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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Thursday, February 12, 1987 - Vol. 29 N° 46

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation particulière sur l'avant-projet de loi sur les pesticides


Journal des débats

 

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M, Saint-Roch): La commission de l'aménagement et des équipements reprend maintenant ses travaux pour poursuivre sa consultation particulière sur Pavant-projet de loi sur les perspectives. Est-ce que nous avons des remplaçants, ce matin, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Harel (Maisonneuve) sera remplacée par M. Paré (Shefford); M. Rochefort (Gouin) sera remplacé par M. Garon (Lévis); M. Vaillancourt (Orford) sera remplacé par M. Assad (Papineau); M. Valiières (Richmond) sera remplacé par M. Cusano (Viau).

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le secrétaire. Je demanderais maintenant au Regroupement pour un Québec vert de prendre place. Ceci étant fait, je demanderais au porte-parole de s'identifier et aussi d'identifier, pour l'information des membres de la commission et du Journal des débats, les gens qui l'accompagnent.

Regroupement pour un Québec vert

M. L'Italien (Gérald): Merci, M. le Président. Le Regroupement pour un Québec vert a accepté de participer à la commission. Tout notre monde est là ce matin. À ma gauche, Michel Lauzon biolobiste, qui a travaillé au mémoire. À ma droite, MM. Pierre Auger et Jacques Normandeau.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. L'Italien. À partir de ce moment-ci, vous avez un maximum de vingt minutes pour présenter votre mémoire.

M. L'Italien: C'est très bref, d'ailleurs. Je dois dire que l'on préférerait privilégier les échanges plutôt que la didactique.

Le Regroupement pour un Québec vert a accepté de bon gré de se prêter à cet exercice de consultation que représente cette commission parlementaire. Nous acceptons volontiers de participer è cette séance parce que nous sommes convaincus du discours que nous tenons. D'autre part, nous souhaitons vivement que notre mémoire soit sérieusement pris en considération, d'autant plus que notre intérêt ici, ceci dit sans prétention, vise le patrimoine biophysique que nous léguerons à nos enfants.

Vous n'êtes pas sans savoir, M. le ministre, que| la science dite officielle a souvent plus de réponses toutes faites et hautement toxiques aux problèmes créés par les ravageurs) qu'une réflexion ouverte et sage et une prévention toute minimale.

Nous sommes convaincus que votre projet de loi jest nourri de bonnes intentions, même s'il constitue tout juste un projet. C'est, justement, notre intention de vous souligner que vous devrez fortement bonifier ce projet de loi, sinon il est inutile d'ajouter à la confusion que nous vivons depuis trop longtemps. S'il faut patienter encore quelque temps pour avoir une véritable politique de gestion des pesticides, nous croyons que cela est préférable au rapiéçage et aux cas particuliers qui font que, encore une fois, les gros consommateurs, tels les agriculteurs, le ministère des| Transports, Hydro-Québec et le ministère de l'Énerqie et des Ressources sont exclus du présent projet de loi.

L'usage immodéré et abusif des pesticides doit non seulement être sérieusement encadré dans une loi, mais aussi fortement réglementé afin d'en décourager l'usage à tout propos. Il faut des politiques de prévention et d'éducation populaire, seules garantes d'un environnement sain et mieux équilibré.

Trop longtemps, on a négligé les séquelles d'une spécialisation de la production vivrière, par exemple, enencourageant la monoculture qui exclut, évidemment, la rotation des cultures. Trop longtemps, on a ignoré que la monoculture engendre le cycle infernal prédàteur-répresseur-intoxication pour que vous ne teniez pas compte de cet élément écologique fondamental. La future loi sur l'usage des pesticides doit inclure les usages industriels qui se font et se feront en agriculture et en foresterie, pour ne citer que ces deux secteurs.

Nous sommes conscients et au fait qu'un sérieux lobby intéressé et mercantile tentera de vous convaincre qu'il vous faut vous en remettre au plus voyant des utilisateurs (de pesticides, c'est-a-dire M. Tout-le-Monde et sa pelouse. S'il faut intervenir dans la vente, nous aimerions savoir s'il y aura intervention auprès des fabricants, jces valeureux champions de l'arrosage. Votre projet de loi est venu susciter des espoirs et des débats, et nous souhaitons ne pas être déçus.

Sans plus tarder, je laisse la parole à

Michel Lauzon qui va présenter l'autre partie du mémoire. Je souligne tout de suite que le chapitre II, en page 9, a été remanié depuis le dépôt du mémoire. La version finale parviendra au ministère d'ici quelques jours.

Le Président (M. Saint-Roch): M.

Lauzon.

M. Lauzon (Michel): M. le Président, membres de la commission, je vais résumer les principaux éléments du chapitre I du document qu'on a déposé. L'utilisation massive de pesticides dans les écosystèmes agricoles, forestiers et urbains inquiète sérieusement notre corporation, d'autant plus qu'on ne cesse de découvrir les répercussions négatives qu'elle engendre sur les diverses composantes de notre environnement, ainsi que sur la santé de la population et des travailleurs.

Nous sommes d'avis qu'une loi portant sur les pesticides devrait avoir comme prémisse la réduction de leur utilisation et devrait contenir des dispositions relatives è l'atteinte de cet objectif. Les problèmes liés à la santé humaine et à l'environnement à la suite de l'utilisation des pesticides sont, de par les motifs et la nature des interventions proposées par le ministère de l'Environnement du Québec, suffisamment sérieux pour que soient légiférées leur vente et leur utilisation. Déjà huit provinces canadiennes sur dix ont agi en ce sens et nous nous réjouissons qu'enfin le Québec se dote, lui aussi, d'une loi en matière de pesticides.

Des connaissances scientifiques abondantes, mais incomplètes et des pratiques hasardeuses paraissant être les causes fondamentales des problèmes reliés à l'utilisation des pesticides inciteront le ministère à proposer deux avenues de solution, soit la recherche et le développement, ainsi que l'éducation.

En ce qui concerne les connaissances scientifiques incomplètes, la courte histoire des pesticides nous démontre qu'à l'usage, au fil du temps, après suffisamment d'études, la nocivité d'un pesticide est mise à jour, nocivité qui, couplée à de plus grandes exigences quant è la protection de notre environnement, force les fabricants de pesticides à les retirer et à en proposer de nouveaux dont l'innocuité ne semble pas remise en cause, puisque les études sont incomplètes.

Le manque de connaissance est plutôt au niveau des écosystèmes, des agents naturels de contrôle, de l'aménagement ou de l'exploitation des ressources biologiques, de la spécificité et de la rémanence des pesticides. Afin de contrer des pertes économiques, le MENVIQ devrait privilégier le recours à des moyens physiques et biologiques de prévention et encourager les recherches qui permettent les méthodes, systèmes ou stratégies de lutte biologique, selon les principes directeurs énoncés dans le document d'appui à la préconsultation, mais qu'on ne retrouve pas dans l'avant-projet de loi.

Quant aux pratiques hasardeuses d'utilisation comme causes fondamentales des problèmes reliés à l'utilisation des pesticides, nous sommes d'avis qu'un maximum d'information doit être donnée aux détaillants et aux utilisateurs afin que, lorsqu'elle est vraiment nécessaire, l'utilisation des pesticides se fasse dans les conditions les plus sécuritaires.

De plus, nous considérons qu'une campagne périodique de sensibilisation de la population aux danqers de l'utilisation des pesticides devrait être effectuée par l'intermédiaire des médias. L'émission d'un certificat et de permis aux vendeurs et aux utilisateurs ne réglera pas de façon satisfaisante les problèmes de contamination de l'air, de l'eau, du sol et des organismes vivants engendrés par l'emploi des pesticides.

D'autre part, l'article 5 du projet de loi, qui soustrait à l'application de la loi les secteurs agricoles et forestiers, rend la loi inopérante puisque plus de 85 % de l'utilisation des pesticides au Québec se retrouvent dans ces secteurs d'intervention. Le gouvernement doit donc inclure ces secteurs dans le contrôle des pesticides, sans quoi le projet de loi n'aura été conçu que pour les paysagistes, les pépiniéristes et les exterminateurs, ce qui est nettement insuffisant.

Pourtant, un sondage réalisé par COGEM en 1981 indiquait que près de la moitié des agriculteurs désirait recevoir des informations supplémentaires sur les pesticides en général et, plus spécialement, sur les avantages et les désavantages des différents produits, ainsi que sur leur utilisation pour chaque type de culture.

Nous sommes aussi d'avis que la vente des pesticides pour usage domestique ne devrait être effectuée que par des détaillants qui disposent d'une formation adéquate. De plus, ces substances ne devraient jamais être disponibles dans les magasins d'alimentation.

En ce qui a trait à la responsabilisation des intervenants, il semble intéressant que ceux-ci soient partenaires dans l'élaboration de "codes de pratiques professionnelles", mais il ne faudrait pas que le gouvernement se dégage de ses responsabilités au profit du secteur privé.

Si l'approche légale correspond à un échec, comme on le dit dans le document d'appui à la préconsultation, c'est que la loi n'est pas appliquée et/ou que les règlements sont inopérants, ou les deux à la foix. Le gouvernement doit fixer un cadre rigide quant à l'éthique professionnelle en matière de pesticides.

De plus, le MENVIQ devrait lui-même

accréditer les programmes et cours de formation puisqu'il dispose des éléments faisant office de contenu, tout comme le fait le ministère de l'Énergie et des Ressources, par exemple.

Je laisse la parole à M. Normandeau pour le deuxième chapitre.

Le Président (M. Saint-Roch): M.

Normandeau.

M. Normandeau (Jacques): M. le Président, MM. les membres de la commission, à ce moment-ci, nous voudrions formuler quelques commentaires et recommandations sur certains articles. Évidemment, on ne passera pas les 102 articles en 20 minutes.

En concordance avec ce qui a été exposé précédemment, concernant l'article 2, nous voudrions que cet article soit rédigé de la façon suivante: "Le présent projet de loi a pour objet de réduire l'usage des pesticides afin de protéger les espèces vivantes, dont l'être humain, de prévenir la détérioration de l'environnement et de protéger la propriété et ce, en atteignant un état d'utilisation minimale des pesticides dans les dix années suivant la mise en application de la présente loi."

De plus, considérant que la toi devrait s'appliquer sans discrimination, nous demandons que l'article 5 soit abrogé, car il pourrait rendre caducs les articles 95, 96 et 101. À ce sujet, sur les terrains de grande fertilité en foresterie, l'entretien devient une activité indispensable, car la concurrence de la végétation est beaucoup plus forte. Si aucune politique rationnelle d'utilisation de produits chimiques homologués n'était adoptée, le programme actuel de régénération de la forêt du ministère de l'Energie et des Ressources pourrait être remis en cause. Si l'on regarde les prévisions en termes de plantation, de reboisement, etc. au fil des années, on se rend compte que la superficie traitée suit une courbe exponentielle et non pas une belle courbe linéaire. Donc, en excluant, évidemment, le ministère de l'Énergie et des Ressources, ainsi que la foresterie, d'ailleurs, du projet de loi, on se prive d'un champ d'application extrêmement important.

À l'article 7, conséquemment à l'article 2, dans une pespective de recherche de contrôle des pertes économiques, nous voudrions proposer l'ajout de l'alinéa suivant, concernant les pouvoirs du ministre responsable de l'application de la toi: "Le ministre doit exécuter ou faire exécuter des recherches pouvant conduire à l'élaboration de modes alternatifs de contrôle des populations animales et végétales excluant l'emploi de pesticides."

Concernant l'article 15, nous considérons aussi que la loi doit être appliquée sans discrimination. En conséquence de quoi les municipalités devraient aussi être soumises au second alinéa.

En ce qui a trait aux articles 15, 21, 30 et 39, les dispositions de ces articles permettent à une personne physique ne détenant pas de certificat, mais agissant sous la responsabilité directe d'une personne qui, elle, détient un certificat, d'effectuer des opérations reliées à l'utilisation de pesticides, à la récolté et la communication des renseignements reliés à l'utilisation des pesticides. Nous estimons que ces dispositions affaiblissent qrandement les possibilités de contrôle. Seuls les détenteurs de certificats devraient être habilités à effectuer ces opérations et de plus, ils devraient assumer la responsabilité des dommages causés par leurs activités. Il serait difficile pour le gérant d'un magasin à grande surface ou d'une quincaillerie à grande surface, seul détenteur d'un certificat, de pouvoir effectivement contrôler les activités de tous les employés de cet endroit. Nous considérons aussi que les données minimales devant être transmises au ministère de l'Environnement du Québec devraient être définies dans la loi et non dans d'éventuels règlements.

Concernant l'article 34, le renouvellement de Ia certification ne devrait être effectué que lorsque le demandeur aura subi avec succès un examen de contrôle. De plus, nous considérons que la vente et l'utilisation d'un pesticide devraient être interdites lorsque la dernière révision du certificat d'homologation date de plus de quinze ans.

À l'article 53 - je vais seulement me permettre dej faire un bref rappel - il est écrit que le ministre doit consulter le ministre des Affaires municipales avant de procéder à la; délivrance de toute ordonnance adressée à une municipalité. Les municipalités étant avisées préalablement selon l'article 50, nous considérons que l'article 53 doit être abrogé. L'article 58 vise les droits d'appel lorsque des personnes sont visées par une ordonnance; nous considérons que la décision en cette matière, à l'article 58, devrait être finale, et sans appel et ce àfin de ne pas affaiblir la position du ministre. Cet article doit être abrogé.

À l'article 74, on dit que le ministre a le droit de nommer des inspecteurs, ce qui est une procédure normale dans un texte de loi; cependant, nous savons que l'efficacité d'une loi est reliée à sa structure, mais aussi à son application. Nous voulons avoir l'assurance qu'effectivement des inspecteurs en quantité i suffisante seront nommés afin que cette loi soit appliquée et efficace.

 l'article 88 qui vise la vente de matériel ayant fait l'objet de saisie avec, évidemment, l'accord de l'inspecteur, il nous apparaît évident que du matériel ayant fait

l'objet d'une saisie, donc, à risque, ne devrait pas être remis en circulation. Notre compréhension de la formulation actuelle de cet article nous entraîne è recommander son abrogation.

Enfin, à l'article 100, deuxième alinéa, qui vise la classification des pesticides, si nous faisons référence au document d'appui à cet avant-projet de loi, la classification des pesticides devrait contenir des critères additionnels qui viendraient s'ajouter à la dose létale 50. Parmi ceux-ci, nous estimons qu'il faudrait, entre autres, considérer la rémanence des produits, de même que certains effets chroniques de ces produits.

Enfin, concernant les dispositions pénales, soit les articles 102 à 108, puisque certains systèmes semblent déjà être efficaces, nous pensons qu'ils pourraient aussi être appliqués aux utilisateurs et aux vendeurs de pesticides. Donc, en ce qui a trait aux dispositions pénales, nous estimons qu'un système de pointage de démérite pouvant entraîner la révocation du permis ou du certificat, en sus des amendes imposées, serait un moyen incitatif et efficace. La suspension temporaire ou permanente serait fonction de la gravité des offenses, ainsi que de leur fréquence. Je passe la parole à M. L'Italien.

M. L'Italien: Cela termine, grosso modo, le mémoire, si l'on veut. Alors, on demeure disponible pour répondre aux questions des membres de la commission.

Le Président (M.Saint-Roch); Merci, M. L'Italien.

M. Lincoln: M. le Président, je remercie M. L'Italien et les collègues de son groupe d'avoir bien voulu nous faire parvenir un mémoire qu'ils ont étoffé aujourd'hui par une présentation complémentaire. Naturellement, en ce qui concerne les suggestions spécifiques sur les articles du projet de loi, il est impossible pour nous de les considérer en détail aujourd'hui, parce qu'il faudrait voir le mot à mot. Certaines choses ont déjà été suggérées par d'autres intervenants. Mais c'est sûr que nous allons les étudier avec le plus grand sérieux et que nous les examinerons avec la plus grande attention.

Pour ce qui est des questions spécifiques, mon collègue, adjoint parlementaire, avait des questions d'ordre général que lui avait suggérées spécifiquement votre mémoire. Dans le fil de la discussion, je reviendrai plus tard sur des questions spécifiques. Merci.

Le Président (M. saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le député de Pontiac.

M. MiddLemiss: Merci, M. le Président. M. L'Italien, dans votre mémoire, vous indiquez que vous reconnaissez les bonnes intentions du ministère de l'Environnement dans l'avant-projet, mais que, toutefois, vous auriez préféré une véritable politique de gestion des pesticides. Est-ce que vous pourriez expliquer ce que serait cette politique, d'une façon sommaire? Vous pourriez probablement prendre énormément de temps. Mais, pour vous, quelle serait une véritable politique de gestion des pesticides? (10 h 30)

Le Président (M. Saint-Roch): M. L'Italien.

M. L'Italien: Je vais laisser Michel Lauzon répondre à cette partie-là.

M. Lauzon: La démonstration qu'on a essayé de faire ce matin était, justement, en vue d'énumérer les éléments essentiels qui devraient constituer des priorités à l'intérieur du projet de loi; le projet de loi devrait, premièrement, stipuler une volonté du gouvernement du Québec de diminuer l'utilisation des pesticides sur le territoire québécois. Cela fait partie de la pierre angulaire que devrait contenir la loi.

M. MiddleMiss: D'accord, mais maintenant...

M. Lauzon: À ce moment-là, si on diminue l'utilisation des pesticides, il faut les remplacer par autre chose. C'est là qu'on suggère des dispositions par rapport à la loi. Il faudra faire intensément de la recherche sur des modes alternatifs d'utilisation des pesticides. Il n'y a pas de solution miracle, mais il y a déjà des expériences pilotes qui démontrent qu'on peut fortement diminuer l'utilisation des pesticides et avoir le même rendement, tant dans le domaine agricole que forestier.

M. L'Italien: En fait, c'est un constat d'impuissance de la part du ministère devant l'état de fait que les pesticides sont consommés sur une grande échelle; M. Lincoln le rappelait avant-hier. On constate qu'on ne peut pas vivre sans les pesticides. C'est un acquis philosophique de société qu'on trouve absolument aberrant. C'est refuser d'avance ce que la recherche pourrait apporter comme mode alternatif de gestion du capital territoire, du territoire biophysique, que de s'avouer vaincu devant des problèmes causés par les prédateurs ou d'autres pestes. C'est un aveu d'impuissance à notre époque, en plus, où on souligne, entre autres, que le Québec est considérablement en retard sur tout le Canada au plan de la gestion des pesticides. Je pense qu'il faut arrêter de se péter les bretelles en disant qu'on est en avance technologiquement et se rendre compte qu'on marque des retards considérables à d'autres

plans. Je pense qu'il ne faut pas nécessairement mettre les bouchées doubles, mais il faut vraiment en tenir compte et y aller avec des propositions beaucoup plus concrètes et beaucoup plus musclées que ce que contient le projet de loi.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: Je pense que tout le monde est d'accord que, malheureusement, on est en retard. On dit souvent: Rien ne sert de courir, il faut partir à temps. Là, on part. On a l'avant-projet de loi et le projet de loi sera présenté avec des modifications à la suite des consultations. Est-ce que le début n'est pas d'éduquer les gens? Une fois que les gens seront éduqués à l'utilisation et aux conséquences, une fois que les utilisateurs de pesticides seront plus sensibilisés aux effets nuisibles, dans un premier temps... Est-ce que l'éducation n'est pas la chose la plus importante pour que, éventuellement, on atteigne le but de la réduction des pesticides en trouvant des méthodes alternatives?

Le Président (M. Saint-Roch): M.

L'Italien.

M. L'Italien: Dans une première partie, je vous répondrai que c'est drôle comme l'éducation n'est pas aussi versée vers les fabricants, parce qu'on vend des pesticides à pleine page. Si vous regardez l'hebdomadaire La Terre de chez nous, chaque année ils ont un nouveau produit et ils sont prêts à le vendre aux agriculteurs. Allez-vous éduquer ces gens aussi? Allez-vous restreindre la publicité'' Si on restreint la publicité pour les enfants à la télévision, est-ce que vous allez restreindre la publicité à pleine page des gros fabricants? Eux ont intérêt à vendre des pesticides. On le mentionne d'ailleurs, on sait que ce lobby existe. Je laisserai la deuxième partie de la réponse à Michel Lauzon.

M. Lauzon: Au Regroupement pour un Québec vert, on considère que l'éducation de la population sur l'utilisation des pesticides est très importante pour la sécurité. Maintenant, est-ce la question la plus importante? Non. Même si on disait aux gens qu'on ferait mieux de ne pas en utiliser, allez voir un agriculteur demain matin et dites-lui: Vous n'utiliserez plus de pesticides, il va vous demander: Qu'est-ce que vous proposez? Allez-vous me subventionner pour la perte de récoltes que je vais subir?

Donc, à ce moment-là, le plus important, ce à quoi il faut donner priorité, c'est è la découverte des solutions de rechange en plus d'amener de l'éducation et de la formation. Mais la formation n'amènera pas la recherche. L'éducation n'amènera pas la recherche. Il faut proposer autre chose que l'utilisation massive de pesticides. Cela devrait être le premier objectif de la loi: réduire et, si on veut réduire, qu'est-ce qu'on propose? Il faut faire de la recherche pour proposer autre

Ensuite il faut éduquer les gens. Il faut même éduquer la population. Il faut aller plus loin que ce que stipulent le texte de loi et le document d'appui. Je pense qu'il faut y aller avec les médias, la télévision, par exemple, au printemps, au mois de mai, lorsque les gens veulent commencer à mettre des engrais sur leur pelouse, lorsqu'ils veulent commencer à tuer leurs pissenlits. Je pense qu'il faut dire aux gens: Lisez les étiquettes. Faites attention. Mettez des gants. Portez des lunettes protectrices.

Je crois que le ministère de l'Environnement devrait avoir des annonces à la télévision pour prévenir le consommateur des dangers d'utilisation.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Lauzon. M. ledéputé de Nicolet.

M. Richard: Messieurs, aux pages 9 et 10 de votre mémoire, on constate que vous suggérez que le ministre exécute ou fasse exécuter des recherches pouvant conduire à l'élaboration, de modes alternatifs de contrôle des populations végétales ou animales, modes de contrôle excluant l'emploi des pesticides. Pourtant, on sait que, au nombre des méthodes alternatives, il y a certains pesticides d'origine biologique qui sont effectivement recommandés. Ne croyez-vous pas qu'il serait peut-être plus logique et plus raisonnable de faire des recherches poussées, mais contrôlées, en ce qui a trait è certains pesticides?

Une voix: Je vais laisser Michel Lauzon répondre.

M. Lauzon: Vous êtes monsieur?

M. Richard: Maurice Richard, député de

Nicolet.

M. Lauzon: M. le Président, M. Richard, indépendamment du nom qu'il porte, c'est-a-dire biologique, la philosophie d'intervention de l'insecticide biologique n'a rien d'une lutte biologique contre un ravageur. C'est la même philosophie d'intervention, c'est-à-dire que, lorsqu'il y a problème, lorsqu'il y a catastrophe appréhendée, on arrose sur une grande superficie avec un produit biologique qui, très souvent, a des adjuvants à l'intérieur: xylène ou autre produit, chitinase, qui augmentent de beaucoup son spectre d'efficacité, c'est-è-dire que les espèces non cibles, les espèces qui ne devraient pas être

atteintes par le produit ie sont à cause d'additifs chimiques. Le rôle de ces additifs chimiques est de former des gouttelettes. Ce sont des huiles, bien souvent. Pour que le produit soit bien pulvérisé, on a des additifs du type xylène ou, pour augmenter l'efficacité d'un produit biologique, on va ajouter des chitinases. La chitine est l'env" est l'enzyme. Chitinase veut dire un enzyme qui détruit les enveloppes des organismes. À ce moment-là, votre produit, votre insecticide qui est dit biologique, au lieu de toucher une espèce cible, touche à l'ensemble des composantes qu'il y a dans l'environnement. Donc, vous nuisez au système de contrôle naturel qui est en place dans le milieu tant agricole que forestier, avec les prédateurs, les parasites qui, finalement, arrivent à contrôler une épidémie.

Comme tel, un insecticide biologique peut être employé, en dernier ressort, dans des cas exceptionnels. Mais je ne crois pas que la recherche doive strictement s'en aller vers la fabrication de pesticides dits biologiques. Je ne crois pas que ce soit la solution. À court terme, c'est peut-être une solution. Mais ce n'est pas une solution stable à long terme.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Lauzon. M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai lu avec beaucoup d'intérêt votre mémoire. Je vais essayer, en une minute ou deux, de résumer ce que je pense de la pensée qui a fait que vous avez écrit un mémoire de cette qualité.

J'ai l'impression que c'est ceci: Vous dites que, jusqu'à aujourd'hui, le gouvernement du Québec, depuis sa fondation, depuis Jacques Cartier - pour ne pas faire de partisanerie - a laissé tranquillement mourir le monde et se détériorer les terres nourricières ici. Vous dites: Maintenant, voici arrivé le moment d'un projet de loi tant attendu, et que nous voulons bien rédigé et bien fait. Selon votre analyse - vous me direz si j'ai raison ou tort - plutôt que d'être là pour que cessent éventuellement la destruction des sols et l'empoisonnement tranquille de la population qui y habite, on arrive avec un projet de loi qui rend sécuritaires les utilisateurs provocateurs de ces deux choses néfastes: la destruction du monde et des terres. Est-ce dans cet esprit que vous voyez venir notre loi? Est-ce bien dans cet esprit que votre mémoire a été écrit et est-ce que je vous comprends bien?

Le Président (M. Saint-Roch): M.

L'Italien.

M. L'Italien: J'aurais pu préciser au début qui était membre du Regroupement pour un Québec vert; cela regroupe pas mal de monde, d'organismes et de préoccupations. Du fait qu'on constate qu'on est obligé, comme je le disais tantôt, d'utiliser des pesticides, c'est que déjà la situation s'est détériorée. Si cette situation s'est détériorée, cela a été enclenché par des mécanismes, par des comportements de production, par exemple. On dit, depuis longtemps, en foresterie, qu'on prépare une nouvelle épidémie de tordeuses des bourgeons de l'épinette parce qu'on fait l'enrésinement des forêts. Les feuillus sont coupés à blanc comme les résineux et il faut donc reboiser; mais on reboise strictement selon les besoins de l'industrie. On pourra récolter un petit sapin dans vingt ans et même chose pour l'épinette, juste pour faire du papier. On n'a plus de bois d'oeuvre ici. Même si on le cache, il n'y en a plus.

Nous disons que ces comportements de répresseurs face à la nature, on n'essaie jamais de composer avec. M. le député disait tantôt qu'il fallait chercher d'autres produits biologiques de lutte et de contrôle. C'est peut-être une autre question qu'il faut se poser: Comment se fait-il qu'on soit rendu avec un tel problème? Comment se fait-il qu'on en soit rendu là? On s'est débattu sur le projet de loi 150 pour essayer de vous convaincre que les méthodes d'intervention en forêt devaient être modifiées; on ne rase pas à blanc un territoire sans que cela ait un impact considérable sur la nappe phréatique, avec tous les problèmes qui s'ensuivent.

Quand on dit, par exemple, que les pluies acides causent le dépérissement des érablières, ce n'est pas seulement cela; d'autres chercheurs ont d'autres hypothèses encore. Souvent, on a fait de la monoculture, on a enlevé les autres types d'arbres des érablières. Quand on est rendu à la monoculture, nécessairement, on engendre des problèmes. Quand les biologistes qui ne sont pas du côté du pouvoir et des vendeurs de produits chimiques parlent, on a toujours l'air de tomber des nues; pourtant, ce sont des vérités éternelles. Cela a toujours l'air d'être une découverte quand on se fait dire cela, mais du fait qu'on soit rendu là, nous autres, on dit: II faut tenir un discours parce que personne ne le tient; tout le monde a peur. Il n'y a jamais personne qui risque de s'avancer, qui veut s'avancer; tout le monde est toujours compartimenté pour n'être pas d'accord avec l'exercice et les pratiques quotidiennes qui se font. Nous autres, on dit: Il faut le tenir, le discours. C'est çai Michel Lauzon veut ajouter quelque chose.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Lauzon.

M. Lauzon: L'allocution que vous avez présentée tantôt, globalement, je crois comprendre que c'est l'esprit qu'on voulait traduire par notre mémoire, sauf qu'on s'est dit: S'il y a un projet de loi, si enfin le gouvernement a décidé de légiférer là-dessus, tant qu'à légiférer, il faut légiférer le plus possible, le mieux possible. Il ne faut pas que la loi soit une façon de cautionner l'utilisation des pesticides, surtout pas. Il ne faut pas se donner bonne conscience parce qu'on fait de l'éducation auprès des gens, qu'on leur donne un permis et un certificat pour continuer, après cela, l'utilisation des pesticides. Au lieu d'utiliser X tonnes, on va utiliser deux fois plus de pesticides dans quinze ans.

Puisque le constat est fait à partir des trois premiers chapitres du document de préconsultation, lorsqu'on lit cela, on se dit: Ouais, il y a un problème grave avec les pesticides, il y en a d'autres avec les pluies acides et d'autres encore avec les rejets d'égouts et la mauvaise gestion de nos ressources naturelles. Entre autres, il y a un problème avec les pesticides comme produits toxiques; ce sont des poisons qu'on libère dans l'environnement. On le constate à tous les niveaux de la chatne alimentaire; même chez l'espèce humaine, on se rend compte qu'il y a des résidus de produits toxiques dans l'organisme. Donc, on se dit: On veut légiférer, mais on veut légiférer et non pas seulement cautionner l'utilisation et l'emploi des pesticides; on veut réduire l'utilisation et l'emploi des pesticides. (10 h 45)

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Merci de votre réponse. Je pense que j'étais dans la bonne orientation. J'ai compris votre mémoire, je crois. Vous dites que vous semblez être un peu anxieux et craintif devant l'éventuelle législation qu'on est en train de préparer. Vous dites: "S'il faut patienter encore quelque temps pour avoir une véritable politique." Autrement dit, vous aimeriez qu'on attende un peu plus pour avoir une vraie loi. C'est ce que vous dites à la page 2, d'après ce que je comprends. Mais il faut vous consoler. Hier, M. le ministre a dit que cela prendrait bien du temps à cause des rapports et des mémoires; cela pourrait prendre peut-être encore un an avant que cela vienne. Je pense que vous allez être écoutés, il l'a dit hier. J'ai confiance, moi aussi. J'ai peut-être plus confiance que vous. Vous dites, en conclusion que vous avez pris votre responsabilité et que vous espérez que le ministre prendra la sienne. J'ai bien l'impression qu'il va vous répondre qu'il va la prendre sa responsabilité et on l'espère tous, on est ici pour cela.

Je reviens à la charge. ÀA la page 4, paragraphe 3, vous dites: "Nous sommes d'avis qu'une loi portant sur les pesticides devrait avoir comme prémisse la réduction de leur utilisation et devrait contenir des dispositions relatives à l'atteinte de cet objectif." Reconnaissez-vous, comme moi je le crois, que dans cet avant-projet de loi il n'y a rien" pour réduire quantitativement l'utilisation rationnelle des pesticides, pour qu'on en vienne éventuellement à presque pas d'utilisation si possible? Il ne faut tout de même pas penser qu'on est capable de bannir cela demain matin. Cela serait irréaliste. Mais je trouve qu'il n'y a rien dans cette loi qui ferait que la quantité de pesticide serait décroissante au fil des années, pour en arriver à un plus grand respect des êtres humains, de l'environnement et de la nature elle-même. C'est ce que je comprends que vous dites là. Je vous demande si c'est cela que vous dites.

M. L'Italien: Oui, monsieur, c'est exactement cela. D'ailleurs, on est un peu surpris de cet avant-projet de loi. Considérant -ce qu'on nous a déjà dit et le retard qui est accumulé quand même par rapport à la gestion des pesticides, on aurait préféré quelque chose de beaucoup plus étoffé que cela. Je connais le MENVIQ depuis longtemps, il a des ressources et il s des qens capables de parler, des gens capables d'écrire aussi, pas seulement des avocats, voyons donc! C'est sûr qu'il faut vraiment une politique de prévention et une politique de réduction de l'usage des pesticides. C'est un pis-aller, un pesticide; c'est sûr, cela. Mais il faut vraiment le dire que c'est un pis-aller. Il faut vraiment le dire et insister là-dessus. À partir du moment où on a constaté cela, on prend les moyens pour que cela diminue et pour aller justement vers l'utilisation zéro.

M. Blais: Personnellement, je vais vous poser une question, je pense que cela va être ma dernière! Le député de Dubuc en aurait a vous poser. Ce n'est pas moi qui peux répondre aux questions que vous posez dans ce mémoire! Je peux faire des pressions, je suis dans l'opposition et je vais les faire avec plaisir, pour que dans cette loi arrive un contrôle quantitatif des pesticides. L'Opposition va faire ces pressions et je vous demande, en terminant, de continuer à les faire. J'espère que vous avez d'autres moyens que cette commission parce que, d'ici à ce que le projet de loi ne soit adopté, j'espère quej vous ferez des pressions pour que, quantitativement, cette loi trouve des solutions. J'espère que vous avez d'autres moyens.

M. L'Italien: Ce n'est pas seulement la quantité qui est en question, on l'a mentionné. Il y a les ministères qui utilisent

et recommandent souvent l'utilisation des pesticides. Quand les agronomes arrivent à tour de bras et qu'ils recommandent tant d'engrais chimiques et des pesticides et que c'est la même chose pour les ingénieurs forestiers, il y a de l'éducation à faire è l'intérieur même des ministères. Il y a des gens qui sont allés trop à l'école, il faut qu'ils y retournent, parce qu'ils ont complètement perdu les pédales. La monoculture, ce n'est pas bon. C'est connu que la monoculture, ce n'est pas bon.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Une question, je m'excuse, et c'est une classique que je pose à ceux qui viennent. Est-ce que vous, comme certains groupes, vous seriez d'accord pour qu'il y ait une taxe sur les pesticides pour faire de l'éducation, de la prévention et de la recherche pour éliminer les pesticides?

M. L'Italien: Si on surtaxe les cigarettes, on doit surtaxer ceux qui les consomment et ceux qui consomment les pesticides. On a déjà discuté de cela en comité et cela serait le minimum que le ministre réussisse à avoir, une taxe sur l'usage des pesticides.

M. Blais: Merci beaucoup. Je passe à mon confrère, M. le député de Dubuc.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Merci, M. le Président. Avant-hier, les représentants du Mouvement pour l'agriculture biologique nous disaient qu'ils ne prévoyaient pas qu'on puisse arriver à vraiment faire promouvoir la culture biologique avant 30 ans. Ils disaient: On donne ce chiffre pour indiquer un ordre de grandeur; cela peut être 40 ou 50. À ce moment-là, évidemment, ils prônent la diminution et la disparition des pesticides en agriculture. Est-ce que vous êtes de leur avis, soit qu'il y a une période de temps qui peut être assez longue? Sinon, est-ce que vous avez des suggestions? Que le projet de loi ait peut-être des mesures encore plus restrictives, plus coercitives, cela semble votre objectif. Est-ce que vous auriez d'autres suggestions qui permettraient d'accélérer le processus de disparition?

Le Président (M. Saint-Roch): M.

L'Italien.

M. L'Italien: Je vais laisser Michel Lauzon répondre à votre question.

Le Président (M. Saint-Roch): M.

Lauzon.

M. Lauzon: Vous savez, le temps que cela peut prendre avant d'adopter des modes alternatifs, même en agriculture biologique, cela dépend toujours des efforts qu'on y consacre. Quand je parle d'efforts, je parle d'efforts financiers, mais aussi en termes de ressources humaines. Si on y va à petits pas, tranquillement, je crois que cela va prendre 30 ou 40 ans. Si on met le paquet, comme on le fait en recherche, pour trouver des nouveaux pesticides, cela va prendre dix ans, j'en suis convaincu. II y a des centaines de millions, pour ne pas dire des milliards, qu'on met au Canada pour la recherche sur les pesticides, sous homologation, à Bio-Recherche, à Montréal. Si tout ce fric était mis dans des moyens de gestion différents autres que les pesticides, cela prendrait dix ou quinze ans et on aurait nos alternatives. Sauf que cela prend des efforts financiers impressionnants. Je pense qu'il faut le faire. On se doit de le faire.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Dans votre esprit, ces efforts financiers devraient venir du gouvernement.

M. Lauzon: La recherche, c'est le gouvernement surtout qui la subventionne. L'entreprise la fait, mais pour vendre un produit de consommation. À moins qu'il n'y ait des corporations qui voient le vent tourner, qu'elles décident de s'en aller dans la lutte bioloqique et qu'elles-mêmes fassent de la recherche, je pense que le gouvernement va être obligé de prendre un certain leadership au début. S'il faut que le vent tourne, le gouvernement va être obliqé de s'en mêler. Quelles sont toutes les retombées médicales, environnementales, sur la décontamination et sur la santé des gens, toutes les retombées indirectes, tout l'argent que le gouvernement va économiser au lieu d'encore réparer les pots cassés? Cet argent qu'il aura investi en bloc pendant les dix premières années, il va en être gagnant pour les 100 autres qui vont suivre.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Merci. À la page 4, de façon plus précise, toujours dans la même avenue, vous mentionnez au paragraphe 3 que la Loi sur les pesticides "devrait avoir comme prémisse la réduction de leur utilisation." "Devrait avoir", donc vous juqez que cette loi n'a pas cela comme prémisse. D'ailleurs, mon collègue l'a déjà soulevé à quelques reprises. Est-ce bien ce qu'on doit comprendre? Vous parlez "des dispositions relatives à l'atteinte de cet objectif." Est-ce que vous pouvez préciser davantage ces

dispositions, justement - en plus de la recherche que vous avez mentionnée - dans la loi elle-même?

M. L'Italien: Les dispositions légales. Je vais laisser Jacques Normandeau répondre.

Le Président (M. Saint-Roch): M.

Normandeau.

M. Normandeau: MM. les membres de la commission, lorsqu'on tente de régler un problème, la première chose qu'on fait, on analyse bien le problème. Je pense que le constat qui a été fait l'a très bien été par rapport à ce qui a été produit par le ministère de l'Environnement. Ensuite, on se fixe un but. À la base, ce qui est faux, c'est de fixer un but qui vise à régir. Régir, c'est bien. Cela va peut-être favoriser la réduction ou l'utilisation, mais si le législateur se fixe comme objectif de réduire plutôt que de régir, c'est vraiment un objectif opérationnel par rapport à toute la problématique des pesticides. On peut parler, disons, d'une vision un peu caricaturale comme si, depuis Jacques Cartier, on avait tué les gens avec des pesticides, mais le fait est que c'est un risque qui est bien souvent inutile à l'heure actuelle. La mauvaise utilisation, il est vrai, provient en partie d'une question de connaissances, de savoir, mais elle est aussi reliée à la qualité même des substances et des produits.

Vous aurez beau faire toute l'éducation que vous voulez, si vous enlevez tous les feux de circulation de Québec, j'ai comme l'impression que vous allez avoir énormément de difficulté en ce qui concerne la circulation routière. C'est la même chose en ce qui concerne les pesticides. L'éducation est un élément qui est absolument essentiel, de la même façon qu'il aurait été absolument inacceptable d'avoir un projet de loi relatif aux permis et à la certification, etc., sans que l'élément d'éducation soit là. Les extrêmes sont aussi nocifs les uns que les autres.

Cependant, pour ce qui est des mesures qui devraient être adoptées, par exemple, dans le cadre d'une loi concernant l'emploi, l'utilisation et la vente des pesticides, je me permets de vous rappeler qu'actuellement on discute énormément du retrait possible du 2,4-D comme arme de répression des ravageurs. Le 2,4-D est un phytocide, un herbicide et il est utilisé depuis très longtemps. Ce n'est que tout récemment qu'on s'est repenché sur les certificats d'homologation de cette substance. Une des mesures, entre autres, est d'éviter ou d'interdire la vente de pesticides dont le certificat date de trop longtemps. La toxicologie évolue rapidement, mais, malheureusement, plus lentement que la synthèse de nouveaux produits. C'est un des moyens, entre autres.

Je pense que le législateur doit prendre une position ferme par rapport à ceci et les moyens qui existent lorsqu'on vise un objectif sont, évidemment, l'éducation et la recherche de nouveaux moyens alternatifs. Comme on l'a souligné, la recherche des effets des pesticides et la recherche sur les pesticides comme tels ne font que contribuer à continuer l'utilisation. On utilisera de nouveaux pesticides, mais, de toute façon, comme je vous l'ai dit, en toxicologie, on a toujours une connaissance incomplète des substances et on préfère réduire le risque.

Il y a deux politiques en gestion environnementale. Je m'excuse d'utiliser ces termes: il y en a une qui s'appelle "no risk" et l'autre '"acceptable risk". Le risque acceptable nécessite une analyse coûts-bénéfices où il est difficile de chiffrer la perte de jouissance d'un lieu, la perte de jouissance dé la vie, les dommages faits aux individus, alors que, dans le "no risk" ou le risque zéro,qui semble peut-être une espèce d'utopie, lorsqu'on se fixe un objectif tel que celui-là, on a suffisamment d'imagination pour trouver les moyens.

Il y en| a quelques-uns qui sont proposés ici dans les recommandations que nous faisons par rapport au projet de loi. Il n'est pas question d'enlever l'éducation, entre autres. C'est un excellent moyen. On vise toujours à responsabiliser les individus pour qu'ils acquièrent de plus en plus d'autonomie. La preuve en est qu'on a maintenant des systèmes de consultation publique, ce qui aurait été impensable il y a très longtemps ou même il n'y a pas si longtemps que cela. Mais, parmi ces moyens, il faut se fixer des moyens qui vont nous permettre d'être rigides et, justement, de punir sévèrement les contrevenants. La certification et le permis sont une chose, mais perdre son certificat et ne plus pouvoir épandre des pesticides quand c'est notre source de revenus, notre bien, c'est au départ un incitatif puissant de bien faire ce qu'on a à faire.

Actuellement, les solutions alternatives commencent à exister. Ce sont des recherches qui bénéficient de fort peu d'appui économique, mais si on investissait réellement au départ dans le développement de ces alternatives, on pourrait sortir du cercle des pesticides. C'est un moyen. Si déjà on part avec une certaine philosophie, un but ou un objectif, les moyens vont venir facilement et la gradation va se faire. Du jour au lendemain, on n'a pas réussi à construire des avions, évidemment. Mais il y a une différence entre partir avec quelque chose et continuer avec des dirigeables pendant 150 ou 200 ans; il y a une nuance entre les deux.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous

remercie, M. Normandeau. M. le ministre.

M. Lincoln: Est-ce qu'il me reste du temps?

Le Président (M. Saint-Roch): II vous reste environ une dizaine de minutes, M. le ministre. (11 heures)

M. Lincoln: Tout d'abord, j'aurais voulu passer en revue certaines des choses que vous avez dites pour nous éclairer sur certains sujets très importants que vous avez abordés dans votre mémoire et aussi dans vos commentaires. Premièrement, les agriculteurs et sylvicuteurs, je pense qu'il en a été longuement question, ici, depuis le début de ces audiences. L'article 5 n'exclut pas du tout le sylvicuteur et l'agriculteur. Si vous voyez l'alinéa 2, c'est la façon d'écrire juridiquement le texte pour dire qu'au départ les sylvicuteurs et les agriculteurs ne sont pas inclus, mais le deuxième alinéa donne les pouvoirs au ministre de les inclure dans le projet de loi à n'importe quel moment. Le deuxième alinéa de l'article 5 est en coordination avec l'article 95 qui donne alors des pouvoirs de réglementation.

Avant-hier, il y a eu des représentants du monde agricole et du monde forestier qui étaient ici pour exprimer leur point de vue. Tous sont tout à fait au courant. En fait, on a eu déjà des consultations intensives avec le milieu agricole et le milieu forestier depuis longtemps. Tous savent qu'ils vont être inclus dans une réglementation. Il y a même une date précise qui a été discutée avec les agriculteurs en accord avec le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation pour qu'ils soient inclus progressivement. Il y a 42 000 agriculteurs qui sont impliqués. Il était impossible de les soumettre à une loi tout de suite, parce qu'il faudrait des programmes d'éducation, de formation, de contrôle, d'inspection qu'il serait impossible pour nous de réaliser d'un jour à l'autre.

C'est pourquoi nous avons donné un délai. La seule province de tout le Canada qui, aujourd'hui, a un programme restreint pour les agriculteurs, c'est la Colombie britannique. L'Ontario, qui a une loi depuis 1949, n'en a pas. En fait, nous serions, je crois, la seconde province à établir quelque chose pour les agriculteurs lorsque cela va arriver. On sera la deuxième qui aura quelque chose ici. Certains Etats des Etats-Unis vont même très progressivement, parce que c'est un domaine tellement vaste. C'est très beau de mettre cela dans les lois, mais, après, vous pourriez venir me demander pourquoi vous avez mis cela dans la loi, vous n'allez pas la renforcer. Il faut préparer le terrain, il faut travailler avec ces gens qui sont tout à fait au courant qu'ils vont être inclus dans la loi, qu'il y a une régle- mentation qui se prépare, que les agriculteurs et les sylviculteurs vont être soumis à la loi.

Dans le cas de la forêt, j'ai même signé une lettre formelle qui a été contresignée par le ministre délégué aux Forêts pour dire que le plus tôt possible une politique et une réglementation sur les pesticides s'appliquera au milieu forestier. Donc, la loi prévoit d'inclure ces deux milieux et ils vont être inclus. Je vous en donne la garantie tout à fait formelle. Tous sont au courant. En fait, l'industrie forestière était ici hier et elle est tout à fait au courant que cela va arriver.

Deuxièmement, j'aurais voulu aussi faire quelques remarques sur certains articles que vous avez soulignés. Les employés de magasins à rayons. En fait, nous les avons examinés nous-mêmes; même avant la commission parlementaire, nous réalisions qu'il y avait une lacune, à savoir que dans les magasins à rayons il y aurait un manque de contrôle si seulement une personne avait un permis. Nous examinons cela pour faire les rectifications en ce sens. C'est certain qu'on prendra cela bien au sérieux. C'est sûr qu'il y a une différence entre les toutes petites entreprises et les qrosses. En tout cas, on va s'occuper de cela.

Pour ce qui est de l'article 53, il est en concordance avec l'article 30 de la Loi sur la qualité de l'environnement. La seule chose, c'est qu'il y a une omission tout à fait involontaire qui s'y est qlissée. L'article 30 est inclus dans la Loi sur la qualité de l'environnement pour que le ministre des Affaires municipales, selon la loi municipale, soit avisé dans les cas où il y aurait des dépenses engendrées par une ordonnance soumise à une municipalité. La concordance va être faite, c'est-à-dire que les mots qui ont été omis involontairement dans l'article 53 vont être inclus. Cela va être une concordance presque exacte avec la Loi sur la qualité de l'environnement.

Pour ce qui est du droit d'appel, toutes les lois qui sont soumises à l'Assemblée nationale aujourd'hui doivent inclure des droits d'appel. Aujourd'hui, on a la Charte des droits et libertés du Québec et la Charte des droits et libertés de la personne canadienne qui insistent pour la chose. Même si on ne le mettait pas de façon constitutionnelle aujourd'hui, chaque personne a droit à un appel et tout le système juridique du Québec aujourd'hui insiste pour que ces droits soient inclus pour tout le monde.

Je pense qu'il y a une question sur les inspecteurs. Il y aura un groupe d'inspecteurs restreint au début, parce que naturellement toutes ces choses-là ne vont pas se faire... Nous aurions voulu le plus grand nombre d'inspecteurs possible. Il y aura un nombre d'inspecteurs restreint au départ, quelques-

uns, et on va en ajouter de plus en plus lorsque nous aurons les moyens et lorsque le cadre s'élargira, lorsque les agriculteurs et le domaine de la forêt devront entrer en jeu.

Je voulais aussi situer un point afin d'éviter tout malentendu, parce que je ne suis pas sûr si je vous ai bien compris, M, L'Italien. Vous avez semblé dire, dans les remarques que vous avez faites, que l'usage des pesticides, c'est là, qu'il faut presque l'accepter. Ce que j'ai dit très clairement au cours de cette session, c'est que l'objectif fondamental, c'est de ne pas avoir de pesticides. Hier, par exemple, quand on a eu des échanges avec M. Lafond, j'ai cité l'expérience suisse dans la forêt - j'ai eu des rencontres avec M. de Coulon, de la Suisse -pour démontrer que les Suisses se débrouillent sans pesticides. C'est cela, l'objectif. Je partage toutes vos remarques à 100 %, Je pense que plusieurs intervenants ici, les agriculteurs biologiques, Nature-Action hier, ont fait le point et nous sommes tout à fait d'accord que c'est l'objectif ultime. Je pense qu'on ne se départage pas du tout dans cette question.

Seulement, il faut admettre qu'aujourd'hui il y a des pesticides. On ne peut pas vivre sans la réalité des choses. Quoiqu'on soit obligé de les tolérer, il faut, d'accord, les réduire. Nous allons regarder sérieusement l'idée, peut-être dans l'objectif du projet de loi, d'inclure le mot "réduire" au lieu de "régir". À l'article 7 qui donne au ministre, des pouvoirs intensifs sur la recherche, on a fait la suggestion d'y ajouter des recherches sur d'autres méthodes.

Nous allons considérer la chose avec beaucoup de sérieux pour l'inclure. Mais c'est sûr qu'il y a une différence fondamentale entre une loi et une politique. Vous-même, vous le constatez dans votre mémoire. Vous parlez toujours de politique, vous ne parlez pas de loi. Une loi donne des pouvoirs habilitants. On aurait pu faire un projet de loi qui soit dix fois plus long que cela, mais cela ne contient pas les éléments d'une politique.

Nous avons fait une esquisse de politique justement dans le document de travail que vous avez cité. Le document de travail fait une esquisse de politique et dit: Les moyens naturels, ce sont les moyens privilégiés; les moyens biologiques sont les moyens secondaires. La dernière et ultime ressource, c'est le pesticide. Nous l'avons redit. Tous les gens du ministère le redisent tout le temps.

Vous avez parlé, par exemple, d'une publicité à la télévision. Nous avons commencé en partie. II y a déjà des programmes d'éducation télévisés qui se font depuis au moins deux ans dans le secteur. On va les étendre à d'autres. Mais, tout cela, on ne peut pas le faire tout de suite sans les moyens. Il faut trouver de l'argent. On va mettre le plus d'argent possible dans le domaine des pesticides. On va créer un groupe qui. va maintenant s'occuper des pesticides.

On poursuit les mêmes objectifs que vous. Pour y arriver, nous avons notre modèle. Je ne sais pas si vous avez lu le document du Conseil consultatif de l'environnement recommandant une loi sur les pesticides. Ses recommandations ont été suivies presque textuellement. Nous avons suivi les recommandations de l'Organisation des Nations unies et de l'OCDE sur le modèle à suivre pour une loi sur les pesticides. Nous avons consulté presque toutes les provinces du Canada. Nous avons consulté beaucoup d'états des États-Unis, le Wisconsin, New York, etc., pour arriver à ce modèle, qui est une première, étape. Je ne vous dis pas que c'est une étape ultime. Je sais que, par exemple, M. Normandeau a parlé de contrôle. C'est vrai. Maintenant, vous avez des pouvoirs d'injonction, des pouvoirs d'ordonnance, des pouvoirs d'inspection. Nous avons même à l'article 57 un pouvoir d'injonction basé sur un article qui est des plus contraignants que je vous soumets, l'article 67 qui sera inclus dans le domaine des pénalités!

En tout cas, tout ce que je peux vous dire, c'est qu'on va lire vos suggestions sur les articles avec le plus grand sérieux. On a les mêmes objectifs que vous. Je ne pense pas que les objectifs dans ce domaine soient exclusifs à un groupe ou à un autre. Il y en a des quantités qui ont dit la même chose que vous et qui n'ont pas peur de le dire. Moi, je n'ai pas peur de le dire et les gens du ministère non plus. Il faut utiliser les moyens que nous avons aujourd'hui et, l'idée même de l'avant-projet de loi, c'était d'indiquer que nous n'avons pas la science infuse. On n'a pas dit que ce projet de loi était définitif ou qu'il était idéal. On s'est servi de tous les modèles que nous avions devant nous, de nombreux modèles de partout, pour tenter d'arriver à quelque chose aujourd'hui qui établirait un consensus. Il ne s'agit pas du tout d'une loi qui refléterait un domaine idéal, c'est un point de départ. Si on peut le bonifier avec vos suggestions ou d'autres suggestions, c'est cela, l'idée d'une commission parlementaire, et j'espère que vous accepterez qu'on regarde toutes les suggestions.

Le groupe qui vous suivra a fait un travail remarquable. Je ne sais pas combien de suggestions il a faites, mais on les a suivies avec beaucoup d'attention et j'espère qu'on va finir par avoir quelque chose de mieux que ce qu'on avait au départ. C'est toujours pour cela l'idée d'avoir une commission parlementaire. Si on savait qu'on a les réponses complètes... Personnellement, nous avonsconsulté je ne sais combien de personnes. Tout le monde se demande

jusqu'où aller dans le domaine des pesticides. En tout cas, on va suivre ce que vous dites avec beaucoup d'intérêt. On va tenir compte de vos suggestions par rapport aux articles. Si vous avez des questions plus directes à me poser par rapport aux agriculteurs, sylviculteurs ou autres, s'il reste du temps, je serai très heureux de vous répondre. Merci beaucoup.

Le Président (M. Saint-Roch): II reste très peu de temps, M. le ministre. Brièvement, s'il vous plaît!

M. L'Italien: Je vais laisser Jacques répondre, mais j'aurais auparavant une question supplémentaire. M. le ministre a mentionné que le ministère de l'Énergie et Ressources ou, enfin, le ministère des Forêts avait probablement une politique d'utilisation des pesticides. Ce qui reste encore dans l'ombre, c'est Hydro-Québec qui fait l'entretien de ses lignes avec de puissants phytocides. Le ministère des Transports n'a pas encore de politique à ce sujet et est continuellement en chicane avec le ministère. Cela demeure des points d'ombre,

M. Lincoln: M. L'Italien, vous avez dit dans votre mémoire qu'Hydro-Québec avait été exemptée. J'avait oublié cela; je suis content que vous en parliez. Vous verrez dans un article de la loi, je pense que c'est Particle 6: "La présente loi lie le gouvernement, ses ministères et les organismes qui en sont mandataires." Il n'y a aucune raison pour laquelle Hydro-Québec ne serait pas sujette à cette loi. Hydro-Québec est sujette à cette loi et tous les organismes gouvernementaux, tous les ministères, incluant le ministère des Transports, Aujourd'hui, il y a des dispositions dans la Loi sur la qualité de l'environnement pour des études d'impact par rapport aux pulvérisations aériennes et aux pulvérisations dans le secteur hydroélectrique. Hydro-Québec sera soumise è cette loi, comme le ministère des Transports. Je suis tout à fait d'accord qu'on ne peut pas demander à d'autres de faire ce que le gouvernement ne fait pas. C'est sûr qu'il faudra que les gens s'y soumettent. Je ne peux pas vous dire que cela va se faire comme par miracle au moment où cette loi sera adoptée, ce n'est pas le cas. Cette loi est une loi habilitante qui prévoit des règlements. Les règlements sont déjà en préparation au ministère. Nous prévoyons qu'en juillet nous en aurons une esquisse. Si la loi est adoptée au cours de la présente session, au plus tard è l'automne - mais j'espère que ce sera au cours de la présente session - d'ici septembre, nous aurons la réglementation qui va élucider beaucoup de ces choses. On ne peut pas tout inclure dans un projet de loi qui est soumis à une réglementation basée sur le projet de loi. Je peux vous assurer qu'Hydro-Québec, le ministère des Transports et tous les ministères seront soumis à la loi. On va l'appliquer comme on le fait, par exemple, pour la loi sur le tabac.

M. L'Italien: J'en prends bonne note.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vais vous permettre une dernière brève intervention, M. Normandeau.

M. Normandeau: M. le ministre, il est vrai qu'aux articles 95, 96 et 101, il est prévu des mesures spéciales concernant la sylviculture et l'agriculture. J'ai un peu de réticence par rapport à cette approche parce que, suivant mon expérience en santé au travail, qui est une époque révolue où la législation était divisée dans un tas de lois ou de règlements, il nous était très difficile d'intervenir sur la foi d'un règlement si les pouvoirs n'étaient pas donnés dans une loi clairement stipulée et clairement écrite. À l'heure actuelle, si l'agriculture et la foresterie bénéficiaient d'un système spécial ou d'échéances spéciales, peut-être que ce serait possible. Evidemment, avec tout le volume qu'il y a à faire et les maigres ressources qui existent à l'heure actuelle, ce serait difficile à réaliser. Mais je pense que ce serait vraiment indiqué de donner des pouvoirs, une force à une loi que d'inclure tous les individus, quitte à avoir, par la suite, des mesures d'exception, parce qu'il est très difficile d'agir sur un règlement plutôt que sur la loi. (11 h 15)

M. Lincoln: D'accord, mais la loi, dans l'esprit des sylviculteurs, de toutes les associations de forestiers qui sont venues ici, de toutes les associations, de toutes les grosses compagnies, de l'UPA, selon eux, l'article 2 - en fait, ils le citent dans leurs mémoires - est l'article habilitant qui fait qu'il soit inclus. C'est dit dedans. Toutefois, le gouvernement peut déterminer, parmi ces dispositions, celles qui s'appliquent à un agriculteur ou un sylviculteur qui utilise des pesticides aux fins de son exploitation agricole ou sylvicole. C'est ça, le pouvoir. Nous l'avons fait ainsi, parce que certaines choses ne s'appliqueront pas. Par exemple, la CIP aura un permis d'un type différent de celui que l'on donne à un vendeur individuel. Il est évident que l'on ne pourra pas, par exemple, avoir des certificats dans le domaine de la forêt qui s'appliqueront à chacune des personnes travaillant dans ce secteur. Ce sera une circonstance différente. Il faudra se baser sur ce qui est fait ailleurs, dans le domaine agricole - c'est la même chose - ce qui est fait dans le cas des firmes familiales, etc. C'est pourquoi on a mis cette disposition de cette façon.

Ces articles s'appliqueront à tous les

agriculteurs, à tous les sylviculteurs. Eux, ils sont très au courant. En fait, ils citent cela dans leurs mémoires. Ils réalisent que l'alinéa 2 est le pouvoir que la loi donne et qu'il est inclus automatiquement. J'ai ce pouvoir, aujourd'hui, de l'inclure demain matin si je veux.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre...

M. Normandeau: Au niveau de la loi...

M. Lincoln: Au niveau de la loi, oui. Si vous lisez l'alinéa 2, c'est ce que cela dit, oui, au niveau de la loi. Sans cela, on n'aurait pas pu faire de règlements. On ne peut pas faire de règlements sans cela. C'est pourquoi l'article 5, paragraphe 2, est essentiel pour habiliter l'article 95. Autrement, l'article 95 serait inopérant. Il serait illégal.

M. Normandeau: À la lecture, cela nous paraissait le contraire. L'article 5, justement, invalidait ou rendrait caducs...

M. Lincoln: Non, le premier...

M. Normandeau: ...les articles 95, 96 et 101.

M. Lincoln: Excusez-moi, je n'écris pas les lois. Mais la façon d'écrire cette loi avait pour but de permettre que, au départ, ces gens ne soient pas soumis immédiatement, mais que l'on puisse les soumettre demain ou après-demain ou dans une échéance que, moi, je choisirais. On a écrit, d'abord, que les dispositions ne s'appliquent pas. Je dois dire que, selon moi, il aurait été plus simple d'écrire que la loi s'applique, mais qu'elle s'appliquera plus tard. Mais, c'est comme ça qu'ils écrivent cela dans les lois, que voulez-vous? On dit, à l'alinéa 2 qu'elles ne sont pas incluses au départ, mais que le gouvernement peut déterminer celles qui s'appliquent à un agriculteur. On peut déterminer que la loi s'applique complètement et que trois articles ne s'appliqueront pas, mais ils sont inclus. Je vous donne ma garantie formelle. C'est la garantie de tous les juristes qui ont travaillé là-dessus, les conseillers juridiques du comité de législation, ici. Eux, ils sont tout à fait conscients que cela s'applique. Je crois que, hier, dans leur mémoire, ils citaient cela, justement, pour dire: On ne voudrait pas être inclus tout de suite, mais ils réalisent qu'on les inclut tout de suite.

Le Président (M. Saint-Roch): Je m'excuse. L'horaire chargé de notre commission m'oblige, malheureusement, à intervenir et à interrompre cet échange de qualité. En conclusion, M. le député de

Terrebonne, brièvement, s'il vous plaît!

M. Blais: Oui, très brièvement. Plusieurs personnes passent ici pour venir nous lire des] mémoires et venir nous dire que, malgré que le ministère avait devant lui les réglementations et les lois de neuf autres provinces et de beaucoup de lois à travers le monde, la synthèse n'est pas très positive. Comme vous, je pense que c'est un peu un rapiéçage et que nous allons, en écoutant les gens, essayer d'améliorer ce costume rapiécé.

La nature, le sol, l'eau et l'air, ainsi que les humains qui en ont l'usufruit, ont un besoin vital de défenseurs comme vous. Continuez votre lutte. Je vous remercie d'être venus, car ce n'est pas avec cet avant-projet de loi que votre bataille est réglée. Votre bataille, je tiens à vous dire que je la fais mienne. Merci d'être venus.

Le Président (M. Saint-Roch): Je tiens à vous remercier, messieurs du Regroupement pour un Ouébéc vert, de la qualité de votre intervention.

Je demanderais maintenant à la Société pour vaincre la pollution de prendre place.

M. Green (Daniel): M. le Président, je serai prêt quand vous le serez.

Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend maintenant ses travaux. M. Green, il nous fait plaisir de vous voir participer aux travaux de cette commission. J'aimerais vous rappeler que vous avez un maximum de vinqt minutes pour présenter votre mémoire. Je vous cède la parole, M. Green.

Société pour vaincre la pollution

M. Green: Vu qu'il s'agit d'un avant-projet de loi et que, en termes législatifs, un avant-projet de loi n'a pas comme tel une entité législative, j'ai considéré ce document un peu comme un livre blanc. Les discussions sérieuses et l'intention du législateur seront considérées sérieusement lors de la présentation du projet de loi. Nous considérons que ce document est une ébauche et une tentative du ministère de l'Environnement de nous montrer de façon officieuse à quoi pourrait ressembler un véritable projet de loi sur des pesticides au Québec, d'où notre méthode, si on veut, d'analyse article par article ou, plutôt, concept par concept.

Premièrement, nous considérons la discussion à savoir: si un projet de loi est nécessaire oui si un règlement est nécessaire. Le législateur a décidé d'utiliser la route du projet de loi Beaucoup de discussions se font pour savoir si c'était une bonne idée. Si on regarde les lois à travers le Canada, la plupart des autres provinces ont leur loi sur les pesticides. Moi, je crois, d'après les

discussions que j'ai eues avec nos avocats-conseils, vu que le Québec voulait se doter d'une loi d'utilisation, de vente et de gestion des pesticides, qu'il fallait adopter une loi puisqu'il existait déjà une loi fédérale, la Loi sur les produits antiparasitaires. Ici, on voit des sections de la Loi sur les produits antiparasitaires qui ont été simplement transférées dans la Loi sur les pesticides. Comme de fait, un des articles à la fin cite textuellement la loi fédérale sur les produits antiparasitaires et dit que le règlement de cette loi est réputé faire partie de la loi québécoise. Donc, je pense que c'était plutôt une action législative légaliste pour adopter un projet de loi.

Ce qui est aussi intéressant dans un projet de loi, c'est qu'il permet la modification d'autres lois et une répartition de l'administration de la loi. Peu importe la décision de ce gouvernement de légiférer sur les pesticides, un fait reste: le ministère de l'Environnement n'a pas, maintenant, les moyens d'appliquer une réglementation sur les pesticides au Québec faute de personnel, faute d'effectif. Je demande, et j'en fais une recommandation même si elle n'est pas incluse dans notre mémoire, que cette loi soit coadministrée par le ministère de l'Environnement et par le ministère de la Santé et des Services sociaux. Si le législateur décide de le faire, il pourra, d'un seul coup, augmenter son pouvoir d'intervention. Le réseau des Affaires sociales au Québec est tellement étendu que, d'un seul coup, le ministère pourra augmenter son pouvoir d'inspection, de saisie et d'intervention pour arrêter les usages abusifs des pesticides. Nous avons vu que les médecins et les professionnels de la santé sont très aptes à défendre l'intérêt des Québécois et des Québécoises pour un environnement sain. Ils l'ont fait, ils le font dans certains DSC, justement sur les pesticides; je mentionne les DSC de Joliette, de Rimouski.

Sur d'autres points comme la salubrité des plages, on a vu que les DSC ont été extrêmement actifs concernant la santé publique. Une recommandation assez formelle que je fais au gouvernement, c'est de voir si le gouvernement pourrait faire coadministrer la loi. Il existe des précédents, la loi des contaminants du fédéral et la nouvelle loi sur la protection de l'environnement est une loi coadministrée par Environnement-Santé-Bien-Être. Je crois qu'il y a une grande volonté de la part du ministère des Affaires sociales d'intervenir sur les pesticides. Évidemment, ce transfert ou cette division de responsabilité peut uniquement se faire par un projet de loi.

Concernant toute l'attitude ou l'intention, plutôt, du gouvernement, M. le ministre, vous pouvez dire ce que vous voulez, l'interprétation qu'on fait de la loi, et d'autres juristes aussi, c'est que la loi est farcie de connotations qui nous disent que le gouvernement ne veut pas intervenir pour forcer 80 % des utilisateurs de pesticides au Québec à la certification et au permis. On pourrait faire des interprétations du jour au lendemain, mais il reste qu'on écrit une loi, qu'on doit utiliser un langage très économe. La loi est farcie d'ambiguïtés qui seront un cauchemar à interpréter par le législateur, et plus encore par le magistrat. Si j'ai une recommandation à faire au législateur, c'est de dire plus clairement que c'est inscrit. Si l'intention du législateur est de soumettre les agriculteurs et les sylviculteurs à la loi, qu'il se débarrasse de l'article 5, de l'article 95 et de l'article 96. Si l'intention du législateur est de permettre à ses intervenants - on parle de 40 000 agriculteurs au Québec - d'être capables d'avoir le temps, le loisir de les former correctement, l'article 99 de la loi vous le permet. L'article 99, pour vous montrer l'approche de ce que pourrait être un texte de loi économique, dit très clairement que le gouvernement peut fixer par règlement les catégories de certificats et la date d'exigibilité des certificats. Tout est là. Le gouvernement a le pouvoir discrétionnaire -même si je n'aime pas trop donner à l'État des pouvoirs trop discrétionnaires - le gouvernement a tous les pouvoirs, en vertu l'article 99, de dire que les agriculteurs, que le certificat de compétence pour l'agriculteur va être exigible. Nous, nous proposons le printemps 1990. Cela vous donne beaucoup de temps pour former.

On comprend évidemment que le gouvernement du Québec, nonobstant l'interprétation, la déclaration des utilisateurs des pesticides: Oui, on reconnaît que nous allons devoir être réglementés en ce qui concerne l'usage des pesticides. Nous vous disons, de notre côté: la loi telle qu'elle est écrite, exclut ou risque d'exclure ces utilisateurs. Vous, en tant que législateurs, vous devrez décider qui a raison, les groupes qui n'ont aucun intérêt à ce que les pesticides soient utilisés ou les groupes qui ont un Intérêt à ce que les pesticides soient utilisés, ou qui sont tout au moins pour le statu quo. C'est votre choix. Vous avez deux opinions devant vous, c'est à vous de choisir. Il est sûr que l'UPA est composée de membres qui ont comme vertu d'être des libres penseurs: les agriculteurs du Québec ne veulent pas se faire imposer quoi que ce soit par l'État. C'est l'exemple type de la PME, indépendante. C'est sûr que les agriculteurs ne veulent pas être réglementés a outrance. On l'a vu dans d'autres dossiers environnementaux. Par contre, je trouve que les agriculteurs sont en train de se jouer un mauvais tour. Agriculture Canada reçoit, par exemple, un avis comme on en a reçu la semaine dernière concernant l'herbicide

2,4-D.

(11 h 30)

Conclusion, une conclusion assez alarmante: Le ministère déclare que ce pesticide doit dorénavant être considéré comme un cancérigène humain. Le 2,4-D est utilisé partout au Québec. Alors, le ministère de l'Agriculture a une décision à prendre. Il y a, au Québec, au Canada, plusieurs agriculteurs - 200 000 ou 300 000 - qui utilisent le 2,4-D, d'après les statistiques. Donc, on signe l'arrêt de mort pour environ 100 à 200 de ces agriculteurs en fonction du pourcentage des probabilités de mortalité. Le législateur fédéral se dit ceci: On est d'accord que, si le 2,4-D est utilisé de façon sécuritaire, les risques pour l'agriculteur, pour l'utilisateur, décroissent de façon draconienne.

Agriculture Canada se pose une deuxième question: Est-ce que je peux être satisfait de la façon dont les agriculteurs canadiens sont capables et sont formés pour utiliser correctement le 2,4-D? Réponse: Vu que la plupart des provinces canadiennes n'obligent pas la certification des agriculteurs, ils disent non. Donc, les agriculteurs canadiens ne sont pas formés pour utiliser le 2,4-D. Il y a un risque pour cette population. Le ministre de l'Agriculture prend la recommandation du ministère de la Santé nationale et du Bien-être social. On demande l'interdiction du 2,4-D. Les agriculteurs viennent de perdre un outil pour lutter contre les mauvaises herbes. Pourquoi? Parce que c'est leur faute. Les agriculteurs devraient reconnaître que la certification, la preuve de leur compétence pour utiliser un pesticide est une garantie pour être capable d'utiliser un pesticide moyennement dangereux. Si l'agriculteur peut démontrer à l'État qu'il est apte à utiliser un pesticide de façon sécuritaire, l'État va peut-être être moins pressé d'interdire un pesticide qui risque de causer des dommages à sa santé. C'est un point fondamental. On l'a vu avec l'alachlore et on va probablement le voir avec le 2,4-D, et, évidemment, le Québec n'a absolument rien à voir au niveau de l'homologation. Si le fédéral décide d'interdire l'utilisation du 2,4-D, vous pouvez faire des représentations, mais c'est le choix du fédéral d'interdire l'utilisation ou les ventes d'un pesticide au pays.

On comprend que la certification immédiate des agriculteurs et des sylviculteurs est impossible. On recommande le printemps 1990 comme date cible. Ce n'est pas draconien. Mon grand-père me disait qu'il a conduit pendant 25 ans sans permis de conduire et, quand le ministère de la Voirie a décidé d'imposer des permis de conduire, il y a eu un tollé de protestations. Par contre, on voit aujourd'hui que non seulement le permis de conduire est obligatoire, mais, si j'écoute les bruits qui courent au ministère des Transports, il est possible que tie permis ne soit pas délivré à un demandeur a moins qu'il ait suivi un cours reconnu par le ministère de l'Éducation et le ministère des Transports.

Concernant le certificat du chasseur -il y a 30 000, 60 000 chasseurs au Québec -chaque chasseur doit avoir son certificat qui prouve qu'il a suivi un cours de maniement des armes à feu. Qui a donné ces cours? La Fédération québécoise de la faune. Si le gouvernement' était malin, il dirait à PUPA: Tous les agriculteurs doivent être certifiés et c'est vous qui allez les certifier; on va vous donner, à l'UPA, la "job" de la certification. L'UPA va sauter sur cela et on devrait peut-être regarder ce que la fédération a fait. La Fédération québécoise de la faune a augmenté son membership et sa pénétration dans les régions à la suite du transfert du MLCP pour le cours de maniement des armes â feu. S'il y a quelqu'un de l'UPA, ici, derrière moi, je lui recommanderais aussi de voir l'expérience de la fédération concernant la certification des chasseurs. Elle a augmenté son membership, et elle a augmenté sa pénétration en régions, en confiant à son organisation la formation de ses membres? C'est un moyen magnifique et formidable que se donne une organisation de pénétrer dans une région. Encore une fois, je pense que l'UPA se joue un double mauvais tour parce qu'elle aurait une bonne occasion de former elle-même ses membres.

Concernant l'article 6, le ministre l'a reconnu, je crois que c'est important. Le gouvernement du Québec était évidemment obligé de faire cela parce que la loi sur les produits antiparasitaires a été modifiée et il y a un article qui dit que "this law binds the Crown"; alors donc la loi fédérale l'a fait et le Québec est obligé de le faire. Cela dit, le législateur va devoir regarder toutes les lois des autres ministères pour voir s'il n'y a pas une contradiction. Un exemple: J'ai cité dans mon mémoire que dans la loi du ministère de l'Énergie et des Ressources un article dit que le ministre peut protéger la forêt contre les ravageurs en intervenant et en protégeant nos ressources forestières, même sur un terrain privé!' C'est-à-dire que si les députés qui sont devant moi ont un chalet et qu'il y a des tondeuses dans les sapins et les épinettes, le gouvernement a le droit d'arroser votre terrain à votre insu même si vous vous y opposez, parce que le ministre a une raison d'État.

La raison d'État a toujours été une très mauvaise école de démocratie et je crois qu'on doit permettre à des individus de dire non à un arrosage. Voilà un exemple dans la loi du ministère de l'Énergie et des Ressources qui contredit un peu l'intention du législateur de laisser le citoyen décider s'il veut on non être exposé à des pesticides.

On dit évidemment que le ministère

veut étudier le problème des pesticides au Québec. Je sais qu'Environnement Canada et Environnement Québec collaborent pour faire cet excellent document, L'utilisation des pesticides au Québec, publié en 1982, et je recommande au gouvernement de continuer à publier des études comme cela qui nous démontrent la quantité de pesticides utilisés au Québec. Je dois admettre qu'il y a une augmentation d'utilisation d'à peu près 10 % par année. Par contre, un fait manque. Quand j'ai siégé, le ministre de l'Environnement avait nommé un groupe de travail sur l'assainissement des eaux et on s'est aperçu qu'Environnement Québec n'avait rien en ce qui concerne les pesticides contemporains dans nos eaux. On analyse le DDT, le dieldrin et les autres produits, mais ce sont des produits qu'on n'utilise presque plus. Donc, le ministère de l'Environnement manque de données sur les pesticides dans nos cours d'eau actuellement. Le ministère va donc devoir se doter de systèmes analytiques un peu plus sophitisqués pour aller analyser les pesticides utilisés maintenant.

Concernant les arrosages aériens, les arrosages aquatiques et les arrosages de pesticides de classe 2, donc dits de classe restreinte, je crois que le ministère de l'Environnement devrait adopter un régime beaucoup plus strict pour ces arrosages. Peu importe l'utilisateur, qu'il soit agriculteur ou sylviculteur, je crois que les exigences de preuve de compétence devraient être demandées immédiatement. Même s'il s'agit d'un utilisateur agricole, s'il fait un arrosage aérien ou s'il fait un arrosage de classe 2, il doit être immédiatement assujetti à la loi parce que ces pesticides et cette méthode d'arrosage sont trop dangereux pour qu'on attende. Cette méthode doit donc être réglementée immédiatement.

Dans le document, il y a un terme qui s'appelle la supervision immédiate, c'est-à-dire que nul ne peut utiliser un pesticide sans être sous la supervision immédiate d'un possesseur de certificat. Encore une fois, un terme très vague. Le législateur se nuit en adoptant un terme aussi vague que cela. Si l'intention du législateur est d'assurer que toute utilisation de pesticide se fasse d'une façon réglementée et sans nuire à l'environnement et à la santé publique. Le législateur devrait préciser ce qu'il veut dire par "supervision immédiate". J'ai donné des exemples: 100 mètres, 200 mètres, radiotéléphone, un applicateur certifié pour 200 ou 300 applicateurs non certifiés. Il faudrait établir un ratio, établir des normes beaucoup plus strictes en ce qui concerne la supervision immédiate.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Green, malheureusement je dois vous demander de conclure.

M. Green: Oui, je vais conclure. Très souvent, on voit dans les textes législatifs un pouvoir discrétionnaire laissé au ministre. Le ministre peut faire ceci, peut faire cela. On comprend l'intention du législateur de laisser quand même une discrétion au ministre. C'est démocratiquement acceptable, sauf en cas d'urgence. Je crois que le ministre va avoir l'obligation d'intervenir en cas d'urgence. C'est pourquoi je demande, par exemple, à l'article 51 que le pouvoir du ministre soit presque obligatoire. Si le ministre lui-même dit qu'il y a urgence, il doit intervenir. Je crois que l'État devrait être aussi responsable que les utilisateurs. L'État est là pour nous protéger et il doit intervenir s'il voit qu'il y a un problème. Pour conclure, je suis au courant que le ministre va inclure les articles 116 et 118. Dans mon mémoire, j'ai transformé ces articles et je les ai mis à la sauce pesticide. D'accord? Je recommande au légisteur de les utiliser textuellement à la suite de la décision du ministre, quand on va présenter le projet de loi.

Quant à la réglementation, il y a évidemment des points très précis. Nous demandons que le projet de règlement soit déposé avec le projet de loi. Je vous dis tout de suite que, s'il n'y a pas de projet de règlement lors du dépôt du projet de loi et si la commission se penche sur le projet de loi, je ne vais pas venir. Moi, je vais seulement discuter de ce projet de loi s'il y a des règlements. Comme me dit un ami avocat: La loi, c'est le tronc, mais les règlements, ce sont les feuilles et les branches. Il nous faut cela pour voir ce qu'est véritablement l'intention du législateur.

Il faut augmenter les dispositions pénales de façon au moins équivalente à la Loi sur la qualité de l'environnement et je réfère le ministre à la Loi sur la protection de l'environnement du fédéral. Il s'agit quand même de contaminants et peut-être le ministre pourrait-il regarder la loi fédérale et utiliser les dispositions pénales prévues dans la loi fédérale quand il y a vraiment abus. Voilà, je vous invite à lire mon mémoire avec le projet de loi à côté de vous parce que c'est article par article. Je suis prêt à recevoir vos questions.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Green. M. le ministre.

M. Lincoln: M. Green, nous travaillons ensemble depuis pas mal d'années maintenant. Je dois vous dire, et je le dis en pesant mes mots, qu'après avoir examiné tous les mémoires qui nous ont été soumis, je dois vous féliciter - parce que je sais que vous n'avez pas une grosse équipe de travail - pour la qualité du mémoire que vous avez produit. Je pense que, de tous les mémoires

- les autres intervenants ne m'en voudront pas de l'exprimer ainsi - c'est le mémoire qui a été le plus loin dans une étude exhaustive du projet de loi. Cela nous a été très très bénéfique. Cela a été un travail vraiment remarquable, considérant les moyens que vous avez à votre disposition. C'est une étude soignée, une étude réfléchie et, comme je l'ai dit, exhaustive. J'ai aussi considéré que chacune de vos remarques sur le projet de loi était très objective. (11 h 45)

En fait, de tous les mémoires que nous avons reçus, parce que lui s'adressait spécifiquement aux articles de la loi et à presque tous les articles, nous en avons fait une étude un peu spéciale en ce sens qu'il touchait à presque tous les articles du projet de loi pour voir comment on allait pouvoir vous dire, aujourd'hui, dans quelques minutes... On ne peut pas se pencher sur tout ce que vous avez dit.

Alors, je voudrais vous le dire en deux parties. Premièrement, je pourrais vous dire, au départ, que certaines suggestions sont contenues dans d'autres mémoires et que certaines sont nouvelles dans votre mémoire. Je peux vous dire qu'on les a considérées. On peut vous dire et vous confirmer qu'il y a là des choses qu'on va considérer très positivement ou d'autres qui sont acceptables aujourd'hui. Il y en a d'autres qu'on étudiera, naturellement, parce que ces choses-là demandent du temps et de la réflexion, comme vous le savez.

Avant de passer au côté spécifique, je voudrais vous dire, par rapport aux agriculteurs ou sylviculteurs, que ce sont nos conseillers juridiques, le comité législatif, plusieurs comités juridiques qui nous ont suggéré d'écrire cela ainsi, étant donné qu'au départ nous ne voulions pas inclure ces catégories. Mais on prend bonne note de votre suggestion par rapport à l'article 99. En tout cas, je peux vous dire que c'est dans l'esprit des conseillers juridiques et de ces corporations qui sont tout à fait au courant que le projet de loi s'applique à eux. En fait, avec l'UPA, nous avons eu des négociations; enfin, nous avons eu des représentations assez continues de l'UPA, qui est le représentant clé du monde agricole, aujourd'hui.

Au départ, comme vous le savez - vous avez siégé vous-mêmes au comité de l'assainissement des eaux - l'UPA ne veut rien savoir d'une loi sur les pesticides. En fait, votre suggestion pour le printemps 1990, c'est la suggestion que nous avons proposée nous-mêmes: janvier 1990. D'abord, elle avait accepté. Dans son mémoire, elle dit que c'est trop court. Mais c'est une affaire à négocier. Mais, en tout cas, sur janvier 1990, on se trouve d'accord.

Pour la question de la formation, c'est exactement la conclusion que nous avons faite nous-mêmes. Si nous mettons l'UPA elle-même responsable de la formation à la certification, ce sera la même chose qui se passera avec la fédération de la chasse, etc. À ce moment-là, nous avons suggéré cela à l'UPA fortement. L'UPA avait accepté le principe et l'idée d'emblée. Mais, dans son mémoire, elle s'est retranchée en disant: Non, on préférerait que ce soit le ministère de l'éducation et les ministères de l'Environnement et de l'Agriculture qui y participent. Le ministre de l'Agriculture était là. Il a déploré, il a regretté que l'UPA ait pris cette position, mais je crois qu'eux, ils voient cela comme une affaire d'argent. Cela va leur coûter de l'argent. Je pense qu'on va y revenir abondamment, parce que nous pensons que c'est la façon la plus sûre de les responsabiliser plus directement auprès de leurs membres. En tout cas, je trouve l'idée très valable et je suis tout à fait d'accord là-dessus.

J'ai bien aimé vos remarques sur la question des 2,4-D. C'est évident ce que vous dites. Par rapport à l'eau potable, c'est vrai. Comme vous le savez, nous avons commencé un programme d'étude sur les micropolluants qui incluent aujourd'hui les vieux pesticides. On va commencer par cela. Mais c'est sûrement l'objectif et c'est sûr qu'il faut aller vers les pesticides contemporainsi

Une dernière remarque générale. Quant à la question de l'accès à l'information, on est certainement d'accord avec vous. Nous avons constaté que vous avez répété les dispositions exactes de la Loi sur la qualité de l'environnement. De toute façon, on va écrire la loi de façon à dissiper tout malentendu. Nos avis juridiques nous indiquaient clairement que la Loi sur la qualité de l'environnement impliquait que les pesticides sont des contaminants. Mais on va préciser que les pesticides sont des contaminants, afin de faire la juxtaposition. On écrira la loi de façon qu'il y ait une correspondance avec la Loi sur la qualité de l'environnement, que les deux s'appliquent d'une façon complémentaire et indépendante, afin qu'on soit très bien situé et que tous les pouvoirs de la Loi sur la qualité de l'environnement s'appliquent in toto.

Pour ce oui est des choses que nous trouvons très valables et acceptables, pour la question de la supervision immédiate, il y a des précédents pour expliquer ce qu'est la supervision immédiate dans les lois. Par exemple, elle a été interprétée en droit professionnel comme quelque chose qui a trait au milieu du travail lui-même. Mais nous trouvons votre suggestion très intéressante de faire une définition en fonction du ratio d'applicateurs. On va y revenir avec il vous de façon spécifique pour savoir exactement comment vous balisez cela. Si on peut l'incorporer pour rendre la

loi plus efficace, certainement qu'on va la considérer avec beaucoup de sérieux.

Pour ce qui est de l'assurance-responsabilité civile, il est de notre intention de l'inclure dans la réglementation, bien sûr. En ce qui concerne l'attention particulière accordée aux utilisateurs et vendeurs de pesticides de classe 2, on pourra le faire par une certification pour tout ce qui est de la classe 2 et ne pas faire mention de la supervision immédiate dans ce cas. On va considérer cela très sérieusement.

Vous avez suggéré, pour l'article 30, d'exiger que sur les lieux d'entreposage de grossistes, il y ait une personne qualifiée. Nous sommes d'accord là-dessus. Il y a d'autres suggestions qui ont été faites et on va certainement inclure les grossistes. Quant à publier dans les journaux la liste des suspensions et révocations de permis ou de certificats, ce sera considéré très sérieusement. On pense qu'on se servira des associations avec lesquelles on transige pour inclure cela dans les codes de bonne pratique, comme cela se fait dans les codes professionnels.

Le droit à l'accès à l'information, j'en ai parlé. Pour ce qui est des taxes sur les pesticides, beaucoup d'intervenants en ont parlé. C'est peut-être la suggestion qui revient le plus souvent et ce sera aussi examiné sérieusement. Naturellement, c'est un cadre beaucoup plus large que le cadre dont je suis responsable. La délégation aux municipalités, nous en avons discuté. Personnellement, j'aurais voulu faire une délégation aux municipalités, inclure cela dans la loi, mais, au premier abord, les municipalités nous ont dit: Tenez la commission parlementaire et on verra les réactions. On négocie avec le monde municipal et j'espère qu'il sera d'accord pour l'inclure.

La promotion et la recherche de méthodes alternatives, nous allons spécifiquement mentionner cela dans la loi. Pour ce qui est d'un réseau de surveillance, vous avez beaucoup parlé d'intensifier les réseaux en place. Là aussi, on va revenir pour essayer d'approfondir les suggestions que vous faites là-dessus.

Ce sont les choses que je pouvais vous dire. On va les analyser très positivement. Pour ce qui est de la réglementation, je suis tout à fait d'accord avec vous que produire un projet de loi définitif sans une réglementation, c'est vraiment produire, comme vous le dites, un corps sans coeur. La clé, c'est toute la réglementation. Je peux vous assurer qu'aujourd'hui, une réglementation est en voie de préparation. Lorsqu'elle sera au stade où on pourra la publier, naturellement, elle sera l'objet de consultations intensives et elle sera produite afin que les gens sachent exactement quelle sera la réglementation en concordance avec le dépôt du projet de loi, ou même avant. Alors, ce sera fait.

Malheureusement, le temps me manque. Je dois vous féliciter encore une fois, c'est un mémoire - je le dis sans exagérer, je pense - assez exceptionnel et on va le considérer de façon très sérieuse. Le dernier point que je vais soulever, c'est la nouvelle recommandation que vous faites ici, soit la coadministration entre le MENVIQ et le MAS. C'est sûr que tout ce qui va bonifier notre projet de loi, nous sommes disposés à le faire. Si cela avait été figé dans le ciment, on n'aurait pas produit un avant-projet de loi. C'est une suggestion tout à fait nouvelle, on n'y avait pas pensé du tout. On va la regarder, on va la soupeser, on va en discuter. On verra, au sein du ministère, avec tout l'appareil gouvernemental, ce qui peut être fait. Il y a certainement beaucoup d'avantages à s'associer à un ministère beaucoup plus puissant que nous, surtout financièrement, et avec de vastes effectifs. On va certainement prendre cela au sérieux.

Merci beaucoup d'être venus ici nous donner vos idées. On gardera certainement le contact pour avoir les détails de vos suggestions.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Bien sûr, comme le ministre, je vous félicite pour la qualité de ce mémoire. L'analyse article par article, c'est vrai que c'est un travail très bien fait. J'avais cependant une réticence quant à l'introduction. Je trouvais qu'elle souffrait d'un paupérisme décevant.

Une voix: D'un quoi?

M. Blais: D'un paupérisme décevant. Cependant, avec votre présentation verbale qui était lucide, claire, intelligente et surtout intelligible, cela me réconcilie un peu avec le fait que vous n'ayez pas voulu, par écrit, faire une appréciation générale. Vous disiez que vous vouliez attendre le projet de loi lui-même. Vous avez le droit de le faire. Cependant, votre présentation verbale m'a permis de saisir que vous aviez beaucoup de restrictions dans l'ensemble.

C'est le député de Jonquière qui va vous poser les principales questions sur votre mémoire. Cependant, de façon classique - j'y reviendrai peut-être à la fin - je me dois de poser la question classique suivante: Seriez-vous d'accord pour que, comme plusieurs groupes qui ont présenté des mémoires, pour l'éducation, la publicité et la recherche, il y ait une taxe directe sur les pesticides pour financer ces trois points d'une importance capitale? En deuxième lieu, croyez-vous que, même si le projet de loi n'est pas encore

finalisé, et vous avez le droit de réserver votre interprétation quand arrivera le projet final, actuellement, dans son essence, cet avant-projet de loi subodore que les quantités de pesticides utilisées pourront être défavorisées par cet avant-projet de loi?

Le Président (M. Saint-Roch): M. Green.

M. Green: Première question concernant une taxe. Cela fait des années que je rêve d'avoir un système fiscal qui pourrait dire: Chaque gramme de déchet toxique utilisé et chaque gramme de pesticide déversé sera taxé. Et cette taxe irait dans un fonds pour favoriser soit le nettoyage, les alternatives, le recyclage. Cela fait des années que j'en rêve. La SVP a proposé une taxe spéciale pour les producteurs de produits chimiques à être versée dans un fonds monétaire d'intervention sur les sites. Alors, sur ta question des taxes spéciales, j'en suis. Mais j'ai tellement eu une fin de non-recevoir du gouvernement -M. Blais, je vous dirai des deux gouvernements: celui d'avant et l'actuel - sur cette proposition. Les échos que j'ai entendus sont que, au Québec et au Canada, et peut-être même dans le Commonwealth, des taxes spéciales ou des taxes versées dans un fonds spécial n'existent pas. Tout va dans le trou noir qu'on appelle le fonds consolidé du Québec.

Donc, cela me fait rire que l'on parle de taxes sur ceci, de taxes sur la cigarette et de taxes olympiques. Non. Il n'y a pas un compte de banque où le gouvernement doit prendre le 0,0009 $ sur chaque gallon de pesticide vendu et le mettre dans un compte qui ne peut être utilisé que pour favoriser les alternatives.

Si le législateur veut changer le système fiscal québécois pour permettre cela, j'ai beaucoup de propositions de taxes spéciales à lui proposer: une taxe spéciale sur les déchets industriels, une taxe sur les pesticides. Cela peut même être une taxe sur la coupe forestière, une taxe spéciale qui irait au reboisement, par exemple. Il y a beaucoup d'exemples. On m'a toujours dit: Le problème, c'est le régime fiscal canadien. On a même proposé cela, récemment, au ministre fédéral de l'Environnement. Il nous a dit exactement la même chose.

Donc, je serais d'accord. Par contre, je ne voudrais pas que cette taxe serve à payer les arrosages que le MER fait contre la tordeuse. Que le gouvernement me garantisse que l'argent provenant de cette taxe spéciale sur les pesticides ira dans un fonds spécial utilisé seulement pour les alternatives, je serai d'accord.

Pourriez-vous me rappeler votre deuxième question, s'il vous plaît?

M. Blais: Est-ce que cet avant-projet de loi...

M. Green: Oui, d'accord...

M. Blais: ...sur la quantité réelle...

M. Green: Lors des discussions sur les modifications ,de la Loi sur les contaminants de l'environnement du Canada, on s'est dit: Est-ce que cette loi va réduire l'utilisation des contaminants au Canada? C'est toujours la question qu'on se pose. Oui, mais à long terme. (12 heures)

Alors, entre vous et moi, ce qui est intéressant avec ce projet de loi, c'est que, plus on légifère et plus on contrôle, plus, évidemment, ça coûte cher, et, plus ça coûte cher, plus l'alternative non pesticide est intéressante. Un applicateur, qui est un gars ou une fille en vacances du cégep et qui s'improvise applicateur ne va plus être capable de faire cela. Il ne va pas non plus demander 5 % l'heure, il va demander un tarif professionnel: excusez-moi, je suis un applicateur de pesticides formé, c'est 25 $ l'heure. Alors, ça va coûter un peu plus cher. W.H. Perron qui engage un étudiant pour s'occuper de son magasin de pesticides ne va plus être capable de faire cela, il va être obligé de le payer plus cher. Il ne va plus être capable de garder les pesticides sous le comptoir, il va être obligé de les garder dans une salle équipée de gicleurs contre le feu. Tranquillement et subtilement, chaque fois que le législateur légifère sur un contaminant, ce contaminant devient plus difficile à utiliser et plus cher. La loi du marché s'occupe du reste.

Si un utilisateur de pesticides, un agriculteur peut utiliser un produit ou une méthode pour 'se protéger contre un ennemi nuisible, un produit ou une méthode qui lui coûte moins. cher, évidemment, il va l'adopter. Si une compagnie de pesticides vient vous dire que cette loi va lui coûter plus cher, votre objectif est partiellement atteint.

M. Blais: Merci de vos réponses. J'en aurais 500 à sous poser, vous êtes tellement intéressant. Je vais passer la parole au député de Jonquière.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Je ne pense pas faire de redondance en disant que le rapport est intéressant. Il y a peut-être des points, par exemple, qui soulèvent des interrogations; peut-être trois points que je vais prendre l'un après l'autre. Est-ce que dans ce projet de loi, M. Green, il y a des forces que vous pouvez déceler?

M. Green: Est-ce qu'il y a des...

M. Dufour: Est-ce qu'il y a des forces que vous pouvez déceler? Par exemple, est-ce que le projet de loi, à vos yeux, était nécessaire?

M. Green: S'il était nécessaire? M. Dufour: Oui.

M. Green: Oui, il fallait une loi québécoise sur les pesticides. Effectivement, je le crois. Nous étions la seule province canadienne à ne pas en avoir et je pense que cela pourra nous aider. Aussi, vu l'utilisation du pesticide... Le pesticide est un étrange contaminant. On l'utilise justement parce que c'est un biocide, contrairement aux autres éléments polluants. Je peux, à la rigueur, comprendre pourquoi le législateur voulait se doter de quelque chose en particulier qui s'appelle loi ou règlement sur les pesticides.

Je crois que, si on permet au citoyen le même droit d'appel - je l'ai recommandé à une commission sur les pesticides au Québec - que les utilisateurs, le débat sur les pesticides va commencer au Québec. Le projet de loi est un outil intéressant pour permettre ce débat, si le législateur veut que le débat se fasse et si le législateur permet ou inclut dans sa loi des modalités pour que les victimes interviennent. C'est pourquoi je demande que le droit d'appel soit à double sens. Quelqu'un possédant un certificat et qui se fait refuser un permis a un droit d'appel; par contre, moi, je dois aussi avoir un droit d'appel concernant l'émission d'un permis à telle compagnie.

Si le législateur permet le droit d'appel à double sens, je pense que la Loi sur les pesticides sera un outil qui permettra un débat sur les pesticides. Dans toutes les provinces canadiennes - Nouveau-Brunswick, Ontario, Colombie britannique - cette commission sur les pesticides était une tribune pour débattre des pesticides qui a aidé les provinces à évoluer dans l'utilisation des pesticides. Exemple: l'Ontario a été l'une des premières provinces à défendre l'utilisation du 2,4,5-T. Évidemment, les rumeurs voulaient que le 2,4,5-T interdit en Ontario soit vendu à Hydro-Québec ici, mais ce sont des rumeurs, je n'en ai pas de preuve. Par contre, cela permet un débat. Un forum, un débat, si la loi le permet, je pense que les méfaits des pesticides seront connus du public, on va en discuter. Si le projet de loi nous donne cela, ce sera un pas dans la bonne direction, oui.

M. Dufour: Je vais aller immédiatement au droit d'appel, parce qu'il y a peut-être d'autres questions que j'aurais aimé soulever en premier, mais, comme vous nous amenez sur cette question, je comprends aussi que la plupart des gens vont favoriser un tribunal administratif pour régler leurs problèmes. Cela se présente chaque fois. Il y a aussi des montants d'argent inhérents à la mise sur pied d'un tribunal administratif. Je pense bien, connaissant votre réalisme quant à tout le projet, que vous ne devez pas nécessairement penser que ce tribunal administratif va être mis sur pied dans l'immédiat.

M. Green: Le tribunal pourrait être mis sur pied rapidement. Il y a beaucoup d'exemples au Québec: la Régie de l'électricité et du gaz, la Commission des transports du Québec, le Bureau des audiences publiques, la Régie des services publics. Évidemment, toutes ces commissions coûtent cher. Je sais que, lors de l'élection de ce gouvernement, on a entendu, comme de fait, des rumeurs selon lesquelles on abolirait certains tribunaux quasi judiciaires ou commissions. Mais on parle de la gestion de substances dangereuses, on a quelquefois des discussions très techniques. Ayant siéqé à quelques audiences en cour provinciale et en Cour supérieure dans les dossiers environnementaux, laissez-moi vous dire que je ne suis pas très impressionné du quotient environnemental de la plupart des magistrats au Québec.

La question que je me pose est la suivante: Est-ce que l'appareil juridique, tel qu'on le connaît actuellement, est apte à bien gérer, par l'intermédiaire de nos tribunaux, les appels, les discussions sur tes pesticides? Je ne le crois pas. Je pense qu'il y aurait lieu d'avoir effectivement, comme les autres provinces, une commission. Les autres provinces, le Nouveau-Brunswick, l'Ontario, la Colombie britannique, ont une commission. La commission ne doit pas siéger continuellement. Elle peut siéger de façon ad hoc ou temporaire quand il y a une demande d'appel. Elle peut être composée à la rigueur de personnes de la communauté ou de la région, peu importe. Elle n'a pas besoin d'avoir une grosse structure. Je crois qu'on pourrait développer une structure assez flexible dans la formation d'une commission. Par contre, une chose dont je suis sûr: ce n'est pas par la Cour provinciale qu'on va avoir ce débat. La Cour provinciale est déjà très occupée, je me demande où pourrait être située, dans le rôle, une demande de modification de permis. Je crois qu'un tribunal administratif serait plus rapide, pourrait agir en plus grande connaissance de cause et pourrait être le lieu d'un débat beaucoup plus intéressant que la structure et le décorum d'une salle de cour.

M. Dufour: Le ministère de l'Environnement est un jeune ministère. Il n'a pas un vécu tellement grand et Dieu sait si cela prend de la volonté politique, qu'on ne décèle pas nécessairement tout le temps, à

première vue, et on se rend compte des problèmes qu'il affronte sur le terrain régulièrement. Vous suggérez de faire une coadministration avec les Affaires sociales, mais c'est un ministère qui est structuré structurant, qui a des montants d'argent extraordinaires, mais qui a aussi ses problèmes. Comment voyez-vous cette possibilité de faire cette administration tout en tenant compte des objectifs qu'on poursuit? Il faut admettre qu'aujourd'hui c'est la Loi sur les pesticides qui est la loi la plus importante, comme cela pourrait être tantôt une loi qui touche à un autre domaine, à d'autres commissions parlementaires.

M. Green: Je crois que le législateur a déclaré ceci à l'article 2: protéger l'environnement et protéger l'homme et ses biens. Dans toute la loi, on parle de la santé publique. Lors de la création du ministère de l'Environnement, il y avait la Loi sur l'hygiène publique du Québec et le ministère a pris de cette loi des sections et en a laissé au ministère des Affaires sociales, maintenant connu sous le nom de ministère de la Santé et des Services sociaux. On a remarqué, au cours des années, une certaine maturation en ce qui concerne le lien que l'appareil médical fait entre santé et environnement. Les études du Dr Barbeau, feu le Dr Barbeau, sur la maladie de Parkinson, dans le sud-ouest du Québec: le Dr Barbeau semblait dire qu'il y a une relation entre l'utilisation des pesticides organo-phosphates des carbamates qui ont des effets neurotoxiques, et la maladie de Parkinson. Le lien entre le syndrome urénique et hémolytique à Rivière-du-Loup et les arrosages contre la tordeuse. Le syndrome de Reye, qui a tué beaucoup d'enfants au Nouveau-Brunswick. On s'est aperçu qu'au Nouveau-Brunswick, c'était le ministère de la Santé qui intervenait concernant le problème des pesticides plutôt que le ministère de l'Environnement. Je ne vois pas une incompatibilité logique de demander au ministère de la Santé et des Services sociaux de coadministrer la loi.

Pratiquement, sur le terrain, cela fonctionne un peu ainsi. Un applicateur verse un pesticide sur des champs de maïs avec un avion. Il vente. Le vent pousse le nuage de pesticides vers un village. De jeunes enfants développent de l'asthme, de l'urticaire, des convulsions. On ne sait pas ce qui se passe. Le directeur du DSC, un médecin, est averti. Le médecin utilise ses pouvoirs en vertu de la loi, même un pouvoir d'inspecteur et il ordonne en fonction des pouvoirs de saisie de la loi: Je saisis votre avion, je saisis vos pesticides; vous allez à l'encontre de l'objectif de la loi qui est de protéger l'homme et ses biens; c'est un usage abusif des pesticides; je vous interdis de faire cela.

Un intervenant de plus pour protéger l'environnement ne ferait pas de mal. Marcel Léger disait- quand je dis Marcel Léger, je sens les murs vibrer dans cette enceinte sacrée - qu'il faut 6 000 000 d'inspecteurs au Québec.j Je vous suggère d'en donner peut-être 200 ou 300 autres en demandant au ministère de la Santé et des Services sociaux des médecins des hygiénistes et d'avoir aussi le pouvoir d'inspection et d'application de la loi quand il y a risque pour la santé publique, ce qui est le rôle du ministère de la Santé et des Services sociaux. Finalement, je donne un outil de plus. Administrativement, est-ce que cela sera un cauchemar? Peut-être que oui, peut-être que non. C'est sûr qu'il y aurait des arrangements à faire. J'ai parlé au Dr Lajoie, qui est, je pense, le représentant de l'association des DSC du Québec et il semblait aimer l'idée. Il lui semblait quel l'idée était séduisante. Je pense que le gouvernement devrait l'explorer et voir si, d'un coup, avec un mot, le ministre de l'Environnement et le ministre de là Santé et des Services sociaux administrent la loi en vertu de dispositions transitoires, l'article 119: "...est chargé de l'application de la présente loi". Ce serait très bien et il y a les précédents canadiens de la Loi sur les contaminants de l'environnement où c'est le ministre de l'Environnement et le ministre de la Santé nationale qui s'occupent d'administrer, les contaminants.

M. Dufour: Je vais laisser la parole au porte-parole officiel de notre formation pour vous remercier, à moins qu'il n'y ait d'autres questions. Je veux vous remercier et je peux vous dire que non seulement vous avez répondu à des questions, mais que vous en avez suscitées beaucoup d'autres.

M. Green: Merci.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le député del Jonquière. En conclusion, M. le ministre.

M. Lincoln: Le temps a passé, malheureusement, mais très constructivement, je pense. Nous avons appris des choses. M. Green, nous vous remercions d'être venu et de nous avoir présenté votre mémoire qui sera étudié, comme je l'ai dit déjà, avec le plus grand sérieux. Merci beaucoup.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Green.

M. Green: Est-ce que je pourrais ajouter une note informelle? Quand j'ai lu le projet de loi, ma première réaction a été d'être très fâché. Mais je me suis dit qu'on pouvait prendre le projet de loi, le couper en petits morceaux et l'épandre sur les terrains affectés par les insectes au Québec. Chaque insecte pourrait lire une section du projet de

loi et il trouverait cela tellement drôle que l'insecte pourrait mourir sur le champ. Plus besoin d'arroser avec des pesticides au Québec!

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Green. M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Sur ces paroles de confettis jetés dans la nature, je vous remercie et vous félicite pour la compétence traditionnelle de vos présentations et de vos mémoires.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Green, au nom de tous les membres de cette commission, je tiens à vous remercier pour la qualité de votre présentation et la commission de l'aménagement et des équipements suspend maintenant ses travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 16)

(Reprise à 14 h 16)

Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de l'aménagement et des équipements reprend maintenant ses travaux pour poursuivre la consultation particulière portant sur l'avant-projet de loi sur les pesticides. À ce moment-ci, j'aimerais faire part aux membres de la commission qu'il y a un changement à l'horaire de nos travaux. La session qui était prévue ce soir de 20 heures à 21 heures pour entendre l'Ordre des chimistes est reportée à 18 heures. Nous allons entendre l'Ordre des chimistes de 18 heures à 19 heures ou avant, s'il y avait lieu, suivant le déroulement de nos travaux.

À ce moment-ci, j'aimerais inviter les gens du Service d'aide au consommateur à venir prendre place, s'il vous plaît, devant la commission.

Je demanderais au porte-parole du Service d'aide au consommateur de s'identifier, s'il vous plaît, et d'identifier les gens qui l'accompagnent.

Service d'aide au consommateur

Mme Plamondon (Madeleine): Mon nom est Madeleine Plamondon. Je suis présidente du Service d'aide au consommateur. C'est Mario Saint-Pierre, recherchiste, qui m'accompagne.

Le Président (M. Saint-Roch): Nous vous souhaitons la bienvenue, Mme Plamondon. À partir de ce moment-ci, j'aimerais vous rappeler que vous avez jusqu'à un maximum de 20 minutes pour faire entendre aux membres de la commission votre mémoire. Je vous cède la parole.

Mme Plamondon: J'aimerais d'abord commencer par présenter un peu ce qu'est le Service d'aide aux consommateurs. C'est la première fois qu'on vient en commission parlementaire sur l'environnement et nous voulons vous dire un peu quelle est notre préoccupation. Le Service d'aide au consommateur est un organisme à but non lucratif qui fête ses treize ans d'existence aujourd'hui.

Une voix: Bonne fête!

Mme Plamondon: Merci. Nos objectifs sont de renseigner les gens et les conseiller dans leurs choix pour les produits et les services en consommation. Nous voulons aussi intervenir devant tout organisme privé ou public quand l'intérêt du consommateur est là. Dans l'évolution du Service d'aide au consommateur, on a vite vu, dans les premières années, qu'on ne peut pas dissocier la santé et l'environnement de la consommation, ce qui fait que la banque de données du Service d'aide au consommateur, qui est dans les deux langues, qui est informatisée et qui est disponible dans tout le Canada par une ligne centrée dans les deux langues, a aussi un gros secteur qui touche l'environnement. Évidemment, les pesticides sont une petite partie de l'environnement, parce qu'on en a aussi sur 18 contaminants, et c'est le plus gros secteur dans notre banque de données. Ce n'est pas la plus grosse partie de la banque de données, mais, comme secteur, c'est la plus grosse partie.

À deux reprises, le ministère de l'Environnement a subventionné pour étoffer la recherche, pour bâtir la banque de données et on a eu aussi des projets de mois de l'environnement, dont un spécialement sur les pesticides. On ne peut pas, comme je l'ai dit, dissocier l'environnement de la consommation. Chaque fois qu'on voit dans les journaux, parce que I'input de notre banque de données... Évidemment, il y a les revues spécialisées, mais il y a aussi tous les journaux à travers le Canada et on reçoit le sommaire des périodiques du monde entier, ce qui nous donne une vue globale du monde de la consommation et de l'environnement et qui nous permet de nous apercevoir que les pesticides causent un préjudice grave à tous les consommateurs où qu'ils soient et, particulièrement, on le sait, dans le tiers monde où tout ce qui ne passe pas dans les pays industrialisés est "dompé", si on peut dire, et mal utilisé.

Mais, si on se rapproche un peu plus de notre région, on vous a parlé ce matin - je pense que Daniel Green et d'autres vous l'ont dit - des accidents qui sont survenus et des inquiétudes, autant du DSC de Rimouski que d'autres endroits. Mais, dans ma région, dans la région de la Mauricie, au coeur du

Québec, il y a des choses qui ne sont jamais parues dans les journaux.

Je vais vous en donner quelques exemples. Cela vous dira pourquoi on intervient aussi avec un mémoire sur les pesticides auquel on aurait voulu pouvoir consacrer plus de temps, mais étant donné que c'est un des secteurs d'activité du Service d'aide au consommateur, on a préféré venir avec ce qu'on a plutôt que de ne pas venir du tout.

L'aldicarbe, qui est un pesticide utilisé dans les champs de patates, s'il est utilisé plusieurs années de suite, comporte un danger de contamination pour les nappes souterraines. Dans notre région, des résidents de Mont-Carmel, de Saint-Léonard-d'Aston -il y en a aussi à Sainte-Thècle - ne peuvent plus utiliser leurs sources d'eau.

On sait que l'aldicarbe est fait par Union Carbide et qu'Union Carbide n'est pas un modèle pour la protection de l'environnement. Union Carbide a même proposé à un cultivateur de lui fournir à vie de l'eau embouteillée parce que l'eau n'est plus utilisable sur son terrain. C'est pour vous dire que les répétitions d'aldicarbe, même si chaque application est faite de la bonne façon, font que cela se retrouve dans les nappes souterraines.

Une autre chose qui est arrivée et qui nous fait intervenir, c'est qu'en consommation vous vous en allez dans des grands magasins où on peut se servir tout seul. Les deux organismes qui nous ont précédés ce matin l'ont mentionné. On s'inquiète de la façon avec laquelle on peut si facilement aller chercher de la mort en vente libre.

D'abord, je vais prendre un exemple de ma région et cela non plus, ce n'est pas su dans le moment. Dans la région de Saint-Didace, il y a quelqu'un qui a acheté sept poches de roténone pour faire mourir les poissons dans un ruisseau pour pouvoir, après, ensemencer une espèce en particulier. Évidemment, un ruisseau, ça coule, et c'est le cultivateur de la terre voisine qui a déposé une plainte parce que ses animaux s'abreuvaient dans ce ruisseau.

Cela veut dire que n'importe qui, n'importe quand, peut aller acheter n'importe quoi et empoisonner qui il veut. On ne vit pas, dans le moment, des temps de terrorisme au Québec, mais avez-vous pensé avec quelle facilité n'importe quel poison pourrait se retrouver dans toute l'eau potable au Québec tellement c'est facile d'aller acheter n'importe quel pesticide.

On a procédé article par article; cela dénote nos préoccupations. Ce n'est pas poussé comme le mémoire de Daniel de SVP. J'aurais aimé y consacrer autant de temps que lui et j'approuve ce qu'il vous a dit, mais j'aimerais vous dire, avant que Mario commence, pourquoi, nous, on est si préoccupés. Dans le tiers monde, il y a une personne qui meurt toutes les minutes empoisonnée par les pesticides parce que l'industrie et tous ceux qui l'exploitent se foutent de la façon dont on les utilise. Ils veulent cela par mesure de prévention, avant qu'une mauvaise herbe pousse et avant même qu'il y ait quoi que ce soit, n'importe où. On le fait par prévention. C'est un peu comme si, comme consommateur, on prenait trois aspirines par jour pour prévenir les maux de tête. C'est un peu comme si on utilisait tous les médicaments en vente libre pour éviter d'avoir les maladies rattachées à ces médicaments. Vous vous imaginez quel cocktail cela peut faire dans l'organisme. C'est la même chose avec les pesticides. On se retrouve avec une conjugaison de pesticides par mesure de prévention. Avant même qu'il n'y ait une mauvaise herbe au printemps, on met des pesticides, au cas où il arriverait quelque chose.

On retrouve cela avec le poulet. Je vous donnerai] cet exemple, même s'il ne s'agit pas de pesticides. Le poulet qui sort de sa coquille commence à manger de la moulée où il y a des hormones, des antibiotiques. Avant même qu'il soit malade, on prévoit toutes les maladies. Vous pouvez vous imaginer ce que ce serait si on nourissait les êtres humains aux antibiotiques à la naissance juste au cas. On est en train de faire cela avec tous les pesticides qui se retrouvent dans notre organisme et qui sont utilisés soi-disant par mesure de prévention.

On désire aussi - vous l'aurez remarqué dans le mémoire - élargir le réseau d'émission dej certificats pour couvrir les agriculteurs. On est d'accord avec les autres orqanismes qui nous ont précédés. Au Québec, 85 % des utilisateurs de pesticides sont des agriculteurs. On a aussi inclus les détaillants, les vendeurs de machinerie qui iront avec ces pesticides et qui diront aux gens comment les utiliser.

Une chose qui n'est pas incluse dans notre mémoire et que l'on mentionnera tout de suite, c'est qu'il devrait y avoir non seulement une formation donnée aux agriculteurs, mais des modes d'emploi plus clairs. Parce que j'ai su, de quelqu'un du ministère de l'Environnement, qu'un litre et un gallon, pour certains agriculteurs, c'est la même chose. Donc, les quantités varient considérablement. Il devrait également y avoir des instructions très claires sur les mesures à prendre pour utiliser des pesticides pour ne pas qu'on se retrouve avec des gens qui, de bonne foi, vont utiliser des pesticides, mais vont quand même mal les utiliser.

Je laisse Mario vous donner...

M. Lincoln: M. le Président, est-ce que je pourrais faire une suggestion à Mme Plamondon et, M. Saint-Pierre? On a vingt

minutes pour chaque mémoire et it vous reste environ huit ou neuf minutes, selon l'horaire. Je sais que vous avez fait pas mal de travail sur des suggestions spécifiques concernant les articles. Je sais que dans notre cas et aussi le cas du service de la recherche du critique de l'Opposition, nous avons fait une grille d'analyse de toutes les recommandations, par exemple, sur chaque mémoire. J'ai une grille d'analyse de chacun de ces articles. Ce que je voulais vous suggérer c'est qu'il n'est pas nécessaire de lire chacune des recommandations en détail, parce que nous les avons annotées et analysées. Je sais que le service de la recherche du critique de l'Opposition a fait la même chose. Or, si vous voulez faire une synthèse, cela vous laissera peut-être plus de temps pour le faire dans le temps qui vous est alloué. C'est libre à vous de choisir. Si vous commencez à lire cela en détail, vous n'aurez pas assez de temps. Enfin, c'est libre à vous. C'est une suggestion que je vous fais. Je voulais vous dire que toutes les suggestions que vous avez faites concernant les articles ont été annotées. On pourrait ensuite les commenter et vous dire...

Mme Plamondon: D'accord. Mario, si tu veux résumer?

Le Président (M. Saint-Roch): M. Saint-Pierre.

M. Saint-Pierre (Mario): Un des points majeurs de notre mémoire, c'est que nous voulons élargir le système de permis et de certificats aux agriculteurs et aux sylviculteurs parce que, justement, ils représentent 85 % des utilisateurs.

Ensuite, nous voulons coordonner les recherches qui sont faites par les ministères et organismes du gouvernement sur les problèmes environnementaux reliés à l'usage des pesticides et sur les solutions de rechange possibles.

Nous désirons aussi que la publication et la diffusion des informations, des études et des enquêtes soient faites le plus largement possible.

À la section des permis, nous proposons que le titulaire d'un permis d'une catégorie déterminée doive tenir les registres d'achat, de vente ou d'utilisation et que, par réglementation, les renseignements suivants soient inclus: le nom, l'adresse et le numéro de permis du vendeur, le nom, l'adresse et le numéro de permis de l'acheteur, le nom, le numéro d'enregistrement et la quantité des pesticides vendue ou achetée et la date de la transaction. C'est un peu le même type de renseignements que nous voulons retrouver dans les registres d'utilisation.

Au sujet des permis temporaires, nous voulons aussi qu'ils soient effectifs pour ceux qui s'adonnent à la vente et non seulement à l'utilisation.

Dans la section des certificats, nous voulons que les gens qui donnent des renseignements sur l'utilisation des pesticides à la clientèle d'un détaillant, qui offrent ou dispensent des services reliés à la vente en gros de pesticides, soient inclus dans le mécanisme des certificats.

Toujours concernant les certificats, par rapport à l'article 38, nous désirons que les détaillants titulaires d'un certificat affichent à un endroit bien en vue et publient à chaque place d'affaires ou établissement leur certificat, que les titulaires de certificats qui exécutent des travaux de nature technique reliés à l'utilisation des pesticides le présentent à la demande d'un inspecteur.

J'essaie d'aller au plus important. Quant aux ordonnances, a l'article 47, nous désirons inclure - il y en a toute une série -le dépôt, la distribution, l'élimination, l'entreposage, le transport, le recyclage, l'étiquetage et les contenants des pesticides. Nous désirons aussi modifier cet article pour l'élarqir; il se lirait comme suit: "...s'il est susceptible d'en résulter un danger pour la vie, la santé, la sécurité, le bien-être ou le confort de l'être humain ou un dommage à la qualité du sol, de l'air, de la végétation, de la faune et des biens." Nous apportons des précisions à ce niveau. Nous souhaitons que les ordonnances s'appliquent dans les situations où des cas d'urgence sont soupçonnés de survenir. (14 h 30)

Les mesures conservatoires ne doivent pas seulement s'appliquer en cas de dommages immédiats; les dommages à long terme et à court terme doivent être évités. Si un dommage est susceptible d'être provoqué, il doit être évité.

À la section des injonctions, nous considérons que nul ne peut émettre, déposer, dégager ou rejeter ni permettre l'émission, le dépôt, le dégagement ou le rejet dans l'environnement d'un pesticide contrairement aux méthodes, normes et procédés - ici, nous précisons - reconnus par les normes fixées par règlement du gouvernement. C'est une nuance importante.

Toujours sur les injonctions: Dans le cas où le gouvernement, ses ministres ou ses sociétés d'État s'avéreraient de mauvais utilisateurs de pesticides, un citoyen doit avoir la possibilité de viser une de ces parties par le droit à l'injonction.

Quant à l'inspection, la saisie et la confiscation, les pesticides fabriqués et l'équipement doivent pouvoir être inspectés, saisis et confisqués. D'ailleurs, le Service d'aide au consommateur s'inquiète de la possible nocivité des choses saisies périssables et qui, selon le projet de loi, peuvent être revendues.

Au chapitre VI, quant à la réglementation, nous considérons comme essentiel

que soient établies des règles précises en ce qui concerne l'épandage, l'approbation préalable des projets d'arrosage, l'évaluation préalable de l'impact environnemental de telles pratiques, l'émission de quotas évalués en fonction de la capacité d'absorption de chaque milieu récepteur de pesticides.

Ensuite, à la section des dispositions pénales, nous constatons que les amendes ne s'appliquent pas dans le cas où les normes d'utilisation ou d'épandage ne sont pas respectées. Les amendes visent uniquement ceux qui contreviennent aux ordonnances ou au système d'autorisation d'utilisation ou de vente. Devons-nous conclure que l'avant-projet de loi est plus sensible aux droits des pollueurs qu'envers les défenseurs de l'environnement? En gros, c'est notre mémoire.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Saint-Pierre. S'il n'y a pas d'autres commentaires, M. le ministre.

M. Lincoln: M. Saint-Pierre et Mme Plamondon, merci beaucoup d'être venus témoigner ici et surtout de nous avoir soumis un mémoire qui, pour un organisme sans but lucratif, demande de la patience et beaucoup de temps bénévole pour étudier le projet de loi. Nous qui avons des équipes pour le faire, nous savons ce que c'est que de faire ce genre de travail avec une petite équipe de bénévoles. Donc, nous vous remercions tout particulièrement d'être venus témoigner. Peut-être devrais-je commencer par dire: M. Saint-Pierre, non, nous ne passons pas le pollueur avant celui qui aime prévenir l'environnement. Je pense que nous tous, quoique nous soyons des gens du gouvernement de part et d'autre, du côté de l'Opposition, comme du côté ministériel, nous avons les mêmes objectifs en vue. Ce n'est pas du tout l'idée. Le phénomène de produire un projet de loi, c'est d'indiquer qu'on veut restreindre. Ici, on a parlé de régir et de réduire les pesticides, on a dit qu'on allait prendre cela en considération, mais on poursuit certainement les mêmes objectifs. Vous avez fait beaucoup de recommandations sur les articles. Je voudrais situer très brièvement, dans le temps qui nous est alloué, quelques-unes des constatations que vous avez faites et vous indiquer certaines choses par rapport aux plus importantes notions que vous avez présentées ici. D'abord, pour le redire encore une fois: les agriculteurs et les sylviculteurs seront certainement inclus dans une disposition du projet de loi. C'est sûr qu'une réglementation sera incluse pour eux selon l'article 95 et l'habilitation qu'on a au deuxième alinéa de l'article 5. C'est sûr, les agriculteurs le savent et les sylviculteurs le savent. Officiellement, c'est l'engagement formel que la loi nous permet de faire et ils vont être inclus, mais pas au départ parce que cela prend beaucoup plus de temps dans des secteurs tellement vastes. Même M. Green, comme vous t'avez entendu ce matin, a suggéré une date, le printemps 1990, qui allait un peu plus loin que la date que nous nous étions fixée, soit janvier 1990, pour les agriculteurs. Pour les sylviculteurs, cela se fera bien avant parce que nous avons déjà une entente avec le ministre délégué aux Forêts pour produire le plus tôt possible d'abord une politique qui sera suivie d'une réglementation sur les pesticides. En fait, le milieu forestier voulait que ce soit identifié même avant avril de cette année. Je ne sais pas si on pourra y arriver, mais, en tout cas, ce sera le plus tôt possible. Le premier pas, c'est d'abord de faire la loi et de l'adopter.

Vous avez parlé des autres ministères. Les autres ministères sont soumis à la loi, en vertu de l'article 6. Donc, tout ce qui s'applique à un citoyen s'applique aussi aux ministères et aux organismes gouvernementaux. II n'y a pas de traitement de faveur dans la loi; ils sont traités de la même façon que tous les autres.

Plusieurs de vos recommandations ont trait à certaines choses - en fait, vous le dites vous-même - qui vont apparaître dans la réglementation éventuelle: par exemple l'adresse, les permis, l'étiquetage, etc. Ce sont des choses qui n'apparaissent pas dans le projet de Ioi parce que, normalement, ce ne sont pas dès détails qui sont inclus dans un projet de loi. C'est pourquoi le projet de loi habilite le gouvemement et le ministre à produire une réglementation afférente selon les secteurs et les conditions des secteurs. Je répète ce que j'ai dit en réponse à M. Green qui, tout à l'heure, me disait: Une loi sans réglementation, cela ne vaut rien; il faut étudier les deux ensemble. Je vous donne un engagement formel que, aussitôt que le projet de réglementation auquel on travaille présentement sera prêt, il va aller en prépublicaïion afin qu'il y ait une consultation relativement à cette réglementation sans laquelle le projet de loi est inerte. Ainsi, vous saurez exactement ce qu'il y aura dans cette réglementation et ce que vous mentionnez, nous en prenons bonne note car c'est le genre de choses qui sera inclus dans les dispositions de la réglementation.

Pour ce qui est de la section pénale, des pénalités de la loi, vous dites avec raison... Cela nous a été souligné; on l'avait remarqué, en fait, avant même de venir ici et c'est pourquoi j'avais dit, au tout début de la commission, que l'article 67 que vous retrouvez au chapitre de l'injonction l'article 67 du projet de loi si vous l'avez devant vous - va être aussi inclus dans le chapitre des pénalités. C'est-à-dire que cela va répondre à votre dernière remarque. Il n'est pas du tout question d'essayer... C'est

sûr qu'on l'avait mis dans le chapitre de l'injonction, mais il devait aussi être dans le chapitre pénal qui contrôle toutes les amendes: "Nul ne peut émettre..." Cela va être inclus, je vous donne mon engagement.

Je n'ai pas de questions formelles pour vous. Il y a eu tellement de questions par rapport aux choses que vous avez apportées. Je voulais vous donner ces confirmations sur les points les plus importants que vous avez apportés. Mon collègue va vous poser une ou deux questions pour finir notre temps avant que le critique de l'Opposition ne prenne la parole. Merci beaucoup.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Mme Plamondon, M. Mario St-Pierre, vous êtes ici à cause de votre sincérité à défendre la cause environnementale qui vous a poussés à écrire ce mémoire et à venir le défendre. Je vous félicite parce que vous êtes des bénévoles. D'autant plus que, Mme Plamondon, vous nous avez donné une série d'exemples qui nous démontraient certains gestes irresponsables qui sont posés et qui sont très représentatifs de la réalité blâmable un peu partout au Québec. Et ceci, pour faire part de vos inquiétudes et, indirectement, pour nous dire que le projet de loi que nous sommes enfin en train d'étudier doit être assez sévère, quand même, pour que, à l'avenir, les exemples que vous nous avez donnés ne soient plus possibles. Vous avez aussi parlé de la guerre aux pesticides préventifs dont l'innocuité n'est pas prouvée et je vais vous poser, à vous et à votre partenaire, les deux mêmes questions classiques qui sont importantes. Premièrement, vous représentez un service aux consommateurs. Des gens d'un autre service pour la protection du consommateur sont venus et je leur ai posé la question aussi. Seriez-vous pour une taxe sur les produits toxiques ou les pesticides afin que la recherche, l'éducation et la prévention soient financées par cette taxe? De plus, vous avez parlé dans votre introduction de l'usage restrictif que vous aimeriez que l'on fasse de certains pesticides. Voici la deuxième question qui est classique aussi: Ce projet de loi, d'après moi, n'est pas assez sévère et j'y vois a peine une façon d'empêcher quantitativement les pesticides d'être utilisés. J'aimerais avoir votre opinion sur ces deux questions.

Le Président (M. Saint-Roch): Mme

Plamondon.

Mme Plamondon: En réponse à votre première question, je trouve que le consommateur québécois est surtaxé. Ce n'est certainement pas moi qui vais vous suggérer de le taxer davantage. C'est certain que pour tous ceux qui sont tenus responsables dans l'environnement de mal utiliser les pesticides, de les produire ou de prendre cela comme première mesure avant de regarder des solutions de rechange, il devrait y avoir des contributions de la part de ces industries. Cela devrait être acquis parce que les solutions de rechange qui vont venir ne seront pas financées à même une taxe spéciale. Je ne crois pas, moi, que la taxe spéciale que vous suggérez ou qui pourrait être suggérée va être un incitatif assez fort, contrairement à ce que pensent ceux qui m'ont précédé, pour pouvoir empêcher l'utilisation de pesticides. Le lobbying de l'industrie, la production et la rentabilité d'une culture vont faire que les gens vont vouloir en utiliser, un peu comme on a augmenté les taxes sur l'essence et le transport en commun, dans certaines villes, on a encore de la misère à le faire utiliser. Il doit y avoir une promotion pour l'utiliser, même si les taxes sur l'essence ont monté de façon faramineuse.

Je suis contre une taxe supplémentaire pour les agriculteurs ou pour n'importe qui utilise les pesticides. Comme Daniel Green l'a dit: Les taxes s'en vont dans un trou noir et sont utilisées ailleurs. Je serais pour des dommages-intérêts exemplaires, par exemple. Je pense à Union Carbide. Comment allez-vous laisser passer une affaire comme celle-là? Comment allez-vous laisser passer que quelqu'un fait un produit, le met sur le marché légalement, il est utilisé par les agriculteurs et l'agriculteur perd sa principale source d'eau? Comment laissez-vous passer cela? Est-ce que c'est en taxant l'agriculteur que vous allez lui redonner son eau? II devrait y avoir des dommages-intérêts exemplaires vis-à-vis des grosses compagnies qui s'en sauvent trop facilement. Qu'est-ce qu'ils peuvent bien vous dire en secret pour que vous approuviez tous ces produits? Comment cela se fait-il? Comment vous sentiriez-vous si c'était votre terrain, que vous ne pourriez plus vous abreuver à ces sources et qu'on vous offrait comme compensation des bouteilles d'eau à vie? C'est quoi pour les descendants après? Comment réagissez-vous vis-à-vis de cela? J'aurais le goût de vous en poser des questions.

M. Blais: Allez-y.

Mme Plamondon: Comment réagiriez-vous? Qu'est-ce que vous feriez si vous étiez celui à qui Union Carbide a proposé de l'eau embouteillée à vie? Allez-y.

M. Lincoln: Je suis disposé à répondre.

M. Blais: L'Opposition, le pouvoir ou les deux?

Mme Plamondon: Pardon?

M. Blais: L'Opposition, le pouvoir ou les deux?

Mme Plamondon: Les deux.

M. Blais: On vous donne préséance.

M. Lincoln: Je suis très heureux de vous répondre. Je ne défendrai certainement pas Union Carbide ou n'importe quelle compagnie qui nous propose de l'eau à vie. En fait, dans beaucoup de discours que j'ai faits è l'AQTE ou ailleurs, j'ai dit que je trouve cela très très triste, sur le territoire du Québec où 20 % de notre masse est composée d'eau, que nous soyons obligés, même dans une infime proportion, de boire de l'eau embouteillée et après cela, d'avoir les contenants en plastique qui détruisent l'atmosphère. Je trouve cela inacceptable. Certes, du côté de l'Opposition comme de notre côté, la recherche que nous faisons, notre objectif éventuel est qu'il n'y ait pas de pesticides dans l'atmosphère.

Aujourd'hui, on est obligés de les tolérer, mais, comme vous le savez, madame, l'homologation, la mise en marché des pesticides, l'importation des produits, les contrôles sur les fabricants dépendent de la loi antiparasitaire du ministère fédéral. Jusqu'ici, il y avait très très peu de connexions entre le ministère fédéral de l'Agriculture, qui en a la responsabilité, et le ministère de la Santé et de l'Environnement fédéral. Je sors d'une rencontre avec le ministre ontarien de l'Environnement où on a justement parlé de cette question. Ce que nous voulons, nous, c'est de l'information sur la toxicité des produits. Cette information, c'est le fédéral qui l'a. C'est le fédéral qui la contrôle. Cela a été très difficile pour les provinces de l'obtenir. (14 h 45)

Nous sommes en train de mettre les pressions les plus actives pour l'obtenir. C'est cela, un des gros problèmes. On n'est pas partie à l'homologation dans les provinces. On ne sait pas ce qui se fait, parce que ce n'est pas nous qui avons les pouvoirs d'homologuer et c'est pourquoi il faut qu'on fasse des pressions ensemble dans toutes les provinces, toutes les organisations, sur le système d'homologation et de revue des pesticides homologués.

Malheureusement, le temps me manque, mais je voudrais bien vous dire toutes les mesures qui ont été prises de la part du gouvernement du Québec avec les autres provinces pour essayer de... Mais avec ce que vous dites par rapport à l'eau embouteillée, je ne ne peux pas être plus d'accord.

Mais ce n'est certainement pas de ce côté-ci ou de l'autre, je le sais, qu'on va essayer d'absoudre une compagnie ou une autre qui essaie de nous dire: Allez boire de l'eau embouteillée; c'est ce qu'on tient dans les magasins. C'est la dernière solution possible.

Mme Plamondon: Mais quelle sorte de mesures allez-vous prendre vis-à-vis des compagnies qui les produisent quand même Car c'est mis sur le marché, c'est utilisé par les agriculteurs. Quelle sorte de mesures allez-vous prendre? Est-ce que les amendes seront assez mordantes pour pouvoir les empêcher?

Souvent les amendes, dans des lois, ce sont simplement des permis additionnels. Si je regarde le domaine de la consommation, la publicité trompeuse, on peut poursuivre Distribution aux consommateurs et aboutir avec une amende de 1000 $. Ils se foutent de l'amende!'! C'est presque un incitatif à recommencer!

Il va falloir que les amendes soient vraiment exemplaires, parce que vous allez vous retrouver avec un système qui ne fonctionnera pas. Il va y avoir beaucoup de gens mis à l'amende, mais cela va être payant pour les compagnies quand même.

M. Blais: Je vais vous donner une réponse très courte.

M. Lincoln: Oui, d'accord.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Personnellement, vous me demandez ce que je ferais devant les grands pollueurs. Tout simplement, si j'étais ministre, quand je présenterais un projet de loi, je mettrais ce qu'il faut pour écraser ces meurtriers de notre environnement. Un point, c'est tout.

M. Lincoln: Mme Plamondon, je n'ai pas envie de vous chanter la pomme; je ne suis pas ici pour le faire. C'est très beau de dire: Bon, je vais fermer Union Carbide; je vais fermer Pfizer; je vais fermer toutes les compagnies qui produisent des pesticides. Tout d'abord comme je vous l'ai dit, l'homoloqation de tous les produits chimiques par rapport aux pesticides, les produits parasitaires, dépend de la constitution du Canada, du gouvernement fédéral.

C'est là où il faut mettre les pressions d'abord, parcel que c'est là qu'est le pouvoir. Je ne peux pas vous dire que nous avons les pouvoirs que nous n'avons pas. Nous ne les avons pas. Mais seulement ce qu'il faut... Vous allez dire d'aller les chercher. C'est bien amusant Allez chercher les pouvoirs, c'est ce qu'ils disent. Mais c'est ce que je vous disais. Si M. le député de Dubuc avait écouté ce que j'avais dit d'abord! Si le

député avait écouté, pour !a première fois, nous avons fait une réunion au mois de janvier où toutes les provinces du Canada se sont assises ensemble, avec les trois ministres fédéraux impliqués dans l'homologation des pesticides. Nous avons adopté une résolution demandant formellement, sous cinq chapitres, au gouvernement fédéral de participer beaucoup plus activement à l'homologation.

Donc, ce que nous avons fait, c'est beaucoup plus que ce qui a été fait jusqu'à présent. C'est pourquoi aujourd'hui, je me suis assis avec le ministre de l'Ontario pour discuter des pressions qu'on peut faire sur le gouvernement fédéral en ce sens. Mais vous dire aujourd'hui qu'on peut fermer ces compagnies ou les mettre à l'amende, etc., le point, c'est ceci: Légalement, ces compagnies ont le droit de produire certains produits chimiques d'après des critères.

Si les critères ne sont pas assez forts, il faut faire des lois pour les empêcher. Dans ce projet de loi, nous nous donnons des pouvoirs de bannir des pesticides au Québec. Nous nous donnons plus de pouvoirs qu'on n'en a jamais eu. Vous parlez des amendes. Il y a une section pour les amendes. Ce projet de loi prévoit des injonctions, des ordonnances du ministre, des amendes. Cela prévoit des choses. Il va y avoir une réglementation. On va avoir un système de permis, de certificats.

Au moins, il faut commencer quelque part. Je sais que, idéalement, on voudrait qu'on n'ait pas de pesticides dans l'atmosphère. Je sais que, idéalement, on voudrait que toutes les compagnies qui produisent des produits chimiques soient fermées. Demain matin, je voudrais être la personne qui vit dans un endroit où 5000 ou 6000 employés travaillent dans ces compagnies qui produisent des produits légalement.

Il faut vivre dans la réalité. Je suis un idéaliste, oui. Je suis un écologiste, oui; un environnementaliste, oui. Mais il faut des points de départ réalistes. Entre l'idéal et la réalité, il y a des pas à faire. Il faut essayer de les faire petit à petit. Au moins, on a commencé. On a fait une loi. On n'avait pas de loi; on n'avait pas de permis; on n'avait pas de certificat; on n'avait rien.

Maintenant, nous aurons quelque chose, nous aurons un instrument de départ. Comme je vous le dis, il faut travailler ensemble pour mettre de la pression là où le produit est homologué. C'est tout ce que je peux vous promettre aujourd'hui.

Le Président (M. Saint-Roch): Mme

Plamondon.

Mme Plamondon: Merci. Quand vous parlez d'emplois à préserver dans l'industrie des pesticides, je suis un peu réfractaire à cet argument parce que je vis dans une ville, Shawinigan, où on a connu la pollution et où on a des industries chimiques. On a connu la pollution. Quand on parlait publiquement d'empêcher la pollution, on nous disait: Cela va faire perdre des emplois. Il y a quatre usines qui sont fermées. Quand cela n'a plus été rentable, les compagnies s'en sont allées et nous ont laissé le dépotoir, elles ont laissé leur pollution. Une compagnie, quand ce n'est plus rentable, elle s'en va, elle se fout des gens. Il ne faut pas prendre comme argument les emplois seulement, c'est du chantage que les compagnies peuvent faire pour continuer à produire, à amener des pesticides et à polluer l'environnement.

C'est clair que cela doit être une préoccupation économique pour vous et pour moi aussi. Je trouve que c'est dommage, mais ça ne doit pas être un argument qui nous tient comme une épée de Damoclès. On dit: Si vous nous faites fermer, il y aura moins d'emplois, et il y a déjà une récession économique. Je n'accepte pas cet argument parce que j'ai connu cela à Shawinigan, et je ne le prends pas.

Il y a une autre chose qui m'inquiète aussi et dont je voudrais vous parler. Vous nous avez parlé de 1990. Qu'est-ce qui va arriver des grands magasins comme Canadian Tire où on peut acheter à volonté tous les pesticides? Qu'arrive-t-il? Est-ce que vous allez faire quelque chose?

M. Lincoln: Quand j'ai parlé de 1990, j'ai parlé des agriculteurs. La loi s'appliquera à Canadian Tire et aux vendeurs dès le moment où il y aura une réglementation. Je n'ai pas parlé de 1990 pour Canadian Tire.

De plus, je pense que j'ai parlé aussi franchement que je l'ai pu sur la question. Je n'ai jamais dit que les emplois sont prioritaires à la santé et à la qualité de vie des citoyens. J'ai dit qu'on vit dans un monde réel, on ne vit pas dans un monde idéal. Aujourd'hui, on pourrait aller partout au Québec et fermer chaque grosse industrie polluante. Je pourrais vous en donner des exemples longs comme ça. Ne croyez pas que j'accepte cette situation. Cette année, nous avons signé des accords avec deux compagnies, Dioxyde et N L Chem qui ont envoyé des milliers de tonnes d'acide dans le Saint-Laurent. Nous avons dit à ces compagnies qu'elles seraient pénalisées, c'est-à-dire qu'elles devraient fournir 50 00n 000 $ pour dépolluer d'ici 1991. Nous avons signé un accord avec la compagnie QIT qui pollue depuis des années au Québec, et la compagnie va liquider 40 000 000 $ pour dépolluer. C'est ce qu'il faut.

Je sais que la qualité de vie passe avant, mais, en même temps, si demain matin, par exemple, un gouvernement disait: On ferme Noranda, il faut aussi tenir compte de ceci: Est-ce qu'on ferme les deux villes

de Rouyn et Noranda tout de suite? Qu'arrive-t-il de toutes ces infrastructures? Qu'est-ce qui arrive des villes? II faut être réaliste. Il faut mettre de la pression sur les industriels, leur dire franchement ce que vous avez dit et ce que je vous dis aujourd'hui pour qu'ils dépolluent et qu'ils nettoient leur industrie. C'est ce qu'il faut faire de plus en plus. La réponse n'est pas de dire: Bon, il y a des industries qui polluent parce qu'à ce moment-là il faudrait tout fermer. II faudrait fermer General Motors, il faudrait fermer Hyundai, il faudrait cesser tout ce qu'on fait. Ce qu'il faut, c'est faire de l'industrie propre et convaincre les industriels que l'environnement est essentiel au développement économique.

Je crois que les emplois doivent être préservés dans un environnement économique sain qui passe par un environnement économique, écologique et environnemental. Cela n'arrivera pas demain matin et c'est pourquoi je veux vous dire que je ne peux pas vous promettre de solutions instantanées. S'il y en avait, les autres gouvernements les auraient adoptées. J'aurai une rencontre avec le ministre de l'Environnement de l'Ontario qui a une loi sur les pesticides depuis 1947, depuis 40 ans, et les agriculteurs n'y sont même pas encore inclus. Ils sont en train de travailler pour faire un système. Nous, on parle de 1990, c'est déjà quelque chose.

Ce n'est pas facile. C'est facile de le dire, mais c'est très difficile de le faire, il y a tellement de circonstances. Mais il faut avoir un objectif. Je suis content de savoir qu'on partage exactement le même objectif. Je sais que vous voudriez y arriver plus vite que moi parce que je n'ai pas les moyens d'y arriver. Il faut de l'argent, il faut des taxes. Si on avait voulu avoir 20 inspecteurs dans les pesticides... L'Ontario a aujourd'hui 41 inspecteurs de l'environnement. Ici, on en a un et on en aura bientôt trois. On n'a pas les moyens, que voulez-vous? C'est cela, la réalité. On essaie d'agir le plus vite possible.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Je vous trouvais intéressante. On pourrait passer l'après-midi avec vous. C'est sûr. Je ne suggère pas que l'on ferme les compagnies. Ce n'est pas ce que je veux dire. Je pense qu'il y a différents endroits et différents intervenants. Les différents intervenants doivent prendre leurs responsabilités, autant les consommateurs, madame, que les gouvernements et que les compagnies. Je pense qu'il va falloir, de votre côté, en tant que représentants des consommateurs, que vous vous disiez: S'il y a un prix à payer pour un environnement sain, on doit être prêt à le faire.

Deuxièmement, au sujet des compagnies, il faut leur enseigner que protéger des profits à court terme, comme plusieurs de ces compagnies le font, au détriment de l'environnement et de la santé des individus ce n'est pas rentable à long terme. C'est destructeur de l'humanité et de la nature humaine.

Les gouvernements doivent de plus en plus prendre leurs responsabilités propres, eux aussi. Par exemple, en Ontario, ils ont même emprisonné le président d'une qrande compagnie. nls n'ont pas demandé la permission à nOttawa. Je ne dis pas que je suis d'accord pour emprisonner tous les présidents den compagnies qui font tort à la nature humaine, à ta santé, qui ne respectent rien. Ce n'est pas ce que je dis. Mais on voit qu'il y en a qui sont un peu plus aptes à prendre leurs responsabilités. C'est dans ce sens. Les responsabilités doivent être prises aux trois endroits pour que la nature soit respectée autant dans le sol, dans l'air que dans l'eau. C'est nous, les humains, qui avons l'usufruit de cette nature et c'est nous qui la détruisons par un manque de rationalisation!! de nos gestes ou une cupidité maladive de profits immédiats de certains gros producteurs. C'est ainsi que les choses vont mal.

Là, le gouvernement arrive avec un avant-projet de loi qui manque un peu de muscle. Il en manque. On est là pour se le dire. On n'est pas ici pour se "partisaner". C'est très dangereux, quand on discute avec quelqu'un qui nous présente un mémoire, que, d'un côté ou de l'autre, on dise des choses partisanes qui dépassent un peu notre esprit ou ce qu'on veut dire. Ce n'est pas ça. On ne veut pas vous faire assister à un débat partisan.

II est vrai aussi, et je tiens à vous le dire, que c'est beaucoup plus facile quand on est un groupe de pression comme le vôtre ou qu'on est dans l'Opposition, comme moi, de critiquer ceux qui ont la responsabilité que lorsque l'on a à la mettre vraiment en application de façon directe. C'est beaucoup moins courageux dans l'Opposition de dire ce qu'il faut faire que de le dire quand on est au pouvoir. Ca aussi, il faut qu'on l'admette. Mais tous ensemble, c'est pour cela que l'on reçoit des gens ici, c'est pour cela que vous êtes venus. C'est votre sincérité qui vous a amenés nous voir. Je vous remercie personnellement d'être venus. La leçon que vous nous avez servie ou ce qu'on s'est mutuellement dit, j'espère que cela va servir à l'amélioration de ce projet de loi. J'aimerais qu'il ait un peu plus d'étoffe, un peu plus de muscle, un peu plus de sévérité.

Le Président (M. Saint-Roch): Mme

Plamondon.

Mme Plamondon: J'aimerais poser une question à M. Lincoln. Dans votre réunion avec les autres provinces, est-ce qu'il a été

question de libre-échange? Est-ce qu'il a été question, advenant le cas où des produits seraient refusés dans un pays et acceptés dans l'autre, de la façon dont ils circuleront? C'est une autre des préoccupations de notre groupe en consommation. Est-ce que vous avez prévu, dans vos discussions avec le groupe de travail - c'est ma deuxième question - faire des opérations-témoins, un peu comme en protection du consommateur'' On prend une région et on va aller voir de quelle façon les pesticides sont utilisés et on fait un exemple. Est-ce que vous avez prévu des façons de procéder comme celles-là? Un peu pour mettre les gens sur leurs gardes et qu'ils se disent: Ça pourrait nous arriver que des inspecteurs qui ne se nomment pas viennent regarder de quelle façon cela se passe. Un peu comme il y a opération-témoin pour les réparations d'autos et de télévisions dans le domaine de la consommation dans votre gouvernement, à l'Office de la protection du consommateur.

Est-ce que vous avez prévu, aussi dans le Protégez-vous et dans d'autres journaux et revues qui sont lus par les consommateurs, de faire des mises en garde pour que les consommateurs fassent attention dans la manipulation? Est-ce qu'il y a des choses comme cela qui ont été discutées? (15 heures)

M. Lincoln: II y a beaucoup de questions dans votre question. Principalement, pour commencer par la dernière, tout ce que je peux vous dire, c'est que, lorsque le projet de loi sera adopté - c'est l'étape à laquelle on travaille - il y a tout un système de communication, d'information et de sensibilisation du public qui va se faire en même temps que le projet de loi sera lancé dans le public; l'information sera faite dans le secteur. On a déjà commencé à travailler avec les différentes associations qui contrôlent ces secteurs: l'horticulture, l'extermination, les agriculteurs, les sylviculteurs, etc. Il va y avoir beaucoup de dissémination, d'information par le biais des médias. Cela, c'est une partie de la campagne; naturellement, cela va se faire lorsqu'il y aura un projet de loi pour l'appuyer. C'est le point central et il faut d'abord passer par là.

Lorsque les provinces ont rencontré le gouvernement fédéral, le sujet portait spécifiquement sur les pesticides. Cette rencontre avait été mise de l'avant par le Conseil canadien des ministres des Ressources et de l'Environnement duquel tous les ministres de l'Environnement, fédéral et provinciaux, sont membres automatiquement. Les points qu'on a soulignés à M. Wise, le ministre de l'Agriculture, par une résolution établie par toutes les provinces unanimement sont les suivants: 1. Les difficultés des provinces d'obtenir de l'information du ministre fédéral de l'Agriculture relativement aux pesticides homologués. Ces difficultés empêchent les provinces de prendre les décisions appropriées lorsqu'il s'agit de permettre l'usage d'un pesticide en vertu d'une loi provinciale. Nous voulons une plus grande information directement aux provinces, surtout sur la toxicité de ces produits, information qu'eux seuls ont. 2. Une implication insuffisante des préoccupations de la santé et de l'environnement dans la gestion des pesticides au niveau fédéral. On demande que les deux autres ministres soient impliqués de la façon la plus active. Les deux autres ministres, M. Epp et M. McMillan, ont participé à cette rencontre et acceptent cette suggestion. 3. La réévaluation de tous les pesticides déjà sur le marché. 4. Le besoin d'assurer un suivi et une surveillance écologique des pesticides utilisés. 5. Le besoin d'assurer une formation adéquate pour les utilisateurs de pesticides. 6. L'homoloqation temporaire des pesticides, c'est-à-dire qu'il y a tout un système d'homologation qu'il faut contrôler pour les pesticides qui sont en train d'être testés, etc. Nous voulons qu'ils soient contrôlés beaucoup plus sévèrement.

Le ministère fédéral de la Santé et le ministère de l'Environnement sont prêts à collaborer de très près à la réalisation de ces choses le plus tôt possible. M. Wise a pris l'engagement de reqarder cela. Une lettre signée par toutes les provinces sera acheminée par le conseil canadien pour confirmer ces choses au gouvernement fédéral. C'est là où tout naît et c'est là où il faut que les pressions se fassent d'abord parce que nous n'avons pas de pouvoir d'homologation; nous n'avons pas, non plus, de pouvoir d'importation et de contrôle des pesticides à leur naissance. Tout ce qu'on a, c'est le pouvoir de contrôler la distribution et la vente sur notre territoire.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le député de Terrebonne.

M. Blais: C'est pour dire merci, le temps est écoulé des deux côtés. Je vous remercie, madame. Je suis content que vous soyez venue, je le répète. Vous nous avez un peu sensibilisés par vos fresques qui ont frappé notre esprit, on aurait juré que vous parliez en couleur, parce que vous parliez bien. Je vous remercie d'être venue, madame, et je vous félicite du bénévolat que vous faites pour la cause de l'humanité. Merci beaucoup!

M. Lincoln: Merci beaucoup, Mme Plamondon, surtout pour votre conviction dans vos arguments; c'est ce qui compte surtout.

Le Président (M. Saint-Roch): Mme

Plamondon, je tiens à vous remercier de la qualité de votre intervention et de votre apport aux travaux de cette commission.

Je demanderais maintenant au Groupe de travail sur les pesticides de prendre place devant la commission. Je demanderais au porte-parole du Groupe de travail sur les pesticides de s'identifier et d'identifier les personnes qui l'accompagnent.

Groupe de travail sur les pesticides

M. Brodeur (Jules): Mon nom est Jules Brodeur; je suis accompagné de la présidente du groupe, à ma gauche, Mme Esther Goldenberg. J'ai également avec moi des collègues: M. Perry Anderson, M. Gaston Chevalier et M. Pierre Lajoie.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Brodeur. J'aimerais vous rappeler que vous avez maintenant jusqu'à un maximum de 20 minutes pour présenter votre mémoire et votre organisme aux membres de cette commission. Je vous cède maintenant la parole.

M. Brodeur: Je vous remercie. J'aimerais d'abord vous présenter très brièvement notre groupe de travail. Celui-ci a été créé en 1985 par un groupe de citoyens de la région de Montréal à la suite d'une prise de conscience des risques reliés à l'utilisation des pesticides. Notre groupe ne s'oppose pas de façon irréductible à l'utilisation des pesticides. Il prône plutôt un recours rationnel à ces agents chimiques ainsi que l'emploi de méthodes différentes de lutte contre les insectes et autres organismes dits nuisibles. Le principal moyen d'action du groupe de travail est l'information et l'éducation du grand public, mais aussi des professionnels comme par exemple les médecins qui sont appelés à traiter les cas d'intoxication aux pesticides. Pour atteindre ses objectifs, le groupe de travail s'est adjoint un certain nombre de scientifiques québécois qui possèdent des compétences diverses dans le domaine des pesticides et, avec leur collaboration, le groupe de travail a déjà des réalisations intéressantes, dont un colloque sur les pesticides à l'intention du grand public, des dépliants d'information sur l'utilisation des pesticides. Nous avons avec nous des comptes rendus du symposium que nous avons tenu l'an dernier et il nous fera plaisir d'en laisser des copies à l'intention des membres de la commission.

L'avant-projet de loi sur les pesticides a été passé en revue par les consultants du groupe de travail et nous appuyons les principes guides de cette loi dans ses éléments qui visent à classifier les pesticides en fonction des risques d'utilisation, à vérifier la compétence des utilisateurs et des vendeurs, et à contrôler la vente et l'utilisation des pesticides. Nous aimerions toutefois formuler un certain nombre de commentaires et soumettre un certain nombre de recommandations à l'intention de la commission. Étant bien conscients par ailleurs que certains des commentaires que nous ferons s'appliquent davantage à la réglementation qu'au projet de loi lui-même, nous les mentionnons quand même et, à l'invitation qui a déjà été faite par M. le ministre, je ne lirai pas le mémoire que nous avons préparé mais j'insisterai davantage sur les points principaux.

En ce qui concerne les articles 7.1 et 7.2 au chapitre des pouvoirs du ministre, on y voit que le ministre a les pouvoirs de faire effectuer des recherches, de coordonner ces recherches, d'exécuter des études et des enquêtes. Le groupe de travail est d'avis qu'une loi de l'importance de celle qui est maintenant proposée doit se donner des outils pour objectiver le degré de contamination de l'environnement et éventuellement aussi pour objectiver l'impact de la loi sur la qualité de l'environnement. La façon de procéder à cette objectivation consiste à mettre sur pied un réseau de surveillance de la qualité de l'environnement. Un réseau qui s'intéresse non seulement; aux effets des pesticides sur la santé de l'humain, mais aussi sur les divers éléments de l'écosystème. C'est pourquoi le groupe de travail recommande que la loi contienne des dispositions engageant expressément le ministre à mettre sur pied un réseau de surveillance de la qualité de l'environnement dont les activités seraient centrées principalement sur la recherche de la persistance des pesticides dans l'environnement physique et chez les organismes qui y vivent.

Au chapitre III, concernant l'octroi de permis, nous 'avions, comme plusieurs autres groupes sans doute, déploré l'absence dans la loi de dispositions touchant tes agriculteurs et les sylviculteurs. Nous avons déjà eu, lors de la présentation précédente, de la part de M. le ministre, une réponse à cette remarque. Nous la reformulons et il nous semble tout à fait normal que les agriculteurs et les sylviculteurs soient soumis à cette loi.

En ce qui concerne la durée du permis, considérant le fait que les concepts changent et que les règles de pratique évoluent, nous sommes d'avis que la durée de validité d'un permis devrait être relativement courte, même très courte dans certains cas, une année, dans le cas d'utilisation pour l'extermination et l'entretien paysager. Dans le cas de l'utilisation en aqriculture et en sylviculture, la durée pourrait être plus lonque.

Concernant l'octroi de certificats de compétence, nous nous interrogeons sur la portée de l'article 30.4° qui précise qu'aucun

certificat ne sera requis de celui qui exécute des travaux de nature technique reliés a l'utilisation des pesticides ou qui donne des renseignements s'ill exerce ses activités sous la supervision immédiate d'une personne physique elle-même titulaire d'un certificat. Nous nous posons des questions, à savoir s'il sera possible, dans les faits, d'assurer que ta personne détenant le certificat pourra superviser son employé de façon immédiate, comme le demande le projet de loi.

Concernant la durée du certificat, nous n'avons pas, bien sûr, de suggestion précise à faire, sauf une recommandation qui va dans le sens de l'obligation de la recertification, c'est-à-dire de la réévaluation périodique de la compétence. Cette réévaluation devrait tenir compte d'au moins deux éléments: d'abord qu'il y ait évidence que le détenteur du certificat a effectivement pratiqué sa profession ou son métier de façon continue pendant la durée de son certificat et, deuxièmement, qu'il y ait aussi évidence qu'il a maintenu ses connaissances à jour vraisemblablement par des démarches de type éducation permanente.

En ce qui a trait à la classification des pesticides - nous en sommes maintenant à la réglementation - le groupe de travail insiste avec vigueur pour que celle-ci soit souple, qu'elle soit ouverte et basée sur un ensemble de critères qui ne tiennent pas compte uniquement de la toxicité absolue du pesticide, mais également d'autres critères dont l'un des plus importants, à notre avis, est la persistance dans l'environnement. Nous disons très simplement et nous insistons sur ceci; cette classification devrait être ouverte; elle devrait être souple pour pouvoir procéder à des mutations à l'intérieur de la classification.

Le groupe de travail est d'avis qu'il est absolument important qu'il y ait un comité "aviseur" qui assiste le ministre. L'existence de ce comité "aviseur" ne semble pas visée par le projet de loi. Ce comité devrait être très représentatif et devrait inclure des représentants des ministères concernés, des représentants des associations professionnelles d'utilisateurs de pesticides et aussi des membres du grand public qui auront manifesté un intérêt éclairé pour les questions de santé publique et de protection de l'environnement.

En relation avec les articles 100.3 et 100.6 , le groupe de travail aimerait soumettre quelques recommandations pertinentes à la réglementation, laquelle touche les lieux de vente des pesticides. Nous affirmons qu'aucun pesticide ne devrait être vendu sous quelque forme que ce soit dans un lieu où se vendent également des aliments. Nous disons que tes pesticides qui sont vendus sous forme concentrée ne devraient être vendus qu'en des endroits où l'on trouve une personne possédant un certificat. (15 h 15)

Comme nous sommes un groupe oeuvrant de façon plus qrande en milieu urbain, nous formulons également une recommandation qui a trait à l'information à donner au public à la suite de l'utilisation des pesticides dans les endroits publics, par exemple dans les parcs, et même autour des résidences privées. Je pense ici à cette activité qui consiste en l'arrosage des pelouses, que cela soit dans les endroits publics ou les endroits privés. Il serait fort utile qu'à l'intention du public des informations soient transmises de façon très visible, sous forme de piquets d'avertissement, qui aviseraient de l'usaqe très récent de pesticides, qui identifieraient les pesticides et qui identifieraient également la durée de l'affichage à cette fin. Pour éviter qu'il y ait disparité dans les signes ou les piquets d'avertissement, nous suggérons que cette partie de la réglementation soit sous contrôle provincial. Enfin, nous nous intéressons également au chapitre des dispositions pénales. Il est possible qu'en raison de la dévaluation du dollar les montants déjà prévus à la loi deviennent, après quelques années, ridiculement minimes. Donc, nous suggérons très simplement qu'il y ait, quelque part dans la loi, un texte donnant un peu plus de dents à ces dispositions pénales et qu'au moins ces dispositions pénales soient indexées au niveau de ta valeur actuelle du dollar.

Le groupe de travail remercie la commission de l'aménagement et des équipements pour l'invitation qui nous a été faite d'exprimer notre opinion relativement à l'avant-projet de loi sur les pesticides.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. Brodeur. M. le ministre.

M. Lincoln: Dr Brodeur, je voudrais tout d'abord vous remercier de venir ici témoigner et vous dire de continuer le travail que votre groupe a entrepris depuis plusieurs mois déjà et même plus, pour sensibiliser le public, le gouvernement et tous les intervenants sur la question des pesticides. Je dois témoiqner publiquement ici, puisque l'occasion m'en est donnée, et féliciter Mme Goldenberg d'avoir eu l'idée et l'initiative de réunir un groupe de personnes travaillant en science environnementale qui est vraiment un panel des plus prestigieux qui puisse se trouver n'importe où au Canada. J'ai eu l'occasion de travailler avec vous depuis un bout de temps, de participer à votre colloque à Montréal où vous tous ici, et aussi le Dr Hill qui ne peut pas être ici aujourd'hui, ainsi que le Dr Nantel, aviez fait des représentations vraiment étonnantes. Je me souviens surtout de celle du Dr Hill, une personne de réputation mondiale

reconnue dans le domaine des moyens naturels et des méthodes alternatives aux pesticides. Je vous félicite donc, Mme Goldenberg, d'avoir pris l'initiative de réunir un groupe tellement talentueux et prestigieux dont la connaissance et l'expertise appuient toute votre démarche. C'est pourquoi, naturellement, votre mémoire est pris avec beaucoup de sérieux parce que je sais que les personnes qui vous accompagnent aujourd'hui, le Dr Brodeur, les personnes qui ne sont pas ici comme les Drs Ecobichon, Hill et Nantel et vous autres avez des expériences vécues que vous voulez transmettre au gouvernement du Québec, Dans ce sens, je voudrais répondre brièvement - dans le temps que nous avons -aux questions que vous avez soulevées. J'essaierai de vous répondre de la façon la plus explicite possible.

Vous avez, par exemple, fait référence, de même que chacun des intervenants, à la question des agriculteurs et des sylviculteurs. Je ne veux pas reprendre ce que vous avez peut-être déjà entendu lorsque M. Green a parlé et les autres aussi. Je peux vous donner l'engagement formel que, selon tous les juristes du gouvernement, sont officiellement inclus, dans l'alinéa 2 de l'article 5 et dans l'article 95 du projet qui prévoit la réglementation éventuelle, les agriculteurs et les sylviculteurs. On peut les inclure, on va les inclure. Ils ont déjà été avisés en conséquence.

L'idée était de ne pas les inclure au départ vu la dimension immense du projet dans le cas de l'agriculture spécialement. Le projet de réglementation sur l'agriculture sera pour 1990; quant aux sylviculteurs, cela va être bien avant cela. Pour ce qui est du réseau de surveillance, M. Green, de la Société pour vaincre la pollution, avait fait la même recommandation que nous allons certainement examiner. Pour ce qui est de la durée de validité d'un permis, là aussi, nous nous prenons cela en considération. Il y a beaucoup de gens qui ont demandé des permis renouvelables pour une période de temps, selon le type de produit. Nous allons considérer toute cette question et elle va être traitée, naturellement, dans la réglementation à suivre. Comme je l'ai cité, la réglementation va être prépubliée et va faire l'objet d'une consultation auprès de votre groupe et auprès des autres groupes qui ont comparu ici et tous les intervenants qui sont impliqués.

Pour ce qui est de la question de supervision immédiate, là aussi il y a eu beaucoup de remarques et certaines suggestions pratiques. Par exemple, celle de la Société pour vaincre la pollution concernant le ratio de personnes, selon le volume de pesticides vendus et utilisés. Nous regardons toute cette question. Je peux vous assurer que, par exemple, dans la question des magasins à rayons, nous avons réalisé qu'il faudra renforcer la loi pour qu'elle soit beaucoup plus précise et élargie afin de permettre de réaliser une supervision beaucoup plus effective et peut-être un système de certificats qui va aller beaucoup plus loin que ce qui était prévu initialement. En tout cas, cette question va être prise très très au sérieux et revue avec le concours des organisations qui ont fait des suggestions pratiques pour arriver à une méthode plus|efficace de supervision.

Pour ce qui est de la réglementation, oui nous avons les pouvoirs dans la loi de reclassifier des produits et nous les avons automatiquement par la réglementation elle-même. II y aura des classifications de départ qui vont être surtout basées sur l'homologation fédérale. Nous allons avoir cinq classifications. Certaines provinces comme l'Ontario en ont six. Généralement, cela varie de quatre à six. Nous allons avoir cinq classifications. Nous pourrons, par règlement, changer les classifications d'après les expériences ultérieures du vécu de ces produits. Nous aurons automatiquement le pouvoir de changer la réglementation et changer la classification de ces produits.

Votre recommandation principale - je pense que vous serez d'accord que c'est là que vous avez mis le plus d'accent d'instituer unît comité "aviseur" revient dans je ne sais combien de mémoires. Vous avez entendu parler d'un genre de tribunal en plus d'un comité "aviseur", comme l'a suggéré M. Green, ce matin. Certains, ont suggéré un conseil consultatif. Je sais qu'au moins trois provinces ont des comités "aviseurs". Nous allons étudier cette question de très très près, à savoir quelle forme ce comité voudrait prendre, et si ce serait un comité formel ou informel. On va regarder toute cette question de très près et nous allons étudier toutes les suggestions qui nous ont été faites en çe sens dans les mémoires.

Nous prenons aussi bien à coeur votre recommandation que les pesticides ne devraient pas être vendus dans les mêmes étalaqes que les aliments ou aux mêmes endroits que les aliments. Cela coule tellement de source. C'est le genre de choses qu'on va établir dans la réglementation? et votre remarque est certainement très appropriée.

C'est la même chose pour la question des piquets d'avertissement. Nous allons prévoir ces méthodes ou bien dans la réglementation ou bien dans les codes de pratiques qui vont s'établir dans les secteurs clés. Il va y avoir des codes de pratiques, un peu comme le Code des professions, avec tous les qrands secteurs. Là, dans ces codes de pratiques, on va avoir des critères et des normes qui vont être établis et où les organisations çoncernées, par exemple, la FIHOQ et l'ASEQ, etc., vont s'engager dans

un accord formel avec Je ministère à suivre ces normes. Ce sers une des choses qui vont être considérées de plus près.

Pour l'indexation des pénalités, c'est quelque chose qui semble logique, Je suis entièrement d'accord avec vous que, malheureusement, pour cette question, ii n'y a aucun mécanisme d'indexation prévu juridiquement aujourd'hui au Québec et, en fait, dans aucune province du Canada, je pense. La loi pourrait toujours être modifiée pour indexer les montants prévus si ceux-ci deviennent désuets. Mais il n'y a pas de mécanisme automatique. Je ne pense pas -en fait, c'est l'opinion de nos conseillers -que ce serait permis par le ministère de la Justice et le comité législatif. Nous allons regarder si c'est possible, mais je ne le crois pas, parce que cela poserait des complications et des précédents peut-être très difficiles par rapport au système judiciaire, parce qu'il faudrait que le système judiciaire tienne compte presque à tous les jours de l'indexation. Cela pourrait créer des précédents pour toutes sortes de cas, considérant que des milliers de causes sont vécues tous les jours. Alors, cela poserait des problèmes administratifs graves. C'est pourquoi ce n'est pas inclus automatiquement dans les lois. Mais, en tout cas, on prend acte de cela et on va voir ce qui en est.

Si vous avez des questions à nous poser, je serais aise d'essayer de vous répondre. Entre-temps, j'ai essayé de toucher aux points principaux que vous avez touchés. On continuera de travailler de très près avec vous, sachant, comme je vous l'avais dit auparavant, l'importance de la représentation de votre groupe,, Si jamais on forme un comité "aviseur", vous pouvez être sûr qu'on va essayer de puiser dans vos rangs. Merci beaucoup.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Je vous remercie beaucoup d'être le, moi aussi. Dans la tradition, cela fait pratiquement un cliché au début, mais c'est sincère quand même, d'une fois à l'autre. Vous êtes un petit groupe qui vous battez contre les fabricants en gros. Ce n'est pas direct; vous n'êtes en guerre contre personne, mais vous êtes contre la tradition en cours de l'emploi abusif de pesticides ou contre la publicité, souvent, à cause de laquelle les gens ne pensent pas des pesticides ce qu'ils devraient en penser.

Mais des petits groupes comme cela sont, bien sûr, absolument nécessaires dans une société. Mais il ne faut pas se décourager si on vous compare à une crevette qui s'attaquerait à un requin. C'est bien sûr. L'Opposition se sent comme une espèce d'hippocampe devant la baleine qui est le pouvoir aussi. Alors, je me sens exactement dans la même position. Cela ne fait que vous honorer d'avoir travaillé et d'avoir formé ce groupe-là, parce que vous savez que, étant très peu nombreux, on est souvent moins écouté. Mais, vous voyez, aujourd'hui vous êtes là et on vous écoute avec plaisir et avec délice.

Dans votre lutte pour faire comprendre ce que sont les pesticides aux Québécois, vous avez dit à la page 1 de votre mémoire: "Ainsi, le 13 avril 1986, le groupe a tenu, au Victoria Hall de Westmount, un colloque à l'intention du grand public, intitulé "Les pesticides, le public et le gouvernement". C'est extraordinaire comme colloque. Mais je ne vois nulle part quels seraient è peu près les petits résultats de ce colloque et quel a été le résultat du public devant ce gouvernement ou des pesticides devant le public. Quel a été le résultat de ce petit colloque?

Le Président (M. Saint-Roch): Dr Brodeur. (15 h 70)

M. Brodeur: Merci. Comme je vous l'indiquais, nous avons ici des copies de ce colloque pour chacun de vous et il me fera plaisir de les déposer immédiatement.

M. Blais: Cela nous ferait plaisir, si M. le Président le permet.

M. Brodeur: Nous en avons des copies immédiatement.

Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que c'est le symposium du Groupe de travail sur les pesticides?

M. Brodeur: C'est exact. M. Blais: Je ne l'ai pas eu.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le secrétaire me dit que cela a été déposé. Nous ferons parvenir une copie aux membres.

M. Blais: C'est gentil. Je m'excuse de cette question redondante mais tout le monde était censé avoir reçu cette copie. Personnellement, je ne l'ai pas reçue et, vu que le temps de ia commission est très précieux, j'en prends copie et je le lirai moi-même. Je suis persuadé que c'est un document très riche. Si vous voulez le résumer pendant une minute ou deux, ça me fera plaisir.

M. Brodeur: J'ai eu le plaisir non pas de présenter une communication à ce colloque mais des collègues qui sont à cette table et d'autres qui n'y sont pas y ont participé et le texte de leur conférence y est consigné. J'ai eu le plaisir d'écrire

l'introduction. Si vous me le permettez, je vais la lire, c'est très court.

J'y disais: Le Groupe de travail sur les pesticides a choisi un titre des plus appropriés pour son premier symposium public - le titre est bien celui que vous avez mentionné - ce titre souligne en effet avec beaucoup d'à-propos l'importance du rôle que le grand public - et nous faisons partie du grand public - peut exercer dans la prise de décision scientifique et/ou politique sur des sujets qui le touchent de près. Voilà donc que des personnes qui font partie du grand public invitent d'autres personnes - parce que c'est cela qui s'est passé - elles aussi du grand public à entendre des scientifiques ainsi que le ministre de l'Environnement leur parler des pesticides. Ces personnes veulent savoir, de la bouche même de ceux qui sont appelés à formuler des avis et à prendre des décisions, ce qu'ils pensent des pesticides, de leur utilisation, des risques encourus, des bénéfices recherchés et des solutions envisagées.

J'ajoutais que moi-même, issu du milieu scientifique, je ne pouvais m'empêcher de penser que ces gens du grand public ont raison de chercher à savoir. Après tout, ce sont eux qui seront les bénéficiaires ou les victimes des effets des pesticides. J'ajoutais en terminant: Savoir - nous avons tous le droit de savoir, comme membres du public -signifie posséder des outils pour infléchir des décisions dans la direction que suggère un jugement éclairé.

M. Blais: Merci. Je sais que vous avez assisté à la présentation d'autres mémoires, mais je me dois, très brièvement, de vous poser deux questions que je pose à tous les groupes. Est-ce que vous êtes d'accord avec une taxe pour la recherche et la publicité sur les pesticides? Vous avez certainement entendu cette question à plusieurs reprises. Deuxièmement, une question classique que je pose à tous tes groupes aussi: Trouvez-vous que ce projet de loi s'attaque réellement à la quantité de pesticides utilisée ou si, comme je le crois, il ne s'attaque qu'à la sécurité de ceux qui manipulent les pesticides?

Le Président (M. Saint-Roch): Dr

Brodeur.

M. Brodeur: À la question de la taxe, je répondrai oui, mais j'aimerais apporter une distinction: pas nécessairement une taxe à l'utilisation ou à la consommation, mais peut-être une taxe à la pollution. Il serait peut-être intéressant, à ce chapitre, de consulter ce que nos voisins américains ont fait à cet égard, c'est-à-dire taxer davantage la pollution que la consommation comme telle. Je réponds oui, bien sûr, d'autant plus qu'une taxe de cette nature pourrait générer des fonds oui, eux, pourraient être utilisés à des fins de "monitoring", de surveillance environnementale, ce sur quoi nous nous permettons à insister à nouveau. Je ne sais pas si mes collègues veulent ajouter quelque chose là-dessus.

Quant à la quantité, si le projet de loi s'attaque à essence même du problème, je crois très sincèrement que le projet de loi est un pas considérable vers une amélioration de la situation. C'est un pas de géant qui sera franchi en l'espace de quelques mois, sinon de quelques années. C'est certain que nous avons manifesté - et nous l'avons dit dans notre mémoire - notre satisfaction du dépôt de la loi. Nous avons soulevé quelques points qui témoiqnent que nous pensons qu'il y a place à l'amélioration et nous les avons signalés.

M. Blais: Dr Brodeur, à 15 h 30, après environ quinze heures de discussions sérieuses, je vais vous poser une question de façon badine, mais qui est appuyée par un raisonnement sérieux. Au haut de votre paqe 4, on jurerait que vous avez écrit un paragraphe pour plaire aux fonctionnaires. Je vous le dis de façon badine pour nous dérider un peu: La durée de validité d'un permis devrait être courte (une année) pour des utilisations telles que l'extermination et l'entretien paysager; dans le cas des cultivateurs, cela pourrait s'étendre à trois ans. Avec cela, vous faites plaisir aux fonctionnaires parce que si on renouvelle à chaque année pour la plupart des gens et aux trois ans pour les cultivateurs, comme il y a 47 000 cultivateurs, on aura besoin de toute une armée de fonctionnaires, en fait.

À la page précédente - et cela aussi, c'est correct on lit: "Le groupe de travail recommande donc que la loi contienne des dispositions enqageant le ministre à mettre sur pied un réseau de surveillance de la qualité de l'environnement". D'une part, le ministre a répondu tantôt au groupe qui vous a précédé qu'il ne croyait pas avoir dans ses crédits des il sommes pour répondre aux besoins minimums d'inspecteurs. Là, vous demandez qu'à tous les ans un permis soit émis. Je suis persuadé que cela ne sera pas acceptable à cause de la paperasse que cela enqendre. Je ne crois pas que ce soit vraiment une t recommandation que, moi, je retiendrais. Et, si je me devais de la retenir, quels sont vos arguments pour m'en convaincre?

M. Brodeur: J'ai déjà mentionné ces arguments. Ils s'appuient sur la rapidité avec laquelle, dans certains domaines, les concepts d'utilisation, de mode et de règles de pratique évoluent dans le domaine de la lutte contre les substances nuisibles, particulièrement dans le domaine de l'entretien paysager; je parle de l'épandage, par

exemple, sur les pelouses. Donc, si l'on tient compte de la rapidité avec laquelle certains concepts changent effectivement, il nous semble que, les modes changeant, on doit avoir dans la loi des mécanismes qui permettent de s'ajuster à ces changements et pour permettre à ceux qui ont la responsabilité de faire de la vente ou de l'épandage d'être au courant.

Nous avons, bien sûr, dans un élan d'enthousiasme, proposé une période d'une année. Disons que c'est une échelle de grandeur. Nous voulions surtout souligner le fait que, dans le cas d'utilisations où les concepts, les règles de pratique changent, il serait important de penser avoir des durées de permis qui soient plus courtes que dans des domaines où les traditions durent plus longtemps.

M. Blais: En ce qui me concerne, cette réponse m'explique un peu plus votre idée. Je vous remercie. Je n'ai pas d'autres questions, parce que je trouve votre mémoire très clair. Il est très limpide en soi et les explications que vous m'avez données me donnent satisfaction. Merci d'être là.

M. Chevalier (Gaston): Je voudrais peut-être ajouter, si vous me le permettez, qu'en ce qui concerne ce type de sociétés qui assurent les arrosages des pelouses en ville ou en banlieue il s'agit d'emplois saisonniers et, souvent, le personnel change d'une saison à l'autre. Ce sont souvent des étudiants ou des gens qui sont engagés sur la base d'une saison. Alors je pense qu'il est important qu'il y ait une réactualisation du permis qui soit faite à chaque année.

M. Blais: Vous supposez d'avance que le permis serait donné à la compagnie et non à la personne?

M. Chevalier: II serait...

M. Blais: Si on change d'employés, la personne ne l'a pas son certificat.

M. Chevalier: Non, le permis serait accordé à la compagnie. Mais en raison de la rapidité, comme le disait le Dr Brodeur, des procédures, des pratiques concernant, par exemple, la toxicité des différents produits, je pense qu'il serait bon que la compagnie soit avisée à chaque année des modifications des dossiers toxicologiques, par exemple, qui évoluent très rapidement et que le personnel, par conséquent, en soit...

M. Blais: Je m'excuse, je sors ma loi. À l'article 18, si je me rappelle bien, pour répondre à votre question on dit: "Une société ou une personne morale qui est titulaire d'un permis doit informer le ministre de toute fusion, vente ou cession de la société ou de la personne morale. Elle doit aussi aviser le ministre de toute modification de la raison sociale." Ce n'est pas à la compagnie, c'est à la personne qui détient le certificat. Même en cas de vente, si la vente se fait... D'une année à l'autre, cela peut arriver, si c'est périodique ou sporadique comme fonctionnement; je le sais, j'en ai dans mon comté, des arroseurs. Heureusement, je n'ai pas eu trop de bébés qui en ont subi les conséquences. En fait, il y a des arroseurs, de ce temps-ci, à qui on donne des permis n'importe comment. C'est bon que cette loi arrive.

J'aimerais que ce soit le ministre qui me donne une explication là-dessus. Normalement, on n'est pas supposé faire cela devant vous autres, je m'excuse. Si vous me le permettez, M. le ministre, ce sera la première que je vous pose. Pour éclaircir la question et aussi pour éclairer ma lanterne, qui semble faiblarde à cette heure-ci? je ne sais pas pourquoi, il est pourtant tôt. D'après moi, le certificat doit être donné à la personne et la compagnie doit être détentrice d'un permis opérationnel. Si on change de personne, la personne qui reviendrait dans cette compagnie, si c'est un étudiant, devrait avoir un certificat d'utilisation. Donc, elle est compétente même si les méthodes d'épandage changent? Je ne sais pas. Je m'excuse, je ne pensais pas...

Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.

M. Lincoln: Le permis sera émis à la compagnie lorsque la compagnie aura accepté toutes les normes de pratique, aura respecté toutes les exigences du code de pratique et la réglementation. Il y a un permis qui est émis à la compagnie et des certificats individuels aux applicateurs. C'est bien cela. Vous parlez du renouvellement du permis et du certificat pour une période courte. Le permis est à la compagnie et le certificat est à l'individu.

M. Brodeur: Nous avions également insisté sur la durée du certificat, ta durée de validité du certificat et surtout sur la nécessité de réévaluer périodement la compétence. Nous aimerions, bien sûr, être informés qu'il y aura éventuellement un mécanisme de certification périodique, toujours compte tenu, comme nous l'invoquions il y a quelques moments, du changement des concepts, des règles de pratique et ainsi de suite.

M. Blais: Merci, je comprends beaucoup mieux maintenant. Merci de m'avoir éclairé.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le député de Terrebonne. Est-ce qu'il y a

d'autres interventions? M. le ministre, est-ce qu'il y a d'autres interventions?

M. Lincoln: Brièvement, je voudrais remercier le Dr Brodeur et tous ses collègues qui sont venus ici de tout ce que vous avez fait jusqu'à présent. Je me suis rappelé, lorsque le député de Terrebonne vous a questionné sur le symposium, que le symposium a donné le départ à l'engagement d'un projet de loi qui allait suivre. C'est là que toute cette affaire a commencé. C'est peut-être à cause de l'implication de votre groupe de travail, des pressions que vous avez faîtes au ministère pour qu'on ait un forum de départ pour sensibiliser le public. Je me souviens du succès de votre symposium.

Mrs Goldenberg, I would like to thank you, to congratulate you on your efforts to date. I hope you just keep them up and carry on for a long time. Merci beaucoup.

M. Blais: Thank you very much, Madam!

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Terrebonne, avez-vous des remarques de conclusion?

M. Blais: Je remercie ceux qui sont là, ainsi que madame; merci beaucoup d'être venus, vous m'avez bien éclairé.

Le Président (M. Saint-Roch): Or

Brodeur ainsi que les membres du Groupe de travail sur les pesticides, je vous remercie pour la qualité de votre intervention et votre apport aux travaux de cette commission.

À ce moment-ci, je demanderais aux membres de l'Association des biologistes du Québec de prendre place, s'il vous plaît. (15 h 45)

À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend maintenant ses travaux et je demanderai au porte-parole de l'Association des biologistes du Québec de s'identifier et de bien vouloir aussi identifier les personnes qui l'accompagnent.

Association des biologistes du Québec

M. Beaumont (Jean-Pierre): Bonjour. Jean-Pierre Beaumont, président de l'Association des biologistes du Québec. À mes côtés, Mme Edith Smeesters, M. Joseph Valéro.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. Beaumont. Je tiens è vous rappeler que vous avez jusqu'à un maximum de vingt minutes pour présenter votre mémoire. Je vous cède maintenant la parole.

M. Beaumont: Parfait. Bonjour, M. le ministre, M. le Président, membres de la commission. L'Association des biologistes du

Québec regroupe des professionnels de la biologie au Québec oeuvrant dans des domaines aussi divers que l'enseignement, la gestion des ressources biologiques et de l'environnement, la biotechnologie, la toxicologie et la santé environnementale. Sensibilisés et informés, ils se sont regroupés en association pour assurer, entre autres, la diffusion de l'information scientifique, se prononcer face aux problèmes sociaux à caractère scientifique et promouvoir de façon générale la biologie dans l'intérêt du public.

L'ABQ est heureuse de l'occasion qui lui est offerte par la commission de l'aménagement et des équipements de faire part de son avis sur l'avant-projet de loi sur les pesticides. Notre participation a pour but de souligner certains aspects particuliers à notre champ d'action professionnel et de sensibiliser la population en général à la problématique ides pesticides. Ces substances doivent être régies dans le cadre d'une gestion globale de l'environnement. Cet aspect est important puisque l'objet principal de cet avant projet de loi est de régir l'usage des pesticides afin de prévenir la détérioration de l'environnement et de protéger les espèces vivantes, l'homme et ses biens.

L'ABQ s'intéresse, d'ailleurs, depuis plusieurs années à la problématique des substances toxiques. Entre autres, ses membres ont senti la nécessité de former un comité spécial sur cette question dès novembre 1984. En novembre 1985, notre congrès annuel portait sur "Les substances toxiques, de l'environnement à l'homme." D'ailleurs, les comptes-rendus de ce congrès sont disponibles depuis peu dans la collection "Environnementj et géologie", dont c'est le troisième ouvrage. De plus, nous avons pris position sur le projet de pulvérisation aérienne d'insecticides contre la tordeuse des bourgeons de l'épinette.

Nous tenons à adresser nos félicitations au ministère de l'Environnement du Québec pour la qualité de la présentation du problème des pesticides dans le document de travail remis lors de la préconsultation du 25 novembre 1986. Dans ce document, il est bien clair que nous nous trouvons devant un état de fait malheureux: l'usage des pesticides s'est généralisé et cela engendre des problèmes graves de pollution et de santé.

D'après l'actuelle Loi sur la qualité de l'environnement, les pesticides devraient être bannis. C'est, évidemment, impossible sans changer les habitudes de toute la population et cela ne peut pas se faire du jour au lendemain. Nous croyons que le ministère devrait situer la Loi sur les pesticides par rapport à la Loi sur la qualité de l'environnement.

Cela dit, nous approuvons dans les grandes lignes le plan d'action du ministère:

la classification des pesticides, l'éducation des intervenants et le contrôle de la vente et de l'utilisation. Cette démarche nous paraît logique dans la mesure où elle vise l'élimination des produits les plus toxiques, la réduction globale de leur usage à long terme et le contrôle des abus actuels. Nous aimerions élaborer sur ces trois points saillants.

La classification des pesticides. C'est un élément essentiel è définir et nous constatons que le MENVIQ s'apprête à établir une classification plus précise que celle d'Agriculture Canada. Cependant, il nous semble que les critères de toxicité actuels sont inadéquats étant donné que, chaque année, des produits d'utilisation courante et même domestique doivent être bannis parce qu'un risque majeur pour l'environnement, la santé ou les deux, a été mis en évidence. Il serait, d'ailleurs, souhaitable de publier la liste de ces produits en indiquant les raisons qui ont motivé leur retrait.

D'après le document de travail du MENVIQ et les informations recueillies auprès d'Agriculture Canada, la distinction entre les classes est basée principalement sur la question de concentration des produits. Ainsi, un même composé peut se trouver à la fois en classe commerciale et domestique en fonction de sa dilution. Il est possible que la toxicité se trouve ainsi réduite, mais il n'en va pas de même de la toxicité chronique, autant sur les espèces animales que végétales.

La classification devrait être basée sur des critères de toxicité qui tiennent compte des effets à court et à long termes. Des tests devraient être effectués sur les espèces les plus susceptibles de mettre en évidence une toxicité, soit aiguë, soit chronique, et sur un ensemble d'espèces afin d'obtenir des évidences supplémentaires nous assurant une protection efficace des écosystèmes. Ils seraient faits aux frais des fabricants, réalisés avant la mise en marché des produits et les résultats contrôlés par le gouvernement. Un compendium des pesticides devrait être disponible, à prix abordable, pour toute personne intéressée.

Par ailleurs, il est inadmissible qu'un produit prohibé puisse encore être écoulé auprès des consommateurs jusqu'à épuisement des stocks. Il devrait être retourné au fabricant et éliminé de façon sécuritaire. C'est pourquoi tous les intervenants devraient recevoir une formation relative à toutes les catégories de pesticides.

Concernant l'éducation des intervenants, nous sommes très heureux de constater l'importance accordée à l'éducation des utilisateurs de pesticides. Il est bien reconnu qu'une grande part des dommages causés par les pesticides est due à une mauvaise utilisation et au manque d'information sur les méthodes de prévention ou de contrôle nature! des parasites. L'Association des biologistes du Québec est désireuse de collaborer avec le ministère à l'élaboration du contenu de son programme d'éducation et à sa diffusion. Nous aimerions, cependant, insister sur l'importance de l'éducation pour tous les groupes d'intervenants: grossistes, détaillants, applicateurs commerciaux ou privés, agriculteurs, sylviculteurs et utilisateurs domestiques.

Les agriculteurs et sylviculteurs devraient certainement être inclus dans le processus de formation dans leur propre intérêt et celui de l'environnement étant donné les quantités importantes de pesticides qu'ils utilisent. Ils devraient comprendre les avantages qui peuvent être obtenus non seulement è la suite d'une utilisation rationnelle des pesticides, mais aussi à la suite d'une gestion écologique des terres agricoles. La lutte chimique intensive est intimement liée à une mauvaise exploitation agricole. Une agriculture qui justifie sa rentabilité sans tenir compte de l'avenir et qui calcule froidement le bilan des mortalités et des maladies graves qu'elle entraîne n'est ni logique ni souhaitable. Si une agriculture écologique occasionne parfois une augmentation des coûts de production à cause de la maîn-d'oeuvre, de rotations ou d'autres pratiques, il faut considérer que c'est un investissement pour protéger la santé et les intérêts des générations futures. C'est pourquoi nous considérons que l'enseignement des principes et des techniques de l'agriculture biologique devrait être obligatoire dans toutes les écoles d'agronomie et de technologie agricole et sa pratique devrait être encouragée par des campagnes d'information appropriées.

L'utilisateur domestique bénéficierait également d'une campagne d'éducation axée sur les dangers reliés aux pesticides et sur les autres possibilités d'éliminer ou de limiter un parasite. Il ne suffit pas de réduire l'usage des pesticides, mais d'inculquer des méthodes écologiques qui vont permettre de réduire notre dépendance vis-à-vis des pesticides.

La société devrait absolument diminuer sa dépendance vis-à-vis des pesticides afin de réduire leur production globale et leur utilisation. Les risques chroniques, de même que des catastrophes de l'ampleur de celles qui ont eu lieu à Bhopal et à Bâle seraient ainsi réduits.

La popularité croissante des services d'épandage pour les arbres et les pelouses devient très inquiétante pour la santé des citadins et leur environnement parce qu'il semble que les pesticides soient répandus en plus grande quantité par unité de surface en milieu urbain qu'en milieu agricole. L'usage croissant et incontrôlé des pesticides en milieu urbain pose des problèmes particulièrement sérieux reliés à la densité

de la population et à la concentration des produits dans un même site.

Au niveau du contrôle de la vente et de l'utilisation, les bilans de vente et d'utilisation des pesticides permettront certainement d'obtenir des statistiques intéressantes et procureront une meilleure évaluation du problème au Québec. Cependant, il est assez inquiétant et surprenant de lire que le ministère ne prévoit pas élaborer, à court terme, une réglementation détaillée concernant les normes de diverses pratiques reliées à l'usage des pesticides, en particulier les normes d'application. Il nous semble difficile d'éduquer adéquatement les applicateurs de pesticides sans une définition préalable des normes.

Pour ce qui est de l'avant-projet de loi, dans l'ensemble, il constitue un pas dans la bonne direction. Il faut, cependant, spécifier que ce pas intervient tardivement et qu'il est loin d'avoir l'ampleur souhaitable pour réduire substantiellement et contrôler efficacement l'usage des pesticides. L'ABQ note, en outre, l'absence d'une base sérieuse permettant une gestion globale de l'environnement et signale que plusieurs articles seront inopérants tant que les règlements n'auront pas été adoptés, ce qui devrait se faire rapidement. En attendant, différents articles devraient être modifiés afin que la loi soit plus efficace.

Chacun sait que ce sont les agriculteurs et les sylviculteurs qui utilisent le plus de pesticides à l'échelle de la province et qu'ils sont, par conséquent, les plus exposés aux dangers potentiels que présentent ces substances. Il est donc absolument indispensable qu'ils soient soumis aux dispositions de la loi, sinon elle n'aurait plus qu'une faible valeur intrinsèque.

Il n'est pas admissible qu'une personne ou une entreprise puisse vendre des pesticides au détail, même si cela est exceptionnel, sans posséder un permis de vente et la compétence requise. (16 heures)

Les grossistes devraient recevoir une formation élémentaire sur la sécurité lors de la manipulation et l'entreposage des pesticides, afin d'éviter les accidents graves pour eux-mêmes et l'environnement.

Il est évident que tous les citoyens ne peuvent pas posséder un permis ou un certificat avant d'utiliser, sur leurs biens, des pesticides. Cependant, il serait bien important que ces utilisateurs prennent conscience de leurs responsabilités et connaissent les règles de sécurité que le vendeur devrait leur fournir, qu'ils suivent le mode d'emploi imprimé sur l'étiquette et qu'ils ne dépassent pas les limites de leur propriété.

Il est capital de définir, par règlement, des normes bien claires pour l'utilisation, le i transport, la distribution, l'élimination des pesticides avec l'entrée en vigueur de la loi. Ces normes et règlements devraient être élaborés le plus rapidement possible pour rendre opérante la Loi sur les pesticides. Il est essentiel, que le ministre conclue des ententes avec les municipalités, comme le mentionnait l'article 7,5°, pour juger de la plupart des cas qui découlent de l'évidence même: dépassement des limites d'un terrain, vaporisation de pesticides par temps venteux, élimination de pesticides dans un égout, vérification d'un permis.

Les citoyens doivent aussi avoir les moyens d'intervenir en cour pour protéger leurs intérêts, leur santé et leur environnement.

La procédure de l'article 53 nous semble un peu lourde lorsqu'il s'agit de protéger un patrimoine qui appartient autant à la province qu'à une municipalité.

En guise de conclusion, tous !es pesticides devraient être soumis è des tests de toxicité qui démontrent leurs effets à court et à long termes sur la santé et l'environnement. Les pesticides prohibés devraient être retournés aux fabricants. Les résidus de pesticides devraient être retournés aux détaillants et, ensuite, au fabricant. Dans les deux! cas, le fabricant devrait les éliminer d'après les normes du MENVIQ.

La classification des pesticides existants devrait être remaniée en collaboration avec Agriculture Canada en fonction des critères de toxicité mentionnés plus haut et en tenant compté des effets synergiques et environnementaux.

Les pesticides de la classe 1 devraient être soumis d une surveillance gouvernementale très sévère. S'ils sont aussi néfastes pour la santé et l'environnement, il devrait y avoir très peu de raisons pour les utiliser encore, même par des personnes très compétentes. Un compendium de tous les pesticides devrait être accessible à un prix abordable pour toute personne intéressée.

Dans le milieu urbain, plusieurs pesticides ne devraient pas être appliqués sur une grande échelle en raison de leur toxicité aiguë particulièrement élevée.

Au plan de l'éducation, toutes les catégories d'utilisateurs, excepté l'utilisateur domestique, devraient suivre un cours et obtenir un certificat avant d'utiliser un pesticide de n'importe quelle classe. Des cours d'agriculture écologique devraient être obligatoires dans toutes les institutions d'agronomie et de technologie agricole. Une campagne de sensibilisation devrait être orientée vers lès utilisateurs domestiques afin de leur apprendre les notions d'écologie pertinentes au contrôle des ravageurs, les dangers reliés à l'utilisation des pesticides, les méthodes préventives et naturelles qui permettent d'éviter ou de diminuer l'usaqe des pesticides, les exigences de la loi en

matière d'application et d'élimination des pesticides.

Au plan de ia recherche, il faudrait encourager davantage, la recherche de méthodes alternatives. Il faudrait aussi encourager la recherche sur l'impact social et environnemental réel de l'utilisation des pesticides.

En agriculture biologique, il faudrait développer la production agricole écologique.

Au niveau des règlements, des règlements sur l'utilisation sécuritaire des pesticides devraient faire l'objet de consultations auprès de divers intervenants. À notre avis, ces règlements devraient comprendre les articles suivants: respect de la propriété privée; normes précises d'après les conditions météorologiques

(le vent, la température) et le milieu (habitations, sources d'eau potable, lacs); signalisation d'un terrain traité au moyen d'un panneau "danger" avec mention du temps de réintégration au besoin; service d'inspection chargé d'évaluer le respect des normes de vente, d'entreposage et d'utilisation des pesticides; des mesures pénales bien claires applicables par les autorités municipales.

L'étiquetage. L'étiquetage des pesticides est à revoir complètement. On devrait pouvoir lire clairement la formulation complète, le mode d'emploi sécuritaire et les premiers soins à donner en cas d'absorption. Le symbole "poison" devrait être plus évident et de plus, être affiché dans les commerces au-dessus des étalages de pesticides.

Pour la protection des consommateurs, les détaillants devraient proposer à tout acheteur de pesticides une brochure sur l'utilisation sécuritaire de ces produits et le matériel de protection requis. Dans les magasins d'alimentation, le consommateur devrait savoir quels produits ont été utilisés pour la culture des légumes qu'il achète. Cela devrait être indiqué sur les emballages ou sur les rayons, tout comme c'est exigé pour les aliments préparés.

Au niveau des pénalités, les pénalités concernant les diverses infractions à la loi devraient être au moins aussi élevées que dans la Loi sur la qualité de l'environnement. On juge que la Loi sur les pesticides devra comprendre les articles de la Loi sur la qualité de l'environnement se référant à l'accès è l'information du citoyen et, entre autres, on veut que l'article 116 soit restreint par des contraintes d'étendue, de quantité et de type de pesticides.

Nous vous remercions encore de nous avoir permis de nous exprimer.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. Beaumont. M. le ministre.

M. Lincoln: Bienvenue, M. Beaumont,

Mme Smeesters et M. Valéro. Mme Smeesters, vous êtes ici pour la deuxième fois, cela m'a doublement convaincu. M. Beaumont, j'espère que la prochaine fois que vous viendrez ici, on pourra s'adresser à vous comme au président de l'ordre.

M. Beaumont: On l'espère!

M. Lincoln: C'est un voeu. Naturellement, votre association et ses membres représentent un des grands espoirs de changement dans le monde; les biologistes travaillent très activement à des solutions de rechange aux produits chimiques. Nous accordons encore plus d'attention à ce que vous avez à dire, a cause de tout le passé de votre organisme, de votre expérience, de votre avenir dans ce domaine et de tout ce que vous faites dans te milieu de l'éducation et ailleurs pour la protection de l'environnement.

Votre mémoire a été lu, étudié, analysé avec beaucoup de soin, comme les autres. C'est le travail que nous avons eu à faire depuis qu'on l'a reçu. Ce que nous remarquons - je suis sûr qu'on le soulignera du côté de l'Opposition - c'est que certaines des constatations qu'on y retrouve se retrouvent également dans beaucoup de mémoires. Je ne vais pas insister et aller dans les détails, mais je voudrais passer en revue quelques-unes des choses que vous avez dites, surtout celles où vous vous détachez un peu, où vous avez des choses additionnelles ou différentes à nous dire. Peut-être que vous pourriez nous demander des précisions là-dessus.

Si je comprends bien, vous dites que vous êtes d'accord avec les grandes lignes du projet, la classification, l'éducation, le contrôle, mais vous dites qu'il n'est pas question d'exclure les agriculteurs et les sylviculteurs. Comme je l'ai souligné, il est tout à fait de l'intention et c'est un engagement formel du gouvernement d'inclure ces secteurs. Vous dites aussi qu'il faudrait situer la Loi sur les pesticides par rapport à la Loi sur la qualité de l'environnement. Là aussi, j'ai précisé que nous ferons des modifications de concordance pour établir très clairement que la Loi sur la qualité de l'environnement s'applique tout à fait indépendamment de cette loi et que tous les pouvoirs qui y sont ne seront aucunement diminués par la Loi sur les pesticides. Afin de ne laisser aucune équivoque, nous allons le préciser dans trois sections qui établiront très clairement que les dispositions sur l'information contenues dans la Loi sur la qualité de l'environnement, le fait que les pesticides sont un contaminant, ce qui fait donc une juxtaposition, seront inclus dans cette loi.

Pour ce qui est de la classification, vous en avez parlé beaucoup et nous retenons ce que vous dites; on va étudier

cela de très près. Toute la question de la classification, comme vous le savez, apparaîtra dans la réglementation et la réglementation, comme je l'ai souligné à d'autres intervenants, aussitôt qu'elle sera prête - elle sera publiée sans doute vers la fin de l'été, au début du printemps - sera prépubliée afin que ce soit un élément de consultation avec les groupes. Nous réalisons que les règlements sont peut-être plus importants que la loi qui les habilite elle-même, parce que c'est l'essence de la chose.

Vous avez suggéré plusieurs choses très intéressantes pour nous, par exemple, des cours d'agriculture écologique obligatoires. Naturellement, ce n'est pas de notre ressort en tant que ministère de l'Environnement, mais on va passer le message. On va transmettre le message à notre collègue de l'Agriculture, surtout, et de l'Éducation.

Vous parlez aussi beaucoup de la recherche et des méthodes alternatives. Là, nous nous sommes mis d'accord, à l'article 7, pour inscrire ceci formellement dans la loi là où on parle du secteur de la recherche. Les grossistes seront inclus. Je pense que j'ai confirmé cela à Mme Smeesters hier. C'était une de ses recommandations. Il y aura une campagne d'information et de sensibilisation assez vaste qui va se faire. Mais, naturellement, on ne veut pas la faire maintenant, parce qu'on ne sait pas exactement ce que sera le projet de loi, ce que sera la réglementation. Aussitôt qu'on sera prêt et que tout cela sera terminé, la première chose qui sera enclenchée sera une grande campagne d'information et de sensibilisation par rapport à la loi et à la réglementation qui sera suivie d'ententes sur les codes de pratique avec les grands secteurs d'utilisation où, à ce moment-là, tous ces critères d'éducation, des critères plus détaillés, seront précisés.

Vous avez parlé de l'article 53. Là aussi, j'avais précisé que l'article 53 était purement un article de concordance avec l'article 30 de la Loi sur la qualité de l'environnement. Excepté que, par omission, on avait laissé des mots se rapportant aux dépenses municipales. Le sens était de faire concorder cela avec le Code municipal. Cela sera corrigé. C'était une omission tout à fait involontaire.

Vous parlez beaucoup de critères de classification. Ce matin, j'expliquais à un intervenant que nous travaillons de très près avec le gouvernement fédéral pour être beaucoup plus impliqués au niveau de l'homologation. C'est cela la clé. Il y a des informations plus ou moins confidentielles et des statistiques, au début de l'homologation du produit, qui ne sont pas connues des provinces aujourd'hui. Sans cela, il nous manque un outil de travail presque essentiel. C'est là que nous essayons de faire des pressions. Nous avons déjà fait des demandes officielles qui seront suivies d'une lettre au ministre de l'Agriculture de la part de toutes les provinces pour avoir une participation beaucoup plus active surtout en ce qui concerne l'information que le fédéral possède et que nous !ne n'avons pas aujourd'hui. Cela nous aidera davantage pour le contrôle et la classification, naturellement.

La réglementation et les codes de pratique toucheront à toute la question de l'utilisation. Je ne sais pas ce qu'on prévoit pour la question de l'affichage par rapport aux usages domestiques, etc., mais on a pris bonne note ''de vos recommandations, des recommandations du groupe de Mme Smeesters et de beaucoup d'autres sur cette question qui revient souvent.

Sur la question de l'étiquetaqe et de l'étalage, vous et le groupe précédent, vous l'avez vu, avez produit des recommandations qui seront étudiées pour la réglementation qui va suivre. Est-ce que vous auriez des questions à poser?

M. Beaumont: J'aurais peut-être deux questions, mais je pense que vous en avez peut-être déjà discuté avec d'autres intervenants. Cette fameuse Loi sur les pesticides et ses règlements, c'est prévu pour quand?

M. Lincoln: Ce qui arrive, c'est que nous avons uni avant-projet de loi. Moi, mon grand espoir,c'est que cette session-ci, qui commence le 10 mars, soit la session au cours de laquelle nous puissions introduire et déposer le projet de loi refait...

M. Beaumont: D'accord.

M. Lincoln: ...qui sera sujet à des discussions lors d'une commission parlementaire, etc.

M. Beaumont: Donc, le...

M. Lincoln: Mais ce n'est pas certain, parce que, d'après le cadre législatif actuel, si, par exemple, il y avait une grande différence entre l'avant-projet de loi et le projet de loi qui allait être déposé définitivement,' s'il y avait 50, 60 ou 90 amendements, le Comité de législation ne le permettrait jamais. II dira que l'avant-projet de loi et le projet de loi qu'on a déposé ne sont pas du tout la même chose. Il faut alors refaire le mécanisme de le soumettre aux comités interministériels, etc. À ce moment-là, cela voudrait dire qu'on le déposerait à ''l'automne. Si on le dépose à l'automne, cela sera adopté - nous l'espérons - au cours de la session d'automne. J'espère que ce sera lors de la session d'été. Mais si c'est impossible, le plus tard sera l'année 1987, dans tous les cas. Nous espérons que ce sera pendant l'été, parce que si c'est adopté pendant l'été, les règlements pourront

être effectifs pour l'automne 1987. Il y aura déjà une saison de manquée en 1987, mais au moins on aura cela pour le reste de 1987 et à partir de 1988. (16 h 15)

Si, par exemple, la loi était adoptée è l'automne, si on pouvait l'adopter au début de la session, à ce moment-là, pour le règlement, ça prend une soixantainte de jours, il faut compter que la réglementation serait là... Puisque nous voulons aller en prépublication du règlement et faire une consultation sur le règlement, cela demande un mois à six semaines pour faire cela. On préfère parler de deux, trois ou quatre semaines et avoir quelque chose qui représente un consensus plutôt que d'adopter un règlement dont personne ne veut. D'ailleurs, on préfère consulter les gens et savoir que cela représente un genre de consensus. Si c'est plus long, ce sera plus long, qu'est-ce qu'on peut faire?

M. Beaumont: L'autre question, c'était au sujet des budgets qui pourraient être associés à un tel projet de loi pour la recherche, etc.

M. Lincoln: Le budget prévu au départ... Je sais que, pour vous, ça ne paraîtra pas assez, ça ne paraît jamais assez, mais c'est déjà quelque chose, c'est un début. Vous devez connaître M. Saint-Jean qui travaille presque à 100 % sur les pesticides; on a déjà une équipe qui ne fait que ça. Le budget qu'on va soumettre est un budget nouveau, de l'argent neuf, 1 200 000 $ pour commencer, pour nous permettre d'avoir une petite équipe d'inspecteurs, pour nous permettre d'avoir un cadre de communication, de recherche, tout l'équipement, le suivi de ta réglementation, les permis, la classification et tout le reste.

Le Président (M. Saint-Roch): Mme

Smeesters.

Mme Smeesters (Edith): J'avais une question au sujet de l'article 9 - nous l'avons mentionné tout à l'heure - sur les cas exceptionnels. Qu'est-ce que c'est, ces gens qui vendent des pesticides "de façon exceptionnelle"? Qui visez-vous avec cela?

M. Lincoln: Vous avez, par exemple, dans le cadre de l'agriculture - c'est ce qui a été visé principalement, mais ce n'est pas nécessairement cela - deux agriculteurs qui ont des fermes voisines et qui se passent certains produits. Ce n'est pas une vente commerciale. La vente commerciale, c'est quelque chose de répétitif. Là, on parle d'une vente exceptionnelle, d'une façon unique. Un jour, c'est un incident unique, pour des raisons, par exemple, de maladie d'une personne, il n'a pas les produits, il passe donc à la ferme avoisinante, quelque chose comme ça. Techniquement, il faudrait qu'il ait un permis de vente. Ce sont les cas exceptionnels dont on parle.

Il nous a été souligné par un groupement qui est venu ici qu'il y a des ventes par ce qu'on appelle des "farmer dealers" ou quelque chose comme ça, c'est le terme utilisé dans ce milieu. C'est une espèce de vente plus ou moins officielle, mais qui représente un très grand volume, 20 %. Là, nous avons dit: Ce n'est pas exceptionnel parce que ça se fait de façon régulière et répétée; ces gens vont être assujettis à un permis. Tout ce qu'on veut éviter ici, c'est que si, une fois, dans une circonstance exceptionnelle, quelqu'un passe un produit à un autre sans le faire de façon répétitive, il soit obligé d'être reconnu comme un vendeur par la loi. C'est cela, le sens de cet article. S'il faut le baliser plus, on le fera. C'était cela, l'idée.

Le Président (M. Saint-Roch): M.

Valéro.

M. Valéro (Joseph): M. le ministre, je pense que l'homologation des pesticides est la pierre angulaire de tout règlement. Concernant ta qualité, les tests, les exigences requises pour l'homologation des pesticides, comment le ministère de l'Environnement du Québec pourrait-il intervenir auprès du gouvernement fédéral pour garantir la validité de ses tests? Très souvent, un produit est homologué, tout le monde est fort heureux, on le met en vente et, au bout de trois ou quatre ans, on se rend compte que ce produit peut être cancérigène, tératogène ou mutagène. Je sais bien que le ministère de l'Environnement du Québec a peu d'influence dans le domaine, mais est-ce qu'il est possible de prévoir dans la loi un dispositif ou un recours permettant à votre ministère d'intervenir à ce niveau?

M. Lincoln: D'après le système constitutionnel actuel, nous ne pouvons pas être impliqués de façon législative dans l'homologation, c'est clair. Pourtant, nous avons une disposition - j'ai oublié le numéro de l'article, c'est 90 quelque chose - qui nous donne des pouvoirs de bannir des pesticides, d'en interdire la distribution, c'est assez vaste, mais c'est a posteriori, malheureusement.

À priori, voici ce que nous pouvons faire de plus efficace. Je l'ai indiqué ailleurs et je n'ai pas envie de répéter tout ce que j'ai dit ce matin; j'ai lu la lettre à M. Wise et je pourrai vous donner une copie de ce que nous avons indiqué. Au lieu de le faire individuellement, les provinces ont décidé de travailler par l'entrernise du conseil des ressources et des ministères de l'Environnement. Par une circonstance très

fortuite, cette année, le Québec a la présidence de ce conseil. Je suis président du conseil, je peux arranger les réunions. J'ai convoqué une réunion en janvier et la plupart des provinces étaient là. Nous avons demandé aux trois ministres fédéraux de venir, nous avons adopté une résolution et nous voulons maintenant entrer dans le processus de l'homologation. Légalement, on n'en a pas le droit, mais ils ont accepté notre demande de façon très ouverte. Surtout le ministre fédéral de la Santé, M. Epp, est très intéressé è ce que les provinces participent, surtout le ministre de l'Environnement. Eux-mêmes cherchent un petit filon pour entrer dans le système parce que vous savez que c'est contrôlé par le ministère de l'Agriculture.

Formellement, nous avons demandé au ministre de l'Agriculture, au nom de toutes les provinces canadiennes et des territoires, d'être beaucoup mieux informés sur l'homologation et aussi d'avoir un système de réévaluation des pesticides en cours beaucoup plus efficace et d'y impliquer les deux autres ministères de la Santé et de l'Environnement, qui meurent d'envie d'être impliqués. Eux, ils peuvent se servir de nous, les provinces, comme instrument de pression et nous de même. C'est à ce niveau qu'on peut travailler.

Le Président (M. Saint-Roch): M.

Valéro.

M. Valéro: En ce qui concerne les stocks de produits qui sont bannis parce que toxiques, allez-vous établir une politique pour les éliminer ou les réexpédier aux compagnies qui les produisent ou si les gens vont pouvoir continuer à les écouler comme si de rien n'était?

M. Lincoln: Je l'ai dit à Mme Smeesters hier - je pense qu'elle nous avait posé la question là-dessus ou son mémoire y faisait référence - on ne parle pas des déchets dangereux dans une grande limite parce que c'est une autre affaire. Nous sommes en train de travailler sur les BPC. Comme vous le savez, il y a une politique qui vise l'élimination graduelle de tous les toxiques émis par les usines, mais on ne parle pas de cela. Pour les petites quantités domestiques, que les gens gardent chez eux, oui, une politique est en train d'être établie actuellement au ministère et on travaille aussi de près avec les autres provinces; l'Ontario travaille aussi de pair sur cela. C'est une des grandes questions aujourd'hui: Qu'est-ce qu'un individu fait avec tous les pesticides qu'il a? Des critères seront aussi adoptés pour les agriculteurs et on assurera un suivi des produits, le recyclage, le nettoyage des contenants, etc. C'est déjà commencé su ministère de l'Agriculture, mais, là aussi, c'est suivi de près.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci. M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Moi, aussi, comme toujours, je vous remercie d'être là. Vous êtes, en fait, les cerveaux de l'espoir de la solution de rechange. Le fait que vous y êtes démontre que vous avez le coeur de le devenir de façon percutante, c'est d'autant plus valeureux que vous soyez venus. À vous aussi, avant de passer le dossier au député de Dubuc, je vais vous poser les deux mêmes questions classiques, bien que ce soit encore plus difficile de vous les poser, à cause de votre groupé. Avec l'Association des consommateurs, il y avait une espèce d'incompatibilité parce qu'ils sont là pour protéger les prix au consommateur. Pour vous, c'est doublement une incompatibilité parce que, si je vous demande si une taxe devrait être exigée, normalement, on devrait s'attendre que vous répondiez: On aimerait mieux ne pas en parler parce que c'est à nous que ça va rapporter, ça va revaloriser notre profession si on se sert des biologistes pour remplacer les pesticides.

Mais je vous pose quand même la question: Est-ce que vous êtes favorables à une taxe pour favoriser la recherche, l'éducation et une publicité saine pour des produits de remplacement des pesticides toxiques? Est ce que vous croyez que ce projet de loi vise, dans son essence et dans son esprit, une utilisation en quantité moindre de produits toxiques?

Le Président (M. Saint-Roch): M. Beaumont.

M. Beaumont: À la première question sur la taxe, évidemment, l'Association des biologistes ne s'est pas penchée spécifiquement sur cet aspect; on n'a donc pas statué dans notre mémoire sur cette question. Cependant, nous savons, selon des sondages parus l'année passée, que l'ensemble de la population semble prête à payer un certain montant supplémentaire pour assurer la protection de l'environnement. À ce sujet, l'Association des biologistes du Québec considère qu'il est intéressant de chercher à réduire la consommation de produits qui peuvent polluer notre environnement, en faisant prendre conscience aux utilisateurs qu'effectivement ce sont des polluants ou des contaminants.À ce moment, l'idée d'imposer une taxe, qui serait clairement identifiée, pourrait être envisagée. Par exemple, il faudrait que le but et les retombées de cette taxe soient orientés, comme vous l'avez dit, peut-être sur la recherche de méthodes alternatives et sur la sensibilisation du grand public à une réduction de

l'utilisation des pesticides et particulièrement ceux qui sont toxiques, etc.

M. Blais: Pour les sept minutes qui restent, je passerai la parole à mon confrère de Dubuc.

M. Beaumont: Mais la deuxième partie de votre question? Vous avez deux questions. J'ai répondu à la première. La deuxième question...

M. Blais: Ce serait plus cohérent, excusez-moi.

M. Beaumont: Pauvre vous!

M. Blais: Une chance que vous êtes là pour compenser.

M. Beaumont: Pour la deuxième question, je pense que notre mémoire est clair. L'article 5 de notre mémoire dit que le projet de loi "constitue un pas dans la bonne direction", mais "qu'il est loin d'avoir l'ampleur souhaitable pour réduire substantiellement et contrôler efficacement l'usage des pesticides". Par contre, nous sommes conscients que chercher à sensibiliser et à éduquer les utilisateurs et la population dans son ensemble, c'est déjà effectivement quelque chose qui devrait amener une certaine réduction de l'utilisation. Nous pensons qu'effectivement cela peut avoir son impact. En lisant notre mémoire, je pense que vous avez vu qu'on a mis beaucoup d'éléments qui doivent aussi être ajoutés à ce projet de loi, toujours dans le but d'en arriver à une gestion globale de notre environnement.

M. Blais: Merci beaucoup. M. Beaumont: Parfait.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Merci, M. le Président. Évidemment, notre temps est limité. Par ailleurs, votre mémoire est très clair et très précis. Cela nous permet de nous faire une idée assez exacte de vos propositions et de vos remarques sur l'avant-projet de loi. Cependant, l'éducation, c'est quand même de la répétition. Alors, j'aimerais vous faire répéter certaines de vos positions. Auparavant, toutefois, vous dites, à la page 2, que changer toutes les habitudes d'une population, cela ne peut pas se faire du jour au lendemain. Un peu plus loin dans la même page, vous dites: "La réduction globale de leur usage à long terme, etc." Évidemment, ce sont des choses plus ou moins à long terme: modifier ou développer des méthodes alternatives à l'utilisation des pesticides; c'est quelque chose qui peut être plus ou moins long. Le mouvement pour l'agriculture biologique nous avait parlé d'une trentaine d'années peut-être et même il précisait que lorsqu'on dit 30 ans, c'est peut-être 40 ans ou 50 ans, c'est une échelle. Par ailleurs, le Regroupement pour un Québec vert, ce matin, disait: Cela dépend de la volonté politique. Cela pourrait aussi peut-être prendre seulement dix ans si on prenait les moyens. Alors, lorsque vous parlez de plus ou moins long terme, où vous situez-vous par rapport à ces deux "extrêmes", entre guillemets?

Le Président (M. Saint-Roch): M. Beaumont.

M. Beaumont: Nous n'avons vraiment pas mis de périodes fixes. C'est un fait que, si le gouvernement du Québec investit beaucoup d'argent et met une réglementation stylique encadrant l'utilisation des pesticides et si, en ce qui concerne sa campagne de sensibilisation, il montre aux citoyens que peut-être on n'a pas besoin de ces produits pour avoir un gazon vert ou des choses de ce genre-là, si on enlève certaines idées peut-être préconçues, on pourrait en arriver probablement à une réduction plus rapidement. Mais, effectivement, il y a un gros travail à faire et aussi, les méthodes doivent être changées en ce qui a trait aux produits et tout cela. Il ne faut pas oublier que, dans les pesticides, il y a aussi des produits qui sont probablement moins nocifs et l'idée que ces produits sont nécessaires... Il faut se donner un certain temps pour amener ce changement d'idée; je ne peux pas vous dire de période, cinq ou dix ans.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Valéro.

M. Valéro: Est-ce que je pourrais faire un commentaire? Je crois qu'il est toujours difficile d'établir une date limite et une période. Il est essentiel que ce programme d'éducation commence le plus rapidement possible, que tous les moyens soient mis en oeuvre afin que la population soit sensibilisée au problème. Si les gens commencent à comprendre qu'il n'est pas nécessaire qu'une pomme soit bien rouge, bien ronde et bien lustrée pour être bonne ou qu'un pissenlit est très bon en salade au lieu de s'en débarrasser avec un herbicide, le changement de mentalité va se faire seul. C'est une question de mentalité. Mais il faut que les ministères s'impliquent rapidement. Il ne s'agit pas de prévoir réussir dans dix ans, c'est maintenant que les programmes doivent commencer à être réalisés. Il est sûr que, de toute façon, toute la population ne peut pas changer de mentalité en l'espace de dix ans. Si la majorité peut changer en deux ou en

cinq ans, tant mieux pour nous, tant mieux pour l'environnement!

Je voudrais faire un commentaire concernant l'imposition d'une taxe si vous le permettez. Beaucoup ont parlé d'imposition de taxes, mais on oublie que des insecticides biologiques sont déjà sur le marché et qu'ils ne sont pas subventionnés. Lorsque les consommateurs demandent un insecticide biologique, il est tellement cher que personne ne peut l'acheter. Je me demande s'il ne serait pas possible d'imposer une taxe proportionnelle à la toxicité et, au besoin, de subventionner des produits qui ne sont pas toxiques et les méthodes alternatives, comme l'agriculture écologique. Pour quelles raisons une taxe imposée sur des produits toxiques ne pourrait-elle pas être utilisée pour subventionner des produits non toxiques ou des solutions de rechange?

M. Desbiens: Ou pour rendre le prix du produit toxique assez élevé que l'autre puisse le concurrencer.

Une autre question sur l'idée qui a été avancée aussi par un autre groupe. Vous faites d'ailleurs le rapprochement, comme tout le monde, entre pollution et santé, bien sûr. Il y a un groupe ce matin qui a parlé de permettre aux médecins et au ministère de la Santé et des Services sociaux conjointement - je ne me souviens pas de l'article de la loi qui serait touché - de s'impliquer directement dans l'administration de la loi. Que pensez-vous d'une telle suggestion?

Le Président (M. Saint-Roch): M.

Beaumont.

M. Beaumont: Oui. C'est un aspect qui serait à examiner plus en profondeur. J'aimerais laisser la chance au ministère de l'Environnement de gérer le plus complètement possible la Loi sur les pesticides, de voir à des modalités d'intervention avec les autres ministères. Je laisserais la loi telle qu'elle est à ce sujet.

M. Desbiens: Est-ce que je peux y aller encore un peu, M. le Président? Deux petites courtes.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Dubuc.

M. Valéro: Est-ce que je peux faire un commentaire?

Le Président (M. Saint-Roch): M.

Valéro.

M. Valéro: II est essentiel qu'Environnement Québec soit le responsable de cette loi, mais est-il possible que le ministère de la Santé et des Services sociaux s'implique dans l'homologation des pesticides? II serait intéressant de demander avis aux médecins parce que ce sont eux qui sont responsables de la santé, humaine. S'il participe au processus d'homologation, les tests seront bien meilleurs bien plus précis.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Deux brèves questions pour terminer parce que mon temps est déjà écoulé. Je vous remercie, M. le Président. À la page 9, à 6.5, sur l'éducation, vous mentionnez que des cours d'agriculture écologique devraient être obligatoires. L'ABQ a-t-elle déjà fait des représentations quelconques auprès des autorités gouvernementales ou pédagogiques à ce sujet?

M. Beaumont: À ma connaissance, non, mais on en parle ouvertement aujourd'hui.

M. Desbiens: Je remarque, en terminant, votre suggestion qui m'apparaît très intéressante concernant l'emballage des produits, des légumes par exemple, achetés où, comme vous le signalez, on devrait indiquer au consommateur les produits toxiques qui ont été utilisés pour la culture de ces légumes.

Je vous remercie beaucoup. J'aurais eu peut-être d'autres questions, mais le temps est limité.

Le Président (M. Saint-Roch): M.

Beaumont.

M. Desbiens: Vous avez une commandite à faire.

Le Président (M. Saint-Roch): En conclusion, M. Beaumont.

M. Beaumont: Ce n'est pas une commandite. Tout à l'heure, j'ai apporté ici seulement un document, le compte rendu de notre congrès. On l'a reçu il y a moins de deux semaines. Je le dépose à la commission. M. le ministre de l'Environnement, vous allez en avoir une copie.

M. Desbiens: Est-ce que c'est "Environnement et Géologie"?

M. Blais: Est-ce que l'Opposition va en recevoir une copie aussi?

M. Beaumont: On va penser à vous. M. Blais: C'est mon rêve.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre, en conclusion.

M. Beaumont: Je vous dis, par exemple,

que le nombre de copies est très limité. Merci.

Le Président (M. Saint-Roch): Vous nous donnez encore quelques instants, M. Beaumont.

M. Beaumont: Oui, excusez-moi.

M. Desbiens: Est-ce que c'est "Environnement et Géologie"?

M. Beaumont: C'est dans la collection "Environnement et Géologie". C'est Je troisième volume.

M. Desbiens: Dans la collection.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Beaumont. M. le ministre, en conclusion.

M. Lincoln: M. Beaumont, je vous remercie beaucoup d'être venu. J'ai le plus grand respect pour votre association. J'espère que le voeu que cela aille plus loin comme code professionnel sera exaucé bientôt. Je suis tout à fait d'accord là-dessus. J'espère aussi que nous allons continuer â travailler ensemble aux objectifs que nous recherchons. Je suis très très conscient que le projet de loi que nous avons déposé n'est pas la solution finale. Je ne pense pas qu'on puisse le regarder comme cela. C'est une étape. C'est un grand départ, je crois. Le fait même de l'avoir va créer un effet d'entraînement. Tout ce qui sera ajouté à cela, la réglementation, les codes de bonne pratique, c'est là que vous aurez beaucoup d'influence à nous aider à les composer, à les travailler. Cela va beaucoup aider à le rendre le plus perfectionné possible.

Pour répondre à M. Valéro, nous avons déjà une entente, le ministère de l'Environnement et le ministère de la Santé, qui inclut une très grande section sur les pesticides. Malheureusement, au niveau de l'homologation, comme je vous l'ai dit, on ne peut pas travailler directement, mais indirectement parce que nous n'avons pas les pouvoirs. C'est en voie d'être fait de façon active.

Nous vous remercions beaucoup de votre collaboration, de votre mémoire bien présenté et bien expliqué ici. Merci d'être venus.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le député de Terrebonne.

M. Blais: La tradition veut que l'Opposition remercie les gens et c'est avec grand plaisir que je le fais. Je suis content que vous soyez toujours dans la lutte pour essayer de combattre ce cancer qu'est la toxicité. Merci d'être là et continuez votre bon travail. On a besoin de gens comme vous.

M. Beaumont: Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Beaumont et les membres de l'Association des biologistes du Québec, j'aimerais vous remercier au nom de tous les membres de la commission pour votre apport à nos travaux.

Sur ce, la commission va suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 35)

(Reprise à 16 h 50)

Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend maintenant ses travaux. Je demanderais à l'Ordre des agronomes du Québec de prendre place devant la commission, s'il vous plaît. Je demanderais maintenant au porte-parole de bien vouloir s'identifier et d'identifier les membres qui l'accompagnent.

Ordre des agronomes du Québec

M. Laguë (Paul): Mon nom est Paul Laguë. Je suis président de l'Ordre des agronomes du Québec. Je suis accompagné, à ma droite, de M. Alphonse Lapointe, directeur général, et, à ma gauche immédiate, de Daniel Savoie et Michel Tremblay, tous deux agronomes et membres du comité des antiparasitaires.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le président. Sur ceci, je vous rappelle que vous avez maintenant vingt minutes au maximum pour faire part de votre mémoire aux membres de la commission. Je vous cède maintenant la parole.

M. Laguë: Merci, M. le Président. M. le ministre et MM. les membres de la commission, nous vous remercions de nous offrir l'occasion de discuter avec vous de l'avant-projet de loi sur les pesticides. Nous sommes confiants que ce premier partage des contributions de l'Ordre des agronomes du Québec à la promulgation d'une loi qui, soulignons-le, est souhaitée par la grande majorité de la population sera le fondement d'une collaboration encore plus étroite entre l'Ordre des agronomes du Québec et les ministères impliqués dans le contrôle des pesticides. Avant d'exposer le sens de notre mémoire, où nous examinons la concordance de la législation proposée en regard des objectifs visés, objectifs d'ailleurs que nous jugeons louables et souhaitables, nous voulons faire quelques mises au point importantes afin d'éliminer toute ambiguïté dans la discussion.

Dans la première section du chapitre 1 de l'avant-projet de loi, le législateur propose une définition du mot "pesticide" qui diffère substantiellement de celle contenue dans la Loi sur les produits antiparasitaires adoptée par le Parlement canadien, en septembre 1982. Pour faciliter la compréhension et prévenir les interprétations différentes, qui ouvrent la porte aux abus, nous recommandons d'utiliser l'expression "produits antiparasitaires" plutôt que "pesticides" et également de revoir et de compléter la définition proposée dans l'avant-projet de loi, afin d'inclure les produits régulateurs de croissance.

Selon les notes explicatives inscrites au préambule du projet de loi, il importe d'établir une distinction entre l'information scientifique pertinente à l'utilisation d'un produit antiparasitaire - on parle à ce moment des paramètres culturaux, de la lutte intégrée, des seuils de tolérance, des seuils économiques, de la protection du milieu physique et des espèces vivantes - et des renseignements techniques sur la manipulation sécuritaire de ces produits.

À partir de ces énoncés, nous suggérons de remplacer l'expression "renseignements sur l'utilisation des pesticides" par "renseignements sur la manipulation sécuritaire des produits antiparasitaires". Cela couvre tous les aspects tant pour l'utilisateur que pour l'environnement et les aliments produits.

Dans la rédaction de notre mémoire, nous avons cherché un point d'équilibre entre des mesures législatives pour assurer la protection des êtres vivants et de l'environnement, et les intérêts souvent divergents des intervenants dans la vente, l'utilisation et la manipulation sécuritaire des produits antiparasitaires.

Notre mémoire a été basé, si vous voulez, sur une consultation assez large auprès d'agronomes. Comme vous allez le voir un peu plus tard, nous essayons de définir ce qu'est un agronome afin de vous montrer notre champ d'exercice et c'est ce à quoi nous sommes utilisés dans le domaine agricole. Quand nous parlons de vulgarisation scientifique, ici, nous parlons vraiment de transfert technologique. C'est dans ce sens qu'il faudrait le voir.

Dans le premier paragraphe des commentaires généraux à la quatrième ligne, il y a une erreur dans le traitement de textes. La phrase se lit: "On sait, en effet, que la présence des produits antiparasitaires, tant en milieu urbain qu'en milieu rural - il faudrait écrire "suscite" au lieu de "rendu possible" - suscite actuellement plus d'inquiétude que la plupart des autres questions sociales. Cependant, leur présence n'a pas encore suscité le moindre consensus sur la façon dont il faudrait gérer leur usage."

Dans le mémoire, nous citons ensuite une série d'extraits du document d'information publié par le ministère de l'Environnement, le 6 novembre, où l'on fait part des dangers de contamination dans l'utilisation des produits antiparasitaires. On parle des résidus dans les aliments. Il ne faut pas oublier, aujourd'hui, qu'un agriculteur lpeut nourrir jusqu'à 100 personnes. Alors, c'est très important, à ce moment, que cette personne soit bien entourée et bien encadrée. Il y aussi des accidents qui sont dus à de mauvais rangements et des accidents de parcours dans l'utilisation et qui, la plupart du temps, amènent des conséquences néfastes à l'environnement beaucoup plus en général qu'une utilisation rationnelle. Il y a aussi des applications qui ont résulté en la contamination des sources d'eau, de l'air et du sol. Si les problèmes sont réels et sérieux, nous croyons en l'importance de les confiner et d'en réduire l'impact au minimum. C'est pour cela que, dans l'avant-projet de loi, nous voudrions voir insérer le concept de la gestion intégrale des pesticides, soit à court ou à moyen terme, plutôt que d'avoir une gestion partielle des pesticides; que, du moins, la loi, dans son cadre, maintienne cette unité.

L'analyse du projet de loi permet de constater que son emprise est limitée, qu'elle laisse une large place à la réglementation. Il est peut-être sage de la part du gouvernement de fonctionner de cette façon-là et il le fait dans un premier temps. Mais, comme je l'ai mentionné tantôt, je crois qu'il est très important d'inclure, dans la loi-cadre, la gestion intégrale de façon qu'il soit facile de préparer la mise en place graduelle des diverses facettes des contrôles dans l'utilisation rationnelle des antiparasitaires.

Sans nous présenter, si vous le voulez, ou vouloir nous vanter en tant qu'agronomes, il serait peut-être bon de faire une mise au point et de savoir ce que fait un agronome, quelle formation il reçoit, tout simplement pour, au moins, informer le législateur de ce à quoi sert l'argent du contribuable dans la dispensation du financement universitaire et, plus particulièrement, des facultés d'agriculture.

II est évident que, étant une corporation professionnelle, nous avons un champ d'exercice exclusif d'après la loi que nous avons. Notre champ exclusif porte essentiellement sur la communication et la vulgarisation Comme je le mentionnais tantôt, la vulgarisation, c'est le transfert des technologies, c'est l'analyse des problèmes qu'un producteur peut avoir avec des recommandations spécifiques pour résoudre ces problèmes. On parle donc ici de communiquer de vulgariser et d'expérimenter les principes, les lois et les procédés de la culture des plantes agricoles, de l'élevage des animaux de ferme, etc. On vous donne

ensuite ce que nous entendons aussi par la culture - si vous le voulez - des plantes. C'est très complexe parce qu'on parle des façons culturales, on parle des contrôles de lutte intégrée, on parle de l'éradication des plantes nuisibles, de la génétique et de l'utilisation de produits antiparasitaires, si c'est nécessaire*

Ces pratiques sont basées normalement sur des connaissances scientifiques que l'agronome a acquises durant sa formation universitaire et cela comprend tout le volet qu'on décrit et qu'on pourrait présenter, en sommaire, comme une biologie, si vous le voulez, appliquée, dans un but bien précis de production, soit de production animale soit de production végétale.

L'agronome reçoit donc, en général, une formation qui englobe toutes ces connaissances et il lui revient, si vous le voulez, l'utilisation rationnelle des produits antiparasitaires. On ne parle pas d'utilisation sécuritaire ici, on parle d'utilisation rationnelle.

Dans les facultés d'agriculture, il y a eu énormément de modifications apportées au cours des années avec le développement de la recherche, des nouvelles techniques. Les professeurs qui y travaillent sont des personnes compétentes et qui, normalement, visent à la productivité agricole. La productivité agricole, c'est toujours quelque chose qui vise la plus haute rentabilité possible, en ce sens que, si on peut utiliser moins d'antiparasitaires - c'est ce que nous allons viser - et s'il y a d'autres moyens, ce sont ces moyens qui seront recommandés.

Il y a non seulement les facultés d'agriculture dans ce réseau, mais il y a aussi des agronomes qui travaillent dans les stations de recherche, il ne faut pas les négliger non plus; nous en avons de très bonnes qui essaient de développer davantage l'utilisation d'alternatives et de contrôler autant que possible l'utilisation d'antiparasitaires.

Nous avons également été impliqués dans diverses organisations face à l'utilisation des antiparasitaires, nous avons eu un colloque, nous avons fait parvenir, dans le passé, des documents aux ministères concernés.

Se basant sur nos connaissances, se basant sur notre champ d'exercice et sur notre expérience, l'agronome est évidemment un intervenant essentiel dans le processus visant à instaurer une gestion rationnelle des produits antiparasitaires et en diminuer graduellement l'usage par l'application d'une nouvelle technologie. C'est pourquoi l'Ordre des agronomes veut collaborer avec le ministère de l'Environnement et celui de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation à la mise en oeuvre des programmes qui permettront d'atteindre les objectifs visés par le législateur.

Nous parlons ensuite de la formation que le ministère de l'Environnement propose dans son avant-projet de loi; nous sommes conscients et heureux de la voir incluse. Je crois que c'est un bon vent de purification, si vous le voulez, qui va exister; peut-être qu'on trouve que le vent n'est peut-être pas assez fort encore, il reste quand même que c'est un bon pas dans cette direction.

La dispensation de l'information est nécessaire et plus cette information est pertinente et fiable, plus tout le monde pourra en profiter. Il reste cependant que, lorsque la formation sera donnée, il faudrait que le ministère de l'Environnement confie un rôle important aux facultés d'agriculture afin de puiser aux compétences qui y sont présentes. (17 heures)

Un autre aspect sur la formation: II faudrait prendre soin d'éviter de donner l'impression aux vendeurs, aux personnes qui sont détenteurs de certificats qu'elles ont la compétence nécessaire pour l'utilisation rationnelle des antiparasitaires, en ce sens que ces personnes pourraient avoir l'impression qu'elles ont des connaissances pour déterminer le pourquoi, le quand et le comment de l'application.

En instaurant un système de permis et de certificats obligatoires, le MENVIQ établit une mesure préventive qui lui assure un bon mécanisme de surveillance de la distribution et de la vente des produits antiparasitaires, mais ne permet pas d'exercer un contrôle sur les quantités de produits ni sur la pertinence de leur usage, tant en milieu urbain, agricole ou forestier.

Nous sommes conscients que l'approche progressive dans l'application de la loi est la meilleure situation parce qu'il y aura probablement des changements apportés. Nous sommes d'accord et nous appuyons cet aspect. Mais nous voudrions, comme nous l'avons mentionné dans une première étape, que la loi-cadre contienne toutes les informations nécessaires avec un échéancier peut-être d'application pour que cela soit plus facile à utiliser dans l'avenir.

Quant aux codes de bonne pratique, évidemment ce sont des codes qui seront établis et qui seront basés sur la loi. Ils permettent aussi la gestion intégrale dans les pratiques agricoles. C'est un aspect sur lequel il faudra être vigilant et qui devra faire partie, si vous voulez de la gestion intégrale des produits antiparasitaires. Cependant, comme je l'ai mentionné antérieurement, si les certificats qu'on donne dans les codes de bonne pratique sont des certificats sur la manutention sécuritaire tant pour l'utilisateur que pour l'environnement, il ne faudra pas que l'utilisateur ait l'impression qu'il connaît tout ce qu'il y a à connaître sur l'utilisation de ces produits.

Nous avons fourni un extrait ici qui

provient du doyen de la Faculté d'agriculture de l'Université de Guelph en Ontario et qui parle si vous voulez des "plant doctors", les docteurs en plantes. C'est un système qui existe déjà et qu'il faudrait peut-être développer davantage.

Pour assurer une gestion efficace, le code de bonne pratique devra donc s'appuyer sur une évaluation professionnelle du milieu et des conditions d'utilisation en relation avec la toxicité des produits utilisés. Cette évaluation ponctuelle exige une formation scientifique comme celle que nous avons décrite au chapitre V de ce mémoire.

Ce mode de gestion intégrale va présenter plusieurs avantages:

II va renforcer la loi et faciliter son application;

II va facilititer à l'État, sans coût additionnel, une surveillance constante et précise de l'utilisation de tous les produits antiparasitaires qui présentent un danger pour la santé humaine, les êtres vivants ou l'environnement;

II va garantir à l'utilisateur un achat judicieux, souvent plus économique et un usage plus sécuritaire;

Il va aussi assurer à la population une plus grande fiabilité du cycle et des méthodes de vente et d'utilisation des produits antiparasitaires partout au Québec.

Dans le rôle des intervenants nous voyons différentes personnes impliquées. On sait que déjà plusieurs ministères sont impliqués. Nous voudrions quand même qu'on puisse donner certains rôles à l'Office des professions du Québec en ce sens et également aux corporations professionnelles qui sont concernées. Et, il y en a plus d'une.

Comme il a été mentionné lors de présentations antérieures - je le mentionne ici brièvement - nous voulons avoir un comité "aviseur" pour assister le ministre dans l'élaboration des règlements et des modalités. Nous demeurons disponibles pour une consultation ultérieure, une collaboration très étroite.

Nous vous listons ici la série de recommandations que nous avons faites et les principales sont:

D'inclure dans la loi le principe d'une gestion intégrale des produits parasitaires;

De reconnaître la compétence de l'agronome pour la mise en oeuvre d'une gestion intégrale des produits antiparasitaires;

De prévoir dans la loi l'obligation pour le vendeur de fournir la preuve d'une recommandation émise par un professionnel pour tout produit antiparasitaire présentant un risque élevé;

D'aller chercher des personnes, d'associer les groupes comme l'Office des professions du Québec et d'autres corporations pour assister, si vous voulez, le ministère dans l'établissement de la loi et de la réglementation;

De prévoir aussi un comité "aviseur".

Il y avait aussi d'autres recommandations qu'on pourrait dire que nous avons omises ou que nous n'avons pas écrites au mémoire parce qu'elles étaient évidentes. Nous allons parler ici de lutte intégrée, de réseau de dépistage. Il faudrait y mettre beaucoup d'accent dans ce sens-là afin d'être plus propice dans les recommandations et la détection des maladies afin que l'utilisation des produits tantiparasitaires devienne moins dangereuse pour l'environnement.

En deux mots, pour protéger et pour obtenir la visée que le ministère de l'Environnement se donne, il faut parler de gestion intégrale des pesticides non seulement à l'intérieur du grand concept de l'agriculture, mais aussi de la sylviculture -ce n'est pas notre domaine, mais il faut y aller quand même - et également du milieu urbain, où on cultive des plantes horticoles.

Nous espérons que cette première étape en sera une de collaboration avec le ministère de l'Environnement. Je vous remercie, messieurs.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le président. M. le ministre.

M. Lincoln: M. Laguë, merci à vous comme à tous les autres intervenants. C'est ce que nous faisons d'abord et avec raison parce que vous avez pris la peine et mis beaucoup de temps à attendre ici et vous présenter pour venir nous dire des choses qui, dans le cadre de votre rôle, sont, à bien des sens, différentes des recommandations que d'autres ont faites. Dans ce sens-là, elles sont nouvelles et demandent une nouvelle attention.

J'ai remarqué dans votre mémoire une ou deux choses principales que vous avez mentionnées et sur lesquelles je voudrais vous questionner. Par exemple, l'utilisation du mot "pesticide". Vous êtes le seul intervenant a avoir suggéré qu'on emploie le terme "produit antiparasitaire" pour la bonne raison que ce terme est déjà utilisé dans la loi fédérale ce qui me semble une très bonne raison. La raison pour laquelle nous nous sommes servis du terme "pesticide" c'est que ce terme est déjà celui employé dans la Loi sur la qualité de l'environnement et dans la réglementation. C'est par une concordance entre les deux lois et, pour nous, la Loi sur la qualité de l'environnement, c'est la loi-cadre. C'est la raison pour laquelle nous, avons préféré et nous préférons utiliser le mot "pesticide"; autrement, cela créerait des problèmes. II faudrait changer le mot "pesticide" pour "produit antiparasitaire" dans la Loi sur la qualité de l'environnement. Éventuellement, il faudra que cela se fasse, mais, pour le moment, c'est la raison. C'est à cause de la concordance et c'est cela que nous avons fait.

Vous avez aussi soulevé la question de la gestion intégrale. Je veux vous demander en ce sens-là ce que vous entendez exactement par gestion intégrale. Est-ce que vous parlez de lutte intégrée en recherchant d'abord des moyens alternatifs avec l'objectif ultime des moyens naturels et l'objectif d'utiliser de moins en moins de pesticides en se servant de tous les moyens possibles? Vous avez cité le dépistage en agriculture. Est-ce que vous parlez de gestion intégrale comme on parle de lutte intégrée dans le domaine des pesticides ou si c'est quelque chose de plus vaste? Pouvez-vous nous expliquer ce que vous aviez en vue lorsque vous avez parlé de gestion intégrale?

Le Président (M. Saint-Roch): M. Laguë.

M. Laguë: Merci. La lutte intégrée, comme vous l'avez mentionné, je pense que vous en aviez une très bonne définition. La gestion intégrale couvre d'autres aspects encore plus larges. Vous allez parler d'une loi et de mécanismes qui vont contrôler la vente et aussi l'utilisation de ces produits. De quelle façon cela va-t-il se produire exactement? Différentes modalités pourraient être élaborées. On parle de gestion intégrale en ce sens que, dans un plan de culture agronomique qu'un producteur obtient, il y aura différentes façons d'aborder les problèmes auxquels il aura à faire face. Il y en a qui sont prévisibles un an à l'avance; il y en a d'autres qui sont prévisibles quatre, cinq ou six jours à l'avance, selon les maladies ou selon le parasite que vous contrôlez. Je vais vous donner un exemple de ce qui est prévisible un an à l'avance. Un producteur agricole a eu telle et telle mauvaise herbe dans ses cultures, cette année. On sait que les graines vont rester dans le sol et, l'année prochaine, les graines vont germer. À ce moment-là, ce genre de choses est prévisible. C'est peut-être plus difficile quand c'est une maladie. Évidemment, c'est assez difficile de prévoir les maladies un an à l'avance. C'est pour cela que les réseaux de dépistage vont entrer en ligne de compte et lorsque l'information sur le développement de l'organisme ou des conditions a été favorable, à ce moment, on pourrait avoir une décision qui sera prise et une recommandation qui sera faite pour l'utilisation des produits. La gestion intégrale, si vous voulez, cela s'insère dans les plans de culture et cela s'insère exactement aussi pour le contrôle de la vente et de l'utilisation du produit.

M. Lincoln: Je voudrais faire une suggestion. Comme vous le savez, nous avons produit un document de travail qui vous a été envoyé. Dans ce document de travail -j'aurais pu vous donner la référence - il y a la politique globale du ministère qui est insérée où on parle de lutte intégrée comme étant le principe. Si vous voulez faire valoir votre notion afin qu'on l'étudie plus à fond, peut-être que vous auriez pu nous laisser savoir quelque chose à son sujet qui l'explicite plus parce que, dans votre mémoire, vous en parlez sans définir vraiment et là je réalise que c'est difficile en quelques mots de le saisir tout è fait. Si vous pouviez expliciter cela et nous expliquer exactement jusqu'où va votre gestion intégrale afin que nous puissions la considérer dans la préparation d'une politique qui va appuyer la loi.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Laguë.

M. Lague": Voulez-vous que je vous donne la définition immédiatement?

M. Lincoln: Non, non. M. Laguë: Non, d'accord.

M, Lincoln: Non. Ce que je veux vous suggérer, c'est que vous puissiez élaborer un peu plus pour nous et envoyer cela au ministère ou à moi-même puisqu'on est en train d'ébaucher tout ce travail. Il y a une chose qu'il est important que nous sachions à propos de l'article 40 de la loi. Vous avez fait des remarques à propos de l'article 40 de la loi. Je sais qu'en vertu de votre loi constituante de l'Ordre des agronomes vous avez une réserve de jeunes qens qui ont l'exclusivité de vulgariser là science agronomique dans votre loi. Jusqu'où s'étend cette réserve? Avez-vous une interprétation de cette réserve, dans votre ordre, dont vous pourriez nous parler pour nous dire jusqu'où cela va?

M. Laguë: Le terme "vulgariser", comme je l'ai défini tantôt, ce n'est pas d'empêcher quelqu'un qui diffuserait de l'information générale comme un journaliste, par exemple, qui assisterait à une conférence médicale et qui en rapporterait les délibérations. Si vous prenez cela dans le même sens, un journaliste qui assisterait à une conférence agricole pouvait rapporter ce qui a été dit, et il fait de la vulgarisation. À ce moment, il n'entre pas dans notre champ d'exercice. Le terme "vulgarisation" va plus loin que cela. Le terme "vulgarisation", c'est vraiment, si vous voulez, mettre à la portée du producteur agricole les dernières connaissances. Aussi, lorsqu'on parle de cela, à ce moment, c'est que nous allons faire les analyses nécessaires auprès du producteur pour analyser les problèmes qu'il rencontre et lui faire des recommandations. C'est ce que nous appelons "vulgarisation".

M. Lincoln: Vous avez parlé des

facultés d'agriculture et de les associer aux mouvements de formation. Je puis vous assurer que c'est presque automatique. C'est la chose indiquée, nous allons le faire. Le ministère de l'Agriculture travaille de très près dans toute cette affaire. Alors, il est sûr qu'il faut impliquer de plus près les facultés d'agriculture. Dans ce sens, il y a un agronome qui représentait un des groupes, hier ou avant-hier, qui a attesté ici que, lorsqu'il a fait son cours, il n'y avait aucun cours sur l'écologie ou sur l'agriculture biologique, par exemple. C'est lui qui a eu à demander de façon volontaire ces cours qui existaient, mais il n'y avait rien, c'était facultatif plutôt qu'obligatoire. Est-ce que, dans ce sens, vous êtes d'accord que dans votre ordre à vous, pour devenir agronome, il faudrait avoir obligatoirement des cours en écologie et surtout en agriculture biologique?

Le Président (M. Saint-Roch): M. Laguë.

M. Laguë: D'une façon obligatoire, présentement, si vous voulez, si vous le regardez tel quel, peut-être pas. Qu'est-ce qui va arriver? Dans la formation de l'agronome, je vous ai mentionné tantôt que tout vise à la profitabilité de l'entreprise. Je ne parle pas de production maximum. On parle de profitabilité. À ce moment, vous regardez les choix qui vont coûter te moins cher, d'accord? II est vrai - et je pense que je cannais l'agronome auquel vous faites référence - que, lorsque cette personne a suivi son cours, cela n'existait pas. Il y a 10, 15 ou 20 ans, on avait très peu conscience, si vous voulez, des effets secondaires...

M. Lincoln: Maintenant, vous dites? Cela existe maintenant? (17 h 15)

M. Laguë: Non, je parle de l'agronome qui est venu ici et auquel vous faisiez référence il y a quelques minutes.

M. Blais Daniel Vanier.

M. Laguë: Pardon?

M. Blais: Daniel Vanier.

M. Laguë: Daniel Vanier. Alors, les cours n'existaient pas à ce moment-là. Ils commencent a y en avoir. Ils ne sont pas obligatoires, mais il y en a. Le Collège Macdonald...

M. Lincoln: Ne pensez-vous pas qu'ils devraient devenir obligatoires? Si vous parlez de votre ordre comme étant impliqué de façon presque première dans les méthodes de remplacement, dans les alternatives, est-ce que ces cours ne devraient pas devenir obligatoires plutôt que facultatifs? C'était ce qu'il soulignait, que les cours étaient facultatifs. Ils étaient disponibles, mais par exemple, s'il. avait eu le choix, il aurait pu ne pas suivre ce cours. Il aurait pu suivre un autre cours que celui-là.

M. Laguë: D'accord. L'ordre verrait d'un très bon oeil qu'ils deviennent obligatoires. Le problème, comme je le vis dans le milieu universitaire, devient plus difficile un peu lorsque vous les rendez obligatoires. Vous faites alors des changements dans les programmes. Vous êtes très au courant des difficultés qu'on rencontre à changer les programmes. Mais je crois qu'à courte échéance c'est un aspect qui sera de plus en plus enseigné à l'intérieur. Il n'est peut-être pas nécessaire qu'ils deviennent obligatoires pour tous les agronomes, parce que d'après nos codes de déontologie l'agronome pratique dans son champ de connaissance. Alors, celui qui est en zootechnie, par exemple, n'ira pas pratiquer dans le champ de la phytologie.

Il reste, quand même que, pour les personnes qui iraient dans certains programmes donnant ouverture au permis d'exercice, ces cours pourraient devenir obligatoires, Cela serait très bienvenu. L'ordre serait très content de le faire, de pousser sur cela.

M. Lincoln: J'ai une dernière question avant de passer la parole à mes collègues. Je pense que c'est une question très importante de votre mémoire et c'est toute la question de la prescription pour les pesticides. Vous avez suggéré un système de prescription en faisant référence, par exemple, à une personne qui achète des médicaments. II faudrait pratiquement qu'une personne ait une prescription, une recommandation, un papier quelconque d'un ordre. Est-ce que pour vous cela fera partie de votre rôle? Quel est le système que vous préconisez, brièvement, sans rentrer dans les détails? Qu'est-ce que vous aviez en vue lorsque vous avez recommandé cela?

M. Laguë: Lorsque je vous ai parlé de gestion intégrale tantôt, j'ai bien dit que cela s'insérait dans un plan de culture. Il ne faudrait pas voir et pressentir ici que nous voulons avoir, un système de prescription fait comme celui d'un médecin à un patient. Comme je l'ai mentionné tantôt, il y a toute une série de produits et de façons culturales qui peuvent! être prévisibles d'année en année. Cela s'insérera dans un programme de culture, à ce moment-là. D'autre part, si l'on parle de prescriptions, assez souvent on parle de contact immédiat et de visibilité. J'ai mentionné tantôt qu'avec les réseaux de dépistage, s'il y a ce qu'on appelle des "scouts" à différents endroits et des moniteurs pour nous donner les éléments nécessaires pour développer ce qui arrive

dans tel secteur, si on connaît les variétés du producteur, les genres de traitement qu'elles ont reçus auparavant, les types de sol qu'il a - ce sont toutes des connaissances agricoles essentielles - à ce moment-là, il pourrait y avoir le conseil du professionnel qui entrerait en ligne de compte. La prescription ne pourrait pas être, si vous le voulez, sur papier, mais elle pourrait être faite, par exemple, par des moyens de télédiffusion ou de télécommunication, aujourd'hui, qui sont très rapides, par exemple comme Codaphone.

M. Lincoln: J'ai une dernière brève question avant de céder la parole. Vous avez suggéré un comité "aviseur". Je pense que chacun des groupements a suggéré une forme de comité "aviseur". Par exemple, je connais un des comités "aviseurs" provinciaux qui est très élaboré, qui coûte beaucoup d'argent. Il va dans le sens de la loi. C'est appuyé par des honoraires, beaucoup de dépenses parce que, quand vous avez un conseil semblable, cela coûte de l'argent. Est-ce que vous et les membres de votre ordre seriez prêts en tant qu'organisme à participer à un comité "aviseur" composé de bénévoles, au lieu d'un comité "aviseur" qui recevrait des honoraires?

Le Président (M. Saint-Roch): M. Laguë.

M. Laguë: M. le ministre, je peux vous répondre que du moins les membres qui sont dans la corporation seront heureux de pouvoir collaborer d'une façon bénévole sans arrière-pensée.

M. Lincoln: Merci beaucoup.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Merci beaucoup. Merci beaucoup à l'Ordre des agronomes du Québec d'être là. Le ministre m'a enlevé plusieurs questions que j'ai trouvé bien posées et vous avez vous-même dans votre exposé, en ne lisant pas de façon systhématique votre texte, répondu à plusieurs de mes questions. Je vous félicite parce que vous avez certainement prévu' d'avance les questions qu'on vous poserait. Cependant, j'en ai une qui est un peu une colle, mais je suis persuadé que vous avez vous aussi le sens de l'humour. Je lis à un endroit, à la page 6, "l'agronome est le seul professionnel dont la formation englobe cet ensemble de connaissances". Donc, par déduction, ce sont les seuls qui pourraient être les grands manitous de toute cette connaissance. Cela fait un peu "nombriliste" entre guillemets, et fait penser au syllogisme... Ensuite, vous dites que ce sont les seuls qui ont la formation pour pouvoir prendre toutes ces décisions. J'avais justement pris en note le nom de l'agronome qui est venu. J'ai dit Daniel Vanier tantôt; c'est Robert Marcotte, je m'étais trompé de note. Il disait que les agronomes ne suivaient pas pour la plupart des cours facultatifs sur les pesticides. Je regardais cela et je pensais un peu au syllogisme... Vous donnez un exemple de l'Université de Guelph plutôt que de trouver un exemple valable d'une université québécoise pour défendre votre point. Donc, cela fait chercher ailleurs. Cela me fait penser au syllogisme suivant: Si la banane est jaune, la banane est mûre; or, les Chinois sont jaunes, les Chinois sont mûrs. C'est un syllogisme qui pèche par son essence, dans son énoncé. C'est M. le ministre qui m'a glissé cela en coulisse tantôt. Cela me tentait beaucoup de le répéter ici parce qu'après quelques heures...

M. Lincoln: Ce n'est pas du tout le cas, je m'excuse.

M. Blais: ...où on a été derrière nos bureaux à écouter des choses excessivement sérieuses il m'a demandé de glisser un petit brin d'humour. C'est pour ce faire que je viens de glisser ce syllogisme qu'il a composé, ce matin, apparemment en se brossant les dents. Je voulais vous demander pourquoi - et ceci avec toute la noblesse que je reconnais à votre profession et surtout depuis les dix dernières années avec le progrès que l'agriculture a fait au Québec... Vous y êtes pour beaucoup, il n'y a pas que notre programme comme gouvernement quand nous étions au pouvoir qui a fait que l'agriculture a monté en flèche du côté autosuffisance, et vous étiez les instruments no 1. Pourquoi l'agronome serait-il le seul professionnel compétent pour l'utilisation rationnelle des pesticides? Pourquoi dites-vous cela dans... Vous éliminez les cultivateurs, qui, à cause de leur expérience, savent, je crois, les éléments essentiels de leur métier pour faire l'utilisation...

Le Président (M. Saint-Roch): M. Laguë.

M. Laguë: M. le député, la première des choses, si les Chinois sont mûrs, vous ne m'accoterez pas au pied du mur?

M. Blais: Je vous disais cela en murmure derrière vous.

M. Laguë: Non, non d'accord. La personne que nous citons est une personne d'autorité. Ce n'est pas parce qu'elle est doyen, c'est quand même une personne qui travaille en phytologle à l'Université de Guelph, en Ontario. On les cite puisque cela fait quand même longtemps qu'ils ont un "Pesticide Act" là-bas. Ils sont en avance sur nous à certains points de vue.

On disait tantôt qu'il y a très peu d'agronomes qui suivaient les cours en pesticides. Je me porte carrément contre cette affirmation. C'est peut-être vrai que peu d'agronomes suivent le cours, mais ce ne sont pas tous les agronomes qui travaillent en phytologie. Beaucoup travaillent en agroéconomie, beaucoup travaillent en zootechnie. Alors, ceux-là ne prennent pas les cours. Même en zootechnie, on donne des cours pertinents aux animaux. D'accord?

L'essence, si vous vouiez, de votre question, je l'ai peut-être oubliée..

M. Blais: L'essence, c'est à la page... Regardons-la ensemble a la page 6.

M. Laguë: D'accord. C'est seul l'agronome, d'accord.

M. Blais: L'agronome est le seul professionnel. Je vous disais, entre guillemets, que cela faisait un peu nombriliste, égocentrique et introverti. Je n'ai peut-être pas dit cela, mais...

M. Laguë: C'est le seul professionnel en agriculture qui ait cette formation. Il ne faut pas se leurrer. Je ne peux pas parler pour les autres ordres professionnels, si vous voulez, où les produits sont utilisés. Nous parlons ici de l'Ordre des agronomes du Québec. Je ne suis pas pour faire des recommandations pour qu'une autre corporation fasse un peu la même chose parce qu'elles ont les mêmes connaissances et les mêmes prérogatives.

Donc, lorsque je parle de notre domaine, je parle de notre domaine. De ce côté, c'est la seule personne capable de faire le discernement nécessaire. Le producteur agricole a des connaissances, c'est vrai, mais le producteur agricole n'a pas toutes les connaissances. Il ne connaît pas toutes les propriétés des espèces, des variétés qu'il utilise d'année en année. Cela change aussi, la génétique des plantes. Les conditions météorologiques, le cultivateur n'est quand même pas météorologue. Il n'est pas capable d'identifier tous les insectes, il n'est pas capable de faire toute l'analyse de tous les facteurs qui viennent avec tout cela. Il ne sait pas l'influence que les cultures qu'il a faites l'année d'avant auront sur l'année suivante. C'est pour cela que c'est un domaine très complexe et qu'il faut un professionnel. D'ailleurs, notre association est quand même formée depuis 1937. Cela fait longtemps que le législateur a reconnu que la personne compétente en agriculture, c'était l'agronome. Peut-être que je me regarde le nombril, mais...

M. Blais: Non, non, mais, vous savez, je l'ai mis entre guillemets. On vous demande beaucoup, vous êtes un peu les députés des cultivateurs et, comme les députés, ici, on demande beaucoup de ces gens-là, je sais qu'on demande beaucoup de vous.

À la page 7, il y a un paragraphe qui me plaît beaucoup; il y en a beaucoup de paragraphes,, mais là de façon particulière. Je ne lirai pas toute la phase 1 de la formation, mais prenons le dernier paragraphe parce qu'on sait dans quel contexte il est cité: "En instaurant un système de permis et de certificat obligatoire, le MENVIQ établit une mesure préventive qui lui assure un mécanisme de surveillance de la distribution et de la vente des produits antiparasitaires, mais ne permet pas d'exercer un contrôle sur les quantités de produits ni sur la pertinence de leur usage..."

Je reviens à cette question classique et au groupe d'aqronomes, cette question est d'une importance capitable pour l'avant-projet de loi que nous faisons. Vous dites ici que permis et certificat ne contrôlent pas la quantité des produits. Désireriez-vous que cette loi contrôle de façon quantitative les pesticides pour en assurer la diminution au cours des décennies qui viennent?

M. Laguë: Ce n'est pas dans ce sens-là qu'il faut le voir. De toute façon, la diminution de la quantité va se faire automatiquement par les recherches que nous faisons et par les nouvelles applications de lutte intéqrée, si vous voulez. On s'en va vers une diminution de l'utilisation de ces produits. Non seulement on va vers une diminution, mais on s'en va aussi vers des produits beaucoup moins nocifs et beaucoup moins résiduels. Les certificats et les permis disent exactement ce que nous voyons, c'est que cela va permettre, si vous voulez, un mécanisme de surveillance, mais cela ne dira pas au ministère quelle quantité a été appliquée dans tel acrage. À ce moment-là, ce n'est pas un contrôle quantitif légal, vous allez confier le contrôle quantitatif à un professionnelqui, lui, a à rendre compte de ses actes à sa profession par les comités de discipline et par les comités d'inspection professionnelle.

M. Blais: D'accord. Je vous pose la deuxième question classique que j'ai posée à tous ceux qui sont venus: Êtes-vous en faveur d'une taxe où qu'elle soit, surtout sur les pesticides, pour favoriser une publicité, une recherche et une éducation de la population devant ces produits?

M. Laguë: L'ordre, en tant qu'organisme - je vais parler au nom de plusieurs personnes - ne verrait pas d'un mauvais oeil une certaine forme de taxation en s'assurant, cependant, que cette taxation soit bien marquée, qu'elle soit levée et dirigée vers les buts pour lesquels on l'aura levée. Ce

serait ma réponse.

M. Blais: Je vous remercie parce que je n'ai pas eu le temps... M. Green nous disait: On envoie tout cela dans le fonds consolidé, et c'est vrai, mais il demeure qu'il y a des exemples dans le passé: la taxe sur les cigarettes dont une partie fixe va au déficit olympique. Il est entendu que tout l'argent va dans le fonds consolidé, mais, si cette partie ne répond plus au budget prévu pour la chose à laquelle on l'avait prévu, on augmente; cela se fait très bien. Ce n'est qu'une défaite. Quand on dit que cela va dans un fonds, c'est une défaite pour ne pas la lever. Je ne vous dis pas que je suis en faveur d'une taxe. J'ai demandé à chaque intervenant s'il était, oui ou non, en faveur d'une taxe; la plupart, l'extrême majorité a répondu oui.

Je vous remercie et je suis content que vous soyez venus. Les agronomes sont des gens qui sont les directeurs, en fait, de ceux qui nourrissent le monde entier. Vous avez une profession très noble. Je suis content que vous vous soyez déplacés pour venir témoigner ici. Je suis content que vous ayez fait un mémoire de classe parce que cette loi est très importante. Merci beaucoup.

M. Laguë: Cela m'a fait plaisir. (17 h 30)

Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.

M. Lincoln: M. Laguë, en mon nom ainsi qu'au nom de mes collègues du côté ministériel, je voudrais vous remercier très sincèrement de vous être déplacé, de nous avoir apporté des notions novatrices, différentes des autres, des points de vue qui ont ajouté au débat, c'est sûr, et qui ont ajouté è notre compréhension de ce que vous vouliez véhiculer. Je suis surtout heureux de votre confirmation tellement promptes sans même hésiter une minute, vous avez dit que vous seriez prêts, dans votre ordre, à nous fournir des ressources au sein de tout comité "aviseur" qui pourrait siéger à titre bénévole. Je pense que les comités sont beaucoup plus valables de cette façon et je vous en suis particulièrement reconnaissant. Je pense que cela a été un débat riche, même incluant les syllogismes sur les bananes mûres, soit dit en passant, puisque c'est enregistré. J'en nie tout à fait la paternité, parce que je n'ai pas l'imagination aussi fertile.

M. Blais: On va éplucher cela pour voir si c'est vrai.

M. Lincoln: Merci beaucoup, M. Laguë, ainsi que vos collègues. On va continuer à travailler ensemble avec les mêmes objectifs que nous partageons, je le sais, de toute part ici. Merci.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre.

M. Laguë, dans un premier temps, permettez-moi de vous féliciter pour la qualité de votre mémoire et de votre présentation aux membres de cette commission, et, dans un deuxième temps, de féliciter l'Ordre des agronomes pour son 50e anniversaire de fondation cette année. Je vous souhaite, à l'aube de l'an 2000, 50 années de prospérité.

M. Laguë: Je vous remercie beaucoup. Est-ce que vous me laisseriez corriger une erreur qui a circulé cet après-midi? En tant que professeur en production avicole, je ne peux pas laisser la passer, vu que c'est enregistré. On a mentionné à un moment donné que les poussins recevaient des antibiotiques, des hormones et toutes sortes de choses dès leur naissance, avant même qu'il y ait maladie. Cela fait 24 ans que des hormones n'ont pas été données aux poulets.

M. Lincoln: Je m'excuse, M. Laguë. Cela m'a échappé.

Une voix: C'est Mme Plamondon.

M. Laguë: C'est Mme Plamondon qui a soulevé ce point-là cet après-midi.

M. Lincoln: Ah bon!

M. Laguë: Je voulais simplement faire une mise au point. Le poulet que nous mangeons n'est pas contaminé par les antibiotiques. Les antibiotiques que nous donnons sont régis. Ils le sont d'une façon préventive, pour prévenir la diarrhée chez le petit poussin, tout simplement pour qu'on ait à manger un oiseau qui soit plus sain, à la fin.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. Laguë.

Je demanderais maintenant aux gens de l'Ordre des chimistes de prendre place devant les membres de la commission.

Je demanderais au porte-parole de l'Ordre des chimistes de s'identifier et de bien vouloir identifier, pour les fins du Journal des débats et pour les membres de la commission, les personnes qui l'accompagnent.

Ordre des chimistes du Québec

M. Delvin (Edgar): D'accord. Je suis Edgar Delvin, président de l'Ordre des chimistes et, aujourd'hui, je suis accompagné de Mme Lise Boulé qui remplace M. Lester Fowley qui n'a malheureusement pu venir; elle est membre du comité de l'environnement. M. Réal Laliberté, à ma gauche immédiate, est le directeur administratif de

l'ordre. À ma droite immédiate, M. Antoine Fournier est le vice-président aux relations publiques et M. Yvon Pépin, à l'extrême droite, est le président du comité de santé et de sécurité de l'Ordre des chimistes.

M. le ministre, M. le Président, MM. les membres de la commission, je vous remercie de nous avoir permis de venir ici aujourd'hui afin de présenter notre point de vue. Étant donné que notre mémoire a déjà été lu par vous tous, je me contenterai en quelques minutes de souligner, à l'aide d'exemples, si possible - mol-même ou les gens qui m'accompagnent - les points saillants de nos recommandations.

Notre mémoire souligne, d'une part, que les inspecteurs doivent avoir une formation adéquate et correspondant aux responsabilités qui leur sont données; deuxièmement, qu'un comité "aviseur" soit formé pour la préparation de la réglementation et la définition des normes et des méthodes qui seront appliquées dans le cadre de cette loi; troisièmement, que rien dans cette loi ne devrait gêner l'exercice de leur profession par nos membres; - nous verrons pourquoi plus tard - que la santé et la sécurité des utilisateurs devraient être assurées et que des fonds pour la recherche de solutions de rechange soient débloqués à court terme, afin d'obtenir un environnement plus sain dans les années futures. Donc, les quatre ou cinq points que je vous ai mentionnés ne sont pas une surprise pour vous, étant donné qu'ils ont déjà été repris par bon nombre d'intervenants aujourd'hui.

Les objectifs visés par la loi sont, tel que nous le comprenons, de réglementer la vente et l'utilisation des pesticides, d'avoir un effet dissuasif sur l'usage excessif et de pénaliser les contrevenants. Or, d'après nous, les exclusions qui sont présentes dans la loi pour l'obtention d'un permis affaiblissent cette argumentation. Ainsi, à l'article 9, troisième alinéa, cela nous semble contradictoire à l'esprit de la loi. En effet, les agriculteurs et les sylviculteurs sont de grands utilisateurs de ces produits toxiques. Or, ils sont exclus de la loi. Par ailleurs, à l'article 15, troisième alinéa, un permis est délivré à toute personne qui fournira une déclaration attestant que des travaux de nature technique seront effectués par une personne détenant un certificat, ou par une personne physique agissant sous la supervision immédiate du titulaire du certificat.

Nous voudrions savoir ce que le législateur entend par supervision immédiate, d'une part. Aussi, nous voudrions soulever le problème du certificat qui, à mon sens, est peut-être employé dans un sens trop large. Cet article nous semble donc difficile à appliquer tel qu'il est présentement et devrait probablement être remanié d'une certaine façon. Est-ce à dire que l'application de pesticides se fera dans le cadre de cette supervision immédiate? Est-ce à dire que l'application de pesticides se fera sous la supervision constante par un détenteur de permis? On se pose la question: Comment cela pourra-t-il vraiment se réaliser si on ne veut pas mettre la moitié de la population qui vérifie l'autre moitié de la population?

De plus, il faudra bien définir ultérieurement quelles seront les qualités des personnes qui auront droit à un permis. Quelles seront leurs codifications? L'obtention d'un permis, par la voie d'un examen soumis par le ministère, ne devrait pas laisser croire aux gens qui obtiennent les permis qu'ils ont, à toutes fins utiles, les connaissances universelles dans le domaine. Comme on l'a déjà souligné, c'est un domaine très complexe et les certificats qui seront délivres seront probablement délivrés dans un cadre, j'imagine, un peu plus restrictif quej[ce que l'on prévoit dans la loi. Ceci est d'autant plus important, car les personnes qui auront le permis devront interpréter les dangers des substances toxiques qui vont être utilisées en agronomie.

Finalement, nous croyons que restreindre la" loi è des classes de pesticides ouvre la porte à un manque de contrôle. Ici, je m'explique! En effet, si les pesticides sont classifiés comme c'est indiqué dans la loi, il serait facile de fabriquer - ceci, naturellement, c'est un aspect qui appartient proprement aux chimistes - des produits dont l'action pourrait être la même, mais qui, par des modifications structurales ou des modifications de molécules, ne tomberaient pas nécessairement dans la même classe. Donc, la fabrication analogue de ces produits en industrie est chose courante. Elle pourrait, à ce moment, produire un remplacement ou une modification de la structure et permettre, à ce moment, d'obtenir des pesticides actifs, mais qui seraient complètement hors de la classification. Non seulement au niveau de l'utilisation, mais aussi au niveau de la fabrication de ces pesticides, un mécanisme devrait être inclus, à mon sens, dans la loi. Cet aspect de la fabrication est important car la quantité de matériel utilisé pour la fabrication de ces matériaux ou de ces substances est énorme. À notre sens, la fabrication fait partie intégrante de l'utilisation.

Nous soulignons dans notre mémoire que toute réglementation rendant la loi applicable devra se faire de concert avec des gens versés en la matière. Nous soulignons aussi qu'il faudra agir avec beaucoup de circonspection. Nous sommes convaincus que les chimistes et les autres professionnels devront être présents lors de la rédaction de la réglementation.

Un autre aspect très important que nous soulignons dans notre mémoire est la

formation des inspecteurs. En effet, ces personnes seront confrontées quotidiennement à des problèmes complexes auxquels elles seront appelées à donner une réponse rapide. Ainsi, ces gens auront à faire face à des problèmes de mélange de produits, à des résidus de produits toxiques utilisés en série dans le même équipement. Se surajouteront à ces problèmes des problèmes de contenant, d'entreposage, d'élimination de produits toxiques.

La loi donne aux inspecteurs énormément de pouvoirs et je me réfère à l'article 78 où il est dit que: "Tout inspecteur peut, dans l'exercice de ses fonctions: "1° pénétrer, à toute heure raisonnable, dans tout lieu ou endroit dans lesquels des pesticides sont ou devraient être utilisés ou vendus, en conformité de la présente loi et des règlements, et en faire l'inspection; il peut examiner les produits qui s'y trouvent, en prélever gratuitement des échantillons, installer des appareils de mesure, procéder à des analyses, examiner les registres ou tout autre document et en prendre un extrait ou une copie;"

II faut donc que les inspecteurs qui, selon la loi, pourront être cités comme témoins de la couronne aient des compétences nécessaires pour justifier les accusations qui pourraient être éventuellement portées contre les utilisateurs.

L'élaboration de dossiers techniques exige des connaissances suffisantes. C'est pourquoi, dans notre mémoire, en page 5, nous soulignons que, si l'inspecteur est un technicien ou a une compétence équivalente à celui-ci ou, à plus forte raison moindre, et qu'en contre-preuve un chimiste est amené à découdre l'argumentation du technicien ou la procédure qu'il a utilisée, le but de la loi ne sera pas atteint et la protection du public en souffrira.

De plus, l'article 5 de notre loi nous fait une obligation de surveiller ce qui se fait en chimie. Il se lit ainsi: "Les fins de la corporation sont: a) d'exercer une surveillance générale sur l'exercice de la chimie professionnelle." C'est dans ce contexte que nous disons que les travaux concernant la détection, le dosage ou l'identification des pesticides exigée par cette loi relèvent de l'exercice de la chimie. C'est pourquoi l'ordre intervient et demande que soit créé un contexte pour que ces tâches soient effectuées selon les normes reconnues. Nous y demandons aussi que l'encadrement des inspecteurs se fasse par des chimistes pour tout ce qui concerne l'exercice de la chimie ou de notre profession.

En corollaire à ce qui vient d'être dit, je tiens à souligner, comme nous l'avons fait dans notre mémoire, que l'analyse, la détection, l'identification de substances complexes requièrent la présence de chimistes. Nous avons souligné qu'un encadrement professionnel est indispensable à l'application de la loi. Nous insistons donc pour demander qu'en aucune façon la loi ne puisse gêner l'exercice de la profession par nos membres, d'autant plus qu'un chimiste pourrait être appelé è témoigner et, s'il n'est pas exclu de la loi, il pourrait être incapable de le faire parce qu'il n'a pas eu accès aux produits dont il avait besoin pour faire ses propres analyses.

En matière de santé et de sécurité, il est notoire que bon nombre d'usagers n'utilisent pas les précautions nécessaires. Les malaises dont souffrent les utilisateurs de ces produits sont nombreux. Il est utile de rappeler l'incident survenu à Pierrefonds, l'an dernier, où des enfants à proximité d'un site d'utilisation d'herbicides vaporisés ont failli être intoxiqués. Quoi qu'il en soit, cet incident met quand même en relief l'urgence d'une telle action. II ne faut pas attendre qu'il y ait vraiment des accidents pour agir. Donc, une prudence est de rigueur dans l'utilisation de ces produits et c'est pourquoi, dans notre mémoire, en page 9, nous demandons avec insistance que des normes de sécurité soient établies afin de protéger le public, d'une part, et aussi l'utilisateur qui fait naturellement partie de ce public.

Nous croyons fermement en l'utilité d'une période de formation telle que cela a déjà été présenté dans la loi. Elle peut être récurrente, mais elle doit être envisagée. Nous abondons dans cette voie. M. Pépin, qui est à ma droite, pourrait élaborer plus tard. (17 h 45)

Nous voulons aussi que des fonds de recherche soient affectés à la recherche de solutions de rechange. En effet, les pesticides tels que nous les avons, nous les utilisons. Entre deux maux, on choisit le moindre. Cela doit être considéré comme une étape transitoire, et des substances moins nocives devront être utilisées si nous voulons continuer à utiliser de tels herbicides ou pesticides dans une agriculture de haute densité.

En terminant, il faut réaliser que l'aspect polluant des pesticides revêt plusieurs formes. D'une part, certains de ces produits restent dans le sol pour une longue période. Donc, ils risquent graduellement d'être entraînés vers les eaux souterraines, donc, vers la nappe phréatique, en plus d'aller dans les rivières. D'autre part, ils sont susceptibles de se concentrer dans la chaîne alimentaire. Je cite ici en exemple le cas maintenant célèbre du DDT qui, quoique étant très efficace, a été éliminé du marché parce qu'il se retrouvait à un moment donné dans la chaîne alimentaire et entre autres dans le lait maternel. D'autres exemples pourraient être donnés. Ainsi, les herbicides qui sont utilisés dans la culture du maïs, qui demeurent assez longtemps dans le

sol et qui, année après année, peuvent revenir lors de la culture du maïs et à ce moment se retrouver dans les aliments. La même chose pourrait se produire en ce qui concerne la viande. Si les animaux broutent des fourrages qui contiennent des herbicides, il est certain qu'ils pourraient se concentrer et que nous en écopions pour notre santé. En plus de ces aspects, il faut considérer la transformation de ces produits en substances qui peuvent être aussi, sinon plus toxiques, que les substances mêmes et qui se retrouveront donc en circulation.

Toutes ces raisons militent en faveur d'une loi où les professionnels ayant compétence en la matière auront leur place. Ceci conclut notre présentation. Merci.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Delvin. M. le ministre.

M. Lincoln: Merci beaucoup, M. le président, pour votre présentation et du soin que vous y avez apporté, comme du reste tous les intervenants qui sont venus ici. Nous vous remercions de nous apporter des notions qui nous permettront de bonifier le projet de loi. C'est cela, le sens de l'audience. Vous avez fait plusieurs remarques qui demandent à être explicitées. Avant de vous demander de le faire, peut-être que j'aurais voulu vous souligner, encore une fois, que les agriculteurs et les sylviculteurs sont certainement prévus dans la loi. Ils seront inclus dans la loi. C'est le mécanisme prévu par les légistes qui ont préparé le projet de loi pour signifier que l'inclusion va se faire dans le cas des sylviculteurs à une date un peu ultérieure, cette année sans doute, et les agriculteurs d'ici à 1990.

Vous avez fait plusieurs remarques; d'abord, sur la compétence des inspecteurs. Je pense que vous êtes le premier intervenant et le seul jusqu'ici à avoir fait des remarques relatives à la compétence des inspecteurs. Nous les prenons bien au sérieux. Nous allons les examiner de près parce qu'il est évident que, si les inspecteurs contrôlent un élément dans l'atmosphère qu'ils vont aller surveiller et inspecter, il faut qu'ils sachent de quoi il s'agit. II va de soi que ces inspecteurs devront avoir les connaissances approfondies pour pouvoir évaluer les risques, les dangers et les délits. En ce sens, vous nous suggérez quelqu'un qui a au moins un DEC en chimie. Je ne sais pas si telle sera la recommandation. En tout cas, on en a pris bonne note. On peut vous assurer que les inspecteurs qui travailleront en ce domaine seront tous des gens qui auront une expertise très claire et très approfondie de ce sujet. Ils vont être formés et ils vont travailler avec des équipes du ministère . qui sont spécialisées dans ce domaine. Vous avez aussi parlé d'un comité "aviseur". Dans votre cas, c'est un peu différent du comité "aviseur" qui a été suggéré par d'autres intervenants, quoique plusieurs aient suggéré un comité "aviseur". Dans votre cas, j'ai compris que c'était un comité "aviseur" qui travaillerait dès maintenant pour aider le ministère à faire la réglementation. C'est une idée très intéressante. Comme vous le savez, nous comptons travailler et nous avons déjà travaillé en consultation avec tous les groupes. Beaucoup de groupes qui sont venus ici pourraient nous apporter des éclairages et de l'aide afin de constituer le projet de loi. Pour le projet de réglementation, nous allons faire une consultation aussi. Par rapport au projet du comité "aviseur" - vous m'avez entendu poser la question à l'Ordre des agronomes du Québec - vous avez demandé que, si on formait un comité "aviseur", un membre de votre ordre y soit inclus. Ce qui me semble être très logique dans ce cas. Votre ordre serait-il prêt à considérer une participation à titre bénévole considérant que nous du gouvernement, nous ne voulons pas d'appareils qui, quand ils sont constitués deviennent très lourds, deviennent très bureaucratiques parce que cela devient coûteux, cela fait des rapports officiels, etc.? Un comité "aviseur" composé de bénévoles, selon nous, est encore plus valable parce que ce sont des gens vraiment concernés qui vont y travailler. Êtes-vous prêts a considérer cette notion?

Le Président (M. Saint-Roch): M.

Delvin.

M. Delvin: Vous avez posé la même question aux agronomes, et je vous ferai la même réponse: Oui, nous avons fait cette recommandation sans arrière-pensée et nous sommes prêts à collaborer de quelque façon que ce soit avec le ministère, c'est clair.

M. Lincoln: C'est-à-dire que vous seriez prêts à travailler de façon bénévole?

M. Delvin: Certainement, oui.

M. Lincoln: Vous avez apporté une notion qui, je le comprends, doit beaucoup vous préoccuper: selon l'alinéa 6 de l'article 100, vous semblez penser que la rédaction de ce texte pourrait porter atteinte à votre droit professionnel d'exercer complètement votre profession. Quant à nous, le sens et la préparation de cette loi nous indiquent que -j'ai vérifié cela encore avec l'un de nos légistes qui a travaillé au projet de loi - il n'y a aucune interprétation, d'aucune façon, qui puisse dire que cela pourrait enfreindre votre droit d'exercer votre profession en totalité. Puisque vous l'avez apporté, il est sûr - un homme sérieux comme vous - que vous aviez des raisons. Vous avez cité l'alinéa 6° de l'article 100, le paragraphe qui

donne les pouvoirs de réglementation. À la page 8 de votre mémoire, vous dites: "L'alinéa 6° de l'article 100 définit le pouvoir du gouvernement de régir, limiter ou prohiber le dépôt ou la distribution..." Après avoir développé cela, vous dites: "L'ordre demande d'ajouter en début de loi un article qui précise que rien dans cette loi ou la réglementation ne peut empêcher un chimiste d'exercer sa profession." Je voulais vous demander ce que vous croyez qui existe dans cet article qui pourrait vous empêcher d'exercer votre profession, compte tenu que tout ce qu'on veut, nous, c'est d'avoir des certificats qui sont appliqués à certains utilisateurs de pesticides, des vendeurs, des grossistes vendeurs etc., les applicateurs et les utilisateurs. C'est-à-dire que, si un chimiste professionnel est un vendeur de pesticides, un utilisateur ou un agriculteur qui se sert de pesticides, là, il serait soumis à un certificat, mais celui qui ne l'est pas n'est nullement inclus dans la loi ou contrôlé par la loi. C'est pourquoi je voulais savoir quelle est la relation que vous faites entre les deux.

M. Delvin: En fait, à l'alinéa 6° de l'article 100, on dit que le gouvernement a le pouvoir de régir, limiter ou prohiber la distribution, par exemple, ou le traitement de tout pesticide, contenant ou la vente de tout pesticide. C'est-à-dire, que si des chimistes voulaient se procurer des pesticides pour en faire l'analyse sans avoir besoin d'un certificat... Il faut mettre ceci en relation avec l'obtention d'un certificat qui, lui, est délivré par le ministre à la suite d'un examen. Nous avons vu là une possibilité que, en fait, le chimiste qui voudrait se procurer des produits chimiques, ou avoir des pesticides en sa possession pour des fins d'analyse ou d'expertise, devrait éventuellement passer un examen, avoir un certificat pour pouvoir posséder ces produits chez lui. À ce moment-là, ceci est une entrave. On considère que ce serait une entrave à notre profession que des chimistes qui, en fait, finalement, fabriquent et contrôlent ce genre de produits, doivent éventuellement avoir un certificat pour pouvoir en obtenir. Dans ce cas-là, c'est une double allégeance ou un double contrôle sur la compétence des chimistes. C'est simplement cela.

M. Lincoln; Enfin, nous allons vérifier si, de façon tout à fait imprévue, cela pourrait impliquer ce que vous dites. J'ai vérifié avec notre légiste-conseil ici présent qui travaille sur le projet de loi et il n'y a pas la moindre possibilité. Au contraire, c'est le vendeur ou l'applicateur qui vous vendrait les pesticides, mais vous êtes au même titre que n'importe qui. Si vous vous en servez en laboratoire, vous n'aurez pas besoin d'un examen ou d'un certificat pour vous en servir. C'est très clair. Le fait est que la réglementation qui va découler de l'article 100 ne peut pas aller plus loin que la loi elle-même. C'est aussi clair. Lorsque la réglementation sera émise, vous pourrez la consulter. De toute façon, nous prenons note de ce que vous dites et nous allons faire une double vérification. Mais, selon nos juristes, il est impossible d'interpréter la loi pour dire que, dans les circonstances que vous avez décrites, vous serez soumis à un certificat ou à un contrôle de la loi; aucunement.

M. Delvin: En fait, c'était simplement une vérification que nous voulions.

M. Lincoln: Oui.

M. Delvin: Donc, si c'est fait, cela nous satisfait.

M. Lincoln: On va faire une double vérification, mais, à ce stade-ci, cela semble très catégorique que ce n'est pas le cas.

M. Delvin: D'accord.

M. Lincoln: Avant de donner la parole à mon collègue, est-ce que vous avez des questions spécifiques à me poser afin d'élucider quelques points qui vous préoccuperaient?

M. Delvin: Peut-être pas une question, mais surtout un commentaire concernant le recyclage et l'élimination des pesticides. Nous avons d'ailleurs souligné dans notre mémoire que ce contexte est différent et nous voudrions savoir si le ministère de l'Environnement aura une loi en accord avec le règlement sur les déchets dangereux, qu'il y ait une concordance entre les deux. Lorsqu'on parle de recyclage et d'élimination de pesticides, ces substances doivent être considérées comme dangereuses ou toxiques et devraient donc être gérées de la même façon.

M. Lincoln: Oui, c'est le cas. Lorsque la réglementation sera faite, toute la question de la réglementation sur les déchets dangereux et les matières dangereuses sera examinée afin qu'il y ait une concordance et une complémentarité. C'est le cas.

M. Delvin: Outre les recommandations que nous avons faites, il y a aussi l'aspect de l'étiquetage qui nous est particulièrement sensible. L'ordre a déjà fait des représentations dans ce sens lors de la Semaine de la santé et de la sécurité, qui était organisée par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, il n'y a pas très longtemps. M. Antoine Fournier avait d'ailleurs fait une présentation à cet effet. Nous voudrions savoir ce qui est

envisagé dans le cadre de l'étiquetage des produits pesticides. Nous pensons que certains de ceux-ci, ceux qui sont vendus dans le commerce, sont particulièrement peu explicites ou, en fait, l'étiquetage est fait de telle façon qu'on a beaucoup de difficulté à les lire. M. Fournier pourrait enchaîner là-dessus.

Le Président (M. Saint-Roch): M.

Fournier.

M. Fournier (Antoine): L'étiquetage doit être repensé. Si les pesticides pouvaient parler, ils diraient sans doute à l'humain: Pour le bien-être de l'humain, je détruis les organismes que tu considères indésirables, mais, en même temps, je m'attaque à ta santé. Malheureusement, on ne peut pas connaître le langage complet des pesticides et la majorité des utilisateurs, tels les agriculteurs et les sylviculteurs, connaissent peu le langage des pesticides, c'est-à-dire les effets sur les organes vitaux pour la santé. On devrait présenter aux utilisateurs des fiches techniques ou encore un étiquetage bien structuré en mettant l'accent sur les principaux et les plus inquiétants problèmes de santé pouvant être causés par les pesticides et aussi un étiquetage avec une présentation imagée des précautions qu'il faut prendre lorsqu'on les manipule et lorsqu'on fait de l'épandage. On est parvenu, il y a quelques années, à inscrire sur un paquet de cigarettes que le danger croît à l'usage; il en est de même pour les pesticides. (18 heures)

Une étude récente de M. Michel Fournier, de l'Université du Québec à Montréal, faisait ressortir que le contact répété avec des insectides pouvait affecter le système immunitaire et la résistance aux infections bactériennes et virales. Je pense que la meilleure façon de faire connaître aux grands utilisateurs les problèmes des pesticides pour la santé, c'est d'avoir un étiquetage très bien structuré et repensé.

Il y a un autre élément que je voudrais demander à M. le ministre. Quand on considère la loi sur l'élimination des déchets dangereux, il y a un manifeste qui doit être présenté. Est-ce qu'on prévoit, pour les grands utilisateurs de pesticides, qu'il puisse y avoir un manifeste avec des points précis tels que le type de pesticide utilisé, la quantité utilisée, la date, le lieu, les conditions climatiques et les conditions météorologiques? Je vais indiquer pourquoi.

Récemment, en Italie, l'automne dernier, il y a eu un épandage de pesticides dans les terrains en culture. À la suite de cet épandage, il y a eu une pluie diluvienne de telle sorte que c'est le fleuve Pô qui a récolté les pesticides. En plus d'avoir fait un épandage inutile, on a amélioré sensiblement la pollution du Pô. Je ne vous en cache pas la réalité. Si on considère aussi un autre phénomène, si les Américains parviennent à exporter les pluies acides par la nature, je pense que dans un épandage il est fort possible, si le vent est présent, que des champs voisins où il pourrait y avoir des animaux en train de se nourrir puissent absorber ce pesticide sous sa forme originale. On sait quel bon nombre de pesticides se décomposent après un certain nombre de jours ou de semaines. Mais, à ce moment, compte tenu des conditions climatiques, il est fort probable que ces pesticides apparaissent dans la chaîne alimentaire. Aussi, je demande au ministre s'il y aurait un manifeste...

M. Lincoln: Là, vous m'embrouillez dans vos questions. J'en ai deux.

M. Fournier: Oui.

M. Lincoln: II y a d'abord l'étiquetage. Il y a la question du manifeste.

M. Fournier: Je veux compléter en disant pourquoi un manifeste pourrait être utile. Cela permettrait de suivre l'état de la qualité de l'eau, par exemple pour les eaux souterraines fou les rivières qui sont à proximité. Et si l'on suivait l'état de l'eau, cela pourrait amener le ministre à imposer des interdits Ià certaines classes de pesticides qui sont à proximité des rivières et surtout de celles qui vont servir à la consommation d'eau courante, d'eau potable pour l'humain. C'est en ce sens qu'un manifeste pourrait être utile pour un suivi ultérieur et pour protéger nécessairement l'environnement et l'écosystème.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.

M. Lincoln: D'abord, pour ce qui est de l'étiquetage. Votre recommandation suit le fil de l'idée de plusieurs intervenants qui ont parlé de l'étiquetage et de l'étalage. Je voudrais vous expliquer que l'étiquetage comme tel, tous les barèmes et les critères qui ont un étiquetage réglementaire et obligatoire, d'après la loi, dépendent du gouvernement fédéral. Nous, nous n'avons pas le droit de regard; par exemple, nous ne pouvons dire à un fabricant de pesticides, de produits antiparasitaires. Il faut que vous mettiez telle chose sur l'étiquette. Tout cela est contrôlé par le fédéral. En fait, l'exemple que vous avez donné sur le tabac est typique. La mention, tant aux États-Unis qu'au Canada, dépend du fédéral et c'est le fédéral par le ministère de la Santé et du Bien-être social qui a insisté et qui a légiféré pour que cette mention soit mise sur les cartons de cigarettes.

L'étiquetage de base dépend de la loi fédérale sur les anti parasitaires, parce que toute la question de la fabrication, de l'autorisation de fabriquer un produit et de son homologation est une responsabilité clairement fédérale. Ce que nous nous pouvons faire, ce que nous avons le droit de faire, c'est, sans changer les bases de cette loi sur lesquelles nous n'avons pas droit de regard, aller plus loin en demandant d'ajouter des choses, par exemple. Il y a certaines suggestions pratiques et concrètes qui ont été faites ici, par exemple, avoir un étalage séparé pour les produits parasitaires et les produits non parasitaires, avoir une section du magasin qui dirait: produits poisons, etc., ou poison; avoir des affiches graphiques, avoir des renseignements additionnels sur certains contenants, surtout sur certains contenants de pesticides de classes plus restreintes, etc. Nous allons examiner cela de très près et voir comment cela peut être fait. Est-ce que cela se fera dans la réglementation ou dans les codes de pratique qui seront élaborés avec les secteurs définis parce que certaines considérations s'appliquent à certains secteurs et ne s'appliquent pas à d'autres? Ces questions, nous allons les étudier de très près, entre autres, la position sur l'étiquetage, l'étalage. Nous allons prendre cela en considération et, dans la mesure où ce sera possible pour nous d'aller plus loin que le fédéral, nous allons l'examiner de très près et travailler avec les intervenants afin d'arriver à une solution. Je pense que l'idée est très bonne.

Pour ce qui est de l'épandage et du manifeste, ce qui arrive, c'est qu'il faut distinguer quand vous parlez de la réglementation sur les déchets dangereux qui demande un manifeste. C'est quand le produit est devenu un déchet. C'est la conséquence du produit, la fin du produit, quand il est devenu un déchet. Qu'est-ce qu'on fait avec cela? Je ne sais pas si c'est de cela dont vous parliez qui est jeté à la rivière ou du pesticide lui-même. Comment allons-nous contrôler le pesticide? C'est par l'article 67 du projet de loi qui sera maintenant inclus sous le chapitre des dispositions pénales. C'est comme cela que nous allons le contrôler.

Si quelqu'un a des pesticides qu'il peut utiliser légalement, qu'il les utilise dans le cadre de la loi, qu'il détienne un certificat de compétence et que sa compagnie possède un permis. À ce moment-là, l'obligation qui est faite, ce n'est pas un manifeste à chaque épandage, parce qu'il serait impossible de contrôler cela. On va demander dans la loi des bilans, des registres. C'est de cette façon qu'on va pouvoir contrôler la chose. Ce sera par un manifeste du même type que le manifeste pour les déchets dangereux.

Le Président (M. Saint-Roch): M.

Fournier.

M. Fournier: Est-ce que, par exemple, cette quantité qui sera utilisée va être la source des vendeurs ou des utilisateurs?

M. Lincoln: D'abord, le vendeur sera obligé de détenir un certificat de compétence et sa compagnie un permis, c'est-à-dire qu'il y aura des vendeurs autorisés qui auront à tenir des registres. L'utilisateur, prenons le cas d'un agriculteur, lui aussi devra détenir un certificat de compétence. Si, par exemple, il allait émettre dans l'atmosphère une matière dangereuse, à ce moment-là, il sera soumis... Excusez, un instantl

D'abord, suivant l'article 22, le titulaire d'un permis d'une catégorie déterminée doit tenir des registres, conserver les pièces justificatives et transmettre au ministre les états des transactions prévues par rèqlement. En plus, à l'article 67, vous pouvez voir qu'il y a presque une prohibition. C'est un devoir pour la personne, d'après la loi, sous les injonctions, à l'article 67 qui dit: Nul ne peut émettre dans l'atmosphère, etc., qui puisse être dommageable aux voisins. Nous allons prendre cette même disposition que nous allons inclure au chapitre VII des dispositions pénales, à la page 23, c'est-à-dire qu'il y aura un mécanisme de contrôle. C'est le mécanisme prévu pour les pesticides.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Delvin.

M. Delvin: Oui. Je voudrais poser une autre question, pas nécessairement pour ce qui est de l'utilisation des pesticides, mais de la fabrication des pesticides. Je voudrais savoir si le législateur entrevoit, soit dans cette loi ou dans une loi ultérieure, une loi qui régirait en quelque sorte la fabrication. Si on fait référence à des problèmes, certains nous viennent en mémoire, en particulier ceux de Bhopal où on faisait, en fait, des carbamates, qui sont des pesticides aussi, et où il y a eu un accident assez dramatique. Je ne voudrais pas lever ce spectre ici. C'est peut-être excessif, mais il faudrait éventuellement voir, si on développe une industrie de fabrication, à réglementer cette industrie de façon qu'il n'y ait pas de problèmes qui surgissent, peut-être pas maintenant, mais dans dix ans ou des choses comme cela.

M. Lincoln: II y a deux choses différentes. D'abord, si vous parlez d'une industrie comme Norsk Hydro qui s'implante ici à côté de Trois-Rivières, à Bécancour, ou de n'importe quelle autre industrie, cela pourrait être une industrie de produits chimiques ou de pesticides. Cette industrie, dans les cas où il y a des impacts

environnementaux, est obligée de faire une étude d'impact environnementale très exhaustive et obtenir une autorisation du ministère avant même de commencer. Dans le cas des industries que je cite, pour n'importe quel investissement au Québec d'ordre majeur ayant un impact environnemental sérieux, elles ne peuvent s'implanter sans un certificat d'autorisation du ministère après des études exhaustives environnementales qui prévoient justement la prévention d'accidents ou d'émissions dans l'atmosphère, dans le sol ou dans les rivières, C'est une chose.

Par rapport aux produits qu'elles produisent elles-mêmes, prenons le cas de Merck Frosst, de Pfizer ou de Sandoz ou de n'importe quelle industrie qui pourrait produire des produits antiparasitaires ou des pesticides. Nous n'avons aucun droit de regard sur le contenu de cette fabrication parce que l'autorisation de fabriquer, l'homologation du produit est clairement de juridiction fédérale. La juridiction du Québec commence au niveau de la distribution, de la vente du produit et de l'application du produit. Là, nous pouvons intervenir, c'est le seul stade.

Tout ce que nous pouvons faire, c'est d'exercer des pressions auprès du fédéral pour être plus impliqués indirectement dans le processus d'homologation afin de savoir ce qui se passe. Le gros problème, c'est qu'on ne sait pas ce qu'ils savent. Ils ont toutes sortes de renseignements en ce qui a trait à l'homologation avant que le produit ne soit homologué, mais ils ne veulent pas nous transmettre cela parce que cela reste confidentiel. Ils ont peur, en diffusant cela aux provinces, que tout le monde sache et en fasse un usage dont ils n'auront pas le contrôle. Nous voulons être impliqués afin de savoir ce qu'il en est. Lorsqu'on saura ce qu'il en est, on sera mieux informés. Nous n'avons pas droit de regard sur cela.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Pépin, je crois que vous aviez une question.

M. Pépin (Yvon): Sur la question de l'étiquetage, je suis d'accord avec le ministre lorsqu'il dit que le fédéral a juridiction sur les produits qu'on considère comme "grand public". Si l'on considère que les pesticides utilisés par les agriculteurs et les sylviculteurs le sont dans le cadre de leur travail, je pense qu'on pourrait regarder l'utilisation de ces pesticides comme étant à l'intérieur de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Je sais qu'il y a des projets de loi sur l'étiquetage des substances dangereuses mises dans les mains des travailleurs.

M. Lincoln: Oui, je suis d'accord avec vous.

M, Pépin: Dans ce sens, on pourrait réglementer l'étiquetage.

M. Lincoln: Dans ce sens, oui.

M. Pépin: C'est dans ce sens, je pense, que l'Ordre des chimistes voyait l'intervention.

M. Lincoln: Oui.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Pépin. M. le député de Terrebonne.

M. Blais: La tradition veut, même si vous êtes le dernier groupe de la journée, que je vous dise un gros merci d'y être. Je veux aussi donner une appréciation de votre mémoire: il est très complet en soi bien que restreint, mais il parle beaucoup. Plutôt que de lire votre mémoire, vous avez parlé sur le sujet et cela a été très instructif. Je vous ai laissé parler plus longtemps que normalement l'on fait avec M. le ministre parce qu'il posait exactement les questions que j'aurais voùlu vous poser. Alors, pendant ce temps, je me reposais.

Au monsieur qui est un peu poète et qui voulait faire parler des pesticides, tantôt, sur l'étiquetage, j'aimerais lui dire que, compétence aimerait bien parler. Il y a très peu de compétence provinciale dans le domaine de l'étiquetage, sauf par une échappatoire législative, mais l'étiquetage lui-même, je crois, bien que de bon aloi, même pour la cigarette que vous voulez valable, je ne crois pas que cela convainque qui que ce soit et cela n'influence pas beaucoup. Compétence nous dirait que nous avons compétence, si elle pouvait parler, comme vous l'avez dit tantôt, dans le domaine de la publicité et dans le domaine de l'éducation. Ce sont deux arguments, je crois, qui plaideraient pour ce que vous voulez défendre encore plus fort que l'étiquetage.

J'ai bien l'impression que je vais tomber à ma question classique. En plus de la recherche, de la publicité et de l'éducation, à cause du but que vous poursuivez, seriez-vous en faveur d'une certaine taxe, directe ou indirecte, sur les produits toxiques pour favoriser la recherche, la publicité) et l'éducation constructive? (I8 h 15)

Deuxième question classique, qui va être un peu plus longue que d'habitude. En conclusion, vous dites: "En guise de conclusion, nous ajoutons que tout pesticide répandu dans l'environnement risque fort, à un moment! ou l'autre, de se retrouver dans l'eau que nous buvons, dans les aliments que nous consommons ou dans l'air que nous respirons, que ce soit sous forme du produit d'origine où d'un produit transformé. Chaque épandage doit être perçu comme un risque

calculé. Il nous revient à tous de voir à réduire ces risques. La qualité de la vie en dépend." Voici la deuxième classique sur la quantité de pesticides répandus dans la nature: Croyez-vous que cet avant-projet de loi contrôle suffisamment, je ne dirai pas ce beau risque, plutôt ce risque néfaste, mais calculé quand même, surtout que vous êtes, d'après votre métier, porteurs de beaucoup de solutions de rechange à ces produits toxiques?

Le Président (M. Saint-Roch): M.

Delvin.

M. Delvin: À la première question, personne n'est contre la vertu. Il est certain que si une taxe...

M. Blais: Voulez-vous dire que la taxe est une vertu?

M. Delvin: Non, non, attendez une minute.

M. Blais: Ah bon!

M. Delvin: Nous sommes tous pour la recherche de voies nouvelles et ainsi de suite. La taxe, c'est une chose à laquelle nous n'avions pas pensé, comme beaucoup d'entre nous qui sommes venus ici. Il appartient su gouvernement de penser aux taxes et non aux contribuables. Je dois vous dire qu'il serait peut-être difficile de faire de cette loi... Pardon? Oui, de la mettre en application. Taxerait-on les gens qui les vendent ou ceux qui les utilisent? On pourrait envisager une taxe comme celle-là, mais c'est le contribuable, d'une façon ou d'une autre, qui va en hériter. Il est au bout de la chaîne, il est au bout de la chaîne alimentaire et il est au bout de la chaîne des taxes aussi. On a là un point en commun.

Quant à savoir si la loi vise à réduire les risques, je pense que c'est un pas dans la bonne direction, oui, peut-être avec les aménagements que nous et d'autres avons proposés et qui, d'ailleurs, semblent être déjà en bonne voie. Je crois que cette loi pourra, à court terme, d'une façon immédiate, disons, dans les années qui viennent, déjà réduire ces risques. Il faut cependant réaliser une chose, c'est que ces risques demeureront tant que le deuxième volet que nous présentons, c'est-à-dire les voies de rechange, ne sera pas vraiment mis en application. Que les moyens soient mis à notre disposition ou à la disposition des gens qui travaillent dans ce domaine pour trouver les voies de changement.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Terrebonne, je m'excuse, mais je crois que M. Pépin a un complément de réponse.

M. Blais Allez-y, M. Pépin.

M. Pépin: Merci. J'aimerais intervenir parce qu'on parle de diminuer les risques dans la loi, mais il faudrait bien s'entendre sur les risques, vis-à-vis de qui. On parle beaucoup de l'agriculteur et du sylviculteur, mais j'en viens à l'article 2 de la loi et, si on regarde l'énumération de ceux qu'on veut protéger, je pense qu'on a nommé les mauvaises personnes au début: "La présente loi a pour objet de régir l'usage des pesticides afin de prévenir la détérioration de l'environnement et de protéger les espèces vivantes, l'homme et ses biens." Je pense qu'on aurait dû inverser et lire plutôt: "afin de protéger l'homme, les espèces vivantes et prévenir la détérioration de leur environnement." Je comprends que l'environnement est important, mais à quoi sert de protéger l'environnement si l'homme y perd la santé et quelquefois la vie? Donc, il ne faudrait pas mettre les choses à l'envers.

Je comprends que le ministère de l'Environnement veut protéger son environnement, mais le but primordial du projet de loi est de permettre à l'homme de survivre dans son environnement. Si on veut permettre à l'agriculteur et au sylviculteur de survivre dans l'épandage de pesticides, il n'y a qu'une façon de le faire, c'est par la formation. C'est pour cela qu'on a dénoncé un peu la supervision immédiate, comme beaucoup d'autres, parce qu'on pense qu'il est presque impossible de superviser de façon efficace, immédiatement, l'agriculteur qui va épandre des pesticides, à moins que la moitié de la population ne surveille l'autre moitié. II va falloir passer par la formation. C'est une grosse tâche, une tâche de longue haleine, mais ce n'est pas parce que c'est une grosse tâche qu'il ne faut pas commencer immédiatement. Le but primordial du projet de loi, c'est la formation et l'information des utilisateurs. À quoi cela sert-il de donner des permis ou de former des gens pour la vente quand c'est l'utilisateur qui est en cause, que c'est lui qui s'intoxique et qui intoxique son milieu? Son milieu, ce peut être sa famille, ses enfants. Plusieurs de mes collègues de travail pourraient témoiqner de ces cas pathétiques où l'agriculteur, lors de l'épandage des presticides empoisonne sa famille et ses enfants, en plus de s'empoisonner lui-même. J'insiste donc pour que la formation et l'information soient le but primordial pour améliorer la situation et l'utilisation de ces produits.

M. Blais: Je vous remercie, vous deux. Je n'ai pas d'autres questions. Je vous remercie parce que cela a été tellement bien fait entre vous et le pouvoir que l'Opposition

en a été presque éblouie. Je voudrais vous dire cependant que, dans ce réalisme d'un jeudi à 18 h 17, à cause de ses nombreuses préoccupations, le législateur a souvent le verbe haut, mais le productif bas. Je vous demanderais de nous surveiller, de continuer à nous surveiller et à nous aiguillonner. C'est bon d'avoir des gens qui nous surveillent et vous êtes certainement intéressés parce que vous vous êtes déplacés pour venir ici présenter un mémoire, ce que vous avez fait avec beaucoup de brio. Merci beaucoup.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le député de Terrebonne. M. le ministre, en conclusion.

M. Lincoln: Je m'associe à mon collègue de l'Opposition pour vous remercier bien sincèrement de la qualité de votre intervention ici aujourd'hui. Je pense que les remarques concluantes ont très bien résumé la philosophie qui vous anime. Nous vous sommes très reconnaissants d'être venus, d'avoir pris le temps de présenter votre mémoire et de nous l'expliquer. L'entrevue d'aujourd'hui est une première étape. On va continuer à travailler ensemble et à nous associer à vous et aux autres intervenants pour que, finalement, nous puissions avoir quelque chose qui soit un pas en avant. Merci beaucoup.

Le Président (M. Saînt-Roch): M. le président, au nom de tous les membres de la commission, nous tenons à vous féliciter et à vous remercier de votre apport à nos travaux.

J'aimerais maintenant attirer l'attention des membres de la commission que nous allons ajourner nos travaux au mardi 24 février 1987, à dix heures. Le lieu de la réunion sera ici, a la salle du Conseil législatif. Sur ce, bonne soirée et bonne semaine.

(Fin de la séance à 18 h 23)

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