(Treize heures quarante minutes)
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, bonjour à toutes,
bonjour à tous. Prenez place. Nous allons débuter nos travaux.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Nous sommes à la rubrique Déclarations de
députés, et, sans plus tarder, je reconnais M. le député de Nicolet-Bécancour.
Rendre hommage à
M. Louis-Marie Jutras et souligner le succès
de l'entreprise Les Cultures de chez nous
M. Donald Martel
M. Martel : M. le Président, je
suis fier de souligner, aujourd'hui, l'excellence d'une famille d'agriculteurs
de Sainte-Brigitte-des-Saults, dirigée avec passion par M. Louis-Marie
Jutras.
Son entreprise, Les Cultures de chez nous, est
un chef de file québécois dans la culture du poireau. Elle s'est d'ailleurs classée au premier rang national,
catégorie Or, au prestigieux concours de l'Ordre national du mérite
agricole 2024.
Ce succès
remarquable s'explique de bien des façons : des aliments de qualité
supérieure produits selon les pratiques agricoles durables, une mise en marché axée sur l'audace et l'innovation
et, enfin, une gouvernance collaborative qui met en valeur le bien-être
et le talent des employés.
La famille
Jutras incarne ce que le Québec fait de mieux. En lui rendant hommage
aujourd'hui, c'est tout le Québec agricole que je veux saluer.
Bravo, Louis-Marie Jutras!
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Bravo,
M. Jutras! Merci, M. le député de Nicolet-Bécancour.
Et la parole revient maintenant à Mme la députée
de Mille-Îles.
Souligner le Jour de la Terre
Mme Virginie Dufour
Mme Dufour : Merci,
M. le Président. En ce Jour de la Terre, soulignons l'importance de préserver
la faune et la flore de notre précieuse planète.
Aujourd'hui
et demain, rappelons-nous notre devoir envers les générations futures, celui de
répondre à l'urgence climatique et d'agir face au déclin dramatique de
la biodiversité.
Nous devons poser des gestes forts en matière de
protection des milieux humides, qui sont essentiels à la biodiversité. Les milieux humides permettent la
séquestration du carbone et jouent un rôle clé dans la réduction des inondations
et la lutte aux îlots de chaleur.
Malgré
l'annonce du Plan nature 2030 et l'engagement du Québec lors de la COP15
sur la biodiversité, des dossiers comme Northvolt et Stablex nous confirment
l'importance de rester vigilants face à la destruction des milieux naturels.
Chaque jour,
adoptons un geste de plus pour protéger la richesse écologique de notre unique
planète. Bon Jour de la Terre à tous!
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de
Mille-Îles. Et je cède maintenant la parole à M. le député de
Saint-Jean.
Souligner la Semaine de
l'action bénévole
M. Louis Lemieux
M. Lemieux : M. le Président,
il faut qu'on se parle de bénévolat, parce que ce dimanche marquera la première
journée de la 51e édition de la Semaine de l'action bénévole.
Mais, voilà,
on va se le dire, le bénévolat n'est plus ce qu'il a déjà été. Il y a de plus
en plus de besoins, mais de moins en moins de bénévoles. Que ce soit dans nos
CAB, les centres d'action bénévole, qui font un travail essentiel et
remarquable, ou dans les organismes dont l'action est basée sur le bénévolat,
comme le Club des petits déjeuners, par exemple,
on passe de plus en plus de temps à recruter des bénévoles, c'est de plus en
plus difficile, et de moins en moins de temps pour aider et servir la
clientèle, que ce soit pour faire des raccompagnements, ou de popoter, ou
livrer des repas aux aînés.
Il faut en parler, et
c'est ce que je vais faire, dimanche, en remettant deux médailles du député de
l'Assemblée nationale à des bénévoles pour saluer et remercier tous ceux et
celles qui incarnent le service à la communauté. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député de Saint-Jean. Au tour, maintenant, de M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
Souligner le
20e anniversaire de Patin Libre
M. Alexandre Leduc
M. Leduc : Merci, M. le
Président. Aujourd'hui, je souhaite prendre le temps de souligner le
20e anniversaire de Patin Libre.
Patin Libre, c'est une compagnie montréalaise,
hochelagaise, de patinage contemporain, fondée en 2005 par une poignée
d'athlètes de haut niveau. Ils et elles se sont regroupés dans le désir de
pousser le patinage dit artistique encore plus loin. Ils ont donc laissé de
côté les habits de patinage classiques pour créer des oeuvres uniques et des
chorégraphies grandioses.
Il n'y a pas à dire, ces artistes athlètes,
depuis 20 ans, ont révolutionné le patinage et se sont taillé une place à
l'international.
Par ailleurs, leur dernier spectacle, Murmuration,
offre autant de prestations chez nous, à Montréal ou à Amqui, que dans l'Ouest
canadien ou en Allemagne.
Soulignons
aussi leur atelier chorégraphique, qui invite jeunes et moins jeunes à
s'initier à cette forme d'art, autant sur roulettes que sur glace.
Je félicite
et remercie donc Alexandre Hamel et toute l'équipe de la compagnie Patin Libre
de nous faire vibrer et de faire rayonner notre culture, tant ici, au
Québec, qu'à l'international, depuis plus de 20 ans. Félicitations!
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve. Et je cède maintenant la parole à Mme la
députée des Chutes-de-la-Chaudière.
Souligner la tenue d'un
spectacle-bénéfice présenté par Beautés Fatales
au profit du département de pédopsychiatrie de l'Hôtel-Dieu de Lévis
Mme Martine Biron
Mme Biron : Merci, M. le
Président. Ce vendredi, le projet Beautés Fatales présentera la deuxième
édition de son spectacle-bénéfice au profit du département de pédopsychiatrie
de l'Hôtel-Dieu de Lévis. Les fonds amassés s'ajouteront à ceux déjà recueillis
plus tôt dans l'année et serviront à améliorer le séjour de jeunes
hospitalisés.
Initié en 2017 par Mélissa Lemieux, enseignante
à l'école l'Horizon, Beautés Fatales vise à développer une meilleure estime de soi chez les adolescents par
l'entremise de diverses activités. Je tiens d'ailleurs à saluer
Mme Lemieux, accompagnée de Stacy Gagnon et des élèves Mélodie et
Roselyn, présentes dans les tribunes.
Félicitations
à vous et toutes les personnes impliquées dans Beautés Fatales pour votre
engagement remarquable envers le mieux-être des jeunes! Votre impact est
réel et significatif, et j'espère que vos actions sauront inspirer d'autres
établissements scolaires au Québec.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. La parole revient maintenant à Mme la
députée de Robert-Baldwin.
Souligner le Mois du
patrimoine sikh
Mme Brigitte B. Garceau
Mme Garceau : Merci,
M. le Président. En ce mois d'avril, nous soulignons le Mois du patrimoine sikh
au Québec. C'est un moment privilégié pour reconnaître et célébrer les
contributions exceptionnelles des Québécoises et des Québécois d'origine sikh à
notre société.
As part of Sikh Heritage Month,
I had the pleasure of attending the Vaisakhi festival at the Gurudwars Sahib temple, located in my riding. This was an
important celebration of faith, harvest, and the founding of the Khalsa. This
moment also served as a reminder of the enduring fundamental culture
values of Sikhism of equality, social justice, compassion, and community service, which inspire concrete
actions on a daily basis. These values, deeply rooted in Sikh tradition,
resonate strongly with the ideals we collectively share.
Ce mois est aussi une
invitation à mieux connaître cette riche culture, son histoire et ses
traditions.
We are honored to join the Sikh
community in celebrating this special month of recognition and pride.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
Mme la députée de Robert-Baldwin. Et je reconnais maintenant M. le député de Deux-Montagnes.
Souligner le Jour de la Terre
M. Benoit
Charette
M. Charette : Merci, M. le Président.
Aujourd'hui, c'est le Jour de la Terre, et, cette année, la thématique mise
de l'avant est celle de la biodiversité, c'est pourquoi j'aimerais souligner en
cette Chambre l'importance de la nature et de tous les bénéfices qu'elle nous
apporte.
La nature est un
pilier essentiel à la santé de notre planète, à la vitalité économique et à
notre qualité de vie. La nature et sa
biodiversité sont au coeur de la culture, de l'identité et du mode de vie des
Québécoises et des Québécois. Nous avons le privilège de vivre sur un
territoire exceptionnel, riche de milieux naturels uniques et d'une
biodiversité précieuse mais aussi fragile.
Partout
sur la planète, les écosystèmes sont sous pression, c'est pourquoi nous
agissons maintenant pour inverser cette
tendance. Rappelons qu'à l'automne dernier nous avons dévoilé notre Plan
nature, qui vise notamment à conserver 30 % de notre territoire
d'ici 2030.
En
cette journée de la Terre, soulignons les progrès réalisés et poursuivons
ensemble nos efforts pour un Québec riche et fier de sa nature. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Merci, M. le député de Deux-Montagnes. Et la
parole revient maintenant à Mme la députée de Terrebonne.
Souligner
le travail de La HUTTE
Mme Catherine
Gentilcore
Mme Gentilcore : Merci, M. le Président. J'aimerais
souligner, aujourd'hui, l'apport inestimable de La HUTTE,
hébergement d'urgence pour les personnes en situation d'itinérance, un
organisme essentiel basé à Terrebonne.
La HUTTE, c'est bien
plus qu'un lieu d'hébergement temporaire, c'est un véritable pilier de soutien
pour les personnes en situation d'itinérance dans tout Lanaudière. Dans un
contexte où cet enjeu social ne cesse de prendre de l'ampleur, La HUTTE adapte ses services avec rigueur, humanité et
innovation, en offrant des programmes d'accompagnement qui favorisent une sortie durable de la rue et une
transition stable vers un logement. Par son expertise et son engagement,
elle contribue à l'insertion socioprofessionnelle des personnes et au
renforcement de leur autonomie.
C'est en misant sur
des partenaires solides comme La HUTTE que nous pouvons bâtir des milieux de
vie plus inclusifs, plus humains et mieux
outillés pour affronter les défis de l'itinérance. J'aimerais donc remercier
François Savoie, Anouk Lussier et toute l'équipe de La HUTTE pour leur
travail indispensable. Merci, M. le Président.
• (13 h 50) •
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Terrebonne. Et la parole
revient maintenant à Mme la députée de Repentigny.
Souligner
la Semaine de l'action bénévole
Mme Pascale
Déry
Mme Déry :
Merci beaucoup, M. le Président. Alors, la semaine prochaine, M. le
Président, c'est la Semaine de l'action
bénévole, et l'engagement de nos bénévoles, particulièrement, évidemment, dans
ma circonscription et dans ma MRC, joue un rôle fondamental dans le
domaine de l'éducation. Ils enrichissent l'apprentissage, le développement des
individus, notamment auprès des jeunes, mais auprès des aînés également.
Alors, dans le cadre
de l'éducation des aînés, les bénévoles de nos organismes animent des sessions
sur des sujets variés tels que
l'informatique, la santé, l'histoire et leurs droits, aussi. L'interaction
entre bénévoles et participants crée, bien sûr, un environnement qui est
très propice à l'échange d'idées et aussi de socialisation.
Puis,
pour nos jeunes, évidemment, les bénévoles offrent un soutien essentiel. Leur
présence contribue à stimuler la motivation et l'engagement, tout en
leur fournissant des modèles positifs. De plus, ces interactions permettent de
développer des compétences sociales et émotionnelles essentielles pour le
développement personnel.
Alors, la
contribution de tous les bénévoles ne se limite pas à l'engagement des
connaissances, mais joue un rôle excessivement important. Alors, je veux
remercier tout le monde et leur souhaiter une bonne Semaine d'action bénévole.
Merci.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
Mme la députée de Repentigny. Et je reconnais maintenant Mme la députée
de Verchères.
Souligner
le 30e anniversaire de La Maison de la Famille Joli-Coeur
Mme Suzanne
Roy
Mme Roy (Verchères) : Merci, M.
le Président. Aujourd'hui, je prends la parole pour souligner l'anniversaire de
La Maison de la Famille Joli-Coeur.
Établie à Contrecoeur
depuis 30 ans, cet organisme s'engage à développer un milieu sain,
stimulant et chaleureux pour les familles.
Par leur service de garde, leur brigade scolaire, les activités adaptées aux
besoins des enfants et des parents, elle offre une belle escapade aux
enfants et un grand répit aux parents.
Je tiens particulièrement à saluer la directrice
générale, Mme Cindy Mathers, qui est présentement en tribune pour
représenter son incroyable équipe et les bénévoles. C'est vraiment une occasion
spéciale qu'il faut souligner. Vos efforts acharnés pour offrir autant de
services méritent les plus grandes salutations. Bravo!
En terminant,
je veux souhaiter un bon 30e anniversaire à La Maison de la Famille
Joli-Coeur. Et que les 30 prochaines années soient tout autant
remplies de succès. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de
Verchères. Et je reconnais maintenant Mme la députée de Rimouski.
Souligner la performance d'une
délégation de l'Université Laval
aux Jeux miniers canadiens
Mme Maïté Blanchette
Vézina
Mme Blanchette Vézina : Merci.
Merci, M. le Président. Je tiens à souligner l'excellence et l'engagement de la
délégation de l'Université Laval aux récents Jeux miniers canadiens, qui a
réalisé des performances remarquables en montant sur le podium à
17 reprises, ce qui leur a assuré une deuxième place au classement
général. Ils sont dans les tribunes avec nous, d'ailleurs.
Je souhaite féliciter tout particulièrement les
co-capitaines, Isak Talbot et Arielle Girard, deux finissants en génie des
mines et de la minéralurgie, pour leur leadership exemplaire tout au long de
cette aventure.
Je souligne également la relève assurée pour la
prochaine édition des jeux avec la nomination de Samuel Girard et Mike
Lalancette à titre de nouveaux capitaines.
M. le
Président, le secteur minier joue un rôle fondamental dans l'économie du
Québec. Source de milliers d'emplois de qualité, moteur de développement
régional et pilier de la transition énergétique, cette industrie est appelée à
croître de manière responsable et durable.
Former la relève dans ce domaine est donc essentiel pour assurer l'avenir
économique et environnemental du Québec.
Bravo à toute
l'équipe de l'Université Laval pour votre fierté, votre détermination et votre
rayonnement! Le Québec est fier de vous.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
Mme la députée de Rimouski. Alors, bravo à vous! Et bienvenue à l'Assemblée
nationale, bienvenue avec nous.
Je reconnais maintenant M. le député de Borduas.
Rendre hommage à Me André
Allard
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Bonjour, M.
le Président. Je souhaite profiter de mon temps de parole, aujourd'hui, pour rendre hommage à Me André Allard, qui est dans les
tribunes avec nous aujourd'hui, un citoyen qui a consacré la majeure
partie de sa carrière à la protection des consommateurs.
Me Allard a été juriste à l'Office de la
protection du consommateur au début des années 2000. Par la suite, il a
dirigé la Direction des affaires juridiques de l'organisme pendant 15 ans,
avant de prendre sa retraite récemment.
Parmi ses
nombreuses contributions, Me Allard a été l'un des principaux artisans de la
Politique d'exactitude des prix. Au
fil du temps, M. le Président, il a également participé à la mise à jour de
mesures importantes sous la responsabilité de l'office, tel que la bonification de la couverture du Fonds
d'indemnisation des clients des agents de voyages, les règles en matière
d'hébergement en temps partagé, les changements liés à la réparabilité des
biens, ainsi que le resserrement des règles propres au crédit, pour ne
nommer que celles-ci.
Me Allard, merci pour votre engagement, votre
dévouement exceptionnel au service de l'État. Votre travail a été déterminant
dans l'évolution du droit et de la protection des consommateurs. Bonne retraite
et merci mille fois!
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député de Borduas. Alors, je me joins au député de Borduas pour vous
souhaiter aussi à vous, Me Allard, bonne retraite.
Alors, voilà
qui met fin à la rubrique Déclarations des députés. Je remercie chacun des
collègues pour votre déclaration.
Et nous allons suspendre les travaux quelques
instants.
(Suspension de la séance à 13 h 55)
(Reprise à 14 h 04)
La
Présidente : Bonjour, tout le monde. Messieurs dames,
bienvenue. Le parlement du Québec, c'est chez vous.
Messieurs dames les
députés, nous allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie beaucoup. Veuillez vous
asseoir.
Présence
de l'ambassadrice de la République des
Philippines, Mme Maria Andrelita Austria
J'ai le plaisir, aujourd'hui, de souligner, dans
les tribunes, la présence de l'ambassadrice de la République des Philippines,
Son Excellence Mme Maria Andrelita Austria, à l'occasion de sa visite
officielle.
Et nous poursuivons les affaires courantes.
Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations
ministérielles ni présentation de projets de loi.
Dépôt
de documents
À la rubrique Dépôt de documents, M. le ministre
de la Sécurité publique. Vous en avez beaucoup, ce matin.
M.
Bonnardel : Mme la
Présidente, permettez-moi de déposer les avenants n° 3
aux ententes des services policiers dans les communautés d'Odanak et de Wôlinak
ainsi que d'Essipit pour la période du 1er avril 2018 au 31 mars
2028, les avenants n° 4 sur la prestation des
services policiers dans les communautés de Pessamit pour la période du 1er avril 2018 au 31 mars
2028, d'Abitibiwinni pour la période du 1er avril 2018 au 31 mars
2028, de Kebaowek pour la période du
1er avril 2018 au 31 mars 2025, d'Uashat-Maliotenam pour la période
du 1er avril 2020 au 31 mars 2030, Wemotaci pour la période du
1er avril 2018 au 31 mars 2028, et dans le village naskapi de
Kawawachikamach pour la période du
1er avril 2018 au 31 mars 2025, les avenants n° 5
sur la prestation des services policiers dans les communautés de
Listuguj pour la période du 1er avril 2018 au 31 mars 2019, de Pakua
Shipi pour la période du 1er avril 2018 au 31 mars 2023, Manawan pour la période du 1er avril 2019 au
31 mars 2029, Lac-Simon pour la période du 1er avril 2018 au
31 mars 2025,Kitigan Zibi pour la période du 1er avril 2018 au
31 mars 2028, Timiskaming pour la période du 1er avril 2018 au 31 mars 2028, Wendake pour la période du
1er avril 2018 au 31 mars 2028, d'Opitciwan pour la période du
1er avril 2018 au 31 mars 2028, de Mashteuiatsh pour la période du
1er avril 2018 au 31 mars 2025, de Kahnawake pour la période du 1er avril 2019 au 31 mars 2029, les
avenants n° 6 à l'Entente sur la prestation des services
policiers dans la communauté de
Gesgapegiag pour la période du 1er avril 2018 au 31 mars 2025,
l'Entente sur la prestation des services policiers dans la région de
Kativik pour la période du 1er octobre 2024 au 31 mars 2029, et le décret
n° 421-2025 concernant la Convention complémentaire n° 4 à la Convention du Nord-Est québécois entre la Corporation
foncière naskapie de Schefferville, la Société Makivik, le Gouvernement de la
nation crie, le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada.
La Présidente : Ces documents sont
déposés. M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bonjour,
Mme la Présidente. Je dépose les réponses aux questions inscrites au feuilleton
le 18 mars 2025 par le député de Taschereau, le 20 mars 2025 par le
député de Marguerite-Bourgeoys, le 25 mars
2025 par la députée de D'Arcy-McGee, et les réponses aux pétitions déposées en
Chambre le 19 mars 2025 par la députée de Sherbrooke. Merci.
La Présidente : Ces documents sont
déposés.
Pour ma part, je dépose des décisions du Bureau
de l'Assemblée nationale.
Je dépose également le rapport détaillé du Directeur
général des élections du Québec sur les récents... résultats officiels du
scrutin de l'élection partielle du 17 mars 2025 dans la circonscription
électorale de Terrebonne.
Enfin, j'ai
reçu préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain aux
affaires inscrites par les députés de l'opposition. Conformément à
l'article 97.1 du règlement, je dépose copie du texte de ce préavis.
Dépôt
de rapports de commissions
À la rubrique
Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission de l'aménagement du territoire
et député de Drummond—Bois-Francs.
Auditions
et étude détaillée du projet de loi n° 214
M.
Schneeberger :
Merci, Mme la Présidente. Alors, je dépose le rapport de la Commission de
l'aménagement du territoire qui, le 22 avril 2025, a procédé à l'audition
des intéressés et à l'étude détaillée du projet de loi privé n° 214, Loi
concernant la Ville de Rouyn-Noranda. Et la commission a adopté le texte du
projet de loi sans amendement.
Mise
aux voix du rapport
La Présidente : Et est-ce que ce
rapport est adopté? Adopté.
Et Mme la
présidente de la Commission spéciale
sur les impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le
développement des jeunes et députée de Rivière-du-Loup—Témiscouata.
Consultations particulières sur les impacts des écrans et
des réseaux
sociaux sur la santé et le développement des jeunes
Mme Dionne : Mme
la Présidente, je dépose le rapport intérimaire de la Commission spéciale sur
les impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le développement
des jeunes. Ce rapport contient une recommandation. Merci, Mme la Présidente.
(Applaudissements)
La Présidente :
Et, à cette étape-ci, les députés ont le droit d'applaudir.
Modification à la composition de commissions
parlementaires
Pour
ma part, je dépose le rapport du comité directeur de la Commission de l'Assemblée nationale qui s'est tenu le 17 avril 2025 afin
de statuer sur la demande des députés du Parti québécois pour devenir membres
d'une commission parlementaire.
Je cède maintenant la
parole à Mme la deuxième vice-présidente et députée de Mirabel.
Motion proposant d'adopter les modifications
La Vice-Présidente
(Mme D'Amours) : Mme la Présidente, je propose :
«Que
les modifications à la composition des commissions telles que prévues au
rapport du comité directeur de la Commission de l'Assemblée nationale
soient adoptées.»
La Présidente :
Et est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 129 du règlement
et à l'article 4.4 des règles de fonctionnement? Consentement?
Consentement.
Mise aux voix
Cette motion est-elle
adoptée?
• (14 h 10) •
Des voix :
Adopté.
La Présidente :
Adopté.
Il n'y a pas de dépôt
de pétitions.
Il n'y a pas de
réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de
droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous en sommes
maintenant rendus à la période de questions et de réponses orales, et, pour ce
faire, je cède la parole, en question principale, au chef de l'opposition
officielle.
Gestion des finances publiques
M. Marc Tanguay
M. Tanguay :
Mme la Présidente, récemment la CAQ a déposé son septième budget, et, là aussi,
on a pu constater l'ampleur de la perte de contrôle. La CAQ a tellement
gaspillé qu'ils n'en ont plus, d'argent.
Mercredi dernier,
coup de tonnerre, S&P a décoté le Québec. Ça, ça a des impacts très
tangibles pour les Québécoises et Québécois,
qui vont payer plus cher d'intérêts sur les sommes, notamment, empruntées, ce
qui faisait dire, le 17 avril dernier, à Tommy Chouinard, dans La Presse,
et je le cite : «Un coup particulièrement dur pour le premier ministre, qui a présenté son équipe comme un
gouvernement de comptables.» Fin de la citation. Là, on le sait, c'est clair,
Mme la Présidente, c'est un gouvernement de comptables qui ne sait pas compter.
Également,
rappelez-vous, en 2012, le chef de la CAQ, en 2012, déchirait sa chemise sur la
place publique face à Pauline Marois, qui avait un déficit pas de
13,6 milliards mais de 1,6 milliard, ce qui le faisait dire, face à Pauline Marois, ce qui suit, et je le
cite : «Je me mets à la place des agences. Ils doivent avoir hâte d'avoir
une visite de la première ministre, puis pas pour aller faire du shopping, pour
vraiment discuter des finances du Québec.» Fin de la citation exacte,
Mme la Présidente. Il parlait, à ce moment-là, d'un trou de 1,6 milliard.
On
le voit, aujourd'hui, le premier ministre est incapable, incapable de bien
gérer, de bien administrer, incapable
d'offrir les services. Imaginez-vous donc combien ça va être long, cette fin de
régime.
Mme la Présidente, la
CAQ n'aura jamais été le parti de l'économie.
La Présidente :
La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Oui. Merci, Mme la Présidente. Bien, Mme la
Présidente, on va tous être d'accord ici qu'une décote, ce n'est jamais
une bonne nouvelle.
Il faut quand même
remettre les choses en perspective. Pour l'année 2025‑2026, on présente un
déficit de 1,8 % du PIB. Rappelons-nous
qu'en 1994‑1995 le Parti libéral avait présenté un budget avec un
déficit de 3,3 % du PIB, donc deux fois le déficit dont on parle actuellement.
Mme
la Présidente, il y a eu une émission d'obligations ce matin. Heureusement,
pour l'instant, il n'y a pas eu d'impact sur les taux d'intérêt.
Par contre, bien, il
faut regarder pourquoi, pourquoi on se retrouve dans cette situation-là. Deux
raisons, essentiellement. Première raison, on avait tout un rattrapage à faire
en santé et en éducation. Donc, on a augmenté, depuis six ans et demi, les
budgets en santé de 52 % et les budgets en éducation de 55 %, entre
autres des augmentations de salaire
importantes pour les employés, qui le méritaient, en particulier suite à la
pandémie. Maintenant, deuxième raison, on a baissé les impôts de la
classe moyenne.
Donc, moi, je
voudrais savoir, aujourd'hui, de la part du chef de l'opposition officielle
qu'est-ce... avec quoi il n'est pas d'accord. Est-ce qu'il propose de couper
dans les dépenses? Est-ce qu'il propose d'augmenter les impôts? Que
propose-t-il?
La Présidente :
Première complémentaire.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay :
On ne pourra jamais lui enlever ce qui est son dû, c'est ses deux records
consécutifs de déficit, Mme la Présidente,
13,6 milliards de dollars. Il dit : Par où commencer? Qu'est-ce qu'on
aurait pu faire? Mme la Présidente, ils ont engagé, en sept ans,
12 000 fonctionnaires de plus, pas celles et ceux qui donnent les
services en santé puis en éducation, 12 000 fonctionnaires de plus.
Et le premier ministre est allé dire, la semaine passée, je reviens là-dessus, parce qu'il dit : J'aurais voulu en faire
plus pour rendre l'État plus efficace. Il revient là-dessus
avec ses ministres depuis quelques mois. Pourquoi il n'y a
pas vu dans les sept dernières années?
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Bien,
Mme la Présidente, depuis six ans et demi, on a embauché
109 000 personnes de plus, 109 000 personnes
de plus, dont 98 000 pour donner des services à la population, donc plus
d'infirmières, plus de préposés aux bénéficiaires, plus
d'orthophonistes, plus d'aides à la classe dans nos écoles. Donc, Mme la
Présidente, le gros de l'augmentation vient des services qu'on a ajoutés pour
la population. C'est le temps de le dire. Si le Parti libéral veut revenir
à l'austérité d'avant 1998, c'est le temps de le dire.
La
Présidente : Deuxième complémentaire.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : C'est
le temps de le dire, qu'est-ce qu'on n'a pas compris quand il a promis, en
2018, qu'il allait couper de
5 000 le nombre de fonctionnaires qui ne donnent pas les services. C'est
le temps de le dire, pourquoi il en a engagé 12 000, dont il vient d'en
faire la démonstration, qui ne donnent pas de services, puis qui va augmenter,
puis qui coûte cher. On évalue ça, nous — lui, il évalue ça à combien? — à
600 millions de dollars par année, récurrent, sur
12 000 fonctionnaires qui brassent de la paperasse, qui appliquent
des règlements, qui viennent éteindre notre force économique. C'est ça, un
gouvernement qui n'aura jamais été, jamais, un gouvernement de l'économie.
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Oui,
Mme la Présidente, rappelons-nous la pandémie, rappelons-nous les CHSLD. Il n'y
avait pas de patron ou de patronne dans les
CHSLD, Gaétan Barrette et le Parti libéral avaient vidé les bureaux des CHSLD.
Donc, quand on essayait de savoir : Est-ce que vous avez assez
d'équipement, est-ce que vous avez assez de personnel?, il n'y avait pas
personne pour venir répondre, parce que les cadres avaient été coupés partout
dans les CHSLD.
Donc, Mme la
Présidente, quand je vous dis : On a ajouté 98 000 personnes,
bien, bien sûr qu'on a besoin, entre autres,
dans les hôpitaux, d'ajouter aussi des cadres pour être capables de superviser
ces personnes-là, les aider du point de vue administratif.
La
Présidente : Troisième complémentaire.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : Le
12 000, il n'est pas dans les hôpitaux, il est à Québec, Mme la Présidente,
c'est la fonction publique. Ils sont hors réseau, les 12 000. Première des
choses.
Il dit : On a
ajouté des patrons. Bravo! Ils ont fait un serpent à deux têtes avec le
ministère de la Santé puis Santé Québec. Ça coûte 3 millions de
dollars de plus en hauts dirigeants. Bravo, Santé Québec!
Et là HMR, qui tombe
en décrépitude, qui est le symbole de l'échec de ce mauvais gouvernement-là en
santé, à toutes les années de report c'est 300 millions de dollars de
plus. Bien, bravo!
Je pense que le
premier ministre... Il voudrait-tu avoir des félicitations, à matin, de sa
mauvaise gestion?
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Oui.
Bien, Mme la Présidente, le chef de l'opposition officielle nous parle d'HMR,
de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont. Je pourrais lui parler... Quand on est
arrivés, il y avait 12 hôpitaux sur lesquels on travaillait, en
réalisation, pour améliorer la situation. Actuellement, il y en a 38 sur
lesquels on travaille : l'Hôpital de Dolbeau, Enfant-Jésus, cardiologie à
Québec, Trois-Rivières, Fleurimont, Verdun, l'hôpital juif, Lachine, Fleury,
Santa Cabrini, Gatineau, Pierre-Le Gardeur à Terrebonne, Vaudreuil.
Lesquels veut-il qu'on arrête?
La
Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le député
de Marguerite-Bourgeoys.
Baisse de la cote de crédit du Québec
M. Frédéric Beauchemin
M.
Beauchemin : On le sait maintenant, plus personne ne croit dans le
plan de retour à l'équilibre budgétaire de
la CAQ, perte totale de crédibilité. Standard & Poor's a décoté la dette du
Québec parce que ce mauvais gouvernement n'a jamais été capable de bien
gérer les finances publiques. Ils ne sont juste pas bons, Mme la Présidente.
S&P l'a dit, mettre 19 milliards
par année pour trois ans en infrastructures, c'est insoutenable. Le ministre
des Finances le sait, il me l'a même
dit. Dans son budget, il inclut la taxe sur le gain en capital, puis il pense
qu'on va avoir une croissance de 1,1 %. C'est du n'importe quoi,
Mme la Présidente.
S&P
a parlé, mais il y a aussi d'autres agences de notation. On peut tout de même
se poser la question : Qu'est-ce que ce gouvernement-là va faire
pour nous éviter d'autres décotes?
La
Présidente : La réponse du ministre des Finances.
M. Eric Girard
M.
Girard (Groulx) :
Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. En fait, je comprends
que le député de l'opposition n'a pas lu le
rapport de la S&P, parce qu'ils ont des bons mots pour notre gestion. Et on
a un plan de retour à l'équilibre budgétaire qui est crédible, qui est
sur cinq ans, avec des gestes aux revenus, des gestes aux dépenses, avec des efforts pour propulser l'économie. Et
puis tout ça, c'est sur cinq ans, et puis S&P aurait préféré que ce soit
sur trois ans. Alors, ils ont des considérations; nous en avons.
D'ailleurs, nous avons une loi qui dit que c'est trois ans.
Ensuite,
S&P dit que nous avons trop d'infrastructures, et parce qu'eux, ils additionnent les infrastructures
au déficit de 2027-2028, qui, en passant, est à 0,6 % du PIB. Vous
regarderez les déficits du fédéral, de la Colombie-Britannique, tout ça est en
haut de 2 %. Alors, ils additionnent les infrastructures au déficit, ils
disent : Vous dépassez un ratio, et c'est insoutenable, mais on le savait,
ça, Mme la Présidente, mais on a fait le choix de supporter l'économie, dans
cette période de grande incertitude, en
augmentant les infrastructures, parce que les entreprises privées ne font pas
de dépense en capital, présentement.
• (14 h 20) •
La
Présidente : Première complémentaire.
M. Frédéric Beauchemin
M.
Beauchemin : Les promesses de la CAQ, Mme la Présidente. On va réduire
la taille de l'État, mais on augmente de
12 000 employés. On va bien gérer les finances du Québec, mais on
passe de déficit record à déficit record. On va réduire le fardeau
administratif de nos PME; ça leur coûte 2,4 milliards de plus en paperasse
par année, avec la CAQ.
Je répète ma
question, j'aimerais une réponse : Qu'est-ce que ce gouvernement-là va faire
pour nous assurer qu'on n'ait pas de décote?
La
Présidente : La réponse du ministre des Finances.
M. Eric Girard
M. Girard (Groulx) :
Oui. Alors, Mme la Présidente,
je veux donner le contexte, là, qui semble...
Une voix : ...
M. Girard (Groulx) : ...échapper,
voilà.
Alors, S&P est extrêmement négatif sur le
Canada, ils ont émis une... un nuage, une perspective d'ensemble où ils disent : Le Canada est dépendant au
marché américain, et il y a une guerre commerciale. Et, suite à ça, il y a eu
des actions sur quatre provinces. Alors, le Nouveau-Brunswick a été décoté,
avec perspective négative. La Nouvelle-Écosse, perspective négative. Le
Nouveau-Brunswick a perdu sa perspective positive. Et là, nous, on nous
reproche un plan de retour à l'équilibre
budgétaire qui est crédible mais qui est sur cinq ans, on aurait préféré trois
ans. Et on nous indique qu'ils auraient aimé moins d'infrastructures,
mais c'est un...
La Présidente : Deuxième
complémentaire.
M. Frédéric
Beauchemin
M.
Beauchemin : Le contexte qui échappe au ministre, Mme la
Présidente, c'est qu'en sept ans il y a eu six budgets déficitaires,
dont deux records, fiasco après fiasco, Northvolt, SAAQclic, près de
10 milliards de gaspillage, on ajoute 12 000 fonctionnaires de
plus.
Honnêtement,
Mme la Présidente, là, je ne peux pas croire que le premier ministre, il est
fier de son legs. En ce qui me concerne, là, c'est : Dehors, la CAQ!
La Présidente : La... La réponse du
ministre des Finances. On l'écoute.
M.
Eric Girard
M. Girard
(Groulx) : Oui, Mme la Présidente. Bien, mon collègue semble
manquer un peu de perspective, hein? Parce que je voudrais donner le
contexte général. Effectivement, il y a eu une pandémie, suivie d'une période
de haute inflation, de taux d'intérêt
élevés, et là il y a une guerre commerciale qui menace l'existence même du
Canada, et on a une responsabilité. Alors, le choix qu'on a fait, c'est
de prioriser l'économie tout en protégeant les services en santé et en
éducation et en conservant une saine gestion des finances publiques,
c'est-à-dire qu'on a choisi un plan de retour à l'équilibre budgétaire sur cinq
ans.
La Présidente : En question
principale, je reconnais maintenant la députée de Bourassa-Sauvé.
Financement
des entreprises d'insertion
Mme Madwa-Nika
Cadet
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Le ministre des Finances vient de parler d'une guerre commerciale
qui nous menace, mais, notamment, celle-ci menace l'emploi.
Le
21 mars dernier, j'ai interpelé la ministre de l'Emploi sur ces coupures,
sur ces coupures qui, justement, minent l'accès et le maintien en emploi de plusieurs clientèles dites éloignées
du marché du travail, qui vivent encore plus d'incertitude en pleine
tempête tarifaire.
Plusieurs
regroupements ont levé la main, ils ont dit à la ministre : On veut vous
aider. La réponse de la CAQ, bien, ils ont coupé leurs subventions.
C'est le cas de Boulot vers..., une entreprise d'insertion que j'ai déjà
visitée, qui, depuis plus de 40 ans,
vient en aide à plus de 70 jeunes par année en leur enseignant le métier
d'ébéniste. Parmi ces jeunes, certains arrivent de la DPJ, certains ont
vécu des épisodes d'itinérance. Boulot vers... respecte ces jeunes, les
accompagne, leur offre du soutien
psychosocial, leur permet de développer leur confiance et leur autonomie pour
qu'ils soient prêts à conserver un emploi.
Je demande à
la ministre : Est-ce qu'elle va prendre la seule bonne décision qui
s'impose et renverser la coupure subie par Boulot vert...?
La Présidente : La réponse de la
ministre de l'Emploi.
Mme Kateri
Champagne Jourdain
Mme
Champagne Jourdain : Merci, Mme la Présidente. Je suis contente d'avoir
cette question-là aujourd'hui, ça va me permettre de mettre les choses en
contexte. S'il y a quelqu'un ici, Mme la Présidente, qui comprend ce que
ces jeunes-là vivent, chez Boulot vers...,
c'est moi. S'il y a quelqu'un qui a dû rembarquer dans la chaloupe de la vie,
c'est moi. S'il y a quelqu'un qui a dû rembarquer dans la chaloupe de
l'éducation, c'est moi, Mme la Présidente. Alors, je les comprends très bien.
Mais,
une fois que je dis ça, Mme la Présidente, ça ne me ramène pas le
145 millions des coupures fédérales unilatérales,
qui ont été faites par le gouvernement fédéral, ça ne me les ramène pas. Ça
m'oblige quand même à faire des choix difficiles.
Et, malgré les choix
difficiles que j'ai à faire, Mme la Présidente, je vais m'assurer qu'on ne
perde aucune place. Les choix difficiles que
j'ai à faire vont m'amener, oui, à peut-être avoir des interventions à faire à
Boulot vers..., mais je vais m'assurer que les 137 places soient
transférées dans d'autres entreprises de réinsertion. On a des entreprises,
plusieurs entreprises limitrophes, entre autres, sur l'île de Montréal, et je
vais m'assurer, certainement, continuer de m'assurer que les bonnes personnes
reçoivent le bon service, Mme la Présidente, au bon moment. Merci.
La
Présidente : Première complémentaire.
Mme Madwa-Nika Cadet
Mme Cadet : Mme
la Présidente, si la ministre comprend la situation que vivent ces jeunes, je
lui demande pourquoi elle décide de
continuer de couper la subvention que reçoit Boulot vers... Boulot vers...
reçoit 1,1 million de dollars sur un budget total de
2,3 millions. Aujourd'hui, en fait le 3 mars dernier, son directeur
général a reçu un appel de Services
Québec lui disant : On vous coupe tout, pas de négociation, ça finit ici,
maintenant, sans aucune mesure transitoire.
Je répète ma
question. Je comprends ce que la ministre me dit, mais est-ce qu'elle va
intervenir au niveau de Boulot vers...?
La
Présidente : La réponse de la ministre.
Mme Kateri Champagne Jourdain
Mme Champagne
Jourdain : Merci, Mme la Présidente. Je l'ai expliqué plusieurs fois,
le contexte, le contexte des coupures
unilatérales fédérales. Je ne l'ai jamais entendue dénoncer ces coupures-là. On
a 145 millions de dollars de moins par année pour offrir des services d'emploi à cause des coupures
unilatérales fédérales. Et, malgré ça, Mme la Présidente, malgré les décisions
difficiles que j'ai à prendre, je vais m'assurer que les 137 places dont
on parle soient transférées dans d'autres organismes et qu'on ne perde
pas ces places-là pour les jeunes qui en ont besoin. Je vais continuer de
m'assurer que, et c'est ma responsabilité, les gens aient les bons services au
bon moment, Mme la Présidente.
La
Présidente : Deuxième complémentaire.
Mme Madwa-Nika Cadet
Mme Cadet : D'abord,
Mme la Présidente, le 21 mars dernier, lors de l'interpellation dont j'ai
parlé, on a parlé abondamment de la coupure
de 145 millions du fédéral. Le problème, c'est que la ministre, elle s'en
lave les mains. Elle ne peut pas tout simplement déférer sa
responsabilité au gouvernement fédéral, alors que c'est à elle qu'incombe la décision de couper dans ces organismes.
Aujourd'hui, ceux-ci, ils nous écoutent puis ils veulent savoir ce que la
ministre, elle va faire. Ils veulent s'assurer que chaque organisme, qui
joue son rôle particulier, qui offre un soutien psychosocial à ces jeunes,
continue de respecter sa mission.
Est-ce que la
ministre va renverser sa décision?
La Présidente :
La réponse de la ministre.
Mme Kateri Champagne Jourdain
Mme Champagne
Jourdain : Merci, Mme la Présidente. Écoutez, malgré le contexte qui
est difficile, toujours lié aux coupures...
Je vous le dis, je ne peux pas faire de miracle, là. Le gouvernement fédéral
nous a coupé 145 millions de dollars
par année pour des services publics d'emploi dans un contexte où on aurait
besoin d'encore plus, Mme la Présidente. Mais, malgré tout, on continue de soutenir des organismes spécialisés en
employabilité à la hauteur d'environ 250 millions de dollars
par année, Mme la Présidente. Et, malgré les choix difficiles que j'ai à faire,
je vais m'assurer, comme je l'ai toujours fait, de respecter mes engagements,
que les personnes les plus éloignées du marché du travail puissent recevoir des
services. C'est ce qui va se passer dans ce cas-ci. Les 137 places vont
être conservées, Mme la Présidente.
La
Présidente : En question principale, je reconnais maintenant la cheffe
du deuxième groupe d'opposition.
Gestion des finances publiques
Mme Ruba Ghazal
Mme Ghazal : Merci,
Mme la Présidente. Le gouvernement du Québec vient de subir la première baisse
de sa cote de crédit depuis 30 ans. Ça,
c'est le bilan du premier ministre du Québec. Pourtant, il est arrivé au
pouvoir, il y a sept ans, en
promettant, et je le cite, de gérer les finances de façon responsable, donc pas
de déficit, puis on va continuer de réduire le poids de la dette
publique. Clairement, ce n'est pas ça qui est arrivé.
Les
seuls à blâmer pour cette décote, c'est ce gouvernement de gestionnaires et de
comptables qui ne savent visiblement ni
gérer ni compter. Les seuls à blâmer, c'est la CAQ, qui a gaspillé l'argent des
Québécois et des Québécoises dans Northvolt, SAAQclic, le troisième lien. Au
lieu de se regarder dans le miroir puis de reconnaître ses erreurs, le
premier ministre préfère justifier sa décote
par les hausses salariales des gens qui tiennent à bout de bras nos services
publics, les travailleurs et travailleuses qui sont... qui tiennent à
bout de bras nos écoles, nos hôpitaux, qui éduquent nos enfants, notamment dans
les CPE. Ce n'est pas eux et elles à blâmer pour l'échec de la CAQ.
Le
premier ministre devrait être transparent avec les Québécois et Québécoises. Il
devrait leur dire qui va payer pour le gaspillage et l'austérité
caquistes.
Qui va payer pour ça?
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Oui, Mme la Présidente, bien, pour une fois, je
pense qu'on est d'accord, la cheffe du deuxième groupe d'opposition et
moi, on a augmenté de façon importante les salaires des personnes qui
travaillent en santé, qui travaillent en
éducation. Puis je ne les blâme pas. C'est le choix qu'on a fait, c'est le
choix qu'on a fait. Puis on a augmenté de 109 000 le nombre de
personnes qui travaillent dans nos réseaux. Donc, Mme la Présidente, on est d'accord.
Maintenant, j'aimerais
avoir le début du commencement d'une vraie proposition pour régler le problème
de la décote, là. Québec solidaire, depuis
six ans et demi, n'a jamais fait une proposition, jamais une, pour réduire les
dépenses. Donc, c'est une journée historique. Est-ce qu'on va avoir une
première proposition de Québec solidaire pour réduire les dépenses le
22 avril 2025? J'ai hâte de l'entendre.
• (14 h 30) •
La
Présidente : Première complémentaire.
Mme Ruba Ghazal
Mme Ghazal : Mme
la Présidente, on en a fait plein. Il faut juste que le gouvernement écoute, il
faut que le premier ministre écoute. Ça fait que j'espère qu'il va m'écouter.
Gaspiller l'argent
des Québécois pour ensuite couper dans les services publics puis le filet
social, ça, c'est le cercle vicieux dans
lequel tombent tous les mauvais gouvernements. Pourquoi le premier ministre
refuse de regarder la colonne des revenus? C'est un comptable. Il sait comment
c'est fait, un budget. Il y a la colonne des dépenses, il y a la colonne des revenus. Il n'y a pas de magie. Si on
regarde juste la colonne des dépenses, on va couper, puis on s'en va dans
l'austérité. Il faut aller chercher l'argent dans le 1 % des plus riches
au Québec.
La Présidente :
La...
Des voix : ...
La
Présidente : Je vous rappelle l'article 32. L'article 32
vous demande de garder le silence.
Des voix :
...
La
Présidente : S'il
vous plaît! On ne s'interpelle pas des deux côtés. Gardez le silence.
J'aimerais entendre la réponse du premier... premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Quelle
déception, Mme la Présidente! On était tout ouïe, à se dire : On va avoir
enfin une proposition de réduction de dépenses de la part de Québec solidaire.
On l'attendait. On se disait : Wow! c'est une grande journée. Bien, la réponse qu'on a, c'est : Il faudrait
augmenter les impôts, il faudrait augmenter les taxes, il faudrait augmenter les allocations familiales, il faudrait
enlever le crédit d'impôt de 2 000 $ par année pour les personnes de
70 ans et plus. Donc, il faudrait aller chercher des revenus
additionnels. Donc, rien dans les dépenses. Québec solidaire, c'est plus d'impôt, plus de taxes, puis, si on veut
vraiment aller chercher des milliards, bien, il faut s'attaquer à la classe moyenne.
Je sais que la classe...
La
Présidente : Deuxième complémentaire.
Mme Ruba Ghazal
Mme Ghazal : Mme
la Présidente, on a un déficit historique de 14 milliards, puis ça, ce
n'est pas le résultat de Québec solidaire,
c'est les choix de la CAQ. Il faudrait commencer par arrêter de gaspiller
l'argent des Québécois et des Québécoises.
Luc Godbout,
hein, ce n'est pas un économiste d'extrême gauche, il est d'accord avec Québec
solidaire, il dit que l'austérité, ce
n'est pas une fatalité. C'est vers là que nous mène la CAQ, vers l'austérité.
Ça, ça fait mal aux travailleurs, travailleuses, à la population québécoise. Pourquoi
le premier ministre ne va pas écouter Québec solidaire et Luc Godbout,
qui leur dit d'aller chercher l'argent dans les revenus?
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Mme
la Présidente, on le sait tous ici, là, ceux qui ont regardé attentivement,
pour aller chercher des milliards, les riches, selon la définition de Québec
solidaire, c'est des personnes qui gagnent plus que 50 000 $ ou 60 000 $ par année, c'est des
enseignants, c'est des infirmières. C'est des riches, ça, selon Québec
solidaire, puis ils devraient payer plus d'impôt. Bien, on n'est pas
d'accord avec Québec solidaire.
La
Présidente : En question principale, je reconnais maintenant la
députée de Verdun.
Gestion des finances publiques
Mme Alejandra Zaga Mendez
Mme Zaga
Mendez : Merci, Mme la Présidente. Le ministre des Finances a déjà
annoncé qu'il reverrait la trajectoire vers
l'équilibre budgétaire pour rassurer les agences de notation à la suite de la
décote du Québec. Concrètement, ça veut dire seulement une chose :
plus de compressions, plus d'austérité. N'oublions pas, la CAQ a fait et
continue de faire des mauvais choix, on peut
penser à Northvolt, troisième lien, SAAQclic ou même la hausse de salaire des députés dans cette Chambre, des milliards de dollars
investis aux mauvais endroits alors que notre filet social s'effrite. Ce n'est
pas aux familles, ce n'est pas aux travailleurs, qui subissent déjà la
flambée du coût de l'épicerie et du logement, de payer pour les erreurs de la
CAQ, mais, en termes de finances, on le sait, la CAQ ne travaille pas pour eux.
Le dernier budget annonçait déjà des
restrictions budgétaires dans les services publics, dans une période
d'incertitude économique, et les choses ne vont que s'aggraver.
M. le ministre des
Finances, ma question est la suivante : Quelles seront les prochaines
coupures caquistes?
La
Présidente : La réponse du ministre des Finances.
M. Eric Girard
M. Girard
(Groulx) : Oui, Mme la Présidente. Il y avait beaucoup de choses dans
ça. Je vais commencer par le contexte. Alors, ce que j'ai dit, c'est qu'à la
mise à jour il y aura un contexte différent. En soi, ce n'est pas un énoncé très controversé, là, mais il y aura eu une
élection fédérale, il y aura eu un budget fédéral. Et je rappelle qu'il n'y a
pas de plan d'infrastructures au fédéral depuis décembre 2023. C'est,
évidemment, problématique dans un pays de 40 millions d'habitants. Lorsque le fédéral est coté AAA,
il devrait nous aider dans les infrastructures, et ce n'est pas le cas. Il y
aura aussi certainement le début de la négociation sur l'Accord de
libre-échange nord-américain, et là on a une grande incertitude qui affecte
l'économie.
Alors, à la mise à
jour, on aura moins d'incertitude. Ça permettra de mettre à jour le cadre
financier. Et tout ça sera fait publiquement, ensemble, au bénéfice de tous.
La Présidente :
Première complémentaire.
Mme Alejandra
Zaga Mendez
Mme Zaga Mendez :
Le budget de mars dernier a déjà été marqué par l'austérité, il reculait sur
des projets, sur des promesses, là, on peut
parler de la modernisation de l'Hôpital
Maisonneuve-Rosemont, des projets qui
ont été mis sur la glace à La Malbaie, dans les Laurentides, là.
Maintenant, là, avec un nouveau redressement budgétaire qui s'annonce,
les gens se demandent quel autre projet d'infrastructure va être abandonné.
Est-ce que le
ministre peut aujourd'hui s'engager de ne plus couper dans les services publics,
dans la mise à jour à venir?
La Présidente :
La réponse du ministre.
M. Eric Girard
M. Girard
(Groulx) : Oui. Alors, je rappelle le
budget, parce que les priorités étaient très claires, hein, la priorité va à l'économie, on se concentre sur
l'économie, parce que, face à la grande incertitude, bien, les entreprises sont
en période d'attente, et là nous, on a des
mesures d'urgence, le programme FRONTIERE, on a des infrastructures qui aident à la transition, puis ensuite il y a toute la
transformation de l'économie québécoise, des projets d'investissement,
l'innovation, la productivité. Alors, on travaille là-dessus.
Le plan de retour à l'équilibre
budgétaire, il a été déposé, il est sur cinq ans, il y a des gestes aux
revenus, il y a des gestes aux dépenses, on propulse l'économie vers de
nouveaux sommets, et on demande au fédéral de faire sa part, notamment en
infrastructures.
La Présidente :
Deuxième complémentaire.
Mme Alejandra
Zaga Mendez
Mme Zaga
Mendez : Le ministre doit quand même avouer que la décote qu'on vient
d'avoir va créer de la pression. Puis même les agences de notation l'ont
souligné, la décote est aussi liée à la baisse des revenus de l'État. Mais ça, on n'en parle pas, parce que, on le sait,
les plus fortunés, c'est les intouchables, pour la CAQ. Plutôt d'aller chercher
des revenus là où ils se trouvent, la CAQ va préférer de couper dans les
services et retarder des projets essentiels.
Ma
question est simple, aujourd'hui : Quel service sera le prochain à être
sacrifié à cause de la mauvaise gestion caquiste?
La Présidente :
La réponse du ministre.
M. Eric
Girard
M. Girard
(Groulx) : Bien, juste une petite précision, là, pour la lutte des
classes, la baisse d'impôt a profité à
4,6 millions de personnes. Alors, ce n'est pas les élites, le 1 %,
c'est tout le monde qui paie de l'impôt au Québec qui a bénéficié de la
baisse d'impôt. Et c'était une décision pour propulser l'économie vers d'autres
niveaux, stimuler l'offre de travail. Et puis probablement qu'en 2023, Mme la
Présidente, la baisse d'impôt a prévenu une récession, au Québec, parce qu'elle
était, d'un point de vue cyclique, particulièrement opportune. Alors, voilà.
Puis,
pour ce qui est des budgets en santé puis en éducation, bien, on s'est assurés
de préserver ces budgets-là dans le budget 2025‑2026.
La Présidente :
En question principale, je reconnais maintenant le député de Taschereau.
Troisième
lien entre Québec et Lévis
M. Etienne
Grandmont
M. Grandmont :
Merci, Mme la Présidente. Aujourd'hui, c'est le Jour de la Terre, une journée
qu'on souligne, au Québec, depuis 1990. En
1990, quand on parlait d'environnement, ça se limitait au trou dans la couche
d'ozone puis aux pluies acides. 35 ans plus tard, les enjeux sont
beaucoup plus complexes. Et, quand on voit la... les décisions de la CAQ, on
est en droit de se demander s'ils vivent vraiment en 2025.
Pas plus tard que la
semaine dernière, la ministre des Transports et de la Mobilité durable était
fière d'annoncer l'octroi d'un contrat de
46 millions de dollars pour le troisième lien. Et ce matin, Jour de la
Terre, elle annonçait un autre appel d'offres pour 15 millions de dollars
pour le troisième lien. La CAQ est en train de nous rentrer collectivement
le bras dans le tordeur de ce projet-là, qui
va coûter des dizaines de milliards de dollars aux Québécoises et aux
Québécois, tout ça après avoir annulé un paquet de projets qui auraient été
bons pour la mobilité durable, des voies réservées pour le transport en commun,
notamment, partout au Québec. Ce double standard là, Mme la Présidente, là, il
est alarmant, dans le contexte.
Donc,
comment ce gouvernement est capable de se regarder dans le miroir et de dire
qu'il prend la crise climatique réellement au sérieux?
La Présidente :
La réponse de la ministre des Transports et de la Mobilité durable.
Mme Geneviève
Guilbault
Mme Guilbault : Bien, Mme la Présidente, quelle belle occasion
m'offre le député de Taschereau, encore une fois, comme à chaque fois qu'il me
pose une question. Puis vous remarquerez, Mme la Présidente, que, depuis deux
ans et demi, à peu près, que je suis
ministre des Transports, ses questions tournent toujours autour de la même
chose. Qu'est-ce que la CAQ fait en
transport? Qu'est-ce que la CAQ fait en transport collectif? Et, depuis près de
deux ans et demi, Mme la Présidente, je lui présente, semaine après
semaine, des tableaux qui sont on ne peut plus évocateurs. Je disais, l'autre
fois, que vous avez été saisis par le tableau qui reflète notre dernier Plan
québécois des infrastructures, mais je vais devoir vous le montrer à nouveau,
Mme la Présidente, parce que j'ai l'impression que mon ami de Taschereau ne l'a
pas enregistré.
Alors,
voici, Mme la Présidente, les investissements en transport au Plan québécois des infrastructures depuis 2013, donc depuis 12 ans. On a ici, en bleu foncé,
le Parti québécois. Bon. Ensuite, on a le Parti libéral, les colonnes rouges ici, et on a la Coalition avenir Québec. Mme
la Présidente, je ne sais pas ce que ça prendrait de plus à ce tableau-là. Moi,
je le trouve clair. Je trouve que les couleurs sont claires. Je trouve que la
hauteur des colonnes est encore plus claire. Je ne sais pas ce que ça lui prend
pour comprendre qu'on n'a jamais autant investi en transport...
La Présidente : Première
complémentaire.
M. Etienne
Grandmont
M. Grandmont : Ma question
porte sur le troisième lien. Et j'aimerais lui rappeler que 63 %...
43 % de nos émissions de gaz à effet de serre viennent au niveau...
viennent des transports, au Québec, Mme la Présidente. Faire avancer le troisième lien, c'est continuer à
reculer sur l'ambition climatique. J'ajoute à ça que le troisième lien, ça veut
dire aussi plus d'étalement urbain,
et l'étalement urbain, c'est une des pires menaces pour les milieux naturels
qu'on a ici, au Québec.
Alors, Mme la
Présidente, est-ce que la ministre va être fière, dans quelques années, d'avoir
poussé un projet qui va contre l'intérêt supérieur de la protection de
l'environnement?
• (14 h 40) •
La Présidente : La réponse de la
ministre.
Mme Geneviève Guilbault
Mme Guilbault : Bon, bien, Mme la Présidente, je pensais qu'il me parlait
de transport collectif parce que c'était le Jour de la Terre, mais, s'il est
avide d'entendre parler du troisième lien, ça va me faire grand plaisir, Mme la
Présidente, de lui parler du troisième lien.
Effectivement, la semaine dernière, ou la semaine d'avant, enfin, il y a eu des
articles dans les médias qui disent que,
oui, on a attribué un contrat. Le troisième lien, il avance, Mme la Présidente.
Il avance, il avance, il avance. J'ai
dit aux gens : Regardez-nous aller, on va franchir étape par étape en vue
de la réalisation du troisième lien, et là les gens voient que ça se
concrétise. Il y a des contrats qui sont attribués, il y a un appel d'intérêt
qui a été fait. Jamais autant d'entreprises ne se sont montrées intéressées par
un projet d'infrastructure de transport au Québec
que celui du troisième lien. Et incessamment j'annoncerai le corridor qui va
être retenu pour le troisième lien, donc mon collègue pourra se réjouir
le moment venu.
La Présidente : Deuxième
complémentaire.
M. Etienne Grandmont
M. Grandmont : La
mémoire, c'est une faculté qui oublie, Mme la Présidente, donc ça me fait
plaisir de rappeler à la ministre qu'elle vantait récemment encore l'expertise
de la CDPQ Infra. Et, dans son rapport de l'an dernier sur la mobilité à Québec, la CDPQ Infra était claire à
propos du troisième lien : «L'ajout d'un lien routier aurait pour effet de
déplacer les points de congestion à l'intérieur du réseau de Québec.» En
d'autres termes, le troisième lien est inutile, selon l'organisation dont la
ministre vantait les mérites.
Donc, si la
ministre reconnaît l'expertise de la caisse, pourquoi elle n'est pas capable de
respecter les conclusions du rapport de la caisse?
La Présidente : La réponse de la
ministre.
Mme Geneviève Guilbault
Mme Guilbault : Mme la Présidente, je n'en reviens pas à chaque fois. Le député de
Taschereau est un élu de la Capitale-Nationale. Pourquoi est-ce que, selon lui, les gens de
Québec qui veulent un tramway sont des gens considérables et importants, dont le point de vue est pertinent, mais
ceux qui veulent un troisième lien, qui sont encore plus nombreux que ceux qui
veulent un tramway, et ceux de Chaudière-Appalaches, eux, ce n'est pas important,
ce n'est pas important, leurs
besoins, ce n'est pas important, leur opinion, et on doit calomnier le projet
de troisième lien, malgré que plus de
gens le veulent que celui de tramway, qui, lui, est important aux yeux du
député de Taschereau? Bien, ce n'est pas comme ça que ça fonctionne, Mme la
Présidente. Nous, on réalise tous les projets. Il n'y a jamais eu autant de
chantiers d'infrastructure en cours dans notre Capitale-Nationale, grâce aux
investissements historiques de la Coalition avenir Québec, Mme la Présidente.
La Présidente : En
question...
Des voix : ...
La Présidente : Un petit peu
trop de bruit.
En question principale, je reconnais maintenant
le chef du troisième groupe d'opposition.
Baisse de la cote de crédit du
Québec
M. Paul St-Pierre
Plamondon
M. St-Pierre
Plamondon : Merci, Mme la Présidente. Je pense que ce n'est
pas une exagération que d'affirmer que le Québec est sonné et abasourdi
par cette décote du Québec, une décote qui est grave et une décote qui aura des
impacts, des conséquences financiers... sur le plan financier au cours des
prochaines années.
Le Parti québécois et le Parti
libéral avaient pourtant sonné l'alarme sur la possibilité d'une décote, et ça,
depuis plusieurs mois, et la CAQ, via
le biais de son ministre des Finances, nous avait répété, lors du budget de
l'année dernière, qu'on était, ouvrir
les guillemets, «encore loin d'une décote». Mais à l'évidence ce n'était pas le
cas. Ça ressemble drôlement à ce qu'on nous disait sur Northvolt, qu'on
était en excellente position financière, et quelques semaines plus tard c'était
la faillite. Comme dans tant de dossiers, on
ne peut juste pas se fier à la parole de la CAQ. Et c'est la même chose lorsque
le ministre des Finances nous dit :
C'est une simple divergence de points de vue, entre un retour à l'équilibre sur
cinq ans ou sur trois ans.
L'agence de notation
pose un jugement sur les sept dernières années de la CAQ, c'est ça qui se
produit : bar ouvert des subventions aux entreprises, fiascos de gestion
comme SAAQclic, des chèques électoraux, l'explosion de la bureaucratie, des
projets bâclés. C'est ça que ça donne, au final.
Le ministre des
Finances est allé dire que cette décote est un avertissement. Ce n'est pas un
avertissement, Mme la Présidente, c'est une sanction.
Est-ce que le premier
ministre peut nous confirmer, comme l'a déjà dit le ministre des Finances, que
son gouvernement n'a pas fait de représentations auprès des agences de crédit
dans les semaines qui ont précédé?
La
Présidente : La réponsedu premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
Oui, Mme la Présidente, d'abord, le ministre des Finances parle régulièrement
avec les agences de notation, incluant
S&P. Maintenant, si le chef du troisième groupe d'opposition
lit bien le rapport de S&P, de Standard & Poor's, il attribue
cette décote à essentiellement deux choses. D'abord, il considère qu'on a trop
investi dans les infrastructures. Effectivement, on est passés de
9 milliards par année à 19 milliards par année. Peut-être que le
Parti québécois n'est pas d'accord avec ça, il pourrait nous le dire
immédiatement. La deuxième raison, c'est qu'on a baissé les impôts de la classe moyenne. Là-dessus, je sais que le chef
du Parti québécois est contre, il a dit : Moi, les baisses d'impôt,
«not on my dead body».
Donc, est-ce que...
Étant donné qu'on sait qu'il est contre nos baisses d'impôt, est-ce qu'il peut
nous dire... Est-ce qu'il est d'accord ou
non avec le fait qu'on ait doublé le montant des infrastructures en passant de
9 milliards par année à 19 milliards par année?
La
Présidente : Première complémentaire.
M. Paul
St-Pierre Plamondon
M. St-Pierre Plamondon : Le
premier ministre ne nous dit pas toute la vérité. Le rapport de Standard &
Poor's...
Une voix : ...
La
Présidente : ...du gouvernement, je vais vous entendre sur votre
question... sur votre rappel au règlement.
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, c'est
au lexique, et en plus on doit prendre la parole d'un collègue, ici, en
cette Chambre. Alors, je vous demanderais de faire amender...
La
Présidente : Exactement. Je suis debout. Et vous savez, M. le député,
l'article 35, on ne peut pas refuser d'accepter la parole de son collègue,
alors je vous demanderais de retirer les paroles que vous avez dites.
M. St-Pierre
Plamondon : Je retire.
Le premier ministre
omet certains faits, parce que le rapport, en fait, de Standard & Poor's
nous dit que la cause de la décote, c'est la détérioration des finances
publiques au Québec. C'est ça, une décote, c'est une sanction pour du mauvais
travail. On est obligés de le répéter, le rôle du gouvernement, c'est de
prévoir, et non pas de créer des nouveaux problèmes et ensuite réagir
tardivement à ses propres problèmes.
Est-ce que, oui ou
non, on a rencontré...
La
Présidente : La réponse du premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
Bien, Mme la Présidente, je pense qu'il faudrait qu'il lise les phrases qui
suivent. Dans le rapport de Standard & Poor's, on dit : Détérioration
des finances publiques à cause de deux raisons. Trop investi en santé et en
éducation, principalement en infrastructures et en augmentation des salaires.
Est-ce qu'il est contre ça? Est-ce qu'il pense qu'on a trop augmenté les
infrastructures, trop augmenté les salaires des infirmières, des enseignants?
Puis, deuxième raison, trop baissé les impôts de la classe moyenne. Là-dessus,
on sait, le PQ, il est contre toute baisse d'impôt,
en tout cas le chef actuel, là. Mais il change souvent d'idée, donc peut-être
que ça va changer d'ici un an et demi.
La Présidente : Deuxième
complémentaire.
M. Paul St-Pierre Plamondon
M. St-Pierre Plamondon : Mme
la Présidente, le premier ministre essaie de nous présenter une décote du Québec
comme une bonne nouvelle, il faut quand même avoir du culot, là, comme si
c'était normal, comme si tout est justifié, comme si c'était ça, son mandat de
gouvernement de comptables.
C'est un échec, c'est
un échec qui est grave, et un échec qui est sa responsabilité à lui,
personnellement.
La
Présidente : Alors... M. le leader, je vais vous écouter.
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, le
chef du troisième groupe d'opposition a encore une fois utilisé un mot
au lexique. Je vous demanderais de le lui faire retirer, s'il vous plaît.
La Présidente :
Oui. Retirez le terme que vous
employez, l'adjectif, il est au lexique, vous le savez. Vous le retirez?
La réponse du premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
Oui, bien, Mme la Présidente, j'ai toujours dit qu'une décote, c'est une
mauvaise nouvelle. Donc, je n'ai jamais dit
le contraire. Mais ce que je sais, c'est que le chef du troisième groupe
d'opposition a déjà dit qu'il a un malaise
avec le nationalisme. Il a déjà dit que le déclin du français, ça n'existe pas.
Il a déjà dit que la loi 101 au cégep, ce n'était pas une bonne
idée. Donc, s'il y a quelqu'un ici qui change d'idée, là, c'est le chef du PQ.
La
Présidente : En question...
Des voix : ...
La Présidente :
On ne s'interpelle pas des deux côtés de la Chambre.
En question
principale, je reconnais maintenant le député de Nelligan. On vous écoute,
monsieur.
Politique de mobilité durable
et d'électrification des transports
M. Monsef
Derraji
M. Derraji : Mme la Présidente, quelle
journée historique, aujourd'hui, au Québec! Toutes les sociétés de transport
du Québec, de Gatineau, de Sherbrooke,
Montréal, Laval, Lévis, Saguenay, Mme la Présidente, sont toutes venues à
Québec, pas pour applaudir la ministre, pas pour lui dire qu'elle gère
bien sa fougère, pas pour applaudir qu'elle gère bien l'infrastructure, pas
pour lui dire que ça va bien dans l'électrification du transport, pas pour lui
dire que l'achalandage augmente, Mme la Présidente. C'est une méchante gifle
politique, aujourd'hui, Mme la Présidente, ils sont venus lui dire qu'avec sa politique de mobilité durable le
Québec frappe le mur. On ne parle plus de l'électrification des transports,
on parle de l'électrification dogmatique, sous ce gouvernement caquiste.
Mme
la Présidente, l'ensemble des sociétés de transport ont une seule question à
Mme la ministre : Est-ce qu'elle croit toujours que c'est avec les
bus électriques qu'on va atteindre nos objectifs?
La
Présidente : La réponse de la ministre des Transports et de la
Mobilité durable.
Mme Geneviève
Guilbault
Mme Guilbault : Oui, merci, Mme la Présidente. Bien, écoutez, les sociétés
de transport, voilà des partenaires avec qui on travaille en très étroite
collaboration, depuis deux ans et demi, notamment dans le suivi du rapport qui
a été déposé sur les audits de performance financière des sociétés de
transport, qui nous permettent, à elles et nous, de travailler ensemble vers le
retour à l'équilibre budgétaire, dans leur cas aussi, comme dans le nôtre,
parce qu'on sait qu'il y a eu des historiques de déficits récurrents dans les
sociétés de transport et que ce n'est pas réaliste de demander aux contribuables québécois d'éponger
systématiquement des déficits d'exploitation dans nos sociétés de transport,
qui ne relèvent pas du gouvernement, d'ailleurs. Et on travaille
ensemble depuis ce temps-là, main dans la main, pour aller vers le retour à l'équilibre budgétaire dans nos
sociétés de transport, notamment grâce au cadre financier qu'on a présenté
à la mise à jour budgétaire avec mon collègue des Finances en novembre dernier,
près de 880 millions sur cinq ans pour financer nos sociétés de transport,
du jamais-vu, ça ne s'était jamais fait, notamment du temps des libéraux.
Deuxième chose, Mme
la Présidente, je vous ai présenté les investissements globaux en transport,
voici ceux en transport collectif, je ne sais pas si mon collègue regarde, les
colonnes rouges de son parti et les colonnes bleues de notre parti. Je pense que la différence est au moins aussi flagrante que
dans le précédent tableau. On n'a jamais autant investi en transport
collectif, Mme la Présidente.
• (14 h 50) •
La
Présidente : Première complémentaire.
M. Monsef
Derraji
M. Derraji : Mme la Présidente,
s'ils travaillent ensemble, pourquoi ils sont venus faire une conférence de
presse à Québec? Ils sont venus faire une conférence de presse pas pour
l'applaudir, c'est pour dénoncer son inaction. Mme la Présidente, c'est très
simple, elle oblige les sociétés de transport à acheter des bus électriques,
elle leur coupe le financement, elle leur coupe les garages. Elle veut que ces
autobus se chargent où?
Est-ce
qu'elle va reculer, Mme la Présidente? Est-ce qu'elle va au moins leur
permettre d'avoir des bus hybrides? C'est de l'incompétence, Mme la
Présidente.
La Présidente : Oh! attention, ce
terme est également au lexique — merci,
M. le leader — je vous demande de le retirer. Vous le retirez?
Une voix : ...
La Présidente : Vous le
retirez. La réponse de la ministre.
Mme Geneviève Guilbault
Mme Guilbault : Oui. Alors, sur l'électrification, bien, on est tous
d'accord, ici, c'est une question qu'on a déjà abordée, si je ne m'abuse, à la
dernière étude de crédits, le député de Nelligan et moi, dans les
85 heures qu'on a passées sur le projet de loi n° 61,
l'année dernière, pour Mobilité Infra Québec, un autre projet que, d'ailleurs,
les sociétés de transport ont applaudi parce qu'on vient créer une capacité de
réalisation supplémentaire pour des projets de transport collectif structurants,
qui répondent exactement à la volonté de tous d'avoir, oui, une offre de
transport collectif accrue, mais d'avoir aussi des finances qui sont
structurées dans nos sociétés de transport.
Tout ça pour dire, Mme la Présidente, qu'on n'a
jamais autant investi. Sur l'électrification, j'ai déjà dit à plus d'une
reprise, et ils le savent, j'ai rencontré le nouveau D.G. de l'ATUQ
dernièrement, on est ouverts à revoir la manière d'atteindre les cibles pour
que ce soit réaliste...
La Présidente : Deuxième
complémentaire.
M. Monsef Derraji
M. Derraji : Mme la Présidente,
je vais répéter ma question, mais maintenant au premier ministre : Est-ce
que le premier ministre sait très bien qu'aujourd'hui sa vice-première ministre
oblige les sociétés de transport à acheter uniquement des bus électriques? Ils
n'ont pas de garages, pas de bornes, ils ne peuvent pas avoir accès à des
recharges, ils ne peuvent même pas acheter, Mme la Présidente, des bus
hybrides.
Est-ce que le premier ministre tolère que
l'électrification du transport au Québec devienne dogmatique? Ça ne fonctionne
pas. Il doit agir, Mme la Présidente, le premier ministre.
La Présidente : La réponse de la
ministre.
Mme Geneviève Guilbault
Mme Guilbault : Oui, bien, justement, Mme la Présidente, on est un parti pragmatique.
Que ce soit l'électrification des
autobus urbains ou du transport scolaire, on a fait des adaptations, on a fait
des changements législatifs, réglementaires, dans le cas du transport scolaire, avec mon collègue de l'Éducation, pour
moduler certaines choses, on a agi sur les minibus, par exemple, on a
prolongé la durée de vie des autobus actuels pour accommoder certains transporteurs.
Alors, on agit intelligemment, Mme la Présidente.
On va le faire aussi dans le transport urbain. On le fait avec les sociétés de transport. Je les rencontre
régulièrement. Je rencontre régulièrement l'Association du transport urbain du
Québec, ils savent très bien qu'on va travailler ensemble pour, oui, continuer
d'avoir des cibles ambitieuses de réduction de GES, mais le faire
intelligemment, notamment dans le respect des capacités budgétaires de tout le
monde.
La Présidente : En question
principale, je reconnais maintenant le chef de l'opposition officielle.
Stratégie
d'électrification des transports
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : Alors, Mme la
Présidente, encore, au Québec, une journée où on voit le lot, le lot de ce mauvais
gouvernement là, les mauvaises décisions.
Là, j'interpelle le premier ministre. Là, les
représentantes et représentants des sociétés de transport sont dans nos tribunes, sont descendus à Québec pour envoyer
un message très, très clair. Eux, ils veulent offrir le service, ils veulent
que le service soit fiable, que les usagers
l'utilisent. Pour ça, ils ont des bâtons dans les roues, notamment dû à une
politique, la Politique de mobilité
durable, puis un plan pour un Québec vert 2030 qui ne tient pas la route,
littéralement. Il leur est obligé d'acheter des véhicules électriques — interdit, hybrides — coupé, le financement des garages, coupé, le financement des bornes, ce qui fait dire, entre
autres, à ce groupe, et je les
cite : «En raison de ces délais d'approbation et de l'incapacité de
l'État à financer l'ensemble des projets d'électrification, la situation
actuelle compromet le remplacement de nos autobus en fin de vie par de nouveaux
véhicules nécessaires pour le maintien du service.»
Alors, en ce sens-là, quand on dit au premier
ministre, puis ce n'est pas juste de faire de la partisanerie, là, quand on dit au premier ministre que c'est mal
géré, eux autres sont bloqués à cause d'un dogmatisme. Contrairement à ce que
vient de dire sa ministre, il y a un dogmatisme. Eux autres, ils veulent
pouvoir opérer puis ils ont besoin, pour ça, d'avoir un gouvernement au
rendez-vous, qui soit efficace.
Alors là, je lui ai exposé le problème, là. Que
va-t-il faire à partir de maintenant? Au-delà de la réponse qu'il va me donner en 1 min 45 s, là, en
revenant au bureau, tantôt, là, que va-t-il faire pour changer la donne pour
qu'on ait des bons services?
La Présidente : La réponse du
premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : Oui, Mme la Présidente,
je pense qu'un des plus grands défis qu'on a, dans les prochaines années, puis ce qui m'excite le plus, c'est
l'électrification de notre économie. Peu importe ce que dit M. Trump, ce
que fait M. Trump, on a une responsabilité, là, quand on est élu,
de s'assurer qu'on lutte contre les changements climatiques, puis ça passe par
l'électrification de notre économie. C'est pour ça qu'on s'est donné un plan
extrêmement ambitieux. Alors que Philippe
Couillard disait : C'est fini, les barrages, ça n'existe plus,
l'hydroélectricité, c'est passé date, l'hydroélectricité, bien, nous, on a signé une entente jusqu'en 2075
avec Terre-Neuve pour prolonger le projet de Churchill Falls, pour l'agrandir,
pour être capables, Mme la Présidente, de doubler la capacité chez Hydro-Québec.
On est en train de regarder pour rehausser
la capacité des turbines qui sont déjà installées, pour faire de l'éolien, pour
développer les véhicules électriques, que ce soient des autobus, que ce
soient des batteries pour des véhicules électriques.
Je suis extrêmement surpris de voir que le Parti
libéral du Québec, qui a été un grand parti, est maintenant contre
l'électrification des transports, contre l'électrification de notre économie.
Quel parti passé date!
La Présidente : Alors, cela met fin
à la période de questions et de réponses orales.
Motions sans préavis
Comme il n'y
a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique Motions sans préavis,
et, pour ce faire, je cède la place au troisième vice-président de l'Assemblée
nationale. Bonne fin de journée, tout le monde. Merci.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors,
bon après-midi, collègues. Nous sommes à la rubrique des motions sans préavis.
En fonction de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans
préavis, je reconnais un membre du troisième groupe d'opposition. M. le député
de Matane-Matapédia.
Réitérer la confiance de
l'Assemblée envers le travail de vérification
et d'enquête des équipes de l'Autorité des marchés publics
et du Vérificateur général du Québec
M. Bérubé : M. le Président, je
sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter,
conjointement avec le député d'Acadie, le député de Maurice-Richard et la
députée de Vaudreuil, la motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale réitère son entière
confiance envers le travail de vérification et d'enquête des équipes de
l'Autorité des marchés publics et du Vérificateur général du Québec.»
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Lévesque (Chapleau) : Consentement,
sans débat, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Consentement,
sans débat. M. le député de Matane-Matapédia.
Une voix : ...
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors,
un vote a été demandé. La période de vote est ouverte.
M. le secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 96
Contre :
0
Abstentions :
0
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Cette motion est donc adoptée. M. le député
de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : ...envoyer le
résultat de la motion à l'Autorité des marchés publics, au Vérificateur général...
la Vérificatrice générale, et à la commission Gallant.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Ce
sera fait, M. le député.
Pour la prochaine motion, qui revient au
gouvernement, je reconnais M. le ministre de l'Éducation.
M. Drainville : Merci,
M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de
présenter la motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale reconnaisse que toute
personne travaillant dans une école publique au Québec doit incarner les principes de laïcité et de neutralité, doit respecter
le principe d'égalité entre les femmes et les hommes et ne doit pas
afficher ses croyances religieuses.»
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Y a-t-il consentement
pour débattre de cette motion? Y a-t-il consentement pour débattre de
cette motion? Pas de consentement.
Nous allons à la prochaine motion, qui revient à
l'opposition officielle, et je reconnais...
Des voix : ...
• (15 heures) •
Le Vice-Président (M. Benjamin) : S'il
vous plaît! S'il vous plaît, collègues! S'il vous plaît! Merci. Et je reconnais
Mme la députée de Chomedey.
Souligner la commémoration du
génocide du peuple arménien
Mme Lakhoyan Olivier : Merci,
M. le Président. Avant de présenter la motion, permettez-moi de souligner la
présence, dans les tribunes, de membres de la communauté arménienne, de
dirigeants de divers organismes et églises arméniens, et particulièrement la
présence de trois dignitaires que je ne peux pas me passer de souligner leurs
noms : Son Éminence l'archevêque Papken Tcharian, prélat de l'Église
apostolique arménienne du Canada, M. Levon Afeyan, consul honoraire de
l'Arménie au Québec, et M. Hagop Der Khatchadourian, président du Comité
national arménien international. Merci à vous tous d'être présents ici.
M. le
Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la
motion suivante conjointement avec la
députée de Laval-des-Rapides, le leader du deuxième groupe d'opposition, le
député de Jean-Talon, la députée de Vaudreuil et le député de Saint-Jérôme :
«Que l'Assemblée nationale fasse appel à son
devoir de mémoire et commémore le génocide arménien qui fut l'une des plus
terribles tragédies qui a marqué le début du vingtième siècle;
«Qu'elle rende hommage aux 1,5 million de
victimes qui, il y a 110 ans, ont péri lors de sombres événements qui
débutèrent en avril 1915 et qu'elle exprime sa solidarité envers le peuple
arménien et les membres de cette diaspora;
«Qu'elle rappelle que le peuple arménien a été
au cours des dernières années à nouveau victime d'un conflit sanglant dans la
région du Haut-Karabakh;
«Qu'elle
appelle de tous ses voeux l'édification d'un monde plus juste, plus pacifique
et plus égalitaire et qu'elle réitère
son engagement ferme à lutter contre toute forme de haine, de discrimination
raciale, ethnique et confessionnelle;
«Qu'enfin, les membres de cette Assemblée
observent une minute de silence en mémoire des victimes.»
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Lévesque (Chapleau) : ...M.
le Président, il y a consentement pour un débat de deux minutes de rigueur par intervenant dans l'ordre suivant : la
députée de Mont-Royal—Outremont, la députée de Laval-des-Rapides, le leader
de la deuxième opposition et également le député de Jean-Talon.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Je
comprends qu'il y a consentement pour... afin qu'il y ait un débat de rigueur
de deux minutes. Et, la première intervenante, Mme la députée de Mont-Royal—Outremont.
Mme Michelle Setlakwe
Mme Setlakwe : M. le Président,
en cette année marquant le 110e anniversaire du génocide arménien de 1915,
nous nous souvenons d'un chapitre sombre de
l'histoire de l'humanité. 1,5 million d'Arméniens ont été tués, des
familles entières déracinées, condamnées à l'exil.
Je salue chaleureusement les membres de la
communauté arménienne présents parmi nous, dans les tribunes. Votre présence
rend cet hommage profondément humain.
Permettez-moi de vous parler de mon histoire
familiale. Mon nom de famille, Setlakwe, signifie «six frères». Il réfère à la
fratrie de mon arrière-grand-père, Aziz, seul survivant des massacres qui
avaient déjà débuté à la fin du XIXe siècle, un prélude au génocide que
nous commémorons aujourd'hui.
Chrétien de Mardin, Aziz
Setlakwe a fui vers la Syrie, où est né mon grand-père, avant de venir au
Québec. Il fut le tout premier Arménien à s'y établir. Pour se protéger, il a
dû abandonner son nom de famille d'origine, Sarafian. C'est aussi ça, un génocide, dépouiller un peuple de sa langue, de sa
culture, de son enracinement. Toute ma vie, j'ai dû expliquer mon nom,
le justifier, presque. Les noms arméniens se terminent en «ian». Le mien ne
sonne pas arménien, comme si mon identité
m'avait été volée à moitié. Et pourtant je suis fière, fière de cette force
héritée d'Aziz, dont le courage a permis à toute une lignée de
s'enraciner ici.
Son héritage
se poursuivra malgré la fermeture imminente de l'entreprise qu'il a fondée il y
a 120 ans. Un chapitre se ferme, et le nom Setlakwe continuera de rayonner
autrement. Cette fierté m'habite alors que je prends la parole en tant que descendante de survivants dans cette
terre d'accueil qu'est le Québec. Nous avons le devoir de faire vivre la
mémoire, de dire la vérité et de lutter contre la haine et l'indifférence.
Souvenons-nous des victimes. Chaque famille arménienne porte un deuil
transmis, un exil imposé, une douleur que les mots peinent à dire. Nous ne les
oublierons jamais.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Mont-Royal—Outremont. Et je reconnais maintenant Mme la députée
de Laval-des-Rapides.
Mme Céline Haytayan
Mme Haytayan : Merci, M. le
Président. Le 24 avril 1915 débutait l'un des chapitres les plus
sombres de l'humanité. C'était il y a
110 ans. Ce jour-là, des centaines d'intellectuels arméniens sont arrêtés,
et plusieurs d'entre eux sont
exécutés. Cette date, communément appelée le Dimanche rouge, marquera le début
du génocide des Arméniens perpétré par l'Empire ottoman. Au total, plus
de 1,5 million de femmes, d'hommes et d'enfants ont perdu la vie, sans
compter les déportations massives et l'exode
de ce peuple à travers le monde alors que la communauté internationale de
l'époque était aux prises avec la Grande Guerre, soit la Première Guerre
mondiale, de 1914 à 1918.
Des dizaines
de milliers de Québécois et de Québécoises d'origine arménienne font partie de
notre nation québécoise depuis plusieurs décennies et y contribuent sur
les plans économique, politique, culturel et social. Ensemble, nous continuons de partager des valeurs communes de
paix, d'équité, de liberté, de justice et d'ouverture qui font notre force.
M. le
Président, par devoir de mémoire, l'Assemblée nationale du Québec adopte à
l'unanimité, et ce, chaque année depuis 1980, une motion pour rendre hommage
aux victimes et souligner la résilience des survivants ainsi que de tous
les Arméniens. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Laval-des-Rapides. La parole revient maintenant au leader du
deuxième groupe d'opposition.
M. Guillaume Cliche-Rivard
M. Cliche-Rivard : M. le
Président, aujourd'hui, nous
commémorons le génocide arménien, qui a fait 1,5 million de victimes et qui continue d'affliger, par le
deuil, l'incompréhension et la tristesse, des millions de familles partout à
travers le monde.
C'est pratique courante et très nécessaire pour
nous, membres de l'Assemblée nationale, de faire ce genre de commémoration,
parce que le devoir de mémoire est un geste important, important pour ne pas
oublier et important pour rester vigilants face aux conflits présents. Cette
vigilance était nécessaire encore récemment, alors que le peuple arménien vivait un autre conflit sanglant, cette
fois au Haut-Karabakh. Alors que les diverses nations étaient témoins de ce
conflit, certaines ont décidé de nier les
faits, perpétuant ainsi une grande blessure pour le peuple arménien et laissant
ouverts et vifs de grands traumatismes. Finalement, en mars dernier, le
processus de négociation sur le texte de l'accord de paix entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie a été conclu.
Après des centaines de décès, des centaines de milliers de personnes déplacées,
nous leur souhaitons enfin une paix durable.
Les génocides ont été nombreux dans l'histoire,
trop nombreux, et ils ne sont pas relégués qu'aux diverses histoires et livres d'histoire, on les voit encore
se dérouler sous nos yeux. En effet, l'ostracisation, la stigmatisation et les
crimes contre l'humanité continuent, malheureusement.
Voilà pourquoi
nous devons continuer à nous souvenir. Ainsi, en leur exprimant toute ma
solidarité, je me tourne donc vers la
communauté arménienne du Québec dans un devoir de
commémoration, au nom de ma formation politique, mais aussi envers tous ceux et celles qui luttent encore aujourd'hui
pour leur sécurité et celle de leurs enfants. Soyez assurés que jamais
nous n'oublierons. Merci.
• (15 h 10) •
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le leader du deuxième groupe d'opposition. Et la parole revient maintenant à
M. le député de Jean-Talon.
M. Pascal Paradis
M. Paradis : «Le génocide
s'entend de l'un quelconque des actes ci-après, commis dans l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe
national, ethnique, racial ou religieux : meurtre de membres du groupe;
atteinte grave à l'intégrité physique
ou mentale de membres du groupe; soumission intentionnelle du groupe à des
conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale
ou partielle; mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe;
transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe.» C'est ainsi que la
Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide décrit depuis 1948 le crime
de génocide, une définition, entre autres, reprise par le Statut de Rome de
la Cour pénale internationale.
Le génocide est souvent considéré comme le crime
international ultime, avec les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité et le crime d'agression. Si le
droit international définit plus clairement ce crime aujourd'hui, c'est parce que
nous avons malheureusement connu des génocides, trop souvent niés encore
aujourd'hui.
C'est le cas du génocide arménien. C'est
pourquoi il s'agit de l'un des événements, dans l'histoire mondiale, qui exigent le devoir de mémoire. Honorer la
mémoire des tragédies humaines, c'est rendre aux victimes l'hommage qui
leur est dû, c'est reconnaître que nous sommes, personnellement et
collectivement, le produit de l'histoire.
Cette année, c'est le 110e anniversaire du
génocide arménien que nous commémorons. Nous nous souvenons des exactions
contre les populations civiles lorsque les autorités ottomanes ont entrepris le
nettoyage ethnique de l'est de l'Anatolie.
Entre 1915 et 1916, les Arméniens ont subi les massacres, les exils, le froid,
la famine, les déportations, les camps de détention, des dizaines de
milliers d'enfants enlevés à leurs familles puis convertis de force.
Nous devons nous souvenir parce que l'histoire
compte, parce que ce sont les peuples qui oublient l'histoire qui risquent de la répéter, parce que les
événements du Haut-Karabakh nous rappellent malheureusement les événements
de 1915-1916. Nous commémorons le 110e anniversaire du génocide arménien
et continuerons à le faire, parce que toute commémoration pour l'Arménie est un
appel à la justice, à la paix, à la primauté du droit partout dans le monde.
Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député de Jean-Talon. Alors, cette motion est-elle adoptée?
Des voix : Adopté.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Nous
allons maintenant observer une minute de silence à la mémoire des victimes du
génocide arménien.
• (15 h 13
—
15 h 14
)
•
Le Vice-Président (M. Benjamin) :
Je vous remercie. Et la prochaine motion revient au deuxième groupe
d'opposition, et je reconnais M. le député de Taschereau.
M. Grandmont : M. le Président,
je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante
conjointement avec le député des Îles-de-la-Madeleine :
«Que
l'Assemblée nationale souligne, en ce Jour de la Terre 2025, l'importance
d'investir massivement dans le transport en commun pour répondre aux défis
environnementaux, sociaux et économiques auxquels fait face le Québec;
«Qu'elle prenne acte des fermetures préventives
récentes de stations dans le métro de Montréal, symptôme d'un sous-financement
chronique de l'entretien des infrastructures de transport collectif;
«Qu'elle
déplore qu'en dollars constants, les sommes disponibles sur 10 ans pour le
maintien d'actifs du transport
collectif ne représentent que 50 % des sommes qui étaient disponibles en
2013;
«Qu'elle
s'inquiète que, pendant ce temps, le gouvernement continue d'investir massivement
dans le développement du réseau
routier, et qu'il se prépare même à investir des dizaines de milliards de
dollars dans le projet inutile de troisième lien;
«Qu'elle rappelle que le transport collectif est
un levier incontournable pour lutter contre les changements climatiques,
améliorer la qualité de vie et décongestionner les centres urbains;
«Qu'elle rappelle également que le Québec
dispose d'un savoir-faire reconnu dans la fabrication de trains, de tramways et d'autobus, et que chaque investissement
en transport collectif soutient directement l'économie locale et l'emploi
ici, au Québec;
«Qu'en conséquence l'Assemblée nationale demande
au gouvernement du Québec de revoir ses priorités budgétaires et de s'engager à
financer massivement l'entretien, la modernisation et le développement du
transport en commun sur l'ensemble du territoire.»
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Lévesque (Chapleau) : ...M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Il
n'y a pas de consentement.
Nous sommes toujours à la rubrique des motions
sans préavis. Une motion sans préavis ayant déjà été présentée par le groupe
parlementaire formant le gouvernement, je demande s'il y a consentement pour
permettre la lecture d'une autre motion sans préavis. Consentement? Consentement.
M. le leader adjoint du gouvernement.
Entériner le mandat de procéder à des consultations
particulières sur le projet de loi n° 98
M. Lévesque (Chapleau) : Oui,
merci, M. le Président. Donc, je demande le consentement pour déroger à
l'article 84.1 de notre règlement afin de déposer une motion rétroactive
de consultations particulières donnant suite à une entente entre les leaders,
la députée indépendante de Vaudreuil et le député indépendant de Saint-Jérôme.
Je fais motion,
conformément à l'article 146 du règlement de l'Assemblée nationale,
afin :
«Que l'Assemblée nationale entérine le mandat
donné à la Commission des institutions, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 98, [la] Loi modifiant la Loi électorale principalement
afin de préserver l'intégrité du processus électoral, de procéder à des
consultations particulières et de tenir des auditions publiques dès le mercredi
23 avril 2025, après les avis touchant les travaux des commissions
vers 11 h 15 jusqu'à 13 h 05 et de 15 heures à
18 h 15;
«Qu'à cette fin, la Commission entende les
personnes et organismes suivants : Directeur général des élections, Chaire de recherche sur la démocratie et les
institutions parlementaires de l'Université Laval, Confédération des syndicats
nationaux, Patrick Taillon, professeur à la Faculté de droit de l'Université
Laval, Force jeunesse, Réseau québécois des groupes écologistes;
«Qu'une période de 12 minutes soit prévue
pour les remarques préliminaires, répartie de la manière suivante :
6 minutes pour [...] le gouvernement, 3 minutes [...] pour
l'opposition officielle, 1 minute 12 [...] au deuxième groupe
d'opposition, 1 minute 12 [...] pour la députée indépendante;
«Que la durée maximale de l'exposé de chaque
organisme soit de 10 minutes et l'échange avec les membres de la Commission soit d'une durée maximale de
35 minutes partagées ainsi : 17 minutes 30 secondes pour
[...] le gouvernement, 10 minutes 30 secondes pour
l'opposition officielle, 3 minutes 30 secondes pour le deuxième
groupe d'opposition, 3 minutes 30 secondes pour la députée
indépendante;
«Qu'une suspension de 5 minutes soit prévue
entre les échanges avec chaque personne et organisme;
«Que le ministre responsable des Institutions
démocratiques soit membre de ladite Commission pour la durée du mandat.»
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
Une voix : ...
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Consentement,
sans débat. Cette motion est-elle adoptée?
Des voix : Adopté.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Adopté.
Avis touchant les travaux des commissions
Nous sommes maintenant à la rubrique des avis
touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lévesque (Chapleau) : ...merci
beaucoup, M. le Président.
À nouveau, donc, j'avise cette Assemblée que la Commission
des relations avec les citoyens va poursuivre l'étude détaillée du projet de
loi n° 84, la Loi sur l'intégration nationale,
aujourd'hui, de 16 h 30 à 19 h 15, à la salle
Pauline-Marois;
La Commission de la culture et de l'éducation va
poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 94, la Loi visant notamment à renforcer la laïcité dans
le réseau de l'éducation et modifiant diverses
dispositions législatives,
aujourd'hui, après les avis touchant les travaux des commissions jusqu'à
19 h 20, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;
La Commission des finances publiques va
poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 82, la Loi concernant l'identité numérique nationale et modifiant
d'autres dispositions, aujourd'hui,
après les affaires courantes jusqu'à 19 h 15, à la salle
Marie-Claire-Kirkland;
La Commission de l'économie et du travail
poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 89, la Loi visant à considérer davantage les besoins de la population
en cas de grève ou de lock-out,
aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 19 h 15, à
la salle Louis-Joseph-Papineau.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Y a-t-il consentement
pour déroger à l'article 143 du règlement concernant l'horaire des
travaux des commissions? Consentement.
Pour ma part, je vous avise que la Commission
spéciale sur les impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le développement des jeunes se réunira en séance de travail le mercredi
23 avril 2025, de 7 h 30 à 8 h 45, à la salle
Louis-Hippolyte-La Fontaine, afin d'organiser les travaux de la
commission.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée
Je vous informe que demain, lors des affaires
inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par
M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Cette motion se lit comme suit :
«Que
l'Assemblée nationale prenne acte que sur les sept budgets déposés par le
gouvernement caquiste, six d'entre eux étaient déficitaires;
«Qu'elle
constate que selon les prévisions de son propre gouvernement, à la fin de son
mandat, le premier ministre aura été responsable d'un ajout de
96 milliards de dollars sur la dette du Québec;
«Qu'elle
prenne acte que cette mauvaise gestion financière a résulté en une baisse de la
cote de crédit du Québec auprès de l'agence Standard & Poor's qui
entraînera des coûts supplémentaires en matière de service de la dette;
«Qu'elle
constate que cela a pour effet de limiter sévèrement la capacité du Québec à
répondre adéquatement aux nombreux défis auxquels il fait face;
• (15 h 20) •
«Qu'elle reconnaisse qu'il s'agit d'un triste
legs pour les générations futures;
«Qu'enfin,
l'Assemblée nationale dénonce cette dégradation des finances publiques du
Québec sous la gouverne du premier ministre et du ministre des
Finances.»
Affaires du jour
La période
des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux
affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lévesque
(Chapleau) : Oui, merci
beaucoup, M. le Président. Oui, aux affaires du jour, je vous demande de bien
vouloir appeler l'article 70 du feuilleton, s'il vous plaît.
Motions du gouvernement
Motion proposant que
l'Assemblée autorise une modification
de la Constitution concernant le processus de sélection
des juges des cours supérieures du Québec
Le Vice-Président (M. Benjamin) :
Avec plaisir, M. le leader adjoint du gouvernement. À l'article 70 du feuilleton... Attendez. Voilà. À l'article 70
du feuilleton, aux motions du gouvernement, M. le ministre responsable des
Relations canadiennes présente la motion suivante :
«Que l'Assemblée nationale constate que le
pouvoir de nomination des juges des cours supérieures des États fédérés
appartient au gouverneur général en vertu de l'article 96 de la Loi
constitutionnelle de 1867;
«Qu'elle constate que l'exercice de ce pouvoir
est circonscrit, en ce qui concerne le Québec, par la condition voulant que les juges soient choisis parmi les
membres du Barreau du Québec en vertu de l'article 98 de cette même loi;
«Qu'elle constate que l'article 98 de la
Loi constitutionnelle de 1867 vise à assurer que les juges des cours
supérieures du Québec maîtrisent le droit qui y est en vigueur;
«Qu'elle souligne que le Québec est le seul État
de tradition civiliste au sein de la fédération;
«Qu'elle
considère qu'il y a lieu de protéger et de promouvoir cette tradition en
précisant davantage la condition de nomination prévue à
l'article 98;
«Qu'elle
souligne qu'une telle modification peut être effectuée, conformément à
l'article 43 de la Loi constitutionnelle de 1982, par proclamation
de la gouverneure générale sous le grand sceau du Canada, autorisée par des
résolutions de l'Assemblée nationale, du Sénat et de la Chambre des communes;
«Qu'elle
précise qu'une telle modification ne constitue en aucune façon une
reconnaissance par l'Assemblée nationale de la Loi constitutionnelle de
1982, qui fut adoptée sans son consentement;
«Que
l'Assemblée nationale autorise la modification de la Constitution du Canada par
proclamation de la gouverneure générale sous le grand sceau du Canada,
en conformité avec le texte suivant :
«Modification de la Constitution du Canada
«Loi constitutionnelle de 1867
«1. La Loi constitutionnelle de 1867 est modifiée
par le remplacement de l'article 98 par le suivant :
«98Q.1. Les
juges des cours supérieures du Québec sont choisis parmi les membres du Barreau
du Québec ayant été recommandés par le gouvernement du Québec.
«Titre
«2. Titre de la présente modification :
"Modification constitutionnelle de (année de proclamation)
(Québec)".»
Je cède maintenant la parole à M. le ministre
responsable des Relations canadiennes.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Merci, M.
le Président. Chers collègues, c'est avec beaucoup de fierté que je soumets aujourd'hui à l'Assemblée nationale un projet de
résolution de modification constitutionnelle visant à ce que le Québec puisse
enfin prendre part au processus de sélection des juges appelés à siéger à sa Cour
supérieure et à sa Cour d'appel.
La
modification souhaitée vise, comme vous venez de l'entendre, à préciser
davantage la condition de nomination présentement prévue à
l'article 98 de la Loi constitutionnelle de 1867. À l'heure actuelle,
cette disposition énonce que les juges des cours du Québec seront choisis parmi
les membres du Barreau du Québec. Cette condition de nomination, qui existe depuis 1867, a toujours eu pour
objectif d'assurer que les juges nommés maîtrisent le droit civil québécois. Nous
proposons aujourd'hui d'apporter une précision à cette condition afin que les
juges assignés à nos cours supérieures, en plus d'être membres du Barreau du
Québec, soient préalablement recommandés par le gouvernement du Québec.
Ce geste est nécessaire, il
en va du respect des principes fondamentaux du fédéralisme et du caractère
distinct du Québec. Il s'inscrit d'ailleurs en cohérence absolue avec les
positions historiques du Québec.
La participation directe du Québec dans la nomination
des juges des cours supérieures et à la Cour suprême du Canada figure depuis
longtemps parmi les revendications fondamentales des gouvernements québécois.
Dès 1950, lors d'une conférence fédérale-provinciale, le premier ministre
Duplessis affirmait, et je cite, «qu'il n'est pas raisonnable et qu'il n'est
pas conforme à l'unité nationale bien comprise que l'autorité fédérale s'arroge
le droit de choisir de façon unilatérale les arbitres appelés à décider des
droits respectifs de chacune des parties». Les premiers ministres québécois qui
lui ont succédé, de Daniel Johnson à Pierre Marc Johnson, en passant par René
Lévesque, ont tous revendiqué un pouvoir dans la sélection des juges des cours
supérieures.
À partir des années 1970, la question du
mode de nomination des juges s'est imposée et est devenue incontournable dans
les grandes conférences de négociation constitutionnelle, si bien que toutes
les tentatives de réforme de la constitution, de la charte de Victoria à
l'accord de Charlottetown, comprenaient une modification du processus de nomination des juges de la Cour
suprême, à l'exception notoire de la réforme de 1982. Le gouvernement de Robert
Bourassa en fit même une condition sine qua non de l'adhésion du Québec à un
accord de modification constitutionnelle. Bien que les accords du lac Meech et
de Charlottetown, qui ont échoué au début des années 90, ne concernaient
que la Cour suprême, ils prévoyaient des dispositions dont l'esprit est en
pleine adéquation avec ce que notre gouvernement entreprend au regard des cours
supérieures du Québec. L'idée de venir préciser la condition de nomination à la
fonction de juge de ces cours pour permettre à l'État québécois d'avoir voix au
chapitre a donc des fondements profonds, indéniablement rationnels et qui
transcendent les allégeances politiques.
Ce large consensus, qui a d'ailleurs été réitéré
d'une seule voix par cette Assemblée le 5 février dernier, s'explique
notamment par le caractère complètement antifédéral du pouvoir qui a été
confié... conféré au gouvernement central en 1867. Pour reprendre les mots de
la constitutionnaliste Eugénie Brouillet : «Le pouvoir judiciaire est la
fonction étatique qui reflète le moins bien la nature fédérative du pays. C'est
que les juges qui sont au coeur du système judiciaire
canadien et qui sont les principaux arbitres des différends fédératifs sont
nommés entièrement et unilatéralement par un seul des partenaires de la
fédération : le gouvernement fédéral.»
Le politologue Peter Russell affirmait à cet
effet qu'aucun autre système fédéral ne comporte une telle centralisation de
pouvoirs de contrôle sur les nominations judiciaires. Il suffit de se comparer
à d'autres fédérations dans le monde pour s'en convaincre. Pensons notamment à
l'Allemagne, à l'Australie, à la Belgique, à la Confédération suisse et aux
États-Unis, avec lesquelles nous avons de nombreuses similarités structurelles.
On constate que le Canada est la seule
fédération où le gouvernement fédéral procède unilatéralement à la nomination
des juges des cours des États fédérés, M. le Président. Même dans des
pays comme le Royaume-Uni et l'Espagne, qui ne sont pas des fédérations à proprement parler, les entités autonomes prennent
part au processus de sélection. Cette anomalie canadienne faisait même dire à K. C. Wheare, un des grands
théoriciens du fédéralisme, que le Canada, où la nomination de tous les juges
est entre les mains du gouvernement fédéral, est un exemple de système
qui contredit le principe de fédéralisme.
Le fédéralisme repose d'abord et avant tout sur
la non-subordination des ordres de gouvernement et sur la pleine autonomie des
États fédérés dans leurs champs de compétence. Comment justifier alors que les
arbitres, appelés à trancher non seulement
des questions qui relèvent des compétences du Québec, mais également des
questions constitutionnelles fondamentales, ne soient nommés que par le
gouvernement fédéral? Il ne s'agit pas, ici, M. le Président, de remettre en question l'impartialité ou les
compétences des juges de nos tribunaux supérieurs. Les juges de ces tribunaux
sont compétents, impartiaux et indépendants. Il s'agit plutôt d'une question
d'apparence de neutralité qui transcende les
époques et les considérations partisanes, comme en témoignent les
revendications récurrentes du Québec à cet égard.
La légitimité du pouvoir judiciaire dans notre
fédération repose en grande partie sur la confiance qu'il inspire aux
justiciables. Les institutions qui inspirent la confiance sont celles qui
offrent certaines garanties, notamment sur la neutralité et l'impartialité dans
les faits et en apparence. Eugénie Brouillet disait par ailleurs que la
participation des États fédérés dans le
processus de nomination des juges est, et je cite, «une condition
essentielle à l'apparence de neutralité que doit afficher l'arbitre judiciaire».
Le fédéralisme, c'est aussi l'équilibre des
pouvoirs octroyés aux ordres de gouvernement. Cet équilibre est d'autant plus important lorsque l'une ou des
entités fédérées sont des minorités nationales. Un respect strict des pouvoirs
et de l'autonomie de chacun permet de pallier à ce qui serait autrement
un déséquilibre fondamental au sein même de la fédération. Or, le Québec,
pourtant un partenaire fédératif et un gouvernement au même titre que l'État
fédéral, n'a pas le pouvoir de nommer les juges qui deviendront les
arbitres et les interprètes de ses propres lois. Il ne bénéficie donc pas de toute la latitude prévue à l'origine dans
le pacte fédératif pour préserver son identité et ses aspirations nationales et
culturelles. Ainsi, au-delà des questions d'apparence de neutralité, le
Québec doit pouvoir participer à la désignation des juges dans le respect du principe du fédéralisme asymétrique. Comme
le rappelle le professeur émérite José Woehrling, on doit reconnaître que la centralisation et l'uniformisation
vont à l'encontre de certains objectifs traditionnellement poursuivis
par l'entremise du fédéralisme, l'autonomie des entités fédérées et la défense
de la diversité.
• (15 h 30) •
Rappelons d'ailleurs qu'en 1979 la commission
Pepin-Robarts, créée par le gouvernement libéral du premier ministre Pierre
Elliott Trudeau, concluait que le pouvoir de nomination conféré à l'exécutif
fédéral était, et je cite, «un vestige
anachronique de la centralisation fédérale». Il recommandait que chaque
gouvernement provincial nomme lui-même les juges de leurs cours
supérieures après avoir consulté l'ordre fédéral. Comme vous le savez, cette
recommandation n'a jamais été mise en oeuvre, M. le Président. La nomination
des juges au Canada souffre donc d'un déficit en termes de légitimité
fédérative, et il devient de plus en plus difficile de justifier le maintien...
le maintien de ce vestige inadapté à notre régime politique.
C'est
sans compter les autres impacts indésirables du maintien du système actuel. Le
Québec a développé un processus de nomination des juges à la Cour du Québec
exempt de partisanerie, rigoureux et dont l'intégrité et la neutralité ne font
aucun doute. Le comité québécois de sélection des candidats à la fonction de
juge est composé de membres issus de différents milieux qui évaluent des
candidatures sur la base de critères stricts et transparents afin de soumettre
ses recommandations au ministre de la Justice, qui doit impérativement choisir
parmi les candidats recommandés. Les recommandations faites par le Québec au
gouvernement fédéral seraient sélectionnées suivant la même rigueur et le même souci pour la transparence, l'intégrité et
l'indépendance du processus judiciaire, des conditions essentielles au
maintien de la confiance en notre système de justice à nous tous.
Le processus fédéral
n'offre pas les mêmes garanties et souffre d'un déficit de légitimité auquel
les récentes modifications n'ont pas su pallier. D'une part, les présidents et
les membres des comités consultatifs à la magistrature sont tous désignés par
le ministre de la Justice fédéral. D'autre part, le gouvernement conserve une
très grande latitude dans le choix des juges puisqu'il n'est tenu de nommer un
candidat recommandé par les comités consultatifs, limitant ainsi grandement leur rôle. Le ministre de la
Justice fédéral, M. le Président, n'a pas à recommander un candidat qui lui a été
recommandé par le processus... par le comité de sélection fédéral.
Encore récemment, des
enquêtes journalistiques faisaient d'ailleurs écho à des préoccupations
récurrentes d'apparence de favoritisme suffisantes à écorcher la confiance du
public envers nos institutions que nous nous devons de protéger. S'ajoutent à cela l'inefficacité et la lenteur du processus
fédéral. Pendant de longues périodes, plusieurs postes de juge sont
maintenus vacants, ce qui engendre des délais de procédure inacceptables et
mine la confiance du public envers l'efficacité et l'intégrité du système de
justice québécois. En date du 1er avril dernier, neuf postes de juge sont toujours vacants à la Cour supérieure du Québec et à la Cour
d'appel du Québec, et certains
tardent à être pourvus depuis près
d'une décennie, M. le Président. Ma prédécesseure, l'ancienne députée de
Gatineau, avait modifié la Loi sur les tribunaux judiciaires de 2016, et
ces deux postes-là ne sont toujours pas comblés, M. le Président.
La
modification que nous proposons aujourd'hui s'inscrit donc aussi dans la
continuité de nombreux changements que
nous avons apportés au système de justice québécois depuis cinq ans afin de le
rendre plus accessible, plus efficace, et surtout plus humain.
L'amendement est nécessaire pour permettre au Québec de remplir pleinement ses
responsabilités en matière d'administration
de la justice sans craindre que des postes de juge demeurent inoccupés pendant
plusieurs années.
Il
importe de rappeler que l'initiative que nous entamons aujourd'hui a été
recommandée par le Comité consultatif sur les enjeux constitutionnels du Québec
au sein de la fédération canadienne. Le comité, présidé par MM. Sébastien
Proulx et Guillaume Rousseau et composé
d'experts indépendants provenant de différents horizons, Catherine Mathieu et
Amélie Binette, Luc Godbout et Martine
Tremblay, y a consacré deux de ses recommandations. Dans son rapport, rendu
public le 26 novembre 2024, le comité suggère que l'Assemblée nationale
adopte une résolution afin d'amorcer une modification constitutionnelle
bilatérale de l'article 98 de la Loi constitutionnelle de 1867. Rappelons
que l'article 43 de la Loi constitutionnelle de 1982 autorise la modification
des dispositions de la Constitution, applicables à certains États fédérés
seulement. C'est le cas de l'article 98 de la Loi constitutionnelle de
1867, auquel nous nous attardons aujourd'hui et qui ne s'applique qu'au Québec.
L'article 43
prévoit que de telles dispositions peuvent être modifiées avec le consentement
de l'Assemblée législative de chaque État fédéré concerné et celui du Sénat et
de la Chambre des communes. Cette procédure a souvent été désignée comme la procédure
bilatérale, mais on y réfère davantage depuis les 10 dernières années
comme étant la procédure des arrangements dits spéciaux. L'article 98 de
la Loi constitutionnelle de 1867 constitue sans contredit un arrangement spécial pour le Québec, seul état de
tradition civiliste au sein de la fédération. Il ne concerne en effet que les
cours supérieures québécoises. La
modification de l'article 98 n'aurait donc effet que sur... aucun effet
sur les autres États fédérés. Il y a là un espace pour faire valoir le
caractère distinct du Québec, et nous venons l'occuper.
Et
je veux être bien clair, M. le Président, sur un point : en aucun cas
cette modification ne constitue une reconnaissance de la Loi constitutionnelle de 1982, qui a été
proclamée contre la volonté du Québec et qui demeure totalement illégitime.
Depuis
le rapatriement unilatéral de 1982 par le gouvernement libéral du premier
ministre Pierre Elliott Trudeau, le Québec est assujetti à des règles qui lui
ont été imposées et auxquelles aucun gouvernement québécois ni l'Assemblée
nationale... n'y a consenti. Après avoir
tenté sans succès d'obtenir réparation, le Québec s'est retrouvé paralysé par
une impression d'impuissance, en attente d'une reconnaissance qui n'est
jamais venue.
Aujourd'hui, le
Québec n'attend plus, il s'affirme. Nous prenons, donc, tous les moyens à notre
disposition pour occuper l'espace qui nous
revient de plein droit et défendre la personnalité distincte de la nation
québécoise. C'est, d'ailleurs, ce que nous avons fait ces dernières
années, notamment en ayant recours à la disposition de souveraineté
parlementaire pour défendre les choix et les valeurs des Québécois et des
Québécoises, dont la laïcité de l'État et la protection de la langue française,
en modifiant unilatéralement la Constitution pour y inscrire que les Québécois
et les Québécoises forment une nation, en modifiant unilatéralement la
conscience pour y inscrire que le français est la seule langue officielle et
commune au Québec et en permettant aux représentants du peuple québécois de ne
prêter allégeance qu'à ceux qui les ont élus démocratiquement.
La
résolution que nous proposons aujourd'hui embrasse l'idée que le Québec doit
faire usage de tous les outils à sa disposition afin de se tailler la
place qui lui revient au sein de la fédération canadienne. Cette posture
constitutionnelle est, d'ailleurs, au coeur
des travaux du comité Proulx-Rousseau, qui en fait une nouvelle doctrine
gouvernementale à la disposition de l'État québécois.
L'Assemblée
nationale a le pouvoir d'amorcer les modifications constitutionnelles. Rien
n'oblige la tenue préalable de grandes conférences de négociations comme
celles qui ont échoué par le passé. Aujourd'hui, nous proposons, donc, à cette Assemblée de se prévaloir d'un droit
constitutionnel qui lui appartient en entamant cette démarche de modification
constitutionnelle. Et je l'ai précédemment
évoqué, le 5 février dernier, l'Assemblée nationale s'est exprimée à
l'unanimité. Elle a rappelé, par motion, les revendications
traditionnelles du Québec et a réitéré que l'État québécois devrait prendre part au processus de nomination des juges de ses propres
cours supérieures. Cette motion est révélatrice de la nature transpartisane et de la légitimité de notre
initiative. Elle envoie un message fort quant à la nécessité pour notre
gouvernement et pour l'Assemblée
nationale d'intervenir promptement pour corriger un processus de nomination
inadéquat et déficient, afin de remédier à une situation problématique
qui persiste depuis beaucoup trop longtemps. Je remercie, d'ailleurs,
l'ensemble de mes collègues qui ont donné leur aval à la motion, traduisant
ainsi une reconnaissance claire de notre volonté commune sur cette question.
Il importe de le
rappeler, M. le Président, la Constitution n'appartient pas au gouvernement
fédéral, et l'État du Québec, comme les
autres États fédérés, est libre d'initier des modifications constitutionnelles
par l'entremise de son Assemblée
nationale. Et, comme le comité Proulx-Rousseau, dans son rapport... Et, comme
le rappelle le comité Proulx-Rousseau dans son rapport, en vertu de
l'obligation constitutionnelle de négocier établie par la Cour suprême dans le
renvoi sur la sécession du Québec, le gouvernement fédéral est tenu de négocier
de bonne foi. Il s'agit là d'un devoir
envers la nation québécoise. Le respect des compétences et de l'autonomie des
États fédérés est au coeur de notre pacte
fédératif et, plus fondamentalement, au coeur de notre démocratie. Un refus du
fédéral de respecter cette obligation de négocier reviendrait ni plus ni
moins à renier les principes fondateurs de ce pacte supposé nous unir.
Le gouvernement
fédéral a une opportunité ici d'envoyer un message clair aux entités fédérées,
qui sont de plus en plus nombreuses à réclamer un rééquilibrage des forces au
sein de la fédération et un respect des compétences et des pouvoirs des
partenaires fédératifs. Il en va du respect de certains principes fondamentaux
de notre architecture constitutionnelle, particulièrement le principe du
fédéralisme et le principe de la démocratie. Le processus que nous entamons aujourd'hui a donc non seulement une
importance particulière pour le Québec, mais il est également fondamental
pour l'équilibre et l'intégrité de la fédération.
• (15 h 40) •
Depuis 2018, M. le
Président, le Québec est entré dans une nouvelle ère constitutionnelle, une ère
d'affirmation sans contrition de son identité nationale à l'intérieur de la
fédération canadienne. Il ne se laisse plus contraindre par le scepticisme ni
par l'attente que lui... que d'autres lui offrent le respect de son autonomie
et la capacité d'affirmer et de défendre son
unicité. Les Québécois n'ont pas à être gênés ni à s'excuser d'être qui ils
sont. Nous exprimons clairement ce que nous voulons et nous agissons pour
l'obtenir.
Après des décennies
caractérisées par l'attentisme et l'impasse constitutionnelle, l'État québécois
prend enfin tout l'espace qui lui revient et
utilise tous les outils constitutionnels à sa disposition pour y parvenir.
C'est en droite ligne avec cette approche, cette doctrine gouvernementale que
nous proposons aujourd'hui d'entreprendre une procédure des arrangements spéciaux pour modifier la
Constitution. Le regretté Benoît Pelletier voyait, dans cette procédure, un
potentiel énorme. Il se désolait, d'ailleurs, qu'elle demeure trop peu
exploitée par nos acteurs politiques.
Ailleurs
au Canada, la procédure bilatérale a été utilisée à quelques reprises,
notamment en 1993 pour ajouter une disposition
dans la charte canadienne relativement aux communautés linguistiques françaises
et anglaises du Nouveau-Brunswick. Plus récemment, en 2022, la Saskatchewan
a emprunté cette voie pour une question liée à une exemption fiscale sans
négociation gouvernementale préalable.
Au
Québec, M. le Président, elle n'a été utilisée qu'une fois par l'Assemblée
nationale, qu'une seule fois, en 1997, il y a près de 30 ans, pour
déconfessionnaliser nos écoles. L'Assemblée nationale doit se souvenir
aujourd'hui de ce succès. Souvenons-nous de
la force d'action et de l'impulsion que peuvent générer la volonté québécoise.
Le Québec n'est jamais aussi fort que
lorsqu'il se tient debout pour ses choix et ses aspirations, pour ses valeurs
sociales distinctes, pour ses traditions.
Le
Québec est le seul État de tradition civiliste au sein de la fédération
canadienne. Au-delà du droit, cette tradition façonne notre vivre-ensemble au Québec. Et, comme le disait Marc-André
Bédard, «le Code civil n'est pas une simple loi parmi d'autres, c'est
l'expression du droit courant du pays, c'est le reflet d'une certaine façon de
penser, de concevoir l'organisation des rapports humains et de parvenir à la
solution de justice».
Le gouvernement du
Québec a le devoir de protéger et de préserver ce qui fait du Québec une nation
distincte. L'article 98 de la Loi
constitutionnelle de 1867 constitue un arrangement spécial pour le Québec
visant à assurer que les juges des
cours supérieures du Québec maîtrisent notamment le droit civil. Le
gouvernement du Québec prend aujourd'hui les moyens nécessaires pour s'assurer que l'esprit de la disposition
soit respecté. Nous invitons les collègues à accueillir cette
proposition avec le même enthousiasme dont ils ont fait preuve lors de la
présentation de la résolution du 5 février dernier sur cette même question.
Nous
sommes, tous partis confondus, M. le Président, liés par ce même devoir, cette
même responsabilité d'oeuvrer à
défendre les intérêts du Québec au sein du régime politique dans lequel nous
évoluons. Un appui à la motion que nous présentons aujourd'hui constituerait une démonstration claire de notre
engagement commun envers la nation québécoise.
Nous
tendons d'ailleurs la même invitation à nos homologues du gouvernement fédéral.
Il nous apparaît indéniable que l'ouverture à discuter de cette
proposition dans le respect des principes fédératifs qui nous unissent ne
pourra que renforcer nos institutions et notre partenariat.
Nous
offrons aujourd'hui l'opportunité au gouvernement fédéral de réitérer par des
actions concrètes sa reconnaissance du Québec comme une nation distincte
au sein de la fédération canadienne. Il en va du respect de notre autonomie, de
notre intégrité et de notre entière capacité à faire nos choix collectivement.
Merci de votre attention, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Merci, M. le ministre.
J'en profite pour
vous informer qu'un débat de fin de séance se tiendra aujourd'hui, à
18 h 30. Ce débat portera sur une question adressée par M. le député
de Marguerite-Bourgeoys à M. le ministre des Finances concernant la dégradation
des finances publiques et de la décote de crédit du Québec par l'agence
Standard & Poor's.
Nous poursuivons le débat sur la motion du
gouvernement, et je reconnais M. le député de l'Acadie.
M. André Albert Morin
M. Morin :
Merci, M. le Président. Alors, je
rappelle qu'il y a peu de temps, en fait, en février 2025, le 5 février,
l'Assemblée nationale adoptait une motion qui a précédé la motion que dépose
aujourd'hui le ministre de la Justice, en
lien avec le processus de nomination des juges pour les cours supérieures.
Permettez-moi de rappeler cette motion, M. le Président.
«Que l'Assemblée
nationale rappelle l'importance d'un processus de nomination des juges sans
considération partisane, notamment pour
assurer la confiance du public dans le système de justice.» C'est un
considérant qui m'apparaît tout à fait essentiel puisque nous voulons,
bien sûr, des juges qui sont nommés sans aucune considération partisane, pour qu'ils soient capables de remplir leur devoir
qui est un devoir fondamental, c'est-à-dire de décider, ultimement, des
litiges entre des individus mais parfois entre des individus et l'État. Donc,
vous comprendrez comment c'est important, évidemment, de nommer des juges qui
sont totalement impartiaux.
On disait
également : «Qu'elle réitère que l'allégeance politique ne doit pas être
considérée dans l'évaluation d'une candidature à la magistrature, comme le
prévoit d'ailleurs le processus québécois de sélection des juges.» C'est aussi
un élément qui est fondamental, M. le Président. Ce qu'on veut pour la
magistrature, ce sont des candidats, des candidates qui sont compétents,
compétentes, et ça n'a rien à voir avec leur allégeance politique.
«Qu'elle souligne que
plusieurs gouvernements du Québec ont revendiqué un rôle direct dans la
nomination des juges des cours supérieures.»
C'est exact. C'est, en fait, une revendication du gouvernement du Québec qui
date de plusieurs années. Et, dans les minutes qui vont suivre, M. le
Président, je pourrai vous parler un peu de l'historique de ces
revendications-là.
«Qu'elle
rappelle que la fédération canadienne est une des seules fédérations où tous
les juges des cours supérieures sont nommés entièrement par le
gouvernement fédéral.» C'est exact. Et je vous donnerai aussi des exemples
d'autres fédérations où il y a une plus grande participation à la nomination
des juges des cours supérieures.
«Qu'elle rappelle que
le rapport du Comité consultatif sur les enjeux constitutionnels du Québec au
sein de la fédération canadienne recommande que le Québec prenne part à ces
nominations.» Donc, ce comité consultatif en est arrivé à cette conclusion, mais ça s'insère dans une longue série de
revendications qui ont été faites par différents comités ou auteurs au
fil des décennies.
«Qu'enfin l'Assemblée
nationale reconnaisse que le Québec doit prendre part au processus de
nominations des juges des cours
supérieures.» Et c'est évidemment ce qui a fait en sorte que le ministre de la
Justice a présenté une motion à cet effet et qu'on a le débat cet
après-midi.
En
fait, cette idée de permettre à des entités d'une fédération de pouvoir
participer à la nomination des juges des cours supérieures n'est pas une idée nouvelle, M. le Président. En fait,
en fait, quand on regarde l'historique et les réflexions qui ont été
apportées par différents groupes, ou associations, ou même commissions pour
essayer d'équilibrer, de faire en sorte que
la fédération canadienne et son droit constitutionnel s'adaptent, s'adaptent
aux réalités sur le terrain, bien, on se rend compte que cette
suggestion-là a été faite depuis de nombreuses décennies.
En
fait, il y a 46 ans, en 1979, pour être plus précis, la commission Pepin-Robarts,
donc, commission qui traitait de l'unité canadienne, travaillait et déposait
son rapport. Et ce qui est intéressant, dans le rapport de la commission, c'est
que, d'une part, on s'intéressait beaucoup à la juridiction de la Cour
suprême, mais on s'intéressait aussi aux nominations des cours supérieures dans les provinces, que ce soit au niveau de la
Cour d'appel ou au niveau de la Cour supérieure, et on rappelait
également l'importance de la dualité dans le système du droit canadien. En
effet, au sein de la fédération canadienne,
nous sommes privilégiés de pouvoir utiliser deux grands systèmes de
droit : la tradition civiliste, d'une part, pour tous les rapports
entre particuliers et pour les rapports de droit privé au Québec, et,
évidemment, la common law pour le droit public. Il n'en a pas toujours été
ainsi.
• (15 h 50) •
Après la signature du
traité de Paris, qui a mis fin à la guerre de Sept Ans et qui a cédé la
Nouvelle-France à l'Angleterre, dans un
premier temps, il n'y avait pas de disposition en ce qui a trait au droit
civil. Donc, on a voulu, l'État a voulu utiliser uniquement la common
law, que ce soit dans les rapports entre particuliers ou en ce qui a trait au
droit public. En ce qui a trait au droit public, ce n'était pas nécessairement
une grande surprise, M. le Président, parce qu'à l'époque, quand on signait des traités pour mettre fin à des conflits,
règle générale, la puissance qui gagnait le conflit imposait son droit
public. C'est la raison pour laquelle on s'est ramassés ici en utilisant, par
exemple, le droit criminel anglais, ce qui
n'était pas le cas auparavant, sous le régime français. Mais les conditions
d'application de la common law ont été excessivement difficiles parce
que les habitants du Québec, évidemment, ne comprenaient pas, d'autant plus
qu'à l'époque il y avait, en plus, le
serment du Test. S'ils voulaient participer à des activités de la vie publique,
notamment être membres d'un jury, ça
impliquait, à l'époque, de prêter serment au roi d'Angleterre, ce que les gens
d'ici ne voulaient pas faire.
Donc,
les autorités britanniques se sont ramassées avec une situation problématique.
Au niveau des échanges, des contrats, de toutes les activités de nature
purement privée, les habitants du Québec ne référaient pas à l'administration. Donc, il y avait des notaires, il y avait des
seigneurs, le régime seigneurial existait, et donc ça échappait au gouvernement,
tellement que le gouverneur de l'époque, Murray, en avait fait état à Londres
en disant : Écoutez, votre système, ça ne fonctionne pas. Et c'est, entre
autres, la raison pour laquelle, dans l'Acte de Québec de 1774, le document
reconnaît l'importance d'utiliser le droit civil et donc redonne l'utilisation
du droit civil aux habitants de la province de Québec. C'est probablement...
quand on parle de Constitution ou de droit constitutionnel, c'est probablement
le premier élément d'une constitution écrite pour le Québec.
Donc, on se met à utiliser à nouveau le système
de droit civil dans toutes les transactions de nature privée. Dans le domaine
du droit public, la common law va continuer d'exister, mais c'est excessivement
important, comme décision, parce que ça va caractériser
d'une façon unique le Québec et la façon dont, évidemment, ses habitants vont
pouvoir régir leurs différends ou leurs activités de nature juridique entre
eux. Ce sera unique, et donc ça va jouer, évidemment,
un rôle important pour la suite des choses dans le développement de l'histoire
du Québec, et donc, évidemment, de notre droit civil.
Alors, on se ramasse, donc, en utilisant le
droit civil au Québec, et ça devient une caractéristique, évidemment, de l'État québécois. C'est reconnu, d'ailleurs,
dans le rapport Pepin-Robarts et... entre autres, et, dans ce rapport, on a aussi
parlé énormément de légalité du statut constitutionnel respectif des deux
ordres de gouvernement. Ce volet-là est aussi important parce que c'est ce qui
explique, entre autres, les revendications du Québec. Il faut savoir que, dans
notre droit constitutionnel, la province,
l'État du Québec, dans ses compétences, est souverain, et donc il y a un
partage entre les compétences du gouvernement fédéral et celles des provinces, notamment le Québec. Ceci crée parfois
certaines tensions parce qu'au départ, quand est venu le temps de
négocier l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, comme il s'appelait à l'époque, et donc de créer une entité fédérée,
les personnes qui ont réfléchi à l'établissement de la fédération canadienne,
de la Confédération canadienne, comme on
l'appelait dans le langage vernaculaire, ne s'entendaient pas nécessairement
pour identifier d'un commun accord, d'un consensus le type de fédération qu'ils
voulaient bâtir ou mettre sur pied. Ma compréhension,
c'est que John A. Macdonald et les gens qui, évidemment, étaient dans son
sillage préféraient un État unifié ou, en fait, une fédération très
centralisatrice, et Georges-Étienne Cartier, donc, qui était du Québec, avec
plusieurs de ses adeptes, aurait plutôt préféré un modèle très décentralisé. Alors,
un compromis est finalement arrivé, et on s'est... on fonctionne depuis ce
temps-là avec le document qui, maintenant, s'appelle la Loi constitutionnelle
de 1867. Mais il y a toujours eu, si vous me
permettez, M. le Président, cette tension. Et il y a aussi parfois, au sein de
notre fédération, certains, je vous dirais, débalancements au sein de
notre fédéralisme. Et je donne deux exemples.
Le
gouvernement fédéral a des compétences très précises, mais, dans certains cas,
il y a son pouvoir de prépondérance qui existe dans l'interprétation de
notre droit constitutionnel, et il y a aussi son fameux pouvoir de dépenser qui
instaure un déséquilibre parce qu'il a, à ce
niveau-là, une plus grande marge de manoeuvre que les provinces. Ça ne veut pas
dire que les provinces, dans leurs sphères de compétence, ne sont pas
égales au fédéral. On n'est pas... Une province n'est pas une espèce de cousin du gouvernement fédéral, ce n'est pas ça du
tout. Il s'agit de deux entités qui ont des compétences respectives. Mais il n'en demeure pas moins que
ces... cet élément-là de la fédération ou de la mécanique de la fédération canadienne
fait en sorte que ça peut créer un débalancement et qu'on a parfois
l'impression, mais ce n'est pas du tout le cas dans la réalité, qu'une province
pourrait avoir moins de droits ou d'autorité que le gouvernement fédéral.
Donc, dans le
document de la commission Pepin-Robarts, on parle, entre autres, de la Cour
suprême, de la juridiction de la Cour suprême puis de la composition et
de la structure de la Cour suprême, et donc de l'importance, évidemment, qu'il y ait des juges du Québec, donc trois, pour,
justement, être capable d'interpréter et faire vivre cette tradition civiliste qui
émane du Québec. Mais ce n'est pas tout. Et ce qui était particulièrement
intéressant à l'époque — rappelez-vous,
je vous disais, on est en 1979 — eh
bien, dans le document final de la commission, on parle aussi de la nomination
des juges des autres cours. Et permettez-moi de... en fait, de citer le
document. On dit : «En vertu de l'article 96 de l'Acte de l'Amérique
du Nord britannique, les juges des cours supérieures des provinces sont nommés
par le gouvernement central.» C'est encore la situation aujourd'hui. Et là ça
devient très intéressant, parce que la commission Pepin-Robarts ajoute :
«Et, à notre avis, il s'agit d'un vestige anachronique de la centralisation
fédérale. Nous suggérons que chaque gouvernement provincial nomme lui-même les
juges de toutes les cours provinciales, mais non sans avoir consulté, dans les
cas des juges de la cour d'appel et de la cour supérieure, le gouvernement
central, puisque ces cours sont impliquées
dans l'interprétation des lois centrales. Le gouvernement central continuerait
à nommer seul les juges de la Cour fédérale.» Qui est une cour qui va décider
de litiges entre l'administration fédérale et des sociétés ou des particuliers.
Mais ce qui est intéressant, c'est que déjà, en 1979, on reconnaissait qu'il y
avait un déséquilibre. En fait, la commission Pepin-Robarts utilise, à mon
avis, même un langage qui est assez dur. On parle d'«un anachronisme et un
vestige anachronique de la centralisation
fédérale». Et c'est la raison pour laquelle, M. le Président, je vous disais,
d'entrée de jeu, qu'au départ, quand
on a rédigé l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, il y avait cette tension
entre différents groupes où on voulait un gouvernement plus centralisé,
centralisateur, et d'autres voulaient un gouvernement plus décentralisé. Et, ça, ça fait en sorte qu'aujourd'hui encore on
reconnaît que c'est un problème comme on le reconnaissait en 1979. Et,
en 1979, même la commission Pepin-Robarts allait même plus loin que la motion
qu'on doit étudier aujourd'hui, parce que la
motion d'aujourd'hui dit : «...les cours supérieures du Québec sont
choisis parmi les membres du Barreau
du Québec ayant été recommandés par
le gouvernement du Québec.» En 1979, on disait : Non, non, non, les
provinces devraient être capables de les nommer.
• (16 heures) •
Alors, vous comprendrez qu'au fil du temps cette
question-là est revenue d'une façon systématique, et le fait qu'il n'y ait pas
toujours de consultation entre les nominations faites par le gouvernement
fédéral au sein des cours provinciales entraîne parfois des tensions. Et, évidemment,
dans le cadre d'une fédération qui évolue, c'est ce qu'on veut éviter, c'est ce qu'on veut être capable...
avoir, en fait, des mécanismes qui vont faire en sorte que la fédération va pouvoir être capable de fonctionner le plus
efficacement possible. Parce que, rappelons-le, les cours, la Cour supérieure,
la Cour d'appel, ce sont des cours du
Québec, tout comme la Cour du Québec. Alors, les juges de la Cour supérieure, de la Cour
d'appel ne sont pas nommés par le gouvernement du Québec, mais le gouvernement
du Québec est chargé de l'administration de
ces cours. Et, à ce titre, ce sont des cours québécoises, il faut le rappeler,
c'est quand même important. Donc, cette idée-là, elle n'est pas nouvelle
et elle continue, elle continue de faire son chemin.
En
fait, le temps passe et, peu de temps après la commission et le rapport de la
commission Pepin-Robarts, il y a... et, bon, évidemment, il va y avoir
un référendum au Québec, et le Québec va décider de rester au sein de la
fédération canadienne. Peu de temps après, M. Ryan, M. Claude Ryan,
de regrettée mémoire, qui a été membre, évidemment, chef
de mon parti, le Parti libéral du Québec, s'est aussi intéressé à la question
dans son livre beige, document qu'il a écrit pour tenter lui aussi de réformer
la fédération canadienne. Et c'est particulièrement intéressant parce qu'à sa
recommandation 26, que l'on retrouve dans le livre beige de M. Ryan,
et je cite, «la Constitution attribuera aux provinces non seulement
l'administration de la justice, mais aussi la nomination des juges, notamment
ceux des cours supérieures de juridiction générale». Et ça, c'est
particulièrement important. Je vous disais tout à l'heure que les cours,
l'administration de ces cours sont déjà sous la compétence du Québec, mais pas
le pouvoir de nommer des juges. Alors, déjà,
déjà, en 1980, M. Ryan disait : Non, il faut aller plus loin, il faut
que la province soit capable de nommer des juges des cours supérieures.
Alors,
vous comprendrez que, quand on a reçu, d'abord, la motion qui a été lue en
février 2025, bien évidemment, on s'est joint à l'auteur de la motion.
Et, quand on regarde la motion qui est présentée aujourd'hui, elle non plus ne
va pas aussi loin que ce que M. Ryan suggérait, parce qu'ici on parle de
recommandation, on ne parle pas de nommer comme
tel. Mais vous comprendrez que, quand le ministre actuel de la Justice
s'inspire et fait écho du livre beige libéral, je ne peux que m'en réjouir, évidemment. Dans le cadre de ses fonctions,
il veut faire fonctionner la fédération canadienne, et, vous savez, M. Ryan avait d'excellentes
idées, d'excellentes suggestions, donc c'est effectivement une très bonne
chose.
Mais il est important
de revenir sur la question parce qu'effectivement, effectivement, cette façon
de procéder pour la nomination des juges est
un vestige anachronique. Et c'est un sujet de débat, c'est un sujet qui fait
couler de l'encre et qui permet aux constitutionnalistes de réfléchir.
Je
lisais encore récemment un document du Centre d'études en droit administratif
et constitutionnel de l'Université Laval, publié en mars 2025, La
désignation des juges au Canada : vers un processus plus
intergouvernemental, et c'est signé
par Jordan Mayer, c'est un doctorant en cotutelle de l'Université Laval et de l'Université de Liège. Son document est le premier de
trois. Mais ce qu'il est important de souligner, c'est qu'il reconnaît
effectivement, parce que c'est l'État du droit présentement, M. le Président,
qu'en vertu de l'article 96 de la Loi constitutionnelle de 1867 il appartient
au gouvernement fédéral, au gouverneur général en conseil de nommer les juges
des cours supérieures. Sauf qu'il ajoute, selon son opinion, mais c'est
intéressant, qu'il s'agit en fait d'un déficit du fédéralisme judiciaire. Il
raconte que, dans l'idéal de la théorie du
fédéralisme, les partenaires d'une fédération s'en remettent, quant à
l'interprétation du partage des compétences, à des différends
fédératifs, à un arbitre neutre chargé de trancher des litiges. Or, la façon
dont les juges sont nommés... Parce que ce sont les juges des cours
supérieures, particulièrement de la Cour supérieure, qui sont chargés, entre
autres, d'évaluer, de trancher les questions notamment constitutionnelles. Or,
on dit ici que ceci crée, en fait, un
accroc. Et donc c'est un pouvoir unilatéral de nomination, et c'est donc un
accroc aux tenants du fédéralisme, un fédéralisme,
donc, qui serait plus souple et qui permettrait dans... aux membres de la
fédération de pouvoir, évidemment, avoir voix au chapitre au niveau de
ces nominations-là.
Donc, on parle ici
d'un déficit de fédéralisme judiciaire du Canada, et donc ça fait débat, ça
fait débat. Et, de temps à autre, il y a des préoccupations qui sont soulevées
à l'égard du processus de désignation des juges des cours supérieures. Donc, il
faut essayer de trouver un moyen d'évidemment modifier cet état de fait pour
qu'il y ait cet équilibre. Cet équilibre, on
le retrouve en partie au niveau des nominations à la Cour suprême, parce que, rappelez-vous, l'actuelle
présidente du Conseil du trésor, quand elle était ministre de la Justice, a signé
une entente entre les gouvernements du Québec et du Canada pour la nomination
de postes du juge du Québec lorsqu'un poste devient vacant à la Cour suprême du Canada. Donc, ça, ça permet
une flexibilité. Mais il n'en est rien en ce qui a trait à la nomination des
juges des cours d'appel et de la Cour supérieure.
Donc, il faut revenir
à ce que j'appellerais un fédéralisme pragmatique, c'est d'ailleurs ce que
prônait M. Ryan, pour faire en sorte
que le fédéralisme puisse s'adapter à nos nouvelles réalités et faire en sorte
que les provinces puissent participer activement non seulement à son
fonctionnement, mais aussi à son évolution. Et c'est la raison pour laquelle je
vous dirais que la participation du Québec à la nomination des juges des cours
supérieures est un avantage.
Il faut savoir
également que, dans le mémoire de maîtrise de M. Eric Duchesne, il rappelait
également l'importance du rationalisme libéral et le pragmatisme de
M. Ryan sur différents aspects du fonctionnement du droit constitutionnel canadien. Et rappelez-vous que ce
pragmatisme et ce rationalisme libéral, c'était aussi la pierre angulaire
de la pensée politique du regretté Benoît Pelletier.
• (16 h 10) •
Donc,
pour nous, au Parti libéral du Québec, évidemment, on l'a dit, mon chef intérimaire l'a
dit à plusieurs reprises, pour nous, c'est Québec d'abord, mais on le
fait dans le maintien du lien fédéral, qui, à notre avis, est le plus apte à assurer l'épanouissement du Québec. Ça ne veut pas
dire, cependant, que le Québec, avec ses droits constitutionnels qui émanent
de la fédération et du partage des pouvoirs, est une espèce de cousin pauvre ou
d'un enfant mineur au sein de la fédération. Ce n'est pas du tout ce qui en
est. Il faut donc, je pense, préférer un fédéralisme asymétrique, et donc de faire en sorte qu'on soit capables d'apporter des
modifications à la Constitution, quand, bien sûr, ce n'est pas un sujet qui
requiert la formule d'amendement qui est
déjà connue, et qui est d'ailleurs assez complexe, mais, pour différents
domaines qui touchent une province et le gouvernement fédéral, il est possible
de négocier et éventuellement d'avoir des modifications
constitutionnelles.
Ça
a été fait quand, au Québec, on a décidé de passer des commissions scolaires
confessionnelles — d'ailleurs,
le ministre y faisait référence tout à l'heure, dans son allocution — à des
centres de services scolaires non confessionnels. Alors, il a fallu entrer en négociation avec le gouvernement fédéral.
Sauf que, pour modifier cette protection constitutionnelle qui était
accordée au Québec, on n'a pas eu d'avoir... on n'a pas eu besoin d'avoir
l'assentiment de toutes les provinces, il a fallu uniquement négocier entre le
Québec et le gouvernement fédéral. Et donc... Et donc ça s'est fait. Alors,
c'est particulièrement important, et, dans certains domaines qui ne touchent
pas l'ensemble de toutes les compétences des provinces,
il est donc possible de négocier et d'avoir éventuellement des modifications
constitutionnelles. Alors, ça, c'est particulièrement important.
Donc,
il faut parler... il faut mettre en oeuvre ce que j'appelle un fédéralisme
asymétrique et voir... tout dépendant de la province en question, de
voir à adapter notre formule de fédéralisme pour qu'effectivement les provinces
puissent, bien sûr, s'épanouir au sein de la fédération canadienne.
Je vous dirais que c'est particulièrement
important pour le Québec. Et là ça revient... je fais un lien avec ce que je vous disais au début. Quand je vous parlais
de l'importance du droit civil, de notre droit civil, bien, il est important
que les personnes qui soient nommées dans des tribunaux, qui auront à
interpréter notre droit civil, que ces personnes-là viennent... non seulement
qu'ils soient membres du Barreau du Québec, mais qu'en plus le gouvernement du
Québec puisse participer à leur nomination. Donc, ça, c'est particulièrement
important.
C'est aussi important parce qu'il y a aussi,
présentement, plusieurs postes de juge qui sont vacants à la Cour supérieure, au Québec, ce qui a un impact sur
l'administration de la justice. Donc, il serait important de procéder,
évidemment, à des nominations le plus
rapidement possible. Ça ne veut pas dire, cependant, que... Parce que, là, on a
la motion. Donc, on a le principe. Et
le principe fait en sorte qu'on veut, avec cette motion, que les juges des
cours supérieures soient choisis parmi les membres du Barreau qui ont
été recommandés par le gouvernement du Québec. Ça, c'est le principe qui est mis de l'avant. Mais, une fois qu'on s'est mis
d'accord avec ça, il y a aussi la manière, il y a la façon dont on va procéder
pour y arriver, et ça aussi, c'est
particulièrement important. La motion comme telle n'en parle pas, mais il faut
savoir que, dans un contexte
québécois, nous avons présentement... pour la nomination des juges à la Cour du Québec, nous avons un processus qui
fonctionne très bien. Et, à la suite de la commission Bastarache, il y a eu un
grand nombre de recommandations qui
ont été faites pour la procédure de sélection et la nomination des juges. Vous
comprendrez, M. le Président, que ce système-là fonctionne présentement
pour les nominations à la Cour du Québec et à la cour municipale. Si jamais le
gouvernement fédéral était d'accord avec la demande en provenance de
l'Assemblée nationale, pour moi, ça m'apparaît essentiel que, par la suite, le
gouvernement utilise le même système pour être capable d'identifier des
candidats et des candidates compétents qu'il
pourra soumettre, après ça, au gouvernement fédéral pour la nomination de ces
personnes au sein des cours supérieures, que ce soit la Cour supérieure
du Québec ou la Cour d'appel.
Et ça, je tiens à le souligner, parce que, bien
sûr, la motion n'en fait pas état. La motion n'en parle pas, mais, puisqu'on a à débattre de cette motion
aujourd'hui, il me semble essentiel d'y faire référence. Pourquoi? Bien, parce
que, vous vous rappelez, au tout début de mon intervention, je vous
disais qu'il est essentiel, en référant à la motion qui a été adoptée en février 2025, que l'Assemblée
nationale rappelle l'importance d'un processus de nomination des juges sans considération
partisane pour assurer la confiance du public dans le système de justice,
qu'elle réitère que l'allégeance politique
ne doive pas être considérée dans l'évaluation d'une candidature à la
magistrature, comme le prévoit le processus québécois de sélection des
juges.
Donc, il est très important d'utiliser les recommandations
de la commission Bastarache pour faire en sorte qu'on puisse nommer des juges, mais à l'issue d'un processus
transparent, équitable et où des citoyens... pas uniquement des juristes
ou des membres de la cour où la personne postule pour être éventuellement
nommée, pas uniquement ça, mais qu'on ait
des citoyens de différentes couches, espaces de la société pour faire en sorte
qu'un tribunal soit véritablement représentatif des gens qu'il doit
évidemment écouter, et, évidemment, une fois la preuve terminée, faire en sorte
qu'il y aura un jugement.
Donc, ça, ça
m'apparaît excessivement, excessivement important, donc, constitution d'un
comité de nomination avec des membres
du public. Et, compte tenu, bien sûr, de l'importance des décisions que peut
rendre la Cour supérieure puis, par la suite, la Cour d'appel, bien,
moi, je vous dirais, M. le Président, qu'il est excessivement important que ce
comité-là soit formé de plusieurs membres du public, et des membres du public
qui vont être représentatifs de la population des différentes régions du
Québec.
On dit aussi, et c'étaient les recommandations
du comité... la commission Bastarache : «Le comité devra aussi assurer la parité hommes-femmes et, dans la mesure
du possible, une représentation juste des communautés culturelles.» Parce
qu'évidemment on veut avoir une magistrature qui représente toute la diversité
de la population québécoise. Ça m'apparaît être totalement essentiel. Je vous
dirais que c'est particulièrement important dans le cadre de la Cour d'appel parce que, dans notre système de justice,
en matière de droit civil, la Cour d'appel du Québec ne porte pas, comme
tel, le titre de «cour suprême», mais, dans
les faits, c'est elle, dans le quotidien, qui rend l'immense majorité des
décisions en droit civil au Québec.
Regardez, dans les décisions récentes de la Cour
suprême du Canada, les décisions qui traitent spécifiquement et uniquement de
droit civil québécois. Ça arrive, mais c'est excessivement rare, parce que,
pour passer le test d'une autorisation de pourvoi à la Cour suprême, puis, en
matière de droit civil, il n'y a pas un appel de plein droit, donc il faut demander la permission de la cour, il faut
être capable de démontrer l'importance, l'importance d'une question nationale. Or, ça peut arriver, mais, dans la majorité des
cas, ce test-là va être difficile à franchir. Et donc, vous verrez, dans les
recueils de la Cour suprême, dans les dernières années, la majorité des
pourvois sont ou bien de droit public ou de droit criminel. Et donc, au fond, la Cour d'appel est presque
notre tribunal de dernier ressort en droit civil, d'où l'importance, bien sûr, d'avoir
des juges qui seront choisis, sélectionnés par un comité composé, entre autres,
de membres du public.
• (16 h 20) •
Donc, important aussi d'avoir un comité
permanent de sélection avec un mandat pour s'assurer que les membres du comité pourront faire leur travail
pendant une période de temps et qu'ils seront, évidemment, à l'abri de toute
considération partisane. C'est tout à fait, tout à fait essentiel, à mon avis.
Et, donc, on
parle aussi des formulaires qui pourraient être utilisés et, donc... pour
faciliter le travail de la commission. Et on disait aussi, dans les
recommandations de la commission Bastarache, qu'il y ait une grille d'évaluation
des candidatures : «L'évaluation des
qualités requises pour la fonction judiciaire ne devrait pas favoriser un
modèle de pratique ou d'engagement dans la profession en particulier.»
C'est particulièrement important parce qu'il faut être capable,
justement, d'avoir une évaluation qui se justifie puis qui est évidemment
exempte de toute partisanerie. Et donc il faut aussi faire en sorte de ne pas
favoriser un modèle de pratique ou d'engagement dans la profession, parce qu'on ne veut pas défavoriser des gens par rapport
à d'autres. Et, rappelez-vous, M. le Président, le gouvernement permet maintenant à des notaires d'accéder à des
fonctions judiciaires. Donc, il faut aussi que ce comité-là soit représentatif
du travail que les notaires font, ça, ça m'apparaît essentiel, pour qu'on ait,
justement, une magistrature qui est représentative de notre société.
Évidemment, il est essentiel que les travaux du
comité permanent se déroulent avec la plus grande transparence possible. Et
donc il y avait une recommandation ici, la recommandation 25, que... on
recommandait «que le nom des membres du comité permanent de sélection, les
critères d'évaluation, les sujets qui feront l'objet de questions lors de
l'entrevue et, de façon générale, toutes les informations concernant les
processus de sélection soient disponibles sur le site Web du secrétariat». Il y a présentement un secrétariat, au Québec,
à la sélection des juges, mais là, question de transparence, on va plus
loin, et ça m'apparaît être une excellente, une excellente pratique.
Donc,
évidemment, il y a aussi un processus de nomination par le Conseil des
ministres, après la remise du rapport du comité de sélection au ministre
de la Justice. On suggérait que ce soit édicté dans une loi ou un règlement.
Moi, je vous dirais, M. le Président, que cet élément-là est totalement
essentiel. Et je vous dirais qu'il est aussi totalement essentiel que le
ministre de la Justice, si jamais ça arrivait... parce qu'on sait que, dans le
passé, c'est arrivé, mais, si jamais ça
arrivait à nouveau, qu'il divulgue au Conseil des ministres et au premier
ministre s'il a un intérêt, s'il connaît la personne, etc. Parce que ce qu'on veut... on ne veut pas que le Conseil
des ministres ou le premier ministre apprenne ça le lendemain par le
biais des journaux, on veut que la procédure soit la plus transparente
possible. Et ça, pour moi, c'est un élément
qui est excessivement important. Donc, s'il y a un enjeu, bien, effectivement,
qu'on fasse en sorte que ce soit connu puis, s'il y a lieu ou s'il y a
une apparence de conflit, bien, à ce moment-là, que le ministre se retire pour
que le Conseil des ministres puisse décider. Ça m'apparaît être tout à fait
essentiel et important.
On recommande également qu'il y ait des règles
d'éthique établies interdisant aux membres du Conseil des ministres et aux députés de faire toute démarche
pour favoriser un candidat. Et, de toute façon, ça, c'est directement en lien
avec la motion qui a été adoptée en février 2025 pour s'assurer que
l'allégeance politique ne soit pas considérée. Et donc on dit aussi que... il y a une recommandation «que
le ministre de la Justice soit tenu de motiver son choix en donnant au Conseil des ministres un sommaire du curriculum
vitae du candidat choisi, la liste des personnes consultées, la liste des
personnes ayant fait des recommandations, la
liste des candidats jugés aptes, les critères retenus», et ça, bien évidemment,
c'est pour accroître la transparence, et ce volet-là m'apparaît aussi
excessivement important.
Alors, je
suis heureux de vous retrouver, M. le
président de la Commission des
institutions, au salon rouge. Alors, continuons, continuons.
Ceci étant, donc, ça aussi, c'est un élément qui
m'apparaît tout à fait essentiel. Parce que, ce qu'on veut, et puis c'était
exactement dans l'esprit de la motion qui a été adoptée par l'Assemblée
nationale en février 2025, on veut que les
gens soient hypercompétents, mais on veut que ce ne soient pas des nominations
partisanes, donc qu'on soit en mesure de présenter au Conseil des
ministres le choix qui sera envoyé éventuellement au gouvernement fédéral mais qu'il y ait des éléments qui appuient la
recommandation qui sera faite au gouvernement fédéral. Ça, ça m'apparaît
totalement essentiel, essentiel pour le ministre de la Justice, mais
essentiel pour les membres du Conseil des ministres qui siègent avec lui. Et donc, si on veut véritablement avoir
des choix sans allégeance politique, bien, on procède de cette façon-là.
Ça permet aussi de s'assurer qu'on va nommer les bonnes personnes dans les bons
postes. Parce que, je vous le répète, M. le
Président, dans la motion qui est présentée par le ministre de la Justice
aujourd'hui, on parle bien sûr de toutes les cours supérieures, incluant
la Cour d'appel. Donc, il me semble que c'est un minimum qui devrait être fait.
On souligne
également, dans les recommandations de la commission Bastarache, qu'il devait y
avoir un maximum de 60 jours entre la réception du rapport du
comité de sélection et la nomination comme telle. Et ça aussi, ça m'apparaît
totalement essentiel et important. Pourquoi? Bien, parce que le ministre de la
Justice y faisait référence précédemment dans
son allocution en disant : Écoutez, il y a des postes qui ont été ouverts,
donc la Loi sur les tribunaux judiciaires du Québec a été amendée pour augmenter, par exemple, le nombre de postes à
la Cour supérieure ainsi qu'à la Cour d'appel. D'ailleurs, souvent, ces
projets de loi là sont étudiés par la Commission des institutions. Ceci étant,
une fois que c'est fait, bien, on s'attend
de l'autre organe de l'État, donc, dans ce cas-ci, le gouvernement fédéral,
qu'il procède rapidement à la nomination, parce que ça a un impact pour
une saine administration de la justice et ça a un impact sur les justiciables, donc d'où l'importance de les nommer avec
célérité. De toute façon, M. le Président, avec les recommandations que je
fais aujourd'hui au ministre... Et c'est l'avantage ici de parler au salon
rouge, n'est-ce pas? On est filmés, puis c'est enregistré, donc, comme ça, ça va être clair, donc, après ça, il faut
agir. Si on a un comité de sélection, et c'est ce que je souhaite vivement, en fait, même, je dirais :
J'exige que le ministre le fasse parce qu'il en va d'une saine administration
de la justice, bien, à ce moment-là, une fois que tout ce travail-là a
été fait, bien, qu'on procède le plus rapidement possible à la nomination.
Autre élément, qui n'a pas été mis en vigueur
encore, mais, compte tenu de la motion du ministre de la Justice aujourd'hui, je pense que c'est important de le
réitérer, quand vient le temps de nommer un juge en chef, que ce soit le
juge en chef de la Cour d'appel, qui est aussi juge en chef du Québec, juge en
chef de la Cour supérieure ou juge en chef
de la Cour du Québec, il m'apparaît important qu'il y ait un comité
consultatif, et c'était une recommandation de la commission Bastarache,
mais qui soit formé de juges des autres cours ainsi que du juge en chef
sortant. Donc, ça m'apparaît être important
pour qu'on puisse recommander, par la suite, des candidats, parce que, bien
sûr, le ou la juge en chef a un rôle important au sein de
l'administration de la cour, du bon fonctionnement de la cour et, évidemment,
par la suite, de faire en sorte que la cour ne manque de rien pour son travail.
Donc, ça, c'est une recommandation qui est particulièrement importante et que
je tenais à préciser.
Bien sûr, ça va être
important, par règlement, de prévoir des mécanismes d'entrevue et d'évaluation.
Et donc, par la suite, les comités de sélection fournissent une appréciation
particularisée de chacun des candidats déclarés aptes, toutefois sans établir
de priorités. Et pourquoi c'est particulièrement important, M. le Président?
Bien, c'est parce que, dans la motion qui est sous étude cet après-midi, ma compréhension
de la demande de M. le ministre de la Justice, c'est qu'il y aurait une modification
constitutionnelle, donc modification à la Constitution du Canada, mais pour
faire en sorte que les juges soient choisis parmi les membres du Barreau
du Québec, mais ayant été recommandés par le gouvernement du Québec. Et
d'ailleurs, en lisant la motion, on parle uniquement du Barreau. Alors, je ne
sais pas si, à un moment donné, le ministre
voudra réfléchir à la Chambre des
notaires, parce que, là, à la Cour du Québec, on peut nommer des notaires, mais, si on laisse le Barreau, il n'y
aura pas de notaires qui vont pouvoir y accéder. Le ministre pourra réfléchir à ça. Mais, puisqu'on a ouvert la
porte aux notaires à la Cour du Québec, on pourrait très bien le faire à des
cours supérieures. C'est une suggestion que je fais à M. le ministre, il pourra
prendre note. Mais ça, ça m'appartient... ça m'apparaît être particulièrement
important, donc, qu'il y ait cette évaluation-là avec une appréciation
particularisée, parce qu'une fois que la
demande va être envoyée au gouvernement fédéral, bien, il va falloir faire en
sorte que le ministre fédéral puisse décider, mais qu'il puisse décider
sur quelque chose. Et on ne voudrait pas que tous les efforts qui ont été investis dans ce comité transparent soient
perdus, ça m'apparaît être tout à fait essentiel. Donc, d'où l'importance de particulariser
et de donner suffisamment d'informations pour que le ministre procède à la
nomination.
• (16 h 30) •
Vous aurez compris également, M. le Président,
que ce que je suggère puis ce que je recommande fortement au ministre, parce
que, là, sa motion n'en parle pas, c'est qu'évidemment il n'envoie pas
seulement un nom. Parce que, justement, si on veut s'insérer dans l'idée de la
motion qui a été adoptée, hein, on ne veut pas qu'il y ait d'allégeance politique, on veut qu'il n'y ait pas de
considérations partisanes, donc, évidemment, envoyer seulement un nom pour une
nomination, c'est quelque chose qui ne m'apparaît pas convenable, mais, encore
là, d'aucune façon. Donc, il faudrait qu'il
y ait au moins une série de noms qui soit envoyée, sélectionnés d'abord par le
processus que nous avons au Québec, qui
est un processus qui fonctionne bien, M. le Président, qui est un processus qui
a fait ses preuves et qui est un processus qui est transparent. D'où
l'importance, évidemment, de pouvoir le transposer et de le continuer,
maintenant qu'on voudra éventuellement suggérer des noms pour des
nominations dans les cours supérieures et, évidemment, à la Cour d'appel. Donc, très, très important qu'il y ait plusieurs
noms, qu'il y ait aussi, bien sûr, suffisamment d'informations pour que le ministre
fédéral puisse nommer et prendre une décision qui est éclairée. C'est
important. On ne veut pas de partisanerie puis
on veut aussi que le ministre, quand il fera des recommandations au Conseil des
ministres, parce qu'à mon avis ça ne peut pas être uniquement le
ministre seul qui fait la recommandation, il faut que ce soit fait suite à une
discussion au conseil des ministres, qu'il
fasse en sorte... si jamais il y avait un intérêt, qu'il le déclare, pour ne
pas, évidemment, que le premier ministre l'apprenne par la voie des
journaux le lendemain matin.
Donc, tout ça
pour vous dire, M. le Président, que notre système judiciaire, c'est un pilier
fondamental de notre société démocratique. Et, au Québec, la question de
la nomination des juges des cours supérieures et de la Cour d'appel ont soulevé beaucoup d'enjeux au fil des temps.
D'ailleurs, vous le savez, je vous en ai parlé, on en parle depuis, entre
autres, 1979 avec la commission Pepin-Robarts, on en a parlé aussi dans
le livre beige de M. Ryan, et ça soulève des enjeux que je vous... que je
qualifierais de cruciaux, liés à l'autonomie et à la reconnaissance spécifique
du Québec en ce qui a trait au droit civil,
donc reconnaître une spécificité juridique et culturelle puis aussi, bien sûr,
améliorer l'efficacité du système judiciaire. J'y faisais état, M. le
Président, M. le ministre en parlait, il y a présentement plusieurs postes
vacants à la Cour supérieure, donc il n'y a pas de raison d'attendre
pour les nommer. Alors, bien que le Québec administre ses tribunaux, la nomination des juges de la Cour
supérieure et de la Cour d'appel, comme je le soulevais, relève du gouvernement
fédéral, alors donc il y a lieu de
s'interroger. Il y a lieu, dans une fédération avec un fédéralisme asymétrique,
de faire en sorte qu'on puisse
améliorer cette façon de procéder, et je vous dirai que la motion qui est
présentée aujourd'hui est un pas dans cette direction.
Donc, bien que le Québec soit responsable de
l'administration de ses tribunaux, il ne détient pas le pouvoir de nommer les
juges de la Cour supérieure et de la Cour d'appel. C'est une dichotomie entre
l'administration de la justice et la nomination qui est réservée au
gouvernement fédéral. Et, comme je le mentionnais précédemment, ceci crée une
tension, au sein de la fédération, entre les compétences provinciales et
fédérales.
Qui plus est, et ça, je pense que c'est
important de le souligner, le Québec, au sein de la fédération canadienne, se
distingue par son système juridique de tradition civiliste, et je tiens à le
rappeler, donc, hérité, évidemment, et inspiré du Code civil français, mais
aussi des coutumes juridiques qui avaient cours en France. Et ça, c'est unique,
c'est unique au Canada. Donc, il faut s'assurer, évidemment, que le droit civil
sera interprété correctement et qu'on tiendra compte de cette spécificité
juridique du Québec. C'est particulièrement important.
Donc, la recommandation qui serait faite par le
gouvernement du Québec permettrait une meilleure utilisation des ressources et
permettrait de mieux spécifier les besoins spécifiques du Québec en ce qui a
trait, notamment, aux nominations des juges. Ça va améliorer l'efficacité du
système judiciaire, à condition, bien sûr, comme je le soulignais, de faire en
sorte que les recommandations du rapport Bastarache et les processus de
sélection des juges soient mis en place et
qu'on puisse appliquer ce qu'on a maintenant aux recommandations qui pourraient
être faites pour les juges des cours
supérieures et de la Cour d'appel. Donc, ça permettrait aussi, je pense, de
renforcer, d'une certaine façon, l'efficacité puis la légitimité du système
judiciaire aux yeux des citoyens québécois. Ça leur permettrait aussi de
s'assurer, avec un comité consultatif
et un comité indépendant, que les magistrats seront choisis en fonction des
réalités et des valeurs de notre société.
Ce ne serait
même pas un précédent, et ça, j'en parlais précédemment, parce que, dans
d'autres fédérations, comme, par
exemple, en Allemagne, les länder peuvent nommer des juges de leur Cour
supérieure. Donc, là-dedans, là, on n'est pas en train, là, de créer une révolution, on
n'est pas en train d'innover, là, ça existe, ça existe ailleurs. Et donc ça
permet une meilleure adaptation du système judiciaire aux particularités
régionales. Donc, ça permettrait, d'une certaine façon, au Québec d'assurer ou
de bénéficier d'une plus grande autonomie judiciaire, et donc ça ferait en
sorte que le Québec pourrait s'assurer de
faire rayonner sa spécificité, et ça permettrait, évidemment, au Québec de
jouer un plus grand rôle au sein de la fédération canadienne en ce qui a
trait à la nomination des juges.
Donc, en fait, je
vous dirais, en conclusion, M. le Président, accorder au Québec le pouvoir de
recommander des nominations des juges des cours supérieures et de la Cour
d'appel serait, je pense, une reconnaissance importante, en fait, une reconnaissance que notre système
fédératif, au sein de la fédération canadienne, puisse fonctionner avec un fédéralisme
asymétrique en tenant compte des spécificités de certaines régions du Canada,
dont, évidemment, le Québec, à cause
notamment de sa spécificité juridique et de sa spécificité culturelle, évidemment,
notre langue française, langue officielle, langue commune au Québec.
Cela va renforcer l'efficacité, la légitimité et l'autonomie, évidemment, du système judiciaire, et, bien sûr, ça nous
permet de respecter les principes fondamentaux du fédéralisme canadien, dont j'ai
déjà parlé.
Je
pense qu'il est temps, je pense qu'il est temps, M. le Président, d'engager un
dialogue et, je dirais, un dialogue constructif, et là je fais appel au
ministre, dialogue constructif avec le gouvernement fédéral, parce que,
parfois, en cette Assemblée, de la part du
gouvernement, quand on pose des questions, c'est toujours de la faute du
fédéral. Bien là, pour que ça, ça fonctionne, il ne faut pas arriver à
Ottawa en disant : C'est de la faute du fédéral. Ça ne marche pas. Ça, là, ce n'est pas une très bonne technique de
négociation, M. le Président. Donc, moi, je pense qu'il faut... on veut faire respecter
les principes fondamentaux de notre fédéralisme, mais il faut faire en sorte
qu'on soit capable d'engager un dialogue
constructif entre le Québec et le gouvernement fédéral pour faire en sorte que
cette réforme fonctionne, pour faire en
sorte que notre système judiciaire évolue, pour faire en sorte que notre
fédéralisme, évidemment, soit vivant. Ça, ça m'apparaît être totalement,
totalement important.
• (16 h 40) •
Et
évidemment je vais, au nom de ma formation politique, le Parti libéral du
Québec, appuyer la motion qui est présentée aujourd'hui par le ministre
de la Justice. Comme je le mentionnais, ce n'est pas un chèque en blanc, hein,
j'ai eu l'opportunité de m'exprimer quant à la mise en oeuvre, après, de ce qui
devrait être fait. Et je pense que c'est un
pas, cependant, dans la bonne direction. Et je suis heureux, je le redis, je
suis heureux de voir que le ministre de la Justice s'inspire de M. Ryan, qui a été, évidemment,
un chef de ma formation politique, pour faire avancer le débat au sein de la
fédération.
Le
Parti libéral du Québec a toujours été là pour défendre les intérêts du Québec,
nous allons continuer à le faire, mais nous le faisons au sein de la
fédération canadienne. Mais il s'agit là, il s'agit là d'un pas, je pense, dans
la bonne direction. Et, écoutez, on sera là
pour continuer, bien sûr, à accompagner le ministre pour que ça fonctionne,
dans le cadre, bien sûr, d'un débat constructif avec le gouvernement
fédéral.
Alors,
pour toutes ces raisons, je vais appuyer la motion, M. le Président. Et je vous
remercie pour votre attention.
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Merci, M. le député de l'Acadie. Nous poursuivons
ce débat sur la motion du gouvernement, et je reconnais maintenant M. le leader
du deuxième groupe d'opposition et néanmoins le député de Saint-Henri—Sainte-Anne.
M. Guillaume
Cliche-Rivard
M. Cliche-Rivard : Merci, M. le Président.
Vous avez raison. Alors, très content de discuter de la motion aujourd'hui, suivant le collègue de l'Acadie. Alors, c'est
notre position sur la nomination... en fait, la motion du gouvernement portant
sur la nomination des juges, modification et motion apportées, là, pour faire
une revendication à la Loi constitutionnelle.
Donc, la motion
déposée par la ministre des Relations canadiennes porte certainement sur un
enjeu important. Il faut le reconnaître, M. le Président, demander que le
Québec participe pleinement à la nomination de tous les juges de ses tribunaux, y compris ceux de la Cour
supérieure et de la Cour d'appel du
Québec, ce n'est pas une mince ni une
nouvelle revendication. C'est quelque chose qui est important.
En
effet, c'est une revendication ancienne, une aspiration légitime, que Québec
solidaire porte, d'ailleurs, depuis longtemps, mais de manière beaucoup plus
forte et beaucoup plus assumée que ce qui nous est proposé aujourd'hui.
Ce que la motion propose n'a rien d'inusité dans le cadre d'un État fédéral. Au
contraire, dans plusieurs autres fédérations, comme
l'Allemagne ou la Suisse, les entités fédérées participent activement au
processus de nomination judiciaire. Loin d'y voir une menace, on y
reconnaît qu'un tel partage, au contraire, favorise des choix plus équilibrés.
Alors, oui, nous
allons offrir notre appui à cette motion, mais ce sera un appui timide,
critique, pour ne pas dire, qui nous laisse
un peu dubitatifs, parce que, si l'intention est louable, le mécanisme proposé,
lui, laisse à désirer. Et surtout nous ne pouvons pas passer sous
silence la mise en scène politicoconstitutionnelle à laquelle se livre la CAQ avec tout le caractère solennel qu'on essaie
d'insuffler à la motion. Ce n'est pas une résolution constitutionnelle en soi.
Ce n'est pas une réforme. C'est un signal, c'est une demande, c'est une
intention, ni plus ni moins.
Depuis
plusieurs années, le processus de nomination des juges fédéraux fait l'objet de
critiques. Ce n'est pas un secret, M. le Président, l'incapacité du
fédéral à combler les postes vacants à temps contribue à engorger notre système
de justice, c'est vrai. Nous l'avons dénoncé
ici à plusieurs reprises. Alors, oui, oui, il faut revoir le mécanisme, il faut
le rendre plus transparent, plus rigoureux, et, bien sûr, il faut que le
Québec, seul État de droit civil au sein de la fédération, fasse le choix de
ses juges appelés à trancher des questions profondément liées à son identité
juridique. Ce que nous défendons, à Québec solidaire, ce n'est pas seulement
une participation plus active du Québec au processus, c'est un mécanisme de nomination des juges par et pour le
Québec qui repose sur la compétence, l'indépendance et la transparence.
Soyons clairs, ce que
propose la CAQ n'est pas une réforme du système, c'est une tentative de
démonstration d'audace après des années de
surplace sur l'autonomie du Québec. Après avoir vu ses demandes piétiner sur
l'immigration, sur la langue, sur les champs de compétence, la CAQ
tente, encore, ici, une fois, l'approche de la fameuse troisième voie, expression désormais consacrée, qui ne donne
aucun résultat et qui est devenue une ruelle sans issue. Le ministre se rêve
en grand stratège constitutionnel, M. le Président, mais, à force de multiplier
les chemins de traverse, on finit par tourner en rond, et le ministre confond
un raccourci juridique avec un raccourci politique.
Pendant ce temps, Mark Carney, en pleine
campagne électorale, a déjà dit non. Et, en termes polis, bien sûr, mais
fermes, il a dit : Le Québec est déjà représenté sur les comités, ça
suffit. Bon. Voilà. Circulez, il n'y a rien à voir, M. le Président. Encore un autre échec sur le tableau caquiste des
demandes au fédéral. Aussitôt la motion annoncée, aussitôt fut-elle
balayée du revers de la main par le principal intéressé. Que cette tentative du
ministre se heurte au scepticisme, voire au
refus des partis fédéraux, ce n'est pas une surprise et ça en dit long sur les
limites de cette fameuse troisième voie.
C'est au peuple québécois qu'il revient
ultimement, M. le Président, de choisir les institutions qui le servent, et, tant que ces institutions seront construites à
Ottawa selon des mécanismes sur lesquels nous n'avons pas de droit de
regard, il sera toujours légitime d'exiger mieux. Le Québec mérite mieux que
cette troisième voie, M. le Président, il mérite une vraie réforme. Il mérite
qu'on travaille pour lui, pas pour des manchettes. Il mérite de décider par et
pour lui-même. Il mérite évidemment sa pleine autonomie et sa pleine
indépendance. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne. Je reconnais maintenant M. le député de Jean-Talon.
M. Pascal Paradis
M. Paradis : Merci, M. le
Président. J'ai posé une question en Chambre au ministre de la Justice au sujet
de cette motion le jour où elle a été présentée. Je pense qu'on se souviendra
que la motion a été présentée un matin ici, à l'Assemblée nationale. Elle a été
évoquée par des journalistes avec le premier ministre du Canada, Mark Carney,
qui aussitôt, quelques heures à peine après son inscription au feuilleton, déjà
disait : Non. Non, ça n'arrivera pas.
Et j'ai posé la question au ministre, bien,
qu'est-ce qu'il va faire, maintenant qu'il s'est encore fait dire non, parce que, je vais y revenir plus tard, hein, il y
a un long historique, un long historique de refus du gouvernement fédéral
face aux demandes minimales du Québec en matière de nomination des juges,
notamment des juges de la Cour suprême du Canada aussi, qui est le tribunal
d'arbitrage suprême, notamment des litiges constitutionnels, et le ministre m'a
répondu qu'il faisait... c'était une main tendue à l'ensemble des députés, que
c'est un devoir. Il l'a redit aujourd'hui, tout à l'heure, dans son discours, il
a mentionné que nous sommes liés par le pacte d'améliorer le régime
fédératif : «Le Québec n'est jamais
aussi fort que lorsqu'il se tient debout. Après des années d'attentisme et
d'impasse, on arrive là.» Ça, il a
dit ça aujourd'hui, mais, la dernière fois, il a dit : Je tends la main,
c'est important qu'on parle d'une seule voix.
Bien, quand on parle d'un sujet aussi important,
construire un consensus, construire une position forte du Québec, ça ne se fait pas en ne parlant à personne
et en arrivant à l'improviste, sans que personne n'en soit mis au courant,
avec une motion comme ça mise au feuilleton,
bang! Nous, c'est comme ça qu'on l'a appris, là, c'est arrivé au feuilleton.
Ah! Tiens donc. Le ministre de la Justice, chevalier de la défense des intérêts
du Québec, s'en va à Ottawa puis il veut bâtir un consensus.
Donc, déjà, malheureusement, c'est un problème
de la démarche du ministre, parce que ça aurait été... bien, j'allais dire «ça aurait été facile»... ça aurait
été le minimum de contacter les trois partis d'opposition avant, de dire :
J'ai l'intention de faire ça, qu'est-ce que vous en pensez? Est-ce qu'on
peut avancer ensemble dans ce processus-là? Il ne l'a pas fait. Il n'a parlé à personne. Il a déposé sa motion, qui, on le
verra tout à l'heure... mais, déjà, la façon dont c'est arrivé démontre
que c'est un exercice de communication, que c'est le gouvernement de la CAQ qui
tente tant bien que mal, par des actions
d'éclat qui lui permettent de faire des communications, de sauver le minimum du
petit peu, minime, petit, qui est
devenu sa troisième voie caquiste, là, son programme, son nouveau programme
pour les nationalistes québécois, d'aller chercher des gros gains à
l'intérieur du Canada. On est rendu là.
Donc là, il y a eu... il a lu le rapport des
experts, puis il a pris cette suggestion-là, puis il dit : Bien, je
retourne avec ça. Donc, malheureusement... Donc, un consensus, une unanimité,
ça se construit en amont. Ça ne se fait pas avec des gestes d'éclat puis
ensuite en disant, supposément, main tendue avec les oppositions.
• (16 h 50) •
D'ailleurs, ça, on a vu ça souvent du premier
ministre sur tant d'autres questions... la main tendue, main tendue, mais il
n'écoute personne, il ne répond même pas à nos appels à dialoguer sur plusieurs
questions. On l'a vu récemment dans tout ce qui concerne les négociations avec
l'administration Trump, ou à l'intérieur de la fédération, pour que le Québec
ait le minimum de ses intérêts respectés dans les négociations, donc,
commerciales internationales. Il est venu ici,
il a fait un discours solennel : Je tends la main à toutes les
oppositions. Aïe! Des semaines avant, on lui avait écrit pour lui
dire : Est-ce qu'on pourrait se parler? Il n'a même pas daigné répondre.
On a su que les syndicats, les représentants des travailleurs, ça fait des
semaines qu'ils essaient de leur parler. Il ne leur répond même pas. Donc là,
c'est la même chose avec la ministre de la
Justice. Il parle d'une main tendue, mais ce n'est pas une véritable main
tendue. Donc, c'est mal parti, de commencer un tel processus sans
discussion préalable avec quiconque.
Bon, on
remarque que, dans la troisième voie caquiste, donc dans le... ce programme de
gros gains présenté il y a une dizaine d'années, jusqu'à maintenant, zéro
résultat, on parle de la nomination des juges de la Cour suprême du Canada. Donc, il veut un droit de regard... la CAQ, le
gouvernement de la CAQ veut un droit de regard pour la nomination des juges
de la Cour suprême du Canada. On ne
parle pas de ça actuellement. Donc, celui-là, on ne peut pas le cocher, ce
n'est même pas
visé, ce n'est pas ça, la demande, de toute façon. Ça fait 75 ans qu'on se
fait dire non là-dessus. Là, il y va avec les cours supérieures, donc la Cour
supérieure du Québec, la Cour d'appel du Québec, et là il veut passer par une nouvelle voie,
qu'il considère pratiquement révolutionnaire, c'est-à-dire celle de
l'amendement de dispositions de la Loi constitutionnelle de 1867, qui ne concernent que le Québec. Donc,
avec l'accord du Sénat, et de la Chambre
des communes, à Ottawa, et avec
l'accord de l'Assemblée nationale, il pourrait y avoir une telle modification
constitutionnelle. Bon, tout ça repose sur ce que le ministre lui-même a
appelé...
Bon, d'abord, est-ce que c'est vraiment une voie
révolutionnaire? Bien, on l'a mentionné plus tôt aujourd'hui, elle a déjà été utilisée, mais ça demande quand
même l'accord du gouvernement fédéral, du Parlement à Ottawa, du Sénat
et de la Chambre des communes. Et ça repose quand même... J'ai trouvé ça
intéressant, le ministre a dit tout à l'heure : C'est parce qu'il y a un déficit de légitimité fédérative quand vient le
temps de parler de nomination des juges. Et c'est vrai. Et c'est vrai. C'est un autre des symboles de ce
que d'aucuns ont appelé le fédéralisme de domination, le fédéralisme de
contrôle, le fédéralisme qui n'est pas vraiment un fédéralisme, mais qu'il y a
un État central fort puis des provinces qui subissent le pacte
confédératif, au départ, hein, parce que c'était comme ça qu'il s'appelait au
départ.
Mais, oui, c'est un vice fondamental, et qui a
été dénoncé par tant de premiers ministres du Québec, qui ont dit : Bien, il y a un problème, c'est que les
juges des cours supérieures sont nommés par le gouvernement fédéral, c'est lui
qui décide. Puis ce n'est pas juste des juges qui décident dans des cas de
droit privé, donc des individus entre des entreprises, entre des
organisations, c'est souvent des tribunaux qui ont à juger des disputes
constitutionnelles entre le Québec et Ottawa,
parce qu'il y en a plusieurs. Des chicanes, il y en a plusieurs, dans
l'histoire, qui sont allées devant les tribunaux. Et là les arbitres de
ces disputes-là sont nommés par le gouvernement fédéral, sans aucune
participation du Québec, dans le cas du
Québec. Donc là, le mot «province», hein, qui vient du latin, prend tout son
sens : territoire conquis, territoire dominé.
Le pouvoir de nomination des juges, c'est
essentiel. Puis là on en a certains qui viennent nous dire : Ah! oui, mais les juges ne sont pas politisés, puis que ce
soient Ottawa puis Québec qui nomment, ce n'est pas grave, à la fin, ils sont indépendants. Qu'on cesse de nous raconter
des histoires, M. le Président. C'est essentiel. C'est clair que le pouvoir
de nomination, comme il s'est exercé dans le
passé, avec moins de transparence... Aujourd'hui, il y en a un peu plus, particulièrement au Québec, parce que nous, on a
changé notre système de... notre mécanisme de nomination des juges. Il
est plus transparent maintenant que celui du fédéral. Mais n'empêche que ce
qu'on a vu, c'est que le pouvoir de nomination des juges, il a un impact sur le
type de juges qu'on a, sur le type de décision qui est rendue. Donc, c'est au coeur de l'affaire, et c'est pour ça que le
gouvernement fédéral ne veut pas laisser aller ce pouvoir-là. Il veut garder ce
pouvoir de nomination.
Donc,
actuellement, on est sur le minimum qu'on puisse demander. Ce que la motion
prévoit, c'est que le gouvernement de la CAQ, donc, demande à ce que la
Constitution, en ce qui concerne le Québec, soit modifiée comme suit, qu'à partir de maintenant ce serait encore
le gouvernement qui... le gouvernement fédéral qui déciderait, ce qui est
un problème en soi, mais là il le ferait sur
la base d'une liste ou de recommandations fournies par le gouvernement du Québec.
Bon, notons d'abord que, lorsqu'il s'agit de
la Cour suprême du Canada, dans le programme de la CAQ, c'est prévu que ce
serait le pouvoir de nomination du gouvernement fédéral sur recommandation de
l'Assemblée nationale du Québec. Là, on ne
parle pas de la même chose, on parle du gouvernement du Québec. Bon, on aurait
pu en discuter, mais je comprends qu'actuellement le processus de
nomination des juges des cours supérieures et de la Cour du Québec, c'est un
pouvoir qui conféré au gouvernement.
Plus tard, on pourra peut-être faire des
suggestions qui ratissent encore plus large pour modifier notre processus de nomination, mais là c'est le minimum, c'est de
dire : C'est encore toi qui décides, le gouvernement fédéral, je suis
encore soumis à ton bon vouloir,
mais, au moins, c'est moi qui vais te fournir une liste. C'est pas mal le
minimum. Puis ça, ça arrive au moment où la troisième voie caquiste, là,
s'est butée à tellement d'échecs depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement de
la CAQ : le rapport d'impôt unique, les pleins pouvoirs en immigration,
avec des promesses puis des engagements,
main sur le coeur, de notre premier ministre et des ministres successifs de
l'Immigration, les transferts en santé, qui sont suffisants minimalement
pour couvrir les besoins énormes du Québec, l'assujettissement des entreprises
fédérales à la Charte de la langue française, avec le fédéral qui s'est
contenté d'un assujettissement volontaire, la nomination
des juges issus du Québec à la Cour suprême, sur recommandation du Québec, je
l'évoquais tout à l'heure, d'autres qui n'ont même jamais fait l'objet
d'aucune démarche réaliste ou sérieuse de la part du gouvernement de la CAQ,
les transferts des budgets en culture, les
transferts d'un point d'impôt, dont on a déjà parlé dans le passé, transfert en
bloc des budgets en infrastructures, parce que, là, c'est le
gouvernement fédéral qui décide de tellement de choses en projets d'infrastructures, et, bien sûr, l'encadrement du
pouvoir fédéral de dépenser, pour mettre fin aux empiètements dans les
champs de compétence du Québec.
Ça, c'est des
bien grands mots, mais, pour comprendre, c'est qu'actuellement on envoie plein
d'argent à Ottawa, et Ottawa décide ce qu'il va investir et comment il va
l'investir, y compris dans les juridictions exclusives du Québec. Il va y avoir des institutions dans le domaine de la
santé, dans le domaine de l'éducation, de l'enseignement supérieur, en recherche, en innovation, en économie, dans tous
les domaines, puis il dit... il impose son bon vouloir. Ça, zéro, il n'y a eu
aucune avancée sur l'ensemble de ces sujets-là.
En ce qui concerne, donc, le judiciaire, le
processus de nomination des juges, c'est un irritant pour le Québec depuis le
début. Et le premier qui en a parlé, en disant : Ça ne marche pas, c'est
un problème, c'est un vice, je le disais tout
à l'heure, du système fédéral, c'est Maurice
Duplessis. Donc, Maurice Duplessis a
été le premier à demander une révision du
processus de nomination des juges, en particulier des juges de la Cour suprême,
mais pas seulement. Puis là il l'a demandé en 1947. Duplessis l'a encore
demandé en 1950. En 1968, c'est Daniel Johnson, dont il faut lire l'ouvrage
là-dessus, parce qu'il en parle longuement, du problème avec la nomination des
juges. Pour lui, c'est un des problèmes les plus importants
dans la fédération. Puis là, dans son livre qu'il a écrit en 1965, il
dit «égalité ou indépendance», il dit : Ça, c'est une des conditions
fondamentales, ça nous la prend maintenant, puis, si on ne l'a pas, ça veut
dire que la fédération ne marche pas, puis il faut sortir. Il a écrit ça en
1965 dans son ouvrage, M. le Président. Donc, il le demande en 1968.
Réponse : Non.
En
1969, c'est Jean-Jacques Bertrand. En 1978, c'est René Lévesque. En 1980, René Lévesque encore. En 1985, c'est Pierre Marc
Johnson. En 1986, c'est Gil Rémillard qui le fait au nom du gouvernement. En
1987, Robert Bourassa le fait lui-même. En
1992, Gil Rémillard, qui revient à la charge là-dessus. En 1997, c'est Lucien
Bouchard, qui le refait en 1998, qui le refait en 2000. En 2004, c'est
Benoît Pelletier, le regretté Benoît Pelletier. En 2007, Jacques Dupuis. En 2008, Benoît Pelletier encore. En 2008,
deuxième fois, là, Jean Charest revient à la charge. 2013, Alexandre Cloutier.
2015, Philippe Couillard. 2017, Philippe Couillard. Savez-vous ce que ça a
donné, ça, M. le Président? Rien. Zéro. Zéro puis une barre. Ça n'a rien donné.
C'est zéro, comme dit la chanson.
• (17 heures) •
Alors,
quelles sont les chances de succès de la démarche cette fois-ci? Le ministre de
la Justice prétend que c'est un
mécanisme vraiment nouveau. Mais, je le disais tout à l'heure, ce n'est pas
vraiment nouveau, et, à la fin, ça demande... Bon, je comprends que ce n'est pas toute la grosse quincaillerie
constitutionnelle, que ça prend l'accord de l'ensemble des provinces,
etc., ou une quantité importante des provinces représentant tel pourcentage de
la population, vous savez, là, ces formules très compliquées d'amendement.
Là, je comprends
qu'entre guillemets c'est plus simple parce que c'est seulement la Chambre des
communes et seulement le Sénat, mais ça veut
dire oui, ça prend un oui du gouvernement fédéral, et, depuis toutes ces
années-là, ça a toujours été non, la réponse. Donc, on ne voit pas
pourquoi le gouvernement fédéral, aujourd'hui plus qu'avant, aurait la volonté de laisser tomber un tel pouvoir de
nomination qui est tellement important. Il va toujours vouloir garder le dernier
mot. C'est dans son intérêt, il le sait,
malgré tous les bons mots pour l'indépendance judiciaire, il le sait que c'est
dans son intérêt. Donc, encore une fois, ça va être la troisième voix
caquiste qui va démontrer que ça ne peut pas marcher.
Puis ça, c'est un
signe d'abandon aussi des véritables réformes dont on a besoin. Et la véritable
réforme dont on a besoin pour nommer
nous-mêmes les juges qui vont décider de questions importantes, c'est
l'indépendance du Québec, c'est que ce ne soit pas le gouvernement...
c'est que ça ne soit pas des voisins qui décident pour nous de qui va arbitrer
nos disputes et encore moins nos disputes avec ce gouvernement. Parce qu'il y a
encore moins d'intérêt qu'avant, parce que
les juges sont encore plus présents qu'avant dans les disputes
constitutionnelles. Le litige constitutionnel s'est énormément développé
depuis 1947.
Donc, on nous
dit : Bon, souvenons-nous du succès de 1997, c'était sur la
déconfessionnalisation des écoles. Mais ça,
le gouvernement fédéral n'avait pas d'intérêt, il n'y avait pas... ce n'était
pas contentieux, ce n'était pas litigieux. Donc, dans ce cas-ci, les chances de
succès sont à peu près nulles. Le ministre, on est conscients, va en faire une
opération de communication, il va se
dire : Bon, bien, on est unis puis on y va. Quand il va se faire dire non,
qu'est-ce qu'il va dire?
En
fait, je le mentionnais tout à l'heure, le premier ministre a déjà dit non.
Cela étant dit, le ministre veut le tenter de nouveau. On va le laisser faire son travail, faire sa tentative.
Alors donc, on va appuyer la motion pour qu'il puisse partir avec son
petit bonhomme de chemin et répéter ce que tant de premiers ministres et que
tant de ministres de la Justice ont fait
avant lui pour obtenir la même réponse. Même s'il y a une ouverture quelconque
de la part du gouvernement fédéral, on le redit, le problème va rester
entier. Là, on va avoir gagné un petit quelque chose. Mais ce qui compte, c'est
le pouvoir de nomination, et ça va encore être le gouvernement fédéral qui va
nommer les juges des tribunaux supérieurs du
Québec. Et ça, ça ne se modifiera pas, comme partie fondamentale de l'équation
et du déséquilibre de ce régime fédéral, qui avantage toujours le
gouvernement fédéral, qui collecte plus d'impôt que jamais, qui prend des
décisions plus que jamais dans tous les champs de compétence. Est-ce que
quelqu'un a regardé les débats ou les promesses des partis fédéraux, actuellement? Toutes les promesses ou
presque, les plus importantes, les promesses-phares sont faites dans les champs
de compétence du Québec, on parle de santé, on parle d'éducation. Donc, il va y
avoir encore plus de disputes. Et qui va décider de ces disputes-là devant les
tribunaux? Des juges nommés par le gouvernement fédéral. Alors, c'est un
problème fondamental, inscrit à même la Constitution du Canada, et, ce
problème-là, il ne se réglera pas tant qu'on n'aura pas l'indépendance du
Québec, M. le Président. Merci.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député de Jean-Talon. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Je
reconnais M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Mathieu
Lévesque
M. Lévesque
(Chapleau) : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. C'est en ma qualité
de député de Chapleau et adjoint
gouvernemental au ministre de la Justice que je vais intervenir cet après-midi.
Un plaisir, d'ailleurs, de pouvoir intervenir sur cette résolution. J'en
profite pour vous saluer, également saluer l'ensemble des collègues qui sont
ici, là, aujourd'hui à cet important débat, là, justement, sur la résolution de
modification constitutionnelle sur le processus fédéral de nomination des juges qui a été déposée par le ministre de la Justice. Non
seulement il me fait plaisir, M. le Président, mais c'est un privilège de
pouvoir m'inscrire dans ce débat, parce que c'est très, très rare que nous
ayons l'opportunité de débattre de
résolutions de modification constitutionnelle à l'Assemblée nationale telle
qu'elle est présentée aujourd'hui.
Évidemment, si je
suis en faveur de la prémisse de cette résolution pour les mêmes raisons qui
ont été détaillées plus tôt par le ministre,
il m'importe toutefois de revenir sur le contexte dans lequel s'inscrit cette
revendication qui est historique. L'absence d'une participation
véritable et concrète du Québec au processus fédéral de nomination des juges
est dénoncée depuis l'époque du gouvernement Duplessis, et par de nombreux
gouvernements qui se sont succédé, et un changement est réclamé depuis tout aussi
longtemps.
Et
donc, comme l'indique le rapport Proulx-Rousseau, le rapport du Comité
consultatif sur les enjeux constitutionnels du Québec au sein de la fédération
canadienne, et je vais citer, «peu importe le parti au pouvoir, les arguments
présidant à ces représentations ont été les mêmes : garantir un
traitement des différends constitutionnels plus représentatif du concept même
de fédération plurinationale et la prise en compte des caractéristiques
particulières du Québec».
Bien qu'imprégné d'histoire, l'énoncé qui fait
débat aujourd'hui est empreint de nouveauté et prend place dans une nouvelle ère constitutionnelle. En effet,
l'outil de la résolution de modification constitutionnelle auquel nous faisons
appel a été largement sous-utilisé au Québec.
Dans les faits, c'est seulement la deuxième fois que nous référons à
l'article 43 de la Loi
constitutionnelle de 1982 pour demander une modification bilatérale de la Constitution canadienne, la première fois étant en 1997, lorsque nous avons remplacé le système scolaire
confessionnel catholique et protestant par un système scolaire
linguistique francophone et anglophone.
L'ex-ministre des Affaires intergouvernementales
et ancien député de ma circonscription de Chapleau, le regretté Pr Benoît
Pelletier, qui a produit des travaux fascinants et intéressants sur les
modalités de modification de la Constitution,
qui accordent beaucoup d'intérêt à cet outil, celui qui fut, évidemment, mon
mentor, M. Pelletier, voyait dans cette procédure une voie de
passage pour autoriser un certain nombre d'asymétries constitutionnelles,
asymétries qui, soulignons-le, sont
essentielles pour le Québec, son unicité, ses caractéristiques et son identité
propres, et, plus largement, pour
l'authenticité et la préservation du pacte fédératif. Le Québec a tout à gagner
à explorer de nouvelles voies constitutionnelles
afin de consolider et de faire valoir ses spécificités au sein même de la
fédération canadienne, et c'est précisément ce qui guide la démarche
aujourd'hui.
D'ailleurs,
dans cette démarche, il y a la volonté que le Québec joue un rôle et puisse
prendre part aux nominations des juges dans nos cours supérieures et
d'appel... en fait, de la Cour d'appel du Québec. Une question légitime se pose
en lien avec cette volonté, il s'agit de l'impact pour nos concitoyens :
En quoi cela pourrait-il améliorer leur quotidien? Eh bien, abondamment documentée et critiquée, la problématique de
lenteur du processus de nomination fédéral n'est plus à démontrer. Comme
le soulignait le ministre de la Justice plus tôt, certains postes sont toujours
à pourvoir depuis près d'une décennie, M. le Président, 10 ans. Et, si la
lenteur est réelle, les conséquences le sont d'autant plus.
En effet, selon des données avancées par la Cour
supérieure, les postes non pourvus priveraient la population de plus de
65 jours d'audiences chaque mois, donc, ça, 65 fois, fois 12,
année, après année, après année, et ce, depuis 10 ans et plus. Résultat, des personnes victimes et des citoyens se
préparent des mois durant pour aller témoigner ou pour enfin régler leurs litiges, et, au dernier moment,
la cause est repoussée, faute de disponibilité de la cour ou, dans les pires
scénarios, la cause, donc, n'ayant pu être entendue dans un délai raisonnable.
Les citoyens sont donc directement affectés et
seraient les premiers à bénéficier d'un processus de nomination plus efficace
et plus rapide au sein de nos tribunaux supérieurs, incluant la Cour d'appel.
D'ailleurs, comparativement aux nominations
fédérales, les nominations des juges faites par le Québec dans nos cours de
notre juridiction sont faites rapidement,
et les postes vacants sont comblés promptement. En ayant notre voix au chapitre
dans la nomination des juges des cours supérieures, nous garderions assurément
cette bonne habitude, M. le Président, de célérité quant aux nominations.
J'aimerais également vous entretenir d'une autre
notion, celle de notre tradition civiliste, qui est une de nos caractéristiques propres, au Québec, et qui nous
distingue du reste du Canada. Le droit civil québécois s'inscrit dans une tradition
codifiée, structurée par un corpus normatif qui repose sur la cohérence de
notre Code civil et l'interprétation rigoureuse de nos lois. Il s'oppose, dans
sa logique, à la tradition de common law en vigueur dans le reste du Canada.
En effet, il est légitime et normal que le
gouvernement du Québec, en tant que gardien de la tradition civiliste et garant du bon fonctionnement de notre système
de justice, participe activement à la nomination des juges qui rendront justice au nom du peuple québécois. Il importe
toutefois, M. le Président, de souligner que d'aucune façon les remarques
ci-dessus que je viens de faire ne viennent
remettre en cause la compétence, l'expertise et l'indépendance des membres de
la législature.
D'ailleurs, peut-être, à ce sujet-là, tout
récemment, même, en fait, aujourd'hui même, un avis public a été rendu par le Barreau, et je le vais le citer, parce que
c'est très, très intéressant : «Le Barreau du Québec se prononce en faveur
d'une amélioration du processus de nomination des juges des cours
supérieures au Québec et accueille avec ouverture la proposition du ministre selon laquelle les provinces seraient davantage
impliquées dans les critères de sélection et l'identification des meilleurs candidats. Le tout doit être guidé par
des principes de dépolitisation et de transparence permettant d'assurer
la confiance du public dans l'indépendance judiciaire, tel que soutenu par le
Barreau, notamment lors de participations à
la Commission d'enquête sur le processus de nomination des juges.» Et donc
c'est tout frais, ça, M. le Président. Ça vient de sortir aujourd'hui,
l'appui du Barreau à cet effet.
• (17 h 10) •
Cela étant, il est de notre responsabilité à
tous de prendre, évidemment, M. le Président, les mesures nécessaires pour protéger et rehausser le niveau de confiance
de la population envers la justice. Et, en votant en faveur de la résolution
présentée aujourd'hui, nous envoyons un message clair et ferme quant à la
volonté du Québec d'offrir à la population une justice efficiente et humaine. Qu'il le veuille ou non, le gouvernement
fédéral n'aura d'autre choix que d'entendre le Québec.
Dans une décision fondamentale rendue en 1998,
le renvoi relatif à la sécession du Québec, la Cour suprême écrivait que «la
tentative légitime par un participant de la Confédération de modifier la
Constitution a pour corollaire l'obligation faite à toutes les parties de venir
à la table des négociations». C'est entre autres sur cette décision que se base la recommandation dans le rapport
Proulx-Rousseau et c'est aussi en vue de cette dernière que nous sommes en
droit de nous attendre à des
négociations en bonne et due forme avec le gouvernement fédéral sur la question
constitutionnelle de la nomination
des juges. Manquer à cette obligation reviendrait, pour le fédéral, à renier
les principes mêmes du fédéralisme.
Ce moment que nous vivons aujourd'hui est donc
historique. Ce débat sur cette résolution constitutionnelle l'est tout autant.
C'est la première fois que l'article 43 de la Loi constitutionnelle est
invoqué de concert avec la notion d'obligation de
négocier instaurée dans le renvoi sur la sécession du Québec. Et donc
l'adoption de cette résolution engage le déclenchement de négociations
constitutionnelles en lien avec la nomination des juges.
Et donc, en
terminant, nous le réitérons, le Québec doit pouvoir participer au processus
fédéral de nomination des juges. Nous
affirmons que le droit civil et moderne est essentiel à la compréhension du
Québec contemporain. Nous affirmons également que le gouvernement du
Québec a un rôle légitime à jouer dans la sélection de ses juges pour assurer
la qualité, la cohérence et l'intégrité de notre système judiciaire. Et surtout
nous affirmons, par cette résolution, que le
Québec est et demeure maître de son destin juridique. C'est donc avec
enthousiasme que j'offre mon appui, évidemment, au ministre de la
Justice et que j'encourage mes collègues à en faire de même. Merci beaucoup, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le leader adjoint du gouvernement et néanmoins M. le député de Chapleau.
Y a-t-il d'autres intervenants?
Alors, cette motion
est-elle adoptée?
Une voix : ...
Vote
reporté
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors,
ce vote sera donc reporté à demain. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lévesque
(Chapleau) : ...d'appeler l'article 10 du feuilleton, s'il vous
plaît, M. le Président.
Projet
de loi n° 83
Prise
en considération du rapport de la commission qui en
a fait l'étude détaillée et des amendements transmis
Le Vice-Président (M. Benjamin) : À
l'article 10 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport
de la Commission de la santé et des services sociaux sur le projet de loi
n° 83, Loi favorisant
l'exercice de la médecine au sein du réseau public de la
santé et des services sociaux, ainsi que les amendements transmis en
vertu de l'article 252 du règlement par M. le ministre de la Santé et M.
le député de Rosemont. Ces amendements sont déclarés recevables.
Est-ce qu'il y a des
interventions sur ce rapport ainsi que sur ces amendements?
Une voix : ...
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Pardon? Est-ce qu'il y a des intervenants?
Une voix :
...
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Shirley
Dorismond
Mme Dorismond :
Bonjour, M. le Président. Merci beaucoup. Donc, nous voici, hein,
maintenant rendus à l'étape de la prise en considération du rapport de la Commission
de la santé et des services sociaux sur le projet de loi n° 83, qui veut dire Loi favorisant l'exercice de la médecine au sein
du réseau public de la santé et des services sociaux.
Et, d'entrée de jeu,
M. le Président, je veux souligner que nous sommes très, très, très satisfaits
des réflexions et des discussions que nous
avons eues en commission entourant ce projet de loi. Ces échanges se sont
déroulés dans un esprit de
collaboration et dans un objectif commun de bonifier le projet de loi en vue de
son adoption. Je remercie sincèrement tous mes collègues qui ont
contribué de façon intensive à l'étude détaillée du projet de loi, aux
amendements proposés.
Tout au long des
travaux relatifs à ce projet de loi, je le rappelle, chacune de nos décisions a
été motivée par un seul et seul principe qui est celui de bâtir un système
de santé solide, adapté aux besoins
de notre population et équitable pour
tous. D'ailleurs, c'est d'abord et avant tout pour améliorer le bien-être des
Québécois et leur offrir un meilleur accès aux soins que nous avons
proposé ce projet de loi.
M. le Président, pour
atteindre cet objectif fondamental, le projet de loi n° 83, qui est de
favoriser l'exercice de la médecine au sein
du réseau public, il est proposé de modifier la Loi sur l'assurance maladie
ainsi que la Loi sur la gouvernance du système de santé et de services
sociaux.
Je tiens à rappeler
les principales mesures du projet de loi qui a été proposé.
Le projet de loi vise
d'abord à obliger les nouveaux médecins à exercer dans le secteur public
pendant leurs cinq premières années de pratique.
Ensuite,
il a pour but de permettre au gouvernement, s'il le juge opportun, d'exiger un
engagement des étudiants, des résidents en médecine à exercer dans le
réseau québécois pour une période de cinq ans à la fin de leur formation.
Par
la suite, je vous dirais que, finalement, le projet de loi vient encadrer la
pratique médicale dans le secteur privé en instaurant un régime d'autorisation temporaire permettant d'évaluer
les demandes des médecins qui souhaitent travailler au privé. Et, plus précisément, cette dernière
mesure vise à encadrer le va-et-vient entre le public et le privé qu'effectuent
certains médecins afin de freiner la migration des ressources médicales.
Je tiens aussi à préciser
que les amendements ont été apportés au projet de loi afin de répondre aux
principales préoccupations des groupes
entendus lors des consultations particulières et lors des travaux des études...
de l'étude détaillée, pardon.
Par ailleurs,
je tiens à rassurer les étudiants, les résidents en médecine, toute
l'information nécessaire pour la prise de
décision dans le contexte de l'application de cette loi sera mise à leur
disposition. J'ai rencontré des jeunes inspirants, des futurs médecins, des futurs résidents, en
commission parlementaire, qui ont parlé de la préoccupation de la place au
privé en commission parlementaire. Et je
crois sincèrement qu'ils peuvent compter sur nous de parler de cette discussion
librement et de façon ouverte pour vraiment explorer cette dynamique.
Également, précisons la nature temporaire du
régime d'autorisation permettant à Santé Québec d'évaluer la demande d'un médecin de devenir un professionnel
non participant, qui... En effet, ce régime prendra fin au maximum de
deux ans après l'entrée en vigueur du présent projet de loi.
M. le
Président, je tiens encore une fois à remercier tous les députés qui ont pris
part à la commission parlementaire pour le processus législatif. Et je
vous remercie grandement de votre écoute, M. le Président. J'ai terminé.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Marie-Victorin. Je reconnais maintenant Mme la députée de La Pinière.
Mme Linda Caron
Mme Caron : Merci,
M. le Président. Alors, il me fait plaisir de prendre la parole pour la prise
en considération du projet de loi n° 83, Loi favorisant l'exercice de la médecine au sein
du réseau public de la santé et des services sociaux.
Alors, comme je le disais dans mon intervention
sur le principe de ce projet de loi, l'écart entre l'intitulé du projet de loi
et son contenu est plutôt grand. En fait, quiconque lit cet intitulé, Loi favorisant l'exercice de la médecine au sein du réseau public de la santé et des services sociaux, pourrait croire légitimement qu'il s'agit d'un
projet de loi avec des dispositions concrètes qui sont susceptibles de
favoriser et de faciliter de manière concrète l'exercice de la médecine dans le réseau public, donc, de santé et services
sociaux, que c'est un projet de loi qui va véritablement améliorer l'accès aux
soins.
Par des mesures concrètes, M. le Président, je
pense, par exemple, à s'assurer que les hôpitaux dans lesquels les médecins et autres professionnels de la santé
pratiquent et où sont soignés nos concitoyens et concitoyennes du Québec...
que ces hôpitaux ne tombent pas en ruine
comme l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont, comme l'hôpital de Drummondville, qui
tiennent avec de la broche, on l'a déjà entendu en ces murs, M. le Président.
On l'a vu... On l'a lu dans les journaux, on
l'a vu. Certains d'entre nous se sont rendus sur les lieux et ont constaté l'état
des lieux. On en a vu des photos. Alors, ce n'est pas une figure de style, dans ces cas-là, quand on dit que des
hôpitaux tiennent avec de la broche. C'est désolant quand on voit un hôpital
comme l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont, qui a toute une faune, n'est-ce pas, avec des
chauves-souris, avec des écureuils, avec des fourmis sur les prothèses
dentaires. C'est dégueulasse.
• (17 h 20) •
Alors, on se
serait attendus que des mesures concrètes pour prévenir ces situations ou pour
corriger ces situations soient incluses dans le projet de loi pour favoriser
l'exercice de la médecine dans le réseau public, des moyens de garder
les hôpitaux ouverts en région, des moyens de permettre aux femmes enceintes
d'accoucher près de chez elles, comme dans toute société civilisée, des moyens
de faire en sorte que les personnes qui reçoivent un diagnostic de cancer
soient toutes, sans exception, traitées,
voire opérées sans délai, d'une part, pour maximiser leur espérance de vie, les
guérir, d'autre part, pour leur éviter le stress, l'angoisse, le désespoir,
dans certains cas, de l'attente, réduire, donc, cette attente insoutenable et
le désespoir inévitable qui guette les personnes qui reçoivent un diagnostic de
cancer. Il n'y a rien de tout cela dans le projet de loi, M. le Président,
projet de loi qui vise à favoriser l'exercice de la médecine au sein du réseau
public de santé et services sociaux.
Le ministre défend son projet de loi en disant
que c'est une chose dans un ensemble... un ensemble de choses, que c'est une mesure parmi tant d'autres pour
améliorer le système de santé, pour arrêter l'exode vers le privé, pour faire
peut-être plus de
500 000 chirurgies par année. Ne nous méprenons pas, nous partageons
ces objectifs. Nous souhaitons, tous autant que nous sommes, dans cette
Chambre, la population partage ces objectifs, que tout le monde reçoive sa consultation à temps, que l'accès aux médecins
pour les diagnostics soit rapide, pour que l'accès aux spécialistes se fasse
tout aussi rapidement, pour que les
personnes qui ont besoin de traitements ou d'opérations puissent les subir sans
délai pour pouvoir guérir, pour pouvoir mettre fin, le plus rapidement
possible, à cette parenthèse-là dans leur vie, pour avoir une qualité de vie par la suite, pour pouvoir
continuer de s'épanouir, de prendre soin de leurs familles, d'être avec leurs
proches. Bref, c'est une aspiration tout à fait humaine et qu'on s'est donné le
droit d'avoir quand le système a été créé, quand la Régie de l'assurance
maladie a été créée.
Tous les
groupes qu'on a entendus durant les consultations, M. le Président, se sont dit
aussi en faveur de l'objectif du projet de loi mais contre la façon de s'y
prendre, contre la façon de faire, contre la méthode coercitive qui est
introduite dans ce projet de loi, une
méthode qui, selon leurs dires, et ce sont des gens du terrain... une méthode
qui ne marchera pas, qui aura des
effets pervers et voire qui pourrait faire le contraire, avoir le résultat
contraire de ce qui est demandé, de ce qui est voulu, de ce qui est
affirmé par le projet de loi.
Le projet de loi veut freiner le départ des
médecins vers le privé, mais les gens du terrain craignent le contraire, craignent une érosion du réseau public. La FMOQ, Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, nous l'a dit sans ambages durant les
consultations et dans son mémoire également. Et, aujourd'hui encore, la
Fédération des médecins résidents du Québec,
la FMRQ, presse le gouvernement de ne pas saper ses propres efforts pour
attirer de jeunes praticiens en adoptant de
nouvelles contraintes à la pratique, à leur pratique avec ce projet de loi, ce
projet de loi qui obligera les jeunes médecins à pratiquer, à exercer la
médecine au Québec pendant au moins cinq ans dans le réseau public.
Je me
permets, M. le Président, de faire référence à cet article : «La FMRQ
presse le gouvernement de François Legault de ne pas saper ses propres
efforts pour attirer de jeunes praticiens en adoptant de nouvelles contraintes
à la pratique...»
Le Vice-Président (M. Benjamin) : M.
le leader adjoint du gouvernement.
Une voix : ...
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors,
je comprenais que vous étiez en train de citer un article.
Une voix : ...
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : D'accord. Alors, on va
faire acte de prudence pour les prochaines fois. Allez-y.
Mme Caron : Merci,
M. le Président. Alors, si le nom d'un autre élu revient dans l'article, je
donnerai son titre plutôt que son nom,
mais effectivement je suis en train de citer un article qui a paru... qui a été
publié par l'Agence QMI aujourd'hui même, à 4 h 04 du
matin.
Donc, alors, la FMRQ, donc, presse le
gouvernement du premier ministre «de ne pas saper ses propres efforts pour attirer de jeunes praticiens en adoptant de
nouvelles contraintes à la pratique, en allusion au projet de loi n° 83,
qui obligerait les jeunes médecins à demeurer au Québec après leur
formation.
«"Les
solutions mises en place au cours des dernières années commencent enfin à
porter concrètement leurs fruits. Ce n'est pas vraiment le temps de
ramer à contresens", a déclaré le président de la FMRQ, Ghassen Soufi,
dans un communiqué lundi.
«"Nous sommes sur le bon chemin. Il ne
resterait plus au gouvernement qu'à retirer les mesures illégales et contre-productives contenues au projet de loi
n° 83, dont celle visant à obliger les jeunes médecins à demeurer au
Québec après leur formation", a indiqué le Dr Soufi.
«Le président de la FMRQ précise que le jumelage
pancanadien a permis jusque-là à plus de médecins résidents de poursuivre leurs
études dans les quatre facultés québécoises, alors qu'ils ont le choix de le
faire dans 18 facultés de médecine ailleurs au Canada.»
Lorsque le Dr Soufi fait référence aux mesures
qui ont été mises en place ces dernières années et qui portent fruit, ce à quoi il fait référence, c'est au fait
que pas moins de 943 médecins résidents entameront leur formation
postdoctorale le 1er juillet cette année, alors qu'ils étaient 894
une année plus tôt, donc l'année dernière. C'est une... Et, parmi ces 943 médecins résidents qui entament leur
formation postdoctorale cet été, 484 d'entre eux ont choisi la médecine de famille
comme spécialité, ce qui est une hausse de près de 6 % et ce qui est une
bonne nouvelle.
Alors, la
crainte de cette fédération, c'est que l'adoption de ce projet de loi va venir
mettre... va venir, entre guillemets, calmer les ardeurs, c'est-à-dire
mettre un frein aux décisions des jeunes médecins de pratiquer au Québec et
même de venir étudier... c'est-à-dire,
d'étudier au Québec, parce que nos meilleurs peuvent aller dans des facultés de
médecine à l'extérieur du Québec, ce
qui serait vraiment, vraiment une perte pour nous, pour l'ensemble de la
population québécoise.
Ce qu'on nous a dit aussi, M. le Président,
durant les consultations, c'est que les médecins vont faire carrière dans le
réseau public si on répare le réseau. Et, concrètement, ça veut dire, et c'est
ce qu'on nous a dit en consultations, remplacer le matériel défectueux, parce
qu'il y a des chirurgies qui s'effectuent avec du matériel qui fonctionne de manière intermittente, rendre les plateaux
disponibles avec du personnel, parce que, lorsqu'une chirurgie d'une durée
prévue de deux heures commence à 14 h 15 parce qu'il y a eu du
retard accumulé dans la journée, bien, la chirurgie est annulée, parce que le personnel doit finir à
16 heures. Je comprends qu'il y a des conventions collectives, mais est-ce
qu'il n'y a pas des moyens de régler ça, dans l'intérêt public, pour que
les médecins puissent faire les chirurgies tant attendues par des patients plutôt que de payer des
professionnels jusqu'à 16 heures, alors qu'ils ne feront pas de la
chirurgie, qu'ils ne participent pas
à la chirurgie, qui ne se fera pas? Il me semble qu'il y a quelque chose qui
pourrait être fait, là, de très concret, qui aiderait à débloquer les
choses.
Concrètement, ça veut aussi dire, j'y ai fait
allusion tout à l'heure, rénover ou remplacer des locaux vétustes et avoir du
personnel pour donner des rendez-vous, parce qu'imaginez-vous, M. le Président,
qu'on nous a dit, en consultations, que, dans certains cas, on manque de
personnel administratif pour donner les rendez-vous. Le plateau... les plateaux
sont disponibles à certaines plages horaires, certaines dates, les médecins
également, l'équipe autour, mais il n'y a
pas personne pour donner des rendez-vous. C'est un non-sens. Et je sais que le
ministre n'aime pas ça, là, plus que moi, là, mais là où je veux en
venir, c'est le fait que le projet de loi ne s'adresse pas à cette
problématique-là.
• (17 h 30) •
Les
consultations se sont déroulées le 6 février et le 11 février
dernier. Il s'est écoulé sept semaines, M. le Président, entre la fin des consultations et le début de
l'étude détaillée, le 1er avril. Personnellement, j'espérais que le ministre
avait bien entendu les préoccupations exprimées en consultations, et
qu'il en avait tenu compte, et qu'il allait nous arriver avec des amendements pour modifier le projet de
loi en profondeur, pour aller dans le sens de ce qu'on avait entendu en commission, ou alors tout simplement le retirer.
Mal m'en prit. Le ministre préparait plutôt une liasse d'amendements pour
créer, ajouter un nouveau volet au projet de loi, un volet qui n'était pas du
tout présent dans le projet de loi initial, et c'est un volet pour instaurer un
nouveau régime temporaire d'autorisation d'exercer la médecine en dehors des
cadres du régime public d'assurance maladie.
Qu'est-ce que ça veut
dire? C'est qu'à l'heure actuelle un médecin qui souhaite aller travailler dans
le privé n'a qu'à faire... n'a qu'à donner
avis à la RAMQ, à la Régie de l'assurance maladie, qu'il s'en va travailler
dans le privé. Il y a 150 médecins qui font du va-et-vient entre le public
et le privé de cette façon-là. Il y a 800 médecins qui sont dans le
privé, qui ne sont pas touchés par ce projet de loi là, qui vont y rester.
Alors, le régime, le nouveau régime temporaire
d'une durée de deux ans, qui est amené avec les amendements qui ont été proposés, déposés pour ce projet de
loi, fait en sorte que les médecins qui veulent aller travailler dans le privé,
que ce soit pour une semaine... On nous a donné l'exemple, par exemple, de la
période estivale, où un médecin, par exemple, ne pourrait pas faire de
chirurgie ou n'aurait pas les équipes nécessaires pour travailler dans le
réseau public, bien, pourrait aller donner
un coup de main dans une clinique privée, peut-être, qui fait des chirurgies,
peut-être, à la demande du
gouvernement, payé par le gouvernement. Et donc ce médecin peut aller aider
pendant une semaine, deux semaines, peut-être, pendant l'été. C'est un des
exemples. Ce n'est pas le seul. Il existe d'autres situations, mais c'est un
des exemples qu'on nous a donnés.
Alors, il
faudra que ce médecin, maintenant... au lieu d'aviser la RAMQ qu'il s'en va
faire ça, il faudra qu'il fasse la demande à... demande d'autorisation à
Santé Québec. Alors, Santé Québec devra évaluer la demande à l'aune de critères
qui sont inscrits dans le projet de loi et déterminer ensuite si l'autorisation
est accordée ou non, donc, aviser le médecin
que, oui, il peut y aller ou non, auquel cas le médecin aura une dizaine de
jours pour faire ses commentaires et puis,
à ce moment-là, voir si Santé Québec change d'idée ou bien si la décision est
toujours la même de ne pas le laisser aller.
Alors, la
question à se poser là-dessus, c'est de savoir est-ce que tous les efforts qui
vont être mis là-dedans vont porter...
vont porter des fruits. On comprend que c'est pour freiner le va-et-vient.
C'est pour empêcher les médecins d'aller dans le public... dans le privé
ou, en fait, leur rendre la tâche un peu plus difficile pour le faire, pour
assurer un certain contrôle. On comprend ça. Mais est-ce que ça va vraiment
être efficient au bout du compte? Est-ce que ça va vraiment permettre de réaliser plus de chirurgies ou de
voir plus de patients? Parce que, si le médecin, dans l'exemple qu'on nous a
donné, prend une semaine de congé du public pour aller au privé donner un coup
de main et faire plus de chirurgies, bien, est-ce qu'il va aller... est-ce
qu'il va faire toute cette démarche de demande d'autorisation pour une semaine?
Peut-être pas. Et là c'est le... ce sont les patients qui vont en
souffrir, parce qu'il y en aura un de moins pour faire les chirurgies qui auraient pu être faites dans... avec une entente
faite dans le réseau... pas dans le réseau, mais dans une clinique privée, par
exemple.
Malgré tout cela, M. le Président, on a... je
partage ce qui a été dit par la députée de Marie-Victorin. On a eu de très
bonnes séances de travail en commission. L'objectif était de travailler de
manière sérieuse sur le projet de loi. On
s'est même dit qu'on s'entendait pour ne pas s'entendre, mais on a fait un
travail sérieux. Et j'en profite pour remercier toutes les équipes du
ministère qui étaient présentes, les techniciens, les collègues aussi, bien
entendu.
Et j'en profite, puisque c'est le temps de dire
ça, durant la prise en considération, qu'on a quand même fait un gain à l'article 1 du projet de loi,
c'est-à-dire que le projet de loi original, à l'article 1, prévoyait des
amendes qui seront imposées aux médecins, aux jeunes médecins qui ne
respecteraient pas, par exemple, les cinq premières années dans le réseau
public et qui iraient faire des actes au privé, alors les amendes étaient de
20 000 $ à 100 000 $ et de 40 000 $ à
200 000 $ en cas de récidive, et c'était décrié par la FMSQ, par
exemple, qui voyait ça vraiment comme une sanction inéquitable. Dans son mémoire, la FMSQ, donc, dénonçait les sanctions
prévues à l'encontre de ces médecins en cas de violation du nouvel
article 27 de la Loi sur l'assurance maladie. Les amendes envisagées,
donc, allant de 20 000 $ à 100 000 $
par infraction et doublées en cas de récidive, sont accompagnées d'une interdiction
prononcée par la RAMQ d'être rémunéré pour tout service assuré pendant
une période de six mois. Ces sanctions sont totalement disproportionnées et
excessives, représentant les mesures les plus sévères jamais imposées aux
médecins en vertu de la Loi sur l'assurance maladie.
Et, à titre comparatif, elles dépassent largement celles appliquées dans
d'autres situations. Par exemple, en cas d'exercice illégal de la médecine, les amendes varient entre 2 500 $
et 62 500 $, doublées en cas de récidive. Et, lorsqu'un médecin exige ou reçoit pour un service assuré,
donc payé par la RAMQ, une rémunération autre que celle prévue à son entente de rémunération, il est passible d'une
amende de 5 000 $ à 50 000 $, doublée en cas de récidive.
Et donc l'amendement que j'ai proposé, c'était de réduire au moins ces
amendes-là à un niveau qu'on retrouve ailleurs. Donc, il faut que ce soit en cohérence avec l'article 22 de la Loi sur
l'assurance maladie. Donc, c'est un amendement qui a été accepté par le
ministre, et je l'en remercie, pour les jeunes médecins.
Aussi, dans
le fameux régime temporaire dont je vous parlais tout à l'heure, M. le
Président, à propos du va-et-vient qu'on veut contrôler des médecins entre le
public et le privé, c'est un régime temporaire qui va être en vigueur pendant
deux ans. Et, étant donné que c'est un régime temporaire, on n'a pas demandé
d'avoir un rapport de mise en oeuvre de la
loi, puisque ce volet-là, au bout de deux ans, sera terminé, à moins qu'un
futur ministre de la Santé veuille le renouveler, mais normalement c'est
un régime, en tout cas, qui sera pour deux ans. Et je salue l'engagement du
ministre à publier un tableau de bord sur les données, les statistiques en lien
avec l'application de ce volet du projet de loi. Alors, on aura au moins accès
aux données, comme d'autres tableaux de bord qui sont accessibles à tous en
ligne pour pouvoir ensuite évaluer si c'est une façon de faire efficiente et
aussi surtout pour avoir des données sur cette façon de faire.
En conclusion, M. le Président, je vous dirais
que ce que les médecins nous ont dit à multiples reprises durant les consultations, c'est que, dans leurs études en
médecine, ils sont formés pour prendre une décision basée sur des faits.
Ils établissent un diagnostic après avoir analysé les symptômes présentés par
le patient et puis ils s'attardent à corriger les causes des symptômes et non
pas les symptômes. Donc, si j'ai mal à la tête, on ne va pas juste me donner du
Tylenol pour m'enlever le mal de tête, on va regarder quelle est la cause de
mon mal de tête. Si la cause, c'est du stress, si la cause, c'est la fatigue, si la cause, c'est un problème physiologique,
bien, on va me dire : On va traiter la cause, tu n'auras plus les
symptômes, on n'aura plus besoin de traiter les symptômes. Et ici c'est un
peu... c'est l'analogie que font les médecins
qui sont venus, les fédérations, etc., qui sont venus en consultations, en nous
disant : Bien, en faisant ça, avec ce projet de loi
où on oblige, par des mesures coercitives, les jeunes médecins à travailler
pendant cinq ans dans le réseau public,
bien, on travaille sur le symptôme, le symptôme étant qu'on en perd, des
médecins qui vont dans le privé, mais on ne travaille pas sur la cause,
les motifs qui les encouragent à aller vers le privé. On veut décourager les
motifs qui les amènent vers le privé.
Alors,
moi, je pense que les groupes qui sont venus étaient sages en nous
disant : Au lieu de mettre des ressources et du temps, autant des
parlementaires, que de Santé Québec, que de la fonction publique, à travailler
sur l'instauration de ce régime coercitif,
bien, ce temps et ces ressources, pourquoi vous ne les dédiez pas plutôt à
continuer de trouver des moyens concrets d'améliorer les choses pour que
les médecins aient le goût de faire toute leur carrière dans le réseau public? Parce que les médecins qui sont formés au
Québec, ils nous l'ont dit, les fédérations des étudiants nous l'ont dit,
ils veulent faire 30 ans dans le réseau
public, ils veulent faire toute leur carrière dans le réseau public, mais,
s'ils arrivent dans le réseau public,
travailler dans des conditions, comme on a vu dans... à l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont, à l'hôpital de Drummondville ou dans d'autres hôpitaux beaucoup
plus neufs, où tout est beau, tout est moderne, mais il n'y a pas de personnel pour pouvoir faire les chirurgies,
par exemple, bien, ça les décourage, puis on les comprend, ça décourage même
les patients. Alors, malheureusement, le projet de loi ne vient pas toucher à
ces aspects concrets là.
Alors, je vais
conclure sur cela, M. le Président. Je vous remercie beaucoup.
• (17 h 40) •
Le Vice-Président
(M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de La Pinière. Nous
poursuivons. Maintenant, je reconnais M. le député de Rosemont.
M. Vincent
Marissal
M. Marissal :
Merci, M. le Président. Bonne fin d'après-midi.
Je
serai bref, aujourd'hui, pour la prise en considération du projet de loi
n° 83, puisque nous y reviendrons pour l'adoption finale, je
présume, cette semaine, demain ou jeudi. Je garderai donc l'essentiel de mes
commentaires — il
y en aura beaucoup plus à ce moment-là — pour la conclusion, donc pour
l'adoption finale.
Puis,
bon, pour briser le punch et puis m'autodivulgâcher, je vous dis tout de suite
qu'on va voter contre ce projet de loi, non pas que l'intention est
mauvaise, c'est que ce n'est pas la bonne cible, c'est essentiellement... en
termes médicaux, ce n'est pas le bon diagnostic, donc ce n'est pas le bon
remède, et ça, tous les groupes qui sont venus nous l'ont dit, j'y reviendrai,
là, justement, je ne veux pas brûler tout le matériel que je veux préparer pour
l'adoption finale, parce que, je tiens à le dire quand même, il y a une
intention, dans ce que le ministre a déposé, qui me semble aller dans la bonne
direction. Mais, si j'étais un instituteur et que le ministre de la Santé était
un de mes pupilles, j'écrirais «peut faire mieux» au bas de sa note, que je
qualifierais de C+ en ce moment, parce que, malheureusement, ça ne va pas assez
loin, ça ne touche pas le réel problème.
Le
réel problème, on le connaît, là, c'est les médecins qui quittent le réseau
public et, de façon encore plus inique, les médecins qui quittent et qui reviennent, là, qui font les fameux
allers-retours, ce que moi, j'appelle les portes tournantes, là, parce qu'à un moment donné, la porte, elle
n'arrête jamais, là, ça rentre, ça sort. Les médecins partent avec des dossiers
qu'ils ont récoltés au public puis s'en vont
faire du privé. Quant à moi, ça devrait même être totalement interdit. Le ministre
est d'accord avec moi là-dessus, donc on va finir par y arriver, là.
Je
sais que le ministre — ça
fait quelques années que je le pratique — il
y va par étapes, là. Puis, en toute justice et à sa décharge, je vais
dire qu'il est en train de mener une réforme qu'il veut audacieuse. Puis, tout
le monde le dit, le réseau de la santé, ce n'est pas une petite affaire, là, ce
n'est pas un dépanneur, là, c'est de l'ordre du méga, du méga Costco, là, puis il faut le prendre,
effectivement, étape par étape. Je ne partage pas nécessairement les étapes
qu'il choisit de faire, mais je
constate qu'il met des morceaux en place, et on travaille ensemble quand la possibilité de le faire existe, on l'a
fait notamment pour mettre fin au recours systématique aux agences
de placement de personnel, qui nous coûtaient une fortune, bon, qui
coûtent encore pas mal cher, mais c'est beaucoup moins pire qu'avant. Puis ça,
je nous en félicite parce que... sans
vouloir me donner tout le crédit, je pense que j'ai été pas mal un des premiers
à parler de ça, ici. Le ministre a
donné suite, il y a eu un projet de loi, qu'on a adopté il y a quelque temps,
là-dessus. Ça commence à donner des résultats. Donc, on n'est pas toujours en train de chialer, pour reprendre une
expression qui a été utilisée ici par le premier ministre, parfois aussi
on arrive avec des solutions, puis, quand on arrive à se rejoindre, tant mieux,
tant mieux.
Ce n'est
malheureusement pas le cas dans 83, même si, je vous le dis, l'intention, elle
est bonne. Je pense que c'est les moyens
utilisés qui ne sont pas adéquats, surtout en visant seulement les jeunes
médecins. Je pense, en plus, que ça risque d'être contre-productif, et c'est ce
qu'ils nous ont dit, les jeunes médecins. Alors, je pense, malheureusement,
que 83 entre dans la catégorie des fausses bonnes idées.
Si on veut vraiment
mettre fin à l'exode des nos médecins vers le privé, il faut faire ce qui s'est
fait ailleurs. Et là je ne parle pas de
républiques socialistes, là, je parle de l'Alberta, notamment, et de l'Ontario,
qui ont tout simplement soit interdit
la pratique au privé... D'ailleurs, les anglophones, le reste du Canada n'en
reviennent pas, de notre situation, au Québec, là. Pour une fois, notre
société distincte n'est pas particulièrement reluisante. J'ai vu, encore
récemment, à la une du Globe and Mail, un grand article de leur spécialiste... journaliste spécialiste en
matière de santé, qui a fait un très,
très long papier dans lequel moi, je n'ai rien appris parce que je connais la
situation du Québec, mais c'était intéressant de voir que le Canada anglais n'en revenait pas, était sidéré de voir
qu'au Québec, qui est pourtant un endroit où l'État-providence existe et
la social-démocratie a encore droit de cité... le Globe and Mail n'en
revenait pas de voir qu'on est rendus à
quasiment 1 000 médecins désaffiliés au Québec. Le Globe and Mail essayait de comprendre ce phénomène qui n'existe pas ailleurs.
Puis moi, pour avoir vécu en Ontario dans mes
jeunes années de journalisme, j'ai déjà été, même, Ontarien, sous le régime de Mike Harris, je peux vous dire
qu'il n'a probablement pas de carte de Québec solidaire, Mike Harris, là, et ses successeurs non plus, puis ils ne sont jamais allés
là, ils ne sont jamais allés là, Mike Harris a déjà voulu privatiser les
hôpitaux, il n'est pas allé là. Alors, pourquoi est-ce que le Québec a fait ça?
Effectivement, la question du Globe and Mail est judicieuse.
Alors, si on veut vraiment — j'y
reviens — empêcher
ça, arrêter ça, il y a deux façons de faire. La façon plus drastique est de dire : Dorénavant, sauf pour
les ayants droit, pour les clauses grand-père, vous n'avez pas le droit de vous
désaffilier puis d'aller travailler au
privé, à moins qu'on soit dans une situation vraiment exceptionnelle où il faut
qu'on développe une ligne. Vous voyez, je suis parlable, là, même pour
ça, je serais parlable. Mais sinon la règle, c'est : vous ne vous désaffiliez pas, vous travaillez dans le
réseau public, puisque nous avons payé, collectivement, un réseau. Nous le
payons, d'ailleurs, chèrement, mais on n'est même pas capables de faire
fonctionner notre réseau, nos salles d'op, notamment, nos salles
d'opération parce qu'on n'a pas assez de monde. C'est un peu idiot, là, comme
situation, puis on l'a créée nous-mêmes,
cette situation-là. Donc, solution a, plus drastique : on empêche
carrément le passage au privé des médecins.
Solution b, qui est plus douce, mais qui arrive
au même résultat : on plafonne les tarifs du privé à ceux de la grille
RAMQ. Donc, vous pouvez aller pratiquer, vous, médecins, au privé, mais sachez
que, pour la hanche que vous remplacez, pour les épaules que vous réparez, vous
ne pourrez pas être payés plus que ce que la RAMQ vous paierait. Autrement dit, quel est donc votre avantage
d'aller travailler au privé, si ce n'est peut-être que les installations sont
peut-être plus modernes, les cas sont moins lourds, ça, c'est connu, mais sinon
l'aspect monétaire, l'aspect pécuniaire ne tient pas, ici.
Alors, ça a été fait dans d'autres provinces, je
vous l'ai dit, l'Ontario, l'Alberta l'ont fait, puis, comme on dirait à Toronto, «the proof is in the pudding», la
preuve est dans le pouding, on le voit très bien, ça fonctionne très bien,
puisque les médecins ne se
désaffilient pas. Il y en a, je pense, dans tout le Canada, là, cinq ou six,
médecins désaffiliés. On est rendus à
quasiment 1 000, ici, autour de 850, et puis on voit la courbe, là, ça
s'en va comme ça, là. Si on ne fait rien, effectivement, d'ici quelque
temps, on en aura des milliers puis on va perdre, encore une fois, l'accès aux
services.
Donc, là où je veux en venir, puisque je vais
garder l'essentiel de mes commentaires pour demain ou pour après-demain, c'est que j'ai déposé un amendement qui
allait spécifiquement dans le sens de la méthode b, donc la méthode douce de plafonner les tarifs que l'on peut exiger
au patient au privé. À moins que je lise mal la gestuelle et les commentaires
du ministre, je pense qu'on va peut-être
aller là à un moment donné, c'est quelque chose que j'ai entendu de sa part, et,
le connaissant, je pense qu'on peut continuer de travailler là-dessus. En tout
cas, moi, je vais essayer de cheminer avec le
ministre puis avec le gouvernement vers ça parce que je pense que c'est une
bonne solution. C'est généralement, aussi, compris et c'est généralement la façon dont on nous dit de le faire,
plutôt que de l'interdire, les interdictions ont parfois des effets
contre-productifs qui ne sont pas souhaitables, mais d'y aller plus doucement,
justement, en plafonnant les tarifs, je pense qu'on peut y arriver.
Puis j'ai
entendu le ministre, à plusieurs reprises, dire : On pourrait en discuter,
je suis prêt à en discuter, le projet de loi n° 83 est une autre brique à
mon édifice, on ira peut-être vers là. Alors, je veux juste vous dire que ce
n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd. Je vais continuer autant que
je serai ici et critique en matière de santé. C'est quelque chose, je crois, qu'on doit faire. Je pense qu'on
se le doit. On se le doit pour sauver notre réseau public, faire fonctionner
nos hôpitaux, nos salles d'opération,
être capables de soigner notre monde avec des médecins qui sont formés ici, au
Québec, à moindre coût, qui sont très bons, les formations sont très, très
bonnes dans les quatre facultés, mais qui travaillent, donc, au public puisqu'ils ont été formés au public, avec des frais de
scolarité, on le sait, beaucoup moindres, au Québec, et ils ont comme un
engagement envers la société, ça, je suis d'accord avec ça.
Alors, j'ai déposé un amendement qui allait
précisément dans ce sens de plafonner, donc, les tarifs imposés. Il a été rejeté par le gouvernement, j'en prends
bonne note, mais je prends bonne note aussi de ce dont je vous parlais il y a une
minute, c'est-à-dire de l'intention du gouvernement de poursuivre cette
discussion. En tout cas, si d'aventure le ministre
souhaite poursuivre la discussion là-dessus, il trouvera en moi un
interlocuteur intéressé et rigoureux. Je pense qu'on devrait faire ça,
je l'ai dit. Alors, c'est l'amendement que j'ai déposé. Je voulais surtout,
aujourd'hui, vous le présenter, même s'il a été... il a été battu séance
tenante, pendant qu'on faisait l'étude article par article. Mais ce
sous-amendement existe toujours, et je me permets
même de demander au ministre de reconsidérer ou, en tout cas, certainement de
donner suite à son engagement de poursuivre la discussion là-dessus.
Merci, M. le Président.
• (17 h 50) •
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député de Rosemont. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?
Mise aux voix de l'amendement
du ministre
Alors, l'amendement proposé par M. le ministre
de la Santé est-il adopté?
Des voix : ...
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Adopté
sur division.
Mise aux voix de l'amendement
du député de Rosemont
L'amendement proposé par M. le député de
Rosemont est-il adopté?
Des voix : ...
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Rejeté.
Mise
aux voix du rapport amendé
Le rapport de
la Commission de la santé... Le rapport, tel qu'amendé, de la Commission de la
santé et des services sociaux portant
sur le projet de loi n° 83, Loi favorisant l'exercice de la médecine au sein du réseau public de la
santé et des services sociaux, est-il adopté?
Des voix : ...
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Adopté
sur division.M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lévesque (Chapleau) : Oui, merci
beaucoup, M. le Président. Question de directive. Est-ce que vous aviez
mentionné des débats de fin de séance?
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Oui,
il y a un débat de fin de séance.
M. Lévesque
(Chapleau) : ...de bien vouloir suspendre nos travaux jusqu'à
la tenue de ce débat, s'il vous plaît.
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, conformément à la
demande de M. le leader adjoint du gouvernement, les travaux sont
suspendus jusqu'à 18 h 30 pour permettre la tenue du débat de fin de
séance annoncé précédemment.
(Suspension de la séance à 17 h 54)
(Reprise à 18 h 31)
Débats de fin de séance
Le
Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, tel qu'annoncé
précédemment, nous allons maintenant procéder au débat de fin de séance, qui portera sur une question adressée par M. le
député de Marguerite-Bourgeoys à M. le ministre des Finances concernant la
dégradation des finances publiques et la décote de crédit du Québec par
l'agence Standard & Poor's.
Je vous
rappelle que, conformément à l'article 310 du règlement, le député qui a
soulevé le débat et le ministre qui lui répond ont chacun un temps de
parole de cinq minutes, et le député a ensuite droit à une réplique de deux
minutes.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je vous
cède la parole pour une durée de cinq minutes.
Baisse de la cote de
crédit du Québec
M. Frédéric Beauchemin
M. Beauchemin : Merci
beaucoup, M. le Président. On le sait maintenant, donc, S&P a décoté la
dette du Québec, pour plusieurs
raisons, mais évidemment le manque de crédibilité du plan de retour à
l'équilibre budgétaire du gouvernement était fondamentalement présent
dans la tête des analystes à cette agence de notation. Écoutez, l'agence de
crédit l'a mentionné, il y avait plusieurs éléments, là, qui expliquaient
pourquoi qu'on en est arrivés à une décote, mais ça ne devrait pas être une si grande
surprise que ça pour le ministre puis pour ce gouvernement-là, parce qu'ils ont
reçu des avertissements dans le passé.
Vous savez,
le gouvernement a décidé, là, O.K., de mettre énormément d'argent en ajoutant
12 000 fonctionnaires qui brassent de la paperasse. Est-ce que
vous avez senti, M. le Président, une amélioration des services? Posez la question aux Québécois, là, puis ils vont vous
répondre que non. Mais ça, c'est un choix du gouvernement. Le gouvernement
a décidé d'investir de l'argent, 19 milliards par année pour trois ans,
dans un plan d'infrastructures, sachant très bien que ce n'était pas
soutenable. Les agences de crédit l'ont soulevé, S&P l'a soulevé. Les
dépenses qui ont perdu un fil directeur, il
n'y a plus de contrôle dans les dépenses de l'État, M. le Président. Puis, dans
la présentation du budget, le ministre nous donne la taxe sur le gain en
capital, sachant très bien qu'elle ne sera pas incluse, au fédéral, dans le
budget qui va arriver.
Donc, ici, on
joue avec un élément, là, qui est extrêmement important, là, parce que c'est
probablement la chose qui est la plus importante, quand on négocie avec les
agences de crédit, c'est notre crédibilité. Quand on perd notre crédibilité,
quand elle s'effrite, M. le Président, ça va prendre beaucoup plus de temps, la
retrouver. Puis, généralement, dans
l'histoire des décotes des gouvernements provinciaux, là, ça a pris un
changement de gouvernement pour en arriver à être capable de remonter la
pente.
Vous savez, dans le rapport de Standard & Poor's,
il n'y avait rien de joli, dans ça. Puis j'ai entendu le ministre me répondre, tout à l'heure, en période des
questions : Bien, effectivement, on l'a très bien lu, le rapport. Non
seulement on l'a lu, on s'est même rendu compte, là, comme tous, quand ils ont
fait la lecture, que Standard & Poor's rentrait dans le
gouvernement, leur rentrait dedans tellement qu'ils menaçaient une autre cote...
une autre décote si le gouvernement n'ajustait pas son tir.
Est-ce que c'est un mystère, pour le ministre des
Finances, que Standard & Poor's veut un plan en trois ans? La réponse,
c'est non. C'était écrit dans le ciel. C'était écrit dans le ciel pourquoi?
Parce que le gouvernement s'est donné toutes les échappatoires pour étendre, modifier, prendre son temps
avant de déposer un plan de retour à l'équilibre budgétaire. Après la période de COVID, il y a eu un déficit, le
gouvernement devait déposer un plan, on a attendu un an après. Puis,
pendant cette année-là, on a modifié la loi pour faire en sorte qu'on puisse se
donner une année pour revenir à l'équilibre budgétaire, au lieu de le déposer
en même temps, le plan de retour, en même temps que de déposer un déficit. Donc, il n'y a rien de... il n'y a
rien... il n'y a rien de surprenant, là, dans les commentaires de l'agence de
crédit, qui veulent quelque chose en trois ans.
Puis, vous savez,
tous les efforts, les gestes concrets de la part du gouvernement qui avaient
été planifiés dans le budget pour avoir une réduction des dépenses, là, c'est
tout après la prochaine élection. 80 % des gestes sont après la prochaine
élection. M. le Président, c'est certain que, quand tu es un analyste, tu vas
regarder ce qui se passe, puis tu vas regarder ça, puis tu vas dire :
Bien, coudon, il manque de crédibilité ici.
Puis j'entends le
ministre qui nous dit : Bien, c'est tout partout pareil, là, au Canada,
là, S&P nous a pris en grippe. Bien, je m'excuse, mais on avait laissé de
la marge de manoeuvre. Le gouvernement a fait les choix de réduire et
d'éliminer, d'anéantir cette marge de manoeuvre là. Tout ça tombe sur le dos...
le dos, et la responsabilité doit être portée
par le gouvernement, par le premier ministre, qui exige à son ministre des
Finances d'agir comme il agit. C'est ça, la réalité, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le député de Marguerite-Bourgeoys. M. le ministre, je vous cède maintenant
la parole et vous rappelle que vous disposez d'un temps de parole de cinq
minutes.
M.
Eric Girard
M. Girard
(Groulx) : Oui. M. le Président, je suis un peu dubitatif du
processus, là, parce que je n'ai pas senti qu'il y avait des questions ou un
sujet à débattre. Mais je vais y aller.
Alors,
quel est le contexte? Alors, le contexte, c'est qu'il y a une guerre
commerciale et que S&P a déclaré que le Canada était à risque en raison de
sa grande dépendance envers le marché américain. Et donc S&P a pris les
devants et a, suite à la publication de l'ensemble des budgets
provinciaux, à l'exception de l'Ontario, parce que l'Ontario a eu une élection,
n'a pas déposé de budget, et d'ailleurs c'est la même situation au fédéral...
mais S&P a pris des actions sur quatre
provinces. Alors, la Colombie-Britannique a été décotée, avec, en plus, une perspective
négative. Nous avons été décotés. La Nouvelle-Écosse a une perspective
négative. Le Nouveau-Brunswick a perdu sa perspective positive.
Alors, dans notre
cas, qu'est-ce que S&P dit dans son rapport? Ils disent que ça va être
difficile de revenir à l'équilibre
budgétaire et qu'ils constatent un plan crédible, avec des actions aux revenus
et aux dépenses, mais que le plan va prendre cinq ans. Puis, évidemment,
un plan qui a cinq ans... Et on mentionne même le fait qu'il y aura une
élection durant ces cinq années-là, mais il y a toujours une élection dans un
cycle de cinq ans. Mais ils disent que ça va être difficile de revenir à l'équilibre budgétaire, mais ça, nous le
reconnaissons. Là où on n'est pas d'accord, c'est l'argument qu'il aurait fallu revenir à l'équilibre
budgétaire en trois ans. Mais, bref, il y a un commentaire à l'effet qu'on
prend trop de temps pour revenir à l'équilibre budgétaire.
• (18 h 40) •
Ensuite,
essentiellement, ce qui s'est passé, puisque S&P regarde trois ans, M. le
Président, c'est que S&P se concentre
beaucoup sur l'année 2027‑2028, et elle a un ratio qui est la somme du déficit
d'opération, dans notre cas 4 milliards de dollars, qui correspond à 0,6 % du PIB, 0,6 % du PIB, c'est
plus... c'est 4 milliards de plus qu'on voudrait, mais ce n'est pas
dramatique, là, je tiens à le dire, M. le Président, et ils somment ce
4 milliards de déficit à l'important effort qu'on fait en dépenses en capital. Alors, effectivement, il y a des dépenses
en capital de l'ordre de 19 milliards. Il y a des ajustements. Pour
S&P, c'est 18. Mais essentiellement on prend les dépenses en capital plus
le déficit d'opération, puis on divise ça
par les revenus, puis on dit : Vous avez dépassé un seuil qui fait que ce
seuil n'est pas cohérent avec la cote que vous aviez, alors on abaisse votre cote. Mais je tiens à dire, M. le
Président, que, ce ratio-là et ce seuil de 10 %, nous le connaissions
et nous le savions, mais, au budget 2025-2026, qui a été fait dans un
contexte de grande incertitude... Rappelez-vous notre hypothèse de 10 % de tarifs, tout le monde a critiqué notre
hypothèse, alors que ce qu'on sait, aujourd'hui, c'est que les tarifs
effectifs, présentement, au Québec, sont inférieurs à 10 %. Alors, on a
choisi de se concentrer sur l'économie, avec
l'urgence, la transition et la destination. Mais, pour ce qui est de...
L'urgence, c'est le programme FRONTIERE. Mais, pour la transition, pour aider l'économie durant cette période de grande
incertitude, on a fait deux choix, M. le Président : libéraliser le
commerce à l'intérieur de l'espace économique canadien, avec nos partenaires,
et augmenter les dépenses d'infrastructures. Et pourquoi, M. le Président?
Parce que les dépenses en capital des entreprises sont présentement extrêmement faibles. Pourquoi? En raison de
l'incertitude quant à l'accès au marché américain. On avait donc un devoir
d'assurer la transition, et c'est pour ça
qu'on a augmenté les infrastructures. Et nous le savions, que ça mettait un
ratio financier à risque, mais nous avons une responsabilité envers
l'économie québécoise.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci,
M. le ministre. M. le député, je vous cède la parole pour votre droit de
réplique de deux minutes.
M. Frédéric
Beauchemin (réplique)
M. Beauchemin : On parle toujours du
contexte, ici, mais en même temps, là, on a tablé sur des tarifs qui allaient être plus petits. Là, j'entends le ministre dire
qu'ils le sont, plus petits. Il n'y a rien de coulé dans le béton encore, M. le
Président, un. Puis, deuxièmement, là, il y
en a, des analystes, qui ont dit que ça allait être 21 % et non 10 %.
Donc, au niveau de la crédibilité, on va se garder une petite retenue
ici.
Mais le pire, dans tout
ça, là, c'est que la CAQ savait qu'il y avait un risque de décote, le risque
était présent. Puis, vous savez, S&P
aurait voulu avoir un plan de retour à l'équilibre budgétaire en trois ans.
C'est sûr. Le gouvernement a pris deux ans de plus avant de déposer un
plan de retour à l'équilibre budgétaire. C'est certain que ça augmente le
scepticisme envers le rationnel, et la solidité, et la crédibilité de ce plan
de retour à l'équilibre budgétaire.
Le ministre nous dit, là, que ce n'est pas
dramatique, que ce n'est pas rien d'énervant, là, d'avoir une décote, on le savait, que ça s'en venait. Comment se
fait-il que, si on le savait, que ça s'en venait, on n'a pas décidé d'agir
autrement? Comment se fait-il, dans le contexte actuel, sachant très bien que
le 19 milliards par année était insoutenable, sachant très bien que
les conséquences allaient être la décote, que le gouvernement, donc, si je
comprends bien, a accepté que la décote se fasse?
Le gouvernement a donc choisi de décoter le
Québec? Pourquoi? Parce qu'ils sont rendus au bout du rouleau, M. le Président.
Ça fait sept ans qu'ils sont au pouvoir, ça fait sept ans qu'ils... qu'ils
dépensent sans regarder, puis là, maintenant, on n'a plus de marge de
manoeuvre, ça fait qu'ils ont choisi la décote parce qu'il n'y avait aucun
autre choix à faire. C'est ça qu'il nous
dit? Je trouve ça extrêmement désolant pour l'avenir de tous les Québécois, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors,
voilà qui met fin à ce débat de fin de séance.
Ajournement
Compte tenu de l'heure, nous allons ajourner nos
travaux au mercredi 23 avril, à 9 h 40.
(Fin de la séance à 18 h 44)