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(Dix heures dix-sept minutes)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
piaît!
La commission de l'aménagement et des équipements reprend
maintenant ses travaux pour poursuivre la consultation générale
portant sur le projet de loi 100. Avant le début de nos travaux, y
a-t-il des remplaçants, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: Oui. M. Maltais (Saguenay) remplace M.
Vallières (Richmond). C'est tout.
Corporation des secrétaires municipaux
Le Président (M. Saint-Roch): Merci. J'aimerais souhaiter
la bienvenue à ce moment-ci à la Corporation des
secrétaires municipaux du Québec. Pour le bénéfice
de notre Journal des débats, j'aimerais demander au porte-parole de
s'identifier et d'identifier aussi les membres qui l'accompagnent.
M. Gagné (Serge): Merci. Je me présente. Serge
Gagné, président de la Corporation des secrétaires
municipaux, secrétaire-trésorier d'Hébertville,
Lac-Saint-Jean. Je suis accompagné du directeur général de
la corporation, Marie-Andrée Levasseur; également, de deux de mes
confrères: M. Pierre Pétrin, secrétaire-trésorier
de Saint-Denis-sur-Richelieu et Pierre Saint-Onge, vice-président de la
corporation et secrétaire de Sainte-Étienne-des-Grès.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie. Si vous
voulez procéder.
M. Gagné: Madame, messieurs les membres de la commission
de l'aménagement et de l'équipement, M. le ministre, vous me
voyez très réjoui a titre de président de la Corporation
des secrétaires municipaux du Québec de pouvoir soumettre nos
commentaires relativement au projet de loi 100, loi sur les élections et
les référendums. Je suis confiant que mon voyage d'aujourd'hui
sera fructueux car, vous savez, chaque fois que j'emprunte le parc des
Laurentides à partir de ma municipalité -elle porte sur le lac
Saint-Jean - j'ai toujours l'impression de partir à l'inconnu avec les
nombreuses inscriptions du ministère des Transports, "routes
isolées", tout au long du parcours.
Je reviens donc au sujet. Comme vous avez pu le constater dans le
dépliant qui joignait le mémoire de la Corporation des
secrétaires municipaux du Québec, nous regroupons 1200 membres,
dont, à peu près 1200 secrétaires-trésoriers et
1200 présidents d'office d'élections, et ce sur une
possibilité de 1225 municipalités.
Depuis 1982, nous avons fait valoir notre point de vue en accord avec
l'Union des municipalités régionales et les municipalités
locales du Québec. Nous avons évité les
interférences entre le point de vue politique et le point de vue
administratif. Nous constatons aujourd'hui que cette démarche a eu des
effets positifs puisque, au cours des deux dernières années, les
nombreux points de vue, les opinions que nous avons émises ont
été retenues. Là-dessus, je félicite les membres de
la commission ainsi que ceux qui ont participé à la
préparation du mémoire.
Nous aurions aimé avoir un peu plus de temps pour nous pencher
sur le projet de loi, mais nous sommes assurés que les quelques
réflexions qui vous seront soumises sauront trouver leur mérite.
Sans plus tarder, vous me permettrez de céder la parole à mon
confrère, Pierre Pétrin à qui je viens tout juste de
succéder à la barre de la CSMQ. Pierre.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Pétrin.
M. Pétrin (Pierre): M. le Président, M. le
ministre, mesdames et messieurs de la commission, je vais résumer, bien
sûr, le texte du mémoire que nous avons soumis en
commençant par ce premier commentaire qui a trait au recensement
obligatoire. Depuis le début de nos représentations, nous avons
toujours trouvé un mérite à ce que l'analogie que vous
tentez de faire avec les lois provinciales ou fédérales
concernant les élections, que ce recensement obligatoire avait son
mérite même au point de vue municipal.
Il arrive que les présidents d'élection que nous
représentons dans plusieurs milieux et presque dans tous les milieux
sont presque des artisans de confection de listes électorales. Vos
articles disent notamment un peu plus loin que les propriétaires, les
locataires, les conjoints, tous, ont droit de voter. Cependant, il faut vous
dire que, dans
plusieurs municipalités, nous n'avons même pas accès
aux baux qui sont signés entre les propriétaires et les
locataires. En conséquence, il nous faut faire un inventaire par les
moyens qu'on a pour venir à bout d'identifier ce monde-là.
Nous considérons également qu'un recensement obligatoire
qui serait fait, surtout si on y va sur une période de quatre ans,
trouverait également son mérite pour un début de mandat de
conseil municipal. Il n'est pas tout d'avoir un référendum
à des fins strictement électorales, mais nous considérons
qu'il est important pour un conseil municipal qui commence un mandat d'avoir
devant lui une image de sa municipalité, que ce soit sur le volume de la
population, sur les catégories d'âges, ceci afin de mieux
planifier éventuellement ses infrastructures de loisirs, de transports,
le cas échéant.
Alors, si on parle de véritable analogie avec des lois
électorales provinciales ou fédérales, nous
considérons qu'au point de vue municipal, un recensement obligatoire une
fois par quatre ans pourrait être commandé également sous
le contrôle de la municipalité. Nous avons même ouvert la
porte à la possibilité que ce référendum,
plutôt ce recensement, pourrait être contrôlé ou
surveillé par le Directeur général des élections,
le cas échéant, mais organisé et effectué
physiquement, à l'instar de ce qui se fait au niveau provincial ou
fédéral, par des recenseurs locaux qui pourraient, comme on le
fait au niveau provincial, être choisis par les partis politiques ou des
choses semblables. C'est le premier commentaire que nous soulevons.
Nous disons aussi que la question d'économie, parce que nos
confrères et nos amis les élus soulèveront l'impact
économique de ce recensement... Or, comme on sait qu'actuellement les
élections municipales ont lieu généralement tous les deux
ans et que, bien souvent, avec le jeu de la rotation, on se retrouve
très souvent avec des élections presque toutes les années,
nous soulevons avec respect qu'un recensement une fois par quatre ans ne
coûterait pas moins cher qu'une élection toutes les années
comme cela se fait actuellement.
Nous parlons ensuite au chapitre B de la question des fonctionnaires et
du cens d'éligibilité. Au début de nos
représentations, lors de la proposition originale, on se rappellera que,
paradoxalement, le secrétaire-trésorier et les fonctionnaires
municipaux pouvaient briguer les suffrages à la mairie et au poste
d'échevinage. Fort heureusement, à la suite de nos commentaires
et de ceux d'autres, sans doute, les rédacteurs du projet de loi ont
retiré cette possibilité, et nous nous en réjouissons.
Cependant, le projet actuel maintient deux exceptions, si je peux m'exprimer
ainsi. Il y a d'abord toute la question des pompiers volontaires. Avec tout le
respect que j'ai pour mes collègues pompiers volontaires, je me dis:
pourquoi eux et pas d'autres, finalement? Nous savons qu'en certains milieux -
et je veux me permettre d'être un peu folkloriste - les pompiers
volontaires ont beaucoup de pouvoir ou tout au moins cherchent à avoir
beaucoup d'envergure. Alors, je me permets de parodier et de dire: Quelle
serait la situation d'un conseil municipal où vous vous retrouveriez
avec des pompiers volontaires qui seraient majoritaires à la table du
conseil? J'aurais peur pour le service des loisirs à ce moment.
Comme je le soulignais, il y a des milieux où les pompiers
volontaires sont très forts. Nous proposons le maintien si vous voulez
ou le statu quo de ce côté dans ce sens que le pompier volontaire
qui veut se présenter - je ne lui enlève pas le droit de se
présenter - présente sa démission comme il le fait
actuellement. S'il est élu, bien sûr, il ne siège que comme
élu. Si jamais il avait à être battu, je ne vous cacherai
pas que, dans la majeure partie de nos municipalités,
généralement, il est réintégré dans ses
fonctions de pompier volontaire.
Il y a également l'article 61 où le libellé nous
semble très paradoxal. Nous avons d'ailleurs dû faire appel
à des opinions de plusieurs confrères avocats sur cela. Je vous
confierai que leur interprétation était très divergente.
Alors, si elle est l'est a priori quelle sera-t-elle a posteriori à ce
moment? Vous nous dites entre autres que sont prohibées - ou dans le cas
des exceptions - toutes les personnes assimilées par la loi à des
fonctionnaires ou employés de la municipalité. On a fait
plusieurs études et on s'est posé plusieurs questions et cela n'a
jamais été clair dans l'esprit de personne finalement. Est-ce que
cela pourrait aller aussi loin que le procureur de la municipalité?
Est-ce que celui qui ramasse les chiens est couvert dans cela? II y a un
éventail de choses qui donnent, à notre sens, une ouverture
à l'interprétation sur cela. Somme toute, ce que nous disons,
c'est que ceux qui veulent se présenter ne devraient somme toute avoir
aucun lien avec la fonction publique municipale de quelque nature que ce soit.
Je reconnais que c'est là être très puritain mais je ne
pense pas que ce soit un défaut d'être un peu pur aujourd'hui.
Il faut dire qu'au départ, en ce qui concerne le projet de loi
original, on permettait de façon non équivoque la
possibilité du conflit d'intérêts. La proposition originale
semblait d'ailleurs bonifier très libéralement cette notion. Elle
nous semble avoir été atténuée dans le projet de
loi actuel. Cependant, nous semblons lire, tout au moins au début du
texte de loi, qu'on prohibe le conflit d'intérêts, que les
élus ne
pourraient pas avoir de contrat directement ou indirectement avec le
conseil municipal. Mais plus loin, aux articles 308 et 309, vous faites une
nomenclature d'exceptions qui, finalement, viennent rabattre le principe ou
viennent le diluer à un point tel que nous nous demandons à quel
point vous ne le recréez pas finalement.
Sur la même longueur d'onde, nous disons que, au nom de la pleine
liberté d'action, il serait opportun d'éviter toute forme de
conflits d'intérêts en matière municipale à l'instar
de ce que vous tentez de faire au niveau provincial ou au niveau
fédéral.
Nous parlons ensuite du cens électoral. Nous vous vous
suggérons notamment l'exercice de l'article 49 du projet, qui fait
référence à d'autres articles de d'autres projets de loi.
Si vous vous reportez à ce projet de loi auquel vous vous êtes
référé, celui-ci va vous référer à
d'autres projets de loi. Vous tombez dans le labyrinthe de l'identification.
Pour un président d'élection qui, par définition, n'a pas
le mandat de se porter juge ou maître de l'interprétation, nous
considérons que le libellé de cet article est peut-être un
peu confus et, somme toute, nou3 amène dans des dédales
d'interprétation qu'il y aurait peut-être lieu de corriger.
Vous parlez des douze mois de propriété. Nous soulevons
encore là toute la question, qui n'a jamais été
éclaircie, du phénomène des contrats enregistrés
versus leur non-enregistrement. La loi dit, si ma mémoire est
fidèle, que la personne doit être inscrite au rôle
d'évaluation ou propriétaire depuis douze mois. Or, on sait
qu'elle n'est pas toujours inscrite au rôle d'évaluation depuis
douze mois, parce que les contrats notariés sont très souvent
enregistrés beaucoup plus tard après la simple signature. Or nous
savons que les règles d'enregistrement sont aux fins de donner un
caractère public aux contrats notariés. Mais entre les partis,
nous savons d'ores et déjà que le contrat est parfait au moment
de sa signature.
Le droit de propriété public compte-t-il, dans l'esprit de
la commission, à partir du moment de son enregistrement ou à
partir du moment de la signature du contrat? Vous comprendrez que si nous
partons du moment de la signature du contrat, nous n'avons aucune preuve
à la municipalité à cet effet. Cependant, s'il est
enregistré, normalement les mutations arrivent à la
municipalité. Il faut dire aussi que, en pratique, très souvent
l'évaluateur ne transmet les certificats d'enregistrement à la
municipalité que trois ou quatre fois par année. En
conséquence, il peut très bien arriver que dans la confection de
la liste électorale que nous devons faire à partir du rôle
d'évaluation pour une partie, nous perdions des gens finalement. Fort
heureusement, la commission a retenu la possibilité de faire la
révision de la liste électorale à une date
postérieure qu'elle était anciennement, ce qui est fort heureux
et nous l'avions d'ailleurs demandé à l'époque, parce que
vous vous souviendrez qu'anciennement la révision de la liste
électorale se faisait avant même la mise en candidature. Or, qui a
intérêt à pointer ou à vérifier, si vous
voulez, la liste électorale si ce ne sont les candidats? Vous avez fort
heureusement retenu la révision après la mise en nomination, ce
qui nous permettra, dans certains cas où il y aurait élection par
acclamation, d'éviter de constituer un bureau de révision.
Nous parlons ensuite du phénomène de
copropriété. Vous stipulez dans la loi que tous ceux qui sont
copropriétaires devront maintenant désigner, par une forme de
délégation, celui ou celle qui portera ou aura le droit de porter
le chapeau lors de l'élection, c'est-à-dire de voter. Bien
sûr, nous pourrions faire de grands débats sur les droits et
libertés fondamentales des personnes; cependant, nous soulignons le fait
que cette coutume semble de plus en plus acquise dans nos milieux. (10 h
30)
Vous me permettrez une incise pour vous dire que, par profession, je
suis notaire et que régulièrement, tous les jours, je fais des
contrats en copropriété entre le mari et la femme. En
conséquence - je ne veux pas parler de querelle de ménage ici -
il peut arriver que lorsqu'il n'y aura pas entente entre les deux conjoints, il
n'y aura pas de vote, tout simplement. Dans quelle mesure cette technique de
délégation ne peut-elle pas faire perdre un droit de vote? Vous
me direz que c'est parce que les gens ne s'entendent pas entre eux, mais pour
nous, municipalement parlant, à partir du moment où notre
rôle serait bien confectionné, en faire voter un ou en faire voter
quinze, c'est du pareil au même. Nous soulignons donc qu'il y aurait
peut-être lieu de maintenir la copropriété et que tous ces
gens puissent avoir droit de vote lors d'une élection.
Nous vous parlons ensuite de l'article 199 au sujet du retrait de
candidature. Cet article donne le droit au président
d'élection... Vous dites "d'altérer", mais vous me permettrez
d'être folkloriste et dire que vous permettez au président
d'élection de barbouiller un bulletin de vote en biffant le nom du
candidat qui s'est retiré. Surtout si nous allons vers une technique qui
va faire que les partis politiques pourront nommer les officiers des bureaux
d'élection, ce n'est pas à vous que je vais apprendre que
l'altération d'un bulletin de vote peut servir d'autres fins. Nous
considérons en conséquence que l'altération, de quelque
façon que ce soit, d'un bulletin de vote ne devrait pas être
tolérée. Qu'une information verbale soit donnée à
l'électeur qui vient voter,
spécifiant que M. Jos Bleau n'est plus candidat, qu'il s'est
retiré de l'élection, nous considérons que cet avis verbal
pourrait être suffisant. Toute forme d'altération du bulletin de
vote ne nous paraît pas opportune, en l'occurrence.
Nous parlons ensuite de l'article 68, qui donne le pouvoir à la
Commission municipale de nommer un président d'élection en
remplacement de celui qui se désisterait de ses fonctions ou qui
décéderait ou serait malade. Nous nous opposons, à
l'instar sans doute de ce que feront les élus, à ce rôle
qui pourrait être dévolu à la Commission municipale
d'intervenir dans le milieu local en nommant elle-même un
président d'élection. Nous considérons que c'est là
le mérite des élus qui sont en place.
Nous terminons nos courts commentaires avec les articles 162, 324 et 337
où vous conférez au secrétaire-trésorier un
rôle que je qualifierai de maître de discipline. Vous nous chargez
d'informer le conseil municipal du fait qu'une personne est maintenant devenue
inhabile à voter, soit parce qu'elle a manqué un certain nombre
d'assemblées ou soit parce qu'elle n'a plus la qualité pour
être en fonction. Nous considérons que c'est là jouer un
rôle de maître de discipline et se mettre en lieu et place des
contribuables finalement, à qui revient ou est dévolu
carrément ce privilège. Je pense que les élus feront de
même aussi et s'opposeront à ce que le
secrétaire-trésorier ait ce rôle de maître de
discipline. C'est d'ailleurs arrivé dans quelques endroits
déjà que le secrétaire-trésorier a joué ce
rôle. Je vous confierai que dans plusieurs cas on a eu sa peau dans les
mois qui ont suivi. Donc, au nom de ces principes, nous nous opposons à
ce que cette chose puisse être maintenue.
Somme toute, nos commentaires sont fort simples. Nous avons voulu les
faire à la fois techniques et les plus administratifs possible, bien
qu'on ne se cachera pas que parfois l'administratif est drôlement
influé par le politique.
Nous disons, en conclusion, que nous sommes fort réjouis non
seulement de notre participation de ce matin mais du fait que plusieurs des
commentaires que nous avions faits antécédemment ont
été retenus par les rédacteurs du projet de loi. Nous
sommes conscients du fait que cet exercice est très particulier et, par
surcroît, très difficile. Dans l'ensemble nous nous
réjouissons de la teneur du projet de loi.
Quant aux autres points sur lesquels nous n'avons pas fait de
représentation, nous n'avons pas voulu les faire a priori. Nous disons
simplement que nous allons vivre avec ceux-ci et, à l'usage, nous
verrons les commentaires qui pourront être faits, et lesquels pourront
éventuellement amener des amendements ultérieurs. Je vous
remercie.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Pétrin. M.
le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, je félicite la
Corporation des secrétaires municipaux du Québec pour cette
nouvelle intervention, si je puis dire, dans le dossier du projet de loi sur
les élections et les référendums. Comme ils l'ont
constaté eux-mêmes, les observations qui ont été
faites précédemment, lors des rencontres antérieures, ont
donné lieu à des améliorations au projet de loi dans le
sens de plusieurs des recommandations qui avaient été faites par
ledit organisme.
Aujourd'hui, il s'agit d'une nouvelle contribution de la corporation
à la bonification du projet de loi. J'admets qu'il y a toujours
possibilité de bonifier un projet de loi. Je ne doute pas que, d'ici
à son adoption, il y aura encore des modifications qui seront
apportées et peut-être qu'il y en aura même après son
adoption. À l'usage, on pourra peut-être voir qu'il y a des points
qui devraient être améliorés encore. Dans le cas
présent, ici, j'aurais deux ou trois observations. Une me surprend un
peu. C'est votre recommandation au sujet de l'article 68.
Dans le cas où on n'a pas de président d'élection,
le projet de loi vise à faire en sorte que ce soit la Commission
municipale qui, en dernière analyse, puisse nommer un président
d'élection. Vous nous dites, non, cela ne devrait pas être la
Commission municipale, cela devrait être le maire. Cela m'étonne
un peu parce que dans un processus électoral, n'y a-t-il pas un danger
que le maire étant, à ce moment-là, lui-même dans
l'eau chaude, ou enfin, dans la partie qui se joue en processus
électoral, soit lui-même taxé d'être en conflit
d'intérêts s'il désigne M. ou Mme Untel comme
président d'élection? On sait que, quand le climat
électoral s'installe, tout le monde est susceptible d'avoir un jugement
un peu plus coloré qu'en temps normal. Cela pourrait faire en sorte de
miner la crédibilité du président d'élection,
puisqu'il aurait été nommé, à la toute fin du
mandat, par quelqu'un qui vraisemblablement est probablement un candidat
à l'élection.
Dans ce sens, je me demande si ce ne serait pas vraiment
préférable, si on ne peut pas faire en sorte que ce soit le
greffier ou son adjoint, que vraiment on trouve un président
d'élection à partir d'un processus extérieur à la
municipalité.
M. Pétrin: II est évident que, somme toute, avant
que la Commission municipale intervienne, ce que nous suggérons
foncièrement, c'est qu'on essaie de trouver dans la municipalité
des personnes en titre qui pourraient suppléer à la tâche
de façon idéale. Il est évident que s'il y a un
secrétaire-trésorier adjoint, je pense que c'est lui qui,
d'office, doit remplir la fonction à ce moment. D'ailleurs, je pense que
le projet de loi, au risque de me tromper, le prévoit. De toute
façon, je n'ai pas souvenance là, mais si le projet de loi ne le
prévoyait pas, je pense qu'il y aurait lieu de passer par ces
étapes avant tout au moins d'en arriver à une nomination par la
Commission municipale.
Il est évident que je partage votre point de vue dans le sens
qu'il est évident que s'il était nommé par le maire, on
risque une situation comme celle que vous soulevez. Cela va de soi. Par
ailleurs, encore là, c'est peut-être une représentation un
peu puritaine, mais nous disons quand même que nous aimons mieux
régler nos problèmes chez nous avant toute chose, avant de les
confier à d'autres. C'est un peu ce qui sous-tend cette
représentation.
M. Bourbeau: J'ajoute que la Commission municipale, si elle nomme
un président d'élection, vraisemblablement, ce serait quelqu'un
quand même de la municipalité. Il serait assez improbable qu'elle
aille chercher quelqu'un ailleurs que dans la municipalité. Donc, on
s'entend sur le fait que ce soit une personne de la municipalité. Il
s'agit de savoir qui procéderait à la nomination.
M. Pétrin: II serait peut-être opportun à ce
moment-là, je ne sais pas dans quelle mesure, de préciser tout au
moins que le président d'élection, s'il était nommé
par la Commission municipale, devrait être une personne idéalement
résidant dans la municipalité.
M. Bourbeau: Oui. Le recensement tous les quatre ans, alors
là, vous semblez tenir beaucoup à cela. Actuellement, le projet
de loi permet un recensement, mais là, nous suivons le conseil que vous
venez de nous donner au point précédent. Vous nous dites que vous
préférez que l'autonomie municipale soit exercée.
Là, nous exerçons l'autonomie municipale en donnant à la
municipalité l'option de faire un recensement ou de procéder
selon une autre formule qui vise à confectionner...
M. Pétrin: Notre mémoire mentionne d'ailleurs, M.
le ministre, que le recensement municipal pourrait peut-être aussi - il
s'agirait de voir - avoir une vocation scolaire éventuellement. Il y
aurait peut-être possibilité de jumeler le rencensement municipal,
lequel pourrait idéalement avoir également des fins scolaires,
des fins de listes électorales scolaires également.
M. Bourbeau: C'est un bon point. On va regarder cela
attentivement. Un autre point, c'est le cens d'éligibilité. Vous
êtes de la faction puriste qui voudrait que les fonctionnaires ne soient
absolument pas, qu'on ne leur permette pas de se présenter à
moins qu'ils ne démissionnent de leur poste. Le projet de loi fait
quelques exceptions dont les pompiers volontaires et les autres personnes qui
sont mentionnées dans le projet de loi. On dit: Les personnes
assimilées par la loi à des fonctionnaires. On me dit que ces
personnes assimilées seraient des gens comme ceux qui sont à
contrat avec la municipalité pour ramasser les animaux morts, les chats
et les chiens par exemple, ou émettre des permis pour les bicyclettes.
La loi dit que ces gens sont assimilés à des fonctionnaires pour
les fins de leur travail. Ce ne sont pas des employés de la
municipalité comme tels, mais la loi, par une fiction de la loi, dit
qu'ils sont assimilés à des fonctionnaires et, dans ce sens, on
pensait leur donner le droit de vote. D'autant plus que de l'autre
côté du spectrum, la Commission de protection des droits de la
personne vient nous dire, à l'inverse de ce que vous dites, qu'on
devrait ouvrir la porte plutôt que la fermer à l'endroit des gens
qui voudraient se présenter à un poste électif. En tant
que député de Laporte, je suis toujours intéressé
à voir la situation plutôt ouverte que fermée. Je ne sais
pas comment vous réagissez par rapport à cela, c'est seulement
une observation que je fais là-dessus.
M. Pétrin: II est évident que nous
représentons des milieux où les conflits d'intérêts
sont plus sensibles. Dans des municipalités comme les nôtres
où très souvent le volume de population va osciller entre 200
personnes et peut-être bien plus -on a des municipalités qui sont
quand même de l'ordre de 5000 personnes - il est évident que les
conflits d'intérêts sont beaucoup plus sensibles. C'est en
s'inspirant de ces situations que nous paraissons aussi purs, finalement. Il
est évident que dans une grande ville, le sous-contractant de la
troisième classe, le sous-sous-entrepreneur, c'est peut-être moins
sensible, surtout si dans certains cas cela s'applique strictement à un
quartier de la ville ou des choses semblables. Alors, nous, ce que nous
soulevons c'est que dans nos milieux, il est évident que c'est beaucoup
plus sensible.
Si, par exemple, mon maire était mon entrepreneur de chemins
d'hiver et que j'avais des plaintes à tour de bras, comme je suis
responsable à cause de mes fonctions de la qualité des services,
vous me voyez mal en train de dire à mon maire: Écoute... Il y
aurait du filtrage de courrier qui risquerait de se faire au niveau du conseil
à ce moment-là, d'une part.
Je ne crois pas que le projet de Foi veuille aller aussi loin en termes
de
bonification. Si tel avait été le cas, vous comprendrez le
fait qu'on s'insurge. Mais, il reste toujours le problème, M. le
ministre, de l'interprétation quand vous dites: "des fonctionnaires
assimilés par la loi aux fonctionnaires municipaux". "Assimilés
par la loi", c'est vague. Il est évident, je comprends avec vous qu'on
ne fera pas une nomenclature, on ne dira pas: Cela veut dire ceux qui ramassent
les chiens, ceux qui ramassent les vidanges au troisième coin de rue,
mais qui sont juste employés de l'entrepreneur ou des choses semblables.
Il y a au moins cette difficulé d'interprétation qui n'est pas
claire dans notre esprit.
M. Bourbeau: Très bien. Un dernier point. Vous notez dans
votre mémoire que vous vous réjouissez de la disparition de la
possibilité que les membres du conseil aient pu être en conflits
d'intérêts. Dans le premier projet de loi qui avait
été déposé, on permettait à des membres du
conseil d'avoir un intérêt dans des contrats avec la
municipalité. Cependant, il devait y avoir une procédure de
prévue où l'on dénonçait son intérêt,
où on déclarait son intérêt et on s'abstenait de
voter. Le nouveau gouvernement a décidé de ne pas permettre cette
situation et d'être un peu plus exigeant, si je peux dire, à
l'endroit des élus municipaux et de ne pas permettre qu'ils puissent
avoir l'occasion de faire des marchés avec la municipalité.
Nous avons pensé que les membres d'un conseil municipal,
jusqu'à un certain point, ont une fonction qui est plus que
législative; elle est exécutive aussi, parce qu'ils prennent des
décisions continuellement sur des problèmes d'administration et,
en ce sens-là, ils sont un peu comme un conseil des ministres
municipal.
Vous notez que si on a voulu faire disparaître cette notion, on a
quand même conservé des exceptions. Vous semblez dire que les
exceptions sont tellement importantes que cela fait renaître la notion
dans son intégralité. Vous dites: "La liste des exceptions s'y
trouvant fait renaître cette triste situation que la CSMQ voudrait voir
éviter absolument de juge et partie." Est-ce que vous pourriez
détailler un petit peu? Est-ce que vraiment vous trouvez que de la
façon dont cela est rédigé présentement, cela
revient à la situation antérieure? (10 h 45)
M. Pétrin: Dans l'article 309, finalement, c'est de cet
article dont on parle.
M. Bourbeau: Oui, l'article 309.
M. Pétrin; II y a là cette nomenclature des dix points.
Nous, nous disons toujours, par interprétation ou par libéralisme
jusqu'à un certain point du conseil municipal: dans quelle mesure
éventuellement cette nomen- clature aussi serait-elle limitative? On
parle d'amendements futurs mais qui ne dit pas que, si on donne cette ouverture
que vous avez limitée, je le reconnais, dans quelle mesure
éventuellement cette nomenclature de dix ne serait pas rendue à
quinze ou à des choses semblables? Il y a cette garantie qu'on ne
retrouve pas. Nous partagions, bien sûr, le 9° de cette nomenclature,
parce qu'il nous paraissait être un chapeau qui pouvait couvrir ou
coiffer l'échappatoire ou l'ouverture en ce sens, quand vous
énoncez que "l'intérêt général de la
municipalité ou de l'organisme municipal exige que le contrat soit
conclu de préférence à tout autre." Bien sûr, je
reconnais avec vous qu'encore là il y aurait matière à
interprétation. Mais quand nous avons regardé l'article de loi,
on s'est dit: Dans quelle mesure l'article 308 ne pourrait pas se terminer en
faisant l'exception de l'article 309, 9°?
M. Bourbeau: Oui, je reconnais que le paragraphe 9° est
très vague. Si on dit que l'article 308 ne s'applique pas lorsque
l'intérêt général de la municipalité ou de
l'organisme municipal exige que le contrat soit conclu de
préférence à tout autre, cela devient un peu difficile de
savoir quand c'est vraiment l'intérêt général et
quand c'est l'intérêt particulier. Qui va finalement être
l'arbitre? Probablement qu'on va regarder cela. Il y aurait peut-être
moyen de baliser ce texte en faisant en sorte que, si un tel cas se
présente ou qu'on veuille permettre à un maire, à un
conseiller municipal, de faire un marché ou un contrat avec la
municipalité à cause de l'intérêt
général de la municipalité, probablement qu'il serait
préférable de faire en sorte d'obtenir le consentement de la
Commission municipale ou quelque chose comme cela.
M. Pétrin: Oui, il est évident que nous sommes
conscients du fait que, dans plusieurs petites municipalités notamment,
si vous avez besoin de bois et qu'il y a un seul fournisseur de bois dans la
municipalité et qu'il arrive que ce fournisseur de bois siège au
conseil municipal, il faut vivre avec une réalité aussi. Alors,
nous sommes ouverts à la rigueur à ce qu'il y ait une
possibilité en ce sens, mais qu'il y ait une formule de
dénonciation qui soit faite ou peut-être une dénonciation,
non seulement en ce qui concerne la table du conseil, mais une
dénonciation qui pourrait être communiquée au ministre ou
encore à la commission éventuellement. On voudrait qu'il y ait un
minimum d'encadrement mais autre que simplement le point de vue municipal,
conscients de la réalité particulière de certains
milieux.
M. Bourbeau: Je crois que les
observations sur l'article 309 sont tout à fait à point.
On va regarder de nouveau le texte de l'article 309 afin de tenter de resserrer
davantage les cas d'exception.
Je tiens à vous remercier de votre excellente contribution et qui
va certainement permettre de bonifier davantage le projet de loi. Merci.
M. Pétrin: Merci.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le
député de Jonquière.
M. Dufour: Je voudrais aussi vous souhaiter la bienvenue à
cette commission et peut-être en profiter pour féliciter d'une
façon spéciale le nouveau président de la Corporation des
secrétaires municipaux du Québec qui est un type de la
région du Lac-Saint-Jean. Donc, je pense qu'on doit se réjouir
lorsqu'il y a des gens de chez nous qui militent ou qui ont des postes
importants. J'ai, non seulement l'impression, mais la certitude que la
Corporation des secrétaires municipaux du Québec a fait beaucoup
de travail. Lorsque je les écoute parler, je ne peux m'empêcher de
voir en eux beaucoup de sagesse lorsqu'ils parlent des conflits
d'intérêts. Je comprends que le ministre est sensible à ce
que la Corporation des secrétaires municipaux du Québec a
soulevé tout à l'heure dans son mémoire sur les conflits
d'intérêts, mais il n'y a pas seulement le paragraphe 9° qui,
à mon sens, fait problème, il y a le paragraphe 10° qui
laisse beaucoup de latitude au ministre. D'une part, on dit qu'il y a beaucoup
de conflits d'intérêts et, d'autre part, que le ministre peut
décider à peu près n'importe quoi. Je crois que, dans
notre droit, il faut que les gens soient capables de se situer quelque part.
Quand on parle des intérêts et des conflits
d'intérêts, je pense que cela fera toujours problème. Il y
a le paragraphe 2° où on parle de la possession d'actions. Je
comprends qu'on voudrait bien que tout le monde puisse posséder des
actions et ne contrôle rien, mais dans les faits, dans une
municipalité, un individu possédant un peu d'actions pourrait
avoir des conflits d'intérêts extrêmement grands et pourrait
aussi influencer les décisions du gouvernement municipal, bien
sûr, non pas provincial. À ce moment-là, je me dis, oui, il
y a un conflit d'intérêts et regardons-le. Lorsqu'on veut faire
des particularités et qu'on veut faire des exceptions il y a toujours
des dangers qu'on en oublie et je crois que pour le "bien-fondé" des
moeurs électorales, non seulement dans les petites municipalités
mais dans les grandes aussi, vous avez raison. Je suis porté à
croire que votre point de vue doit être retenu et que le ministre doit
aller encore un peu plus loin dans sa recherche. Car on ne changera pas ces
lois-là à toutes les semaines. Cette loi qui mérite
d'être bonifiée, il faut qu'elle le soit. C'est une bonne loi dans
ses principes. Je suis sensible aux arguments que vous apportez concernant les
conflits d'intérêts.
Par contre, lorsqu'à l'article 68, vous parlez de la Commission
municipale et que vous dites: "Elle ne devrait pas nommer le président
d'élection", "vous ne laissez pas beaucoup de portes de sortie. Si vous
aviez parlé du Directeur général des élections du
Québec, cela aurait été acceptable. Moi, je serais
tenté de donner le pouvoir ou accepter dans la loi que ce soit la
Commission municipale. J'ai l'impression qu'on est parti sur un "trip" quelque
part avec la loi à savoir qu'il faut absolument que les lois municipales
soient provincialisées. J'ai peur de cela. Je pense qu'il faut garder un
caractère un peu plus spécifique aux municipalités. Il
faut tenter quelquefois d'être différents des autres. Si on fait
trop semblable, vous savez, il y a une tentation plus grande d'aller un peu
plus loin encore. À un moment donné, vous allez être pris
dans la grande roue. Personnellement, je suis porté à croire que
la Commission municipale pourrait être un organisme, jusqu'à
maintenant, qui semble remplir un rôle de chien de garde, mais aussi de
conseil aux municipalités. J'ai l'impression que c'est un organisme qui
a apporté jusqu'à maintenant des preuves valables de son
intérêt pour les municipalités.
À l'article 199 vous parlez de l'altération du bulletin.
Effectivement, c'est le premier organisme qui souligne ce point de
l'altération du bulletin, comme le fait qu'il y ait une barre
d'imprimée pour annuler le bulletin. Vous nous dites que c'est une
altération qui pourrait porter à aller plus loin. Quelle est
votre crainte par rapport à cela? J'aimerais savoir ce que vous avez
à dire.
M. Gagné: Dans la loi provinciale sur les
élections, cette possibilité est déjà
prévue, mais on dit bien que c'est en cas de force majeure. Souvent, les
municipalités pensent en fonction de l'économie. Quand il y a un
retrait de candidature, à moins que ce soit 24 heures - je dis bien en
cas de force majeure - avant l'élection, je pense qu'il y a lieu de
faire reprendre le bulletin de vote. L'article ne dit pas que c'est en cas de
force majeure. C'est une façon de pointer... Le fait de ne pas inclure
"force majeure", cela laisse le temps d'altérer des bulletins de vote et
d'enlever son caractère secret à certains points de vue.
M. Pétrin: L'article pourrait effectivement
prévoir, comme le dit Serge, la possibilité de
réimpression des billets. Mais il est évident, pour
répondre de façon franche à votre question, M. Dufour,
qu'un vice-
président d'élection pourrait pointer le vote à de
moment-là.
M. Dufour: Les gens qui s'occupent du côté technique
vont sûrement s'arrêter à votre suggestion. Quant à
moi, c'est la première fois que cela m'est indiqué, mais je pense
que vous devez le faire avec raison.
Quant au recensement tous les quatre ans, il est sûr que des
tentatives sont faites actuellement. Au Québec, on est peut-être
le peuple le plus recensé - en tout cas on pense cela - on ne sait
peut-être pas ce qui se passe ailleurs, remarquez bien que je le donne
sous toutes réserves. On est recensé par le gouvernement
fédéral, on est recensé par le gouvernement provincial, on
est aussi recensé dans le secteur scolaire. Quant aux
municipalités, il y a une certaine latitude qui demeure: la
décision du conseil municipal à savoir s'il y aura recensement ou
pas. Il n'y a rien... Si vous recommandez qu'il y ait un recensement
obligatoire è tous les quatre ans, en supposant que cette proposition
soit retenue... Vous dites que cela pourrait servir pour le trésorier,
mais il y a d'autres façons de se servir de d'autres recensements. Il
n'y a rien dans la loi qui dit que votre recensement serait plus valable que
celui du gouvernement provincial. Si cela remplace un autre recensement quelque
part dans le temps, cela vous donne non pas une marge de manoeuvre, mais au
moins la certitude que le recensement que vous faites vaut quelque chose. Il va
servir soit pour fixer les salaires des conseillers - cela pourrait être
la meilleure raison de faire un recensement. Il y a beaucoup de discussions.
Les municipalités disent qu'elles ne sont pas d'accord avec les
recensements soit fédéral ou provincial, ce n'est pas tout
à fait la vérité. Je ne sais pas sur quoi on se base,
parce que, quand on ne le fait pas, il est difficile de dire que l'autre n'a
pas raison. D'une façon ou de l'autre... De quelle façon
verriez-vous que votre recensement, autre que pour vos propres fins comme
greffier ou pour les fins de la municipalité? Est-ce que vous
désirez que cela pourrait être surveillé par le Directeur
général des élections ou quelque chose comme cela, ce qui
vous donnerait une certaine légalité. Pourriez-vous
préciser cela un peu plus?
M. Gagné: Effectivement, c'est un clou que je voulais
ajouter sur les éléments que l'on vient d'exposer. Quant au
recensement obligatoire tous les quatre ans, je voudrais faire une comparaison
avec les cités et villes. La plupart des cités et villes font des
recensements assez régulièrement alors qu'en milieu rural, c'est
peu fréquent, ce qui fait que ce recensement pourrait, pour vous donner
un exemple, servir à régler - chez nous, on a un problème
de chiens - les problèmes des licences de chiens. En même temps
que l'on fait le rencensement à des fins électorales, il y a lieu
de s'en servir pour autre chose. C'est un peu la revendication que nous
faisons. C'est facile de poser des questions pour connaître un peu le
profil de notre municipalité. En milieu rural, cela ne se fait pas
tellement souvent, je dirais même très peu souvent. On n'a pas de
commissariat industriel ou des choses du genre. Je pense qu'il y a lieu de
profiter du rencensement pour autre chose que des fins électorales.
Deuxième chose que l'on vit à chaque élection.
Quand on n'a pas la chance d'avoir le recensement du provincial qui nous arrive
tout cuit dans le bec, on est aux prises avec un sérieux
problème. À toutes les élections, on nous demande comment
il se fait que tel nom a été oublié? Le document de base
que l'on nous suggère dans la loi, c'est le rôle
d'évaluation. Dans ce rôle, vous n'avez pas les locataires et vous
n'avez pas les personnes qui viennent d'avoir 18 ans et plus et qui ont droit
de vote. Quand on a le malheur d'arriver un an après que le recensement
a été fait, il faut courir après ces noms et ce n'est pas
facile. Je peux vous avouer que ce n'est pas facile.
M. Dufour: Je comprends vos explications, vous avez
éclairé ma lanterne. Dans le cas des cités et villes, il y
a un rencensement à des fins électorales. On engage des
recenseurs qui passent par les maisons. Êtes-vous en train de me dire que
le Code municipal ne vous astreint pas aux mêmes obligations?
M. Gagné: Non. Dans le projet de loi, on prévoit
que la municipalité a le droit de nommer des recenseurs pour effectuer
un recensement, mais il y a très peu de recensements qui se font au
niveau des municipalités.
M. Dufour: Mais ce n'est pas obligatoire au même titre que
dans la Loi sur les cités et villes?
M. Gagné: Non. Je ne sais pas si c'est obligatoire dans la
Loi sur les cités et villes - je dois être honnête - mais je
sais que, dans 90 % des cas, il y a recensement dans les cités et
villes.
M. Dufour: Mais il faut faire la différence entre un
recensement à des fins électorales et un recensement global de la
municipalité.
M. Gagné: Oui, effectivement.
M. Dufour: Par exemple, quand j'étais maire - je ne veux
pas remonter au déluge -le recensement de notre municipalité se
faisait régulièrement, chaque année. Cela se
tenait, et, en même temps, on faisait le recensement à des
fins électorales. Dans la plus grande municipalité, dans la
municipalité fusionnée, il n'y a jamais eu de recensement global
de la population, mais il y a eu un recensement électoral chaque fois,
et cela ne créait pas de problème. On avait discuté, dans
la municipalité, pourquoi ne pas faire un recensement pour savoir
combien on comptait de citoyens. Ce n'est pas toutes les municipalités
qui sont prêtes à accepter cela. Mais pour le vote... Si ce n'est
pas fait, je pense que c'est une suggestion qui pourrait être
examinée. Je n'ai pas le pouvoir de le faire mais, comme Opposition,
cela me semble nécessaire, surtout à des fins électorales.
Se baser simplement sur le rôle d'évaluation, ce n'est pas
suffisant. Il y a parfois des personnes qui ne sont pas nécessairement
recensées, parce qu'elles ne font pas partie du rôle
d'évaluation, surtout quand il y a des changements de locataires,
etc.
M. Gagné: D'ailleurs, de récentes discussions avec
le président de l'UMRCQ nous ont démontré que
fréquemment les élus se plaignaient de la mise à jour de
la liste électorale municipale parce qu'on ne bénéficie
pas tout le temps, au moment où les élections municipales
arrivent, de la liste électorale provinciale qui est à jour.
M. Dufour: Peut-être aussi qu'une élection tous les
quatre ans pourrait aider à convaincre les élus municipaux. Il
faut penser que ces gens ont intérêt à bien recenser leur
territoire. Peut-être que la loi, même si elle dit "peut", pourrait
dire "doit" aussi. S'il y a une élection tous les quatre ans, comme
c'est prévu dans ce projet de loi, cela va permettre d'essayer de
baliser un peu mieux les élections. Que vous le demandiez ou que vous le
souligniez, en tout cas, pour ma part, j'aimerais examiner de quelle
façon cela pourrait fonctionner.
M. Gagné: D'autant plus que, sur le plan provincial, on
tend à restreindre la fréquence des recensements provinciaux
à cause du coût. (11 heures)
M. Dufour: D'accord. Quant au cens électoral proprement
dit, concernant le lieu de résidence de douze mois, je retiens que c'est
aussi le seul mémoire qui a soulevé ce problème d'une
manière différente... Il y en a qui disent qu'on devrait donner
24 mois au lieu de 12 mois, c'est une question d'opinion. Quand vous dites
qu'il y a des difficultés à savoir si c'est le temps du contrat
ou de l'enregistrement, ne pensez-vous pas - je donne cela comme
hypothèse - que normalement dans de petites municipalités, il y a
toujours ce que les gens pensent "de bonne foi", vous connaissez pas mal tout
votre monde... Ces gens-là demeurent dans le coin depuis un an... La
preuve du contraire, quelqu'un est prêt à faire serment que cela
fait un an qu'il y demeure, en supposant qu'il ne serait pas inscrit.... Est-ce
que vous pensez que le fait du voisinage n'est pas actuellement une preuve
à sa face même, prima facie, que cela a de l'allure ou que cela
n'en a pas? Vous demandez d'aller un peu plus loin, dans les détails. Je
trouve qu'on va loin dans la démarche.
M. Gagné: Je suis d'accord avec votre question à
trois volets à savoir que le président d'élection pourrait
assermenter sur place avec des gens pour dire... Vous direz que cela se faisait
déjà un peu, même si la loi ne le permettait pas. Quoiqu'il
en soit, pour le deuxième volet, il est vrai qu'on est un peu puriste en
disant: Est-ce la date de l'enregistrement ou la date de la signature du
contrat? Je vous avouerai qu'on vit le problème. Quand un
propriétaire nous dit: Je ne suis pas inscrit sur le rôle
d'évaluation... il faut aller vérifier son contrat pour savoir
s'il est vraiment propriétaire. C'est la seule façon dont on
peut, légalement parlant, aller vérifier le droit de
propriété de quelqu'un qui n'est pas inscrit au rôle
d'évaluation. Cela c'est un volet. À partir du moment où
on fait cela, est-ce la date de la signature ou la date d'enregistrement? On
mentionne la date de référence qui est le 1er septembre. On
aimerait savoir ce que c'est, car lorsqu'on a le problème il faut le
savoir.
On dit: Le droit de propriété... Quand un
propriétaire vient nous dire qu'il n'est pas inscrit au rôle et
qu'il est propriétaire depuis au moins douze mois, on le fait pour un.
Alors pourquoi ne pas le faire pour les autres? Si un propriétaire nous
le demande, on le fait pour lui mais il faudrait vérifier pour tous les
autres, leur droit de propriété au cours des douze derniers mois.
Comme Pierre Pétrin le mentionnait tout à l'heure, souvent au
mois de septembre l'évaluateur n'a pas encore inscrit au rôle
d'évaluation les propriétaires au cours de l'année qui
vient de s'écouler ou il n'a pas eu le temps de les inscrire encore au
rôle. Je ne sais pas si cela répond à votre question, M. le
député de Jonquière?
M. Pétrin: Je voudrais peut-être ajouter aussi, M.
le député de Jonquière, si vous me permettez, pour
répondre à votre question, que le dénominateur commun de
toute cette représentation c'est de faire en sorte que le
président d'élection ait les moyens de confectionner une liste
électorale complète, la plus exhaustive, la plus
représentative possible. Dans ce sens-là je pourrais me permettre
d'être humoristique et de dire que je comprendrais mal le
président d'une MRC de s'opposer à ce que nos listes
électorales soient précises et complètes après
l'expérience qu'il a lui-même vécue. Il est
important, à notre sens, de donner au président d'élection
tous les moyens matériels. Il est temps, je pense, vous me permettrez
d'être méchant en le disant, que les
secrétaires-trésoriers cessent d'être des artisans quand
c'est le temps de confectionner leurs listes électorales.
M. Dufour: Cela va. Je pense que cela fait à peu
près le tour des points que vous avez soulevés concernant...
Une voix: Le rôle de juge et de censeur.
M. Dufour: Non. Je pense qu'au point de vue du rôle de juge
et de censeur du secrétaire-trésorier, on s'est
déjà prononcé là-dessus. Je pense que vous avez
raison d'être très prudents dans cela.
M. Pétrin: Si vous me permettez une dernière
remarque. Dans la délégation pour les copropriétaires,
notre mémoire fait état -je ne l'ai pas soulevé
verbalement - que le projet ne mentionne pas, dans l'hypothèse où
vous retenez cette formule, de la date limite où le président
peut recevoir ces délégations. Je comprends qu'à un moment
donné, sa liste électorale sera confectionnée, mais il
serait peut-être opportun de préciser jusqu'à quand il peut
recevoir. Nous, on propose que ce soit jusqu'à la date de la
clôture du bureau de révision, quelque chose dans ce
genre-là, pour que ce soit fini, parce que le projet ne le
précise pas. Est-ce que cela pourrait vouloir dire... Parce que si la
personne est inscrite au rôle d'évaluation parce qu'ils sont
plusieurs propriétaires, est-ce que le lendemain du bureau de
révision on pourrait changer la délégation ou cela? Est-ce
que cela pourrait arriver la journée du vote? La loi ne semble pas
claire là-dessus. La délégation jusqu'à quand
peut-elle arriver? Est-ce qu'elle peut arriver juste la journée du vote?
On semble donner ouverture à cette chose. C'est un petit point
d'interrogation qu'on s'est posé. En principe, la personne
déléguée devrait figurer sur la liste.
M. Gagné: M. le ministre, j'aimerais ajouter
également sur la copropriété que Pierre Pétrin
ajoutait que ce n'était pas plus compliqué d'ajouter les
copropriétaires. Cela va être le dernier clou qu'on va mettre
là-dessus. Je vous dirai que la Loi sur la fiscalité municipale
prévoit que l'évaluateur doit inscrire au rôle
d'évaluation tous les copropriétaires. Pour nous, ce n'est pas
plus compliqué d'en mettre un sur la liste électorale que d'en
mettre dix. Je comprends... Cet article, je ne sais pa3 s'il est venu à
cause du problème de condominiums. Nous autres, c'est évident
qu'au niveau rural, on n'a pas ce problème de représentation
forte au niveau des condominiums. Pour nous, ce n'est pas plus compliqué
de mettre les copropriétaires. Je pense qu'on y tient beaucoup
là-dessus.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Bourbeau: Le problème, c'est que les
copropriétaires, s'ils sont des résidents, ils ont le droit de
vote, chacun a le droit de vote. Les problèmes se posent quand les
copropriétaires sont des étrangers à la
municipalité. Là, dans des petites municipalités, ce
serait très facile pour un groupe d'individus de prendre le
contrôle de la municipalité. Vous savez, on peut acheter un
terrain qui coûte 1000 $ ou 500 $ dans la municipalité. L'acheter
à 350 personnes. Prendre 350 personnes d'une autre municipalité
voisine. Acheter cela en parts indivises: 1/350 chacun. Cela se fait
très facilement. Vous êtes notaire. Moi aussi. Vous savez que ce
n'est pas tellement compliqué à faire. Vous nommez les 350 noms
et chacun a une proportion indivise de 1/350. Et ça y est, tout le monde
a le droit de vote. Ce serait presque un jeu d'enfant. On pense
qu'essentiellement, le droit de vote doit être laissé aux
résidents de la municipalité. On a fait des exceptions dans le
cas des propriétaires qui ont des immeubles dans la municipalité,
mais qui demeurent à l'extérieur. On voudrait leur accorder un
droit de vote chacun par immeuble. Même chose pour les gens qui
détiennent un commerce, les commerçants. Comment les
appelle-t-on? Les occupants de places d'affaires.
Je pense que c'est un peu la raison qui a motivé ce
contrôle qu'on tente d'imposer sur le vote des
copropriétaires.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Pétrin.
M. Pétrin: Les emplacements de chalets sont achetés
dans les milieux comme les nôtres qui sont très souvent
touristiques. Les époux, comme je le mentionnais tantôt, vont
acheter le chalet en copropriété. Ils sont effectivement
résidents de l'extérieur. C'est cette hypothèse qu'on a
voulu couvrir. Il est évident que je pourrais faire de l'humour avec
vous et vous dire que de toute façon, plus il y a de noms sur la liste
électorale, plus c'est intéressant pour nous.
Une voix: Le chat est sorti du sac.
M. Bourbeau: Je comprends, ils sont payés au nom.
Une voix: M. le ministre...
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Pétrin. M. Gagné.
M. Pétrin: ...pour les conjoints, c'est-à-dire pour
les époux, à ce moment, le mari et la femme, je ne sais pas.
M. Bourbeau: Là, pour les conjoints, cela devient
compliqué.
M. Pétrin: Oui. De fait, naturel, etc.
M. Gagné: II est évident que nous ne l'avions pas
vu de ce point de vue. Vous nous disiez qu'on était puriste. Vous
l'êtes et on l'accepte. Là-dessus, on ne l'avait pas vu de cette
façon, je vous avouerai bien franchement.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
questions de la part des membres?
M. Dufour: Pas d'autre question. Moi, je voudrais...
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: ...vous remercier de votre présentation.
Effectivement, je partage l'opinion du ministre des Affaires municipales
concernant la copropriété. Ce n'est pas une question de
pureté non plus d'intention. Je pense que c'est vraiment les cas qui se
produiraient régulièrement. Pour les quelques-uns qui pourraient
se sentir brimés, je pense que la démocratie est mieux servie
à la faveur d'un individu qui va signer. Ils s'entendront entre eux.
S'ils ne s'entendent pas, ils ne voteront pas. J'aime mieux qu'on brime un
individu d'un vote ou deux que d'essayer... Aller chercher tout ce que vous
dites, je pense qu'à ce moment-là on pourrait se ramasser, comme
M. le ministre disait, avec 200 voteurs qui n'ont pas vraiment
d'intérêt dans la municipalité.
Je comprends aussi votre intérêt. Vous devriez
peut-être essayer de demander de hausser les coûts de ceux qui vont
voter, les électeurs.
Le Président (M. Saint-Roch): Je remercie la
délégation de la Corporation des secrétaires municipaux du
Québec pour l'apport aux travaux de notre commission.
M. Gagné: Au nom des 1200 présidents
d'élection - parce qu'il faut bien se le dire, on représente 1200
présidents d'élection - je remercie les membres de la commission
pour leur attention, M. le ministre, M. le critique officiel. Soyez
assurés que nous ferons bonne pratique des dispositions de la loi et, si
on voit des petits problèmes à l'usage, nous vous les
soulèverons en temps opportun. Je remercie les membres de la commission
pour leur attention.
Conseil central de Montréal
Le Président (M. Saint-Roch): J'inviterais maintenant les
porte-parole du Conseil central de Montréal (CSN) à prendre place
devant la commission, s'il vous plaît!
Pour le bénéfice de notre Journal des débats et des
membres de la commission, est-ce qu'on pourrait procéder à
l'identification, s'il vous plaît?
M. Paquette (Pierre): Moi, c'est Pierre Paquette. Je suis
président du Conseil central de Montréal. Avec moi, il y a Victor
Leroux, qui est conseiller syndical.
D'abord, je voudrais remercier la commission de nous entendre parce
qu'à la lecture de la loi et de notre mémoire on peut voir qu'il
y a une distance assez importante entre ce qui est proposé et ce que
nous on aimerait voir. Par contre, je pense qu'il y a certains petits
détails qui pourraient peut-être vous intéresser.
Je vais me permettre de lire le document en sautant les passages qui
sont plus techniques. Je n'ai malheureusement pas l'esprit de synthèse
de ceux qui nous ont précédés.
Le Conseil central de Montréal (CSN) est le porte-parole
régional de la Confédération des syndicats nationaux
(CSN). Nous regroupons près de 75 000 membres provenant de tous les
secteurs d'activités y compris la fonction publique municipale et toutes
les municipalités de la grande région de Montréal. C'est
donc à double titre que nous pouvons parler: celui de regroupement de
travailleurs et de travailleuses, et celui de regroupement de citoyennes et de
citoyens.
À notre avis, le projet de loi 100 sur les élections et
les référendums dans les municipalités, tout en
constituant une amélioration par rapport à ce qui existe, ne va
pas assez loin dans le processus de démocratisation de la vie
municipale. Par certains aspects, il va même à l'encontre des
principes élémentaires de la démocratie.
Il n'est pas dans notre intention de passer le projet de loi point par
point. D'abord, on n'a pas les connaissances techniques nécessaires.
D'autre part, on peut les ramasser en deux grands titres: le mode de scrutin et
l'article 288 du projet de loi 100.
Le mode de scrutin. Au delà de 10 000 élus composent les
conseils municipaux des quelque 1600 gouvernements municipaux du Québec.
Ceux-ci sont élus à l'automne, à l'occasion d'une
élection qui leur est entièrement réservée. Dans
les villes, les mandats de quatre ans du maire et des conseillers viennent
à échéance en même temps. Dans un certain nombre de
municipalités rurales,
la mécanique est légèrement différente. Le
maire est élu par l'ensemble des électeurs tandis que chaque
conseiller est, en général, choisi dans un district
électoral. Encore une fois, dans certaines municipalités rurales,
il n'y a pas les mêmes dispositions.
Le projet de loi 100 prévoit des modifications qui feront
disparaître les différences entre les milieux municipaux urbains
et ruraux. Le projet de loi prévoit, aussi, que la durée des
mandats de l'ensemble des élus locaux soit uniformément
fixée à quatre ans. Le Conseil central de Montréal est
d'accord avec ce processus d'homogénéisation de la
mécanique électorale pour autant qu'on tienne compte du
caractère spécifique des grandes villes - on en a cité
trois, on pourrait toujours discuter Ià-dessus; Montréal,
Québec et Laval - pour ce qui est du mode de scrutin. Par contre, nous
ne sommes pas sûrs que le fait de ne pas imposer que les élections
se tiennent la même année dans toutes les municipalités
soit une bonne chose. On sait, en effet, que la vie politique municipale
soulève peu d'intérêt aussi bien auprès des citoyens
que des médias. On a beaucoup parlé du niveau de participation
plus bas aux élections municipales - autour de 50 % - que lors des
scrutins provinciaux - autour de 30 % - et fédéraux. Le fait de
regrouper les élections des diverses municipalités à un
même moment est un élément permettant d'attirer l'attention
sur le scrutin municipal. Dans ce sens, le Conseil central de Montréal
recommande de laisser l'obligation de tenir les élections
générales municipales le même jour, le premier dimanche de
novembre, et la même année. Actuellement, on sait qu'il y a un
décalage. Cela pourrait être maintenu, mais le problème
qu'on peut voir, c'est encore une dilution plus grande de
l'intérêt au niveau de l'ensemble de la province. (11 h 15)
Par ailleurs, on propose de nouvelles règles concernant les
districts électoraux, afin d'amener un meilleur équilibre de la
représentation des citoyens dans les conseils municipaux. S'il s'agit
là d'un progrès par rapport à ce qui existe, ces nouvelles
règles sont insuffisantes. À Montréal, par exemple,
où existent déjà des districts électoraux, le
scrutin majoritaire à un tour n'a pas accordé aux partis en
présence un nombre de sièges équivalant au poids relatif
du vote populaire. On donne l'exemple, en 1982, du Rassemblement des citoyens
et des citoyennes de Montréal qui recevait 36 % du vote mais ne faisait
élire que quinze conseillers, ce qui représente 26 % des
sièges. Vous avez des données è la page suivante. La
majorité fut donc surreprésentée au conseil municipal de
la ville de Montréal où le même parti domine largement
depuis au-delà de 20 ans. La même situation peut être
constatée d'ailleurs à Québec.
La CSN a déjà proposé un mode de scrutin au niveau
provincial qui fasse en sorte que la volonté populaire, exprimée
par le vote de l'électorat, ne soit pas déformée par la
mécanique du mode de scrutin lorsqu'il s'agit de traduire les suffrages
électoraux en sièges parlementaires. Le Conseil central de
Montréal veut en quelque sorte que le conseil municipal devienne le
miroir le moins déformant possible du verdict populaire. Cela est
possible en adoptant un mode de scrutin à la proportionnelle. On en
suggère un, mais même des éléments qui se
rapprocheraient de cela, par exemple, en introduisant une mécanique
où la proportionnelle jouerait un rôle pour rétablir
l'équilibre qu'on constate qui n'existe pas entre le nombre de
sièges et les votes, seraient déjà un pas en avant. On en
suggère un ici.
Dans les municipalités de moyenne et de petite importance, on
pourrait appliquer le scrutin proportionnel intégral,
c'est-à-dire que le nombre de sièges de conseiller devrait
être proportionnel au pourcentage de voix obtenu par un parti, une
coalition ou un regroupement de candidats. Pour ce qui est des grandes villes,
étant donné leur densité et la diversité de la
population, on pourrait diviser le territoire en districts régionaux ou
en districts de quartier. Dans leur cas, on utiliserait le mode de scrutin avec
quotient maximum.
Selon ce mode de scrutin, dans un premier temps, seront élus
conseillers d'un district électoral seulement les candidates et les
candidats ayant recueilli un nombre de voix égal ou supérieur au
quotient obtenu en divisant le nombre total des suffrages exprimés dans
ce district par le nombre de sièges parlementaires à pourvoir.
C'est ce qu'on appelle le quotient maximum. Dans un second temps, les restes,
c'est-à-dire les voix inutilisées, seront reportés au
niveau municipal. On répartira alors entre les partis en lice les
sièges non pourvus avec ta première méthode de
façon rigoureusement proportionnelle aux voix obtenues. On a
donné une illustration. Je vais sauter cela pour continuer à la
page 6.
En fait, avec la technique du quotient maximum au niveau du district
régional ou du regroupement de quartier et celle du report des voix
inutilisées au niveau municipal, on s'approche sensiblement de la
proportionnelle intégrale où il n'y a qu'une seule
circonscription. La distorsion possible ne peut provenir que du
découpage de la carte électorale et de la différence dans
les taux de participation d'une circonscription régionale à
l'autre. Cette formule répond également au principe de
représentation régionale ou de quartier puisqu'une bonne partie
des sièges est pourvue au niveau régional ou de quartier. Avec la
technique du quotient maximum, les candidates et les
candidats élus au niveau des quartiers, au niveau
régional, reçoivent une proportion des votes qui est
équivalente à une majorité absolue en système
majoritaire. On peut donc dire que les conseillers sont vraiment
représentatifs de leur district. De même les conseillers
élus au deuxième stade, même s'ils ne représentent
pas une circonscription donnée, voient leur élection
justifiée par la proportion des voix reçues par leur parti.
Nous croyons qu'il appartient à chaque formation politique de
constituer elle-même en toute indépendance la liste des candidates
et des candidats et de déterminer l'ordre de présentation des
noms qui y apparaissent. Il appartient à chacun des partis ou
regroupements de créer des mécanismes démocratiques
internes permettant aux membres d'exprimer leurs préférences
à cet égard. La vie démocratique des partis politiques
appartient aux membres des partis politiques. En conséquence, nous
proposons une liste bloquée, sous la responsabilité des partis.
Cela veut dire que l'électrice ou l'électeur porte son choix
nécessairement sur l'ensemble d'une liste d'un parti mais qu'il ne peut
pas modifier l'ordre des candidats ou des candidates sur cette liste.
D'autre part, nous croyons qu'avec ce mode de scrutin les partis auront
sans doute la préoccupation d'équilibrer leur
représentation hommes-femmes. Nous ne prétendons pas par
là que l'inégalité très grande de
représentation entre les hommes et les femmes soit uniquement due au
mode de scrutin. Le rôle traditionnel des femmes et leur statut
économique réel n'excusent pas cette situation. Par ailleurs,
nous savons que la représentation des femmes dans les pays qui utilisent
un mode de scrutin proportionnel est de beaucoup supérieure à ce
qui existe dans les pays où prévaut le scrutin uninominal
à un tour.
Enfin, nous croyons que la liste fermée favorisera un
accroissement réel des effectifs des partis et suscitera une plus large
et plus active participation des citoyennes et des citoyens à la vie
politique de notre collectivité et par là permettra une plus
grande démocratie municipale. Ceci est d'autant plus urgent qu'on
assiste depuis quelques années à une valorisation par les
pouvoirs supérieurs, entre autres le gouvernement provincial, du pouvoir
local et de la décentralisation.
Le conseil central, lors des audiences de la commission d'étude
sur les municipalités formée par l'Union des municipalités
du Québec, s'est dit ouvert à la prise en charge par les
municipalités des services publics dits de première ligne, comme
les CLSC et les garderies, pour autant qu'il y ait une véritable
volonté de démocratisation de la vie politique municipale.
L'adoption du mode de scrutin proportionnel constituerait une preuve
remarquable de cette volonté.
On nous objectera qu'une telle réforme du mode de scrution
devrait s'effectuer au niveau des élections provinciales avant de
s'appliquer au niveau local. À notre avis, une telle réforme au
niveau municipal permettrait aux citoyennes et aux citoyens du Québec de
faire l'apprentissage de ce mode de scrutin et ainsi d'accélérer
son adoption au plan national.
Dernier élément que nous voudrions soulever sur le mode de
scrutin, c'est le mode de désignation du maire. Dans le présent
système électoral municipal, on retrouve certains
éléments du régime présidentiel (élection du
chef de l'exécutif par l'ensemble des électeurs) et du
régime parlementaire (élection des représentants sur la
base de districts, à majorité simple des voix). Il est
déjà arrivé que des maires aient été
élus alors que le conseil municipal leur était hostile (ex:
Longueuil en 1978; cela aurait pu être le cas de Laval il y a quelques
années aussi). La position difficile dans laquelle se trouve alors le
maire fait ressortir la nécessité d'une réforme dans le
mode de désignation du maire. Selon le Conseil central de
Montréal, le maire devrait être d'abord élu comme
conseiller, puis comme chef du gouvernement si son parti obtient la
majorité des sièges. Ce mode de désignation du maire nous
semble plus conforme aux principes du régime parlementaire. De plus,
dans l'éventualité de l'instauration d'un mode de scrutin
proportionnel, cette désignation serait le reflet de la volonté
démocratique de l'ensemble de la population.
L'ensemble de ce que nous proposons implique une politisation de la vie
municipale qui nous semble être nécessaire si on veut vraiment
valoriser le pouvoir local. Je me permettrais de faire une remarque
là-dessus: À notre avis, le principal problème qui se pose
actuellement en ce qui a trait à la démocratie municipale, c'est
l'absence de politisation des débats. On nous présente cela comme
étant une administration et non un gouvernement. D'ailleurs les
élus municipaux sont souvent tenants de cela. J'ai moi-même
rencontré M. Dupras il y a quelques jours qui me disait que le conseil
municipal et le maire de Montréal étaient des administrateurs et
non des politiciens, sauf que ces administrateurs font des choix politiques qui
ont une certaine importance. Dans ce sens, nous voulons favoriser la
politisation de la vie municipale et on croit que l'existence de partis
politiques est nécessaire à cette politisation pour rendre
vraiment démocratique la vie municipale. Malheureusement, il n'est pas
vrai, comme on l'entend dire, que le pouvoir le plus près des citoyens
est le plus démocratique ou le plus représentatif; en tout cas,
ce n'est pas le cas actuellement.
Sur l'article 288, la démocratie repose sur quatre principes de
base, je ne vous apprendrai rien: la possibilité de désigner les
représentants par voie électorale, le suffrage universel, la
liberté d'association et la liberté d'opinion et de presse. Ces
principes font ressortir que la démocratie n'est pas simplement une
affaire d'élection, mais encore une question de conditions dans
lesquelles celle-ci se tient. Dans ce sens, la démocratie implique la
liberté de se regrouper et d'articuler ses points de vue. Or, l'article
288 limite cette liberté dans le cas des fonctionnaires d'une
municipalité. L'article 288 va même plus loin en étendant
cette restriction aux associations représentant les
intérêts de ces employés. On cite ici les articles 288 et
289.
Ainsi, le Conseil central de Montréal qui regroupe des
travailleurs et des travailleuses dans tous les secteurs, y compris la fonction
publique municipale, n'aurait pas le droit de prendre position lors des
élections municipales, à la lecture de l'article 288. Pour nous,
l'interdiction faite aux individus et aux associations de salariés de se
livrer à un travail de nature partisane, même si l'article 289
l'assouplit pour les individus, enfreint les principes
élémentaires de la démocratie. Le Conseil central de
Montréal recommande donc l'abandon de cet article.
On pourrait peut-être éventuellement être d'accord
avec les restrictions pour les hauts fonctionnaires municipaux. Peut-être
ceux qui nous ont précédés... Mais, quand on parle de
personnes qui sont commis ou qui font un travail de secrétariat, on ne
voit pas où le conflit pourrait exister entre le fait qu'elles se
présentent en demandant un congé sans traitement et le fait
qu'elles soient de la fonction publique municipale.
L'autre élément là-dedans, c'est que, actuellement,
vous savez que, devant les tribunaux au fédéral, l'Alliance de la
fonction publique fédérale conteste aussi un règlement de
ce type-là, qu'il y a eu des problèmes aussi aux dernières
élections avec le Syndicat de professionnels du gouvernement du
Québec. On serait d'accord, disons, pour les très hauts
fonctionnaires qui ont accès directement aux prises de décision,
mais pour ce qui est de la fonction publique en général,
c'est-à-dire 90 % des salariés de la fonction publique
municipale, on n'en voit pas l'intérêt.
Donc, en conclusion, la démocratisation des institutions
politiques est, depuis longtemps, un sujet de préoccupation du Conseil
central de Montréal. Le conseil central recommande donc de maintenir
l'obligation de tenir des élections municipales à la même
date et la même année, d'instaurer le mode de scrutin
électoral à la proportionnelle intégrale dans les petites
et moyennes villes et à la proportionnelle avec la technique du quotient
maximum pour les grandes villes, que l'on modifie le mode de désignation
du maire pour se conformer aux principes du parlementarisme et que l'article
288 soit retiré du projet de loi 100 afin que la liberté
d'association et de parole soit respectée. Je vous remercie de votre
attention.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
président. M. le ministre.
M. Bourbeau: Très intéressant, le mémoire du
Conseil central de Montréal. Une observation à la page 2 de votre
mémoire, au premier paragraphe de la page 2, vous ditesî "Dans un
certain nombre de municipalités rurales, la mécanique est
légèrement différente. Le maire est élu par
l'ensemble des électeurs tandis que chaque conseiller est, en
général, choisi dans un district électoral." J'ai
plutôt l'impression que c'est dans les municipalités urbaines que
l'on procède par district électoral.
M. Paquette: En fait, il aurait dû y avoir un paragraphe.
Cela répondait à la description précédente,
c'est-à-dire que dans les villes les mandats sont de quatre ans pour le
maire alors que dans certaines municipalités rurales ce peut être
deux ou trois ans. C'est cela qui est différent. Il y a un paragraphe et
puis: "Le maire est élu par l'ensemble..."
M. Bourbeau: Bon, très bien. En général,
dans les petites municipalités, le maire et les conseillers sont
élus par l'ensemble des citoyens.
M. Paquette: Oui.
M. Bourbeau: D'accord. Vous faites certaines recommandations, on
pourrait peut-être les reprendre. L'obligation de tenir des
élections municipales à la même date et la même
année. Effectivement, vous avancez un bon argument. L'impact d'une telle
décision aurait probablement pour effet de maximiser
l'intérêt des citoyens pour la chose municipale, pour la
démocratie municipale et aurait probablement pour effet d'augmenter la
participation, ce qui aurait un effet d'entraînement un peu partout au
Québec. C'est une suggestion intéressante que je retiens, mais il
peut y avoir des problèmes d'application. Je ne vois pas, par exemple,
que l'on puisse demander à la ville de Montréal de tenir deux
élections en trois ans parce qu'il faudrait que tous se mettent au
diapason la même année. Quand on connaît le coût d'une
élection dans les très grosses villes, il faudrait que la
planification soit faite sur un certain nombre d'années pour que tout le
monde entre éventuellement dans le giron. Il y aura possiblement
d'autres
effets, plutôt négatifs ceux-là, mais disons que
nous allons prendre en sérieuse considération cette
recommandation et on verra dans quelle mesure on pourrait l'appliquer. Je ne
sais pas si le critique de l'Opposition veut faire des commentaires à ce
sujet, je serais intéressé de connaître son point de
vue.
Le mode de scrutin à la proportionnelle. Là, c'est le
grand débat sur le mode de scrutin et je n'ai pas l'intention, ce matin,
de reprendre toute la problématique du mode de scrutin.
Présentement, c'est un mode de scrutin qui n'a pas la faveur des
gouvernements en Amérique du Nord. Est-ce que l'on deviendrait des
pionniers? Probablement qu'on le serait. Je vous laisse le soin de continuer
vos démarches pour convaincre les gouvernements de la justesse de cette
opinion.
La désignation du maire. Vous recommandez que le maire se fasse
d'abord élire comme conseiller municipal et, deuxièmement, qu'il
devienne maire si son parti politique emporte la majorité des
sièges. Il y a un problème qui se pose. Évidemment, cela
implique une plus grande politisation des conseils municipaux. Actuellement, la
loi ne fait pas obligation aux municipalités d'avoir des partis
politiques. Je connais des municipalités où la tradition ne va
pas tellement dans ce sens. Il peut, à la rigueur, se former des
équipes, mais elles ne vont pas jusqu'à... C'est plutôt une
entraide mutuelle. Il y a des municipalités au Québec où
la tradition s'accommode très bien d'un système qui est moins
politisé qu'ailleurs. Enfin, c'est une suggestion intéressante;
elle pourrait possiblement être appliquée plus facilement dans les
très grosses villes, où on retrouve des partis politiques et cela
fonctionne très bien. (11 h 30)
Quatrièmement, que l'article 288 soit retiré afin de
permettre aux fonctionnaires de s'impliquer davantage dans le processus
électoral. Il ne s'agit pas seulement de se présenter aux
élections mais de se livrer à un travail de nature partisane.
Pour ce qui est de permettre à un fonctionnaire de se présenter
comme candidat à une élection, la loi actuelle dit qu'il doit
démissionner. On me dit qu'on ne prévoit pas de congé sans
traitement. On pourrait faire en sorte que quelqu'un à l'emploi de la
municipalité qui veut postuler un poste de conseiller ou de maire puisse
avoir droit à un congé sans traitement. Il faudrait voir. Disons
que c'est un point de vue qu'on regardera. Le fait de se livrer à du
travail partisan, il y a évidemment deux écoles de pensée:
celle que vous défendez et celle des maires, des conseillers et des gens
qui sont dans le système qui se trouvent assez mal à l'aise au
lendemain d'une élection avec des fonctionnaires qui ont milité
activement contre l'administration municipale. Je ne sais pas si c'est dans
l'intérêt des fonctionnaires municipaux de se livrer à du
travail partisan parce que cela crée à ce moment-là des
situations assez difficiles au lendemain d'une élection où, de
part et d'autre, la confiance ne règne pas tellement. C'est un petit peu
comme un sous-ministre - je crois que vous avez d'ailleurs exclu les hauts
fonctionnaires - qui se livrerait à du travail partisan et qui se
retrouverait avec un ministre de l'autre côté de la clôture
après les élections. Cela pourrait faire des petits
déjeuners assez difficiles.
C'est sûrement à cause de ces problèmes
anticipés que le projet de loi tente d'éviter ces
problèmes qui se présentent a posteriori. Il y a aussi le fait
qu'un employé municipal pourrait, lors d'une élection, je
présume, avoir accès à des renseignements. Il pourrait se
faire un coulage de documentation, ce qui ne serait peut-être pas dans
l'intérêt non plus... On pourrait aller pirater le bureau du
greffier. A priori il y a une grande réticence dans le monde municipal.
Je tente de trouver les raisons. On nous en a donné plusieurs et je
tente de les énumérer. Sûrement que ma liste n'est pas
exhaustive.
Ce sont les réactions que je peux avoir à vos
recommandations. Je ne sais pas si vous voulez reprendre un peu sur le
sujet.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Paquette.
M. Paquette: Merci. Je voudrais dire d'abord que l'ensemble du
mémoire, même si on présente la proportionnelle comme
étant le mode de scrutin qu'on préconiserait dans l'absolu, vise
à une politisation de la vie municipale. À notre avis, la
démocratie et la prise en charge par la collectivité ne passent
pas en dehors de cette politisation et l'existence de partis et de
regroupements doit être favorisée. D'ailleurs, les amendements qui
avaient été amenés par le gouvernement
précédent en permettant la mise sur pied de partis municipaux,
avec, par exemple, pour la ville de Montréal, un budget pour
l'opposition, ont amené une politisation, dans la vie de
Montréal, des débats du conseil municipal qui sont
drôlement plus intéressants que ceux d'il y a quelques
années et une élection s'en vient qui sera drôlement plus
suivie que par le passé. À notre avis cela est lié
à l'existence des partis politiques. Que dans les petites villes on ne
mette pas sur pied un parti qui traversera plusieurs élections, je le
comprends très bien. Mais il me semble qu'il devrait exister ou qu'on
devrait favoriser, sans en faire l'obligation peut-être mais comme cela
se fait déjà un peu avec la présente loi, le regroupement
de candidats
autour de quelques enjeux pour permettre aux citoyens d'avoir une
prise.
Ce contre quoi j'en ai particulièrement au niveau municipal,
c'est qu'on nous présente cela strictement sous la nature
administrative. Je pense que des choix politiques se font là. C'est
peut-être plus manifeste dans les grandes villes mais cela l'est aussi,
je crois, dans les moyennes et les petites municipalités. C'est dans ce
sens-là, par exemple, que sur la question des fonctionnaires vous dites
qu'il pourrait y avoir du coulage. Il se fait malgré tout, sauf qu'au
lieu de se faire... Je suis d'accord avec vous qu'il doit y avoir des limites
au transfert d'informations du pouvoir public vers l'opinion publique en
général, que cela ne doit pas se faire n'importe comment. Je suis
totalement d'accord avec cela sauf que, actuellement, si un fonctionnaire veut
faire de la fuite, il peut toujours prendre les mesures pour le faire. Par
contre, s'il est identifié à un parti politique ou à un
des candidats en présence, il me semble qu'il va pouvoir identifier
beaucoup plus facilement d'où cela vient. On a un peu le même
problème, je dirais, nous, à la CSN, c'est-à-dire qu'on ne
fait pas de politique, contrairement, d'ailleurs, à ce que les gens
pensent. On est une des centrales qui ne font pas de politique partisane. On
n'a jamais appuyé un parti politique de notre histoire, sauf que nos
salariés, nos membres en appuient. Ils le font sur une base
individuelle, et souvent cela nous pose des problèmes quand on sait
très bien que l'ensemble de nos salariés, par exemple, ou de nos
militants appuie tel ou tel parti et que, selon la prise de position
officielle, on n'appuie aucun parti.
J'ai toujours été un peu mécontent de cette
situation. C'est dans ce sens que l'article 288 semble prêcher dans le
même sens, c'est-à-dire que l'apolitisme des fonctionnaires
n'existe pas. Ils prennent des positions politiques et souvent ils en prennent
plus que les autres parce qu'ils ont même un caractère parfois...
Ils sont proches des problèmes, ils ont aussi des fois des
problèmes de convention collective, etc. Je ne voudrais pas qu'on
utilise des élections municipales pour faire des négociations,
sauf qu'à mon avis, en permettant aux associations... Je peux donner
encore l'exemple du SPGQ, son dossier noir sur la fonction publique, en le
rendant public, c'est sûr qu'il faisait mal au gouvernement qui
était au pouvoir, mais au moins il le présentait dans l'opinion
publique directement. Il était prêt à affronter les
problèmes que cela pouvait poser relativement, par exemple, aux prises
de position des éditorialistes ou du gouvernement au pouvoir. Par
contre, si on interdit cela, on va le faire, mais par en dessous. Là il
n'y aura plus aucune prise au niveau du débat public sur ces documents.
C'est un peu la vision que j'ai. Il faut des limites, mais la manière
dont est rédigé l'article, à mon avis, cela brime la
liberté individuelle et d'association.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Bourbeau: Qu'un organisme syndical décide de publier un
dossier blanc ou noir ou rouge sur une situation ou sur un parti politique,
c'est son droit. Il peut le faire en tout temps. Ce n'est pas
nécessairement dans le cas d'une campagne électorale. À
partir du moment où cela se fait lors d'une campagne électorale,
c'est là que les fonctionnaires qui le composent, qui composent
l'organisme prennent parti activement dans une lutte électorale et c'est
là que c'est susceptible de causer des problèmes. Si le syndicat
rend son document public un an avant ou deux ans avant, ou en dehors de la
période électorale, cela peut avoir le même effet, mais
cela ne devient pas partie d'une lutte partisane. Maintenant, je pense que ce
n'est pas dans l'intérêt des employés municipaux, des
fonctionnaires de s'impliquer personnellement dans une campagne
électorale parce que cela peut créer des problèmes le
lendemain des élections, et c'est l'ensemble de la collectivité
qui va payer parce qu'il va y avoir une situation ou peut-être un risque
de blocage dans l'efficacité de l'administration municipale.
D'autre part, le droit des individus de s'exprimer a été
défendu par la Commission des droits de la personne. Je pense qu'il faut
trouver une solution mitoyenne où on pourrait concilier les droits des
uns et l'intérêt de la communauté. Cela termine ce que
j'avais à dire sur le sujet.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le
député de Jonquière.
M. Dufour: Ce que je peux dire, c'est que votre mémoire
semble refléter une grande cohérence dans tous vos
énoncés. D'abord, d'une façon très directe, vous
affirmez que les partis politiques sont une nécessité au
Québec. Cela devient le fait de l'ensemble de la population. Tous vos
énoncés tournent autour de cela. Un des premiers est que vous
dites que les élections devraient avoir lieu la même année
et le même jour. C'est certain qu'en partant de vos prérequis et
des principes de base que vous avez énoncés, quand on parle
d'élections générales tous les quatre ans, cela s'inscrit
dans une position correcte. À ce moment, cela ne devient plus de la
politique municipale, et vous avez presque dit à un moment donné
qu'il faut que les gens soient politisés vis-à-vis de la
politique municipale.
Vous êtes même allé jusqu'à dire que
ce n'est pas vrai qu'ils sont plus près des citoyens. Je pourrais
peut-être vous dire que vous faites peut-être injure à 1600
municipalités au Québec ou à 1499 qui prétendent
qu'elles sont près des citoyens parce que, dans l'ensemble au
Québec, ce ne sont pas de grosses municipalités. En bas de 100
000, on ne considère pas que que ce sont de grosses
municipalités. Si vous voyiez le rôle que les maires jouent,
à quel point ils sont près des citoyens, le
téléphone, les rencontres. Les gens connaissent l'adresse du
maire. C'est plus facile. En tout cas, je peux vous faire part de mon
expérience: les gens sont plus près du maire que du
député, à mon avis. Après avoir été
18 ans maire d'une municipalité, je peux vous en assurer. Si vous me
dites que ce n'est pas vrai, nous pourrions avoir une bonne discussion; je
serais prêt à prendre une heure après la commission pour
parler avec vous du fait qu'ils sont près des gens.
C'est certain que les élections municipales
générales tous les quatre ans, cela a déjà
été discuté, c'est déjà venu à la
surface dans certaines discussions d'élus municipaux, à savoir si
cela devait être préconisé par rapport à l'autre
système. C'est sûr que le but visé est d'avoir le plus de
votes possible. Mais c'est vrai aussi pour les associations; ce n'est pas 100 %
des gens qui votent pour élire leur exécutif syndical. Il ne faut
pas se scandaliser parce qu'au municipal ce n'est pas 100 % des gens. Je peux
vous dire une chose: Les mécontents votent, c'est certain. Les contents,
leur vote est plus difficile à sortir. Cela peut jouer beaucoup plus
pour l'opposition, si ça ne vote pas beaucoup, que pour le pouvoir,
à mon avis, en tout cas, selon ma petite expérience.
Avec une élection tous les quatre ans, je suis un peu craintif
qu'on provincialise les élections municipales. à ce
moment-là, vous allez vous retrouver comme en France où les
maires et les conseils municipaux ont beaucoup d'honneurs, beaucoup de
prestige, mais pas beaucoup de pouvoirs. Ils ne décident pas
grand-chose, car il y a tellement de monde d'impliqué qu'ils ne peuvent
plus fonctionner.
Vous dites que le maire devrait être désigné comme
conseiller municipal; vous oubliez un principe très important. Au
provincial, c'est vrai que le premier ministre se présente comme
député et se fait élire avant d'être nommé
premier ministre, mais il a un "moses" de pouvoir qu'aucun maire n'a: il peut
dissoudre la Chambre n'importe quand sur simple recommandation et c'est lui qui
nomme les ministres. Les maires ne nomment personne, ils n'en ont pas le
pouvoir. Il y a peut-être quelques chartes spéciales qui peuvent
leur permettre de nommer l'exécutif mais, règle
générale, dans la plupart des municipalités au
Québec, les maires ne nomment même pas leurs présidents de
commissions. Ou ils en font ou ils n'en font pas. Ils peuvent les nommer ou ne
pas les nommer, mais c'est toujours sur recommandation et le conseil a le droit
de dire oui ou non.
Quand vous me dites que le maire devrait être nommé par ses
conseillers pour jouer son rôle, il va prendre une moyenne
"débarque" si ses conseillers ne sont pas d'accord avec lui au cours du
mandat. Vous dites qu'il y a eu des problèmes à Longueuil, il y
en a eu ailleurs aussi, et les problèmes que vous allez créer
seront pires encore. Vous demandez que le maire soit responsable par rapport
aux conseillers, ce qui veut dire que vous l'amputez de toute
responsabilité. À mon avis, ce n'est pas tout à fait comme
au provincial. C'est un régime présidentiel jusqu'à un
certain point, mais les conseillers en assemblée peuvent dire oui ou
non, si ça fonctionne ou pas.
Ce que l'on cherche dans tout cela, c'est que le municipal soit
politisé? Faut-il qu'il y ait une opposition obligatoire dans un conseil
municipal? Il y a des coûts rattachés à cela. C'est
sûr qu'un conseil municipal qui se fait élire doit prendre
certaines décisions politiques. Dans l'urbanisme, il y a des
décisions politiques. Mais avec les lois, la population est au courant,
elle est consultée jusqu'à un certain point.
Bien sûr, vous nous parlez d'une ville comme Montréal, mais
il n'y a qu'une ville qui s'appelle Montréal au Québec; une autre
s'appelle Laval; il y a aussi Québec et Longueuil. À supposer
qu'il y ait des gens mécontents - on en voit de temps en temps en
commission parlementaire, des gens qui font partie des partis d'opposition -
bien sûr, on peut dire qu'on n'est pas content par rapport à ce
qui se passe, mais, jusqu'à preuve du contraire, j'aimerais savoir... Je
ne peux pas dire que je suis toujours content des décisions municipales
qui me concernent, mais, dans l'ensemble, il y a moyen de faire des pressions
ou de faire changer des choses.
Est-ce qu'on pourrait décemment dire: Oui, on va désigner
le maire comme conseiller municipal d'abord et puis il se fera élire? Il
doit rendre des comptes à ceux qui l'ont nommé. Si le premier
ministre n'est pas content, il dissout la Chambre et dégomme ses
ministres. Cela va bien, il a un pouvoir. Mais le maire n'aurait pas de
pouvoirs, selon ce que vous dites. Peut-être que cette proposition
devrait être réexaminée pour voir si cela est possible ou
pas. (11 h 45)
Les élections la même année, je trouve que vous
politisez le problème un peu trop. La preuve en est - lorsque vous
avancez comme argument que l'ancien gouvernement l'a fait - qu'il s'est fait
battre, l'ancien gouvernement. On est dans l'Opposition. Donc, on peut se
permettre de réfléchir
actuellement sur tout ce qu'on pensait avant.
Quant à savoir si les élections municipales doivent
devenir provinciales un jour, il y a un coût et certainement une
mentalité à créer. Je ne pense pas que cette commission
parlementaire puisse donner une réponse à des changements
majeurs. Il y a peut-être d'autres domaines ou d'autres lieux municipaux
pour attaquer ces problèmes-là.
Il y a eu des publications sur la proportionnelle et cela n'a pas
été retenu, ni d'un bord ni de l'autre. Je ne peux pas me
prononcer là-dessus, mais il n'y a pas de système parfait. Il y a
toujours des lacunes quelque part. Là, la proportionnelle, cela nous
avantagerait, bien sûr, on serait quelques personnes de plus. Par contre,
il y a d'autres moments où c'est le contraire qui pourrait jouer. C'est
mon opinion personnelle et non pas une position de parti. Je ne suis pas,
personnellement, pour la proportionnelle. Suis-je antidémocratique
à cause de cela?
Ma réflexion va aller un peu plus loin. Quand vous faites des
élections au syndicat -je ne veux pas vous "garrocher" la pierre ou vous
tirer les vers du nez - des gens votent pour quelqu'un et d'autres contre.
Quand l'élection est faite, c'est fini, vous fermez les livres. Dans le
syndicat, vous n'acceptez pas qu'il y ait un parti d'opposition officielle et
un parti au pouvoir. Vous dites: Tout le monde dans le même "straight".
Vous me direz: Oui, mais le syndicat, ce n'est pas pareil. Oui, c'est pareil
parce qu'avec le principe de la formule Rand où tout le monde fait
partie du syndicat, c'est un circuit fermé. Ces gens-là ont le
droit d'avoir voix au chapitre. Je ne suis pas sûr qu'ils ont tous voix
au chapitre. J'ai fait partie d'un syndicat et j'ai déjà
appartenu à la CSN en plus. Donc, il y a une obligation quelque part.
Dans une municipalité, pourquoi est-ce qu'on demande des partis? Tout le
monde fait partie de la municipalité, tous sont tous touchés par
ce qui se passe dans la municipalité. Une certaine voix est
donnée à l'opposition.
Dans les associations, ce n'est pas tout à fait pareil. Quand
c'est fini, on ferme les livres et on dit: Embarquez dans le même train.
Je ne suis pas sûr qu'on doit trouver nécessairement et
obligatoirement d'autres moyens ou qu'on doit exagérer pour trouver des
moyens pour donner absolument une voix à l'opposition. De temps en
temps, il faut que cela fonctionne. Vous avez dit qu'une municipalité,
ce n'est pas administratif. Je vous invite à faire partie d'une
municipalité. Vous verrez qu'on passe beaucoup de temps à
décider. Ce n'est pas nécessairement juste de la politique quand
on négocie les conventions de travail. Ce sont des questions
administratives, ce sont des taxes.
Tout cela pour dire que je trouve votre mémoire cohérent.
Je trouve que vous avez de la suite dans les idées. Il est bien
présenté et cela se suit, à la condition qu'on accepte vos
principes en partant. Je vais être obligé de
réfléchir là-dessus, sûrement.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Jonquière. M. Paquette.
M. Paquette: Je n'ai pas dit qu'il n'y avait pas d'administration
dans les municipalités. On nous présente actuellement les
municipalités comme étant exclusivement des administrations. Je
dis que c'est aussi un palier de gouvernement et, dans ce sens-là, il
doit y avoir une forme de politisation, je dirais, proche des gens, parce qu'on
dit, justement, que, localement on peut avoir accès aux maires. Les
curés de paroisse étaient proches des gens et ils
n'étaient pas élus. Dans ce sens-là, on pourrait
très bien trouver un autre mode de désignation par la province
strictement. C'est dans le sens où je voudrais qu'on aille vers une
tendance. 0 y a des problèmes de mentalité très
importants. Il y a eu des améliorations. Entre autres, votre
gouvernement en avait apporté. Je les ai signalées tout à
l'heure. Je dirais, à ce compte-là, qu'un des problèmes,
c'est peut-être que vous n'avez pas tenu l'ensemble des promesses que
vous aviez faites, entre autres, au niveau de la proportionnelle qui
était dans le programme du Parti québécois au moment
où vous avez pris le pouvoir.
L'autre élément, c'est l'analogie que vous faisiez avec
les syndicats. Je dirais, premièrement, que la participation aux
élections laisse parfois à désirer et on ne s'en satisfait
pas. On fait des efforts constants pour augmenter la participation au vote.
C'est dans ce sens-là aussi que les mesures qu'on préconise, qui
ne sont peut-être pas les réponses uniques à cela, sont
aussi des mesures en vue d'augmenter la participation.
Une dernière petite chose. Aux élections syndicales, quand
on est élu, par exemple, président du conseil centrai, on doit
faire face à l'assemblée générale des membres
à chaque mois. Tous les mercredis, n'importe qui peut venir dire qu'il
n'est pas d'accord sur telle ou telle chose. Il ne vient pas
nécessairement. Les mécontents viennent, mais les autres ne
viennent pas nécessairement, sauf qu'il n'y a pas de
délégation de pouvoirs absolue comme c'est le cas, par exemple,
après une élection municipale ou provinciale où, pendant
quatre ans, le gouvernement, surtout un gouvernement majoritaires a les
coudées franches.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: Je voudrais juste reprendre la dernière
affirmation selon laquelle ils ont
un pouvoir absolu. Non. Les conseils municipaux n'ont pas un pouvoir
absolu parce qu'avec la loi sur les référendums... C'est
déformé un peu. Vous parlez de Montréal, mais on parle de
l'ensemble parce que, pour nous autres, la loi je pense que son but, c'est de
couvrir l'ensemble des municipalités du Québec le plus possible
et d'harmoniser. Dans les autres municipalités, en règle
générale, les gens ont droit à des
référendums. Ils ont droit à des périodes de
questions. C'est entendu que c'est tout déformé par la lunette
où vous êtes dans un coin pour dire que c'est Montréal.
C'est tellement gros. C'est clair. Allez voir dans l'ensemble des
municipalités, quand on veut "paqueter" une assemblée de conseil,
il y a même des droits de parole obligatoires que le conseil est
obligé de donner à sa population.
Je vous passe un papier que le maire d'une municipalité passe du
temps à répondre aux gens et à répondre au
téléphone. Je peux vous dire que même des problèmes
complètement extérieurs à la municipalité, durant
que j'étais maire, nous touchaient: des grèves, par exemple. Dans
une ville comme Jonquière où il y avait un syndicat de l'Alcan,
avec la grosseur de l'usine quand il y a une grève que pensez-vous que
le maire fait? J'ai eu une grève municipale, mais la grève de
l'Alcan m'a fait plus mal que la grève municipale. 6000 personnes dans
un municipalité qui sont en grève, cela commence à faire
du monde à la messe.
Dans ce temps-là, je suis obligé de dire ou d'affirmer que
le conseil est proche et que le maire n'a pas de pouvoirs absolus. Cela ne peut
pas être cela. Les gens sont trop proches, à moins que ce ne soit
un maire qui se cache, et ce n'est pas supposé. Cela n'arrive pas dans
les municipalités comme les nôtres. Les gens se croisent. C'est un
grand village. Quand bien même il y a 50 000 personnes, tout le monde se
connaît. C'est vrai que, si on regarde par une lunette, moi, je ne veux
pas qu'on provincialise les élections; je ne voudrais pas, non plus,
qu'on "montréalise" le Québec parce qu'il me semble qu'on doit
garder le plus de personnalité à nos coins. À mon sens, en
tout cas, je persiste à dire que votre mémoire est très
bien étoffé. C'est une question de philosophie globale. Moi, je
ne suis pas sûr que j'embarque immédiatement dans cette
philosophie.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Jonquière. M. le député de
Chapleau.
M. Kehoe: Juste une question, M. le ministre. Vous avez
mentionné que vous êtes plus ou moins d'accord avec la
première conclusion du mémoire demandant de tenir les
élections à la même date et la même année,
Vous avez mentionné la difficulté de demander à la ville
de Montréal de tenir deux élections dans une courte
période de temps. Je suis bien d'accord avec cela, mais où je
veux en venir avec cela, c'est de savoir si vous avez vraiment fait une
étude. Quand on parle de la participation, de maximiser
l'intérêt et toutes les autres raisons qui peuvent militer pour
avoir les élections à la même date et la même
année, est-ce que vous avez fait une étude ou si cela n'est pas
allé plus loin que ce que vous avez mentionné au sujet de la
possibilité d'avoir des élections à la même date et
la même année?
Le Président (M. Saint-Roch); M. le ministre.
M. Bourbeau: II y a eu des consultations qui ont
été tenues avec les représentants du monde municipal et
les unions municipales. La réaction a été plutôt
négative lors de ces consultations. On me dit qu'une des raisons qui
font hésiter les dirigeants du monde municipal, c'est une certaine
crainte que le fait d'avoir des élections à la même date
partout crée une polarisation telle que les partis politiques
provinciaux pourraient s'ingérer ou prendre le contrôle des partis
politiques municipaux parce que tout cela se ferait au même moment,
à la même époque. Le monde municipal, en
général, n'est pas très favorable à une mainmise
éventuelle sur les conseils municipaux du gouvernement du Québec
sur le plan de la politique.
C'est, semble-t-il, une des raisons qui font que le monde municipal est
plutôt négatif. Tout à l'heure, je n'ai pas dit
nécessairement que j'étais d'accord avec la proposition, mais que
je la trouvais intéressante et que j'avais l'intention de regarder de
nouveau ce sujet pour voir s'il n'y aurait pas un intérêt à
tenter de mettre en vigueur cette recommandation après avoir fait,
évidemment, les consultations qui s'imposent.
Le Président (M, Saint-Roch): Merci, M. le ministre.
Est-ce qu'il y a d'autres questions? M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: J'ai quelque chose à soulever. Ce n'est pas
parce que je ne trouve pas intéressant le travail de nature partisane.
J'ai parlé pas mal là-dessus hier. Je ne voudrais pas prolonger,
non plus, les travaux de la commission. Je vous invite juste à lire
les...
Une voix: Les galées?
M. Dufour: Non, cela ne s'appelle pas les galées, mais le
Journal des débats de la commission pour savoir ce que j'en
pense.
Personnellement, je suis porté à croire que le travail de
nature partisane, cela va causer beaucoup plus de tort que cela ne va faire de
bien.
Effectivement, je comprends votre préoccupation de faire
participer les gens à la vie électorale de leur milieu. Par
contre, quand on est employé, on a choisi d'être employé.
Vous n'avez pas assisté à toutes les présentations de
mémoires qu'on a entendus. Vous devriez entendre les mémoires des
employés des municipalités; ils ont très peur du principe
que les employés pourraient faire un travail de nature partisane. La
plupart des municipalités sont tellement petites - ces gens-là y
travaillent régulièrement - que s'ils affichent leurs couleurs
aussi fortement, je ne sais pas de quelle façon on pourrait
rétablir un climat vivable. On n'a pas le moyen dans les
municipalités de se payer des "tablettes". Vous savez bien que les
conseils municipaux, si des gens ont travaillé contre eux, vont leur
faire un beau party. Peut-être qu'au provincial ils peuvent se permettre
d'avoir des "tablettes". Je le déplore, ce n'est peut-être pas
correct, mais cela se fait. Pourquoi? Parce que, justement, il y a des gens qui
font du travail de nature partisane des fois et, d'autres fois, on pense qu'ils
sont partisans, et cela arrive au même.
Au municipal, on n'a pas les moyens de payer des gens à ne rien
faire. De ce côté-là, je suis presque un
irréductible. Avec l'expérience que j'ai vécue, je
n'aurais pas voulu que les gens autour de moi fassent du travail de nature
partisane au cas où. Peut-être qu'ils auraient travaillé
pour moi, je n'ai jamais perdu une élection au municipal. Même si
j'avais des doutes - pas sur l'honnêteté des gens, ils sont
toujours honnêtes, en principe - sur leur façon de penser par
rapport à ce que j'étais, moi, cela ne m'empêchait pas de
vivre. Mais s'ils s'étaient affichés ouvertement, à moins
de faire de l'angélisme, j'ai l'impression que je les aurais
tassés quelque part. Je ne leur aurais pas cassé de bras, mais je
les aurais tassés quelque part, parce que dans les municipalités,
c'est trop petit. On a besoin de gens très loyaux autour de soi. C'est
vrai aussi dans les gouvernements. Un ministre qui douterait de la
loyauté de quelqu'un autour de lui, je pense qu'en principe il ne doit
pas travailler avec lui parce qu'on ne peut pas vivre dans un climat de
suspicion à l'intérieur de notre travail. Je pense que c'est un
principe de base. Voilà!
Quand on a des doutes, on ne peut pas. Il faut qu'il y ait un climat de
confiance. J'ai travaillé avec des gens pendant 22 ans dans une
municipalité comme élu municipal. J'ai toujours eu une confiance
extraordinaire envers les employés avec qui j'ai travaillé. Il y
en a qui n'étaient pas du même parti politique - ne vous en faites
pas - mais ils avaient une loyauté envers leur municipalité et
envers les gens qui étaient élus. J'appréciais cela
beaucoup de leur part et j'essayais de leur rendre.
Je vous remercie de la présentation de le votre
mémoire.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Paquette, est-ce qu'il y a quelques remarques en conclusion?
M. Paquette: Je voudrais conclure en disant que ce qu'on vise par
l'ensemble de nos interventions, c'est finalement la valorisation du pouvoir
local. Dans ce sens-là, le projet de loi 100, à mon avis, va avec
toute une dynamique à laquelle on faisait référence, soit
la valorisation du pouvoir local. On pense que cela va dans le sens qu'on
préconisait dans le mémoire. On vous remercie beaucoup de nous
avoir entendus.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Bourbeau: Oui, M. le Président. Il nous a fait plaisir
de revoir à nouveau le Conseil central de Montréal et son
président, M. Pierre Paquette, que nous avions l'occasion de le
rencontrer lors du sommet économique de Montréal au mois de
juin.
Le point de vue du Conseil central de Montréal est toujours un
point de vue rafraîchissant, si je peux dire, qui se situe toujours un
peu à l'avant-garde du monde municipal qui, lui, par définition,
est plutôt conservateur et qui chemine lentement sur la voie de la
démocratie. Mais je dois dire que le cheminement se fait quand
même, même si c'est moins rapide que le souhaiteraient certains. Je
pense que c'est normal que nous n'évoluions pas tous à la
même vitesse.
Le monde municipal a quand même fait des pas de géant dans
la direction d'une plus grande démocratisation et de la revalorisation
du rôle des élus. Plusieurs lois ont été
adoptées au cours des dernières années. On a
instauré le système des partis politiques. On l'a fait d'une
façon prudente en laissant le choix aux citoyens de se former ou non un
parti politique dans les municipalités. Je pense que, dans ce sens, on
progresse lentement vers les objectifs que souhaiterait voir se réaliser
la CSN, probablement à plus court terme.
Les idées qui sont émises sont très valables et
possiblement qu'à la longue on pourra faire encore des progrès
dans le sens que souhaitent les intervenants. Je pense, quant à moi,
qu'il est bon d'être prudent, d'évoluer au fur et à mesure
de l'évolution des mentalités. Quand les citoyens acceptent
facilement les réformes, c'est plus facile de les mettre en vigueur que
lorsqu'on brime un peu Ies citoyens, en ce sens qu'on leur impose une
façon de voir qui n'est peut-être pas celle qui correspond
à leur état de
pensée à ce moment-là.
Je dois dire que, tout de même, on lit le mémoire de la CSN
avec beaucoup d'intérêt. On va le relire encore. J'ai l'intention
de m'asseoir avec les hauts fonctionnaires du ministère pour revoir
chaque point que vous avez avancé et voir comment nous pourrions - si la
chose est possible - insérer ces principes dans le projet de loi. Je
vous remercie.
Le Président (M- Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
président, de votre participation aux travaux de la commission de
l'aménagement et des équipements. La commission va maintenant
ajourner ses travaux au 23 octobre.
(Fin de la séance à 12 h 1)