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Version finale

31st Legislature, 3rd Session
(February 21, 1978 au February 20, 1979)

Tuesday, December 12, 1978 - Vol. 20 N° 228

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 90 — Loi sur la protection du territoire agricole


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 90

(Dix heures vingt-trois minutes)

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous plaît! La commission permanente de l'agriculture se réunit ce matin pour étudier les mémoires des groupes et personnes concernant la Loi sur la protection du territoire agricole.

Les membres de la commission sont: M. Baril (Arthabaska), M. Beauséjour (Iberville), M. Dubois (Huntingdon), M. Gagnon (Champlain), M. Garon (Lévis), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Rancourt (Saint-François), M. Roy (Beauce-Sud), M. Vaillancourt (Orford), M. Marcoux (Rimouski) remplace M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Charbonneau (Verchères), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue) remplacé par M. Lavoie (Laval), M. Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Picotte (Maskinongé), M. Samson (Rouyn-Noranda).

Ce matin, nous avons, en premier lieu, l'Association des jardiniers maraîchers, représentée par M. Dominique Charbonneau, président. M. Charbonneau, si vous voulez vous identifier et identifier ceux qui sont avec vous.

Association des jardiniers maraîchers de la région de Montréal

M. Charbonneau (Dominique): J'aimerais présenter ceux qui sont ici à la table. Dominique Charbonneau, président de l'Association des jardiniers maraîchers...

Le Président (M. Boucher): Pourriez-vous vous asseoir, pour le microphone, s'il vous plaît!

M. Charbonneau (Dominique):... Alain Gibou-leau, vice-président, Raymond Guinois, directeur, Michel Legault, directeur, Pierre Hubert, directeur, Denis Locas, directeur et M. Alphonse Couture, notre porte-parole officiel.

Le Président (M. Boucher): Alors, M. Couture, si vous voulez présenter le mémoire.

M. Couture (Alphonse): M. le Président, MM. les membres de la commission, l'Association des jardiniers maraîchers de la région de Montréal regroupe les jardiniers et horticulteurs de cette région qui englobe un secteur d'environ 50 milles autour de Montréal.

Le secteur horticole est l'un des plus dynamiques de l'agriculture québécoise. Sa croissance a été constante depuis le début des années soixante et la valeur annuelle de la production des légumes pour vente à l'état frais et des plants de fleurs excède $60 millions. On exclut ici naturellement les légumes pour la conserve ainsi que la pomme de terre.

Ces jardiniers et horticulteurs emploient une main-d'oeuvre saisonnière très nombreuse, plus de 6000 — ce sont des emplois directs — et quelques centaines d'ouvriers permanents. A cause du climat et de la proximité du marché de Montréal, qui est le principal centre de consommation de la province, cette industrie est fortement concentrée dans la région de Montréal, c'est-à-dire l'île Jésus, le nord-ouest, l'est et le sud de Montréal.

En période de production, nous alimentons, en plus de la province de Québec, une bonne partie de l'est de l'Ontario et des Maritimes. Nos exportations de légumes, principalement sur le marché américain, sont importantes: carotte, céleri, oignon, chou, laitue, etc.

Les jardiniers des zones urbaines sont ceux qui ont le plus souffert de l'absence d'un zonage agricole adéquat au cours des 30 dernières années et ils se réjouissent de son avènement ou, du moins, ils s'en réjouissaient jusqu'au dépôt du projet de loi.

Telle que rédigée, cette loi peut causer de graves préjudices aux jardiniers à l'intérieur des zones urbaines où on les retrouve majoritairement; plus de 275 à l'île Jésus et un grand nombre dans les villes satellites de Montréal — le chiffre de 275 provient d'une liste de statistiques du ministère de l'Agriculture. On l'a mentionné hier, et je pense que ceux qui sont ici considèrent qu'il y en a plus que cela, mais officiellement, sur la liste du ministère, on en voit 275 ou 278 — La valeur annuelle de leur production est d'environ $20 millions parce que leur culture est plus intensive. Ils emploient environ 40% de la main-d'oeuvre saisonnière de ce secteur.

Le zonage devra: a) freiner l'urbanisation sauvage du territoire; b) limiter la croissance désordonnée des agglomérations urbaines; c) créer des zones de verdure permanentes à l'intérieur des zones urbaines; d) conserver les meilleurs sols des zones urbaines pour assurer des sources de production et d'approvisionnement locales de légumes frais; e) permettre aux jardiniers et horticulteurs de la ville et de la périphérie de planifier à long terme l'exploitation de leur entreprise et d'y faire les améliorations et investissements nécessaires sans crainte de voir leurs efforts anéantis par l'urbanisation de leur terre.

Nous nous bornerons à vous signaler quelques articles de ce projet de loi qui inquiètent les jardiniers ou qui leur sont préjudiciables. Nous vous suggérons quelques amendements indispensables si on veut corriger certaines injustices et permettre aux jardiniers de survivre en zone urbaine, à l'intérieur ou à l'extérieur d'une zone agricole, tout particulièrement: 1) le sens du mot "agriculture"; 2) les restrictions concernant le lotissement en zone agricole; 3) la procédure et les conditions d'intégration d'un jardinier ou agriculteur à une zone agricole;

4) la procédure et les conditions d'exclusion d'un jardinier ou agriculteur d'une zone agricole ou du changement de zonage d'un territoire agricole; 5) les amendements à la loi de l'évaluation foncière prévus à l'intérieur de ce projet de loi; 6) l'établissement de critères d'admissibilité pour les jardiniers ou agriculteurs situés à l'extérieur d'une zone agricole d'une région agricole désignée; 7) les vieux jardiniers et le sort que leur réserve ce projet de loi.

Le sens du mot "agriculture ". Nous considérons que la définition du terme "agriculture" à l'article 1, au premier paragraphe, est insuffisante pour couvrir adéquatement les activités agricoles des jardiniers et horticulteurs.

En plus des activités énumérées, nous suggérons d'insérer après les mots "la culture du sol" la culture en serre et hydroponique, la classification, l'emballage et le préemballage des fruits et légumes, l'entreposage, la congélation et la transformation de ces produits.

Les restrictions concernant le lotissement en zone agricole. A l'article 40 ainsi qu'aux articles 28 et 29, on restreint le droit de subdiviser et on limite la construction permise à celle d'une résidence pour le père, son fils et un employé. Dans le cas du secteur horticole, ces restrictions sont inadmissibles. Un jardinier doit conserver le droit de céder une partie de sa ferme à des fins agricoles, de bâtir des maisons pour ses enfants et ses employés permanents ainsi que des serres, des entrepôts frigorifiques ou non, une salle de classification et d'emballage, les installations nécessaires à la congélation, à la déshydratation, à la mise en conserve et à la vente de ses produits sur sa ferme ou des subdivisions de sa ferme.

Il faut aussi prévoir les installations connexes, telles que des remises et ateliers de réparations de la machinerie agricole, un système de refroidissement, des kiosques à léqumes, etc. Les constructions permises devraient être clairement définies dans la loi et la subdivision à ces fins doit être accordée pour en faciliter le financement et la copropriété. Lors de la vente d'une ferme, le propriétaire devrait avoir le privilège de conserver sa résidence, même si celle-ci a été construite après l'entrée en vigueur de cette loi.

Les jardiniers, du moins ceux en zone urbaine, préfèrent la petite ou moyenne entreprise qui leur permet de bien vivre. Ils n'ont pas l'ambition de posséder des fermes d'une valeur de $400 000 ou $500 000 en quotas, bâtisses, entrepôts et fonds de terre.

Les jardiniers, en zone urbaine ou à la campagne, ont besoin d'une main-d'oeuvre nombreuse et de résidences pour les employés. Ils sont souvent copropriétaires d'un entrepôt ou d'un centre de classification. Ils ont besoin de connaître les règles du jeu pour planifier leurs activités et ne veulent pas subir les tracasseries de modifications constantes aux règlements de zonage qui les concernent. (10 h 30)

L'interdiction de subdiviser peut aussi causer de très nombreux problèmes de financement et empêcher l'établissement d'un enfant sur sa propre ferme. En horticulture, il n'est pas nécessaire d'avoir cinquante ou cent arpents en culture pour obtenir un revenu raisonnable si le sol est fertile et si l'entreprise est située à proximité des marchés. Il est normal que le père partage sa terre entre 2 et 3 enfants qui veulent s'établir à leur compte. Dans certains cas, cela peut aller même jusqu'à 4 ou 5 enfants qui s'établissent sur la terre paternelle.

La procédure et les conditions d'intégration d'un jardinier ou agriculteur à une zone agricole. A l'article 58, on mentionne qu'un lot peut être inclus dans une zone agricole en en faisant la demande à la corporation municipale. Les jardiniers hors zone seront très nombreux et ne pourront continuer à exercer leur profession si la ville s'y oppose et si la commission lui donne raison, ce qui est plus que probable. Nous nous opposons fortement à cette procédure qui va priver un jardinier de ses droits légitimes et l'exposer à la perte de ses biens au bout de quelques années. La majorité des villes vont refuser de faire une recommandation favorable à la commission. Le zonage agricole va faire baisser l'évaluation foncière globale des villes et il est normal que celles-ci désirent réduire la zone agricole au minimum en s'opposant énergiquement à toute addition à cette zone, parce que la diminution de l'évaluation, par suite du zonage, va affaiblir leur pouvoir d'emprunt.

Ils vont également s'opposer à ce qu'on appelle le "spot zoning ". Si un cultivateur est isolé dans le secteur, cela va être difficile.

Nous insistons fortement pour que tous les jardiniers ou agriculteurs hors zone d'une région agricole désignée soient considérés comme étant inclus dans la zone agricole d'une région désignée ou bénéficient des mêmes avantages et privilèges que ceux d'une zone agricole, s'ils répondent aux critères que nous vous suggérons, à moins que l'agriculteur n'indique par écrit à sa corporation municipale qu'il désire être exclu de la zone agricole.

Les jardiniers ont des droits prioritaires sur le territoire et si le zonage avait été fait en temps, il y a vingt-cinq ou trente ans, ils auraient tous été inclus dans une zone agricole. Pourquoi les priver de leurs droits et en vertu de quels principes?

La plupart ne seront pas intéressés à abandonner leur terre. Ils n'ont pas les moyens de prendre une retraite prématurée et ils sont trop âgés pour songer à s'installer ailleurs. Si la corporation municipale s'oppose à leur inclusion dans la zone agricole, ils devront se résigner à vivre en marginaux, payer des taxes quarante ou cinquante fois plus considérables que celles de leurs confrères ou céder leur ferme à très bas prix et se voir condamner à l'oisiveté et au bien-être social éventuel. C'est une situation absolument injuste et inhumaine qui leur est faite et nous espérons que cette anomalie sera corrigée. Il ne faut pas oublier que la disparition de ces jardiniers va tout simplement accélérer le mouvement d'abandon d'une foule d'excellentes terres que le propriétaire ne pourra pas vendre avant

plusieurs années, à moins de la céder à vil prix à un spéculateur ou à un investisseur qui a les capitaux suffisants pour acquitter les taxes annuelles, en attendant que les services municipaux soient rendus et que les terres aient atteint une valeur raisonnable pour fins de construction domiciliaire ou commerciale. On va relancer un mouvement de spéculation sur les terres des agriculteurs hors zone qui seront forcés de vendre, parce qu'ils n'auront pas les moyens d'acquitter les taxes foncières annuelles.

S'ils veulent continuer à exploiter leur ferme, ils auront à faire face à une concurrence déloyale, parce que les jardiniers de la zone agricole adjacente bénéficieront d'avantages fiscaux et autres qui leur seront refusés.

La procédure et les conditions d'exclusion d'un jardinier ou agriculteur d'une zone agricole ou du changement de zonage d'un territoire agricole. A l'article 65, il est prévu que la corporation municipale pourra toujours demander l'exclusion d'un ensemble de lots d'une zone agricole. Cette clause, nécessaire pour permettre l'évolution normale d'une zone domiciliaire, industrielle ou commerciale, est inadmissible si les pénalités prévues à l'article 106 sont maintenues. On traite alors ces jardiniers comme s'ils avaient commis un vol au cours des dix dernières années et ils devront, au moment de l'exclusion de la zone agricole, restituer ces sommes, même s'ils n'en ont pas les moyens.

Les amendements à la loi de l'évaluation foncière prévus à l'intérieur de ce projet de loi. A la section X, article 106, on modifie la Loi de l'évaluation foncière en ajoutant l'article 21a, qui a pour effet d'augmenter les avantages consentis aux agriculteurs d'une zone agricole désignée qui continueront à payer leurs taxes foncières sur une évaluation maximale de cent cinquante dollars l'acre et le ministère remboursera désormais aux agriculteurs inclus dans une zone agricole reconnue 70% des taxes foncières que les jardiniers, pour leur part, remettront en partie aux gouvernements fédéral et provincial, sous forme d'impôt additionnel sur le revenu. Cet article classifie les agriculteurs en 3 catégories: ceux situés à l'extérieur d'une région agricole désignée; ceux qui sont situés hors zone agricole d'une région agricole désignée et enfin, les agriculteurs de la zone agricole.

Le paragraphe suivant concerne prioritairement les jardiniers et les horticulteurs des zones urbaines où ils se trouvent en grande majorité.

Dans un premier temps, il y a ceux qui sont exclus de la zone agricole, et ils seront très nombreux, surtout après les très fortes pressions qui seront faites par les villes et les communautés urbaines pour convaincre la commission de réduire la zone agricole. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il faut tous les inclure dans la zone agricole au point de départ, à moins qu'ils n'expriment le désir d'en être exclus ou, du moins, qu'on leur accorde les mêmes privilèges qu'à ceux qui sont inclus dans la zone agricole. On maintient les droits acquis aux commerces inclus dans une zone agricole, mais on va dépouiller les jardiniers d'une partie importante de leurs droits acquis, s'ils ont le malheur de se retrouver à l'extérieur d'une zone agricole, d'une région agricole désignée.

Le jardinier ou l'horticulteur ainsi exclu voit son évaluation imposable grimper en flèche sur une période de quatre ans et perdre tout privilège à la cinquième année. Ces valeurs indiquées dans le projet de loi excéderont, dans certains cas, la valeur réelle des terrains adjacents.

Ces jardiniers, les brebis galeuses du ministère de l'Agriculture, n'auront plus droit aux avantages fiscaux. Ils devront subir la concurrence de leurs confrères de la zone agricole qui auront des coûts de production moindres; ils paieront 40 ou 50 fois plus de taxes foncières qu'eux et ils n'auront plus de subvention du ministère. Ils seront probablement mis à l'écart de tout programme gouvernemental de financement et d'aide à l'agriculture. Pourquoi veut-on les éliminer, les sortir, malgré eux, du secteur agricole? Ils sont les principaux producteurs de primeurs et de plants de fleurs; ils exploitent des centaines de serres et des milliers de couches chaudes. Rien ne justifie leur exclusion, tant et aussi longtemps que leur terre est en culture. Ils ont droit d'être traités de la même façon et de bénéficier des mêmes avantages que les jardiniers ou horticulteurs de la zone agricole. Il est injuste de créer deux classes de jardiniers: les exploités en ville et les bénéficiaires des largesses du gouvernement, parce que localisés à l'intérieur d'une zone agricole stable, située en dehors d'un territoire urbain.

En cas de vente de la terre pour des fins non agricoles, telle que définie par la loi du zonage agricole, un jardinier ou un horticulteur hors-zone, mais considéré comme en faisant partie ou bénéficiant des mêmes avantages, pourrait devoir rembourser, à la ville, les taxes qu'il aurait dû normalement payer sur son évaluation foncière des trois dernières années et les remboursements de taxes reçus du ministère de l'Agriculture au cours de cette même période. Il y a déjà un précédent de créer dans ce sens avec les clubs de golf. Ce serait une pénalité suffisante parce qu'il aura, de toute façon, à acquitter l'impôt sur le gain de capital qu'il pourra alors réaliser et les terres ne valaient pas cher dans l'île Jésus le 31 décembre 1971, jour de l'évaluation pour fins de calcul des gains de capitaux imposables.

La même règle pourrait s'appliquer lorsqu'un producteur est exclu d'une zone agricole à sa propre demande. Il ne faut pas oublier qu'un horticulteur ou un jardinier n'a pas de quota de production à vendre lorsqu'il cesse de cultiver.

Au paragraphe suivant, du même article 106, on prévoit que lorsqu'une ferme est exclue de la zone agricole après dix ans, sauf pour cause d'expropriation, le fermier aura à payer, au moment de l'exclusion, dix ans de taxes foncières et devra rembourser au ministère le 70% de rabais de taxes reçu au cours de ces dix ans et sur lequel il aura déjà payé l'impôt sur le revenu. Ces remboursements au ministère et à la ville ne seront pas déductibles de son revenu; il pourra seulement les déduire du prix de vente éventuel.

On dit bien au sous-paragraphe ii) de l'article 21a, que ce remboursement se fera au moment de l'exclusion, et je cite: "Lorsqu'une ferme est exclue de la zone agricole, sauf en raison d'une expropriation, celui qui est tenu d'en payer les taxes doit rembourser" et non au moment de la vente ou graduellement, au fur et à mesure de la perception du prix de vente.

Dans le premier cas, s'il est hors-zone, on le torture pendant quatre ans, avec l'espoir de le voir mourir dans le cours de la cinquième année! Dans le second cas, s'il et dézoné, exclu d'une zone agricole contre son gré, on veut qu'il meure tout de suite au moment du dézonage!

Il n'y a rien qui indique que l'agriculteur sera dézoné seulement lorsqu'il aura un acheteur pour sa terre. Il est plus probable qu'il devra attendre que les services municipaux et les travaux d'infrastructure se fassent par la ville avant qu'il puisse obtenir la valeur réelle de sa terre. Veut-on le forcer à vendre à vil prix à un spéculateur?

Le jardinier inclus dans une zone agricole va investir, à long terme, dans des serres, des entrepôts, des salles de classification, des systèmes de refroidissement et le reste. En sortant de la zone, la valeur de ses immobilisations sera réduite à néant. Il faudra déduire le coût de la démolition de ses installations de la valeur du fonds de terre. Le sortir de la zone, sans son consentement et, de plus, lui imposer le remboursement immédiat de dix ans d'arrérages de taxes basées sur une évaluation arbitraire faite au moment de l'exclusion pour les dix dernières années, est une mesure d'extorsion inadmissible et injuste. Après avoir payé ses taxes, ses impôts sur le gain de capital, absorbé la perte de valeur des immobilisations faites sur sa ferme, il ne lui restera pas suffisamment d'argent pour se réinstaller ailleurs ni pour prendre sa retraite.

Cette mesure injuste va maintenir les jardiniers dans la crainte et l'angoisse d'être "dézonés" et va les décourager d'investir au lieu de les inciter à faire progresser leur entreprise.

L'établissement des critères d'admissibilité pour les jardiniers ou autres agriculteurs qui sont situés à l'extérieur d'une zone agricole d'une région agricole désignée. Cependant, nous croyons qu'il serait logique d'établir des critères d'admissibilité pour qu'un jardinier, un horticulteur ou un agriculteur qui est à l'extérieur de la zone agricole d'une région désignée puisse bénéficier des avantages de ceux qui en font partie. Il devrait faire la preuve que la valeur de sa production annuelle moyenne est d'au moins $10 000 pour les trois ou cinq dernières années, excepté s'il est trop âgé ou que sa santé ne lui permet plus de cultiver.

Les vieux jardiniers et le sort que leur réserve ce projet de loi. Avant de terminer, nous désirons attirer votre attention sur une autre injustice plus grave que cette loi va créer.

Il s'agit du cas des jardiniers ou horticulteurs qui sont propriétaires de leur terre, dans la majorité des cas, de petites terres de 10, 20 ou 50 arpents depuis 20, 25 ans ou plus, donc, trop vieux pour repartir à zéro sur une autre ferme et souvent encore trop jeunes et trop pauvres pour prendre leur retraite, même en tenant compte du produit éventuel de la vente de la terre qui sera diminué de l'impôt sur le gain de capital.

Pour bénéficier actuellement d'une exemption de taxes foncières, la terre doit être cultivée, mais les critères sont nébuleux et imprécis et, en vertu du projet de loi, les exemptions disparaissent pour les jardiniers d'un territoire hors de la zone agricole d'une région agricole désignée. Comme nous l'avons mentionné plus haut, il faut protéger les producteurs hors de la zone tout en fixant des critères réalistes auxquels les vieux jardiniers pourront difficilement satisfaire dans certains cas.

Les producteurs âgés, propriétaires depuis 20, 25 ans ou plus de leur terre, devraient avoir le droit de vivre leur retraite chez eux s'ils le désirent, dans la dignité et la quiétude, sans être menacés de se voir dépossédés lentement de leurs biens. A leur âge, leur état de santé les empêche souvent de se défendre contre les empiétements de l'Etat. Au cours des dernières années, de vieux jardiniers ont sacrifié leurs terres parce qu'ils n'en pouvaient plus de voir fondre leurs économies en payant des taxes foncières exagérées et injustifiées et ce, parce que leur contestation de taxes foncières avait été mal présentée au bureau de révision.

C'est pourquoi nous recommandons et espérons que le gouvernement va prévoir dans la loi qu'un jardinier propriétaire de sa terre depuis 20, 25 ans ou plus, âgé de 60 ou 65 ans, qu'il soit situé dans une zone agricole ou non, pourra continuer à bénéficier, sa vie durant, de son statut d'agriculteur aux fins de taxation foncière sans qu'il soit requis de satisfaire à des critères de production.

En cas de vente à des fins non agricoles, il pourrait être assujetti aux mêmes exigences que les autres agriculteurs en pareil cas.

Ces vieux propriétaires, s'ils sont affectés par le zonage agricole, devraient de plus être compensés pour la perte d'une partie de leurs droits. Ces vieux jardiniers, dès l'achat de leur terre, il y a 20 ou 25 ans, ont tenu compte de la plus-value éventuelle, comme leur père l'avait fait avant eux. Toute leur vie, ils se sont satisfaits d'un revenu de subsistance, comptant sur la plus-value de leur ferme pour assurer leur retraite et celle de leur épouse. Ils n'ont pas de quota de production à vendre. Ce ne sont pas des spéculateurs. Ils ont fait un investissement à long terme et ils ont largement contribué à l'économie de la province par leur activité agricole et leurs impôts.

Si, sous prétexte d'une justice égalitaire, mais qui, en réalité, va surtout favoriser les gros agriculteurs qui vont largement profiter des largesses gouvernementales, on leur refuse toute compensation, on doit au moins reconnaître leur statut d'agriculteur à vie, tant et aussi longtemps qu'ils seront propriétaires de leur terre, avec les avantages que cela comporte, même s'ils cessent de cultiver.

Les jardiniers sont ceux qui seront les plus directement impliqués par cette législation étant en majorité dans les zones urbaines affectées par le zonage agricole et, en conséquence, ils espèrent être adéquatement représentés au sein de cette commission.

Nous espérons que les recommandations de notre association seront prises en très sérieuse considération et nous remercions votre commission de nous entendre.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Couture. M. le ministre. (10 h 45)

M. Garon: Je vous remercie infiniment, M. Couture, pour votre mémoire. Nous allons sûrement lors de l'étude article par article, regarder les points que vous avez soulevés. Il y en a un, entre autres, qui me frappe parce qu'il serait peut-être celui qui réglerait tous les autres. En fait, vous savez pourquoi il a été difficile d'inclure tout le monde, au point de départ; il n'y a pas vraiment de définition d'un agriculteur. Si on regarde les jugements des tribunaux et la jurisprudence, il n'y a pas de définition d'un agriculteur. Un gars qui a un jardin et qui fait un profit de $50 est un agriculteur aux yeux des tribunaux.

On ne pouvait donc pas procéder avec cette formule parce qu'on arrivait avec des aberrations: tous ceux qui avaient un jardin devenaient agriculteurs. Je l'ai d'ailleurs déjà mentionné antérieurement à l'Assemblée nationale lors de l'étude de la loi sur les mauvaises herbes et cela posait des problèmes. La solution c'est peut-être la première que vous mentionnez, à savoir qu'une personne qui veut être incluse puisse faire sa demande directement à la commission sans envoyer un avis à la municipalité. Vous savez, c'est toujours la même chose, si on ne passe pas par la municipalité, les gens disent: Vous voulez centraliser; si on passe par la municipalité, les gens disent: Vous nous empêchez d'avoir des droits que les autres vont avoir.

M. Couture (Alphonse): C'est pour cela qu'on insiste pour que ce soit dans la loi parce que, qu'on s'adresse à la municipalité qui transmet la demande à la commission ou qu'on s'adresse à la commission qui va ensuite se référer à la municipalité pour avoir une opinion, on ne règle pas le problème. J'ai l'impression que cela revient au même.

M. Garon: Vous mentionnez dans votre mémoire...

M. Couture (Alphonse): II va y avoir des objections considérables de la part des municipalités parce qu'effectivement, à ce moment-là, elles vont dire: Vous voulez nous faire faire du "spot zoning". Malheureusement, les jardiniers ne sont pas tous groupés dans une zone urbaine, ils sont dispersés dans le territoire. Il y en a énormément dans la zone blanche, même telle qu'elle apparaît pour l'île Jésus; ils sont dispersés. De quelle façon... à moins qu'on dise, dans la loi, que tous les véritables jardiniers sont inclus...

M. Garon: Du "spot zoning", cela ne m'énerve pas tant que cela parce qu'en réalité, de la même façon dont on reconnaît les droits acquis dans la zone agricole, le "spot zoning" équivaut uniquement à reconnaître les droits acquis dans la zone urbaine. Personnellement...

M. Couture (Alphonse): Je pense bien que les jardiniers seraient très satisfaits si, dans la loi, on disait que tous les producteurs actifs sont automatiquement inclus dans la zone et pourront en être exclus à leur demande s'ils sont dans une zone blanche; ils seraient entièrement satisfaits de cela.

M. Garon: Je vous remercie.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Merci, M. le Président. M. Couture, dans les premières pages de votre mémoire, vous faites allusion au revenu que pourraient obtenir annuellement les jardiniers maraîchers de l'île Jésus. Entre autres, vous mentionnez que plus de 275 jardiniers maraîchers habitent l'île Jésus. Est-ce que ce sont des chiffres assez précis?

M. Couture (Alphonse): Nécessairement, ce sont des chiffres approximatifs. Je pense qu'on s'est basé sur les statistiques selon lesquelles il n'y a que 275 producteurs. D'après les jardiniers, aussi bien en assemblée générale que comme ceux qui font partie du conseil, tout le monde est d'accord pour dire que le chiffre est trop bas; il y en a beaucoup plus que cela. Cela peut se situer autour de 400 à 500.

En comptant de 400 à 500 jardiniers, on évalue la production moyenne d'un jardinier de l'île Jésus à environ $40 000. $40 000 multipliés par 500 jardiniers donnent les $20 millions que vous voyez dans le mémoire.

M. Giasson: Comment expliquez-vous cette variante de chiffres qu'on peut nous donner. Hier, nous recevions des jardiniers de la ville de Laval, de l'île Jésus et ils avaient d'autres données. Aujourd'hui, vous arrivez avec d'autres données dans votre mémoire.

M. Couture (Alphonse): Justement, on n'avait pas de chiffres et on s'est basé sur une liste de producteurs que le député de Verchères avait, laquelle provient, je pense, du ministère de l'Agriculture et qui mentionnait qu'il y avait 275 jardiniers. Cette liste était-elle récente?

Il me semble que plusieurs personnes ont regardé la liste et ont dit: Untel n'y est pas, untel autre n'y est pas, il semblait y avoir des lacunes dans la liste. On a quand même pris ce chiffre pour se raccrocher à quelque chose de bien concret. Déjà, 275 jardiniers, c'est un bon nombre de jardiniers. Parmi le nombre, plus de la moitié

probablement seront dans la zone blanche. Ils ne seront pas dans la zone verte.

M. Giasson: Vous aimeriez également que la définition du terme "agriculture" soit autre que celle que nous retrouvons dans la loi?

M. Couture (Alphonse): II faut tout de même être logique. Si on demande que les jardiniers maraîchers qui sont dans la zone blanche... En fait, la loi leur en fait prendre un bon coup. Si on veut les sauver, les jardiniers sont prêts... D'ailleurs, il n'y a pas de problème pour eux. La majorité des jardiniers produisent pour plus de $10 000. Il n'y a que le cas qu'on a mentionné, des personnes âgées, des vieux jardiniers qui sont rendus à 60 ou 65 ans. A un moment donné, il faut bien qu'ils ralentissent. Ils n'ont pas le choix.

Mais il n'y a pas de problème pour une production d'au moins $10 000 pour l'ensemble des jardiniers de la zone blanche. De toute façon, à un moment donné, il va falloir faire une définition. Qu'est-ce qu'un agriculteur? Il faudrait peut-être commencer tout de suite par un secteur, prendre le secteur jardinier. Ce serait une expérience. On verrait ce que cela donne dans la pratique, graduellement. Les jardiniers sont prêts à l'accepter parce que le mémoire n'est pas seulement l'opinion d'un groupe de directeurs. Il a été adopté en assemblée générale, dans l'île Jésus.

M. Giasson: Mais si on modifie la définition du terme "agriculture", ce n'est pas encore la définition du terme "agriculteur".

M. Couture (Alphonse): Excusez, le terme "agriculture". Voici, entre autres choses, il y a une très bonne raison pour changer ce paragraphe. Dans l'île Jésus, vous avez beaucoup de jardiniers. A un moment donné, on leur contestait leur titre parce que des gars qui avaient des serres, on disait: Ce ne sont pas des agriculteurs. Ils ont eu un paquet de problèmes avec la Loi de l'évaluation foncière et ils ont encore des problèmes lorsqu'ils vont chercher un permis à l'hôtel de ville, etc. Ils aimeraient bien qu'on définisse ce qu'est l'agriculture et ce que cela comprend. Même si vous dites: Oui, d'accord...

Il y a la culture hydroponique. Dans la loi, je pense qu'on n'en parle absolument pas. Et cela s'en vient.

M. Garon: Ce n'est pas fait sur des sols.

M. Couture (Alphonse): Ce n'est pas la culture du sol. Et il n'y a pas de sols en cause là-dedans.

M. Garon: Ici, on protège les sols, on ne protège pas l'eau.

M. Couture (Alphonse): Pardon?

M. Garon: On ne protège que les sols, on ne protège pas l'eau.

M. Couture (Alphonse): Dans les cultures hydroponiques, on utilise de l'eau. A part cela, pour les jardiniers, c'est aussi important, parce que si on définit quels sont les secteurs couverts, on parle un peu des activités, ce qu'ils ont le droit de faire, nécessairement, les règlements, on ne les voit pas. Quels vont être les règlements? Si c'est dans la loi, tout de suite les gens ont déjà une assurance. On n'insiste pas plus que cela sur ce sujet.

M. Garon: Suite aux mémoires qui nous ont été présentés, pour nous, ce serait clair que ce serait dans la culture du sol. Mais pour plus de clarification, je pense qu'on va pouvoir marquer "y compris ' ou quelque chose comme cela. On va marquer, à la fin...

M. Couture (Alphonse): J'imagine qu'il y en a d'autres qui vont être des pépiniéristes qui...

M. Garon: Oui, on va clarifier.

M. Giasson: M. Couture, étant donné l'absence de précision dans la loi, vous semblez croire qu'il serait difficile pour des producteurs agricoles, jardiniers même, de se faire inclure dans la zone agricole, même si leur établissement, présentement, n'est pas à l'intérieur de la zone verte telle que déterminée par le ministre sur les cartes produites.

Vous n'aimeriez pas passer par la municipalité ou par l'hôtel de ville pour demander que l'un de vos membres demande que sa ferme soit incluse ou soit zonée verte ou zonée agricole?

M. Couture (Alphonse): Chat échaudé craint l'eau froide. Les jardiniers l'ont été souvent, échau-dés. Mais il est évident que si la loi reste telle quelle ou si on la change pour dire qu'on s'adressera à la commission plutôt qu'à la ville, d'une façon ou de l'autre, la ville va faire des objections. Elle va avoir toutes sortes de bonnes raisons. Elle va invoquer le "spot zoning", elle va invoquer la diminution de l'évaluation de ces terres. Elle va dire: On a déjà concédé une zone verte alors si vous voulez nous en zoner une autre partie, c'est notre pouvoir d'emprunt qui dégringole avec l'évaluation foncière. Ils vont avoir 56 bons arguments pour essayer de convaincre les membres de la commission de ne pas accepter. Les jardiniers, il y en a peut-être 150 ou 175 qui seront dans la zone blanche peut-être plus que cela. Une fois que la zone verte à l'île Jésus sera achevée, il va y en avoir peut-être plus dans la zone blanche.

Tout de même, c'est impossible de fonctionner pour ces gens-là, si on regarde la loi, avec la loi telle qu'elle est là, quand ils voient monter leurs taxes en flèche pour finalement se ramasser la cinquième année avec une évaluation à sa pleine valeur. A l'île Jésus, cela ne veut pas nécessairement dire que le gars peut vendre sa terre demain matin $5000 ou $8000. L'évaluation cela varie entre $3000, $4000 et $5000 et cela peut aller jusqu'à $8000 ou $9000 l'arpent. Si le gars est obligé de payer des taxes sur cette base, pour le

jardinier qui sera dans la zone verte de l'autre côté, qui est évalué à $150 et qui reçoit un rabattement de 70% du ministère, c'est une concurrence qui est un peu difficile. Le gars, à ce moment-là, il n'a qu'une chose à faire, c'est de vendre et de se débarrasser au plus vite. je ne pense pas que ce soit l'idée du ministère d'accélérer la disparition des jardiniers à l'île Jésus. C'est regrettable. Cette loi aurait dû être adoptée il y a vingt ans. C'étaient les jardins de la province et on les aurait encore. Il reste tout de même de bons morceaux de jardins qu'il faudrait conserver.

M. Giasson: Vous avez parlé aussi des problèmes que la loi pouvait apporter à l'endroit des vieux jardiniers qui voudraient terminer leurs jours sur leur entreprise. Comment peut-on concevoir une forme d'indemnisation pour ces vieux jardiniers?

M. Couture (Alphonse): J'ai l'impression que, pour les vieux jardiniers qui seront en dehors de la zone verte, il faudrait — c'est justement ce qu'on dit — qu'on continue à les considérer comme des jardiniers. Il y en a plusieurs là-dedans qui n'ont qu'une dizaine d'arpents, dix ou quinze arpents. Généralement, la maison n'a pas été faite en fonction d'un développement domiciliaire. La maison est mal placée. Si le gars vend, il faut qu'il vende avec la maison et quant à la maison il faut qu'elle "décolle". A ce moment-là, il perd sur la valeur de la maison ou il perd sur la valeur de la terre. S'il veut se relever, il ne lui restera plus rien. Il est "poigné" et il est tout de même pris avec un compte de taxes qui peut s'élever à $3000, $4000 ou $5000 par année. C'est évident. Avec les économies qu'il a réalisées... Aujourd'hui, les gens font plus d'argent, en fait, avec l'inflation, mais au moment où il était actif, il prêtait quelques piastres tous les ans, mais il n'a pas pu en économiser tellement. Il faudrait le protéger.

Celui qui sera dans la zone verte et qui a une petite terre, il ne cultive pas beaucoup. J'admets qu'aujourd'hui il n'y en a pas. On dit: C'est en friche ou je ne sais pas quoi. Tout à l'heure, j'imagine qu'il y a d'autres projets de loi qui vont venir ou des règlements, je ne sais pas quoi. Si le type ne cultive plus, il peut arriver autre chose. A part cela, si ce type vend sa terre c'est pour des fins agricoles. Il ne pourra pas vendre pour autre chose. Combien va valoir la terre pour des fins agricoles? Cela peut varier de combien? Ce ne sont tout de même pas des terres noires, à l'île Jésus. Il y en a de petits morceaux, il n'y en a pas grand. Ce sera peut-être $500 ou $1000 l'acre, je ne le sais pas, mais ce ne sera pas cher.

En fait, il ne faut pas oublier une chose. Si vous regardez le mouvement qui s'est fait; l'évolution de la culture maraîchère, cela a commencé à Côte-des-Neiges, c'est déménagé un peu plus loin, c'est allé à Saint-Léonard, à Sainte-Geneviève, à l'île Jésus. Cela a commencé au bord de la rivière à l'île Jésus pour finalement sauter dans le rang Saint-Antoine, en arrière. Mais la plupart de ces gens-là, quand ils ont acheté, ils payaient plus cher, passablement plus cher leur terre que s'ils étaient allés s'installer 25 milles plus loin mais, comme leur père, une génération, deux générations vont cultiver sur la terre et à un moment donné on va la vendre et on recommencera, parce qu'en fait c'était réellement le fonds de pension de ces gars-là. En les zonant, leur fonds de pension, jusqu'à un certain point, "branle dans le manche". N'y aurait-il pas moyen de compenser ces gens-là? On vous souligne le problème. Malheureusement, on ne vous dit pas d'une façon précise: II faut faire cela.

Vous avez également les gars des zones blanches, s'ils sont pris, eux, avec des taxes, ce n'est pas compliqué, ils vont manger leurs épargnes et ce ne sera pas long, parce que des acheteurs pour des terres à l'île Jésus ils ne courent pas la rue dans le moment. La spéculation, même les constructeurs de maison, il y en a passablement de terres à vendre et elles ne se vendent pas si cher que cela. (11 heures)

M. Giasson: M. le Président, je vais laisser à mes collègues, mais je voudrais remercier les jardiniers maraîchers de l'excellent mémoire qu'ils nous ont présenté. Je continue d'espérer avec eux que le ministre va trouver des formules que la loi ne prévoit pas dans le moment de manière à protéger davantage ceux qui seront touchés dans votre région de façon fort différente que dans la plupart des autres régions du Québec. Merci.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. Oui, M. le ministre.

M. Garon: II y a une question que je veux vous poser. Supposons que quelqu'un d'âgé, qui possède dix acres, ne cultive plus et prenne sa retraite. Cela veut dire qu'il en a vendu bien des morceaux au cours des années.

Une Voix: Pas nécessairement. M. Garon: Comment cela?

M. Couture (Alphonse): Pas nécessairement, M. le ministre. Je m'excuse, je n'avais pas bien saisi. Il ne faut pas oublier une chose. Vous avez une foule de jardiniers maraîchers. Je vais vous donner un cas précis. Le père du président ici, présent n'a jamais eu plus de 22 acres de terre à l'île Jésus. Avec ces 22 acres, il a réussi à installer six fils sur la terre. Il ne leur a pas vendu la terre, il a donné une terre à chacun de ses six fils. La petite terre est encore là, 22 acres. Il y en a qui en ont moins, il y en a qui en ont quatre ou cinq.

M. Garon: Elle n'est cultivée par personne?

M. Couture (Alphonse): Cette terre? Oui elle est cultivée.

M. Garon: Alors, il n'y a pas de problème.

M. Couture (Alphonse): II n'y a pas de problème... le jardinier qui vieillit et qui n'a pas d'enfant, il a un problème, parce qu'à un moment donné... On a des cas qui sont pathétiques. Il y a des gars qui se sont fait accrocher, malheureusement, par le Bureau de révision, ils ne sont plus reconnus comme agriculteurs. Cela leur coûte $4000 ou $5000 de taxes par année. C'est triste.

M. Garon: Le gars peut se faire inclure et louer sa terre; ainsi, il profite de l'article 21.

M. Couture (Alphonse): Oui, dans le moment... Il y a un autre problème à l'île Jésus. Malheureusement, je n'ai pas eu le temps de l'approfondir. Il semble qu'il y ait deux... Selon la Loi de l'évaluation foncière, lorsqu'un cultivateur, dans le moment, loue sa terre, il est correct. Par contre, et c'est important que vous le sachiez, que vous en teniez compte, lorsque c'est un spéculateur qui loue sa terre — c'est ce cas même ici, on en a parlé hier, on en a entendu parler — je ne sais pas en vertu de quel principe, mais il semble que le gars paie ses taxes d'après la pleine valeur, même si la terre est cultivée. Si ce n'est pas un cultivateur qui est le vrai propriétaire à la source, il paie ses taxes, il n'est pas exempté en vertu de la Loi de l'évaluation foncière. Il paie ses taxes d'après la pleine valeur, même si la terre est en culture.

M. Garon: D'après la loi, telle qu'elle est, le gars a un choix à faire. Celui qui est inclus est inclus. Celui qui n'est pas inclus, qui est dans la zone blanche, comme on l'appelle, peut demander ou non d'être inclus. S'il ne le demande pas, c'est parce qu'il ne veut plus s'occuper d'agriculture. Il n'a pas, en fait, à jouir des avantages d'un agriculteur.

M. Couture (Alphonse): Oui, maintenant...

M. Garon: Laissez-moi finir! Ou bien il demande d'être inclus. S'il demande d'être inclus, sa terre va être incluse dans la zone agricole. A partir de là, pour bénéficier de l'article 21, il faut qu'il fasse produire sa terre pour $1000. Il peut la louer et avoir le produit. Votre cultivateur à sa retraite, normalement, peut le faire faire. S'il l'a cultivée toute sa vie, pendant 25 ans, c'est une terre en bon ordre. Il va pouvoir la louer.

M. Couture (Alphonse): Voici...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: J'essaie de suivre le ministre. Si vous louez votre terre, elle se loue à combien l'arpent?

M. Gibouleau (Alain): Tout dépend de la terre, pour commencer. Elle se loue entre $25 et $40 ou $45, cela dépend...

M. Giasson: Celui qui a 20 acres de terre à $50 l'acre, cela lui donne $1000 de location, mais ce n'est pas une vente de produits agricoles.

M. Gibouleau: Non.

M. Garon: C'est reconnu par? D'ailleurs, je connais cela.

M. Giasson: Oui, mais ce n'est pas une vente de produits agricoles. S'il a des revenus de ses intérêts, on va les reconnaître?

M. Garon: Non, pas les revenus des intérêts.

M. Giasson: Oui, mais un revenu de location ou un revenu d'intérêts, c'est pas mal différent de la vente de produits agricoles pour un montant de $1000.

M. Garon: Oui, mais c'est l'article 21.

M. Dubois: ... le reconnaît.

M. Garon: C'est reconnu comme de la production agricole.

M. Dubois: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): Oui, M. Couture?

M. Couture (Alphonse): C'est là qu'il y a une espèce de zone grise. Actuellement, si c'est un cultivateur qui loue ou si c'est son fils qui cultive, il n'y a pas de problème. Si c'est un spéculateur qui loue une terre à un jardinier, il paie ses taxes sur la pleine évaluation foncière, il semble y avoir une différence entre les deux groupes.

M. Garon: S'il est dans la zone blanche, il n'est pas inclus; s'il ne demande pas d'être inclus, même si le spéculateur loue la terre pour un revenu additionnel, il ne bénéficiera plus de l'article 21 parce qu'il n'a pas demandé d'être inclus. C'est là que la loi va jouer tout son rôle, c'est-à-dire que dans la zone verte, les agriculteurs sont tous sur le même pied, mais dans la zone blanche, vous avez, disons, l'agriculteur et le spéculateur. L'agriculteur va dire normalement: Je veux être inclus. On peut modifier cela et demander directement à la commission, etc. Mais le spéculateur, normalement, ne demandera pas d'être inclus. Si l'agriculteur est inclus, alors il sera dans la même condition que les autres.

M. Couture (Alphonse): Les demandes d'inclusion, je suis bien d'accord; il y en a un grand nombre qui vont en demander, mais s'il faut qu'ils passent par la ville ou par la commission, j'ai l'impression qu'il y en a un grand nombre qui vont frapper un noeud. C'est pour cela qu'on aimerait que dans la loi on le dise. Ils sont inclus, mais s'ils envoient une lettre à la ville demandant d'être exclus, pas d'objection; vous êtes dans la zone blan-

che, si vous voulez être exclus, vous allez l'être tout de suite. Mais, qu'automatiquement, ils soient tous inclus, quitte à faire des barèmes. C'est pour cela d'ailleurs qu'on disait: Les jardiniers sont prêts, en contrepartie, à dire: d'accord, remontez les barèmes, que ce soit une production d'au moins une dizaine de milliers de dollars ou quelque chose comme cela.

M. Garon: On ne peut pas faire en sorte que cela soit partout pareil.

M. Dubois: ... de revenir tout à l'heure.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Huntingdon, vous allez avoir votre tour.

M. Garon: On ne pourra pas faire cela de la même façon partout, parce que si on met $10 000, dans d'autres régions on va créer des aberrations. Je vais laisser les autres parler parce que j'ai parlé deux fois.

M. Couture (Alphonse): On étudie justement une loi de zonage, M. le ministre, alors vous pourriez zoner le territoire et dire: Dans un secteur donné, le barème, c'est cela; dans une autre région c'est un autre barèrne. C'est évident qu'en grande culture, cela ne serait peut-être pas la même chose du tout.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Merci, M. le Président. Je voudrais, premièrement, souhaiter la bienvenue aux dirigeants...

M. Giasson: II va prendre de l'expérience... M. Garon: II est encore jeune.

Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît, M. le député de Montmagny-L'Islet! M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Je voudrais premièrement souhaiter la bienvenue aux dirigeants de l'Association des jardiniers maraîchers ainsi qu'au président du Marché central métropolitain.

Vous faites état, je pense, de nombreuses craintes au niveau fiscal. C'est surtout dans ce domaine que se situent la plupart de vos craintes. Ma première question serait celle-ci: Je connais assez bien Laval et je sais qu'il y a de belles terres qui sont dans des enclaves et sans doute, le conseil municipal de ville Laval voudra les annexer à ses terres en développement, même à rencontre de la volonté de certains jardiniers maraîchers; c'est ce qu'on appelle du "spot zoning" qui peut se faire; la commission peut faire du "spot zoning" en ce sens qu'on réserve une terre pour fins agricoles dans une enclave ou peut-être que cette terre devrait être retournée pour fins de construction domiciliaire. Je pense que c'est une crainte que vous avez formulée et je me demande quelles pressions pourra exercer la ville sur la commission pour qu'effectivement ces terres retournent aux fins de construction résidentielle. Vous craignez que la ville puisse exercer des pressions trop fortes sur la commission et que le jardinier ne puisse pas résister à ces pressions exercées par la ville? Est-ce un peu dans ce sens que vos craintes sont formulées?

M. Couture (Alphonse): II est évident que c'est là la crainte. Maintenant, j'ai l'impression que dans plusieurs cas, la ville va peut-être avoir des arguments qui vont être valables et il est fort probable qu'elle gagne son point. Les jardiniers tiennent à leur métier; ils ont des droits acquis, ils veulent les conserver et je pense que c'est compréhensible.

M. Dubois: Au niveau des services municipaux, à certains moments, une terre dans une enclave peut couper certains services de la ville et entraîner des coûts pas mal plus élevés pour que ces services contournent ces enclaves.

M. Couture (Alphonse): C'est pour cela," d'ailleurs, que dans notre mémoire, nous avons dit: Soit qu'on les inclue automatiquement dans la zone, soit qu'on leur accorde les mêmes privilèges que ceux de la zone. A ce moment-là, ces terres ne seraient pas incluses dans la zone, donc elles ne pourraient pas nuire tellement à la ville s'il y avait un développement; mais alors, qu'elles bénéficient des mêmes avantages que celles des autres cultivateurs, qu'elles soient évaluées à $150 et qu'elles paient sur une base de $150. Cela n'affecterait pas l'évaluation de la ville et le jardinier serait protégé.

Il est évident que si, à un certain moment, il y a un développement domiciliaire qui commence à se faire chez lui... parce qu'il ne faut pas oublier une chose. Quand vous avez un développement domiciliaire qui est parallèle à une ferme, et cela va arriver à un certain moment, à la ligne de la zone, le jardinier qui est à côté résiste pendant un certain temps, mais si c'est un gars qui cultive des concombres, il dit: Mes deux premières rangées de concombres, c'est pour mes voisins. Je récolte le reste.

M. Dubois: Présentement, à Laval, on vit peut-être une expérience différente d'ailleurs au Québec. Vous avez certains propriétaires de fermes qui cèdent même des terres en location pour rien, sans exiger aucune redevance, pour l'exemption des taxes foncières.

M. Charbonneau (Dominique): Des personnes âgées...

M. Dubois: Je pense que cela n'arrivera plus, suite au projet de loi. Celui qui voudra louer une ferme dans la zone non réservée pour fins agricoles devra payer quand même un coût très élevé de location puisque le propriétaire devra payer lui-même des taxes très élevées à la ville.

Alors, les terres qui sont présentement louées à des agriculteurs par des exploitants ou des proprié-

taires qui désirent acquérir des fermes pour location, ceux-ci vont être obligés d'exiger le gros prix, le plein prix de leurs taxes et peut-être un revenu additionnel.

Alors, sera-t-il possible pour un agriculteur de louer des fermes à $500 l'acre finalement.

M. Couture (Alphonse): Non. Cela va être assez difficile maintenant. J'ai l'impression que... quel est le pourcentage de terres qui peut être loué dans la zone blanche? Il y en a peut-être moins que dans la zone verte qui est actuellement montrée... Je pense que les terres louées sont surtout dans la zone verte. Il y en a beaucoup moins.

Généralement, je pense que dans le cas des terres qu'on dit louées, cela sera plutôt le père qui est âgé qui fait cultiver la terre par un de ses fils, quelque chose comme cela, sans lui avoir cédé la propriété. Ce sont plutôt de tels cas dans la zone blanche.

M. Dubois: Et les fermes dans la zone blanche, avez-vous l'impression que ces fermes prendront de la valeur ou diminueront de valeur?

M. Couture (Alphonse): Si la loi ne change pas, il est évident qu'il va y avoir un mouvement de spéculation qui va se faire sur ces terres parce que le maraîcher jardinier n'est pas millionnaire. Il a peut-être épargné quelques dollars, mais il n'est pas riche. Alors, il est évident que si cela reste ainsi, il dit: Un instant. Mon évaluation monte à $500, à $1000 et à $2000 et après cela, à sa pleine valeur, iI va y avoir une certaine panique peut-être, d'autant plus que c'est une période actuellement où la vente de terres pour le développement domiciliaire, la demande n'est pas tellement forte. Alors, cela va créer une espèce de mouvement de panique. Il est fort probable qu'il y a peut-être des spéculateurs qui vont en profiter pour ramasser ces terres à vil prix et les garder un certain nombre d'années en attendant que la terre ait pris sa pleine valeur parce qu'il y a des terres dans la zone blanche, et cela va prendre au moins quinze ans à vingt ans avant que le développement domiciliaire soit rendu là.

M. Dubois: Je vais revenir avec cette affaire. Vous avez indiqué que l'agriculteur serait, présentement, selon le projet de loi, pénalisés pour dix ans de remboursement de taxes foncières, contrairement à un club de golf qui, présentement, selon la loi de l'évaluation, ne rembourse que cinq ans d'arrérages. C'est à peu près cela, je pense?

M. Couture (Alphonse): Dans le cas des clubs de golf, oui.

M. Dubois: On pénalise le club de golf qui vendrait pour d'autres fins...

M. Couture (Alphonse):... cinq ans d'arrérages.

M. Dubois: ... cinq ans d'arrérages de taxes tandis que l'agriculteur, selon le projet de loi, on le pénalise pour dix ans. Trouvez-vous cela juste ou moins juste?

M. Couture (Alphonse): Non. On ne dit pas c'est juste. On trouve cela injuste et je pense bien que c'est une erreur. Cela doit être une erreur.

M. Dubois: Je pense qu'il y aurait lieu de corriger cet article.

M. Garon:... en zone permanente, vous avez le choix.

M. Dubois: A la page 5 de votre mémoire, vous avez indiqué dans le cas du secteur agricole, que ces restrictions sont inadmissibles. Un jardinier doit conserver le droit de céder une partie de sa ferme à des fins agricoles, de bâtir des maisons pour ses enfants et ses employés permanents ainsi que des serres, entrepôts frigorifiques ou non, une salle de classification.

Selon le projet de loi présentement, les maisons que le père construirait pour ses fils ou céderait à ses fils feraient partie intégrale de l'exploitation. On sait pertinemment qu'il pourrait y avoir cinq maisons sur la même ferme ou six maisons et le jour de la transmission de ses biens, cela sera pas mal difficile. Vous avez soulevé le cas; avez-vous des suggestions à faire à la commission? (11 h 15)

M. Couture (Alphonse): Effectivement, il y a deux problèmes. D'abord, il ne faut pas oublier que le secteur jardinier et le secteur de la grande culture, ce n'est pas du tout la même chose. Il est évident que pour les jardiniers, en règle générale, c'est la coutume, de bâtir la maison de leurs enfants, même s'il y en a 3, 4, 5 ou 6. Maintenant, même en dehors de la zone, si un type veut bâtir la maison de son garçon, il ne faut pas oublier une chose, c'est que, généralement, le garçon n'a pas l'argent pour payer la maison d'un seul coup, ni le père. Donc, il faut faire un emprunt; s'il a déjà un crédit agricole de $50 000 ou $60 000 sur la terre, il va demander au crédit agricole une main levée sur un lot. Il le subdivise et bâtit la maison de son gars.

Au point de vue du financement, ça va certainement créer des problèmes assez sérieux. C'est un peu la même chose dans le cas de certains entrepôts où deux ou trois cultivateurs vont se mettre ensemble pour former une société. C'est la même chose. Même au crédit agricole, on va leur dire: Ecoutez, la première chose à faire, c'est que le fonds de terre où va être bâti l'entrepôt devienne la propriété conjointe des trois individus, même s'ils ont chacun leur terre, personnellement.

Maintenant, on dit ailleurs aussi qu'on ne peut pas subdiviser. Pour un jardinier maraîcher, subdiviser sa terre, c'est quasiment une nécessité. Même si les enfants restent en société, en règle générale, le père subdivise sa terre entre ses deux fils pour que, si un jour ça ne va pas trop bien, chacun soit à son compte. Vous savez que même dans votre région, ça se produit de temps à autre. Cela fonctionne bien. Mais, à un moment donné, si ça fonctionne moins bien les gars se divisent. A ce moment-là, ils ont chacun leur terre, ils sont propriétaires.

M. Dubois: Est-ce que vous avez l'impression, spécifiquement à Laval, que, quand il s'agira de construire des salles de classification, d'emballage, des entrepôts frigoriques ou autre chose, la ville exercera des pressions pour que ces bâtiments aillent dans la zone...

M. Couture (Alphonse): La zone industrielle qui est là.

M. Dubois: ... industrielle ou commerciale de la ville?

M. Couture (Alphonse): Même en dehors de la zone, les jardiniers voudraient bien avoir l'assurance qu'effectivement le préemballage, l'entreposage, la congélation et la transformation puissent se faire à l'intérieur de la zone. En fait, s'ils veulent bâtir une usine, ils voudraient que ça puisse se faire sur leur propre propriété.

M. Dubois: M. le Président, il y a un membre présent à la commission ici ce matin, M. Legault, qui a un problème particulier et j'aimerais qu'il l'expose au ministre, parce que ce n'est pas le seul problème que j'ai vécu dans la région chez nous...

M. Couture (Alphonse): II y en a plusieurs semblables.

M. Dubois: M. le ministre, il y a un monsieur de la commission qui aimerait vous poser une question.

Le Président (M. Boucher): M. Legault.

M. Garon: Quoi?

M. Dubois: Vous allez l'écouter? M. Legault.

M. Legault (Michel): M. le ministre, on est un groupe de producteurs agricoles qui avons décidé de construire un entrepôt qui doit être en exploitation l'été prochain...

M. Garon: A quel endroit? M. Legault: A Sainte-Clothilde. M. Garon: Dans la zone agricole? M. Legault: Dans une zone agricole.

M. Garon: Vous n'aurez pas de problème. La définition de l'agriculture, c'est "la culture du sol, y compris le fait de le laisser en friche, l'élevage des animaux et, à ces fins, la confection, la construction ou l'utilisation de travaux, ouvrages ou bâtiments..." Un entrepôt entre dans la définition de l'agriculture. Ce sont des travaux, des bâtiments à des fins agricoles.

M. Legault: Est-ce que le fait que l'on ne soit pas propriétaire actuellement d'une terre, qu'il faut la subdiviser, est-ce que ça ne peut pas nous créer des délais?

M. Garon: Pourquoi pas la subdiviser pour faire ça?

M. Legault: On ne peut pas construire sur une terre de 60 acres, on a besoin de 3 ou 4 acres pour construire un entrepôt.

M. Garon: Vous n'êtes pas propriétaire de la terre?

M. Legault: II y a un membre du groupe qui est propriétaire de la terre, mais pour se former en compagnie, il faut que la compagnie soit propriétaire de la terre.

M. Dubois: II faut que l'un d'eux fasse partie de la ferme pour permettre la construction en compagnie d'une...

M. Garon: Là, on se comprend...

M. Dubois: Cela arrive très fréquemment.

M. Giasson: Cela commence à être un peu...

M. Garon: Non, cela a été mis comme ça précisément, parce que la porte de sortie est toujours celle-là. C'est comme l'impôt. C'est évident qu'à ce moment-là le bâtiment doit être au service de la ferme.

M. Dubois: II est au service de plusieurs fermes, mais il est bâti sur un lot particulier. Afin d'avoir une hypothèque, il faut quand même "sortir" ce lot.

M. Garon: Comment cela, il est au service de plusieurs fermes?

M. Dubois: Ils sont plusieurs...

M. Legault: On est trois producteurs de carottes et on veut faire un centre d'entreposage et d'emballage commun aux trois, pour toutes sortes de raisons évidentes d'économie. Là, on est aux prises avec ce problème, à savoir quoi faire et le faire à temps pour pouvoir construire l'été prochain. J'aimerais savoir si...

M. Garon: Une loi ne peut pas prévoir tous ces cas. C'est pour ça qu'on prévoit dans la loi tous les cas généraux et, pour les cas particuliers, on dit de demander l'autorisation à la commission. Vous avez un cas patent. Normalement, la loi dit qu'il y a des bâtiments sur une ferme à des fins agricoles. Vous êtes trois propriétaires individuels et vous voulez construire un entrepôt commun aux trois. Vous ne pouvez pas prévoir tous ces cas dans une loi, c'est impossible. Autrement, la loi aura 500 pages. A ce moment-là, vous demandez à la commission... C'est l'esprit de la loi, permettre une chose comme celle-là.

M. Legault: Mais est-ce que c'est possible de croire qu'on peut avoir une autorisation assez rapidement pour...

M. Garon: Moi, je le pense. Parce que c'est l'esprit de la loi. C'est un cas qui est clair.

M. Legault: Mais est-ce qu'il y a des procédures à prendre actuellement pour accélérer la décision de la commission?

M. Giasson: ... recommandé à la commission à 200A Chemin Sainte-Foy, Québec. Ce sont les bureaux du ministère de l'Agriculture.

M. Garon: Parlez-en un mot à M. Landry qui est ici pour voir comment faire votre demande. Je comprends qu'il va y avoir des règlements, qu'il va y avoir de la procédure, mais c'est une demande tout simplement en vertu de l'article de la loi. On ne peut pas prévoir tous ces cas-là dans la loi. Il faut voir les cas généraux. On ne peux pas dire: II n'y a pas d'autorisation de la commission dans tel cas, tel cas. Ce sont des cas particuliers. Je pense que c'est un beau cas pour montrer que la commission ne prendra pas cinq minutes pour régler un cas comme celui-là.

M. Giasson: C'est curieux, mais vous devez adresser une lettre à une commission qui n'existe pas. La lettre va se rendre quand même à l'endroit donné et quand la commission sera créée, nantie de commissaires, là elle va prendre connaissance de toute cette correspondance.

Une Voix: Elle va exister bientôt.

M. Legault: Je demanderais peut-être au ministre s'il peut prévoir un calendrier normal pour une telle réponse.

M. Garon: C'est une façon de parler parce que là on est rendu au 12. Normalement, cela doit être adopté le 22. Le temps de préparer votre lettre, de l'envoyer et le délai du temps des Fêtes, quand votre lettre arrivera la commission sera formée.

M. Giasson: Le ministère fédéral des Postes n'est pas vite.

M. Garon: La Gendarmerie royale qui ouvre les lettres pour voir ce qu'il y a dedans.

M. Giasson: Ils ouvrent les lettres.

M. Legault: Mais est-ce qu'il n'y a pas risque d'encombrement quand même pour le début des travaux de la commission?

M. Garon: Non. La commission normalement qui va être formée... C est seulement un début, mais là on va dire: Ce sont les demandes individuelles. Il y a des négociations permanentes. Il va y avoir un gars en charge de cela et à un moment donné il va dire: Les dossiers qui sont automatiques. Disons qu'ils sont cinq pour les régler. Vous avez des dossiers qui sont plus compliqués. Je pense qu'une affaire comme celle-là, à mon avis, c'est simple à régler. C'est l'esprit de la loi. Si cela avait concerné une terre individuelle, il n'y aurait même pas eu d'autorisation à demander. Au fond, en faisant cela, vous détériorez encore moins de sol parce que vous avez un bâtiment pour trois fermes au lieu d'un par ferme. C'est l'esprit de la loi. Il me semble, quand le gars voit arriver cela...

M. Roy: M. le Président, est-ce que vous permettez?

Le Président (M. Boucher): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: J'ai seulement une remarque sur la question qui est actuellement discutée. Il y a les conditions de prêts hypothécaires, soit les prêts d'une compagnie. Il y a, évidemment, les clauses de réméré qu'on appelle, les clauses dans le cas où la compagnie ne puisse pas subvenir à ses versements.

Je ne dis pas que cela peut arriver dans leur cas, mais ce sont des prévisions générales qu'on retrouve dans tous les contrats hypothécaires. Alors, l'entreprise qui fait le financement, l'institution qui fait le financement redevient propriétaire et elle peut le vendre ou le mettre en vente à des organismes, à des entreprises qui peuvent être intéressées par l'entrepôt et qui ne serait pas nécessairement utilisé pour des fins agricoles, d'où une complication qui peut arriver au niveau du financement à cause de ces exigences. Si le prêt était consenti par le prêt agricole — j'espère que le prêt agricole ne ferait pas de réserve — mais dans le cas où ce serait une autre institution qui ferait le prêt, même les caisses populaires, il y a danger qu'il y ait une réserve à ce moment-là, une restriction et cela peut créer des embêtements.

M. Garon: Mais il n'y a pas de problème. Il y a même un programme du ministère qui subventionne à 35% la construction d'entrepôts, jusqu'à $35 000.

M. Legault: Par contre, un entrepôt de $300 000, il reste une balance hypothécaire assez importante.

M. Garon: Oui, très importante. M. Roy: C'est cela.

M. Giasson: Sauf si vous avez assez pour ne pas avoir à toucher...

M. Dubois: Est-ce que votre construction doit commencer bientôt, M. Legault?

M. Legault: Aussitôt le gel terminé. Au début d'avril, il faut commencer et, entre temps, il faut obtenir le financement et pour obtenir le financement cela prend des autorisations.

M. Garon: Voyez M. Landry, tantôt — on va ajourner à midi — pour savoir le numéro de télé-

phone et tout cela. Vous pouvez envoyer votre demande immédiatement. Des cas comme ceux-là, je compte qu'une commission peut en régler 100 par jour. Ce n'est pas compliqué.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Huntingdon, est-ce que vous avez terminé?

M. Dubois: Une dernière question. Vous avez indiqué le désir que les agriculteurs puissent conserver leur statut d'agriculteur même s'ils ne cultivent plus le sol. J'aimerais que vous explicitiez un peu plus là-dessus, parce que je pense que vous avez touché un point quand même assez important, étant donné que le vieil agriculteur peut se voir pénalisé par des taxes de $5000, $6000, $7000 ou $10 000 par année et il va finalement perdre tous ses revenus ou son fonds de pension qu'il aura accumulé pendant nombre d'années. Je pense que ce serait un bon point à expliciter. J'espère que le ministre en prendra bonne note.

M. Couture (Alphone): Dans l'île Jésus, il y a plusieurs jardiniers, nécessairement, qui sont assez âgés. Etant donné que les terres sont tellement petites dans bien des cas, des terres de 15 ou 20 arpents, il y a une maison déjà dessus qui est mal située, donc, qui va nuire à la vente de l'ensemble, c'est-à-dire que si le type vend, de deux choses l'une; s'il faut déplacer la maison pour donner une certaine valeur au terrain, alors, cela diminue la valeur globale de la propriété actuelle. Et si ces gens se ramassent dans la zone blanche, il y en a définitivement dont la santé ne leur permet plus de cultiver. Ils sont trop âgés. D'un autre côté, ils veulent rester chez eux. Et c'est un peu normal; les personnes âgées n'aiment pas déménager. Elles tiennent à rester chez elles et même si elles voulaient déménager, au prix qu'elles pourraient vendre actuellement, cela ne leur permettra pas de se réinstaller. Cela est clair comme de l'eau de roche.

A ce moment-là, je pense que ces gens ont tout de même des droits acquis et on devrait leur laisser leur titre d'agriculteur et les exempter. Cela va peut-être durer quelques années. Si le développement les atteint, ils vont peut-être vendre éventuellement. A ce moment-là, on sera prêt à accepter qu'ilsjemboursent peut-être trois ou quatre ans de taxes foncières, mais durant les quelques années qu'il leur reste à vivre, au moins, qu'on les laisse tranquilles, que ces gens puissent continuer. Il y en a qui cultivent encore un peu. Mais on ne voudrait pas qu'ils soient "maganés" parce qu'ils ne méritent pas le sort qu'on leur réserve en vertu de ce projet de loi.

M. Dubois: Un dernier point. On sait tous que la loi ne prévoit aucune indemnité. Spécifiquement, à Laval, je suis certain qu'il y a beaucoup de jardiniers qui sont tout près des zones résidentielles et voient leur terre prendre de la valeur annuellement. S'ils sont dans un secteur réservé pour fins agricoles, ils ne pourront pas vendre pour d'autres fins que l'agriculture. Une ferme peut être vendue pour $100 000 quand elle pourrait valoir $1 million pour d'autres fins. Cela peut arriver des cas comme cela, j'imagine, de temps à autre. Pour ces gens qui se sentiraient pénalisés, avez-vous eu des cas soulevés lors de vos rencontres avec les gens du milieux?

M. Couture (Alphonse): II y a le cas des vieux agriculteurs qui sont dans une zone. Il est évident que leur terre a absolument une valeur agricole. Il devrait y avoir compensation pour eux, un peu.

Il y a un point qu'on n'a pas mentionné. Vous avez des jardiniers qui ont acheté au cours des deux ou trois dernières années des terres qu'ils ont payées cher, peut-être $1500, $2000 l'arpent. Ils viennent de construire des serres, et ils ont investi un paquet d'argent sur ces terres. Ils sont dans une zone blanche. Ils ont obtenu un prêt du crédit agricole, tout le sacré bazar, $100 000 ou $125 000 et ils sont dans une zone blanche, complètement isolés. Il n'y a pas de cultivateurs à côté d'eux. Il y en a une couple. Ils ne seront pas faciles à sauver à moins qu'on les sauve par la loi. Et ce ne sont pas des gars qui ont acheté pour spéculer. Ils étaient au bord de l'eau. Ils ont déménagé plus loin et ils se sont installés parce qu'ils connaissent l'île Jésus. Ils aiment le climat. Ce sont des gars qui se spécialisent dans la culture en serre. Cela faisait leur affaire. Ils ont investi. Mais ils ne savaient pas qu'il y aurait une loi de zonage et qu'à un moment donné, ils seraient du mauvais côté de la clôture. Ce ne sont pas des farces, quand on y pense! C'est pour cela qu'il faut les sauver à tout prix.

M. Dubois: Je vous remercie M. Couture.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, M. le Président. Je remercie M. Couture et sous ses collaborateurs pour l'excellent mémoire qu'ils ont soumis à la commission ainsi que pour leur disponibilité. Je devrais ajouter leur grande patience, parce que plusieurs d'entre eux étaient déjà parmi nous hier.

Dans votre mémoire, vous avez soulevé un point qui est extrêmement important. Vous avez parlé des agriculteurs, des jardiniers maraîchers qui sont en dehors des zones, qui risquent d'être en dehors d'une zone agricole et qui veulent continuer d'exercer l'agriculture. Je pense que c'est un point extrêmement important, qui a une importance très grande dans la région que vous représentez, mais qui a également une autre importance dans d'autres régions actuellement du Québec, dans certaines localités qui peuvent avoir des étendues de terrains qui ne sont pas actuellement dans la zone réservée et pour lesquelles des agriculteurs voudraient bénéficier des avantages qui découleront de la loi relativement aux exemptions fiscales et aux subventions particulières qui doivent s'y rattacher. (11 h 30)

J'aimerais demander — vous qui avez fait une étude très attentive sur ce sujet — si vous iriez jusqu'à proposer que sur simple requête faite par les agriculteurs concernés, les agriculteurs intéressés à la commission provinciale, automatiquement pourraient être inclus?

M. Couture (Alphonse): Vous voulez dire, à ce moment-là, que le type soulignerait ou demanderait à la commission d'être inclus; que la loi serait modifiée pour qu'effectivement, dès qu'il ferait sa demande, il serait automatiquement inclus, sans qu'il y ait aucune référence à la corporation municipale; autrement dit, que ce soit automatique? Si c'est automatique, pourquoi ne le met-on pas tout de suite dans la loi? Ce serait plus simple.

M. Roy: L'inclure dans la loi. J'ai parlé de la loi de l'Oregon hier, mais je l'ai laissée de côté parce que le ministre n'a pas l'air d'avoir des affections particulières pour cette région des Etats-Unis.

M. Garon: Ah! c'est très beau, c'est un des plus beaux endroits au monde.

M. Roy: Je vais lui parler de l'Etat de New York un peu. La loi de l'Etat de New York a été amendée en 1971 en vue de permettre la création de districts agricoles pour assurer ainsi la protection et la revalorisation des terres agricoles. La loi permet plutôt la création de districts agricoles dont les propriétaires, sur requête individuelle, accepteraient de conserver ces terres pour l'agriculture moyennant un allégement de la fiscalité foncière ou de la taxation foncière devant alors être basée exclusivement sur une valeur agricole. Dans l'Etat de New York, c'est une demande qui est faite sur une requête de la part des agriculteurs concernés et ils se trouvent automatiquement — si j'en tire une conclusion — comme faisant partie de la zone protégée dans le territoire agricole protégé.

J'aimerais demander au gouvernement si le ministère a des objections sérieuses à la demande qui est faite ce matin par les jardiniers pour qu'il y ait une disposition dans la loi comme quoi ce serait automatique qu'un agriculteur... Parce que, prenons sur l'Ile-de-Montréal, il y a sûrement des secteurs — les gens qui connaissent un peu la ville de Montréal en connaissent — des enclaves, des îlots qu'on pourrait appeler des îlots de résistance parce que cela a été effectivement par résistance que ces gens ont réussi à conserver leur terrain, leur lopin de terre, pour l'agriculture... S'il y a possibilité qu'il y ait des prévisions dans la loi pour permettre à ces gens, propriétaires de terres agricoles, d'avoir la protection de la loi et de bénéficier des avantages qui découleront...

M. Giasson: Une protection automatique.

M. Roy: ... d'une protection automatique. On touche un point extrêmement important, extrêmement névralgique, qui couvre des centaines de milliers d'acres, si on fait l'inventaire de tout cela à la grandeur du Québec.

M. Garon: Non. Peut-être pas des centaines de milliers d'acres.

M. Roy: II y a des centaines de milliers d'acres parce que dans le plateau laurentien, comme dans le plateau appalachien, il y a de petites régions à l'intérieur même des municipalités qui peuvent regrouper trois, quatre ou cinq fermes. Les municipalités verront peut-être difficilement la nécessité, ne croiront pas à la nécessité ou ne voudront pas faire en sorte que ce territoire soit zoné agricole. Les agriculteurs qui sont dans ces territoires, dans ces enclaves, voudront, eux, bénéficier de la protection de la loi et des avantages qui découleront de la loi.

M. Garon: Quand on a fait la loi, dans les zones blanches, on a évalué dans les régions désignées qu'il pouvait y avoir environ 300 fermes, à peu près.

M. Roy: 300 fermes dans la zone blanche?

M. Garon: Dans l'ensemble des zones blanches, les 614 municipalités. C'est cela qu'on a calculé à peu près.

M. Giasson: C'est beaucoup d'acres.

M. Garon: Non. Ce ne sont pas de gros "acrages". Non, parce qu'il y a beaucoup de petites fermes là-dedans. Comme le disait M. Couture, normalement, dans la zone blanche de ville Laval, même si cela fait un nombre d'individus, je suis persuadé qu'en termes d'acres, cela ne représente pas beaucoup d'acres.

M. Couture (Alphonse): Oui, mais la densité de production est là, ce sont en partie tous des gens qui ont des serres. A part cela, la zone verte telle qu'on le voit actuellement, j'ai l'impression qu'elle subira des modifications. La zone verte va rapetisser, dans certains cas, et au fur et à mesure que les zones vertes vont rapetisser, il y a encore des jardiniers qui vont valser et qui vont se ramasser dans la zone blanche. C'est normal. On serait à la place des autorités municipales et on aurait une tendance à vouloir rapetisser la zone verte pour toutes sortes de bonnes raisons. Si, à un moment donné, on délimite la zone, il est évident qu'après cela, la municipalité va s'opposer et ne voudra plus en voir entrer une espèce dans la zone verte.

M. Garon: Quand on dit qu'elle va rapetisser, elle ne rapetissera pas si vite que cela. Il y a trois phases, à mon avis; la première phase est qu'une municipalité — disons comme celle de Repentigny — fait une demande d'exclusion sur la tendance à zone permanente, à des fins immédiates.

M. Giasson: L'article 37.

M. Garon: Ensuite, il y a la discussion sur la zone permanente. La zone permanente normalement en zone agricole, par décret, une fois qu'elle a été discutée entre la municipalité et la commission, va avoir un certain caractère de permanence. Il n'y aura plus de discussion sur la zone permanente après cela. Ce qu'il va y avoir après, ce sont des demandes d'exclusion ou de dérogation. Les demandes d'exclusion, après cela, — évidemment, comme c'est une zone permanente, on ne regardera pas tout au pouce carré; on dira: C'est un périmètre comme celui-là — seront examinées individuellement: Est-ce un bon sol ou non? Si c'est un bon sol, on va dire: Pas d'exclusion. Si c'est un sol avec un mauvais potentiel, parfait, exclusion. C'est un peu cela qui va se faire, si vous regardez cela. C'est pour cela qu'il ne faudrait pas — d'ailleurs je l'ai dit plusieurs fois au cours de cette commission — considérer la zone agricole permanente comme une zone à développement différé, ce ne sera pas cela. Ce sera une zone permanente qui va avoir un certain caractère de permanence.

M. Lavoie: Elle va rester agricole.

M. Garon: Elle va normalement rester en grande partie agricole, sauf que les demandes d'exclusion... Parce que, dans la grande zone permanente, il y aura peut-être 100 acres qui ne seront vraiment pas bonnes, et une fois qu'on regardera en détail la zone permanente, on dira: Ces 100 acres, cela ne donne rien de les garder, elles ne sont pas bonnes. On va les enlever, mais dans la première phase, on va faire une zone permanente.

M. Roy: Oui, mais cela ne répond pas tout à fait à la question que j'ai posée tout à l'heure.

M. Garon: Non, je le sais, mais je voulais d'abord expliquer cela.

M. Chevrette: II va y répondre.

M. Garon: Deuxièmement, ce que je veux dire, c'est que moi, je n'ai pas vraiment d'objection à ce qu'on dise: Celui qui demande d'être inclus... Mais il faudrait prévoir si celui qui demande d'être inclus est un agriculteur qui fait de l'agriculture, qu'il aille directement à la commission. Mais si on fait un amendement, il faudrait le faire de telle sorte que ce soit quasi automatique, que la commission puisse regarder un peu pour que ce ne soit pas une aberration.

M. Roy: Je pense que s'il y avait une convention qui existait... Prenons le cas, par exemple... Là on a parlé abondamment des cas qui sont à l'intérieur du grand territoire actuellement réservé; il y a des zones blanches dans le territoire réservé, mais il y a des dispositions dans la loi — je pense à l'article 22 — selon lesquelles le gouvernement peut, par décret, identifier comme une région agricole désignée toute partie du territoire du Québec.

Quand j'ai parlé de centaines de milliers d'acres tantôt, je faisais référence également aux plans éventuels que les municipalités pourront soumettre, plans à l'extérieur de la zone réservée actuelle, mais qui pourraient s'ajouter à la zone agricole réservée. Mais autour de ces municipalités et même à l'intérieur de ces municipalités, il y a des agriculteurs qui ne sont pas dans la zone réservée, mais qui désirent, eux, conserver leur droit d'agriculteur et leurs privilèges. Si on ajoute cette catégorie, on couvre tout le territoire du Québec et on touche à des centaines de milliers d'acres, inévitablement, par la force des choses; j'en suis convaincu. Je ne dirais pas un million, mais je dis quelques centaines, cela peut être 200 000 acres, cela peut être 300 000 acres, dans tout le territoire du Québec.

Je prends, à titre d'exemple, M. le ministre — je ne voudrais pas retarder nos invités, on pourra y revenir lors de la discussion du projet de loi article par article — mais qu'est-ce que le gouvernement entend faire vis-à-vis des agriculteurs qui, actuellement, sont en dehors des zones réservées et qui désirent maintenir leurs activités agricoles et avoir les garanties nécessaires?

M. Garon: Ils vont avoir le choix de demander s'ils veulent être inclus ou non. Le raisonnement qu'on a fait est le suivant: II y a une zone qui a été établie; il y a une zone agricole et il y a une zone non agricole. Celui qui est dans la zone non agricole, évidemment, cela va lui imposer des contraintes. Les gars qui, par exemple, ont des serres dans les milieux plus urbanisés ont des emmerdements; il y a des jeunes qui lancent des roches, etc. On en rit, mais ils ont à subir de telles contraintes. Alors, plutôt que le gars soit dans une zone blanche, non agricole, s'il veut continuer à cultiver dans cette zone et être inclus, on lui laisse le choix; c'est cela qu'on a voulu faire.

On se dit: II va y avoir des contraintes, si lui, il dit: Moi, je suis d'accord, moi je veux être agriculteur dans cette zone-là. On dit: Parfait. C'est lui qui va décider. On considérait cela plus équitable.

S'il dit: Je ne continue pas. Il vend sa terre, elle va aller au développement. Le produit de sa vente va lui donner la possibilité de s'en acheter une autre, dans un endroit, dans une zone agricole, supposons. C'est pour cela qu'on a dit: On va laisser le choix, comme cela. Si l'individu dont vous parlez dit: Je veux rester là et je veux continuer à faire de l'agriculture là. Je n'y vois aucune objection.

M. Roy: II n'y a pas de disposition qui le garantit, comme le disait M. Couture, dans la loi, actuellement.

M. Garon: Non. Il faut dire que dans le cas des maraîchers — cela, je suis prêt à le mettre — dans le cas des maraîchers, cela ne posera pas autant de problèmes, sauf celui des serres où il y a des affaires de roches, des affaires comme cela, ce sont des petits problèmes — d'ailleurs si vous regardez le film "Québec à vendre" — ils le disent, les gars qui ont des serres.

Deuxièmement, c'est parce que ce n'est pas le même problème pour tout le monde. Si le gars a des vaches, par exemple, à un moment donné il est avec ses vaches en plein milieu de la ville. Cela dérange peut-être un peu tout le monde et lui aussi. Et si c'est une porcherie, la situation n'est pas la même. C'est pour cela qu'on a dit: On va laisser le gars faire sa demande d'inclusion lui-même.

C'est évident que dans le cas des légumes d'un maraîcher qui poussent à côté des maisons, cela ne dérange pas les maisons du tout.

M. Roy: II y a lieu, je pense de faire une distinction. Ce serait assez facile de faire une distinction dans la loi: entre quelqu'un qui fait de la culture comme les maraîchers font et quelqu'un qui fait de la production animale. Il n'est pas nécessaire de faire de grands articles...

M. Garon: Mais, on va tomber dans d'autres conséquences. C'est pour cela qu'on a dit: Laissons l'individu faire sa demande. Parce que si on essaie de trop réglementer cela, vous voyez, vous êtes pris au jeu, vous essayez de réglementer aussi.

M. Roy: Voyez-vous, moi... Quand on dit: Laisser l'individu faire la demande... M. le Président, c'est la raison pour laquelle je reviens toujours à ce que j'ai dit au début, cela va être extrêmement compliqué et les agriculteurs risquent d'avoir des délais extrêmement longs. Je me rappellerai toujours les réserves que nous avons eues au moment où nous avons étudié et où nous avons voté la Loi de l'environnement, ici à Québec, en 1971-1972. Il y a des gens qui ont attendu 18 mois pour avoir un permis pour pouvoir agrandir leur étable. Dix-huit mois de correspondance et si le député ne s'en était pas mêlé, peut-être que certains appelleront cela du patronage, cela je m'en contrefous comme de l'an quarante, mais si le député n'était pas intervenu pour faire hâter la décision, cela aurait pris 24 mois.

Alors, ce sont des situations dans lesquelles les gens se trouvent, à un moment donné, lorsque tout se réfère toujours à la commission gouvernementale, l'attitude, la discussion et la négociation et tout cela... S'il y avait des garanties dans la loi, des précisions dans la loi, comme ces gens-là le demandent, ici, ce matin, ce serait beaucoup plus simple. Parce qu'à partir du moment où l'agriculteur en ferait sa demande, par lettre recommandée, en vertu d'une requête, c'est automatique dans la loi. Quitte à reprendre la discussion par la suite dans la loi et faire en sorte d'étudier le cas. Mais qu'il y ait quand même un point de départ légal.

M. Garon: Oui, mais à l'Agriculture, là...

Le Président (M. Boucher): On a dépassé l'heure et largement.

M. Roy: Non, mais ces gens-là sont ici et ils ont présenté un mémoire, ici ce matin.

M. Garon: A l'Agriculture, on est habitué de traiter des milliers de demandes. Dans les travaux mécanisés, ce sont quelque 20,000 demandes. Dans les entrepôts, dont parle monsieur, cette année, cela a été 140 demandes; dans les silos à grain, cela a été presque 2000 demandes; dans les silos verticaux, cela a été autour de 800; dans les séchoirs à foin, cela a été 2500. On est habitué à traiter sur des milliers de demandes.

Et vous allez voir que les délais — moi je me fie à mes gars — jusqu'à maintenant, les délais on les a raccourcis terriblement. Quand vous parlez d'environnement, c'est autre chose, mais il faut dire que ce n'est pas le ministère de l'Agriculture, d'abord, et deuxièmement, c'est que la croissance de la production porcine, depuis 1976, s'est accrue de 50%, au Québec. Vous allez dire: "C'est du monde à la messe".

M. Roy: Non, il ne vont pas à la messe.

M. Garon: Non, ils ne vont pas à la messe. Mais, cela fait du cochon. On est au-dessus de 3 000 000 de cochons au Québec.

M. Roy: Je veux laisser mon droit de parole à d'autres personnes. Je veux également en profiter pour remercier nos invités.

Le Président (M. Boucher): Nous avons largement dépassé l'heure. Il est déjà midi moins quart. Nous avons plusieurs mémoires à entendre aujourd'hui.

M. Garon: Mais, j'aimerais qu'on y pense. Je ne suis pas rébarbatif à un droit quasi-automatique. On pourrait y penser. On va regarder quelque chose d'un bord, et quand on va regarder cet article-là, on a le problème qui est posé.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Laval.

M. Lavoie: M. le Président, je ne voudrais pas être... Ah! M. Couture.

M. Couture (Alphonse): Je constate que le ministre est pas mal d'accord avec les jardiniers maraîchers pour trouver la formule. Alors j'espère que cela va se concrétiser parce que franchement, si on élimine complètement la corporation municipale du portrait, cela se fait automatiquement, à la demande d'un producteur. Ce n'est pas si mal. Si on pouvait faire cela ainsi, je pense que les gens seraient satisfaits. (11 h 45)

Le Président (M. Boucher): M. le député de Laval.

M. Lavoie: Est-ce que le ministre nous assure... Cette question a été soulevée à plusieurs reprises, on a parlé de la fameuse taxation des jardiniers qui ne sont pas inclus dans la zone verte, c'est un gros problème.

M. Garon: Vous seriez d'accord?

M. Lavoie: Certainement. Ce sont de vrais jardiniers et ce serait pénaliser ceux qui ont survécu au jardinage et à l'agriculture. Si vous ne leur donnez pas une protection, vous allez les forcer à arrêter de produire, ils ne pourront plus produire, ils vont crever avec les taxes qui vont leur être imposées. Est-ce que le ministre peut nous assurer que dans le projet de loi, il va y avoir des modifications à cet effet?

M. Garon: Dans le sens de l'inclusion quasi automatique, je ne suis pas rébarbatif. Allez-vous toujours être pour cela quand ces gens seront partis?

M. Lavoie: Pardon? M. le ministre, cela fait trois ou quatre fois que je soulève cette question et je vois que pour la première fois, cela commence à entrer un peu, vous commencez à...

M. Gagnon: Cela a toujours été les mêmes réponses.

M. Lavoie: M. le Président, je n'en ai pas pour tellement longtemps, mais ne me bousculez pas. L'entente d'une heure, on a dit que c'était une question de bon sens.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Laval, il y a des gens qui sont ici et nous avons 11 mémoires à entendre; nous avons largement dépassé l'heure puisque cela fait déjà une heure et demie...

M. Lavoie: M. le Président, vous n'avez aucun droit de m'arrêter. On va être poli et on va s'entendre.

Le Président (M. Boucher): Je ne veux pas vous arrêter, M. le député de Laval, mais je vous demande d'être le plus bref possible dans vos questions.

M. Lavoie: Je ne sais pas pourquoi et je n'en ferai pas une question de privilège, il n'y en a pas en commission. Mais je ne comprends pas pourquoi, lorsque l'UPA de Laval s'est présentée hier devant la commission, alors qu'elle était au bout de la liste, vous en avez profité pour la faire devancer alors que j'étais retenu à une autre commission pour le projet de loi de la ville de Laval. J'aurais eu des questions intéressantes à poser à l'UPA de Laval.

Le Président (M. Boucher): C'est une demande qui m'a été faite...

M. Lavoie: C'est la raison pour laquelle je veux prendre quelques minutes, ce matin, étant donné que j'ai été privé de mon droit, hier. J'avais des questions. Est-ce que vous en avez profité parce que vous saviez que j'étais à la commission des affaires municipales?

M. Gagnon: Absolument pas.

Le Président (M. Boucher): Ils étaient sur la liste, hier.

M. Clair: M. le député de Laval a été retenu jusqu'à 2 heures ce matin. De toute façon, il n'était pas question de profiter... Le Conseil de comté de Joliette a eu, lui aussi, le privilège d'être entendu plus tôt.

M. Lavoie: J'ai fini à 3 heures ce matin.

M. Clair: Ce n'est pas une question de profiter de l'absence...

M. Lavoie: C'est pour cela que je veux demander une dizaine de minutes, actuellement; vous avez toujours eu notre collaboration, nous sommes rendus au quarantième organisme.

M. Garon: Je n'ai aucune... M. Clair: Consentement.

Le Président (M. Boucher): Nous devons ajourner à midi, M. le député de Laval.

M. Lavoie: M. Couture, depuis combien d'années êtes-vous au Marché central à Montréal?

M. Couture (Alphonse): C'est une bonne question. Depuis son ouverture en 1960, mais j'étais là bien avant cela.

M. Lavoie: Vous étiez à place Jacques-Cartier avant, j'imagine?

M. Couture (Alphonse): J'étais à place Jacques-Cartier depuis 1947 ou 1948.

M. Lavoie: Vous vivez dans le milieu des maraîchers et des jardiniers de la région de Montréal?

M. Couture (Alphonse): Je suis mêlé au milieu des jardiniers depuis un bon nombre d'années et même, je suis un résident de Sainte-Dorothée. Donc, je suis complètement intégré.

M. Lavoie: Existe-t-il de l'appréhension, actuellement, dans le milieu des jardiniers, des maraîchers, de la grande région, non seulement de l'île Jésus, parce que cela couvre les terres noires et toute la région métropolitaine de Montréal, mais on pourrait dire une périphérie qui se rend jusqu'à Joliette au moins? Est-ce qu'il y a certaines appréhensions, actuellement, dans ce milieu devant le projet de loi 90 sur le zonage agricole?

M. Couture (Alphonse): Oui, mais il faut dire que très peu ont eu l'occasion d'étudier la loi. On ne peut pas dire que la loi soit tellement bien connue. J'ai participé à une réunion de jardiniers

qui regroupait l'UPA et les jardiniers maraîchers; finalement, les jardiniers maraîchers ont tenu une autre réunion deux jours plus tard et c'est seulement à la deuxième journée que les gars ont commencé à comprendre les implications du projet de loi. Il reste une chose, c'est que les jardiniers de l'île Jésus sont convaincus et très convaincus que c'est absolument impensable et impossible que le gouvernement adopte une loi qui comporte tout particulièrement les deux articles concernant le gars qui est dans la zone blanche et qui est un peu considéré comme un spéculateur, du moins au bout de trois, quatre ou cinq ans et d'autres restrictions selon lesquelles le gars est dans une zone et on "le dézone" au bout de dix ans; il aura donc des taxes à payer pour dix ans d'arrérages. Ils ne l'admettent pas et ils sont convaincus que le gouvernement ne fera pas cela. On espère aussi, avec eux, que cela ne sera pas comme cela.

M. Lavoie: M. le ministre, c'est très important, lorsque M. Couture nous dit — il nous dit, en somme, je voudrais bien le répéter le plus honnêtement possible — qu'il existe, que cette loi, malheureusement, est plus ou moins bien connue dans le milieu des producteurs agricoles et des jardiniers maraîchers de la région de Montréal, et que leur grande appréhension, c'est l'article 106, la question de la taxation. Moi, je vous dis que... je pense qu'il n'y a pas eu de normes régionales, dans votre projet de loi; vous avez trop voulu uniformiser à l'échelle du Québec. Cela fait longtemps qu'on vous le dit. Pour les grands producteurs agricoles qui exploitent 200 ou 300 acres qui sont situés à 100 ou 125 milles ou à 75 milles de Montréal, ce n'est pas le même problème que pour ceux qui sont dans la périphérie de 25 milles dans le rayon de Montréal; ce sont deux paires de manches complètement.

M. Garon: Mais on ne les pénalise pas parce qu'ils nous disaient tantôt que cela pourrait aller jusqu'à $10 000 pour être reconnu producteur agricole. Si on regarde, actuellement, pour être considéré comme producteur agricole, c'est $1000; cela ne pénalise personne sur l'île Jésus.

M. Lavoie: Ce n'est pas cela.

M. Garon: Bien, de quoi parlez-vous?

M. Giasson: C'est l'article 21a de la loi d'évaluation modifiée par l'article 106.

M. Garon: Ah bien non; là, il faut...

M. Lavoie: II va falloir... parce que nous...

M. Garon: C'est un article essentiel qui... cela, c'est un article essentiel; si on zone une... à part de ça, si on fait une zone permanente. Le gars est dans une zone agricole et il est agriculteur; sa terre est bonne pour l'agriculture; elle va rester dans la zone agricole. L'article 106 ne jouera pas contre le gars.

M. Lavoie: D'accord, celui-là, mais avez-vous constaté qu'ils sont dans le milieu; ils sont dans un milieu quasi-urbain. Pensez-vous que c'est toujours agréable de jardiner et de faire cultiver.

M. Garon: II y en a d'autres qui aiment cela. M. Lavoie: Ils aiment cela, eux, bon.

M. Garon: Vous, vous n'aimeriez pas cela mais eux, ils aiment cela.

M. Lavoie: Je les connais, M. Garon. Ma famille vient de là depuis 200 ans. Je connais ce milieu pas mal plus que vous à part cela.

Le Président (M. Boucher): A l'ordre s'il vous plaît, M. le député de Laval!

M. Lavoie: Peut-être que la grande culture, vous la connaissez, mais la question maraîchère dans la région de Montréal; j'ai été élevé là. Je le connais ce problème. Il y a des gens, il y a des problèmes de relève, également, dans ce milieu. Des gens, même s'ils sont dans la zone agricole et qu'ils ont 25 ou 30 arpents, qui ont toute la misère du monde à cultiver parce qu'ils ont des développements de 300 ou 400 maisons à leur porte et vous savez, les terres sont traversées et tout; elles sont pillées souvent. Les jeunes se trouvent d'autres occupations aussi. C'est plus facile dans la région métropolitaine de Montréal, d'aller dans d'autres occupations, d'aller chercher des salaires intéressants.

M. Gagnon: Oui, mais là, cela ne semble pas être le problème.

M. Lavoie: S'ils restent dans la zone agricole et qu'il n'y a pas de relève...

M. Garon: Et la relève...

M. Lavoie: ... qu'est-ce qu'ils vont faire avec leur terre qu'ils ont conservée; ils ne pourront pas la... Si le développement est à côté, le développement normal urbanisé, il va y avoir des pressions de la municipalité éventuellement, vers la commission, pour qu'ils soient exclus de la zone agricole. Là, ils vont être obligés de payer dix ans en arrière, rembourser 70%. Vous les tuez sur un bord et il y en a d'autres, à moins qu'on fasse des "poches" et du "spot zoning ", il y en a qui vont rester dans la zone blanche. Même, une fois la zone définitive faite, ils vont être dans la zone blanche; ils vont être taxés au bout de trois ou quatre ans; ils vont mourir!

Une Voix: Ah, ah, ah!

M. Garon: Par ailleurs...

M. Gagnon: Arrêtez donc de charrier!

M. Lavoie: Savez-vous que cela... j'en connais... M. Gaqnon, M. le député de Champlain,

écoutez: II y en a qui paient $100 ou $150 de taxes actuellement et qui vont payer — avec la même terre dans quatre ou cinq ans, s'ils ne sont pas dans la zone agricole — $25 000 de taxes par année. Savez-vous que les terres dans notre bout sont évaluées à $10 000 l'arpent au point de vue municipal? Je ne rigole pas; je ne suis pas dans Champlain. Ce n'est pas évalué à $30 l'acre, comme dans certaines régions.

M. Gagnon: Un instant, ne commencez pas à comparer les régions; on a chacun nos problèmes. Le ministre a justement réglé ce problème...

Le Président (M. Boucher): Je m'excuse de vous interrompre, mais il y a des gens qui sont devant nous et vous êtes en train de dialoguer entre les membres de la commission. Vous ferez cela article par article, s'il vous plaît. Alors, posez les questions aux gens qui sont devant nous.

M. Lavoie: Non, mais je voudrais sensibiliser le ministre que sa loi n'est pas tellement...; elle n'est pas achetée et ce n'est pas parce que les gens de l'UPA de Laval, qui sont venus hier, que je respecte et qui veulent, comme nous préserver les terres agricoles, mais pas... Vous avez dit aux municipalités, quand les représentants de la ville de Laval sont venus, qu'il y a 40 000 arpents de zones comme zones réservées, vous avez dit au maire de Laval...

M. Garon: 35 000 acres sur 60 000 acres de Laval.

M. Lavoie: Oui, j'ai dit 40 000 arpents, c'est à peu près cela, sur 72 000 arpents, c'est 20% de différence.

M. Garon: Pas tant que cela.

M. Lavoie: C'est exactement cela, M. le minisre. Vous avez dit aux gens de Laval — vous tenez un langage à certains groupes et un autre langage à d'autres groupes — voyons! Cela va changer, cette zone verte va rapetisser, ça n'a pas de bon sens.

M. Garon: Je n'ai pas dit cela.

M. Lavoie: Vous dites aux agriculteurs... Vous avez dit cela aux gens de Laval, vous avez dit cela aux gens de Repentigny.

Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Garon: Ce que j'ai dit aux gens de Repentigny, au contraire...

Le Président (M. Boucher): Je m'excuse...

M. Garon: ... vous êtes entourés de bonnes terres agricoles...

Le Président (M. Boucher): C'est un dialogue.

M. Garon: Oui.

M. Gagnon: II y a une chose que je voudrais vous faire remarquer, M. le Président, c'est que j'ai demandé la parole et j'ai accepté, pour donner la chance à d'autres de venir comparaître ici... Vous l'avez donnée au député de Laval qui charrie comme ce n'est pas possible. Il essaie de faire dire des choses qui n'ont pas été dites. Si quelqu'un a changé de couleur suivant les intervenants ici, c'est bien le député de Laval et les autres députés de l'Opposition.

M. Lavoie: Je termine. Je voudrais vraiment que le ministre se penche sur ce problème de l'article 106. Le député de Champlain dira que je charrie, mais dans la région de Montréal, au point de vue de la taxation, je dis que c'est suicidaire pour ceux qui vont rester dans la zone définitive s'ils ne peuvent pas disposer de leurs terres de leur vivant ou autrement. Si vous gardez cette pénalité de dix ans, il vous faudra amoindrir cette pénalité peut-être à deux ou trois ans. Prévoir que ceux qui resteront seront exclus de la zone. Vous avez beau dire qu'ils le demandent ou qu'ils le désirent, ce n'est pas l'agriculteur qui décide, c'est la commission qui va décider. Il y aura des pressions de la municipalité ou d'autres qui pourront soit les exclure ou les faire entrer et des deux côtés il y a de grands préjudices. Je vous assure que d'un côté ou de l'autre, il y a de grands préjudices.

M. Garon: C'est vrai qu'il va y avoir de grandes pressions, comme vous dites, et c'est pour cela qu'il faut une commission qui va être impartiale. Mettre des politiciens là-dedans, vous savez ce que cela va donner? Les gars vont dire: II faut que je me fasse élire et cela va faire le diable à quatre, les pressions là-dedans. Il faut sortir cela de la politique.

M. Lavoie: Par contre, si vous donnez cela uniquement à l'UPA, par exemple, ou aux gens...

M. Garon: Pas à l'UPA, à une commission.

M. Lavoie: Oui à une commission, mais il paraît que vous êtes très près de l'UPA, vous faites partie de... Et je n'ai rien contre cela... Mais est-ce qu'elle n'est pas en conflit d'intérêts...

M. Garon: Tout le monde...

M. Lavoie:... dans les régions métropolitaines de Montréal, lorsqu'elle veut entrer dans des marchés conjoints sur toutes les productions? Les jardiniers maraîchers ne sont peut-être pas d'accord avec cela.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous leur posez la question, M. le député de Laval?

M. Lavoie: Oui. Je vous pose la question, M. Couture. Est-ce que les jardiniers maraîchers de la région de Montréal sont d'accord avec les marchés conjoints sur toutes les productions?

M. Couture: J'ai l'impression qu'en fait, si on peut faire une comparaison, on parle beaucoup de souveraineté-association, et les jardiniers maraîchers seraient également pour la souveraineté, l'indépendance et peut-être ensuite l'association avec l'UPA. Lorsque cette loi a été adoptée, dans le mémoire que l'association avait soumis, on avait suggéré certains amendements pour permettre aux jardiniers de conserver leur souveraineté. Malheureusement ils l'ont perdue en grande partie dans ce projet de loi. Officiellement, tout le monde est membre de l'UPA, chacun paie sa cotisation. Leur association est demeurée bien vivante.

M. Garon: Vous parlez de la loi 64? M. Couture: Oui, la loi 64.

M. Garon: Adoptée dans le temps des libéraux.

M. Couture: Je ne me rappelle plus au juste si c'est dans le temps des libéraux ou de l'Union Nationale. De toute façon, quel que soit le gouvernement, j'ai l'impression... On a créé une vraie fédération, une confédération et les jardiniers ont opté pour conserver leur indépendance, quitte ensuite à faire une association. Mais ils auraient voulu avoir leur association indépendante.

M. Lavoie: Une dernière question, M. le Président, on nous a dit — je n'étais pas là hier —

Le Président (M. Boucher): II est l'heure de l'ajournement, M. le député de Laval.

M. Lavoie: On m'a rapporté que les représentants de l'UPA de la section de Laval auraient dit à la commission que la très grande majorité de leurs membres — vos membres sont membres de l'UPA nécessairement; je crois; ... oui, je crois, pour avoir leur rabais de taxes et tout, cela prend...

M. Garon: Non. (12 heures)

M. Couture (Alphonse): Non. Cela prend la carte du ministère de l'Agriculture. Malheureusement, cela a été tellement bien colporté dans l'île Jésus que même le député de Laval est convaincu que cela prend une carte de l'UPA.

M. Lavoie: Mais est-ce que la majorité de vos membres sont membres de l'UPA en même temps?

M. Couture (Alphonse): La majorité des membres de l'Association des jardiniers maraîchers doivent payer leur cotisation à l'UPA en vertu de la loi. Ils continuent à maintenir leur association qu'ils considèrent réellement comme l'organisme professionnel qui les représente.

M. Lavoie: Je suis d'accord, mais ils ont deux "memberships".

M. Couture (Alphonse): Oui, un peu comme le Québec, la Confédération, le Canada, tout le bazar.

M. Chevrette: M. le député de Laval, hier, cependant, face à la question que vous posiez sur les comités conjoints, il faut admettre que le groupe de Laval a répondu à peu près la même chose que répondent ces messieurs, en ce sens qu'ils ont dit qu'ils étaient capables, à cause de la proximité des lieux, à cause de la proximité des marchés, qu'ils assumaient eux-mêmes leur mise en marché et qu'ils ne favorisaient pas, pour le moment, les plans conjoints. Il faut être honnête avec les groupes.

M. Lavoie: C'est le pouls que j'avais pris d'ailleurs. On a rapporté hier que les gens de l'UPA auraient dit que la grande majorité de leurs membres étaient favorables à la loi, telle que rédigée actuellement.

M. Couture (Alphonse): Je ne voudrais pas agir comme interprète des gens qui ont présenté un mémoire hier. En autant que l'Association des jardiniers maraîchers est concernée, les jardiniers sont en faveur du principe de la loi. Ils sont en faveur du zonage agricole. En fait, ils l'auraient souhaité il y a 20 ou 25 ans et ils ont même participé à des réunions il y a dix ou quinze ans où ils disaient déjà qu'ils étaient en faveur du zonage agricole.

Il y a certains articles qu'on a mentionnés dans notre mémoire et sur lesquels on a attiré l'attention du gouvernement parce qu'on ne voudrait pas créer deux classes de jardiniers: les jardiniers qui seront dans la zone verte et les jardiniers qui seront dans l'autre zone. Tout le monde sera sur le même pied d'égalité. Justement parce qu'on fonctionne dans une économie de libre marché, il est important que les règles du jeu soient identiques pour tout le monde.

Il reste qu'on peut certainement dire que les jardiniers maraîchers sont peut-être ceux qui sont le plus heureux de voir arriver cette loi à condition qu'ils ne soient pas pénalisés à la suite d'un jeu de procédures, question de zonage, dézonage, ces choses-là. Mais définitivement, ils sont d'accord avec le zonage. Cela aura des suites heureuses pour les jardiniers maraîchers.

M. Garon: Je vous remercie de nous avoir présenté votre mémoire. Vous pouvez être certain qu'on va en tenir compte.

M. Couture (Alphonse): Merci.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Couture. Nous sommes à l'heure de l'ajournement. La commission ajourne ses travaux sine die.

Fin de la séance à 12 h 4

Reprise de la séance à 15 h 55

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs! M. Giasson: Tiens, un nouveau président.

Le Président (M. Clair): La commission permanente de l'agriculture est réunie pour procéder à l'audition des mémoires relatifs au projet de loi no 90, Loi sur la protection du territoire agricole.

Les membres de la commission sont les suivants. Vous voudrez bien me prévenir au fur et à mesure, s'il y a des remplacements.

Les membres sont donc les suivants: M. Baril (Arthabaska), M. Beauséjour (Iberville), M. Dubois (Huntingdon), M. Gagnon (Champlain), M. Garon (Lévis), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Rancourt (Saint-François), M. Roy (Beauce-Sud) et M. Vaillancourt (Orford).

Les intervenants sont les suivants: M. Brassard (Lac Saint-Jean) remplacé par M. Marcoux (Rimouski); M. Charbonneau (Verchères), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue) remplacé par M. Lavoie (Laval); M. Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Picotte (Maskinongé) et M. Samson (Rouyn-Noranda).

Comme les membres de cette commission l'ont sans doute remarqué, le député de Rivière-du-Loup, qui a été assigné à la présidence des travaux de cette commission est absent pour quelques heures. C'est moi qui le remplace en l'occurrence. Selon les indications qu'il m'a données, premièrement, vous en êtes, dans vos travaux, à entendre les représentants du Marché central métropolitain.

M. Garon: Oui.

Le Président (M. Clair): Et il y avait une entente assez souple qui était intervenue, à l'effet d'accorder environ une heure, en plus ou en moins, à chacun des groupes. Je tâcherai d'interpréter cette entente au fur et à mesure, si besoin est.

J'invite immédiatement les représentants du Marché central métropolitain...

M. Garon: On ne l'a jamais interprété strictement. Quelquefois, cela dure une demi-heure, d'autres fois trois heures.

Le Président (M. Clair): On jugera au fur et à mesure si besoin est.

Au nom des membres de la commission, je souhaite la bienvenue aux représentants du Marché central métropolitain et j'invite immédiatement M. Alphonse Couture, le directeur général qui, je crois, est le principal porte-parole du groupe à s'identifier et à nous présenter les gens qui l'accompagnent. M. Couture.

Marché central métropolitain

M. Couture (Alphonse): J'ai, à ma droite, M. Raymond Guinois qui est le président de la compagnie Marché central ainsi que M. Pierre Hubert qui est un des administrateurs de la compagnie, de même que M. Robert Vais qui est un autre administrateur de la compagnie. Quant à moi, j'en suis le directeur général.

M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission, la compagnie du Marché central métropolitain limitée a été incorporée en vertu de la première partie de la Loi des compagnies du Québec le 13 novembre 1948.

Elle compte actuellement 685 actionnaires dont la grande majorité sont des jardiniers maraîchers de la région de Montréal. Elle est propriétaire et administre le marché central, centre de distribution en gros de produits agricoles, qui a ouvert ses portes en 1960. Pour ceux qui l'ignorent peut-être, le marché central couvre une superficie d'environ 102 acres. Il est situé à l'intersection du boulevard Crémazie et du boulevard L'Acadie, à Montréal.

Ce marché groupe sur son territoire la Coopérative fédérée de Québec, qui y a son siège social ainsi que des entrepôts importants; les Pêcheurs unis de Québec, qui y a son siège social et deux entrepôts; de nombreux grossistes et courtiers en fruits et légumes; deux épiceries en gros; trois vendeurs de contenants; les services ferroviaires, les deux chemins de fer: CN et CP; le service des douanes; le service d'inspection de fruits et légumes, provincial et fédéral; le service de restauration et le service bancaire. Et, au centre de son territoire, un marché des cultivateurs d'une capacité de 450 places.

La section des cultivateurs du marché central, réservée exclusivement à la vente des fruits et légumes du Québec, est fréquentée par plus de 1500 jardiniers et pomiculteurs qui y ont vendu environ 100 000 tonnes de fruits et légumes en 1978 et plus de 1 100 000 boîtes de plants de fleurs.

La fréquentation du marché, par les cultivateurs, qui était de 21 324 assistances quotidiennes en 1960, l'année d'ouverture, va dépasser les 51 000 assistances quotidiennes en 1978, soit un record inégalé.

Les investissements en immobilisation de la compagnie sont de $7 573 000, y inclus les subventions reçues, au début, du gouvernement de la province de Québec, au montant de $1 896 000. (16 heures)

L'évaluation foncière excessive depuis le début est actuellement de $13 897 200 et ne tient pas compte des restrictions imposées quant aux activités permises qui sont définies par le chapitre 190 des lois du Québec de 1958-1959. La compagnie a payé $864 000 de taxe foncière pour l'exercice 1978/79. Cela représente plus de 60%, 70% à peu près de son revenu brut.

Par un amendement au règlement de zonage, la ville de Montréal adoptait, à la séance du 31 juillet 1978, le zonage du territoire du marché qui est maintenant conforme à sa vocation spécifique. Nous espérons toujours que le gouvernement va finalement intervenir pour nous aider à régler de façon définitive ce problème d'évaluation, ce qui

nous permettra de relancer l'expansion du marché central qui est paralysé depuis 1965 par le fardeau excessif des taxes foncières.

Il n'y a eu aucune construction de bâtisses, depuis 1965, parce qu'effectivement le taux de la taxation, si on le reporte sur nos immobilisations, représente environ 9% ou 10% plus l'intérêt de l'amortissement de la dette; cela fait un loyer prohibitif. Effectivement, tous les locataires ont été pénalisés à la suite de cette surévaluation.

Cette entreprise est essentielle à la mise en marché des fruits et légumes du Québec et est absolument indispensable aux petits et moyens jardiniers. Il y a suffisamment d'espace disponible au marché pour recevoir et accommoder les autres secteurs agricoles qui auraient avantage à y établir des entrepôts et à y centraliser leurs activités de mise en marché. C'est possible à condition que les taxes soient normales.

La compagnie a toujours été pour le zonage agricole et félicite le gouvernement de son initiative. La culture horticole dans l'île Jésus et autres zones urbaines va connaître un essor considérable à la suite de cette loi qui va protéger tous les jardiniers si le gouvernement tient compte des recommandations faites par l'Association des jardiniers maraîchers de la région de Montréal.

M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission, nous vous remercions de nous avoir entendus.

Le Président (M. Clair): Le ministre de l'Agriculture.

M. Garon: Je vous remercie infiniment, M. Couture, d'être venu faire une représentation au niveau du marché central. Je vais laisser mes...

Le Président (M. Clair): Le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Merci, M. le Président. Merci, M. Couture, et les gens que vous représentez pour la préparation de ce mémoire qui fait part aux députés membres de la commission parlementaire des difficultés que vous rencontrez surtout vis-à-vis du problème découlant de l'évaluation qui vous est faite par la ville de Montréal. C'est cela?

M. Couture (Alphonse): Exactement.

M. Giasson: Quand vous dites: Nous espérons toujours que le gouvernement va finalement intervenir pour nous aider à régler de façon définitive ce problème d'évaluation, ce qui nous permettra de relancer l'expansion du marché, etc., est-ce que vous croyez que cette aide que devrait vous donner le gouvernement doit venir à l'intérieur de la loi 90 sur la protection du sol arable ou est-ce que ce ne serait pas plutôt par l'intermédiaire du ministère des Affaires municipales? Autrement dit, est-ce que vous croyez que le territoire de 102 acres que vous possédez dans l'île de Montréal devrait être reconnu aux fins de la loi 90 sur la protection et en même temps de l'agriculture?

M. Couture (Alphonse): II est évident que si le gouvernement acceptait de reconnaître le territoire comme faisant partie d'une zone verte, je pense que tous les jardiniers en seraient très heureux. Cela contribuerait également à donner un essor à l'ensemble du secteur agricole et de l'agro-alimentaire. C'est certainement un moyen. Cela peut se faire peut-être par l'intermédiaire d'autres lois, mais il est évident que c'est peut-être une loi qui nous permettrait de régler ce problème.

M. Giasson: Je crois qu'il serait intéressant de connaître l'attitude de notre ministre de l'Agriculture qui se fait le champion de l'agro-alimentaire au Québec afin qu'il nous indique quelles seraient ses capacités ou son pouvoir de trouver une solution aux problèmes que vous rencontrez à l'intérieur de la loi 90 en décrétant zone agricole soit le territoire que vous possédez ou tout au moins une partie de ce territoire, compte tenu des installations sur le terrain.

Le Président (M. Clair): M. le député de Montmagny-L'Islet, j'ignore l'attitude adoptée par le député de Rivière-du-Loup à la présidence de cette commission, sauf que je n'ai pas personnellement l'intention de permettre qu'un débat s'engage entre des membres de l'Opposition et le ministre sur des sujets qui ne sont pas directement reliés à la protection du territoire agricole. Le mandat de la commission, à ce moment-ci, c'est d'entendre des groupes. Au moment de l'étude article par article, si le député voit l'occasion de relier sa question à un article, en particulier, il aura l'occasion de le faire au niveau de l'étude article par article du projet de loi. M. le député.

M. Giasson: M. le Président, l'attitude de votre prédécesseur, le député de Rivière-du-Loup, a été une attitude de franche collaboration à l'endroit de tous les membres de la commission, comme à l'endroit des intervenants. S'il faut relier cela à une des dispositions, je demande au ministre si, par le biais de l'article 106 qui a pour effet de modifier l'article 21 de la Loi de l'évaluation foncière, il se croit en mesure d'apporter une solution au problème d'évaluation que connaît le Marché central métropolitain, si cela vous va, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Montmagny-L'Islet, je m'appuierai sur l'opinion des membres de cette commission, mais je peux vous assurer que cela ne me va pas du tout, puisqu'il me semble que le mandat de la commission, à ce moment, c'est d'entendre les groupes et non d'avoir des discussions entre les différents partis représentés à cette commission. Maintenant, si le ministre veut y répondre, je suis ici pour environ une heure. Je n'ai pas l'intention d'être un fauteur de troubles, sauf qu'il m'apparaît que c'est absolument en dehors du sujet.

M. Giasson: C'est totalement à l'intérieur du sujet. Vous me permettrez de différer d'avis avec vous, M. le Président...

Le Président (M. Clair): Vous avez le droit.

M. Giasson: ... même si je respecte la présidence. J'aimerais entendre le ministre.

M. Gagnon: Cela va prendre une motion... Une Voix: Une motion dilatoire.

M. Giasson: On n'aura pas le temps de formuler de motions dilatoires aujourd'hui.

M. Garon: En réalité, par le règlement de zonage de la ville de Montréal adopté au mois de juillet, au fond, je pense que cela règle votre problème actuellement, sauf que... Pardon?

M. Couture (Alphonse): Sauf qu'effectivement, M. le ministre, depuis longtemps, on voulait que le zonage soit spécifique à l'usage qu'il est permis d'en faire en vertu de la loi. Maintenant, il reste que les évaluateurs vont être en face d'un zonage assez spécial.

Nos experts en évaluation, comme nos conseillers légaux, nous ont signalé qu'évidemment, c'est quelque chose, c'est un pas dans la bonne direction. Si on doit suivre le cours normal des procédures, aller au Bureau de révision, évidemment, si à ce moment, la décision n'est pas favorable pour des raisons qu'on ignore, soit parce qu'on a mal plaidé notre cause ou je ne sais quoi, il faut aller en Cour d'appel, il faut éventuellement aller en Cour suprême. Cela peut prendre cinq ou six ans. Durant ce temps, le marché est paralysé, les jardiniers maraîchers... Actuellement, vous zonez le territoire agricole d'une partie de l'île Jésus dans les zones urbaines. Le complément essentiel pour les jardiniers maraîchers, surtout ceux qui sont à proximité de la ville, est qu'ils ont absolument besoin de leur marché. Pour que leur marché soit efficace, il faut que ce soit un véritable centre de distribution en gros de produits agricoles.

Il est évident aussi qu'il y a certains organismes aujourd'hui qui sont installés hors-marché, même ceux qui découlent de plans conjoints. Il y aurait certainement avantage pour eux d'être installés au marché. A ce moment, ils réaliseraient des économies formidables au niveau de la distribution, parce que les clients s'amènent au marché. Dans le moment, ils s'approvisionnent surtout en fruits, en légumes, et en épicerie, en gros. S'il y avait d'autres secteurs, c'est évident qu'ils pourraient s'y approvisionner. A ce moment, c'est dans l'intérêt de tout le monde comme dans l'intérêt des consommateurs.

Maintenant, on a déjà dans la Loi de l'évaluation foncière les clubs de golf qui jouissent d'un certain privilège. Peut-être qu'il y aurait une possibilité, parce qu'on y touche à la Loi de l'évaluation foncière dans le bill 90, de fixer... pour que le marché soit considéré comme zone agricole. A ce moment, on tombe à 150. On n'en demande pas tant. Même si on avait une évaluation de $300 000 ou $400 000 pour le terrain, tout le monde serait heureux. Actuellement, le fonds de terre est évalué à $4 200 000. Dans le cas d'un marché agricole, tous les experts américains comme européens admettent que l'utilisation maximum du sol, c'est 20% de la surface en bâtisse, un très petit pourcentage. Les bâtisses, toutes des bâtisses d'un étage, les entrepôts et ces choses, c'est un étage, un point, c'est tout.

Alors, il est évident que si l'évaluateur continue à vouloir donner aux terrains une valeur comparative aux terrains adjacents, on n'en sort pas. Ils ont été évalués à $4 200 000 et la seule chose qui peut arriver, c'est que cela peut monter encore, à moins qu'on tienne réellement compte du règlement de zonage qui a été adopté.

Maintenant, étant donné qu'on est en face d'un zonage spécial — c'est une formule qui est actuellement dans les règlements de zonage de la ville — quels sont les évaluateurs qui savent ce qu'est un marché de gros de produits agricoles? Il y en a un à Montréal, il y en a un de moindre importance à Toronto. Pour en trouver d'importance comparable, il faut aller aux Etats-Unis ou en Europe, et même là, souvent, le marché a une section agricole, mais qui est bien petite et qui a très peu d'importance comparativement au marché de Montréal parce qu'on a l'avantage, dans la région de Montréal, d'avoir 1500 jardiniers dans un rayon d'à peu près 50 milles.

M. Garon: Ce que je vais faire, on a déjà parlé ensemble, M. Couture. Là, il y a un pas de fait et je ne pense pas que la loi 90 soit la façon de le faire. Je pense que cela devrait être par le ministère des Affaires municipales et la ville de Montréal. De toute façon, je vais en parler au ministre des Affaires municipales. Je dois aussi rencontrer M. Drapeau prochainement concernant les Floralies, parce que le gouvernement du Québec a obtenu au mois de mars 1978 que les Floralies internationales viennent au Québec en 1980 et, à travers les candidatures, nous avons choisi la ville de Montréal comme site des Floralies de 1980; il doit y avoir, avant longtemps, la signature d'un protocole d'entente entre Montréal et le gouvernement du Québec. Je saisirai l'occasion pour dire un mot à M. Drapeau pour qu'on trouve une solution si possible permanente pour le Marché central et regarder aussi, possiblement, le Marché central dans une perspective d'avenir, comment anticiper son développement, ce qu'on veut en faire, regarder toute la question.

Je pense qu'il y a un pas de franchi avec la ville de Montréal, qui lui reconnaît une vocation spécifique de marché agricole. Maintenant, il faudrait, comme vous le dites, aller plus loin et dire ce que signifie "connaître sa vocation agricole". Je ne pense pas que ce soit l'endroit, dans la Loi sur la protection du territoire agricole, pour inclure des... Tout à l'heure, on parlait de toutes sortes d'enclaves. Je pense que cela serait mieux de les prévoir dans la loi d'évaluation foncière.

M. Couture (Alphonse): Si vous me le permettez, M. le ministre, il y aurait peut-être un autre

moyen. Il y a déjà une loi qui est justement mentionnée dans le règlement de zonage de la ville, au chapitre 190 de la loi 58, je crois.

M. Garon: Oui.

M. Couture (Alphonse): Nécessairement, si le gouvernement est d'accord avec les partis de l'Opposition et que tous les députés sont d'accord, le marché pourrait peut-être présenter un amendement à cette loi spéciale, c'est une alternative. Je pense que ce qui est extrêmement important, c'est de le rayer et de le rayer une fois pour toutes. Cela fait depuis 1965 qu'on rencontre les autorités gouvernementales; tout le monde est en faveur mais on cherche depuis 1965 le moyen de le rayer et il n'y a personne qui réussit à trouver le tour de rayer ce damné problème. Il faudrait à un moment donné que cela accouche, parce...

M. Garon: On en arrive là.

M. Couture (Alphonse):... qu'on a quatre ans de révision de taxes en arrière et on n'a pas encore été entendus au bureau de révision, c'est-à-dire que, de temps en temps, il nous invite; on demande un délai, parce qu'on voudrait bien que cela se règle autrement que par ce moyen. Autrement, on s'embarque encore dans une dépense de $50 000, $60 000 ou $75 000 pour une nouvelle contestation sans savoir si, éventuellement, cela aura une solution favorable. On a déjà dépensé à peu près $150 000; on a gagné un montant peut-être un peu plus élevé au bureau de révision, mais le problème n'est pas réglé, et il faudrait le régler. Je regarde M. Couture, mon homonyme de l'UPA, qui dit: On est en faveur du zonage agricole, à condition qu'il y ait une relance de l'agriculture. Je pense que, pour les jardiniers maraîchers, la relance: "Un coup de pouce au Marché central", cela presse.

M. Garon: D'accord.

Le Président (M. Clair): Le député de Montmagny-L'Islet avait-il terminé ses questions?

M. Giasson: J'y reviendrai, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Merci, M. le Président. J'appuie les paroles du député de Montmagny-L'Islet, parce que je pense que si, d'une part, on veut retenir comme aire réservée pour l'agriculture le secteur de Laval et de la périphérie de Montréal, d'autre part, on devrait considérer le Marché central comme vital pour les jardiniers maraîchers. Je pense que la seule manière d'avoir une expansion en production maraîchère est d'assurer la survie du Marché central et je sais, que sa survie est très en danger. J'ai vécu une expérience l'an passé où des grossistes sont allés construire à l'extérieur parce que les taxes étaient plus élevées sur le Marché central pour les grossistes en fruits et légumes qu'elles ne l'étaient dans le territoire adjacent du Marché central. (16 h 15)

Alors, c'est une situation intolérable et d'ailleurs, je pense que je l'ai soulevée en commission parlementaire l'an dernier, au moment de l'étude des crédits et depuis ce temps cela n'a pas bougé et je pense qu'il serait temps que cela bouge et je suggérerais qu'on peigne ce secteur en vert. Amendez la carte et peignez en vert. On verra la réaction de la ville de Montréal après.

M. Garon: Ce que je ne comprends pas, vous êtes pour l'autonomie municipale; d'un coup sec, vous voulez d'autorité qu'on fasse, des zones de marché central, des zones vertes? Je trouve que c'est un peu incohérent.

M. Dubois: C'est peut-être poussé, mais il va falloir faire quelque chose et d'autres marchés ont le même problème...

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Garon: Vous remarquerez que mon attitude est constante. Je dis qu'on va discuter avec la ville de Montréal; comme dans la loi 90, on est en commission, on va discuter avec les municipalités.

M. Giasson: ... parti pour dire une si belle chose.

Le Président (M. Boucher): A l'ordre!

M. Giasson: Vous étiez sur le point de dire une si belle chose. Comme la commission, par 90, va discuter avec la ville de Montréal.

M. Garon: ... avec les municipalités. Alors, on va discuter avec les municipalités pour trouver une solution à la question le plus rapidement possible. M. Couture, je me rappelle vous avoir rencontré à ce sujet à quelques reprises, mais on va essayer de trouver quelque chose, une solution à ce problème.

M. Dubois: Mais vous savez, M. le ministre, que la ville de Montréal ne veut même pas discuter de ce problème. Alors, il va falloir arriver à imposer quelque chose si on veut que les jardiniers maraîchers survivent.

M. Gagnon: Ah! Cela change.

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous plaît! Nous devrions profiter de l'occasion de la visite des gens du Marché métropolitain pour leur poser des questions...

M. Dubois: Ce sont ces gens qu'on protège et qu'on veut protéger.

Le Président (M. Boucher): Je veux simplement éviter que le député de Champlain et d'autres entament une conversation avec vous.

M. Dubois: J'ai une autre question à poser à M. Couture. Je voudrais connaître la situation financière du Marché central présentement. Etes-vous en difficulté financière?

M. Couture (Alphonse): Non.

M. Dubois: Non. Etes-vous obligé de...

M. Couture (Alphonse): Des organismes en déficit, les jardiniers n'aiment pas cela. Le Marché central est viable. On rencontre nos obligations. Le personnel est restreint; il est extrêmement limité. Il n'y a pas de syndicat. Les gars travaillent. En définitive, on se demande toujours à tous les ans si on va pouvoir faire face à la prochaine augmentation de taxes, mais on ne peut pas dire que le Marché central... Il fait ses frais, mais effectivement, les locataires paient plus cher que n'importe où ailleurs.

Vous avez des grossistes en fruits et légumes qui sont installés de l'autre côté de la rue et ils ont un loyer qui est à peu près le quart des grossistes qui sont installés au Marché central et c'est de même pour tous les locataires. Ces gars sont victimes d'une injustice depuis qu'ils sont installés au marché — depuis 1960 — alors que, normalement, à Toronto comme la plupart des marchés, non seulement ils bénéficient d'avantages au point de vue taxation, mais en plus de cela, on crée une zone de protection.

A Montréal, il n'y a pas de zone de protection. Actuellement, on doit avoir au moins six ou sept grossistes dans un rayon d'à peu près un quart de mille. Ces gens font leurs affaires au marché. Ils vendent au marché. Cela ne leur coûte pas un sacré cent. Ils n'ont qu'à envoyer leurs gens le matin, durant la période de vente, ils brassent leurs affaires, ils viennent chercher leurs clients, mais on n'a pas de zone de protection. Qu'est-ce que vous voulez qu'on fasse.

Dans le temps, cela n'a pas été facile parce qu'à ce moment, la ville était contre le marché quand on l'a construit — les autorités du temps. Cela a été imposé par la Législature du temps. Actuellement, le marché existe. Le marché a certainement joué un rôle très important dans l'essor que la culture maraîchère a connu dans les années soixante.

On dit que le nombre d'agriculteurs a diminué depuis 1960. Le nombre de jardiniers n'a pas diminué. Il s'est multiplié. Si les jardiniers maraîchers aujourd'hui sont capables de vivre sur dix, quinze, vingt arpents de terre, qu'ils font bien vivre leurs familles et qu'ils réussissent même à acheter des terres à leurs gars, c'est parce qu'ils ont l'avantage de fréquenter un marché et c'est un marché libre. Les gars ne travaillent pas en arrière d'un plan conjoint avec des prix garantis. Ils prennent les risques du marché, mais c'est normal qu'en prenant les risques du marché, une année de temps en temps, ils en profitent. Ils rencontrent des bons prix. Ils font de bonnes années de temps en temps, sur une moyenne de cinq ans, à tel point que vous avez pu le constater hier que les gens sont assez satisfaits de fonctionner dans un régime d'entreprise libre et ils ont à faire face à la concurrence de l'Ontario, des Etats-Unis, une concurrence extrêmement serrée, très difficile, parce qu'au point de vue climat, on est un peu défavorisé. Ils ne perdent pas de terrain. Ils en gagnent du terrain parce qu'il y a 20 ans, on n'exportait pas et actuellement, on exporte du céleri, des carottes, toutes sortes de choses.

Il est évident que pour être dynamique, pour être effectif, il faut justement un peu fonctionner dans un système d'entreprise libre parce qu'autrement, si on était pris avec des quotas, si on avait mis des quotas dans le céleri il y a dix ans, c'est bien dommage mais notre production serait restée ce qu'elle était à ce moment-là. On a rien contre les plans conjoints et les producteurs qui veulent s'en servir dans certains secteurs agricoles, peut-être la meilleure formule dans le secteur horticole; étant donné les variations de rendement avec la même superficie, vous pouvez avoir des surplus épouvantables, une autre année vous pouvez avoir pratiquement une disette. A cause de la température, les rendements varient énormément.

Je pense que dans le secteur maraîcher, c'est assez difficile de vouloir passer à côté de l'entreprise libre. Nos jardiniers sont des gens qui ont une bonne connaissance du marché, qui se tiennent au courant de la situation dans les autres provinces, dans les pays étrangers et ils se défendent assez bien. Ils réussissent. Mais pour cela, il faut leur donner des instruments et l'instrument par excellence pour eux, c'est le marché. Comme je le mentionnais dans le rapport, l'an passé, il y a au moins 100 000 tonnes de légumes qui sont passés par là. Vous avez des fleurs qui s'y vendent. De ce temps-ci, même là, de plus en plus, vous avez des gens qui viennent, ils vendent du bois pour les foyers. Cela commence. Il y a les sapins au temps des Fêtes. Durant l'été, vous avez des gens qui viennent vendre des fleurs toutes les fins de semaine, des fleurs en pots, des fleurs coupées. Je pense que le marché joue réellement son rôle. Il y aurait certainement un besoin d'amélioration. Pour le faire, il faut régler le problème.

C'est un autre point aussi. A un moment donné, les jardiniers se posent la question: Est-ce que le ministère de l'Agriculture est pour ou contre le marché? Il y a des échos qui arrivent de temps en temps. On se pose des questions. Il faudrait bien régler cela aussi une fois pour toutes en même temps qu'on va régler son problème d'évaluation.

M. Garon: Est-ce qu'il y a moyen, M. Couture, qu'on se rencontre à la fin de janvier ou au début de février? Disons à la fin de janvier. On va communiquer ensemble. On va essayer de... On a été pris pas mal depuis le début de l'automne avec cette loi et les mesures qui s'y rattachent. On pourra communiquer ensemble, se rencontrer et travailler là-dessus pour régler cela au plus sacrant.

M. Couture (Alphonse): Est-ce qu'on va le régler cette fois-là?

M. Garon: On va essayer.

M. Couture (Alphonse): Parce qu'on s'est rencontré plusieurs fois.

M. Garon: Oui, mais vous comprenez que dans les deux premières années... On a communiqué. Ce n'est pas un dossier qui était fermé. Il y a de la correspondance, mais à travers la multitude de problèmes, beaucoup de choses ont été faites. En 1979, disons qu'on s'occupe du marché central.

M. Couture (Alphonse): Alors, on tient pour acquis qu'au mois de janvier au plus tard, il y a une rencontre et on...

M. Garon: Mais vous savez, si on ne procède pas par la loi 90... La loi 90 va être adoptée, cela s'amende des lois. Alors, s'il n'y a pas d'autre solution, on pourra faire une plaque verte avec la loi 90.

M. Couture (Alphonse): Si le gouvernement est d'accord, si les membres du Parlement sont d'accord, il y a la possibilité d'apporter un amendement, par un projet de loi privé, à la loi de 1958-1959.

M. Garon: C'est toujours mieux, dans une première phase, dans les premières phases, qu'on essaie de rencontrer les institutions et de discuter pour essayer de régler cela harmonieusement plutôt qu'arriver et bang! Jusqu'à maintenant, dans mes relations avec M. Drapeau, il y a toujours eu une bonne collaboration dans les dossiers qu'on a eu à régler ensemble.

M. Couture (Alphonse): Vous réglez cela comment? A l'intérieur de la charte de Montréal ou... Cela va prendre combien de temps?

M. Garon: Cela peut être plus rapide qu'on ne le pense. Parce qu'il semble que l'Opposition serait d'accord. Alors, elle dit cela des fois, c'est toujours en principe, mais...

M. Dubois: Ne charriez pas, M. le ministre.

Le Président (M. Clair): Est-ce que le député de Huntingdon avait terminé ses questions?

M. Dubois: De toute façon, je veux seulement indiquer que je vais talonner le ministre afin que ce problème soit réglé dans les plus brefs délais et je ne lâcherai pas. J'ai déjà commencé et je vais aller plus rapidement. Je vais indiquer au ministre que je pense que s'il veut que la production maraîchère vive, c'est la seule façon et il va falloir y penser très tôt. Je pense que ce marché pourrait être développé du double des activités qu'il a présentement. Je vous remercie, messieurs.

Le Président (M. Clair): Merci, M. le député. M. le député de Montmagny-L'Islet avait d'autres questions.

M. Giasson: Oui. M. Couture, vous avez 102 acres de terrain au marché central. L'évaluation pour le fond de terre — oublions tous les bâtiments qu'il y a dessus, vous donnez une description de tout cela, le fond de terrain lui-même est évalué à combien l'acre?

M. Couture (Alphonse): $4 200 000 en tout. Alors, si on divise, cela fait...

M. Giasson: $40 000 l'acre.

M. Couture (Alphonse): A peu près, oui.

M. Giasson: $40 000 l'acre.

M. Couture (Alphonse): A peu près.

M. Giasson: C'est incroyable.

M. Couture (Alphonse): Vous savez, il y a différentes formules d'évaluation. Il y a la méthode comparative, il y a la valeur économique. Si on employait la valeur économique — en fait, nous, on dit que c'est la seule méthode de l'évaluer, ce sacré marché — on arrive invariablement à une valeur résiduaire de terrain, parce qu'à ce moment-là on fait un résiduaire terrain. On trouve la valeur globale de l'entreprise, on soustrait la valeur des bâtisses et on dit: Ce qui reste, ça s'applique au terrain. La valeur résiduaire terrain, ça donne à peu près une valeur constante, au cours des années, de $300 000 ou $400 000 pour le terrain, ce qui est à peu près le prix qu'on a payé, à peu près $300 000.

Maintenant, ça s'explique facilement, parce que l'espace qui est occupé par les chemins de fer, l'espace de chargement et de déchargement, la section des cultivateurs où il n'y a pas de bâtisses du tout, les rues — la ville nous a imposé des artères, ce ne sont pas des rues, ce sont des boulevards — nécessairement, tout ça est évalué. Même nos rues sont évaluées. Les rues sont privées à l'intérieur de ça; tout est évalué. Cela donne une valeur à peu près constante de terrain de $300 000 ou $400 000.

A cette valeur qui pourrait être fixée dans la loi, quitte à être révisée, par exemple, à tous les cinq ou dix ans, il n'y a pas de problème, le marché central pourrait lancer le développement de son entreprise, continuer de progresser, d'ailleurs, comme on l'a fait de 1960 à 1965. Cela a été très rapide. On a commencé et, à tous les ans, on avait deux ou trois bâtisses qui s'additionnaient. En fait, la ville aurait fait plus d'argent en taxes si on avait été bien évalué au point de départ, parce qu'actuellement, ce serait probablement tout bâti, tandis que là, plus de 60% des revenus bruts s'en vont en taxes foncières. Cela coûte plus cher aux locataires; le montant des taxes qu'ils ont à payer au marché, c'est souvent supérieur au montant du loyer qu'ils payent, le loyer véritable.

M. Giasson: Quelle est la superficie du terrain qui n'est pas construite?

M. Couture (Alphonse): A peu près 1 million de pieds.

M. Giasson: Là, vous n'avez plus de demandes par des locataires éventuels qui veulent s'installer chez vous?

M. Couture (Alphonse): Dans le moment, non seulement on n'a plus de demandes pour des locataires éventuels, mais le marché est tellement bien reconnu comme étant un site où le coût est exorbitant que, même lorsqu'on a des bâtisses — actuellement, on a une bâtisse à louer, ça ne fait pas tellement longtemps — à louer, les gens disent: Ecoutez, le loyer, c'est rien, mais ce sont les taxes. Elles sont tellement fortes que les gens ont peur de venir s'installer au marché parce qu'ils ont peur de se faire pincer et c'est malaisé de les blâmer.

M. Giasson: J'ai bien l'impression que ça va vous prendre le poids d'un ministre lourd pour être capable de trouver une solution au problème dans lequel vous vous débattez depuis longtemps. Je pense qu'en la personne du ministre de l'Agriculture on aurait ce poids lourd, s'il veut appuyer de tout son poids les revendications que vous formulez.

M. Couture (Alphonse): On a fait beaucoup de suggestions par le passé à différents gouvernements et, invariablement, cela ne s'est jamais concrétisé. Le problème n'a pas été réglé; ça ne date pas d'hier, ça date de 1965.

M. Giasson: Est-ce que vous avez plus d'espoir en la loi 90 que dans d'autres modes d'intervention, soit au niveau des Affaires municipales, soit au niveau de la ville de Montréal?

M. Couture (Alphonse): Je pense qu'au niveau des Affaires municipales, comme au niveau de la ville de Montréal, ça va être difficile. A mon point de vue, il y a deux choix, le bill 90 ou un bill privé qui serait présenté avec l'assentiment du gouvernement, nécessairement, qui serait un amendement à la loi actuelle qui définit ce qu'on peut faire au marché central.

M. Giasson: Merci, monsieur.

M. Couture (Alphonse): Ces deux formules.

Le Président (M. Clair): Le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Tantôt, vous avez parlé de taxation. Vous avez dit, si j'ai bien compris, que ce sont surtout les taxes qui empêchent le développement du marché central. Mais est-ce que les gens ne paient pas le même taux de taxes lorsqu'ils vont se construire en face ou de l'autre côté de la rue?

M. Couture (Alphonse): Cela fait une différence assez importante, parce que, lorsqu'ils s'installent de l'autre côté de la rue, ils sont en bordure d'une rue publique. Alors, vous savez — j'imagine, peut-être, que dans votre région, c'est un peu comme à Montréal, que pour la plupart des entrepôts qui sont construits en bordure d'une rue publique, le propriétaire ou ses clients utilisent la rue pour le mouvement des camions, pour le stationnement et, effectivement, l'espace de terrain vacant autour de l'entrepôt est généralement restreint. (16 h 30)

Maintenant, autour du marché central, il y a un autre facteur qui intervient, c'est qu'il y a eu de vieux entrepôts qui étaient utilisés par d'autres entreprises, c'est-à-dire des entrepôts assez confortables, assez modernes qui ont été libérés et ils ont pu les louer à des taux très raisonnables. D'ailleurs, l'évaluation de ces bâtisses, comparée à celle du marché, était faible parce que le marché est considéré par les évaluateurs comme un beau secteur. Alors, on y goûte.

Le marché, en fait, c'est un peu une petite ville; il faut faire l'entretien de rues, il faut faire du déneigement l'hiver, il faut mettre du sable, il faut éclairer. On a plusieurs obligations qu'un type n'a pas à rencontrer lorsqu'il est situé en bordure d'une rue. Justement parce que le territoire est occupé au maximum à 20%, cela implique que, si le terrain est évalué cher, cela augmente forcément le coût des taxes pour chacun des locataires qui est au marché, parce que, en définitive, les taxes sont distribuées en fonction des immobilisations que le marché a faites pour chaque locataire ou que le locataire lui-même a faites à l'intérieur de sa bâtisse.

M. Cordeau: Lorsque vous parlez de taxes, c'est surtout des frais d'administration que vous devez exiger automatiquement pour pouvoir administrer votre budget et pour l'équilibrer.

M. Couture (Alphonse): Voici, la formule c'est qu'il y a un loyer de base qui tient compte des frais d'amortissement de la dette lorsqu'on bâtit, de l'amortissement du coût de la construction sur une période d'une quarantaine d'années. Lorsqu'on a signé des baux, on savait, par expérience, qu'il y a d'autres marchés qui sont morts à cause de la taxation foncière ailleurs. D'ailleurs, question d'équité, il y a une clause qui dit qu'effectivement le compte de taxes foncières sera partagé entre les locataires et le propriétaire en fonction des immobilisations qui sont faites par le marché, pour lui même ou pour ses locataires. Autrement dit, le compte de taxes est partagé sur une base coopérative en fonction des immobilisations de chacun. Quant aux frais d'administration comme tels, c'est toujours le marché qui les a absorbés depuis le début, sans qu'il y ait majoration de loyer, mais c'est le compte de taxes qui a fait cela. Sur une période de quatre ou cinq ans cela a monté. Ce n'est pas d'hier que le terrain est évalué à $4 200 000; cela fait déjà six ou sept ans.

Le Président (M. Clair): M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Merci, M. le Président. Quand on regarde ce problème que vous avez au marché métropolitain et qu'on analyse un peu les statistiques que vous nous donnez, c'est tout de même un marché qui est de plus en plus fréquenté. Vous êtes passés de 21 000 à environ 51 000 acheteurs par semaine. Est-ce qu'il existe à Montréal, dans les politiques municipales, une aide quelconque au consommateur, parce que finalement vous rendez un service au consommateur qui vient s'approvisionner directement du producteur? Y a-t-il d'autres avenues, M. le ministre, qui pourraient être regardées, en collaboration avec la ville, pour une question d'aide au consommateur?

M. Garon: II n'y a pas de plan provisoire déposé pour l'île de Montréal, c'est-à-dire qu'il n'y a pas eu de terres retenues sur l'île de Montréal. En vertu des articles 35, 36, 37, après la formation de la commission, Montréal va avoir un avis comme les autres et elle va avoir une période de six mois. Théoriquement, en vertu des articles de la loi, il serait possible, au cours des prochains mois, de dire: On fait un plan provisoire et le marché central est zoné agricole.

Mais, avant de faire cela, je pense qu'on peut...

M. Couture (Alphonse): M. le Président, si vous me le permettez, pour répondre au député de Champlain, la ville de Montréal ne semble pas avoir tellement modifié son opinion concernant les marchés, parce qu'actuellement il reste le marché Jean-Talon. Ils ont essayé de le fermer à plusieurs reprises, mais cela a été un tollé général, c'est un marché de détail. Il a été question, avant les élections municipales, d'ouvrir le marché Maisonneuve; il y a eu des pressions assez fortes exercées par des groupes de consommateurs pour faire ouvrir ce marché. La réponse de l'hôtel de ville a été négative.

Au marché central, nécessairement, c'est différent parce que c'est un marché de gros malgré qu'avec des activités de gros vous avez, surtout en fin de semaine, au cours des mois d'été, un marché de détail qui est peut-être aujourd'hui le marché de détail le plus important de la province; il s'y passe passablement de choses. Cela est toléré. C'est d'ailleurs marqué dans la loi, les activités de détail au marché central sont considérées comme accessoires; elles sont permises par la loi. De là à dire que... Si on va trouver les autorités de la ville pour leur demander des faveurs, je n'ai pas l'impression qu'il y ait quelque chose à faire de ce côté-là.

M. Gagnon: Vous dites que depuis une quinzaine d'années vous tentez de trouver une solution, vous vous adressez à tous les paliers de gouvernement pour tenter de trouver une solution; la ville a-t-elle été rencontrée? A-t-on proposé à la ville un plan de travail quelconque de façon à réduire...

M. Couture (Alphonse): On a fait des démarches auprès du gouvernement et auprès de la ville. Finalement, l'été dernier, on a fini par obtenir que la ville accepte de zoner le terrain comme marché de gros de produits agricoles conformément à la loi qui régit le marché. C'est déjà un pas dans la bonne direction, mais je pense que c'est le plus loin qu'on peut leur demander d'aller.

Le Président (M. Clair): Le député de Champlain a-t-il d'autres questions à poser à nos invités? Le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: M. Couture, n'auriez-vous pas l'impression qu'en vertu de deux articles qu'on retrouve dans notre loi, les articles 36 et 37, il y aurait possibilité d'apporter une modification au plan provisoire qui a été déposé en date du 9 novembre? Ces deux articles peuvent permettre au ministre, bien avant que soit définie la zone agricole permanente, de modifier les plans provisoires qui ont été déposés en date du 9 novembre.

M. Couture (Alphonse): Je ne sais pas, je ne suis pas le ministre de l'Agriculture. Je pense que la Législature est souveraine jusqu'à un certain point, elle peut se permettre de faire beaucoup de choses, mais de là à dire que... Je ne voudrais pas me substituer au ministre de l'Agriculture. Je réglerais le problème du marché, je pense que cela ne prendrait pas 24 heures.

M. Cordeau: Vous pouvez...

Le Président (M. Clair): Messieurs, au nom des membres de la commission, je vous remercie de la présentation de votre mémoire. Maintenant, j'inviterais M. Albert Rioux, qui a demandé à être entendu à titre personnel.

M. Couture (Alphonse): Je vous remercie de nous avoir écoutés; on compte sur une prochaine rencontre au mois de janvier, M. le ministre.

M. Garon: Merci.

M. Albert Rioux

Le Président (M. Clair): Merci. J'invite maintenant M. Albert Rioux.

M. Rioux, au nom des membres de cette commission, je vous souhaite la bienvenue et je vous invite immédiatement à procéder à la présentation de vos commentaires ou de votre mémoire.

M. Rioux: M. le Président, je m'aperçois que mon mémoire est adressé au ministre de l'Agriculture. Excusez-moi de cette dérogation aux règlements parlementaires, c'est peut-être parce que cela m'inspire plus de m'adresser directement au ministre.

Je vous félicite, M. le ministre, de présenter cette loi depuis longtemps réclamée. C'est un geste politique courageux, parce que vous ne pourrez pas satisfaire tout le monde. Aucun autre gouvernement n'a osé affronter le lobby des

spéculateurs et les intérêts de quelques cultivateurs anticipant leur retraite. Je ne m'atterderai pas à prouver que la perte accélérée de nos meilleures terres arables menace l'avenir de notre agriculture. Je n'ai qu'à me référer à l'excellent document de travail préparé par votre ministère et au discours étoffé que vous avez prononcé en présentant cette loi.

Vous savez que l'incitation seule ne peut arrêter la perte accélérée de notre sol arable. La loi que vous proposez prévoit la création d'une commission de protection du territoire agricole du Québec ayant le pouvoir de prendre les mesures radicales qui s'imposent. Vous admettez, M. le ministre, que cette loi devrait protéger tous les sols arables du Québec, comme le suggère le mémoire de l'UPA. Alléguant que vos études ne sont pas prêtes pour le reste du territoire, vous avez dû limiter cette protection aux régions les plus fertiles et les plus menacées, la plaine du Saint-Laurent et l'Outaouais.

Cependant, il se fait aussi de l'agriculture dans l'Estrie, la Beauce, le Saguenay-Lac-Saint-Jean, l'Abitibi, le Témiscamingue, le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie. Les mémoires de l'UPA et de l'Ordre des agronomes de ces régions font entendre le même cri d'alarme. Les agronomes de Chicoutimi, par exemple, écrivent: "Le développement anarchique dont la région est victime." L'Alcan a récemment acheté 1000 acres de terre arable pour construire une nouvelle aluminerie.

Des chalets d'été, des résidences ont envahi des rangs entiers de fermes prospères. Des hommes d'affaires, des professionnels achètent de bonnes terres sur lesquelles ils bâtissent une maison, en laissant le reste en friche. On estime que 10 000 acres sur un total de 300 000 sont perdues pour l'agriculture depuis quelques années.

Je pourrais faire le tour des régions laissées de côté par la loi pour prouver que ce gaspillage de nos meilleures terres s'accélère partout. Les spéculateurs, frustrés dans le territoire protégé, vont se lancer à l'assaut des sols qui ne bénéficient pas de la même protection.

C'est pourquoi nous croyons, avec l'UPA et l'Ordre des agronomes, qu'il est urgent d'étendre la loi de protection des sols à tout le territoire agricole du Québec. M. Marcel Léger demande aux six millions de Québécois d'être ses inspecteurs pour l'application de la loi de l'environnement. Pourquoi n'enrôleriez-vous pas toutes les régions dans cette croisade pour la protection de leur propre sol? Aucune loi d'aménagement, d'environnement, de protection des sols n'atteindra ses objectifs si vous n'intéressez pas la population et surtout l'élite de chaque région.

La montagne a enfanté d'une souris dans le Bas-Saint-Laurent, parce que les deux gouvernements, fédéral et provincial, se sont bagarrés sur la place publique, sans mettre la population locale dans le coup. C'est pourquoi la centaine de millions de dollars dépensés a produit de piètres résultats.

Une étude qui a coûté $5 millions concluait à la nécessité de concentrer les usines laitières, une mesure que préconisaient, depuis quelques années, l'UPA et l'Ordre des agronomes de la région.

Des technocrates de Québec décidèrent un jour de fermer une vingtaine de paroisses qui auraient été viables avec une politique appropriée. Les mouvements dignité 1 et dignité 2 arrêtèrent cette destruction. Les dirigeants locaux prirent leurs affaires en main. Plusieurs paroisses condamnées à mort sont devenues plus prospères que jamais.

Votre gouvernement, M. le ministre, a proclamé qu'il veut donner aux différentes régions la possibilité de promouvoir leur propre développement économique et social. Il a déménagé la gestion des pêcheries à Gaspé. Le ministre préposé à l'aménagement du territoire présentera bientôt un projet de loi pour décentraliser l'administration. Grâce à une loi que vous venez de faire approuver, les cultivateurs pourront emprunter des banques et des caisses populaires, dans toutes les régions.

Vous avez une occasion en or d'appliquer ce principe primordial de la régionalisation. Vous avez à votre disposition douze organismes régionaux prêts à servir de cadres pour l'application de votre loi de protection des sols. Le Québec est trois fois plus étendu que la France. Il compte plusieurs régions, différentes par leur sol, leur climat, leur distance des marchés et d'autres conditions économiques. Chacune d'elles exige une politique agricole appropriée pour donner son plein rendement.

A cette fin, le ministère de l'Agriculture a divisé le Québec en douze régions agronomiques dirigées par autant de coordonnateurs. Chaque région, composée de quatre à dix comtés, possède un petit ministère de l'Agriculture, comptant de 35 à 65 agronomes ou techniciens agricoles, dont une vingtaine sont affectés au bureau régional et les autres, au bureau de comté. (16 h 45)

Les bureaux régionaux ont leurs chefs-lieux à Rimouski, Sainte-Foy, Saint-Joseph-de-Beauce, Nicolet, Rock Forest, Saint-Hyacinthe, Châteauguay, Buckingham, Noranda, L'Assomption, Cap-de-la-Madeleine et Aima. Ils sont situés au centre de régions homogènes, mais différentes les unes des autres. On ne peut pas appliquer les mêmes politiques agricoles dans la région métropolitaine à proximité d'un grand marché et comptant 180 jours sans gelée que dans l'Abitibi avec 90 jours sans gel et à 500 milles des grands marchés.

M. le ministre, vous avez souvent proclamé avec éloquence la nécessité de régionaliser l'agriculture pour que chaque région donne son plein rendement et contribue, selon ses possibilités agricoles, à l'autosuffisance alimentaire du Québec, il semble que le ministère n'exige pas assez de ses bureaux agricoles régionaux, dont l'efficacité dépend de trois conditions.

La première est qu'ils aient assez de pouvoirs décisionnels non seulement pour orienter les cultures et élevages déjà pratiqués, mais aussi pour découvrir et mettre en marche de nouvelles

productions végétales et animales qui seraient rentables dans certains comtés, comme l'élevage du mouton ou du boeuf, la culture des céréales, quelques-unes des 35 denrées que nous importons et que nous pourrions produire.

La deuxième condition est qu'ils travaillent en étroite collaboration avec les autres organismes du milieu.

La troisième condition, et comme corollaire indispensable, est qu'ils aient leur mot à dire dans la protection des sols de leur région.

Vous avez, M. le ministre, l'occasion idéale de réaliser ces trois conditions, d'accentuer la régionalisation de l'agriculture et d'appliquer d'une façon plus démocratique votre loi de protection des sols. Il suffirait de former, dans chacune des douze régions agronomiques, un comité composé de représentants de l'UPA, de délégués municipaux désignés par les conseils de comté et d'agronomes du bureau régional.

Vous alléguez, M. le ministre, que votre ministère n'a pas eu le temps de préparer les cartes nécessaires pour les régions laissées de côté par la loi, mais ces cartes existent. Hier après-midi, je lisais dans la Presse que le président de la région du Saguenay déplorait que votre loi ne s'applique pas à la région de Chicoutimi-Lac-Saint-Jean-Saguenay. Il dit: Nous avons les cartes nécessaires pour mettre cette loi en application. Nous les avons et nous les connaissons. J'en sais quelque chose, c'est moi qui ai signé le premier accord avec Ottawa pour la classification des sols — arrêtez, c'est en 1938 — il y a quarante ans. Il y a quarante ans qu'on a fait cette classification. Elle est prête pour toute la région. Voici, par exemple, une carte comme illustration. C'est la carte des sols de la municipalité de Saint-Fabien, dans Rimouski. C'est en dehors de la zone. Vous voyez ici les bleus, ce sont les sols de plus mauvaise qualité, no 6. A mesure que cela devient moins bleu, les sols s'améliorent. Le jaune, ce sont les...

M. Cordeau: C'est vert, cela.

M. Picotte: C'est vert bleu.

M. Cordeau: C'est vert, d'accord.

M. Picotte: Cela pourrait être "vers demain".

M. Rioux: Excusez-moi, c'est vert, mais cela devient bleu ici. Mais quand cela devient bleu, cela s'améliore.

M. Cordeau: II me semblait bien.

M. Rioux: Ici, c'est jaune. Ce sont les meilleures terres, les jaunes. Vous voyez, à la mesure d'une municipalité, la variété de terres qu'il y a. Saint-Fabien, le village, est bâti dans les meilleures terres. Il n'est pas besoin de le déloger de là, mais il y a des leçons à prendre pour l'avenir, par exemple. Ces cartes existent. Des équipes de géologues, agronomes et ingénieurs forestiers ont fait la classification des sols dans tout le Québec, d'après leur texture, leur composition physique, chimique et biologique, leurs possibilités agricoles, en tenant compte de la demande et de la distance des marchés. Elles ont tracé des cartes de sols que possèdent les bureaux agronomiques régionaux et que peuvent consulter les dirigeants de l'UPA et des municipalités. Ces dirigeants ont, d'ailleurs, une connaissance pratique de la valeur agricole des terres de leur région.

Comment fonctionnera le comité régional? Toutes les ventes de sols à des non-résidents ou pour des fins non agricoles, toutes les transactions mentionnées dans le projet de loi 90 que nous avons là seront d'abord soumises, sous peine de nullité, à ces organismes qui prendront des décisions selon des barèmes déterminés par cette loi, notamment, par les articles 26 à 32, 70 et le reste. Seules les décisions du comité contestées par une des parties seront soumises à la Commission de protection des sols.

Quels sont les problèmes que le comité aura à régler? Evidemment, cette loi n'arrêtera pas le progrès du Québec. On continuera à construire des routes, des installations électriques, des usines, des centres commerciaux, des résidences et le reste. Il s'agira, pour le comité régional d'empêcher ces développements d'envahir nos meilleures terres. La plupart de ses décisions seront dictées par le bon sens autant que par la technique, il est clair qu'il ne permettra pas d'établir un terrain de golf sur un sol de première classe. Il se basera, d'ailleurs, sur les directives de la commission provinciale qui ne tardera pas à établir une jurisprudence basée sur ses propres décisions. Les parties sauront qu'il ne servira à rien d'en appeler à la commission quand un comité régional ne fera qu'appliquer les articles de la loi.

Vous prenez, par exemple, la carte que je vous ai montrée. Supposons qu'une scierie veuille s'établir à Saint-Fabien, elle s'adresse au comité. Si la scierie veut s'établir dans la partie jaune, le comité dit: Non, c'est de la terre arable de première qualité. Alors, il y a assez de parties vertes pour établir une scierie dans Saint-Fabien sans gâter une partie de la meilleure terre de la paroisse. C'est un principe général que les comités régionaux devront établir. Je vous dis que cela dépendra surtout du bons sens. On ne fera pas un terrain de golf sur la meilleure terre. Je pense qu'il faut faire confiance aux gens de chaque région. J'ai dit que cela s'appuierait sur le bon sens, mais le bon sens, c'est une denrée, M. le ministre, qui est autosuffisante dans nos régions rurales, pour employer une de vos expressions favorites.

Je crois qu'il faut en profiter pour leur donner un peu d'initiative.

Le Président (M. Boucher): Je m'excuse, M. Rioux, s'il vous plaît, compte tenu de l'heure, est-ce que vous voulez vous en tenir à votre texte?

M. Rioux: J'ai été impliqué dans une loi comportant deux paliers décisionnels: la Loi du concordat, adoptée par le gouvernement fédéral en 1934 pour régler les dettes des cultivateurs

pendant la crise. Chaque commission provinciale était présidée par un juge et comptait deux autres membres représentant les créanciers et les débiteurs. Les cultivateurs endettés soumettaient leur cause à un séquestre nommé dans chacun des quelque 60 comtés ruraux de la province. Seuls les cas qui n'avaient pas été réglés par un séquestre, soit environ 50%, allaient devant la commission provinciale. S'il n'y avait pas eu un séquestre prévu dans cette loi, un séquestre par comté, la commission provinciale aurait été enterrée, nous n'aurions jamais pu en sortir. Les gens allaient devant le séquestre et les séquestres habiles réglaient 60% des cas. Il y avait seulement les cas qui n'étaient pas réglés devant le séquestre qui venaient devant nous autres. Quand cela arrivait devant nous autres, il y avait déjà un déblayage de fait. On savait pourquoi l'entente n'avait pas été conclue. On savait ce qui avait bloqué. Là, on avait déjà un déblayage de fait. Je vous prédis que si vous laissez seulement une commission provinciale, vous allez avoir une avalanche de cas, un embouteillage. Je suis convaincu que les comités régionaux de protection des sols régleront au moins 50% des cas qui leur seront soumis.

L'administration de la loi coûtera-t-elle plus cher? Je suis convaincu du contraire. Les membres des comités régionaux recevront un cachet lorsqu'ils siégeront seulement. La commission provinciale exigera beaucoup moins de personnel et déboursera moins de frais de voyage. Ces comités pourront rendre d'autres services. L'exercice de leurs fonctions mettra les membres au courant des fermes à vendre pour constituer la banque des sols prévue par la loi no 100. Pourquoi ces comités ne seraient-ils pas les agents du ministère de l'Agriculture pour étudier et régler les problèmes d'environnement dans la région?

Pourquoi multiplier les organismes, un organisme pour l'environnement, un organisme pour la banque des sols, donc, pour régler les problèmes de l'environnement? Ces comités savent certainement d'où viennent les vents dominants dont on a tant parlé.

Cette régionalisation de la protection des sols devrait recevoir l'approbation de l'UPA, qui est aussi structurée régionalement en trois paliers: le cercle paroissial, la fédération diocésaine et la centrale. L'OCC ou l'UPA doit au clergé ses premiers succès dans les cadres de la paroisse et du diocèse. Plus tard, elle a divisé quelques diocèses pour s'identifier davantage à chaque région du Québec.

Dans son mémoire. l'UPA insiste sur la nécessité d'un organisme par région agricole qui aurait des pouvoirs décisionnels et qui soumettrait à la commission provinciale les causes contestées par une des parties. C'est précisément dans le cadre des douzes régions agronomiques que le ministère de l'Agriculture peut immédiatement protéger tout le territoire du Québec selon la principale exigence de l'UPA.

Je me suis basé sur le mémoire de l'UPA présenté au ministre avant la passation de la loi. Je ne lis que le résumé. 4. Que la loi de zonage s'applique dès le départ à l'ensemble du territoire québécois. C'est cela que l'UPA demandait. Ensuite:

Que soit créé un organisme par région agricole regroupant sous la coordination des représentants des producteurs agricoles les parties intéressées par la loi du zonage. Cet organisme aura pour tâche de délimiter, sur une base permanente, le territoire agricole à partir de la carte de zonage temporaire. Si un tel organisme arrive à une entente, il soumettra pour approbation ses recommandations à la régie. Si les participants n'arrivent pas à s'entendre, les points de vue divergents seront soumis à la régie, qui tranchera la question.

Donc, la région sera un arbitre comme notre commission provinciale de concordat agricole l'était.

M. le ministre, vous avez un choix difficile à faire, centraliser la protection des sols dans une grosse machine ou partager cette responsabilité avec des organismes régionaux. Le gouvernement s'est trouvé devant le même dilemme pour l'élec-trification rurale. Cette loi fut une réussite incontestable, parce qu'elle a mis les intéressés dans le coup. Il y a une analogie quasi complète entre les deux situations.

J'avais préconisé dans une thèse de doctorat l'étatisation de la production électrique et l'élec-trification des campagnes par des coopératives régionales. Quand je lui ai parlé de ce projet, M. Duplessis me répondit qu'il n'avait pas de sens. Lorsque le premier ministre Godbout présenta sa loi étatisant la Montréal Light, Heat and Power, je lui exposai le succès phénoménal des coopératives d'électricité aux Etats-Unis et dans d'autres pays. Il me promit d'ajouter un chapitre comportant la création de coopératives pour distribuer l'électricité dans les régions rurales. Quelques semaines plus tard, un haut fonctionnaire m'avisait que le Cabinet provincial renonçait à ce projet parce que le lobby des compagnies s'y opposait. Je rencontrai le chef de l'Opposition Duplessis, qui changea d'avis à son tour et fit présenter une motion demandant au gouvernement d'électrifier les campagnes par les coopératives. Sa motion fut battue, mais, devenu premier ministre, il fit adopter sa loi d'électrification rurale. Ce fut un succès prodigieux. Les coopératives et les compagnies, stimulées par leur exemple, construisirent 23 000 milles de lignes, soit le tour du monde à notre latitude pour desservir 180,000 familles, faisant passer le pourcentage des fermes électrifiées de 20% à 97%, hissant le Québec à la tête de toutes les provinces. (17 heures)

Cette réussite fut loin d'être onéreuse. Les déboursés de l'Etat pour l'office et les coopératives ne dépassèrent pas $20 millions, comparés à $120 millions que l'Ontario a consacrés en subvention aux municipalités pour électrifier les campagnes. C'est parce qu'ils étaient vitalement inté-

ressés que les membres et administrateurs des coopératives travaillèrent bénévolement d'arrache-pied pour recueillir les parts sociales, obtenir les droits de passage et assurer le succès de leur réseau électrique.

J'ai préparé cette Loi de l'électrification rurale avec les légistes Emery Beaulieu et Edouard Asselin. Nous l'avons divisée en deux chapitres, le premier concernant l'Office de l'électrification rurale, le second, les coopératives d'électricité. Je suggère d'appliquer la même formule à la loi de la protection des sols. La première partie est déjà rédigée. C'est le projet de loi no 90 créant la commission provinciale. La seconde, beaucoup plus courte, définira la composition, le rôle et les pouvoirs des comités régionaux formés dans le cadre des régions agronomiques du ministère de l'Agriculture.

M. le ministre, vous vous donnez corps et âme à vos fonctions. Vous avez déjà d'excellentes mesures à votre crédit. Vous voulez faire adopter la loi de la protection des sols arables la plus parfaite possible. C'est sans doute aussi le désir des députés de l'Opposition. Aucun parti ne ferait de la petite politique quand il s'agit de défendre le sol de la patrie contre des envahisseurs autochtones ou non résidents.

Permettez-moi de vous suggérer de former un comité composé de membres de cette commission parlementaire et de juristes pour tracer les grandes lignes du chapitre sur les organismes régionaux de protection des sols arables. Cette addition ferait tomber la plupart des objections soulevées contre l'actuel projet de loi. Elle remédiera à la centralisation et à l'autoritarisme qu'on lui reproche. Elle empêchera, par un premier triage à la base, les embouteillages à la commission provinciale. Elle remportera l'adhésion spontanée, la collaboration active de l'élite et de la population de chaque région. Elle vous permettra d'intégrer la protection des sols de tout le territoire du Québec dans cette politique de régionalisation de notre agriculture.

M. le ministre, j'ai ici la liste de tous les agronomes et des techniciens agricoles attachés aux douze régions agronomiques. Il y en a 465. Comme je vous l'ai dit, le minimum dans chaque région agronomique est de 40 et le maximum de 60. Vous auriez là tout de suite 465 bénévoles travaillant pour votre loi. Vous avez ensuite dans chaque région une élite de cultivateurs très intelligents, très débrouillards qui vous feraient aussi au moins 500 autres bénévoles. Vous auriez tout de suite 1000 bénévoles qui travailleraient. Je vous dis que cela remplacerait un tas de fonctionnaires à la centrale.

Ensuite, savez-vous que chaque fois, cela sera des cas particuliers? J'ai entendu la plus grande partie des discussions qui ont eu lieu au dernier congrès de l'UPA. Tous ceux qui ont pris part à la discussion nous arrivaient avec des cas particuliers et des hypothèses. J'ai entendu ensuite la plupart des discussions qui ont eu lieu à l'Assemblée nationale. Je suis retraité et j'ai eu beau écouter cela. Ecouter les débats de l'Assemblée nationale, cela veut la plupart des navets qu'on nous sert à la télévision.

M. Giasson: Cela vaut ou cela s'équivaut?

M. Rioux: Alors, tous les cas qui vont être présentés sont des cas particuliers. J'ai aussi écouté les discours, comme je vous l'ai dit, à l'Assemblée nationale. La plupart des députés de l'Opposition qui ont parlé sur cette question ont cité des cas hypothétiques, des cas qui peuvent se présenter, évidemment, des cas qui se sont présentés. Ils ont raison de les citer, peut-être, mais je vous dis que la plupart des cas, si vous créez des organismes régionaux, vont se régler régionalement. Vous pouvez citer des cas hypothétiques. Je connais un cultivateur qui a placé ses quatre enfants, qui a donné des terrains à ses quatre enfants sur sa terre. Ses enfants travaillent en ville. C'est contre la nouvelle loi, n'est-ce pas? Seulement, cette partie de la terre, c'est près d'une dépression, c'est un rocher. Le roc affleure ici et là. Ce n'est pas cultivable. Alors, le comité régional va dire: C'est une terre qui n'est pas cultivable. C'est vrai que la loi défend à un cultivateur de placer ses enfants sur sa terre, mais c'est une terre qui n'est pas cultivable. Alors, le bon sens va dire: C'est très bien, bâtissez-les, donnez ces terrains à vos enfants. Je connais un autre cas, un cultivateur qui vend sa terre à son fils et qui...

Le Président (M. Boucher): M. Rioux, je m'excuse de vous interrompre. Compte tenu de l'heure, est-ce que vous avez terminé votre mémoire?

M. Rioux: Oui.

Le Président (M. Boucher): Nous pourrions passer aux questions des membres de la commission.

M. Rioux: C'est ce que je fais, je réponds aux questions d'avance. Je savais que la question me serait posée.

Le Président (M. Boucher): Justement, si vous répondez à toutes les questions avant qu'elles soient posées, on ne pourra plus vous parler.

M. Giasson: On n'aura pas d'autres questions.

Le Président (M. Boucher): Alors, je donne la parole à M. le ministre. D'accord? Merci. M. le ministre.

M. Garon: Vous savez, M. Rioux, dans toute affaire, il faut faire des choix. Cette année, on a entrepris des programmes régionaux à peu près dans toutes les régions, mais l'affaire la plus difficile dans les programmes régionaux, c'est de faire faire des choix.

M. Rioux: S'il vous plaît, je ne suis pas de votre âge, je suis plus vieux que vous et, à mon

âge, j'ai l'oreille dure un peu. Voulez-vous parler plus fort?

M. Garon: Le principal problème, c'est de faire faire des choix, parce que, si on ne demandait pas aux régions de faire des choix, vous savez ce qu'on aurait? On aurait tous les mêmes programmes dans toutes les régions pour toutes les productions, indépendamment des vocations des régions, indépendamment de la capacité de production des régions. Je comprends que votre mémoire procède d'une grande générosité, mais, quand on arrive dans le concret, les gens peuvent dire: II faudrait bien faire du bleuet parce qu'il y a un gars qui en a déjà fait. Il faudrait un programme sur le bleuet. Finalement, on se retrouve avec autant de ministères de l'Agriculture dans les régions qu'on en a à Québec. Dans les régions, le grand problème, je vais vous dire ce que c'est: c'est que tout le monde veut être dans la région, mais ne veut plus être dans le comté. Alors, on se retrouve avec une centralisation au niveau de la région. Actuellement, on a fait une décentralisation. On n'en a pas parlé beaucoup. On a fermé les bureaux de l'hydraulique agricole pour les envoyer dans les comtés; pas dans les régions, dans les comtés, dans les 84 bureaux de comté. Si on ne disait pas un mot et qu'on laissait faire le ministère, ce ne serait pas long que vous n'auriez plus de bureaux de comté ou des bureaux de comté très faibles. Tout le monde se retrouverait dans la région avec le bureau régional.

Notre tendance, actuellement, au lieu de faire les plans au niveau de la région, est de les faire au niveau des bureaux de comté pour que ce soit le plus proche possible de l'agriculteur, parce que c'est là que les gens rendent des services à l'agriculteur. C'est le travail qu'on fait. Dans les années qui s'en viennent, cela va être de décentraliser le ministère encore plus qu'il n'est pour le rapprocher de l'agriculteur.

Quand vous dites que les commissions régionales coûteraient moins cher, vous savez, dans les années trente, les gens travaillaient gratuitement, mais aujourd'hui ils demanderaient tous des per diem. On se retrouverait avec 12 commissions... C'est la réalité. Ne charrions pas, c'est la réalité.

M. Roy: Je n'ai pas dit un mot, je n'ai pas dit un mot, M. le Président.

M. Garon: II faut bien... Non, mais je vois ça, je vois.

M. Giasson: Vous le sentez venir.

M. Garon: Je verrais ça, on aurait 12 commissions, avec 5 ou 6 commissaires, à tous des per diem. 60 commissaires. Et comme c'est per diem, c'est encourageant de faire des réunions, parce que plus tu en fais, plus c'est payant. Moins tu en fais, moins c'est payant. Alors, vous vous retrouvez avec une autre bureaucratie, avec des délais encore plus longs. C'est pour ça qu'on a pensé à ce problème. L'idéal, pour moi, j'aurais pensé que cela aurait été ça. On a pensé, pour éviter le plus possible la bureaucratie, que ce soit le plus simple possible, que le débat se fasse au niveau des municipalités, et si cela avait été les conseils de comté... Je ne dis pas qu'éventuellement ça ne pourra pas être les conseils de comté. Seulement, il va y avoir la loi de l'aménagement qui va arriver, mais actuellement, il faut prendre les conseils de comté tels qu'ils sont. Je ne voulais pas faire la réforme des conseils de comté en même temps qu'on fait la protection des terres. Les conseils de comté sont comme ça. Il faut aller au niveau municipal, c'est la réalité la plus proche des gens. Faire le débat au niveau des municipalités, mais pas en créant de nouvelles structures, pas en engageant de nouveaux fonctionnaires et de nouveaux organismes, mais avec des organismes existants, pour qu'il y ait le moins de bureaucratie possible.

On s'est dit: Le débat devrait avoir lieu au niveau de la municipalité, avec des organismes. C'est pour ça que j'ai dit qu'il faudrait préciser le sens de l'article 35 pour qu'il n'y ait pas seulement des représentations écrites, mais aussi des audiences publiques où pourront venir faire des représentations, des discussions, les gens de l'UPA, les producteurs agricoles, les gens des conseils de comté, possiblement les gens des conseils régionaux de développement ou d'autres personnes intéressées, mais au niveau des municipalités, sans créer d'organismes nouveaux, sans créer de structures nouvelles, en utilisant ce qui existe déjà. On peut multiplier les structures. Je pense que ça ne donne rien d'en multiplier d'autres, il faut utiliser celles qui existent, actuellement, sur le territoire.

Il y a l'aide technique, comme vous dites, du ministère de l'Agriculture. Le ministère des Affaires municipales vient de faire une décentralisation à la faveur du projet de loi sur la protection du territoire agricole pour fournir les services de professionnels sur tout le territoire québécois des municipalités. C'est la première fois que ça se fait. 31 professionnels vont aider les municipalités. Les gens vont savoir comment fonctionner, mais avec ce qui existe déjà. C'est évident que quand, au niveau local, par exemple, avec l'aide du ministère, avec l'aide des gens des Affaires municipales, les organismes au niveau local vont discuter de cela ensemble, ils vont dire comme vous dites: notre affaire, c'est quoi? Il va y avoir des gens pour leur expliquer les capacités des sols, tout ça, faire le périmètre et dégager ce qui n'est pas bon pour l'agriculture dans la municipalité, sans perdre le caractère de continuité, il va y avoir l'agriculture en même temps.

A ce moment-là, c'est évident que si ça arrive à la commission, vous avez la municipalité qui dit: Bon, nous autres, on a regardé ça tous ensemble, les représentations sont faites à la commission, tout le monde est d'accord. Là, il n'y aura pas de problème. C'est quand il va y avoir des désaccords qu'il va y avoir des problèmes. Les gens nous disaient: ça prend des décisions rapides, par exemple, qui ne sont pas soumises trop à des

pressions politiques. Je pense qu'une commission provinciale... Il faut regarder les articles qui s'écrivent dans les journaux. Les journalistes vont en Colombie-Britannique; d'où vient le problème, disent-ils? Ils vous disent que le problème vjent du même endroit: les pressions politiques qui essaient de contrevenir aux décisions qui seraient rendues d'une façon normale. (17 h 15)

A ce moment-là, il y a des pressions politiques qui sont faites et je pense que la meilleure protection au sujet des pressions politiques, dans une phase où il n'y a personne d'expert en zonage agricole... Il ne faut pas se faire d'illusion, il n'y en a pas d'experts dans le zonage agricole, parce qu'il ne s'en est jamais fait, en pratique. Il y a eu quelques municipalités qui en ont fait un peu. Alors, la commission, pendant les premières années, sera composée de gens qui seront les seuls dans le Québec. Il ne faut pas se faire d'illusion. Les gens qui travaillent là-dessus ce sont des gens qui travaillent depuis quelques années. Ceux qui travaillaient dans le temps des libéraux vont travailler avec nous autres. Il y en a d'autres qui travaillent depuis moins d'années. Mais les seules gens qui connaissent cela vraiment, qui connaissent les différentes hypothèses et qui ont étudié les conséquences des décisions à rendre, c'est l'équipe qui travaille là-dessus actuellement.

Si on veut aller assez rapidement et procéder sans créer de structures inutiles et des paliers... Des gens nous ont dit, par exemple: Vous avez mis un délai de six mois pour l'appel. C'est trop long, parce qu'on ne pourra pas prendre de décision tant que le délai de révision ne sera pas passé. Plusieurs organismes nous ont demandé de ramener cela à trente jours. Ils ont dit: En attendant, on ne pourra pas prendre de décision, parce qu'il peut y avoir une révision et que la décision peut être changée.

Vous voyez à quel point il y a des articles qui sont importants. Je pense que, du jour au lendemain, garrocher dans le décor un tas de commissions régionales ou de comités régionaux qui se retrouvent avec des cartes de sols... Il y a des cartes de sols et il n'y a pas beaucoup de gens qui connaissent les sols au Québec. Il y a plusieurs façons d'interpréter ces cartes. Elles ont été bâties d'une façon particulière. Les pédologues, au Québec, se comptent sur les doigts de deux mains.

Je pense qu'il faut agir prudemment. C'est pour cela qu'on a voulu faire un débat au niveau municipal, avec l'intervention des organismes locaux et régionaux, mais en même temps, pour qu'il y ait un organisme qui s'occupe de la conformité des décisions, avec la protection du territoire agricole.

Au fond, il faut voir aussi que les organismes, dans les premiers mois... Il ne s'est jamais parlé autant, depuis quelques mois, de zonage agricole, ce que cela signifie et les implications que cela apporte. Cela se parle. Il ne s'en parlait pas avant. Il s'en parlait dans les grands principes, mais là, concrètement, qu'est-ce que cela veut dire? Les gens parlent de cela, à toutes fins utiles, depuis septembre. Avant, il ne fallait pas. Là, il s'en parle plus concrètement. Les gens voient les hypothèses, les problèmes que cela pose. Et avec le projet de loi, ils sont allés encore plus loin, parce qu'on entre dans les détails et qu'il y a eu des décisions prises. C'est le fruit des années de réflexion qui sont dans ce projet de loi. Il y a des choix qui sont faits. Avec la commission qui va commencer à être appliquée, dans six mois, un an, deux ans, cette loi va connaître des ajustements pour tenir compte de la réalité.

Je pense qu'il s'agit d'un problème complexe. Il s'agit d'un problème très complexe, qu'il faut traiter avec prudence, et qui n'est pas simple, à part cela. Dire que n'importe quel petit Croteau va arriver à une commission et va prendre des décisions, ouf! Je vous dis que c'est un problème complexe...

M. Picotte: II va s'ajuster en cours de route.

M. Garon: Oui, mais il faut y aller prudemment. C'est pour cela que je dis toujours qu'il faudrait avoir le plus de discussion, le plus d'organismes impliqués sur le plan local, mais ne pas multiplier les structures intermédiaires.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: M. le Président, le moins qu'on puisse dire, c'est que M. Rioux a l'air d'aimer l'agriculture. Il a vraiment choisi la bonne profession quand il a décidé de s'en aller là-dedans.

Je voudrais tout d'abord vous féliciter de votre mémoire et de vos suggestions qui ont été très intéressantes. Vous comprendrez cependant, M. Rioux, que nous en sommes rendus à peu près au quarantième mémoire. Souventefois les mêmes suggestions ont été faites et les mêmes choses sont revenues. Si on a un peu moins de questions à vous poser, c'est parce que ces questions ont été débattues à plusieurs reprises.

Il y aurait une chose, entre autres. On doit dire d'ailleurs que nous sommes d'accord sur plusieurs questions soulevées dans votre mémoire, et nous en avons discuté. Le ministre a prêté une oreille assez attentive à ces suggestions. Il y a une chose entre autres — j'aurai une seule question à vous poser — on sait que, dans le projet de loi, tel que rédigé présentement, il n'est pas question de terres vendues à des non-résidents de même que dans la définition d'"agriculture", à l'article 1, il est question qu'on parle de terre en friche. Selon vous, pensez-vous qu'il serait primordial qu'à l'intérieur du projet de loi 90, ces deux points majeurs soient inscrits dans le sens qu'on ne puisse laisser à l'intérieur d'un zonage agricole les terres en friche et que ces terres ne soient pas vendues à des non-résidents? J'aimerais connaître vos brefs commentaires en ce sens.

M. Rioux: Je crois qu'il devrait y avoir une clause pour empêcher la vente de terres agricoles à des non-résidents, c'est évident. Je le crois.

D'ailleurs, dans le programme même du Parti québécois, c'est indiqué en grosses lettres, la défense de vendre des terres à des non-résidents. M. le ministre disait tantôt qu'il fallait utiliser ce qu'on a. Justement, les douze bureaux régionaux sont payés déjà par le ministère de l'Agriculture. C'est déjà quelque chose que le ministère de l'Agriculture paie. Les fonctionnaires, il les paie déjà. Je crois que, quand on peut intéresser des gens bénévolement, leur donner la fierté, l'amour de leur petite patrie, le dévouement pour leur petite patrie, on peut obtenir n'importe quoi d'eux. C'est pourquoi je crois qu'aucune loi ne peut avoir de succès si elle ne se base pas sur les gens du milieu, de chaque région. C'est mon opinion. Cela me fait bien de la peine que le ministre de l'Agriculture... Il aurait eu une loi tellement merveilleuse à faire avec ce qu'il a en main, ces douze régions où il paie déjà les bureaux, où il paie déjà des agronomes. Vous savez, M. le ministre, quand on fait la Loi de I'électrification rurale, cela a été une autre affaire. On a été obligé de parcourir la province, de fonder 110 coopératives pour ensuite en garder 48, après des fusions et après toutes sortes... pour diriger ces coopératives. Vous, vous êtes bien chanceux, vous avez déjà douze bureaux régionaux tout prêts, des instruments merveilleux pour faire votre loi.

M. Picotte: D'accord, M. Rioux, cela a été mentionné à quelques reprises dans d'autres mémoires aussi. L'autre partie de ma question à laquelle vous n'avez pas répondu concerne les terres en friche.

M. Rioux: Oui.

M. Picotte: Pensez-vous que cela devrait être biffé dans le projet de loi?

M. Rioux: Voici: J'ai passé par des paroisses qui ont été fermées depuis ce temps-là. J'ai vu de beaux champs de grains, j'ai vu de beaux troupeaux et ces paroisses ont été fermées. Il y a bien des terres en friche qui pourraient être utilisées actuellement pour faire des céréales, pour faire l'élevage du boeuf, l'élevage du mouton, etc. J'ai été dans le désert du Sahara. Si vous voyiez ce qu'il y a à manger pour les moutons. Cependant, vous y voyez d'immenses troupeaux de moutons. Je crois qu'on pourrait utiliser beaucoup de terres du Québec à faire du mouton, des terres où on ne peut pas faire de culture intensive. Ce programme, les cartes de sols indiquent les possibilités agricoles de chaque sol. Elles sont faites pour toute la province.

M. Picotte: M. le Président, je veux remercier encore une fois M. Rioux de sa collaboration, en espérant que les bonnes remarques qu'il a faites seront non seulement appréciées mais étudiées attentivement par le ministre. Merci infiniment.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Maskinongé. M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Merci, M. le Président. Brièvement, je voudrais remercier M. Rioux de l'excellent dossier qu'il nous a présenté. Vos remarques sont passablement importantes, je pense, parce que j'ai remarqué que vous avez soulevé des points qui s'apparentent étrangement avec mon discours de deuxième lecture. Je me demande bien qui a volé qui, quoi à qui. En tout cas! J'ai aussi apprécié le fait que vous avez passé des remarques dans le sens que plus c'était bleu, meilleur c'était. De toute façon...

M. Garon: Insinuez-vous que M. Rioux est un voleur? Il vous accuse quasiment d'être un voleur.

M. Dubois: Cela peut être moi le voleur. M. Garon: Mais vous ne le connaissiez pas.

M. Dubois: Non, mais je peux avoir lu le mémoire avant.

M. Giasson: J'y vois plutôt une similitude de pensée qu'un vol à l'étalage.

M. Ouellette: ... M. le Président, comme le député de Huntingdon, c'est là la ressemblance fondamentale des deux discours.

M. Giasson: Non, M. Rioux disait: M. le ministre.

Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît! M. le député de Huntingdon. Allez-y, votre question.

M. Dubois: Non, j'ai fini. Je n'ai pas de question à soulever. Je vous remercie infiniment, M. Rioux.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: A mon tour je veux me joindre à mes collègues pour remercier bien sincèrement M. Rioux qui nous a présenté un mémoire basé sur une longue expérience, une riche expérience et le gros bon sens. M. Rioux nous a dit que dans le milieu rural, il y avait une autosuffisance de gros bon sens. Je voudrais peut-être ajouter...

M. Garon: ... fonctionnaires qu'en vous, par exemple!

M. Roy: Pardon? Comment dites-vous cela?

M. Garon: J'ai plus confiance en nos fonctionnaires qu'en vous.

M. Roy: Qu'en moi?

M. Garon: Oui, parce que vous dites toujours qu'ils sont bien lents, nos fonctionnaires.

M. Roy: Un instant! Je n'ai pas interrompu le ministre, si ma mémoire est bonne. Je voulais ajouter aussi que dans le milieu rural, le gros bon

sens est une richesse renouvelable parce qu'il y en a encore du gros bon sens dans le milieu rural et il y en a beaucoup. Je veux vous remercier bien sincèrement, compte tenu que vous avez fait une analyse très sérieuse de la question du zonage agricole. Vous êtes venu connaissant à fond l'agriculture québécoise, la mentalité rurale... Le ministre me donne l'impression qu'il connaît peu ou connaît mal la mentalité rurale. Le mémoire que vous avez préparé tient compte, effectivement, de cette mentalité rurale ainsi que de cette volonté qu'ont les ruraux de se gouverner eux-mêmes autant que possible, à la condition de disposer des structures et des moyens pour être en mesure de régler leurs problèmes.

Je remarque que votre mémoire est centré sur la régionalisation. C'est un point sur lequel vous êtes constamment revenu et je tiens à le souligner ici, puisque le point de vue que vous soulignez a été partagé par tous nos collègues de l'Opposition et la majorité des personnes qui se sont fait entendre devant la commission.

J'écoutais rire mes collègues du côté ministériel tout à l'heure lorsque vous avez dit que les députés de l'Opposition étaient en faveur du zonage agricole, en ce sens qu'ils avaient parlé en faveur du zonage agricole, mais qu'ils avaient des réserves. Je tiens à être bien clair là-dessus. La grande réserve que nous avons... Quand je vois des hommes d'expérience comme M. Rioux venir nous parler ici aujourd'hui — lequel n'a aucune implication dans quelque parti politique autour de cette table — avec une connaissance approfondie du milieu rural, de l'engorgement d'un bureau provincial, à la suite des expériences qu'il a lui-même vécues et que nous vivons dans le milieu rural quand même... Il ne faudrait pas oublier que tous les actes hypothécaires, les transactions de terrains devront passer devant la commission pour avoir un permis. Je me demande quelle structure on pourra mettre sur pied pour tâcher de faire en sorte justement que les droits des uns ne soient pas lésés par les objectifs des autres. Vous suggérez, M. Rioux, qu'une commission parlementaire particulière soit formée pour faire en sorte qu'on puisse étudier un deuxième volet du projet de loi voulant qu'on prépare un mécanisme, qu'on prépare des structures pour permettre la création d'organismes régionaux pour que le plus grand nombre possible de dossiers soit réglé au niveau des instances régionales, compte tenu des particularités, des besoins de chacune des régions et des objectifs de chacune des régions.

C'est le commentaire que je voulais faire, tout en remerciant bien sincèrement M. Rioux pour son mémoire. Encore une fois, je pense que les députés et tous mes collègues seront unanimes pour vous rendre hommage, à la suite d'une longue carrière dans le milieu rural, de vous être donné la peine de vous présenter devant la commission et franchement de vous être imposé des heures de travail et des sacrifices pour venir vous faire entendre et exposer votre point de vue sur cet important projet de loi, compte tenu que vous avez à coeur le bien-être du Québec et des Québécois. Merci, M. Rioux.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Beauce-Sud. Au nom de tous les membres de la commission, je remercie M. Rioux d'avoir bien voulu présenter ce mémoire. J'invite un autre organisme, soit l'Association de la relève agricole, représentée par M. Michel Lozeau. (17 h 30)

Association de la relève agricole de la région du Richelieu

M. Lozeau (Michel): Avant de commencer je voudrais présenter M. Claude Giard. On est ici à titre de porte-parole à part entière. De toute façon vous allez le voir par la façon dont on va procéder pour notre mémoire.

M. Giard (Claude): M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, mesdames et messieurs. Nous sommes présents aujourd'hui en commission parlementaire au nom de l'Association de la relève agricole de la région du Richelieu. Etant bien conscients qu'il nous faut une loi de zonage pour protéger nos bonnes terres arables, nous considérons que le projet de loi dans son ensemble aura sans doute des répercussions favorables dans le milieu agricole d'aujourd'hui et celui de demain. C'est nous, de la relève agricole, qui sommes le plus impliqués dans ce projet de loi, étant un genre de tampon entre un zonage agricole souhaitable et sa réalisation pratique.

Durant toute notre vie agricole, 20, 30, 40 ou 50 ans, elle sera toujours présente. Il nous faut donc protéger nos bonnes terres, mais aussi conserver notre liberté d'agriculteur. Pour atteindre cet objectif, nous nous sommes penchés sur le projet de loi 90 pour s'assurer qu'il protège nos droits d'agriculteur.

Récemment nous avons organisé un colloque qui a réuni au-delà de 140 futurs agriculteurs. Cette rencontre nous a permis de percevoir que certains articles du projet de loi n'assuraient pas à la relève agricole une protection suffisante pour l'avenir.

En ce sens, nous exprimons aujourd'hui notre vision assez technique au sujet des équivoques que posent certaines facettes du projet de loi 90.

M. Lozeau: Attendu que l'article 4 du projet de loi 90 n'assure pas la représentativité du milieu agricole à l'intérieur de la commission;

Attendu que nous considérons cette présence indispensable pour favoriser la protection du territoire agricole;

Attendu que nous considérons cette présence bénéfique pour rehausser la confiance du milieu rural envers cette commission;

Attendu que nous considérons la grande importance d'une mutuelle confiance pour favoriser une bonne relation entre la commission et le milieu agricole;

Nous demandons au gouvernement d'intégrer à cette dite commission trois personnes nommées par des institutions représentatives du milieu agricole telles que l'Association de la relève agricole et l'UPA.

Attendu que le projet de loi 90 ne donne pas un droit d'appel pour les agriculteurs en cas d'injustice;

Attendu que nous considérons ce droit comme fondamental dans une société telle que la notre qui prône la libre entreprise et le respect des libertés individuelles;

Nous demandons que le gouvernement respecte ce droit en reconnaissant le droit d'appel pour le milieu agricole.

Attendu que l'article 40 du projet de loi 90 oblige la résidence de l'agriculteur à rester avec le fonds de terre si cette dernière est construite après le 9 novembre 1978;

Attendu que nous considérons ce point important et bénéfique pour la protection du sol arable;

Attendu, cependant, que ce même article empêche les jeunes agriculteurs établis ou en voie d'établissement en compagnie de posséder en main leur propre résidence et le lot qui est requis pour la construction de cette dernière;

Attendu que nous considérons la tendance déjà significative de la relève agricole vers la coexploitation;

Attendu que ce facteur est déterminant et démontre l'importance de l'impact des compagnies qui constituent une grande partie de l'avenir agricole du Québec qu'assume la relève;

Nous demandons au gouvernement d'insérer à l'intérieur de son projet de loi une clause spéciale permettant au jeune agriculteur à l'intérieur d'une compagnie agricole de pouvoir posséder son lot pour la construction de sa propre résidence.

Attendu que l'article 66 est suffisant pour permettre l'expansion des services à la communauté;

Nous nous demandons l'intérêt du gouvernement à inclure dans son projet de loi l'article 96 qui lui confère une substitution bien inutile à la commission, puisque celui-ci s'attribue les mêmes pouvoirs.

Attendu que le seul intérêt que nous avons décelé de la part du gouvernement en analysant les articles 12 et 96 du projet de loi 90 serait la flexibilité qu'il s'assure sur le choix des critères pour émettre une décision ou un avis;

Nous demandons à cet effet au gouvernement d'expliquer avec franchise quelle est la nature exacte des affaires à soustraire à la juridiction de la commission telle qu'indiquée à l'article 96 et quelle assurance le gouvernement nous offre afin d'assurer une flexibilité surtout profitable pour le futur agriculteur.

M. Giard: Ceci étant dit, nous désirons que notre point de vue soit considéré dans toute sa portée pour la relève agricole qui, ne l'oublions surtout pas, représente la pierre angulaire de l'autosuffisance de demain.

En dernier lieu, nous tenons à souligner l'aspect très centralisateur du projet de loi, ce qui nous apparaît une flagrante contradiction avec les politiques actuelles mises de l'avant par le gouvernement vers une décentralisation qui tiendrait compte davantage des besoins de la base.

Le Président (M. Boucher): Merci, MM. Giard et Lozeau.

M. le ministre.

M. Garon: La discussion va se faire au niveau municipal. Vous dites que c'est centralisé. A quel niveau inférieur cela aurait-il pu être fait?

M. Giard: On a pensé au niveau régional. M. Garon: C'est supérieur à municipal.

M. Lozeau: Disons que ce point n'a pas été... Je voudrais quand même tout de suite dire dans quel contexte on a rédigé notre mémoire. On a fait notre colloque le 30 novembre et, le 7 décembre, notre mémoire était fini de rédiger. Nous sommes à temps partiel, c'est après nos cours. Il y a eu aussi les fameuses journées de la relève agricole provinciale. Cela a considérablement réduit notre temps. Sur ce point, nous n'avons pu vraiment approfondir, mais cela a été un point. On a tenu à le souligner parce que c'est un point qui a été rappelé assez souvent durant notre colloque, et le monde semblait voir cela dans cette optique.

Evidemment, on n'a pas eu le temps de détailler sur quelle facette on verrait cette décentralisation.

M. Garon: La discussion va se faire au niveau municipal. Cela ne peut être plus décentralisé que cela. Si on veut l'envoyer au niveau régional, on centralise plus qu'au niveau municipal.

M. Giard: Oui, mais si on regarde quand même la façon dont le projet de loi est... De la façon que le projet de loi est apporté, il faut que les municipalités s'accordent avec la commission et si la commission n'est pas d'accord, à ce moment, cela retourne à la juridiction du gouvernement. On se demande jusqu'à quel point c'est décentralisé vers les municipalités.

M. Garon: Très bien. Je vous remercie.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Merci, M. le Président. Messieurs, félicitations pour votre mémoire. A la lecture de ce mémoire, on constate qu'au Québec il y a encore des jeunes qui pensent à une carrière en agriculture et qui ont l'intention de jouer un rôle dans la société. Je dois vous dire que cela vous fait honneur.

J'ai cru comprendre que vous êtes des étudiants à l'ITA sans doute.

M. Lozeau: Personnellement, je suis étudiant au CEGEP à Saint-Hyacinthe.

M. Giasson: Etudiant de CEGEP.

M. Lozeau: Je suis en techniques administratives, mais je désire m'établir. J'ai fait un an à l'ITA, mais j'ai considéré que ce n'étaient pas des

cours tellement adéquats selon ma personnalité. C'est là que j'ai opté pour techniques administratives au CEGEP.

M. Giasson: Vous allez être bon administrateur de compagnies agricoles qui vont exploiter des fermes. Et vous, monsieur?

M. Giard: Je suis établi en coexploitation depuis moins d'un an.

M. Garon: Avec votre père?

M. Giard: Avec mon père et mon frère.

M. Garon: A quel endroit?

M. Giard: A Saint-Hughes.

M. Garon: Dans le comté de Johnson?

M. Cordeau: Le comté de Verchères.

M. Giasson: Saint-Hughes, c'est dans le comté de Johnson.

M. Cordeau: Le comté de Johnson.

M. Giasson: A la page 1 de votre mémoire, vous dites: C'est nous de la relève agricole, qui sommes le plus impliqués dans ce projet de loi étant un genre de tampon entre un zonage agricole souhaitable et sa réalisation pratique. Qu'est-ce que vous entendez par là?

M. Giard: Nous voulons un zonage agricole, mais, comme on dit, on veut garder notre liberté d'agriculteur. Nous voulons pouvoir faire les transactions qu'on désire sans avoir à demander la permission à trop de gens, ce qui entraîne trop de pertes de temps, d'un côté, et l'autre. C'est qu'on peut perdre des transactions qui seraient bénéfiques à long terme.

M. Lozeau: Pour compléter, c'est aussi le fait qu'on s'est dit: C'est bien beau sur papier, le projet de loi 90, tous les articles, mais nous nous demandons ce que cela va faire dans dix ou dans 20 ans, ce qui va se passer pratiquement, si cela va être vraiment les buts qui ont été fixés au départ par le gouvernement. C'est ce qu'on se demande. On se dit: Est-ce que vraiment cela va être axé dans ce sens et si les résultats, à long terme, vont être les mêmes? C'est dans ce sens qu'on a dit qu'on se considérait bien importants, parce que, s'il y a des côtés bénéfiques au projet de loi, c'est nous qui allons les assumer et si, par contre, il y a des points qui ont été mal orientés ou mal pensés, à ce moment, c'est nous qui allons en subir les conséquences. C'est dans cette optique qu'on parle de tampon entre la réalité et le côté technique.

M. Giasson: Lorsque vous avez tenu votre colloque, vous aviez 140 personnes. Est-ce qu'il s'agissait de jeunes ou de cultivateurs d'âge moyen?

M. Lozeau: Notre association s'adresse surtout à des jeunes en voie d'établissement d'environ trois ans et non établis depuis plus que cinq ans.

M. Giasson: II s'agit de jeunes qui ont l'intention de se diriger vers l'agriculture?

M. Lozeau: Oui, ou qui se sont très récemment établis et, du côté de l'UPA, ils ne semblent pas présentement établis encore. A ce moment-là, ils se considèrent plus encore dans la relève agricole et leurs idées sont encore plus vers la relève agricole que déjà un cultivateur établi.

M. Giasson: Vous semblez également souhaiter que la formation de la commission de contrôle ou de protection, la Commission de protection du sol, ait des gens représentatifs du milieu agricole, et vous proposez même d'avoir la possibilité d'une personne qui serait désignée par l'Association des jeunes en relève agricole.

M. Lozeau: Non, nous pensions que, sans que ce soient des personnes justement de l'UPA et de l'association, l'association et l'UPA aient quand même leur mot à dire dans le choix d'au moins trois personnes de cette commission. Dans ce sens-là, on ne demande pas d'imposer un gars de l'UPA ou un gars de l'association. On voudrait qu'il y ait une entente avec l'association, l'UPA et le gouvernement, pour choisir au moins trois personnes qui vont siéger à la commission. Dans ce sens, si vous regardez les points qu'on a apportés, on voyait cela pour appuyer quand même la publicité face à la commission. Nous considérons que c'est important que les agriculteurs aient confiance à la commission, cela va aider à empêcher des prises de bec et des malentendus qui ne seraient pas souhaitables. C'est dans cette optique qu'on a apporté notre point de vue, et, du même coup, pour qu'on ait la possibilité de choisir les personnes qu'on croirait représentatives du milieu. C'est dans cette optique que nous nous sommes exprimés.

M. Giasson: Vous semblez craindre également la situation qui est faite par la loi 90 à savoir que la décision de la commission devient finale sauf si la commission veut elle-même reconsidérer une décision qu'elle aurait prise antérieurement.

Quand vous parlez de la nécessité, selon votre vision des choses, d'avoir une capacité d'appel, un droit d'appel, quel genre de droit d'appel avez-vous à l'esprit?

M. Lozeau: Le fait de revenir devant un même jury, on ne considère pas cela comme un droit d'appel.

M. Giasson: Qu'est-ce que vous voudriez? Un appel devant un tribunal ou devant une autre commission administrative?

M. Lozeau: Justement, à ce titre-là.

M. Giasson: II y a un autre élément dans votre mémoire qui laisse croire qu'une évolution va continuer de se produire dans la propriété des fermes, c'est-à-dire que vous semblez déceler une capacité dans l'avenir que des jeunes se regroupent à l'intérieur de compagnies pour fins d'exploitation agricole. Vous êtes portés à croire que cela va être une nouvelle forme de possession de l'entreprise agricole, c'est-à-dire des gens qui s'associent à l'intérieur d'une corporation? (17 h 45)

M. Lozeau: C'est déjà un facteur très présent aujourd'hui. Même mon collègue ici présent est en compagnie, en société avec ses frères et son père. On considère que du côté financement, c'est meilleur, les conditions de vie et de travail sont meilleures aussi. On considère que c'est une option importante pour la relève agricole, la co-exploitation. A cet effet, le fait qu'on ne puisse pas avoir notre terrain à nous pour bâtir notre maison, on considère que cela brime nos droits qu'on avait avant. C'est dans ce sens qu'on va.

M. Giasson: Comme la plupart des intervenants, je remarque que vous demandez l'élimination de l'article 96 qui donne des pouvoirs absolus et discrétionnaires au gouvernement de soustraire de l'attention de la commission un ou des dossiers.

M. Lozeau: Justement, à cet effet, on avait posé une question dans notre mémoire. Ce qui est dommage, c'est que le ministre ne nous ait pas répondu. On voulait qu'il dise ce qu'il entend par "les affaires à soustraire de la juridiction de la commission" et aussi, qu'est-ce qui... je vais reprendre notre mémoire: "Quelle assurance le gouvernement nous offre-t-il afin d'assurer une flexibilité surtout profitable pour le futur agricole, l'agriculteur?" Ce sont ces deux questions qui ont été posées tantôt. C'est dommage que le ministre ne nous ait pas répondu là-dessus. C'est quand même quelque chose qu'on considérait comme important et on n'était pas sûr.

M. Garon: L'article 96, on va sans doute l'enlever. C'est un article qui était mis là simplement au cas où il arriverait une affaire un peu exceptionnelle, comme General Motors ou Ford qui voudrait s'établir au Québec. C'est une décision de politique économique que le Conseil des ministres aurait pu prendre lui-même. Mais moi, je n'y tiens pas plus que ça. Alors, si les gens n'en veulent pas... Par ailleurs, s'il arrive des délais, vous avez certaines décisions comme ça, je ne manquerai pas de rappeler à l'Opposition qu'elle a voulu que cet article-là n'y soit pas.

M. Giasson: Pas seulement l'Opposition, M. le ministre.

M. Garon: Et je rappellerai à l'Opposition qu'il y avait un article 96 et que cette Opposition a fait une campagne pour que l'article disparaisse. Je peux le faire disparaître, mais il y a des conséquences à ça.

Quant à l'autre affaire...

M. Giasson: M. le ministre, vous devez reconnaître qu'il n'y a pas seulement l'Opposition.

M. Garon: Non, mais je veux dire... J'ai expliqué pourquoi les gens n'ont pas voulu écouter, ça ne me fait rien, je n'y tiens pas plus que ça. Mais c'était pour ça, des cas exceptionnels. L'article 96 n'était pas pour rejeter à tout moment les décisions de la commission, parce qu'il n'y a pas un gouvernement intelligent qui agit comme ça. Quand vous créez une commission et que vous rejetez, pas beaucoup de ses décisions mais trois ou quatre durant l'année, vous lui faites perdre sa crédibilité. C'est évident qu'un homme qui a le moindrement d'expérience sait que l'article 96 n'était pas là pour que le gouvernement, à tout bout de champ, rejette des décisions à la commission. Parce que cela n'a aucun bon sens, il n'y a aucun organisme qui pourrait vivre avec ça.

Alors, c'était clair, tout ça. Tout simplement, je veux rappeler ça, on en reparlera à l'article 96, quand on va étudier article par article le projet de loi. Je ne comprends pas trop quand vous dites: "Quelle assurance le gouvernement offre-t-il, afin d'assurer une flexibilité surtout profitable pour le futur agriculteur?" Je ne comprends pas la question. Qu'est-ce que vous voulez dire par là?

M. Lozeau: Si on regarde l'article 12 qui dit: Les critères de base pour émettre un avis ou une décision, on marque notamment... à la suite, on énumère certains facteurs qui vont être déterminants pour prendre une décision. Quand même, vous étiez représenté à notre colloque...

M. Garon: Par qui?

M. Lozeau: Par M. Charbonneau, député de Verchères.

M. Garon: Ah bon.

M. Lozeau: Au colloque, on avait un avocat de l'UPA et un avocat du Barreau et ils ont expliqué que l'article 12...

M. Garon: Quels avocats étaient là?

M. Lozeau: M. Pierre Paradis.

M. Garon: Oui, un avocat du Barreau, celui-là.

M. Lozeau: Enfin...

M. Garon: Tous les avocats sont membres du Barreau.

M. Lozeau: Enfin, je sais... Je ne pense pas que ça puisse faire grand-chose, là-dessus. Ce qui est bon à retenir, c'est que les trois qui étaient

présents ont été unanimes à nous dire que, notamment, ça pouvait impliquer qu'on puisse mettre autre chose dans cet article, d'autres prérequis pour émettre une décision ou un avis.

M. Garon: A quel sujet? Je ne comprends pas. M. Lozeau: L'article 12... M. Garon: Oui.

M. Lozeau: ... dit que notamment la commission va tenir compte des facteurs biophysiques du sol et du milieu, des possibilités... Quand on dit "notamment" il nous a été expliqué qu'à ce moment-là le gouvernement pouvait en mettre ou en enlever.

M. Garon: Non. Le lieutenant-gouverneur ne peut pas en ajouter. La loi ne dit pas qu'il doit en ajouter. Mais la commission, en rendant sa décision, pourrait tenir compte de ces facteurs. Elle peut tenir compte d'autres facteurs qui ne sont pas indiqués là, mais elle doit tenir compte de ceux-là.

M. Lozeau: A cet effet, quand on parle des facteurs dont elle peut se prévaloir en disant qu'elle peut prendre autre chose, on se disait: Qu'est-ce que cela donne? Le gouvernement prend la juridiction, mais il se sert des mêmes critères de base que la commission pour émettre son avis ou sa décision.

A ce moment-là, on s'est dit: II n'y a que l'article 12 qui permet de prendre d'autres critères de base pour établir une décision. A cet effet-là, on se demande dans quelle mesure le gouvernement va nous assurer que cela ne reviendra pas contre les agriculteurs à un moment donné. Justement, vous parliez de l'installation d'une grosse entreprise multinationale. Si c'est en plein milieu d'un territoire agricole avec un bon sol, vous brimez une partie de cette région agricole. C'est dans ce sens-là qu'on a apporté ce point. Je ne sais pas si c'est clair.

M. Garon: Oui, c'est clair.

M. Lozeau: Bon. Mais, si vous me dites que l'article 96 va sans doute être enlevé, à ce moment-là, on n'a plus besoin de vous demander cela. Mais, si vous n'êtes pas sûr que l'article 96 va être enlevé, à ce moment-là, on vous demande d'expliquer dans quelle...

M. Garon: Je comprends.

M. Lozeau: Vous comprenez mon approche?

M. Garon: II n'y a pas de problème. L'article 96 va être modifié ou possiblement enlevé.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Merci, M. le Président. D'abord, je tiens à vous féliciter tous les deux, de même que toute votre équipe, l'Association de la relève agricole de la région du Richelieu no 6, dont fait partie le comté de Saint-Hyacinthe, pour l'excellent travail que vous accomplissez dans la région et également pour votre dynamisme et l'intérêt que vous portez à votre cause, l'agriculture. Pour informer les membres de la commission, ce sont deux jeunes agriculteurs qui sont dans l'industrie laitière.

M. le député de Montmagny-L'Islet a posé plusieurs questions que j'aurais moi-même posées. Je ne les reposerai pas. Par contre, tantôt, vous avez mentionné le deuxième article, soit le droit d'appel. Je ne sais pas si les explications ou les commentaires que le ministre a faits vous rassurent ou si vous aimeriez que le ministre soit plus explicite concernant le droit d'appel et concernant votre demande de détacher d'une ferme coopérative les terrains sur lesquels les sociétaires construiraient leur propre maison.

Je crois que ce sont deux points que le ministre n'a pas touchés ou très peu dans ses remarques. Je pense que si vous êtes venus ici présenter ce mémoire, c'est que vous vous posez des questions et que vous aimeriez retourner chez vous avec des explications un peu plus précises. Est-ce que M. le ministre serait prêt à préciser ces deux points en quelques minutes, parce qu'il reste 20 minutes?

M. Garon: Qu'est-ce que vous m'avez demandé?

M. Cordeau: Le droit d'appel et également le droit de détacher d'une ferme coopérative les terrains sur lesquels les membres de la...

Une Voix: Compagnie.

M. Cordeau: La compagnie. Ce n'est pas une coopérative, c'est une compagnie. Le droit de détacher d'une compagnie les terrains sur lesquels les membres construiraient leur maison.

Une Voix: Je voudrais ajouter quelque chose.

M. Garon: C'est plus compliqué que cela. Il faut dire qu'une loi, quand elle est faite, elle est toujours faite pour être interprétée d'une façon intelligente. Il y a des gens qui peuvent dire que cela pourrait vouloir dire telle affaire, mais elle est faite pour être interprétée d'une façon intelligente tout le temps, la loi. Le principe d'interprétation du législateur, c'est qu'il a écrit pour dire quelque chose qui, normalement, a du bon sens. Je vais vous donner un exemple pourquoi ce n'est pas si simple que cela, pourquoi on dit que cela prend des permissions de la commission. Théoriquement, ce serait possible. On a vu, par exemple, des affaires qui ont été plaidées. Je vais vous donner des exemples. Vous demanderez à Me Paradis, il connaît cela. Dans le domaine des oeufs, par

exemple, cela a déjà été dit que dans le même poulailler, il y avait 10 000 poules. Je ne me rappelle pas du nombre, mais je me demande si ce n'était pas quarante personnes qui avaient 250 poules chacune. Un certain nombre de personnes différentes étaient dans le poulailler. Pourquoi? Pour ne pas être dans le plan conjoint, parce qu'à 250 poules, elles en étaient exemptées. Le gars qui avait le poulailler disait que chacune avait 250 poules, qu'il y avait quarante personnes différentes qui avaient 250 poules.

M. Giasson: Dans votre comté, M. le ministre?

M. Garon: Evidemment, les lois ne sont pas faites pour faire ce genre de "gimmick". Quand les personnes qui ont 250 poules sont exemptées, ce n'est pas pour mettre quarante fois 250 poules dans un poulailler. Ce n'était pas cela, le but de la loi. Quand on fait cela, c'est parce qu'on essaie de faire servir des lois à d'autres fins que les fins pour lesquelles elles ont été faites. Je veux être clair là-dessus.

La loi dit quoi? Je vais vous donner un exemple concret et vous allez comprendre. Vous avez une coopérative qui a 200 membres. C'est possible. Elle est propriétaire d'une ferme. Théoriquement, un esprit vicieux pourrait dire: On peut tous se bâtir sur la ferme de notre coopérative. On va bâtir 200 maisons pour chacun des membres.

M. Giasson: 200 coopérateurs vivant de l'exploitation d'une ferme?

M. Garon: Une coopérative qui serait propriétaire d'une ferme. Il y a différentes situations. Dans l'industrie laitière, vous avez parlé d'une ferme de 100 ou 200 acres, selon le nombre d'animaux que vous avez. On parlait ce matin, par exemple, des maraîchers qui vivent avec... On disait: Si ce sont des serres, cela peut être deux acres. Il y en a qui ont parlé de production maraîchère de vingt acres. Selon les types de produits, dix acres seraient suffisantes. Une loi, à moins d'avoir 500 pages ou même 1000 pages, ne peut pas prévoir tous les cas. La façon la plus simple, la plus facile pour les gens aussi et la façon de le faire de la façon la plus intelligente possible, c'est de dire: On va mettre le grand principe dans la loi. Pour juger de chacun des aspects, on va demander à un organisme. On peut faire deux choses. Ou bien vous dites: On va faire des règlements pour prévoir chaque affaire. C'est pour cela que les députés disent: C'est tout dans les règlements et il n'y a rien dans la loi. Il est impossible de prévoir tous les cas dans le domaine agricole; c'est trop diversifié, l'agriculture. Chacun pourra soumettre son cas à la commission qui dira: Oui, cela répond aux fins de l'article 12. Cela va bien dans le sens de l'agriculture. Cela, c'est correct. Mais, on va avoir la prudence que cela ne desserve pas les fins de l'agriculture.

Je vais vous donner un exemple: Dans le journal de ce matin, en Colombie-Britannique, il y avait des exemples de trous dans leur loi. Vous avez une ferme de 240 acres. La personne demande de la diviser en autant de fermes de vingt acres. Leur commission avait parlé de quatre fermes de soixante acres. La discussion s'est faite là-dessus. Finalement, la ferme a été divisée en douze fermes de vingt acres. Ce sont douze gars qui ont de l'argent qui ont acheté la ferme de vingt acres pour aller passer leurs vieux jours. Est-ce que c'est cela la protection des terres? Comprenez-vous? Il peut arriver toutes sortes de situations. Il faut être capable d'évaluer chaque situation au mérite pour rendre justice aux gens et aussi assurer la protection des terres que la loi veut assurer.

M. Cordeau: M. le ministre, vous avez donné des exemples assez frappants, mais cela ne répond pas à l'interprétation qu'ils ont posée tantôt: Claude, qui s'associe avec son père et son frère — il est garçon encore, mais tantôt il sera peut-être marié et il voudra avoir sa maison — voudrait que le terrain sur lequel sa maison sera construite soit séparé de la compagnie, ne fasse pas partie de la compagnie. (18 heures)

M. Lozeau: Je voudrais, en plus, sensibiliser le ministre au fait que ce n'est pas un point particulier qu'on amène. C'est une tendance générale. Il faut faire attention à la coexploitation. Il faut être d'avis qu'il faut admettre la coexploitation. Cela va être une grande priorité dans le domaine de l'agriculture. On se demande si justement il n'y aurait pas moyen de prévoir cela dans le projet de loi, sans passer après... Je suis d'accord sur le point dont vous parlez, c'est cela qui revient. Si vous avez 200 ou 300 coexploitations à passer, cela vous fait 200 ou 300 points à réviser encore. Je me demande jusqu'à quel point...

M. Garon: C'est pour une compagnie, par exemple.

M. Lozeau: Oui, une compagnie, précisément.

M. Garon: Une compagnie a des actionnaires et des employés. Comme cultivateurs, vous allez être actionnaires de la compagnie et, comme cultivateurs qui travaillez pour la compagnie, vous êtes employés. Or la loi dit bien que l'employé peut construire sur sa terre.

M. Cordeau: Le père peut construire. M. Garon: Une personne. M. Giasson: L'article 40.

M. Garon: L'article 40. Il peut construire une maison pour son employé.

M. Giasson: Sans l'autorisation de la commission?

M. Garon: C'est cela.

M. Lozeau: Oui. C'est cela, une personne pour son employé. La compagnie considère tous ses gars comme employés. Je ne comprends pas.

M. Giasson: Nécesairement. Si vous travaillez pour une compagnie, vous devenez des salariés de la compagnie.

M. Giard: Oui, au point de vue économique, les compagnies, c'est ce qu'il y a de mieux au point de vue humain, au point de vue social. Pour moi-même, m'incorporer, c'était la solution idéale. J'aimerais quand même avoir quelque chose qui m'appartienne un jour. Ce quelque chose, ce serait une maison. La femme que je vais probablement épouser, j'aimerais aussi qu'elle travaille dans sa maison, et non dans la maison de la compagnie. Avec l'article 40 comme il est écrit, la maison va toujours devoir appartenir à la compagnie et non à l'individu.

M. Cordeau: Oui, c'est sur ce point. M. Garon: Alors... M. Lozeau: ... vous me demandez. M. Garon: Oui.

M. Lozeau: Le problème, c'est que les gars... A l'article 40...

M. Garon: Qu'est-ce qu'il vous dit? M. Lozeau: C'est surtout l'article 40...

M. Garon: Non, je ne dis pas qu'il ne peut pas être disséqué. Une personne dont la principale occupation est l'agriculture peut, sans l'autorisation de la commission, construire sur son lot une résidence, etc.. La construction d'une résidence en vertu du présent article n'a pas pour effet de soustraire le lot ou la partie, du lot... C'est l'application des articles 28 à 30, où on dit que vous ne pouvez pas distraire une maison de la ferme sans l'autorisation de la commission. Comprenez-vous? Il s'agit, dans le cas de l'article 40, de faire cela sans l'autorisation de la commission. Si vous voulez vous séparer — on va voir les articles 28 à 30 - la maison, vous demandez la permission de la commission. Si vous ne faites pas ces articles comme cela, il y aura toujours des fins finauds qui vont dire: On se bâtit des maisons, elles sont pour nos enfants. Alors, ils changent d'idée, ils ne vont pas rester là, il faut que je la vende. Il y a tout un processus. Le but de la loi, ce n'est pas d'embarquer les cultivateurs pour les "maganer". L'article 40 est là pour permettre de construire sans problème et même sans la permission de la commission. On dit: Les articles 28 à 30 s'appliquent. Si vous voulez séparer la maison de la ferme, à ce moment, vous pouvez le faire en demandant l'autorisation de la commission à l'article 28. C'est pour empêcher les abus, c'est évident! Par exemple, s'il y a une compagnie qui a deux cultivateurs...

M. Giasson: Une compagnie, c'est une personne morale!

M. Lozeau: Là-dessus...

Le Président (M. Boucher): Messieurs, nous sommes à l'heure de la suspension. Est-ce que j'ai le consentement pour qu'on continue quelques minutes pour terminer?

M. Cordeau: Pour leur permettre de retourner. M. Giasson: C'est oui.

Le Président (M. Boucher): D'accord. Alors, allez-y, M. le ministre. Oui, monsieur.

M. Lozeau: Là-dessus, je voudrais que ce soit clair, parce que, quand même, j'en ai 140 qui veulent être renseignés là-dessus. Selon la loi telle qu'elle est là, le gars peut bâtir une maison à son fils ou à son employé. Les gars qui sont à l'intérieur d'une compagnie ne peuvent pas se bâtir une maison à eux seuls. Est-ce comme cela? Nous autres, on l'a interprété comme cela, et c'est comme cela que cela a été interprété. C'est cela qu'on veut savoir.

M. Garon: L'article...

M. Giasson: Cela prend une permission de la commission.

M. Garon: Cela prend une permission de la commission.

M. Lozeau: Cela prend une permission de la commission. C'est cela qu'on se demande. Vu l'importance des compagnies à cet effet, on se demandait jusqu'à quel point il serait bon d'insérer une clause qui aide les gars qui sont en compagnie et dont la principale activité est l'agriculture pour pouvoir avoir leur maison à eux seuls.

M. Garon: On ne pouvait pas mettre un article bidon, omnibus, c'est-à-dire un article qui comprend tout dans une telle loi. Là, chaque cas va être étudié à l'espèce. C'est évident que vous vous êtes formés en compagnie parce que cela facilite vos affaires. Vous êtes agriculteur et vous voulez vous bâtir sur votre ferme. A ce moment, vous demandez la permission à la commission et, normalement, vous n'aurez pas de problèmes. Mais c'est écrit de cette façon pour qu'il n'y ait pas des exclusions automatiques qui vont amener des abus.

Le but de la loi n'est pas de faire des absurdités, de vous empêcher de demeurer sur votre ferme. Ce n'est pas le but de la loi. Le but de la loi est de fontionner de façon intelligence. Mais, en même temps, elle doit être rédigée de façon à ne pas mettre certains droits dans la loi qui permettent des abus que vous ne serez pas capable d'arrêter. C'est pour cela.

M. Lozeau: Donc, tout revient à la commission à ce moment tous les jugements sur cela?

M. Garon: Sauf ce qui prévu pour fonctionner sans autorisation de la commission. Il y a un paquet d'affaires qui sont indiquées dans la loi et qui n'ont pas besoin de l'autorisation de la commission.

M. Lozeau: En le demandant à la commission, on pourrait lotir un terrain appartenant à la compagnie et, avec ce lotissement, on pourrait se construire une maison.

M. Garon: II faudrait le demander.

M. Lozeau: La commission a le pouvoir...

M. Garon: Oui.

M. Lozeau: ... de permettre le lotissement.

M. Cordeau: Vous affirmez que, comme le demande l'association des jeunes de la relève agricole, ils pourront distraire d'une ferme...

M. Lozeau: En compagnie.

M. Cordeau: ... en compagnie le lot des coactionnaires.

M. Garon: Avec l'approbation de la commission.

M. Cordeau: Oui, avec l'approbation de la commission.

M. Beauséjour: Elle peut bien dire non aussi.

M Giasson: Oui, cela peut être non également.

M. Beauséjour: II faut éviter de contourner la loi et qu'à un certain moment tu te ramasses avec un développement.

M. Cordeau: Je veux savoir du ministre, si la loi actuelle telle que rédigée le permet.

M. Garon: Quoi?

M. Giasson: Sans l'autorisation de la commission. Non.

M. Cordeau: Non. Avec l'autorisation de la commission.

M. Beauséjour: Le ministre n'a pas parlé de la commission.

M. Garon: L'article 28 dit: "Une personne ne peut, sans l'autorisation de la commission, effectuer un lotissement dans une région agricole désignée".

M. Giasson: Cela ne peut pas être plus net. M. Garon: C'est pour empêcher le lotisse- ment, de morceler les terres, de faire des lots et de les revendre. La loi dit: "Une personne ne peut, sans l'autorisation de la commission...", mais elle pourra avec l'autorisation de la commission. Elle peut pouvoir avec l'autorisation de la commission.

M. Vaillancourt (Orford): Si la commission décide que c'est acceptable; cela va dépendre des cas.

M. Giasson: Si elle juge que ce n'est pas correct, cela va être non.

M. Vaillancourt (Orford): Si elle juge que ce n'est pas acceptable, cela ne sera pas acceptable.

M. Garon: Le but de la loi, ce n'est pas d'empêcher le cultivateur de rester sur sa ferme. C'est évident, cela.

M. Cordeau: Je suis bien heureux de vous l'entendre dire, parce qu'il y en a plusieurs qui se posent des questions, même des avocats.

M. Garon: C'est normal.

M. Cordeau: Même les jeunes qui ont étudié le projet de loi, et qui, je pense, y ont apporté une attention bien spéciale se posent cette question.

M. Garon: C'est pour cela que je dis que c'est un secteur complexe. C'est parce qu'il y a toutes sortes d'affaires dans cette loi, qui ont été pensées, un paquet de problèmes qui ont été pensés au cours des dernières années et sur lesquels on a réfléchi et on a fait un choix comme cela dans cette loi. C'est pour cela qu'on a parlé à un certain moment de l'interprétation. Ce qui va se faire durant la première année et durant la deuxième année sera extrêmement important parce que c'est là que la ligne va se tracer, comment cela va fonctionner.

C'est pour cela que je disais au départ qu'il était absolument essentiel qu'il y ait une commission. Eventuellement, on peut imaginer que cela pourrait être différent, dans un an ou deux, mais, au départ, il va vraiment y avoir une tendance. Il n'y a pas d'expert en zonage agricole au Québec. Il va falloir bâtir cela ensemble un peu.

M. Ouellette: Quand vous allez comprendre toutes les substilités, vous allez vous acheter une terre.

M. Garon: Si, à certain moment, il arrivait qu'un article soit interprété par la commission d'une façon absurde, supposons que cela arriverait, qu'est-ce qui va arriver? On va amender la loi pour qu'elle ne dise pas cela.

La loi a été faite d'une façon intelligente. Un cultivateur qui reste sur sa ferme, c'est la façon normale de la faire fonctionner. Il faut l'interpréter dans le sens qui a bu bon sens.

Maintenant, s'il arrivait que, pour une raison ou pour une autre, la commission disait: Cela veut

dire telle chose. Le gouvernement dirait: Cela n'a pas de bon sens. On n'est pas d'accord sur cela et on changerait la loi pour que cela ne veuille pas dire cela. Comprenez-vous? Mais, au début, c'est normal que les gens se posent des questions et aient certaines inquiétudes. C'est normal, mais tout cela va se clarifier. Les gens connaissent beaucoup plus la loi aujourd'hui qu'ils ne la connaissaient il y a un mois.

M. Lozeau: On vous remercie beaucoup, M. le ministre, et on espère que cette commission va nous donner un coup de pouce à la relève agricole. Comme on le disait tantôt, c'est quand même nous qui sommes le tampon entre les réalités techniques et les réalisations pratiques qui vont se faire dans le futur.

M. Garon: Merci.

Le Président (M. Boucher): Au nom de tous les membres de la commission, je remercie, M. Giard et M. Lozeau pour le mémoire qu'ils nous ont présenté.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

Suspension de la séance à 18 h 10

Reprise de la séance à 20 h 21

Le Président (M. Boucher): A l'ordre s'il vous plaît! A la suspension de 18 heures, nous avions terminé avec l'Association de la relève agricole. J'appelle maintenant le Conseil régional de développement de l'Est du Québec, représenté par M. Pierre Jobin, directeur général, et M. Jocelyn Lachance.

M. Lachance, si vous voulez procéder à la lecture de votre mémoire.

Conseil régional de développement de l'Est du Québec

M. Lachance (Jocelyn): On a noté les interventions de cet après-midi. On va essayer d'être brefs.

Le Président (M. Boucher): Merci.

M. Lachance: M. le Président, messieurs les membres de la commission, l'intervention qu'on vous présente fait un petit historique de ce qu'est le CRD, rappelle les interventions faites jusqu'à maintenant dans le dossier et, dans un deuxième temps, indique pourquoi zoner dans l'est et comment.

Il nous est apparu à propos de mettre sur papier les raisons qui justifient à nos yeux notre participation à la commission parlementaire avant d'aborder l'objet proprement dit de notre intervention et d'exprimer les réactions que nous inspire le projet de loi à l'étude.

Né en 1967 de la fusion entre le Conseil d'orientation économique du Bas-Saint-Laurent et le Conseil régional d'expansion économique de la Gaspésie et des Iles-de-la-Madeleine, le Conseil régional de développement de l'Est du Québec est une compagnie sans but lucratif régie selon la troisième partie de la Loi des compagnies. Reconnu comme interlocuteur privilégié en matière de développement régional, il vise des objectifs de consultation et de concertation en regroupant les organismes régionaux préoccupés du développement de la région. Ces derniers participent à l'assemblée générale annuelle qui choisit les membres du conseil d'administration, lesquels nomment les membres du conseil exécutif. Le CRD regroupe des associations syndicales, telles l'UPA, la CSN, la FTQ, la CEQ, des associations patronales, le CDE, des coopératives, l'Union régionale des caisses populaires, des associations communautaires comme la régionale des jeunes chambres, la Société nationale de l'Est du Québec et divers conseils spécialisés: culture, loisirs, forêt, environnement, communications, aménagement intégré, conférences municipales, et favorise la concertation sur des questions d'intérêt régional. Consultatif, il émet avis et recommandations sur les questions de développement régional. Mentionnons la négociation de diverses ententes de développement, les programmations régionales, le fonds de développement régional et le reste.

Notre participation en commission parlementaire n'est pas la première intervention que nous faisons dans ce dossier. Lors de la tournée de M. Garon sur la question du zonage, le CRD a présenté un avis dont les grandes lignes sont les suivantes: 1) la dilapidation des bons sols agricoles est une cause de contraintes pour l'agriculture; 2) cette situation est, par ailleurs, le reflet d'un problème plus vaste où l'âge des exploitants, les revenus agricoles et la valeur des terres sont des composantes majeures; 3) la région de l'Est est défavorisée dans son ensemble, y compris en agriculture, car le nombre de fermes diminue rapidement, les revenus agricoles augmentent, mais cela s'accompagne de la spécialisation, voire de la surspécialisation de la production régionale. Le secteur agro-alimentaire est au premier rang de la région et double la moyenne du Québec. Le ministère de l'Agriculture s'est donné dans l'est une banque de terres de plus de 100 000 acres. 4) la gestion actuelle du zonage par les municipalités offre les inconvénients de l'éparpillement, mais les avantages de la décentralisation. Et, enfin, les recommandations qu'on faisait à ce moment-là et qu'on continue, évidemment, à faire: Que le ministère de l'Agriculture prépare un zonage qui est homologué automatiquement par les municipalités, mais demeure sujet à amendement selon les formules habituelles. Une taxe spéciale serait imposée au bénéficiaire d'un changement de zonage. Qu'on crée des sociétés d'aménagement foncier. Qu'on accorde aux plans de développement de l'agriculture préparés par nos UPA les budgets requis.

Lors de la discussion avec le ministre sur notre mémoire, nous avons eu l'occasion de dialoguer sur la multiplicité des structures dans notre région, UPA, CRD, municipalités, sociétés d'exploitation des ressources, groupements forestiers, CEREQ, JAL, etc. Nous avons mis de l'avant que la concertation était non seulement souhaitable, mais possible compte tenu des nombreuses collaborations déjà vécues entre ces divers organismes. Lors du dépôt du projet de loi 90, nous avons, après une analyse que nous avouons sommaire, tenté de comparer ce qu'on pourrait appeler le point de vue régional, tel que présenté par les mémoires soumis au ministre, et les réponses contenues dans le projet de loi. Le tableau est éloquent.

On a divisé ce tableau en cinq catégories. En ce qui concerne le zonage des terres dans l'est, sur les dix intervenants, les dix ont dit oui, le ministre a dit non; en ce qui concerne la banque de sols, deux intervenants se sont prononcés; les deux ont dit oui, le ministre a dit non.

M. Garon: Sur la banque de sols?

M. Lachance: En ce qui concerne la régie centrale, neuf intervenants se sont prononcés; sept ont dit non, le ministre a dit oui; gestion décentralisée, six intervenants se sont prononcés en faveur, le ministre a dit non; mesures de rentabilisation, huit intervenants ont dit oui, le ministre a dit non.

M. Garon: Je vais vous dire une chose, par exemple...

M. Lachance: Depuis, toutefois...

M. Garon: Je vais répondre à ça tout à l'heure.

Le Président (M. Boucher): D'accord, M. le ministre.

M. Giasson: Quelle tentation!

M. Lachance: Depuis, toutefois, des mesures ont été annoncées en ce qui concerne la banque de sols, d'une part, et certains programmes de rentabilisation de l'agriculture, d'autre part. A ce dernier propos, il ne s'agit toutefois pas encore de plans de développement soumis par nos UPA. Nous comprenons que ce sont là des mesures qui sont difficilement intégrables comme telles dans une loi sur le zonage, mais on nous comprendra de profiter de toutes les occasions pour sensibiliser le ministre à ce propos.

Nous tenons, dans un premier temps, face au dépôt du projet de loi, à faire un certain nombre de remarques. D'abord, nos propos valent pour l'Est du Québec; ensuite, nous n'avons pas l'intention de faire porter nos commentaires sur l'indemnisation ou les pouvoirs des enquêteurs ou d'autres aspects très précis du projet de loi, mais plutôt sur les raisons qui font, selon nous, que l'on devrait avoir des mesures de protection des terres arables dans notre région et sur les grandes lignes de leur application.

Sans prétendre pour autant qu'il faille appliquer aveuglément dans notre région toutes les prescriptions prévues au projet de loi 90, il nous est apparu qu'il existe une série de raisons qui justifient qu'on applique dans l'Est du Québec les mesures qui s'en inspirent. On ne peut prétendre longuement que c'est pour des raisons techniques qu'on n'a pas pu inscrire l'Est du Québec dans le territoire à être régi par la loi 90. D'abord, parce que, pour une fois que ça peut servir les tonnes de livres, cartes, documents, études, analyses, recherches et le reste dont nous sommes spécialement fournis à titre de région pilote, on serait fort malvenus de dire qu'ils n'existent pas.

En plus de ces aspects documentaires, nous avons dans la région des ressources humaines en qualité et en quantité suffisante, que ce soit dans les bureaux locaux ou au bureau régional du ministère de l'Agriculture. D'ailleurs, on a prêté des ressources aux centrales, d'une part, et à l'Université du Québec, d'autre part. Nous devons en conclure que, si l'Est du Québec n'est pas couvert, ce n'est pas pour des raisons techniques, du moins au sens que nous donnons généralement à ce terme.

Nous avons fait référence plus haut à une analyse sommaire des mémoires présentés dans la région au ministre Garon lors de sa tournée à l'automne. Notre propos n'est pas de faire une savante étude de la représentativité de ces divers intervenants, même si nous croyons être en mesure d'affirmer, à partir de notre connaissance du milieu, que les principaux intéressés étaient là. Cependant, on peut et on doit noter que, lors d'audiences publiques ouvertes à tout le monde et ayant fait l'objet d'une publicité importante, tant au niveau des personnes que des organismes, personne ne s'est présenté pour demander que la région ne soit pas couverte ou pour s'opposer, en principe, au zonage. (20 h 30)

Or, dans les mêmes circonstances, le projet de réforme de l'assurance automobile avait soulevé des objections nombreuses. Donc, sans en faire une certitude et sans avoir d'arguments scientifiques à l'appui de cette thèse, on peut avancer que les intéressés se sont, dans l'Est du Québec, prononcés en faveur du principe d'une loi de protection des terres arables qui s'appliquerait à la région.

Une loi de protection des sols arables peut se justifier et s'interpréter de diverses façons. Voyons comment ces raisons s'appliquent ou pas à notre région, partant du constat que la loi est conçue en fonction du Québec dans son ensemble et non en fonction de l'est. 1. C'est pour protéger toutes les bonnes terres agricoles, auquel cas l'Est du Québec serait couvert, car nous comptons 422 000 des 2 917 400 acres de sol de catégorie AA du Québec. 2. C'est pour couvrir les cas où la menace est la plus grande. Si c'est par rapport à des sols d'une qualité et d'une productivité exceptionnel-

les, nous ne sommes pas spécialement touchés. Si c'est par rapport à un volume de transactions très élevé, nous ne sommes pas spécialement touchés non plus. Par contre, si c'est en termes de menace à l'agriculture, nous croyons que notre région mérite toute la protection possible. En effet, la perte d'une terre de qualité dans une région où il y en a trop peu, il faut bien le reconnaître, mais qui est à la fois la plus rurale du Québec, constitue un phénomène beaucoup plus grave qu'ailleurs. D'abord, parce que la perte est beaucoup plus significative en termes relatifs; ensuite, parce que les effets psychologiques sur le milieu rural sont beaucoup plus considérables surtout dans une région où la fermeture des paroisses est encore une ombre menaçante. On pourra toujours objecter que la population diminue dans notre région et que ce ralentissement démographique se produisant surtout en milieu rural, il devrait en résulter une pression moindre sur les sols agricoles. C'est faire bon marché de quelques phénomènes, dont celui qui veut que ce ne soit pas dans les meilleures paroisses agricoles qu'on observe le plus fort déclin démographique et que ces paroisses sont, comme presque partout au Québec, situées à proximité des agglomérations urbaines.

C'est donc dans la mesure où nous disposons de relativement peu de bon sols dans la région la plus rurale du Québec, d'une part, et que l'agriculture est en butte, chez nous, à de nombreux obstacles, d'autre part, que nous croyons que devraient s'appliquer dans l'Est du Québec des mesures de même ordre que celles prévues dans la loi 90.

Une fois admis et justifié le prérequis de la protection des sols arables, encore faut-il y aller de recommandations quant à son application. Nous n'allons pas nous lancer dans une savante analyse des disparités régionales, de l'évolution différente des pratiques agricoles, des variantes climatiques et pédologiques, etc., pour justifier que nous ne sommes pas une région comme toutes les autres, au moins certaines d'entre elles

Le ministre l'a fait à notre place dans son projet de loi. Nous ne sommes pas régis par la loi 90.

Si, donc, nous sommes une région pas comme les autres, ce que nous venons de démontrer, il nous semble que la structure de régie de zonage agricole chez nous pourrait ne pas être comme l'autre. Nous croyons que dans l'Est du Québec on pourrait fonctionner comme suit: 1. Le bureau régional du ministère de l'Agriculture transmet tous les documents pertinents à la commission régionale de protection du territoire agricole formée des représentants des corporations municipales, des unions de producteurs agricoles et du Conseil régional de développement de l'Est du Québec et de deux représentants du public. 2. La commission régionale prépare et expédie aux diverses municipalités du territoire un plan de zonage agricole automatiquement homologué sur réception. 3. Les amendements aux règlements se font selon la formule habituelle. 4. Toute personne, corporation ou municipalité se sentant lésée par une décision de la commission régionale pourrait en appeler à la Commission de protection du territoire agricole du Québec.

Les avantages de cette formule sont les suivants: protection du territoire agricole de l'est; association des principaux intéressés à la préparation des plans de zonage; décentralisation des décisions; possibilité d'appel à un organisme panquébécois neutre et spécialisé et, enfin, coût réduit et structure légère. Cela suffit pour nous donner le goût de montrer que chez nous aussi on est capable de zoner. Merci.

Le Président (M. Boucher): Merci", M. Lachan-ce. M. le ministre.

M. Garon: D'abord, pour être honnête, il va falloir mettre au point certaines choses qui ne sont pas exactes. Premièrement, vous dites que le MAQ s'est donné dans l'est une banque de terres de plus de 100 000 acres. Vous savez que le ministère de l'Agriculture n'a pas voulu se donner une banque de terres. Ce sont des décisions qui sont venues d'ailleurs. Il n'était qu'un instrument qui appliquait des décisions venues d'ailleurs.

Quand vous dites que vos organismes voulaient tellement la protection du territoire agricole, remarquez qu'une bonne partie d'entre eux disaient que le problème chez vous n'était pas la protection des terres, mais l'abandon des terres. Le problème était beaucoup plus, plutôt que de geler du territoire pour l'agriculture, de remettre du monde dans les rangs qui se vidaient. Je ne voudrais pas protéger des fantômes ou bien des rangs.

Quand vous dites que pour la banque de sols, il y en a deux qui ont dit oui et le ministre a dit non, je regrette. Il faudrait que vous soyez au courant qu'il y a une loi devant l'Assemblée nationale concernant une banque de terres.

Lorsque vous dites qu'une régie centrale, les UPA en veulent et que les autres n'en veulent pas, j'ai l'impression que les principaux conseillers dans le domaine agricole, ce sont les UPA, justement.

Je peux vous dire aussi que, lorsqu'on a fait le plan d'aménagement Basque-Neigette, qui a été fait par toutes sortes d'organismes, l'UPA, la première chose que l'UPA a demandée, c'est d'être consultée, parce qu'elle n'avait pas été assez consultée. Le projet a été, à toutes fins pratiques, retardé d'un an. Si tous vos organismes régionaux se concertent tant que cela, pourquoi a-t-il fallu recommencer la consultation pour Basque-Neigette avec l'UPA qui n'avait pas été assez consultée?

Concernant les organismes régionaux, je pense que, d'une façon générale, le ministère de l'Agriculture a aidé tous les organismes régionaux dans tous les cas. Le ministère de l'Agriculture, par exemple, a subventionné la coopérative du JAL, alors qu'on aurait normalement dû subventionner uniquement ce qui concernait l'agriculture.

M. Giasson: Vous êtes allés au-delà de l'agriculture.

M. Garon: En subventionnant la coopérative du JAL, on allait au-delà de l'agriculture un peu, je pense.

M. Giasson: Le député de Rivière-du-Loup est d'accord.

M. Garon: En l'absence d'autres organismes qui le faisaient.

Je dirais ceci également. Vous parlez de mesures de rentabilité. Je dirais que, pour l'est, ce serait bon que vous commenciez à convaincre les gens de chez vous, parce que, lorsqu'on a discuté avec l'UPA des programmes régionaux — cela fait deux ou trois fois que je le dis, mais je voudrais que ce soit clair, c'est enregistré — dans le Bas-du-Fleuve, dans le Bas-Saint-Laurent, il n'y avait pas de budget à ce moment-là, parce que les budgets sont prévus d'avance dans le budget du ministère. Normalement, les budgets en cours d'année sont pris dans le fonds de développement régional.

Troisièmement, il y avait eu des recommandations négatives de la conférence administrative régionale du Bas-Saint-Laurent pour qu'il y ait des fonds investis dans le développement agricole primaire. Est-ce que c'est clair? Quand vous dites que le ministère de l'Agriculture, à Québec, ne développe pas le Bas-Saint-Laurent, j'aimerais que vous commenciez à faire la concertation chez vous.

Le Président (M. Boucher): M. Lachance.

M. Lachance: Je pensais que ce serait bref. On part?

M. Giasson: D'accord. Attachons nos ceintures.

M. Lachance: Je veux souligner six points. Le premier, la banque de sols; que cela dépende du ministère de l'Agriculture ou pas, il reste qu'elle est là. Il y a 100 000 acres de sols.

Deuxièmement, quand on parle de zonage et que le ministre dit: Chez vous, il y a des terres en friche, et on les abandonne, c'est peut-être vrai, sauf que, lorsqu'il y a des politiques de rentabilisation, il faut se souvenir — puisque M. le ministre a parlé du JAL — que nos premières patates, on les a plantées dans une plantation de sapins. Cela se fait. Et c'est rentable présentement.

La troisième remarque sur Basque-Neigette, j'aimerais mieux qu'on ne parle pas de ce qui s'est passé pour Basque-Neigette au niveau de la consultation. Ce n'était pas au niveau de la population qu'on ne s'entendait pas; c'était au niveau du ministère de l'Agriculture.

M. Garon: Le ministère de l'Agriculture en région.

M. Lachance: Pour nous autres, c'est le ministère de l'Agriculture.

En ce qui concerne les organismes régionaux, on parle de la coopérative du JAL qui est subventionnée pour d'autres fins que de l'agriculture; de cela aussi, on pourrait en parler longtemps. Du JAL, je pense que je peux en parler beaucoup, mais on n'est pas venu ici spécialement pour cela. Ce qu'on note, par exemple, c'est que les subventions du ministère de l'Agriculture sont présentée sur un "phasing out" de trois ans avec rien au bout, supposément dans la région la plus rurale au Québec. Quand vous dites que vous subventionnez le JAL pour quelque chose qui n'est pas de l'agriculture, vos subventions, le dernier CT qui a passé, cela a été $200 000 sur trois ans; après trois ans rien, sans consultation, à ma connaissance, ni de la région, ni des gens du JAL.

Sixième point, les mesures de rentabilité UPA Bas-Saint-Laurent. S'il y a des chicanes entre l'OPDQ et le ministère de l'Agriculture...

M. Garon: Pas l'OPDQ; la conférence administrative.

M. Lachance: La conférence administrative. Si au niveau de la conférence administrative on ne s'entend pas, je n'aimerais pas qu'on dise que les organismes populaires de la région ne s'entendent pas, parce que ce n'est pas tout à fait à la même table qu'on se rencontre.

M. Garon: Je n'aimerais pas, non plus, qu'on dise que c'est Québec qui ne veut pas aider dans le bas.

M. Jobin (Pierre): Je ne pense pas qu'on ait mentionné qu'il y avait de la mauvaise volonté du ministère de l'Agriculture par rapport à ce programme. Tout ce qu'on dit c'est qu'on profite de toutes les occasions pour en parler. De toute façon, c'est un plan qui a été mis de l'avant par l'UPA au sujet duquel on n'a pas toutes les réponses encore. Mais il n'a pas été mentionné là-dedans, en tout cas à ma souvenance pour avoir lu le mémoire une couple de fois, qu'il y avait de la mauvaise volonté quelque part.

Par ailleurs, quand on parle de la banque de sols, vous pouvez noter qu'on a repris le tableau, parce qu'on l'avait sorti très vite pour des fins internes. On a repris celui-là, parce qu'on n'a pas eu le temps de le refaire, mais il est noté immédiatement en bas, à la ligne suivante: "Depuis, toutefois, des mesures ont été annoncées en ce qui concerne la banque de sols, d'une part, etc."

Le Président (M. Boucher): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Messieurs, merci pour le mémoire que vous déposez au nom du CRD de l'Est du Québec. Le tour d'horizon que vous faites à l'intérieur de votre mémoire permet à des gens qui ne vivent pas à l'intérieur de la région de l'Est, la région qu'on appelle, nous autres, Gaspésie-Bas-Saint-Laurent, de voir certains sujets de préoccupation.

A la lecture de votre mémoire, on voit que vous déclarez, à la page 4, que la région de l'Est est défavorisée dans son ensemble, y compris en agriculture. Vous dites cela à l'intérieur d'un mémoire qui vient commenter la loi de protection des terres. La première remarque que vous faites, c'est que le nombre de fermes diminue rapidement. Est-ce que le nombre de fermes diminue parce que les gens cessent de les cultiver ou parce que les fermes sont achetées par des voisins ou des cultivateurs qui veulent agrandir?

M. Jobin: II y a un peu des deux phénomènes, mais la majeure partie de cette diminution provient d'un abandon de l'agriculture par un certain nombre de cultivateurs. Il y a eu une consolidation importante tant en termes de superficie des fermes que de grosseur des exploitations dans la région, mais il nous reste, dans la région, un peu moins que 4000 fermes et, depuis 1966, on en a perdu 6000. Cela vous donne une idée du phénomène. On ne peut plus en perdre autant qu'on en a perdu.

M. Giasson: D'accord, vous avez perdu 6000 fermes, en l'espace de dix ans, de douze ans.

M. Jobin: Dix ans, à toutes fins pratiques.

M. Giasson: Vous aviez combien d'acres en culture il y a dix ans et vous avez combien d'acres en 1978?

M. Jobin: Là-dessus, mes chiffres sont moins précis, mais il y a eu une diminution de 10% ou 15%. Je ne voudrais pas vous induire en erreur, mais il y a une diminution de cet ordre, si j'ai bonne souvenance, de l'acrage. Mais la valeur de la production a considérablement augmenté. On a de meilleurs cultivateurs, mieux équipés et plus rentables, etc., mais ils sont beaucoup moins nombreux.

M. Giasson: Cet abandon de l'agriculture, le retrouvez-vous principalement dans les paroisses de l'arrière-pays ou est-ce que le phénomène joue également dans les municipalités ou les paroisses qui longent le fleuve?

M. Jobin: Dans l'arrière-pays, il y a eu vraiment abandon massif, sans consolidation ou très peu, tandis que, dans les paroisses agricoles, il y a eu consolidation surtout. Il n'y a pas eu de terres de perdues finalement, pas d'exploitations agricoles de perdues. Il y a moins de cultivateurs, mais on peut dire qu'en gros on n'a pas perdu d'agriculture. (20 h 45)

M. Giasson: En bordure du Saint-Laurent, de la baie des Chaleurs, dans la vallée de la Matapédia, est-ce qu'il y a peu de terres en friche?

M. Jobin: II y en a. Mettre un pourcentage, ce serait vraiment risqué, mais il y en a, spécialement dans la vallée de la Matapédia et également dans la baie des Chaleurs, parce qu'il n'y a pas là une exploitation agricole aussi intense qu'il pourrait y en avoir si ce n'était de la qualité du sol. A cause des difficultés de transport et du nombre de cultivateurs qu'il y a là...

M. Giasson: Je me pose une question, après la lecture de votre mémoire, quant à la priorité dans le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie. Est-ce qu'il y a urgence de protéger le sol agricole ou s'il n'y a pas plutôt urgence de bâtir des programmes spéciaux adaptés à une région du Québec qui est différente des autres pour un tas de raisons que vous connaissez mieux que moi? Vous auriez aimé voir le zonage s'appliquer intégralement sur tout le territoire du Québec, puisque, s'il se rend chez vous, il va aller dans le Saguenay-Lac-Saint-Jean, il va aller dans l'Estrie, à peu près dans toutes les régions, même celle du Nord-Ouest. Je vous avoue qu'après la lecture du mémoire l'urgence, même si c'est important de zoner et de protéger — ce n'est pas là-dessus que je veux émettre des doutes — ce seraient des programmes nouveaux fort importants qui s'adaptent à la région, parce que vous ne pouvez pas avoir le même type d'agriculture que dans le coeur du Québec et dans la vallée du Saint-Laurent en allant vers Montréal. Vous n'avez pas le même climat, ce n'est pas le même type de sol, ce ne sont pas les mêmes productions dans l'ensemble. Vous avez l'industrie laitière qui va très bien avec le reste, mais, au-delà de cela, je pense qu'il faut reconnaître que cela diffère.

M. Lachance: Je pense qu'il faut se remettre un petit peu dans le contexte de l'est où, il y a dix ans, on vidait systématiquement les paroisses. Quand on parle d'une banque de sols, elle n'est pas arrivée tout d'un coup. Il y avait des politiques claires, nettes et précises, dans un premier temps, de fermer les paroisses globalement; dans un deuxième temps, d'inciter les gens à s'en aller en ville. Le problème, c'est que, quand ils arrivaient en ville, il n'y avait pas plus de solutions et ils étaient autant sur le chômage ou marginaux qu'ils l'étaient à la campagne, de telle sorte que présentement, on se ramasse avec un tas de sols qui ont du potentiel agricole, mais avec moins de gens pour s'en servir et avec des terres en friche qu'on est obligé de reprendre et de labourer pendant cinq ou six ans avant que cela finisse par faire une terre normalement rentable. C'est évident, quand vous me parlez de politique de rentabilisation, on est 100% d'accord. On regrette en même temps que la programmation régionale ne soit pas encore passée au Conseil du trésor, mais un n'élimine pas l'autre, je pense, parce qu'en même temps qu'il y a de l'abandon on commence à ressentir des problèmes de spéculation, c'est-à-dire des gens de Québec, de Rimouski, de Rivière-du-Loup qui viennent s'acheter une terre à la campagne. A la campagne, c'est chez nous, c'est mon voisin. Il me semble que ce sont deux politiques qui doivent être menées de front.

M. Giasson: Si vous avez des gens de l'extérieur de votre région qui vont acheter des fermes, c'est parce que, tout de même, il y a des cultivateurs qui consentent à les vendre. S'ils ont des fermes, c'est parce qu'il y a un gars qui possède une ferme et qui la vend à un acquéreur éventuel.

M. Lachance: Evidemment. Ceux qui vendent, ce sont des gens marginaux qui vont, évidemment, avoir normalement un peu plus cher d'un gars de Québec que de leur voisin qui a besoin de leur terre pour prendre de l'expansion et se stabiliser. Présentement, chez nous, on vit ce problème. On a des cultivateurs ayant 30 ou 35 vaches qui voudraient s'agrandir, se stabiliser, sauf que les voisins vendent au gars de la ville. Le gars de la ville passe deux mois là quand il a deux mois de vacances.

M. Giasson: Parce qu'il paie plus cher que les offres qui peuvent venir d'autres cultivateurs.

M. Lachance: Chez nous, pour vous donner une idée de la valeur des terres — cela pose peut-être un autre problème de stabilisation des fermes — il y a cinq ou six ans, des terres s'achetaient facilement pour $2000 à $3000.

M. Giasson: Quoi? Une ferme?

M. Lachance: Des terres. Une maison de 1940 avec des bâtiments plus ou moins valables et une terre de 105 acres, cela se vendait de $2000 à $3000. Présentement, après cinq ou six ans, les terres ont augmenté. Compte tenu de ce qui se passe dans l'est depuis quelque temps, cela vaut entre $12 000 et $14 000 pour l'équivalent. Il reste que pour $12 000, pour quelqu'un de la ville, c'est le prix d'un chalet. Là, il se ramasse avec une terre d'un mille de long et un ruisseau et du bois. Il n'en revient pas, il achète. Le voisin n'a peut-être pas les moyens d'acheter.

M. Giasson: Quoique, si une ferme se vend $10 000 à $12 000 avec les bâtiments et un boisé, j'ai bien l'impression que, si le voisin en a vraiment besoin, il va payer les $10 000 ou $12 000.

M. Lachance: Le gros avantage qu'on a depuis tout récemment, c'est le crédit forestier. Par le biais du crédit forestier, beaucoup de cultivateurs — ceux qui voulaient prendre de l'expansion — ont été soulagés. Le Crédit agricole chez nous prête sur la valeur foncière et les terres sont encore évaluées à $2000 ou $3000.

M. Giasson: Vous avez fait allusion à la fermeture de paroisses ces dernières années, mais vous indiquez que la fermeture des paroisses est toujours une ombre menaçante. Craignez-vous la fermeture d'autres paroisses dans le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie?

M. Lachance: Si on regarde l'évolution démographique, en milieu vraiment rural, elle est à la baisse. Pierre peut peut-être en parler plus. As-tu des chiffres, Pierre?

M. Jobin: Cela baisse dans l'ensemble de la région en valeur absolue. Notre région représentait en gros 325 000 personnes en 1971; c'est rendu à 315 000 en 1976. Là-dessus, il faut comprendre qu'il y a un bilan migratoire négatif de l'ordre de 5000 personnes par année. Cela veut dire qu'il y a 5000 personnes de plus qui quittent la région qu'il n'y en a qui y entrent. Comme ce phénomène se produit dans les couches relativement jeunes, il y a un fort vieillissement de la population et on peut penser que la courbe va baisser encore plus rapidement dans la décennie qui va suivre. Cela frappe particulièrement le milieu rural, c'est clair, net et évident.

Ces propos sont illustrés de façon claire dans le document sur la gestion des déchets, des ordures, présenté par le ministre léger. Ce document contient des annexes avec des prévisions démographiques pour l'an 2001 et les commissions scolaires jouent aussi beaucoup là-dedans. Dans le comté de Matapédia, je ne me rappelle pas à combien il est rendu en 2001, mais il me semble que c'est en bas de 15 000 personnes.

A part Amqui et Causapscal, c'est passablement rural, agricole, agroforestier. Donc, ces paroisses-là sont fortement touchées. Il est clair que, même avec des mesures rapides, quelques-unes de ces paroisses sont appelées à disparaître. D'ailleurs, on appelle cela des paroisses, mais bien souvent c'est un bout de rang. La paroisse de Routhierville ne comprend que huit ou dix familles. C'est un rang. Il y a un peu de fiction là-dedans aussi, on a 215 paroisses pour 315 000 de population. Donc, il y en a qui sont très petites, mais il va y avoir des abandons.

La fermeture des écoles à cause du petit nombre d'élèves amène des départs de parents et c'est le doigt dans l'engrenage. A moins de mesures vraiment dynamiques pour contrer un mouvement comme celui-là, il y a des dangers prochains d'ici 1981. Cela sans programme systématique d'aide aux migrants.

M. Giasson: En page 10, vous signalez que vous avez une région qui n'est pas comme les autres et que vous voulez une régie pas comme les autres aussi. Vous voudriez une espèce de statut particulier dans la protection des terres agricoles, dans l'hypothèse où le ministre déciderait d'étendre la zone jusqu'à l'est de la province. Vous réclameriez un genre de statut particulier en matière de protection des terres agricoles par rapport aux dispositions de la loi.

M. Jobin: De fait, on pense que cette formule-là pourrait être applicable chez nous. Peut-être pourrait-elle être applicable dans d'autres régions; on n'a pas l'ambition — on ne s'est pas concerté à ce point-là avec l'extérieur — de prétendre que c'est un modèle qui fonctionnerait partout. Mais on pense que chez nous il y aurait moyen de fonctionner comme cela.

Un des avantages de cette formule et qu'il n'y a pas dans une autre formule, c'est que le rythme et les priorités d'intervention resteraient dans une région comme la nôtre. Même si la loi s'appliquait chez nous, j'ai l'impression que l'Est ne serait pas la priorité sur la liste de la commission. Je ne connais pas les membres de la commission et je ne veux pas leur prêter de mauvaises intentions, mais j'ai l'impression à la façon dont on parle généralement du problème de la protection des sols arables au Québec, qu'on ne serait pas les premiers sur la liste.

Avec cela, il y aurait moyen chez nous de s'organiser peut-être pas pour aller plus vite que le violon et que la commission, mais pour définir des priorités d'intervention dans l'Est — parce que ce n'est pas tout qui est également menacé chez nous — qui colleraient à peu près aux besoins ressentis dans le milieu.

Je ne sais pas jusqu'à quel point c'est la même chose ailleurs, mais, chez nous, j'ai l'impression que tous les documents sur le zonage ont été faits et refaits un certain nombre de fois. On a trois ou quatre sortes de zonages. Il n'y a pas de problème de documentation là-dessus. Ce qu'il y a à faire, c'est un choix. On a à dire: Cela, on le protège ou on ne le protège pas. Il n'y a pas de considérations techniques qui peuvent freiner cette affaire. Il y a un choix à faire et cela peut prendre beaucoup de temps faire un choix. C'est finalement une décision. Il n'y a pas de travail technique à monter.

M. Giasson: Autrement dit, vous avez tout le matériel en main pour procéder...

M. Jobin: Je considère qu'on en aurait assez pour pouvoir faire quelque chose qui aurait à peu près de l'allure. Mailloux-Dubé n'a pas été inventé quelque part dans les nuages. Cela a été inventé chez nous. Le ministère de l'Agriculture a produit à plusieurs reprises différents types de zonages biophysiques, socio-économiques, etc. Il y a vraiment là une documentation de base très considérable.

M. Giasson: C'est un élément qui m'apparaît coller à une réalité de votre milieu et, d'ailleurs, cela va dans le sens d'un grand nombre de recommandations qui sont venues de différentes régions du Québec. Je parle de gens qui sont venus devant la commission, qui viennent tant des Laurentides que d'autres endroits, d'autres régions du Québec.

A ce niveau, cet avis en matière de possibilité de commission régionale, ce n'est pas particulier à votre région. Nous avons eu devant la commission plusieurs intervenants qui ont fait des recommandations dans ce sens pour des motifs à peu près similaires à ceux que vous invoquez dans votre mémoire.

De toute façon, je veux donner la possibilité à mes collègues d'intervenir.

Je vous remercie encore une fois du mémoire que vous nous déposez.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Merci, M. le Président. Bonsoir, messieurs du CRD du Bas-Saint-Laurent.

Vous indiquez dans votre mémoire que vous avez 422 000 acres de terre AA. Il y en a combien en exploitation présentement? Je parle d'exploitation viable et rentable. Un pourcentage approximatif.

M. Jobin: J'ai l'impression que c'est la majeure partie. Il faut tenir compte que là-dessus, il y a les utilités publiques. La voirie, la plupart du temps, passe sur les bonnes terres agricoles, l'Hydro, etc. Enfin, vraiment agricoles, cela doit aller chercher entre 60% et 75%, quelque part là-dedans. Si on exclut les villes comme Rivière-du-Loup, Trois-Pistoles, Rimouski, Matane, Mont-Joli, a la limite, c'est construit dans le AA, cela doit être entre 70% et 75%, mais j'ai l'impression qu'il n'y en a plus de disponibles pour être mises en valeur au plan agricole.

M. Dubois: Celles qui sont exploitées présentement, elles sont viables et rentables?

M. Jobin: Dans cette zone, pour la plupart, oui. Il y a encore de petites exploitations, mais, pour la plupart, on peut dire que c'est une agriculture rentable.

M. Dubois: Sont-elles vraiment menacées présentement? (21 heures)

M. Jobin: La menace n'est certainement pas du même ordre que ce qu'on peut voir dans la plaine de Montréal. Je ne suis pas originaire de Rimouski. Quand je suis arrivé à Rimouski, Saint-Anaclet était une paroisse agricole. Aujourd'hui, ce sont seulement des gens du CEGEP et de l'université qui restent là. C'est une paroisse où restent les professeurs du CEGEP, de l'université, des voyageurs de commerce, des gens comme cela. De l'agriculture il y en a dans les autres rangs, mais dans le deuxième rang, il n'y en a plus. Le Bic, tout près du futur parc éventuellement, c'était également une paroisse agricole. C'était, parce qu'aujourd'hui, c'est la même chose que Saint-Anaclet. Cela se meuble de gens qui aiment voir le fleuve, la campagne, le bon air, etc., et qui aiment payer moins de taxes qu'à Rimouski. Il y a toutes sortes de bonnes raisons pour aller là. Mais quand ils vont là ce sont les agriculteurs qui s'en vont. Je comprends que ce n'est pas, à l'échelle du Québec, fort impressionnant, mais on n'a pas assez de bonnes paroisses agricoles dans la région pour en perdre trop. Il n'y en a pas beaucoup.

M. Dubois: Le ministre a fait cela pour semer du blé d'Inde, à Beaumont.

M. Garon: Oui, mais moi, je le cultive. J'ai pris un bien petit morceau, six ou sept acres. Mais cela

me fait penser, quand vous dites cela, à Jean Narrache. Vous rappelez-vous le programme de Jean Narrache? Là-dedans, il y a les deux femmes qui vont au cinéma, qui voient deux orphelines, elles pleurent à mort, elles ont les larmes aux yeux et, quand elles sortent du cinéma, il y a justement deux orphelines qui tendent la main parce qu'elles n'ont pas une "cenne". Les deux femmes disent: Tassez-vous, mes petites gueuses, vous achalez le monde. Il y a des gens de même qui aiment mieux les cultivateurs dans les vues.

M. Dubois: Vous avez indiqué que vous aviez perdu 6000 fermes. Quelles sont les raisons exactement? Quelles sont-elles?

M. Jobin: II y a diverses raisons. Ce serait d'abord le fait que c'était recommandé dans le plan du BAEQ et dans l'entente qu'on en a retenue par la suite, l'entente générale de coopération Canada-Québec, de parvenir à la rationalisation des activités traditionnelles de base. Cela voulait dire de la petite pêche en petites barques, n'en faites plus. De la petite forêt avec la petite hache, n'en faites plus. Et de la petite agriculture avec la petite charrue, n'en faites plus. Rationaliser, cela voulait dire...

M. Dubois: Cela ne se fait plus, non plus, à la hache...

M. Jobin: ... consolider. Non, mais...

M. Dubois: ... cela ne se fait plus à la pelle, cela ne se fait plus avec la pelle et la charrue à une raie. Cela se fait autrement, aujourd'hui, l'agriculture.

M. Jobin: Oui, mais il y a dix ou quinze ans, cela se faisait encore dans la région en quantité importante.

M. Dubois: Oui, mais là c'est en 1978. On parle d'aujourd'hui.

M. Jobin: Oui, mais ce qui a fait la diminution de 6000 ou à peu près, en bonne partie, c'est la rationalisation, ces programmes de consolidation qui ont fait que notre production laitière a presque doublé. La région, sur le plan agricole, en termes de revenus agricoles, c'est deux ou trois fois mieux qu'avant, mais il y a deux ou trois fois moins de monde là-dedans qu'avant.

M. Dubois: Est-ce qu'il y a avantage comparatif à produire?

M. Jobin: Avantage?

M. Dubois: Un avantage comparatif à produire. Est-ce que cela prendrait des programmes agricoles différents d'autres régions pour que l'agriculture soit plus prospère là-bas? Enfin, est-ce qu'il faudrait investir plus dans l'agriculture chez vous par acre en culture que dans d'autres régions plus centrées vers Montréal afin d'attirer l'agriculteur à rester sur sa ferme? Vous dites que vous avez perdu 6000 fermes, c'est parce qu'il y a des agriculteurs qui ne sont pas intéressés à produire. Les gens délaissent la ferme parce que ce n'est pas rentable ou il n'y a pas avantage comparatif à produire. Il y a une raison pour laquelle les gens délaissent la ferme.

M. Jobin: C'est cela. Dans la mesure où il y a ce vaste mouvement de consolidation qui s'est amorcé chez nous, en même temps, au Québec, l'agriculture évoluait aussi. Ce qui fait qu'on avait, il y a quinze ans, seulement ou à peu près seulement de petits cultivateurs, très petits. Ce sont eux qui ont lâché. Dans les années qui vont venir, à moins de frapper de grosses malchances dans le lait, comme cela a été le cas il n'y a pas si longtemps malgré tout, il est à prévoir que ceux qui sont là vont rester. En tout cas, ceux qu'on a perdus, c'est ceux qui étaient destinés à sortir. Ceux qui sont restés sont ceux qui ont investi considérablement, qui ont amélioré leur gestion de ferme, qui ont amélioré leurs troupeaux, leur équipement, qui se sont agrandis, etc. Ceux-là, donc, ont la couenne plus dure, mais, en même temps, c'est clair qu'ils ont des besoins plus grands. En termes financiers, c'est plus gros. Ils ont plus d'obligations à assumer, etc.

M. Dubois: Si vous désirez être vous-même producteur agricole à temps plein sur une ferme, est-ce que vous allez vous localiser dans la région du Bas-Saint-Laurent ou si vous allez vers la région de Montréal, si vous aviez le goût d'y aller à temps plein, comme vrai producteur? Si vous aviez un choix à faire, c'est quoi?

M. Garon: On ne décide pas ça de même. M. Dubois: Tout sentiment enlevé.

M. Jobin: Tout sentiment enlevé, je ne suis pas sûr...

M. Giasson: Les racines, c'est fort.

M. Dubois: Oui, je parle de sentiment, ce n'est pas le sentiment qui fait foi de tout, dans l'agriculture, quand même.

M. Jobin: En me mettant absolument neutre, je ne suis pas sûr qu'avec un certain nombre de programmes de rentabilisation de l'agriculture un peu particuliers à l'Est du Québec, il n'y a pas, à la limite, pour quelqu'un qui part de rien, pour qu'il n'y a pas plus d'inconvénient à aller à une place qu'à l'autre, avantage à aller chez nous, dans la mesure où les coûts d'installation, de base, ce que ça coûte pour acheter de la terre, finalement, sont beaucoup moins élevés qu'ils peuvent l'être à Saint-Hyacinthe, par exemple et la concurrence est moins forte pour l'achat de ces terres.

M. Dubois: Même avec le fait que vous puissiez acquérir une ferme à coût beaucoup plus bas que n'importe où ailleurs, ça vous prendrait

des programmes agricoles encore, en fait, où on investirait plus d'argent pour vous garder sur la ferme là-bas, que dans la région de Montréal ou que dans la région de Saint-Hyacinthe. Il faudrait investir plus dans l'agriculture.

M. Jobin: C'est-à-dire que le problème, en tout cas, ce n'est pas le seul problème dans l'agriculture de l'Est, sans doute que M. Garon pourrait vous en citer quelques autres, mais un des problèmes, c'est que presque tout notre monde est dans l'industrie laitière et qu'il n'y a plus d'avenir là-dedans. Il n'y a plus moyen de grossir tellement la production, on en fait déjà trop dans la région; Québec en fait déjà trop dans un Canada qui en fait déjà trop.

M. Dubois: Ecoutez, on connaît plus les problèmes du lait.

M. Jobin: II y a des quotas, les quotas baissent, les gars se font serrer la vis.

M. Dubois: II s'agit de savoir s'il y a avantage comparatif à diversifier, à aller dans d'autres cultures là-bas. C'est ce qu'il faut savoir...

M. Jobin: Voilà.

M. Dubois: ... si c'est une culture qui doit être supportée par l'Etat à coups de taxes, ça vient que c'est peut-être indécent de produire dans certaines régions où il faudrait investir toutes les taxes de l'Etat. C'est la question qu'on doit se poser quand même.

M. Jobin: En tout cas, c'est la problématique qu'il y a dans le plan de développement qui a été mis de l'avant par l'UPA, ce que j'en ai retenu après une lecture attentive. C'est qu'il faut absolument parvenir à la diversification des productions dans notre région, parce qu'avec le lait, les gens se nuisent.

M. Dubois: En définitive...

M. Jobin: Ils se marchent sur les pieds. Il faut absolument trouver des programmes de diversification et même des programmes de transfert de production, parce que le gars, ce n'est pas tout de lui dire: Tu devrais diversifier et lâcher le lait, mais, quand il est poigné avec ses cent vaches, disons qu'il est moins mobiles que d'autres.

M. Dubois: En définitive, il ne semble pas que vous ayez un problème majeur de zonage agricole, c'est plutôt un problème de programmation en agriculture que de zonage agricole que vous avez chez vous.

M. Jobin: Oui. D'ailleurs, c'est ce qui se dégageait du mémoire qu'on a soumis à M. Garon lors de sa tournée. Comme il l'a bien dit, c'est ce qui se dégageait de la majorité des mémoires qui ont été présentés dans notre région.

M. Dubois: Merci beaucoup, monsieur.

M. Garon: II y a plus de possibilités qu'on pense quand même. Parce qu'il y a de bons potentiels, il y a de bons territoires. Je vais vous donner un exemple qu'on m'a raconté récemment au ministère. Il y a eu une expérience dans le chou-fleur dans le Témiscouata. Apparemment, il est sorti un chou-fleur de là cet été, pas épouvantable, c'est extraordinaire. Le chou-fleur était très beau, parfaitement blanc, on ne pourra pas sortir quelque chose de plus beau que ça, n'importe où au monde. C'est sorti dans le Témiscouata. Je ne sais pas à quel endroit, je ne peux pas vous le dire.

Il y a des possibilités de développer certaines affaires, des pommes de terre de semence, des choses comme ça. Mais il n'y a pas d'impossibilité qu'il en ait aussi dans la plaine de Montréal. Eventuellement, ce qui est un fait idéal, c'est qu'en développant l'agriculture, dans la région de Montréal, dans certains domaines, il va y avoir des avantages comparatifs, comme pour les céréales, les légumes, des choses comme ça. Normalement, la production de lait nature devrait rester près des centres de consommation, mais il faudrait qu'éventuellement — ça, ce sont les producteurs entre eux qui doivent s'en parler, parce qu'il y a des règlements de quotas, par région, ça appartient à la Fédération du lait industriel — ces règlements de quotas puissent prévoir des transferts de quotas de lait industriel vers les régions qui sont moins favorisées, alors que des régions plus favorisées vont se développer en regard d'autres productions.

Ce qui peut arriver aussi, c'est que la région plus favorisée dise: J'ai un quota, mettons, de 30 millions de livres de lait, et ce qui part d'un producteur de la région, doit aller à un autre producteur de la région. Donc, tous les quotas vont rester dans la région. Les producteurs vont devenir de plus en plus gros, et certaines régions périphériques qui ont des avantages moins grands, mais qui, au point de vue des pâturages, sont parfaites, pourraient faire du lait industriel. On pourrait y faire de l'élevage de boeuf et certains types de production. C'est évident qu'ils ne feront pas des tomates, il n'y aurait pas d'avantage à y faire des tomates. Mais il y a des produits offrant des avantages. C'est en développant tous les secteurs dans lesquels il y a des avantages, c'est un peu ce dont on voulait vous parler, le zonage de production, mais cela ne peut pas se faire d'une façon impérative, par exemple, le climat économique.

M. Dubois: II ne peut pas y avoir de production de légumes dans cette région parce qu'il n'y a pas de marché, premièrement. Avec le zonage agricole qui se fait actuellement, on va avoir assez de problèmes aux alentours de Montréal, dans la région périphérique de Montréal et de Québec, si on a plus de production maraîchère plus que pour les besoins actuels.

M. Garon: II y a des légumes qui viennent bien chez eux.

M. Dubois: C'est local. C'est quand même assez limité. Cela peut aller pour quelques centaines d'acres peut-être. On ne peut pas remonter la production maraîchère indéfiniment, il y a une limite quand même, parce que les marchés ne sont pas là.

M. Giasson: En culture maraîchère, il y a toujours un marché local, la Côte-Nord et le Bas-Saint-Laurent.

M. Dubois: En dehors du marché local, cela se limite quand même à un certain nombre d'acres, cela ne va pas tellement loin.

M. Garon: Pour nous, le marché local, cela peut vouloir dire également le Bas-Saint-Laurent et la Côte-Nord. Cela veut toujours dire quelque chose, en plus des productions de boeuf. Même s'il n'y a pas eu de programmes régionaux, le programme national du boeuf à 50 têtes joue à plein dans leur région au fond. Elle peut augmenter, elle peut donc jouer dans la région. D'ailleurs, il y en a déjà dans la Gaspésie qui s'en sont prévalus.

M. Giasson: A condition que les exigences de l'environnement ne mangent pas les $5000 de subvention.

M. Garon: Pardon?

M. Giasson: Le programme des parcs d'engraissement, 50 têtes?

M. Garon: Oui.

M. Giasson: A condition que les exigences de l'environnement ne viennent pas manger la subvention.

M. Garon: Ce programme ne va pas trop mal jusqu'à maintenant.

M. Giasson: J'ai des éleveurs de boeuf chez nous qui sont aux prises avec des permis de l'environnement et ils vont manger la subvention accordée pour les parcs d'engraissement à cause d'exigences folichonnes.

M. Garon: Ce n'est pas comme cela ailleurs.

M. Giasson: C'est ce que je vis chez nous avec deux producteurs de boeuf.

M. Garon: Dans quelle paroisse?

M. Giasson: Un à Saint-Omer et l'autre à L'Islet.

M. Garon: C'est parce qu'ils sont bâtis à côté du motel!

Le Président (M. Boucher): Je m'excuse, M. le député de Montmagny-L'Islet...

M. Giasson): Le vrai nom, M. le Président, de l'organisme.

Le Président (M. Boucher): Nous sommes en face d'un organisme qui s'appelle le CRD de l'est du Québec. M. Jobin, vous aviez quelque chose à ajouter? M. Lachance.

M. Lachance: On pourrait ajouter une ou deux petites choses, comme souligner de nouveau la spéculation qui commence chez nous, souligner aussi qu'il ne faut pas évaluer l'Est du Québec avec des yeux de Montréal. C'est ce qu'on dit dans le mémoire, on n'est pas pareils. Perdre 100 acres chez nous, c'est grave, beaucoup plus grave qu'ailleurs, justement parce qu'on n'en a pas beaucoup. Zoner, pour nous autres, cela veut aussi dire qu'on s'assure que le ministère des Terres et Fôrets n'ira pas planter sur une terre agricole, ce qui se fait actuellement.

M. Garon: Ah oui.

M. Lachance: C'est plat, mais cela se fait. Cela se fait au niveau des individus. Il y a des particuliers qui achètent une terre et qui reboisent, parce qu'il y a des programmes du ministère des Terres et Forêts qui incitent au reboisement. Enfin, peut-être la dernière chose que je voudrais souligner, c'est qu'on part en bas de zéro. Quand je donnais l'exemple des pommes de terre tout à l'heure, c'est vrai qu'on a besoin de programmes supplémentaires, mais des programmes supplémentaires à court terme, parce que, quand tu sèmes des pommes de terre et qu'avant, l'année précédente, il y avait des arbres de dix pieds de hauteur, tu n'as pas un rendement qui entre dans la moyenne régionale, ce n'est pas vrai. On ne fait pas de miracles. Mais si on a des programmes d'aide pendant les deux ou trois premières années pour finir par avoir un rendement normal, après cela, je ne pense pas qu'on quête plus que d'autres. Sauf que si on dit: On relève la région, on la relève avec tout ce que cela comporte, c'est parce qu'elle est en bas de zéro. Présentement, on est en bas de zéro. Pardon?

M. Giasson: Est-ce que vous êtes producteur vous-même?

M. Lachance: Je fais partie d'une coopérative de production de pommes de terre de semence. Autre chose qu'il faudrait dire aussi, c'est que de la pomme de terre de semence, vous n'en ferez pas à Montréal, ce n'est pas vrai. Vous allez en faire dans des régions froides comme chez nous.

M. Dubois: Je suis bien au courant de la situation.

M. Lachance: Et on produit en bas de 35% de nos besoins.

M. Dubois: De la pomme de terre élite, je sais où cela se fait.

M. Lachance: II y a de la place en masse. Nous autres, ce qu'on veut dire, c'est qu'il y a entre ministères de petits conflits qui se régleraient peut-être avec un zonage. Il y a des gens qui n'ont pas une préoccupation agricole et qui achètent parce que, chez nous, les terres ne sont pas chères. Cela réglerait aussi ce problème, mais cela ne veut pas dire que cela ne nous prend pas des programmes spéciaux de rentabilisation pour qu'on finisse par rattraper le restant de la province, parce qu'on est en retard. (21 h 15)

Le Président (M. Boucher): M. le député de Rimouski.

M. Marcoux: Nous avons encore plusieurs autres mémoires à attendre. Ce serait tout simplement de vous remercier d'être venus nous présenter votre mémoire, surtout par les réponses aux questions qui ont été posées, peut-être d'avoir illustré la complexité et même l'ambiguïté qu'il peut y avoir dans les objectifs qu'on peut viser au plan agricole dans la région. Je veux simplement rappeler deux chiffres que j'ai eu l'occasion de citer en deuxième lecture pour montrer l'importance, même si, pour l'ensemble du Québec, l'agriculture, c'est dans la région de Montréal, Québec, Trois-Rivières et tout cela, par rapport à notre région, le secteur agricole, c'est 35% de l'ensemble... L'agriculture, dans l'Est du Québec, engendre le secteur agro-alimentaire, plus de 35% de l'ensemble du secteur manufacturier, tout en générant 28% des salaires, alors que, pour le Québec, c'est 16% du secteur manufacturier et 22% des salaires. On voit là l'importance du développement de l'agriculture, et qu'il y a une agriculture qui est rentable. Vous avez montré, en fait, là où elle est rentable et là où elle ne l'est pas. C'était quand même assez complexe. Mais l'importance, en termes d'emploi et de vitalité dans la région, du développement de l'agriculture est beaucoup plus forte que dans une autre région où il y a plus de choix et même où les choix de productions sont beaucoup plus importants. De toute façon, je pense que les problèmes ont été abordés avec suffisamment de nuances sans qu'il faille insister et poser d'autres questions. Je vous remercie.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Rimouski. Au nom des membres de la commission, je remercie, M. Jobin et M. Lachance pour le mémoire qu'ils ont présenté au nom du CRD de l'Est du Québec. J'appelle maintenant le Conseil de recherche de la Haute-Yamaska, présenté par M. Jules Thibault.

Conseil de recherche de la Haute-Yamaska

M. Thibault (Jules): Je vais prendre un verre d'eau. Je commence à être fatigué un petit peu.

Le Président (M. Boucher): Certainement.

M. Thibault: On va parler de choses sérieuses, mais pas trop sérieusement, parce que vous avez subi le marathon. C'est assez rare qu'une loi a une aussi longue séance. Maintenant, avant de commencer, je vais demander à ceux qui m'accompagnent de se présenter. Mon nom est Jules Thibault, président du conseil de recherche.

Mme Simard: Je suis Danielle Simard, je suis directrice du projet qui s'appelle schéma d'aménagement du comté de Shefford, projet qui a accouché pendant l'été aussi, parce qu'on a fait un inventaire du milieu physique et socio-économique. En même temps, il y en avait un autre qui se situait aussi dans le bassin de la Yamaska, pour Brome-Missisquoi, qui était dirigé par d'autres personnes. Ce projet, le projet du comté de Shefford, se continue, entre autres, à l'intérieur de ce qu'on retrouve dans la région du bassin de la Yamaska, et il y a quand même différentes choses à souligner dans le cadre d'un zonage agricole.

M. Garon: Vous êtes financés par qui, quand vous dites être un groupe du schéma d'aménagement?

Mme Simard: Devinez.

M. Garon: Je ne le sais pas.

Mme Simard: Canada au travail.

M. Thibault: On va vous en parler tout à l'heure.

M. Garon: Vous appelez cela le schéma d'aménagement du comté de Shefford.

Mme Simard: Oui. Cela s'appelle comme cela parce que, tout simplement, vous savez que cela fonctionne par comtés, par divisions, c'est-à-dire par comtés électoraux. Cela fait qu'à ce moment, on ne pouvait pas couvrir plus grand que cela, malheureusement.

M. Garon: Le Conseil de recherche de la Haute-Yamaska, c'est incorporé? C'est qui?

M. Thibault: C'est qui? Ici, vous avez la délégation qui a été nommée...

M. Picotte: Est-ce qu'on pourrait connaître la troisième personne?

M. Racine: Mon nom est Jean-Marie Racine. Je suis vice-président du Conseil de recherche. Nous sommes tous trois de Granby.

M. Thibault: Mon premier mot est pour féliciter...

M. Garon: On sait que Mme Simard est pour le schéma d'aménagement, vous avez parlé de Canada au travail. Et le Conseil de recherche de la

Haute-Yamaska Inc. comme tel, c'est quoi? Moi, je ne le sais pas.

M. Thibault: Dans le texte, on vous l'explique, mais je dois vous dire franchement que c'est assez simple. C'est un organisme formé de citoyens. Dans le texte, c'est écrit, c'est formé de citoyens et on s'occupe de planification. En tout cas, en lisant le texte...

Je voudrais d'abord vous adresser mes félicitations, M. le ministre, pour avoir eu le courage de présenter une loi aussi importante que celle-là. On a beau rire, je vous ai vu rire tout à l'heure, mais vous ne pourrez pas rire bien longtemps parce que vous avez une grosse loi, vous savez. Plus on fait les choses en grand et en gros, plus on a de petits problèmes. Je vous félicite parce que c'est vraiment une loi dont on avait besoin. Il y a des conséquences à cela. Il y a des choses qui vont survenir. A longue échéance, c'est une très belle loi. Mais à courte échéance, c'est un tas de troubles. Maintenant, je ne veux pas être trop sérieux parce qu'on a des choses pas mal sérieuses à vous dire. Mais ce matin, on s'est levé de bonne heure, vous savez. Je comprends votre lassitude. Je veux vous faire reposer un petit peu. Je pourrais vous raconter une petite histoire, mais je vais vous épargner cela.

On était convoqué pour 10 heures ce matin.

M. Giasson: Si elle est bonne, allez-y. M. Garon: Si elle est bonne, envoyez.

Le Président (M. Boucher): Je considère que nous avons le consentement des membres pour l'histoire. Merci.

M. Giasson: Est-ce que vous tenez à ce qu'elle soit enregistrée au journal des Débats?

M. Thibault: Non. Nous regrettons avec cette fatigue que vous avez de vous dire des choses très sérieuses. Mais nous allons le faire de façon que ce soit le moins pénible possible. Voici, à la page 1, introduction: Le Conseil de recherche de la Haute-Yamaska couvre le territoire du bassin de la rivière Yamaska. Environ 200 000 personnes et une centaine de municipalités ont juridiction sur ce territoire. Les deux principales villes du territoire sont Granby et Saint-Hyacinthe. Nous sommes une région non identifiée, sans services adéquats, au sens large du mot. Pour l'agriculture, notamment, trois comtés de la Haute-Yamaska sont rattachés à Sherbrooke et quatre autre comtés sont rattachés à Montréal et Saint-Hyacinthe. Quand on veut obtenir des informations, on n'en finit plus de chercher. Dans des brochures du ministère de l'Agriculture, les gens de la Yamaska sont classés dans la section Richelieu. Notre conseil est un organisme créé par la volonté des citoyens et financé par eux-mêmes.

Nous avons réalisé la première phase d'un schéma d'aménagement dans trois comtés, soit Brome-Missisquoi et Shefford. Ces projets ont été financés par Ottawa. M. le ministre, Ottawa, on l'a mis là. Inutile de vous dire qu'on a vite l'impression que le secteur agricole est un secteur marginal, non organisé et non planifié. Quand on fait l'inventaire du milieu, on se rend compte rapidement qu'on a perdu le sens des valeurs et de l'équilibre. Tout le monde peut intervenir dans le secteur agricole, y installer n'importe quoi, cultures maraîchères, porcheries, campings, pistes de courses automobiles et le reste. On peut en ajouter. Les municipalités rurales interviennent rarement et des permis, on n'en exige pas dans bien des cas. Les taxes sont peu élevées et on se contente de cela.

Dans l'ordre des valeurs humaines — je parle des choses sérieuses — l'alimentation et les ressources énergétiques sont à la base du fonctionnement de notre régime socio-économique. Ce sont des valeurs de bien commun qui doivent être au service de la communauté avant de servir les intérêts des particuliers. L'objectif de notre intervention est premièrement d'appuyer le projet de loi sur la détermination de zones agricoles, deuxièmement, d'améliorer notre bilan alimentaire en favorisant la production et le développement agro-alimentaire et la transformation de l'agro-alimentaire. Donc, une agriculture plus prospère et plus dynamique.

Le projet de loi no 90, Loi sur la protection du territoire agricole. Nous sommes en faveur d'une loi-cadre. Quant à la formation de la commission, nous sommes d'accord avec l'article 4. Cependant, nous croyons qu'en plus des membres de la commission devraient s'ajouter des représentants des producteurs, du secteur de la transformation et un représentant des consommateurs.

Je ne sais pas si c'est cela que vous avez derrière la tête, M. le ministre, ou bien si vous êtes trop fatigué et que vous aimez mieux répondre à la fin.

M. Garon: D'habitude, on répond à la fin afin d'avoir une idée globale.

M. Thibault: D'accord, très bien. Pourvoir régional: Les groupes régionaux... J'ai sauté une feuille. Excusez-moi. Régions agricoles désignées. Le gel des terres agricoles pour 614 municipalités est en vigueur depuis le 9 novembre 1978. Cette procédure a créé beaucoup d'émotions et nous recommandons au ministre d'agir avec une certaine célérité, car il y a des craintes qui sont fondées et beaucoup d'autres qui ne le sont pas, soit par le manque d'information ou par pure démagogie. Ce ne sont pas seulement 614 municipalités qui sont concernées, mais, vous le savez, c'est l'ensemble du territoire agricole du Québec. 3. Dépôt du plan provisoire. Article 34: "Le ministre prépare un plan provisoire identifiant l'aire retenue pour fins de contrôle à l'égard de chaque municipalité située dans la région agricole désignée." A cette fin, on met de côté toute régionalisation qui serait de bon aloi. Il est préférable de s'associer avec la population que d'imposer une politique. Le paternalisme, c'est terminé.

La population veut avoir son mot à dire sur le sol qu'elle habite. Il est entendu que la commission devrait avoir pleine autorité sur le plan déposé. La concentration des demandes à Québec des 600 municipalités ou plus est inconcevable. Il faudrait songer à la formation d'environ dix régions. Certains ont dit douze, cela peut être cela. Une bonne loi mal administrée ne vaut guère mieux que pas de loi du tout. (21 h 30)

Pouvoir régional: Les groupes régionaux devraient être composés des représentants des producteurs, des municipalités, des groupes socio-économiques régionaux, du ministère de l'Agriculture, des Terres et Forêts, du secteur de la transformation agro-alimentaire, environ sept membres. Il y aura des demandes de modification de zones. L'appréciation régionale est quelque chose de valable. De plus, faire confiance aux gens, c'est s'assurer leur estime. Nous insistons pour que la loi soit appliquée uniformément sur tout le territoire.

Recours civil: La loi ne permet pas de recours civil. J'aimerais poser une question au ministre de l'Agriculture. D'après nos renseignements, la Loi sur la protection du territoire agricole de la Colombie-Britannique permet les recours au civil. Existe-t-il une raison particulière pour ne pas les permettre au Québec?

Article 100: Cet article a une grande portée et ne fait pas concordance avec les règlements de l'environnement. Il ne faudrait pas être rétrograde. Nous insistons pour que vos collègues des services de l'environnement concourent aux bienfaits de cette loi. Je veux citer un cas typique, il y en aurait plusieurs. Par exemple, dans un rang où ce sont tous des maraîchers — les maraîchers, c'est la population de la ville qui vient chercher ses fruits, qui vient faire la cueillette de ses fruits et des ses légumes — on a une porcherie à côté. Quand on va voir les cultivateurs, savez-vous ce qu'ils nous disent: Le gars d'en face, si je pouvais, je le tirerais au fusil! Il y a quelque chose qui ne va pas dans cela. Je n'ai pas de solution à vous proposer, vous les connaissez. Il n'y a pas que ce cas, il y en a d'autres. C'est un cas véridique, ce n'est pas un cas inventé. Vous savez que Saint-Hyacinthe, c'est une bonne région agricole, mais Granby aussi. On ne peut pas concevoir, alors que la population des villes encourage surtout les maraîchers — de plus en plus, pour réduire leurs frais d'exploitation, les gens vont faire la cueillette eux-mêmes — qu'on ait à côté ou en avant des porcheries. Peu importe la direction des vents, cela n'a pas de sens. Je suis allé là. Cela puait tellement, c'était effrayant! C'était pour souligner ce cas. Oui.

M. Garon: Qu'est-ce qui sentait? Une vieille porcherie ou une porcherie neuve?

M. Thibault: Je n'ai pas vérifié la date, elle semblait à peu près à 700, 800 ou 1000 pieds de chemin. L'âge, je n'ai pas regardé. Vous savez, quand on va chez un maraîcher, on ne va pas demander au voisin son âge. C'est ce qui s'est passé. Je ne le sais pas.

M. Garon: Les porcheries modernes ne sentent pas.

M. Thibault: Cela sent passablement. J'ai un fils qui en a une.

M. Garon: II a une porcherie.

M. Thibault: Je pourrais vous répondre là-dessus.

M. Garon: II a une vieille porcherie?

M. Thibault: Elle n'est pas vieille, il est à la bâtir.

M. Garon: Elle n'est pas encore bâtie, elle ne peut pas sentir.

M. Thibault: Elle est bâtie. Là, je vous tiens. Non, pas d'arguments, on va arrêter cela là. On va passer à la page suivante.

M. Garon: Je vais vous dire une chose.

M. Thibault: La porcherie, cela sent le cochon, n'oubliez pas cela! Voyons donc!

M. Garon: Une porcherie neuve faite selon les normes, cela ne sent rien.

M. Thibault: Pas dans le salon rouge, mais dans la porcherie, cela sent. Les indemnités: Plusieurs groupes privés et organismes publics réclament des mesures pour compenser les pertes encourues si leurs fermes avaient été vendues pour usage urbain, lotissement et le reste. Nous ne sommes pas favorables à l'enrichissement des spéculateurs. On n'a pas besoin de loi pour enrichir les spéculateurs professionnels. Ils ont généralement suffisamment de ressources pour y parvenir autrement.

La socialisation: On a tellement attendu pour adopter une loi qui aurait dû exister depuis au moins quinze ans que les spéculateurs se réclament des droits acquis. Messieurs, que faut-il penser de l'agriculteur marginal, celui dont la ferme est trop petite ou sous-équipée pour vivre convenablement, quand les spéculateurs veulent se faire payer en plus.

Il convient de noter ici qu'il existe en plusieurs pays, des déséquilibres marqués entre terre et peuplement. Dans certains pays, les hommes sont rares et les terres cultivables abondent. En d'autres régions, à l'inverse, les hommes abondent et les terres cultivables sont rares.

Nous avons à peine 1,5 million d'acres de sol à très bon potentiel, soit 0,44% de l'ensemble du territoire québécois. Quelle voie devons-nous choisir? Il faut accepter la socialisation, celle qui crée la solidarité humaine et place le bien commun avant l'intérêt personnel.

De nos jours, l'Etat intervient de plus en plus dans des domaines qu'on considérait comme intouchables. La fonction sociale de la propriété privée n'en est pas pour autant altérée, désuète, comme certains auraient tendance à le croire par erreur, et là, s'enracine dans la nature même du droit de propriété. Citation de Jean XXIII, Mater Magistra.

Dans la société moderne, la notion de propriété a quelque peu changé. Dans bien des secteurs, on préfère une formation professionnelle plus poussée, donc, plus enrichissante pour l'individu. Le développement de la science et les moyens technologiques nous ont permis d'évoluer dans ce sens. Je crois que cela ne s'arrêtera pas là. Au contraire, ce mouvement va s'accentuer.

Le "développement" doit demeurer sous le contrôle de l'homme. Il ne doit pas être abandonné à la discrétion d'un petit nombre d'hommes ou de groupes jouissant d'une trop grande puissance économique ni à celle de la communauté politique ou à celle de quelque nation puissante.

Il convient, au contraire, que le plus grand nombre possible d'hommes de tous les niveaux puissent prendre une part active à son orientation. Le rôle de l'Etat est d'encourager les initiatives spontanées des citoyens, de les coordonner, de les ajuster, de les harmoniser entre elles.

Le développement ne peut être laissé ni au jeu quasi automatique de l'activité économique des individus, ni à la seule puissance publique. Nous avons fait de la recherche pour vous autres. Vous n'avez pas besoin de vous cacher, on l'a faite pour vous autres, pour vous sauver du travail.

M. Garon: Quelle subvention aviez-vous pour votre projet de recherche, avec Canada au travail?

Mme Simard: C'est ridicule comme montant. M. Garon: Ce n'est pas beaucoup? Mme Simard: Non.

M. Thibault: Est-ce que vous permettez que je finisse? Franchement, j'aimerais mieux finir, M. le ministre.

M. Garon: Oui.

Une Voix: Finissez votre mémoire et, après cela, on passera aux interventions.

M. Thibault: J'aimerais mieux cela que les interventions.

M. Picotte: II vous reste deux pages.

M. Thibault: II m'a mêlé, lui, là.

D'après cet énoncé, si l'on veut que le développement soit acceptable, il faut une participation des individus. S'il est impossible de satisfaire ces exigences, il faut prendre les moyens nécessaires pour que nos institutions puissent prendre en main les responsabilités qui leur incombent, par une modernisation des structures et, par consé- quent, un changement d'attitude. Vous voulez bien noter que l'insistance s'adresse aux municipalités et au gouvernement, car la décentralisation doit se réaliser.

Malheureusement, nos municipalités n'ayant pas évolué avec le temps — je parle surtout des municipalités rurales — se trouvent dans une position dérisoire et sans autorité. Les solutions de facilité, à coups de subventions ne les ont pas préparées pour le rôle qu'elles devraient normalement jouer.

Il faut regrouper nos municipalités pour en faire des unités serviables et rentables. Des tâches importantes les attendent, si elles veulent bien évoluer.

Le zonage n'est que la première étape juridique d'un encadrement qui devra être suivi de bien d'autres mesures qui ont encore plus de profondeur, comme l'aménagement du territoire, car il n'y a pas seulement les sols arables dont il faut s'occuper. Il y a bien d'autres choses, comme les lacs, les lieux touristiques, les lieux de nature écologique, enfin, toute l'organisation du territoire.

L'administration des nouvelles politiques est celle que le gouvernement fait déjà à la place des municipalités, les permis d'établissements, leur contrôle, le service de la police, la protection contre le feu, etc.

Il ne faut pas se leurrer, il y a longtemps qu'on fait ce zonage dans les villes, on ne s'en plaint pas trop pour autant. A nous aussi, il nous arrive que la valeur de nos propriétés baisse à cause de modifications du zonage ou par la pollution accrue de l'environnement, il arrive aussi que la valeur de nos propriétés augmente.

Conclusion de cette première partie; nous voulons que la Loi sur le zonage soit adoptée, afin qu'on puisse entrevoir le renouveau agricole, des emplois nouveaux et une vie meilleure.

Je demanderais à mademoiselle de continuer.

Le Président (M. Boucher): Compte tenu du temps qu'il nous reste...

M. Thibault: Les recommandations sont dans l'autre partie.

Le Président (M. Boucher): ... seriez-vous d'accord pour qu'on puisse inclure l'appendice au journal des Débats, sans qu'il y ait lecture?

M. Picotte: M. le Président, je pense qu'on pourrait donner notre consentement, il y a peu de pages et on pourrait l'écouter.

M. Garon: C'est une demoiselle à part cela. M. Thibault: Donnez-lui une chance!

M. Vaillancourt (Orford): Nous sommes d'accord.

Mme Simard (Danielle): Je suis rarement speakerine, mais je vais m'arranger pour que ce soit rapide.

C'est intitulé: Regardez en avant. Regardez en avant, c'est penser à demain, c'est également espérer, c'est également avoir foi en l'avenir, la justice et l'équité; regardez en avant, c'est également briser quelques liens avec le passé. Pourquoi toujours répéter les mêmes gestes et dans les mêmes circonstances?

Nous savons tous que des gestes répétés trop souvent risquent de devenir mécaniques et d'aboutir à la mort à brève échéance. L'homme est essentiellement mobile et doit toujours travailler pour demain afin d'atteindre sa dimension spirituelle.

En conséquence, nous demandons que l'agriculteur de demain puisse jouir d'un revenu annuel garanti et nous demandons que le gouvernement rachète les terres marginales pour en constituer une banque, de gré à gré.

Nous demandons également que la participation des organismes actifs du milieu prennent part à ce vaste programme de zonage par le CRI. Nous demandons également que le ministre des Affaires municipales prenne des mesures incitatives et financières pour regrouper les municipalités, afin qu'elles puissent jouer d'autres rôles que celui de commis délégué de l'Etat.

Nous demandons aux élus municipaux de faire moins de déclarations politiques, afin d'être les dignes représentants du peuple, tant pour ses besoins que pour ses aspirations, auprès des autorités supérieures.

Nous recommandons une redéfinition plus réaliste des zones régionales, accompagnée d'un traitement plus équitable des organismes régionaux en place; d'après l'Office de planification, Granby et Saint-Hyacinthe sont, à l'échelle para-métropolitaine, des villes satellites de quatrième niveau. Ce sont vraiment des descriptions d'échelle de fonctionnaires. Nous demandons une meilleure représentation et une désignation plus réelle. Nous offrons notre collaboration.

Nous demandons que l'aménagement du territoire soit d'abord et avant tout l'expression du milieu et non une politique élaborée de la capitale et imposée au reste de la province.

Nous demandons que le zonage et l'aménagement soient envisagés sur une base régionale et non sur la base de comté. Il faudrait plutôt envisager comme base les bassins versants des eaux, la qualité des sols, la pédologie.

Qu'une saine régionalisation soit mise à l'étude, ayant comme base la zone d'influence des centres urbains et non les conseils de comté.

Nous demandons que l'agriculture soit valorisée par des politiques appropriées et sélectives, que les villes situées dans les zones agricoles soient favorisées par le développement du secteur tertiaire et de l'industrie agro-alimentaire.

M. le ministre, messieurs les députés, voilà nos humbles recommandations et considérations. Merci à tous.

Le Président (M. Boucher): Merci, Mlle Simard, merci M. Thibault. M. le ministre.

M. Garon: Vous avez l'air joyeux, M. Thibault.

M. Thibault: Pardon?

M. Garon: Vous avez l'air de bonne humeur.

M. Thibault: Je pense qu'après tout le travail que vous avez fait, le marathon, il faut tout de même vous encourager un peu. C'est ma façon de vous dire ma joie, aussi bien au parti au pouvoir qu'à l'Opposition, parce que nous sommes apolitiques, nous ne nous occupons pas de politique, on veut le bien-être des citoyens.

Il y a quelques questions que nous avons posées au début, pouvez-vous y répondre brièvement? Vous avez répondu des centaines de fois, mais nous n'étions pas là.

M. Garon: II n'y avait pas de questions là-dedans, je n'ai pas vu de questions.

M. Thibault: Si vous ne les avez pas vues, c'est bien de valeur!

M. Garon: Lesquelles?

M. Thibault: Pauvre vous!

M. Garon: A quelle page?

M. Thibault: A la page 4.

M. Garon: II y avait une question à la page 4?

M. Thibault: Les recours au civil, pourquoi ne les permet-on pas dans la province de Québec, alors que la Colombie-Britannique les permet? (21 h 45)

M. Garon: C'est parce qu'on n'occupe pas la Colombie-Britannique!

M. Thibault: Non, mais une réponse courte, simple; dites ce que vous pensez tout simplement, sans détour.

M. Garon: Vous vous référez à l'article 100, n'est-ce pas?

M. Thibault: Non, 80...

M. Garon: L'article 82 ne servait pas à des recours. "S'il y a recours, la Cour supérieure peut ordonner la radiation de tous droits, privilèges et hypothèques qui sont créés ou qui découlent de tout fait en contravention des articles 26 à 29, 55 et 70".

Cela veut dire que si des actes sont faits contrairement à la loi et qu'ils peuvent être déclarés nuls par la cour, la cour peut radier les droits et privilèges des hypothèques qui ont été créés illégalement.

M. Thibault: D'accord, s'ils n'ont pas suivi la loi. Mais, ce n'est pas dans ce sens, c'est dans le

sens que si, par exemple, quelqu'un se sent lésé, soit par le zonage, par exemple, qu'il trouve qu'il y a eu des erreurs...

M. Garon: II pourra demander une révision à la commission.

M. Thibault: Alors, après cela, ça va au Conseil des ministres, n'est-ce pas?

M. Garon: Non, l'article 18 dit justement...

M. Thibault: S'il veut poursuivre plus loin, cela va au ministre de l'Agriculture et au Conseil des ministres après.

M. Garon: Non, c'est de révision à la commission, mais la décision ou ordonnance entachée d'erreur d'écriture, de calcul ou de quelque autre erreur de forme peut être modifiée par la commission, sans même qu'il y ait de demande de révision.

M. Thibault: Oui, mais supposons qu'elle refuse. Là je parle d'un cas où il n'y a pas de mésentente.

M. Garon: S'il n'y a pas de mésentente, il n'y aura pas de litige.

M. Thibault: II y aurait les deux, un grief, si vous voulez.

M. Garon: II y a mésentente, s'il y a grief. Vous avez dit: S'il n'y a pas de mésentente. S'il n'y a pas de mésentente, il n'arrive rien.

M. Thibault: Non, mais s'il y a mésentente, vous ne permettez pas de recours au civil.

M. Garon: Entre qui et qui il y a mésentente? M. Thibault: Franchement!

M. Garon: Cela peut être entre la municipalité et la commission. A quel stade y a-t-il mésentente? Ce ne peut pas être une mésentente en général; c'est une mésentente à quel sujet?

M. Thibault: Non, le pouvoir de recours au civil pour contester une décision qu'on croit léser les biens de quelqu'un.

Une Voix: C'est une autre loi.

M. Thibault: Ce n'est pas une autre loi. C'est que la loi de la Colombie-Britannique permet cela et nous, nous ne le permettons pas au Québec. Est-ce que c'est parce qu'il y aurait affluence de contestations qui empêcheraient la loi de fonctionner?

M. Garon: Vous voulez dire des recours à quel sujet? En dommages-intérêts?

M. Thibault: Cela pourrait être n'importe quoi. Tandis que là, telle que la loi est faite, la décision finale, c'est celle de la commission.

M. Garon: Oui.

M. Thibault: C'est cela; alors, est-ce que vous avez réfléchi à cela? Est-ce que cela amènerait trop de problèmes? Si c'est permis dans la loi de la Colombie-Britannique, il y a certainement des raisons.

M. Garon: Vous voulez dire un appel au Conseil des ministres?

M. Thibault: C'est cela.

M. Garon: Oui, mais c'est bien critiqué aussi, n'est-ce pas?

M. Thibault: Oui, on dit que le pouvoir est parti des spéculateurs et qu'il est rendu aux politiciens, en Colombie-Britannique, ce qui n'est pas joli.

M. Garon: Non, mais justement, on va pouvoir éviter cela.

M. Thibault: C'est ce qu'on dit qui existe après six ans, alors...

M. Garon: La Colombie-Britannique a trouvé que notre loi était meilleure que la leur.

M. Thibault: Je ne veux pas dire que la loi de la Colombie-Britannique était meilleure que la vôtre; ce n'est pas ce que je veux dire.

M. Garon: Non, on ne pense pas cela non plus.

M. Thibault: Je ne veux rien insinuer, mais je parle de l'expérience de six ans, qui est quelque chose de valable.

M. Garon: C'est cela, on s'est aperçu que le droit d'appel donnait de mauvais résultats, parce qu'on reportait le droit d'appel au Conseil des ministres ou à un tribunal. Si vous reportez le droit d'appel au Conseil des ministres, l'appel est plus politisé, n'est-ce pas?

M. Thibault: C'est ce qui se produit en Colombie-Britannique, apparemment, c'est devenu plus politisé.

M. Garon: Alors, vous avez le droit d'appel actuellement, selon l'article 33 du Code de procédure civile; ce n'est pas marqué dans cet esprit, parce que c'est le recours en droit commun, sur le droit, en vertu du pouvoir de surveillance de la Cour supérieure, mais sur les faits, vous pouvez seulement demander une révision à la commission elle-même, si elle s'est trompée sur les faits.

Je vous remercie infiniment d'être venus nous rencontrer pour nous expliquer votre point de vue, comme centre recherche de votre région. Je vais donner la parole à l'Opposition... Vous vous demandez pourquoi on ne rit pas souvent, c'est que nous, nous avons l'Opposition en face de nous. Elle va maintenant vous poser des questions.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: M. le Président, je veux remercier les gens qui sont devant nous de s'être donné la peine de nous faire quelques recommandations et de nous avoir présenté leur mémoire.

A la page 3 du mémoire, vous avez soulevé certaines inquiétudes concernant le gel des terres au niveau de 614 municipalités. Remarquez bien qu'il y a des organismes qui sont passés avant vous et qui ont parlé de la même chose que vous, c'est-à-dire de la possibilité de commissions régionales, parce que déjà on avait une crainte que la commission de protection du territoire ait beaucoup de boulot à entendre les griefs de possiblement 614 municipalités. On prétend que le gel des terres pourrait se poursuivre trop longtemps. Dans votre esprit, quand vous parlez de commissions régionales, était-ce dans le but justement de venir...

M. Thibault: Oui, je vais préciser ma pensée, parce que c'est assez important; un connaisseur en a parlé cet après-midi. Selon notre opinion, la loi est celle du gouvernement; le plan provisoire déposé est la responsabilité pleine et entière du gouvernement. L'organisme régional vient ensuite à l'écoute des citoyens, parce que le gouvernement qui adopte la loi est le responsable; à ce moment, c'est lui qui doit endosser et doit avoir la liberté entière de faire ce qu'il veut et de la manière qu'il veut le faire. Mais l'organisme régional est ensuite un niveau intermédiaire à l'écoute des citoyens pour apporter au niveau de la commission les problèmes. Je ne veux pas entrer dans les détails, mais il y aurait un certain pouvoir décisionnel pour ce groupe, mais pas au premier plan, parce que le premier plan appartient au gouvernement; c'est lui qui a pris la décision, c'est à lui de le faire tel qu'il le veut. Je ne veux pas mêler les cartes, mais il faut développer un pouvoir régional.

Aujourd'hui, on a visité des ministères et, savez-vous, ce ne sont pas les lieutenants auprès des ministres qui nous créent des problèmes, ce sont les fonctionnaires mêmes qui faussent l'opinion. On a attendu longtemps, on est arrivé à 10 heures ce matin et on a attendu toute la journée. Alors, on est allé ailleurs. Mais il y a des problèmes, vous savez, et ce n'est pas de votre faute, ce n'est pas la faute des gens qui sont autour de la table ici.

M. Garon: C'est la faute de qui?

M. Thibault: C'est que, lorsqu'on est chef de service et qu'on a un bon personnel, il faut décentraliser et envoyer des gens dans le champ. Tiens, c'est la cloche pour les élèves!

M. Garon: Non, c'est qu'il y a un vote. M. Thibault: On peut clore là-dessus.

M. Garon: Est-ce que vous avez d'autres questions?

M. Picotte: Deux minutes au plus, parce qu'il me restait deux commentaires. Lorsque vous parlez de l'article 82 — recours au civil — si vous voulez dire que le citoyen pourrait faire appel d'une décision de la commission constituée, je serais, pour ma part, réticent à ce qu'on donne un recours au civil comme tel, parce qu'on sait jusqu'à quel point parfois un recours peut prendre deux, trois ou quatre ans, ce qui deviendrait un embêtement additionnel, parce que tout le monde était en faveur du gel des terres momentanément et tout le monde a hâte qu'elles se dégèlent aussi, surtout les municipalités. Je pense que c'est le voeu de la commission. Alors, si on donne des possibilités d'aller au civil, je pense qu'on donne encore plus de temps; le temps que cela prendra va causer des inconvénients additionnels. Je préférerais de beaucoup qu'il y ait une commission d'appel qui soit constituée où le citoyen pourra justement faire appel d'une décision rendue par la commission. Je pense que cela a été exprimé à certains endroits.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Maskinongé, étant donné qu'il y a un vote à l'Assemblée nationale, nous devons suspendre pour dix ou quinze minutes.

M. Dubois: Ce que j'ai à demander ne prendra que 30 secondes.

Le Président (M. Boucher): 30 secondes, M. le député de Huntingdon?

Une Voix: On pourrait les libérer ensuite.

Le Président (M. Boucher): D'accord, vous pourriez être libérés tout de suite. 30 secondes, M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Je voudrais vous remercier pour votre mémoire; il y a seulement un bout que je ne comprends pas et je vais vous dire ce que c'est. "Les deux principales villes du territoire sont Granby et Saint-Hyacinthe. Nous sommes une région non identifiée et sans services adéquats". C'est ce bout-là que je ne comprends pas, parce que Saint-Hyacinthe a tout du ministre de l'Agriculture et c'est non identifié et sans services. Alors, là je me pose des questions.

M. Thibault: Cela prendrait une réponse assez détaillée. On n'a pas de services gouvernementaux adéquats; c'est la caisse populaire de l'endroit qui

fournit l'information, la papeterie, etc., pour les différents services. Il n'est pas normal qu'un gouvernement aujourd'hui ait recours à de tels moyens. Je n'appelle pas cela du service. Quand il faut aller à Sherbrooke et à Montréal tout le temps, alors qu'on a une région qui a 200 000 de population, on ne peut pas appeler cela du service.

Cela est en général. Cela n'attaque pas le ministre de l'Agriculture plus que d'autres, mais c'est une situation de fait qu'une population de 200 000 devrait avoir plus de services que ce que la caisse populaire du coin peut donner, à un kiosque, pour s'amener de la clientèle.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Thibault. Merci, Mlle Simard, ainsi que les messieurs qui vous accompagnent. La commission suspend ses travaux jusqu'après le vote.

M. Picotte: M. le Président, on reprend avec quel organisme après?

Le Président (M. Boucher): Ce sera la municipalité de Franklin.

Suspension de la séance à 21 h 57

Reprise de la séance à 22 h 18

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous plaît!

A la suspension, avant le vote, nous avions complété avec le Conseil de recherche de la Haute-Yamaska. J'appelle maintenant la municipalité de Franklin, représentée par M. Jean-Guy Latreille. M. Latreille, si vous voulez lire votre mémoire.

Municipalité de Franklin

M. Latreille (Jean-Guy): Mon nom est Jean-Guy Latreille, je suis maire de la municipalité de Franklin. J'ai seulement une intervention sur un article de la loi. C'est l'article 1 sur l'interprétation de l'alinéa 16 qui dit "sol arable". La définition du projet de loi est la suivante: "Le sol possédant les propriétés qui le rendent propice à la croissance des végétaux".

M. Garon: Qu'est-ce que vous avez dit? Une Voix: II a lu la définition.

M. Latreille: "Le sol possédant les propriétés qui le rendent propice à la croissance des végétaux". C'est l'article 1, alinéa 16, dans votre projet de loi.

M. Garon: Je n'avais pas votre mémoire.

M. Latreille: La définition du Larousse donne l'interprétation suivante des mots "sol arable": Sol qui peut être labouré, qui vient du mot latin "arare", qui veut dire "labourer". "Croissance" veut dire développement progressif d'une chose. "Végétaux" veut dire arbres et plantes. Ces définitions sont contradictoires et, comme tel, nous protégeons tous les terrains inclus dans le projet de loi, la région verte. Exemple: les terres rocheuses, les terres sableuses, les marécages, les rochers, car elles sont toutes propices à la végétation. Est-ce réellement le but de ce projet de loi ou est-ce la protection des terres fertiles à l'agriculture?

J'aimerais vous présenter un exposé du règlement de zonage de notre municipalité, qui est en vigueur depuis trois ans. Le but de ce projet était de protéger les fermes agricoles, de contrôler la construction des industries, des projets domiciliaires et de tout autre commerce.

Franklin est une municipalité située dans le comté de Huntingdon, bordant les frontières américaines et ayant une population de 1600 personnes. Les caractéristiques sont très diversifiées. Premièrement, nous avons deux agglomérations de population: le village Saint-Antoine-Abbé et le village Franklin centre, et une montagne de huit milles de long qui s'appelle la Covey Hill, dont le bas est très fertile à la pomiculture.

En plus, il y a une paroisse qui comprend de très bonnes terres agricoles et un terrain de roc solide de quatre milles de long par six milles de large, qui a une très pauvre qualité de végétation. Enfin, ce qui reste, ce sont des terres sableuses, de gravier, qui sont très peu propices à l'agriculture. Nous avons donc la gamme complète. Inutile de vous dire que ce fut un travail complexe et laborieux de préparer un règlement de zonage.

En plus, nous avons les industries suivantes qui sont situées dans notre municipalité: Lussier et Frère, Leahy et Fils, deux des plus grands emballeurs de pommes de la province de Québec; la cidrerie Lubec, une des deux cidreries qui sont encore en opération; l'Institut Dorea, qui est une institution pour les enfants handicapés; trois terrains de camping dont un est au lac des Pins, le plus gros et le mieux organisé de la province; et un moulin à scie. Ces industries apportent beaucoup d'emplois et, vu qu'il y a très peu de logis et de maisons disponibles, cette situation a stimulé de nouvelles constructions dans notre municipalité.

Cette période de croissance nous a portés à préparer ce projet de zonage et à établir un règlement de construction. Pour nous aider à préparer ce plan directeur, nous avons engagé les services d'un urbaniste. Le premier travail qu'il a entrepris fut l'étude des sols avec les cartes géographiques qu'il s'est procurées du gouvernement provincial, de même que des photos aériennes. Avec le résultat de ces études de sols, nous avons pu déterminer trois zones: la zone agricole, la zone rurale (zone non propice à l'agriculture) et la zone urbaine. On a pu constater que les gens qui demeuraient dans la zone agricole, incluant agriculture et pomiculture, étaient réellement prospères des fruits de l'agriculture.

Depuis que ce règlement de zonage est en vigueur, à ma connaissance, il y a eu la vente de deux fermes situées dans la zone agricole, qui se

sont vendues à des prix très bons et qui étaient très convoitées. Il est donc évident que toute ferme propice à l'agriculture garde sa valeur et reste convoitée.

La majorité des constructions qui se sont faites dans notre municipalité est dans la zone rurale. Cette année, en 1978, nous avons émis 27 permis de construction pour des maisons neuves, dont 23 étaient dans la zone rurale. On se rend compte que ces constructions sont faites, en majorité, dans des endroits boisés, montagneux et ne nuisent pas. S'il y a de quoi, ces constructions sont plutôt avantageuses. Comme nous ne donnons pas les services d'aqueduc et d'égouts, ils doivent avoir un terrain de 30 000 pieds carrés pour construire. Ils doivent aussi avoir une façade sur une route publique.

A la suite de notre expérience que je viens de vous exposer, nous recommandons les points suivants: que la définition du sol arable soit remplacée par la définition suivante: "sol propice à l'agriculture", avec des critères précis. Nous sommes convaincus que ce changement clarifierait beaucoup de choses et permettrait aux municipalités d'établir leur zone agricole et leur zone non agricole avec plus de facilité. Un agronome qui travaille pour le ministère de l'Agriculture me disait que la définition d'un sol arable doit être: un sol apte à la production agricole commerciale, suivant les normes déjà connues avec les différents types de sols du Québec.

M. le ministre, depuis le 9 novembre 1978, nous avons dû refuser quatre permis de construction pour des jeunes gens de chez nous qui voulaient s'établir dans notre municipalité. Où iront-ils s'établir?

Pour terminer, j'aurais quelques questions à poser à M. le ministre. Permièrement, est-ce que vous allez faire adopter le projet de loi 90 sur la protection du territoire agricole pour réellement protéger les cultivateurs ou pour protéger les villes?

Deuxièmement, quand vous avez gelé le territoire agricole, j'ai vérifié la carte que vous nous avez fait parvenir. Le rocher de quatre milles sur six milles, vous l'avez inclus dans l'aire protégée pour l'agriculture. La population de Franklin trouve cela très ridicule. Vous allez probablement dire la même chose. Vous allez aussi me répondre que les municipalités ont 180 jours pour présenter les amendements à la commission. Quels critères avons-nous pour définir le plan de zones agricoles de notre territoire? M. le ministre, la commission devra suivre la loi telle qu'elle sera adoptée. Dans ce cas précis, avec notre rocher, avec très faible végétation, elle devrait simplement nous dire que, par définition, un sol arable est le sol possédant les propriétés qui le rendent propice à la croissance des végétaux. Or, notre rocher reste dans le territoire agricole.

Troisièmement, M. le ministre, avec les critères précis sur le sol que vous voulez protéger dans la Loi sur la protection du territoire agricole, ceci facilitera la tâche de la commission, des municipalités et des contribuables. De plus, ceci éliminera une multitude de demandes de la commission.

Quatrièmement, ne trouvez-vous pas, M. le ministre, que la base de cette loi devrait se faire avec des études de sols? Merci beaucoup.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Latreil-le. M. le ministre.

M. Garon: C'est exact ce que vous dites, que la base de la protection des terres va se faire avec les études de sols. Ce que vous avez reçu actuellement, c'est un plan provisoire qui trace un périmètre autour de votre municipalité pour une zone urbanisable. Le reste, c'était zoné agricole temporairement, provisoirement. Par exemple, lors de la définition de la zone permanente, puisque vous parlez du rocher de 4 milles sur 6 milles, c'est évident qu'il pourrait être exclu, à ce moment. Au point de départ, c'était pour permettre un périmètre. Si on avait procédé comme d'autres ont procédé quand ils font un zonage, un règlement de zonage, à ce moment, tout est gelé, sans exception. Le plan provisoire a uniquement pour but de dégager dans un périmètre autour de votre municipalité, lequel la construction est entièrement la responsabilité de la municipalité et il n'y a rien de gelé. C'est pour cela, le plan provisoire. Le but de cela, c'était de prévoir un périmètre pour la construction pendant une période de temps au cours de laquelle la zone permanente va être discutée entre la municipalité et la commission. A ce moment, lors de l'établissement de la zone permanente, des territoires qui n'ont aucun potentiel agricole, comme votre rocher, par exemple, pourront être exclus.

M. Latreille: M. le ministre, je suis au courant de cela, mais il y a une chose que je me demande. Je parle du rocher, parce que c'est pire, mais il y a des régions où on a fait le zonage agricole et où on a gardé seulement les terres qui sont réellement fertiles à l'agriculture comme régions agricoles. Dans ces régions agricoles, il n'y a pas d'industrie, il n'y a pas de construction, excepté les domiciles des cultivateurs, ou suivant la route, ce qui est semblable un peu à votre projet de loi, excepté qu'on a des normes très précises. Les fermes qui n'étaient pas propices à l'agriculture, les fermes qu'on appelle de sable, les terres de sable où il n'y a rien qui pousse, on les a enlevées, on les a exclues, avec les études de sols qu'on a faites. Dans le moment, dans le projet de loi, il n'y a rien de précis là-dedans. C'est cela qui va être important pour les municipalités. Dans le moment, ce que je vais faire, à la commission, quand elle sera ouverte, je vais présenter notre plan de zonage tel qu'il est. Peut-être qu'elle va l'accepter, peut-être qu'elle ne l'acceptera pas. J'espère qu'elle va l'accepter. Peut-être qu'elle va dire qu'une telle zone qu'on a décrétée rurale...

M. Garon: Si vous avez, à ce moment, un modèle de zonage pour votre municipalité, vous aurez une base de discussion, à savoir le plan provisoire et le vôtre. Vous savez, à ce moment, ce que vous voulez demander, qui va être protégé dans votre municipalité. A ce moment, vous pou-

vez commencer vos délibérations plus rapidement avec la commission.

M. Latreille: Ce que je veux dire, ce n'est pas seulement chez nous...

M. Garon: Avez-vous consulté les cultivateurs, quand vous avez fait...

M. Latreille: Non, nous avons fait des études de sols.

M. Garon: Ah oui!

M. Latreille: On n'a pas consulté les cultivateurs pour faire cela. C'est la municipalité qui a pris charge de faire le zonage agricole chez nous.

M. Garon: Voyez-vous, ce serait peut-être une bonne chose de consulter les cultivateurs pour savoir ce qu'ils en pensent.

M. Latreille: De quoi? De notre plan de zonage? De chez nous? Les gens sont très satisfaits de cela. Chez nous, les gens sont très satisfaits de la manière que c'est fait.

M. Garon: En avez-vous parlé aux cultivateurs?

M. Latreille: Tout le monde est au courant de notre projet de loi. On l'a fait il y a quatre ans. Cela fait trois ans qu'il est en application. Cela nous a pris un an à le travailler, par exemple, parce qu'on l'a fait faire trois fois par l'urbaniste pour le rendre propice à notre municipalité.

M. Garon: Combien de cultivateurs avez-vous chez vous? (22 h 30)

M. Latreille: Des cultivateurs qui possèdent des vaches laitières, on en a à peu près 75. Pour ce qui est de la pomiculture, et nous sommes l'une des plus grosses régions de pomiculture de la province de Québec, il doit y en avoir à peu près une centaine.

M. Giasson: Si vous permettez, est-ce que, vous avez des cultivateurs qui siègent au conseil municipal?

M. Latreille: Oui. Il y a deux conseillers municipaux qui sont cultivateurs et possèdent des fermes laitières et il y a deux pomiculteurs.

M. Giasson: II y a quatre agriculteurs qui vivent des activités agricoles et qui siègent au conseil municipal?

M. Latreille: C'est cela. Quand on a passé notre plan de zonage agricole — ce n'est pas seulement du zonage agricole, cela a été zoné municipalité au complet — on n'a eu aucune critique. Mais on a gardé les terres réellement propices à l'agriculture, les fermes qui ont été vendues depuis ce temps qui étaient dans la zone agricole ont été vendues à des prix extraordinaires.

Il y a un type, cette année, qui a eu une offre de $1 million pour ses fermes. Il avait grand de ferme, il a 800 arpents de terre. Avec les quotas de lait, il a refusé une offre de $1 million cette année. Et ils sont heureux d'être dans la zone agricole, parce qu'ils savent que c'est du terrain qui est réellement propice à l'agriculture. Quand on a fait des études de sol, on a gardé le meilleur et non les sols qui n'étaient pas propices à l'agriculture.

C'est pour cela que j'insiste dans le moment. Si le projet de loi est clair et qu'on donne des indications précises sur les sols qu'on doit conserver pour l'agriculture, les cultivateurs vont être contents de demeurer sur leurs terrains.

Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'il y a d'autres questions? M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Merci, M. le Président. Bonsoir, M. le maire. J'imagine que vous perdez certains investissements depuis un bout de temps, étant donné que le territoire est gelé au complet, même la bande de roc de quatre milles sur six milles. C'est malheureux que la carte le démontre en vert. Vraiment, il n'y a rien de possible en culture là-dessus. Est-ce que c'est là que les lots se vendent?

M. Latreille: Non, pour la partie qui est rocheuse, dans le moment, on refuse d'accorder des permis de construction parce que, chez nous, cela prend 30 000 pieds carrés et il faut que le type creuse un puits et ait une fosse septique. Une fosse septique sur du roc, cela ne se fait pas. Il faut qu'il apporte un plan d'ingénieur parce que cela prend à peu près de quatre à six pieds de gravier avant d'y poser une fosse septique. Dans le moment il n'y en a que trois qui ont bâti à cet endroit. Il n'y en a pas d'autres qui bâtissent.

Il y a deux campings existants qui étaient dans la zone rurale. Quand on a présenté notre plan de zonage, il y en a un nouveau qui s'est implanté. Et lui aussi, il est dans la zone rurale, parce que ce n'était pas une place qui était propice à l'agriculture.

M. Dubois: Est-ce qu'il y a eu une étude des sols?

M. Latreille: C'était la base de tout le travail.

M. Dubois: Et elle vient du ministère de l'Agriculture?

M. Latreille: On s'est servi des cartes du ministère de l'Agriculture parce qu'elles nous donnaient l'étude des sols. En plus de cela, il y a une étude qui a été faite par une personne spécialisée dans les sols afin de savoir exactement si les cartes étaient réelles. On n'a pas eu de difficultés avec cela.

M. Dubois: Je pense qu'il y aurait avantage, dans votre cas, à présenter à la commission votre

plan de zonage tel que vous l'avez présentement, aussitôt qu'elle sera formée. Je pense que ce serait un cas assez rapide à trancher. Je ne pense pas qu'il soit très litigieux, étant donné qu'il y a un bon travail de fait.

M. Latreille: Non, c'est à peu près 200 pages et c'est clair. Tout est clair et précis. Il y a des cartes à l'appui.

Mais ce n'est pas seulement pour la municipalité chez nous. En général, cela manque dans le projet de loi, la classification de ce point qui est trop vague. La définition des sols arables, lorsqu'on dit "sol possédant les propriétés qui le rendent propice à la croissance des végétaux "; les végétaux, c'est un peu de tout.

M. Dubois: C'est peut-être cela qui est malheureux. Le projet de loi dit: On veut protéger les sols arables, mais on protège toute la province, pratiquement, ou la région urbanisée, si on veut. Cela amène des problèmes de construction. Je suis bien d'accord avec vous sur cela. Et il y a des manques d'investissements qui se font présentement. Cela peut causer du chômage. Cela amène des problèmes dans toutes les municipalités, définitivement. Il ne reste qu'à espérer que la commission pourrait trancher la question rapidement, tout de suite après le 1er janvier. C'est ce que le ministre nous permet, d'ailleurs. Il nous a dit que cela irait bien, que cela irait vite. C'est cela?

M. Garon: J'ai dit: Dans certains cas.

M. Dubois: Oui; pas dans tous les cas? C'est un cas assez facile à trancher, je pense, parce qu'il y a un travail de départ qui est bien fait. Il y aura des gens au sein de la commission qui connaissent la région, je n'en doute pas, ou des fonctionnaires qui connaîtront la région très bien et qui pourront évaluer...

M. Garon: D'habitude, vous donnez 27 permis de construction par année?

M. Latreille: Non, j'ai dit 27 permis de construction pour maisons neuves. On en a donné plus que cela, parce que...

M. Garon: Quand?

M. Latreille: Cette année, en 1978.

M. Garon: 27.

M. Latreille: C'est l'année où on en a donné plus. C'est pour cela qu'il ne faut pas avoir peur là-dedans, dans le zonage.

M. Garon: 27. Comme cela, quand le député de Huntingdon dit que cela va plus mal depuis 1976, ce n'est pas vrai.

M. Latreille: Comment dites-vous cela, vous?

M. Garon: La construction va mieux que jamais chez vous.

M. Dubois: C'est parce que les gens...

M. Garon: C'est votre plus grosse année, 1978.

M. Dubois: ... sortent des autres comtés et s'en viennent dans le comté de Huntingdon.

M. Latreille: On ne discutera pas de cela. C'est de la politicaillerie!

M. Garon: C'est parce qu'il nous dit cela. Je constate que...

M. Dubois: C'est parce que...

Une Voix: II part de Lévis pour s'en aller à Huntingdon.

M. Latreille: Vous devriez venir voir cela chez nous, c'est une des plus belles régions.

M. Garon: Je le sais.

M. Latreille: Vous êtes au courant de cela?

M. Garon: D'ailleurs, dans l'entreprise Leahy & Fils...

M. Latreille: C'est vrai. C'est mon ancien employeur.

M. Garon: La Société québécoise des produits agro-alimentaires est partenaire là-dedans. On a pleine confiance dans votre région.

M. Latreille: Voyez-vous, M. le ministre, vous avez un cas. Vous êtes au courant de celui de Leahy & Fils. Leahy et Fils emploient environ cent personnes. Lubec, vous devez être au courant, vous venez de lui donner un permis pour les frais du vin. C'est un autre employeur qui doit employer environ 40 à 50 personnes. Son père, à qui appartient Lussier & Frères, emploie environ une cinquantaine de personnes. C'est tout dans l'agriculture. C'est dans le produit agro-alimentaire. Les quatre permis qu'on a refusés dernièrement, c'étaient à des personnes de chez nous qui se marient. Vous savez, les jeunes de chez nous se marient comme ailleurs et ils n'ont pas de place où rester. Les maisons, dans notre coin, il n'y en a pas; des logis vides, il n'y en a pas.

M. Garon: Vous devez avoir un périmètre autour de votre village.

M. Latreille: II est tellement maigre. J'ai un terrain vacant chez nous, il a pris de la valeur depuis que vous avez adopté votre loi. Il en reste trois et j'en ai un parmi eux. Il n'y en a pas beaucoup.

M. Garon: Vous avez eu 28 constructions en 1978. En 1977?

M. Latreille: L'année dernière, il y en a eu à peu près 15 ou 16 maisons neuves. Quand on parle de construction, on doit parler de maison neuve, parce que des silos, il s'en bâtit pour des granges.

M. Garon: En 1976?

M. Latreille: A peu près 12 à 15. Les années précédentes, cela se joue à peu près entre 10 et 12. C'est notre meilleure année, cette année.

M. Dubois: II y a des industries florissantes aussi, cela amène des employés supplémentaires. Avec tout cela, cela amène de la construction supplémentaire.

M. Giasson: ... Saint-Hyacinthe qui va bien.

M. Latreille: II y a une chose, M. le ministre, nos taxes, chez nous, ne sont pas tellement élevées. On suit des normes et cela aide beaucoup, ces choses. Je ne suis pas contre les normes en autant qu'on ne contrôle pas le gars jusqu'à lui dire comment faire tourner son robinet. Il y a des normes chez nous et les gens sont heureux avec ces normes. Les maisons sont à trente pieds du chemin et les gens respectent nos normes. Ce n'est pas facile, cela a pris du temps, mais, aujourd'hui, les gens comprennent.

M. Garon: Vous me parlez de construction, des quatre permis, est-ce que c'était pour commencer en hiver ou au printemps?

M. Latreille: Non, c'était pour commencer bientôt. Ce sont des personnes qui se marient et elles veulent commencer à faire bâtir cet automne. Il y a une chose que les gens ne font pas, c'est qu'ils ne prévoient pas un an d'avance pour bâtir. Ils décident de bâtir demain matin et ils viennent chercher leur permis. Ils décident de se marier, cela prend une place et il n'y a pas de place pour habiter, alors ils viennent chercher leur permis. A la campagne, on fonctionne à la dernière minute.

M. Garon: Cela les prend quasiment comme une grippe, sans avertissement!

M. Dubois: Le mariage, cela doit être cela, paraît-il! Je ne connais pas, mais...

M. Garon: Comme vous disiez tantôt, il faut qu'ils choisissent!

M. Dubois: Oui, bien choisir.

M. Garon: Sans émotion!

M. Dubois: Sans émotion, surtout!

M. Garon: C'est ce que vous disiez tantôt!

M. Dubois: Oui, je suis bien d'accord.

M. Giasson: Que ce soit au Québec ou dans l'Orégon, mais il faut choisir sans émotion!

M. Dubois: Cela...

M. Garon: Cela veut dire que les jeunes ont confiance dans l'avenir du Québec chez vous! Ils n'attendent même pas le printemps pour se marier.

M. Giasson: C'est parce que la frontière est tout près.

M. Latreille: On est près des frontières. Les gens sont dynamiques et on a des personnes... Il y a du travail chez nous, on ne le nie pas.

M. Dubois: C'est parce que c'est la onzième province en perspective. C'est la porte d'entrée des Etats-Unis vers Montréal. C'est pour cela que les gens sont confiants.

Une Voix: ... ils s'organisent pour ne pas avoir de misère.

M. Garon: Je pense que l'idéal, comme vous avez déjà un plan de fait, ce serait de communiquer avec la commission dès sa formation pour dire que vous êtes intéressés à discuter votre zone agricole. A ce moment, la commission pourra entrer en communication avec vous pour commencer la discussion le plus rapidement possible sur la zone permanente à Franklin.

M. Dubois: On vous remercie, M. le maire. M. Latreille: Merci beaucoup.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le maire, au nom de tous les membres de la commission pour ce mémoire.

M. Giasson: Félicitations également pour votre plan d'aménagement de la municipalité.

M. Garon: Oui.

Le Président (M. Boucher): J'appelle maintenant la municipalité de Saint-Patrice de Shering-ton, représentée par M. René Poirier, maire.

Une Voix: Ils ne sont pas présents.

Municipalité du village d'Ormstown et Saint-Malachie d'Ormstown

Le Président (M. Boucher): Ils ne sont pas présents, alors, nous allons passer immédiatement à la municipalité du village d'Ormstown. Est-ce que la municipalité de Saint-Malachie-d'Ormstown est avec le village d'Ormstown? Alors, les deux ensemble.

M. Garon: Faites rapport en même temps.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous aviez un texte, M. Marcil?

M. Marcil (J. Claude): Non, nous n'avons pas de texte.

Le Président (M. Boucher): Vous n'avez pas de texte, alors vous pouvez y aller.

M. McDougall (Russell G.): Mr President, Mr Agricultural Minister Garon, representatives of the National Assembly, I have no prepared document to present this evening, whatever I have to present will be entirely verbal.

Possibly, you know that the area I represent has some of the finest agricultural lands in the whole of the province or, further, in all of Canada. Yet, on the other hand, if you go south of Ormstown, towards the municipality that Mr Latreille represents, towards Franklin, you come into an entirely different area, more or less lightly wooded, brushy, sandy, gravelly and most of the owners on this type of land have abandoned it, most of them are employed in industry outside of the land altogether. It is not suitable at all for farming.

We would ask that this part be removed from agricultural zoning. Two years ago, at quite a large expense, we had an agricultural plan drawn up by a professional. The council studied this matter with him, they held public hearings, public meetings — three, I believe — to get the opinion of the people. I would say roughly 90% of the farmers were in favour of some sort of a zoning plan. Those who opposed it were mostly, as I say, people in this marginal area, who were employed outside; they possibly had left a small plot of land and, according to our law, if the house should burn down, they did not have the right to build on this same lot because it was too small by today's standards; they could not come up to the 30 000 feet required by law, for most of them had only half of it. In many instances, they had a good drilled well, possibly they had a first class basement — in cement — and they felt that was a great hindrance to them.

For one reason or another, this plan was never passed by the council, but it is already made, sitting right there; the types of soil have been studied and it is there.

Now, we would like this poorer, what we call the poor land, removed from this zoning law. We feel that it would be very suitable for housing projects; we have nowhere to expand, if we do not go somewhere. There are areas in that designated for light industry, heavy industry; we already have one, what we call the Blueberry Rock, it is an ammunition plant. We feel that to give employment to our residents, it is only fair that somewhere should be reserved for this type of use. Right at the border of the village, and our municipality, we have a zephyr textile plant. That has given employment to 250 people over the last 30 years. Should they wish to expand, where are they going to go? The only suitable spot is into our parish, we have the water mains right up to them, the sewers; does it not seem reasonable that we should be allowed a little bit of acrage here or there to accommodate these industries? Without business, there is not very much in a community. (22 h 45)

These are some of the main points. I am not here to take up a lot of your time, but one other point I would like to make is the odd farmer, who accepts this plan, but says: I have a second farm there, the whole front is four acres wide, possibly limestone ridged, — you could take out rocks the size of the square of that table — it could never be ploughed, you could bulldoze it from now till doomsday, you would still have a rock pile. Now, those people think that they should have the right to say: Two or three houses could be built there; the drainage is perfect, it is high and dry. This is a proposition I bring before the commission.

M. Garon: You talked about a plan that was made. Was it adopted or?

M. McDougall: A plan, yes, it is right here with us.

M. Garon: No, I know that you have it with you, but was it adopted by the municipality or...

M. McDougall: Zoning, yes.

M. Garon: When was it adopted? When was it voted?

M. McDougall: It was never voted, it never went to a vote; we had three public meetings and it sat on the desk ever since.

M. Vaillancourt (Orford): It was accepted without a referendum?

M. McDougall: No, it never was accepted, they did not put it to a vote.

M. Garon: ... was it a bylaw?

M. McDougall: It was the small lot holders who contested it more than anyone else, not the farmers.

M. Garon: Have you adopted a bylaw?

M. McDougall: It has not been adopted yet, no.

M. Garon: It is only a project...

M. McDougall: A $10 000 project, paid for.

M. Marcil: Le conseil a présenté le règlement en assemblée des électeurs et 200 personnes se sont présentées pour demander le référendum. Alors, devant leur nombre imposant, le conseil a décidé de "tabler", temporairement, le projet de règlement de zonage, ainsi que le règlement de construction et de lotissement.

M. Garon: Quand?

M. Marcil: II y a près d'un an et demi. Tout de suite après cela, on a commencé à avoir des échos qu'un zonage agricole par le gouvernement allait être présenté dans un avenir assez rapproché, alors le conseil a décidé d'attendre que cette Loi sur le zonage agricole soit adoptée, pour ensuite le modifier et le présenter à nouveau.

M. Vaillancourt (Orford): Etes-vous dans la zone verte, chez vous, à Saint-Malachie?

M. Marcil: Oui, au complet.

Le Président (M. Lévesque, Kamouraska-Témiscouata): Avez-vous terminé votre mémoire?

M. Marcil: Je représente le village d'Ormstown et, en prenant connaissance...

M. Dubois: M. le Président, j'aurais peut-être quelques questions à poser à M. McDougall avant.

Le Président (M. Lévesque, Kamouraska-Témiscouata): On va prendre le mémoire de la municipalité du village et on reviendra.

M. Garon: Etes-vous les deux en même temps ou...

M. Marcil: Oui.

M. Garon: Cela vous concerne tous les deux ce que dit...

M. Marcil: Oui, parce que le problème du village est relié à celui de la paroisse, autant que celui de la paroisse est relié à celui du village.

M. Garon: Etes-vous fusionnés?

M. Marcil: Non, on n'est pas fusionné; par contre, le village donne quand même plusieurs services à la paroisse et d'autres services sont en commun. En ce qui concerne les lots à bâtir ou l'expansion du village, cela fait autant partie de...

M. Garon: Comment trouvez-vous le plan provisoire que vous avez reçu?

M. Marcil: En ce qui concerne le village, je trouve qu'on a mis une cage autour des maisons, parce que, d'après la description de l'aire retenue pour fins de contrôle de l'espace agricole, en lisant cela, je constate qu'on décrit toute la zone bâtie en faisant le tour des maisons, pour laisser trois petits morceaux de terrain vacant qui tombent sous la coupe du contrôle agricole.

Un premier terrain représente environ 45 arpents, dont un boisé, soit une érablière, où le village a sa source d'approvisionnement en eau potable; on a cinq puits et le réservoir souterrain, le village ne veut certainement pas se débarrasser de cela, parce qu'il doit le conserver pour fins d'aqueduc. Les 20 autres arpents sont 20 arpents d'assez bonne terre, évidemment, mais c'est traversé pour la conduite maîtresse pour amener l'eau au village, alors les 20 arpents tombent dans la zone agricole et la propriété appartient à la municipalité, elle n'appartient pas à un particulier.

M. Garon: Mais votre plan, que vous avez fait sous forme de projet, il y a un an et demi, couvre la municipalité, le village et la paroisse?

M. Marcil: Non, le village a son propre règlement de zonage et le lot 631, évidemment, est zoné pour le résidentiel, l'unifamilial ou le semi-détaché, sauf pour la partie boisée, qui est à peu près de 25 arpents et qui est zonée comme parc. Evidemment, la municipalité veut en faire un parc de verdure éventuellement. Cela coûterait assez cher pour le transformer, mais il est sûr et certain qu'elle ne veut pas s'en défaire, de quelque façon que ce soit, parce que Cela protège ses installations.

Dans le deuxième terrain, il s'agit du lot 81, qui est coupé par la route 138. Eventuellement, le ministère des Transports a un projet pour une autre route qui raccorderait la route 138 avec la route 201 et cela passerait encore à travers le même lot 81 qui a une superficie totale, dans les limites du village, d'à peu près 20 à 25 arpents. Ce qui va rester, ce sera encore une petite pointe de terrain et avec la machinerie que les cultivateurs ont aujourd'hui, ce serait à peine travaillable avec l'équipement, parce qu'il y aurait trop de perte.

Evidemment, ce terrain est zoné, par le village, pour des immeubles à logements; c'est le seul terrain qui soit zoné comme cela, alors, en le zonant agricole, on n'a plus aucun endroit, dans la municipalité, pour les immeubles à logements.

La troisième parcelle de terrain qui reste est de l'autre côté de la voie ferrée. C'est un terrain industriel qui a sept arpents de superficie, avec un bâtiment industriel dessus. Alors, il ne reste qu'à peu près cinq ou six arpents de terrain dans ce coin, terrain qui est en plus coupé par un cours d'eau. Je ne vois pas comment cela pourrait être utile pour fins d'agriculture.

Ce qu'on demande c'est d'enlever au village tout contrôle agricole, parce que, en totalité, cela ne représente même pas 100 arpents de terre; il y en a peut-être 75 ou 80 qui sont déjà coupaillés par toutes sortes de choses. Ce n'est pratiquement pas utile au point de vue de l'agriculture, même s'il s'agit de quelques petits morceaux de glaise sur lesquels pourraient être cultivées quelques petites choses, mais enfin ce n'est pas assez grand pour que cela vaille vraiment la peine.

M. Garon: Et ceci est près du village?

M. Marcil: Oui, c'est à l'intérieur des limites du village.

M. Garon: De quelle grandeur est-ce?

M. Marcil: Je dirais qu'au maximum c'est à peu près 80 arpents, mais c'est déjà coupaillé par une route, un autre morceau va être coupaillé

éventuellement et le boisé prend déjà 25 arpents là-dessus. Ce qui reste d'utile pourrait être 40 arpents en totalité. D'autant plus que d'après la façon dont c'est décrit, il reste à peu près 20 terrains vacants à l'intérieur de l'autre territoire et cela répond à peu près à la demande de terrains pour un an. Le village est bloqué, il ne peut plus s'étendre, il ne pourra pas répondre à la demande de terrains pour la construction résidentielle, qu'elle soit unifamiliale, semi-détachée ou qu'il s'agisse d'immeubles à logements. On ne pourra plus répondre d'ici un an, parce qu'on n'aura plus de terrain disponible, tout va être bâti au complet à l'intérieur de la zone non protégée.

Le Président (M. Lévesque, Kamouraska-Témiscouata): Avez-vous d'autres points que vous voulez soulever, avant que je donne la parole pour une période de questions?

M. Marcil: Non, c'était l'essentiel.

Le Président (M. Lévesque, Kamouraska-Témiscouata): M. le ministre avez-vous d'autres questions, soit à l'une ou l'autre municipalité?!

M. Garon: Non, je pense que le mieux sera, dès le mois de janvier, de faire savoir à la commission que vous êtes intéressés à recevoir un avis pour discuter de votre zone permanente le plus rapidement possible. Je suis persuadé que vous allez bien vous entendre. Did you understand, Mr McDougall? Do yu speak French or...

M. McDougall: I am English, I speak some French...

M. Garon: McDougall, is not English?

M. McDougall: Pardon?

M. Garon: Are you White or McDougall?!

M. McDougall: McDougall, a Scotchman.

M. Garon: That is what I thought.

M. McDougall: That makes it worst.

M. Garon: I am 50% Irish.

Le Président (M. Lévesque, Kamouraska-Témiscouata): M. le député de Montmagny-L'Islet. Vous avez fini, M. le ministre?

M. Garon: Oui.

M. McDougall: At home, we all get along, I never ask a man in the parish his language or his religion; I attend to my business and we get along well.

Le Président (M. Lévesque, Kamouraska-Témiscouata): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Dans la municipalité du village d'Ormstown, vous avez combien de citoyens?

M. Marcil: Environ 1650.

M. Giasson: 1650 et vous avez besoin d'environ 20 terrains par année pour les demandes de construction?

M. Marcil: De 15 à 20 terrains par année, oui.

M. Giasson: Et puis là, tout ce qu'il vous reste, à l'intérieur de votre municipalité, c'est ce que vous avez décrit tout à l'heure, avec les restrictions qui s'imposent et que vous avez mentionnées.

M. Marcil: Oui, le village en a 8, l'hôpital en a 5 ou 6, la fabrique en a 3 ou 4 et il y en a peut-être 2 ou 3 d'éparpillées, ici et là, dans la municipalité.

M. Giasson: Mais au-delà du développement domiciliaire qui se fait chaque année pour répondre à des besoins locaux, est-ce qu'il y a également de la construction domiciliaire dans la municipalité rurale de Saint-Malachie?

M. Marcil: Oui, dans la municipalité rurale, il y en a. Il y a à peu près de 40 à 50 permis pour des maisons mobiles ou des nouvelles maisons, des nouvelles constructions, qui sont émis chaque année. Or, depuis le dépôt de la loi, on a été obligé de tout bloquer de ce côté-là.

M. Giasson: Alors, cela se développe autant du côté de la municipalité rurale que dans le village?

M. Marcil: Oui, cela se développe plus dans la paroisse. C'est dû à la rareté des terrains dans le village et puis maintenant, cela étant bloqué, on ne peut pas penser à étendre les services, tels les services d'aqueduc, d'égout et de construction de rues.

M. Giasson: D'accord, merci, M. le Président.

Le Président (M. Lévesque, Kamouraska-Témiscouata): D'accord, le député de Huntingdon.

M. Dubois: Non, ce n'est pas grave...

M. Vaillancourt (Orford): Peut-être que vous allez poser les questions que je voulais poser.

M. Dubois: Ah! je ne le sais pas. Au tout début, M. Marcil, en ce qui a trait à la corporation du village d'Ormstown, vous avez déjà un plan depuis un an et demi.

M. Marcil: Cela fait plusieurs années qu'on a notre règlement de zonage.

M. Dubois: Cela fait plusieurs années.

M. Marcil: II a été révisé dans les années 1971 -1972, peut-être.

M. Dubois: II touche tout le territoire du village, c'est cela?

M. Marcil: Oui, parce qu'il y a eu annexion en 1969 de certains lots de la paroisse et on a dû réviser le règlement de zonage, pour donner du zonage aux nouveaux lots qui ont été annexés et en même temps on a révisé les différentes zones à l'intérieur de la municipalité.

M. Dubois: Ce qui veut dire que présentement, il n'y a pas beaucoup de travail à faire pour préparer le plan que vous devrez présenter à la commission. Vous êtes presque prêt.

M. Marcil: II est complet.

M. Dubois: Alors, vous êtes prêt à présenter un plan à la commission afin de retirer de l'aire retenue les secteurs dont vous avez besoin pour la construction pendant quelques années. Je ne sais pas combien, ce sera votre choix de les définir. Puis ce sera à la commission de l'accepter ou non.

M. Marcil: Oui, c'est essentiel pour la municipalité. Avec les industries, l'hôpital et le ministère des Transports, on fournit quand même au-delà de 1000 emplois aux gens qui habitent le village, la paroisse et même la région. Et un bon nombre veulent s'approcher, parfois, de leur lieu de travail. On a des demandes assez fréquentes pour des terrains.

M. Dubois: Je pense bien qu'étant donné que vous êtes presque prêt, ou prêt à présenter votre plan, au début de janvier, la commission devrait commencer à siéger ou à être formée, et je pense bien que vous aurez une réponse assez rapide, quand même. Est-ce qu'il vous reste quelques terrains de disponibles, encore, là, qui ne seraient pas retenus dans l'aire agricole?

M. Marcil: II y en a à peu près une vingtaine. M. Dubois: Présentement, là? M. Marcil: Oui, présentement.

M. Dubois: Alors, vous êtes bon pour d'ici au mois de février, à peu près?

M. Marcil: Oui, mais on ne peut pas en... M. Garon: D'ici au mois de février. M. Marcil: II n'y a sûrement pas de problème. M. Dubois: Je pense bien...

M. Garon: Vous êtes bon jusqu'à quand, sans problème?

M. Marcil: Le fait que ce soit bloqué dans la paroisse, cela peut changer beaucoup.

M. Garon: Oui, dans la paroisse, tout le monde ne se bâtit pas là.

M. Marcil: Oui, il y en a une quarantaine au moins qui se bâtissent, par année.

M. Garon: Dans la paroisse?

M. Marcil: Dans la paroisse oui. Depuis 4 ans, on a au-delà de 200 maisons mobiles qui se sont installées.

M. Garon: Mais là, dans la paroisse, vous êtes dans les terres agricoles.

M. Marcil: Tout est gelé dans la paroisse. A ce moment-là, c'est que pour les quelques terrains qui ne sont pas gelés à l'intérieur des limites du village, il va y avoir des demandes, ce ne sera pas long. Surtout que les gens commencent déjà à dire que les prix vont augmenter. Alors, ils se dépêchent à essayer de les acheter. J'ai été le premier à essayer, moi, la semaine passée, j'en ai acheté deux. Je n'ai pas pris de chance.

M. Garon: Vous voyez que la loi de la protection des terres agricoles stimule l'activité économique.

M. Giasson: A des endroits.

M. Dubois: Mr McDougall, you have a plan prepared that costs $10,000? Right? Your plan costs $10,000.

M. McDougall: Right.

M. Dubois: It did not go through the council, it was not accepted?

M. McDougall: We did not put it to the vote of the people.

M. Garon: Why did not you?

M. McDougall: They felt that the cost of putting a vote, suppose it had not gone through, it was by the numbers and by the response that they got at their public hearings. They figured that there were too many of these small lot holders opposed to it. Those who opposed to it were mostley from one area. It was not farmers. There were formers all aroud; they had no meeting and they came up after and they said that it is the finest thing you ever come up with. Push it through. (23 heures)

M. Dubois: Why did they oppose it?

M. McDougall: The farmers did not. It was the...

M. Dubois: I mean these small lot holders?

M. McDougall: Mostly.

M. Dubois: But what was the reason?

M. McDougall: I think if they had made a few changes in that, would you agree with that Mr Secretary?

M. Marcil: Yes, it was mentioned at one point that those that objected, it was mainly because they had residential zones on one road and the people there have some small businesses and they felt that they would not be allowed to practise their business any longer. This is why, so they just got other people on another road to support them and they came in. They were close to 200 — to object to it, and in fact they made so much noise that night that I could just not read them.

M. McDougall: I might add that the evening they came to protest, I was outside the door at 10 o'clock. The room was full, you could not get another person in — I suppose it is a square roughly the size of this — there were out on the street, for 150 feet, down the street, 2 and 2, and 2. There it was decided against coming up with a referendum. But it has been talked about at council I have only been the mayor I am beginning my second year. It has been mentioned several times.if we should bring this out, make a few amendments. Get hold of our professionnal man and say here is what they...

M. Garon: But the farmers were happy with your plan?

M. McDougall: Most of them, yes.

M. Garon: As a matter of fact, that law will help you to enforce or to adopt a zoning plan for your municipality.

M. McDougall: Well, without changes, if we had said to these people: We have made some amendments...

M. Garon: Yes.

M. McDougall: It could have been through, I believe.

M. Dubois: Presently nobody can oppose it. The plan, nobody can oppose it, because you have got to present it to the commission. But is it ready for presentation or have you got to rework it?

M. Marcil: We may need to revise a couple of zones.

M. McDougall: It is all prepared...

M. Dubois: And pinpoint the areas which are not good for agriculture?

M. McDougall: Oh! yes, entirely. M. Dubois: It is done. M. McDougall: Yes.

M. Garon: It is easier for the municipality.

M. McDougall: Light zoning, light industry, heavy industry, etc., residential and area for recreation, another area for mobile homes, etc.

M. Dubois: But, presently, you are completely frozen. There is nothing you can do anywhere. You do not have one single lot? Not a single lot, presently?

M. Garon: Ils ont dit qu'ils avaient 25 acres. M. McDougall: Lots of land, but it is frozen.

M. Garon: But you said that 25 acres are not frozen.

M. Marcil: C'est dans le village, M. le ministre, ce n'est pas dans la même municipalité.

M. Garon: C'est plus normal que les gens se bâtissent dans le village.

M. Marcil: Par contre, si on prend le cas de la paroisse, sur le James tunnel, qui est contigu aux limites du village, où il y a les services d'aqueduc actuellement, il y a quand même peut-être un potentiel de 40 à 50 terrains qui pourraient être bâtis et c'est tout gelé et ce sont des terrains éparpillés ici et là, entre les maisons existantes. Sur une distance d'environ 3000 pieds, il y a 87 maisons. Cela veut dire qu'il reste quelques terrains ici et là, dans tout cela. Et là, il n'y a rien qui puisse se vendre, on ne peut pas faire une terre sur un terrain de 30 000 pieds carrés ici, 22 000 pieds là, ainsi de suite. Alors, tout cela est bloqué quand même, tout est gelé.

M. Dubois: II n'y a pas d'égouts sanitaires, il y a seulement l'aqueduc sur ce...

M. Marcil: Seulement l'aqueduc, oui.

M. Garon: Thank you for having come to explain what is happening in Ormstown, and I hope that the law will not give you too much disagreement, but will help you to have a good zoning for your municipality.

M. McDougall: Thank you for the privilege of allowing us to come and explain our case.

M. Garon: Thank you.

Le Président (M. Boucher): Au nom des membres de la commission, je remercie M. McDougall et M. Marcil, pour leur mémoire.

M. Garon: Merci, M. Marcil.

Le Président (M. Boucher): Maintenant, j'appelle le Club des administrateurs municipaux actifs, représenté par M. Paul Biron. M. Biron.

Club des administrateurs municipaux actifs

M. Biron (Paul): M. le Président, le Club des administrateurs municipaux actifs est un organisme reconnu par le ministère des Affaires municipales.

Au niveau de l'agriculture, je vais vous expliquer brièvement que c'est un organisme formé de plus de 80 conseils municipaux, soit maires, conseillers et secrétaires-trésoriers qui ont des réunions mensuelles d'information et de renseignements au niveau municipal.

J'aimerais remettre au ministre 75 copies conformes des résolutions que vous avez en main, qui ont été adoptées par les 75 municipalités en question la semaine dernière. Je représente ces municipalités pour vous expliquer la résolution.

M. Garon: Vous auriez pu nous donner une liste.

M. Biron (Paul): Oui, je pense que cela aurait pu être fait. Vous m'excuserez si cela fait un document de plus, M. le ministre.

Vu le projet de loi 90 sur la protection du territoire;

Attendu que cette loi vise en premier lieu les agriculteurs;

Attendu cependant que le corporations municipales sont fortement impliquées;

Attendu que la corporation municipale ne se prononce pas sur le mérite de la loi, mais désire cependant des modifications en ce qui la concerne;

Attendu que l'article 12 du projet de loi qui définit les critères qui doivent guider la commission dans ses décisions est muet sur l'opinion de l'administration municipale;

Attendu que l'article 41 retire aux municipalités le pouvoir de déterminer ce que sont les fins municipales, étant donné que le 7e paragraphe de l'article 80 dicte que c'est le gouvernement qui définit de telles fins;

Attendu que l'article 47 du projet de loi prévoit le délai de négociation entre la municipalité et la commission, mais ne prévoit pas quand ce délai commencera, de sorte que la période de gel qui existe actuellement risque de se prolonger de façon préjudiciable;

Attendu que l'article 48 prévoit que si, à la fin du délai, aucune entente n'est intervenue, la commission décide en dernier ressort alors qu'il serait plus juste qu'un arbitre rende plutôt la décision, de même que dans le cas de l'article 65;

Attendu que l'article 62 est muet sur l'opinion de l'administration municipale;

Attendu que l'article 98 du projet de loi rend inopérante toute disposition inconciliable des règlements municipaux, de sorte que la municipalité ne peut plus contrôler la localisation des productions sans sol;

Attendu que l'article 98 crée de sérieux problèmes durant la période transitoire, à savoir jusqu'au moment où les négociations avec la commission auront eu lieu, car toute personne peut construire pour fins agricoles dans l'aire retenue pour fins de contrôle malgré le règlement de zonage local et malgré qu'il soit possible qu'une partie de cette aire ne soit pas dans la zone agricole définitive;

Attendu que l'article 101 du projet de loi autorise les détenteurs de droits acquis à faire toute utilisation autre que l'agriculture, sans que ces détenteurs ne soient soumis aux règlements de zonage de la municipalité;

Attendu que l'article 105 du projet de loi ne concerne que les lots qui deviennent adjacents à des chemins desservis par les services d'aqueduc et d'égouts sanitaires, sans tenir compte des lots déjà desservis pas lesdits services;

Attendu que l'article 105 exige que les services d'aqueduc et d'égouts sanitaires soient tous les deux existants, alors qu'il existe des chemins desservis par l'aqueduc seulement;

Attendu que l'article 111 du projet de loi exclut tous les règlements de la loi de la qualité de l'environnement sauf indication contraire desdits règlements; or aucun de ces règlements ne spécifie le contraire et, en conséquence, toute personne située dans l'aire retenue pour fins de contrôle peut construire à des fins agricoles sans tenir compte des règlements de l'environnement, de même que toute personne détentrice de droits acquis par l'utilisation peut faire ce qui était interdit par les règlements de l'environnement;

Attendu que les maires et conseillers de la municipalité sont les élus de la population, y inclus les agriculteurs;

Attendu finalement que les agriculteurs font également partie des conseils municipaux;

En conséquence, il est proposé et résolu à l'unanimité de demander d'apporter au projet de loi les modifications suivantes: 1.D'obliger explicitement la future commission à prendre en considération l'opinion exprimée par la corporation municipale dans ses décisions. Les articles 12 et 62 ne parlent pas de cela. 2.De laisser aux municipalités le pouvoir de déterminer ce que sont les fins municipales.

Actuellement, dans votre projet de loi, le gouvernement détermine les fins municipales, alors que le législateur a déjà décidé que les municipalités décident ce que sont les fins municipales, de sorte que l'exécutif défait ce que le législateur a fait.

Il faut aussi considérer que les administrateurs municipaux ne sont pas des spéculateurs et n'iront pas construire des maisons, parce que ce n'est pas pour des fins municipales, sur des sols arables. La seule chose que la municipalité peut faire, c'est de faire passer un chemin à un endroit parce que c'est pour le bien de la municipalité ou de dire qu'un tel terrain est propice pour un centre de loisirs, parce que c'est

le bien de la municipalité. Je pense qu'il y aurait lieu de prêter bonne foi aux administrateurs municipaux.

Troisièmement, laisser en vigueur les règlements sur la qualité de l'environnement et les règlements municipaux de zonage jusqu'à ce que soit déterminée la zone agricole et également après que la zone agricole sera déterminée. Ce qui arrive, c'est que dans l'aire retenue pour fins de contrôle, aucun règlement de l'environnement ne s'applique actuellement, de sorte que vous pouvez avoir un terrain de camping, par exemple, qui est actuellement dans une aire retenue; demain matin, il peut devenir un dépotoir sans que personne puisse l'empêcher. Cela crée des problèmes à la municipalité.

Un autre exemple que je puis vous donner, ce sont les distances requises pour les porcheries. Si le règlement municipal n'en parle pas actuellement, les règlements de l'environnement ne s'appliquent pas dans l'aire retenue pour fins de contrôle, vous pouvez avoir des situations embêtantes pour les municipalités.

Quatrièmement, prévoir un mécanisme d'arbitrage en cas d'échec...

M. Garon: Pourquoi les règlements municipaux ne s'appliqueraient-ils pas?

M. Giasson: L'article 111.

M. Garon: L'article 111, ce n'est pas cela.

M. Biron (Paul): Les règlements ne s'appliquent pas parce que l'article 111 dit que les règlements de l'environnement ne s'appliquent que si c'est spécifié dans iesdits règlements. Or, vous n'avez aucun règlement de l'environnement, actuellement, qui l'a spécifié; évidemment, ils sont tous antérieurs à ce projet de loi, de sorte qu'aujourd'hui, M. le ministre, aucun règlement de l'environnement ne s'applique dans l'aire retenue pour fins de contrôle.

Quatrièmement, prévoir un mécanisme d'arbitrage en cas d'échec des négociations entre les municipalités et la commission, de même que dans le cas de l'article 65. Pour que les négociations qui auront lieu entre la commission et la municipalité se jouent à armes égales, on demande un mécanisme d'arbitrage. On vous laisse le soin de déterminer quel mécanisme pourrait arbitrer un litige. La municipalité se sent mal à l'aise de négocier avec la personne qui prend la décision finale; s'il n'y a pas d'entente, les règles du jeu sont difficiles pour les municipalités.

Cinquièmement, prévoir qu'à l'intérieur de la zone agricole les municipalités pourront faire du zonage de productions agricoles. Antérieurement au 9 novembre, les municipalités en faisant du zonage agricole pouvaient déterminer, dans leur territoire, les endroits où il y aurait de l'agriculture. Elles pouvaient déterminer, par exemple, à quel endroit les porcheries pourraient s'établir en déterminant les zones agricoles. Désormais, vous pouvez avoir des porcheries tout autour du coeur du village, parce que la zone blanche est limitée. Je n'ai absolument rien contre les porcheries et les municipalités non plus, mais il faut quand même prévoir les problèmes qui seront causés à l'ensemble de la municipalité. En faisant du zonage de productions agricoles — et vous verrez plus loin appouvé par le ministre de l'Agriculture — cela permettrait de régler beaucoup de problèmes éventuels.

M. Garon: Qui vous a dit que vous n'aviez pas le droit de faire cela?

M. Biron (Paul): On n'a pas le droit de faire cela actuellement, mais ce n'est pas prévu dans la loi qu'on aura le droit de le faire, parce que votre loi, M. le ministre, dit que les dispositions incompatibles du règlement de zonage local ne s'appliqueront pas. Incompatibles avec cette loi, mais cette loi ne fait pas de zonage de productions agricoles.

M. Garon: Non, mais cela n'empêche pas la municipalité de faire des règlements.

M. Biron (Paul): Si les règlements sont incompatibles avec la loi.

M. Garon: Avec ce qu'il y a dans la loi?

M. Biron (Paul): Oui, les règlements ne s'appliquent pas; la loi ne fait pas de zonage de productions agricoles. Elle dit: Dans la zone agricole, vous pouvez faire tout ce qui est agricole, y compris la laisser friche. D'accord?

M. Garon: Alors, ce que vous allez faire, s'il n'y a rien dans notre loi, ne sera pas incompatible.

M. Biron (Paul): Oui, si la municipalité dit: Les porcheries seront limitées au sud-est du territoire de la municipalité, le type qui reste au nord-est et qui est dans la zone agricole se sert de la loi pour dire: Moi, j'ai le droit, dans la zone agricole, de faire ce qui est prévu à la définition 1.1 de l'agriculture, c'est-à-dire la culture du sol, l'élevage des animaux. J'ai le droit de le faire. La municipalité ne pourra pas lui interdire de faire cela, parce que c'est incompatible avec 1.1.

M. Garon: Mais, elle va pouvoir le réglementer.

M. Biron (Paul): Non, elle ne pourra pas faire de zonage de productions parce que c'est contraire à l'article 1.1.

M. Garon: Oui, mais la loi n'empêche pas de faire cela. (23 h 15)

M. Giasson: Définition de l'agriculture.

M. Biron (Paul): Si, M. le ministre, la loi permet à la municipalité de faire du zonage de production agricole, suivant votre interprétation,

je pense que vous n'aurez pas d'objection à ce que ce soit clarifié clairement, à ce moment-là.

M. Garon: C'est clair.

M. Biron (Paul): Sixièmement, de soumettre les détenteurs de droits acquis aux règlements municipaux de zonage. C'est qu'en vertu de l'article 101, vous dites qu'une personne qui a un droit acquis en vertu de l'utilisation — je ne parle pas du permis d'utilisation — je pense, par exemple, à un terrain de camping dans la zone verte, cette personne a le droit de faire n'importe quoi qui n'est pas de l'agriculture; elle va pouvoir prendre son terrain de camping et en faire un dépotoir ou une industrie parce que l'environnement ne s'applique pas, en vertu de l'article 111 où on parle des normes de l'environnement; deuxièmement, votre article 101 dit ceci, M. le ministre: Une personne peut, sans l'autorisation de la commission, utiliser à une fin autre que l'agriculture un lot situé dans une région agricole, dans la mesure où il était déjà utilisé autrement. Vous ne dites pas que cette personne ne peut pas l'utiliser de façon différente de ce qu'elle faisait le 9 novembre; vous dites: Elle peut l'utiliser de façon autre que l'agriculture. Je suis heureux de voir que, dans votre idée, vous entendez respecter les règlements locaux de zonage, vous entendez que la personne qui a un droit acquis de terrain de camping ne peut pas faire autre chose qu'un terrain de camping.

M. Garon: Ce n'est pas cela qu'on dit.

M. Biron (Paul): Ce n'est pas cela que vous voulez dire.

M. Giasson: Bien, 101...

M. Biron (Paul): En lisant l'article 101, je dis: La personne qui a un droit acquis au 9 novembre...

M. Garon: Pour une fin autre que l'agriculture...

M. Biron (Paul): Oui.

M. Garon:... n'a pas une fin autre uniquement d'un terrain de camping, a une fin autre que l'agriculture.

M. Biron (Paul): Elle va pouvoir transformer son terrain de camping en dépotoir.

M. Garon: Théoriquement, elle le pourrait, mais c'est toujours sujet aux règlements de la municipalité.

M. Giasson: Oui, mais s'il est permis de...

M. Biron (Paul): Mais non, parce que vous avez toujours le fameux article qui dit que les règlements municipaux...

M. Garon: Non, avez-vous vu un avocat?

M. Biron (Paul): Je suis avocat, M. le ministre. On est collègues en ce sens. C'est pour cela que je viens ici, M. le ministre, pour vous dire que j'ai une interprétation différente de la vôtre; jusqu'à ce que la loi soit adoptée, vous avez un avantage sur moi, j'en conviens, et c'est pour cela que je suis ici, mais est-ce que... Je pense qu'il serait simple de la clarifier avant qu'elle soit adoptée.

M. Garon: Quand on dit que quelqu'un a le droit à une utilisation autre que l'agriculture, cela n'empêche pas la réglementation municipale, sur ces fins autres que l'agriculture.

M. Biron (Paul): Oui, mais si la réglementation municipale contredit l'article 101, qu'arrive-t-il?

M. Garon: Je vais aller plus loin que cela: Si la commission dit à quelqu'un: "Vous avez le droit de vous construire en fonction de nous"; cela ne lui donne pas le droit. Pour nous, c'est clair, mais il n'a pas le droit tant qu'il n'a pas eu son permis de la municipalité. On n'abroge pas les pouvoirs municipaux avec cela.

M. Biron (Paul): Que faites-vous de l'article qui dit que les règlements municipaux incompatibles n'ont pas d'application?

M. Garon: Est-ce que c'est incompatible de réglementer l'utilisation?

M. Biron (Paul): M. le ministre, pourquoi refuseriez-vous de l'écrire clairement dans la loi?

M. Garon: C'est clair pour nous.

M. Biron (Paul): C'est clair pour vous, mais ce n'est pas clair pour tout le monde, M. le ministre.

M. Garon: Mais là, il faut savoir lire.

M. Biron (Paul): Oui, je suis d'accord qu'il faut savoir lire, mais...

M. Garon: Quand on dit, dans une municipalité, qu'on a une utilisation agricole ou non agricole, on n'a pas été plus loin que cela parce que ce n'est pas notre rôle d'aller plus loin que cela. Pour le reste, c'est nous.

M. Biron (Paul): Je dois tenir pour acquis, suivant ce que vous me dites, que l'article 101, par exemple, de votre projet de loi, est sous réserve des règlements municipaux de zonage.

M. Giasson: Vous faites référence à l'article 32?

M. Biron (Paul): Je parle de l'article 101.

M. Giasson: L'article 101 par rapport à l'article 32?

M. Garon: On dit qu'on respecte les droits qui existaient déjà, les droits acquis, parce que le lot était utilisé, de fait...

M. Biron (Paul): Oui.

M. Garon: De fait, parce qu'il peut ne pas y avoir de règlements de la municipalité, ou faisant déjà l'objet d'un permis d'utilisation à des fins autres que l'agriculture; un permis, normalement, c'est vous qui l'avez donné.

M. Biron: Je dis au début, ne parlons pas de permis, parlons de l'utilisation effective.

M. Garon: On a mis l'un et l'autre dans notre article 101, utilisation de fait sans réglementation municipale ou faisant l'objet d'un permis d'utilisation à une fin autre que l'agriculture. Si vous avez un permis d'une municipalité, vous ne pouvez pas avoir de permis ailleurs, normalement. On respecte les droits acquis. Nous disons tout simplement qu'il a le droit à de l'utilisation non agricole et plus loin on dit: S'il arrête l'utilisation non agricole, pendant un an, il perd son droit d'utilisation non agricole. Il peut transformer son utilisation non agricole. Comme vous le dites, cela peut être un terrain de camping qui devient dépotoir. On ne dit pas de devenir un dépotoir, c'est à vous autres à réglementer cela.

M. Biron (Paul): Vous dites qu'il peut faire toute chose autre que l'agriculture, d'après ses droits acquis.

M. Garon: Pour autant que cette loi est concernée. Cette loi ne fait pas disparaître les règlements municipaux.

M. Biron (Paul): Non, mais M. le ministre, vous dites que les règlements municipaux qui vont à l'encontre de l'article 101 ne s'appliquent pas.

M. Garon: Cela ne va pas à l'encontre de l'article 101.

M. Biron (Paul): Bien oui, l'article 101 dit que vous pouvez prendre votre terrain de camping et en faire un dépotoir. Si vous passez un règlement pour dire: Non, vous ne le pouvez pas...

M. Garon: Ce n'est pas cela.

M. Biron (Paul): Je respecte votre opinion, M. le ministre, mais je pense que l'opinion contraire n'est pas nécessairement sans fondement. C'est juste créer des problèmes aux municipalités. Je suis heureux de constater votre prise de position. Tout ce que je vous demande, c'est de la clarifier, cela ne coûte pas cher, avant que le projet de loi ne soit adopté.

M. Garon: C'est clair, c'est marqué là.

M. Biron (Paul): Vous avez 75 municipalités qui ne le comprennent pas comme vous et il y en a peut-être d'autres aussi. La clarifier, cela ferait le bonheur de tout le monde, surtout si c'est votre intention.

Septièmement, inclure à l'article 105 les lots déjà adjacents à des chemins desservis par l'aqueduc et les égouts sanitaires. L'article 105 parle de lots qui deviendront adjacents à un chemin public, on ne parle pas du tout des lots déjà adjacents à un chemin public.

Huitièmement, inclure à l'article 105 les lots adjacents à des chemins desservis par un seul des services. Vous avez des municipalités qui n'ont qu'un service d'aqueduc et qui n'ont pas le service d'égouts. Pour ces municipalités, pour que le réseau devienne rentable, il y aurait lieu que le droit linéaire de construire sur un demi-hectare s'applique lorsqu'il n'y a qu'un des services, pour que le réseau puisse se payer.

M. Garon: Vous savez, ce projet de loi laisse beaucoup plus de pouvoirs aux municipalités qu'on ne le pense.

M. Biron (Paul): Je suis heureux de vous l'entendre dire.

M. Garon: Bien oui.

M. Biron (Paul): Neuvièmement, laisser en vigueur les règlements sur la qualité de l'environnement dans la zone agricole. J'ai parlé tout à l'heure de l'article 111 qui dit que les règlements sur l'environnement ne s'appliquent pas, à moins qu'on ne le dise. Dans l'immédiat, cela peut créer des problèmes jusqu'à ce que de nouveaux règlements de l'environnement soient promulgués. Il serait bon, je pense, que les règlements existants de l'environnement, que ce soit concernant les dépotoirs ou les porcheries, etc., s'appliquent et continuent de s'appliquer dans la zone verte.

Dixièmement, M. le Président, faire en sorte que ce soit la corporation municipale et non la commission qui rende les décisions et donne les approbations requises par le projet de loi. Lorsque la corporation municipale a un règlement de zonage approuvé par le ministère de l'Agriculture et qui ne peut être modifié sans l'approbation du ministère de l'Agriculture.

Evidemment, je ne suis pas le premier à parler de décentralisation. Il y a eu plusieurs suggestions de faites, c'en est une — je ne sais pas si elle vous a été faite — à savoir laisser aux administrations locales, rurales, donc où il y a des agriculteurs, le soin d'appliquer la loi, mais sous votre surveillance, en ce sens que le règlement approuvé ne peut être modifié sans votre autorisation. Je vous remercie.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Biron. M. le ministre, est-ce que vous avez d'autres questions?

M. Garon: Vous avez les municipalités, laissez-les étudier le projet de loi comme il faut, elles

vont se rendre compte que ce projet de loi tait des choses; il y a beaucoup de choses que certaines municipalités pensent interdites et qui ne le sont pas. Il ne fait pas plus que ce qu'il dit, le projet de loi. Quand vous dites que l'article sur les dispositions est incompatible, il y a beaucoup de choses qui ne sont pas incompatibles et qui vont s'appliquer dans les municipalités. Quant à l'article 111, il dit tout simplement: Pour ce qui est des règlements de l'environnement faits en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement, ils vont s'appliquer dans la zone agricole... Cela veut dire qu'ils vont s'appliquer expressément dans la zone agricole. Pourquoi cet article est-il là? Cela vient modifier la Loi sur la qualité de l'environnement. Les règlements adoptés en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement qui vont s'appliquer à la zone agricole, ce n'est pas spécifique à la zone agricole. Vous avez remarqué, à l'article 100, qu'il y a une certaine protection accordée concernant la réglementation en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement et cela concerne uniquement les bruits, les odeurs et les distances. Il n'y a aucune protection apportée en vertu de l'eau, par exemple on dit alors que cela veut dire que pour les règlements qui seront apportés, concernant la protection animale, par exemple, les articles qui vont s'appliquer vont devoir spécifier quand ils s'appliquent à la zone agricole.

M. Biron: En attendant, il peut se produire des situations qui vont être un peu absurdes. D'ici à ce que ces règlements soient approuvés, il peut se produire des situations difficiles avec les municipalités.

Sur votre premier point, vous dites que les municipalités ont beaucoup de pouvoirs. Ce que je demande, bien humblement, c'est de le dire plus clairement. C'est tout.

M. Gagnon: En attendant que ces règlements soient adoptés, il n'y a pas de transaction qui puisse se faire, il n'y a pas de dommage qui puisse se faire. Si j'ai bien compris le sens de l'intervenant, c'est qu'en attendant la loi, on pourrait ouvrir des bâtiments ou une porcherie n'importe où.

M. Garon: II faut inspecter ces bâtiments.

M. Gagnon: S'il n'y a pas de règlement. Ce que je veux dire, compte tenu que le territoire est gelé...

M. Garon: ...

M. Gagnon: Si la loi n'est pas adoptée et que la commission n'est pas formée, en attendant, il n'y a rien qui se fait.

M. Garon: Non, non. Ecoutez. Avant cette loi, dans un endroit, disons qu'un type qui avait un terrain de camping pouvait faire un dépotoir. Avec la loi telle qu'elle est, un terrain de camping peut faire un dépotoir. Après que la commission sera créée un terrain de camping pourra faire un dépotoir. Il n'y a rien de changé. Tout ce qu'on dit là-dedans, c'est une fin non agricole. Toutes les fins agricoles sont permises sur un terrain, mais en autant qu'on est concerné. Il y a une chose, c'est qu'on ne réglemente pas la municipalité; on dit tout simplement que dans les endroits où il y a des fins agricoles et des fins non agricoles, il faut inventorier les fins non agricoles.

M. Biron: M. le ministre, que je sache, le ministère de l'Environnement a émis des règlements concernant les dépotoirs.

M. Garon: Oui.

M. Biron: Bon! Alors, en vertu de cette loi, ces règlements ne s'appliquent pas dans la zone retenue pour fins de contrôle. Et sans qu'il y ait transaction — parce que le député a soulevé la question de transaction — je n'ai pas à faire de transaction si je suis déjà propriétaire du terrain. Je veux en faire un dépotoir. Avant le 9 novembre, je n'en avais pas le droit à cause des règlements de l'environnement. Depuis le 9 novembre, j'ai ce droit.

M. Garon: Oui, mais...

M. Biron: En théorie.

M. Garon: Théoriquement.

M. Biron: Bien oui, théoriquement, cela peut se produire.

M. Garon: Quand la loi sera adoptée, normalement, le ministère de l'Environnement va voir à amender des règlements qu'il veut voir appliquer en zone agricole.

M. Biron: Pendant ces quatre mois, dans les 613 municipalités, il peut se produire deux ou trois cas... Ecoutez, j'en représente 75 ici qui disent: On peut avoir le problème.

Une Voix: II faudra que le type demande un permis à la municipalité. La municipalité a le droit de refuser.

M. Biron: Pas nécessairement, si la municipalité...

M. Giasson: Quand c'est un droit acquis, non.

M. Gagnon: II n'y a pas de droit acquis, il n'y a pas de dépotoir.

M. Biron: Si la municipalité n'a pas de règlement, parce qu'il y a des municipalités qui n'ont pas de règlement, mais les règlements de l'environnement protégeaient la municipalité, ce qu'ils ne font plus.

M. Giasson: Lisez l'article 101, cela ne peut pas être plus précis.

M. Garon: Sur la décentralisation, vous utilisez votre pouvoir de faire des règlements.

M. Biron: On vous offre d'approuver des règlements et on ne les changera pas sans votre approbation. Ce sont des organismes déjà existants. Certaines suggestions vous sont faites là-dessus.

M. Garon: Je pense que ce qui va arriver, c'est que l'environnement va modifier les règlements qui doivent être modifiés et appliqués en zone agricole.

M. Biron: Si cela se fait vite, il n'y a pas de problème. C'est ce que je demande, tout simplement. (23 h 30)

M. Garon: Les dépotoirs qui se forment au mois de décembre, entre Noël et le Jour de l'An, vous savez...

M. Biron (Paul): Je vous parle de dépotoirs, mais il y a bien d'autres règlements qui...

M. Garon: D'accord. Je vous remercie infiniment, on va regarder les considérations que vous avez faites, lors de l'étude article par article.

M. Biron (Paul): Merci.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Merci, M. le Président. M. Biron, dans les recommandations que vous faites, dans la première, vous semblez demander beaucoup de pouvoirs pour les municipalités, lorsque vous dites qu'une modification serait pour obliger explicitement la future commission à prendre en considération l'opinion exprimée par la corporation municipale. Si, par hasard — vous allez me dire: Les municipalités ont le sens des responsabilités; je suis d'accord — vous aviez une ou deux des municipalités... Dans l'hypothèse où le ministre accepterait la recommandation d'obliger explicitement la future commission à prendre en considération une demande formulée par une municipalité et que cette demande irait justement à l'encontre de l'objectif poursuivi par la loi de protéger du bon sol agricole, qui n'est pas encore pourvu des services municipaux, vous n'avez pas l'impression que...

M. Biron (Paul): Non, M. le...

M. Giasson: Vous allez me dire: Faites confiance aux municipalités; je suis d'accord...

M. Biron (Paul): Non, ce n'est pas cela que je vais vous dire; je ne demande pas, dans la première recommandation, de forcer la commission à accepter l'opinion de la municipalité; je demande tout simplement que l'opinion de la municipalité entre à l'intérieur de l'article 12 qui définit les critères sur lesquels la commission doit se baser pour rendre une décision. A l'article 12, on parle des conditions biophysiques du sol et du milieu, des possibilités d'utilisation du lot, etc.; je veux seulement qu'on ajoute un critère, qui ne sera pas nécessairement de force exécutoire; c'est un critère de plus dont la commission devrait tenir compte; je ne dis pas "devra", je dis "devrait" tenir compte. La commission ne serait pas liée par l'opinion de la municipalité, mais elle devrait en tenir compte de la même façon que des conditions du sol et des autres conditions prévues à l'article 12.

M. Giasson: Oui, mais vous dites, dans votre texte, obliger explicitement la future commission à prendre en considération...

M. Biron (Paul): Oui, à prendre en considération.

M. Giasson: Elle peut considérer, décider que ce n'est pas cela et...

M. Biron (Paul): C'est cela; mais, si c'est inscrit dans le texte de la loi, la commission va peut-être le prendre en considération plus sérieusement que si elle n'est pas tenue de le faire. Si elle n'est pas tenue de le prendre considération, qu'est-ce que cela donne de passer par les municipalités pour faire les demandes?

M. Giasson: D'accord, je saisis mieux.

Vous dites également qu'il faudrait laisser aux municipalités le pouvoir de déterminer les fins municipales. Là encore, quel est l'objet de vos craintes sur les dispositions de la loi, pour autant que les fins municipales sont concernées?

M. Biron (Paul): C'est que les fins municipales seront, par exemple, un centre de loisirs, un chemin public, cela peut être... Disons que ce sont les deux exemples qui me viennent en tête.

Pourquoi ne pas prêter bonne foi aux administrateurs municipaux qui ne sont pas là pour mettre de l'argent dans leur poche? S'ils décident que le meilleur endroit pour faire le centre des loisirs de la municipalité est sur tel terrain, géogra-phiquement et pour d'autres raisons, pourquoi dire: Non, ce n'est plus vrai, ce n'est plus vous qui décidez. Cela va être le gouvernement qui va décider, alors que le législateur a déjà accordé ce pouvoir-là aux municipalités, celui de décider des fins municipales? Et les administrateurs municipaux ne sont pas des imbéciles. Ils administrent pour le bien de la municipalité. Je pense qu'il faut leur laisser décider au moins ce qu'est une fin municipale. C'est dans ce sens-là que l'article 2 existe.

M. Giasson: Vous aimeriez également découvrir dans la loi un mécanisme d'arbitrage, afin que quelqu'un tranche les différents...

M. Biron (Paul): Entre la municipalité et la commission.

M. Giasson: Mais cet arbitre-là ou ce mécanisme, dans votre esprit, c'est quoi?

M. Biron (Paul): Ecoutez, moi, j'agis au nom des municipalités et les municipalités ne veulent pas s'avancer à faire des suggestions sur l'arbitre. Evidemment, un arbitre, en principe, c'est un neutre.

M. Giasson: Ce serait quoi, la Commission municipale?

M. Biron (Paul): Ce pourrait être la Commission municipale. Ce pourrait l'être ou ce pourra être un autre organisme gouvernemental déjà existant, mais qui serait neutre, en ce sens qu'il ne serait pas nommé, ne serait pas partie ou ne serait pas impliqué...

M. Giasson: ... partie à l'application de la Loi de la protection des terres.

M. Biron (Paul): C'est cela.

M. Giasson: Mais vous êtes d'avis que, présentement, en vertu du libellé de l'article 111, les lois de l'environnement ne s'appliqueraient plus, à moins de dispositions particulières, à l'intérieur de l'aire retenue pour fins de contrôle.

M. Biron (Paul): Oui, et le ministre est aussi d'accord avec moi là-dessus.

M. Giasson: Si je comprends bien l'article 111, c'est la solution à laquelle j'en viens aussi.

M. Biron (Paul): Oui, et le ministre était d'accord avec cette interprétation-là. La seule chose où on ne s'est pas entendu, c'est sur ce qui est compatible ou non avec la loi. Je le vois ainsi: Lorsqu'une chose est permise par cette loi et qu'un règlement municipal l'interdit, je me dis que le règlement municipal est incompatible avec la loi. C'est ainsi que les tribunaux ont toujours interprété des clauses semblables. Tout ce que je demande, c'est que ce soit plus clair pour éviter des problèmes, surtout que c'est ainsi que vous le voyez. C'est tout ce que je demande.

M. Garon: Les règlements adoptés en vertu de la Loi de la qualité de l'environnement?

M. Biron (Paul): Non, on parle des règlements municipaux incompatibles avec la loi 90.

M. Garon: Les règlements municipaux qui ne sont pas incompatibles seront appliqués.

M. Biron (Paul): Oui, mais, M. le ministre, quand le projet de loi 90 permet de faire quelque chose et que le règlement municipal l'interdit, n'est-ce pas incompatible?

M. Garon: Ah non! mais non! c'est incompatible.

M. Biron (Paul): Bon! La loi 90 va me permettre de faire un dépotoir. D'accord? La loi 90 va me permettre de faire un dépotoir, l'environnement ne s'applique pas, j'ai un terrain de camping et j'en fais un dépotoir. J'en ai le droit en vertu de 101 et de 111.

M. Garon: C'est-à-dire qu'il est possible, à ce moment-là, que les règlements adoptés en vertu de la Loi de la qualité de l'environnement — je n'en suis pas certain, il faudrait que je la regarde plus — ...

M. Biron (Paul): M. le ministre, en vertu de 101 et 111, j'ai un terrain de camping dans la zone verte et j'en fais un dépotoir. J'en ai le droit.

M. Giasson: M. Biron...

M. Biron (Paul): Le règlement municipal qui m'empêche de faire cela, n'est-il pas incompatible?

M. Garon: Non.

M. Biron (Paul): II n'est pas incompatible. Il m'empêche de faire ce que la loi me permet et il n'est pas incompatible.

M. Giasson: M. Biron, si, avant le 9 novembre, dans votre municipalité, vous aviez un permis pour gérer un terrain de camping, vous êtes d'avis que l'article 101 vous permet de changer la vocation de ce terrain de camping?

M. Biron: Oui, parce que l'article 101 me permet de faire toute chose qui n'est pas de l'agriculture. Ce n'est pas...

M. Giasson: Pour autant que...

M. Biron: ... écrit en accord avec le règlement de zonage; c'est écrit que le règlement de zonage local ne s'applique pas, si c'est incompatible. Si l'article 101 me permet de faire quelque chose et que le règlement local me l'interdit, je vous ferai remarquer respectueusement que c'est incompatible. Pourquoi ne pas ajouter ces trois mots: "sous réserve du règlement local"? Ce serait si simple.

M. Giasson: Je partage votre avis dans le cas d'un terrain de camping, puisque c'est l'exemple que vous avez pris, dans une municipalité qui n'émet pas de permis — et il y en a encore beaucoup au Québec.

M. Biron: Oui.

M. Giasson: Vous avez aménagé un terrain de camping sans obtenir de permis municipal, parce qu'il n'y a pas d'obligation; l'article 101 vous donne des droits acquis pour une utilisation, une fin autre que l'agriculture. Il vous permettrait de modifier l'utilisation de ce terrain de camping, pour lequel vous n'avez pas de permis parce que la municipalité n'en émet pas, à d'autres fins.

M. Biron: Que j'aie un permis municipal ou pas.

M. Garon: Je pense, monsieur l'avocat...

M. Giasson: Je n'ai pas fait d'études de droit.

M. Garon:... que, quand on les a rédigés, on a pris l'avis des Affaires municipales et on les a consultés.

M. Biron: J'ai déjà, M. le ministre, été en cour avec des avis du ministère des Affaires municipales et j'ai perdu. Je ne critique pas le contentieux du ministère des Affaires municipales, mais je vous dis que c'est une question d'opinion et que c'est facile de régler ce problème.

M. Garon: A mon avis, c'est clair, cette loi n'interdit pas la réglementation municipale, simplement la réglementation municipale incompatible.

M. Biron: Bien oui, mais...

M. Garon: Ecoutez-moi, laissez-moi finir un peu. Quand on dit, à l'article 101, qu'il y a des droits acquis à des fins autres que l'agriculture, ce n'est pas n'importe quelle fin, sans aucune réglementation municipale, ce sont des fins autres que l'agriculture dans le cadre de la réglementation municipale.

M. Giasson: Ce n'est pas dit de cette façon.

M. Garon: Non, mais...

M. Biron: Vous avez même dit...

M. Garon: Je vais aller plus loin que cela. Quand vous dites, par exemple, que dans la zone agricole, une municipalité pourrait dire que des porcheries devraient être dans telle partie de la zone non agricole et que ce serait valable.

M. Biron (Paul): En parlant de porcheries, le règlement local, s'il parlait de distances, je suis d'accord avec vous pour les distances par rapport aux voisins. Cela s'appliquerait, ce n'est pas incompatible. Mais s'il disait, par exemple, que dans la partie nord-est ou nord-ouest, il n'y aura pas de porcherie, ce serait incompatible avec votre projet de loi qui dit: Dans la zone verte, vous pouvez avoir des porcheries. C'est cela que vous dites, cela fait partie de l'agriculture.

M. Giasson: D'après la définition du moins. Oui, je peux construire...

M. Garon: Cela, à notre avis...

M. Biron (Paul): D'autant plus, là-dessus, M. le ministre, si vous me permettez d'ajouter quelque chose, c'est qu'actuellement les municipalités n'ont aucun pouvoir de faire du zonage de pro- ductions agricoles. A quelle place vont-elles le prendre le pouvoir de le faire? Vous me dites qu'elles l'ont; ce n'est pas écrit qu'elles l'ont. Dans le Code municipal, elles ne l'ont pas ce pouvoir. Comment se fait-il que du jour au lendemain elles se trouveraient à avoir un pouvoir et qu'il n'y a aucune loi qui leur donne ce pouvoir? Vous savez que les municipalités ont des pouvoirs délégués. Je ne peux pas concevoir...

M. Garon: Comment se fait-il que vous dites que vous le faites actuellement?

M. Biron (Paul): Pardon?

M. Garon: Vous avez un règlement et vous dites que les porcheries sont dans le nord-est du village, de la municipalité.

M. Biron (Paul): Vous me dites que les municipalités pourraient faire un règlement pour dire qu'il n'y aurait pas de porcheries dans le nord-est de la municipalité.

M. Garon: Est-ce qu'elles en auraient le droit?

M. Biron (Paul): Elles n'ont pas le droit de faire cela. C'est le pouvoir que je vous demande d'avoir, parce que vous dites: II y a des porcheries tout le tour dans le territoire de la municipalité.

M. Beauséjour: Actuellement, elles en ont le droit, il y en a qui le font.

M. Biron (Paul): Non, actuellement, elles peuvent dire que la zone agricole va être uniquement dans le sud-est.

M. Beauséjour: Je ne parle pas de la loi. Actuellement, dans la réalité, une municipalité peut décider par règlement que dans telle région, cela va être des porcheries, etc. Elles le font.

M. Biron (Paul): Elles peuvent décider actuellement que la zone agricole va être au sud-est, d'accord? Puis que le reste sera résidentiel. De cette façon, elles vont limiter les porcheries au sud-est. Mais avec le projet de loi, vous dites: La zone agricole, c'est tout le tour du coeur du village. A ce moment, les porcheries ne sont plus juste dans le sud-est, elles sont partout autour du village. On ne l'a pas, le pouvoir de délimiter à l'intérieur de la zone agricole l'endroit où les porcheries pourront s'établir. Le seul pouvoir qu'on a, c'est de dire que cela sera à 500 pieds du voisin.

M. Garon: Cette loi n'enlève pas le pouvoir de réglementation des municipalités. Elle ne lui donne pas de pouvoirs de réglementation, mais elle n'enlève pas le pouvoir de réglementation des municipalités à moins qu'il ait pour but d'empêcher l'agriculture dans une zone agricole.

M. Biron (Paul): C'est cela que je dis.

M. Garon: C'est clair? Une Voix: C'est clair.

M. Biron (Paul): M. le ministre, on ne se comprend pas.

M. Garon: Me Biron voudrait qu'on lui donne des pouvoirs par notre loi. Notre loi ne lui donne pas des pouvoirs de réglementation nouveaux. Ce n'est pas à nous de lui donner cela.

M. Biron (Paul): C'est au législateur à le donner. Il y a des lois agricoles, M. le ministre, qui donnent des pouvoirs aux municipalités. Ces lois viennent toutes du législateur. Cela peut y être inclus. Ce n'est pas nécessaire que cela soit dans le Code municipal.

M. Garon: Je comprends. Mais votre pouvoir normal de réglementation, ce n'est pas dans la Loi sur la protection du territoire agricole que vous allez le trouver.

M. Biron (Paul): La loi sur la protection des abeilles n'est pas une loi du ministère des Affaires municipales. C'est une loi qui existe, qui donne des pouvoirs aux municipalités. Il y a une soixantaine d'autres lois qui ne proviennent pas des Affaires municipales et qui donnent des pouvoirs aux municipalités. Elles viennent toutes du législateur. Vous avez maintenant une loi. C'est le meilleur moment pour donner ce pouvoir de zonage, de productions. Vous changez la zone agricole et s'il y a des porcheries tout autour du village, vous voyez les problèmes que cela peut entraîner? Avec cette loi, on ne peut pas interdire les porcheries, sauf pour ce qui est de la distance des voisins. Avant, on pouvait le faire indirectement en limitant la zone agricole dans une partie du territoire. Pour éviter un problème, je vous demande de nous donner le pouvoir de faire du zonage de productions agricoles, que vous approuverez.

M. Garon: L'article 100, ce sont les droits acquis qu'on reconnaît.

M. Vaillancourt (Orford): D'après moi, l'article 100 est bon. Ce sont des droits acquis. Cela veut dire qu'on suit les lois de l'environnement et les lois des municipalités. C'est comme cela que je le comprends.

Une Voix: C'est cela. (23 h 45)

Le Président (M. Boucher): M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: J'avais seulement une remarque à faire. Je ne serais pas d'accord pour céder à une corporation municipale le pouvoir de régir les opérations agricoles sur son territoire, c'est-à-dire situer une porcherie, un poulailler... Si on lui donne ce pouvoir, elle pourrait dire à un jardinier: Tu n'as plus le droit de produire des produits maraîchers. Tu vas produire autre chose. Ce seraient des pouvoirs abusifs donnés aux municipalités. Il y a un ministère de l'environnement qui étudie la situation géographique d'une porcherie. Il émet un permis ou il n'en émet pas. S'il y a un impact sur la municipalité quant à établir une porcherie à un tel endroit, le ministère de l'environnement s'en charge. Mais je n'oserais pas céder à une corporation municipale des pouvoirs aussi abusifs que de réglementer la culture sur son territoire.

M. Biron (Paul): Sauf votre respect, justement, les règlements de l'environnement ne s'appliquent plus. Deuxièmement, les règlements de l'environnement, pour ce qui concerne les porcheries, sont très minimes. On parle de 500 pieds et c'est tout ce dont on parle; même pas 500 pieds. Je n'ai rien contre les porcheries, mais vu les vents dominants, si vous mettez les porcheries dans les vents dominants, vous voyez le problème au coeur du village?

M. Dubois: Oui, mais vous parlez de production agricole; réglementer la production agricole sur un territoire, c'est aller très loin quand même.

M. Biron (Paul): Ce serait approuvé par le ministre. Il faut se fier, encore une fois, au bon sens des administrateurs municipaux. Ils ne prendront pas une terre bonne pour la culture pour dire: Là, il n'y aura pas de culture. Je pense bien que là-dessus, il faut concéder un peu de bonne foi.

M. Dubois: Ce n'est pas à cela que je veux en venir. Je suis d'accord pour que les municipalités aient certains pouvoirs. D'ailleurs, je l'ai souvent demandé. Mais de là à céder aux municipalités le pouvoir de réglementer la production agricole, je pense que cela pourrait devenir abusif dans certains cas, à moins que la commission dise à une municipalité: Oui, on accepte que vous réglementiez de telle façon. Par contre, le ministère de l'environnement s'en charge présentement. C'est un fait. Il n'y a tout de même pas une porcherie qui va construire présentement sans l'approbation du ministère de l'environnement. Peut-être conjointement avec le ministère de l'Agriculture, d'accord, parce qu'ils vont travailler main dans la main à partir de ce projet de loi plus qu'avant parce qu'ils travaillaient séparément — mais je ne pense pas que, présentement, le projet de loi prévoie qu'une porcherie pourrait être installée n'importe où sans que l'environnement ait un mot à dire.

M. Biron (Paul): L'article 111.

M. Dubois: Des droits acquis, oui, mais est-ce que cela veut dire...

M. Biron (Paul): Non. L'article 111...

M. Dubois: Oui, vous parlez de l'article 111, mais il reste quand même que l'environnement a son mot à dire. Au lieu de travailler séparément

comme deux ministères bien individuels, il va y avoir de l'environnement agricole qui va se pratiquer quand même à l'intérieur de ce projet de loi. En tout cas, c'est mon point de vue. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Champlain.

M. Gagnon: M. le Président, comme cela semble, de toute façon, créer un problème d'interprétation, je demanderais au ministre de vérifier avec le ministère de l'environnement de façon qu'il n'y ait pas les problèmes que M. Biron mentionne. Je ne sais pas exactement comment l'interpréter, mais c'est difficile à interpréter, l'article 111. Il semblerait que l'interprétation que vous donnez n'est pas nécessairement celle que l'on comprend. Est-ce qu'il y aurait possibilité de vérifier pour être...

M. Garon: Oui, quand on va étudier article par article. Nos gars qui étaient ici tout le temps commencent le travail sur les amendements possibles ou des choses semblables, mais on va regarder des choses comme celle-là et on va vous donner... Je me rappelle très bien que le but de l'article 111 était de faire une réglementation d'environnement qui s'applique dans la zone agricole et une autre dans la zone agricole. Il y a beaucoup de réglementations qui seront communes. Je pense aux dépotoirs et aux choses semblables. On n'a pas à mettre plus de dépotoirs en zone agricole qu'en zone non agricole. Mais c'est la réglementation. Ce sera réglementé. Pour les activités agricoles, la Loi de la qualité de l'environnement peut réglementer des activités agricoles. Il faut qu'en zone agricole, on ait une réglementation qui tienne compte qu'on est en zone agricole et que les gens font de l'agriculture. Si, à un moment donné, le gars bat du grain et on dit: Cela fait de la poussière. Eh bien, cela fait de la poussière! Ce sont des choses comme cela. Si le gars étend du fumier, habituellement, il ne s'amuse pas à en étendre pour le faire sentir au monde. Il va en étendre. Il y en a qui vont dire: II devrait l'étendre à telle date. Que cela sente le 15 juin ou le 15 juillet, cela ne me dérange pas du tout que cela sente le 15 juin ou le 15 juillet. Il y des affaires comme cela dont il faut tenir compte. Qu'on tienne compte qu'on est en zone agricole.

Le cultivateur, à un moment donné, fait ses récoltes le soir par exemple, quelquefois, il faut qu'il fasse ses récoltes parce qu'il n'a pas beaucoup de temps à cause de la température — on ne sait jamais — il veut se presser, alors qu'on ne l'achale pas pendant les quelques jours où il fait ses récoltes. Au fond, ce sont des choses comme cela. Ce n'est pas pour ennuyer le monde mais pour empêcher des gens un peu pincés qui sont venus rester à la campagne et qui ne sont pas à leur place...

M. Biron (Paul): Si vous remarquez, M. le ministre, j'ai bien...

M. Garon: Ce n'est rien que cela.

M. Giasson: Ils veulent jouir du bonheur mais ils ne veulent prendre aucun petit inconvénient.

M. Biron (Paul): Si vous remarquez, M. le ministre, j'ai bien dit dans mes considérations que je ne me prononce pas sur le bien-fondé de la loi en aucune façon; je viens vous exposer les problèmes municipaux. Je ne vous demande pas d'abolir la loi en aucune façon.

M. Garon: Je comprends.

M. Biron (Paul): Je vous demande tout simplement... Je vous expose des problèmes et, surtout, il y en a que j'aimerais voir clarifier parce que vous dites...

M. Garon: Je vais vous dire une chose. Actuellement, le ministère des Affaires municipales est à mettre en place une trentaine de personnes qui vont travailler avec les municipalités concernées et qui vont dépendre de quelqu'un au ministère des Affaires municipales pour expliquer toutes ces affaires tranquillement aux municipalités.

M. Biron (Paul): Je suis au courant mais ce qui arrive est ceci: Ces 30 personnes ou 30 bureaux expliquent la loi d'une façon et le type se construit mais la commission fait démolir cinq ans après parce qu'elle n'est pas d'accord avec l'interprétation de ces personnes. Vous voyez le problème que cela cause à l'individu alors que ce serait si simple de le mettre clair. C'est juste cela que je vous demande d'autant plus que vous dites que c'est comme on veut que cela soit; alors ce n'est pas compliqué de le mettre clair dans le texte de la loi.

M. Giasson: M. Biron, pourrais-je vous remercier de la recherche que vous avez faite sur le projet de loi; c'est évident que vous avez eu à le fouiller même dans les questions d'interprétation juridique, vous pouvez différer d'opinion. Il est évident, à entendre votre discussion ce soir, que vous vous êtes donné la peine d'examiner fort sérieusement le contenu du projet de loi et les conséquences que cela peut entraîner, par cet excellent travail que vous avez fait au nom de 65 municipalités...

M. Biron (Paul): 75.

M. Giasson: 75, nous vous remercions.

M. Biron (Paul): Merci.

Le Président (M. Boucher): M. le député d'Iberville.

M. Beauséjour: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): Vous n'avez pas d'autres questions?

Au nom de tous les membres de la commission, M. Biron, je vous remercie pour cet excellent mémoire étant donné que c'est le 41e mémoire, vous êtes le dernier...

M. Garon: 49e.

Le Président (M. Boucher): Sauf ceux qui se sont abstenus. Alors, je vous remercie au nom de tous les membres de la commission.

M. Biron (Paul): Merci.

M. Giasson: Comme vous êtes le dernier intervenant, la commission vous invite à prendre un verre.

M. Garon: Etes-vous un avocat qui gagne au-dessus de $75 000?

Le Président (M. Boucher): La commission ajourne ses travaux sine die.

Fin de la séance à 23 h 54

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