement à cette politique-là, il existe une mesure gouvernementale qui consiste à allouer environ 1 % du budget à la réalisation d'oeuvres d'art lors de la construction d'un bâtiment ou de l'aménagement d'un site public. Et le gouvernement s'est engagé, à cet effet, à déléguer la gestion du 1 % à un comité-conseil de la ville, et, là aussi, la ville s'est engagée à ce qu'un représentant de Wendake y participe et y contribue. Donc, l'art riche de la nation huronne-wendat, dont je parlais il y a quelques instants, aura sa voix et la fera refléter dans divers lieux à travers la ville de Québec. Alors, voilà ce qui me rend fière, M. le Président, dans ce projet de loi sur la ville de Québec, nous avons été en mesure d'inclure des éléments afin de reconnaître la place que prend la communauté de Wendake dans notre ville, reconnaissant du même coup son importance.

Au début de mon intervention, j'ai également parlé des concitoyens que je représente et qui résident dans des municipalités qui font partie de la Communauté métropolitaine de Québec, et je parle ici des citoyens de Lac-Beauport, de Lac-Delage et de Stoneham-Tewkesbury. À la suite de l'adoption du projet de loi n° 109, un fonds de la capitale nationale et sa région sera créé, et des sommes supplémentaires aussi seront disponibles pour appuyer cette stratégie de développement économique non seulement de la ville de Québec, mais de toute la région de Québec. Donc, c'est une excellente nouvelle pour Québec, mais aussi pour tous ceux qui vont pouvoir en bénéficier, donc, de Portneuf à Charlevoix, en passant par la Côte-de-Beaupré et, bien sûr, la MRC de la Jacques-Cartier, qui comprend Lac-Beauport, Lac-Delage et Stoneham, situées dans mon comté. Donc, on parle d'un fonds de 7 millions de dollars au départ, mais qui va atteindre 25 millions de dollars d'ici 2022, et cette dernière somme, donc 25 millions, sera récurrente pour les années suivantes.

Donc, M. le Président, je souhaite ardemment voir le projet de loi n° 109 adopté à l'Assemblée nationale. C'est une grande avancée pour la ville de Québec, pour la région et pour les citoyens qui en bénéficieront, bien sûr, également.

Je veux profiter de cette tribune aussi pour remercier le ministre des Affaires municipales pour son écoute tout au long du projet de loi, de l'étude du projet de loi. Je vous parlais plus tôt également du projet de loi n° 122, déposé hier par le ministre des Affaires municipales. Eh bien, je veux souligner que, tout comme pour le projet de loi n° 109, je vais suivre l'étude du projet de loi n° 102 avec beaucoup d'attention, comme la plupart de mes collègues à l'Assemblée nationale, parce que certaines municipalités de mon comté seront touchées par les nouvelles mesures qui ont été accueillies avec enthousiasme par la FQM et l'UMQ.

Mais, M. le Président, savourons l'instant présent, réjouissons-nous du moment historique que nous sommes en train de vivre avec la reconnaissance officielle qu'au Québec nous avons une capitale nationale forte, autonome et dont les nouveaux pouvoirs lui permettront de rayonner bien au-delà de nos frontières. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie de votre intervention, madame, et je cède maintenant la parole à M. le député de René-Lévesque pour son intervention.

M. Martin Ouellet

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, effectivement, nous sommes rendus à l'adoption finale du projet de loi sur la capitale nationale. Et, comme ma collègue de Taschereau l'a si bien dit, on n'a pas été en opposition, M. le Président, là, nous avons, effectivement, travaillé en collaboration, collaboration pour faire de ce projet de loi le meilleur projet de loi possible, parce qu'il était demandé et surtout, M. le Président, il était entendu.

Bon, c'est sûr qu'on pourrait faire un peu de sémantique. Est-ce que c'est historique? Est-ce que c'est symbolique? Est-ce que c'est significatif? Une chose est sûre, on est tous d'accord, c'est un pas vers l'avant pour la ville de Québec et sa communauté. Et, pour franchir ce pas vers l'avant et écrire la suite de l'histoire de Québec, avant même que l'encre ne sèche, il était important pour nous de questionner la loi, chaque mot, pour comprendre leur portée et leurs impacts pour l'avenir de Québec, mais pour l'avenir aussi de tous ceux et celles qui partagent cette magnifique capitale nationale.

Dans le projet de loi en question, M. le Président, je vous dirais, deux priorités ont été vraiment mises de l'avant. On a travaillé beaucoup sur l'organisation et le développement de la ville, dont notamment le fonds de développement économique, son pouvoir de taxation, on a parlé de redevances, de relations de travail. Et l'autre pan, un pan très important de la loi, était cette reconnaissance particulière qu'on donnait aujourd'hui au statut de la capitale nationale. Maintenant, M. le Président, la capitale nationale sera vue comme un lieu de hautes rencontres, de débat, d'enjeux, et surtout aura une visée à l'international pour accueillir les gens issus du monde diplomatique.

J'aimerais aussi envoyer un certain clin d'oeil au ministre aujourd'hui parce que j'ai eu l'impression, cette semaine, de découvrir, tel un calendrier de l'avent, plusieurs pans de la loi qui allaient toucher le monde municipal. Donc, à chaque jour, le ministre nous dévoilait de nouveaux projets de loi avec lesquels nous aurons à travailler. C'était important pour nous, à travers cette étude du projet de loi de Québec, de bien savoir quel était l'impact de la communauté de Québec, mais quel serait aussi l'impact susceptible d'apparaître dans les autres projets de loi et qui pourrait, effectivement, intéresser d'autres municipalités et d'autres villes du Québec dans cette décentralisation ou, du moins, dans cette autonomie qui est chère au ministre en question.

M. le Président, le statut de la capitale nationale appartient à tous les Québécois, et notamment à leurs citoyens. Mais moi, M. le Président, j'habite à Baie-Comeau, je parcours le territoire pour me rendre à Québec. Et Québec est aussi ma ville de travail, j'écoute sa radio, je subis sa météo, je goûte à ses restos. Et donc je fais partie de la communauté de Québec, et, pour moi et comme pour tous les citoyens de Québec, c'est avec une immense fierté qu'aujourd'hui nous allons avoir, de façon très succincte, mais surtout officielle, une capitale nationale reconnue, forte et fière. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie, M. le député de René-Lévesque, de votre intervention. Et je ne vois pas d'autre demandeur de parole. Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement, pour la suite de nos choses.

Des voix : ...

Mme Vien : Oui, on l'a adopté?

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui, je le sais, mais... Alors, le projet de loi n° 109, Loi accordant le statut de capitale nationale à la Ville de Québec et augmentant à ce titre son autonomie et ses pouvoirs, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Adopté. C'est fait, il est adopté. Pour la suite.

Mme Vien : Alors, M. le Président, pour nous permettre, en fait, l'étude en commission plénière, je vous demanderais — du projet de loi n° 125 — de suspendre jusqu'à 16 heures.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, est-ce que cette motion de suspension temporaire jusqu'à 16 heures est adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Adopté. Les travaux sont suspendus jusqu'à 16 heures.

(Suspension de la séance à 15 h 48)

(Reprise à 16 h 1)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci. On avait suspendu nos travaux pour quelques instants. Je cède à nouveau la parole à Mme la leader adjointe du gouvernement pour qu'elle nous indique qu'est-ce que nous allons faire.

Mme Vien : Bien, on va commencer par appeler l'article 24, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : C'est une bonne idée, parce qu'à l'article 24, nous allons nous transformer en commission...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui. Alors, c'est une motion. Alors, à article 24, la motion de Mme la leader du gouvernement propose que l'Assemblée se constitue en commission plénière.

En conséquence, je suspends les travaux seulement quelques instants afin de permettre à l'Assemblée de se constituer en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi n° 125, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires.

Les travaux sont suspendus quelques secondes uniquement pour procéder.

(Suspension de la séance à 16 h 2)

(Reprise à 16 h 5)

Projet de loi n° 125

Commission plénière

M. Gendron (président de la commission plénière) : Alors, tel que... Excusez, on va baisser le son un peu. Alors, tel que la leader adjointe du gouvernement l'a annoncé tantôt, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier en détail le projet de loi n° 125, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires.

Remarques préliminaires

On va essayer de le faire avec le plus de souplesse possible, mais normalement, dès qu'on tombe en commission plénière et qu'on débute un projet de loi, il y a souvent des remarques préliminaires. Alors, je veux vérifier si, Mme la ministre, vous avez des remarques préliminaires. Vous n'êtes pas obligée, mais il faut que je le demande.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : De brèves.

Le Président (M. Gendron) : De brèves?

Mme Vallée : De brèves.

Le Président (M. Gendron) : Alors, à vous la parole...

Mme Vallée : D'accord.

Le Président (M. Gendron) : ...pour vos brèves remarques préliminaires.

Mme Vallée : Donc, je vous remercie, M. le Président. Évidemment, nous procédons à l'étude du projet de loi n° 125. Ce projet de loi, il faut rappeler, prévoit une augmentation du nombre de juges, donc de la composition de la Cour du Québec, de la composition de la Cour supérieure et de la composition de la Cour d'appel. On aura la chance d'échanger plus longtemps.

On a eu quelques échanges hier, puis je souhaitais apporter des précisions, parce que ce projet de loi là s'inscrit dans un travail de plus longue haleine, en collaboration avec les partenaires de la Table Justice, et certains collègues disaient que nous agissions en catastrophe, que c'était de l'improvisation, et tout ça. Alors, je souhaitais rectifier les choses et apporter aux collègues une précision qui, pour moi, est fort importante, c'est-à-dire, lorsque nous avons établi les besoins en vue de l'ajout de ressources dans le système judiciaire, l'ajout de ressources qui a été annoncé hier, qui se chiffre par un investissement de 175,2 millions, on a consulté les partenaires afin d'avoir le détail... l'évaluation de leurs besoins.

Alors, je veux simplement mentionner aux collègues que les besoins de la Cour supérieure nous ont été communiqués le 21 septembre, les besoins de la Cour du Québec nous ont été communiqués le 14 octobre, les besoins de la Cour d'appel, le 28 septembre. Donc, suite à ça, on a dû procéder à l'évaluation des besoins de ressources qui en découlaient. Tout ça pour dire qu'on est, aujourd'hui, le 8 décembre. Je pense qu'on a agi avec célérité. Merci.

Le Président (M. Gendron) : Vous avez de la parole pour la brièveté de vos remarques. Alors, je cède maintenant la parole à la porte-parole de l'opposition officielle en ces matières. Mme la députée de Joliette, à vous la parole.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, comme nous l'avons annoncé hier, lors de l'adoption de principe, nous allons collaborer pour l'adoption rapide de ce projet de loi n° 125 modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires, qui vise essentiellement, donc, à augmenter le nombre de juges, ce qui est quelque chose qui est bienvenu, et à modifier... à enlever une certaine obligation pour que le processus de nomination puisse se faire de manière encore plus diligente et rapide, bien sûr. Et nous espérons que nous pourrons échanger, je dirais, le plus librement possible, sur le contexte dans lequel le projet de loi est déposé, à savoir, donc, des investissements qui ont été annoncés hier, comme la ministre le disait, et de comprendre comment ce morceau-là du projet de loi s'imbrique dans l'ensemble des moyens qui ont été annoncés hier.

Donc, on souhaite qu'on puisse avoir, donc, une discussion qui ne s'étendra pas pendant des jours, vous l'aurez deviné, puisque nous sommes à l'avant-dernier jour de la session, mais de pouvoir avoir des réponses à un certain nombre de questions qui pourront nous éclairer pour pouvoir juger si les mesures qui sont proposées répondent effectivement aux besoins du terrain et à la crise que nous vivons.

Alors, on voulait simplement réitérer cette collaboration-là à la ministre et dire souhaiter l'échange le plus, je dirais, convivial et transparent possible, pour avancer correctement dans l'étude du projet de loi.

• (16 h 10) •

Le Président (M. Gendron) : Merci, Mme la députée de Joliette. M. le député de Borduas, avez-vous quelques remarques préliminaires? Oui? À vous.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Oui. Merci, M. le Président. Bien, écoutez, je pense qu'aujourd'hui le fait qu'on soit assis, au salon bleu, en commission plénière, ça démontre la collaboration de l'opposition. Parce qu'il faut dire qu'en fonction des règles parlementaires ça prenait le consentement des deux oppositions pour pouvoir être assis ici, pour pouvoir adopter le projet de loi n° 125, ce qu'on va faire probablement aujourd'hui ou demain.

Donc, de notre côté, on offre une très grande collaboration, mais, pour bien faire notre travail de parlementaires, M. le Président, il va falloir pouvoir échanger aussi, pouvoir savoir est-ce que la ministre souhaite bonifier le projet de loi par rapport à des discussions que nous avons déjà eues lors de rencontres privées, et notamment on a soulevé quelques points qu'il serait pertinent d'inclure dans ce projet de loi.

Parce qu'on vient modifier la Loi sur les tribunaux judiciaires, et vous n'êtes pas sans savoir, M. le Président, que cette loi-là a été modifiée, et le règlement associé à la nomination des juges, il y a quelques années, suite au rapport Bastarache, du commissaire qui porte le même nom, le commissaire Bastarache. Il y a une recommandation qui n'avait pas été mise en oeuvre dans le cadre du rapport de la commission, celle à l'effet de créer un secrétariat indépendant à la nomination des juges. Et le gouvernement libéral n'a pas, lorsqu'il a mis en place ces recommandations-là, retenu cette recommandation-là. Je pense qu'il aurait été pertinent, dans le cadre du présent projet de loi, de peut-être y penser, et peut-être d'y réfléchir, et de créer ce secrétariat-là, indépendant complètement de l'exécutif, de façon à assurer la plus grande indépendance possible pour la magistrature.

Le second élément également, M. le Président, et je l'ai souligné à la ministre aussi, c'est le fait de savoir qu'est-ce que la Cour supérieure et qu'est-ce que la Cour du Québec pensaient de cette proposition-là. On a échangé à l'effet : Est-ce qu'on pourrait avoir des correspondances de la Cour supérieure et de la Cour du Québec? On a discuté de cela mardi. On n'a pas toujours eu de nouvelles de la part de la ministre de la Justice. Je pense qu'on s'attend à un retour de sa part maintenant qu'on est rendus à jeudi.

Et un autre élément également, M. le Président, sur le fait de nommer rapidement les juges, à l'effet que les concours parfois ne sont pas comblés. À partir du moment où le juge quitte son poste de juge, il y a une vacance de plusieurs mois. Et je l'ai montré lors de l'adoption du principe hier, ici, au salon bleu, et je pense qu'on pourrait peut-être modifier le règlement. On pourrait prendre l'occasion se modifier le règlement pour amener un changement pour indiquer que, lorsque la date de vacance est déjà connue, bien, le rapport sur la sélection des juges est rendu à la ministre rapidement, avec une grande célérité, de façon à ce que le ou la ministre puisse désigner les juges qui vont le remplacer. Parce que, ce qu'il faut dire, c'est que, lorsqu'un juge arrive sur le banc, un nouveau juge, bien, il a plusieurs semaines, plusieurs mois de formation, et on ne lui attribue pas des causes du jour au lendemain.

Donc, ceci étant dit, M. le Président, nous, on est prêts à collaborer, mais avec les amendements qui s'imposent au projet de loi. Puis j'espère que la ministre va vouloir travailler dans le même sens que nous.

Et l'autre élément aussi, M. le Président, vous me permettrez, parce que la ministre y a fait référence tout à l'heure, à l'effet que ce n'était pas une annonce précipitée, qu'elle a eu les informations de la Cour supérieure, de la Cour du Québec récemment au mois de septembre. Ça fait des années, M. le Président, des années que le système de justice est embourbé. L'arrêt Jordan, qui est arrivé au mois de juillet, touche les causes criminelles et pénales, mais tout le monde sait, et elle-même est membre du Barreau, a été avocate, a pratiqué, mais je suis convaincu que dans son réseau aussi, elle le sait, c'est une réalité dans les différents palais de justice du Québec, que vous soyez en matière familiale, en matière civile, en matière criminelle, il existait déjà des délais.

Donc, la création de la Table Justice, la table des partenaires en janvier, bien, c'était une proposition du gouvernement libéral, oui, mais la problématique, elle était déjà connue depuis nombre d'années. Et on ne peut pas aujourd'hui se féliciter, se taper dans dos et dire qu'on a répondu rapidement à une situation que le gouvernement libéral a lui-même créé depuis les 14 dernières années, depuis 2003, depuis qu'ils sont au pouvoir.

Et vous me permettrez un clin d'oeil. Lorsque ça fait 14 ans qu'on exerce le pouvoir, à l'exception d'une période de 18 mois, on ne peut pas reporter la faute sur les autres. L'imputabilité, elle doit être assumée par ce gouvernement. Et je pense que la chose à faire, ça serait de le reconnaître et que l'investissement des sommes dans le système de justice, ça soit un début de réponse à cette problématique-là. Mais, lorsqu'on me dit : Écoutez, ça n'a pas été fait de façon précipitée à la dernière minute, laissez-moi en douter, M. le Président.

Ceci étant dit, on est prêts à travailler sur le projet de loi dans les prochaines heures.

Le Président (M. Gendron) : Alors, je vous ai entendu réciproquement. Je ne vois pas d'autre demandeur de parole pour des remarques préliminaires.

Étude détaillée

Maintenant, je suis obligé de demander ça, là, est-ce qu'il y a des motions préliminaires avant de débuter? Parce que, pour ce que vous avez mentionné, normalement, les amendements, bien, on en parle au moment où on étudie article par article. Alors, moi, s'il n'y a pas de motion préliminaire, nous allons à procéder à l'article 1.

Alors y a-t-il des interventions à l'article 1 du projet de loi? Et c'est bien... en appelant chaque article, vous savez que vous avez l'opportunité d'intervenir avec vos commentaires, vos points de vue. Alors, Mme la ministre, à l'article 1.

Mme Vallée : Est-ce que vous voulez qu'on en fasse la lecture, M. le Président? Je pense que peut-être...

Le Président (M. Gendron) : Ça, dans les commissions plénières, j'en ai fait quelques-unes, si les collègues autres souhaitent effectivement qu'on le fasse avec beaucoup de rigueur, d'intensité, normalement, oui, on lit chaque article. S'il reste du temps... pas s'il reste du temps, mais si vous pensez que vous avez besoin de temps pour des explications d'ordre plus général sur les éléments de l'article 1 sans en faire la lecture, il vous en appartient. Parce que l'article 1... Moi, je n'ai pas le projet de loi comme tel. Elle ne doit pas être bien, bien longue, là.

Mme Vallée : Non, c'est ça, justement. En fait, peut-être pour... En fait, c'est...

Le Président (M. Gendron) : Présentez-le succinctement, puis on va procéder comme ça.

Mme Vallée : L'article 1. Je vous lis ses deux lignes :

L'article 6 de la Loi sur les tribunaux judiciaires est modifié par le remplacement, dans le premier alinéa, de «20» par «22» et de «19» par «21».

Alors, c'est un article qui vient modifier la composition de la Cour d'appel. Donc, on hausse de 20 à 22 le nombre de juges qui siègent à la Cour d'appel, et donc, en conséquence, cette demande-là fait suite... en fait, cette modification-là fait suite à la demande de besoins additionnels qui a été présentée par la juge Duval Hesler, juge en chef de la Cour d'appel du Québec.

Le Président (M. Gendron) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : J'aurais juste une question de fonctionnement. Est-ce qu'on peut fonctionner alinéa par alinéa au lieu que ce soit... par article, mais par alinéa.

Le Président (M. Gendron) : ...la présidence... Non, non, mais là, je... pas tout seul. Je veux juste avoir une appréciation. Est-ce qu'on a déjà fait ça dans une commission plénière? La réponse, c'est oui. Est-ce qu'on peut faire autrement? Oui, si on en convient.

Mme Vallée : Il n'y a qu'un article qui comporte deux alinéas.

Le Président (M. Gendron) : Oui.

Mme Hivon : Voilà ma demande.

Le Président (M. Gendron) : Voilà. Alors, s'il n'y a qu'un article qui comprend deux alinéas, on va y aller alinéa par alinéa, ce ne sera pas long. Alors, allez-y pour votre commentaire, ou votre question, ou votre point de vue.

Mme Hivon : Oui. Alors, quelques demandes, d'où mes remarques préliminaires où je souhaitais qu'on puisse avoir, comme c'est souvent le cas, au premier article, une discussion plus large que sur simplement le premier article, puisque ce projet de loi là s'inscrit donc dans une démarche plus large. C'est une demande que nous avons formulée, que nous reformulons à nouveau : Que la ministre dépose un état de situation sur l'ensemble de l'analyse qui a été faite, des dossiers qui sont à risque en ce moment, compte tenu, notamment, de l'arrêt Jordan et des délais que l'on connaît dans notre système de justice criminelle et pénale, de savoir combien de ces causes-là sont à risque, quelle est l'analyse qui a été faite au ministère ou au Directeur des poursuites criminelles et pénales et quelles sont les projections que l'on fait pour les prochaines semaines et les prochains mois. Donc, j'aimerais savoir si la ministre peut répondre à cette demande que nous lui formulons.

Le Président (M. Gendron) : J'entends la demande. Mme la ministre, à vous la parole.

Mme Vallée : M. le Président, sur cette question, oui, il y a une évaluation des dossiers qui est faite par le Directeur des poursuites criminelles et pénales, qui est indépendant. Je pense qu'il est important, dans tout ça, de comprendre et de bien respecter les principes.

Notre DPCP est indépendant, notre magistrature est indépendante. Alors, ça, c'est deux principes qu'il est important... qu'on doit garder en tête.

L'évaluation des dossiers, elle est faite par le DPCP, ça, je tiens à rassurer tout le monde. Au début de la semaine, on avait un total de 288 requêtes pour arrêt de procédures qui avaient été présentées, signifiées.

Ceci étant dit, M. le Président, le plafond, dans un dossier, ce n'est pas un simple chiffre dans la période transitoire. C'est important, parce que l'arrêt Jordan fait quand même état d'une analyse transitoire qui se doit d'être faite par le juge qui est saisi d'une requête. Et c'est pour ça que c'est difficile de vous dire... Un, dire qu'un dossier est à risque, c'est un peu présumer de la suite des choses, présumer du sort de la requête, d'une part. Dire qu'un dossier est à risque, c'est aussi donner une indication à la défense qu'il y a peut-être une porte pour mettre un terme aux procédures.

Moi, M. le Président, je ne souhaite pas que l'arrêt Jordan ait l'effet qu'un autre arrêt de la Cour suprême avait déjà eu dans le passé, l'arrêt Askov, qui avait, en certaines provinces, suscité des milliers d'arrêts de procédures. Ce n'est pas ce qu'on souhaite, et ce n'est pas dans ce sens-là qu'on travaille, au contraire.

Alors, les 288 dossiers, les 288 requêtes qui ont été présentées, bien, ce sont des requêtes qui seront évaluées en fonction des situations particulières de chaque dossier. Puis la Cour suprême le mentionne, là, elle le dit — je suis au paragraphe 98 de l'arrêt Jordan : «L'examen doit toujours être contextuel. Nous nous fions au bon sens des juges de première instance pour juger du caractère raisonnable du délai dans les circonstances de chaque cas.» Compte tenu du temps qui nous est imparti, je ne veux pas trop prendre de temps, mais la cour, aux paragraphes 92, 94, 97 et 98, fait état un peu de ce que devrait être l'analyse transitoire pour chaque cas d'espèce.

Alors, effectivement, l'analyse est faite. Mais, lorsqu'hier je disais que je n'entrais pas dans les détails, c'est certainement pour assurer de préserver la stabilité. Mais vous comprendrez que, si nous injectons des ressources, si nous prenons les mesures que nous avons prises depuis le dépôt de l'arrêt Jordan, c'est précisément parce qu'on souhaite éviter une multiplication des procédures et on souhaite permettre aux tribunaux de pouvoir répondre en présentant, en proposant des dates d'audition à l'intérieur des délais qui sont prévus par les dossiers de la cour puis permettre de traiter les dossiers à l'intérieur de délais raisonnables. Ça, c'est ce qui nous a motivés et qui a permis de vraiment donner ce souffle d'énergie. Je réitère, c'est quand même 175,2 millions sur quatre ans, c'est majeur, c'est sans précédent au cours, je vous dirais, des 25 dernières années, M. le Président, je pense. Ça fait longtemps que la justice n'a pas eu autant d'investissement à l'intérieur d'une seule annonce.

• (16 h 20) •

Le Président (M. Gendron) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Il y a deux éléments dans ce que la ministre dit. Il y a l'analyse transitoire, c'est-à-dire l'analyse des causes qui étaient pendantes avant que l'arrêt Jordan soit rendu, donc auquel cas, comme elle le dit, il y a une certaine, je dirais, interprétation qui doit être faite, par les tribunaux, des principes. Elle va me permettre de ne pas être en accord avec elle, dans le sens où ce qu'on sait en ce moment, c'est qu'il y a 288 requêtes, mais effectivement... plus ou moins, parce que ça a dû fluctuer depuis le début de la semaine, donc on ne sait pas combien de dossiers pendants sont à risque. Et je comprends ce qu'elle me dit. Pour ce qui était avant Jordan, c'est une analyse un peu plus sophistiquée que purement mathématique.

Donc, d'une part, nous, pour faire notre travail, c'est certain que ce seraient des données que je juge pertinentes. Je pense que, par souci de transparence, parce qu'on vit une crise qui est importante... et là on ne fait pas de l'enflure verbale quand on dit ça. On aurait pu nous accuser, quand on a parlé de crise il y a quelque temps, que c'était une vue de l'esprit de l'opposition, mais absolument tous les partenaires sont venus qualifier la situation de crise véritable. Donc, l'idée, c'est d'avoir cet état de situation là le plus transparent pour que nous, on soit capables de faire notre travail le mieux possible.

L'autre chose que je lui demande, c'est que, dans cet état de situation là... Évidemment, il y a des milliers, il y a des centaines de dossiers qui sont à risque après que Jordan soit tombé, et là ça, ça veut dire toutes les accusations qui sont rentrées après le mois de juillet. Ça en fait, ça, des dossiers si on regarde juste le sommaire, les facultés affaiblies, tout ça. Donc, quelle est l'analyse qui est faite, à savoir que, dans maintenant 13 mois, ça va tomber comme un couperet, l'arrêt Jordan va s'appliquer complètement? Et quelle est l'analyse qui est faite de ces causes-là, du nombre de causes qui sont donc concernées par Jordan et qui, dans l'état actuel des choses, sont déjà fixées à dans un an ou dans 18 mois? Donc, quelle est l'analyse qui a été faite du ministère par rapport à ça?

Le Président (M. Gendron) : Oui, Mme la ministre.

Mme Vallée : Alors, comme je mentionnais, M. le Président, l'analyse a été faite et l'analyse nous a permis hier d'annoncer les besoins d'effectifs, et d'annoncer le déploiement des effectifs sur le territoire, puis d'annoncer les effectifs... Lorsqu'on parle d'effectifs, là, on va bien au-delà du nombre de juges sur lesquels on se penche aujourd'hui, mais il y avait un besoin parce que traiter les dossiers, c'est, oui, avoir des juges pour entendre les causes, mais c'est aussi avoir toute l'équipe, c'est-à-dire les procureurs, les techniciens, les greffiers, les constables spéciaux, les agents correctionnels. C'est une chaîne, c'est une équipe, c'est un tout et c'est l'amalgame des efforts de tous ces gens-là qui nous amène à traiter les dossiers à l'intérieur des délais que la Cour suprême a considérés comme étant une période raisonnable, un plafond raisonnable.

Donc, cette analyse-là est faite. Elle nous a amenés à annoncer, hier, ce déploiement d'effectifs sans précédent, elle nous a permis de présenter également le projet de loi. Pour ce qui est des besoins de la cour que je vous mentionne, ce sont tant la Cour du Québec, la Cour supérieure et la Cour d'appel qui, de concertation avec les partenaires, ont identifié, considérant la réalité actuelle, considérant Jordan, considérant également les recommandations du rapport Bouchard... Parce qu'il y a ça aussi qu'on doit avoir en tête lorsqu'on s'attarde à ces questions-là. N'oublions pas que le rapport Bouchard a été déposé il y a quelques semaines. Ce rapport-là fait état d'un certain nombre de recommandations pour mieux gérer les mégaprocès, pour nous permettre de traiter les mégaprocès à l'intérieur, également, des délais raisonnables. Le rapport Bouchard a dû aussi adapter ses recommandations à la réalité Jordan, parce qu'il avait été mandaté préalablement à Jordan pour nous faire part de cette réalité. Et d'ailleurs, le rapport Bouchard, suite au mandat donné par le DPCP, j'avais donné à Me Bouchard le mandat spécifique d'émettre des recommandations quant aux ressources, à la suffisance des ressources actuelles. Alors, ce rapport-là, qui a été rendu public il y a trois semaines mais qui a été déposé quelques semaines plus tôt officiellement, fait état de besoins, et nous répondons aux recommandations du rapport Bouchard, nous recommandons... nous répondons, pardon, à l'évaluation des besoins qui a été faite par tant la magistrature... Alors, ça, ce travail-là a été fait.

Je mentionnais à mes collègues hier qu'il n'était pas habituel de déposer la correspondance de la magistrature, en raison, évidemment, de l'indépendance de la magistrature et du respect de cette indépendance. Ceci étant... Et je pense que mon collègue de Borduas a certainement pu entendre les commentaires de la magistrature, qui s'est exprimée hier également, donc ça fait deux fois qu'ils s'expriment en une semaine. Mais je pense que... La juge Côté, en entrevue au 98,5, mentionnait qu'ils avaient demandé 15 effectifs, qu'ils en avaient eu 16, donc elle était satisfaite. Et je pense que le juge Pidgeon a aussi accordé une entrevue ici, à Radio-Canada Québec, et il mentionnait qu'il était satisfait des annonces parce que... Et ce que je comprenais des commentaires de la magistrature, c'est qu'ils reconnaissent aussi que l'ajout de sièges, l'ajout de postes aux différentes cours, en soi, n'était pas suffisant, et donc l'annonce d'hier a su les satisfaire. Et, pour ce qui est de la juge Duval Hesler, j'avais fait référence à une allocution qu'elle avait faite. Je sais qu'elle a communiqué à notre sous-ministre de façon très laconique, hier, sa satisfaction à l'égard des deux postes qui lui ont été accordés puisqu'il s'agissait là d'une demande de la Cour d'appel. Donc, en conséquence, dans le fond, c'est ce qui nous amène à cette annonce, à ce dépôt de projet de loi, et c'est pour ça que nous avons ajouté autant de ressources.

Maintenant, de déposer, par exemple... je ne sais pas si c'est à ça que la collègue faisait référence, mais de déposer une liste de dossiers avec une liste de noms, je pense que ça nous amène un petit peu à nous mettre les deux mains dans le processus judiciaire. Puis ça, il faut apprendre aussi chacun de notre côté notre rôle, puis ça, comme parlementaires, je pense qu'on ne voudrait pas se mettre les deux mains dans les dossiers, dans le processus judiciaire.

Le Président (M. Gendron) : Mme la députée de Joliette. Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Joliette.

• (16 h 30) •

Mme Hivon : Ce n'était pas le sens de ma demande. Je pense qu'on comprend que, si on se met à nommer des dossiers qui pourraient être problématiques, ça peut être problématique. C'était d'avoir un état de situation plus global avec une projection dans le temps, parce qu'on veut totalement collaborer aujourd'hui, mais la ministre connaît notre demande, ça fait maintenant plus de 10 jours que nous l'avons formulée. On sait qu'en Ontario, par exemple, ils ont fait cet exercice-là, ils sont arrivés à parler de 6 000 dossiers. L'idée, ce n'est pas d'alerter tout le monde. En fait, moi, je suis d'avis que, si on était plus dans la transparence et qu'on expliquait vraiment la relation causale entre ce qu'on vit dans le transitoire, ce qu'on va vivre une fois que Jordan va s'appliquer pleinement, les ressources qu'on annonce, c'est quoi, comment on a fait ce lien-là, ça serait de nature à rassurer potentiellement.

C'est le sens de ma demande, d'avoir un état de situation plus exhaustif de la part de la ministre sans évidemment nommer les causes. Parce qu'on peut, je pense, faire des approximations à partir de... quand on voit que ces causes-là vont venir sur le rôle, où elles sont prévues selon les districts. C'est sûrement le genre d'exercice — du moins, on le souhaite — qui a été fait.

Alors, c'est ça qu'on demande à la ministre et qu'on a réitéré à plusieurs reprises. Je comprends que nous n'aurons pas de réponse positive à notre demande. Je la réitère. Si jamais les choses se raffinent et que la ministre est prête à le faire prochainement, on va vraiment en être heureux.

L'autre chose que je demandais par ailleurs, hier, et je ne sais pas si elle a une ouverture par rapport à ça, on l'apprécierait beaucoup, c'est que mensuellement, minimalement, il puisse y avoir un état de situation d'où on en est en termes, donc, de gestion de ces requêtes en arrêt de procédures et comment on en est dans le déploiement des nouvelles ressources. Donc, une espèce d'état de situation qui n'a pas besoin d'être quelque chose d'archiexhaustif.

Mais, comme là on sait le nombre de requêtes face auxquelles on est en ce moment, le plan qui est annoncé par la ministre, est-ce que ce serait possible, mensuellement, de savoir comment ça se vit sur le terrain? Combien de requêtes sont en cours de route? On voulait un état de situation plus global, on continue à dire à la ministre qu'on aimerait beaucoup l'avoir. Mais minimalement est-ce qu'on peut avoir cet état de situation là, côté état des lieux, pour les risques de procès qui avortent, d'accusés libérés et aussi le déploiement des ressources?

Le Président (M. Ouimet) : Merci. Mme la ministre.

Mme Vallée : Bonjour, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet) : Bonjour.

Mme Vallée : Dans un premier temps, simplement, je pense que, par souci, on me dit que la correspondance... le courriel de la juge Duval Hesler, il est convenu qu'elle consent à ce que ce soit déposé puisqu'elle ne s'est pas adressée aux médias, elle, hier. Mais, pour rassurer les parlementaires que les effectifs additionnels conviennent à la cour, elle a communiqué avec le bureau de la sous-ministre par courriel. C'est très laconique. Je vous le lis : «Pour faire suite à notre conversation téléphonique de ce jour, je confirme par le présent courriel que les amendements proposés à la Loi sur les tribunaux judiciaires satisfont et répondent pleinement à ma demande de deux postes additionnels — deux juges — à la Cour d'appel pour le district de Montréal.»

Alors, c'est simple, laconique, mais je vais le déposer.

Document déposé

Le Président (M. Ouimet) : Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt? Consentement.

Mme Vallée : Maintenant, pour répondre à notre collègue de Joliette, j'aimerais savoir un petit peu de quelle façon elle voit ce rapport-là. Parce qu'on m'indique, lors de l'adoption d'un projet de loi qui prévoyait, je crois... c'est le Fonds d'Accès Justice?

Une voix : ...

Mme Vallée : Le Fonds d'aide aux recours collectifs. On a prévu un rapport à l'Assemblée nationale. Je pense que de faire un rapport annuel peut demander énormément aux équipes, et il faut bien cibler l'objectif.

Moi, je n'ai pas de problème à rendre compte sur le déploiement. On a prévu et on a des objectifs, par exemple au 31 mars, on a des objectifs au 30 septembre. Est-ce que notre collègue serait satisfaite si, au 31 mars, nous faisions rapport du déploiement des effectifs qui est prévu pour le 31 mars, du déploiement des effectifs pour le 30 septembre? Je trouve que la demande n'est pas déraisonnable dans le contexte où on communique une volonté de régler une situation, de déployer des effectifs. Bien, donnons-nous les moyens d'assurer que ce déploiement-là puisse s'effectuer. Alors, là-dessus, je n'ai pas de problème à ce qu'on puisse trouver un moyen, un véhicule pour assurer ce déploiement-là, là. Je pense que c'est dans l'intérêt de tout le monde, là.

Le Président (M. Ouimet) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Je ne demande pas de faire ça par amendement à la loi ou par rapport formel, pas du tout. Un peu de la même manière où la ministre a dit combien il y avait de requêtes en arrêt de procédures, ce que je demande, c'est qu'on puisse avoir cette transparence-là. Moi, je le demanderais mensuellement, d'une part, pour savoir où on en est. Est-ce que ça augmente énormément les requêtes en arrêt de procédures? Ça, c'était le premier élément. De toute façon, je pense que vous allez vous le faire demander. Donc, en...

Une voix : ...

Mme Hivon : Puis, si vous ne voulez pas le dire à chaque jour, vous pouvez fixer une autre échéance. Donc, moi, je vous demandais ça. Puis ça peut être très informel, sur le site du ministère, moi, je ne suis pas du tout dans un rapport formel à l'Assemblée, d'une part.

Et puis, d'autre part, dans le déploiement — là, je comprends qu'il va y avoir des avis, il va y avoir un processus de recrutement qui va se faire — de nous tenir au courant au même moment, par exemple, où vous donnez cette information-là, moi, je dis mensuellement, c'est la demande que je fais, ce n'est pas excessif, là, je ne dis pas hebdomadairement, mais de nous dire : Oui, le processus est en cours, on a tant de greffiers qui sont... tant de postes qu'on veut combler d'ici telle date, bon, tout ça. Les juges, là, on le voit, donc, ça, on a... Donc, c'est ça, l'esprit de la demande.

Le Président (M. Ouimet) : Oui, Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, je pense qu'il peut y avoir un moyen d'assurer le suivi de notre stratégie d'action. Mensuellement, dans un contexte où on a un recrutement de personnel, ça peut être lourd un peu pour les équipes, là, d'y aller à chaque mois, sachant aussi qu'au cours du prochain mois, des prochains mois ça peut être un petit peu plus lent, parce qu'on doit aussi publier les avis de recrutement. Mais, ceci étant, je pense qu'il y a lieu d'aménager... puis je vais voir avec les équipes comment on peut aménager une forme de suivi de cette stratégie-là. L'utilisation du site du ministère serait possiblement la meilleure vitrine, permettant à tous d'avoir accès rapidement à l'information.

Pour la magistrature, c'est la même chose. En fait, c'est certain que l'objectif est de pourvoir rapidement. Certains postes, bien, vont commander une collaboration de la part de nos collègues du fédéral.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Et le nombre de requêtes?

Le Président (M. Ouimet) : Oui, Mme la ministre.

Mme Vallée : Pour le nombre de requêtes, en fait, on pourrait... l'information, elle est généralement obtenue par le... elle est obtenue par le DPCP, qui gère ces dossiers. Alors, est-ce qu'on le fait sur le site du ministère? Moi, je ne souhaite pas non plus alarmer la population, puis c'est un petit peu ça qui me préoccupe aussi, je vais être bien transparente avec vous, parce que, la semaine dernière, entre le début de nos échanges sur cette question-là et la semaine dernière, il y a eu une multiplication assez importante des requêtes. Je ne sais pas quelle en est la cause, mais on est passés, en sept jours, de 222 à 288. Est-ce que par nos débats certains ont pu voir là une stratégie à l'intérieur de leurs dossiers? Et là il faut garder en tête que l'objectif de Jordan, ce n'est pas de faire tomber tous les dossiers puis ce n'est pas de créer une hécatombe.

Donc, c'est ça qui me préoccupe, je vous le dis bien franchement. Comme je vous dis, l'évaluation des dossiers, elle est faite, le travail se fait de façon très responsable de la part des équipes du DPCP, mais je ne voudrais pas que l'information qui est communiquée puisse servir à quiconque souhaite utiliser ça pour faire... dans le cadre d'une stratégie, parce que, il ne faut pas se le cacher, ce qu'on se dit ici, ce qui est dit publiquement peut servir, puis moi, je serais très mal à l'aise qu'ultimement on utilise tout ça pour faire tomber de façon procédurale les accusations contre quelqu'un qui aurait commis des actes criminels, je serais très mal à l'aise.

Le Président (M. Ouimet) : Mme la députée de Joliette.

• (16 h 40) •

Mme Hivon : Moi, je suis vraiment une tenante de la transparence dans tout ça, parce que je pense que la pire chose, ce serait que le public, qui maintenant est informé de la situation comme jamais en justice, je pense... L'administration de la justice, les greffiers, il y a des gens qui ont entendu parler de ça pour la première fois de leur vie, et je pense bien honnêtement qu'on a atteint le sommet de l'intérêt et de la publicité qui a pu être faite autour de ça, je dirais, au cours de la dernière semaine, bien qu'il risque d'y avoir d'autres arrêts de procédures, ce qui va ramener le dossier. Mais ce que je veux dire, c'est que, justement, vu qu'on est dans cette situation-là de crise, ce n'est vraiment pas dans l'objectif de vouloir augmenter ça, je pense qu'on est dans cette situation-là déjà. C'est plus de savoir où nous en sommes, comment ce qu'on déploie, ce que le gouvernement déploie répond. Et, si ça a eu cet effet-là, un, je trouve ça surprenant parce que, bon, les avocats connaissent leur travail, connaissent l'arrêt Jordan, et tout ça. Et par ailleurs je pense que ça ne peut pas être une raison invoquée pour ne pas... Puis je ne pense pas que c'est du tout ce que la ministre veut dire, là, mais je veux juste qu'on soit tous clairs là-dessus, que les gens qui nous écoutent le comprennent bien. On ne peut pas invoquer ça pour dire : On ne fera pas le débat de manière tout à fait transparente, et cet enjeu-là, qui en est un réel en démocratie, on ne l'abordera pas, de crainte que ça ait des répercussions sur des stratégies judiciaires, et tout ça.

Donc, tout ça pour dire que je réitère ma demande de transparence à la ministre. Je ne la tiendrai pas sur ça pendant des heures. Je pense que, sur le site du ministère ou du DPCP... On a fait une demande, d'ailleurs. Si la partie ministérielle, parce que je sais qu'elle va me dire que ce n'est pas elle qui va siéger sur la Commission des institutions qui va le déterminer, mais, si ses collègues... ou elle peut dire à ses collègues que ce serait une bonne idée, dans le contexte de crise actuel que l'on vit, que notre demande de mandat d'initiative, d'audition du DPCP soit acceptée, je pense que ce serait une excellente chose. On pourrait lui poser toutes ces questions-là et on pourrait aussi s'assurer qu'il y ait une reddition de comptes du DPCP par rapport à ça. Mais, puisque nous n'avons pas ce loisir-là, on aimerait que la ministre puisse y répondre, que ce soit sur son site ou qu'elle transmette cette demande-là au DPCP. Je pense que, par souci de transparence, ce serait une bonne chose.

Le Président (M. Ouimet) : Merci, Mme la députée. Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, une chose est certaine, c'est que le nombre de requêtes, c'est une donnée qui est publique, là, on s'entend. Ça, ce n'est pas une donnée confidentielle. Est-ce que c'est compliqué, peut-être, de publier de façon hebdomadaire ou mensuelle le chiffre sur le site? Moi, je serais plus à l'aise avec le site du DPCP, puisqu'il y a vraiment une distinction entre le ministère de la Justice et le DPCP, puis je pense que c'est important de la maintenir. Je ne veux pas m'engager formellement sur la forme. J'aurai des discussions avec les équipes du DPCP, voir... Et peut-être même que ça libérerait le porte-parole du DPCP, qui est submergé par des demandes des journalistes à cet effet, et puis ça permettrait peut-être... Alors, je ne suis pas contre l'idée.

Puis, pour ce qui est du déploiement de la stratégie d'action, on va le faire, peut-être pas au mois parce que, comme je vous disais, c'est peut-être un peu lourd, mais, oui, on va le faire, parce que c'est... je suis tout à fait d'accord. Le ministère annonce le déploiement de ressources, le gouvernement annonce un engagement formel à cet effet-là pour qu'on puisse, dans le temps, prévoir que, depuis telle date, on a eu un certain nombre de greffiers, d'agents correctionnels engagés, et je pense que ça va de soi. Vous savez, aussi, à travers les effectifs, il y a du personnel de soutien, il y a des techniciens, donc il y a quand même plusieurs personnes qui seront appelées à mettre la roue à l'épaule.

Donc, ça, je pense qu'on pourra le faire, mais difficile de m'engager sur un moment parce que... Je regarde les équipes à côté de moi. Il faudra voir aussi, là, au niveau des ressources, la disponibilité de nos propres ressources humaines, en ces temps un petit peu difficiles, pour aller de l'avant avec le processus. Et je vois que nous sommes bien accompagnés par nos collègues et les membres des juristes de l'État, qui suivent nos travaux avec attention. Alors, encore une fois, on espère que vous serez de retour rapidement et qu'on pourra compter sur des échanges autour de la table de négo, parce que c'est là que les discussions, les bonnes discussions doivent avoir lieu.

Alors, ceci étant dit, M. le Président, je pense que...

Le Président (M. Ouimet) : Très bien, alors passons maintenant du côté de la...

Mme Hivon : ...

Le Président (M. Ouimet) : Vous souhaitez revenir?

Mme Hivon : C'est correct. Non, mais c'est-à-dire que ça me va que le collègue puisse parler.

Le Président (M. Ouimet) : Oui, alors je vais alterner. Alors, allons du côté de la deuxième opposition. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Bien, écoutez, d'entrée de jeu, dans mes remarques préliminaires, j'ai eu certaines interrogations puis j'aimerais que la ministre nous réponde, à savoir : Est-ce qu'il y a des démarches qui ont été faites, premièrement? Je comprends que le juge Pidgeon s'est exprimé hier, la juge Côté s'est exprimée hier, mais je veux savoir : Est-ce que, du côté ministériel, on a fait des démarches pour avoir leurs commentaires de façon formelle par le biais d'une lettre, tel qu'il avait été discuté?

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Je sais que, lors de discussions, les collègues auraient aimé avoir les échanges ou peut-être avoir le dépôt des demandes officielles. L'indépendance de la magistrature commande qu'on respecte ces échanges entre le ministère de la Justice, entre la sous-ministre et la magistrature.

Alors, j'ai avec moi l'allocution du juge Fournier, à la rentrée des tribunaux, où il mentionnait un besoin d'effectifs additionnels. Il ne le chiffrait pas, par contre, mais, pour ce qui est des échanges précis entre... il n'est pas d'habitude, par respect de cette indépendance, puis je suis persuadée que notre collègue comprend ces enjeux...

Par contre, dans le contexte — puis je tiens à rappeler, c'est assez particulier, c'est assez exceptionnel, on l'a dit maintes fois — le juge Fournier et le juge Pidgeon, qui est le juge en chef associé, pour ceux et celles qui ne le savent pas, et le juge Fournier étant le juge en chef de la Cour supérieure, se sont exprimés sur la place publique la semaine dernière. Je sais que le juge Pidgeon a accordé une entrevue hier, en fin de journée, parce que j'ai eu l'occasion de la visionner. Donc, je crois que ça peut peut-être répondre à notre collègue de Borduas, et ça correspond... Je pense qu'il n'y a pas d'écart entre ce dont nous avons pris connaissance dans les médias et la réponse gouvernementale.

D'ailleurs, la juge Côté... la juge en chef associée, qui est la juge Danielle Côté, qui, elle aussi, s'était exprimée, dans les médias à quelques reprises, s'est également exprimée, et, dans un article paru ce matin sous la plume de notre collègue de la Tribune, Marco Bélair-Cirino, et elle exprime : «On avait demandé 15 postes. Nous en avons 16.» Alors, je pense que la juge,dans son indépendance...

Moi, je vous dirais, M. le Président, je n'étais pas gênée, dans ce sens que je sais que le projet de loi correspond aux demandes de la Cour et je savais également que, compte tenu de leur indépendance, les juges n'auraient pas hésité à indiquer si le projet de loi n'avait pas correspondu à leurs demandes. Ça, je le sais. Alors, je pense que justement, en raison de cette indépendance-là, ils n'hésitent pas à sortir puis... Mais cet article-là, je pense, parle de lui-même.

Le Président (M. Ouimet) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui. Merci, M. le Président. Je pose la question parce qu'on a demandé deux choses. On a demandé, un, d'avoir accès à certaines correspondances qui auraient été communiquées à la ministre de la Justice par la magistrature : non pas pour affecter l'indépendance de la magistrature, simplement pour que les parlementaires soient informés des demandes de la magistrature.

Les juges en chef peuvent s'exprimer dans les médias, ils le font, ils sortent de leur devoir de réserve. Mais il faut réaliser, M. le Président, ici, qu'on est à l'Assemblée nationale puis que les députés votent des projets de loi. Donc, ça serait tout à fait normal que les députés soient au courant de ce sur quoi ils vont voter et, le projet de loi aussi, ce sur quoi ils sont appelés à étudier les articles.

Donc, la première demande était celle-là. La ministre nous informe : Je ne veux pas communiquer les informations de façon entière et complète parce qu'elle dit ça affecterait l'indépendance de la magistrature. M. le Président, vous me permettrez de dire que je doute que ça affecterait la magistrature. Je ne dis pas de transférer l'ensemble de la documentation, l'ensemble des correspondances, mais certaines correspondances.

Nous avons demandé, subsidiairement, deuxièmement : Est-ce que le cabinet de la ministre peut faire une démarche auprès des juges en chef, suite à la rencontre que nous avons eue, pour qu'ils nous envoient une lettre ou qu'ils viennent en commission parlementaire... mais simplement pour nous indiquer ce qu'ils souhaitent dans une lettre destinée à l'attention de la Commission des institutions ou ici, à la commission plénière?

Je comprends que ça n'a pas été fait. Je vous rappelle qu'on est dans le cadre d'une approche collaborative. Ma collègue de Joliette, mon collègue de Mercier et moi-même, on est ici pour adopter le projet de loi, mais, encore une fois, on a une définition différente de celle de la part du gouvernement lorsqu'il est question de collaboration. Nous, on est prêts à travailler, mais on ne sent pas qu'il y a d'effort, de l'autre côté, qui est fait là-dessus, puis je trouve ça un petit peu malheureux parce qu'on aurait pu avoir, dans des lettres, de la part des juges, adressées aux parlementaires, des technicalités, des informations qui peuvent être pertinentes pour l'adoption du projet de loi qu'on va faire aujourd'hui. Vous m'en trouverez désolé, puis je trouve ça un peu dommage, cette façon d'agir là.

• (16 h 50) •

Même élément, M. le Président. Sur le projet de loi n° 51, quand on a modifié le mode de rémunération des juges par le comité indépendant, j'avais formulé la même demande à la ministre de la Justice, et ce n'est pas une demande déraisonnable. Donc, elle devrait y être habituée. On a servi les mêmes arguments, et on ne démontre pas de bonne foi de l'autre côté. J'en suis désolé encore une fois.

Ceci étant dit, j'ai d'autres commentaires, M. le Président, et d'autres questions aussi relativement notamment au fait qu'on nous dit beaucoup : Il ne faut pas se mettre les deux mains dans le processus judiciaire. M. le Président, d'ici 2018, la ministre de la Justice est mieux de s'habituer, parce qu'on va continuer à poser des questions, à questionner, et à s'assurer que le système de justice est en voie de réhabilitation, est en voie de s'améliorer, et qu'on améliore le système de justice. Parce que le système de justice est là pour les justiciables, est là pour les Québécois, et on constate qu'on n'a pas un système de justice à la hauteur de ce qu'on devrait avoir, qui sert les citoyens.

Il y a beaucoup de gens, là, leur expérience avec le système de justice, c'est une expérience de frustration, parce qu'ils ne sentent pas que leurs droits ont pu être respectés. Et l'expérience client, si je peux dire, M. le Président, elle n'est pas toujours présente. Et nous, notre travail, c'est de s'assurer d'avoir le meilleur système de justice possible, notamment en matière criminelle et en matière civile aussi.

Donc, je pense que les questions de l'opposition sont pertinentes. Et on ne peut pas dire à chaque fois qu'on aborde une question de justice : Hé! Attention! Il ne faut pas vous mettre les deux mains dedans. C'est possible de discuter de façon appropriée, de façon balisée. Tout le monde ici est conscient de notre règlement. Ceci étant dit, il ne faut pas qu'à chaque fois que c'est une question de justice on dise : Attention! L'indépendance! Puis on ne peut même pas en parler. Ce n'est pas vrai, ça, M. le Président. Puis on va continuer à poser nos questions en ce sens-là.

J'avais une question, M. le Président, relativement... Bien, en fait, tout d'abord, j'aimerais ça savoir... Bon, pour les lettres des juges, leurs commentaires, on ne l'a pas. La ministre n'a pas fait l'approche auprès d'eux. On va prendre ce qui est dans les médias.

Deuxièmement, par rapport, en fait, au projet de loi, je voudrais savoir si la ministre a l'intention de déposer des amendements relativement au secrétariat indépendant qui avait été recommandé par la commission Bastarache. Le rapport Noreau recommande la même chose. Ça, c'est le premier élément, M. le Président.

Également, relativement à notre proposition d'amendement pour le délai lorsqu'il y a vacance d'un siège à la Cour du Québec, est-ce que les concours vont recevoir une date limite à laquelle le rapport doit être rendu?

Donc, ça serait mes deux premières questions relativement à la ministre pour savoir : Est-ce que ces amendements-là vont être proposés dans le cadre du projet de loi?

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci, M. le député de Borduas. Mme la ministre de la Justice.

Mme Vallée : Dans un premier temps, M. le Président, je... simplement. Qu'on questionne sur l'administration de la justice, je n'ai aucun problème, au contraire. Et plus on parlera de justice au Québec, plus on se préoccupera de la justice au Québec, mieux notre système de justice va se porter. Ça, je n'ai aucun problème à ce qu'on discute. Puis même c'est une bonne chose. On n'a jamais autant parlé de justice au Québec que dans la dernière année. Aucun problème avec ça, au contraire.

Et des efforts pour améliorer l'accès à la justice dans le milieu criminel, dans le milieu pénal, dans le milieu civil, il s'en fait au quotidien, et on en a fait beaucoup au cours de la dernière année. On oublie. On oublie. La mémoire est une faculté qui oublie. Et on a fait beaucoup de gestes, on a posé plusieurs gestes au cours de la dernière année. Je pense à l'augmentation des seuils de l'aide juridique. Ça nous semble bien loin parce que ça avait été annoncé il y a quelques années, mais, malgré un contexte budgétaire pas évident, on est allés de l'avant. Je pense au déploiement de centres de justice de proximité sur le territoire, je pense aux appels à projets dans les Fonds d'Accès Justice, Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels. Bref, on fait des choses au quotidien.

Et que le collègue de Borduas nous questionne sur l'administration de la justice en général, ça va. Là où j'ai un problème, c'est lorsque le collègue de Borduas insinue des accros substantiels à l'indépendance tant de la magistrature que du DPCP, comme il a fait la semaine dernière. Ça, c'est inacceptable, parce qu'il porte atteinte à notre système de justice.

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet) : J'ai une question de...

Mme Vallée : Non, mais c'est parce que c'est lui-même...

Le Président (M. Ouimet) : Juste un instant, Mme la ministre de la Justice. Question de règlement, M. le député de Borduas?

M. Jolin-Barrette : Oui, la ministre de la Justice me prête des intentions.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, allons-y avec prudence. Les choses vont bien. J'ai compris qu'il y a une collaboration qui est souhaitée de part et d'autre. Parlons de ce qui est devant nous, les articles du projet de loi, et évitons d'aller dans le passé. Mme la ministre de la Justice.

Mme Vallée : M. le Président, alors, pour répondre aux questions du collègue... Est-ce que j'ai des projets d'amendement? Non, je n'ai pas de projet d'amendement à déposer. Si le collègue souhaite que nous abordions la question du rapport Bastarache, il me fera plaisir de... J'ai sorti, on a ressorti... j'ai ressorti le rapport, j'ai devant moi l'analyse des recommandations qui avaient été faites à l'époque. Je pense qu'à l'époque l'objectif, c'était d'avoir un secrétariat qui puisse encadrer, c'était une recommandation plutôt de nature mécanique, parce que, lorsqu'on prend le rapport... Je m'excuse.

Alors, venons-en maintenant à la mécanique du processus que je propose. Et là on parlait de la mise en place d'un comité de sélection permanent, on parlait de la création d'un secrétariat, ce qui existe, et du processus de sélection des juges du Tribunal administratif. Bref, suite au rapport, il y a eu la création d'un secrétariat, le secrétariat est rattaché au ministère de la Justice. Ce secrétariat et les suites de Bastarache ont été donnés suite à une consultation auprès de la magistrature, du Barreau, des acteurs du milieu, parce que ce travail-là s'est fait de façon aussi très rigoureuse. Et le fonctionnement du secrétariat, il est quand même... et le fonctionnement et tout le processus de la nomination des juges est encadré par règlement, comme le sait notre collègue. Et donc on a un secrétaire... en fait, une secrétaire qui est en charge du secrétariat, le nom de la personne a été... la personne a été désignée suite à une consultation de la sous-ministre auprès des juges en chef et du Barreau. Ce comité, le comité de sélection, bien il est composé du président, qui est nécessairement un juge. Alors, déjà, en partant, c'est un juge qui préside le comité, ce n'est personne d'autre. Les membres du comité, notamment les représentants du public, ne sont plus des choix politiques, ils sont identifiés par l'Office des professions. Donc, c'est fait de façon tout à fait indépendante, le politique n'a pas à s'immiscer dans cette démarche-là.

Alors, le processus... Puis je tiens à rassurer le collègue de Borduas. C'est vrai qu'il y a eu plusieurs modifications au processus qui ont été apportées, mais c'est un processus qui est transparent, c'est un processus qui est rigoureux.

Mais j'ai analysé la suggestion que le collègue a faite hier, lors d'une rencontre de travail, et j'ai pris la suggestion du collègue avec beaucoup de sérieux, et on m'indiquait que, dans certaines circonstances, d'avoir un temps limite pour la production du rapport, dans certaines circonstances, ça pouvait s'avérer problématique, par exemple lorsque la période des travaux du comité tombe pendant, par exemple, la période estivale, et là c'est difficile de réunir le comité pendant cette période-là. Donc, ça peut contribuer à certains délais, qui ne sont pas volontaires, mais il peut parfois survenir des situations qui amènent le comité à déposer un rapport dans un délai plus ou moins long. Alors, de le restreindre à un délai particulier, ça pourrait être problématique dans certains cas, surtout si on doit avoir un volume important de dossiers à traiter à l'intérieur d'un seul comité. Parfois, les comités vont traiter peu de demandes; parfois, les comités vont être appelés à traiter de nombreuses demandes, selon la région, par exemple. Dans certaines régions du Québec, il y aura une dizaine de candidatures; dans d'autres régions du Québec, on pourra se retrouver avec une soixantaine de candidatures à analyser. Donc, ça amène... Les conditions dans lesquelles le comité est appelé à se pencher sur ces candidatures-là ne sont pas les mêmes, sont aléatoires, et c'est ça qui peut être problématique.

Donc, je comprends très bien ce qui amène notre collègue de Borduas à soulever cette question, mais, après analyse, après échange avec notamment la responsable du secrétariat, on me dit que ça pourrait être problématique et ça pourrait s'avérer difficile, dans tous les cas, de respecter un délai prescrit. Généralement, par contre, généralement, puis ça dépend des mois... Puis je sais que notre collègue hier a abordé un certain nombre de dossiers, puis, compte tenu du temps, je ne vais pas faire l'analyse — au besoin, je le ferai, là — mais, dans certains dossiers que le collègue avait soulevés hier, il y avait des circonstances particulières, notamment, entre autres, dans un dossier, c'était un concours où il y avait de nombreuses candidatures, et ce concours-là, les travaux du comité s'étaient déroulés aussi pendant la période estivale. Donc, ça avait causé un délai puis une difficulté à rassembler les membres du comité pour émettre leurs recommandations.

• (17 heures) •

Le Président (M. Ouimet) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui. Peut-être que je commencerais par demander à la ministre si elle peut déposer son état de situation par rapport aux recommandations de la commission Bastarache, à laquelle elle a fait allusion tout à l'heure.

Le Président (M. Ouimet) : ...

M. Jolin-Barrette : Je demandais, M. le Président, à la ministre si elle accepterait de déposer le document auquel elle faisait référence sur le suivi des recommandations de la commission Bastarache, à laquelle elle faisait référence.

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre.

Mme Vallée : C'est que le document que j'ai relève de l'avis juridique parce qu'il a été préparé par des juristes du ministère. Donc, comme il n'est pas habituel de... En fait, c'est un document de travail pour mes besoins parce que je savais que le collègue était pour questionner sur la question. Et donc il s'agit plutôt, là, de notes personnelles que d'un rapport officiel. Il ne s'agit pas d'un rapport officiel comme tel, là.

Le Président (M. Ouimet) : Vous avez tout le loisir de vouloir déposer ou ne pas déposer. Il vous l'a demandé. Si vous dites : Je n'ai pas l'intention de le déposer, ça va. Veuillez procéder avec votre prochaine question, M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Bon, ça aurait peut-être pu nous aider à cheminer.

Ceci étant dit, pour la seconde proposition que j'ai faite... Enfin, M. le Président, vous me permettrez de revenir sur Bastarache et Noreau. Il y a quand même des gens du milieu de la justice également qui recommandent... Dans le cas de Noreau, on l'a très bien expliqué, ça touche les juges administratifs, la ministre est également responsable. On va s'éloigner un petit peu, mais, vraiment, il y a des gens du milieu de la justice qui disent : Bien, écoutez, on devrait véritablement sortir le secrétariat, en créer un pour les juges administratifs, même chose pour celui des juges de la Cour du Québec. Je pense que la demande, elle est d'autant plus pertinente parce que, pour assurer, justement, la plus grande indépendance possible, ce serait pertinent de sortir le secrétariat de l'exécutif. Bon, je comprends qu'il n'y a pas d'appétit aujourd'hui pour l'inclure dans le projet de loi.

Par contre, pour le deuxième volet, relativement aux dates limites, de ne pas compresser le temps, écoutez, j'ai de la difficulté à... (panne de son) ...réponse, M. le Président, parce que, si on ne se fixe pas d'échéancier, bien, c'est sûr qu'on va toujours déborder. On pourrait trouver une façon de libeller un amendement, dans le cadre du règlement sur la nomination des juges, de dire... Écoutez, on sait que les juges de la Cour du Québec prennent leur retraite à 70 ans. Automatiquement, on pourrait dire : Bien, à partir d'un an ou à partir d'un an et demi avant la date d'anniversaire du juge qui atteint l'âge de 70 ans, bien, on met en place le processus pour que la ministre, au moment de la vacance du poste, lorsque le juge prend sa retraite, bien, il puisse être remplacé, il puisse y avoir un décret du Conseil des ministres pour nommer un nouveau juge. Ça, c'est possible de le faire.

Je comprends la ministre lorsqu'elle nous dit : Écoutez, pour des circonstances exceptionnelles, bien, c'est impossible de mettre un délai. Bon, bien, on peut écrire également dans l'article du règlement : Pour des circonstances exceptionnelles, le comité pourrait demander une prolongation de délai. Ça serait possible de le faire, ça serait possible de le mettre dans le texte réglementaire. Donc, je ne vois pas pourquoi on ne devrait pas le faire.

Parce que, vous savez, pour les concours à la magistrature à la Cour du Québec, c'est même déjà prévu que la ministre de la Justice, lorsqu'elle reçoit la liste des gens aptes à être nommés à la fonction de juge à la Cour du Québec, l'article dit que, si l'intérêt de la justice le commande, elle peut annuler le concours et recommencer le concours. C'est arrivé dans un cas qu'on pourrait qualifier de célèbre ici, à Québec, en 2014 ou en 2015, avec un procureur qui a été par la suite nommé juge. Donc, déjà dans le texte réglementaire, c'est possible de le faire.

Donc, je pense que, cet après-midi, on pourrait travailler ensemble pour arriver à une proposition, dans le souci que, toujours pour les justiciables, il n'y ait pas de longs mois de délai de vacance, où il y a un poste, dans une cour du Québec, qui est laissé vacant durant des mois et des mois. Surtout que, vous savez, bon, à Montréal, vous en avez beaucoup, de juges, mais ça peut arriver que, dans certaines régions, dans certains palais de justice, bien, il y ait moins de juges d'assignés, hein, à la Cour du Québec, et ça peut vraiment entraver le travail et ralentir le travail.

Et là le juge qui va être nommé plusieurs mois plus tard, à ce moment-là, lui, il se retrouve avec déjà une pile de dossiers, il commence à siéger et là il se retrouve déjà avec une charge de travail qui est considérable. Il faut qu'il pédale, c'est un nouvel emploi puis il faut qu'il pédale pour rattraper le retard. Donc, je pense qu'on aurait intérêt à travailler en amont puis, déjà, à le mettre dans le règlement, dès aujourd'hui, à faire la proposition.

C'est sûr, M. le Président, si un décès survient, on ne peut pas le prévoir, ça; donc, c'est une circonstance, aussi, et le temps que le comité se mette en branle... Si jamais il y a démission aussi, soudaine, ça, on ne peut pas le prévoir. Mais généralement, lorsque les juges décident de démissionner, ils en informent la juge en chef ou le juge en chef assez rapidement. Donc, je pense qu'il y a des modalités aussi à mettre en place. Parce que, vous savez, lorsqu'on ne fixe pas de délai, même si c'est un comité indépendant, dans la vie, c'est comme partout : quand vous voyez que vous avez le temps, parfois il peut y avoir de la procrastination. Donc, je ne dis pas que c'est le cas, M. le Président, mais, si on a des balises claires... on est mieux de se mettre des balises et ça va guider les individus qui vont siéger sur le comité.

D'autant plus que la ministre nous dit : Le comité est présidé par un juge. Bien, qui est le mieux à même d'évaluer si l'intérêt de la justice commande un report? Le président du comité de sélection pourrait informer que, pour une circonstance exceptionnelle, il ne pourra pas rendre son rapport en temps opportun. Il me semble que notre proposition m'apparaît pondérée et raisonnable, et surtout c'est dans un souci, aussi, que les juges puissent entrer en fonction le plus rapidement possible, puissent commencer à siéger le plus rapidement possible, et que, dans un souci d'efficacité... Parce que, un des problèmes, M. le Président, dans notre système de justice : Parfois, si vous allez à la cour, on a l'impression d'être... je ne les ai pas vécues, M. le Président, mais des années pas mal antérieures, puis on ne dirait pas qu'on est à l'ère de la technologie puis à l'ère de l'efficacité, M. le Président. Et je pense qu'il y a beaucoup de justiciables qui, lorsqu'ils vont passer une journée dans les palais de justice du Québec, se disent : Il me semble que ça pourrait être plus efficace. Il me semble que ça pourrait être plus efficace.

La responsabilité est partagée; il y a une partie qui appartient à la magistrature, il y a une partie qui appartient au ministère de la Justice. Ceci étant dit, je pense que, nous, aujourd'hui, ici, on peut mettre de l'avant certaines mesures. Des fois, c'est plein de petites mesures, M. le Président, qui peuvent accompagner. Donc, je vais voir ce que la ministre de la Justice va nous dire là-dessus.

Le Président (M. Ouimet) : Merci. Mme la ministre de la Justice.

• (17 h 10) •

>223 Mme Vallée : M. le Président, j'aurais tendance à poser la question au collègue, à savoir... parce que, lorsqu'on est appelés à modifier un processus, un processus qui n'est quand même pas très vieux, c'est généralement parce qu'on a constaté un problème, et le processus actuel ne pose pas de problème. Parce que je sais que le collègue va soulever le délai entre la date de retraite de certains juges et la nomination du nouveau juge, mais je pense qu'il y a quelque chose... peut-être qu'il y a une information qu'il n'a pas puis qu'il devrait avoir, c'est que ces postes-là ne sont pas vacants pendant cette période-là. Il y a des juges suppléants qui sont appelés à rester, et parfois le juge qui a donné l'intention, qui a manifesté son intention de prendre sa retraite à une date x sera nommé suppléant le temps de combler la vacance.

Alors, le poste n'est pas vacant. Le juge continue d'exercer ses fonctions judiciaires. Mais le collègue fait signe que non, mais c'est oui. Alors, on a actuellement une banque et, en plus, on a une banque actuellement qui est composée de 63 juges suppléants qui sont désignés par la juge en chef et qui viennent apporter un coup de main lorsque des vacances surviennent, lorsque des maladies surviennent ou lorsque des besoins spécifiques sont identifiés.

Alors, par exemple, je sais que le collègue a son petit tableau, on nous parlait d'un certain nombre de nominations et des délais entre le moment où la demande d'ouvrir le concours avait été formulée par la juge... Là, je vous dirais, par exemple, la chambre civile à Montréal, le collègue soulevait le juge Forlini, la nomination du juge Forlini. Le juge précédent, qui était le juge Keable, avait annoncé sa retraite le 8 septembre à la juge en chef et il avait annoncé sa retraite en indiquant : Je prendrai ma retraite le 2 avril 2016. La juge en chef a demandé l'ouverture du concours en novembre 2015 en demandant de publier l'avis en février. On l'a fait.

La nomination a eu lieu en octobre 2016, mais le délai entre avril et octobre, bien, il a été créé parce que, dans ce poste-là bien particulier à la chambre civile de Montréal, il y avait un nombre assez impressionnant, important de candidats qui avaient postulé. Donc, le comité a dû prendre plus de temps pour aller de l'avant avec les entrevues, rencontrer les candidats, analyser les C.V., faire l'analyse et assurer la recommandation. Mais par contre, pendant les vacances, il y avait eu 60 juges qui avaient été désignés comme juges suppléants, et donc ces 60 juges là pouvaient assurer la relève. Et d'ailleurs le juge Keable, qui avait pris sa retraite, fait partie de ces juges suppléants qui avaient été désignés par la juge en chef. Donc, il y avait une retraite théorique parce qu'effectivement le juge arrivait à l'âge de la retraite, mais, dans les faits, le juge était actif, était sur le banc.

Donc, c'est pour ça, je comprends... Puis, soyez assuré, M. le Président, de tout le sérieux qui est accordé lorsqu'une demande est présentée par la juge en chef pour ouvrir un concours. Il s'écoule très peu de temps entre l'autorisation de publication et la demande de la juge. C'est vraiment très rapide. Par la suite, pour la composition du comité, ça aussi, ça va quand même assez rapidement. Et il arrive parfois qu'un seul concours est ouvert pour deux postes. Puis ça je pense qu'on a eu des échanges sur cette question-là. Et les deux postes ne viennent pas à échéance au même moment. Alors, ça, parfois, ça pose problème, et on a parfois des délais entre les deux.

Mais, au-delà de ça, M. le Président, on s'assure, par la nomination de juges suppléants, qu'il n'y aura pas de vacance physique. Parce qu'il y a une vacance théorique, effectivement, mais on s'assure que des juges sont là et pourront venir combler les vacances, au même titre qu'on va combler les maladies et autres types d'absence.

Alors, on travaille de cette façon-là. Je sais que c'est peut-être peu connu, parce que certains... Bien, en fait, la question des juges suppléants, je soulève ça parce qu'on a eu quelques questions. Je ne parle pas du député de Borduas, M. le Président, évidemment, mais on a eu quelques questions des médias sur cette question-là parce qu'on comprenait mal le rôle des juges suppléants et surtout leur utilisation, parce que c'est méconnu, et puis ça mérite d'être connu. On met en place les moyens, et la cour met en place les moyens pour assurer que les postes sont vacants et donc que chaque district judiciaire aura des effectifs pour répondre aux besoins du district.

Le Président (M. Ouimet) : Merci. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Je comprends les explications de la ministre, M. le Président. Ceci étant dit, les juges suppléants ne devraient pas servir à ça. On devrait, lorsque le juge annonce sa retraite et que son temps prend fin, bien, que tout de suite son remplaçant soit déjà connu ou qu'il soit nommé dans les jours, dans les semaines qui viennent. Dans le cas du juge Keable avec le juge Forlini, il y a quand même six mois. Je comprends qu'il y avait plusieurs candidatures, là, je comprends, mais six mois pour évaluer les candidatures, c'est extrêmement long, c'est extrêmement long. Pensez à un employeur, là, qui a un besoin de main-d'oeuvre puis qui dirait : Bien, moi, je vais passer une entrevue pendant six mois. C'est important d'avoir les meilleurs candidats au poste de juge, M. le Président, mais il faut être efficace.

Les dossiers, là... La ministre a annoncé, là, que son annonce avec 16 nouveaux juges de la Cour du Québec, cinq de la Cour supérieure, si le fédéral les nomme, puis deux de la Cour d'appel, on pourrait traiter 10 000 dossiers de plus. Est-ce qu'on peut commencer, dans l'appareil public québécois, là, à être efficace, à être ordonné, puis à dire : Dans le fond, écoutez, on va se doter d'une méthode de travail, d'un mode de nomination qui va faire en sorte qu'on va avoir des délais extrêmement serrés? Je pense qu'on a une occasion aujourd'hui de le faire, d'améliorer le processus, et les juges suppléants pourront servir pour les maladies, pour les absences soudaines.

Mais, ceci étant dit, je réitère ma proposition à la ministre. Je comprends qu'elle me donne énormément d'arguments pour ne pas l'accepter. Ceci étant dit, je suggère tout de même qu'il s'agit d'une proposition qui nous permettrait peut-être d'améliorer un peu l'état de la justice, l'état des délais dans nos palais de justice aussi.

Ceci étant dit, M. le Président, j'avais une autre question également. Ça faisait suite à la question de ma collègue de Joliette. Au niveau des procureurs de la couronne, 69 procureurs qui devraient être embauchés. Il n'y a pas déjà de banque de procureurs de la couronne qui ont passé le concours actuellement?

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre de la Justice.

Mme Vallée : On m'informe, M. le Président, que le processus de recrutement des procureurs est terminé. Et donc il y a en place une liste, une banque de procureurs. Alors donc, on devrait pouvoir atteindre les objectifs à l'aide de ces listes-là.

Le Président (M. Ouimet) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Une précision. Lorsqu'on dit : Atteindre les objectifs, je comprends qu'on a 69 postes à combler, mais le DPCP va embaucher d'ici Noël, d'ici le 31 janvier? Parce que c'est urgent maintenant, là. Il faut avoir les bons candidats, ils ont été habilités, ils ont passé le concours, mais...

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, ce qui est prévu, donc, d'ici le 31 mars, c'est d'embaucher 45 procureurs additionnels. On en a 15 qui ont déjà été embauchés. Donc, ça, c'est d'ici le 31 mars, et par la suite, d'ici le 30 septembre 2017, 24 procureurs supplémentaires. Donc, dans les prochains trois mois, là, il y a 45 procureurs. Donc là, suite à la liste, il y aura des entrevues qui seront effectuées. Je pense, M. le Président, que les équipes au DPCP attendent avec impatience l'arrivée de leurs nouveaux collègues et verront à assumer le traitement, mais évidemment, compte tenu de l'indépendance, ce n'est pas le ministère de la Justice qui procède au recrutement mais bien l'institution qu'est le Directeur des poursuites criminelles et pénales. Alors, les échéances qui sont là sont quand même raisonnables. 31 mars, on parle d'un peu plus trois mois.

Le Président (M. Ouimet) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Vous dites 45 procureurs au 31 mars. On comprend que ça va être imputé sur l'année financière en cours. 30 septembre 2017, parce que ça va être imputé sur l'autre année financière? Pourquoi ne pas donner l'investissement tout de suite? Parce que septembre 2017, c'est quand même dans 10 mois, là.

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre.

M. Jolin-Barrette : C'est parce que...

Le Président (M. Ouimet) : Je vais revenir.

• (17 h 20) •

Mme Vallée : Avec respect, M. le Président, je comprends, là, puis je pense que, pour les gens qui nous écoutent, on est loin de l'article 1 du projet de loi, là. On est dans la stratégie qui a été déployée hier puis dans le fin détail de la stratégie, là. Bien non, mais le collègue fait signe d'impatience, je m'excuse, mais le projet de loi, c'est sur la nomination des juges.

Alors, ceci étant, M. le Président, le collègue a posé une question : Pourquoi dans l'année financière en cours? Bien, parce que c'est une question de capacité d'accueil aussi de ces équipes-là. On a quand même 15 nouveaux procureurs qui sont arrivés depuis l'été, on prévoit en ajouter 45 autres d'ici la fin de l'année financière, c'est quand même important comme volume de nouveaux procureurs. Il faut prendre le temps aussi de bien les accueillir, de faire le travail. Et les 24 procureurs suivants, dans l'année financière suivante, ce n'est pas retardé, c'est même à l'intérieur de la prochaine année. Donc, c'est dans la première partie, la première moitié de la prochaine année financière. C'est un exercice qui, à mon avis, est responsable pour une organisation comme celle du DPCP et ça correspond à la capacité aussi de recevoir tout ce personnel-là, parce qu'au-delà des 69 procureurs qui s'ajouteront on a aussi des effectifs, on a 114 personnes qui viendront se joindre, donc des techniciens, du personnel de soutien, du personnel administratif. C'est beaucoup de ressources qui arriveront en deux périodes, donc la capacité d'accueil de l'équipe, elle doit aussi être considérée pour s'assurer que tout ça se déploie de façon harmonieuse.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Merci, Mme la ministre. Je sais, M. le député de Borduas, que vous aviez une précision à demander sur quelque chose que vous n'aviez pas entendu. Je vous cède la parole.

M. Jolin-Barrette : Relativement aux procureurs qu'on va engager, quel est le profil d'expérience qui est visé? Non, mais la question, elle est pertinente, M. le Président, puis je vais vous le dire aussi, parce que...

Le Président (M. Ouimet) : La pertinence, je vais vous dire, oui, nous sommes sur un projet de loi qui prévoit de faire passer le nombre des juges à différentes instances judiciaires d'un nombre x à y. Je comprends le sens des questions du député de Borduas. Pour qu'il y ait une amélioration au niveau du fonctionnement du système de la justice, il veut également avoir des précisions sur les procureurs de la couronne et tout l'effectif qui tourne autour du fonctionnement des tribunaux. Je considère que c'est pertinent.

M. Jolin-Barrette : Et donc la question qui se pose, M. le Président, c'est... En fait, on annonce des procureurs aux poursuites criminelles et pénales. Maintenant, dans l'annonce d'hier, il y en a une partie qui vont entrer en poste d'ici le 31 mars, il y en a une autre partie qui va rentrer d'ici septembre 2017. Là, on est face à une situation où... tout à l'heure, la discussion en faisait état, on disait : Écoutez, le nombre de requêtes en arrêt des procédures augmente constamment, puis là on ne veut pas trop divulguer le nombre de requêtes, mais là ce qu'on a de besoin puis, enfin, ce que, du côté gouvernemental, on a compris, c'est que ça prenait des bras, hein, des bras pour juguler la crise, mais là les procureurs vont arriver de façon sporadique dans le temps d'ici les prochains mois. Et on devrait donner un électrochoc au DPCP pour dire : Voici les ressources, voici vos bras, pour éviter que les requêtes soient contestées, pour réduire les délais de façon importante, mais là ce qu'on fait, c'est qu'on vient les rajouter sur deux années financières. Oui, on fait un effort, mais on se retrouve dans une situation où ils ne seront pas en poste le 1er janvier pour aller à la cour, pour aller contester les requêtes en arrêt des procédures aussi, M. le Président. Donc, c'est une approche qui est déclinée, c'est une approche progressive, mais il faut juste être conscient que les procureurs de la couronne, là, ils ne seront pas là le 1er janvier, dans nos palais de justice, pour contester les requêtes.

Et, la question de l'absorption des ressources, si je me rappelle bien, aux crédits l'an passé, la ministre nous avait dit qu'il y avait environ 600 procureurs de la couronne. Bon, bien, 45 sur 600, ça donne à peu près une augmentation d'effectifs de 7,5 %. Réparti sur l'ensemble du territoire québécois, je pense qu'on va être capable de les insérer dans les équipes. Et c'est pour ça que je posais la question à la ministre à savoir quel est le profil de compétence recherché. Est-ce qu'on requiert des procureurs sans expérience? Est-ce qu'on va viser des procureurs de cinq ans d'expérience, de 10 ans d'expérience? Je pense que c'est pertinent et c'est en lien avec son annonce et avec le projet de loi qu'on étudie présentement.

Le Président (M. Ouimet) : Bien, sur le profil, cependant, des procureurs, là, on s'éloigne un peu, là, du projet de loi, là. Je vous ai laissé aller, au niveau de la pertinence, pour savoir combien d'effectifs au niveau des procureurs de la couronne, je comprends, mais, sur le profil, peut-être vous seriez mieux de garder ces questions-là pour l'étude des crédits éventuelle, M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, parce que vous m'interpellez, l'étude des crédits, c'est probablement uniquement au mois de mars ou au mois d'avril prochain. Donc, vous voyez, s'il y a d'autres arrêts des procédures, là, dans les prochaines semaines, dans les prochains mois, ça va aller mal, là, M. le Président.

<857 >857 Le Président (M. Ouimet) : Je vous dirais amicalement : Il y a deux périodes de questions qui restent, au cours de...

M. Jolin-Barrette : ...

Le Président (M. Ouimet) : ...de la journée de demain. Mais je vais permettre à la ministre... je vais laisser le loisir à la ministre de la Justice de déterminer si elle veut répondre à votre question du profil, mais je vous souligne qu'on s'éloigne un petit peu, là, de la pertinence. Mme la ministre de la Justice.

Mme Vallée : Je ne sais pas si le collègue est intéressé par les postes qui sont ouverts, mais je l'invite à consulter le site du DPCP, qui fait... Bon, honnêtement, non, je vous aime bien.

Donc, c'est des compétences...

Une voix : ...

Mme Vallée : ...des compétences en droit criminel, je vous dirais, M. le Président, je pense que ça va de soi, là. Et ce qu'on m'indique, c'est qu'il y a... évidemment, on va privilégier les personnes qui avaient occupé des fonctions d'occasionnel, donc qui ont déjà une connaissance du rouage. Alors, ceux et celles qui avaient déjà oeuvré au sein du DPCP, bien, évidemment, il y a des chances que ces personnes-là soient appelées en renfort effectivement. Donc, voilà. Mais, pour le détail, je vous dirais, je ne fais pas partie des comités de sélection, je suis désolée.

Le Président (M. Ouimet) : Ça va? Merci. Alors, je vais aller du côté... C'était précisément là-dessus — parce que le député de Mercier s'est joint à nous — Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : ...mais je pourrai revenir.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, M. le député de Mercier. Non? O.K. Très bien. Alors, je reviens à vous, Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Mais je voulais justement poser des questions sur, je dirais, les mesures à très, très, très court terme. Parce que le député de Borduas met le doigt sur quelque chose d'important, c'est que, très bien d'avoir eu cette annonce, de voir, la ministre, comment ça va s'étaler dans le temps. D'ailleurs, moi, dans le communiqué, je sais qu'il y a des choses pour le 30 septembre, mais, pour les procureurs, je vois 30 juin, c'est-à-dire que je pense même que toutes les embauches devraient être d'ici le 30 juin. En tout cas. Ça fait que je ne sais pas s'il y a eu un changement, depuis le communiqué, quand on parle de 30 septembre. Je sais qu'il y avait des types d'emplois qui étaient d'ici le 30 septembre?

Mme Vallée : Bien...

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre de la Justice.

Mme Vallée : En fait, c'est qu'en fait de communication il y avait deux blocs : d'ici le 31 mars, d'ici la fin de la prochaine année financière et d'ici le milieu de la... Pardon. D'ici la fin de la présente année financière et d'ici le milieu de la prochaine année financière, voici ce que nous souhaitons, voici la façon dont va se décliner le déploiement des effectifs sur le territoire. Mais évidemment, et vous avez raison, pour les procureurs, idéalement, c'est d'ici la fin juin. Et on me confirme que c'est effectivement l'objectif que s'est donné le DPCP pour permettre de vraiment avoir une équipe complète. Donc, il semble être en mesure de procéder aux démarches d'ici cette date-là.

Le Président (M. Ouimet) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Donc, justement, on parlait des mesures, parce que, oui, de l'aveu de tout le monde hier, il y avait encore énormément de risques. Évidemment, les risques d'arrêts de procédure, les risques de libération d'accusés demeurent, parce que toutes ces mesures-là ne seront pas en place demain matin. On le voit, là, quand la ministre nous explique, dans l'étalement du temps, comment ça va se produire. Et, nous, on ne sera pas là la semaine prochaine, on ne sera pas là dans deux semaines, on ne siégera pas au début du moins de janvier. Donc, je pense que c'est notre responsabilité, aujourd'hui, collectivement, de poser toutes les questions et de se dire : Est-ce qu'on a tout fait ce qu'on pouvait pour éviter d'autres libérations, d'autres arrêts des procédures? Parce que j'imagine que la ministre ne peut pas nous garantir aujourd'hui qu'il n'y en aura pas d'autres. Alors, je pense qu'on a une obligation de moyens, d'être archi, je dirais, vigoureux dans ce qu'on analyse.

Donc, moi, j'ai une question à la ministre : Quelles mesures, à très, très court terme, là, demain matin, la semaine prochaine, peuvent être mises en place? Puis elle parlait des juges suppléants, c'est pour ça que je voulais intervenir à ce moment-ci, il y en a une soixantaine sur la liste, donc de juges suppléants qui peuvent donner du temps. Je comprends qu'ils ne sont pas tous, en ce moment, réquisitionnés et qu'ils ne donnent pas tous du temps.

Moi, je veux savoir ce qui est déployé, là, vraiment, à très court terme, pour dire : On va tout faire demain, la semaine prochaine, ramener des procureurs à la retraite, s'il y en a qui sont disponibles, des greffiers à la retraite qui seraient déjà formés en attendant qu'on fasse nos nouvelles embauches puis qu'il y ait de la formation qui se donne. La juge Côté disait d'ailleurs hier que, bien sûr, c'est une chose de se doter de nouveaux juges, mais qu'après il faut les former.

Donc, quels sont ces moyens-là qui sont pris, peut-être de manière exceptionnelle? Là, les salles, c'est quelque chose, je vais vouloir entendre la ministre là-dessus, pas dans le moindre détail, mais est-ce que ça veut dire qu'on construit de nouvelles salles ou on va utiliser des salles déjà existantes? Est-ce qu'on peut penser qu'à court terme on peut louer des salles? Donc, c'est des choses comme ça qu'elle m'a entendue lui demander. Aujourd'hui, j'ai la chance de l'entendre répondre.

Alors, j'aimerais ça savoir qu'est-ce qu'on peut déployer demain pour avoir le sentiment de vraiment mettre tout ce qui est possible en oeuvre?

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre de la Justice.

• (17 h 30) •

Mme Vallée : En fait, M. le Président, on déploie déjà, depuis l'été dernier et bien avant, un tas de mesures pour justement, là, donner de l'oxygène à notre système. Alors, notre collègue aborde la question de la location des salles, il y a des sommes qui sont budgétées pour permettre, au besoin, de louer des salles si ça devait s'avérer nécessaire.

Par exemple, au sein du DPCP, il y a une série de mesures qui ont été prises aussi pour assurer qu'on puisse rapidement traiter les dossiers. Puis, petite parenthèse, lorsqu'on utilise : Est-ce que vous pouvez nous assurer qu'il n'y aura pas d'arrêt de procédures?, il faut comprendre que l'arrêt des procédures, ça peut être un remède, en vertu de la Charte des droits, dans certains dossiers. Donc, les délais ne sont pas le seul facteur qui peuvent mener à un arrêt de procédures.

Alors, je comprends que, lorsque ma collègue fait référence aux arrêts de procédures, elle fait référence aux arrêts de procédures pour cause de délais déraisonnables. Alors, elle me fait signe que oui, alors on se comprend, parce que de vous promettre demain matin qu'il n'y aura plus un arrêt de procédures sans considération pour tous les autres motifs, j'aimerais le faire, mais, bon, on sait ce qui en est.

Maintenant, pour revenir au Directeur des poursuites criminelles et pénales, déjà il y a des directives qui ont été transmises par le DPCP aux procureurs afin de limiter les remises dans les dossiers, que ce soit en matière criminelle ou pénale. Donc, il y a déjà un effort pour éviter des remises. On sollicite, de façon plus formelle, les autorités de la Cour du Québec pour mettre en place des mesures administratives pour accélérer le traitement des dossiers.

Il y aura l'accélération du déploiement provincial du programme de résolution rapide du dossier. C'est un programme dont on a parlé beaucoup ici, à Québec, un projet pilote qui a été initié par l'équipe du DPCP, et ce programme-là consiste à faire une offre de règlement du dossier dès l'institution de la poursuite pour accélérer le règlement des dossiers qui normalement se traduisent par un plaidoyer de culpabilité. Parce qu'on a, dans le système, des dossiers qui ne sont pas contestés qui font l'objet d'un plaidoyer de culpabilité après très longtemps, après de nombreuses remises. Et ça, bien, cette manipulation de dossiers là, en soi, contribue à l'augmentation des délais.

Il y a maintenant aussi des exigences très claires envers les policiers afin que le dossier soit complet au moment où ils vont le soumettre pour une autorisation d'une poursuite pour éviter les délais qui sont inhérents à la communication de la preuve et qui, dans certains dossiers, ont mené également à des arrêts ou des demandes d'arrêt de procédures. Alors, les exigences ont été communiquées aux corps policiers par les procureurs-chefs, donc de façon régionale, partout sur le territoire. Puis elles font aussi l'objet d'un rappel auprès de chaque policier qui consulte le Bureau des services-conseils pour que le dossier arrive, autant que possible, complet dès la comparution. Il y a un suivi continu, au niveau provincial, des décisions qui sont rendues au Québec pour assurer la diffusion des jugements qui rejettent par exemple une demande d'arrêt de procédures afin que tous les procureurs soient au fait, en temps réel, de l'évolution de la jurisprudence — parce que ça aussi, c'est important — et qui permettent aussi d'identifier les jugements qui méritent d'être portés en appel.

À la Cour supérieure, je l'ai mentionné, on a attitré des juges à la retraite pour permettre à des juges de pouvoir traiter des dossiers criminels. Alors, ça, ça a été autorisé, c'était une demande du juge en chef à laquelle on a répondu favorablement. Pour la Cour du Québec, il y a déjà eu, l'été dernier, un ajout de jours de cour, de termes, pour traiter plus de dossiers durant la période estivale. À Montréal, ce sont 60 jours d'audience, en tout et partout, qui ont été ajoutés. On ajoute deux salles d'audience au palais de justice de Montréal. Dès janvier, il y a une transformation de la salle des célébrations en salle multifonctions qui va s'amorcer, donc elle devrait être prête en janvier. On a implanté, en octobre dernier, le projet de visioconférence entre le centre de détention de Montréal, de Bordeaux, et la Cour du Québec, au palais de justice de Montréal, parce qu'il y avait des délais qui étaient inhérents au transport des détenus. Le trafic à Montréal est une réalité, et puis on peut trouver ça cocasse, mais, lorsque des détenus arrivent une heure, deux heures, trois heures plus tard que l'heure prévue, n'ont pas rencontré leur avocat... donc ça retarde d'autant le processus. Alors, la visioconférence permet de répondre à cet enjeu-là, permet aussi aux avocats d'interagir avec leur client de façon tout à fait confidentielle. Donc, ça, c'est quand même important.

On utilise maintenant le pavillon Gouin, le Centre de services judiciaires Gouin pour les procès et les requêtes. Alors, Gouin était utilisé auparavant pour les mégaprocès, mais on maximise l'utilisation. Lorsque, dans le Plan Accès Justice, on parle d'optimiser nos ressources, bien, c'en est un exemple. On a l'aménagement d'une salle supplémentaire pour les audiences pénales par défaut, on a ajouté 60 jours entre septembre 2016 et septembre 2017, c'est 20 000 dossiers de plus qui seront traités au niveau pénal de cette façon-là. Et il y a une tendance, là, il y a un effort qui est fait pour devancer les procès qui étaient initialement prévus à partir de l'été 2017, les devancer, offrir des dates au printemps 2017. Donc, ils étaient prévus pour l'été, on les devance pour le printemps. Il y a une gestion rigoureuse des dossiers qui est faite tant par le DPCP que la magistrature pour permettre, à la lumière de cette nouvelle disponibilité de salles, de ressources, bien, de réaménager parfois des dossiers.

Donc, l'effort... Puis je pourrais continuer, parce qu'on a plusieurs autres mesures comme ça. Il y a énormément de démarches qui ont été mises en oeuvre, qui ont été déployées pour répondre à la pression qu'a occasionnée cette décision de la Cour suprême.

Le Président (M. Ouimet) : Merci, Mme la ministre de la Justice. Mme la députée de Borduas.

Mme Hivon : Joliette.

Le Président (M. Ouimet) : De Joliette. Désolé.

Mme Hivon : Donc, je comprends que la ministre juge qu'à court terme elle ne peut pas injecter ou avoir recours à des ressources, je dirais, de manière temporaire pour faire un blitz, pour essayer de vraiment faire le maximum pour que le maximum de causes puissent être entendues et qu'il y ait le minimum d'impact, donc, je dirais, d'avortements de procès ou d'arrêts de procédures?

Le Président (M. Ouimet) : Alors, Mme la ministre.

Mme Vallée : En fait, ce qu'on m'indique, c'est qu'en fait tout est possible. Pour recruter plus rapidement, il y a des avis qui ont été déjà publiés, pour pouvoir recruter le personnel, on est en démarche. Si ma mémoire est bonne, je pense que c'est la semaine dernière qu'il y a eu des avis qui ont été lancés pour le recrutement du personnel. Puis il n'y a aucune porte qui est fermée, là, c'est-à-dire que...

Mme Hivon : ...

Mme Vallée : Ça pourrait faire l'objet, si les gens sont intéressés... Mais, pour vous donner une petite idée, là, au niveau des ressources humaines, il y a déjà 12 effectifs qui ont été embauchés pour soutenir trois postes de juge à la Cour supérieure, donc ils ont déjà été embauchés. L'affichage des postes de greffier-audiencier et d'adjoint à la magistrature a été fait pour toutes les régions de la province. On a mis en place un partenariat avec les maisons d'enseignement pour occuper du personnel qui est formé en techniques juridiques, il y a eu la transmission des affichages en cours aux finissants des trois dernières années, on a affiché des stages en techniques juridiques pour plusieurs régions. Il y a actuellement 27 effectifs qui sont en cours d'embauche pour assurer l'accélération des audiences en matière criminelle et pénale.

Donc, il y a énormément de travail qui est fait, là, pour répondre le plus rapidement possible à l'annonce qui a été faite. On a travaillé en amont pour que tout soit prêt et permettre le déploiement, là, dès l'autorisation obtenue.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Mme la députée de Joliette.

• (17 h 40) •

Mme Hivon : Et, en lien avec ma prochaine question ou, en fait, avant, je vais saluer à mon tour les juristes de l'État qui sont présents dans nos tribunes, très assidus à nos travaux. Évidemment, j'exerce un devoir de réserve dans mes propos, étant moi-même une ex-juriste de l'État, proche d'autres juristes de l'État, mais je veux dire que nous leur souhaitons un règlement rapide, négocié et que nous puissions bénéficier de leur expertise à nouveau, parce que je dois dire que nous sommes quand même surpris de voir des projets de loi déposés, on l'a vu aujourd'hui et on l'a vu hier, alors que les juristes de l'État sont en grève présentement depuis sept semaines.

Et la prochaine question... Peut-être que la raison pour laquelle nous n'avons pas de réponse de la ministre est liée à cette réalité-là, qu'elle n'a pas ses experts avec elle, mais la ministre sait qu'on a soulevé la question de l'utilisation de la clause dérogatoire — en bon français, nous devrions l'appeler disposition de dérogation — et la ministre n'a jamais fermé la porte. Et la situation est telle que, de l'avis de tous, hier, comme je le disais, nous allons revivre des arrêts de procédures, nous allons revivre des accusés qui vont être libérés. Et hier, dans son point de presse, dans sa conférence de presse, elle a dit que c'était une avenue pour laquelle elle n'avait pas fermé la porte et que ça pourrait faire l'objet, elle me corrigera si j'erre, de discussions, qu'elle était en discussion avec l'ensemble de ses partenaires du reste du Canada sur cette question-là.

Donc, je voulais savoir où en était son examen par rapport à cette possibilité-là. Parce que je pense que ce que les Québécois attendent de nous aujourd'hui, c'est que nous fassions le maximum pour que justice soit rendue et que, quand on investit des ressources policières pour que des gens puissent être accusés, que les enquêtes soient faites, que ça mène à des accusations, que notre système soit capable d'absorber ça, et il faut s'assurer qu'on fait le maximum. Et qui doit payer en ce moment pour cette crise-là que l'on vit? Est-ce que c'est toute la population? Comment on répond à ces impératifs-là de crises dans lesquelles on est? Donc, je pense qu'on ne peut rien exclure et je veux connaître l'opinion de la ministre sur ce sujet-là.

Le Président (M. Ouimet) : Merci. Alors, Mme la ministre.

Mme Vallée : Je tiens à souligner que, bien que nous travaillions à ressources réduites, j'ai encore 23 cadres qui nous supportent, et qui sont multidisciplinaires, et qui travaillent très fort. Et je profite de ce moment pour les remercier, parce qu'au cours des sept dernières semaines, Dieu sait que le ministère de la Justice a été appelé en renfort dans bien, bien des dossiers. Alors, je salue les équipes qui nous accompagnent au quotidien, mais évidemment, on a hâte que nos procureurs et nos juristes soient de retour. Ça, je vous le garantis, M. le Président.

Ceci étant, pour ce qui est de la clause dérogatoire, c'est sûr que la question se pose. Moi, encore une fois, il y a un passage de Jordan qui, je pense, nous interpelle, parce que, sur la clause dérogatoire, il y a des avis partagés, puis je pense qu'il y a plusieurs juristes constitutionnalistes qui se sont exprimés publiquement dans les médias sur cette question-là. Alors, et d'un côté comme de l'autre, le fondement, la réflexion, elle est sérieuse. Mais, lorsqu'on parle de clause dérogatoire, encore une fois, on a un petit peu de pédagogie à faire pour ceux et celles qui nous écoutent, c'est que, dans le fond, l'idée, c'est de suspendre l'application de l'article 11b de la charte, qui prévoit le droit pour un accusé d'avoir un procès à l'intérieur d'un délai raisonnable.

Et, lorsqu'on lit Jordan... Jordan en soi, lorsqu'on le lit... Puis je le relisais, pas plus tard qu'à l'heure du lunch pour... bien, l'heure du lunch, il faut le dire vite, pendant la petite pause. Le paragraphe 98 de la décision Jordan commence par la phrase suivante, puis ça, ça doit mener à réflexion : «Les droits de tous les accusés protégés par l'article 11b ne peuvent pas pour autant être suspendus pendant que le système cherche à s'adapter à un nouveau cadre d'analyse établi en l'espèce.» C'est comme si la Cour suprême nous avait déjà dit : Je sais, là, que vous allez songer à invoquer la clause dérogatoire, mais ce n'est pas une bonne idée.

Alors... Alors...

Mme Hivon : Moi, je pense...

Le Président (M. Ouimet) : Oui, Mme la députée de Joliette, oui.

Mme Hivon : ...on veut avoir un échange, puis c'est très intéressant comme sujet. Moi, je pense que ce que la cour dit là-dedans, c'est qu'une demande, par exemple, de sursis serait peut-être difficile à obtenir, mais en fait c'est peut-être parce qu'elle est venue nous dire : Là, dans l'intervalle, avant, pour les causes pendantes, voici le cadre d'analyse qu'on suggère, et tout ça, mais... En tout cas, je l'ai lu aussi avec ce regard-là, je ne suis pas certaine qu'elle est en train de nous parler de la clause dérogatoire.

Mme Vallée : Non, mais en fait l'effet de l'utilisation de la clause dérogatoire, c'est la suspension pendant un temps donné, parce qu'évidemment l'objectif ce ne serait pas de suspendre indéfiniment ces droits-là, parce que là on revient à la case départ et puis on est dans un autre type de problématique.

Et l'autre élément, je pense, qui est le plus important dans la réflexion puis qui mérite vraiment qu'on s'y attarde, c'est qu'advenant que la solution soit celle de l'utilisation de la clause dérogatoire, est-ce qu'il n'y aurait pas, suite à l'adoption de cette disposition-là, une recrudescence des procédures pour contester l'application de cette loi-là? Est-ce qu'on ne va pas créer des délais par un autre type d'encombrement des tribunaux? Et ça, c'est probablement un élément qui est aussi dans notre analyse de la question. L'objectif, c'est que le moyen qui sera utilisé ne soit pas un motif qui va amener en soi une multiplication de procédures.

Alors, on est là-dessus. Il y a des échanges, et il y a des échanges parce qu'il y a différents véhicules qui pourraient peut-être être utilisés. Et il y avait, oui, une demande de sursis avec les collègues du fédéral. Il y aurait peut-être une intervention dans certains dossiers parce qu'il y a certaines requêtes qui ont fait l'objet de décisions des tribunaux. Donc, est-ce qu'une intervention... Et un de ces dossiers-là pourrait, sous peu, être porté devant la Cour suprême. Donc, est-ce qu'une intervention dans ce dossier ne serait pas un moyen approprié qui serait le plus pratique?

Alors, on pèse les avantages et les inconvénients. On a initié cette discussion-là parce que personne ne l'avait fait autour de la table, préalablement, avant que le Québec initie la démarche. Il y a eu des échanges au niveau administratif, des échanges au niveau politique, sur cette question-là. Donc, chacun est en réflexion, mais il y a certaines avenues, là, qui apparaissent comme étant plus pratiques et moins dangereuses, là, dans ce sens, dangereuses étant moins susceptibles de créer un encombrement des tribunaux.

Le Président (M. Ouimet) : Merci. Alors, il reste, je pense, autour de trois minutes pour votre bloc, Mme la députée de Joliette. Trois minutes.

• (17 h 50) •

>27 MmeHivon : Parfait. Mais la ministre doit être consciente évidemment que, si on est encore en train d'analyser ces manières potentielles d'intervenir pour qu'à court terme on puisse échapper le moins de causes possible, ça veut dire qu'on va continuer à échapper des causes, parce qu'on est encore en réflexion, en discussion, potentiellement avec d'autres provinces, à analyser. Nous, ce qu'on veut, justement, c'est de se dire : On a tout fait. Et la clause dérogatoire, c'en est une, avenue. Et puis, oui, il y a la question du partage des compétences qui se pose, on peut avoir un long débat là-dessus, mais qui vit, en ce moment, avec les effets du jugement? Je pense que la ministre est bien placée pour le savoir, c'est le Québec. Ce sont les provinces qui sont responsables de l'administration de la justice qui doivent trouver les mesures, donc qui doivent agir et qui se ramassent avec les impacts de ça, d'une part, et, d'autre part, il n'y a rien qui empêche le fédéral, de son côté, de faire la même chose pour être complètement blindé et de se dire : Il ne pourra pas y avoir de contestation.

Et, oui, pour que les gens comprennent bien, ça ne veut pas dire de dire : Il n'y aura plus aucun délai qui va compter et pour une période de cinq ans.

On peut faire ça de manière très restreinte. Il n'y a rien qui dit que la clause dérogatoire ne peut pas être utilisée pour une période beaucoup plus courte que cinq ans, et on pourrait très bien dire : x mois sont le maximum pour pouvoir se sortir de la limite mathématique de Jordan. Parce qu'il faut quand même rappeler que, dans Jordan, il y a cinq juges qui sont venus mettre une limite mathématique, mais il y en a quatre qui étaient farouchement opposés à ça, en disant que ce n'était pas leur rôle et que c'était le rôle du législateur. Donc, ça serait tout à fait légitime, dans ce cas-ci, de dire, justement : Le législateur agit avec ses prérogatives, ses fonctions, et, pour une période limitée de temps, pour éviter que l'hécatombe se poursuive, nous agissons avec cette clause-là.

Donc, vraiment, nous, on demande à la ministre d'être très, très diligente dans cet examen-là, de nous tenir au courant de ce qui va être fait, parce qu'on est conscients que, là, on légifère aujourd'hui une clause de dérogation. Ça prend un véhicule législatif, on ne siégera plus. Moi, je le dis d'emblée, si on voit que les choses continuent de mal aller, on pourra revenir n'importe quand pour légiférer, pour prendre les mesures qu'il faut, parce qu'on pense qu'il faut examiner toutes ces options-là, et c'est ce qu'on demande à la ministre. Puis on est quand même surpris que ces discussions-là aient lieu maintenant, quand l'arrêt Jordan a été rendu au mois de juillet dernier. Je comprends que nous, on a avancé cette hypothèse-là il y a une dizaine de jours, dans la foulée d'autres juristes qui ont soulevé la question, mais il me semble que ce n'est pas normal que ces avenues-là, des avenues exceptionnelles, mais on est vraiment dans une crise exceptionnelle, n'aient pas été analysées avant. Donc, on demande à la ministre des réponses, claires, rapides sur ces enjeux-là.

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, je n'entrerai pas dans la question du quand, pourquoi, comment, mais chose certaine, tout est sur la table. On s'est affairés beaucoup, on a mis énormément d'énergie dans ce dossier-là au cours des six derniers mois, je vous dirais plus précisément depuis le dépôt de l'arrêt Jordan, et donc sachez qu'on va maintenir la cadence et nos efforts.

Mais, vous savez, c'est la multiplication des problèmes... des requêtes, lapsus, multiplication des requêtes qui est le gros problème. Si la solution que l'on met sur la table constitue en soi une source de multiplication de requêtes, on n'est pas avancés, on n'est vraiment pas avancés. Donc, il y a le dossier... je pense que c'est Colby, en Ontario, qui pourrait justifier une intervention à court terme et qui pourrait nous amener à rapidement avoir une décision. Mais je vous dis ça parce que parfois on a des idées hyperintéressantes, puis effectivement, puis je comprends le message de la collègue, puis on a échangé, on a eu des échanges fort intéressants avec les équipes au ministère sur cette question-là, puis même avec les équipes du DPCP, et la crainte, c'est d'en arriver avec une solution fort intéressante en théorie mais qui en pratique cause d'autres problèmes. Et ça, je pense que ce n'est pas ce qui est souhaité.

Le Président (M. Ouimet) : Il reste 30 secondes, Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Je vais les garder, je vais les garder précieusement.

Le Président (M. Ouimet) : Vous allez les garder? Très bien.

M. le député de Mercier, je vous propose... Je vais revenir à vous vers les 19 h 30, il reste trois minutes au député de Borduas... ou on peut aller avec vous.

M. Khadir : ...

Le Président (M. Ouimet) : Allez-y, M. le député de Mercier.

M. Khadir : Jusqu'à 18 heures, c'est ça?

Le Président (M. Ouimet) : On me chuchote qu'on pourrait peut-être dépasser 18 heures. Alors, prenez le temps, puis je vous aviserai.

M. Khadir : D'accord. Bon, bien des choses ont été dites. J'interviens à ce moment-ci parce que ma collègue de Joliette a fait mention des avocats et notaires du gouvernement qui sont en grève depuis plusieurs semaines, à cause de la réserve qu'elle doit manifester en raison de sa profession. Moi, je n'ai pas cette réserve-là et je peux donc dire à quel point nous estimons qu'il y a, là encore, une grave erreur de la part du gouvernement de se passer des services inestimables et précieux de ces spécialistes, qui sont nécessaires dans bien des causes. Vous savez qu'actuellement, juste pour en nommer quelques exemples, au cours de la semaine actuelle, juste au moment où on se parle, si la ministre est attentive, 413 nouvelles causes pénales qui impliquent Revenu Québec alentour des enquêtes et accusations lancées par l'UPAC, par le ministère du Revenu pour fraude fiscale, dans les dossiers de contrebande de tabac, ont été remises en raison de la grève des juristes — ça va? — ...

Le Président (M. Ouimet) : Je vous écoute.

M. Khadir : ...oui, en raison de la grève des juristes de l'État québécois, ce qui porte le total à tout proche de 1 500. Si on regarde un peu ce que ces causes représentent comme revenus possibles, dans les causes où le gouvernement s'attend, en poursuivant ces fraudeurs, ces malfaiteurs, à aller chercher des revenus, ça remonte, suivant certaines estimations, à tout près de 30 millions de dollars.

Or, le gouvernement se passe d'une expertise, et on sait à quel point, dans l'histoire récente du Québec, le manque d'expertise dans nos ministères, notamment au ministère des Transports, a pesé lourdement sur les fonds publics, a causé d'innombrables dérapages. Toute une, je dirais, histoire de corruption est directement reliée, suivant la commission Charbonneau, à l'absence d'expertise interne, et on est en train de s'en passer, en plus de l'impact sur le processus, disons, législatif et plus particulièrement dans ce que la ministre doit faire pour s'assurer qu'elle mène tambour battant, avec tout le dispositif législatif et juridique dont elle a besoin, dont c'est nécessaire pour mener ces consultations et pour venir en appui à l'administration de la justice.

Je rappelle également, parce que je ne dispose pas de beaucoup de temps, qu'un pur hasard m'a amené à un concert vendredi dernier, à l'occasion duquel j'ai rencontré l'ex-juge Gomery. Donc, ça a été l'occasion, bien sûr, d'aborder un sujet d'actualité, qui était la situation de l'administration de la justice. Et il affirmait que le problème est connu depuis des années, que, s'il y avait la moindre compétence dans l'administration de la justice... et je le répète parce que ça implique soit une volonté réelle, compétente de faire quelque chose, soit une incompétence qui explique pourquoi on n'a pas fait quelque chose, soit une ignorance. Alors, je me demande lequel de ces cas concerne le gouvernement actuel, concerne particulièrement sa ministre de la Justice. Ça fait depuis des années. La juge de la cour criminelle et pénale, hier soir en entrevue, disait : C'est bien avant...

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet) : Écoutez, je... La présidence, des fois, essaie de régler d'autres problèmes. M. le député de Mercier.

Des voix : ...

Le Président (M. Ouimet) : Malheureusement, je les ai manqués, ces mots-là, en toute honnêteté.

M. Khadir : ...je dis : Ça fait des années que la chose est connue. Danielle Côté, juge en chef de la cour pénale et criminelle, hier soir en entrevue, disait : C'est bien avant l'arrêt Jordan qu'on connaît le problème. Alors, qu'est-ce qui explique? Est-ce que c'est à cause des juristes? C'est à cause des conseillers du gouvernement? Est-ce que c'est la ministre? Est-ce que c'est sur son conseil? Qui a fait qu'on a pris tant de temps et que c'est deux jours avant la fin des travaux qu'on nous présente ce projet de loi? On ne peut pas accepter.

Quand j'ai demandé : Est-ce qu'il y a eu des consultations? Donnez-nous le résultat de ces consultations, dites-nous : Bien, elle était... Elle ne l'a pas été, lors des échanges, elle n'est toujours pas capable de nous fournir de la documentation qui puisse démontrer qu'elle a véritablement consulté les principales parties concernées.

Mais peu importe. Ce qui est bien, c'est qu'on a enfin pensé à des juges, à des salles, à des procureurs de la couronne. Je voudrais juste mentionner ce que je retiens avec le plus d'acuité dans l'échange que j'ai eu avec le juge Gomery, c'est qu'il trouvait préoccupant la différence de rémunération entre les procureurs de la couronne — et c'est pour ça que j'aimerais l'entendre là-dessus — qui sont sous-payés actuellement, et les procureurs de la défense, souvent des firmes privées qui peuvent payer de deux, trois, parfois même jusqu'à cinq fois le salaire annuel qui est offert à nos procureurs de la couronne.

Donc, j'aimerais savoir si la ministre compte, dans ses fonds octroyés, faire en sorte que les procureurs de la couronne, qui travaillent pour la justice, qui travaillent pour l'État québécois, seront mieux rémunérés à l'avenir et si elle compte aussi, pour agir tambour battant dans l'intérêt de l'administration de la justice, régler le plus vite possible, avec son gouvernement, la question des juristes, des avocats et des notaires qui sont en grève actuellement.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, juste avant de céder la parole à la ministre de la Justice pour sa réponse, Mme la leader adjointe du gouvernement, je pense que vous avez une proposition à nous faire.

Mme Vien : Oui, bonsoir, M. le Président. Bonsoir, chers collègues. Oui, si c'était possible, M. le Président, d'un commun accord avec les parlementaires, nous souhaiterions poursuivre au-delà de 18 heures nos travaux.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, y a-t-il consentement pour aller au-delà de 18 heures? Pas de consentement. Très bien.

Alors, je vais suspendre les travaux de l'Assemblée et nous serons de retour à 19 h 30.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 19 h 33)

Le Président (M. Ouimet) : Alors, la commission plénière reprend ses travaux. Au moment de la suspension de nos travaux, nous étions sur le droit de parole de M. le député de Mercier. Il avait adressé quelques questions à Mme la ministre de la Justice. Je ne sais pas si, à ce moment-ci, Mme la ministre de la Justice, vous souhaitez faire une intervention.

Mme Vallée : Je pense que le principal intéressé n'est pas ici.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, il restait 30 secondes à la députée de Joliette et trois minutes à M. le député de Borduas. Alors, peut-être... M. le député de Borduas, il vous reste trois minutes.

M. Jolin-Barrette : Oui.

Le Président (M. Ouimet) : Je vous cède la parole.

M. Jolin-Barrette : Parfait. Merci, M. le Président. Écoutez, lors de ma dernière intervention, j'ai posé des questions à la ministre sur, bon, les ressources attribuées au Directeur des poursuites criminelles et pénales, le nombre de procureurs, et j'entendais l'échange avec ma collègue de Joliette relativement à quel moment les ressources vont être attribuées puis l'importance d'attribuer les ressources dès maintenant et de juguler la crise dès maintenant. Et là je voulais voir avec la ministre. Dans le cadre de son annonce, on sait qu'avec les procureurs de la couronne, actuellement, c'est extrêmement difficile pour eux de faire autoriser leur temps supplémentaire. Est-ce qu'il y a une directive qui a été envoyée, claire, à la Directrice des poursuites criminelles et pénales pour que les procureurs de la couronne qui désirent faire du temps supplémentaire, notamment dans le cadre de requêtes en arrêt des procédures ou pour traiter davantage de dossiers... est-ce que leur temps va être autorisé? Parce qu'ils sont sur une semaine de 37 h 30 min, et, généralement, il faut qu'ils fassent préautoriser leur temps.

Donc, ça, ça serait une mesure concrète, une mesure financière. Puisque les procureurs de la couronne qu'on va engager ne rentreront pas en poste tout de suite, ceux qui sont déjà là présentement, est-ce qu'on peut envoyer un signal pour dire : Bien, écoutez, on va délier les cordons de la bourse dans le cadre de notre annonce et on va autoriser le temps supplémentaire, si nécessaire, pour justement réussir à résoudre cette crise-là? Parce que, moi, ce qu'on me dit, on me dit : C'est difficile de faire autoriser le temps supplémentaire en raison du budget, tout ça. Je pense que ça serait peut-être une mesure concrète, présentement, qui pourrait permettre un peu d'amener une autre solution aussi, une solution supplémentaire pour la crise.

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre de la Justice.

Mme Vallée : M. le Président, je ne suis pas au fait d'une problématique telle que celle que notre collègue le décrit. En fait, on m'indique qu'il n'y a pas de contrainte actuellement puis que le temps supplémentaire, lorsqu'il est requis, il est autorisé. Alors, sans avoir plus de détails, là, cette problématique-là ne semble pas être une problématique générale, là.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Il vous reste une minute, M. le député.

M. Jolin-Barrette : Toujours sur ce point, M. le Président, écoutez, moi, ce qu'on me dit dans le milieu, c'est que c'est difficile, faire autoriser du temps supplémentaire. Si on veut traiter un nombre de dossiers important, peut-être que, pour éviter des remises, pour pouvoir être prêts pour plaider ces dossiers-là, pour plaider les requêtes, peut-être que ça vaut la peine d'injecter des sommes supplémentaires ou, à tout le moins, mettre la disponibilité de ces sommes-là. Dans le milieu, ce qu'on me dit, c'est qu'il faut avoir une préautorisation de temps supplémentaire, puis parfois c'est difficile, en avoir.

Donc, est-ce que la ministre peut envoyer un message clair à la Directrice des poursuites criminelles et pénales qu'elle l'appuie dans ce sens-là? Je pense qu'avec l'ajout des procureurs ça pourrait constituer également une mesure parce que, oui, il y a des procureurs qui ont été ajoutés, comme elle l'a mentionné tout à l'heure, spécialement depuis Jordan, mais il y en a 15. Est-ce que le temps supplémentaire aussi peut être une option envisageable?

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, il n'y a pas de problématique actuellement, il n'y a pas de problématique en cours. Alors, si le collègue a une situation particulière, bien, on n'est pas ici pour régler des situations particulières, mais, moi, on m'informe que ce n'est pas une problématique. Alors, c'est difficile de... Les procureurs qui, de par leurs investissements, sont tenus de faire du temps supplémentaire qui est justifié, bien, ce temps supplémentaire est autorisé. Donc, aller au-delà de ça, là, on est... Désolée, là, mais cette problématique-là n'est pas une problématique actuellement.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. 30 secondes, M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui, bien, je comprends qu'on va voter l'article 1, j'aurais une question pour la ministre. Pourquoi venir indiquer clairement le nombre de juges dans le projet de loi? Vous le faites à l'article 1, vous le faites également pour les juges de la Cour du Québec, la Cour supérieure aussi. Pourquoi est-ce qu'on vient, dans la Loi sur les tribunaux judiciaires, dire le nombre de postes disponibles, combien il y en a de créés? Parce que, si jamais, dans cinq ans ou dans 10 ans, la population augmentait d'autant, comme ça a été le cas depuis les années 90, le nombre de juges, on va devoir se rasseoir en commission parlementaire. Pourquoi...

Le Président (M. Ouimet) : ...interrompre là-dessus. Pourquoi le nombre de juges est signalé ou mentionné dans l'article, Mme la ministre?

Mme Vallée : En fait, on a toujours travaillé de cette façon-là, on a toujours identifié le nombre de juges autorisé, et ça, historiquement, là, ça date de 1964. Alors, c'est une question qui est d'une évidence budgétaire à sa face même, là. Il y a une question de bonne gestion des fonds publics. Donc, lorsque le besoin apparaît... Puis je pense que l'exercice auquel on se livre aujourd'hui a ceci d'excellent, c'est que nous parlons, pendant quelques heures, de justice à l'Assemblée nationale. Je pense que ce n'est pas mauvais.

Le Président (M. Ouimet) : Merci. Alors, Mme la députée de Joliette, il vous reste également 30 secondes.

Mme Hivon : Alors, je note avec satisfaction que nous avons eu le dépôt d'un courriel de la juge en chef, donc, de la Cour d'appel, ce que j'apprécie. Et, à cet égard, je vois que le nombre qui est mis à l'article 1 correspond au nombre demandé par la Cour d'appel ou, du moins, qu'elle s'en déclare satisfaite. Alors, en ce qui me concerne, je suis prête à voter l'article 1.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, y a-t-il d'autres interventions? Sinon, je vais mettre aux voix l'article 1.

Est-ce que l'article 1 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Ouimet) : Adopté. Passons maintenant à l'article 2, Mme la ministre de la Justice.

• (19 h 40) •

Mme Vallée : Donc, pour ce qui est de l'article 2, on est toujours dans la Cour d'appel, on vient modifier la résidence, le nombre de juges avec résidence à Montréal ou dans son voisinage immédiat. Donc :

L'article 7 de la loi est modifié :

1° par le remplacement, dans le premier alinéa, de «20» par «22» et de «13» par «15»; et

2° par le remplacement, dans le troisième alinéa, de «20» par «22».

Alors, les juges, les deux juges additionnels seront attitrés à Montréal. Et évidemment l'ouest du Québec est plus durement touché par une augmentation du volume, particulièrement Montréal. Alors, ça correspond aussi à la demande qui avait été formulée par la juge en chef.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Merci. Alors, Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : J'aurais une question, à ce moment-ci, sur la part des investissements qui va aux nouvelles salles. Juste pour savoir, ça représente combien? Combien de millions qu'on investit ou de centaines de milliers de dollars? J'imagine qu'on est plutôt en millions, mais c'est ça que je veux savoir pour les nouvelles salles qui ont été annoncées dans l'annonce de la ministre hier. Puis comment ça se déploie? Comment ça va se concrétiser dans les différents palais qui sont touchés? Puis quelles instances?

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Il y a des sommes... Il y a une somme de 2 millions qui est réservée pour la location de salles en cas de besoin. Ça, c'est une chose qui est importante. Et pour ce qui est des sommes... Vous comprendrez qu'on était sur le nombre de juges, alors je vous reviens.

Le Président (M. Ouimet) : Je conviens qu'on est un peu en périphérie, mais ça permet parfois de mieux comprendre les dispositions du projet de loi.

Mme Vallée : Pardon. Pour la location de 10 salles supplémentaires, qui vont permettre la tenue d'audiences, on prévoit un coût annuel de location d'une salle qui est estimé à peu près à 200 000 $, alors le ministère aura besoin de crédits supplémentaires annuels totalisant 2 millions. Donc, ça, c'est le 2 millions qui est rattaché pour les locations de salles supplémentaires. Pour ce qui est des salles qui ont été annoncées, donc qui seront mises à la disponibilité à court terme, ces sommes-là sont déjà dans le budget du ministère, alors sont déjà budgétées. Pour chaque salle, là, je n'ai pas le détail du coût de la salle de Sherbrooke, par exemple, de la salle de Gatineau ou des salles à Montréal, mais ça fait partie du budget d'immobilisation du ministère.

Le Président (M. Ouimet) : Oui, Mme la députée.

Mme Hivon : Pour se comprendre, dans le 175 millions d'annoncé, dans le fond, c'est 2 millions qui sont pour la location de salles, ce que nous saluons, M. le Président, parce que je pense que c'est une des mesures et... même s'il y a plus de besoins parce qu'il y a beaucoup de palais au Québec et de districts qui sont engorgés, je pense que c'est une mesure qui peut simplifier les choses, d'avoir cette souplesse-là. Donc, je pense que c'est une bonne idée. Et puis, par ailleurs, pour ce qui est des... je pense, c'est quatre salles qui sont annoncées, qui sont budgétées, mais, juste comprendre, est-ce qu'on parle d'une salle qui n'était pas utilisée? Est-ce qu'on parle d'agrandissement dans certains cas?

Mme Vallée : En fait ce sont... Dans certains cas, ce sont des réaménagements de salles à l'intérieur de palais de justice existants, mais réaménagement pour permettre la tenue de mégaprocès ou de procès où on retrouve plus d'accusés, et donc qui nécessitent des aménagements particuliers. C'est des sommes qui étaient déjà budgétées parce qu'il faut se rappeler que notre collègue le leader actuel avait à l'époque, en 2012, annoncé un plan important de réfection des palais de justice. Et donc, à l'intérieur de ce plan-là, il y avait la réfection des salles. Donc, le ministère procède à ces rénovations-là. Donc, dans certains palais de justice, le réaménagement des lieux permet... bien, comme on le dit parfois, on agrandit par l'intérieur, donc on tasse... on va réaménager le tout.

Donc, les salles... Puis j'avais donné des exemples tout à l'heure, mais, lorsque je parlais de la transformation de la salle des célébrants, on la transforme en salle multifonctionnelle. Donc, ça va permettre à cette salle-là d'être utilisée pour la tenue d'auditions et non seulement pour des célébrations. Et, par exemple, moi, je vais vous parler plus particulièrement du palais de justice de Gatineau parce que je le connais personnellement. Et il y a eu des réaménagements de salles, la salle 1 et la salle 2, qui n'étaient pas adéquates, qui n'étaient pas sécuritaires, qui ont été réaménagées. Et une sera réaménagée pour permettre la tenue de mégaprocès parce qu'il y a un volume aussi important dans l'ouest du Québec.

Donc, pour les fins... pour ma collègue, à Longueuil, c'est une salle d'assise qui est libérée pour permettre de tenir des audiences en Cour du Québec, chambre criminelle et pénale. Elle sera libérée de janvier à juin 2017. Donc, ça donne une disponibilité additionnelle. Et il y a plusieurs aménagements comme ça qui seront faits pour vraiment maximiser et optimiser l'utilisation des ressources.

Le Président (M. Ouimet) : Oui, Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Lors du débat, il y a une question qui a été soulevée, qui revient souvent. Les salles qui ont été aménagées spécifiquement pour les mégaprocès, puis on pense, par exemple, au Centre judiciaire Gouin, est-ce que ces salles-là sont utilisées beaucoup? Est-ce qu'on va optimiser leur utilisation?

Mme Vallée : Depuis cet automne, on optimise l'utilisation de ces salles-là parce que, lorsqu'il n'y a pas de mégaprocès, il serait tout à fait irresponsable de ne pas utiliser les salles qui existent. Même chose pour d'autres installations. La chambre de la jeunesse, par exemple, à Montréal siégeait dans un édifice à part. Il y avait des salles de cour dans un édifice à part du palais de justice. Mais cet édifice va être... On va optimiser l'utilisation des salles. C'est certain qu'il y a un choix qui est fait quant aux types de dossiers, mais, dans bien des palais de justice, la chambre de la jeunesse et les activités habituelles du palais de justice se côtoient. Alors, on va faire la même chose.

L'objectif, c'est que les salles d'audience puissent être utilisées de façon maximale. Et, vraiment, l'équipe du ministère travaille très fort pour s'assurer, là que cette gestion des salles, là, se fasse de la façon la plus rigoureuse possible.

Le Président (M. Ouimet) : Merci. Mme la députée.

Mme Hivon : Quand on parle de changement de manière de faire et de changement de culture, je pense que ça, c'est un des exemples dans le sens que, traditionnellement, c'est comme si on pensait que des salles étaient dédiées à des causes de type x, et puis, hors de ce type de cause là, on ne se servait pas des salles, ce qui, je pense, n'est pas très logique, compte tenu en plus de la situation qu'on traverse. Donc, je comprends de la ministre que toutes les options sont regardées, tous les types de salles et les aménagements. Je voyais aussi qu'on regardait en matière jeunesse, comme vous avez dit, si on est capable d'aménager pour faire cohabiter parfois des types de causes qui ne sont pas nécessairement similaires, tout en respectant les droits et les réalités de chacun, mais, quand on a des salles disponibles, qu'on puisse les utiliser. Je comprends qu'on s'inscrit dans ça.

Mme Vallée : Et, M. le Président, bon, par exemple, la salle des greffiers est utilisée, et puis il y a des efforts qui sont faits pour hausser les heures d'utilisation des salles parce que ce n'est pas que d'utiliser la salle, mais d'utiliser la salle aussi sur un horaire qui est beaucoup plus... Disons que l'agenda soit complet et qu'on utilise, on maximise l'utilisation des salles. Et il y a des évaluations parce qu'on n'a pas terminé. On a annoncé notre plan, mais on continue d'innover. Et il y a des échanges qui ont cours, à savoir est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de prévoir des termes additionnels dans certaines salles des palais de justice? Parce que certaines activités ont cours surtout en avant-midi, ce qui libère des salles en après-midi. Donc, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de prévoir des termes pour des dossiers autres pendant cette période où la salle est libérée? Parce que c'est encore là des salles libres. Et, lorsqu'on connaît un petit peu le milieu puis on côtoie ou on fréquente les palais de justice, on sait qu'il y a certains moments dans la semaine, dans la journée, où les salles sont moins occupées. Donc, comment bien gérer l'utilisation des salles, c'est le défi des équipes et notamment de l'équipe que notre collègue Me Couturier dirige.

• (19 h 50) •

Le Président (M. Ouimet) : Mme la députée.

Mme Hivon : Et est-ce que la question d'avoir des... je comprends d'augmenter le nombre de jours, mais est-ce que de siéger l'été, je sais qu'il y a eu une augmentation, mais est-ce que c'est envisagé d'étirer, donc d'avoir plus d'heures pour que les palais ne ferment pas nécessairement à 16 h 30, en soirée, on sait que c'est des choses qu'on entend depuis un bon moment, sans que ce soit des mesures permanentes? Je suis consciente de certaines réalités, je dirais, de l'organisation de la main-d'oeuvre, mais, justement, vu que, là, on entre avec de nouvelles embauches, et tout ça, est-ce que ce sont des choses, en termes d'heures, soirée, fin de semaine... C'est des choses qu'on entend souvent. On sait que, dans certaines juridictions dans le monde, ça ne siège pas juste du lundi au vendredi de 9 h 30 à 16 h 30. Est-ce que c'est examiné, ne serait-ce que temporairement, pour débourrer le système?

Mme Vallée : Je pense que, oui, l'examen est en cours. Il y a des échanges avec la magistrature parce que ça doit... dans certains cas, il faudra peut-être penser à revoir les règles de pratique. Et les règles de pratique relèvent de la Cour supérieure, de la Cour du Québec. Et, oui, c'est envisagé. Je pense qu'on ne doit pas se priver de revoir tout ça.

D'ailleurs, je tiens à saluer la juge en chef Corte. L'ex-juge en chef Corte avait ajouté, l'été dernier, des jours, 60 jours de cour justement pour répondre à ces besoins pressants. Je sais qu'il y a des juges... il y a une volonté, là, d'aller dans ce sens.

Alors, il y a un travail, c'est certain, puis ça amène certaines... Certaines révisions de nos façons de faire vont apporter aussi nécessairement, comme je le mentionnais, des révisions des règles de pratique puis peut-être des révisions à d'autres niveaux, mais il y a vraiment, au niveau des conditions de travail des employés, il y a toute une réflexion qui a cours actuellement sur cette question-là. Mais moi, je suis persuadée qu'il y a lieu de revoir l'horaire et les heures d'ouverture, surtout, comme la collègue de Joliette le mentionne, maintenant, de pouvoir maximiser et avoir des termes qui sont un peu, peut-être, différents des termes auxquels on est habitués historiquement. Mais c'est ça, le changement de culture, c'est de sortir un peu de notre zone de confort et de voir à faire les choses différemment.

Le Président (M. Ouimet) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Parce que, si tout le monde était prêt, et là tout le monde dit qu'ils veulent collaborer... Et moi, je dois dire en passant que je pense que, si les juges prenaient la parole publiquement — petit aparté — plus souvent dans leur rôle, je dirais, d'administrateurs... parce que, oui, l'indépendance judiciaire, c'est une chose, évidemment, en ce qui concerne les jugements qui sont rendus, les décisions, mais on voit très bien, on est vraiment à l'interface dans ce qu'on travaille en ce moment, où la magistrature a un rôle aussi de travailler avec le ministère de la Justice sur, donc, l'administration des tribunaux. Et, dans ce rôle-là, je pense qu'ils ont une responsabilité d'administrateurs.

Et, comme on en parlait, moi, je pense que, dans ce rôle-là, puis la question va peut-être se reposer pour la commission d'enquête sur la question de la protection des sources journalistiques, est-ce qu'ils peuvent venir témoigner, tout ça, il n'y a rien qui l'empêche. Et moi, je salue ça et je pense aussi que, si on les entendait plus souvent sur des questions sur lesquelles ils peuvent et elles peuvent intervenir, je pense que ce serait aussi de nature à simplifier les rapports et à démystifier le rôle de chacun dans l'administration de la justice. Alors, moi, je vois ça d'un bon oeil.

Évidemment, la semaine dernière, ça a donné un coup de tonnerre parce qu'on ne les entend pas souvent, et donc on comprend, dans l'état des choses, qu'ils aient senti ce besoin-là de sortir de leur réserve, mais je pense qu'il n'y a rien qui empêche, d'un point de vue d'administration de la justice, de les entendre plus souvent pour comprendre leur point de vue aussi.

Donc, sur ça, je voulais juste dire que, s'il y a une situation qui commande de réfléchir à de nouvelles options et de vraiment, je dirais, le faire rapidement, maintenant, même si tout n'est pas changé, tout n'est pas parfait pour cinq ans, 10 ans, dans les organisations qu'on pourrait faire, il me semble que, puisque tout le monde dit, Barreau, magistrature, DPCP, ministère de la Justice, qu'ils sont prêts à faire le maximum, je trouve qu'on devrait, dès janvier, être en train de voir des nouvelles manières de faire les choses, de voir si on peut siéger justement plus l'après-midi, en soirée, les fins de semaine de manière exceptionnelle. Je pense que le public serait très rassuré de sentir que les acteurs de la justice travaillent très, très étroitement et dans le sentiment d'urgence aussi et qu'ils sont prêts à remettre, je dirais, leur manière de faire traditionnelle en cause, mais très rapidement, pas juste dans un an ou dans deux ans. Parce qu'on sait que revoir des règles de pratique, pour avoir déjà vu comment... ça peut être très long. Donc, il y a beaucoup d'intervenants, puis tout le monde a un point de vue sur les choses. Donc, est-ce qu'on peut agir, là, de manière rapide, quand on traverse la crise, pour essayer de faire le maximum? Donc, c'est un appel que je fais à tous les partenaires.

Le Président (M. Ouimet) : Merci. Mme la ministre.

Mme Vallée : Il y a... et je tiens à ajouter parce qu'il y a des mesures, quand même, qui sont prises de façon rapide. Et, depuis le printemps 2016, donc même avant la décision Jordan, il y avait cette motivation qui fait suite à la concertation autour de la Table Justice, parce qu'avant Jordan on avait quand même nos acteurs autour de la table, et la Cour du Québec avait augmenté, avait assigné plus de jours que jamais, donc avait une augmentation de 15 % de jours assignés. À Mont-Laurier, on a... parce que, dans chaque district judiciaire aussi, il y a eu un effort de fait, et, par exemple, à Mont-Laurier, pour optimiser des journées d'audience, il y a eu un réaménagement des horaires de cour pour rendre les journées de cour plus efficientes, plus efficaces. À Saint-Jérôme, on a ajouté 60 journées de cour supplémentaires entre le 5 décembre 2016 et le 30 mars 2017. Il y a une deuxième salle à volume qui sera ouverte pour ces 60 journées supplémentaires là. En Montérégie, il y a eu une accélération des audiences en matière pénale à Salaberry-de-Valleyfield. Alors, le juge coordonnateur fait des efforts pour fixer des nouveaux termes. Bref, il y a vraiment un effort, puis on sent que le milieu est mobilisé pour justement trouver des solutions rapides tout en ayant la réflexion sur le long terme.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Ça va pour l'instant.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, passons à la deuxième opposition, M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui, merci, M. le Président. J'aimerais qu'on revienne sur l'annonce au niveau des salles de cour et des palais de justice. Peut-être que la ministre peut nous renseigner. On annonce l'ajout de nouvelles salles d'audience, dont trois à Montréal, deux à Laval, une à Sherbrooke et une à Gatineau, d'ici l'automne 2017. Dans La Tribune de ce matin, on titrait : Une nouvelle salle d'audience à Sherbrooke... déjà annoncée. Et le journaliste, là, René-Charles Quirion, disait que la SQI, donc la fameuse Société québécoise des infrastructures, avait déjà annoncé et que c'était dans le Plan Accès Justice lancé en septembre 2011.

Donc, je voulais savoir : Est-ce que... Un, avait-elle déjà été annoncée? Puis, deux, est-ce que les crédits avaient déjà été budgétés pour cette salle-là ou ça fait partie de l'annonce de la ministre d'hier?

• (20 heures) •

Mme Vallée : Comme je mentionnais à mon collègue, il y avait déjà dans le budget des sommes prévues dans notre budget d'immobilisations pour la réfection de salles. C'est clair. Pour ce qui est de la salle de Sherbrooke, c'est le réaménagement d'une salle pour permettre la tenue de mégaprocès. Alors, on vient sécuriser, on vient agrandir le banc des accusés, on augmente l'espace pour les avocats, on ajoute des équipements technologiques pour permettre l'utilisation de la visioconférence, la présentation de preuve volumineuse par support électronique. C'est, effectivement, la même salle dont le réaménagement avait été annoncé dans le Plan Accès Justice. Par contre, les travaux d'analyse avaient démarré à l'époque, mais ils ont été interrompus pour différentes raisons, dont l'utilisation de la salle suite à la tragédie de Lac-Mégantic. Donc, ça a mobilisé les ressources de la SQI, et, donc, il y a eu une première rencontre pour le démarrage du projet le 7 juin dernier. Donc, le projet avait déjà été prévu, était provisionné, mais n'avait pas été amorcé. Et là le projet est en branle. La livraison, elle est prévue pour la fin de l'été 2017.

Et c'est un investissement, quand même, de 1 000 049 $ qui était, oui, dans le budget. Les sommes qui ont été annoncées hier, ce sont... Le 175,2 millions, ça, c'est de l'argent neuf qui est surtout pour les ressources. Ça, c'est des sommes qui étaient déjà dans le budget actuel du ministère de la Justice. Mais ce n'est pas une salle qui est déjà rénovée, là, c'est une salle qui va être agrandie, qui va être aménagée d'ici l'été 2017, donc.

Le Président (M. Ouimet) : ...

M. Jolin-Barrette : La salle de Sherbrooke n'est pas dans le 175 millions que la ministre a annoncé hier.

Mme Vallée : Elle est dans le budget actuel du ministère. Donc, elle s'ajoute, mais elle sera aménagée pour permettre la tenue de mégaprocès. Les travaux avaient été annoncés, mais pas réalisés encore. Alors là, ils sont en réalisation actuellement.

M. Jolin-Barrette : Donc, lorsqu'on dit l'ajout de nouvelles salles d'audience, elle était déjà annoncée, mais on la réannonce.

Mme Vallée : C'est beau, une annonce, mais encore faut-il que ce soit réalisé. Là, elle est en voie de réalisation. Donc, oui, effectivement, il y aura une salle d'audience supplémentaire rénovée, aménagée et à la fine pointe de la technologie pour les procureurs de la région de l'Estrie.

M. Jolin-Barrette : Je comprends. On s'en réjouit, mais c'est juste que, quand je lis votre communiqué, ça dit : L'ajout de nouvelles salles d'audience, dont trois à Montréal, deux à Laval, une à Sherbrooke, une à Gatineau d'ici l'automne 2017.

Mme Vallée : ...

M. Jolin-Barrette : Non, mais je le sais, qu'elle n'existe pas, mais elle a déjà été annoncée par la SQI, puis là vous la réannoncez. C'est juste ça, j'essaie de comprendre, là.

Mme Vallée : En fait, M. le Président, on accélère le déploiement puis la rénovation de salles qui, oui, sont... Parce qu'il y a plein de projets, vous savez, il y a plein de projets qui sont dans les cartons des sections immobilières, mais on a devancé et on accélère la rénovation des salles pour qu'elles puissent rapidement être mises à contribution. À ça, on ajoute les ressources, puis le 175 millions, bien, c'est surtout le coût des ressources humaines, c'est beaucoup. Mais ces sommes-là, ces salles-là font partie... on a un budget d'immobilisations et, du budget d'immobilisations, on priorise des salles qui vont permettre la tenue de mégaprocès dans des régions, dans des districts où il y a un volume important.

Le Président (M. Ouimet) : M. le député.

M. Jolin-Barrette : Oui. Parce que, dans le communiqué, là, salles d'audience, capacité de location, ça, c'est les salles que la ministre a parlé tout à l'heure, c'est au niveau de la location, ce n'est pas au niveau de l'immobilisation. Donc, dans le communiqué que vous avez envoyé, est-ce qu'on indique les budgets supplémentaires des immobilisations dans le tableau?

Mme Vallée : La stratégie qui a été annoncée hier, elle comporte un ensemble de mesures. Il y a certaines mesures qui bénéficient d'argent neuf, d'injection d'argent. Donc, le 175,2 millions, ça, c'est de l'argent neuf qui vise surtout des ressources humaines. Et les fonds nouveaux, il y a le 2 millions additionnels pour les immobilisations, pour la location de salles au besoin. Mais il y a des fonds qui sont déjà budgétés. Ce n'est pas parce que c'est déjà budgété que ce n'est pas une bonne mesure, que ce n'est pas une bonne annonce, que ce n'est pas nécessaire, que ce n'est pas utile, que ce n'est pas... Bon, tu sais, des fois, là, il faut aussi comprendre que...

M. Jolin-Barrette : ...

Mme Vallée : Bien non, mais c'est parce que vous tentez de faire une mauvaise nouvelle avec une excellente nouvelle, on devance le déploiement des salles.

Le Président (M. Ouimet) : Juste un instant, là!

M. Jolin-Barrette : ...

Le Président (M. Ouimet) : Non. M. le député de Borduas, Mme la ministre, je vais distribuer les droits de parole. On était sur le droit de parole de Mme la ministre, je vais revenir à vous, M. le député de Borduas. Vous avez terminé?

Mme Vallée : Oui.

Le Président (M. Ouimet) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Bien là, M. le Président, moi, je suis content des investissements, là, mais je veux juste bien les comprendre. On nous annonce dans le communiqué... Plus il va y avoir d'argent en justice, mieux que ça va être. Plus on va investir puis qu'on va parler de justice, c'est bien. Plus rapidement que les juristes de l'État vont rentrer travailler puis qu'on va pouvoir négocier avec eux vraiment à la table de négociation, plus je vais être content aussi, parce que c'est en se parlant qu'on réussit à régler la situation, puis il faut avoir des mandats de négocier aussi.

Ceci étant dit, M. le Président, moi, quand je regarde le communiqué qui a été émis, là, par le cabinet de la ministre hier, on dit : Des investissements massifs de plus de 175,2 millions de dollars sur une période de quatre ans,je comprends que la ministre nous dit : Bon, ça va dans les ressources humaines principalement, puis on en a de besoin. Bon, on a besoin des ressources humaines, mais on a aussi besoin de salles dans les palais de justice, dans certains palais. Je confirme à la ministre qu'à Gatineau, effectivement, c'est problématique. Mais là, de la façon dont on lit le communiqué, on dit : L'ajout de salles d'audience, dont trois à Montréal, deux à Laval, une à Sherbrooke et une à Gatineau. Bien, ce que je comprends, c'est que ça ne fait pas partie du 175 millions qui a été annoncé, c'étaient déjà des sommes qui avaient été immobilisées sur un plan triennal ou un plan quinquennal, donc c'était déjà de l'argent qui était là. C'est juste ça que je veux soulever, à l'effet que l'argent était déjà budgété. Puis elles n'étaient peut-être pas réalisées, les salles, mais ce n'est pas une nouvelle annonce, vous l'aviez déjà annoncé. Puis tant mieux que vous l'aviez déjà annoncé, mais la SQI l'avait confirmé.

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre.

Mme Vallée : En fait, il y a une petite rectification. Il y a une annonce globale qui avait été faite, mais, lorsque les annonces globales sont faites, ce n'est pas une annonce de réalisation qui... Alors là, ce que l'on a donné hier, ce sont des dates de réalisation de projets qui sont attendus dans les milieux, oui. Puis c'est certain que, lorsqu'il y a des annonces comme ça, il y a toujours un contact qui se fait avec le milieu pour bien identifier aussi les besoins de la communauté juridique locale, alors, oui, c'est dans les budgets des ministères. Et, dans ces projets-là, on doit aussi, à chaque fois, à chaque étape, obtenir l'autorisation du Conseil du trésor. Oui, c'est budgété de façon large, mais il faut aussi l'obtenir. Donc, ce n'est pas parce que c'est là que tout est beau, puis qu'il n'y a pas de travail, puis qu'il n'y a pas de démarches à faire pour faire avancer le projet.

Alors, ce déploiement ou ce grand coup qui est donné pour accélérer les rénovations de salles, bien, il est quand même important parce que, là, on a donné des échéanciers. Puis je sais que vous allez nous talonner là-dessus, je sais que vous allez souhaiter que l'on respecte nos échéanciers, puis moi aussi, je souhaite qu'on les respecte, nos échéanciers parce que, là, en l'annonçant, on a une communauté juridique, on a un milieu qui s'attend à pouvoir compter... et qui va faire sa planification aussi en fonction de ces salles-là.

Le Président (M. Ouimet) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui. Merci, M. le Président. Peut-être que j'aimerais ça que la ministre me fasse une promesse aussi, là. C'est la SQI, tout ça, est-ce qu'elle peut me promettre que les palais de justice ne seront pas vendus puis qu'on ne louera pas les salles par la suite? C'est une blague, c'est une blague. C'est de l'humour, c'est de l'humour.

Le Président (M. Ouimet) : Alors, c'est sans commentaires. D'autres questions, M. le député de Borduas?

M. Jolin-Barrette : Oui, certainement. Certainement.

Le Président (M. Ouimet) : O.K. Allez-y.

M. Jolin-Barrette : L'an passé...

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Merci, Norbert. L'an passé, la Directrice des poursuites criminelles et pénales est venue en commission parlementaire pour expliquer son plan de restructuration, puis elle nous avait dit : Écoutez, avec les ressources que j'ai, ça va. Même si je subis une compression de 4,2 millions de la part du Conseil du trésor, je suis capable de répondre à la demande. Un an plus tard, 13 mois plus tard, on constate que le plan de la capacité des ressources à faire le travail, bien, il y avait certaines lacunes parce qu'on a besoin d'avoir 69 procureurs supplémentaires. Donc, à cette époque-là, est-ce qu'on était conscient de la lourdeur de la tâche? Parce que, dans le fond, on a compressé le budget du DPCP à cette époque-là. Puis, aux crédits aussi, on avait eu la discussion, puis la Directrice des poursuites criminelles et pénales était là aussi au mois de mars 2015, puis on était conscients aussi des délais. C'est sûr que Jordan n'était pas sorti, sauf qu'il y avait déjà énormément de dossiers aussi. Donc, ma question, c'est : Est-ce qu'on a fait un peu l'équilibre budgétaire sur le dos de ces compressions-là?

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre.

• (20 h 10) •

Mme Vallée : Pas du tout, M. le Président. Je pense que les efforts qui ont été faits par notre gouvernement nous permettent, aujourd'hui, de pouvoir compter sur des investissements importants. Pas seulement qu'en justice, dans d'autres secteurs, en éducation, en santé, mais c'est la somme de ces efforts-là qui nous amène aujourd'hui à pouvoir annoncer un investissement budgété, prévu de 175,2 millions pour les quatre prochaines années. Je trouve que c'est important.

Et je dirais, M. le Président, que les efforts de restructuration, de réorganisation faits par la DPCP vont bien au-delà de la question du strict exercice budgétaire. Puis je pense qu'on a eu la chance à plus d'une reprise d'en discuter ici, il y avait une vision de la DPCP, une vision d'efficacité, une vision de revoir le travail des équipes. Parce qu'après un certain nombre d'années la criminalité évolue, le profil de la criminalité évolue, et il y avait une volonté de la part de la DPCP de réorganiser en fonction... et, en fonction de cette nouvelle réalité, de déployer les effectifs d'une façon différente, de revoir sa structure.

Elle l'a fait, elle a une équipe qui est extrêmement compétente partout sur le territoire du Québec, il y a des procureurs d'expérience partout sur le territoire du Québec qui sont à même d'accompagner leurs collègues. Et l'ajout des 69 effectifs, c'est un ajout qui fait suite, oui, aux besoins de l'arrêt Jordan, qui fait suite à une volonté de pouvoir réellement agir et intervenir afin de réduire les délais. Et, pour ce travail d'évaluation des besoins, bien, ce travail d'évaluation des besoins fait suite aux travaux de la table justice, et c'était prévu, nous avions convenu avec la DPCP de faire le point sur cette question-là. Je lui ai demandé d'établir les ressources dont elle avait besoin pour mener à bien la suite des choses dans le contexte que nous connaissons, avec les objectifs que nous avions, elle et moi, c'est-à-dire de mettre un terme à cette problématique.

À titre de partenaire, le DPCP a un rôle à jouer, a besoin non seulement de procureurs, mais aussi de personnel, de techniciens, de soutien technique. Parce que ce n'est pas tout que d'être à la cour, mais c'est très utile pour les procureurs de pouvoir compter sur une équipe qui va préparer les procédures, qui va pouvoir faire la recherche, le cas échéant. Donc, on a identifié tout ça, et, aujourd'hui, grâce... Et je le dirai, puis on ne le dira jamais assez de ce côté-ci, grâce aux efforts qu'on a déployés, bien, on est à même d'investir, de réinvestir dans le système de justice et, justement, de répondre à ce besoin de ressources.

Alors, moi, je m'en réjouis, M. le Président, et je ne partage pas l'opinion du collègue. Le travail fait par la DPCP, c'était un travail d'optimisation des ressources, de réorganisation du travail et des équipes. Elle avait une vision de ce que devait être le travail du DPCP, elle l'a mise en place et elle a réussi son pari. Et maintenant, avec cette réorganisation-là, elle a fait le tour des besoins d'effectifs, tant au niveau des procureurs que du personnel de soutien, et nous répondons à cette évaluation. Alors, moi, je suis très satisfaite. Puis ça, bien, ça n'aurait pas été possible si on n'avait pas redressé les finances de l'État. Alors, ça fait partie... Pourquoi on fait des efforts? Bien, c'est pour pouvoir réinvestir dans les secteurs nécessaires.

Puis j'entendais le collègue : Je suis content qu'il y ait des investissements en justice. Je vous dirais avec un sourire, je suis contente de vous l'entendre dire parce que je pense que tout le monde ici, tous ceux et celles qui sont du milieu de la justice, reconnaissent que cet investissement-là, il est important et il est nécessaire. Ce n'est pas du luxe aujourd'hui, là. On ne discute pas de luxe, on discute de besoins qui ont été identifiés, qui sont requis. Ce personnel-là, ces procureurs-là, toutes ces équipes-là vont s'affairer puis vont nous permettre, nous aider à atteindre nos objectifs. Ça, j'en suis persuadée. Puis je pense que l'exercice n'a pas été facile, puis il y a des moments parfois dans le travail, que ce soit d'un élu ou d'un gestionnaire, il y a des moments qui sont un peu plus difficiles à traverser, mais, une fois qu'on les a traversés, on comprend pourquoi on a fait cet effort-là puis, ultimement, bien, on se dit : L'effort a valu le résultat, et on a fait ce qu'il fallait au moment où on devait le faire.

Le Président (M. Ouimet) : Merci. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, écoutez, moi-même, aux crédits, l'an passé, je demandais qu'il y ait plus d'argent pour la justice. Donc, c'est sûr que je me réjouis qu'il y ait davantage d'argent pour la justice. C'est la position de la ministre que je ne comprends pas, qui, une année, coupe, puis, l'autre année, se rend compte après que, finalement, ils ne devaient pas couper puis qu'ils devaient réinvestir. Il y a un peu une incongruité entre les deux. Puis je dois dire que, nous, notre position n'a pas changé, la position du gouvernement, elle, elle a changé. On a coupé, on a compressé, puis là on se rend compte qu'on l'a trop fait puis qu'on manquait de ressources, puis qu'on a créé... notamment, on a contribué à la crise, et là on réinvestit massivement.

C'est tout de même particulier de dire... Écoutez, en novembre 2015, quand la Directrice des poursuites criminelles et pénales vient nous voir, elle nous dit : Je suis très à l'aise de couper 4,2 millions, je me coupe de ressources. Au ministère de la Justice, on coupe des ressources aussi pour dire quoi? Pour dire : Bien, écoutez, on coupe, on va voir comment ça va. Puis, finalement, ça va mal, ça fait qu'on va réinvestir de l'argent. Ce n'est pas vraiment logique, d'autant plus, M. le Président, que, dans le rapport Bouchard, qui a été rendu public en octobre, je crois, à la recommandation 25 — je peux me tromper, M. le Président, mais, de mon souvenir, c'est la recommandation 25 — Me Bouchard dit : C'est important que les gens qui votent les crédits budgétaires, la ministre, que le Conseil du trésor attribuent les sommes requises au DPCP afin qu'il puisse poursuivre sa mission. On parle des mégaprocès, on est très d'accord avec ça. Mais à l'époque, l'an passé, lorsque, la DPCP, elle est venue, ce n'était pas la position du gouvernement, ce n'était pas la position de la ministre non plus au mois de mars 2016. Alors, vous voyez, M. le Président, aujourd'hui, on réinvestit, mais, à l'époque, on a coupé.

Je suis très heureux, je le dis à la ministre, je suis très heureux qu'elle réinvestisse aujourd'hui, il y avait nécessité de réinvestir. Par contre, on n'a peut-être pas adopté la bonne stratégie l'an passé. Et, lorsque les partis d'opposition... Parce que je me souviens de ma collègue de Joliette aussi, aux crédits, elle disait : Pourquoi vous coupez dans l'administration de la justice? La ministre nous dit : La DPCP a évalué ses besoins après une année. Écoutez, s'il y a des besoins maintenant, il devait y en avoir dans le temps aussi. Avec Jordan, ça a réduit les délais encore plus. Donc, ça me fait dire, M. le Président, qu'il y a peut-être eu une mauvaise évaluation à l'époque.

Ceci étant dit, je partage l'opinion de la ministre sur le fait que c'était nécessaire de réinvestir, puis je vais le dire, c'est important qu'on le fasse en justice. Mais la résultante, M. le Président, ce sont des années et des années de vaches maigres, et ça peut avoir des conséquences. Et on l'a vu, c'est quoi, les conséquences, il y a des requêtes en arrêt des procédures relativement aux délais, les intervenants du milieu de la justice sont parfois essoufflés.

Tout à l'heure, lorsque je parlais du temps supplémentaire, ce n'est pas la pratique d'en autoriser, ce n'est pas la pratique. Donc, c'est une suggestion que je fais à la ministre de peut-être avoir une discussion avec la Directrice des poursuites criminelles et pénales pour que ce temps-là soit autorisé et pour qu'on puisse faire le travail qu'il y a à faire rapidement.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. Merci, M. le député de Borduas. Des commentaires, Mme la ministre de la Justice?

• (20 h 20) •

Mme Vallée : Bien, simplement, évidemment, je ne partage pas tout à fait l'interprétation du collègue des dernières années. Je pense que, le changement de culture, la DPCP l'avait amorcé avant. Comme je le mentionnais, c'était sa vision que d'assurer que l'organisation soit pleinement efficace. Et ça, je pense que c'est un concept de base, là, de bonne gestion, d'assurer l'efficacité avant de penser à injecter des ressources. Injecter des ressources sans revoir les façons de faire, ça n'aurait pas nécessairement été utile. Alors, la révision des façons de faire, la réorganisation, c'est fait, et le plan de réorganisation prévoyait également une analyse des besoins en fonction de cette réorganisation. Cette analyse-là s'est accompagnée d'une analyse des besoins en fonction de cette réorganisation et la réalité Jordan aussi, et les recommandations, évidemment, du rapport de Me Bouchard, auxquelles je souscris, et donc c'est ce qui nous mène à l'annonce, à l'investissement qui accompagne l'annonce d'hier.

Et simplement, M. le Président, on parle beaucoup de coupures, de coupures, mais, dans les sommes qui étaient budgétées pour l'an passé, on parlait, de mémoire, là, de 121,5 millions de prévus pour l'année en cours, pour cette année, mais à ces sommes-là se sont ajoutées des transferts du ministère des Finances pour un peu plus de 3,5 millions, ce qui nous amène à près de 125 millions, et donc on n'est pas en deçà de l'année dernière, on est légèrement au-dessus. Et ça, c'est en date d'aujourd'hui, puis l'année financière n'est pas en cours. Alors, de prétendre qu'il y a une coupure... Je comprends qu'on peut interpréter les chiffres de différentes façons. Oui, dans le livre des crédits, il y avait une somme qui était budgétée pour le DPCP, mais, bon an, mal an, il y a toujours des sommes qui sont transférées par le ministère des Finances en cours d'année. Alors, ces sommes-là ont été transférées cette année, et donc ce n'est pas tout à fait exact de dire que nous avons sauvagement coupé... J'utilise le terme «sauvagement» pour imager, mais ce n'est pas tout à fait exact de dire que c'est ce traitement qui a été réservé.

Mais, ceci étant dit, M. le Président, beaucoup de mots et de salive pour, quand même, ultimement s'entendre, mon collègue et moi, sur l'importance à accorder aussi à l'institution qu'est le DPCP.

Le Président (M. Ouimet) : Merci. D'autres questions? M. le député de Borduas, allez-y.

M. Jolin-Barrette : Certainement. M. le Président, c'est tout ce que j'ai, moi, de la salive puis des mots. Donc, je vais me contenter de cela. Mais, M. le Président, relativement au DPCP, vous savez, on parle beaucoup de pourquoi est-ce qu'on injecte autant d'argent, à cause des requêtes en arrêt des procédures, en raison des délais. On a commandé le rapport Bouchard. On a commandé le rapport Lortie aussi, qu'on attend toujours, d'ailleurs. On a demandé qu'il soit rendu public, le DPCP l'a. La même journée où on a déposé une motion à l'Assemblée nationale pour l'avoir, comme par hasard, la même journée, il y a un communiqué du DPCP qui sort puis qui dit : Ah! finalement, on l'a depuis quelques jours. On l'a trouvé dans notre tiroir, puis on va l'analyser, finalement. On n'avait pas été informés que le DPCP l'avait reçu, quelle coïncidence! Ça arrive, des fois, des choses comme ça.

Ceci étant dit, en 2011, dans le dossier SharQc, on avait accusé les Hell's à la fois, oui, sur les meurtres, mais aussi au niveau du trafic de stupéfiants. Puis c'était le même juge, le juge Brunton, qui avait envoyé un avertissement au gouvernement et au DPCP pour dire : Écoutez, là, votre choix de poursuite, là, il y a des lacunes, on n'est pas capables de l'absorber. Puis on a continué. Donc, il y avait déjà quelque chose d'important, là, un message important qui avait été véhiculé. Mais qu'est-ce qu'on a fait à ce moment-là? On n'a pas réinvesti dans le système de justice à cette époque-là, on n'a pas écouté, on n'a pas entendu les messages de la cour nous annonçant la chronique annoncée. Bon, on va voir avec le rapport Lortie qu'est-ce qui est arrivé précisément dans SharQc. On a très hâte de le savoir, d'ailleurs.

Ceci étant dit, il y a eu plusieurs signes avant-coureurs de cette crise-là, M. le Président, et ça fait état du bilan libéral en matière de justice. Là, on réalise enfin que c'est le temps d'investir et on le fait. Enfin, je vous dirais. Mais, lorsqu'on me dit : Écoutez, on a évalué nos ressources, on a pris un moment de recul pour évaluer tout ça, mais la crise a été générée par les actions précédentes ou par l'inaction précédente, donc j'espère que dans le futur, à partir d'aujourd'hui, pour le système de justice, pour la justice, on va travailler différemment.

Pour l'article 2 du projet de loi, M. le Président, tout à l'heure la ministre nous disait : Écoutez, historiquement, on inscrit dans la Loi sur les tribunaux judiciaires le nombre de juges à la Cour d'appel. La ministre nous dit : Bien, c'est comme ça puis c'est pour être efficace. Puis je lui ai dit tout à l'heure : Écoutez, pourquoi indiquer un nombre précis de juges? Parce que, si la population augmente — ce qui risque d'arriver — on va devoir se rasseoir ici, peut-être dans cinq, dans 10, dans 15 ans, et à nouveau modifier la loi. Parfois, il faut agir rapidement pour s'adapter à la réalité. Alors, je demande à la ministre : Pourquoi ne pas y aller plutôt avec une formulation dans la loi qui serait de mettre un plancher plutôt que de cibler un nombre de juges et de laisser la possibilité au ministre, à la ministre, de nommer davantage de juges, d'accorder cette flexibilité-là?

Parce que, dans le fond, on vient mettre un carcan ici. Supposons, pour la Cour d'appel ou pour la Cour du Québec, la Cour supérieure, c'est un choix gouvernemental de mettre 22 juges à la Cour d'appel, de mettre des juges à la Cour du Québec, à la Cour supérieure. Pourquoi est-ce qu'on n'y va pas avec un minimum de juges, ceux qui sont déterminés actuellement par la ministre, et de laisser une formulation qui est positive, et de laisser cette flexibilité-là? Je me questionne à savoir pourquoi est-ce qu'on n'adopte pas la formulation inverse.

Le Président (M. Ouimet) : Merci. Mme la ministre de la Justice.

Mme Vallée : Dans un premier temps, vous me permettrez, je vais déposer... Pendant notre séance de cet après-midi, il y a eu un communiqué de la Cour du Québec sur le site de la Cour du Québec qui a été émis. Alors, je vais déposer le texte. Parce que c'est sur le site Web, je n'ai pas de copie papier. Alors, c'est simplement une capture d'écran, mais je vais déposer...

Le Président (M. Ouimet) : Consentement pour le dépôt?

Des voix : Consentement.

Document déposé

Le Président (M. Ouimet) : Consentement.

Mme Vallée : Et je reviens à la question du collègue, je vous dirais, c'est curieux parce que, la question du collègue, je crois qu'elle avait été posée par notre collègue de Joliette en 2011, ou une question similaire, lorsqu'il y a eu l'étude du projet de loi parce que j'ai relu nos échanges... À l'époque, j'étais à la Commission des institutions, alors j'ai relu les échanges, et cette question-là a été abordée. Alors, hier soir, quand je préparais mes trucs, j'ai relu, et, en fait il y a certains projets de loi qui prévoient, effectivement, un plafond, donc est composé d'un maximum de x juges. Avant, d'ailleurs, je crois que la loi était libellée de cette façon-là. Mais, lorsqu'on fixe un plafond de juges, bien, parfois, ce plafond-là, parce que c'est un maximum, n'est pas respecté. Alors, le problème avec le plancher, c'est la prévisibilité budgétaire. Il y a aussi une prévisibilité au niveau budgétaire qui se doit d'exister, et, de plus, la loi fédérale... Parce que la Cour d'appel prévoit un nombre de juges, mais la loi fédérale prévoit également un nombre de juges.

Moi, je vous dirais, M. le Président, que ce n'est pas mauvais qu'on se revoie puis qu'on révise la Loi sur les tribunaux judiciaires parce que, justement, lorsque j'ai relu les échanges qui avaient eu cours en 2011, bien, en 2011, il y a eu des discussions sur l'accès à la justice, et on a parlé de justice. Puis aujourd'hui, bien, on est dans ce projet de loi là, puis on aura passé un certain nombre d'heures non seulement à analyser le projet de loi, mais on aura aussi pris le temps, puis de façon bien correcte, d'aborder les autres enjeux. Alors, moi, je ne pense pas que ce soit problématique que de revenir périodiquement pour ajuster la Loi sur les tribunaux judiciaires, et puis ça permet... Il y a une question de prévisibilité, je pense, qui est importante aussi dans le cadre d'une gestion rigoureuse des fonds publics.

Le Président (M. Ouimet) : Merci. M. le député de Borduas, il vous reste environ sept minutes.

• (20 h 30) •

M. Jolin-Barrette : Parfait. Merci, M. le Président. Sur la question de la gestion rigoureuse des fonds publics, j'en suis, mais, à partir du moment où vous avez un nombre minimal, un nombre plancher de juges, que ça soit à la Cour d'appel, à la Cour supérieure ou à la Cour du Québec... Je comprends qu'à la Cour d'appel puis à la Cour supérieure c'est le fédéral qui rémunère et peut-être qu'ils sont inquiets que le Québec lui attribue des dépenses supplémentaires en nommant des juges supplémentaires. C'est peut-être ça, la prévisibilité dont la ministre parle.     Ceci étant dit, je ne vois pas de problématique à mettre un plancher, parce que de toute façon c'est budgété. Si vous avez un nombre minimal de 22 juges, bien vous les avez toujours, ces 22 juges là, et ça vous laisse de la flexibilité. Je comprends que c'est bien de se revoir en commission parlementaire pour étudier le projet de loi. D'ailleurs, j'aimerais ça qu'on se revoie rapidement pour étudier davantage les recommandations de Bastarache sur un secrétariat indépendant. Même chose sur le rapport Noreau, ça fait longtemps que le rapport a été déposé. Moi, ça me fait toujours plaisir de siéger et de voir la ministre et d'échanger en matière de justice, et je sais que c'est réciproque, et donc j'ai déjà hâte à janvier.

Ceci étant dit, je pense qu'on devrait peut-être modifier la façon dont la loi est construite pour donner cette flexibilité-là à la ministre, pour dire : Bien, écoutez, si je me retrouve dans une situation de crise, si j'ai besoin de nommer davantage de juges pour un trop-plein de dossiers d'une façon soudaine, bien j'aurai la possibilité, à la Cour du Québec, j'aurai la possibilité, à la Cour d'appel ou à la Cour supérieure, de nommer davantage de juges. Et j'espère que, pour la question de la prévisibilité budgétaire, avant de faire quelque chose au ministère de la Justice... je suis convaincu que le Conseil du trésor est impliqué dans ce processus-là, donc ça ne m'inquiète pas trop à ce niveau-là.

Mais, M. le Président, j'avais tout de même une question sur la nomination... bien, en fait, les deux postes supplémentaires de juge à la Cour d'appel et, pour les prochains articles aussi, les juges à la Cour supérieure. On vient créer deux postes supplémentaires à la Cour d'appel, cinq postes supplémentaires à la Cour supérieure. On l'a dit, les tribunaux supérieurs, au Québec, la nomination, elle est fédérale. Est-ce qu'on a une entente avec la ministre de la Justice fédérale pour qu'elle procède rapidement à la nomination? Parce que nous, à l'Assemblée, on annonce des postes supplémentaires, mais, si ce n'est pas attaché avec le gouvernement fédéral, bien ça peut être problématique, parce que, même si on dit dans la loi : Oui, il y a des postes supplémentaires, ça ne veut pas dire que... pour que les gens, ils nous comprennent à la maison, ça ne veut pas dire qu'il va y avoir davantage de juges de la Cour supérieure ni de juges de la Cour d'appel, parce qu'il faut attendre après la nomination fédérale et c'est eux qui les rémunèrent, parce que, M. le Président, en 2014‑2015, on avait annoncé trois postes supplémentaires à la Cour supérieure, et là on est rendus quasiment en 2017, et ces postes-là n'ont toujours pas été comblés. Voyez-vous, ça fait plus qu'un an. Donc, oui, on peut l'annoncer, oui, on peut annoncer des juges supplémentaires, sauf qu'il faut que ce soit vraiment annoncé.

J'espère avoir une réponse positive à ce niveau-là, puis on va appuyer la ministre dans ses démarches avec son homologue fédérale.

Ceci étant dit, le seul pouvoir dont dispose ici... sur la nomination, ce sont les juges de la Cour du Québec. Donc, j'aimerais savoir l'état des discussions avec la ministre de la Justice fédérale.

Le Président (M. Ouimet) : Merci. Mme la ministre.

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Simplement dire au collègue : On va se revoir en janvier, parce qu'on va travailler sur le projet de loi d'adoption, le projet de loi n° 98, puis je sais qu'il va sans doute participer aux échanges sur 62. Donc, j'ai l'impression que les...

Une voix : ...

Mme Vallée : Bien, j'ai vu le collègue participer à 62 aussi, à certains échanges. Mais, bref, tout ça pour dire que vous êtes toujours le bienvenu, cher collègue, autour de la table.

Pour ce qui est des échanges avec ma collègue, avec la ministre de la Justice fédérale, il y a actuellement des échanges qui ont cours pour la nomination des trois juges, parce que, on s'entend, on a trois postes vacants depuis plusieurs années. Vous l'avez mentionné. Je ne peux présumer de l'adoption du projet de loi. Alors, je vous dirais que j'ai abordé avec ma collègue le projet de loi, mais, évidemment, je ne peux présumer de rien parce que j'ai un peu trop de respect pour le travail parlementaire ici, en cette Chambre.

Mais, ceci étant, la collègue est informée de nos démarches, informée de notre volonté. Je suis en contact... On s'est parlé pas plus tard qu'avant-hier, nos chefs de cabinet sont en contact très régulier. Je pense qu'elle est très sensible à la situation qui se vit ici, mais aussi ailleurs au Canada, donc j'ose pouvoir compter sur sa collaboration. Je sais qu'elle a également, au même titre que nous avons des échanges avec les juges en chef... Je sais que les juges en chef de la Cour supérieure et de la Cour d'appel l'ont informée de l'urgence de doter les postes qui sont actuellement vacants et de contribuer à l'ajout des ressources.

Alors, je ne peux pas présumer, mais soyez assuré que, si, d'aventure, ce projet de loi devait être adopté très prochainement, j'ai déjà certaines communications et d'autres étapes à venir. Et on sera, sans doute, de retour dans nos circonscriptions en début de semaine, alors ce ne sera pas très loin pour moi pour rencontrer ma collègue fédérale, puisque nous n'avons qu'un petit pont à traverser pour discuter entre nous, et, de mon bureau, je vois son bureau.

Le Président (M. Ouimet) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Il faut faire attention à l'espionnage, M. le Président. Je n'ai pas d'autre question.

Le Président (M. Ouimet) : Très bien. D'autres questions, Mme la députée de Joliette?

Mme Hivon : Pour la Cour d'appel, non, ça va.

Le Président (M. Ouimet) : Alors, s'il n'y a pas d'autre intervenant, je vais mettre aux voix l'article 2 du projet de loi. Est-ce que l'article 2 du projet de loi est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Ouimet) : Adopté. L'article 3 du projet de loi. Mme la ministre de la Justice.

Mme Vallée : Donc : L'article 21 de cette loi est modifié par le remplacement, dans le premier alinéa, de «152» par «157».

Alors, ça, c'est l'article qui vise le nombre de juges à la Cour supérieure. Donc, actuellement, nous avons une possibilité de 152 juges. Et nous haussons à 157 juges. Donc, ces cinq postes additionnels s'ajouteraient aux trois postes actuellement vacants.

Peut-être rappeler... puis je pense qu'on est tous conscients de l'importance d'aller de l'avant avec la dotation, la Cour supérieure a une pression importante, particulièrement dans l'ouest du Québec. Montréal, l'Outaouais et la couronne de la Montérégie, la croissance démographique, elle se situe à l'ouest du Québec et elle a évidemment des impacts sur le volume de dossiers.

Le Président (M. Ouimet) : Bien. Merci. Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Oui. Alors, je prends acte de cette augmentation-là. Évidemment, quand on regarde la déclaration qui a été faite en une du Journal de Montréal vendredi dernier par le juge en chef Fournier, qui disait qu'à peu près toutes les causes étaient hors délai et qu'il estimait qu'il y avait d'énormes risques, donc, y compris pour des dizaines de causes de crime très grave, de meurtre, quelle assurance on a qu'avec ces nominations supplémentaires toutes les craintes exprimées vont être résorbées?

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre de la Justice.

Mme Vallée : L'objectif, c'est de ramener les délais à l'intérieur des délais, des plafonds que nous impose la Cour suprême. Alors, après l'analyse, avec l'analyse qui a été faite... parce que la Cour supérieure, pour nous faire part de ses besoins de ressources, a fait une analyse, et, selon elle, cet ajout de ressources, qui s'ajoute également à des ressources humaines et à d'autres mesures, devrait permettre de résorber la problématique. Mais effectivement il y a une autre mesure, là, qui va compléter l'ajout de juges dans l'ouest du Québec, à Montréal, c'est l'ajout des salles d'audience. Donc, tout ça mis ensemble devrait contribuer à résorber... Dès que les salles d'audience seront prêtes, on pourra rapidement procéder à adresser les termes. Les salles mises à la disposition... dans les palais de justice, les réaménagements de salles vont permettre aussi d'ajouter des jours-juges.

Et, pour la Cour supérieure, je répète, on a pris une nouvelle mesure, c'est-à-dire qu'on a attitré deux juges à la retraite qui permettent de faire de la gestion en matière civile pour libérer deux juges temps plein qui pourront s'occuper des dossiers. Alors, ça, c'est assez récent, là, c'est entré en vigueur, c'est assez récent, mais c'est pour permettre vraiment d'ajouter des heures-juge au palais de justice de Montréal et donner de l'oxygène au système.

Donc, on a une série de mesures, et puis l'évaluation qui est faite, c'est que, si on optimise nos ressources et on met l'épaule à la roue, on devrait pouvoir résorber la problématique.

• (20 h 40) •

Le Président (M. Ouimet) : Bien. Merci. Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Oui. Donc, je comprends que ça répond complètement à la demande de la Cour supérieure en termes d'augmentation du nombre de juges. Parce qu'on n'a eu aucune communication formelle de la Cour supérieure comme on en bénéficie pour la Cour d'appel puis la Cour du Québec, donc on doit prendre la parole de la ministre.

Mme Vallée : En fait, je ne sais pas si vous souhaitez que je dépose... J'ai les allocutions du juge Rolland, du juge Fournier, qui demandaient l'ajout de ressources, qui n'étaient pas... Le juge Fournier n'avait pas, dans son allocution à la rentrée des tribunaux, établi un chiffre précis, mais il disait qu'il y avait un besoin de ressources à Montréal.

Moi, j'ai compris des interventions notamment du juge Pidgeon, parce que le juge Fournier, semble-t-il, est sous des cieux plus cléments, le chanceux... Mais j'essaie de retrouver la transcription de l'émission — c'était au Téléjournalhier soir avec le juge Pidgeon — à Radio-Canada, au Téléjournal du 7 décembre 2016, à 18 h 30. En fait, il disait que l'ajout de juges à la Cour supérieure et l'ensemble de l'annonce des investissements règlent en très grande partie la problématique qu'il a dénoncée la semaine dernière. Évidemment, pour le juge Pidgeon, à Québec, il dit, il n'y a pas d'enjeu... l'enjeu des délais à Québec n'est pas aussi important qu'à Montréal, mais c'est une question de volume de dossiers, parce qu'il dit : «À Québec, la Cour supérieure ne fait pas face à une crise. Aucune requête en arrêt des procédures n'a été signifiée.» C'est ça. Alors là, il le réitère, puis je pense que c'est un peu le message de tout le monde, c'est à l'effet que tous les intervenants devront maintenant s'assurer que le système de justice fonctionne. Parce qu'évidemment le système de justice, ce n'est pas qu'une injection... Régler la situation ne passe pas que par l'injection de sommes d'argent et l'ajout de salles. Encore faut-il que, lorsqu'on propose une date, par exemple, à la défense, la défense accepte cette date-là et se rende disponible pour traiter le dossier à l'intérieur des délais raisonnables. Alors, il y a cet élément-là aussi.

Mais le juge Pidgeon semblait satisfait, en tout cas — du moins, de ce qui ressort de l'entrevue accordée... je pense que c'était avec M. Savard.

Le Président (M. Ouimet) : Merci. Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Donc, pour faire suite un peu à ce que mon collègue disait, c'est quand même... on est vraiment dans une situation où on est tenus à espérer la bonne foi et la collaboration du gouvernement fédéral, ce qui est un petit peu surréaliste, parce qu'on comprend que cette crise-là, elle interpelle tout le monde, et il y a ces trois juges-là qu'on attend depuis des années, je pense, on peut le dire, des années, qui ne sont toujours pas nommés, et là on vient demander au fédéral cinq autres... donc on attend huit nominations du fédéral. Alors, je veux juste dire que je pense qu'il y a une urgence d'opération de conviction.

Nous soutenons aussi tous les efforts que la ministre va faire. En ce sens-là, nous interpellons directement aujourd'hui la ministre fédérale pour qu'elle bouge de manière urgente pour que ces postes-là puissent être comblés. Et j'espère qu'elle a été sensibilisée au cri d'alarme lancé par le juge en chef de la Cour supérieure la semaine dernière sur les causes de meurtre qui sont en péril, la criminalité très grave, donc, qui pourrait échapper au processus judiciaire, du fait des délais que l'on vit, notamment à Montréal. Et je sais que la situation n'est pas la même partout au Canada. Donc, je veux lui dire que la situation est problématique et qu'il y aurait déjà un bon moment que ces postes-là auraient dû être comblés, et nous lui demandons d'agir rapidement.

Mais nous demandons à la ministre de la Justice du Québec de vraiment faire tous les efforts dès la semaine prochaine, si on comprend bien, pour que ces postes-là soient comblés très, très rapidement. Je dois vous dire qu'évidemment, si on avait un seul ordre de gouvernement, ces choses-là seraient beaucoup plus simples. Et, encore une fois, nous en avons une preuve éclatante. Et c'est comme ça qu'on peut réaliser comment un projet qui, des fois, a l'air plus théorique a des répercussions très pratiques comme celui de pouvoir disposer de tous nos pouvoirs.

Donc, ceci dit, dans l'immédiat, on espère que ces postes-là vont pouvoir être comblés rapidement, et j'aimerais beaucoup que... d'autant plus, hein, qu'on va avoir un autre litige qui va nous attendre à cause de... Les juges de la Cour supérieure vont contester la nouvelle compétence monétaire des juges de la Cour du Québec. Donc, autant de choses qu'on pourrait s'éviter si on avait une seule juridiction.

J'aimerais savoir où vont être précisément les huit postes qui sont anticipés. Et je veux juste porter à l'attention de la ministre que j'ai reçu une correspondance — elle l'a probablement reçue aussi — du bâtonnier de la Gaspésie, qui saisit l'occasion, donc, de l'augmentation du nombre de juges à la Cour supérieure pour rappeler que la Gaspésie n'est pas dotée des effectifs de magistrature... c'est-à-dire, d'un poste permanent de la Cour supérieure en Gaspésie. Et donc je sens qu'il est rempli d'espoir face à cette annonce qui est arrivée. Donc, j'aimerais savoir comment la distribution des postes de juge nouveaux se fait entre les districts.

Le Président (M. Ouimet) : Mme la ministre.

Mme Vallée : En fait, pour les cinq postes qui sont prévus au projet de loi, ces cinq postes seraient nommés à la Cour supérieure pour le district de Montréal. La crise et le besoin, la demande de la Cour supérieure était vraiment de doter Montréal de cinq juges supplémentaires, parce que Montréal traite annuellement 23 000 dossiers.

Une voix : ...

Mme Vallée : Écoutez, sur le nombre de dossiers total...

Une voix : ...

Mme Vallée : 100 000. Oui, c'est ça.

Une voix : ...

Mme Vallée : C'est ça. 23 000 dossiers criminels et pénaux.

Une voix : ...

Mme Vallée : Ah! seulement criminels? Donc, on est dans les 23 000 dossiers criminels sur 100 000 dossiers ouverts sur l'ensemble du territoire.

Mme Hivon : ...criminels ouverts à la Cour supérieure.

Mme Vallée : Au criminel, oui, c'est ça. Parce que je voulais juste...

Mme Hivon : Oui... ou en tout.

Une voix : ...

Mme Vallée : Ah! Cour du Québec, Cour supérieure. D'accord. Excusez-moi. Cour du Québec, Cour supérieure, 100 000 dossiers criminels ouverts. De ces 100 000 dossiers ouverts, on en a 23 000 à la Cour supérieure à Montréal. C'est ça?

Une voix : Cour supérieure, Cour du Québec.

Mme Vallée : Ah! Cour supérieure, Cour du Québec. D'accord. Parce que ce n'était pas si clair que ça. Donc, 25 % est à Montréal... du volume criminel total.

Mme Hivon : ...dossiers, toutes juridictions confondues, en criminel, Cour du Québec, Cour supérieure, au Québec. De ce lot-là, le quart à peu près est à Montréal, Cour supérieure, Cour du Québec. Est-ce qu'on a les chiffres... ce n'est pas un piège, mais ça serait intéressant de le savoir, est-ce qu'on a les chiffres du nombre de causes criminelles en Cour supérieure et la proportion à Montréal?

Mme Vallée : Attendez, je vais juste... Je pense que dans un... j'ai peut-être...

Mme Hivon : ...que, si c'est 25 % et que, là, tous les nouveaux postes de juge vont à Montréal, il y a probablement des régions qui vont se poser des questions. D'où ma demande d'état de situation, qui pourrait nous éclairer sur tout ça.

Mme Vallée : Je pense qu'il est important de considérer l'article 23 de la loi, qui prévoit que les juges exercent leurs fonctions dans les districts judiciaires qui leur sont assignés. C'est-à-dire que, s'il y a un besoin, par exemple, un juge de Montréal pourrait être assigné à Québec, pourrait être assigné dans un autre district. Donc, l'objectif, le juge en chef assure la gestion sur son territoire. Et il y a également l'article 34 qui prévoit que, «lorsque l'expédition des affaires judiciaires exige, dans un district, les services de plus de juges qu'il n'en est attribué à ce district, le juge en chef requiert un ou plusieurs juges d'exercer temporairement leurs fonctions dans ce district».

Donc, si, par exemple, il survenait un besoin particulier en Gaspésie au sujet d'un volume de dossiers, le juge en chef ou le juge en chef associé pourrait s'assurer de déployer sur le territoire un juge, et puis il faut comprendre aussi qu'au-delà du nombre de dossiers c'est à Montréal qu'on retrouve les mégaprocès. Donc, il y a des juges qui ont été attitrés, pendant des mois, voire des années, à un seul dossier. Habituellement, les juges vont traiter un certain volume... une certaine diversité de dossiers, mais ce n'est pas toujours possible lorsque le juge est attitré à un dossier de plus longue haleine.

• (20 h 50) •

Mme Hivon : ...ailleurs qu'à Montréal : Laval, Joliette...

Mme Vallée : Oui, il y en a ailleurs, mais le volume de mégaprocès est plus important à Montréal que dans d'autres districts. C'est certain, là, il y en a ailleurs, puis c'est d'ailleurs pour ça qu'on s'assure qu'il y ait, dans les régions, des salles prêtes à accueillir les mégaprocès pour éviter que ces procès-là ne viennent alourdir le volume d'un district, c'est certain, mais il y a quand même une réalité qui est celle de Montréal.

Puis je comprends, puis, je vous dirais, on entend régulièrement des demandes : Bon, on aimerait avoir un juge résident dans notre district, et puis il y a déjà... en fait, la Gaspésie fait partie du district de Québec, et il y a quand même un déploiement de juges puis une équipe de juges qui est déployée sur les territoires, et on a, à l'intérieur du district de Québec... puis on retrouve à l'article 32.2 : «2° pour le district de Québec, avec résidence sur le territoire de la ville de Québec, ou dans le voisinage immédiat de ce territoire, 30 juges, dont l'un est spécialement chargé des districts de Gaspé et de Bonaventure, un autre du district de Beauce, un autre du district de Montmagny, un autre du district d'Arthabaska, un autre du district de Kamouraska, un autre du district de Charlevoix et un autre du district de Roberval.»

Alors, la Gaspésie a quand même un juge qui est spécifiquement chargé du district Gaspé-Bonaventure, mais, si, d'aventure, il devait y avoir un besoin imminent, c'est certain que le juge en chef a la capacité de déployer, pour répondre aux besoins, des juges en Gaspésie.

Mme Hivon : Est-ce que c'est la seule région qui n'a pas de juge spécifiquement désigné de manière permanente?

Mme Vallée : Bien, en fait, la région de Québec... et, quand on regarde le libellé de l'article 32, on a Longueuil qui a un juge, on a Mégantic et Saint-François avec résidence sur le territoire de Sherbrooke, Chaudière-Appalaches n'a pas de juge... de juge résident, on s'entend, là. Je vous dirais, en Outaouais, les juges ont résidence à Gatineau, n'ont pas résidence dans le Pontiac, n'ont pas résidence en Haute-Gatineau, bien que certains aient eu, à une époque, des chalets, mais tout ça pour vous dire que...

Mme Hivon : ...

Mme Vallée : Non, mais...

Mme Hivon : ...à l'attention de la ministre que, quand on lit ça, je crois que c'est la seule région éloignée qui n'a effectivement pas de juge qui est attitré en vertu de l'article 32, parce que l'Abitibi, la Côte-Nord, tout ça, Rimouski... Alors, je porte ça à son attention, je pense que c'est une demande de longue date, et évidemment je pense que vous allez comprendre que, vu qu'on revoit, et certainement pas souvent, pour ce qui concerne la Cour supérieure le nombre de juges, il y a comme des espoirs qui sont éteints en Gaspésie de par les propos de la ministre, que l'ensemble des juges vont être nommés ailleurs.

Mme Vallée : ...

Une voix : ...

Mme Vallée : Excusez-moi. M. le Président, on répond à la demande qui a été formulée par la Cour supérieure, ce n'est pas arbitraire. Il n'y a pas eu de demande de formulée par la Cour supérieure pour la Gaspésie, donc. Et puis je sais à quel point le juge Pidgeon porte chèrement dans son coeur la Gaspésie et le Bas-Saint-Laurent.

Mais, ceci étant, je pense que, pour répondre aux besoins de la cour... puis, au-delà de nos liens et de nos souhaits, il y a aussi une réalité, c'est-à-dire celle de répondre à des besoins imminents, des besoins pressants de la cour. Ce qu'on nous a formulé comme demande, c'était de doter le district de Montréal de cinq juges supplémentaires. Alors, il n'y a pas d'arbitraire, on répond de façon très transparente à une demande de la magistrature.

Le Président (M. Ouimet) : Mme la députée.

Mme Hivon : Mais, juste pour bien comprendre, il y a quand même, j'imagine, une discussion qui a cours entre le ministère et la magistrature quand les demandes sont faites sur les lieux d'assignation, parce qu'on peut comprendre que pour la magistrature ça peut être plus simple de gérer à partir de pôles où il y a une concentration de juges, quitte à les affecter, ça donne une plus grande marge de manoeuvre. Donc, on peut imaginer ça, c'est légitime aussi. Mais on peut imaginer aussi qu'une région puisse vouloir, que ce soit la Gaspésie, le Nord-du-Québec... des régions plus éloignées puissent vouloir être dotées, comme les autres régions, d'un poste permanent. Puis, la raison pour laquelle évidemment j'en parle maintenant, je comprends que ce n'est pas la Gaspésie en ce moment qui est le plus engorgée des suites de l'arrêt Jordan, mais c'est quand même une demande de longue date, et on ne rouvrira pas cette loi-là très souvent. Je comprends que la ministre veut faire vraiment un projet de loi chirurgical, on est d'accord avec ça aujourd'hui, mais on est conscients aussi qu'on ne rouvrira pas cet article-là probablement dans six mois, dans un an.

Alors, c'est pour ça que, s'il y a quelque chose à réparer, il nous semble que ce serait le bon moment de le faire par rapport à ça, à moins que la ministre nous dise que c'est une demande qu'elle prend très au sérieux et qu'elle va y revenir très prochainement avec une réouverture potentielle de la loi, mais je pense que la ministre devrait se pencher sur cette réalité-là de la Gaspésie.

Mme Vallée : Vous savez, M. le Président, je suis tellement sensible aux besoins puis aux réalités des régions, pour avoir longtemps pratiqué en région, à Maniwaki. Ça me fait toujours plaisir de parler de Maniwaki ici, en cette Chambre. Non, mais, sérieusement, j'ai toujours dit — puis personnellement, là, j'y crois vraiment : L'accès à la justice, ce n'est pas juste la capacité financière d'avoir recours à l'avocat, ce n'est pas la capacité non plus d'avoir une salle à l'intérieur des délais, ce n'est pas que ça, c'est aussi avoir accès à la justice sur le territoire, peu importe où on est au Québec, je le dis, je le redis. Et la justice de proximité en région, elle est, pour moi, extrêmement importante, M. le Président.

Alors, je comprends le souhait du bâtonnier Massé, que je salue, qui nous écoute certainement, je comprends très bien. Par contre, il ne s'agit pas d'une demande. Et, avant d'amender la loi ce soir, de faire un changement, je pense qu'il serait opportun de discuter avec nos partenaires que sont les juges chargés de l'administration de la Cour supérieure. Mais sachez, M. le Président, que je comprends ce besoin-là. Les dispositions permettent d'assurer une desserte sur le territoire de la Gaspésie sans pour autant exiger un juge résident. Ce que je comprends de la demande, c'est qu'on aimerait avoir une désignation de juge résident dans le district en Gaspésie, d'un juge avec domicile à Gaspé ou Bonaventure, mais, avant d'apporter un amendement de la sorte et de réorganiser... parce que, ce faisant, on doit réorganiser la répartition des autres districts, parce qu'on prend de quelle façon on le fait... je pense qu'il serait à propos d'avoir une discussion avec le juge en chef associé qui est responsable de ce secteur-là, donc, le juge Pidgeon, et le juge Fournier.

Mais je comprends ce que notre collègue nous dit et je partage l'importance d'assurer les services de justice sur l'ensemble du territoire, d'ailleurs c'est pour ça qu'on... puis on est loin de la Gaspésie, mais les deux juges qui sont ajoutés à la Cour du Québec, les ressources pour les juges suppléants à la Cour du Québec pour permettre une meilleure desserte, dans le Nord-du-Québec, de la cour itinérante, bien, c'est aussi ça, c'est d'assurer que les services de justice et que justice puissent être rendus en temps utile partout sur le territoire.

• (21 heures) •

Le Président (M. Gendron) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : ...ça serait simple, hein, ça serait un amendement tout simple : au lieu de dire «152 à 157», on dirait «152 à 158», puis on viendrait ajouter une petite phrase à l'article 32. On n'en demande pas 12, mais je pense que la Gaspésie serait très heureuse. C'est une demande vraiment qui est de longue date. Puis là je peux m'imaginer le bâtonnier, et la communauté juridique de la Gaspésie, qui se dit : Ça nous passe sous le nez. Il y a un amendement au nombre de juges à la Cour supérieure, et on n'embarque pas dans le train. Je veux simplement dire à la ministre que je pense que l'occasion aurait été belle, je veux lui demander de regarder cette question-là très sérieusement, donc, avec les juges en chef, donc, de la Cour supérieure, et nous allons lui poser la question à nouveau au moment de l'étude des crédits. Donc, elle aura le temps de se préparer pour avoir une réponse sur quand ce changement-là pourrait venir.

Donc, pour revenir, les cinq vont être à Montréal, puis les trois qui sont déjà... les trois qu'on attend depuis des années, eux, ils vont... est-ce qu'ils sont tous à Montréal aussi?

Mme Vallée : Ils sont à Montréal aussi, oui.

Mme Hivon : Donc, ça veut dire huit nouveaux juges...

Mme Vallée : Bien, en fait, ils ont déjà été prévus, vous aviez déjà consenti lors de l'adoption du projet de loi en 2011. Alors, Montréal a vraiment besoin de ces trois juges et... En fait, ce sont huit juges qui sont nécessaires pour assurer le bon fonctionnement du district de Montréal.

Mme Hivon : Je comprends que les huit postes vont tous être des juges qui vont siéger en chambre... en criminel.

Mme Vallée : C'est le souhait qui a été manifesté par la Cour supérieure, effectivement. Je vois la collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, qui doit se réjouir d'un ajout de ressources sur le territoire de Montréal.

Mme Hivon : ...comme en Cour du Québec, ils ont une juridiction générale, mais on se comprend que l'objectif de ces huit nominations-là, c'est d'avoir des juges qui vont siéger principalement en matière criminelle.

Mme Vallée : Principalement en matière criminelle et principalement à Montréal, l'ouest du Québec, évidemment, parce que parfois il arrive qu'en raison de certains besoins, comme je le mentionnais, on affecte un juge... Encore une fois, je parle de l'Outaouais, mais je sais qu'il est arrivé à certaines occasions que des juges de Montréal soient affectés en Outaouais, compte tenu d'absences, de vacances, en raison de maladie et d'impossibilité d'avoir des termes à court... dans un délai raisonnable.

Mme Hivon : On me parlait d'une... L'information n'est pas urgente, mais si on peut, dans le courant de la soirée, l'avoir, combien de juges à la Cour supérieure, et on parle de tout le Québec, sont principalement affectés aux causes criminelles?

Mme Vallée : Donc, ça, je vais...

Mme Hivon : ...peut avoir l'information.

Mme Vallée : Je vais demander à mes supercollaboratrices de vérifier, parce que je ne voudrais pas vous donner un mauvais chiffre.

Le Président (M. Gendron) : Quand vous aurez l'information, on pourra un peu plus tard la transmettre. Ça va? Alors, est-ce que je vais à M. le...

Mme Hivon : Pour l'instant... la parole, oui.

Le Président (M. Gendron) : Donc, j'ai l'autorisation de passer la parole?

Mme Hivon : ...

Le Président (M. Gendron) : Vous êtes pas mal fine! Alors, M. le député de Borduas, à vous.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Je n'oserais pas vous dire ça, moi, en tout cas!

M. le Président, écoutez, sur la question qui était posée par ma collègue relativement à la Gaspésie, c'est sûr que c'est une question intéressante, parce que, quand on regarde le nombre de palais de justice, la grandeur des districts judiciaires aussi, on se dit : C'est pire que d'être députés de Bonaventure puis de Gaspé, parce que, pour couvrir tout ça, c'est quand même important, puis, dans le fond, on peut dire que c'est une run de lait pour les juges de la Cour supérieure qui partent pour entendre les dossiers loin de chez eux aussi. Donc, c'est vrai que ça ne serait pas mauvais d'avoir des juges avec résidence dans chacun des districts judiciaires du Québec ou, à tout le moins, à proximité. Puis, c'est ça, il y a plusieurs palais de justice à couvrir, il y a celui de New Carlisle, de Gaspé, de Sainte-Anne-des-Monts, de Carleton, ça fait qu'il y en a plusieurs.

Mais, c'est sûr, on centralise les juges à Montréal. Je comprends que c'est une demande de la Cour supérieure, mais ça vient à dire... tout à l'heure, ce que je disais tantôt, ce que je demandais à la ministre de la Justice en introduction, à savoir : Est-ce qu'il y avait des démarches qui avaient été faites pour avoir des communications avec les parlementaires? Parce que, voyez-vous, on n'a pas de canal de communication. On nous dit, bon : C'est l'indépendance de la magistrature, tout ça, mais je pense que ça serait bon parce que... Puisqu'on va se revoir pour modifier à nouveau la Loi sur les tribunaux judiciaires, comme la ministre nous l'a promis, en 2017, ça serait bon de pouvoir... Bien, vous nous avez dit : On va se revoir pour...

Mme Vallée : ...

M. Jolin-Barrette : Oui, tout ça aussi, mais peut-être pour d'autres propositions dans la Loi sur les tribunaux judiciaires.

Mme Vallée : ...

M. Jolin-Barrette : Exactement, j'en prête avec intérêt. Ceci étant dit, M. le Président, ça serait bon, puis ça va arriver, dans le domaine de la justice on va avoir à légiférer encore sur des dossiers qui touchent la magistrature, d'avoir un canal de communication formel pour dire : Lorsqu'on touche... lorsqu'on apporte une modification législative qui touche la Cour supérieure, la Cour d'appel ou la Cour du Québec, que les parlementaires puissent bénéficier de correspondance ou d'une formule pour entendre les besoins. Parce que, là, on soulève des questions intéressantes avec un juge en Gaspésie, peut-être avec résidence, mais on nous dit : Écoutez, ça n'a pas été abordé avec la Cour supérieure. Mais peut-être, si on avait pu échanger avec les juges ou avoir une correspondance de leur part, bien, ça permettrait aux parlementaires d'avoir cette réflexion-là puis de légiférer en ce sens-là.

Et, moi, ça me désole qu'on soit obligés de regarder Le téléjournal, de regarder les nouvelles, de lire les entrevues dans les journaux pour savoir ce que la Cour supérieure, la Cour d'appel ou la Cour du Québec pense. Je pense qu'à l'Assemblée nationale on devrait pouvoir avoir certains contacts avec eux. Parce qu'à partir du moment où les juges sortent publiquement dans les médias, bien, ils sortent de leur devoir de réserve. Donc, je ne m'explique pas pourquoi est-ce qu'avec les parlementaires justement on ne devrait pas avoir certains échanges, en tout respect de leur indépendance. Mais, à partir du moment où ils font une sortie publique parce qu'ils mettent de la pression sur le gouvernement pour avoir des ressources supplémentaires, ça serait normal qu'il y ait un échange entre l'ensemble des parlementaires et eux, d'une façon formelle, d'avoir un canal de communication. Parce qu'il existe déjà, ce genre de canal de communication, entre la ministre, entre le ministère de la Justice qui... C'est encore pire, M. le Président, parce que c'est l'exécutif en plus, on ne parle même pas du législatif, donc il y a une plus grande proximité. Là, donc, il y aurait une possibilité de développer un canal de communication.

Pour ce qui est du lieu de résidence des juges, M. le Président, je vais vous raconter une expérience personnelle aussi. Ça m'est déjà arrivé, moi, à Longueuil et même à Laval aussi, d'arriver... et vous arrivez au rôle, puis il n'y a pas de juge, il n'y a pas de juge. Ça, il faut que les gens comprennent, à la maison, là, bon, ici, on peut bien déployer... on peut bien ajouter des juges dans la Loi sur les tribunaux judiciaires, mais, à un moment donné, la magistrature aussi... il faut qu'ils gèrent ça aussi. Vous arrivez au palais de justice, comme avocat, avec votre dossier, pour plaider ou pour entendre une requête, puis on vous dit, le juge qui est sur le banc puis qui distribue les dossiers : Bien, je suis désolé, je n'ai pas de juge pour vous entendre. Donc, il faut faire venir un juge de Montréal, qui est au palais de justice de Montréal, pour l'envoyer à Longueuil, à Sorel ou à Saint-Hyacinthe. C'est extrêmement problématique.

Puis peut-être qu'on devrait revoir éventuellement, aussi, le lieu de résidence et l'assignation des juges dans les palais de justice. On comprend que c'est une mécanique complète, mais ça n'a pas de bon sens qu'il n'y ait pas de juge dans les palais de justice, parce que, un, les clients perdent de l'argent, parce qu'il faut qu'ils paient leur avocat pendant le temps qu'il attend pour passer devant un juge pour entendre la requête, deuxièmement, ça n'a pas vraiment d'allure, M. le Président. C'était mon commentaire éditorial.

Le Président (M. Gendron) : Oui, mais est-ce que l'éditorial est terminé?

M. Jolin-Barrette : Non, pas encore.

Le Président (M. Gendron) : ...

• (21 h 10) •

M. Jolin-Barrette : Pas encore. Mais, M. le Président, je pense qu'on devrait travailler en collaboration avec la magistrature sur ce point-là pour amener des nouvelles façons. Parce que, de dire : Il n'y a pas de juge, on ne peut pas vous entendre... L'accès à la justice, elle est là et... bien, c'est problématique, elle n'est pas là, justement, l'accès à la justice.

Pour la question du nombre de requêtes, qu'on a abordée au début de l'étude du projet de loi, M. le Président, je voudrais communiquer à la ministre, M. le Président, l'importance de rendre cette information publique, là. Parce qu'elle nous a mentionné tout à l'heure : Bien, écoutez, le nombre de requêtes se retrouve dans la sphère publique, le DPCP est au courant. Par contre, je pense que c'est important de les comptabiliser puis que les gens soient au courant de l'état de la situation, parce que c'est ça qui va faire en sorte de savoir est-ce qu'on a un système de justice en santé ou non. Je pense que le public a droit à l'information. Ça fait que c'est important de colliger ça et que l'information soit disponible, parce que ça va nous donner véritablement un portrait du système de justice... et de savoir si ça fonctionne ou ça ne fonctionne pas. Donc, ça, c'est pour les juges de la Cour supérieure.

Simplement rappeler à la ministre, elle nous disait : Bon, bien, je vais avoir des discussions avec mon homologue fédéral. Le projet de loi n'est pas adopté, mais, je peux lui prédire quelque chose, il risque fort d'être adopté ce soir. Mais il va falloir que ça bouge vraiment avec l'homologue fédéral. Et en même temps vous pourriez aborder la question de la nomination des juges du Québec à la Cour suprême du Canada. Vous avez un projet de loi au feuilleton qui propose une formule intéressante pour que ça soit vraiment les choix du Québec qui soient à la Cour suprême du Canada. Ça devrait faire partie des discussions aujourd'hui.

Et, pour l'article 3, M. le Président, je n'aurai pas d'autre commentaire, à part une question d'intérêt. On nous dit à l'article 21 de la loi : «La Cour supérieure, qui est un tribunal d'archives». Qu'est-ce qu'un tribunal d'archives?

Le Président (M. Gendron) : À la question, Mme la ministre, puis on pourrait régler l'article 3.

Mme Vallée : Je vais...

Le Président (M. Gendron) : Fouiller dans vos archives?

Mme Vallée : Bien, oui, on va... En fait, je sais que c'est une vieille appellation.

(Consultation)

Mme Vallée : Excusez-moi, je...

Mme Hivon : Est-ce qu'on a la réponse?

Le Président (M. Gendron) : Oui. Eh oui, en attente. Est-ce que vous avez la réponse?

Mme Vallée : Oui.

Le Président (M. Gendron) : Bon. On la communique. On va avancer avec une réponse.

Mme Vallée : Alors, c'était l'appellation parce que la Cour supérieure... Tous les registres sont déposés à la Cour supérieure. Donc, à l'époque, les registres, les mariages, les divorces, les séparations, donc, bref, tous ces actes-là sont déposés à la Cour supérieure... étaient déposés. Et c'était l'appellation.

Une voix : ...

Mme Vallée : Ah! c'est vrai : et nos célébrants ad hoc. Donc, je sais que M. le député de Borduas a une expérience, une double expérience en la matière. Donc, j'imagine qu'il est... il a dû aller déposer sa documentation à la Cour supérieure. Et donc d'où l'appellation «tribunal d'archives». Cette minute historique.

Le Président (M. Gendron) : Est-ce qu'on peut dire que l'article 3 est adopté?

Une voix : ...

Le Président (M. Gendron) : Parce que, lui... Non, non, mais, vous, on va revenir à votre question après l'adoption, parce qu'il...

Mme Hivon : Ça serait mieux d'avoir la réponse avant l'adoption, parce que c'est en lien avec...

Le Président (M. Gendron) : C'est une bonne idée, parce que c'est lié. Alors, Mme la ministre, est-ce que vous avez la réponse à la question de la députée de Joliette?

Mme Vallée : D'accord. En fait, la cour demandait... À l'époque, lorsque la loi avait été modifiée, la Cour supérieure demandait deux juges en chambre civile, cinq pour la chambre criminelle. Il semble qu'avec la nouvelle... Avec les cinq juges que l'on ajoute, quatre seront destinés au criminel, et un sera destiné au civil pour permettre de remplacer un juge hybride, parce que nous avons aussi des juges hybrides, afin de permettre au juge hybride de siéger en matière criminelle.

Mme Hivon : Donc, si on récapitule, des trois qui étaient déjà là, mais pas pourvus, il y en aurait deux en civil, un en criminel?

Mme Vallée : Il y en aurait un en civil. On aurait trois mixtes, en fait. C'est trois mixtes, avec compétence dans les... en civil et en criminel.

Mme Hivon : Donc, sur les huit au total, juste pour qu'on se comprenne... Parce que ça peut apparaître surprenant, compte tenu de la crise qu'on traverse et du cri d'alarme, pour reprendre le titre qui a été lancé par le juge en chef Fournier, qu'il y ait seulement quatre postes en criminel, dédiés en criminel.

Mme Vallée : En fait, quatre postes en criminel, un en civil qui va permettre de remplacer les juges que l'on a déjà qui sont capables d'aller en criminel. Mais il faut comprendre aussi que la Cour supérieure, à Montréal, en matière civile, est aussi confrontée à des enjeux. Donc, le besoin... Parce que les recours collectifs sont massivement déposés à Montréal, les conférences de règlement à l'amiable et les gros dossiers qui occupent beaucoup de salles de cour sont aussi majoritairement à Montréal. Alors, la demande de la cour vise à pouvoir répondre à ces besoins, à ces deux besoins. Lorsqu'on a des juges hybrides, bien, on a des juges qui peuvent être affectés, selon le volume, tant à l'exercice qui vise à résorber les délais en matière criminelle puis également résorber les délais en matière civile.

Mme Hivon : Donc, trois hybrides, un civil, quatre criminels.

Mme Vallée : C'est ça.

Mme Hivon : Parfait. Mais je veux juste faire remarquer à la ministre, bien amicalement, comme dirait son leader, en toute amitié, que cela montre que les changements ne sont pas uniquement que pour gérer la crise, même si c'est le coeur du projet de loi, bien entendu, et que donc la demande de la Gaspésie pourrait être, je dirais, analysée dans le cadre du projet de loi qui nous occupe. Je voulais juste porter ça à l'attention de la ministre.

Le Président (M. Gendron) : Est-ce que l'article 3 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Gendron) : Alors, l'article 4, Mme la ministre.

Mme Vallée : L'article 32 de cette loi est modifié par le remplacement, dans le paragraphe 1° du premier alinéa de «96» par «101».

Donc, il s'agit de l'ajout ici à Montréal, dont a discuté.

Le Président (M. Gendron) : Est-ce qu'il y a des commentaires, des questions, des discussions, interrogations, ou autres choses? Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Oui, je voudrais simplement savoir où ces nouveaux juges là vont se retrouver sur le territoire.

Mme Vallée : À Montréal.

Mme Hivon : C'est ça que vous avez dit?

Mme Vallée : À Montréal.

Mme Hivon : Oui, O.K., O.K. Donc, l'ensemble?

Mme Vallée : Donc, c'est le district de Montréal, parce qu'évidemment, on le mentionnait tout à l'heure, là, c'est... L'évaluation des régions où les besoins étaient le plus criants puis où on devait ajouter des ressources additionnelles, c'était vraiment Montréal qui se retrouvait au premier rang. Et je pense qu'actuellement, là, les délais pour fixer des procès à Montréal sont déjà très longs. Donc, il y a des efforts qui sont faits pour appeler les dossiers. Avec les ajouts de salles, notamment, ça va permettre de peut-être devancer des dossiers qui sont fixés un peu plus tard par manque de disponibilité. Mais on s'entend que ces juges-là ont une possibilité de siéger ailleurs au besoin, là.

Mme Hivon : On est quand même conscients que l'actualité des dernières semaines nous a montré que c'était loin d'être uniquement à Montréal où il y avait des arrêts de procédure qui étaient déclarés, où il y avait une épée de Damoclès au-dessus de la tête des tribunaux. Je pense au cas de Tom Harding, évidemment, dans le coin de Lac-Mégantic, donc on est... En tout cas, il y a différents... Sherbrooke a été interpellé, la couronne de Montréal est interpellée, on en a vu un petit peu partout sur le territoire. Donc, j'essaie juste de comprendre. C'est évident que Montréal vit la plus grosse problématique, et on ne s'obstinera pas longtemps là-dessus, mais qu'est-ce qui justifie que l'ensemble, l'entièreté des 15 postes soit à Montréal?

Mme Vallée : C'est vraiment une demande de la magistrature. Le juge en chef a évalué ses besoins et a identifié là où ses besoins étaient le plus criants, et il nous a identifié Montréal. Et je le mentionnais, là, il y a les gros... Les dossiers principaux, crime organisé, sont à Montréal, les dossiers de gangs de rue sont principalement à Montréal. Les mégaprocès, on a plusieurs mégaprocès dans le district de Montréal. Donc, c'est là que... Et vraiment, là, le besoin imminent à combler en matière de... à la Cour supérieure, il est à Montréal.

On a fait référence à d'autres dossiers, je pense qu'il y a des requêtes qui ont été présentées dans certains dossiers et je sais qu'il y a un leadership aussi qui est pris par les juges dans le dossier pour rappeler les parties et offrir des dates. J'ai compris que, dans certains dossiers, finalement on n'était pas disponibles aux dates offertes par le tribunal. Bref...

Le Président (M. Gendron) : Ça va, Mme la députée de Joliette?

Mme Hivon : Je veux vérifier quelque chose, ça fait que mon collègue peut prendre la parole.

Le Président (M. Gendron) : M. le député de Borduas, avez-vous quelque chose à l'article 4?

• (21 h 20) •

M. Jolin-Barrette : Oui.

Le Président (M. Gendron) : On vous écoute.

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est vrai que les délais sont importants, M. le Président. Je vous donne l'exemple : il y a une cause qui a été fixée la semaine dernière ou il y a deux semaines, des accusés... multiples accusés, six, sept accusés de fraude, enquête préliminaire, c'est fixé... Dans le fond, ils ont comparu, et l'enquête préliminaire a été fixée décembre 2017. Donc, ça, c'est les délais aujourd'hui. Donc, on ne parle pas du procès, on parle uniquement de l'enquête préliminaire, qui est 13 mois plus tard.

Moi, je suis un peu inquiet de ces délais-là. Je donnais un cas d'exemple, M. le Président, pour le district de Montréal en cour... en matière criminelle, où déjà, au palais de justice, supposons, en novembre 2016, si vous fixez une enquête préliminaire, on se retrouve en décembre 2017. Et là le procès n'est pas encore appelé.

Donc, c'est sûr qu'on est tributaires de la ministre de la Justice fédérale, mais il va vraiment falloir que l'ensemble du gouvernement mette de la pression sur le gouvernement fédéral et exige la nomination de ces juges-là. Parce que ce soir, oui, on fait notre bout de chemin, mais j'espère que, s'il faut que le premier ministre agisse aussi, il va le faire, considérant la gravité de la crise.

Ceci étant dit, la réflexion que nous avons sur pourquoi est-ce qu'on passe de 96 à 101 uniquement à Montréal, je comprends que la Cour supérieure l'a dit. Je réitère mes commentaires à l'effet que ça aurait été bon d'avoir un canal de communication formel avec la Cour supérieure pour nous indiquer véritablement... Parce que ça aurait peut-être évité à la ministre d'avoir à répondre à nos multiples questions aussi. Donc, je pense que, dans le futur, on devrait véritablement avoir ce canal de communication.

Le Président (M. Gendron) : Mme la députée de Joliette, avez-vous quelque chose?

Mme Hivon : Oui, je veux juste dire que je suis désolée, j'étais un article... Ma question ne devait pas avoir l'air très cohérente, là, parce que je parlais de 15 juges. Donc, j'étais un article d'avance. Ma question visait la Cour du Québec, j'étais très étonnée qu'on les mette tous à Montréal, c'est ça qui... C'est là-dessus que j'étais. Donc, je suis désolée si ça a prêté à confusion.

Le Président (M. Gendron) : ...dire quelque chose, mais un président doit être neutre et objectif, alors je n'ai pas commenté.

Mme Hivon : ...de clore l'article, je reviens à ma question sur, à la Cour supérieure, le nombre de juges qui sont affectés principalement en chambre criminelle : Est-ce qu'on a cette donnée-là pour l'ensemble du territoire?

Mme Vallée : ...

Le Président (M. Gendron) : Oui, ce qu'elle vous a demandé... Ce qu'elle vous a demandé à l'article 3, vous étiez censée faire des recherches intenses pour être en mesure de lui fournir cette information-là. Vous avez dit: Bien, on va poursuivre, puis on va vous donner la réponse. Alors, on attend cette réponse.

Mme Vallée : On essaie d'avoir les chiffres. On sait qu'à Montréal on a 14 juges qui sont des spécialistes, disons, des criminalistes, là, des criminalistes à temps plein, mais, pour l'ensemble du territoire, on n'a pas avec nous la répartition, là. On a un certain nombre de juges hybrides, mais...

Mme Hivon : Mais ça donne une idée, parce que, s'il y en a 14 qui sont principalement en chambre criminelle, et on leur en ajoute quatre, assurément plus des hybrides, donc on augmente les effectifs d'à peu près 25 % pour les juges. C'est cet ordre de grandeur là que je cherchais. Donc, c'est bon.

Le Président (M. Gendron) : Et on vient de le trouver. Adopté.

Est-ce que l'article 5 est adopté? 4, excusez, là, écoutez, je veux bien aller vite, mais pas trop vite. Alors, l'article 4 est adopté.

À l'article 5, Mme la ministre, contez-nous ça, là.

Mme Vallée : Alors, nous voici à l'article 5. Donc, l'article 85 de cette loi est modifié par le remplacement de «290» par «306».

Alors, il s'agit ici de l'ajout de 16 juges à la Cour du Québec.

Le Président (M. Gendron) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Je vous pose maintenant la question que j'avais posée de manière erronée à l'article précédent. Donc, comment ces juges-là, nouveaux postes, vont se répartir sur le territoire?

Mme Vallée : Je sais qu'il y avait des échanges, notamment avec la Cour du Québec, afin de déterminer avec précision... Et je vous reviens, là, parce que je crois... On parle surtout de l'ouest du Québec... Les besoins qui ont été identifiés par la cour, puis là je n'ai pas le nombre précis dans chaque district par contre, il y a Montréal, Saint-Jérôme, Laval, Longueuil, Joliette, Saint-Hyacinthe, Gatineau et Valleyfield. Je regarde les gros yeux du président, est-ce que j'ai...

Le Président (M. Gendron) : Bien, c'est parce qu'habituellement, là...

Mme Vallée : Vous ne m'aviez pas donné la parole, hein?

Le Président (M. Gendron) : Non, ce n'est pas ça, c'est que moi, je connais le Québec un peu, et habituellement, quand on parle de l'ouest du Québec, ça finit par toucher l'Abitibi-Témiscamingue. L'Abitibi, ce n'est pas le Nord-Ouest.

Mme Vallée : Ah! Excusez-moi, j'avais oublié votre patelin.

Le Président (M. Gendron) : Ça fait que, là, je vous attendais pour voir si nous aussi, on aurait droit...

Mme Vallée : Je pense que les besoins sont moins pressants en Abitibi. On m'indiquait récemment que la gestion des délais était très...

Le Président (M. Gendron) : Relativement convenable.

Mme Vallée : Plus que relativement même, semble-t-il que c'était quand même bien... il n'y avait pas trop de problématique. Mais par contre notre collègue de Borduas, tout à l'heure, faisait référence à Longueuil, faisait référence à la Montérégie, puis effectivement il y a des enjeux, il y a une croissance démographique, et ça a un impact sur le volume de dossiers à traiter.

Le Président (M. Gendron) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Montréal, Saint-Jérôme, Joliette, Longueuil, j'ai juste manqué...

Mme Vallée : Laval.

Mme Hivon : Laval, donc...

Mme Vallée : Gatineau, Valleyfield. Alors, on m'indique... Ah! la répartition serait... et ce n'est pas dans tous ces districts, on m'indique que la répartition a été... Donc, neuf seraient en résidence à Montréal, quatre juges avec résidence à Laval, qui siégeront dans le district de Joliette, Laval, Terrebonne et Labelle, qui incluent le secteur Mont-Laurier, parce que Labelle, c'est un grand district qui se rend jusqu'à Maniwaki, et même jusqu'à Gracefield, et donc deux juges avec résidence à Longueuil pour siéger dans les districts de Beauharnois, Iberville, Longueuil, Richelieu, Saint-Hyacinthe, et un juge avec résidence à Gatineau pour siéger dans le district de Gatineau, Labelle et Pontiac.

Le Président (M. Gendron) : Est-ce que ça va pour la répartition?

Mme Hivon : La ministre parlait du Nord-du-Québec, si je regarde le détail... parce qu'il y a une rubrique spécifique pour ça, mais on parle de deux juges affectés ou non. C'est deux juges...

Mme Vallée : Ce sont deux juges suppléants qui vont assurer de maintenir une présence de la cour itinérante sur le territoire. Alors, ça, c'est une demande qui a été formulée par la juge en chef pour vraiment, là, bonifier les services de la cour itinérante.

Il y a eu beaucoup d'efforts, on n'en a pas parlé beaucoup, mais il y a eu beaucoup d'efforts qui ont été faits pour améliorer les services de la cour itinérante dans le Nord-du-Québec, parce que c'était aussi problématique. Quant à la fréquence, ça aussi, ça cause des délais.

Mme Hivon : Je comprends que c'est des juges suppléants, donc il n'y a pas de permanence là, ça va varier au fil du temps, mais il y avait un besoin de venir spécifier qu'il y aurait en tout temps... En fait, on va fonctionner avec des juges suppléants et non pas des juges affectés spécifiquement à la cour itinérante, c'est ça?

Mme Vallée : ...qui sera permanent pour assurer ce service-là, ce service additionnel à la cour. On a des enjeux à attirer des gens dans le Nord-du-Québec, mais on a des juges suppléants qui ont vraiment cette passion et donc qui seront mis à contribution pour... Bien, évidemment, on m'indique, avec raison, on a les juges de l'Abitibi, les juges permanents qui se rendent dans le Nord pour assurer les services de la cour itinérante, Et ces juges suppléants vont s'ajouter à l'équipe de juges permanents de la cour itinérante.

Mme Hivon : Donc, ça va être des juges à la retraite qui vont accepter, donc, de siéger, et donc ça va fluctuer dans le temps, mais on s'assure qu'il va toujours y en avoir deux suppléants, en tout temps, affectés à ces travaux-là. O.K.

Mme Vallée : En Abitibi, on a 10 juges affectés à la cour itinérante. Donc, l'équipe sera bonifiée d'autant.

• (21 h 30) •

Mme Hivon : ...pas des juges, mais des ressources que la ministre a annoncées, donc, de soutien aux juges : greffiers, huissiers, personnel administratif. Donc, je comprends qu'il va y avoir des concours pour pourvoir ces postes-là. Puis on parle encore une fois essentiellement, dans les districts dont elle a parlé, ou est-ce qu'il va y en avoir ailleurs que dans les endroits où on nomme des nouveaux juges? Je ne sais pas si la ministre me suit, mais est-ce qu'on va avoir des postes supplémentaires dans les palais, en dehors des lieux où on a des juges qui vont être nommés, ou essentiellement ça va suivre les nominations de juges?

Mme Vallée : Pour l'ensemble du territoire. Parce que c'est vraiment... on a des districts judiciaires où on retrouve des besoins plus pressants, où le nombre de dossiers à traiter est plus important. Mais les ressources, on a quand même des besoins de ressources additionnelles pour assurer de répondre aux paramètres de Jordan, qui sont sur l'ensemble du territoire. Donc, on va déployer nos ressources sur le territoire.

Mme Hivon : O.K. Puis donc que le juge soit avec résidence dans un lieu où... parce que là, vous nous disiez : neuf, Montréal; quatre, Laval; deux, Longueuil; un, Gatineau. Mais ils vont siéger ailleurs aussi. Ça, ça ne sera pas, je dirais, rigide, pour, après, venir déterminer où on ajoute des ressources dans l'ensemble du territoire.

Mme Vallée : On a des ressources qui sont affectées directement à la nomination des juges, mais on a d'autres ressources qui sont déployées sur le territoire pour assurer l'activité judiciaire, le bon fonctionnement de l'activité judiciaire dans l'ensemble des palais.

Mme Hivon : Et est-ce qu'il y a des ressources, je dirais, plus dédiées à chaque endroit où il va y avoir des nouveaux juges? Il y a comme un minimum, un plancher de ressources qu'on s'assure pour que les nouveaux magistrats puissent être accompagnés adéquatement, autant juge que juge suppléant? Parce qu'en fait les juges suppléants, ça va avoir le même effet, j'imagine, ça va augmenter la cadence, ou... Je ne sais pas comment ça fonctionne.

Mme Vallée : On a, et là j'essaie de retrouver la fiche, parce qu'il y a effectivement un juge... Bien, chaque juge amène une série d'effectifs. Bon, c'est ça, l'adjoint, l'adjointe, ça, ça va de soi. Mais il y a aussi un certain nombre de personnel, là, qui... Alors, le calcul se fait en fonction d'une équation mathématique où chaque juge va correspondre à un besoin en ressources additionnelles de personnel x, de x personnes. À ça s'ajoute évidemment, parce que, dans l'annonce, on a aussi du personnel du ministère de la Sécurité publique...

Ah! voilà. Pour vous donner une idée plus globale, pour les 16 juges, on a besoin de 16 adjoints, adjointes; un recherchiste; on a besoin d'huissiers-audienciers; de greffiers-audienciers; de personnel de greffe, donc... de professionnels, de techniciens en informatique, de techniciens en administration. C'est quand même... il y a un ajout qui s'ensuit. C'est la même chose pour la Cour supérieure, en passant, parce que la Cour supérieure, les juges sont rémunérés par le fédéral, mais tout le soutien administratif, c'est le gouvernement du Québec qui l'assume.

Mme Hivon : ...touche beaucoup l'administration de la justice dans le partage des compétences, je suis convaincue de ça.

Puis juste pour clarifier, vous nous avez dit tout à l'heure qu'il y avait déjà des juges suppléants qui avaient été rappelés en renfort. J'imagine, un nombre plus important que ce qu'on fait habituellement. Là, je vois qu'il va y avoir deux juges suppléants dédiés au Nord-du-Québec. Est-ce que la même logique s'applique aussi, donc, d'avoir des ressources pour s'assurer que les juges suppléants puissent être accompagnés adéquatement? C'est tenu en compte, j'imagine.

Mme Vallée : Les juges suppléants ont le personnel de soutien à la cour. Ils n'ont pas d'adjointe, par contre, mais ils ont un personnel : le personnel de soutien du palais de justice, de la cour, est présent pour soutenir leur travail.

Mme Hivon : Ma question, c'est plus : Est-ce qu'on s'est assurés, compte tenu du fait que... Là, je comprends qu'il y a deux postes de juges, bon, Nord-du-Québec, suppléants, mais il y a aussi des juges suppléants qui sont amenés en renfort. Est-ce qu'on s'est assuré que, outre les nouveaux postes de juges, que les juges suppléants qu'on ramène, qui vont être... qu'on va avoir assez de ressources pour les soutenir? Vous me suivez? Parce que, si on décide de faire un effort pour avoir des juges suppléants, mais qu'on n'a pas le soutien, bien peut-être que ça ne donnera pas les effets...

Mme Vallée : L'exercice de l'évaluation des ressources...

Mme Hivon : ...effets contre tout ça.

Mme Vallée : Contre tout ça. On a pris en considération l'arrivée de nouveaux juges, l'utilisation ou la mise à contribution des juges suppléants, parce qu'ils sont déjà... les juges suppléants sont déjà très présents, très... Ils sont appelés à combler des vacances. Parce qu'à travers tout ça, là, on a des chiffres, mais il n'en demeure pas moins que ce sont des êtres humains qui parfois sont malades, qui parfois doivent s'absenter pour toutes sortes de raisons. Alors, oui, l'évaluation est faite en conséquence.

Mme Hivon : Ça va.

Le Président (M. Gendron) : M. le député de Borduas, avez-vous des questions à l'article 5?

M. Jolin-Barrette : ...M. le Président. J'aimerais juste avoir des points d'information sur les juges suppléants. Bon, c'est des juges qui sont à la retraite parce qu'ils ont atteint un certain nombre d'années de service en fonction soit de leur âge, soit en fonction de leurs années où ils ont siégé et, pour devenir juge suppléant, dans le fond, il y a un décret qui est adopté pour désigner le nombre de juges suppléants. Ces juges-là sont affectés au dossier par le juge coordonnateur ou le juge en chef. Mais, en fait, la charge de travail d'un juge suppléant, à quoi correspond-elle?

Mme Vallée : ...variable. C'est variable, parce que tout dépend des besoins de la cour, donc il y a des moments où le... un juge suppléant peut être appelé à siéger d'une façon plus constante et à une autre période... aura peu d'affectations, donc c'est difficile pour moi de vous dire aujourd'hui exactement à quoi consiste le travail, parce que c'est... En fait, le juge suppléant est appelé à présider des séances et appelé à entendre des parties, mais tout dépend du besoin. Parfois, c'est pour assurer le remplacement, comme je le mentionnais, d'un collègue qui est en congé de maladie. Alors, un rôle sera attitré au juge suppléant, mais...

M. Jolin-Barrette : Comment est établie la rémunération du juge suppléant? Est-ce que c'est en fonction du nombre de séances? C'est en fonction... Parce que j'imagine qu'il reçoit sa pension de base et...

Mme Vallée : C'est ça. Les juges suppléants sont rémunérés à la séance. Donc, selon les heures qu'ils font.

M. Jolin-Barrette : Parfait. J'ai une autre question, M. le Président. Le Barreau y a déjà réfléchi, dans d'autres provinces aussi au niveau des cours provinciales, on y a réfléchi, il y a des auteurs aussi qui l'ont proposé aussi. Au niveau de la flexibilité des chambres à la Cour du Québec, lorsqu'on est nommé à la Cour supérieure, dans le fond, on a une juridiction qui est, si je pourrais dire, universelle. On peut entendre des dossiers en fonction de différents sujets, en fonction de ce qui est présenté devant nous. Par contre, le décret de nomination, généralement, à la Cour du Québec, il désigne le juge soit à la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale, soit à la chambre civile, soit à la chambre de la jeunesse. Donc, j'aimerais savoir où est le... Est-ce que le ministère de la Justice y a pensé? Est-ce que le ministère de la Justice y a réfléchi, d'avoir plus de flexibilité? Parce que, dans le fond, on a compartimenté la Cour du Québec. Je sais que c'est une avenue qui pourrait être envisagée, à savoir est-ce qu'on pourrait avoir de la flexibilité au niveau des juges. Parce que les gens qui sont nommés à la Cour du Québec, oui, ils ont travaillé dans le domaine dans lequel ils ont été nommés, mais les juges de la Cour supérieure travaillaient comme avocats aussi avant, donc j'aimerais peut-être vous entendre pour savoir où est votre processus de réflexion.

Le Président (M. Gendron) : Mme la ministre... processus de réflexion.

• (21 h 40) •

Mme Vallée : Bien, je dirais que le processus de réflexion est terminé puisque l'article 106, deuxième alinéa, prévoit qu'«à la demande du juge en chef, un juge est tenu d'exercer la compétence de la cour dans une matière qui n'est pas du ressort de la chambre à laquelle il [était] affecté». Donc, il y a déjà cette mobilité de prévue à l'article 106, deuxième alinéa, finalement. Et, dans le premier, à l'article 106 : «Chaque juge a compétence sur tout le territoire du Québec et pour l'ensemble de la compétence de la cour, quelle que soit la chambre à laquelle il est affecté.» Et, à la demande du juge, le juge est tenu d'exercer. Alors, c'est déjà là.

Une voix : ...

Mme Vallée : Oui, oui, il y a des juges qui sont appelés, dans certains districts, à siéger en... disons, des petites créances, par exemple, au besoin, ou siéger en chambre de la jeunesse, des juges de chambre civile ou de la chambre criminelle qui ont appelés à siéger en chambre de la jeunesse. Bref, ça se fait.

Le Président (M. Gendron) : Ça va?

M. Jolin-Barrette : Ça va.

Le Président (M. Gendron) : Est-ce que l'article 5 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Gendron) : Adopté. Mme la ministre, pour l'article 6.

M. Jolin-Barrette : ...amendement à proposer.

Le Président (M. Gendron) : O.K. Allez pour votre amendement.

M. Jolin-Barrette : Donc : Insérer, après l'article 5 du projet de loi, l'article suivant :

5.1. L'article 28 du règlement sur la procédure de sélection des candidats à la fonction de juge de la Cour du Québec, de juge d'une cour municipale ou de juge de paix magistrat est modifié par l'ajout, à la fin, des alinéas suivants :

«Le rapport du comité doit être transmis au plus tard à la date de la retraite obligatoire ou à la date annoncée de vacance du poste et, dans les autres cas, dans les — j'ai laissé un blanc — mois après la mise en vacance du poste ou après l'annonce d'un nouveau poste à pourvoir.

«Toutefois, le comité peut demander, lors de circonstances exceptionnelles, un délai supplémentaire au secrétaire.»

Le Président (M. Gendron) : Alors... déposer votre amendement. Nous allons le recevoir, en prendre connaissance, juger de sa recevabilité et distribuer une copie, bien sûr, aux parties qui nous accompagnent, c'est-à-dire Mme la ministre et la porte-parole de l'opposition officielle. Alors, on vous indique qu'on va vous donner une copie de l'amendement pour que vous puissiez l'apprécier.

Mme Hivon : J'ai la copie.

Le Président (M. Gendron) : Vous avez déjà la copie.

Mme Hivon : J'ai un bon service de la deuxième opposition.

Le Président (M. Gendron) : Alors, Mme la ministre, acceptez-vous qu'on l'entende davantage dans la présentation de l'amendement proposé?

Mme Vallée : Bien, j'aimerais avoir une copie de l'amendement.

Le Président (M. Gendron) : Ah! vous ne l'avez pas?

Mme Vallée : Non, je ne l'ai pas. Je n'ai pas le privilège de ma collègue de Joliette.

Une voix : ...

Mme Vallée : Merci.

Le Président (M. Gendron) : Bon, on va vous laisser prendre... On va suspendre quelques instants pour que vous en preniez connaissance.

Mme Vallée : Merci.

(Suspension de la séance à 21 h 43)

(Reprise à 21 h 51)

Le Président (M. Gendron) : Alors, nous allons poursuivre. Et on vous a informés qu'il y a un certain intérêt, là, d'en prendre connaissance très rapidement, puis quelques commentaires, et, après ça, on décidera qu'est-ce qu'on fait avec l'amendement.

Alors, M. le proposeur, si vous voulez faire une phrase ou deux de plus, ou si ce n'est pas nécessaire... Parce que, Mme la ministre, est-ce que vous êtes en mesure de réagir tout de suite? Mme la ministre, est-ce que vous êtes en mesure de réagir? Souhaitez-vous réagir tout de suite au dépôt de l'amendement?

Mme Vallée : Bien, je ne sais pas si le collègue a des commentaires additionnels à faire.

M. Jolin-Barrette : Je peux l'expliquer. Je l'ai dit dans mes remarques préliminaires aussi. Mais simplement, dans le fond, écoutez, je pense que la démonstration a été faite, avec le tableau qu'hier j'ai présenté à la ministre, il y a plusieurs mois de vacances parfois qui existent, et l'objectif avec l'amendement que l'on propose, c'est véritablement que, lorsqu'un juge prend sa vacance, bien, on puisse le remplacer le plus rapidement possible de façon à ce que le nouveau juge entre dans ses fonctions le plus rapidement possible, soit saisi de ses dossiers.

Je le dis très candidement à la ministre : Moi, je suis très ouvert à travailler un libellé qui peut être différent avec elle. C'est un libellé que l'on propose. Je pense que tout le monde connaît la finalité de la proposition. On est ouverts à travailler le libellé de l'amendement ensemble.

Le Président (M. Gendron) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Je comprends l'objectif visé; par contre, quand on regarde l'amendement, le délai, la limite ou la date de dépôt obligatoire du rapport du comité peut susciter d'autres problématiques. Parce qu'il faut permettre au comité de travailler d'une façon tout à fait libre de toute forme de pression, de façon indépendante. Et il y a toutes sortes de raisons parfois, toutes sortes d'enjeux qui peuvent survenir en cours de route dans la vie d'un comité. Notamment, suite à la réception des candidatures, il peut y avoir une obligation pour un membre de se récuser en vertu de l'article 21 du règlement, ce qui peut entraîner des délais, ce qui peut entraîner du... c'est ça, des délais additionnels. Le nombre de candidats qui soumettent leur candidature à un concours précis peut également venir influencer ou va influencer la durée du processus de sélection, du processus, entre autres, d'entrevues du comité. Parce que l'objectif, là, on ne veut pas que le comité tourne les coins ronds et on veut s'assurer que le comité va rencontrer tous les candidats potentiels, toutes les candidates potentielles, donc de limiter...

Et puis je pense que c'était, à l'époque... au moment où le règlement a été rédigé, il y avait ce souci de ne pas mettre de pression sur le comité parce que le comité Bastarache... pardon, le juge Bastarache avait, dans ses recommandations... souhaitait s'assurer que le processus était perméable aux interventions ou aux influences de toutes sortes, puis là, bon, oui, les influences politiques, mais aussi une pression qui pourrait être mise sur le comité. C'est-à-dire, si le comité a besoin d'obtenir une autorisation, bien, il y a une certaine pression à savoir est-ce que l'autorisation pour prolonger le délai sera accordée ou pas.

Et ceci m'amène à dire que le deuxième alinéa de l'amendement, lorsqu'on réfère à une demande portée au secrétaire du comité, il faut comprendre que le secrétaire du comité n'a pas de pouvoir décisionnel et ne participe pas non plus aux travaux du comité. Alors, c'est vraiment quelqu'un qui a un rôle de liaison, je dirais, entre le comité... entre la cour... la juge en chef et le cabinet ministériel, la ministre, pour s'assurer de transmettre le rapport. C'est aussi au secrétariat que sont consignées toutes les archives. Donc, le secrétaire n'a pas de pouvoir décisionnel. Lorsqu'une demande est formulée à la secrétaire, par exemple, pour ouvrir un concours, bien évidemment le secrétaire du secrétariat va me transmettre la demande. Donc, c'est un peu... le rôle, c'est vraiment... Puis il y a vraiment un lien. Le président est en relation avec la juge en chef, qui est en relation avec le secrétaire, qui est en relation avec la ministre. Et le secrétaire, c'est une fonctionnaire du ministère.

Le Président (M. Gendron) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Ça me fait dire que ce serait d'autant plus simple d'avoir un secrétariat indépendant avec une personne désignée. Ceci étant dit, on peut remplacer «secrétaire» par «la ministre» pour des circonstances exceptionnelles aussi. Moi, je suis ouvert à accepter un sous-amendement sur l'amendement, ou même d'avoir un libellé commun qui nous permettrait d'y arriver.

Ceci étant dit, je comprends très bien ce que la ministre nous dit. Il peut y arriver des événements exceptionnels. C'est pour ça que le deuxième alinéa le prévoit. Si vous connaissez... vous êtes juge, vous êtes sur le comité de sélection, c'est un de vos confrères qui applique, vous devez vous récuser.

Ceci étant dit, dans le premier alinéa, on dit : «Le rapport du comité doit être transmis au plus tard à la date de la retraite obligatoire...» Premier élément. Date de la retraite obligatoire, on sait déjà à quelle date tous les juges vont avoir 70 ans. Ça, on le sait déjà. Ça fait qu'on peut faire la demande déjà à l'avance. «Ou à la date annoncée de vacance du poste», ça, c'est lorsque le juge décide de dire : Bien, moi, je vais prendre ma retraite, ou : Je décide de démissionner de mon poste. Dans les cas de démission, ça peut être plus soudain, mais, dans les cas de retraite annoncée à l'avance, généralement, les juges vont le dire pas à la dernière minute, ils vont informer la juge en chef ou le juge en chef assez rapidement. Et, dans les autres cas, supposons... prenons le cas d'une mort subite, là c'est pour ça qu'on a laissé : «...dans les [x] mois après la mise en vacance du poste ou après l'annonce d'un nouveau poste à pourvoir.» Donc, on propose la flexibilité en fonction des différentes circonstances auxquelles on a pensé qui pourraient survenir.

Mais ce qu'il faut dire, M. le Président, c'est qu'avec le tableau qui est disponible sur le site Internet de la Cour du Québec, voyez-vous, prenons des exemples concrets, là... Le concours 2016-068 à la Chambre de la jeunesse, bien, écoutez, la juge en chef a demandé, le 11 novembre 2015, déjà, qu'elle allait avoir un poste à pourvoir. Et les travaux du comité ont pris neuf mois, et, dans les faits, il y a eu une vacance de deux mois également.

Dans le cas à la Chambre civile, ici à Québec, l'ancien poste du juge Brochet, lorsque la juge Cotnam a été nommée, bien le comité a pris 11 mois pour faire son travail. Même chose à la Cour du Québec, Chambre civile, en remplacement de l'honorable Godbout... Chantal... l'honorable Gosselin, qui a été nommée, ça a pris 11 mois. En chambre de la jeunesse à Québec aussi, 13 mois. En plus là il y a eu une vacance de six mois entre le moment où le juge a pris sa retraite effective et où il y a eu remplacement. Vous avez la chambre de la jeunesse à Québec encore une fois; vous avez, au Saguenay, 10 mois; Longueuil, 10 mois; Salaberry-de-Valleyfield, 11 mois; Montréal, 11 mois; Montréal encore, 10 mois.

Donc, voyez-vous, là, il y a la liste comme ça. La ministre nous l'a dit tout à l'heure : Parfois, il y a des juges suppléants qui vont remplir le poste. Mais je pense qu'on pourrait vraiment quand même indiquer certaines balises. Et c'est le sens de la proposition d'amendement.

Le Président (M. Gendron) : As-tu de quoi à dire là-dessus? Oui. Alors, Mme la députée de Joliette, première réaction.

• (22 heures) •

Mme Hivon : Oui. Moi, je veux simplement dire que la forme de l'amendement m'importe peu. Mais j'ai aussi beaucoup réfléchi et j'ai passé le règlement, et on dirait qu'avec le recul et avec la crise qu'on vit, et avec aussi les impératifs, on peut tous penser qu'un gouvernement, quand il veut économiser, ça pourrait être un moyen. Je n'impute pas de motifs à personne, mais ça pourrait être un moyen aussi de dire : On ne comblera pas le poste rapidement, comme ça, bien, on n'a pas un poste de juge de plus à payer pendant une année, pendant 18 mois.

Donc, il y a de réels enjeux là et je pense qu'en ce moment, on voit... moi, j'ai fait l'analyse, j'ai vu que ça pouvait... ça a passé de quatre mois à 14 mois, les nominations, là, que j'ai examinées, en termes de délais pour procéder. La ministre a dit hier qu'elle espérait faire passer le temps de six mois, peut-être, en moyenne... nous, on avait calculé que la moyenne, c'était neuf mois, ce qui est très long, quand même, à trois mois. Donc, on salue ça.

Mais je me dis : Il me semble que de mettre une référence temporelle dans le règlement, ce serait clairement une avancée. Je pense que ce serait une avancée pour tout le monde, y compris pour la ministre de la Justice, qui veut que les choses se fassent de manière diligente, qui veut que les juges puissent être nommés rapidement et pas être soumise à d'autres impératifs qui puissent advenir.

Donc, je pense que, moi aussi, là, pour le libellé exact... Mais je pense que l'idée de mettre un temps, exemple, trois mois, sauf circonstances exceptionnelles, puisque c'est ce que la ministre a suggéré elle-même, je pense que ce serait très positif quand on regarde l'histoire récente et les délais qui ont été encourus.

Le Président (M. Gendron) : Ça va? Bien, Mme la ministre est-ce que vous avez une réaction? Et là il faudrait peut-être envisager de revenir assez rapidement sur le fond.

Mme Vallée : En fait, je vous dirais, pour les raisons que j'ai mentionnées, je pense qu'il n'est pas... cet amendement-là pourrait engendrer des problèmes que nous n'avons pas actuellement, pourrait créer des problèmes notamment sur la question... Lorsque le collègue disait : Bien, si ce n'est pas le secrétaire qui autorise le report, ça pourrait être la ministre, bien il ne faut pas que le ministre ou la ministre s'immisce de quelconque façon dans les travaux du comité, d'aucune façon. Je pense qu'on reviendrait à une situation où potentiellement il y aurait une pression du politique. Mais je veux simplement rappeler que, parfois, on a jusqu'à 100 candidatures pour un poste. Alors, le limiter dans un espace temporel restreint pourrait apporter et amener d'autres problèmes.

Et l'autre chose, c'est qu'à chaque fois que c'est... La dernière fois, lorsque le règlement a été préparé, lorsque le travail a été fait, suite à la recommandation Bastarache, il y avait eu un travail important de consultation auprès du Barreau, de la magistrature, et là, ce soir, ce travail n'a pas été fait.

Je vous dis : Je comprends très bien l'objectif qui est visé, mais je ne crois pas qu'une modification de cette façon va nous aider, au contraire, et je vous dirais que le travail... Et je comprends aussi la crainte de notre collègue de Joliette, mais, au cours des dernières années, malgré les efforts budgétaires, il y a eu une cadence assez soutenue pour assurer de combler les postes pour lesquels une vacance était annoncée. Donc, il n'y a pas eu de... compte tenu de l'importance... Puis je pense qu'un ministre ou une ministre de la Justice qui a à coeur la saine administration de la justice n'a pas intérêt à utiliser la nomination des juges pour équilibrer son budget.

Le Président (M. Gendron) : Est-ce à dire... Oui?

Mme Hivon : Ça, je n'en doute pas. Ce n'est pas des ministres de la Justice dont je doute. Des fois, c'est d'autres partenaires qui peuvent penser que la justice, c'est moins important, c'est des choses qu'on voit des fois. Donc, là, on voit que c'est important.

Moi, je me permettrais juste de demander à la ministre... en tout cas, personnellement, je pense que ça devrait être quelque chose qui soit fait, parce que, en ce moment, c'est bien d'avoir l'indépendance et la latitude, mais ça peut tomber dans l'excès à toutes les étapes du projet. Puis la ministre a dit qu'elle souhaitait que, pour les prochaines nominations, ça se fasse en trois mois. Donc, je comprends que là on va examiner la question de la publication dans le Journal du Barreau, mais on se comprend que c'est une petite partie quand on compare 14 mois, neuf mois à trois mois. Comment elle va s'en assurer? Comment nous, on peut en être assurés si on ne met pas une référence temporelle dans le règlement?

Le Président (M. Gendron) : Alors, on fait quoi avec l'amendement?

Mme Vallée : Moi, je suis prête à voter. Je pense, pour...

Le Président (M. Gendron) : Vous êtes prête à voter? C'est ce que j'ai compris. Alors, le vote est demandé. Oui, M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Non, mais, écoutez, moi, je pense qu'on propose une idée et je comprends que la ministre nous dit : Écoutez, ça pourrait soulever des questions si, moi, j'interviens. Ce n'est pas une question d'intervenir. Puis il y a des mécanismes, on peut le baliser, on peut vraiment le baliser. Écoutez, je pense qu'on peut arriver à une solution qui va faire en sorte qu'on va mettre un délai temporel parce que, dans plein d'endroits, il existe des délais temporels, et je ne vois pas pourquoi... On ne squeezera pas le comité outre mesure, on va juste dire quelle est l'intention du législateur, puis on va dire : Bien, le ministre de la Justice veut avoir la disponibilité des noms à telle date, arrangez-vous pour le faire en respectant votre indépendance. Mais on se ramasse avec des délais qui sont importants, c'est ça, la constatation. Il y a une possibilité réelle ici d'arriver avec une proposition et d'arriver avec une solution.

Le Président (M. Gendron) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, je pense que je suis prête à voter. Mais une chose, puis, lorsque j'ai mentionné que la magistrature ne pas été consultée, les partenaires n'ont pas été consultés, moi, ce que je suis prête à faire aujourd'hui, c'est de m'engager à enclencher ce processus de consultation et à pouvoir voir de quelle façon... Je comprends, je comprends la préoccupation, je la partage, mais je veux éviter que le moyen que nous utilisions pour assurer que les postes puissent être comblés rapidement ne soient pas un frein à la saine... au travail libre de toute pression du comité.

Alors, je ne suis pas contre l'idée, je voudrais pouvoir consulter nos partenaires, comme on l'a toujours fait lorsque venait le temps d'apporter des modifications. Je vais le faire, je vais vous revenir. Ça, je n'ai pas de problème. Mais, ce soir, à 10 h 5, d'apporter cette modification comme ça... Je pense que les analyses n'ont pas été faites en ce sens-là. J'avais fait des analyses préliminaires suite à nos discussions. J'en ai parlé d'entrée de jeu. Je ne suis pas du tout fermée à ce qu'on regarde cette question-là, puis... Et je vais rapidement consulter les partenaires. Votre copie d'amendement, je la garde précieusement avec mes annotations et mon griffonnage, et il y a peut-être quelque chose qui pourrait être présenté, mais peut-être pas dans la forme actuelle de l'amendement.

C'est le message que je lance, M. le Président. Je ne suis pas fermée, ce n'est pas parce que je ne veux pas recevoir l'amendement que je ne comprends pas les préoccupations des collègues. Je les comprends très bien. Mais on pourrait le faire autrement que par cet amendement législatif parce que, vous savez, généralement, ce travail de réception des commentaires, et de partage, et de réflexion se fait, puis je ne voudrais pas briser cette...

Le Président (M. Gendron) : Est-ce que l'amendement est adopté? Veuillez poursuivre.

M. Jolin-Barrette : Oui. Deux points, M. le Président. Le premier, puisqu'on est dans les délais temporels, je comprends que la ministre nous dit : Je vais vous revenir rapidement. Est-ce qu'on peut avoir un délai temporel de sa part? Et, deuxièmement, on se retrouve, oui, à 10 h 5, oui, à 10 h 10, puis on rappellerait que c'est un choix du gouvernement de déposer son projet de loi à la dernière semaine et que nous, de notre côté, on a offert toute notre collaboration pour pouvoir étudier le projet de loi. Donc, quand on propose des amendements comme celui-ci, je pense que... Écoutez, nous, on a fait notre bout de chemin, ça aurait été le fun que le gouvernement fasse son bout de chemin également.

L'autre point important, ce que la ministre nous dit, ça réitère ce que je dis depuis le début : Lorsqu'on vient légiférer dans le domaine de la justice et que ça touche la magistrature, on devrait avoir un canal de communication pour que les parlementaires puissent interagir avec les magistrats d'une façon ordonnée, d'une façon balisée pour avoir leurs commentaires puis qu'on puisse en bénéficier tous ensemble. Donc, pour le délai temporel, peut-être, M. le Président.

Le Président (M. Gendron) : Oui, Mme la ministre.

• (22 h 10) •

Mme Vallée : Simplement, M. le Président, le projet de loi actuel vient modifier la Loi sur les tribunaux judiciaires. On ne vient pas modifier d'article du règlement. On vient simplement suspendre l'obligation de publier dans Le Journal du Barreau, donc on ne modifie pas le texte du règlement. Et les modifications qui sont apportées à la loi, bien, font suite à des consultations auprès de la magistrature. Alors, je comprends. Et puis, pour ce qui est du temps de l'élément temporel, bien, évidemment, ce ne serait pas... je ne vous reviendrai pas, d'ici la fin de la session, ça, je ne m'engagerai pas à ça parce que je sais qu'un de nos partenaires est sous des cieux plus cléments.

Le Président (M. Gendron) : Alors, oui.

M. Jolin-Barrette : Quand on va passer à l'article 6, on vient modifier le règlement.

Mme Vallée : ...son application pour une période temporelle.

M. Jolin-Barrette : On n'est pas loin.

Le Président (M. Gendron) : Bien, en tout cas, on pourra y aller à l'article 6 pour bien le comprendre.

Une voix : ...

Le Président (M. Gendron) : Alors, est-ce que ça veut dire qu'on vote sur l'amendement? Alors, l'amendement, adopté ou rejeté?

Mme Vallée : Rejeté.

Le Président (M. Gendron) : Rejeté. Alors, l'amendement...

Une voix : Sur division.

Le Président (M. Gendron) : Sur division, oui. C'est-à-dire, l'amendement proposé, rejeté sur division. Et nous en sommes maintenant à l'article 6, Mme la ministre, pour nous expliquer ce que vous croyez que ça veut dire.

Mme Vallée : Bien, en fait, l'article 6 prévoit que «la publication d'un avis dans Le Journal du Barreau[...], tel que prévu à l'article 7 du Règlement[...], n'est pas [requis] à l'égard d'un concours [qui vise] à pourvoir un poste de juge de la Cour du Québec ouvert dans les 180 jours suivant l'entrée en vigueur de la présente loi, pourvu qu'un tel avis soit publié dans un journal diffusé dans tout le Québec».

Donc, habituellement, les avis sont publiés dans Le Journal du Barreau. Malheureusement, on n'a pas de date de tombée avant le mois de février 2017, donc de s'en tenir à cette obligation-là reporterait le processus des candidatures. Et je dois vous dire que, si d'aventure le projet de loi était adopté, nous pourrions, dès demain, procéder aux publications d'avis dans les journaux, donc dans les journaux diffusés sur l'ensemble du territoire du Québec évidemment.

Et d'ailleurs nous avons également entrepris une discussion avec le Barreau qui transmettra, de plus, l'avis à l'ensemble de ses membres par courrier électronique, au même titre qu'il nous transmet les avis de formation permanente et d'offre de formation professionnelle. Donc, c'est ce qui est prévu et c'était pour permettre rapidement de procéder à l'envoi des avis.

Le Président (M. Gendron) : Commentaires, points de vue, Mme la députée de Joliette?

Mme Hivon : En fait, je pense que... je soumets une réflexion plus globale, à savoir que... Est-ce qu'effectivement cette obligation-là de publication dans Le Journal du Barreau a toujours vraiment sa raison d'être? Parce que ça entraîne un délai. Et je ramène ma question sur le trois mois que la ministre a dit qu'elle allait respecter. Donc comment, outre le fait qu'on ne publiera plus dans Le Journal du Barreau, quels moyens vont être mis en place pour s'assurer que les 16 nouveaux postes qui sont créés vont être pourvus dans le délai de trois mois, qu'elle s'est engagée à respecter hier?

Mme Vallée : ...travail s'effectue... je sais qu'il y a eu plusieurs échanges pour assurer la composition des comités, que rapidement puissent être désignés... que la juge en chef puisse désigner rapidement les présidents de comité, qu'on puisse procéder à la nomination des comités rapidement. Donc, le processus est déjà... tout le travail préparatoire, tout ce qui peut être fait et pouvait être fait sans, pour autant, prendre... tout ce qui pouvait être fait par le secrétariat a été fait, a été mis en place pour rapidement amorcer, je dirais, dès l'adoption du projet de loi, les démarches.

Alors, la juge en chef est sensibilisée à la question, l'Office des professions, qui fournit la liste des candidats, est sensibilisée. Donc, les démarches sont faites afin que l'office puisse rapidement transmettre les noms. Et c'est d'ailleurs un petit peu pour ça qu'on est appelés à travailler rapidement, parce qu'il y a tout ce cheminement-là qui doit s'effectuer et qu'on souhaite pouvoir effectuer. Alors, les intervenants sont sensibilisés.

Par ailleurs, pour ce qui est de la réflexion de la collègue quant à l'opportunité peut-être de revoir le règlement pour la publication du Barreau, bien je l'inscris aussi parce que c'est... dans Le Journal du Barreau, parce qu'il s'agit là effectivement d'un élément qui affecte le délai, parce qu'il y a certains concours pour lesquels la publication de l'avis est arrivée un petit peu plus tard puisqu'il n'y avait pas, par exemple, pendant la période estivale, de publication du Journal du Barreau. Alors, la révision va également porter sur cette question-là. Je suis bien d'accord, je partage tout à fait la question de la collègue, il y a des moyens, il y a un tas de moyens mis à notre disposition pour assurer de rejoindre le plus de juristes possible sur le territoire et peut-être même d'avoir une meilleure diversité au sein de la magistrature. Alors, je pense que c'est un souhait qui est partagé par plusieurs.

Le Président (M. Gendron) : Mme la députée de Joliette, ça vous va?

Mme Hivon : Ça va.

Le Président (M. Gendron) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui. Une question d'application. On disait, sur le comité, le juge en chef désigne, bon, un président sur le comité, deux personnes désignées par le Barreau du Québec, un avocat et une personne qui oeuvre dans le domaine du droit, deux personnes qui ne sont ni juge ni membre du Barreau ou de la Chambre des notaires désignées par l'Office des professions du Québec.

Les gens qui sont désignés par l'Office des professions du Québec, c'est ceux qui sont sur les listes de l'Office des professions, les mêmes qui sont désignés sur les conseils d'administration des ordres professionnels?

Mme Vallée : Pas nécessairement, parce que les membres qui sont nommés sur les conseils d'administration des ordres professionnels ont certaines connaissances et certaines compétences. Ce sont des personnes qui sont ici... Attendez.

(Consultation)

Mme Vallée : Bien, évidemment, l'article 17 prévoit les critères que l'office doit déterminer, là, s'assurer évidemment qu'au sein des comités il y a une parité entre les hommes et les femmes, s'assurer d'une représentation des communautés culturelles et de la population de la région. Donc, ce sont des banques de personnes qui soumettent leur intérêt à l'office, qui font connaître leur intérêt à l'office, dont la candidature est évaluée, et, dans chaque région, l'office va désigner une personne. Parce que ce n'est pas nécessairement les mêmes personnes qui sont intéressées à siéger au conseil d'administration, parce que la charge de travail, l'implication est tout à fait différente. Mais ces gens-là ont manifesté leur intérêt à l'office et l'office a une banque régionale de personnes intéressées.

M. Jolin-Barrette : ...président, est-ce que c'est le conseil d'administration?

Mme Vallée : C'est le conseil d'administration, alors c'est pour ça, je sais que l'office a un conseil d'administration dans les prochains jours, donc, si d'aventure la loi était adoptée, l'office pourrait, au cours des prochains jours, rapidement désigner les personnes qui permettraient de constituer le comité de sélection, aussi, rapidement.

M. Jolin-Barrette : Ça, c'est des listes qui seront modifiées par le projet de loi n° 98, donc...

Mme Vallée : Je doute que le C.A. de l'office soit modifié d'ici la fin de cette session. Je veux bien travailler fort, mais là je pense que...

M. Jolin-Barrette : Je comprends. Je comprends. Puis rappelez-nous, sur le C.A. de l'office, il y a le président de l'office, il y a un membre désigné par le CIQ...

Mme Vallée : Oui. Je n'ai pas la composition avec moi, là, je suis désolée, là, ce soir, là, je n'ai pas...

M. Jolin-Barrette : O.K. Mais, tout de même, on comprend que ces gens-là, pour les prochains concours, pour les 16 prochains concours, là, de juges de la Cour du Québec, eux, vont être capables de faire leur travail en dedans de trois mois.

Mme Vallée : Oui. Il y a un C.A. spécial qui sera convoqué pour permettre d'établir, en fonction des affectations, en fonction des régions, des personnes. Parce qu'on s'entend, là, à Montréal, ce ne sera pas les mêmes personnes qu'en Montérégie.

M. Jolin-Barrette : Mais on s'entend que la ministre de la Justice devrait recevoir le rapport d'ici trois mois — c'est le désir, dans le fond, du législateur ce soir — mais...

Mme Vallée : C'est le souhait.

• (22 h 20) •

M. Jolin-Barrette : C'est le souhait. Mais je reviens avec ma proposition d'amendement. Si on le formule et on le souhaite pour ça, on aurait pu l'indiquer par voie législative avec un critère d'exception quand il arrive quelque chose. Je vous le dis, M. le Président : Je comprends ce que la ministre m'a dit tout à l'heure, son ouverture, mais ce que je veux dire : Si c'est ce qu'elle souhaite, concrètement, il faudrait l'indiquer dans la loi, dans le règlement. C'est notre job, là, de faire ça.

J'ai une dernière question relativement à l'article 6. On dit «dans un journal diffusé dans tout le Québec». On entend «journal diffusé», journal papier?

Mme Vallée : En effet, oui. Bien, journal papier, mais on a plusieurs journaux aussi qui sont et papiers et électroniques.

M. Jolin-Barrette : Non, mais je vous donne un exemple, là. La Presse+, ce n'est pas visé par l'article 6.

Mme Vallée : Non. En fait, le journal diffusé, c'est... on est dans le journal papier pour avoir cet accès. Je ne sais pas, puis je vais vous dire bien honnêtement, je ne sais pas si les offres d'emploi se retrouvent dans La Presse+ ou les avis; je ne crois pas, je ne crois pas qu'on les ait. Mais c'est parce que je l'ai... peut-être que ma lecture de La Presse+ est plutôt sur le contenu...

M. Jolin-Barrette : Je veux juste m'assurer que ça soit clair qu'on s'entend que c'est un journal papier diffusé à la grandeur du Québec.

Mme Vallée : Oui. En fait, l'objectif, oui, journal papier. Maintenant, si le journal papier ou si le journal en question publie ses avis par voie électronique, tant mieux. Il y aura aussi publication sur le site Internet du ministère de la Justice, je pense que c'est important, bien que ce soit... Le site est quand même là. Il y aura l'envoi d'un message évidemment de l'avis par le Barreau du Québec à ses membres via courriel, donc le député de Borduas recevra également l'avis.

M. Jolin-Barrette : Je ne pourrai pas appliquer, par contre.

Mme Vallée : Ah!

Le Président (M. Gendron) : Est-ce que l'article 6 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Gendron) : Adopté. L'article 7, c'est la mise en vigueur. L'article 7.

Mme Vallée : Oui. Donc : La présente loi entrera en vigueur le jour de la sanction.

Le Président (M. Gendron) : Est-ce qu'il y a des commentaires? Il n'y a en a pas. Est-ce que l'article 7 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Gendron) : Adopté. Alors, est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Gendron) : Est-ce que la motion d'ajustement des références est adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Gendron) : La commission plénière ayant accompli son mandat, je mets fin à ses travaux et je remercie toutes celles et ceux qui y ont contribué, qui y ont participé pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance. Je suspends les travaux pour quelques instants.

Les travaux sont suspendus.

(Suspension de la séance à 22 h 23)

(Reprise à 22 h 25)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, M. le député.

Prise en considération du rapport de la commission
plénière qui en a fait l'étude détaillée

M. Hardy (président de la commission plénière) : Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n° 125, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires, et qu'elle l'a adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Sans amendement.

M. Hardy : Sans amendement.

Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Gendron) : Vous devez lire au complet. Alors, ce rapport est-il adopté? Merci.

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Ce rapport est adopté. M. le leader du gouvernement.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Tanguay : Oui, bonjour, M. le Président. Alors, je propose, M. le Président, je propose l'adoption du projet de loi.

Des voix : ...

M. Tanguay : Il y a un article pour l'adoption?

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui.

M. Tanguay : Voilà.

Le Vice-Président (M. Gendron) : ...consentement pour déroger à l'article 22 du règlement, prévoyant qu'un projet de loi présenté après le 15 novembre ne peut être adopté pendant la période des travaux en cours de laquelle il a été présenté? Alors, il faut qu'il y ait consentement. Y a-t-il consentement?

Des voix : ...

Adoption

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, est-ce à dire que le projet de loi n° 125, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires, est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Adopté. Et, M. le leader adjoint du gouvernement, je crois...

M. Tanguay : Le projet de loi est adopté. Alors, pouvez-vous suspendre une minute, M. le Président? On va suspendre une minute, oui.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, on peut suspendre une demi-minute.

Les travaux sont suspendus une demi-minute.

(Suspension de la séance à 22 h 26)

(Reprise à 22 h 27)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Bon, très simplement, ce que je comprends, c'est qu'il est souhaité qu'il y ait quelques petites interventions pour finir le travail. Alors, je suis prêt à entendre Mme la ministre sur les quelques mots qu'elle a à nous dire sur l'adoption finale.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : Évidemment, M. le Président, premier mot : merci aux collègues de l'opposition pour leur collaboration. Je pense que ce projet de loi vise à doter la Cour du Québec, la Cour supérieure, la Cour d'appel de ressources additionnelles qui sont nécessaires et qui sont nécessaires à la saine administration de la justice sur le territoire du Québec, un projet de loi qui s'inscrit dans une vaste stratégie d'action, dans une foulée de changements importants de notre système de justice. Ce projet de loi fait suite évidemment aux travaux de la Table Justice, tout un travail face au changement de culture, tout un travail aussi face à l'ajout de ressources additionnelles à l'intérieur de notre système de justice. Et ces ressources-là, quant à la constitution des tribunaux, elles sont nécessaires.

Maintenant, je ne veux pas refaire... On a parlé abondamment, on a eu la chance d'échanger. Je vous dirais que l'exercice de cet après-midi et de ce soir aura sans doute... nous aura permis de parler de façon très libre de l'administration de la justice, permettre d'échanger sur ces enjeux-là. Je reconnais que mon collègue de Borduas, ma collègue de Joliette partagent le même intérêt, la même préoccupation que moi. On le voit parfois différemment, mais je pense qu'on a réussi ce soir à s'entendre sur tout ça.

Alors, M. le Président, je remercie mes collègues, je remercie l'équipe qui m'accompagnait, du ministère de la Justice, et je profite de l'occasion pour saluer nos amis les juristes de l'État qui sont dans les tribunes.

Et, M. le Président, évidemment, comme dans toute chose, l'honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et il en recommande l'étude à l'Assemblée.

• (22 h 30) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci. Je reconnais maintenant Mme la porte-parole de l'opposition officielle pour son intervention. Mme la députée de Joliette, à vous.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Oui, merci, M. le Président. Alors, je suis heureuse, au nom de l'opposition officielle, d'en être à cette étape où nous pouvons adopter de manière finale le projet de loi n° 125, loi visant à modifier la Loi sur les tribunaux judiciaires. La ministre de la Justice et moi-même sommes habituées à collaborer. On l'a fait de plusieurs manières depuis des années sur plusieurs projets de loi et autres démarches. Et je suis heureuse qu'on ait pu collaborer ce soir à nouveau pour l'adoption de ce projet de loi.

Il y a des moments où une opposition et un gouvernement n'ont pas le même point de vue. On l'a vu, ça a été le cas dans les dernières semaines. On a vécu des moments d'une grande intensité dans tout ce qui a trait aux débats parlementaires et politiques en lien avec la crise qu'on vit dans le milieu du système de justice criminelle. Ça ne fait pas en sorte qu'on n'est pas capables de collaborer quand le temps de collaborer est requis. C'est ce qu'on a fait ce soir. Et je pense que c'est comme ça qu'il faut travailler aussi pour faire avancer les intérêts supérieurs de notre système de justice.

Donc, je veux remercier la ministre et toute son équipe, sa petite équipe qui ne bénéficie pas des services des juristes de l'État dont nous espérons tous le retour très, très prochain, les collègues, le collègue de Borduas et les collègues de l'Assemblée qui ont veillé tard avec nous ce soir, mais c'était pour une très, très bonne cause.

La ministre me permettra, en terminant, de lui réitérer que nous souhaitons et nous... par ce que nous avons entendu ce soir, nous espérons que vraiment tous les moyens seront mis de l'avant, y compris de manière très, très urgente, dans l'intervalle où les mesures qui ont été annoncées hier et qui sont contenues au projet de loi puissent prendre pleinement effet, que tout soit mis en oeuvre pour que la crise que nous traversons ne fasse pas en sorte que d'autres accusés soient libérés, que d'autres procès avortent, et que vraiment tout puisse être mis en place et que toutes les options, y compris celles que nous lui avons soumises, puissent être étudiées, et que la collaboration du fédéral soit vraiment requise, plaidée avec toute la force qui est requise dans les circonstances.

Donc, voilà essentiellement ce que nous avions à dire, et nous allons suivre avec intérêt le déploiement de ces ressources-là. Et, en terminant, je pense que nous avons fait du chemin en matière de justice criminelle. Nous espérons que ces mesures-là vont avoir un impact concret très rapidement. Évidemment, notre système de justice est plus large, et je pense qu'il y a des gens qui sont jaloux de voir tout l'intérêt qu'on porte à la justice criminelle. C'est requis parce que l'état de crise le commande en ce moment, mais je pense que l'idée d'états généraux sur la justice, je sais que la ministre n'y est pas fermée. C'est une demande du milieu. Je pense qu'on est vraiment dus pour ça et que ce qu'on vit en ce moment dans le dossier criminel, mais globalement, le commanderait, et nous réitérons cette demande. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, Mme la députée de Joliette. Et maintenant, je cède la parole à M. le député de Borduas pour son intervention. M. le député de Borduas, à vous.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Bien, écoutez, on intervient sur l'adoption finale du projet de loi n° 125. Je vais remercier les collègues parlementaires, la ministre, les collègues de la partie gouvernementale, la députée de Joliette, mon collègue de Groulx, qui m'a accompagné pour la soirée ici, c'est fort apprécié, remercier également Mme Amélie Coulombe, qui travaille au Service de la recherche de notre formation politique.

Écoutez, on ne peut pas dire, M. le Président, que l'opposition n'est pas flexible et constructive, hein? On a dérogé aux règles parlementaires qui s'appliquent. Je pense que ça démontre une grande ouverture de notre part, lorsqu'il y a des dossiers importants, de travailler en collaboration avec le gouvernement. De notre côté, on tente toujours d'améliorer le projet de loi. Parfois, nos amendements ne sont pas retenus. Ceci étant dit, nous avons un engagement qu'il y aura une réflexion et que nous reviendrons dans des délais, dans certains délais. Espérons que ce ne sont pas les délais de la justice criminelle. Je le souhaite abondamment. Je souhaite qu'on investisse des ressources en termes de temps pour nous revenir. Et vous pouvez être certain, M. le Président, qu'il est nécessaire de réinvestir dans le système de justice, mais aussi on va devoir demeurer vigilant, M. le Président, parce que ce n'est pas uniquement une question d'argent, mais c'est une question aussi de méthode de travail. Et aussi les gens doivent sentir que le système de justice est à leur service et non pas le contraire. Ça passe par la magistrature. Ça passe par le service à la clientèle qu'on offre dans les palais de justice, ça passe par le Barreau, la Chambre des notaires. Et donc notre formation politique est satisfaite de pouvoir donner son appui.

Ceci étant dit, il reste du travail à faire, et on va continuer, vous pouvez en être certain, M. le Président, à parler le plus souvent possible, tant que le leader du deuxième groupe d'opposition va me le permettre, de poser des questions en matière de justice ici, dans cette Assemblée.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Finalement, pour conclure, même la présidence a collaboré en dérogeant à l'horaire qui était fixé. Alors, la présidence a collaboré aussi.

Mise aux voix

Alors, est-ce à dire, en finale, que le projet de loi n° 125, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires, est adopté?

Des voix : Adopté.

Ajournement

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, si le projet est adopté, moi, je suspends... j'ajourne, pardon, les travaux jusqu'à demain, 9 h 40, pour la poursuite. Les travaux sont ajournés.

(Fin de la séance à 22 h 36)