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Version finale

31st Legislature, 3rd Session
(February 21, 1978 au February 20, 1979)

Wednesday, February 14, 1979 - Vol. 20 N° 265

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 116 - Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles


Journal des débats

 

Étude du projet de loi no 116

(Dix heures quinze minutes)

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de l'agriculture est réunie afin d'étudier article par article le projet de loi 116, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles.

Les membres de cette commission sont: M. Baril (Arthabaska), M. Beauséjour (Iberville); quant à l'Union Nationale, M. Dubois (Huntingdon) de-meure-t-il membre de cette commission?

M. Fontaine: II est remplacé, ce matin, par M. Biron.

Le Président (M. Laplante): M. Dubois est remplacé par M. Biron (Lotbinière); M. Gagnon (Champlain) est remplacé par M. Ouellette (Beauce-Nord); M. Garon (Lévis), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Rancourt (Saint-François), M. Roy (Beauce-Sud), M. Vaillancourt (Orford).

Les intervenants sont M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Charbonneau (Verchères), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe)...

Une voix: Remplacé par M. Fontaine (Nicolet-Yamaska).

M. Chevrette: Les vrais agriculteurs se désistent, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue), M. Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord)... il est membre; M. Picotte (Maskinongé), M. Samson (Rouyn-Noranda).

Avant de commencer, j'aimerais éclaircir sans discussion les deux décisions que j'ai rendues hier pour ne pas qu'il reste d'ambiguïté dans les...

M. Biron: J'aimerais vous poser une question. J'ai suivi les noms, est-ce que le Parti libéral a demandé d'avoir M. Verreault comme intervenant?

Le Président (M. Laplante): II n'a rien demandé.

Sur la première motion, hier...

M. Giasson: S'il m'est permis un retour en arrière, il s'agirait de remplacer M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue) par M. Verreault (Shefford), histoire d'être agréable au chef de l'Union Nationale.

Le Président (M. Laplante): D'accord. M. Verreault (Shefford) remplace M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue).

Sur la première motion que j'ai jugée irrecevable, je voudrais faire référence à la loi 22; le 18 juillet 1974 la même décision, dans le même contexte, a été rendue parce qu'on ne doit pas donner un ordre...

Concernant la deuxième motion que j'ai jugée recevable, le même cas s'applique au 11 juin 1974; la motion est identique et elle a aussi été jugée recevable. La parole était au député de Beauce-Sud sur l'intervention de la motion du député de Nicolet-Yamaska.

Motions (suite)

M. Roy: Merci, M. le Président. Je vais tenter d'être bref pour essayer de convaincre mes collègues de voter en faveur de cette motion. Évidemment, M. le Président, je ne plaide pas ma cause quand je parle en faveur de cette motion, puisque j'ai le droit de participer à toutes les commissions parlementaires soit à titre de membre ou à titre d'intervenant, ce qui a fait dire à plusieurs personnes que j'avais un statut privilégié à l'Assemblée nationale. Le député de Joliette-Montcalm — j'espère qu'il ne perdra pas son calme ce matin — dit que c'est vrai.

M. le Président, lorsque nous avons refait le règlement de l'Assemblée nationale en 1971, il y a des dispositions qui on été inscrites dans ce règlement concernant les commissions parlementaires, puisque l'Assemblée nationale ferait étudier dorénavant les projets de loi article par article en commission parlementaire élue plutôt que de procéder en commission plénière à l'Assemblée nationale, compte tenu du nombre et de l'augmentation des partis politiques reconnus à l'Assemblée nationale — il y en avait quatre à l'époque — et compte tenu également du grand nombre de lois déposées devant la Chambre.

M. le Président, ces dispositions qui ont été mises dans le règlement et qu'on retrouve dans l'article 48, j'ai toujours exprimé le voeu qu'elles s'appliquent avec équité, qu'elles s'appliquent avec une certaine sagesse, en partant du principe qu'un député élu pour représenter la population de son comté n'a pas un mandat limité par rapport à un autre député. Il a un mandat complet et je comprendrais mal qu'on empêche un député de se faire entendre devant cette commission parlementaire alors qu'on étudie le projet de loi 116, qui touche la mise en marché des produits agricoles au Québec. Tous les députés qui représentent des comtés ruraux du Québec et qui ont des agriculteurs dans leur comté doivent pouvoir se faire entendre et doivent avoir le pouvoir d'intervenir en commission parlementaire. C'est une question de principe.

Pour éviter que, à chaque fois qu'un député demande la permission d'intervenir et, tenant compte de l'humeur de certains membres ou de certaines formations politiques autour de cette table, qu'on l'entende ou qu'on ne l'entende pas, cela fait toujours des scènes déplorables. Il y en a trop eu dans le passé de ce genre de scènes. Qu'on règle donc la question une fois pour toutes ce matin, au début de cette commission parlementaire, et dans un geste de gentilhommerie, dans un geste vraiment démocratique, qu'on permette donc à tous les députés qui désireront se faire entendre sur ce projet de loi et qui sont directe-

ment concernés par les implications de ce projet de loi... Il y a des gens dans leurs comtés qui sont inévitablement concernés par ce projet de loi, qu'ils puissent compter sur la voix de leurs porte-parole, de leurs députés, pour être en mesure d'être représentés à cette table, à cette commission parlementaire.

C'est une question de principe, M. le Président, et je déplorerais énormément, en ce qui me concerne... Encore une fois, je vous dis, M. le Président, que je ne parle pas pour obtenir des privilèges personnels. Je ne suis pas en conflit d'intérêts à ce moment-ci. C'est une question de principe et j'ai pris cette position. Je pourrais relever ce que j'ai dit dans le journal des Débats en d'autres occasions, alors même que j'appuyais les députés du Parti québécois qui, au temps où ils étaient dans l'Opposition, faisaient exactement les mêmes demandes. Ce serait trop long ce matin d'énumérer toutes les fois où nous avons dû intervenir dans ce sens. C'est une question de principe qui était vraie hier et qui est vraie aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle je pense que la motion du député de Nicolet-Yamaska, étant donné que, dans sa formation politique, autant du côté du Parti libéral que de celui du Parti québécois, il y a sûrement des gens qui aimeraient se faire entendre, qui aimeraient participer aux travaux de cette commission parlementaire...

Il est évident qu'il faut, à un moment donné, que l'on tranche. Il faut que des décisions se prennent. Il faut qu'un vote soit pris. Il y a des dispositions dans le règlement qui permettent aux seuls membres officiels de la commission parlementaire de pouvoir voter pour ou contre un amendement. Le droit de vote est une chose, mais le droit de participer en est une autre. Le droit de participer est un droit sacré, c'est un droit fondamental dans notre régime démocratique. C'est un droit fondamental qui devrait être reconnu. On apportera peut-être, M. le Président, l'argument que cela retarderait les travaux de la commission parlementaire. Bien oui, imaginez-vous que cela pourrait retarder de trois jours les travaux de la commission parlementaire! Que sont trois jours? Des lois semblables, dans certains pays, aux États-Unis notamment, sont étudiées pendant deux ans ou même trois ans avant de franchir toutes les étapes. Ce n'est pas franchir les étapes une par jour; parfois même, c'est une étape par année. Les exemples qu'on pourrait citer seraient assez nombreux.

Alors, dans des projets de loi qui ont autant d'importance et autant d'implications que celui que nous avons à étudier à l'heure actuelle, je ne vois pas pourquoi ce serait si désastreux que la commission parlementaire siège un jour, deux jours, et même trois jours de plus, même que ce serait une semaine de plus, pour permettre aux représentants des différents comtés, les comtés ruraux particulièrement, parce que c'est ce point précis que je veux souligner à l'attention des membres de la commission parlementaire, qui sont visés directement par ce projet de loi, d'être en mesure de représenter ceux qui les ont mandatés, leurs électeurs, de venir exprimer leur point de vue en commission parlementaire, de nous faire part de leurs recommandations lorsqu'il y aura des motions qui seront présentées et discutées, ou encore sur certains principes qui seront discutés à cette commission parlementaire. M. le Président, ce n'est pas un privilège extraordinaire que je demande. Ce n'est pas un privilège abusif que je demande. Je demande tout simplement qu'on reconnaisse le droit à un député élu, représentant d'une population, d'être capable d'exercer son mandat à part entière, et non pas d'avoir un mandat restreint.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre.

M. Garon: M. le Président, on a entendu le refrain habituel du député de Beauce-Sud, défenseur des grands principes. Mais la démocratie, dans sa grande sagesse, a fait des règlements, qui sont dans des volumes, et qui disent qu'on doit fonctionner d'une certaine façon, pour que les règles démocratiques fonctionnent; autrement, c'est l'anarchie.

On peut avoir de grands principes, tout le temps, mais il faut en arriver à l'application concrète de ces grands principes. L'Opposition a eu tout le temps qu'elle a voulu, tous les députés ont parlé, en deuxième lecture. Mais un Parlement est là pour légiférer, et il faut aussi qu'il administre des lois. Les partis, normalement, ont des représentants. Ils ne sont pas obligés de faire parler tout le monde; le parti a une position, normalement, une ou deux personnes parlent pour exprimer l'opinion de leur parti, après avoir débattu les questions dans leur caucus.

Je suis un peu étonné. Chaque fois qu'on a une commission parlementaire, le député de Beauce-Sud fait le même discours, la même motion. Les trois quarts du temps, en commission parlementaire, c'est le problème qu'on a. Ce n'est pas d'avoir trop d'intervenants. Même ceux qui sont officiellement nommés comme intervenants et représentants, on a de la misère à les retrouver. En commission parlementaire sur la protection du territoire agricole, souvent, des gens qui devaient être là n'y étaient même pas. Je ne parle pas du député de Montmagny-L'Islet qui fronce les sourcils, il était toujours là.

M. Roy: J'espère que vous ne parlez pas du député de Beauce-Sud non plus.

M. Garon: Le député de Beauce-Sud n'est pas souvent là. Il vient à la course, il prend la parole, et ensuite, il se sauve au plus sacrant.

M. Roy: Je m'excuse, sur la Loi de protection du territoire agricole...

Le Président (M. Laplante): II y a l'article 96. Vous vous servirez de l'article 96 pour rectifier les faits.

M. Garon: Je vous ai laissé parler, M. le député de Beauce-Sud. Je pense que... Je n'ai pas

dit que les députés étaient tous absents. Ceux qui liront les débats pourront voir les silences. Vous savez, c'est comme autrefois, les députés avaient le droit de se lever; le premier ministre souhaitait bonne fête aux députés le jour de leur fête. Habituellement le député se levait pour remercier. C'est la seule fois qu'il se levait dans l'année. Aujourd'hui, on a enlevé cette tradition — grâce à la télévision, il y en a d'autres qui se lèvent un peu plus souvent sans cela cela paraîtrait mal. Mais je pense que les règles rédigées dans le règlement — — avant, il y avait 1500 articles, non pas 1500 articles mais un grand nombre d'articles — ont été faites pour diriger nos travaux. On nous dit là-dedans qu'il y a des représentants. Il y a eu des intervenants qui ont été ajoutés pour que les gens puissent parler. On pourrait bien dire: Ce serait plus démocratique s'il n'y avait pas de feux rouges dans les villes, les gens pourraient passer quand ils voudraient, mais, quand on vit en société, quand on vit dans des organismes, il y a des règles. Il y a des règles du parlementarisme qui ont existé au cours des années. Les partis sont là justement pour exprimer ces règles-là. Les députés qui, par leur parti, soit par l'Union Nationale ou par le Parti libéral, ont des représentants, des porte-parole peuvent exprimer ce qu'ils ont à dire. On n'est pas pour commencer à dire, à un moment donné: Tous les députés vont parler un par un et on va abolir les règles. De toute façon, c'est habituellement un problème théorique, parce que je n'ai pas vu jusqu'à maintenant de députés qui sont venus faire des représentations de cette façon, parce que le député les représentait. Je pense que c'est une motion inutile et que s'il y a des gens qui se présentent éventuellement, on devra voir les cas pièce par pièce.

Le Président (M. Laplante): Le député d'Iberville.

M. Beauséjour: M. le Président, je trouve que les premiers propos du député de Beauce-Sud sont très biens et nous apportent un éclaircissement, surtout au niveau historique, du changement des règlements. Il nous dit qu'autrefois, dans l'ancien règlement, l'étude article par article était faite en commission plénière. On a voulu en changeant les règlements, étant donné qu'il y a plusieurs partis et le nombre de lois, former des commissions pour étudier les projets de loi article par article. Je pense que c'est l'argument clef, mais je n'arrive pas à la même conclusion: c'est que la proposition devant nous serait simplement un recul en permettant que toute l'Assemblée nationale vienne étudier ici. (10 h 30)

Si on a cru bon de se limiter à un certain nombre, c'est pour éviter probablement une perte de temps. On a cru aussi que les députés qui faisaient partie d'une commission, comme intervenants ou bien comme membres, avaient probablement l'intelligence voulue pour étudier un projet de loi. On leur faisait confiance. C'est pour cela que je crois que si on regarde bien les premiers arguments du député de Beauce-Sud, on pourrait facilement arriver à la conclusion qu'il va falloir qu'on batte la proposition.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: À écouter trois députés de suite du gouvernement, vous allez peut-être croire qu'on a envie de "filibuster" cette motion. Il y a seulement deux petits points que je veux souligner. Si cette motion vient de l'Union Nationale, cela s'inscrit dans une ligne de conduite adoptée antérieurement sur le même projet de loi. Pour la commission parlementaire, les propositions sont décidées en caucus de parti. Vous avez à présenter des propositions sur chacun des amendements, si vous le voulez bien. L'attitude que vous avez prise en deuxième lecture — je m'excuse de m'adresser comme cela à l'Union Nationale — de parler tous — on sait que la redondance arrive vite, après avoir sorti les dix arguments contre, tout ce que tu peux faire, c'est que les dix répètent dix fois les dix arguments, c'est ce qu'on appelle "filibuster" une loi — ... Si on ouvre le débat "at large" ici, et que les dix viennent parler sur chacun des amendements, je pense que cela ne répond plus à l'objectif du député de Beauce-Sud qui, lui, dit: C'est sacré, quand un député a de quoi à dire sur un projet de loi. Je dois le dire, je suis d'accord avec lui. C'est aussi sacré dans un contexte démocratique de ne pas venir indûment faire perdre le temps, surtout quand les règles sont clairement établies dans les règlements. S'il y a du nouveau à apporter, dites-le-nous. Chaque fois qu'il y aura un gars de l'Union Nationale ou du Parti libéral qui s'en viendra ici et qui dira: J'ai quelque chose de neuf dans le débat par rapport à ce que mes confrères ont dit préalablement, on va l'applaudir; à part cela, on va le laisser parler, soyez sans crainte, consentement pour 40 minutes au lieu de 20, mais venir redonder, pas d'affaire!

Le Président (M. Laplante): Votre droit de réplique?

M. Fontaine: Ce n'est pas mon droit de réplique, je n'ai pas parlé sur la motion.

Le Président (M. Laplante): C'est à vous, vous parlez sur la motion.

M. Fontaine: Non, je n'ai pas parlé sur la motion.

M. Chevrette: Vous répliquerez sur votre amendement.

M. Fontaine: À entendre le député de Joliette-Montcalm, on dirait quasiment qu'on a trop de 110 députés à l'Assemblée nationale. Si les députés ne peuvent plus prendre la parole, quand ils le veulent, sur un projet de loi et exprimer une opinion à laquelle ils croient, à ce moment, il

faudrait peut-être réduire le nombre de députés; si c'est ce que le député de Joliette-Montcalm pense.

Mais les dix députés de l'Union Nationale qui se sont battus à l'Assemblée nationale, tant sur une motion de report que sur la motion de deuxième lecture, et qui ont parlé sur le projet de loi, c'est parce qu'ils croyaient à la défense qu'ils voulaient apporter. Ils se sont battus pour ce à quoi ils croyaient; aujourd'hui, si on vous demande la permission, par une motion, de permettre à chacun des députés de l'Assemblée nationale qui sont intéressés au domaine agricole de venir s'exprimer, ce n'est pas pour vous faire perdre du temps, c'est pour permettre à la démocratie de s'exprimer librement et permettre à chacun des députés qui ont quelque chose à dire de venir le dire. Il faut tenir pour acquis que le député qui va venir prendre la parole sur un article du projet de loi aura quelque chose à dire; si on part en disant que tout le monde parle pour ne rien dire, ça ne vaut pas grand-chose d'être assis autour de cette table.

M. le Président, par exemple, j'aimerais bien donner la chance au député de Drummond; il y a une grande partie de son comté qui est agricole, il a pris part au débat de deuxième lecture; il n'a pas parlé longtemps, mais quand même il a dit quelques mots. Je pense qu'il serait intéressant de l'entendre en commission parlementaire. D'ailleurs, c'est lui qui est allé expliquer la loi 116 aux gens du PQ de Brome-Missisquoi; son affaire n'a pas été un gros succès parce qu'il a été renversé; il pourrait peut-être venir nous informer des résultats de cette rencontre. Si c'est lui qui a été informer les membres du PQ de Brome-Missisquoi de la loi 116, il doit être informé dans ce domaine.

Il s'est d'ailleurs vanté d'avoir participé à plusieurs réunions de l'UPA au cours des dernières années, je pense qu'il doit être un expert dans le domaine et je pense que ce serait important de l'entendre.

Il y a de rares députés du Parti québécois qui ont pu prendre la parole au cours du débat de deuxième lecture, à cause de la décision qui avait été prise au causus du parti. Je pense qu'il serait peut-être important, ici en commission parlementaire, que ces députés, qui n'ont pas eu la chance de le faire en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, puissent venir ici et exprimer au moins une opinion sur certains articles du projet de loi.

M. Chevrette: L'article 96, M. le Président. Je m'excuse, M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, l'article 96, c'est lorsque mon discours sera fini.

Le Président (M. Laplante): Oui? Des voix: Oui.

M. Chevrette: Quand il y a une fausseté de dite, M. le Président...

M. Fontaine: M. le Président.

M. Chevrette: M. le Président, je vous fais confiance, vous me direz quand je devrai intervenir.

Le Président (M. Laplante): Vous n'avez droit qu'à une question si l'intervenant veut y répondre.

M. Chevrette: Non, ce n'est pas cela; d'abord vous m'avez dit...

M. Fontaine: M. le Président, est-ce que j'ai la parole?

M. Chevrette: Question de règlement.

Le Président (M. Laplante): Sur une question de règlement.

M. Chevrette: Quand quelqu'un dit une fausseté, quel est le moyen... on n'est pas tous des avocats spécialistes de la procédure.

Le Président (M. Laplante): Après l'intervention du député, vous invoquez l'article 96 et vous faites une rectification des faits s'il y a lieu.

M. Giasson: Immédiatement après que le député aura terminé.

M. Chevrette: Je vous remercie, je le ferai avec plaisir.

M. Fontaine: M. le Président...

M. Chevrette: Je le lis souvent, mais ce n'est jamais celui qu'il faut utiliser.

M. Fontaine: II y a également le député de Shefford. Je comprends que le Parti libéral, ce matin, a inscrit son nom pour siéger à la commission. Étant donné qu'il n'est pas ici, je suis sûr qu'il n'a pas été avisé qu'il pouvait siéger à cette commission. Mais le Parti libéral, demain matin, pourrait décider de ne pas l'inscrire, ou décider de ne pas l'inscrire cet après-midi; il n'aurait plus le droit de parole.

M. Giasson: II sera inscrit encore cet après-midi, ne vous inquiétez pas.

M. Fontaine: Cela pourrait arriver. Le député de Shefford est le seul membre du Parti libéral qui a eu l'audace d'aller jusqu'au bout de ses convictions et de voter contre le projet de loi 116 en deuxième lecture. Je pense que c'est une personne qui mériterait d'être assise à cette table et de pouvoir prendre part à la discussion. Il a eu le courage de prendre ses responsabilités, d'aller à l'encontre de la pensée de son parti et d'aller également à l'encontre des ordres qui lui ont été donnés par son chef. Je pense qu'il mérite une place près de cette table afin de prendre part aux discussions sur le projet de loi article par article.

Il y a également le député de Maskinongé; il est peut-être membre de cette commission... on

peut l'oublier parce qu'il est membre, il pourrait venir prendre part aux discussions. Étant donné que c'est lui qui a présenté la motion de report en deuxième lecture, il serait peut-être important qu'il soit présent à cette table.

Que le ministre ne s'en fasse pas, il n'y aura pas foule autour de cette table, parce qu'en deuxième lecture on avait à peine quorum à l'Assemblée nationale, lequel est de 30, alors qu'il n'y avait pas d'autre commission qui siégeait. Hier, on a siégé une bonne partie de l'après-midi sans avoir quorum. Le whip en chef du Parti ministériel l'a même avoué en disant: Cela fait une demi-heure qu'on a quorum. Cela voulait donc dire, à la réflexion, qu'avant cette demi-heure, pendant un bon bout de temps, on n'avait pas quorum. Il a dit: On est 40 à l'Assemblée nationale; que je sache, on n'est pas 40 députés, on est 110 députés à l'Assemblée nationale. Il y a, au maximum, une quarantaine de députés qui s'intéressent au domaine agricole; ce serait important qu'au moins ces 40 députés puissent venir prendre la parole ici même.

M. le Président, seuls les députés de l'Union Nationale ont pris part au débat en deuxième lecture, ils ont tous parlé parce qu'ils croyaient à ce qu'ils avaient à dire; je pense qu'il serait important qu'eux aussi, aujourd'hui, puissent venir prendre part à la discussion. Les seuls députés qui sont intéressés au domaine agricole vont venir en commission parlementaire et vous pouvez être assuré, encore une fois, que les 110 députés ne viendront pas ici. S'il y a, au maximum, 20, 30 députés qui viennent à tour de rôle, je suis assuré que ce sera le maximum, parce que des gens qui s'intéressent au domaine agricole, il n'y en a pas beaucoup. Dans le gouvernement actuel, il y a beaucoup plus de professeurs et ils ne s'intéressent pas tellement...

M. Garon: IL y a des cultivateurs.

M. Fontaine: Les agriculteurs sont ici, mais pas tous, il en manque.

M. Garon: II n'y en a pas dans vos partis.

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Garon: Les gars qui font de l'argent avec les cultivateurs ne sont pas des cultivateurs.

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Fontaine: Ce n'est pas parce que vous cultivez trois ou quatre plants de blé d'Inde que vous êtes cultivateur.

M. Garon: Je ne prétends pas l'être non plus.

M. Fontaine: M. le Président, également, au niveau des chefs de parti, c'est important que ces gens-là puissent également prendre part à la dis- cussion. Le seul chef de parti actuellement qui ait pris part au débat, c'est le chef de l'Union Nationale et je pense qu'il y a pris part d'une belle façon. Il a participé à tous les débats. Il y a également le chef du PNP, M. Fabien Roy, le député de Beauce-Sud, mais étant...

M. Chevrette: Lui, son caucus n'est pas gros. Une voix: II est là à 100%.

M. Fontaine: II est le seul représentant de son parti et peut-être le seul membre aussi, je ne le sais pas.

M. Roy: M. le Président, le député de Nicolet-Yamaska était bien parti, il est en train de tout gâter. Moi qui avait décidé d'appuyer sa motion, M. le Président, et il a des propos assez discutables, ce matin, pour ne pas dire très discutables.

M. Fontaine: M. le Président, je retire ces paroles, je pense que cela a dépassé ma pensée. Ce que je voulais vous dire, M. le Président...

M. Garon: II n'ya pas un gars qui ose. Avoir une pensée aussi pure que cela, ils ne veulent pas entrer dans ce parti-là.

M. Fontaine: M. le Président, il y a un seul chef de parti qui a pris part aux discussions en deuxième lecture et pour un chef de parti, M. le Président, on comprend qu'il y a beaucoup d'activités qui l'appellent même à l'extérieur de l'Assemblée nationale. On sait qu'en vertu de notre règlement, pour être capable de prendre la parole dans une commission parlementaire, il faut, au début de chaque séance, demander la permission aux autres membres de la commission. Par exemple, si le chef de l'Union Nationale avait eu une activité ce matin, il n'aurait pas pu venir en commission parlementaire à 10 h 30 ou 11 heures pour demander la parole. À ce moment-là, le règlement ne lui permettait pas de le faire. C'est ce qu'on demande par notre motion, que tous les députés qui sont intéressés dans ce domaine puissent le faire à n'importe quelle heure du jour lorsque la commission siégera — si on siège la nuit, ils pourront le faire la nuit également — qu'ils puissent venir et exprimer leur opinion. On comprend que le premier ministre n'ait pas pris part à la discussion en deuxième lecture. Cela se comprend il a d'autres préoccupations, c'est bien sûr. Peut-être qu'à un moment donné, en commission parlementaire, il pourrait prendre quelques minutes pour venir nous donner son opinion. Le chef du Parti libéral, c'est sûr qu'il ne peut pas venir, il n'est pas membre de l'Assemblée nationale mais il y a un chef intérimaire. Il n'a pas pris la parole non plus. Il a l'air de vouloir que les débats finissent le plus vite possible. Je ne sais pas pour quelle raison.

M. le Président, il y a également un grand nombre de députés qui ne sont pas membres de cette commission et qui voudraient intervenir à

cette commission parlementaire. Vous avez, entre autres, par exemple, le député de Matane, il y a de l'agriculture dans son comté; le député de Chicoutimi, il y a de l'agriculture également; le député d'Abitibi-Est, un technicien, il y a également de l'agriculture dans son comté. À Rivière-du-Loup, un directeur — je ne sais pas de quoi — il y a certainement de l'agriculture dans son comté; il aurait intérêt à venir ici nous donner son opinion sur le projet de loi. Le député de Lac Saint-Jean, un professeur, aurait certainement quelque chose à dire là-dessus, Le député d'Abitibi-Ouest, un éducateur, aurait également quelque chose à dire là-dessus.

M. Chevrette: Deux-Montagnes, alouette!

M. Fontaine: Le député de Sherbrooke, un travailleur communautaire, il y a beaucoup d'agriculture dans la région de Sherbrooke... Pas dans Sherbrooke même mais dans la région. Il aurait certainement des choses à nous dire là-dessus.

M. Chevrette: Dans la côte King, le maïs pousse pas mal.

M. Fontaine: II y a de l'agriculture dans la région de Sherbrooke, voyons!

Une voix: II y a une grande plate-bande.

M. Fontaine: Dans Laviolette, un agent syndical, il pourrait certainement venir nous donner son opinion, M. le Président. Dans Beauharnois, un enseignant. À Laval, M. le Président, on sait qu'il y a beaucoup de problèmes dans le domaine agricole, surtout à la suite du zonage agricole.

M. Chevrette: II apprend sa géographie. M. Garon: ... ce matin.

M. Fontaine: II y a également beaucoup de producteurs de fruits et légumes dans cette région. Certainement que le député de Laval aurait intérêt à venir prendre part aux débats de la commission parlementaire. Le député de Chambly, M. le Président, un médecin administrateur, il aurait certainement quelque chose à dire là-dessus. Le député de Laurentide-Labelle, un comptable agréé, il aurait certainement... Il est ministre délégué à l'aménagement, il aurait beaucoup de choses à dire là-dessus, dans le domaine de l'agriculture. Même si on me dit qu'il est à Chicoutimi aujourd'hui, la commission ne finira pas aujourd'hui, je ne pense pas; alors il pourra certainement venir à l'Assemblée nationale nous dire ce qu'il a à dire là-dessus. Le député de Saguenay, un professeur, aurait certainement quelque chose à dire là-dessus. Le député de Kamouraska-Témiscouata est ici. (10 h 45)

M. Ouellette: C'est un bon client.

M. Fontaine: Le député de Charlevoix, je pense qu'il aurait des choses importantes à nous dire.

M. Ouellette: Le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Fontaine: Le député de Portneuf, qui a pris part en deuxième lecture à la commission parlementaire, aurait certainement intérêt à venir.

Une voix: Le député de Duplessis.

M. Fontaine: Le député de Saint-Jean, professeur et whip du parti, aurait certainement beaucoup de choses à nous dire sur ce projet de loi.

M. Chevrette: Duplessis!

M. Fontaine: Le député de Jonquière, un avocat. Le député de Trois-Rivières, il n'y a pas d'agriculture dans la ville même de Trois-Rivières mais dans les environs, étant donné qu'il est ministre et qu'il représente cette région, pourrait certainement venir nous dire des choses là-dessus.

M. le Président, ce qu'on demande ce matin en commission parlementaire au ministre de l'Agriculture, c'est de faire un effort, un exercice de démocratie pour permettre à tous les députés qui veulent bien prendre part à un tel débat qui est important, un débat qui ne se déroule pas souvent à l'Assemblée nationale pour les agriculteurs, de pouvoir le faire sans être obligés de quémander une permission à chaque fois. Le gouvernement s'est vanté d'être transparent; depuis le début de son mandat qu'il nous répète cela, qu'il va être un bon et un vrai gouvernement démocratique. S'il est si démocratique que cela, qu'il permette à tous les députés de consentement d'accepter cette motion pour que tous ceux qui sont intéressés viennent prendre part au débat.

M. le Président, on nous dit que cela prend du temps. C'est donc bien important le temps pour tout de suite. On n'a pas d'autre chose à faire...

M. Garon: Imaginez-vous comment cela coûte par jour à l'Assemblée nationale.

M. Fontaine: M. le Président, on n'a pas d'autre chose à faire maintenant que d'étudier le projet de loi 116.

M. Garon: Pour des discours comme cela, c'est cher en maudit.

M. Fontaine: II n'y a pas autre chose à l'Assemblée nationale; tous les autres projets ont été discutés hier, nous avons fini à 23 heures, pour discuter de ces projets de loi. Actuellement, c'est le projet de loi 116 à l'Assemblée nationale et c'est un débat qui permet à tous les députés de revenir sur un sujet important qui est la mise en marché des produits agricoles du Québec. Je pense que si le gouvernement est sérieux dans l'adoption de ce projet de loi...

M. Garon: On peut en parler.

M. Fontaine: ... on se demande pourquoi il empêcherait chacun des députés de prendre part au débat, que cela prenne deux jours ou trois jours de plus ou même quatre jours, ce n'est pas cela qui est important.

M. Chevrette: Qui va en parler de l'agriculture?

M. Fontaine: Ce qui est important, c'est qu'un exercice démocratique soit fait et que chacun ait l'occasion de venir s'exprimer. Pour une fois, M. le Président, qu'on a une session qui est entièrement consacrée à l'agriculture, donnons-nous donc le temps et les moyens de jeter un peu de lumière sur ce dossier de la mise en marché des produits agricoles. Merci, M. le Président.

M. Chevrette: J'avais une question en vertu de l'article 96, mais je la laisse tomber pour parler d'agriculture.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Lotbinière.

M. Biron: M. le Président, je voudrais parler brièvement là-dessus tout simplement pour rappeler au ministre de l'Agriculture ce qui est déjà arrivé ici, dans ce Parlement, dans cette Assemblée nationale, le 16 juillet 1974, à une motion semblable. Lorsque le ministre de l'Agriculture dit: Les députés n'ont pas à venir autour de la table, on est assez, la démocratie...

M. Garon: Je n'ai pas dit cela. Un instant!

M. Biron: Les gens sont nommés; on est assez.

M. Garon: Je n'ai pas dit cela; j'ai dit: On verra à la pièce.

M. Biron: On verra à la pièce. Je voudrais tout simplement vous lire justement ce que disait M. Jacques-Yvan Morin, alors chef parlementaire de l'Opposition officielle, en 1974, à une commission parlementaire, en faisant la motion suivante: C'est pourquoi, M. le Président, puisque vous nous avez indiqué que cela était l'une des façons de procéder, je propose que la commission parlementaire sur l'éducation entende tous les membres de l'Assemblée nationale qui veulent intervenir sur le projet de loi 22, même s'ils ne sont pas membres à titre permanent de la commission et ce, jusqu'à ce que la commission ait terminé son mandat.

Ce n'est pas un député de l'Union Natinale qui a proposé cela; ce n'est pas le député de Beauce-Sud et chef du PNP; ce n'est pas un député libéral; c'est un ministre, c'est celui qui, aujourd'hui, est ministre dans le cabinet du Parti québécois et qui était, à l'époque, le chef parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Baril: Ils étaient six.

M. Biron: II demandait de faire entendre tout le monde sur la loi 22. Je vais vous dire qu'un peu plus loin M. le député de Sauvé, chef parlementaire à l'époque, aujourd'hui ministre de l'Éducation, intervenait. Un peu plus loin, le leader parlementaire d'aujourd'hui, le député de Saint-Jacques, qui était aussi député de Saint-Jacques à l'époque, disait ceci: "Nous avons proposé que tous les droits de l'Opposition et de tous les membres de l'Assemblée soient intégralement respectés à cette commission élue, parce que cette commission élue a pour unique tâche de remplir ce que traditionnellement la commission plénière avait comme fonction, celle d'étudier une loi article par article. "Ce n'est que dans ce sens, pour que la commission élue soit intégralement la copie conforme de la commission plénière, tout en permettant à la Chambre de procéder à autre chose, que nous le faisons."

C'était toujours à la commission parlementaire, pour pouvoir entendre tous les députés. Un peu plus loin, M. Charron disait ceci: "Nous allons présenter tous les amendements que nous jugeons essentiels d'apporter à cette loi, et il y en a beaucoup. Il y en a plusieurs parce que, comme la plupart des Québécois qui sont venus à cette table de la commission, nous avons rejeté le principe de ce projet de loi et nous viserons à en faire une loi conforme aux aspirations des Québécois."

C'est le député de Saint-Jacques qui parlait à l'époque et qui disait ceci, un peu plus loin: "Nous considérons comme absolument irrégulier dans l'histoire politique du Québec... Cela ne change rien. Si le chef de l'Opposition a proposé cette motion au nom de l'Opposition, c'est pour que tous les membres de l'Assemblée nationale, ceux qui ont voté pour comme ceux qui ont voté contre le projet de loi, aient l'occasion de parler selon la tradition même de toutes les commissions parlementaires et selon la tradition de la commission plénière que nous remplaçons ici. Or, que ceci soit, sur la motion du député de Sauvé, un avertissement très clair et très net."

C'est celui qui, aujourd'hui, est le leader parlementaire du gouvernement. Est-ce que vous allez renier ce qu'il a dit à l'époque, en 1974? Est-ce que vous allez lui dire que ce qu'il a dit il y a quatre ans et demi seulement, c'est complètement faux, que ce n'est pas vrai? Ou allez-vous reconnaître que votre leader parlementaire d'aujourd'hui, qui était député de Saint-Jacques à l'époque, et aussi le chef parlementaire de l'Opposition officielle à l'époque, qui est aujourd'hui le vice-premier ministre du gouvernement, que ces deux députés se sont battus pour que les droits des parlementaires à l'Assemblée nationale soient respectés?

Et avec leurs argumentations, on en est venu un peu plus loin au résultat que le gouvernement libéral de l'époque, même si vous l'avez accusé d'être un peu antidémocrate ou quelque chose comme cela, a accepté la motion, pour permettre à tous les députés de se faire entendre à la commission parlementaire.

M. le Président, ce que je veux vous prouver...

Une voix: II y avait huit députés.

Une voix: Ils étaient 110 députés comme aujourd'hui.

M. Biron: II y avait 110 députés. Ce que je veux vous dire par là, M. le Président, ce que nous voulons voir ici, à la commission parlementaire, c'est voir respecter les droits de tous les parlementaires et nous voulons que les députés du Parti québécois, aujourd'hui, respectent ce que leur leader parlementaire a dit il y a quatre ans et demi, ce que leur vice-premier ministre a dit il y a quatre ans et demi, que vous ne reniiez pas ces gens qui se sont battus pour vous autres, qui ont fait des batailles pour vous autres et qui vous ont permis de vous faire élire dans vos comtés, en se battant à l'Assemblée nationale pour des principes auxquels ils croyaient.

Le droit de parole à la commission parlementaire pour les députés de l'Assemblée nationale, à mon point de vue, c'est sacré. La commission parlementaire n'est que le prolongement de l'Assemblée nationale.

Bien sûr, le ministre nous a parlé tout à l'heure du droit de vote et de la démocratie. Nous comprenons qu'étant donné que c'est quand même restreint, que tout le monde peut peut-être venir parler, mais que c'est quand même restreint, il faut quand même que le gouvernement, que le législatif puisse jouer son rôle. Et nous comprenons que, lorsqu'il est question de voter, il faut quand même limiter le vote, selon la proportion des membres présents à l'Assemblée nationale, soit moins de députés qui ont le droit de vote à l'Union Nationale, un peu plus au Parti libéral et beaucoup plus au Parti québécois.

Nous comprenons que, du côté de la démocratie, pour le vote, cela puisse jouer. Mais pour ce qui est de la participation, M. le Président, c'est la deuxième phase et c'est peut-être la première phase de la démocratie, il faut permettre à ceux qui sont élus, représentants de la population de leur comté, de participer aux commissions parlementaires et de dire ce qu'ils ont à dire.

Si on veut brimer les droits les plus fondamentaux de la population du Québec et des députés, qu'on les empêche de parler. Mais si on les empêche de parler en commission parlementaire à l'Assemblée nationale, il y a des gens qui iront parler dans la rue tantôt. La démocratie se fera dans la rue. Moi, j'aime mieux que la démocratie se fasse à l'Assemblée nationale et aux commissions parlementaires.

C'est pour cela qu'on demande aujourd'hui que ceux qui ont le droit de se faire entendre, ceux qui ont quelque chose à dire, ceux qui veulent parler sur ces questions, fassent en sorte de venir ici, qu'on les invite et qu'on leur dise: Vous avez droit de parole si vous êtes député à l'Assemblée nationale, représentant de la population de votre comté, et faites-vous entendre, dites ce que vous avez à dire. Et une fois que la démocratie de la majorité aura fait son devoir et son oeuvre, on votera. Et si l'Opposition perd, elle perdra, et cela finira là. Mais, au moins, on pourra dire ce qu'on a à dire.

Comme le disait le député de Beauce-Sud tout à l'heure, si cela prend deux jours de plus, trois jours de plus, cinq jours de plus, il n'y a rien là, on va étudier sérieusement le projet. Après cela, le projet de loi sera adopté, selon ce que le gouvernement veut adopter, de la façon dont il veut l'adopter, mais il y a peut-être moyen de lui faire entendre raison sur certains articles du projet où on voit que le gouvernement est dans l'erreur; à force d'argumenter, peut-être le gouvernement comprendra-t-il quelque chose.

M. Garon: ... garder le pouvoir. Merci beaucoup.

M. Biron: À bien légiférer, je l'ai dit d'ailleurs à plusieurs reprises. Je ne suis pas là pour fourrer le Parti québécois, ni le Parti libéral, ni personne d'autre, je l'ai dit à plusieurs reprises. J'ai été élu à l'Assemblée nationale non pas pour servir un parti politique...

M. Chevrette: ... sur la loi...

M. Biron: ... j'ai été élu à l'Assemblée nationale pour servir les meilleurs intérêts des citoyens de mon comté et de ma province. C'est de cette façon-là, en permettant à tous ceux qui ont quelque chose à servir... Même ceux qui ont quelque chose à dire et à dire contre ce que j'ai à dire, je trouve que c'est la démocratie, qu'ils disent ce qu'ils ont à dire au moins, qu'ils arrêtent de lire les journaux en commission parlementaire et qu'ils disent ce qu'ils ont à dire. Au lieu de rester assis à l'Assemblée nationale, même en deuxième lecture, qu'ils viennent en commission parlementaire et qu'ils disent ce qu'ils ont à dire. C'est là au moins qu'on va savoir ce que la population pense, ce qu'eux autres pensent. Une fois que le vote sera pris, je me soumettrai de bonne grâce au résultat en disant: C'est la majorité encore une fois qui l'emporte, mais au moins mon devoir, comme député de l'Assemblée nationale, comme porte-parole de mes électeurs, sera fait. Les jours de plus, on nous a déjà dit au mois de décembre, au début de décembre: Si cela n'est pas adopté, tout sera à l'envers dans l'industrie agricole au Québec et il n'y a plus rien qui va marcher. Cela fait deux fois et cela continue à marcher et n'y a pas grand chose de changé. Même si on prenait trois jours de plus pour étudier sérieusement...

M. Garon: J'ai eu un engagement gouvernemental.

M. Biron: ... un projet de loi, il n'y aura rien là de mal et, au moins, la population sera instruite, la population pourra savoir ce qu'ont à dire les gens qui sont pour et ce qu'ont à dire les gens qui sont contre. Nous voudrions vous permettre, vous, les députés du Parti québécois, de donner vos arguments. Jusqu'à maintenant, on n'en a pas eu, sauf

de dire que c'est pour combler un vide de la Cour suprême. Cela va boucher le trou. Ce n'est pas un argument. On veut des arguments de fond. C'est pourquoi on a deux choses dans ce projet de loi. On veut justement donner la chance à chacun des membres du Parti québécois et à chacun des membres de l'Opposition de venir ici et de dire ce sur quoi ils sont pour et ce sur quoi ils sont contre et d'apporter des arguments sérieux sur le fond du projet de loi.

M. Baril:... de la chicane en troisième lecture.

M. Biron: II y en a ici qui ne peuvent pas apporter des arguments sérieux, qui lisent les journaux et qui ne parlent pas plus que cela. Il y en a peut-être d'autres qui ne sont pas ici aujourd'hui et qui voudraient apporter des arguments sérieux sur le projet de loi, sur le fond du projet de loi, pourquoi il y a une phrase qui dit: La Cour suprême... On vous l'a dit tout de suite, nous, de l'Union Nationale, cela aurait été accepté au mois de décembre, s'il s'était agi seulement de l'affaire de la Cour suprême. Encore là, si vous voulez adopter les articles 4 et 7, comme dit la Coopérative fédérée du Québec, on est prêt à les adopter, cela prendra quelques heures et ce sera fini, en troisième lecture; mais lorsque, par exemple, vous apportez d'autres choses de nouveau, d'autres moyens de contrôler davantage la production et lorsque vous voulez aller encore plus loin que la rue, que vous voulez entrer sur le terrain privé du producteur agricole et aller dans sa grange, dans sa maison et dans ses champs et lui dire comment faire, quoi faire, à quel temps le faire et à quelle heure le faire, là-dessus, nous exigeons des arguments qui nous disent pourquoi vous voulez faire cela, pourquoi vous voulez envoyer des inspecteurs de l'Agriculture partout pour surveiller chacun des producteurs agricoles, pourquoi vous voulez mettre des contrôles pour rien, pourquoi vous voulez mettre un tas de réglementations et dire au gars: Si tu ne respectes pas ces règlements et toutes ces histoires, on va te couper ton quota et on va le saisir et toutes ces histoires-là. Donnez-nous des arguments et donnez-en à la population du Québec.

Je ne sais pas si vous faites du bureau de comté, vous autres, mais moi j'en fais. Les gens viennent un par un dans mon bureau de comté, ils viennent me dire: M. Biron, cela ne marche pas. On voudrait avoir davantage d'explications là-dessus. C'est quelque chose d'important, je pense et on voudrait, nous autres, que les députés du Parti québécois qui ont quelque chose à dire, comme les députés de l'Opposition qui ont quelque chose à dire, viennent en commission parlementaire et se fassent entendre sur ce projet de loi. C'est tout simplement pour donner une chance à la démocratie de jouer son rôle et complètement. J'ai confiance aux media d'information. Après cela, ces derniers vont informer la population du pour et du contre sur le projet de loi. Ils vont révéler les deux côtés et la population jugera. C'est seulement cela qu'on veut, mais jusqu'à maintenant, on a développé un tas d'arguments, l'Union Nationale et le député de Beauce-Sud, contre le projet de loi et contre des interventions étatiques pour rien là-dedans et contre un tas d'interventions qui vont compliquer la vie du producteur agricole à un tel point qu'il devra s'engager un avocat qui travaillera pour lui pour le protéger. On a déjà assez de fonctionnaires de l'Agriculture au Québec et, s'il faut mettre encore plus de fonctionnaires de l'Agriculture, le producteur agricole n'a pas fini. On a développé un tas d'arguments contre le projet et on n'a entendu... (11 heures)

M. Garon: Les fonctionnaires ne sont-ils pas bons?

M. Biron:... aucun argument sérieux, à l'heure actuelle, sur le fond du projet de loi, sauf celui de nous dire: C'est pour boucher un trou de la Cour suprême. Le trou de la Cour suprême, on vous l'a dit déjà, si c'est seulement cela, on n'y a pas d'objection et on va vous l'accorder tout de suite.

D'un autre côté, ce qu'on veut avoir — je veux que le ministre en parle, je veux que les députés en parlent — ce sont des arguments. Les arguments de la Coopérative fédérée dans son mémoire du 16 décembre, il y a quelque chose là-dedans. On veut avoir des réponses, à savoir pourquoi la Coopérative fédérée a déposé ce mémoire et, article par article, ce qui arrive là-dessus. Il doit y avoir des gars dans le Parti québécois qui sont capables de parler parmi ces députés. Il doit y en avoir un, de temps en temps, capable de venir nous dire, article par article, pourquoi et pourquoi et qu'est-ce qu'on a dit. Si on a employé des arguments vis-à-vis de la Coopérative fédérée, qu'on nous le dise à l'Assemblée nationale et qu'on le dise à la population du Québec. On n'a rien dit à l'heure actuelle. On a caché la vérité à la population du Québec. On est train...

M. Garon: Cacher le télégramme de la Fédérée, arrêtez donc de mentir!

M. Biron: Vous avez...

Le Président (M. Laplante): M. le ministre.

M. Garon: Comme menteur, on ne fait pas mieux!

Le Président (M. Laplante): M. le ministre.

M. Garon: Pendant un mois et demi, vous avez caché que vous aviez reçu le télégramme de la Fédérée...

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Garon:... disant qu'elle était d'accord avec les amendements.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Lotbinière.

M. Biron: M. le Président, je ne peux pas accepter que le ministre emploie des termes complètement antiparlementaires.

M. Chevrette: Vous avez traité les gens de malhonnêtes, hier soir! Ne charriez pas, vous non plus!

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Biron: Je ne peux accepter que le ministre emploie des termes aussi antiparlementaires.

M. Chevrette: Ce n'est pas toi qui es président!

M. Roy: Un à la fois!

M. Biron: C'est mon honneur de député et le ministre devrait retirer ses paroles tout simplement. C'est important. Autrement, ce n'est pas fini, ces termes, il va y avoir une escalade. M. le ministre, retirez vos paroles tout simplement!

M. Garon: Je peux bien dire que vous n'êtes pas menteur, mais je peux dire que vous avez caché le télégramme de la Fédérée pendant un mois et demi et que vous faisiez des discours en Chambre pour dire que la Fédérée n'était pas d'accord, alors que vous aviez le télégramme qui disait qu'elle était d'accord avec les amendements que je lui avais proposés le 16 décembre.

M. Biron: Je comprends que le ministre a retiré ses paroles. D'un autre côté, hier, j'ai mis au défi le ministre de l'Agriculture de déposer sur la table de l'Assemblée nationale le mémoire reçu de la Coopérative fédérée le 16 décembre. Jusqu'à maintenant, le mémoire n'a pas été déposé. Ce serait important qu'on sache pourquoi si la Fédérée a des arguments de fond, on n'a rien fait pour corriger cela. Elle n'a pas changé d'idée depuis ce temps, d'après mes discussions avec elle. Qu'est-ce qu'on a fait vis-à-vis de la Coopérative fédérée? Quelles ont été les discussions avec elle? Je pense que c'est important que la population le sache. C'est important qu'on fasse la lumière sur tout cela. On n'a pas voulu la faire en deuxième lecture. On a voulu cacher la vérité en deuxième lecture. C'est peut-être le temps de faire la lumière.

Il y a des députés du Parti québécois qui sont peut-être au courant de quelques transactions à quelque part, je ne le sais pas. Il faudrait qu'ils viennent en parler et dire ce qui s'est passé. Ici, la législation ne se fait pas seulement derrière des officines et des portes fermées, en cachette. Elle se fait à la grande lumière, surtout quand on a un organisme aussi important que la Coopérative fédérée de Québec. C'est important. L'Union Nationale a réussi à mettre la main sur ce mémoire et à le rendre public, alors que le ministre n'a même pas voulu le rendre public.

Je pense qu'à la commission parlementaire, on veut justement donner une chance à chacun des députés du Parti québécois d'apporter des arguments pour le projet de loi. Jusqu'à maintenant, on ne l'a pas eue. Je n'ai pas l'impression qu'on l'aura, avec la vitesse à laquelle on est parti. Les députés ne veulent pas parler sur le fond du projet de loi. C'est justement le bien-fondé de la motion du député de Nicolet-Yamaska, basée sur ce que le leader parlementaire du gouvernement d'aujourd'hui a dit il y a quatre ans et demi, basée sur ce que le vice-premier ministre a dit il y a quatre ans et demi. Ce n'est pas n'importe qui dans votre parti. Pensez, avant de voter contre une telle motion du député de Nicolet-Yamaska, que vous allez renier ces ministres, ces grands hommes de votre parti qui se sont battus pour vous autres. Ce sont eux qui ont fait la bataille pour vous autres, pensez à cela, c'est important.

M. le Président, je veux terminer en disant tout simplement que ce que l'Union Nationale veut faire en présentant cette motion, c'est de donner une chance à tous les députés de l'Assemblée nationale, et particulièrement aux députés du Parti québécois, de travailler un petit peu le projet de loi, de l'étudier en profondeur pour nous dire ce qu'ils en pensent et nous apporter des arguments en sa faveur. À l'heure actuelle, on n'a eu aucun argument en faveur d'un tel projet de loi.

Le Président (M. Laplante): J'appelle...

M. Chevrette: Si vous appelez le vote, d'accord.

Le Président (M. Laplante): ... aux voix la motion du député de Nicolet-Yamaska: "Que les députés qui ne sont ni intervenants, ni membres de la commission permanente de l'agriculture puissent se faire entendre sans devoir obtenir la permission, et ce, pour toutes les séances que tiendra ladite commission relativement à l'étude, article par article, du projet de loi no 116". Ceux qui sont pour? Adopté? Vous voulez un vote enregistré?

M. Roy: Normalement, vous devez appeler, nommer les députés un par un, vous faites l'appel.

M. Chevrette: Un vote nominal.

Le Président (M. Laplante): L'appel? M. Baril (Arthabaska)?

M. Baril: Contre.

Le Président (M. Laplante): M. Beauséjour (Iberville)?

M. Beauséjour: Contre.

Le Président (M. Laplante): M. Biron (Lotbinière)?

M. Biron: Pour.

Le Président (M. Laplante): M. Gagnon (Champlain) remplacé par M. Ouellette (Beauce-Nord)?

M. Roy: M. le Président, je m'excuse, sur un point de règlement. Les paroles qui sont enregistrées au micro sont écrites dans le journal des Débats. Le député d'Arthabaska vient de prononcer des paroles que je n'accepte pas pour un parlementaire, je lui demanderais de les retirer et qu'on fasse en sorte que ce ne soit pas écrit dans le journal des Débats.

M. Giasson: Quand ça a été prononcé, c'est écrit.

Le Président (M. Laplante): Y a-t-il consentement?

M. Roy: On peut toujours demander le retrait.

M. Fontaine: On peut, de consentement, demander que ce ne soit pas inscrit.

M. Baril: II faudrait vérifier, premièrement, si c'est vraiment inscrit.

M. Roy: Si vous attendez que ce soit vérifié, c'est votre affaire.

Je lui tends une perche, M. le Président.

M. Baril: Je n'ai rien à retirer, parce que je ne me sens coupable de rien.

M. Chevrette: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Président (M. Laplante): D'accord. M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Si ce n'est pas enregistré, ça va l'être, parce que je vais répéter ce qui a été dit. Le député d'Arthabaska a simplement dit qu'il était contre les pertes de temps. Je trouve que ce n'est pas antiparlementaire.

M. Roy: II a ajouté autre chose.

M. Chevrette: On a entendu le chef de l'Union Nationale répéter huit fois la même chose.

M. Fontaine: Non, c'est autre chose qui a été dit.

M. Chevrette: On voudrait parler du fond et donner des réponses, mais il ne nous donne pas la chance de commencer.

Le Président (M. Laplante): D'accord, je continue l'appel du vote. M. Ouellette, Beauce-Nord.

M. Ouellette: Contre.

Le Président (M. Laplante): M. Garon, Lévis.

M. Garon: Contre.

Le Président (M. Laplante): M. Giasson, Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Pour.

Le Président (M. Laplante): M. Lévesque, Kamouraska-Témiscouata.

M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata):

Contre la perte de temps.

Le Président (M. Laplante): M. Rancourt, Saint-François.

M. Rancourt: Contre.

Le Président (M. Laplante): M. Roy, Beauce-Sud.

M. Roy: Pour.

Le Président (M. Laplante): M. Vaillancourt, Orford.

M. Vaillancourt (Orford): Pour.

Le Président (M. Laplante): Six contre, quatre pour; motion rejetée.

M. Giasson: Quatre pour? M.Roy: Cinq pour.

M. Giasson: Biron, Lotbinière, Nicolet-Yamaska; Beauce-Sud...

Le Président (M. Laplante): Baril, Arthabaska, contre; Beauséjour, Iberville, contre; Dubois, Huntingdon, remplacé par Biron, Lotbinière, pour; Gagnon, Champlain, remplacé par Ouellette, contre... C'est parce qu'il n'y a qu'un représentant de l'Union Nationale, c'est cela qui fait la différence.

Quatre pour, six contre; motion rejetée.

M. Garon: La démocratie vient de parler.

Le Président (M. Laplante): J'appelle l'article 1.

M. Fontaine: M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Oui, M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Avant d'entamer l'article 1, M. le Président, je voudrais vous rappeler, à la suite des commentaires que vous avez faits, au début de cette séance, que vous avez rappelé des décisions que vous avez rendues hier soir. Après vérification, je pense qu'il serait possible, ce matin, de présenter une nouvelle motion qui serait conforme à notre règlement. Je vous avise à l'avance que si le président — je pense que c'est permis par le règlement — jugeait que des modifications de forme étaient nécessaires à cette motion, je serais heureux qu'il puisse le faire.

Je voudrais vous présenter, M. le Président, la motion suivante: "Que cette commission invite les représentants de la Coopérative fédérée du Qué-

bec à se faire entendre, le 15 février, à 10 heures, afin que la présente commission soit pleinement informée de la portée du projet de loi 116 touchant en particulier le contrôle de la production par les offices des producteurs".

Le Président (M. Laplante): Suivant la logique d'hier...

M. Chevrette: Voulez-vous la relire?

Le Président (M. Laplante): Vous voulez que je la relise?

M. Chevrette: S'il vous plaît!

Le Président (M. Laplante): Vous n'avez pas de copies pour tous les membres, n'est-ce pas?

M. Giasson: Non, mais donnez-en lecture.

Le Président (M. Laplante): Motion: "Que cette commission invite les représentants de la Coopérative fédérée du Québec à se faire entendre, le 15 février à 10 heures, afin que la présente commission soit pleinement informée de la portée du projet de loi 116 touchant en particulier le contrôle de la production par les offices de producteurs".

Je la juge recevable, parce que je prends cette motion comme une invitation, non pas comme un ordre à la commission.

Qui veut s'exprimer? Voulez-vous un vote tout de suite?

M. Chevrette: Je voudrais parler.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président, c'est à peu près la troisième tentative du genre. Personnellement, je vais affirmer catégoriquement que c'est une motion purement dilatoire. Au niveau de l'argumentation en deuxième lecture, l'Union Nationale a tout fait pour essayer de faire comprendre que le ministre n'avait absolument pas consulté; le ministre a répondu à plusieurs reprises que, dans l'espace d'une année, ses fonctionnaires et lui-même avaient rencontré régulièrement tous ces gens, leur avaient donné les chances et l'occasion, à tout moment, de discuter; il a même dit qu'il avait eu des rencontres avec le mouvement coopératif en fonction de modifier le projet de loi; il a déposé un projet de loi amendé tenant compte justement de ces consultations avec le mouvement coopératif. On a tenté, ici, par une motion, hier soir, d'arriver à la même fin; à cause de technicités, vous l'avez jugée irrecevable, mais, dans l'esprit de tous ceux qui avaient argumenté, c'était clair qu'il n'était pas question d'ouvrir à nouveau une commission parlementaire où on inviterait des gens.

Ce matin, on se reprend avec une autre formule du même genre, techniquement changée pour que vous la jugiez recevable, mais qui va prendre encore probablement une heure, une heure et demie de débat, pour savoir si, oui ou non, on va entendre les gars de la Coopérative fédérée nous dire ce que le ministre sait, ce qu'elle a écrit dans son mémoire; c'est ce qu'on appelle des motions dilatoires.

Le chef de l'Union Nationale parlait tantôt du fait qu'il avait hâte d'entendre pourquoi on était en faveur de tel article, pourquoi on était en faveur de tel autre article. On a hâte de le lui dire. Ce n'est pas avec des motions du genre qui visent à écarter l'étude même du projet de loi article par article sur le fond qu'il va savoir quoi dire bientôt. Il ne pourra pas, il va toujours répéter ses mêmes redondances style cassette, parce qu'on ne peut pas avoir la chance, jusqu'à maintenant, de lui dire pourquoi on est pour. Je suis même prêt à lui dire quel type d'agriculture que, personnellement, je préconise; je suis prêt à lui donner la différence qui existe entre un intégrateur et un producteur qui s'est donné un instrument de protection pour son marché. Je suis prêt à lui donner des exemples, à lui photocopier des papiers et à lui répéter ce que j'ai dit hier soir. Encore faut-il qu'il s'ouvre les oreilles et qu'il écoute les arguments pour bien comprendre qu'on lui en donne de temps en temps, quand on a la chance de parler sur le fond.

Depuis le début, l'Union Nationale cherche délibérément à ne pas aborder le fond du projet de loi. J'ai hâte de voir si ces gens vont être aussi loquaces au niveau du contenu article par article qu'ils le sont au niveau des bebelles de procédure. C'est là qu'on va voir de quel bois ils se chauffent, quelle argumentation ils ont pour protéger le milieu dans lequel ils ont été le plus forts dans le passé. J'ai hâte qu'ils nous disent pourquoi ils sont plus ou moins en faveur des plans conjoints, pourquoi ils favorisent les dissidences, pourquoi, par exemple, ils favorisent le type d'agriculture que certains préconisent, comment ils concilient les principes de la démocratie quand une majorité de producteurs s'est donné un plan conjoint et pourquoi la minorité ne suit pas. Mois aussi, j'ai des questions à leur poser, j'ai hâte qu'ils abordent le fond. Là, ils se battent: Doit-on recevoir quelqu'un ou non? Devrait-on commencer à 10 heures le 15 février par écouter tel groupe ou non? Cela fait avancer le débat du contenu, je vous dis qu'ils sont forts, très très forts, ils m'épatent en termes de procédure, ils s'obstinent sur les numéros d'article.

M. le Président, il me semble que cela a assez duré. S'ils sont sérieux, s'ils veulent discuter du fond, personnellement, je suis prêt à donner mon consentement à n'importe quel intervenant qui aura quelque chose à nous dire sur le fond des articles, mais pas pour s'amuser pendant des heures. Il y a déjà une heure et quart de passée; hier soir, on a passé deux heures à discuter de bebelles, de "giddy", comme on dit, et on n'a pas avancé du tout sur le projet de loi. Là, ils disent: II faudrait permettre à tout le monde de venir parler. C'est vrai qu'il faudrait peut-être permettre à d'autres de venir parler, je serais prêt à donner

mon consentement parce que, quand un député est obligé de nommer toutes les villes du Québec pour venir à bout d'occuper son temps, c'est parce qu'il n'a pas grand chose à dire sur la loi.

Le Président (M. Laplante): C'est tout? D'autres intervenants?

M. Fontaine: M. le Président...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, le député de Joliette-Montcalm ainsi que les autres députés du Parti québécois font toujours grand état du fait qu'on prend du temps de cette commission pour demander des choses qui, je pense, sont raisonnables. Si on en est sur la question de temps, à savoir si on doit entendre ou non la Coopérative fédérée de Québec, je vous dirai que je suis prêt à perdre du temps pour pouvoir entendre ces gens. Le ministre ne fera pas accroire qu'après avoir présenté un mémoire — dont je me donnerai la peine de vous lire quelques extraits tout à l'heure — le 16 décembre 1978, qui était non seulement contre le projet de loi 116, mais qui expliquait également au ministre les malaises profonds qui existent dans le domaine agricole, le conflit qui existe entre les coopératives fédérées et le mouvement syndical par l'entremise des plans conjoints et des offices de producteurs...

M. Garon: On les avait avertis pendant 20 ans. (11 h 15)

M. Fontaine: ... M. le Président, je pense que c'est un débat de fond. La Coopérative fédérée, même si elle peut avoir changé d'idée sur certains articles du projet de loi 116 depuis le mois de janvier, ne peut certainement pas avoir modifié son opinion quant au débat de fond qui est exprimé dans ce document. Le ministre de l'Agriculture, hier, à l'Assemblée nationale lors de sa réplique, a lui-même avoué que ce malaise entre le Mouvement coopératif et le mouvement syndical existe depuis plusieurs années. Je pense qu'il serait peut-être temps aujourd'hui de prendre la peine, que ce soit quelques heures ou une journée, d'entendre le Mouvement coopératif. On pourrait également vous demander d'entendre l'UPA, le mouvement syndical qui viendra lui aussi nous donner la contrepartie.

M. le Président, le malaise est là, il existe. Je voudrais vous citer quelques extraits du mémoire qui a été présenté par la Coopérative fédérée de Québec, le 16 décembre 1978. Il a été présenté au ministre. Le ministre nous a dit, hier, quelles personnes étaient présentes, tout cela. On est bien d'accord sur cela, mais cela s'est passé en catimini, derrière la porte close du cabinet du ministre. Cela ne s'est pas fait publiquement. Je pense que si cela se faisait publiquement, il y aurait des producteurs qui réagiraient de l'autre côté.

M. Garon: Cela fait trente personnes.

M. Fontaine: Trente personnes, écoutez, ce n'est tout de même pas la province de Québec.

M. Garon: Non, mais mon bureau n'est pas assez grand.

M. Fontaine: On vous demande un débat public là-dessus, M. le ministre.

M. Roy: II y a des salles.

M. Fontaine: On a tout ce qu'il faut ici pour entendre les gens. Il n'y a pas de problème là-dessus. Que cela prenne une journée de plus, je vous ai dit tantôt qu'on était en train d'étudier une loi importante, une loi qui touche le domaine agricole et on a seulement cette loi-là à étudier présentement. Je me demande pourquoi on essaie de bousculer tout le monde afin de passer cela à la vapeur sans que personne ne puisse venir donner son opinion là-dessus d'une façon publique. Si le ministre a des choses à cacher, ce n'est pas pareil, on comprend son attitude; mais, s'il n'a rien à cacher — je pense qu'il n'a rien à cacher non plus — je me demande pourquoi il n'accepte pas de faire entendre la Coopérative fédérée de Québec ou le Mouvement coopératif. Les sujets qui ont été soulevés par la Coopérative fédérée de Québec dans son mémoire au ministre sont tellement de fond qu'il est impossible qu'aujourd'hui, en février, elle ait changé d'idée sur des questions de principe fondamental. Je pense que tous les membres de la commission vont en convenir. Même hier, le député de Montmagny-L'Islet a posé des questions au ministre au sujet de ce mémoire. Il s'interrogeait à savoir s'il était possible qu'un mouvement aussi important que la Coopérative fédérée de Québec change d'idée d'une façon aussi radicale en si peu de temps. Je pense que c'est impossible.

M. le Président, la Coopérative fédérée de Québec disait ceci dans son mémoire: Nous revenons devant vous, aujourd'hui, pour vous souligner les dangers graves que comportent pour les sociétés coopératives et pour tous les producteurs, membres ou non des coopératives, les dispositions des articles 1, 3 et 5 du projet de loi no 116 et pour vous demander non seulement de retirer ces amendements, mais de rétablir dans la Loi de la mise en marché des produits agricoles les dispositions qui protégeaient les associations de producteurs constituées en coopératives et empêcheront désormais toute intervention dans les relations entre les membres usagers et leurs coopératives par le biais des plans conjoints."

Voilà, M. le Président, un débat de fond. On avait reconnu, dans la première loi qui a été adoptée en 1958, sur la mise en marché des produits agricoles, des pouvoirs aux coopératives qui ont été diminués, par la suite, par la loi de 1974 et les coopératives demandent, par le biais de ce mémoire, de rétablir les pouvoirs qu'elles avaient au début, lorsque la première loi de mise en marché a été mise en application.

Il continue: "Les dispositions du projet de loi

qui retiennent en tout premier lieu notre attention sont celles proposées à l'article 3 du projet de loi pour amender l'article 67 de la loi actuelle. Les notes explicatives qui accompagnent le projet de loi laissent entendre que l'objet principal des modifications proposées est de faire suite au jugement récent de la Cour suprême du Canada déclarant ultra vires certaines dispositions législatives fédérales sous l'autorité desquelles des frais ou redevances avaient été imposés ou perçus.

En fait, ce sont surtout les articles 4 et 7 du projet de loi qui traitent de cette matière, l'article 3 du projet de loi n'a rien à voir avec cet objectif; au contraire, les amendements qui sont proposés à l'article 67 de la loi ont pour but et pour effet uniquement d'accroître les pouvoirs déjà exorbitants des offices de producteurs en leur donnant maintenant la faculté de retirer à tout producteur le droit fondamental et, quant à nous, inaliénable, de produire et donc d'exercer sa profession."

M. le Président, si, après avoir dit cela, la Coopérative fédérée de Québec, le mouvement coopératif a changé d'idée, je ne comprends pas son attitude et j'aimerais bien que ces gens puissent se faire entendre pour nous dire pourquoi, aujourd'hui, ils auraient changé d'idée et ils appuieraient le projet de loi 116? Ces amendements permettraient aux offices de producteurs de s'attribuer en conséquence un pouvoir, à toutes fins pratiques, absolu sur toutes les associations de producteurs constituées en coopératives et sur tous les producteurs du produit commercialisé sans possibilité de réplique ou de défense authentique.

On nous dit un peu plus loin: "Les amendements proposés à l'article 67 de la Loi des marchés agricoles auraient pour effet de légaliser ces abus de pouvoir et d'autoriser ce genre de menace. En effet, le paragraphe j), le droit nouveau, que l'on propose d'ajouter à l'article 67 de la loi actuelle, donne à tout office de producteurs le droit de suspendre ou d'enlever le contingent d'un producteur pour toute violation de la loi, violation d'un plan conjoint, violation d'une ordonnance, violation d'un règlement, d'une convention homologuée ou d'une sentence arbitrale. De plus, en vertu de cette disposition, il semblerait que le droit de produire du producteur ne précède pas le droit de réglementation de l'office, de sorte que c'est l'office qui attribue au producteur son contingent, c'est-à-dire, son droit de produire. Ces dispositions ont pour effet de placer le producteur à la merci totale de l'Office des producteurs et à la merci totale de l'interprétation par cet office, bonne ou mauvaise, erronée ou non, tendancieuse ou non, fallacieuse ou non, de la loi, du plan conjoint, d'un règlement, d'une ordonnance, d'une convention homologuée, d'une sentence arbitrale ou d'une combinaison quelconque des dispositions contenues dans ces divers éléments.

M. Garon: II y ajustement un amendement là-dessus; ce n'est pas par l'office, c'est par la régie.

M. Fontaine: Le ministre nous dit qu'il y a un amendement qui a été proposé là-dessus. Je ne pense pas, M. le Président, que l'amendement qui a été proposé satisfasse entièrement la demande de la Coopérative fédérée de Québec parce que l'amendement qu'on propose est un appel à la Régie des marchés agricoles pour réviser la décision.

M. Garon: C'est encore bien mieux, la décision va être prise par la régie; il n'y aura même pas d'appel, cela va éviter une procédure.

M. Fontaine: Non, l'article, ce n'est pas cela. M. Garon: C'est ce qu'on propose.

M. Fontaine: L'article de la loi n'est pas cela, c'est que la première décision...

Le Président (M. Laplante): II ne faudrait pas tomber dans l'étude, article par article; je vous mets en garde là-dessus, M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: D'accord, M. le Président. Si je n'avais pas été interrompu, je n'en serais pas arrivé à ce sujet mais puisque le ministre m'y a invité, M. le Président, je dois vous dire que l'amendement qui est proposé est un appel à la Régie des marchés agricoles et cet appel ne peut pas nous satisfaire et ne peut pas non plus satisfaire les revendications de la Coopérative fédérée de Québec, certainement pas.

Ce qui pourrait satisfaire la Coopérative fédérée de Québec et particulièrement, également, l'Union Nationale, ce serait sûrement un appel de droit commun à la Cour provinciale, devant les tribunaux de droit commun. Cela pourrait certainement nous satisfaire mais je ne pense pas que le ministre, jusqu'à maintenant, soit prêt à accepter un tel amendement. La Coopérative fédérée de Québec poursuivait: Or, sans son contingent, le producteur ne peut plus produire, c'est donc attribuer à l'Office des producteurs un droit de vie ou de mort sur chaque producteur individuellement. Ce sont là, quant à nous, des dispositions qui portent atteinte aux droits de l'homme.

On pourrait peut-être demander à M. Hurtubise, le président de la Commission des droits de la personne, de venir témoigner là-dessus en commission parlementaire pour nous dire s'il est d'accord qu'on enlève un droit aussi fondamental.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Nicolet-Yamaska, je vais vous demander seulement une petite coopération. Vous avez le droit de lire le texte, mais le commenter article par article, vous ne le pouvez pas à ce moment-ci; sans cela, je serai obligé d'appeler l'article 1, d'accord? Je voudrais qu'on s'entende là-dessus. Vous êtes sur une motion d'invitation; vous dites le pourquoi mais je ne voudrais pas que les articles soient commentés. D'accord?

M. Fontaine: Je suis d'accord là-dessus, M. le Président. Ce que je suis en train d'expliquer aux membres de la commission, c'est que la Coopéra-

tive fédérée de Québec a émis plusieurs arguments de fond à l'encontre du projet de loi 116. Ce que je suis en train de vous expliquer, c'est que je ne comprends pas comment il se fait que le ministre puisse aujourd'hui nous dire que la Coopérative fédérée de Québec a changé d'idée et appuie le projet de loi 116, alors qu'elle avait émis des opinions sur un débat de fond, en disant qu'elle était opposée complètement au projet de loi 116.

Ce que je voudrais, par ma motion, c'est que la Coopérative fédérée de Québec, qui a 19 000 membres, qui représente tous ces producteurs, puisse venir ici, en commission parlementaire, nous expliquer si c'est vrai qu'elle a changé d'idée et pourquoi. Est-ce que le ministre a raison de nous dire qu'elle a changé d'idée, oui ou non? Si c'est vrai, qu'elle vienne nous dire pourquoi elle a changé d'idée. Ce serait peut-être important que les 19 000 producteurs qu'elle représente sachent pourquoi leur coopérative présente un mémoire aussi sévère à l'endroit du projet de loi 116, au mois de décembre 1978, alors qu'on nous demandait d'adopter ce projet de loi à la vapeur, à la dernière minute de la session. C'est uniquement grâce à l'Union Nationale, si nous sommes encore ici aujourd'hui pour en discuter.

M. Garon: Encore...

M. Fontaine: M. le Président, qu'elle vienne nous expliquer pourquoi... Oui, c'est grâce à l'Union Nationale et je suis fier de le dire. N'eut été de l'Union Nationale, le projet de loi 116 aurait été adopté le 21 décembre et, cette fois-là, on aurait eu raison de dire que cela aurait été la nuit. Il n'y a aucun producteur qui aurait pu s'exprimer là-dessus, il n'y a aucune association qui aurait pu venir faire des représentations en commission parlementaire, tel que nous le demandons aujourd'hui.

M. le Président, je pense que, d'après les arguments de fond qui sont exposés par la Coopérative fédérée dans ce mémoire, c'est quasiment impossible que ces gens aient pu changer d'idée aussi rapidement, sur une question de fond qu'ils ont proposée au ministre.

Il y a eu également, du fait que l'Union Nationale a réussi à faire reprendre ce débat, qu'on a découvert que la Régie des marchés agricoles avait également émis des opinions quant au conflit qui existe entre le mouvement coopératif et le mouvement syndical, à la suite d'une étude qu'on a faite sur la fondation d'une coopérative fantôme, qui a été faite par la Fédération des producteurs de lait nature.

Ce jugement qui a été rendu, cette ordonnance de la Régie des marchés agricoles, nous disait ceci: Après examen des témoignages et des documents, la régie croit que l'utilisation des sommes perçues en vertu du règlement imposant une contribution pour fins de publicité, promotion et développement des marchés, en vue de l'établissement d'une troisième force ou de prêts ou subsides à la Société coopérative québécoise à cette fin, n'est pas justifiée, ni sur le plan légal, ni sur celui de son opportunité. La régie considère que l'utilisation de la majeure partie de ces contributions n'est pas conforme aux dispositions de la loi, ni à celles du plan conjoint que la fédération est chargée d'appliquer. Et le ministre a cautionné cela en prêtant $900 000 à l'UPA, c'est-à-dire à la coopérative fantôme...

M. Garon: Cela prend combien de membres à une coopérative pour être fantôme?

M. Fontaine: C'est la régie qui dit cela, ce n'est pas nous, la troisième force qui est indiquée dans l'ordonnance de la régie. Ce n'est pas nous autres qui disons cela.

M. le Président, je voudrais bien comprendre. Le producteur qui est dans mon comté ou dans le vôtre, voudrait bien comprendre également pourquoi, en vertu de quoi celui qui est membre de la Coopérative fédérée, volontairement, qui décide d'adhérer, en tant que membre de la coopérative, et qui, d'un autre côté, est obligatoirement...

M. Garon: Les gens ne sont pas membres de la Coopérative fédérée; c'est une fédération de coopératives.

M. Fontaine: ... membre du mouvement coopératif. En vertu de quoi, si un membre du mouvement coopératif décide volontairement d'y adhérer et, d'un autre côté, obligatoirement, d'une façon obligatoire, est membre de l'UPA, l'UPA pourrait-elle utiliser des fonds qui sont versés obligatoirement par le producteur membre de l'UPA, pour faire concurrence à la coopérative, si le producteur appartient aux deux? Je voudrais bien qu'il y ait quelqu'un qui m'explique en vertu de quoi cela serait permis. (11 h 30)

II ne faut pas oublier que l'article 2 du chapitre 36 défend cela. La régie le dit. Il serait peut-être important que les membres du Mouvement coopératif viennent nous expliquer pourquoi ils sont contre cette affaire-là. C'est important. Il serait peut-être également important que le mouvement syndical vienne nous expliquer pourquoi il a fait cela. On est en droit de se poser des questions actuellement. Je ne pense pas que le ministre y ait répondu, même si on lui a posé des questions en Chambre là-dessus.

M. le Président, je pense que ma motion est bien fondée. On aura beau dire, du côté du Parti québécois et du gouvernement, que c'est une motion dilatoire qui veut faire retarder les travaux, je pense que c'est beaucoup plus sérieux qu'on ne le pense de l'autre côté. J'espère que les députés qui auront à prendre le vote — je ne suis qu'un intervenant à cette commission et je n'ai pas droit de vote — tant du parti ministériel que du Parti libéral — je pense que j'aurai certainement l'appui du député de Beauce-Sud — vont bien tenir compte du fait qu'il existe présentement un conflit entre ces deux mouvements qui sont d'égale importance pour les producteurs et qu'il est important aujourd'hui de désamorcer le plus pos-

sible ce débat par une commission parlementaire où les gens pourront venir s'exprimer librement, où ils pourront donner leur opinion et, à la suite de cela, les producteurs qui sont à la base pourront eux aussi se faire une opinion quant aux objectifs qui sont prônés par le projet de loi 116 et décider s'ils donneront leur appui à ce projet de loi. En même temps, les députés, tant de l'Opposition que du gouvernement, pourront véritablement prendre une décision en toute connaissance de cause. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, M. le Président. S'il y avait une motion sur la table ce matin pour abolir l'Opposition, j'ai bien l'impression que tous les députés du côté ministériel s'empresseraient de l'appuyer.

Non, je suis heureux de l'entendre dire, parce que j'ai l'impression que le travail que font les députés de l'Opposition pour essayer d'avoir plus d'éclairage, plus de lumière pour l'étude sérieuse d'un projet de loi sérieux — il faut le dire, c'est un projet de loi sérieux — est considéré comme une perte de temps. Les députés se font accuser de tous les péchés d'Israël par le fait justement qu'ils osent, que nous osons intervenir.

On a dit que la motion était dilatoire; toute motion est dilatoire. Toutes les motions présentées ont une forme dilatoire, parce que les motions provoquent toujours un débat. Il est évident que, s'il n'y avait qu'une seule formation politique, une dictature, il n'y aurait pas de débats. On sait ce qui se passe dans certains de ces pays.

On a également dit tout à l'heure qu'on viendrait dire, si on invitait les gens de la Coopérative fédérée et d'autres devant la commission parlementaire, devant cette même commission, ce que le ministre sait déjà. Ce que le ministre sait actuellement, c'est une chose. Cela n'a rien à voir avec la commission comme telle. Que le ministre ait eu des rencontres dans son bureau avec trente personnes — comme il l'a dit lui-même, son bureau n'est pas assez grand pour en recevoir plus — c'est le travail et la responsabilité du ministre, il se devait de le faire. Mais l'éclairage que doit avoir le ministre lors de la présentation d'un projet de loi, les discussions qui doivent avoir lieu préalablement, avant qu'un projet de loi ne soit rédigé, cela fait partie du devoir et de la responsabilité du ministre.

Le rôle de la commission parlementaire, ce n'est pas d'être des "yes men" à ce que le ministre propose. Le rôle de la commission parlementaire, d'une commission parlementaire qui veut agir de façon responsable, qui veut prendre son rôle au sérieux, est justement de faire en sorte que soit divulgué devant cette même commission parlementaire ce que le gouvernement a comme objectif, et il est de la responsabilité de la commission parlementaire de demander, lorsque c'est nécessaire et lorsque l'intérêt public le commande, de pouvoir obtenir de l'éclairage. Ce qui est important, ce n'est pas ce que le ministre sait jusqu'à maintenant; ce qui est important, c'est ce que la commission parlementaire doit savoir, puisque nous sommes ici à la séance de la commission parlementaire. Le rôle de la commission parlementaire n'est pas tout simplement d'approuver et d'appuyer inconditionnellement ce qui peut être proposé du côté ministériel, du côté gouvernemental.

Je ne dis pas cela à l'endroit d'une formation politique plus qu'à l'endroit d'une autre, c'est une question de principe qui a toujours prévalu et sur laquelle nous avons eu souventefois l'occasion d'intervenir et de nous prononcer. Comme le ministre le dira peut-être tout à l'heure, le député de Beauce-Sud vient de dire ce qu'il a déjà dit. Oui, mais le ministre devrait peut-être ajouter que ce que le député de Beauce-Sud dit aujourd'hui, ce sont des choses que le députés du Parti québécois disaient lorsqu'ils étaient dans l'Opposition. Le chef de l'Union Nationale en a cité de larges extraits tout à l'heure et j'ai bien dit que je pourrais bien, moi aussi, scruter le journal des Débats.

J'en aurais long à dire, je n'en aurais pas assez de mes vingt minutes pour être capable d'énumérer seulement les dates, les occasions au cours desquelles les députés du Parti québécois, au moment où nous siégions ensemble, dans l'Opposition, ont dû intervenir pour réclamer ce que nous réclamons ce matin. Il serait très intéressant, très important, si on veut avancer et déboucher vers quelque chose de sérieux. J'ai bien l'impression, seulement à regarder de quelle façon le ministre semble préoccupé par nos propos, semble vouloir en tenir compte, on ne se fait pas d'illusion de ce côté-ci de la table, que le ministre ne semble pas tellement intéressé par les propos qu'on peut tenir. Son lit est fait, il a peut-être un certificat d'infaillibilité, je ne le sais pas. Pour ce qui me concerne, je n'ai pas mon certificat d'infaillibilité.

La Coopérative fédérée a écrit dans son mémoire que contrairement aux dispositions de l'article 2 proposé dans le projet de loi, il ne s'agit plus d'un pouvoir de réglementation de la production agricole. C'est la Fédérée qui a écrit cela. Il s'agit du pouvoir d'attribuer la production à qui l'office veut bien et la retirer à qui il veut bien également. C'est cela qui est dans le mémoire de la Coopérative fédérée. Un pouvoir de prohibition n'est pas un pouvoir de réglementation. C'est ce que nous disons.

Pour ce qui me concerne, j'aimerais bien savoir de la part des gens de la Fédérée, qu'ils viennent nous le dire en commission parlementaire, ce que cela peut représenter de risques pour l'avenir du Mouvement coopératif et l'avenir de certaines coopératives. Personne ne peut ignorer — j'aimerais poser des questions à la Fédérée — quelles seraient les conséquences, par exemple, si dans une coopérative qui couvre un secteur, un territoire déterminé, une coopérative qui a 250 ou 300 membres et dont 25 de ses membres perdent leur quota, et qui sont obligés de quitter l'agriculture à cause de toutes les restrictions et de toutes

ces réglementations qui découlent de l'application d'une loi trop rigide, et que ces quotas sont transférés dans un autre territoire. Il ne faut pas oublier que cela met en jeu la survie même, la rentabilité même de la coopérative. Pour les agriculteurs qui continuent, qui sont propriétaires de cette coopérative, qui continuent d'y participer, qui continuent d'envoyer leurs produits, de faire affaires avec leur coopérative, ce sont eux qui devront assumer les pertes, les risques qui découleront d'une telle situation. Le débat est beaucoup plus grave et beaucoup plus sérieux qu'on ne le pense. Il a des implications extrêmement grandes. Je m'étonne du peu de sérieux avec lequel on accueille du côté gouvernemental les propos, les réserves et les demandes de l'Opposition. Les demandes que nous faisons, ce matin, au nom de personnes, au nom de mouvements, au nom d'organismes, au nom de coopératives, ces questions sont posées actuellement dans le territoire du Québec, elles se posent dans les régions, dans les coopératives. Elles y sont posées. Si on n'y répond pas en commission parlementaire, ces questions vont continuer à se poser dans les régions, dans les coopératives. Il n'y aura rien de réglé.

C'est la raison pour laquelle devant un débat aussi fondamental et aussi sérieux, et comme je le disais hier, un débat qui suscite autant de discussions, autant d'inquiétudes chez la classe agricole elle-même, qui suscite autant de controverses dans le milieu agricole, devrait nous faire réfléchir à cette commission parlementaire, très sérieusement. Jamais un projet de loi concernant la classe agricole n'a suscité autant de questions, autant d'inquiétudes et de doutes, voire d'opposition dans les milieux mêmes de l'agriculture. Au lieu de faire avancer un dossier dans la bonne direction, j'ai l'impression qu'on cherche sans le vouloir, parce qu'on a décidé, on a pris une décision tout simplement d'aller là, quoi qu'en disent et quoi qu'en pensent les députés de l'Opposition. On a décidé d'aller là. Alors, au lieu de chercher des formules qui permettraient de construire des ponts pour tâcher de rapprocher les parties, pour tâcher de rétablir l'harmonie dans le milieu agricole, on apporte des projets de loi qui risquent d'élargir les fossés déjà en place. On n'aura rien réglé et on va se retrouver avec des problèmes extrêmement sérieux. Ce sont les agriculteurs du Québec qui en assumeront les frais d'une manière ou d'une autre, il ne faut pas oublier cela; ce sont les agriculteurs du Québec qui en assumeront les frais, ce ne seront pas les autres.

Quand le mémoire dit: "II va de soi que ces dispositions permettraient de porter un coup de mort aux coopératives...", ce n'est pas le député de Beauce-Sud qui a écrit ça, ce n'est pas le député de Nicolet-Yamaska qui a dit ça, ce n'est pas le chef de l'Union Nationale qui a dit ça, c'est dans le mémoire de la Coopérative fédérée. "Il va de soi que ces dispositions permettraient de porter un coup de mort aux coopératives." Le mouvement coopératif est un mouvement trop sérieux pour qu'il se permette d'écrire de telles choses, s'il n'y avait pas anguille sous roche, s'il n'y avait pas des inquiétudes quelque part. Ne pas admettre ou déclarer tout simplement que les coopératives ont écrit une petite opinion qu'elles ont décidé d'émettre tout bonnement, ce serait dire que les gens du milieu coopératif ne sont pas des gens sérieux. Quand on écrit, dans un tel mémoire: "II va de soi que ces dispositions permettraient de porter un coup de mort aux coopératives," je pense que c'est notre devoir de nous poser de sérieuses questions et de faire en sorte que nous puissions en connaître davantage quand nous serons appelés à étudier le projet de loi article par article.

M. le Président, si ce n'était pas de prolonger le débat, j'apporterais un amendement à la motion du député de Nicolet-Yamaska pour qu'on fasse en sorte, non pas d'inviter seulement les gens de la coopérative, mais qu'on invite les représentants des différents organismes concernés par le projet de loi qui désirent se faire entendre par la commission parlementaire. Je ne ferai pas d'amendement, parce que si on ne permet même pas aux gens de la coopérative de venir se faire entendre devant la commission parlementaire si c'est leur désir, je pense qu'on ne permettra pas plus aux autres de le faire. Je ne veux pas présumer de la décision qui sera prise, mais, en ce qui me concerne, je me dois d'appuyer sérieusement et sincèrement la motion de mon collègue, le député de Nicolet-Yamaska, pour tâcher que la commission parlementaire, les députés des deux côtés de cette table aient le maximum d'éclairage.

Je comprends que, du côté ministériel, on puisse se fier au ministre et dire: Le ministre l'a dit, nous faisons confiance à notre ministre. C'est beau d'avoir confiance, mais ce que le ministre sait actuellement, c'est une chose, ce que le ministre sait, il ne l'a pas tout dit. Le ministre s'est gardé bien des choses qu'il n'a pas communiquées à la commission parlementaire, qu'il n'a pas communiquées à l'Assemblée nationale à ce moment-ci et la commission parlementaire se doit d'être éclairée, la commission parlementaire se doit d'être en mesure de faire une évaluation sérieuse et objective du dossier, des implications qui découleront de l'application de la loi no 116.

M. le Président, ce n'est pas simplement pour faire du placotage que nous disons ces choses et je tiens à dire au ministre, à l'heure actuelle, que s'il continue dans la voie qu'il semble s'être tracée envers et contre tous, il va se retrouver avec des problèmes aussi graves et aussi sérieux que ceux qu'on retrouve actuellement dans d'autres secteurs d'activités économiques, notamment dans le secteur de la construction. On légifère à la pièce, sans jamais vouloir prendre la peine et le temps d'examiner le dossier dans son ensemble pour en faire un examen complet, un examen objectif pour faire en sorte que lorsque nous serons appelés à prendre des décisions sur le plan législatif, lorsque des lois seront proposées, qu'on puisse y aller de façon que, justement, on puisse apporter des améliorations, apporter des corrections dans le secteur.

Nous ne sommes pas ici pour nous amuser, nous sommes ici pour travailler et je pense que l'Opposition a un rôle à jouer à ce moment-ci et le rôle de l'Opposition est en quelque sorte d'être un chien de garde et de poser des balises. On a bien critiqué lorsqu'on a discuté la Loi sur l'assurance automobile: L'Opposition fait perdre le temps de la commission parlementaire, l'Opposition fait perdre le temps de la Chambre et cela coûte cher, mais ce que l'Opposition a dit a provoqué des amendements dans la loi, cela a permis de poser des balises quant à l'application de la loi elle-même et cela a permis, effectivement, de faire en sorte que dans la réglementation qui découlait de l'application de la loi, j'ai été en mesure de me rendre compte que bien des recommandations, qui avaient paru bien superflues de la part des députés de l'Opposition à cette époque, avaient été retenues. On retrouve ces mêmes recommandations dans la réglementation. C'est un exemple que je prends, je ne veux pas rouvrir le débat sur l'assurance automobile, mais c'est bien démontré que, malgré toutes les accusations qui ont été faites à l'endroit de l'Opposition de perte de temps, de motions dilatoires, de "filibuster", etc., tout a été dit à l'endroit des députés de l'Opposition, c'étaient des mauvais. (11 h 45)

M. Garon: C'était censé être un désastre.

M. Roy: Oui, mais cela a évité de faire un désastre.

M. Garon: Oh, oh!

M. Roy: Comme je viens de le dire, je ne voudrais pas — parce que vous pourriez me rappeler à l'ordre — discuter de toute cette question. Bien des recommandations ont été faites et on les retrouve dans la réglementation qui découle de l'application de la loi parce que le travail qui a été fait du côté de l'Opposition n'a pas été une perte de temps, cela a permis d'apporter un point de vue différent, cela a permis d'apporter un éclairage nouveau, cela a permis de poser — ce que le premier ministre dit souvent — des balises dans l'application de la loi; c'est la même chose pour la loi 116. Si la contestation ne se fait pas ici à l'Assemblée nationale et si les différents points de vue des différents groupes ne sont pas entendus à cette commission parlementaire, comme le disait le chef de l'Union Nationale ce matin, c'est dans la rue que cela se fera.

Il n'y a pas tellement longtemps au Québec, alors que nous n'étions que huit députés dans l'Opposition, il n'y avait pas une seule semaine où il n'y avait pas de manifestation devant le parlement. Pourquoi? Parce que les huit députés de l'Opposition ne suffisaient pas à la tâche pour représenter les différents courants d'opinion qu'il y avait chez la population du Québec. Toutes les semaines, le parlement était entouré de barricades pour empêcher les gens de les traverser parce qu'il y avait de la contestation partout. Pourquoi y avait-il de la contestation? Parce que les gens avaient l'impression de ne pas être compris ou d'être mal compris, parce que huit députés seulement à l'Opposition ne suffisaient pas à la tâche. Aujourd'hui, il y a plus de députés à l'Opposition, qu'on cesse de les considérer comme des mauvais.

On veut travailler sur ce projet de loi pour tâcher qu'il tienne compte de la réalité du monde agricole, et qu'on ne légifère pas en fonction de la conception de certains principes que certains idéalistes veulent promouvoir, mais qu'on légifère en fonction de la réalité agricole, de la réalité rurale québécoise, ce qu'on semble oublier, et, compte tenu des propos que je viens de tenir, inutile de vous dire que vous aurez sûrement deviné que je vais appuyer la motion de mon collègue de Nicolet-Yamaska.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Lotbinière.

M. Garon: Vous voulez intervenir après? Allez-y.

M. Biron: Non, c'est juste pour savoir... si vous dites: Oui, je suis prêt à les entendre, on n'aura peut-être pas besoin d'intervenir. Sinon, je vais essayer d'apporter d'autres arguments pour convaincre le ministre et le Parti québécois d'accepter la motion du député de Nicolet-Yamaska et d'inviter les représentants de la Coopérative fédérée et les représentants des coopératives qui voudraient se faire entendre en commission parlementaire justement pour savoir ce que ces représentants de coopératives, les dirigeants des coopérateurs agricoles au Québec, ont à dire sur le projet de loi 116.

Bien sûr, tout à l'heure on a entendu le député de Joliette-Montcalm qui disait: Le ministre le sait, il les a rencontrés et il sait ce que c'est. Mais la population du Québec ne le sait pas, la population agricole du Québec ne le sait pas. Même si le ministre nous dit: Tout est réglé, il n'y a pas de problème, les affrontements majeurs continuent à l'heure actuelle dans le domaine agricole au Québec, les affrontements entre ces deux géants qui sont le syndicalisme agricole et les coopératives agricoles, et on a besoin des deux au Québec, on a besoin de les sauvegarder tous les deux au Québec et on a besoin d'arrêter ces affrontements une fois pour toutes pour sauvegarder l'économie agricole au Québec.

Vous voulez savoir où l'Union Nationale se branche là-dedans, parce que le député de Joliette-Montcalm l'a dit tout à l'heure. Nous sommes d'accord pour des plans conjoints, on est d'accord pour l'UPA, on est d'accord avec la coopérative agricole au Québec, mais on veut que chacun puisse s'exprimer devant cette commission parlementaire et nous dise ce qu'il a dans le ventre. C'est fini de faire des affaires en cachette. Cela fait assez longtemps que le Parti québécois a reproché à l'ancien gouvernement d'avoir fait des affaires en cachette. Le premier ministre lui-même, lors d'un de ses premiers discours, sinon le premier, à l'Assemblée nationale, nous a dit: Nous

aurons un gouvernement transparent. Ce qu'on fait actuellement dans le domaine de l'agriculture, on le fait derrière des portes closes et on veut cacher la vérité à la population du Québec et spécialement aux producteurs agricoles.

L'Union Nationale veut prendre la défense des producteurs agricoles au Québec et savoir véritablement pour eux ce qui se passe, ce qui se trame à travers leurs coopératives et leurs syndicats. L'Union Nationale veut forcer le ministre à entendre publiquement les deux parties à la barre de la commission parlementaire et qu'on les aide à résoudre leurs problèmes. C'est pour cela que le député de Nicolet-Yamaska a proposé cette motion, pour entendre les représentants des coopératives et, bien sûr, dans sa grande générosité, je sais que le ministre, tout à l'heure, va proposer un amendement en disant: On va aussi entendre les représentants de l'UPA et des fédérations de producteurs et on va entendre tous ces gens.

Je sais d'avance ce que va faire le ministre, mais, s'il le fait, bien sûr, je vais voter en faveur de sa motion d'amendement parce que c'est important qu'on entende les deux parties. Mais je pense que, pour aller selon le règlement, le député de Nicolet-Yamaska a voulu être très clair dans sa première motion et montrer que nous voulions faire la lumière sur cet affrontement qu'il y a dans le milieu agricole au Québec. Le pire, c'est que ce sont les producteurs agricoles qui paient pour cet affrontement, d'une part, et ce sont les consommateurs, tous les Québécois, qui paient pour cet affrontement, d'autre part.

Le producteur agricole, à l'heure actuelle, finance sa coopérative pour entrer en concurrence avec son syndicat et il finance son syndicat pour entrer en concurrence avec sa coopérative. Il y en a un des deux, quelque part, qui va manger des coups et les coups vont être payés finalement par qui? Pas par le gouvernement du Québec. Le gouvernement du Québec, c'est tout le monde, mais par le consommateur à l'autre bout et par le producteur agricole. Le producteur agricole est tanné de payer pour tout cela et il voudrait que cela se règle et qu'on arrête de se chicaner. J'ai dit, à l'Assemblée nationale hier, en deuxième lecture, que cela va faire vivre des avocats. Je ne suis pas avocat et je ne suis pas intéressé à faire vivre des avocats. Je suis intéressé à faire vivre les producteurs agricoles. Je suis intéressé à ce que le consommateur ne paie pas trop cher pour ses produits. Je suis intéressé à ce qu'on s'entende dans l'UPA et qu'on s'entende dans les coopératives et qu'on arrête de se chicaner.

L'Union Nationale est en faveur de l'UPA, est en faveur des coopératives, mais on veut que ces mouvements s'entendent et on veut les sauvegarder tous les deux. Justement, le ministre de l'Agriculture, en prenant position carrément avec sa loi 116 pour une partie plutôt que pour l'autre, veut détruire l'autre. C'est pour cela que l'Union Nationale voudrait entendre les coopératives agricoles et savoir justement ce qu'elles ont à dire, les interroger publiquement au lieu de les interroger dans le secret, savoir publiquement pourquoi elles ont écrit le mémoire et le mémoire est très dur envers la loi 116, le mémoire de la Coopérative fédérée est très dur envers la loi 116. Qu'est-ce qui est arrivé pour que ces gens changent d'opinion complètement, s'ils ont changé d'opinion? Je prétends qu'ils n'ont pas changé d'opinion. Qu'est-ce qu'on a fait derrière ces portes closes? Nous voudrions le savoir et les producteurs agricoles ont le droit de savoir ce qu'on a fait derrière les portes closes, et la population du Québec aussi. Tout le public a le droit de savoir. Ce n'est pas assez de dire, comme le député de Joliette-Montcalm tout à l'heure: Le ministre le sait. Il faut que la population du Québec le sache. Il faut que les producteurs agricoles le sachent une fois pour toutes. C'est pour cela que l'Union Nationale à l'heure actuelle, M. le Président, propose cette motion par la voix du député de Nicolet-Yamaska.

Lorsque le ministre nous dit: Tout est réglé, tout est calme maintenant, tout est calme depuis le 18 décembre ou quelque chose comme cela, là-dessus, je ne suis pas d'accord avec lui parce que ce n'est pas calme. Les coopératives, à l'heure actuelle, posent des gestes très clairs en réponse à des gestes qui ont été posés par le syndicalisme agricole et la loi 116 ne fera qu'envenimer ces gestes qui ont été posés. Tout dernièrement, on faisait état, à l'Assemblée nationale justement, d'une décision de la Coopérative agricole de Granby qui est une filiale de la Coopérative fédérée qu'on veut faire entendre ici. C'est pour cela qu'on veut voir ces gens, les entendre, parce que c'est relié directement au projet de loi 116, cette décision, la décision de l'assemblée générale du 25 janvier. La coopérative doit cesser la retenue des $0.025 pour les plans conjoints administrés par la Fédération des producteurs de lait industriel. Le plan conjoint, c'est de cela qu'on discute justement dans la loi 116, c'est ce qu'on veut essayer de sauvegarder et d'aider un peu et, pendant que nous travaillons pour sauvegarder cela, les coopératives agricoles disent: Nous voulons jeter par terre ce plan conjoint.

Il y a certainement des raisons quelque part. Si le ministre sait la vérité, il ne l'a pas dite aux députés du Parti québécois. Il y a des agriculteurs ici à la table en face de moi. Je ne sais pas s'ils savent toute la vérité là-dessus. Je vais leur dire ce que la coopérative dit là-dessus.

Le mémoire présenté à la régie à l'occasion de l'étude sur le problème des plans conjoints, dont chacun de vous a reçu un exemplaire, est assez clair à ce sujet. Citons-en deux extraits comme exemples. Les coopératives administreront désormais elles-mêmes pour leurs sociétaires et autres fournisseurs un plan conjoint taillé sur mesure qui sera en tout point conforme à la lettre et à l'esprit de la loi. Je me demande ce qu'on fait maintenant avec le projet de loi 116, si ce n'est pas jouer un peu là-dedans aussi. Et qui sera vraiment un moyen supplétif. Là, on retrouve l'article 1 du projet de loi 116 et c'est pour cela qu'on veut voir les coopératives, pour savoir ce qu'elles ont à dire sur cet article 1 qui change l'article 2 du chapitre 36. Un moyen supplétif ou, si l'on veut, un moyen

complémentaire de mise en marché plutôt qu'une source de conflits de toutes sortes. Les droits des producteurs qui ne sont pas constitués en association coopérative et les droits des entreprises, l'acheteur de lait, ne sont pas plus grands ni plus importants que ceux des producteurs sociétaires des coopératives et des coopératives qu'ils ont formées.

Un peu plus loin, la coopérative continue et dit ceci: L'assemblée générale n'a pu accepter non plus la façon dont la Fédération des producteurs de lait industriel a traité et continue de traiter les producteurs de lait industriel membres de coopératives en très grande majorité, en voulant mettre sur pied, de concert avec l'autre Fédération des producteurs de lait nature, une agence de commercialisation qui nie d'un bout à l'autre le statut particulier de propriétaires usagers des coopérateurs.

Je voudrais savoir ce que les coopératives ont à dire là-dessus. Il est inconcevable que seule la philosophie syndicale de la mise en marché, philosophie basée essentiellement sur la négociation entre acheteurs et vendeurs, soit uniquement celle retenue par la loi, alors qu'un groupe important de producteurs ont dépassé cette étape en étant sociétaires de coopératives produisant, transformant et vendant alors eux-mêmes leurs produits le plus près possible du consommateur.

La coopérative continue en disant ceci: Ceux qui se sentent à l'aise dans les structures actuelles de la mise en marché — n'est-ce pas ce qu'on étudie, la Loi de la mise en marché? — pourront toujours continuer à verser eux-mêmes directement leur contribution à la Fédération des producteurs de lait industriel. Une chose est certaine, cependant, la coopérative ne fera plus cette retenue sur les payes de lait à compter des livraisons du 1er février 1979 suite à la décision de l'assemblée générale.

Si le ministre me dit que l'escalade est terminée et que les coopératives ont dit que tout est correct dans le projet de loi 116, on a une preuve qui est datée de février 1979, cela ne fait pas longtemps, que les coopératives ne sont pas d'accord avec le fond du projet de loi 116, parce qu'il pose des gestes justement contraires à ce que vous voulez présenter comme projet de loi à l'heure actuelle.

C'est pour cette raison, M. le Président, qu'il faut absolument faire venir les intéressés. Qu'on fasse venir les coopératives agricoles et que le ministre soit assez généreux — je vais appuyer son amendement — pour proposer un amendement. Faites venir le syndicalisme agricole à la barre et on va les interroger publiquement. On prendra un, deux ou trois jours; ce ne sera pas grave; on va passer au travers, et la population des producteurs agricoles va savoir la vérité une fois pour toutes sur ce qui se passe dans leurs affaires. Ce n'est pas grave passer quelques jours... Je sais qu'il y en a qui veulent aller en vacances et partir. Mais je pense que le devoir d'un député, c'est d'être député à l'Assemblée nationale et prendre le temps qu'il faut pour étudier les lois convenable- ment et donner satisfaction à ceux à qui les lois s'appliquent. Or, cette loi 116 s'applique aux producteurs agricoles, aux coopératives agricoles, au syndicalisme agricole. Il faudrait au moins donner confiance à ces gens et leur donner satisfaction.

Lorsqu'on voit de tels gestes, M. le Président, on n'a qu'une seule chose à faire, c'est de s'ouvrir les yeux et faire venir les représentants des coopératives agricoles et du syndicalisme agricole et de leur demander franchement, dans les yeux, de dire à toute la population et de dire aux médias d'information et à tous les producteurs agricoles au Québec ce qui se passe.

Plus que cela, même, M. le Président, la coopérative prend une deuxième décision encore contraire à l'esprit de la loi 116 ou du chapitre 36 que la loi 116 va compléter et c'est celle-ci: La retenue pour la publicité continue. Tous les producteurs sont conscients de l'importance de continuer à faire de la publicité sur une base nationale par le Bureau canadien des producteurs de lait. Aussi, la coopérative continuera à percevoir de ses membres $0.05 les 100 livres de lait pour la publicité, mais elle percevra dorénavant ces montants directement au Bureau canadien des produits du lait sans passer par la Fédération des producteurs de lait industriel au Québec.

C'est dire que la coopérative n'a pas confiance en la Fédération des producteurs de lait industriel du Québec. Pourtant, ce sont deux organismes qui sont au service du producteur agricole du Québec et deux organismes qui sont, à l'heure actuelle, en grande compétition. Le ministre va arrêter de charrier en disant que les coopératives ont tout compris, que c'est facile et que c'est bien entendu. Je voudrais les entendre à la barre ici, les coopératives, et non le 19 ou le 20 ou le 21 décembre, je voudrais les faire venir depuis la décision qu'elles ont prise le 1er février 1979. Je voudrais faire venir les coopératives et savoir exactement ce qui se passe.

Vous savez, M. le minitre, si on adopte la loi 116 telle que vous la présentez à l'heure actuelle, les coopératives ne marcheront pas dans la loi 116 et ce sera encore l'escalade et l'affrontement et le producteur agricole va payer. Il va payer un gros coût et, en même temps, le consommateur aussi. C'est pourquoi, M. le Président, l'Union Nationale voudrait absolument faire venir les coopératives agricoles; on va faire venir aussi le syndicalisme agricole et on va essayer de leur aider à régler les problèmes. Seulement le fait de le dire au grand public, de le dire à des députés, va peut-être automatiquement leur aider à régler leurs problèmes, mais il va falloir qu'ils les expriment quelque part.

Je ne sais pas si les députés du Parti québécois ont véritablement lu d'un bout à l'autre tous les documents qui concernent cela, l'ordonnance de la Régie des marchés agricoles datée du 18 octobre 1978; je vous conseille de la lire d'un bout à l'autre; je vous conseille de lire le mémoire déposé par la Coopérative fédérée de Québec le 18 décembre 1978. Si vous n'en avez pas de copie,

si le ministre ne veut pas vous en donner une copie, venez me voir, je vais vous en donner une. Cela va vous éclairer pour que vous puissiez savoir véritablement ce qui se passe dans le domaine agricole, dans le domaine du coopératisme agricole et dans le domaine du syndicalisme agricole.

M. le Président, je pense que c'est faux de dire que les coopératives sont d'accord et qu'elles ne feront pas de problèmes là-dessus. Il y a des gestes qui ont été posés depuis la réunion du 18 ou du 19 décembre qui sont justement contraires à ce que le ministre vient de nous dire, qui sont justement en réaction d'une décision que le ministre lui-même a prise, par exemple pour provoquer les coopératives — une décision de prêter $900 000 à une coopérative fantôme pour concurrencer les coopératives agricoles du Québec. C'est une décision pour provoquer les coopératives. (12 heures)

La réaction, on l'a eue tout de suite après. Vous n'avez pas besoin de courir après. L'escalade est en marche à l'heure actuelle, M. le ministre. Moi, je voudrais tellement aider le ministre dans le problème agricole, je voudrais tellement l'aider à solutionner ces problèmes, parce que, autrement, on s'en va véritablement vers un fiasco dans le domaine agricole, un affrontement extraordinaire qui peut, à la longue, détruire, soit les coopératives agricoles, soit le syndicalisme agricole tel qu'on le connaît aujourd'hui.

Et il ne faudrait pas cela. Si vous ne voulez pas cela, acceptez la motion du député de Nicolet-Yamaska. Faisons venir les gars des coopératives et les gars de l'UPA et on va leur parler, on va les questionner, on va savoir quelque chose. Le fait de parler à la barre de l'Assemblée nationale, à la barre d'une commission parlementaire, ils vont peut-être s'entendre.

Je vous donne un exemple. Le ministre du Travail, M. Johnson, a été assez intelligent pour faire venir les parties à une commission parlementaire sur la Commonwealth Plywood. Vous vous souvenez de cela. Cela ne se réglait pas, cela se tirait des coups de fusil, c'était épouvantable. Qu'a fait le ministre du Travail? Il a dit: On va les faire venir à la barre, on va les questionner. Cela ne réglera peut-être pas le problème, mais au moins, on va les questionner, on va les forcer à se parler dans les yeux. Je le sais, il me l'a dit personnellement, le ministre du Travail. Il a dit: Je ne suis pas sûr de régler le problème, mais au moins, on va les forcer à se parler. Ces gars-là ne se parlent pas à l'heure actuelle et ils s'affrontent. On va les forcer à se parler. Il les a fait venir à la barre et deux ou trois semaines après, quatre semaines après... Je ne sais pas si mon excellent ami, le député de Joliette-Montcalm est intervenu dans ce dossier, oui, il est intervenu. Finalement, cela s'est réglé. Cela s'est réglé pourquoi? Parce qu'il y a eu un ministre qui a eu assez de "guts", assez de courage et assez de cran pour les faire venir à la barre et leur faire dire ce qu'il y avait. Cela a fait dur, cela a fait dur, ceux qui ont participé à cette commission parlementaire me l'ont dit, cela a fait vraiment dur, l'affrontement qu'il y a eu là. Mais cela leur a permis de se rencontrer, de se parler. Aujourd'hui, les problèmes sont passablement soulagés et cela fonctionne bien là-bas.

C'est exactement cela que je voudrais faire, les faire venir ici et qu'on s'entende. La Régie des marchés agricoles leur a dit, à la coopérative et aux producteurs agricoles, aux fédérations de producteurs: Vous allez former un comité de sept personnes pour vous rencontrer et régler vos problèmes. Quand est-ce que ce comité s'est rencontré? Ils ne se sont pas encore rencontrés, d'après les informations que j'ai eues. Je pense bien que ce serait important de faire quelque chose et si on les laisse faire comme cela, si on les laisse aller dans le champ — c'est le cas de le dire, pour l'agriculture, si on les laisse aller dans le champ — on ne les réglera pas, les problèmes.

M. le ministre, ce n'est pas pour mettre le Parti québécois en boîte, ce n'est pas pour mettre le gouvernement en boîte que l'Union Nationale agit ainsi. Nous avons des députés de comtés agricoles, il y a dix députés de comtés agricoles et on écoute nos gens. Nos gens ne voudraient pas de chicane entre leur coopérative et leur syndicat. Ils ne peuvent plus rien faire. Ils sont à la base et la chicane est prise en haut. Vous le savez comme moi, ce sont deux géants et c'est bien gros. C'est compliqué, vous l'avez dit vous-même. L'Union Nationale veut nous aider. Acceptez donc de faire venir ces deux parties, les coopératives et le syndicalisme agricole. On va les aider à se parler dans la face. Ils s'engueuleront, ce n'est pas grave. Ils vont s'engueuler devant tout le monde. On va savoir le fond du problème, on va savoir ce qu'ils ont dans le ventre. Et une fois que cela va être dit, je suis sûr, M. le ministre, que vous allez réussir à régler cela. Cela va être un fleuron à votre chapeau de ministre. Je le reconnaîtrai, si vous faites quelque chose, et je vais vous le dire le premier.

Mais ce que je veux, à l'heure actuelle — je l'ai dit et je le répète encore une fois, pour que vous en soyez sûr — ce n'est pas de vous mettre en boîte pour rien, mais c'est de régler les problèmes agricoles. 38% des gens de Lotbinière sont des producteurs agricoles ou des familles de producteurs agricoles. C'est important pour moi, dans mon comté. Les coopératives, c'est important. Les gars tiennent à leurs coopératives et ne veulent pas les détruire. Les gars tiennent à leur syndicat agricole, ils ne veulent pas le détruire. Mais c'est notre responsabilité à nous autres, vous, moi, les députés du Parti québécois, les députés du Parti libéral, le député de Beauce-Sud. C'est notre responsabilité à nous autres, lorsque ces enfants qui sont nés d'un gouvernement du Québec ne peuvent pas s'entendre et qu'ils se chicanent, de rassembler les enfants dans une même chambre et dire: Les enfants, vous allez vous parler. Vous allez vous parler, vous allez faire quelque chose et on va essayer de s'entendre. C'est cela, la motion du député de Nicolet-Yamaska.

M. Garon: Les géants viennent de rapetisser, ce sont des enfants maintenant.

M. Biron: Ce sont les enfants des provinces. Mais au point de vue économique, ce sont des géants. M. le ministre, je ne voudrais pas que vous fassiez le bouffon dans cette histoire. Je voudrais, au contraire, que vous fassiez le ministre sérieux qui veut régler des problèmes, pas le ministre qui veut se cacher derrière des paravents. Faites-les donc venir, les coopératives et le syndicalisme agricole. Avez-vous peur qu'ils disent quelque chose qui ne fasse pas l'affaire de votre parti politique? C'est une autre affaire. Mais si vous n'avez pas peur, faites-les venir et on va discuter, on va montrer à toute la population du Québec, on va montrer véritablement aux agriculteurs ce qui se passe chez eux et ils vont le savoir. On va sauver ensemble, à la fois le syndicalisme agricole, à la fois les coopératives agricoles et les producteurs agricoles. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Le député d'Arthabaska.

M. Baril: M. le Président, je trouve un peu effrayant de voir comment, depuis la semaine dernière, certains députés de l'Opposition essaient de défendre la classe agricole et lapident les organisations agricoles, soit les coopératives ou le syndicalisme agricole. C'est un peu effrayant de voir surtout que toute l'argumentation est faite à partir d'un mémoire qui a été présenté par la Coopérative fédérée au ministre de l'Agriculture, avant les Fêtes — je crois que ce mémoire avait été présenté le 16 décembre — et qu'on se base encore sur ce mémoire pour essayer d'argumenter. Ce même mémoire est tout à fait dépassé, puisque, même si le député de Lotbinière a fait mention de communiqués que chaque membre de la Coopérative de Granby a reçus ou reçoit toutes les semaines, dans un journal à nouvelles, en date du 8 février 1979, La Terre de Chez Nous, on peut lire — je comprends que l'Union Nationale ne semble plus croire au journal La Terre de Chez Nous, puisque c'est un journal agricole — "La Coopérative de Granby, conjointement avec la Coopérative fédérée, donnait son accord, dès le 21 décembre dernier, au projet de loi 116. C'est donc qu'elle accepte l'imposition de certains frais ou redevances effectués en rapport avec un produit commercialisé au Québec."

De plus, c'est facile de parcourir les campagnes avec un projet de loi sans avoir les amendements. Un certain monsieur a fait les commentaires d'un projet de loi dans la marge. On se base là-dessus et on dit aux cultivateurs qu'on rencontre: Tel article vise à réglementer la production, vise à faire disparaître l'Office de production de porcs...

M. Fontaine: Question de règlement.

M. Baril: Quand j'aurai fini, M. le député de Nicolet-Yamaska.

Le Président (M. Laplante): Sur quoi?

M. Fontaine: Le député d'Arthabaska, M. le Président, cite... Le Président (M. Laplante): L'article 96?

M. Fontaine: Non. Un instant! je vais expliquer ma question de règlement, s'il vous plaît. Le député d'Arthabaska cite un projet de loi qui a été imprimé par quelqu'un. Il dit que les amendements n'y sont pas inclus, alors que les amendements ont été déposés seulement hier soir.

Le Président (M. Laplante): Je vous coupe tout de suite. Vous pouvez invoquer l'article 96 à la fin du discours du député d'Arthabaska. M. le député d'Arthabaska.

M. Baril: C'est une autre fausseté que le député de Nicolet-Yamaska vient d'avancer, parce que le ministre de l'Agriculture a déposé les amendements en commission parlementaire.

M. Fontaine: Les amendements ont été déposés hier soir.

M. Baril: Les amendements ont été déposés en commission parlementaire sur la loi 90 et le député de Huntingdon était présent. C'était un accord entre les partis.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Nicolet-Yamaska, il vous reste deux minutes de votre temps. Si vous voulez les employer, vous les emploierez. Le député d'Arthabaska.

M. Baril: C'est lors d'un accord impliquant chaque parti que le ministre a déposé ces mêmes amendements en commission parlementaire sur la Loi sur la protection du territoire agricole.

M. Fontaine: C'est faux.

M. Baril: Que le député de Nicolet-Yamaska se pense ici devant un juge ou devant la cour, c'est son droit, c'est son affaire, mais je ne pense pas qu'il va dicter ou imposer son idée ou son impression à tous les membres de cette commission. Je l'ai laissé parler, qu'il me laisse parler, mais je vais quand même dire les faits tels qu'ils sont. Je vois le député de Montmagny-L'Islet, qui approuve mes propos, parce qu'il est au courant que cela a été déposé en commission parlementaire.

Si l'Union Nationale avait assisté aux assemblées tenues sur le projet de loi tel qu'amendé, elle se serait peut-être aperçu que les agriculteurs n'étaient pas des caves comme elle semble vouloir les traiter, parce qu'à l'entendre parler, tous les cultivateurs ne comprennent rien...

M. Fontaine: Si vous voulez avoir un débat, vous allez l'avoir, mais arrangez-vous pour dire des choses qui ont du bon sens.

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît, le député de Nicolet-Yamaska!

M. Baril: La preuve...

M. Biron: Parlez de la Société coopérative de Lotbinière.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Lotbinière, personne ne vous a dérangé.

M. Baril: Ce que je dis ici, je peux...

Le Président (M. Laplante): Chaque interlocuteur a parlé et il n'a pas été dérangé durant son discours.

M. Baril: ... les coopératives ici.

Le Président (M. Laplante): C'est là-dessus qu'il vient aussi.

M. Baril: Même si on faisait venir les coopératives ici, je vais vous lire un autre article, toujours du journal La Terre de Chez Nous. Je crois à ce journal. "Les producteurs informent Rodrigue Biron. Les producteurs du syndicat de Beaurivage et du centre de Lotbinière ont rencontré leur chef, leur député et chef de l'Union Nationale, Rodrigue Biron. Après avoir écouté les arguments de leur député, les producteurs, insatisfaits de la compréhension qu'il avait de la loi 116, ont tenté de faire comprendre à M. Biron la portée de ce projet de loi. Les agriculteurs espèrent qu'à la lumière des informations qu'il a reçues, leur député appuiera le projet de loi...

M. Fontaine: Question de règlement.

M. Baril: ... pour montrer qu'il veut améliorer le sort des producteurs québécois...

Le Président (M. Laplante): Question de règlement.

M. Fontaine: M. le Président, ma motion va dans le sens de demander la venue à cette commission parlementaire du mouvement coopératif... Je ne pense pas... M. le Président, je pense que vous avez bien écouté les paroles du député d'Arthasbaka. Il ne parle absolument pas sur la motion. Je vous demanderais bien humblement de le rappeler à la pertinence du débat.

Le Président (M. Laplante): J'ai très bien compris les proposdu député d'Arthabaska. Il plaide pour que les gens ne puissent pas venir ici, qu'ils n'ont pas d'affaire ici. C'est l'argument qu'il donne. Je l'accepte.

M. Fontaine: Les coopératives?

M. Biron: Les coopératives n'ont pas d'affaire ici?

Le Président (M. Laplante): Non, il plaide contre votre motion.

M. Biron: II plaide pour dire que les coopératives n'ont pas d'affaire ici, au Parlement.

Le Président (M. Laplante): C'est l'argument qu'il donne. M. le député d'Arthabaska.

M. Fontaine: Ce n'est pas celaqu'il dit. Il ne parle pas des coopératives.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Arthabaska.

M. Baril: M. le Président, j'en ai fait mention avant même de commencer. Même si on invitait la Coopérative fédérée à venir s'asseoir ici et à discuter avec nous autres, actuellement, on se bat pour essayer de faire comprendre à l'Union Nationale la nécessité d'adopter la loi 116. Dans l'article auquel je fais mention ici, les agriculteurs du comté de Lotbinière ont rencontré leur propre député pour essayer de le convaincre et ils n'ont pas été capables de le convaincre. Même s'il venait un paquet d'organismes ici pour essayer de vous convaincre, vous êtes informés par un groupe de gens qui appuient les dissidents, vous êtes appuyés par ces gens, vous êtes informés par ces gens. Vous avez décidé de coucher avec eux, c'est votre plein droit, c'est votre liberté.

M. Biron: C'est faux. Regardez les renseignements qu'on a des coopératives. Regardez les coopératives et vous en parlerez.

M. Chevrette: L'Union Nationale pourrait peut-être...

M. Baril: Je vais finir l'article que j'avais commencé à lire. "Les agriculteurs espèrent qu'à la lumière des informations qu'il a reçues, leur député appuiera le projet de loi 116 pour montrer qu'il veut améliorer le sort des producteurs québécois et ceux de son comté. On sait que M. Biron dit qu'il n'est pas contre le projet, tout en étant contre." Ce n'est pas moi qui le dis, c'est un article de journal. Je suis parfaitement d'accord. Quand on dit qu'il faut faire venir des coopératives pour essayer de s'exprimer ou d'éclaircir le débat, on s'empare de la loi 116 actuellement pour mêler toutes sortes de problèmes qui existent en agriculture. Ce n'est pas depuis la loi 116 que les problèmes existent en agriculture, il y en a toujours eu. Ce n'est pas parce que le Parti québécois est au pouvoir qu'on va régler tous les problèmes. Ce n'est pas vrai non plus. Il ne faut quand même pas mêler les tomates avec les choux et les carottes avec les oignons; chaque chose à sa place. Je pense bien qu'actuellement, c'est la loi 116. Quand on reconnaît la nécessité des plans conjoints, on ne défend pas les dissidents pour qu'après cela, ce soit une épine au pied pour les plans conjoints. Soit qu'on dise oui ou qu'on dise non. Quand on reconnaît la nécessité des plans conjoints, on leur donne des pouvoirs pour s'administrer, ces mêmes plans conjoints. Dans la classe agricole, actuellement... Moi aussi, j'en ai rencontré des agriculteurs. Quand tu leur expliques exactement ce qu'est la loi 116, pas à ma façon, avec les articles ici, mais non à la vôtre, de cette façon... Vous vous obstinez à défendre la loi 116 sur la première version avant qu'il n'y ait des amende-

merits, et vous continuez à dire que vous n'avez pas eu d'amendements. Si vous ne les avez pas eus, ce n'est pas notre faute...

M. Fontaine: Hier soir. M. Baril: C'est faux!

M. Chevrette: Le député de Huntingdon n'a pas fait son travail.

M. Dubois: Officiellement, c'était hier soir.

M. Baril: Officiellement...

M. Chevrette:... ici devant moi, c'est...

M. Dubois: C'était un projet d'amendements, ce n'étaient pas les amendements déposés en bonne et due forme.

M. Baril: Quand on veut continuer à induire la population en erreur, on s'empare de tous les droits, de tous les pouvoirs, de n'importe quoi, pour dire qu'on n'avait pas les amendements, qu'ils n'ont pas été déposés officiellement. Si on veut être malhonnêtes, ce n'est pas notre responsabilité, c'est leur faute, ce ne sont pas nos problèmes. C'est pour cela que je voterai contre cet amendement, parce que, même si on faisait venir tout le monde possible et imaginable ici, jamais l'Union Nationale ne sera convaincue.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre.

M. Biron: Sur l'article 96, parce que le député d'Arthabaska a dit trois faussetés que je veux reprendre. D'abord, la loi 116 modifiée, avec laquelle on se promenait quelque part en province; de mon siège de député, je n'ai jamais vu...

M. Baril: Vous êtes allé vous faire applaudir au Hilton avec cela!

M. Biron:... ce papier que le député d'Arthabaska possède. S'il veut s'en servir, très bien, mais il n'a pas le droit de m'accuser de m'être servi de ce papier. Je ne l'ai jamais vu de ma vie. Deuxième chose: Lorsque le député...

M. Chevrette: Vous n'êtes pas à confesse, monsieur...

M. Biron: ... De mon siège de député, et vous prouverez le contraire...

M. Chevrette: Vous demanderez au député de Gaspé de vous absoudre.

M. Biron: Deuxième chose: Lorsque le député d'Arthabaska a dit que l'Union Nationale n'appuie que les dissidents, il se base sur une coupure du journal La Presse, si j'ai bien vu, et c'est complètement faux. On a apporté des arguments qui étaient clairs, qui étaient logiques. Tout ce qu'on veut, je l'ai dit et je le redis, c'est prendre la défense du producteur agricole, sauvegarder sa coopérative et sauvegarder son syndicalisme agricole. Le troisième point — j'ai dit trois points — est le suivant. La lecture qu'il a faite de l'article de la Terre de chez nous, je m'en rends compte avec les dirigeants de l'UPA, ce ne sont pas tous les producteurs agricoles, c'est 30 dirigeants de l'UPA; je les ai rencontrés et j'en ai rencontré d'autres. J'ai rencontré à plusieurs reprises des dirigeants de l'UPA de Lotbinière, j'ai rencontré 450 agriculteurs lors d'une assemblée dans Lotbinière. Je rencontre tous les gens de Lotbinière qui veulent me rencontrer, spécialement les producteurs agricoles. (12 h 15)

Le Président (M. Laplante): M. le député de Lotbinière! M. le ministre.

M. Garon: M. le Président, ce qui m'apparaît évident aujourd'hui, c'est que l'Union Nationale est mal partie sur la loi 116, en appuyant les dissidents. Elle s'est rendu compte, en cours de route, qu'elle faisait erreur et qu'elle s'était mis un doigt dans l'oeil jusqu'au coude, alors elle a dit: II faut faire dévier le débat pour que les gens ne se rappellent pas que c'est ça qu'on appuyait.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre, j'aimerais que vous reveniez à la pertinence de la motion.

M. Garon: C'est ça, c'est là où je veux en venir, vous allez voir.

Une voix: II va retomber sur ses pattes, vous verrez.

Le Président (M. Laplante): D'accord.

M. Garon: J'ai donné, au mois de décembre... il dit que ce n'est pas officiel, il est évident qu'il n'y a pas de dépôt officiel en commission parlementaire, mais j'ai déposé les règlements, les amendements que je proposais pour la loi 116, à la suite de ma rencontre avec le Mouvement coopératif. À la demande même de l'Opposition qui nous disait: Cela nous permettra de connaître à l'avance les règlements. Aujourd'hui, on peut faire de la petite politique et dire, comme le député de Nicolet-Yamaska: Ce n'est pas un dépôt officiel. Évidemment, on va tomber dans du petit légalisme, du petit juridisme et avec cela je pense qu'on n'avance pas beaucoup. Si on marche là-dedans, c'est là qu'il y a eu des problèmes dans le monde de l'agriculture, parce que, pendant des années, les gens ont fait du petit juridisme.

J'ai voulu tout simplement donner à l'avance les amendements que je proposerais, à la suite de la rencontre avec le mouvement coopératif. C'est évident que ce n'est pas un dépôt officiel, il n'y a pas de dépôt officiel, mais à la suite de cette rencontre... jamais l'Union Nationale n'en fait mention et, pendant des semaines, elle a fait croire à la population qu'elle n'était pas au courant, alors que le chef de l'Union Nationale

avait reçu ce télégramme, que je relis. Il m'était adressé, avec copie au chef de l'Union Nationale, copie au chef parlementaire du Parti libéral. Il dit ceci: "Coopérative fédérée de Québec, en son nom et au nom des coopératives agricoles concernées, est d'accord avec projet de loi 116, tel que soumis à notre attention, lundi matin, le 18 décembre — c'est-à-dire avec les amendements qu'on proposait; ces gens ont cru à ma parole — Coopérative fédérée réaffirme qu'elle n'a jamais, ni de près ni de loin, adhéré ou donné son appui au mouvement des producteurs dissidents."

Je dois nommer les gens qui étaient présents; je le répète encore une fois: La délégation qui m'a rencontré était composée de représentants de la Coopérative fédérée, de la Coopérative agricole de Granby, de la Coopérative agricole du Bas-Saint-Laurent, de la Coopérative laitière du sud de Québec, de la Coopérative agricole de la côte sud, de la Coopérative agricole régionale de Papineau, de l'Association coopérative laitière du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de la Chaîne coopérative du Saguenay et de leur procureur, Me Guy Gagnon. Cela représente tout le monde coopératif; c'est peut-être la première fois d'ailleurs que le monde syndical et le monde coopératif — et cela fait mal à l'Opposition — sont d'accord sur un projet de loi, la loi 116. Il y a des débats, il y a des requêtes devant la régie; c'est vrai, mais c'étaient des requêtes et des débats qui existaient avant la loi 116, ce sont des débats qui se poursuivent depuis des années qui sont devant la régie et ce ne sont pas des débats sur la loi 116. Actuellement...

M. Biron; ...

M. Garon: Que le député de Lotbinière se ferme donc!

Ce sont des débats qui existaient avant. Le député de Johnson qui a dit qu'il appuyait "à mort" la dissidence, à l'Hôtel Hilton, et apparemment il s'est secoué les pleumas devant l'assemblée. Aujourd'hui, il est évident que l'Union Nationale s'en est rendu compte, mais elle était mal conseillée, elle n'a pas d'antennes dans le monde rural. Elle n'a pas d'antennes, c'est un accident de la nature qu'elle ait été élue dans des comtés ruraux.

M. Biron: Parlez donc comme un ministre!

M. Garon: Elle s'est rendu compte qu'elle se fourvoyait; pour faire oublier qu'elle s'était trompée de direction, elle essaie de faire porter le débat sur un autre point, elle ne parle plus des dissidents, elle parle maintenant des coopératives. Pourquoi? Pour faire croire aux gens que c'est là qu'est le débat. C'est faux; le Mouvement coopératif et le mouvement syndical sont d'accord sur le projet de loi 116, parce qu'ils en sentent le besoin. Je ne comprends pas, quand on nous demande de les faire comparaître; il n'y a pas de grève comme dans le cas de Commonwealth Plywood, il n'y a pas de débat entre deux organismes; on parle du projet de loi 116 et, à cet égard, j'ai l'appui du mouvement syndical et du Mouvement coopératif c'est clair. Alors, pourquoi essayer d'alimenter des débats qui n'existent pas?

Sur d'autres lois, sur d'autres problèmes, il y a des débats et c'est normal. Le mouvement coopératif, dans certains cas, veut administrer lui-même un plan conjoint; je pense que cela n'a pas encore été fait à ce jour au Québec, mais il y a des requêtes devant la régie de coopératives qui voudraient administrer elles-mêmes un plan conjoint. C'est un débat qui est devant la régie, c'est la régie qui tranche cette question. Sur la loi 116, c'est clair comme de l'eau de roche, actuellement, l'ensemble du mouvement coopératif... Il est possible que vous rencontriez un dirigeant ou un administrateur de coopérative qui n'aime pas le projet de loi 116, c'est possible, mais tous les représentants que j'ai rencontrés, par la voie de leur porte-parole, ont mentionné qu'ils étaient d'accord avec les amendements que je proposais. À ce moment-là, ils donnaient leur appui au projet de loi 116.

J'ai même reçu un autre télégramme le 21 décembre dans lequel on insiste pour adopter le projet de loi 116 le plus rapidement possible, c'est de la Coopérative fédérée. Que voulez-vous que je vous dise? Pourquoi susciter des débats qui n'existent pas? Pourquoi faire perdre le temps de la Chambre? C'est pour cela que je dis, à ce moment-là, qu'il faut procéder article par article parce que ce débat n'existe que dans l'esprit des gens de l'Union Nationale qui veulent faire croire qu'il y a un débat. Ils souhaiteraient, en réalité, qu'il y ait une division, concernant le projet de loi 116, qui n'existe pas. Curieusement, assez curieusement, en 1963, en 1974, les projets de loi qui ont été adoptés en Chambre ont fait l'unanimité des partis en Chambre alors qu'il y avait division dans le monde agricole. Actuellement, il y a unanimité entre le monde syndical...

M. Fontaine: Cela n'a jamais été aussi mal.

M. Garon: 35% d'augmentation de revenus, cette année, ce n'est tout de même pas pire. Vous n'avez pas fait cela pendant les 20 ans de l'Union Nationale.

M. Biron: Dans le porc et dans le boeuf; 2% dans le lait.

M. Garon: Ce n'est pas vrai, 2% dans le lait.

M. Biron: C'est ce qui était écrit sur votre communiqué.

M. Garon: Regardez encore les chiffres, c'est faux.

M. Fontaine: II y avait eu une diminution deux ans auparavant.

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît.

M. Garon: Vous savez, 35% pour l'ensemble

des producteurs, on ne réalise pas cela avec le boeuf au Québec parce qu'on n'élève pas beaucoup de boeufs; le porc en est une partie. L'Union Nationale au fond, actuellement, est contre un projet de loi qui fait l'unanimité entre le mouvement coopératif et le mouvement syndical. C'est normal... Je pense qu'il faudra changer les règlements de la Chambre. Les règlements de la Chambre étaient peut-être valables quand il n'y avait pas de télévision, mais maintenant qu'il y a la télévision, tous les députés de l'Opposition peuvent conter toutes les sornettes, les gens entendent cela et disent: Qu'est-ce que c'est le projet, exactement?

M. Biron: Les ministres aussi peuvent conter des sornettes.

M. Garon: Je pense sincèrement qu'avec l'avènement de la télévision, actuellement, il y a une foule de gens qui parlent, qui disent des sornettes et qui mêlent la population alors que cela devrait être limité de façon différente à tant de porte-parole par parti pour ne pas faire constamment des "filibusters". Autrement, on serait dans des "filibusters" constants s'il fallait jouer le jeu de l'Opposition depuis l'avènement de la télévision. C'est ce qui explique actuellement ce "filibuster" que fait l'Union Nationale tout en mettant des clous de 12 pouces dans son cercueil dans le monde rural.

M. Biron: M. le Président, est-ce que je pourrais poser une question au ministre?

M. Garon: Alors, je vais voter contre cette proposition parce qu'on a reçu des télégrammes du monde syndical et du monde coopératif qui appuient le projet de loi 116 avec les amendements que j'ai proposés. Je vous dis d'avance que je n'ai pas l'intention de taponner longtemps dans les amendements non plus parce que c'est assez difficile de faire l'unanimité dans le monde coopératif et dans le monde syndical sur un projet de loi. Quand on a réussi à le faire, on ne commence pas à taponner dans le projet de loi.

M. Biron: Est-ce que je peux vous poser une question?

Le Président (M. Laplante): Acceptez-vous une question?

M. Garon: Posez-la!

M. Biron: J'ai un mémo de la Coopérative agricole de Granby qui date de janvier 1979, adressé à tous ses principaux dirigeants, qui dit ceci: "Étant donné que le projet de loi 116 n'a pu recevoir l'approbation de l'Assemblée nationale avant la fin de la session qui a précédé les Fêtes, il faudra attendre une nouvelle présentation du projet de loi pour que les coopératives puissent faire connaître leur position à ce sujet." Pourquoi est-ce que cela date de janvier quand vous préten- dez qu'en décembre, ils vous ont dit qu'ils étaient d'accord?

M. Garon: Que dites-vous?

M. Biron: C'est compliqué! Je vais recommencer. Les coopératives disent ceci: Étant...

M. Garon: Qui signe?

M. Biron: La Coopérative agricole de Granby, c'est un mémoire aux dirigeants. Étant donné que le projet de loi 116...

M. Garon: Un mémoire pour qui?

M. Biron: La Coopérative agricole de Granby, vous connaissez cela?

M. Garon: Oui.

M. Biron: Étant donné que le projet de loi 116 n'a pas pu recevoir l'approbation de l'Assemblée nationale...

M. Garon: C'est adressé à vous? M. Biron: Non. Écoutez...

M. Garon: C'est un télégramme adressé à qui?

M. Biron: Je vous dis: Expliquez-moi ce que cela veut dire: Étant donné que le projet de loi 116 n'a pu recevoir l'approbation de l'Assemblée nationale avant la fin de la session qui a précédé les Fêtes, il faudra attendre une nouvelle présentation du projet de loi pour que les coopératives puissent faire connaître leur position à ce sujet. Cela date de janvier 1979. C'est un mémo pour les dirigeants des coopératives agricoles au Québec. Cela date de janvier. Cela ne date pas de décembre, c'est janvier 1979.

M. Garon: Un mémo... Cela veut dire qu'il faudrait attendre, parce qu'il ne faut pas entendre.

Une voix: On patine!

M. Garon: Donnez donc votre document. Vous dites qu'il y a un mémo entre des dirigeants de coopératives. Je ne vais pas fouiller dans les bureaux de direction des entreprises pour savoir quelle sorte de mémos se présentent entre deux personnes, entre deux dirigeants de coopératives, si c'est exact seulement. Voyons donc, ce sont des niaiseries.

M. Biron: J'ai seulement posé une question au ministre. Il n'a pas voulu répondre. Très bien.

M. Garon: Cela ne dit même pas à qui il est adressé. Il n'a même pas le courage de dire à qui il est adressé et par qui il est signé.

M. Biron: Mes sources d'information, je les garde.

M. Garon: Oui, l'anonymat. La lâcheté, encore une fois...

M. Biron: M. le Président, l'article 96... Le Président (M. Laplante): À l'ordre!

M. Biron: M. le Président, le ministre devrait apprendre à arrêter de faire le bouffon et répondre clairement aux questions des députés de l'Opposition.

M. Garon: Ayez donc le courage de dire par qui sont signés les mémos dont vous parlez et à qui ils sont adressés. Il y a toujours des limites. N'importe quel brouillon va arriver et on va dire: Prononcez-vous sur les papiers qui se promènent à l'intérieur des entreprises. Voyons donc.

M. Biron: D'accord, si les coopératives sont d'accord...

Le Président (M. Laplante): Sur la motion, M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Très brièvement, M. le Président. Sur la motion déposée par le député de Nicolet-Yamaska, à l'effet d'inviter les représentants de la Fédérée à venir devant la commission parlementaire, je ne vous cacherai pas que je suis non seulement d'accord en ce qui a trait à la venue de la Fédérée, mais je voudrais entendre également — et je l'ai exprimé antérieurement — le conseil d'administration de FEDCO, le conseil d'administration de la Fédération de chair de volaille, le conseil d'administration de la Fédération du lait. Je voudrais l'UPA. Je voudrais également des représentants de l'OPPQ. Et si ces gens-là veulent se faire accompagner d'experts ou de procureurs, tant mieux, on aura la possibilité d'un éclairage encore plus complet, parce que jamais la commission parlementaire de l'agriculture, depuis 15 ans de vie, d'expériences à l'intérieur de plans conjoints, n'a été en mesure d'approfondir véritablement ces expériences vécues, les difficultés assumées qui ont fait que les programmes par lesquels on voulait ordonner la production de la mise en marché n'ont pas fonctionné et qui ont brisé les règles du jeu.

Pourquoi cela n'a-t-il pas atteint les objectifs fondamentaux qui étaient recherchés? Un jour, M. le ministre, on devra prendre le temps, les membres d'une commission de l'agriculture ici, d'aller voir pourquoi des plans n'ont pas donné à certaines périodes la rentabilité qui était espérée par les producteurs qui, au moyen d'un référendum, avaient voulu se donner des outils pour fonctionner à l'intérieur d'une production et d'un système de mise en marché.

Je souhaite la venue de représentants de la Fédérée et je souhaite également la venue d'un représentant de tous les groupes qui ont vécu de véritables expériences, qui se sont fait torpiller parfois par des "smarts" que j'appelle, qui profitaient du système, qui non seulement en profi- taient par des structures de prix qui étaient possibles en fonction d'un système établi, mais qui en profitaient doublement, c'est-à-dire en allant produire au-delà des règles établies, en dépassant les quotas, qui profitaient donc aux deux paliers.

Ce sont des vérités qu'il va falloir connaître et on va les connaître le jour où on aura des personnes qui ont vécu des expériences et qui vont nous dire de quelle façon le système n'a pas fonctionné et on pourra les interroger là-dessus pour aller découvrir et chercher la vérité, la réalité vécue à l'intérieur de ces plans conjoints. Je n'ai pas autre chose à dire, M. le Président, sur la motion du député de Nicolet-Yamaska. Je souhaiterais la venue de la Fédérée et de tous les autres organismes qui sont directement intéressés par l'expérience des plans conjoints.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président, je sais qu'il me reste passablement de minutes, mais je n'en prendrai pas beaucoup. La question soulevée par le... Il y a une question de règlement?

M. Fontaine: L'article 150, paragraphe 2, dit ceci: Lorsque l'Assemblée est en session, à moins qu'elle n'ait ajourné ses travaux pour plus de cinq jours, les commissions peuvent siéger aux mêmes heures que celles prévues pour l'Assemblée de même que le lundi à compter de 15 h et de 10 h à 12 h 30 du mardi au vendredi. M. le Président, étant donné qu'on a prévu, en vertu du règlement, des caucus pour étudier d'autres problèmes, je vous demande, M. le Président, d'appliquer le règlement et que nous puissions suspendre nos travaux. (12 h 30)

Le Président (M. Laplante): C'est qu'il y avait aussi l'ordre de la Chambre qui était accompagné d'une heure...

M. Fontaine: Mais, M. le Président, l'ordre de la Chambre ne peut pas aller à l'encontre du règlement.

Le Président (M. Laplante): Pardon, je m'en excuse.

M. Fontaine: C'est impossible, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Je suis, avant tout, l'ordre de la Chambre.

M. Fontaine: M. le Président, le règlement est là.

Le Président (M. Laplante): L'ordre de la Chambre est que la Chambre devrait commencer ses travaux à 14 heures; elle les commence à 15 heures. C'est pourquoi la commission a été...

M. Fontaine: Pas le mercredi, M. le Président.

M. Garon: On commence à 15 heures aujourd'hui.

Le Président (M. Laplante): 15 heures aujourd'hui.

M. Fontaine: Le règlement est bien clair, M. le Président. Je ne pense pas qu'on puisse aller à l'encontre de cela. Je vous invite à le lire.

M. Chevrette: Quand c'est irrégulier, c'est laissé à votre décision.

Le Président (M. Laplante): II faut que j'aille dans le sens de l'ordre de la Chambre.

M. Fontaine: M. le Président, le règlement... C'est impossible.

Le Président (M. Laplante): Pour faciliter la chose, s'il y a unanimité des membres pour finir à 12 h 30, je me plie, mais, s'il n'y a pas unanimité, je suis obligé d'aller à 13 heures.

M. Fontaine: M. le Président, vous allez à l'encontre du règlement.

Le Président (M. Laplante): Non, c'est tout ce que je peux dire actuellement. Je vais selon l'ordre de la Chambre, de l'Assemblée nationale.

M. Fontaine: Vous allez à l'encontre du règlement.

Le Président (M. Laplante): Je vais selon l'ordre de l'Assemblée nationale. Si vous voulez faire une motion d'urgence pour finir à 12 h 30...

M. Biron: Faites attention parce qu'on aura besoin d'unanimité tantôt.

M. Fontaine: D'accord.

M. Roy: M. le Président, un point de règlement. Pour déroger du règlement, même s'il s'agit d'un ordre de la Chambre, ne serait-ce que d'une virgule — je ne veux pas faire du chromage de virgule — il faut le consentement unanime. C'est une règle qui a toujours été sacrée, tant en commission parlementaire qu'à l'Assemblée nationale. Ces choses ont toujours été sacrées. Il a pu, à un moment donné, y avoir un ordre de la Chambre qui a passé à peu près inaperçu parce qu'on sait que parfois, dans le brouhaha des discussions, cela arrive souvent qu'il y en a deux qui parlent en même temps, alors cela passe inaperçu, mais on ne peut pas déroger au règlement de l'Assemblée nationale, au règlement des commissions parlementaires sans qu'il y ait unanimité. C'est fondamental. On ne peut pas aller à l'encontre de cela.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: M. le Président, si vous vous rappelez, pour ceux qui étaient à l'Assemblée nationale hier, au moment où le leader parlementaire du gouvernement a proposé que notre commission parlementaire siège de 10 heures à 13 heures, il y a eu une objection et les propos et les remarques du leader du gouvernement ont été à peu près les suivants: Je préfère en mettre plus que moins. C'était à peu près dans ces termes. Je pense que c'est hier que nous aurions dû, les députés de l'Assemblée nationale, au moment de la proposition du leader du gouvernement, faire objection au non-respect du règlement que vient d'invoquer le député de Nicolet-Yamaska. Il m'apparaît, quant à moi, M. le Président, que nous sommes liés par l'ordre qui vient de la Chambre et hier la Chambre aurait dû s'opposer lors de la proposition de séance du leader du gouvernement.

M. Chevrette: M. le Président, sur la question de règlement, je voudrais ajouter que, quand le leader a dit: Je préfère en mettre plus que moins, ce n'était pas sur la question des heures; c'est parce que la Chambre devait siéger à 10 heures ce matin, et non pas sur la question de 10 heures à 13heures. Le leader s'est levé et a dit: J'aime mieux en mettre plus que moins parce qu'il ne savait pas, à l'époque, au moment où il a transmis la directive, si la loi 110 serait adoptée ou non hier soir. C'est pour cela qu'il a dit: J'aime mieux en mettre plus que moins. Si la loi 110 n'avait pas été adoptée hier soir, la Chambre aurait siégé à 10 heures ce matin. Ce sont les faits concrets.

Le Président (M. Laplante): À ce moment-ci, pour éviter la perte des travaux, je suis l'ordre de l'Assemblée nationale qui est 13 heures et, s'il y a un député qui désire demander l'unanimité pour finir à 12 h 30, je n'ai pas d'objection.

Le député de Nicolet-Yamaska.

M. Chevrette: M. le Président, j'avais le droit de parole.

Le Président (M. Laplante): Oui, seulement pour trancher ce débat tout de suite.

M. Biron: Nous nous sommes basés sur le règlement et avons prévu un important caucus à 14 heures.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous demandez officiellement, M. le député de Lotbinière, de finir à 12 h 30?

M. Biron: Compte tenu de ce qui s'est toujours passé...

Le Président (M. Laplante): Est-ce que les membres de cette commission sont d'accord pour finir à 12 h 30?

M. Biron: Je pense que le mercredi, M. le Président...

M. Fontaine: M. le Président, il serait peut-être important de penser également, pour les autres députés membres de cette commission, qu'à compter d'aujourd'hui et demain, on aura besoin de certains autres consentements. Pensez à cela aussi.

M. Chevrette: C'est du chantage.

Le Président (M. Laplante): II n'y a pas de consentement.

M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Garon: Est-ce que je peux vous faire un "deal"?

Le Président (M. Laplante): M. le ministre.

M. Garon: Je vous le propose: Est-ce que vous seriez d'accord pour siéger ce soir durant trois heures, de 20 heures à 23 heures, au lieu de demain matin de 10 heures à 13 heures.

M. Biron: Au lieu de demain matin?

M. Garon: Oui. J'ai un rendez-vous à Montréal qui est prévu depuis un mois et demi.

M. Biron: D'accord, cela vous permettrait d'être ici demain après-midi à 14 heures?

M. Garon: Oui. On pourrait siéger ce soir de 20 heures à 23 heures.

M. Fontaine: D'accord.

M. Chevrette: Consentement unanime.

M. Roy: À condition qu'on termine.

M. Chevrette: Sacrifice, c'est enculer des mouches.

M. Biron: Pour ma part, si cela peut vous arranger, M. le ministre, on siégera ce soir...

M. Garon: Je comprends que d'après le règlement, ce n'est pas prévu. On ne compte pas sur le règlement. Mais s'il y a consentement.

M. Vaillancourt (Orford): La Chambre va donner l'ordre.

M. Garon: Cela prend l'unanimité. Je ne peux pas vous imposer cela.

M. Giasson: Pour siéger à nouveau, cela prendra un nouvel ordre de la Chambre et c'est là qu'on fera le débat.

M. Chevrette: M. le Président, je veux parler là-dessus. Si cela fait comme d'habitude, on va s'entendre ici et ils vont s'arranger avec un "finfin" pour se lever et dire non en haut. On ne se fera pas jouer de tour, non monsieur.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que je pourrais vous suggérer à ce moment-ci de vous entendre entre leaders, pour que cela devienne un ordre de la Chambre?

M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Biron: M. le Président, je dirai au ministre tout simplement que je suis prêt à accepter son offre.

Le Président (M. Laplante): Je préférerais que cela s'arrange entre les leaders de chaque parti.

M. Biron: Cela va s'arranger au niveau de notre leader.

M. Giasson: À l'Assemblée nationale, c'est là que cela doit se régler.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président, le député de Montmagny-L'Islet a exprimé un argument...

Le Président (M. Laplante): Est-ce qu'il y a consentement pour ajourner les travaux immédiatement?

M. Giasson: J'ai d'autres engagements ce soir. Le mercredi, on ne siège jamais.

Le Président (M. Laplante): II n'y a pas de consentement. Le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Joliette-Montcalm, c'est à vous la parole.

M. Chevrette: M. le Président, j'ai bien apprécié les propos du député de Montmagny-L'Islet qui dit que' possiblement, un bon jour, il faudra faire venir le Mouvement coopératif et le syndicalisme, pour s'expliquer sur certains types de relations. Et je pense qu'il faudra le faire.

Mais quant à l'objet même du projet de loi 116 — c'est là-dessus que je trouve que l'Union Nationale a complètement des visières — il s'agit d'abord de légaliser une situation et de définir un cadre possible pour que les gens établissent des plans conjoints. Les rivalités qui pourraient exister ou les tensions qui peuvent exister entre le mouvement syndical agricole et le Mouvement coopératif peuvent très bien faire l'objet de discussions complètement à part et dans un temps ultérieur.

Il me semble qu'actuellement, ce n'est qu'une échappatoire, les propos qu'on tient depuis bientôt sept ou huit heures, uniquement en dehors du fondement même du projet de loi 116. Il me semble qu'il faut mettre fin à cela. Si on ne demande pas le vote, c'est bien regrettable, mais je vais proposer une commission itinérante pour aller expliquer, dans le comté de certains indivi-

dus, ce que c'est que la loi 116. On va l'expliquer. Il y en a peut-être qui vont avoir à répondre officiellement de leurs gestes. Ce ne sera pas un problème d'expliquer la loi 116. On pourrait aller dans le comté de Huntingdon et les intéressés pourraient faire venir leur conseiller juridique qui ricane, pour expliquer sa version du projet de loi 116.

M. Dubois: Je suis prêt à y aller.

M. Chevrette: On expliquera aussi les gestes que certains individus posent à l'intérieur de cela.

M. Dubois: Je suis prêt à y aller avec toi, dans Huntingdon.

M. Chevrette: Vous allez voir que cela ne sera pas long, à part cela. On en sortira d'autres, en temps et lieu, des situations. Et on mêlera les affinités à cela. On mêlera les engagements partisans de certains individus. Et on se parlera dans le blanc des yeux.

M. Dubois: Je t'invite à me rencontrer dans Huntingdon.

M. Chevrette: Ce n'est pas un procureur qui va ricaner parce qu'on va aller dans Huntingdon. Je vais le faire venir à Joliette. On va lui parler. On va lui parler dans le blanc des yeux, avec les producteurs, et il amènera ses dissidents avec lui. Et il amènera Rouville Ménard avec ses 60 porcs. Il va apprendre qu'on ne vote pas par tête de porc, au Québec, on vote par individu.

M. Fontaine: On nomme des noms?

M. Chevrette: On va s'en parler, M. Paradis. Certainement. Je vais vous apprendre à vivre. Vous allez apprendre à vivre.

Le Président (M. Laplante): La prochaine intervention que vous ferez, monsieur, je serai obligé de vous faire sortir.

M. Fontaine: Un instant, M. le Président! M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Laplante): Le public est là comme spectateur.

M. Fontaine: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): C'est tout ce que je peux dire à ce moment-ci.

M. Fontaine: Question de règlement, M. le Président, s'il vous plaît!

M. Chevrette: Défends-le, ton poulin.

Le Président (M. Laplante): Oui, question de règlement.

M. Fontaine: M. le Président, cela fait dix minutes que j'entends le député de Joliette-Montcalm s'adresser au public. Il provoque le public. Je pense, M. le Président, que ce n'est pas digne d'un parlementaire à cette Assemblée nationale. On ne peut pas reprocher au public d'avoir un mot pour réagir.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Joliette.

M. Roy: M. le Président, sur le point de règlement, j'aimerais ajouter bien calmement ceci. Si le règlement était appliqué, un député, que ce soit à l'Assemblée nationale ou en commission parlementaire, devrait toujours s'adresser à la présidence. Qu'on fasse appliquer le règlement et on va éviter des incidents fâcheux, des incidents malheureux comme celui que nous venons de connaître.

Le Président (M. Laplante): Je suis d'accord avec le député de Beauce-Sud sur cet élément et je prierais le député de Joliette-Montcalm de s'adresser à la présidence, s'il vous plaît.

M. Chevrette: M. le Président, je pense que je m'adressais à la présidence, même si je regardais de l'autre côté. Un chien regarde bien un évêque. Je pense bien que je peux me permettre de regarder M. Paradis et vous parler.

Le Président (M. Laplante): C'est tout? Une voix: On va prendre le vote.

Le Président (M. Laplante): Le vote sur la motion?

M. Fontaine: Je voudrais avoir le droit de parole, s'il vous plaît!

Le Président (M. Laplante): II vous reste deux minutes, M. Fontaine, M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Je vais essayer d'être très bref. Le député de Joliette-Montcalm, lors de sa première intervention, disait: L'Union Nationale ne s'est pas branchée, ne sait pas sur quel pied danser — en tout cas, c'est la rengaine habituelle — choisir le genre d'agriculture qu'elle veut et tout cela, mais, M. le Président, je pense que nous, on s'est déjà prononcés pour dire qu'on était favorables aux plans conjoints. Par exemple, le député de Brome-Missisquoi du Parti québécois est contre cela, il ne faudrait pas l'oublier. Nous demandons aussi que l'agriculteur perce au niveau de l'industrie secondaire, soit le niveau de la transformation. C'est là que le Mouvement coopératif intervient, parce que c'est dans le Mouvement coopératif qu'on fait le plus de transformation. Les plans conjoints s'occupent du niveau primaire, du niveau de la production, mais le Mouvement coopératif s'occupe de la transformation. Je re-

joins dans mes propos les paroles de M. Lessard, le député de Saguenay, qui était dans l'Opposition en 1974 et qui était le porte-parole du Parti québécois en matière d'agriculture. Il disait ceci: Quand au domaine des oeufs, des viandes, de la volaille, des fruits et des légumes, la participation des agriculteurs aux phases secondaire et tertiaire est faible, sinon nulle. Le champ est occupé par les grandes corporations le plus souvent non québécoises. Citons, par exemple, Canada Packers, Green Giant, Kraft, Swift, etc., qui tirent une part de plus en plus grande de leurs profits de l'industrie alimentaire, tel que je l'expliquais tout à l'heure. Il y a également maintenant les coopératives qui sont dans ce domaine, il ne faudrait pas l'oublier. Il poursuivait: "Comme nous l'avons dit en commission parlementaire, tant et aussi longtemps que les agriculteurs ne perceront pas vraiment au niveau de l'industrie secondaire et même tertiaire, leur contribution et participation aux bénéfices de l'industrie alimentaire ne cesseront de décroître, parce que ce n'est pas au niveau du secteur primaire..."

Le Président (M. Laplante): Veuillez conclure, s'il vous plaît.

M. Fontaine: Oui, M. le Président. Je conclus en disant que le député de Joliette-Montcalm est en retard dans son argumentation, parce que, déjà, en 1974, le député Lessard disait exactement la même chose que ce que l'Union Nationale dit actuellement. C'est le député de Joliette-Montcalm qui est en retard dans ses affaires.

Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant le vote sur la motion du député...

M. Roy: M. le Président...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Je ne sais pas combien de temps il me reste.

Le Président (M. Laplante): Cinq minutes, M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Je n'ai pas l'intention de les prendre tout simplement. Je dirais que le ministre a tenté d'induire le monde en erreur, d'induire la commission parlementaire en erreur, lorsqu'il a dit que tout allait bien dans le monde agricole et que c'était la première fois qu'il y avait entente, qu'il y avait unanimité.

M. Garon: Sur le projet de loi 116.

M. Roy: Sur le projet de loi 116, je ne peux pas prendre cela, parce que si le ministre a consulté et s'il a eu le loisir, le pouvoir et la possibilité de consulter les dirigeants des différents secteurs de l'économie agricole du Québec, chaque député a également ce pouvoir. Pendant la période où la session a été ajournée, du 21 décembre jusqu'à ce qu'elle revienne, le 6 février dernier, j'ai eu des conversations avec bien des dirigeants, des conversations téléphoniques. J'ai eu des rencontres avec ces gens. Je pense qu'il ne faudrait faire croire — ce serait induire la population en erreur — que tout va bien dans le monde agricole, et que, pour la première fois, il y a unanimité, s'il y a unanimité. Que le ministre semble vouloir nous faire accepter cela, je pense que le ministre est quand même suffisamment honnête intellectuellement pour dire toute la vérité devant les membres de la commission parlementaire. Il peut le dire à son caucus, cela le regarde, mais, au niveau de la commission parlementaire, quand même, ce n'est pas interdit aux députés de l'Opposition de communiquer avec les dirigeants de la coopération, de communiquer avec les dirigeants du syndicalisme agricole, de rencontrer des directeurs de syndicats de base, de rencontrer des dissidents, de rencontrer des gens qui sont dans le milieu et qui vivent de l'agriculture au Québec. (12 h 45)

J'ai tenu ces rencontres, j'ai fait ces contacts. Je comprends que, dans certains milieux, cela a dérangé bien du monde.

M. Garon: Cela a fait...

M. Roy: Oui, mais je peux vous dire...

M. Garon: Par une assemblée de 800 personnes.

M. Roy: II y en a d'autres qui se sont fait parler. Je m'excuse, M. le ministre, mais je me suis fait parler par des gens qui n'étaient pas là au moment où j'y étais. Ils ont préféré parler par l'entremise d'autres, alors qu'on ne sait même pas s'il y avait même une réunion. Les petits communiqués de presse, vous savez, c'est bien facile. Il n'y a pas de contestation. Dans les réunions auxquelles j'ai assisté et auxquelles il y avait des dirigeants de syndicats de base, j'aimerais quand même dire au ministre que, si cela va si bien, je me demande pour quelle raison certaines personnes, dont des dirigeants de syndicats de base, ont eu des appels téléphoniques des fonctionnaires, des employés de l'UPA pour leur interdire d'aller aux réunions. Ces gens se sont levés en pleine salle, se sont identifiés devant le public qui était là pour dire qu'ils n'étaient pas censés venir à la réunion, mais puisqu'on leur demandait de ne pas aller à la réunion, c'est qu'il y avait anguille sous roche, il y avait quelque chose qu'on semblait vouloir cacher à la population. Ces gens sont venus aux réunions, se sont exprimés, se sont identifiés. Partout où le vote a été pris au cours de ces réunions, que ce soient des réunions de groupes de 30 ou des réunions de 300 ou de 500 personnes, là où il y a eu un vote de pris, il a été largement et majoritairement contraire à la loi 116. Que le ministre ne vienne pas nous dire que cela va bien, que le ministre ne vienne pas nous dire, à un moment donné, que l'harmonie est en train de s'établir,

que la loi 116 va rapprocher les parties, c'est faux. Je continue de maintenir qu'on va éloigner les gens parce qu'on donne des pouvoirs accrus à des offices à l'heure actuelle, alors que, dans l'exercice de ces mêmes pouvoirs, il y a eu de la contestation dans bien des milieux. Qu'on ne vienne pas charrier, qu'on n'induise pas la commission parlementaire en erreur, qu'on mette tout simplement les cartes sur table. Je pense que c'est bien important que tout soit dit. Je souscris à la proposition qui a été faite. Je répète aussi les propos qui ont été tenus par le député de Montmagny-L'Islet, que, dans le secteur agricole, il commencerait à être temps qu'on songe à faire un tour d'horizon et à inviter tout le monde devant une commission parlementaire pour faire en sorte que les gens se parlent et qu'on en vienne à dénouer la crise, parce qu'il faut se parler de crise actuellement dans le secteur agricole. Si on retarde trop, on risque d'avoir moins d'interlocuteurs, parce que les agriculteurs disparaissent en grand nombre chaque année.

Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. Maintenant, j'appelle le vote sur la motion. Que cette commission invite les représentants de la Coopérative fédérée du Québec à se faire entendre le 15 février, à 10 heures, afin que la présente commission soit pleinement informée de la portée du projet de loi 116, touchant en particulier le contrôle de la production par les offices de producteurs. Voulez-vous un vote enregistré?

M. Roy: Oui, monsieur.

Le Président (M. Laplante): M. Baril (Arthabaska)?

M. Baril: Contre.

Le Président (M. Laplante): M. Beauséjour (Iberville)?

M. Beauséjour: Contre une motion dilatoire.

Le Président (M. Laplante): M. Biron (Lotbinière)?

M. Biron: Pour.

Le Président (M. Laplante): M. Ouellette (Beauce-Nord)?

M. Ouellette: Contre la motion.

Le Président (M. Laplante): M. Garon (Lévis)?

M. Garon: Contre la motion dilatoire.

Le Président (M. Laplante): M. Giasson (Montmagny-L'Islet)?

M. Giasson: Pour la motion.

Le Président (M. Laplante): M. Lévesque (Ka-mouraska-Témiscouata)?

M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata):

Contre la perte de temps.

Le Président (M. Laplante): M. Rancourt (Saint-François)?

M. Rancourt: Contre la motion.

Le Président (M. Laplante): M. Roy (Beauce-Sud)?

M. Roy: Pour la motion.

Le Président (M. Laplante): M. Vaillancourt (Orford)?

Trois pour, six contre; motion rejetée. J'appelle maintenant l'article...

M. Biron: M. le Président, c'est une question de règlement. Est-ce que je peux encore une fois faire appel à la grande compréhension des membres de cette commission... À cause d'engagements antérieurs que nous avions... Il reste seulement avant...

Le Président (M. Laplante): J'appelle l'article 1.

M. Roy: M. le Président, avant l'article 1.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: II reste quand même quelques minutes, je pense qu'avant d'appeler l'article 1...

M. Chevrette: II n'y a pas de motion, M. le Président, pour l'article 1.

M. Fontaine: Est-ce que vous me permettriez, M. le Président, d'ajouter juste quelques mots avant que le député de Beauce-Sud prenne la parole? J'ai le droit, je n'ai pas terminé mes 20 minutes sur les remarques préliminaires.

Je voudrais tout simplement dire que j'avais une autre motion à présenter, au nom de l'Union Nationale, pour demander que l'Union des producteurs agricoles puisse être entendue devant cette commission. Étant donné le fait que le ministre n'a pas voulu entendre les mouvements coopératifs, il est bien évident qu'il est inutile...

Le Président (M. Laplante): Je veux savoir si c'est une motion que vous voulez présenter, M. le député.

M. Fontaine: Est-ce que je peux avoir la parole?

Le Président (M. Laplante): Soyez moins agressif; je vous demande si c'est une motion que vous voulez présenter, M. le député.

M. Fontaine: Si j'ai une motion à présenter, je vous le dirai.

M. le Président, je voulais simplement dire qu'à ce stade-ci, il m'apparaissait inutile de présenter une telle motion, étant donné l'attitude du gouvernement face aux mouvements coopératifs. Il serait injuste de demander maintenant à l'UPA de venir se faire entendre. Je ne présenterai pas cette motion, mais je m'aperçois que le gouvernement a fait son lit, qu'il ne veut entendre aucun des intervenants, qu'il ne veut pas savoir la vérité et on s'aperçoit que la transparence, qui devait être l'apanage du gouvernement, s'estompe peu à peu. Ce qu'il voulait une réalité n'est plus maintenant qu'un voeu et il n'y a plus de transparence du côté du gouvernement.

M. Roy: M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Sur les remarques générales, je pense qu'il devait me rester encore environ...

Le Président (M. Laplante): II ne vous reste rien, M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Absolument rien?

Le Président (M. Laplante): II ne vous reste rien.

M. Roy: Même pas une seconde?

Le Président (M. Laplante): Je peux vous donner 30 secondes, M. le député.

M. Roy: M. le Président, avant que vous n'appeliez l'article 1, j'aurais aimé présenter une motion sur le titre de la loi, parce que je pense que c'est bien important; on pourra peut-être en rire, mais ça fait partie de nos préoccupations.

M. Baril: On rit des motions.

M. Roy: C'est un sujet sur lequel les députés ont le droit de présenter des motions. Je pense qu'un projet de loi se doit de définir clairement les objectifs mêmes de la loi. Avec votre permission, M. le Président, la motion que je propose concerne le titre du projet de loi — ce n'est pas un précédent, cela s'est présenté bien des fois que des modifications ont été apportées au titre même du projet de loi — pour que ce titre reflète exactement les objectifs qu'on cherche à atteindre. Je propose que ce titre soit modifié en remplaçant, après le mot Loi, les mots "sur la mise en marché des produits agricoles" par les mots "favorisant le contrôle de la production agricole". C'est la motion que je vous présente. Je vous en fais parvenir une copie, j'en remets également une copie à mes collègues de l'Opposition ainsi qu'aux députés ministériels.

M. Garon: C'est un argument sur le fond.

M. Roy: M. le Président, si vous n'êtes pas prêt à accepter la recevabilité de la motion à ce moment-ci, j'aimerais quand même dire quelques mots sur la recevabilité, à moins que vous ne déclariez que la motion est reçue.

Le Président (M. Laplante): Étant donné les doutes que j'ai actuellement dans mon esprit, j'aurais un conseil à demander à des gens plus expérimentés que moi. À ce moment-ci, j'ajourne la séance sine die.

(Suspension de la séance à 12 h 53)

(Reprise de la séance à 16 h 39)

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît, mesdames, messieurs! Nouvelle séance de la commission de l'agriculture pour l'étude article par article du projet de loi 116, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. Sont membres de cette commission, M. Baril (Arthabaska) remplacé par M. Bordeleau (Abitibi-Est); M. Beauséjour (Iberville), M. Dubois (Huntingdon), M. Gagnon (Champlain), M. Garon (Lévis), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Rancourt (Saint-François), M. Roy (Beauce-Sud), M. Vaillancourt (Orford).

Les intervenants sont: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Charbonneau (Verchères), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe) remplacé par M. Biron (Lotbinière).

M. Biron: M. le Président, j'aurais une suggestion à faire. Tout à l'heure, lorsqu'on aura l'ordre de siéger ce soir, c'est pour être remplacé ce soir par un autre intervenant.

Le Président (M. Laplante): D'accord. M. Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord). Vous ne remplaciez pas ce matin...

M. Ouellette: Je remplace...

Le Président (M. Laplante): M. Gagnon (Champlain). Il est membre régulier. M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue) est remplacé par M. Ver-reault (Shefford); M. Picotte (Maskinongé), M. Samson (Rouyn-Noranda).

Avant de rendre ma décision sur la motion du député de Beauce-Sud, telle que proposée à l'Assemblée nationale, j'aimerais que les membres puissent s'entendre sur l'heure à laquelle la commission pourrait se réunir ce soir en compensation pour les heures de demain. Est-ce qu'il y aurait un membre qui pourrait en faire la proposition?

M. Giasson: II s'était formé une espèce de consensus à la suite d'une proposition qui avait été formulée par le parti ministériel, mais le ministre nous avait indiqué que, demain matin, il

devait remplir un engagement accepté depuis fort longtemps dans la région de Montréal. De mon côté, j'avais des réserves à siéger en soirée parce que l'habitude, la tradition et notre règlement de procédure font que nous ne siégeons pas habituellement le mercredi soir et j'avais pris un engagement. J'ai décidé, en vue d'activer la tenue de nos travaux, et compte tenu qu'on ne pourra pas siéger jeudi matin, en matinée, de contrernan-der mes activités. Je me ferai le proposeur devant la commission pour que les travaux se poursuivent en soirée et cela, dans le sens de l'indication qu'a donnée le leader du gouvernement tout à l'heure, soit de 19 h 30 à 22 h 30, de manière à remplacer les trois heures de délibérations qui étaient prévues pour la matinée de demain.

Le Président (M. Laplante): Est-ce qu'il y a objection? M. le député de Lotbinière.

M. Biron: Tel que je vous l'ai dit tout à l'heure, en substituant à mon nom celui de M. Cordeau (Saint-Hyacinthe) à la commission, je n'ai aucune objection; d'ailleurs j'ai donné ma parole au ministre là-dessus.

Je voudrais quand même que cette assemblée accepte que ce soir, le deuxième intervenant de l'Union Nationale soit remplacé, parce que j'ai vérifié personnellement et c'est impossible de contremander certains engagements que j'avais ce soir. Ce sera possiblement Me Fontaine, député de Nicolet-Yamaska qui me remplacera.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que les membres de la commission sont d'accord?

M. Roy: M. le Président...

M. Giasson: Je donne mon consentement.

Le Président (M. Laplante): D'accord.

M. Roy: Pour ce qui me concerne, j'aurais préféré que l'on siège demain, plutôt que ce soir; mais pour ne pas empêcher mes collègues de faire leur travail, de permettre aussi au ministre d'aller à un rendez-vous important demain matin, je vais accepter la proposition qui a été faite par l'honorable député de Montmagny-L'Islet, à savoir qu'on siège ce soir et que, demain matin, on ne siège pas, selon la motion.

Le Président (M. Laplante): Consentement? Des voix: Consentement.

Le Président (M. Laplante): Merci.

M. Garon: Je voudrais en profiter, M. le Président, pour remercier les membres de la commission d'avoir accepté ce compromis, soit de siéger ce soir au lieu de demain matin.

Le Président (M. Laplante): Merci à tous les membres.

Maintenant, revenons à la proposition du député de Beauce-Sud. Lorsque nous avons ajourné les travaux, il y avait une motion qui pouvait se lire comme suit: Je propose que le titre du projet de loi soit modifié en remplaçant les mots après "Loi" par "favorisant le contrôle de la production agricole."

Après vérification dans le nouveau règlement, aujourd'hui, je n'avais rien qui pouvait m'éclairer sur la portée de cette motion. J'ai consulté l'ancien règlement, à l'article 564, où il est dit d'ailleurs très clairement que changer le titre d'une loi ou discuter le titre d'une loi vient dans l'ordre au no 7, c'est-à-dire qu'on ne peut proposer un changement au nom d'une loi avant d'avoir disposé du projet de loi en entier, que ce soit le dernier point en discussion. Il y a même une réserve aussi à la fin: Vous pouvez présenter une motion à cet égard sans vous assurer qu'elle sera recevable encore à ce moment-là. C'est une option que je me réserve comme président. Il est dit aussi que pour changer le titre d'une loi, il faut qu'il y ait des changements fondamentaux dans la loi après l'étude article par article. C'est pourquoi je me réserve aussi ce droit, si le député de Beauce-Sud ou un autre député voulait faire une motion de changement du titre de cette loi. (16 h 45)

Même lors de l'étude de la loi 22, vous avez aussi une jurisprudence qui a été faite à ce moment-là, sur le refus de changer, pour les mêmes raisons que j'ai évoquées, le titre de la loi 22.

Sur ce, je me trouve dans l'impossibilité de recevoir votre amendement. Je le trouve prématuré, si vous aimez mieux.

M. Roy: M. le Président, j'accepte votre verdict. D'ailleurs, pour faire cette motion — je ne veux pas reprendre les discussions — je me suis basé sur les discussions qui ont eu lieu au cours de l'étude d'autres projets de loi dont l'objet est de soumettre à la commission parlementaire le nom du projet de loi. Effectivement, lorsque la commission parlementaire des consommateurs, coopératives et institutions financières a siégé hier matin, le président de la commission, qui était M. Jolivet, a présenté à la commission le nom du projet de loi demandant si ce nom de Loi concernant la Société nationale de fiducie était adopté. Cela arrive souvent, au cours des discussions des commissions parlementaires, lorsque nous étudions des projets de loi, que le nom soit soumis pour approbation aux membres de la commission. C'est dans cet esprit que je l'avais fait. Si j'avais une directive à vous demander, M. le Président, ce serait celle de réserver cette motion pour la présenter une fois que la loi aura été étudiée article par article, mais de la présenter toujours à cette commission.

Le Président (M. Laplante): Je préférerais, M. le député de Beauce-Sud, qu'à ce moment-là, vous la représentiez vous-même, pour qu'on puisse en juger la recevabilité à ce moment-là. D'accord?

Objet de la loi

J'appelle maintenant l'article 1 du projet de loi 116. M. le ministre. Vous allez m'excuser, mais je vais vous laisser aux mains d'un autre président pour cet après-midi.

M. Garon: Je dois dire que j'avais proposé un amendement sur ce projet de loi, pour qu'il se lise de la façon suivante: "1. La Loi sur la mise en marché des produits agricoles (1974, chapitre 36) est modifiée par l'insertion, après l'article 2, du suivant: "2a. La présente loi a pour objet de réglementer la production au Québec des produits agricoles et la mise en marché des produits agricoles dans le commerce intraprovincial au Québec."

Récemment, la Cour suprême a précisé, à plusieurs reprises, la juridiction du gouvernement fédéral et les juridictions du gouvernement du Québec et des provinces en matière de production et de mise en marché des produits agricoles. Il y a eu plus particulièrement la décision du 19 janvier 1978, qui renvoie relativement à la Loi sur l'organisation du marché des produits agricoles et également à celle du gouvernement de la Saskatchewan dans l'affaire de Central Canada Potash Company Ltd, jugement du 3 octobre 1978, et, également, dans l'affaire de CNR versus Nor-Min Supplies Limited, en 1977, volume I, rapport de la Cour suprême, page 333.

Dans ces jugements, il est clairement établi que la réglementation de la production relève de l'autorité provinciale et que cette réglementation ne doit pas servir à contrôler le commerce interprovincial. Il est important pour toute interprétation de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles que le sort de son application constitutionnelle soit clairement déterminé à la lumière de ces récentes décisions. Autrement, on se trouve dans un tas d'ambiguïtés juridiques de sorte qu'il y a une multiplication de procès au Québec. À la suite des représentations qui nous ont été faites sur ces sujets, et afin de bien indiquer la distinction que l'on doit faire quant au contrôle de la production et de la mise en marché des produits agricoles, j'ai proposé l'amendement que je viens de mentionner. Je dis pourquoi l'amendement, plutôt que l'article, était présenté comme cela. Vous savez que l'article 2 de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles est un article important pour le mouvement syndical et le mouvement coopératif. Dans l'article du projet de loi 116, tel que rédigé, le mot "également" semblait pouvoir présenter certaines ambiguïtés pour le mouvement coopératif. C'est pour cela que j'ai montré au mouvement coopératif, dans les discussions, quelle était la version que nous avions, le texte même que nous avions présenté au comité de législation pour la rédaction finale du projet de loi 116.

Ce comté de législation, dans la rédaction, de façon que ce soit plus élégant, avait rédigé l'article 2a, c'est-à-dire l'article 1 du projet de loi, qui a pour but d'ajouter l'article 2a dans la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, de la façon dont vous l'avez vu dans le projet de loi 116. Par ailleurs, quand je leur ai montré le projet que nous avions, qui est l'amendement que je viens de proposer, qui était celui que nous voulions mettre dans la loi, qui est sans doute moins élégant en termes de style littéraire, mais qui présente moins d'ambiguïté ou plus de clarté pour tout le monde, nous sommes revenus au texte original que j'ai présenté en termes d'amendements. C'est le but de cet amendement.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Montmagny-L'Islet. Vous me permettez quand même, M. le député; pour le moment, il va falloir s'entendre sur le mode de travail face à l'amendement. Nous avons un projet de loi, celui qui a été adopté en deuxième lecture à l'Assemblée nationale. M. le ministre nous a fourni un nouveau document sur lequel apparaissent des amendements. À moins que vous ne me disiez qu'à chaque fois qu'il y aura un nouvel amendement, un article amendé par le dépôt d'un nouveau texte par le ministre, je devrai forcément clarifier en quoi consiste l'amendement et faire voter d'abord sur l'amendement, c'est-à-dire les éléments nouveaux ajoutés à l'article, et ensuite voter sur l'article nouveau si l'amendement est accepté... Oui, M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: M. le Président, ce n'est pas la première fois que nous sommes en face d'une telle procédure. Ce qui a été retenu, pour éviter bien des débats, c'est que l'amendement proposé par le ministre, au moment où l'article est appelé, fait partie et est considéré comme étant l'article soumis à la commission, pour éviter le débat sur l'amendement que propose le ministre et un vote sur l'amendement qui est proposé par le ministre. Les deux formules peuvent être retenues. Ce que je suggère, c'est la deuxième, parce que la deuxième éviterait, évidemment, des débats et des répétitions. Je ne dis pas cela parce que je veux que la loi soit adoptée rapidement — je ne voudrais pas qu'on m'interprète, on va prendre le temps qu'il faut — mais, sur ce point, il y a une jurisprudence, une habitude, une tradition clairement établie, et cela a toujours bien fonctionné dans le passé.

Le Président (M. Dussault): C'est ce que je visais, M. le député de Beauce-Sud, à savoir ce que la commission souhaitait. Je conclus donc, par l'attitude des membres de la commission, que, chaque fois qu'au nouveau texte soumis, il y aura des éléments nouveaux, nous considérerons le texte nouveau. Ceci dit, M. le député de Montmagny-L'Islet, vous avez la parole.

M. Giasson: Merci, M. le Président. L'addition de l'article 2a au contenu et dispositions de l'article 2, tel que nous le retrouvons dans la loi, semble vouloir introduire, de façon plus explicite le terme "production" à l'intérieur de la loi sur la mise en marché, puisque la loi parle surtout de mise en marché ou de commercialisation de

produits agricoles. Effectivement, selon l'expérience vécue à l'intérieur des plans conjoints depuis leur existence au Québec, est-ce que dans des litiges ou dans des questions d'interprétation qui ont été rendues devant les tribunaux, dans les jugements qui ont été rendus, suite à ces litiges, il y a eu des indications, de la part des juges qui ont eu à entendre ces causes, qui auraient signalé une faiblesse d'interprétation de la loi, suite à l'absence du terme "production" très bien spécifié à l'intérieur de la loi? Ou, au-delà des jugements rendus par les tribunaux, est-ce que pour la Régie des marchés agricoles du Québec, il se peut qu'il ait surgi des problèmes par ce manque de précision de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles du Québec?

M. le Président, je n'aurais pas d'objection à ce que le conseiller...

M. Garon: II s'agit d'un cas de jurisprudence.

M. Giasson:... juridique réponde personnellement et que ce soit inscrit au nom du ministre.

M. Garon: M. le Président, j'ai eu connaissance d'au moins un jugement dans lequel... excusez-moi, je n'ai pas l'expérience d'un parlementaire du tout et c'est heureux pour la population.

C'est dangereux pour moi!

Pas du tout!

J'espère que non, M. le ministre.

M. le Président, j'ai eu connaissance d'au moins un jugement dans lequel une demande d'injonction a tourné autour de cette question pendant au moins deux jours, sinon trois, devant l'honorable juge Jasmin, de Montréal, dans laquelle les producteurs revendiquaient le droit de produire pour le commerce interprovincial. Évidemment, les fédérations prétendaient que ces producteurs n'avaient pas de quota et enfin, il y a eu un débat qui a duré au moins deux jours et demi sur cette question et le juge Jasmin en est arrivé à la conclusion que la province avait juridiction pour contrôler ou réglementer la production, mais n'avait pas juridiction pour réglementer le commerce interprovincial.

Dans ce cas, il a refusé l'injonction parce qu'il a prétendu — il s'agissait de la volaille — que le règlement concernait la production seulement et non pas la mise en marché. Il s'agissait de savoir si on pouvait, dans un poulailler, élever tant de volailles au Québec. Si ma mémoire est fidèle, c'est un producteur qui avait déjà rempli le quota qui lui était alloué et il essayait d'en obtenir un second sous prétexte de remplir des contrats qu'il avait avec certaines firmes d'Ontario. J'ai eu connaissance au moins de ce jugement.

Il y a les trois jugements dont le ministre a parlé et la Cour suprême, dans un de ces jugements, tout en parlant de mise en marché, cinq juges ont cru à propos de faire des notes séparées, c'est-à-dire de se déclarer d'accord avec les notes du juge Pigeon simplement pour déclarer que la production était de juridiction provinciale.

M. Verreault: En d'autres mots — juste pour compléter la question de mon collègue — si on lit à l'article 2a: "La présente loi a pour objet de réglementer...", est-ce que cela veut dire une nouvelle réglementation?

M. Garon: Non, parce que si vous allez à l'article 67, paragraphe c), vous voyez déjà que le contrôle de la production apparaît là. Vous avez, à l'article 67: Statuer sur les conditions de production, c'est contingenter la production. C'est simplement, pour une question de clarté, de dire: L'ensemble du projet de loi réglemente la production et la mise en marché. Auparavant, c'était marqué seulement...

M. Verreault: II faut réglementer, je pense bien.

M. Garon: C'est déjà dans la loi; les règlements, les articles sont déjà dans la loi.

M. Verreault: Si ce n'était pas dans la loi, maintenant on l'inclut; s'il n'y avait pas de réglementation, il faudrait en faire.

M. Garon: C'est uniquement pour éviter les ambiguïtés parce que c'est déjà là.

M. Verreault: La réglementation est déjà là.

M. Garon: II n'arrivera aucun changement parce que ce sera indiqué dans la loi. Actuellement, vous avez déjà...

M. Verreault: Parce que l'article 2a dit bien: "... a pour objet de réglementer". Je vous pose la question: Est-ce qu'il va y avoir des nouveaux règlements. S'il y en a, on voudrait les connaître.

M. Garon: Tout ce qu'il y a, ce sont les articles que vous avez là. Auparavant, dans la loi...

M. Verreault: Si on changeait le terme "réglementer", cela changerait toute la substance de l'article 2a. C'est pour cela que j'insiste sur la réglementation.

M. Garon: L'article 2 a pour objet le moyen supplétif de mise en marché ordonné par les produits agricoles. Par ailleurs, quand vous regardez tout le cadre de la Loi sur la mise en marché, vous avez les articles qui permettent de faire un contrôle de la production pour statuer sur les conditions de production, pour contingenter la production. À l'article 85, on parle même de permis de production, etc. Au fond, en incluant cela dans la loi, vous clarifiez que la loi a pour but de réglementer la production et la mise en marché, c'est tout. Avez-vous autre chose à ajouter? (17 heures)

Le Président (M. Dussault): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: Effectivement, M. le Président, même si on ne retrouvait pas le terme "production" à l'article 2 du projet de loi, dans la pratique, l'expérience vécue à l'intérieur du fonctionnement de plans conjoints, c'est que les règlements des offices de producteurs qui les administraient avaient le droit de réglementer la production. Ils se sont donné des règlements, je présume, qui ont été soumis à la Régie des marchés agricoles et la régie a accepté, a donné un accord de principe à ces règlements. Il n'y a pas lieu de croire que la question de production à l'intérieur de la loi de mise en marché et en vertu des règlements que se sont donné les offices, on ne peut pas dire que la production était absente au plan de la réglementation. Si on a pu faire fonctionner les plans conjoints au Québec, c'est parce qu'il y avait dans le règlement des offices ou l'administration des plans conjoints des pouvoirs touchant la production.

M. Verreault: Oui, mais, M. le Président, si on s'en tient à l'article 3 qui suit, on parle en plus, à la deuxième page des amendements du ministre, à l'article c) par additions, alors que ce sont d'autres réglementations. Le terme ici a pour objet de réglementer, ce n'est pas de réglementer ce qui était déjà réglementé. Il y aura des additions.

M. Garon: On a voulu prendre exactement la décision de la Cour suprême, qui dit... Vous regardez l'article... on dit que la présente loi, c'est un moyen de réglementer notre mise en marché, mais, dans le cadre de la loi, vous avez un article pour réglementer la production également, en vue de la mise en marché. À b), la Cour suprême a dit: Les provinces ont la juridiction sur la production et la mise en marché intraprovinciale. On a pris le terme exact de la décision de la Cour suprême pour dire: La loi couvre vraiment ce sur quoi on a juridiction, uniquement pour fins de clarté et cela n'ajoute pas de pouvoirs, à mon avis, par rapport à la loi existante.

M. Vaillancourt (Orford): Si je comprends bien, vous vous êtez basé sur les termes qui ont été mis dans le jugement pour les mettre dans la loi?

M. Verreault: Moi, je ne m'arrête pas aux termes, tout particulièrement, du conformisme, mais on commence avec l'article 1 et on dit que la présente loi a pour objet de réglementer, or, on sait pertinemment qu'il va y avoir une nouvelle réglementation et je pense qu'en tant que commissaire...

M. Garon: II n'y aura pas de nouvelle réglementation, qu'on sache, en tout cas on n'en n'anticipe pas. On aura les règlements un à un, si vous voulez, vous allez voir que...

M. Verreault: Cela ne nous donnera pas la substance de cette réglementation quand même, la réglementation après l'arrêté en conseil.

M. Garon: II ne donne pas de pouvoirs. Il précise simplement l'objet de la loi. L'article 2a ne donne pas de pouvoirs.

M. Vaillancourt (Orford): C'est une précision qui n'existait pas avant, et que vous suggérez par la loi.

M. Giasson: M. le Président, est-ce qu'il y aurait lieu de savoir quelle était la réserve précise qu'avait la Coopérative fédérée lorsque, dans son mémoire du 16 décembre, elle demandait tout simplement le retrait de l'article 1 du projet de loi 116, tel que formulé avant le dépôt des amendements? Quelles étaient les craintes de la Coopérative fédérée face au libellé de l'article?

M. Garon: C'était le mot "également". Elle avait peur que ce ne soit pas une précision, mais que cela ajoute et en enlevant le mot "également" et en rédigeant l'article tel qu'on l'a rédigé, cela l'a satisfaite. On ne voulait pas l'ajouter et le mot "également" dans la rédaction du projet de loi 116 l'inquiétait. C'est comme si cela ajoutait quelque chose, comme "aussi", en plus. Elle a alors préféré la deuxième rédaction qui ne dit pas "en plus" ou "également" ou "en outre", mais qui tout simplement précise les termes.

Évidemment, si, dans leur esprit, cela voulait dire beaucoup plus loin au fond, évidemment, cela est une autre affaire. Ce n'est pas cela que cela voulait dire.

M. Biron: M. le Président, sur le même sujet.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Lotbinière.

M. Biron: Est-ce que j'ai bien compris le ministre lorsqu'il dit "a pour objet de réglementer la production"? Le gouvernement du Québec aurait le pouvoir de réglementer la production, même pour le commerce interprovincial et international?

M. Garon: Pour toutes fins, où que la production aille. Ce qui n'était pas clair auparavant.

M. Biron: À mon point de vue, je ne voudrais pas prendre de votre temps, mais je voudrais juste vous lire quand même ce que je vois dans le jugement de la Cour suprême. Je prétends qu'on n'a pas le droit de le faire, d'après le jugement de la Cour suprême, que c'est seulement complémentaire. Je voudrais lire à la page 7 — je ne sais pas si vous l'avez — "We are not called upon to decide in the present case whether the Federal Parliament could assume control over egg farms devoted exclusively to the production of eggs for extraprovincial trade." Est-ce que vous l'avez? Voulez-vous le regarder?

M. Garon: Je vous écoute.

M. Biron: "Under the present circumstances, such farms are like any other farms, local under-

takings subject to provincial authority irrespective of the destination of their output. I can see no reason why such legislator authority would not extend to the control of production as to quantity just as its extents are undoubtedly to the price to be paid for raw materials." On a toujours eu cela. On n'a pas besoin de loi nouvelle. D'après la Cour suprême, on dit qu'on l'a toujours eu.

Un peu plus loin, on dit: "This does not mean that such power is unlimited. A province cannot control extraprovincial trade as was held in the Manitoba egg reference and in the Burns food case. However, marketing does not include production and therefore, provincial control of production is prima facie valid. In the instant case, the provincial regulation is not aimed at controlling the extraprovincial trade. Insofar as it affects this trade, it is only complementary to the regulations established under federal authority. "

Un peu plus loin, on dit: "While I adhere to the view that provinces may not make use of their control over local undertakings to affect extraprovincial marketing, this does not, in my view, prevent the use of provincial control to complement federal regulation of extraprovincial trade."

On dit qu'on ne peut qu'ajouter un complément. Il n'y a rien de neuf là-dedans. On dit qu'on ne peut pas se servir du contrôle. C'est la façon dont je le comprends. C'est pour cela que je voudrais peut-être que M. Trudeau nous explique à nouveau sa façon de voir. La façon dont je le comprends, c'est qu'on n'a pas le droit d'employer du contrôle de production pour contrôler directement un commerce interprovincial et international parce que cela relève du gouvernement fédéral.

M. Garon: C'est exact; on n'a pas le droit. J'admets que ce n'est pas facile d'interpréter un jugement de la Cour suprême, surtout de cette ampleur. Pour autant que je le comprenne, par ailleurs, si on peut le résumer, c'est ceci: La production est une matière locale et de juridiction provinciale. Cela n'était pas dans la loi de mise en marché et l'amendement l'inscrit. Cela ne l'était pas tel quel, en termes blancs et noirs, comme objet de la loi.

M. Dubois: Est-ce que je pourrais ajouter un commentaire juste avant de continuer? Cela n'a quand même rien à voir avec le vide juridique créé par le verdict de la Cour suprême.

M. Biron: On l'a toujours eu, ce n'est pas nécessaire.

M. Dubois: Je dirais que réglementer la production n'a rien à y faire directement.

M. Garon: II y a beaucoup de questions dans ce que dit l'honorable chef de l'Union Nationale; il y a deux ou trois questions les unes dans les autres. Si je pouvais répondre à la première qui est déjà complexe, M. le Président.

La production, c'est une matière locale et pri- vée, donc, de juridiction provinciale. Deuxièmement, elle demeure de juridiction provinciale, si je comprends bien le jugement de la Cour suprême, même si toute la production est destinée au commerce extraprovincial ou d'exportation, comme cela a été le cas dans la cause de Coronation, par exemple, où la compagnie a plaidé que la réglementation provinciale était nulle, parce que tout son produit ou 95% de son produit, s'en allait à l'extérieur. La Cour suprême a dit non. Quelle que soit la destination subséquente de votre produit, la production, c'est une matière provinciale.

Mais — j'arrive à ce que vous avez dit tantôt — on ne peut pas, sous le couvert de réglementer la production, faire une législation qui viserait le commerce interprovincial, dont ce serait l'objet. On ne pourrait pas. L'exemple typique, c'est celui de la cause de la potasse. Il a été mis en preuve que la province de la Saskatchewan a des réserves de potasse pour environ 1000 ans à venir. Je ne suis pas spécialiste en la matière, mais c'est marqué dans le jugement.

À un moment donné, ces gens ont fait une législation pour contrôler la production de la potasse. La Cour suprême a dit: Ce n'est pas possible que le but de la législature soit de contrôler la production. Tout le monde sait que ce n'est pas dans la province que cela s'écoule, cela s'écoule sur les marchés extérieurs. Elle a annulé la loi.

Nous, nous étions sur la frontière. Il n'y avait rien qui disait que notre loi voulait réglementer toute la production au Québec. On a essayé de le dire. Par ailleurs, quand est arrivée la mise en marché, on a essayé de dire qu'on voulait rester, pour le moment en tout cas, dans le domaine de notre compétence constitutionnelle, c'est-à-dire que quant à la mise en marché, on voulait la contrôler, seulement dans le commerce intrapro-vincial.

C'est ainsi qu'on a essayé de saisir, parce que... Juste une autre remarque, je pense, qui va rejoindre l'autre question qui m'a été posée. Il ne faut pas oublier que lorsque le Manitoba avait testé la loi du Québec, sous le couvert d'une loi du Manitoba, en proposant une loi, mot à mot, qui était la loi du Québec, la Cour d'appel du Manitoba, une des raisons qui avait servi à déclarer la loi ultra vires, c'est qu'on était à peu près les seuls, la province de Québec, parmi ceux qui ont des lois de mise en marché, qui n'avions pas un énoncé de principe voulant que la loi avait pour but de réglementer le commerce intraprovincial. Et le juge Dixon, qui siège aujourd'hui à la Cour suprême, a dit que l'absence des mots "within the province" dans une loi de mise en marché, alors que ces mots existent dans toutes les autres lois, c'était un indice suffisant pour la faire déclarer ultra vires.

On a essayé de boucher les deux trous au mieux de l'habileté de certains légistes, celui de la production et celui du commerce intraprovincial.

M. Biron: Je vous remercie de votre explication. De notre part, on n'a aucune objection à la mise en marché intraprovinciale. On marche avec

vous là-dessus. Mais lorsque vous parlez de contrôler la production, votre explication, à mon point de vue, n'est pas encore claire. Dans le fond, on a le cas de la potasse qui arrive là-dessus. J'ai l'impression que cette loi pourrait aller encore une fois jusqu'à la Cour suprême et être déclarée ultra vires, si on contrôle indirectement ce qu'on n'a pas le droit de contrôler directement, c'est-à-dire le commerce intraprovincial. Et il va y avoir encore un trou quelque part. C'est vrai.

M. Garon: Si quelqu'un se sert non pas de l'article 2, mais de l'article 67 auquel on va arriver tantôt, si quelqu'un se sert du pouvoir, si la loi est adoptée, que vous lui accorderez pour adopter un règlement qui va contrôler les deux commerces, il n'y a pas de doute que ce règlement sera cassé par les tribunaux. Il faudra qu'il légifère — je parle au point de vue de la réglementation — avec prudence, autrement ce serait cassé.

M. Giasson: Les règlements de l'office, dans l'hypothèse que vous venez d'énoncer, seraient-ils acceptés par la Régie des marchés agricoles du Québec?

M. Garon: II ne faudrait pas qu'ils le soient.

M. Giasson: Ah bon!

M. Garon: Je ne peux pas parler pour la régie.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, M. le Président. À la suite des explications qui viennent d'être données, j'aimerais revenir un peu sur ce que le ministre a dit tout à l'heure. D'ailleurs, il le dit depuis le début. C'est déjà dans la loi. On l'a dit. On l'a dit partout. Pourquoi, si c'est déjà dans la loi, y revenir? C'est une question qu'on peut se poser. Je comprends qu'on pourra me répondre: C'est pour être plus précis, c'est pour être plus clair.

J'ai participé aux discussions qui ont eu lieu en commission parlementaire et je ne me souviens pas si mon collègue de Montmagny-L'Islet y avait participé à l'époque. Lorsqu'on a étudié le fameux projet de loi 12, la loi qui, aujourd'hui, constitue le chapitre 36 des lois de 1974, il n'a pas été tellement question de contrôler la production. Il avait été dit qu'il fallait certains pouvoirs dans certains domaines, que c'était très limité, mais le but n'était pas de contrôler la production, c'était de contrôler la mise en marché. D'ailleurs, c'est ce qui a été dit à l'époque et la loi est bien claire là-dessus. Quand on prend la section II du chapitre 36 des lois de 1974, quand on parle de la régie, à l'article 4, la régie a pour fonction générale de favoriser une mise en marché ordonnée, efficace et juste des produits agricoles. C'étaient les buts de l'industrie, du commerce et des autres personnes engagées dans la mise en marché des produits agricoles. L'article 4 établit les pouvoirs de la régie. C'est l'étude que nous avons faite en 1974 de la loi. Il était question de la mise en marché des produits agricoles, il n'était pas question du contrôle de la production. (17 h 15)

Lorsque j'entends le ministre — j'aimerais bien qu'il soit clair là-dessus — faire toujours référence à la Cour suprême, la Cour suprême n'a pas recommandé, que je sache, que le Québec vote une loi de contrôle de la production. Ce que la Cour suprême a dit, si j'ai bien compris, c'est qu'il appartenait aux provinces de le faire. Entre dire que le fait d'exercer ce pouvoir est de notre juridiction; confirmer un pouvoir et exercer un pouvoir, c'est complètement différent. D'ailleurs, le débat sur la loi 194 est un bel exemple pour l'illustrer, le projet de loi sur l'autodétermination. Elle a reconnu que nous avions le droit de le faire. Elle n'a pas recommandé de le faire. Qu'on ne vienne pas s'abrier...

M. Garon: ...

M. Roy: ... qu'on ne vienne pas se couvrir derrière le jugement de la Cour suprême pour dire que cette disposition de la loi 116 s'impose.

Le Président (M. Dussault): M. le ministre.

M. Garon: C'est l'enfance de l'art. Les tribunaux ne disent pas aux provinces: Faites telle loi, ou faites ceci ou cela. Ils vous disent: Vous avez juridiction ou vous n'avez pas juridiction. Si vous avez une juridiction et qu'à un moment donné, vous êtes dans ce champ et que vous avez des contrats à signer et des plans nationaux et tout cela, et que ce n'est pas votre juridiction, comment allez-vous faire pour faire fonctionner cela? Voyons donc, c'est l'enfance de l'art! Un tribunal ne dira pas au gouvernement: Faites ceci ou faites cela! Il va nous dire ce qui se passe. Il vous dit actuellement de façon claire: Production, compétence des provinces; commerce intraprovincial, compétence des provinces. Il fait certaines distinctions et il dit, par ailleurs... Il répond aux questions 8 et 9 concernant le commerce extraprovincial, etc., et la production par rapport à cela. Il ne vous dit pas adopté ou non, mais: On a des plans nationaux, on a des plans de mises en marché. Actuellement, il y a des contrôles sur la production, il y a des contrôles sur la mise en marché et tout cela. Quand on signe des accords après cela, il faut être capable de les faire respecter, il faut avoir les pouvoirs dans les lois. Il me semble que c'est évident.

M. Roy: Les pouvoirs dans les lois, M. le ministre, existent en vertu de la loi 64.

M. Garon: Vous avez trouvé cela raffiné comme distinction dans le jugement de la Cour suprême? C'est un référé du gouvernement de l'Ontario, parce qu'il veut avoir une opinion de la Cour suprême pour que ce soit clair, parce qu'il est tanné des procès qu'il y a dans ce secteur.

M. Roy: On ne parlera pas du cas...

M. Garon: C'est la même chose pour le Québec. On n'est pas dans des madriers au point de vue... On est dans des choses minces au point de vue juridique. M. Trudeau, vous avez vu les prudences qu'il prend, parce qu'il dit: C'est mince sur le plan juridique.

M. Roy: II dit même, M. Trudeau, il vient de dire, si je l'ai bien compris, que si un règlement de cette nature était fait, il pourrait même, à la suite des questions du chef de l'Union Nationale, être jugé ultra vires par la Cour suprême. M. Trudeau a dit cela tout à l'heure.

M. Garon: Non, ne déformez pas les choses. Ce n'est pas cela qu'il a dit.

M. Roy: Ce n'est pas cela qu'il a dit?

M. Garon: II a dit: Si un office adoptait un règlement pour faire dire autre chose qui n'était pas de sa juridiction, il serait illégal. C'est ce qu'il a dit. Il n'a pas dit: Un règlement adopté dans le cadre des juridictions.

M. Giasson: Si j'ai bien compris M. Trudeau, il a voulu nous indiquer que si un office de producteurs, dans des règlements que l'office décide d'adopter ou de faire adopter, et voulait établir des pouvoirs dans cette réglementation qui ne relèvent pas de la juridiction provinciale, mais d'une juridiction fédérale...

M. Chevrette: C'était ultra vires.

M. Giasson: ... la Législature du Québec ou les tribunaux du Québec ne seraient pas capables de reconnaître cela au plan constitutionnel ou au plan juridique dans le partage des pouvoirs.

M. Garon: C'est cela.

M. Giasson: Je l'ai saisi ainsi. Je ne sais pas si...

M. Garon: C'est ce qu'il a dit.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Merci, M. le Président. J'aimerais revenir aux propos antérieurs du ministre. Vous avez répété, à maintes reprises, que le projet de loi 116 avait pour but et seul but de combler le vide créé par le verdict de la Cour suprême et de déclarer les prélevés perçus d'une façon rétroactive comme étant perçus et étant acceptés, et le projet de loi 116 ratifie ces prélevés. On déborde de loin le besoin ou le vide créé par la Cour suprême, parce que réglementer la production comme vous insérez cela à l'article 2a, c'est-à-dire à l'article 1 qui modifie l'article 2 de la loi de 1974, chapitre 36, ce n'était pas une nécessité due au fait du verdict de la Cour suprême. C'est une nouvelle mesure que vous apportez ici, mais qui n'a aucun lien avec le verdict de la Cour suprême. C'est là-dessus qu'il faudrait quand même vider le sac en partant.

M. Roy: C'est cela. C'est le point.

M. Garon: L'article 2a lui-même ne réglemente pas la production. Il stipule que la loi a aussi pour objet de réglementer la production et la réglementation se trouve dans d'autres articles qui sont déjà dans la loi 67, la loi 85.

M. Giasson: C'est cela. Les pouvoirs qui sont donnés à des offices de producteurs de faire des règlements dans différents articles qu'on retrouve dans la loi.

M. Garon: C'est cela, mais dire qu'une loi a pour objet de faire telle chose...

Le Président (M. Dussault): M. le député de Huntingdon, vous n'avez pas terminé?

M. Dubois: Non, je n'ai pas terminé. M. le ministre, ce matin, vous avez laissé entendre que les minimes amendements que vous avez apportés au projet de loi 116 satisferaient les coopératives. Je pense que vous avez indiqué cela assez clairement ce matin et moi, j'ai rencontré, au début de février — cela ne date pas de tellement loin — avant la reprise de cette session, des dirigeants de certaines coopératives affiliées à la Coopérative de Granby et ils ne sont pas satisfaits. Ils demandent absolument que cette loi soit révisée et amendée en vue de respecter un peu plus l'élément coopératif au Québec.

D'ailleurs, dans ce sens, j'aimerais relire, peut-être... Vous avez reçu, le 16 décembre, M. le ministre, une lettre ou un mémoire où les coopératives du Québec font part de leur inquiétude. Je pense que même avec l'amendement minime que vous avez apporté à l'article 1, cela ne répond pas aux coopératives. On dit clairement: "Dans ce contexte" et je cite... M. le ministre, j'aimerais citer quand même un article ou un paragraphe de la lettre que vous avez reçue des coopératives. On dit: "Dans ce contexte, l'article 2a, proposé par l'article 1 du projet de loi, prend une signification inquiétante." Il n'y a pas eu de changement majeur qui enlève cette inquiétude. "Ce texte est, en apparence, tout à fait conforme. Nous avons toujours pensé, en effet, que la loi des marchés agricoles du Québec a pour objet de réglementer la production et la mise en marché des produits agricoles au Québec. C'était à l'article 2 du chapitre 36 de 1974. On peut se demander... — ce sont les coopératives qui parlent —... pourquoi ce texte devient nécessaire, alors que la législation a tenu debout, sans ce texte, pendant 20 ans et a reçu plusieurs interprétations de la part de nos tribunaux, selon lesquelles l'objet de la loi était, en effet, de réglementer la production et la mise en marché des produits agricoles au Québec.

"À notre connaissance, aucun tribunal n'a mis en doute cette affirmation et le jugement de la Cour suprême, dont les notes explicatives au projet de loi font état, n'a pas pour effet, ni de près, ni de loin, de porter atteinte à ce point de vue; dans ce contexte, cet amendement proposé, d'ajouter un article 2a à la loi, pour dire ce que tout le monde a toujours compris, est carrément inutile. La loi existe depuis 20 ans et les textes de cette loi sont substantiellement les mêmes depuis 20 ans."

M. Garon: C'est ce que j'ai toujours dit, que cela n'ajoutait rien, que cela précisait.

M. Dubois: Mais il y a une nuance quand même qui est assez intéressante, quand on parle de réglementer. "Tous les textes peuvent être interprétés de manière à s'appliquer exclusivement à la production et à la mise en marché intraprovinciale et toutes les interprétations de tous les tribunaux jusqu'à ce jour nous disent que l'objet de la loi est la réglementation de la production et de la mise en marché. Si quelques règlements ou quelques plans conjoints ou quelques conventions intervenues en vertu de ladite loi ont pour effet de réglementer la production ou la mise en marché interprovinciale, les cours seront bien là pour déclarer pareille activité ultra vires des pouvoirs, soit de la Législature, soit de l'organisme qui les aura exercés, qu'il y ait un article 2a ou non." L'article 2a n'a pas son importance, selon les Coopératives. "Cet article 2a, par contre, serait désormais juxtaposé — c'est là que c'est intéressant, M. le ministre — à l'article 2 actuel de la loi et serait introduit dans la loi des marchés agricoles avec les amendements à l'article 67 dont nous faisons état dans le présent mémoire. Est-ce à dire que le texte de cet article 2a aurait pour but ou pour effet de dire que les coopératives et leurs membres, lorsque ceux-ci sont assujettis à un plan conjoint, sont réglementés dans leur production et leur mise en marché par le plan conjoint? Ne serait-ce pas là l'intention cachée de cet article 2a?

Le résultat pratique ne serait-il pas, alors, d'anéantir, de fait, tout le sens qu'on peut encore espérer donner à l'article 2 actuel de la loi malgré les interprétations de la régie — voir la décision dans l'ACL — et malgré l'amputation faite, il y a quelques années, au dernier paragraphe de cet article 2.

Comme le législateur, en principe, ne parle pas pour ne rien dire — ordinairement, c'est cela — et comme l'interprétation actuelle de la loi est bien à l'effet que la loi a pour objet de réglementer la production et la mise en marché des produits agricoles au Québec, il faut bien conclure qu'il y a derrière cette disposition, en apparence anodine — la photocopie n'est pas parfaite — une intention de porter atteinte aux droits des coopératives.

Dans les circonstances, nous demandons non seulement que cet article 2a soit biffé des amendements, mais que le dernier paragraphe de l'article 2 qui a été amputé il y a quelques années, sans raison, soit rétabli. Quand vous prenez...

M. Garon: Combien y a-t-il de coopératives dans la production, d'après vous?

M. Dubois: Dans la production de?

M. Garon: Vous dites que cela réglemente la production pour faire plaisir aux coopératives. Les coopératives ne produisent pas.

M. Dubois: C'est 19 000 membres...

M. Garon: Elles transforment les produits.

M. Dubois: C'est 19 000 coopérateurs...

M. Giasson: Ce sont des coopératives qui possèdent des blocs de quotas joliment importants. Vous avez une coopérative, à un moment donné, qui a acquis tous les actifs de Québec Poultry, ils avaient un quota... peut-être 2 millions de pieds de plancher. Je ne sais pas qui produit, mais ce sont eux qui ont les quotas.

M. Dubois: Au premier paragraphe de l'article 2, en fait il y a 19 000 sociétaires au Québec. N'est-ce pas, M. le ministre?

Le Président (M. Dussault): Alors...

M. Dubois: Ce sont eux qui avaient le choix, vous êtes au courant qu'il y a 19 000 sociétaires au Québec.

M. Garon: Pardon?

M. Dubois: II y a 19 000 sociétaires dans toutes les coopératives affiliées ou non dans la transformation du lait. D'ailleurs, c'est ce qu'on dit dans la requête à la Régie de la mise en marché à l'effet que les coopératives désireraient leur propre plan conjoint. On indique au tout début de cette requête qu'il y aurait 19 000 sociétaires coopérants à l'intérieur de toutes les coopératives qui ont signé cette requête. Je pense que 19 000 producteurs sur 25 000, c'est quand même une bonne part de l'industrie laitière au Québec; c'est d'ailleurs 70%.

M. Garon: Quelle requête?

M. Dubois: La requête des coopératives, dans le lait, à la Régie de...

M. Garon: C'est une autre affaire.

M. Dubois: Cela ne fait rien; je vous indique quand même que cela représente 70% des producteurs de lait, c'est indiqué dans cette requête qu'il s'agit de 19 000 coopérants. Je pense que c'est assez important d'y penser.

M. Garon: Cela n'a rien à voir avec cela.

M. Dubois: Oui, cela a directement affaire avec cela. Absolument. Les extraits du mémoire du 16 décembre que je viens de vous lire touchent

directement l'article 1 et l'amendement 2a du projet de loi 116. Je me demande... si vous dites que cela n'a rien à voir avec cela, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans votre explication. Si vous prenez l'article 2...

M. Garon: C'est une requête devant la régie dont je parle.

M. Dubois: Je m'en sers pour vous indiquer l'importance des coopératives au Québec au niveau de la transformation du lait et du nombre de producteurs qui sont inscrits comme sociétaires à la coopérative. Ils ont des inquiétudes et ces inquiétudes, vous les avez.

M. Garon: Pensez-vous que le gouvernement a pour but de faire disparaître les coopératives? C'est fou raide!

M. Dubois: Non, c'est une question de...

M. Garon: Savez-vous combien de coopératives on va financer cette année?

M. Dubois: Ce n'est pas...

M. Garon: Vous trouvez qu'on en finance trop, vous avez dit cela toute l'année.

M. Dubois: Je ne vous parle pas du financement des coopératives, je vous parle du respect des entités en place. Je pense que c'est de cela dont on va discuter.

Quand on dit, à l'article 2 du chapitre 36 de 1974, que la présente loi a pour objet de mettre à la disposition des producteurs et des consommateurs un moyen supplétif de mise en marché ordonnée et juste des produits agricoles "et elles ne doivent pas être interprétées comme moyen de concurrencer l'organisation coopérative de la production et de la mise en marché des produits agricoles.., il n'est pas question de concurrencer les coopératives, mais de leur apporter un moyen supplétif. C'est net et clair à l'article 2 du chapitre 36 de 1974.

À cet égard, je propose une motion d'amendement qui se lirait comme suit: Que l'article 1 du projet de loi 116 soit modifié en retranchant, au début de la deuxième ligne de l'article 2a, les mots "la production au Québec des produits agricoles et".

M. Garon: Cela ne serait plus du tout clair. M. Dubois: II en reste encore assez. M. Garon: Bien non!

M. Dubois: II reste la mise en marché, c'est suffisant.

M. Garon: II est déjà dans l'article. M. Dubois: Oui, mais c'est cela.

Le Président (M. Dussault): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Huntingdon, vous allez me fournir le texte. Merci. La motion d'amendement consiste en ceci: Que l'article 1 du projet de loi 116 soit modifié en retranchant au début de la deuxième ligne de l'article 2a, les mots "la production au Québec des produits agricoles et". (17 h 30)

Je me dois de me prononcer sur la recevabilité de cette motion. Je pense, M. le député de Huntingdon, que vous conviendrez que si vous enlevez les mots que vous suggérez à la commission d'enlever à l'article, à toutes fins utiles, vous enlevez au texte le sens premier qu'il avait. En fait, vous le rendez tout à fait contraire à ce qui existe. De toute façon, c'est ma première impression et je vais quand même écouter des membres de la commission sur la recevabilité pour m'éclairer davantage. M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président, je crois effectivement qu'elle est irrecevable parce qu'elle vient enlever un des principes de la loi votés en deuxième lecture.

M. Roy: Enfin... Allez, cela va bien.

M. Chevrette: Je vous dirai ce que vous n'avez pas compris tantôt.

Le Président (M. Dussault): S'il vous plaît, M. le député de Joliette-Montcalm, vous avez la parole.

M. Chevrette: M. le Président, l'Assemblée nationale, après s'être prononcée en deuxième lecture sur des principes d'une loi, on peut en modifier les techniques, mais on ne peut pas en modifier les principes fondamentaux qui sous-tendent une loi. C'est acquis. Et la jurisprudence à l'Assemblée nationale est acquise depuis toujours sur cela. En deuxième lecture, il n'y a même pas eu d'amendements, que je sache, de l'Union Nationale pour enlever la production. Il n'y a même pas eu d'amendements, il n'y a même pas eu d'argumentation là-dessus parce qu'à l'époque, elle mêlait complètement la question des dissidents, des intégrateurs et des producteurs pour ensuite se rabattre en commission en parlant là, par exemple, de la divergence de vues entre le syndicalisme agricole et les mouvements coopératifs. Même avec la dernière argumentation, on se rend encore compte qu'on ne comprend pas le projet de loi 116 comme tel. Nous disons ceci: La loi a été votée en deuxième lecture, le principe fondamental en a été accepté. Ce qu'il s'agit d'amender maintenant, ce sont des modalités. Selon moi, si vous enlevez le principe de la réglementation d'une production au Québec, vous venez d'amputer le projet de loi d'un des principes fondamentaux qui ont été votés en deuxième lecture à la majorité, à l'exception de dix personnes qui ont voté contre.

Le Président (M. Dussault): Sur la recevabilité, M. le député de Lotbinière.

M. Biron: M. le Président, on sait que le titre même du projet de loi c'est: Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. L'amendement présenté par le député de Huntingdon a pour effet de tout simplement confirmer le titre même du projet de loi 116, c'est-à-dire justement avoir une loi qui va légiférer sur la mise en marché des produits agricoles au Québec. Dans les discussions que nous avons eues tout à l'heure, M. Trudeau et le ministre nous disent: C'est sûr qu'on n'a pas le droit de contrôler la production pour le commerce interprovincial et international et on marche sur du papier passablement mince. C'est là qu'on s'aperçoit que ce que déclarait le ministre en deuxième lecture, il avait raison, c'est pas mal comprliqué. Alors les procès vont continuer. Cela ne réglera rien. C'est tout simplement de la redondance, le fait de parler de contrôle de production quand on ne peut même pas la contrôler, on n'a pas le droit de la contrôler et on l'a contrôlée en fait, en pratique, depuis une vingtaine d'années et on n'a pas eu de problème là-dessus. Ce n'est pas avec le contrôle de production qu'on a eu des problèmes.

M. Garon: On était bourré de problèmes ce matin.

M. Biron: Ce n'est pas avec le contrôle de production qu'on a eu des problèmes et il faut bien diviser, M. le Président, ce qu'il y a dans le projet de loi 116, c'est-à-dire le problème dans les notes explicatives, on le retrouve, d'ailleurs, pour corriger un trou venant de la Cour suprême sur la mise en marché et on a dit qu'on était d'accord pour en discuter et en discuter rapidement. On s'aperçoit aussi que, finalement, à l'article 1 du projet de loi, M. le Président, on ajoute un deuxième principe à la loi en disant: Cette présente loi a pour objet de réglementer la production, au Québec, des produits agricoles. M. le Président, je soumets que l'amendement proposé par le député de Huntingdon va tout simplement faire en sorte que l'article 1 de la présente loi, c'est-à-dire 2a du chapitre 36, devienne exactement: La présente loi a pour objet de réglementer la mise en marché des produits agricoles dans le commerce interprovincial au Québec. C'est le titre même du projet de loi. Alors, c'est recevable. Vous ne pouvez pas ne pas recevoir un tel amendement qui ne va que confirmer le titre du projet de loi, M. le Président.

M. Roy: M. le Président.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Concernant la recevabilité, si je prenais à la lettre les propos qui ont été tenus par mon collègue et ami, l'honorable député de Joliette-Montcalm — qui aime bien que ce soit bien précis — il viendrait de me fournir un sérieux argument sur la motion que j'ai l'intention de présenter à la fin de l'étude du projet de loi, c'est-à-dire d'en changer le titre. Le titre de la loi est Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. C'est le titre qu'on nous a servi, le projet de loi no 116. Quand on arrive à l'article 2a, on dit: L'objet en est de réglementer la production au Québec des produits agricoles et la mise en marché des produits agricoles, il y a deux éléments. Alors, ce n'est pas la Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, si je retiens les propos qui ont été tenus par l'honorable député de Joliette-Montcalm. Ce serait la Loi qui a pour objet d'assurer le contrôle de la production agricole au Québec.

M. le Président, je ne veux évidemment pas aborder la question de fond à ce moment-ci. Je pense que cette question est quand même fondamentale, tenant compte de tous les débats qui ont eu lieu, puisqu'on dit tout simplement qu'on ne fait que préciser. C'est le ministre qui a dit qu'on ne faisait que préciser. Si cela ne fait que préciser, cela ne change pas le principe de la loi. Si le ministre nous dit que cela ne fait que préciser, que cela ne change pas le principe de la loi, le député de Joliette-Montcalm dit qu'on mettrait de côté un des principes fondamentaux du projet de loi.

M. le Président, après cela, on nous demande de comprendre. Cela commence à être passablement compliqué. J'aimerais savoir quel bout de la table dit vrai. La décision que vous avez à rendre, M. le Président, serait à l'effet, à mon humble avis — puisqu'on me demande mon opinion — de permettre aux parlementaires de pouvoir s'exprimer sur ces modalités puisque, s'il s'agit de précisions, il s'agit de modalités. Alors, on devrait retenir les propos du ministre, si ce sont les propos du ministre qui prévalent, de façon que ce ne soit pas la présidence qui dispose de l'amendement, mais les parlementaires, la commission elle-même. Pour moi, c'est fondamental que ce soient les membres de la commission parlementaire qui disposent de l'amendement et non pas la présidence. À mon avis, cet amendement... Nous avons vu des amendements de ce genre dans l'étude de tous les autres projets de loi qui ont été soumis à différentes commissions parlementaires. Ce sont les membres de la commission parlementaire qui ont décidé si l'amendement devait être accepté ou refusé. Dans les circonstances, M. le Président, de façon à ne pas fausser le rôle que doit jouer cette commission parlementaire, je pense que vous devriez déclarer cette motion recevable.

M. Giasson: M. le Président.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Montmagny-L'Islet, je devrais normalement, pour être éclairé — enfin, c'est le privilège du président de recevoir de l'éclairage, mais quand il est suffisamment informé, qu'il est prêt à rendre une décision, il le fait tout à fait à l'aise, alors, je ne devrais normalement n'entendre qu'un autre parti, c'est-à-dire le Parti libéral, que je n'ai pas entendu

jusqu'à maintenant. Je vous dirai si j'entendrai quelqu'un d'autre par la suite.

M. le député de Montmagny-L'Islet.

J'ai entendu le parti de l'Union Nationale et c'est monsieur le chef de l'Union Nationale que j'ai entendu.

M. Dubois: ...

Le Président (M. Dussault): Je verrai, d'accord?

M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: M. le Président, sur la recevabilité, en fonction des diverses expériences que j'ai vécues au cours de travaux dans nos commissions parlementaires où j'ai été témoin très souvent de décisions, de jugements rendus sur la recevabilité ou la non-recevabilité de certaines motions, je serais d'avis que la motion présentée par le député de Huntingdon est recevable. Voici pourquoi. L'article 2 recherche deux objectifs, soit celui de réglementer la production au Québec et la mise en marché des produits agricoles dans le commerce intraprovincial au Québec. Ce sont là deux objets qui sont nettement séparés l'un de l'autre.

M. Chevrette: Des objets.

M. Giasson: Deux objectifs. Non pas des principes, des objectifs. Des objets donc, des objectifs.

M. Chevrette: L'Union Nationale va dire que ce sont deux objets.

M. Giasson: À l'article 2, on dit: "La présente loi a pour objet." Donc, des objectifs qui sont donnés par cela. Il y a deux objectifs poursuivis à l'intérieur de l'article 2a. Je ne veux pas discuter du bien fondé de la motion en soi; si vous la recevez, elle sera débattue, elle sera votée par la commission mais, selon moi, dans l'interprétation de l'article 70 de nos règlements, qui dit: Un amendement doit se rapporter directement au sujet de la motion proposée et ne peut avoir que les objets suivants, on ne dit pas les principes suivants, mais que les objets suivants: Retrancher, ajouter des mots ou les remplacer par d'autres. Il est irrecevable si son effet est d'écarter la question principale sur laquelle il a été proposé et il en est de même d'un sous-amendement par rapport à un amendement.

Lorsqu'on interprète notre article 70 et qu'on voit le libellé de l'article 2a, il y a deux objectifs, à mon sens, qui sont poursuivis, celui de réglementer la production et celui de réglementer la mise en marché des produits agricoles dans le commerce intraprovincial. Selon l'interprétation que je fais de notre article 70 du règlement, cette motion, à mon avis, serait recevable, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): Je vais entendre d'autres points de vue. M. le député de Huntingdon et ensuite M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Dubois: M. le Président, le titre du projet de loi ou l'appellation, c'est Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles; tout simplement. Si on prend l'article 154, deuxièmement, on dit: "La commission peut amender un projet de loi, pourvu que l'amendement ne soit pas étranger à l'objet du projet et qu'il ne s'oppose pas au principe affirmé en deuxième lecture."

L'appellation du projet de loi, je pense, est conforme avec mon amendement, puisque le titre du projet est "... modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles." Cela demeure encore, à l'article 1.2a, où on dit que la présente loi a pour objet de réglementer la mise en marché des produits agricoles dans le commerce intraprovincial. C'est une addition, quand même. Le commerce intraprovincial n'existait pas au projet de loi original. Le ministre a apporté un amendement. Je pense que ma motion est tout à fait conforme au règlement et devrait être déclarée acceptable, puisque le titre même du projet de loi le confirme.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Joliette-Montcalm et, après cette intervention, je vais rendre ma décision.

M. Chevrette: M. le Président, je pense que c'est le député de Montmagny-L'Islet qui nous donne le meilleur élément pour prouver qu'elle est irrecevable. À partir du fait, d'abord, qu'on ne peut amender les principes d'une loi, les objets fondamentaux d'une loi, quand il apporte comme argument qu'un amendement a pour objet de retrancher des mots ou d'ajouter des mots; on ne peut pas retrancher des mots ou ajouter des mots qui ont pour objet de changer l'objectif même de la loi.

Le premier dépôt en Chambre, et sur lequel on a voté — regardez votre feuille du tableau comparatif des deux projets de loi, amendé ou non — dans les deux cas, vous avez: "La présente loi a également pour objet de réglementer la production et la mise en marché des produits agricoles au Québec."

Donc, vous aviez les deux principes mêmes de la loi dans l'article 2a avant. L'amendement apporté par le ministre conserve ces deux principes, parce que le ministre n'aurait même pas pu ajouter un principe fondamental à une loi s'il ne l'avait pas mis dans son principe initial. Et je vous réfère à la loi 101, M. le Président, lorsque le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières a voulu apporter, au niveau de l'étude article par article, un amendement visant à ce que l'État crée lui-même une société pour assurer le matériel. C'était un principe qui n'avait pas été adopté au niveau de la deuxième lecture et cela a été déclaré irrecevable par le président, prétextant justement qu'on ne pouvait pas changer l'objet même du projet de loi.

Comme l'objet du projet de loi est bien de réglementer la production et la mise en marché, il est impossible... Si j'ai fourni une belle occasion au député de Beauce-Sud, il vient de m'en fournir une très belle de démontrer qu'ils sont contre les plans conjoints.

M. Roy: Question de privilège, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): Un instant! M. le député de Beauce-Sud. Vous savez très bien qu'il n'y a pas de question de privilège en commission parlementaire.

M. Roy: Non, question de règlement. C'est un lapsus, M. le Président, question de règlement. Je n'ai jamais dit, en aucun moment, en aucune occasion, en aucun endroit du Québec que j'étais contre les plans conjoints. Je regrette. Il ne faut pas l'oublier, le député de Joliette-Montcalm serait peut-être heureux qu'on le dise pour pouvoir nous lapider davantage. Je peux le rassurer tout de suite, je n'entrerai pas dans ce petit jeu, je n'ai jamais prétendu que les plans conjoints ne devraient pas exister, au contraire, j'ai fait bien d'autres déclarations dans le sens opposé de celui que vient de déclarer le député de Joliette-Montcalm. Quand on parle du contrôle de la production et de la mise en marché, il y a une nuance qui s'impose, c'est la nuance que nous tentons d'apporter à cette commission. On ne se laissera pas manipuler pour essayer de se faire prêter des intentions qu'on n'a pas, qu'on n'a jamais eues et qu'on n'a pas l'intention d'avoir.

Le Président (M. Dussault): Je vous remercie. M. le député de Montmagny-L'Islet, comme président, je me sens suffisamment informé.

Une voix: J'attends la réponse.

M. Giasson: M. le Président, j'invoque une question de règlement.

Le Président (M. Dussault): Je vous écoute.

M. Giasson: Tout à l'heure, vous avez donné la parole au député de Joliette-Montcalm qui a voulu interpréter à sa manière les propos que j'avais tenus à la défense de la recevabilité. Or, il veut jouer avec le principe de la loi ou les objectifs poursuivis dans la loi.

Qu'est-ce que le ministre de l'Agriculture nous a donné comme indication de l'objectif recherché lorsqu'il a déposé le projet de loi 116? Le grand objectif, l'objectif fondamental, c'était celui de valider les opérations qui avaient été menées à l'intérieur de l'administration de plans conjoints tant au plan provincial qu'au plan national — un instant! — parce qu'un jugement de la Cour suprême avait indiqué que l'utilisation de pouvoirs conférés par des lois fédérales pour réglementer la mise en marché des produits intraprovincialement était ultra vires, qu'il ne relevait pas d'une loi fédérale pour venir poser des décisions administratives pour des produits commercialisés à l'intérieur d'une province. Lorsque le ministre a déposé cela, c'est toujours cela qu'il a soutenu.

Cependant, à l'article 2a, nous retrouvons une affirmation qui va dans le sens du jugement rendu, lorsqu'on dit: La mise en marché des produits agricoles dans le commerce intraprovincial au

Québec. Cela va dans le sens du principe de base recherché par le projet de loi 116. On ajoute, d'accord: Réglementer la production au Québec, mais ce qui va vraiment dans le sens des objectifs qu'on voulait atteindre par le projet de loi 116, soit de valider les décisions rendues dans l'administration de plans conjoints à partir de lois fédérales qui s'étaient immiscées au niveau d'une juridiction qui ne relevait pas du fédéral, mais d'une province, on le retrouve lorsqu'on dit: La mise en marché des produits agricoles dans le commerce intraprovincial au Québec.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Montmagny-L'Islet, je tiens à vous faire remarquer que vous aviez invoqué une question de règlement. Vous en avez profité pour donner un éclairage supplémentaire au président, en y allant passablement sur le fond.

De toute façon, je suis bien conscient de l'importance de la décision que je dois prendre. Il est toujours un peu odieux qu'un président tranche une question à la place des membres d'une commission, ce qui doit le rendre effectivement extrêmement prudent, parce qu'un président n'aime jamais se faire reprocher d'avoir pris des décisions à la place des membres d'une commission. C'est pour cette raison que je suis tolérant quant à l'éclairage qu'on veut m'apporter. Je voudrais quand même qu'on s'en tienne à la forme, le plus possible. On sait que dans de telles circonstances, il est difficile de s'en tenir uniquement à la forme.

M. le ministre, si je comprends bien, vous voulez aussi éclairer le président? Non, il m'a demandé la parole, M. le député de Shefford. Vous ne l'avez peut-être pas vu faire.

M. Garon: Ce n'est pas nécessaire.

Le Président (M. Dussault): Ceci dit, je vais rendre ma décision. D'abord, je vais essayer de vous expliquer comment je comprends l'amendement qui a été présenté, parce qu'il ne faut pas oublier que nous avons accepté, au début des travaux de la commission tout à l'heure, d'aborder les amendements par le biais de la modification présentée. Donc, nous acceptions d'étudier l'article tel que modifié, ce qui veut dire que nous avons accepté d'introduire, dans l'article du projet de loi, une distinction et une précision qui n'existaient peut-être pas dans l'article, au départ. Je pense que c'est très important de le regarder de cette façon. Comme président, maintenant que la commission a accepté la modification, le texte modifié que nous étudions tel quel, je suis obligé de le regarder avec l'interprétation que je peux en faire.

L'interprétation que j'en fais est la suivante: On n'a pas voulu, à la commission, prendre le risque de mal interpréter le texte et on a voulu y donner une précision qu'il n'avait pas. Alors, au lieu de dire: La production et la mise en marché des produits agricoles au Québec, on a dit: La production au Québec des produits agricoles et la

mise en marché des produits agricoles. On a distingué les deux pour être bien sûr qu'on traitait vraiment des deux questions. Je ne peux pas tirer la conclusion qu'on n'a pas voulu dire cela dans le projet de loi, auparavant. Je suis même porté à penser que c'est effectivement cela qu'on a voulu dire, mais on a voulu le dire d'une façon plus précise maintenant. Si on voulait enlever un de ces éléments qu'on a voulu clarifier et bien distinguer pour être sûr d'être bien compris, j'aurais l'impression, effectivement, qu'on enlève du projet de loi quelque chose qu'on avait accepté au départ, qui était un principe.

C'est pour cela que j'ai une réticence très grande vraiment à décider que cet amendement serait recevable. J'avoue que j'ai beaucoup de difficulté à le faire.

Une voix: On va ajourner. M. Roy: Ce serait préférable.

Le Président (M. Dussault): Je pense que vous convenez vraiment de l'importance de la question et je suis forcé d'admettre aussi l'importance de cette question. J'aimerais que la commission me donne quelques minutes supplémentaires pour pouvoir y réfléchir. Cela pourrait fort bien nous mener jusqu'à 18 heures. Alors, si j'ai le consentement de la commission pour suspendre jusqu'à ce que nous revenions, forcément à 19 h 30, je l'apprécierais. Oui, M. le député de Lotbinière.

M. Biron: Je voudrais ajouter un argument que j'ai entendu à plusieurs reprises, depuis que je suis ici, de la part du président de l'Assemblée nationale. S'il y a un doute dans votre décision, je crois que le doute devrait toujours pencher en faveur de l'Opposition, en fait, parce que le gouvernement, ayant la majorité, peut plus facilement décider...

Le Président (M. Dussault): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Lotbinière, vous avez parfaitement raison: quand un président a un doute, il doit en faire bénéficier non pas l'Opposition, mais la commission. C'est effectivement ce que je ferai si mon doute persiste, M. le député de Lotbinière.

Est-ce que j'ai le consentement de la commission pour suspendre jusqu'à 18 heures, donc, forcément, jusqu'à 19 h 30? Alors, j'ai le consentement, les travaux de la commission sont donc suspendus. Oui, M. le député de...

M. Chevrette: Compte tenu qu'on a accepté un changement de membre pour l'Union Nationale, est-ce que vous accepteriez qu'on puisse apporter une modification ce soir à une délégation...

M. Giasson: De mon côté, aucun problème.

Le Président (M. Dussault): C'est donc accepté et les travaux sont suspendus jusqu'à 19 h 30.

Suspension de la séance à 17 h 53

Reprise de la séance à 19 h 40

Le Président (M. Dussault): À l'ordre, messieurs, s'il vous plaît!

Nous reprenons les travaux de la commission parlementaire élue permanente de l'agriculture qui étudie le projet de loi no 116, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles.

Avant de rendre le jugement que le président avait promis avant que nous suspendions les travaux de la commission, j'ai l'assentiment de la commission pour que M. Chevrette (Joliette-Montcalm) remplace M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata) comme membre votant de cette commission. Je fais remarquer que M. Biron (Lotbinière) a réussi à se libérer; il reste donc intervenant de la commission.

Pour ce qui est de la recevabilité de la motion d'amendement de M. le député de Huntingdon à l'article 1, je voudrais vous rappeler les doutes dont je vous avais fait part avant la suspension et particulièrement les doutes que j'avais sur l'équivalence au niveau du principe entre le texte de l'article 1 dans le projet de loi initial et le texte modifié que la commission avait accepté d'étudier. C'est à ce niveau que ma réflexion a porté; j'en ai fait l'analyse logique et grammaticale — pour parler le langage de l'enseignant — et, après cette analyse, le doute s'est dissipé, parce que j'ai la conviction qu'il y a équivalence entre les deux au niveau du principe, ne me prononçant pas nécessairement sur les modalités qui ont pu s'ajouter.

M. Giasson: II y a équivalence entre les deux.

Le Président (M. Dussault): Au niveau du principe. À la lumière de ce que je viens de dire, je pense que la motion d'amendement de M. le député de Huntingdon aurait pour effet d'éliminer l'un des deux objets qui, conjugués, composent le principe voté par l'Assemblée nationale. Donc, en vertu de l'article 154, alinéa 2, je me vois dans l'obligation de juger cet amendement irrecevable.

M. Roy: Est-ce que je peux poser une question, M. le Président?

Le Président (M. Dussault): Oui, M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Disons, tout d'abord, que je respecte votre décision; c'est mon habitude de ne pas contester les décisions rendues par la présidence. On sait qu'un projet de loi important — n'importe quel projet de loi, d'ailleurs; ce sont tous des projets de loi importants — suscite évidemment des débats politiques.

II y a des mots dans les articles de la loi qui, évidemment, peuvent être contestés de la part des membres d'une commission parlementaire, de la part de représentants d'autres formations politiques. La directive que je vous demanderais serait la suivante: Jusqu'où les membres de la commission parlementaire peuvent-ils aller dans les amendements qu'on peut proposer pour qu'il y ait un débat sur chaque article, ici, en commission parlementaire? Jusqu'où peut-on aller?

Le Président (M. Dussault): Je pense que c'est jusqu'à la limite, pour répondre à votre question, de ce que prévoit l'économie de l'article 154, alinéa 2, particulièrement.

M. Roy: Article quel numéro?

Le Président (M. Dussault): Article 154, alinéa 2. Au niveau de la forme, je pense que vous avez là la limite. Au niveau du fond, particulièrement en ce qui concerne le principe, vous avez là aussi une réponse. Je pense que c'est l'élément principal à partir duquel je pouvais vraiment juger de la recevabilité, et c'est ce que j'ai fait, sans nul doute, parce que je vous avais prévenu, avant de quitter, que s'il y avait un doute dans l'esprit du président, le président en ferait bénéficier la commission. Et le président n'a pas de doute.

M. Roy: M. le Président, j'aimerais...

Le Président (M. Dussault): Je l'ai jugée irrecevable. (19 h 45)

M. Roy: ... revenir sur la question. Avec votre permission, j'aurais une question à poser à Me Trudeau, qui est ici, au sujet de l'article amendé. C'est un avis juridique que je demande. Me Trudeau d'ailleurs est ici pour informer les membres de la commission. Lorsqu'on dit: "La présente loi a pour objet de réglementer la production au Québec des produits agricoles", réglementer la production au Québec des produits agricoles, est-ce que cette disposition de la loi est nécessaire, est fondamentale pour combler le vide créé par le jugement de la Cour suprême? Je ne vais pas sur l'autre aspect, les autres termes qu'on retrouve dans le même article 2a.

M. Garon: Je vous répondrai en toute franchise, M. le Président. Si on me demande...

Le Président (M. Dussault): Pourriez-vous parler dans le micro, s'il vous plaît?

M. Garon: ... nécessaire et fondamentale, je vais répondre non. Utile, je vais répondre oui.

M. Roy: M. le Président, je pense que le ministre, par la décision qui est rendue par la présidence, que je ne remets pas en cause, illustre la situation dans laquelle les membres de la commission parlementaire se trouvent. Nous nous sommes fait dire depuis le matin qu'il n'y a rien là. C'est tout simplement une petite concordance. Le fait de la production, c'était déjà dans la loi. Que cela n'ajoutait rien de nouveau. Que ce n'était qu'une petite précision. Je ne sais pas si le ministre a bien compris la décision que le président vient de rendre. Cela modifie un des principes de la loi. Alors le ministre nous dit que cela n'est pas une question de principe dans la loi et dit encore non et le président vient de refuser l'amendement.

M. Garon: Ce n'est pas cela l'affaire.

M. Roy: Un instant, M. le Président. Il vient de refuser l'amendement qui a été proposé par le député de Huntingdon parce que cela change un principe de la loi. C'est tout le débat, M. le Président, depuis le début de ce projet de loi, depuis qu'on discute du projet de loi no 116, et à partir même du mois de décembre. Le débat est là. Qui dit vrai? Le député de Joliette-Montcalm nous disait ce soir que c'est le principe de la loi qui est mis en cause. Le ministre nous dit que ce n'est pas le principe de la loi, c'est tout simplement une très petite concordance, une petite précision qu'on vient nous apporter. Je ne veux pas charrier en disant cela, mais le jugement que vient de rendre le président, jugement que je respecte, contredit complètement ce que le ministre nous a dit jusqu'à maintenant sur ce point précis. Je pense que les gens de la commission parlementaire, comme ceux qui sont ici, ont droit à la vérité, ont droit à l'information.

On s'est référé énormément au jugement de la Cour suprême. Je viens de poser une question à Me Trudeau. Vous avez entendu la réponse. Je n'ai pas à la répéter. Vous avez entendu la réponse. Ce n'est pas absolument nécessaire. C'est ce qui a été dit. Ce n'est pas nécessaire, parce que justement — et c'est là qu'est le fondement même du débat, M. le Président — on s'est servi du jugement de la Cour suprême, on s'est servi du vide créé par la Cour suprême pour changer la Loi sur la mise en marché des produits agricoles et pour étendre les pouvoirs qui ont été demandés depuis bien des années par un certain nombre de personnes...

M. Garon: Demandez-lui donc comment cela étend les pouvoirs, à Me Trudeau.

M. Roy: Si cela étend les pouvoirs?

M. Garon: Vous posez une question et à partir de la question, vous faites un paquet d'affirmations. Demandez donc à Me Trudeau si l'article 2 étend les pouvoirs.

M. Roy: M. le Président, ce serait bien la première fois qu'un ministre me dit quelle question poser. Ce serait bien la première fois.

M. Garon: C'est votre façon. Vous posez une question et, à partir de là, vous contez un roman.

M. Roy: Le ministre a droit de poser des questions à Me Trudeau. Il n'a pas besoin du député de Beauce-Sud pour les poser lui-même.

J'ai posé une question. Je suis maître des questions que j'ai à poser et j'ai posé une question bien précise à Me Trudeau pour voir si effectivement la question de réglementer la production au Québec des produits agricoles était absolument nécessaire pour combler le vide créé par le jugement de la Cour suprême. On va sortir la transcription du journal des Débats, M. le Président.

M. Garon: Vous allez voir que j'ai dit aussi: Pour régler des questions d'ambiguïté et des procès inutiles. C'est ce que j'ai dit en Chambre.

M. Roy: Vous avez parlé d'une concordance... M. Garon: J'ai dit qu'il y avait des articles...

M. Roy: ... d'une précision, mais ce n'est pas ce que le président vient de nous dire. Ce n'est pas ça que le président vient de nous dire. Qui dit vrai?

M. Garon: Le président dit vrai aussi.

M. Roy: II y a un programme de télévision là-dessus qui est très intéressant, il a une bonne cote d'écoute.

M. Garon: En droit, je vais vous dire une chose...

M. Roy: Qui dit vrai?

M. Garon: C'est simple, l'article 2a, tel que rédigé actuellement, n'ajoute rien, il précise, je le dis depuis le début...

M. Roy: Ce n'est pas cela que le président a dit.

M. Garon: Une minute! Mais si vous prenez l'amendement du député de Huntingdon ou qu'il en enlève une partie, là vous ne lui faites plus dire la même chose, par exemple. Si vous prenez la peine d'ajouter seulement que cela a pour but de réglementer le commerce intraprovincial et que vous enlevez la production, vous ne dites plus la même chose, vous lui donnez une signification, et quand on le met comme tel, l'article ne l'a pas.

M. Roy: M. le Président.

M. Dubois: Dans un certain sens c'est déjà inscrit.

M. Garon: Ce n'est plus la même chose. M. Dubois: Dans la loi... M.Roy: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): Un instant, s'il vous plaît. Pour clarifier, le président a rendu une décision en vertu de l'article 154, alinéa 2, et je ne vois pas pourquoi on ramènerait la décision du président à un niveau d'interprétation sur le fond. Le président n'a pas rendu la décision sur le fond, il a rendu une décision sur la forme. Ensuite il a dit que, tel que présenté, cet amendement contredirait le principe adopté à l'Assemblée nationale, puisque ce principe, tel qu'il apparaît dans l'article, est composé de deux éléments, de deux objectifs et qu'en faisant disparaître un des deux objectifs, on se trouvait à contredire le principe adopté à l'Assemblée nationale. C'est là le jugement qu'a rendu le président.

M. Roy: C'est exactement, M. le Président, mon interprétation de la décision qui a été rendue par le président.

M. Chevrette: C'est une sage décision.

M. Roy: Le député de Joliette-Montcalm dit que c'est une sage décision. Je comprends, il a soutenu que c'était une question de principe depuis le début, ce que ne soutient pas le ministre de l'Agriculture, parrain du projet de loi.

M. le Président, quand on en vient à lire l'article de la loi qui est proposé, avec l'amendement qui a été proposé par le ministre, la présente loi a pour objet de réglementer la production au Québec des produits agricoles et la mise en marché des produits agricoles dans le commerce intraprovincial au Québec, on ne parle pas du commerce interprovincial, on parle du commerce intraprovincial. L'objet de l'amendement du député de Huntingdon ne touchait pas cet aspect du commerce intraprovincial, il touchait exclusivement la production, au Québec, des produits agricoles, seulement cela.

M. Chevrette: M. le Président...

M. Roy: Je pense que c'est bien important qu'on le dise. Lorsque, M. le Président...

M. Chevrette: M. le Président... M.Roy: J'avais la parole.

M. Chevrette: Appel au règlement, M. le Président. Je ne voudrais pas insulter mon ami de Beauce-Sud, même si...

Le Président (M. Dussault): Sur une question de règlement, M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Merci. M. le Président, quand on revient pour expliquer un amendement qui a été rejeté, c'est reconsidérer d'une façon indirecte votre décision. Je comprends que le climat est bon, qu'il ne faut pas se fâcher, que cela va aller bien, mais je vous invite, comme président, à faire respecter votre jugement et votre décision.

Le Président (M. Dussault): Je pense, M. le député de Joliette-Montcalm, que votre intuition peut être partagée par le président. Puisque l'intervention de M. le député de Beauce-Sud

s'adressait à M. le ministre et qu'elle visait à avoir un avis juridique de la part de la personne qui accompagne M. le ministre, j'ai été tolérant. J'avoue M. le député de Beauce-Sud, que cela ressemble énormément à une façon de remettre en question la décision du président.

M. Roy: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): Je vous invite tout simplement à la prudence, M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: M. le Président, je vous pose la question. Si je comprends bien, ce que vous venez de dire, c'est que dorénavant, pour ne pas remettre en cause votre décision, il sera impossible de parler de la réglementation de la production au Québec, parce que vous venez de rendre une décision.

Le Président (M. Dussault): Vous pourrez en parler, mais...

M. Roy: Bon! C'est ce que je faisais, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): ... comme partie intégrante de l'article 1.

M. Roy: C'est ce que je faisais, M. le Président. Là, on touche une question de fond. Ce n'est plus une question de forme; c'est une question de fond que vous avez jugée comme étant une partie intégrante. Vous avez refusé l'amendement; c'est sur l'amendement que vous vous êtes prononcé. Mais vous ne vous êtes pas prononcé sur la rédaction de l'article 2a tel que décrit actuellement. Je fais des interventions et des observations sur l'article 2a tel que rédigé actuellement parce que cela fait l'objet de nos délibérations, de nos discussions. C'est cela dont on discute à l'heure actuelle, l'article 2a tel que rédigé. Vous avez rendu une décision sur la motion d'amendement, mais vous n'avez pas rendu de décision stipulant qu'on ne peut plus parler de réglementer la production.

Le Président (M. Dussault): D'accord.

M. Roy: On se comprend?

Le Président (M. Dussault): Très bien.

M. Roy: Parce que la question de réglementer la production, c'est la raison fondamentale de nos objections, d'une partie de nos objections à l'actuel projet de loi, à cause des implications qui en découlent, notamment au sujet de la mise en application de telle loi, du pouvoir de réglementation qu'on retrouve également dans la loi 12, dans le chapitre 36, la Loi de la mise en marché des produits agricoles du Québec.

Or, je suis obligé, si on veut faire une étude sérieuse du projet de loi, de parler de ce qui est contenu dans le projet de loi. Je ne veux plus revenir sur l'amendement qui a été proposé par le député de Huntingdon, mais je peux très bien poser des questions, par exemple, et demander des explications — je pense que c'est notre privilège — concernant deux thèses qu'on retrouve devant nous. Il y a des tenants de deux thèses devant nous. Il y en a qui prétendent que ce n'est que de la concordance, que c'est seulement une précision qu'on apporte, alors que d'autres ici — je ne parle pas de votre jugement, de votre décision — prétendent que c'est une question de principe.

J'ai fait évidemment référence à votre décision sans la constater, ce qui était bien normal. J'ai le droit de faire référence à votre décision, M. le Président. C'est officiel, c'est inscrit dans le journal des Débats. Là où je peux être rappelé à l'ordre, c'est au moment où je conteste votre décision, mais je n'ai pas du tout l'intention de contester votre décision parce qu'elle confirme, M. le Président, ce que j'ai toujours soutenu, que c'était une question de principe qu'on retrouvait dans le projet de loi actuel.

J'aurai d'autres observations à faire, mais je vais laisser la parole à d'autres collègues à ce moment-ci.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Lotbinière.

M. Biron: M. le Président, je voudrais simplement tenir quelques propos sur cet article 1 de notre projet de loi et souligner au début la clarté et le bon sens des propos de mon collègue de Beauce-Sud, surtout parce que, suite à l'étude que nous avons faite en deuxième lecture, les propos du ministre, les propos qu'on a entendus depuis le début de cette commission parlementaire, votre décision, on s'aperçoit que c'est fondamental ce qu'il y a dans ce projet de loi et que cela va beaucoup plus loin que tout simplement boucher le trou de la Cour suprême, comme on nous l'a présenté au début et comme il en est question dans les notes explicatives. Il est véritablement question de réglementer la production au Québec des produits agricoles et de réglementer aussi la mise en marché des produits agricoles dans le commerce interprovincial au Québec. Réglementer les produits agricoles dans le commerce interprovincial, je pense bien qu'on a toujours eu ce pouvoir. Réglementer la production pour le Québec, on aura probablement cela aussi, mais on intervient aussi dans beaucoup d'autres choses et on réglemente la production automatiquement, par accident, éventuellement avec un projet de loi tel quel, et on viendra probablement devant les cours avec cela. On réglemente la production pour le commerce interprovincial et international. (20 heures)

Mais ce qui va beaucoup plus loin, en disant qu'on veut maintenant réglementer la production au Québec des produits agricoles, c'est qu'on donne un peu plus loin, dans ce même projet de loi, des pouvoirs énormes de réglementation.

Vous vous en souvenez hier, à l'occasion de la deuxième lecture, j'avais avec moi les règlements dans le domaine des oeufs. Il y en avait à peu près quatre ou cinq pouces d'épais. On en a encore plus que cela dans le domaine du lait; on en a sept, huit ou neuf pouces d'épais. Or, le producteur agricole va devoir être prudent là-dessus et savoir véritablement tous ces règlements. S'il passe à côté de ces règlements, on va voir qu'on donne à l'office de producteurs le pouvoir de suspendre les quotas, de réduire les quotas, et tout cela. Or, M. le Président, pour le producteur agricole, parce que c'est pour lui qu'on légifère aujourd'hui, cela va être compliqué tantôt. Alors, avant de donner des pouvoirs extraordinaires et extravagants à mon point de vue, il faudrait être prudent de ce côté. Si on accepte ces deux principes ici, en commission parlementaire, de réglementer la production et de réglementer la mise en marché et surtout le temps et le lieu de la production, bien, on va compliquer la vie de notre producteur agricole.

Là-dessus je rejoins les propos de mon député de Beauce-Sud, mon collègue de Beauce-Sud, et je pense, M. le Président... C'est cela.

M. Ouellette: C'est une question de privilège? M. Chevrette: Mon pénépiste préféré.

M. Garon: Connaissez-vous l'article 1053 du Code civil?

M. Biron: On parle de cet article... Non, M. le ministre, j'ai été élevé dans l'industrie et l'économie et malheureusement, ou peut-être heureusement, je ne suis pas avocat.

M. Garon: Connaissez-vous l'article 1053 du Code civil? C'est l'article sur la responsabilité; c'est cela qui entraîne le plus de procès et qui entraîne le plus de responsabilités. C'est curieux que vous puissiez vivre en société sans connaître cet article-là et sans savoir que, quand vous causez des dommages, vous êtes responsables.

M. Biron: Quand on parle de mise en marché, de production et tout cela, il y a bien des choses que vous ne connaissez pas et je ne vous blâme pas là-dessus. Sur les points de loi, il y a bien des choses que je ne connais pas, je ne voudrais pas être blâmé non plus, cela n'a pas été mon métier, cela n'a pas été ma profession. Mais, par exemple, ce que je veux dire, M. le Président, ici,...

M. Garon: Vous pourriez vous laisser faire.

M. Biron: Oui, mais lorsque mes producteurs agricoles sont aux prises avec des problèmes, par exemple, je ne peux pas vous laisser faire. Lorsque je trouve que pour les producteurs agricoles de mon comté cela ne fonctionnera pas, que ce n'est pas possible, que ce n'est pas humain pour eux, je pense qu'il faut absolument que j'intervienne et que j'essaie de convaincre le ministre par votre entremise, M. le Président, de mettre quelque chose dans son projet de loi ou de changer son projet de loi pour que ce soit véritablement vivable et que ce projet de loi soit applicable. Si ce n'est pas applicable, qu'est-ce qui arrivera tantôt? Il va y avoir des avocats qui vont gagner. L'article 1053 du Code civil et... Il va y en avoir en masse.

M. Garon: C'est ce qu'on veut prévenir, les procès inutiles.

M. Biron: II va y avoir des avocats qui vont gagner. Non, en réglementant la production, M. le ministre, et surtout le temps et le lieu de la production et tout cela, les amendes, les règlements, les homologations, les décisions arbitrales et le reste, notre producteur, tantôt, il faudra presque que ce soit un avocat ou il faudra qu'il s'engage un avocat. C'est pour cela qu'on veut essayer d'avoir une loi avec laquelle le producteur agricole va pouvoir vivre.

En plus de cela, M. le Président, il y a un autre principe dans cet article du projet de loi. On change passablement l'esprit et le sens même de l'article 2 du chapitre 36. Cela dit bien que la Loi sur la mise en marché des produits agricoles (1974, chapitre 36) est modifiée par l'insertion, après l'article 2, du suivant: ... M. le Président, l'article 2, pour se souvenir ce que c'est, on va peut-être le relire rapidement ensemble, c'est très court. L'article 2 dit: La présente loi a pour objet de mettre à la disposition des producteurs et des consommateurs un moyen supplétif de mise en marché ordonnée et juste des produits agricoles; elle ne doit pas être interprétée comme moyen de concurrencer l'organisation coopérative de la production et de la mise en marché des produits agricoles. Ce principe doit guider l'application de la présente loi pour ne pas gêner l'action de coopératisme dans les régions et les secteurs où il peut répondre efficacement aux besoins et afin de profiter autant que possible du concours des coopératives pour l'établissement et l'administration des plans conjoints dans les secteurs de production et les régions où il est désirable d'en établir.

M. le Président, en plus de cet objet, premièrement, on arrive maintenant avec un autre objet ou deux autres objets. L'autre objet est: "La présente loi a pour objet de réglementer la production au Québec des produits agricoles et la mise en marché des produits agricoles dans le commerce intraprovincial au Québec." Lequel va avoir préséance sur l'autre? Cela aussi est un objet tel que présenté à l'heure actuelle, cela a peut-être autant d'importance ici que là. C'est là que les coopératives du Québec s'inquiètent. C'est pour cela que l'Union Nationale est intervenue aussi fortement pour défendre les coopératives au Québec parce que les coopératives s'en inquiètent. D'ailleurs, dans le mémoire, M. le ministre, que vous avez reçu des coopératives...

M. Garon: Avant les amendements.

M. Biron: ... on nous dit ceci: Dans les circonstances, nous demandons non seulement que cet article 2a soit biffé des amendements, biffé complètement — les coopératives ne peuvent pas changer d'idée complètement — mais que le dernier paragraphe de l'article 2 qui a été amputé il y a quelques années, sans raison, soit rétabli. Un peu plus loin dans ce mémoire, M. le ministre, on nous dit: En conclusion, M. le ministre, la Coopérative fédérée de Québec, en son nom et au nom de toutes les coopératives et de tous les coopéra-teurs qu'elle représente, vous prie respectueusement, premièrement, de prendre les dispositions appropriées pour supprimer les articles 1, 2a, 3 et 5 et, deuxièmement, de proposer que le texte du dernier paragraphe de l'article 2 de la Loi des marchés agricoles qui a été supprimé il y a quelques années soit rétabli.

Si, M. le ministre, vous dites que cela ne dérangera pas les coopératives, que vous ne voulez pas déranger les coopératives, que vous voulez permettre aux coopératives de continuer leur évolution, de faire ce qu'elles font présentement, et même de prendre de l'expansion et de l'évolution, je vais vous donner une chance de nous le dire et je vais vous donner une chance de le prouver en proposant la motion d'amendement suivante à l'article 1 de ce projet de loi 116. Il faudrait ajouter, après l'article 2a, les mots suivants: "La présente loi a pour objet de réglementer la production au Québec des produits agricoles et la mise en marché des produits agricoles dans le commerce intraprovincial au Québec. Que l'article 1 du présent projet de loi soit modifié en ajoutant à la fin de l'article 2a les mots suivants: Rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements d'un producteur vis-à-vis sa coopérative, ou avec les engagements de celle-ci envers une autre coopérative.

M. Garon: Je pourrais même vous dire d'où vient votre amendement? De quel bureau d'avocats?

M. Biron: La loi votée en 1956 par l'Union Nationale.

Le Président (M. Dussault): Un instant, s'il vous plaît. La motion d'amendement dit ceci: "Que l'article 1 du projet de loi 116 soit modifiée en ajoutant à la fin de l'article 2a les mots suivants: "Rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements d'un producteur vis-à-vis de sa coopérative ou avec les engagements de celle-ci envers une autre coopérative."

M. Biron: Sur la recevabilité, M. le Président...

M. Garon: Est-ce que je pourrais poser une question?

Le Président (M. Dussault): Un instant, M. le ministre.

M. Garon: Pourquoi l'Union Nationale a-t-elle fait sauter cet article en 1968?

M. Biron: Non. Il a sauté en 1964, M. le ministre.

M. Garon: Non.

M. Biron: Oui. En 1964, par les libéraux.

M. Garon: Dans le temps de l'Union Nationale.

M. Biron: En 1964 par le Parti libéral.

M. Garon: Ce n'est pas moi qui l'ai fait sauter. C'était dans la loi avant et cela a sauté.

M. Biron: Nous, non plus.

Le Président (M. Dussault): S'il vous plaît, messieurs, je vais entendre les avis de membres de la commission sur la recevabilité et je vais réduire la portée de cet éclairage. Je vais entendre un membre par parti, comme on le fait habituellement.

M. Biron: M. le Président, je peux...

Le Président (M. Dussault): M. le député de Lotbinière, puisque vous êtes le proposeur.

M. Biron: M. le Président, cette motion vient à la suite d'un amendement ou de mots spéciaux qu'on a ajoutés à l'article 2 du chapitre 36, qui font en sorte qu'on pourrait mettre en doute cet article 2 en ajoutant 2a. Mais nous croyons que le ministre est de bonne foi et ne veut pas nuire justement à l'esprit même de l'article 2, mais qu'il veut même expliciter un peu plus ce qu'est l'article 2 de la présente loi. Nous voudrions que ce soit très clair que l'article 2a ne sert pas justement à contredire complètement l'article 2 du chapitre 36 parce qu'on veut maintenant rajouter un 2a. Dans ce sens, M. le Président...

Le Président (M. Dussault): M. le député de Lotbinière, vous êtes sur le fond de la question.

M. Biron: Je dis pourquoi c'est recevable. Cela ne change pas l'esprit du projet de loi ou du chapitre 36, ni même l'esprit de ce que le ministre veut nous présenter comme addition au chapitre 36, par l'article 2a. Cela ne fait que confirmer et rendre très clairs l'article 2 et la pensée du ministre lorsqu'il dit: Je ne veux certainement pas détruire l'article 2 au début. Dans ce cas, M. le Président, je juge que notre amendement est parfaitement recevable.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Je ne parlerai pas longtemps parce que, parfois, c'est aussi long de s'opposer que de voter contre, mais il m'apparaît, M. le

Président, que cet article vise un autre objet qui n'est pas dévolu par la loi. Il vise à régler un problème qui n'est pas touché par l'essence même et par l'esprit même du projet de loi. L'esprit du projet de loi, c'est de définir, c'est de légaliser des choses et de rendre permissibles d'autres choses, alors que ce qui arrive là, c'est de dire: II y a des tensions entre l'UPA comme syndicat...

M. Roy: Là, vous touchez le fond.

M. Chevrette: Je vais vous dire pourquoi. Je vous ai laissé aller dix minutes tantôt.

Le Président (M. Dussault): Je vous écoute, M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Giasson: C'est laborieux, M. le député, mais on vous écoute.

Le Président (M. Dussault): J'apprécierais que vous vous en teniez à la forme, M. le député.

M. Chevrette: Les rires ne paraissent pas au journal des Débats.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Garon: Quand vous le dites, cela paraît! Ah! Ah!

M. Chevrette: C'est pour montrer ma bonne foi.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Joliette-Montcalm, je vous prierais vraiment de faire l'effort de vous en tenir à la forme, s'il vous plaît.

M. Chevrette: D'accord. C'est exact. Quand on dit que "rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements d'un producteur vis-à-vis de sa coopérative", il y a des législations qui lient les producteurs par rapport à la loi constituant les coopératives. On n'a pas à interpréter une autre loi par une loi dans les présentes circonstances. Ce n'est pas du tout l'objet même de la loi, absolument pas l'objet de la loi. Ce n'est pas de régler une chicane entre une coopérative et un syndicat, l'objet de la loi. L'objet de la loi est de clarifier deux situations. C'est quasiment une échappatoire. Je m'excuse de le dire. Je sais que cela blesse l'Union Nationale.

M. Biron: C'est faux.

M. Chevrette: Ils sont à la recherche d'un "face saver" et il faut qu'ils prennent les moyens pour ce faire et c'est cela, ce type d'amendement. Ce n'est vraiment pas relatif au contenu de la loi.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: M. le Président, j'aimerais vous faire une mise en garde très sérieuse parce que j'ai l'impression que certains de nos collègues — puisque vous êtes impartial dans cette commission — aimeraient que vous décidiez à leur place.

Les arguments que j'ai entendus de la part de mon collègue le député de Joliette-Montcalm sont des arguments contre la motion. La discussion de la motion, le rejet de la motion, l'acceptation ou le rejet de la motion, cela doit être décidé par la commission et non pas décidé par la présidence. Cet amendement ne fait que préciser déjà une disposition qu'on retrouve dans la Loi de la mise en marché des produits agricoles. La loi vise à apporter des amendements à la Loi de la mise en marché des produits agricoles et tout simplement à préciser et apporter une protection qui nous apparaît absolument nécessaire, compte tenu des dispositions de l'article 2a. Je ne veux pas aborder le fond du sujet. J'y reviendrai tout à l'heure, M. le Président, mais je dis de façon très sérieuse que si jamais une décision était rendue par la négative, à savoir que vous rejetez cette motion, je respecterai votre décision, mais je tiens bien à vous faire une mise en garde sérieuse que ce serait bien la première fois de ma vie que je verrais la présidence décider à la place des membres de la commission sur une question comme celle-là. C'est un pensez-y bien.

Le Président (M. Dussault): Est-ce qu'il n'y a pas d'autres... Brièvement, s'il vous plaît.

M. Biron: Si vous remarquez, l'article 2 du chapitre 36 actuellement, c'est exactement le même article 3 du chapitre 37, c'est-à-dire la première loi qui a créé la Loi établissant un office provincial pour aider à la vente des produits agricoles. C'est exactement la même chose. C'est exactement la même chose aujourd'hui, l'article 2, moins exactement ce que je vous propose, l'amendement que je vous propose. Cela veut dire que cela y était à l'époque, dans la loi. Si cela a été enlevé, c'est par une résolution, une motion à l'Assemblée nationale. Donc, si c'était recevable en 1956, cela doit être encore recevable aujourd'hui. C'est exactement la même chose mot pour mot, M. le Président.

M. Garon: C'est arrivé en quelle année, vous rappelez-vous? Avez-vous vérifié?

M. Biron: 1964, je pense, M. le ministre. Je ne peux pas vous dire. Je ne veux pas vous induire en erreur, mais mes informations sont 1964.

M. Garon: Depuis 1964, sous ce troisième paragraphe, trouvez-vous que les coopératives sont disparues ou ont progressé?

M. Biron: On discutera le fond tout à l'heure, voulez-vous? Là, on juge la recevabilité.

Le Président (M. Dussault): C'est ce que j'allais vous prier de faire, s'il vous plaît. Oui.

M. Chevrette: Est-il exact que le mouvement coopératif peut demander lui-même un plan conjoint?

Le Président (M. Dussault): Je ne pense pas que le président puisse répondre à cette question. Il faut que vous adressiez votre question d'information au président.

M. Chevrette: C'est une question au ministre. Cela a de l'importance. Pourriez-vous me laisser finir, M. le député de Beauce-Sud?

M. Roy: Est-ce que j'ai parlé?

Le Président (M. Dussault): M. le député de Joliette-Montcalm, je pense que notre question intervient sur le fond...

M. Chevrette: Elle a de l'importance sur la recevabilité parce que, M. le Président, s'il est exact que le mouvement coopératif...

M. Giasson: C'est-à-dire que les producteurs, à l'instigation du mouvement coopératif, pourraient demander à la régie.

M. Chevrette: II y a déjà une demande devant la régie. Elle est là. Donc, si c'est vrai, cela assoit sur une meilleure plateforme encore l'irrecevabilité de cette motion.

M. Giasson: La loi prévoit que des producteurs, dans un secteur donné, peuvent demander à la régie.

M. Chevrette: Bon. C'est exact, c'est irrecevable, cela.

Le Président (M. Dussault): Non. M. le député de Lotbinière, je pense que le président va rendre une décision. L'appel à la prudence de M. le député de Beauce-Sud qui reconnaissait en même temps que le président n'avait pas rendu une décision à la place de la commission tout à l'heure, puisqu'il disait que ce serait la première fois qu'il le verrait, m'amène à être prudent, effectivement. Je pense que si le président se prononçait sur l'irrecevabilité, il s'engagerait probablement sur le fond. Il y a beaucoup de risques qu'il le fasse. Je pense que je vais plutôt laisser la commission trancher cette question. Je la juge donc recevable.

M. Roy: Le député de Beauce-Sud l'emporte sur l'agressivité du député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Avant le souper, de quoi aviez-vous l'air?

Le Président (M. Dussault): À l'ordre, messieurs! Je laisse la parole à M. le député de Lotbinière, sur la motion d'amendement.

M. Biron: M. le Président, même si mon excellent collègue de Joliette-Montcalm a plaidé la non-recevabilité de mon amendement, je suis sûr qu'il votera avec moi en faveur d'un tel amendement, compte tenu des propos qu'il a tenus antérieurement et surtout compte tenu du fait que son parti, le Parti québécois, a déclaré à plusieurs reprises avoir un préjugé favorable envers les coopératives au Québec. (20 h 15)

Cet amendement, M. le Président, ne change pas de principe dans le projet de loi, mais n'est qu'une espèce de chien de garde. En tout cas, on a maintenant ajouté à l'article 2 — avec ce qu'on connaîtra maintenant, si c'est accepté — l'article 2a du chapitre 36. Alors, c'est tout simplement pour redire, et très clairement, la volonté des députés, à l'Assemblée nationale, de protéger les coopératives agricoles au Québec.

En même temps je réponds à quelques questions qui ont été posées tout à l'heure, entre autres par mon excellent collègue de Joliette-Montcalm, en disant: L'Union Nationale, où se branche-t-elle là-dedans? Eh bien! vous le savez où l'Union Nationale se branche avec cet amendement; on est carrément pour les coopératives au Québec et on veut que vous vous prononciez. Ce n'est pas tout de se promener à travers la province en disant: On a un préjugé favorable envers les coopératives agricoles. Mais, quand il s'agit de poser un geste concret, là ça va être le temps. Vous l'avez le geste concret avec cette motion d'amendement et vous devrez vous dire carrément si vous êtes oui ou non pour les coopératives au Québec ou si vous voulez vous déclarer carrément contre les coopératives au Québec. L'Union Nationale a voulu faire en sorte qu'on donne un certain équilibre à cette guerre de géants dont on a traité hier et ce matin entre les sociétés coopératives et le syndicalisme agricole. L'Union Nationale veut justement que ces gens, qui sont des adultes, puissent régler leurs problèmes. Bien sûr, on a voulu les faire venir pour les aider un peu, mais, si on ne veut pas les faire venir à la barre de la commission parlementaire, si on ne veut pas les aider directement à régler le problème en les entendant et en allant au fond des choses, au moins on pourrait essayer de donner les outils nécessaires à ces deux géants, très importants dans le monde économique agricole au Québec, pour qu'ils puissent évoluer pleinement selon les besoins, selon les aspirations les plus légitimes de leurs membres.

Encore une fois, il faut se souvenir que les membres de ces coopératives sont les mêmes que ceux du syndicalisme agricole au Québec. C'est certainement la marque de commerce de l'Union Nationale, au cours de ce débat, de prendre position carrément pour les sociétés coopératives, prendre position carrément pour qu'on puisse voir clair dans le conflit et qu'on fasse un peu l'équilibre entre le syndicalisme agricole et les coopératives. Si le ministre ne veut pas se mouiller les pieds et ne veut prendre aucune décision, qu'il veut laisser pourrir les conflits qu'il y a entre les deux, l'Union Nationale veut faire en sorte que, au

moins, on donne des outils aux deux parties en cause.

Dans ces cas en particulier, il est sûr que le ministre se promène avec un télégramme qui date du mois de décembre, lorsque nous avons en main des papiers qui datent de décembre et d'autres de janvier et de février, qui prouvent que les coopératives au Québec...

M. Garon: ...

M. Biron: Si vous n'avez pas une copie du mémoire de la Coopérative fédérée, je vous en ferai tenir une.

M. Garon: C'est antérieur à mon télégramme, qui appuie la loi.

M. Biron: Les actions des sociétés coopératives au Québec — surtout toutes les coopératives dans le monde agricole au Québec — qui ont été posées depuis le mois de décembre dernier nous prouvent que ces coopératives ne sont pas satisfaites des amendements que le ministre leur a proposés.

Bien sûr, on a peut-être trouvé certains moyens de dire: Ne dites pas un mot temporairement. Mais on veut savoir la vérité là-dedans; on veut faire en sorte que les producteurs agricoles qui sont membres des coopératives se sentent protégés. On présente un tel amendement qui va bien clarifier le débat à cette commission parlementaire, surtout compte tenu de l'amendement que le ministre veut apporter à l'article 2; cet amendement dit que rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements d'un producteur vis-à-vis de sa coopérative, ni avec les engagements de celle-ci envers une autre coopérative.

Je pense que c'est passablement clair et les gens vont savoir où aller d'un bout à l'autre. C'est la position que l'Union Nationale veut prendre là-dedans.

Je voudrais dire que j'ai parlé avec plusieurs dirigeants de coopératives, au cours des mois de janvier et février ainsi que fin décembre. Ces gens nous disent: Bien sûr on a la Régie des marchés agricoles, quand il y a quelque chose qui ne marche pas on peut porter plainte à la régie; la régie entend ça, ça dure un an et fait une ordonnance. Mais l'ordonnance de la régie reste là. Si la régie dit à une autre partie que les coopératives: Faites telle chose, l'autre partie fait tout simplement appel au Conseil des ministres et laisse mourir cela là. Cela attend et attend, ça laisse pourrir les événements. Cela a forcé des coopératives agricoles... J'en ai donné des preuves hier et aujourd'hui, vous n'avez qu'à surveiller un peu ce qui se passe dans le monde des coopératives agricoles, vous allez voir les décisions qui sont prises par les coopératives. Vous n'avez qu'à vous promener à travers le Québec; allez dans des assemblées de coopératives agricoles et vous allez voir que cela va mal dans ce monde-là à l'heure actuelle. Il faut leur donner les outils nécessaires pour régler leurs problèmes. Il ne faut justement pas subordonner les coopératives, soit au syndicalisme agricole ou à une telle loi lorsqu'on a décidé que les coopératives, c'est l'esprit même du chapitre 36 qui a été voté il y a plusieurs années, premièrement en 1956, par un gouvernement de l'Union Nationale alors que M. Duplessis était premier ministre. Ce n'est pas d'aujourd'hui. Il a justement voté cet article qui est important: "La présente loi ne doit pas être interprétée comme tendant à concurrencer l'organisation coopérative de la production et de la mise en marché des produits agricoles. Elle doit l'être comme ayant pour objet de mettre à la disposition des producteurs et des consommateurs un moyen supplétif de mise en marché ordonnée et juste des produits agricoles."

L'Union Nationale veut être sûre que ce qu'on fait à l'heure actuelle avec le projet de loi 116, cela devienne un moyen supplétif aux coopératives, que ce ne soit pas un moyen de concurrencer les coopératives. Les coopératives pourront continuer. C'est un fleuron dans l'histoire économique du Québec, les coopératives. Je ne sais pas si vous les aimez ou si vous ne les aimez pas, mais nous, on veut garder ces coopératives agricoles au Québec. C'est pour cela qu'on se bat, c'est pour les coopératives agricoles qu'on se bat et qu'on vous invite justement à prendre position.

Je vous connais, je sais que vous aussi, M. le ministre, voulez prendre carrément position pour les coopératives agricoles au Québec. Vous non plus ne voulez ps déséquilibrer les forces en présence. Je sais que vous aussi, vous allez, comme les députés de l'Union Nationale, comme mes amis du Parti libéral et comme le député de Beauce-Sud, voter en faveur des coopératives tout à l'heure. Vous allez vous élever pour faire un acte de foi envers les coopératives agricoles au Québec, je le sais. Je ne pense pas que vous vouliez donner une tape à la figure ou un coup de pied au derrière des coopératives agricoles. Si oui, les coopérateurs à travers le Québec s'en souviendront. Si oui, les gens vont le savoir, les producteurs agricoles ne sont pas fous, les membres des coopératives ne sont pas fous; ils vont savoir que vous avez voté contre les coopératives. Mais je n'ai pas besoin de vous dire tout cela, vous êtes assez intelligent, vous êtes assez partisan des coopératives agricoles pour appuyer avec empressement cet effort et cette volonté de l'Union Nationale de faire en sorte de mettre les coopératives agricoles au Québec sur un pied privilégié, de protéger ces outils qui appartiennent aux producteurs agricoles. Les coopératives agricoles ne nous appartiennent pas, ni à vous de l'autre côté, ni à moi, ni à vous, M. le ministre, elles appartiennent aux producteurs agricoles. Cela vous appartient à vous aussi, mon cher ami, les coopératives. Justement, cela appartient à ces gens, et il faut les protéger.

Dans le monde des coopératives agricoles, il y a 19 000 membres, il y a 16 800 membres, selon la Coopérative fédérée de Québec. Je pense que

c'est important et c'est ce qu'il y a de plus important. Si on voulait attaquer les caisses populaires, demain matin, tout le monde se lèverait de l'autre côté de la table — j'en suis sûr — pour prendre la défense des caisses populaires et nous aussi; tous ensemble, à l'unanimité, nous voudrions défendre les caisses populaires. Maintenant que des gens veulent attaquer les coopératives agricoles, je suis sûr que vous aussi allez vous lever. J'espère, en tout cas, que chacun de vous, ce soir, va faire une profession de foi envers les coopératives agricoles au Québec.

Si vous ne le faites pas, je me charge de me promener à travers le Québec pour dire ce que vous avez fait, pour dire à la population du Québec que vous avez voté contre les coopératives au Québec. C'est clair, mon amendement. Cela va faire en sorte, M. le ministre, et vous, messieurs les députés du Parti québécois...

M. Garon: Vous pouvez bien rire.

M. Biron: ... que vous allez arrêter de vous promener à travers la province et de charrier que vous êtes en faveur des coopératives. Vous allez le prouver. Je vous demande un acte de foi et un geste positif.

M. Garon: ...

M. Biron: Vous allez poser ce geste, tout à l'heure, je le sais, je vois votre figure souriante et je sais que vous allez justement poser ce geste en faveur des coopératives.

M. Chevrette: Vous ne pouvez pas nous empêcher de rire.

M. Biron: Grâce à l'Union Nationale, le Parti québécois pourra enfin se prononcer clairement en faveur des coopératives agricoles au Québec. Cela, ça va être intéressant. L'Union Nationale vous donne la chance de prouver... Cela fait deux ans et demi que vous attendez cette chance inouie de faire un acte de foi en faveur des coopératives agricoles. L'Union Nationale, dans sa grande générosité, à l'occasion de l'étude du projet de loi 116, veut justement vous donner cette chance.

M. le Président, je ne veux pas parler trop longtemps et je vais donner la chance au ministre de l'Agriculture et à chacun des députés du Parti québécois d'intervenir. J'espère qu'avant de voter cet amendement chacun va se prononcer clairement...

M. Chevrette: On va y penser.

M. Biron:... pour que ce soit inscrit au journal des Débats et qu'on puisse se promener et montrer ce que vous avez dit à travers la province. Vous vous déclarez clairement et fièrement pour les coopératives agricoles au Québec.

Le Président (M. Dussault): Merci, M. le député de Lotbinière. M. le député de Joliette-Montcalm.

Une voix: Vous nous laissez le choix des moyens. On va voter contre.

M. Chevrette: Je vais essayer d'être un peu plus souple, parce que trop en mettre, parfois, déborde les cadres et la crédibilité est entachée.

M. Biron: J'ai essayé de vous convaincre, mon cher ami.

M. Chevrette: Vous n'avez pas pris le bon moyen. M. le Président, je pense qu'il y a vraiment une incompréhension... Est-ce qu'il veut parler?

Le Président (M. Dussault): Vous avez la parole, M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Garon: On est rendu en 1962. Cet article a été aboli avant 1962. On a vu que cela n'a pas fait bouger le mouvement coopératif. C'était dans la loi avant.

M. Chevrette: M. le Président, j'ai la forte impression qu'on voudrait s'immiscer dans les structures, alors que le projet de loi est permissif. Le projet de loi 116 est permissif sur le plan des structures possibles à se donner, conditionnellement à d'autres lois qui prévoient des procédures bien précises pour s'organiser.

Je ne pense pas que ce soit à un gouvernement ou que ce soit à l'Assemblée nationale comme telle de décider comment les producteurs veulent s'organiser, quels sont les choix qu'ils ont à faire. C'est aux producteurs de le faire. La loi rend permissive une situation en disant: Vous avez le droit, vous autres, si vous voulez, de vous former un plan conjoint, en créant un office, en administrant et même en limitant vos productions, si vous le voulez, dans un contexte bien précis, et en vous organisant face à la centralisation des marchés pour être au moins capables de faire face à tout ce qui peut se produire advenant un non-contrôle absolu. Tu n'es pas obligé d'attendre que la débandade soit prise.

J'ai écouté des arguments du député de Beauce-Sud depuis que je suis en cette salle; il disait: II y a des petits producteurs qui craquent; chaque jour, il en disparaît. Il avait même donné des chiffres. Je ne me souviens pas des chiffres précis, mais c'était quasiment alarmant, parce qu'à la façon dont cela mourait, il n'en restait pas gros.

M. Roy: C'est alarmant aussi.

M. Chevrette: Le projet de loi, il me semble, à l'article 2a, donne aux producteurs une autre possibilité, une possibilité de s'organiser eux-mêmes, mais dans des cadres que nous fixons et qu'ils ont le droit de choisir ou de ne pas choisir. Ils peuvent choisir de rester dans le mouvement coopératif comme tel et de se créer le marché qu'ils veulent bien. Ils peuvent décider de faire plus avec le projet de loi. Vu qu'on légalise même les plans nationaux, ils peuvent décider de se bâtir un référendum et de se voter un plan conjoint et

de contrôler leurs productions pour ne pas faire en sorte qu'on fasse face, un jour ou l'autre, à trois ou quatre gros qui peuvent faire mourir un paquet de petits. On sait très bien qu'avec la centralisation des marchés les gens n'aiment pas courir à dix places à la fois pour aller acheter leurs produits, s'ils peuvent acheter à la même place. Ce sont des mots simples que les producteurs de Joliette-Montcalm comprennent. Cela doit être la même chose dans Lotbinière, d'après moi.

Je suis convaincu que les gars de Lotbinière, peut-être pas dans tous les produits, vont sentir le besoin, à un moment donné, de s'unir et d'avoir la possibilité législative de le faire, pour se donner une force. En effet, on n'a pas à le nier, on n'a qu'à ne créer aucune possibilité et nous allons nous ramasser avec des situations tout à fait aberrantes où les marchés seront contrôlés par quelques individus. À ce moment-là, le souci pour l'État ne se situe pas uniquement au niveau des producteurs; il y a aussi un souci face aux consommateurs.

Je disais hier, je crois, que c'est une question d'approche, de conception même de ce qu'est l'agriculture. En tout cas, dans mon comté, les nombreux petits producteurs qui sont chez nous nous disent: C'est ensemble par la voie du syndicalisme agricole qu'on est prêt à se donner les outils pour travailler. C'est leur droit. La loi le prévoit. (20 h 30)

Donc, on dit: Ce qu'on veut, par exemple, c'est que vous ne fassiez pas cela. On n'organisera pas, on ne laissera pas organiser des minorités. On exige 66% de participation et on exige un vote majoritaire de 50%. C'est fort, cela. C'est plus fort que ce qu'on demande au mouvement syndical en général pour des votes de grève ou pour des votes d'allégeance. C'est 50% plus un des ouvriers dans une industrie pour former un syndicat. On leur demande, cette fois-ci, 66%. C'est plus fort. On prend des précautions. On dit: Oui, c'est un vote économique. C'est vrai, M. le député de Huntingdon, que c'est un vote économique, et c'est un vote économique aussi pour celui qui vit décemment, sans grossir d'une façon désordonnée, qui peut avoir 500 porcs, par exemple, et que pour lui, c'est rentable pour vivre, 500 porcs. Il vit. On ne fera toujours pas voter les têtes de porc!

M. Dubois: Des porcs, des porcs!

M. Chevrette: Écoutez une minute, cela n'a pas d'allure. Est-ce que c'est parce que...

M. Biron: Vous parlez des coopératives... M. Giasson: ... M. le député.

M. Chevrette: Écoutez, je m'excuse, mais quand on se prononce carrément contre la réglementation des productions, vous savez très bien vous-même par expérience ce qui peut arriver dans certains types de productions, M. le député de Montmagny-L'Islet, vous le savez très bien.

M. Biron: M. le Président, je voudrais...

Le Président (M. Dussault): Un instant, question de règlement, M. le député de Lotbinière.

M. Biron:... que vous rameniez notre excellent ami à la pertinence du débat vis-à-vis des sociétés coopératives.

M. Giasson: II s'est voté des plans conjoints dans le porc et il n'y a jamais un porc qui a voté sur ces deux référendums-là. Arrêtez donc de charrier.

M. Chevrette: Non mais les dissidents, que prônent-ils et à quoi s'accrochent-ils? On essaie de se faire le défenseur, du jour au lendemain, du mouvement coopératif qui est un instrument au service des producteurs. Mais il y a aussi d'autres instruments possibles, qui sont reconnus, et je ne vois pas en quoi on briserait le mouvement coopératif parce qu'on permet certains contrôles de productions, parce qu'on permettrait à des groupes de s'unir, de s'associer et de voir à contrôler même leurs productions pour ne pas se retrouver devant des catastrophes. En quoi cela brimerait-il le mouvement coopératif? C'est un argument nouveau, depuis hier, dans la discussion, parce que les débats en deuxième lecture, c'est à la toute fin que c'est sorti, la question des coopératives. Là, on n'avait plus d'autres arguments à fournir, on voyait que la face nous changeait. Donc, on a sorti l'argument des coopératives. Ce n'était pas cela, la discussion, au début, pas une minute. Quand on essaie de faire dire que le gouvernement est contre le mouvement coopératif, je trouve cela très drôle, parce que je me souviens des propos du député de Huntingdon là-dessus. Il devrait les répéter. L'avoir su, je serait allé chercher intégralement ses déclarations là-dessus, dans le journal des Débats d'une certaine commission parlementaire...

M. Dubois: Je n'ai pas peur des propos que j'ai tenus...

M. Chevrette: ... où il se trouvait scandalisé qu'on donne une subvention de $4 500 000 à la Coopérative de Granby. C'était effrayant. C'était du gigantisme qu'il devait étouffer.

M. Dubois: Cela ne se tient pas dans vos paroles.

M. Chevrette: C'était du gigantisme qu'il devait étouffer.

M. Dubois: Je vous expliquerai tout à l'heure.

M. Chevrette: J'espère. C'est pour cela que je vous en offre l'occasion, autrement cela a l'air flou et cela a l'air fou.

M. le Président, je pense qu'on essaie d'introduire ici une dimension qui n'est même pas recherchée par le projet de loi. C'est une échappatoire qu'on recherche pour sauver la face.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Premièrement, je voudrais indiquer que le député de Joliette-Montcalm a débordé largement le sujet en discussion puisqu'il est question...

M. Chevrette: C'est à vous de faire un appel au règlement.

M. Dubois: ... de la motion d'amendement du député de Lotbinière afin de respecter intégralement, dans ce projet de loi, le rôle coopératif au Québec. C'était l'amendement en discussion et il n'en a pas parlé du tout. Je dois dire aussi que l'Union Nationale n'a jamais été contre les plans conjoints. Jamais. Et on n'a jamais indiqué cela non plus. Mais, je veux quand même indiquer que ce que je désire dans un plan conjoint, personnellement, c'est qu'il y ait au moins un minimum de volume de production qui soit d'accord à l'intérieur d'un plan conjoint. Regardez le plan conjoint du porc. Si vous en avez parlé, j'ai le droit d'en parler, je pense que vous avez ouvert la porte à cela. 85% de la production du porc sont représentés par les dissidents ou ceux qui ne veulent pas de plans conjoints. Appelez cela comme vous voudrez. Mais, le plan conjoint du porc ne fonctionne pas. Le jour où nous aurons un plan conjoint sanctionné selon la volonté des producteurs mais intégrant aussi un large volume de production, je pense que les plans conjoints fonctionneront. C'est ce que j'ai dit dans le passé et je le redis encore aujourd'hui. Un référendum sur un plan conjoint, c'est un vote économique. Ce n'est pas pour l'avenir constitutionnel du Québec, quand on vote sur un référendum de plan conjoint, mais c'est pour une économie quelconque.

Si on laisse de côté l'économie dans un plan conjoint, on n'arrivera jamais à en faire fonctionner d'une façon décente. Dans ce sens, j'ai toujours répété que j'aimerais au moins qu'un minimum de 50% de volume de production soit inclus dans un référendum de plan conjoint. Si cela avait été le cas dans le porc, je peux vous assurer d'une chose, c'est qu'il fonctionnerait le plan conjoint du porc, d'accord? Je ne sais pas...

M. Garon: Vous êtes contre?

M. Dubois: Je ne suis pas contre; je n'ai jamais dit que j'étais contre le plan conjoint mais je vous dis quand même qu'il est important d'intégrer un volume de production dans un plan conjoint. Ce n'est pas le sujet en discussion, je suis d'accord, mais le député de Joliette-Montcalm m'a ouvert la porte. Les chiffres, ils ont été répétés maintes et maintes fois au niveau du porc; c'est un cas particulier.

M. Chevrette: On donnait des chiffres. Le lait...

M. Dubois: Je n'ai pas parlé du lait. Je n'ai jamais dit que j'étais contre le plan conjoint du lait; je suis au courant qu'on a 48% de la production canadienne du lait; je n'ai jamais dit un mot contre le lait.

M. Chevrette: Les oeufs? Les pommes?

M. Dubois: II y a des problèmes dans les oeufs. Cela peut se régler.

Une voix: Il en manque. M. Dubois: Je n'ai jamais...

M. Chevrette: Ce sont tous des votes économiques.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Huntingdon, est-ce que je peux maintenant compter sur vous pour refermer la porte?

M. Dubois: Vous n'auriez pas pu fermer la porte tout à l'heure au député de Joliette-Montcalm? Il n'a même pas dit un mot sur la motion.

Le Président (M. Dussault): Remarquez que je vous ai laissé parler là-dessus. Je vous demande maintenant s'il y aurait moyen de refermer la porte et de revenir à la pertinence; vous avouez vous-même que ce n'est pas pertinent, d'accord?

M. Dubois: D'accord, mais la porte était ouverte.

Le Président (M. Dussault): J'essaie d'être tolérant.

M. Dubois: Je vous remercie, M. le Président. Le Président (M. Dussault): Allez.

M. Dubois: Je continue. Je demanderais au ministre de l'Agriculture d'être plus objectif en ce qui a trait au malaise qui existe, et je pense qu'il doit le reconnaître, il y a un malaise qui existe dans l'agriculture, il y a un malaise qui existe au niveau des contingentements dans le lait et il y en a eu depuis de nombreuses années. Il y a des gens qui sont malheureux de la coupe de quotas et de bien des choses; il y en a beaucoup qui sont malheureux de leur office de producteurs. Au niveau administratif — je ne vous dis pas au niveau structures d'un plan conjoint, je parle strictement au niveau administratif — il y a beaucoup de gens qui sont malheureux. Il y a beaucoup de gens qui sont malheureux de leur syndicat. Je pense que demain matin, s'il y avait un référendum sur l'opportunité d'adhérer ou non à l'UPA, ce serait drôle de voir le résultat. Je parle de la structure actuelle. Il y a des correctifs à apporter. Je pense que c'est vous-même qui avez dit hier: S'il y a des éléments qui ne sont pas bons dans telle chose, il faudrait qu'ils partent. Je pense que vous avez dit quelque chose dans ce genre. Une épuration, si on veut; je pense qu'on est dû pour cela.

La motion du député de Lotbinière pour respecter intégralement les coopératives dans le projet de loi 116, cela s'inscrivait dans une volonté du ministre de respecter les gros éléments en place. On a deux structures parallèles ou presque, il y une guerre engagée, et vous en êtes au courant. Le projet de loi 116 participe à répandre un petit peu d'essence encore sur le feu. Je pense que le seul correctif possible présentement au niveau de ce projet de loi serait, dans le texte du projet de loi 116, d'indiquer de nouveau le respect que vous avez pour les coopératives. Vous dites vous-même que vous en avez du respect. Je suis bien d'accord pour donner des subventions de quelques millions mais il faut aussi respecter la structure des coopératives.

Regardons seulement la requête auprès de la Régie des marchés de la part de la Coopérative fédérée du Québec ou des coopératives qui sont dans la transformation du lait; que demandent-elles? Leur propre plan conjoint. Il y a une bataille engagée entre la Fédération des producteurs de lait, d'une part, et les coopératives, de l'autre. Si le ministre voulait avoir l'esprit assez ouvert pour amener ce respect à l'intérieur de son projet de loi 116, on réglerait tous les problèmes immédiatement. On pourrait clore la discussion bien vite mais le ministre ne semble pas avoir l'esprit assez ouvert et c'est malheureux. J'aimerais que dans sa réplique tout à l'heure le ministre nous dise: Oui, j'accepte tout cela, et ce serait, je pense, la clé du succès du projet de loi 116.

Il y a aussi le fait — je pense que tout le monde est au courant — que la Coopérative agricole de Granby ne veut plus retenir les prélevés de $0.025 les 100 livres.

M. Chevrette: Cela ne le regarde même pas.

M. Dubois: Non, mais je veux faire état des problèmes qui existent présentement entre l'UPA et les coopératives. Il y a le même problème qui existe. La motion du député de Lotbinière...

M. Beauséjour: Cela ne regarde pas la loi 116.

M. Dubois: Non, cela s'inscrit très bien parce que la motion du député de Lotbinière... On parle de motion. Cela réglerait tout ce problème. Cela rassurerait les coopératives dans la transformation du lait sur le fait qu'elles ont leur place et qu'elles auront encore leur place dans le domaine de la mise en marché, de la transformation du lait au Québec; c'est important. Si vous voulez régler le problème, si vous voulez être assez objectif pour vouloir le régler, vous devez prendre en considération cette motion du député de Lotbinière. Je pense que c'est très important.

J'aurais autre chose à apporter tout à l'heure sur le fond de la question. Présentement, au niveau de la motion du député de Lotbinière, je pense qu'il y a de quoi faire réfléchir tous les membres de cette commission.

M. Chevrette: Seulement une petite question pour essayer de comprendre. Si dans quinze jours, trois semaines... Il m'a permis, M. le Président, que je lui pose une question.

Le Président (M. Dussault): D'accord.

M. Chevrette: Si, dans quinze jours ou trois semaines, on vous offrait l'occasion, et à d'autres parlementaires, à l'ouverture de l'autre session, de voir les possibilités de rapprochement, dû aux tensions actuelles, est-ce que vous maintiendriez votre amendement puisque cela m'apparaît vouloir régler un problème par le biais d'une loi qui n'est pas tout à fait connexe.

M. Dubois: Connexe?

M. Chevrette: Le sujet que vous apportez comme amendement, d'après moi, je vous dis que c'est parce que vous voulez régler le problème des tensions. Je vais peut-être poser ma question autrement. Vous désirez régler les tensions existantes entre l'UPA et le mouvement coopératif. Comme objectif, il n'y a personne qui va s'opposer à cela, mais vous y allez par le biais d'une loi qui ne vise pas à créer ou à ne pas créer de tensions. Elle vise à donner des moyens...

M. Dubois: Je suis bien d'accord avec cela.

M. Chevrette: ... de contrôle de production possible et des plans de mise en marché. Il me semble que...

M. Dubois: Cela coûte quoi, de l'inscrire dans le texte? Si vous vérifiez le mémoire des coopératives — il est là et c'est inscrit en blanc et en noir — vous allez voir que c'est l'inquiétude des coopératives. Si vous regardez le chapitre 36 de la loi de 1974, cela devient un élément supplétif à l'action coopérative et là, on l'écarte du projet de loi 116. Si on rassure l'élément coopératif, je pense qu'on va plaire à tout le monde. Cela va régler le problème. Cela va régler la majorité des articles du projet de loi 116. Je ne sais pas si vous ne voulez pas l'entendre. C'est votre affaire. De toute façon, M. le Président, je vais revenir sur le fond du problème tout à l'heure. Il est question de la motion du député de Lotbinière. Je reviendrai tout à l'heure sur le fond de la motion.

Le Président (M. Dussault): À l'ordre!

M. Ouellette: Est-ce que vous me permettriez une remarque, M. le Président?

Le Président (M. Dussault): Est-ce que M. le député de Beauce-Sud permet, parce que c'est à lui que normalement la parole revient? D'accord?

M. Roy: Peut-être que je vais donner la permission au député de Beauce-Nord. D'ailleurs, je sais qu'il aime beaucoup la lumière.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Beauce-Nord, vous avez la parole.

M. Ouellette: Oui. Toute l'électricité de Beauce-Sud passe par chez nous d'ailleurs.

M. Roy: C'est la raison pour laquelle il y a autant de pannes de courant!

M. Ouellette: Dans Beauce-Sud seulement. Le député de Huntingdon par ses propos nous dit ceci, à peu près, du moins de la façon dont je le comprends. Il y a des problèmes. Il y a des tensions entre le mouvement syndical agricole et le mouvement coopératif. Pourquoi ne pas profiter de la loi 116 pour essayer de les régler? C'est à peu près la façon dont il pose le problème.

M. Dubois: Ce n'est pas régler les problèmes.

M. Ouellette: Je vous dirai, et vous allez me répondre non, j'espère, que si on décelait des problèmes dans l'Office des autoroutes, il ne serait pas question d'amener cela dans la loi 116.

M. Dubois: II s'agit de la mise en marché, de la production.

M. Ouellette: Je prends un exemple complètement farfelu pour qu'on se comprenne très bien. On ne réglera pas le problème des autoroutes dans la loi 116. La loi 116 n'avait pas non plus pour objet de régler les problèmes de tensions entre le syndicalisme et le mouvement coopératif.

M. Dubois: II en crée d'autres.

M. Ouellette: II en crée d'autres? On verra. J'ai parlé aujourd'hui avec le directeur général d'une coopérative très importante au Québec. Le directeur général me disait ceci: Nous ne sommes pas intéressés à ce que la loi 116 règle tous les problèmes agricoles. On est intéressé cependant à ce que la loi 116 règle les problèmes qui sont nés le jour du jugement de la Cour suprême. Une fois que cela sera réglé, on passera à autre chose. Et cela, j'imagine que le ministre de l'Agriculture, qui est conscient comme vous...

M. Biron: Le ministre est d'accord. On va procéder et cela va prendre deux heures.

M. Ouellette: ... de ces problèmes sera d'accord pour convoquer — je ne sais pas — peut-être une commission parlementaire de tout le monde agricole pour régler les autres problèmes. Mais réglons celui-là d'abord et on verra au reste ensuite.

M. Biron: C'est ce qu'on voudrait faire. M. Dubois: M. le Président...

M. Ouellette: Mais en dehors de la loi 116, en dehors de ce débat qui est devenu, à toutes fins utiles, un prétexte pour faire ressortir l'ensemble des problèmes agricoles qui sont à régler demain, en attendant, il faut régler celui-là. C'est mon opinion.

M. Biron: D'accord...

M. Dubois: M. le député de Beauce-Nord, est-ce que je peux apporter un élément supplémentaire?

Le Président (M. Dussault): Allez-y!

M. Dubois: Le projet de loi 116 a quand même ouvert une grande discussion au niveau du monde agricole au Québec. Premièrement, il a été avoué par Me Trudeau tout à l'heure que le projet de loi 116 fait plus...

M. Garon: Vous l'accusez?

M. Dubois: Non, je ne l'accuse pas, mais il a avoué quand même que le projet de loi 116 fait plus que strictement remplir le vide créé par le verdict de la Cour suprême. Il fait plus que cela. S'il fait plus que cela, c'est qu'on a amené le problème...

M. Garon: II n'a pas dit cela.

M. Dubois: II a dit que c'était préférable, mais pas nécessaire. C'est la réponse qu'il a donnée au député de Beauce-Sud.

M. Garon: Non, il a dit: Utile, mais pas essentielle...

M. Dubois: Elle n'était pas essentielle. Alors...

M. Garon: Sine qua non, condition sine qua non, mais utile.

M. Dubois: Oui, utile. Mais ce n'est pas une nécessité.

M. Garon: Le jugement de la Cour suprême a justement pour but...

M. Roy: Mais utile à qui?

M. Garon: Pour empêcher des débats juridiques inutiles.

M. Dubois: Mais n'empêche que cela n'a pas rapport avec le jugement de la Cour suprême.

M. Garon: Oui. J'ai parlé de...

M. Dubois: À la suite des propos du député de Beauce-Nord...

M. Roy: Le débat a eu lieu sur d'autres sujets...

Le Président (M. Dussault): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Dubois: Le projet de loi 116 a engendré un grand nombre de discussions au Québec au niveau des problèmes. Présentement, les coopératives, face au projet de loi 116, présentent un dos-

sier au ministre, un mémoire au ministre, où c'est bien indiqué que le mouvement coopératif est en danger. On peut corriger la loi 116 tout de suite. (20 h 45)

M. Ouellette: Ce n'est pas ce qui ressort des propos du directeur général, propos qu'il m'a tenus cet après-midi.

M. Dubois: Quel directeur général?

M. Ouellette: Le directeur général de la Coopérative du Sud de Québec qui me dit: II n'y a pas de problème. À la suite de la rencontre qu'on a eue avec le ministre le 16 décembre et des amendements que celui-ci va apporter, la loi 116 pour nous ne pose aucun problème.

M. Dubois: J'ai moi-même rencontré deux filiales, au début de février, de la Coopérative agricole de Granby. Ce n'est pas la teneur de leurs propos du tout.

M. Garon: Quelles filiales?

M. Dubois: Huntingdon. Premièrement, cela en est une. C'est une filiale de la Coopérative de Granby.

M. Chevrette: Ne faites pas comme Bourassa. Nommez-moi un seul cas.

M. Garon: Cela ne venait pas du conseiller juridique, alors.

M. Dubois: On a des coopératives à Napierville aussi.

M. Garon: Est-ce que les gens de la coopérative de Huntingdon avaient lu le jugement de la Cour suprême?

M. Dubois: Ils étaient mandatés par la Coopérative de Granby pour me rencontrer parce que c'est près de chez nous. Je ne sais pas, vous avez reçu un télex. Ils étaient au courant de tout cela. Ils ne sont pas encore satisfaits parce que, si vous regardez le mémoire que vous avez reçu des coopératives et de la Coopérative de Granby, il y a du matériel là-dedans. Il y en a quinze pages. Vous n'avez pas réglé le problème avec vos petits amendements. Le problème est loin d'être réglé. La guerre est engagée et elle est loin d'être finie. Vous le savez. Vous êtes conscient de cela.

M. Ouellette: Ce n'est pas le même débat.

M. Dubois: C'est le même débat, parce que le débat est engagé avec les coopératives à cause de la loi 116. Alors, qu'on le règle tout de suite.

M. Garon: Cela fait 30 ans.

M. Dubois: Oui, mais vous avez mis de la gazoline en masse sur le feu.

M. Garon: Pardon?

M. Dubois: Vous avez mis de la gazoline en masse sur le feu. Il faut éteindre le feu.

Le Président (M. Dussault): Messieurs, c'est au tour de M. le député de Beauce-Sud; ensuite, le ministre.

M. Roy: Je vais laisser parler M. le ministre.

M. Garon: Je vais être assez bref. La Loi établissant un office provincial pour aider à la vente des produits agricoles, chapitre 37 — vous voyez la propagande dans le titre — a été sanctionnée le 23 février 1956. Elle avait, à l'article 3 qui énumérait les objets de la loi, un alinéa ou un paragraphe qui se lisait exactement comme la proposition que vient de faire le député de Lotbinière, mot à mot. "Rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements d'un producteur vis-à-vis de sa coopérative, ni avec les engagements de celle-ci envers une autre coopérative." En 1963, lors de la refonte de cette loi... Voyons, où est-elle? Je l'ai perdue de vue. D'accord. Chapitre 34. Cela s'est fait en même temps, chapitre 34, Loi des marchés agricoles du Québec; chapitre 35, Loi modifiant la Loi des sociétés coopératives agricoles. Il y a eu une refonte de la Loi des marchés agricoles du Québec qui a été sanctionnée le 24 avril 1963, chapitre 34. Dans cette refonte, ce troisième alinéa, l'équivalent de l'article 3 devenu l'article 2, est disparu, en 1963. Depuis ce temps...

M. Roy: Qui était au pouvoir à ce moment? Une voix: M. Lesage.

M. Garon: II y a eu une commission parlementaire.

M. Roy: Ce n'est pas une référence.

M. Vaillancourt (Orford): Cela fait une bonne référence.

M. Ouellette: Pour une fois qu'il y a eu un bon gouvernement libéral.

M. Garon: À ce moment, il y a eu une commission parlementaire que M. Lesage avait dirigée lui-même. Il m'en contait justement les souvenirs dimanche soir dernier, lors de la rencontre avec le premier ministre de France. J'ai eu l'occasion de jaser un peu avec lui et il m'en racontait les péripéties. À l'occasion de cette loi, l'alinéa 3 a disparu. J'ai l'impression depuis 1963 que le mouvement coopératif a progressé terrible-mont au Québec...

M. Biron: Pas terriblement, merveilleusement.

M. Garon: ... beaucoup puisque aujourd'hui on considère que, dans le secteur du lait indus-

triel, les coopératives agricoles contrôlent à peu près 85% du lait industriel et dans le lait nature au-dessus de 50%, entre 50% et 60%. Donc, cela veut dire que les coopératives dans le secteur laitier — c'est là qu'elles sont principalement — dans la mise en marché, j'entends, des produits, sont en excellente santé. On essaie de dire que le gouvernement a comme une intention cachée. Vous savez, il y a une loi cachée; il faut adopter cela vite en vue de faire disparaître les mouvements coopératifs, c'est un peu gros comme raisonnement.

À part ça, quand les gens disent: Quelle salade avez-vous vendue aux coopératives? Je n'ai pas l'impression que les gens des coopératives sont des niaiseux. Ils sont venus à mon bureau, ce sont des gens avertis; on a discuté ensemble et ils ont dit: Ces amendements sont corrects, on serait d'accord. Ensuite, je les ai rencontrés, il y avait le mémoire dont vous avez parlé. Ils ont envoyé un télégramme pour dire qu'ils étaient d'accord sur les amendements et le projet de loi 116, le 18 décembre. Le 21 décembre, ils en envoient un autre — je n'ai pas la copie avec moi, mais ils y réfèrent dans leur article du Coopérateur agricole du mois janvier — où ils insistent en disant: Nous insistons fortement pour que 116 soit adopté le plus rapidement possible. Je me demande même s'ils ne disaient pas: Avant l'ajournement de la session. J'ai l'impression que si le projet de loi avait pour but de les faire mourir, ces gens ne seraient pas masochistes au point de dire: Dépêchez-vous d'adopter ce projet de loi. Ils diraient: II y a quelque chose qui ne va pas.

Je pense que le problème, actuellement, c'est que l'Union Nationale s'est embarquée dans un mauvais débat qui a commencé avec la dissidence. Elle s'est rendue compte, en cours de route, que c'était un mouvement qui était très petit, marginal, au Québec. Elle est allée à l'hôtel Hilton ensuite et le député de Johnson a pris des engagements pour défendre tous les dissidents. Là, elle voudrait faire dévier le débat en disant que, dans le fond, ce qu'elle appuie, en réalité, ce sont les coopératives. Mais ce sont des grands coups d'épée dans l'eau, puisque la Coopérative fédérée, qui est la fédération de toutes les coopératives agricoles du Québec, nous a envoyé deux télégrammes pour nous demander d'adopter le projet de loi 116 le plus rapidement possible. Il y a quelque chose que je ne comprends vraiment pas. On revient sur des articles qui ont été abolis, qui ont été abrogés il y a près de 16 ans. Je pense que l'Union Nationale veut simplement sauver la face pour montrer que tout ce débat a servi à quelque chose et qu'elle a gagné quelque chose en changeant l'article 2.

Essentiellement, dans ce débat, les problèmes qui existent entre les coopératives et les syndicats, ils existent depuis 30 ans, parce que chacun n'a pas vraiment déterminé la place que chacun doit occuper. La loi 116 ne réglerera pas cela. Je pense que, quand on aura adopté la loi 116, plus tard je dois vous dire que je songe de plus en plus à faire une commission parlementaire, peut-être pas sur l'ensemble des produits, mais on pourrait commencer par le problème du lait, par exemple; parce que la mise en marché des différents produits ne se fait pas de la même façon.

On ne peut pas dire sur le projet de loi 116, mais depuis longtemps il y a des débats dans le monde agricole, c'est évident, tout le monde le sait. Il y a des procès pour des requêtes, devant la Régie des marchés agricoles. Mais de là à dire que la loi 116 va abolir le mouvement coopératif, c'est une autre paire de manches. Je soutiens encore que la loi 116 a pour but essentiellement de combler le vide juridique qui résulte de la décision de la Cour suprême et, en même temps, il y a des corrections pour éviter des ambiguïtés. On a dit — et je l'ai dit tout le temps du débat — qu'essentiellement le référé de l'Ontario était pour connaître un certain nombre de réponses de la Cour suprême, parce qu'eux étaient fatigués de tous les problèmes juridiques qu'ils avaient et des procès qu'ils avaient dans le secteur agricole.

Alors, à la suite de ça, qu'est-ce que l'article 2a, tel qu'on l'a fait, vient faire? L'article 2a vient simplement dire: Ce que la Cour suprême a dit, vous avez juridiction là-dessus et là-dessus. C'est vrai, on a juridiction là-dessus et là-dessus, on la prend, on la met dans la loi, exactement selon la décision de la Cour suprême. C'est pour cela que, éventuellement, quand les gens voudront plaider devant les tribunaux que la loi n'a pas pour but de régir la production, la première fois que le juge se trouvera devant une loi de la mise en marché des produits agricoles — on n'a qu'à voir combien les gens sont mêlés avec ça, ici, en commission parlementaire — il écoutera cela et ça lui prendra une journée ou deux de délibérations avant de s'apercevoir que ce n'est pas vrai que la loi actuelle des marchés agricoles a une juridiction. Elle statue sur les conditions de production.

Quand vous arrivez devant un juge, qu'il y a une nouvelle loi sur laquelle il n'a jamais entendu de procès, cela lui prend un petit bout de temps, il ne connaît pas la loi de la Régie des marchés agricoles par coeur.

Cela a simplement pour effet de préciser. À ce moment-là, si on dit que la loi n'a pas pour effet de réglementer cela, le juge va aller voir aux objets — il sait qu'habituellement les objets se trouvent au début de la loi — et il va dire: Non, cela a telle chose pour objet. Cela va être clair, cela va éviter des procès et des débats juridiques inutiles qui coûtent de l'argent aux producteurs. Ce sont même des avocats qui ont voulu inclure cela dans la loi en pensant aux consommateurs et en pensant aux gens qui vont utiliser les services juridiques quand ils n'en ont pas besoin, pour faire des procès inutilement.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: M. le Président, je pensais apprendre quelque chose de nouveau en écoutant le ministre; c'est la raison pour laquelle je lui ai laissé mon droit de parole, un droit de parole que vous m'aviez accordé.

M. Garon: La vérité est une, je ne peux pas parler autrement.

M. Roy: Je me suis dit: Si le ministre parle et dit autre chose, on va peut-être apprendre autre chose. Je me suis rendu compte, à ma grande déception, que le ministre se sert de deux arguments cassettes répétés et re-répétés, dans le plus pur style bourassien. On a connu cela du temps de...

M. Biron: Cela, c'est une insulte! M.Roy: Style Bourassa ou cassette. Une voix: Est-ce que c'est parlementaire?

M. Roy: Je ne le sais pas, je laisse aux autres de juger si c'est parlementaire ou non.

M. Garon: II ne parlait jamais d'agriculture, M. Bourassa; je l'ai d'ailleurs très peu connu.

M. Roy: Non, je n'ai pas parlé de M. Bourassa, j'ai parlé d'un argument bourassien; j'ai fait une allusion, c'est permis.

M. Garon: Je l'ai rencontré également... M.Roy: Alors, le ministre dit... M. Garon: II était bien aimable.

M. Roy: Je n'ai pas dénoncé le style, j'ai fait une comparaison avec le style.

M. Chevrette: Cela avait l'air péjoratif. Une voix: Sans commentaire!

M. Roy: L'argument que nous sert le ministre: L'Union Nationale s'est lancée dans un mauvais débat, ils ont pris part aux dissidences; l'Union Nationale tente de sauver la face...

M. Garon: Elle est obligée.

M. Roy: ... etc., etc. Le ministre de l'Agriculture a le droit de dire ce qu'il voudra aux gens de l'Union Nationale; l'Union Nationale est capable de se défendre, mais cela ne répond pas à la question. Le ministre nous dit qu'il n'y a rien là, que, dans le secteur des coopératives, il n'y a pas d'inquiétude, qu'il a eu un télégramme dans lequel elles lui disaient qu'elles voulaient voir la loi 116 adoptée au plus vite, etc., et que la loi 116 vient combler le vide créé par le jugement de la Cour suprême et que, du fait que la Cour suprême a décidé que nous avions juridiction sur la production, nous devons exercer cette juridiction. C'est comme si le gouvernement fédéral disait, demain matin: Le gouvernement de la province de Québec a juridiction pour doubler l'impôt sur le revenu. Le ministre des Finances dirait: On vient de nous dire que nous avions juridiction, on double les impôts.

Entre affirmer une juridiction et l'exercer, il y a une différence; je ne reviendrai pas là-dessus, je l'ai dit cet après-midi. Mais le ministre ne nous fera pas croire que la rencontre qu'il a eue avec les gens du milieu coopératif dont on s'est servi dans le mémoire...

M. Beauséjour: ... des cassettes.

M. Garon: Vous avez déjà dit que j'avais acheté l'UPA; ai-je acheté les coopératives aussi?

M. Roy: On dit que c'est une autre cassette. Je ne l'ai pas utilisée tellement, mais le ministre ne viendra pas nous faire croire, à force de répéter — c'est la raison pour laquelle j'ai cru nécessaire de sortir le document — que les petits amendements mineurs qu'il a apportés à la loi ont répondu aux questions et aux inquiétudes des coopératives. Le ministre ne l'admet pas devant la commission parlementaire; parce qu'il connaît le fond de la question, la préoccupation fondamentale du secteur coopératif, le ministre de l'Agriculture a sûrement appris, depuis le 16 novembre 1976 — il a été nommé ministre de l'Agriculture dans les jours qui ont suivi — que le mouvement coopératif, dans son ensemble, souventefois, se plaint de la disparition d'une des dispositions qu'il y avait dans la loi de 1956 qu'on voudrait bien retrouver dans la loi actuelle. Les pouvoirs accrus qu'on donne aux offices de mise en marché et la mobilité qui découle de la réglementation des quotas de production causent des inquiétudes au mouvement coopératif. (21 heures)

On pourrait aborder toute la question des quotas, ce n'est évidemment pas l'objet de l'article no 2 de la loi, mais on sait très bien que, dans les autres provinces, puisqu'on semble vouloir y faire référence, dans le Manitoba, on ne déménage pas les quotas d'un producteur à l'autre et d'une ferme à l'autre. Le quota suit les établissements et les bâtisses.

M. Garon: ... changer.

M. Roy: C'est dans la loi du Manitoba. Il y a des choses qui se font ailleurs. Il y a des expériences qui ont été vécues. Il y a des expériences malheureuses qui ont été vécues, comme il a pu y en avoir ici au Québec et qui nécessitent qu'il y ait des amendements. M. le Président, si on veut parler sérieusement sur l'amendement qui a été proposé par l'Union Nationale, je pense que nous avons le devoir de revoir l'article 2 de la loi 36 sur la mise en marché des produits agricoles. "La présente loi a pour objet de mettre à la disposition des producteurs et des consommateurs un moyen supplétif de mise en marché ordonnée et juste des produits agricoles. Elle ne doit pas être interprétée comme moyen de concurrencer l'organisation coopérative de la production et de la mise en marché des produits agricoles."

Deuxième paragraphe: "Ce principe doit guider l'application de la présente loi, pour ne pas

gêner l'action du coopératisme dans les régions et les secteurs où il peut répondre efficacement aux besoins et afin de profiter autant que possible du concours des coopératives pour l'établissement et l'administration de plans conjoints dans les secteurs de production et les régions où il est désirable d'en établir."

Ce que la loi vient ajouter à cet article, qui fait en quelque sorte référence au mouvement copé-ratif dans son ensemble, c'est ceci: La présente loi a pour objet de réglementer la production au Québec des produits agricoles et la mise en marché des produits agricoles dans le commerce inta-provincial au Québec." L'amendement de l'Union Nationale demande qu'on ajoute tout simplement le paragraphe qui a disparu en 1963 et qui a causé des problèmes. D'ailleurs, la Régie des marchés agricoles connaît mieux que je peux le savoir les problèmes que cela a pu créer. "Rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements d'un producteur vis-à-vis de sa coopérative." Le ministre sait très bien ce que cela signifie quand on dit les engagements d'un producteur vis-à-vis de sa coopérative. Le ministre comprend ces mots-là. Il connaît toute la portée, toute la dimension des engagements d'un producteurs qui s'engage a fournir et à vendre son produit à sa coopérative. Sa coopérative a effectivement des responsabilités vis-à-vis d'une autre coopérative et aussi vis-à-vis des engagements de celle-ci envers une autre coopérative. Le ministre a compris cela. Le ministre comprend cela ces engagements.

M. Garon: Cela veut-il dire que cela empêcherait les contingentements?

M. Roy: Je ne veux pas dire que cela empêche les contingentements, mais je dis que dans la préparation, l'élaboration des règlements de contingentements, il faudra qu'on tienne compte de certains facteurs. C'est cela que cela veut dire. Quand on est rendu, par exemple, à pouvoir, dans une région... On me demande un exemple et je vais en donner un. C'est l'adjoint parlementaire de l'Agriculture qui me demande cela. Je vais donner un exemple. Le député de Beauce-Nord a parlé de la Coopérative laitière du Sud du Québec qui, actuellement, compte 3800 membres fournisseurs de lait à cette coopérative. Si, dans le règlement des contingentements, il y a une partie des contingentements qui sont déménagés ailleurs, qu'est-ce qui va arriver à cette coopérative? Cela met en danger l'existence même des coopératives. Les coopératives l'ont très bien dit dans leur mémoire. Il va de soi que ces dispositions permettraient de porter un coup de mort aux coopératives. Ce n'est pas le député de Beauce-Sud qui écrit cela, c'est écrit dans le mémoire qui a été soumis au ministre, dont le ministre a pris connaissance.

M. Garon: Avant le télégramme, avant les amendements.

M. Roy: Le télégramme n'a rien réglé, arrêtez cela. Le ministre a pu avoir des conversations avec les dirigeants des coopératives, j'en ai eu. Mais je me suis engagé, parce qu'on me l'a demandé, à garder confidentiel les conversations que j'ai eues.

M. Garon: C'est toujours facile de dire cela. Je vous dis publiquement...

M. Roy: Je sais que le ministre l'a fait aussi. Le ministre n'a pas tout divulgué. Le ministre s'est limité uniquement à parler du petit télégramme. Que le ministre ne vienne pas me faire croire... Il pourra le faire croire à la galerie. Il pourra le faire croire à la population en général...

M. Garon: Merci.

M. Roy: ... mais j'ai eu des rencontres, des discussions, bien des questions sur bien des sujets. J'ai pris plusieurs heures à étudier le dossier, et le ministre sait très bien de quoi je veux parler à ce moment-ci. Il y a beaucoup d'inquiétude.

M. Garon: Non, je ne le sais pas.

M. Roy: Si le ministre ne le sait pas, c'est inquiétant.

M. Garon: Pardon?

M. Roy: Le ministre manque d'information, d'éléments dans son dossier.

M. Garon: Je ne sais pas qui vous voyez en secret.

M. Roy: C'est très inquiétant. C'est très inquiétant pour le ministre, si le ministre n'est pas au courant de ces choses-là.

M. Garon: Si je le savais, je vous ferais suivre.

M. Roy: Bon. Alors, pour quelle raison avez-vous refusé qu'on fasse venir les gens du milieu coopératif ici aujourd'hui?

M. Garon: Ils nous demandent d'adopter le projet de loi 116.

M. Roy: Le ministre vient de nous donner la preuve, M. le Président, qu'il a une information à sens unique. Il vient de nous donner la preuve par ce qu'il vient de dire qu'il a une information à sens unique. À ma grande déception, du moins, il laisse supposer par ses propos que l'information vient seulement d'un côté de la médaille. Il ne voit qu'un seul côté et il vient encore de nous en donner la preuve. Quand il s'est établi tout un système de coopératives au Québec, au cours des années, M. le Président, pourquoi les coopératives se sont-elles développées au Québec? Pour quelle raison? Parce que les agriculteurs, les produc-

teurs agricoles, étaient à la merci des sociétés multinationales, de grandes sociétés à grand capital, des sociétés qui étaient presque anonymes. Les agriculteurs ont formé des coopératives dans leur milieu, ont formé des coopératives dans leur région. Il y en a eu un grand nombre de coopératives au Québec. Il y en a encore quelques-unes. On se rend compte qu'au niveau du secteur laitier seulement, en 1960 — et ces chiffres devraient faire réfléchir l'honorable ministre — il y avait au Québec 647 entreprises acheteuses dans le secteur laitier. Je n'ai pas le détail des coopératives, je pourrais l'obtenir. Je pensais que le ministre les avait.

M. Garon: En quelle année?

M. Roy: En 1960. En 1979, dans le secteur laitier, il ne reste que 71 entreprises acheteuses. Il y a eu des fusions de coopératives, il y a eu la fermeture d'entreprises de fabriques de beurre, il y a eu des fermetures d'entreprises de fabriques de fromage, il y a eu des fermetures d'entreprises, des regroupements d'entreprises qui se sont faits. Cela a été remplacé par d'autres usines, j'en conviens.

M. Garon: Réalisez-vous que vous parlez contre le mouvement coopératif actuellement?

M. Roy: Je ne parle pas contre le mouvement coopératif.

M. Garon: Bien, voyonsl C'est le mouvement coopératif qui a fait cela. Plus de 85% maintenant du lait industriel et de transformation, ces fromageries et tout cela, cela lui appartient.

M. Roy: Mais c'est ce que je dis. Pour quelle raison les gens se sont-ils donné des coopératives, pensez-vous? Les gens se sont donné des coopératives parce que justement, avant de se donner des coopératives, ils étaient à la merci des sociétés multinationales.

Une voix: Ils voulaient transformer.

M. Roy: Ils voulaient s'occuper de la transformation chez eux.

M. Garon: Et le fait...

M. Roy: Le ministre est donc bien nerveux! Il est donc bien nerveux, notre ministre.

M. Garon: Non, mais je vois bien que vous vous en allez dans un cul-de-sac et je veux vous sauver la vie. Vous dites que sur 640 entreprises, il en reste cent quelques. Maintenant, 85% des entreprises dans le domaine de la transformation sont des coopératives.

M. Roy: Je remercie le ministre de sa bouée de sauvetage, mais, à l'heure actuelle, je constate qu'elle est trouée passablement. Je n'oserais pas m'en servir.

M. Garon: II n'y a pas beaucoup d'eau.

M. Roy: Non, il n'y a pas beaucoup d'eau, justement. Il n'y a pas beaucoup d'eau, mais c'est dans le sable mouvant.

M. Garon: Vous donnez des coups d'épée dans l'eau.

M. Roy: Cela paraît effectivement que le ministre est dans un terrain mouvant. Alors, c'en sont des raisons, M. le Président; aujourd'hui, le nombre d'entreprises a diminué considérablement au Québec et le peu d'entreprises qui existent actuellement sont intéressées à poursuivre leurs opérations, sont intéressées à continuer de jouer leur rôle. Alors, si de tels pouvoirs devaient être utilisés au maximum à un moment donné, est-ce qu'on se rend compte de la discrétion qui pourra être exercée à l'endroit de certains établissements et notamment dans le secteur des coopératives, puisque effectivement, comme le dit le ministre, près de 80% du secteur laitier sont actuellement entre les mains du système coopératif?

Or, M. le Président, je pense qu'il n'y a rien dans l'article qui peut représenter un aspect négatif, qui va à l'encontre des objectifs que poursuit le ministre, que poursuit le gouvernement. On ne fait qu'affirmer un principe qui vise à reporter dans une loi une précision qui existait déjà et qui a été enlevée sans le consentement des personnes concernées. On veut le remettre aujourd'hui. On veut étendre des pouvoirs en changeant le pouvoir qui est réservé actuellement au niveau de la mise en marché. On veut étendre les pouvoirs pour aller contrôler la production. Quand on parle de contrôler la production, il est évident qu'on parle de contrôler la production sur la ferme. Il est donc important qu'on pose certaines balises de façon à permettre au secteur coopératif de garder sa place, d'être en mesure de continuer à jouer son rôle.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Saint-François.

M. Rancourt: M. le Président, peut-être que ce sera ici la première fois qu'un membre d'une coopérative parle parce qu'en fait, je suis membre de la Coopérative de Granby, je suis membre de la coopérative La québécoise, celle qui a été qualifiée de fantôme par l'Union Nationale, mais je ne suis pas un fantôme, j'espère.

M. Biron: Surtout pas. C'est la régie qui l'a qualifiée de "front".

M. Rancourt: En partant de là, j'aimerais faire comme point de départ le pourquoi de la coopération. Comme agriculteur — je vois des membres ici qui sont agriculteurs et des agriculteurs qui sont membres de la coopération aussi — nous avons, au départ, mon père et moi ou d'autres chez les agriculteurs du Québec, décidé une bonne fois de prendre en main nos usines de transformation. Nous avons utilisé les moyens qui

nous étaient fournis, donc, une part sociale dans une coopérative pour l'achat, comme vient de le dire le député de Beauce-Sud. D'accord, nous avons pris en main l'industrie que nous avons transformée en coopérative et que nous avons transformée en usine de coopérative de transformation. Nous avons été chercher les débouchés soit en production de lait industriel surtout ou en transformation de lait nature au Québec. Nous l'avons fait parce que nous voulions aller de la production à la consommation, au départ.

Du même coup, nous avons aussi formé des offices de commercialisation — les mêmes agriculteurs — justement pour pouvoir négocier avec des industries, des industriels laitiers, et des coopératives. Il y a eu la Fédération des producteurs de lait nature du Québec; il y a eu la Fédération des producteurs de lait industriel aussi. La Fédération des producteurs de lait industriel a conclu un protocole d'entente avec la Coopérative de Granby — il ne faut pas que vous l'oubliiez, je ne pense pas qu'il y ait quelqu'un qui l'ait fait valoir ici — pour qu'ils ne puissent pas diriger le lait; cela voulait dire que c'était la Coopérative de Granby qui utilisait le lait, et le lait était en consignation — il ne faut pas l'oublier — avec un prix de base. Par la suite, au bout de l'année, si la coopérative réussissait à faire des profits, elle remettait les sommes d'argent aux agriculteurs.

Les offices de producteurs sont allés plus loin. Ils ont demandé à la régie de négocier des coûts de revient, et ces coûts de revient ont permis aux agriculteurs de faire une production ordonnée et de fournir tout le lait nécessaire aux industriels laitiers du Québec, incluant les coopératives et les industriels laitiers. Vous vous retrouvez avec une situation actuellement où les producteurs de lait nature fournissent des coopératives, comme Granby par son secteur de lait nature, parce que la Coopérative de Granby a acheté des industriels laitiers avec la classe 1. Donc, elle fournit le lait de classe 1 à la filiale de Québec-lait et, par son "pool", fournit une quarantaine d'industriels laitiers ainsi que la Coopérative de Granby — dans le cas particulier, c'est la même parfois — qui ne veulent pas leur donner le lait nécessaire pour continuer à transformer des produits laitiers en produits finis.

Je crois que quand nous réglementons la production au Québec, nous ne sommes pas contre la coopérative.

M. Biron: La Coopérative de Granby qui ne veut pas fournir le lait aux industriels...

M. Rancourt: C'est que la Coopérative de Granby, actuellement, même si elle a des demandes d'industriels laitiers pour transformer des produits parce qu'elle a un grand potentiel de cueillette de lait, le garde pour elle.

M. Biron: Quand vous parlez d'industriels laitiers, cela peut être Kraft ou...

M. Rancourt: Cela pourrait être Saputo, Delisle ou beaucoup d'autres.

M. Biron: Elle garde le lait pour elle.

M. Rancourt: Elle garde le lait pour elle, ne le fournit pas. Donc, ces industriels laitiers ont été obligés de se retourner vers la Fédération des producteurs de lait nature du Québec. En partant de là, cette fédération utilise son lait de classe de transformation ou de classe industrielle. Il ne faut pas oublier non plus — et cela, vous l'oubliez — que le lait de transformation est sur un quota national. On dépend de la Commission canadienne du lait. Vous oubliez beaucoup de choses. Dans tout ce qui se dit ce soir ici et ce qui s'est dit avant, je pense que l'essentiel n'a jamais été dit, et je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de personnes qui puissent le dire, à l'exception des quelques agriculteurs qui sont ici, membres de l'Assemblée nationale. (21 h 15)

Donc, ce règlement permet de réglementer la production des produits laitiers au Québec. Rien d'autre. Ce qui n'empêche pas la Coopérative de Granby... J'ai rencontré les animateurs. Attention! Je me demande si vous n'avez pas rencontré seulement les animateurs de la coopération qui sont venus dans chacun des bureaux des députés essayer de nous dire des choses qui ne sont pas nécessairement valables. La direction de la coopérative a rencontré le ministre, et ces animateurs-là n'étaient même pas au courant que c'était rendu au ministre et qu'ils avaient fait une entente. Je leur ai donné ce renseignement. Ils étaient tout surpris. En tout cas, je n'en passe pas de remarque très particulière, mais j'ai été surpris.

M. Biron: Je m'excuse de vous déranger. M. Rancourt: Oui, allez-y. On a le temps.

M. Biron: Je voudrais seulement revenir un peu. Vous avez dit — c'est intéressant — que la Coopérative de Granby ne veut pas vendre son lait à d'autres industriels. Savez-vous pour quelle raison et quel préjudice cela cause aux producteurs de lait? Vous avez dit: On a un quota national et on ne peut pas le dépasser. Il faut le respecter. Cela cause peut-être un préjudice à je ne sais qui, mais pour quelle raison la Coopérative de Granby ne veut-elle pas vendre son lait?

M. Giasson: Parce qu'elle peut l'utiliser.

M. Rancourt: Parce qu'elle l'utilise elle-même, bien sûr, pour une part, mais d'autre part, quand elle le vend à d'autres sociétés, ces autres sociétés paient parfois des prix supérieurs aux prix que reçoivent les agriculteurs. De quelle façon faire la répartition des sommes reçues? Peut-être peut-elle le faire par le système de ristournes, mais, au niveau de la Fédération des producteurs de lait nature du Québec ils font une péréquation mensuelle des prix reçus au niveau du lait de différentes industries et, à chaque mois, l'agriculteur reçoit un prix moyen pour l'utilisation du lait industriel, ce que la Coopérative de Granby ne fait pas. Si la Coopérative de Granby, Québec-Lait,

veut bien utiliser la loi 116... D'ailleurs, elle a déjà, avant, demandé un office de producteurs pour ses propres producteurs, ce qui veut dire qu'elle jette par terre la Fédération des producteurs de lait industriel du Québec parce qu'elle a la majorité des membres qui y sont fournisseurs. Mais, en tout cas, ce n'est pas un problème que j'ai à régler. C'est à la Régie des marchés de régler ce problème. Ils sont là pour rétablir ce fait. Je sais fort bien que la Coopérative de Granby a une demande en suspens à la Régie des marchés agricoles, actuellement. Qu'elle continue à le faire. C'est son travail. Personnellement, comme je suis membre de la Coopérative de Granby, je n'ai rien à dire et, si elle le fait, d'accord. Mais je suis aussi membre de la québécoise. Justement, tantôt, on disait que la coopération, les industriels laitiers sont très peu nombreux au Québec et on manque peut-être de fournisseurs. On ne veut pas déstabiliser les fournisseurs à travers le Québec, certaines usines, mais c'est justement ce que la québécoise a fait. Ils ont acheté des usines de transformation pour pouvoir maintenir une concurrence entre des secteurs de production, de transformation, qu'ils soient des coopératives ou non — pour moi, cela n'a pas d'importance — pour pouvoir maintenir dans des régions comme la Beauce des agriculteurs avec des quotas sur place. Une chose que vous ne savez peut-être pas aussi, c'est que pour le lait industriel, malheureusement, les pouvoirs ne leur permettent pas de vendre des quotas à l'enchère comme cela se fait dans la production de lait nature. Ils sont obligés de vendre les fermes avec ou de l'autre. Personnellement, je trouve cela très mauvais. Dans les producteurs de lait nature au Québec, chaque mois, s'il y a des agriculteurs, cela ne change pas le quota global de production au Québec, mais cela permet à des agriculteurs, ceux qui veulent vendre, de vendre leurs quotas de production à d'autres qui en ont besoin pour maintenir une production ou une ferme viable.

M. Giasson: Est-ce le producteur de lait nature qui abandonne, qui vend lui-même ou si c'est son organisme?

M. Rancourt: C'est le producteur de lait nature qui décide de cesser sa production qui remet le quota et il reçoit l'argent.

M. Giasson: II le remet à qui?

M. Rancourt: II le remet à la fédération et la fédération le vend à l'encan. L'argent revient à l'agriculteur.

M. Giasson: Au plus offrant?

M. Rancourt: Au plus offrant. C'est un encan public.

M. Giasson: Mais le producteur de lait nature qui abandonne sa production ne vend pas personnellement à un autre producteur, il passe par son organisme.

M. Rancourt: Pas de gré à gré, un à un. C'est un encan public, mensuellement.

M. Giasson: D'accord.

M. Dubois: Eventuellement il a quelque chose.

M. Rancourt: Non, monsieur.

M. Giasson: Tandis que, dans le lait industriel, le producteur remet d'abord, et il n'y a pas de vente à l'encan. C'est la fédération régionale qui fait une répartition entre des producteurs de lait industriel qui veulent augmenter leur production. Non?

M. Rancourt: Oui, c'est exact. Le grand problème dans la production actuellement, c'est que la Fédération des producteurs de lait industriel n'a pas suffisamment de pouvoirs parce qu'elle les a délégués autrefois dans un protocole d'entente à la coopération. Actuellement, elle manque de pouvoirs pour réussir à vivre d'une façon normale.

M. Roy: Est-ce que M. le député me permettrait une question?

M. Giasson: Cela vaudrait le coup d'avoir les deux fédérations de producteurs, je pense. On le demande depuis longtemps.

M. Rancourt: Cela ne change rien au niveau de l'adoption de la loi 116. En partant de là, je suis contre et j'aimerais qu'on poursuive l'étude de la loi 116.

Le Président (M. Dussault): Est-ce que vous permettez une question, M. le député de Saint-François, de la part de M. le député de Beauce-Sud? Oui?

M. Roy: Le député de Saint-François vient de nous exposer un problème, une situation pour laquelle j'ai un volumineux dossier ici avec beaucoup de renseignements, beaucoup de détails. Je ne me suis pas présenté devant la commission parlementaire les mains vides. J'aimerais demander à l'adjoint parlementaire, à mon collègue le député de Saint-François, par votre entremise, M. le Président, si les pouvoirs qu'on réclame dans la loi 116, de contrôle de la production, viseraient à favoriser davantage les producteurs de lait nature par rapport aux producteurs de lait industriel ou vice-versa.

M. Rancourt: Absolument pas. Rien à voir.

M. Roy: Cela n'a rien à voir.

M. Rancourt: Est-ce que vous avez terminé?

M. Roy: Non. J'ai autre chose. Quand je regarde ici — M. le Président, si on me permet, je viole peut-être le règlement, je m'excuse d'avance, étant donné que la porte est ouverte — par exemple, le nombre de producteurs au Québec et que je

fais la comparaison entre les producteurs de lait nature et les producteurs de lait industriel, pour 1974-1975, 1975-1976, 1976-1977, 1977-1978, on remarque que la situation n'est pas la même pour les deux. Elle n'a jamais été la même pour les deux. Vous avez touché un point qui est fondamental. On dit qu'il y avait 4831 producteurs de lait nature en 1974-1975, il y en a 4737 en 1977-1978. Il y en a environ 90 de moins. Par contre, si on regarde les producteurs de lait industriel, c'est 24 159 en 1974-1975, 20 000 en 1977-1978. On se rend compte que le pourcentage de diminution ne se compare pas avec celui des producteurs de lait industriel. Quand mon collègue a parlé tout à l'heure de vendre les quotas à l'enchère, M. le Président, j'aurais des remarques à faire là-dessus et des observations à transmettre si jamais on en venait là.

Il y a de petits producteurs, à l'heure actuelle — le député de Montmagny-L'Islet doit avoir à peu près le même problème chez lui qu'on retrouve ailleurs — qui ont 125 000, 150 000, 175 000 livres de lait industriel. Quand le père veut vendre la ferme à son fils ou qu'il veut vendre la ferme à son voisin, il perd automatiquement 25% du quota qui va à une banque.

M. Giasson: Je n'ai pas été témoin de tels cas.

M. Roy: 25% du quota... Écoutez, j'ai peut-être de mauvais renseignements. Pardon, c'est oui? Bon, c'est oui. J'ai eu des preuves la semaine passée qui ont été établies à mon bureau, à moins qu'on m'ait fourni une mauvaise information. Un instant. J'aimerais bien vous entendre. Nous aurions bien des questions à vous poser et vous pourriez peut-être nous apporter des lumières et apporter des lumières au ministre aussi.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Beauce-Sud. S'il vous plaît! N'ouvrez pas une porte.

M. Roy: C'est le ministre qui ne veut pas vous entendre. Ce n'est pas le député de Beauce-Sud qui ne veut pas vous entendre. C'est le ministre qui ne veut pas.

Une voix: Ce n'est pas relatif à la loi. M. Garon: Cela n'a rien à voir avec la loi.

Le Président (M. Dussault): À l'ordre, s'il vous plaît. S'il vous plaît, à l'ordre. M. le député de Beauce-Sud, je vous ai laissé aller. J'espérais que vous tireriez des conclusions qui me permettraient de relier la question à l'amendement de M. le député de Lotbinière. Vous n'y arrivez pas. Je vous demanderais, s'il vous plaît, d'y arriver le plus tôt possible, sinon je vais fermer la porte.

M. Roy: II y a eu de l'interférence. J'y arrive. Quand on parle d'un pouvoir de contrôler la production, cela pose le problème. Cela le pose le problème. C'est écrit dans la loi et dans l'article qu'on écrit.

M. Rancourt: Question de règlement.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Saint-François, oui.

M. Rancourt: II y a une clarification, c'est qu'au niveau père-fils, les 25% ne sont pas inclus.

M. Roy: Mais pour la vente au voisin. M. Rancourt: Vous avez parlé de père-fils.

M. Roy: J'ai parlé de père-fils, j'ai donné les deux exemples. Mais pour la vente du quota dans une même paroisse, dans le même rang, il y a une perte de 25% du quota entre deux voisins. C'est pour le lait industriel. Cela n'existe pas dans le domaine du lait nature.

M. Garon: Ce n'est pas la loi qui fait cela.

M. Roy: Ce n'est pas la loi; c'est le pouvoir de réglementation qui découle de la loi.

M. Rancourt: Question de règlement. J'aimerais revenir à la loi 116.

Le Président (M. Dussault): Effectivement, nous allons revenir à la loi 116, c'est-à-dire à l'amendement de M. le député de Lotbinière qui a demandé la parole sur son amendement.

M. Biron: Si l'adjoint parlementaire voulait me permettre une question. D'abord, je voudrais le féliciter. Je pense qu'on comprend un peu plus et on voit qu'il est véritablement dans le métier. Mais le problème pour moi, c'est qu'on a un amendement sur les coopératives et je voudrais que le député de Saint-François explicite davantage. Les "coopérants" envoient leur lait à leur coopérative. On va prendre l'exemple de Granby.

M. Rancourt: Les coopérateurs.

M. Garon: Les coopérants, c'est une compagnie d'assurance.

M. Biron: Les coopérateurs envoient leur lait, mettons, à la Coopérative de Granby. Là, vous avez formé une société coopérative que la régie a qualifiée de fantôme, la Société coopérative québécoise, disons pour bien s'entendre. Cette société peut vendre à Saputo, à Kraft ou ailleurs?

M. Rancourt: Non.

M. Biron: Ce n'est pas cela?

M. Rancourt: Elle transforme du lait pour le lait liquide. Cela veut dire que ce sont des laiteries qui utilisent le lait de classe 1, ce que vous buvez.

M. Biron: Vous avez dit tout à l'heure qu'au lieu d'envoyer le lait à Granby vous l'envoyez à Saputo.

M. Rancourt: Non, le surplus, le lait industriel dans le "pool" de la Fédération des producteurs de lait du Québec.

M. Biron: Alors que Granby voudrait le garder?

M. Rancourt: Non, vous mêlez tout actuellement.

M. Garon: C'est simple, je vais vous l'expliquer. Un producteur de lait nature produit cent pour cent de son lait. Il y a une partie qui va au lait de consommation, mettons 65%, et 35% qui sont du lait de surplus.

M. Biron: Cela, je le comprends. M. Garon: C'est ce qu'il vous dit.

M. Biron: C'est que vous avez parlé de conflit avec la Coopérative de Granby.

M. Chevrette: Je sais que c'est bien le "fun", mais ce n'est pas relatif à la loi.

M. Biron: Non, c'est relatif à l'amendement.

M. Rancourt: Non, je vous ai donné des explications pour bien vous situer au départ.

Le Président (M. Dussault): Êtes-vous en train de me dire que c'est relatif à l'amendement, mais que ce n'est pas relatif à la loi?

M. Giasson: Voici, M. le Président. Le député de Saint-François nous a donné des exemples pratiques de faits vécus dans la réalité. Il a parlé de la fédération des producteurs de lait nature et de la Fédération des producteurs de lait industriel qui se sont donné des réglementations acceptées par la Régie des marchés pour jouer tout le mécanisme des quotas. Il y a une relation. La Loi sur la mise en marché des produits agricoles, dans l'attribution des quotas, c'est de là que viennent les pouvoirs de réglementation; ils ne viennent pas d'ailleurs. Ce n'est pas la Commission canadienne du lait à Ottawa qui donne ces pouvoirs; ce sont les offices de producteurs, par la Loi sur la mise en marché des produits agricoles et avec l'approbation de la Régie des marchés agricoles du Québec. C'est ainsi que les mécanismes jouent.

M. Garon: C'est cela.

M. Rancourt: Oui, mais disons que je reviens à la loi 116 et que je suis contre la motion d'amendement. Je termine là-dessus.

M. Biron: La question que je voulais poser, c'est pour que vous nous expliquiez les relations qu'il y a entre la Coopérative de Granby, Saputo et les autres. Si j'ai bien compris tout à l'heure, la Coopérative de Granby ou les coopératives veulent garder leur lait pour le transformer, tandis qu'il y a des entreprises privées, à l'extérieur, qui veulent en avoir. C'est cela? Et là il y a un conflit parce que le producteur voudrait en avoir le plus possible et que c'est peut-être plus payant de l'envoyer pour le lait industriel à Saputo que de l'envoyer à Granby. Le conflit est là, à l'heure actuelle, à travers les coopératives. Non?

M. Rancourt: Ce n'est pas nécessairement au niveau des coopératives; c'est au niveau des deux fédérations de producteurs. Les deux fédérations de producteurs n'ont pas les mêmes pouvoirs.

M. Biron: Si vous continuez, vous allez me donner des arguments pour les faire venir à la barre de la commission parlementaire et les entendre.

M. Rancourt: Mais après ceci.

M. Giasson: Probablement qu'avant six mois le ministre, en dehors d'un débat sur une loi de la mise en marché, va nous permettre de découvrir la réalité des choses.

M. Garon: Je l'ai déjà dit dans le passé et le député de Beauce-Sud en avait déjà parlé. On avait la Loi sur la protection du territoire agricole, on a la loi 116, il y avait des lois à apporter. À un moment donné, quand on va avoir plus de temps, on pourra faire une commission, sans projet de loi, et les gens viendront nous parler des problèmes dans le domaine du lait, par exemple.

M. Vaillancourt (Orford): Je pense que le ministre aurait eu tout avantage à permettre une commission parlementaire pour éclairer la majorité des membres de cette commission. Je me rends compte que la majorité des membres n'est pas au courant du mécanisme qui existe entre les deux fédérations. C'est tout relié ensemble. J'admets que ça ne relève pas du projet de loi no 116, mais c'est pour cela que les membres de la commission mêlent ça avec le projet de loi 116.

Le Président (M. Dussault): Nous allons vite revenir au projet de loi 116, puisque vous l'avouez. S'il n'y a pas d'autres intervenants, M. le député de Lotbinière. (21 h 30)

M. Biron: Avant d'intervenir, je voudrais poser une question au ministre. Est-ce que, d'après lui, le télégramme qu'il a reçu de la coopérative, le 18 décembre, rend caduques toutes les demandes des coopératives dans le mémoire qui a été soumis le 16 décembre? D'après vous?

M. Garon: Pour ce qui avait rapport au projet de loi 116, je pense que oui. Ceux qui ont vécu les problèmes des années passées — je n'étais pas parlementaire à ce moment-là — la loi de 1956 a été amendée en 1963, elle a été amendée à plusieurs reprises. À chaque fois, le mouvement syndical et le mouvement coopératif ont essayé de faire non pas un règlement de compte, mais ont

essayé de faire ajouter, à l'occasion d'un jugement dans la loi, des articles avantageant l'un ou l'autre parce qu'ils avaient des problèmes entre eux.

La loi 116 règle un problème particulier. Elle n'est pas une remise en question du plan coopératif et ne tente pas de régler les divergences qu'il y a entre les deux; ce n'est pas cela, l'objet de la loi 116. Je l'ai dit à plusieurs reprises, c'est le problème de la Cour suprême, la juridiction sur la production par le gouvernement du Québec et certaines petites ambiguïtés qui existaient, ici et là, et qui amenaient des conflits juridiques parce qu'il y avait des ambiguïtés dans la loi. C'est cela, l'objet du projet de loi 116, il n'y a rien d'autre.

Mais tu ne peux pas coucher avec tout le monde. Tu es accusé de coucher avec l'UPA, tu es accusé de coucher avec les coopératives parce qu'elles ont été d'accord après cela.

M. Giasson: Pas avec les dissidents, j'espère.

M. Garon: II faut toujours quelques nuits pour aller à la maison.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Huntingdon. Vous n'avez pas terminé, d'accord. Allez-y.

M. Biron: Le ministre, par sa réponse je le juge de bonne foi de vouloir, tout simplement, régler un problème. Le fait d'accepter l'amendement que nous avons suggéré ne change absolument rien. Cela redonne une garantie additionnelle aux coopératives, mais cela ne change rien de ce que vous voulez corriger vis-à-vis des problèmes de la Cour suprême. Ce n'est pas cet amendement qui va changer quelque chose. Cela ne fait que donner une garantie additionnelle aux coopératives. Vous ne voulez pas changer les éléments à l'intérieur du grand débat qui anime les coopératives, d'une part, et le syndicalisme agricole d'autre part.

M. le Président, je voudrais convaincre le ministre, par votre entremise, que dans le fond, on ne change absolument rien au jugement de la Cour suprême en ajoutant l'amendement que je suggère; au contraire, on clarifie la situation à la fois pour les coopératives et à la fois pour le syndicalisme agricole. Lorsque le ministre nous dit qu'il ne faut pas s'inquiéter, qu'il n'y a pas d'inquiétude là-dedans, je m'inquiète parce que j'ai des documents en main qui font en sorte qu'on doive s'inquiéter. Lorsqu'on voit... je ne voudrais pas déranger le député de Montmagny-L'Islet...

Le Président (M. Dussault): Je vous écoute M. le député de Lotbinière.

M. Giasson: Vous avez parfaitement raison. Le président vous écoutait.

M. Biron: Lorsqu'on voit des mémos qui circulent à l'intérieur des coopératives, on est un peu inquiet quand le ministre nous dit: Ne vous inquiétez pas. Ce sont les coopératives qui parlent.

On voit qu'il y a des conflits et c'est pour cela que je ne voudrais pas qu'on règle les conflits avec la loi 116. Je voudrais, comme le dit le ministre, qu'on règle véritablement le fond du problème avec la Cour suprême. Ne réglons pas le conflit. En passant, je félicite le ministre qui a dit: On va avoir une commission parlementaire, on va commencer par le problème du lait et après, on fera cela.

M. Garon: Je n'ai pas dit qu'il y en aurait une. M. Biron: Si on a réussi à vous convaincre...

M. Garon: J'ai dit peut-être. Je ne l'ai pas dit d'une façon catégorique.

M. Biron: Si on réussit à convaincre le ministre, au cours de cette commission parlementaire sur l'étude de ce projet, qu'il faut une commission parlementaire sur ce problème, je pense qu'on aura réussi à faire quelque chose et cela aura valu la peine de se battre. Ce sera une grande victoire.

M. Giasson: Le ministre a raison, M. le Président. Il n'a pas dit qu'il y en aurait une, il a dit que ce serait bon qu'il y en ait une. Il était d'accord avec vous.

M. Garon: Ce ne serait peut-être pas mauvais. Vous comprendrez qu'on a passé presque tout l'automne en Chambre et le mois de janvier; il faut que je sois au bureau de temps en temps. Vous avez le législatif et l'exécutif.

M. Vaillancourt (Orford): Là, on est rendu dans le mois de février.

M. Giasson: II y a d'autres problèmes à régler.

M. Biron: M. le Président, si je ne dérange pas trop, je vais continuer.

M. Garon: Même la Saint-Valentin, aujourd'hui, qu'on manque. Nos femmes vont être en maudit.

M. Biron: Voilà ce que la Coopérative agricole de Granby disait, il n'y a pas tellement longtemps: Qu'une agence veuille s'emparer de leur lait — en parlant du lait des producteurs agricoles — pour le diriger à sa guise, même au bénéfice de tous les producteurs agricoles du Québec, constitue pour eux une grave injustice, un vol pur et simple de leur produit et de leur rentabilité d'entrepreneurs. Ce n'est pas moi qui dis cela, c'est la Coopérative agricole de Granby. "C'est une nationalisation sans indemnisation qu'une démocratie même socialisante ne saurait cautionner sans entamer sa crédibilité." Ce n'est pas moi encore qui dis cela, c'est la Coopérative agricole de Granby. "Les coopérateurs, on semble l'oublier, sont producteurs et copropriétaires de leurs usines. On n'a pas plus le droit de les dépouiller qu'on pourrait le faire de toute entrepri-

se privée. Ils ont prouvé qu'ils sont tout aussi capables que n'importe qui d'autre d'orienter leurs usines vers les productions les plus rentables et les marchés les plus intéressants à leur propre avantage. "Une fois de plus, c'est la mauvaise foi des promoteurs de l'agence qui sème la confusion dans les esprits et laisse croire que les producteurs en général seraient avantagés par la direction du lait et par l'agence. Enlever aux uns pour donner aux autres peut constituer un nivellement, mais l'égalité n'est pas l'équité." C'est la Coopérative de Granby qui disait cela en décembre. On voit qu'il y a des problèmes à ce niveau-là.

M. Garon: On ne parle pas du projet de loi 116, on parle de l'agence de vente, la requête devant la régie.

M. Biron: Le ministre dit: Ne vous inquiétez pas, il n'y a pas de problème. Il faut s'inquiéter, parce qu'il y en a. Il y a des problèmes. Je reviens à l'amendement que je suggère. En janvier 1979, la Coopérative de Granby disait encore ceci: "Par ailleurs, ces articles — en parlant du projet de loi 116 — notamment, l'article 1 — où j'apporte un amendement, M. le Président — visent aussi les coopératives et semblent avoir pour but ou pour effet de dire que les coopératives et leurs membres seraient réglementés dans leur production et leur mise en marché par le plan conjoint. Le résultat pratique — c'est la Coopérative de Granby qui dit cela — de cette addition serait d'anéantir de fait tout le sens que l'on peut trouver à l'article 2 actuel de la loi des marchés agricoles qui est décrite comme un moyen supplétif de mise en marché qui ne doit pas être interprété comme un moyen de concurrencer l'organisation coopérative de la production et de la mise en marché de ces produits agricoles."

Il me semble que c'est très clair. Le ministre devrait comprendre. Pour donner satisfaction aux coopératives agricoles, il devrait dire: D'accord, vous voulez travailler avec nous autres, on va régler le problème de la Cour suprême et on va vous donner votre garantie nécessaire et, après cela, on va prendre le temps qu'il faut. Je suis d'accord que le ministre dise: Cela va prendre un mois, deux mois, trois mois, quatre mois. On fera une commission parlementaire et on réglera le problème, mais, en attendant, je pense qu'on n'a pas le droit de prendre position contre les coopératives agricoles, dans le sens du projet de loi. Ces mots, de janvier 1979, sont de la Coopérative de Granby, c'est après le télégramme. Cela dit justement que l'article...

M. Garon: ... agence de vente.

M. Biron: Non. "Notamment, à l'article 1...". Vous n'avez pas écouté, M. le ministre. Ce sont les coopératives qui disent cela. Je pense que c'est très intéressant de noter cela et de s'informer davantage. Cela prouve, dans le fond, que l'Union Nationale avait raison lorsqu'on a dit: II faut faire venir les coopératives ici, la Coopérative fédérée, et s'informer un peu de ce qui se passe à travers cela.

Je voudrais vous lire, très rapidement, un petit bout de paragraphe qu'il y a dans l'enquête qui a été faite par la Régie des marchés agricoles sur tous ces problèmes, relations coopératives-syndicalisme agricole qu'on veut déranger avec le projet de loi 116, parce que c'est la Coopérative de Granby qui dit qu'on veut les déranger. On dit ceci: "L'on y reproche globalement aux fédérations de vouloir faire échec aux coopératives en méconnaissant complètement le rôle prioritaire de la coopérative dans la mise en marché du lait et d'exclure les coopératives de leur rôle essentiel d'association de producteurs ayant le mandat exclusif d'agent de négociation et de vente de leurs sociétaires." Ce n'est pas l'Union Nationale qui dit cela, ce ne sont pas tous ceux qui chialent partout qui disent cela, c'est la coopérative, c'est la fédération. "Les coopératives considèrent que les fédérations veulent intervenir carrément dans l'organisation coopérative de la production et de la mise en marché du lait — c'est bien cela qu'on étudie, la mise en marché et la production — qu'elles vont briser les liens unissant les coopéra-teurs à leurs coopératives et nuire à leur développement, contrairement aux dispositions de l'article 2 de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles." On veut amender l'article 2 et on change toutes les règles du jeu en l'amendant. C'est pour cela que je veux faire tous les efforts nécessaires pour convaincre le ministre qu'on n'a pas le droit de changer les règles du jeu, ici en particulier. Il faut au moins garder temporairement les règles du jeu, si on ne veut pas intervenir en commission parlementaire. Corrigeons — je suis d'accord avec vous — le problème causé par la Cour suprême, mais au moins ne changez pas d'autres choses là-dessus. Les coopératives s'inquiètent. Un peu plus loin: "Encore là, la Régie des marchés agricoles...

Le Président (M. Dussault): M. le député de Lotbinière, je m'excuse, vous avez dépassé le temps qui vous est alloué. Je vous demanderais de conclure s'il vous plaît.

M. Biron: Question de règlement, M. le Président. J'ai posé quelques questions, mais ce n'est pas compris sur mon temps.

Le Président (M. Dussault): J'ai vraiment été conservateur dans le calcul du temps. Je ne vous défavorise pas.

M. Biron: Très bien. M. le Président, je voudrais seulement citer ceci, en terminant, et peut-être prendre une minute pour le citer. "En plus des dispositions spécifiques de la Loi sur les sociétés et coopératives et les engagements pris volontairement par les producteurs membres des coopératives, le procureur de la Fédérée répète que l'article 2 de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles est une disposition interprétati-

ve qui doit guider l'action des organismes qui administrent les plans conjoints.

Cet article 2 prévoit que — le procureur parle de l'article 2 qu'on veut amender... Il dit ceci en terminant: "Le procureur allègue donc que les offices de producteurs ne peuvent ignorer l'existence des coopératives dans le cours de l'exécution des plans, par exemple, au moment de l'intégration des producteurs ou de la direction du lait des producteurs membres. Pour exister, une coopérative doit conserver ses liens avec ses membres et ces derniers doivent faire affaires avec leur organisme coopératif. Autrement, c'est la fin des coopératives laitières au Québec. C'est d'ailleurs, dit-il, le motif pour lequel cet article 2 de la loi stipule que le plan conjoint constitue un moyen supplétif de mise en marché et non concurrent. Un office de producteurs ne devrait donc poser aucun geste contraire à ces principes et encore moins combattre des coopératives. Ce n'est pas, ajoute le procureur de la Fédérée, en fabricant de toutes pièces une soi-disant coopérative dans le but de déclarer, de combattre le monopole du système coopératif laitier, si possible, avoir accès aux subsides du ministère."

Mais l'inquiétude des coopératives — je dis cela en terminant, M. le Président — est tellement grande vis-à-vis de ce qu'on peut changer à l'article 2 que je demande au ministre de réfléchir sérieusement là-dessus, de donner satisfaction aux coopératives. S'il veut changer, après cela, les règles du jeu à travers les coopératives et la Fédération de producteurs et tout cela, on en discutera en commission parlementaire. On fera le tour du sujet et on l'étudiera. Mais, dans le projet de loi 116, si le ministre ne veut que boucher les trous de la Cour suprême, on va l'aider là-dessus, mais non pas changer les règles du jeu et favoriser le syndicalisme agricole aux dépens des coopératives agricoles. C'est pour cela que l'Union Nationale a proposé cet amendement, pour protéger les coopératives agricoles au Québec.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Merci, M. le Président. Le ministre a été assez vague tout à l'heure quand il nous a dit: Peut-être que ce ne serait pas mauvais si on avait une commission parlementaire pour régler les problèmes du lait. Est-ce que vous pouvez être plus précis et nous assurer qu'il y aura une commission parlementaire dans les mois qui viennent?

M. Garon: Je ne peux vous l'assurer, parce que, écoutez...

M. Giasson: ... problèmes, une commission parlementaire, mais cela va...

M. Dubois: ...

M. Giasson: Cela va nous faire découvrir des choses, nous, les parlementaires...

M. Dubois: Et cela fera aussi participer les régies.

M. Giasson: Et mieux comprendre les mécanismes et pourquoi on veut avoir tel pouvoir pour poser telle action à l'intérieur de la loi de la mise en marché.

M. Dubois: De toute façon, si, pour nous, l'Union Nationale, le fait d'avoir tenu vivant ce débat ne faisait que participer à régler le problème qui existe entre, d'une part, les coopératives et, d'autre part, les fédérations de producteurs et le syndicat, je pense que ce serait déjà un grand pas qu'on aurait fait.

J'aimerais ici, pour les fins de la discussion, citer un petit article de la Régie des marchés agricoles dans sa décision où on dit: "La régie est quelque peu perplexe devant ces diverses déclarations et prises de position, tant de la part des fédérations que des coopératives. L'on semble assez loin d'une parfaite harmonie dans l'action de ces divers organismes de producteurs. Or, faut-il le rappeler, ce sont les intérêts de ces derniers qui doivent primer et dont il faut se préoccuper en premier lieu. Pendant que les problèmes s'accumulent, l'on se reproche mutuellement l'interprétation erronée de dispositions législtives et l'on accuse les autres de poser des actes contraires aux intérêts de l'ensemble des producteurs. "Les coopératives affirment qu'elles ne désirent pas combattre le plan conjoint, sur le plan des principes, ajoutant toutefois qu'elles ne peuvent plus accepter les actions anticoopératives des fédérations. Ces dernières soutiennent, d'autre part, qu'elles ne veulent pas nuire aux coopératives, alors qu'en fait, elles font toutefois des déclarations qui paraissent le contredire. L'on pourrait croire qu'il s'agit plus d'un concours de prestige pour déterminer quel organisme va en imposer le plus à l'autre. Où se trouve alors l'intérêt véritable du producteur de lait? Les organismes, devant la régie, ont-ils vraiment cherché à régler les difficultés réelles des producteurs? Il nous semble, selon la régie, que certaines des interventions faites par des producteurs au cours des audiences doivent bien refléter le sentiment d'un très grand nombre d'entre eux qui y ont vu une bataille entre centrales, sinon une inutile guérilla légale. La longue série d'audiences, la nature des arguments apportés, l'atmosphère des débats et des échanges entre les procureurs ainsi que les nombreuses discussions de nature procédurale peuvent nous laisser songeurs."

Alors, la régie est présentement songeuse. Je pense qu'il y a de quoi se poser des questions et une commission parlementaire serait bienvenue dans ce sens-là. Si le ministre pouvait nous assurer que, dans les mois qui viennent, on pourra participer à une commission parlementaire, amener une souplesse, quand même, entre les deux parties, les deux belligérants, parce qu'il y en a deux belligérants, présentement...

Le Président (M. Dussault): M. le député de Beauce-Sud. (21 h 45)

M. Roy: Merci, M. le Président. Il me reste plusieurs minutes, mais je n'en utiliserai que deux, tout simplement pour dire qu'on a fait largement état des coopératives et on s'est limité à discuter de coopératives dans le secteur laitier; je pense bien que c'est le secteur le plus important de l'industrie agricole au Québec, mais il y en a d'autres également qu'il ne faudrait pas négliger. Je me permettrai de n'en citer qu'une pour démontrer qu'il y en a qui jouent un rôle extrêmement important dans un secteur particulier, entre autres, la Coopérative des producteurs de sucre et de sirop d'érable, coopérative qui existe au Québec actuellement et on sait qu'il y a également un plan conjoint dans le sucre et le sirop d'érable, le plan conjoint de Québec-Sud dans ma région. Depuis une quinzaine d'années...

M. Garon: La Coopérative de Plessisville a demandé d'en avoir un elle aussi.

M. Roy: La Coopérative de Plessisville a demandé d'en avoir un elle aussi à cause des problèmes, des engagements et des obligations et à cause de la distribution du marché. Il y a ce point sur lequel je voulais attirer l'attention de mes collègues de la commission. Il ne faudrait pas oublier — il ne faut pas repousser du revers de la main la motion qui a été présentée par nos collègues de l'Union Nationale — que c'est l'Office des producteurs qui détermine par voie de règlements sanctionnés par la Régie des marchés agricoles, l'attribution des quotas de production. C'est l'office de mise en marché également qui établit un plan de réglementation en ce qui a trait à la transférabilité de ces quotas de production, de ces quotas de mise en marché. On ne parlera pas seulement de quotas de mise en marché. On va parler de quotas de production si l'article 2 est accepté intégralement.

Si l'amendement du chef de l'Union Nationale était accepté, il obligerait ceux qui ont la responsabilité d'établir les règlements de quotas, les règlements de transférabilité des quotas, de protéger les territoires des coopératives, de protéger les membres de certaines coopératives, soit que les membres ne changent pas d'une coopérative à l'autre. Quand un membre d'une coopérative perd son quota ou qu'il vend son quota à un membre d'une autre coopérative, la coopérative vient de perdre un membre et elle vient de perdre un chiffre d'affaires. C'est un sujet sur lequel il y a bien des questions qui sont posées.

Le ministre pourra intervenir tout à l'heure; je ne veux pas me faire interrompre pour faire détourner la question. Un instant!

M. Garon: Comment pourrait-il en être autrement?

M. Roy: Je vais prendre un exemple dans le cas des oeufs.

M. Garon: Je voudrais seulement comprendre.

Je suis un coopérateur et il est un coopérateur; nous ne sommes pas dans la même coopérative. Je lui vends mon quota et le quota s'en va à cette coopérative.

M. Roy: Supposons que le quota change de comté, de région. C'est une possibilité.

M. Garon: Êtes-vous pour ou contre cela?

M. Roy: Le changement de quota et de région? Je ne suis pas en faveur de cela; c'est bien clair parce qu'on risque de vider...

M. Garon: Mais le plan... M. Roy: Non, un instant. M. Garon: Le plan conjoint aussi.

M. Roy: Je ne demande pas l'opinion du plan conjoint; vous m'avez demandé mon opinion. Les plans conjoints ont le droit d'avoir la leur. Je tiens à dire qu'il y a un danger énorme de faire en sorte de ruiner l'industrie agricole dans certaines régions et dans certains comtés de la province. Il y a un danger énorme. Il y a des protections dans certaines régions; cela n'a pas été fait dans le cas des oeufs. Ceux qui connaissent la région du Bas-du-Fleuve et de la Gaspésie savent très bien actuellement qu'il y a un seul poulailler dans la région du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie. Je pense qu'il a des problèmes à part cela. Cela a été dit et même écrit. Actuellement, dans la région de la Gaspésie — je parlais avec le député de Gaspé — dans la ville de Gaspé, les oeufs sont importés de l'extérieur du Québec. Ce sont des problèmes. J'en ai déjà discuté avec les dirigeants de l'UPA; j'en ai discuté avec des dirigeants des offices de producteurs et, là-dessus, il va falloir que nous ayons une préoccupation parce qu'il y va du déséquilibre de l'économie régionale.

Si on transfère tous les quotas d'une région à l'autre, nous allons avoir des problèmes. Si cette disposition, cet amendement qui est proposé par le député de Lotbinière est indiqué dans la loi, si cet amendement était accepté, cela constitue une balise additionnelle, une balise que je considère importante pour que l'on protège les droits des coopératives. Je ne vois aucun aspect négatif à ce que cet amendement soit adopté et je n'ai pas entendu non plus un aspect vraiment négatif du côté de nos collègues gouvernementaux.

M. Biron: M. le Président, j'aimerais connaître l'opinion du parti de l'Opposition officielle, du député de Montmagny-L'Islet sur cet amendement. Il n'a pas eu la chance de parler jusqu'à maintenant.

M. Giasson: J'ai eu toutes les chances de parler, M. le député. Les gens ici à cette table demandent la parole au président quand ils ont le goût d'intervenir. Ne vous inquiétez pas.

M. Biron: Ce serait peut-être intéressant de savoir si le Parti libéral est en faveur des coopératives.

M. Giasson: C'est une motion qui a été reçue et qui doit être mise aux voix. Vous serez témoin de mon vote, M. le chef de l'Union Nationale.

Le Président (M. Dussault): Est-ce que l'amendement de M. le député de Lotbinière est adopté?

M. Biron: Adopté.

M. Chevrette: Vote enregistré.

Le Président (M. Dussault): Nous allons passer au vote enregistré. Je vous demande de signifier si vous êtes pour ou contre l'amendement. La motion d'amendement de M. le député de Lotbinière disait ceci: "Que l'article 1 du projet de loi 116 soit modifié en ajoutant, à la fin de l'article 2a, les mots suivants: Rien, dans l'application de la présente loi, ne doit venir en conflit avec les engagements d'un producteur vis-à-vis de sa coopérative ou avec les engagements de celle-ci envers une autre coopérative." M. Bordeleau (Abitibi-Est).

Une voix: Absent.

Le Président (M. Dussault): M. Beauséjour (Iberville).

M. Beauséjour: Contre.

Le Président (M. Dussault): M. Dubois (Huntingdon).

M. Dubois: Pour.

Le Président (M. Dussault): M. Ouellette (Beauce-Nord).

M. Ouellette: Contre.

Le Président (M. Dussault): M. Garon (Lévis).

M. Garon: Contre l'amendement.

Le Président (M. Dussault): M. Giasson (Montmagny-L'Islet).

M. Giasson: Contre l'amendement.

Le Président (M. Dussault): M. Chevrette (Joliette-Montcalm).

M. Chevrette: Contre.

Le Président (M. Dussault): M. Rancourt

(Saint-François).

M. Rancourt: Contre l'amendement.

Le Président (M. Dussault): M. Roy (Beauce-Sud).

M. Roy: Pour.

Le Président (M. Dussault): M. Vaillancourt (Orford).

M. Vaillancourt: Contre l'amendement.

Le Président (M. Dussault): Je fais le compte. Il y a deux pour et sept contre. La motion d'amendement est donc rejetée. Est-ce que l'article 1 est adopté?

M. Biron: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): Oui, M. le député de Lotbinière.

M. Biron: Sur cet article, l'amendement que j'ai présenté qui visait tout simplement à donner une assurance additionnelle aux coopératives qu'elles pourraient continuer à fonctionner librement...

Le Président (M. Dussault): Je m'excuse. L'amendement a été rejeté. Alors, il ne faudrait pas revenir sur l'amendement.

M. Biron: Oui, je le sais, M. le Président. Je parle sur l'article 1 de la présente loi qui a pour objet de réglementer la production des produits agricoles et la mise en marché des produits agricoles dans le commerce interprovincial au Québec. On sait qu'en particulier dans la mise en marché, les sociétés coopératives au Québec sont très fortes. Ce sont elles qui ont réussi à faire une percée extraordinaire et je pense qu'on doit lever nos chapeaux devant ces gens, les dirigeants, les administrateurs de ces sociétés. M. le Président, je déplore le fait que le Parti québécois ait voté contre mon amendement pour protéger les coopératives. Je déplore aussi le fait que le Parti libéral ait agi un peu comme le club ferme du Parti québécois et ait voté avec le Parti québécois contre l'amendement pour protéger les coopératives.

M. Garon: J'en doute.

M. Biron: On trouve d'ailleurs depuis un petit bout de temps, depuis qu'on a changé de chef au Parti libéral, cette volonté d'agir souvent comme le club ferme du Parti québécois dans beaucoup de sujets. Je déplore véritablement ce fait, M. le Président, parce que la mise en marché des produits agricoles par notre système coopératif au Québec, c'est quelque chose qu'il faut absolument protéger. Lorsqu'on change l'essence même de la loi, lorsqu'avec un paragraphe qui semble anodin on se promène à travers le Québec en disant: On veut tout simplement boucher un trou créé par la Cour suprême et qu'on change l'essence même de

la loi, on change même les forces en présence. On fait en sorte d'appuyer sur une force plutôt que l'autre et, surtout, on appuie très fort sur un côté et pas du tout sur le côté coopératif. On fait en sorte que la mise en marché des produits agricoles au Québec dans le commerce intraprovincial puisse changer avec le temps. Vous savez que dans le domaine de la langue ou de la culture, c'est peut-être facile de s'y retrouver, mais dans le domaine des affaires, c'est une vraie jungle et dans cette jungle-là, les coopératives auront maintenant un adversaire additionnel. Il y avait l'entreprise privée. Maintenant, il y a un adversaire additionnel. C'est le gouvernement du Parti québécois. Il faut être prudent avant de s'engager plus avant là-dessus.

Là-dessus, je voudrais tout simplement, encore une fois, me référer à cette enquête qui a été menée par la Régie des marchés agricoles du Québec et à cette ordonnance. Je veux référer à cela parce que dans le commerce, dans la mise en marché des produits agricoles, aujourd'hui, on a une guerre entre des monopoles, on a une guerre entre des géants et cela va véritablement influencer, continuer et accélérer cette guerre. On met un peu de gazoline sur le feu en acceptant un tel projet de loi.

Là-dessus, je voudrais tout simplement vous citer cette partie de l'enquête qui traite spécialement encore de la mise en marché et de la production au Québec de ces produits. Je vous cite ceci, M. le Président: "À ce sujet, le mémoire conjoint de l'Union des producteurs agricoles et des deux fédérations rappelle qu'à l'occasion de l'établissement du plan conjoint des producteurs de lait industriel, la Fédérée avait émis une opinion nettement favorable à l'idée d'un plan conjoint provincial de lait industriel — les deux ensemble. Elle déclarait alors que les coopératives comprenaient leur obligation morale de ne poser aucun geste préjudiciable à l'ensemble des producteurs." À l'heure actuelle, on a parlé aujourd'hui, M. le Président, du fait que les coopératives arrêtent de prélever $0.025 les 100 livres de lait pour le plan conjoint dans le lait industriel.

C'est $1 500 000 que la Fédération des producteurs de lait industriel perd par année si les coopératives continuent, et elles font toutes cela à travers tout le Québec. Les informations que j'ai, c'est que les autres assemblées continuent maintenant et continueront et qu'à compter du 1er avril à peu près toutes les coopératives vont arrêter de prélever ces $0.025 les 100 livres de lait dans le lait industriel. Quand on parle de mise en marché des produits agricoles, c'est cela, M. le Président, à l'heure actuelle, et la Fédération des producteurs de lait industriel — la Fédération des producteurs de lait nature, c'est la même chose — mais surtout celle du lait industriel, à l'heure actuelle, va être empêchée de percevoir des cotisations, des prélevés auxquels elle avait droit et qui représentent $1 500 000. On s'ingère donc justement dans cette grande bataille à l'heure actuelle.

Un peu plus loin, j'en ai parlé aussi aujour- d'hui, la coopérative dit: On va prélever $0.05 les 100 livres de lait pour faire de la publicité, mais on ne les enverra pas directement à la Fédération des producteurs de lait industriel parce qu'on ne peut pas s'entendre avec eux. Là on intervient directement sur un projet de loi justement dans cette bataille, M. le Président, et c'est là que l'Union Nationale ne peut pas accepter qu'on réglemente à la fois la production, la mise en marché et tout cela, et qu'on nuise aux coopératives en réglementant cela par un projet de loi. C'est justement l'enquête qu'a menée la Régie des marchés agricoles du Québec là-dessus. On dit un petit peu plus loin: L'Union des producteurs agricoles ne voyait pas d'objection à ce que les coopératives soient visées par un plan conjoint au même titre que les autres établissements laitiers. La Coopérative laitière semblait à ce moment d'avis que le plan conjoint avait juridiction sur les conditions de mise en marché de la matière première — cela veut dire le lait et la crème des producteurs — tandis que les établissements coopératifs devaient comme les autres entreprises dans ce domaine s'occuper de la transformation et de la commercialisation du produit fini. C'est la mise en marché.

Selon la fédération précitée, c'est d'ailleurs ce qui paraît avoir été l'opinion de la Commission royale d'enquête sur l'agriculture qui a fait un rapport sur ce sujet en 1968. Dans ce contexte, les fédérations soutiennent qu'elles doivent agir pour améliorer les conditions de vente de la matière première de tous les producteurs englobant alors les membres des coopératives pour l'établissement du prix ou du versement effectué par ce produit. Selon le producteur de la Fédération des producteurs de lait, l'article 2 de la loi, qu'on veut changer maintenant en ajoutant un article 2a qui va changer tout le sens de l'article 2 de la loi, l'article 2 de la loi, dis-je, stipule que la loi ne doit pas être interprétée comme un moyen de concurrencer les coopératives. En ajoutant 2a, on va l'interpréter maintenant comme un moyen de concurrencer les coopératives, M. le Président.

Là on ne dit pas que les plans conjoints ne peuvent viser les producteurs coopérateurs. En d'autres termes, la loi n'est pas faite pour combattre la coopération, mais elle prévoit un régime additionnel administré par les producteurs qui possèdent les pouvoirs et les devoirs prévus à cette loi. La régie ayant déjà examiné cette question lors d'un conflit entre la plupart des mêmes groupes et rendu une décision en 1976 à ce sujet, il nous semble inutile d'y revenir. Justement, là on a dit en d'autres termes, que la loi n'est pas faite pour combattre la coopération. On ajoute maintenant un paragraphe à la loi et ce paragraphe va servir pour combattre la coopération, contrairement à l'esprit du premier paragraphe, le paragraphe 2 du chapitre 36. On ajoute maintenant 2a et on change complètement l'esprit de la loi. Cela veut dire que tout cela ne sert plus à rien. Il s'agit de jeter cela au panier maintenant. Cela ne sera plus bon. On a changé tout l'esprit de la loi. C'est là-dessus, M. le Président...

Le Président (M. Dussault): M. le député de Lotbinière, je m'excuse. Vous avez écoulé et même dépassé votre temps déjà de quelques minutes Je vous demanderais de conclure, s'il vous plaît.

M. Biron: Je termine, M. le Président, dans ce cas. Je termine tout simplement en vous faisant la lecture d'un dernier paragraphe. La Fédération des producteurs de lait soutient d'autre part qu'elle reconnaît le statut particulier d'une organisation coopérative de producteurs. C'est ainsi que son procureur déclarait que la fédération ne veut pas diriger inutilement le lait des producteurs membres d'une coopérative à une autre fabrique puisque ce producteur a un lien particulier avec sa coopérative. Il ajoute toutefois que si un autre établissement laitier faisant un produit de plus haute rentabilité a besoin de lait et que la fabrique coopérative ne fait que des produits de moindre rentabilité, le lait devrait être finalement livré à l'usine qui pourra remettre au producteur le plus haut prix. (22 heures)

II est, dit-il, nécessaire d'alimenter en priorité les meilleurs marchés, quitte à faire ensuite la péréquation de tous les revenus entre les producteurs. La fédération ne veut pas défaire les coopératives ni leur enlever les avantages fiscaux qu'elles possèdent. Il doit y avoir de la place pour les deux systèmes et, avec le projet de loi, à l'heure actuelle, on est en train de détruire un des deux systèmes, le système coopératif de mise en marché des produits du Québec pour aider les producteurs agricoles du Québec. M. le Président, je voterai contre cet article du projet de loi.

Le Président (M. Dussault): Est-ce que l'article 1 est adopté?

M. Giasson: M. le Président.

Le Président (M. Dussault): J'avais sur ma liste M. le député de Huntingdon, mais remarquez qu'il faudrait faire l'alternance le plus possible.

M. Giasson: Pas de problème, j'attendrai.

Le Président (M. Dussault): II y avait le député de Beauce-Sud ensuite.

M. Dubois: Allez, vous êtes le représentant de l'Opposition officielle.

M. Giasson: Je prendrai l'ordre de l'inscription; allez-y, M. le député.

M. Dubois: Avant de commencer la discussion de l'article 1, j'aurais une question. Je voudrais savoir pourquoi vous avez enlevé le mot "également" à l'article; y a-t-il une raison précise pour laquelle vous l'avez enlevé?

M. Garon: Je l'ai expliqué ce matin. C'est ce mot qui inquiétait le mouvement coopératif. Il disait que le mot "également" semble dire qu'il y a des objets additionnels, tandis que, rédigé tel que dans 2a, le fait d'enlever "également", qui veut dire en outre, en plus, aussi... En enlevant le mot "également", l'ambiguïté qu'il craignait disparaît.

M. Dubois: C'était la seule crainte qu'il avait? M. Garon: Essentiellement, c'était cela.

M. Dubois: C'est que ça change quand même...

Le Président (M. Dussault): Avez-vous terminé, M. le député de Huntingdon?

M. Dubois: Je n'ai pas terminé, je commence. Je voudrais indiquer que je trouve indécent et inhumain de réglementer la production dans le domaine agricole.

M. Garon: Cela l'était déjà.

M. Dubois: Cela l'était peut-être, mais on l'indique encore plus clairement et la nuance qu'on apporte, au niveau du projet de loi 116, est un peu différente de ce qui est inscrit dans le chapitre 36 de la loi de 1974.

M. Garon: Vous savez que ce n'est pas nécessaire dans tous les domaines. Dans les fruits et légumes, dans votre région, ce n'est pas réglementé, vous le savez.

M. Dubois: Je parle de ceux qui sont réglementés présentement, où il y a un plan conjoint: les oeufs, le lait, les dindes; les poulets grillés, ça s'en vient au niveau national. C'est que, dans un monde où à peu près les deux tiers de la population mondiale crèvent de faim, je trouve que c'est indécent et inhumain de réglementer la production et de dire: Demain matin, ça prend un permis pour produire, quand il y a une partie du monde qui crève de faim.

M. Garon: C'est un sophisme que vous faites là. Le problème, avant...

M. Dubois: Un instant, je vais vous citer des paroles de votre premier ministre au sommet agroalimentaire où on traite du problème de la faim. Ce sont les paroles du premier ministre, en avril 1978, je pense. Le premier ministre disait: "Aujourd'hui, l'agriculture, l'alimentation, l'agroalimentaire, c'est de l'industrie et c'est du commerce. En même temps, cela se situe dans un monde menacé où, probablement, la faim va être un des problèmes les plus stratégiques à affronter". C'est le premier ministre qui l'a dit.

Il continue un peu plus loin: "On redécouvre, au fond, l'impératif du maximum d'autosuffisance; on ne produira pas tout, sans doute, mais, au lieu d'augmenter, notre autosuffisance, depuis une dizaine d'années, a diminué dans des secteurs importants. Cela n'a pas de sens dans le monde

où nous vivons, pour aucune société qui se respecte. Il faut qu'on vise le maximum possible d'autosuffisance parce que c'est essentiel pour l'équilibre économique en général d'une société. Si on n'a pas ce maximum d'autosuffisance, on exporte continuellement des emplois. Toute la société est donc intéressée à enrayer un phénomène comme celui-ci. Si on ne fait pas le maximum, on tombe de plus en plus dans la dépendance des autres et, par conséquent, dans le danger d'exportation contrôlée. Chacun, comme citoyen, comme consommateur, doit être intéressé à cela. C'est non seulement essentiel pour l'équilibre économique d'une société, mais aussi essentiel pour sa dignité, son minimum de dignité, dans un monde où la faim n'a pas encore été vaincue". Cela est dit par votre premier ministre.

Est-ce que c'est un principe pour vaincre la faim dans le monde entier que de dire: Demain matin, au Québec, on va produire 80% ou 90% de notre suffisance? C'est un principe pour combattre la faim mondiale?

M. Garon: Me permettez-vous une question? M. Dubois: Allez-y.

M. Garon: Savez-vous que c'est dans les productions réglementées que la production québécoise est la plus forte?

M. Dubois: On sait que le lait, c'est 48% du lait canadien.

M. Garon: C'est dans les domaines où ce n'est pas réglementé que la production québécoise est la plus faible.

M. Dubois: Touchez donc aux oeufs, pour voir.

M. Garon: Les oeufs, c'est mieux que cela était avant quand il n'y avait pas de plan.

M. Dubois: C'était 71% avant.

M. Garon: Avant, il y avait le dumping régulier de l'Ontario et des États-Unis.

M. Dubois: C'était 71% avant et la Régie des marchés dit 55% ou 60%. Alors, ce n'est pas mieux que c'était avant; qu'on ne vienne pas me dire cela.

M. Giasson: On en produit peut-être un peu moins, mais les producteurs d'oeufs au Québec cessent de devoir des comptes de moulée qui montent sans cesse à l'endroit des meuniers du Québec.

M. Dubois: Ce n'est pas...

M. Giasson: Vous avez déjà vécu la réalité des oeufs avant le plan conjoint.

M. Dubois: Ce n'est pas dans ce sens...

M. Giasson: Nos gars s'endettaient et s'en allaient vers la faillite.

M. Dubois: Ce n'est pas dans ce sens que je veux...

M. Giasson: C'est mieux de produire moins et de produire avec rentabilité.

M. Dubois: L'économie américaine agricole...

M. Giasson: Je sais qu'il y a des accords au plan national.

M. Duboi: L'économie américaine a été montée par une certaine liberté de production. C'est pourquoi, aujourd'hui, ils font vivre une partie du monde entier, c'est parce qu'on y produit. On n'a pas peur de produire.

M. Garon: Ils étaient des milliers devant le parlement américain.

M. Dubois: Ce qu'ils demandent, c'est un plan de soutien de prix. Un plan de soutien de prix et un contingentement, c'est deux. Si je vous donne un exemple des oeufs au Québec, on a besoin de 6000 pondeuses, à peu près, pour être autosuffisants au Québec.

M. Garon: Un peu plus que cela.

M. Dubois: Je fais erreur. Disons qu'on a besoin de 6 millions de pondeuses, une pondeuse par tête, cela fait 6 millions. Si on disait, par exemple, demain matin: On va avoir un prix de soutien dans les oeufs pour un maximum de 20 000 poules pondeuses par producteur. Cela fait 300 producteurs à 20 000 poules, si je ne me trompe pas, si mes calculs sont bons. On soutient aux producteurs 20 000 poules pondeuses à un prix pour qu'ils vivent. Produisons-en des oeufs, on va en exporter demain matin, si vous voulez, si vous avez la volonté et le désir d'en produire.

M. Garon: Le Québec n'a jamais exporté d'oeufs.

M. Dubois: Je parle d'un principe, je ne parle pas spécifiquement d'une production. On dit que le Québec n'exporte rien sur le marché mondial. Pourquoi n'exporte-t-on rien? À part le lait en poudre, qu'est-ce qu'on exporte? C'est du fromage... dans le lait, d'accord.

M. Garon: Du porc.

M. Dubois: Du porc, présentement, ce n'est pas contingenté. On exporte du porc et je pense que les cultivateurs vivent passablement bien dans le porc.

M. Garon: C'est la seule production qui n'est pas réglementée...

M. Dubois: Ils vivent bien, quand même, les producteurs de porc, vous ne pouvez pas dire qu'ils vivent mal.

M. Garon: Non.

M. Dubois: Cela va bien, relativement bien. Si on veut quand même accroître ces exportations, ce que les Américains demandent, c'est un soutien de prix, ce n'est pas un plan conjoint pour contingenter. Ils veulent un permis pour produire, demain matin. Tant qu'on aura des permis...

M. Garon: II augmente, le porc. Il ne faudrait pas qu'il y ait un gros pourcentage d'augmentation pour qu'on ait des problèmes au Québec.

M. Dubois: N'empêche que si le Québec veut être un exportateur de denrées agricoles, il faudra quand même qu'il y ait des amendements dans notre processus pour garantir le prix des producteurs. Les plans conjoints, cela ne date pas de la semaine passée, cela peut être amendé tout en respectant le bien-être du producteur. Il y a des amendements possibles qui pourraient être apportés à l'effet que le Québec pourrait peut-être devenir un exportateur de denrées agricoles dans bien des domaines. Je trouve vraiment indécent de dire: On vous donne un permis pour produire X montant...

M. Garon: Ce n'est pas cela.

M. Dubois: La motivation... qu'est-ce qu'on entend par productivité?

M. Garon: C'est simplement dans la loi.

M. Dubois: Ce n'est pas cela. Écoutez, des lois, cela s'améliore. Il y a du chemin à faire pour améliorer la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. Le producteur est dans un carcan de production; même s'il était motivé et qu'il avait le grand désir de produire plus que son quota pour vendre à l'extérieur du pays, il n'est pas capable. C'est quand même mettre un producteur dans un carcan avec un permis de production. Quand on contingente d'une façon abusive dans certaines productions, je pense qu'on est lié à la production à l'intérieur; on peut peut-être devenir plus suffisant, je suis bien d'accord, on peut devenir plus suffisant au Québec. Notre avenir économique, c'est quoi, si ce n'est pas de l'exportation. On parle toujours d'exportation pour faire vivre — on ne pourrait peut-être pas donner nos produits — une partie du Tiers-Monde qui pourrait payer, parce qu'il y en a une partie qui pourrait payer. Il y a une partie du monde où il n'y a pas de denrées et qui serait prête à acheter. Si on contingente toute la production, parce que c'est toute la production qu'on contingente, pour le commerce intraprovincial aussi bien que sur le commerce interprovincial. C'est quoi, dans les oeufs.

C'est quoi dans le porc, le plan conjoint, cela va être quoi demain matin?

M. Garon: Quand il y a des plans; quand il n'y a pas de plan, on n'est pas pour en inventer.

M. Dubois: De toute façon...

M. Garon: Dans le porc, ce n'est pas contingenté.

M. Dubois: Votre premier ministre lui-même trouve cela indécent de contrôler la production à un point abusif.

M. Garon: Bien non!

M. Dubois: Oui! Cela peut être aussi bien dans ce sens parce que la faim dans le monde existe et elle existera encore de plus en plus.

M. Garon: La faim dans le monde...

M. Dubois: II est là, le document, c'est le premier...

M. Garon: Les gens dans le monde mangent du grain et on n'en fait pas. C'est du grain que les pays pauvres achètent.

M. Dubois: Je sais qu'il manque de grain. Je suis bien d'accord qu'il s'en produise plus de grain. Je suis bien d'accord pour qu'il y ait plus de viande rouge ici au Québec, mais je suis bien d'accord qu'il n'y aura pas plus de production pour autant que le cultivateur puisse vivre sur sa ferme. Je pense qu'il y a quand même lieu de songer...

M. Garon: Le projet de loi 116 ne vise pas à régler le problème de la faim dans le monde.

M. Dubois: En fait, on réglemente la production, on contingente la production. C'est cela, contingenter la production. Réglementer, c'est contingenter.

M. Garon: C'était déjà dans la loi.

M. Chevrette: La loi 12...

M. Garon: L'article 67, paragraphe c) dans la loi existante: Contingenter la production et la vente. C'est déjà dans la loi.

M. Chevrette: ... l'article 67c de la loi.

M. Dubois: Dans le cadre de la vente, mais là, il est strictement question de réglementer la production. Dans le projet de loi 116, on ne parle pas d'autre chose que de contingenter la production, de réglementer la production.

M. Garon: Non.

M. Dubois: Cela devient indécent, cela devient inhumain, finalement, quand on voit que des pays n'ont même pas de quoi se nourrir. Je pense qu'il y a d'autres formules à trouver que celle-là pour, peut-être, régler le problème dans l'avenir.

Le Président (M. Dussault): Avez-vous terminé votre intervention, M. le député de Huntingdon?

M. Dubois: Oui, je reviendrai plus tard.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, M. le Président...

M. Garon: Avant la réglementation, les gens faisaient du "dumping" dans les oeufs. Le prix montait, le gars s'organisait, le "dumping" commençait et le gars faisait faillite.

M. Dubois: Je n'ai pas dit que cela ne prend pas un plan de...

M. Garon: Vous pouvez avoir les statistiques de production dans les oeufs. Je peux vous fournir les statistiques depuis 1930.

M. Dubois: J'ai parlé d'un prix de soutien.

M. Garon: Vous allez voir que le prix est stable depuis qu'il y a un plan conjoint. Il varie de $0.01 ou $0.02 à la hausse ou à la baisse.

M. Dubois: On n'est pas plus suffisant aujourd'hui qu'on ne l'était en 1970.

M. Garon: Le prix est stable. Les gars gagnent bien leur vie. La production, le pourcentage de suffisance augmente un peu régulièrement dans les oeufs.

Une voix: ... 1970.

Une voix: Oui, mais on remonte.

Une voix: II y a une entente nationale, que voulez-vous qu'on fasse?

Une voix: Tout en faisant vivre l'agriculteur.

Le Président (M. Dussault): L'article 1 est-il adopté?

M. Roy: Non, M. le Président, j'attends.

Le Président (M. Dussault): Vous êtes toujours intéressé, M. le député de Beauce-Sud?

M. Roy: Je suis très intéressé, mais je ne suis pas intéressé à me battre pour avoir mon droit de parole.

M. Garon: Vous avez passablement parlé.

M. Roy: C'est parce qu'on parlait passablement. Je ne suis pas tellement intervenu sur le fond de l'article qu'on discute actuellement, l'article 2a, puisque l'amendement a été rejeté. Je pense que ce qui est dit dans cet article, selon sa rédaction, veut dire: Les mots ont une signification, les mots ont une portée. Quand on vient dire que c'est déjà dans la loi, les mots "réglementer la production", qu'on les retrouve à l'article 67 de la loi, il faut dire que cela ne figure pas dans les objectifs comme tels de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, au chapitre 34 des lois de 1974. Cela ne figure pas non plus dans les pouvoirs de la Régie des marchés agricoles puisque effectivement, dans l'article 4 de la loi, il est bien dit que la Régie a pour fonction générale de favoriser une mise en marché ordonnée, efficace et juste des produits agricoles. À cette fin, elle aide à orienter la production agricole, à coordonner les diverses opérations de la mise en marché des produits agricoles et elle collabore avec les producteurs, les organisations coopératives ou professionnelles d'agriculteurs, les associations de consommateurs, les représentants de l'industrie et du commerce et les autres personnes engagées dans la mise en marché des produits agricoles. Ce sont les pouvoirs de la régie.

À l'article 2, il n'est pas question du contrôle de la production, alors que le paragraphe qu'on apporte dans la loi, l'article 1 de la loi, a pour objet de faire ajouter un paragraphe à l'article 2 qui spécifie qui détermine bien clairement que le projet de loi no 116 a pour objet de réglementer la production au Québec des produits agricoles; c'est ce que cela veut dire.

Que veut dire réglementer la production agricole? Comment va-t-on appliquer une loi de contrôle de la production agricole? Actuellement, la loi de mise en marché réglemente la vente, il y a des règlements de vente, il y a des règlements de mise en marché. Cela entraîne inévitablement pour le producteur qui s'est vu décerner un quota de mise en marché l'obligation qu'il a de se réglementer chez lui et de contrôler sa production. (22 h 15)

II y a une différence entre la production contrôlée par l'agriculteur sur sa ferme et la production contrôlée sur la ferme de l'agriculteur par la Régie des marchés agricoles, en vertu des pouvoirs que lui confère la loi. On nous dira: On ne veut pas exercer ces pouvoirs. Ce n'est pas la première fois que j'entends dire devant cette commission parlementaire et devant l'Assemblée nationale, dans des projets de loi qui nous sont présentés: Écoutez, on demande des pouvoirs en tout cas, on demande des pouvoirs en vue d'être en mesure, si c'est nécessaire. Chaque fois, moins de deux ans après, les pouvoirs ont été exercés, et je pense que les agriculteurs du Québec oublient peut-être à l'heure actuelle que les plans conjoints peuvent être décidés sans référendum.

On s'est battu en 1974 contre cette disposition de la loi. Les agriculteurs oublient cela. On oublie aussi les pouvoirs dont dispose la Régie des marchés agricoles, sur les offices de producteurs, qu'elle peut y mettre fin, qu'elle peut ordonner des enquêtes, qu'elle peut faire toutes sortes de choses. Elle peut les mettre en tutelle au moment où elle décidera de le faire. On oublie cela, du côté de la classe agricole! Moi, je fais confiance aux pro-

ducteurs. Certes, il y a eu des problèmes et il y en aura toujours, mais à vouloir faire des lois trop rigides, on risque de construire des prisons. Je me rappellerai toujours un exemple qui nous a été servi à de multiples reprises. Quand une institution financière ne veut jamais perdre d'argent et ne jamais prendre le risque de perdre un cent sur les prêts qu'elle consent, c'est qu'on la considère comme une institution financière du genre de ce qu'on appelle les requins de la finance, parce qu'effectivement, il n'y a aucune porte de sortie, il n'y a aucune soupape, il n'y a de place pour aucune interprétation. Alors, c'est du totalitarisme et cela la classe agricole l'oublie.

Je m'engage aujourd'hui, M. le Président, quant aux dispositions de cette loi, à les mettre en garde sérieusement, et si le député de Beauce-Sud se trompe, il sera le plus heureux des députés de l'Assemblée nationale de se tromper sur sa mise en garde d'aujourd'hui. Je serai le plus heureux de me tromper, le plus heureux, mais l'avenir le verra. On ne peut pas avoir une vérification et avoir une réponse demain matin. On ne peut pas avoir une réponse dans six mois, dans un an non plus. Mais on aura une réponse dans deux ans. On sera en mesure de pouvoir justement vérifier la véracité des faits, l'exactitude des faits. J'ai demandé à des producteurs agricoles dont des présidents et des directeurs des syndicats de base s'ils étaient prêts à signer la loi 116 telle que présentée, s'ils étaient prêts à signer nom, adresse, numéro de téléphone, date et tout cela en disant: On se reverra dans trois ans. Il n'y en a pas un qui a voulu signer.

À deux de mes amis, j'ai dit: Je ne vous demande même pas — parce que c'étaient des amis personnels — d'aller jusque là parce que je me rappelle la loi qui a été amendée et qui a effectivement apporté des modifications pour accroître les pouvoirs concernant l'inspection des aliments. Les agriculteurs l'ont vécue. J'ai fait des mises en garde. Je broyais du noir; j'étais pessimiste; c'est ce qu'on m'a dit à l'Assemblée nationale; c'est écrit dans le journal des Débats. Pourtant, un an après, on se rappellera la bataille qu'on a été obligé de faire pour garder les petites entreprises qu'on appelait les petits abattoirs dans les milieux ruraux du Québec. D'ailleurs, le ministre a eu le problème sur les bras et il a fini par trouver une solution satisfaisante. Je ne dirai pas la solution idéale parce que c'est un problème extrêmement complexe. Il faudra peut-être y revenir à un moment donné.

Ce sont des expériences que j'ai vécues ici à l'Assemblée nationale et ici même, à cette commission parlementaire, à cette même table, et le passé est garant de l'avenir. Aujourd'hui, il y a un gouvernement du Parti québécois; hier, c'était un gouvernement du Parti libéral; avant-hier, c'était un gouvernement de l'Union Nationale. Il n'y a pas eu un gouvernement au Québec qui a été éternel jusqu'ici. Demain, il y aura d'autres gouvernements et les pouvoirs qu'on donne aujourd'hui sont des pouvoirs qui pourront être utilisés. Si quelqu'un vient à s'en plaindre et si, à un moment donné, je reçois dans mon bureau une délégation de producteurs agricoles qui viennent se plaindre du fait qu'on en est rendu à les contrôler sur la ferme, même l'agriculteur, à aller compter ses animaux, à aller mesurer sa ferme, l'arpenter et que les agriculteurs viennent se plaindre contre cet abus de pouvoirs, je n'aurai pas d'autre solution que de leur dire: Messieurs, c'est légal; la loi le prévoit; la loi le permet.

Quand on fait des ouvertures de ce genre, il faut penser aux conséquences que cela implique. Quand on a proposé des amendements de bonne foi pour tâcher que certaines balises soient posées, de façon à éviter qu'il y ait trop de discrétion accordée, le ministre de l'Agriculture sait très bien, avec le peu d'expérience qu'il a comme ministre de l'Agriculture après deux ans et demi... À la fin de son terme, il aura plus d'expérience; chaque député comme chaque ministre prend de l'expérience chaque jour. On se rendra compte, à un moment donné, que, dans la réglementation et dans l'application de la loi, dans l'application de la réglementation, il y a bien des abus qui peuvent se commettre. S'il y a eu tant de causes devant les tribunaux jusqu'à ce jour... Je ne parlerai pas de toutes les causes, mais il y en a eu qui étaient justes parce que, justement, il y avait eu de sérieux abus. J'ai eu des cas, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): Vous avez dépassé votre temps; il faudrait conclure.

M. Roy: J'ai déjà dépassé mon temps. Le Président (M. Dussault): Oui.

M. Roy: Je suis très déçu, M. le Président, parce que je n'avais pas terminé.

Le Président (M. Dussault): Je ne voulais pas vous décevoir.

M. Roy: Vous êtes très délicat, mais est-ce qu'on me permettrait une minute?

Le Président (M. Dussault): Pour conclure, oui.

M. Roy: Je ferais une suggestion, M. le Président. Ce n'est pas une question de prolonger le débat, mais il y a des choses qui doivent être dites et il faut qu'elles soient dites; c'est notre devoir de les dire et nous allons prendre le temps de les dire.

J'estime, M. le Président, et j'en fais une suggestion — je pourrais même en faire une motion — je suggère que l'article 1 soit modifié en remplaçant les mots, par l'addition, à la fin de l'article 2, de l'alinéa suivant. Au lieu de faire un article 2a, je préférerais que ce soit un paragraphe qu'on ajoute à l'article 2. Sur le plan juridique, sur le plan de l'interprétation des lois, cela pourrait permettre, je pense, une meilleure protection pour ce qui est contenu dans les deux premiers paragraphes de l'article 2 de la loi 36, pour protéger, en quelque sorte, et voir à ce que la présente loi

ne vienne pas gêner ou concurrencer l'action des coopératives.

Pour résumer, M. le Président, il s'agit tout simplement d'enlever le chiffre 2a au lieu que ce soit un nouvel article ou un article additionnel à l'article 2, que ce soit un paragraphe parce qu'on ajoute tout simplement l'article 2. Je m'explique, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): Ce ne pourrait être qu'une suggestion que vous faites à la commission ou au ministre ou à quelqu'un d'autre qui aurait la parole puisque votre temps est écoulé.

M. Roy: Je veux en faire une motion quand même pour permettre à d'autres collègues de pouvoir s'exprimer là-dessus étant donné qu'il y a du temps de parole qui est épuisé jusqu'à maintenant. Ils ne pourraient pas revenir. Je préfère le faire sous forme de motion.

Le Président (M. Dussault): C'est ce que j'étais en train de vous dire, M. le député. Je vous ai avisé que votre temps était écoulé. Je ne pourrais pas, votre temps étant écoulé, accepter de votre part une motion d'amendement à un article.

M. Roy: Si vous me permettez un droit de parole de quelques secondes, M. le Président. Je ne suis pas contingenté. Je ne suis pas encore réglementé. Il n'y a pas encore de contrôle de la production là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): En vertu de l'article 160 de notre règlement, M. le député de Beauce-Sud, vous êtes contingenté.

M. Roy: Je suis contingenté?

Le Président (M. Dussault): Vous avez 20 minutes sur un article et 20 minutes sur un amendement. Vous les avez dépassées et vous n'avez pas annoncé avant de les dépasser que vous aviez un amendement. Je ne peux pas le recevoir.

M. Roy: C'était mon intervention. C'est parce que le temps a passé trop vite, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): Oui, c'est cela, mais le président ne peut pas être tenu responsable de cela.

M. Roy: À partir du moment, M. le Président, où on a quand même quelques secondes qui nous sont allouées, il n'y a quand même pas de restriction à ce que nous devons dire et à ce que nous pouvons dire à l'intérieur de ces quelques secondes. Il ne faudrait quand même pas être trop à cheval sur les principes. La suggestion que je fais...

M. Chevrette: On va vous donner le consentement. On sait ce qu'ils veulent.

Le Président (M. Dussault): Je vais devoir vraiment demander le consentement parce que je ne peux pas... J'ai été strict, malgré que bien raisonnable dans le calcul, pour tout le monde. Je voudrais l'être de la même façon. Je ne veux pas passer outre à cette règle. Est-ce que j'ai le consentement des membres de la commission pour accepter cet amendement de M. le député de Beauce-Sud?

M. Ouellette: Je voudrais lui accorder un consentement contingenté cependant.

Le Président (M. Dussault): II le sera évidemment dans le calcul du temps qu'on prendra pour le discuter, pour le débattre, le "on" excluant, bien sûr, la personne qui parle. Est-ce que vous pourriez me répéter votre amendement, M. le député, et me transmettre le texte, s'il vous plaît?

M. Roy: "Que l'article 1 soit modifié en remplaçant les mots suivants par l'insertion après l'article 2 du suivant — c'est entre guillemets — par les mots, remplacer les mots que je viens de vous signaler, que je viens de citer, par les mots suivants: "Par l'addition à la fin de l'article 2 de l'alinéa suivant en en retranchant le chiffre 2a".

Pour résumer et pour que ce soit bien clair dans l'esprit de tout le monde, il s'agit de retrancher le chiffre 2a de façon que cela ne devienne pas un nouvel article, mais que ce soit un paragraphe qui soit ajouté à l'article 2. Ce n'est pas plus malin que cela.

Une voix: Ce n'est pas plus malin que cela.

M. Roy: Cela m'apparaît avoir une portée et un sens réel.

Le Président (M. Dussault): C'est un amendement de forme, à toutes fins utiles. Cela n'a pas d'implication sur le fond.

M. Roy: C'est seulement un amendement de forme.

M. Garon: C'est un amendement de forme, mais qui peut avoir des implications. J'ai discuté avec les gens du mouvement coopératif devant leur avocat et je n'ai pas l'intention de jouer dans des amendements comme cela et qu'ils y voient des interprétations. J'étais satisfait de l'article 2a tel qu'amendé. Les amendements ne sont pas... Après cela, vous n'avez vu qu'un mot, le mot "également" et cela les a énervés. Je n'ai pas l'intention, comprenez-vous, d'enlever 2a et de les énerver d'un autre bord en voulant dire que cela vient changer le sens de l'article 2. On a dit: 2, on n'y touche pas. On n'a pas touché à 2. Je ne voudrais pas faire cela, à un moment donné, pour donner l'impression de ne pas respecter ma parole, c'est certain.

M. Biron: M. le Président, peut-être demain matin faudrait-il mettre quelqu'un sur le téléphone et appeler.

Le Président (M. Dussault): De toute façon, je n'ai pas encore dit que je recevais cet amendement de M. le député de Beauce-Sud.

M. Biron: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): Oui, M. le député...

M. Biron: ... je ne sais pas si vous voulez être éclairé sur la recevabilité ou si vous voulez prendre une décision tout de suite.

Le Président (M. Dussault): Remarquez que ce serait de bon aloi que de recevoir des avis, mais vous comprendrez que ce serait en bonne partie pour épuiser le temps parce que j'avoue que dans si peu de temps, je ne voudrais pas prendre le risque de déclarer recevable cet article rapidement. Si le temps qu'il nous reste peut servir à m'éclairer, je suis prêt à le faire, mais remarquez que, de toute façon, cette nuit — bien sûr, vous savez que le président continue toujours à travailler durant la nuit — je vais réfléchir à cela et une décision sera rendue lorsque nous reviendrons.

Une voix: C'est un excès de zèle!

Le Président (M. Dussault): Le temps étant venu de mettre fin aux travaux de cette commission, la décision sera rendue, évidemment, au retour, lorsque la Chambre donnera l'ordre à la commission de reprendre ses travaux. J'ajourne les travaux de cette commission sine die.

(Fin de la séance à 22 h 27)

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