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Etude du projet de loi no 90
Onze heures quarante-trois minutes
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, messieurs!
La commission permanente de l'agriculture est réunie ce matin
pour entendre les mémoires des organismes et des personnes, concernant
la Loi sur la protection du territoire agricole.
Les membres de la commission sont: MM. Baril (Arthabaska),
Beauséjour (Iberville), Dubois (Huntingdon), Gagnon (Champlain), Garon
(Lévis), Giasson (Montmagny-L'Islet), Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), Rancourt (Saint-François), Roy
(Beauce-Sud), Vaillancourt (Orford) remplacé par M. Lavoie (Laval).
Les intervenants: MM. Brassard (Lac-Saint-Jean), Charbonneau
(Verchères), Chevrette (Joliette-Montcalm), Cordeau (Saint-Hyacinthe),
Verreault (Shefford) remplace M. Larivière
(Pontiac-Témiscamingue), Mercier (Berthier), Ouellette (Beauce-Nord),
Picotte (Maskinongé) et Samson (Rouyn-Noranda).
Conseil régional de développement de
Lanaudière (suite)
A l'ajournement d'hier soir, nous avions demandé au Conseil
régional de développement de Lanaudière de revenir pour
terminer les questions des députés qui voulaient se faire
entendre. M. Malo, si vous voulez vous approcher ainsi que MM. Charette et
Gaumont.
M. le député de Joliette-Montcalm avait demandé la
parole; M. le député de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Dans un premier temps, je voudrais faire
référence, non pas à la lecture de votre mémoire,
mais à l'argumentation que vous avez tenue suite à certaines
questions de l'Opposition officielle.
Dans votre mémoire, vous vous déclarez en désaccord
avec la commission provinciale, en termes de centralisation; vous
préconisez, je crois, des commissions régionales. Mais, au niveau
de l'argumentation, vous avez manifesté la crainte que les conseils
municipaux ne soient pas capables... Je m'excuse, M. le Président,
est-ce qu'on pourrait exiger le silence? Merci. Vous aviez manifesté une
crainte indiquant que la pression est trop forte sur les conseils
municipaux...
M. Picotte: On nous demande de garder le silence, j'aimerais
inviter le ministre à en faire autant.
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît!
M. Picotte: Vous n'avez pas entendu votre collègue?
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Joliette-Montcalm, si vous voulez
poursuivre.
M. Garon: Vous avez votre souffleur habituel, il va commencer
à souffler toute la journée; tenez-vous donc tranquille!
M. Saint-Germain: Soyez donc sérieux, il y a des gens ici
qui...
Le Président (M. Boucher): A l'ordre! M. le
député de Joliette-Montcalm, vous avez la parole.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Donc, je disais que
vous aviez manifesté la crainte de voir les conseils municipaux subir
trop de pression et ne pas correspondre, en fait, à l'objectif que vous
recherchiez, une voix régionale plus anonyme. A partir de là,
vous avez ajouté, dans un même souffle, que vous aviez
réussi, au niveau régional, à dégager un consensus
à la présentation de votre mémoire.
J'ai sous les yeux le communiqué de presse de l'UPA, l'UPA
régionale, l'UPA de Joliette qui dit: Que le ministère de
l'Agriculture soit responsable de l'application de la loi, qu'un seul organisme
provincial soit créé.
Dans un premier temps, je vais vous demander comment vous conciliez le
fait que vous affirmiez devant la commission que vous avez réussi
à dégager un consensus au niveau régional alors que l'UPA
semble favoriser, au niveau local, une seule créature provinciale en
fonction de l'administration de la loi.
M. Gaumont: Hier, nous avons soutenu que, sur le plan
régional, il fallait absolument qu'il y ait un organisme pour
accélérer les choses, mais remarquez que nous avons dit
également que la commission nationale était le principal
organisme responsable et c'est à cet organisme que la commission
régionale référerait les cas dans le sens qu'après
en avoir étudié les possibilités, elle ferait une
recommandation.
Si la commission régionale ne fait pas de recommandation à
la commission nationale, cela n'ira pas plus loin, exactement comme il est
prévu dans le projet de loi que si la municipalité ne donne pas
le consentement de poursuivre, cela ne va pas plus loin, à moins que les
individus ou les organismes ne s'adressent directement à la commission
nationale.
M. Chevrette: D'après vos propos...
M. Charette: Je voudrais compléter là-dessus.
M. Chevrette: Oui.
M. Charette: Je vous inviterais à lire attentivement le
mémoire que l'UPA régionale va vous
présenter et je pense qu'elle aussi a évolué au
niveau de sa définition d'intervention de la commission. Je pense que
cela sera légèrement modifié du communiqué que vous
avez déjà.
M. Chevrette: Mais, même dans l'argumentation au niveau du
mémoire ou suite à vos réponses à des questions
posées par l'Opposition, il semble que le premier souci du CRD est
d'abord d'être consulté. Est-ce que j'interprète vos propos
correctement?
M. Gaumont: Que les éléments du milieu soient
consultés. Les CRD, ce sont des organismes de concertation. Si les
organismes de concertation ont réussi à faire asseoir à la
même table des gens de l'UPA, des gens des conseils municipaux pour
discuter du zonage, d'aménagement et de protection des terres, je crois
que le travail qu'ils ont fait est réellement valable.
M. Charette: Je pense, M. le député, que c'est plus
que consulter, c'est participer en région à l'évaluation
des demandes d'amendements qui sont faites dans le milieu. Dans ce sens, c'est
plus qu'une consultation, c'est plus qu'une filière de décision
qui va de la région au provincial.
M. Chevrette: Vous défendiez le fait que le conseil de
comté serait plus apte à siéger d'une façon
paritaire avec l'UPA pour décider de faire des recommandations
précises à la commission.
M. Charette: Je pense qu'il y avait deux groupes majeurs en
région qui sont intéressés par ce projet, ce sont l'Union
des conseils de comté ou les comtés ou les municipalités
et les gens de l'UPA, et le bout de chemin qu'ils ont fait, c'est de se rendre
compte que ni l'un ni l'autre des groupes n'est apte à décider
tout seul de ce qui devrait être pour le territoire agricole.
M. Chevrette: Au niveau du comité paritaire ou de la
commission paritaire régionale que vous préconisez, vous ne
faites pas confiance aux conseils municipaux pour intervenir d'une façon
directe, vous préférez une structure supérieure, qui est
le conseil de comté. Je vais vous poser un problème concret.
Chaque municipalité aura à établir son propre plan.
Pensez-vous que les maires qui siègent au conseil de comté vont
aller se contredire au niveau de cette structure-là, après avoir
pris des votes dans leur propre milieu, après avoir
décidé, chacun dans leur propre municipalité ou
localité, tel plan? Pensez-vous que les gens vont se contredire? Est-ce
que vous ne croyez pas qu'il arriveront là liés, qu'ils seront
mandatés pour aller parler au niveau du conseil de comté et non
plus libres de décider quoi que ce soit?
M. Charette: Je pense qu'il y a deux phases dans
l'élaboration d'une loi comme celle-là au niveau du plan
provisoire. D'une part, il y a justement le niveau du plan provisoire,
où les municipalités vont être appelées avec la
commission provinciale pour déterminer plus spécifiquement, dans
chacune des municipalités, le territoire arrêté pour
l'agriculture. C'est bien tant mieux si, après cela, après le
décret de zonage agricole, les municipalités
représentées au sein de la commission peuvent garder la ligne de
pensée qui a été élaborée avec la commission
provinciale face au zonage de leur propre victoire, mais les besoins
étant toujours à combler et comme il y a toujours une
évolution en termes d'affectation des sols, il ne faut pas dire qu'il
n'y aura aucun changement qui va se faire à l'avenir au niveau des
périmètres zonés pour l'agriculture. Même si,
à un moment donné, avec un échange entre une commission et
une municipalité, on avait trouvé valable de zoner certains
périmètres pour l'agriculture, il n'est pas dit que, dans dix ans
ou dans quinze ans, ces mêmes périmètres vont demeurer
encore totalement à l'agriculture.
M. Chevrette: A une question du député de
Montmagny-L'Islet, vous disiez: Ce qu'on craint, c'est que, dans une
municipalité donnée, un conseil plus ou moins
intéressé va placer, sur un placard, un petit bout de papier et
personne ne saura où et quand intervenir, parce qu'on ne l'aura pas vu.
Je ne sais pas si vous vous rappelez avoir répondu ça, hier, au
député de Montmagny-L'Islet.
En vertu de l'article 35 du projet de loi sur la protection des sols
arables, vous avez l'autorisation, le droit d'intervenir en tout temps; toute
personne intéressée, selon ce qu'il est dit. Votre crainte, c'est
que vous ne soyez pas informé du moment où vous pouvez
intervenir; est-ce que je me trompe?
M. Gaumont: Est-ce que cet article de la loi 35 fait
référence à l'évolution du projet de loi, une fois
adoptée, aux limites territoriales et au zonage agricole fixé ou
si ça fait référence à plus tard?
M. Chevrette: C'est suite au dépôt du plan
provisoire. Si vous regardez le deuxième paragraphe, "cet avis indique
la date du dépôt du plan provisoire et le nom de la corporation
municipale visée. Il mentionne de plus que le plan peut être
consulté au bureau de chacune de ces corporations municipales et au
bureau de la commission et que toute personne peut faire des
représentations écrites à la corporation municipale
visée en en transmettant une copie à la commission".
M. Gaumont: D'accord. Dans notre vision des faits, nous
prévoyons la commission régionale après cette phase. Au
moment où les municipalités sont assises avec la commission
nationale pour fixer les zones, le plan ou le travail de la commission
régionale verra à faire faire ou à ne pas faire faire les
modifications. C'est sur ce plan que nous nous plaçons.
M. Garon: Qu'est-ce que vous faites là-dedans de
l'autonomie des municipalités?
M. Gaumont: On protège l'autonomie des
municipalités parce que, à ce moment-là, ce sont les
conseils de comté. Vous savez que dans les municipalités, les
conseils de comté ont une voix importante parce que les gens qui font
partie des conseils de comté sont des représentants mêmes
des municipalités.
L'intention du gouvernement est de donner plus de pouvoirs aux conseils
de comté.
M. Garon: Si vous donnez des pouvoirs à quelqu'un, vous en
enlevez à d'autres. Vous ne pouvez pas donner des pouvoirs à tout
le monde. Si vous enlevez des pouvoirs à l'un, c'est parce que vous en
donnez à d'autres. Vous en enlevez à un et vous en donnez
à d'autres.
Les pouvoirs que vous voulez donner aux conseils de comté, vous
allez les enlever aux municipalités.
M. Charette: M. le ministre, à ce niveau-là, on l'a
dit tantôt, je pense. Sans parler d'autonomie municipale, on disait qu'en
région, il y avait deux groupes majeurs qui intervenaient dans la
protection du territoire agricole. Ils avaient leur mot à dire. Le
principe qui nous guide là-dedans, c'est de dire qu'il faut qu'au niveau
régional, il y ait des décisions à prendre par ces corps
intermédiaires que sont les municipalités et l'Union des
producteurs agricoles, sans plus.
M. Garon: Pour respecter davantage l'autonomie des
municipalités, c'est l'article 35, si vous le lisez comme il le faut. On
dit: Le débat doit se faire au niveau de la municipalité et toute
personne qui voudrait intervenir interviendra là. Au lieu de vider la
municipalité de son pouvoir, on dit: Si le conseil de comté veut
dire quelque chose au niveau de la région, du comté, il ira le
dire au niveau de la municipalité, ou au niveau où les gens sont
directement concernés.
On pense qu'à ce moment-là, on respecte davantage
l'individu. Au niveau municipal, les gens sont habitués de transiger, de
fonctionner. Il ne faut pas se conter des histoires. Les conseils de
comté, actuellement, ne font pas grand-chose au Québec. Ils ont
un rôle à jouer. Si on compare avec le rôle que jouent les
municipalités, les pouvoirs sont dans les mains des municipalités
actuellement. Est-ce qu'on va enlever des pouvoirs aux municipalités et
les donner aux conseils de comté?
Je ne sais pas ce que vous en pensez. Nous, on a pensé
fonctionner avec ce qui existait, avec les municipalités existantes. A
ce moment-là, que les représentations se fassent au niveau de la
municipalité.
M. Charette: On ne parle pas de conseils de comté, on
parle de commissions régionales, d'une part. Et ce que vous nous
expliquez comme mécanique d'approche, c'est une mécanique qui
existe actuellement au niveau des plans provisoires qui sont
déposés. Nous vous parlons d'une commission qui vient
après le décret de région agricole ou de zone
agricole.
Le Président (M. Boucher): Y a-t-il d'autres intervenants?
M. le ministre.
M. Garon: Je voudrais vous remercier infiniment d'être
venus nous rencontrer et du temps que vous avez mis... On vous a
peut-être fait passer une nuit à Québec, ce qui
n'était pas prévu dans votre horaire. Je vous remercie infiniment
de la préoccupation que vous avez pour la protection des terres
agricoles.
Le Président (M. Boucher): Au nom de tous les membres de
la commission, je remercie M. Gaumont ainsi que M. Charette. J'appellerais
maintenant l'Union des conseils de comté, représentée par
MM. Viau, Delisle et Massey, avocats. Si vous voulez prendre place au centre,
s'il vous plaît. Mémoire no 1-M. Si vous voulez vous identifier et
identifier ceux qui vous accompagnent, s'il vous plaît. (12 heures)
Union des conseils de comté
M. Moreau (Jean-Marie): M. le Président, mon nom est
Jean-Marie Moreau. Je suis président de l'Union des conseils de
comté du Québec. Je désire remercier le gouvernement
d'avoir tenu cette commission parlementaire sur le projet de loi 90 et de nous
avoir permis de nous faire entendre.
Sans plus tarder, je vais procéder à la lecture du
mémoire qui a été préparé par l'Union des
conseils de comté du Québec.
Le Président (M. Boucher): M. Moreau, pour-riez-vous
présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît?
M. Moreau: Me Pierre Viau et Me Jean Massey. Le mémoire se
lit comme suit: Le 9 novembre 1978, M. Jean Garon, ministre de l'Agriculture,
déposait devant l'Assemblée nationale le projet de loi no 90, Loi
sur la protection du territoire agricole.
L'union entend faire les commentaires suivants:
Depuis plusieurs années, l'Union des conseils de comté du
Québec a insisté auprès des gouvernements pour que le
Québec soit doté d'une législation en matière
d'aménagement du territoire et de protection des sols agricoles. C'est
ainsi qu'à son congrès de 1976, dont le thème était
l'aménagement du territoire, l'UCCQ a adopté la résolution
suivante: "Que la législation relative à l'urbanisme et à
l'aménagement du territoire contienne des dispositions traitant du
zonage agricole et de la protection des terres arables".
Il n'est donc pas question pour nous de contester l'à-propos de
mesures visant à protéger les sols arables, mais nous avons
toujours cru et nous croyons encore que ce sujet doit être discuté
et résolu dans un contexte plus global, d'une part, et
dénué, d'autre part, de toute urgence préfabriquée
à des fins politiques.
Commentaires sur certains aspects municipaux. Pour un aménagement
du territoire global et
rationnel. La protection des sols arables fait partie intégrante
d'une politique d'aménagement du territoire. Le zonage est une technique
pour la mise en oeuvre d'une partie de cette politique. Il ne faut pas
confondre les deux sous peine de méprise grave dont les
conséquences peuvent peser lourd sur l'avenir du Québec.
L'agriculture est un secteur de l'activité humaine tout comme
l'industrie manufacturière, la construction de routes ou d'immeubles et
ainsi de suite.
La protection du sol arable au moyen d'une loi de zonage agricole de la
nature proposée par le projet de loi numéro 90 est, à n'en
pas douter, un aménagement sectoriel du territoire qu'il faut absolument
condamner en soi.
L'aménagement du territoire est la planification et
l'organisation d'un espace. Cette planification, si elle doit tenir compte de
tous les aspects de l'activité humaine, ne peut pas, a priori, en
privilégier un au détriment des autres.
Lé Québec, par sa composition géographique et la
nature de ses sols, joint au fait historique que sa population s'est depuis
toujours fixée sur les rives de cours d'eau et donc dans les plaines
où les sols sont les meilleurs, nécessitait et nécessite
encore un aménagement de la campagne.
Mais aménager la campagne n'est pas nécessairement
synonyme de zoner uniquement les sols agricoles: ce n'est là qu'un des
moyens, lequel, sans être absolument mauvais, n'est pas
nécessairement le meilleur. Il faut admettre que l'Etat, ses organismes
et autres corps publics ont, par le passé, posé des actes qui ne
sont pas des exemples de clairvoyance en aménagement. Par contre, c'est
avec grande satisfaction que nous avons assisté, il y a deux ans,
à la création d'un quasi-ministère de
l'aménagement.
A la conférence Québec-municipalités, de juin 1978,
qui était l'aboutissement de quelques mois d'étude, de recherche
et de consultations, le ministre d'Etat à l'aménagement
lançait l'opération aménagement du territoire et
décentralisation en ces termes: "Ce n'est pas de Québec que doit
se faire l'aménagement." (La revalorisation du pouvoir municipal,
décentralisation, avant-propos, page 5, juin 1978).
Le projet de loi numéro 90, à l'encontre des promesses de
décentralisation. En effet, quelques mois à peine après
son arrivée au pouvoir, l'actuel gouvernement, par des voies
ministérielles, annonçait au peuple québécois son
intention de mettre fin à l'absence de coordination entre les
différents ministères. Il proposait aussi un profond mouvement de
décentralisation au profit de l'autonomie des gouvernements locaux dont
le premier sujet de réalisation serait l'aménagement du
territoire.
En toute bonne foi, au prix de multiples efforts humains et de
coûts élevés, nous avons participé, avec les
représentants de l'actuel gouvernement et des villes, à une
consultation fondamentale au sein de comités appropriés, en vue
d'élaborer une politique d'aménagement du territoire dans le
cadre d'une essentielle décentralisation au profit des instances locales
et régionales.
Nous devons dire maintenant que ces efforts soutenus nous paraissent
avoir bien peu pesé dans l'élaboration du projet de loi no 90. Il
n'en faut pas douter, certaines modalités de ce projet de loi
constituent un menaçant recul pour le monde municipal. Ce projet de loi,
non seulement méprise l'autorité locale et ignore l'instance
régionale, mais il centralise d'une façon honteuse plusieurs
pouvoirs et prérogatives des instances locales et régionales au
profit de technocrates et d'agents de l'Etat qui, jouissant d'une
immunité exorbitante, décideront encore du sort des
Québécois, sans avoir à répondre de leurs
décisions devant l'électorat, ce qui, à toutes fins
pratiques, laisse planer la menace d'une mainmise totale du ministère de
l'Agriculture sur la vie économique dapproximativement 1000
municipalités au Québec.
Le projet de loi no 90 compromet la réforme de la
fiscalité. Les études et les recherches commencées en
matière de décentralisation administrative ayant vite fait de
faire ressortir le problème majeur que constitue actuellement la
fiscalité municipale, c'est aussi à cette même
conférence Québec-municipalités que fut officiellement
mise en branle une vaste campagne de consultation en vue de réformer la
fiscalité actuelle des municipalités et de revaloriser le pouvoir
municipal.
La réponse du monde municipal a été unanime;
peut-être pas dans les modalités, mais immédiatement dans
sa participation. Des comités d'étude ont été mis
sur pied et, ici encore, de nombreuses heures de travail ont été
consacrées, tout au cours de l'été et de l'automne, afin
d'en arriver à un consensus sur cette question épineuse. Il est
certain que ce projet de loi affectera le champ de taxation de plusieurs
municipalités en apportant des modifications aux valeurs
foncières.
Ce projet de loi devrait prévoir des compensations aux
municipalités qui seront affectées. Par exemple, les
municipalités devraient être remboursées de la
différence entre les taxes perçues en vertu de l'article 21 et
celles perçues sur la valeur réelle. Il va sans dire que cette
valeur réelle tendra à rejoindre la valeur marchande agricole,
après l'entrée en vigueur du projet de loi.
Le projet de loi no 90 et la démocratie municipale. Le projet de
loi no 90 ampute la démocratie municipale et contient des
éléments dangereux pour l'avenir en confiant des pouvoirs
exercés démocratiquement par les municipalités à
une commission qui n'aurait pas à répondre de ses actes devant
les citoyens.
De plus, ce projet de loi favorise une trop grande centralisation au
gouvernement. Non seulement le gouvernement peut exclure un lot d'une zone
agricole pour les fins d'un ministère ou d'un organisme public
article 86 non seulement le gouvernement se donne-t-il le pouvoir
discrétionnaire de presque tout décider par règlement
article 80 mais encore, il se protège par une clause
parapluie, le mettant à l'abri de toute poursuite.
L'esprit qui anime le gouvernement est formalisé dans l'article
96 du projet de loi no 90. Le
gouvernement peut, par avis écrit à la commission,
soustraire une affaire à sa juridiction. Le gouvernement est alors saisi
de l'affaire avec les mêmes pouvoirs que la commission.
Cet article est dangereux. Il permet au gouvernement de rendre caduque
la Commission de protection du territoire agricole du Québec en la
vidant de ses dossiers et en s'arrogeant ses pouvoirs et, par ricochet, ceux
des municipalités.
En conséquence, le gouvernement pourra, en tout temps
contrôler de façon absolue et sans appel les territoires
zonés agricoles.
Suggestions de modifications. Sans entrer, à ce moment-ci, dans
l'étude du projet de loi, article par article, nous entendons faire
maintenant quelques recommandations, lesquelles seraient de nature à
rendre plus acceptable le projet de loi no 90.
La commission parlementaire devrait être ajournée quand ses
travaux seront terminés, à l'instar du comité conjoint sur
la fiscalité et du comité conjoint en aménagement de
décentralisation, lesquels ont été animés
respectivement par les ministres des Finances, des Affaires municipales et
celui délégué à l'aménagement du territoire.
Un comité conjoint devrait être aussitôt formé pour
reformuler le projet de loi no 90. A ce comité présidé par
le ministre de l'Agriculture, devraient siéger des représentants
du ministère des Affaires municipales, du ministre
délégué à l'aménagement du territoire, de
l'Union des producteurs agricoles, de l'Union des municipalités du
Québec et de l'Union des conseils de comté du Québec.
Dans les 60 jours de l'entrée en vigueur de la loi, chaque
comté municipal aurait l'obligation de créer et mettre sur pied,
par règlement, une commission de protection du territoire agricole de
comté, présidée d'office par le préfet et
constituée de cinq membres, le délégué de la
municipalité demandant une approbation ou une modification du zonage
agricole, un représentant de l'Union des producteurs agricoles de la
région, un fonctionnaire du ministère de l'Agriculture du
Québec, deux autres personnes à déterminer.
La municipalité requérante ou tout intéressé
pourrait en appeler de la décision à la Commission de protection
du territoire agricole du Québec. Afin de protéger les sols
arables dans l'ensemble du territoire québécois, obligation
serait faite à toutes les municipalités impliquées dans ce
territoire de procéder dans un délai raisonnable à
l'établissement par voie de règlement d'un
périmètre d'urbanisation à moyen terme avec avis de la
commission de protection du territoire agricole de comté. Toute
municipalité pourrait déléguer à la corporation de
comté son pouvoir en cette matière pour les fins de
délimitation de ce périmètre. A défaut par une
municipalité de procéder à l'établissement de ce
périmètre d'urbanisation, le plan provisoire identifiant l'aire
retenue comme zone agricole devient définitif.
Tout le territoire agricole désigné et non inclus dans les
périmètres d'urbanisation adoptés par règlement ou
décrétés par ordonnance serait sous la juridiction de la
Commission de protection du territoire agricole du Québec. Un droit
d'appel des décisions de la Commission de protection du territoire
agricole du Québec devrait être institué devant la
Commission municipale du Québec. La clause privative contenue à
l'article 17 du projet de loi numéro 90 devrait profiter
également à chaque commission de protection du territoire
agricole de comté.
Le texte de l'article 19 devrait être modifié en
reconnaissant à la commission le pouvoir de faire des enquêtes
publiques nécessaires à l'exercice de ses fonctions; les
paragraphes 2, 3 et 4 de cet article devraient être biffés.
Tout décret du gouvernement devrait être assujetti au droit
d'une municipalité, d'un conseil de comté, ou d'une
communauté urbaine ou régionale, de demander que ce décret
soit soumis à l'Assemblée nationale et à l'étude
d'une commission parlementaire le cas échéant, tout comme s'il
s'agissait d'une loi.
L'article 27 devrait couvrir tous les boisés se trouvant dans le
territoire soumis à la juridiction de la Commission de protection du
territoire agricole du Québec, toute autre utilisation devrait
requérir un permis de la commission de protection du territoire agricole
de comté.
La décision du gouvernement d'exclure un lot d'une zone agricole
pour fins d'un ministère ou d'un organisme public (article 66) devrait
requérir l'obtention d'un permis municipal, lui-même assujetti
à l'approbation de la commission de protection du territoire agricole du
comté.
L'article 93 devrait être modifié pour que les amendes
perçues soient versées à la municipalité ayant
intenté la poursuite.
L'article 96 du projet de loi devrait être biffé
complètement; le remplacer par l'obligation faite au gouvernement et
à ses organismes de respecter les règlements municipaux de zonage
déjà en vigueur.
Dans la perspective de la modification de l'article 21a de la Loi de
l'évaluation foncière, prévoir que des en-lieux de taxes
seraient payés à la municipalité par le ministère
de l'Agriculture du Québec.
En conclusion, nous venons de vivre une grande expérience.
Maintenant que le dossier de la fiscalité, entrepris en juin 1978, est
presque terminé, nous pouvons dire que, pour la première fois, un
gouvernement consultait réellement le monde municipal avant de
réaliser une réforme. Le résultat est intéressant
à plusieurs points de vue. D'une part, cette réforme,
étant également celle des municipalités, sera
réalisée beaucoup plus facilement; d'autre part, le gouvernement
et son ministre des Finances en sortent grandis aux yeux de tous ceux qui ont
suivi le débat et participé à la consultation. Nous avons
dès lors pensée que tous les dossiers seraient traités de
la même façon.
Nous collaborons actuellement à une autre consultation qui avance
à grands pas. En effet, le dossier de la décentralisation et de
l'aménagement du territoire est étudié par deux
comités, l'un
technique et l'autre avec la participation appréciée de
deux ministres, celui des Affaires municipales et celui de
l'aménagement. Les travaux sont à ce point avancés que
l'on peut déjà croire au succès de l'entreprise. (12 h
15)
Nous avons été quelque peu pris par surprise avec le
dossier du zonage des terres arables. Nous nous attendions à être
consultés au préalable et nous avions de bonnes raisons de croire
que cette question allait être débattue dans son véritable
contexte, soit celui de l'aménagement du territoire.
Nous disons au ministre de l'Agriculture que nos représentations
n'ont pour but que de continuer dans le sens d'une étroite collaboration
avec le gouvernement, ce qui, tout en facilitant l'application des lois,
conserverait aux municipalités leur juridiction et réaliserait
déjà une étape dans la voie de la décentralisation
si souvent vantée et promise.
M. le Président, je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Moreau. M. le
ministre.
M. Garon: Je vous remercie d'avoir présenté le
mémoire au nom de l'Union des conseils de comté. Il y a une chose
que j'aimerais dire, quand vous dites que vous vous attendiez à
être consulté au préalable, je pense qu'il y a eu un appel,
au mois d'août, à tous les organismes et cela a été
votre décision de ne pas présenter de mémoire au cours de
la tournée de consultation en septembre. Il ne faudrait pas nous
reprocher le fait que vous n'ayez pas présenté de mémoire,
c'est vous qui avez décidé de ne pas en présenter, ce
n'est pas moi. Nous avons fait la même demande à l'Union des
conseils de comté, comme aux autres.
Vous parlez, à la page 2, de l'urgence de protéger les
terres qui est une urgence préfabriquée à des fins
politiques. Dans votre esprit, vous croyez maintenant qu'il n'y a pas urgence
de protéger les terres agricoles. Est-ce exact?
M. Moreau: M. le Président, je voudrais répondre
à la première question de M. le ministre, pour ce qui concerne la
présentation de mémoire. L'Union des conseils de comté a
présenté un mémoire en mars 1978 au premier ministre du
Québec qui nous a donné un accusé de réception.
Aussitôt qu'il a été question du zonage des terres, quand
on a commencé à entendre dire qu'il y aurait consultation au
niveau des différents organismes du Québec et de la population
sur le zonage des terres, nous avons fait parvenir au ministère de
l'Agriculture 100 copies de ce mémoire qui avait été
envoyé au premier ministre au mois de mars. Cela faisait partie d'un
mémoire provisoire, parce qu'à ce moment-là, le projet de
loi n'était pas encore connu.
Je pense qu'il est pas mal difficile de se prononcer, M. le
Président, sur un projet de loi qu'on ne connaît pas. Ce
mémoire-ci, précisément, est le mémoire de l'Union
des conseils de comté, une fois que nous avons pris connaissance du
projet de loi.
Maintenant, quant à la deuxième question, il est bien
entendu que nous sommes absolument d'accord. D'ailleurs, on le mentionne
à la première page de notre mémoire présenté
au congrès de 1976. Je vais relire, pour bien clarifier: "Que la
législation relative à l'urbanisme et à
l'aménagement du territoire contienne des dispositions traitant du
zonage agricole et de la protection des terres arables." Il n'est pas question,
pour ce qui nous concerne, que l'Union des conseils de comté ne soit pas
d'accord avec une juste utilisation des sols et une utilisation rationnelle. Je
pense qu'on aurait pu, aussi facilement, avec la création d'un
comité conjoint qui, à mon sens, aurait eu sa raison d'être
très particulière, geler la vente des terres arables le temps que
ce comité aurait travaillé.
M. Garon: Alors, quand vous dites...
M. Moreau: Depuis 1970, il y a eu passablement de coulage des
terres arables. Ce n'est pas un mois de plus qui aurait changé
grand-chose.
M. Garon: Pendant les deux années que j'ai
été ministre de l'Agriculture avant de déposer la loi,
presque toutes les semaines je me faisais assaillir de demandes sur l'urgence
de protéger les terres. Cela m'a semblé être une demande
à peu près universelle au Québec.
Je suis étonné de voir que vous dites:
"Dénuée de toute urgence préfabriquée à des
fins politiques" dans votre texte.
M. Moreau: On peut l'interpréter comme on le veut, M. le
Président.
M. Garon: Je le lis mot à mot.
M. Moreau: Quand on parle d'urgence, M. le Président, il y
a toutes sortes d'urgences. On peut l'interpréter de la façon
qu'on veut. On le dit là. Je pense que cela fait partie du texte.
M. Garon: Cela veut dire, à ce moment-là, qu'il n'y
a pas urgence à protéger les terres, qu'on préfabrique une
urgence à protéger les terres qui n'existe pas. C'est ce que vous
voulez dire?
M. Moreau: II n'y a personne qui conteste l'urgence de
protéger les terres.
M. Garon: Je vois cela dans votre texte.
M. Moreau: On vous dit que si on tient compte de ces urgences,
nous sommes prêts, dans les délais les plus courts, à
étudier cette question, tous ceux qui sont intéressés.
M. Garon: C'est très important parce que d'une part, si
vous voulez avoir la responsabilité de protéger les terres et
qu'en même temps, vous n'en voyez pas l'urgence...
M. Moreau: Je n'ai pas dit que je n'en voyais pas l'urgence.
M. Garon: C'est ce que je lis.
M. Moreau: On l'a dit en 1976 que c'était important. Cela
ne se conteste pas. On parlait de cela en 1976. Cela n'était pas urgent
depuis 1976.
M. Garon: Est-ce que c'est urgent ou si cela ne l'est pas?
M. Moreau: On n'a pas dit que ce n'était pas urgent. On a
dit que c'était urgent, on en a parlé en 1976.
On parle des formules. Cela ne change pas l'urgence ou la
non-urgence.
M. Garon: C'est cela que vous avez écrit. M. Chevrette:
C'est une présomption de quoi?
M. Garon: Je vais vous poser une question, M. Moreau. Dans le
schéma d'aménagement, il y a un exemple au Québec, dans la
Communauté régionale de l'Outaouais. Cela a été
publié en juin 1977. C'est tout récent. Il est dit, à la
page 262: "Une réglementation aussi stricte permettant que
l'agriculture, dans le territoire agricole, ne peut constituer qu'un aspect
d'une politique générale de protection des terres arables et de
relance de l'industrie agricole. Cette politique d'ensemble, qui relève
des gouvernements supérieurs, est depuis longtemps promise, mais
toujours attendue. En l'absence de ce complément, le zonage agricole ne
va pas sans difficulté et se heurte à plusieurs objections de la
part des cultivateurs et des organismes intéressés à
l'économie agricole".
Vous arrivez à la page suivante. Les gens qui ont fait le
schéma d'aménagement du territoire de la Communauté
régionale de l'Outaouais étaient dans le dilemme entre
protéger 108 000 acres, soit la superficie identifiée dans
l'inventaire des terres du ministère de l'Agriculture du Québec,
basé sur l'inventaire des terres du Canada, qui étaient propices
à l'agriculture, qui devraient être protégées et que
réclamaient les organismes agricoles régionaux. Et eux ont dit:
On a protégé 75 000 acres, mais 60 000 qui ont vraiment un bon
sol. 60 000 acres par rapport à 108 000. Donc, au niveau local, il y
avait des organismes qui voulaient en protéger 60 000 et il y a d'autres
organismes agricoles ou para-agricoles qui voulaient en protéger 108
000. Entre ces deux écarts, 108 000 acres de bon sol à
protéger que veulent les organismes agricoles et 60 000 acres que
veulent les autres organismes, qui devrait trancher?
M. Moreau: M. le Président, je n'ai pas le document auquel
fait allusion, M. le ministre. Je pense que cette question devrait obtenir
réponse de ceux qui étaient concernés, les gens de
l'Outaouais. Nous, on parle de l'ensemble du territoire québécois
et aussi des territoires qui sont désignés
présentement.
La question qui m'est posée, je ne m'aventurerai pas sur les
plans techniques d'un document que je ne possède pas.
M. Garon: On va changer d'exemple.
M. Moreau: Mais je dirai tout simplement, M. le Président,
que cette réponse devrait être faite par les gens de l'Outaouais,
ceux qui sont concernés.
M. Garon: Supposons que nous sommes dans le comté de
Verchères, vous le connaissez mieux. Les organismes agricoles, les
cultivateurs, le ministère de l'Agriculture, selon l'inventaire des
terres du Canada, qui a été retravaillé par le
ministère de l'Agriculture du Québec, disent qu'il y a 110 000
acres de bonne terre agricole. Les organismes municipaux, les organismes de
développement ou d'autres organismes veulent protéger 60 000
acres par rapport aux organismes agricoles et para-agricoles, à
l'industrie alimentaire, etc., qui veulent 110 000 acres. Qui va trancher entre
les deux pour savoir si on doit protéger 110 000 ou 60 000 acres?
M. Moreau: M. le Président, quand le conseil de
comté de Lévis, si vous voulez je ne prendrai pas celui de
Verchères, je vais prendre celui de Lévis ...
M. Garon: On peut prendre l'exemple dans Lévis.
M. Moreau: Ce sont deux beaux comtés. M. Garon: Ah
oui!
M. Moreau: Quand le conseil de comté ou les
municipalités...
M. Garon: ... parce que Madeleine de Verchères a
gagné contre les indiens et Lévis a gagné contre les
Anglais.
M. Moreau: Oui. Quand les municipalités ou le
comté... Le rôle de ces organismes, c'est bien entendu que le
relevé des terres agricoles pourrait se faire de la même
façon que c'est fait présentement, ce n'est pas cela qu'on
conteste. On conteste le fait qu'une fois ceci accompli, le pouvoir des
municipalités est sapé par en haut. Ce qui me surprend, c'est
qu'il faut toujours fonctionner à partir du gouvernement local jusqu'en
haut et de façon démocratique. La question des terres, à
un moment donné, est le bébé du ministère de
l'Agriculture; que le ministère de l'Agriculture envoie à chaque
municipalité du Québec une carte qui vient démontrer le
territoire agricole avec un droit de juridiction de la commission, mais que les
pouvoirs d'administration restent entre les mains des municipalités.
M. Garon: Regardez, M. Moreau. On s'est dit, dans notre projet de
loi...
M. Moreau: Je ne conteste pas ce que vous dites là.
M. Garon: ... que, quand la municipalité et la commission
s'entendent, il n'y a pas de problème. Elles s'entendent sur la
même chose: protéger les mêmes terres. Il n'y a pas de
problème. Tout le monde s'entend, cela marche. Il faut décider
des cas où il y a des problèmes. Quand elles ne s'entendent pas,
qu'est-ce qui arrive? Quand elles s'entendent, djiguidou! ils veulent tous la
même chose, les cultivateurs, la municipalité, la commission, tout
le monde veut la même chose. Oublions ces cas-là. La commission
discute avec la municipalité et elles s'entendent, quel que soit
l'intervenant cela peut être la municipalité, le conseil de
comté entre ce que le monde agricole veut réserver
à l'agriculture et ce que l'agro-alimentaire veut réserver
à l'agriculture dans un comté ou dans une municipalité et
ce que la municipalité ou le comté veut réserver à
l'agriculture. C'est l'exemple concret, il y a eu un schéma
d'aménagement dans le Québec jusqu'à maintenant, il y en a
eu seulement un, dans l'Outaouais, il y en a un qui dit 108 000 acres et
l'autre dit 60 000, qui doit décider si cela doit être 110 000,
108 000 ou 60 000?
M. Moreau: II est bien entendu que s'il n'y a pas une entente au
niveau des comtés, au niveau de la commission régionale qui sera
formée, on est d'accord qu'à ce moment-là la commission
puisse trancher la question. Qu'on fasse cela au niveau d'un comté ou
qu'on fasse cela au niveau de l'Etat, nous croyons aussi que la commission
devrait être regardée par la Commission municipale aussi, parce
que les municipalités rurales particulièrement sont
nécessairement affectées par le zonage des terres d'une
façon très considérable, dans leur juridiction même.
Je pense que c'est essentiel qu'à un moment donné il faille qu'il
y ait une autorité supérieure, la commission, qui, s'il n'y a pas
d'entente au niveau des municipalités et du comté, pourra
décider. On n'a pas contesté cela. Si vous lisez le document
comme il faut, c'est ce que cela dit.
Il est bien entendu qu'on peut ajouter... Si on tenait pour acquis qu'il
y ait un comité conjoint de formé, on ne prétend pas que
c'est gelé dans le ciment, ce qu'on a dit ce matin, mais ce qu'on pense,
c'est qu'il devrait y avoir un comité conjoint où le gouvernement
serait représenté largement, où les municipalités
et le monde agricole seraient aussi représentés. A mon sens, je
pense bien qu'on aurait une chaussure qui ferait peut-être passablement
mieux aux Québécois que ce qu'on est en train de nous passer.
M. Garon: On a pris la chaussure la plus proche possible du
citoyen, on a pris la municipalité.
M. Moreau: C'est ce que votre gouvernement dit, M. le ministre,
depuis 1976.
M. Garon: Oui.
M. Moreau: On est d'accord avec cela. On est d'accord.
M. Garon: Je vais vous poser...
M. Moreau: Quand on parle de décentralisation de pouvoirs,
ce n'est pas cela que cela dit, cela centralise les pouvoirs de façon
exagérée. (12 h 30)
M. Garon: Vous venez de dire la même chose que moi,
à moins que j'aie mal compris. J'ai dit que la municipalité et la
commission discutent ensemble. Cela pourrait être le comté,
remarquez bien, cela pourrait être le comté ou la
municipalité. S'ils s'entendent, il n'y a pas de problème. S'ils
ne s'entendent pas, cela veut dire que la commission nationale devrait
décider. C'est ce qu'on dit.
M. Moreau: C'est pas mal différent. M. Garon:
Pardon?
M. Moreau: C'est pas mal différent. A un moment
donné, quand on délimite un territoire, que ce soit agricole, que
ce soit résidentiel ou que ce soit industriel, si on veut le faire
régionalement l'aménagement, c'est cela ce sont les
municipalités avec le gouvernement régional, si vous voulez, le
conseil de comté ou un autre organisme régional, qui
délibèrent et qui, démocratiquement, autour d'une table,
comme on le fait aujourd'hui, essaient de se mettre d'accord. Si, à un
moment donné, en fin de compte, personne n'est d'accord, je suis
d'accord pour qu'à ce moment, la commission tranche. C'est cela. Et
aussi l'obligation de protéger les terres agricoles.
M. Garon: Dans le fond, si on regarde cela...
M. Moreau: Que cela passe par la commission de comté.
M. Garon: Pardon? Je n'ai pas compris.
M. Moreau: J'ai dit que cela passe par la commission de
comté au début, au préalable.
M. Garon: Vous ne trouvez pas que cela fait bien des
chiffres...
M. Moreau: C'est-à-dire que les municipalités
c'est une question que vous posez devraient
déléguer les pouvoirs régionaux, quand on parle
d'aménagement. On s'entend avec le ministère d'Etat à
l'environnement pour dire que l'aménagement se fait
régionalement. Alors, on est entièrement d'accord pour
qu'à ce niveau, ce soient les municipalités qui
délèguent les pouvoirs aux comtés. Si on ne s'entend pas
aux comtés, à ce moment, la régie tranchera la question.
On n'a pas d'objection à cela. Il va falloir que quelqu'un tranche la
question.
M. Garon: Nous, on a procédé de la façon
inverse. On a dit...
M. Moreau: C'est cela. C'est une autre affaire!
M. Garon: On a dit: On va discuter avec la municipalité.
Si le conseil de comté veut faire des représentations au nivau de
la municipalité, il n'y a pas de problème. Lors de notre
tournée en septembre, on a ajouté cet article pour dire: Tous les
organismes qui veulent faire des représentations au niveau de la
municipalité le peuvent, cela peut être le conseil de
comté, cela peut être l'Union des producteurs agricoles, cela peut
être les CRD, tous les organismes qui veulent faire des
représentations; on l'a dit. Le point de discussion, le centre de
discussion va au niveau de la municipalité. Pourquoi? Parce qu'il
fallait tenir compte des conseils de comté. En faisant une loi comme
cela, on ne peut pas commencer à changer toutes les structures
municipales. J'ai pris les structures municipales telles qu'elles existaient.
On dit: Le forum municipal actuellement, c'est la municipalité. Le
conseil de comté vient jouer un autre rôle. S'il a des pouvoirs
plus grands plus tard, c'est une autre affaire. Je ne suis pas contre cela. Il
faut prendre la structure municipale telle qu'elle est. Je l'ai dit, à
ce moment, notre interlocuteur, c'est la municipalité. Maintenant, si le
conseil de comté veut jouer un rôle et veut s'impliquer... parce
que les conseils de comté ne jouent pas le même rôle partout
dans l'ensemble du Québec. Dans certains endroits, par exemple, si on
veut partager les terres, vous ne touchez pas les villes. Il y a tous les
secteurs qui n'auraient pas pu être touchés parce que le conseil
de comté ne couvre pas l'ensemble du territoire actuel, même dans
la région où on voulait discuter. Prenons, par exemple, dans la
plaine de Montréal; il y a une grande partie des terres agricoles qui ne
sont pas couvertes par des conseils de comté. Il fallait procéder
par la municipalité. On s'est dit cela. En même temps, en
permettant aux conseils de comté d'intervenir pour donner leur opinion,
comment ils voient la municipalité, en se disant que la
municipalité était l'organisme le plus proche des citoyens. En
même temps, on a dit: S'il y a un plan régional, s'il y a des
institutions régionales, le conseil régional de
développement, des conseils de comté, ils pourront faire valoir
leur point de vue au niveau de la municipalité et l'envoyer à la
commission pour que la commission soit au courant que ces organismes
régionaux ont indiqué comment ils voyaient la protection des
terres dans la municipalité.
Une autre chose qu'on s'est dite, c'est que le développement de
l'agriculture et le développement agro-alimentaire au Québec ne
peuvent pas être un objectif local. Il faut que ce soit un objectif
national. Si on veut développer l'agriculture au Québec,
développer l'industrie agro-alimentaire, cela ne peut pas être au
niveau municipal qu'on décide cela. Le schéma
d'aménagement de l'Outaouais le dit. C'est une responsabilité des
gouvernements il pouvait appeler cela des gouvernements
supérieurs; je ne sais pas s'ils sont vraiment supérieurs, mais
en tout cas il voulait dire le gouvernement du Québec et le
gouvernement d'Ottawa, j'imagine!
Alors, on a dit: C'est un objectif et, à ce moment-là, si
on a une politique nationale de développement de l'agriculture et de
l'industrie agro-alimentaire, au Québec, c'est au gouvernement du
Québec de prendre cette responsabilité et d'avoir une politique
de développement agroalimentaire. Mais, pour cela, il y avait une
politique à la base, c'était de protéger les terres pour
commencer, autrement c'est un peu comme si on bâtissait des papeteries,
sans s'assurer qu'il y a une forêt pour alimenter ces usines, cela ne
marcherait pas. Alors, de la même façon, quand les
propriétaires d'usines disent: On aimerait s'implanter au Québec,
à un certain endroit; est-ce que nous aurons la sécurité
des approvisionnements? Si je n'ai pas de sécurité, je ne suis
pas intéressé à aller m'implanter là.
La sécurité, cela veut dire des cultivateurs qui
produisent, qui vont me fournir. Catelli était intéressée
dans Saint-Hyacinthe, à condition d'avoir de petits concombres, des
marinades, des betteraves pour mettre dans ses pots, autrement, ce seront des
pots avec du vinaigre qu'elle vendra. Donc, elle a besoin de cela et, pour
l'implantation, c'est nécessairement une politique nationale. Je ne sais
pas, mais c'est ainsi qu'on a raisonné.
Il y a un point sur lequel je voudrais dire un mot. L'article 96 a
été mal perçu. Vous dites que c'est le gouvernement qui
veut soustraire à la commission ses décisions. Cela a
été mis, je vais vous dire pourquoi. D'une façon
générale, le gouvernement pourra utiliser l'article 96 de
façon exceptionnelle; dans notre esprit, c'était évident.
On dit: "Le gouvernement peut, par avis écrit à la commission,
soustraire une affaire à sa juridiction. "Lorsque le gouvernement se
prévaut des pouvoirs qui lui sont conférés au
présent article, le secrétaire de la commission doit lui remettre
une copie du dossier et aviser par écrit les intéressés
que l'affaire a été soustraite à la juridiction de la
commission. Le gouvernement est alors saisi de l'affaire avec les mêmes
pouvoirs que la commission."
C'est pourquoi cela a été mis, quand il exerce un pouvoir
exceptionnel. On a pensé vous donner un cas où on l'envisageait.
Supposons que le gouvernement fédéral n'aurait pas donné
d'argent à Ford et qu'elle serait venue au Québec au lieu d'aller
en Ontario; elle a besoin de 500 acres ou de 1000 acres, c'est une grosse
usine, c'est un peu comme l'Alcan, par exemple, 500 acres. On s'est dit: Est-ce
la commission qui doit décider de l'implantation de l'usine ou si ce
n'est pas une décision de politique économique qui dépasse
la commission? Cet article a été mis là uniquement pour
des cas semblables; des cas exceptionnels, sur le plan économique. Il
n'a pas été mis là pour que le gouvernement du moment dise
à la commission: Laisse faire, je vais régler cela à ta
place! Au contraire, uniquement de façon très exceptionnelle,
comme GM, Ford, Alcan; une grande entreprise, une aluminerie, par exemple, dont
on parle. Il a été question d'aluminerie dans Portneuf ou dans
Lévis; à quelle place cela devrait-il aller? Là, on dit:
Est-ce vraiment à la commission ou au gouvernement à le
décider? Cet article 96 a été mis là
exclusivement pour des cas exceptionnels comme ceux-là. Dans mon
esprit, un gouvernement qui déciderait trop souvent à la place de
la commission, immédiatement la commission perdrait son autorité.
Je voulais clarifier ce point, l'article 96 est un article d'application
exceptionnelle, très exceptionnelle, à notre avis.
M. Moreau: M. le Président, quant à prendre les
pouvoirs, il faudrait les prendre tous, parce que, à mon sens, la loi,
sous sa forme actuelle, fait des municipalités des agents de
consultation, pas autre chose.
Je demanderais à M. Massey de répondre pour ce qui
concerne l'article 96.
M. Garon: ...
Le Président (M. Boucher): Me Massey.
M. Massey (Jean): M. le Président, je pense que la
déclaration du ministre va dans le sens des précisions que le
projet de loi devrait contenir.
Si on regarde l'article 2 du projet de loi, par lequel le gouvernement
est lié par la loi et que l'on constate les mots qui ont
été choisis pour rédiger l'article 96, je pense bien que
n'importe quel mortel va se rendre compte que, avec un texte comme
celui-là, malgré les bonnes déclarations du ministre,
malgré que je comprenne qu'on vise surtout des objectifs nationaux et
des cas exceptionnels, ce n'est vraiment pas ce que l'article 96 dit. Cet
article dit tout simplement que le gouvernement peut, à n'importe quel
moment, mettre la tutelle sur la commission, la vider de ses dossiers, et
prendre un pouvoir tout à fait exorbitant qui lui permettrait de
contrôler l'ensemble du territoire agricole couvert par ce projet de loi
lorsqu'il sera devenu loi.
C'est exactement dans ce sens que nous faisions des
représentations. Plutôt qu'avoir un article dans le style de celui
que nous avons à l'article 96, nous préférons de beaucoup
le voir biffé complètement pour ne garder que l'article 2,
à moins que, suite à la commission parlementaire, on apporte des
modifications à cet article d'une façon substantielle, lui
changer complètement la façade et montrer réellement ce
qu'on entend faire avec un tel texte, c'est-à-dire prévoir des
cas exceptionnels qui pourraient ou devraient même être soumis
à l'Assemblée nationale lorsque le moment sera venu de les
étudier.
M. Garon: A ce moment, il n'y aurait que l'article 2... Je vais
vous donner un cas concret. J'ai discuté il n'y a pas longtemps lors
d'une réunion je pense bien que ce n'est pas confidentiel de le
dire; en tout cas, je vais prendre une chance... Dans une région, il y
avait des organismes qui voulaient qu'autour des lacs, l'espace gardé
pour protéger l'environnement ou protéger les lacs devrait
être telle distance. Je ne me rappelle pas de la distance, si
c'était 1000 pieds ou quelque chose comme cela. Cela équivalait,
dans une région, à fermer toutes les usines de papier parce
qu'elles n'auraient pu continuer à fonctionner avec un tel
règlement, les lacs étant tellement nombreux qu'à ce
moment, vous regardiez la zone et il n'y avait qu'une petite poche de bois et
une autre petite poche de bois qu'il fallait aller chercher dans le
territoire.
A ce moment, le gouvernement a dit: Un tel règlement n'a pas de
bon sens. L'industrie pape-tière ne pourra pas vivre. C'est trop grand,
1000 pieds autour d'un lac. Il faut mettre un écart qui a du bon sens.
Ne me demandez pas si c'étaient 200 pieds ou quelque chose comme
cela.
Alors, supposons qu'au niveau... un tel règlement est fait, le
gouvernement ne pourrait pas intervenir pour dire: Non, il y a un objectif
supérieur qui est le développement de l'industrie des pâtes
et papiers au Québec. A ce moment, ce règlement empêche le
développement de cette industrie. Je ne dis pas que le gouvernement doit
intervenir d'une façon habituelle, mais vous pensez que le gouvernement
devrait dire: Fini!
M. Massey: Je sais par expérience déjà pas
vieille autant que d'autres en ont, mais depuis une quinzaine d'années,
je n'ai jamais vu une loi appliquée avec souplesse, lorsque la loi ne
recommande pas la souplesse. Je n'ai toujours vu que des lois, une fois
adoptées, appliquées telles quelles au texte et, bien souvent,
avec plus de sévérité encore par les technocrates qui ont
à l'appliquer pour toutes sortes de raisons.
Je n'ai jamais vu aller dans le sens dune application souple. On
l'applique et si on cherche un moyen de l'appliquer différemment du
texte, on y va plus sévèrement encore que le texte et ce principe
que la loi dit ce qu'elle dit est assez ancien, même si, peut-être,
certains pourraient contester la juridiction de la Cour suprême. Je pense
qu'au moment où elle a été rendue, la décision de
1954 ne fait pas de doute c'est vraiment dans la cause de Reader's
Digest à laquelle je me réfère...
M. Garon: Oui.
M. Massey: ... le ministre la connaît sûrement et on
ne peut pas prendre une loi autrement que ce qui est écrit dans la loi
et même pas... Je voyais encore, récemment, une autre cause
où, pour des motifs historiques, on cherchait à
interpréter un texte législatif et la décision
était exactement dans le même sens. Malgré que les
circonstances puissent changer, un texte est un texte et il faut
procéder par l'amendement de la loi.
Vous comprendrez que, devant un texte comme celui de l'article 96, nous
sommes plus que méticuleux devant la rédaction d'un article
semblable, parce qu'il est assez compliqué parfois d'obtenir des
amendements à des lois une fois que telles lois ont été
adoptées. C'est le sens de nos représentations. Je comprends tous
les exemples que l'honorable ministre veut nous donner. Par contre, si ces
exemples sont bons, ils ne nous donnent absolument aucune satisfaction parce
que le texte est écrit dans une telle forme que nous devons le
contester.
M. Garon: On est là pour étudier ces articles.
M. Massey: Et nous sommes ici pour cela aussi, M. le ministre.
(12 h 45)
M. Garon: A la page 9, vous dites: un droit d'appel de la
décision de la Commission de la protection du territoire agricole du
Québec devrait être institué devant la Commission
municipale du Québec. Comme organismes municipaux, avez-vous
déjà été offusqués que la Commission
municipale du Québec n'ait pas de droit d'appel? Il n'y a pas d'appel
des décisions de la Commission municipale du Québec. Vous
voudriez qu'il y ait un appel à la commission des terres agricoles, mais
votre propre Commission municipale du Québec n'a pas d'appel de ses
décisions.
M. Massey: Est-ce que nous avons bien compris que vous avez dit
que la Commission municipale n'avait pas de droit d'appel?
M. Garon: Non. Quand la Commission municipale du Québec
rend une décision, vous ne pouvez pas en appeler de sa
décision.
M. Massey: Sauf si elle excède sa juridiction et qu'elle
commet une faute.
M. Garon: C'est la même chose pour la protection des
terres. La Commission de protection des terres agricoles, on veut lui donner,
au point de vue des appels, exactement comme la Commission municipale du
Québec...
M. Lavoie: Est-ce que le ministre pourrait me permettre de faire
remarquer que la Commission municipale est un tribunal quasi judiciaire
où il y a des juges avec une constitution joliment différente de
la commission de contrôle que vous créez actuellement, qui n'est
composée uniquement que de fonctionnaires alors que l'autre...
M. Garon: Pas du tout.
M. Lavoie: ... a un statut quasi judiciaire.
M. Garon: C'est dans votre esprit que c'est composé de
fonctionnaires. Dans notre esprit, ce n'est pas composé de
fonctionnaires. Dans notre esprit, il n'y aurait même à peu
près pas de fonctionnaires. Ce seraient plutôt des
cultivateurs.
M. Lavoie: Qui deviendraient fonctionnaires.
M. Garon: Non, pas des fonctionnaires. La Commission municipale
rend une décision dans le domaine municipal et c'est fini. Il n'y a pas
d'appel, sauf en cas d'excès de juridiction. Dans les fonctions de la
Commission municipale, c'est elle qui connaît le secteur. Dans la
protection des terres agricoles, on dit la même chose. Il y a même
exactement le même genre de pouvoirs que la Commission municipale.
M. Massey: M. le Président, j'aimerais quand même
mentionner que la Commission municipale n'a pas le pouvoir de faire les
règlements des municipalités, alors que cette loi sur le zonage
agricole va remplacer les règlements municipaux. La Commission de
protection des terres agricoles du Québec n'est absolument pas une
instance d'appel, c'est une instance décisionnelle, et si on lui donnait
à elle-même une possibilité d'appeler de ses propres
décisions, je pense que cela irait à rencontre de tous les
principes connus actuellement.
M. Garon: Quand la Commission municipale de Québec rend
une décision, c'est final, sauf en cas d'excès de juridiction,
selon l'article 33 du Code de procédure civile, qui s'applique, et il
s'applique pour la Commission municipale de Québec et aussi pour la
Commission de protection des terres agricoles du Québec. C'est la
même chose.
M. Massey: Oui, mais ce qu'il faut bien comprendre, c'est que la
commission...
M. Garon: Les pouvoirs de la Commission municipale sont assez
grands. Quand vous voulez emprunter, la Commission municipale a des pouvoirs
assez grands, aussi grands, sinon plus grands, que la Commission de protection
des terres agricoles.
M. Massey: Mais, M. le Président, le point que nous
voulons faire comprendre à l'honorable ministre, c'est que la Commission
de protection des terres agricoles, telle que constituée, est
définitivement une instance décisionnelle. Elle prend des
décisions sur le territoire des municipalités et, très
largement, se substitue à elle dans toutes les matières se
référant au zonage des terres agricoles. En aucun endroit, le
projet de loi ne mentionne qu'il y a appel des décisions de la
Commission de protection des terres agricoles. C'est à ce niveau que
nous faisons les représentations contenues dans notre mémoire; il
faudrait instituer une instance d'appel, quelle qu'elle soit. Nous en
suggérons une, il pourrait y en avoir d'autres. Ou que l'on
enlève la clause privative qui protège la commission et ses
membres.
M. Garon: Vous disiez que la Commission municipale, c'est ma
commission, la commission des municipalités.
M. Massey: La Commission municipale...
M. Garon: Tandis que la commission de protection des terres, ce
n'est pas ma commission.
M. Massey: En dehors de la mise en tutelle d'une
municipalité, la Commission municipale ne se substitue pas à une
municipalité; c'est la municipalité qui agit en fonction du Code
municipal, qui l'interprète dans son territoire et qui
adopte une réglementation en conséquence pour le
mieux-être de ses citoyens sur son territoire. Lorsqu'il y a appel, il y
a appel à la Commission municipale.
M. Garon: Tous les pouvoirs d'approbation qu'elle a, c'est quand
même assez important...
M. Massey: La Commission municipale a des pouvoirs d'approbation
et des pouvoirs d'appel, le cas échéant. Cela se compare
très mal avec la Commission de protection des terres agricoles.
M. Garon: Non, c'est la même chose.
M. Massey: Bien non.
M. Garon: Bien oui.
M. Massey: Bien non.
M. Garon: Bien oui, mais...
M. Massey: M. le ministre...
M. Lavoie: ... le ministre ne veut pas comprendre, M. le
Président...
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît, à
l'ordre.
M. Lavoie: M. le Président, on n'a pas dit un mot depuis
une demi-heure. On a laissé le crachoir au ministre.
Le Président (M. Boucher): Vous aurez votre droit de
parole tout à l'heure.
M. Lavoie: Ecoutez, la vérité a ses droits. Ce que
je veux dire, c'est que la Commission de protection du territoire
agricole...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Laval...
M. Lavoie: ... se substitue aux municipalités...
Le Président (M. Boucher): Vous pourrez faire votre
intervention tout à l'heure.
M. Lavoie: J'espère qu'on aura le droit de parler.
Le Président (M. Boucher): D'accord.
M. Chevrette: Vous ferez remarquer vos points en temps et
lieu.
M. Garon: Aucun problème, vous allez avoir tout le temps,
on n'est pas pressé. Il faut prendre le temps qu'il faut.
M. Massey: On croyait qu'il y avait urgence, M. le ministre.
M. Garon: II n'y a pas de problème, le territoire est
gelé.
M. Chevrette: C'est pour fins de partisanerie. M. Garon:
Depuis le 9 novembre.
M. Massey: Je pense que le débat n'est pas terminé,
M. le Président.
M. Garon: Ne lorgnons pas plus longuement là-dessus.
M. Massey: Je suis surpris de constater que le ministre ne
comprend pas ce qui est écrit dans le texte du projet de loi.
M. Garon: Pardon?
M. Massey: Ce qui est inscrit dans le projet de loi est vraiment
le texte de base sur lequel nous devons nous fier pour faire des
représentations. S'il existe déjà un autre texte que nous
ne connaissons pas...
M. Garon: Non, non.
M. Massey: ... nous ne pouvons pas faire de
représentations adéquates.
M. Garon: Non. Quand vous dites, par exemple, qu'il n'y a pas de
droit d'appel à la commission.
M. Massey: II n'y a aucun droit d'appel à la
commission.
M. Garon: C'est exactement la même clause que dans la
Commission municipale.
M. Massey: M. le Président, ce que ne semble pas
comprendre, M. le ministre, c'est que la législation qui couvre la
Commission municipale n'est pas du tout du même type que celle qui
crée la commission de protection des terres agricoles. La Commission
municipale a été instituée dans une planification
d'ensemble de la vie municipale, c est-à-dire que les
municipalités doivent faire approuver certaines réglementations
par la Commission municipale et peuvent s'y référer pour exercer
un droit d'appel. Dans le cas de la commission que le projet de loi 90 entend
créer, il s'agit réellement d'une commission décisionnelle
qui a seule le pouvoir, sauf le gouvernement qui peut le lui enlever n'importe
quand, et sans aucun droit d'appel de quelque nature que ce soit, à
moins que le Parlement veuille bien, en vertu des pouvoirs énormes qu'il
a...
M. Garon: Vous avez...
M. Massey: ... s'instituer comme une instance d'appel de sa
propre loi.
M. Garon: Dans la loi, à l'article...
M. Massey: Trouvez-moi un article où on indique, dans le
projet de loi, qu'on peut en appeler des pouvoirs de la commission.
M. Garon: L'article 18, c'est un article que vous trouvez dans la
plupart des tribunaux administratifs.
M. Massey: C'est un pouvoir de révision et de
révocation. Ce n'est pas un pouvoir d'appel.
M. Garon: C'est ce que vous retrouvez habituellement dans les
tribunaux administratifs.
M. Massey: Non, ce n'est pas du tout un pouvoir...
M. Garon: On aurait pu vous donner un faux appel, dire, à
un moment donné...
M. Massey: Cela en est un, un faux appel.
M. Garon: Non. Ce n'est pas un appel, c'est un pouvoir de
révision. Nous nous sommes dit: On ne fera pas de bureaucratie. On va
mettre le moins de paperasse possible. On aurait pu dire: La
municipalité va commencer à discuter avec un fonctionnaire et
après, la commission servira de tribunal d'appel. On aurait pu faire
cela. Mais qu'est-ce qu'on aurait ainsi fait? On aurait multiplié les
délais. On peut créer une chaîne de trois ou quatre
organismes, mais tout ce que cela fait au fond, c'est de multiplier les
délais. Et le citoyen, qui est écoeuré de la bureaucratie,
dit: On veut avoir des organismes simples, rapides d'exécution et nous
ne sommes pas obligés de passer par trois ou quatre étapes. C'est
ce qu'on a voulu faire avec cela.
M. Massey: Est-ce que le ministre veut dire que ce n'est vraiment
pas cela qui sera institutionnalisé?
M. Garon: Quoi?
M. Massey: Des délais d'appel qui vont être
excessivement longs, tel que le projet de loi est composé.
M. Garon: Des pouvoirs de révision, des demandes en
révision.
M. Massey: Nous prétendons, justement, pour poursuivre un
objectif de souplesse, qu'il y aurait lieu que les instances municipales
locales se réfèrent immédiatement, sur leur propre
terrain, à une commission de protection du territoire agricole de
comté qui pourrait être vue comme un organisme à mi-chemin
entre une commission d'urbanisme telle que nous la connaissons actuellement, et
le bureau des délégués, c'est-à-dire une
institution où les personnes responsables et impliquées se
concertent pour régler un problème. Ceci n'impose aucun
délai, vous le savez, M. le ministre.
M. Garon: ... supplémentaire. M. Massey: Non.
M. Garon: En faisant tout le travail au niveau municipal, vous
évitez de faire une étape de plus.
M. Massey: Exactement, tout se réglerait sur le
territoire.
M. Garon: Au niveau municipal. M. Massey: Au niveau
municipal.
M. Garon: Tantôt, M. Moreau disait qu'il était
d'accord pour dire que s'il n'y avait pas entente, la commission nationale
devait décider.
M. Massey: Nous demandons qu'il y ait une instance d'appel de ces
décisions. C'est tout à fait normal.
M. Moreau: Je suis d'accord avec cela. On partirait, M. le
Président, du niveau municipal et s'il n'y a pas entente, c'est le
rôle de la commission, c'est le rôle de la régie.
M. Charbonneau: On partirait du niveau régional.
M. Moreau: Du niveau régional. C'est différent.
M. Garon: Tout simplement, le débat se ferait au niveau
municipal.
M. Moreau: Les gens qui siègent au niveau régional
sont responsables des municipalités locales. Je ne vois pas ce qu'il y a
de différent là-dedans.
M. Charbonneau: ...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Verchères, j'ai interrompu le député de Laval tout
à l'heure, alors...
M. Garon: Je veux vous remercier d'avoir répondu à
mes questions. Je pense que les députés de l'Opposition
officielle désirent vous poser des questions. Je vous remercie
d'être venus nous rencontrer pour nous parler de la protection des terres
agricoles et nous faire connaître votre préoccupation à ce
sujet.
Le Président (M. Boucher): M. le...
M. Massey: Si vous permettez, M. le Président, j'aimerais
seulement demander au ministre s'il serait d'accord avec la formule que nous
proposons dans notre mémoire.
M. Garon: Quelle formule?
M. Massey: La formule de la commission de la protection du
territoire agricole de comté.
M. Garon: Non. Je voudrais être franc avec vous. Cela
ferait 75 commissions dans l'ensemble du Québec. Vous pariez de six ou
sept personnes. Je pense, dans l'état actuel des choses, qu'il faut
procéder avec les municipalités c'est mon opinion
en donnant la possibilité à tous les organismes régionaux
de faire entendre leur point de vue au niveau municipal.
M. Massey: Si je comprends bien, M. le Président, il
s'agit de faire de la consultation plutôt que de faire de la
décentralisation?
M. Moreau: A ce compte-là, M. le Président, on
pourrait avoir...
M. Garon: On peut jouer avec les mots, vous savez, mais,
simplement, ce qu'on dit c'est que la politique agricole, la politique
alimentaire, c'est un objectif national. Si la municipalité veut
protéger les terres, elle va s'entendre avec la commission. Si elle ne
veut pas protéger les terres cela va arriver dans les
municipalités qui ne veulent pas ... Vous seriez
étonnés du nombre de maires qui entrent en communication avec
moi, qui m'envoient des télégrammes et qui me disent
jusqu'à quel point ils sont d'accord sur cela. Ils disent: Cela va
même nous aider à restreindre le développement anarchique
qui se fait. Vous seriez d'ailleurs surpris du nombre de maires...
D'ailleurs...
M. Picotte: J'aimerais connaître les noms. Il faudrait
avoir la liste.
M. Garon: Je l'avais même dit quand je suis allé
à l'Union des conseils de comté, quand j'ai rencontré les
maires qui étaient là, 200 ou 300. Vous avez vu à quel
point ils étaient d'accord sur la protection des terres? C'était
des maires ruraux.
M. Moreau: Le principe de protéger les terres, je ne pense
pas qu'il y ait personne qui s'inscrive contre cela. Tout le monde est pour
cela. La technique d'application, c'est une autre affaire. A mon sens, comme
représentant de municipalités et comme représentant de
l'Union des conseils de comté du Québec, je pense bien qu'il est
essentiel que je signale à ceux qui sont responsables de la sanction des
lois qu'on est en train, avec le projet de loi sous sa forme actuelle,
d'enlever à 400 municipalités, aux territoires
désignés, pratiquement leur raison d'être, pour certaines
municipalités à vocation purement agricole. Ce n'est pas
s'inscrire en faux contre la loi, contre le principe...
M. Garon: Je vais vous poser seulement une question.
M. Moreau: ... c'est dire tout simplement qu'il pourrait y avoir
d'autres techniques d'application aussi efficaces. Si on fait le raisonnement
qu'il y aura 75 commissions au Québec, on pourrait bien dire aussi qu'il
y aura seulement une municipalité au Québec qui sera menée
d'en haut. Si on part de ce principe, il n'y a plus un gouvernement local qui a
sa raison d'être, puisqu'on tient pour acquis que seule une commission,
omnipotente, qui n'a pas à répondre devant l'électorat,
peut décider sans appel de l'avenir des terres agricoles au
Québec. C'est dans ce sens, c'est en vertu de cette fonction, de ce
principe que l'Union des conseils de comté fait cette
représentation.
M. Garon: Seulement une dernière question. En suivant le
processus que vous suggérez, combien cela prendrait-il de temps à
déterminer les zones permanentes?
M. Moreau: Avec les 180 jours, je me demande aussi combien cela
va prendre de temps pour déterminer les zones permanentes.
M. Lavoie: Le même temps que cela va prendre avec la loi
actuelle. Négocier avec 614 municipalités...
M. Chevrette: Ouais.
M. Lavoie: Le même temps.
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît!
M. Chevrette: Je pensais que c'étaient eux!
M. Lavoie: Vous auriez dû le faire avant au lieu
d'après.
Le Président (M. Boucher): Etant donné qu'il ne
reste qu'une minute avant 13 heures, est-ce qu'on doit suspendre tout de suite?
La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures. Nous entendrons de
nouveau l'Union des conseils de comté.
Suspension de la séance à 12 h 59
Reprise de la séance à 15 h 6
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît, messieurs!
Un simple changement dans les membres de la commission, le
député de Deux-Montagnes remplace le député de
Lac-Saint-Jean, comme intervenant.
M. Chevrette: C'est que, ce matin, on n'avait pas fait les
changements des intervenants.
Le Président (M. Boucher): Nous en étions au
mémoire de l'Union des municipalités...
M. Garon: Moi, j'avais terminé.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre, vous aviez
terminé; j'en étais à donner la parole à M. le
député de Laval. M. le député de Laval.
M. Garon: C'est un nouveau défenseur de l'agriculture!
M. Lavoie: M. le Président, j'ai appris qu'en politique,
il faut être polyvalent et non seulement je défendrai
peut-être les agriculteurs, mais les citoyens en général,
même peut-être les "gentlemen farmers ' de la région de
Québec.
M. le Président, je voudrais être plus bref que le
ministre, parce qu'il faut quand même considérer qu'il y a eu sept
organismes invités, aujourd'hui; sept et nous en sommes au premier.
Je regrette, au départ, que deux ministres ne soient pas
présents à cette commission, soit le ministre d'Etat à
l'aménagement du territoire, qui aurait sans doute apporté une
contribution des plus valables, ainsi que le ministre des Affaires municipales,
surtout lorsque nous avons l'occasion de dialoguer avec le représentant
des gouvernements locaux et régionaux, tels l'Union des conseils de
comté, l'Union des municipalités et autres représentants
des gouvernements locaux.
En ce qui nous concerne, nous aimons l'approche régionale
présentée par l'Union des conseils de comté. Pourquoi?
Parce qu'il faut réaliser, par la pratique de la vie, que si on veut
faire un aménagement appelons cela aménagement du
territoire ou aménagement agricole c'est difficilement faisable
strictement au niveau municipal, dans chacune des municipalités, si on
ne considère pas un tout ou une région. J'ai eu
l'expérience de la vie municipale dans le passé et je sais bien
qu'entre autres, l'aménagement de la ville de Laval s'est fait
c'est un exemple que je vous donne avant que, par un organisme
supramunicipal qui s'appelait la commission supramunicipale de
l'Ile-Jésus, qui groupait les quatorze municipalités... Ce fut la
seule formule pour faire un aménagement régional pour cette
entité géographique.
Ce qu'on reproche peut-être à l'approche
ministérielle, actuellement, c'est qu'on a procédé
à l'envers. On a procédé à rebours. On a mis le
grappin sur un territoire québécois qui va de l'Outaouais
à Québec, qui couvre une surface occupée par 85% de la
population du Québec, un territoire qui couvre, au nord du
Saint-Laurent, une profondeur de 50 à 60 milles en moyenne et, sur la
rive sud, une bande d'environ 100 milles au sud du Saint-Laurent jusqu'à
la frontière américaine. Pour ma part, je me pose la
question.
On ne peut faire uniquement un contrôle agricole. Il aurait fallu
commencer autrement, soit par un aménagement du territoire qui couvre,
en priorité, le territoire agricole, je suis bien d'accord, le
territoire forestier, le territoire de certaines régions minières
ou industrielles, certains sites de loisirs ou de résidences secondaires
pour les citadins, des sites touristiques et sans oublier l'industrie de
l'économie de la construction, l'habitation urbaine. On a tout mis dans
le même sac et on a voulu régler tout cela d'un coup sec. C'est le
problème auquel doivent faire face le gouvernement et le ministre parce
que cela retrousse de tout bord et de tout côté. Et ce n'est pas
fini.
M. Garon: Nous ne sentons pas cela.
M. Lavoie: C'est un aménagement du territoire à
l'envers. C'est un aménagement strictement agricole, sans disctinction,
avec une certaine universalité, une certaine uniformité.
D'ailleurs, c'est le député de Rimouski qui, hier, lors de son
intervention a parlé de certaines normes régionales. On n'a pas
pris en considération des territoires à vocation strictement
agricole qui sont situés peut-être à 100 milles ou à
75 milles des centres urbains où la vocation pour des années et
des décennies est strictement, à tout jamais, agricole. C'est un
problème. Je pense qu'il pourrait se résoudre assez
facilement.
Je dirais qu'il y a d'autres territoires au Québec à
vocation mixte, des territoires à 20, 25 ou 30 milles des régions
urbaines. C'est un autre problème. C'est une autre sorte d'exploitation
agricole. Il y a d'autres régions où on est à 10 ou 15
minutes des centres urbains qui, encore là, ont d'autres
problèmes. Aujourd'hui, avec votre projet de loi massue, votre projet de
loi marteau, vous avez tout congelé, d'un coup sec, sans tenir compte de
ces normes régionales.
Il y a des implications énormes. En procédant de la sorte,
vous avez mis de côté les droits des citoyens et je ne
voudrais pas refaire mon discours d'hier autant des agriculteurs que des
urbains ou des citadins qui ont des droits de propriété
également.
Vous avez donné aux municipalités, les gouvernements
locaux, régionaux ou les municipalités rurales ou de cités
et villes, au mois de juin cette année, une lueur de consultation, de
décentralisation, de concertation en parlant de démocratie
municipale, de fiscalité municipale. Trois ou quatre mois après,
vous faites fi, je dirais, de vos slogans et vous arrivez avec une loi de la
sorte qui met en tutelle pratiquement toutes les municipalités, autant
rurales que les cités et villes et les autres gouvernements locaux;
d'une décision, d'un décret, vous mettez tout cela de
côté. Je me demande, justement, où est la consultation,
où est la concertation, où est la décentralisation,
où est la démocratie municipale.
Je crois que le ministre fait face actuellement, à cause de ses
velléités ou de son utopie, à une mission impossible en
créant un tel bouleversement. Comment voulez-vous, M. le
Président et M. le ministre, que dans les douze jours de session qui
restent actuellement et les députés le savent, on
siège actuellement de dix heures du matin à minuit le soir et
même à l'Assemblée nationale on peut aller plus tard que
minuit comme hier soir on puisse passer la soixantaine de lois qu'il y a
à l'Assemblée et que le gouvernement désirerait voir
adopter avant la fin de la présente session? Comment voulez-vous qu'on
puisse entendre d'une manière intelligente 55 organismes qui sont
inscrits, qui veulent se faire entendre sur ce projet de loi? Nous sommes
actuellement au troisième, il en reste 52.
M. Charbonneau: M. le Président, une question de
règlement. Cela fait sept minutes que le député de Laval
parle. On a des témoins, une commission parlementaire pour entendre des
témoins. Les discours de deuxième lecture sont terminés.
Est-ce qu'il serait possible que le député de Laval en vienne au
sujet et à la pertinence du débat? S'il veut poser des questions
aux témoins qui sont là, je pense qu'ils sont ici pour cela, mais
je pense qu'on a entendu son discours de deuxième lecture. Il y en aura
un autre pour la troisième lecture, mais on n'est pas ici pour cela.
M. Lavoie: Nous avons accordé au ministre ce matin
au-delà d'une heure pour défendre son projet de loi en
général. Il est allé dans les modalités du projet
de loi, ce que je ne ferai pas. Je ne vous parlerai pas de l'article 96. Je ne
vous parlerai pas du non-appel qu'il y a dans la loi. Je vais la respecter.
J'en ai peut-être encore pour cinq minutes. Mais je crois que c'est
important. (15 h 15)
Ce que je vais dire aujourd'hui à l'occasion de la parution de
l'Union des conseils de comté, je n'aurai pas à le
répéter lorsque l'Union des municipalités viendra ou
lorsque les constructeurs ou l'UPA se feront entendre. On essaie, au
début, de faire un tour d'horizon et je n'en aurai pas pour tellement
longtemps.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Laval, vous avez la parole.
M. Lavoie: Je dis qu'il faut être réaliste, que le
ministre a procédé un peu à l'envers. Je reviens à
la suggestion du mémoire que nous avons devant nous, qu'il y aurait
moyen, sans faire marche arrière, de prendre certaines suggestions
à même les idées contenues dans le mémoire de
l'Union des conseils de comté, qu'on fasse vraiment la consultation, il
est encore temps. Cela ne prendra pas plus de temps que le mécanisme que
vous voulez mettre en marche dans la loi, le mécanisme de consultation,
une fois votre commission créée; commission, d'après moi,
qui est plus ou moins nécessaire, parce que ça pourrait
être fait par une réorganisation du crédit agricole, une
espèce d'organisme de développement rural, à
l'échelle du Québec, sans laisser certaines parties non
visées par la loi, en consultation avec le milieu agricole, avec les
représentants du milieu agricole, également avec d'autres.
Dans le milieu agricole, il y a plusieurs intérêts
différents, il y a l'industrie laitière, l'élevage, ceux
qui font la pomiculture, les jardiniers maraîchers, il y a des
intérêts diversifiés dans l'économie agricole. Avec
les municipalités rurales, les conseils de comté, avec les
cités et villes, l'Union des municipalités, avec également
votre ministre d'Etat qui est un superministre à l'aménagement du
territoire il devrait avoir un mot à dire dans ça
avec le ministre des Affaires municipales, à la suite des discussions
que nous avons eues ce matin, il pourrait y avoir facilement un organisme
d'arbitres qui, s'il n'y a pas entente sur les consultations qui pourraient se
faire, dans l'année qui vient.
Pensez-vous que vous allez chambarder le modus vivendi ou la
mentalité de vie, le milieu de l'habitat du Québécois,
dans l'espace de six mois ou d'un an. Ecoutez, vous avez une grande
destinée, le Parti québécois, mais vous n'êtes quand
même pas la fin du monde. Allez-vous changer tout ça dans quelques
mois? Prenez votre temps un peu. J'en ai connu des gouvernements dont j'ai fait
partie, dans les années soixante, qui ont chambardé bien des
affaires. Mais, au bout de six mois, la population en avait assez de ce
rôle peut-être trop présent et trop accru. Laissez un peu la
population digérer ce que vous voulez faire.
Une réforme en profondeur comme vous voulez faire, une
espèce d'aménagement du territoire à rebours, cela ne se
fait pas dans trois mois, dans six mois, dans neuf mois; ce n'est pas vrai.
C'est une mission impossible. Faites-le par étape, en considérant
les particularités régionales, comme l'a dit le
député de Rimouski. Faites-le avec la concertation du milieu et
un organisme d'arbitres, s'il n'y a pas d'entente. Cela pourrait être
fort bien la Commission municipale du Québec. C'est le rôle de la
Commission municipale du Québec d'arbitrer lorsqu'il y a des
problèmes entre certaines municipalités pour certains services ou
quoi que ce soit. La Commission municipale du Québec a toujours eu un
rôle d'arbitre.
Je termine, M. le Président, en disant que je ne suis pas surpris
de voir la déception des gouvernements locaux qui se sont fait vendre
une marchandise, il y a quelques mois, de consultation, de démocratie,
de décentralisation, les implications de la fiscalité; ils ont eu
une lueur. Et ils ont la matraque trois ou quatre mois après. Ils sont
tous en tutelle. C'est une commission qui va décider de
l'aménagement du territoire dans les municipalités du
Québec, sauf Montréal. Les plans de zonage, les plans d'urbanisme
qui sont faits depuis cinq ans ou dix ans sont mis de côté du
revers de la main. Il y a des affaires abracadabrantes. On aura l'occasion...
Dans certaines villes, vous laissez en zones exploitables, en zones blanches,
ce qui n'est pas exploitable dans une ville, alors que vous mettez en vert ce
que les villes ont prévu comme réservoir de développement.
Mais je n'irai pas dans ces détails. Sans compter les dommages
énormes que vous faites à l'économie actuellement; il y a
aujourd'hui les représentants des constructeurs où, dans une
multitude de localités du Québec, vous mettez en danger
l'industrie de la construction.
Je pense bien qu'il n'y aurait pas de dommage à ce que vous
preniez votre affaire un peu plus calmement. La consultation que vous voulez
faire dans l'année qui vient, avec les 614 municipalités, avec un
avis de 190 jours que vous voulez leur donner, vous pourrez leur donner cet
avis. La consultation pourrait avoir lieu de la même façon et vous
aurez, en ce qui nous concerne, de la part de l'Opposition, notre
collaboration.
Par contre, à mon point de vue, c'est une des lois les plus
importantes qui aient été adoptées au
Québec depuis de très nombreuses années, avec
toutes les implications que cela a dans le droit de la jouissance, dans le
droit de propriété. Même avec la collaboration qu'on va
vous offrir, je me demande comment vous pouvez logiquement, d'une
manière intelligente, faire adopter votre loi avant le 22
décembre.
M. le Président, j'ai fait le tour d'horizon. Je suis d'accord
sur beaucoup de choses dans le développement régional, il faut la
concertation de tous les agents de notre milieu. Autrement, je me demande
comment on peut arriver avec une espèce d'aménagement du
territoire qui s'appelle maintenant aménagement agricole du
Québec.
J'ai terminé pour le moment, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Laval. M. le député de Huntingdon.
M. Dubois: Merci, M. le Président. Je voudrais tout
d'abord saluer M. Moreau, le président, ainsi que M. Massey et M. Viau.
Je vous remercie pour le mémoire très étoffé que
vous avez présenté. D'ailleurs, il reflète bien les
désirs et les préoccupations de l'Union Nationale au moment de la
deuxième lecture. Il correspond également à une
préoccupation toute première, soit celle de la
décentralisation. Là, on voit que le ministre qui a
prêché lui-même la décentralisation de plusieurs
services pour ce qui a trait à l'agriculture centralise
présentement à Québec, par une commission qui sera en
même temps juge et partie.
Nous avons dénoncé avec véhémence cet
état de chose au niveau de la deuxième lecture. Je connais bien
le rôle que les municipalités, ayant moi-même vécu
quatre ans à titre de maire, peuvent jouer. Je m'aperçois
qu'après la présentation ou, suite à la
présentation de leur plan respectif de zonage et d'utilisation de leur
territoire respectif, on va en faire des porteurs de documents, parce que tout
ce qu'elles auront à faire sera de soumettre les demandes de leurs
citoyens à la commission qui, elle, sera le seul juge.
Je pense que le rôle de l'élu du peuple n'est plus
respecté du tout. C'est une chose que l'on peut dénoncer avec
beaucoup de force. D'ailleurs, nous avons eu un colloque à
Saint-Hyacinthe et cela a été la préoccupation
première de tous les conseils municipaux.
J'espère bien que le ministre saura réviser sa position
dans ce sens. J'ai fait état d'une possibilité peut-être de
douze commissions, étant donné qu'on a douze régions
agricoles au Québec, sans nécessairement aller vers tous les
conseils de comté, dans chacune des régions agricoles, le maire
ou un représentant du conseil pourra siéger là où
il y a un litige. C'était une première demande, savoir que le
maire de la paroisse où il y a un litige siège automatiquement
à la commission, en plus de membres de l'UPA, c'est-à-dire
l'Union de producteurs agricoles, et peut-être de membres du
ministère de l'Agriculture. Ce sont des suggestions qu'on a faites.
Au moins douze commissions, ce serait plus logique que d'en avoir une.
Parce que 614 plans d'aménagement du territoire, à juger sous la
neige, si ces plans sont présentés en janvier et février,
je pense qu'on ne peut pas les juger avec objectivité sous quatre pieds
de neige. Il va falloir que la commission attende que le sol soit
dégagé pour savoir si c'est un terrain rocheux ou non. Si on
s'ent tient à la lettre et à l'esprit de la loi, c'est la
commission qui jugera si on peut exclure certains lots de l'aire
réservée pour fins agricoles. A ce moment-là, je pense que
c'est impossible qu'une commission puisse juger 614 plans d'aménagement
du territoire.
Le ministre m'a dit une fois: En quinze minutes, on passe à
travers cela, un plan d'aménagement de territoire d'une
municipalité. J'ai trouvé cela ridicule de la part du ministre de
porter un tel jugement, à savoir qu'en quinze minutes, on puisse
disposer d'un plan d'aménagement de territoire d'une
municipalité. Cela se fait à Québec, à part de
cela.
M. Garon: Qui vous a dit cela?
M. Dubois: Vous m'avez dit cela personnellement.
M. Garon: Quand?
M. Dubois: Quand? Au moment de la deuxième lecture, lors
de mon discours.
M. Garon: Où?
M. Dubois: A l'Assemblée nationale.
M. Chevrette: Question de règlement, s'il vous
plaît!
M. Garon: Où était-ce enregistré?
M. Dubois: Ce sont vos propres paroles: En quinze minutes, on
passe à travers cela.
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît! M. le
député de Huntingdon, si vous voulez continuer...
M. Dubois: Oui, c'est d'accord, je reviens.
M. Chevrette: S'il revient à la pertinence, il n'y aura
pas de question de règlement, mais s'il n'y revient pas, je vais en
appeler au règlement.
M. Dubois: En plus des 614 municipalités, l'on aura
à juger peut-être de milliers de cas individuels. A ce moment, je
pense que c'est rêver que de penser qu'une seule commission puisse
décider du sort de toutes les fermes au Québec, surtout dans 614
municipalités. Il y aurait une question que j'aimerais poser à M.
le Président en ce qui a trait, premièrement, à la
reconnaissance d'un producteur agricole. J'aimerais qu'il me donne son
évaluation sur ce que devraient être les critères de
reconnaissance d'un vrai producteur
agricole, parce que dans la loi on va concéder 70% des taxes
scolaires aux producteurs et 70% des taxes municipales également. Donc,
on sait qu'il y a environ 9000 à 10 000 "gentlemen farmers" qui ont
peut-être un revenu de $1000 ou plus, des fois, ce n'est même pas
un revenu, en autant qu'ils ont un reçu en main, ils peuvent se
prévaloir des dispositions de la loi. J'aimerais savoir de M. Moreau ce
qu'il pense, premièrement, de la reconnaissance du statut de producteur
agricole et quelle est son évaluation dans ce sens. J'aurai d'autres
questions qui suivront.
Le Président (M. Boucher): M. Moreau, allez-y!
M. Moreau: Je pense bien que si on veut identifier le statut d'un
producteur agricole, on n'a qu'à référer à la loi
64 qui traite précisément des producteurs agricoles. Cela ne veut
pas dire que c'est la lumière du Saint-Esprit, la loi 64 non plus, parce
qu'il faut s'entendre en ce qui concerne l'article 21. Qu'est-ce que l'article
21 va faire dans l'évaluation, dans la taxation des terres agricoles,
quand on va jouer là-dedans tout à l'heure? On le démontre
particulièrement dans le projet de loi 90 également. Il va
falloir déterminer, à ce niveau parce que le contexte va
être pas mal changé ce que va être un producteur
agricole. Pour moi, c'est très difficile de dire, présentement,
ce que va être un producteur agricole en vertu du projet de loi 90 sur le
zonage des terres parce que, là aussi, on va jouer pas mal, dans
l'article 21, sur les exemptions et sur la taxation des terres agricoles.
M. Dubois: De plus, M. Moreau, sur un autre point de vue qui n'a
pas été abordé, dans votre mémoire, en ce qui a
trait au fait qu'on enlève la libre disposition de biens acquis aux
propriétaires de fermes, premièrement, l'aliénation de nos
biens, c'est à peu près cela, on remet entre les mains de
technocrates, ici à Québec, la disposition de nos fermes. Je
pense que c'est la lettre et l'esprit de la loi.
Moi, dans ma région, j'ai une foule de Néo-Canadiens,
Hongrois, Yougoslaves, Russes, Allemands de l'Est, qui ont pu laisser au bon
moment; ils se posent vraiment des questions sérieuses sur ce projet de
loi, parce qu'ils ont connu ce qu'était une imposition de l'Etat sur des
droits acquis, une entrave à la liberté individuelle ou à
la libre disposition des biens.
J'aimerais connaître votre point de vue dans ce sens.
M. Moreau: Je pense bien que le projet de loi 90, actuellement,
n'a aucune spécification en ce qui concerne la vente des terres à
des Néo-Québécois ou à des Néo-Canadiens, si
vous voulez. Cela n'a rien à voir avec le projet de loi 90.
M. Dubois: Ce n'est pas dans ce sens que je posais ma question;
c'est qu'eux ont connu ce qu'était l'intrusion de l'Etat dans nos vies
respec- tives. Alors, eux, qui vivent au Québec présentement,
voient d'un mauvais oeil l'Etat s'ingérer dans la disposition de biens
acquis. C'est dans ce sens que je posais la question.
M. Moreau: Là, vous me posez une question
complètement en dehors des prérogatives de l'Union des conseils
de comté. Je pense bien que, à ce moment-là, c'est une
question d'appréciation de la part de chacun des citoyens du
Québec.
En ce qui nous concerne, c'est la représentation, à notre
avis, du monde municipal, des gouvernements locaux, par rapport au gouvernement
central, qui, dans le contexte du projet de loi, centralise à
Québec toutes les prérogatives locales, particulièrement
au niveau des municipalités à vocation purement agricole. Je ne
voudrais pas parler de questions qui sont en dehors des juridictions du monde
municipal.
M. Dubois: Je sais qu'il y a plusieurs collègues qui
veulent intervenir et je ne veux pas abuser du temps, alors je vais laisser la
parole à d'autres.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Huntingdon. M. le député de
Champlain.
M. Gagnon: Merci, M. le Président. Très
brièvement; cela me surprend un peu, aujourd'hui, de voir jusqu'à
quel point l'Union des municipalités semble inquiète ou semble
devoir protéger le territoire agricole, parce que cela fait tout de
même longtemps qu'on parle de protection du territoire agricole et je
pense que jusqu'à maintenant, on n'a pas eu de représentations
tellement fortes de la part des municipalités et de la part de l'Union
des municipalités. Pour preuve, à la première page de
votre mémoire, vous mentionnez que la législation relative
à l'urbanisme et à l'aménagement du territoire contient
des dispositions traitant du zonage agricole. Si jamais on adopte quelque
chose, il ne faudrait pas oublier le territoire agricole. (15 h 30)
Cela m'apparaît assez faible et quand on prend l'année
1976, alors que la Commission April, avait siégé en 1968 ou 1969
et que, depuis au moins une dizaine d'années, l'Union des producteurs
agricoles mentionnait jusqu'à quel point c'était urgent de
légiférer dans ce domaine et qui avait été
adopté par la plupart des partis politiques, parce qu'on retrouve cette
promesse dans les programmes électoraux de tous les partis
politiques.
A la deuxième page, vous mentionnez aussi que l'agriculture est
un secteur d'activité humaine, tout comme l'industrie
manufacturière, la construction des routes et d'immeubles, etc. Il
m'apparaît que vous ne ressentez pas le besoin de protéger le
territoire agricole.
Nulle part, en fait, dans votre mémoire, on sent
réellement la volonté de protéger ce territoire agricole
et, lorsqu'on dit que cela devrait être fait au niveau de l'Union des
municipalités, personnel-
lement, je ne voulais que soulever cela pour le mettre en doute
sérieusement, parce que, si les municipalités et si l'Union des
municipalités en avaient senti le besoin depuis longtemps, je pense
qu'on aurait fait les efforts, les pressions voulues pour que cela se fasse,
mais il a fallu attendre, justement, que le gouvernement le fasse pour entendre
dire après: Nous aussi, nous sommes capables de le faire.
M. Moreau: Je voudrais mentionner ceci. M. le
député n'est pas dans la bonne union parce que c'est l'Union des
conseils de comté du Québec...
M. Gagnon: Excusez. Oui. Je me suis trompé.
M. Moreau: ... premièrement. Deuxièmement, il est
présomptueux parce que ce n'est pas le rôle des
municipalités de faire des lois. Les municipalités ont la
responsabilité d'exécuter en vertu des lois et je pense
qu'à ce moment, l'Union des conseils de comté, depuis... Ici, on
cite en 1976 et cela va plus loin que cela en arrière, et je reviens
à ce que je disais ce matin. Précisément, les
municipalités du Québec, en ce qui concerne la protection des
terres, ont eu à se prononcer quand il y a eu un projet de loi devant
elles. Quant au principe de sauvegarder et de protéger les terres
agricoles, je pense bien qu'il n'y a jamais eu de conflit entre le monde
agricole et les municipalités rurales dans ce sens.
Et je dirais précisément qu'à ce moment, je vois
l'UPA qui défend, et avec raison d'ailleurs, la protection des terres,
mais qui a vendu les terres, si ce n'est pas le monde agricole, à un
certain moment. Et la spéculation? Ce ne sont pas les
municipalités. Si on veut voir les plus grands prédateurs et les
plus grands... ceux qui ont gaspillé les terres, c'est
précisément le gouvernement du Québec; si on regarde les
dommages qu'ont fait à l'agriculture l'Hydro-Québec et le
ministère des Transports... Et encore, cela se fait
présentement.
Je peux vous amener à des endroits où vous voyez de
l'industrie, des routes qui sont implantées non seulement dans les
trécarrés des terres, mais de biais dans les terres. On ne tient
même pas compte de la valeur des terres et des terres les plus valables
en agriculture au Québec et je ne vois pas pourquoi, aujourd'hui, on
semble vouloir accuser les conseils de comté et les municipalités
de ne pas avoir sauvegardé les terres quand le gouvernement central ne
l'a pas fait.
Donnez-nous des lois. Vous l'avez fait dans le domaine de
l'évaluation foncière. Les municipalités se sont-elles
opposées pour faire l'évaluation foncière du bien-fonds du
Québec? Pas du tout, mais il faut avoir des législations
conséquentes pour le faire et c'est dans ce sens que le monde municipal,
sans se faire déposséder de ses prérogatives et de ses
droits fondamentaux et démocratiques, est prêt à collaborer
avec le gouvernement dans le sens de trouver un moyen terme entre une loi du
marteau et une loi démocratique qui permette à tout le monde de
se faire entendre.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Montmagny-L'Islet. Ah! Me Massey.
M. Massey: J'ai relevé dans les propos du
député de Champlain ce qui me semble être absolument
l'envers de ce que doit être l'aménagement du territoire. Je pense
bien que si on sort du contexte de l'aménagement du territoire, on devra
faire face à des problèmes de plus grande envergure que ceux
qu'on veut résoudre par le projet de loi 90. Pour illustrer, comme il
semble difficile de comprendre ce qu'est l'aménagement du territoire, je
me servirai d'une comparaison qui m'a déjà d'ailleurs
été fournie par un des bons organisateurs de mon
député de comté, M. Beau-séjour, que j'ai le
plaisir de saluer ici, à la table. Cet organisateur est maire,
d'ailleurs. Il employait l'image de celui qui veut se faire confectionner un
habit. Si je décide de me faire confectionner un habit, je peux me
choisir du tissu. Le projet de loi 90 déjà coupe le tissu avant
d'avoir pris les mesures, alors que l'aménagement du territoire est
d'abord de prendre les mesures de celui qui veut se faire confectionner un
habit avant de tailler le tissu. Autrement, le risque est grand, à moins
que ce soit une très grande personne que l'on vise en premier et que
l'on fasse un habit pour un plus petit. Il y a de forts risques que le tissu
soit gaspillé.
Un territoire est exactement comme un tissu. C'est un tissu national.
J'ai plusieurs fois, dans le passé, dit qu'il fallait procéder
par la protection des sols agricoles. Ce n'est pas aujourd'hui que je vais dire
le contraire. Mais également, il faut se rendre compte que la seule
façon de procéder, c'est par une perspective d'ensemble, une vue
globale de ce qu'est le territoire national que l'on veut aménager et de
procéder ensuite à du découpage.
Le contenu de nos représentations indique que si l'on commence
par du découpage, le risque est très grand, il est même
trop grand que ce découpage soit fatal à un bon couturier pour
faire un habit. C'est ainsi que l'on traite principalement l'aménagement
du territoire.
M. Gagnon: M. le Président, je voudrais ajouter, parce que
c'est encore moi qui ai le droit de parole, que depuis longtemps on a
commencé à couper dans le tissu agricole. Les mesures, on
commence à les connaître avec les programmes qu'on va mettre de
l'avant pour justement employer cet habit au complet.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Merci, M. le Président. M. Moreau, au
début de votre mémoire, vous déclarez ceci: L'agriculture
est un secteur de l'activité humaine tout comme l'industrie
manufacturière, la construction de routes ou d'immeubles et ainsi de
suite.
Vous reconnaissez dès l'abord que l'agriculture constitue un des
éléments à l'intérieur de
l'ensemble de l'économie du Québec. Mais à votre
avis... Vous êtes agriculteur, je pense.
M. Moreau: Oui, monsieur.
M. Giasson: Croyez-vous que le Québec doit continuer
d'instaurer des programmes, des politiques qui fassent qu'on continue de
développer l'agriculture à l'intérieur du grand ensemble
qu'est l'agro-alimentaire?
M. Moreau: M. le Président, je pense bien qu'on peut faire
une petite rétrospective du passé. C'est au cours du mois de
décembre qu'on veut sanctionner une loi sur le zonage des terres. On
tient pour acquis que dans la région de Montréal ou dans les
régions autour de l'urbanisation, il y a 500 000 acres de terre en
spéculation; mais il faut bien distinguer entre l'utilisation des sols
et l'agro-alimentaire.
Nous sommes d'accord qu'il doit y avoir un maximum d'autosuffisance en
agro-alimentaire au Québec, mais ce n'est pas en zonant les terres,
particulièrement, qu'on va régler ce problème.
Actuellement, il y a des terres en friche au Québec. S'il y a des terres
en friche, ce n'est pas parce qu'elles ne sont pas zonées, c'est parce
qu'il n'y a pas de politique agricole. C'est bien différent. C'est parce
que, de tous les temps, le ministère de l'Agriculture et il l'est
encore a été le parent pauvre de tous les
ministères au Québec. Le problème de la désertion
cela n'a rien à voir, M. le Président, avec le zonage des
terres a des conséquences économiques bien contraires
à la question du zonage. L'on peut zoner aujourd'hui, ce qui est
souhaitable, les terres, protéger les terres agricoles, mais si on n'a
pas simultanément une politique viable en agriculture, dans 20 ans, on
aura des terres en friche au Québec. C'est cela qu'on va avoir.
Je pense et nous le disons dans ce mémoire que le
zonage des terres, sous sa forme actuelle, est une action sectorielle, parce
que ça ne comprend pas... L'aménagement du territoire et ce, dans
tout le Québec, devrait prendre place et le zonage des terres devrait
être à l'intérieur d'une politique d'aménagement du
territoire.
Quand on parle d'aménagement, on parle d'économie, on
parle de tout ce qu'il faut mettre en place pour l'ensemble du territoire
québécois. Même aujourd'hui, qu'on zone les terres demain
matin, du côté économique, on n'aura pas
réglé grand-chose puisque, l'intérieur des régions
non zonées, le coût des terrains et le coût de l'habitation
vont doubler et tripler, peut-être quadrupler. On va avoir ce qui s'est
passé en Colombie-Britannique, c'est la même chose.
C'est dans ce sens qu'on dit que c'est sectoriel et qu'on devrait... Ce
que les gens en Colombie-Britannique n'ont pas fait, parce que c'était
une expérience au Canada, on devrait, à la lumière de ce
qui s'est passé en Colombie-Britannique, aménager le territoire
du Québec de façon que l'ensemble de l'économie
québécoise ne soit pas affecté. C'est ça, à
notre avis, qui est prématuré dans le zonage des terres,
c'est-à-dire que ce n'est pas un plan d'ensemble.
Nous avions l'impression, M. le Président, et même la
conviction, que l'aménagement du territoire comporterait, dans son
ensemble, le zonage des terres agricoles. C'est dans ce sens qu'à mon
avis on n'a pas réglé le problème. On va peut-être
conserver des terres, je ne conteste pas ça, mais au point de vue
économique, si l'économie fonctionne bien au Québec,
à tous les paliers, l'agriculture va certainement en
bénéficier. Je le dis parce que je suis moi-même un
agriculteur et un agriculteur actif dans la région de Montréal,
précisément dans une région où les gens qui sont
encore en agriculture ont prétendu que c'était valable de sauver
le patrimoine et d'être des agriculteurs actifs. J'ai une ferme, 130
têtes de bétail, producteur de lait, à 18 minutes de
Montréal. Ce n'est pas à vendre pour autre chose.
M. Giasson: Un peu plus loin, dans votre mémoire, vous
faites allusion à une des dispositions qu'on retrouve dans la loi, celle
des modifications apportées à l'article 21 de la Loi de
l'évaluation foncière. Vous déclarez: "II est certain que
ce projet de loi affectera le champ de taxation de plusieurs
municipalités en apportant des modifications aux valeurs
foncières". Qu'est-ce que vous craignez exactement derrière tout
ça, ce changement à la valeur foncière des fermes?
M. Moreau: Je vais demander à Me Viau de répondre
à cette question.
M. Viau (Pierre): Dans les questions d'évaluation, quand
vous vérifiez l'article 21 attentivement, lors de l'étude article
par article, sans prendre le texte qui est là, je ne suis pas
assuré que les municipalités ne récupéreront pas
sur la bâtisse éventuellement ce qu'elles vont échapper sur
la terre. Cela n'apparaît pas de façon très claire. Mais,
à ma connaissance, quand un texte de loi n'est pas rédigé
de façon claire, il faut s'attendre un jour que ce soit
interprété contre la personne, en faveur de la
municipalité.
Dans le cas de l'article 21, ce qui est arrivé, par le jeu de cet
article tel qu'il est rédigé, replacez-le à
l'intérieur de la Loi de l'évaluation foncière et je suis
convaincu qu'en dedans de deux ans, les municipalités vont pouvoir
récupérer sur la maison ce qu'elles vont échapper sur la
terre, à tout événement. Evidemment, on ne discutera pas
ici des questions d'interprétation judiciaire puisque les tribunaux sont
peut-être un peu plus...
M. Garon: Je pense que je peux répondre à
ça, donner une explication. Au contraire, si on avait fait l'imposition
de la maison, séparée de la ferme, ce que vous dites serait vrai.
Selon les avis qu'on a eus des experts en fiscalité, il fallait que tout
soit évalué dans l'ensemble comme cela se fait actuellement, la
maison, les bâtiments, la ferme et, après ça, un
remboursement de 70%. Il y
a eu une enquête auprès de je ne me souviens pas si
c'est 1500 ou 15 000 fermes très nombreuses fermes, faite par le
ministère des Affaires municipales, qui révèle que la
taxation de la maison représente, par rapport à l'ensemble de la
ferme, 29%. On a fait un chiffre rond, 30%, 70%, de sorte que la maison de
l'agriculteur va être taxée comme la maison d'un autre citoyen
mais, par rapport à une maison de ferme, comme une maison de ferme. Par
ailleurs, à ce moment-là, les bâtiments et le sol vont
être détaxés. (15 h 45)
M. Viau: J'aimerais bien partager l'opinion du ministre, mais on
ne partira pas de querelle de juristes là-dessus. J'attirerais cependant
l'attention de la commission sur l'article 1, paragraphe 1, qui définit
l'agriculture d'une façon un peu particulière, mais, à
tout événement, la définit quand même.
"Agriculture": la culture du sol, y compris le fait de le laisser en friche,
l'élevage des animaux et, à ces fins, la confection, la
construction ou l'utilisation de travaux, ouvrages ou bâtiments, à
l'exception des résidences".
Si on réintroduit la définition d'agriculture et qu'on
combine l'article 21a avec la Loi de l'évaluation foncière et que
le ministre peut donner des opinions juridiques là-dessus, tant mieux
pour lui, parce que j'aimerais mieux qu'on ne débatte pas ces questions
de cette façon, car elles seraient encore moins claires dans votre
propre texte. C'est-à-dire que si on exclut dans la définition la
résidence et qu'on combine l'article 21 avec les dispositions de la Loi
sur l'évaluation foncière, ou bien la municipalité se fait
jouer un tour, ou bien le propriétaire se fait jouer un tour. Etudiez-le
comme il le faut, vous allez voir que c'est cela. D'accord? Un des deux, en
tout cas.
M. Garon: Non.
M. Viau: Un instant! Cela étant acquis, il me semble que
ce n'est pas la façon de légiférer de façon claire
pour savoir si des gens vont être taxés d'une façon ou
d'autre autre. Je pense que la commission aurait peut-être avantage
à voir les travaux que le sous-comité sur la fiscalité,
traitant de l'article 21, a faits. Il y avait des représentants du
ministère de l'Agriculture à ce sous-comité, un rapport a
été soumis au comité de la fiscalité et, à
ce moment-là, ces questions-là ont été
soulevées. Je pense que ce serait de l'intérêt de la
commission de connaître cela. Passé cela, bien...
M. Garon: Me Viau, si vous regardez l'article 106, qui amende la
Loi sur l'évaluation foncière, la définition du paragraphe
1 ne fait pas partie de la Loi sur l'évaluation foncière. Voyons
donc! Tout ce qu'on ajoute, c'est l'article 21a à l'article 21. Dans la
Loi de l'évaluation foncière, vous n'avez pas la
définition d'agriculture que vous retrouvez dans la loi 90. Voyons
donc!
M. Viau: M. le ministre, vous vous adressez à moi comme
avocat. Je vais vous répondre comme avocat. Je comprends tout cela.
M. Garon: Cela m'apparaît évident.
M. Viau: Je comprends que c'est d'autant plus mal situé
que d'amender une loi d'évaluation par une loi de zonage agricole, mais
cela n'est pas mon problème, c'est le vôtre. Mais c'est le fait
actuel. Ce que je vous dis actuellement, c'est de vérifier les travaux
qui ont été faits au sous-comité de la commission traitant
de la fiscalité que M. Parizeau, et M. Tardif ont formée.
Peut-être même que là, les gens de votre ministère
vous instruiraient sur les conséquences des amendements à
l'article 21a que vous retrouvez dans votre propre loi.
M. Garon: Je pourrais vous dire, Me Viau, pour votre information,
que les gens du ministère du Revenu étaient membres du
comité qui a rédigé cet article.
M. Viau: Eh bien! Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise?
M. Garon: Et M. Parizeau y était aussi, de même que
ses fonctionnaires.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: M. Moreau, dans les suggestions et les modifications
que vous proposez, dès le départ, vous indiquez que la commission
parlementaire, à la fin des présents travaux, devrait s'ajourner
et qu'on mette fin à la poursuite de l'étude de la loi 90, selon
les étapes prévues par les règlements de
l'assemblée.
Est-ce que vous avez évalué les conséquences que
cela pourrait poser sur l'ensemble du territoire compris à
l'intérieur de la zone verte, s'il y avait un arrêt, pour une
période de temps, pour reformuler une nouvelle Loi sur la protection du
territoire agricole, qui serait présentée avec des modifications
fort importantes, si on s'en rapporte aux commentaires ou aux suggestions qui
suivent?
Vous savez qu'il y a un gel à peu près sur toute
opération, transaction ou activité. Il y aurait des
conséquences derrière votre recommandation. Est-ce que vous avez
évalué les conséquences qu'il y aurait?
M. Moreau: M. le Président, je pense bien que nous n'avons
pas d'objection qu'il y ait un gel, puisqu'on nous dit que c'est tellement
urgent de sauver l'agro-alimentaire et tout cela. On n'a pas d'objection au
gel. Mais je pense que si on procédait avec un comité conjoint,
avec les organismes qui devraient faire partie du comité conjoint, cela
irait même plus vite que les dispositions actuelles de la loi 90 avec les
180 jours de délai, si on tient pour acquis que chacune des
municipalités va avoir à passer à tour de rôle.
Je ne pense pas qu'il y aurait retard au calendrier. D'ailleurs, M. le
Président, cela n'a jamais été, à mon sens, quelque
chose de vicieux et de mauvais que de consulter les gens qui sont
impliqués. On nous dit, d'une part, que l'UPA est
impliquée dans l'agriculture. Je suis absolument d'accord sur cette
question, mais les municipalités sont également
impliquées, particulièrement les municipalités rurales.
Cela a des retombées sur les municipalités rurales et sur
l'ensemble du monde rural au Québec et cela a aussi des retombées
sur le monde urbain.
Je pense que prendre le temps voulu cela n'implique pas des
délibérations qui vont avoir une durée de six mois
avec les personnes responsables voulues pour arriver avec une loi comestible,
je ne vois pas comment cela causerait préjudice à la population
du Québec. Bien au contraire, je pense que ce serait salutaire pour la
population du Québec, pour l'ensemble des Québécois.
Le Président (M. Boucher): Me Viau. Me
Massey.
M. Massey: Si vous permettez, M. le Président, je voudrais
seulement ajouter un élément d information ou de réponse
à la question qui a été formulée par le
député de Nicolet-Yamaska. Je pense que la terre est aussi
gelée...
M. Giasson: De Montmagny.
M. Massey: De Montmagny, je m'excuse. Je vous ai donné un
autre comté.
M. Giasson: ...
M. Massey: La terre est aussi gelée le 23 décembre
que le 23 février au Québec.
M. Giasson: Non, ce serait plus facile dans Lévis.
M. Massey: Cela continue dans le sens des mesures dont je parlais
tantôt.
M. Garon: C'est 6000 de majorité.
M. Massey: Ce que je voulais apporter comme précision,
c'est que le délai qui est suggéré n'est pas un
délai qui dépasserait vraisemblablement soixante jours. La terre
serait aussi gelée le 23 février qu'elle l'est le 23
décembre. Entre les deux, tout le monde aurait le temps, par un
comité que nous suggérons, de dégeler non seulement la
terre, mais de dégeler le climat et de dégeler la loi pour lui
permettre d'être potable à tout le monde, à tous les
citoyens du Québec et permettre aux municipalités de ne pas se
sentir frustrées dans un contexte global de décentralisation des
entreprises, mais de donner suite aux politiques générales du
gouvernement.
M. Garon: Dégeler les terres en février, cela va
coûter cher de chauffage.
M. Massey: Je suis supris d'apprendre que votre terre est
chauffée, M. le ministre.
M. Giasson: Je suis bien d'accord sur l'opinion que vous venez
d'émettre, mais, tout de même, nous avons vécu
récemment une expérience dans les municipalités du
Québec. La nouvelle Loi de l'évaluation foncière a
donné la possibilité aux municipalités de procéder,
du moins dans ma région. Je ne peux pas porter de jugement sur
l'ensemble du Québec. Dans ma région, l'application et tout le
travail à être exécuté dans la mise en application
d'une nouvelle évaluation foncière, cela a été
extrêmement long, même si c'était décentralisé
au niveau d'un conseil de comté. Cela faisait un an qu'on avait une
équipe d'évaluateurs en place et on ne savait pas encore
où on allait.
M. Moreau: M. le Président, je pense que c'est une
question absolument pertinente. Ce n'est pas le monde municipal qui a
retardé dans ce domaine de l'évaluation foncière. Vous
savez que le gouvernement nous avait dit: Dans l'évaluation
foncière, vous allez fonctionner avec des normes et les normes,
c'était un manuel d'évaluation. Nous avons attendu deux ans si ce
n'est pas trois ans pour la mise à jour d'un manuel d'évaluation.
Aussitôt que le manuel d'évaluation a été sorti, les
municipalités ont commencé à fonctionner. Je ne vois pas,
le jour où le monde municipal, où les conseils de comté
ont des lois auxquelles ils doivent se conformer, ce qui retarderait plus un
conseil de comté ou une municipalité de fonctionner qu'un
gouvernement ou qu'une régie, avec les délais requis. A ce
moment-là, quand on parle d'évaluation, c'était par
ordonnance que cela se faisait, la mise en marche de l'évaluation.
L'ordonnance, ce ne sont pas les conseils de comté, ni le comté,
ni la municipalité qui l'émettait. Cela est sorti le 15 avril
1977. Il ne faudrait pas blâmer la municipalité pour d'autres
inerties.
Sans vouloir jeter le blâme sur qui que ce soit. Le monde
municipal, après quoi attend-il? Après des lois, après des
réglementations qui viennent d'en haut, puisqu'on est
précisément les créatures de l'Etat. C'est dans ce sens
qu'on veut fonctionner. L'ordonnance est arrivée le 15 avril 1977. Les
municipalités ne pouvaient pas, avant le 15 avril 1977, commencer
à fonctionner. Dieu sait combien cela a coûté aux
municipalités de tripoter avec des vieux rôles.
M. Giasson: Oui, mais effectivement, M. Moreau, il y a des
municipalités qui ont commencé à revoir
l'évaluation foncière, même si elles n'ont pas
touché aux bâtiments, elles ont commencé à faire
l'évaluation du sol ou du terrain. Dans une autre étape, elles
sont venues, elles ont poursuivi leur évaluation des
propriétés, des immeubles qu'il y avait sur ce terrain.
L'évaluation du bien-fonds a commencé plus tôt, vous dites
le 15 avril 1977?
M. Moreau: C'est cela, le 15 avril 1977.
M. Giasson: Certaines municipalités ont commencé
avant cette date.
M. Moreau: II n'y a pas de délai là-dessus.
M. Giasson: J'ai remarqué également que vous avez
des doutes et des inquiétudes très grandes relativement à
l'article 96. Le ministre nous a indiqué un cas ou des cas possibles qui
pourraient se prévaloir des pouvoirs énormes que le gouvernement
se garde par l'article 96. Comme vous, je trouve que c'est excessif, comme
pouvoirs que l'Etat se donne. Je crois que c'est à l'article 66 que
l'Etat se réserve déjà certains pouvoirs vis-à-vis
des ministères ou des organismes gouvernementaux. Il pourrait
très bien, et je veux avoir votre avis là-dessus... Est-ce que
l'Etat pourrait se garder la marge de manoeuvre qui lui est nécessaire,
selon les explications fournies par le ministre, en modifiant quelque peu
l'article 66, et en ajoutant: "Suite au ministère et organismes".
M. Moreau: II faudrait que l'article 96 soit biffé et
l'article 66, à mon sens, avec un peu d'élaboration, pourrait
facilement être mis en place et être accepté comme tel.
M. Giasson: D'autant plus que l'article 80 également
laisse énormément de place et de pouvoirs au gouvernement par la
réglementation qui va être mise en vigueur à l'application
de la loi.
Je remarque que vous auriez aimé également que l'article
27 s'étende à tout ce qui est boisé, non seulement se
limiter aux érablières dont il est fait mention dans l'article
27. Que recherchez-vous par l'obligation pour chaque propriétaire de
boisé de détenir un permis avant de procéder à des
exploitations ou à des opérations forestières?
M. Moreau: Je laisserais à Me Massey le soin de
répondre à cette question.
M. Massey: M. le Président, cette recommandation s'inscrit
dans le sens de ce que nous avons dit précédemment,
c'est-à-dire que le zonage agricole devrait et doit, dans tous les cas,
s'inscrire dans une politique d'aménagement du territoire.
Il est assez farfelu de constater que le projet de loi ne vise que les
érablières, avec l'obligation de détenir un permis
à peu près pour tout, sauf pour quelques éclaircies. On ne
mentionne pas qu'il faut détenir un permis pour entailler au printemps,
et c'est bien juste. Il n'y a rien là comme mesure de protection du sol
agricole. Tout le monde sait que nos forêts, le petit peu qui en reste
dans le territoire visé d'abord par la cartographie qui a
été produite et enregistrée au bureau d'enregistrement,
recouvrant un sol classé, la plupart du temps, A-1 comme le territoire
agricole qui est cultivé dans les environs. Ce n'est pas une raison pour
ne pas protéger les terres sur lesquelles il y a des boisés
privés. Ce n'est d'ailleurs pas une raison pour ne pas protéger
les montagnes qui sont les Montérégiennes qui se trouvent dans
cette région, qui ne sont pas nécessairement du sol A-1, mais qui
sont quand même une valeur sûre au niveau de l'environnement, de
l'écologie, de la protection du patrimoine rural
québécois, ce qui appartient à tout le monde. Il nous
semble que c'est excessivement restrictif que de ne viser que certains
boisés et d'en exclure d'autres. C'est pourquoi nous faisions la
recommandation d'inclure tous les boisés.
M. Moreau: Vous savez, dans un contexte d'environnement, à
mon sens, la loi ne va pas assez loin dans le domaine du zonage agricole, quand
on vise certaines régions agricoles. Je pense que si l'ensemble du
Québec si on tient pour acquis que la société
québécoise est un ensemble, cela couvre l'ensemble du territoire
québécois à ce stade-ci, l'aménagement du
territoire devrait être mis de l'avant et l'aménagement du
territoire de tout le territoire québécois. (16 heures)
Si, à un moment donné on zone une certaine région
pour des vocations purement agricoles et qu'on ne prend pas en charge d'autres
périmètres qui ne sont pas agricoles, on va connaître
là des phénomènes d'anarchie assez difficiles à
résoudre. Je pense que cela va avoir une incidence sur d'autres parties
du territoire qui ne sont pas zonées et qui ne sont pas
aménagées.
Je pense bien qu'une loi d'aménagement du territoire devrait,
à mon sens, couvrir l'ensemble du Québec.
M. Giasson: C'est dans ce sens, sans doute, M. Moreau, que, si
votre première recommandation était entendue et
écoutée par le gouvernement, surtout dans l'hypothèse du
dépôt prochain de la loi sur l'aménagement et l'urbanisme,
l'opération pourrait être menée de front, conjointement et
solidairement, par tous les secteurs de territoire du Québec, quelle
qu'en soit la vocation, qui doivent être protégés par un
programme d'aménagement intégré.
M. Moreau: D'ailleurs, M. le Président, c'est ce que nous
croyons et ce, non seulement depuis la conférence
Québec-municipalités du printemps dernier, mais c'est même
inscrit au programme du Parti québécois que l'aménagement
du territoire, la décentralisation, la consultation étaient pour
être inclus dans les nouvelles politiques du gouvernement. C'est dans ce
sens... Le zonage des terres exclu de l'aménagement du territoire, on a
commencé à en prendre connaissance seulement à la fin
d'août; avant cela, c'était l'aménagement du territoire. Je
pense bien qu'à ce moment les municipalités ne se sont pas
inscrites en faux contre l'aménagement du territoire, d'ailleurs il y a
un comité conjoint sur l'aménagement du territoire qui a
été formé, qui a siégé avec le ministre
délégué à l'environnement. Il y a même une
assemblée prévue pour ce soir. Je pense que l'aménagement
inclut le zonage des terres et cela devrait, à mon avis, être
partie de l'ensemble dans tout le Québec.
M. Giasson: Merci, M. le Président, ce sera tout.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Montmagny-L'Islet. M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Le maire de
Verchères ne sera pas surpris que son député
intervienne!
Je voudrais vous placer devant la situation où nous avons
été placés. Vous avez un gouvernement qui veut intervenir
énergiquement et rapidement sur la protection du territoire agricole,
d'une part, qui trouve que cela est urgent et on pourrait discuter
longtemps sur votre affirmation de la page 1 mais, indépendamment
de cela, qui a une perception assez particulière de la situation, qui
considère, lui, que c'est urgent, d'autant plus que c'est
réclamé depuis nombre d'années.
Là, d'une part, on fait une tournée à travers le
Québec et vous avez des milieux agricoles et je pense, entre
autres, à l'UPA de Saint-Hyacinthe, parce que j'ai eu l'occasion
d'assister à cette partie de la tournée régionale
où vous avez des représentants de producteurs agricoles qui
viennent prier le gouvernement, prier le ministre de ne pas confier une
éventuelle protection du territoire agricole au monde municipal. Cela a
été l'une des principales revendications des producteurs
agricoles, on se méfie du monde municipal.
Vous avez, par ailleurs, de l'autre côté, à l'autre
pôle, le monde municipal, en particulier l'Union des conseils de
comté qui réclame un rôle majeur dans l'intervention et
dans l'administration éventuelle de cette loi et un rôle clef dans
la protection des territoires agricoles.
Tenant compte également du fait que les structures des conseils
de comté ne sont pas également efficaces à travers le
Québec, tenant compte que nous avons une loi vous avez à
bon compte, je pense, mentionné qu'il y a tout un travail de
consultation et de préparation qui se fait sur l'aménagement du
territoire qui n'est pas encore mise en place, que la réforme qui
est proposée, en termes de décentralisation, n'est pas encore
arrivée, qu'il va falloir un certain temps, même si la loi est
déposée, avant que celle-ci soit mise en application, qu'on
s'entende sur ses structures éventuelles et qu'on les fasse fonctionner.
Ne trouvez-vous pas normal qu'en attendant tout au moins que ces structures
existent, qu'elles aient établi leur crédibilité, puisque
certaines municipalités ont pu l'établir vis-à-vis du
milieu agricole, par exemple, n'est-il pas préférable de
procéder finalement de la façon dont on procède,
c'est-à-dire de réserver au monde municipal, mais localement
d'abord, un rôle important et de confier finalement à une
commission le soin, en dernier recours, de prendre des décisions?
M. Moreau: Je remercie le député de
Verchères pour son assiduité, pour son courage à vouloir
sauver la démocratie locale et les gouvernement locaux. Il faudrait,
tout de même, faire une preuve des prières qui ont
été adressées au gouvernement dans le sens de ne pas faire
confiance aux municipalités
Je connais des maires qui sont agriculteurs, je suis agriculteur
moi-même et je connais aussi des membres de conseils municipaux, de
conseils de comté, qui sont des agriculteurs et je n'ai pas entendu ces
prières. Peut-être ne suis-je pas la bonne personne pour recevoir
les prières.
M. Charbonneau: Probablement.
M. Moreau: Mais il reste ceci. C'est une loi. Ce sont des
prérogatives qui ont été vantées non pas par les
municipalités, mais précisément par le ministre d'Etat
à l'aménagement du territoire, qui nous a dit jusqu'à
très récemment que l'aménagement du territoire, cela
faisait partie, cela incluait le zonage des terres agricoles, que les
décisions, et cela est mentionné dans le mémoire on
peut même citer le numéro des paragraphes où cela a
été dit par M. Léonard lors de la Conférence
Québec municipalités, que les décisions ne devaient pas se
prendre dans le sens de l'aménagement du territoire et de la
régionalisation à Québec. Alors, on est parti de cette
conclusion qui nous venait d'en haut d'ailleurs.
M. Charbonneau: II y a une chose...
M. Moreau: Puis-je terminer ce que j'ai à dire? M.
Charbonneau: Oui. Allez-y donc.
M. Moreau: A ce moment, les municipalités n'ont pas la
prétention de posséder en elles-mêmes la science infuse,
mais il reste tout de même que si on veut tenir pour acquis que les
gouvernement locaux ont d'autres rôles à jouer que des rôles
symboliques de coupeurs de rubans, je pense bien qu'il faut leur donner par une
loi qui sera surveillée d'en haut, évidemment d'ailleurs,
cela se fait ailleurs dans d'autres domaines par le gouvernement, pour
voir à ce que les prérogatives, à ce que les lois soient
exécutées et on ne demande pas plus que cela. On ne demande pas
de contrôler seuls et sans appel, comme le fait la commission, la
décision de la protection des terres agricoles. On demande qu'avant que
cela aboutisse devant la commission, que le monde local, les élus
locaux, soit les plus près du peuple, puissent harmoniser une politique
de protection des sols. S'il n'y a pas entente à ce moment, c'est la
commission qui décide. Cela n'a rien d'antidémocratique.
M. Charbonneau: Si on est d'accord avec vous, et je pense qu'il
n'y a pas lieu qu'on soit nécessairement en désaccord,
êtes-vous conscient que les structures municipales qu'on veut
réformer ne sont pas encore réformées? Pouvez-vous nous
dire, actuellement, que l'ensemble des conseils de comté dans tout le
Québec pourraient, du jour au lendemain, assumer ces
responsabilités tel qu'ils font actuellement? Est-ce que, dans
l'ensemble, les conseils de comté sont aussi efficaces que le conseil de
comté de Verchères?
M. Moreau: Cela fait dix ans que le monde municipal demande une
législation qui nous per-
mette d'administrer démocratiquement, avec des pouvoirs qui
viennent d'en haut, les municipalités locales et les régions au
Québec. Si vous prétendez, si le gouvernement prétend que,
par sa science, par son immunité, par sa connaissance absolue du
territoire, il va pouvoir se substituer au gouvernement local dans les
décisions touchant la protection des terres agricoles, allez-y,
faites-le et le gouvernement portera l'odieux des décisions qu'il va
prendre. Il y a des gens qui vont se réveiller dans six mois, un an et
qui vont comprendre que cette loi ne tolère absolument pas, à
côté d'elle, d'autres instances.
On fait actuellement des municipalités des agents de l'Etat. On
l'a fait dans d'autres domaines dans le passé. Est-ce qu'on va
répéter la même procédure avec les
municipalités? En réalité, c'est le gouvernement qui va
décider; on ne peut pas s'inscrire en faux contre cela, mais on portera
l'odieux de tout cela. La population du Québec paiera. A mon sens, M. le
Président, quand on ne fait pas la distinction entre l'agro-alimentaire
qui, sans conteste, est la responsabilité du ministère de
l'Agriculture et du ministère de l'Industrie et du Commerce et tout
cela... On ne conteste pas cela du tout. Quand le gouvernement dit: Nous
voulons avoir le pourcentage maximum d'autosuffisance, je ne vois pas que des
gens puissent s'inscrire en faux contre cela. Mais je pense que c'est
déplacer le contexte quand il s'agit du zonage des terres, quand il
s'agit de la protection des terres agricoles, quand on tient pour acquis que,
présentement, il y a des terres qui sont en friche et on prévoit
également dans la loi qu'il va y en avoir d'aures en friche. On n'oblige
personne à cultiver les terres. On ne fait que les protéger. Cela
va venir, mais ce n'est pas là. C'est dans ce sens que
l'agro-alimentaire, je suis d'accord sur cela. Si vous me permettez une
boutade, M. le Président, je pense bien que, M. le ministre et
moi-même, on est une preuve vivante que l'agro-alimentaire, on pourrait
retarder cela de deux ou trois mois et on n'en souffrirait pas.
M. Garon: Vous savez, M. Moreau, c'est parce que nous sommes un
gouvernement social-démocrate. On veut partager cela avec tout le
monde.
M. Charbonneau: M. Moreau, tout en constatant que, finalement, la
chose sur laquelle on ne s'entend pas, c'est que nous pensons
qu'éventuellement, lorsqu'il y aura une loi d'aménagement, de
nouvelles structures seront mises en place, il y aurait peut-être lieu,
à ce moment-là, de voir à ce que ces nouvelles structures
assument certaines des responsabilités qui sont actuellement
confiées par la législation; mais le délai peut
malgré tout être suffisamment long si on considère
l'urgence. C'est là peut-être qu'on diffère et c'est
peut-être là où prend tout son sens votre note du
début. On considère que l'urgence de la situation, le fait que
c'est réclamé et attendu depuis des années par d'autres
milieux... Je pense qu'il y avait lieu, à notre avis en tout cas, de
procéder de cette façon-là.
Mais je voudrais vous poser une autre question concernant l'appel. Vous
demandez qu'il y ait un droit d'appel devant la Commission municipale. Est-ce
que vous ne trouveriez pas plus indiqué qu'éventuellement, on
puisse envisager un appel, mais qui serait à l'intérieur de la
commission de protection? Par exemple, il pourrait y avoir une division d'appel
qui ferait en sorte qu'on serait assuré d'avoir des décisions qui
seraient prises par des gens spécialisés. Le problème,
c'est que, finalement, si vous ne mettez pas de droit d'appel ou si vous
réservez un droit d'appel général à la Cour
supérieure, est-ce que ces gens-là sont bien
préparés à juger sur le fond? Ils peuvent juger sur le
droit et ce sont d'ailleurs leurs prérogatives actuellement, mais est-ce
que, finalement, on ne tomberait pas dans le problème qui nous a fait
créer à différents endroits des tribunaux
spécialisés parce que la Cour supérieure n'est pas un
tribunal spécialisé pour juger de ces questions? Est-ce qu'il n'y
aurait pas une autre formule que la Commission municipale qui pourrait
être envisagée pour éventuellement prévoir un droit
d'appel? Par exemple, il existe la Commission des transports et il y a le
Tribunal des transports, mais c'est finalement un tribunal d'appel
spécialisé qui, lorsqu'il se penche sur une question,
connaît la situation. Il peut éventuellement se prononcer sur le
fond et non pas uniquement sur le droit.
M. Moreau: M. le Président, je demanderais à Me
Massey de répondre en ce qui concerne le droit d'appel. En ce qui
concerne la première question du député de
Verchères, je voudrais bien mentionner qu'on parle depuis dix ans ou
qu'on réclamait depuis dix ans le zonage des terres. Je pense bien que,
si on le réclame depuis dix ans et qu'on en est seulement au stade d'une
loi qui semble vouloir être adoptée à la vapeur à la
veille de la fermeture de l'Assemblée, je pense bien qu'un autre deux
mois ne causerait pas tellement de préjudice aux Québécois
et que cela permettrait de confirmer, M. le Président, la philosophie du
Parti québécois, celle d'être ouvert à la
consultation, à la participation et aussi à la démocratie.
(16 h 15)
A mon sens, c'est purement et simplement d'accaparer les pouvoirs du
monde municipal. Je voudrais insister, sans préjudice, M. le
Président, je reviens au passé, sur ce qui est arrivé. On
dit: Après, on va remettre des pouvoirs dans la loi d'aménagement
du territoire. Les combats d'arrière-garde, M. le Président, je
n'ai jamais eu confiance en eux. Je regarde ce qui est arrivé, on va le
dire bien clairement, parce qu'il faut tout de même appeler les choses
par leur nom, aux commissions scolaires au Québec. A un moment
donné, elles avaient des pouvoirs. Je me souviens que lors d'un
congrès de la Fédération des commissions scolaires, le
ministre a dit: L'an prochain, vous allez être pas mal moins nombreux que
cette année, parce qu'il va y avoir moins de monde dans votre
équipe. Tout le monde a applaudi.
Aujourd'hui, les commissions scolaires cherchent encore à obtenir
des pouvoirs qu'elles ont
perdus. Vous savez, une fois qu'on a perdu quelque chose, je ne vois pas
tellement ce serait un précédent dans l'histoire
occidentale un gouvernement redonner les pouvoirs après les avoir
pris. C'est précisément la peur de l'Union des conseils de
comté des municipalités rurales.
Je dis ça, non pas dans le sens de vouloir protéger le
monde municipal, parce que je suis un représentant municipal, mais de
vouloir protéger les citoyens, particulièrement au niveau rural,
où !e levier de force du monde municipal au niveau rural, c'est
précisément la collectivité. Les municipalités sont
peut-être aussi, pour le gouvernement, si on veut les
déposséder de leurs pouvoirs, le bastion de la
stabilité.
Alors, je vois très mal que par une loi comme celle-là, on
enlève tout pouvoir, particulièrement aux municipalités
à vocation purement agricole; elles n'ont même plus leur raison
d'être.
Le Président (M. Boucher): Un instant, s'il vous
plaît! Je ne pense pas que, comme président, j'aie des dons
visuels spéciaux, mais vous voyez passer l'heure aussi bien que moi. Or,
je vous demanderais d'être assez brefs, de collaborer avec la
présidence pour qu'on puisse entendre les autres organismes
invités aujourd'hui, qui attendent dans la salle depuis ce matin.
M. Charbonneau: M. le Président, je comprends qu'il y a
d'autres organismes, mais j'ai posé une question, je pense que sur le
droit d'appel, ce serait peut-être intéressant d'avoir...
M. Massey: Nous sommes en commission parlementaire et je pense
que les questions soulevées mériteraient réponse. Je
prends bonne note que, sous le couvert de son immunité parlementaire, le
député de Verchères traite d'assez haut la Cour
supérieure en la qualifiant d'incompétente.
M. Charbonneau: Me Massey, je pense que vous abusez un peu.
M. Massey: Je voudrais dire, quand même, qu'on me laisse
répondre, puisque la question a été posée.
Le Président (M. Boucher): Un instant, s'il vous
plaît!
M. Chevrette: Un instant. Question de règlement. M.
Massey, sous le couvert du témoignage non plus, vous ne pouvez pas faire
de procès d'intention à un député.
Je vous demanderais, M. le Président, de rappeler le
témoin à l'ordre et qu'il s'en tienne à répondre
aux questions.
Le Président (M. Boucher): Alors, Me Massey.
M. Massey: J'espère, M. le Président, que je
n'aurai pas besoin de demander la retranscription de la question posée
par le député de Verchères, parce que je cite ses
paroles.
M. Charbonneau: M. le Président...
M. Massey: De toute façon, je voulais ajouter...
M. Charbonneau: Me Massey, il y a une chose que je ne voudrais
pas laisser passer.
M. Massey: De toute façon, M. le Président...
M. Charbonneau: Me Massey, un instant, vous êtes à
l'Assemblée nationale.
M. Massey: M. le Président, c'est moi qui ai la
parole.
M. Charbonneau: Me Massey...
M. Massey: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît!
M. Massey: M. le Président... M. Charbonneau: Me
Massey...
M. Massey: ... est-ce que vous pourriez rappeler le
député à l'ordre?
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Verchères, est-ce que vous
voulez soulever une question de règlement?
M. Charbonneau: M. le Président, je pense que mon
collègue de Joliette-Montcalm l'a bien indiqué, je voudrais y
revenir, parce que je pense que le témoin n'a pas compris. On ne doit
pas prêter d'intention aux députés et aux membres de
l'Assemblée nationale. Ici, vous avez des élus du peuple devant
vous, on ne se prend pas pour d'autres, mais je pense que c'est un rôle
qu'on doit assumer. Je n'ai pas l'impression que pour les gens dans la salle,
mes paroles avaient pour but et disaient explicitement que la Cour
supérieure était une cour de peu d'importance. J'ai simplement
dit que ce n'était pas une cour spécialisée. Je pense que
n'importe qui, qui connaît la Cour supérieure, est capable de
l'admettre.
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Massey: Je ne continuerai pas le débat, M. le
Président.
M. Picotte: M. le Président, sur l'appel au
règlement, j'aimerais bien qu'on cesse ce débat. J'aimerais dire
aux membres de la commission que ce n'est pas une façon de
procéder, par des questions de règlement, pour intimider ceux qui
viennent à la barre. Qu'on s'en tienne uniquement aux
réponses.
Le Président (M. Boucher): A l'ordre!
M. Chevrette: Question de règlement. Je m'excuse, je ne
laisserai pas passer cela non plus.
Ce n'est pas une question d'intimidation, je m'excuse. C'est une
question de comportement. Ce ne sont pas les témoins qui fixent les
règles du jeu, M. le Président, c'est l'Assemblée
nationale comme telle qui pose des questions. Si les témoins ne sont pas
satisfaits, ils ont toujours le loisir de s'adresser à vous pour dire
qu'ils sont lésés. Mais ce n'est pas à eux à
rappeler à l'ordre les députés et à faire des
procès d'intention.
Le Président (M. Boucher): Ceci étant dit...
M. Giasson: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Pour être honnête, je ne crois pas que le
témoin qui est devant nous ait rappelé à l'ordre quelqu'un
de nous. Il a tout simplement relevé des propos. Cela s'est
limité à cela. Prenons les choses dans leur contexte
véritable.
Le Président (M. Boucher): Ceci étant dit, Me
Massey, si vous voulez continuer.
M. Massey: Merci, M. le Président. Je prends quand
même note de la précision apportée par le
député de Verchères.
Je voulais ajouter dans ma réponse que, dans tous les cas, la
Cour supérieure avait quand même plus de
désintéressement que la Commission de protection du territoire
n'en aura jamais puisque, en lui donnant le pouvoir de décision, il est
assez mal venu de lui donner également le pouvoir d'en appeler de ses
propres décisions, ce qui me semble l'inverse de toute procédure
parlementaire et juridique au Canada, en Amérique du Nord et dans tout
l'Occident.
M. Garon: II ne s'agit pas d'avoir un tribunal
désintéressé, M. Massey. Il s'agit d'avoir un tribunal en
faveur de la protection des terres.
M. Massey: M. le ministre, c'est épouvantable, ce que vous
dites là!
M. Garon: En faveur.
M. Massey: C'est épouvantable! Vous venez de mentionner,
M. le ministre, que le tribunal doit être intéressé dans la
décision qu'il va rendre.
M. Garon: Je dis que vous avez une loi qui est en faveur de la
protection des terres. Ce n'est pas une loi neutre.
M. Massey: Comment pensez-vous qu'on puisse se présenter
en appel devant une commission qui décide par intérêt?
C'est ce que vous venez de dire.
M. Garon: Ce n'est pas pareil.
M. Massey: Bien oui.
M. Garon: Voyons! C'est une loi pour la protection des
terres.
M. Massey: M. le ministre, je suis obligé de
prendre...
M. Garon: Ce n'est pas une loi neutre.
M. Massey: M. le ministre, je suis obligé de prendre les
textes tels qu'ils sont...
Le Président (M. Boucher): S'il vous plait! M. Garon:
Voyons.
M. Massey: M. le Président, j'apprécierais pouvoir
continuer sur ce sujet. Il me semble tout à fait hors de propos qu'un
tribunal qui a à entendre des appels sur des décisions soit le
même organisme que celui qui prend des décisions dont on
appellera. Je comprends mal que quiconque, avocat ou pas, puisse penser en ce
sens-là. Je suis obligé, à l'état actuel du projet
de loi 90, de prendre les textes tels qu'ils sont. Et les textes tels qu'ils
sont donnent un pouvoir décisionnel. Je me répète, bien
sûr, mais il me semble que personne ne l'a compris encore.
La Commission de protection du territoire agricole a des pouvoirs
décisionnels exclusifs, sans droit d'appel. Et ceci est écrit en
noir sur blanc dans le projet de loi.
M. Charbonneau: M. le Président, je terminerai non pas
avec une question, mais avec une remarque. J'ai l'impression que Me Massey
avait mal compris la question. Ce que je demandais à l'Union des
conseils de comté, c'était son opinion sur une éventuelle
division d'appel au sein de la commission, division d'appel qui, bien
sûr, n'aurait pas à statuer en première instance.
Lui a présumé que ce que je voulais dire, c'est que ce
seraient les mêmes personnes qui jugeraient à la fois à la
première instance et à la deuxième. Ce n'était pas
cela du tout.
M. Massey: M. le Président, je pense que le
député de Verchères a mal compris en pensant que je
n'avais pas compris. J'ai très bien compris et il vient tout simplement
de répéter ce que j'ai commenté
précédemment. C'est comme si on demandait à
l'épouse de juger, en appel, de la décision qu'elle vient de
prendre parce que son mari vient de lui dire que ce n'est pas correct. Elle va
dire encore la même chose.
M. Charbonneau: ... les mêmes personnes, mon cher monsieur,
je ne sais pas comment vous pouvez dire cela.
Le Président (M. Boucher): A l'ordre! M. le
député de Verchères, vous avez terminé? M. le
député de Shefford.
M. Verreault: Merci, M. le Président. J'ai quelques points
à soulever et j'aimerais que ces points-là soient adressés
à Me Massey et à l'organisme qu'il représente. Je dois
quand même admettre que le mémoire qui a été
présenté est un mémoire très intelligent. Je pense
que c'est un excellent mémoire. Il reflète très exactement
les idées émises et les revendications du conseil de comté
que j'ai dans ma région.
D'autre part, il est quand même très malheureux que, ce
matin, le ministre ait répondu à Me Massey en disant: Ecoutez,
votre mémoire, vos recommandations, on n'en tiendra même pas
compte.
M. Garon: Un instant. Je regrette, M. le Président, je
n'ai pas dit cela. A une question précise, j'ai répondu que je ne
partageais pas cet avis. Et je respecte l'opinion des gens des conseils de
comté. En aucun moment ai-je dit que je ne tiendrais pas compte du
mémoire, au contraire. Il y a des consultations.
M. Verreault: M. le Président, lorsque Me Massey lui a
posé la question à savoir s'il prendrait en considération
les recommandations faites au mémoire, il a répondu que non.
M. Garon: C'est faux.
M. Verreault: De toute façon, cela ne tranchera pas la
question.
M. Garon: II y a eu un point sur lequel j'ai dit que je ne
partageais pas cette opinion.
M. Chevrette: Sur un point. Il ne comprend rien.
Le Président (M. Boucher): A l'ordre!
M. Verreault: Comme je le mentionnais tout à l'heure, Me
Massey, dans plusieurs articles du projet de loi 90 l'organisme que vous
représentez touche environ 400 municipalités, presque les deux
tiers des municipalités qui sont concernées par le zonage
agricole on retrouve une réglementation qui n'est pas connue
jusqu'à maintenant et qui touche les municipalités. Vous ne
parlez pas de cela dans votre mémoire. J'aimerais connaître votre
point de vue sur cette réglementation.
Deuxièmement, vous dites aussi qu'il y aurait peut-être
d'autres moyens de protéger le sol agricole. J'aimerais les
connaître. En plus, dans le projet de loi, on parle d'un certain droit de
préemption. J'aimerais connaître votre opinion à ce
sujet.
M. Massey: M. le Président, pour ce qui concerne les
règlements, le député de Shefford soulève le point
que, dans notre mémoire, il n'en est pas question. Bien sûr, il
serait intéressant, en même temps qu'un projet de loi, de
connaître les règlements sur lesquels on s'appuie pour appliquer
des normes. Compte tenu de l'expérience que nous avons
déjà vécue avec d'autres lois qui donnaient des pouvoirs
de réglementation au lieutenant-gouverneur en conseil ou au
gouvernement, il serait probablement approprié je reconnais que
cet élément n'a pas été mentionné dans notre
rapport ainsi qu'on le suggérait, de demander que ces
règlements soient présentés le plus tôt possible
afin que les municipalités et toutes les personnes concernées
puissent savoir de quoi il s'agit dans ces règlements.
Pour ce qui concerne le droit de préemption que M. le
député mentionnait, bien sûr que ce n'est pas le seul moyen
qui existe pour protéger les sols, de quelque nature qu'ils soient. Nous
avons constaté, à l'étude du projet de loi que l'on
voulait protéger les sols agricoles, mais on ignorait à peu
près totalement que le coût des sols urbains qui
découlerait fatalement de l'application d'une loi stricte en zonage
agricole doublerait, sinon triplerait ou quadruplerait. Pour contrer ce
phénomène d'augmentation du coût des sols urbains, qui sont
en particulier des sols pour la construction domiciliaire ou autres
constructions, il y aurait peut-être lieu d'envisager, dans le texte du
projet de loi, la possibilité pour les municipalités de se
constituer des banques de terrains afin de pouvoir contrôler d'une
façon administrative le coût de ces terrains à
l'intérieur des périmètres d'urbanisation.
Pour ce qui concerne le droit de préemption, il s'agit là
d'une mesure qui est en application dans plusieurs pays. Puisque le projet de
loi fait quelques importations, il y aurait peut-être eu lieu de
prévoir celle-là également comme mesure permettant aux
municipalités d'acheter des terres qui auraient à un moment
donné été à vendre afin de compléter la
mesure de protection des sols arables.
Bien sûr, cette mesure de préemption supposerait à
un moment donné l'achat des terres, mais il y aurait peut-être
possibilité d'entrevoir des moyens de remboursement aux personnes dont
les terres auraient été assujetties à un droit de
préemption qui permettrait de payer ces gens-là de façon
indirecte, soit par la mesure de rentes ou par la mesure de paiements
différés sur le sol qui aurait été assujetti
à un droit de préemption.
Enfin, il s'agit là vraisemblablement de plusieurs mesures qui
auraient été appropriées et que l'on aurait pu
suggérer dans le cadre d'un comité conjoint, tripartite ou
quadripartite qui aurait travaillé à l'élaboration d'un
texte de projet de loi.
M. Verreault: En terminant, M. le Président, j'aimerais
savoir de la part du ministre s'il a vraiment l'intention et s'il
écoute de déposer la réglementation dans les plus
brefs délais possible.
M. Garon: J'ai déjà répondu à cette
question. Non, parce que la réglementation est mineure dans le cas de ce
projet de loi. On peut faire le charriage qu'on veut, si vous voulez. Lisez
l'article 80 et vous verrez que la réglementation est à toutes
fins pratiques pour des fins de procédure administrative. Il n'y a pas
de réglementation ma-
jeure découlant de ce projet de loi, l'essentiel est dans la
loi.
M. Verreault: II faut tout de même admettre, M. le
Président...
M. Garon: Contrairement, je pense...
M. Verreault: ... que la réglementation a
été faite par le Conseil des ministres.
Le Président (M. Boucher): Voulez-vous la
réponse?
M. Garon: Contrairement à une loi qu'on a...
M. Verreault: Je suis à la veille de répondre
à sa place, si cela continue. (16 h 30)
M. Garon: ... ou contrairement à une loi, par exemple,
qu'on a modifiée en 1977, sur les produits agricoles et les aliments,
sur les abattoirs, où l'essentiel était dans le règlement,
j'ai déposé mes règlements pour en prendre connaissance en
même temps que la loi. Dans ce cas, les règlements... Vous voyez,
quand on dit: Définir les règles de régie interne de la
commission, et des choses comme cela, les honoraires des experts et
enquêteurs, l'impression des formulaires, etc., vous voyez que la
réglementation est mineure. L'essence est dans la loi. A ce moment, les
règlements n'aideraient pas aux débats.
M. Verreault: Chose certaine, le ministre sait très bien
qu'une loi se change difficilement tandis que des règlements, cela se
change tous les jours.
M. Garon: Oui.
M. Verreault: Dans les circonstances, pour la meilleure
compréhension du projet de loi 90, il y aurait avantage à faire
le dépôt. À ce moment, les municipalités qui ont des
rapports avec la soi-disant commission qui s'en vient et avec le ministre et le
ministère sauraient à quoi s'en tenir, si le dépôt
de ces règlements était fait. Je n'accepte pas du tout l'argument
du ministre qui dit que la réglementation est mineure. Je crois qu'elle
a un effet majeur. J'aimerais quand même prendre à témoin
les municipalités qui sont ici, à savoir que l'implication des
règlements va avoir des conséquences assez importantes dans les
décisions qu'elles auront à prendre.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Shefford. M. le député de Huntingdon.
M. Dubois: J'ai deux questions très courtes à poser
à M. Moreau. Ne croyez-vous pas que, face au projet de loi 90, dans
certaines régions du Québec ou certaines municipalités,
les terres de roches inaptes à la culture pourront peut-être
prendre plus de valeur que de belles terres fertiles? Qu'en pensez-vous?
M. Moreau: II est bien évident que les terres... Je ne
sais pas si c'est ce que vous voulez dire; celles qui ne sont pas
zonées? Est-ce cela que vous voulez dire?
M. Dubois: Non, dans le secteur retenu, mais des terres inaptes
à la culture.
M. Moreau: Pas zonées?
M. Dubois: Zonées.
M. Moreau: Zonées.
M. Dubois: Présentement, c'est gelé.
M. Moreau: J'aurai beaucoup de difficulté à
répondre à cela. Si ces terres vont prendre de la valeur.
M. Dubois: Non. je veux dire que les terres de roches, les terres
inaptes à être cultivées, quand la municipalité
présentera son plan, ne seront pas retenues pour fins de culture.
M. Moreau: Evidemment.
M. Duboi: A ce moment, ce seront les seuls endroits où on
pourra exercer d'autres commerces ou industries.
M. Moreau: Evidemment, je pense que, si on laissait... Il y a
certainement des terres qui devraient être sélectionnées.
Il est bien entendu qu'une terre de roches ou une terre qui n'a aucune valeur
agricole devrait être affectée à d'autres fins. On est
d'accord sur cela. A mon sens je ne sais pas si cela répond
à votre question cela pourrait aussi, évidemment, mettre
en valeur des terres qui n'ont pas de valeur agricole. En voulant zoner et en
voulant protéger exclusivement les terres agricoles, on prête le
flanc à une spéculation effrénée dans les
périmètres d'urbanisation. C'est là, à mon sens, au
niveau économique... Parce que l'agriculture, c'est une partie de
l'économie québécoise, ce n'est pas l'économie
québécoise. C'est dans ce sens qu'on va permettre... D'ailleurs,
c'est une expérience qui a été vécue en
Colombie-Britannique, où le coût des terrains et le coût de
l'habitation ont grimpé d'une façon astronomique. Cela ne peut
pas faire autrement, puisqu'on va délimiter d'une façon bien
précise où la spéculation devra se faire dans le
développement. Même présentement, les jeux se font,
même avec le dépôt du projet de loi. Je connais des gens,
dans certaines municipalités, qui commencent déjà à
faire l'acquisition de terrains pour plus tard. On peut imaginer facilement,
dans un avenir très rapproché, si on ne fait pas
d'aménagement, si on fait simplement du zonage de terres agricoles, ce
qui va se passer. C'est visible, c'est fondamental. C'est la
réponse.
M. Dubois: Ne croyez-vous pas également que, parce que le
gouvernement n'a pas voulu
présenter un plan global d'aménagement et d'utilisation du
territoire, parce que nous avons une seule commission qui siégera de
Québec, et à cause de la lourdeur administrative qu'on peut
prévoir, dans certains secteurs, l'économie pourrait en souffrir,
l'économie pourrait en souffrir, I'économie régionale
surtout? J'ai même des cas qui crèvent les yeux, à l'heure
actuelle, sur cet état de choses.
M. Moreau: Je suis entièrement d'accord. M. Dubois:
Merci.
M. Moreau: D'ailleurs vous avez des cas particuliers dans la
ville de Laval, si on veut donner des noms, Mirabel, où
déjà dans des territoires qui sont, à mon sens, je ne
dirais pas entièrement urbains, parce qu'il faut s'entendre sur les
superficies dans certaines régions, je ne voudrais pas me substituer aux
élus locaux pour déterminer ce qui doit être agricole et ce
qui ne doit pas l'être, mais il reste, M. le Président, que dans
des régions où il y a peut-être une certaine
nébulosité entre les futurs territoires agricoles et les
territoires de développement, il est bien sûr que
présentement il se fait déjà, je ne dirais pas des
transactions, mais il y a des gens qui se préparent très
bien.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Hier, lors de mon allocution sur le projet de loi, en
deuxième lecture, j'ai attiré l'attention du ministre et lui ai
posé une question concernant les règlements. Il n'y a pas
répondu. Au paragraphe 8 de l'article 80, on lit: "déterminer le
tarif des droits, honoraires, frais et dépens payables dans toute
demande soumise à la commission... " Est-ce à dire qu'une
municipalité, qui va demander un amendement à son
règlement de zonage, devra également payer des frais?
Je vous mentionnais que les municipalités et les villes n'ont pas
le droit de demander à leurs citoyens de payer les frais pour
règlement à leur zonage. D'ailleurs, la revue
Municipalité, que j'ai ici, dernièrement le mentionnait
très clairement. Est-ce à dire que lorsqu'une municipalité
demandera un amendement à son règlement de zonage, il va falloir
qu'elle paie $100 ou $200 de frais pour l'amendement à son
règlement.
Le Président (M. Boucher): C'est une question que vous
posez à M. le ministre?
M. Cordeau: A M. le ministre ou, je vais changer de
côté de table. Croyez-vous, M. Massey, qu'il serait logique qu'une
municipalité paie, à la commission, un montant pour un amendement
à son règlement de zonage, lorsque les municipalités des
villes n'ont pas le droit, actuellement, de demander des honoraires pour un
amendement à leur règlement de zonage.
M. Massey: Je vais répondre par votre mot, M. le
député de Saint-Hyacinthe, ce ne serait pas logique. Mais pour
faire un triangle parfait, j'aimerais bien refiler la question à M. le
ministre, si vous me le permettez, M. le Président.
M. Garon: C'est simple, le député de
Saint-Hyacinthe aurait dû lire le paragraphe jusqu'à la fin, il se
termine ainsi: " ... de même que les catégories de personnes qui
peuvent en être exemptées;".
Le Président (M. Boucher): Merci. M. Garon: II faut
lire jusqu'à la fin.
M. Cordeau: Oui, mais encore là il faut dire que si on
avait les règlements d'ailleurs ils ne doivent pas être
prêts cela nous aiderait à la compréhension du
projet de loi.
M. Garon: J'ai l'impression que le gros du débat est sur
le tarifs; il ne faut pas...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Maskinongé.
M. Picotte: M. le Président, compte...
M. Cordeau: Une dernière question, s'il vous
plaît.
Le Président (M. Boucher): Une autre question au ministre
ou à nos invités?
M. Cordeau: A M. Massey.
Le Président (M. Boucher): Bon, allez-y.
M. Cordeau: M. Massey, tantôt vous avez fait allusion aux
pouvoirs que les municipalités pourraient avoir pour acheter des
terrains pour bâtir des habitations, car, actuellement, les
municipalités ont le droit d'acquérir des terrains pour fins de
parcs industriels et commerciaux par contre, elles n'ont pas le pouvoir
d'acquérir des terrains pour fins d'habitations.
Hier, aussi, je demandais au ministre de l'Agriculture de demander au
ministre des Affaires municipales de changer la Loi des cités et villes
et le Code municipal afin de donner le pouvoir aux municipalités
d'acquérir des terrains pour fins d'habitations, afin de contrer la
hausse galopante des terrains actuellement disponibles. Que pensez-vous de
cette suggestion?
M. Massey: M. le Président, il s'agit là d'une
question de fond qui aurait dû être débattue dans un
comité tripartite, ainsi que nous l'avions suggéré. Le
fait que la question soit soulevée de nouveau indique bien son
importance. Je pense bien que c'est à ce niveau qu'elle aurait dû
être solutionnée pour être incluse dans le texte du projet
de loi 90.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: M. le Président, considérant qu'il
reste encore au moins six organismes d'une grande importance, je pense bien que
je vais céder mon droit de parole.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: D'autant plus que c'étaient des commentaires
et non des questions, je vais permettre à l'Union des
municipalités de s'amener immédiatement.
Le Président (M. Boucher): Merci. Alors au nom de tous les
membres de la commission, je remercie M. Moreau ainsi que ceux qui
l'accompagnent d'être venus présenter ce mémoire et
j'inviterais immédiatement l'Union des municipalités du
Québec, représentée par M. André Benoît.
M. Benoît, si vous voulez présenter ceux qui sont avec vous
et présenter votre mémoire.
Union des municipalités du
Québec
M. Benoît (André): M. le Président, le
porte-parole de l'Union des municipalités sera M. Hono-rius Charbonneau,
maire de Saint-Hilaire qui sera accompagné de M. Dufour, maire de
Jonquière.
M. Charbonneau (Honorius): Je voudrais, au nom du
président de l'Union des municipalités, vous remercier d'avoir
bien voulu permettre à l'union de vous soumettre ce mémoire. On
va essayer d'être assez bref. On n'a pas de procureur, mais on va essayer
de s'exprimer quand même!
M. Chevrette: C'est toujours comme cela qu'on s'entend le
mieux!
M. Charbonneau (Honorius): M. le ministre, messieurs les membres
de cette commission, l'Union des municipalités du Québec a
déjà fait état de l'intérêt que portent les
municipalités urbaines à l'application d'une politique de
protection du territoire agricole.
D'ailleurs, la nécessité d'une intervention dans ce
secteur a été fort bien démontrée. Par contre,
l'urgence d'une intervention dans un domaine qui englobe le zonage agricole,
c'est-à-dire dans le domaine de l'aménagement du territoire, nous
préoccupe également. Ainsi, notre participation au comité
d'orientation sur l'aménagement témoigne du désir que nous
avons de collaborer avec le gouvernement à l'élaboration de
solutions concrètes au problème du développement rationnel
du territoire québécois.
C'est avec ce même esprit de collaboration que l'Union des
municipalités du Québec vous donne aujourd'hui son opinion sur le
projet de loi no 90 portant sur la protection du territoire agricole.
Le zonage agricle et l'aménagement. Le projet de loi 90 sur la
protection du territoire agricole est, par essence, une loi de zonage
sectoriel. En tant que tel, le prjet crée une embûche
sérieuse à l'aménagement intégré du sol
québécois et à la définition des champs de
compétence des gouvernements en présence.
Au moment même où le gouvernement du Québec invite
les représentants municipaux au dialogue sur la décentralisation
et l'aménagement du territoire avec les ministres des Affaires
municipales et de l'aménagement, un autre ministre, celui de
l'Agriculture, propose une loi qui contredit de façon évidente
les objectifs énoncés par les deux premiers.
Nul n'ignore que dans le prolongement de la Conférence
Québec-municipalités, deux comités conjoints ont
été mis sur pied, l'un portant sur la fiscalité municipale
et l'autre sur l'aménagement du territoire et la
décentralisation. Ces deux tables de travail regroupent des
représentants du gouvernement du Québec et du monde municipal,
tant rural qu'urbain.
Qui plus est, ces deux démarches ont été
amorcées sous le thème de la revalorisation du pouvoir municipal,
thème choisi par le gouvernement lui-même. Fidèle à
ce thème, c'est dans un contexte et une optique d'aménagement
global et de renforcement du pouvoir local que l'Union des municipalités
du Québec a examiné le projet de loi 90. Les élus
municipaux partagent avec le gouvernement du Québec certaines positions
de fond souventefois énoncées sur la décentralisation et
I'aménagement du territoire.
Les principaux éléments de cette position sont
décrits dans les fascicules sur la décentralisation
publiés par le secrétariat à l'aménagement sous la
signature du ministre Jacques Léonard. (16 h 45)
On y retrouve les énoncés suivants. D'abord, que les
responsables municipaux et de comté devraient pouvoir décider de
l'aménagement de leur territoire, des zones et espaces à
protéger, des équipements à mettre en place et des
activités sociales et économiques à promouvoir;
deuxièmement, que la décentralisation doit conduire à une
harmonisation de la ville et de la campagne; troisièmement, que la
décentralisation va contribuer à stimuler le dynamisme et la
vitalité des communautés territoriales; quatrièmement, que
la décentralisation nécessite un réaménagement des
pouvoirs par la valorisation des municipalités, le renouvellement des
municipalités de comté et le rajustement du rôle de
l'Etat.
Dans ses fascicules, le ministre Léonard refuse l'option
centralisatrice en matière d'aménagement. Il fait sienne une des
conclusions du comité ministériel de l'aménagement,
à savoir que; Ce n'est pas de Québec que doit se faire
l'aménagement. On ajoute un peu plus loin: Que l'Etat entend, par sa
politique de décentralisation, modifier son approche de
l'aménagement et de l'urbanisme de manière à confier aux
instances locales, plus près des citoyens, les pouvoirs et les
moyens
d'assumer plus adéquatement leurs responsabilités et de
faire les choix qui leur reviennent.
L'orientation du secrétariat de l'aménagement est donc
très claire et nous y adhérons. C'est elle qui tisse la toile de
fond d'une nouvelle relation entre l'Etat et la municipalité. Cette
relation est explicitée dans un modèle de partage des pouvoirs
présenté dans les mêmes fascicules. On y fait état
d'un schéma d'aménagement régional et opposable aux
organismes et agents de l'Etat.
Le contenu du schéma porte sur la délimitation du
territoire d'urbanisation, l'établissement des règles de
développement pour les secteurs hors de ce périmètre et
pour certaines zones spécifiques. On y fait mention d'une commission
nationale d'aménagement qui servira de mécanisme d'appel et de
surveillance de la loi.
L'Union des municipalités du Québec, nous le
répétons, souscrit à cette orientation et s'est
engagée à participer au processus d'élaboration des
structures qui en découlent. Nous avons travaillé avec le
secrétariat de l'aménagement au sein du comité
d'orientation de l'aménagement. Le ministre a déjà
annoncé le dépôt d'un projet de loi sur
l'aménagement et l'urbanisme pour le mois de décembre 1978.
Devant une telle volonté de la part du gouverment, d'abord, la
question de l'aménagement de façon globale et
décentralisée, comment expliquer que ce gouvernement, par son
ministre de l'Agriculture, dépose une loi de zonage d'application
sectorielle centralisatrice dévalorisante pour le palier municipal?
C'est une loi cantonnée dans un esprit totalement opposé à
celui qui sous-tend les travaux de ces autres comités actuellement en
marche. Cela est d'autant plus incompréhensible que les ministres de
l'Agriculture, des Affaires municipales et de l'aménagement
siègent tous les trois au comité ministériel sur
l'aménagement.
Comment expliquer alors que l'un dépose un projet de loi dans
l'esprit même et en opposition directe avec les intentions avouées
de l'autre? Peut-être s'agit-il, nous dira-t-on, de situer le
débat dans un contexte différent. Le projet de loi sur la
protection du territoire agricole a été présenté
comme une mesure à caractère essentiellement économique,
c'est-à-dire une mesure de protection nécessaire au
développement économique du secteur agricole et alimentaire. Cela
est peut-être vrai, mais alors pourquoi la délimitation du
périmètre urbain est-elle l'élément qui ressort le
plus fréquemment des exposés de divers membres du gouvernement au
sujet du projet de loi?
Il a même été dit que la protection des terres
agricoles doit renverser les procédés actuels de
développement. Ceux-ci devront, semble-t-il, se faire à partir du
territoire agricole créé par le gouvernement. Cette affirmation
ne serait pas loin de la vérité puisque la préoccupation
première de la Commission de la protection du territoire agricole sera
d'assurer le maintien d'une zone agricole continue et que la qualité des
sols sera un facteur prédominant pour la prise de décision en
matière de zonage. Il en résultera donc que les facteurs
reliés aux besoins d'expansion de la zone urbaine seront
relégués au second rang.
Il est donc évident qu'en plus de ces préoccupations de
santé économique du secteur agro-alimentaire, le projet de loi 90
a des incidences démesurées sur l'aménagement du
territoire et le développement urbain. L'Union des municipalités
du Québec a fait sien l'objectif gouvernemental de freiner
l'étalement désordonné du secteur urbain. Par contre, nous
ne croyons pas que le projet de loi 90 soit l'instrument approprié
à cette fin. Nous inscrivons plutôt le développement urbain
et le zonage agricole dans la problématique globale de
l'aménagement du territoire tel qu'énoncé par le
gouvernement dans la série verte sur la décentralisation.
Le rôle privilégié de la municipalité dans le
projet de loi 90. Le gouvernement du Québec, dans un numéro
spécial de la revue Municipalité 78 a fait état du
rôle privilégié de la municipalité dans la mise en
oeuvre de la politique de protection du territoire agricole. On y lisait: 1)
Entre le dépôt de la loi et son entrée en vigueur, la
municipalité informera les citoyens de la teneur de la loi et de sa
primauté sur les lois et les règlements qui lui sont
incompatibles; 2) entre l'entrée en vigueur de la loi et l'entrée
en vigueur d'un décret de zonage, la municipalité définira
une zone agricole à partir de la proposition gouvernementale et
soumettra ce zonage à la commission; 3) après l'entrée en
vigueur de la loi, la municipalité donnera son avis à la
commission sur les ajustements de la zone agricole et soumettra à la
commission toute demande d'exclusion. C'est là le rôle
privilégié que le projet de loi 90 entend confier aux
municipalités en matière de zonage agricole, un rôle
d'information, un rôle de consultation et un rôle de commissaire de
l'Etat. Le gouvernement semble plutôt avoir réservé les
vrais privilèges à d'autres paliers que le local, comme la
commission de protection.
C'est effectivement à la Commission de protection du territoire
agricole que le gouvernement donne un rôle privilégié.
Cette commission est constituée en vertu de l'article 3 du projet de loi
90. Elle s'apparente à une régie d'Etat et ses pouvoirs retirent
à la municipalité la gestion d'une partie de son territoire. Les
dispositions suivantes du projet de loi le démontrent bien; article 3c,
la commission délimite, en collaboration avec la corporation municipale,
la zone agricole dans une municipalité; articles 26, 28 et 29, la
commission décide du lotissement et de l'usage d'un lot dans la zone
agricole inscrite dans un territoire municipal; article 32, la commission
contrôle l'émission de permis municipaux; articles 41 et 80, la
commission détermine, par règlement, quelles sont les fins
municipales; articles 47 et 48, la commission limite le rôle de la
municipalité à la consultation dans la délimitation de la
zone agricole permanente; enfin, articles 17 et 18, la commission est
elle-même le mécanisme d'appel de ses propres
décisions.
Ce sont là des types de privilège que le projet de loi 90
réserve aux municipalités, face à la Commission de
protection du territoire agricole. Cependant, face à cette même
commission, le gouvernement se réserve un traitement fort
diffé-
rent de celui qu'il propose aux municipalités. Les dispositions
suivantes du projet de loi en témoignent: article 66, le gouvernement
peut, après avoir pris l'avis de la commission, exclure un lot ou une
partie de lot d'une zone agricole, pour les fins d'un ministère ou
organisme public; article 96, le gouvernement peut, par avis écrit
à la commission, soustraire une affaire à sa juridiction. Le
gouvernement est alors saisi de l'affaire, avec les mêmes pouvoirs que la
commission.
Voilà des privilèges. Les agents du gouvernement tels la
Régie de l'électricité, le ministère des Richesses
naturelles, la Régie des services publics, le ministère des
Affaires culturelles jouissent eux aussi d'un traitement
privilégié. En effet, ils n'ont qu'à obtenir un simple
avis de la commission avant de prendre une décision portant sur une aire
retenue pour fins de contrôle agricole.
On constate donc que, dans le projet de loi 90, le seul privilège
de la municipalité est celui d'être la cible du
législateur.
La position de l'union. L'analyse du projet de loi 90 renforce l'opinion
que nous avons déjà exprimée dans le passé. Nous
appuyons le principe du zonage agricole pour autant qu'il soit inscrit dans le
prolongement d'une loi sur l'aménagement du territoire. Cette même
loi sur l'aménagement devra, par ailleurs, s'inspirer des propositions
gouvernementales de décentralisation fondées sur la valorisation
du pouvoir local. L'approche sectorielle privilégiée par le
projet de loi 90 risque de compromettre l'aménagement cohérent du
territoire québécois. Au contraire, nous désirons
participer à la réalisation d'un aménagement
intégré du territoire québécois.
Nous refusons d'être astreints à devenir des bureaux locaux
chargés d'informer les citoyens des procédures de diverses
législations sectorielles dont la gestion est centralisée
à Québec. Dans ce même esprit, nous jugeons essentiel que
la surveillance de l'application d'une éventuelle loi de protection du
territoire agricole soit confiée à une commission nationale
d'aménagement; pour que cette commission s'inscrive dans le prolongement
des principes de décentralisation et de revalorisation du pouvoir local
déjà énoncés, nous proposons qu'elle soit
formée de trois représentants des municipalités urbaines
et de trois représentants des municipalités rurales, le
président étant désigné par le
lieutenant-gouverneur en conseil.
En outre, l'autorité nécessaire à
l'élaboration des schémas d'aménagement doit être
déléguée à des structures régionales
chargées de cette opération, lesquelles structures seront
à la base de la concertation entre le monde rural et urbain. Le
comité d'orientation sur l'aménagement travaille
présentement à l'élaboration de telles structures pour les
territoires qui ne sont pas déjà couverts par les
communautés urbaines et régionales. L'autorité de
développer et gérer un territoire n'appartient qu'à ceux
qui ont été élus pour ce faire. C'est donc aux plans local
et régional et par des représentants élus que doit se
faire l'aménagement du territoire. Cette position de l'Union des
municipalités du Québec est renforcée par celle du minis-
tère de l'aménagement qui a indiqué publiquement que
l'aménagement est un choix politique qui affecte les citoyens, et ceux
qui font ces choix doivent être des élus; que de par nature,
l'aménagement implique une consultation obligatoire auprès des
citoyens; que le pouvoir doit être réparti et défini
clairement en trois paliers, le central, le régional et le local; que la
loi de l'aménagement doit assurer la concertation entre ces trois
niveaux et prévoir l'arbitrage en cas de conflit.
De plus, pour notre part, nous croyons que la législation en
matière d'aménagement devra respecter l'intégrité
de la compétence municipale quant à la gestion de son territoire.
Dans la pratique, cela veut dire que peu importe le requérant en
matière d'utilisation du sol, il devra s'adresser d'abord aux
autorités locales; que tout organisme régional ou national dont
les activités affectent le territoire municipal devra prendre avis des
autorités locales; que la localisation des équipements collectifs
ne pourra se faire sans l'approbation de l'autorité locale.
Voilà, M. le ministre, en quelques pages, un peu ce que l'Union
des municipalités avait à vous dire. Nous aurions pu discuter
naturellement de l'application de divers articles de loi, mais nous avons
pensé qu'il serait peut-être possible d'en discuter autrement que
dans un mémoire. Je remercie le ministre de m'avoir répondu.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Char-bonneau. M. le
ministre.
M. Garon: J'ai lu votre mémoire. Aux pages 7 et 8, vous
parlez des pouvoirs de contrôle de la commission. Je pense que vous
exagérez. Quand vous dites à l'article 32: "La commission
contrôle l'émission de permis municipaux", ce n'est pas du tout ce
que dit l'article 32. Celui qui veut demander un permis de construction
à la municipalité doit, en même temps, faire une
déclaration, une preuve, et envoyer une déclaration à la
commission, indiquant qu'il n'est pas dans la zone agricole. Mais
contrôler les permis municipaux, il ne faut pas charrier.
M. Charbonneau (Honorius): Non, mais quand même si on lit
l'article 32, M. le ministre: "Une corporation municipale, une corporation de
comté ou une communauté ne peut émettre un permis de
construction sur un lot situé dans une région agricole
désignée à moins que la demande ne soit accompagnée
d'un certificat d'autorisation de la commission..."
M. Garon: Oui, "... ou d'une déclaration du
requérant à l'effet que le projet faisant l'objet de la demande
ne requiert pas l'autorisation de la commission".
Et on dit qu'il produit une déclaration avec sa demande, il doit
fournir la preuve qu'un exemplaire de cette déclaration a
été transmis à la commission. Cela veut dire quoi? Cela
veut dire que quand le gars demande un permis de construc-
tion, il vous dit: Ce n'est pas dans la zone. Et il vous donne la preuve
qu'il a avisé la commission qu'il demandait un permis de
construction.
Si vous avez la preuve, cela veut dire un certificat de recommandation
postale, qu'il n'est pas dans la zone, vous émettez le permis. Et
après cela, vous lui dites, s'il est dans la zone agricole, qu'il est
autorisé à construire. Que voulez-vous? Ce n'est pas le
contrôle des permis. C'est tout simplement pour ne pas permettre, dans la
zone agricole, des constructions qui ne sont pas permises. Pour le reste, il
n'y a aucun problème.
Si vous protégez les terres, puisque tout le monde peut
construire comme avant, vous avez protégé quoi?
M. Dufour (Francis): M. le ministre, si on veut avoir une
continuité dans la position de l'Union des municipalités, qu'on
confie à l'autorité locale l'aménagement du territoire,
parce que je pense que le zonage agricole, ce n'est qu'une partie de
l'aménagement du territoire.
M. Garon: Ce n'est pas ce que je veux dire. Je veux dire tout
simplement que lorsque vous énumérez les pouvoirs de la
commission, aux pages 7 et 8, vous exagérez. Ce n'est pas vrai, ce que
vous dites là. (17 heures)
Quand vous dites, à l'article 41, par exemple: "La commission
détermine par règlement quelles sont les fins municipales", ce
n'est pas vrai. Ce n'est pas ce que dit l'article 41. L'article 41 dit qu'une
corporation municipale peut, sans l'autorisation de la commission, utiliser un
lot situé dans l'aire retenue pour fins de contrôle à des
fins municipales identifiées par règlement. L'article 80
détermine ces fins. Au fond, qu'est-ce que cela veut dire? C'est qu'un
règlement de la commission peut déterminer un tas de fins
municipales pour lesquelles la municipalité n'aura aucune autorisation
à demander à la commission. Le but de ceci: si, par exemple
je pense à quelque chose une municipalité
élargit une route et qu'elle va demander l'autorisation à la
commission, que cela ne détermine pas les fins municipales, mais vous
n'avez aucune autorisation à demander à la commission pour les
fins municipales. Il ne faut pas exagérer. On dit cela comme si la
commission était un monstre; au contraire, ces deux articles ont pour
but de soustraire les municipalités à des demandes à la
commission.
M. Dufour: J'ai compris ce que vous vouliez dire dans le fond,
mais j'aimerais bien être capable de dire... La position de l'Union des
municipalités est la suivante: Que, dans le zonage agricole on
réclame cela dans notre mémoire les municipalités
soient responsables du contrôle aussi. Je n'aurais peut-être pas
objection que, lorsqu'il y a une demande, la municipalité émette
un permis dans une zone et qu'elle avertisse la commission que c'est fait. Je
n'y ai pas d'objection. Mais là, je pense que la commission comme telle
se substitue à la municipalité et agit directement sur le terri-
toire. Je pense que l'Union des conseils de comté a exprimé le
même voeu ou la même opinion que l'Union des municipalités
dans le sens que le contrôle du territoire doit nous être remis et
on doit mettre en application ce zonage.
M. Garon: Ne pensez-vous pas que le gouvernement du Québec
a un mot à dire concernant le territoire aussi, entre nous autres?
M. Dufour: On l'admet, M. le ministre, mais en admettant tout de
même que quand le zonage sera fait et déposé, je pense bien
que les organismes qui sont les plus habilités à en faire
l'application et la surveillance, ce sont les municipalités qui, elles,
lorsqu'il n'y a pas de problème qui se pose, émettent les permis
et avertissent en même temps la commission qu'un tel permis a
été donné et il n'y a pas de problème. Là,
vous faites le contraire, on est obligé d'aller directement à la
commission pour demander le permis. Tantôt, on aura des problèmes,
parce que je me demande si la commission aura assez d'oreilles et de membres
pour répondre à toutes les demandes qui seront faites dans toute
la province de Québec, dans tout l'Etat québécois, si on
veut bien se comprendre.
M. Garon: Vous faites cette affirmation à la page 5: "II a
été même dit que la protection des terres agricoles doit
renverser les procédés actuels de développement. Ceux-ci
devront, semble-t-il, se faire à partir du territoire agricole
créé par le gouvernement. Cette affirmation n'est certes pas loin
de la vérité, puisque la préoccupation première de
la Commission de protection du territoire agricole sera d'assurer le maintien
d'une zone agricole continue et que la qualité des sols sera un facteur
prédominant pour la prise de décision en matière de
zonage. Il en résultera donc que les facteurs reliés aux besoins
d'expansion de la zone urbaine seront relégués au second rang.
"
Voulez-vous dire que vous êtes contre cela, que les meilleures
terres, les terres qui ont une bonne qualité agricole, les terres
arables soient protégées et soient réservées
à l'agriculture en priorité?
M. Dufour: J'ai l'impression, M. le ministre, que ce qu'on veut
c'est identifier le tissu urbain et le territoire urbain. Avec le projet de loi
sur le zonage agricole, tel qu'il a été déposé, il
arrive qu'il y ait certaines zones à l'intérieur du
périmètre urbain qui soient décrétées zones
vertes. A ce moment-là, la municipalité pense que, pour la
rationalisation des coûts, pour une meilleure identification du
territoire, elle doit avoir son mot à dire et qu'elle doit être
capable de rationaliser. Sans cela, on jouera à saute-mouton, ce sera un
développement à la saute-mouton, parce qu'il faut qu'on
réunisse les villes ou les municipalités pour que le territoire
soit vraiment unifié. S'il y a une zone verte qui est
décrétée à l'intérieur d'une
municipalité, c'est parce que le territoire est bon, bien sûr,
mais on ne peut pas être l'esclave du passé au point de ne plus
pouvoir fonctionner dans le pré-
sent et à l'avenir. A mon point de vue, on doit être
capable de resserrer les tissus urbains, parce que lorsqu'on parle de
développement sauvage, je pense qu'on se comprend. Je pense que c'est
cela qu'on ne veut pas.
M. Garon: A la page 10, la commission, pour décider des
terres, doit être une commission formée de trois
représentants des municipalités urbaines et trois
représentants des municipalités rurales avec un président
nommé par le lieutenant-gouverneur en conseil. Est-ce cela que vous
dites?
M. Dufour: Oui, on a dit cela, parce que votre projet de loi est
assez muet là-dessus. Par exemple, j'ai écouté votre
exposé adressé à l'UPA dans le sens que votre commission
sera formée d'à peu près tous des cultivateurs.
M. Garon: Pas tous, je n'ai pas dit tous. J'ai dit que cela en
prendrait.
M. Dufour: Vous avez dit cela en badinant. M. Garon: Pas
en badinant.
M. Dufour: Vous avez dit: La majorité sera probablement
des cultivateurs.
M. Garon: Je pense que ce serait pas pire. Ce sont leurs
terres.
M. Dufour: Ce ne serait pas pire, mais, à ce moment, je
pense que vous vous feriez jouer.
M. Garon: Oui, mais vous ne pensez pas que ce sont leurs terres,
en fin de compte?
M. Dufour: Ce sont peut-être leurs terres, mais il y a une
chose, ce sont des parties à la cause. Ce sont des parties au
développement du territoire.
M. Garon: Vous autres, vous êtres neutres?
M. Dufour: C'est-à-dire qu'on a peut-être une autre
responsabilité. On a à répondre de nos actions, de nos
prises de décisions à la population. La population peut porter un
jugement. Comme il y a des commissions... Je pense que les élus sont des
gens sensibles. Politiquement, que ce soit un gouvernement ou l'autre, on a
à peu près tous la même préoccupation, celle de
mieux servir les intérêts de la collectivité. A ce moment,
à votre commission, vu qu'elle est muette, si vous admettez... Je pense
que, dans les ruraux, parce qu'on parle de municipalités rurales, ceci
veut dire qu'il y a certainement des cultivateurs à l'intérieur
de ces municipalités, ils seraient donc représentés
à l'intérieur de notre commission, et, à ce moment, on
pourrait porter un jugement de valeur. Peut-être qu'on pourrait
s'entendre à savoir qu'il pourrait y avoir un droit d'appel ou une
certaine prise de position...
M. Garon: Est-ce la Commission municipale...
M. Dufour: Cela pourrait être la Commission municipale
comme cela pourrait être un autre organisme, parce que la commission,
pour nous, devient...
M. Garon: Pensez-vous que le développement agricole et
alimentaire au Québec, c'est une responsabilité d'une politique
municipale?
M. Dufour: Je pense bien, M. le ministre, que vous allez
être le premier à nous le rappeler, si on ne pense pas comme cela.
Je pense que le gouvernement du Québec a une responsabilité de
l'agro-alimentaire, mais je ne répéterai pas toute
l'argumentation qui a été donnée par M. Moreau...
M. Garon: Non.
M. Dufour: ... à savoir telle chose et telle chose. C'est
votre responsabilité.
M. Garon: Supposons...
M. Dufour: Je dis que, même avec cela, on a la
responsabilité d'un développement harmonieux du territoire.
M. Garon: Oui, on est d'accord là-dessus. On est d'accord
pour bâtir des chalets aux endroits où vont les chalets, pas sur
les meilleures terres, et les gars vont être bien heureux, parce qu'un
chalet, habituellement, dans une terre planche, cela fait un peu "plat" comme
paysage, pour un chalet, tandis que, sur le bord d'une montagne, ou au bord
d'un lac, habituellement, il ne se fait pas tellement d'agriculture là.
On est d'accord là-dessus. Les terrains de camping, on est d'accord pour
ne pas les installer à côté des porcheries. Cela va
être mieux pour la porcherie, cela va être mieux pour le campeur
aussi, pour tout le monde. Je pense que tout le monde est d'accord
là-dessus. C'est mieux de localiser les choses aux bons endroits. C'est
une vérité de La Palice, ce que le député de
Montmagny-L'Islet dit, mais si c'était autant une vérité
de La Palice, cela ne se ferait pas tout le temps comme cela. Il y a des gens
qui se bâtissent à côté des porcheries, et,
après cela, ils trouvent que cela sent la porcherie. Cela aurait
été une bonne idée d'y penser avant. Par ailleurs...
M. Giasson: Je suis très sérieux.
M. Garon: ... dans votre argumentation, vous parlez que ce soit
confié, mais vous ne dites pas à quel organisme exactement.
Pensez-vous que ce doit être les conseils de comté qui doivent
être en charge de la protection du territoire agricole?
M. Dufour: M. le ministre, vous devez être au courant qu'il
y a un comité de l'aménagement du territoire et on va aller
siéger tout à l'heure là-dessus.
M. Garon: Bon.
M. Dufour: Au comité, actuellement, il en est question
je ne sais pas si je dévoile le comité en disant cela
il y a peut-être des nuances à apporter, est-ce que cela
doit être le conseil de comté ou un autre organisme? L'Union des
municipalités a son opinion, l'Union des conseils de comté a la
sienne. On pense que, vu que I'aménagement du territoire... On peut dire
pourquoi peut-être on a une opinion différente; c'est que
l'aménagement du territoire, personne ne l'a fait jusqu'à
maintenant, parce que, lorsqu'on parle de l'aménagement du territoire,
cela dépasse le cadre d'une municipalité. On pense donc que cela
doit être un organisme un peu plus grand, élargi, et que
peut-être que cela vaut la peine pas "peut-être", je suis
sûr que cela vaut la peine qu'on crée un organisme nouveau
qui réponde à des besoins nouveaux et auquel vont être
rattachés d'autres pouvoirs qu'on appelle des pouvoirs de
décentralisation.
C'est donc important dans mon esprit que les deux mondes, cela fasse
seulement du monde, parce que c'est le même monde, qu'ils soient
rattachés à un organisme, mais à un nouvel organisme,
où ces gens vont pouvoir dialoguer et où la distinction va
s'enlever. J'ai peur que si on garde des noms, cela devienne... J'ai
vécu des fusions...
M. Garon: Qui perdrait des pouvoirs? Ce sont les
municipalités qui les perdraient au profit d'un autre organisme.
M. Dufour: Oui, mais cet organisme pourrait être
représenté par des gouvernements locaux. Les gouvernements locaux
vont être représentés sous l'organisme élargi de la
région d'appartenance. Ce dont j'ai peur, c'est qu'on se limite à
l'aménagement du territoire, lorsqu'on sait que, dans la politique de
décentralisation, les pouvoirs vont être beaucoup élargis.
C'est pour cela que je n'ai pas peur que l'on forme de nouveaux organismes qui
répondent de leurs actes: ce seront des élus locaux qui feront
partie d'un organisme un peu plus élevé et cela va amener
d'autres changements.
M. Garon: Maintenant que vous avez ce nouvel organisme, j'imagine
que, dans votre esprit, il regroupe les municipalités rurales, les
municipalités urbaines, n'est-ce pas? Il anime la protection des terres
sur cette région d'appartenance, comme vous l'appelez; l'organisme, lui,
veut protéger... Prenons un cas, il y a un schéma
d'aménagement dans l'Outaouais; c'est la seule place où il y en a
eu un récemment. Il a été publié, en juin 1977;
Schéma d'aménagement du territoire pour la Communauté
régionale de l'Outaouais. Là-dedans, on dit qu'il y a eu un
problème, les gens du monde agricole disaient qu'ils voulaient garder
108 000 acres pour l'agriculture, il y avait 108 000 acres de bonnes terres.
Les autres organismes qui faisaient partie de la communauté ont dit:
Nous, nous sommes prêts à garder 60 000 acres; il y en avait un
peu plus, mais ce n'était pas bon pour l'agriculture. D'un
côté, 60 000 acres; de l'autre, 108 000 acres. Quand arrive un tel
débat, alors que le monde agricole ou l'industrie alimentaire... Par
exemple, je pense au maire de Saint-Hilaire. A la raffinerie de sucre, on dit:
J'ai besoin de tant d'acres pour développer ma raffinerie, parce qu'avec
l'équipement qu'on a acheté, il y aura possibilité
d'épuiser la production de 24 000 acres; cela prend des acres. Alors,
c'est 108 000 acres réservées pour l'agriculture et pour
l'industrie alimentaire. D'autres instances veulent réserver
mettons dans votre région d'appartenance, ceux qui décident
60 000 acres. Qui doit décider si c'est 108 000 ou 60 000
acres?
M. Dufour: II est bien sûr que vous me posez une colle et
je ne suis pas prêt à...
M. Garon: Non, c'est...
M. Dufour: C'est peut-être difficile de répondre,
parce que ce que je voulais vous répondre... C'est bien sûr...
M. Garon: Ce sera exactement ce qui va se passer dans la
réalité.
M. Dufour: Oui, mais en supposant votre commission telle que vous
la proposez, où le monde rural et le monde municipal ne seraient pas
présents, les mêmes problèmes vont se soulever; je ne pense
pas qu'on va donner une réponse précise à votre question.
Ce que je peux vous dire, c'est qu'à force de se parler, parfois on
finit par se comprendre. Je dis que cet organisme régional n'aura pas
toutes les réponses, bien sûr; il va falloir qu'il y ait un
organisme supérieur à cet organisme, qui va répondre
à plus grand. A ce moment, il va y avoir un arbitrage qui va se
faire.
M. Garon: Oui, mais vous avez convenu tantôt qu'une
protection des terres devait être partie d'une politique nationale, d'un
objectif national; vous en avez convenu.
M. Dufour: Oui.
M. Garon: Commission ou comité d'aménagement,
région d'appartenance, quel que soit l'organisme, il n'a pas pour mandat
particulier de protéger les terres, il a le mandat de répartir
cela; si bien que, dans le rapport de la Communauté régionale de
l'Outaouais, on dit que, pour protéger les terres, de façon
stricte, pour l'agriculture, les réserver, cela ne peut constituer qu'un
aspect d'une politique générale de protection des terres
agricoles et de relance de l'industrie agricole. Cette politique d'ensemble qui
relève des gouvernements supérieurs est depuis longtemps promise
et toujours attendue. En continuant la lecture, on lit qu'il faut qu'un
organisme ait le mandat de faire cela. Alors, qui va avoir comme mandat
particulier de protéger les terres? Dans des cas où le milieu
agricole, le cultivateur, l'industrie alimentaire demandent tant d'acres et
où l'organisme qui a pour mission d'aménager ne veut pas
réserver les acres
pour l'agriculture, qui doit trancher la question de la protection des
terres?
M. Charbonneau (Honorius): Je pense bien que l'Etat est le seul
qui puisse faire des lois pour protéger les terres agricoles, parce
qu'il y a déjà plusieurs villes de la province qui ont
déjà mis de l'avant des plans de zonage qui ne sont
peut-être pas si mauvais que cela. Elles ont quand même assez bien
protégé le patrimoine dans chacun de leur milieu. Peut-être
pas à cent pour cent; je pense qu'il y a eu, dans la province, des
hémorragies de territoires, je suis d'accord et je crois qu'autour de
Montréal, nous en avons vécu. Par contre, il ne faudrait pas
blâmer uniquement les villes de ces hémorragies. Le but serait
d'essayer de trouver cette commission à laquelle pourraient participer
les élus municipaux et ceux qui ont réellement besoin de
planifier le territoire dans chacune de nos villes.
M. Garon: Si on regarde cela concrètement... (17 h 15)
M. Dufour: II y a peut-être un complément que je
pourrais ajouter. Vous avez l'intention de faire une politique agricole.
M. Garon: Oui.
M. Dufour: A ce moment, si ce n'est pas vous qui avez la loi,
parce que je parle beaucoup plus d'une politique d'aménagement du
territoire que seulement une loi...
M. Garon: Les deux ne sont pas incompatibles.
M. Dufour: Elles ne sont pas incompatibles. Elles se
complètent, mais une est comprise dans l'autre. Quant à moi,
l'aménagement du territoire est plus grand. A ce moment, votre
ministère, qui a la préoccupation du secteur agro-alimentaire, de
la protection en même temps du zonage agricole, pourrait,
vis-à-vis de cet organisme, faire les représentations en
conséquence pour défendre le point de vue du Québec
vis-à-vis de cette commission qui aurait à juger et à
jouer le rôle de l'arbitre.
M. Garon: Oui, mais regardez bien l'affaire. Supposons qu'il y a
une politique d'aménagement, c'est-à-dire aménager les
endroits récréatifs, les industries, les institutions et la
protection des terres. Ne pensez-vous pas que l'idée serait de
protéger les terres et d'aménager le reste pour construire des
maisons à des endroits qui ne sont pas des terres agricoles, les
meilleures, les moins bonnes, de faire des parcs dans des endroits qui ne sont
pas bons pour l'agriculture? Mais pour cela, quand vous dites à un
certain moment: A mon avis, il faudrait faire cela, dire: On garde les terres
d'un bord et on aménage ce qui n'est pas bon pour l'agriculture. Cela ne
veut pas dire qu'il n'y aura pas une terre ou deux qui vont servir pour
d'autres fins, mais de façon générale, dire: On garde les
bonnes terres pour l'agriculture, on aména- ge le reste. On met un
terrain de camping et le sol A, on le met ailleurs.
Par ailleurs, vous avez une commission d'aménagement, il y a
trois gars des municipalités rurales, trois gars des
municipalités urbaines. Pensez-vous que les agriculteurs sont
d'égale force si c est cette commission qui décide de
l'affectation des sols, alors, que la protection des sols devrait être
réservée à un organisme qui a pour mandat de
protéger les sols et que, les municipalités utiliseront le reste
pour faire tous les aménagements qu'elles veulent faire?
M. Dufour: Vous avez le président de cette commission. On
parle de six, mais il y a un président. Il me semble qu'il peut trancher
la question lorsqu'un problème surgit. Vous ne devez pas l'ignorer.
C'est une personne importante, d'habitude, un président dans un
organisme, surtout avec les pouvoirs que vous voulez lui conférer.
M. Garon: Vous avez trois représentants de ville, trois
représentants de municipalités rurales et un président. Le
président préside et vote quand ils ne sont pas d'accord, quand
ils sont égaux. Ne pensez-vous pas que les agriculteurs ne
pèseront pas lourd à une telle commission?
M. Dufour: Je ne vois pas nécessairement le
problème de la même façon parce qu'on côtoie le monde
rural. On dit actuellement que les périmètres urbains sont assez
bien délimités dans la province et que si on peut rentabiliser ce
périmètre, il faudrait peut-être qu'on arrête de
faire de l'étalement. Une des façons, je pense que les villes
vont vous aider à cet égard. Elles vont protéger, parce
que j'ai amené des territoires agricoles dans ma ville. J'ai 80 milles
carrés de territoire. C'est assez grand.
M. Garon: Les villes sont d'accord.
M. Dufour: Et on essaie de protéger le territoire
agricole. Dans notre plan directeur d'urbanisme, on a porté justement
une attention spéciale. On connaît les cultivateurs qui veulent
cultiver et on connaît ceux qui ne sont pas intéressés. Ils
sont intéressés à vendre leur terrain et je pense que les
villes sont beaucoup plus jalouses qu'on en pense ce qu'on voudra
des territoires agricoles que les agriculteurs, parce qu'il faut bien penser
qu'on vient de quelque part, les gens des villes. Il n'y a pas tellement
d'années, on demeurait quelque part à la terre. Que ce soient nos
parents, nos grands-parents.
M. Garon: C'est-à-dire que les vrais agriculteurs, je
pense, sont jaloux de leurs terres. C'est important. Il y a des vrais et des
pas vrais, mais des vrais qui gagnent leur vie et qui sont fiers d'être
agriculteurs sont organisés.
M. Dufour: II y en a de bons.
M. Garon: Je ne parle pas des gars comme moi. Je parle des
vrais.
M. Charbonneau (Honorius): Les gens des municipalités sont
élus quand même et dans le passé, pourquoi ces mêmes
agriculteurs n'ont-ils pas protégé leurs terres agricoles?
N'avaient-ils pas les mêmes avantages? Ils auraient quand même pu
protéger leurs terres agricoles. J'ai confiance aux cultivateurs. J'en
ai été un à venir jusqu'à il y a quelques
années.
M. Garon: Vous savez comme moi que I'agriculteur, dans cette
position, entre vous et moi, c est un sophisme. C'est un peu comme
l'agriculteur sans plan conjoint. Il peut bien négocier les prix qu'il
voudra, tout seul, il est mal pris en maudit. D'accord, ils disent: On va
négocier cela ensemble pour avoir plus de force, un peu comme les
syndicats ouvriers qui disent: On va négocier des salaires ensemble. On
va être capable d'avoir plus de pouvoir de marchandage. Il faut un peu
cela pour avoir plus de force, mais si vous mettez le cultivateur tout seul
face à la spéculation, il est évident qu'il n'a pas de
poids.
M. Dufour: Là-dessus, M. le ministre, je m'inscris en faux
parce que vous avez déjà discuté avec des cultivateurs,
des vrais. Je ne parle pas des "cultivailleurs". Vous avez déjà
discuté avec des cultivateurs? Avez-vous déjà
arraché du poil là-dedans? Ils sont "tough" en saint-sirop!
Même si on est des villes, ils ne cèdent pas de terrain tellement
facilement. S'ils ne trouvent pas leur profit, ils vont dire non et ils disent
non longtemps.
M. Garon: Ce n'est pas le problème, c'est que le
cultivateur, un vrai, a peut-être comme voisin un pas vrai. Alors, lui,
il va vendre à un gars qui n'est pas intéressé. Qu'est-ce
qui va arriver? Toutes sortes de désagréments pour l'agriculteur
parce que le gars à côté ne s'occupe pas de son affaire. A
ce moment-là, cela pousse en friche, les mauvaises herbes, il va
peut-être faire toutes sortes de choses là-dedans qui vont causer
un paquet de problèmes à l'agriculteur et l'agriculteur veut
s'agrandir à un moment donné. Il n'est pas capable parce que le
gars spécule sur la terre. Il n'est pas intéressé à
la vendre à l'agriculteur. Il est intéressé à
attendre que le prix monte. Alors, est-ce que c'est cela le bien collectif?
M. Charronneau (Honorius): Mais, M. le ministre, est-ce que votre
loi sur le zonage agricole va quand même empêcher celui qui ne veut
pas cultiver de cultiver avec la loi actuelle?
M. Garon: On ne règle pas tout par cette loi-là,
mais dans toute chose il y a des étapes. C'est la première
étape. Il va en venir d'autres lois. Je n'ai pas déposé
tout mon arsenal.
M. Charbonneau (Honorius): Parce que je serais très
heureux, M. le ministre, si vous étiez capable de me garantir que,
demain, ceux qui veulent cultiver pourront le faire sans avoir de contrainte de
la part de leurs voisins, de la part des gens qui souvent ne sont pas des
agriculteurs et viennent détruire beaucoup plus l'agriculteur que les
villes et municipalités du Québec.
M. Garon: Je n'ai pas dit que c'étaient les villes et les
municipalités. Je n'ai jamais dit cela.
M. Charbonneau (Honorius): Non, mais seulement...
M. Garon: J'ai renconré assez de maires qui m'envoyaient
des télégrammes avant qu'on dépose la loi, qui
m'engueulaient pour protéger les terres agricoles. Je peux vous montrer
des télégrammes d'ici, pas loin, à l'île
d'Orléans, par exemple, les maires ont envoyé un
télégramme disant: Qu'est-ce que vous attendez pour
déposer votre loi pour protéger nos terres? On n'est pas capable
de faire face à la spéculation. J'ai entendu cela. Les trois
paroisses autour de Trois-Rivières, par exemple, les gens sont venus
nous rencontrer pour dire... Saint-Louis-de-France, je pense. Sainte-Marthe,
Pointe-du-Lac et l'autre, il me semble que c'est Saint-Louis-de-France. Ils
sont venus nous dire: On a beau en arrêter un, il en sort dix. C'est un
peu comme Belzébuth. Tu n'es pas capable d'arrêter cela. Alors,
ils disent: On n'est pas organisé pour arrêter la
spéculation. Les maires m'ont dit, et j'en ai rencontré autant
comme autant; On a besoin de votre loi.
Je regarde les municipalités, jusqu'à maintenant, il y a
quand même un tas de municipalités à qui j'ai parlé
depuis le dépôt de la loi qui disent que c'est une
bénédiction pour les municipalités. On va avoir un petit
ajustement, certainement; s'il n'y avait pas eu d'ajustement à faire, ce
ne serait pas des plans provisoires, ce seraient des plans permanents. Ce sont
des plans provisoires. On dit: la commission va arriver, vous allez discuter
ensemble, essayer d'établir une zone qui a du bon sens.
Je suis persuadé que l'ensemble des municipalités vont
s'entendre facilement, mais si elles ne s'entendent pas et disent: Je ne suis
pas intéressée à ça, la protection des terres
agricoles, je suis intéressée à d'autres affaires, qui va
décider à ce moment-là?
M. Charbonneau (Honorius): M. le ministre, ce que les
municipalités du Québec veulent avoir ce sont des outils
nécessaires pour conserver leur autonomie. Parce que, lorsqu'on conserve
l'autonomie des municipalités, nous conservons l'autonomie des citoyens.
Je pense qu'étant élus par ces gens, nous voulons que, dans la
province de Québec, le gouvernement ait sa place, que les
municipalités aient leur place et que les citoyens aient leur place.
C'est ce que l'Union des municipalités veut, en somme. Mais elle a peur,
je pense, à raison, qu'à un moment donné, l'infiltration
de l'Etat vienne lui enlever le peu d'autonomie qui lui reste.
Je pense que, dans ce sens-là, peut-être "roffement", en
terme d'habitant, j'en suis un, je n'ai pas honte de le dire, c'est
peut-être de ça qu'on a peur. On voudrait, dans une
municipalité
où il y a de l'industrie, où il y a des résidences,
où il y a de l'agriculture, que tout le monde soit à sa place et
que chacun n'aille pas enfarger l'autre. Je pense que les municipalités
du Québec sont d'accord là-dessus, mais elles ont quand
même peur d'une intervention trop prolongée de l'Etat dans les
pouvoirs des municipalités.
M. Garon: Vous êtes dans quelle production agricole?
M. Charbonneau (Honorius): J'étais dans la production
laitière.
M. Garon: Vous n'y êtes plus?
M. Charbonneau (Honorius): Je n'y suis plus depuis quatre ans.
C'est malheureux parce que j'y étais bien heureux. Des raisons
personnelles m'en ont sorti.
M. Garon: Non... Je ne le savais pas.
M. Charbonneau (Honorius): Quand on vieillit, M. le ministre, on
est comme tout le monde, on n'a pas de remplaçant, on est obligé
de laisser. J'y fait ma vie et je l'ai très bien faite.
M. Garon: Vous êtes tout jeune.
M. Charbonneau (Honorius): Pardon?
M. Garon: Je suis un peu myope, mais vous avez l'air tout
jeune.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le
député de Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Merci, M. le Président. Si j'avais
l'assentiment de tous les députés de la commission, je ferais une
demande pour que le premier intervenant pour notre groupe soit le
député de D'Arcy McGee. Est-ce que...
Le Président (M. Boucher): Est-ce que les membres sont
d'accord?
M. Giasson: Quitte à ce que je revienne au deuxième
ou au troisième tour de table.
Le Président (M. Boucher): D'accord. M. le
député de D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: Merci, M. le Président. Je remercie mes
collègues à cette table de m'accor-der le droit de parole. M.
Charbonneau, vous avez dit des choses que j'ai trouvées importantes et
précises et vous avez posé des questions que j'ai trouvées
particulièrement pertinentes.
Le ministre a dit, il y a quelques minutes, qu'il ne blâme
personne pour la perte de terres agricoles dans le passé et il a
précisé aussi qu'il ne blâme pas les municipalités,
ni de villes ni de campagnes. Pourtant, il me semble qu'il y a au moins une
critique négative qui est implicite dans la présentation de ce
projet de loi et dans les mécanismes qui sont créés pour
assurer la prise des décisions, quant au zonage agricole. Ces critiques
implicites sont devenues même un peu explicites dans les interventions de
certains membres de cette Assemblée.
Je vous pose une question qui est assez fondamentale et je ne la pose
pas dans un sens désobligeant. Il y a, dans le fait qu'on n'accorde pas
aux municipalités, ni aux municipalités rurales
représentées par les conseils de comté, ni aux
cités et villes, la principale responsabilité
décisionnelle quant au zonage agricole, il y a au moins cela qui dit,
sans le dire, que les municipalités ne sont pas capables d'assumer cette
responsabilité ou ne sont pas bien placées, ou ont des
intérêts qui ne vont pas dans le sens de ce que le gouvernement
veut réaliser. (17 h 30)
Je vous pose donc la question, sans revenir sur le passé, sans
essayer d'attribuer un blâme à qui que ce soit pour la perte de
terres agricoles. Quelle assurance l'Union des municipalités du
Québec peut-elle donner que, si sa proposition d'un organisme avec trois
représentants du monde urbain, trois du monde rural et un
président, si cela était accepté, si un mécanisme
avec des modalités différentes peut-être, mais, de toute
façon, un organisme où les municipalités du Québec
seraient valablement représentées et participeraient donc au
processus décisionnel, si un tel organisme était
créé, quelle assurance l'Union des municipalités du
Québec peut-elle donner à la population que cet organisme
fonctionnera dans l'intérêt de la collectivité, en toute
objectivité et éviterait les erreurs du passé?
M. Charbonneau (Honorius): Tout d'abord, M. le Président,
je dois dire qu'il est bien clair je le dis et je le
répète qu'en autant que nous aurons les outils
nécessaires pour mettre de l'avant une politique qui pourrait
protéger les sols agricoles, je suis convaincu que, chez les élus
municipaux du Québec, tant des villes que des municipalités
rurales, il y a une possibilité de garder, de protéger les sols
agricoles d'une manière convenable. Nous en sommes convaincus. Mais tout
cela, en autant que et je le répète encore une fois
l'Etat nous fournisse les outils nécessaires pour le faire. Je suis
convaincu que les élus municipaux peuvent en arriver, dans un projet
d'aménagement complet, et je dis bien dans un projet
d'aménagement complet... Je pense que le zonage agricole pourrait
être intégré dans un chapitre de la Loi sur
l'aménagement et probablement donner des résultats aussi
efficaces que ceux qu'elle va donner actuellement. J'en suis à peu
près convaincu.
Je dis ceci. L'aménagement du territoire et le zonage agricole,
qu'on l'ait gelé temporairement, je n'ai aucune objection à cela.
C'était peut-être de mise, dans un premier temps, pour
empêcher la spéculation. Nous avons eu suffisamment, dans le
passé, de spéculation au Québec. Il est temps
d'arrêter d'en avoir. Je pense que nous sommes
d'accord, les élus municipaux. C'est pour cela que nous avons
voulu, dans ce comité, laisser les décisions aux élus
municipaux. Nous pensons, l'Union des municipalités et je ne veux
pas parler pour l'Union des conseils de comté que nos élus
municipaux ont suffisamment d'envergure pour prendre de telles décisions
et aider le pouvoir public, c'est-à-dire le gouvernement du
Québec, à réaliser l'aménagement du sol
québécois.
M. Goldbloom: M. le Président, il y a deux thèses
fondamentales qui s'affrontent ici. A l'instar de l'Union des conseils de
comté qui, par le hasard de l'ordre de présentation des
mémoires, vous a précédés, vous insistez beaucoup
sur le rôle de l'élu municipal. Vous dites que celui qui se fait
élire au niveau de la municipalité a, par le fait même, une
responsabilité à l'égard de ses concitoyens et à
l'égard de l'administration du territoire de cette
municipalité.
Le ministre, de son côté, dit que le principal
intérêt doit être celui de protéger le sol arable.
Donc, il faut que les principaux responsables du processus décisionnel
soient des agriculteurs.
Je me pose, entre parenthèses, une question à cet
égard. Je me demande si, face aux pressions qui pourraient exister
à certains endroits, où l'offre, dans le contexte d'un
développement résidentiel, par exemple, pourrait être
très supérieure à l'offre d'achat d'une ferme comme ferme,
si un cultivateur, au nom d'un autre cultivateur, serait toujours prêt
à résister totalement à cette pression; j'aimerais vous
poser cette question: Laissant de côté l'aspect d'élection
au niveau municipal, laissant de côté la question de
l'expérience vécue dans le monde agricole, à votre avis,
quelles devraient être les qualités des personnes qui devraient
être nommées pour assumer cette responsabilité
décisionnelle?
M. Dufour: Tout en parlant des types du monde municipal?
M. Goldbloom: Vous dites que les responsables devraient
être des représentants choisis par le monde municipal, sauf le
président qui serait choisi par le gouvernement. Le ministre dit: Les
principaux responsables devraient être des agriculteurs et seulement
quelqu'un qui a vécu l'expérience agricole pourrait être
suffisamment motivé et suffisamment objectif pour savoir comment
protéger, et quand protéger et où protéger le sol
arable. J'aimerais vous demander si vous pouvez me donner en quelque sorte un
portrait robot de la personne à laquelle vous confieriez la
responsabilité de décider.
M. Dufour: On va essayer d'être le plus objectif possible
pour ne pas se décrire à travers cette personne-là. Cela
prend une personne je pense que le monde municipal a la preuve de cela
qui a certainement une connaissance de son milieu, quand je parle de
milieu, c'est un milieu plus grand que sa propre municipalité, qui s'est
impli- quée dans la vie économique de sa région, ou
même plus, de la province, ce qui suppose, au départ, une personne
d'une intégrité certaine.
Je pense qu'on peut les identifier, parce que lorsque les gens sont
élus, d'habitude, on peut voir assez facilement à qui on a
affaire, quels sont ces gens-là. On demande une intégrité,
pas d'intérêt personnel dans ces choses-là; des gens qui
n'ont pas fait de spéculation. Je pense que c'est bien important de les
éliminer au départ, parce qu'on aura tendance à aller
chercher ce qu'on a toujours fait et ce qu'on a voulu pratiquer ou favoriser
des groupes dans ce sens-là.
On demande des personnes qui ont une connaissance très grande de
leur milieu, des personnes qui ont des principes d'honnêteté et
des personnes de jugement.
Le meilleur critère, c'est encore le jugement. Cela se
répartit également un peu dans la population, il paraît que
ce n'est pas comme l'intelligence. Il y a des gens qui doivent avoir du gros
jugement, parce que c'est un ajustement qu'il va falloir faire par rapport
à un plan de zonage. Que ce soit de l'aménagement, du zonage
agricole, il y a certainement des ajustements qu'il faut faire. Cela demande
des gens qui ne sont pas, au départ, bornés à vouloir ou
à seulement écouter une partie, des gens aussi qui ont les
oreilles ouvertes, qui peuvent entendre ce qui se dit et essaient de porter des
jugements de valeur. Je pense que cela pourrait être un portrait robot
grossier. Je ne pense pas nécessairement que cette personne soit un
urbaniste. Je ne pense pas nécessairement que ce doive être des
gens qui ont des compétences particulières, par exemple, au point
de vue des finances. Pour moi, c'est important que la personne ait du gros bon
sens. Je pense que le ministre me comprend. Je pense qu'on pourrait dire que
c'est un homme de bon sens, dans son cas.
M. Goldbloom: M. Dufour, je suis très
intéressé par votre réponse, parce que, tout à
l'heure, quand le député de Montmagny-L'Islet a demandé, a
sollicité le consentement des membres de la commission pour que je
puisse prendre la parole, il y a eu certains sourires autour de la table comme
si je ne veux pas prêter des intentions à qui que ce soit
certains collègues se disaient: Mais, quelle expérience
a-t-il dans le milieu agricole et comment se fait-il que c'est lui qui
participe à cette discussion? Pourtant, je suis un élu du peuple
et j'ai la responsabilité, comme législateur, de me prononcer sur
ces questions agricoles, municipales et autres.
Je vous pose une dernière question. La voici. Le projet de loi,
tel que rédigé actuellement, n'assure pas que la terre
protégée par le zonage sera effectivement cultivée,
n'assure pas que la ferme achetée ne sera pas laissée en friche.
Comment verriez-vous, d'un point de vue municipal tenant compte de ce
que le ministre lui-même a dit, des problèmes de contagion, si
vous voulez, de mauvaises herbes et de mauvais drainage et tout cela, des
mauvais effets que cet abandon de la terre arable pourraient avoir sur des
terres voisines la prise d'une décision? Peut-être
qu'après un certain temps, on aurait essayé de trouver un vrai
agriculteur pour s'en occuper, pour cultiver ces terres, mais après
combien de temps verriez-vous une autre décision prise, une
libération de cette terre laissée en friche à d'autres
fins, disons, dans un sens très large, municipales?
M. Dufour: Je vais essayer de répondre à une partie
de la question. Parmi les mesures appropriées, il y aurait
sûrement, à mon point de vue, des mesures fiscales qui
grèveraient ce bien, qui feraient que la personne ne pourrait pas
laisser cela en friche, pour la spéculation. Pour moi, ce serait
important qu'une mesure fiscale soit appliquée à des gens qui
veulent garder des terres à but spéculatif.
M. Charbonneau (Honorius): En d'autres mots, M. le ministre, il
faudrait que les cultivateurs soient de vrais cultivateurs, et non pas des gens
intéressés que par le site géographique d'une ferme
lorsqu'ils l'achètent, par exemple. Assez souvent, c'est ce que nous
voyons. Le jour où on aura des vrais cultivateurs
intéressés tantôt, vous m'avez encouragé,
lorsque vous m'avez dit que vous étiez pour mettre de l'avant des
mesures pour que les cultivateurs puissent aller chercher des gains, je pense
que c'est la seule manière d'arriver à faire cultiver nos terres
agricoles.
M. Goldbloom: Sauf que ce que vous venez de dire, M. Charbonneau,
n'est pas assuré par la loi dans sa rédaction actuelle.
M. Charbonneau (Honorius): Non, actuellement, on protège
le sol agricole, mais on ne protège pas la productivité.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Huntingdon.
M. Dubois: Je voudrais saluer les quatre membres
représentant l'Union des municipalités du Québec et les
remercier du mémoire très intéressant qu'ils nous ont
présenté. Je crois que vous avez fait des remarques très
précises. Vous avez plusieurs réserves que nous avons
nous-mêmes sur le projet de loi. Premièrement, quand vous avez
parlé de plan global d'aménagement de territoire, comme l'Union
des conseils de comté l'a mentionné, ce fut une de nos grandes
réserves au niveau de la deuxième lecture de ce projet de loi. Je
dois vous dire que j'ai extrêmement confiance en la capacité des
élus municipaux, des élus du peuple, d'administrer un projet de
loi, d'émettre des permis. On sait toujours que, comme vous tenez compte
de toutes les lois qui touchent l'administration municipale, au niveau de la
commission municipale, vous administrez ces lois d'une façon convenable.
Je pense que vous êtes capables d'administrer une loi sur le respect des
sols fertiles de la même façon que vous le faites au niveau de la
commission municipale dans ses règlements et lois. Je crois que ce
serait manquer de respect envers les élus du peuple que de confier
strictement à une commission toute l'administration de ce projet de loi.
Connaissant bien le milieu, je crois qu'il serait désirable que vous
puissiez, premièrement, émettre des permis et, tout de suite
après, la commission pourrait peut-être juger de cette valeur.
S'il y a erreur, la commission pourrait vous rappeler à l'ordre plus
tard. Je pense que cela pourrait quand même être une formule qui
respecterait beaucoup le territoire agricole.
Je voudrais vous poser une question: connaissant à fond les vrais
producteurs agricoles, je me demande s'ils vont être heureux et je
vous pose la question de voir une commission qui siège à
Québec décider du sort des fermes québécoises et de
leur vocation, quand on a des élus du peuple qui sont près d'eux
et qui pourraient décider et administrer une loi. Ce que je veux savoir,
c'est comment vous pensez que le vrai producteur agricole va réagir,
parce qu'enfin on n'a pas eu tellement le son de cloche du vrai producteur
agricole, ici, ou de l'ensemble des producteurs? (17 h 45)
M. Dufour: Je pense bien que si on relit le mémoire, tel
que présenté, on a essayé de se mettre à la place
du régional ou du local pour pouvoir exprimer un point de vue, parce
que, si, comme élus d'un gouvernement local, nous n'exprimons pas les
vues de l'ensemble de nos contribuables, nous ne serons peut-être pas
là très longtemps. Donc, à ce moment, le sens du
mémoire de l'Union des municipalités est qu'on essaie de
répondre aux besoins du milieu et, les connaissant mieux, il est
peut-être plus facile de travailler avec lui. On peut donc donner une
réponse beaucoup plus rapide, plus adéquate et je ne vois pas
pourquoi la commission s'interposerait au niveau local, s'il n'y a pas de
difficulté.
M. Dubois: Une dernière question, parce que je crois qu'il
y a plusieurs collègues qui désirent en poser.
Je pense qu'on sait qu'environ 85% de notre PNB se situe en dehors des
activités agricoles et agro-alimentaires; ne croyez-vous pas que les
municipalités, les corporations municipales, les conseils de
comté ou les commissions régionales seraient plus aptes à
juger d'investissements parce que j'ai peur aux ralentissements
effectifs, alors qu'une commission aura à décider pour les 614
municipalités et de toutes les autres demandes qui seront
formulées par les résidents. J'ai peur qu'à ce moment les
85% d'activités qui se situent hors de l'agriculture et hors de
l'agro-alimentaire, soient pénalisés par une lenteur
administrative. Je pense que, dans le sens où vous présentez
votre mémoire, cela irait beaucoup plus vite au niveau administratif et
de la façon dont on jugera un cas particulier. J'aimerais avoir votre
opinion dans ce sens.
M. Dufour: Bien sûr, étant préoccupés
du milieu, il est important, pour nous, de donner des jugements le plus
rapidement possible et qui aient
le plus de valeur possible. Nous sommes peut-être plus sensibles
à ce qui se passe dans notre milieu, nous avons peut-être une
connaissance plus grande aussi; cela donnerait plus de satisfaction et, en
même temps, je pense qu'on aurait des réponses beaucoup plus
rapides à des problèmes qui seraient soulevés. Ce qu'on
craint avec la commission, c'est qu'elle impose d'en haut, et que les recours
doivent suivre. J'ai dit tout à l'heure qu'elle allait peut-être
manquer d'oreilles, mais elle va peut-être manquer de membres.
Il faut bien croire qu'il y a beaucoup de réponses qu'on pourrait
trouver à des problèmes précis, dans l'immédiat,
mais si on transfère tout cela à une commission de sept membres,
comment trouver le moyen de couvrir tout le territoire? C'est ce qui nous fait
un peu peur.
M. Dubois: C'est d'ailleurs l'une de nos préoccupations.
Je vous remercie, M. le Président, je passe la parole à
d'autres.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: Merci, M. le Président, je veux à mon tour
remercier les représentants de l'Union des municipalités du
Québec de s'être donné la peine de préparer un
mémoire, de se déranger et de venir en commission parlementaire
nous exprimer leur point de vue pour nous apporter le plus d'éclairage
nécessaire, face aux responsabilités que nous aurons, au cours
des prochains jours et des prochaines semaines.
Si j'ai bien compris votre mémoire, il y avait un point central,
c'est que vous craignez énormément l'érosion du pouvoir
municipal de par l'application du projet de loi 90, alors, que, d'un autre
côté, on a beaucoup parlé, il n'y a pas tellement
longtemps, et on en parle encore beaucoup de la revalorisation du pouvoir
municipal.
Le ministre, quant à lui, d'après les remarques qu'il a
faites d'ailleurs, hier, cela a été à peu
près la même chose n'a pas l'air d'avoir une grande
confiance dans le rôle que pourraient et devraient jouer les
municipalités et les conseils de comté dans la protection des
terres arables.
Vous nous avez dit que, si vous aviez les outils nécessaires,
vous pourriez faire davantage que ce que vous avez fait jusqu'à
maintenant et ce que vous pouvez faire maintenant.
Quels sont les outils? Pourriez-vous nous dire ce qui manquerait aux
municipalités du Québec comme outils pour pouvoir faire le
nécessaire dans ce secteur et voir à assumer une protection
adéquate du territoire agricole dans chacune de vos
municipalités?
M. Dufour: Je pense que, d'abord et avant tout, c'est une loi
habilitante, donc une loi qui nous permette de le faire. Une deuxième
chose, c'est d'avoir un plan d'aménagement du territoire, parce qu'il
faut l'appliquer. Je pense que ce sont les deux outils qui nous permettraient
d'agir parce que, si on regarde l'ensemble des municipalités du
Québec, dans l'ensemble des pouvoirs qui leur sont
accordés, à condition que les moyens financiers suivent, qu'ils
soient avec, je pense que les municipalités ont prouvé leur
sérieux et ont prouvé aussi leur engagement à la
collectivité parce que je pense qu'il y a moins de perturbation dans le
domaine municipal que dans n'importe quel gouvernement.
Il y a une bonne raison. Il y a un besoin de stabilité et je
pense que ce qui donne le plus de stabilité dans la province, ce sont
les gouvernements locaux, où les gens peuvent s'identifier, venir parler
et venir mieux expliquer leur point de vue.
M. Roy: Quand vous parlez d'une loi habilitante pour bien
nous éclairer sur ce point vous voulez dire que les
municipaliés du Québec, actuellement, n'ont pas les pouvoirs de
faire des législations, des plans en vue de procéder à la
protection du territoire agricole.
M. Dufour: On peut le faire localement et on le fait. Si je
prends ma municipalité et on parle des choses qu'on connaît
le mieux on a un pouvoir, on l'exerce à 100%, mais, lorsqu'on
regarde un territoire qui est plus grand que la municipalité, à
ce moment, cela ne peut pas exister.
M. Roy: II ne peut y avoir de concertation, en vertu des lois
actuelles, au niveau du conseil de comté, de collaboration entre les
municipalités.
M. Dufour: Vous savez bien que, quant à la bonne
volonté, tout le monde veut aller au ciel, mais personne ne veut
mourir.
M. Roy: Oui, je sais bien. On connaît le vieux dicton. Il y
a aussi un aure point sur lequel...
M. Garon: ... dicton?
M. Roy: Le vieux dicton: Tout le monde veut aller au ciel, mais
personne ne veut mourir.
M. Garon: Ah!
M. Roy: C'est le cas du ministre.
M. Garon: C'est vrai.
Une Voix: II risque d'aller au purgatoire.
M. Roy: Oui, il risque d'y être un peu plus longtemps.
Une Voix: Ou aller au diable vauvert.
M. Garon: Les libéraux... Les curés ont toujours
dit que l'enfer était rouge. Donc, on ne sera pas là.
M. Roy: II y a également un point, une constante qu'on
retrouve dans les mémoires qui ont été
présentés jusqu'à maintenant et dans les
remarques dont nous avons pu prendre connaissance. On craint
énormément le pouvoir trop excessif, trop centralisateur, pour
employer le terme, de la commission actuellement composée de sept
membres. On a beaucoup parlé d'instances régionales. L'Union des
conseils de comté a parlé, tout à l'heure, d'avoir des
instances au niveau des comtés municipaux.
J'aimerais avoir votre opinion sur la suggestion qui a été
faite par plusieurs, solution ou suggestion que j'ai reprise. Etant
donné qu'il y a douze grandes régions agricoles au Québec,
serait-ce acceptable par l'Union des municipalités du Québec
qu'il y ait des commissions régionales à l'intérieur de
chacune de ces douze grandes régions qui seraient, en somme, beaucoup
plus près des instances municipales, des instances locales qu'une seule
instance provinciale et qui pourraient travailler en étroite
collaboration avec les autorités municipales, les autorités des
municipalités et des conseils de comté de même que les
bureaux régionaux d'agronomes, les services du ministère de
l'Agriculture, l'UPA, les fédérations régionales de l'UPA.
Nous nous retrouverions en somme à impliquer le plus de gens possible
dans la mise en valeur du territoire de chacune de leurs régions et voir
à assumer une politique de protection qui tient compte de la
réalité régionale, qui tient compte du caractère de
chacune des régions. Est-ce que cela pourrait donner satisfaction
à l'Union des municipalités du Québec?
M. Dufour: Ce qui nous fait peur, c'est qu'en même temps
qu'on parle de zonage agricole, on parle aussi d'aménagement du
territoire et, dans l'aménagement du territoire, on parle de
régions d'appartenance, de petites régions. Si vous enlevez ces
commissions locales ou, par région d'appartenance, vous les diminuez,
mais plus vous êtes loin du pouvoir décisionnel, plus cela va
prendre du temps, nous disons: S'il y a un organisme ou s'il y a une loi
d'aménagement du territoire, à l'intérieur de laquelle va
être compris le zonage agricole, il devrait y avoir autant de commissions
qu'il y a de régions d'appartenance. C'est pourquoi il faut un arbitre,
parce que si cela vient en appel, une raison pour des appels plus loin, en
même temps, cela donne l'assurance que les causes et les problèmes
vont être soulevés, ils vont se régler beaucoup plus vite.
Parce que ces gens-là qui vont avoir une fois pour toutes... Je pense
bien qu'il faut se comprendre. Un gouvernement, d'habitude, veut régler
les problèmes, il ne veut pas en créer. Il en crée des
fois, mais normalement il ne veut pas en créer. Je dis que le pouvoir
local, n'est pas différent des autres pouvoirs. Il veut régler
des problèmes, pas à n'importe quel prix et dans n'importe quelle
condition. Ce qui serait laissé pour compte, ce ne serait pas l'ensemble
des problèmes qui seraient soulevés, mais une petite partie,
parce que je pense que dans ces commissions il y aurait moyen de trouver des
terrains d'entente.
M. Roy: En somme, si je comprends bien, vous êtes en faveur
du fait que le zonage agricole, que la protection des terres arables se fasse
à l'intérieur d'un plan d'aménagement complet et qu'il n'y
ait qu'une seule commission qui verrait à l'équilibre du
territoire dans chacune des régions avec le plus de
décentralisation possible. N'est-ce pas là votre propos?
M. Dufour: Une vérité de La Palice.
M. Roy: J'aurais une dernière question. J'avais
effectivement hâte de pouvoir rencontrer les autorités municipales
pour la poser. La question nous est posée par la population et il est
assez difficile d'y répondre.
Le territoire est gelé actuellement dans une partie du
Québec, surtout dans le plateau du Saint-Laurent. La commission n'est
pas formée. Quelles sont les conséquences, les
inconvénients que cette situation implique actuellement sur le plan de
l'administration municipale?
M. Casault (Henri): Avec la permission de M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): Oui, M. le maire.
M. Casault: Nous avons, à l'heure actuelle, ici dans la
région de Québec, dans le territoire de la Communauté
urbaine, des pertes énormes qui vont être subies par des gens qui
ont acheté des terres, qui n'étaient pas cultivées, en vue
d'un développement futur.
Alors, je peux vous dire qu'il y en a quelques-uns qui m'ont
approché et il va y avoir quelque $100 000 de pertes, seulement dans la
région de Québec, si c'est gelé bien longtemps, à
cause des investissements qui y ont été faits. Il y aurait
peut-être une autre partie de la réponse, nous vivons ce soir les
élections de la nouvelle Communauté urbaine de Québec et
nous avons, dans cette loi, le devoir d'aménager le territoire de la
Communauté urbaine de Québec. Depuis le dépôt de la
loi 90, on voit des espaces verts et je vous dis franchement que lorsque
l'Union des municipalités demande qu'il y ait des représentants
locaux, si je prends une remarque de M. le ministre, il dit que ceux qui vont
cultiver des terres et ceux qui veulent se bâtir, qu'ils aillent
ailleurs.
Dans notre territoire de Charlesbourg, vous avez deux territoires,
Beauport et Charlesbourg, qui sont construits jusqu'au boulevard de la Capitale
et vous avez un espace vert qui est à peu près le seul, parce que
ça fait plus qu'un an que nous avons des experts qui travaillent le
nouveau plan directeur de la ville de Charlesbourg. Si on va un peu plus loin,
les services vont coûter trois à quatre fois plus cher, vu les
accidents de terrains, le roc, ces choses-là. Des experts dûment
mandatés nous disent: II faudrait que vous réserviez ça
pour du développement à meilleur marché.
Je me demande, avec le devoir que la Communauté urbaine va avoir
de faire un schéma d'aménagement du territoire de la
Communauté urbaine de Québec, comment on va pouvoir faire la
relation entre la nouvelle commission et le schéma d'aménagement.
Je pense que là, les difficultés vont s'agrandir au lieu de
diminuer.
M. Roy: Cela veut dire, tant et aussi longtemps que la commission
n'est pas nommée, il est absolument impossible d'avoir un permis, de
bouger à l'intérieur des territoires réservés?
M. Casault: Surtout de lotir.
M. Roy: De lotir à l'intérieur des territoires
réservés. Dans la zone verte, pour la partie qui vous concerne,
est-ce qu'il y avait effectivement des terrains déjà lotis?
M. Casault: Oui, il y en a une partie seulement, mais il y en a
d'autres qui ont été achetés, qui ne sont pas lotis, du
fait que nous n'étions pas en mesure de leur donner des services
immédiats.
M. Roy: Lorsque vous parlez de pertes, ce sont des pertes dues
aux délais ou aux dangers que ça comporte.
M. Casault: Cela va être à cause des délais,
surtout dans la région de Saint-Augustin, qui fait partie de la
Communauté urbaine de Québec.
M. Roy: J'aurais une question à poser au ministre, avec
votre permission, M. le Président, Le député de
Bellechasse avait souligné cette question lors de son intervention de
deuxième lecture, pour voir si on songe à ce qu'il y ait quelque
chose de provisoire, en attendant que la loi soit votée.
M. Garon: Pensez-vous que, dans la ville de Charlesbourg, il
serait bon de bâtir des maisons dans des territoires où il n'y a
pas de services?
M. Casault: Les services sont à côté. Ce sont
des prolongements de services, M. le ministre.
M. Garon: II n'y a pas de services actuellement.
M. Casault: Non, il y en a une partie qui est à se
lotir...
M. Garon: Je vous pose une question précise. Est-ce qu'il
serait bon, dans votre ville, de bâtir des maisons à des endroits
qui ne sont pas desservis par des services?
M. Casault: Le développement s'est fait comme cela, mon
cher monsieur, et nous sommes la deuxième ville en population du
Québec.
M. Garon: Vous bâtissez les maisons avant d'apporter les
services?
M. Casault: Naturellement qu'on met les services. Les
entrepreneurs paient les services à tant le pied et ils s'en vont avec
cela. On a un plan triennal et ils s'en vont avec cela. Il y en a qui n'ont pas
eu les services en 1978, et ils ne les auront peut-être pas en 1979, mais
ils ont acheté pour avoir des services d'ici quelques années.
Vous avez d'autres exemples je ne voudrais pas prendre
Charlesbourg comme exemple là où les parents sont partis
et les fils ne veulent pas cultiver, ne veulent pas vendre cela au prix d'une
terre. Les enfants disent: Nous sommes sept ou huit et nous vendons la terre
pour faire du développement, on ramasse notre héritage et on s'en
va.
M. Garon: Vous, vous aimeriez mieux, au fond, qu'on bâtisse
les maisons sur les terres et qu on envoie l'agriculture sur la roche?
M. Casault: Je parle pour Charlesbourg, M. le ministre, si vous
le permettez. J'ai été élevé à la campagne.
Je ne parle pas de Saint-Hilarion. Je vous parle de Charlesbourg.
M. Garon: Oui.
M. Casault: Je pense bien qu'il faut prendre les mesures
où on vit à l'heure actuelle. Si on était à
Saint-Pierre-de-Montmagny, où j'ai été
élevé, il y en a encore de bons cultivateurs.
M. Roy: M. le Président, j'ai posé la question
à l'honorable ministre. Je veux remercier d'ailleurs les gens de lUnion
des municipalités du Québec. Mais la question que j'ai
posée à l'honorable ministre n'était pas
nécessairement pour Charlesbourg et un cas dans la ville de
Charlesbourg. Le territoire qui est gelé actuellement est assez grand
dans le territoire du Québec et il y a sûrement un certain nombre
de cas frontières, de cas qui ont été suspendus et qui
pourront, à la suite de la décision qui sera rendue, être
exclusivement réservés au territoire agricole ou
libérés. Je ne veux pas entamer le débat sur tel ou tel
territoire à ce moment-ci.
Mais, étant donné que c'est gelé, cela paralyse
certainement un bon nombre d'investissements, je voudrais demander au ministre
si, en attendant, il est prévu, à moins que la commission soit
nommée aussitôt que la loi sera franchi l'étape de I
adoption finale à l'Assemblée nationale, mais la commission
parlementaire va siéger encore une partie de la semaine prochaine... (18
heures)
M. Garon: II n'y a rien de paralysé. Je vais vous dire
pourquoi.
M. Roy: II n'y a rien de paralysé, vous dites? M.
Lavoie: Tout est paralysé. M. Garon: Voyons donc!
M. Giasson: Article 32. La commission n'existe pas.
M. Cordeau: M. le ministre, apprenez-nous une bonne nouvelle.
M. Garon: Apprenez à lire la section des droits acquis et
l'article 31 qui dit: Dans une région agri-
cole désignée c'est en plus des droits acquis
le propriétaire d'un lot vacant en vertu d'un titre
enregistré le 9 novembre 1978, peut y construire, dans les trois ans de
cette date ou, le cas échéant, de la date d'entrée, en
vertu du décret visé à l'article 22, sans l'autorisation
de la commission, une seule résidence et utiliser à cette fin une
superficie n'excédant pas un demi-hectare.
Evidemment, cela a pour but d'empêcher des développements
dans les terres agricoles. On veut protéger les terres, c'est
évident.
M. Lavoie: Mais, pour les cas frontières, comme vient de
le dire M. le maire?
M. Garon: Laissez-moi finir. Je dis que cela a pour but de
protéger les terres. La loi protège.
M. Roy: Je comprends...
M. Garon: Mais l'individu... Ecoutez, à moins qu'on
veuille continuer et dire: Tout le monde veut aller au ciel et personne ne veut
mourir. On veut protéger les terres. A ce moment-là, il ne pourra
pas y avoir de développement dans les terres comme avant.
M. Roy: M. le Président, sur un point de règlement.
Ce n'est pas la question de remettre en cause le principe du zonage des terres
agricoles et la protection des terres agricoles. La question que j'ai
posée était bien précise. Il y a un certain nombre de cas
frontières...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Beauce-Sud, je suis obligé de vous interrompre sur cette question.
M. Lavoie: On peut permettre une dernière question.
Le Président (M. Boucher): Cependant, il reste que le
projet de loi va être discuté article par article et les questions
que vous posez au ministre se situent à un stade
précédent.
M. Cordeau: Non.
M. Roy: Non, c'est complémentaire.
Le Président (M. Boucher): II est 18 heures. Avec le
consentement des membres...
M. Charbonneau (Verchères): M. le Président, sur
une question de règlement. Y aurait-il possibilité, étant
donné que cela fait un peu plus d'une heure que les représentants
de l'Union des municipalités témoignent, qu'on s'entende et qu'on
finisse leur témoignage pour qu'ils n'aient pas à revenir
à 20 heures? Ils ont attendu tout l'après-midi et...
Le Président (M. Boucher): II reste encore quatre
intervenants qui ont demandé la parole.
M. Roy: Etes-vous disponibles pour revenir ce soir?
M. Dufour: Nous sommes prêts à revenir. Le
Président (M. Boucher): Alors...
M. Charbonneau (Verchères): Le député de
Beauce-Sud vient de me faire signe qu'il serait d'accord pour qu'on termine
avec l'Union des municipalités. Est-ce que mes collègues...
M. Roy: Ecoutez, je ne veux pas empêcher mes
collègues de poser des questions. C'était la dernière
question que j'avais à poser. Elle était complémentaire
à celle que j'avais adressée à l'Union des
municipalités du Québec. Je ne prévois pas avoir d'autres
questions, pour ce qui me concerne, mais je ne veux pas empêcher mes
collègues, d'un côté ou de l'autre de la table,
d'interroger les représentants de l'Union des municipalités du
Québec, parce que je considère que c'est un des mémoires
importants que nous avons à examiner.
M. Giasson: M. le Président, si vous me permettez,
j'aimerais savoir des trois principaux intervenants qui ont reçu la
visite du maire de Charlesbourg s'il leur est possible d'être ici ce soir
sans que cela ne pose aucun problème à leur horaire.
M. Pageau (Marcel): Ce soir, on a la communauté
urbaine.
M. Giasson: La communauté urbaine. M. Pageau (Marcel):
C'est à 20 heures.
M. Dufour: Pour les trois ici, je peux peut-être
répondre. On a un comité qui devait siéger avec ies
ministres Léonard et Tardif et qui demande à peu près deux
heures. Je pense qu'on pourrait être de retour à 20 heures, pour
continuer.
M. Charbonneau: Puisque cela ne vous embête pas de revenir
à 20 heures.
Une Voix: Ils ont déjà un rendez-vous à 18
heures, on ne peut pas les retarder.
M. Dufour: Ce sera à choisir, parce qu'on va perdre des
ministres en chemin.
Le Président (M. Boucher): La commission suspend ses
travaux jusqu'à 20 heures.
Suspension de la séance à 18 h 4
Reprise de la séance à 20 h 7
Le Président (M. Boucher): A l'ordre! A la suspension de
18 heures, nous en étions au
mémoire de l'Union des municipalités du Québec. M.
le député de Beauce-Sud avait la parole. Je remarque que ce
dernier n'est pas encore arrivé. Je vais donner la parole
immédiatement à M. le député d'Arthabaska.
M. Baril: Quand on a terminé à 18 heures, on
discutait un peu du gel des terres, à cause du projet de loi, et des
inconvénients que cela causait. Chose qui est peut-être vraie dans
certains cas. Il y a une chose qui est quand même surprenante, c'est que
depuis que cette loi a été déposée, il y a
plusieurs citoyens, individus ou organismes qui se disent lésés
dans leur droit à cause de cette loi. C'est seulement depuis le 9
novembre, parce que supposément, ils étaient censés se
construire, s'établir ou acheter un terrain quelque part, mais si ce
n'est pas fait, c'est parce que le notaire n'a pas eu le temps, il y a toutes
sortes de raisons.
Il a été fait mention aussi qu'il y a des gens qui vont
perdre jusqu'à $100 000, $150 000 ou $200 000, ceux qui avaient
acheté toute une terre pour faire du développement. Comment
voyez-vous cela? Cela fait dix ou quinze ans que ces gens ont acheté des
terres des terres qui sont sous spéculation, on en voit beaucoup
à travers le Québec où il n'y a jamais eu de
développement. Pourtant, depuis le 9 novembre, ce serait censé,
du jour au lendemain, tout être développé et tout
être construit. Quelle est votre opinion à cet égard?
M. Dufour: On pourrait peut-être dire, par exemple, que
l'Union des municipalités n'a pas soulevé ce point dans son
mémoire. Il a été soulevé par le
député de Beauce-Sud, à savoir ce qu'on en pensait. Nous
avons exprimé une opinion, mais elle n'est pas contenue dans notre
mémoire. Il y a un de nos membres qui a donné un point de vue,
qui est plus personnalisé qu'un point de vue de l'union comme telle;
parce qu'on est bien conscient que pour déposer un projet de loi
semblable, il n'y avait pas tellement de portes de sortie pour le gouvernement,
à savoir comment procéder. Je pense qu'on n'a pas de leçon
à donner au gouvernement. Il devait prendre une attitude. Même si
on pense qu'il y a des choses qui ne sont pas correctes, on souhaite seulement
une chose, c'est que cela s'ajuste le plus vite possible, pour causer le moins
de torts possible. Voilà le point de vue de l'union.
On est conscient que si on dépose une loi, il faut bien y mettre
un arrêt quelque part. Vous avez décidé que c'était
le 9 novembre. Je ne pense pas que l'union conteste ce point de vue du
gouvernement.
M. Baril: J'en faisais mention parce que, tout à l'heure,
vous aviez...
M. Dubois: Quelques jours avant la deuxième lecture du
projet de loi 90, j'ai été le premier, je crois, à
soulever la question dune possibilité pour le gouvernement d'amener une
mesure législative qui préconiserait une commission provisoire
pour prendre en considération les cas urgents. A ce moment, le ministre
n était pas en Chambre je pense que son absence était
motivée puisqu il était à Saint-Hyacinthe, avec le
député de Saint-Hyacinthe, je comprends cela j'ai
posé la question au ministre d'Etat au développement
économique.
M. Garon: Le député de Saint-Hyacinthe était
avec moi, on allait inaugurer une usine, dans le secteur alimentaire...
M. Dubois: Oui, je le savais, j'ai posé la question parce
que j'avais un cas urgent...
M. Garon: Comme le député de Saint-Hyacinthe essaie
de se coller à moi le plus possible pour avoir l'air de faire quelque
chose...
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît! M.
Dubois: Ma petite question est celle-ci... M. Roy: Le ministre est
donc bien agressif!
M. Dubois:... c'est que j'ai soulevé la question à
I'Assemblée nationale, bien avant la deuxième lecture j'ai
d'ailleurs été le premier à la soulever j'ai
posé la question au ministre d'Etat au développement
économique, mais il ne pouvait pas me répondre, il m'a dit: Le
ministre de l'Agriculture n'est pas là et il répondra plus tard,
si vous posez la question à nouveau.
Je me demande pourquoi le ministre n a pas présenté une
mesure législative, en même temps que le projet de loi 90,
préconisant une commission provisoire, parce qu'on sait pertinemment que
certains territoires, avant que le plan ne soit présenté, vont
être gelés pour X mois. Combien de mois? Je ne sais pas,
dépendamment du temps que prendra la municipalité pour
présenter son plan d'aménagement de territoire. Je pense que cela
aurait été une mesure quand même assez simple. Je ne sais
pas si le ministre a eu peur que I'Opposition charrie sur un petit projet de
loi, pendant deux mois et retarde son projet de loi, enfin je pense qu'on n
aurait pas fait cela parce qu on savait que c était important d avoir
une mesure qui aurait tenu compte des cas urgents.
M. Garon: Non, je l'ai dit hier en Chambre, je n'ai pas eu
confiance. Hier, il y a eu une entente entre les partis pour qu'on prenne le
vote à 18 heures, cela voulait dire que je devais faire ma
réplique à 17 h 40, lOpposition n'a même pas
respecté cela; vous pensiez que j'allais prendre une chance sur une
commission provisoire pour me faire charrier dans deux débats? Je n ai
pas pris de chance!
M. Dubois: Mais, au niveau économique, c'est important et
vous le savez à part cela!
M. Garon: L'Opposition ne respecte pas ses
engagements... Ecoutez, je ne dis pas: Toute l'Opposition...
M. Dubois: Si vous pénalisez l'économie du
Québec pour l'attitude que peut avoir l'Opposition et c'est
normal quand même, c'est notre devoir de bonifier les lois, vous le
savez.
M. Garon: Je vois le député de Beauce-Sud qui veut
protester. Je dois dire d'avance que je ne le visais pas quand je disais
cela.
M. Roy: Je l'espère!
M. Dubois: Je pense que c'est normal qu'on travaille pour
bonifier les lois.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Huntingdon, ceci étant dit, je redonne la parole au député
d'Arthabaska.
M. Roy: M. le Président, je m'excuse, mais j'avais la
parole au moment de l'ajournement.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Beauce-Sud, je regrette, mais j'ai donné la parole au
député d'Arthabaska, étant donné que vous
n'étiez pas présent au moment de l'ouverture de la
commission.
M. Roy: C'était sur le même sujet.
Le Président (M. Boucher): Je vous reconnaîtrai
immédiatement après le député d'Arthabaska.
M. Roy: C'est que c'était sur le même sujet et cela
y faisait suite explicitement; en 30 secondes on pourrait peut-être
régler la question.
Le Président (M. Boucher): J'aimerais que le
député d'Arthabaska termine son intervention et, par la suite,
vous pourrez intervenir.
M. Baril: Je ne veux pas déplaire au député
de Beauce-Sud.
M. Roy: Non. Pas de problème.
M. Baril: Je comprends que cela n'était pas dans votre
mémoire, mais vu qu'un de vos représentants en a fait mention
tout à l'heure, je tenais à avoir certains
éclaircissements.
Un autre point qu'on retrouve dans plusieurs mémoires, c'est au
niveau de la décentralisation administrative et du rôle
administratif qu'on aurait dû donner aux conseils municipaux, aux
conseils de comté. Vous en faites également mention vous aussi
dans votre mémoire.
J'aimerais aussi connaître votre opinion à ce point de vue.
On a dit tout à l'heure qu'une certaine partie des conseils municipaux
étaient représentés par des agriculteurs élus
démocratiquement. C'était vrai, c'est encore vrai, mais cela s'en
vient peut-être de moins en moins vrai.
Si on part de cela et qu'on dit qu'il y a des agriculteurs qui font
partie des conseils municipaux, donc, ils sont censés représenter
et défendre en même temps la classe agricole. Si on regarde dans
le passé, il y a des municipalités qui se sont voté des
règlements de zonage, dont certains étaient excellents, mais, par
contre, d'autres favorisaient plus le développement urbain qu'ils ne
protégeaient l'agriculteur.
On sait que la classe agricole est représentée et
très bien représentée par son syndicat, qui est l'UPA.
Donc, ces mêmes personnes se retrouvent à deux paliers
représentatifs, qui sont les conseils municipaux et le syndicat. (20 h
15)
Les conseils municipaux voudraient avoir des pouvoirs administratifs
dans la loi, ils voudraient avoir beaucoup plus de contrôle pour eux et,
d'un autre côté, ces mêmes agriculteurs qui sont
représentés par l'UPA nous disent: Ne donnez jamais cela aux
conseils municipaux, ni aux conseils de comté. C'est le gouvernement qui
doit prendre cela et c'est lui qui doit contrôler cela. Donc, si on part
de ces deux philosophies, j'aimerais un peu connaître comment vous
expliquez cela, d'autant plus qu'il y a beaucoup de maires et de conseillers
qui, individuellement, nous disent, nous laissent entendre qu'ils ne sont pas
capables. En tout cas, ils ne se sentent pas capables, ils ne veulent pas
toucher à cela, parce que c'est trop malin, c'est trop grave et trop
propre.
M. Charbonneau (Honorius): M. le Président, je pense bien,
d'abord, pour répondre au début de votre question... Vous avez
dit qu'il y avait des agriculteurs qui étaient maires, qui
étaient éche-vins; il y en a peut-être de moins en moins,
mais c'est comme dans toutes les autres classes de la société; je
pense bien que, dans un conseil municipal, il y a des gens de toutes les
classes de la société.
Deuxièmement, vous nous avez demandé, à un moment
donné, comment il se fait que les agriculteurs eux-mêmes ne
voulaient pas que ce soient les conseils municipaux qui prennent en main leurs
affaires. Je pense bien, sans déplaire à qui que ce soit comme
agriculteur, que, si les agriculteurs sont certains aujourd'hui de remplir leur
tâche en prenant en main leurs affaires, ils auraient dû le faire
plutôt que de laisser le soin au gouvernement et aux municipalités
de prendre l'affaire en main. Il y a quand même cela, je pense, parce
qu'actuellement, ces gens-là vous disent: Ne donnez pas cela aux
municipalités. Alors, si on regarde ce qui s'est fait dans le
passé, ce serait peut être une bonne chose que les
municipalités les aident. Je pense qu'il y aurait quelque chose à
faire; ces gens des municipalités sont quand même des gens
élus. Ils ont des responsabilités. S'ils ne font pas l'affaire,
aux prochaines élections, ils auront seulement à les mettre
dehors. Personnellement, j'ai fait, dans ma ville, un plan de zonage et jamais
je n'ai eu d'opposition des agriculteurs. Ce que j'ai eu d'opposition,
c'était beaucoup plus des citadins que des agriculteurs. Je pense que
les municipalités sont prêtes à prendre
leurs responsabilités en collaboration avec la classe agricole,
dans certains endroits où c'est nécessaire de le faire, mais il
ne faudrait pas que ces gens-là pensent que les municipalités ne
peuvent rien faire pour eux aussi bien que l'Etat ne peut rien faire pour eux.
Parce qu'ils ont des responsabilités comme nous en avons.
M. Baril: Je comprends, mais, quand même, on voit une
tendance très nette, très claire de la part des agriculteurs de
laisser diriger cela par les conseils municipaux ou les municipalités.
Pourtant, je sais qu'eux-mêmes savent qu'ils sont
représentés par des agriculteurs à ces mêmes
conseils. J'ai fait partie d'un conseil municipal et je suis un agriculteur
également. J'ai essayé de faire voter un règlement de
zonage dans ma municipalité. Je n'ai jamais été capable.
Pourtant, c'étaient pour tous des agriculteurs qui siégeaient au
conseil municipal. Je n'ai jamais été capable d'en faire voter
un. Pourquoi? Parce qu'on disait: II n'y a pas de danger, c'est bien trop
grave. Le problème n'est pas là. Vous savez qu'il y a des
municipalités aujourd'hui qui ne sont même pas conscientes des
problèmes de développement urbain dans leur paroisse. C'est
vrai.
Bien plus que ça, il y a des municipalités où on
commence à avoir une sensibilisation, heureusement. S'il y avait un
groupe de citoyens qui désiraient se présenter pour faire valoir,
démocratiquement, leurs idées à un conseil municipal, ce
serait assez facile pour eux, parce que dans certaines paroisses, il y a plus
de résidents non agriculteurs dans les municipalités que
d'agriculteurs eux-mêmes. Donc, ce serait assez facile de se former un
conseil municipal, majoritairement, de représentants non agriculteurs
qui ne s'intéressent absolument pas ou, plus ou moins, à
l'agriculture.
C'est pour cette raison, quand on voit les agriculteurs eux-mêmes
avoir des réticences à donner tous les pouvoirs ou toute la
latitude possible aux conseils municipaux pour administrer une telle loi, que
je voulais vous entendre expliquer, parce que les deux groupes sont
représentés.
M. Dufour: J'ai bien l'impression que lorsque vous affirmez que
certains agriculteurs ne veulent pas que les municipalités s'embarquent
là-dedans, c'est d'abord l'expression d'une méconnaissance d'un
plan d'aménagement de territoie, d'une loi de zonage. Je pense qu'au
départ, ils ont peur. Ils pensent aussi qu'en confiant leur
problème à un gouvernement supérieur, c'est un peu
naturel, il y a beaucoup de gens qui disent: Quand on n'est pas capable de
régler notre problème, on va l'envoyer plus haut pour le
régler. Il n'y a rien de plus faux, parce que penser que le gouvernement
d'en haut est plus fin que celui d'en bas, au départ, c'est une mauvaise
interprétation ou une mauvaise vision de l'administration
municipale.
J'ai l'impression que les gens qui font des représentations
semblables ne connaissent pas ce qu'est un plan de zonage, ce qu'est un plan
d'urbanisme, ce que tout cela veut dire. Ils ont peur au départ et ils
disent: Peut-être que nos gars ne sont pas bien fins, ils ne l'ont jamais
fait et ils vont venir nous dire quoi faire. C'est plutôt une
méconnaissance du sujet qu'une réticence par rapport à la
responsabilité qui pourrait être exercée localement.
Vous avez dit: J'ai voulu en établir un, en faire adopter un chez
nous et ils ont dit non. Pourquoi ont-ils dit non? C'est parce qu'ils ne
connaissent pas ça; parce qu'il y a une façon de protéger
tout le monde, au point de vue de la justice et de l'équité, ave
un plan directeur d'urbanisme, on sait où on va.
M. Baril: II faut bien admettre, si on veut être terre
à terre, être réaliste...
M. Dufour: D'ailleurs, on est comme ça.
M. Baril: ... que quand il y a une mesure à adopter,
d'avance, on le sait, elle ne plaira pas à tout le monde, parce qu'une
mesure qui plaît à tout le monde n'est pas bonne,
automatiquement.
Donc, si on sait qu'en voulant passer une mesure, on va déplaire
à quelqu'un, on aime bien mieux remettre la charge de la
responsabilité sur le dos des autres, pour ne pas avoir l'odieux de
passer cette même réglementation ou cette même
décision.
C'est possible que ce soit pour cela que certaines municipalités
ne veulent pas avoir à prendre une décision. On sait comment cela
fonctionne partout à travers le Québec, partout ailleurs, dans
n'importe quel pays ou dans n'importe quelle province: le maire est élu
démocratiquement, les conseillers aussi. Par contre, il y a toujours des
pressions qui se font, assez fortes, parce que, dans une municipalité,
les gens se connaissent tous et c'est difficile de dire non à un gars.
C'est assez difficile.
C'est cela que je veux essayer de faire ressortir. Possiblement, ils
vont arriver et... On aime mieux laisser passer cette responsabilité ou
cette décision à d'autres que l'assumer nous-mêmes.
M. Dufour: Avez-vous l'assurance que le gouvernement ou la
commission serait à l'abri des pressions? Chez nous, on a un plan
d'urbanisme. Venez voir les pressions, ils en font. Mais quand c'est
coulé dans le ciment, cela reste là. Cela ne bouge pas.
M. Baril: Je ne veux absolument pas défendre la commission
sans la connaître, mais ce ne seront tout de même pas des gens qui
connaîtront tout le monde à travers le Québec.
M. Picotte: Tout à coup ces gens-là ne prennent pas
leurs responsabilités...
M. Baril: Ecoutez un peu.
M. Picotte: Cela ressemble un peu à cela.
M. Garon: Je pense que ce n'est pas une
question de ne pas prendre leurs responsabilités ou non. Ce n'est
pas cela. Est-ce que vous pensez vraiment que l'un de vos mandats est d'assurer
la protection du territoire agricole pour qu'on puisse développer
l'agriculture au Québec?
M. Dufour: Je dois vous répondre que la
responsabilité de l'aménagement du territoire, dans son ensemble,
est une responsabilité municipale, qui est peut-être conjointe
avec le gouvernement du Québec, ou sûrement conjointe. Mais le
zonage agricole ou la protection des terres agricoles, fait partie et je
pense que c'est indissociable de l'aménagement du territoire.
M. Garon: II faut faire des distinctions entre localiser un
terrain de camping et les terres agricoles. Il y a une différence. Le
terrain de camping, on peut le mettre à bien des places. Les terres
agricoles, on ne peut que les prendre là où elles sont. On ne
peut pas... Je vais vous donner un exemple.
M. Dufour: Je vais vous poser une question. Est-ce que, dans
votre esprit, une terre agricole va être immuable, en supposant qu'elle
serait prise entre deux territoires complètement urbanisés
où tous les services techniques de nos municipalités en viennent
à la conclusion que ce territoire est une entrave au
développement harmonieux de la ville et est en même temps une
entrave à l'intégration de la ville et des services. A ce
moment-là, je pense qu'il va falloir qu'il se fasse un choix. C'est un
choix économique qu'il va falloir faire.
M. Garon: Oui.
M. Dufour: C'est pour le mieux-être de la population.
M. Garon: Oui.
M. Dufour: Si vous me dites que le zonage agricole est
dissocié de l'aménagement du territoire, je vais avoir de la
misère à vous suivre.
M. Garon: Je vais vous poser une question plus simple. C'est quoi
l'aménagement du territoire pour vous?
M. Dufour: L'aménagement du territoire, pour moi, c'est
d'abord une délimitation d'un territoire donné. Je pense qu'il
faut s'entendre là-dessus. Il y a donc un certain découpage
territorial. A l'intérieur de ce découpage, il faut absolument
qu'un gouvernement local puisse trouver les grandes vocations qu'une
région doit se donner. Je pense par exemple au développement
économique. De quelle façon allons-nous entreprendre le
développement économique? Quelles sont les infrastructures que la
région doit se donner? Quelles sont les terres agricoles qu'on doit
protéger pour que cela ait de l'allure? Quelles sont les grandes routes?
Où doivent être ces routes? Quels sont les équipements
collectifs qu'on doit se donner?
Quels sont les parcs qui doivent être là? C'est cela que
j'appelle un développement harmonieux, mais je n'oublie pas et je
n'exclus jamais dans mon esprit que le zonage agricole, c'est bien
important.
M. Garon: D'accord. Le développement d'une politique
agro-alimentaire est la responsabilité de quel ordre de gouvernement
dans votre esprit?
M. Dufour: Je pense que vous l'avez déterminé. Je
pense que c'est le ministre de l'Agriculture qui doit être responsable de
cette loi, mais cela n'empêcherait pas le ministre de l'Agriculture, par
l'intermédiaire de son organisme ou de son corps politique, dans toute
sa grandeur et sa splendeur, de venir faire des pressions, de venir dire au
comité d'aménagement du territoire régional: Ecoutez, les
gars, vous vous trompez, vous vous fourvoyez. Le gouvernement du Québec
a telle politique. En vertu de cela, vous devriez vous conformer... Si on ne
s'intègre pas, je pense qu'à ce moment-là, on ne veut pas
prendre la place du gouvernement, on veut que le gouvernement local ait son
autonomie, une autonomie certaine plutôt qu'une certaine autonomie, mais
en respectant tous les intervenants, non pas en les dissociant. J'ai peur qu'on
fasse des gens séparés un de ces jours, séparés
dans le sens que, dans une région, on n'ait pas le même langage,
on n'ait pas les mêmes buts, les mêmes intérêts.
M. Garon: Je vais vous poser une dernière question. Vous
dites que c'est une politique nationale, une politique de développement
agro-alimentaire. Vous avez parlé d'appartenance à de petites
régions, quelque chose comme cela ces petites régions
d'appartenance, il y en a combien dans la province, en passant? Il y en aurait
combien?
M. Dufour: Nous disons que cela pourrait se limiter à
environ 87 divisions territoriales. C'est donc beaucoup plus grand qu'une
municipalité.
M. Garon: Et c'est plus petit qu'un conseil de comté.
M. Dufour: Non, parce qu'il y a 71 conseils de comté. Je
ne voudrais pas employer cela.
M. Garon: Si vous en avez 87, c'est parce que c'est plus petit
qu'un conseil de comté, en moyenne.
M. Dufour: C'est parce qu'on sait que, si on veut vraiment faire
de l'aménagement du territoire, les conseils de comté
divisés en 71 comtés ne répondraient pas, d'une
façon certaine, à une vraie délimitation de régions
d'appartenance. Je pense qu'il va falloir qu'on retouche les conseils de
comté, parce que, si je regarde comment c'est divisé chez nous et
un peu ailleurs, il va falloir qu'on se trouve des points communs...
M. Garon: Oui.
M. Dufour: ... et qu'on puisse parler le même langage,
parce que, vous savez, quand on est assis à la même table, s'il y
en a un qui demeure à 150 milles, c'est difficile de faire du
développement de territoire. On ne veut pas que Québec le fasse
et je ne voudrais pas le faire à la place de tout le monde, quand je
sais que je ne répondrais pas.
M. Garon: Les conseils de comté seraient
modifiés.
M. Dufour: On pense, nous autres, qu'ils devraient être
modifiés. Il y aura une consultation là-dessus.
M. Garon: Cela devrait être modifié comment? M.
Dufour: Pardon?
M. Garon: Comment devraient-ils être modifiés?
M. Dufour: II va y avoir vous êtes en train de nous
faire dire ce à quoi le comité est en train de travailler; en
tout cas, je pense que ce n'est pas mauvais qu'on fasse de la coordination, si
c'est possible d'en faire des projets de découpage territorial
que vont être soumis à l'ensemble des municipalités du
Québec qui, elles, par un mécanisme de consultation, auront
à se prononcer là-dessus et sur d'autre chose.
M. Garon: Dans vos petites régions d'appartenance,
supposons, dans n'importe quelle région du Québec, une
région X, pour ne pas l'identifier... Le même problème
s'est présenté dans la Communauté régionale de
l'Outaouais, où il y avait des agriculteurs... Oui, c'est le point
fondamental dans tout cela; il y avait, à ce moment...
Le Président (M. Boucher): M. le ministre, je suis
obligé de demander le consentement des membres à ce stade, parce
qu'étant donné que c'était le député
d'Arthabaska qui avait la parole et que vous lui avez... Je vous ferai
remarquer qu'il y a d'autres intervenants.
M. Garon: Une dernière question. A ce moment, il y a le
monde agricole et alimentaire, dans votre petite région d'appartenance,
qui dit qu'il devrait y avoir 108 000 acres ou 110 000 acres pour
l'agriculture. Vous avez les autres intervenants qui sont des organismes
municipaux, récréatifs, et tous les autres; ils disent 60 000
acres. Qui doit trancher cela? (20 h 30)
M. Dufour: Quand vous aurez respecté, M. le ministre, le
gouvernement local dans la nouvelle loi, j'ai bien l'impression que votre
commission d'aménagement québécoise pourra venir jouer le
rôle d'arbitre. A ce moment, le ministère de I Agriculture pourra
se faire entendre une autre fois. Je pense que, fondamentalement, et c'est un
principe que le gouvernement a admis, on doit redonner aux gouvernements locaux
leurs places. Qu'on leur fasse jouer le rôle qu'ils doivent jouer. A ce
moment, le rôle d'arbitre, votre commission nationale qui aura aussi des
élus et peut-être autre chose... Je pense bien que nous, on ne
fait pas la loi, on fait des suggestions. A ce moment, on pourra
peut-être se comprendre et accepter.
M. Garon: Je vais vous dire une chose. Si votre petit
gouvernement local, dans la petite région d appartenance, d'après
ce que j'ai pu comprendre, va regrouper les villages et les villes, vous ne
pensez pas que les cultivateurs ne seront pas bien pesants? Ils ne sont
déjà pas pesants dans les villages.
M. Dufour: Là, je vais vous servir le même argument.
J ai négocié avec des cultivateurs et, s il y a des gars qui sont
"tough", ce sont eux. Il faut méconnaître le monde rural je
m'excuse, je voulais le dire sans animosité et bien honnêtement,
parce que j'essaie de parler le plus simplement possible pour croire un
instant que ces gens vont se laisser dépouiller facilement, pour avoir
travaillé de très près avec eux.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Beauce-Sud, j'avais promis de vous reconnaître après le
député d'Arthabaska. M. le député de Beauce-Sud, si
vous voulez terminer votre intervention.
M. Roy: Oui, merci. Je vois que le gouvernement inférieur,
le gouvernement municipal est aussi jaloux de ses prérogatives
vis-à-vis de son gouvernement supérieur, que le gouvernement
provincial vis-à-vis de son gouvernement supérieur actuel.
M. Garon: N'oublions pas une chose, c'est que les gouvernements
provinciaux ont fait deux créatures, ils ont créé le
gouvernement fédéral et les gouvernements municipaux et les deux
veulent le manger maintenant.
M. Roy: C'est épouvantable! Le ministre est
réellement en danger.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre, vous me
créez des problèmes. M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: Relativement à la question que j'avais
posée, suite à ce qui avait été dit par le maire de
la ville de Charlesbourg, je ne veux pas aborder de cas spécifiques, de
cas frontières, vis-à-vis des cas frontières qui, à
l'heure actuelle, peuvent être tranchés dans un sens ou dans
l'autre et qui constituent des cas d'urgence dans certaines
municipalités, dans certains régions du Québec. J'aimerais
que le ministre puisse nous dire, ce soir, en commission parlementaire, quels
sont les moyens qu'elles ont actuellement ou qu'elles auront d'ici quelques
jours, pour pouvoir trancher ces questions.
C'est une question fondamentale, et importante que je pose,
puisqu'actuellement, dans certains endroits, cela peut compromettre
l'établissement d'industries. Cela peut aile jusque-là. Je n'ai
pas d'exemple à donner, mais cela peut aller jusque là. On
pourrait même donner aussi des exemples. J'aimerais savoir quels sont les
mécanismes, les moyens qui sont à la disposition des
municipalités du Québec pour pouvoir faire trancher une
question.
M. Garon: D'abord, ne charrions pas. M. Roy: Je ne charrie
pas.
M. Garon: On est au mois de décembre, ce n'est pas la
période forte pour la construction. Premièrement, sur 614
municipalités, il y en a 73 où il n'y a aucune zone verte, ce
sont des villes; les parcs industriels sont prévus dans les droits
acquis, regardez tous les droits acquis, regardez les franges, etc., et vous
allez voir que les usines qui s'établissent dans le quatrième
rang, peut-être n'est-ce pas la bonne place, peut-être
devraient-elles aller dans les parcs industriels. Il n'y a pas de
problème.
M. Dubois: Je vais vous soumettre un cas, moi.
M. Garon: Oui, votre cas c'est une usine d'engrais chimique. On
n'épandra pas beaucoup d'engrais chimique au mois de janvier.
M. Dubois: ... au mois de janvier, M. le ministre, vous ne
connaissez pas cela, voyons donc.
M. Roy: M. le Président, sur un point de règlement,
je ne veux pas argumenter sur des cas spécifiques; ma question est bien
précise. Actuellement, on ne peut pas geler un territoire de
l'étendue de celle qui vient d'être gelée par le
dépôt de la loi, sans que cela cause des problèmes
spécifiques, dans des endroits donnés. Je ne veux pas discuter de
cas particuliers pour ne pas entreprendre de discussion pour s'implanter ou
encore essayer de s'improviser en juges de la question; ce n'est pas cela, mais
quelles sont les possibilités que les municipalités ont, à
ce moment-ci? Ou, est-ce que tout simplement il n'y en a aucune?
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Beauce-Sud...
M. Garon: II y a la loi, les droits acquis et l'article 31.
M. Roy: C'est tout ce qu'il y a, il n'y a pas d'autres
instances.
M. Garon: C'est pas mal.
M. Roy: S'il y a une question litigieuse, il n'y a aucune
instance actuellement. Est-ce que le ministre pourrait nous dire quand on
prévoit qu'il y aura une instance qui sera en mesure de trancher?
M. Garon: Dès l'adoption de la loi. M. Roy:
Immédiatement après?
M. Garon: Oui, il y aura une commission de formée.
Le Président (M. Boucher): Vous avez terminé, M. le
député de Beauce-Sud? Permettez-moi tout simplement de passer une
remarque. Nous sommes à une étape de l'étude où il
y a des invités qui représentent des mémoires. Je
demanderais que les questions s'adressent aux invités et non pas au
ministre, étant donné qu'on va étudier le projet de loi,
article par article, dans une deuxième étape et que vous aurez le
loisir, à ce moment, de poser des questions au ministre.
Je pense qu'on fait perdre un peu de temps aux invités qui sont
ici lorsqu'on pose des questions au ministre.
M. Roy: Vous avez raison, mais la question que j'ai posée
au ministre, je l'avais posée avant le dîner. J'avais la
moitié de ma phrase de dite devant la commission lorsque vous avez
ajourné les travaux, mais elle faisait suite, effectivement, à
des discussions que j'avais eues avec nos invités.
Le Président (M. Boucher): D'accord. M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau (Jean-Pierre): Je voudrais d'abord
féliciter l'Union des municipalités pour le ton qu'elle a
adopté devant la commission. Elle a démontré une ouverture
d'esprit qui est intéressante à souligner, même si on n'est
pas nécessairement obligé de partager toutes ses opinions.
Je voudrais vous poser une question. Vous avez dit que ce que vous
préféreriez c'est un organisme... quelque chose comme 80
organismes locaux qui seraient des espèces de structures
régionales ou mini-régionales qui assumeraient une partie du
pouvoir d'application de la loi sur la protection du territoire agricole.
Ne craignez-vous pas que le grand nombre d'organismes de ce genre ferait
en sorte que, finalement, il n'y aurait pas d'uniformité dans
l'application de la loi, qu'on aurait toutes sortes de critères, chacun
dans sa région, dans tout le Québec, pour l'application de la
loi? On se retrouverait avec des interprétations différentes. On
se retrouverait avec des décisions dans un coin où on aurait
décidé de dézoner, par exemple, une terre qu'on aurait
voulu protéger, de permettre un développement dans un secteur et
les mêmes critères pourraient être invoqués ailleurs
pour une décision contraire et vice-versa. N'y a-t-il pas un danger,
finalement, qu'on en arrive à avoir une multitude
d'interprétations d'une loi qui devrait être uniforme partout,
compte tenu qu'il y a des problèmes en jeu, notamment des
problèmes on l'a signalé à quelques reprises
de propriété? A partir du moment où on décide que
c'est selon certains critères, le droit de propriété peut
être limité ou réglementé, s'il y a des
interprétations différentes dans tout le Québec...
M. Dufour: Lorsqu'on parle de décentraliser, il y a un
danger parce que lorsqu'on décentralise, cela veut dire qu'on donne des
pouvoirs à d'autres. Il y a des dangers qu'il y ait 87 intervenants ou
80 ou 82 je pense qu'on ne s'entendra pas sur le nombre exact...
M. Charbonneau (Jean-Pierre): Ce n'est pas important.
M. Dufour: Ce n'est pas important. C'est un nombre qu'on met. Il
faut bien comprendre que le plan d'aménagement du territoire ou la loi
de zonage, parce que cela sera intégré, il y en aura 80 ou 87 et
je pense qu'il ne faut pas avoir peur que le Québec n'ait pas la
même paire de culottes pour l'ensemble de la province.
Chacun dans sa région va trouver sa vocation ou son orientation
lorsque le plan d'aménagement sera adopté, comprenant le zonage
agricole, ce qui veut dire qu'il y aura une commission nationale qui aura le
dépôt de tous ces plans et, à ce moment, je pense qu'il
sera possible de faire une coordination afin que les décisions qui
seront prises au niveau régional soient soumises ou soient remises
à la commission nationale d'aménagement qui verra si c'est
suivi.
M. Charbonneau (Jean-Pierre): Dans ce cas, je me pose la
question. Etant donné que ces organismes n'existent pas actuellement, on
a des conseils de comté, d'une part, et des cités et villes,
d'autre part. Etant donné aussi que cela peut prendre un certain temps
avant de les mettre en application on a dit qu'on déposerait la
loi... J'ai vu dans les journaux que le ministre voulait la déposer
avant Noël j'espère que cela pourra se faire mais il
y aura une période de consultation qu'on a également
annoncée qui va dépasser la consultation privée, par
exemple, dont votre organisme a pu bénéficier...
En attendant, finalement, je crois qu'on a fait un choix qui permet de
revoir vos préoccupations, c'est-à-dire de respecter le pouvoir
local premier, d'abord la municipalité, qu'elle soit cité, ville
ou municipalité rurale, cette municipalité fait la
première étape et soumet sa décision à
l'approbation de la commission. Est-ce que ce n'est pas, finalement, ce qu'on
fait en attendant qu'il y ait une structure régionale qui intègre
d'une façon cohérente et les cités et villes et les
municipalités rurales?
M. Dufour: J'ai l'impression que ce que nous proposons n'a pas
pour effet de retarder l'application de la loi. Quand vous me dites: Cela
n'existe pas, je peux peut-être vous citer de mémoire qu'il y a
une communauté urbaine à Montréal qui fait de
l'aménagement du territoire, il y a la Communauté urbaine de
Québec, il y a la région de l'Outaouais, il y a le Conseil
métropolitain du Haut-Saguenay qui fait aussi de l'aménagement du
territoire, c'est sa principale fonction. On a donc déjà quatre
organismes qui, actuellement, oeuvrent dans ce domaine. Je ne pense pas que
cela puisse être de nature à retarder. Il s'agit que la loi nous
dise ce qu'elle doit avoir et d'y aller carrément. Si vous me dites que
c'est dangereux pour ce qui reste à faire, cela a été
dangereux depuis le temps que les municipalités existent. Il n'y a
jamais eu de plans d'aménagement du territoire. Cela ne m'énerve
pas plus que cela. Cela prendra six mois ou cela prendra sept mois avant de
devenir fonctionnel, mais qu'on prenne le temps et qu'on le fasse comme il
faut. C'est ce qu'on fait là si on n'implique pas et si on n'embarque
pas les municipalités ou les gouvernements locaux dans le coup, j'ai
l'impression qu'on va se ramasser avec de petits et de gros problèmes
tantôt. C'est là qu'il va y avoir des notes discordantes.
J'aimerais bien qu'on le fasse avec le milieu. C'est bien sûr que cela
prend un peu plus de temps et que c'est fatiguant. La démocratie, c'est
fatiguant à vivre aussi, parce qu'il faut demander à tout le
monde, il faut consulter. Cela m'embarrasse parfois. Je vous le dis bien
honnêtement. Mais c'est le seul moyen qu'on ait trouvé pour faire
passer des choses et, si le monde ne l'accepte pas, de les rallier et de dire:
C'est la voix de la majorité.
M. Charbonneau (Jean-Pierre): On ne peut pas être
nécessairement en désaccord total avec ce que vous dites, mais
j'ai l'impression que, finalement, en attendant que la loi d'aménagement
soit...
M. Dufour: C'est une hypothèse ensemble...
M. Charbonneau (Jean-Pierre): Allez-y donc pour voir. Je vais
vous suivre.
M. Dufour: Supposons, qu'au départ de la loi, on
l'accepte. Il y a une commission nationale qui se crée avec des
représentants locaux élus. Au début, je pense bien que,
les problèmes majeurs qui ont été soulevés par le
député de Beauce-Sud, on peut y porter attention en attendant,
mais, en même temps que cela se fait, on met nos structures
régionales en place et on dit: Maintenant, vous allez jouer votre
rôle et vous allez prendre vos responsabilités. A ce
moment-là, je pense que vous n'embarrassez personne et le gouvernement
local a l'impression, et c'est plus qu'une impression, il a l'assurance, qu'il
a son autonomie et qu'il va jouer son rôle.
M. Charbonneau (Jean-Pierre): En fait, si je vous ai bien
compris, vous me dites: II y a une commission nationale qui est
créée où...
M. Dufour: Avec les élus.
M. Charbonneau (Jean-Pierre): ... il y aurait... Vous
suggérez actuellement qu'il y ait des représentants
régionaux. C'est cela que vous dites.
M. Dufour: Qu'il y ait des élus municipaux à
l'intérieur de cette commission pour s'assurer que, lorsque se fera
l'aménagement du territoire, parce que, dans l'aménagement, il va
peut-être y avoir
une autre commission d'arbitrage aussi là-dedans, on tienne
compte de cela.
M. Charbonneau (Jean-Pierre): Est-ce que vous aimeriez, si jamais
on n'allait pas complètement dans votre direction, qu'il y ait au
minimum à la commission nationale des représentants du monde
municipal?
M. Dufour: En majorité.
M. Charbonneau (Jean-Pierre): En majorité.
M. Dufour: En majorité, quatre sur sept. C'est un
compromis. On parlait de six sur sept. Je suis rendu à quatre.
M. Charbonneau (Jean-Pierre): Comment arbitrez-vous cela avec les
agriculteurs qui eux aussi veulent la majorité?
M. Dufour: Je vous l'ai dit. Si vous demandez aux syndicats
d'appliquer la loi du travail vous allez peut-être avoir des
problèmes, le ministre du Travail va peut-être avoir des
problèmes tantôt. Il va être juge et partie. Demandez au
patron de faire la même chose et cela va être la même maudite
affaire. D'une façon ou de l'autre, vous arrivez toujours avec le
même problème. Je vous dis une chose: c'est qu'au moins j'ai
l'assurance qu'avec des élus qui ont la préoccupation de leur
milieu, et j'espère que la population fait de bons choix de temps en
temps, en ce qui concerne les élus, ces élus vont avoir
conscience de leurs responsabilités, et s'ils n'en ont pas conscience il
faudra peut-être les remettre à l'ordre quelque part. Il y a moyen
de le faire. Cela se fait. Il en tombe des représentants en chemin.
M. Charbonneau (Jean-Pierre): Une dernière question,
est-ce que vous pensez que ces élus devraient pouvoir siéger
à la commission nationale pour l'ensemble du Québec ou
régionalement? (20 h 45)
M. Dufour: Je pense qu'il appartient au gouvernement de nommer,
que ce soit par une consultation avec l'Union des municipalités et
l'Union des conseils de comté, à savoir quels seraient les gens
susceptibles ou que le gouvernement décide... Moi, je n'irais pas
jusqu'à imposer mes vues à ce sujet. Je fais confiance au
gouvernement pour aller choisir des gens qui sont valables. Ce n'est pas parce
qu'il est élu qu'il est fin.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Shefford.
M. Verreault: M. Dufour, ma question est hypothétique. Si
le gouvernement acceptait les structures de contrôle
suggérées dans votre mémoire, est-ce que vous auriez
certaines régions ou certains secteurs privilégiés que
vous porteriez comme prioritaires ou si, simplement, vous agiriez d'une
manière générale, en prenant les dossiers tels qu'ils se
présentent?
M. Dufour: Je pense bien que, si cet organisme était
créé de la façon qu'on le propose, il y a une loi du
zonage agricole qui est déposée. Je pense qu'on ne pourrait la
laisser de côté, au départ; donc, il faudrait la
privilégier d'une certaine façon. Mais, globalement, je n'oublie
jamais j'espère que c'est votre préoccupation aussi
que l'aménagement du territoire, c'est global. Trop longtemps, on veut
séparer des choses l'une de l'autre, on veut séparer les gens
l'un de l'autre. On est tous des gens pris avec les mêmes
problèmes. Quand il y a un problème de chômage dans une
région, c'est l'ensemble de la région qui en souffre; quand on
est pris avec un problème de développement touristique, c'est
l'ensemble de la région.
Donc, on devrait, à travers tout ça, si les gens qui sont
là ont bien la préoccupation de leur milieu, retrouver les
préoccupations de l'ensemble de la population.
M. Verreault: Ce que je voulais particulièrement dire,
c'est que vous avez déjà une zone dans le projet de loi qui est
désignée. Evidemment, il y a des municipalités et des
villages. La question que je vous posais, encore hypothétiquement, c'est
pour savoir si vous aviez certaines priorités dans certaines
régions ou dans certains secteurs de cette zone.
M. Dufour: II faudrait nécessairement. M. Verreault:
Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Rimouski.
M. Marcoux: J'aurais une question. Tantôt, vous avez
donné un exemple concret, vous avez une ville qui se développe
des deux côtés et, au centre, vous avez une terre agricole. Vous
disiez que ça coûterait probablement moins cher à la
municipalité de développer ce territoire pour regrouper les deux
parties. Je vous fais le raisonnement suivant, je voudrais avoir votre avis sur
ceci. C'est sûr, comme le disait également le maire de
Charlesbourg qui donnait à peu près le même exemple cet
après-midi, que c'est plus facile de développer des
réseaux d'aqueduc, etc., dans la terre que dans la roche.
Bien sûr, pour les citoyens, ça coûterait moins cher
à court terme. Mais, si on fait le calcul à long terme, un peu
comme on a eu le problème depuis plusieurs années avec les
"lignes" de l'Hydro-Québec. L'Hydro-Québec faisait le
raisonnement suivant: Si on passe en ligne droite, ça nous coûte
beaucoup moins cher, même si on coupe les terres agricoles. Mais le
ministre de l'Agriculture a défendu un autre point de vue, il a
regardé comment les autres fonctionnaient, le coût, les taux
actuariels; il s'est mis à faire le même raisonnement, ce qu'une
terre ne produirait pas, en échelonnant ça sur plusieurs
années, avec des taux actuariels; il a prouvé à
l'Hydro-Québec, noir sur blanc, que, même au plan de la
rentabilité éco-
nomique, l'ensemble de la société économisait
à faire passer l'installation ailleurs, même si c'était
plus long que de la faire passer dans les terres.
Par rapport au même type de choix qui peut se poser chez nous pour
une municipalité, quelle est l'attitude que devrait adopter la
commission nationale, est-ce qu'elle doit choisir le coût
économique à court terme ou le gain économique à
long terme?
M. Dufour: Je pense qu'assez longtemps, au Québec, on a
tenu compte ou on n'a pas assez tenu compte des coûts économiques
du développement des municipalités. Parfois, on a tenu compte,
sentimentalement, d'autres choses. Il faut qu'un jour, cela arrête. Je
vais vous donner un exemple concret. Chez nous, dans ma municipalité,
c'est une ville fusionnée qui a été créée
par une loi. J'espère que les législateurs savaient ce qu'ils
faisaient. Je suis pris avec une zone où il y a 40 000 de population
d'un côté, 22 000 de l'autre; comment vais-je faire pour les
réunir?
Ou c'est vrai ou ce n'est pas vrai. Une ville, c'est un ensemble de
citoyens qui vivent, qui mettent des choses en commun. Chaque fois qu'on fait
des barrières physiques ou qu'on crée une barrière
psychologique, on ne réussira jamais à s'en sortir. J'aimerais
bien mieux que, fondamentalement, on décide, économiquement, de
réunir nos villes et de les rendre plus denses, de les mettre ensemble
plutôt que d'accepter que tout le monde se place n'importe comment dans
la province de Québec. Ce sont des coûts extraordinaires. Vous
n'avez qu'à regarder les subventions qui sont données un peu
partout. C'est causé par quoi? Au développement sauvage qui s'est
fait n'importe comment.
On est obligé de donner des réseaux d égouts et d
aqueduc sur des milles de long, pour pas de monde du tout. Dans ma
municipalité, pour 582 familles, cela coûterait $9 millions pour
donner de l'eau. Il y a 58 000 personnes dans la région urbaine; les
autres sont des cultivateurs et il y a aussi des cultivailleurs". Il y a les
deux là-dedans.
Cela coûte un prix fou. A un moment donné, je pense que le
gouvernement du Québec, comme l'ensemble des citoyens, décident
qu'ils vont rentabiliser leurs investissements et vont arrêter de
disperser leurs efforts. Quand on demande cela, je ne pense pas qu'on demande
une chose qui mette en danger la loi du zonage agricole et je ne pense pas qu
on mette en danger I'industrie agro-alimentaire. Il faut faire des choix.
Celui-ci est un choix économique, basé sur des
sociétés équilibrées. Des zones grises dans des
municipalités, il ne devrait plus y en avoir. Si vous mettez des
secteurs séparés, il y a des dangers que cela se produise. Vous
avez des dangers que des gens n'aient jamais de sentiment d'appartenance. Il
faudrait qu'un jour nos citoyens se rallient à quelque chose et soient
capables de s identifier à des choses bien précises, qu'est une
municipalité bien organisée et ordonnée, surtout
ordonnée.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Rimouski, vous avez terminé?
M. Marcoux: Oui.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Laval.
M. Lavoie: J'aurais une courte question à poser à
nos invités. Vous représentez un certain nombre de
municipalités. On nous a dit que I Union des conseils de comté
représentait environ 400 municipalités rurales.
M. Dufour: ...
M. Lavoie: Si je fais la soustraction, vous devez en
représenter...
M. Dufour: 250.
M. Lavoie: 250.
Pour les fins du journal des Débats et l'étude du dossier,
avant que le plan qui gèle toute la zone de l'Outaouais à
Québec, qui perturbe un tant soit peu les plans directeurs d'urbanisme
des municipalités, vos maires des conseils municipaux de ces 200
municipalités ont-ils été consultés sur le plan de
la zone agricole désignée, qui est en annexe au projet de loi
90?
M. Dufour: Selon toutes les démarches qu'on a
effectuées à l'Union des municipalités, les maires n ont
pas été consultés, que je sache.
M. Lavoie: Ils n ont pas été consultés.
M. Dufour: A moins que le ministre me contredise.
M. Garon: Non, non.
M. Lavoie: II n y a pas de quoi rire, M. le ministre, quand
même.
Deuxième point, concernant la fiscalité municipale de ces
250 cités et villes. Est-ce que vous prévoyez qu'il peut y avoir
une implication fiscale? Si, d après la décision de la commission
de contrôle, ou si la commission de protection des terres agricoles
décide, en dernier appel, que dans vos municipalités, certaines
zones vertes actuellement et qui pourraient possiblement rester vertes,
deviennent zones agricoles finales, où la limite d évaluation qui
est de $150 l'acre serait appliquée dans les zones vertes et où
ces terres, avant ce plan, ont des évaluations possibles de $1000,
$2000, $3000 ou $4000 I arpent, quelles seront les implications fiscales pour
ces municipalités, si ces évaluations sont réduites de
$2000, $3000 ou $4000 I arpent à $150 l'acre, avec un taux d'imposition
maximum de $1 du $100 d évaluation? Est-ce que vous prévoyez que
cela peut chambarder joliment la fiscalité ou I imposition de
quelques-unes de vos villes?
M. Dufour: La réponse est oui. En même temps, si on
ne peut pas développer le territoire selon ce que j'ai expliqué
tout à l'heure, cela a des incidences fiscales au point de vue de la
municipalité.
M. Lavoie: Dernière question, M. le Président.
Est-ce que cela ne chambarde pas à ce point certaines villes, où
on a fait des investissements d'infrastructure d égouts, de collecteurs
assez importants, ou des conduites maîtresses d'aqueduc, ou des grandes
artères qui sont amorcées, si le plan est changé, cela
devient du territoire agricole, à vocation strictement agricole? Que
vont faire ces municipalités pour amortir ces investissements
d'infrastructure?
M. Dufour: Je pense qu'on...
M. Lavoie: Ce sont des implications, je crois, qu'il faut
aborder.
M. Dufour: Je pense qu'on va dans le domaine de l'expectative.
J'espère tout de même que la Commission d'aménagement du
territoire québécois, la commission nationale qui aura des
élus municipaux sur la commission...
M. Lavoie: Est-ce que vous faites un amendement au projet de
loi?
M. Dufour: Non, mais c'est dans nos propositions. Je veux
être logique avec ce qu'on propose. ...va tenir compte de l'aspect
financier aussi dans ses décisions, surtout qu'il faut tenir compte
aussi que les municipalités ne connaissant pas de loi de zonage au
moment où elles ont adopté leur plan directeur, on devra au moins
essayer de rentabiliser les équipements qui sont en place.
M. Lavoie: J'ai terminé, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Laval. Comme il n'y a pas d'autres opinants, je
remercie, au nom de tous les membres de la commission, l'Union des
municipalités pour le mémoire qu'elle a
présenté.
Nous allons passer immédiatement à la
Confédération de l'UPA.
M. Dufour: Avant de terminer, j'aimerais...
Le Président (M. Boucher): Oui, Monsieur le maire.
M. Dufour: ... remercier la commission qui a bien accepté
de nous recevoir. Je voudrais peut-être rappeler, très vite, que
le zonage agricole doit être considéré dans sa juste
perspective de développement, c'est-à-dire dans un plan global
d'aménagement du territoire, assurer aussi que l'administration de la
loi soit décentralisée et que ce soit géré par des
corporations municipales; assurer que l'aménagement se fasse au plan
régional, pour une meilleure compréhension; donner à la
commission nationale le rôle d'arbitre pour qu'elle puisse jouer ce
rôle-là et non pas se substituer au gouvernement local et en
même temps respecter le principe de la décision qui doit
être confliée aux élus.
Je pense que c'est dans cette optique que l'Union des
municipalités a voulu collaborer à la mise en place et à
l'adoption du prochain projet de loi que vous aurez à adopter.
Là-dessus, je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci beaucoup, M. Dufour.
J'appellerais la Confédération de l'Union des producteurs
agricoles représentée par M. Paul Couture.
Une Voix: Ils ont de bonnes recommandations.
Le Président (M. Boucher): M. Couture, si vous voulez
présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.
Union des producteurs agricoles
M. Couture (Paul): II me fait plaisir de présenter d'abord
M. Pierre Gaudet, vice-président de l'UPA, M. Jean-Marc Kirouac,
secrétaire général et M. Mario Dumais, économiste
au service d'étude et de recherche à l'UPA.
Nous vous remercions d'abord de nous permettre de présenter un
rapport. Avec votre permission, M. le Président, je demanderais à
M. Jean-Marc Kirouac, secrétaire général, de donner
lecture du rapport.
M. Kirouac (Jean-Marc): M. le Président, l'Union des
producteurs agricoles a fait connaître sa position sur la question de la
protection du territoire agricole dans un mémoire qui fut rendu public
en septembre 1978, qui fut présenté au ministre de l'Agriculture
dans le cadre de sa tournée de consultation.
Ce mémoire est contenu en annexe du présent document.
Etant donné que nous réunissons en 26 propositions nos
recommandations sur cette question, nous examinerons chacune d'entre elles afin
de voir dans quelle mesure le contenu du projet de loi correspond à ces
propositions.
L'UPA réclame, premièrement, l'adoption d'une loi de
zonage ayant comme objectif la protection du territoire agricole, pourvu que
cette loi soit assortie de mesures visant à accroître la
rentabilité des exploitations agricoles et, deuxièmement, qu'un
tel projet de loi soit déposé dans les plus brefs
délais.
Le congrès général de l'UPA a demandé
à quatre reprises que le gouvernement du Québec intervienne en
vue de protéger le territoire agricole. Par conséquent, l'UPA
aborde aujourd'hui la discussion sur le projet de loi 90 dans un esprit
positif. Nous discuterons plus loin, dans ce texte, des mesures de
rentabilisation de l'agriculture annoncées par le ministère de
l'Agriculture et
nous ferons état de celles que nous voudrions voir
implantées.
Troisièmement, l'UPA réclame que le ministère de
l'Agriculture soit responsable de la loi et des organismes auxquels elle
donnera naissance.
Cette demande de l'UPA avait pour but de s'assurer que la Loi sur la
protection du territoire agricole et les organismes auxquels elle donnera
naissance soient sous la juridiction du ministère de l'Agriculture,
parce que celui-ci est, de tous les ministères, le plus susceptible de
comprendre les préoccupations du monde agricole. (21 heures)
Le rôle dévolu au ministère de l'Agriculture en
vertu des articles 3, 20, 21, 34, 35, 36 et 37 et en particulier 115, qui
stipule que "le ministre est responsable de l'application de la présente
loi", correspond à cette exigence.
Quatrièmement, que la loi de zonage s'applique dès le
départ à l'ensemble du territoire québécois. Cette
demande n'est manifestement pas satisfaite par le projet de loi, puisque seules
les basses terres du Saint-Laurent et de l'Outaouais sont incluses dans la
région désignée. En particulier, ceci aura pour
conséquence que l'accroissement des remises de taxes foncières ne
s'appliquera qu'aux agriculteurs établis dans cette région. De
plus, nous réaffirmons notre crainte que cette situation n'aggrave la
dilapidation des terres arables en dehors de la région
désignée. Cependant, l'article 22 du projet de loi, qui permet au
gouvernement de décréter "région agricole
désignée" toute partie du territoire du Québec,
tempère notre mécontentement face à cet état de
faits. Nous demandons que, dans un délai maximum de six mois, les autres
régions fassent partie du territoire protégé.
"Entre-temps, que les bénéfices prévus pour la
rentabilisation de la production agricole, et, en particulier, l'accroissement
des remises de taxes foncières, s'appliquent aussi aux producteurs
agricoles en dehors de la région agricole désignée."
Cinquièmement, que la loi sur le zonage agricole s'étende
à tout le territoire municipalisé du Québec, à
l'exception du territoire urbain, c'est-à-dire le territoire
effectivement occupé par les cités et villes. La zone agricole
proprement dite devra inclure toutes les terres cultivées ou
susceptibles de l'être, de même que les boisés privés
et les lots de la couronne situés à l'intérieur des
municipalités.
Compte tenu des remarques formulées à notre proposition no
4, la définition des mots "agriculture" et "sol arable" à
l'article 1 et le contenu des articles 12, 63, 27 et 105 font que le projet de
loi correspond à l'esprit de notre proposition no 5. Cependant, c'est
par une étude au niveau de chaque municipalité de ce qu'inclut
exactement la zone agricole que nous serons le mieux en mesure de le
vérifier. Nous nous proposons d'intervenir en temps et lieu à ce
sujet.
Sixièmement, qu'une carte délimitant sur une base
temporaire l'ensemble du territoire agricole soit déposée en
même temps que le projet de loi et qu'un délai soit fixé au
bout duquel le zonage temporaire deviendra permanent.
Cette demande correspond aux articles 34, 35, 37 et 47 du projet de
loi.
Septièmement, que toute transaction ayant pour conséquence
de changer la vocation d'une terre agricole soit interdite durant la
période qui sépare le zonage temporaire du zonage permanent. Les
articles 39 et 42 du projet de loi correspondent à cette revendication.
"Par ailleurs, nous insistons pour que le délai qui sépare le
zonage temporaire du zonage permanent soit réduit au minimum."
Huitièmement, qu'une régie publique provinciale soit
créée, composée majoritairement de membres choisis
à même une liste soumise par l'association
accréditée pour représenter les producteurs agricoles.
Cette régie détiendra le pouvoir décisionnel en
matière de zonage.
L'article 4 du projet de loi spécifie que les membres de la
commission seront nommés par le gouvernement. Nous
réitérons sur cette question notre demande que les membres de la
commission soient choisis, en majorité à même une liste
soumise par l'association accréditée pour représenter les
producteurs agricoles.
Quant aux pouvoirs détenus par la commission, ils sont
considérables, tel que nous l'avions demandé. Il nous semble que
la protection des terres arables ne peut être laissée entre les
mains d'autorités locales, susceptibles d'interpréter d'une
manière variable la poursuite de cet objectif. Cependant, en vertu de
l'article 96, "le gouvernement peut, par avis écrit à la
commission, soustraire une affaire à sa juridiction."
L'article 96 ouvre la porte à des interventions trop
considérables du pouvoir politique dans les opérations du zonage
du territoire et constitue de plus une incitation pour les opposants au zonage
agricole à chercher constamment à se soustraire à
l'autorité de la commission. Nous demandons la disparition de cet
article.
Neuvièmement, que soit créé un organisme par
région agricole, regroupant, sous la coordination des
représentants des producteurs agricoles, les parties
intéressées par la loi de zonage. Cet organisme aura pour
tâche de délimiter sur une base permanente le territoire agricole
à partir de la carte du zonage temporaire. Si un tel organisme arrive
à une entente, il soumettra pour approbation ses recommandations
à la régie. Si les participants n'arrivent pas à
s'entendre, les points de vue divergents seront soumis à la
régie, qui tranchera la question.
Eu égard à cette recommandation, c'est aux
municipalités qu'est dévolu, dans le projet de loi, le rôle
que nous assignions à un organisme régional, coordonné par
les représentants des producteurs agricoles. Dans la version finale du
projet de loi, lorsqu'on mentionne que les intéressés peuvent
intervenir devant la commission ou les municipalités, nous demandons que
l'on précise que les diverses instances de l'UPA seront
considérées comme des parties intéressées.
Selon
l'article 59, qu'une municipalité qui est saisie d'une demande du
type de celles qui sont prévues à l'article 58 soit tenue
d'aviser le public à cet effet et d'entendre les
intéressés, plutôt que de dire qu'elle peut les
entendre.
L'article 10: Que les organismes ou les groupes d'individus ou les
individus touchés par le zonage puissent faire appel d'une
décision de la régie auprès du lieutenant-gouverneur en
conseil.
Les dispositions des articles 18 et 44 prévoient que seule la
commission peut réviser ou révoquer l'une de ses décisions
ou ordonnances. Nous sommes insatisfaits de cette disposition et nous estimons
que les intéressés devraient pouvoir en appeler d'une
décision de la commission auprès du lieutenant-gouverneur en
conseil.
Demande no 11: Que seule la régie soit autorisée, sur
l'avis des instances régionales prévues à notre
proposition no 9, à permettre l'utilisation à des fins non
agricoles d'une partie des terres arables, ces utilisations devront être
compatibles avec l'activité agricole.
Compte tenu de nos remarques relatives à notre proposition no 9,
les dispositions des articles 12 et 62 correspondent à cette
proposition.
No 12: Qu'aucun lotissement et qu'aucune construction, sauf celles qui
servent directement ou indirectement à l'agriculture, ne soient permis
en zone agricole, à moins d'obtenir un permis de la régie.
No 13: Qu'aucune construction de résidence principale ou
secondaire ne soit permise, sauf celles servant à la main-d'oeuvre
agricole.
No 14: Qu'il soit permis de construire, sur une exploitation agricole,
autant de résidences que l'exploitation compte de propriétaires
qui travaillent, la majorité de leur temps, sur la ferme, et
d'employés permanents. Ces résidences pourront être
louées, mais ne pourront être vendues qu'avec l'exploitation.
No 15: Que la régie soit chargée d'établir la liste
des constructions servant directement ou indirectement à des fins
agricoles.
Nous trouvons, dans le projet de loi, des dispositions qui correspondent
à ces revendications, en particulier aux articles 26, 28, 31, 40, 62,
101, 103 et 105. Par ailleurs, étant donné que la commission peut
émettre des autorisations qui permettent de déroger à ces
règles, il faudra dire de quelle manière ces dispositions seront
appliquées.
Demande no 16: Toute utilisation à des fins
d'établissement d'infrastructures, par exemple: les routes, les
aéroports, les "lignes" hydroélectriques, les oléoducs,
les parcs industriels, etc., requerra l'approbation de la régie.
Les articles 66, 107, 108, 109, 110 et 112 prévoient que
l'utilisation des terres arables à des fins autres qu'agricoles, par les
organismes gouvernementaux, exige un avis de la commission.
Nous avions demandé que la commission approuve un tel geste; de
plus, l'article 96 peut même dispenser le gouvernement de devoir se
soumettre à un avis de la commission. C'est une raison
supplémentaire pour demander la disparition de cet article.
Demande no 17: Tout terrain sera immédiatement restitué au
territoire agricole lorsque sera discontinuée une utilisation non
agricole d'une partie des terres arables et que cette utilisation n'aura pas
détruit son potentiel agricole.
L'article 102 du projet de loi prévoit qu'il en sera ainsi,
après un délai d'un an, lorsqu'il sera mis fin à
l'utilisation non agricole. Nous considérons qu'il correspond à
notre demande.
Demande no 18: Que toute transaction ayant pour effet de
démembrer une exploitation agricole soit interdite, sauf aux fins de
consolidation d'une ou de plusieurs autres exploitations ou si les subdivisions
peuvent constituer des exploitations agricoles rentables. L'article 29
correspond à cette demande.
Demande no 19: Qu'aucune partie du territoire ne puisse être
vendue à des non-résidents du Québec, les terres
appartenant à des non-résidents ne pourront être revendues
qu'à des résidents.
Aucune disposition du projet de loi ne correspond à cette demande
et nous soulignons à nouveau l'urgence d'intervenir sur cette question.
Soulignons, par ailleurs, que nous établissons une nette distinction
entre un non-résident et un immigrant, puisque celui-ci n'est pas un
non-résident à partir du moment où il s'établit au
Québec.
Demande no 20: Que, dans un délai fixé par la loi, soient
établies les zones d'extension futures du territoire urbain. Que les
procédures et les mécanismes prévus aux propositions 8 et
9 pour rendre permanent le zonage temporaire, servent également à
la réalisation de cet objectif.
Précisons à propos de cette revendication que le point de
vue de l'UPA n'est pas d'enfermer les villes dans un territoire dont
l'extension serait impossible. Il s'agit plutôt de forcer les
autorités municipales à planifier le développement urbain,
planification dont l'un des impératifs serait de minimiser
l'étendue du territoire soustrait à l'agriculture et de
privilégier l'extension urbaine sur les terres de moins bonne
qualité.
Ici encore, c'est une étude spécifique des zones non
agricoles dans chaque municipalité qui nous permettra de vérifier
dans quelle mesure on a répondu à cette demande. Nous nous
proposons d'intervenir dans le processus que prévoira le projet de
loi.
Demande 21. Que soit créée une banque de terres qui fera,
entre autres, le pont entre les propriétaires de sols agricoles qui ne
peuvent les cultiver et les agriculteurs qui recherchent de la terre. Le projet
de loi 99 autorise le gouvernement à agir dans ce sens.
Il s'agit, cependant, d'une autorisation et non d'une obligation. Par
conséquent, c'est par l'usage que fera le gouvernement des pouvoirs qui
lui sont conférés par cette loi que nous serons en mesure de
juger jusqu'à quel point il s'oriente dans la direction que nous
souhaitons.
Demande 22. Que les lois et règlements visant à la
protection de l'environnement qui s'appliquent en zone agricole soient
adaptés à l'activité principale qui s'y déroule.
Les articles 97 et 111 et spécialement l'article 100 du projet de loi
consti-
tuent une première démarche dans la bonne direction. A
l'article 100, cependant, nous demandons au premier paragraphe les mots
"à la délivrance d'un certificat d'autorisation en vertu de la
Loi de la qualité de l'environnement ou de ses règlements
permettant l'établissement ou l'agrandissement d'une exploitation de
production animale... " soient remplacés par ce qui suit: "à
l'implantation d'une exploitation de production animale construite ou agrandie
après 1972 et qui détient un certificat d'autorisation en vertu
de la Loi de la qualité de l'environnement ou de ses
règlements."
De plus, pour que la volonté politique sous-ja-cente à
l'article 100 s'applique vraiment, il faut, non seulement que les nouveaux
arrivants ne puissent pas se plaindre des agriculteurs qui y étaient
avant eux, mais de plus, il faut que les nouveaux arrivants ne puissent pas,
par leur seule présence, comme habitation voisine, empêcher
l'agrandissement des fermes qui y étaient avant eux.
C'est pourquoi nous demandons que le droit de premier occupant que nous
avons réclamé lors de la commission parlementaire de
l'environnement soit incorporé à la loi de zonage. Ce droit de
premier occupant se formule comme suit: Au moment de la demande d'un permis
d'agrandissement, les habitations qui se sont construites dans les 30
années précédant la demande de permis et dont la
construction est postérieure à celle des bâtiments de la
ferme ne seront pas considérées au chapitre des distances
à respecter par rapport aux habitations voisines ou par rapport aux
agglomérations.
La demande 23. Que les lois fiscales s'appli-quant aux exploitations
agricoles, en particulier, les taxes foncières et les droits
successoraux, soient réexaminées et
réaménagées afin de les rendre compatibles avec les
objectifs poursuivis par la politique de développement de l'agriculture
et de la Loi sur la protection du territoire agricole.
Demande 24. Que le ministère de l'Agriculture formule une
politique globale de l'assainissement des sols.
Article 25. Que le gouvernement s'engage à garantir des revenus
stables et adéquats pour les producteurs agricoles en
accélérant la mise en place des plans conjoints et le
développement des programmes d'assurance-stabilisation et
d'assurance-récolte.
Que des politiques additionnelles de développement
régional soient adoptées visant à combler les
inégalités régionales de revenu en milieu agricole.
Et la demande 26. En vue d'en arriver à la pleine utilisation des
terres protégées et à un meilleur développement
régional, que le gouvernement mette immédiatement en oeuvre des
politiques visant au développement des productions actuelles et des
nouvelles productions.
Tout au long du mémoire que l'UPA présentait sur la
protection du territoire agricole en septembre, de même que dans la
première de la série de propositions qui l'accompagnait et dans
les résolutions 23, 24, 25 et 26, nous avons essayé d'exprimer
aussi clairement que possible l'idée que la protection du territoire
agricole est une mesure nécessaire, mais non suffisante pour assurer le
développement de l'agriculture.
Nous tenons à souligner, à nouveau, qu'une terre arable
protégée ne sera pas nécessairement mise en valeur si le
contexte socio-économique n est pas modifié en vue
d'accroître la rentabilité de la production agricole. (21 h
15)
L'article 106 du projet de loi 90 qui prévoit en zone agricole la
hausse de 40% à 70% du remboursement des taxes foncières, le
projet de loi 100 qui a pour objet de doubler le montant maximum des
subventions de mise en valeur des exploitations agricoles, l'annonce de
l'extension aux finisseurs du programme de stabilisation dans le boeuf et
l'implantation d'un tel programme dans le cas du maïs-grain, constituent
des pas dans la bonne direction. Nous demandons que de nombreuses autres
mesures allant dans le même sens soient adoptées, en particulier
pour faciliter l'implantation d'autres plans conjoints, étendre les
programmes de stabilisation à d'autres productions,
accélérer l'acceptation des programmes de développement
régional, permettre l'expansion des productions actuelles et nouvelles,
alléger le fardeau fiscal des producteurs agricoles, faciliter le
transfert des exploitations d'une génération à I'autre et
le reste.
Pour nous, le dépôt du projet de loi 90 doit constituer un
engagement du gouvernement à développer l'agriculture par
d'autres mesures. Il devra agir vigoureusement dans le sens des domaines
mentionnés ci-haut, sinon les producteurs agricoles considéreront
qu'ils ont été leurrés dans ce débat.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Kirouac. M. le
ministre.
M. Garon: J'ai toujours commencé depuis le matin. Je vais
laisser commencer l'Opposition.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Maskinongé.
M. Picotte: M. le Président, j'aimerais tout d'abord
remercier et féliciter la Confédération de l'UPA pour le
magnifique mémoire qu'elle a présenté et l'esprit dans
lequel elle l'a présenté, d'autant plus que cela correspond
peut-être pas en tout, mais en partie aux discours de deuxième
lecture que les membres de l'Opposition officielle ont faits et la raison pour
laquelle nous avons...
M. Marcoux: Le consentement...
M. Picotte: Ce n'est pas surprenant qu'ils ne se souviennent pas
de cela, on a demandé le quorum trois fois à certains moments, M.
le Président. Ils n'étaient pas là.
Il y a plusieurs points, d'ailleurs, M. le Président, qui ont
été soulignés par le député de
Montmagny-L'Islet, par moi et par d'autres concernant certaines demandes que
vous faites. Un premier point m'accroche, M. le Président, et sur lequel
je voudrais vous poser ma première question. Lors-
que je regarde l'article 1 du projet de loi, lorsqu'on définit le
mot "agriculture", qu'on parle de culture du sol, y compris le fait de le
laisser en friche, j'aimerais connaître, selon vous, quelles implications
pourraient avoir une telle affirmation lorsqu'on définit le mot
"agriculture". J'imagine que cela ne doit pas aider tellement l'agriculture,
des sols en friche.
M. Couture (Paul): Notre compréhension en disant: Le
laisser en friche, c'est que cela détermine qu'une terre qui est en
friche dans une zone agricole est aussi zonée agricole; mais le
problème, comme on le voit, c'est que le projet doit s'accompagner de
mesures de rentabilisation de l'agriculture qui feront que ces terres-là
devront être cultivées.
M. Picotte: Comme deuxième question, nous avons nettement
remarqué, dans le projet de loi, que l'agriculteur voit ses droits
fondamentaux brimés dans certains articles, pour n'en mentionner que
deux. Il y a l'article qui mentionne, à un moment donné, que
l'agriculteur ne peut donner librement de son vivant une partie de son bien
à ses enfants pour fins d'habitation. L'article 29 dit, entre autres,
que l'agriculteur ne peut partager avec ses enfants même pour fins
d'agriculture, son bien immobilier à parts égales, en fait, que
la terre est indivisible. J'aimerais connaître votre réaction
à ces articles.
M. Couture (Paul): Le problème que vous soulevez est un
problème qu'on a longuement discuté, parce qu'on sait que le
zonage brime certaines possibilités, certaines disponibilités
d'établir ses enfants sur la ferme et le reste. Mais, devant les
problèmes auxquels on a fait face, avec la protection de
l'environnement, notre position a été claire, la position des
agriculteurs est que la zone agricole est une zone industrielle-agricole. Comme
on ne laisse pas construire n'importe comment dans une zone industrielle, la
zone industrielle-agricole amène des inconvénients et souvent les
résidents qui sont dans cette zone s'en plaignent.
Donc, notre raisonnement, si on fait bâtir... Disons que j'ai cinq
enfants, ils se construisent chez nous, parce que c'est plaisant. Je peux
vendre ma ferme ou, dans dix ans, des cinq enfants, il n'en restera
peut-être plus qu'un. Ils auront des exigences et ceux qui auront
acheté la ferme auront des exigences, soit pour la protection de
l'environnement, l'épandage du fumier et le reste. Donc, la relation
avec ça, cela pose des problèmes et on dit, à partir des
problèmes auxquels on a fait face, on a préféré
laisser aller cette possibilité parce qu'elle pouvait nous créer
des inconvénients, à long terme.
M. Picotte: M. le Président, à maintes reprises,
depuis que je suis député à l'Assemblée nationale,
nous avons entendu les discours du député de Saguenay dans le
temps où il était dans l'Opposition. J'ai même lu le
programme du Parti québécois en 1976 et j'ai même entendu
l'UPA, à certains moments, qui demandait de protéger les terres
arables contre les acheteurs non résidents. Nous constatons que dans ce
projet de loi, il n'en est fait aucunement mention. Trouveriez-vous essentiel
que, dans le projet de loi, on ait un article qui inclurait cette demande que
vous faisiez?
M. Couture (Paul): Chez nous, c'est dans nos demandes. On le
signale, le non-accès aux fermes à des non-résidents. Je
ne sais pas si cela devrait être dans ce projet de loi ou dans un autre,
mais on trouve importante la question du non-accès aux fermes à
des non-résidents. Cependant, à partir de la définition
qu'on donne, on ne veut pas dire par là les gens qui achètent des
fermes, qui cultivent et qui vivent dessus; même s'ils viennent de
l'extérieur, ça ne pose pas de problèmes.
Mais l'achat de fermes par des non-résidents, c'était une
de nos demandes.
M. Picotte: Cela devrait être prohibé, selon votre
organisme.
M. le Président, à la page 4 de votre mémoire, vous
mentionnez au milieu: "L'article 4 du projet de loi spécifie que les
membres de la commission seront nommés par le gouvernement. Nous
réitérons sur cette question notre demande à l'effet que
les membres de la commission soient choisis, en majorité, à
même une liste soumise par l'association accréditée pour
représenter les producteurs agricoles". Pensez-vous qu'il est essentiel
que cette mesure que vous demandez avec instance soit inscrite dans le
même projet de loi?
M. Couture (Paul): Pour les agriculteurs, c'est essentiel, parce
qu'on dit que c'est la gestion de nos fermes, cela implique une
responsabilité qui relève des agriculteurs. On maintient cette
demande, on la remet à nouveau dans le mémoire.
M. Picotte: Je vais en profiter pour faire un commentaire, M. le
Président. Un peu plus loin, dans le mémoire, justement au bas de
la page 4, il est fait mention de l'article 96. Nous sommes entièrement
d'accord avec votre demande, parce que nous constatons que les articles 66,
107, 108, 109, 110 et 112 sont tout simplement des articles trompe-l'oeil,
parce qu'on aura beau dire que même les organismes gouvernementaux
doivent se soumettre à la commission, d'un revers de la main, avec
l'article 96, on pourrait le démolir. Alors, je demande au ministre ici
de bien prendre en note cette demande de la Confédération de
l'UPA, demande qui a été faite par d'autres organismes qui sont
venus avant vous, pour que l'article 96 soit biffé du projet de loi.
Je pense que c'est quand même bien important.
M. Garon: L'article 96, vous avez voté contre en
deuxième lecture?
M. Picotte: Non, pour une foule de raisons dont vous connaissez
déjà les réponses.
M. Chevrette: Contre le principe.
M. Picotte: Vous dites aussi dans votre rapport, à la page
5, vous semblez... nous avons entendu l'Union des conseils de comté,
auparavant, qui parlait de créer un organisme régional. Je
remarque que vous-même, qui connaissez passablement l'agriculture,
revenez avec la même recommandation au sujet d'un organisme
régional. Pourriez-vous me donner votre opinion et les raisons
fondamentales pour lesquelles vous semblez insister concernant cet organisme
régional?
M. Couture (Paul): L'organisme régional étant
proche du milieu, c'était la principale raison. Il est composé de
gens de la profession, encore en majorité, parce que c'est le même
raisonnement. Donc, on dit que ces gens plus proches du milieu seraient
peut-être plus en mesure de juger des problèmes qui se posent.
M. Picotte: A la page 6, je lis votre recommandation no 10: "Que
les organismes, les groupes d'individus ou les individus touchés par le
zonage puissent faire appel d'une décision de la régie
auprès du lieutenant-gouverneur en conseil.
Dans le projet de loi, comme on l'a présentement, nous voyons
qu'il n'existe pas de droit d'appel, peu importe ce qu'on pense. C'est tout
simplement un droit de révision par la même commission, qui se
trouverait, à ce moment-là, à être juge et partie.
Vous avez d'ailleurs très bien saisi l'importance de ce point de vue
puisque vous le soulignez avec pertinence à la recommandation no 10.
Personnellement, je trouve que cette décision de faire appel au
lieutenant-gouverneur en conseil alourdirait peut-être davantage la
procédure, mais, en supposant que le ministre, étant donné
qu à d autres occasions, il a mentionné qu'il ne semblait pas
tellement enclin à accepter une telle recommandation, en supposant que
le ministre ne voudrait pas accepter une telle recommandation, auriez-vous un
autre mécanisme qui pourrait permettre aux gens qui se sentent
lésés, aux agriculteurs qui se sentent lésés, de
faire appel à un autre organisme pour que justice soit rendue?
M. Couture (Paul): L'habitude de fonctionnement qu'on a chez
nous, notre expérience, c'est surtout avec la Régie des
marchés agricoles. On dit que la régie peut décider des
choses, elle entend les parties. Il y a toujours un recours, si on n'a pas
satisfaction, au lieutenant-gouverneur en conseil. Mais ce sont des exceptions
qui se sont faites dans le passé. Cela a été des cas
très rares.
Mais il faut donner la possibilité à l'organisme de
régler ces problèmes, pour qu'il n'y ait pas un engorgement au
niveau du lieutenant-gouverneur en conseii.
M. Picotte: A la page 7, il y a une autre recommandation qui a
attiré mon attention, la recommandation no 14: "Qu'il soit permis de
construire, sur une exploitation agricole, autant de résidences que
l'exploitation compte de propriétaires qui travaillent, la
majorité de leur temps, sur la ferme, et d employés permanents.
Ces résidences pourront être louées, mais ne pourront
être vendues qu'avec l'exploitation."
M. le Président, quand on lit attentivement le projet de loi tel
que rédigé, on se rend compte que c est loin d'être ce que
vous espérez obtenir, ce que le projet de loi vous accorde.
Là-dessus, je suis peut-être un peu embêté. Je ne
suis pas prêt à dire que, tel qu'il est rédigé, ce
n'est pas nécessairement une bonne chose, mais j'aimerais
connaître les inconvénients majeurs qui pourraient résulter
ou qui pourraient affecter un agriculteur si la loi demeurait telle que
rédigée.
M. Couture (Paul): Si vous faites référence
à l'article 40, je pense, on dit: "Dans l'aire retenue pour fins de
contrôle, une personne dont la principale occupation est l'agriculture
peut, sans l'autorisation de la commission, construire sur son lot une
résidence pour elle-même, pour son enfant et son employé.
La construction d'une résidence en vertu du présent article n'a
pas pour effet de soustraire la partie du lot sur laquelle elle est
construite... "
Je pense que c'est le même raisonnement que celui de tout à
l'heure. On voudrait que, s'il y a des enfants, un ou deux de ses enfants qui
travaillent sur la ferme, ils aient la possibilité de se construire,
mais que la maison qui est construite reste attachée à la ferme
pour qu'elle ne passe pas à des mains extérieures, ce qui
viendrait créer des inconvénients à cause de ce que je
vous disais tout à l'heure: l'environnement, etc.
M. Gaudet (Pierre): Je voudrais peut-être ajouter une chose
là-dessus. Notre position, c'est un choix. Et le choix qu'on fait, c'est
le développement de l'agriculture dans une zone agricole. Pour cela, ce
qu'on regarde, en même temps qu'on regarde la loi, c'est au niveau du
développement; il y a une question bien importante et les
problèmes qu'on a eus avant aujourd'hui, c'est sur
I'environnement. (21 h 30)
Quand on dit cela dans notre demande, au niveau de l'article 14, ce
qu'on veut faire, c'est se protéger en regard de ceux qui vont venir
dans notre territoire. Voici notre exemple. Quand une municipalité
détermine, décide qu'il y a une zone industrielle, il n'y a pas
de maisons qui se construisent là, ce sont des industries. Nous disons
que l'agriculture, c'est aussi une industrie.
II y a des résidents qui doivent être près de
l'industrie, à cause du type de l'industrie, mais c est cela qu'on
développe et c'est sur ce point-là qu'on argumente pour prendre
la position que nous avons prise, sur l'article 14, parce que, notre choix,
c'est le développement de l'agriculture, de ceux qui en vivent, non pas
de ceux qui n'y sont plus ou qui s'en vont.
M. Picotte: Dans votre esprit, si je prends I'article 40 tel que
vous l'avez mentionné je vais
surtout vers la fin de l'article lorsqu'on dit "construire sur
son lot une résidence pour elle-même, pour son enfant ou son
employé", comprenez-vous par là, dans cet article tel que
rédigé, que vous avez la possibilité d'ériger trois
résidences?
M. Couture (Paul): Ce que nous croyons, c'est qu'il devrait y
avoir autant de résidences qu'il y a de personnes impliquées dans
l'administration de la ferme, la possibilité de cela.
M. Picotte: D'accord, vous l'avez fait dans votre recommandation
tantôt, mais je vous demande, tel que l'article est rédigé
ici "construire sur son lot une résidence pour elle-même, pour son
enfant ou son employé", est-ce que, dans votre esprit vous avez
étudié le projet de loi cela veut dire qu'un agriculteur
pourrait construire trois résidences à sa ferme?
M. Couture (Paul): Dans notre esprit, si le projet ne veut pas
dire cela, on voudrait qu'il veuille dire cela.
M. Picotte: Je voudrais poser seulement une courte question au
ministre à ce moment-ci. Est-ce que cela veut effectivement dire, dans
l'esprit selon lequel le projet de loi est rédigé, que
l'agriculteur a le droit de construire trois résidences sur sa
terre?
M. Garon: Oui, je pense que cela veut dire cela. La personne peut
construire une résidence pour elle-même. Remarquez bien que cela
s'applique à une personne dont la principale occupation est
l'agriculture.
Une Voix: Oui.
M. Garon: Elle peut construire une résidence pour
elle-même, pour son enfant...
M. Picotte: Parce qu'il travaille en agriculture.
M. Garon: Non, son enfant. On ne spécifie pas. ... et son
employé. En droit, le singulier inclut toujours le pluriel, n'est-ce
pas? Le paragraphe suivant dit: "La construction d'une résidence en
vertu du présent article n'a pas pour effet de soustraire le lot ou la
partie du lot sur laquelle elle est construite à l'application des
articles 28 à 30".
Cela veut dire que, par ailleurs, ces résidences-là ne
peuvent pas être séparées de la ferme, sans autorisation de
la commission.
M. Picotte: Le ministre a mentionné que même si son
enfant ne travaille pas au niveau de la ferme... Cela veut dire que si
l'agriculteur a trois enfants...
M. Garon: Je vais vous dire une chose. M. Picotte: Un cas
précis. M. Garon: Oui, c'est cela.
M. Picotte: C'est sûr que cela ne se produit pas à
des centaines d'exemplaires.
M. Garon: Des couvées d'enfants qui sont autour de leurs
parents, on ne voit pas cela sauf dans un poulailler habituellement.
Deuxièmement, un fils d'agriculteur qui ne travaillerait même pas
dans la ferme à temps plein, disons qu'il travaillerait au village, qui
veut se bâtir à côté de son père, la
résidence se trouverait la propriété du père. Il
faut permettre cela, parce que, souvent, le fils permet des vacances au
père. Il ne travaille pas à temp plein dans la ferme, mais si le
père veut quitter une fin de semaine, le soir, pour une assemblée
de l'UPA, par exemple, s'il veut que quelqu'un s'occupe de la ferme, le fils
est bâti là, ou c'est le gendre avec la fille du cultivateur, cela
permet une aide à l'agriculteur, cela lui permet une relève, non
pas dans le sens qu'elle va prendre sa place, mais cela lui permet de le
remplacer pour que l'agriculteur puisse vaquer à d'autres
activités et possiblement prendre des vacances, etc.
Je pense que c'est important.
M. Vaillancourt (Orford): Occasionnellement.
M. Garon: Occasionnellement, oui. Je pense qu'il ne fallait pas
empêcher cela, mais que la résidence demeure sa
propriété et se vend avec la ferme. Mais, d'une façon
générale, les agriculteurs qui ont dix employés et cinq
enfants qui veulent bâtir dans la ferme, je n'ai jamais entendu parler de
cela.
M. Gaudet: Je tiens à préciser une autre chose,
c'est que celui qui aurait quatorze enfants, pour prendre un exemple, cela a
déjà existé dans le milieu rural, c'est ce qui fait qu'on
est grand et fort aujourd'hui, il va falloir qu'on y pense. On ne pourra pas
construire dix de nos enfants dans nos terres, parce que, si vous regardez ce
qu'on demande, ce qu'il y a dans la loi, on demande que ce soit rattaché
à la terre, qui va vendre cette terre avec dix maisons s'il n'y a pas de
ferme? Je pense que cette question-là limite dans une certaine partie le
nombre de constructions possibles.
M. Picotte: Je suis d'accord avec vous. Est-ce que...
M. Gaudet: II y a un autre point, un autre facteur aussi qui est
assez limité, c'est que, pour que le père les bâtisse tous,
il va falloir que l'agriculture soit passablement rentable.
M. Picotte: C'est vrai, c'est exact. Ce à quoi je voulais
en arriver tout simplement, par cet exemple, c'était de faire dire au
ministre que c'était possible, que cela ne se produirait pas à
des centaines d'exemplaires, mais que même s'il n'y avait qu'un cas
à l'intérieur de la province, je voulais savoir du ministre si
c'était possible. On me dit que c'est possible. Je prends bonne note de
cela.
Il y a un autre point, à la page 11 de votre
mémoire, qui est fondamental. D'ailleurs, j'ai eu l'occasion d'en
discuter avec quelques-uns des représentants de la
confédération. J'ai eu l'occasion de participer à la
commission parlementaire de l'environnement, à ce moment. Le
mémoire que vous aviez présenté faisait état du
droit du premier occupant. Je pense et c'est peut-être un autre
point que j'apporte à l'attention du ministre, et de façon bien
particulière il serait excessivement important que le droit du
premier occupant soit inscrit dans la loi de zonage, ce qui éliminerait
un tas de procédures concernant l'environnement. On le connaît,
les agriculteurs ont vécu le problème. Je pense que si ce point
faisait partie de la loi, ce serait déjà un gros point d'acquis.
J'aimerais attirer l'attention du ministre de façon spéciale
là-dessus. J'espère que, parmi les amendements qu'il apportera au
projet de loi, cela en sera un qui retiendra son attention de façon
particulière. Cela rejoint, évidemment, les préoccupations
de la Confédération de l'UPA, mais je pense que c'est un point
majeur, fondamental.
M. Garon: Quand m'avez-vous dit cela?
M. Picotte: Ce n'est pas à vous que j'ai dit cela.
M. Chevrette: II l'a dit en deuxième lecture.
M. Picotte: Non.
M. Garon: Vous avez voté contre.
M. Picotte: Ce n'est pas à vous que j'ai dit cela. C'est
lors de la commission parlementaire de l'environnement où on s'est
battus, les députés de l'Opposition, pour vous inviter à
venir. Vous êtes venu faire un tour cinq minutes et vous vous êtes
sauvé après. Vous n'avez pas pu comprendre. Si vous aviez
passé les trois jours avec nous autres, vous auriez compris cela du
premier coup. On n'aurait même pas eu besoin de le demander, il aurait
été dans votre projet de loi.
M. Charbonneau: Vous avez tellement bien compris que vous n'avez
pas voté pour en deuxième lecture.
M. Picotte: Cela, on s'en reparlera!
M. Chevrette: J'ai l'impression que vous étiez
tiraillé, M. le député de Maskinongé.
M. Picotte: Ne me dites pas que j'ai des allures de premier
ministre.
M. Garon: Pensez-vous que le député de Laval...
M. Picotte: Le premier ministre a été
tiraillé avant moi.
M. Garon: Pensez-vous que le député de Laval
défendait beaucoup les agriculteurs tantôt devant les
municipalités?
M. Lavoie: Pourriez-vous répéter votre question,
s'il vous plaît?
M. Garon: Je lui demandais s'il trouvait que le
député de Laval avait beaucoup défendu les agriculteurs
devant les municipalités tout à l'heure?
M. Lavoie: Ecoutez, M. le Président, je crois que je
défends ici les citoyens qui me mandatent. Parmi ces citoyens, il y a
des municipalités, il y a des agriculteurs, il y a des maraîchers.
J'entends les représenter, ce que je fais depuis 19 ans d'ailleurs, le
mieux possible, et ils me le rendent bien à chaque élection.
Le Président (M. Boucher): Je crois qu'on doit
revenir...
M. Picotte: A la pertinence du débat.
Le Président (M. Boucher): ... à nos moutons.
M. Picotte: La recommandation 26, quand je mentionnais
tantôt les discours de deuxième lecture des députés
de l'Opposition, entre autres, je pensais à la recommandation 26. Cela a
été l'argumentation, peut-être pas de base du
député de Montmagny-L'Islet, il l'a évoquée, mais
cela a été mon argumentation de base aussi lorsque je suis
intervenu en deuxième lecture, en vue d'en arriver, comme vous le dites
si bien, "à la pleine utilisation des terres protégées,
à un meilleur développement régional et que le
gouvernement mette immédiatement en oeuvre des politiques visant au
développement des productions actuelles et de nouvelles
productions."
En zonant le territoire arable au Québec, on va donner une grosse
chance. Même s'il y avait un beau zonage agricole au Québec, si on
ne s'organise pas comme gouvernement pour rentabiliser l'agriculture, cela ne
donnera absolument rien. Vous soulignez un point qui est fondamental. J'aurais
espéré qu'en même temps qu'on dépose ce projet de
loi, on nous apporte d'autres projets de loi qui puissent venir nous confirmer,
une fois pour toutes, qu'il y aura des mesures apportées pour
rentabiliser l'agriculture. On nous a dit que cela viendrait. Je ne veux pas
mettre en doute la bonne foi, ni du ministre, ni de personne, mais j'ose
espérer que ce ne sont pas des voeux pieux.
J'ose espérer que ces mesures viendront dans un court laps de
temps, qu'on n'aura pas besoin de quémander et que ce ne sera pas une
occasion pour le ministre de nous dire: Ecoutez, on a adopté une grosse
pièce législative, qui s'appelle la loi 90, laissez-nous souffler
un peu, on a déjà un gros magot d'accompli, on verra par la
suite. Je pense que ces lois que vous demandez devraient suivre dans pas
grand-temps. J'ose espérer qu'au mois d'avril on va avoir un budget, que
quelques centaines de millions additionnels apparaîtront au budget de
l'Agriculture. A ce moment, on me convaincra que le ministre n'a pas fait de
voeux pieux.
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît!
M. Picotte: M. le Président, je pense que j'ai
relevé quelques points; évidemment, il y en aurait d'autres, mais
je ne veux pas accaparer tout le temps de la commission, parce que je sais
qu'il y aura d'autres députés qui voudront intervenir, je me
réserve évidemment le droit de revenir par la suite, lorsqu'on
aura fait un tour des partis reconnus. Encore une fois, M. le Président
et ceux qui vous accompagnent, je vous félicite de votre mémoire,
il est très constructif, je pense qu'il dit exactement ce qu'il veut
dire, et si le ministre acceptait la totalité des points que vous
soulevez, il aurait déjà fait un bon pas pour nous faire voter en
faveur de la loi en troisième lecture.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Maskinongé. M. le député de
Huntingdon.
M. Dubois: Merci, M. le Président, je voudrais adresser un
bonsoir à vous, messieurs de la Confédération de l'UPA.
C'est avec plaisir que j'ai parcouru votre document et que j'ai pu constater
vos bonnes recommandations.
M. Marcoux: Est-ce que vous êtes prêt à
répéter ce que vous avez dit en Chambre concernant les dirigeants
de l'UPA?
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît, M. le
député de Rimouski! M. le député de Huntingdon,
vous avez la parole.
M. Dubois: Merci, M. le Président. M. Chevrette:
... ce que vous avez dit.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Joliette-Montcalm, à l'ordre!
M. Dubois: M. le Président je m'adresse à M.
Couture vous avez certainement entendu d'autres intervenants cet
après-midi je pense que vous étiez ici pendant un bout de
temps quand même où on a fait part à la commission
de plusieurs suggestions, que j'ai trouvées très
concrètes, et que nous avons d'ailleurs nous-mêmes
proposées au moment de la deuxième lecture. Entre autres, nous
avons parlé de planifi-caton globale au niveau de l'aménagement
et de l'utilisation du territoire. Nous croyons fermement que le zonage
agricole devrait s'inscrire à même un plan global. J'ai
remarqué que, dans votre mémoire, vous n'avez pas soulevé
ce cas. Ce serait ma première question; j'aimerais savoir si vous croyez
qu'on aurait dû procéder par un plan global d'aménagement
et d'utilisation du territoire dans lequel on aurait inscrit le zonage
agricole?
M. Couture (Paul): Notre préoccupation... D'abord, les
commentaires qui ont été faits cet après-midi
étaient toujours en fonction du bien commun. Mais, en fonction du bien
commun, le problème, comment se le pose-t-on? On dit: La
collecivité de l'agriculture, en a-t-on besoin? A partir du fait qu'on a
besoin de l'agriculture, le premier choix qu'on a à faire, c'est de
protéger nos sols. Je pense que, pour être en mesure de
fonctionner avec d'autres organismes qui ont déjà des plans de
zonage prenez les municipalités de villes, il y a
déjà des plans de zonage, elles sont déjà
équipées je pense que, pour arriver à être
capables de discuter au même niveau, il nous faut aussi avoir notre plan
de zonage et être capables de fonctionner. Je pense que c'est une
préoccupation de la collectivité de protéger ces sols
agricoles, parce que la collectivité en a besoin. A partir de là,
quand on vient dire qu'on va arrêter tout développement, je n'y
crois pas du tout, parce qu'on n'arrêtera pas le monde de tourner. Il y a
environ 2% des sols qui sont à vocation agricole, de bons sols, il en
reste 98%. Ensuite, à l'intérieur de cela, il y aura des
possibilités de discussion; si une municipalité a un plan, je
pense que le développement se fera après une étude et il
sera mieux planifié que si on part de pouvoirs à des
municipalités et qu'ensuite on en vient à un objectif
secondaire.
Dans les discussions, cet après-midi, l'inquiétude a
persisté dans mon esprit, parce que la préoccupation était
beaucoup plus pour le développement surtout dans le
mémoire de l'Union des municipalités de la
municipalité que le souci de la protection des sols. On le voit,
même par le potentiel de sols que l'on prétend protéger
on parle d'un potentiel de 120 millions d'acres, on dit: On va en
protéger 60 millions, on en protège la moitié, donc la
préoccupation n'est pas la même que de sauver cette richesse non
renouvelable qu'est le sol et je pense que c'est important. (21 h 45)
M. Gaudet: II faudrait préciser aussi que cela fait 20 ans
qu'on attend des programmes de planification globale et là, on a
décidé de commencer par un bout.
M. Dubois: II y a aussi le fait qu'il y a trois ministres,
présentement, qui travaillent en collaboration, afin d'établir un
plan d'aménagement et d'utilisation globale.
Ce qui veut dire que vous ne croyez pas que le respect des terres
fertiles ou du territoire agricole puisse s'exercer dans un plan de
planification globale. Vous n'y croyez pas?
M. Couture (Paul): Je pense que, pour être capable de
travailler dans un plan global, il faut avoir une loi sur la protection des
sols agricoles et ensuite, on part en partenaires et on est capable de discuter
et cela s'inclut ensuite dans un plan global agricole.
M. Dubois: Sur un autre sujet, vous êtes certainement au
courant qu'il y a eu, depuis longtemps, des voeux pieux de formulés par
le gouvernement actuel en vue de décentraliser les services de
l'agriculture. Nous avons une commission qui siégera de Québec,
une commission qu'on peut appeler une régie d'Etat, une seule
commission, qui prendra 614 dossiers municipaux, premièrement, et
peut-être des milliers de cas privés. Je
pense qu'au niveau des services agricoles, l'UPA est favorable à
une décentralisation des services envers l'agriculture.
Croyez-vous qu'une seule commission, c'est rendre un véritable
service à l'agriculture, une seule commission qui siège à
partir de Québec, parce que c'est encore un service à
l'agriculture qu'on va rendre à partir de cette commission?
M. Couture (Paul): Ma compréhension de la loi, ce n'est
pas que tout sera fait à partir de la commission; c'est que la
commission a la responsabilité d'administrer la loi et il y aura du
travail qui sera fait dans le milieu, mais qui sera sous la surveillance de la
commission. Si je comprenais que la commission devra préparer tous les
programmes et les plans, je pense que cela serait anormal; les organismes du
milieu auront un travail à faire mais la commission, selon ma
compréhension, a la responsabilité d'administrer la loi, de
surveiller comment cela s'applique.
M. Dubois: Donc, à la suite du dépôt que
chacune des 614 municipalités aura à faire, vous acceptez que le
rôle de ces municipalités soit celui de porteur de documents. Cela
revient à peu près à dire cela, à la suite du
dépôt de chacun de leur plan...
M. Couture (Paul): Cela dépend...
M. Dubois: ... parce que, tout ce qu'elles auront à
prendre ou à juger elles n'ont même pas le droit de juger
c'est-à-dire qu'elles auront le privilège de
transférer le document du fermier ou de la personne qui se sent
brimée dans ses droits à la commission de contrôle.
M. Couture (Paul): Cela dépend de la philosophie, de
l'approche qu'on a parce que, pour moi, comme toute loi a un responsable pour
l'administrer, les gens ont tous une responsabilité à
l'intérieur. Je pense que le rôle des organismes est quand
même assez respectable et ce n'est pas le seul rôle d'une
municipalité d'administrer la loi de zonage. Elle a beaucoup d'autres
rôles à jouer et on les respecte. A l'intérieur de cela, je
pense qu'elle a un rôle qui est important.
M. Dubois: Je voudrais avoir votre opinion sur une suggestion que
j'ai faite en deuxième lecture. Etant donné que nous avons douze
régions agricoles au Québec, douze services agricoles, j'ai
suggéré qu'il y ait douze commissions où pourraient
siéger certains membres du bureau régional agricole, certains
membres élus de conseils municipaux ou de conseils de comté, des
membres de l'UPA, des producteurs agricoles, bien d'accord, peut-être un
commissaire industriel, peut-être un urbaniste, enfin, on pourrait avoir
des groupes régionaux, étant donné que nous avons douze
régions agricoles.
J'aimerais que vous donniez votre opinion sur la valeur d'une telle
suggestion.
M. Couture (Paul): Sur ce paragraphe, on a notre recommandation
ici. Je pense que c'est assez clair, le point 9. On dit que l'UPA, à
l'intérieur... On ne nie pas que les autres corps aient le droit
d'être entendus, mais on dit qu'on considère l'UPA, à
l'intérieur de cela, comme un interlocuteur valable et qu'il soit
consulté à ce moment au niveau de la région, parce qu'il y
a une implication qui est régionale et il y a des gens qui sont plus en
mesure de fonctionner.
M. Dubois: Cela n'exclut pas la commission de contrôle qui
chapeauterait tout cela...
M. Couture (Paul): Bien non.
M. Dubois: ... qui serait le dernier intervenant s'il y a
litige.
M. Gaudet: Au niveau de la commission de contrôle, le
chapeau dont vous faites mention est important pour nous pour une raison bien
simple. On tient à ce que l'application d'une telle loi soit
conrôlée à un certain niveau pour garantir aux agriculteurs
de l'ensemble des régions qui seront zonées d'avoir le même
cheminement, la même démarche, pour s'assurer qu'il n'y ait pas un
régime qui s'applique d'une façon à un endroit et d'une
autre façon à un autre endroit, ce qui aurait pour effet de
brimer les agriculteurs dans une région ou dans une autre si la loi ne
s'appliquait pas de la même façon.
M. Dubois: C'est la raison pour laquelle j'accepte bien le
chapeau de la façon que vous l'interprétez à titre de
surveillance de douze commissions régionales possibles, parce que je
suis d'accord que cela prend une surveillance quand même pour
vérifier si les services sont rendus d'une façon équitable
à travers les régions. De toute façon, je pense que
personne n'est cimenté, pas plus l'UPA que le ministre. J'espère
que le ministre ne l'est pas trop. Il me semble l'être pas mal, quand
même. Nous sommes prêts à concéder, tout le monde est
prêt à concéder, mais le but, c'est de bonifier la loi,
c'est la raison pour laquelle vous êtes ici et que nous sommes ici.
J'ai d'autres questions ici. On parle, dans le projet de loi, de 70%
d'exemption ou de rabattement de taxes scolaires et municipales. Je pense que
vous savez tous que j'ai un préjugé très favorable pour
les agriculteurs, mais...
M. Baril: II faudrait le démontrer.
M. Lavoie: M. le Président, le député de
Joliette... On discute de choses sérieuses actuellement.
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît
M. Chevrette: On n'a aucune leçon à recevoir de
vous.
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît, M. le
député de Joliette-Montcalm, je vous rappelle à
l'ordre!
M. Chevrette: L'ancien président qui est censé
donner l'exemple! Vierge offensée.
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Joliette-Montcalm. M. le
député de Huntingdon, vous avez la parole.
M. Dubois: Je suis loin d'être contre le fait de rembourser
ou d'aider. Pas rembourser, mais plutôt aider l'agriculteur. Je crois
qu'il va y avoir une levée de boucliers vis-à-vis des 70% parce
que vous savez qu'il y a peut-être 12% de la population qui vivent de la
ferme, ou environ, pas loin, en tout cas qui vivent en secteur rural, et on
sait que le travailleur d'usine ne retirera pas des 70% de remboursement
scolaire surtout. C'est à celui-là que je m'attaque
premièrement. Je crois que le même argent, en fait c'est une
suggestion que je fais, les mêmes 70%, les fonds des 70% qu'on va verser
en remboursement de taxes scolaires surtout pourraient peut-être servir
à de meilleures fins si on prenait le même argent pour
rentabiliser davantage l'agriculture. Je pense à ce moment-là
à l'égouttement. On est très en arrière au niveau
de l'égouttement des sols au Québec et cela prend nombre
d'années pour arriver à quelque chose et, en plus, si on
calculait le nombre d'acres perdues en récolte au Québec, c'est
fantastique quand même ce qu'on perd chaque année à cause
du mauvais égouttement. Alors, il n'y a rien qui enlève, le plus
de motivation au producteur que quand il arrive pour récolter et qu'il a
une demi-récolte et en plus qu'il ne peut pas entrer dans le champ. Si
on veut faire bénéficier le vrai producteur agricole, celui qui
vit de la ferme, ce n'est pas là qu'on devrait mettre nos dollars. Il y
a d'autres places pour les mettre, comme la recherche au niveau des nouvelles
variétés, parce qu'on est en arrière au niveau de la
productivité à l'acre. Si je ne me trompe pas, le Québec
se situe le dernier dans le monde industriellement développé au
niveau de la productivité à l'acre. Alors, il y a beaucoup
d'endroits où notre argent devrait être mis en agriculture. Quant
à moi, en tout cas, je ne considère pas comme prioritaires les
70% de taxes scolaires. J'aimerais savoir pourquoi vous avez apporté
cette proposition. Il y a bien d'autres places pour mettre l'argent.
M. Couture (Paul): D'abord, quant à la
productivité, qu'on soit les derniers agriculteurs, les moins
productifs, je mets cela en doute. Mais ce n'est pas votre question. C'est la
question des 70%. La question des 70% relève d'une vieille
défense des agriculteurs qui dit: Pourquoi, dans le cas de
l'agriculteur, sa terre qui est son outil de travail, est taxée. Je
pense que c'est cela le raisonnement. Ce qui était demandé
à ce moment-là, c'est qu'on taxe sa maison, mais qu'on ne taxe
pas sa terre. Mais la formalité qui s'est trouvée la plus
plausible, j'en ai discuté longuement avec M.
Goldbloom lorsqu'il était ministre des Affaires municipales,
parce que c'est la question du remboursement des 40%, qu'on demandait, à
ce moment-là, seulement sur la terre. Mais la difficulté
d'appliquer cela a amené une remise de taxe qui était de l'ordre
de 40%, parce qu'on disait que cela se rapprochait de la demande de l'UPA. Les
70%, je pense que cela peut créer une certaine équité,
parce que les 30% peuvent représenter a peu près
l'évaluation, la taxation sur la maison et cela ne taxe pas un bien de
production qui est la terre agricole et tout son équipement.
M. Dubois: Quand j'ai dit que le Québec se situait le
dernier, le Canada se situe présentement le deuxième pays
industriellement développé, selon les dernières
statistiques. Le Québec est le dernier, ou à peu près, au
Canada. Alors, on est près... Si on n'est pas le dernier, on est
à 1 1/2, si ce n'est pas 1. Alors...
M. Couture (Paul): Là-dessus, on pourrait reprendre une
autre discussion, je pense.
M. Dubois: Je pense qu'il y a du chemin à faire là.
En plus, au niveau de la reconnaissance du producteur agricole, les $1000,
est-ce que vous êtes prêt à faire des suggestions pour
amender ce statut? Parce que vous savez pertinemment qu'il y a environ 9000
à 10 000 producteurs qui ont peut-être un revenu de $1000 ou
à peu près, qui vont recevoir 70% de remboursement de taxes
scolaires et municipales. Ne croyez-vous pas qu'il y aurait lieu d'avoir un
changement immédiatement, afin de ne pas faire bénéficier
des producteurs de fin de semaine ou des "gentlemen farmers", de ces 70% de
remboursement? Est-ce que vous avez un commentaire là-dessus?
M. Couture (Paul): D'abord, la formule, la remise de 40%
présentement, ne s'applique pas à tout agriculteur qui a produit
pour $1000. Cela s'applique selon certaines normes d'occupation de
l'agriculteur. Cela ne s'applique pas automatiquement au gars qui fait $1000,
la formule actuelle.
M. Dubois: Je connais des avocats, des notaires qui
reçoivent 40% présentement, ils demeurent à
Montréal et ils vont chercher...
M. Couture (Paul): Ce sont des classes de gens qui peuvent passer
à travers bien des choses.
M. Dubois: ... dix tonnes ou vingt tonnes de foin, ils ont une
facture de $1000 et ça y est.
M. Couture (Paul): La question des $1000 n'est pas automatique.
Mais cette question, on en discute tous les ans, c'est étudié,
c'est une formule que les agriculteurs mettent en cause, la définition
de producteur agricole, c'est ce qui existe dans la loi présentement.
Mais les agriculteurs, à tous les congrès, tous les ans,
étudient cette hypothèse. L'application des politiques agricoles
n'est pas automatique pour le gars qui a $1000 de revenus.
M. Dubois: Je comprends que ça peut contribuer à la
vente de cartes de membres aux producteurs agricoles, parce qu'il y en a 9000
à 10 000 qui en achètent présentement, ou à peu
près, ce sont les chiffres que j'ai eus. Remarquez bien qu'ils ne sont
pas officiels et je ne les confirme pas comme officiels. Mais on prétend
qu'il y a 9000 à 10 000 personnes qui, avec leur carte de membre de
l'UPA, qui coûte S50, bénéficient d'un abattement de taxes
scolaires et municipales.
Je me demande... Vous avez un congrès cette semaine, est-ce qu'il
va en être question, du statut de producteur?
M. Mailloux (Marcel): Comme à l'UPA, on vise à
améliorer le revenu du producteur, une des politiques mises de l'avant,
le zonage agricole en fait partie comme tel. Deuxièmement, la politique
de l'union, on va revendiquer pour obtenir un meilleur revenu pour le
producteur. Etant donné que vous jugez qu'il y en a 8000 ou 9000, on
estime de plus en plus qu'il y en a de moins en moins, en ayant des politiques
pour améliorer le revenu du producteur. C'est un objectif à
atteindre pour le bien-être de la collectivité, le bien-être
de la classe agricole au Québec. C'est dans ce sens que l'Union des
producteurs agricoles travaille.
M. Dubois: Nous avons discuté de régie temporaire
avec l'Union des municipalités. Trouvez-vous que cela aurait
été une solution, depuis le début, lors de la
présentation du projet de loi 90, une mesure législative qui
aurait préconisé une régie provisoire pour s'occuper des
cas urgents? Dans les 614 municipalités, c'est sûr qu'il va y
avoir des cas urgents. C'est sûr que quand on parle de droits acquis,
ça n'existe pas dans 614 municipalités, il y en a peut-être
seulement 150 ou 175 qui ont un parc industriel et un service d'égouts
ou d'aqueduc.
Dans ces cas-là, je comprends qu'il y a des droits acquis. Mais
dans une municipalité où il n'y a aucun service, cela veut dire
qu'il n'y a aucune zone réservée pour d'autres fins que
l'agriculture. A ce moment-là, il y a des investissements qui devraient
se faire et vous savez qu'on a un grand nombre de travailleurs de la
construction qui ne trouvent pas d'emploi durant l'hiver et je pense que,
jusqu'à un certain point, on participe à ralentir
l'économie. Il me semble que l'UPA pourrait peut-être
réagir dans ce sens. Je sais que le ministre réagit bien aux
demandes de l'UPA.
Je me demande si vous ne pourriez pas pousser le ministre à avoir
une régie temporaire.
M. Couture (Paul): La question de la régie temporaire n'a
pas été étudiée, mais je pense qu'on est à
étudier une loi de zonage. Je pense que le plus réaliste, c'est
d'essayer de l'adopter et, ensuite, de s'équiper, parce que si on
revient à une régie temporaire, on remet tout en cause, on
reprend toutes les études qui ont été faites; je pense que
c'est ce qui serait le plus long aujourd'hui.
M. Dubois: Cela ne touche pas les études du projet de loi
90. C'est bien en dehors du projet de loi 90. Cela aurait pu être
présenté en même temps et dans une journée, on
adopte ça à l'Assemblée nationale et il y aurait eu une
commission provisoire qui aurait pu prendre charge des cas urgents. C'est dans
ce sens-là que je pose la question.
M. Couture (Paul): On n'a pas étudié cette
approche...
M. Dubois: D'accord.
M. Couture (Paul): ... et spontanément...
M. Gaudet (Pierre): II faudrait peut-être préciser
là-dessus que nous autres, cela nous apparaissait facile d'avoir une loi
du zonage, parce qu'à venir jusqu'à maintenant, tous les
gouvernements ont dit qu'ils étaient d'accord avec une loi du zonage. On
a dit: Cela va passer comme du beurre dans la poêle et cela va
s'appliquer tout de suite. (22 heures)
M. Dubois: II faut quand même sortir les vices de la loi,
ne pensez-vous pas?
M. Gaudet: Je suis bien d'accord.
M. Dubois: Si vous allez à l'article 96, c'est un vice de
la loi. On est d'accord là-dessus, on a critiqué ouvertement cet
article. Il laisse la porte au gouvernement pour imposer à la commission
à peu près n'importe quoi.
Ensuite, quand on touche la construction domiciliaire sur le territoire
agricole, j'ai des cas particuliers qui m'ont été
soulignés en fin de semaine et cela n'a pas été
éclairci. On en a parlé un peu tout à l'heure.
Par exemple, si le fermier, à 60 ans, décide de demeurer
dans sa maison, garder son petit lopin de terre, vendre la terre à son
fils, le fils doit se construire une maison. D'accord? Il peut s'en construire
une sur sa ferme également. Il va y avoir deux maisons sur la ferme. Dix
ans après, le père décide d'aller vivre dans un centre
d'accueil. Il a un fils. L'autre maison fait partie intégrante de
l'exploitation. D'après le texte de la loi, le fils ne peut pas se
retourner et vendre cette maison à n'importe qui. Je parle de la maison
de son père. Il est obligé de l'acheter, cela fait partie
intégrante de la ferme et il n'a pas le droit de la vendre à
n'importe qui. Qu'est-ce qui arrive dans ce cas-là? Est-ce que vous avez
étudié cette approche?
M. Couture (Paul): Cela fait partie de tous les
inconvénients de la loi, mais, présentement, le père,
comme vous le dites, peut séparer sa maison.
M. Dubois: D'accord, je le concède.
M. Couture (Paul): La maison qui est construite.
M. Dubois: Oui.
M. Couture (Paul): Mais, par la suite, il peut en disposer, s'il
l'a sortie de sa ferme.
M. Dubois: On dit que toutes les constructions sur la ferme font
partie intégrante de l'exploitation.
M. Couture (Paul): Mais il n'est plus sur la ferme le matin qu'il
l'a lotie, qu'il l'a sortie de sa ferme, qu'il l'a cadastrée.
M. Dubois: Ce n'est pas clair dans la loi.
M. Lavoie: Est-ce que le ministre est d'accord pour dire qu'on
peut...
M. Garon: Quoi?
M. Lavoie: Que le cas exposé par le député
de Huntingdon est véridique?
M. Garon: Si le cultivateur a le droit de sortir sa maison? Le
père?
M. Dubois: Le père a-t-il le droit de sortir la maison de
l'exploitation de la ferme?
M. Garon: Oui, et si on combine l'article 101 et l'article 1,
paragraphe 1, qui est la définition de l'agriculture, l'agriculture ne
comprend pas les résidences, alors qu'à l'article 101, on dit:
"Une personne peut, sans l'autorisation de la commission, aliéner, lotir
et utiliser à une fin autre que l'agriculture un lot situé dans
une région agricole désignée, une aire retenue pour fins
de contrôle ou une zone agricole, dans la mesure où ce lot
était utilisé ou faisait déjà l'objet d'un permis
d'utilisation à une fin autre que l'agriculture lorsque les dispositions
de la présente loi visant à exiger une autorisation de la
commission ont été rendues applicables sur ce lot. "
Ce lot était donc utilisé à une fin autre que
l'agriculture, puisque la résidence d'un demi-hectare autour de la
résidence, est distrayable, peut être distraite du lot principal.
A ce moment-là, l'agriculteur est dans la même position qu'un
individu qui a une terre qui est en friche. Celui-ci va pouvoir garder pour des
fins non agricoles sa maison et un demi-hectare. Le reste tombe agricole.
Le même droit est à l'agriculteur. Il n'est pas
différent de celui-là. La seule chose que cela pourrait amener,
c'est que celui qui n'est pas agriculteur ne pourrait pas bâtir une autre
maison, mais l'agriculteur dont l'occupation principale est l'agriculture, lui,
va le pouvoir.
M. Lavoie: II faudrait clarifier, je crois, parce que l'article
29 également défend les démembrements. Il faudrait
clarifier. Si c'est l'intention du ministre, ce sera facile de clarifier
article par article.
M. Garon: Voyons donc, on l'a rédigé comme cela,
justement pour le permettre.
M. Dubois: Dans votre suggestion, au numéro 19...
M. Garon: On avait de bons avocats.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Huntingdon, si vous voulez poursuivre.
M. Picotte: Vous étiez leur professeur? J'espère
que non.
M. Dubois: A la page 8, au numéro 19, on dit: "Qu'aucune
partie du territoire ne puisse être vendue à des
non-résidents du Québec." Je me pose une question sur
Québec. Que je sache, nous sommes encore au Canada. C'est encore un
pays.
M. Charbonneau: II voit des séparatistes partout.
M. Dubois: Un instant! Cela va bien plus loin que cela.
M. Baril: Tout à coup la reine Elizabeth s'en vient
ici.
M. Dubois: L'Ontarien qui vit à un quart de mille des
limites du Québec, le gars du Nouveau-Brunswick qui vit à un
quart de mille des limites du Québec, n'auraient pas le droit d'acheter
une terre et de résider en Ontario ou de résider au
Nouveau-Brunswick. C'est à peu près cela. Je pense que c'est
très coercitif. Je ne sais pas si vous allez dans le sens du
gouvernement séparatiste, mais là, je pense que c'est pousser,
c'est charrier. Je le pense réellement.
M. Couture (Paul): Mais la question, je pense...
M. Dubois: Oui, écoutez...
M. Couture (Paul): Un type de la Colombie si on peut
donner des exemples et aller aux excès qui aurait acheté
une terre ici et qui réside en Colombie ne cultive pas sa terre. On dit
que c'est pour celui qui va acheter une terre pour la cultiver.
M. Dubois: Un non-résident, cela veut dire celui qui ne
réside pas au Québec, n'est-ce pas? Le Québec, ce n'est
pas une île. On touche à d'autres frontières d'autres
provinces. C'est dans ce sens que je pose ma question. Le type qui demeure en
Ontario, près des frontières du Québec, ne pourrait pas
acheter une terre au Québec, l'exploiter et résider en Ontario,
comme c'est là. Comme c'est proposé, c'est cela.
M. Mailloux (Marcel): Mais les lois de lotissement, les lois de
cadastre et tout cela, c'est de nature provinciale. C'est relié aux
politiques provinciales comme telles. C'est dans ce sens-là que la
protection des terres est assujettie à notre juridiction
provinciale.
M. Dubois: Qu'aucune partie du territoire ne puisse être
vendue à des non-résidents du Québec; c'est bien cela,
n'est-ce pas?
M. Gaudet: D'autre part, M. le Président, il y a une autre
question dans cette argumentation qui est la suivante: C'est qu'en fonction de
nos organismes de mise en marché, avec lesquels on brasse des affaires,
on a eu du "fun" avec les gens qui étaient aux frontières...
M. Dubois: Vous en avez des gars de l'Ontario qui...
M. Gaudet: On a eu passablement de "fun" avec les gars qui
essayaient de jouer sur les doubles frontières. C'est pour cela que,
dans le paragraphe 19, quand on parle de non-résidents du Québec,
on pense aussi à nos formules de commercialisation et on veut s'assurer
que, quand on va participer à des formules au Québec, un gars ne
pourra pas être à cheval sur la clôture.
M. Dubois: Je pense bien que le Québécois qui
réside aux frontières Québec-Ontario va avoir encore le
privilège d'aller acheter une ferme en Ontario, de recevoir les services
du gouvernement de l'Ontario, du ministère de l'Agriculture
là-bas, et je pense qu'il sera le bienvenu de l'acheter. Là, on
empêche les autres provinces ou les résidents des autres
provinces, aux frontières, à venir acheter ici. En tout cas,
remarquez bien que je vais combattre cet élément jusqu'au bout.
C'est votre privilège de le présenter comme cela.
M. Baril: ... défendre les Québécois. M.
Dubois: Tu charries royalement. M. Baril: Non, mais c'est cela.
M. Dubois: Tu ne comprends même pas le texte de loi, comme
c'est là.
Une Voix: II faudrait quand même que ce soit
constitutionnel.
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Dubois: A présent, je vais aller à un autre
domaine, moins litigieux peut-être. J'ai suggéré, en
deuxième lecture, que l'environnement agricole soit séparé
de l'environnement comme tel. La dépollution du Saint-Laurent, c'est une
chose, mais l'environnement agricole, quand il s'agit de donner des permis
d'exploitation aux porcheries, enfin, à l'exploitation animale, je pense
que c'est un autre domaine plus particulier. Est-ce que vous seriez d'accord
qu'il y ait une division de l'environnement dont un secteur touche
spécialement l'agriculture? Comme c'est là, il n'y a pas
d'entente. Enfin, on ne s'entend pas trop bien entre les deux ministres. Entre
le ministre délégué à l'environnement et celui de
l'Agriculture, il y a des frictions. Pour éliminer cela et rendre un
meilleur service à l'agriculteur, ne croyez-vous pas qu'il y aurait
peut-être lieu qu'il y ait deux services distincts?
M. Couture (Paul): On a une mentalité au niveau de
l'environnement. On sait qu'il y a des problèmes avec le
ministère de l'environnement. On a dit: On est d'accord avec des
règlements. On sait que, par le développement des élevages
et le reste, tu ne peux plus produire sans règlement, mais on dit que
ces règlements doivent être applicables et tiennent compte de la
réalité. Vous demandez s'il serait possible qu'il y ait deux
règlements de l'environnement, etc.; on n'a pas d'objection à
cela, si cela se réalise mieux, mais ce qu'on a dit, et c'est là
l'essentiel, c'est qu'on n'est pas contre des règlements concernant
l'environnement, mais on est contre qu'ils mettent en cause toute
l'économie de l'agriculture. On veut que cela s'applique normalement,
qu'on permette aux agriculteurs de s'ajuster à cela et que cela ne
demande pas des investissements qui soient hors de leur portée.
M. Dubois: Si j'amène cela, c'est parce qu'on constate
souvent qu'il y a un ralentissement dans l'investissement agricole ou
l'aménagement, enfin, vers une nouvelle...
M. Garon: M. le Président, M. le député de
Huntingdon, je peux donner une clarification ici. Si vous regardez l'article
111, il dit exactement ce que vous dites actuellement: "Aucune disposition d'un
règlement susceptible d'affecter les immeubles compris dans une aire
retenue pour fins de contrôle ou dans une zone agricole établie
suivant la Loi sur la protection du territoire agricole... ne s'applique
à cette aire ou à cette zone à moins que le
règlement ne l'indique expressément.
Cela veut dire que, dans un règlement de l'environnement, pour
affecter un territoire zoné agricole, il devrait être inscrit
spécifiquement que ce règlement s'applique au territoire
zoné agricole, ce qui veut dire, au fond, que l'environnement devra
avoir des règlements spécifiques à l'agriculture et
d'autres qui ne seront pas spécifiques à l'agriculture, avec
l'article 111 qui ajoute l'article 124a dans la Loi de l'environnement.
M. Dubois: L'article 111 n'apporte pas nécessairement un
service plus rapide envers les producteurs agricoles.
M. Garon: Non, je ne parle pas des permis.
M. Dubois: C'est cela le problème présentement.
M. Garon: II y a un règlement d'environnement particulier
à la zone agricole.
M. Charbonneau: Ce n'est pas une loi-parapluie pour régler
tous les problèmes.
M. Garon: Evidemment, on ne peut régler notre
système administratif par une loi.
M. Baril: Ce n'est pas une encyclopédie.
M. Dubois: J'achève, M. le Président. A l'article
25, on parle de plans conjoints. J'aimerais savoir si ces plans conjoints que
vous désirez voir mis en place, c'est avec référendum ou
sans référendum, et si vous comptez tenir compte du volume de
production au moment du vote au référendum sur les plans
conjoints.
M. Couture (Paul): Là-dessus, il y a un raisonnement assez
simple. On veut demander des amendements d'abord à la loi de mise en
marché pour permettre des référendums avec des normes
normales, comme on a des exigences pour n'importe quelle autre industrie,
n'importe quel autre cinquante plus un; je pense que c'est normal. Pour la
question à savoir si le vote va être relié au nombre de
cochons, notre raisonnement, c'est que ce sont les individus qui votent, pas
les cochons.
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît!
M. Dubois: Vous êtes peut-être applaudi sur votre
raisonnement.
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît! Je ferai
remarquer à l'assistance qu'en aucun cas, on doit manifester. Merci.
M. Dubois: Voter à un référendum pour
l'avenir du Québec, c'est une chose, mais voter à un
référendum économique, parce qu'un plan conjoint, il faut
quand même penser que c'est un référendum économique
seulement. Un instant!
M. Charbonneau: Question de règlement! M. Dubois:
II n'y a pas de règlement.
M. Charbonneau: Question de règlement. Je voudrais
simplement demander à la présidence de faire appliquer le
règlement qui veut que les droits de parole soient limités
à vingt minutes. Je pense qu'il y a d'autres députés qui
voudraient poser des questions sur le projet de loi.
Le Président (M. Boucher): M. le
député...
M. Dubois: Dans l'ensemble, je n'ai pas eu vingt minutes
encore.
M. Charbonneau: Vous avez eu vingt minutes de parole, vous en
avez eu au-delà de vingt minutes.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Verchères, je crois que de ce côté, si on avait
appliqué le règlement, je pense qu'on aurait passé notre
temps dans le règlement.
M. Picotte: On serait rendu au onzième mémoire.
M. Charbonneau: Pardon?
M. Picotte: On serait rendu au onzième mémoire, si
on avait appliqué le règlement depuis le début, ce qu'on
n'a pas fait.
M. Charbonneau: Ce qu'on lui demande, c'est de s'en tenir
à la pertinence du débat, par exemple. On a le droit de faire
cela?
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît!
M. Picotte: C'est au président à le rappeler
à l'ordre, ce n'est pas au député de Verchères.
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Maskinongé, s'il vous
plaît!
M. Picotte: C'est à vous à le rappeler à
l'ordre, ce n'est pas au député de Verchères.
Le Président (M. Boucher): D'accord. M. le
député de Huntingdon, vous avez la parole. Maintenant, je vous
demanderais de tenir compte qu'il y a d'autres organismes qui attendent aussi
pour être entendus. Merci.
M. Dubois: Je disais qu'un référendum sur l'avenir
constitutionnel, c'est une chose. Un référendum
économique, c'est une autre chose. Un référendum sur une
production agricole, c'est bien plus économique que politique. Il est
question de l'avenir économique agricole du Québec quand on vote
à un référendum. C'est là qu'entre en ligne de
compte la production. Si vous arriviez demain matin à un vote, vous vous
diriez, c'est General Motors contre une usine de dix automobiles par
années, je pense qu'il y aurait un déséquilibre. C'est
à peu près à la même chose que vous en venez. Vous
dites: Un cochon, 5000 cochons, 50 000 cochons. C'est cela que vous voulez
dire? Si c'est comme cela que vous fonctionnez, d'accord.
M. Couture (Paul): On peut le ramener à une autre
production qui est peut-être plus simple. Les producteurs d'abord qui
administrent les plans conjoints sont élus par les producteurs je
pense que c'est un cas comme hommes. Les agriculteurs qui sont
élus, ce n'est pas vrai que ce sont de petits producteurs. Ce sont des
producteurs qui sont efficaces, qui représentent un volume de
production. Le gars qui administre le plan conjoint, qu'il ait un volume de 100
000 livres ou de 50 000 livres, cela ne veut pas dire qu'il est plus efficace
et qu'il est meilleur comme administrateur. Donc, il y a une relation comme
dans n'importe quelle autre représentation. La valeur financière
du gars ne veut pas toujours dire sa valeur morale ou sa valeur...
M. Dubois: Pas valeur financière, ni valeur morale, mais
capacité de production, c'est quelque chose quand même à
évaluer, je pense. Quand il arrive avec un plan conjoint où il y
a 60% des producteurs qui disent oui, mais qui représentent
peut-être 10%, 15% ou 20% de la production globale, ce n'est pas tout
à fait représentatif au niveau économique. Je le prends
dans ce sens. Si...
M. Couture (Paul): Oui, c'est assez difficile. On parle
beaucoup... Vous faites allusion, si je comprends bien, au
phénomène d'intégration, si vous voulez...
M. Dubois: Les coopératives sont les plus grands
intégrateurs, alors pourquoi parle-t-on d'intégration ici? (22 h
15)
M. Couture (Paul): Est-ce qu'on va laisser administrer toute la
production par un gars pas par lui-même parce qu'il
représente une compagnie et qu'il va contrôler, mettons, le tiers
ou la moitié de la production. Quelle justification a-t-il de mener
à lui seul toute la mise en marché de la production, parce que ce
qu'on veut par un plan conjoint, c est un équilibre de forces pour les
producteurs qui sont des unités, des entités, pour essayer de
leur redonner une force pour faire face à des entités qui sont
regroupées comme acheteurs.
M. Dubois: C'est un sujet sur lequel on pourrait s'étirer
pendant bien des semaines, je pense, alors je vais l'abandonner
immédiatement parce qu'il y a d'autres intervenants ici.
Je peux quand même percevoir que vous donnez un oui à peu
près systématique au projet de loi 90. Je me demande
jusqu'à quel point ce oui, presque systématique, ne serait pas
motivé par le dépôt du projet de loi no 116.
M. Couture (Paul): II n'y a aucune relation avec le projet de loi
116.
M. Dubois: Non, mais il y a eu un dépôt de projet de
loi et vous connaissez le projet de loi 116.
M. Couture (Paul): Oui, mais pour nous il n'y a aucune relation.
Une loi de zonage, chez nous, c'est une loi de zonage, cela fait longtemps
quelle a été demandée.
M. Dubois: Oui, je comprends très bien, mais je parle du
oui systématique ou à peu près, parce qu'on peut quand
même s'apercevoir que la plupart des mémoires revendiquaient plus
de droits aux municipalités, le fait qu'il n'y ait pas de plan
d'aménagement global du territoire et je pense que ce sont des choses
qui sont assez raisonnables. Le fait que vous acceptiez à peu
près intégralement le projet de loi, quand vous êtes au
courant que le projet de loi no 116 est déposé qui est
d'ailleurs très plaisant pour l'UPA et pour les
fédérations de producteurs je me demande s'il n'y a pas un
lien entre les deux; c'était plutôt une question que je me posais.
C'est tout, M. le Président.
M. Gaudet: M. le Président, si vous le permettez, il
faudrait peut-être préciser que les positions de l'union, en ce
qui a trait au zonage, ne sont pas nouvelles; ce n'est pas d'aujourd'hui. Par
exemple, on pourrait regarder le mémoire qui est en annexe,
mémoire qu'on a présenté au cours du mois de septembre, en
annexe du présent mémoire. Les positions de l'UPA sont telles que
présentées depuis quatre ans. Or, je ne sais pas s'il y a quatre
ans, il y a eu dépôt du projet de loi 116.
M. Dubois: Merci, messieurs de I'UPA.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Huntingdon. M. le député d'Iberville.
M. Beauséjour: J'aimerais d'abord vous féliciter
parce qu'après la deuxième lecture, on a adopté le
principe, ce qui veut dire qu'on ne peut pas revenir et changer, dans la loi,
ce qui est de principe.
Ce que je remarque dans votre mémoire, c est que vous avez
beaucoup d'aspects qui étudient différents articles et aussi qui
apportent des idées.
Pour poser ma première question, je partirais d'une constatation
de quelqu'un qui a dit récemment: C est de savoir si le ministre de
l'Agriculture, le gouvernement péquiste et l'UPA ont vraiment
travaillé sur le projet de loi dans l'intérêt propre du
cultivateur ou si ce n'est tout simplement pas dans leur intérêt
personnel? Il s'adressait à Mme le Président je reviendrai
tout à l'heure sur l'UPA, car j'en ai long à dire le
député de Shefford.
Je sais que vous êtes en congrès, je suppose que vous
êtes élus démocratiquement, alors ce que je voudrais savoir
d'abord c'est combien de producteurs agricoles vous représentez?
M. Couture (Paul): 48 000 agriculteurs qui sont membres.
M. Beauséjour: Merci. Permettez que je vous cite autre
chose en vue d'une deuxième question? C'est au sujet de la commission;
le député de Shefford disait, au sujet de l'UPA: "Si ça
reste comme c'est là, c'est la course, c'est le concours de
popularité, le concours de belles langues et le concours de tout ce que
vous voudrez, même Miss UPA, pour essayer d'avoir l'un des quatre postes
qui vont faire l'objet des nominations "patroneuses du gouvernement d'en face.
" Si je prends la page 4 de votre mémoire, vous indiquez que vous
voudriez que la majorité des membres soit choisie à partir d'une
liste présentée par votre organisme. Est-ce que vous voyez, dans
les autres membres, soit des représentants municipaux ou autres?
M. Couture (Paul): Pour notre part, ce qu'on demande, c'est que
la majorité soit formée de représentants de l'UPA et comme
on ne voulait pas d'interférence politique, on dit: A même une
liste qui est fournie. Je pense que c'est assez clair.
Pour ce qui est de l'insinuation qu'il y aurait une course pour des
fonctions ou chose du genre, c'est assez simple d'y répondre. Je pense
qu'il y a une réponse du congrès.
Ce matin, on avait 300 délégués en congrès.
Ils ont adopté une résolution unanime appuyant les
délégués, les représentants de l'UPA ici, et
appuyant leur mémoire. Donc, les représentants peuvent bien
être un peu... on peut les juger comme on veut, mais on ne peut pas juger
toute la classe agricole de travers. Ces gars représentent leur milieu
et ils sont aussi conscients que n'importe qui et aussi responsables que
n'importe qui, c'est leur représentation et c'est leur point de vue.
Pour ceux qui craignent que, si on a défendu le projet de loi,
c'est pour avoir des jobs, je me refuse à tout qualificatif parce que,
spontanément, on peut dire des choses qui ne sont peut-être pas
acceptées dans cette assemblée. Mais les dirigeants de l'UPA ont
quand même été élus par les agriculteurs, ils sont
en poste, ils jouent leur rôle honnêtement et le temps qu'ils
seront là, ils joueront leur rôle honnêtement.
M. Beauséjour: Je vous remercie. Je suppose que ceux qui
en ont long à dire s'ouvriront la trappe à un certain moment.
M. Verreault: Voulez-vous m'agacer?
M. Beauséjour: A la page 5, je trouve qu'il y a un aspect
très intéressant que vous signalez, et j'aimerais vous en faire
part. Pour ce qui est des interventions devant la commission et surtout aussi
au niveau des municipalités, vous suggérez, dans votre
mémoire qu'elle soit tenue d'aviser le public à cet effet et
d'entendre les intéressés plutôt que de dire qu'elle peut
les entendre, mais qu'elle soit obligée de les entendre. C'est un aspect
que je trouve très positif.
A la page 11, sur l'article 23, vous dites "que les lois fiscales
s'appliquant aux exploitations agricoles, en particulier les taxes
foncières et les droits successoraux, soient réexaminés et
réaménagés afin de les rendre compatibles avec les
objectifs poursuivis par la politique de développement de l'agriculture
et la Loi sur la protection du territoire agricole.
Pourriez-vous me préciser un peu ce que vous entendez par cet
article?
M. Couture (Paul): D'abord, là-dessus, on a des
représentations à faire au ministre des Finances en temps et
lieu, mais la question des droits successoraux, des problèmes de
passation de la propriété ou de la ferme qui impliquent
aujourd'hui des montants considérables, cela crée des
problèmes de transmission aux enfants, et comme il y a une
possibilité de don pour une valeur maximale de $75 000 pour l'ensemble
des enfants, si je donne ma ferme à un de mes fils, et que je le fais
bénéficier de l'avantage de $75 000 parce que, souvent, c'est
plus difficile de vendre à son fils que de vendre à un
étranger, car on est plus surveillé par la loi, je pense que cela
crée des problèmes et je lèse mes autres enfants. Si j'ai
sept enfants, j'ai alors donné la plus grosse partie de mon avoir
à un de mes fils et je ne suis pas capable d'en donner à
d'autres.
M. Beauséjour: Merci, monsieur.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député d'Iberville. M. le député de Rimouski.
M. Marcoux: Merci. Les premières questions que je voulais
soulever ont été abordées par le député
d'Iberville. Je vais aborder d'autres questions. D'abord, un premier
commentaire. Je vous remercie d'appuyer à nouveau l'idée que le
zonage soit étendu le plus tôt possible, d'ici un délai de
six mois, à l'ensemble des régions du Québec. Je pense que
cet appui que vous donnez va aider à ce que ceci se réalise le
plus tôt possible.
Ma première question concerne ce que je pense être une
contradiction dans votre mémoire entre l'opinion que vous donnez
concernant l'article 96, les articles 18 et 44 et la façon dont vous
regardez l'avis de la commission par rapport aux organismes gouvernementaux qui
voudraient se soustraire du territoire agricole.
D'une part, je voudrais traiter les trois ensemble pour vous permettre
de vraiment clarifier votre idée sur ce sujet. D'abord, vous demandez
l'abolition de l'article 96, qui permet, en somme, au gouvernement de changer
ou de soustraire à la commission une matière qui est sous
décision ou à être décidée.
D'autre part, parce que vous craignez jusqu'à un certain point
l'intervention gouvernementale dans certaines décisions, vous demandez
de modifier l'article 18 et l'article 44 pour qu'on puisse en appeler de la
décision, mais au lieutenant-gouverneur, donc au gouvernement. D'une
part, vous voulez soustraire au gouvernement une possibilité de
décision ou peut-être d'appel et, d'autre part, vous dites: On
voudrait qu'il y ait une instance subséquente qui serait le gouvernement
comme tel. Et une troisième contradiction apparente, en tout cas, vous
dites: En ce qui concerne les organismes gouvernementaux, on ne veut pas que la
commission donne seulement son avis, on veut qu'elle soit décisionnelle.
Là, il n'y aurait plus de possibilité d'appel. Si, pour les
organismes gouvernementaux, c'est la commission qui a la décision
finale, il n'y a plus d'appel, même le gouvernement ne peut plus en
appeler de la décision de la commission. Alors, comment concilier ces
trois choses-là? J'ai l'impression qu'il y a au moins une contradiction
qui peut disparaître, mais...
M. Couture (Paul): Je pense que c'est assez simple. La
première, c'est que le lieutenant-gouverneur en conseil peut soustraire
de lui-même, sans passer par la commission, quand il dit: Peut
soustraire...
M. Marcoux: C'est l'article 96. Vous proposez qu'il soit
biffé.
M. Couture (Paul): Oui. Parce que là, il peut le
soustraire. Mais dans l'autre, si la commission ou les individus se sentent
lésés, ils ont une demande qui est faite au lieutenant-gouverneur
en conseil et
c'est différent. C'est parce que le lieutenant-gouverneur en
conseil, dans le premier cas, à l'article 96, peut le soustraire, mais,
dans l'autre cas, il peut se prononcer, parce qu'il y a une demande soit de la
commission, soit des intéressés. Est-ce que vous comprenez la
différence?
M. Marcoux: Disons que je m'attendais un peu à cette
réponse pour les deux premiers aspects, mais le troisième, je le
concilie mal avec les deux premiers.
M. Dumais (Mario): Celui sur les articles 66 et...
M. Marcoux: Celui qui interdit au gouvernement d'en appeler de la
décision de la commission concernant les organismes gouvernementaux.
M. Dumais: Là-dessus, si vous lisez très
attentivement ce qu'on écrit, on maintient notre demande. C'est
évident que c'est un peu difficile de dire au gouvernement: Tu vas
toi-même passer par là et tu n'auras pas de droit d'appel. On
n'insiste pas nécessairement dans la représentation qu'on fait
pour dire: On tient mordicus à ce que ce soit, plutôt qu'un avis,
une décision ferme de la commission là-dessus; de la
manière que c'est régidé, cela le dit bien clairement.
Mais je voudrais juste souligner, pour revenir aux deux autres, qu'il y a une
différence fondamentale entre le 96 et le droit d'appel. Lorsqu'on va en
appel, la commission s'est d'abord prononcée tandis que, par le 96, ce
qui nous apparaît un peu exorbitant, c'est que la commission ne se
prononce pas dans un premier temps et c'est par un simple avis écrit.
Beaucoup de gens pourraient dire: De toute manière, le gouvernement peut
tout faire. Il peut changer la loi. Il peut défaire ce qu'il y a dans la
loi de zonage, un éventuel gouvernement, celui-là ou un autre.
C'est vrai, mais défaire par un processus législatif, c'est plus
compliqué. Cela implique des débats à l'Assemblée,
dans l'opinion publique, tandis que soustraire par un simple avis écrit,
la commission ne se prononçant pas sur la question, on trouve cela
vraiment trop fort et on demande que ce soit biffé. On ne trouve pas
cela contradictoire avec la demande d'avis au lieutenant-gouverneur en conseil,
parce que la commission se prononce dans un premier temps.
M. Marcoux: Pour les deux premiers aspects, et vous avez
nuancé le troisième, disons que cela répond très
bien à mes questions. En ce qui concerne la banque de terres, il y a une
petite précision que j'aimerais avoir. Vous avez regardé le
projet de loi 99. Vous faites une distinction entre autorisation et obligation.
Je voudrais que vous précisiez un peu cela.
M. Gaudet: La question est bien simple. L'inquiétude qu'on
avait, ce qu'on a cru comprendre dans la loi 99, c'est que le gouvernement
pouvait créer, pouvait acheter des terres. Le problème qui se
posait, c'est que, pour nous, il ne faut pas seulement qu'il puisse, il faut,
dans certains cas, qu'il doive les acheter. On prend l'exemple d'un gars qui a
82 ans et qui est dans une zone délimitée. Pour une raison ou
pour une autre, il n'aurait pas d'autre acheteur autour. Plutôt que de
laisser cette terre aller en friche, que le gouvernement l'achète. Il y
aura un autre producteur qui va la louer ou un autre jeune qui pourra s'y
installer à cause des possibilités que pourrait lui offrir
l'Etat.
M. Couture (Paul): J'aimerais mettre une nuance sur une
intervention que vous avez faite au début, quand vous avez dit que vous
nous remerciiez d'appuyer le gouvernement.
M. Marcoux: Je vous remercie d'appuyer l'idée
d'étendre l'application de la zone désignée à
l'ensemble du territoire.
M. Couture (Paul): Parce que nous, l'appui, ce n'est pas l'appui
au gouvernement, c'est l'appui à la loi. (22 h 30)
M. Marcoux: Non, d'appuyer l'idée d'étendre le
territoire zone à l'ensemble des régions.
M. Couture (Paul): Je trouvais ça important.
M. Marcoux: Je n'essaierai pas de tirer la couverture. Je vous
remercie pour cet aspect. Vous parlez d'amélioration des programmes pour
rentabiliser l'agriculture, étendre les programmes de stabilisation
à de nouvelles productions. Rapidement, en 30 secondes, quelles sont les
nouvelles productions auxquelles vous songez, qui seraient prioritaires?
M. Couture (Paul): II y a des productions qu'on commence à
développer, on va donner un exemple, le boeuf, les productions de
céréales, il y a d'autres productions maraîchères
pour lesquelles on dépend de l'extérieur. On a un ensemble de
productions qu'on peut développer et aussi, créer des conditions.
On parle souvent de concurrence, être capable de produire avec les
autres, créer des conditions pour le faire. Tantôt, M. Dubois
parlait de la recherche, c'est important. On dit que c'est l'optique de
développement. Quand les gens disent on l'entend dire que
l'UPA appuie le gouvernement, l'UPA demande, que ce soit n'importe quel
gouvernement, une loi de zonage dans une optique de développement de
l'agriculture.
On est loin de rien demander au gouvernement, on va exiger, ça va
être un défi et c'est un défi qui n'est pas facile, on sait
qu'il va y avoir des choses à monter et ça va aller assez loin,
c'est un défi pour les agriculteurs de voir à ce que le
gouvernement réalise cet engagement. C'est l'optique de la loi. On
n'appuie ni un parti politique ni un gouvernement, on appuie une loi de zonage
qu'on demande depuis cinq ans, dans une optique de développement de
l'agriculture, qu'on pense importante pour l'économie agricole, pour
l'économie en général surtout.
M. Marcoux: Voici un autre point que je voudrais aborder avec
vous, une double question, la question des normes régionales et la
question de l'application de la loi par des formules
décentralisées. Si on prend le niveau de la moyenne, il y a une
commission nationale proposée. Hier, dans le discours de deuxième
lecture, j'ai suggéré qu'il pourrait y avoir deux façons
d'améliorer cet aspect de la loi pour rejoindre les objectifs d'une
certaine décentralisation au niveau de la décision. Une
première hypothèse que j'ai émise, c'était qu'il y
ait des commissions régionales décisionnelles qui pourraient
être composées sur le même modèle que celle
proposée actuellement, de 3, 5 ou 7 personnes nommées, mais qui
permettraient de tenir davantage compte des facteurs régionaux,
peut-être aussi pour qu'il n'y ait pas engorgement, qu'on puisse
étendre le zonage à l'ensemble du territoire agricole, à
l'ensemble du Québec.
Il y a différents autres objectifs que je n'ai pas l'intention de
reprendre tous. On pourrait maintenir la commission nationale, mais comme
instance d'appel, jusqu'à un certain point ou de ratification. C'est une
première hypothèse.
Une deuxième hypothèse que j'ai émise, c'est que la
commission nationale, telle qu'elle est proposée actuellement comporte
des membres permanents, 4 ou 5, et un certain nombre de membres nommés
par région, 2 ou 3, ces membres étant partie aux décisions
concernant leur région, ce qui rendrait plus facile le fait de tenir
compte de certaines normes régionales ou de certains besoins
régionaux.
Quand je parle de ces normes régionales, je veux simplement vous
donner un exemple, en une minute. Dans ma région, autour de Matane,
Mont-Joli, Rimouski, tout ça, on veut l'application de la loi dans le
même esprit qu'à Montréal, Sherbrooke et
Trois-Rivières. Dès qu'on s'étend dans les autres
paroisses environnantes, les paroisses d'arrière-pays, c'est un peu
l'inverse, ce qui manque, c'est du monde dans les rangs, pour justifier les
services qui y sont, les services d'électricité, de transport,
etc. Les groupes qui sont venus rencontrer le ministre, lors de ses audiences
publiques, ont plutôt insisté pour qu'on permette que ces rangs
continuent d'accueillir de nouveaux résidents.
Ce qui veut dire, en somme, que dans la région, on veut que la
loi s'applique et on dit que les mêmes normes ne pourraient pas
s'appliquer dans les zones plus densément peuplées, que dans les
paroisses plutôt marginales.
Je reviens à ma question, clairement. Qu'est-ce que vous pensez
de l'idée que la commission nationale comporte un certain nombre de
membres régionaux ou l'idée de créer les commissions
régionales décentralisées?
M. Couture (Paul): Ce qu'on a suggéré,
c'était d'abord qu'il y ait un genre de commission avec un rôle
consultatif au niveau des régions qui pourrait se faire entendre. On n'a
pas été plus loin dans les structures, parce qu'on a
fonctionné selon la loi et la représentation de l'agriculteur et
la possibilité de participer. Ce qu'on n'a pas voulu, c'est d'essayer de
recommander une double structure qui serait permanente. Je ne sais pas quel
serait son rôle.
Mais à partir des unités qui sont là, le rôle
qui a été dévolu, la responsabilité qu'il y a dans
les régions par les municipalités ou les conseils de comté
je ne sais pas quelle sera la structure, à ce niveau-là,
qu'on puisse se faire entendre et qu'on puisse être présents, que
les agriculteurs du milieu puissent être présents.
M. Mailloux (Marcel): Vous invoquez une argumentation qui peut
aussi entrer dans les cadres administratifs. C'est sûr. Pour nous,
l'assurance qu'il faut obtenir, c'est que l'esprit de la protection des terres
soit assuré. Pour qu'il soit assuré, cela prend la reconnaissance
pratique des producteurs agricoles.
La vocation comme telle sera d'autant plus assurée si ce sont des
producteurs. Dans l'esprit que vous l'apportez, cela peut être des
représentants sur la commission provinciale, au niveau des
régions, auxquels on fait allusion dans le projet de loi. Mais
l'assurance qu'on veut comme producteurs agricoles, comme union des
producteurs, c'est que la protection de cette terre arable, comme telle, soit
reconnue.
M. Marcoux: Une dernière question. Je m'étonne que
ni aujourd'hui, ni hier, on ait parlé de l'indemnisation. Je ne sais pas
ce que cela veut dire. On a oublié ce terme. Vous avez rencontré
vos membres aujourd'hui. Il en a peut-être été question.
J'aimerais savoir quels sont les arguments clefs qui emportent le fait que ce
besoin ou cette demande d'indemnisation, pour vous, ce n'est pas une demande,
alors qu'on nous dit que les véritables agriculteurs, la base des
agriculteurs, ceux qu'on rencontre dans le champ, eux, ce qu'ils veulent c'est
l'indemnisation. Vous autres, la direction, c'est vous autres qui
empêchez que ce besoin s'exprime.
M. Couture (Paul): C'est une question qui se pose, que je juge
importante. On en a discuté à plusieurs reprises, de cette
question d'indemnisation. Que la base veuille l'indemnisation, je pense que
l'opinion de l'UPA représente la position de la base. Je ne vous dirai
pas qu'il n'y a pas un agriculteur qui est proche du village, qui est proche
d'une route, qui dit: Je viendrai à vendre, cela peut me léser.
Mais l'ensemble des agriculteurs, et à forte majorité, a dit:
S'il y a des montants d'argent à mettre, qu'on les mette dans le
développement de l'agriculture, parce qu'elle en a besoin et cela va en
prendre, de l'argent, pour développer l'agriculture.
Comme raisonnement, admettons que j'aie une terre le long d'une route.
Je juge, ou on juge je ne pense pas que cela soit laissé à
la discrétion de personne que cela vaut $300 000 d'indemnisation.
Pour la collectivité agricole, qu'on me donne $300 000, pourquoi mon
voisin, qui est dans les mêmes conditions, n'aurait rien? On se dit:
Comment va-t-on régler ce problème?
On dit: Si on met les montants d'argent nécessaires au
développement de l'agriculture, toute la classe agricole va en
bénéficier. Je peux vous donner des exemples. Nous sommes tous
pris un peu comme cela. Nous avons des terres. Moi, le premier, j'ai une terre
à laquelle je pourrais m'attacher. Mais ma sécurité comme
agriculteur, c'est dans le développement de l'agriculture, c'est dans la
rentabilisation de l'agriculture et c'est là que je vais aller chercher
mon affaire et c'est là qu'on va servir l'ensemble de l'agriculture. Sur
le plan économique, cela n'a pas la même influence. Cela n'a pas
le même impact. Si vous mettez le montant d'argent pour développer
l'agriculture, vous développez l'économie. Et si vous donnez de
l'argent à quelques agriculteurs qui seraient placés pour
recevoir une indemnisation, vous allez permettre à ces gars-là de
se retirer souvent et ça ne va pas beaucoup plus loin que cela. Mais je
ne pense pas qu'il y ait beaucoup de gens qui soient lésés.
Si on part du principe qu'une terre qui est zonée agricole ne
vaudra plus rien, je suis d'accord, qu'il y a une perte, mais ce n'est pas
vrai, une terre zonée agricole vaut de l'argent et, l'année
prochaine et dans deux ans, elle va valoir plus qu'elle ne vaut aujourd'hui
pour fins agricoles. Si on rentabilise l'agriculture, elle va prendre de la
valeur et le gars ne sera pas beaucoup plus lésé, mais l'ensemble
de la collectivité agricole et l'ensemble de l'économie vont se
porter mieux. Ces choses ne sont pas faciles. Ce sont des options à
prendre, un matin. Nous en avons discuté sérieusement. Ceux qui
disent qu'on ne représente pas les agriculteurs là-dessus
viendront me le dire, parce que, personnellement, j'ai demandé d'en
discuter à plusieurs réunions. On a repris ces points, parce
qu'on les savait chauds. On a repris le point de la façon de lotir une
terre. Les agriculteurs ont pris une option, mais c'est dans l'option du
développement.
Ceux qui pensent qu'on ne pose pas au gouvernement et à tous les
gouvernements qui sont là un défi important à relever
auront des comptes à rendre, c'est le défi de rentabiliser et de
développer l'agriculture. On est conscient de cela. Je ne dirais
même pas qu'on court un risque, parce que le gouvernement, s'il prend
l'option de zoner ses terres agricoles et s'il n'a pas l'intention de
développer l'agriculture et de la rentabiliser, est inconséquent
ou il y a quelque chose qui ne marche pas.
A partir de là, comme raisonnement, chez les agriculteurs, on
dit: A partir de cet engagement, on va faire des bouts. Je vais vous donner des
exemples. Vous vous souvenez des problèmes de boeuf qu'on a eus. On a
rencontré le gouvernement, qui était un autre gouvernement que
celui-ci, et on est sorti de là avec un engagement que les producteurs
agricoles avaient droit à des revenus. En principe, cela ne
réglait rien, mais, maudit, on s'est accroché à cela et on
a fait des bouts en agriculture et, à partir de la Loi sur le zonage
agricole, on va en faire des bouts, et si vous ne voulez pas la respecter, je
vous mets au défi de ne pas la respecter, et les agriculteurs seront en
arrière de nous.
M. Marcoux: Merci.
Le Président (M. Boucher): Vous avez terminé? M. le
député de Berthier.
M. Mercier: Je voudrais revenir sur votre option de
protéger l'ensemble du territoire du Québec pour fins
d'agriculture. Pourriez-vous refaire l'argumentation qui vous a amenés
à cela, parce qu'en somme, vous savez la complexité que cela
représente déjà d'avoir à faire passer 614
municipalités par la régie et dans un laps de temps assez court,
puisqu'en fin de compte, il ne faut pas trop nuire à l'activité
économique. D'autre part, c'est la région la plus
stratégique. Sur quoi fondez-vous votre argumentation pour nous inciter
à faire l'ensemble du territoire?
M. Couture (Paul): La réponse est simple, et c'est une
preuve que les agriculteurs veulent du zonage. On est en congrès
présentement. On sort d'un conseil général. Les
producteurs disent: Nous, quand serons-nous zonés? C'est que, dans les
zones limitrophes, il y a déjà un commencement de grugeage. Les
gens disent: Là, c'est possible et ils refoulent ces zones. Ensuite, les
gens veulent participer au développement de l'agriculture et ils ne
voudraient pas être lésés et être en arrière.
Prenez même la remise de 70%. Vous allez prendre un agriculteur dans une
zone désignée et il aura un voisin qui ne sera pas dans la zone
désignée. Vous voyez l'iniquité que cela pose. Les
agriculteurs disent: Nous autres, ce n'est pas notre faute si nous ne sommes
pas dans une zone désignée. On veut participer au
développement et on veut avoir la même protection. Ils l'exigent
donc. Je pense que c'est une preuve que de la volonté des agriculteurs
de vouloir une Loi sur le zonage agricole quand déjà ceux qui ne
sont pas dans les zones désignées nous demandent de
l'être.
M. Mercier: Je poursuis justement sur cette idée, sur la
définition même de la ferme. Je pense que ce qu'on a connu, c'est
une période de temps où des gens achetaient des fermes dans des
régions à très fort potentiel. Or, depuis quelques
années, on constate que des boisés dans des régions
à potentiel agricole presque inexistant, selon les définitions
traditionnelles, ces terres, ces boisés se sont vendus à bon
marché mais risquent de présenter également certains
inconvénients dans la mesure où, pour les moulins à scie
de la région, ce sont des espaces considérables où la
coupe de bois devient absolument impossible, parce que les gens ne sont pas
intéressés. Enfin, cela modifie les vocations de ces territoires.
Il y a également coexistence entre des vocations touristiques beaucoup
plus prononcées et des vocations agricoles. Mais, dans la section des
"boisés ", les exploitations forestières sont compromises. Est-ce
que l'UPA est en mesure d'évaluer un peu l'impact
que cela représente actuellement et les conséquences que
cela peut avoir? (22 h 45)
M. Couture (Paul): L'évaluation qu'on a, c'est qu'on a des
agriculteurs dans des régions où la forêt est une partie
importante de leur revenu. A partir de là, il s'est
développé des formules à cause de la mécanisation
d'aménagement, de groupements forestiers qui font de
l'aménagement et du reboisement. A partir de là, ils ne veulent
pas que ces terres qui sont à proximité de leurs fermes, qui
fournissent de l'emploi, soient gaspillées. Donc, ils disent: On veut
faire une sélection, une production forestière
intéressante. Je pense que cette production s'avère rentable.
C'est là qu'on a les meilleurs rendements et c'est là que les
repeuplements se font le mieux. C'est pour cette raison que les producteurs de
bois, et surtout ceux qui ont des groupes forestiers d'aménagement, ont
demandé que ces sols soient protégés.
M. Mercier: D'accord. Une dernière question. Vous avez
évoqué tout à l'heure l'article 96 dont vous aimeriez voir
le retrait et, d'autre part, vous avez évoqué dans votre
présentation un appel au lieutenant-gouverneur en conseil, ce qui
demeure toujours possible. Ne craignez-vous pas que le retrait de l'article 96
amène une utilisation plus fréquente des interventions du
lieutenant-gouverneur en conseil, ce qui risque, par l'habitude, de politiser
en quelque sorte un tribunal administratif? Ne craignez-vous pas, compte tenu
des implications extrêmement politiques de ces décisions, que cela
puisse atténuer un peu les pouvoirs de décision de cette
commission?
M. Couture (Paul): L'inquiétude qu'on a, selon la
compréhension qu'on a, est plutôt contraire à ce que vous
mentionnez. On dit: D'abord, vu la possibilité sans demande
d'intervenir, il y a une possibilité d'intervention qui est politique.
Donc, c'est cela qu'on veut éviter, c'est pour cela qu'on le
demande.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Laval.
M. Lavoie: Sur une question technique, en ce qui concerne
l'article 106 du projet de loi, qu'est-ce que vous répondez à
certains de vos membres qui sont des cultivateurs, des maraîchers, des
jardiniers de bonne foi, dont la principale occupation est l'agriculture
vous en avez certainement un certain nombre dans les régions suburbaines
de Montréal ou de Québec ou d'ailleurs qui ne seront pas
compris dans une zone agricole, ceux qui ne seront pas compris dans une zone
agricole et qui demeureront agriculteurs? Ils vont perdre, d'après mon
interprétation, non seulement les 40% ou les 70%, mais même les
40% qu'ils ont sur le rabais de taxes municipales et scolaires. Ils vont perdre
également le maximum d'imposition de 1% sur leur évaluation ainsi
que le maximum d'évaluation de $150 l'acre, avec une espèce de
"phase- out" de $500, $1000, $2000 l'arpent, et, après la
quatrième année, il n'y a plus de maximum. Cela veut dire que,
s'ils sont évalués vraiment à la valeur marchande, ils
peuvent avoir une évaluation de $2000, $3000, $5000, $10 000 ou $20 000
l'arpent. Cela existe. En vertu de cette loi, ils ne seront plus
protégés. C'est pour ceux qui ne seront pas compris dans une zone
agricole.
Deuxièmement, ceux qui seront éventuellement exclus,
peut-être pas à leur demande, mais par une décision de la
commission, à la suite de représentations d'une
municipalité ou d'une autre, et qui devront, à ce moment,
rembourser au ministre de l'Agriculture, pendant dix ans, les 70% qu'ils ont
eus de rabais de taxes, et également aux municipalités, sur une
période de dix ans, la vraie imposition qu'ils aurient dû payer
sur des montants d'évaluation de $150 000... Qu'est-ce que vous
répondez à vos membres qui sont dans ce cas?
M. Couture (Paul): Une première chose, d'abord, selon ma
compréhension de la loi, celui qui est dans un secteur qui n'est pas
zoné agricole peut se faire inscrire comme producteur agricole, peut se
faire zoner agricole.
M. Lavoie: Oui, mais vous allez comprendre qu'on ne peut pas
faire ce qu'on appelle communément du "spot zoning"; s'il y a seulement,
une, deux, quatre ou cinq terres entourées de développements, je
me demande si elles peuvent rester indéfiniment à vocation
agricole. Vous savez, cela existe dans les municipalités suburbaines.
Celles qui ont une vocation assez directement reliée à un
développement urbain éventuel.
M. Couture (Paul): II y a de ces cas où les gens ont la
volonté de faire zoner leur terre agricole, j en connais de ces
gens.
M. Lavoie: Certainement, il y a des cas.
M. Couture (Paul): C'est un choix qu'ils font. Pour la
question...
M. Lavoie: Par contre, même s'ils le veulent, cela ne veut
pas dire qu'ils vont l'être, c'est la commission qui décide.
M. Couture (Paul): Oui, mais je ne vois pas comment la
commission, à partir d'une option de zonage...
M. Lavoie: Mais il va y avoir des représentants du milieu,
de la municipalité ou d'autres qui peuvent dire: On ne voit pas pourquoi
vous resteriez agriculteurs.
Je m'excuse de vous avoir interrompu.
M. Couture (Paul): Ma réponse, c'est la
possibilité, pour une terre, d'être zonée agricole.
Ensuite, la question de la remise sur une période de X temps, là
c'est le choix ou non, mais il y a une plus-value quand même, le zonage
va quand
même lui donner un marché assez captif, parce qu'il y a la
possibilité, en limitant l'accessibilité au développement
extérieur, cela donne une accessibilité beaucoup plus forte
à ceux qui sont à l'intérieur. C'est un problème
plus délicat, la question des dix ans.
M. Lavoie: Je connais des cas particuliers, où des gens
qui paient $150 ou $200 de taxe, qui ont 25 ou 30 arpents, qui sont de vrais
maraîchers, des producteurs de génération en
génération et qui, avec cette loi, vont se réveiller, dans
trois ou quatre ans, avec des comptes de taxe de $10 000, $15 000 ou $20 000
par année; tel que l'article 106 est rédigé.
M. Gaudet: Je ne sais pas si on comprend bien le mécanisme
de la loi, en tout cas il y a pas mal de monde, ici, qui peut nous
l'expliquer...
M. Lavoie: Je l'ai étudiée.
M. Gaudet: Notre compréhension, à ce moment-ci,
je comprends bien ce que vous voulez dire et je comprends surtout les
cas que vous voulez défendre dans le secteur où vous
êtes...
M. Lavoie: J'ai un comté suburbain de la région
métropolitaine de Montréal.
M. Gaudet: Notre compréhension est la suivante. Un gars,
qui est dans un territoire urbain, peut-être comme les
vôtres...
M. Lavoie: Ou peut-être semi-urbain.
M. Gaudet: Appelez-les comme vous le voulez. Quelqu'un fait de la
production, au moment où on se parle, il va être en production en
attendant que le développement s'en vienne, parce que, pour avoir
pataugé un peu dans votre territoire, je dis que ce n'est pas sûr
que cela va se construire du soir au matin. Notre compréhension et la
raison pour laquelle on veut que ce soit des agriculteurs qui soient au niveau
de la commission, c'est que lorsqu'un tel cas sera présenté
devant la commission, que celle-ci décide qu'une ferme comme
celle-là, pour une période de temps donné jusqu'à
ce que le développement soit rendu, puisse avoir les avantages d'une
ferme dans une zone agricole. C'est notre compréhension. Il y a des
articles dans la loi qui nous laissaient croire cela. Je ne sais pas si on est
naïfs.
M. Lavoie: Je ne pense pas. La commission n'est pas au-dessus de
la loi. La commission applique la loi, mais elle n'a pas le droit de
l'appliquer à sa...
M. Gaudet: C'est notre compréhension des articles 62 et 65
de la loi. Lorsque nous avons consulté nos avocats, ils nous ont dit
cela. Je ne sais pas si les avocats sont là pour se manger, mais en tout
cas, nous autres, c'est ce qu'on nous a dit.
M. Lavoie: Si on lit bien l'article 106, on a demandé des
opinions juridiques à ce sujet-là.
M. Gaudet: On pourrait peut-être retourner la question au
ministre et lui demander si la commission, en vertu de la loi, pourrait faire
cela.
M. Lavoie: C'est pénaliser des agriculteurs, des
producteurs, de bonne foi, qui veulent rester, qui veulent continuer à
produire pendant un certain nombre d'années et même si le
développement est à leur porte. Cela doit exister sur la rive sud
de Montréal, un peu partout, et ils ont même résisté
à vendre. Ils veulent produire. Mais à un certain moment, il peut
arriver un problème de relève, de succession ou autres.
L'agriculteur veut produire encore cinq ou sept ans. Quelqu'un a le droit
d'avoir un libre choix de disposer de ses biens. Telle que la loi est
rédigée, il est pris pour avoir résisté ou pour
avoir continué à être agriculteur et producteur, il est
pénalisé par votre loi.
M. Garon: Non. Il n'est pas pénalisé. Il peut
toujours demander de se faire inclure dans la zone. Si on ne l'a pas inclus
dans le plan provisoire, l'agriculteur peut demander de l'être. S'il
l'est, il bénéficie des avantages qui s'y trouvent.
M. Lavoie: Ecoutez, il y a des...
M. Garon: Si l'agriculteur ne peut pas se faire inclure, c'est
parce qu'il est davantage spéculateur qu'agriculteur.
M. Lavoie: Non. C'est un membre de l'UPA, mais il y a des
endroits...
M. Garon: Vous êtes notaire. M. Lavoie: Pardon?
M. Garon: Vous êtes notaire. M. Lavoie: Oui, je suis
notaire. M. Garon: Moi, je suis avocat.
M. Lavoie: Je préfère être notaire quand
même.
M. Garon: Dans l'UPA, comme chez les notaires et chez les
avocats, on a nos brebis galeuses chacun dans notre domaine.
M. Lavoie: Je n'en connais pas beaucoup.
M. Garon: Ecoutez.
M. Lavoie: Je ne les fréquente pas.
M. Garon: Je ne les connais pas moi non plus, mais cela veut dire
qu'à ce moment... Vous savez que ce n'est pas écrit dans la
figure d'un gars s'il est un spéculateur ou un agriculteur.
M. Lavoie: Je ne parle pas des notaires, ni des avocats. Je parle
des agriculteurs, des producteurs agricoles, membres de l'UPA. Je ne parle pas
des notaires et des avocats.
M. Garon: Vous pouvez demander, dans la zone agricole, s'il ne
l'a pas été par le plan provisoire. Il n'y a pas de
problème. Il devient sur le même pied que les autres.
M. Lavoie: Vous savez comme moi que même s'il en fait la
demande et si sa terre, à moins de faire ce qu'on appelle du "spot
zoning" à des endroits, tout bon sens dit qu'il ne peut y avoir un
zonage uniquement pour lui, pour 30 arpents ou deux ou trois ou 50 arpents dans
un ensemble de 500 arpents, à moins de faire du "spot zoning", ce qui
est impossible. A part cela, même s'il le désire, c'est la
commission qui va décider et il va avoir des représentations
à moins que la commission...
M. Garon: A ce moment, voyez-vous...
M. Lavoie: La municipalité va faire des
représentations. Elle va dire qu'elle a fait de l'infrastructure
d'égouts, d'aqueduc, etc. C'est dans notre développement
normal...
M. Garon: Normalement...
M. Lavoie: ... tout en protégeant, dans d'autres endroits,
des terres agricoles.
M. Garon: Prenons un gars qui est agriculteur au carré
d'Youville à Québec. Il est en plein milieu de la ville. Il est
en plein milieu de la ville ou il ne l'est pas. S'il est en plein milieu comme
vous le dites, normalement, il n'est pas intéressé à
l'agriculture parce qu'il va trop se faire déranger. Il va vouloir
vendre et s'en aller à un autre endroit. Comme il va être en plein
milieu d'une ville, il va avoir un bon prix et il va pouvoir s'en aller et
acheter une terre à un endroit où il va être tranquille
pour cultiver.
Je n'ai pas l'impression...
M. Lavoie: Cela veut dire que, par votre projet de loi, vous
découragez la production agricole.
M. Garon: Bien non.
M. Lavoie: C'est peut-être un très bon producteur
agricole et vous l'empêchez de produire à cause de la
pénalité que vous lui imposez au point de vue taxation.
M. Garon: Je ne pense pas qu'un agriculteur de façon
normale, à moins qu'il ait beaucoup d'acrage... Si un agriculteur a 1000
acres, 500 acres, même on me dit qu'à Zurich, en plein milieu de
la ville, il y a un gars qui cultive du maïs et il a plusieurs centaines
d'acres et les gens de Zurich disent: On garde cela pour l'agriculture. Je
comprends que c'est exceptionnel, mais je pense que, d'une façon
générale, les gens n'essaieront pas de faire de l'agriculture en
plein milieu des villes et, à ce moment, je pense que ce n'est pas un
vrai problème. Les gars, à ce moment-là, vont dire: Ce
n'est pas là qu'on va cultiver. Je pense bien que dans le cas de
Montréal, selon mes listes, il y a un agriculteur à Outremont.
Alors, on n'a rien zoné à Outremont. Le gars aura à
décider s'il se fait inclure ou non.
M. Lavoie: Kevin Drummond.
M. Garon: S'il ne se fait pas inclure, alors, à ce moment,
il est évident qu'il ne sera pas taxé comme un agriculteur.
Normalement, en plein milieu d'Outremont, il devrait avoir un bon prix pour sa
terre et il aura le moyen de s'en acheter une n'importe où, avoir la
plus belle terre qu'il peut y avoir dans le milieu agricole.
Je pense que c'est là que le choix va se faire.
M. Mailloux (Marcel): Dans ma région, le comté de
Shefford, dans la municipalité de Gran-by, la municipalité comme
telle a annexé un immense territoire comprenant des producteurs
agricoles et ces producteurs agricoles, actuellement, sont très heureux
de constater que la loi de zonage va les protéger parce qu'ils ont
été annexés pour des raisons surtout d'ordre municipal,
urbain et ils ne vont pas reconnaître dans la politique agricole des
avantages.
C'est toujours au détriment des producteurs, avec des mesures
additionnelles de taxation quelconque. Or, à ce moment, le zonage
agricole va leur donner une protection en ce qui concerne ces individus.
Le Président (M. Boucher): Alors, comme il n'y a pas
d'autres intervenants, je vais laisser la parole au ministre pour le mot de la
fin.
M. Garon: Vous avez écouté aujourd'hui, j'ai
remarqué je ne sais pas si tous les dirigeants étaient
ici, je ne pense pas mais j'ai vu M. Couture à un certain moment
cet après-midi, M. Gaudet... Je n'ai pas vu M. Mailloux aujourd'hui. Je
pense que vous deviez être au congrès. Vous avez entendu, cet
après-midi, les représentants des municipalités et des
conseils de comté qui voulaient avoir la responsabilité de la
protection du territoire agricole. Dans votre mémoire, je remarque que
vous demandez que ce soit une responsabilité du ministre de
l'agriculture. J'aimerais que vous donniez votre position là-dessus. (23
heures)
M. Couture (Paul): Là-dessus, notre position est assez
claire. On demande d'abord qu'une loi de zonage soit sous la
responsabilité du ministère de l'Agriculture parce que,
jusqu'à maintenant, cette responsabilité, les conseils de
comté et les municipalités ne s'en sont pas servis et on pense
qu'il y a conflit. Ce n'est pas qu'on méprise les administrateurs des
conseils de comté, mais on pense qu'il y a conflit
d'intérêts entre une municipalité face à un projet
de zonage. C'est que, de plus en plus, la représentation au niveau
d'une
municipalité est de moins en moins agricole. Comme exemple, j'ai
une paroisse qui est exclusivement agricole, il n'y a aucune industrie. Il y a
40 familles d'agriculteurs et il y a 200 familles qui sont des gens de village,
des gens qui travaillent à l'extérieur. Donc, la
représentation au niveau de la municipalité est de moins en moins
agricole. Le souci d'une municipalité, c'est son développement,
c'est d'avoir des revenus, et je pense que c'est un souci normal. On pense donc
qu'en confiant toute l'autorité aux municipalités, il y a ce
conflit d'intérêts, on ne se sent pas protégé et on
dit: Jusqu'à maintenant, comment ceux qui ont fait même des
règlements de zonage ne les ont-ils pas fait dans l'esprit de ce qu'on
veut, d'une loi de protection des sols agricoles?
M. Garon: A la page 5 de votre mémoire, je pense que vous
vous référez à l'article 35, qui permet après le
dépôt du plan provisoire et l'avis à la
municipalité, que tout organisme intéressé, que toute
personne intéressée puissent faire des représentations
à la corporation municipale. Mais vous exprimez une crainte, je pense,
que la municipalité n'entendrait pas nécessairement les
intéressés. Est-ce que je comprends bien? Vous voudriez que la
municipalité soit tenue de tenir des audiences publiques en plus des
représentations écrites qui peuvent lui être faites? Vous
aimeriez même, je pense, quand on dit "toute personne " qu'on soit plus
précis, pour nommer les producteurs agricoles ou leurs
représentations.
M. Couture (Paul): Ce que nous pensons, c'est que les
municipalités qui prépareraient un genre de plan à
l'intérieur d'une loi qu'elles devront soumettre à la commission
doivent entendre les intéressés, qui sont les agriculteurs, parce
qu'on lit dans la loi qu'elles "pouvaient" entendre.
M. Gaudet: M. le Président, il y aurait peut-être
une chose sur laquelle je voudrais revenir par rapport à la
responsabilité que vous avez soulevée, M. le ministre, c'est que,
dans l'affaire de la responsabilité et dans l'ensemble de notre
mémoire, ce que je pense qu'il est important que vous compreniez bien,
ce sur quoi on mise, c'est le développement de l'agriculture. Le
développement de l'agriculture, d'après nous, ne peut pas
être fait par le ministère des Affaires intergouvernementales ou
le ministère des Affaires municipales, il doit être fait par le
ministère de l'Agriculture. C'est pour cela qu'on tient aussi à
ce que la loi de zonage soit sous la responsabilité du ministère
de l'Agriculture.
M. Garon: Je pense que cela se tient. A la page 11, vous parlez
du droit du premier occupant, Au deuxième paragraphe de l'article 100,
il me semble que c'est reconnu, dans le deuxième paragraphe, quand on
dit: "A l'égard d'une ferme d'élevage d'animaux établie ou
agrandie avant que la Loi de la qualité de l'environnement ne soit en
vigueur et ne lui soit applicable, le propriétaire ou l'occupant d'un
bâtiment résidentiel, commercial, industriel ou institutionnel
construit postérieurement à l'établissement d'une
exploitation animale donc c'est établi après
l'établissement de l'exploitation animale ne peut porter plainte
ou agir en justice de quelque façon"... contre l'agriculture... "ou pour
empêcher l'exploitation ou le développement de cette ferme en
raison de sa proximité, du zonage ou des bruits quelle
dégage"-
J'ai l'impression que ce deuxième paragraphe reconnaît
entièrement le droit du premier occupant, puisque toute personne qui
s'est installée là après que l'agriculteur a
organisé son établissement d'exploitation animale ne peut
pas...
M. Couture (Paul): Mais l'esprit qu'on veut, c'est d'abord le
respect du droit du gars qui était là, un droit de premier
occupant, c'est important. Ce qui est sous-jacent à cela, c'est qu'on
dit: Avec les règlements de l'environnement, il y a des productions,
disons que les règlemens datent de 1972; pour les productions
laitières, on n'a pas exigé de permis, les gars ont bâti.
On veut que nos gars n'aient pas de difficultés avec ça. Qu'on le
mette dans une phraséologie qui respecte ça, parce qu'on n'est
pas des légistes, c'est ce qu'on veut. On dit qu'on a des gars qui sont
exposés à avoir un paquet de difficultés avec
l'environnement; étant donné que la préoccupation est
là, qu'on les protège.
Le Président (M. Boucher): Oui, Me Dumais.
M. Dumais: J'aurais une petite chose à ajouter. A
l'article 100, c'est intéressant de voir l'esprit qui est sous-jacent
à ça. Mais il y a une chose qu'on veut souligner, c'est que
l'article 100, entre autres le deuxième paragraphe qui traite de ceux
qui ont construit avant 1972, protège les agriculteurs contre les
plaintes des voisins. Mais ce qui arrive, c'est que ce n'est pas le principal
problème. Le principal problème, même si le voisin ne peut
pas se plaindre, c'est que, si les services de protection de l'environnement,
lorsqu'une demande de permis leur est acheminée, considèrent les
distances, en tiennent compte, le voisin n'a pas besoin de se plaindre, ce sont
les services de protection de l'environnement qui vont dire: La distance n'est
pas respectée.
L'article 100 protège seulement contre les plaintes des voisins.
Ce n'est pas ça; le principal problème, ce sont les Services de
protection de l'environnement et l'obtention des permis, les normes qu'ils
utilisent. Le voisin, même s'il ne s'est pas plaint, s'il est
situé à telle distance, pour les Services de protection de
l'environnement, ça va compter, même s'il ne s'est pas plaint, ce
voisin qui est situé là, et on ne peut pas émettre le
permis. C'est pour ça que l'article 100 a un esprit intéressant,
mais il ne touche pas au principal problème. C'est du côté
des Services de protection de l'environnement, pour les distances, lorsqu'ils
émettent un permis, que ce soit là. C'est là qu'est le
principal problème, que ce soit considéré.
L'article 100 ne nous donne pas grand-chose là-dessus.
M. Garon: C'est l'article 111 qui ajoute l'article 124a, parce
qu'il y a eu des audiences de la commission parlementaire de l'environnement.
Normalement, il va y avoir un règlement de l'environnement et, à
ce moment-là, on dit que l'article 111 modifie l'article 124a de la Loi
de la qualité de l'environnement pour dire qu'à l'avenir, il ne
pourra pas y avoir un règlement dans une zone agricole, à moins
qu'on dise que ça s'applique spécifiquement à la zone
agricole.
A ce moment-là, en faisant ce règlement, on tiendrait
compte de ça, mais le règlement n'existe pas actuellement.
M. Mailloux (Marcel): Ce que vous mentionnez, M. le ministre,
c'est pour l'avenir, en partant d'aujourd'hui. Mais ce qu'on vient d'expliquer,
c'est pour la période rétroactive de 1972 jusqu'à
ajourd'hui. C'est cette partie, actuellement, qui concerne l'article 100 et les
autres; on considère qu'ils ne nous protègent pas
suffisamment.
M. Garon: J'aimerais dire un dernier mot en terminant. Quand vous
mentionnez que le développement économique, M. Couture l'a dit
pas mal parfaitement... Il a dit qu'un gouvernement qui zonerait les terres
agricoles réserverait les terres pour l'agriculture et ne s'occuperait
pas de développer l'agriculture; j'ai l'impression qu'il se ferait
tomber sur la margoulette, parce que ça n'a pas de bon sens. D'ailleurs,
c'est un peu pour ça qu'à la conférence
fédérale-provinciale, où j'accompagnais le premier
ministre, quand il a parlé des programmes de stabilisation du
gouvernement fédéral, je pense qu'on a exprimé clairement
qu'à ce moment-là, le but de la protection des terres agricoles,
c'était qu'on fasse un développement
accéléré de l'agriculture au Québec.
Quand vous mentionnez les programmes, vous demandez pourquoi on a pris
en premier celui du boeuf; c'est le plus gros secteur qu'il est possible de
développer au Québec. On va importer à peu près
$900 millions de boeuf en 1978 au Québec; au prix de 1978, entre $800 et
$900 millions; au prix de 1977, cela aurait été à peu
près $500 millions. C'est le plus gros secteur, on a dit: On va le
stabiliser en premier. Là, vous avez bien dit le maïs-grain
également... Je pense qu'il va falloir l'étendre à
d'autres productions, qu'il faut développer en premier il faut
toujours calculer les coûts dans les secteurs où on peut
prendre de l'expansion. Je pense qu'en faisant cela, on aide aussi la
production laitière.
D'autres vont se diversifier au point de vue agricole, cela va
libérer des quotas pour ceux qui sont dans le lait, cela va consolider
leur exploitation, alors qu'ils vont pouvoir se dissocier dans d'autres
productions. Je pense que je suis complètement d'accord avec vous pour
essayer d'aller le plus rapidement possible pour adopter d'autres mesures de
stabilisation des revenus. Il y aura aussi des programmes de
développement régio- naux dans différentes régions
pour aider l'agriculture.
Concernant la facilité de transfert des exploitations d'une
génération à l'autre, je suis parfaitement de cet avis
également. Vous comprenez qu'on ne peut pas tout annoncer dans la loi
90. Il y a d'autres mesures qui vont venir éventuellement, qui ne
dépendent pas de moi, mais qui vont venir, à un moment
donné. Vous savez, il y a encore le discours inaugural qui va venir
avant longtemps, au début de l'année 1979, de même que le
discours du budget.
Mais je pense que le gouvernement est vraiment engagé dans une
politique de développement agro-alimentaire. Je pense que les
députés que vous avez ici, dont plusieurs sont agriculteurs,
poussent constamment pour que cela aille le plus rapidement possible. Il reste
une chose, c'est que la machine administrative, il faut essayer de la faire
aller plus rapidement, parce qu'elle n'était pas habituée
à aller toujours vite.
Il y a eu des efforts considérables qui ont été
faits. Quand on pense que dans les paiements des remboursements du
ministère pour les subventions du drainage et des travaux
mécanisés, cela prenait une moyenne de six ou sept mois
auparavant et que cela a été ramené à peu
près à 21 jours cette année, comme moyenne, je peux dire
"chapeau" aux fonctionnaires, parce que même dans l'entreprise
privée, c'est considéré comme exceptionnel.
Pour eux qui disaient que le ministère de l'Agriculture
était une vieille "picouille" avant, c'est un vrai cheval arabe
aujourd'hui, parce qu'il est en train de devenir pas mal fringant et il se
compare avantageusement, pas encore dans tous les secteurs, mais de plus en
plus il essaie de se comparer à l'entreprise privée au point de
vue efficacité.
M. Lavoie: Faites attention au prochain budget et aux suivants.
C'est enregistré ce que vous dites.
M. Garon: Oui. Voyez-vous, les budgets, ce n'est pas pour la
grosseur.
M. Lavoie: J'en ai vu beaucoup de ministres qui ont fait des
discours comme cela.
M. Garon: Le budget du ministère de l'Agriculture cette
année est de $255 millions. Celui de l'Ontario est de $170 millions.
Déjà, on prend une distance par rapport au budget de l'Ontario.
Dans les ministères à vocation économique, le budget du
ministère de l'Agriculture si je ne compte pas les routes, on ne
sait pas trop où le mettre, on le met dans les vocations
économiques parce qu'il dépense beaucoup d'argent si on ne
tient pas compte du ministère des Transports, le ministère qui a
le plus gros budget actuellement, dans tous les ministères à
vocation économique, c'est le ministère de l'Agriculture. Si je
prends l'Industrie et Commerce, les Terres et Forêts, les mines, etc.
M. Lavoie: On va revenir à la pertinence.
M. Garon: Vous m'avez ouvert une porte. J'y suis
entré.
M. Lavoie: Je veux vous empêcher de faire des erreurs.
M. Garon: Cela ne veut pas dire qu'il ne va pas continuer
à s'accroître. Je pense qu'il faut surtout avoir l'argent
nécessaire pour faire fonctionner les programmes qu'on a
développés.
M. Lavoie: II est sur un "trip".
M. Garon: Je voudrais, en terminant, vous faire une confidence.
Quand vous avez présenté votre mémoire, au mois de
septembre, l'UPA disait quelle était sa position sur la protection des
terres agricoles. Nous, on préparait notre projet de loi. Il y avait
plusieurs personnes qui disaient: L'UPA vous envoie dans cette direction et une
fois que le gouvernement va y être allé, elle va vous laisser
tomber.
Je voudrais vous remercier d'avoir gardé la position que vous
aviez prise au mois de septembre. Je regarde une chose, c'est que votre
mémoire réfère exactement au mémoire que vous aviez
soumis en septembre, qui était d'ailleurs contenu dans vos
congrès généraux, à la page 16, si je me rappelle
bien. Je voudrais vous remercier et vous féliciter d'avoir gardé
votre position avant et après ce n'est pas toujours facile
de l'avoir fait et de l'avoir défendue dans chacun des congrès
régionaux qui ont suivi votre prise de position au cours du mois de
septembre. (23 h 15)
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. Au nom
de tous les membres de la commission, je remercie M. Couture et ceux qui
l'accompagnent pour le mémoire qu'ils ont présenté.
Je demanderais maintenant à la ville de Saint-Eustache,
représentée par M. Guy Bélisle, maire, de bien vouloir
s'approcher, s'il vous plaît! Oui, M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: J'aurai une demande de directive à
vous faire dès que les représentants de la ville de
Saint-Eustache auront pu s'identifier.
Le Président (M. Boucher): D'accord. A l'ordre, s'il vous
plaît! M. Bélisle, si vous voulez vous identifier de même
que ceux qui vous accompagnent.
Ville de Saint-Eustache
M. Bélisle (Guy): M. le Président, MM. les membres
de la commission, tout d'abord, permettez-nous de vous remercier d'avoir bien
voulu accepter d'entendre notre point de vue concernant le projet de loi 90.
Si, actuellement, nous avons...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Joliette-Montcalm, excusez-moi, une minute.
M. Chevrette: Pourriez-vous vous identifier? Ensuite j'aurai une
suggestion. Je me suis entendu avec le député de Deux-Montagnes.
J'en ai parlé au député de Huntingdon tantôt et
à M. Giasson. J'aurai une suggestion à faire à la
commission, ce sera très bref. Donnez-nous seulement votre
identité avant.
M. Bélisle: Mon nom est Guy Bélisle, je suis
maire.
Le Président (M. Boucher): Et monsieur...
M. Bélisle: Me Richard Lacharité, conseiller
juridique et M. Ronald Biard, directeur général de la ville.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: M. le Président, je voulais faire une
suggestion. J'ai regardé le mémoire de la ville de Saint-Eustache
qui compte 52 pages. Compte tenu de l'heure, j'ai demandé à
l'Opposition si elle acceptait la suggestion est aussi faite aux
témoins qu'on s'entende pour qu'il y ait un résumé
de fait, mais que le mémoire soit en entier consigné au journal
des Débats. Vous pourriez résumer ou faire ressortir les points
les plus importants du mémoire, ou les grandes lignes, et en faire un
résumé assez complet.
M. Bélisle: J'allais justement vous le
suggérer.
Le Président (M. Boucher): Vous n'avez pas
d'objection?
M. Bélisle: Non, aucune objection. D'ailleurs...
M. Chevrette: On accepte que ce soit au journal des
Débats.
M. Bélisle: ... il y a toute une partie...
Le Président (M. Boucher): II y aura transcription de
votre mémoire au journal des Débats. (Voir annexe).
M. Bélisle: Merci.
Le Président (M. Boucher): Je vous invite à
résumer le mémoire immédiatement.
M. Bélisle: Je vais le faire de la façon la plus
cohérente possible. Naturellement, il faudra me pardonner certaines
hésitations; je vais quand même essayer de le suivre.
La raison profonde de notre intervention, c'est que la ville de
Saint-Eustache se trouve actuellement dans une région
aéroportuaire soumise à l'application de la loi 48, loi
d'exception qui fait en
sorte que les villes autour de l'aéroport, au nombre de 32 soient
régies par une loi spéciale. Cette loi a été
sanctionnée en 1970. Elle a fait en sorte que les municipalités
ont été obligées de se concerter et d'obtenir la
concertation de leurs citoyens, au nombre de 180 000; ils ont
préparé ensemble un schéma régional
d'aménagement, schéma qui a été par la suite
complété par un plan d'urbanisme, un plan directeur, un
règlement de zonage et un règlement de construction, de sorte que
toutes ces villes, les 32 municipalités concernées par le
schéma d'aménagement ou par la loi 48 se trouvaient
automatiquement liées par le respect du schéma
d'aménagement et de tout ce qui en découlait, incluant les plans
d'urbanisme et tout ce que j'ai énuméré tout à
l'heure.
Naturellement, il n'est pas du tout question pour nous de contester le
principe de la loi sur le zonage agricole, puisque dans notre propre
schéma d'aménagement, nous avons déjà une
réglementation très précise concernant la protection du
territoire agricole. Dans la seule ville de Saint-Eustache, par exemple, on a
environ 10 000 arpents de terre qui sont en culture, qui sont
protégés par un plan de zonage et également par le
schéma d'aménagement. Ces 10 000 arpents se trouvent
également soumis à une réglementation très
précise quant au développement de la ville sur ce territoire.
Naturellement, il manquait une loi-cadre qui empêchait la ville ou les
villes de refuser des permis de construction sur tout le territoire, de sorte
qu'on était obligé de donner des permis de construction sur tout
le territoire, pour autant que les requérants respectaient et le
règlement de construction et les aménagements.
Maintenant, la loi 90 nous donnerait justement cette
réglementation ou ce carcan qui ferait que nous pourrions
désormais refuser sur une partie de notre territoire des permis de
construction ou une permission de développer en dehors du
périmètre définitivement zoné agricole.
Il n'est pas du tout dans notre intention d'essayer de transgresser la
loi. La loi, dans son essence, lorsqu'elle sera sanctionnée, nous
voulons la respecter. Cependant, nous voulons, et c'est l'objet même de
notre démarche, qu'à cause justement de cette loi spéciale
qui nous rend dépendants actuellement en ce qui concerne tout changement
au schéma d'aménagement, au plan directeur, au plan d'urbanisme
ou même au zonage, au changement de règlement de zonage, qui nous
rend dépendants de l'acceptation du ministre des Affaires municipales...
Ceci ferait que sur notre territoire, on se trouverait avec deux lois
d'exception et tout le lourd processus que cela exige pour arriver à une
décision finale.
C'est justement la première partie de notre mémoire
où, de façon très technique, on dit de quelle façon
la loi s'applique ou de quelie façon la loi a pris naissance pour
évoluer et pour ensuite présenter à toute la région
un schéma d'aménagement articulé, d'autant plus que ce
schéma d'aménagement a été fait, je le
répète, en concertation avec toutes les municipalités, et
également en concertation avec tous les citoyens.
Les objectifs précis qu'on nous avait alors fixés,
étaient, dans un premier temps, d'identifier les pôles
d'attraction de la région aéroportuaire. Naturellement, la ville
de Saint-Eustache, suite aux recherches et aux études des experts, a
été reconnue, cataloguée comme étant le centre de
tout le secteur sud de la zone aéroportuaire.
Un deuxième objectif était de développer
l'autonomie des centres, tout en favorisant la mobilité physique de la
population.
Un troisième objectif, favoriser les retombées
économiques de l'aéroport.
Un quatrième, assurer aux populations du territoire le meilleur
service urbain possible, au moindre coût de mise en valeur et de
fonctionnement.
Cinquièmement, assurer la meilleure utilisation possible des
ressources du milieu naturel de la région en favorisant leur mise en
valeur et en réduisant les conflits entre les différentes
utilisations du sol.
Sixièmement, rentabiliser les investissements des divers niveaux
de gouvernement. Sur ce point, je tiens à souligner que le gouvernement
provincial et le gouvernement fédéral ont investi des millions de
dollars pour que ce schéma d'aménagement puisse trouver
écho et application. Ce schéma d'aménagement correspond au
milieu ambiant, correspond aussi aux objectifs économiques que l'on peut
normalement espérer de l'environnement créé autour de
l'aéroport.
Cependant c'est le deuxième point de notre exposé
les études du ministère des Affaires municipales ont
considéré l'aspect particulier de l'agriculture et c'était
justement un des buts poursuivis, protéger le territoire agricole qui se
trouvait dans tout le territoire des 38 municipalités. Ce territoire
agricole se trouvait à comprendre environ 50% de toute la superficie
ainsi aménagée de façon régionale.
La ville de Saint-Eustache, je le disais donc, désire tout de
suite, vous indiquer qu'elle a vu elle-même, sans attendre d'autres
interventions d'ordre gouvernemental et par la force du bill 48 on le
reconnaît à protéger l'aire agricole de son
territoire.
Effectivement, comme il sera fait mention plus loin dans notre
mémoire, la ville de Saint-Eustache a fait en sorte, par ses
règlements, son plan directeur, premièrement, de protéger
l'aire agricole de son territoire et deuxièmement, d'adopter une
réglementation appropriée.
Elle a, de fait, zoné secteur agricole 10 680 acres de son
territoire. Actuellement, le plan provisoire déposé fait en sorte
qu'il ne nous reste de notre territoire que 16%, ce qui fait que le plan
provisoire a inclus une grande partie de la partie déjà
urbanisée ou de la partie pour laquelle la ville avait
dépensé de fortes sommes d'argent pour continuer l'urbanisation
par des plans directeurs appropriés que l'on complète au fur et
à mesure.
Le moyen pour parvenir au but visé. Tout d'abord, il y avait la
préparation du schéma d'aménagement régional qui a
quand même pris quatre ans à créer, à discuter,
à développer. Il y a
également le schéma directeur des structures. Il y a le
programme de services et d'équipement. Ce programme de services et
d'équipement traduit le schéma directeur des structures en termes
d'échéancier et de réalisation, c'est-à-dire qu'il
présente un programme échelonné sur plusieurs
années, les investissements des immobilisations que la
municipalité devra réaliser en conformité avec ses
capacités financières.
Actuellement, qu'il me soit tout simplement permis de souligner que dans
la perspective de ce schéma d'aménagement et de ce
développement envisagé, la municipalité a investi de
très fortes sommes d'argent pour se donner des structures et des
mécanismes qui lui permettraient de recevoir la population et les
investissements envisagés, que cela soit d'ordre industriel ou
commercial. (23 h 30)
Ensuite, il y a eu la réglementation d'urbanisme qui a fait
l'objet d'un règlement spécial et cette réglementation
faisait en sorte que le plan directeur, de même que le schéma
d'aménagement, puisse trouver application de façon très
précise.
Ensuite, il y a eu les études et plans particuliers comme dans
tout schéma d'aménagement, il y a toujours également
certains plans particuliers. Les municipalités, naturellement, peuvent
préparer des plans particuliers. Ce sont des plans qui précisent
les directives du schéma directeur des structures concernant une partie
du territoire ou un domaine spécifique. Ces études fournissent
donc les recommandations appropriées à la mise en commun et au
regroupement de services et, éventuellement, à des modifications
aux limites municipales. Je pense que ce qu'il y a de plus important à
retenir de ces études, de ce schéma d'aménagement, c'est
que ce schéma d'aménagement nous appartient en propre parce qu'il
a été élaboré par les instances locales incluant
autant la population que les structures municipales.
La ville de Saint-Eustache, avec les autres municipalités du
secteur sud, s'est donc dotée de tous les moyens imposés par le
ministre des Affaires municipales en vue d'atteindre les buts visés,
dont et c'était un des buts visés celui de la
protection du territoire agricole. En effet, les organismes régionaux
suivants ont été créés. Ils ont apporté des
conséquences importantes et heureuses pour le développement
régional. Parmi les organismes régionaux créés
suite à l'aménagement du territoire régional, il y a eu,
premièrement, une commission spéciale qui a été
formée créant un incinérateur qui, en fait, appartient
à huit municipalités différentes, bien qu'il se trouve sur
le territoire de la ville de Saint-Eustache. Il est justement administré
par les huit municipalités en question et dispose d'un budget qui est
voté par les huit municipalités.
Dans un deuxième temps, il y a eu la formation de la commission
industrielle. Je pense que c'est à peu près unique qu'une
commission industrielle régionale réunisse plusieurs
municipalités qui, ensemble, se sont entendues pour ne pas faire
plusieurs parcs industriels sur un même territoire donné. La ville
de Saint-Eustache a été retenue comme choix des huit
municipalités pour installer et être le maître d'oeuvre du
parc industriel, mais il reste que le parc industriel comme tel, c'est le parc
de toute la région. Ce parc est administré par une commission
qu'on appelle la Commission industrielle de Mirabel-Sud, qui est une commission
régionale qui dispose également d'un budget. Ce parc, depuis
qu'il a été fondé en 1973, a attiré au-delà
de 40 industries créant 800 nouveaux emplois. Je pense que pour une
ville ou pour un groupe de petites villes comme chez nous, c'est quand
même assez appréciable et ce dynamisme s'est reflété
sur des industries qui sont de beaucoup plus grande envergure que celles qu'on
avait dans le passé puisque, actuellement, le parc industriel de
Mirabel-Sud a sur son territoire la compagnie General Motors, celle qui
construit les autobus et que, possiblement, à brève
échéance, nous aurons une autre assez grosse industrie qui
pourrait donner encore un nombre très intéressant d'emplois.
Ensuite, il y a, pour superviser les changements à
l'aménagement du territoire régional, ce qu'on appelle une
commission conjointe d'urbanisme qui pourrait peut-être être
l'équivalent d'un conseil de comté tel que le gouvernement
l'envisage dans les mois à venir. Cette commission conjointe d'urbanisme
se réunit lorsqu'il s'agit de faire des changements d'importance au plan
d'aménagement. Naturellement toutes ces décisions, tout
changements, qu'ils soient majeurs ou mineurs, dans tous les cas, se trouvent
à être ratifiés par le ministre des Affaires municipales
lui-même.
Je disais tout à l'heure, c'est important de le resouligner, que
des centaines de milliers de dollars ont été investis par le
gouvernement provincial pour doter les organismes régionaux de
développement de moyens efficaces et modernes pour parvenir au but
visé, suivant les objectifs définis précédemment,
en tenant compte de la situation particulière créée
justement par la venue dans la région de l'aéroport international
de Mirabel. Les retombées économiques de l'aéroport, on
peut dire qu'actuellement, Saint-Eustache en retire la plus grosse partie, de
toutes les municipalités. C'est justement pour pouvoir continuer
à manifester un certain dynamisme et une organisation cohérente
qui constituerait un attrait pour ceux qui veulent s'établir autour, que
nous faisons la présente démarche, actuellement.
La ville de Saint-Eustache s'est entièrement conformée aux
dispositions obligatoires de la loi sur les environs du nouvel aéroport,
et, en paticu-lier aux articles 19, 20, 21 et 22, elle a mis en application les
recommandations de tous les experts mis à sa disposition par le
gouvernement. A un moment donné, ces experts, on pouvait en compter
environ une cinquantaine. Ce qui veut dire que le gouvernement y a mis le
paquet pour que toute la région aéroportuaire puisse être
en mesure de faire face à la musique et à un développement
qui était peut-être dans l'inconnu, à cette date, mais qui
répondait quand même à certaines projections qui
s'avèrent de plus en plus précises.
Cette réglementation et le plan directeur d'urbanisme ont
été approuvés par le ministère des Affaires
municipales, ces règlements sont légalement en vigueur, ils sont
en application de façon scrupuleuse. Conformément au
schéma d'aménagement préparé par le
ministère, une zone agricole a été prévue en accord
avec les objectifs et ainsi, dans la seule ville de Saint-Eustache, je le
répète, nous avons un territoire agricole de grande importance.
Je vous prie de me croire, malgré que nous ayons un territoire agricole
d'importance, cette protection du territoire ne se fait pas en contradiction
des objectifs précédemment établis, mais bien de
façon harmonieuse, afin d'assurer le développement de toute la
collectivité de Saint-Eustache et en rapport avec sa situation
privilégiée.
En somme, il s'agit d'une heureuse synthèse, d'une urbanisation
progressive de la ville de Saint-Eustache, en accord avec sa vocation
spéciale et du développement rationnel de ses meilleures terres
agricoles. En fait, la ville a mis en application le principe à la fois
si raisonnable et si essentiel que l'on retrouve à la page 13 du
fascicule 3 intitulé: "L'aménagement et l'urbanisme",
publié le 2 octobre 1978 par le ministère du Conseil
exécutif et que le ministère de l'aménagement nous a remis
précisément la semaine dernière.
On y lit...
M. Lavoie: il faudrait je crois, qu'on suspende les travaux, si
on n'a la présence du ministre, ni de l'adjoint parlementaire. J'aurais
des questions à poser, autant à nos invités qu'au ministre
sur ce mémoire, qui est bien structuré. Je me demande pourquoi on
siège, si le ministre ni l'adjoint ne sont là.
Le Président (M. Boucher): Le ministre s'est
absenté momentanément pour...
M. Lavoie: Je proposerais qu'on suspende, parce que ces gens
n'ont pas travaillé pour rien, ils s'attendent à avoir des
réponses.
Le Président (M. Boucher): ... quelques minutes, il
revient.
M. de Bellefeuille: M. le Président, sur cette question...
M. le Président...
Le Président (M. Boucher): Oui, M. le député
de Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: ... sur la question soulevée par le
député de Laval, peut-être pas l'aspect de la
présence du ministre, mais l'aspect temps, peut-être que la
commission pourrait convenir de siéger un peu au-delà de l'heure
convenue.
Le Président (M. Boucher): Je regrette, M. le
député de Deux-Montagnes, le règlement session-nel ne
permet pas de siéger après minuit. M. Bélisle, vous pouvez
continuer votre exposé.
M. Bélisle: Pour autant que cela donnera des
résultats, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Le ministre a pris connaissance
de votre mémoire.
M. Lavoie: Ces gens-là attendent depuis le matin. On peut
suspendre la séance pendant quelques minutes, quand même.
Le Président (M. Boucher): Le ministre a pris connaissance
du mémoire. Il reviendra dans quelques minutes. Cela ne sera pas long.
Cela va nous permettre de gagner du temps...
M. de Bellefeuille:... de commenter le mémoire en son
nom.
Le Président (M. Boucher): Allez-y, cela va
épargner du temps pour les commentaires par la suite.
M. Lavoie: Est-ce qu'il y a quorum, M. le Président?
Le Président (M. Boucher): Nous sommes six. Je crois qu'il
y a quorum. Le quorum est de six, M. le député de Laval. Il y a
quorum. Allez-y, M. Bélisle.
M. Bélisle: Cela va. Pour nous, voici les effets du projet
de loi sur la protection du territoire agricole. On en déduit que le
législateur, par l'article 98 du projet de loi 90, raie d'un trait de
plume les années d'efforts et de concertation de la ville, des
municipalités environnantes et de leurs citoyens ainsi que le travail
des experts mis en place par le ministère des Affaires municipales et
les sommes considérables d'argent investies depuis l'année 1969
pour doter la ville de Saint-Eustache et les autres de moyens adéquats
et assurer le développement harmonieux de son territoire.
L'article 98 du projet de loi stipule en effet ce qui suit: "La
présente loi prévaut sur toute disposition inconciliable d'une
loi générale ou spéciale applicable à une
communauté, à une corporation ou à une corporation de
comté. "Elle prévaut également sur toute disposition
incompatible d'un schéma d'aménagement, d'un plan directeur ou
d'un règlement de zonage, de lotissement ou de construction."
Or, si l'on se réfère à la définition que
donne le ministre d'Etat à l'aménagement, M. Jacques
Léonard, on sait ce que cela peut avoir comme conséquence, cette
disposition. C'est ni plus ni moins qu'ignorer tout simplement les efforts de
plusieurs années de plusieurs personnes et également de tous les
citoyens qui ont bien voulu participer à l'élaboration de ce
schéma d'aménagement.
Le projet de loi 90, s'il est adopté tel quel, aura les
conséquences particulières suivantes pour notre ville:
Premièrement, perte de juridiction du conseil de la ville sur
environ 84% de son territoire, suivant
l'aire actuellement retenue pour fins agricoles, et ce, dans un domaine
aussi fondamental que l'aménagement et l'urbanisme. Ce résultat
inquiétant nous semble contredire nettement le principe émis dans
la publication citée précédemment, soit
"L'aménagement et l'urbanisme", publiée le 2 octobre 1978,
où on lit, à propos des pouvoirs partagés respectant les
domaines propres d'intervention: "L'aménagement doit être
perçu, non pas comme l'apanage exclusif de l'Etat, mais bien comme la
responsabilité conjointe et partagée des trois paliers de
gouvernement, c'est-à-dire les municipalités, les comtés
municipaux et le gouvernement québécois. Ce partage de
responsabilités doit se comprendre comme un domaine de juridiction
concourrente, mais non exclusive, même pas, quant à nous, dans le
domaine agricole. "Par contre, il appartient en propre aux
municipalités" et c'est mentionné tel quel dans le texte
"de continuer d'exercer les responsabilités qu'elles assument
présentement et que plusieurs devront assumer plus
réellement."
Deuxièmement, la synthèse harmonieuse que la ville de
Saint-Eustache avait réussi à établir entre une
urbanisation progressive et le développement rationnel de l'agriculture
est nettement mis en péril.
Troisièmement, alors que la ville, par ses textes
législatifs, protège actuellement environ 160 terres pour fins
agricoles, le projet de loi no 90 ajoute inutilement environ 40 autres terres
qui n'ont aucune vocation agricole, mais bien une vocation urbaine, ce qui a
pour effet de compromettre, de façon très grave, le
développement de l'ensemble de la municipalité vis-à-vis
des objectifs que les citoyens se sont fixés. (23 h 45)
Quatrièmement, l'expansion du parc industriel est
arrêtée.
Cinquièmement, des équipements municipaux et des
infrastructures ont été mis en place, en accord avec le plan
directeur de la ville de Saint-Eustache, à un coût
considérable, qui devaient tenir compte de l'urbanisation prochaine et
progressive d'un secteur de la municipalité. Ce secteur fait maintenant
partie de l'aire actuellement retenue pour fins agricoles. Ces
équipements et ces infrastructures imposeront un fardeau fiscal
considérable aux contribuables de la ville de Saint-Eustache.
Sixièmement, la ville de Saint-Eustache perdra des revenus
importants de taxes, compte tenu de la baisse certaine de l'évaluation
des immeubles situés dans la zone agricole. Actuellement, en effet, les
terres qui sont détenues pour des fins autres qu'agricoles dans ce
secteur sont évaluées, suivant la Loi sur l'évaluation
foncière, à la valeur réelle, c'est-à-dire à
leur valeur du marché qui, dans la ville de Saint-Eustache, est un
marché autre que pour fins agricoles.
L'effet du projet de loi no 90, pour ces terres qui sont maintenant
retenues dans l'aire agricole, sera de baisser considérablement leur
évaluation, puisque ces terres n'auront maintenant qu'un seul
marché, soit le marché agricole.
La ville de Saint-Eustache perdra donc des revenus sur une
évaluation de l'ordre de $3 millions.
Septièmement, déjà des plans de
développement sont complétés par les urbanistes-conseils
de la ville de Saint-Eustache et prêts à être mis à
exécution et ce, dans une partie de l'aire pour fins agricoles. La ville
devra en absorber le coût sans que les effets escomptés de ces
plans puissent se produire.
Huitièmement, le développement de l'aéroport de
Mirabel ne fera que s'accentuer dans les prochains mois. Les journaux
récents font état de cette réalité prochaine. Ce
développement amènera sûrement une forte pression sur le
développement urbain de la ville de Saint-Eustache et celle-ci doit
être prête à répondre à cette exigence, non
seulement pour le bienfait de ses contribuables, mais bien pour ceux de toute
la province.
Le projet de loi 90 met donc des embûches des plus sérieux
à notre ville sous ce rapport et la prive de moyens essentiels dont elle
s était dotée à cette fin.
Notre demande particulière. En regard de tout ce qui
précède, la ville de Saint-Eustache demande respectueusement
d'être soustraite, pour l'application du projet de loi 90, à la
commission prévue à cette loi. Elle est en effet toujours
obligée de respecter le schéma d'aménagement
régional préparé par le ministère des Affaires
municipales, suivant la loi concernant les environs du nouvel aéroport
international.
La ville de Saint-Eustache ne veut pas être tiraillée entre
deux lois tout aussi coercitives, soit la loi concernant les environs du nouvel
aéroport et la Loi sur la protection du territoire agricole, alors
qu'elle s'est conformée en tout point à la première et
qu'elle s'est dotée de tous les instruments pour être en mesure de
réaliser les objectifs prévus par la deuxième.
Elle demande d'être elle-même chargée d'appliquer
cette loi, sous la responsabilité du ministre des Affaires municipales
qui a juridiction explicite en pareille matière, suivant la loi
concernée par le chapitre 48 qui contrôle effectivement le zonage
et la protection du territoire agricole suivant cette loi.
La ville de Saint-Eustache soumet respectueusement, en tenant compte de
la situation qui existe chez nous, en prenant en considération les
commissions régionales qui existent, la réglementation
appropriée qui a été faite par la ville et qui a
été approuvée par le ministre des Affaires municipales que
le but visé par la Loi sur la protection du territoire agricole sera
intégralement atteint dans le cas de notre ville et ce, en pleine
harmonie... avec les autres objectifs visés par la ville, qui lui
permettront d'assumer pleinement sa vocation particulière au
bénéfice de toute la collectivité.
La ville a tenu à consulter les producteurs agricoles de son
territoire. Elle a même tenu une soirée d'information, à
laquelle ceux-ci ont assisté en grand nombre. Ils se sont
déclarés en entier, à une exception près, d'accord
avec la demande faite par la ville dans le présent mémoire. Nous
croyons sincèrement que cette demande, loin
d'être présomptueuse, est en parfait accord avec les vues
de M. Guy Tardif, ministre des Affaires municipales, qui s'est employé,
particulièrement depuis les derniers mois, à revaloriser la
fonction des élus municipaux.
Nous soutenons respectueusement que le projet de loi 90 est contraire
à cet objectif. Il prive le conseil municipal de la ville de
Saint-Eustache d'un champ de juridiction qui lui est essentiel, et qui lui
appartient, pour assurer l'épanouissement de la municipalité.
Nous ajoutons, de plus, respectueusement, que cette demande est dans la ligne
d'orientation et de pensée de M. Jacques Léonard, ministre d'Etat
à l'aménagement, qui, au risque de répéter une
partie du mémoire de ceux qui nous ont précédés,
disait, en ce qui concerne l'aménagement du territoire, de quelle
façon il devait être pensé: "Là-dessus l'orientation
a été claire, ce n'est pas de Québec que doit se faire
l'aménagement".
Or, justement, nous l'avons fait à partir de notre propre
territoire, de nos propres citoyens, de nos propres institutions et de nos
propres municipalités.
Vous me permettrez de vous demander tout simplement de lire de la page
46 à la fin, puisque le contenu de ces pages a été
discuté en long et en large depuis ce matin. Ce contenu, quand
même, représente l'opinion de nos agriculteurs, opinion qui a
été émise lors de la réunion que nous avons faite
il y a environ une dizaine de jours. Nous avons retenu les demandes faites par
eux qui, malheureusement, ne semblent pas avoir été
acheminées à bon port par la consultation qui a été
faite par l'UPA.
Justement, sur ce point...
M. Lavoie: M. le Président, il reste six minutes, et ces
pages sont intéressantes. De toute façon, on ne pourra pas vider
la question de Saint-Eustache ce soir. J'inviterais le maire à
résumer, comme il l'a fait depuis le début, les cinq ou six pages
qui restent. Elles sont très intéressantes, d'ailleurs.
M. Garon: Je comprends. Je pense que pour l'avenir on ne peut pas
avoir de romans. Il faudrait avoir une période délimitée
pendant laquelle on pourrait questionner les gens et une période pendant
laquelle on résumerait les mémoires. Je n'ai jamais vu des
mémoires durer une heure et plus.
M. Lavoie: Est-ce qu'il y a deux poids, deux mesures? On a
passé une heure ou une heure et demie avec...
M. Garon: Non, pour la lecture.
M. Lavoie: Un instant! Je vais terminer. D'ailleurs, on ne se
disputera pas longtemps, il reste cinq minutes. Ce que je voulais dire, c'est
que je pense qu'on a laissé une certaine latitude depuis le début
à l'Union des conseils de comté, l'Union des municipalités
et l'Union des producteurs agri- coles. La ville de Saint-Eustache est une
municipalité importante de la région métropolitaine de
Montréal. Je ne pense pas qu'il y ait eu abus de la part de
l'opposition.
M. Garon: Non.
M. Lavoie: On n'acceptera de la part du ministre aucune
restriction et nous allons donner la liberté voulue et
désirée par ceux qui prennent la peine de préparer des
mémoires comme celui-ci et qui veulent se faire entendre.
M. Garon: Je comprends que l'Union des municipalités, pour
toutes les municipalités du Québec, a présenté un
mémoire de 12 pages. On demande un résumé. On l'a lu le
mémoire. Je l'ai lu le mémoire. Normalement, la méthode,
c'est de résumer le mémoire, et après cela on pose des
questions.
M. Lavoie: De toute façon, je pense bien...
M. de Bellefeuille: M. le Président, j'ai demandé
la parole.
M. Lavoie: Oui, allez-y! J'aimerais bien entendre le
député de Deux-Montagnes.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: J'aimerais demander, par votre
intermédiaire, M. le Président, au maire Bélisle et aux
autres représentants de la ville de Saint-Eustache s'ils peuvent revenir
demain devant la commission.
M. Bélisle: On va revenir étant donné qu'on
a quand même pris la peine de préparer ce mémoire. Je tiens
quand même à vous souligner que si je l'avais lu, cela aurait
peut-être pris une heure et quart, mais je l'ai fait en moins de 25
minutes.
M. de Bellefeuille: Je voudrais simplement ajouter que je
reconnais que le mémoire contient beaucoup de substance et je suis
très heureux que la délégation de Saint-Eustache puisse se
présenter de nouveau demain.
M. Lavoie: Peut-être pourriez-vous laisser M. le Maire
terminer son exposé et demain on procédera aux questions.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Laval, j'aimerais peut-être profiter des dernières minutes qui
restent pour discuter des prochains organismes qui vont se présenter. Il
y a deux organismes qui n'ont pu se faire entendre ce soir. Alors, il faudrait
leur demander s'ils sont prêts à revenir demain matin.
Alors, l'Association provinciale des constructeurs et l'Association des
constructeurs de routes et grands travaux du Québec, vous pouvez
revenir
demain. Donc, vous passerez dans l'ordre après la ville de
Saint-Eustache.
Je ferai remarquer aussi qu'il y en a huit...
M. Lavoie: L'Association des urbanistes-conseils du Québec
qui était prévue, pour aujourd'hui, je crois.
Le Président (M. Boucher): Non. Elle n'était pas
sur la liste, M. le député de Laval.
M. Lavoie: Sur la liste que j'ai, moi, ici, le 5
décembre...
Le Président (M. Boucher): Alors, pour demain, il y aurait
neuf autres organismes de prévus. Ah! Il y en a un qui est
annulé. Alors, il y en aurait huit en plus des deux autres et avec
Saint-Eustache, cela fait onze.
M. Lavoie: Onze pour demain.
Le Président (M. Boucher): Onze, en terminant avec
Saint-Eustache.
M. Lavoie: Cela va bien, M. le ministre?
Le Président (M. Boucher): Disons qu'on essaiera de faire
notre possible.
M. Garon: Cela va très bien.
Le Président (M. Boucher): On essaiera de faire notre
possible pour demain.
M. Garon: On n'a qu'à aller jusqu'à 18 heures,
éventuellement. Je suis très résistant au sommeil.
M. Lavoie: A six heures?
M. Garon: 24 heures sur 24, on est capable de faire cela.
M. Lavoie: Ecoutez, il faut quand même être
raisonnable. Vous savez que l'Assemblée nationale siège
actuellement et qu'elle peut siéger après minuit.
M. Garon: Oui.
M. Lavoie: Et moi, je me dirige à l'Assemblée
nationale actuellement pour continuer les travaux là-bas.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Champlain.
M. Gagnon: Comme on a presque terminé pour ce soir et
qu'on va s'aligner avec onze organismes pour demain comme vous l'avez
mentionné, onze mémoires à entendre n'y aurait-il
pas possibilité d'essayer de déterminer un temps pour chaque
mémoire ou avez-vous l'intention de continuer à aller librement
comme cela...
Le Président (M. Boucher): Je l'ai mentionné au
début des travaux de la commission et il n'y a pas eu d'entente entre
les leaders sur le temps pour chacun des mémoires. On a compté
sur la collaboration des membres de la commission pour se limiter. Comme
président, je pense que je n'ai pas de qualité spéciale
pour voir l'heure passer. Tous les membres de la commission peuvent voir
tourner les aiguilles de l'horloge et lors de leurs interventions, ils peuvent
essayer de limiter leurs questions.
M. Garon: D'accord qu'on ne limite pas les périodes
d'échange pour les mémoires, mais les mémoires, on les a
rédigés. Alors, je pense qu'il faudrait quand même que ce
soit un résumé qu on nous présente, lequel pourrait durer
peut-être dix minutes, un quart d'heure, mais pas des textes qui vont
durer une heure.
M. Lavoie: Justement la ville de Saint-Eustache a
résumé son mémoire et a pris à peine une demi-heure
pour présenter son mémoire.
M. Garon: ... parce qu'on a les textes. On peut les lire.
M. Lavoie: II n'y a pas d'abus là.
M. Garon: ... plus qu'une demi-heure.
Le Président (M. Boucher): Pour clore la question...
M. Garon: Ils seront imprimés au journal des Débats
quand même.
Le Président (M. Boucher): ... j'invite les
représentants de Saint-Eustache à revenir demain, après la
période de questions.
M. Bélisle: Vers quelle heure? Onze heures?
Le Président (M. Boucher): Cela veut dire vers onze heures
et ils poursuivront pour les questions. Merci beaucoup.
M. Bélisle: Merci.
Le Président (M. Boucher): Alors, la commission ajourne
ses travaux sine die.
Fin de la séance à minuit
ANNEXE
MÉMOIRE
de la ville de St-Eustache à la commission
parlementaire chargée d'étudier le projet
de loi numéro 90 "Loi sur la protection du
territoire agricole"
Le 30 novembre 1978.
Monsieur le Président,
Messieurs les Membres,
La Commission Parlementaire chargée d'étudier le Projet de
loi numéro 90 "Loi sur la Protection du Territoire Agricole"
La ville de St-Eustache vous soumet respectueusement
PRÉAMBULE
Suivant les notes explicatives qui sont attachées au Projet de
loi numéro 90, "Loi sur la protection du territoire agricole", ce Projet
de loi a "principalement pour objet d'assurer la protection du territoire
agricole ".
La ville de St-Eustache se déclare entièrement d'accord
avec le but visé par ce Projet de loi.
Par le présent Mémoire, elle espère vous convaincre
qu'il ne s'agit pas là de la formulation d'un énoncé poli,
pour pouvoir ensuite le détruire par une série de
"réticences", mais bien qu'elle a déjà agi, de
façon positive, réaliste et concrète, dans l'esprit dudit
Projet de loi.
La ville de St-Eustache croit sincèrement, cependant, que le
Législateur devrait tenir compte de la situation particulière qui
existe actuellement à St-Eustache, au niveau de la protection du
territoire agricole et en regard du développement harmonieux de toute la
municipalité, et eu égard aux mécanismes juridiques, et
aux infrastructures importantes, économiques et autres, dont elle s'est
dotée, pour prévoir l'avenir avec réalisme et pour
recueillir le plus de retombées économiques possibles, suite
à l'événement majeur qui s'est produit dans sa
région immédiate, à savoir l'implantation de
l'Aéroport International de Mirabel, dont les phases de
réalisation les plus importantes restent à venir, selon une
planification préalablement établie.
Premier point:
La venue de l'Aéroport International de Mirabel
et les organismes de planification
En 1969 et en 1970, à la suite de la décision d'implanter
à Sainte-Scholastique un nouvel aéroport international, les
gouvernements mettent en place différents organismes de planification et
de mise en oeuvre. Ces organismes ont pour but d'obtenir le maximum d'effets
bénéfiques liés à l'implantation de
l'aéroport et d'aménager le territoire en accueillant cette
infrastructure d'importance.
En juin 1969, le gouvernement provincial vote le bill 48, 1969, Ch. 57,
"Loi créant le Bureau d'aménagement des environs d'un nouvel
aéroport international au Québec (BAENAIQ)."
En juillet 1970, en vertu de la loi de l'O.P.D.Q., le gouvernement
provincial créait par arrêté en conseil, la Commission de
développement de la région de Montréal (CDRM) avec le
mandat d'élaborer un schéma de développement,
principalement pour la sous-région nord de Montréal et d'assurer
la coordination des efforts interministériels dans ce territoire. En
janvier 1971, le président de la CDRM déposait son rapport
(Rapport du Président) définissant des objectifs de cadrage au
développement et à l'aménagement de la sous-région
nord.
Le 19 décembre 1970, le bill 60, 1970, Ch. 48 "Loi concernant les
environs du nouvel aéroport" crée la nouvelle municipalité
de Sainte-Scholastique, abolit la loi du BAENAIQ et transfère les droits
et obligations du Bureau d'aménagement au ministre des Affaires
municipales. Le personnel technique du BAENAIQ est regroupé dans le
Service d'aménagement du territoire de la région
aéroportuaire (SATRA). L'annexe B du bill 60 définit le
territoire des 32 municipalités pour lequel doit être
préparé un schéma d'aménagement.
Les 32 municipalités qui s'étendent au nord de la
rivière des Mille-Iles jusqu'à Saint-Jérôme et du
Canton de Chatham à l'ouest, à Terrebonne à l'est,
comptaient 180,000 habitants et couvrent une superficie de près de
400,000 acres (1620 km carrés), sept fois la superficie de l'Ile
Jésus.
La région aéroportuaire est une partie de la région
administrative no 6 et s'étend sur trois comtés: Deux-Montagnes,
Terrebonne et Argenteuil.
La ville de St-Eustache est la ville la plus importante du Comté
des Deux-Montagnes.
Le mandat de SATRA était de préparer un schéma
d'aménagement pour la région aéroportuaire, sensibiliser
les ministères aux problèmes de la mise en place de
l'aéroport, assurer l'information, la
consultation et la concertation des administrations municipales et de
leurs citoyens, solutionner les problèmes liés à
l'implantation de l'aéroport et en négocier leur solution avec le
BANAIM (Bureau d'aménagement du nouvel aéroport international de
Montréal Transport Canada), appliquer le bill 60 quant au
schéma d'aménagement, au plan d'urbanisme, au zonage et à
l'annexe A (Sainte Scholastique).
L'on sait que, de façon générale, un schéma
d'aménagement tend à préciser sur un territoire
donné quelles parties de ce territoire doivent être
affectées à des fins agricoles, industrielles, commerciales,
récréatives, ainsi que les services à mettre en place pour
favoriser ces types d'utilisation. Pour ce faire, le schéma doit
inventorier les éléments naturels du milieu, les
caractéristiques de sa population et des équipements urbains,
industriels, routiers déjà en place. Une fois le schéma
précisé, il peut servir de guide à l'élaboration
des politiques des différents niveaux de gouvernement mais
principalement celles des municipalités concernées. Il permet
d'éviter les effets néfastes d'une organisation mal
conçue: gaspillage de terrains, dilapidation du patrimoine naturel et
culturel, dispersion excessive des équipements et des
activités.
Les objectifs précis du SATRA étaient les suivants: 1o. -
Identifier les pôles d'attraction de la région
aéroportuaire.
(La ville de St-Eustache, suite aux recherches et études des
experts, a été reconnue et cataloguée comme étant
le centre de tout le secteur sud de la zone aéroportuaire). 2o. -
Développer l'autonomie des centres, tout en favorisant la
mobilité physique de la population. 3o. - Favoriser les retombées
économiques de l'aéroport. 4o. -Assurer aux populations du
territoire les meilleurs services urbains possibles, au moindre coût de
mise en valeur et de fonctionnement. 5o. - Assurer la meilleure utilisation
possible des ressources du milieu naturel de la région en favorisant
leur mise en valeur et en réduisant les conflits entre les
différentes utilisations du sol. 60. - Rentabiliser les investissements
des divers niveaux de gouvernement.
Deuxième point:
Le ministère des Affaires
municipales, le SATRA et l'Agriculture
Dans les documents officiels du ministère des Affaires
municipales et du SATRA, l'on retrouve l'objectif suivant, clairement
défini quant à l'agriculture: "La sauvegarde de l'agriculture est
un objectif à atteindre et il importe d'en faire une activité
rentable et concurrentielle. Ainsi, non seulement, l'aire agricole doit-elle
être protégée, mais elle doit être mise en valeur
dans le cadre du développement régional. Le territoire
aéroportuaire est agricole à plus de 50% et la lutte pour
l'utilisation du sol devrait se faire de plus en plus vive.
Le contrôle de l'aire agricole et la rentabilité de
celle-ci ne sauraient se faire sans une règlementation de l'utilisation
du sol et de l'adoption de programmes assurant la mise en valeur du territoire.
Les objectifs généraux du ministère de l'Agriculture
décrivent ce concept".
En conséquence, le SATRA a, dans la région
aéroportuaire, déterminé un périmètre
agricole, qui a été rendu obligatoire par les règlements
de zonage que les municipalités étaient tenues d'adopter en vertu
de la "loi concernant les environs du nouvel aéroport
international".
Nous avons déjà cette règlementation
particulière quant à l'utilisation du sol pour fins agricoles
mais il n'était pas de notre responsabilité de mettre en oeuvre
les grandes politiques qui devaient émaner du ministère de
l'Agriculture du Québec, suivant les recommandations mêmes de
SATRA: "Intégration du secteur agricole dans l'économie,
Parité des revenus,
Régionalisation et diversification des productions,
Mobilité et réaffection des ressources, Augmentation du
degré d'auto-approvisionnement, Gestion de l'offre et partage des
marchés, Maintien d'une infrastructure socio-économique en milieu
rural, Intensification de la recherche et des programmes en formation technique
et professionnelle".
Remarque importante
La ville de St-Eustache, je le disais donc, désire tout de suite
vous indiquer qu'elle a vu elle-même, sans attendre d'autres
interventions, à protéger l'aire agricole de son territoire.
C'est ainsi que, dès 1974, l'on retrouve dans le document
d'expertise intitulé "Schéma directeur des structures-St-Eustache
et la région", préparé par Chagnon et Sunderland,
urbanistes-conseils, les textes suivants: 1o.-"La fonction agricole au sein de
secteur sud de la région aéroportuaire est répartie
principalement sur le territoire de St-Eustache, de St-Joseph du Lac, de la
paroisse d'Oka et de la paroisse de St-Placide... 2o. - De cette analyse, il
ressort que la partie Est du secteur est la plus productive au point de vue
agricole et qu'elle se distingue par des productions hautement
spécialisées.
3o. - L'agriculture est localisée sur certaines parties bien
déterminées du territoire; d'autres terres sont affectées
soit la récréation, soit la villégiature, deux
activités qui ne sont pas du tout incompatibles avec les
activités agricoles, bien au contraire.
L'affectation des sols spécifiés au plan du secteur rural
est établie en fonction du potentiel agricole des sols.
C'est ainsi que l'on remarquera certaines enclaves affectées
à la récréation au sein même du secteur
agricole".
Et, effectivement, comme il sera fait mention plus loin dans le
présent Mémoire, la ville de St-Eustache a fait en sorte, par ses
Règlements et son plan directeur, à protéger l'aire
agricole de son territoire. Elle a, de fait, zoné "agricole" 10680.8
acres de son territoire.
Mais, il n'était certes pas de la compétence et de la
responsabilité de la ville de St-Eustache de prendre les autres moyens
pour réaliser les buts du SATRA vis-à-vis l'agriculture, soit
l'adoption de programmes assurant la mise en vigueur du territoire, lesquels
relevaient des objectifs généraux du ministère de
l'Agriculture, suivant les détails, d'ailleurs, qui apparaissent
à la page précédente.
Troisième point: Les moyens pour parvenir aux buts
visés
Afin que les buts visés pour la zone aéroportuaire ne
restent pas lettres mortes, le législateur a prévu des moyens
radicaux pour y parvenir.
Suivant l'article 19 de la "Loi concernant les environs du nouvel
aéroport international", le ministre des Affaires municipales a
préparé un plan indiquant les affectations du sol du
territoire.
Par la suite les municipalités ont été dans
l'obligation d'exécuter des plans municipaux d'urbanisme.
Ces plans devaient être conformes avec les grandes orientations du
schéma d'aménagement régional, et obtenir l'assentiment
des paliers supérieurs, dont, entre autres, l'approbation du ministre
des Affaires municipales et celle du ministre de l'Agriculture. Nous avons
déjà obtenu ces approbations après de longues
discussions.
La confection des plans d'urbanisme, placée sous la
responsabilité des commissions conjointes d'urbanisme de secteur,
assurait la concertation intermunicipale.
Ces plans comprenaient: 1o. - Le schéma directeur des
structures.
Il définit les concepts d'organisation de l'espace d'une
municipalité ou d'une agglomération, identifie et esquisse les
besoins en équipements et infrastructures majeures et dresse un
aperçu des priorités d'action.
Il détermine les affectations du sol (résidentiel,
commercial, industriel, récréatif, agricole, etc.) et les
densités d'occupation.
Il établit les zones d'expansion urbaine et leurs étapes
de développement.
Il délimite les zones à rénover et définit
le type d'intervention (restauration, démolition, etc.).
Il établit la répartition, l'importance et la localisation
des noyaux de services commerciaux (centreville, centre de voisinage,
etc.).
Il identifie les besoins en équipements, les prévoit et
les localise (écoles, hôpitaux, postes de pompiers, parc,
etc.).
Il indique le tracé des voies de circulation à conserver,
à modifier ou à créer. Il définit la
hiérarchie routière, de même que la largeur et les
caractéristiques générales de routes.
Il identifie les besoins en infrastructures d'utilité publique,
prévoit leur emplacement ou leur tracé (égout, aqueduc,
dépotoir).
Il identifie et définit les principaux problèmes
d'aménagement, précise les solutions et les priorités
d'action.
Il précise la politique municipale ou intermunicipale en termes
de conservation et de protection du milieu (protection du patrimoine historique
et architectural, lutte contre la pollution, etc.) et précise les
politiques sur les ressources naturelles. 2o. - Le programme des services et
équipements
II traduit le schéma directeur des structures en termes
d'échéancier de réalisation, c'est-à-dire qu'il
présente un programme échelonné sur plusieurs
années des investissements et des immobilisations que la
municipalité devra réaliser en conformité avec ses
capacités financières.
Il comprend un énoncé d'intention sur la nature et le
niveau des services dont la municipalité, ou le groupe de
municipalités, veut se doter.
Il précise les politiques et les échéances de
réalisation des équipements, des services ou des infrastructures,
selon les directives indiquées dans le schéma directeur des
structures et selon la capacité financière de la
municipalité ou du groupe de municipalités.
II prévoit, en termes de budget et de localisation dans le temps,
la mise sur pied des programmes de promotion économique, d'action
socioculturelle ou encore de protection de l'environnement.
Il inscrit dans son processus, les réalisations
d'équipements ou de services qui ne sont pas de sa compétence,
mais qui sont toutefois prévues dans le schéma directeur des
structures (voirie provinciale, parcs provinciaux, programmes de conservation,
services de santé, etc.). 3o - La réglementation d'urbanisme
Elle est le second mécanisme complémentaire au
schéma directeur des structures. C'est un élément de
contrôle de l'occupation du sol dans la municipalité et de
l'utilisation des différentes parcelles de son territoire.
D'une façon générale, la réglementation
d'urbanisme se compose de trois sections:
Un plan divisant le territoire municipal en zones pour des fins de
réglementation des utilisations du sol.
Un règlement de zonage spécifiant, pour chaque zone, les
constructions et les usages autorisés ou prohibés, les
règles applicables pour chaque construction ou usage, les
modalités applicables à toute rénovation ou
démolition.
Un règlement de lotissement spécifiant, pour chaque zone,
les critères d'approbation d'un plan de lotissement. 4o - Les
études et plans particuliers
Les municipalités peuvent aussi préparer des plans
particuliers. Ce sont des plans qui précisent les directives du
schéma directeur des structures concernant une partie du territoire ou
un domaine spécifique. Ils prévoient, parallèlement et en
accord avec le programme des services et équipements, toutes les
modalités précises de financement et de réalisation des
aménagements ou activités prévues dans cette partie du
territoire ou dans ce domaine spécifique; il peut s'agir aussi bien d'un
plan d'aménagement d'une carrière, que d'un programme complet de
rénovation, par exemple.
Ces études fournissent les recommandations appropriées
à la mise en commun et au regroupement de services et,
éventuellement, à des modifications aux limites municipales.
Quatrième point:
La ville de St-Eustache s'est dotée de tous les
moyens imposés par
le ministère des Affaires municipales, en vue
d'atteindre les buts visés
dont celui de la protection du territoire
agricole
En effet, les organismes régionaux suivants ont été
créés et ils ont apporté des conséquences
importantes et heureuses pour le développement régional. Ces
orgnismes sont les suivants: 10- Le 14 janvier 1972, la Cité des
Deux-Montagnes, le village d'Oka, la paroisse de St-Joseph du Lac, le village
de Pointe Calumet, la Corporation Municipale de Ste-Marthe sur le Lac et la
Corporation Municipale de la paroisse de St-Eustache signaient avec la ville de
St-Eustache une entente concernant l'organisation en commun d'un système
pour l'élimination des déchets, et ces municipalités
formaient une Commission Conjointe à cette fin sous le nom de
"Comité Intermunicipal de Deux-Montagnes".
A la suite de subventions très importantes reçues du
Gouvernement Provincial et du Gouvernement Fédéral, un
incinérateur régional fut construit sur le territoire de la ville
de St-Eustache (dans une aire actuellement retenue pour fins agricoles, par le
Projet de loi numéro 90).
Grâce à de nouvelles subventions importantes,
l'incinérateur régional s'est agrandi en 1974.
Il dessert maintenant les villes mentionnées ci-dessus, et en
plus, de nombreuses municipalités environnantes, l'aéroport de
Mirabel même, les organismes bancaires, et Loto-Québec et
Loto-Canada. 2o. - Le 16 janvier 1973, la ville de St-Eustache, dont alors la
paroisse de St-Eustache faisait partie intégrante, créait une
Commission Industrielle Régionale connue sous le nom de "Commission
Industrielle de Mirabel Sud", avec toutes les municipalités
mentionnées précédemment, et avec en plus la
municipalité de la paroisse de l'Annonciation d'Oka, le village de
St-Placide et la paroisse de St-Placide.
Cette Commission Industrielle Régionale a eu pour effet
immédiat la création d'un parc industriel régional,
situé dans la ville de St-Eustache (malheureusement dans une aire
actuellement retenue comme agricole suivant le Projet de loi numéro
90).
Cette Commission a également vu à l'engagement d'un
Commissaire Industriel et les efforts concertés de tous ont amené
dans le parc industriel régional de St-Eustache, au delà de
quarante (40) entreprises qui ont généré plus de huit
cents (800) emplois.
La dernière industrie à s'y installer est celle de la
compagnie General Motors pour les fins de la construction ou assemblage
d'autobus scolaires, production qui doit débuter incessamment.
3o. - Le 7 septembre 1972, la ville de St-Eustache constituait avec les
huit autres municipalités mentionnées précédemment
au paragraphe 2o, une Commission Conjointe d'Urbanisme qui porte le nom de
"Commission d'Urbanisme de Mirabel Sud".
Cette Commission est des plus active depuis, et voit à la
concrétisation des objectifs visés dans les très nombreux
documents préparés depuis l'année 1969 par tous les
experts en la matière.
Des centaines de milliers de dollars ont été investies par
le Gouvernement Provincial pour doter les organismes de développement de
moyens efficaces et modernes pour parvenir aux buts visés, suivant les
objectifs définis précédemment, en tenant compte de la
situation particulière créée par la venue dans la
région de l'aéroport international de Mirabel. 4o. - La ville de
St-Eustache s'est entièrement conformée aux dispositions
obligatoires de la "loi sur les environs du nouvel aéroport
international," et en particulier aux articles 19, 20, 21 et 22, et elle a mis
en application les recommandations de tous les experts mis à sa
disposition par le Gouvernement.
En collaboration avec la commission" conjointe de l'urbanisme, elle a
édicté les Règlements suivants: le Règlement sur le
lotissement: numéro 763 et amendements. Le Règlement sur la
Construction: numéro 764 et amendements. Le Règlement sur la
zonage avec l'adoption d'un plan directeur d'urbanisme: numéro 762 et
suivants.
Cette règlementation et le plan directeur d'urbanisme ont
été approuvés par le ministre des Affaires municipales,
suivant la loi "concernant les environs du nouvel aéroport
international" (chapitre 48 des Lois de 1970).
Ces Règlements sont légalement en vigueur et ils sont mis
en application de façon scrupuleuse.
Conformément au schéma d'aménagement
régional préparé par le ministère des Affaires
municipales, une zone agricole a été prévue, en accord
avec les objectifs de SATRA, et ainsi, dans la seule ville de St-Eustache, une
superficie de 10680.8 acres a été affectée au zonage
agricole.
Cette protection du territoire agricole ne se fait pas en contradiction
des objectifs précédemment établis, mais de façon
harmonieuse, afin d'assurer le développement de toute la
collectivité de St-Eustache en rapport avec sa situation
privilégiée.
En somme, il s'agit d'une heureuse synthèse d'une urbanisation
progressive de la ville de St-Eustache, en accord avec sa vocation
spéciale, et du développement rationnel de ses meilleures terres
agricoles.
Ces textes législatifs ont concrétisé l'expression
de volonté et de désir des citoyens de la ville de St-Eustache,
qui ont été longuement consultés depuis l'année
1969.
En fait, la ville de St-Eustache a mis en application le principe
à la fois si raisonnable et si essentiel que l'on retrouve à la
page 13 du fascicule 3, intitulé "L'aménagement et l'Urbanisme",
publié le 2 octobre 1978 par le ministère du Conseil
Exécutif: "L'aménagement est l'affaire de tous les citoyens et de
leurs élus dans le cadre de leurs institutions municipales, de
comté ou de l'Etat. Chaque niveau de gouvernement doit être en
mesure de jouer le rôle d'un meneur de jeu pour l'aménagement du
territoire dont il est responsable. Les élus de chaque palier, en
association étroite avec les citoyens, définissent le type
d'aménagement auquel la communauté aspire, En définitive,
il reviendra aux élus de faire les choix, en tenant compte de points de
vue de leurs citoyens".
Cinquième point:
Les effets du projet de la loi sur la protection du
territoire agricole pour la ville de St-Eustache
Le Législateur, par l'article 98 du Projet de loi numéro
90, raye d'un trait de plume les années d'efforts et de concertation de
la ville de St-Eustache, des municipalités environnantes et de leurs
citoyens, le travail des experts mis en place par le ministère des
Affaires municipales, et les sommes considérables d'argent investies
depuis l'année 1969 pour doter la ville de St-Eustache de moyens
adéquats et assurer le développement harmonieux de son
territoire.
L'article 98 du Projet de loi susdit stipule, en effet, ce qui suit: "La
présente loi prévaut sur toute disposition inconciliable d'une
loi générale ou spéciale applicable à une
communauté, à une corporation municipale ou à une
corporation de comté.
Elle prévaut également sur toute disposition incompatible
d'un schéma d'aménagement, d'un plan directeur ou d'un
règlement de zonage, de lotissement ou de construction".
Le Projet de loi numéro 90, s'il est adopté tel quel, aura
les conséquences particulières suivantes pour la ville de
St-Eustache. 1o. - Perte de juridiction du Conseil de la ville de St-Eustache
sur environ 84% de son territoire, suivant l'aire actuellement retenue pour fin
agricole, et ce, dans un domaine aussi fondamental que "l'aménagement et
l'urbanisme".
Ce résultat inquiétant nous semble contredira nettement le
principe émis dans la publication citée
précédemment, soit "l'aménagement et l'urbanisme"
publiée le 2 octobre 1978, par le ministère du Conseil
exécutif, pages 13 et 14,
"DEUXIÈME PRINCIPE: DES POUVOIRS PARTAGÉS RESPECTANT
LES DOMAINES PROPRES D'INTERVENTION. "L'aménagement doit être
perçu non pas comme l'apanage exclusif de l'Etat, mais bien comme la
responsabilité conjointe et partagée des trois paliers de
gouvernement, c'est-à-dire les municipalités, les comtés
municipaux et le gouvernement québécois. Ce partage de
responsabilités doit se comprendre comme un domaine de juridiction
concurrente mais non exclusive. Un tel partage doit cependant faire une large
place aux champs relativement autonomes de responsabilités. Cette
autonomie représente d'ailleurs le seul véritable fondement de la
responsabilité politique des choix à faire en matière
d'aménagement tout comme elle constitue la principale garantie que le
niveau où ces choix doivent être faits (collectivité
locale, collectivité de comté, collectivité
québécoise) sera respecté"... "Par contre, il appartient
en propre aux municipalités de continuer d'exercer les
responsabilités quelles assument présentement et que plusieurs
devront assumer plus réellement. Il leur revient d'élaborer des
plans et règlements en matière d'urbanisme, tout comme il est de
leur ressort de procéder à l'implantation d'un parc municipal ou
à la mise en oeuvre d'un programme d'habitation pour leur
collectivité.
Des moyens plus étendus et plus complets pour assurer une gestion
appropriée de l'aménagement de leur milieu leur seront d'ailleurs
confiés.
Quant au comté, tout en étant une instance de concertation
du milieu municipal et de négociation avec le gouvernement, il pourra
assumer des responsabilités ou exercer un droit de regard sur les grands
équipements intermunicipaux, sur les infrastructures de voirie et
autres. De plus, il sera responsable des grandes affectations de son territoire
et de la délimitation des périmètres d'urbanisation". 2o.
- La synthèse harmonieuse que la ville de St-Eustache avait
réussi à établir entre une urbanisation progressive et le
développement rationnel de l'agriculture est nettement mise en
péril. 3o.-Alors que la ville, par ses textes législatifs,
protège actuellement environ cent soixante (160) terres pour fins
agricoles, le Projet de loi numéro 90 rajoute inutilement environ
quarante (40) autres terres, qui n'ont aucune vocation agricole, mais bien une
vocation urbaine, ce qui a pour effet de compromettre de façon
très grave le développement de l'ensemble de la
municipalité, vis-à-vis les objectifs que ses citoyens se sont
fixés. 4o. - L'expansion du Parc Industriel Régional est
arrêtée. 5o. - Des équipements municipaux et des
infrastructures ont déjà été mis en place en accord
avec le pian directeur de la ville de St-Eustache, à un coût
considérable, mais qui tenait compte de l'urbanisation prochaine et
progressive d'un secteur de la municipalité.
Ce secteur fait maintenant partie de l'aire actuellement retenue pour
fins agricoles.
Ces équipements et ces infrastructures imposeront un fardeau
fiscal considérable aux contribuables de la ville de St-Eustache. 6o. -
La ville de St-Eustache perdra des revenus importants de taxes, compte tenu de
la baisse certaine de l'évaluation des immeubles situés dans la
zone agricole.
Actuellement, en effet, les terres qui sont détenues pour des
fins autres qu'agricoles, dans ce secteur, sont évaluées, suivant
la loi sur l'évaluation foncière à leur valeur
réelle, c'est-à-dire à leur valeur du marché qui,
dans la ville de St-Eustache, est un marché autre que pour fins
agricoles.
L'effet du projet de loi numéro 90 pour ces terres qui sont
maintenant retenues dans l'aire agricole, sera de baisser
considérablement leur évaluation, puisque ces terres n'auront
maintenant qu'un seul marché, le marché agricole.
La ville de St-Eustache est convaincue que le Bureau de Révision
de l'Evaluation Foncière du Québec ne pourra faire autrement que
de tenir compte de cette situation, dans les décisions qu'il aura
à rendre sur les contestations d'évaluation qui lui seront
soumises.
La ville de St-Eustache perdra des revenus sur une évaluation de
l'ordre de $3,000,000.00. 7o. - Déjà, des plans de
développement sont complétés par les urbanistes-conseils
de la ville de St-Eustache, et prêts à être mis à
exécution, et ce dans l'aire pour fin agricole.
La ville de St-Eustache devra en absorber le coût, sans que les
effets escomptés de ces plans puissent se produire. 8o. - Le
développement de l'aéroport de Mirabel ne fera que s'accentuer
dans les prochains mois.
Les journaux récents font état de cette
réalité prochaine.
Ce développement amènera sûrement une forte pression
sur le développement urbain pour la ville de St-Eustache, et celle-ci
doit être prête à répondre à cette exigence,
non seulement pour le bienfait de ses contribuables, mais bien pour ceux de
toute la province de Québec.
Le Projet de loi numéro 90 met des embûches des plus
sérieuses à la ville de St-Eustache, sous ce rapport, et la prive
de moyens essentiels dont elle s'était dotée à cette
fin.
Sixième point: La demande de la ville de St-Eustache
En regard de tout ce qui précède, la ville de St-Eustache
demande respectueusement d'être soustraite, pour l'application du Projet
de loi numéro 90, à la Commission prévue à cette
loi.
Elle est en effet toujours obligée de respecter le schéma
d'aménagement régional préparé par le
ministère des Affaires municipales, suivant la "loi concernant les
environs du nouvel aéroport international."
La ville de St-Eustache ne veut pas être tiraillée entre
deux lois, tout aussi coercitives, soit la "loi concernant les environs du
nouvel aéroport international" et la "loi sur la protection du
territoire agricole ", alors qu'elle s'est conformée en tout point
à la première et qu'elle s'est dotée de tous les
instruments pour être en mesure de réaliser les objectifs
prévus par la deuxième.
Elle demande d'être elle-même chargée d'appliquer
cette loi, sous la responsabilité du ministre des Affaires municipales
qui a juridiction explicite en pareille matière suivant la "loi
concernant les environs du nouvel aéroport international", le chapitre
48 des Lois de 1970, et qui contrôle effectivement le zonage et la
protection du territoire agricole suivant ladite loi.
La ville de St-Eustache soumet respectueusement qu'en tenant compte de
la situation qui existe actuellement dans la ville de St-Eustache, en prenant
en considération les Commissions Régionales qui existent, la
réglementation appropriée qui a été faite par la
ville de St-Eustache et qui a été approuvée par le
ministre des Affaires municipales: le but visé par la loi sur la
protection du territoire agricole sera intégralement rempli dans le cas
de la ville de St-Eustache, et ce, en pleine harmonie avec les autres objectifs
visés par la ville de St-Eustache et lui permettront d'assumer
pleinement sa vocation particulière, au bénéfice de toute
la collectivité.
La ville de St-Eustache a tenu à consulter les producteurs
agricoles de son territoire.
Elle a même tenu une soirée d'information à
laquelle, ceux-ci assistaient en grand nombre.
Ils se sont déclarés en entier accord avec la demande
faite par la ville de St-Eustache dans le présent Mémoire.
Nous croyons sincèrement que cette demande, loin d'être
présomptueuse, est en parfait accord avec les vues de Monsieur Guy
Tardif, ministre des Affaires municipales, qui s'est employé, depuis
particulièrement les derniers mois, à revaloriser les fonctions
des élus municipaux.
Nous soumettons respectueusement que le Projet de loi numéro 90
est contraire à cet objectif: il prive le Conseil Municipal de la ville
de St-Eustache d'un champ de juridiction qui lui est essentiel, pour assurer
l'épanouissement de la municipalité.
Nous ajoutons de plus, respectueusement, que cette demande est dans la
ligne d'orientation et de pensée de Monsieur Jacques Léonard, le
ministre d'Etat à l'aménagement qui s'exprime ainsi, dans
l'avant-propos de chacun des fascicules de l'ouvrage "La
décentralisation: une perspective communautaire nouvelle", publié
par le ministère du Conseil Exécutif, ouvrage auquel il a
été référé précédemment: "Au
début de l'année 1977, j'ai entrepris avec mes collègues
du Comité ministériel de l'aménagement une
réflexion sur les problèmes généraux
d'aménagement du territoire du Québec et sur la prise de
décision en aménagement. Nous avons rapidement fait une
distinction entre deux modèles possibles: ou c'est le gouvernement
lui-même qui aménage le territoire selon sa propre perception des
besoins des individus et des collectivités; ou encore le gouvernement
confie à des instances plus locales les responsabilités de
l'aménagement et leur donne les moyens de faire face à ces
responsabilités.
Là-dessus, l'orientation a été claire: ce n'est pas
de Québec que doit se faire l'aménagement."
LE TOUT RESPECTUEUSEMENT SOUMIS.
VILLE DE ST-EUSTACHE, le 30 novembre 1978
LA VILLE DE ST-EUSTACHE
Par: Me Guy Belisle Maire
Notes complémentaires
La ville de Saint-Eustache espère ardemment que la demande
qu'elle a faite dans la première partie de son Mémoire sera
agréée, dans l'intérêt général de ses
concitoyens, et notamment de ses producteurs agricoles.
La ville de St-Eustache est consciente que plusieurs intervenants ont
soumis et soumettront des Mémoires intéressants sur le texe
même du Projet de loi numéro 90.
Aussi, elle demande respectueusement à la Commission de formuler
les brèves remarques suivantes: 1o - L'intérêt des
producteurs agricoles
Par le projet de loi numéro 90, le Législateur n'a
porté son attention que sur le fonds de terre agricole.
Il ne s'est pas attaché à la personne du producteur
agricole.
La ville de St-Eustache souhaite très fortement que, dans le
domaine agricole aussi, LA PERSONNE PASSE AVANT TOUTE CHOSE.
La ville de St-Eustache prie respectueusement le gouvernement de prendre
les mesures appropriées pour rentabiliser les productions agricoles
existantes, et notamment pour ouvrir des marchés sûrs et
diversifiés aux producteurs agricoles.
Le Projet de loi numéro 90 voue de nombreuses terres à une
nouvelle vocation qu'elles n'avaient pas, la vocation agricole, sans pour
autant que le producteur agricole soit assuré d'un revenu suffisant.
Les nombreuses contraintes auxquelles le producteur agricole est
astreint par le Projet de loi devraient être allégées.
En particulier, le producteur agricole devrait pouvoir continuer
à jouir de sa terre, en liberté.
Toutes les mesures devraient être prises pour que le producteur
agricole assure sa relève, notamment, par l'établissement de ses
enfants sur la ferme, à des conditions autres que celles prévues
dans le Projet de loi.
Le producteur agricole devrait également conserver son droit de
disposer de son bien, dans son meilleur intérêt.
Les pénalités rigoureuses imposées par le dernier
paragraphe de l'article 106, devraient être retranchées. 2o-La
commission spéciale créée par le Projet de loi
numéro 90
Nous suggérons que cette Commission soit formée, entre
autres, de représentants des municipalités, qui sont les plus
près des citoyens et qui sont les mieux placés pour
connaître les problèmes et les solutionner.
En effet, la Commission n'aura qu'un seul objectif, régir le
zonage agricole, sans se préoccuper des autres impératifs d'un
plan d'aménagement rationnel.
Ces représentants devraient normalement venir de l'Union des
municipalités et de l'Union des Conseils de Comté.
Le type de Commission préconisé par le Projet de loi et
son mode même d'opération créeront de sérieuses
difficultés aux municipalités à vocation urbaine: leur
territoire ne pourra, vraisemblablement, être "dégelé"
qu'après plusieurs mois.
D'autre part, les pouvoirs de cette Commission nous semblent absolument
exorbitants: elle consulte seulement les municipalités, pour
l'établissement du périmètre final du zonage agricole,
mais c'est elle qui va décider exclusivement et de façon
finale.
Aucun appel n'est prévu des décisions de la
Commission.
Et, fort curieusement, la Cour supérieure est appelée
à faire observer les décisions de la Commission, mais elle n'a
aucun contrôle sur celle-ci, contrairement aux dispositions mêmes
de notre régime juridique actuel.
Nous suggérons qu'un droit d'appel soit donné des
décisions de la Commission et investi dans un pouvoir municipal
régional ou entre les mains de la Commission Municipale du
Québec.
De plus, un délai devrait être stipulé pendant
lequel la Commission doit rendre ses décisions sur les demandes qui lui
sont soumises. 3o-ll nous paraît anormal que ce soit le Gouvernement qui
établisse tous les règlements relatifs au Projet de loi
numéro 90, y compris les règles de régie interne de la
Commission et les règles de pratique et de procédure de
celle-ci.
4o. - L'article 95 nous paraît injuste et discriminatoire.
Il consacre en fait le principe d'une expropriation
déguisée, sans indemnité, ce qui est absolument contraire
aux notions fondamentales du droit de propriété que la Province
de Québec connaît depuis toujours.
Dans le régime actuel municipal, tout changement de zonage est
sujet au contrôle des citoyens, par la voie du référendum,
et au contrôle du ministère des Affaires municipales.
Le Législateur devrait prévoir un mécanisme
d'indemnisation valable pour tous les propriétaires de biens fonciers de
bonne foi, et affectés directement par le Projet de loi.
Le tout respectueusement soumis. Ville de St-Eustache, le 30 novembre
1978
La ville de St-Eustache
Par: Me Guy Bélisle
Maire