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(Quinze heures trente-deux minutes)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'aménagement et des équipements
entreprend maintenant ses travaux pour exécuter le mandat qui lui a
été confié, soit celui de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 84, Loi sur la
protection des non-fumeurs dans certains lieux publics. Il n'y a aucun
remplacement cet après-midi parmi les membres de la commission.
Y a-t-il des remarques préliminaires?
M. le ministre.
Remarques préliminaires M. Clifford
Lincoln
M. Lincoln: Très brièvement, M. le
Président, j'aurais voulu, d'abord, remercier les membres de la Chambre
qui ont participé au débat et l'Opposition d'avoir appuyé
le principe de la loi. Je réalise qu'ils avaient des contraintes. C'est
l'idée de la commission parlementaire. J'aurais voulu souligner au
critique de l'Opposition qu'une des objections qui avaient été
soulevées, je pense, par deux ou trois des porte-parole de l'Opposition
et, je m'en souviens très clairement, par le député de
Lac-Saint-Jean, c'était sur la question des autobus. Depuis, j'ai
rencontré, après le discours de deuxième lecture, les
représentants de l'industrie des autobus qui ont eu des discussions avec
nous, qui nous ont fait certaines suggestions. Nous avons discuté de la
question, nous leur avons fait nous-mêmes certaines propositions. Ils
sont en train de regarder cela et vont essayer de nous revenir le plus
tôt possible. Alors, j'aurai des idées à suggérer
là-dessus. C'est pour dire à mon collègue de l'Opposition
que cette question est à l'étude et que je devrais avoir des
réponses de l'Association des propriétaires d'autobus du
Québec dans les heures qui suivent, pendant la commission
parlementaire.
À part cela, je n'ai pas de remarque spécifique à
faire. Je pense qu'on a couvert cela pendant le débat de deuxième
lecture et je serais prêt à procéder aussitôt que
possible à l'étude article par article.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Yves Blais
M. Blais: Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Je
suis content d'entendre le ministre dire qu'il va nous proposer des amendements
pour ce qui a trait au droit de fumer ou non dans certains autobus. C'est ce
que je comprends et c'est ce que je pensais parce qu'on a préparé
nous-mêmes certains amendements en ce sens. Il est fort possible que les
deux coYncident et on pourra voir cela probablement après la
période du souper.
Tout d'abord, je n'ai pas beaucoup de remarques préliminaires
à faire personnellement. Je sais que mon confrère de
Jonquière en aurait beaucoup. Je veux tout simplement dire que nous
sommes d'accord en principe avec cette loi - et nous l'avons dit en Chambre -
mais nous ne sommes pas tout à fait d'accord et même
opposés à beaucoup de ses articles. Nous trouvons qu'elle est mal
construite. On peut se tromper, mais on trouve qu'elle est mal construite
à commencer par le titre de la loi. Je pense que le titre est
très mal choisi et je dis que vers la fin, quand on aura fini de
l'étudier, je vais proposer un amendement au titre parce que Loi sur la
protection des non-fumeurs dans certains lieux publics, j'ai l'impression que
cela ne dit pas ce que la loi veut faire. La loi veut assurer une protection
des droits des fumeurs et une protection des droits des non-fumeurs. Ce n'est
pas seulement la protection des droits des non-fumeurs, c'est les deux. Alors,
à cause de l'esprit de cette loi et aussi, j'en suis persuadé,
parce que démocratiquement nous défendons la tolérance
face aux fumeurs et la tolérance face aux non-fumeurs, dans le titre du
projet de loi lui-même, j'ai l'impression qu'on devrait retrouver
protection des droits des uns et des autres. Anciennement, nous étions
beaucoup de fumeurs, j'en étais un, personnellement. Je ne sais pas si
le ministre a déjà fumé.
M. Lincoln: Non.
M. Blais: Non. Vous êtes bien chanceux! J'ai fumé
pendant 41 ans.
M. Kehoe: As-tu plus que 41 ans?
M. Blais: Oui, de métier, j'ai 41 ans. J'ai fumé
pendant 41 ans et c'est extrêmement difficile, après avoir
fumé durant
autant de temps, d'arrêter. Mais c'est une chose qui s'impose,
dans le contexte actuel car, la nature nous pollue assez par son industrie
qu'on ne doit pas se polluer les poumons nous-mêmes en fumant. Mais comme
nous sommes dans un pays libre, le projet de loi devrait lui-même
comprendre, dans son énoncé - le titre de la loi - la protection
des fumeurs parce qu'on se doit d'être tolérant. J'ai appris
pendant 41 ans à demander la tolérance des non-fumeurs et je
demande, aujourd'hui, vu que je suis un non-fumeur, la tolérance des
non-fumeurs encore vis-à-vis des fumeurs. C'est pour cela qu'on
proposera certainement un amendement.
C'est bien sûr qu'il y a longtemps que ce projet de loi mijote
dans les marmites du ministère de l'Environnement. Votre ancien
député, M. Harry Blank, a présenté ce projet de loi
pendant tout le temps qu'il était en Chambre, je pense pendant une
vingtaine d'années. Il l'a toujours présenté année
après année. De 1970 à 1976, il le présentait aussi
et le gouvernement libéral de l'époque n'a pas cru bon d'adopter
ce projet de loi. Nous, on a été là pendant neuf ans, et
on n'a pas cru bon ou on n'a pas pu voir venir le jour de le présenter.
On s'y apprêtait, on s'en venait pour le présenter, mais on
n'avait pas encore eu le courage de le faire ou on n'était pas encore
psychologiquement prêt à le présenter. Vous le
présentez, je vous en félicite et vous vous en félicitez
vous-mêmes, vous l'avez fait dans votre présentation. Je vous
félicite de l'avoir présenté, mais ce n'est pas juste dans
le fait de le présenter qu'on doit se glorifier, c'est de
présenter un projet qui se tienne.
C'est malheureux, mais je suis obligé de dire que ce projet en
gros ne se tient pas. Il ne se tient pas par son titre, il ne se tient pas, non
plus, par la protection qu'il apporte aux non-fumeurs. Il ne se tient pas parce
que ce n'est pas un projet de loi basé sur la tolérance. Il n'est
pas basé sur la compréhension, la liberté et les droits
des gens; il est basé sur la coercition, l'amende, la punition,
l'inspection. Un projet de loi de cette nature, en 1986, il nous est
impossible, à nous de l'Opposition, de l'accepter. On dégage,
dans ce projet de loi, une image de gendarme qui surveille la fumée afin
de faire exploser l'endroit d'où la fumée sort. Je crois que ce
n'est pas un projet digne du XXI e siècle qui arrive. Personnellement,
cela m'offusque d'être obligé de dire cela parce que je suis un
type d'une grande sensibilité, je n'aime pas critiquer. Ce n'est pas
dans ma nature, je suis un type d'une grande grande sensibilité. J'ai
horreur de la critique, je n'ai pas le sens de l'humour du côté
critique. Je l'ai dans le sens du rire franc et honnête, mais dans le
sens de la critique, cela me fait toujours mal de critiquer.
Que voulez-vous, les hasards de la démocratie ont fait que je
suis dans l'Opposition et jamais je ne me refuserai à prendre mes
responsabilités, quoi qu'il m'en coûte et quels que soient les
dommages à ma santé. Alors, j'y vais tout de go, comme cela, en
vous disant: Premièrement, le projet de loi est trop coercitif dans son
essence; deuxièmement, il est trop "abandonnatif". Je sais que c'est un
néologisme - de bon aloi, cependant - mais ce néologisme veut
dire que le gouvernement du Québec donne aux autres la
responsabilité dans beaucoup de domaines, qu'il devrait tenir pour
sienne. On donne à des paliers de gouvernement intermédiaires,
soit les villes, les MRC, les commissions scolaires ou certains agents de
services sociaux, une responsabilité première dans ce domaine.
Cette responsabilité première dans ce domaine devrait être
celle du gouvernement. Je ne peux pas l'appeler central, mais, pour ces
gouvernements secondaires au Québec ou d'autorité
déléguée dans la province, Québec est leur
gouvernement central et le gouvernement central se départit de trop de
responsabilités, contrairement à l'esprit qui a toujours
animé l'Opposition libérale de l'époque.
Je leur sais gré d'avoir toujours eu cet esprit, ils ont toujours
eu en tète - ils l'ont dit à qui voulait les entendre - que
jamais le gouvernement du Québec ne pouvait envoyer une
responsabilité à un gouvernement subalterne, soit une MRC (ou une
municipalité entre parenthèses, une commission scolaire n'est pas
un gouvernement, mais elle agit presque comme un gouvernement) sans transferts
fiscaux. C'est pour cela que le ministre, dans son projet de loi, vu qu'il ne
fait pas de transferts fiscaux pour les responsabilités nouvelles
attribuées à ces différents paliers de gouvernement, met
de la coercition pour qu'ils aillent chercher, par l'amende et par le punitif,
des sommes d'argent pour compenser les dépenses que leurs nouvelles
responsabilités les amènent à faire.
De ce côté, je trouve ce projet intolérant devant
les responsabilités qu'on se doit d'assumer. On doit être
tolérants pour ceux qui fument et tolérants également pour
ceux qui détiennent la responsabilité; on ne doit pas donner
à d'autres des responsabilités si on ne leur donne pas de
compensations financières. Je ne peux pas tolérer - le projet
n'est pas intolérant, c'est moi qui ne peux tolérer - que le
gouvernement du Québec donne une responsabilité aux villes, aux
commissions scolaires ou aux hôpitaux sans leur donner une compensation
fiscale.
D'autant plus que ce projet de loi, on en parie depuis longtemps et,
quand le ministre est arrivé et qu'on lui a donné le
résumé de son ministère, il était écrit
à ce sujet: Le ministère de l'Environnement devra procéder
à l'adoption d'un projet de loi régissant l'usage du tabac dans
un certain nombre de lieux publics et d'espaces. Un
autre projet de loi était préparé pour attribuer
aux municipalités du Québec les pouvoirs de réagir et
d'interdire. Il y avait les deux. Tandis que, là, c'est contraire
à la philosophie du nouveau gouvernement, c'est un projet omnibus. Il
concède aux municipalités, d'une part, et il régit
certains édifices gouvernementaux, d'autre part. Il est dans l'esprit de
ce nouveau gouvernement de ne pas faire de bill omnibus, mais celui-là
est un bill omnibus.
Je ne voulais pas parler longtemps en remarques préliminaires,
cela fait deux ou trois minutes. Mais il y avait, à l'arrivée du
nouveau ministre au ministère de l'Environnement, ces deux options: un
projet de loi qui aurait régi les édifices gouvernementaux selon
lequel le Québec aurait pris ses responsabilités et un autre
projet de loi qui aurait transféré aux municipalités
certains pouvoirs d'inspection ou de réglementation. Une
troisième option, un peu plus modeste, consistait à donner des
pouvoirs de gérance. Le ministre a certainement lu les recommandations
des gens du ministère, car un ministère est une
continuité, quels que soient les gouvernements qui sont là. Il
n'y a que les initiatives personnelles qui font qu'il y a des changements selon
la politique intrinsèque appartenant à chacun des partis durant
le temps qu'ils gouvernent. Les fonctionnaires eux-mêmes assurent la
continuité. Les gouvernements passent, mais les fonctionnaires
restent.
Ceci termine à peu près mes remarques
préliminaires, M. le Président. Je voulais tout simplement
ajouter quelques mots. Je ne voulais pas être long et je me garderai
d'être long dans les remarques préliminaires. Je vais essayer
d'être très constructif durant cette consultation. Je reviendrai,
à la fin, après avoir étudié le projet de loi
article par article, pour essayer d'en changer le titre. Je ne sais pas si vous
êtes disposés à accepter des compromis quant au titre du
projet de loi, qui ne dit pas ce qu'il contient, Loi sur la protection des
non-fumeurs dans certains lieux publics. Ce n'est pas ce que la loi fait. La
loi fait plus que cela. C'est une loi pour les droits des fumeurs et les droits
des non-fumeurs; on légifère pour les deux. On ne peut n'en
mettre qu'un, car les fumeurs ne se retrouveraient pas là-dedans.
Voilà, c'est ce que je voulais dire, M. le Président, en
remarques préliminaires. J'ai essayé d'être le plus bref
possible. J'avais tellement de choses à dire, mais, pour le moment, je
vais arrêter. (15 h 45)
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Terrebonne.
J'appelle maintenant l'article 1.
M. Dufour: M. le Président, j'ai demandé...
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de
Jonquière, avant l'article 1.
M. Francis Dufour
M. Dufour: M. le Président, c'est évident que j'ai
parlé sur le projet de loi lorsqu'il a été
déposé en Chambre il n'y a pas tellement longtemps. Et c'est
toujours dangereux parce qu'on n'a pas le temps nécessairement
d'expliquer exactement tout ce qu'on pense. Je voudrais me reprendre un peu
pour rappeler que c'est un genre de projet de loi - on a voté pour le
principe de la loi, c'est évident - où les gens qui se prononcent
contre, s'ils font des remarques, peuvent être accusés
d'être contre la vertu. Et cela, c'est toute la problématique
qu'on a lorsqu'on décide de discuter sur un projet de loi semblable. Je
vous donnerai comme exemple certains projets de loi qui pourraient concerner
les personnes handicapées. C'est évident que quelqu'un qui se
prononcerait contre l'amélioration des conditions de vie de ces gens va
passer pour un méchant, pour quelqu'un qui est loin d'être
conscient des problèmes que ces personnes vivent.
Cette loi a pour effet de changer les règles du jeu, et assez
fortement. Je me méfie toujours des projets de loi qui nous sont
présentés en nous disant: II n'y a pas grand-chose
là-dedans. Déjà, on a un complexe de culpabilité,
car, s'il n'y a pas grand-chose, pourquoi aurait-on tant de choses à
dire par rapport à cette loi?
Je vais essayer de prendre non pas chaque article, mais quelques
articles qui m'ont frappé. On parle d'organismes publics. On
détermine que les organismes scolaires, les organismes municipaux et les
organismes gouvernementaux sont des organismes publics. Donc, les
municipalités n'ont pas le choix de décider si elles sont ou non
des organismes publics. La loi le décide d'une façon normale. Ce
n'est pas seulement indicatif, mais ipso facto. Cela a l'air, peut-être,
de toucher jusqu'à un certain point à l'autonomie des
municipalités, puisqu'elles n'ont pas le droit, elles n'ont pas le choix
de décider si elles font partie d'un organisme public ou non. Et
immédiatement, on décrète qu'"il est interdit de fumer
dans une salle ou un comptoir destiné à des prestations de
services à des personnes présentes."
Je pense qu'il y a un amendement. Les amendements qui sont
proposés, je vous le dis carrément, je n'ai pas eu le temps de
les regarder, ils viennent de nous être remis. Encore là, ce n'est
pas la première fois que cela arrive, malheureusement, pour des projets
de loi. Il nous arrive régulièrement des amendements et ils ne
sont pas nécessairement suggérés par nous. Je pense que
cela vient simplement nous démontrer que ce projet de loi a
été préparé rapidement parce que cela prenait une
loi. Parce
que nous innovons avec ce projet de loi. Cette loi n'existe pas
ailleurs. Donc, nous allons mettre notre nom quelque part. Ce genre de loi
n'existe pas au Canada. Cela n'existe pas aux États-Unis. Nous innovons.
Quand on innove, on a intérêt à regarder cette loi
lentement pour être bien sûr qu'on ne fait pas trop d'erreurs.
Je conçois difficilement, par exemple, que dans une salle de
conférence, de cours, de réunion ou de séminaire, quand on
regarde le fonctionnement des municipalités où on ne dit pas
qu'il y a une partie qui est considérée publique ou non
publique... Un hôtel de ville, c'est public, entièrement, comme
une salle de conférence ou de cours, Cela veut dire que chaque fois que
quelqu'un va se plaindre, c'est sûr qu'on ne pourra pas fumer.
Dans cette commission parlementaire, il n'y a personne qui fume,
heureusement, bravo, mais cela arrive que des gens veuillent fumer. L'espace
est assez grand et c'est rare que la salle soit complètement remplie
d'individus ou de gens qui fument et qui dérangent tout le monde. Donc,
il y a peut-être dans cet article des points qu'on pourrait examiner. Je
pense qu'il y a des gens qui ont trouvé des modalités sans la
loi. Il y a des organismes qui ont décidé qu'ils avaient un coin
pour les fumeurs, un autre coin pour les non-fumeurs. Ainsi, il y a beaucoup de
salles qui sont dotées d'un système d'évacuation d'air, ce
qui fait que la fumée, on ne la sent pratiquement pas. Je connais des
endroits qu'on pourrait aller visiter où on ne sent pas la fumée,
même s'il y a beaucoup de monde qui fume, et cela permet de ne pas
empêcher quelqu'un qui effectivement...
Je suis d'accord avec mon collègue de Terrebonne, arrêter
de fumer, c'est compliqué. Cela prend de la volonté ou cela prend
une motivation très grande.
M. Blais: Fumez-vous?
M. Dufour: Je regarde le quatrième paragraphe, "une aire
désignée par la personne ayant la plus haute autorité au
sein de l'organisme public". On ne dit pas comment on le fait. On dit que, si
c'est la personne qui a la plus haute autorité, elle peut
décider. Il n'y a pas de méthode pour nous dire comment elle va
décider. Est-ce que cette personne va être radicale en disant: Je
décrète que dans cette salle, pour telle raison, on n'aura pas le
droit de fumet? J'ai décidé, il n'y a pas eu de ratification.
Parce qu'il peut y avoir des autorités qui ne sont pas
déléguées par les personnes qui les ont nommées
nécessairement. Le directeur d'un hôpital, par exemple, n'est pas
nécessairement nommé par ses employés, ni par les gens
autour, au conseil d'administration. Il a été engagé
à la suite d'un concours et, à ce moment-là, cette
personne, si elle ne fume pas et qu'elle hait tous les fumeurs, pourrait ipso
facto enlever ce droit rapidement. Cela me semble découler d'un
espèce d'ostracisme ou d'une sorte de volonté d'aller vite. Je ne
dis pas que celui qui a écrit la loi l'a fait volontairement. Je me dis
que, quand on écrit des mots, il faut essayer de regarder
intrinsèquement qu'est-ce que cela comprend, qu'est-ce que cela veut
dire et qu'est-ce qu'il y a à l'intérieur de ces mots.
Je regarde l'article 10 où on décide d'abord que
l'organisme public. Lesquels sont considérés comme des organismes
publics? On a dit quelque part: On va donner plus d'autonomie. Mais n'oublions
pas une chose, c'est que l'organisme public va être obligé de...
ce n'est pas: il peut le faire! Un organisme public dont la loi exige la
production d'un rapport annuel de ses activités - les
municipalités produisent des rapports annuels, pas nécessairement
de toutes leurs activités, mais de tous leurs bilans financiers d'une
année - va être obligé de donner un rapport. Ce n'est pas
volontaire. J'imagine que c'est peut-être important qu'il fasse ce
rapport, mais qu'est-ce qu'on va en faire? Est-ce juste pour des fins de
statistiques, est-ce pour aller plus loin dans la loi, est-ce pour voir ce
qu'il pourrait arriver ou ne pas arriver par rapport à cela?
À l'intérieur de cela encore je trouve aussi que, d'un
côté, on donne une certaine autonomie aux municipalités et,
de l'autre, on les met un peu en tutelle. Pas une tutelle fatigante comme une
tutelle de la Commission municipale, mais c'est une forme de tutelle puisqu'on
exige. Le ministre pourrait me rétorquer qu'ils sont allés
rencontrer les organismes publics, bien sûr. Je sais que le ministre a
rencontré les corporations municipales ou les grands ensembles et les
associations des municipalités à la table
Québec-municipalités, mais j'ai des doutes qu'ils aient eu le
temps de disséquer le projet de loi.
Encore là, je rappelle que le principe de la loi est bon en soi.
Je pense que mon collègue et moi sommes complètement d'accord
pour dire? Oui, c'est un principe de loi qui est juste, sauf qu'il faudrait se
demander: Est-ce qu'on a besoin d'aller aussi loin que cela ou est-ce qu'on a
besoin de hâter l'exécution ou l'adoption de cette loi? Si c'est
nouveau, on ne peut pas faire d'erreur en disant qu'on va prendre un peu de
temps et la soumettre à la consultation du public pour savoir ce qu'il a
à dire de cette loi. Les esprits ont peut-être été
préparés, mais ils ne sont pas encore préparés
suffisamment.
On sait bien que l'industrie du tabac est celle qui a été
la plus frappée depuis un an, peut-être depuis deux ans ou trois
ans,
mais effectivement c'est cette industrie qui a été
frappée de tous bords et de tous côtés. Cela a eu des
effets, des effets de dissuasion pour arrêter certaines personnes de
fumer. La preuve? On est la preuve vivante de cela et il y en a d'autres qui
ont arrêté de fumer parce qu'ils ont trouvé qu'il y avait
déjà des mesures. On ne connaît pas encore la portée
ou l'ensemble des mesures qui ont été adoptées et
déjà on se prépare à aller plus loin. Cela me
semble faire preuve de rapidité ou d'exigence très grande envers
ces gens.
Quand on regarde, au chapitre III, Fonctions et pouvoirs des
municipalités: "Toute municipalité locale veille, sur son
territoire, à l'exécution des dispositons de la présente
loi, sauf en ce qui concerne les lieux occupés par un organisme public",
cela veut dire que la municipalité n'a pas d'affaire là. Donc, en
principe, ses agents de la paix ne devraient pas être là et il ne
devrait y avoir personne pour aller faire respecter la loi. Cela veut dire que
l'individu qui veut faire respecter la loi, s'il n'est pas un agent de la paix,
il s'expose à avoir des coups, à avoir des problèmes.
Comment va-t-il réagir envers cela? Je ne le sais pas. Il me semble
qu'on donne des fonctions, on donne des pouvoirs et on prend la peine de faire
un article pour dire qu'il surveille, qu'il exécute les dispositions de
la présente loi sauf en ce qui concerne les lieux occupés par un
organisme public.
Quand je regarde la définition d'un organisme public, il y a
aussi le scolaire, il y a aussi les services de santé et un peu tous les
groupes qui dépendent des subventions par rapport à cet article.
Donc, cela m'inquiète un peu de voir que oui, on a les fonctions, les
pouvoirs, mais, en même temps, on n'a pas nécessairement la
responsabilité de l'ensemble. On va plus loin: "peut, par
règlement: interdire de fumer dans toute autre catégorie de lieux
situés sur son territoire; prescrire toute autre mesure non
incompatible..." Quand on regarde cela et qu'on les relit ensemble, on pourrait
s'exposer à ce qu'un conseil municipal aille très loin dans
l'application de ce règlement-là.
Je suis favorable à ce que les municipalités aient le
pouvoir de faire des règlements et soient autonomes. Par contre,
tantôt les gens vont aller un peu d'une municipalité à
l'autre, il est possible que les règlements soient tellement
différents que les gens ne sachent pas trop à quoi s'en tenir. On
peut bien dire: Il va y avoir une affichage, mais on sait qu'une affiche,
ça peut être déchiré, ça peut être
enlevé, être sali. Tout cela fait qu'encore là ces lieux
pourraient ne pas être identifiés clairement au vu et au su de
tout le monde et, à ce moment-là, comment les gens pourraient-ils
être avertis d'arrêter de fumer ou de ne pas fumer ou de ne pas se
présenter dans cette section-là?
Concernant le chapitre de l'inspection, encore là, on parle d'un
agent de la paix, mais, comme pour les fonctions et pouvoirs des
municipalités, qu'on nous a enlevés, je pense qu'un officier de
la police, c'est un agent de la paix. À ce moment-là, on lui
donne le pouvoir. Mais au chapitre III, on lui enlève le pouvoir. Je ne
sais pas comment on va pouvoir concilier ces questions. Je reviens à
l'alinéa 2° qui dit: "une personne autorisée à cette
fin par une municipalité". Il faudrait peut-être qu'on
réglemente quelque part si on ne veut pas être victime de
décisions un peu farfelues ou un peu radicales de la part d'un individu.
Je pense que c'est donner beaucoup de pouvoir à quelqu'un pour appliquer
une loi semblable.
À l'article 23, on dit: "pénétrer à toute
heure raisonnable", mais, quand on étudie les lois, on nous dit: 22
heures, c'est une heure raisonnable. Pour certains, 18 heures pourrait
être une heure raisonnable. 3 heures du matin, cela pourrait être
une heure raisonnable. Quelle est l'extension d'heure raisonnable? Encore
là, ce n'est pas tellement clair dans mon esprit. Quelle est l'heure
raisonnable pour certains individus qui travaillent de nuit et qui pourraient
voir quelqu'un aller inspecter n'importe quand? Dieu sait que cela pourrait
déranger du monde et des individus si c'est un lieu public. Même,
si une salle publique est occupée par un groupe, qu'elle est à la
disposition des individus ou des groupes qui ont payé pour l'occupation
de cette salle, est-ce que ces gens-là vont être
considérés comme n'ayant aucun droit parce que c'est un lieu
public? Ce lieu public peut être visité à n'importe quel
moment, parce qu'une heure raisonnable, à mon sens... On sait qu'il y a
des établissements qui ferment à 3 heures du matin. Ils peuvent
fermer à 4 heures. Même, ils peuvent fermer les portes et on va
aller un peu plus loin. Encore là, est-ce qu'on ne s'expose pas à
travers cette démarche-là à avoir des coups ou des actions
qui peuvent être jugées trop rapides pour le projet de loi qu'on
vise?
Je voudrais revenir à "dans un lieu occupé par un
organisme". Je fais simplement une réflexion à haute voix. On
dit: "Dans un lieu occupé par un organisme gouvernemental, municipal ou
scolaire". On sait qu'il y a beaucoup d'activités qui se font par des
organismes scolaires, municipaux ou autres. Il y a même des hôtels
complètement occupés lors de congrès. Donc, l'hôtel
est occupé par un organisme. Est-ce qu'on pourrait faire un
rapprochement avec ce qui est écrit dans cet article-là? Au
moment où il y a une majorité d'individus qui proviennent d'une
municipalité, qui sont à l'intérieur d'une bâtisse,
on pourrait, selon la loi, faire une interdiction de fumer complète,
parce que c'est définitivement dans un lieu "occupé".
Occupé, cela ne veut pas dire loué. Cela ne veut pas dire
être propriétaire. Cela veut dire être quelque part,
à ce que je sache, à moins que la loi ne veuille dire autre
chose. À mon point de vue, des gens qui occupent un lieu physique, donc,
qui occupent un local majoritairement... Ce n'est pas dit, mais je pense que,
pour occuper, c'est toujours le même principe qui s'applique: la
majorité fait que l'ensemble est là. Quand on regarde cela, par
rapport à cette loi-là, pour des gens qui occupent une
bâtisse, même s'ils sont juste temporairement dans cette
bâtisse, mais qu'ils ont le droit d'être là, qu'ils ont pris
des moyens pour être là, soit par location ou autrement, est-ce
que cela voudrait dire que c'est fini: on n'a pas le droit de fumer? (16
heures)
C'est un peu les remarques préliminaires que je voulais faire et
je pense que mon collègue et moi, on est ouvert à certaines
suggestions. Je pense qu'on va le faire correctement, au meilleur de notre
connaissance. Je pense aussi que, dans une loi qui innove comme cette
loi-là, il ne faut pas avoir peur d'aller creuser et d'aller voir ce
qu'il y a dans cette loi-là. Je ne pense pas qu'on puisse accuser le
ministre d'avoir été méchant et de vouloir du mal à
tout le monde. Je ne pense pas que cela soit le but qu'on vise. On accepte
qu'il le fait au meilleur de sa connaissance avec ses fonctionnaires, etc.,
mais il faut bien s'entendre que cette loi-là est une loi qui innove.
C'est une loi nouvelle, c'est une loi qui a pour effet de faire des choses ou
d'accomplir des choses qui ne sont pas actuellement en application et j'ai
l'impression que l'Opposition comme le gouvernement ont intérêt
à voir au maximum à protéger les droits des uns et des
autres. Je pense que c'est comme cela qu'on va faire notre travail. Je le
répètes Pour nous, cela peut être une excellente loi, mais
elle a besoin d'être modifiée, d'être bonifiée et on
a aussi besoin de bien la posséder pour s'assurer que tout le monde est
protégé par cette loi-là. Merci, M. le
Président.
M. Lincoln: Alors, M. le Président...
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
Discussion générale
M. Lincoln: ...très brièvement, parce que je ne
voudrais pas laisser planer un malentendu. Je pense que le député
de Jonquière - et je conçois tout à fait que chacun ait
ses points de vue là-dessus - a dit que c'était une loi
innovatrice, que cela n'existe pas au Canada, que cela n'existe pas aux
États-Unis et que cela n'existe pas ailleurs.
Les précédents
C'est tout le contraire. Ce que j'ai voulu souligner en Chambre l'autre
jour, c'est qu'au Canada on serait la première province à
introduire une loi similaire. Mais des lois ou règlements similaires
existent au Canada: il y en a une à Calgary, il y en a une à
Toronto, il y en a une à Ottawa, il y en a une à Aylmer depuis,
je pense, 1975, il y en a une à Westmount, il y en a une à
Côte-Saint-Luc, il y en a une qui vient de se faire à la ville de
Mont-Royal. II y en a qui se font de plus en plus et, aux États-Unis, il
y avait 31 Etats... Je lisais, par exemple, un rapport des États-Unis
dont on s'est inspiré: 50 % des États - c'était en 1976 -
des États-Unis avaient adopté la loi: Alaska, Arizona,
Connecticut, Delaware, Floride, Georgie, Hawa?, Idaho, Kansas. On disait qu'il
y avait cinq États qui avaient à ce moment-là des lois
devant leur Assemblée. Aujourd'hui, il y en a 31. On disait encore qu'il
y en avait 21 autres qui avaient proposé des lois en ce sens et que le
Kentucky était le seul État qui n'avait pas ou bien
proposé ou bien adopté une loi. J'ai cité en Chambre des
quantités de pays du monde qui ont de telles lois. Je peux citer la
France, je peux citer l'Italie, je peux citer la Pologne, je peux citer la
Bulgarie, Singapour, la Finlande, partout dans le monde. En fait, si on peut
penser à tous les précédents dont on a pu se servir, si on
pouvait prendre tous les documents qu'un de mes attachés politiques au
cabinet, qui est avocat, et moi-même, avons eu à regarder, on en
aurait fait une pile de trois pieds de haut.
De plus, ce que j'ai expliqué, c'est que ce n'est pas nouveau au
Québec. Le Conseil consultatif de l'environnement avait commencé
à étudier cela et il a publié une étude en mai 1979
où il a fait une constatation. Il a fait une consultation de quelque
chose comme 35 associations, syndicats, centres hospitaliers. Il a fait un
relevé de toute la législation qui était connue à
travers le monde, qui était connue à travers le Canada, à
travers les États des États-Unis. Il y a peu de choses auxquelles
je puisse penser où il y a plus de précédents
écrits et testés. Tout ce qu'on a mis dedans a été
vu et revu ailleurs. En fait, lorsque j'ai rencontré les gens de
l'industrie du tabac et que je leur ai montré la documentation que nous
avions comme base pour écrire ce projet de loi, eux-mêmes se sont
rendu compte qu'il y a différentes façons de le regarder.
Si, par exemple, on voit ce qui s'est fait au Minnesota ou, entre
autres, à Toronto, on verra qu'on va beaucoup plus loin que dans ce
projet de loi. Ce projet de
loi essaie vraiment d'établir un exemple, un symbole. Il n'essaie
pas d'être coercitif. Relativement à tous les autres que j'ai vus,
c'est certainement quelque chose qui se fait tous les jours aujourd'hui. En
fait, vous voyez la France, l'Italie, New York, Chicago, l'Alberta, Ottawa,
Westmount. On a comparé, par exemple, toutes les amendes. Si vous voyiez
certaines, vous verriez que, par exemple, à Ottawa, on prévoit
des récidives trois fois. Il y a toutes sortes de modèles
aujourd'hui sur lesquels on a travaillé pour arriver à ce
à quoi on est arrivé. Ou point de vue des municipalités,
on n'avait que deux options: ou on faisait, comme le député de
Terrebonne l'a suggéré, une loi provinciale ou on faisait une loi
où on habilitait les municipalités.
On a consulté l'Union des municipalités du Québec.
On a consulté les MRC qui nous ont dit qu'elle préféraient
faire elles-mêmes les règlements sur leur territoire. Elles
disaient: Nos membres, les citoyens eux-mêmes, ont demandé cela.
Nous préférons avoir cette autonomie. Qui sommes-nous pour
imposer cela aux municipalités? Nous avons décidé que, si
c'était leur voeu, on serait tout à fait d'accord.
L'Union des municipalités avait suggéré que,
même pour les bâtiments municipaux, tels les hôtels de ville,
elle ne voulait pas qu'on inscrive quelque chose qui inclurait des dispositions
quant à ces bâtiments. Après que l'Union des
municipalités du Québec eut consulté son exécutif,
elle est revenue nous dire: Non, nous voulons les hôtels de ville; nous
voulons les bâtiments municipaux eux-mêmes. Mais, les autres
bâtiments sur notre territoire, nous voulons avoir le pouvoir de les
réglementer.
Aucune loi n'a eu autant d'études faites, depuis des
années et des années que cela dure, depuis dix ans que cela dure,
sur les tablettes. Il n'y a pas de loi où il y a eu plus de
précédents sur lesquels se baser. Il n'y a certainement pas eu de
lois que je connaisse qui, au fil des temps, n'aient reçu autant
d'attention quant à la consultation avec tous les milieux
impliqués. Vous avez parlé de centres hospitaliers auxquels on
imposerait des choses sans redevance fiscale. Tout ce que je vais vous
soumettre, c'est que le ministère des Affaires sociales lui-même,
du temps de votre gouvernement en 1978, avait adapté une politique
visant à faire exactement ce que nous faisons aujourd'hui. Le
ministère de la Santé et des Services sociaux nous a
demandé d'adopter une telle loi et on est appuyé à 100 %
par le ministère des Affaires sociales. Les centres hospitaliers
eux-mêmes le demandent. J'ai toutes sortes de documentation provenant de
centres hospitaliers et de DSC qui demandent une pareille loi. Ce n'est pas
comme si on disait qu'on avait imposé une loi que personne ne veut.
Je suis convaincu que cette loi sera acceptée de la grosse
majorité des citoyens du Québec, incluant surtout les gens du
domaine de la santé. L'autre jour, pour vous citer un exemple, j'ai
reçu un appel de l'Ordre des pharmaciens qui me disait: On nous a
oubliés là-dedans; nous voulons que vous appliquiez cela aux
pharmacies. C'est pour vous dire que, dans le domaine de la santé, on
veut presque unanimement une telle loi.
Ce n'est pas vrai qu'il n'y a pas de précédents. Il y a
des précédents à travers le monde. Il y a des
précédents aux États-Unis. Il y a beaucoup de
précédents au Canada. Tout ce que j'ai dit, c'est que le
Québec est la seule province qui avait été de l'avant
jusqu'à maintenant et je pense qu'il est temps qu'on le fasse. Mais, je
vais être tout à fait ouvert pour écouter les
revendications que vous aurez lorsqu'on étudiera le projet de loi
article par article.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: Oui, j'ai tout de même une question ou deux, si
vous le permettez. D'abord, à la décharge de mon confrère
de Jonquière qui a dit que c'était innovateur que le
Québec amène cette loi, vous-même le disiez...
M. Lincoln: Oui.
M. Blais: ...et d'un autre souffle, vous dites: On n'est pas les
seuls. Ce n'est pas la première fois que cela arrive. Soit qu'on est
innovateur ou qu'on ne l'est pas; mais je ne veux pas me chicaner sur cela. On
est innovateur ou on ne l'est pas. C'est vrai qu'au Canada c'est la
première province qui amène cela. Dans ce sens-là, c'est
innovateur et mon confrère a raison, car il reprenait les paroles que
vous disiez en Chambre. Et je vous donne raison là-dessus aussi. Mais
c'est le deuxième verset de votre tirade qui dit sans le dire: On n'est
pas innovateur; cela s'est fait partout. On fait comme les autres; il y a des
précédents partout. Alors, je pense qu'il faut tenir les deux
rails l'un sur l'autre. On est innovateur ou on ne l'est pas, mais ce n'est pas
très grave. Il s'agit juste de s'entendre sur les mots.
Mais, il y a une chose que j'aimerais bien vous demander avant de passer
à autre chose. Vous nous dites dans le petit exposé que vous
venez de faire - et j'étais content que vous le fassiez, ce petit
exposé - que dans certains États ou à Ottawa même,
c'était très coercitif, qu'il y avait des amendes jusqu'en
troisième récidive. Je tiens à vous dire que je n'ai pas
lu celui d'Ottawa. Mais, vous dites vous-même - là aussi,
faudrait-il qu'on s'entende sur les mots - que ce projet de loi... Je vais
reprendre
vos paroles! "Le ministre Lincoln, lui-même non-fumeur - je vous
félicite, d'ailleurs -reconnaît toutefois que la loi, quand elle
aura été adoptée, aura surtout une valeur symbolique."
Bon. Elle ne peut pas être symbolique tout en étant coercitive.
Là aussi, il va falloir qu'on s'entende sur les mots. Elle est
symbolique ou elle est coercitive. On innove ou on n'innove pas.
Il serait bon, avant de commencer à discuter de ce projet de loi,
qu'on précise nos adjectifs, qu'on s'en donne peut-être une
définition pour qu'on puisse commencer ce projet de loi avec les
mêmes définitions.
M. Lincoln: Il y a toute une distinction à faire entre ce
qui se fait juridiquement et ce qui se fait dans la pratique. On ne peut pas
faire une loi où il y a une réglementation disant de faire ou de
ne pas faire quelque chose sans l'associer à un système de
sanctions juridiques, telles des amendes, parce qu'autrement le projet de loi
serait vicieux au départ. C'est l'interprétation de nos juristes.
C'est cela qui se trouve dans tous ces projets de loi. Lorsque j'ai dit que
cela avait une valeur purement symbolique, ce que j'ai voulu dire, c'est que,
dans toutes les recherches qui ont été faites sur ces projets de
loi... Il y en a des quantités et des quantités. Si on ajoute
tous ceux qui en ont, il y en a peut-être une centaine, parce qu'en plus
des États des États-Unis il y a 81 comtés, des "counties",
des États-Unis qui en ont. Il y a des quantités de villes qui en
ont, en Californie et ailleurs. Il y a des quantités de villes
canadiennes. On a fait un relevé de tous ces endroits pour savoir ce qui
se passait de façon pratique.
Je vais donner un exemple tout à fait concret. Dans les
cinémas aujourd'hui, il y a un règlement municipal qui dit qu'on
n'a pas le droit de fumer. Si vous allez voir le règlement qui le met en
vigueur, vous allez voir qu'il y a une sanction, une amende. Vous allez voir
qu'un policier peut venir vous arrêter si vous fumez. Ce sera la
même chose au Colisée, ce sera la même chose au Forum de
Montréal. Je n'ai pas vu un seul incident.
Ce que nous avons décelé dans nos recherches, c'est que,
bien que ces sanctions doivent exister pour rendre la loi viable de
façon juridique, en pratique, elles ne s'appliquent pas, parce que le
fait même de l'existence de ces lois a un effet d'entraînement et
les gens les observent, et c'est ainsi que ces choses arrivent. C'est comme
cela que cela arrive, aujourd'hui, dans les faits. Dans les endroits où
il y a des règlements contre la cigarette comme les magasins, la
personne qui fume de temps en temps ne se fait arrêter par personne. Le
seul endroit où nous avons constaté que ces choses ont
été appliquées de façon coercitive, c'est dans la
ville de Chicago qui a un tribunal spécial pour les non-fumeurs. Mais,
dans tous les endroits où cette réglementation existe depuis des
années, par exemple, la ville d'Aylmer où cela existe depuis onze
ans, il n'y a eu aucun incident où une personne a été
traduite en cour ou a dû payer l'amende.
Il faut qu'il y ait des amendes qui existent, c'est la façon dont
les lois s'écrivent. C'est cela que le service juridique nous a dit.
C'est pourquoi, nous, dans notre loi, nous avons choisi de prendre le
côté où il n'y avait pas de récidive. On a
prévu une amende, sachant que, dans les faits, l'application de ces
choses ne se fait pas.
Si vous voulez m'excuser un instant, M. le Président. Dans tous
ces pays, c'est une question de mettre une sanction parce qu'il faut la mettre
dans la loi. Ces sanctions varient de pays en pays. L'Italie parle de 20 000
à 100 000 lires, mais, suivant le taux de change, l'amende pourrait
valoir 1,25 $. C'est purement une question d'établir qu'il y a une
amende quelconque dans la loi. Dans les faits, je pense que, d'ici cinq ans, on
verra qu'il y aura très peu de cas, s'il y en a même un, où
des gens auront été traduits en cour pour des choses pareilles.
Cela n'existe pas ailleurs, mais on ne peut faire une loi sans les mettre. Si
on ne mettait pas de sanctions dans ces lois, on n'aurait pas de lois de cette
façon. Cela n'existe pas. C'est cela que nos services juridiques nous
ont dit. On ne peut avoir une loi qui a des sanctions sans avoir de
pénalités possibles. Dans la pratique, ce sont des lois qui ont
un effet symbolique et qui ne s'appliquent pas de cette façon.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: M. le ministre, vous avez dit tout à l'heure
que vous vouliez donner un droit légal, parce qu'on parle de faire une
loi. Que je sache, il y a peut-être des municipalités qui
appliquent des règlements, mais est-ce que ces municipalités,
légalement, ont le pouvoir de le faire? Je comprends que, dans les
municipalités, toute loi qu'un conseil municipal adopte, tant qu'elle
n'est pas contestée en cour, est légale.
M. Lincoln: Oui.
M. Dufour: Je ne pense pas qu'au Québec, actuellement, il
y ait une loi qui permette aux municipalités de faire ces
règlements. Je pense qu'on veut aller corriger cette anomalie ou ce
point. Est-ce que, dans les autres provinces, la loi provinciale peut permettre
aux municipalités de légiférer? (16 h 15)
M. Lincoln: D'accord. C'est un très bon point que vous
appportez. Ce qui est arrivé
au Québec, c'est que la question est très très
floue. Il y a une ville, spécifiquement la ville de Pierrefonds, qui a
demandé au ministère de la Justice de statuer si, oui ou non,
elle avait le droit de le faire. Il y a certaines villes qui l'ont fait sans
demander si elles en avaient le droit. La ville de Côte-Saint-Luc se
retrouve en cour aujourd'hui à défendre le cas, parce qu'il y a
un citoyen qui a dit qu'elle n'avait pas le droit de le faire. Cela va
éclairer cette cause.
Quant aux autres villes, je pense que dans l'Ontario il y a les deux
grandes villes, Toronto et Ottawa, qui ont adopté des règlements.
La province a choisi de ne pas s'imposer, de laisser aller les choses. Je ne
pense pas qu'elles aient de lois habilitantes. Nous aussi, on avait
fermé les yeux quand il s'est agi du cas de Aylmer, de Westmount, mais
Côte-Saint-Luc malheureusement s'est fait assigner en cour. Il y a aussi
des requêtes de certaines municipalités qui nous demandent le
pouvoir habilitant, parce qu'elles ne veulent pas le faire. Elles ont des
opinions juridiques qui disent que les municipalités n'ont pas le
pouvoir, sans l'assentiment du gouvernement. Ce sont des cas
récents.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: M. le ministre, est-ce que, par rapport à
Côte-Saint-Luc, vous avez un article dans cette loi-là qui dit que
toutes les causes pendantes ou qui pourraient être pendantes au moment de
l'adoption de la loi sont éliminées automatiquement? On voit cela
régulièrement dans certaines lois, surtout dans les projets de
loi privés plutôt que dans les projets de loi publics. On dit que
s'il y a une cause pendante, elle est éliminée automatiquement.
Actuellement, je ne vois rien dans cette loi qui dit que la poursuite est
éliminée. Elle peut continuer et elle pourrait, en vertu des
anciennes dispositions, être déclarée illégale.
M. Lincoln: Selon les renseignements juridiques qui me sont
donnés, la poursuite qui a été faite à
Côte-Saint-Luc, d'après ce que nous savons, c'était en
vertu de la Charte canadienne des lois et libertés, alors qu'on ne peut
pas, nous, la changer par une loi. Il faudra attendre ce jugement-là.
Mais on m'informe aussi qu'en Ontario la loi qui se compare à notre Loi
sur les cités et villes est à peu près semblable, dans son
contexte, et qu'il y a plusieurs décisions des tribunaux, là-bas,
qui sont contradictoires. Toute l'affaire n'est pas claire du tout. Ici, au
Québec, certaines municipalités veulent qu'on leur donne ce
pouvoir habilitant.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: Avant d'entrer dans les détails, les
municipalités auront, selon l'esprit de la loi, juridiction sur la
réglementation à l'intérieur de leur territoire.
M. Lincoln: Sauf les lieux qui sont situés dans leur...
Oui.
M. Blais: Sauf les édifices situés... Oui,
d'accord. Chaque ville aura droit à son propre règlement. Est-ce
que le ministère va voir à ce que l'ensemble de la
réglementation soit au moins analogue, se ressemble d'une ville à
l'autre?
M. Lincoln: Non. En fait, vous pouvez comparer cela à
n'importe quel secteur aujourd'hui où les villes ont leurs propres
réglementations qui ne sont pas nécessairement uniformes. Ce qui
arrive, c'est qu'aujourd'hui, par exemple, dans les villes qui ont des
réglementations, dans les grands principes, elles se rejoignent, mais
certaines vont plus loin que d'autres. Aujourd'hui dans la ville de
Québec, il y en a quatre ou cinq et les réglementations ne sont
pas tout à fait similaires. Je pense que c'est important de garder cette
autonomie municipale. On nous a fait ressortir, par exemple, lorsqu'on a
discuté de cela avec les présidents des MRC... Le
président de l'Union des municipalités du Québec,
lorsqu'on a discuté de cela avec lui, nous a fait ressortir une des
raisons pour lesquelles il voulait garder l'autonomie municipale. Il nous
disait que dans une toute petite ville ou une toute petite municipalité
qui n'a pas les moyens, les circonstances sont tout à fait
différentes de celles d'une grande ville qui a les moyens d'aller plus
loin et qu'il faudrait garder, au contraire, cette différence,
l'autonomie, de façon que les municipalités s'ajustent selon leur
territoire, leurs besoins.
Par exemple, il y a la ville de Westmount qui réglemente le droit
de fumer ou de ne pas fumer dans les restaurants en mettant certains
barèmes de pourcentage, etc. La même chose serait peut-être
tout à fait inconcevable dans une toute petite ville où il n'y
aurait qu'un seul petit restaurant. C'est une des considérations qu'on
nous a fait valoir, que différentes municipalités ont
différents besoins. C'est la raison pour laquelle on va laisser les
municipalités décider. Aujourd'hui, ce qui arrive, c'est que dans
les villes qui ont émis des réglementations, si vous comparez
celle de Toronto à celle de Westmount, elles sont tout à fait
diférentes. Celle de Toronto et Ottawa sont tout à fait
différentes. Je pense que chaque ville a essayé d'agencer cela
selon ses besoins, les circonstances, sa population, etc.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Chapleau.
M. Kehoe: M. le ministre, est-ce la même chose dans le
reste du Canada ou les municipalités, toutes les municipalités ou
des États aux États-Unis, est-ce que les municipalités
aussi ont le droit de légiférer dans ce domaine? Le droit est-il
transféré aux municipalités aussi ou y aurait-il des
raisons spéciales... Est-ce parce que les municipalités ont
demandé ce pouvoir-là?
M. Lincoln: Oui. Vous voulez dire dans les autres provinces et
tout?
M. Kehoe: Oui. Pour commencer dans les autres provinces et ici au
Québec.
M. Lincoln: Je ne peux pas vous dire si les municipalités
ont demandé cela aux autres provinces. Je sais que, par exemple, en
Ontario, certaines villes - moi je connais deux cas typiques - je ne sais pas
combien d'autres villes ont cela en Ontario, mais les deux grandes villes ont
insisté pour avoir une réglementation, et je ne pense pas que la
province se soit opposée à la chose.
Ce qui arrive, c'est que, dans certaines villes, il y a des citoyens ou
des groupements qui s'opposent à cela juridiquement, et c'est cela qui
cause un espèce de flou dans l'affaire. Aux États-Unis, il
semblerait que les villes doivent avoir le droit parce qu'il y a des
quantités de villes qui ont ce genre de réglementation aux
États-Unis.
M. Kehoe: Ici, au Québec, cela n'aurait-il pas
été plus simple si la province avait
légiféré dans le domaine, seulement la province?
M. Lincoln: Écoutez...
M. Kehoe: Pour avoir une législation uniforme dans toute
la province, est-ce que cela aurait...
M. Lincoln: Vous voyez, au départ, c'était cela
l'intention que nous avions, de légiférer pour toute la province,
mais, lorsqu'on a fait les consultations, naturellement, le ministère
des Affaires municipales, le Secrétariat à l'aménagement
du territoire, tous les comités interministériels nous ont dit
que c'était essentiel de consulter les municipalités comme je
crois que c'est leur droit de le faire. Lorsque nous avons consulté le
monde municipal, ils étaient tout à fait convaincus qu'ils
préféraient avoir la responsabilité de te faire
eux-mêmes sur leur territoire. C'est pourquoi on a agencé la loi
de façon à habiliter les municipalités dans les domaines
qui sont autres que ceux qui sont cités ici. C'était cela le voeu
très clair des municipalités parce que je suis sûr que si,
par exemple, nous avions persisté à faire une loi provinciale, on
aurait eu une opposition presque totale des municipalités.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: Oui, M. le ministre, j'aimerais vous demander une
simple question. Avez-vous l'intention de faire venir des gens ici qui sont
intéressés, soit des représentants des
municipalités, ou des compagnies d'autobus, ou des commissions scolaires
ou des gens des hôpitaux ou des syndicats...
M. Lincoln: M. le Président, il n'y pas un groupement qui
s'est intéressé à cette loi parce que, à dessein,
j'ai dit très tôt dans mon mandat que j'allais introduire une loi
de ce genre. J'ai fait pas mal d'interviews avec les journalistes pour faire
savoir que cette loi allait se faire.
Le seul groupement qui... En fait, ils m'ont dit qu'ils regrettaient en
un sens de ne pas nous avoir contacté jusqu'à présent, de
tous ceux qui ont été impliqués. Cela a été
la fédération des autobus commerciaux et privés. C'est
pourquoi, après le discours en deuxième lecture, je pense que
c'était jeudi ou vendredi, je les ai rencontrés. On a
passé pas mal de temps ensemble, et ils nous ont fait certaines
remarques et propositions, et ils vont arriver avec des suggestions avant qu'on
ne finisse cette commission parlementaire.
Je peux vous dire que tout ce qu'il y a de monde municipal, de
l'industrie du tabac, de l'alimentation, on les a consultés. Il y a eu
de vastes consultations qui ont été faites par le Conseil
consultatif de l'environnement, par le ministère de la Santé et
des Services sociaux, par la Commission des droits de la personne. Il y a le
Conseil des affaires sociales et de la famille qui a fait une enquête sur
toute la question. Je pense qu'on est arrivé à un point où
maintenant on va aller de l'avant avec la loi. On a situé très
clairement cette perspective. Je ne compte pas à ce stade-ci avoir
d'autres consultations.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
Motion proposant d'entendre le SFPQ
M. Blais: M. le Président, en vertu de l'article 244,
paragraphe 2, j'aimerais faire une motion: Que le Syndicat des fonctionnaires
provinciaux du Québec soit entendu à cette commission.
Le Président (M. Saint-Roch): La commission va suspendre
ses travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 25)
(Reprise à 16 h 33)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission reprend ses travaux. En vertu de l'article 244 de nos
règles de procédure, la motion est recevable. En concordance
aussi avec l'article 209, ceci est une motion de forme. L'auteur de la motion
aura trente minutes et les autres membres de la commission auront dix minutes
de droit de parole. Et M. le ministre...
M. Kehoe: Trois minutes, trente-trois.
Le Président (M. Saint-Roch): La parole est au...
M. Dufour: Est-il obligé de parier durant trente
minutes?
Le Président (M. Saint-Roch): Non, c'est son temps maximum
de parole. M. le député de Terrebonne.
M. Blais: Est-ce que je peux vous demander si vous désirez
que je parle pendant trente minutes?
Une voix: Non.
M. Yves Blais
M. Blais: Écoutez, M. le ministre, c'est une chose d'une
extrême importance. Le président du Syndicat des fonctionnaires
provinciaux du Québec, le 3 juin dernier -c'est une lettre toute
récente - envoyait à M. Clifford Lincoln, le ministre de
l'Environnement, 3900, rue Marly, 6e étage, Sainte-Foy, G1X 4E4, une
lettre format 8-1/2" x 11", sur papier du syndicat, qui a été
rempli sur un seul côté de la page. Cette lettre a
été reçue à mon bureau le 6 juin 1986. Je peux vous
préciser l'adresse de mon bureau qui est situé au 265, à
l'Hôtel du Parlement du Québec. J'aurais pu répondre
à toutes vos questions si vous le désirez, il n'y a aucun
problème. Je l'ai reçue, quant à moi, le 6 juin à
10 h 13, à mes bureaux. C'est ma secrétaire qui l'a reçue.
Je n'étais pas à mon bureau lors de l'arrivée de cette
lettre, mais aussitôt elle m'a appelé. Une copie de cette lettre
avait été signée par M. Jean-Louis Harguindeguy
lui-même; cela montre l'intérêt que le syndicat des
fonctionnaires porte à ce projet de loi. Deux copies avaient
été envoyées: une à moi, une à M. Robert
Bourassa lui-même et à M. Pierre Marc Johnson.
M. Johnson et M. Bourassa étant les deux récipiendaires de
cette missive, cela me laisse croire qu'il est d'importance capitale que nous
parlions du contenu de cette lettre en cette commission parlementaire, parce
que, dans cette lettre, les fonctionnaires nous donnent leur opinion.
L'objet de la lettre, pour être un peu plus précis, se lit
comme suit. C'est très clair. La photocopie que j'ai reçue
était un peu plus conforme, un peu plus facile. C'est très
transparent comme texte: "Objet: Projet de loi 84. Loi sur la protection des
non-fumeurs dans certains lieux publics." Je vois ici, M. le ministre, que le
syndicat des fonctionnaires prend le titre de la loi que vous avez
vous-même donné à la loi que vous voulez que nous
adoptions. Cependant, ce titre-là, nous nous y opposons. Les
fonctionnaires ne pouvaient pas savoir, quand ils ont écrit cette
lettre, que nous, de notre côté, nous nous opposions à ce
titre. Nous le croyons mal choisi et d'ailleurs sur une feuille comme
celle-là, cela ne fait pas balancé, ce n'est pas
esthétique. Il est écrit: M. le ministre et on s'adresse à
M. Clifford Lincoln: "Après avoir pris connaissance de la teneur du
projet de loi précité"; c'est-à-dire ici que tout de suite
à l'approche de cette lettre c'est: après avoir pris
connaissance. C'est donc dire qu'on ne peut pas dès le début
douter que le président de ce syndicat ait pris connaissance de ce
projet de loi. Il parle en connaissance de cause. Dès les premiers mots
c'est: après avoir pris connaissance. On voit après quatre mots
que la personne qui nous écrit nous parle en connaissance de cause. Elle
connaît ce projet de loi. Sinon, ce serait de la prétention de
commencer par ces quatre simples mots: après avoir pris connaissance de.
Donc, on est ici en présence d'une personne qui sait de quoi elle parle
et elle parle en connaissance de cause. Voilà!
Donc: "Après avoir pris connaissance de la teneur du projet de
loi précité - Parce qu'en objet, on citait que c'était le
projet de loi 84, celui que nous étudions aujourd'hui -nous estimons que
celui-ci"; c'est-à-dire après avoir fait l'étude de ce
projet de loi et en avoir pris connaissance article par article, sans les
amendements que le ministre nous a apportés au tout début de
cette séance, ils estiment, eux... Pour estimer, ils ont donc
comparé leurs données propres et les articles qu'il y a dans le
projet de loi, après en avoir discuté certainement dans une
commission qu'eux-mêmes se sont fait de façon interne et avoir
discuté de ce projet de loi au bureau de direction du syndicat.
Donc, après avoir pris connaissance de la teneur du projet de loi
précité, nous estimons que celui-ci compte tenu des
conséquences... C'est donc dire qu'ils admettent dès le
début que ce projet de loi a des conséquences. Bon, vous allez me
dire qu'on légifère afin qu'il y ait des conséquences.
C'est bien sûr. Eux, ils nous mettent tout de suite en garde. Ils
disent
nous savons de quoi nous parlons. C'est qu'après avoir pris
connaissance du projet de loi des non-fumeurs, du projet de loi
précité, nous estimons que celui-ci, donc après
étude... Pour estimer, il faut avoir fait l'étude du projet de
loi. Compte tenu des conséquences, cela veut dire après avoir
étudié, article par article, ce projet de loi, ils ont vu qu'il y
avait des conséquences qui présupposent: puisqu'il va à
l'encontre des droits et libertés de la personne. Et voilà! Ce
n'est pas ce qu'il y a de plus important dans toute la lettre mais: puisqu'il
va a l'encontre des droits et libertés de la personne. Je ne sais pas si
les gens du gouvernement ont reçu cette lettre, je pourrais leur en
faire faire copie.
M. Middlemiss: Vous l'avez reçue. Nous, on est du
côté ministériel.
M. Blais: Je pourrais vous en faire copie. Je la lis
peut-être trop vite. Vous n'avez peut-être pas...
M. Middlemiss: On vous suit. On vous suit.
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Blais: Je ne voudrais pas que vous manquiez un mot de cette
missive du syndicat, parce qu'elle est d'une importance capitale dans le
contexte du projet de loi que nous étudions actuellement.
M. Middlemiss: Est-ce que vous cherchez du temps? C'est pour cela
que vous voulez nous faire faire des photocopies?
M. Blais: M. le Président, M. le député
de...
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Blais: Non, s'il a une question, qu'il la pose.
M. Middlemiss: M. le Président, j'ai posé la
question à savoir si le député avait des problèmes
pour remplir ses trente minutes et s'il voulait retarder encore en nous faisant
faire une photocopie.
M. Blais: M. le Président, je suis content de la question.
Ce n'est pas moi qui suis allé faire la photocopie. Nous avons un
service extraordinaire ici. Le ministre lui-même en a déjà
une copie. Il aurait pu le faire faire. Il n'y a pas de problème. Non,
c'est pour que vous preniez connaissance du sérieux de cette lettre,
simplement, que je vous offrais une photocopie.
On voit: "puisqu'il va à l'encontre des droits et libertés
de la personne." Et c'est là que, dans le titre de la loi, j'interviens
et que je suis d'accord avec le syndicat des fonctionnaires. Le projet de loi,
dans son titre même, est discriminatoire. Dans son titre même, il
est discriminatoire. Quand on a à coeur les droits et libertés
autant individuels que collectifs, on se doit de regarder même le titre
d'un projet de loi que nous apportons. Ce titre-là est discriminatoire
parce qu'il s'adresse à une seule catégorie
intéressée par le tabac, de façon positive ou de
façon négative, il s'intéresse tout simplement à
ceux qui subissent des effets négatifs du tabac. En ce sens-là,
les droits et libertés de la personne, dans le titre de la loi... Vu
qu'il est discriminatoire, ce titre, je demanderai à la fin de le
changer. La liberté de la personne... Regardez comme ici, au parlement,
par exemple. Ici, au parlement, en commission parlementaire, je suis
persuadé que si l'Opposition vote cotte loi-là sans aucun
amendement, en commission parlementaire, si nous acceptons ce projet de
loi-là, on n'aura plus le droit de fumer. On peut dire qu'on est
d'accord avec cela ou pas, mais quand on sait que la cigarette et l'alcool -
pas "l'alco-ol", comme je l'entendais aujourd'hui en Chambre - l'alcool et le
tabac, ce sont des drogues tolérées et non
légalisées, mais tolérées... Ce sont des drogues
tolérées. Ces drogues tolérées, on a le droit de
les utiliser en tant qu'individu, autant l'alcool que le tabac. Les deux. Si le
gouvernement nous laisse le droit d'utiliser ces drogues
tolérées, comment peut-il, après coup, ne s'attaquant pas
à la racine du mal mais à certaines de ses conséquences,
venir en légaliser l'usage dans certains endroits, sans être
discriminatoire? Parce que je suis d'accord sur le principe, mais en
légalisant dans certains endroits une drogue de tolérance et non
une drogue légale, automatiquement, on est discriminatoire envers
certaines personnes. D'autant plus que les fonctionnaires se sont rendu compte
de cela. Où, dans le parlement, aurons-nous le droit de fumer ou pas?
Dans le parlement?
Une voix: Dehors.
M. Blais: Et juste le fait d'être fonctionnaire et
d'être dans ce parlement à longueur d'année, c'est
très difficile de voir venir où le responsable du parlement dira
que les fonctionnaires qui devront subir cette loi eux aussi pourront fumer.
Personnellement, j'aimerais beaucoup, à cause de l'atteinte que l'on
fait aux droits et libertés de la personne... Et on dit: puisqu'il va
à l'encontre des droits et libertés de la personne; cela devrait
être reporté pour étude lors de la prochaine session.
J'admets personnellement que nous avons fait faire, et le ministre a à
sa disposition une kyrielle
d'études, une brochette de documents, avec une litanie de preuves
qui lui aident à étoffer ce projet de loi, j'en suis
persuadé. Même là, malgré cette litanie, cette
kyrielle de documents, les fonctionnaires veulent qu'on fasse un requiem sur ce
projet de loi jusqu'à la prochaine session. Dans l'intersession, ils
voudraient avoir le temps d'être consultés d'une façon un
peu plus précise. (16 h 45)
Il ne faut pas leur en vouloir. Je fus fonctionnaire de 1951 à
1966, donc je l'ai été près de seize ans. Lorsque le
gouvernement faisait des lois, bien entendu pour brimer la liberté,
surtout à l'époque, de 1951 à 1966, nous n'étions
pas aussi libres au Québec que nous le sommes aujourd'hui; je tiens
à vous dire qu'on ne l'est pas aujourd'hui comme on le sera dans quinze
ans, cela est sûr. À toute décennie suffit sa peine et
viennent des droits nouveaux, de la compréhension, de la
tolérance devant la parole, car on doit être tolérant
devant ceux qui ont le droit de s'exprimer dans cette société.
C'est tellement vrai que même dans une commission comme celle-ci, nous
régissons le droit de parole de chacun des individus autour de cette
table. Certains prennent leur droit de parole; ils ne l'utilisent pas toujours
de façon entière, mais ils l'utilisent. Parfois, on voit des gens
qui ont des droits de parole et qui restent cois. On se demande pourquoi,
surtout quand c'est une loi qui concerne les Québécois. Il me
semble que les gens devraient prendre un peu de leur temps pour placer un mot
ici et là afin de nous montrer s'ils connaissent le tabac.
Il est d'une importance capitale que, lors de notre discussion, d'un
côté comme de l'autre de la table, nous nous disions que les
droits et les libertés des individus doivent être
respectés. Je sais que vous - je vous regarde tous - êtes tous des
gens voués à la défense de la liberté, autant celle
des individus que celle des collectivités, même si vous avez dit
non au référendum. Vous avez à coeur les droits et
libertés des gens, je suis persuadé de cela. Cela se lit sur vos
fronts. Vous avez un front parleur et, moi, j'ai un franc-parler! Alors, mon
franc-parler et votre front parleur me prouvent que vous êtes
certainement en accord avec la troisième ligne de cette lettre, je suis
rendu à la troisième ligne de ladite lettre: "puisqu'il va
à l'encontre...
Une voix: Combien de minutes?
M. Blais: ...des droits et libertés de la personne." C'est
cela et c'est là que j'ai fait un acrostiche pour mettre à
côté "individuels", dans "droits de la personne", "individuels et
droits collectifs". Beaucoup de ces expressions syndicales doivent être
étudiées. Il n'y a pas juste la lettre de la missive qu'il faut
entendre, il faut aussi que nous en comprenions l'esprit. L'esprit de cette
missive qui nous a été envoyée par le président du
syndicat, M. Jean-Louis Harguindeguy, ce n'est pas qu'il s'oppose au projet de
loi dans son principe. Loin de là. C'est qu'il ne voudrait pas que le
législateur, par inadvertance ou par distraction, ou fût-ce encore
par méconnaissance, oubliât dans ses interventions ces droits et
libertés que chacun de nous défendons avec acharnement, avec
coeur, avec dynamisme, avec esprit combatif. D'ailleurs, c'est un esprit qui,
j'en suis persuadé, habite autant le ministre que moi; surtout
actuellement, je suis persuadé que vous voyez venir un esprit combatif
pour défendre les lois sur les libertés des individus. Je sens
monter cette fièvre.
M. le président nous dit que les droits et libertés de la
personne devraient être reportés à la prochaine session
pour étude, même si vous me dites, M. le ministre, que vous avez
cet amoncellement d'études devant vous. Il veut absolument. C'est une
personne qui - ne peut-on dire - connaît le fonctionnement de ce
Parlement. Il connaît certainement le tabac. Quelqu'un qui connaît
le tabac, de toute façon ne fume pas. Il connaît certainement le
tabac parce que, toujours, il a été ici, dans ce Parlement,
l'oeil ouvert pour en observer le fonctionnement. À bientôt M. le
ministre. Quelqu'un qui connaît le fonctionnement de ce système,
automatiquement, on doit l'écouter. Il demande que le tout soit
reporté à la prochaine session. Est-ce que pour un seul instant,
vous, qui êtes arrivés depuis le 2 décembre, vous vous
êtes demandé... D'abord, avez-vous lu ce projet de loi? Je demande
cela à mes confrères et à mes consoeurs qui sont mes
vis-à-vis, non pas mes émules, mais mes vis-à-vis. Est-ce
que vous l'avez vraiment lu?
Mme Bélanger: C'est ma lecture de chevet.
M. Blais: Vous l'avez lu.
M. Kehoe: Voyons, c'est tout souligné!
M. Blais: Vous l'avez lu? M. le député de Pontiac
aussi l'a lu? Mme la députée de Dorion, je suis persuadé
que vous l'avez lu.
Mme Trépanier: Oui, monsieur.
M. Blais: M. le député de Nicolet, vous l'avez
lu?
M. Richard: Oui.
M. Blais: Bon. On ne le demande pas aux fonctionnaires, ce sont
eux qui le fabriquent. Ils l'ont certainement lu. À sa
lecture et à sa face même, "prima facie", est-ce que vous
vous êtes rendu compte que ce projet de loi était coercitif, comme
nous le dit le président Jean-Louis Harguindeguy, qui dit que cela brime
les droits et les libertés de la personne? Cela brime les droits et les
libertés de la personne.
M. Kehoe: II n'a pas autre chose à dire.
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre!
M. Blais: M. le président, j'aimerais que vous demandiez
à mon confrère de Montebello de me laisser une chance de dire ce
que j'ai à dire. C'est d'une importance capitale. Je suis
persuadé que les législations de l'avenir prendront cette
commission comme base d'appui pour la défense des droits et
libertés de la personne. Je ne voudrais pas voir Montebello, mais je ne
voudrais pas voir monter le sang de personne non plus. Il ne faudrait pas que
nous nous fâchions, parce que je ne crois pas que...
Une voix: Oh non!
M. Blais: J'entends ce ronronnement; je suis persuadé que
ce n'est pas contre les droits et libertés de la personne.
M. Kehoe: Jamais!
M. Blais: Je ne voudrais pas. Si c'était cela, Dieu nous
garderait qu'une personne qui pense ainsi ait été élue par
des Québécois. Je suis persuadé que vous êtes en
faveur des droits et des libertés de la personne. Alors, je me fais
votre porte-parole en disant que le député de Montebello est en
faveur des droits et libertés et cela me fait plaisir qu'il en soit
ainsi. "Devraient être reportés à la prochaine session." Si
je me fie à la tradition de ce Parlement, la prochaine session devrait
normalement être à l'automne à moins qu'il y ait
élection. Je pense que cela va de soi. J'imagine que, terminant pour la
Saint-Jean-Baptiste...
Une voix: Il n'a rien à dire.
M. Blais: ...nous aurons, disons, une dizaine de jours en juin,
nous aurons 31 jours en juillet, 31 jours en août, 30 jours en septembre
et quatorze à quinze jours en octobre. Si vous additionnez cela, on a
à peu près deux jours par article. Cela voudrait donc dire que ce
projet de loi, pendant que nous serions à l'extérieur du
parlement, nous pourrions l'étudier et consulter des gens qui nous
aideraient à en prendre connaissance et à approfondir chacun des
arguments que ces associations pourraient nous donner durant ce temps. Il dit
bien dans sa lettre - je suis à la quatrième ligne actuellement -
qui permettrait de procéder à une consultation de nos membres. Il
y a 325 000 fonctionnaires, c'est tout de même important. Vox populi, vox
Dei! Ce sont 325 000 personnes qui ont leur mot à dire dans
l'administration gouvernementale. Je suis persuadé que - M. le ministre
en est persuadé aussi - ces 325 000 fonctionnaires sont des gens qui ont
des choses d'une grande importance à dire au législateur,
particulièrement par l'entremise d'une commission parlementaire.
Voilà le hic. Voilà le pourquoi, M. le Président,
voilà le bien-fondé de ma demande.
J'aimerais, entre-temps, relire ma motion. Je suis à peu
près à... Combien me reste-t-il de temps, M. le
Président?
Le Président (M. Saint-Roch): Neuf minutes.
M. Blais: Neuf minutes. Bon. Écoutez, je ne sais pas si je
vais avoir le temps de vous donner toute mon argumentation mais ici on dit: On
devrait peut-être le reporter lors de la prochaine session, ce qui nous
permettrait de procéder à la consultation de nos membres et de
vous soumettre nos commentaires, particulièrement par l'entremise d'une
commission parlementaire.
Cette demande d'un président de syndicat qui représente le
syndicat de la fonction publique, un groupe de 325 000 personnes, je pense
qu'elle doit être entendue avec tout le sérieux que le
sérieux de la personne commande. C'est pourquoi j'ai dit dans ma motion
selon l'article 244 du paragraphe 2: pour que le Syndicat des fonctionnaires
provinciaux du Québec inc. soit entendu à cette commission. Mais
à celle-ci.
M. le ministre nous disait tantôt que personne n'a
manifesté d'arguments pour ou contre. Il y a au moins cette lettre qui
lui est adressée qui plaide non pas pour être entendus à
cette commission-ci, parce que eux trouvent que ce serait
prématuré de paraître à cette commission-ci... Il
faudrait laisser du temps aux gens pour mieux connaître le dossier
à fond, pour que le président, après consultation des
membres de son propre syndicat et après avoir fait des recommandations
particulières, vienne déposer, mais à une commission
à l'automne et non pas ce printemps, à la commission que nous
faisons... Personnellement, afin que ces gens ne soient pas brimés dans
leurs droits, je demande tout simplement qu'ils soient entendus
immédiatement pour essayer de comprendre les raisons qui les poussent
à nous demander de repousser ce projet à l'automne.
Personnellement, je ne crois pas qu'on doive le repousser à
l'automne. J'ai l'impression qu'on devrait demander à ces
gens de venir nous éclairer et nous dire aujourd'hui ce qu'ils
ont. Ils ont certainement des études préliminaires et on
pourrait, d'ici à quelques jours, leur donner les études que nous
avons, que le ministre a. Il nous a dit tantôt qu'il en avait toute une
série. Cette série d'études pourrait éclairer de
façon plus particulière cette association syndicale qui, de bon
aloi, nous demande un laps de temps afin de connaître plus les
conséquences à l'encontre des droits et libertés de la
personne.
S'il y a dans cette société des grands défenseurs
des droits et libertés de la personne c'est, premièrement, le
parti politique dans lequel je suis et aussi l'autre force que nous avons sur
notre territoire, qui est la force syndicale; d'ailleurs, force syndicale qui
est née des droits et libertés de la personne.
M. le Président, j'accélère pour aller le plus vite
possible pour mon argumentation. Je ne voudrais pas cependant passer sous
silence quelques-unes des grandes idées qui militent pour que nous
entendions cette association.
Alors, je viens donc de terminer le premier paragraphe et j'ai
insisté un peu plus sur ce paragraphe, M. le Président. Je pense
que j'ai été à peu près 25 minutes, cela veut dire
à peu près cinq ou six minutes par ligne, mais si vous le
regardez de façon intrinsèque, en soi, il contient vraiment tout:
La défense qu'un peuple doit mettre devant lui pour défendre ses
principes de base comme existence.
Alors, les principes connexes à cette existence, qui sont des
droits secondaires comme le droit de fumer dans certains endroits, eux aussi
dépendent de cette base primaire qu'est l'existence même des
êtres que nous sommes et nous faisons partie d'une nation qui a besoin de
droits et de libertés. C'est avec acharnement que je les défends.
(17 heures)
Comme le dit M. Harguindeguy qui est le président-directeur
général du syndicat, nous estimons donc que l'étude de ce
projet de loi est quelque peu prématurée. Voilà le mot
lâché, M. le Président. M. le ministre, au tout
début, nous disait que cela fait des décennies que nous avons des
études, que nous avons des rapports. Le syndicat qui est ici, lui,
à l'intérieur de ce parlement, qui voit depuis des années
et des années évoluer les choses, dit: "Nous estimons donc que
l'étude de ce projet de loi est quelque peu prématurée."
Prématurée, cela veut dire avant terme. Quel que soit le nombre
d'années où ce projet de loi a été latent, le
président du syndicat, à cause de la non-consultation qui est un
défaut, M. le ministre... Je m'excuse, je suis obligé de dire que
c'est un défaut de votre gouvernement. Vous n'avez pas tellement
tendance à consulter. Vous avez droit à cela. Moi, je ne suis pas
d'accord, mais vous avez le droit de vouloir ou de ne pas vouloir consulter.
C'est entendu, cela vous regarde.
Lorsqu'on ne consulte pas, eh bien, on se rend compte que des agents au
service de la liberté, qui défendent les droits et
libertés de la personne, viennent de temps à autre, comme cela,
nous rappeler que nous n'avons pas fait notre devoir en tant que gouvernement;
c'est ce que le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec vous
rappelle ici de façon non plaisante pour le gouvernement. Mais
l'attitude que vous adoptez de ne recevoir personne aux commissions
parlementaires est une attitude négative et, tranquillement, à
mesure que les mois vont passer sur la tête de votre gouverne, vous allez
vous rendre compte que la couche - on dit une couche de goudron qu'un
gouvernement a sur sa couverture -cette couche de goudron, pour ne pas qu'il
mouille dans la maison, c'est la consultation. Vous ne consultez pas. Vous avez
donc une couverture sans goudron et dans votre maison, bientôt, il
pleuvra et vous allez vous y sentir très mal à l'aise.
Je tiens à vous le dire. Ce n'est pas long, lorsqu'arrive
l'automne et qu'il pleut beaucoup, que l'odeur de moisissure entre dans les
meubles et dans nos textes gouvernementaux. La protection contre les averses de
protestations, ce sont les consultations. Ce gouvernement n'est pas limpide. Ce
gouvernement veut être opaque. Ce gouvernement veut être
rébarbatif à la consultation. Vous allez me dire que cela fait
des projets pauvres, pleutres, très pleutres. C'est un projet pleutre,
en fait. Pourquoi est-il pleutre? Il est pleutre parce qu'il n'y a aucune
consultation qui a été faite. Je n'aurai même pas le temps,
en 30 minutes, de finir de lire toute cette lettre, mais je tiens à vous
dire que si vous donnez du temps à mon confrère, il va
certainement essayer de la terminer. J'en ai à peu près la
moitié de lue, mais en conclusion... J'aimerais donc que les
députés de l'autre côté de la salle me regardent en
cette conclusion!
C'est dans la consultation que nous faisons l'édification des
lois qui gouvernent une nation. Si nous nous refusons à la consultation,
nous nous retrouvons Gros-Jean comme devant, dans une bâtisse où
le toit fuit, où nous avons des fuites partout à
l'intérieur, où cela ne sent pas bon, cela sent le moisi et nous
sommes très mal à l'aise à l'intérieur d'un tel
gouvernement. Je vous souhaite et je vous demande, à vous, de dire
à vos ministres et à votre premier ministre: Consultation,
consultation, quand tu nous tiens, tu es pour la population le meilleur
soutien. Merci beaucoup.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Terrebonne. M. le député de
Jonquière.
M. Francis Dufour M. Dufour: M. le Président...
Le Président (M. Saint-Roch): J'aimerais vous rappeler, M.
le député de Jonquière que vous avez dix minutes, oui.
M. Dufour: Oui, j'ai compris. Je ne sais pas si je parlerai
pendant dix minutes sur votre projet.
Le Président (M. Saint-Roch): À votre
discrétion, M. le député.
M. Dufour: Je vais essayer d'y aller selon mon entendement, parce
que si je rappelle la conclusion de l'intervention que j'ai faite à
l'Assemblée nationale, je disais: Je dis oui au principe de la loi, mais
si on veut que cette loi soit acceptée et qu'elle atteigne les buts
visés, il faudra absolument qu'elle soit repensée et qu'on aille
sûrement en consultation. C'est fini le temps où on va adopter des
projets de loi sans qu'on consulte ou en faisant des consultations bidons. On a
accepté de faire des consultations publiques pour une loi touchant le
bien-être des animaux ou les aliments des animaux. À mon sens,
lorsqu'on touche les personnes ou les individus, c'est d'autant plus important.
J'ai l'impression que pour bonifier cette loi, il faudrait peut-être y
aller lentement.
Je ne crois pas qu'il y ait urgence pour l'adopter immédiatement.
Il faudrait, en plus d'une commission parlementaire parmi les parlementaires,
que le public aussi soit consulté. Lorsque je regarde le contenu de la
lettre qui a été déposée ou que mon
collègue, le député de Terrebonne, a lue à cette
commission, on aurait sans doute pu penser que j'avais pris connaissance de
cette loi. Elle ne m'est pas adressée. Donc, je n'étais pas au
courant qu'il y avait une loi.
Il y a une chose fondamentale que j'examine et que je regarde depuis le
début des travaux parlementaires. À plusieurs reprises, on a
demandé des consultations pour des lois excessivement importantes. Mais
on n'a pas trouvé nécessairement d'échos dans la position
gouvernementale en ce qu'on aurait des consultations ou des commissions
où les gens auraient leur mot à dire concernant leur
bien-être ou sur les lois qui les toucheront autant dans le
présent que dans le futur. À mon sens, cela me semble un peu
dangereux, puisqu'on légifère et, même si on a
déjà consulté, je crois qu'on a tous intérêt
à ce que les individus puissent parler et puissent écouter ce que
les autres ont à dire pour effectivement savoir si les lois les touchent
et de quelle façon elles les touchent.
En partant d'une loi qui, dans son principe ou son essence même
est excellente, on pourrait bien dire oui à la loi. Je pourrais
peut-être vous dire aussi d'un autre côté que je suis pour
que tout le monde aille au ciel un jour, mais je ne suis pas prêt
à tous les tuer demain matin pour les envoyer au ciel. Il y a une
question de modération, il y a une question d'entente et il y a une
question aussi d'examiner dans cette démarche jusqu'à quel
point... Quand on fait des règlements nouveaux, ce n'est pas comme une
loi à laquelle un amendement est apporté. Quand il y a un
amendement apporté qui n'a pas de pesanteur ou de vue, comme on le voit
dans certaines lois qui sont déposées à cette session, je
ne crois pas qu'il y ait des lois qui demandent définitivement une
consultation très large. Quand il a fallu changer le mot "ville" par
"municipalité" ou le contraire, il me semble que cela est
élémentaire et on ne devrait pas s'en offusquer. D'ailleurs,
l'Opposition n'a pas demandé de commission parlementaire à venir
jusqu'à maintenant.
Examinons froidement ce que cela touche? Cela touche des individus: des
individus fumeurs et des individus non-fumeurs. Donc, des gens qui depuis
qu'ils sont au monde ont vécu dans un environnement qui a fait quand
même que fumer, c'était un signe de virilité jusqu'à
un certain point. Il s'agit simplement de reculer jusqu'à 40 ans ou 45
ans. Quand quelqu'un avait son premier paquet de tabac, son père lui
disait: Tu es un homme! Tu es un homme quand je te donne ton premier paquet de
tabac. Tout le monde se dépêchait d'allumer sa cigarette et de
fumer. Même si on avait un peu mal au coeur, cela ne prenait pas de temps
pour devenir un homme. Au bout d'une semaine ou de quinze jours, il
était devenu un homme, cet individu. Donc, il y a une
génération arrivée à un certain âge qui,
elle, est prise avec cette habitude depuis excessivement longtemps. Et on
demande actuellement de la réglementer avec des pouvoirs accordés
à des individus qui pourraient par caprice - Espérons que non!
mais qui pourraient volontairement poser des balises ou créer des
embêtements.
Cela touche non seulement des individus mais cela touche aussi des lieux
physiques. Des lieux qui appartiennent à l'ensemble du public. Pourquoi
quelqu'un qui a payé aussi pour la bâtisse publique, parce que
tout ce qui est publis - dans cette loi, on s'en rend compte - appartient au
public de fait, aux fumeurs et aux non-fumeurs et peut-être plus aux
fumeurs parce que, eux, ils ont été tellement frappés par
des taxes excessives un peu partout, que ces gens ont payé
sûrement les équipements et les lieux publics plus fortement que
tous les autres. On vient de décider que dans ces lieux on pourrait leur
enlever le droit de fumer. Je pense que oui, il y a des mesures qu'on doit
prendre pour
enlever certains droits à des individus. Par contre, je ne pense
pas que cela doive couvrir un champ aussi large et aussi vaste, mais, en
même temps, pas juste couvrir des lieux et des individus mais aussi des
événements. C'est pourquoi je pense qu'il y a une certaine
intransigeance dans cette loi, qui se veut une bonne loi en soi, mais qui
pourrait amener de l'extravagance jusqu'à un certain point. En partant
du principe que la fumée dérange, on pourrait l'élargir en
disant qu'il y a d'autres choses qui dérangent d'autres individus.
Donc, cela pourrait par coups d'accumulation amener à
légiférer cela par d'autres lois. Dieu sait si ce même
gouvernement nous a dit qu'il adopterait moins de lois et qu'il y aurait moins
de règlements. On est en train d'établir un record de
réglementations. Ce n'est pas nouveau; bien sûr, l'exemple a
été donné par l'ancien gouvernement. Mais l'ancien
gouvernement a été battu. Je pense qu'il a été puni
ou qu'il a eu sa leçon ou qu'il est dans une période de
réflexion qui l'amènera à changer son orientation et
à écouter un peu plus la population, s'il y a lieu, parce que je
pense que c'est important que cette écoute se fasse. Le gouvernement
qu'on a devant nous avait dit, et c'était un engagement public, qu'il y
aurait moins de réglementations, oui, qu'il y aurait moins de lois.
À ce moment-ci, non seulement le gouvernement légifère,
mais transfère une responsabilité aux gouvernements municipaux,
aux commissions scolaires qui, elles aussi, auront à se conformer
à des directives; non seulement des lois pour se conformer à des
directives, mais aussi pour fournir des rapports à ce même
gouvernement. Ces rapports pourraient être anodins au départ, mais
on sait que, d'habitude, quand on demande des rapports, c'est pour qu'il y ait
des accumulations de données et cela pourrait amener d'autres lignes,
d'autres places ou d'autres amendements à cette loi.
Donc, en gros, une loi qui touche beaucoup de monde, qui touche beaucoup
de lieux, qui touche aussi, en même temps, l'ensemble de la population,
pourrait-on dire; les transporteurs aussi. Est-ce que ces gens devraient venir
donner leur point de vue? Je réponds carrément: Oui, ces
gens-là devraient avoir le droit de le faire. Retarder l'adoption d'une
loi semblable, qui est une première loi dans les annales du gouvernement
provincial, pourrait amener une réflexion un peu plus grande, une
meilleure acceptation, parce qu'il ne faut pas avoir peur que les gens soient
de plus en plus sensibilisés. On aura beau faire les lois qu'on voudra,
amener les amendes qu'on voudra, si la population n'accepte pas... Elle
pourrait l'accepter, mais, quand elle va voir les événements, ce
qui se passe un peu partout, elle pourra rejeter la loi et, à ce
moment-là, cela veut dire un recommence- ment. Cela veut aussi dire
qu'on amène lés gens à transgresser les lois, et ce n'est
pas ce qu'on cherche normalement.
Vous savez, quand on fait des feux de circulation dans une
municipalité, on fait des études préliminaires, on regarde
ce que cela donne, pourquoi on veut mettre des feux à tel endroit, on
fait des analyses, on examine profondément ce qui se fait et, à
partir de cela, on installe les feux de circulation. S'ils sont mal
placés, ne vous en faites pas, les gens se chargent... Ce n'est pas
parce qu'ils sont contre les feux de circulation, ils sont contre le fait que
les feux de circulation ne servent pas le but pour lequel ils sont
installés, le but pour lequel ils doivent fonctionner, pour
protéger la vie des individus.
Donc, cette loi, qui, à mon sens, a un principe excellent, comme
elle touche beaucoup d'individus, qu'elle touche aussi beaucoup d'endroits, il
me semble qu'on aurait tout intérêt à ce qu'elle soit
amenée en commission parlementaire, qu'on lui fasse de la
publicité. À ce moment-là, on pourra se dire qu'au moins
on a essayé, qu'on l'a regardée pour la bonifier, pour que les
gens en tirent le plus grand bénéfice. Il n'y a rien qui me
désole plus, M. le Président, que des lois qui sont
transgressées couramment. Je dis et j'affirme par mon expérience
que des lois qui ne sont pas acceptées par 90 % ou 95 % du monde, ce
sont de mauvaises lois au départ, parce qu'elles ne sont pas
applicables. Cela prendrait autant de policiers qu'il y a d'individus. Je ne
pense pas qu'on veuille avoir des policiers à tous les coins de rue pour
surveiller parce que cela serait malheureux.
En conclusion, je pense que le ministre ferait preuve d'une grande
ouverture d'esprit, surtout d'une grande sagesse, et c'est important dans ce
monde dans lequel on vit, si on pouvait voir avec les gens ce qu'ils pensent de
cette loi, où on va avec cette loi, comment on va pouvoir l'appliquer et
comment on va en tirer les meilleurs bénéfices pour l'ensemble de
la société. C'est, en fait, un appui à mon collègue
que je donne sans restriction.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
intervenants? M. le ministre.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: Je ne vais pas me lancer dans une longue
argumentation. Je pense qu'on est ici pour étudier un projet de loi qui
a été déposé en bonne et due forme, mais je n'ai
pas pu m'empêcher de sourire quand le député et critique de
l'Opposition a fait tout un plat sur le manque de consultation, surtout du
monde syndical, ce même gouvernement qui a apporté la loi 70,
la lot 105 et la loi 111 qui ont imposé des conditions aux
travailleurs par décret. C'est eux qui disent qu'ils étaient les
rois de la consultation.
Je voudrais dire, très brièvement, que ce projet de loi
n'est pas un secret. Cela demeure sur les tablettes du gouvernement depuis dix
ans déjà. Je répète qu'il y a une consultation qui
a été faite par le Conseil consultatif de l'environnement qui a
inclus le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec auquel on
fait référence aujourd'hui, le Syndicat canadien de la fonction
publique, le Syndicat international des travailleurs de la boulangerie, de la
confiserie et du tabac. Je dis aussi qu'il y a eu un rapport de la Commission
des droits de la personne qui s'est situé très clairement sur la
question du droit des fumeurs et des non-fumeurs par rapport à la Charte
des droits et libertés de la personne du Québec. Il y a eu aussi
une politique très claire en ce sens du ministère des Affaires
sociales depuis 1978. Il y a eu récemment le Conseil des affaires
sociales et de la famille qui a déposé un document
là-dessus. Nous-mêmes, nous avons obtenu une étude
exhaustive de la Direction du droit constitutionnel du ministère de la
Justice, de la direction générale du contentieux qui dit
définitivement que notre loi cadre très bien au sein de la
chère Charte des droits et libertés de la personne, après
l'avoir étudiée.
Je pense que nous avons conclu, après tout ce temps que cette loi
est restée en suspens, qu'elle était en discussion en commission
parlementaire à l'époque où j'étais
député de l'Opposition en 1981, qu'il y ait des projets, d'autres
projets et que c'est tout à fait clair que cette chose-là devait
être apportée sur le tapis, que nous allons la mettre sur le
tapis, nous allons en décider. Je veux vous dire aussi que du point de
vue du consensus social, pour répondre au député de
Jonquière, toutes les prévisions démontrent qu'au moins 75
% des citoyens du Québec désirent ce projet de loi. L'Association
des propriétaires d'autobus du Québec nous a dit: Le sondage
démontre 60 % à 70 %. Air Canada, quand ils font des sondages,
c'est la même chose. Le ministère de l'Environnement du
Québec a fait un sondage parmi les fonctionnaires et c'était des
fonctionnaires qui appartiennent au même syndicat dont parlait le
député et c'est 75 %, encore une fois. Le ministère de la
Santé et des Services sociaux a fait une consultation individuelle, et
c'est 75 % des gens. Le sondage du ministère de l'Environnement parmi le
public du Québec démontre 69 % qui parle de la question en ce
sens. Les gens désirent cette loi. Nous avons apporté cette loi
qui est en discussion depuis des années déjà. J'ai
expliqué les raisons pour lesquelles nous n'allons pas accéder
à la requête du député. Donc, je suggère
qu'on fasse un vote en ce sens.
Excusez, le député a terminé son temps de parole,
de toute façon. Je demande qu'on appelle le vote.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que la motion du
député de Terrebonne qui se lit comme suit, selon l'article 244,
paragraphe 2: "Pour que le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du
Québec inc. soit entendu à cette commission"?
La motion est...
Une voix: Rejetée.
Le Président (M. Saint-Roch): ...rejetée?
Une voix: Sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): La motion est rejetée.
M. Blais: Une question de règlement, s'il vous
plaît, M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: Je savais que dans mes remarques préliminaires -
on est encore aux remarques préliminaires même s'il y a des
motions - il me restait six minutes. Alors, à propos de ces six minutes,
puis-je demander une question ou deux de temps à autre au ministre ou si
je n'ai pas le droit de le faire? Je demande au président de
m'éclairer à ce sujet.
Le Président (M. Saint-Roch): La commission va suspendre pour
quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 20)
(Reprise à 17 h 21)
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de
Terrebonne, à la suite de votre question de règlement, nous avons
permis au début, tel que la tradition de nos commissions le veut, des
remarques préliminaires. À un moment donné, j'ai
appelé l'article 1...
M. Blais: Non, non, non.
Le Président (M. Saint-Roch): J'avais appelé
l'article 1 et vous avez, M. le député de Terrebonne, comme le
règlement, d'ailleurs, l'autorise et le permet à l'article 244,
soulevé une question pour déposer une motion. Nous étions
arrivés avec un autre bloc d'information. Nous avions
débuté. Je pense que le député de Terrebonne,
à l'intérieur de l'étude article par article du projet de
loi, aura la possibilité de
s'exprimer et de poser toutes les questions pertinentes voulues.
M. Blais: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: Nous avons droit - et c'est mon droit le plus strict
à cette commission parlementaire - d'avoir 20 minutes de remarques
préliminaires. Après ces 20 minutes, c'est votre devoir,
après que chacun des députés a épuisé ses 20
minutes ou manifeste qu'il n'a pas le désir d'utiliser ses 20 minutes,
d'appeler l'article 1 ou d'appeler d'autres procédures. Je ne me
souviens pas et je suis persuadé que vous n'avez pas demandé au
député de Terrebonne ou aux autres, s'il y en avait qui avaient
encore des remarques préliminaires à faire... Lorsque je suis
arrivé avec ma motion - je m'en souviens, parce qu'en catimini on
demande certains renseignements - j'ai demandé à ceux qui voient
à cette commission combien il me restait de temps; on m'a dit sept
minutes. J'ai posé une question et je suis revenu avec une motion
immédiatement sans que personne ici ne demande... Vous avez dit une
fois: On revient à l'article I, mais c'est très longtemps avant.
C'est avant que le député de Jonquière parle. J'ai
l'impression que j'ai encore droit à au moins six minutes de remarques
préliminaires. Cela voudrait donc dire, et j'en suis moralement
sûr... Si vous me prouvez le contraire par les règlements,
j'aimerais bien savoir par quel article. J'ai le droit avant qu'on n'arrive
à l'article 1 de parler 20 minutes, avant qu'on n'appelle l'article 1,
j'ai le droit de présenter des motions. Les deux se faisant avant
l'appel de l'article 1, les deux peuvent être combinés. Donc, si,
entre chacune des motions, si j'en ai plusieurs à présenter pour
faire mon devoir de député de l'Opposition, si entre des motions
j'ai des questions, j'ai l'impression et j'en ai la certitude morale, à
moins que vous ne m'avisiez du contraire, M. le Président, que j'ai
toujours droit à ces six minutes, parce que je ne les ai pas
employées et que l'article 1 n'est pas arrivé.
M. Lincoln: M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Lincoln: Je ne voudrais pas qu'au cours de cette commission
parlementaire, sur des questions de règlement sans citer le
règlement, on prenne du temps pour faire des discussions. Tout ce que je
voudrais dire par rapport à la demande du député de
Terrebonne, c'est qu'il est clair que les remarques préliminaires se
font au début de la commission parlementaire. Vous avez donné le
droit aux gens de s'exprimer. S'ils veulent s'exprimer durant cinq minutes
comme je l'ai fait, moi, ou dix-huit minutes, c'est leur droit. Une fois qu'on
commence une autre étape, si le député de Terrebonne
voulait faire d'autres remarques préliminaires, il n'avait qu'à
ne pas présenter de motion pour aller en commission parlementaire. Le
fait même qu'on commence une deuxième étape des travaux,
c'est clair que les remarques préliminaires sont terminées.
Autrement, on ne le peut pas. Ce serait une affaire de fous si, demain matin,
on pouvait revenir à l'article 32 et que chacun dise: Il me reste 20
minutes et tout le monde parlerait durant deux heures. Cela n'a aucun sens. Les
remarques préliminaires, comme les mots le disent, c'est vraiment le
début des travaux. Une fois qu'une autre étape s'est
enclenchée, que ce soit l'étude article par article, que ce soit
une motion, le député lui-même a choisi de faire quelque
chose d'autre, il a fini son travail sur ce point. J'espère que vous
allez rendre une décision rapide, parce que, si on se dirige dans ce
sens, on va se rendre jusqu'à minuit à discuter des
procédures. Moi, je trouve qu'il est temps qu'on commence à
travailler.
M. Middlemiss: Je voudrais ajouter quelque chose, M. le
Président.
Le Président (M. Saint-Roch): Oui, M. le
député de Pontiac.
M. Middlemiss: Normalement, l'Opposition a un porte-parole qui
fait des remarques préliminaires. Si je ne me trompe pas, deux
députés de l'autre côté ont fait des remarques
à ce sujet.
Une voix: Oui.
M. Middlemiss: Oui. Dans ce cas, si on insiste pour avoir 20
minutes, est-ce que ces 20 minutes ne seraient pas pour les
deux?
On va suspendre les travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 25)
(Reprise à 17 h 28)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission reprend maintenant ses travaux. Je reconfirme la
décision qui a été rendue. M. le député de
Terrebonne, à la suite du libellé de votre motion, si je relis
votre motion, elle a été présentée selon l'article
244, paragraphe 2. Si on regarde l'article 244, la section 4 stipule
très bien
que c'est: Étude détaillée en commission. Je crois
qu'à ce moment-là, la commission avait enclenché le
processus de l'étude détaillée et je maintiens qu'on
était dans un nouveau bloc.
Je répète aussi, M. le député de Terrebonne,
que je crois que, à l'intérieur de toute l'étude du projet
de loi article par article, vous aurez tout le loisir de poser les questions
que vous souhaitez.
M. Blais: Oui, M. le Président, je ne peux pas mettre en
doute votre décision et je m'y plie. Je tiens a vous dire que j'ai pris
l'article 244, paragraphe 2: "Avant d'entreprendre l'étude
détaillée", et non pas après l'avoir entreprise. C'est
"Avant d'entreprendre...", c'est pour cela et c'est là-dessus que je
reviens. Je ne sais pas de quelle façon je puis revenir et demander.,.
Mais je ne peux pas mettre votre décision en cause.
Je me suis dit: Selon l'article 244, paragraphe 2, qui commence comme
ceci: "Avant d'entreprendre l'étude détaillée...". Donc,
les remarques préliminaires n'étant pas terminées avant
l'étude détaillée du projet, je soutiens que j'avais droit
encore à mon temps. Mais je suis obligé de m'y refuser. Je ne
sais pas de quelle façon... Pouvez-vous me renseigner de quelle
façon je puis demander une gouverne à ce sujet maintenant?
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne, je pense que l'article 41 de notre règlement est clair.
La décision a été rendue et l'article se termine au
deuxième paragraphe en disant: "La décision du président
ou de l'Assemblée ne peut être discutée".
M. Blais: C'est ce que j'ai dit.
Le Président (M. Saint-Roch): Je pense que cela
s'étend à notre commission.
Par contre, je me dois de vous rappeler aussi, pour votre gouverne,
l'article 213 de nos règles de procédure qui dit: "Tout
député peut demander la permission de poser une question au
député qui vient de terminer une intervention. La question et la
réponse doivent être brèves." Dans ce cas-ci, je pense que
le droit s'étend à M. le ministre. Alors, si M. le ministre
accepte.
Une voix: Il faudrait le consentement.
M. Blais: Je n'ai pas besoin de consentement pour poser une
question. Vous dites que mon temps est terminé. Je ne le crois pas, mais
je suis obligé de me plier à votre décision et je le fais
de bon gré, malgré moi. Voilà.
Alors, M. le Président...
Le Président (M. Saint-Roch): Oui, M. le
député de Terrebonne. J'appelle maintenant l'article 1.
Motion proposant d'entendre l'APAQ
M. Blais: Non, M. le député, j'aurais une motion
à proposer...
Le Président (M. Saint-Roch): M. le Président.
M. Blais: ...selon, M. le Président,...
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: ...l'article 244, paragraphe 2, c'est-à-dire
avant que l'étude détaillée commence. Je voudrais demander
que l'Association des propriétaires d'autobus du Québec soit
immédiatement entendue à cette commission ou dans les plus brefs
délais possibles. Voilà.
Si vous consentez à ce qu'elle vienne, on n'en parlera pas et on
va la recevoir.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Terrebonne.
M. le député de Terrebonne, en accord avec l'article 244,
paragraphe 2, la motion que vous déposez est recevable.
M. Blais: Vu que je n'ai pas la permission de poser des
questions, est-ce que je peux vous demander à vous, M. le
Président, si le ministre accepte que ces gens-là soient
reçus. S'il accepte, on ne parlera pas de cette motion, s'il n'accepte
pas, on va en parler.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Lincoln: M. le Président, j'ai expliqué au cours
de mes remarques préliminaires qu'après le discours en
deuxième lecture, j'ai rencontré moi-même les deux
représentants de l'Association des propriétaires d'autobus et je
peux vous dire, M. le Président, que ces gens-là eux-mêmes
sont tout à fait satisfaits des discussions que nous avons eues
ensemble. On a des relations cordiales, on a des relations constructives, ils
nous ont fait des suggestions de part et d'autre que nous sommes en train
d'accepter et de travailler et d'ici la fin de la commission parlementaire, je
pense qu'ils vont avoir ce qu'ils veulent.
Si le député de Terrebonne veut insister pour refaire le
même petit jeu encore en se servant de l'Association des
propriétaires d'autobus dans ce cas-là, je peux lui dire de
façon très catégorique, pour avoir passé quelque
chose comme deux heures avec eux l'autre jour et pour avoir discuté de
la façon
la plus franche et la façon la plus constructive, que son jeu est
tout à fait clair. Je réalise ce qu'il est en train d'essayer, ce
sera à lui de prendre sa décision. On va écouter son petit
laïus pendant 30 minutes. Il n'est pas question qu'on aille ouvrir une
commission parlementaire pour les raisons que nous avons mentionnées.
Nous avons rencontré ces propriétaires d'autobus. On va
rencontrer les gens et, de part et d'autre, on va arriver à des
compromis satisfaisants pour eux. Ce sera la décision du
député de prévoir comment il entend mener son affaire. On
lui fait part de nos décisions de notre côté. Voilà!
ce sera à lui de faire comme bon lui semble!
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup M. le Président. Merci beaucoup
de vos remarques M. le ministre. Je tiens à dire, M. le ministre, que,
sur ce principe de loi, nous sommes d'accord, mais seulement on sait que tous
les sondages et toutes les consultations nous disent que les gens veulent une
loi et non pas cette loi. Cette loi doit être améliorée et
doit être bonifée. C'est pour cela que nous demandons que
certaines personnes viennent dire leur idée ici en commission
parlementaire. C'est pour leur bien et parce que nous faisons notre boulot.
Nous nous devons d'accomplir notre travail et de bonifier cette loi dont le
principe est demandé, est défendu par l'ensemble de la population
du Québec et par le Parti québécois aussi. Cependant, il y
a... Je pariais tantôt de liberté de la personne et là nous
avons une question de droit, celle des autobus qui sont un moyen de transport
qui, dans cette loi, lui aussi se voit privé d'une certaine
liberté commerciale. C'est drôle comme ce projet de loi a
été mal étudié, il est mal présenté.
Pour en améliorer l'essence, pour en améliorer l'application,
nous avons demandé que les fonctionnaires viennent tantôt, comme
nous demandons que l'Association des propriétaires d'autobus du
Québec vienne donner son avis. Il ne faut pas lire longtemps le projet
de loi pour voir qu'il est discriminatoire envers les autobus interurbains.
Cela saute aux yeux.
C'est pourquoi le 5 juin, il n'y a pas tellement longtemps,
l'Association des propriétaires d'autobus du Québec
écrivait au ministre, M. Clifford Lincoln. L'objet était: Loi sur
la protection des non-fumeurs dans certains lieux publics. C'est la loi que
nous étudions aujourd'hui et mon devoir est d'amener leurs idées
ici parce que le gouvernement ne veut pas que les gens qui ont écrit
cette lettre vienne donner leur avis a l'Assemblée nationale. Pour que
les idées de ces gens passent, c'est par mon intermédiaire que
cela va se faire, et Dieu sait que j'aimerais m'abstenir de cette
représentation parce que, qui mieux que les chauffeurs eux-mêmes
ou leurs représentants... Dans ce cas-ci, c'est signé par Romain
Girard, directeur exécutif. Je vous assure que, pour défendre les
droits primaires de l'Association des propriétaires d'autobus du
Québec, M. Romain Girard est de beaucoup mieux nanti du
côté statistiques, connaissance du milieu que le simple
député de Terrebonne devant cette commission. Mais faisons contre
mauvaise fortune bon coeur. Comme le gouvernement ne veut pas recevoir qui que
ce soit à cette commission, je dois essayer de défendre cette
association du mieux que je peux. Je tiens à dire à l'Association
des propriétaires d'autobus que je prends son cas à coeur et que
je vais essayer de la défendre de mon mieux. Mais qu'on ne vienne pas
nous dire, comme le ministre vient de le faire, que c'est pour faire perdre le
temps à cette commission que j'interviens. Mais, ciel! que c'est mal
juger des intentions que nous avons dans notre for intérieur. Il faut
avoir un faible intérieur pour penser que mon for intérieur passe
de cette façon. Voyons donc!
Ces gens ont demandé d'être reçus et, comme
réponse, ils ont reçu du ministre: Nenni! Je ne veux pas. Niet!
Non! No! Câline! Et ces gens veulent être reçus. Comment se
fait-il que de tout temps les commissions parlementaires se tiennent dans des
salles propices à recevoir une audience, propices à recevoir des
représentants de gens concernés par une loi et comment se fait-il
que depuis que ce gouvernement est au pouvoir les salles sont vides? On ne fait
plus venir personne. C'est le régime de l'éteignoir.
Je me souviens du temps où on parlait du régime de la
grande noirceur, avant 1960; on a appelé cela le régime de la
noirceur. Est arrivée en 1960 la révolution tranquille, la
libération, la prise de possession de nos libertés. On ne s'est
pas rendu au bout, je suis bien d'accord, le Parti québécois a
pris le pouvoir, mais on ne s'est pas rendu au bout. On n'est pas arrivé
à la clarté totale de la nation, qui est le plein
épanouissement par la souveraineté. On ne s'est pas rendu
là, mais, là, on reculerait. Dans votre cathédrale de
bonne entente, ayez au moins un cierge pascal qui éclaire les gens!
C'est incroyable! C'est un gouvernement qui veut agir de nuit. C'est opaque, on
ne voit rien venir. On brime les gens: toutes les tables de consultation ont
été rejetées. On ne reçoit personne aux commissions
parlementaires, c'est incroyable! Ce n'est pas de cette façon que l'on
gouverne. Gouverner, c'est prévoir, mais est-ce que vous avez
prévu que les gens des autobus seraient
ahuris, outrés, blessés, violentés par ce projet de
loi? Ils sont violentés par ce projet de loi, M. le Président.
Ils sont violentés. Ils sont violentés par ce projet de loi. Mon
confrère de Jonquière...
Des voix: Il dort.
M. Blais: ...de sa mine altière, me dit qu'il est d'accord
avec cette position.
Une voix: ...il n'est même pas ici.
M. Blais: L'ancien maire de Jonquière, de sa mine
altière, me dit que ce projet-là, qui n'inclut pas les droits
primaires dans les autobus, qui est discriminatoire envers les usagers de
l'autobus, il est absolument contre, lui aussi. Vous allez entendre son
intervention, il va vous prouver qu'il est contre. Je tiens à souligner,
M. le Président, que, de moi-même, je n'avais pas vu cette petite
lacune. À prime abord, une petite lacune, mais, lorsque l'on gratte,
lorsque l'on gratte un peu plus profondément, on se rend compte que ce
n'est pas une lacune. Ce n'est pas un petit cure-dent qu'on a oublié,
c'est un madrier. C'est tout un système de transport qui n'a pas les
mêmes droits qu'un autre. C'est de la discrimination routière.
C'est un projet anti-autobus. Vous nous avez dit que vous n'aviez pas de projet
de loi omnibus, mais vous avez des projets antiautobus! C'est incroyable! J'ai
l'impression que c'est...
Une voix: Il va aller au Patriote.
M. Blais: Je n'ai jamais été là. C'est un
projet de loi qui, en fait, n'a pas été étudié.
Personnellement, je trouve cela outrageant pour toute cette classe qui
emprunte... C'est souvent, M. le Président. Que vous le savez donc! Une
fois élus, on le sait-y ça? Ce sont souvent les moins nantis qui
prennent les autobus; très souvent, ces gens-là n'ont pas de
véhicule. Le ministre ne défend pas encore de fumer dans les
véhicules personnels, mais les gens moins nantis qui n'ont pas les
grosses bagnoles de nos ministres avec chauffeur, eh bien, eux, sont
obligés de prendre des billets collectifs pour prendre l'autobus. Ils
ont leur chauffeur privé comme les ministres, mais pour plusieurs
personnes en même temps. Ces gens-là n'auront même pas le
droit de fumer pendant un long trajet - c'est incompréhensible - tandis
que, dans le train, ou dans d'autres véhicules, on va avoir des
sièges numérotés comme dans les avions, on le permettra.
Pourquoi cette discrimination "autobussale"? Je ne sais pas si cela existe
comme adjectif, mais disons que c'est un autre néologisme. J'aime
beaucoup les néologismes. C'est discriminatoire!
M. Romain Girard a écrit une lettre de trois pages que je n'ai
pas commencé à lire encore, je tiens à vous le faire
remarquer, M. le Président. Je voudrais absolument que l'ensemble des
citoyens du Québec, qui écoutent avec assiduité ces
commissions parlementaires, comprennent bien ce que M. Romain Girard, directeur
exécutif de l'Association des propriétaires d'autobus du
Québec, nous a écrit dans cette lettre de trois pages. "M. le
ministre". C'est à vous qu'il a écrit, M. le ministre. Je lui
sais gré de m'avoir envoyé une copie conforme pour être
certain qu'il serait entendu à cette commission. La lettre est
datée du 5 juin 1986... Soit dit en passant, le 5 juin c'est mon
anniversaire; c'est mon année chanceuse, M. le ministre. J'espère
que votre loi ne sera pas adoptée telle quelle. Cinquante-cinq ans, le 5
juin, c'est donc mon année chanceuse.
M. le ministre, on vous écrit à vous et on dit: "La
présente fait suite à la présentation, en première
lecture, du projet de loi 84 tentant de mieux définir les espaces
réservés aux fumeurs et aux non-fumeurs dans les lieux publics."
Ici, il faut comprendre que, vu que c'est un chauffeur d'autobus ou un type qui
s'occupe d'autobus, par "lieu public", il veut dire "véhicule public",
parce que l'un embrasse l'autre dans des cas comme celui-ci. Il voudrait dire
"autobus", en fait. "Particulièrement les articles 12 et 13 affectent
nos services de transport par autobus et la présente s'adresse
essentiellement à ces deux articles." Il insiste sur les articles 12 et
13 de façon très particulière parce que ces articles
concernent, de façon plus particulière, les autobus. (17 h
45)
Je vois la députée de Mégantic-Compton qui veut
relever les articles 12 et 13. Je peux vous les lire. Une seconde. Voyez-vous
12 et 13, c'est justement pour vérification à Transports publics,
section II: "Il est interdit de fumer dans un autobus, une ambulance ou une
voiture de métro." Et 13: "L'exploitant d'un service de transport par
traversier ou par train doit prévoir, dans ses embarcations ou
véhicules, une section réservée aux non-fumeurs comportant
un minimum de 50 % des sièges mis à la disposition du public."
C'est clair et cela veut dire que dans les autobus, on ne pourra pas fumer,
tandis que dans un train, un traversier, là, on pourrait fumer. Donc,
c'est discriminatoire. On revient encore avec discrimination
gouvernementale.
C'est un gouvernement qui ne regarde pas les droits des individus. On le
disait tantôt. Et là, il ne regarde pas les droits primaires des
compagnies. Le train est sur un pied d'égalité avec l'autobus
pour les transports à longue distance. Les long-courriers doivent jouir
de la même base de
droit. Je suis persuadé... Je vois vos recherchistes, M, le
ministre, ils ne vous ont certainement pas conseillé. Cela doit
être une fuite quelque part, un oubli. J'ai peine à croire qu'on
ait laissé passer une telle aberration scripturale. J'ai peine à
le croire. Parce que même sans connaissance de cause... Et je suis
persuadé, M. le ministre, qu'autour de vous, vous avez des gens d'une
très haute compétence. Ah, ça, j'en suis persuadé,
parce que plusieurs étaient là pendant que nous y étions,
et c'est la continuité de ce qu'on a fait dans l'environnement qui est
signalée dans le monde d'ailleurs depuis les dix dernières
années. Nous avons toujours été cités comme un
exemple à suivre. Encore là, dans cette loi, la loi que les gens
veulent avoir et non pas celle que vous déposez, mais, dans celle que
les gens veulent avoir, qu'ils nous disent par sondage, je suis
persuadé, si vous vous faites aider un peu plus par tous ceux qui vous
entourent, il y a moyen avec le positif que nous emmenons, nous, de
l'Opposition, de faire une loi qui serait bénéfique pour
l'ensemble de la population, les citoyens et les citoyennes,
Québécois et Québécoises, et si on reçoit
des gens des autres pays, Canadiens et Canadiennes ou Américains et
Américaines...
C'est sûr que cela peut être bon pour l'ensemble des gens.
S'il y a des Européens et des Européennes, excusez-moi des fois
cela arrive. On est capables ensemble. Moi, je vous offre ma coopération
la plus totale pour que ce projet de loi, lorsque nous aurons fini de le
regarder article par article, soit un projet vu le premier. C'est le premier
qui se fait au Canada, c'est la première province, et là-dessus
je prends la parole du ministre, parce que c'est un homme intellectuellement
honnête. Je le lui concède et j'apprécie, d'ailleurs,
travailler avec lui à cause de son honnêteté
intellectuelle. Vu que c'est le premier, attardons-nous donc quelques instants
ensemble pour tenter de bonifier ce projet de loi, et, si nécessaire, je
vous offre, en dehors des heures où nous siégeons, de rencontrer
les gens autour de vous qui sont compétents dans le dossier pour
qu'ensemble, pour gagner du temps à la commission, M. le ministre, en
dehors des heures normales, rencontrer vos gens pour le bonifier pour que,
quand nous arriverons à la prochaine séance, nous puissions
ensemble tomber immédiatement sur ce qui est le plus
bénéfique.
Vous voyez que ma coopération est totale, entière, et elle
vous est acquise. C'est bon de compter sur cela.
Je tiens à vous dire, M. le ministre, qu'il y a beaucoup
d'autobus. Je n'ai pas de statistiques. J'aurais aimé avoir eu le temps
de vous dire combien il y a de véhicules autobus interurbains. Je n'ai
pas ces chiffres sous la main. Combien de personnes fumeuses se
promènent dans ces autobus au Québec ou à
l'extérieur, en provenance du Québec, qui subiront un grave
préjudice comme dit la députée de Mégantic-Compton
comparativement aux gens qui vont prendre le train qui, eux, je ne sais pas
pourquoi... parce que, je ne sais pas, la plupart des compagnies... c'est
à cause du Canadien National? Est-ce à cause du mot canadien que
notre ministre est un peu plus enclin à être doucereux pour ce
moyen de transport? C'est un petit peu... Puis, dans les autobus... les trains
cela marche sur rails tandis que les autobus, c'est sur pneus. Pourquoi se
dégonfle-t-il devant les autobus et est-il gentil envers les gens qui
prennent le train? J'aimerais beaucoup avoir une explication du ministre et je
n'ai pas le droit de lui poser de questions à cette période-ci.
On verra prochainement si j'aurai le droit de le faire. Mais pour le moment,
apparemment, le temps est écoulé pour poser des questions.
Alors, je regarde cette lettre. Hé! Que j'aurais aimé, M.
le ministre, que nous rencontrions ensemble M. Romain Girard. À la
lecture de sa lettre, on sent la compétence. Cet homme n'a pas eu grand
temps pour étudier ce projet de loi qui a été
présenté comme cela, vite vite. D'ailleurs, on voit bien qu'il a
été mis sur la table sans que les articles soient
étudiés, parce qu'on a des problèmes énormes et on
a des contestations de partout. De partout. Alors, ces contestations, c'est
à nous ici, c'est notre devoir de les manifester.
Je lis la lettre pour le bien de tous ceux qui nous écoutent et
qui vont lire les débats de la Chambre à l'avenir: "Il est
démontré par plusieurs études cumulées
jusqu'à date qu'il est possible de définir des sections
réservées aux fumeurs à bord des autobus."
M. le ministre, écoutez. Est-ce que vous avez lu ce paragraphe?
"Il est démontré par plusieurs études cumulées
jusqu'à date" -il dit jusqu'à date. Cela veut dire jusqu'à
aujourd'hui - jusqu'à aujourd'hui "qu'il est possible de définir
des sections réservées aux fumeurs à bord des autobus sans
nuire ou indisposer les non-fumeurs." On s'occupe même, on a la
préoccupation de l'indisposition des autres. On va encore plus loin que
la liberté d'agir. On est susceptible aux indispositions. C'est tout de
même assez sérieux. Même les indispositions sont
considérées dans l'argumentation du représentant M. Romain
Girard. C'est tout de même aller assez loin.
Je le dis, M. le Président, "sans nuire ou indisposer les
non-fumeurs ni même affecter la qualité de l'air à bord du
véhicule" parce que aujourd'hui nos autobus... Moi cela fait plusieurs
années... Je ne sais pas, M. le Président, si vous prenez souvent
l'autobus. Vous avez l'air bien riche, vous.
Pour moi vous avez un gros char. Mais moi, personnellement, je ne prends
pas souvent l'autobus parce que mon comté est très loin mais cela
m'arrive de temps à autre de recevoir des groupes de mon comté
qui viennent justement en autobus. Là-dedans, il y a des fumeurs, des
fumeuses, des non-fumeurs, des non-fumeuses. Les gens de mon comté qui
descendent ici en autobus et les gens de votre comté, par respect pour
les gens de votre comté, et vous tous les députés
élus autour de cette table qui allez recevoir durant vos mandats des
gens qui viennent visiter la maison du peuple, le salon de la race, à
l'endroit où les libertés sont défendues, - ce que nous
faisons actuellement défendre les libertés - qu'est-ce que vous
diriez si deux groupes de votre comté arrivaient en même temps, un
groupe par train et l'autre par autobus et que les fumeuses - supposons l'AFEAS
de votre comté, M. le Président - venaient par train et le club
de l'âge d'or de votre comté - je vois à votre air attendri
que vous comprenez à quoi je veux en venir - arrivait en même
temps au parlement, un groupe déçu parce que venu par autobus,
que vous auriez contraint à ne pas fumer et l'autre, par train,
arriverait regaillardi parce que non privé d'un besoin de nicotine - qui
est, quand on a ce vice, un vice humain; je l'ai eu tellement longtemps - et
serait content de vous parce que vous avez protégé leur
liberté dans le train? Ceux et celles, l'AFEAS, à qui vous
n'auriez pas permis de fumer... Mais comment pourriez-vous décemment,
sans contrainte, sans sourciller, recevoir ces deux groupes dont l'un par vous
ci-devant législateur aurait été brimé par une loi
qui aurait été mal étudiée alors que le ministre
n'aura pas écouté les conseillers que je vois qui voudraient donc
qu'on change cela? On le sent, on sent dans leurs yeux un roulement d'autobus
fumant, on le sent. On sait que ces gens sont des défenseurs de la
liberté. Autant l'individu tantôt était brimé autant
là le côté commercial - et c'est grave - ... C'est
censé être des businessmen qui sont au pouvoir. Faire une
discrimination de3 moyens de transport. Personnellement, j'ai peine à
retenir les miens tant la discrimination est forte. C'est très difficile
de se modérer les transports quand les transports en
général ne sont pas traités sur un pied
d'égalité. C'est incroyable!
Je suis persuadé que par votre intercession... Je vois poindre
des solutions à l'horizon et je suis persuadé que de l'autre
côté vous allez certainement défendre les transports par
autobus interurbain et demander à votre ministre de se raviser,
d'écouter ses conseillers, de modérer ses transports coercitifs
et de donner la permission de fumer dans les autobus. Ce serait une chose
à faire.
Il me reste combien de temps, M. le Président? Je vois arriver 18
heures. J'ai le droit après 18 heures. Ah! Mon Dieu! Je vais terminer
à 18 heures et on terminera à la deuxième section,
d'accord. Je ne voudrais pas aller trop loin dans sa lettre. Je reprendrai
plutôt cela en deuxième partie de séance, ceci pour le bon
entendement de ceux qui nous écoutent et pour, aussi, que M. le ministre
prenne au sérieux nos interventions. Vous savez que ce n'est pas facile
pour un type de l'Opposition d'arriver comme cela et d'essayer d'être
constructif des heures de temps sur des points que je trouve naïvement
banals et que j'accorderais immédiatement prima facie. Je l'accorderais
immédiatement. On voit qu'il y a discrimination. C'est ce pourquoi je
suis obligé de défendre pendant tant de temps des choses avec
lesquelles l'ensemble et même les députés de l'autre
côté sont d'accord. Je les vois. Ils opinent tous du bonnet. Ils
opinent tous du bonnet. Ils savent que l'on doit changer cette discrimination
envers les autobus.
M. le ministre, je reprendrai cela lorsqu'on reprendra la séance
tantôt. En attendant je tiens à vous dire que pour les autobus de
ce côté on ne démordra pas. On ne peut pas démordre
sur cela. C'est un principe trop naturel de protection de la concurrence. Une
loi - surtout par un gouvernement de business - ne peut pas être
discriminatoire pour un moyen de transport et favorable à un autre. Il
faut l'égalité autant des personnes, des industries et des
manufactures que des partis politiques en cette Chambre. Sur ces 18 heures, M.
le Président, je vous remercie.
Le Président (M. Saint-Roch): On pourrait continuer si
j'avais le consentement unanime. Est-ce qu'il y a consentement? Non?
Une voix: Non. On recommence à 20 heures.
Le Président (M. Saint-Roch): La commission de
l'aménagement et des équipements suspend maintenant ses travaux
et les reprendra à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise à 20 h 11)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'aménagement et des équipements reprend
ses travaux pour poursuivre l'étude du projet de loi 84, Loi sur la
protection des non-fumeurs dans certains lieux publics. Au moment de
l'ajournement, la parole était à M. le député de
Terrebonne. J'aimerais vous rappeler qu'il
vous reste quatre minutes et cinquante secondes. M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: M. le Président, je vous remercie. Je trouve que
c'est très peu pour un sujet aussi important. Probablement qu'on
pourrait présenter une autre motion - je ne' sais pas si mon
confrère pourrait regarder cela - pour trouver une compagnie de
transport, d'autobus, qui pourrait venir nous renseigner, parce que je n'ai
vraiment pas eu le temps de passer le dixième des arguments favorisant
le changement dans la loi pour que les autobus soient considérés
à l'égal des autres transporteurs, comme les trains où
l'on prévoit des endroits spécifiques pour les non-fumeurs.
Cette lettre que j'ai reçue d'un groupe d'une importance
terrible... Je dis cela pour ceux qui viennent juste de se joindre à
nous et qui avaient hâte que le programme reprenne. Je tiens à
leur dire que nous allons continuer exactement où nous avons
laissé, c'est-à-dire en essayant de bonifier un projet de loi qui
a été fait à la sauvette, mais que nous allons essayer de
bonifier tous ensemble. Les autobus, pour résumer très
très brièvement... La loi, aux articles 12 et 13 - encore
là comme dans d'autres articles - manque au sens du bien commun en
étant discriminatoire envers certains transporteurs et en en favorisant
d'autres. Je ne voudrais pas aller plus loin que cela dans la discrimination
des transporteurs, mais c'est une chose que l'Opposition ne peut pas accepter.
Tous les transporteurs doivent être sur un pied d'égalité.
M. Romain Girard nous dit: "En considération de ces faits, il est
inéquitable d'interdire de fumer à bord des autobus alors que
cela est autorisé, selon certaines considérations, dans les
trains et les traversiers." Par traversiers, ici on peut entendre la traverse
de Lévis ou d'autres. Ce n'est pas nécessairement des trains
traversiers qui passent d'un côté à l'autre du fleuve. Cela
peut être aussi un bateau. J'ai l'impression qu'ici on parle d'un bateau
et d'un train. "Non seulement l'industrie de l'autobus doit-elle se mesurer
continuellement à l'automobile et au train, mais en l'occurrence le
projet de loi 84 crée un handicap insurmontable auprès de
certaines clientèles dans cette concurrence et intervient en notre
défaveur." C'est exactement l'exemple de l'AFEAS dont je parlais. Je
suis persuadé que vous recevez des groupes qui viennent vous visiter au
Parlement. Un club de l'Âge d'or de votre comté vient ou le club
de l'AFEAS. Cela arrive! Un vient en train, comme je le disais ce matin - vous
n'étiez pas là, vous nous avez laissés pour quelques
minutes - je le dis brièvement. Un groupe vient en train et l'autre
vient en autobus et vous avez des gens qui fument dans les deux groupes. Ceux
qui ont été en train arrivent plus joyeux parce que votre
loi...
M. Kehoe: Vous nous avez dit cela cet après-midi.
M. Blais: ...leur a permis et leur permettra de fumer dans des
endroits réservés pour eux - c'est bon pour les non-fumeurs -
tandis que ceux qui seraient venus en autobus n'auraient pas le droit du fumer
durant le voyage. Imaginez de Montebello jusqu'ici. D'abord, quelle
corvée! C'est très loin.
M. Kehoe: Pas dans mon comté.
M. Blais: Cela fait très loin. Ils vont maugréer
contre leur député. Les gens vont avoir des airs
rébarbatifs. C'est entendu qu'ils n'auront pas eu d'odeurs
nauséabondes dans l'autobus, mais leur droit de fumer aura
été brimé. Tandis qu'en séparant une partie pour
les non-fumeurs d'une partie pour les fumeurs dans les autobus, tout le monde
aurait été content et les droits de toutes les personnes auraient
été respectés à ce moment.
Je suis obligé de conclure, je crois. C'est regrettable parce
qu'il faudrait absolument beaucoup plus de temps pour parler de cette
revendication, parce que j'ai à peine effleuré le début
d'une première page de trois et mon temps est déjà
terminé. C'est la démocratie. Je me dois de céder la
parole à un autre. Je le fais avec réticence, mais quand
même en me pliant à cette démocratie productive.
M. Kehoe: Arrête de pleurer!
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Terrebonne. M. le député de
Jonquière.
M. Francis Dufour
M. Dufour: Admettons que l'industrie du transport est
déjà très inquiète par rapport aux objectifs
poursuivis par le gouvernement concernant le problème de la
déréglementation. J'ai déjà rencontré des
gens de ces compagnies de transport par autobus. Ils sont très inquiets
de la concurrence qui pourrait se faire sur les lignes de voyageurs. Ce qui
fait que ce sont les lignes très achalandées qui paient pour les
lignes moins achalandées; il y a donc un problème de fond, un
problème de base. Pourquoi l'empêchement de fumer dans les autobus
justement sur les lignes qui couvrent de très grandes distances? Par
exemple, si quelqu'un part de Gaspé pour aller à Montréal,
il me semble qu'il y a un temps très long qui fait que les gens vont se
sentir pénalisés.
Je veux bien comprendre que le ministre a rencontré l'Association
des
propriétaires d'autobus du Québec. Mais d'un autre
côté, est-ce qu'on a l'assurance, hors de tout doute, qu'ils vont
être entendus? Et de quelle façon leur demande sera-t-elle
traitée? Il faut penser que les autobus, dans beaucoup d'endroits, sont
à peu près l'unique moyen de transport existant: La ligne de
chemin de fer au Québec n'est pas des mieux situées et aussi au
point de vue d'économie de temps, ce n'est pas nécessairement les
lignes de chemin de fer qui font que les gens pourraient obtenir plus de
satisfaction. Quand on considère le projet de loi, ce sont ces gens qui
seraient favorisés par rapport au transport par autobus. Comme
déjà ceux qui fument s'assoient toujours obligatoirement à
l'arrière de ces véhicules, il y a certainement des
possibilités, une façon de regarder pour pouvoir rendre service
à ces gens qui sont obligés de prendre l'autobus. D'autant plus
que ces gens ne sont pas nécessairement les mieux nantis de la
société, si ce n'est d'un groupe, par exemple, qui
préfère voyager par autobus parce que plus
sécuritaire.
Si la déréglementation a pour effet de diminuer les
revenus, comme cela existe déjà dans le transport aérien,
il commence à y avoir là des problèmes assez cruciaux et
je prends pour avis des sons de cloches qu'on entend actuellement concernant la
déréglementation. Je pense que le même
phénomène vaut, peut-être pas dans les endroits où
il y a beaucoup d'achalandage, mais vaut pour les régions
éloignées. De ce côté, je pense qu'on doit user de
prudence dans le sens qu'il faut protéger les intérêts des
transporteurs parce que c'est une business, c'est l'entreprise privée.
L'intercommunication entre les municipalités, ce n'est pas
subventionné. Ce n'est pas le transport en commun dans les villes, dans
les municipalités. C'est le transport pour les transporteurs qui ont
à parcourir de grandes distances et encore va-t-on le handicaper de
façon telle que les gens vont avoir de la réticence à
prendre ce transporteur.
Encore faut-il regarder ce qui se passe dans le transport par train pour
voir qu'il y a vraiment des désavantages énormes. Si on veut
vraiment éliminer le transport par autobus, c'est peut-être une
bonne façon: d'abord, déréglementer, deuxièmement,
mettre des handicaps assez grands pour les enlever complètement de la
carte. Cela, c'est excessif par rapport à des besoins ou par rapport
à un projet de loi qui se veut excellent pour la santé des
non-fumeurs, mais qui, en même temps, met des entraves à des gens
qui veulent se servir de l'autobus ou qui prennent l'autobus pour se
transporter d'un endroit à un autre. C'est certain qu'il y a des
"chiards" d'autobus, qu'on parle des transports d'écoliers ou du
transport à l'intérieur des municipalités ou sur de
courtes distances. Je pense que ce serait difficile de tenir la même
argumentation pour dire qu'on devrait donner la chance aux gens de fumer.
À ce moment-là, il faudrait accepter que des gens ne fument pas.
Mais, sur de grandes distances, on a vu déjà des protestations de
fumeurs qui ne voulaient pas être radicaux, mais c'est vraiment un oubli
par rapport à cette loi parce que, sur des distances de douze ou quinze
heures en autobus sans que les gens puissent fumer une cigarette ou, s'ils
fument, c'est à la sauvette et à la cachette et, en
débarquant, la première chose à laquelle ils pensent, au
lieu d'aller manger, c'est d'aller fumer. Je ne pense pas que cette loi aide,
d'abord le commerce parce que je pense que c'est important que les gens qui
vendent de la nourriture y trouvent leur compte. C'est important aussi que les
gens ne se sentent pas brimés et, s'ils fument, selon leurs besoins ou
selon leur désir, ils vont peut-être fumer un peu moins. En tout
cas, cela va être moins dommageable pour les poumons parce qu'il y aura
moins de fumée qui entrera dans un coup, et Dieu sait que les gens qui
sont longtemps sans fumer n'hésitent pas à tirer une touche, et
rapidement.
Donc, je pense qu'il y a moyen de regarder cela et d'avoir non seulement
l'assurance, mais au moins d'essayer de rencontrer le directeur de
l'association des transporteurs, M. Romain Girard, le directeur
exécutif, qui, effectivement, selon les données ou selon
l'Information du ministre, que celui-ci a rencontré... Par contre, on
n'a pas la prétention et on n'a pas non plus l'assurance que leurs
doléances vont être entendues. Si c'est vrai des gens qui poussent
une argumentation vis-à-vis d'un besoin ou d'un point de vue officiel,
je pense qu'à travers cela l'Opposition, parce qu'on fait partie du
gouvernement, peut-être pas du bon côté, mais on fait partie
certainement du gouvernement, je pense que c'est un droit essentiel de
l'Opposition de savoir ce qui se passe autour d'une loi qui touche aux droits
fondamentaux des gens, que ce soit d'un côté ou de l'autre.
Je pense que chaque fois, et c'est un argument qu'on a amené
depuis le début de l'après-midi, chaque fois qu'on fait une loi
qui touche au bien-être des citoyens, quels qu'ils soient, c'est
important, c'est intéressant et c'est valable que ces gens soient au
moins entendus et fassent connaître leurs objections ou leurs arguments
favorables, à savoir qu'on devient un peu plus intransigeant et on dit
à ces gens que c'est non. Si le transport en commun commence à
réglementer le fumeur dans les véhicules, je me demande
jusqu'où on va aller dans la réglementation. N'y aura-t-il pas
surréglementation à un moment donné? Il y aura
peut-être des gens qui... On ne peut pas prévoir. Qui aurait dit,
il y a 15 ou 20
ans, qu'on enlèverait le droit de fumer dans les véhicules
de transport? Aujourd'hui, on en est rendu là. C'est possible qu'il y
ait eu des pressions, que des gens aient dit: Cela n'a pas de bon sens, il
faudrait faire quelque chose et il faudrait mettre les gens en santé
malgré eux. Mais on n'enlève pas la cause qui cause les dommages
aux individus, on enlève les conséquences. Dans le fond, on vise
le noir et on tue le blanc. C'est un peu de cette façon qu'on examine ou
qu'on regarde ce projet de loi qui veut obtenir un bienfait pour les individus,
pour les gens. On veut leur enlever des problèmes pour la santé,
mais, d'un autre côté, on n'arrête pas la cause, on frappe
sur les résultats par rapport à ce qu'on recherche.
Donc, le transport en commun, et ce n'est pas le cas de Montréal
ni de Québec où il y a de bons transports en commun, mais pensons
à l'ensemble du Québec. Qu'on pense à la Gaspésie,
qu'on pense au Saguenay-Lac-Saint-Jean, qu'on pense à un peu partout
à l'extérieur des grands centres et vous allez voir qu'on n'est
pas gâté du côté des transporteurs publics. Donc, il
ne faudrait pas les handicaper d'une façon telle qu'on ne puisse pas
retrouver un certain profit parce que, lorsque le transport par autobus ne
fonctionne pas en régions, bien, là, on est rendu avec des avions
au virevent. On a perdu un paquet d'avantages avec la
déréglementation dans le transport aérien à mon
point de vue. Les distances ont allongé. Donc, il y a une baisse des
coûts, c'est évident, mais cette baisse des coûts
n'enlève pas la nécessité pour les gens de voyager d'un
endroit à un autre. Assurément, le transport par autobus est un
transport de masse. C'est un transport qui répond à des besoins.
C'est un transport sécuritaire, mais, encore là, il faudrait
qu'on donne la chance aux gens qui se sentent lésés par cette loi
qui, tantôt, les pénaliserait par rapport à la fumée
qu'ils pourraient inhaler. Ces gens-là pourraient être
écoutés et l'Opposition pourrait avoir la chance, aussi, de
parler avec eux. Je crois à la bonne volonté du ministre, mais,
d'un autre côté, je pense que l'Opposition a aussi des droits au
même titre que le gouvernement dans cette question-là.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
intervenants? M. le ministre.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: Brièvement, pour le Journal des
débats, je vais répéter que j'ai rencontré
l'Association des propriétaires d'autobus, que mon bureau est en contact
constant avec eux, qu'ils travaillent à nous offrir des suggestions que
nous avons accepté de considérer avec la plus grande ouverture,
que les articles 12 et 13 n'arriveront pas avant un bout de temps, qu'on est
prêt à considérer ce qu'ils nous ont suggéré.
Donc, pour toutes ces raisons et parce que c'est l'Association des
propriétaires d'autobus qui m'a fait remarquer que c'était
à sa demande, au cours des années, qu'elle voulait
elle-même avoir du gouvernement une assurance qu'il y aurait une loi qui
obligerait, au moins à 50 %, les compagnies d'autobus à installer
des sièges pour non-fumeurs dans les autobus pour permettre cela plus
facilement, aujourd'hui, ils sont prêts à aller encore plus loin
que cela. Ils sont en train de nous offrir une coopération tout à
fait constructive que nous avons acceptée, de part et d'autre. Pour ces
raisons-là, nous ne pouvons que rejeter la motion de l'Opposition.
M. Doyon: M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): Oui, M. le
député de Louis-Hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Merci, M. le Président. Je voudrais simplement
discuter du désagrément causé par les gens qui sont
habitués de fumer et qui ont de longues distances à parcourir. II
ne faudrait pas oublier que, a contrario, les gens qui ne supportent pas la
fumée et qui ont un long voyage à faire sont incommodés
d'autant plus longtemps par cette même fumée d'une personne qui
fume à côté d'eux. C'est important aussi de
considérer les problèmes causés à des gens qui ont
un long voyage à faire. Qu'est-ce qu'il y a, vous?
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. Je vois le
député de Terrebonne qui est en train de faire des gestes
complètement incompréhensibles, ce qui lui ressemble d'habitude.
Il m'inquiète un peu, M. le Président. Si cela se poursuit,
peut-être qu'il faudrait songer à le faire soigner. Je ne sais
pas, c'est un petit peu inquiétant. Ce que je voulais dire, M. le
Président, c'est que...
M. Blais: Finissez, vous allez vous faire parler
après.
M. Doyon: Vous pouvez me parler. Vous ne m'énervez pas du
tout.
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Doyon: M. le Président, ce que je veux dire, c'est
que...
M. Blais: ...demander de retirer ses
paroles.
M. Doyon: ...en même temps que des gens peuvent être
incommodés...
M. Blais: ...de se faire soigner en commission.
M. Doyon: ...de ne pas avoir à fumer pendant un long
trajet, il y a aussi des gens qui ont ce long trajet-là à faire
et qui ne supportent pas la fumée. Par conséquent, on doit penser
à eux. Là-dedans, il faut essayer de trouver un compromis qui
serait acceptable et je pense que le ministre de l'Environnement a fait les
vérifications qui sont utiles de façon a s'assurer que tout le
monde est respecté. C'est cela qu'il faut avoir à l'idée.
Je comprends qu'on peut dire qu'un long voyage sans avoir la possibilité
de fumer, cela peut être ennuyeux pour ceux qui fument
régulièrement et qui fument beaucoup, mais il faut aussi penser
qu'il y a des gens qui ne fument pas et qui ont de longs voyages aussi à
faire. Ces gens-là, pendant ce long voyage, s'ils sont incommodés
tout le long du voyage pendant des heures par la fumée d'un voisin, ce
n'est pas mieux pour eux. Il faut aussi faire valoir ce point de vue qui semble
être oublié, parfois, dans les arguments qu'on entend. Cela me
rassure de voir que le ministre de l'Environnement est en consultation
constante avec les compagnies de transport, avec les compagnies d'autobus, avec
les transporteurs aériens, de façon à trouver un moyen qui
soit acceptable, et il y a une évolution à ce sujet.
Je pense que tout le monde peut trouver le moyen de préserver la
liberté d'autrui, la santé d'autrui, le confort d'autrui, tout en
s'adonnant à certaines habitudes qu'on a pu contracter. C'est dans ce
sens-là que je voulais aussi, pour les fins du Journal des
débats, m'assurer qu'on tenait compte, aussi, du point de vue de gens
qui sont peut-être moins bien organisés et qui sont moins bien
structurés, qui ont moins l'occasion de faire valoir leur point de
vue.
Je suis prêt à reconnaître que, lorsqu'on est
habitué à fumer deux paquets de cigarettes par jour, faire six
heures d'avion ou d'autobus sans avoir l'occasion de griller une cigarette,
c'est long. Mais quand on est habitué à ne fumer aucune cigarette
et qu'on est assis à côté de quelqu'un, un voisin de
siège ou quelqu'un dans une section voisine qui fume constamment, c'est
aussi un voyage très long. II faut en tenir compte. C'est dans ce sens
que je tenais à faire valoir ce point de vue pour qu'il en soit tenu
compte. Je pense qu'il en est tenu compte dans le projet de loi du ministre de
l'Environnement.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que la motion de M.
te député de Terrebonne pour "que l'Association des
propriétaires d'autobus du Québec soit immédiatement
entendue ou dans le plus bref délai possible" est adoptée?
Des voix: Adopté. Des voix: Rejeté. M.
Blais: Sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): Rejeté sur
division.
M. Blais: ...article 1, non, M. le Président.
Motion proposant d'entendre M. W. Talbot de
Cig-Arrête
J'aimerais faire une motion selon l'article 244, deuxième
paragraphe. Je demande à la commission d'inviter M. W. Talbot de
Cig-Arrête pour nous renseigner sur l'interdiction de fumer dans les
lieux publics et sur les méfaits de la publicité sur la cigarette
que ne réglemente pas le projet de loi 84 actuel.
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Je déclare la motion recevable.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Je remercie le
ministre d'avoir parlé un peu sur la proposition que j'avais faite
précédemment même s'il ne l'a pas acceptée. Je
remercie aussi le député de Louis-Hébert d'avoir
insisté beaucoup sur le respect qu'on se doit d'avoir pour les autres
personnes. Je le remercie d'avoir parlé de cela. J'aurais aimé
qu'il ait du respect pour moi aussi. Pour les autres, il en demande, mais, lui,
il n'en a pour personne. Alors, je le remercie.
M. Doyon: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Louis-Hébert.
M. Doyon: M. le Président, vous étiez à la
table à ce moment-là et vous avez été témoin
des gestes disgracieux du député de Terrebonne, alors que j'avais
à peine dit deux phrases. Le respect qu'il réclame de ma part
à son égard, il devrait commencer par le manifester
vis-à-vis de ses collègues. Je n'avais pas dit deux phrases qu'il
faisait des gestes laissant entendre que j'étais dérangé
ou que les paroles que je disais étaient des paroles qui n'avaient pas
leur raison d'être.
Le respect qu'il réclame à hauts cris, il devrait
être le premier à l'accorder aux autres. C'est son habitude de se
conduire avec une imbécilité et une stupidité semblables,
et je mesure mes mots, M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Je demanderais aux membres des deux côtés de la table...
Nous sommes en train...
M. Blais: M. le Président, question de règlement.
Vous allez faire retirer, je vous en supplie, les paroles à ce
monsieur.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: On ne traite pas nos confrères de malade ni
d'imbécile, c'est antiparlementaire. Lorsqu'on fait un signe du visage,
ce n'est pas enregistré. Il me semble qu'on devrait avoir assez de
jugement pour comprendre cela. "Imbécile" n'est pas un mot
parlementaire. Cela peut être vrai...
M. Doyon: Oui, c'est vrai.
M. Blais: ...mais ce n'est pas parlementaire.
M. Doyon: Je regrette, c'est vrai.
M. Blais: Je ne peux pas vous le dire, même si c'est vrai.
Je ne le dirai pas non plus, mais ce n'est pas parlementaire. On était
très bien avant que vous arriviez.
M. Doyon; Je vais rester ici aussi longtemps qu'il me plaira. C'est
simple.
Le Président (M. Saint-Roch): Nous allons suspendre les
travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 20 h 35)
(Reprise à 20 h 42)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission reprend ses travaux.
Je vais rendre ma décision. Je comprends qu'à ce moment,
vu l'heure avancé des débats - nous sommes également dans
une commission - il est sûr et certain qu'une espèce d'esprit
contradictoire peut se développer. J'ai remarqué des gestes, d'un
côté de la table; j'ai entendu des paroles de l'autre
côté. Je vais considérer l'incident comme étant
clos. Pour les meilleurs intérêts de nos travaux, je demanderais
la collaboration, s'il vous plaît, des deux côtés de la
table, pour faire en sorte que nous puissions acheminer et avancer et revenir
sur le débat de la motion que nous étions en train de
débattre au moment de la suspension.
M. le député de Terrebonne.
M. Blais: M. le Président, une question de
règlement.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: Je n'utiliserai pas les mots, mais par votre
décision, est-ce que cela veut dire qu'on peut dire à quelqu'un,
en commission parlementaire, qu'il est un malade et qu'il est imbécile?
Est-ce que votre décision veut dire cela?
Le Président (M. Saint-Roch): C'est parce que...
M. Blais: Mais c'est quoi?
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député...
M. Doyon: Sur la question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Louis-Hébert.
M. Doyon: M. le Président, vous venez de rendre une
décision et il est obligatoire que tous les membres - je suis prêt
à respecter votre décision, comme le côté de
l'Opposition - et le député de Terrebonne respectent votre
décision. C'est sans appel et on ne peut remettre en question votre
autorité et la décision que vous avez rendue, M. le
Président, sans vous porter offense. Je vous demande de demander au
député de Terrebonne de respecter votre décision, comme je
suis prêt à la respecter.
Le Président (M. Saint-Roch): Je pense qu'à ce
moment, le deuxième paragraphe de l'article 41 est clair. Alors, je vais
considérer l'incident comme étant clos et je vous recède
la parole, M. le député de Terrebonne, concernant la motion que
nous avions devant nous lors de la suspension; pour le point de
règlement en faisant appel au "fair play" des deux côtés de
la table pour la poursuite de nos débats.
M. le député de Terrebonne.
M. Blais: M. le Président, j'accepte votre
décision. C'est vous qui l'avez prise. Seulement, je me demande si je
dois me servir des mêmes mots, maintenant que vous en donnez la
permission. C'est ce que je vous demande comme explication.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le
député de Terrebonne, je pense que j'ai fait appel au
"fair play" des deux côtés de la table et je vais faire appel au
décorum minimum qu'on se doit d'observer pour la poursuite de nos
travaux. Ceci étant dit, M. le député de Terrebonne...
M. Blais: M. le Président, je vais vous faciliter le
travail en étant plus rationnel que certaines personnes, voilà!
C'est plus...
Le Président (M, Saint-Roch): La motion, M. le
député de Terrebonne?
M. Blais: C'est vrai, elle est recevable.
Le Président (M. Saint-Roch): Oui, je l'avais
déclarée recevable, M. le député de Terrebonne.
M. Blais: Je vous remercie beaucoup. Eh bien, voilà! Vous
savez, M. le Président, que le tabac en soi est un pollueur et que
devant le palais de justice à Québec, il y a la statue de Bolivar
et s'il y a beaucoup de monde autour qui fume, cela pourrait briser son image
et j'aimerais qu'on fume moins autour d'elle. J'espère que cette statue
sera considérée comme faisant partie d'un lieu public pour que
son regard ne soit trop dilué et que ceux qui ont un faible pour elle la
reconnaisse de façon continue. Ma proposition se lit comme suit:
Demander à M. Talbot de Cig-Arrête, de venir nous instruire sur le
fait que ta publicité n'est pas régie dans ce projet de loi.
Qu'il vienne nous expliquer les raisons pour lesquelles il aimerait que cette
commission se saisisse d'une argumentation valable pour que la publicité
soit traitée dans ce projet de loi.
M. le Président, j'ai vraiment peine à me contenir. Je
suis vraiment furieux. Je me plie à votre décision, cependant je
suis furieux. Je vais essayer d'être bien calme, mais j'ai beaucoup de
difficulté, j'espère que vous comprenez la nature humaine. M.
Talbot est un très grand spécialiste, un type qui connaît
bien ses dossiers et il nous avise... Vous avez certainement vu, M. le
Président, vous qui êtes au courant de tout ce qui concerne cette
loi puisque vous en présidez les destinées, que ce monsieur... Il
y a un article d'ailleurs dans Le Soleil qui a paru à son sujet
pour faire une mise en garde. Cette mise en garde, je vais en lire un bout: "Ce
n'est qu'illusion, avertit M. Talbot, président du mouvement
Cig-Arrête. Pendant que le ministre de l'Environnement propose une loi
propre à rassurer les non-fumeurs sur le respect de leurs droits, le
ministère de la Santé et des Services sociaux rejette au panier
une pétition de 50 000 signataires demandant entre autres que la
publicité du tabac faite auprès des jeunes soit interdite."
En fait, dans ce projet de loi nous voulons protéger les
non-fumeurs et aussi protéger les fumeurs... Le titre de la loi ne le
dit pas, mais même si le titre de la loi ne le dit pas nous allons,
à la toute fin, demander d'en changer le titre pour que les deux groupes
de la société soient compris. Ce n'est pas une réflexion
imbécile, c'est une réflexion normale, nous voulons que les
non-fumeurs et les fumeurs soient respectés. Cependant, il est
extrêmement difficile, comme vous le savez probablement tous, vous avez
fumé un jour ou vous avez eu la tête fumante, on ne sait jamais,
cela nous arrive parfois... Moi, j'ai fumé pendant quarante et un ans,
M. le Président, et je viens d'arrêter. Cela me rend un peu plus
irascible qu'à l'accoutumée et les quolibets infantiles me vexent
un peu plus que pendant que je fumais. Surtout lorsque les quolibets sont
infantiles. C'est lorsqu'on est tout jeune qu'on ne doit pas contracter cette
habitude de fumer, c'est quand on est jeune, soit physiquement ou
intellectuellement, l'un ou l'autre. Lorsqu'on est tout jeune physiquement et
que la publicité nous entraîne vers ce qu'on appelle l'habitude de
fumer c'est là que le dommage se fait et que nous prenons nos mauvaises
habitudes.
C'est la même chose pour le goût et pour les relations
sociales. C'est inné chez soi. Cela nous habite ou cela ne nous habite
pas. On est social ou on ne l'est pas. On comprend les autres personnes ou on
ne les comprend pas. On contracte, quand on est jeune, cette mauvaise habitude
de fumer à cause de cette publicité de même qu'on s'accepte
même si on ne partage pas les mêmes idées. C'est tout jeune
que cela se fait. Rendu à un certain âge c'est impossible, cela ne
peut pas revenir. C'est viscéral. C'est pour cela que cette habitude de
fumer et la publicité qui entraîne les jeunes à fumer
devrait peut-être faire partie intégrante de ce projet de loi.
Comme je vous le disais, cela faisait 41 ans que je fumais et j'ai
cessé il y a trois semaines. Ce n'est pas long trois semaines, cela ne
fait pas longtemps. Moi et certaines personnes de mon âge avons - je ne
parle pas des jeunes de l'autre côté mais des gens de 55 ans je
pense qu'il n'y en a pas d'autres à la table. Oui, il y a mon
confrère ici. Nous sommes deux vieux. On s'excuse auprès des
jeunes - été victimes de la publicité, lorsque nous
étions adolescents, selon laquelle fumer devenait un signe de
virilité. Tu es un homme, tu fumes. C'était comme cela. Ou, tu es
un gars, tu parles mal ton français. C'est exactement pareil. Deux
colonialismes. Le colonialisme linguistique et le colonialisme du muscle ou de
l'apparence. Les motards de la fumée. Eh bien, si nous
réglementions immédiatement. M. le ministre, je pense que sur
cela on pourrait peut-être s'entendre assez facilement pour avoir un
amendement ou un article spécial dans la loi qui rendrait cette
loi beaucoup plus productive. Je suis sûr que le butcaché sous cette loi c'est qu'il y ait le moins possible de gens qui
fument tout en respectant les fumeurs bien sûr. Je suis persuadé
que vous avez ce respect.
Pour atteindre votre but si vous acceptiez un article qui défende
la publicité à peu près sous toutes ses formes - dans les
écoles, dans les dictionnaires, dans les journaux, sur les statues
fussent-elles de Bolivar - par tous les moyens à tous les endroits
où on peut apposer de la publicité. Si c'était
défendu par ce projet de loi, j'ai bien l'impression que les jeunes
seraient les premiers à bénéficier du but visé et
ne seraient pas portés à fumer ou le seraient moins. Alors, ce M.
Talbot ou M. Talbotte -selon que l'on vienne de Québec ou de
Montréal, la prononciation est différente selon les endroits
d'où l'on vient comme les attitudes d'ailleurs, les façons dont
on a été élevé sont différentes - a dit: Le
geste extrêmement positif, l'oeuvre social et humanitaire posé par
M. Cadrin, proprio des pharmacies Brunet. Vous savez tous que les pharmacies
Brunet ont décidé de dire aux fumeurs de prendre leur pilule dans
le sens que les pharmacies Brunet ne vendent plus de cigarettes. Ils ont
décidé de ne plus vendre de cigarettes, un geste de
réaction antipublicitaire pour la cigarette tout en étant un
geste de publicité pour montrer que dans des endroits où on va
chercher des remèdes pour les malades... Vu que j'ai mai à la
gorge je me suis fait dire que j'étais malade tantôt; je devrais
peut-être passer chez Brunet. Si je passe chez Brunet j'aurai tout ce
dont j'ai besoin, parce que je ne fume plus depuis trois semaines. Ce geste, au
début et actuellement, est anticommercial pour les pharmacies Brunet. Je
suis persuadé que sur une longue période, une période
beaucoup plus longue, le temps de passer è travers deux ou trois
dictionnaires, à travers sa vie, je suis persuadé que là,
cela commencerait à rapporter au bout d'un certain laps de temps. Les
gens iraient plus à cette pharmacie sachant que ce pharmacien s'applique
plus à trouver un moyen de soigner les gens qu'à leur vendre des
cigarettes qui sont nuisibles à la santé.
On sait que cela coûte environ 1 000 000 000 $ par année de
soins. 1 000 000 000 $, un Stade olympique par année, au prix exorbitant
qu'on l'a payé. 1 000 000 000 $, un Stade olympique qui, normalement,
aurait dû coûter 200 000 000 $. Il a coûté 1 000 000
000 $, on sait pourquoi. C'est un stade par année. D'ailleurs, sur le
paquet de cigarettes, il y a la taxe, cette fameuse taxe olympique que la
pharmacie Brunet ne perçoit plus parce qu'elle ne veut pas que les gens
endommagent leur santé dans un endroit comme le leur, qui est
censé servir de base de médicaments pour soigner les gens.
M. Talbot: de Cig-Arrête, trouve, pour sa part, que ce
projet de loi n'est pas assez sévère. Je ne vous dis pas que je
suis d'accord avec son étude du projet de loi, ce n'est pas ce que je
dis. Le titre du Soleil était: Le tabagisme dans les lieux publics -et
en grosses lettres - QUE DE LA FUMEE AUX YEUX DES NON-FUMEURS, selon
Cig-Arrête. Cig-Arrête, c'est C,i,g. Je le dis pour ceux qui
transcrivent les débats. Comment appelle-t-on cela?
Une voix: Le Journal des débats.
M. Blais: Le Journal des débats, merci, madame.
C'est Cig-Arrête, comme le verbe arrêter à l'indicatif de la
troisième personne du singulier, avec un accent circonflexe. C'est comme
cela que cela s'écrit.
Je ne suis pas d'accord avec ce monsieur, je ne trouve pas que ce projet
de loi n'est pas assez sévère. Comme il se défend de la
fumée à tout venant et à tout prix, il trouve que ce
projet de loi ne l'est pas assez. Alors, il dit que ce projet de loi
-d'ailleurs, là-dessus, je le rencontre - ne s'oppose pas aux fumeurs
mais à la fumée. Je n'avais pas lu cet article. En Chambre,
pendant une vingtaine de minutes, quand on a parlé de ce projet de loi -
M. le Président, vous avez certainement écouté mon
discours à ce sujet-là, je sais que je suis très couru et
vous l'avez certainement bien écouté - c'était justement
la base de mon petit laïus, que ce projet s'attaque aux fumeurs et non
à la fumée. Et c'est un fait. Je suis d'accord avec M. Talbot
là-dessus, quand il dit que ce projet de loi s'attaque aux fumeurs et
non à la fumée.
Ce n'est tout de même pas le fumeur lui-même qui est
nuisible à la santé, c'est la fumée qu'une personne
projette, que ce soit dans un lieu public ou... Ne faites pas cela, je vais le
dire au président. Ne faites pas cela, c'est dangereux. Vous bougez la
tête, c'est un signe que vous me faites. Il y en a un qui a fait une
crise à cause de cela tantôt. Excusez-moi!
Dans ce projet de loi, on s'attaque aux fumeurs dans les endroits
publics seulement, on ne s'attaque pas aux fumeurs - ce qui n'est pas correct,
on devrait s'attaquer à la fumée - sur les lieux de travail car
c'est là que les gens sont ensemble le plus longtemps. À la
maison, personne ne va interdire à quelqu'un de prendre un verre ou de
fumer, c'est sûr; le plus grand laps de temps que l'on passe en
société, en dehors de nos maisons, c'est au travail. Dans ce
projet de loi, on ne touche pas du tout au lieu de travail, sauf au parlement,
bien sûr, qui est, pour certaines personnes, un lieu de travail et pour
d'autres un lieu d'amusement. Pour beaucoup de personnes, c'est un lieu de
travail. Il n'est pas nécessaire d'avoir un dictionnaire pour comprendre
cela, c'est un
lieu de travail.
M. Talbot relève cependant que les progrès sont maigres en
l'absence d'intervention gouvernementale bien sentie. Les progrès sont
très minces, très peu perceptibles, autrement dit, maigres,
pleutres. (21 heures)
La loi proposée pour interdire de fumer dans des lieux publics ne
fera pas grand mal aux compagnies de tabac. En gros, tant mieux! Parce que je
ne veux pas de mal aux compagnies et que je sache, je ne crois pas que M. le
ministre, vous soyez un étrangleur de compagnies de tabac. Ce n'est pas
là le but visé. Visez la quiétude des non-fumeurs, la
quiétude des fumeurs dans une douce paix tranquille et un savoir-vivre
social le plus élaboré possible. Je suis persuadé que
c'est ce que vous cherchez.
Une grande partie de l'application de ce projet de loi relèverait
des municipalités. C'est là que M. Talbot nous dit quelque chose
d'une extrême importance. Et pour cela, M. le ministre, j'aimerais que
vous soyez tout ouïe. J'aimerais que vous disiez: Qu'entends-je?
"Qu'oudiai-je" et que vous compreniez bien, que vous soyez tout ouïe. Si
vous avez quelqu'un qui prend des notes, j'aimerais bien que votre
secrétaire vous dise: "Que télétypai-je" afin qu'elle
sache vraiment ce qu'elle dactylographiera. "Que télétypai-je"?
Qu'entends-je? et qu'elle ne me dise pas à la fin de la sortie que je
vais faire là: D'où "sors-je"? Je voudrais qu'elle sache
immédiatement où je m'en vais.
Les municipalités qui feraient des règlements pourraient
faire 1500 règlements différents dans autant de
municipalités du Québec et personne ne les respecterait à
cause du manque d'uniformité d'une place à l'autre. Cela, j'ai
tendance à le croire, mais je vous dis que je suis plein de bonne
volonté. Si jamais, M. le ministre, vous me faisiez un petit
exposé sur cela, j'essaierais vraiment, du fond de moi-même, de
comprendre. D'un autre côté, j'espère que ceux qui
travaillent avec vous... Je vois les experts tourner des feuilles, je suis
persuadé qu'ils cherchent une façon de contourner ces 1500
règlements en devenir parce que cette loi susciterait 1500
règlements en plus des règlements des institutions
gouvernementales, en plus des règlements des commissions scolaires, en
plus des règlements de tous les centres hospitaliers et des centres de
soins sociaux et ensuite la diversité d'une école à
l'autre, d'une municipalité à l'autre.
Je ne sais pas si vous voyez l'avalanche de réglementations pour
un gouvernement qui a dit qu'il voudrait déréglementer. D'un coup
sec, on vient d'en faire 2000 ou 3000, par une seule phrase. Chaque ville,
village, hameau, petit bled, pourra faire sa propre réglementation. Oui,
même un hameau, un petit bled, même cela. Même dans les
igloos,
M. le Président, si on les formait en municipalités, on
pourrait faire son petit règlement. J'ai rien contre cela, mais comment
fera-t-on pour se promener dans ce Québec? Est-ce que certaines
municipalités défendront de fumer dans les voitures qui passent
dans leur municipalité? Voyez les infractions en devenir. Où s'en
va-t-on s'il n'y a pas une base de réglementation?
Je suis persuadé que mon confrère de Jonquière qui,
il n'y a pas si longtemps, était encore maire et pas n'importe quel, un
des principaux maires du Québec, voit cela avec un drôle d'oeil
cette multiplicité de réglementations. Je le voudrais le grand
défenseur des municipalités dans ce dossier afin qu'au moins le
ministère mette une base pour qu'il y ait une certaine uniformité
dans tout le Québec sur cette réglementation. Sinon, je suis
obligé de donner raison à M. Talbot. Si le ministre ne veut pas
que je lui donne raison, ma proposition est là. Je lui demande de venir
à la commission pour que nous l'interrogions et pour lui demander de
quelle façon on peut corriger certaines choses tout en respectant les
idées du ministère de l'Environnement, les idées de
l'Opposition, les personnes et les municipalités en même temps. Il
faut que tout cela soit concilié. Il faut qu'ensemble, nous fassions
quelque chose qui soit positif. Si on prend les éléments un
à la suite des autres, il semble y avoir divergences d'idées et
une impossibilité d'arrimer les choses dans une reconnaissance de droit
et de liberté de l'ensemble de la population ou s'il y a liberté
de droit, il y a impossibilité de respecter les règlements en
passant d'une ville à l'autre.
Alors, les remarques de M. Talbot qui sont rapportées dans le
Soleil du 24 mai 1986 me semblent de très bon aloi dans le
contexte actuel. M. Talbot dit: Qu'adviendra-t-il de la demande faite en
janvier dernier è la ministre, Mme Thérèse Lavoie-Roux,
concernant la publicité des fabricants de tabac auprès des
jeunes? Au panier, dit-il, encore! Posant la question et donnant la
réponse en même temps.. Où ira la recommandation faite
à votre consoeur, Mme Thérèse Lavoie-Roux, ministre de la
Santé et des Services sociaux dans laquelle on demandait de faire des
règlements afin de ne pas favoriser l'usage du tabac chez les
jeunes?
Dans mon comté, il y a une école où je suis
allé il n'y a pas longtemps, qui s'appelle une école sans
fumée. Dans cette école, il est strictement défendu de
fumer, cela fait quatre ou cinq ans. Il n'y a aucune publicité. Les
professeurs acceptent de ne pas fumer dans cette école. Alors, c'est
positif. Je suis allé là, il y a à peu près un mois
et c'est là que j'ai appris la tolérance. La tolérance,
ça s'apprend dans tous les domaines. Quand j'y suis allé, je
fumais. J'ai
dit aux élèves: On m'a demandé de venir ici pour
cette cérémonie qui marque la troisième année de
votre école qui s'appelle l'école sans fumée. Je suis un
type qui fume trois paquets de cigarettes par jour. Je suis heureux que vous
compreniez et que vous ayez de la tolérance pour ceux qui fument. Moi,
par tolérance pour vous, je ne fume pas à l'intérieur de
votre école. Ces gens étaient excessivement contents. Ce sont des
jeunes. Ils se sont mis à applaudir quand je leur ai avoué que je
fumais, mais que je leur ai demandé de me respecter. Alors, si on
regarde cela, moi, je ne fumais pas dans cette école. Je n'avais pas
besoin d'un moyen coercitif pour m'empêcher de fumer, parce que je voyais
que cela s'adressait aux jeunes et comme un exemple à leur donner de ne
pas prendre une mauvaise habitude. Alors, je m'y pliais de bonne grâce,
même si ce projet de loi n'était pas adopté. Dans certaines
écoles ou certaines commissions scolaires, on défend de fumer.
Cela peut arriver qu'on défende de fumer dans certaines écoles,
les commissions scolaires sont libres de le faire. Entendez-bien: libres!
Alors, il y a des pénalités prévues dans la loi, de
grosses pénalités. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire
d'avoir une loi aussi coercitive. Ce n'est absolument pas nécessaire.
Les gens de façon générale sont des personnes de bonne
volonté et se plient aux règlements lorsque ces règlements
sont pour le bien, la sécurité, la santé et le
mieux-être des citoyens et des citoyennes et, surtout, lorsque cela
s'adresse aux jeunes.
M. Talbot nous dit ceci, après avoir parlé de Mme
Thérèse Lavoie-Roux et de la publicité des fabricants de
tabac auprès des jeunes: Au panier encore, posant la question et donnant
la réponse! Au ministère, M. Pierre Cloutier, de la Direction de
la planification de la promotion de la santé répond que la
pétition a été retenue de même que la plupart de ses
éléments. La proposition a été retenue, dit un haut
fonctionnaire des services sociaux. Lorsqu'on lit ce projet de loi, j'ai bien
l'impression que la rétention n'a pas été très
forte. On ne voit nulle part quelque chose qui puisse ressembler à une
limitation de publicité, à moins que j'aie mal lu ou si on a
retenu la plupart de ces éléments, je ne peux voir où.
J'aimerais bien à ce sujet que les grands experts m'indiquent
tantôt à quel endroit le haut fonctionnaire des services sociaux
peut dire que la pétition a été retenue de même que
la plupart de ses éléments. Je ne vois guère d'endroit
où trouver cela dans ce projet de loi, à moins que je ne sache
pas lire; c'est fort possible. On m'accuse de bien des choses; on peut
m'accuser de cela également, une fois partis. Mais j'ai l'impression que
je sais parler et lire et comprendre les êtres humains. Dans ma lecture,
ici, je ne vois rien qui puisse me dire qu'il y a quelque chose
là-dedans qui empêche la publicité. Si je continue: La
publicité, c'est un dossier politique. On est assez mal pris avec cela:
d'un côté, une grosse pression populaire contre la cigarette - et
c'est vrai - de l'autre, le lobby des compagnies de tabac qui est assez fort
et, il faut l'admettre, nous, nous essayons de faire de l'éducation
populaire.
Là, il y a de l'exagération, je crois. Personnellement,
j'ai vu des requêtes des quatre grands de la cigarette. Je sais qu'ils
ont également contacté le groupe de la protection des fumeurs,
aussi curieux que cela puisse paraître! En 1986, on a un groupe qui
s'appelle l'Association de la protection des fumeurs. Ils sont venus me voir.
Ces gens ne s'opposent pas du tout à ce que les gens qui ne fument pas
aient leurs endroits où on les respecte. Ils veulent, cependant, que les
gens qui fument puissent avoir leurs endroits également pour fumer et
insistent pour un système qui s'attaque à la fumée et non
aux fumeurs. Là-dessus, je suis complètement d'accord avec
eux.
M. Cloutier - c'est toujours le monsieur du ministère de la
Santé et des Services sociaux - croit qu'une loi telle que
demandée par les non-fumeurs ne viendra qu'après que ceux-ci
auront multiplié les campagnes et les luttes en ce sens; ce qui fait
dire à Robert Talbot de Cig-Arrête qu'une telle attitude est
hautement amorale de la part d'un ministère pour qui la santé
publique devrait primer.
Là-dessus, je tiens à dire que le ministre de
l'Environnement est passé pardessus l'attitude du ministère de la
Santé et des Services sociaux. Cependant, j'aurais aimé qu'en
sautant par-dessus, il accroche, en passant, les éléments de la
pétition sur la publicité que le ministère de la
Santé et des Services sociaux disait avoir retenus pour le bien de
l'ensemble des citoyens. Mais il ne semble pas les avoir retenus. J'aurais
aimé qu'il retienne cette partie.
En tout cas, on va garder l'oeil sur le déménagement de
Rothman qui ferme à Toronto, pour se grossir à Québec. Il
ne faudrait pas que cela se fasse avec l'aide de subventions gouvernementales,
alors que nous ne pouvons avoir un sou pour des campagnes antitabagisme,
dit-il. En gros, cette phrase est très significative et c'est de bon
aloi.
Le gouvernement fédéral vient de donner environ 7 000 000
$ à 8 000 000 $ à la région de Joliette pour
réorienter la production des tabaculteurs, les agriculteurs du tabac,
vers d'autres produits. Eh bien, il ne faudrait pas que les compagnies de
cigarettes aient, elles non plus, des subventions pour venir s'installer alors
qu'il est vrai que les gouvernements ne font aucune publicité contre le
tabac! Ils en font contre l'alcool et je les félicite, mais contre le
tabac, aucune.
M. le Président, vous me faites signe. Combien de temps me
reste-t-il? Une minute. Merci beaucoup, je vais prendre la minute. Je
recommanderais au ministre de regarder de façon constructive avec
l'Opposition et les membres ministériels - il y en a certainement qui
sont capables de coopérer de l'autre côté - pour essayer de
mettre une clause, un article qui toucherait à la publicité, qui
défendrait de faire de la publicité, afin que les jeunes ne
subissent pas cette tare qu'est la cigarette, cette habitude néfaste
pour la santé et pour l'ensemble des gens qui nous environnent. Merci,
M. le Président, de m'avoir écouté avec autant
d'attention. (21 h 15)
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Terrebonne. M. le député de
Jonquière.
M. Francis
Dufour
M. Dufour: M. le Président, on assiste assez
régulièrement, aujourd'hui, surtout en 1986, à la
surspécialisation. Il y a des gens qui se spécialisent dans le
traitement de ceux qui sont trop gras, il y en a aussi qui vont se
spécialiser pour vendre de l'enthousiasme et il y en a d'autres qui vont
se spécialiser pour arrêter de fumer la cigarette et d'autres vont
utiliser la médecine douce au lieu de la médecine un peu plus
toxique, avec plus de médicaments ou de remèdes. Il est certain
que, dans cette résolution, non seulement se contente-t-on d'appeler des
gens qui sont pour l'usage du tabac probablement réglementé
à l'intérieur d'édifices publics ou de véhicules
publics, mais aussi - c'est là le sérieux de l'Opposition je
pense - c'est qu'on est prêt à écouter des gens qui nous
semblent radicaux à première vue. C'est-à-dire que ces
gens ne veulent pas voir de cigarette du tout et ils ne peuvent pas voir de
fumée non plus. Ces gens se spécialisent dans une position
extrême. Ils ne seront jamais contents. C'est évident.
Je pense que le rôle d'un gouvernement, c'est d'être
modéré ou d'essayer d'être modéré ou
d'essayer de concilier des positions extrêmes. Mais c'est un
début. Il faut bien penser, quand on met une machine en marche, on ne
sait pas jusqu'à quel point elle va s'emballer ou qu'elle va prendre de
la vitesse. Je pense que, par rapport à ce qu'on a toujours connu, c'est
une position nouvelle et qui semble être d'une urgence très forte
et en vertu de laquelle on devrait adopter ce projet de loi le plus rapidement
possible. Malgré cela, je persiste à croire qu'il y a des gens ou
des groupes de gens qui doivent être entendus à ce sujet. Non
seulement les gens qui sont contre la réglementation ou le projet de loi
qui est devant nous, mais aussi les gens qui voient cela différemment.
Je pense que c'est primordial. En même temps, je pense que c'est une
façon de démontrer une certaine tolérance par rapport
à ce qui existe.
Je suis convaincu que ces organismes peuvent certainement nous donner
des points de vue que nous ignorons probablement. Même si on a
l'impression que tout le monde est favorable à cet arrêt,
même si on possède des statistiques très solides, etc., il
faut se méfier parce qu'un gouvernement ne peut pas fonctionner par
sondage. Il ne peut pas fonctionner seulement par statistiques. Il faut aussi
qu'il se base sur le gros bon sens, qu'il se base sur l'évolution d'une
société. On parle d'arrêter de fumer, mais Dieu sait s'il y
a d'autres phénomènes qui font mal et qui détruisent aussi
la santé des individus. Non seulement la santé des individus,
mais qui détruisent aussi les richesses naturelles, mais ceux-là
sont difficiles à contrôler.
Je viens d'une ville industrielle. Si on avait voulu appliquer une
réglementation très sévère, on aurait fermé
l'usine. Ce qui fait que les gens ont appris à vivre avec cette
pollution. Il y a des dépotoirs toxiques dans notre milieu. Il y a de la
fumée. Il y a aussi de la poussière. Dieu sait si je le sais
parce que je travaillais dans un laboratoire qui était justement dans
l'environnement. Je sais donc que ces poussières ou ces senteurs causent
des dommages à la végétation, aux individus, aux
propriétés.
Mais avec le présent projet de loi, on a le coupable. On dit que
c'est le fumeur qui est vraiment la cause de tous les maux. Celui-là on
peut le prendre rapidement. Celui-là ne comporte pas de danger. On sait
bien qu'une industrie peut disparaître, mais il y a encore une marge de
manoeuvre et cette industrie va quand même continuer. On s'attaque encore
non pas à la racine, mais surtout aux effets que cela peut produire.
Le groupe Cig-Arrête a fait une grande publicité
là-dessus et je pense qu'il est important que cette publicité
continue pour que les gens se disent qu'il n'est pas correct de fumer, qu'on
devrait essayer de réglementer cela, qu'on devrait arrêter
volontairement de fumer et pas nécessairement avec des moyens
coercitifs. Encore là, on sait quand cela commence, mais on ne sait pas
quand cela finit. Il me semble trop facile de pouvoir réglementer
l'habitude de fumer, parce qu'on les a, eux, les fumeurs.
L'autre question que l'on peut se poser est à savoir si on sera
vraiment capable d'appliquer cette réglementation? Est-ce qu'il y a
vraiment suffisamment d'agents de la paix ou d'individus qui vont pouvoir
l'appliquer? Encore là, si on fait des règlements et qu'il n'y a
pas suffisamment d'individus pour la faire respecter, à quoi cela sert
de mettre des gens dans un certain sentiment ou un complexe de
culpabilité? On
culpabilise un peu l'individu qui va se sentir poigné en disant:
Je ne devrais pas fumer, parce que ce n'est pas bon pour ma santé, mais
ce n'est pas bon non plus pour la santé des autres. C'est une double
pénalité ou double remords.
Dieu sait si on a vu, je pense que tous les gens autour de la table ont
vu des gens qui ont fumé dans des endroits où c'était
défendu. Que ce soit au cinéma ou dans des moyens de transport,
j'ai vu régulièrement des gens passer à côté
de la réglementation. En principe, c'est une loi excellente, mais,
encore là, doit-on aller aussi loin que de vouloir l'adopter envers et
contre tous? Ne serait-il pas bon de réfléchir, parce qu'on a
quelques amendements de votés, et on se fait passer le rouleau
compresseur. C'est évident que l'on respecte les règlements de la
commission parlementaire. On donne le temps qu'il faut, mais, en fait, on
s'adresse à des gens qui ne veulent rien entendre et qui ne veulent pas
comprendre que l'Opposition a un travail sérieux à faire et qui
doit être fait.
C'est ce qui est important dans un Parlement, c'est que l'Opposition
puisse donner la voix à ceux qui n'en ont pas. C'est ce que l'on appelle
la majorité ou la minorité silencieuse. Il y a des gens qui
voudraient s'exprimer, mais qui n'ont pas la chance de le faire. Qu'est-ce que
l'on fait dans nos amendements? On amène des gens ou on suggère
au ministre d'amener des gens è venir nous dire ce qu'ils en pensent. On
ne prétend pas avoir la vérité. Il y en a qui le
prétendent, mais pas dans l'Opposition. On essaie d'écouter ce
que les autres ont à dire. Les lois seront d'autant bonnes ou meilleures
que l'on aura écouté plus et mieux, et que l'on aura pris le
temps. C'est important de mettre du temps. Qu'est-ce qui donne de la valeur
à une institution et à des lois? C'est quand on a donné
à tout le monde la chance de pouvoir s'exprimer et que l'on recherche
à l'intérieur de cette loi, sinon un consensus complet, au moins
un large consensus, et, en même temps, que la loi soit acceptée
par l'ensemble des intervenants ou par la très grande majorité
des intervenants. Même si on nous affirme que, pour cette loi,
d'après les statistiques ou d'après les sondages que l'on a, tout
le monde est favorable, je suis loin d'être convaincu, M. le
Président, que tout le monde est conscient des particularités
d'une loi.
Si les lois étaient aussi claires et aussi complètes, je
vous passe un papier que l'on n'aurait pas besoin d'avocats, mais, comme les
lois ont toujours des facettes que les gens ne voient pas à
première vue, cela ouvre la porte à des contestations et à
des prises de position des individus, ce qui fait que l'on a besoin de
tribunaux et de lieux où on pousse des débats le plus fortement
possible, et en même temps on ouvre la place à la contestation. Je
suis convaincu que l'amendement que l'on propose et qui n'a pas juste pour
effet d'amener les intervenants qui sont contre le projet, mais aussi des gens
qui sont pour le projet, aurait pour effet de bonifier cette loi et de
respecter le plus possible les individus et ceux qui sont
intéressés, comme Cig-Arrête. L'Opposition veut
écouter non seulement les gens qui sont pour la loi, mais aussi ceux qui
sont contre ou qui voudraient que cela aille plus loin. C'est cela faire preuve
d'ouverture par rapport à cette loi qui, à mon point de vue, va
certainement amener dans son application quelques problèmes, sinon
beaucoup.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Jonquière. Y a-t-ii d'autres interventions?
M. Lincoln: M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: J'ai un très bref commentaire. Je ne ferai pas
de commentaires sur les discours de l'Opposition. Ce sont les discours que
chacun choisit de faire à sa façon. Je comprends, pour l'avoir
vécu moi-même dans l'Opposition, que les "filibusters" font partie
de la tradition parlementaire, de la stratégie, mais je commence
à comprendre maintenant que ce n'est pas un "filibuster" pour la loi
même, mais c'est une partie d'une stratégie plus globale dont
cette loi peut être l'otage. Cela aussi, c'est de bonne guerre. Tout ce
que je pourrais dire en passant, c'est que ces stratégies se jouent des
deux côtés. Il y a beaucoup de gens qui nous écoutent. Il y
a beaucoup de gens qui savent ce qu'on fait ici. Présentement, je dis
qu'il y a une majorité grandissante de gens au Québec qui suivent
les travaux de cette loi, qui la demandent d'une façon très
majoritaire. Ils vont se poser des questions sur tous les commentaires que je
vais faire. On va écouter un autre laïus pour 40 minutes et ensuite
il y aura une autre motion.
Enfin, cela va. On entendra avec la plus grande attention possible les
discours tellement illimités de nos collègues de
l'Opposition.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre.
J'appelle maintenant la motion de M. le député de Terrebonne et
qui se lit comme suit: "Je demande à la commission d'inviter M. W.
Talbot, de Cig-Arrête, pour nous renseigner sur l'interdiction de fumer
dans les lieux publics et sur les méfaits de la publicité de la
cigarette que ne
réglemente pas la loi 84 actuelle". Est-ce que la motion est
adoptée?
Une voix: Rejeté.
M. Blais: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): Rejeté, sur division,
j'imagine.
M. Blais: Sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que je dois conclure
que j'appelle maintenant, pour étude...
M. Blais: Non, M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
Motion proposant d'inviter les quatre grands de
l'industrie du tabac
M. Blais: M. le Président, étant donné que
nous avons très à coeur cette loi, que nous avons hâte
qu'elle soit adoptée et que nous aimerions qu'elle soit adoptée
dans le meilleur contexte possible et le plus bonifié passible,
j'aimerais que nous soyons éclairés sur différentes
facettes.
M. le Président, selon l'article 244, paragraphe 2, je demande
que la commission invite les quatre grands de l'Industrie du tabac afin qu'ils
viennent nous renseigner sur les conséquences de cette loi sur leur
production et leur prévision de développement malgré cette
loi.
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît! Je déclare la motion recevable.
M. Blais: Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Yves Blais
M. Blais: Je suis très heureux, M. le Président,
que notre système parlementaire permette à l'Opposition d'amener
des demandes de cette sorte pour que la commission soit renseignée sur
différentes facettes, comme je disais tantôt, des intervenants
éventuels dans ce projet de loi. Je regrette amèrement, quand
même, que le parti au pouvoir, profitant de son nombre imposant, refuse,
de façon assez systématique, à moins qu'on me dise au tout
début comme cela qu'on ne semble pas vouloir faire venir personne pour
nous éclairer, mais qu'on ouvre les vannes à un moment et qu'on
accepte les revendications justifiées de l'Opposition pour discuter avec
des gens de l'industrie du tabac et de ceux qui s'opposent à la
fumée, à la cigarette, aux conséquences et à sa
publicité.
Jusque là, M. le Président, j'ai essayé, à
quelques reprises, depuis le tout début, de faire intervenir quelques
personnes très intéressées à la chose. Je l'ai fait
en vain. Je ne voudrais pas, malgré une espèce de grippe qui me
tenaille de même que mon confrère, que les efforts que nous
faisons ici pour éclairer le ministre dans cette commission
parlementaire, ministre qui veut, j'en suis persuadé, connaître
tous les aléas de cette industrie... Je suis persuadé qu'il veut
absolument être éclairé de toutes les façons. C'est
ce que je m'efforce de faire et ce que je vais m'efforcer de faire encore
pendant quelques minutes, M. le Président. (21 h 30)
Je vous demande tout simplement s'il vous serait loisible de faire venir
les quatre grands industriels du tabac. Je ne peux comprendre, M. le
Président, pourquoi à priori... Je suis persuadé que je
vais vous convaincre durant ces quelques minutes d'appuyer cette
résolution, mais pour le moment, vous semblez assez négatifs en
gros et pas tellement réceptifs du côté du pouvoir. Les
grands de l'industrie, je ne vous le reproche pas, se rappelleront ce soir que
vous avez refusé de les recevoir. Par bonté envers ceux qui nous
gouvernent actuellement, je le regrette parce que l'Opposition se doit
d'être de connivence avec le pouvoir pour que des lois qui sont faites
à l'Assemblée nationale comprennent deux côtés, les
énoncés des gens du pouvoir et le cisèlement de
l'Opposition. Le pouvoir amène la matière première comme
quelqu'un qui veut sculpter une statue, il l'amène dans son essence
primaire, dirais-je, et nous, de l'Opposition, avec nos cisailles critiques,
nous mettons une forme plus alléchante pour l'ensemble de la population,
plus productive pour les usagers et plus respectueuse de l'ensemble des
désirs de ceux qui nous regardent.
C'est dans cet esprit constructif, c'est dans cet esprit constructif, je
tiens à le répéter, que nous, de ce côté - je
ne dis pas que nous nous égosillons - nous nous forçons à
vous faire entendre... Personnellement, je suis ce qu'on pourrait appeler un
type extrêmement démocrate. La démocratie m'habite comme
mes poumons, la démocratie, j'en parle comme je respire, c'est comme la
souveraineté, j'en parle comme je respire, ça m'habite, cela fait
partie intrinsèque de ma personne, comme le sang dans mes veines. Ce
souci démocratique qui m'habite, quand je regarde ce refus continuel de
transparence, d'acceptation de se faire renseigner... Ce refus, il est presque
outrancier, il est fait avec tellement de désinvolture! M. le
Président, c'est de la
désinvolture. On n'entend même pas dire non. On
présente une motion pour recevoir, écouter les grands du tabac.
Quand même, ce sont des gens qui ont fait énormément pour
le Québec. Ils représentent une partie des gens que cette loi
veut protéger. Cette loi veut protéger les fumeurs et les
non-fumeurs. Cette drogue tolérée qu'est le tabac, tandis que la
politique est une drogue permise, cette drogue tolérée qu'est le
tabac, on jurerait ici - je prends mon confrère à témoin -
que le pouvoir ne veut pas en entendre parler. Il y a quelque chose d'un peu
scabreux dans cette attitude, je ne dirais pas encore rébarbative, on va
dire que je me répète, mais au moins malpolie, pas
dégrossie. Lorsqu'on a fait un peu de contact humain, un peu de
relations sociales, comment peut-on refuser la consultation pour
éclairer un projet de loi qui va concerner 6 500 000 personnes? Qui nous
dit que cette attitude de répulsion envers ceux qui peuvent venir
éclairer ce projet de loi n'entraînera pas l'exode de touristes
dans les années qui viennent? Qui nous dit que cette loi ne fera pas
fuir les touristes? Qui nous dit, j'allais dire... D'où vient cette
voix, M. le Président?
Une voix: D'en haut. Une voix: En bas. Des voix:
Ha! Ha! Ha!
Une voix: Vous avez fini de parler, M. le Président?
Des voix: Le vote, M. le Président.
M. Blais: Alors, M. le Président, comme on voit, j'aurais
peur d'être au pouvoir.
Une voix: Iln'y a pas de danger. M. Blais: J'aurais peur de
l'exode. Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Blais: J'aurais peur, M. le Président, et je suis
persuadé que vous comprenez cette peur que j'ai. Vous comprenez
certainement cette peur.
M. Kehoe: Reste en paix.
M. Blais: Imaginez les Québécois...
Une voix: ...et les Québécoises.
M. Blais: ...qui demeurent ici au Québec, pas des
Québécois géographiques, des Québécois de
coeur, de tête, d'esprit, d'habitat et de coutume. Une voix: Et le
reste.
M. Blais: Ces gens-là vont se promener sur le territoire
avec 1500, 2000, 2500 règlements différents et ils auront de la
difficulté à s'y reconnaître. Imaginez les touristes
maintenant. Supposons qu'on décide à Lévis -je prends une
ville comme cela au hasard -
Une voix: Lévis? Garon!
M. Blais: ...à Lévis... M. le Président, il
me semble que je n'aurais pas besoin de vous le demander. Si je suis
obligé de vous le demander, M. le Président, je vais me poser des
questions.
M. Kehoe: C'est plus fort que nous autres.
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît! J'aimerais entendre M. le député de Terrebonne dans
son allocution et sur la pertinence. Or, si j'ai des interruptions
continuellement, je ne pourrais pas suivre le débat.
M. le député de Terrebonne.
M. Blais: Je vous remercie, M. le Président, de la
façon très catégorique dont vous arrêtez vos
confrères. Ce n'est pas nécessaire d'être aussi dur, mais
je vous remercie d'être gentil.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Blais: M. le ministre, je suis content que vous soyez tout
attentif, parce que cette partie que j'ai à dire, je crois...
Une voix: C'est fini.
M. Blais: ...que c'est une des parties les plus importantes que
vous ayez jamais entendue durant toute votre carrière.
Une voix: On n'en doute pas.
M. Blais: C'est que les Québécois auront peine
à se trouver dans les quelque 1500 à 5000, peut-être,
règlements sur cigarette ici ou pas cigarette ici. Vous pouvez fumer
là, vous ne pouvez pas fumer là. Vous pouvez fumer dans un
corridor à tel endroit, vous ne pouvez pas fumer dans un autre corridor
identique dans une autre ville. Je ne saurais vous dire, M. le
Président, que les Québécois et les
Québécoises auront peine à se retrouver à travers
tout cela. Mais pensez aux touristes. Cela peut être une loi qui fait
fuir le touriste, qui peut faire fuir le touriste. Si on dit à
Lévis - je prenais cette hypothèse - si on dit que dans cette
ville, les gens qui se promèneraient en
auto décapotable n'auraient pas le droit de fumer. Disons. La
ville a le droit de faire ce règlement. Si quelqu'un se promène
en décapotable en fumant dans la ville de Lévis... C'est un
exemple hypothétique, je ne veux pas que vous pensiez que la ville de
Lévis m'a envoyé ce règlement. Mais l'amende peut
être très forte. Cela peut aller jusqu'à 1000 $. Disons que
la ville est raisonnable et c'est 500 $. Quatre Américains s'en viennent
avec une jeep décapotable avec cigarettes, passent dans la ville de
Lévis et on les arrête, c'est 500 $ chacun. Croyez-vous que ces
gens, M. le ministre, une fois qu'ils auront quitté notre territoire,
vont nous faire une publicité positive? Ah! J'ai horreur d'en parler, M.
le Président.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Blais: Juste le fait d'y penser me donne une sorte
d'indigestion touristique, parce que ce projet de loi que nous avons devant
nous n'est pas un appât pour les touristes à cause de la grande
disparité des règlements qui seront soumis.
Une voix: Amenez des Garon.
M. Blais: C'est excessivement difficile pour un
Québécois ou une Québécoise de comprendre cela. Je
demande tout simplement que les quatre grands du tabac viennent nous dire
pourquoi ils sont touchés par cela, comment ils sont touchés par
cela et sur quels points ils sont d'accord ou ne sont pas d'accord. On n'est
pas obligé de prendre tous leurs points. C'est nous ensemble qui, ce
soir, légiférons. On légifère actuellement. Il y en
a qui prennent cela à la sauvette, mais c'est extrêmement
important, ce que nous faisons. C'est un projet de loi unique, une innovation
dans un Parlement canadien. Cela va être la première province,
dit-on, qui va soumettre un projet de loi pour protéger un mauvais
titre. Les non-fumeurs et les fumeurs aussi, il va falloir qu'on organise cela
avant la fin.
Il faut que ce projet de loi soit le plus parfait possible. Il sera
promené dans le Canada comme Terry Fox. On le promènera d'une
province à l'autre et on le montrera comme un trophée à
suivre. Je tiens personnellement à ce que le trophée provenant du
Québec - et je suis persuadé que mes confrères de
l'Opposition pensent exactement comme moi - soit le plus joli possible dans sa
teneur, dans sa forme et dans la protection des êtres humains qu'il
touche.
Une voix: Amen!
M. Blais: Si j'avais goupillon, je vous retournerais quelques
gouttes de votre côté, mais je n'ai pas goupillon et j'aurais
voulu vous voir crier amen! Je ne le peux pas.
Les quatre grands nous disent que la cigarette est en chute libre.
Une voix: La taxe.
M. Blais: Je ne comprends pas. La taxe... Vous voulez que je
parle de la taxe.
M. le Président, vous êtes large en maudit. Je m'excuse.
Vous êtes un peu trop large.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: M. le Président de la commission.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Blais: Les grandes compagnies de cigarettes nous disent que,
comme certains règlements sont en chute libre, la cigarette semble
être en chute libre aussi. Ah! le Parti québécois est en
chute libre. On est tombé à 38 %. Si vous voulez qu'on en parle,
on en parlera, cela ne me dérange pas du tout. C'est
antiréglementaire. Personnellement, j'essaie de me tenir dans le vif du
sujet.
À l'instar de plusieurs fumeurs, l'industrie du tabac, une des
plus importantes au pays, connaît présentement de sérieux
problèmes. Bien sûr, les compagnies de cigarettes ne sont pas les
seules industries à connaître des problèmes. Cependant,
étant donné qu'on se doit de respecter les non-fumeurs, mais que
dans cette loi on se doit aussi de respecter les fumeurs, il faudrait qu'on
pense aux conséquences qu'un règlement trop sévère,
dans son essence, pourrait avoir sur les fumeurs, aux conséquences sur
les emplois de l'industrie du tabac.
Je suis persuadé que vous comprenez très facilement ce que
je veux dire. Je vais recommencer. Il est très grave de voir que, dans
ce projet de loi qui, à bon escient, veut protéger les
non-fumeurs, aussi, sous-jacent à cette protection des non-fumeurs, on
peut voir la protection des fumeurs. Cette protection des fumeurs,
automatiquement, fait intervenir les quatre grands du tabac dans ce projet de
loi, par ricochet, vous me direz, mais par ricochet ils sont là.
Donc, les grands ont peur. Je ne vous dis pas que je suis d'accord. Ils
nous disent -c'est pour cela que je voudrais qu'ils viennent nous expliquer,
mais on refuse de les recevoir - que la majeure partie des dollars s'en allait
directement aux différents paliers de gouvernement, c'est sûr.
Mais il y a 45 032 emplois au Canada, l'industrie elle-même. 5800
personnes dans la culture, 7659 personnes dans te traitement du tabac. Une
grande partie de ces emplois sont au Québec. (21 h 45)
Combien me reste-t-il de temps, M. le
Président?
Une voix: Cela force, n'est-ce pas?
M. Blais: Absolument pas!
Le Président (M. Saint-Roch): Douze minutes, M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: Aucun problème! Je suis persuadé que le
ministre m'écoute très attentivement.
M. Lincoln: Ah oui? Je n'en suis pas sûr.
Des voix: Ha! Ha!
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Terrebonne.
M. Blais: M. le ministre, j'apprécie beaucoup votre sens
de l'humour et des remarques comme celle-là, dans notre
démocratie parlementaire, sont là pour nous dérider de
temps à autre. Je l'apprécie grandement. Je vous jure que j'aime
bien cela. Cela dérange un tout petit peu sur le coup, mais il demeure
que le fond était là. J'aime beaucoup ce genre de remarque.
Cependant, cela dénote aussi que ce projet de loi fait que vous
vous intéressez moins aux grands du tabac qu'aux non-fumeurs. On voit
que vous avez un faible pour les non-fumeurs. J'oserais quasiment dire que
c'est de bon aloi dans le contexte actuel. Mais les grands du tabac vous le
reprocheront certainement, parce qu'ils aimeraient beaucoup que vous vous
intéressiez à leurs problèmes causés par le projet
de loi que vous présentez.
Les grandes compagnies parlent elles aussi avec insistance du marketing
que l'on se doit d'avoir. Elles parlent aussi de cette baisse du nombre de
consommateurs. C'est-à-dire que le nombre des consommateurs baisse plus
vite que la consommation elle-même. C'est presque curieux. Disons que le
nombre de consommateurs baisse de 8 % et que la baisse de consommation n'est
que de 6 %. Cela veut dire que les gens qui fument semblent se venger en fumant
plus. Au lieu de fumer deux paquets par jour, ils en fument trois. On dirait
qu'il y a une course vers le cercueil de plus en plus forte, au fur et à
mesure que les années passent.
Personnellement, j'aimerais beaucoup que les représentants des
compagnies comme Imperial Tobacco, Rothmans de Pall Mail, R.J.R. MacDonald,
Benson and Hedges viennent ici nous parler de leur problème pour
que...
Une voix: Pourquoi est-ce un problème?
M. Blais: M. le Président, si vous ne faites pas ce
à quoi je pense, je vais vous le demander.
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Terrebonne.
M. Blais Merci, M. le Président. J'aurais aimé que
les représentants de ces quatre grandes compagnies viennent ici. Mais
vous semblez ne pas vouloir m'aider, M. le Président, pour que ma voix
soit entendue pour qu'ils viennent. Il aurait été fort
intéressant de les entendre, ne fût-ce que sur l'aspect du
marketing. Malgré les chutes draconiennes des ventes des produits du
tabac, je suis persuadé que vous mourez d'envie de savoir combien les
compagnies canadiennes ont fait de profits en 1985, malgré la chute
libre. Je suis persuadé que cela vous tient à coeur. Pour ne pas
vous laisser sur cette appréhension, je vais vous le dire: Imperial
Tobacco a enregistré des gains d'environ 224 000 000 $. C'est
énorme. C'était en 1984. Pall Mall, 19 000 000 $. Ils sont
passés de 19 000 000 $ à 17 000 000 $. Cela baisse. Cependant,
les fumeurs consomment plus, parce que les compagnies prennent des moyens de
les faire consommer davantage, ce que je regrette. Je suis contre la
consommation excessive de la cigarette, je suis pour l'abstention totale. Mais,
dans ce projet de loi, il n'y a absolument rien pour empêcher
l'excès de consommation. On va décider que les gens pourront
fumer à satiété dans certains lieux. Les gens pourront
s'emboucaner comme des jambons. Il n'y a absolument aucun règlement qui
va empêcher les gens de ce faire. Alors, il faudrait et M. Talbot nous le
disait dans la proposition antérieure que, dans ce projet de loi, nous
surveillions ou nous mettions une mise en garde contre cette surconsommation de
produits du tabac.
Cette surconsommation cause à l'État des dépenses
excessives. Combien de maladies de coeur sont causées par l'excès
du tabac? Il est bien sûr que les gens qui ont une cinquantaine
d'années, de façon générale, n'arrêteront pas
de fumer. Il y a quelques esprits un peu plus forts qui le font, bien plus par
bravade que par conviction, pour prouver que l'on peut être partie
prenante d'un projet de loi tout en étant contre son essence des fois,
mais, dans celui-ci, je suis pour l'essence mais contre la façon dont il
est apporté. C'est pour défendre le droit des fumeurs aussi que
j'ai arrêté de fumer, il y a trois semaines. En étant un
non-fumeur, on ne passe pas pour un partisan, ce que je n'ai jamais
été. Je suis pour la justice dans tous les domaines, c'est pour
cela que même politiquement je ne suis pas un partisan. J'ai des
idéologies et je milite dans un parti, mais je ne suis pas un partisan.
Autrement dit, je ne suis pas fanatique. C'est ce que je veux dire, parce
que partisans, nous le sommes tous et des fois malgré nous.
M. le Président, je suis persuadé que vous brûlez de
connaître ce à quoi je veux en venir avec cette non-partisanerie.
Je veux dire que je peux défendre autant le producteur de tabac, le
fumeur et le non-fumeur. Je peux défendre les trois. Il y a une seule
chose que je ne peux pas défendre en toute conscience, c'est la
publicité que les grands de la cigarette font. La publicité
devrait être interdite et on devrait dire: Oui connaît le tabac, ne
fume pas. Ce serait un beau slogan. Si vous imposiez aux compagnies de
cigarettes dans ce projet de loi des normes strictes et des lois pour les
empêcher de faire de la publicité, je suis sûr que le
Québec s'en tiendrait mieux et que le peuple québécois
s'en porterait mieux aussi, parce qu'un peuple en santé est un peuple
qui travaille mieux. On a plus de force pour se tenir debout, même si on
a le droit d'être assis. Pourquoi? À cause de cette force que le
fait de s'abstenir de fumer nous donne.
M. le Président, j'insiste sur un fait et je suis obligé
d'arriver à une conclusion. Cela passe vite, c'est incroyable. Je trouve
cela incroyable la vitesse à laquelle nos arguments doivent passer. Je
tiens à dire: Vous savez, quand on ne s'intéresse pas à un
projet de loi, que l'on ne prend pas la parole pour en parler avec coeur, que
l'on ne fait qu'écouter ceux qui se dévouent pour la cause de
l'ensemble des Québécois en voulant améliorer les choses
devant nous, c'est sûr que de temps à autre - ce n'est pas un
jugement - on pourrait trouver le temps un peu plus long. Mais, ciel!
mettez-vous le nez à l'ouvrage. Bonifiez ce projet! Aidez votre
ministre! Redonnez-lui le sourire! Redonnez-lui ce sourire qu'il a perdu depuis
quelques minutes!
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Blais: Encouragez-le! Il veut absolument que son projet de loi
soit bonifié. Il nous supplie d'améliorer ce qu'il a pondu avec
ses hauts fonctionnaires. Il aimerait beaucoup que les députés,
qui sont en fait les vrais législateurs... Les hauts fonctionnaires sont
des sortes de penseurs de tournures de phrases, mais ils tournent dans des
phrases ce que nous concevons, nous, les députés, comme
représentants d'un parti. Ils traduisent de façon juridique ce
que, philosophiquement, nous voulons bien mettre sur le tapis. Si ce n'est pas
cela être des législateurs, je me demande qui nous sommes.
Regardez votre ministre. Déjà, il semble avoir un tout
petit sourire, juste le fait que je vous demande de participer un peu. II me
semble, surtout vous - je ne veux pas vous nommer - vous semblez avoir des
talents plus que les autres. On dirait toujours que cela vous tente de parler.
Le président vous ramène continuellement à l'ordre. Je
l'en félicite. Il vous ramène toujours à l'ordre et cela
aide beaucoup, de ce côté, à bien faire son travail. Je
dois féliciter le président là-dessus qui surveille
vraiment. Vous faites vraiment cela comme il faut, M. le Président. Je
tiens à vous féliciter avant la fin de mon intervention. Il ne
vous laisse même pas le temps de me déranger. Mais c'est
extraordinaire! Vous êtes merveilleux, M. le Président. Je pense
qu'à la fin de cette commission je vais faire une motion de
félicitations en Chambre...
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Blais: ...parce que c'est tellement facile. Depuis le tout
début, il laisse l'Opposition s'exprimer sans qu'aucun hiatus ne vienne
briser notre tympan de ce côté-ci. Qu'en termes galants ces
choses-là sont faites, M. le Président! Alors, je vous remercie
de cela et je vous ferai une motion de félicitations en Chambre. Je veux
vous le remettre, parce que vous m'avez toujours dit que j'avais le sens du
parlementarisme. Par ce fait de demander à la Chambre de vous
féliciter, j'espère au moins que les gens de ma formation me
rappelleront, M. le Président, si jamais j'oublie, parce que j'ai
tellement un grand coeur, j'espère qu'ils me rappeleront de faire
d'abord une motion de félicitations pour vous et de féliciter
aussi les députés du gouvernement qui veulent participer à
cette discussion pour redonner à leur ministre un sourire qu'il semble
avoir perdu depuis quelques minutes. Mme la députée, j'ai
terminé.
Sur ce, M. le ministre, je suis toujours à votre disposition pour
bonifier ce projet de loi de façon très constructive, M. le
Président, je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Francis Dufour
M. Dufour: M. le Présidents lorsqu'on regarde la motion
qui est devant nous, qui demande aux quatre grands de l'industrie du tabac de
venir en commission parlementaire, je pense qu'il y a des questions qu'on doit
se poser. Effectivement, ces gens ont travaillé à
l'intérieur d'industries qui étaient permises par les lois et
règlements, tellement permises qu'on les pressure de plus en plus. On a
accepté la loi 2 qui a maté le tabac d'une façon
extraordinaire. On a gelé la taxe ascenseur au dernier budget et on a
mis des inspecteurs pour faire respecter la réglementation stipulant
qu'il ne doit y avoir aucune fuite ou aucune entrée de tabac à
l'intérieur du Québec sans que les gens ne soient munis d'une
licence.
Donc, une industrie qui a des fondements, qui est aussi
surréglementée par rapport à quelque, industrie que ce
soit et, en même temps, qui met en danger des gens qui travaillent ou des
producteurs de tabac au Québec. Il est important de tenir compte de ces
gens-là qui ont accepté de venir s'intaller ici au Québec,
de travailler, de bâtir une industrie et qui, après avoir investi
et sûrement fait de l'argent... Je pense bien qu'on ne doit pas se poser
la question, car heureusement qu'il y a quelques industries qui font de
l'argent parce que je pense que le Québec serait encore plus mal en
point si aucune industrie n'obtenait des bénéfices de sa
production.
Une voix: Ce n'est pas le temps.
M. Dufour: Donc, sous le couvert de bonification,
d'amélioration ou de l'imposition d'une loi, on est appelé
à court terme à asphyxier cette industrie et à la faire
disparaître purement et simplement. Je pense qu'à la longue il y a
une action qui se pose et qui fait que, à force de frapper sur le clou,
on va débarquer des gens qui ont posé des gestes par des lois...
Un vote!
Le Président (M. Saint-Roch): Je m'excuse, M. le
député de Jonquière. Étant donné que la
cloche appelle les députés à l'Assemblée nationale,
nous allons maintenant suspendre nos travaux. Il vous restera huit minutes, M.
le député de Jonquière, à notre retour.
(Suspension de la séance à 22 h 1)
(Reprise à 22 h 16)
Le Président (M. Saint-Roch): La commission de
l'aménagement et des équipements reprend ses travaux. M. le
député de Jonquière, il vous restait huit minutes avant
l'interruption. M. le député de Jonquière.
M. Dufour: Mon argumentation reposait sur les compagnies de tabac
qui fonctionnaient selon des normes très réglementées de
la part du gouvernement dans un système de taxation très fort, ce
qui a fait que le tabac est presque devenu, à mon sens, un produit qu'on
est presque prêt à déclarer immoral par rapport à
l'utilisation qu'on en a faite. Il faut penser que ces compagnies se sont
établies avec les lois et elles ont aussi développé leur
industrie avec ou sans raison, ou avec les problèmes que cela comporte.
Que je sache, ces gens ont toujours fonctionné à
l'intérieur des lois. Donc, si on lit Alain Dubuc dans la Presse
du 31 mai 1986 il dit: Jusqu'ici rien n'aura eu autant d'effet pour
réduire la consommation de cigarettes qu'une bonne vieille recette
économique simpliste sur les bords, les hausses de taxes. Donc,
déjà on a trouvé des moyens de diminuer la consommation de
cigarettes. Il y a déjà une pénalité
exercée.
Si on va un peu plus loin - depuis ce temps, il y a eu d'autres lois qui
ont été mises en vigueur - c'est qu'on va réglementer la
consommation et aussi la circulation du tabac à l'intérieur du
Québec. Donc, cela prend des permis, cela prend aussi du tabac qui est
réglémenté dans le sens qu'il doit y avoir des taxes
à payer et il y a des timbres qui doivent être collés. On a
mis en place aussi des inspecteurs pour bien s'assurer que tout le monde est
correct. On a pris aussi dans ce domaine des moyens où quelqu'un va
presque être arrêté à vue dans certains domaines.
C'est la loi du ministère du Revenu qui a été
discutée la semaine dernière. Les hausses de taxes ont
été un élément important dans la diminution de la
consommation de cigarettes. En fait, dans le même article, on dit: En
1984, les ventes de cigarettes ont baissé de 1/2 % et, en 1985, de 10 %.
Les Québécois ont alors fumé 15 700 000 000 de cigarettes,
soit 1 000 000 000 de moins que l'année d'avant. Qu'il y a t-il eu de
spécial? C'est probant, c'est évident c'est que les deux
ministres des Finances, celui d'Ottawa et celui de Québec, ont
décidé presque en même temps d'aller chercher chacun 0,25 $
de plus dans la poche des consommateurs. Donc, l'efficacité des taxes
comme outil de dissuasion a été très forte.
Qu'est-ce qui arrive à ces compagnies qui ont toujours
fonctionné avec les permis lorsqu'on va les pressurer ou qu'on va
réglementer d'une façon telle que la production de tabac va
arrêter? Cela veut dire certainement des faillites. Qu'est-ce qu'on fait
pour recycler les gens qui sont dans la production du tabac, qui pourraient se
recycler dans d'autres cultures? On ne le voit pas cela et on ne le sait pas.
Actuellement, il y a certainement des gens qui sont inquiets. C'est pour cela
qu'à la commission parlementaire ou dans la motion qu'on a devant nous,
on demande à des gens qui sont spécialistes, mais qui, encore
là, connaissant aussi le principe de la loi qui veut que ce soit une loi
qui prêche la vertu... C'est peut-être embêtant pour ces
compagnies de venir s'opposer ou de dire exactement ce qui se passe. Il faut
penser que l'économie du Québec peut avoir des coups, mais il y a
un bout à quelque part jusqu'à quel point on peut la
pressurer.
Si on lit cet article d'Alain Dubuc, on constate jusqu'à quel
point en taxant l'industrie des combustibles, on a fini par tuer les
raffineries. Donc, en cherchant un principe pour bonifier des choses
existantes, on va jusqu'à faire disparaître des industries
importantes qui ont donné de l'emploi à environ 7000
personnes au Québec. Si on parle des emplois indirects en plus. Il y a
"aussi les taxes qui rapportent 600 000 000 $. Il y a beaucoup d'argent
là-dedans. Il est bien certain que l'on pourrait dire que l'industrie du
tabac a été malhabile, n'a pas été correcte,
qu'elle a peut-être réagi en retard. C'est encore vrai, mais ce
n'est pas parce que quelqu'un ne veut pas se réglementer lui-même,
qu'on doit l'obliger au point qu'il n'aurait même pas le droit
d'être écouté.
Je pense que c'est le noeud du problème. Depuis le début
de la commission parlementaire, on pense que non seulement les gens qui sont
contre, mais les gens qui sont pour devraient être capables de venir nous
dire ce qu'ils en pensent. Il ne s'agit pas seulement d'avoir des statistiques.
On voudrait mettre des visages sur ceux qui sont pour ou contre le projet de
loi. En même temps, je suis convaincu que ce serait de nature à
améliorer ce projet de loi. Il ne faut pas se le cacher. Je pense que
cela devient de plus en plus évident. De la façon qu'on est
parti, on détruit, on pressure ou on force les compagnies de tabac
à aller dans leurs derniers retranchements, sous le couvert de quelque
chose de bien qu'on fait pour le bien de la population. On est quand même
en train de les détruire et on n'a peut-être pas le courage de
leur dire carrément qu'elles doivent disparaître. C'est
peut-être là le noeud du problème.
Arrêtons-nous un instant et regardons ce qui se passe dans cette
industrie. Je pense qu'il y a des éléments assez forts qui nous
permettent de croire que le tabagisme est en diminution mais c'est toujours
fait avec des moyens coercitifs. En augmentant les moyens de pression par la
loi, on va forcer ce mouvement encore beaucoup plus rapidement. Mais on n'a pas
encore trouvé de solution de rechange pour ceux qui sont dans
l'industrie comme telle et qui devront se recycler éventuellement pour
aller dans d'autres productions.
Pour nous, cela revêt une certaine importance que ces gens soient
consultés. Encore là, non seulement ceux qui sont pour le projet
de loi mais aussi ceux qui sont contre, pour qu'on ait vraiment la couleur du
temps et le pouls de toute la population sur un projet de loi qui les affecte
encore dans leur vécu.
Je répète que ce gouvernement, qui nous avait dit qu'on ne
ferait pas beaucoup de lois, qu'on ne ferait pas beaucoup de
réglementation, est en train de nous en passer quelques-unes. Dans peu
de temps, ce sera de la surréglementatioon dans les lois. On sera
obligé de vivre avec cela; ce qui sera loin de l'objectif poursuivi par
ce gouvernement.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
intervenants?
M. Lincoln: Non, pas de commentaires.
Le Président (M. Saint-Roch): Je demande maintenant l'adoption de
la quatrième motion présentée par le député
de Terrebonne, qui se lit comme suit; "Je demande que la commission invite les
quatre grands de l'industrie du tabac afin qu'ils viennent nous renseigner sur
les conséquences de cette loi sur leur production et leurs
prévisions de développement malgré cette loi". Est-ce que
cette motion est adoptée?
Des voix: Rejetée.
Motion proposant de recevoir l'UMQ
M. Blais: Sur division.
M. le Président, selon l'article 244, paragraphe 2, je demande
à la commission de recevoir les représentants de l'Union des
municipalités du Québec, pour nous éclairer sur leur
position devant ce projet de loi.
Le Président (M. Saint-Roch): Je déclare la motion
recevable.
M. Blais: Merci beaucoup, M. le ministre.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: Merci beaucoup,, M. le Président.
M. Middlemiss: M. le Président, sur une question de
règlement. Si des groupes ont déjà été
consultés et qu'ils ne l'ont pas demandé, est-ce que, dans ce
contexte...
M. Blais: Allez-y.
Le Président (M. Saint-Roch): La motion est faite en vertu de
l'article 244 qui dit: "Avant d'entreprendre l'étude
détaillée, la commission peut décider de tenir des
consultations particulières dans le cadre de son mandat". Cela respecte
l'esprit. M. le député de Terrebonne.
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Je croyais...
Est-ce que vous m'accordez quinze secondes, M. le Président?
Le Président (M. Saint-Roch): D'accord. Nous suspendons
pour quelques instants.
(Suspension à 22 h 25)
(Reprise à 22 h 26)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission reprend maintenant ses travaux. M. le député
de Terrebonne.
M. Yves Blais
M Blais: Je vous remercie de votre compréhension d'avoir
suspendu pour quelques minutes.
M. le Président, dans ma motion, j'ai dit l'Union des
municipalités, mais par l'Union des municipalités, je voulais
dire tout ce qui existe en fait d'associations municipales. C'est de cette
façon que je considère ma motion.
II est d'une grande importance pour ce projet de loi que nous recevions
les municipalités ou leurs représentants. Ce serait plus juste.
Je vois des maires ou des anciens conseillers autour de cette table, des gens
qui savent que l'administration municipale dans notre vie collective est d'une
importance capitale. Je n'ai pas à prouver à certaines personnes
de l'autre côté de cette table l'importance de la
souveraineté des conseils municipaux, l'importance que ces gouvernements
ont dans la vie quotidienne de l'ensemble des Québécoises et des
Québécois. Point n'est besoin de dire que j'ai un très
grand respect pour ces gouvernements municipaux qui, soit dit en passant, vous
le savez aussi bien que moi, sont des créatures du gouvernement du
Québec et fonctionnent par pouvoirs délégués.
Québec pourrait demain matin décider qu'il n'y a plus de
municipalités et parce que ce sont les créatures du gouvernement
du Québec, il n'y en aurait plus. Cependant, je ne sais pas si vous
voyez le décor, cela nous prendrait un gouvernement assez totalitaire
pour agir de la sorte, parce que les gouvernements les plus proches des
citoyens, j'en suis persuadé et je vois des yeux qui me regardent de
façon affirmative, ce sont les gouvernements municipaux, sauf dans les
très grandes villes où les gouvernements municipaux sont un peu
confondus avec les gouvernements provinciaux. Par exemple, une ville comme
Montréal, sans vouloir enlever de l'importance au maire qui est
là depuis 1800... Je tiens à dire que les gens confondent souvent
les administrations municipale, provinciale et fédérale dans ces
grandes agglomérations. Il est plus facile de confondre et ceux qui le
font m'en voient confondu, mais c'est le hasard de la vie qui fait qu'il en est
ainsi.
Alors, par respect pour les municipalités, je suis
persuadé, M. le Président, vous qui m'écoutez depuis un
certain laps de temps et qui connaissez très bien mon argumentation
solide et non partisane, qui est une participation qui se veut, je dirais, un
lampadaire dans l'obscurité de ce projet de loi... Je me fais fort
d'être une lumière révélatrice en fait pour le parti
au pouvoir pour que ce projet de loi soit le plus beau et le plus facile
possible pour les citoyens à comprendre et surtout à observer,
parce qu'une loi qui n'est pas facile à observer, que nous le voulions
ou non, tombe très vite en désuétude et est remise aux
calendes qrecques comme si sa naissance n'avait jamais eu lieu. Alors, il vaut
mieux se faire la lumière révélatrice, comme je le disais,
de ce projet de loi et je suis persuadé que l'attention que le ministre
semble porter aux paroles que je lui dis et les nombreuses notes qu'il prend de
mes interventions prouvent qu'il va arriver avec beaucoup d'amendements et je
serai heureux que ma participation intense - on ne peut pas dire d'autre mot
que intense - à ce projet de loi, ait fait que ce projet de loi d'un peu
loufoque qu'il était, deviendra un projet de loi que nous serons fiers,
en tant que parlementaires, d'avoir établi ensemble.
M. le ministre, c'est toujours dans cette veine constructive, dans cette
veine qui se veut communicatrice de renseignements productifs, toujours dans
cet esprit de collaboration que dans un Parlement on se doit d'être
autour d'une table comme celle-ci. On appelle cela une table de production au
nom du peuple. C'est cela qui est une table de commission.
Nous du gouvernement supérieur aux municipalités, ce
serait notre devoir, M. le ministre, de demander aux représentants
municipaux de venir ici nous dire de quelle façon les
municipalités voient la manière dont elles devraient se charger
d'appliquer ce projet de loi. Pensez au 1511 municipalités du
Québec, à part des territoires non identifiés, non
organisés. Pensez à cela. Plus combien de commissions scolaires
et combien d'écoles secondaires, combien d'universités, 900
institutions de soins sociaux: hôpitaux, CLSC, CR poigné de 5 et
nommez-les. Combien d'institutions.
C'est sérieux. Dans toutes ces institutions, comment voulez-vous
qu'on fasse la coordination, la juxtaposition rationnelle des différents
règlements qui seraient élaborés par les
différentes instances sur le territoire québécois,
virgule, règlements découlants de cette loi qui est ombrageuse
dans son essence. Ce serait bon d'avoir l'éclairage des villes, des
villages, des hameaux, des territoires non organisés, des commissions
scolaires, des écoles, des universités, des hôpitaux, des
CLSC des CRS, des CRSSS, de tous les intervenants, et des
municipalités.
Je suis persuadé que le député de Jonquière
va m'approuver en disant que les meilleurs porte-parole de la façon dont
un projet de loi peut être reçu par les citoyens ce sont les
conseils municipaux ou leurs représentants. Plus nous sommes proches de
la population, plus nous sentons vibrer son pouls. C'est la vibration du pouls
d'une population qui doit toujours orienter nos
agissements. Ô! Heureuse vibration de pouls quand tu es sentie.
Que tu donnes aux législateurs l'orientation voulue pour que des
résultats tangibles et positifs soient là devant nous pour
l'ensemble de la population et le mieux-être de la
collectivité!
M. Vaillancourt: Est-ce que le député de Terrebonne
se croit à un théâtre?
M. Blais: Quoi donc? Allez-y.
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Vaillancourt: Est-ce que le député de Terrebonne
se pense à un théâtre?
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Blais: Non, mais je vous remercie de m'attribuer ce talent.
C'est un talent que je ne savais pas que j'avais, mais que j'aimerais bien.
Venant de vous, un vieux parlementaire qui en a vu d'autres, cela me fait
plaisir de voir que vous trouviez que mon éloquence fait vibrer vos
cordes. Cela me fait plaisir, surtout de vous un type qui, à son violon,
a tellement de cordes. Avec l'âge parlementaire que vous avez, 26 ans et
quelques mois de vie parlementaire, cela me fait plaisir. Je suis vaillant, moi
aussi, court je serai dans le restant de mon interview. Mais je
l'apprécie. Venant de vous, cela me flatte, cela m'honore.
Pour revenir - excusez cette parenthèse qui a été
faite de bon aloi, je vous en sais gré - à l'essence de la
vibration du pouls de la population mieux senti par les conseils municipaux que
par les gouvernements provinciaux, je tiens à dire, M. le
Président, qui m'écoutez avec une certaine lassitude, je le
comprends... Il y a des heures que vous m'écoutez; vous avez la
paupière tombante et je vais essayer de la relever en parlant juste un
peu plus fort; je sais que les paroles que je dis vous intéressent au
plus haut point, mais, à la longue, il arrive que nous ayons les
paupières et les yeux bridés de reconnaissance.
Cependant, ce pouls vibrateur des sentiments de la population fait
frémir les législateurs à la moindre secousse de
résistance et heureuse secousse quand elle est bien sentie. M. le
ministre, je tiens - ah! que j'y tiens! - à vous dire que vous allez un
peu manquer d'éclairage si vous ne convenez pas avec l'Opposition que
les municipalités viennent ici, à cette commission, nous dire de
quelle façon elles vont agencer entre elles, le règlement.
N'importe quel treillis ne peut être un bon protecteur lorsque,
entre elles, les fibres ne sont pas tenues de façon adéquate.
C'est la même chose des règlements. Si les règle- ments
intermunicipaux n'ont pas de connivence l'un devant l'autre, il y aura fuite.
Il y aura non-observance.
Alors, j'ai l'impression, M. le ministre... Je vois que le
député de Nicolet semble être approbateur, lui qui est un
ancien maire connaissant les pouvoirs que le peuple lui avait donnés
dans sa municipalité de Nicolet. Il voit ici que nous allons
négliger tout ce pan de la population - "pan", ce n'est pas "paon"; je
l'écris dans le sens de "pan", dans le sens de tout ce flanc, de tout ce
groupe et non pas dans le sens de "paon", l'oiseau orgueilleux; c'est loin de
moi; je ne pense jamais au côté orgueilleux des choses - que
j'oserais dire, M. le ministre, avec un petit rictus ce soir, vous semblez
vouloir laisser pour compte.
Que vois-je? Non, je ne peux en croire mes yeux! Je suis persuadé
que ce court laïus que je vous fais va vous convaincre et je commence
à voir l'oeil approbateur du ministre qui a laissé ses notes pour
essayer de consulter son projet pour voir où il pourrait le bonifier.
Là, j'en suis très heureux! Il y a amélioration au fur et
à mesure que s'égrènent les secondes. Alors, que cette
horloge tinte et si jamais il faut le coucou, nous allons l'avancer et subito
presto, nous allons commencer immédiatement le côté
productif. Moi, je suis prêt.
S'il ne s'agissait que d'avancer cette horloge de quelques minutes pour
que vous laissiez les notes que vous venez de faire et que vous tombiez dans le
projet vers une correction "bonifique", moi, j'y entre tout de suite. Vous
voyez jusqu'à quel point vous avez une Opposition coopérative,
collaboratrice même. C'est presque gênant. Je ne sais pas de quelle
façon mes chefs vont me voir en vous offrant une telle
collaboration.
C'est indirectement manquer un peu à mon devoir, parce que mon
devoir est d'insister pour que vous compreniez que, devant nous, il y a des
chaises vides et qu'il y a une projet qui a des trous et en comblant les vides,
vous combleriez vos trous dans le projet de loi, parce que ces chaises vides
peuvent amener des gens qui ont des choses à dire. Alors, M. le
Président, j'insiste. J'aimerais que sur ces chaises vides viennent les
gens les plus respectés du Québec, qu'on appelle les
représentants des municipalités. Ils ont dans leur bagage toute
l'expertise et toute la documentation qui seraient pour nous comme des jets
éclairants, qui seraient pour nous un peu comme des rayons ultra-violets
qui viendraient éclairer nos cerveaux marécageux dans certains
paragraphes. Il faudrait, pour certains articles que vous voyez devant vous,
l'éclairage de certains représentants municipaux qui pourraient
nous dire en regardant ce projet de loi: Permettez, M. le Président, que
j'introduise l'extrémité de ma
dextre dans vos concavités tabagiques afin d'en extraire une
substance palpable destinée à chasser les humeurs peccantes de
nos cerveaux marécageux. C'est cela, je crois, que certains
édiles municipaux pourraient venir nous dire.
On ne peut pas avoir la science infuse, rares sont les personnes qui, de
façon innée, ont cette science infuse. J'en ai bien vu
quelques-uns à travers les âges, mais je ne crois que nous les
ayons invités ici ce soir. Nous demandons des représentants
ordinaires, des gens qui représentent des associations et de
façon systématique, on refuse d'amener des gens ici qui nous
éclaireraient. On ne pourra tout de même pas dire après
cette commission que moi, le député de Terrebonne, je n'ai pas
fait mon possible pour essayer d'amener des gens. Vous voyez que je
m'évertue à essayer de vous convaincre. M. le ministre, il me
semble qu'à tout moment vous allez lâcher un soupir et me dire: M.
le député de Terrebonne, j'acquiesce à votre demande.
Depuis 15 heures cet après-midi, je vous tourmente verbalement, j'essaie
sous tous les angles de percer cette carapace. C'est une carapace
négative. C'est comme le mur de Berlin. Ou est-ce le mur de Chine? Mais
il y a quelque chose d'impénétrable, autant dans votre regard que
dans vos gestes. Et comme j'aimerais avoir le bagout nécessaire pour
vous convaincre, ne fût-ce que de recevoir une association qui serait la
principale, l'Union des municipalités.
Je sens que vous commencez à faiblir un peu. Votre
résistance s'effrite. On sent des lacunes, on sent que le mur commence,
grâce à mes secousses... Ou serait-ce mon pouls de tantôt?
Serait-ce les secousses du pouls vibratoire de la population qui commence
à secouer votre carapace si solide, semblait-il, au tout début de
cette commission? Il est possible qu'il y ait rapprochement. J'aimerais que ce
soit plus qu'un rapprochement, M. le Président. J'aimerais que cela
devienne une réalité. Pourquoi? Pour les citoyens, pour les
citoyennes, j'aimerais beaucoup cela. C'est encourageant, je sens que je ne
perds pas mon temps... (22 h 45)
Une voix: Il est le seul. Des voix: Ha! Ha! Ha! M. Blais:
Je sens que...
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Blais: Je suis très sincère, M. le
Président.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Blais: Je sais que le ministre commence à faiblir.
Serait-ce que vos députés vous ont conseillé de faire
venir certaines personnes pour nous éclairer? Si c'était cela,
j'aimerais bien en connaître les responsables. Il y a certainement la
députée de Dorion. Je la sens sensible à ma cause. Je la
sens très sensible à ma cause. Ou, peut-être, Mme la
députée de Mégantic-Compton, parce qu'elle m'a dit, durant
le court entracte que nous avons eu tantôt pour aller voter, pour faire
notre devoir de législateur: J'aime beaucoup votre voix, cependant j'ai
hâte de ne plus l'entendre.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Blais: Alors, de lui dire gentiment parce qu'en fait, elle est
d'une extrême gentillesse et je sais qu'elle est très sympathique
à ma cause et moi aussi, je suis sympathique à son oreille qui
est fatiguée d'entendre. Son tympan vibre aux mêmes sons depuis un
assez grand laps de temps. Je sais qu'il aimerait avoir une vacance de ce
timbre de voix que vous entendez depuis plusieurs heures. Il n'en tient
qu'à vous. Votez pour que nous recevions les édiles municipales!
Édile, est-ce masculin ou féminin?
Une voix: Édiles municipaux.
M. Blais: D'accord. Excusez. Ils vont corriger cela aux
débats. Les édiles municipaux... Oui, en tout cas, ce que je veux
dire.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Blais: De toute façon, ils corrigent tout. Mais
seulement, ils ne peuvent corriger que les liaisons dangereuses que nous
faisons de façon verbale, mais ils ne peuvent pas, M. le ministre,
corriger ce que vous me refusez depuis le tout début, soit de faire en
sorte que nous comblions ces chaises vides. Contentez l'envie que ces fauteuils
ont de vous "embraser", M. le ministre! Je suis persuadé, M. le
ministre, qu'il y a longtemps que votre sourire serait revenu et il serait
là de façon constante si nous avions des gens de l'Union des
municipalités devant nous.
J'ai des spécialistes qui me font signe que oui. Regardez ici et
de l'autre côté. Le député de Nicolet a une figure
interrogative. Serait-ce que lui aussi commence à fléchir? Ce
serait tout de même un peu plus positif qu'au tout début. Mais il
y a une chose que je sais, M. le ministre. C'est que vos experts
derrière vous en ont soupé d'attendre les édiles
municipaux. Ils ont très hâte de les voir. Vous devriez
condescendre. Si vous ne le faites pas par conviction, faites-le par
condescendance envers l'Opposition. Faites-le par respect pour ceux qui ont un
bagage à
nous communiquer. Faites-le aussi pour améliorer, M. le
Président, ce projet de loi.
Je ne voudrais pas cependant... Je vais vous dire quelque chose de
très clair. Je suis persuadé que certains députés
dans l'Opposition, qui ont déjà fait ce qu'on appelle dans notre
langage du "filibuster", pensent que l'Opposition est à faire un
"filibuster". Absolument pasi C'est non! Nous avons tout simplement voulu
insister pour que certaines autorités ou certains groupes viennent nous
éclairer. Pour vous prouver que moi, vraiment, avec mon confrère,
ce n'est pas un "filibuster", je ne prendrai même pas ma demi-heure. Je
le pourrais. J'ai d'autres groupes à faire venir, de toute façon.
Vous savez qu'il y a beaucoup de groupes qui s'intéressent à ce
projet de loi.
Je pense que je vais prendre les dernières minutes juste pour
vous dire combien il y a de groupes, M. le ministre, qui voudraient absolument
venir vous voir. Je pense qu'ils vous trouvent sympathique. C'est très
rare qu'on rencontre de visu et qu'on parle à un ministre, parce qu'un
ministre, c'est une bête rare; au Québec, il y en a seulement une
trentaine. Ils ne courent pas les rues. Ce n'est pas comme les
députés, il y en a 122, mais, des ministres, il y en a 28 ou 30.
Il n'y en a pas gros de ces affaires-là. Les gens veulent les voir de
près. Ils aimeraient beaucoup vous voir. D'ailleurs, plusieurs de ces
groupes-là m'ont appelé. Je leur ai dit: Venez le voir, il est
d'une extrême gentillesse, il va vous recevoir les bras ouverts, il va
condescendre à vous écouter. Il fait partie d'un parti qui veut
absolument une grande transparence. Il veut que les gens soient très
renseignés. Il voudrait, à la fin de l'étude de ce projet
de loi, que les gens disent que le ministre de l'Environnement est à
l'écoute de la population. Il ne veut pas que l'on dise: Avez-vous
déjà vu le ministre écouter? Il voudrait absolument que
l'on dise que le ministre est à l'écoute de la population et,
non, je le répète: Avez-vous déjà vu le ministre
écouter? Ce n'est pas pareil. C'est loin d'être pareil.
Pour ma part, M. le ministre, je veux vous prouver que c'est par
sincérité que j'ai adressé quelques mots aujourd'hui
à cette commission. Je n'ai pas vraiment ouvert tout le grand livre de
mes objections. J'ai à peine effleuré le début des
quelques feuilles des volumes que j'ai ici. Jusqu'ici, j'ai à peine
abordé le titre du projet de loi. C'est pour vous montrer à quel
point je veux que ce projet de loi soit un bijou législatif que j'ai
insisté pour recevoir les esprits les plus éclairés du
Québec dans ce domaine. Mon Dieu! que je regrette donc qu'une
après l'autre mes mations aient été refusées. Je
m'écrase sous le nombre que vous êtes. Mais, ciel! que cela me
peine de voir que la démocratie n'est pas entendue.
Là-dessus, pour vous montrer que je ne suis pas un "foliebuster",
je vais arrêter immédiatement. Il me reste quelques minutes,
n'est-ce pas? Il me reste deux minutes? Je vais arrêter, parce que si je
me rends au bout... Je ne prendrai pas deux minutes pour dire que
j'arrête, je veux tout simplement vous dire... Je peux peut-être
prendre une minute et demie, mais je vais finir avant mon temps pour montrer ma
bonne volonté. Je vais finir un peu avant. Il me reste à peu
près une minute et demie? Bon! Je vais finir un peu avant mon temps pour
montrer que j'ai vraiment de la bonne volonté dans ce dossier. Je suis
persuadé que les gens de l'autre côté en sont certains.
Sur ce, M. le Président, je réitère que le ministre
devrait faire venir des gens des municipalités pour que ce projet de loi
se fasse de façon plus constructive pour l'ensemble des citoyens et des
citoyennes du Québec.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de
Jonquière.
M. Francis Dufour
M. Dufour: M. le Président, je pense que, depuis le
début de cette commission, cet après-midi, nous avons
essayé de démontrer au gouvernement qu'il aurait tout
intérêt à entendre différents groupes et
différentes personnes pour que l'Opposition et le gouvernement soient
mieux et plus éclairés. Après toutes les tentatives qu'on
a faites depuis cet après-midi, est-ce qu'on pourrait déduire de
ces demandes répétées et de ces refus
répétés que le gouvernement est déjà vieux?
Qu'il n'est plus à l'écoute de la population? Qu'il est
prêt à adopter des projets de loi en affirmant que lui seul
possède la vérité et qu'il ne veut pas faciliter le
travail de l'Opposition? Je pense que l'Opposition a le droit d'avoir tous les
renseignements, non seulement venant du gouvernement, mais de l'ensemble de la
population concernant un projet de loi qui me semble assez important et qui est
de nature à changer pas mal de choses.
Quand on demande que les représentants des municipalités
soient présents, qu'est-ce qu'on se refuse, au fond? C'est l'expertise
des représentants d'environ 1500 municipalités. Si on prend
l'ensemble des conseillers municipaux, cela veut peut-être dire huit
conseillers par conseil municipal; donc, environ 12 000 personnes qui ont subi
l'épreuve du vote et qui sont représentatives de la population.
Elles ont une très grande expertise des relations avec les citoyens et
ce sont elles qui auront à appliquer ces règlements.
Je pense que c'est important qu'on regarde vraiment quels sont les
engagements que les municipalités vont avoir par rapport
à cette loi. Elles vont avoir à faire des rapports, elles
vont avoir à appliquer, elles vont avoir à écrire des
lois, à faire des règlements et à surveiller pour que cela
se fasse. Dieu sait que toutes les municipalités ne sont pas
outillées pour appliquer ce règlement. Déjà, il y a
des interrogations qui se soulèvent dans mon esprit en ce sens que ces
municipalités auront une grande responsabilité dans l'application
de ces règlements.
Est-ce que les municipalités comme telles ont demandé
cette loi et comment l'ont-elles demandé? Le ministre peut nous dire:
Les municipalités ont accepté la loi comme telle. J'ai des doutes
que les municipalités aient eu le temps de l'examiner, de la regarder
sans toutes ses coutures. À ce moment, il va arriver ce qui va arriver,
c'est-à-dire que les municipalités feront comme elles ont
déjà fait en disant: Vous faites trop de règlements, vous
nous en donnez trop.
Cet argument a tout de même été donné par des
municipalités et elles disaient: Lâchez-nous la paix! Les lois on
veut vivre avec, mais arrêtez de nous en donner. Plus on va dans
l'environnement, plus on va imposer, plus on va faire des lois, plus on va
faire des règlements, plus les municipalités vont être des
agents gouvernementaux. Elles n'ont pas le choix. Le gouvernement peut, en
adoptant cette loi, décider qu'il applique la loi et,
déjà, au départ, il identifie exactement les endroits
où les municipalités n'auront pas le droit d'avoir un choix.
Elles vont être obligées de se conformer à la loi et
à ses règlements.
Tout cela fait que les gens qui possèdent une grande expertise et
qui pourraient nous en faire profiter, mais on nous le refuse. Pour moi, il me
semble au départ, d'un mandat de gouvernement, que, déjà,
cela ne répond plus. La population pourra prétendre qu'elle a
été consultée, mais comment? Je pense que tous les
groupes, dont il a été fait mention ici, auraient eu toutes les
raisons d'être ici afin de nous expliquer en long et en large leur point
de vue et comment ils pourraient fonctionner avec cette loi.
Les municipalités aussi sont touchées jusqu'à un
certain point par cette loi parce que, s'il y a moins de dépositaires de
tabac, il y a certainement des taxes aussi municipales en moins. Le
chômage créé par la disparition d'un producteur de tabac va
faire que les municipalités vont être dérangées dans
leur essence même.
Donc, pour moi, cela serait juste, légitime et normal que les
municipalités, qui représentent l'ensemble de toute la population
du Québec, aient pu venir devant nous pour expliquer de quelle
façon ces lois les affectaient, de quelle façon elles
prévoyaient ou elles voyaient comment elles pouvaient appliquer ces
règlements. Est-ce qu'il y avait de coûts attachés à
tout cela. Cela ne coûte jamais rien, mais à force de faire des
règlements, des lois, de l'application et de la réglementation,
il y a un coût quelque part. Que ce soit un coût direct ou
indirect, il y a toujours un coût qui est attaché à
cela.
Les municipalités sont jalouses de leur autonomie, mais elles
sont aussi jalouses de leur faculté de dépenser. C'est important
qu'une municipalité puisse dépenser selon la volonté du
contribuable. C'est pour cela qu'il y a eu une réforme fiscale qui fait
que les municipalités sont complètement responsables du
degré de service qu'elles donnent à leurs citoyens.
Donc, cela aurait pu être important et je comprends difficilement
que le gouvernement refuse cette expertise de gens qui sont habitués de
travailler avec la population, des gens qui ont une expertise certaine, mais
qui vont aussi, en même temps, être affectés avec cette
réglementation, car ils auront à l'appliquer et ils auront aussi
à vivre avec. Cela me semble drôlement important.
Pourquoi refuse-t-on que ces groupes viennent nous dire ce qu'ils en
pensent? Est-ce qu'on veut que cette loi se fasse en disant: On ne fera pas de
vague et cela va être réglé? On va régler le
problème de tout le monde, il s'agit de les prendre et de les
court-circuiter, aller très rapidement et dire: On va les faire passer
à tabac, c'est le cas de le dire, pour que la loi soit appliquée
au plus sacrant? (23 heures)
Si les gens ont à se disculper ou à réagir, ils le
feront après, et ce n'est pas plus grave que cela. Il y a une
"pressitude" à travers ce gouvernement pour faire des lois très
rapidement. On n'a pas souvent, comme Opposition, la chance de rencontrer des
groupes qui viennent nous donner leur point de vue et nous dire ce qu'ils
pensent. Je pense que c'est le contraire
Peut-être qu'il y avait un excès dans l'ancien
gouvernement. Mais, dans celui-là, il y a un excès contraire.
C'est toujours la période du balancier. Le balancier va d'un bout
à l'autre, mais quand est-ce qu'on va trouver des gens qui prendront le
balancier et le mettront en plein centre, pour qu'on puisse au moins souspeser
le pour et le contre et qu'on puisse se faire l'idée exacte de la
façon dont on va vivre avec cette loi.
Cela m'inquiète un peu, M. le Président, de voir
qu'après tant d'efforts et tant de discussions, on n'ait pas pu arracher
du ministre un semblant de consultation avec certains groupes. Peut-être
qu'il y avait trop de ces groupes. Peut-être qu'on aurait dû en
choisir quelques-uns ou un peu moins. Mais, il me semble que cela n'aurait pas
été de nature à retarder très fortement l'adoption
de ce projet de loi.
Pour moi, cela me semble élémentaire,
cela me semble primordial. On a déjà eu l'exemple, dans le
passé, où l'Opposition a réussi à infléchir
le gouvernement pour amener des gens en commission parlementaire. Celui qui
vous parle a vécu ces expériences où on a exigé du
gouvernement qu'il nous écoute en commission parlementaire avec l'appui
de l'Opposition, et on a pu, comme municipalité, donner notre point de
vue, et bravo!
Je pense que c'est cela, vivre une démocratie. C'est fatigant,
vivre en démocratie; c'est embarrassant des fois. Mais seulement, si le
but qu'on vise, c'est de faire participer, c'est de faire également, en
même temps, une certaine éducation, de faire mieux comprendre aux
gens pourquoi on pose tel geste par rapport à un autre, au lieu d'avoir
une loi, purement et simplement, je pense qu'on obtient beaucoup plus de
maturité de la population. En même temps, il faut voir les effets
néfastes qui pourraient arriver à la suite de l'adoption de ce
projet de loi et d'autres lois qui ont imposé des taxes très
fortes pour que ces lois aillent un peu moins vite. Tout cela, pour amener des
gens à faire une démarche d'adulte, une démarche "mature",
une démarche, également, où les gens vont se
reconnaître.
Les gens ne demandent pas d'avoir des lois à contrecoup et
répétées. Je pense que les gens demandent de vivre avec
des lois et de comprendre cette démarche. Si, dans le passé, les
municipalités ont crié qu'il y avait trop de lois, trop de
règlements, je pense que cela s'en vient comme ça. C'est vraiment
par rapport à cela que les municipalités vont dire: La population
ne peut pas vous suivre. Elle ne peut pas suivre à ce rythme, cette
imposition et surtout ces changements de comportement par rapport à ce
qu'ils sont, ce qu'il veulent et, en même temps, dans ce qui est en train
de se passer devant nous.
Je pense qu'il est important, M. le Président, que cette
réflexion se continue et que le ministre écoute. La commission
n'est pas finie, alors je pense qu'il serait de bon aloi, qu'il serait valable
qu'on puisse entendre quelques groupes ou quelques personnes pour nous donner
un meilleur éclairage sur ce projet de loi. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
intervenants? M. le ministre.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: Pour le Journal des débats, M. le
Président, je devrais souligner, encore une fois, qu'il y a eu des
consultations, dès le début, avec les intervenants du monde
municipal, d'abord, avec les gens qui travaillaient au projet de loi. Ensuite,
durant le congrès de l'Union des municipalités du Québec,
j'ai rencontré le président de l'Union des municipalités
du Québec. J'ai rencontré le président des
municipalités régionales de comté. On les a saisis du
projet de loi qui allait être mis devant l'Assemblée nationale. Us
en ont pris connaissance. Le président de l'Union des
municpalités du Québec, qui était le président
sortant, m'a dit que, parce qu'il était président sortant, il
allait déposer cela devant l'exécutif de l'Union des
municipalités du Québec.
L'exécutif est revenu avec des recommandations qui ont
été incorporées dans le projet de loi. Nous avons pris
contact avec les milieux municipaux, et je trouve que ce projet de loi
reflète les discussions que nous avons eues avec eux, comme avec les
intervenants principaux qui ont été consultés de
façon ouverte et constructive dans ce dossier. Pour cette raison, je
n'ai plus de commentaire à faire et je demande qu'on appelle le
vote.
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): Alors, j'appelle la motion
présentée par le député de Terrebonne. "Je demande
à la commission de recevoir les représentants de l'UMQ pour nous
éclairer sur leur position devant ce projet de loi."
Des voix: Rejeté.
M. Blais: Rejeté sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): Rejeté sur
division.
M. Blais: M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: Depuis le tout début, vous vous rendez bien
compte que je suis très constructif. Alors, selon l'article 244,
paragraphe 2, j'aimerais que nous commencions l'article 1 du projet de loi.
Étude détaillée
Le Président (M, Saint-Roch): J'appelle maintenant
l'article 1. M. le député de Terrebonne.
M. Blais: Merci, M. le Président. J'ai bien essayé
d'avoir des gens pour venir discuter avec nous, mais peine perdue. Alors,
à tout Seigneur, tout honneur, nous commençons à l'article
1. M. le ministre a peut-être quelques remarques à faire.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
Application et interprétation
M. Lincoln: M. le Président, très
brièvement. L'article 1 représente l'objectif de la loi, selon
les recommandations du Conseil consultatif de l'environnement, selon toutes les
recommandations de la Commission des droits de la personne, du Conseil de la
famille et de la santé, du ministère des Affaires sociales et de
tous ceux qui oeuvrent au sein du gouvernement et qui ont oeuvré pour
présenter un projet de loi de cette nature. Alors, l'article 1
reflète cet objectif.
M. Blais; M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: Je comprends très bien votre objectif et je
demanderais au ministre s'il accepte un petit amendement - j'en ai deux en
fait, mais je vais commencer par un -afin de mieux protéger les droits
des fumeurs et la santé et le bien-être des non-fumeurs.
M. Lincoln: M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Lincoln: Toute la problématique de cette loi, -
voilà la recommandation du Conseil consultatif de l'environnement qui
est notre appareil consultatif - c'est l'usage du tabac dans les endroits
publics et la protection des non-fumeurs. Elle cadre avec les recommandations
de la Commission des droits de la personne et la politique du ministère
des Affaires sociales. Toute la loi est en fonction de donner des droits
à des non-fumeurs qui n'en ont pas maintenant. Le droit des non-fumeurs
est reconnu partout aujourd'hui. Les gens fument. C'est pour vraiment
protéger le droit des non-fumeurs à un air sans fumée.
C'est cela l'objectif de la loi.
L'objectif même de la loi va dans le sens de la recommandation du
Conseil consultatif de l'environnement et, qui plus est, le projet de toi du
ministre qui me précédait était en recommandation au
ministère et allait exactement dans ce sens: la protection des
non-fumeurs. C'est le sens même de la loi.
M. Blais: M. le Président, sans présenter
directement l'amendement, je veux vous demander ceci, M. le ministre: Si on lit
l'article 1: "La présente loi a pour objet de régir l'usage du
tabac..." Si nous conservons le mot "régir" plutôt que "interdire"
l'usage du tabac dans certains lieux publics, je me sentirai obligé
d'ajouter pour être concordant: "régir l'usage du tabac pour
protéger les droits des fumeurs et pour protéger la santé
et le bien-être des non-fumeurs". Sinon la présente loi aura pour
objet d'interdire l'usage à ce moment-là. On régit quand
on donne des droits aux fumeurs et aux non-fumeurs. Si on ne régit pas,
on interdit. Il faut faire l'un ou l'autre. Je ne sais pas si je suis logique,
mais je me crois très logique dans ma présentation.
M. Lincoln: Notre interprétation du mot "régir" est
très claire. Le mot "régir" veut dire contrôler, veut dire
donner une permission dans certains cas ou imposer une interdiction dans
d'autres cas.
M. Blais C'est exactement ce que je pense.
M. Lincoln: C'est cela. Alors on veut gérer l'usage du
tabac dans certains lieux publics et l'objectif de la loi c'est de
préserver les droits des non-fumeurs à la santé et au
bien-être, ce qu'ils demandent. C'est l'objectif principal de la loi qui,
comme je vous le dis, cadre tout à fait avec les recommandations.
Là, il faudrait peut-être aller dans le sens de la recommandation
de la Commission des droits de la personne du Québec qui s'exprime en
ces termes: Le droit du non-fumeur de respirer un air pur dans les lieux
publics devrait être reconnu et respecté et ce même s'il
affecte chez les fumeurs l'exercice d'une autre liberté mais non
fondamentale celle-là, celle de fumer dans les lieux publics. C'est
clair que le sens de la loi se situe dans le cadre de la recommandation de la
Commission des droits de la personne du Québec et du Conseil consultatif
de l'environnement. C'est cela l'objectif de la loi.
M. Blais: M. le Président, là vraiment je vais
essayer de bien comprendre. La présente loi a pour objet de régir
l'usage du tabac dans certains lieux publics. Écoutez, si on
régit l'usage du tabac, le mot "régir" veut dire
réglementer si on a le droit à un endroit ou si on n'a pas le
droit. C'est cela que le mot "régir" veut dire. Si on ne parle que du
bien-être des non-fumeurs il faut enlever le mot "régir" et
écrire le mot "interdire"... l'usage du tabac. Si l'on garde le mot
"régir", si on veut être conséquent il faut dire, je crois
- je peux me tromper mais c'est la langue française qui est ainsi faite
- que la présente loi a pour objet de régir l'usage du tabac dans
certains lieux publics afin de mieux protéger les droits des fumeurs ou
de mieux protéger la santé et le bien-être des non-fumeurs.
Ou on change le mot "régir" et on dit: La présente loi a pour
objet d'interdire l'usage du tabac pour protéger les non-fumeurs. C'est
l'un ou l'autre.
M. Lincoln: M. le Président, cela n'aurait pas
été correct. Dans certains articles de la loi on dit qu'il est
permis de fumer tout à fait exclusivement dans certains lieux. Donc, ce
n'est pas une interdiction totale, c'est une interdiction dans certains
endroits. C'est une permission dans d'autres endroits. C'est pourquoi
"régir" a été utilisé pour indiquer que cela veut
dire gérer, contrôler et permettre dans certains cas ou omettre
dans d'autres cas. Régir cela veut dire qu'on a un choix de faire une
chose ou une autre. L'objectif fondamental de la loi c'est de reconnaître
certains droits à des non-fumeurs qui le demandent. C'est cela
l'objectif de la loi. Ces droits n'étaient pas reconnus jusqu'à
présent. C'est le sens même de la loi. Autrement il n'y aurait pas
eu de loi. C'est sûr qu'aujourd'hui sans une loi on pourrait fumer
n'importe où. Alors l'idée c'est justement de donner certains
droits aux non-fumeurs dans certains endroits. Comme je le répète
encore une fois c'est là l'objectif même du mémoire du
Conseil consultatif qui est une recommandation faite au gouvernement sur
l'usage du tabac dans les endroits publics et la protection des non-fumeurs.
C'est cela, on régit l'usage du tabac afin de mieux protéger la
santé et le bien-être des non-fumeurs.
M. Blais: M. le Président, je suis obligé de
présenter un dernier amendement. On le battra tout de suite. Je crois,
et je suis d'une extrême sincérité sur cela, que si on
garde le mot "régir" il faut absolument... On régit des choses,
on régit un choix. On ne régit pas la protection des non-fumeurs,
c'est impossible. On régit des droits pour des fumeurs et des
non-fumeurs. Sinon, si c'est seulement pour les non-fumeurs, on interdit. Il
faut tout de même que la langue française ait les mêmes
définitions pour tout le monde. Personnellement j'aimerais
présenter un amendement. Cet amendement serait celui-ci: Afin de mieux
protéger les droits des fumeurs et de protéger la santé et
le bien-être des non-fumeurs. Ce n'est pas parce que je veux vous parler
pendant 25 minutes sur cela, M. le ministre, mais je tiens à ce que...
Personnellement c'est pour une sorte de concordance des mots de la langue
française. On régit un choix entre deux choses et s'il y a un
seul choix, on interdit. On n'a pas le choix. J'ai l'impression que le mot veut
dire ce qu'il veut dire. Si vous ne voulez pas faire cet amendement en
deuxième partie de l'article 1, je vais faire un amendement pour la
présente loi qui aura pour objet d'interdire l'usage du tabac dans
certains lieux publics. Je présente celui-là. Si vous le refusez,
je vais présenter l'autre. Si vous le refusez, on s'en tiendra
là. Mais je crois, et vous avez des gens derrière vous, qu'il
faut faire l'un ou l'autre. (23 h 15)
M. Lincoln: M. le Président, je...
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Lincoln: ...voulais informellement ne pas entrer dans... Pour
souligner au député, par exemple, prenez l'article 14, c'est un
bon exemple, où on interdit à la fois et où on permet
à la fois. Dans l'article 14, c'est permis et c'est interdit en
même temps. Ce n'est pas contradictoire. En certaines circonstances, on
interdit et en certaines circonstances, on permet. C'est pourquoi l'idée
était de régir.
M. le député, je disais au président que si vous
regardez l'article 14, par exemple, c'est un bon exemple. Dans l'article 14, on
dit: II est interdit de fumer dans un lieu fermé, etc., mais toutefois,
il est permis de fumer dans ces lieux, etc. C'est-à-dire qu'il y a les
deux et les deux ne sont pas contradictoires. En certaines circonstances il est
interdit et en certaines circonstances il est permis. C'est pourquoi nous
parlons de régir parce qu'on peut permettre les deux choses. C'est
cela.
M. Blais: Alors, on est d'autant plus d'accord, je pense, M. le
ministre. J'aime beaucoup mieux le mot "régir" que le mot "interdire",
personnellement. Mais si vous portez dans votre projet de loi le mot
"régir", il faut en subir les conséquences dans le reste du
paragraphe. Si on régit... Vous me dites vous-même que si on va
voir à l'article 14, il y a les deux genres. Alors, si on régit
l'usage du tabac dans certains lieux c'est afin de protéger les fumeurs?
Ou c'est pour les deux?
M. Lincoln: Non, notre objectif à nous, c'est de
protéger les droits des non-fumeurs qui ont dit jusqu'à
présent, avec justification, que ces droits n'avaient pas
été reconnus. Ils sont appuyés par la Commission des
droits de la personne et par le Conseil consultatif de l'environnement. C'est
cela l'objectif principal de la loi.
M. Blais: D'accord, M. le Président. J'aimerais que cet
amendement passe.
M. Lincoln: J'appelle le vote sur l'amendement, M. le
Président.
Le Président (M. Saint-Roch): Adopté?
M. Lincoln: Non. L'amendement est rejeté.
Le Président (M. Saint-Roch): Premièrement,
l'amendement est recevable. Est-ce qu'on passe à l'amendement?
M. Blais: Non, cela va. Je l'ai expliqué
avant de le présenter mais vous pouvez le lire.
M. Lincoln: On a pris le vote sur l'amendement. Vous pouvez le
lire, si vous voulez.
Le Président (M. Saint-Roch): Oui. Pour la
fidélité de la transcription de nos débats. La motion est:
"Après protéger, ajouter protéger les droits des fumeurs
et protéger la santé et le bien-être des non-fumeurs."
Est-ce que l'amendement est adopté?
M. Lincoln: Rejeté. Une voix: Rejeté.
M. Blais: Alors, pour être conséquent avec moi, M.
le ministre, j'amène l'autre sans vouloir parler longtemps dessus.
Le Président (M. Saint-Roch): L'amendement est
rejeté.
M. Blais: Sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): Sur division.
M. Blais: Merci. J'aimerais proposer l'amendement suivant:
"Remplacer le mot "régir" par le mot "interdire" l'usage du tabac dans
certains lieux. Il n'y a que ce mot à changer.
Alors, l'article se lirait comme suit, M. le Président: "La
présente loi a pour objet d'interdire l'usage du tabac dans certains
lieux publics afin de mieux protéger la santé et le
bien-être des non-fumeurs." Il faut qu'on soit logique. On interdit pour
protéger la santé des non-fumeurs ou on régit pour
préserver les deux. Si on ne comprend pas cela, on n'a pas le même
dictionnaire.
M. Lincoln: M. le Président, pour les mêmes raisons
que je citais que nous n'interdisons pas seulement, nous permettons aussi, mais
que nous ne trouvons pas de contradiction entre ceci et l'objectif formel et
principal du projet de loi qui est de protéger les droits des
non-fumeurs, qui est vraiment le sens de la loi, pour ces raisons, je me vois
obligé de refuser l'amendement présenté par le
député de Terrebonne.
M. Blais: Il est sérieux, là. Bien sûr que je
ne m'obstinerai pas là-dessus parce que je suis constructif, j'ai
hâte que le projet soit adopté mais le mot régir ici n'a
pas d'après mot... Et j'aimerais beaucoup après que les gens qui
défendent derrière vous ce mot régir plutôt
qu'interdire, qui défendent un bout ou l'autre m'expliquent ce soir ou
demain - on est ici pour trois semaines, en tout cas - m'expliquent pourquoi,
quel est ce choix. Je ne peux pas malheureusement comprendre, je m'en excuse
très humblement, je ne peux pas comprendre comment on n'interdit pas
l'usage du tabac dans certains lieux publics afin de mieux protéger la
santé des non-fumeurs et le bien-être. Si on ne fume pas, c'est
bien sûr qu'il y a le bien-être. Je ne comprends pas comment cela
se fait qu'on ne dit pas interdire parce que si on met régir cela veut
dire qu'on choisit entre deux choses et on met dans l'autre membre de phrase
une seule chose: des non-fumeurs M. le Président, je voudrais mettre cet
amendement aux voix.
M. Lincoln: Un vote enregistré ou pas?
M. Blais: Non. Remplacer dans la première,
l'article...Vous voulez que je vous le donne?
Le Président (M. Saint-Roch): Oui, s'il vous plaît,
M. le député de Terrebonne.
M. Blais: "L'article 1 de ce projet de loi est modifié par
le remplacement à la première ligne du mot "régir" par le
mot "interdire"."
Le Président (M. Saint-Roch): L'amendement est recevable.
Est-ce qu'il y a un débat ou si je lis la motion?
M. Blais: Non, non, non.
Le Président (M. Saint-Roch): L'amendement se lirait comme
suit: "L'article 1 de ce projet de loi est modifié par le remplacement
à la première ligne du mot "régir" par le mot
"interdire"." Est-ce que l'amendement est adopté?
Une voix: Adopté.
M. Lincoln: Rejeté.
M. Blais: Au moins sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): L'amendement est
rejeté sur division.
M. Blais: M. le ministre, on va laisser passer l'article 1 comme
cela, l'article 1 est adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'article 1 est
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): Adopté.
M. Blais: Adopté, oui, mais c'est seulement pour vous
montrer que je veux absolument qu'on fasse ce projet de loi le plus vite
possible. Je tiens encore à répéter que je ne comprends
vraiment pas pourquoi
on ne change pas ces mots. La langue française a des
définitions et c'est la même pour tout le monde et j'ai la
phraséologie ici: s'opposé, le premier membre s'oppose à
la deuxième. Il y a une opposition verbale. On peut être d'avis
contraire.
M. Middlemiss: M. le Président, je crois que le
député de Terrebonne a refusé de débattre, il avait
le temps de débattre avant qu'on prenne le vote.
M. Lincoln: ...je pense qu'il a eu le temps d'expliquer son point
de vue, c'est juste.
Le Président (M. Saint-Roch): Il y a consentement.
M. Dufour: J'aimerais, M. le Président, c'est sûr
que cela a été adopté, peut-être un peu vite...
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: J'aurais eu un amendement, c'était après
le mot "santé" enlever: "et le bien-être". À l'article 1,
après le mot "santé", enlever: "et le bien-être".
Le Président (M. Saint-Roch): Je m'excuse, M. le
député de Jonquière, l'article 1 a été
adopté maintenant; alors, j'aurais besoin du consentement unanime,
suivant nos règles de procédure, pour le rouvrir.
M. Blais: C'est bien compréhensible. Cela va me prendre
une seconde, mais si vous dites non je vais être "tough".
M. Lincoln: Non, mais écoutez, moi, je suis prêt
à faire...
M. Blais: M. le ministre. On était bien avant qu'il arrive
encore.
M. Lincoln: ...un accord avec l'Opposition à une
condition. On est ici depuis 15 heures, je veux bien faire... Si on accepte
qu'on ne fait pas de discours sur le sujet, si on discute très
brièvement la chose, je suis disposé à rouvrir l'article.
Si c'est une affaire de discours, je vous dirais franchement...
M. Blais: Absolument pas.
M. Dufour: Ce n'est pas un discours d'une demi-heure.
J'apprécie votre compréhension. Si on prend l'article "mieux
protéger la santé des non-fumeurs" on vient de le circonscrire
dans le temps. Le bien-être, est-ce que ce n'est pas tellement large que
cela pourrait amener un abus quelque part? C'est dans ce sens que je pense que
le mot "bien-être" élargit la notion de la loi et permet beaucoup
plus de positionnement.
Le Président (M. Saint-Roch): L'article est rouvert, M. le
ministre.
M. Lincoln: Je voudrais expliquer au député de
Jonquière que le mot "bien-être" fait partie de notre loi de
l'environnement. C'est une partie intégrante de la question de
l'environnement. Cela va plus loin que la santé, il y a aussi la
question des droits que réclame le non-fumeur. Tout cela est basé
non seulement sur le concept de santé, mais aussi sur les droits de la
personne et le bien-être de la personne. C'est pourquoi nous l'avons
inscrit, c'est une notion fondamentale dans la loi de l'environnement.
C'était cela le sens de la chose.
Le Président (M. Saint-Roch): Il n'y a pas d'amendement.
L'article 1 est-il adopté?
M. Lincoln: Adopté.
M. Dufour: Sauf que moi, je veux enlever "et le bien-être",
pour mon principe à moi.
Le Président (M. Saint-Roch): À ce moment-là, M. le
député de Jonquière, cela me prendrait un amendement.
M. Dufour: Oui, je l'avais donné. Peut-être
n'était-il pas assez fort?
Le Président (M. Saint-Roch): L'amendement à
l'article 1 rouvert se lirait comme suit; "L'article 1 de ce projet de loi est
modifié par la suppression, à la deuxième ligne, des mots
"et le bien-être".
M. Dufour: Je suis prêt au vote, Monsieur. On a
défendu notre point.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'amendement de
l'article 1 est adopté?
M. Lincoln: Non, rejeté. M. Blais: Sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): L'amendement est
rejeté sur division. L'article 1 est-il adopté?
M. Lincoln: Adopté. M. Dufour: Sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): Sur division. J'appelle maintenant
l'article 2.
M. Blais: "Dans la présente loi, on entend par "fumer" le
fait d'avoir en sa
possession du tabac allumé."
M. Lincoln: M. le Président, l'idée d'écrire
cela de cette façon, c'est parce qu'on parle par exemple, de cigarettes,
de cigares ou de pipes, c'est-à-dire n'importe quelle forme de tabac
allumé. Parce que "fumer" peut être... C'est pour ne pas avoir
à dire "fumer la cigarette, fumer le cigare, fumer la pipe". Alors,
c'est une description qui inclut les trois principales façons de
fumer.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: Pour être un peu moderne, je ne crois pas que du
"pot" soit du tabac. Si je suis dans un lieu où il est interdit de fumer
et que j'ai un "joint", est-ce que c'est autorisé?
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Lincoln: On n'a pas le droit de... Il y a des lois sur les
drogues qui sont des lois fédérales. Aujourd'hui, la marijuana et
les autres drogues sont régies par les lois fédérales qui
ne sont pas sous notre juridiction. Mais nous avons le droit, ici, de
régir l'usage du tabac qui n'est pas considéré comme une
drogue d'après les lois fédérales. C'est cela la
distinction fondamentale.
M. Blais D'accord, M. le Ministre. Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): L'article 2 est
adopté?
M. Blais: Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): J'appelle maintenant
l'article 3.
M. Blais: L'article 3, si vous permettez qu'on le lise.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: "Pour l'application de la présente loi, sont des
organismes publics: les organismes gouvernementaux, les organismes municipaux,
les organismes scolaires et les établissements de santé et de
services sociaux." Dans les organismes gouvernementaux, je suis
persuadé... On voit en deuxième lieu l'Assemblée
nationale. Pour l'Assemblée nationale, de quelle façon seront
régies les différentes pièces de l'Assemblée
nationale? Cela va poser un problème, je crois.
M. Lincoln: Cette définition d'orga- nismes publics a
été tirée de lois gouvernementales, par exemple la loi sur
l'accès aux documents des organismes publics, la loi 65, qui donne une
description de ce qu'on appelle les organismes publics. On a voulu se fier sur
cette loi qui est une loi que le gouvernement essaie d'uniformiser
actuellement. Si vous voyez la description des organismes publics, c'est celle
qu'on a utilisée pour décrire les organismes.
M. Blais: Cela est peut être un peu difficile, je crois,
tout en essayant d'être très positif. J'ai vu, parce que j'ai lu
la loi, qu'on va avoir des gens... Disons qu'à l'Assemblée
nationale, c'est le Sergent d'armes qui est chargé de surveiller afin
qu'on ne fume pas. Dans certaines commissions parlementaires, j'ai l'impression
que ce sera interdit, malheureusement pour les fumeurs. Nous avons tellement un
bon système de ventilation ici qu'on pourrait leur permettre de fumer et
cela n'incommoderait pas les non-fumeurs; je le crois en tout cas. Il y a aussi
les milieux... Si on interdit "at large" - dans le sens très "loi 101"
du mot -aux gens de fumer dans des endroits comme celui-ci, avec un bon
système comme celui que nous avons, je trouverais cela curieux. Dans
l'esprit de la loi, il demeure possible que l'inspecteur l'interdise. (23 h
30)
Concernant le droit d'entrer dans différents endroits, comme je
l'ai vu, supposons qu'on soit en caucus, que vous avez un caucus du Parti
libéral, ici - c'est une salle de commission et on fait nos caucus dans
des salles de commission - la personne qui serait chargée de faire
respecter ce code de déontologie des fumeurs - comme vous voudrez, je ne
sais pas comment appeler cela - l'un des nombreux 3000 règlements qui
seront émis, il y en aura un qui sera émis pour
l'Assemblée nationale avec des signes... On est en caucus, dans une
salle où c'est interdit de fumer, l'inspecteur entre. D'abord, il y a la
confidentialité du caucus. En tout temps, on dit que les gens pourront
venir à l'Assemblée nationale aussi. En tout temps! Là,
j'ai un petit problème.
M. Lincoln: Monsieur, je comprends très bien ce que vous
voulez dire.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Lincoln: M. le député, ici, on ne fait que
décrire les organismes publics. Plus tard, lorsqu'on va arriver dans le
détail des endroits, par exemple, à l'article 8, où on
parle de salles de conférence, de cours, de réunions, de
séminaires, nous aurons des suggestions à faire pour
répondre aux interrogations du député. Si vous vous
référez à l'article 14, par exemple, vous verrez
que nous ajoutons la notion: "Toutefois, il est permis de fumer dans ces lieux
lorsque ces activités sont réservées exclusivement
à un groupe de personnes déterminées." Nous avons
suggéré quelque chose comme cela pour les rencontres dont vous
parlez. Pour le moment, si on peut accepter la description des organismes
publics, lorsqu'on arrivera au détail des salles de réunion, etc.
on sera... Je comprends ce que vous voulez dire. En fait, nous en avons
discuté et nous allons apporter des suggestions en ce sens.
M. Blais: Je trouve cela un peu ambigu. Juste pour
éclairer ma lanterne, M. le ministre...
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: Au deuxième paragraphe, on dit: "Sont
assimilés à des organismes publics, aux fins de la
présente loi: le lieutenant-gouverneur - cela va - l'Assemblée
nationale, un organisme dont celle-ci nomme les membres et une personne qu'elle
désigne pour exercer une fonction en relevant, avec le personnel qu'elle
dirige." Qu'est-ce que cela veut dire "le personnel qu'elle dirige"?J'ai de la difficulté à comprendre ce que cela veut dire.
Les mots "qu'elle" se rapportent à quoi? À la personne? À
l'Assemblée nationale? À la fonction? Il y a beaucoup de mots
féminins qui précèdent cela. La phraséologie fait
que le féminin se rapporte à trois ou quatre mots féminins
avant, je ne sais pas auquel dans un mélange de féminismes.
M. Lincoln: C'est un organisme...
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Lincoln: Le lieutenant-gouverneur, l'Assemblée
nationale, tout organisme de l'Assemblée nationale, dont
l'Assemblée nationale nomme les membres et une personne qu'elle
désigne pour exercer une fonction en relevant, qui relève de cet
organisme et, en plus, le personnel qu'elle dirige, c'est-à-dire...
M. Blais: Le mot "qu'elle" se rapporte-il à
"Assemblée nationale" ou à "organisme"?
M. Lincoln: À la personne. M. Blais: À la
personne.
M. Lincoln: Un organisme dont celle-ci l'Assemblée
nationale - nomme les membres et une personne qu'elle désigne pour
exercer une fonction qui relève de cet organisme et, en plus, le
personnel qu'elle dirige. C'est le même modèle que celui de la loi
22...
M. Blais: Oui, mais si c'était mal écrit en 1922,
cela l'est encore en 1986.
M. Lincoln: Non, c'était en 1984.
M. Blais: Non mais, ce que je veux dire, c'est que j'ai beaucoup
de difficulté à comprendre la phraséologie et j'ai
l'impression que ce n'est pas très clair pour vous non plus qui
êtes des habitués de ces us et coutumes, parce que vous êtes
obligés de vous forcer les "nénettes" pour me donner
l'explication pour savoir à qui le mot "qu'elle" se rapporte. Il y a
l'Assemblée nationale qui est au féminin avant...
M. Lincoln: Oui.
M. Blais: J'ai bien l'impression... "...un organisme dont
celle-ci - c'est l'Assemblée nationale - nomme les membres et une
personne "qu'elle" désigne - "qu'elle", c'est l'Assemblée
nationale - pour exercer une fonction en relevant, avec le personnel qu'elle
dirige." Vous me dites que le dernier "qu'elle" se rapporte au mot "personne".
J'ai plutôt l'impression qu'il se rapporte à l'Assemblée
nationale. Le premier "qu'elle" se rapporterait à l'Assemblée
nationale et le deuxième "qu'elle" ne se rapporterait pas à
l'Assemblée nationale. C'est encore plus ambigu que je ne le
pensais.
M. Lincoln: Non. Le second "qu'elle", c'est évidemment la
personne désignée par l'Assemblée nationale, par exemple,
un président de commission avec le personnel dirigé par cette
personne, qui est nommée par l'Assemblée nationale.
M. Blais: Pour ma bonne compréhension...
M. Lincoln: Prenons l'exemple... M, Blais: D'accord. Allez
donc!
M. Lincoln: ...de l'Assemblée nationale où une
commission permanente est nommée par l'Assemblée nationale.
Disons que le Bureau de l'Assemblée nationale désigne le
président de l'Assemblée nationale comme président du
Bureau. Le personnel qui est dirigé par cette personne qui est
responsable de la fonction, c'est ce dont on parle.
M. Blais: Oui. Je comprends bien maintenant, de la façon
dont vous me l'expliquez. Il est vrai que le deuxième "qu'elle" doit se
rapporter à la personne...
M. Lincoln: À la personne, oui.
M. Blais ...mais je vous jure que c'est mal écrit.
M. Lincoln: Oui, je dois dire que c'est écrit...
M. Blais C'est vraiment mal écrit. Il y a une limite
à demander des efforts intellectuels aux gens qui lisent cela.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Lincoln: M. le député, je pense que, pour
clarifier cela, si vous voulez, on pourrait écrire "avec le personnel
que cette personne dirige".
M. Blais: Ah! là, ce serait beaucoup plus
compréhensible pour tout le monde, d'ailleurs.
M. Lincoln: Oui.
M. Blais: Je vous en saurais gré et j'approuverais
l'amendement immédiatement.
Le Président (M. Saint-Roch): Je lis l'amendement:
Remplacer les mots "qu'elle dirige" par les mots "avec le personnel que cette
personne dirige".
M. Blais: Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): L'amendement est
adopté. Est-ce que l'article 3 tel qu'amendé...
M. Blais: Non. Si cela ne vous fait rien, j'aurais encore une
question pour essayer de mieux comprendre.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: Est-ce que le Protecteur du citoyen, le
Vérificateur général, le Directeur général
des élections font partie de cela? Sous quelle rubrique allons-nous
retrouver la concordance de ces trois organismes?
M. Lincoln: Ce sont des organismes qui sont nommés par
l'Assemblée nationale elle-même.
M. Blais: "...un organisme dont celle-ci nomme..."
M. Lincoln: Ce sont tous les organismes qui dépendent de
l'Assemblée nationale. Par exemple, je pense que le Directeur
général des élections est nommé par le
président de l'Assemblée nationale. Ce serait certainement un des
organismes. Je ne peux pas vous dire tous ceux qui dépendent de
l'Assemblée nationale, mais ce sont les organismes qui dépendent
directement de la Loi sur l'Assemblée nationale et de son
président. Ce sont toutes les commissions de l'Assemblée
nationale. Le restaurant Le Parlementaire, par exemple, pourrait être un
organisme qui en dépend.
M. Blais: Oui, je le comprendrais, mais le Protecteur du citoyen
étant souvent à l'extérieur... Par exemple, où est
installé le Vérificateur général? Je ne le sais pas
personnellement. Je sais que le Directeur général des
élections est lui aussi à l'extérieur...
Une voix: C'est une personne. M. Blais: Avec son
personnel.
M. Lincoln: Oui, son personnel. C'est pourquoi il y a certains
organismes gouvernementaux qui sont des organismes publics et qui
dépendent de la fonction publique, des ministères ou du
gouvernement du Québec lui-même. On a voulu couvrir tous les
organismes gouvernementaux. Il fallait dire cela parce que l'Assemblée
nationale est responsable de certains de ces organismes.
Il faudrait peut-être regarder les articles 3 et 4 ensemble. C'est
pour couvrir tout l'éventail gouvernemental, c'est-à-dire que
l'Assemblée nationale a certains organismes qui dépendent d'elle;
d'autres dépendent de l'Exécutif, du gouvernement et des
ministères. C'est pour couvrir tout l'éventail parce que,
justement, les détails que vous avez soulevés...
M. Blais: Mon recherchiste me fait, je pense à bon
escient, M. le ministre, remarquer, avec le personnel qu'il dirige que c'est
peut-être le seul article où on parle de personnel. Dans tout ce
groupe, on ne parle que d'institutions, c'est le seul. Est-ce que c'est
exceptionnel ou si...
M. Lincoln: Nous avons pris cela pour coordonner avec les lois
existantes du gouvernement parce que, sans doute, s'il n'y avait pas cette
clarification comme telle pour l'Assemblée nationale... Je suppose qu'il
y a certainement une raison pour laquelle on a situé cela dans les lois
similaires. C'est la raison pour laquelle on a suivi le même mot à
mot.
M. Blais: Pour ma bonne compréhension, cela voudrait dire
que l'Assemblée nationale et toutes ses dépendances physiques
pourraient être régies - pour employer votre mot - pour l'usage du
tabac pour mieux protéger la santé des non-fumeurs et non pas
pour permettre à des gens de fumer. Ils vont juste régir la
santé des non-fumeurs.
M. Lincoln: C'est régir l'usage du tabac
afin de mieux protéger la santé et le bien-être des
non-fumeurs.
M. Blais: Des non-fumeurs et le plaisir des fumeurs, non! On
régit pour deux choses. J'ai un peu la tête dure,
trouvez-vous?
Une voix: Vous êtes concordant. C'est de la
concordance.
M. Lincoln: Je pense qu'il faudrait voir les paragraphes 3 et 4
ensemble pour situer tout l'ensemble de l'appareil gouvernemental. En fait, ce
qu'on a voulu, c'est nommer l'Assemblée nationale spécifiquement
et le lieutenant-gouverneur, parce qu'il y a des organismes, surtout de
l'Assemblée nationale, qui sont formés de façon tout
à fait différente du reste de l'appareil gouvernemental.
M. Blais: Le deuxième paragraphe de l'article 4, si on
prend les articles 3 et 4 ensemble: les Conseils régionaux de
santé et de services sociaux constitués en vertu de la Loi sur
les services de santé, etc., les hôpitaux, tout est dans cela, les
900 institutions et services sociaux. 900 institutions sont incluses dans le
deuxième paragraphe de l'article 4, tout ce qui a à trait au
social, tous les hôpitaux. C'est curieux: "Sont assimilés à
des organismes gouvernementaux, aux fins de la présente loi: les
Conseils régionaux de santé et de services sociaux
constitués en vertu de la Loi sur les services de santé et les
services sociaux (L.R.Q., chapitre S-5) et la Corporation d'hébergement
du Québec," On ne dit pas "hôpitaux". J'aimerais que vous me
disiez, techniquement, pourquoi on ne dit pas "hôpitaux"?
Une voix: C'est parce que, d'une part, ils n'ont pas...
M. Blais: Il peut répondre aussi, c'est permis.
M. Lincoln: Si vous voyez l'article 7, M. le
député, cela va répondre à votre question. "Les
établissements de santé et de services sociaux comprennent les
établissements publics visés dans les articles 10 et 11 de la Loi
sur les services de santé et les services sociaux (L.R.Q., chapitre
S-5), les centres hospitaliers qui sont des établissements privés
conventionnés au sens de ta loi." Cela inclut les établissements
publics visés dans les articles 10 et 11 de ta Loi sur les services de
santé et les services sociaux, c'est-à-dire les cliniques
communautaires et les centres hospitaliers qui sont privés aussi.
M. Blais: C'est une bonne question. M. le ministre...
M. Lincoln: La raison pour laquelle nous avons fait cela en deux
parties séparées, c'est que vous verrez que, dans les
établissements de santé couverts sous l'article 7, il y a une
disposition différente des autres, c'est-à-dire que, dans les
centres hospitaliers, il est interdit de fumer.
M. Blais J'ai une petite question, M. le ministre. Les tribunaux,
les salles judiciaires sont inclus dans cela, à quel endroit?
Jusqu'à l'article 4. On regarde les articles 3 et 4, les affaires de
l'Assemblée nationale et tout ce qui en dépend parce que les
services juridiques dépendent du gouvernement. (23 h 45)
M. Lincoln: Ce sont les ministères, tes organismes non
visés dans les articles 5, 6 et 7 dont le gouvernement ou un ministre
nomme la majorité des membres. C'est certain que le ministre nomme les
juges, et ensuite il y a quelque chose qui a trait aux services juridiques sous
l'article 14.
M. Blais: Ils vont venir plus tard.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: II y a des organismes dont le ministre nomme les
membres, mais où il n'y a pas nécessairement de paiement, ils ne
sont pas rémunérés. Je pense, par exemple, à
Radio-Québec; c'est un organisme dont le ministre nomme les membres. Il
y a les SEPAQ, un groupe qui s'occupe des établissements de plein air au
Québec. Est-ce que ces gens seraient couverts par cette loi?
M. Lincoln: Oui, effectivement. Ce serait certainement le cas
comme Radio-Québec où le ministre nomme la majorité des
membres, c'est sûr que ce serait couvert. C'est un organisme
gouvernemental non visé dans les articles 5, 6 et 7 dont le gouvernement
ou un ministre nomme la majorité des membres et dont la loi ordonne que
le personnel soit nommé ou rémunéré selon la Loi
sur la fonction publique ou dont le fonds social fait partie du domaine public.
Par exemple, si on veut parler d'Hydro-Québec, il faut qu'on remplisse
certaines conditions, que le gouvernement ou un ministre nomme la
majorité des membres et où la loi stipule que le personnel est
nommé ou rémunéré selon la Loi sur la fonction
publique. Alors, ce sont réellement de3 agences gouvernementales. Ce ne
sont pas des sociétés gouvernementales comme les caisses
populaires ou Hydro-Québec, qui ne sont pas régies par la Loi sur
la fonction publique.
M. Dufour: Mais, cela inclut, M. le ministre, tous les groupes
qui ont été nommés, par exemple, les conseils
d'administration. Le 6 n'est peut-être pas correct. Vous les
nommez et c'est déjà dans une bâtisse gouvernementale en
principe, où se déroulent les événements. Je prends
comme exemple un conseil d'administration d'hôpital.
M. Lincoln: Pour un conseil d'administration d'hôpital,
oui, ce le serait, mais cela serait prévu sous l'article 7. Dans la loi,
on dit que le personnel soit nommé ou rémunéré
selon la Loi sur la fonction publique, c'est-à-dire qu'on parle
d'organisation. Je pense que vous avez dit Radio-Québec, et c'est un
bien bon exemple.
M. Dufour: Quand vous... Attendez une minute.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: Quand vous dites "dont le fonds social fait partie du
domaine public", c'est quoi le fonds social?
M. Lincoln: Le fonds social, c'est au sens d'une
société qui appartient à la couronne, une
société dont le fonds social fait partie du domaine public, une
corporation gouvernementale. La Société des transports du
Québec, par exemple, aurait été une corporation
visée dans ce sens.
M. Dufour: Est-ce qu'on pourrait...
Une voix: Comme Quebecair ou une raffinerie de sucre.
M. Lincoln: Oui, une raffinerie de sucre par exemple.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: Est-ce qu'on pourrait assimiler les fonds de retraite?
Non? Il y a un certain nombre de régies qui sont sous la
responsabilité gouvernementale, où on nomme les membres et
où on décide de leur rémunération. J'ai même
des doutes quant au conseil d'administration d'Hydro-Québec, que cela ne
tombe pas sous cet... C'est le gouvernement, à mon sens, qui nomme les
administrateurs d'Hydro-Québec. Cela touche du monde en "barnache".
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Lincoln: L'idée, c'est de couvrir tous les agences et
organismes qui sont propriété publique, contrôlés
par le gouvernement du Québec, qui nomme la majorité des membres,
dont le personnel est rémunéré selon la Loi sur la
fonction publique ou dont le fonds social fait partie du domaine public. Un
exemple typique, dans notre ministère, la Société
québécoise d'assainissement des eaux qui est vraiment une agence
gouvernementale où on nomme la majorité des membres.
C'est une société dont le fonds social est du domaine
public, dont le personnel fait partie de la fonction publique. En fait, les
gens transfèrent du ministère à la société.
C'est ce genre de société qui est couverte par cela.
M. Dufour: Je voudrais dire à M. le ministre...
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: ...qu'à Hydro-Québec, vous nommez le
conseil d'administration. C'est le gouvernement qui le nomme, à moins
que je me trompe. Il me semble que c'est le gouvernement qui nomme ces
gens.
M. Lincoln: Oui.
M. Dufour: Alors, ils seraient couverts par cette loi, à
mon point de vue.
M. Lincoln: Oui. M. le député, je dois apporter une
correction ici; je pensais que ces critères étaient cumulatifs.
On m'a souligné que les critères sont alternatifs,
c'est-à-dire que cela peut être trois choses différentes.
Le gouvernement ou un ministre nomme la majorité des membres, ou bien,
le personnel est nommé ou rémunéré selon la Loi sur
la fonction publique, ou bien, le fonds social appartient au domaine
public.
M. Dufour: Pour une meilleure compréhension, par exemple,
des groupes comme la Sûreté du Québec, ce serait
couvert?
M. Lincoln: Ah oui!
M. Dufour: Les agents de conservation seraient couverts, eux
aussi?
M. Lincoln: Oui, bien sûr. Une voix: Mais
où?
M. Dufour: C'est parce qu'il y a trois conditions et cela peut
être des conditions séparées. Autrement dit, il y a trois
conditions différentes qui font que ces organismes tombent sous la
responsabilité du ministère. Donc, ce n'est pas une addition. Il
n'y a pas de hic; c'est l'un ou l'autre. La loi ordonne que, si la
majorité des membres est nommée par le gouvernement, cela tombe
là-dedans. Si le personnel est nommé ou
rémunéré selon la Loi sur la fonction publique, cela tombe
là-dedans. Le fonds social...
M. Lincoln: Dans le cas des agents de la conservation de la
faune, ce sont des employés directs du ministère de toute
façon. Ce n'est pas une organisation séparée. C'est une
partie du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. On
prend cela comme exemple, mais ils sont automatiquement les employés du
ministère.
M. Dufour: Est-ce que... Une autre question.
M. Lincoln: Mais là, on parle des organismes; on ne parle
pas des individus.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: C'est peut-être farfelu, la question que je vais
poser. Vous donnez des contrats, à un moment donné. Une
soumission est présentée. Les gens font le travail. Est-ce que
cela pourrait, en l'étendant, parce qu'il y a une participation
gouvernementale... Non?
M. Lincoln: Ce sont les organismes gouvernementaux, comprenant le
gouvernement, le Conseil exécutif, le Conseil du trésor, les
ministères, les organismes visés aux articles 5 et 6 dont le
gouvernement ou un ministre nomme la majorité des membres. Alors, cela
ne s'appliquerait sûrement pas.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: M. le ministre, disons qu'on va les prendre
jusqu'à l'article 7, dans leur ensemble, si vous n'avez pas d'objection
majeure.
M. Lincoln: Je n'en ai pas. Non, du tout.
M. Blais: Les organismes municipaux, en gros, les organismes
scalaires, les établissements de santé - c'est là que je
veux revenir sur l'ensemble des trois, sur les minutes qu'on a passées
aujourd'hui à essayer de vous convaincre sur la consultation; j'ai perdu
quelques minutes durant la journée à essayer de vous faire
comprendre - ces gens qui ne viennent pas ce soir, les avez-vous
consultés en les impliquant dans cette loi? Est-ce qu'il y a eu une
consultation interne?
M. Lincoln: Comme je vous l'ai expliqué, pour ce qui est
des organismes municipaux, il y a eu deux écoles de pensée. Le
président de l'Union des municipalités du Québec, lorsque
je l'ai rencontré, voulait exclure tout ce qu'il y avait
d'édifices municipaux de la loi et laisser aux municipalités le
soin de décider, si elles le voulaient, de leurs propres
édifices.
Après avoir consulté son exécutif, il est revenu
à nous pour nous demander de vraiment les inclure. C'est la raison pour
laquelle nous avons inclus l'article 5.
En ce qui concerne l'article 6, les organismes scolaires, les
commissions scolaires, nous en avons discuté avec le ministre de
l'Éducation, parce que, lorsqu'il s'agit des commissions scolaires et
des organismes, il y a très peu de couverture là-dessus. On parle
d'une bibliothèque, d'un laboratoire, d'une salle de conférences,
de cours, de réunions, de séminaires et cela comptait.
Ensuite, on a consulté le ministère de la Santé,
naturellement, et le ministère de l'Éducation. C'est le ministre
de l'Éducation. Cela a été lui. On n'a pas consulté
les commissions scolaires elles-mêmes.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: M. le Président, je regarde l'article 5
concernant les organismes municipaux. Vous assimilez cela et vous faites la
même gymnastique qu'à l'article 4 concernant les organismes
gouvernementaux. Je trouve tout de même que cela va assez loin. Vous avez
dit que c'était une loi qui n'était pas exigeante et qui
n'était pas compliquée. Vous êtes au courant qu'il y a un
paquet d'organismes de bénévolat qui sont nommés par
différents conseils municipaux. Par cet article vous les rentrez dans la
loi. Autrement dit, il y a des groupes qui s'occupent des loisirs qui assez
souvent pourraient être nommés par la municipalité et donc
qui seraient réglémentés par cela. Vous avez les
sociétés de développement économique où le
conseil municipal peut nommer un certain nombre de membres. S'il en nomme plus
de 50 % cela tomberait là-dessus. Il y a aussi les commissions
d'urbanisme qui sont nommées par les conseils municipaux. M. le
ministre, vous ne trouvez pas qu'on va loin, vers une mise en tutelle purement
et simplement? Je trouve que ça fait beaucoup de monde en tout cas qui
sont pris avec cela.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Lincoln: M. le Président, ce que je voulais expliquer
dès le début c'est que nous avons pris le mot à mot de la
Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la
protection des renseignements personnels qui a réellement
commencé à situer tous les organismes municipaux et
gouvernementaux pour décrire la chose. Là, pour les
municipalités, c'est qu'elles soient constituées en vertu d'une
loi générale ou spéciale, y compris les
municipalités de
comté et les municipalités régionales de
comté, les organismes constitués à titre d'agent de l'une
ou de l'autre de ces municipalités ou relevant autrement de leur
autorité. J'en ai donné une copie au président de l'Union
des municipalités régionales de comté. J'en ai aussi
donné une copie au président de l'Union des municipalités
de comté. Cela été déposé devant leur
exécutif. Ils ont accepté la chose. C'est le même mot
à mot que nous retrouvons par exemple dans la Loi sur l'accès aux
documents des organismes publics et sur la protection des renseignements
personnels. C'est dans ce sens que nous l'avons inclus.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: Pour répondre à M. le ministre, je sais,
pour l'avoir vécu, ce qu'est un conseil d'administration de l'Union des
municipalités du Québec ou des MRCQ. Cela doit se ressembler un
peu. C'est sûr que dans un conseil d'administration on peut soumettre des
choses mais je ne suis pas convaincu qu'ils en ont fait l'analyse succintement
article par article. Ce qui n'enlève pas leur sérieux. Vous
savez, dans un conseil d'administration, il y a tellement de points qui
arrivent. Il y a une vingtaine de lois qui ont été
déposées d'un coup sec. Je ne suis pas sûr qu'ils l'aient
vu exactement comme cela. Je veux simplement porter à votre attention,
M. le ministre, que les municipalités s'entourent de
bénévoles qu'elles nomment à certains conseils
d'administration. Cela veut dire que si on accepte cela on pourrait se trouver
devant le fait que seuls les non-fumeurs ont le droit de se dévouer pour
la communauté, comme si les gens qui fument étaient des
pestiférés ou ne seraient pas capables de faire la job. Je crois
qu'il faudrait regarder cet article et voir s'il n'y a pas moyen de le bonifier
et peut-être ne pas aller aussi loin que cela. La municipalité
nomme beaucoup de groupes et d'organismes. Cela fait une main mise ou une
tutelle assez importante.
Le Président (M. Saint-Roch): Je rappelle aux membres de
la commission qu'il est maintenant minuit. M. le député de
Pontiac.
M. Middlemiss: M. le Président, est-ce qu'on pourrait
avoir le consentement de l'Opposition pour continuer l'étude du projet
de loi?
M. Blais: On a été autorisés d'aller
jusqu'à maintenant, on va recommencer demain selon l'ordre de la
Chambre.
M. Middlemiss: En d'autres mots, vous ne donnez pas votre
consentement.
M. Blais: Non.
Le Président (M. Saint-Roch): La commission de
l'aménagement et des équipements ajourne maintenant ses travaux
sine die.
(Fin de la séance à minuit)