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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Monday, August 17, 1987 - Vol. 29 N° 80

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale portant sur la levée du moratoire sur la conversion des immeubles locatifs en copropriété divise


Journal des débats

 

(Neuf heures quarante-deux minutes)

Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de l'aménagement et des équipements entreprend ses travaux ce matin dans le but de tenir une consultation générale sur un document gouvernemental déposé par le ministre responsable de l'Habitation et député de Laporte, M. Bourbeau, portant sur la levée du moratoire sur la conversion des immeubles locatifs en copropriété divise. Le ministre a déposé un document gouvernemental, il y a déjà un certain temps. Par la suite, l'Assemblée nationale a donné mandat à la commission de l'aménagement et des équipements de tenir une consultation générale afin de permettre à l'ensemble des groupes et des individus intéressés à se faire entendre devant les membres de la commission, afin de permettre à ces derniers de se faire une idée précise de toutes les implications de la levée du moratoire et des mesures d'accompagnement contenues au document gouvernemental présenté et déposé par le ministre responsable de l'Habitation.

Nous tenons cette séance, ces séances, puisque nous siégerons lundi, mardi, mercredi et jeudi à Montréal et vendredi à Québec... Nous tenons quatre jours d'audition à Montréal pour des raisons fort évidentes, même s'il s'agit d'une procédure fort exceptionnelle pour une commission de l'Assemblée nationale. Cette commission se déroule pendant quatre jours à Montréal parce qu'il s'agit d'un problème qui concerne principalement les Montréalais et les Montréalaises. C'est ce qui a amené une décision conjointe des membres de la commission de tenir quatre des cinq jours de séance de nos travaux dans la région qui, normalement, sera la plus concernée par les décisions qui suivront les audiences que tiendra la commission de l'aménagement et des équipements sur ces questions.

J'indique immédiatement que nous nous sommes donné un horaire très chargé puisque plus d'une cinquantaine de groupes ont manifesté l'intention de participer a nos travaux et que le mandat que l'Assemblée nationale nous avait donné était de consacrer cinq jours de nos activités à ce dossier. C'est ce qui a amené la commission à décider d'un horaire très chargé, d'un horaire contraignant pour tous et qui impliquera beaucoup de discipline, beaucoup de respect des règles que nous nous sommes données. J'interviens plus directement auprès des parlementaires membres de la commission. Puisque vous avez tous participé aux décisions entourant les horaires de travail, je vais faire appel à votre collaboration encore plus précieuse et plus soutenue que ce que vous nous donnez habituellement, ce qui est déjà très bien. Mais compte tenu du cadre plus restreint que ce qu'on a habituellement, cela va demander une collaboration encore plus soutenue de la part de chacun et chacune d'entre vous pour nous permettre de répondre aux horaires que nous nous sommes donnés, d'une part, parce que nous n'avons pas de possibilité de les dépasser et, deuxièmement, par respect envers les groupes et les individus qui ont demandé à se présenter devant nous et que nous avons décidé de recevoir.

J'indique immédiatement que l'horaire de la journée est le suivant. On le donnera aussi au début de chaque séance, le matin. Dans un premier temps, ce matin, il y aura des remarques préliminaires de la part du ministre responsable de l'Habitation. Ensuite, il y aura les remarques préliminaires du porte-parole de l'Opposition dans le secteur de l'habitation, soit le député de Shefford, M. Paré. Par la suite, nous entendrons pour une période d'une heure et trente, les représentants de la ville de Montréal. Pour chacune des enveloppes que j'énumérerai, ce sera toujours réparti en périodes, soit un tiers de la période de temps réservé à la présentation de l'organisme ou de l'individu qui se présente devant nous; un tiers du temps de l'enveloppe est réservé au parti ministériel pour des échanges avec le groupe ou les individus et une autre période d'un tiers sera réservée à l'Opposition pour des échanges également avec les groupes ou les individus.

Voici, donc, les groupes qui seront entendus dans l'ordre suivant, aujourd'hui: Ville de Montréal, pour une période d'une heure et trente. Par la suite, tous les groupes qui suivent pour une période 45 minutes, dans l'ordre: l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec; le Regroupement d'organismes populaires d'Hochelaga-Maisonneuve; la Commission des droits de la personne; l'Association communautaire de Notre-Dame-de-Grâce; Information Ressources Femmes et

Logement} The Redfern Tenants' Association; l'Association des étudiants aux études supérieures de l'Université McGill et, conjointement, l'Association des étudiants de l'Université McGill; l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales du Québec Inc.; la Commission des services juridiques et l'Association des consommateurs du Canada (section Québec).

Voilà le menu de la journée. Je rappelle aussi que nous suspendrons nos travaux de 13 heures à 15 heures et de 18 heures à 20 heures, pour les périodes de repas et de rencontres parallèles. Je vous indique, également, qu'en respectant rigoureusement nos horaires, l'ordre de comparution des groupes que je viens de présenter, nous mènerait à la fin de nos travaux à 23 heures, ce soir. Je peux vous dire, tout de suite, qu'on est presque 15 à 17 minutes en retard sur les horaires prévus. C'est tout simplement pour vous indiquer qu'on va devoir fonctionner rondement, tout en permettant aux groupes et aux individus, qui sont ici présents, d'avoir le temps de s'exprimer et de bien sensibiliser Jes membres de la commission aux points les plus importants de leur présentation.

Avant d'entreprendre véritablement nos travaux, je demanderais au secrétaire de la commission, M. Chouinard, de nous indiquer s'il y a des remplacements quant aux membres de la commission.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Bélanger (Mégantic-Compton) sera remplacée par M. Polak (Sainte-Anne); M. Charbonneau (Verchères) sera remplacé par M. Boulerice (Saint-Jacques); Mme Juneau (Johnson) sera remplacée par M. Paré (Shefford); M. Paradis (Matapédia) sera remplacé par M. Laporte (Sainte-Marie). C'est tout, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le secrétaire. J'indique également qu'à la suite d'une entente intervenue entre les formations politiques et du consentement des membres du parti ministériel, Mme Harel, députée de Maisonneuve, participera à nos travaux, avec le droit de parole comme pour tous les autres membres de la commission.

Sans plus tarder, j'inviterais le ministre responsable de l'Habitation à nous faire ses commentaires préliminaires. M. le ministre.

Remarques préliminaires M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Mesdames, messieurs les députés et membres de la commission parlementaire, mesdames et messieurs. Je voudrais d'abord souhaiter la bienvenue à nos concitoyens et concitoyennes qui, durant la prochaine semaine, viendront, à titre individuel ou à titre de représentant d'organisme intéressé au secteur de l'habitation, présenter leur position quant à la levée du moratoire sur la conversion des immeubles locatifs en copropriété.

L'importance que revêt, pour les grandes régions urbaines de Montréal et de Québec, cette proposition de lever le moratoire et d'encadrer la conversion par des mesures efficaces de protection des locataires, des acquéreurs et du parc de logements locatifs explique notre présence ici à Montréal pour les quatre prochains jours, et notre venue à Québec pour la dernière journée des audiences, soit vendredi.

Je suis particulièrement heureux d'avoir pu répondre au souhait de plusieurs groupes qui désiraient être entendus à Montréal et je remercie les membres de la commission d'avoir permis la tenue de cette commission hors les murs habituels du parlement de Québec. J'aimerais également remercier le personnel de la commission qui nous assistera au cours de ces auditions et, surtout, le remercier pour l'organisation matérielle ici, à Montréal.

M, le Président, le 12 mai dernier, je rendais public un document de consultation sur les mesures d'encadrement de la conversion en copropriété, intitulé Lever le moratoire: une décision qui s'impose. Les réactions au lendemain de la sortie de ce document m'ont permis de constater que les journalistes et les analystes de nos grands quotidiens souscrivaient à la levée du moratoire et à son objectif d'accès à la propriété, certains voyant également, dans les mesures proposées, un biais favorisant nettement les locataires.

Ce biais en faveur d'une protection accrue des locataires à l'occasion de la conversion de leurs logements en copropriétés, je suis heureux qu'il soit reconnu. C'est d'ailleurs sous cette enseigne d'une protection blindée des locataires que j'annonçais, lors du sommet économique de Montréal en juin 1986, la levée du moratoire et la consultation que nous entreprenons, aujourd'hui, sur les mesures d'encadrement de la conversion.

Cette décision de lever le moratoire et de protéger les locataires n'était pas le fruit du hasard. Vous me permettrez, M. le Président, de faire ici un bref rappel historique. Ce lien, nécessaire entre la conversion d'un immeuble locatif et la protection des locataires, avait été identifié par nombre d'études et de rapports et constituait la base d'un consensus parmi la grande majorité des intervenants en matière d'habitation qui, au fil des ans, et particulièrement au sommet économique de Montréal et lors de la consultation sur le livre vert Se loger au Québec, se sont prononcés sur la question.

En effet, à la suite du moratoire, une

mesure temporaire décrétée par le gouvernement en 1975 è la demande du ministre de la Justice de l'époque, M. Gérard-D. Levesque, les études, les rapports et les analyses se sont succédé. En mars 1976, le rapport Legault sur l'habitation recommandait diverses mesures d'encadrement pour accompagner la levée du moratoire, dont la protection des locataires.

En 1980, la Loi sur la Régie du logement était mise en vigueur et prévoyait l'adoption d'un règlement qui permettrait à cet organisme d'autoriser la conversion et de fixer les conditions de protection des locataires et des acquéreurs. C'est l'absence de ce règlement qui constitue dans les faits notre moratoire actuel. En 1981, on intervenait pour interdire la reprise de possession d'un logement par un propriétaire indivis dans les immeubles de cinq logements et plus.

En 1982, un groupe de travail du ministère de la Justice sur la copropriété recommandait également la levée du moratoire avec des mesures de protection. Finalement, en 1984, paraissait le livre vert, Se loger au Québec, qui suggérait également la levée du moratoire avec des mesures d'encadrement de la conversion qui protégeaient les locataires. Ainsi, à la fin de 1985, prenant en main la responsabilité de l'Habitation au sein du gouvernement, je faisais le constat suivant: Premièrement, les rapports et les études reçus au cours des dernières années concluaient à la nécessité de mesures d'encadrement pour assurer la protection des locataires, des acquéreurs et du parc locatif; deuxièmement, les résultats de la consultation sur le livre vert Se loger au Québec indiquaient, de façon générale, une volonté de favoriser l'accès à la propriété par la levée du moratoire, tout en protégeant adéquatement le locataire qui ne peut ou ne désire pas acheter son logement; troisièment, le moratoire se révélait inefficace et rendait la situation de nombreux locataires difficile. En effet, face à la demande croissante pour la copropriété, certaines voies de contourneraient étaient maintenant empruntées.

Par exemple, à la suite de diverses circonstances: incendie, reconstruction, réfections majeures et travaux majeurs, l'immeuble se trouvant vidé de ses locataires, le propriétaire pouvait profiter de cette occasion pour le transformer en copropriété et, d'autre part, la possibilité de reprendre possession de logements dans les immeubles de quatre logements et moins, alors que le moratoire était toujours maintenu, a retransformé l'achat en copropriété indivise en véritable opération immobilière dans certains quartiers.

Enfin, le Québec était seul à maintenir un moratoire durant une si longue période de temps, onze ans. Aux États-Unis, cette technique du moratoire avait été utilisée dans certains États pour des périodes beaucoup plus courtes. Le Québec pouvait donc bénéficier de l'expérience de ses voisins pour élaborer des mesures d'encadrement appropriées.

Cette expérience, nous pouvions également la puiser auprès d'autres provinces canadiennes et certains pays d'Europe où la tradition de copropriété est ancrée depuis fort longtemps. C'est dans ce contexte que je répondais favorablement à la proposition de la ville de Montréal de lever le moratoire sur la conversion lors du sommet économique de Montréal, en juin 1986.

Est-il besoin de rappeler qu'à cette table du sommet économique de Montréal, la majorité des partenaires socio-économiques de la ville et, la ville elle-même à l'époque, souhaitaient la levée du moratoire avec des mesures d'encadrement? Au nombre de ses partenaires en faveur de la levée du moratoire, l'on retrouvait le Bureau de commerce de Montréal, la Chambre de commerce de Montréal, l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, la Fédération des caisses populaires Desjardins de Montréal et de l'Ouest du Québec, l'Ordre des architectes du Québec, l'Office municipal d'habitation de Montréal.

De leur côté, le Conseil des travailleurs et travailleuses de Montréal, le Regroupement des comités de logements et des associations de locataires, la table des GRT de Montréal et la Fédération des coopératives d'habitation de l'île de Montréal, de même que le Conseil centrai de Montréal ne mettaient pas de côté l'idée de la levée du moratoire exigeant toutefois des garanties plus importantes au plan de la protection du parc des logements locatifs à bas prix, alors que, de son côté, la Fédération de l'âge d'or du Québec s'opposait à la levée du moratoire, du moins, jusqu'au moment de la création d'une banque de logements à prix raisonnables.

Le document de propositions sur la levée du moratoire, qui vous a été soumis et qui fait l'objet de la présente commission parlementaire, vise donc à refaire le tour de la question auprès de l'ensemble des intervenants. Si, d'une part, nous devons examiner chacune des mesures d'encadrement proposées, nous devons également nous poser la question: Le Québec peut-il être un pays de propriétaires?

Cette question, je la tire d'un ouvrage, paru en mars dernier, sur la question de la conversion en copropriété sous la plume de Mme Francine Dansereau, de l'INRS-urbanisation et de M. Daniel L'Écuyer, urbaniste. En proposant la levée du moratoire sur la conversion des immeubles locatifs, il s'agit, en tout premier lieu, de permettre à des ménages locataires d'accéder à la propriété dans les centres urbains, plutôt que

de les délaisser au profit des banlieues.

On doit également s'interroger sur la capacité de notre société de permettre à des ménages locataires d'accéder à la propriété sous ces nouvelles formules de copropriété divise ou indivise, tout en protégeant adéquatement les locataires en place qui ne peuvent ou ne désirent pas accéder à la propriété.

D'autres semblent y être parvenus, dont la France et de nombreux États américains et provinces canadiennes. Les mesures qui nous sont présentées, dans le document, sont nombreuses. Pour les remettre en mémoire, on peut les résumer ainsi: D'abord, pour protéger les locataires.

Premièrement, le droit au maintien dans les lieux pour une période illimitée. L'acheteur d'un logement, qu'il soit un indivisaire ou un copropriétaire divis, ne pourrait pas reprendre possession du logement. Tous les locataires bénéficieraient donc d'une meilleure protection et ne pourraient être forcés de quitter leur logement par la conversion en copropriété ou par l'achat par des propriétaires indivis. (10 heures)

Deuxièmement, une protection additionnelle aux personnes igées ou handicapées, par l'ouverture d'un guichet spécial à la Régie du logement. Ce guichet leur offrirait des services privilégiés d'information et de conciliation et pourrait signaler a la Commission des droits de la personne les problèmes de harcèlement ou d'exploitation qui lui sont rapportés.

Troisièmement, une protection accrue lors des travaux majeurs qui peuvent survenir, et ce, même en l'absence de conversion. Cette protection qui s'appliquerait à tous les locataires se résume par une indemnité automatique qui leur serait versée par un propriétaire lors d'une évacuation temporaire de plus d'une semaine pour réaliser des travaux et des améliorations majeurs et, par un pré-avis de trois mois plutôt que d'un mois, comme cela est prévu actuellement.

Quatrièmement, une assurance contre le harcèlement durant le processus de conversion. Le propriétaire convertisseur ne pourrait pas entreprendre des travaux autres que ceux d'entretien courant ou ceux de nature urgente et nécessaire à la conversion de l'immeuble, sans demander l'autorisation de la régie. De plus, une poursuite pénale pourrait être intentée à l'endroit d'un locateur qui userait de harcèlement pour arriver à ses fins.

Cinquièmement, une possibilité pour le locataire de recouvrer des dommages-intérêts et des dommages exemplaires d'un propriétaire qui effectue des améliorations ou des réparations majeures dans le but de l'évincer et de passer outre aux règles de conversion. La Régie du logement se verrait également accorder le pouvoir de refuser l'autorisation de convertir a un propriétaire qui aurait effectué de tels travaux majeurs dans le but de préparer l'immeuble à la conversion et d'évincer les locataires.

Tous les propriétaires qui désireraient convertir leur immeuble, qu'il soit occupé ou non par des locataires, devraient en faire la demande à la régie. Puis, pour favoriser l'accès à la propriété du locataire occupant, le propriétaire serait obligé, avant d'accepter une offre d'achat présentée par un acquéreur extérieur, de lui offrir d'acheter son logement au même prix et aux mêmes conditions.

La protection des acquéreurs, maintenant, serait quant à elle assurée par une information adéquate sur la qualité du bâtiment et sur la gestion du projet. Un rapport d'experts serait remis à tout acquéreur éventuel. De plus, dans les immeubles de cinq logements et plus, un prospectus serait également remis à l'acheteur éventuel.

Afin de maintenir les coûts au prix le moins élevé possible, aucune réparation ne serait exigée avant la conversion. Il appartiendrait aux nouveaux copropriétaires d'améliorer leur logement et leurs immeubles à leur rythme et selon leurs moyens. Cependant, le rapport d'experts leur fournirait toute l'information nécessaire à une prise de décision éclairée, cela avant d'acheter.

Finalement, la protection du stock locatif serait assurée d'abord par le fait que le locataire demeurerait dans les lieux pour une période illimitée. Cette mesure de protection complète du droit au maintien dans les lieux assurerait un rythme lent à la conversion. Par ailleurs, un suivi attentif du rythme de conversion nous permettrait d'intervenir au besoin dans certains secteurs du marché locatif si des tensions importantes devaient apparaître.

La quantité des mémoires déposés, soit plus d'une cinquantaine, prouve hors de tout doute, s'il fallait encore le démontrer, toute l'importance accordée à la question de la conversion en copropriété. À la lecture de ces mémoires, j'ai pu constater que, pour plusieurs des groupements, l'occasion de cette commission parlementaire a été prise pour adresser au gouvernement des demandes qui touchent d'autres secteurs de l'habitation. Souvent, la question de la levée du moratoire est subordonnée dans ces mémoires à la mise en place, par le gouvernement, du programme d'aide financière aux groupes de ressources techniques, aux associations de locataires, aux coopératives d'habitation ou aux organismes sans but lucratif et, de budgets accrus alloués aux logements sociaux et aux HLM. Je remercie tous ces organismes.

C'est de bonne guerre que d'attirer

également l'attention des membres de la commission sur ces questions. Cela dit, j'ai constaté également avec satisfaction qu'indépendamment de la position des groupes sur la levée du moratoire, chacun a pris soin d'analyser à fond les mesures proposées. Beaucoup d'entre elles semblent retenir l'attention des intervenants. On souhaite les voir adopter avec ou sans modification et cela, indépendamment de l'issue des discussions entourant la levée du moratoire.

Cette commission sers l'occasion pour moi d'une discussion franche et ouverte avec chacun des intervenants, afin de bien comprendre les positions exprimées et les recommandations. Il sera sans doute difficile de satisfaire chacun des intervenants et de donner suite à toutes les recommandations formulées. Mais, j'écouterai avec beaucoup d'attention les présentations de chacun, afin de tenir compte des opinions exprimées.

M. le Président, chers amis, le document intitulé Lever le moratoire: une décision qui s'impose est une proposition qui vise à corriger une situation reconnue comme étant inacceptable par la majorité des intervenants. Cette proposition est le fruit d'un long travail et d'une immense expertise. Elle n'a pas la prétention d'être parfaite.

Le but de l'exercice que nous commençons aujourd'hui est de tenter justement de l'améliorer. Ces améliorations pourraient être mineures, mais elles pourraient également être majeures, selon la qualité des propositions qui pourraient nous être faites. Je dis donc que tout est ouvert, nos esprits comme également nos coeurs.

Je souhaite, à nouveau, la bienvenue a chacun des intervenants, étant assuré que les propos que nous entendrons nous permettront de répondre de mieux en mieux aux besoins de l'ensemble des ménages québécois en matière d'habitation. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie, M. le ministre. J'inviterai maintenant le porte-parole de l'Opposition dans le domaine de l'habitation, M. le député de Shefford, à prendre la parole et à nous présenter ses remarques préliminaires. M. le député.

M. Roger Paré

M. Paré: Merci, M. le Président. Je voudrais tout d'abord remercier toutes les personnes et tous les groupes qui ont pris le temps de préparer un mémoire et qui, cette semaine, prendront aussi le temps de venir en discuter avec nous, et ce, en pleine période estivale.

Espérons que le ministre, malgré sa volonté très clairement exprimée de lever le moratoire, puisque ça s'intitule "une décision qui s'impose", tiendra compte des craintes, des suggestions et des objections contenues dans les mémoires et, par le fait même, acceptera de retirer son projet, tel que proposé, et ce, à la demande de presque tous les intervenants. Quant à nous, nous dénonçons la façon de procéder du ministre sur un sujet aussi important que la levée du moratoire.

Rappelons tout d'abord que c'est le 19 juin 1986 que le ministre a annoncé, d'une façon qui semblait définitive, la levée du moratoire pour le 1er juillet 1987, et ce, sans consultation - plusieurs groupes l'ont exprimé d'ailleurs - ce qui a eu comme effet de provoquer plus de reprises de possession et d'évacuations pour réparations majeures.

Le ministre lui-même le reconnaît dans son document à la page 31 où il est spécifié qu'on observe un accroissement des demandes produites à la régie, de 532 en 1985 à 844 en 1986. Après avoir accepté la tenue d'une commission parlementaire, le ministre l'a reportée à deux occasions. D'abord prévue pour février, elle a été reportée en mai et, maintenant, elle est reportée en plein été au mois d'août.

En plus, voilà que le ministre limite le temps d'intervention de chacun des intervenants à 45 minutes, alors que, d'habitude et de coutume, on se donne une heure d'échanges avec les intervenants quand on considère que le sujet est très important. Mais ce qui est pire encore - cela a été rapporté par plusieurs intervenants aussi - on ne retrouve dans ce document aucune étude complète, aucune prévision sur les conséquences possibles et probables pour les locataires de Montréal et de Québec spécialement.

Cela, le ministre le reconnaît lui-même à la page 57 de son mémoire où c'est cité - je vous le lis - : "Si le suivi du rythme de conversion ou l'arrivée de problèmes liés è des conjonctures économiques et sociales devaient révéler des tensions dans certains segments du marché locatif, il serait possible d'intervenir rapidement afin de limiter ou d'interdire la conversion dans ces secteurs". Rien de précis, mesures vagues.

Encore une fois, on préfère dire qu'on interviendra pour corriger au lieu de prévenir. Nous savons déjà ce que donnent des gestes posés trop rapidement sans évaluation précise des conséquences. On n'a qu'à se rappeler la Raffinerie de sucre du Québec; on n'a qu'à se rappeler Quebecair où le ministre responsable a reconnu lui-même que, dans ce dossier, le gouvernement s'était fait passer un sapin.

M. le Président, je vous dis qu'on ne peut pas se faire passer un sapin en habitation, parce que trop de gens sont menacés, et parmi les plus démunis de la société. C'est vrai qu'on a déplacé beaucoup de gens dans le passé pour des routes ou pour des édifices importants dans les centres-villes, mais on déplaçait tout le

monde parce qu'il fallait moderniser, disait-on. Le prochain grand déplacement que l'on propose est d'évincer des gens pour les remplacer par d'autres personnes qui ont plus de moyens. C'est inacceptable.

Dans le document, on retrouve deux objectifs contradictoires. Premièrement, on parle d'accès à la propriété. Deuxièmement, on parle de la protection du stock de logements locatifs. C'est totalement impossible. On ne peut pas en même temps manger le gâteau et le garder. L'accès à la propriété par la levée du moratoire s'effectuera au détriment des locataires, c'est-à-dire en diminuant le stock de logements locatifs. C'est, précisément, qu'on permet à des gens qui ont les moyens de prendre la place de gens démunis qui n'ont pas les moyens ou la volonté de devenir propriétaires.

La levée du moratoire sur la conversion des immeubles locatifs en copropriété divise est, à mon avis, un sujet beaucoup trop important pour être traité isolément. II s'agit d'un élément majeur d'une véritable politique du logement. Cette décision peut toucher près de 80 % de la population de Montréal et plus de 50 % de la population de Québec. Pourtant, le ministre nous avait promis une politique de l'habitation au début du printemps. Rien n'a été fait. À moins que le ministre nous ait déjà annoncé sans tambour ni trompette et, évidemment sans consultation, sa véritable politique de l'habitation. On pouvait lire dans le journal Habitabec, le 25 avril 1986: Depuis que le Parti libéral du Québec a été porté au pouvoir, on s'applique à modifier le rôle de l'État, que l'on veut beaucoup moins interventionniste. En somme, par le biais de la déréglementation, on veut redonner à l'entreprise privée la place qui lui revient sur le marché de la concurrence, de préciser l'ancien notaire.

Ainsi, une à une, des mesures ont été prises. Mesures plutôt discriminatoires face aux locataires et surtout face aux plus démunis. Je vais citer quelques prises de décision qui ont été annoncées. Premièrement, l'abolition du ministère et ce, malgré les objections du milieu. L'abolition du programme d'accès à la propriété. On parle précisément d'accès à la propriété encore aujourd'hui. L'annonce de la fin progressive de l'aide aux groupes de ressources techniques. La diminution des budgets attribués aux coopératives d'habitation et aux organismes sans but lucratif. La diminution dans la construction de logements HLM.

M. le ministre, vous pourrez intervenir un peu plus tard là-dessus. On a les chiffres. Les gens de la salle pourront enfin savoir qui dit vrai, M. le ministre. Je vous en prie.

Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous plalti M. le ministre, s'il vous plaît! Vous avez eu vos 18 minutes pour prendre la parole. Je vous demande de respecter le temps de parole du député de Shefford. Vous aurez d'autres moments, par la suite, pour intervenir. Et on vous reconnaîtra.

M. Bourbeau: Je comprends, M. le Président, mais la vérité a quand même ses droits.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre, s'il vous plaît! M. le député, je vous demande de poursuivre.

M. Paré: Je veux seulement rappeler au ministre que la quantité des HLM bâtie en 1986 est inférieure a celle construite en 1985.

M. Bourbeau: Elle est supérieure. La vérité a ses droits, M. le Président.

M. Paré: De plus...

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre, je vous demande une fois de plus de demander la parole et on vous reconnaîtra en temps et lieu. Vous pourrez ainsi vous exprimer comme vous avez pu le faire tantôt. Mais le droit de parole appartient maintenant, tel que décidé par les membres de la commission, lors d'une réunion à laquelle vous avez participé de même qu'aux décisions auxquelles vous avez participé, au député de Shefford. Je vous demande de le laisser s'exécuter, comme l'ensemble des membres de la commission vous ont permis de le faire tantôt. M. le député de Shefford.

M. Bourbeau: M. le Président, je voudrais dire quelques mots sur votre question de règlement. Je veux bien respecter totalement le droit de parole du député de Shefford et je vais le faire, comme il l'a fait d'ailleurs dans mon cas. Cependant, je ne peux pas accepter que le député de Shefford dise des choses qui sont totalement contraires à la vérité.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre...

M. Bourbeau: Je m'élèverai à chaque fois.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre, s'il vous plaît! Vous savez très bien qu'il ne s'agit pas d'une question de règlement. Votre expérience de parlementaire vous l'a appris. Je vous demande, M. le ministre, de respecter le droit de parole du député de Shefford et l'intervention sur le règlement que j'ai faite. M. le député de Shefford.

M. Bourbeau: M. le Président...

Le Président (M. Rochefort): Non, M. le ministre. J'espère qu'on ne fera pas une commission sur les procédures, ce matin. M. le député de Shefford, s'il vous plaît! (10 h 15)

M. Paré: Merci, M. le Président. Ce n'est pas la première fois que le ministre m'interrompt là-dessus. Je me souviens, lors d'une autre commission, sur le programme PARCQ, le ministre disait qu'on avait pu investir davantage en 1986 alors que, lorsque les budgets ont été amenés et qu'on a pu étudier les crédits, aucun sou n'avait été dépensé.

Je reviens maintenant aux décisions du ministre depuis qu'il a décidé qu'il y avait moins d'implications dans le logement au Québec par le ministère qui n'existe plus, soit dit en passant. On annonce aussi une nouvelle réglementation pour raccourcir la liste d'attente dans les HLM et cela, pour mieux cacher les besoins et la misère qu'il y a en habitation au Québec. Il y a eu aussi la disparition du programme Loginove et son remplacement par le nouveau programme PARCQ qui est beaucoup moins généreux et difficilement applicable. Et maintenant, on annonce la levée du moratoire. On peut continuer. Hier, les jeunes libéraux en congrès ont voté contre une résolution proposant l'augmentation de l'aide aux logements sociaux.

M. le Président, de ce côté-ci, nous sommes en accord pour permettre au plus grand nombre possible de Québécois d'accéder à la propriété. D'ailleurs, c'est sous l'ancien gouvernement du Parti québécois et grâce aux programmes qu'on avait élaborés qui, malheureusement, ont tous été abolis que, pour la première fois, une majorité de Québécois pouvait se dire propriétaire de son logement au Québec. Nous considérons aussi que la copropriété est une très bonne formule qui, d'ailleurs, est de plus en plus utilisée. Je vous rappellerai ainsi que près de 24 % des logements multiples commencés, donc en construction au cours des mois de janvier et février 1987 dans la région de Montréal, étaient des copropriétés. Le ministre espère que la levée du moratoire permettra au marché immobilier d'être inondé de logements à vendre pour faire baisser les prix. En même temps, il croit qu'à peine 1 % du stock de logements locatifs sera converti en cinq ans. À mon avis, le ministre n'est pas réaliste. Il ne tient pas compte de ce qui se passe réellement. Si seulement 1 % se transforme, les prix seront plutôt à la hausse. Nous savons très bien que le pourcentage sera beaucoup plus élevé dans les quartiers centraux des villes de Montréal et Québec et que les prix iront, de toute façon, en augmentant. Il s'agit de constater l'augmentation des prix des maisons neuves et des maisons usagées. C'est plus de 20 % depuis un an malgré une augmentation considérable du nombre de logements disponibles. Nous n'avons qu'è regarder dans les quartiers centraux de Montréal et Québec à quel prix, en proportion, se vendent présentement les maisons usagées. C'est loin d'être ce que le ministre prétend et ce, malgré le moratoire.

En ce qui concerne le droit de préemption proposé, il sera totalement impraticable. Premièrement, le délai est trop court. Deuxièmement, il n'y a aucun programme d'aide. Le ministre peut bien laisser une porte ouverte à la possibilité qu'il y en ait de nouveau, sauf que la résolution d'hier nous laisse plutôt inquiets. On sait aussi que la très très grande majorité des locataires de Montréal ne veut pas ou ne peut pas devenir propriétaire. Tel que proposé en plus dans le dossier, on sait très bien que la propriété collective, c'est-à-dire par les biais de coopératives d'habitation ou des organismes sans but lucratif, devient impossible. Donc, ce secteur deviendra de plus en plus marginal.

Le maintien dans les lieux pour une période illimitée est une belle théorie, mais que la pratique aura tôt fait de contourner. Qui voudra acheter un logement? Un locataire. Un locataire qui voudra accéder à la propriété, mais pour y résider, ou un spéculateur qui veut louer, avec évidemment plus de profit. Donc, d'une façon ou d'une autre, le locataire en place devra ou bien quitter son loyer ou subir une augmentation considérable des coûts par les moyens déjà connus et qui pourront continuer à s'appliquer malgré les propositions contenues dans le document du ministre.

Nous sommes convaincus, de ce côté-ci que la levée du moratoire amènera une hausse de loyer importante pour les locataires utilisant leur droit au maintien dans les lieux. Premièrement, a cause d'une augmentation considérable des taxes et aussi à cause des coûts qui seront reliés à la transformation et aux frais de rénovation, puisque cela sera toujours permis soit avant l'avis d'intention ou soit lorsqu'une majorité des logements sera possédée par des copropriétaires. De plus, ce phénomène provoquera une hausse généralisée des loyers dans les quartiers centraux de Montréal et de Québec. Je crois que les députés qui sont ici et qui représentent ces secteurs de Montréal sont en mesure de le confirmer.

M. le Président, à cause du manque d'étude complète, a cause de l'absence de programmes d'aide d'accès à la propriété et ce, autant sur une base individuelle que collective, à cause d'une protection insuffisante et d'une protection réelle pour les locataires, è cause de l'absence de précision sur le contrôle qui suivra et, a cause du manque d'une véritable politique

globale de l'habitation et du logement au Québec, nous croyons qu'une décision s'impose: maintenir le moratoire et le rendre efficace.

Je voudrais conclure en disant qu'on trouverait très dommage que, dans le cadre de l'Année internationale du logement des sans-abri, on vienne semer la crainte et l'incertitude dans un secteur qui fonctionne passablement bien et ce, pour environ 80 % de la population de Montréal et 50 % de celle de la ville de Québec. Comment ce gouvernement peut-il parler de sa détermination d'élaborer une politique de la famille et, en même temps, permettre de déloger les gens au profit de ta spéculation? M. le Président, je réitère que nous demandions au ministre de maintenir le moratoire et de le rendre efficace. Merci.

Auditions

Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie, M. le député de Shefford. L'étape des remarques préliminaires étant complétée, j'inviterais sans plus tarder le premier groupe prévu à notre horaire à se présenter devant nous. J'appelle donc les représentants de la ville de Montréal à prendre place à la table des témoins.

Bienvenue, M. Fainstat, M. Gardiner et M. Lavallée. Je vous rappelle que vous avez une période de 30 minutes pour nous présenter le mémoire des autorités montréalaises. Par la suite, une période d'échanges de 30 minutes avec les membres du parti ministériel et une de 30 minutes avec les membres du parti de l'Opposition vous permettront de clarifier un certain nombre de points ou de répondre à des questions précises touchant d'autres aspects du dossier que soulèveraient des membres de la commission. Je vous invite donc immédiatement à nous faire la présentation de votre mémoire.

M. Fainstat (Michael): M. le Président de la commission, M. le ministre, M. le critique de l'Opposition, messieurs et mesdames membres de la commission parlementaire de l'aménagement et des équipements, je souhaite premièrement la bienvenue à Montréal, la métropole du Québec, à tous les membres de la commission parlementaire. Je voudrais remercier le ministre d'avoir convoqué ces audiences sur la levée du moratoire, ici à Montréal, ce qui facilite grandement la présence d'un plus grand nombre d'intervenants.

Je vous présente M. John Gardiner, à ma gauche, membre du comité exécutif, responsable du dossier de l'habitation et du développement urbain, et le conseiller André Lavallée, président de la Commission de l'aménagement, de l'habitation et des travaux publics du conseil de la ville de Montréal. Je cède la parole à M. Gardiner.

Ville de Montréal

M. Gardiner (John): M. le Président, membres de la commission, le libre exercice de la propriété est une valeur bien ancrée au Québec. Par ailleurs, la protection des intérêts des citoyens vulnérables en raison de leur condition économique ou physique est un objectif démocratique endossé par la population québécoise.

Ces choix de société sont parfois difficilement réconciliables et la levée du moratoire en est un exemple. Certains militent en faveur d'une levée du moratoire afin, disent-ils, de consacrer le droit au libre exercice de la propriété. Les autres leur répondent que leur logement n'est pas à vendre. D'autres, enfin, continuent à profiter des failles de la loi actuelle et procèdent à des évictions déguisées. C'est tout à fait réel.

Quoique tout le monde convienne que la situation ne peut plus durer, la difficulté de faire consensus sur la levée du moratoire est telle qu'il faut une bonne dose de courage politique pour s'y consacrer.

En ce sens, nous tenons à remercier le ministre responsable de l'Habitation, M. Bourbeau, de s'être compromis publiquement en faisant une proposition qui, c'est certain, sera analysée par tous les intéressés dont la ville de Montréal.

La levée du moratoire est incontestablement discutée et discutable et la réflexion de M. Bourbeau, telle qu'elle apparaît dans le document de proposition du gouvernement, constitue une contribution significative en vue de l'adoption éventuelle d'une politique claire en matière de conversion d'immeubles en copropriété divise.

Convenons dès le départ que la fausse étanchéité du régime actuel en rend le prolongement inacceptable, que l'on soit locataire ou propriétaire.

Le moratoire est, par définition, une mesure ponctuelle et temporaire. Il ne devrait être qu'une parenthèse permettant au gouvernement et aux différents intervenants du milieu de faire le choix d'une politique permanente en matière de conversion des immeubles en copropriété divise.

Il y a maintenant près de douze ans que le Québec réfléchit au rythme des fluctuations du marché immobilier. Une décision doit être prise.

L'incertitude que nourrit l'existence du moratoire, jointe aux anticipations innombrables qui découlent de l'annonce de sa levée prochaine, et cela depuis juin 1986, au Sommet économique de Montréal, ne laisse d'autre choix a l'État que d'agir. Pourtant, il faut se garder d'improviser, compte tenu de la nature du dossier.

Dans ce contexte, la priorité consiste indiscutablement à apporter des modifications au Code civil. Il faut éliminer les failles qui

sont les voies de contournement, telle la reprise de possession dans le cas des bâtiments de quatre logements et moins, les évictions faites è l'occasion de travaux majeurs et la portée du mot "logement", galvaudé par les cours depuis quelques années maintenant.

De ce fait, le resserrement du cadre légal afin d'assurer la protection complète des locataires, reçoit notre assentiment.

Nous sommes d'autant plus heureux que M. Bourbeau en ait fait l'un de ses postulats de base dans le cadre de sa réflexion.

Le deuxième postulat du ministre, visant à favoriser l'accès à la propriété, nous paraît, par ailleurs, devoir être remis en question. Quoique l'intention soit louable et que notre administration veuille, elle aussi, permettre au plus grand nombre de citoyens et citoyennes de pouvoir contrôler leur milieu de vie, il n'est pas évident que le simple fait de lever le moratoire accroîtra un tant soit peu de façon significative, l'accès à la propriété.

Tous conviendront que l'accès à la propriété exige une capacité financière de base. Or, les statistiques prouvent qu'une partie importante des locataires de Montréal n'ont pas cette capacité minimale.

A ce titre, mentionnons qu'à Montréal, 326 000 ménages sont locataires, soit 32 % du total des locataires de la province de Québec, qu'ils représentent, selon les dernières données disponibles, 78 % de l'ensemble des ménages montréalais, que de ceux-là, près de 90 000 ménages reçoivent de l'aide sociale.

Enfin, près de 300 000 personnes habitant Montréal vivent en-dessous du seuil de la pauvreté.

À cette réalité s'ajoute le fait que 72 000 personnes âgées de 65 ans et plus, soit 13 % de la population montréalaise, vivent principalement de leur pension gouvernementale et que près de 45 000 familles monoparentales résident à Montréal.

Cette réalité montréalaise guide les choix de notre administration et nous croyons que la décision du gouvernement, dans le cadre de la levée du moratoire, doit en tenir compte. Deux raisons nous motivent; d'une part, une vision à plus long terme nous amène à croire que les particularités montréalaises n'iront pas en s'atténuant; d'autre part, l'impact de la levée du moratoire se répercutera principalement dans les grands centres urbains dont Montréal. (10 h 30)

En outre, la levée du moratoire est, quant à nous, un prétexte qui met en veilleuse la principale question qu'il faut se poser: oui ou non, voulons-nous permettre partout, pour tout immeuble et en tout temps, la conversion d'immeubles en copropriété divise au Québec?

Le document ministériel est muet sur cette question. Il semble, en effet, que pour le gouvernement, l'accès à la copropriété divise sait la conséquence directe de la levée du moratoire. Il nous apparaît que ce raisonnement est fondé sur de mauvaises prémisses, puisque le moratoire est essentiellement un carcan juridique, alors que la copropriété divise, elle, est un mode de propriété.

Plusieurs considérations ont contribué à notre réflexion. Ainsi, comme pour nous la conversion n'est pas en soi un programme d'accès à la propriété et que, de plus, les particularités socio-économiques des Montréalais et Montréalaises nécessitent une protection adéquate pour les locataires, la conversion en copropriété n'aura pas, dans les faits, l'impact positif que le ministre anticipe.

Il importe, de notre point de vue, d'éliminer dans un premier temps ce carcan juridique. Dans un deuxième temps et concurremment, il faudrait établir les règles qui encadreront la diversification des choix favorisant véritablement l'accès à la propriété.

À la lumière de ces considérations, nous répondons qu'il ne faut pas ouvrir partout, en tout temps et pour tout type de bâtiment, la possibilité de convertir en copriété divise. Il faut plutôt y aller par exception.

Par le biais du présent mémoire, Montréal veut contribuer positivement à la mise en place des mesures préalables à la conversion des immeubles en copropriété divise, le but avoué étant de donner priorité à la protection des locataires.

D'entrée de jeu, il nous faut expliquer que notre présentation se fera en deux temps. La première étape consiste à articuler nos propositions visant la conversion éventuelle de certains bâtiments.

En second lieu, nous nous attarderons plus spécifiquement sur le document de travail déposé par le ministre. L'analyse est ponctuée de recommandations et même de questions.

Comme chacun le sait, la fébrilité du marché immobilier au cours des dernières années rend presque impossible l'établissement d'un portrait exact de la situation qui prévaut è Montréal.

Sans avoir pu décortiquer toutes les composantes socio-démographiques du logement à Montréal, nous savons qu'il faut éviter que les interventions publiques accentuent le rythme des bouleversements qui s'y remarquent: évictions, spéculations, incertitudes.

Ce souci nous a d'ailleurs largement dicté notre choix de ne pas favoriser l'ouverture généralisée du marché de la conversion en copropriété divise. Sans nier que le projet ministériel soit intéressant, nous croyons qu'il est susceptible de créer

une psychose de la conversion qui ne ferait qu'envenimer la situation.

Au-delà des statistiques et des projections, il faut admettre que le comportement du marché immobilier repose sur une mentalité collective qui est aussi insondable que préoccupante. Dans ce contexte, nous appréhendons, à la lumière de certaines expériences étrangères et des pronostics de plusieurs, les conséquences de l'ouverture généralisée de ce nouveau marché immobilier.

Nous sommes convaincus que le fait de lever le moratoire, tel qu'indiqué par les propositions ministérielles, n'entraînera pas un plus large accès à la propriété. En effet, la levée du moratoire ne rend pas les locataires plus riches, alors que pour acheter un condominium, il faut avoir les moyens financiers requis.

Le scénario du gouvernement qui veut que l'accès à ia copropriété divise ait pour effet de permettre à plusieurs locataires d'accéder à la propriété nous apparaît peu vraisemblable.

L'accès à la propriété est essentiellement une question de capacité financière. Or, les conditions socio-économiques de la population montréalaise démontre clairement que les locataires optent souvent pour cette forme de logement en raison de la fragilité de leur situation financière. Si l'on décide d'être propriétaire, il n'est pas certain que l'on soit toujours locataire par choix.

De ce fait, si le gouvernement veut véritablement favoriser l'accès à la propriété, que l'on envisage les constructions neuves ou existantes, il devrait faire davantage. Pour être crédible, il doit mettre en place une série de programmes de soutien financier visant à permettre au plus grand nombre d'accéder à la propriété.

Ces réflexions nous incitent à penser que le simple fait de permettre la copropriété divise n'aura pas de conséquences véritables quant à un meilleur accès è la propriété.

Nous croyons que la réaction des propriétaires serait à l'inverse de celle des locataires. En effet, nous prévoyons que dès que les propriétaires auront compris les incidences de la proposition ministérielle, toujours dans l'hypothèse où elle serait adoptée en son entier, ils concluront qu'il est de leur intérêt de convertir rapidement, quitte à attendre deux ou trois ans avant de mettre en vente les unités subdivisées.

Ainsi, comme le droit au maintien illimité dans les lieux ne vaut que pour les locataires de première génération, alors que près de 90 000 ménages de l'île de Montréal déménagent annuellement, on verra que le temps servira les propriétaires prévoyants qui convertiront rapidement.

Dans un tel cas, l'on risque d'être confronté, à moyen terme, à un excédent d'unités converties qui devra demeurer sur le marché locatif. Les nouveaux locataires de ces unités converties ne jouiront d'aucune mesure de protection particulière.

De plus, le loyer de ces unités augmentera puisque chaque unité sera évaluée distinctement. Or, la preuve est faite que le total de l'évaluation de chacune des unités est supérieur à l'évaluation de l'immeuble faite globalement.

Nous ne voulons pas que la levée de l'embargo juridique crée chez les propriétaires et les investisseurs un mirage d'avantages financiers qui dépasse les capacités des acheteurs.

Nous ne voulons pas non plus que, sur la foi de telles anticipations, plusieurs propriétaires convertissent leur immeuble et plongent de ce fait un grand nombre de locataires dans l'incertitude, quelles que soient les mesures de protection disponibles. Dans un tel contexte, les propriétaires convertisseurs pourraient avoir la tentation de harceler les locataires. Nous reviendrons sur ce concept.

Bref, afin de ne pas ouvrir à l'avenir le soin de nous donner raison, dans l'hypothèse d'une application de l'ensemble des propositions ministérielles, il faut envisager la possibilité de permettre que la conversion en copropriété divise soit globalement interdite avec, en corollaire, des mesures d'exception qui permettront la conversion à certaines conditions. Pour nous cela implique le retrait du projet de loi tel que présenté.

Sans avoir articulé notre proposition dans toute sa mécanique, il importe d'illustrer le cadre juridique d'une telle politique de conversion.

Dans un premier temps, le moratoire devrait être relégué aux oubliettes. La loi devrait être modifiée pour interdire la conversion des immeubles en copropriété divise. Cette interdiction serait pondérée par des mesures d'exception qui permettraient, dans certains cas, d'aller à l'encontre de la règle générale. Pour ce faire, la loi ou l'un de ses règlements énuméreraient une série de critères dont le propriétaire devrait faire la preuve avant de pouvoir convertir.

Les mesures énumérées seraient limitatives mais pas nécessairement toutes cumulatives. Ainsi, l'on peut imaginer qu'il faudrait que deux ou trois conditions préalables soient acquises afin que la conversion soit permise. Les critères et leur nombre pourraient varier selon que la conversion se fasse dans un quartier ou pour un type d'immeuble. À titre d'exemple, soulignons le cas où une majorité significative de locataires habitant un immeuble, désire se porter acquéreure. Dans un tel cas, la conversion devient opportune.

Les municipalités seraient, en outre, investies du premier droit de regard sur l'adéquation des critères préalables à la

conversion. Ainsi, l'on pourrait exiger du propriétaire requérant qu'il obtienne de la municipalité dans laquelle l'immeuble est sis un certificat de convertibilité. Cette démarche, pour être efficace, devrait précéder le recours à la Régie du logement dont nous reconnaissons d'emblée la compétence en de telles matières. Les municipalités devraient émettre le certificat ou remettre au requérant un écrit stipulant son refus.

De plus, pour les municipalités qui ne désirent pas intervenir, elles devraient avoir l'obligation de le signifier par écrit à chaque requérant. Cet avis de non-intervention serait assimilé à l'octroi du certificat. Par la suite et dans la mesure où le requérant désire continuer la conversion, il devrait se présenter à la régie qu'il ait ou non obtenu le certificat.

Dans le cas où le requérant demande à la régie d'enregistrer la conversion de son immeuble alors qu'il n'a pas obtenu le certificat municipal, la régie devrait signifier copie de la requête è la ville qui pourrait intervenir pour faire la preuve de ces prétentions. La loi reconnaîtrait l'intérêt juridique de la ville.

Voilà brièvement le cadre juridique de notre proposition qui identifie le rôle que les municipalités devraient jouer lors de la subdivision d'un immeuble en copropriété. Évidemment, quoique nous soyons silencieux sur le rôle des locataires à l'intérieur d'une telle démarche, il est indiscutable que nous prévoyons que tous les locataires concernés puissent se faire entendre.

Nous, nous proposons maintenant d'analyser les propositions gouvernementales, telles qu'elles sont formulées dans le document Lever le moratoire; une décision qui s'impose.

Notre cheminement respecte celui qui fut suivi dans le document de travail déposé; conséquemment, nous allons aborder, dans l'ordre, chacune des mesures d'encadrement proposées.

Dès qu'il fut question de lever le moratoire, la préoccupation de M. Bourbeau a toujours été clairement exprimée: prévoir des mesures de protection pour l'ensemble des locataires. Son document est le reflet fidèle de cette préoccupation puisqu'il propose la mise en place d'une série de mesures dont la plus populaire est certes le maintien dans les lieux pour une période illimitée.

Revenons sur les deux points que nous avons abordés en introduction, soit la nécessité d'empêcher que, par le biais des réparations majeures autres qu'urgentes, et par la reprise de possession, certains propriétaires réussissent à évincer les locataires. Ces pratiques malheureuses trop souvent utilisées sont inacceptables. Nous sommes d'ailleurs fort heureux de constater que M. Bourbeau s'apprête à intervenir législativement afin d'empêcher qu'elles ne se perpétuent. Nous n'insisterons jamais assez sur l'urgence d'agir, même si la mise en place de la politique de conversion des immeubles en copropriété divise n'est pas encore achevée.

Puisque l'encadrement des réparations majeures vise è protéger tous les types de locataires quelles que soient les caractéristiques juridiques attachées à leur logement, son adoption ne doit pas être tributaire de la levée du moratoire.

Les chiffres plaident clairement en faveur d'une telle intervention immédiate.

En effet, durant les cinq premiers mois de cette année, il y a eu à la Régie du logement pour l'île de Montréal, 644 demandes relatives à l'article 1653.1 du Code civil.

Cela représente une augmentation de 61 % par rapport à la même période l'année dernière. Presque la moitié de ces demandes provient du secteur centre de l'île. Par ailleurs, depuis 1981, le nombre de demandes a plus que doublé au Québec, et celles-ci se concentrent de plus en plus sur l'île de Montréal; 83 % en 1984, 92 % en 1986.

Si ces données ne constituent pas un inventaire exhaustif de toutes les évictions, elles représentent néanmoins une indication de la situation à laquelle sont confrontés certains locataires.

Nommons les trois mesures envisagées par le ministre, afin de pallier la situation des évacuations temporaires de locataires en raison de réparations majeures, qui nous semblent satisfaisantes: le prolongement du délai d'avis qui passe d'un è trois mois; l'obligation faite au propriétaire - locateur, convertisseur ou indivis - de verser une indemnité au locataire évacué temporairement; l'extension des pouvoirs de la Régie du logement lui permettant de condamner les contrevenants des dommages-intérêts exemplaires.

Toutefois, nous croyons que tout propriétaire devrait être légalement obligé, lorsqu'il n'y a pas d'entente possible entre lui et son locataire, de présenter un avis de réparations ou d'améliorations majeures autres qu'urgentes à la Régie du logement dans le but d'obtenir l'autorisation d'évincer le locataire. En d'autres termes, ce que nous proposons, c'est tout simplement le renversement de la démarche qui, jusqu'à présent, relevait de l'initiative du locataire et pour laquelle il y a actuellement des précédents dans la loi de la régie en ce qui concerne le coût d'occupation.

Cette mesure offre l'avantage de saisir la Régie du logement du litige en lui permettant du coup de contrôler les autres mesures qui nous sont proposées. (10 h 45)

Par ailleurs, nous croyons qu'il y aura

lieu d'apporter quelques précisions à l'égard du recours déjà reconnu aux locataires de loger une plainte à la régie dans la mesure où ils estiment abusifs les travaux d'améliorations qui leur sont proposés. Nous aimerions voir préciser d'une manière plus concrète les critères à partir desquels il serait possible à la Régie du logement de statuer en pareil cas.

Il nous apparaît essentiel que, dans la présente démarche, la protection la plus complète des locataires soit la prémisse de base. Le droit au maintien dans les lieux pour une période illimitée rejoint tout è fait nos propres préoccupations. Les mesures énumérées ci-après et avec lesquelles nous sommes d'accord ont l'avantage de couvrir à la fois la copropriété divise et indivise, ce qui, dans les faits, est un élargissement de la protection actuelle des locataires, entre autres: l'obligation pour le propriétaire convertisseur d'émettre un avis d'intention de convertir; l'interdiction au propriétaire convertisseur de prendre possession d'un logement à partir du moment où l'avis d'intention est émis; l'interdiction à l'acheteur d'un logement converti en copropriété de reprendre possession du logement et l'interdiction au propriétaire d'une partie indivise d'un immeuble locatif de reprendre possession des logements, quel que soit le nombre de logements que comporte l'immeuble. Cela s'applique, bien sûr, à partir du deuxième copropriétaire.

Nous aimerions également attirer votre attention sur un problème encore plus préoccupant: les locataires de deuxième génération. Si les modalités proposées améliorent considérablement la protection des locataires d'un bâtiment faisant l'objet d'une demande d'autorisation de conversion, elles négligent par ailleurs la protection des ménages qui loueront des logements une fois l'avis de conversion émis. Aucune disposition ne peut empêcher un propriétaire de convertir son immeuble selon les exigences prévues et d'attendre, avant de procéder à la mise en vente des unités, que le taux de roulement normal fasse en sorte que les locataires de seconde génération deviennent majoritaires. Or, nous avons la conviction que bon nombre de propriétaires suivront ce scénario.

De ce fait, risquons-nous de nous retrouver d'ici peu dans la situation conflictuelle qui prévalait il y a près de douze ans?

Au surplus, un bâtiment dont la conversion est autorisée et dans lequel se retrouve une majorité de locataires de deuxième génération aura une valeur marchande beaucoup plus grande qu'un bâtiment occupé principalement par des locataires de première génération.

Le document de proposition fait référence à ce phénomène lorsqu'il est fait mention en page 53 - et je cite: "À la suite d'une conversion, l'évaluation municipale pourrait augmenter et, par conséquent, la facture des taxes être appelée à grimper. Cette hausse de l'évaluation municipale pourrait affecter le locataire désirant acheter son logement. Par contre, s'il arrivait que plusieurs logements de l'immeuble converti continuent d'être occupés par des locataires ayant droit au maintien dans les lieux pour une période illimitée, cela pourrait avoir un impact à la baisse sur la valeur de l'immeuble. Dans les faits, ce dernier conserverait en grande partie son statut locatif. ", et j'ajoute, même converti.

Le ministre propose que nous portions une attention particulière à l'application des méthodes d'évaluation foncière, de façon à tenir compte de l'impact sur la valeur réelle de l'immeuble du droit au maintien dans les lieux.

Risquons-nous de voir apparaître un concept d'évaluation foncière variée à plus ou moins longue échéance? Cette perspective, quoique étonnante aujourd'hui, pourrait nous séduire dans un autre contexte. Une protection adéquate des locataires des générations subséquentes oblige à imaginer des scénarios de solutions additionnels, ce que l'on ne retrouve pas dans la proposition ministérielle.

Plusieurs propriétaires seront tentés d'utiliser le harcèlement à l'endroit des locataires pour contourner la protection que représente le maintien dans les lieux. Plus les locataires sont protégés, plus il est important de prévenir le harcèlement. Or, c'est un mandat colossal que de tenter d'imaginer des mécanismes accessibles qui atteindront véritablement le but visé. Nous admettons d'emblée qu'il n'y a pas de solution miracle et que les mesures proposées par le ministre en valent bien d'autres. Toutefois, certaines de ces mesures nous causent un problème, alors que d'autres gagneraient à être resserrées pour être efficaces.

Il faut rappeler que le harcèlement est l'épée de Damoclès qui pend au-dessus de la tête de tous les locataires qui se prévaudront de leur droit au maintien dans les lieux. D'ailleurs, pendant les audiences publiques tenues à Montréal aux mois de mai et juin par la Commission de l'aménagement, de l'habitation et des travaux publics du conseil municipal, le harcèlement est ressorti comme la première préoccupation des locataires, principalement chez les personnes âgées. Afin que les mesures proposées pour éviter le harcèlement soient des outils que les locataires puissent utiliser facilement, il faut qu'elles soient le moins "judiciarisées" possible. Partant de cet objectif, il demeure qu'il faut prévoir le cas où seuls les tribunaux pourront intervenir.

Le ministre propose que le locataire

harcelé puisse entreprendre, par le biais d'une dénonciation, une poursuite pénale à l'endroit du locateur. L'idée est intéressante, mais nous pensons que le processus pénal est trop souvent éprouvant pour les dénonciateurs qui doivent assumer le fardeau de la preuve. Il faudrait, au minimum, prévoir des cas où, a la suite de la preuve faite de certains comportements d'un locateur, le fardeau de la preuve soit renversé. Quoique nous n'ayons pas identifié ces comportements, nous croyons que la chose est faisable. Ces renversements de fardeau soulageraient les locataires du devoir de constituer une preuve juridiquement recevable et permettrait en plus de rendre la mesure moins rébarbative. Dans le cas contraire, la justice pénale étant ce qu'elle est, peu de locataires victimes de harcèlement auront le courage d'affronter le processus judiciaire.

Quant à l'exigence qui est faite au propriétaire convertisseur d'envoyer au locataire un avis de 24 heures visant à l'informer de toute visite du logement par des professionnels pour fins d'expertise dans le choix de la conversion, nous agréons.

Mais, pour assurer que les visiteurs soient véritablement des professionnels dont les services sont requis dans le cadre de la conversion, nous suggérons que l'avis contienne le nom de l'expert ou de la firme qui l'emploie. C'est là, à notre avis, la seule façon de permettre au locataire de vérifier l'identité du visiteur et de comprendre que le mandat de ce dernier est lié è la conversion.

En outre, l'on comprend de cette proposition que seules les visites effectuées dans le cadre de la conversion seront autorisées et que, dès que la conversion sera effectuée, aucune autre visite ne sera permise.

En ce qui concerne le cas des personnes âgées ou handicapées, nous retenons l'idée d'un guichet spécial. Nous présumons que la notion de guichet est entendu dans un cadre plus large, incluant notamment un service téléphonique particularisé. L'idée de ce guichet pour les personnes âgées ou handicapées est souhaitable, mais ce qu'il faut surtout pour aider ces personnes, ainsi que les ménages a revenu modeste, c'est un soutien technique efficace. Bien connaître ses droits et savoir comment les faire valoir représentent pour plusieurs un défi insurmontable. Par ailleurs, nous comprenons que la mise en place d'un tel soutien technique peut être administrativement parlant lourde et coûteuse. Mais c'est là le prix à payer pour une politique généralisée de conversion en copropriété.

Quant aux références qui pourraient être faites à là Commission des droits de la personne, nous en saisissons mal ta signification.

Qui portera un plainte? Comment pourra-t-on juger que le harcèlement est discriminatoire en ce qu'il est fait pour des motifs d'âge ou de handicap physique?

Cela dit, nous croyons que ni le guichet, ni le recours a la Commission des droits de la personne ne soient des mesures efficaces, voire même réalistes. Cet état de choses est d'autant plus inquiétant que la population québécoise vieillit très rapidement, à tel point que, selon les dernières prévisions démographiques, Montréal abritera, à la fin du siècle, 20 % de personnes âgées. Une solution envisageable serait, pour protéger les personnes âgées et handicapées, d'imposer, comme condition préalable à la conversion, l'obligation pour le convertiseur de prendre des mesures afin de relocaliser ces personnes dans des logements de même qualité, a coût comparable et situés dans le même quartier.

Nous sommes conscients des limites de cette proposition, puisqu'il sera en effet possible, par cette caractérisation de locataires, que les locateurs soient de plus en plus réticents a leur louer des logements. Mais nous croyons que, si la conversion est faite par exception, selon notre proposition, l'on pourrait réussir à éviter une telle éventualité.

Sur le droit de préemption, deux petites remarques. La première, pour féliciter le ministre d'avoir livré la marchandise en reconnaissant l'intérêt premier des locataires; deuxièmement, en respectant l'esprit de la proposition ministérielle, nous pensons qu'un délai de six mois devrait être accordé aux locataires afin qu'ils puissent prendre une décision éclairée quant à l'acquisition de leur logement.

Le délai commencerait à courir du jour de la date de réception de l'avis de conversion. Évidemment, toute offre d'achat acceptée avant l'autorisation de la régie devrait être conditionnelle à celle-ci sous peine de nullité, et ce, quel que soit l'acheteur.

En rétrospective, que l'on parle des recours judiciaires, des avis de 24 heures, des guichets spéciaux, de l'accès à la commission québécoise des droits et libertés de la personne, de la protection des personnes âgées ou handicapées et du droit de préemption, la conclusion s'impose d'elle-même.

Un véritable choix en faveur de la protection des locataires et des personnes qui sont les plus vulnérables nous oblige a assortir la conversion en copropriété de mesures telles qu'elle en devient impraticable. Afin de ne pas en arriver à cette extrême limite, la solution demeure de ne permettre la conversion que dans des cas préétablis, ce que nous proposons.

La protection de l'acquéreur en copropriété est pertinente tant lors de l'achat d'un logement existant que lors de

l'achat d'un nouveau logement. Le cadre juridique actuel de la copropriété crée de nombreux problèmes; les uns sont liés aux pratiques du constructeur ou du vendeur, les autres, à la gestion de l'immeuble. Plusieurs acheteurs en copropriété vivent des situations difficiles après coup. Quant aux autres mesures que propose le gouvernement, nous les trouvons adéquates et nous souhaitons les voir appliquées aussi aux nouvelles constructions.

Globalement, tous reconnaissent que la conversion de logements en copropriété n'entraîne pas une perte significative de logements locatifs. Cependant, certains secteurs où le marché immobilier est très actif souffriront particulièrement de cette pratique. Aux États-Unis, à peine 1 % du parc locatif a été converti, a l'échelle nationale, sur une période de dix ans. Par ailleurs, ce pourcentage s'élève à 6 % dans certaines régions métropolitaines. Dans certains secteurs urbains, tel le centre-ville de Washington, le taux est de 7 %. Il semble clair que la conversion se concentre et, pour illustrer ce phénomène, rappelons les propos de Daniel L'Écuyer: "Les vieux quartiers stables offrent un milieu de choix pour les conversions. Ces quartiers comme Outremont et Notre-Dame-de-Grâce, è Montréal, correspondent très bien à cette description. Là aussi, les résidences sont en bon état et ne nécessitent que quelques améliorations de type cosmétique. Enfin, le phénomène se fait ressentir dans les vieux quartiers centraux en voie de revivification. À ce moment, les conversions jouent un rôle dans le processus de transformation sociale et physique du quartier. "Des quartiers comme le Plateau Mont-Royal, Saint-Louis et Pointe-Saint-Charles traduisent cette réalité pour Montréal. La plupart du temps, on assiste à des rénovations majeures. Souvent, le phénomène de conversion se concentre dans quelques quartiers de ce type et c'est à ce moment que les problèmes de délogement sont les plus durement vécus." (11 heures)

La ville de Montréal, comme toutes les autres municipalités, doit s'assurer que ses citoyens puissent se loger convenablement. En raison de la forte proportion de locataires à Montréal, de leurs conditions socio-économiques et de l'importance relative des personnes âgées, la sauvegarde d'un parc locatif à prix abordables demeure une priorité.

Nous désirons donc maintenir, dans tous les secteurs de la ville, un équilibre dans la composition socio-économique des ménages, d'une part, et, d'autre part, nous assurer que le parc immobilier puisse satisfaire le mieux possible les besoins futurs. À cet égard, le consensus social justifie nos préoccupations.

Or, les secteurs où cet équilibre est le plus précaire correspondent sensiblement aux secteurs où la conversion, par le biais de l'indivision, a été, au cours des dernières années, la plus active. Ces secteurs sont aussi ceux où les taux de vacance sont les plus faibles et où les pressions sur l'augmentation des prix sont les plus fortes.

Plusieurs quartiers centraux vivent déjà des pressions de "gentrification" et de "retour à la ville". En s'appuyant sur ces faits, nous appréhendons l'impact des pressions supplémentaires que pourrait exercer une politique de conversion généralisée. Non seulement assisterons-nous à un changement rapide de la composition socio-économique des ménages dans ces quartiers, mais verrons-nous, en même temps, une baisse appréciable du nombre de logements à prix abordable et, par conséquent, à des pressions accrues pour augmenter l'offre en logements sociaux.

Nous sommes certains que le projet sous étude entraînerait, immédiatement après la levée du moratoire, des impacts négatifs qu'il faudrait freiner. De ce fait, nous nous interrogeons sur la pertinence de mettre sur pied une mécanique complexe qu'il faudrait ensuite contenir.

En terminant, nous aimerions porter à l'attention du ministre et des membres de cette commission la nécessité de situer le présent débat dans une perspective d'ensemble quant aux préoccupations que nous devons tous avoir en matière d'habitation.

Ces préoccupations s'instruisent des leçons que nous tirons des divers programmes qui, dans le passé, ont affecté le marché immobilier, qu'il s'agisse de l'Opération 20 000 logements, de Loginove ou de Corvée-habitation, le constat principal que nous devons faire, c'est qu'ils n'ont pas modifié radicalement le portrait du mode d'occupation et qu'à ce titre, Montréal est toujours une ville de locataires.

Assimiler la levée du moratoire à une mesure d'accessibilité à la propriété fausse, d'entrée de jeu, les horizons que nous devons avoir en matière d'habitation. Nous oublions trop facilement le fossé qui existe entre les capacités financières des ménages et la possibilité véritable et réelle d'accéder à la propriété.

On n'insistera jamais assez sur la spécificité montréalaise lorsque l'on traite d'habitation, de même que l'on ne retiendra jamais suffisamment la pression que les caractéristiques démographiques de l'ensemble de la société québécoise, tout particulièrement la baisse du taux de natalité et le vieillissement de la population, exercent sur le parc résidentiel.

Il est nécessaire, dans cette perspective, de diversifier, , les formes d'accession à la propriété, tout en recherchant une amélioration des conditions

d'habitation, quel qu'en soit le mode d'occupation. En même temps, il importe, dans cette perspective, de pallier le handicap financier des locataires, qui demeure l'obstacle principal au passage du locatif à la propriété.

Il faut également voir à augmenter le nombre et la qualité des logements accessibles aux ménages à faible et moyen revenus HLM, coopératives et autres. Il faut se préoccuper de trouver les meilleurs moyens de satisfaire l'ensemble des besoins, tout en respectant les choix des intéressés. En ce sens, la copropriété en est un, à la condition expresse que son développement n'ait pas d'effets négatifs sur la satisfaction de tous les autres besoins en matière d'habitation, Quelle que soit l'issue du présent débat, nous n'aurons couvert, dans les faits, qu'un aspect de l'habitation. Pour que le présent exercice soit valable, il faut qu'il y ait enfin une vaste réflexion sur tous les autres éléments autour desquels doit s'articuler une politique cohérente d'habitation au Ouébec. Si je comprends bien M. le ministre, celui-ci nous invite justement à faire cet exercice avec toute la province.

Comment conclure sans convenir de nouveau que la levée du moratoire est un sujet fort délicat? Il demeure d'autres aspects de cette question, telle qu'elle est traitée par le gouvernement, qu'il faudra discuter tôt ou tard. Qu'il nous suffise de souligner la question de la cohabitation d'intérêts divergents dans un même immeuble, soit: l'intérêt des propriétaires investisseurs, l'intérêt des copropriétaires résidents, l'intérêt des locataires de première génération et l'intérêt des locataires de deuxième génération. Un tel mariage de raison risque fort de causer des problèmes que vous êtes à même d'imaginer.

Dans un autre ordre d'idée, et quoique nous ayons été laconiques à ce sujet, le projet d'ensemble n'a pas vraiment saisi la réalité du marché actuel de l'immobilier. Son évolution au cours des deux ou trois dernières années a montré des signes d'une très grande nervosité. Nous sommes convaincus, si elle pouvait être prise en considération, que cela ferait mentir bon nombre des études et analyses dont on nous a fait part.

Compte tenu de l'ensemble des conséquences dites et non dites que pourrait avoir le droit général de subdivision en copropriété, même balisé, nous ne pouvons acquiescer à la proposition gouvernementale: parce que les mesures proposées pour protéger les locataires nous apparaissent déficientes, parce qu'en raison des conditions de marché et des caractéristiques socio-économiques des locataires de Montréal, la levée du moratoire n'atteindra pas l'objectif premier du ministre qui est de faciliter l'accession à la propriété, parce que l'association de la levée du moratoire et de la copropriété divise crée une psychose qui sert mal tout le marché locatif au Québec. Cela nous a d'ailleurs motivés à proposer une toute autre approche.

Même si cette approche vise à désamorcer les mesures de contournement et è empêcher la subdivision en copropriété sauf exception, nous convenons qu'elle n'est pas, elle non plus, sans reproches. Nous estimons, néanmoins, qu'à défaut d'avoir tous les avantages, elle offre le moins d'inconvénients. Sa principale qualité est de passer un message clair et apaisant pour les locataires et pour les propriétaires. Dans la mesure où le climat social qui en résultera sera plus serein, les conversions par exception se feront dans un meilleur esprit.

Sans présumer de la formule qui sera retenue par le ministre responsable de l'Habitation et le gouvernement, il importe que les dispositions législatives soient adoptées dès la prochaine session parlementaire, afin d'endiguer l'hémorragie des évictions faites sous prétexte des travaux majeurs et de la reprise de possession.

Évidemment, dans le cadre de nos propositions, le calendrier de mise en place impose que le carcan que constitue le moratoire soit effacé du vocabulaire québécois afin d'être remplacé par une loi claire qui interdise la subdivision de bâtiments résidentiels en copropriété et que cette loi soit assortie d'exceptions, lesquelles resteront à déterminer par règlement, que les municipalités soient appelées a travailler de concert avec le gouvernement afin d'identifier les critères permettant la conversion.

Évidemment, Montréal s'engage à consulter sa population, afin de convenir des critères susceptibles de créer le plus large consensus possible.

En dernière analyse, nous sommes convaincus que cette commission parlementaire est un exercice de réflexion collective qui permettra d'enrichir le point de vue de tous les intéressés. Finalement, nous souhaitons qu'elle renverra a l'oubli le débat trop longtemps campé à sa première expression, à savoir: pour ou contre la levée du moratoire.

M. le Président, M. le ministre, M. le critique de l'Opposition et M. les membres de la commission et tous ceux qui sont présents aujourd'hui, nous vous remercions très sincèrement pour ta qualité de votre écoute. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.

Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie de votre présentation. Compte tenu des ententes intervenues jusqu'à maintenant et compte tenu du temps pris par les autorités de Montréal pour nous faire la présentation de leur document, il reste 42

minutes, donc 21 minutes à chacune des deux formations politiques. M. le ministre,

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Le mémoire de la ville de Montréal se termine par des félicitations aux membres de la commission pour la qualité de leur écoute. Moi, je commencerai par féliciter la ville de Montréal pour la qualité du document qu'elle nous a présenté. C'est un document dont on doit louer la qualité non seulement quant au fond, mais également quant à la forme. Il est toujours intéressant de lire un document qui, manifestement, est préparé par des gens qui connaissent le dossier, mais il est doublement intéressant de le lire quand les choses sont bien dites. Or, je dois vous féliciter parce que c'est un document clair, qui se lit facilement et qui donne votre position.

M. le Président, je me permettrai, dans un premier temps, de faire quelques commentaires pour ensuite poser quelques questions aux représentants de la ville de Montréal. Je suis heureux de constater que la ville de Montréal reconnaît que le prolongement du régime actuel, donc, le maintien du moratoire, est inacceptable et que la conversion d'immeubles en copropriété divise pourrait être acceptable dans certaines circonstances. De plus, je constate également avec une certaine satisfaction que la plupart des mesures que nous proposons peuvent être agréées par la ville ou sont déclarées comme telles, reconnaissant que la ville suggère, dans certains cas, des améliorations. Je conclus donc que nous avons le même objectif et essentiellement les mêmes préoccupations. Toutefois, la mécanique d'application est différente. La ville souhaite interdire la conversion d'immeubles, mais avec des exceptions qui feraient l'objet de discussions avec les municipalités. Le gouvernement, quant à lui, propose la démarche inverse, soit de permettre la conversion mais avec des exceptions qui sont contenues dans le document. Je vous rappelle que ce sont des exceptions qui existent dans le cas, par exemple, de réparations majeures où un locateur aurait expulsé des locataires, auquel cas la Régie du logement refuserait la conversion. Donc, c'est une exception.

Il y a également des exceptions prévues à la page 57 du document. C'est probablement l'un des paragraphes les plus importants lequel, je pense, n'a pas été lu avec autant d'attention par la plupart des gens qui se sont penchés sur la question. Le dernier paragraphe de la page 57 est extrêmement important et se voulait, pour nous, une façon importante de dire que, dans bien des cas, il ne pourrait pas y avoir de conversion. Vous me permettrez de lire ce paragraphe: "Si le suivi du rythme de conversion ou l'arrivée de problèmes liés à des conjonctures économiques et sociales - j'insiste sur le mot "sociales" - devait révéler des tensions -j'insiste sur le mot "tensions" - dans certains segments du marché locatif, il serait possible d'intervenir rapidement afin de limiter ou d'interdire la conversion dans ces secteurs".

Il est donc évident que, dans notre proposition, cette mesure dont je viens de parler, et qui est proposée au même titre que toutes les autres, visait en sorte de dire: On pourrait faire des conversions mais avec des exceptions. Ces exceptions pourraient être importantes, tel que je viens de le signaler à la lecture du paragraphe de la page 57. Donc, la ville nous dit: Nous préférons une démarche selon laquelle on commencerait par dire que c'est interdit, sauf dans les situations où ce serait permis, situations qui seraient déterminées à l'avance par règlement. Nous avions dit et nous disons que nous préférons... En fait, la proposition gouvernementale dit: Ce sera permis, sauf quand ce sera défendu. Mais je conclus que, finalement, l'objectif souhaité est le même, c'est-à-dire permettre, dans certains cas, à des locataires d'accéder à la propriété tout en consolidant et en renforçant les droits des locataires d'être maintenus dans les lieux et d'être débarrassés du harcèlement et des autres problèmes qui sont les leurs.

Une autre remarque. On laisse entendre, à quelques endroits dans votre document, que la proposition gouvernementale voit, dans la levée du moratoire, la garantie de l'accession à la propriété. Je ne pense pas qu'on puisse faire dire exactement cela au document. Nous ne pensons pas, et je le ne crois pas, que le document ait dit que la levée du moratoire est une garantie d'accession à la propriété et que c'est la seule et unique façon d'y accéder. Je pense plutôt que la levée du moratoire est l'un des facteurs qui pourraient contribuer à faciliter l'accès à la propriété à des locataires qui n'ont pas actuellement les moyens d'y accéder. Dans ce sens, j'aimerais citer un paragraphe du livre vert, Se loger au Québec, document qui était quand même important à son époque et qui a fait ta somme de la pensée et du gouvernement de l'époque et des intervenants du milieu à ce moment-là. Ce livre vert disait, à ce sujet, que l'encouragement à l'accession à la propriété passe également par une meilleure accessiblité aux différentes formules de propriété. La simplification et l'uniformisation du régime de la copropriété va dans ce sens. (11 h 15)

C'est dans cet esprit que nous avons proposé la conversion des immeubles locatifs comme étant l'une des façons d'accéder à la propriété.

Si vous voulez bien, j'aimerais maintenant poser quelques questions. On ne peut pas éviter de poser des questions sur le problème des réparations majeures. Des réparations majeures, c'est un fait, il y en a.

Je signale, en passant, a la ville, que chaque fois que quelqu'un fait des réparations majeures, cela prend un permis de la ville de Montréal; donc, je ne dirai pas que la ville est complice dans tous les cas, mais elle autorise les réparations, puisqu'il faut un permis. On peut dire qu'il y a deux types de réparations. Il y a des réparations majeures reconnues comme étant nécessaires et urgentes et d'autres réparations qui sont majeures mais non pas nécessaires et urgentes. Certains individus, je dirais même certains groupes, voudraient qu'on ne puisse pas permettre des réparations majeures, è moins qu'elles ne soient urgentes ou nécessaires. On retrouve cela quelque part. Ce n'est pas la position de la ville de Montréal, je ne l'ai pas lue comme telle. Il m'apparaît que, si l'on commence à empêcher des propriétaires de faire des réparations importantes et même majeures è leur immeuble è moins que ce ne soit devenu une urgence nationale, on va se retrouver éventuellement avec un stock locatif en totale décrépitude, puisque, si l'on attend que les toitures commencent à s'écrouler ou qu'on soit dans une situation de catastrophe pour permettre des réparations, on va se retrouver, par exemple, comme en Angleterre, où le stock locatif est totalement déprimé et en très mauvais état, avec les problèmes que cela comporte.

J'aimerais entendre la ville de Montréal au sujet des réparations majeures. Je présume qu'elle n'est pas opposée à ce que le régime permette des réparations majeures, même si elles ne sont pas nécessaires ou urgentes.

M. Gardiner: M. le ministre, si vous me permettez de répondre d'abord à vos commentaires d'ordre général. Nous pensons qu'il y a une différence importante entre généraliser la levée du moratoire, écrire des exceptions et permettre à la régie de statuer plutôt que... Il y a une différence entre cela et faire que le moratoire devienne une loi qui empêche les subdivisions, sauf dans des cas qu'on vous invite à discuter, peut-être avec l'ensemble des municipalités, mais, au moins, avec la ville de Montréal. On en fait mention d'un dans le texte, è savoir: une majorité significative. Peut-être y aura-t-il une question dans ce sens-là, tantôt?

En effet, notre proposition, c'est de dire, fermez les échappatoires immédiatement, la reprise de possession, les travaux majeurs et de concurremment introduire un nouvel article dans le Code civil qui empêche la subdivision en copropriété permettant tout de même de légiférer par le biais de règlement pour des exceptions.

Nous pensons que c'est différent. Cela peut atteindre peut-être les mêmes objectifs, je le souhaite, mais c'est différent. En ce qui concerne les réparations majeures, bien sûr, il y a des réparations majeures à faire à Montréal. Il faut dire que, depuis quelques années, beaucoup de réparations majeures ont été faites dans les duplex, triplex, quadruplex. Il y a peut-être un marché qui existe actuellement dans les maisons d'appartements, dans les nouvelles constructions depuis la deuxième guerre. Il y a des immeubles qui ont besoin de considérations importantes. Nous ne voulons pas et nous ne pensons pas qu'on peut empêcher un propriétaire de faire des travaux majeurs, mais il faudrait tout de même apprivoiser la situation. Ce que nous proposons, c'est une entente entre le propriétaire et le locataire à défaut de quoi, la régie aura à statuer.

La ville de Montréal, dans le passé, non seulement reconnaissait la nécessité de faire des réparations majeures ou que les propriétaires en fassent, mais elle donnait des subventions sans discrimination. Or, nous savons que le gouvernement provincial a accepté, au mois de juin, d'amender la Charte de la ville de Montréal pour que, justement, notre politique de subvention à la restauration soit complémentaire à un programme provincial-fédéral PARCQ actuellement. Loginove aurait été dans le temps ce qui nous permettait de choisir certains types de logement, qui nous permettait de choisir certains types de tenures, qui nous permettait d'étendre vos propres critères de contrôle de loyer suite aux travaux. Nous allons, effectivement, adopter un règlement dans ce sens-là lors du prochain conseil municipal. On ne peut pas l'imposer aux propriétaires. On ne peut pas obliger les propriétaires d'avoir recours à des programmes de subvention. Il faudrait permettre tout de même à l'occupant de questionner la nécessité de ces travaux-là et d'avoir recours à des tiers puisque cette personne pourrait être victime de l'initiative d'un propriétaire.

M. Bourbeau: M. Gardiner, vous parlez justement... On vient de parler des exceptions où l'on pourrait convertir. Vous parlez d'une série de critères dont les propriétaires devraient faire la preuve, avant de pouvoir obtenir la permission de convertir. D'ailleurs, en page 39, vous dites que même les municipalités seraient appelées à travailler de concert avec le gouvernement afin d'identifier les critères permettant la conversion. On aimerait savoir ce que vous avez exactement à l'esprit quand vous parlez de ces critères-là. Pourriez-vous nous énumérer certains de ces critères-là, car c'est effectivement la base de la proposition?

M. Gardiner: La proposition que nous faisons vise à empêcher la subdivision, sauf dans une situation d'exception. Ces exceptions devront être définies par le

gouvernement, mais, on l'espère, en consultation avec les premiers concernés, entre autres, la ville. Nous mentionnons un cas, soit une majorité significative dans un duplex ou dans un triplex, on aura des problèmes, j'en conviens. C'est justement pourquoi on devrait s'asseoir à une même table pour en discuter. Dans notre esprit, quand on est rendu à une situation de duplex, tripex, quadruplex, pour nous, la majorité significative sera dans le cadre d'un projet acceptable et dans l'intérêt de la majorité des occupants. Sachant qu'il y a une ou deux personnes qui ne voudraient pas l'accepter, il faudrait prévoir des compensations pour ces personnes. II faudrait les prévoir, que ce soit un autre logement ou que la compensation soit pécuniaire. On ne voudrait pas que la minorité empêche un accès à la propriété, mais il faut tout de même savoir que cette personne risque d'être lésée dans ses droits d'occuper un même quartier. Il faudrait prévoir des mécanismes. Ce sont des choses sur lesquelles actuellement nous travaillons activement.

On a fait allusion à une considération qui pourrait être celle du taux de vacance dans un secteur donné. Cela pourrait être un critère. Bien sûr, dans la mesure où vous imaginez aller du locatif à la copropriété collective, les coopératives ou les OSBL, ce sont des conversions aussi qu'on pourrait prévoir dans la loi. Elles sont déjà prévues d'ailleurs. Il y a des mécanismes de gré à gré qu'on devrait discuter, mais un gré à gré dans lequel il n'y a pas de harcèlement parce qu'il y a un droit d'occupation. C'est uniquement dans le cas où le cadre juridique permettrait la conversion qu'il y aura discussion sur cette question avec les personnes concernées. Mais les locataires, bien sûr, pourront rester. On change fondamentalement le fardeau, je crois, dans cette situation. Ce sont des exemples, ce sont des hypothèses que nous serions prêts à discuter avec le gouvernement, mais, dans un cadre généralisé de non-subdivision.

M. Bourbeau: Dans votre proposition, vous dites: Dans certains cas, il pourrait y avoir subdivision ou copropriété. On vient de parler des critères. Il pourrait y en avoir un certain nombre de définis à l'avance. Vous dites que, dans ces cas, les propriétaires devraient se présenter à la ville pour obtenir un certificat de convertibilité. Ce certificat serait issu à partir de quoi? Quels seraient vos guides pour émettre un certificat? Est-ce que vous auriez un règlement municipal qui vous autoriserait ou un guide technique? Comment procéderiez-vous pour déterminer qui obtiendrait le certificat de convertibilité?

M. Gardiner: Je pense que cela aussi est à discuter. Bien sûr, on voit un rôle pour la municipalité. Dans un premier temps, on demanderait aux propriétaires de s'adresser à la ville pour voir si la demande dans le secteur, dans le quartier, en ce qui concerne l'immeuble, est conforme aux exceptions qu'on aura définies conjointement et sur lesquelles vous auriez légiféré en temps et lieu. Si les exceptions comportent un rôle pour la municipalité d'étudier la convertibilité de l'immeuble sur le plan physique, c'est un rôle aussi qu'une municipalité comme Montréal, du moins, pourrait jouer. J'imagine que beaucoup de municipalités pourraient le jouer. Finalement, dans notre proposition, on permettrait à la ville d'être partie intéressée a la décision à la régie et d'être en mesure de donner son opinion, son avis sur la situation.

M. Bourbeau: Justement, a ce sujet, supposons qu'un propriétaire ne reçoit pas son certificat de convertibilité de la ville et s'adresse à la régie, puisque vous admettez qu'il pourrait quand même s'adresser à la régie, vous dites, à ce moment: Nous voulons que la ville puisse se faire entendre devant la régie pour faire valoir son point de vue.

M. Gardiner: Oui.

M. Bourbeau: Supposons que, malgré les représentations de la ville, la régie en venait à la conclusion qu'elle devrait quand même autoriser la conversion dans un cas comme cela, dois-je comprendre que la ville accepterait la décision de la régie à ce m ornent-là? (11 h 30)

M. Gardiner: Oui. Je présume que la régie interpréterait bien le règlement qu'on demande au gouvernement de se donner, le règlement qui porterait sur le peu d'exceptions à une loi généralisée de non-subdivision. Dans ce cas qu'on pourrait appeler un "judgement call", la ville se rallierait, bien sûr, à la décision d'un tribunal administratif. Au point de départ, il s'agit de s'entendre sur le règlement qui fait exception à la loi générale.

M. Bourbeau: II nous reste très peu de temps. Malheureusement, le temps passe très vite, je crois qu'il ne reste qu'une couple de minutes. Le président me fait déjà des signes. J'aurais aimé poser bien d'autres questions. De toute façon, je note que, sur l'avis de 24 heures pour visiter les lieux, vous faites une proposition d'identifier le nom du visiteur et cela m'apparaît une bonne suggestion. Je suis d'accord avec le préavis de trois mois dans le cas de réparations majeures.

Quant au droit de préemption, vous voudriez qu'on prolonge de six mois la décision du locataire d'acheter ou de ne pas acheter. Je me demande si c'est réaliste de laisser une vente en suspens pendant six

mois. Cela n'aurait-il pas pour effet de faire tomber les ventes? Un acheteur qui devra attendre six mois pour savoir si son offre d'achat est acceptée parce que, pendant ces six mois, on attend la décision du locataire, cela peut être assez difficile un régime qui retarderait d'aussi longtemps la conclusion d'une vente.

Je vais finalement terminer avec le harcèlement car je vois que notre temps est pratiquement écoulé. Je signalerais simplement que, dans la proposition, nous disons ceci: Il y aurait un guichet unique à la Régie du logement - et nous avons l'intention de l'instituer - où des gens seraient uniquement affectés aux plaintes qui seraient portées par des personnes âgées ou handicapées et ils verraient à leur donner les conseils ou l'information adéquate. Si on se retrouvait dans des cas où du harcèlement était en cause, nous avons déjà eu des discussions avec la Commission des droits de la personne qui possède les pouvoirs d'enquête et même ceux de prendre des procédures. Évidemment, dans ces cas-là, c'est la commission qui prend à son compte les frais de l'enquête et de la procédure. À un moment donné, vous dites que, finalement, les locataires n'ont pas les moyens de débourser les frais judiciaires encourus par ces contestations. Si ce système est mis en place et que c'est la Commission des droits de la personne qui prend à son compte les enquêtes et les poursuites, ne trouvez-vous pas que, finalement, avec une bonne information véhiculée auprès des locataires, ce serait une façon - enfin, ce n'est peut-être pas la perfection même - une amélioration sensible pour tenter de combattre le harcèlement?

M. Gardiner: Oui, dans ce contexte, c'est possible que ce soit plus efficace qu'on l'a peut-être indiqué au document. Toutefois, notre position demeure, et c'est la toile de fond de notre document. Qu'il n'y ait pas de subdivision en copropriété, qu'il n'y ait pas d'éviction par ce fait même, qu'il n'y ait pas de harcèlement par, ce fait même, dans les cas d'exception que l'on voudrait définir avec vous, il y a bien sûr des mesures compensatoires à mettre en place. Dans ce contexte, que le recours soit défrayé ou non par l'État ou par le tribunal, on va le minimiser comme il se doit.

Le Président (M. Rochefort): Merci. Le temps à la disposition du ministre est écoulé. M. le ministre me demande la permission d'ajouter une question et je voudrais savoir s'il y a entente de la part des membres de la commission pour dépasser l'enveloppe de temps que nous nous étions accordée pour nous entretenir avec les représentants de Montréal. M. le député de Shefford.

M. Paré: Ce sera paritaire.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre, le temps que vous prendrez sera ajouté à l'enveloppe de temps de l'Opposition. C'est la condition au consentement de l'Opposition.

M. Bourbeau: Bon, d'accord. Une seule question. II semble y avoir une contradiction. À la page 26. vous dites - et je voulais terminer sur la question du guichet spécial pour les personnes âgées - au deuxième paragraphe: "L'idée de ce guichet spécial pour les personnes âgées ou handicapées est souhaitable..." Mais vous dites également qu'elles ont besoin d'un soutien technique efficace. Or, le guichet spécial vise justement à fournir un soutien technique et c'est indiqué dans la proposition. À la page suivante, au deuxième paragraphe, vous dites: "Cela dit, nous croyons que ni le guichet ni le recours à la Commission des droits de ta personne ne soient des mesures efficaces voire même réalistes". Comment cela peut-il être à la fois non réaliste et souhaitable? Il me semble que, si c'est souhaitable, cela ne peut être non réaliste ou irréaliste. Est-ce qu'il n'y a pas une certaine ambiguïté dans votre position, là-dessus?

M. Gardiner: Nous croyons que ce guichet devrait exister, cela devrait être un service à la Régie du logement. Toutefois, dans un contexte de levée généralisée, nous croyons que ce service ne répondra pas aux besoins appréhendés dans notre rapport. D'une part, c'est un service qui devrait exister et, d'autre part, dans le contexte de la proposition ministérielle, nous ne croyons pas que cela répondrait adéquatement aux besoins.

M. Bourbeau: Vous me dites que c'est souhaitable mais que, dans le contexte d'une levée du moratoire généralisée ou d'une conversion généralisée, le système serait débordé, le guichet serait débordé.

M. Gardiner: C'est cela. Vous comprenez que nous commentons dans la deuxième partie l'ensemble des propositions et nous proposons d'aller de l'avant immédiatement. Nous croyons que beaucoup de ces choses doivent être mises en place, même si nous n'allons pas, tel que nous le proposons, de l'avant sur la généralisation de la subdivision.

M. Bourbeau: Très bien, merci.

Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le ministre. M. le député de Shefford.

M. Paré: Merci, M. le Président, très rapidement afin de laisser la chance à mes

collègues de poser quelques questions. Je voudrais tout d'abord féliciter les autorités municipales pour la présentation de leur mémoire qui est vraiment bien étoffé, avec des chiffres et des perspectives sur des conséquences possibles et probables de la levée du moratoire. Je voudrais féliciter aussi le conseil municipal pour sa préoccupation, depuis moins d'un an qu'il est au pouvoir, en matière d'habitation. On a vu des documents sur lesquels on s'est penché longuement parce que cela relève d'un souci vraiment sérieux de s'occuper d'habitation et surtout de consulter la population, parce que le conseil actuel a rencontré les gens des quartiers, a élaboré même des stratégies, a pris des positions face à la levée du moratoire qui étaient déjà connues et qu'on retrouve, aujourd'hui, d'une façon plus précise et plus concise.

Donc, félicitations pour votre préoccupation envers l'habitation et pour votre mémoire. Ce que je constate, c'est qu'effectivement votre mémoire est clair dans le sens qu'il va totalement à l'encontre de la proposition, Lever le du moratoire: une décision qui s'impose, puisque, a la page 12, on y retrouve la possibilité de permettre que la conversion en copropriété divise soit globalement interdite avec, en corollaire, des mesures d'exception qui permettront la conversion à certaines conditions. C'est tout à fait l'inverse, c'est non, sauf dans certains cas. Je vais en profiter pour vous dire jusqu'à quel point il peut y avoir d'excellents exemples d'exceptions. Dans Milton Park, nous avons une copropriété qui est une exception; les copropriétaires sont des coopératives et des organismes sans but lucratif. Donc, c'est un exemple qui pourrait être retenu en fonction de la proposition de la ville de Montréal. C'est totalement a l'inverse de la proposition puisque, entre tout permettre et avoir certaines mesures de précaution pour les locataires et dire: C'est défendu, sauf lorsque c'est justifiable et que la ville peut intervenir... Connaissant maintenant, à la suite des documents que j'ai lus et de votre présentation, non seulement l'intérêt que vous avez pour l'habitation mais la connaissance approfondie du dossier de Montréal, je dois vous dire, dans le cas de Montréal spécifiquement, que je n'aurais pas d'objection à ce qu'on vous délègue effectivement l'administration en très grande partie d'une politique d'habitation sur laquelle il y aurait interdiction, mais des exceptions sur lesquelles vous auriez à intervenir.

J'ai une seule question pour le moment et, si j'ai le temps, j'y reviendrai. Vous avez beaucoup de craintes sur la levée du moratoire quant à la psychose que cela pourrait entraîner. On fait des comparaisons avec les États-Unis ou ailleurs, mais on les fait toujours de façon globale, alors que vous avez soulevé quelque chose qui est fondamental, c'est qu'il faut comparer des choses semblables, donc, des quartiers. On connaît déjà ce qui est arrivé entre autres sur le Plateau Mont-Royal et ce qui se passe de plus en plus dans d'autres quartiers, Pointe Saint-Charles ou centre sud. J'aimerais très rapidement que vous nous disiez, selon vous, si on levait le moratoire, tel qu'il est proposé dans le document du ministre, quelles seraient les conséquences visibles, très rapidement, à Montréal?

M. Gardiner: Vous comprendriez que notre position découle de l'application d'un règlement temporaire depuis presque douze ans maintenant. Notre évaluation de cette situation est qu'une situation généralisée même assortie de balises n'est pas un contexte qu'on a connu à Montréal sauf pour une période en 1975. Dans ce contexte, votre question est un peu hypothétique. Je pense qu'on pourrait, selon les expériences connues dans d'autres villes mais surtout à Montréal dans le contexte d'un moratoire inefficace, faire des extrapolations. Je pense qu'il y aurait recours, bien sûr, à la vente en subdivision dans les duplex, triplex et quadruplex qui sont très populaires pour une population généralement non résidente des quartiers visés, chose qui s'est faite dans l'indivision pendant quatre ou cinq ans; normalement, cela irait dans ce sens.

Il y aurait, quant à moi, ruée sur les cinq et plus qui y ont généralement échappé ou pour lesquels on n'a pas trouvé d'échappatoires efficaces pendant l'existence du moratoire. C'est généralement les banques, quant à moi, qui appliquaient te moratoire et non pas le règlement, parce qu'il y avait hésitation à financer l'exercice de conversion en indivision dans les cinq et plus. On pouvait, mais on ne voulait pas. J'ai vécu dans mon quartier tout de même des phénomènes de société en commandite dans des immeubles de cinq et plus. Je pense qu'il y aurait une ruée vers cela.

Il faut savoir, par exemple, que les personnes qu'on a chassées des duplex, triplex et quadruplex, qui n'ont pas quitté leur quartier, ont accepté de vivre dans moins d'espace et dans des bâtiments verticaux. C'est le rôle qu'y joue le logement locatif de cinq et plus ou les gratte-ciel aujourd'hui. C'est de cette façon que les gens ont pu rester dans leur quartier. Ce sont des immeubles qui ont été construits en copropriété divise mais qu'on n'a pas pu toucher dans le contexte actuel du moratoire. J'ai beaucoup, et beaucoup, le sentiment sinon la crainte que ce serait une cible importante, un gratte-ciel dans le centre-ville, avec les perspectives de vue, qu'on peut vendre en condominiums mais qui est actuellement en location, ce qui a permis à des gens de rester dans le quartier même

s'ils ont été chassés de leur maison en rangée et n'ont pas pu en trouver d'autres dans le secteur. Je pense que cela peut être une nouvelle cible. C'est tout de même hypothétique. Nous faisons référence au harcèlement, aux personnes exerçant ces droits limités d'occupation et à leur situation précaire. Nous parlons de la deuxième génération et la mixité de la première génération et de la deuxième générations, les droits de l'un par rapport aux droits de l'autre, des propriétaires qui vivront dans un immeuble avec la première génération et la deuxième génération. Nous recommandons fortement au gouvernement que la situation soit "clean", qu'il n'y ait pas de conversion, sauf dans des cas d'exception a définir. Il y a des exceptions, nous le croyons, qui seront acceptables pour tous les intervenants. Merci.

M. Paré: Oui. Juste un petit commentaire très rapide. Vous demandez que cela se fasse par loi mais ce serait finalement l'équivalent du maintien du moratoire, et que ce soit efficace et respecté. Pour que ce soit - excusez l'expression, mais vous l'avez utilisée - "clean", qu'on enlève le mot "moratoire" et qu'on y aille d'une façon législative. (11 h 45)

M. Gardiner: II y a un droit de convertir aujourd'hui et un règlement qui empêche qu'on exerce ce droit, bien que la situation qu'on a connue, ce soient les échappatoires qui ont fait le dommage en termes d'éviction dans la zone centrale de Montréal, pour ne pas parler d'autres secteurs. Nous proposons qu'on remette aux oubliettes la question d'un règlement temporaire qui empêche un droit et que l'on regarde le droit qui existe dans le Code civil. On propose que ce droit soit enlevé sauf dans le cas d'exceptions à définir. M. le ministre a indiqué qu'une discussion en ce sens serait acceptable.

M. Paré: Merci.

Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le député. Si vous le permettez j'aurais aussi deux questions à poser aux représentants de la ville de Montréal. Mon temps sera pris sur le temps de l'Opposition.

Dans un premier temps, très souvent, et cela a été le cas dans l'intervention d'ouverture du ministre, on nous présente un peu, nous, les Québécois et particulièrement les Montréalais, comme étant l'un des rares, sinon l'unique, cas d'exception qui restent dans le monde occidental organisé, auquel on est habitué de se référer: l'ensemble canadien, les États-Unis, la France, l'Angleterre et ailleurs, a avoir des règles qui empêchent la conversion d'immeubles locatifs en copropriété. C'est un élément, je n'irais pas jusqu'à dire un argument mis de l'avant comme un argument majeur, mais c'est un élément qui est souvent cité dans le débat pour situer l'ensemble de l'intervention gouvernementale. J'aimerais savoir justement de la part des autorités municipales de Montréal, et, en même temps, des responsables des questions d'habitation à Montréal! comment réagissez-vous quand vous entendez cet argument cité souvent, a savoir qu'il reste à peu près seulement ici, au Québec et particulièrement à Montréal, où c'est impossible de le faire, puisqu'ailleurs, selon les évaluations qu'on entend de part et d'autre selon le cas, souvent on nous dit: Cela s'est fait avec satisfaction, donc, pourquoi ne pas le faire ici? Comment réagissez-vous en tant qu'administration municipale de Montréal devant un tel argument? Cela vous fait quoi de vous faire dire qu'il reste vous autres comme exception?

M. Gardiner: La ville de Montréal comme exception?

Le Président (M. Rochefort): Le

Québec, mais compte tenu de l'importance du nombre de locataires à Montréal.

M. Gardiner: Je pense que votre document, quand vous étiez ministre, M. Rochefort, et le présent document indiquent qu'en effet, pour la province de Québec et la province de l'Ontario - on regarde de ce côté, vers l'Ouest, pour faire des comparaisons - le pourcentage de propriétaires ou de locataires sont semblables dans les deux provinces. C'est 52 %, 53%. C'est peut-être 47 %. C'est l'un ou l'autre. Les pourcentages sont très semblables pour les deux. Montréal est un peu différent.

Le Président (M. Rochefort)s Mais cela dit... Allez-y.

M. Gardiner: Je dis qu'en ce qui concerne notre administration, le droit à l'occupation est la question fondamentale: le droit pour les gens de vivre là où ils ont choisi de vivre, dans le logement qu'ils ont choisi d'occuper et dans le quartier qu'ils ont choisi. Ce n'est pas une proposition non plus qui empêche, dans notre esprit, la mobilité souhaitée. Il n'est pas seulement question d'échanger le logement locatif qui, historiquement, est toujours maintenu en location contre un autre logement en location qui est toujours maintenu dans cette situation. Je pense que, de notre côté, on aimerait effectivement que plus de personnes aient une mainmise sur la propriété ou deviennent propriétaires. Je sais, pour l'avoir étudié du point de vue historique, qu'en 1945-1946, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, 90 % des Montréalais étaient des locataires et que, 40 ans plus tard, 78 % le

sont. C'est douze points de différence et cela après des investissements de millions et de millions de dollars directement dans des soi-disant programmes d'accès a la propriété qui ont développé nos banlieues plutôt que la ville de Montréal, pour ne pas parler des abris fiscaux. Alors, il faut dire que le mouvement est très lent. Le droit à l'occupation est une chose importante. Nous sommes prêts et nous le faisons actuellement.

M. le ministre et le critique de l'Opposition nous ont tous deux félicités pour la qualité du rapport. Il faut dire que ce sont des personnes de nos services des modules d'habitation et d'autres qui ont préparé ce document. Ces personnes vont nous préparer aussi ce que nous aimerions appeler un programme intégré en matière d'habitation, la conversion étant un élément émotif, un élément important et même un élément d'actualité, mais un élément tout de même parmi beaucoup d'autres considérations. Nous allons nous intéresser è la question de l'accès à la propriété. En ce qui me concerne, l'accès peut se faire de gré à gré en respectant les personnes. On peut introduire la notion de fonds de compensation pour que certaines personnes accèdent à la propriété et que d'autres soient compensées dans cette situation. 11 y a tout de même des réalisations à but non lucratif qui se faisaient à un certain rythme - aujourd'hui, on se demande si le rythme sera maintenu - qu'on appelle des coopératives et des OSBL. Il y a l'ouverture qu'on a mentionnée tantôt sur une base hypothétique, qui consiste à considérer les taux de vacance pour permettre certaines conversions, mais, c'est un objectif qu'on voudrait poursuivre. Je pense qu'il faudrait qu'on aille du côté ministériel et de notre côté pour mettre sur pied, une fois pour toutes, un programme d'accès - c'est là qu'on devrait généraliser - généralisé à la propriété. Là-dessus, on est ouverts. Vu que le rôle de la redistribution de la richesse dans notre société appartient au gouvernement supérieur, nous sommes prêts à développer des idées et nous asseoir avec vous pour tenter de les concrétiser.

Le Président (M. Rochefort): Merci. J'ai une deuxième question qui a trait a un sujet qui a déjà été abordé depuis que vous avez commencé votre présentation. Cela a trait à toute cette question de la protection du parc locatif. On sait que c'est une des conséquences importantes qui est souvent soulevée, c'est-à-dire l'effet direct qu'aurait, sur le parc de logement, donc sur le parc locatif, la levée du moratoire, soit la réduction du nombre de logements sous forme locative, lesquels seraient réservés de plus en plus aux citoyens les plus démunis de notre société. Vous le soulevez dans votre mémoire. Le ministre vous a rappelé, en réaction à cet élément que vous avez abordé, la recommandation contenue dans son livre blanc, à la page 57, qui est justement, et je la relis: "Si le suivi du rythme de conversion ou l'arrivée de problèmes liés à des conjonctures économiques et sociales devaient révéler des tensions dans certains segments du marché locatif, il serait possible d'intervenir rapidement afin de limiter ou d'interdire la conversion dans ces secteurs." Le ministre a resservi cet argument devant une des objections, soit la protection du parc de logements locatif que vous aviez mis de l'avant dans votre mémoire. J'aimerais savoir si, pour vous, la réponse qu'on retrouve dans le document gouvernemental à la page 57, et que je viens de relire est suffisante pour nous donner toutes les garanties quant à une protection du parc de logements locatif dans l'hypothèse de la levée du moratoire sur la conversion des immeubles locatifs en copropriété.

M. Gardiner: Nous pensons qu'il faut donner un message clair et sans équivoque disant que le parc résidentiel ne doit pas être subdivisé et mis en vente appartement par appartement ou étage par étage et qu'on définira les quelques exceptions à ce règlement qui permettraient aux tribunaux administratifs, en temps et lieu, de statuer sur ma demande, à savoir si elle correspond à l'exception oui ou non, tout en permettant, selon notre suggestion, l'intervention et un rôle de premier intéressé à la ville de Montréal. Nous croyons que l'inverse, soit généraliser le droit et baliser son application, ferait en sorte qu'on serait appelé constamment à légiférer sur l'application la plus large possible par les premiers intéressés à la conversion, à savoir le propriétaire, le développeur, le promoteur, et à tenter de voir si cela est abusif ou respecte les balises qu'on aurait mises en place. C'est une situation qui est, pour nous, très différente de la proposition qu'on met sur la table bien que les objectifs de l'un et de l'autre soient les mêmes: protéger les locataires, protéger le parc locatif, donner des droits accrus aux occupants.

Les objectifs pourraient être semblables mais nous croyons sincèrement qu'il y a une différence importante dans notre approche et qui est dans l'intérêt de l'ensemble des occupants des logements à Montréal et, au premier chef, des locataires.

Le Président (M. Roehefort): Je vous remercie. Maintenant, je voudrais reconnaître Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Oui, merci, M. le Président. Je sais que le député de Saint-Jacques et quelques autres de mes collègues veulent aussi intervenir.

Je veux, comme députée de Maisonneuve, députée du bas de la ville et députée d'un quartier considéré comme faisant partie des quartiers centraux dont on parle et aussi comme Montréalaise vous dire ma plus vive et ma plus grande satisfaction à l'égard du mémoire que vous avez déposé. J'en ai pris connaissance ce matin évidemment, puisque, un peu comme toutes les personnes ici présentes à cette commission parlementaire ainsi que les membres de la commission, nous en avons pris connaissance en même temps au moment où vous en faisiez la lecture.

Je dois vous dire que je n'avais pas vraiment d'appréhension. Je me disais bien que l'administration municipale actuelle allait prendre partie en faveur des citoyens les plus vulnérables et certainement ceux qui, de condition modeste, habitent les quartiers de Montréal. Je dois vous dire que votre mémoire m'est apparu vraiment d'une expertise extrêmement éloquente. La démonstration que vous en avez fait notamment nous amène à admettre que reconnaître un droit n'en donne pas les conditions d'exercice. Parmi les différences entre la position que vous nous exprimez ce matin et celle contenue dans ce document, fondamentalement, je pense qu'il y a une question d'objectif. Vous dites: L'objectif, c'est l'amélioration des conditions d'habitation quel qu'en soit le mode d'occupation. Tandis que, dans ce document, l'objectif est dit comme étant l'accès à la propriété, un peu quelles qu'en soient les conséquences. Je pense que l'élément le plus majeur, c'est lorsque vous nous dites: C'est à cause d'un handicap financier s'il n'y a pas le passage du locatif à la propriété. L'obstacle majeur est d'abord financier avant d'être juridique. Je reconnais également comme modification, je pense - je ne sais si vous interviendrez sur ces constatations que je fais de votre mémoire - qu'il n'y a pas simplement une différence pour ce qui est des ojbectifs a poursuivre mais aussi des attitudes. Immédiatement après votre présentation le ministre a dit: Nous avons prévu, en page 57, que, s'il y avait des problèmes, nous aviserions. Alors, son attitude est: Attendons les problèmes, nous aviserons. Votre attitude est: Prévoyons les problèmes, nous les éviterons. Je pense que c'est absolument fondamental.

Je note également, comme mesure importante, que vous souhaitez vraiment qu'il y ait un renversement du fardeau de la preuve dans bien des occasions pour que cela ne repose pas toujours sur les épaules du locataire et que les perspectives d'une victoire à ta Régie du logement ne soient pas aléatoires au risque des représailles qu'elles peuvent entraîner, d'une part; d'autre part, je pense que l'élément important que je retiens, c'est que vous souhaitez que le gouvernement agisse législativement en faveur de l'encadrement des réparations majeures immédiatement sans attendre nécessairement la politique globale en matière de subdivision ou en matière de droit de conversion. C'est parmi les éléments-Un élément m'a étonnée. Je vous le cite tout de suite. C'est votre suggestion. Je crois qu'on la retrouve à la page 31 ou 33 de votre mémoire. Elle concerne la relocalisation des personnes handicapées ou des personnes âgées, dans les quartiers, par les propriétaires investisseurs qui auraient à les déloger. La difficulté que cela représente, dans les quartiers centraux, c'est qu'il n'y a plus de terrains. Comment appliquer une recommandation comme celle-là? Vous dites, avec raison, que si l'on compare avec ce qui s'est fait... Moi aussi, j'insiste, comme le ministre l'a fait d'ailleurs, pour dire combien non seulement la conceptualisation de votre mémoire est remarquable, mais la formulation aussi. Vous insistez pour dire que la conversion se fait de façon accélérée dans certains secteurs. Cela s'est passé ailleurs et cela aurait toutes les chances, comme scénario, de se passer ici. Cela va se passer dans des quartiers centraux où, justement, il n'y a pas de terrains. Alors, une recommandation comme celle que l'on retrouve je ne sais plus à quelle page exactement, je pense que c'est à la fin dans vos recommandations... Oui, c'est à la page 27. Comme solution envisageable, ce serait d'imposer ...Oui, je termine pour que vous puissiez... (12 heures)

Le Président (M. Rochefort): M. Gardiner, peut-être que vous avez un commentaire à faire à la suite des commentaires de Mme la députée de Maisonneuve? Ce sera d'ailleurs, je vous l'indique immédiatement, le commentaire de conclusion.

M. Gardiner: Ce serait... D'accord, cela sert de conclusion?

Le Président (M. Rochefort): Bien, de conclusion aux échanges avec l'Opposition. Par la suite, on vous permettra de prendre quelques...

M. Gardiner: D'abord, c'est une proposition dans un cas d'exception où la conversion serait permise et ce serait une des obligations à respecter, je crois, bien que je sache personnellement que ce n'est pas nécessairement facile de le faire. Là où cela devrait se faire, je pense que c'est au promoteur, au développeur, de voir à ce que ce critère soit réalisé, quitte à ce que la conversion permise ne soit pas réalisable. Je dois dire... Est-ce que c'est...

Le Président (M. Rochefort): On va vous redonner quelques minutes tantôt, c'était par rapport à la question de Mme la députée de Maisonneuve. Cela va? Or donc, le temps écoulé à la disposition de l'Opposition comme au parti ministériel est expiré, sur ce, M. le ministre, vous avez un mot de conclusion?

M. Bourbeau: Oui, c'est simplement pour, à nouveau, remercier la ville de Montréal de sa contribution substantielle au débat que nous entreprenons aujourd'hui et pour l'assurer que les propos tenus par ses représentants et les écrits qu'ils nous laissent seront considérés très attentivement par le gouvernement et par le ministre dans l'élaboration de la proposition gouvermentale qui sera éventuellement - probablement, je présume - soumise à l'Assemblée nationale cet automne.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Shefford.

M. Paré: Oui, seulement aussi pour remercier les représentants de la ville de Montréal pour leur présence ici, ce matin, afin d'échanger des propos avec nous et aussi pour la présentation et la qualité de leur mémoire.

Le Président (M. Rochefort): M.

Fainstat.

M. Fainstat: Je veux remercier encore tous les membres de la commission pour leur écoute attentive et efficace. Je veux simplement répéter que nous sommes toujours disponibles encore. Nos fonctionnaires et nos spécialistes sont toujours disposés à travailler de concert avec les fonctionnaires du gouvernement. Vous pourrez compter sur notre coopération, parce que nous cherchons une solution aux problèmes que nous avons soulevés. Nous avons les mêmes buts, il s'agit de trouver la façon la plus efficace, la plus humaine et la plus juste afin d'arriver a ces mêmes buts que nous partageons.

Le Président (M. Rochefort): À mon tour, je veux vous remercier, M. Fainstat, M. Gardiner et M. Lavallée, de votre participation à nos travaux et de votre contribution substantielle à l'information des membres de la commission. Merci.

Sans plus tarder, j'aimerais inviter maintenant les représentants de l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec à se présenter devant nous. M. Beaudoin Rousseau, nous vous souhaitons la bienvenue parmi nous. Je vous demanderais, pour l'information des membres de la commission et pour le service de transcription de nos échanges, de nous présenter les personnes qui vous accompagnent. Par la suite, vous aurez une période de quinze minutes pour nous faire la présentation des points de vue de votre association face au dossier qui nous réunit ce matin.

Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec

M. Beaudoin Rousseau (Omer): Merci, M. le Président. MM. les membres de cette commission, M. le ministre, M. le critique de l'Opposition, contrairement à la ville de Montréal, je pense que nous avons besoin de présenter un peu notre organisme. Il s'agit de l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, un organisme sans but lucratif qui représente plus de 7700 entreprises réparties à travers le Québec, dont treize régionales qui portent le nom de APCHQ. D'autres associations sont affiliées, notamment la Fédération provinciale du bâtiment et de l'habitation du Québec de même que la Société québécoise des manufacturiers d'habitations.

Essentiellement, l'association provinciale est un organisme de représentation et aussi de services. Or, concernant les services, je voudrais simplement dire quelques mots, à savoir que nous avons institué, depuis 1976, la Garantie des maisons neuves et qu'à ce chapitre, nous avons enregistré plus de 125 000 unités d'habitation. Et, aussi, la preuve que nous sommes un organisme représentatif d'environ 80 % de tout ce qui se fait comme logement au Québec, dans le cadre de Corvée-habitation, l'APCHQ a enregistré à son programme 95 % des unités.

Cela dit, d'ailleurs, une première au Canada a été introduite par l'APCHQ, en 1985, par l'instauration du programme Garantie rénovation. Donc, je pense que c'est un mérite, en ce qui concerne l'organisation, dans le but de mieux protéger le consommateur qui transige avec des entrepreneurs en construction.

Enfin, je dirai aussi que l'APCHQ s'intéresse à la recherche puisque, actuellement, elle administre le programme R-2000, c'est-à-dire des maisons à haut rendement énergétique. Alors, vous comprendrez que les raisons qui nous motivent sont que, tout simplement, les premiers intéressés dans la conversion ou la levée du moratoire sont aussi les entrepreneurs qui auront à exécuter les travaux dans l'industrie de la construction.

Alors, sur ce, je vous présente, à ma droite, M. Serge Crochetière qui est conseiller principal de l'organisation et M. Gilles Doyon. Je laisse le soin à M. Serge Crochetière de présenter les prises de position de l'organisme et de les commenter. Alors, M. Crochetière.

Le Président (M. Rochefort): M.

Crochetière, en vous rappelant que vous avez une quinzaine de minutes.

M. Crochetière (Serge): Oui, M. le Président, M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, comme je n'ai que quinze minutes, je ne procéderai pas è la lecture, je vais seulement vous expliquer, dans un premier temps, comment on a abordé le dossier. Le document de consultation, quant à nous, était un énoncé de principe è l'effet qu'on voulait lever le moratoire tout en conservant trois grands objectifs, c'est-à-dire, premièrement, la protection des locataires, avec deux volets: le droit au maintien dans les lieux et le droit de préemption; deuxièmement, le droit des acquéreurs subséquents et, troisièmement, les mécanismes d'ajustement ou d'assouplissement.

Notre mémoire s'est basé un peu là-dessus. Au tout début, en termes d'appréciation quant au document qui nous a été soumis, je dois dire que la position de principe de l'association et je le répète -elle a été, dans le passé, plusieurs fois exprimée - c'est que nous sommes pour la levée du moratoire parce que nous avons toujours favorisé l'accession à la propriété sous toutes ses formes. Cependant, quant à la présentation du document de consultation, nous avons émis certaines réserves relativement aux statistiques, études qui y étaient démontrées parce que, notamment en ce qui a trait au service économique, on n'arrivait pas è y retrouver des garanties de scénarios futurs qui pourraient se réaliser après la levée du moratoire. Quant à un second aspect du document de présentation, évidemment, il y avait l'expression de la volonté de lever le moratoire, mais pour ce qui est des modalités concrètes, on dit qu'il faudrait qu'il y ait un texte législatif. Nous sommes d'autant plus persuadés de cela après avoir entendu les autorités de la ville de Montréal. Si jamais le législateur allait modifier les textes, notamment en allant jusqu'au Code civil, il faudrait absolument qu'il y ait une autre commission parce que certaines des positions qui pourraient y être reprises auraient un effet direct sur la construction. Notamment, si on touche à tout l'aspect des réparations majeures, il est d'une importance primordiale pour les entrepreneurs de savoir dans quel contexte cela peut se faire.

Alors, c'est pour ce qui est des aspects généraux de la perception du document de consultation. Maintenant, quant au but que tente de rejoindre le document c'est-à-dire, en premier lieu, la protection des locataires. La première mesure qui est exprimée, c'est le droit au maintien dans les lieux. Or, le droit au maintien dans les lieux pour une période illimitée, une protection blindée, nous devons malheureusement vous dire qu'on n'y croit pas. Je ne sais pas si on peut dire qu'on fait "confiance" - entre guillemets -dans l'esprit d'initiative ou l'imagination des promoteurs ou des spéculateurs, mais l'expérience nous a prouvé qu'il est à peu près impensable et impossible d'avoir un texte législatif qui pourrait faire face à toutes les situations sans, d'autre part, créer des iniquités.

Alors, on dit: Plutôt que de tenter l'impossible, notre approche serait d'établir des règles du jeu plus brèves dans le temps mais plus sécurisantes pour les locataires et aussi pour les investisseurs, afin qu'ils sachent à l'avance quelles sont les règles du jeu. L'effet aussi du droit au maintien dans les lieux pour une période illimitée, quant à nous, là-dessus, nous rejoignons les éléments avancés par la ville de Montréal. Nous croyons sincèrement que cela risque d'inciter davantage de propriétaires à faire usage de la transformation.

Par exemple, si, personnellement, j'avais quelqu'un qui me consultait à le suite de l'adoption du document tel qu'il a été présenté dans les règlements, je lui dirais: Écoute, tu as un immeuble de six logements sur le Plateau Mont-Royal, procède immédiatement à la transformation en copropriété, cela ne te coûte presque rien et les avantages sont énormes. Tu as un droit acquis. Si, éventuellement, tes taux d'intérêt augmentent, tu pourras vendre un seut des logements s'il est libéré et le droit de préemption dans ce contexte est beaucoup moins grand à supporter. Or, nous croyons vraiment que cela pourrait avoir comme effet non pas de retarder, mais d'inciter à une plus grande conversion, et pas nécessairement pour expulser les locataires immédiatement. Mais uniquement, en termes statistiques, on pourrait avoir plus de conversions que ce qu'on pourrait prévoir.

Dans un deuxième temps, nous croyons que cela ralentirait l'incitation des propriétaires à faire des réparations et, dans certains cas, troisièmement, cela pourrait même les inciter à attendre des dégradations plus grandes pour qu'on puisse considérer que les travaux sont urgents et donc, forcer les gens à les faire. Évidemment, je ne suis pas là pour commenter le mémoire de la ville de Montréal, mais par rapport aux propositions qu'elle a avancées, ce serait très risqué d'interdire ou d'amener des mesures de contrainte quant aux travaux à apporter sur les immeubles, parce que cela pourrait inciter les propriétaires à laisser l'immeuble se dégrader pour être forcé, finalement, par la ville elle-même, qui enverrait des avis pour que soient faits ces travaux qu'elle aurait refusés deux ans auparavant. Nous ne croyons pas qu'il soit judicieux d'intervenir de cette façon.

Parce que nous ne croyons pas à une protection blindée, nous disons: Pourquoi ne

pas avoir une approche pragmatique qui empêcherait un trop grand nombre d'individus de changer la vocation de leur immeuble pour en faire des copropriétés divises uniquement pour attendre qu'un jour, cela puisse être plus payant pour eux. Mettons des conditions qui satisfassent le propriétaire promoteur, c'est-à-dire qu'il connaisse exactement quelles sont les règles du jeu, qu'il établisse ou qu'il puisse établir d'avance quels sont ses risques financiers et quelle est la rentabilité qu'il pourra en retirer tout en nous assurant que les locataires pourront être prévenus à l'avance et en retirer une compensation. Je dois ici établir que, quant à nous, le droit au maintien dans les lieux est un droit qui existe mais qui ne prime pas le droit de propriété. Le droit au maintien dans les lieux ne doit pas non plus, sous cette forme, devenir un droit d'appropriation des immeubles.

Le scénario que nous avons envisagé est d'établir un délai de deux ans qui gèlerait toute conversion et qui aurait pour mérite, dès maintenant, d'empêcher une conversion pour les deux prochaines années - on verra tantôt les mécanismes d'assouplissement - et de permettre au marché de s'ajuster. Dans un premier temps, quiconque voudrait procéder à une transformation devrait envoyer un avis à tous ses locataires et, subséquemrnent, déposer sa requête pour demander l'autorisation en conversion auprès de la Régie du logement. Cette requête devrait être assortie de la liste exhaustive des locataires occupants, au moment de la demande de conversion, ainsi que de la copie des baux. Deuxièmement, nous préconisons que le promoteur propriétaire soit tenu de payer une compensation équivalent à trois mois de loyer et qu'il fournisse caution à la régie de pouvoir payer ce montant. La raison pour laquelle nous préconisons trois mois, c'est que nous demandons aussi que, pendant les deux années d'attente pour la transformation, il n'y ait aucune hausse de loyer. Alors, nous avons considéré que trois mois capitalisés devraient normalement équivaloir à peu près à l'augmentation que le locataire devrait avoir à subir lorsqu'il déménagera dans trois ans. Entre-temps, il ne subirait aucune augmentation pendant deux ans. Cela fait trois ans à la charge du promoteur propriétaire pour s'assurer que le locataire n'aura pas à subir des hausses. En plus, il devra lui défrayer ses coûts de déménagement. Trois ans, cela nous apparaît une mesure juste, parce que nous ne considérons pas non plus que le propriétaire doive supporter seul la charge sociale de gens à revenu moins important et nous ne discutons pas du cas des gens qui, eux, avec un revenu suffisamment important, choisissent de demeurer locataires. C'est un autre débat que celui-là. (12 h 15)

Après trois ans, si l'État considère qu'on doive aider ces gens-là, l'aide au maintien dans les lieux devrait plutôt se traduire par une aide à la personne, pour aider les défavorisés à payer. Ce n'est pas au propriétaire à supporter indéfiniment la charge de locataires, qui eux ne sont pas capables de suivre le cours économique de la location dans l'immeuble qu'il possède. Or, c'est la démarche que nous préconisons. De plus, évidemment, il y aura un droit de préemption pour le locataire occupant dont le nom aurait été dénoncé à la régie et il pourrait aussi, ce même locataire occupant, se prévaloir de l'indemnité de trois mots, à titre de dépôt, s'il voulait acheter l'unité transformée en copropriété qu'il occupe.

C'est, encore une fois, l'attitude ou la solution que nous considérons la plus juste et la plus déterminante dans les circonstances. Cependant, si le législateur passait outre à notre approche quant aux recommandations contenues dans le document, on demanderait de clarifier certains points particuliers, notamment, le délai de trois ans après un premier refus. S'il n'y a pas eu de premier refus, à partir de quand les trois ans seront-ils calculés? Est-ce que cela sera à compter de la demande de transformation ou à compter des travaux? Le texte est ambigu à cet égard.

D'autre part, il faudrait aussi interdire au locataire occupant de céder son bail. Je parle de cession de bail et non pas de sous-location. La loi prévoit des cessions de bail actuellement et il ne faudrait pas que, par ce biais-là, les locataires spéculent sur le droit au maintien dans les lieux et s'enrichissent aux dépens du propriétaire. Ce qu'on voudrait interdire à l'un ne devrait pas bénéficier à l'autre, en contrepartie. Enfin, il faudrait s'assurer que toutes les dispositions concernant la copropriété divise, la copropriété indivise, la gestion et l'administration des immeubles prévues dans le projet de loi 20 qui a été adopté en deuxième lecture et dont on ignore désormais quel sera le sort, il faudrait s'assurer, dis-je, que les dispositions au projet de loi 20 soient traitées en fonction de la vocation ou de l'orientation qu'on va donner à cette nouvelle loi.

Enfin, concernant la protection des locataires, si on entend modifier les méthodes d'évaluation foncière pour donner des avantages fiscaux, il faut faire attention que cela ne vienne pas perturber le marché de la construction neuve, c'est-à-dire, avoir un système de deux poids, deux mesures, un système fiscal inéquitable pourrait être désastreux dans certaines circonstances pour la construction neuve. Alors, il faudrait absolument en tenir compte si on voulait introduire des méthodes d'évaluation particulières dans ces cas-là.

Ce sont là nos recommandations et nos

commentaires concernant la protection des locataires.

Quant à la protection des acquéreurs, ici on va peut-être être un peu prétentieux ou vous paraître prétentieux, mais nous considérons que, quant à la protection des acheteurs, nous sommes ceux qui avons la meilleure expérience dans ce domaine et les recommandations du document de consultation, M. le ministre, sont inapplicables.

Je vais vous donner un exemple. Vous avez une grosse conciergerie de 150 unités de logements, prenons le cas de la place Simpson, au centre-ville, qui n'est pas encore vendue. Cela fait quatre ans qu'il y a eu un gel, les ventes se font seulement lorsque les locataires libèrent. Votre expertise, celle qui a été faite au moment de la demande de modifications, a été faite il y a cinq ans. Quant aux vices cachés, ceux qui vont avoir été acceptés, ce qu'il y aurait ou ce qu'il n'y aurait pas eu dans l'expertise, est-ce que cela va bénéficier à ceux qui vont acheter six ans plus tard? Comment va-t-on traiter le droit de gestion? Qui sera l'administrateur? Est-ce que ce sera le promoteur qui va continuer? Alors, je vous le dis, cela risque de créer plus de problèmes.

Nos recommandations à ce sujet sont, dans un premier temps, qu'il y ait obligation tout simplement de fournir un plan du gros oeuvre et, dans un second temps, qu'il y ait dans les cas de transformation, obligation de fournir la garantie d'un programme de rénovation, dont celui de l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec.

Enfin, quant aux mécanismes d'assouplissement - puisqu'on me fait signe que mon temps achève - nous parlerons de la protection du parc locatif. Or, nous considérons que, évidemment, cela prend des mécanismes d'assouplissement. Alors, on dit: Pourquoi ne pas donner aux municipalités le pouvoir d'établir des zones d'interventions privilégiées sur chacun de leur territoire ainsi que des quotas alliés à notre proposition, ce qui prendrait deux ans avant de voir les premières conversions? Chacune des municipalités pourrait définir sa politique sur son territoire et adopter les mesures appropriées pour permettre ou limiter la-conversion. En gros, ce sont les positions exprimées dans notre mémoire. Merci.

Le Président (M. Rochefort): M.

Crochetière, je vous remercie de votre présentation. M. le ministre pour une quinzaine de minutes.

M. Bourbeau: M. le Président, j'ai l'un de mes collègues qui va vous poser des questions. Je voudrais simplement faire deux ou trois remarques pour tenter d'éclaircir le dossier le plus possible. Alors, l'interdiction qui serait faite à un propriétaire de demander une nouvelle autorisation au cas où il y aurait un refus de la part de la Régie du logement, c'est de trois ans à partir de la date du refus de la Régie du logement, non pas de la date des travaux. Par exemple, si un propriétaire a effectué des réparations majeures et a évincé des locataires dans le but de préparer l'immeuble à la conversion, donc, à ce moment, si la Régie du logement en vient à la conclusion que c'est ce qu'il a fait, elle statuerait son refus et ce refus entraînerait l'impossibilité de convertir pour trois ans à partir de ce moment. C'est la proposition gouvernementale.

M. Crochetière: C'est de l'intérêt de tout le monde d'aller demander le plus rapidement possible sa conversion pour pouvoir bénéficier du trois ans.

M. Bourbeau: Non. C'est-à-dire que, si on a de la conversion, on doit convertir dans l'année qui suit, sans quoi, le permis n'est plus valable. Donc, on ne peut pas traîner indéfiniment.

M. Crochetière: Un refus automatique et trois ans après on retournerait.

M. Bourbeau: Trois ans après, on retournerait.

M. Crochetière: D'accord.

M. Bourbeau: Si trois ans après on avait encore fait le même petit jeu, on aurait un autre refus pour trois ans encore.

M. Crochetière: D'accord.

M. Bourbeau: Maintenant, les droits des sous-locataires. Notre compréhension, c'est que tes sous-locataires, s'il y a une cession de bail, auraient les mêmes droits que le locataire. Si le locataire a un droit de préemption ou un droit de maintien dans les lieux, son sous-locataire a le même droit.

M. Crochetière: M. le ministre, l'expérience nous prouve qu'ils vendent les clés. Il y a certaines grandes conciergeries où cela se vend jusqu'à 15 000 $, 20 000 $ ou 25 000 $. Je ne crois pas que le législateur puisse envisager cela, parce que ce qu'il veut faire pour protéger les petits immeubles va avoir des conséquences beaucoup plus grandes dans les grands immeubles du centre-ville.

M. Bourbeau: Je comprends que, de votre point de vue, il y a des problèmes. Il y a également des problèmes, semble-t-il, avec la protection des acquéreurs. Les mesures que nous proposons ne vous semblent pas adéquates. Nous proposons un rapport

d'expert et un prospectus. Je veux reconnaître d'emblée la grande expertise de l'APCHQ dans tous ces domaines. Alors, dans les semaines à venir, lorsque nous procéderons à des consultations pour fignoler notre propre position è la suite de toutes les demandes et de toutes les interventions qui seront faites ici, sûrement que vous aurez l'occasion de nous faire valoir vos points de vue d'une façon encore plus directe sur les questions où il semblerait y avoir des divergences de vue importantes entre l'APCHQ et le gouvernement.

M. Crochetière: C'est parce qu'on a vécu ces problèmes en mettant sur pied nos programmes de rénovation dans des immeubles existants, pour les convertir en copropriété, dans les cas où cela se faisait.

M. Bourbeau: Nous sommes là justement pour vous entendre et pour voir comment on pourrait bonifier la proposition.

M. Crochetière: On va vous donner notre garantie.

M. Bourbeau: Finalement, une dernière question. Enfin, je remarque que ce que nous disons, dans notre proposition, c'est que nous voulons que les locataires aient un droit au maintien dans les lieux, pour une période illimitée. On parle, bien sûr, du locataire en place au moment où la Régie du logement rend son autorisation. Vous nous dites que le système n'est pas à votre goût et que vous en avez un meilleur. Vous nous dites que les locataires auraient une protection de deux ans ou peut-être de trois ans. J'ai lu deux ans, mais vous semblez dire trois ans.

M. Crochetière: La demande dans le nouveau renouvellement, dans certains cas, pourrait aller jusqu'à deux ans et onze mois.

M. Bourbeau: Disons entre deux et trois ans et, après cela, le locataire devrait quitter moyennant un paiement de trois mois de loyer. Je trouve que finalement, en toute déférence pour votre position, la position gouvernementale donne beaucoup plus de protection au locataire, puisque le droit au maintien dans les lieux est illimité, donc perpétuel si je peux dire, pour ce locataire. Alors que vous, vous le mettez à la porte au bout de trois ans, finalement.

M. Crochetière: Oui, pour deux considérations. Premièrement, on dit que, effectivement, il appartient a l'État, après trois ans, de supporter les coûts de maintien dans les lieux, si l'État le veut, d'une part. D'autre part, on ne croit pas, M. le ministre, qu'il n'y aura personne qui ne trouvera pas de solution pour expulser vos locataires qui vont avoir sur papier, un droit au maintien dans les lieux pour une période illimitée. On peut se tromper. Souhaitons qu'on se trompe. Mais on pourrait imaginer des scénarios où des gens réussiront quand même à expulser des locataires. À ce moment-là, ils n'auront rien, aucun bénéfice, alors que notre proposition, croyons-nous, a le mérite au moins de leur assurer une protection de base.

M. Bourbeau: Ce sera évidemment à la formule gouvernementale de prévoir que les locataires soient parfaitement informés de leurs droits et qu'ils puissent se défendre correctement contre les mauvais propriétaires qui voudraient les expulser ou les harceler, je présume.

M. Crochetière: Je n'ai pas parlé de mauvais, j'ai parlé peut-être de pulsions économiques ou d'impulsions qui pourraient amener certains propriétaires à agir de façon à contourner la loi, tout en restant dans la légalité. Je n'ai pas parlé de harcèlement.

M. Bourbeau: Comme cela se fait présentement.

M. Crochetière: Comme cela se fait présentement. On a déjà trouvé des trous et on risque d'en trouver encore.

M. Bourbeau: Alors, on vous demandera conseil pour tenter de les boucher.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Crochetière: Tout dépend de qui retiendra nos services. Ha! Ha! Ha!

M. Bourbeau: Je crois que le député de Louis-Hébert aurait des questions à poser.

Le Président (M. Rochefort): Oui. Je vous remercie, M. le ministre.

À moins que !a commission décide de fonctionner autrement, on va y aller par alternance. M. le député de Shefford et ensuite, évidemment, je retiendrai le nom du député de Louis-Hébert.

M. le député de Shefford.

M. Paré: Merci, M. le Président. Bienvenue aux gens de l'association. Je dois vous dire que je n'aî malheureusement pas eu le temps de le lire. Comme on n'en a pas fait la lecture, je vais échanger selon les commentaires et les remarques que vous avez faits. J'espère que cela sera toujours en ligne directe avec le contenu du mémoire que j'ai reçu seulement ce matin. Mais il y a une chose que je tiens à faire au tout départ, c'est de féliciter l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec pour son plan de garantie. Je pense que c'est bon de l'amener parce que vous devancez même le gouvernement qui devrait

mettre en application la loi 53 sur le bâtiment qui permettrait justement les plans de garantie. Mais le gouvernement ne Ta pas fait. Donc, on ne peut pas faire autrement que de reconnaître ce que votre association a fait et la féliciter, dans ce sens, pour la protection du consommateur.

Ma première question. Vous avez, lors de votre exposé, à quelques reprises, parlé des effets sur la construction de logements neufs. J'aimerais qu'on puisse élaborer là-dessus. Si le moratoire était levé, tel qu'on le retrouve dans la proposition gouvernementale, que le permis soit accordé à tout le monde et qu'il se produise une inondation du marché de logements à vendre, quels seraient, à votre avis, les effets sur la construction et les logements neufs?

M. Crochetière: Encore une fois, j'ai pris la peine de dire, au début, que nous n'avions pas de scénario qui puisse nous dire quel serait le résultat. Mais, imaginons celui susceptible de se produire. C'est-à-dire qu'actuellement, le droit au maintien pour une période illimitée pourrait inciter un grand nombre de propriétaires à demander immédiatement la conversion. Avec les années, cela ne serait pas nécessairement des logements qu'on retrouverait pour fins de vente sur le marché. Cependant, si on s'en rapporte aux études démographiques et aux besoins futurs du Québec dans les années quatre-vingt-dix, on parle d'une chute du besoin qui se situerait peut-être a 25 000 ou 26 000 unités par année. Si au cours des ans, d'ici 1992 à 1995, on a accumulé en milieu urbain 10 000 unités susceptibles d'être vendues, dans un contexte où on a une demande décroissante, une courbe démographique à peu près stable, avec une population vieillissante, il est évident que si vous amenez 7000, 8000 ou 9000 unités à vendre dans ce marché, les autres ne se construiront pas. Vous allez peut-être en construire, à la marge, 2000 de moins parce qu'il va y avoir évidemment un jeu, soit l'attraction du neuf par rapport à l'existant, contre le centre-ville par rapport à la banlieue. Mais, si on tient compte de tous ces éléments, il est impensable qu'il n'y ait pas une interrelation. Il y a aussi tout l'aspect du travail qui est fait dans la rénovation. C'est un marché qui est souvent beaucoup plus accessible au travail au noir. Il y a eu des tentations de la part du gouvernement, à différentes époques, de permettre des conditions de travail différentes dans l'existant par rapport au neuf. Tout cela nous fait craindre qu'on vienne créer un marché privilégié dans l'existant. Ne serait-ce aussi, comme on le soulignait tantôt, que la question d'équité fiscale, si on vient établir des conditions de taxation différentes dans l'existant par rapport au neuf. Encore là, il va falloir qu'on mesure tous ces éléments. C'est dans ce contexte qu'on dit qu'il y a one interrelation entre les deux et, de favoriser librement une trop grande accession ou un trop grand apport d'existant par rapport au neuf, cela ne peut que créer de la distorsion sur le marché. C'est pourquoi on préconise une approche plus lente, plus graduelle. (12 h 30)

M. Paré: Est-ce que vous croyez à l'énoncé qu'on retrouve dans le document ministériel qui dit que le fait qu'on permette globalement la levée du moratoire va probablement amener beaucoup de logements à vendre et va amener une baisse du prix de vente? Est-ce que vous croyez, effectivement, parce qu'il risque d'avoir beaucoup de logements à vendre - on sait que cela affectera les quartiers très populaires de Montréal et Québec particulièrement - que cela va faire baisser les prix?

M. Crochetière: Cela se pourrait. Le scénario que je viens de vous décrire, dans une concurrence entre te neuf et l'existant, aurait un effet à la baisse sur les prix. En contrepartie, on peut dire que, quand on transforme, cela vaut plus cher normalement qu'au niveau locatif. En contrepartie, les taxes sont plus élevées et, graduellement, les loyers sont plus élevés. La valeur économique des immeubles en location étant plus élevée, est-ce qu'il n'y aura pas, par effet d'enchaînement, un accroissement de la valeur du neuf ou des logements? Je ne peux pas vous répondre comme cela, oui ou non. Je vous dis que cela se peut.

M. Paré: Certains objectifs sont poursuivis. On parle d'accès à la propriété et de protection des locataires. C'est à peu près, grosso modo, les objectifs majeurs qu'on veut privilégier. On retrouve dans votre dossier que la commission est peut-être prématurée - comme je vous le dis, je l'ai lu très vite - aussi, le manque d'études d'impact sur les conséquences de la levée du moratoire. Pour être capable d'atteindre les objectifs qu'on s'est fixés, est-ce qu'il ne serait pas plus simple, est-ce qu'on n'obtiendrait pas plus rapidement satisfaction si, tout simplement, on amenait un meilleur programme de rénovation avec protection aux locataires et un programme d'accès à la propriété pour les locataires qui ont les moyens? Est-ce qu'on ne serait pas mieux de privilégier des programmes d'aide plutôt que de venir perturber le marché?

M. Crochetière: Encore là, il faudrait faire attention au fait que les programmes d'aide soient des aides à la personne et non pas en fonction de la tenure ou de la structure dans laquelle ils se trouvent. Autrement, vous allez perturber le marché si vous favorisez un programme d'aide à

l'accession au logement existant- Les gens vont aller chercher cette forme d'aide plutôt que d'aller chercher du neuf. Aussi, tous les problèmes de l'indivision vont inévitablement se perpétuer. Alors, encore une fois, je regrette, mais je ne suis pas capable de vous dire spécifiquement si c'est blanc ou noir. Cela crée des problèmes, cela crée des distorsions sur le marché, quelle que soit la mesure qu'on va prendre. Si vous me dites: Est-ce que cela ne serait pas mieux pour le marché qu'on gèle è toutes fins utiles toute transformation? Nous disons: non.

M. Paré: Quand je spécifiais un programme d'aide d'accès à la propriété, je parlais d'un programme universel avec le choix au futur acquéreur entre le quartier de son choix, entre l'ancien et le nouveau en matière de logement. Est-ce que cela n'est pas plus simple et n'est-ce pas la meilleure façon de favoriser l'accès à la propriété sans amener de perturbations majeures dans certains quartiers?

M. Crochetière: On a toujours été favorable à cela, soit un programme d'accès à la propriété.

M. Paré: Vous amenez une proposition qui a l'avantage d'être très claire, je dois le dire. Au départ, nous ne pouvons pas contester cela. Ce n'est pas...

Une voix: Une franchise brutale.

M. Paré: ...une franchise brutale, comme dit ma collègue, effectivement. Un montant est accordé pour une période délimitée. On ne peut pas demander quelque chose de plus clair. Mais il y a une préoccupation dans les objectifs qui est la protection des locataires. À votre avis, si cela se faisait, quels seraient les effets sur le stock du marché locatif?

M. Crochetière: Dans le cadre de notre proposition?

M. Paré: De votre proposition.

M. Crochetière: Nous pensons que ce seront les vrais transformateurs qui vont s'en prévaloir. Avec deux ans d'avance, même à trois ans, avec un prix préétabli, cela ne sera plus M. Tout-le-monde qui va prendre le risque d'essayer de transformer son triplex. Donc, l'impact va être moins grand de deux façons, parce que vous aurez seulement ceux qui vont avoir analysé le marché et cela va être limité aussi dans des circonscriptions bien particulières. On n'ira pas faire cela à Saint-Glinglin ou a 35 milles des centres-villes urbains. C'est sûr que cela va rester, à ce moment, un élément bien déterminé, premièrement. Deuxièmement, il ne faut pas oublier qu'on a assorti cela à un pouvoir aux municipalités de déterminer les points d'impact et des quotas. Pendant deux ans, avant de demander à la régie la requête pour la transformation, on doit aller à la municipalité pour avoir son certificat d'admissibilité, non pas en termes de structure mais en termes de quota et de région. La ville ou la municipalité qui considérerait que l'impact de la nouvelle législation est trop grand diminuerait tout simplement ses zones d'intervention et ses quotas et, seuls les véritables promoteurs, encore une fois, seraient intéressés. Quant au droit au maintien dans les lieux, on peut en discuter socialement et économiquement aussi. Mais, on a dit, dès le départ, que le droit au maintien dans les lieux ne devait pas primer le droit de propriété et que le coût social après un délai de trois ans, plus les déboursés de trois mois, plus les déboursés des frais de demande devraient revenir à l'État et non pas au propriétaire de cet immeuble. On peut discuter de la pertinence de notre position mais je pense que c'est à partir de là que nous développons le scénario d'intervention en matière de levée du moratoire.

M. Paré: Ce serait tout pour le moment.

Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie M. le député. Je reconnais maintenant M. le député de Louis-Hébert, en vous rappelant qu'il reste neuf minutes à votre formation politique. M. le député de Louis-Hébert.

M. Doyon: Merci, M. le Président. La position qui nous est exposée par l'association est très intéressante - peut-être que le micro est un peu loin - nous en prenons bonne note. Je la compare avec celle qui a été exposée par la ville de Montréal tout a l'heure - je pense que vous avez eu l'occasion d'y assister - qui avait une vision des choses tout à fait différente. En fait, l'analyse que vous faites du document gouvermental propose une certaine modification sur des modalités. Sur le fond, c'est-à-dire sur la nécessité de poser des gestes qui soient de nature à lever globalement le moratoire quitte à l'encadrer, à le baliser, je pense que vous acceptez cette position de la ville de Montréal. J'aimerais avoir votre réaction à la position. On connaît votre réaction à la position gouvernementale, on en prend bonne note. Comment réagissez-vous à ce que la ville de Montréal propose, c'est-à-dire de conserver le moratoire et de l'assortir d'un certain nombre d'exceptions? Est-ce que c'est une façon de faire les choses qui vous paraisse acceptable? Quelle est votre réaction à cet égard?

M. Crochetière: En premier lieu - là je parle personnellement parce que je n'ai pas eu le temps de consulter mes collègues - je crois que, si on fait cela, cela ne fera que reporter la discussion dans deux, trois ou quatre ans ou bien, les modalités comme telles devront être rétablies. L'essence même de leur position résiderait dans les modalités et les porte-parole n'en ont exposé aucune. Juste a titre d'illustration, on dit: Plus de moratoire, mais plus de droit à la conversion, si ce n'est dans des cas bien particuliers qui pourraient être des cas où il y aurait des caractéristiques physiques et particulières. En contrepartie, on dit: On ne se servira plus du tout des droits de transformation et de réparations autres que majeures sans l'autorisation de la régie. On va être dans un beau cercle vicieux. Qu'est-ce qu'on va faire pour arriver à les transformer si pour pouvoir les transformer il faut physiquement faire des travaux, mais que ces travaux ne sont pas permis juste au cas où la régie pourrait intervenir? Quelle est l'expertise et l'expérience de la Régie du logement en matière de construction ou de rénovation? Est-ce qu'à ce moment il ne sera pas plus avantageux... Si j'ai un triplex dans un quartier centre de Montréal, juste à la limite, je ne serai jamais assez fou pour aller le réparer si je veux le transformer. De façon bien concrète, il ne faut pas non plus être angélique et penser que les gens vont jouer le jeu du gouvernement, s'ils veulent transformer. C'est faux. Alors, ils vont le laisser se dégrader jusqu'à ce que la ville elle-même intervienne pour te dire de faire les transformations. Tu as un certificat de la ville, tu vas à la régie et tu dis: II faut que je fasse des transformations, la ville m'y oblige. En même temps, tu dis: Bien, je rentre dans les critères de la ville de Montréal, parce que, comme j'ai fait les transformations, physiquement, j'ai la même chose. Est-ce que c'est à cela qu'on va en arriver? Vous me demandez de commenter ta position de la ville de Montréal. La ville de Montréal parlait d'un droit à rester dans le quartier, un droit au maintien dans les lieux. Il y a un droit au maintien dans les lieux, mais je ne l'ai jamais vu exprimé autrement que socialement et peut-être même moralement, le droit de permettre aux gens de choisir le quartier où ils veulent habiter. Mais ce n'est pas un droit établi et absolu au point que tous les autres droits traditionnels de propriété doivent s'estomper devant lui. On parle de quoi? Encore une fois, je ne peux pas commenter toute la proposition de la ville de Montréal, quant à moi, elle n'en a pas fait. Ses porte-parole ont énoncé un principe mais ils n'ont pas dit comment il s'appliquerait.

M. Doyon: En fait, ce que vous mettez en cause, c'est l'absence de précision sur la proposition. C'est-à-dire que le rejet de la proposition gouvernementale par la ville de Montréal est une chose, mais la proposition concrète qu'elle voudrait faire nous laisse un peu dans le vague.

M. Crochetière: On refuse la proposition telle qu'elle nous est faite; on demande le gel et on déterminera des cas d'exception plus tard conjointement à cela.

M. Doyon: Cela veut dire que c'est le statu quo.

M. Crochetière: C'est encore pire, parce qu'ils demandent en plus de libérer la nouvelle législation de contrainte, pour intervenir au chapitre des travaux. C'est très dangereux, parce que ce n'est pas tout le monde qui fait des travaux pour convertir en copropriété, ce n'est pas vrai. La plupart des gens n'ont pas l'intention de convertir en copropriété, ils veulent réparer leur maison. Souvent, ils y habitent ou souvent ils la possèdent depuis 15 ou 20 ans et en retirent un profit et ils veulent avoir une bonne valeur et ils sont fiers de leur bâtisse. Vont-Us être, à chaque fois, obligés d'aller à la régie pour demander s'ils peuvent changer les cadres de fenêtres? Cela ne se tient pas.

M. Doyon: Avec le risque d'une détérioration éventuelle du parc immobilier.

M. Crochetière: C'est sûr. C'est évident. Vous ne pouvez pas mettre tout le fardeau sur les épaules des propriétaires pour garder le plus de valeur possible à leurs immeubles. Ce n'est pas vrai. Les gens vont se dire: Quant à aller à la régie chaque année pour peinturer mes fenêtres, je vais attendre aux cinq ans, c'est moins astreignant de me présenter a ta régie quand j'en ai 20 à faire faire a la fois.

M. Doyon: En ce qui concerne les règles que vous voulez avoir c'est-à-dire le droit de maintien illimité, vous n'y croyez pas pour des raisons que vous nous avez expliquées. Vous voulez le voir assorti d'un certain... Vous voulez des règles définies aussi bien pour le propriétaire que pour l'acquéreur éventuel, que tout le monde sache à quoi s'en tenir, c'est-à-dire que vous parlez de deux ans, quelque chose entre deux et trois ans. Est-ce que cette règle de deux à trois ans serait immuable dans ce sens qu'il n'y aurait pas possibilité pendant les deux ou trois prochaines années de procéder à aucune conversion en copropriété divise ou si à l'intérieur de ces règles-là, en cas d'unanimité ou en cas d'accord entre les parties, il ne pourrait pas se faire des transformations, des conversions qui pourraient être acceptables à tout le monde?

M. Crochetière: Si le législateur voulait assouplir cette règle, d'accord. Notre position était plus rigide que celle que vous venez d'exprimer. On croyait que les deux ans pourraient être un prérequis pour permettre à tout le monde de s'ajuster, mais peut-être que dans certains cas vous pourriez l'assouplir davantage.

M. Doyon: En ce qui concerne, on en disait un mot tout à l'heure, les risques de détérioration du parc résidentiel, avez-vous une expertise dont vous seriez en mesure de nous faire part? Quelle est ta situation actuelle du parc immobilier en ce qui a trait aux réparations requises et concernant sa valeur, est-ce qu'il s'améliore, est-ce qu'il se détériore? Qu'est-ce qu'il se passe actuellement? Est-ce que vous êtes en mesure de nous informer là-dessus?

M. Crochetière: Personnellement, je n'ai aucune statistique, je ne sais pas si le service économique... Non, on n'a pas fait l'analyse de cela.

M. Doyon: Vous n'avez aucune donnée là-dessus. Est-ce que vous pensez que le fait de lever le moratoire, selon des modalités qu'on est en train de discuter ensemble, aurait pour effet éventuel d'améliorer l'état du parc immobilier? Avez-vous étudié cette possibilité, cette éventualité? Est-ce que la levée du moratoire aurait un effet sur la qualité du parc résidentiel au Québec?

M. Croehetière: Écoutez, les seules conversations que j'ai eues avec les gens du service économique font état que cela dépend de la structure ou du type de logement. Dans certains immeubles, d'abord, certains n'ont pas besoin - on parle des grosses conciergeries de béton - de transformation. Alors, à ce niveau, l'impact serait sûrement petit. Dans certains quartiers, je pense, par exemple, autour du Carré Saint-Louis, la transformation et la rénovation ont déjà été faites, alors, cela ne changerait pas grand-chose.

Dans d'autres quartiers où vraiment c'est plus dégradé mais où il y a de bonnes localisations, là, oui, l'impact serait plus grand. De là à vous donner des chiffres, c'est impossible. Mais, par déduction et par des conversations qu'on a eues à ce niveau, cela dépendrait du type de structure et de sa localisation pour savoir si cela inciterait ou non les gens. Il est certain, cependant, qu'il n'y aurait pas de dégradation amenée, cela n'aurait pas un effet incitatif à laisser se dégrader, donc, on peut croire que cela serait, au moins, l'équivalent à ce que c'est aujourd'hui et avec de bonnes chances que cela apporterait un peu d'amélioration au stock de logements. Est-ce que mon temps est terminé?

(12 h 45)

Le Président (M. Rochefort): M. le député, il vous reste 24 secondes.

M. Doyon: Alors, tout simplement pour remercier les représentants de l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec. Son mémoire est extrêmement intéressant; ses points de vue, son expertise aussi, nous en tiendrons compte. Je vous remercie des précisions que vous nous avez apportées.

Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie, M. le député de Louis-Hébert.

Quant à moi, je me suis inscrit pour vous poser une question. Vous abordez la question de l'état du parc de logements locatif dans l'hypothèse de la levée du moratoire agrémentée des conditions qu'on retrouve au document gouvernemental. Vous avez précisé notamment, à l'occasion des échanges, une des raisons de la dégradation, selon vous, de l'état du parc locatif étant donné qu'il y a tout le lien des possibilités d'expulsion de locataires s'il y a des réparations majeures à effectuer, que cela, c'est un moyen qui peut mener à l'expulsion des locataires. J'aimerais savoir si vous avez évalué l'autre facette possible de dégradation du parc des immeubles locatif dans le cadre de la levée du moratoire selon ce qui est proposé et qui serait la suivante. Dans la mesure où effectivement le moratoire est levé, qu'il y a effectivement un marché, il y a fort à parier que ce sont les meilleurs logements qui vont partir les premiers et qui vont être achetés par les locataires les mieux nantis. Donc, inversement en conséquence, on va se retrouver avec un parc de logements locatif réduit, mais réduit aux moins bons logements et réduit aux locataires les moins fortunés.

Est-ce que vous n'avez pas l'impression que cet état de fait aura aussi pour effet de nous placer dans une situation où, à moyen terme, on va se retrouver avec des logements qui vont, au fur et à mesure devenir des taudis et que compte tenu de l'état de dégradation progressif que connaîtront ces logements, on risque de se retrouver dans une situation où l'État devra intervenir par des programmes dynamiques, des programmes actifs de subventions à la rénovation pour éviter qu'on se retrouve avec un parc locatif de plus en plus composé de taudis et non pas de logements comme ceux qu'on connaît actuellement?

Est-ce que vous avez regardé cette hypothèse-là?

M. Crochetière: On ne l'a pas examinée de cette façon-là, c'est-à-dire qu'évidemment, on a exprimé notre crainte que cela ait comme conséquence de dégrader, et ce que vous dites c'est la

dégradation du stock de logements en qualité ou en localisation. C'est peut-être vrai, d'un autre côté, il faudrait considérer que, si le coût pour acquérir ces logements-là donne plus de valeur, vous allez peut-être pouvoir louer à un taux plus élevé ceux qui se trouvent juste en périphérie. Donc, encore une fois, il faut essayer d'avoir une meilleure valeur économique pour entretenir ce stock locatif qui va demeurer, parce que tous les immeubles ne seront pas convertis.

Je ne crois pas que cela ait un effet tellement grand, et, que dans cinq ans ou dans huit ans on soit obligé d'arriver avec des programmes gouvernementaux pour empêcher la dégradation de la qualité du stock locatif. Personnellement, encore là, on ne l'a pas étudié, mais je ne croirais pas que la conséquence a court et à moyen terme soit si grande que cela.

Le Président (M. Rochefort): Je ne veux pas argumenter longuement...

M. Crochetière: Non, c'est possible que je me trompe.

Le Président (M. Rochefort): Pour suivre votre raisonnement, vous dites oui mais, ceux qui vont être autour, les logements qui vont demeurer locatifs, mais qui vont être autour de ce qui aura été transformé, eux autres, compte tenu de la valeur importante qu'ils vont avoir prise, il va donc y avoir une capacité financière de les entretenir. Mais, justement, la troisième et la quatrième "gang", il n'y a pas possibilité qu'on se retrouve dans cette situation-là, selon vos expériences?

M. Crochetière: Là, déjà, normalement, la valeur relative est excentrique jusqu'à un certain point. Vous avez un cercle autour du centre urbain qui se dégrade et ensuite vous reprenez une certaine forme de valorisation, je veux dire qu'on s'éloigne de cela. Par exemple, si vous êtes près de la Place Ville-Marie ou si vous êtes à Westmount, cela a une grande valeur. Si vous vous en éloignez, jusqu'à un certain point cela se dégrade et, après cela, si vous revenez vers la banlieue ou des zones encore plus excentriques, la valeur augmente. On parle des quartiers Rosemont et Ahuntsic; entre les deux, il y a des quartiers qui sont plus défavorisés. D'abord, convertir en copropriété, cela ne serait pas partout où les gens iraient se loger, cela serait, encore une fois, concentré davantage vers les centres-villes et peut-être que cela aurait pour effet de reculer davantage ces zones tampons, mais cela aurait pour effet d'accroître en termes d'importance, d'un nombre de grandeur spatiale, ces unités-là, je ne sais pas, je ne pense pas.

Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie. Cela met donc fin à la période consacrée aux échanges. M, le ministre, en conclusion.

M. Bourbeau: Je voudrais remercier nos amis de l'APCHQ de leur importante contribution su débat. L'association est reconnue comme un interlocuteur de premier ordre dans le domaine de l'habitation. Les gens de la SHQ et moi avons l'occasion de la consulter très fréquemment. Encore aujourd'hui, son mémoire est à la hauteur de son expertise. Merci.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Shefford.

M. Paré: Moi aussi, je vous remercie. Ce fut très intéressant. Je dois dire que je vais lire votre mémoire avec beaucoup d'attention, parce qu'effectivement, vous apportez une facette du problème de l'habitation, côté construction, qui doit absolument être considérée de façon prioritaire. Merci beaucoup.

Le Président (M. Rochefort): Pour le mot de la fin? Cela va?

M. Crochetière: Non, merci. Cela va.

Le Président (M. Rochefort): À mon tour, je veux vous remercier au nom de tous les membres de la commission pour votre participation et votre contribution à nos travaux. Merci.

J'inviterais immédiatement les représentants du Regroupement d'organismes populaires d'Hochelaga-Maisonneuve à prendre place devant nous. Pendant qu'ils le font, je veux informer les membres de la commission d'une entente intervenue entre les différentes formations politiques, relativement à nos travaux. Compte tenu des contraintes de notre horaire et des retards que nous avons déjà pris et afin d'éviter d'accueillir nos derniers intervenants dans la nuit, nous allons immédiatement procéder, tel que prévu, à l'audition du Regroupement d'organismes populaires d'Hochelaga-Maisonneuve. Nous reprendrons nos travaux à 15 heures, quelle que soit l'heure de l'ajournement, pour essayer de reprendre le retard accumulé jusqu'à maintenant.

Sans plus tarder, je vous souhaite la bienvenue. Pour l'information des membres de la commission de même que pour le Journal des débats, je vous demanderais de vous présenter et de présenter les personnes qui vous accompagnent. Par la suite, sans plus tarder, veuillez nous présenter, en une quinzaine de minutes, votre position quant au document gouvernemental qui a été déposé.

Mme Latreille (Gisèle): Gisèle Latreille.

Je suis travailleuse communautaire dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Carrier (Marie); Marie Carrier, de l'AQDR d'Hochelaga-Maisonneuve et du collectif.

Mme Dubé (Angelina): Angelina Dubé, de l'Association des locataires d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Ménard (Ginette): Ginette Ménard. Je fais partie du Carrefour familial qui est aussi membre du Collectif en aménagement urbain d'Hochelaga-Maisonneuve. Je fais aussi partie du comité de pastorale sociale d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Blanchet (Monique): Monique Blanchet, Services à l'habitation d'Hochelaga-Maisonneuve, groupe de ressources techniques dans le quartier.

Le Président (M. Rochefort): Merci.

Regroupement d'organismes populaires d'Hochelaga-Maisonneuve

Mme Latreille: M. le Président, mesdames et messieurs membres de la commission parlementaire. Nous avons intitulé notre mémoire "Pour une décision qui s'impose... énoncer une politique globale d'accès au logement pour tous". Ce mémoire est appuyé par 25 groupes communautaires du quartier Hochelaga-Maisonneuve. La liste mentionnant le nom de chacun de ces groupes a été remise au président de cette commission. Pour la majorité des résidents d'Hochelaga-Maisonneuve, les droits légaux d'occupation, leurs droits social et moral liés à l'occupation de leur logement, sont prioritaires aux droits de propriété. C'est pourquoi nous avons intitulé ainsi notre mémoire.

Nous croyons toutefois que c'est dans une tentative d'éviter que se perpétue l'actuel fouillis provoqué par l'annonce de la levée du moratoire que le gouvernement veut réglementer la conversion de logements locatifs en copropriété. Il est certain que, sans l'énoncé d'une politique d'accès au logement qui définirait clairement les objectifs à atteindre et les moyens pour y parvenir, nous ne saurons jamais où nous mènera cette décision qui, selon le gouvernement, s'impose, c'est-à-dire lever le moratoire.

En l'absence d'une telle politique, nous vous soulignons notre hésitation à considérer les mesures d'encadrement et de protection qui sont proposées comme étant satisfaisantes et rassurantes pour notre population quoiqu'elles nous apparaissent fort séduisantes, ces mesures de protection...

Nous tenons à ce que soit maintenu le moratoire tant et aussi longtemps que nous ne serons pas convaincus de l'efficacité de l'encadrement proposé. Nous tenons à ce que soient protégés par vos mesures; 1° le parc de logements à coût raisonnable dans Hochelaga-Maisonneuve; 2° les locataires évincés de leur logement pour reprise de possession à la suite des transformations en copropriétés indivises; 3° les locataires harcelés par la réalisation de rénovations et de réparations majeures dans leur logement; 4° les locataires subissant divers méfaits économiques d'une spéculation immobilière incontrôlée et éhontée. Ces méfaits provoquant de l'insécurité et de la privation dans des besoins aussi essentiels que l'alimentation, l'habillement et l'éducation; 5° les locataires qui portent toujours le fardeau de se défendre actuellement.

Nous vous présentons quatre citoyennes du quartier qui témoignent des difficultés vécues par des résidents d'Hochelaga-Maisonneuve. Ces citoyennes appréhendent des failles dans l'application de la réglementation proposée s'il y a levée du moratoire. Les exemples apportés nous invitent tous à en considérer la pertinence en vue de prévenir les risques engendrés par l'annonce de la levée du moratoire. La première présentation est faite par Mme Marie Carrier de l'AQDR d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Carrier: M. le Président, si je suis ici aujourd'hui, c'est après avoir eu, pendant quatre ans, des problèmes de logement. À 70 ans, à cause d'un incendie, je suis délogée d'un logis qui me satisfaisait compte tenu du loyer que je payais. Je suis restée, je ne suis pas une déménageuse ni une personne instable. À mon âge, on ne déménage plus par plaisir. Étant sinistrée et me voyant dans l'impossibilité de me trouver rapidement un autre logement, je m'adresse au groupe des sinistrés. On me répond: II n'y a pas de disponibilité dans les HLM. Or, j'étais éprouvée par cet incendie et je ne me trouvais plus en forme, comme jadis, pour dépenser beaucoup d'énergie dans un déménagement. Je suis donc sur le trottoir. Avec l'aide de gens charitables du voisinage, j'ai pu entreposer tous mes effets et j'ai dû aller me loger en chambre pour cinq mois. Je devais alors payer en plus pour prendre mes repas à l'extérieur.

Une fois les réparations nécessitées par l'incendie terminées, je suis retournée dans mon logement mais j'ai dû subir une augmentation de 105 $ par mois. Un an après, le propriétaire me réclame une autre augmentation de 50 $; le connaissant bien, je lui ai dit: Je n'accepte pas ton augmentation à moins que tu ne la réduise de moitié. Et de peur d'être obligée de déménager à nouveau, j'ai accepté les 25 $ d'augmentation. Je découvre pendant l'hiver que la réparation a été mal faite, le loge-

ment est encore moins isolé qu'avant et je suis obligée de déménager. Je doute que l'on inspecte convenablement les logements rénovés, car je me trouve dans un nouveau logement, lut aussi fraîchement rénové, mais qui m'occasionne des dépenses de chauffage trop lourdes pour mes moyens. Je me demande quelles mesures de contrôle les gouvernements imposent aux rénovateurs afin de nous protéger, nous qui ne sommes pas des inspecteurs de travaux de rénovations. Nous nous sentons exploités par les propriétaires. Il ne m'apparaît pas convenable que l'on blâme des personnes âgées entre 70 et 75 ans de ne pas connaître les nouvelles techniques en habitation.

Après trois déménagements, je décide de chercher un HLM. Je fais des pressions, on m'aide beaucoup et je suis rendue dans un HLM. Là, je n'aurai pas peur d'un nouveau propriétaire qui va m'évincer pour prendre le logement, quoiqu'il n'y a pas vraiment beaucoup de propriétaires dans notre quartier qui habitent leur propre maison. La majorité des gens sont de l'extérieur. Ce que j'ai trouvé de pire dans tout cela, c'est que le droit des locataires âgés, qui se sentent bien dans leur quartier, qui se lient d'amitié avec des voisins et qui s'habituent aux services de leur environnement, ne représente rien pour les législateurs et les spéculateurs. Le temps de résidence dans le milieu est bafoué par les propriétaires, mais c'est bien important pour une personne âgée. Je suis plus en sécurité dans mon HLM, mais bien d'autres personnes âgées, de ma connaissance, vivent encore beaucoup d'insécurité. (13 heures)

II faudrait conserver de petits logements locatifs, à prix abordables, dans chacun des secteurs de notre quartier, que ce soient des HLM ou autres, pour que les personnes âgées ne soient pas déracinées lorsqu'elles sont obligées de déménager. Enfin, si on accorde des privilèges aux personnes âgées dans votre loi, même si ce peut être bon d'avoir des guichets spéciaux pour personnes âgées, ne craignez-vous pas que les propriétaires hésitent à louer à des personnes âgées parce qu'ils seront plus contrôlés? Je termine en demandant à tous ceux qui signeront pour la levée du moratoire, qu'ils n'oublient pas que la majorité des personnes âgées est là. Merci.

Mme Latreille: La deuxième présentation est faite par Mme Angelina Dubé de l'Association des locataires d'Hochelaga-Maîsonneuve.

Mme Dubé: M. le Président, l'Association des locataires Hochelaga-Maisonneuve est un organisme à but non lucratif établi depuis 1932 sous la troisième partie de la Loi sur les compagnies. Son local est situé au 1691 du boulevard Pie IX dans le Pavillon d'éducation communautaire.

L'organisme est composé de 150 membres dont l'âge varie entre 30 et 45 ans. Parmi ceux-ci, nous retrouvons sept personnes siégeant au conseil d'administration et des bénévoles actifs. Hochelaga-Maisonneuve, au début des années 1900, appelé "quartier ouvrier", aujourd'hui vieux de plus de 100 ans, est devenu au fil des ans un quartier populaire majoritairement composé de locataires.

Les locataires ont perdu des acquis importants au cours de ces décennies. L'arrivée de l'autoroute Ville-Marie a vu disparaître 1300 logements décents, grands et accessibles aux faibles revenus. On leur donne, en guise de compensation les logements dits sociaux: les HLM, dont la liste d'attente est aussi longue que l'autoroute Ville-Marie? les coopératives d'habitation, dont l'accessibilité est très restreinte. Le logement n'est-il pas un besoin vital? Pourtant, les locataires d'Hochelaga-Maisonneuve y vivent mille et un problèmes, tels que hausses de loyer abusives, réparations, harcèlement, rénovations, évictions.

Voici des exemples de hausse de loyer abusive. Vous n'avez pas les chiffres dans le mémoire, il a fallu faire des recherches dans nos dossiers. Une locataire de la rue Jeanne-d'Arc, en 1985, a vu son loyer passer de 165 $ à 300 $ par mois. Une autre locataire de la rue Adam, a vu son loyer passer de 250 $ à 375 $ par mois.

Attentive aux problèmes des locataires, groupe fondateur du collectif en aménagement urbain, membre du Front d'action populaire en réaménagement urbain et à la suite de l'annonce de la levée du moratoire fait par M. André Bourbeau, ministre des Affaires municipales du gouvernement libéral, l'Association des locataires d'Hochelaga-Maisonneuve a relevé des statistiques sortant de quelque 1000 dossiers traitant de problèmes vécus par les locataires du quartier. Ces statistiques nous permettent de souligner ce qui suit. Nous avons divisé en deux tranches de trois ans ces statistiques. Il y a trois fois plus de harcèlement et de discrimination dans les trois dernières années que les trois précédentes; les trois dernières années étant 1985, 1986 et 1987; réparations, rénovations majeures: plus que le double dans les trois dernières années; évictions: neuf fois plus en 1985, 1986 et 1987; changements de propriétaires: quinze fois plus que les trois années précédentes.

La levée du moratoire, un atout pour qui? Pour une minorité ou une majorité de la population? Seront payées à quel prix les rénovations, évictions, transformations occasionnées par l'actuelle annonce de la levée du moratoire? Merci.

Mme Latreille: Nous passons maintenant à la troisième présentation qui est faite par Mme Monique Blanchet des Services è l'habitation Hochelaga-Maisonneuve et du groupe de ressources techniques.

Mme Blanchet: En accord avec la position prise par la coordination nationale des GRT et le Collectif en aménagement urbain Hochelaga-Maisonneuve, nous pouvons constater que le gouvernement libéral et le ministre Bourbeau n'ont encore proposé aucune politique de l'habitation mais bien des mesures a la pièce ayant une forte tendance vers le marché privé, plutôt qu'une aide aux populations des classes ouvrières comme celles de notre quartier.

En effet, depuis deux ans, nous assistons à une dégringolade des mesures sociales envers le logement, à savoir la signature d'une entente entre les gouvernements fédéral et provincial qui réduit considérablement le nombre de logements et qui, en plus, écarte les ménages gagnant entre 16 000 $ et 20 000 $. Cette mesure est encore plus dramatique dans notre quartier puisqu'elle atteint directement la clientèle majoritaire des coops d'Hochelaga-Maisonneuve. Selon une étude faite par Mme Christine Darnme aux services à l'habitation, en 1985, 50 % des familles qui composent les coops d'Hochelaga-Maisonneuve ont des revenus faibles ou très faibles, moins de 20 000 $. Ces familles sont celles que la formule coopérative a le plus rejoint dans leurs besoins et attentes: 58,3 % des ménages gagnant moins de 16 000 $ sont logés dans des coops d'habitation en rénovation, comparativement à 40 %, en coopérative d'habitation en construction neuve.

La mise en place d'un supplément au loyer québécois pour le marché privé, mesure qui favorisera, encore une fois, dans notre quartier, les pressions exercées par les propriétaires sur les locataires en place et incitera à spéculer sur leur dos. D'ailleurs, des études démontrent très bien que cette réglementation profite plus aux propriétaires qu'aux locataires. De plus, encore une fois, l'odieux des recours reviendra au locataire qui devra recourir sans cesse à la régie pour se protéger. Au fil des années, arrivera ce qui se passe aujourd'hui: le locataire excédé par ces multiples démarches partira vivre ailleurs.

Diminution des subventions aux GRT et disparition des programmes de subvention en rénovation. Ce problème est d'autant plus grave pour notre quartier puisque c'est la seule mesure qui répondait au maintien des gens dans leur milieu. Des chiffres à l'appui le démontrent: 46 % des membres qui habitent des unités de rénovation habitaient le logement avant qu'ils ne fassent partie de la coopérative et 50 % des membres de coops rénovées habitaient le quartier avant de se joindre à la coopérative. De 1976 à 1987, sur 466 logements coopératifs dans Hochelaga, 37 % sont des logements rénovés. Depuis 1986, aucun projet de coop en rénovation n'a vu le jour, faute de programme adéquat et non pas faute de demandes en provenance des gens.

Au contraire, les logements en constructions neuves ont augmenté durant la deuxième période de cette décennie. Ce fut une bonne chose puisque cela a permis l'accessibilité à la formule coop è plus de familles, il ne faut pas le nier. Mais il est évident que les programmes pour les projets en construction neuve ne favorisent pas le maintien des gens dans leur quartier, surtout dans Hochelaga-Maisonneuve, puisqu'à peine 30 % des gens peuvent y adhérer, en fonction de leurs revenus, et que les autres doivent absorber les coûts du loyer qui sont de plus en plus élevés. Les loyers, en 1987, d'une des coopératives, soit la coopérative "Bonheur d'occasion", sans services, sont pour une chambre, de 355 $; pour deux chambres, 425 $; trois chambres, 460 $; quatre chambres, 495 $. Ce qui est très loin d'être accessible pour les familles de notre quartier.

Si ces familles d'Hochelaga-Maisonneuve trouvent, en ce moment, les loyers trop coûteux, comment parviendront-elles à accéder à l'achat de leur logement? Ce sera impossible. Elles seront donc évincées pour faire place à de nouveaux venus, encore une fois. Bien sûr, M. Bourbeau fera état des coops catégorie 1, dans le programme SHQ qui est offert pour une clientèle à faible revenu. Mais, encore là, une catégorie de la clientèle est évincée, celle des 18 000 $-25 000 $ qui ne peut accéder à ces logements et la demande est loin de répondre aux besoins de notre quartier. Nous avons plus de 300 noms de personnes à faible revenu qui voudraient avoir un logement en coopérative et, cette année, il y a eu à peu près 250 unités.

De plus, la clientèle des 18 000 $ à 25 000 $ était celle que nous appelions nos "leaders" dans les coopératives. Habituellement, c'est l'ouvrier ou le technicien et c'est lui qui est évincé dans le moment. Où irons donc ces familles? En construction neuve du programme fédéral, le loyer est de plus en plus élevé. En construction neuve du programme provincial, elles ne sont pas admissibles. En rénovation? II n'y a pas de programme adéquat actuellement. Ce n'est pas l'accessibilité a devenir propriétaire de leur logement qui réglera le problème puisque, financièrement, il y a de forts risques que ce soit impossible pour elles. Un triplex se vendant 150 000 $ dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve, cela suppose une hypothèque de 50 000 $ pour un logement, plus les taxes, les réparations et

l'entretien, donc un coût mensuel trop élevé pour les familles de notre quartier, puisqu'elles sont actuellement incapables d'absorber les coûts de loyer de certains projets de coop. Et il n'y a donc aucune mesure d'aide pour compenser la capacité des familles.

Nous réitérons donc que, dans notre quartier, la propriété collective, les coops et les OSBL offrent la meilleure garantie de sécurité d'occupation. Ces modes d'occupation des logements sont bien adaptés aux ménages à revenu faible et modéré, notamment les personnes âgées, handicapées, les familles monoparentales et les jeunes. Ces formes de propriétés collectives assurent le maintien dans les lieux des locataires a bas revenu, surtout lorsqu'il y a des programmes adéquats en rénovation. Elles permettent de maintenir un parc de logements locatif dont les coûts de location sont raisonnables, en plus de ralentir !es tendances spéculatives du marché privé. Elles permettent l'accès à un mode d'occupation orienté vers la prise en charge collective des conditions de logement, donc des conditions moins lourdes pour chaque personne. Elles offrent une garantie du maintien en bon état du patrimoine immobilier et sont souvent le seul moyen des ménages à revenu faible et modéré de prendre possession des logements.

Pour nous, dans Hochelaga-Maisonneuve, lever le moratoire n'est pas une décision qui s'impose. Ce qui s'impose, à notre avis, c'est une véritable politique d'accès au logement pour tous, avec le droit, pour chaque famille, de demeurer dans son logement, sans subir de pression extérieure, à un prix abordable et selon la forme de propriété désirée: coop, HLM, locataire ou copropriété, cela avec la pleine assurance de pouvoir elle-même en décider la forme.

Mme Latreille: Vous trouverez des tableaux en annexe.

La quatrième présentation sera faite par Mme Ginette Ménard, du Carrefour familial Hochelaga.

Le Président (M. Rochefort): Si vous le permettez, madame, je veux vous souligner que vous avez déjà passablement dépassé le temps mis à votre disposition pour la présentation. À la suite d'un accord intervenu entre les membres de la commission, nous allons vous permettre de poursuivre, mais dans la mesure du possible, puisque le temps que vous allez prendre sera réduit d'autant dans les enveloppes de temps prévues pour les échanges. Je vous demanderais peut-être d'essayer de résumer un peu vos présentations, pour qu'on conserve une période de temps à la disposition des deux formations politiques pour permettre des échanges, compte tenu des horaires retenus.

Mme Latreille: Mme Ménard connaît très bien ce qu'elle a apporté et je pense que cela va se faire assez rapidement, si vous nous permettez de poursuivre.

Le Présidant (M. Rochefort): Oui.

Mme Ménard: Je fais partie du groupe le Carrefour familial Hochelaga-Maisonneuve. C'est un groupe d'entraide familiale et d'éducation populaire. II est aussi membre du Collectif en aménagement urbain Hochelaga-Maisonneuve.

Le Carrefour familial Hochelega-Maisonneuve est un lieu où se regroupent les familles du quartier afin d'améliorer ensemble leurs conditions de vie. On rejoint environ 400 à 500 familles par année. Les gens qui viennent sont surtout des femmes, chefs de famille, bénéficiaires de l'aide sociale et à revenu très modeste. Nous sommes donc en contact avec la réalité dramatique qu'est le logement.

Les femmes seules avec des enfants éprouvent beaucoup de difficultés à se trouver un logement. Il y a des angoisses aussi qu'elles peuvent rencontrer souvent. Des gens viennent aussi nous dire qu'il y a beaucoup de hausses du coût des loyers; les prix varient peut-être de 400 $ à 650 $ et, pour des familles du quartier, c'est beaucoup trop. Les gens quittent le quartier et d'autres choisissent la cohabitation à deux familles. On voit des expulsions pour rénovation et reprise de possession, du harcèlement et des menaces. Il existe encore des logements mal entretenus et ne répondant pas au code du logement. Il en résulte de la malnutrition parce qu'il faut de 40 % à 57 % du revenu pour payer le loyer. Du stress est vécu dans les relations familiales. Ensemble, nous essayons de trouver des solutions adéquates et nous nous entraidons mutuellement.

Je voudrais vous raconter un peu mon vécu depuis les derniers mois, mais je voudrais que vous ayez derrière la tète, par exemple, le vécu des quartiers Plateau Mont-Royal, Saint-Henri, Pointe Saint-Charles, et peut-être que le prochain sera Hochelaga-Maisonneuve où je demeure. (13 h 15)

J'habite dans un triplex d'Hochelaga-Maisonneuve, dans un deuxième étage, qui a été vendu, au printemps, pour 80 000 $ et, trois semaines après, il a été revendu pour 135 000 $. J'ai maintenant quatre nouveaux copropriétaires. Â ma première rencontre avec eux, ils m'ont donné un avis d'expulsion pour juillet 1987, même si ce n'était pas dans les lois.

S'apercevant que je connaissais un peu mes droits, ils m'ont envoyé une augmentation de 100 % pour le loyer. Par la suite, même si j'ai persisté à demeurer dans les lieux, j'ai subi de l'intimidation, du

harcèlement, des menaces, des travaux la nuit; on m'a menacée de feu, de vol, de vandalisme, de dégâts, de dégâts d'eau. Pour les vols, il y a eu des petits larcins qui se sont faits dans la maison comme telle, il y a eu du courrier de volé, des choses comme cela. Par la suite, j'ai reçu un avis de réparation majeure. Cela a occasionné la perte d'une pièce, une chambre, et de services, je n'ai plus de hangar, et même si les propriétaires ne devaient pas entrer dans mon logement à la suite d'un avis de la régie, il y avait quand même intrusion.

Cela m'a occasionné aussi beaucoup de surcroît de travail. Il y a eu aussi perte de jouissance des lieux, parce que, quand on vit dans la poussière pendant quelques mois - ce n'est pas encore terminé - ce n'est pas tellement intéressant d'inviter des gens et de vivre dans ces lieux-là, c'est souvent très démoralisant,

II y a eu des délais qui n'ont pas été respectés, donc, j'ai été obligée d'aller à la régie plusieurs fois. J'ai eu des problèmes aussi avec la régie, parce que cela m'a pris, la première fois, et c'était ma première expérience une heure et quart pour que la dame qui était là prenne seulement ma demande comme telle. Par la suite, quand j'ai rencontré le régisseur, comme les propriétaires demandaient de relocaliser la salle de bains dans une autre pièce, le régisseur m'a dit: Vous devriez être contente, vous allez avoir une salle de bains neuve. Mais cela s'est fait le 5 mai et les travaux ne sont pas encore terminés. Les propriétaires m'ont dit que la prochaine étape, ce sera sûrement la cuisine qui sera à refaire. Donc, je serai peut-être jusqu'à la fin de l'année, jusqu'en juillet 1988 dans la même situation.

Le seul recours qu'il me restait, c'était de faire une retenue de loyer, mais je pense que cela ne les dérange pas tellement. Face à cela, j'ai dû me déplacer plusieurs fois pour connaître mes droits, faire appel à la régie, ce sont des démarches qui sont longues, interminables. Il me faut des témoins, des photos, des lettres enregistrées, des dépenses supplémentaires. Même, les propriétaires disent que, pour eux, les travaux sont terminés et que, donc, pour la finition, c'est à moi à payer les frais.

Je suis devenue, à cause des événements, beaucoup plus fatiguée, irritable, nerveuse, inquiète et insecure. Je ne me sens pas réellement protégée par les lois actuelles, je ne me sens pas non plus chez moi et ce, peut-être, jusqu'en juillet 1988.

Voici les conséquences du droit accordé actuellement aux propriétaires de copropriétés indivises qui se préparent a venir habiter mon logement, à moins que la maison ne soit revendue.

J'aurais deux questions à poser au ministre. Ce serait: S'il y a la levée du moratoire comme telle, quelles protections aux locataires habitant un logement situé dans une copropriété indivise seront prévues? Y aura-t-il des changements quant à la reprise de possession, c'est-è-dire un seul propriétaire d'une copropriété indivise aura-t-il, à ce moment, le droit d'évincer un locataire?

L'autre question serait: Si la copropriété se change en condominium, l'avis d'éviction reçu devant être effectif en juillet 1988 sera-t-il encore légal? Aurai-je alors le droit d'acheter mon logement? Je ne crois pas que ce soit une possibilité pour la plupart des résidents d'Hochelaga-Maisonneuve qui sont défavorisés sur le plan pécuniaire. La lenteur du gouvernement à établir de réelles mesures de protection des locataires face aux spéculateurs immobiliers coûte cher en énergie et en argent aux citoyens des milieux populaires. Ce sont eux qui souhaitent aussi que soit protégé le stock de logements locatif dans Hochelaga-Maisonneuve. Puisqu'on sait qu'il y a à peu près 30 % des logements, dans Hochelaga-Maisonneuve, qui ont besoin de réparations majeures, 60 % des établissements ayant été construits avant 1940, il est important de prévoir des logements libres pour les personnes qui doivent temporairement quitter leur logement.

Mme Latreille: Le bon motif du gouvernement de vouloir faciliter l'accès à la propriété, nous le mettons en doute. Et la réponse que nous réclamons ne nous apparaîtra donc plausible que dans le contexte d'une politique d'accès au logement pour tous. Nous savons, bien sûr, que l'actuelle crise de spéculation que nous vivons dans Hochelaga-Maisonneuve n'existe pas que chez nous, mais nous déplorons que la "gentrification" qui s'installe chez nous et les progrès qui devraient en découler engendrent, malgré la débrouillardise bien connue de nos citoyens, tant d'insécurité, de dépenses essouflantes d'énergie, dans des recours où le fardeau de la défense pèse lourd et revient au locataire, du stress dans les relations familiales et même de la malnutrition parce que, le loyer étant une dépense fixe, on coupe dans l'alimentation souvent, chez nous. 26 % des cas d'hospitalisation, à l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, sont causés par la malnutrition de nos citoyens. On voit un rapport évident entre le coût élevé des logements, la capacité de payer de nos résidents et ce qui leur reste pour l'alimentation. On a un taux de bébés naissants avec un poids inférieur à la moyenne qui est équivalent à celui qu'on trouve au Pérou ou en Chine.

En tant que société, nous avons des choix à faire. Dans Hochelaga-Maisonneuve, nous avons toujours su innover et peut-être qu'ensemble, les citoyens de notre quartier et les divers paliers du gouvernement qui

sont concernés par le, logement, nous arriverons à faire des choix qui s'imposent pour réduire l'écart entre les riches et les pauvres. Nos citoyens ne seront pas plus riches parce que vous voulez favoriser l'accès à la propriété.

Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie. Il reste quinze minutes pour la période des échanges, c'est-à-dire sept minutes trente secondes par formation politique. M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, Je fais une observation et je vais passer la parole à un de mes collègues. La situation qui a été décrite par les différentes intervenantes indique bien que la situation présente est inacceptable. Les calamités dont on nous a fait I'énumeration se produisent dans le contexte de la situation telle qu'elle existe présentement. C'est donc dire que la ville de Montréal a raison quand elle dit que le maintien du moratoire est inacceptable puisque c'est ce qui permet la situation telle qu'elle est présentement. Il faut donc remplacer ce système par un système qui va mieux protéger les locataires. C'est ce que nous voulons faire avec les mesures additionnelles de protection que nous avons insérées dans te document. On nous a posé quelques questions tout à l'heure. J'ai noté. On nous parle des propriétaires indivis. Est-ce qu'un seul propriétaire indivis pourrait évincer, je pense... Je n'ai pas très bien compris la question. Pourriez-vous la répéter?

Mme Ménard: Les locataires. Dans la loi, il y avait le fait qu'un copropriétaire aurait le droit d'évincer un locataire comme tel.

M. Bourbeau: Dans le système actuel, dans les édifices de quatre logements et moins, on peut évincer des locataires si on est un propriétaire indivis. Cela veut dire que si deux personnes achètent un immeuble ensemble, chacune d'elle peut évincer un locataire. Donc, ce sont deux locataires qui sont évincés. Si trois personnes achètent ensemble, chacune des trois peut évincer un locataire. C'est ce qu'on appelle l'indivision. S'il n'y a qu'un acheteur, on n'est plus en indivision. Pour être indivis, il faut être au moins deux. S'il n'y a qu'un propriétaire de l'immeuble, que ce soit un duplex, un triplex ou un quadruplex, ce propriétaire a le droit d'évincer un locataire pour ses fins à lui. Cela existe dans le système actuel. Il a toujours été reconnu qu'un propriétaire peut prendre un logement pour lui-même. La seule exception qui existera à partir de maintenant, si notre proposition est acceptée, c'est que même cela ne sera plus permis après la conversion. Si la proposition est acceptée, nous proposons d'interdire à un propriétaire d'un immeuble converti, même à un propriétaire seul, de déloger un locataire pour les fins du propriétaire. Ce serait la première fois que cela se ferait où il y a une interdiction totale pour un propriétaire d'évincer un locataire. Dans le système actuel, un propriétaire seul, qui est propriétaire de tout l'immeuble, peut évincer un locataire pour ses fins à lui. Il y a des exceptions pour sa famille immédiate si elle dépend de lui. Alors, c'est la situation qui existe présentement. Également, deux propriétaires peuvent évincer s'ils sont en indivision deux locataires, etc. Nous proposons de bloquer également la possibilité que les propriétaires indivis puissent chacun évincer des locataires. Autrement dit, si deux personnes sont propriétaires d'un duplex, ils ne pourront pas évincer ni l'un ni l'autre. Si trois personnes sont propriétaires d'un triplex, aucune des trois ne pourra évincer. Ce sont les améliorations que nous proposons dans la position gouvernementale.

Maintenant je voudrais simplement terminer en disant: On nous dit que le gouvernement a fait beaucoup de bévues, semble-t-il, en matière d'habitation pour ne pas aider les citoyens. Je voudrais simplement vous signaler que la nouvelle entente que nous avons signée avec le gouvernement fédéral fait en sorte de concentrer l'essentiel des fonds publics vers les citoyens les plus démunis de la société, ceux qui ont le moins les moyens de s'en sortir. Étant donné qu'il y a une certaine somme d'argent disponible pour l'habitation et qu'on n'a pas des budgets illimités, nous voulons en premier lieu venir en aide aux plus démunis de la société. Dans ce sens, je vous signale que dans l'année 1987 nous faisons 37 % de plus de logements sociaux, des HLM, que précédemment. Donc, dans l'année 1987, il y aura 37 % de plus de logements faits pour des démunis, construits pour des démunis, au Québec que ce qui se faisait précédemment. Donc, il ne faut pas dire qu'on n'en fait moins, on en fait plus pour des gens qui ne sont pas financièrement à l'aise.

Le supplément au loyer que nous avons annoncé dans le secteur privé, ce sont des HLM et les gens qui vont y être logés sont des démunis aussi. Cela ne leur coûtera pas un sou de plus que s'ils étaient dans un HLM public. C'est la même chose, les mêmes normes et les mêmes critères. Le propriétaire ne fera pas la passe, parce que le loyer qui va être payé en tout, c'est exactement le même loyer qu'ils paient présentement et c'est pour cinq ans. C'est la SHQ et l'office municipal qui va diseuter avec le propriétaire, ce qui veut dire qu'il va peut-être être même mieux équipé pour diseuter, parce que l'office municipal ou la SHQ va être plus solide pour résister au propriétaire, s'il veut faire le fou, qu'un

locataire seul. Donc, le locataire va être protégé face au propriétaire par la SHQ, par l'office municipal. Les locataires qui vont être là sont des démunis. Ils ne vont payer que 25 % de leur revenu, exactement comme dans un HLM. Donc, il ne faudrait pas décrier la formule. Elle nous permet d'en faire deux fois plus qu'avec les HLM ordinaires. Autrement dit, avec l'argent que cela nous coûte pour faire un HLM ordinaire, on en fait deux dans la formule du supplément au loyer. Donc, deux familles vont être logées en même temps plutôt qu'une. Je pense que c'est un avantage, on en fait deux fois plus.

Maintenant, je pourrais continuer sur le reste mais comme on n'a peu de temps, je vais laisser continuer mon collègue, avec la permission du président, le député de Sainte-Marie.

Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie M. le ministre. Il reste une minute et trente secondes à votre formation politique. Dans le cadre de l'alternance, je vais donner la parole au député de Shefford et, par la suite, j'accorderai la minute et trente secondes au député de Sainte-Marie. M. le député de Shefford.

M. Paré: Merci, M. le Président. Alors, Mme Dubé, Mme Carrier, Mme Latreille, Mme Ménard et Mme Blanchet, je vais juste vous remercier pour vos témoignages. Etant donné que le temps est tellement limité, je vais laisser immédiatement la parole à ma collègue, Mme la députée de Maisonneuve.

Le Président (M. Rochefort): Je veux vous indiquer que je suis lié par l'alternance...

M. Paré: Allez.

Le Président (M. Rochefort): ... alors, je vais reconnaître le député de Sainte-Marie pour une minute et trente secondes. M. le député de Sainte-Marie.

M. Bourbeau: On pourrait fort bien laisser l'occasion de continuer à...

Le Président (M. Rochefort): Oui, mais je ne voudrais pas qu'on dépense nos précieuses minutes à discuter...

M. Bourbeau: On ne les dépensera pas.

Le Président (M. Rochefort): ...qui a la parole, je vous donne la parole, M. le député.

M. Laporte: Merci M. le Président. Premièrement et très rapidement, je tiens à remercier effectivement le regroupement pour le style de témoignage qu'il a apporté è la commission et cela pour plusieurs raisons, dont entre autres, je pense, le plus important et le plus particulier, afin de permettre aux membres de la commission, aux ministres et au président de prendre témoignage justement de cas vécus particuliers comme tous ceux qui ont été énumérés tantôt. Je pense que cela est très révélateur de ce qui peut se produire dans un quartier particulier et de ce qui peut se produire de façon concrète. Je pense que cet avantage va permettre justement de mieux visualiser ou, à tout le moins, de mieux comprendre ce qui est vécu dans nos quartiers. (13 h 30)

Étant donné que le temps est limité, je me permettrais de poser certaines questions sur les possibilités dues justement aux cas évoqués et les propositions que vous comptez avancer. Vous dites entre autres, en regard du supplément au loyer dont le ministre a fait part tantôt, que vous n'étiez pas d'accord ou, à tout le moins, que vous sembliez en désaccord avec cette proposition. Avez-vous examiné le pour et le contre? Avez-vous également des propositions de rechange? Vous avez mentionné, concernant les rénovations majeures, qu'il existe des problèmes et, on doit constater et convenir effectivement qu'il y a de sérieux problèmes dans notre secteur à ce chapitre. Des propositions sont avancées. Je ne sais pas si vous vous êtes effectivement penchées là-dessus. Peut-on apporter des solutions autres en regard de cela? Est-ce que ce qui est proposé par rapport à ce qui existe déjà rencontre votre assentiment sans nécessairement regarder dans l'avis de moratoire? J'aurais aimé vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Rochefort): Je vous demanderais de répondre brièvement, s'il vous plaît.

Mme Latreille: Nous ne nous sommes pas opposés à un supplément au loyer. Notre population la plus démunie consacre en moyenne 45,5 % de son revenu au logement. Avec les services, cela va jusqu'à 57 % dans bien des cas, dans le cas de tous les assistés sociaux. Chez nous, presque 10 000 personnes crèvent de faim. Vous comprenez bien que ce que l'on demande, c'est du logement social. On veut plus de HLM, plus de coopératives. S'il n'y a plus de terrain pour en bâtir, il faudrait peut-être penser à l'achat-restauration-rénovation avec une forme de supplément au loyer pour les gens, ou l'achat-restauration-HLM par les offices municipaux d'habitation.

On aimerait aussi que des mesures exemplaires de dommages et intérêts soient imposées au propriétaire qui contreviendrait aux lois qui devraient actuellement protéger les locataires. On veut que la protection soit renforcée pour les locataires habitant des

immeubles de cinq logements ou moins, incluent un bon contrôle des projets de rénovation en assurant une inspection des travaux, la qualité et une évaluation plus réelle des coûts. Je le répète, nous attendons l'imposition de mesures de dommages qui soient exemplaires pour les propriétaires qui seront contrevenants aux lois qui doivent protéger les locataires. Je trouve que ces mesures aideraient les gens de notre quartier.

On aimerait également, peut-être en collaboration avec les offices municipaux, que des logements temporaires soient disponibles pour ceux qui seront délogés de leur logement. Je crois qu'on n'a plus de temps.

Le Président (M. Rochefort): Concluez, madame. Cela va?

Mme Latreille: Oui.

Le Président (M. Rochefort): Sur ce, je reconnais Mme la députée de Maisonneuve. Vous avez sept minutes pour vos échanges.

Mme Harel: Très bien, M. le Président. D'abord, ce n'est pas sans raison, je pense, que le mémoire est présenté par des femmes du quartier. Très majoritairement, c'est un quartier où l'on compte statistiquement le double de la moyenne du Québec en ce qui concerne la catégorie des veuves, où l'on compte actuellement 18 % de personnes âgées et où près du tiers des familles sont monoparentales. C'est une expertise que le ministre aurait intérêt à écouter attentivement. Si on pense que cela ne l'a pas ébranlé, je pense que plusieurs de ses collègues ont peut-être mieux compris ce qu'était la réalité d'un quartier du bas de la ville de Montréal.

J'espère et je souhaite que le ministre n'adoptera pas l'attitude de défendre son projet coûte que coûte envers et contre tous ceux et celles qui viendront. S'il est ici pendant quatre jours, cela doit être pour écouter ce que le monde qui vit les problèmes a à lui dire, non pas pour adopter comme attitude de ne défendre que son projet. On ne peut accepter de faire travestir la position qu'a prise la ville de Montréal ce matin; elle était très claire: c'était non à la subdivision, et ce n'est que l'exception qui était envisagée par la ville de Montréal.

Les questions que je veux vous poser sont à cet effet et concernent la protection. La ville a beaucoup parlé de la deuxième génération. Tantôt, le ministre a dit concernant les HLM: On a eu 37 % de plus de logements sociaux en 1987. Il faut constater que, dans la programmation qu'il a annoncée pour l'année 1987 et qu'il a rendue publique pour la Société d'habitation du

Québec, il a décidé de n'inscrire la construction d'aucune nouvelle unité dans Hochelaga-Maisonneuve. Alors, les 37 % ne sont pas dans un quartier qui, pourtant, vit une situation de crise. Le logement est en crise en grande partie à cause de la spéculation. Quand vous disiez, Mme Ménard, que votre logement était passé de 80 000 $ à 135 000 $ en l'espace de trois semaines, c'est une réalité qui n'est pas exceptionnelle.

Cette situation de crise commanderait une attitude interventionniste pour pallier cette réalité en n'oubliant pas qu'aucune unité de supplément au loyer, même en HLM privé, n'est prévue dans le bas de la ville, dans ce quartier d'Hochelaga-Maisonneuve, et en n'oubliant pas que cela ne comble pas le problème de la vétusté. Il y a une combinaison de facteurs. Il y a un manque de revenu, mais, en même temps, il y a un problème de vétusté de logements où la moitié ont été construits avant 1920. La combinaison des deux - et c'est là-dessus que j'aimerais vous entendre - vous parliez tantôt d'achat-rénovation-restauration... Est-ce que vous avez, pour l'avantage du ministre peut-être, des programmes à lui suggérer d'achat-restauration-rénovation, j'imagine, peut-être en matière de HLM ou en matière de coop, qui permettraient de pallier le problème que vous avez éloquemment décrit dans un secteur aussi densément habité que le bas de la ville?

Ma dernière question concerne la politique familiale. Le ministre dits On aide les plus démunis. J'aimerais vous entendre sur la question des travailleurs et travailleuses à salaire minimum, ceux qui sont dans les manufactures de l'est de Montréal. Est-ce qu'il y a des programmes qui permettent à ces personnes de se loger convenablement, de se loger aussi en conformité de ce qu'on peut souhaiter que soit une politique familiale en matière d'habitation?

La deuxième génération, les gens qui vous ont précédés ont dit: Les spéculateurs ont trouvé facilement à contourner le maintien de façon illimitée que prévoit le ministre en achetant les locataires, en achetant leurs droits d'occupation illimitée par une cession de bail. Compte tenu de ce que vous écrivez, vous avez le sentiment que des personnes démunies seraient susceptibles de vendre ce droit d'aînesse qu'elles auraient en première génération mais qui serait fini pour celles qui les suivraient.

Mme Latreille: Je vous avoue, madame, que cela nous répugne un peu d'étaler ici tout ce qu'on peut entrevoir de harcèlement, de pression sur les locataires du quartier qui seraient sollicités par un propriétaire pour que le logement soit transformé en habitation à vendre. On a déjà vu ce qui se passait dans le cas de Ginette où la

spéculation qui a eu lieu dans sa maison, actuellement, ce sont quatre propriétaires en copropriété indivise qui sont les propriétaires. Sa soeur qui habitaient le troisième a fui plutôt que de défendre ses droits parce qu'elle en avait assez de vivre sous le harcèlement, de vivre dans la crainte comme elle vivait depuis deux mois. Mais qui nous dit que ces quatre copropriétaires ne décideront pas de vendre leur logement, de le vendre ensuite en condo? Là-dessus, on demande au gouvernement de porter une attention au fait que si Ginette, elle, voulait l'acheter son logement, après tout ce qu'elle aura vécu, est-ce qu'elle a une possibilité morale, sociale et légale de continuer à habiter le logement qu'elle aime et qu'elle habite depuis longtemps? Est-ce que le droit de propriété accordé par la levée du moratoire va être prioritaire au point de la déloger? Elle n'aura pas les moyens financiers d'acheter son logement. Ce que je trouve et ce que je dénonce, c'est que dans les mesures d'encadrement du ministre il n'y a aucun programme d'aide qui accompagne ces mesures d'encadrement. C'est pour cela que nous doutons beaucoup et que nous n'accordons pas de préjugé favorable au projet du ministre parce qu'aucun programme d'aide n'accompagne les mesures d'encadrement qu'il a proposées.

Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie. Il vous reste quarante-cinq secondes Mme la député de Maisonneuve.

Mme Harel: Oui, je les offre à Mme Blanchet. J'ai l'impression que vous vouliez ajouter quelque chose.

Mme Blanchet: Vous nous aviez demandé tout è l'heure s'il y avait des programmes pour achat-rénovation, pour le moment il n'en existe pas. Mais ce que nous, les groupes de ressources techniques ainsi que la Fédération des coopératives de Montréal et tous les groupes qui travaillent dans le logement, avons offert maintes et maintes fois au gouvernement du Québec ainsi qu'à la ville de Montréal, c'est de travailler à l'implantation d'un nouveau programme de rénovation. Nous sommes convaincus que, dans nos quartiers, c'est une solution. Je ne dis pas la solution, mais l'une des solutions au maintien des gens dans les lieux, à des conditions qui leur permettraient financièrement de vivre dans ces logements.

Tout à l'heure, on parlait aussi des familles à revenu moyen, nos ouvriers qui composent le quartier Hocheiaga-Maîsonneuve et d'autres quartiers. On dit dans les statistiques que le seuil de pauvreté au Canada, c'est une famille qui gagne 20 000 $: une famille de deux enfants dont le revenu est d'environ 20 000 $ vit sous le seuil de la pauvreté. Comment les familles de notre, quartier d'ouvriers qui gagnent a peu près cela feront-elles pour accéder à la propriété? Les mesures qu'on donne aux locataires ne sont pas, à notre avis en tout cas, comme Gisèle l'a dit, des mesures efficaces pour les protéger. Si une maison de trois logements est vendue et qu'il y a deux copropriétaires, un peu comme Mme Ménard en a fait mention, comment pensez-vous que l'ouvrier ou la famille se retrouvera entre ces deux copropriétaires qui pousseront constamment pour que des rénovations soient faites, pour que les maisons soient améliorées, alors qu'il n'aura même pas l'argent au départ pour acheter son logement? En plus, les travaux commenceront à se faire et il n'aura pas plus l'argent non plus. Les hausses, ce sera toujours lui qui les aura sur le dos. Je ne sais pas comment tout cela s'articule, mais ce sont des grosses questions qu'on se pose ici.

Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie, madame. Un mot de la fin, M. le ministre.

M. Bourbeau: Oui, je voudrais remercier les gens d'Hochelaga-Maisonneuve et leur dire que, dans la situation actuelle, le locataire d'un immeuble comme celui dont vous avez parlé peut être évincé par un des copropriétaires. Dans la proposition que nous faisons, le locataire aura le droit au maintien dans les lieux d'une façon indéfinie, perpétuelle - je parle pour Ginette. Également, si le logement est vendu, vous avez le droit de premier refus; on ne peut pas le vendre à quelqu'un d'autre sans vous l'offrir. Donc, la proposition vous offre deux droits que vous n'avez pas présentement, car, dans la situation actuelle, vous pouvez être évincé par un propriétaire indivis.

Pour ce qui est des rénovations, je dirai que nous avons plusieurs programmes: un programme d'achat-restauration sans but lucratif privé, nous venons d'accorder 900 unités à des groupes de ressources techniques et les OSBL; nous en avons 200 dans le programme pour les sans-abri et également, pour les OSBL, les groupes de ressources techniques et les coops, surtout de la catégorie 1; en rénovation, nous avons le programme PARCQ qui s'occupe des rénovations; vous pouvez également rénover des immeubles. Je pense que nous avons actuellement un éventail de programmes qui s'appliquent aux gens sous le seuil de la pauvreté ou aux alentours du seuil de la pauvreté.

Finalement, je dis aux gens d'Hochelaga-Maisonneuve que nous avons récemment accordé dix unités de supplément au loyer dans le secteur privé, quoi qu'en dise la députée qui vous représente et qui ne semble pas au courant. Alors, cela fera au moins dix familles de plus de votre quartier

qui pourront se loger dans des logements à des loyers qui représenteront 25 % de ieur revenu. Merci.

Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie. M. le député de Shefford.

M. Paré: Oui, très rapidement pour vous remercier. Je n'ai pas l'intention de faire le tour et de commenter tout ce qu'a dit le ministre, sauf que vous serez les premiers juges dans vos quartiers pour voir si les programmes répondent réellement à vos besoins. Je pense que le programme PARCQ a fait ses preuves de non-applicabilité en 1986. On verra, en 1987, à l'étude des crédits. Le ministre nous dit finalement qu'il vous accorde de nouveaux droits, mais vous avez tout à fait raison, des droits sans moyen pour les exercer, cela ne vaut rien.

Je vous remercie beaucoup des témoignages que vous avez apportés et vous pouvez être sûrs qu'on va les utiliser au bon moment.

Le Président (M. Rochefort): Merci de votre présence parmi nous.

Sur ce, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures. Je vous rappelle l'importance d'être à l'heure à 15 heures. Vous pouvez laisser vos documents sur place; ils seront gardés sous surveillance pour la durée du repas.

La commission suspend donc ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance è 13 h 45)

(Reprise à 15 h 8)

Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de l'aménagement et des équipements reprend ses travaux dans le cadre de la consultation générale qu'elle mène sur le document gouvernemental concernant la levée du moratoire sur la conversion des immeubles locatifs en copropriété divise.

J'inviterais maintenant les représentants de la Commission des droits de la personne, qui sont devant nous, à nous faire leur exposé. Je vous rappelle que vous avez une quinzaine de minutes pour nous faire la présentation de votre mémoire. Ensuite, chacune des deux formations politiques jouira d'une période d'une quinzaine de minutes pour échanger des propos avec vous. Alors, bienvenue parmi nous et, sans plus tarder, je vous demanderais de nous faire la présentation de vos opinions.

Commission des droits de la personne

M. Lachapelle (Jacques): Merci, M. le Président. Je me permets de m'identifier, pour les auditeurs, Jacques Lachapelle, président de la Commission des droits de la personne; également, Mme Renée Lescop, de la direction de la recherche à la Commission des droits de la personne.

D'abord, je voudrais remercier les membres de cette commission de nous permettre de faire entendre le point de vue de la commission sur la levée du moratoire sur la conversion des immeubles locatifs en copropriété divise. Je pense que c'est une question économique extrêmement importante. C'est aussi une question qui touche de très près les droits et les libertés de la personne. D'ailleurs, il y a une partie de la Charte des droits et libertés qui touche aux droits économiques et sociaux.

Je pense que le gouvernement est conscient que la levée du moratoire est importante et je pense que cette commission est également très réceptive aux suggestions qui seront faites, puisqu'un livre blanc est déposé ici pour discussion. Le moindre faux pas dans ce domaine pourrait nous entraîner et pourrait avoir des conséquences déplorables qu'il faudra, tôt ou tard, réparer si jamais on le faisait. Alors, je crois qu'il est important de réfléchir sur cette question avant de faire quelque mouvement que ce soit.

Le document qui a été présenté par la Commission des droits de la personne ne fait des commentaires que sur la levée du moratoire comme telle et sur les conditions autour de la levée du moratoire. Avec votre permission, puisque nous avons une quinzaine de minutes, j'aimerais demander à Mme Lescop de nous présenter une partie qui n'est pas incluse dans le mémoire remis aux membres de la commission et qui a trait è certains éléments factuels de ce dossier, certains éléments économiques concernant plus particulièrement les personnes âgées.

Alors, j'imagine, M. le Président, que nous ne voyez pas d'objection à ce que Mme Lescop nous fasse cet exposé.

Le Président (M. Rochefort): Bien au contraire.

M. Lachapelle: Merci.

Le Président (M. Rochefort): Madame.

Mme Lescop (Renée): Merci, M. Lachapelle. Je voulais tout simplement faire ressortir, en quelques minutes, les deux genres de problèmes concernant le logement, plus particulièrement la discrimination en matière de logement, que les travaux de la commission ont permis de dégager.

Le premier problème en est un d'accessibilité financière; c'est un problème économique. Le second problème, c'est un problème de conservation des logements, un

problème dont la dimension est beaucoup plus juridico-sociale.

Pour ce qui est de l'accessibilité financière, je pense que je n'apprendrai rien à personne en disant que, particulièrement à Montréal, les loyers ont augmenté de 32,5 %, selon les chiffres qui nous ont été fournis par la Régie du logement, depuis 1981, une augmentation qui est au moins de deux à trois fois plus élevée que l'augmentation des prix à la consommation et une augmentation nécessairement beaucoup plus élevée que l'augmentation des revenus des particuliers. Parmi ces particuliers, je pense qu'il faudrait souligner les personnes âgées dont le revenu moyen - il faut aussi ne pas l'oublier - est, pour les hommes en 1985, de 11 885 $ par année et, pour les femmes, de 7 265 $ par année. Donc, ces loyers à Montréal sont de plus en plus élevés et de plus en plus difficiles à assumer financièrement pour les personnes à revenu faible ou fixe.

Le deuxième problème, c'est celui de la conservation des logements. Il est lié a la difficulté en réalité d'exercer un droit qui est pourtant reconnu au Code civil à l'article 1657, celui du droit au maintien dans les lieux en raison, en particulier, des nombreuses limitations dont ce droit est assorti. Le locataire risque de perdre ou de quitter son logement pour les raisons prévues par la loi, soit la démolition, la reprise de possession, les réparations majeures, le changement d'affectation, les subdivisions et bientôt, si le moratoire est levé, la conversion en copropriété,

Le document ministériel dont nous avons pris connaissance a pris acte de ces deux problèmes, économique et juridique, et il a formulé des propositions de solution. Ces solutions, particulièrement sur le deuxième problème, la reconnaissance du droit au maintien de façon illimitée, sont un progrès par rapport à la situation actuelle, mais je pense qu'il est illusoire de penser - et cela serait se faire beaucoup d'illusions - qu'elles règlent tout. Le problème de la hausse du coût des loyers à Montréal, en particulier, est un problème qui reste entier malgré les propositions contenues dans le document ministériel, il reste entier pour les locataires à faible revenu. Ceux-ci sont encore devant la même alternative qui est la suivante: ou bien ils acceptent les hausses de loyer et ils vivent avec mais doivent consacrer de 50 % à 60 % de leur revenu au loyer, ces données ont été mises en lumière récemment par la Société de Saint-Vincent-de-Paul, par divers organismes, ou bien lorsqu'ils ne peuvent vraiment assumer ces augmentations de loyer, c'est le déménagement forcé, c'est le déracinement d'un quartier où on a souvent habité et, pour les personnes âgées, je pense que le problème est particulièrement aigu.

Sur le plan de la reconnaissance du droit au maintien dans les lieux de façon illimitée, je pense que là aussi il ne faut pas se faire trop d'illusions sur la protection qu'offre la législation. Cela ne changera pas non plus le fait que bien souvent le locataire, particulièrement le locataire peu informé, la personne âgée, est mis devant le fait accompli, il n'a pas le temps de se retourner que les délais sont déjà écoulés. L'évacuation temporaire est souvent synonyme de déménagement et aussi cette protection que lui reconnaît la loi repose sur deux préalables qui, dans le cas de certains locataires, font malheureusement défaut. Préalable premier, l'information. Beaucoup de locataires ne sont pas informés sur leurs droits. Le deuxième préalable, c'est la capacité et la volonté aussi d'exercer les recours qui nous sont reconnus par la loi. Vous le savez, les recours sont limités. Ils sont extrêmement complexes; en fait, dans notre système tout repose sur le locataire, y compris le fardeau de la preuve. Il est donc bien difficile pour ces locataires, onéreux et coûteux en énergie et en temps d'exercer ces droits.

Je pense qu'il ne faudrait pas oublier ceux qui sont les plus menacés actuellement par la levée du moratoire, ceux qui sont menacés de quitter leur logement, soit pour des raisons économiques parce qu'ils ne peuvent plus en assumer les loyers, soit pour toutes sortes de raisons qui sont prévues par la loi, la démolition, les réparations et bientôt la conversion en copropriété. Je pense que la question à se poser, c'est: Est-ce que cette protection supplémentaire qu'on veut leur accorder va véritablement changer quelque chose à cet égard?

Le Président (M. Rochefort) M.

Lachapelle.

M. Lachapelle: Je me permets de présenter le mémoire de la commission. La commission s'intéresse à ce dossier, entre autres, pour trois raisons: la première, c'est que la Charte des droits et libertés de la personne donne des protections spéciales aux personnes âgées et aux personnes handicapées. Une deuxième - je pense que c'est important de le souligner de façon précise, - c'est l'article 6 qui donne à toute personne le droit à la jouissance paisible, à la libre disposition de ses biens, sauf, bien sûr, dans la mesure prévue par la loi. Il est important de le souligner parce que la charte reconnaît des droits à des personnes susceptibles de subir de la discrimination, mais également à toute personne, donc à des propriétaires aussi, à la libre disposition de leurs biens.

Le document ministériel propose expressément comme mesure, - c'est le troisième point, - que les dossiers d'exploitation concernant les personnes âgées

et les personnes handicapées soient référés à la Commission des droits de la personne pour enquête. Donc, sur ce chapitre, la Commission des droits de la personne est vivement intéressée par ce dossier.

Je souligne également que, concernant cette seconde proposition, la commission a un pouvoir d'enquête selon l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne en matière de discrimination, en matière de harcèlement.

Pour entrer de plein pied dans les sujets qui nous intéressent, les articles 10.1 et 48 établissent la juridiction de la Commission des droits de la personne. L'article 10.1 indique: "Nul ne peut harceler une personne en raison de l'un des motifs visés dans l'article 10". L'article 10, on le sait, mentionne l'âge et mentionne le handicap. Également, ce harcèlement, on pourrait le définir de la façon suivante. Il s'agit d'une conduite se manifestant, entre autres, par des paroles, des actes ou des gestes répétés, à caractère vexatoire ou méprisant, à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes en raison par exemple de sa condition sociale, de son âge ou de son handicap.

L'autre article sur lequel la commission peut intervenir par voie d'enquête, c'est en matière d'exploitation. L'article 48 mentionne: 'Toute personne âgée ou toute personne handicapée a droit d'être protégée contre toute forme d'exploitation".

L'exploitation, la commission l'a déjà définie dans ses documents. Pour qu'il y ait exploitation d'une personne âgée ou handicapée, trois conditions doivent être réunies. Que cette personne âgée ou handicapée subisse un préjudice moral ou matériel de la part d'une autre personne ou d'un organisme. Que son âge avancé ou son handicap l'affecte au plan physique, mental ou psychologique au point de la placer dans une situation de dépendance. Finalement, que la personne ou l'organisme mis en cause mette à profit cette situation de dépendance et lui cause tel préjudice. La commission a, en vertu de la charte, le pouvoir de faire enquête sur ces plaintes de harcèlement et d'exploitation.

Les mesures de protection en faveur des locataires. Les mesures de protection qui sont prévues dans le cadre de la levée du moratoire sur la conversion en copropriété sont-elles des garanties suffisantes aux personnes vulnérables au harcèlement et a l'exploitation et désirant exercer leur droit au maintien dans les lieux?

Premièrement, les mesures contre la reprise de possession. Il est à noter que dans le projet proposé par le document ministériel, l'exercice du droit à la reprise de possession n'est interdit qu'à partir du moment où l'avis de l'intention de convertir est émis au locataire. Rien ne semble donc empêcher le propriétaire de se prévaloir de ce droit avant d'émettre l'avis de conversion tel qu'exigé dans le projet. Ce dernier demeure en effet silencieux sur les mesures qui pourraient être prises à rencontre des propriétaires qui reprendraient possession des logements en évinçant les locataires qui s'y trouvent et procèdent ensuite à la conversion de leur immeuble en copropriété divise. Dans l'état actuel de la législation, l'exercice du droit à la reprise de possession par le propriétaire est assujetti à un certain nombre de conditions qu'on retrouve dans la loi: celle de donner un avis de six mois avant l'expiration du bail; celle, en cas de refus du locataire de quitter le logement, de demander l'autorisation de la régie dans le mois du refus et de démontrer qu'il est de bonne foi et qu'il entend réellement reprendre possession du logement et qu'il ne s'agit pas d'un prétexte pour atteindre d'autres fins. Une telle disposition ne s'applique cependant que si le locataire refuse de quitter les lieux. Mais si un locataire est docile, comme cela peut être le cas des personnes âgées ou handicapées ou de certains immigrants, et a déjà quitté les lieux, il faudrait prévoir, nous pensons, une disposition lui garantissant que le propriétaire n'aura pas recouru au moyen détourné de l'exercice du droit a la reprise de possession pour procéder à la conversion.

On devrait, en conséquence, refuser l'autorisation de la conversion pour la période de trois ans dans le cas où le propriétaire évince ses locataires sous le prétexte de reprendre possession de son immeuble et a demandé ladite autorisation en question en évitant ainsi de donner l'avis préalable requis aux locataires.

Deuxièmement, les mesures contre l'éviction de locataires pour cause de réparations urgentes. Les propositions du ministre visant à décourager le contournement des règles de conversion n'apparaissent pas s'appliquer au cas où il y a résiliation du bail parce que le logement, selon le locateur, est devenu impropre à l'habitation et qu'il y a lieu de procéder a des réparations urgentes. Dans ce cas, le locataire dispose de la possibilité de soumettre la demande à la régie. Cette dernière peut déclarer d'office que le logement est impropre à l'habitation et statuer sur le loyer, fixer les conditions nécessaires à la protection des droits des locataires et, le cas échéant, ordonner que le logement soit rendu propre à l'habitation.

Le problème dans ce cas, comme dans la situation où le propriétaire décide de faire des réparations majeures, est que le locataire est souvent mis devant le fait accompli. De gré ou de force, il est souvent obligé de quitter les lieux, le temps que les réparations soient terminées et que le logement, bien sur, redevienne propre à

l'habitation.

À défaut d'une ordonnance du tribunal qui ne peut avoir lieu que sur l'initiative du locataire, le harcèlement ou l'intimidation aboutissent souvent au même résultat.

Selon les propositions du ministre, seules les réparations majeures autres qu'urgentes, ayant nécessité l'évacuation des locataires et qui ont été effectuées dans le but de préparer l'immeuble à la conversion et d'évincer les locataires, peuvent justifier de la part de la Régie du logement un refus d'autorisation de conversion en copropriété ou un recouvrement en dommages-intérêts de la part des locataires.

Nous estimons que les réparations majeures mais urgentes et qui aboutissent au même résultat, à savoir l'éviction des locataires pour pourvoir procéder à une conversion devraient également justifier un refus d'autorisation de la conversion en copropriété.

Troisième élément, les mesures contre la hausse des coûts d'occupation ou la hausse de prix de vente à la suite de travaux effectués dans le cadre d'une conversion. Même à supposer que la limite imposée par la Régie du logement à la hausse du loyer occasionnée dans le cadre d'une conversion soit scrupuleusement respectée, celle-ci représente néanmoins un fardeau financier difficile à supporter pour les personnes à revenu faible et fixe, ce qui est le cas d'un nombre important de personnes âgées ou handicapées. Je répète encore une fois que 60 % des personnes âgées vivent actuellement sous le seuil de la pauvreté. Pour elles, l'alternative est la suivante: ou bien elles acceptent ces hausses de loyer et elles consacrent une part de plus en plus grande de leur revenu au logement - jusqu'à 50 % et même 60 % - réservant une part congrue de leur revenu à l'alimentation, au vêtement et au loisir, ou elles refusent ces hausses de loyer et elles n'ont d'autre choix que de déménager, se déracinant d'un logement et souvent d'un quartier où elles ont vécu une grande partie de leur vie.

De plus, on dit que la conversion des immeubles locatifs en copropriété divise aura certes pour effet de permettre à une certaine catégorie de locataires d'accéder à la propriété. Cependant, pour les locataires à revenu modeste, cet accès n'est qu'illusoire, d'autant que la propriété divise commande un prix de vente inabordable et est généralement assujettie à un impôt foncier plus élevé; la majorité des locataires âgés ou handicapés étant incapables d'acheter les logements ainsi convertis seront donc obligés de quitter les lieux qu'ils habitent. Même si la commission ne se sent pas en mesure de proposer des recommandations à ce stade, elle souhaiterait néanmoins attirer l'attention des autorités publiques sur les sérieuses conséquences auxquelles auront à faire face les personnes démunies à la suite de l'augmentation des coûts de location que la levée du moratoire risque d'entraîner.

Quatrièmement, les mesures contre le harcèlement et l'exploitation des personnes âgées ou handicapées. Les propriétaires convertisseurs, mettant à profit la situation de dépendance dans laquelle se trouvent certaines catégories de personnes et de surcroît à faible revenu, ont souvent recours a toute forme de harcèlement en vue de créer un climat d'intimidation les forçant à quitter les lieux. En octobre 1986, 400 membres de l'Association of tenants against conversion in condos, tous des résidents entre 65 et 75 ans de Côte-Saint-Luc, avaient dénoncé les multiples formes d'intimidation qu'ils subissaient lors des rénovations: ascenseurs qui arrêtent de fonctionner, chauffage fermé, hausse de loyer, bruits de nettoyage par jets de sable sur les murs extérieurs, rénovations qui se font dans l'immeuble à l'étage au-dessus, etc.

La suggestion du ministre de référer, pour enquête, è la Commission des droits de la personne les dossiers de harcèlement et d'exploitation des locataires âgés ou handicapés par les propriétaires convertisseurs ou par les nouveaux acquéreurs est sûrement une bonne initiative, d'autant plus qu'il est déjà prévu dans la loi que la commission puisse faire enquête. Je pense, toutefois, que la suggestion de guichet unique est une amélioration sur la situation où la Régie du logement pourra peut-être davantage vérifier les possibilités qu'il y ait exploitation de ces personnes.

Cependant, il ne faudrait pas penser qu'une telle suggestion constitue la seule solution adéquate au problème. En effet, l'expérience de la commission dans les enquêtes sur les cas d'exploitation des personnes âgées dans d'autres domaines que le logement a pu démontrer que ces personnes, se trouvant souvent dans une situation d'intimidation, de peur, de dépendance, peuvent difficilement aider les enquêteurs à constituer des éléments de preuve suffisants pour convaincre du bien-fondé de leurs plaintes. Ceci est encore plus vrai s'agissant des situations de harcèlement et d'exploitation dans le secteur du logement qui sont, dans la plupart des cas, comme on vient de le noter, d'ordre psychologique. Dans ces conditions, y aurait-il lieu d'évaluer la portée réelle d'une telle suggestion et d'envisager en conséquence les moyens de la rendre plus efficace?

À cet égard, la commission voudrait davantage mettre l'accent sur le problème vécu particulièrement par les groupes de personnes protégés par la charte. En cas de conversion ne respectant pas les conditions que requiert la réglementation, c'est toujours au locataire qu'incombe le fardeau de prouver l'utilisation de moyens détournés

auxquels a pu recourir le propriétaire. Dans un tel contexte, les personnes âgées ou handicapées, particulièrement celles à faible revenu, mériteraient, selon la commission, une attention individualisée de la part de la régie pour la constitution de dossiers solides et ce, pour les raisons ci-après: a) leur état de dépendance et de vulnérabilité. Davantage que d'autres locataires en raison de leur état de dépendance matérielle et psychologique, les répercussions d'un déménagement éventuel leur sont insupportables. Un bon nombre d'entre elles vivent actuellement sous la menace de devoir quitter leur logement pour des raisons économiques d'abord parce qu'elles ne peuvent plus en assumer le loyer - il faut noter, comme le disait tantôt Mme Lescop, que les loyers ont augmenté de 32,5% depuis 1981 alors que le revenu des personnes âgées n'a pas augmenté dans les mêmes proportions, et même en très faible proportion - et pour toutes sortes d'autres raisons telles que la démolition, des réparations majeures, les changements d'affectation ainsi que la reprise éventuelle des conversions en copropriété divise. Le droit au maintien dans les lieux est d'autant plus important dans leur cas que leur logement constitue pour elles non seulement un gîte mais leur univers principal. b) ignorance de leurs droits et des recours existants. On s'en rend compte à la commission, beaucoup de personnes âgées ou handicapées locataires ne connaissent pas leurs droits dans le secteur du logement comme ailleurs. Celle ou celui qui ne connaît pas ses droits et ses recours est la victime toute désignée de certains propriétaires qui pourraient en profiter pour agir en toute impunité et sans égard à la loi. (15 h 30)

II faut noter aussi la complexité des recours. L'utilisation des divers recours prévus dans le projet demande une énergie et une combativité que certains locataires âgés n'ont pas ou n'ont plus envie d'investir à de telles fins. Pour faire face à un propriétaire qui a décidé de convertir son immeuble en copropriété divise, il faut avoir beaucoup d'audace et être bien armé pour ne pas succomber aux pressions et au harcèlement qui ne manqueront pas d'être faits dans certains cas. Les personnes âgées ou handicapées sont particulièrement vulnérables à cet égard. Sans l'aide supplémentaire que nécessite une telle situation, il est fort à parier que peu d'entre elles seront en mesure d'utiliser les recours qu'on mettra à leur disposition.

L'argument avancé dans le projet ministériel pour écarter la possibilité d'une telle protection n'est pas tout à fait convaincant. On y dit en effet: "II .faut être conscient que multiplier les mesures visant à protéger de façon particulière une clientèle distincte a souvent pour effet de lui rendre difficile la recherche d'un logement."

Mais comme la Charte des droits et libertés de la personne interdit la discrimination fondée sur l'âge ou le handicap, entre autres, dans le secteur du logement, la commission veillera à ce que la difficulté mentionnée dans le document ministériel soit évitée à l'occasion de l'examen des plaintes qui lui sont adressées par les personnes concernées. Lors des enquêtes qu'elle sera appelée à faire sur chacun des cas, il lui reviendra d'entamer la procédure en vue de faire respecter, s'il y a lieu, leur droit de ne pas subir de discrimination dans la recherche d'un logement.

En faisant ces commentaires sur le document ministériel, la commission aimerait rappeler qu'il n'est pas de son intention de particulariser démesurément les problèmes d'un groupe par rapport à ceux d'un autre ou même d'imposer les intérêts d'un groupe à ceux d'un autre ou de généraliser à l'ensemble d'un groupe une situation qui n'affecterait pas nécessairement tous les membres de ce groupe au risque de créer une sorte de ghetto pour ces personnes. Les droits inscrits dans la charte s'appliquent en effet à toute personne, qu'elle soit propriétaire ou locataire. Si la commission a mis l'accent dans son mémoire sur les personnes âgées ou handicapées, c'est d'abord et avant tout parce que le document ministériel l'y invite implicitement en lui rappelant son mandat en cas d'exploitation et de harcèlement de ces personnes. Cependant, les recommandations qui suivent peuvent très bien s'appliquer à toute personne locataire qui, dans le cadre d'une conversion en copropriété divise, risque de subir de l'exploitation ou du harcèlement.

On pourrait faire état des recommandations de la commission. Compte tenu des difficultés que rencontrent souvent les locataires, surtout ceux parmi eux qui sont âgés ou handicapés, à faire respecter leurs droits reconnus par la loi, les recommandations les plus importantes de la commission portent sur l'importance de sensibiliser ces personnes à leurs droits, au contenu exact de ceux-ci et de prévoir également un mécanisme de soutien individuel dans l'exercice de ces mêmes droits. Ces recommandations sont donc les suivantes: 1° s'assurer qu'à l'occasion de chaque conversion, les locataires concernés soient dûment sensibilisés è leurs droits et bien informés de leur contenu et des divers recours qu'ils ont à leur disposition et leur fournir te soutien nécessaire et au besoin individualisé à l'exercice de ces droits et de ces recours. De plus, la loi qui serait adoptée à la suite des mesures d'encadrement proposées avant la levée du moratoire devrait recevoir toute la publicité requise et

être portée à la connaissance du grand public dans un langage simple et accessible à tous. 2° accorder au locataire le droit d'exiger que toute entente qu'il conclut avec le propriétaire dans le cadre d'une conversion soit notariée et porte minute. Nous croyons qu'avec la présence d'un notaire ou d'une personne ayant des connaissances juridiques, on pourrait informer adéquatement toute personne de tous ses droits pour qu'elle ne soit pas inquiète lors de la signature d'un tel document.

Les autres recommandations que nous faisons portent particulièrement sur certaines mesures d'encadrement qui devraient s'ajouter à celles proposées dans le document ministériel: 3° refuser l'autorisation de la conversion dans le cas où le propriétaire reprend possession des logements de son immeuble après en avoir évincé ses locataires et désire procéder ensuite à une conversion en évitant ainsi de donner à ces derniers l'avis d'intention de convertir préalablement requis. Comme dans les cas mentionnés dans le document ministériel, ce refus d'autorisation devrait être pour une période de trois ans.

Enfin, 4° refuser l'autorisation de conversion en cas d'éviction de locataires pour travaux urgents nécessités par l'état du logement devenu impropre à l'habitation, si ces travaux, bien sûr, ont fourni au propriétaire le prétexte pour convertir son immeuble en copropriété divise. Ce refus d'autorisation vaudrait également pour une période de trois ans.

Je conclus, M. le Président, en réitérant notre inquiétude face à la levée du moratoire pour ce qui est des personnes protégées par la Charte des droits et libertés de la personne, particulièrement les personnes âgées, les personnes handicapées et les personnes ayant un statut social précaire. Je voudrais également vous indiquer que la Commission des droits de la personne s'intéresse à cette question, s'est intéressée plus particulièrement à la question de la location pour ce qui est des minorités ethniques et que nous sommes à préparer une documentation sur ce sujet à la suite d'enquêtes que nous avons menées dans divers secteurs de la ville de Montréal. Nous sommes heureux de constater que le ministre a l'intention d'adopter une politique plus globale concernant le logement. Là-dessus, nous aurons sûrement des commentaires à faire concernant la discrimination que peuvent subir certains groupes ethniques dans la région de Montréal par rapport aux questions de logement.

Nous sommes heureux d'avoir contribué, nous l'espérons, quelque peu aux travaux de votre commission. Nous vous remercions, M. le Président.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Lachapelle. Je tiens à rappeler aux membres de la commission qu'il reste 18 minutes. Donc, nous répartirons le temps uniformément: 9 minutes pour chaque côté.

M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Bourbeau: J'ai un commentaire. Je félicite la commission pour la présentation de son mémoire. La commission nous indique comment il est difficile de démontrer les cas de harcèlement et de discrimination envers les personnes âgées ou handicapées. La commission réaffirme dans son mémoire que dans le régime actuel, un propriétaire peut reprendre possession des logements de son immeuble après en avoir évincé ses locataires. On a peut-être mal saisi ce que vous voulez dire, mais dans le régime actuel, il n'est pas possible pour un propriétaire d'évincer des locataires pour reprendre possession des logements sauf pour un logement, le logement que veut occuper le propriétaire lui-même ou encore pour des membres de sa famille selon des modalités bien précises qui sont déterminées par la Régie du logement. II y a également l'interdiction pour une personne morale d'évincer tout locataire, quel qu'il soit. Il y a aussi l'interdiction pour des propriétaires indivis d'évincer des locataires quand il s'agit d'un immeuble de cinq logements ou plus. Alors, je ne pense pas qu'on puisse dire qu'actuellement, un propriétaire peut évincer ses locataires pour convertir.

M. Lachapelle: On sait, M. le ministre, comment certains propriétaires ont pu manoeuvrer dans le passé pour... Je comprends que vous indiquiez que...

M. Bourbeau: Oui.

M. Lachapelle: ...des propriétaires indivis ne peuvent pas...

M. Bourbeau: Je comprends ce que vous voulez dire, sauf que vous utilisez l'expression "reprise de possession".

M. Lachapelle: D'accord.

M. Bourbeau: Or, la reprise de possession est connue comme étant le geste d'un propriétaire qui dit à un locataire: Veuillez sortir...

M. Lachapelle: Je veux reprendre.

M. Bourbeau: ...je veux prendre le logement.

M. Lachapelle: Oui.

M. Bourbeau: Finalement, j'ai une seule question. Dans le document, on parle de la possibilité que la Régie du logement, à

même son guichet unique qui sera mis en place pour s'occuper des personnes âgées et des personnes handicapées, puisse vous référer les cas de harcèlement qui lui seront signalés. Êtes-vous en mesure d'agir si jamais la Régie du logement ou lorsque que la Régie du logement vous dira: Voici, il y a des cas de harcèlement; à tel endroit, on a tout lieu de croire qu'il y s du harcèlement? Serez-vous en mesure d'agir, de faire enquête et de prendre action le cas échéant?

M. Lachapelle: Je pense qu'on doit préciser qu'il s'agit non seulement de cas de harcèlement mais d'exploitation, ce qui est quand même un domaine un peu particulier. Mais on imagine que les cas d'exploitation résultent d'abord et souvent de cas de harcèlement. Ce qu'on vous mentionne sur cette question, c'est que les preuves en pareils cas ne sont pas faciles. Je passe à la première partie de votre question: Est-ce que la commission pourra agir? Oui, bien sûr. Elle fera enquête. Je ne pourrais pas vous affirmer que dans l'état actuel des effectifs de la commission, si on nous faisait parvenir quelques centaines de dossiers en même temps, on pourrait avec quelque 25 enquêteurs actuellement couvrir l'ensemble de toutes ces plaintes. Encore une fois, il s'agit peut-être d'une disposition administrative qu'on pourra régler éventuellement avec le ministère de la Justice. Ce qu'on peut vous dire, c'est que la commission fera enquête lorsqu'on nous saisira des dossiers. Il sera important, je pense, préalablement, qu'avec la Régie du logement, on puisse informer les personnes sur la tenue et comment monter un dossier pour être véritablement efficace. Souvent, malheureusement, des personnes âgées nous arrivent avec des bribes d'information: J'ai subi du harcèlement. Oui, mais comment? Bien, telle journée. C'est souvent très vague. Ces dossiers sont extrêmement difficiles à monter parce que les personnes, souvent, sont très démunies et elles n'ont pas pris les précautions nécessaires, soit de prendre des notes sur les événements qui sont produits. C'est très vague. Les événements récents se chevauchent parfois avec des événements passés. C'est très difficile. Je pense qu'il faudra véritablement s'entendre avec la Régie du logement sur un gabarit de preuve pour nous permettre ensuite d'être efficaces.

D'autre part, je comprends aussi que même si on parle de guichet unique, cela n'empêcherait pas toute personne de venir porter plainte à la commission, la 'charte n'étant pas amendée; à moins qu'on ne l'amende et qu'on dise: II n'y aura qu'un guichet unique. Je pense qu'il serait intéressant que ces plaintes soient filtrées d'abord par la Régie du logement et que celle-ci, justement, prenne des cas qui lui semblent intéressants. Dans un tel contexte, la commission pourra agir. Mais encore une fois, la preuve demeure extrêmement difficile.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Lachapelle. Je cède maintenant la parole à M. le député de Shefford.

M. Paré: Merci, M. le Président, Moi aussi, je vous remercie de la présentation de votre mémoire. Même si je l'avais lu, je dois dire qu'en écoutant les commentaires que vous avez faits, j'ai le goût de discuter avec vous en réfléchissant tout haut. On parle beaucoup, maintenant, d'un des objectifs qui est l'accès à la propriété. Donc, on parle de futurs propriétaires. On parle de l'accès à la propriété comme de la situation idéale. Sauf qu'il ne faut pas oublier qu'il existe et qu'il existera toujours des locataires. C'est un choix et il faut respecter cela. Je pense que vous êtes bien placés pour le respect des choix des individus. Les locataires sont souvent là par choix et malheureusement, très souvent aussi, par obligation. Je pense qu'il faut absolument respecter cela. Avec les chiffres que vous nous avez donnés sur la situation des personnes âgées, cela ne va pas en s'améliorant, au contraire. Donc, depuis 1981, la situation des personnes âgées s'est détériorée grandement, au point où pour la majorité, l'accès à la propriété est utopique et impensable. En même temps, ce que les gouvernements proposent et suggèrent et ce qu'on apporte comme projet, c'est le maintien à domicile et la désinstitutîonnali-sation. À un moment donné, il va falloir être constant, il va falloir être logique dans ce que l'on fait comme gouvernement et ne pas aller en vase clos: un ministère dans une direction et l'autre complètement dans une autre. Là, on veut désinstitutionnaliser et garder les gens chez eux. On demande au ministère de la Santé et des Services sociaux de donner davantage pour garder les gens chez eux et, en même temps, on amène avec cette espèce d'idole de propriété une espèce de sens tout à fait contraire qui fait que là, maintenant, on va plutôt favoriser les propriétaires. Et pour les locataires, il y aura plutôt un risque ou je pense une certitude de déplacement pour les personnes les plus vulnérables. On sait que pour les personnes âgées, l'un des graves problèmes, c'est justement l'insécurité. Si on les déloge, on vient de compliquer terriblement la vie de ces gens. Pour le ministère de la Santé et des Services sociaux, c'est augmenter considérablement les problèmes et les coûts. J'avais le goût de réfléchir tout haut. C'est en vous écoutant, finalement, que cela m'est venu. C'est pour cela que tes échanges, c'est important. Comme orientation gouvernementale, je trouve qu'on est en train de s'"écartiller"; on va se ramasser avec des problèmes beaucoup plus graves au niveau

social que ce qu'on va avoir comme gain économique de l'autre côté. Moi, cela me convainc juste davantage que la proposition ne tient pas.

J'aurais une question à poser mais comme c'est limité, je vais plutôt essayer de vous en poser quelques-unes en même temps. On dit que ceia prend un guichet unique pour les personnes âgées et les personnes handicapées. Je vous pose la question parce que cela a été même soulevé ce matin. Est-ce qu'on ne risque pas de venir pénaliser davantage ces clientèles les plus vulnérables en faisant en sorte qu'il y ait une protection en plus? Est-ce que cela va vouloir dire que les propriétaires bailleurs qui acceptent dans leur logis ou leur loyer cette clientèle plus vulnérable seront moins portés à l'accepter? C'est ma première question. La deuxième: On dit que comme tâche ou comme responsabilité du guichet unique, c'est de fournir beaucoup d'information, que ces gens connaissent leurs droits et ce qu'ils ont comme possibilité de recours, C'est beau de donner de l'information mais regardons à la page 8 ce que vous avez souligné comme points: leur état de dépendance et de vulnérabilité, l'ignorance de leurs droits et des recours existants et la complexité des recours. Est-ce que vraiment, pour venir en aide à ces gens, même si cela prend beaucoup d'informations et de connaissances de leurs droits et recours, cela ne prend pas plus que cela? Le plus, est-ce que ce ne serait pas, pour être capable de passer à travers tout cela, une aide technique? Si oui, je ne pense pas que ce soit la Régie du logement qui puisse fournir une aide technique, puisque la Régie du logement est là pour trancher et la commission pour faire des enquêtes. Donc, ce ne pourra pas être ia commission non plus. Est-ce que, si on veut vraiment aller au-delà des souhaits pour aider ces deux clientèles, il ne faudrait pas qu'il y ait une aide technique qui soit légalement reconnue à ces gens et qui serait fournie par d'autres associations qui pourraient être les groupes de ressources techniques ou les associations de locataires? (15 h 45)

Le Président (M. Saint-Roch): M. Lachapelle.

M. Lachapelle: C'est l'essence, finalement, de notre première recommandation. Quand on parle de sensibiliser les personnes et qu'on parle d'un support individualisé, nous croyons que ces personnes ne peuvent recevoir comme cela de l'information en vrac, même sur de beaux papiers bien faits, bien dégagés et bien colorés. Nous croyons que chaque personne qui se présente à la régie avec un problème spécifique doit recevoir un support individualisé, ce qui va supposer un nombre important de personnes pour l'aider.

Pour ce qui est de la question du guichet unique, quant à nous, on trouvait la formule intéressante, soit une espèce de filtre avant de se rendre à la Commission des droits de la personne pour bien indentifier et bien cerner le sujet. Cela nous apparaissait un moyen intéressant pour avoir une information cohérente et complète. Bien sûr, la Commission des droits de la personne pourra recevoir toute personne. Je le mentionnais tantôt parce que la charte a déjà un article 48 qui précise bien qu'une personne âgée ou handicapée qui subit de l'exploitation peut s'adresser à la commission. Alors, le guichet ne sera pas en principe unique même si, formellement, on l'aura établi de cette façon.

Encore une fois, je suis également de votre avis. Ces personnes doivent recevoir un support individualisé. Les éléments qu'on indique dans notre document en font état. On doit vous dire qu'à la commission, on a eu des cas extrêmement pénibles de personnes exploitées et même des personnes qu'on voulait aider et qu'on a été obligé d'aider malgré elles en prenant des injonctions devant les tribunaux pour les faire sortir d'endroit où elles étaient exploitées. Ces personnes ne voulaient pas sortir, parce qu'elles se disaient bien, même exploitées. Alors, on imagine bien que ces personnes exploitées ne viendront pas à la commission ni à la Régie du logement et ces cas nous inquiètent beaucoup. Évidemment, ils ne seront pas là par milliers. Il ne s'agit pas d'avoir des milliers d'injustices pour crier à l'injustice. Il y en aura et cela nous inquiète énormément. Je pense encore une fois que le support individualisé et technique sera très important. Je ne me prononcerai pas à savoir si la régie sera en conflit d'intérêts si c'est elle qui le donne. Quant à moi, c'est une question qui relève administrativement de la régie.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Shefford.

M. Paré: J'aimerais avoir vos commentaires sur le principe du rachat du droit du maintien à domicile. On sait que cela a été aussi soulevé et que le ministre a même déclaré que c'était en soi une chose tout à fait acceptable sinon une bonne chose. De toute façon, que ce soit l'un ou l'autre qui soit dans le logement, il est habité et un pour un, cela veut dire le même nombre de personnes qui demeure dans un logement. Donc, quand quelqu'un veut faire le rachat, que ce soit le propriétaire actuel ou le copropriétaire à la suite de la transaction, il décide d'aller voir la personne âgée, la personne handicapée ou n'importe lequel des locataires en place et de lui offrir un montant quelconque. Que pensez-vous de ce principe de rachat du droit de propriété,

quand on sait très bien qu'en fin de compte, c'est une personne démunie et que quand elle l'aura dépensé, elle n'en aura plus, et le stock du marché locatif aura diminué?

M. Lachapelle: Ma première réaction est quasi viscérale, j'allais dire. Cela m'apparaît quasi inacceptable qu'on puisse négocier ce droit avec une somme d'argent. Si une personne désire demeurer dans son logement parce que c'est son choix, on ne devrait pas la placer devant le choix de recevoir un montant d'argent. Je dois vous avouer qu'avec les quelques études que nous avons faites sur ce sujet, cela serait inquiétant de proposer qu'on puisse racheter ce droit. Je ne sais pas si Mme Lescop a des commentaires aussi sur cette...

Mme Lescop: Je pense que cela se fait couramment maintenant et qu'on rachète pour pas cher.

Le Président (M. Saint-Roch): Je m'excuse, M. le député de Shefford, mais le temps alloué è votre formation est écoulé. Je cède maintenant la parole à M. le député de Saint-Hyacinthe tout en lui rappelant qu'il a quatre minutes et trente secondes.

M, Messier: Merci, M. le Président.

Juste une question avant de vous remercier. Le fait de garantir le droit au maintien dans les lieux pour une durée illimitée, est-ce que vous croyez que c'est une garantie suffisante pour protéger les locataires?

M. Lachapelle: À notre avis, seulement cette disposition-là n'est pas suffisante. Pour ce qui est des personnes âgées, la crainte que nous avons, c'est qu'on pourrait convertir quand même sans faire directement du harcèlement. On comprend que les autres locataires peuvent entreprendre des travaux, on comprend qu'ils auraient le goût d'améliorer leur environnement. Est-ce que les personnes qui sont en place auront certaines garanties que toutes ces améliorations ne seront pas appliquées éventuellement dans leur loyer, que tous ces travaux-là vont se faire dans le respect de certaines personnes qui, justement, sont des personnes âgées qui ne peuvent pas subir du bruit, etc.? Ce n'est pas suffisant. Nous pensons qu'il devrait y avoir, avec cela, d'autres conditions. Je dois vous avouer que je ne suis pas un spécialiste en ces matières, mais ce n'est probablement pas suffisant que de ne garantir strictement cela.

Mais encore une fois, si on veut lever le moratoire, il faut comprendre que ce ne sera pas sans certains inconvénients. Il faut les minimiser le plus possible. On comprend que, si on veut permettre à des locataires d'accéder à la propriété, il y aura certains inconvénients. Je dois vous dire encore une fois que, si la personne qu'on représente plus particulièrement est une personne handicapée et âgée, il va falloir trouver d'autres moyens pour la protéger.

M. Messier: J'aimerais vous remercier au nom du ministre, au nom de notre formation...

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. le ministre, de brèves remarques de conclusion.

M. Bourbeau: Oui, simplement pour remercier les représentants de la Commission des droits de la personne de leurs interventions. Je pense que c'est un organisme qui peut être appelé a jouer un rôle important dans la guerre que nous entreprenons afin de tenter de contrer les mesures de harcèlement dont sont victimes les personnes âgées. Nous sommes bien au courant que c'est un problème qui s'aggrave continuellement et c'est la raison pour laquelle nous avons tenté de trouver des façons de s'attaquer à ce problème-là et une des façons, bien sûr, pourrait passer par une aide, ou un recours, plutôt, à la Commission des droits de la personne.

Alors, espérons qu'ensemble on pourra livrer une lutte victorieuse autant que possible, en tout cas, a ce fléau que constitue le harcèlement à l'égard des personnes âgées.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre.

M. le député de Shefford.

M. Paré: Très rapidement; M. Lachapelle et Mme Lescop, merci beaucoup pour l'éclairage important que vous avez donné sur ce côté humain qu'on doit absolument toujours avoir en tête au cours de nos débats et surtout lorsqu'on sera à l'Assemblée nationale pour décider finalement de l'avenir de ces gens-là. La levée du moratoire, c'est une belle expression, mais c'est sur le terrain que c'est important et s'il y a des gens bien placés pour connaître les conséquences et voir les malheurs des gens qui doivent subir nos décisions, vous êtes à peu près les mieux placés. C'est important que vous soyez venus et que vous nous ayez sensibilisés au problème que vivent ces gens-là et des dangers que constitue la proposition qui est sur la table présentement. Merci.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le député de Shefford. M. Lachapelle,

M. Lachapelle: Merci. Nous vous

souhaitons bonne chance dans vos réflexions, en espérant que vous trouverez toutes les lumières pour protéger ces personnes. Merci.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie de votre témoignage au nom de la Commission des droits de la personne.

Je demanderais maintenant aux représentants de l'Association communautaire de Notre- Dame-de-Grace de prendre place.

Dans un premier temps, j'aimerais vous souhaiter la bienvenue ici, aux travaux de la commission de l'aménagement et des équipements. Je demanderais maintenant à M. Ross Stitt de bien vouloir identifier les gens qui l'accompagnent.

Association communautaire de Notre-Dame-de-Grace

M. Stitt (Ross): Oui, bonjour, monsieur. We are going to present a brief in English, so we hope that everybody can understand. On my right is Myrtle Ellis; she has been a longtime executive member of our association and she is one of the founders of one of the former groups that represented our group prior to a merger. On my far right is Louise Poisson, who is a social animator with our association.

Le Président (M. Saint-Roch): I would like to thank you, Mr. Stitt, and you can proceed now. I would like to remind you that we have a very long schedule today so, I would like to invite you, if possible, to remain within the fifteen minutes that we will allow you to present your documents.

M. Stitt: Basically, what we want to do today is to present a similar brief to the one that was presented to the City of Montreal on June, 1987. I think what I will do is to try to summarize that brief as best I can without making it boring for people who are listening.

The Quebec Government is in the process of lifting restrictions on converting rental units into condos.

As we stated in our letter of October 28, 1987 to M. André Bourbeau, we are strongly against lifting the moratorium which has been in effect since 1975. After having read the document entitled "Lifting the Moratorium... A Necessary Decision", we are still strongly opposed to the lifting of the ban despite the hard work by the Government to convince us otherwise. Why is the Government proposing this?

They are citing as reasons: the lack of supply of home ownership for moderate income persons; therefore potential new home buyers are either continuing to rent or are moving to the suburbs. Also, to replace the moratorium with more effective measures that will stop landlords for getting around the law.

We question whether the lifting of the moratorium would grant access to home ownership from moderate income tenants. In fact, the Lapointe, Cyr study states that the cost of a converted unit would only be 10 % to 20 % less than the cost of a brand new condominium. In NDG, the majority of new condos that are presently on the market start at 78 000 $ a year. Therefore, a converted unit would cost anywhere from 63 000 $ to 70 000 $ a year plus appliances, notary fees, welcome tax, certification of location, property taxes, heating and condo fees.

The type of income that would be required to afford this scenario would be approximately 50 000 $ per year if the standard 25 % of gross income is kept for housing. This would eliminate the vast majority of present tenants from buying converted condominiums and would undermine the Minister's premise to give moderate income earners the chance to be home owners.

In a 1980 Housing and Urban Development (HUD) Study, it was stated that 58 % of tenants were evicted upon conversion. The types to move out were the elderly and younger households. In general, they move into poorer quality housing. The percentage of income on housing would have more than doubled had they bought.

We do not buy the Minister's proposal of a package deal to better protect tenants against present abuses of the current moratorium. Currently landlords temporarily vacate their buildings for so-called major repairs, under the famous article 1653. This is de facto eviction since most tenants do not move back due to major inconveniences.

This results in empty buildings available for sale as condos, whether renovated or not, and the loss of rental units.

We demand the protection of tenants via reforms of article 1653 and also repossession of units in buildings of four units and less. We demand action now.

Our association has compiled abuses that tenants have suffered under this present law and the numbers affected are in the hundreds.

Although the Government cites studies that imply that the percentage of rental stock will not diminish if apartments are converted, it seems very plausible that the rental stock will decrease due to a shift to ownership from rentals. In addition, as apartments are emptied due to tenant movement, they will be sold and this should have a negative impact on the rental stock.

We would also like to highlight the potentials of abuse, not just to seniors and disabled but to all tenants. Can the régie protect tenants against indue pressure to purchase or evacuate? In the Dansereau-

Godbout Study 1981 the vulnerability of elderly and retired tenants who were afraid of eviction was emphasized. In fact, these people felt forced to buy their units. This is unacceptable. This same study stated that occupancy costs increased from 45 % to 123 %. (16 heures)

To conclude, we again reiterate our opposition to the lifting of the moratorium. We want it maintained. We insist that the Government close the loopholes and stop tenants being evicted for major repairs and phony repossessions.

Mr. Bourbeau has stated that nothing will change the Government's mind in its1 intent to lift the moratorium, unless of course the citizens take to the streets in opposition. If the moratorium is lifted, then we strongly recommend the use of Mr. Bourbeau1 s suggestion. Let us ail take to the streets and protest!

The Government is proposing a seven point procedure: 1) Notice of intent to tenants. (No repossession after this) 2) Having a condo cadastral subdivision plan and a declaration of co-ownership declared. 3) Request the régie for authorization to register the declaration of co-ownership. 4) If all is in order, register this declaration within the same year. 5) Submit an expert's report to buyers. (No physical alteration required). 6) Submit a prospectus (five or more) to buyers which describes the chief building components, operations and administration. 7) The tenant has a priority opportunity to buy. If not interested, the tenant has an unlimited time limit and the right to remain.

If the Government refuses to keep the present freeze on conversion, we recommend that: 1) Not only should temporarily evacuated tenants receive compensation for moving costs to and from temporary premises, but they should receive damages for inconvenience, storage of goods if needed, meals, packing and unpacking of household goods, moving insurance, disconnection and re-connection of services, additional travel expenses, differences in rent, hotel costs, if no temporary apartment can be found, and perhaps for welfare recipients, an amendment to the Welfare Act that permits them not to have a new lease in order for them to continue to receive benefits. For disabled persons or sick persons, a special indemnity which would cover additional costs that they might have such as transportation, home care, etc.

The law should ensure that tenants receive at least half and preferably two thirds of these estimated costs in advance, prior to evacuation. 2) Good faith of landlord when asking for permission to allow temporary evacuation for major repairs should be shown and proven before the régie, for example, permits, feasibility studies, good landlord/tenant history, no conflicts on previous repossession attempts. 3) To authorize the régie to rule on all major improvements repairs and force owners to apply for such authorization to take away the burden from the tenant to contest within ten days. During this authorization process, any landlord, who has done major repairs in the last five years, should be refused. How do you prove bad faith, that the reason for major repairs was to prepare the building for conversion? 4) Punitive damages is a good idea but should be well defined in the law. How much and under what conditions' 5) To extend the required notice from 24 hours to inform tenants of professionals entering their dwelling for purposes of expert assessment required to convert a rental building into a condominium to one week (seven days). 6) The régie should be in charge of punitive penalties for harassment. They could use the services of the Human Rights Commission or other government bodies. 7) What could prevent an owner from causing damage to his building that would require urgent repairs ans also temporary evacuation? Would he or she be allowed to convert to condominiums if the tenants did not return as is the situation now? This could encourage criminal acts. 8) More clarification is needed as to the tenant having right of preemption. Before he has decided on the offer, and another offer is made to the owner, the landlord must then offer the unit at the same price and conditions to the tenant. This could lead to price-fixing and collaboration between the bidder and the owner and could put pressure and tension on the tenant to make a quick or bad decision. This could lead to increased speculation. 9) Extend the time period to three months from one month to respond to an offer to purchase by the tenant and to clarify whether or not a new owner would be allowed to do major repairs that would force the temporary evacuation of the residing tenant. How soon? 10) Submission of a prospectus to any prospective buyer should be required for buildings that contain four units or less. 11) While owners/convertors are requesting authorization from the régie, a hearing should be called so that all the tenants have the right to be heard and the interest of all tenants to purchase should be carefully considered before authorization is granted.

On November 28, 19B6, we wrote a

press release and the heading of it was "Neighborhood Association Forms Evicted Tenants Committee". It reads: "Since so many tenants have recently been exposed to the application of an unjust law (article 1653), the NDG Neighborhood Association has decided to form a sub-committee of tenants that have suffered or are suffering due to its application. The new group is named ETR 1653, or "Evicted Tenants for Reform of Article 1653". Under the present law, a landlord can force tenants to temporarily evacuate for a period of more than one week upon giving an advance notice of one month. The law states that the tenants do no have the right to contest the nature or the expediency of the work. But they can apply at the régie within ten days of receipt to have an immoderate condition suppressed or modified. "What this means in application is that an owner can rid himself (herself) of tenants that he (she) does not like, in the middle of winter, by sending a notice to evacuate for three or four months within one month's time. An owner could try to have you out on Christmas Day if the notice is sent on November 25th. You can eat your turkey in the street. In most cases, the landlord is in bad faith and this is a tactic to get rid of tenants that are paying lower rents or stick up for their rights. Most tenants will not contest and a lot just decide to move rather than contest at the régie or ask for compensation themselves. If they contest immoderate conditions, usually the Board will allow the work to be done (despite proof that no real work is needed) and will set conditions such as compensation for moving both ways and any difference in rents at the new location. This is extremely unfair. Where do tenants find apartments to live in for four months in the middle of winter? It disrupts their whole lives and we would like to see the politicians exposed to this harassment and anguish for awhile. Believe me, they would reform this law very quickly. "Some recent examples of abuse under this law: "1) 3410, 3420 Kensington, where tenants are still legally fighting a régie decision to evacuate for four months. Only six tenants paying lower rents received the evacuation notice, and in the meantime, the owner is signing new leases on empty apartments for close to double the former rents. He - the owner - testified that he had to empty the whole building to do the work and then goes ahead and re-rents at ridiculous rents. "2) 6240 Sherbrooke St. West, régie granted an evacuation of one month's duration even though the owner did not show up at the hearing. Owner is known to constantly make false demands at régie just to scare the tenants. "3) 5550 Côte St. Luc Rd. Régisseur refused to accept the owner's request for temporary evacuation. Only a few tenants that had contested rent increases got this notice. The new owner is also threatening to do major repairs. "4) 2372 Wilson. Régisseur refused to accept owner's request since no city permits had been issued and no construction contracts had been signed. Despite this temporary victory, all 40 tenants have moved out. "5) 2259 Prud'homme. Régisseur granted an almost three month evacuation period but delayed this evacuation for one month until January 6, so the tenant could spend Christmas in his apartment. Owner went ahead and re-rented his apartment once he had left."

And it states, at the bottom of this press release, that we would like all tenants that have been affected by this law to contact us at our office.

I would just like to summarize a letter wrote to Mr. Bourbeau on October 28, 1986. "Dear Minister: Our Association has been working in the defense of tenants, rights and housing issues for ten years now. We presented briefs to Parliament when the present legislation, Bill 107, was being formulated. Upon hearing that your Government is seriously considering lifting the present moratorium that exists preventing the conversion of apartment buildings of five units and more into condominiums (Bill 20, articles 136.1, 136.2), we would like to state the following: "1) This proposal is totally unacceptable and on behalf of our five hundred members, and the tenant population at large, we wish to state our contestation to it. "2) In May, we began to circulate a petition against the lifting of the ban, and that the ban should be enlarged to protect buildings of four units and less. At present, we have collected a thousand signatures. Conversion of present rental units irregardless of the amount of units in the building to condominiums is totally unacceptable. "3) We have formed a coalition with several other groups and senior citizens' associations to pressure (the Government the numbers of individuals that are represented by these groups number in the tens of thousands). "4) We do not believe that the Government is capable of protecting tenants in their buildings (if condo conversion is allowed) against harassment, intimidation, etc., by speculative owners. In fact, we see that the present law is very weak in protecting tenants now and we demand immediate reform of article 1653 where an owner can throw tenants out in the middle of winter to do so-called needed major

repairs upon giving one month's notice. We have seen many recent examples of abuse and tenant harassment under this clause and will be forwarding to you specific examples of this in the future. In addition, there have been thousands of illegal conversions in Montreal as the law has allowed owners to rid themselves of tenants and they demolish their apartments to make condos. "5) There are more than enough condo units on the market for those who wish, or can afford, to purchase one- Do not displace tenants for this reason. Surveys have shown that only 13 % of tenants would be interested in buying their unit and this figure is highly questionable. 78 % of the local population are tenants and we will put a stop to economic self-interest groups influencing the government at the expense of this population. "6) Lifting the freeze will not open up access to home ownership. Most cannot afford to buy their unit (even if they could, what about their freedom of choice?. "7) We would like a formal invitation to any and all consultations that you will be holding this year or next. In fact, we wish to meet with you anyway, even if consultations will not be held. "8) We urge the Government to spend more funds on subsidized housing units for low income earners. Thousands are on waiting lists and this is not acceptable. Rrant subsidies are not that effective in maintaining decent, affordable housing. 'In conclusion, we insist on the seriousness of this matter and look forward to meeting with you in the future. Sincerely."

Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le ministre.

M. Bourbeau: Oui, M. le Président. I will try to say that in English, although I am not as familiar with that language as with the French language. I will do my best.

Every group that comes before us puts before us its case and we attach more or less credibility depending on whatever is said and the way that it is said. I must say that I am really disturbed to read in your brief a sentence that quotes me in a way that is completely against reality. You say: "Mr. Bourbeau has stated that nothing will change the Government's mind in its intent to lift the moratorium, unless of course, the citizens take to the streets in opposition." The word that really comes to my mind is "démagogie", I do not know what that is in English, but I presume you must know what that means.

If you look at the document that we have deposited, in the foreword, it is an invitation for you to come here and it is said: "Interested parties are invited to comment on theses measures with the assurance that their comments will be taken into consideration when the final draft is being prepared. My signature is right underneath. Now, if you read that carefutly, how can you afterwards, come and say that I declared that there was nothing that would change my mind or anything like that? Is that not contradictory?

M. Stitt: What I was referring to was when you were on CJAD, I believe, back in February, those are the comments that you made at the time on the radio.

M. Bourbeau: I take exception to that. I was on CJAD and I have never entertained the opinion that our proposition was "coulée dans le béton" - how do you say that in English?

M. Stitt: Fixed forever in concrete.

M. Bourbeau; Fixed forever in concrete. I did say in the foreword of the document that we were here to consult. This morning, in my opening remarks, I made it very clear that we were here to consult and that the document we had, which was a document for discussion, could be improved, could be modified; not even slightly, but it could be modified substantially if need be. So, I do not think really that the attitude you are taking here is one that is compatible with a sound discussion. I think it is agressive, unnecessarily agressive. (16 h 15)

M. Stitt: I do not believe it is agressive, but if you are questioning, if you are saying you did not say those things on the radio in February, I guess there is only one way we can solve that. I do not have a transcript of the whole program that was aired at the time, but I made notes by listening to that and, in fact, I spoke to you. I was one of the callers on that show and you were very ironclad in saying that the Government is going ahead with lifting the moratorium and basically, nothing was going to change your mind or the Government's mind, except perhaps if you got so much opposition and the citizens of Montreal took to the streets. If you want, I can approach CJAD and try to get a transcript of the show, but...

M. Bourbeau: May I have some...? It is your word against mind and I flatly deny having said that. It is impossible. I would never have said words like that, it is not like me. Furthermore, at that time, there was no proposal. The proposal was tabled in April and you are referring to something in February. So, I could not refer to any proposal in February since there was no written proposal.

M. Stitt: You kept promissing at the time that a proposal was coming out shortly by the Government, but as far as the Government's position on conversion, you made it very clear that the Governement was intending to go ahead with it.

M. Bourbeau: We intended to deposit a proposal. Sure, that I did say.

M. Stitt: You were questioned by many tenants as to: Would the Government change their mind? And you stated very strongly and sincerely: No, the Government is going ahead with it. The form of the proposal might change, but the Government wanted to lift the moratorium.

M. Bourbeau: That is the danger of coming here and citing on a paper something you heard over the radio. It is very easy to twist the facts. While I could have said that the intention was to come up and deposit a proposal or the intention was to deposit a proposal for lifting the moratorium, you tend to say that I said that we would not change anything in our proposal when the proposal did not even exist. It is very difficult. The intention was to come here and we did, afterwards, deposit a proposal.

Anyway, I am not going to spend the day on this. I just wanted to say that this is not really the proper way to get into a serious discussion on that matter.

M. le Président, je vous laisserais sur cette mise au point et, subséquemment, mon collègue, le député de Sainte-Anne, a l'intention de poser des questions.

Le Président (M. Rochefort): Oui. Je vous remercie, M. le ministre.

Je veux rappeler aux membres de la commission que nous avons retenu les services d'un membre du secrétariat des commissions, M. Comeau, pour les groupes ou les membres de la commission qui voudraient profiter des services d'un traducteur. Sur ce, je reconnais M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Mrs. Ellis, Mrs. Poisson and Mr. Stitt, on behalf of my colleagues, I just want to say that I am sorry the Minister welcome you that way. I do not feel that you are demagogues, as he said, but you are concerned citizens and after reading your memorandum, we can say that you are practical because you have a knowledge of what I call the field action that makes your remarks and recommendations very accurate to our standards. Thanks for doing it.

If I am right, when I read your memorandum, you pointed out that old age and handicapped people are the first victims of it. Even a so-called special wicket could be opened at the régie, which is, on one side costly and will not solve any problems. There are more problems than that problems old age and handicapped peoples are facing, such as health and psychological problems and damage to there health coming from the stress of being evicted, or having the sentiment that they could be evicted from their dwelling where they have been living for a couple of years, specially in such an area as yours, which rs NDG. I know it very well because I lived in that area, as my boss did. As a matter of fact, you probably know that he was born and raised in NDG.

There is one point that people have also pointed out if we lift that moratorium. How do you say it in English? Thank you. Since I am in Quebec City I am losing my English. That does not mean that I should be defeated and go back to Montreal to learn it back.

Now since the stock of apartments will not be any higher, it will stretch.

There is another problem coming also. You probably know that we have just ended another parliamentary commission on immigration. On both parts, we agreed that immigration levels should be raised here, in Quebec, to face "dénatalité" and all those problems. So, do you feel that with the lifting of the moratorium, as the Minister pointed out, we could come to a kind of crash which is going to be "fight for your own flat", because we are going to have a housing problem in Montreal? Do you agree with that assertion which 1 am making on behalf of my colleagues?

M. Stitt: I think that we have a housing crisis right now.

M. Boulerice: ...one of the lowest in North America, I guess.

M. Stitt: Well, perhaps some people look at the vacancy rate and say that it is above 1 %. Therefore, that makes it a healthy rental market. We would argue, on the contrary, that tenants are spending a higher percentage of their income on rents. Nobody is building new apartments for rental and, if they are building new buildings -there are very few going up - they are not under rent control anyway for the first five years, so they can ask whatever the market will bear. So, as far as decent affordable apartment units are concerned, there are very few in Montreal, specially in our area and in other areas as well. So, it is a big problem for people who are earning under 25 000 $ or 30 000 $ a year. We know that the vast majority of Quebec' households, not just Montreal, but Quebec households are spending well over 25 % of their income on rents.

M. Boulerice: There is a kind of

folklore - we are going to see that with The Redfern Tenants' Association coming a little later today - saying that if you live in the Westmount area or NDG, you are rich, which, 1 do not believe because I face it. You are not specially rich, except maybe if you are just uphill. You mentioned a couple of addresses and I can picture those places. Could you go into it deeper and tell me the situation in NDG right now, in terms of old age population and handicapped people?

M. Stitt: Historically, NDG has one of the highest percentages of senior citizens in Canada. There have been various comparisons between NDG and Victoria, B.C., where there is a large percentage of seniors. Most of the time, they say we are number two in the country as far as having a concentration of senior citizens, which is about 18 %. As far as the disabled are concerned, I am not sure of the statistics for that. I do not have the statistics on how many disabled people live in NDG, but recent figures have quoted that 20 % of all citizens are below the federal poverty line; one fifth of the population is below the poverty line. So, that certainly dispels the myth that Westend Montrealers are moderate or wealthy residents.

M. Boulerice: Yes, please Mrs. Poisson.

Mme Poisson (Louise): They also state that i7 % of the families come from single parents families.

M. Boulerice: 17 %.

Mme Poisson: Familles monoparentales, 17 % à Notre-Dame-de-Grâce.

M. Boulerice: 17 %. Mme Poisson: 17 %, oui.

M. Boulerice: Well, this is very significative. 1 guess that you have been working as an association... First, you were the NDG Block Association, I guess, a couple of years ago.

M. Stittî NDG Block, NDG Tenants, two groups.

M. Boulerice: So, you have been working as least for ten years. Just to make us aware of the problem you are really facing, people are probably going to your association as the resource they know in your area. How many cases did you have, let us say, for the last year?

M. Stitt: We get over 10 000 phone calls a year and we probably get 550 or 600 in-office visits a year.

M. Boulerice: OK. Do you agree with me, Mr. Stitt, that if housing is an economical preoccupation, it is also, first and basically, a social right. That is my stand. I am asking you if you stand with me on that issue. If so, you are... And I did not ask for it, it just happened like that. You will be m a by-election a few weeks from now. Is your association asking the candidates to stand firmly and clearly on that, because it concerns your population?

M. Stitt: To respond to the first part of the question, out association and the two former associations have always publicly stated that housing is a social right, not a privilege. And, with linkups with other housing associations in Montreal, other tenant groups, I think we all basically have that philosophy. As far as the upcoming by-election in NDG is concerned, I have been on holidays for the last few weeks, so I have not really spoken to any candidate, personalty or otherwise. I am a little bit out of touch, but I believe that the local NDP candidate has come out against condo conversions. I do not know about the Liberals; I do not think that the Liberals have chosen a candidate yet, so I do not know what their position is or what the candidate's position will be, but I think that it will become an election issue, yes.

Mme Poisson: Yesterday, at Sunday in the park, Myrtle was there and I was there, there was Mrs. Guay who is a candidate running for the by-election; she represents the NDP. She told us that she was supporting our group. But we did not ask for her support, she offered it to our association and she is here today.

M. Boulerice: OK. We quite often read that there is a right to property. I do believe that there is also a right not to be a house-owner. It was my choice for many years and some people, not only for economical reasons but for their own interests, prefer to invest their money into travelling or things like that. So, there is also a right to being a tenant. Do you agree with us when we say that the solution is not what is actually proposed in kind of opposing the right to property to the right to be a tenant, but to try to make a conciliation of the two? If you were there this morning, someone said that "primauté" - I do not what the word is again...

M. Stitt: Priority.

M. Boulerice: ...priority should be on property. For those who want it, okay, but for those who do not want it, not only those who cannot do it but also those who do not want it because this is their right, I do not

think that we can go on with that kind of assumption.

Mme Poisson: There might be a lot of people who may want to have a greater ownership, including speculators and investors. For the people who cannot afford to buy when these speculators or investors are on the way, it makes it very hard for them. So, you have to take that into consideration, the ones who may afford it. Finally, they are going to eliminate the rights of the ones who cannot take the advantage of buying or who do not have the capacity to buy. I do not know if it is clear.

M. Boulerice: Yes.

Mme Poisson: I too am better off in French than in English.

M. Boulerice: OK. Thank you for coming. I was pleased to see you. I mean we were pleased to see you. I am the one who expressed it, but I guess that my colleagues all agree with me.

M. Stitt: Just to finish off that one point, it is interesting because I think that our present system and the capitalist system in general put the priorities of the people who have the money, to buy housing or anything else, ahead of the interests of the majority of the people who are falling into those circumstances. Every day, we look at examples, in the media, in the world, but I do not think that we are here to debate changing the political structure even though it is involved in all this for sure; it is the basis for it all. (16 h 30)

I think that what our group wants to do is protect tenants, the majority of the citizens who are tenants. We do not. have anything against access to home ownership, we believe it exists right now. The problem is that I do not believe that the Government feels, if they lift the moratorium... 1 think the Government may believe that access to home ownership will open up, but we question that highly and we say: To whom? Will these condos be 30 000 $? And, even if they are, who can afford that? It sounds good, it sounds nice, 30 000 $ for a condo, that is not very expensive compared to the new condos, but when you look at the amount of money you need to put a down paiyment, the increase you put out every month on all the condo fees, etc., you would still need a hefty over 30 000 $ to afford a unit at 40 000 $ or 50 000 $.

Le Président (M. Rochefort): Cela va? 'M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Thank you again.

Le Président (M. Rochefort): Merci. M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: Merci, M. le Président. Mr. Stitt, two preliminary remarks. I have studied your brief and I think that there are a lot of very good points in there. It is unfortunate... I want to support the Minister in this, because I have had my differences of opinion with the Minister, but I can assure you that he is simply not the type to make that statement: "...unless the citizens take to the streets in opposition. I find that paragraph unfortunate... I would like to see you possibly withdraw it because even if he may have used the words, it is simply not his intent. I know him well enough for that. I am more interested in the contents of your brief than in that one little paragraph which could perhaps upset him little bit and I agree With him that a paragraph like that one should not be in there, but perhaps you did not intend to do it.

The second point that my colleague made is the partisan part of politics. I would have wished that we could avoid that because, really, we are here in consultation. I think that the Minister is a big enough man, if change has to be made, to accept changes for the better or what the population believes is best. That is the reason why I got on this committee because I feel strongly about this issue and I think that it is very interesting to listen to all the briefs, to all the persons who appear here and that we will all learn together. So, I know that my good friend from Saint-Jacques is worried about the bu-election in NDG. I do not blame him because his own leader has already said that they are going to finish third.

To me, this should be above partisan politics. This is an issue that concerns us all and I want to talk just about the contents of your brief. How many members does your association have, roughly?

M. Stitt: 450.

M. Polak: Are most of them elderly people who have problems or are on fixed incomes, or is it made up of a certain group of people?

M. Stitt: We have quite a mix, I would say. We have a lot of senior citizens, a lot of welfare recipients. We have some tenants that are not necessarily below the poverty line as well. Most of the members all at one time have had trouble with the landlord, or with rent increases, or with repairs or with lack of maintenance. At one point during our history, they have come to us for help.

M. Polak: Have you consulted your members as to how far they have expressed

an interest to buy, when the chance is given, the apartment in which they live now and turn it over once it becomes a condominium?

M. Stitt: We have not heard from any of our members, not one member, an interest to buy a converted apartment unit. In fact, we have not heard from any tenant in NDG who is not even not a member of our group of any desire to buy a converted unit.

M. Polak: Do you have any prices of condominiums now in NDG? More particularly, I would like to know if there are instances where an apartment has been turned over into a condominium. Let us say the tenant was kicked out of there or perhaps by legal means who was no longer there or whatever happened, a fire, anything like that, and it became a condo. What are the average prices in NDG?

Mme Ellis (Myrtle); I can tell you about the one that I was evicted from ten years ago when the group helped me at the YMCA. There were just... And then, we eventually formed the tenants' association. Those are condominiums today. It was foreign investment that came in here.

He lied; he produced a wife and child. The child could have been his, but the girl was not his wife. I lost my case and it was only after that, and I had to store my things. I had been there 26 years. Our rent had always been paid on time. I was a widow and also 1 had had an accident while on duty at the Reddy hospital. I was using two canes at the time and I was only given five months notice that he wanted to move in to my apartment. He never moved in, he remodeled the apartment and got twice as much rent. I had gone to the Rental Board frequently even after my husband died. There are the condominiums on Grand Boulevard, next to a bank, all sorts of stores, ideal, and there are a lot of handicapped people and there are a lot of seniors in that district. They cannot afford to pay their 95 000 $ for 3 1/2 and you have to pay for maintenance, 115 000 $. The things is, who are taking them? Not senior people. The young people who both have jobs are the only ones really moving into that building.

M. Polak; You mentioned before, Mr. Stitt, the vacancy rate. What is the vacancy rate right now in apartments in NDG? Are you aware of that? Let us say, is it bad? Let us suppose that people have to leave their apartment, whatever the reason is they would automatically be forced to take apartments elsewhere for much more money or is there a readily available market in the same type of housing?

M. Stitt: I would say that it is about 1,5 % without having any statistics to back that up. But I would say that to find a decent affordable apartment, it is much lower, well below 1 %, and by affordable, 1 mean there are vacancy rates in buildings with cockroaches and balconies falling down and everything else. But, try to find a half decent 4 1/2 for 400 $, and good luck!

M. Polak: You mentioned the yardstick and I have always heard of 25 % of the gross income being spent on housing. That is roughly what everyone goes by. In your group of members, do you have statistics on the percentage of the gross income that they are spending on housing now?

M. Stitt: No, we do not. We can only go by our experience. A lot of people do not want to tell us how much money they make. But we can tell based on whether they are welfare recipients: We know that they are paying 40 % or 50 % on housing, specially the ones under 30 years. They are living together just to pay the rent and, even then, they are paying 40 % or 50 % on housing. But most of the seniors on pensions stay around 25 % or 30 %, I would say. There are exceptions, but...

M. Polak: One last question. You discussed the right of preemption. I found interesting the point that you seem to make, that is how can you stop a prospective purchaser from going to the owner and offering perhaps an artificially high price and then going to the tenant who says: Look, I cannot buy for that price, and perhaps the actual sale is going through for another amount. Is that the point? Could you elaborate a bit on that?

M. Stitt: We believe there would be automatic price fixing involved. If the tenant has the first choice, there is nothing to stop an owner from saying: Well, I am offering you the first choice to buy, but Mr. and Mrs. So-and-So next door, or down the street, or I have heard from somebody else, that they are willing to give me X amount of dollars. So, right away, you are offering the place to the tenant, but you are setting a price, perhaps artificially high or whatever, so the tenant is going to be intimidated by that and say: Well, I cannot afford that, or: If that is what the market is, I will have to move, I guess.

M. Polak: In the document of the Minister on lifting the moratorium, have you read the section concerning major repairs and the improvements that he is suggesting to try to plug that hole? Do you find that it goes far enough, not far enough? What is your evaluation of that?

M. Stitt: What section are you referring to specifically?

M. Polak: I am talking...

M. Stitt: It seems that everything in this paper is tied in with the lifting of the moratorium. So, if we are not talking about lifting the moratorium, I do not think that there is anything in this paper that talks specifically about major repairs and changing 1653.

M. Polak: I understand that my time has passed, so I will have to continue my discussion with you in the corridor.

Le Président (M. Rochefort): Parfait, merci. II reste deux minutes à l'Opposition.

M. Boulerice: Just to say, Mr. Stitt, Mrs. Ellis and Mrs. Poisson, that I really want to express our high appreciation of your comments and concern. I hope that some Crown people will have the courage to stand on this issue. If not, I am sure you will force or even push them.

I would like to say that my father was a humble taxi driver, so I know what my background is. If having convictions is partisan, some people will call me that until I die, probably. But I will live with that!

Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le député. M. le ministre, le mot de la fin.

M. Bourbeau: 1 would like to thank the NDG Neighbourhood Association for their brief. I can assure them that we will study it - as we have already done it - very carefully and, whenever we take a decision, your comments will be taken into consideration.

M, Stitt: Thank you. We would like to present you with 1700 signatures against the lifting of the moratorium and to expand it to include units of 4 and less.

Le Président (M. Rochefort): Merci. Sur ce, je remercie l'association.

J'inviterais immédiatement le groupe Information ressources femmes et logement à se présenter a la table des témoins, s'il vous plaît.

Bienvenue parmi nous. Je vous demanderais de vous présenter, ainsi que les personnes qui vous accompagnent pour l'information des membres de la commission et du Journal des débats. Par la suite, je vous demanderais de vous en tenir aux quinze minutes qui vous ont été réservées. Je me permets de dire - cela ne s'applique pas qu'à vous et pas à partir de vous, mais je pense qu'il est important de le dire pour vous comme pour l'ensemble de ceux et de celles qui vous suivront - que les membres de la commission ont reçu vos mémoires et en ont pris connaissance. Donc, je pense que les quinze minutes qui vous sont réservées peuvent être souvent l'occasion d'accentuer ou de relever les points qui vous semblent les plus importants dans votre présentation ou qui ont été soulevés avant que votre tour ne vienne pour vraiment peut-être préciser à nouveau le fond de votre pensée.

Information Ressources Femmes et Logement

Mme Mondor (Françoise): Je me présente, Françoise Mondor; à ma droite, Geneviève Daudelin, Sylvie Poirier, Ruth Pilote et Francine Léonard.

Il serait à propos de discuter du bien-fondé de la levée du moratoire, puisque nous doutons sérieusement que ce soit une décision qui s'impose pour les motifs que vous mentionnez à la page 7 du document. D'abord, on ne vise finalement qu'une catégorie de locataires désireux de s'approprier leur propre logement et qui sont en mesure de l'acheter par leurs propres moyens. Enfin, il nous semble illogique et tortueux de voir qu'il faille passer par la levée du moratoire pour envisager des mesures d'encadrement plus efficaces.

Ce que nous retenons à la lecture de ce document, c'est qu'on évite encore soigneusement d'établir une véritable politique globale du logement. En effet, on reconduit d'une façon à peine voilée la nécessité de diversifier les choix d'accès aux logements publics et privés. De même, on élude ta capacité réelle de payer de tous les ménages locataires. (16 h 45)

Le droit au logement pour tous et pour toutes étant une cause déjà fort bien défendue, nous avons choisi de nous attarder sur un point précis qui ne manque certes pas de visibilité dans le document, mais qui demeure somme toute obscur, d'autant plus pour les personnes qui ont une certaine expertise en la matière. Il s'agit des mesures visant à protéger les locataires contre le harcèlement possible de la part des propriétaires.

Que l'on soit pour ou contre la levée du moratoire, la protection des locataires devrait constituer un enjeu de premier ordre dans toute politique gouvernementale sur l'habitation. Non seulement parce que les locataires composent la moitié de la population totale du Québec mais aussi parce qu'ils dépendent des conditions fluctuantes du marché de l'offre de logement.

Les mesures énoncées dans le document pour tenter de les protéger plus efficacement demeurent somme toute évasives et force est de constater qu'avec la levée du moratoire, la question de la protection des locataires

devient particulièrement épineuse. Vous avez la franchise de l'admettre s votre façon dans le document. Vous utilisez ouvertement et à plusieurs reprises le terme "harcèlement". Cela prouve à tout le moins que vous reconnaissez l'existence de cette réalité dans le vécu des locataires. Mais quelles mesures nous apportez-vous? Moult ambiguïtés apparaissent. Nous tenterons donc de les relever systématiquement afin que vous soyez à même de constater entre autres tout l'imbroglio juridique entourant la question du harcèlement et nous irons plus loin en qualifiant cet imbroglio de vide juridique tout simplement.

Tout d'abord, on énonce à la page 3 qu'on vise "à assurer aux locataires une protection maximale dont un droit au maintien dans les lieux pour une durée illimitée". Mais attention, ce droit n'est pas nécessairement universel car plus loin, aux pages 9 et 49, il est spécifié qu'il ne sera accordé qu'aux locataires déjà en place qui auront reçu un avis d'intention de conversion de la part du propriétaire. La porte reste ainsi ouverte au harcèlement possible de la part du propriétaire bien avant que l'avis d'intention de conversion soit déposé par ledit propriétaire.

Une deuxième ambiguïté apparaît à la page 9. On croit protéger le locataire en interdisant "à l'acheteur du logement converti en copropriété de reprendre possession du logement tant et aussi longtemps que le locataire en place au moment de l'autorisation de la régie désire demeurer dans les lieux". À toutes fins utiles, on devrait interdire tout achat de logement pour conversion en copropriété tant et aussi longtemps que le locataire dudit logement désire demeurer dans les lieux. Car qui sont ceux qui auront les moyens d'acheter un logement sans l'habiter? C'est à partir de ce moment, entre autres, que le locataire peut Être harcelé sous de multiples formes non seulement par l'acheteur éventuel mais aussi par le propriétaire de l'immeuble ou encore par les éventuels copropriétaires de l'immeuble. Le harcèlement peut prendre la forme d'intimidations de toutes sortes. Certains propriétaires vont même jusqu'à acheter le départ des locataires. C'est ce qu'on appelle communément un dédommagement. Peut-on imaginer que le montant que le locataire aura reçu peut réellement compenser les préjudices subis et la perte de son logement? Retrouva-t-il mieux ailleurs'? L'offre en logement locatif sera-t-elle suffisante à plus ou moins long terme avec la levée du moratoire?

Une troisième ambiguïté apparaît à la page 8 lorsque vous mentionnez la présence de "certains recours à la Régie du logement en vue de se prémunir contre le harcèlement que peut exercer un propriétaire". En réalité, ces recours sont pratiquement inexistants.

Nous sommes surprises de constater que nos représentants gouvernementaux puissent véhiculer des faussetés en gonflant à tort les pouvoirs de la Régie du logement en cette matière. Le concept de harcèlement n'apparaît en aucune façon dans la loi sur le logement, car le harcèlement n'a jamais été défini comme étant un délit en soi au sens strict de la loi. Par exemple, lorsque vous téléphonez à la Régie du logement et que vous énoncez le terme "harcèlement" dans le but de déposer une plainte de cet ordre contre votre propriétaire, automatiquement on vous réfère à la Commission des droits de la personne. Nous discuterons plus loin de ce recours possible. Le mot "harcèlement" n'existant pas au terme de la loi sur le logement il n'est donc pas recevable à la Régie du logement. Il faut avoir recours au vocable suivant: "perte de la jouissance paisible des lieux" si vous voulez que la Régie du logement prenne en considération votre plainte. On peut facilement imaginer le nombre de locataires qui, faute de connaître le jargon propre à la régie, laissent tomber leur plainte après cette première tentative soit parce qu'il est impossible de se faire comprendre soit par peur de procédure laborieuse si on les relègue à une autre institution gouvernementale. Il faut être drôlement combatif et informé pour vouloir et pour pouvoir poursuivre les démarches.

Il est très important de rappeler et d'insister sur le fait que le harcèlement est le plus souvent une combinaison de multiples actes ou paroles préjudiciables qui justifie en elle-même son appellation.

On ne peut passer sous silence la peur souvent justifiée des représailles de la part du propriétaire. Cette même peur constitue un premier obstacle à l'utilisation des recours. Le second obstacle est inhérent à la nature même du harcèlement. Comment accumuler suffisamment de preuves irréfutables quand les actions répréhensibles sont commises le plus souvent de façon insidieuse et cachée? Avec tout ce que les démarches actuelles impliquent de la part des locataires harcelés, on peut facilement comprendre la réaction de la majorité d'entre eux qui préféreront endurer en silence la situation quitte, en fin de compte, à déménager.

Ainsi, le harcèlement entre dans la normalité du quotidien particulièrement chez les plus démunis socialement et économiquement. C'est un non-sens en soi.

Pour conclure sur la question des recours possibles à la régie, il nous apparaît impérieux d'abord de définir une fois pour toutes le concept de harcèlement, de l'inscrire dans la loi sur le logement et, en prenant bien soin d'envisager les multiples formes que peut sous-tendre ce délit.

Il est également impérieux de prévoir des pénalités exemplaires envers les

propriétaire ou leurs intermédiaires qui outrepasseraient leurs droits au détriment des locataires.

Mme Poirier (Sylvie): Une quatrième ambiguïté apparaît à la page 10 et est reprise à la page 51 lorsque vous énoncez des mesures complémentaires à celles supposément existantes. Nous relevons d'abord la mesure suivante: "Prévoir une poursuite pénale à l'endroit d'un locateur qui userait de harcèlement pour arriver à ses fins". Sans changement effectif en faveur d'une reconnaissance officielle de ce délit, cette mesure s'avère vide de sens et jette de la poudre aux yeux de ceux et celles qui ignorent l'imbroglio juridique qui entoure la notion précise de harcèlement.

Enfin, il serait nécessaire que vous puissez démontrer clairement à quelle démarche précise on doit s'attendre s'il y a poursuite pénale. Cette poursuite serait entreprise sous quelles conditions, par qui et avec l'aide de qui? Combien en coûtera-t-i! au locataire harcelé? S'agit-il d'une poursuite à la Cour provinciale? Quelle sera l'apport de la régie?

Une cinquième ambiguïté apparaît dans l'énoncé de la seconde mesure complémentaire à la section 6.1.4: "...Pour réaliser d'autres types de travaux, l'obliger (le propriétaire) à s'adresser à la Régie du logement et à en démontrer l'utilité immédiate pour les locataires. Maintenir cette contrainte jusqu'au moment où les acquéreurs deviendraient majoritaires à l'assemblée des copropriétaires". Pourquoi en serait-il ainsi, puisqu'un de vos grands objectifs est de protéger justement le locataire qui désire rester dans les lieux contre toute hausse de loyer abusive et contre toute éventualité de harcèlement? Que devient donc le droit du locataire a la jouissance paisible des lieux? Cette contrainte devrait être maintenue même si les locataires composent une minorité au sein de l'immeuble.

Une sixième ambiguïté apparaît dans la troisième mesure complémentaire énoncée à la page 10 et reprise également à la page 52. L'exigence de l'envoi d'un avis de 24 heures au locataire dans le cas de visite des lieux par des professionnels ne constitue pas une mesure complémentaire en soi. Celle-ci existe déjà dans les termes de la loi aux articles 1654.1 et 1622; législation sur le logement locatif.

Une septième ambiguïté apparaît à la page 10 et est reprise à la page 52 lorsque vous entrevoyez l'établissement d'un "guichet spécial à la Régie du logement afin de fournir l'aide nécessaire aux personnes âgées ou handicapées" contre le harcèlement que peut subir cette catégorie de locataires en particulier.

Nous constatons que vous êtes sensibilisés aux problèmes que peut rencontrer cette couche de la population en particulier, mais le harcèlement est un préjudice que tous les ménages locataires sont susceptibles de rencontrer. L'information et l'aide doivent donc être universalisées.

Mais quelle information et quelle aide pourra-t-on efficacement fournir par ce guichet spécial si on ne prévoit aucune reconnaissance légale du concept de harcèlement? L'établissement d'un guichet spécial demeurera une mesure bidon tant et aussi longtemps que l'information et l'aide souhaitées se baseront sur l'imbroglio juridique, sur la rengaine des poursuites à la pièce et des ordonnances sans pénalité. Ce n'est qu'après la reconnaissance légale du délit de harcèlement qu'on pourrait prévoir des moyens d'information et d'aide largement publicisés et accessibles à tous et à toutes.

Une huitième ambiguïté apparaît à la page 10 à l'intérieur même de la mesure concernant le guichet spécial: "Ce guichet spécial pourrait leur offrir (aux personnes âgées et handicapées), notamment, des services privilégiés d'information et de conciliation et pourrait signaler à la Commission des droits de la personne, en vue d'une enquête, les problèmes de harcèlement et d'exploitation qui lui sont rapportés". Il est effectivement possible de recourir à la Commission des droits de la personne dans le cas notamment de ces deux catégories de population, puisque le harcèlement est inclus dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne à l'article 10.1. Mais on se demande pourquoi la clientèle privilégiée du guichet spécial n'engloberait pas également toutes les personnes visées dans l'article 10 de cette même charte. Quoi qu'il en soit, si on dépose une plainte à la CDPQ, il faut d'abord faire la preuve que la personne est harcelée pour les motifs de discrimination stipulés dans cette charte. Et ce n'est qu'une fois cette preuve établie qu'il faudra prouver qu'il y a bel et bien eu harcèlement. C'est une démarche fastidieuse et, a notre connaissance, aucune personne n'a jusqu'à maintenant utilisé ce recours parce qu'apporter la preuve formelle d'une discrimination représente déjà une démarche très complexe et très longue au départ. Durant tout ce temps, tous ceux et celles qui sont incapables de fournir la preuve de discrimination et tous ceux et celles qui sont harcelés sans pour autant être l'objet de discrimination se retrouvent dans un véritable "no man's land" juridique total.

En définitive, si la volonté du ministère est de décourager réellement le harcèlement, il importe au plus haut point de le définir le plus clairement passible. Le harcèlement doit être considéré comme un délit aux termes de la loi. C'est la première étape nécessaire à l'élaboration de mesures appropriées pour résoudre ce problème.

Le document que vous nous soumettez

témoigne de l'incompréhension dont vous faites preuve face au harcèlement subi par trop de locataires. Les mesures proposées pour contrer le harcèlement sont insuffisantes et ambiguës. Elles ne tiennent pas compte de la réalité du harcèlement ni des pressions, de la peur et du silence qu'il accompagne trop souvent.

À notre sens, des mesures plus sévères doivent être envisagées pour décourager les propriétaires harceleurs et les démarches pour utiliser les recours doivent être simplifiées. Ceci est à la portée de votre ministère et serait cohérent avec les objectifs que vous dites poursuivre.

Avant de passer à la période de questions, nous aimerions vous faire entendre brièvement les commentaires d'une chef de famille monoparentale victime de harcèlement en matière de logement depuis trois ans. En plus d'avoir subi de nombreuses formes de harcèlement, elle a dû se présenter au tribunal de la régie a cinq reprises, entre autres pour trois tentatives d'éviction abordées à chaque fois en des termes différents.

Sur les cinq causes de régie, quatre de ces causes ont été gagnées, mais ces gains de causes n'ont fait que retarder l'échéance finale de son sort, en l'occurrence, Mme Léonard a dû quitter le logement qu'elle habitait et qu'elle avait choisi d'habiter. À l'heure actuelle, Mme Léonard a pour résidence fixe le ciel étoilé et fier de la ville de Montréal. Il est à noter que par la nature de ce bref exposé, on a l'impression sincère que cela répondra à certaines de vos questions. Mme Léonard.

Le Président (M. Rochefort): Brièvement, s'il vous plaît, madame.

Mme Léonard (Francine): Oui. Je suis chef d'une famille de trois enfants avec un revenu de 833 $ par mois dont 413 $ de l'aide sociale. Travailler m1 insécurise beaucoup parce que je ne peux espérer mieux. Si j'enlève les services fournis par la carte de bien-être, j'en aurais probablement moins. Je suis seule pour élever mes trois enfants: seule pour les problèmes d'école, seule pour l'entretien de la maison, seule pour faire l'épicerie, seule pour tout ce qui concerne la maison et l'équilibre psychologique de la famille.

Je suis le pilier de ma famille. Si je n'étais pas là, la famille n'existerait plus telle qu'elle est maintenant. Le logement a été un gros problème pour moi. Lorsque mon mari est parti, mon propriétaire a tout essayé pour me mettre a la porte. En trois ans, j'ai gagné cinq causes devant la régie. Je les ai gagnées parce que j'avais la force de me battre et que c'était dans mon caractère. (17 heures)

D'autres préfèrent s'en aller lorsqu'elles font face aux menaces et au harcèlement. Je dis "elles" parce qu'il est plus facile de menacer une femme.

J'ai eu des menaces. J'en ai eu de toutes les sortes. Des téléphones anonymes, par exemple. Il entrait dans ma maison avec sa clé. J'ai demandé l'aide de la police. La police ne pouvait rien faire, disait-elle, parce qu'il était censément chez lui. J'ai demandé à la régie s'il avait le droit de faire cela. On m'a dit non. Sauf que la police ne voulait pas faire de rapport. J'ai subi toutes sortes de choses semblables. Il y a eu des voisins qui ont été montés contre moi. Ils m'attendaient dans l'escalier à chaque fois que je montais. Je n'avais pas de témoin. J'étais seule. J'ai dû subir tout cela en même temps que ma séparation. De plus, j'étais seule pour élever mes enfants.

Il y a quelques mois, la maison a été vendue. Le propriétaire voulait faire des rénovations. Il m'a dit qu'a la suite de cela, le montant du loyer serait augmenté à 450 $. Comme je n'avais pas les moyens de rester là, je suis allée a la régie. J'ai demandé un dédommagement et j'ai accepté de partir. II est vrai que j'ai reçu un dédommagement mais cela ne me donnait pas un logement. Je n'ai donc pas eu de logement. Je suis allée voir partout. Tous les prix des logements variaient entre 350 $ et 450 $. Ce n'étaient pas pour des logements neufs, mais pour des taudis, des cabanes. Sans savoir si je ne vivrais pas la même chose l'année suivante, parce que si un propriétaire décide de rénover, c'est encore le même problème qui recommence. Je ne savais plus quoi faire. J'ai écrit une lettre dans le journal. Je ne voyais pas d'autres solutions. J'en étais rendue à penser de placer mes enfants parce qu'il fallait que je quitte et je n'avais pas de logement. C'était la seule solution que j'avais.

II y avait aussi celle de mettre le feu dans mon logement pour avoir un HLM. Cela faisait trois ans que j'attendais mais on disait que mon cas n'était pas urgent. On m'a dit que la seule urgence qu'il pouvait y avoir était que le feu prenne. À ce moment-là, on a un logement d'urgence. Mais je suis trop honnête, je ne suis pas capable de faire cela. Ce qui fait que j'ai décidé d'écrire ma lettre pour essayer de soulever l'opinion publique. J'ai demandé l'aide de ma députée, Mme Louise Harel, qui a tout fait pour essayer de m'aider. Elle m'a envoyé des lettres d'appui. Cela n'a absolument rien donné. J'ai demandé un logement dans une coop. Ce qui est arrivé, c'est que ma lettre parue dans le journal m'a fait connaître dans une coop. Là, j'ai eu une place au mois d'octobre. Mais en attendant, je suis dans la rue. Je suis allée passer l'été dans un camp familial. C'est un camp familial où je vais passer mes vacances à chaque année. Je

payais une pension pour la nourriture. Pour compenser l'hébergement, j'ai fait du bénévolat. Pendant ce temps-là, je payais un loyer pour mes meubles qui sont en entreposage à Montréal.

Je vous le dis bien franchement, je me sens comme si j'étais complètement dépouillée, comme si j'avais tout perdu. Excusez-moi mais c'est parce que je revis des choses qui ont été très pénibles. J'ai dû subir tout cela pendant trois ans. J'étais seule pour lutter contre cela. Il est urgent que vous fassiez quelque chose. Il y a d'autres femmes qui sont dans la même situation et qui ne sont pas capables de se défendre. Faites quelque chose avant qu'il soit trop tard parce que, bientôt, il y aura des familles complètes dans la rue et des familles monoparentales en particulier. Elles sont seules. Elles n'ont personne. Elles ne peuvent pas avoir de témoin. Quant à moi, même si j'ai eu un logement dans une coop, j'ai décidé de continuer à lutter. Mais je suis épuisée. Je suis à bout. Mais tant qu'il n'y aura pas des règlements sévères qui serviront à quelque chose, je ne lécherai pas, je vais continuer à lutter pour cela. Je vais en soulever du monde et je vais en écrire des lettres. Je n'ai pas fini d'en écrire des lettres.

M. le ministre, les lois que vous faites pour éliminer les femmes de vos HLM, je ne sais pas ce que vous avez dans la tète mais vous n'êtes sûrement pas conscient de ce que vous faites. Je suis une femme, d'accord. Je suis seule avec trois enfants. Mon mari m'a laissée. Je ne vais pas travailler? Non, parce que mes enfants ont le droit d'avoir une mère même s'ils n'ont pas un père. Mais pendant ce temps-là, je n'ai pas de logement. Mon logement n'est toujours pas rénové. Il n'est toujours pas loué. Mais je ne peux pas le prouver. Je ne peux pas le prouver parce que pour cela, il faudrait que j'entre dans le logement et je n'ai plus de clé. J'aurais droit à 500 $ de plus mais je ne peux pas l'avoir. Mais comme c'est là, mon logement n'est toujours pas rénové et je suis dans la rue pendant ce temps-là. Je vais aller vivre chez ma mère pour les deux ou trois prochaines semaines. Cela dépend. Je suis censée avoir mon logement en octobre. 'Mais pendant ce temps, mes enfants sont inscrits à l'école à Montréal. Il va falloir que j'aille les reconduire à chaque matin de Pointe-aux-Trembles à Montréal, pour qu'ils puissent aller à l'école. Il va falloir que je fasse cela matin et soir, jusqu'à ce que j'aie mon logement dans la coop. En plus, j'ai deux déménagements à payer. Parce que j'ai dû faire déménager mes meubles pour les mettre en entreposage et je dois les faire déménager de l'entreposage à la coop.

Si vous jugez que c'est ça la justice... Je suis une femme seule, d'accord, mais j'ai autant de droits qu'une femme mariée.

J'estime même que j'ai plus de mérite par le fait que je suis seule pour tout faire. N'oubliez pas que dans mes mains repose le sort de mes enfants. C'est moi qui les éduque. C'est moi qui vais en faire des citoyens plus tard, des électeurs aussi. Je suis impartante et je n'admets pas que la Commission des droits de la personne ignore cela. On parle des gens âgés en situation défavorisée, mais que fait la femme pendant ce temps-là? Elle attend toujours, c'est tout. J'ai fini.

Mme Poirier: C'est important pour nous de laisser la parole à Mme Léonard parce que la commission de l'aménagement et des équipements est pour elle une instance, une occasion de se faire entendre, également. Merci.

Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie de votre présentation. M. le ministre, il reste 23 minutes, me dit-on, ce qui fait onze minutes et demie par formation politique.

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Il est toujours émouvant d'entendre des témoignages comme celui que nous venons d'entendre. Ce n'est pas une mince affaire que d'être responsable d'un dossier comme celui-là. Vous reconnaîtrez qu'il aurait été beaucoup plus facile pour nous de ne pas toucher à cela du tout, de maintenir le statu quo, de tenir toute cette question-là à douze pieds avec une perche de douze pieds et de ne pas du tout remuer ces cendres.

La situation que vous décrivez, madame, est une situation qui existe maintenant. Elle existe depuis longtemps, elle n'est pas nouvelle et elle se détériore avec le temps. C'est justement parce qu'on a pris connaissance de cette situation-là, qui va en s'empirant, que j'ai décidé de prendre le taureau par les cornes et de tenter d'articuler une proposition qui viserait à améliorer la situation actuelle. Vous parlez du harcèlement. C'est sûr que le harcèlement existe, je le sais. D'ailleurs, si je ne le savais pas, votre témoignage me l'apprendrait, me le confirmerait. D'autres groupes nous le disent aussi, et on le sait par les gens qui viennent nous voir dans nos bureaux de comté et par les confidences que l'on reçoit à gauche et à droite.

Dans le document ici nous tentons de contrer la question du harcèlement et d'améliorer les mesures. Il me semble que vous trouviez que ce que l'on propose n'est pas suffisant. Tant mieux! vous êtes là et vous nous faites des propositions additionnelles. Nous allons en prendre note, mais il faut quand même reconnaître que ce que nous faisans est peut-être timide un peu, ce n'est peut-être pas suffisant, mais c'est quand même une amélioration sur le statu

quo, sur ce qui existait avant. Par exemple, nous disons: Pour les personnes âgées - cela n'est pas votre cas manifestement - et les personnes handicapées, guichet spécial à la Régie du logement; ce qui n'existe pas, donc un service personnalisé et préparation de dossiers et entente avec la Commission des droits de la personne pour faire des enquêtes et des poursuites. Déjà c'est un pas significatif en avant. Ce n'est peut-être pas l'idéal, mais il n'y avait rien avant. Donc, c'est déjà quelque chose.

Concernant les cas de harcèlement autres que pour les personnes âgées, il n'y a rien qui interdise que le guichet spécial s'occupe de tous les harcèlements, incidemment. Nous avons pensé faire un guichet spécial pour les personnes âgées, mais on pourrait très bien concevoir un guichet spécial qui serait pour tous les cas de harcèlement; personnes âgées ou autres. Je ne mets pas de côté cette possibilité-là.

Nous avons prévu, dans ces cas-là, des poursuites pénales à l'endroit du locateur qui userait de harcèlement pour arriver à ses fins. Encore là, cela pourrait être la Commission des droits de ta personne et rien n'interdit que l'on puisse également référer ces cas-là à la Commission des droits de la personne, auxquels cas c'est la commission qui prend à ses frais les poursuites et les enquêtes. On parlait tantôt des efforts, des coûts et de la difficulté pour les locataires de se défendre eux-mêmes. Alors, voilà des possibilités, nous les évoquons, c'est par écrit. Nous avons pris la peine d'y réfléchir, de consulter et d'écrire cela. Vous devez au moins reconnaître que nous avons le mérite de mettre les faits sur la table, de proposer des choses qui sont probablement imparfaites - et vous nous le soulignez - mais qui indiquent notre volonté d'apporter des changements.

De plus, tout à l'heure, madame faisait état de ses problèmes et de ses efforts pour trouver un logement. Je déplore que vous n'ayez pas réussi à trouver de logement. Je dirai simplement que depuis un an et demi que je suis à la direction de l'Habitation, nous avons signé de nouvelles ententes avec le gouvernement fédéral sur l'habitation sociale. Ce qu'il y a de nouveau dans ces ententes-là par rapport aux ententes précédentes, c'est que nous avons l'intention - et c'est inscrit dans l'entente - de faire en sorte de diriger la majorité des fonds disponibles vers les cas les plus patents et les plus criants d'injustices vers les personnes les plus démunies financièrement. Si on tente de venir en aide à tout le monde en même temps, finalement, on risque de venir en aide à des gens qui ont des revenus supérieurs et de ne pas venir en aide à ceux dont les revenus sont inférieurs. Alors, nous avons dit: Parmi tous ceux qui ont des besoins de logement, nous allons commencer par venir en aide à ceux qui sont vraiment au bas de l'échelle; c'est là que les besoins sont les plus criants.

Or, les nouvelles ententes que nous avons signées vont carrément dans cette direction: priorité absolue à ceux qui sont au bas de l'échelle en matière de revenu. Je présume que Mme Léonard doit se situer là-dedans, puisqu'elle semble être dans ce cas. Normalement, vous seriez sur la liste privilégiée des gens accessibles à des HLM. Le nouveau programme de supplément au loyer, que j'ai annoncé il y a un mois dans le secteur locatif privé, devrait également s'appliquer à vous.

Maintenant, les critères d'admission dans les HLM sont en fonction de ces ententes. Je suis un peu déçu, en fait, très déçu de voir qu'on interprète assez mal, finalement, l'intention du gouvernement. Les critères, actuellement en usage dans les offices municipaux d'habitation, privilégient systématiquement la femme seule avec des enfants, les familles monoparentales. Il y a un accent positif absolu en faveur de la famille monoparentale. Les critères, actuellement en vigueur, font en sorte que, dans les listes d'attente de familles, c'est systématiquement les familles monoparentales qui se retrouvent en haut de la liste, à cause de l'accent qu'il y a dans le règlement.

Je suis complètement estomaqué de voir des gens qui viennent nous dire: Vous discriminez les familles monoparentales. Regardez les règlements, c'est l'inverse qui se produit. Tous les règlements sont faits de telle sorte qu'ils privilégient systématiquement les familles monoparentales. Je pense qu'il est incorrect de venir affirmer que, finalement, le gouvernement s'attaque à la famille monoparentale, c'est l'inverse; les règlements font l'inverse.

Nous avons simplement dit que si tout se passe comme prévu dans les règlements, nous devrions avoir, théoriquement, 100 % de familles monoparentales dans nos HLM. C'est là que l'expérience pilote, que nous avons menée, nous a indiqué que cela peut causer des problèmes à l'occasion, le fait de n'avoir que des femmes seules dans un édifice de 25, 30 ou 50 logements. On nous a suggéré -c'est une suggestion qui a été faite - de permettre aux offices municipaux d'habitation de pouvoir admettre les couples démunis -forcément, il faut que ce soit tous des démunis - avec les familles monoparentales afin d'apporter un certain équilibre, une sorte de sécurité, etc. C'est une suggestion qui a été faîte par les offices municipaux d'habitation qui ont fait l'objet du projet pilote. Cette suggestion est dans le public.

Maintenant, c'est possible - vous avez peut-être plus d'expérience que moi dans ce domaine précis - que cela ne cause pas de problème que de n'avoir que des femmes

clans un édifice HLM. J'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que, effectivement, cela cause des problèmes?

Mme Léonard: Je ne vois pas pourquoi il y aurait une différence entre les hommes et les femmes. Il y a des femmes qui sont capables de changer une ampoule électrique et il y a des hommes qui ne sont pas capables. Je ne vois pas quelle différence cela fait si c'est un homme qui est locataire plutôt qu'une femme. Je n'en vois pas, en tout cas. Si vous, vous faites de la discrimination, je ne suis pas prête à en faire.

M. Bourbeau: La discrimination qui existe présentement, c'est une discrimination positive.

Mme Léonard: Oui! C'est l'égalité pour les deux, c'est cela qui est supposé d'être, selon la charte des droits...

M. Bourbeau: Oui, égalité pour les deux, je suis d'accord, sauf que si, dans les règlements, il existe des critères de revenus, d'enfants, etc., les critères sont faits de telle façon que lorsqu'on additionne les points, une famille monoparentale a plus de points qu'une famille ordinaire; autrement dit, parce qu'il y a des problèmes additionnels, dont vous avez parlé tantôt, ceux-ci se traduisent par des points. Donc, en considérant le dossier d'une famille monoparentale - ce n'est pas de la discrimination, c'est l'addition des points -cela fait en sorte qu'il y a plus de points pour une famille monoparentale à cause du contexte d'isolement, etc. Cela fait en sorte de privilégier les familles monoparentales.

Donc, je pense que c'est un point de vue qui vaut la peine d'être dit.

Mme Léonard: Maintenant, est-ce que c'est vrai ou si ce n'est pas vrai que des femmes attendent depuis huit ans pour avoir un logement et qu'elles n'en ont pas encore? Vous ne trouvez pas que les points ne donnent pas grand-chose. (17 h 15)

M. Bourbeau: Écoutez, les listes d'attente sont longues, c'est évident. Ce sont des listes d'attente de points et non pas de temps. Autrement dit, vous, vous avez un problème. Vous perdez votre mari, etc. Votre situation change un bon jour. Vous faites réévaluer votre demande et votre nombre de points peut augmenter substantiellement d'une journée à l'autre, de sorte que vous pouvez passer de la cinquantième place sur la liste d'attente à la première place, du jour au lendemain.

Mme Léonard: C'est ce que j'ai fait. Cela n'a rien changé.

M. Bourbeau: Bon, parce que les points sont plus grands. La question de la période de temps depuis laquelle vous attendez n'a rien à voir avec l'accessibilité. Il y a rirs gens qui peuvent avoir fait une demande il y a quinze ans et qui n'entreront jamais, parce qu'ils n'auront jamais un nombre de points suffisants. Par exemple, s'ils ont des revenus supérieurs, ils gagnent un peu plus d'argent, évidemment, ils passent après. Mais quelqu'un qui se trouve dans une situation d'être vraiment démuni...

Mme Léonard: Comme dans mon cas quoi!

M. Bourbeau: ...du jour au lendemain, je suis convaincu que votre nombre de points, si vous faites réévaluer - vous devriez demander une réévaluation par l'Office municipal de l'habitation - peut augmenter substantiellement à la suite de faits nouveaux qui surgissent.

Mme Léonard: Je me suis fait dire que mon cas n'était pas un cas d'urgence, que cela ne changeait absolument rien à mon dossier du fait que je me faisais mettre à la porte.

M. Baurbeau: Là, je ne connais pas tous les détails de votre cas. Il faudrait l'examiner.

Mme Poirier: Ce serait opportun de revenir au concept de harcèlement et au mémoire, s'il vous plaît.

M. Bourbeau: Ce n'est quand même pas étranger. De toute façon, on va terminer sur cela. Je pense qu'il n'a pas été inutile de discuter de cela. En ce qui concerne la question du harcèlement, évidemment certaines mesures dans la proposition sont une amélioration sur la situation présente. Â la lecture de votre mémoire, je vois des propositions d'amélioration. Est-ce qu'il y a d'autres propositions que vous aimeriez faire et que nous pourrions discuter avant que nous terminions nos échanges?

Mme Pilote (Ruth): À partir du cas de Francine Léonard, je voudrais vous montrer à quel point une situation de harcèlement est une situation cul-de-sac. Francine est allée cinq fois à la Régie du logement, elle s'est vraiment battue. Elle a subi du harcèlement de la part de son propriétaire qui revenait et qui supposément voulait faire une reprise de possession et qui, en dernier, l'a évincée pour une raison de rénovations majeures. La cinquième fois, si Francine avait pu invoquer le harcèlement pour défendre son cas, probablement que le propriétaire aurait été reconnu comme étant de mauvaise foi. Le harcèlement n'étant pas défini dans la loi sur

le logement on n'a pas pu, du tout, défendre son cas en parlant de harcèlement. Ce qui fait que Francine se retrouve maintenant dans la rue avec ses trois enfants. Alors, il est très important, je pense, que le concept de harcèlement soit inclus dans la loi sur le logement.

M, Bourbeau: Seulement une réponse. Je suis content que vous me disiez cela parce que c'est exactement ce que nous nous proposons de faire. Si la commission et les gens qui viennent ici nous laissent déposer à l'automne - enfin, si le gouvernement décide de le faire aussi - un projet de lot pour régler l'ensemble de ces problèmes, notre intention est d'introduire dans la loi le concept du harcèlement de façon à donner une poignée, si je peux dire, è ceux qui vont se présenter devant la Régie du logement. Dans ce sens, nous nous proposons de faire ce que vous souhaitez. Je vous suggère, si vous avez encore des améliorations à nous proposer, de le faire, puisque nous avons l'intention de nous diriger dans ce sens.

Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie. M. le député de Shefford. En vous rappelant que vous avez onze minutes et demie.

M. Paré: C'est très court. Je vais essayer d'être très bref. Je trouve que la présentation que vous avez faite est particulièrement importante. Vous avez touché à des points majeurs qui portent à interprétation. C'est là qu'il faut être clair et dire la même chose, peu importe où l'on se trouve. Je vais rapporter des interprétations que le ministre vient de faire. Entre autres, on veut diminuer les risques de harcèlement. Je dis que ce qui est là va augmenter. Je partage votre opinion sur cela.

Premièrement vous posez la vraie question: Oui va se porter acquéreur des logements? Ce sont des gens qui veulent y demeurer. Si ce sont des locataires actuels qui ont un peu de comptant, ils vont vouloir devenir propriétaires pour s'en aller dans le logement. Donc, il va falloir que le locataire qui est là quitte par tous les moyens. Si ce ne sont pas des gens qui sont locataires qui veulent devenir propriétaires, ce sont des spéculateurs, ce sont des gens qui veulent faire des profits avec un logement. Un profit, cela veut dire le plus grand profit possible. Cela voudra dire faire augmenter le loyer par toutes les formules qu'on connaît: les taxes, les rénovations et là, on augmente les loyers et, finalement, on fait partir les gens qui n'ont pas les moyens de payer plus cher. Donc, la mesure qui est proposée va faire en sorte que le harcèlement va augmenter, à mon avis. De plus, les gens qui veulent devenir propriétaires vont faire augmenter le harcèlement. Maintenant que c'est défendu, moins de gens veulent convertir. Si, demain matin, on dit: On lève le moratoire, tout le monde peut tout vendre. Le ministre espère que le marché va être inondé de logements à vendre, que des propriétaires qui n'y avaient même pas pensé vont devenir intéressés. Donc, même là où cela va bien, les relations locataires-propriétaires risquent de s'envenimer dès demain matin, si on lève cela. On va multiplier le harcèlement par je ne sais combien. Il faut faire attention. À mon avis, ce dont on discute est majeur. C'est le premier point que je voulais toucher.

Le deuxième point, pour vous montrer à quel point l'interprétation... Il faut dire la même chose, peu importe où l'on se trouve. Vous considérez avec raison que de vouloir acheter le départ, c'est du harcèlement. Les gens qui ont été entendus avant vous, les gens de la Commission des droits de la personne ont dit que c'était un geste inacceptable. À l'Assemblée nationale, le ministre a dit que c'était tout à fait normal. Peu importe qu'on achète un départ, ce sera un locataire pour un autre, une personne pour une autre, cela ne change rien: un égale un, en termes de gens qui respirent. Sauf que ce n'est pas comme cela qu'il faut voir la chose. Je le vois plutôt de votre façon: un achat de départ à des gens qui n'ont pas les moyens, c'est du harcèlement, il va falloir le reconnaître. L'interprétation du ministre, c'est que ce n'est pas du harcèlement, c'est correct, cela fait partie du marchandage, cela fait partie de la libre entreprise. C'est le deuxième point que je voulais toucher.

Le troisième point: les listes d'attente. Vous avez raison, M. le ministre, vous venez de dire que la réglementation actuelle favorise - entre guillemets - les femmes chef de famille monoparentale. Cela n'est pas de la discrimination. Quand on révalue comme cela, au départ, on fausse les règles du jeu. Ce n'est pas de la discrimination, c'est un programme qui existe pour aider les plus démunis. Si, dans notre société, les plus démunis, ce sont les femmes chef de famille monoparentale, il est normal que ce soient celles qu'on va aider en premier. Si on n'accepte pas cela, là on fait de la discrimination. Ce serait vraiment inacceptable de vouloir faire de la discrimination pour pénaliser les plus démunis. C'est inacceptable. Cela me rassure que vous disiez aujourd'hui - parce que les écrits restent ici habituellement parce que nous sommes enregistrés - que c'est juste une proposition qu'on est prêt à regarder. J'espère que, comme vous avez dit, vous êtes content d'avoir entendu des faits vécus pour être capable... Avant de prendre une décision, j'espère que vous allez en tenir compte. La dernière fois qu'on en a parlé à l'Assemblée nationale, votre discours était la

défense de la nouvelle réglementation. Je vous disais là-dessus: s'il y a de l'insécurité parce qu'il y a seulement des femmes; au lieu de pénaliser les femmes, on s'organise comme gouvernement pour amener des mesures de sécurité de plus dans les HLM. Ce sont des commentaires que je voulais amener parce que le mémoire qui est présenté est important, puisqu'il touche une clientèle vraiment importante et parmi les plus démunies.

Une seule autre question, parce que je veux laisser aussi ma collègue de Maisonneuve, qui a demandé la parole, poser des questions. Quant au guichet, vous demandez qu'il soit ouvert à toutes les personnes victimes de harcèlement. Je vous pose à nouveau la question que j'avais posée précédemment aux gens de la Commission des droits de la personne: le fait de limiter de toute façon à des groupes ne risque-t-il pas même de pénaliser davantage les groupes qu'on veut aider?

Mme Daudelin (Geneviève): Je pense qu'il faut avoir des moyens de se défendre. Quand on dit que le guichet spécial ne devrait pas être réservé qu'aux personnes âgées et handicapées, c'est parce qu'on trouve que les personnes qui auraient besoin d'une aide plus efficace que celle que la régie est en mesure de donner actuellement, c'est beaucoup plus large que ces clientèles-là. On travaille avec des femmes locataires, des femmes qui ont d'énormes problèmes de harcèlement et qui ont toutes les difficultés du monde à se défendre et à se faire entendre à la régie parce que, justement, le thème n'est pas recevable au téléphone même; elles sont référées ailleurs et elles sont comme des balles de ping-pong sur une table. C'est aussi bête que cela. Quand on parle de guichet spécial, on pose mal le problème. En fait, la régie répond assez souvent très mal aux problèmes réels que vivent les personnes et ce serait cela qui devrait être changé. On devrait aussi simplifier les recours et ce serait déjà quelque chose d'énorme.

Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le député de Shefford. Compte tenu qu'il ne reste plus de temps du côté du parti ministériel, je reconnaîtrai un autre membre de la formation de l'Opposition. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. J'avais eu l'occasion de prendre connaissance du document sur l'enquête femmes et logements que vous aviez publié l'an dernier déjà - il y a donc un an, bien avant que les intentions du ministre ne soient communiquées - portant sur la discrimination, le harcèlement et le harcèlement sexuel.

J'ai eu l'occasion aussi, à maintes reprises, d'en discuter avec Francine Léonard et je la remercie pour le courage qu'elle a eu de venir nous illustrer la réalité qui est vécue. J'aimerais d'abord constater que c'est un dialogue de sourds. J'ai l'impression d'avoir assisté à un dialogue de sourds, pas seulement dans le cas de votre présentation de mémoire. Vous dites au ministre: II y a des problèmes de harcèlement qu'il faut définir. Le ministre dit: Justement, dans ma réforme, je vais le définir. Mais ce qu'il omet de dire, c'est que sa réforme va augmenter les occasions et va multiplier les possibilités de harcèlement. Mais, là, vous allez avoir une définition. Quelle chance! Parce qu'il ne faut jamais oublier que la reconnaissance d'un droit, par exemple, la définition du harcèlement n'entraîne pas pour autant les conditions d'exercice du recours.

Vous avez une bonne définition du harcèlement, tant mieux, et je pense que vous avez raison d'attirer notre attention là-dessus. Mais, ne pas avoir de harcèlement, c'est mieux que la définition. Je pense qu'en ce qui concerne cette question de la discrimination possible ou envisagée quant à l'accès des femmes chef de famille dans les HLM...

J'ai devant moi les comptes rendus de l'Assemblée nationale, 19 mai 1987. C'est leJournal des débats, très officiel. Le ministre ne parle pas des familles monoparentales; il parle des femmes chef de famille monoparentale. Dire qu'il y a des critères qui privilégient la famille et que la combinaison de ces critères fait que les familles monoparentales sont priviligiées dans les HLM, c'est un critère. Cela s'appelle l'action positive en faveur des familles monoparentales, sans oublier qu'on peut être un homme chef de famille comme une femme chef de famille.

Ce sont les familles monoparentales qu'on privilégie. Mais je vous assure - je ne veux pas vous le lire, parce qu'on n'a pas beaucoup de temps - que le ministre ne parle que des femmes chef de famille. Il dit, par exemple: Dans certains HLM où il n'y a que des personnes âgées, des femmes seules dans une proportion de 99 %, il y a un problème. C'est la même chose quand il n'y a que des femmes seules ou des femmes chef de famille monoparentale avec des enfants dans les HLM pour familles à faible revenu. Il y a un problème qui se crée, etc.

Si on reprend les propos que le ministre tenait à l'égard de Mme Léonard en l'invitant à se représenter devant l'office s'il y a des faits nouveaux, je pense qu'il faut que le ministre s'en rende compte, je le souhaite, pendant les jours qu'il va passer à Montréal, ce n'est pas un cas d'exception, Mme Léonard. Mme Léonard, pour l'Office municipal de l'habitation de Montréal, ce n'est pas un cas d'exception qu'on révise, parce que sa situation se renouvelle, parce

qu'elle a un avis d'éviction et qu'elle est chef de famille. Ce sont des centaines - je n'exagère pas - d'avis d'éviction avec des chefs de famille.

J'ai vu des personnes âgées qui habitaient depuis 48 ans leur quartier, qui avaient 72 ans, qui faisaient face à des avis d'éviction et qui, de toute façon, n'allaient pas au bout de ces avis d'éviction. Ces avis se révélaient faux dans la majorité des cas. Mats, de toute façon, ces gens âgés ne tolèrent pas d'être en mauvais termes avec le propriétaire.

Alors, le ministre dit: Je vais améliorer la situation. Il n'a pas tort quand il dit: La situation se dégrade. Mais si on ne faisait rien, la situation continuera de se détériorer. Mais le problème, c'est que sa solution, c'est pire. C'est un remède qui va tuer le cheval. Cela ne va pas améliorer, cela va empirer, parce que si le ministre est sincère, il va envisager des mesures où il va intensifier, il va faciliter l'intensification du logement social et il va assurer la participation plus grande du gouvernement dans la construction de logements.

M. le ministre, Mme Léonard est dans un quartier où, pour l'année qui vient, vous n'avez prévu aucune nouvelle unité de logement social, ni coop. Vous allez me sortir vos dix nouvelles unités de logements privés, dix nouvelles unités dont vous m'avez informée aujourd'hui, dix nouvelles unités de HLM privés.

Je regrette infiniment, M. le ministre, on est dans un quartier où il y a des centaines de personnes qui sont en attente d'un logement convenable. C'est un peu la réaction que je souhaite avoir de vous: Est-ce qu'une définition est satisfaisante? Est-ce qu'une seule définition vous suffirait?

Mme Poirien En fait, une seule définition ne serait effectivement satisfaisante. Dans les dernières lignes du mémoire que nous avons déposé à la commission, on répète que des mesures plus sévères doivent être envisagées et que les démarches pour utiliser les recours doivent être simplifiées et doivent être accessibles. (17 h 50)

C'est à notre sens très important, qu'il y ait ou non levée du moratoire, qu'il puisse à l'heure actuelle y avoir un concept et une définition de harcèlement aux termes de la loi et des mesures pour appliquer les poursuites pénales à envisager. C'est la recommandation la plus ultime que l'on a à déposer ici.

Le Président (M. Richard): Puisque le temps est expiré, nous vous remercions sincèrement de nous avoir présenté ce mémoire. Nous demanderions à l'autre groupe... M. le ministre?

M. Bourbeau: J'aimerais que l'on puisse leur dire bonjour avant de partir. J'espère que vous ne voulez pas briser la tradition.

Le Président (M. Richard): Je n'ai aucune objection. On voudrait vous souhaiter des voeux avant que vous quittiez. M. le ministre.

M. Bourbeau: Si vous tenez à avoir une longue vie, M. le Président, il faudrait respecter la tradition.

Le Président (M. Richard): C'est ce qui s'appelle créer de la jurisprudence.

M. Bourbeau: J'aimerais simplement dire au groupe Information Ressources Femmes et Logement qu'il m'apparaît que ce que nous nous proposons de faire va exactement dans le sens de ce que vous nous proposez, c'est-à-dire introduire dans la loi le concept du harcèlement et améliorer sensiblement les mesures qui pourront être prises dans les cas de harcèlement. Il est possible, comme je l'ai dit précédemment, que ce que nous proposons maintenant ne soit pas très clair. Cela ne vous a peut-être pas apparu aussi clair que je vous le dis maintenant, mais déjà le document qui forcément était incomplet contenait les prémisses de ce que je viens de vous dire. Je ne peux pas penser autrement que vous allez vous réjouir de la décision du gouvernement de finalement bouger dans ce domaine-là quand on sait que cela fait des années que les gouvernements ne font rien pour contrer le harcèlement, y compris, bien sûr, le gouvernement de nos gens d'en face qui aujourd'hui déchirent leurs vêtements devant la situation qui existe. Merci.

Mme Poirier: Si ce n'est pas le cas, une fois la décision prise, si nous ne sommes pas réjouies, soyez assuré que nous irons vous rencontrer à nouveau pour vous faire part de nos commentaires ultérieurs.

M. Bourbeau: Vous viendrez me harceler.

Le Président (M. Richard): Merci. M. le député de Shefford, vous aviez un commentaire?

M. Paré: Oui, très court pour dire qu'à écouter le ministre passer ses commentaires, j'ai l'impression qu'il est en train de faire accroire aux gens en face, que le cheval blanc de Napoléon est noir. C'est plutôt bizarre et c'est comme cela depuis le matin.

Je vais conclure en vous remerciant infiniment de votre présentation. Vous avez apporté un éclairage très important, je dois dire, sur plusieurs sujets. Vous pouvez être sûres qu'on va en tenir compte lors de

l'élaboration autant de la politique sur la copropriété que sur d'autres qui sont plus un élément social d'habitation. Merci beaucoup.

Le Président (M. Richard): Merci d'avoir été là.

Je présente le prochain groupe The Redfern Tenants' Association, représenté par Mme Wendy Gillanders.

Nous débutons immédiaternent. Nous vous souhaitons la plus cordiale des bienvenues. Vous aurez évidemment à présenter vos collègues. Vous connaissez la procédure, vous avez quinze minutes pour présenter votre document. Vous n'êtes pas obligé de les prendre, c'est bien évident. Vous ne pouvez pas excéder quinze minutes, mais vous avez droit à moins de quinze. Vous présentez immédiatement votre document et les personnes qui sont avec vous. Madame.

The Redfern Tenants Association

Mme Gillanders (Wendy): Good afternoon. First of all, I would like to take this opportunity to thank you for...

Le Président (M. Richard): I repeat in English: You need to use only fifteen minutes, not more. You can use less. Go on.

Mme Gillanders: Good afternoon. First of all, I would like to thank you for the opportunity to present our brief. I would like to begin by introducing the members. On my left, I have Mrs. Honey Dresner, who is our executive in communications, Mme Jeannine Dorland, who is our secretary-treasurer; on my right is Mrs. Kyra Emo, our vice-president, and Mrs. Jane Nicholson, building representative. My name is Wendy Giltanders, I am the president of the Redfern Tenants' Association.

Mrs. Emo, would you begin?

Mme Emo (Kyra): Thank you. In response to "Llifting the Moratorium: a Necessary Decision. As tenants residing in apartment buildings within the City of Westmount, we are deeply concerned over the proposal to lift the moratorium currently in effect on condominium conversion and we would like to reply to the Honourable Minister Bourbeau's invitation to comment on the white paper by raising the following issues which directly affect the condition, the guarantees and the welfare of our lives by this proposal.

The City of Westmount's population is approximately 20 000, 57 % of which are tenants in rental dwellings of five or more units. Therefore, the proposal to allow the conversion of existing rental units into condominiums would have a deep and lasting effect on slightly more than half the population of the City of Westmount.

We wish to address not only the ramifications that this proposed lifting would have on the lives of all tenants, but also the loopholes in the existing legislation that have lead to the present situation of uncertainty, anxiety and upheaval for many tenants through the use of harassment tactics and the violation of Article 1653, whereby tenants may be temporarily evicted on the grounds of major renovations.

We strongly feel, in addition to the provision of complete protection to all tenants ensuring the protection of their rights in the event of the lifting of the moratorium, that immediate and necessary measures should be established to prevent the use of harassment, pressure tactics, and/or the misuse of Article 1653 by unscrupulous speculators who empty apartment buildings either in anticipation of converting to condominiums or with the intention to increase the sale value of property in the wake of the active but inflated real estate market that currently exists on the Island of Montreal.

Under present laws, there is little or no protection available to tenants who suddenly find themselves innocent victims of speculators. When confronted by a sudden change in their home environment, some tenants relocate at their own expense while others organize themselves in an attempt to protect their homes. However, very few tenants have the stamina, sophistication, access to resources, or the self confidence to organize and seek the help they need to deal with the problems that arise when a landlord wishes to replace a tenant or to convert a building. And if they do, they become bewildered, frustrated, and angry when they find themselves belittled and unprotected by the present tenant legislation. They are being forced from their homes without choice, desire or say in the matter. A small proportion of those who are still able, through exhausting legal battles and quite often staggering legal fees, to forestall the immediate eviction or to regain their acquired rights are still uncertain about their future and what effect the lifting of the moratorium will have on them.

Many fear that they will be forced to make a sudden and irreparable decision as to whether or not to buy the unit. The vast majority, especially those living on limited or fixed incomes as is generally the case with the young, the elderly, the retired, the one-parent family, the single-income person or family, or those already bearing previous financial obligations, feel they will be coerced into making a decision to either place themselves in potential financial debt by something they are simply not able to afford or else be forced to relocate their home. Most likely, given the economic status

of many areas, they will also be uprooted from the environment where they have resided, many for most of their lives. Should they opt to stay and continue to reside as tenants in a converted building, the present day legislation and laws still leave them vulnerable to the same loopholes that allow current landlords to use harassment or the application of Article 1653 to evict tenants.

Therefore, we strongly urge the Honourable Minister Bourbeau, the Government of Québec and all parties concerned to listen to and act on the following issues which we, tenants and private citizens whose lives and futures will be directly affected by the action of lifting the present moratorium on condominium conversion, believe require immediate and strong legislation to protect our homes, our environment and our rights.

Mme Gillanders: The next section deals with harassment. Page 8 of the White Paper states that "conversion is likely to result in situations favorable to harassment". Pages 10 and 51 contain the recommendation to discourage harassment and to discourage landlords from putting pressure on tenants, saying that the "following action could be taken" or "might be envisaged: To provide for criminal proceedings in cases where landlords use harassment to achieve their purposes". 1. The white paper clearly acknowledges the fact that harassment as a technique to persuade tenants to vacate buildings is more than probable should the moratorium be lifted. However, as is generally the circumstance when something is anticipated, people prepare in advance for its possibility. The proposal of the Provincial Government to lift the moratorium was made public more than a year ago. We contend that a number of individuals or parties have already made plans and have begun to employ questionable methods to empty buildings on the assumption that they will be permitted to convert these buildings once the official ruling has been passed. Harassment is occurring now, in advance, and steps to investigate these cases should be taken now. The recommendation of the White Paper to "possibly" provide for criminal proceedings when landlords use pressure to force tenants to leave should be instituted and regulated now, not after the moratorium has been lifted. By then the buildings will be have been emptied. 2. Page 8 of the White Paper states: "At present, tenants can protect themselves from harassment by landlords by taking legal action at the Régie du logement. They can thus request authorization to withold or deposit their rent, fulfilment in kind of the landlord's obligation, damages or reductions in rent." Under present tenant legislation, the use of the word "harassment" is not defined and as a charge is not covered by any known law with regard to tenant-landlord relationships. It can only be "tacked on" to a direct action that is being contested under the judicial system. The official definition of the word "harass" in the Merriam-Webster dictionary states "to worry and impede by repeated raids, to annoy continually". It is, therefore, not a case of one isolated incident, but rather a series of incidents. Although tenants have the right to legal recourse through the Régie du logement, they would have to apply to the régie on a continual basis for each separate incident, but they cannot contest the situation of harassment by itself. Therefore, harassment, and its use or application, must be clearly defined and recognized as a separate issue; one that is subject to independent administration of justice. 3. Harassment is a complex issue. Some cases are overt and blatant, others more subtle, and therefore their intention difficult to prove. Some examples follow on the next few pages. They are different types of technics that might be used for harassment. I will not go into at this point but there is a couple pages of them.

These are only some of the harassment tactics employed to force tenants to move out, each one containing many issues, each requiring a separate action. Under present day legislation, the burden is placed on the tenant to pursue legal avenues in order to resolve each one. These harassment techniques are not employed all at one time, but are ongoing and relentless. The tenant has no alternative but to apply to the régie for each individual incident and in each case, it is also the obligation of the tenant to provide sufficient evidence in the form of witnesses, documents, affidavits, etc., to prove that there has been an abuse of justice. This is often extremely difficult to do, and requires a great deal of time, effort and expense. 4. Furthermore, because harassment is not clearly defined, many forms of it border on the edge of civil versus criminal jurisdictions and are, therefore, often lost between two different judicial systems. We commend the Government of Québec for acknowledging that harassment would possibly be applied under the Criminal Code; however, the use of the words "could be" or "might be" does not reassure those tenants who are being subjected now to this form of abuse.

(17 h 45) 5. Many acts of harassment violate the Québec Human Charter of Rights which grants fundamental freedoms and rights to each and every individual, regardless of their status in life. Yet, as tenants who are subjected to harassment, we are not

receiving these rights as so stipulated and guaranteed by the Government of Québec because loopholes exist in the law.

In summation, we strongly urge the Government of Québec to: A. Define harassment and its application, B. Recognize harassment as a separate issue and one that is subject to independent administration of justice, C. Acknowledge harassment as a reality now by investigating suspected cases, O. Put a stop to it now by legislating it into the Criminal Code and provide strong deterrents by making it an indictable offense, E. Condemn offenders of this crime to pay severe damages which victims may petition for.

Mme Dorland (Jeannine): Je vais maintenant passer à une considération et discussion de l'article 1653, mais je vais continuer en anglais parce que je ne suis pas très bonne dans la traduction simultanée de notre document.

Temporary eviction for renovation. Article 1653 of the Civil Code which addresses itself to major improvements other than urgent repairs, setting criteria under which such work would be carried out and allowing for temporary eviction of tenants, was designed to give owners the opportunity to improve their property. However, with the proposed lifting of the moratorium as well as an inflated real estate market, abuses of the most blatant kind have already taken place through the use and abuse of this article. This is substantiated by the White Paper on page 46 where it states "abuses have occurred" and goes on to acknowledge that "this situation is likely to continue after the moratorium is lifted". The proposed measures envisaged to protect - and 1 underline, je souligne l'emploi du terme "envisagées" - the tenants from this abuse are covered on page 47. 1. Under present legislation, unscrupulous speculators already have the ability to use this clause to empty buildings willy-nilly, holus-bolus, on the pretext of major renovations and, once emptied, they then have the right to apply to Superior Court for permission to convert. Abuses of this article are alreday common throughout the Island of Montreal. Although several of the recommendations put forth in the White Paper to protect tenants from misuse of this article are laudable, unless they are put into effect immediately, they will not serve the purpose for which they were intended, as buildings will be and are being emptied and converted even prior to the lifting of the moratorium. Therefore, until such time as there is an official ruling on the lifting of the moratorium and until protective measures against this abuse can be guaranteed, we recommend that a freeze on Article 1653 be implemented at once. 2. Indeed, one of the weakest parts of Article 1653 is that tenants cannot contest the nature or the very expediency of the proposed work and, therefore, this clause can be invoked without any say whatsoever on their part. I remind you that, although a lease has been signed in good faith, a legalized contract - and I repeat contract -to which both parties are henceforth bound, owners have the ability, through Article 1653, to break the lease without any allowable contestation from tenants by temporarily evicting them. Statistics show that more than 90 % of tenants who leave the premises do not return. Deux minutes?

Deux minutes, d'accord. Je vais tenter de résumer la balance de cette section.

Je passerai donc à nos recommandations concernant l'article 1653. We commend the City of Montreal's planned by-law for subsidized renovations which will require landlords to produce an agreement with their tenants showing that the two sides agree to the renovations and we stongiy urge that this clause be added to Article 1653 as a protection to tenants.

We recommend furthermore that provisions be instituted whereby tenants can be reassured that they will receive compensation when they are required to evacuate their premises.

In conclusion, on this particular section, we strongly urge the Government of Québec to: firstly, put a freeze on Article 1653 until such time as the official ruling on the moratorium has been made and protective measures against its abuse can be guaranteed to tenants. We furthermore respectfully submit that you add a clause that renovations or repairs must be agreeable to both parties, tenant and landlord, since they are both parties to the contract that has been signed.

Thirdly, we submit that you follow through on a recommendation to provide complete protection to tenants by implementing protective measures for those who are temporarily evicted. Finally, we request that you provide strong deterrents to any misuse or abuse of Article 1653.

Mme Gillanders: In conclusion, we would just like to say that we recommend and we strongly urge the Government of Québec to: 1. Put an immediate stop to harassment of innocent victims by taking the necessary measures to prevent its occurrence, 2. Put an immediate freeze on Article 1653 until such time as the official ruling on the moratorium has been made and protective measures against abuses can be guaranteed to tenants, 3. Continue the moratorium on condominium conversion. Thank you.

Le Président (M. Richard): Thank you

for your efforts. M, le ministre.

M. Bourbeau: Combien de temps avons-nous?

Le Président (M. Richard): Quinze minutes.

M. Bourbeau: Mr. Chairman, it is with pleasure that I welcome again the representatives of the Redfern Tenants1 Association of Westmount, whom I had the pleasure to see last week, in a meeting that was short, but fruitful somehow.

I am quite aware that one of the main problems of your association is the question of harassment. I have read with much interest your brief, as well as the other black document that you left with me. I have looked at it very carefully, as I promised I would do, including all the nice pictures you left in it.

I must say that it is quite convincing. Yhe renewal notice is quite shocking. I would have been shocked myself to get a notice of renewal saying that my rent has increased from 535 $ to 1150 $, starting...

Mme Gillanders: That was a month ago, it has now been increased to 1240 $.

M. Bourbeau: ...October 1st next. I cannot understand how such a raise can be justified in front of the Régie du logement. I do hope that the person who got this notice knows what to do with it. I hope, anyway, you will tell her.

The question of harassment was discussed with the previous group; I presume you were a witness to these discussions and that you have probably took note of the fact that I did say that our intention is, indeed, to introduce in a forthcoming legislation, a definition of harassment as you asked us to do, in order to give the people a chance to better protect themselves in front of the Régie du logement. Any comment with respect to this declaration that I have made before? Are you satisfied with this undertaking that I have made?

Mme Gillanders: We are mainly concerned that something be done now, that nothing until the moratorium is lifted... If there are any measures to be put in, these measures have to be put in now. It is occurring now.

M. Bourbeau: I understand, but in order to be able to introduce the definition of harassment in the law and measures that go with it, we have to amend the law; this is a law. And the House is not resuming its session until October 20th; that is when the House will reconvene.

Then, in the weeks that will follow, there will be a "projet de loi"; a draft bill will be deposited and hopefully adopted with the help of the Opposition. I presume that they will cooperate on this. So, the earliest possible date at which a bill could be adopted, embodying these changes, will be sometimes in November or December of this year. We cannot amend a law otherwise than with another law.

The same comment would apply to any possible freeze on Article 1653. We cannot freeze the law in any other way than by introducing a new law that will contradict the first one or modify it or abolish it. So, you do realize that it is physically impossible for me, today, to declare single-handedly that there is a freeze on Article 1653; we would have the Opposition up in arms and telling me that I am a dictator. It has to go through the House.

Mme Dorland: M. Bourbeau ou M. le ministre, je pourrais répondre a cela. J'ai eu une longue discussion avec M. Marcel Côté, ce matin, concernant cette question précise. Pour nous, c'est une question d'urgence et de rapidité. On peut vous citer des cas de harcèlement chez nous qui existent depuis deux ans déjà. Dans mon cas personnel - j'ai pris la section sur l'article 1653 - j'ai été le premier membre de notre association à recevoir ces fameux avis qui me demandaient d'évacuer mon logement. C'est le 31 juillet qu'on m'a demandé d'évacuer mon logement à cause d'une inondation qui a été causée par une voisine. Alors, voyez-vous, nous avons déjà développé la mentalité de victime. Nous avons été assujettis a toutes sortes de formes de harcèlement et de mesures arbitraires, etc. Alors, on a un sentiment d'urgence. On veut voir cette loi modifiée et sanctionnée sans délai, aussi rapidement que possible. J'ai posé la question ce matin à mon collègue, M. Côté: Si je me retrouve dans la rue au mois de septembre, à la suite d'une décision de la Régie du logement, qu'est-ce que je vais faire?

M. Bourbeau: Écoutez, je vous dis deux choses: Oui, nous avons l'intention d'intervenir par voie législative pour prévenir le harcèlement en introduisant, dans la loi, les articles qu'il faut. Je vous dis que je le ferai dans les meilleurs délais que me permet la loi. Si je vous disais, ce matin, que la loi sera amendée au mois d'août ou au mois de septembre, là, je ne serais certainement pas honnête puisque c'est impossible de le faire tant que l'Assemblée nationale ne se réunira pas. Dans votre document, vous faites un ensemble de propositions, relativement au harcèlement, qui reprennent, pour une bonne partie, les objectifs que nous avons nous-mêmes établis dans le document que nous avons déposé. Vous ne nous parlez pas, dans votre

mémoire, du guichet spécial à la Régie du logement pour les personnes âgées ou handicapées, ni des enquêtes que la Commission des droits de la personne pourrait être appelée à faire. Est-ce que vous avez examiné la pertinence de ces propositions?

Mme Dorland: Une seconde, s'il vous plaît, M. le ministre.

M. Bourbeau: Well, I may just say it in English. In the brief, in our submission, we propose to establish a special Régie du logement service to provide the necessary assistance to the elderly and the disabled, a special counter for them. Furthermore, we say that this service could, among other things, provide particular assistance and information, and conciliation and also a notify the Commission des droits de la personne of any harassment or exploitation problems reported with a view to an investigation. This morning, la Commission des droits de la personne said that, indeed, they have the possibility of making such investigations and taking action. So, I would just like to know whether you have studied our proposal and whether you agree with it. (18 heures)

Mme Gillanders: We definitely want to see investigation on harassment cases, but I think what is bothering a lot of us is that the words are "possibly" and "could be." There is nothing definite. We have endured a lot of sympathy from a lot of departments, from legal counsel to Régie du logement, from fire departments, police departments, city hall, we have had a lot of sympathy, but sympathy has not done anything for us. It has not solved the problem.

M. Bourbeau: I have much sympathy for you also. However, you have to realize that my being here in charge of these dossiers is rather recent. Before tackling such a very delicate problem, an important problem, we have to study the situation and the document that we have here did not take a few days to draft. It is the result of a year of studies and preparation. I do not think you can blame us for not having moved as soon as we were elected on this subject. It is slow, but it is the time that it took us to really be able to go around the whole problem.

Now, you say that we have possibly some loose words in our wording. It is not that our intention is not there. It is just that if we are categoric in saying that this is what we are going to do, people are going to say: So, your mind is already made up and you are consulting us for nothing. So, we use these words to make sure that the people know that we are ready to listen, to hear and to improve our proposition. So, you should not take these words as being a sign of no interest on our part. It is because we want to be democratic about it.

Mme Dresner (Honey); M. le ministre des Affaires municipales, mesdames et messieurs, j'aimerais vous faire part un peu de nos frustrations et de nos inquiétudes parce qu'on vit une situation difficile depuis très longtemps. En plus d'être frustrés et un peu insatisfaits de la longueur des procédures et du manque ou de l'absence de rapidité dans cette affaire, c'est un problème de juridiction. On doit faire face à des juridictions différentes. Il y a la Cour supérieure ici, il y a la régie là, on va à la police qui constate que c'est une autre juridiction. Il y a tant de créneaux, il y a tant dé trous à remplir. C'est cela qui nous frustre te plus.

Étant donné tous les bouleversements qu'on à subis, toute la frustration, je pense que vous n'avez aucune idée... Il faut vraiment vivre cette situation pour comprendre cette réalité. On est au moins chanceux d'avoir des réseaux, soit des professionnels, des gens qu'on connaît, il y a des avenues de redressement, si vous voulez, mais, même avec ces ressources, c'est pratiquement impossible de résoudre le problème, c'est une frustration continue à cause des lois existantes. Nous n'avons pas l'expertise professionnelle, légale, politique, ainsi que financière pour combattre cela.

M. Bourbeau: II suffit de regarder le document que vous m'avez remis pour comprendre ce qu'est le harassement. I mean, just by looking at the various documents you handed out to me, there is already a good lesson on what harassment is all about, I would say.

Since we have a litte time, I would like to talk about these major renovations. You describe the situation as follows: you say that some owners, thinking that the moratorium will be lifted, are already evicting tenants, preparing for eventual conversion. You know that when they apply for conversion, if the proposal is enacted into legislation, they will have to prove, I mean the Regie du logement will make an inquiry ,and if it is proved that they did expel tenants for purposes of major renovations and this in order to prepare for conversion, they will be refused condo conversion. This is on page 47 of our proposal. We propose to refuse to authorize a building conversion when major improvements or repairs other than urgent repairs requiring the evacuation of tenants were carried out in order to prepare the building for conversion and to evict the tenants.

So, I think that these owners should know by now, if they do not, that they will just meet with a cement wall if they come to the Régie du logement after having

evicted tenants. Therefore, they may not have the success they think they will have.

Mme Gillanders: I appreciate your answer, Mr. Bourbeau, but I would like to point out that in our documents supporting that, you will find in The Westmount Examiner of March 26th that our owner has already not ruled out the possibility of condo conversion and her answer also is that if we do not accept what they do, we can leave. And your proposal that they will not be allowed to convert is for them. But that is not going to help us if we are already gone, if we have been evicted. It will not serve us any purpose.

M. Bourbeau: I have read this. I have seen the newspaper article in your brief. What I would like to say is that with the present system, the way the system works right now, your owner can probably convert if he is successful in emptying the_ building by whatever measures he is using. You know that, right now, whenever a building is empty, the owner can convert, in the present system, with the moratorium the way it exists right now.

I do not think that this is satisfactory to you and it is not satisfactory to me either. So, this morning, we talked to the officials of the City of Montreal and they agreed that it is not acceptable. They said that the keeping of the moratorium is unacceptable and I share that view. We cannot keep on with the system the way it is right now because this moratorium is not capable anymore of protecting tenants.

So, the City of Montreal has suggested to replace it by a new system whereby there would be a more general freeze on condo conversion with the possibility of exceptions where some owners could convert, if some criteria are met. These criteria have not been defined but there would probably be cases where a majority of tenants would agree to conversion or where some other criteria would be met. What is your reaction to this proposition of the City of Montreal?

Mme Gillanders: Well, I was about to ask you a question, Mr. Bourbeau, and that has to do with certain fundamental premises and assumptions that underline your White Paper. One certainly emerges from the reading of your paper with the very strong inference that there is a clamour in the Province of Quebec, there is a clamour in the City of Montreal amongst current tenant consumers, people who are not currently owners of property, to own their own units. And I am not satisfied. I grant it to you, I have not read all of your back-up presentations. I know that you have undertaken extensive research, consultation and that you have done polls and so on. But one figure did stand out in my mind from your White Paper and that is that 16 % of those polled in the survey that you undertook were "peu intéressés". 28 %? I read 16 %. I will have to find that.

Le Président (M- Richard): J'aimerais vous faire part que le temps de la partie ministérielle est terminé. C'est maintenant au parti de l'Opposition. M. le député de Saint-Jacques, si vous avez des questions, s'il vous plaît.

M. Boulerice: Yes. First, I have to congratulate you for your memorandum. It is not the time you take to write it down that matters, it is the ideas in it. Probably for less money and in a shorter time you have put more in your memorandum than the so-called best-seller the minister is spreading around.

You are telling us things that are very interesting. For example, you said that 57 % of Westmounters are tenants. Again, as I said this morning, it really kills the old folklore about Westmount and tells us that we are now really facing a Greater Montreal problem with loosing. That is why, as the Opposition, we requested that the commission sit in Montreal, so we could hear you and listen to what you had to say or to what you have to say.

I am going to go by "absurdo", if you allow me. Anyone can answer. Can one of you afford to go and live at 285, Clark Street, where the penthouse condo is up to 1 300 000 $? Good gracious: I thought it was an ad for an Upper Manhattan apartment! I thought I was reading the Architectural Digest. But no, it is next block from here. So, if you are evicted, can you go and live there?

Mme Dresher: Seeing as I am the most likely one to be evicted, I can tell you that I cannot even afford to go and live in the toilet, never mind the penthousel

M. Boulerice: Yes. I was sure about it. Neither can I. I wish we could but we cannot, so... If we are evicted, that is what will happen. The Minister says that he cannot legislate on Article 1653. You know, the Minister could stand in the House and do, as we say in French, "une déclaration ministérielle". That has the force of a law. He could do that. So when he says that he cannot do anything about it, I am sorry, but I just do not believe him. He sticks to his unique wicket for senior citizens and handicapped people, pretending, as my collegues, say, that Napoleon's black horse is white or Napoleon's white horse is black, no matter what it is, that It is really solving the problems.

First, most senior citizens... Well, they

will probably try to call and the line is busy, of course, because there are a lot of people doing it. Can they go and take the bus up to it? I do not think this is a great solution. I mean, that it is not the end of the world with that wicket. I am not very much impressed with it. If I look at his so called best-seller, the only question I am asking myself is: Where is the beef» as we say? Do you feel that you will have better protection if his law is voted?

Mme Gillanders: Are you asking if we would be more protected if the moratorium is lifted? I did not catch your question.

M. Boulerice: What I am saying is that everybody describes the situation right now as kind of critical. We are all having problems, right? The Minister comes with his solution. I am asking him: Where is the beef? He is probably going to give me an answer some day, a correct one, I hope. You have one memorandum, you have read that book, you have met him. Do you feel that the situation will make that we will be better off with this, tomorrow, if it is voted?

Mme Dresner: Mme Dorland va répondre à cela.

Mme Dorland: Je reprends l'histoire du guichet. J'aurai 65 ans l'année prochaine et je suis un peu handicapée. Qu'est-ce que sera ce guichet? II y aura des queues. Il faudra un immeuble entier pour contenir tous les gens qui auront des problèmes. Cet aspect de l'histoire du guichet, que M. le ministre a l'air de prôner comme très efficace, je ne peux pas imaginer cela. Je trouve cela absolument irréaliste. Cette loi ne me protège absolument pas. Enfin, le moratorium... Comment dit-on? Abaisser le... Non, pas abaisser.

Une voix: Enlever?

Mme Dorland: Non. Comment est-ce qu'on dit?

Une voix: Lever le moratoire?

Mme Dorland: Supprimer le moratoire. Je ne trouve pas le mot parce que je pense en anglais. Que le moratoire soit supprimé, en ce qui me concerne, je ne me sens absolument pas protégée, d'aucune façon.

M. Boulerice: About harassment, you want it to be precise in the law and you even used Webster's to describe it, which is fair, of course. You also have said about harassment that it should be included the Criminal Code.

Mme Dorland: Have you ever been harassed?

M. Boulerice: What?

Mme Dorland: Have you ever been harassed...

M. Boulerice: Yes.

Mme Dorland: ...and had to live through something like that?

M. Boulerice: Yes. But let me tell you that is not what you are doing to me right now. I just want to say that I do agree with you about it, I mean this sexual harassment. People are convinced that it should be included the Criminal Code. I know what the psychological damages of harassment are. We saw that lady who came in, a few minutes ago, and went into tears because it reminded her of so many bad moments she had to go through because of all those harassments.

Mme Dresner: Si je peux répondre à votre question... Pardon.

Mme Nicholson (Jane): We may not be as emotional and you may not see our emotions, but we have suffered incredibly. We are simple people, we are working people. We are nearly all working people, there are some elderly people. And I hear a lot of talk about elderly people. I am sympathetic to elderly people and to young people. But, nevertheless, there is a lot of young people who cannot take it anymore. I do not consider myself old, but I know that my life has been made hell, it has been turned upside down. I am a single parent. I have tried to help the others and tried to organize. But it is pathetic. We expected... Maybe people think that it happens in other parts of the city. Westmount, supposedly, is a better part of the city. But we are right beside Westmount City Hall and nobody can do anything. The police can not do anything, it is a civil matter. The fire department can not do anything. There are rules and regulations. We are having to get out there. We are spending our evenings, our weekends, our nights trying to organize things, trying to improve things, trying to find out how the law works.

How can the elderly defend themselves when we, the strong, the working people cannot manage to defend ourselves? We have to spend our money at the court, we have to spend our time, trying to organize people. Some people are afraid, they do not want to participate, they do not want to put their name on anything because they will be sued. There are already three of us being sued for libel. I understand very much the emotions of this woman who was here today because

we have suffered a great deal and we do not know what the solutions are. We want you to find the solutions. We want you to help us. We do know the problems, we know them very strongly. All of us could become very emotional but the thing is, it is not the time or the place, but we do feel very strongly.

M. Boulerice: I am going to go with a statement. We stand with you on that point to include it into the Criminal Code.

Mme Nicholson: I think it is time that people pay for that kind of behaviour that they are dishing out. I do not think that people should make money on the backs of others and that simple people who do not know how to defend themselves should have to go through this day in and day out. It is increadible.

Mme Dresher: C'est cela, le problème. Ces problèmes sont inexorables. Ils continuent tous les jours. On se lève le matin, on rentre chez soi et on a peur que les portes soient enfoncées, que quelqu'un soit la, que quelqu'un soit dans nos casiers, qu'il y ait un autre assaut physique, qu'il y ait une autre voiture déplacée du garage. C'est une série de gestes, d'actes qui sont absolument flagrants, qui sont inexorables et qui ne sont pas contrôlables par nous. Il y a trop de créneaux dans les juridictions respectives. Juste le fait d'essayer de combattre cela exige d'aller consulter des avocats, entraîne des frais absolument extraordinaires.

M. Boulerice:...even psychologists and all that stuff?

Mme Nicholson: Even psychologists.

Mme Dresner: Je suis partie un mois en Europe. J'ai fait des procurations pour toutes mes voisines au cas où je recevrais une lettre recommandée pour éviction temporaire, pour n'importe quel problème. Dans une démocratie, on ne peut même plus partir en voyage parce qu'on a peur de ne plus retrouver son logement à son retour. C'est quand même terrible! On est arrivé au point où on a fait installer des "screamers", dans une vingtaine d'appartements parce que des portes ont été enfoncées, des clés ont disparu et on a peur que quelqu'un entre dans notre appartement durant notre absence. Vous voyez vraiment que ce n'est pas Manhattan réchauffé, c'est quelque chose de très particulier ici à Montréal.

M. Boulerice: Mr. Goodbar.

Mme Dresher: L'analogie n'est pas trop trop loin.

M. Boulerice: Sorry. The chairman has just told me that I only have two or three minutes to go. Three minutes. So again, thank you for coming. Congratulations for your work at a cheap price, in a short period of time, but on many stands much better again is what I have said about that book. I do not think that we are going to give the Minister more time than I have left to change the law. Thank you for coming in and let us know what other problems we are facing right now.

What I find great and I might try to reverse the sentence and use it for all of us: Tenants of all Montreal, let us unite, because that is what we need right now. Thank you.

Mme Nicholson: There is one thing more we want to mention. We are just one building in Westmount that has this problem. We are now in the process of forming a common front and we are very much aware that many many buildings have the same types of problems and we just do not seem to find any solution. But we are not going to give up. So people are going to have to do something about it.

Le Président (M. Richard): Bien. M. le ministre, pour le mot de la fin.

M. Bourbeau: Yes. It was a pleasure to meet again with the people of the Redfern Tenants' Association. I must say that I am a little disappointed that our friend, le député de Saint-Jacques, only found time to make jokes, but this is quite standard with him. This is a very serious problem.

In our proposal, we tried to improve the situation. Obviously, I can see by your answers to the questions of the député de Saint-Jacques that you prefer the status quo to what we are proposing, but I am not happy with your answer. I am not going to settle with the status quo personally, because Ï think that there are things which we can do, and we will do, to improve the situation as far as harassment is concerned and I am certain that you cannot object to us improving the law in order to try to give more possibilities to fight harassment. We have said that we would like the Régie du logement to have a special place where harassed people could receive special treatment. We are told that this is not a good solution, so we will try again. We will put it back on the drawing board and see whether we can improve upon this.

We will try to bring the Commission des droits de la personne in the case. I do not know whether you like it or not. I do not think that we have commented on this. 1 am determined to find ways to improve the situation and I hope that you will help us to improve a plan which obviously is not enough

for you.

Finally, I will say that, as far as the Criminal Code is concerned, it is probably a good thing to have it amended also, but this is of Federal jurisdiction, as you know, and you would have to see your Federal MP to put pressure on the Federal Government to amend the Criminal Code in that way. Thank you.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Jacques, pour un mot final.

M. Boulerice: Our stand this morning, at the very beginning, was to maintain the moratorium, but to make it really effective by all means and ways. As far as putting it into the Criminal Code, I will just say to our colleague, who pretends to be a good negotiator with the Federal Government to which we all still belong: Well, use your so-called forces. And about making jokes, I do it sometimes to calm myself in front of stubborn attitudes.

Le Président (M. Richard): Merci de votre présence et de la présentation de votre mémoire. J'ai l'impression que vous voulez dire quelque chose. I imagine you want to say something?

Mme Gillanders: I just want to say thank you to everybody. We still stand on what we stated. We still would like to see something done immediately about harassment. We still want to see Article 1653 frozen and we still take a stand that the moratorium should be maintained. We are living through this now, please help us have some justice done. Thank you!

Le Président (M. Richard); Thank you very much for being here. Nous supendons les travaux jusqu'à 20 heures. Bon appétit a chacun d'entre vous. Vous pouvez laisser vos documents sur les tables, il n'y a aucun problème.

(Suspension de la séance à 18 h 26)

(Reprise à 20 h 11)

Le Président (M. Richard): Mesdames et messieurs, la commission de l'aménagement et des équipements reprend ses travaux de consultation générale portant sur la levée du moratoire sur la conversion des immeubles locatifs en copropriété divise.

Le groupe que nous entendrons est l'Association des étudiants aux études supérieures de l'Université McGill et l'Association des étudiants de l'Université McGill.

Je tiens à vous répéter que vous avez quinze minutes pour présenter votre mémoire. Je vais être assez sévère; quand il va rester deux minutes - et c'est d'ailleurs chronométré - on va vous le signifier. Si votre texte est plus long que cela, il faudra aller directement à la conclusion. Cela va? Par la suite, les membres du Parlement, autant de l'Opposition que du pouvoir, auront chacun quinze minutes pour vous poser des questions.

Is it necessary to repeat in English?

Des voix: No, no.

Le President (M. Richard): Wonderful!

The only thing I want to say in English, just in case, is: Fifteen minutes, not more. You can use less. Go on.

Association des étudiants aux études supérieures de

l'Université McGill et Association des étudiants

de l'Université McGill

M. Schultze (David): Merci.

Le Président (M. Richard): Vous présentez votre délégation en premier.

M. Schultze: C'est cela. Je m'appelle David Schultze. J'ai été le, vice-président aux affaires externes de l'Association des étudiants aux études supérieures de l'Université McGill. À ma droite, M. Daniel Teneunbaum, l'actuel président de l'Association des étudiants de l'Université McGill qui regroupe l'ensemble de la population étudiante de McGill; à ma gauche, Mme Maria Battaglia, la vice-présidente aux affaires universitaires, et, à mon extrême gauche, M. André Couture, l'actuel vice-président aux affaires externes de l'Association des étudiants aux études supérieures.

D'abord, j'aimerais souligner que notre mémoire parle uniquement de la situation des étudiants è l'Université McGill, mais nous croyons que ses conclusions s'appliquent également aux autres étudiants, surtout aux étudiants du centre de Montréal, notamment de l'Université du Québec à Montréal, de Concordia, du Cégep du Vieux-Montréal et de Dawson College. Evidemment, à cause de nos contraintes de temps et de ressources, notre analyse porte sur les étudiants de McGill, mais je pense que les problèmes qu'on décrit et les solutions que l'on suggère s'appliquent à l'ensemble de la population étudiante en tant que locataire.

J'ajouterai même que, probablement, la situation pour les étudiants de l'UQAM est pire, étant donné qu'à ma connaissance, c'est la seule université à Montréal qui n'ait aucune résidence étudiante.

D'après ce que vous avez compris dans le mémoire, il y a déjà une énorme pression sur la population étudiante qui habite les quartiers du centre de Montréal. Ces étudiants habitent ces quartiers pour être près de leur campus et, actuellement, ces quartiers étant à la mode, il y a de plus en plus de gens qui veulent y habiter. Ils ont des revenus beaucoup plus grands que les étudiants. il y a donc'une concurrence pour une quantité limitée de logements. Donc, nous avons peur que les étudiants sortent perdants.

Vous trouverez dans le mémoire un ensemble de propositions. J'aimerais commencer par souligner la première proposition dans laquelle nous reprochons quelque peu au gouvernement de reconnaître lui-même les lacunes de l'actuel moratoire sans les résoudre jusqu'à une politique plus complète quant au moratoire.

Si vous, les membres du gouvernement, reconnaissez qu'il existe un problème, on vous suggère, on vous demande de le résoudre au plus vite parce que ce sont nos membres, ce sont nos collègues qui en souffrent actuellement. Je ne pense pas qu'on puisse attendre des solutions plus lointaines.

Pour le reste, on reprend les recommandations du Regroupement des comités logement et associations de locataires pour des gels sur la conversion dans les quartiers où le taux de vacance ne dépasse pas les 3 %. Je pense que cela impliquerait l'ensemble des quartiers entourant les campus universitaires. Nous insistons beaucoup sur la proposition 3 qui parle d'élargir la juridiction de la Régie du logement aux logements inoccupés. C'est un point sur lequel on va revenir. C'est important de comprendre que le document qu'a publié le ministère parle toujours d'un droit de locataire qui passe par l'individu. Il ne comprend pas les locataires comme groupe social, alors que les étudiants, comme locataires individuels, changent souvent d'appartement.

Une réglementation qui protège uniquement leurs droits au moment ou ils sont dans ces appartements ne les protège pas beaucoup. Si, par exemple, on est forcé de retourner à Rivière-du-Loup pour l'été, un droit de préemption n'aide pas beaucoup.

Pour terminer, j'insisterai sur l'importance que, dans une plus grande politique du logement le gouvernement considère la situation des étudiants. Si vous ne la considérez pas, ces étudiants vont concurrencer les autres clientèles à faible revenu, c'est-à-dire que n'importe quelle politique de logement social qui ne tient pas compte des étudiants risque d'être défaite par la concurrence qu'ils livrent aux autres ménages a faible revenu.

M. Couture (André): Merci, David. Pour continuer notre présentation, je parierai un peu du rôle des universités dans la ville de Montréal, surtout de McGill. Comme David l'a dit avant, cela s'applique à l'autre université sur l'île de Montréal.

Le record de McGill concernant les logements louables près du campus est vraiment choquant. Premièrement, l'expansion de ses propres départements est malheureusement défavorable aux locataires des logements de McGill. Pire, il y a la politique que l'université a de vendre son immobilier, incluant des logements louables et convenables pour les étudiants, aux développeurs privés. Par exemple, sur la rue Peel, où les étudiants, enseignants et autres gens habitaient tout près de l'hôtel Shangrila, McGill a vendu un immeuble qui est maintenant complètement détruit. L'exemple le plus frappant est l'édifice le Marlborough sur Milton, angle Université, un immeuble d'environ 150 locataires avant, la plupart étudiants, qui a été vendu et qui est maintenant un complexe magnifique de condominiums complètement ou presque complètement inaccessibles aux étudiants. C'est un exemple frappant de la politique de McGill.

Je souligne qu'avec les pressions fiscales dont McGill et toutes les autres universités souffrent, on peut le comprendre, c'est une politique a laquelle ils sont vraiment forcés pour... Les pressions fiscales les ont vraiment forcées à vendre ces immeubles pour de l'argent. Quand même, pour les étudiants, ce n'était pas une excuse vraiment,

Concordia's record is not much better. We all have heard of the library expansion project on Bishop Street, where a lot of students were moved out of the building in order for expansion of the library at that point without any consideration regarding where they were supposed to live. It is an example of how this policy is not just a McGill policy, it certainly applies to the other universities.

Now, what we - as David outlined in his recommendation - would like to see the Provincial Government do is to exercise the powers that it does have over real estate in the Montreal area. We all know the example of the provincial pressures on the Museum of Fine Arts, giving the Museum of Fine Arts the power to expropriate land across the street to expand the museum. We would like to see the Provincial Government use these powers in a similar situation for universities. The financial powers that the Provincial Government has over the universities are well known and we would like to see both of these responsibilities of the Provincial Government exercised in tandem to benefit students on the Island of Montreal who are, after all, the future citizens, taxpayers, voters and what have you of the province.

Mme Battaglia (Maria): Thank you André. Depuis les années soixante-dix, il n'y a quasiment pas eu d'études au sujet des besoins en logements des étudiants, malgré le fait qu'ils constituent un grand marché d'hébergement dans le centre urbain. Les étudiants qui n'ont pas l'aide de leur famille préfèrent habiter aussi près du campus que possible, à cause de leurs études intenses et de l'utilisation qu'ils font des laboratoires parfois jusqu'à douze heures de suite. Pour ces raisons, il est nécessaire d'habiter aussi près du campus que possible.

L'hébergement pour les étudiants, au Québec, est absolument insuffisant. En 1981, par exemple, la province entière a logé seulement 13 460 personnes entre 15 ans et 34 ans. Il faut noter que ces jeunes n'étaient pas tous des étudiants. Seulement à McGill, en 1986-1987, il y avait 10 276 étudiants qui provenaient d'autres provinces.

Présentement à McGill, le manque d'hébergement est devenu critique. Les résidences de McGill contiennent au maximum 1114 lits. Un nombre absolument inacceptable puisque, dès le 4 mai, il y avait 5000 demandes de chambres dans les résidences à McGill.

The right of tenants in Quebec is an almost perpetual right. However, where students are concerned, there is a deficiency in the present law. Due to the students' high mobility rate, the change of tenants offers landlords the possibility of vacating the premises and renovating the building. If the moratorium is lifted, one could expect that most of these apartments would be for sale as condominiums by the summer of 1988.

The right of preemption is useless to students, since most students cannot afford to buy condominiums; few condos are owned by young people in Canada. A 1984 national market study prepared by the Canada Mortgage and Housing Corporation revealed that 47,8 % of condo owners are between the ages of 40 and 65. Furthermore, another 22,5 % were over the age of 65. The average condo household income was more than 38 000 $, more than twice the average household for young Quebeckers.

Another concern with students is the quality of student life. There are three universities in the downtown area and two cegeps, all competing for student housing. By losing students from outside the city or province due to a lack of affordable housing, we would be losing the national character of our university.

The problem is not going unnoticed by many members of the McGill community and many have voiced their concern for this matter. For example, the university's off campus housing service has increased its staff this summer to help students find suitable housing space. The McGill senate on nonresident housing has prepared a report which looks at a scheme to improve the quality of student life by accommodating a wide variety of students, including married students, disabled and students with children in a financially self-sustaining project. However, for such a project to be feasible, there is a need for buildings and for funding.

Last but not least, the Student Society of McGill University has established a student housing task force to look into the range of possible solutions to the problem in the vicinity of McGill Campus. The committee would prefer that the Quebec Government had a coherent housing policy to which we could contribute rather than introducing a harmful policy whose damage we would have to spend our time trying to repair

Merci, messieurs. Si vous avez des questions è poser, nous serons très heureux d'y répondre.

Le Président (M. Richard): Merci. On vous félicite, vous êtes à l'intérieur des quinze minutes.

Thank you for those minutes.

M. le ministre.

M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: Merci beaucoup, M. le Président. Just trying to stay within the time frame. First of all, I read the memoir and I am very impressed by the "prestations" of the students. I just have a few questions and I ask the ones in English according to the text in English; if it is in French according to the text in French. You mentioned a percentage of 3 % vacancy on page 8 of your memoir. How did you take this percentage? I know it is less than 3 % now. But why did you say that the safeguard should be 3 %?

M. Schultze: It was a percentage... That is a recommendation we borrowed from le Regroupement des comités logement et associations de locataires. My understanding is that 3 % is seen as the sign of a healthy housing market, that it ensures, that it takes into account a certain amount of moving in and moving out, and accessibility of housing.

M. Polak: Okay.

M. Schultze: Something like the 3 % unemployment that is supposed to be full employment.

M. Polak: Thank you. On page 2, you talked about the rents that the students are paying. You go from 1982 to 1987, you give some very interesting statistics concluding that the students are really now paying an average of 50 % increase in five years. Those are figures that you have taken from actual figures from students who are residing

in apartments?

M. Schultze: To explain the methodology, at the end of the year there are always dozens, if not hundreds of students who are leaving the city for the summer; they try to sublet their apartments. One of the ways by which they try to sublet them is to put classified ads in the McGill Daily. So, in the last issue of any school year of the McGill Daily usually has dozens of advertisements for sublets. So, what we did was to take these advertisements from five years, break them down by size of apartment and calculate the average rent. In the column N, you see the size of the sample. While it is not a perfect sample, I think it indicates a general pattern which is an extremely sharp increase in rents.

M. Polak: Another question is that you mention on page 6 the protection of the individual tenant. As you know, the Minister has stated in his document that the tenant in place will be protected and has the right to stay. Of course, I understand that in the case of a student, it changes almost from year to year, or two years to two years, depending on which faculty he or she is at. Do you suggest - you did not mention it in your document - that the Minister should sort of... Because his intent is to protect the tenant. Sometimes, I criticize the Minister, but I have to give him credit too when he says: I want to protect the tenant in place. He has said that the tenant is protected forever and Ï agree whole-heartedly with that. But in case of students, do you suggest sort of an exception for that particular category?

M. Schultze: Myself, I have trouble seeing that that would be feasible, which is why we included the recommendation that areas with vacancy rates below 3 % not have any conversion of apartments to condominiums.

Just a note on a point. The members of the committee could in one minute's walk from this hotel find buildings that each year see dozens of students move in and dozens of students move out. Many of the students have no choice but to move out. They have to return home for the summer and home is outside of Montreal. Now, I understand the motives of the Minister in protecting individual tenants but these apartments are in an area that is extremely attractive to prospective condominium owners which also happens to be the closest to McGill University and if the proposals that have so far been presented by the Minister go through, I think that we can only expect that almost all of those apartments will be condominiums within months of the students departure.

M. Polak: Last question, and then I will gladly turn, it over to the very bilingual MNA for Saint-Jacques. He is always complaining about the fact that we do not protect French; he is bilingual, so I do not blame him because he is protected already: He knows English very well. (20 h 30)

I found it interesting when you said, on page 1 of your memoir, that where you live used to be known as McGill Ghetto and now, it is called "Durocher Village" or maybe village, depending on... He would say "village" in English and I say "village" in French.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Polak: Could you just comment because, to me, it was a little bit ironic when you sort of said: Look what happens. You are pushed out and the rich are taking over. Is that what you tried to say?

M. Schultze: That is exactly a bloc from this apartment. A few weeks ago or rather in the spring, I was walking around in this area with some friends on a nice warm Sunday afternoon and we walked down, I think, Aylmer or Hutchison just below Pine. We passed the building with a sign that said: "Open House". You know... Whatever "Open House" is in French. We recognized the place. I knew students that had lived there. I think they were six or seven sharing the place. It was a very nice place. Since then...

I suppose perhaps some of you might be interested in buying half of it for 195 000 $. Unfortunately, on a bursary, I cannot afford to buy it at 195 000 $.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Polak: Okay. Thank you very much. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député de Sainte-Anne.

M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: "Que dice el deputado de Sainte-Anne no es importante."

Ce que le député de Sainte-Anne a dit tantôt quant à mes compétences linguistiques, ce n'est pas important. Je ne sais pas quel phénomène, je ne sais pas si c'est votre jeunesse qui a provoqué un grand mouvement de détente dans cette commission qui a été peut-être auparavant un peu tendue, surtout quand j'ai dit au ministre que son livre n'était pas ce que j'appelais un "best-seller". Donc, vous avez provoqué une certaine détente qui n'est pas à sous-estimer. D'une façon beaucoup plus sérieuse, je voudrais effectivement vous féliciter d'être venus intervenir à cette commission.

Je sais que vous appartenez à une organisation qui est spécifiquement rattachée à l'Université McGill mats je pense que la qualité de votre mémoire vous donne -comment dirais-je pour essayer d'employer un mot français - du crédit qui déborde très largement celui d'uniquement une représentation de l'Université McGilI. Je pense que vous situez très bien la problématique vécue au niveau des étudiants. Vous avez parlé, dans votre présentation verbale comme dans le mémoire écrit que vous avez transmis, de la présence de votre université, McGill, de celle de l'UQAM d'ailleurs qui est dans Saint-Jacques, de Dawson, du Vieux-Montréal en omettant, mais je vous pardonnerai cela bien volontiers, l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec qui regroupe aussi un nombre d'étudiants dont la quasi-totalité vient de l'extérieur de Montréal et pour qui, effectivement, se pose le problème que vous faites valoir, à savoir qu'ils doivent quitter l'été, et le problème de rétention que cela peut constituer pour eux.

Au-delà du moratoire comme tel... Si je comprends bien ce que vous dites, c'est que vous êtes contre la levée du moratoire et que vous ne voulez pas de moratoire. Vous parlez du renforcement des mesures de protection. Est-ce que je dois comprendre que ce qui est proposé là-dedans ne constitue pas à vos yeux des mesures de renforcement qui seront efficaces pour le point de vue que vous faites valoir?

M. Schultze: Comme j'ai déjà essayé de l'exprimer, je ne porterai pas de jugement pour l'ensemble de la population "locatrice", mais pour ce qui est de la population étudiante, ce qui est proposé dans le document ne la protège pas d'une façon adéquate.

M. Boulerice: La majorité des intervenants qui se sont présentés durant la journée ont fait part d'un certain "harassment"...

Une voix: Harcèlement.

M. Boulerice: Je m'excuse. "Harassment", c'est le mot anglais. Est-ce que vous avez des cas où des propriétaires ont effectivement profité de votre condition d'étudiant, donc avec des ressources financières limitées, pour faire véritablement du harcèlement, harassment is the word he used.

M. Schultze: Je pense que l'un des meilleurs exemples qu'on pourrait donner serait le cas du bâtiment de Marlborough que M. Couture a cité. Je ne sais pas s'il aimerait décrire la situation.

M. Couture: Comme vous êtes déjà au courant que, dans ma présentation, on donne le rapport, effectivement, oui, le Marlborough est un excellent exemple de cet harcèlement des locataires dans les lieux. Après que le Marlborough ait été vendu, le nouveau propriétaire a donné avis aux locataires de plusieurs appartements qu'il faisait des réparations majeures. Alors, ils avaient un mois pour quitter. La plupart sont partis mais il y en a quand même, je pense que c'est six ou sept, qui sont restés pour se battre. Je ne connais pas leur situation en ce moment, mais je pense qu'ils ont perdu leur bataille. C'est vraiment un exemple, primo, qu'on a des étudiants qui souffrent d'une politique inadéquate. La politique proposée n'aura presque pas d'effets sur les étudiants. Alors, on voit une grande lacune dans les deux politiques.

M. Boulerice: J'ai lu la statistique qui est vraiment époustouflante, à savoir le nombre de demandes qui avaient été présentées, à ce que vous appelez le "Off Campus Housing Service", avec une courbe ascendante vraiment incroyable. Je ne sais pas, je vous pose la question: Est-ce qu'à ce service, on a poussé l'étude jusqu'à être capable de déterminer si les conditions de logerneht extrêmement difficiles qui peuvent exister pour les étudiants ont été jusqu'à être significatives dans le taux d'abandon scolaire ou d'abandon universitaire, enfin, vous me comprenez?

M. Schultze: Je ne pense pas qu'on puisse vraiment répondre à cette question. En effet, on a constaté qu'en ce qui touche les statistiques, les renseignements sont extrêmement limités. Il ne serait pas possible de faire des liens de ce genre. Il serait peut-être à noter que malgré le fait qu'il y ait une augmentation évidente des loyers à Montréal, je ne pense pas qu'il y ait eu une augmentation semblable des prêts et bourses.

M. Boulerice: C'est vous qui dites cela. Je suis très content de vous l'entendre dire. Mais c'est un débat qu'on pourra avoir dans une autre commission avec un autre ministre.

Le Président (M. Richard): Vous changez un peu de dossier.

M. Boulerice: Vous changez un peu de dossier. Non, vous avez à juste propos, je pense, fait état de cela, comme du sous-financement chronique des universités qu'a dénoncé d'ailleurs ma collègue, Mme Blackburn, députée de Chicoutimi. Cela demeure toujours dans le portrait.

Dans les recommandations, vous dites prévoir la construction de logements pour étudiants dans le cadre d'un programme de logement social pour les ménages à faible

revenu. Vous l'incluez dans la notion de ménage à faible revenu. Je vous avoue que cela m'a... Que vous n'ayez pas spécifiquement fait état d'habitations étudiantes mais bien de l'inclure dans un programme dit pour ménages à faible revenu.

M, Schultze: Ce n'est pas pour dire qu'on souhaiterait l'intégration d'étudiants particuliers dans des HLM. C'est pour dire que c'est quand même une population è faible revenu. Ce que l'on tient à vous signaler c'est d'ailleurs une conclusion qu'a tirée une commission en Ontario, il y a quinze ans, qui est citée a la page 7 - c'est que cela fait partie d'une clientèle a faible revenu. Je pense que ce qu'on verrait si ce moratoire est levé sous les conditions énoncées dans le document du ministère, c'est que les étudiants sont prêts è payer de plus grands montants parce que c'est temporaire et, je pense, qu'on peut supporter les choses mieux quand c'est temporaire. Je pense qu'ils vont commencer, de plus en plus, à concurrencer les autres populations à faible revenu.

Déjà, il y a des étudiants de McGill -cela va peut-être vous surprendre - qui habitent la Petite Bourgogne, Verdun, même Pointe-Saînt-Charles, Saint-Henri, il y en a beaucoup à Saint-Henri. Ce qu'on dit, c'est que si, dans une plus grande politique de logement social, vous ne prévoyez pas les besoins des étudiants, comme je l'ai dit, cela risque de défaire cette politique, parce qu'il y aura comme une demande pour du logement peu coûteux dont on n'aura pas tenu compte qui va défaire l'ensemble de la politique.

Je veux dire, on ne veux pas voir qu'il y a des étudiants qui s'opposent à des familles bénéficiaires d'aide sociale pour avoir des appartements pas cher, ce qui pourrait se produire.

M. Boulerice: Mlle Battaglia, gentlemen, thank you. Je ne sais pas si mes autres collègues veulent...

Le Président (M. Richard); Cela va? Est-ce que vous avez des commentaires, M. le ministre, en terminant?

M. Bourbeau: M. le Président, deux commentaires. Premièrement, le très ineffable député de Saint-Jacques a fait allusion, tout à l'heure, au document gouvernemental en le traitant de best-seller, évidemment, en riant un peu, parce qu'il croyait que le document n'était pas très populaire. J'aimerais l'informer, de même que les autres membres de la commission, que non seulement le document a été populaire, mais on a dû procéder à une réimpression è la suite de sa très grande popularité.

À la première impression, nous avions fait 2500 copies françaises et 750 anglaises. Nous avons dû réimprimer 1500 copies françaises et 300 anglaises. Voilà, pour répondre au député de Saint-Jacques. Deuxièmement, j'aimerais féliciter les étudiants de l'Université McGill.

I would like to congratulate you for your brief and tell you that if I did not personally intervene, it is because 1 am in a conflict of interest as far as McGill is concerned, since I am a McGill graduate myself and I have a daughter who is studying presently at McGill. So, I selected not to get involved. Congratulations!

Le Président (M. Richard): Des commentaires, M. le député?

M. Boulerice: Je terminerai, M. le Président, en disant qu'effectivement, l'augmentation de diffusion subit la même courbe que les oppositions au livre, ce qui ne m'étonne pas, et effectivement, le ministre le confesse aussi spontanément. Mais, néanmoins, toujours sur l'essentiel, puisqu'il semble se préoccuper de l'accessoire, je pense que vous nous avez fait connaître un point de vue extrêmement pertinent et surtout extrêmement intéressant.

Soyez certains que mes collègues et moi prenons très bonne note de vos considérations. D'ailleurs, je me chargerai personnellement de faire le relais avec notre porte-parole pour ce qui est des questions d'enseignement supérieur, la députée de Chicoutimi, Mme Blackburn. Je vous remercie de nouveau, Mlle Battaglia et messieurs.

Le Président (M. Richard): Je vous remercie bien de votre présence.

Maintenant, nous appellerons le prochain groupe, l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales du Québec, ce qu'on appelle l'UMRCQ, représentée par M. Georges Filion, son vice-président, et M. Roger Langlais, conseiller technique. Ah non!

Mme Martel (Gaétane): M. Filion est absent et c'est moi qui le remplace.

Le Président (M. Richard): Ah bon. C'est votre droit le plus strict. Prenez donc place, s'il vous plaît. Je n'ai rien contre M. Filion, mais cela va sûrement faire l'affaire.

Mme Martel: Merci beaucoup.

Le Président (M. Richard): Vous vous identifiez, s'il vous plaît et vous présentez votre collègue. Je tiens à répéter, à vous aussi, que vous avez quinze minutes chronométrées. Vous n'êtes pas obligés de faire quinze minutes, évidemment, mais à

deux minutes près, je vous aviserai pour vous mentionner le délai qu'il vous reste. Donc, quand je vous avertirai, il faudra sauter à la conclusion pour permettre aux deux groupes d'Intervenants de pouvoir, eux aussi, utiliser leur période pour vous questionner sur votre document. On y va?

Mme Martel: Mon nom est Gaétane Martel. Je suis responsable du service de recherche à l'union et mon collègue est Me Roger Langlais qui est conseiller technique pour nous dans ce dossier.

Le Président (M. Richard): Merci, à vous la parole, madame.

Union des municipalités régionales

de comté et des municipalités locales

du Québec Inc.

Mme Martel: Je vais vous faire un résumé de notre mémoire. L'UMRCQ a déjà fait connaître son point de vue sur la levée du moratoire dans le cadre de la consultation et de la table de concertation Québec-municipalités. (20 h 45)

L'UMRCQ souscrit à l'objectif de lever le moratoire dans le respect et la protection des droits des locataires en place. Cependant, il nous semble que les modalités proposées pour atteindre les objectifs risquent de créer un régime où, précisément, ceux qui doivent le plus bénéficier de protection seront les plus désavantagés.

La garantie de maintien dans tes lieux. Le locataire qui bénéficiera de cette protection devra subir les inévitables conflits que l'on retrouve dans les immeubles en copropriété où cohabitent des copropriétaires et des locataires. Relativement à l'étendue de la protection conférée aux locataires en place, s'applique-t-elle exclusivement au signataire du bail? Le conjoint ou le conjoint de fait ou encore toutes les personnes occupant les lieux lors de l'introduction de la demande de conversion, pourront-elles bénéficier de cette garantie?

La protection s'appliquera-t-elle aussi aux héritiers ou au conjoint dont l'époux ou l'épouse décède? Les occupants des lieux auront-ils le droit de sous-louer leur logement et de continuer à bénéficier de la protection de la loi? La protection s'appliquera-t-elle aussi à un occupant qui, au moment de l'introduction de la demande de la conversion, occupait un logement è titre de sous-locataire?

Étendre le principe de la garantie de maintien dans les lieux à toutes les personnes l'occupant lors de l'introduction de la demande de conversion constituerait, à notre avis, une mesure trop large. D'autre part, il nous semble que le ministre devrait statuer sur la question du droit de l'un des conjoints, à la suite de la rupture du mariage ou au décès de l'autre, de bénéficier des avantages du maintien dans les lieux.

De même, il y aurait avantage à clarifier la situation du sous-locataire qui occupe les lieux lors de l'introduction de la demande de conversion auprès de la régie.

De la même façon, le règlement sur la conversion devra statuer sur le droit des locataires en place de sous-louer leur logement. Le projet de levée du moratoire propose de consentir un traitement particulier aux logements occupés par des locataires en ce qui a trait aux taxes municipales que devront supporter les locataires de ces logements.

Toute tentative de modifier le système d'évaluation et de taxation foncière actuel risque de cornplexifier un processus déjà suffisamment lourd pour ce qui est de l'évaluation municipale, en plus de menacer les principes d'équité et de parité.

Avant de tenter de modifier le régime de taxation foncière pour la copropriété divise, il importe, dans un souci d'équité collective, de s'assurer que les copropriétés indivises, environ 15 000 logements au Québec, paient leur juste part d'impôts fonciers.

Les auteurs du rapport sur la levée du moratoire proposent que la protection du locataire soit assortie d'un droit de préemption en fonction du locataire sur l'achat de son logement.

Les auteurs du rapport proposent qu'aucune nouvelle norme touchant la qualité physique du logement ne soit applicable aux logements convertis, sauf celles ayant trait à la protection contre l'incendie. En somme, on dit que le logement, sur lequel un minimum de travaux auront été faits, devra coûter moins cher à l'achat et que, par conséquent, plus de locataires dont les revenus sont plus faibles pourront se permettre d'acheter ainsi leur logement.

Mais qu'adviendra-t-il, dans un ou deux ans, lorsque des travaux importants devront être entrepris et que des locataires-acheteurs devront consentir à payer des sommes importantes? Ce problème pourrait être compliqué du fait que les locataires, pour acheter, auront dû consentir à un taux d'efforts accrus pour rembourser une hypothèque et pour payer des taxes foncières augmentées. L'arrivée de dépenses imprévues, dans ces conditions, ne peut qu'occasionner une pression intolérable sur le budget du ménage qui aura à faire le passage du statut de locataire a celui de propriétaire.

Mais ce qui est plus fondamental dans cette approche du problème, c'est que l'on défavorisera ainsi les locataires les plus démunis ou ceux qui appartiennent aux groupes les plus âgés et que l'on empêchera ces clientèles, dans les faits, d'acheter leur logement par peur de voir mettre en péril

l'équilibre financier de leur ménage.

L'autre question fondamentale, c'est le fait qu'on ne profite pas de la levée du moratoire pour encourager et promouvoir un vaste effort de remise en état du parc locatif.

Une remise en état ordonnée et accélérée du parc locatif au moyen de la levée du moratoire ferait davantage pour réduire l'éviction des locataires que la situation actuelle, qui conduit inévitablement à devoir envisager la démolition de plusieurs logements devenus inhabitables au cours des prochaines années et qui entraînera des déplacements forcés de locataires.

La récupération par le règlement sur la conversion des pratiques de rachat du droit d'occupation que l'on retrouve sur le marché de la conversion et l'établissement d'un prix minimal de rachat en fonction de la durée d'occupation antérieure du logement par le ménage locataire s'inscrirait dans le sens du principe général de protection du droit des locataires en place de continuer a occuper les lieux a titre de locataire. Vous me permettez, une seconde.

Le Président (M. Richard): II vous reste encore un peu de temps, madame. Prenez cela "relax".

Mme Martel: Merci. Cette formule permettrait que le principal obstacle, surtout d'ordre financier pour le locataire, soit éliminé et lui permette d'acheter son logement s'il le désire.

Oui plus est, ce mécanisme permettrait aux locataires de monnayer et convertir en mise de fonds, la valeur de leur droit d'occupation en fonction de la durée de leur occupation antérieure.

Pour le locataire qui, pour acheter, monnayera sa durée d'occupation antérieure, le prix d'achat ne serait pas supérieur de beaucoup à celui qu'il aurait effectivement déboursé pour acquérir un logement non remis aux normes. Cependant, il aura l'assurance de devenir propriétaire d'un logement dont les principales composantes ont été remises à neuf et pourra mieux prévoir, dans son budget de ménage, les dépenses reliées à l'entretien pour le futur.

La transformation de la durée antérieure d'occupation en valeur monnayable ouvre davantage de possibilités aux locataires puisqu'ils peuvent soit acheter le logement qu'ils occupent, soit vendre leur droit d'occupation et utiliser l'indemnité reçue pour acheter un autre logement ou pour se reloger ailleurs dans le parc locatif.

Pour éviter que l'on ait recours à des travaux majeurs pour évincer des locataires, le locataire évincé pour travaux majeurs pourrait disposer du droit de réclamer le paiement de l'indemnité pour occupation antérieure, dans le cas où le propriétaire procéderait à la conversion sans lui avoir permis ou offert de réintégrer son ancien logement è la suite de travaux majeurs.

La complexité du processus suggéré par les auteurs du rapport sur la conversion aura l'effet de réduire l'intérêt des propriétaires qui envisageraient la conversion de logements locatifs. On constate rapidement que les formalités et les exigences reliées à la levée du moratoire constituent un domaine pour les spécialistes de la conversion et nécessiteront le recours à des conseils professionnels. La récupération par le règlement des activités de conversion dans le domaine de l'indivis aura l'effet de réduire le niveau des activités dans ce domaine qui a été florissant au cours des dernières années.

En conclusion, il nous apparaît, avant de proposer pour adoption un projet de règlement sur la conversion en copropriété, qu'un examen en profondeur des mécanismes proposés devrait être entrepris avec les objectifs suivants: simplifier les mécanismes; permettre le couplage de la remise en état des bâtiments locatifs et de la conversion en copropriété; articuler un mécanisme qui permette véritablement aux locataires de choisir entre la vente de leur droit au maintien dans les lieux et l'application è l'achat de leur logement de la valeur monétaire de ce droit; examiner en profondeur les conséquences et les effets de récupérer, au moyen du règlement, le contrôle des achats du droit d'occupation sur le marché de la conversion, en considérant particulièrement l'opportunité de lier l'indemnité à payer au temps antérieur d'occupation des lieux par les locataires; préciser les modalités et les règles d'application de la garantie de maintien dans les lieux des locataires, une fois la conversion réalisée, particulièrement en ce qui a trait aux conjoints, aux sous-locataires, et préciser la portée et l'étendue de ces règles.

Dans cette démarche de reformulation des règles touchant la levée du moratoire sur la conversion, l'UMRCQ vous offre sa collaboration et sera heureuse d'appuyer, auprès de ses membres, toute initiative favorisant l'accession à la propriété pour les ménages et les occupants du parc locatif. Merci.

Le Président (M. Richard): Merci, madame, M. le ministre, est-ce que vous avez des questions ou des commentaires a la suite du document présenté par l'UMRCQ?

M. Bourbeau: Oui. Il me fait plaisir de saluer de nouveau nos interlocuteurs privilégiés qu'est l'UMRCQ. Nous avions l'occasion de les rencontrer, il y a une dizaine de jours, en d'autres lieux, pour discuter d'autres sujets. L'UMRCQ est certainement un organisme très représentatif

d'une large partie du Québec, puisqu'elle compte environ 1200 municipalités membres sur les quelque 1500 que compte le Québec. Je remarque d'une façon générale que l'UMRCQ se prononce en faveur de la levée du moratoire, ainsi qu'en faveur, bien sûr, de la protection accrue... Pardon, M. le député de Jonquière, est-ce que vous avez des remarques à faire à ce stade-ci?

M. Dufour: Oui, il faut le lire comme il faut.

M. Bourbeau: Ah bon! Alors, l'UMRCQ, dis-je, se prononce en faveur de la levée du moratoire et de la protection accrue des droits des locataires en place. D'une façon générale, vous suggérez des modifications à la proposition gouvernementale. Nous avions, dans la proposition gouvernementale, préféré des mesures qui n'inciteraient pas aux réparations, majeures ou non, préalablement a la conversion, en pensant que, si nous voulions favoriser l'accès à la propriété par des locataires à revenu modeste, il n'était pas souhaitable de gonfler le prix des appartements par des réparations préalables à la conversion de façon que, justement, les gens à revenu modeste ou moyen puissent se permettre financièrement l'achat d'un logement, quitte à laisser ensuite aux locataires, après conversion, le loisir de modifier ou d'améliorer leur logement à mesure que leurs moyens financiers leur permettraient de le faire.

Vous semblez suivre un cheminement différent. Vous prétendez plutôt qu'on devrait encourager les travaux avant la restauration. Est-ce que vous pensez qu'en ce faisant, on bloquerait, si je puis dire, le chemin ou la voie à un nombre important de Québécois qui ne pourraient pas, à cause du prix plus important qui serait certainement demandé par les vendeurs, accéder à la propriété?

M. Langlais (Roger): Si vous permettez, M. le ministre, je vais tenter de répondre à cette question. Dans l'achat d'une propriété immobilière, il y a des moments importants. Le moment le plus important est celui où l'on réalise la première acquisition. C'est à ce moment que l'on négocie le financement hypothécaire. Les créanciers hypothécaires acceptent de prêter sur des immeubles qui ont une valeur d'emprunt reconnue. Si on a affaire à un logement qui a besoin de réparations majeures, les prêteurs vont être beaucoup plus réticents à offrir du financement.

On s'est dit, finalement, que ce qui est important, c'est la mensualité de l'emprunteur. Il s'agit de savoir s'il sera capable ou non de payer cette mensualité. La façon dont le projet présente le système actuellement, c'est que l'achat est réalisé et qu'ensuite, comme vous le dites, le locataire aurait le loisir d'apporter des modifications ou des ajouts. Dans certains cas, je pense qu'il n'en aura pas le loisir. Il sera obligé de le faire. Si la toiture coule, si la plomberie casse, si le système de chauffage doit être remplacé, ce sont des obligations immédiates, auxquelles il doit répondre. Souventefois, il n'a pas les moyens financiers de réaliser ces travaux. Si le logement était remis en état au moment où le locataire y entre comme propriétaire, il aurait la possibilité d'éviter ces réparations majeures...

M. Bourbeau: Mais le rapport de l'expert le lui aurait dit...

M. Langlais: ...d'avoir une relative sécurité pour s'adapter à son nouveau mode de vie, qui est celui d'un propriétaire, de s'adapter aussi à des paiements accrus du fait de son achat. Si, de plus, il y avait des frais additionnels imprévus, nous pensons que cela pourrait créer des problèmes majeurs.

M. Bourbeau: Évidemment, il y a deux cas qui peuvent se produire. Ou bien on parle de réparations majeures, ou on parle de réparations mineures ou d'entretien normal. Si ce sont des réparations mineures ou d'entretien normal, vraisemblablement, cela n'affecterait pas la valeur d'emprunt, si je puis dire, du logement. Cela n'empêcherait pas un acheteur de trouver un prêt hypothécaire. D'autre part, il est possible, par exempte, qu'un jeune couple, qui achète un logement, n'ait pas les moyens financiers la première ou la deuxième année de réparer ou de faire des améliorations importantes, mais il est possible qu'après un certain nombre d'années, il ait amassé un capital lui permettant d'améliorer la qualité de son logement. (21 heures)

Si on parle de réparations majeures, le rapport d'expert, qui sera obligatoire avant l'achat devra indiquer quelles réparations majeures devront être faites au cours des cinq premières années. À ce moment, les acheteurs achèteront en connaissance de cause. Enfin," - il nous apparaissait qu'ils achèteraient en connaissance de cause ayant en main un rapport d'expert qui leur donnerait un aperçu des réparations devant être effectuées au cours des cinq prochaines années, et des coûts inhérents à ces réparations.

Dans ces conditions, ne pensez-vous pas qu'un acheteur pourrait quand même avoir une bonne idée de ce qui l'attend et se préparer en conséquence?

M. Langlais: II va savoir à quoi s'attendre, mais il ne saura pas passer à travers sur le plan financier. C'est ça qui est le problème. C'est qu'une fois que vous avez placé une première hypothèque sur un

immeuble, comment en placer une deuxième pour faire des réparations. C'est très complexe et très compliqué. Vous créez toutes sortes de problèmes.

M. Bourbeau: D'abord, les hypothèques de cinq ans sont de plus en plus rares. Deuxièmement, il arrive très souvent qu'à l'occasion d'un refinancement le propriétaire présente à son prêteur la garantie et une offre de soumission d'un entrepreneur pour faire des réparations pour 5000 $, par exemple, ou 10 000 $ et obtient l'hypothèque sur la valeur améliorée du logement.

M. Langlais: II faut le faire au départ, justement. C'est cela le point qu'on tente de démontrer. Si ça coûte 5000 $ ou 10 000 $ pour le restaurer ce logement, mettons les, ça va coûter 80 $ ou 100 $ par mois de plus.

M. Bourbeau: II n'y a rien qui dit qu'au moment de l'achat, le locataire ait les moyens financiers de payer une hypothèque plus élevée. Mais, après deux ou trois années, surtout si on parle de couples relativement jeunes, l'enquête de la Régie du logement indique que l'intérêt des locataires è Montréal, dans une proportion importante et surtout chez des jeunes couples, au bout de deux ou trois ans, les moyens financiers s'améliorant, il est possible qu'on ait la possibilité de payer une hypothèque un peu plus élevée, ce dont on n'avait pas les moyens quelques années auparavant... Enfin, c'est une façon d'en discuter.

Vous parlez, dans votre mémoire, au sujet des réparations majeures, des dépenses imprévues qui pourraient survenir après. Je relis mes notes. On en a parlé tout à l'heure. Je vous ai parlé du rapport d'expert. Ce matin, la ville de Montréal, dans son mémoire a fait allusion, a proposé une formule. Elle proposait que les propriétaires, qui voudraient convertir, s'adressent en premier lieu à la municipalité pour obtenir ce que la ville appelle un certificat de convertibilité. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Évidemment, c'est un peu tôt pour réagir, mais que pensez-vous de la possibilité que les municipalités en règle générale soient associées au processus de conversion?

M. Langlais: Je pense que l'idée est intéressante, M. le ministre. Sans vouloir engager l'UMRCQ, j'imagine qu'il va y avoir des frais associés a cela, et la ville va devoir s'équiper d'experts pour évaluer la convertibilité ou la non-convertibilité de certains logements. Elle va certainement chercher quelqu'un à qui présenter la note pour ces services. Cela dit, je pense que la ville pourrait intervenir et cela est dans le cadre d'une visée plus large où on chercherait à remettre en état le parc locatif ou le parc d'habitation en général. Dans ce sens, je pense que les municipalités ont intérêt et à participer a ce processus.

M. Bourbeau: Évidemment, la on spécule puisque c'est un concept nouveau qui a été avancé par la ville. Mais, par exemple, supposons qu'une municipalité décide de s'impliquer et pose comme condition à son approbation que justement des réparations soient faites, cela pourrait être une hypothèse qu'une municipalité dans un règlement municipal accepte de filtrer, si je peux dire, les demandes ou d'émettre des certificats de convertibilité et qu'elle pose comme condition une remise en état des logements, par exemple.

Mme Martel: En fait, ce qu'on disait dans notre mémoire finalement, c'est que comme condition première, c'est de remettre en état le logement et après permettre la conversion, le tout chapeauté par la municipalité. C'est ce que vous voulez dire, si je comprends bien.

M. Bourbeau: Cela pourrait être une possibilité, oui. Ou encore, est-ce que par hasard, vous nous proposeriez de confier à la MRC dans les régions du Québec le soin de gérer les certificats de convertibilité?

Mme Martel: Aux MRC? Mon président n'est pas ici.

M, Bourbeau: Bon, alors je pense que je vais retirer ma question. On pourrait peut-être... Mais étant donné qu'on a devant nous des représentants des MRC, évidemment, je pose une question hypothétique. Je tente de voir quelles sont les réactions de l'UMRCQ à la proposition de la ville de Montréal.

Mme Martel: La réponse est assez générale. Je pense que vous connaissez le point de vue de l'UMRCQ sur le rôle des futures MRC. Je pense que cela vous amène à tirer des conclusions.

M. Bourbeau: Etant donné les conclusions de nos assises il y a dix jours, il faudrait bien que toutes les municipalités locales soient consentantes pour transférer è la MRC cette responsabilité.

Une voix: ...

M. Bourbeau: Oui, M. le Président, merci de votre préavis.

Vous parlez, dans votre mémoire, de la possibilité de monnayer le droit au maintien dans les lieux. À votre avis, le profit de la vente du droit au maintien dans les lieux serait-il suffisant pour permettre aux

locataires de se relocaliser sans problème sur le marché du logement?

M. Langlais: Ce ne serait peut-être pas suffisant, mais ce serait mieux que rien du tout. Ce qu'on vise dans cela, c'est de dire: En donnant aux locataires le droit au maintien dans les lieux, on vient de créer une valeur pour ce locataire, on vient de créer quelque chose qui est monnayable. On dit qu'il faudrait que ce locataire puisse éventuellement monnayer cela dans des conditions où il puisse en bénéficier et qu'il ne se fasse pas avoir au change par des convertisseurs un peu trop entreprenants, comme je l'ai vu dans le passé, dans le cas de l'indivis particulièrement. Des gens sont entrés dans un appartement, la veille de Noël, à 9 heures le matin et en sont sortis à 11 heures le soir. Ils les avaient tous attachés et cela avait coûté 900 $ par tête. Cela s'est fait, M. le ministre, et cela continue de se faire, surtout quand on a affaire a des ménages économiquement faibles. Ils sont beaucoup plus sensibles à la présentation de chèques de 1000 $, de 1500 $ et de 2000 $. On dit: Le ministre devrait prescrire le montant minimal en dessous duquel on ne peut pas aller. Ainsi, cette valeur pourrait être transférée au locataire. Il s'agira d'établir ce chiffre à un montant qui puisse constituer un avoir substantiel pour ce locataire qui lui permette de faire sa mise de fonds, soit sur ce logement, soit sur un autre logement dans un autre immeuble converti, soit sur un bungalow en banlieue. Pour répondre à votre question, ce serait certainement un bon bout de chemin vers une mise de fonds complète.

M. Bourbeau: Vous dites que le règlement pourrait prescrire le montant minimal. Évidemment, cela n'exclurait pas, dans votre esprit, que le locataire puisse demander plus que le minimum requis.

M. Langlais: En dessous duquel on ne peut pas aller.

M. Bourbeau: Qu'est-ce qui pourrait nous assurer que le propriétaire ne présenterait pas quand même un chèque inférieur au minimum et que le locataire ne serait pas quand même tenté d'accepter un chèque inférieur, par exemple? Quelle façon aurions-nous de nous garantir contre des abus?

M. Langlais: II y a peut-être des mécanismes comme celui de la Régie du logement par lesquels le locataire pourrait tout simplement dire: Écoutez, on m'a offert un chèque de tant, ce qui est en dessous du montant minimum requis, je veux m'en plaindre. Cela pourrait être une chose qui est contre l'ordre public - si l'on veut - qu'on pourrait toujours faire rescinder et contre laquelle on pourrait toujours se plaindre.

M. Bourbeau: Autrement dit, vous nous dites: Si, subséquemment, le locataire a été payé moins que le minimum requis, il pourrait toujours revenir et exiger le vrai montant, un peu comme le locataire qui, actuellement, signe un bail à un loyer supérieur et qui se rend ensuite compte que le loyer est inférieur; il peut revenir et faire diminuer le montant de son bail.

M. Langlais: C'est analogue, oui.

M. Bourbeau: Au fond, ce qui est proposé actuellement, c'est un droit illimité au maintien dans les lieux. Est-ce que cette valeur de monnaie dont vous parlez ne pourrait pas être utilisée par le locataire pour faire baisser le prix d'achat du logement qu'il occupe lui-même?

M. Langlais: À titre de locataire ou d'acheteur?

M. Bourbeau: À titre d'acheteur. Par exemple...

M. Langlais: C'est précisément ce qu'on suggère dans notre mémoire. On dit que cela peut servir à trois choses: soit à acheter le logement qu'on occupe; soit à acheter un logement ailleurs que dans l'immeuble et partir avec son indemnité; cela peut aussi servir de pénalité pour le propriétaire qui évince des locataires pour travaux majeurs. Si le locataire est évincé pour des travaux majeurs, cela donne ouverture à son droit de réclamer la pénalité si le propriétaire ne le réintègre pas dans son logement à la fin des travaux ou - j'irais même plus loin que cela - s'il ne convient de modalités acceptables au locataire pour réintégrer son logement, il va devoir payer cette indemnité qui, dans ce cas, pourrait même être plus forte. On crée donc une valeur et on la transfère au locataire.

M. Bourbeau: Deux commentaires seulement, puisque mon temps est terminé. Dans certaines entrevues que j'ai données, j'ai parlé de ce droit au maintien dans les lieux et du droit de préemption comme étant un "bargaining power", si vous voulez, que nous offrons au locataire pour lui permettre de négocier avec le propriétaire un prix à rabais, si on peut dire, de son logement ou, enfin, lui permettre d'avoir les moyens d'acheter un autre logement.

Je pense que, dans ce sens-là, votre proposition rejoint à peu près ce que j'ai dit à plusieurs reprises. C'est que dans la proposition gouvernementale, il y avait un genre de "bargaining power" pour le

locataire; c'était pour lui permettre de mieux affronter, si je peux m'exprîmer ainsi, un propriétaire qui serait trop exigeant sur le prix de vente de son logement.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Maintenant, je cède la parole è M. le député de Shefford.

M. Paré: Merci, M. le Président. Très rapidement, parce que mon collègue responsable des affaires municipales aimerait vous poser quelques questions. Je vous remercie aussi pour la présentation de votre mémoire; c'est vrai que vous représentez beaucoup de gens au Québec et c'est important qu'on ait votre point de vue.

J'aimerais juste revenir sur le dernier point qui a été discuté, sur lequel vous venez d'échanger avec M. le ministre des Affaires municipales. C'est sur le pouvoir de monnayer justement ce droit de maintien dans les lieux. Je dois vous dire qu'il en a été passablement question cet après-midi, justement de pouvoir vendre ce droit qui est acquis. Je dois vous dire que le président de la Commission des droits de la personne, qui était ici, a déclaré cette mesure tout à fait irrecevable et inacceptable. Les groupes, qui sont venus dénoncer le harcèlement, considèrent que ce monnayage est une des principales causes de harcèlement, que c'est injustifiable et inacceptable.

Je dois vous le dire, je me rends compte que vous n'étiez pas là cet après-midi, mais c'est bon de le savoir parce que les groupes le dénoncent. Effectivement, on a eu le témoignage de gens qui ont vécu du harcèlement. C'est une cause de plus de harcèlement qu'on amène parce que si l'on permet à tous les logements d'être à vendre du jour au lendemain et que ceux qui veulent les acheter veulent y demeurer immédiatement ou des gens qui veulent faire de l'argent en location, ils vont vouloir être capables de louer à qui ils veulent et au prix qu'ils veulent. Et payer un certain montant pour libérer le logement, c'est une forme de harcèlement puisqu'on va vouloir acheter un droit qui est acquis, en vertu de la loi, par quelqu'un.

Alors, on peut en discuter beaucoup, sauf qu'il va certainement y avoir beaucoup d'autres intervenants là-dessus, beaucoup de contestations, je dois vous le dire. J'imagine que c'est venu par les associations ds locataires, par des groupes de résidents et cela va certainement venir par les groupes de l'âge d'or et par les personnes âgées, demain. On pourra en discuter. On a votre version. Vous voulez qu'on en tienne compte comme d'une mesure positive. Je dois vous dire et il est bon de savoir, en ce qui concerne la Commission des droits de la personne, que c'est vu non seulement comme une mesure négative mais inacceptable.

J'ai une question è poser avant de laisser la parole...

M. Bourbeau: ...des nuances.

M. Paré: On aura des nuances, on aura certainement la chance d'en discuter très longtemps...

M. Bourbeau: Vous affirmez des choses, il y a des nuances.

M. Paré: ...au cours des journées qu'il nous reste, mais les questions étaient directes cet après-midi.

J'ai une seule question. Vous dites, en commençant votre mémoire, oui à la levée du moratoire. Tout au long de votre exposé, vous demandez qu'on rajoute des choses, qu'on simplifie les mécanismes, que la levée du moratoire soit accompagnée par une remise en état du stock locatif, de logements, ce qui n'est pas abordé dans le document, qu'on aurait besoin - cela finit comme cela - d'un examen en profondeur des mécanismes et qu'il y a des inquiétudes face à la cohabitation de copropriétaires ou de locataires, de locataires au premier niveau et, au deuxième niveau; vous avez aussi des inquiétudes là-dessus. Donc, vous dites oui, mais vous avez une foule d'inquiétudes. En fonction de quoi dites-vous oui? Qu'est-ce qui vous porte à dire, tout d'abord, oui? Quels sont les points favorables qui justifient que malgré ce nombre élevé de craintes» d'inquiétudes et même de points négatifs, vous favorisez la levée du moratoire?

M. Langlais: Je pense que les commentaires sont de deux ordres là-dessus. Je pense que, d'abord, la copropriété, c'est quelque chose de relativement récent au Québec; cela date de 1969. C'est un phénomène qui est installé un peu partout dans toutes les sociétés. C'est appelé à progresser, à s'établir et à se consolider. Alors, on serait un petit peu spéciaux que de ne pas aller dans cette voie. Il semble que c'est ce vers quoi on se dirige. C'est le premier commentaire. La conversion n'est que la poursuite de la tendance à la copropriété ou au fractionnement de la propriété en unités divises, ce qui est amorcé et qui se continue. (21 h 15)

Le deuxième commentaire, c'est que le parc locatif... Il y a des raisons historiques è la constitution du parc locatif dans les grands centres urbains, comme Montréal, Québec, Sherbrooke, Hull, etc. Est-ce que la société d'aujourd'hui est encore une société qui veut être locataire, qui continue è être locataire? J'ai l'impression qu'un mouvement vers l'accès à la propriété s'est développé et prend de l'ampleur depuis plusieurs années. Pourquoi les gens qui habitent dans les

milieux urbains ne pourraient-ils pas profiter de ce mouvement-là? On se dit: Plus ils pourront en profiter tôt, mieux ils pourront faire une meilleure transaction, si on veut. Plus on retarde, plus les gens voient venir le phénomène et ils se positionnent en conséquence et là, l'inflation s'installe peu à peu dans ce domaine-là. Si on faisait la promotion, et qu'on libéralisait en permettant la conversion en copropriété, cela permettrait à des groupes de locataires d'accéder à la propriété et de continuer à résider en milieu urbain. Ce sont essentiellement les deux ordres de raisons que je vois.

Le Président (M. Richard): Je cède maintenant la parole à M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Bonjour. Je vous félicite du travail que vous avez fait pour venir présenter ce mémoire. J'ai l'impression que l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales aura de la misère à suivre le ministre quelque peu, vu qu'on a eu des problèmes avec la loi 43 parce qu'il y a eu ni oui ni non. Je ne sais pas si c'était un oui, mais il y a eu des problèmes quelque part. Là je lis votre mémoire et, pour moi, c'est un oui très mitigé. D'abord, je pense que dans le moratoire vous y allez très délicatement, et ce que vous touchez surtout du doigt, c'est que les facilités d'accès à la propriété devraient être augmentées, parce que cela ne donne pas plus l'accès à la propriété. Cela ne met pas plus d'argent dans les poches du contribuable ou du locataire parce qu'il y a une levée du moratoire. Je pense que de ce côté-là, il faut être clair, cela ne donne pas plus d'argent.

Deuxièmement, vous dites: On devrait améliorer le parc locatif. Tout le monde est d'accord. Vous comprenez qu'actuellement, depuis un an et demi, on n'a pas amélioré le parc locatif à mes yeux, parce que ce que l'on a donné de possibilités à des gens, avec très peu de moyens financiers, d'améliorer des logements avec des réparations majeures, quand on sait que ces gens-là sont sous le seuil de la pauvreté et que s'ils le font, ils se priveront de quelque chose, la preuve en est que des gens fournissent pour leur logement, actuellement, plus de 50 % de leurs revenus et ce ne sont pas des cas d'exception. Cela semble être des cas assez répandus au Québec. Donc, à ce moment-là on n'a pas à s'interroger longuement. Vous avez une expertise comme représentants des municipalités, mais votre expertise est beaucoup plus probante à mes yeux dans les problèmes vécus sur le plancher. Actuellement, ce que vous dites c'est qu'il n'y a pas de politique d'habitation au Québec. C'est clair, il n'y a pas de politique d'habitation. Vous tentez... en disant: II devrait y avoir de l'accès à la propriété, mais il n'y a pas de programme de suggéré. Vous dites: On devrait améliorer le parc locatif. Ce n'est pas avec une mesure, parce qu'on a toujours le tiroir miracle, le guichet unique qui fait qu'on a juste à tirer sur un piton et tout le monde va régler son problème. Je ne pense pas que ce soit comme cela que l'on doive voir cela. Dans le logement, il y a toutes sortes de possibilités, il y a une panoplie que l'on peut appeler des coopératives, que l'on peut appeler des condominiums. Cela peut être une partie de solution du problème. Mais, il y a beaucoup d'autres choses et d'autres événements qui font qu'historiquement les gens au Québec pourraient se loger d'une façon ou de l'autre, selon leurs propres choix.

Donc, quand on s'appuie sur le mémoire de Montréal, comme le ministre a dit tout à l'heure, il semble dire que Montréal s'est prononcé pour la levée du moratoire, ce que je n'ai pas compris. Probablement qu'on n'a pas suivi les mêmes cours et qu'on n'a pas les mêmes cours de lecture. Moi, j'ai compris qu'ils disaient non, que Montréal disait: La levée du moratoire, au lieu de la faire par un décret, changez cela et mettez cela dans la loi. Vous procéderez par des cas d'exception.

Le ministre depuis ce matin nous dit: Montréal a dit oui. Le ministre se cherche des alliés depuis ce matin et quand on regarde tout ce qui nous a été présenté depuis ce matin, on se rend compte qu'il n'y a pas beaucoup d'alliés, parce qu'il y a tellement de restrictions vis-à-vis de cette décision que cela amène quelques tollés de protestations. Comme les mesures proposées sont incomplètes, personne ne veut s'embarquer la-dedans. Je comprends que quelqu'un ne veuille pas faire partie d'un voyage s'il ne sait pas s'il aura son billet de retour. Là, le billet c'est le billet de dehors, c'est la porte qu'il lui offre.

M. le Président, j'ai le droit de parole, j'ai le droit de poser des questions ou de faire des constatations.

Le Président (M. Richard): Vous avez la parole, M. le député de Jonquière.

M. Dufour: C'est la première fois. Le ministre a beau ne pas aimer cela, cela ne me dérange pas. Il faut lui dire des vérités. De temps en temps il faut lui en dire. Il ne les comprend pas, mais on lui en dit quand même. Je vous dis qu'actuellement la réponse à cela, à la levée du moratoire, c'est que depuis ce matin les gens viennent nous dire: Non à la levée du moratoire... Vous ne nous ouvrez pas de porte; vous nous ouvrez seulement la porte pour qu'on prenne le chemin de la rue. C'est cela que les gens viennent nous dire depuis ce matin. Je pense que, vis-à-vis de l'Union des municipalités

régionales de comté et les autorités locales, vous avez des mesures tout de même intéressantes. Vous commencez à inventorier un certain nombre d'actions qui pourraient faciliter l'accès à la propriété par d'autres mesures qui ne sont pas nécessairement la levée du moratoire. Cela pourrait être des mesures fiscales, cela pourrait être des crédits d'impôt, cela pourrait être aussi une autre mesure. On ne soulignera pas au ministre comment il pourrait faire; on espère qu'il le sait. Il ne les a pas sorties nulle part, ces mesures, il les a laissées cachées. Lorsque mon collègue a parlé, c'est peut-être ce point-là qui m'a frappé le plus dans votre mémoire, c'est le droit de location de quelqu'un, la durée d'une propriété... le maintien dans la propriété. Le groupe des droits de la personne est venu nous dire que c'est un droit qui est presque inaliénable pour eux. Ce serait difficilement acceptable et, en fait, cela cause du harcèlement. On a eu aussi des groupes défavorisés qui sont venus nous dire la même chose, dans leurs mots. Il y a des gens qui ont été victimes de harcèlement. Tout cela fait que les gens, même s'ils ont un peu d'argent sur le coup, cela ne les met pas dans la même situation. Des fois, l'appât du gain fait qu'on voit tout en rose, qu'on oublie le coût du déménagement, la réinstallation, le changement de quartier. Il y a des problèmes sociaux trop grands. Je comprends que dans le moratoire on dise qu'on va laisser ce droit, il faudrait tout de même qu'on explique quelque part ce que c'est. Vous, vis-à-vis de ce que nous on prétend, les arguments qui ont été apportés, est-ce que vous avez l'impression que ce que vous avancez doit être maintenu ou si cela mérite plus de recherche de votre part ou de notre part?

Une voix: De la part du ministre surtout.

M. Langlais: Vous voulez que je réponde?

M. Dufour: Moi, je n'essaierai pas de vous faire dite... Si vous me dites...

M. Bourbeau: On avait une question. Ha! Ha!

M. Dufour: Je vais essayer de vous dire... Non, j'ai regardé ce que le ministre...

Je peux vous dire que le ministre est dangereux.

M. Bourbeau: On a passé proche d'avoir une question.

M. Dufour: Je veux dire comment le ministre est dangereux. Il a essayé de vous faire répondre a la place des élus. Vous n'êtes pas des élus que je sache. Je connais Me Gaétane Martel depuis de nombreuses années. Elle n'est pas éiue, elle a été sage, elle n'a pas répondu. Vous non plus, je ne vous reconnais pas comme un élu. Le ministre a essayé de vous faire vous prononcer au nom de l'Union des municipalités régionales de comté. Avez-vous déjà vu cela un ministre qui essaie de vous embarrasser? Je vais vous demander de répondre dans la mesure de ce que vous savez, à l'intérieur de ce que vous nous avez présenté.

M. Bourbeau: Vous ne posez pas de question.

M. Dufour: M. le ministre, je vous ai laissé parler toute la journée. On vous subit suffisamment, vous pouvez nous laisser la paix. Qu'il nous laisse la paix, un peu.

M. Langlais: Me permettriez-vous de faire un commentaire sur l'histoire du harcèlement? Je pense que, précisément, ce qu'on propose c'est d'établir un prix minimum pour partir la négociation pour ceux qui souhaitent, qui acceptent et qui veulent vendre leurs droits. Ce qui se passe actuellement, dans le contexte d'aujourd'hui, c'est qu'il n'y a pas de prix minimum. N'importe qui, qui entre et offre 500 $ à un locataire dans le besoin, risque d'avoir une signature au bas de la feuille. On va le protéger ce locataire en disant: Tu n'as pas le droit de vendre en bas de 5000 $, 6000 $ ou 10 000 $, un chiffre qu'on déterminera. Cela va peut-être limiter le harcèlement ou ils vont les harceler pour leur en donner plus; là, c'est une autre paire de manches. C'était juste pour rétablir... Dans ce cadre, je ne sais pas si la Commission des droits de la personne s'est prononcée sur cette question précisément.

M. Dufour: Cela pourrait être un meilleur encadrement qui permette de mieux déceler malgré que ce ne soit pas facile.

Le Président (M. Richard): Je tiens à vous mentionner qu'il reste une minute et une fraction...

Une voix: II reste une petite minute.

Une voix: De toute façon, le ministre a dépassé son temps.

Le Président (M. Richard): Vous aviez un autre commentaire, M. le député de Jonquière?

M. Dufour: Dans les programmes qui ont été annoncés depuis un an avec le nouveau gouvernement ancien, est-ce que

vous sentez chez vos membres une amélioration du parc de logements, actuellement au Québec... Cela peut être des logements de propriétaires comme de locataires. Est-ce que vous sentez cela de la part de vos membres? Est-ce que vous sentez des difficultés avec le programme PARCQ, actuellement? Vous avez parlé d'améliorer le locatif, le logement. Avec ce programme, est-ce que vous sentez... Est-ce que vous pouvez répondre là-dessus?

Mme Martel: Je peux vous répondre pour ce que vous m'avez demandé sur le programme PARCQ. Je peux vous dire que nos membres nous avaient fait part de certains commentaires sur l'administration de ce programme, entre autres les critères d'admission et le rôle des MRC, relativement au programme. À la suite d'une rencontre entre nos représentants et ceux de la Société d'habitation du Québec, des améliorations ont été apportées et ont satisfait nos représentants élus.

Pour ce qui est de toute la question du parc locatif je pourrais laisser mon collègue répondre. Il est spécialisé là-dedans.

M. Langlais: Je ne suis pas un élu.

M. Dufour: Constatation. Vous êtes libre de répondre ou pas.

M. Boulerice: Chanceux, va!

M. Langlais Cela dit, l'amélioration du parc locatif, c'est quelque chose de difficilement mesurable. C'est mesurable sur une longue période et c'est aussi une tâche gigantesque quand on regarde l'état du parc immobilier au Québec qui a besoin d'infusions massives, de transfusions massives pour être remis en bon état, particulièrement dans des milieux comme Montréal et Québec. C'est extrêmement difficile de mesurer l'amé-lioration de ce parc-là avant d'y avoir injecté des millions et des millions. À ce titre-là, je pense qu'il n'y a pas eu récemment d'injections suffisantes pour qu'on puisse mesurer le progrès.

Le Président (M. Richard): Le temps est donc écoulé. Il vous a été emprunté par un non-élu.

M. le ministre, vous avez un commentaire pour terminer?

M. Bourbeau: Oui, M. le Président, nous soulignons l'incohérence du député de Jcnquière qui nous reproche de poser des questions à des non-élus, alors que ce sont les seuls qui sont devant nous, et qu'il se permet de faire exactement la même chose en demandant des commentaires sur un programme d'habitation qui n'a rien à voir avec la levée du moratoire. Également, nous soulignons que le ministre n'a pas besoin de solliciter des appuis puisque, seulement aujourd'hui, nous avions l'APCHQ pour appuyer notre position, la Commission des droits de la personne, l'UMRCQ maintenant, et nous aurons tantôt l'Association des consommateurs du Canada, bref, autant d'organismes qui sont très représentatifs et qui appuient d'une façon générale la proposition gouvernementale. Je me permets de remercier nos gens de l'UMRCQ pour une contribution substantielle, tout en notant qu'il s'agit là d'un organisme qui ne représente pas un groupuscule ou une conciergerie donnée mais 1200 des 1500 municipalités du Québec, donc la très grande partie, 80 % des municipalités du Québec. C'est donc un témoignage important que nous accueillons comme tel. Merci.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre.

M. le député de Shefford.

M. Paré: Merci, M. le Président. Je veux vous remercier aussi. C'est un sujet important et je dois vous dire que tout le monde, de façon unanime, est d'accord avec l'accès à la propriété. On reconnaît même que la copropriété est une des bonnes façons. D'ailleurs on l'a dit ce matin à l'ouverture. Dans le logement neuf, au début de l'année, 24 % des mises en chantier étaient en copropriété. Donc, nous sommes d'accord. Là où il faut maintenant s'entendre entre nous, c'est à savoir si, en le faisant sur le dos des plus démunis, en le faisant sur le dos des locataires actuels, on a la bonne voie. Je dois vous dire, contrairement au ministre qui est en train de nous faire accroire que le cheval blanc de Napoléon est noir, qu'il n'a pas eu autant d'appuis qu'il semble le dire parce que... Il semble dire que tous les autres groupes n'étaient pas importants. Je trouve que tous les groupes sont importants, ceux qui représentent les étudiants de McGill ce sont des dizaines de milliers de jeunes et tous les groupes de locataires et les autres qui sont venus, tous les groupes sont importants. À Montréal, les groupes de locataires représentent 80 % de la population et, au-delà de la représentativité des groupes, aucun groupe n'est venu dire: C'est une bonne façon, allez-y, on adhère à ça. Ils sont tous venus nous dire, certains carrément, non, et d'autres: C'est un danger. D'autres: Oui, mais à certaines conditions qui viennent modifier largement la proposition, à la condition qu'il y ait énormément de choses qui soient corrigées, changées ou modifiées.

Je ne veux pas peser maintenant, parce qu'on commence. On va tenir compte de votre mémoire comme de tous les autres mémoires et on vous remercie d'être venus ce soir. Je vous répète simplement en

terminant que nous sommes aussi pour l'accès à la propriété mais nous voudrions bien que le fait de le permettre à plus de gens ne vienne pas pénaliser d'autres personnes dans la société. (21 h 30)

Le Président (M. Richard): Merci, M, le député de Shefford. Madame, je tiens à vous mentionner que M. Filion était très bien représenté par vous. Merci beaucoup,

J'inviterais l'autre groupe, l'Association des consommateurs du Canada (section Québec), à prendre place, s'il vous plaît, pour la présentation de son mémoire.

Une voix: C'est la Commission des services juridiques, M. le Président.

Le Président (M. Richard): Je l'ai passée? Ah! je m'excuse. Je ne voulais pas énerver qui que ce soit. On "rewind" un peu. La Commission des services juridiques représentée par Me Georges Massol. Il y a encore une erreur là? Il y a deux noms. Est-ce que vous êtes vraiment ceux qui représentez la Commission des services juridiques?

Une voix: Ceux-là, oui.

Le Président (M. Richard): Ah bon! Je vous félicite. S'il vous plaît, vous vous identifiez. Dans un premier temps, vous présentez vos collègues et je vous le répète aussi - je pense que vous avez compris tout à l'heure, vous étiez là - vous avez quinze minutes pour présenter votre mémoire et par la suite, les gens vous interrogeront. C'est à vous.

Commission des services juridiques

M. Lafontaine (Yves): Merci, M. le Président. Nous remercions la commission de nous permettre de nous faire entendre. Mon nom est Yves Lafontaine, Je suis président de la Commission des services juridiques. À ma droite, j'ai Me Georges Massol du service de recherche et, à ma gauche, Me Pierre-Yves Bourdeau, du même service de recherche. Le mémoire a été conçu par des avocats de différentes régions du réseau de t'aide juridique et il est endossé par la Commission des services juridiques. Je vais demander à Me Massol de faire la présentation du mémoire et les deux pourront répondre à vos questions par la suite. Allez Georgesl

M. Massol (Georges): Bonsoir. Vu que le temps presse un peu, nous allons passer immédiatement aux deux points qui ont attiré notre attention dans le document présenté par le ministre.

Les deux principaux objectifs visés par la réforme: d'abord, favoriser l'accès à la propriété - évidemment, je répète des choses que vous savez - et deuxièmement, protéger le locataire en place. Nous croyons que ces deux objectifs ne sont pas nécessairement compatibles. Cela peut être très incompatible, on le verra dans les commentaires qui suivront.

Nous allons commencer avec le deuxième objectif, soit la protection des locataires en place. On invoque d'abord dans le document que le moratoire présentement est inefficace et fait l'objet de contournements divers et que certains locateurs ont trouvé la façon de contourner ce moratoire. C'est la raison fondamentale de l'intention de lever le moratoire. Nous croyons que ce n'est pas parce que quelque chose fait l'objet d'un contournement qu'on doive nécessairement l'adopter ou encore le valider. Au contraire, il faut renforcer les mesures pour que le contournement cesse.

Je vais prendre l'exemple d'un arrêt au coin d'une rue qui ne serait pas respecté par un ensemble d'automobilistes, Est-ce qu'on va enlever l'arrêt parce qu'il n'est pas respecté ou si on va plutôt mettre des policiers pour le faire respecter? Va-t-on prendre des mesures nécessaires afin que cet arrêt soit respecté? Je pense qu'ici, le point fondamental avec lequel on est d'accord dans le document, c'est celui qui dit qu'il y a un contournement des règles prévues en matière de logement, en matière de reprise de possession et en matière de réparations majeures. Si l'intention du gouvernement est de protéger le locataire convenablement, comme c'est l'un des objectifs principaux, je ne pense pas que l'on doive valider une pratique dommageable. Il faut plutôt renforcer la protection des locataires en réglementant davantage le cas des réparations majeures et des prises de possession.

Le projet comme tel nous semble être une pièce du casse-tête. C'est une pièce importante. Cela peut être une solution. Malheureusement, on doit avoir à notre disposition les autres composantes du casse-tête. Actuellement, on étudie une pièce seulement du casse-tête. On n'est pas en mesure de voir si l'ensemble des mesures protectrices s'avéreront efficaces.

L'adoption de ce document ne résout qu'une facette du problème, soit l'accès à la propriété. Mais on ne dit pas que la protection des locataires en sera automatiquement assurée. Nous croyons que le gouvernement devrait plutôt consacrer ses énergies à adopter une législation globale en matière de logement, particulièrement pour réparer je ne dirais pas les erreurs mais les oublis du passé qui ont mené à une certaine détérioration en matière de logement, en matière de reprise de possession et en matière de réparations majeures. Le document énonce et reconnaît qu'il y a des

contournements. Je crois qu'il faut d'abord corriger ces errements et, par la suite, adopter une politique globale pour y inclure une levée de moratoire, s'il y a lieu. Dans le contexte actuel, nous croyons que c'est prématuré.

Les mesures de protection, puisqu'on en parle - c'est l'un des objectifs du document - se révèlent, è notre avis, complètement inefficaces, illusoires et temporaires. Inefficaces parce qu'on pourra passer à côté, illusoires parce que c'est pratiquement consacrer la pratique actuelle et temporaires parce que le locataire qui va bénéficier de la protection mourra un jour, cédera son logement à quelqu'un d'autre, partira pour x raison et ce droit à l'occupation et au maintien dans les lieux ne pourra bénéficier à ses ayants droit, aux autres personnes ou à ses sous-locataires, comme quelqu'un l'a souligné tout è l'heure. C'est quelque chose de très temporaire.

On a parlé tout è l'heure de "package deal". C'est un peu l'impression que le document nous donne. Il s'agirait, en fin de compte, de privilégier d'abord le deuxième objectif qui est l'accès à la propriété. Mais ce deuxième objectif peut être incompatible avec le premier. Voici pourquoi. Premièrement, nous croyons que la Commission des services juridiques qui représente environ 240 000 bénéficiaires au Québec n'a aucun avantage ou en tout cas la clientèle n'a aucun avantage è ce que la levée du moratoire s'effectue.

Il y a 240 000 bénéficiaires de l'aide juridique au Québec. Le revenu moyen doit se situer, en vertu de la Loi sur l'aide juridique, à 11 000 $ par année. Selon le Conseil national du bien-être social, tous les bénéficiaires de l'aide juridique vivent donc sous le seuil de la pauvreté. 92 % des bénéficiaires de l'aide juridique sont locataires; à Montréal, 98 % des bénéficiaires de l'aide juridique sont locataires. 2 % ont déjà accédé à la propriété dans des temps plus cléments. Actuellement, compte tenu du marché qui est effarouché, je ne pense pas que les locataires à 11 000 $ par année de revenu en moyenne pourront bénéficier de ce droit.

Le document Lever le moratoire spécifie, à un moment donné, que les institutions financières accordent du financement si le prix de vente de l'unité est plus petit ou égal à deux fois et demie les revenus du ménage. Pour suivre la courbe de notre clientèle, à 11 000 $ par année de revenu, le bénéficiaire de l'aide juridique pourra s'offrir une unité de logement d'une valeur maximale de 27 500 $. Je ne pense pas qu'il y ait de ioqement confortable à ce prix-là. Je pense même que, à un prix inférieur à 50 000 $ actuellement à Montréal, il ne faut pas y penser. À cela, il faut ajouter que la taille de la famille n'est pas comptée. Il peut s'agir d'une famille avec dépendance. En plus de cela, il y a les charges foncières, l'augmentation du coût des assurances, du coût du chauffage, il y a les déménagements, les taxes de mutation et j'en passe.

Nous ne croyons réellement pas que notre clientèle puisse bénéficier de l'accès à la propriété. C'est pourquoi les recommandations concernant la protection des acquéreurs ne feront évidemment pas l'objet de commentaires de notre part.

Le projet ne contient malheureusement pas d'indication de subvention qui puisse permettre au présent locataire d'accéder à la copropriété. C'est regrettable. Cela aurait peut-être été une façon de tempérer la rigidité du projet.

Le principe d'accès à la propriété, à notre avis, entrera en plus en nette contradiction avec celui de la protection du locataire lorsque l'acquéreur ne pourra occuper le logement qu'il vient d'acheter. Je vous donne l'exemple de l'individu qui vient d'acquérir un logement et qui est un ancien locataire. Il voudra reprendre le logement qu'il vient d'acquérir, mais le locataire qui occupe présentement...

Le Président (M. Richard): Votre temps n'est pas terminé.

M. Massol: Merci. Ha! Ha! Ha!

M. Boulerice: Pour qui sonne le glas. Ha! Ha! Ha!

M. Massol: Je vais continuer mon exemple.

M. Bourbeau: Le député de Saint-Jacques prend son air de croque-mort!

M. Massol: La cloche continue.

Une voix: Est-ce qu'il y a un vote?

M. Massol: Oui, il n'y a pas un vote?

Une voix: C'est pour le quorum?

Le Président (M. Richard): Ha! Ha! Ha!

M. Massol: Je vais attendre que la cloche cesse de sonner. Je vais continuer?

Des voix: ...

M. Massol: C'est cela. Cela va faire comme à Ottawa il y a quelques années. La situation très problématique, c'est la situation où une personne achète une unité de logement qu'elle n'occupe pas. Cela laissera au locataire occupant le droit sacré de rester là. Alors, le pauvre locataire qui s'est acheté une unité ailleurs ne pourra pas

occuper son logement.

Qu'est-ce qui va arriver è ce moment-là? Le locataire qui bénéficie du droit au maintien dans les lieux passera pour qui? II passera pour celui qui veut faire le trouble, pour celui qui empêche l'ancien locataire d'accéder è la propriété. On peut imaginer les tensions qui vont exister entre un acquéreur et un locataire, dans ce cas, et l'acquéreur, ce sera un ancien locataire.

Rapidement, notre opinion là-dessus, c'est que, d'abord, il n'y a pas d'urgence. Le ministre, dans le document et dans les diverses déclarations, a laissé entendre qu'il y avait urgence. Cela fait onze ans que le moratoire a été imposé. Je pense que le fait que cela fasse onze ans que le moratoire existe, ce n'est pas un taux non enviable, comme un taux de criminalité dans une ville ou un taux de chômaqe. Que, dans d'autres provinces, cela fasse un mois, deux ans, trois ans ou quatre ans, ce n'est pas grave.

Je pense que ce qui est important, c'est d'assurer la protection des locataires ou des plus démunis. Alors, à notre avis, le moratoire - nous le disons clairement -devrait subsister et des mesures additionnelles devraient même être adoptées pour renforcer la protection des locataires, particulièrement au chapitre des réparations majeures et des reprises de possession.

Si, néanmoins, le gouvernement devait persister, nous suggérons qu'une aide soit possible à l'accès à la propriété par des subventions, l'augmentation des habitations è loyer modique pour permettre que le parc locatif augmente et l'incitation aux propriétaires désirant conserver la nature locative de leur immeuble, par exemple, par des subventions qui ressembleraient è celles octroyées par le programme fédéral PAREL.

Dans ce cadre, le locateur ou le propriétaire recevrait une subvention è charge de conserver sa valeur locative pendant dix ans. Enfin, comme vous pouvez le constater dans notre mémoire, je pense que si le gouvernement devait persister, on devrait accorder à la Régie du logement un véritable pouvoir de déterminer dans chaque cas si le parc locatif est en danger et non pas, comme le document Lever le moratoire le laisse entendre, s'il y a des problèmes, qu'il y ait intervention rapide.

C'est très flou. On ne donne pas à un organisme qui est déjà reconnu, a un tribunal en plus, le pouvoir d'adjuger spécialement dans chaque cas et de déterminer si le parc locatif est en danger.

À ce moment-là, la Régie du logement ne deviendrait pas seulement une espèce de tribunal qui adjugera sur des règles techniques: Est-ce que le convertisseur a envoyé tel avis? Est-ce qu'il a envoyé son rapport d'expert? C'est trop simple comme mécanisme pour assurer la protection des locataires occupants.

Enfin, la Régie du logement, comme nous le mentionnions dans notre rapport, pourrait avoir des pouvoirs qui sont similaires è ceux de la Commission de protection du territoire agricole. Merci.

Le Président (M. Richard): Merci, monsieur. M. le député de Louis-Hébert.

M. Doyon: L'exposé qui vient de nous être fait, M. le Président, est intéressant dans le sens qu'il nous permet d'entendre, de la part de gens qui sont près de certaines situations qui sont vécues quotidiennement, quels sont les problèmes qui sont rencontrés. (21 h 45)

On nous fait valoir que la levée du moratoire n'est pas une urgence. C'est là une question d'opinion et d'appréciation. Vous me permettrez de diverger d'opinion. Je pense que le ministre a suffisamment expliqué qu'un moratoire est essentiellement une mesure temporaire dont on doit éventuellement pouvoir voir la fin. Le fait de la perpétuer indéfiniment ne règle pas le problème. Il faut trouver des solutions. C'est dans ce sens que la commission parlementaire qui se tient ces jours-ci è Montréal est extrêmement importante. Elle permet de voir comment les problèmes se posent et d'envisager un certain nombre de solutions. II est bon de souligner que le ministre a mentionné à plusieurs reprises qu'il est ouvert à des suggestions, à des recommandations et à des modifications, si nécessaire.

Dans votre mémoire, vous nous faites valoir que l'accessibilité à la propriété ne sera pas garantie parce que les gens que vous desservez n'ont pas les revenus nécessaires et qu'ils se trouvent en difficultés financières quasi permanentes. Dans ces circonstances, l'accès à la propriété leur est de ce fait interdit ou, à toutes fins utiles, rendu très difficile.

Je voudrais savoir de vous, par les contacts que vous avez avec les gens que vous rencontrez et que vous desservez, s'il n'y a pas un désir chez cette clientèle d'avoir accès d'une manière ou d'une autre à la propriété. Au moins, est-ce qu'on peut s'entendre sur une chose, soit qu'il y a un nombre considérable de personnes - je le crois jusqu'à preuve du contraire - pour qui la propriété foncière ou immobilière est un but qu'elles poursuivent soit consciemment ou inconsciemment?

M. Bourdeau (Pierre-Yves); Essentiellement, le désir de notre clientèle est de vivre dans des logements convenables à des prix abordables. C'est leur désir essentiel. Ce qui va arriver par la levée du moratoire, c'est que, précisément, on va avoir des nouvelles embûches qui seront mises de l'avant. Ce sont encore les locataires à faible revenu qui

en seront les victimes. Je pense que la seule solution pour le gouvernement en ce moment, avant d'instaurer ou de favoriser l'accès à la propriété pour des gens à revenu moyen, c'est d'instaurer des politiques qui vont permettre à des gens à faible revenu de pouvoir vivre convenablement. Il ne faut pas se faire d'illusion, les conditions de vie dans les grandes villes, pour les gens à faible revenu, se détériorent.

Lorsqu'on voit, dans le livre blanc, que le ministre nous indique qu'il y a possiblement exode des gens vers les banlieues parce qu'il n'y a plus de possibilité d'accéder à la propriété à Montréal, nous, ce que nous prétendons, c'est que cela va entraîner un exode des gens à faible revenu vers les banlieues. Plus nous avançons vers l'an 2000, plus les grandes villes modernes comme Montréal vont devenir inaccessibles aux gens à faible revenu, s'il n'y a pas une politique du logement mise sur pied. Avant d'édifier une structure comme celle permettant l'accès à la propriété pour les gens à revenu moyen, je pense qu'il faut mettre des fondations. Les fondations, c'est la majorité des citoyens, et que je sache, la majorité des citoyens à Montréal, en ce moment, ce sont les locataires.

M. Doyon: Indirectement, vous remettez en question la protection déclarée par le ministre et dont il fait état dans son document concernant ce qu'il appelle une protection blindée contre l'éviction, en faveur des locataires. En quoi voyez-vous des failles dans la proposition ministérielle qui vise précisément à préserver le maintien du droit è habiter un endroit comme locataire? Est-ce qu'il y a actuellement des failles qui vous paraissent évidentes? Le ministre reconnaît lui-même qu'il y a actuellement une situation qui permet à certains investisseurs, promoteurs ou appelons-les comme on voudra, de profiter de certaines failles dans la loi ou dans la réglementation pour pouvoir faire des conversions. Le ministre a déclaré dans son document, à cet effet, que son action ou son intention visait premièrement à boucher ces trous. D'un autre côté, il s'agit de bien encadrer toute cette démarche de conversion. Quelles sont les failles que vous voyez dans ce blindage que nous voulons et que nous considérons comme désirable en faveur des locataires, contre l'éviction?

M. Bourdeau: Essentiellement, les failles que l'on voit sont... Premièrement, il y en a une très évidente que j'ai pu voir dans le livre blanc. Une fois que le logement est converti en copropriété, une fois que les acquéreurs sont devenus propriétaires d'un logement, entre autres, au chapitre des travaux majeurs, qu'arrive-t-il? Il ne faut pas se le cacher, l'accès à la propriété sans possibilité d'occuper le logement, c'est de la bouillie pour les chats. Il n'y a personne qui va acheter un logement sans avoir la possibilité de l'occuper. Cela veut dire qu'on a beau instaurer n'importe quelle politique de protection qu'on voudra bien à l'intérieur d'une législation, je pense qu'il faut savoir comment cela se passe dans les quartiers défavorisés pour se rendre compte que la législation n'atteint pas habituellement... Les gens n'ont pas la possibilité de revendiquer leurs droits. Ils tentent de sauver leur peau quotidiennement, c'est ce qu'ils font.

Lorsqu'on voit des propriétaires, des promoteurs se promener dans les logements et faire signer des renonciations à des locataires moyennant un mois de loyer gratuit pour qu'ils renoncent à leur droit au maintien dans les lieux, ce sont là des choses qu'on voit quotidiennement dans les quartiers défavorisés. C'est là un exemple.

C'est évident que la législation ne pourra jamais prévoir toutes les possibilités, mais il ne faut pas non plus rajouter des possibilités pour permettre à des promoteurs de se servir de la législation et de carrément mettre de côté le droit au maintien dans les lieux qui est mis de l'avant par le ministre. Nous, on y croit au droit au maintien dans les lieux, il n'y a pas de problème. On est d'accord sur la question des travaux majeurs - je pense qu'il y a de grands problèmes - et la question des reprises de possession aussi, sauf que nous ne pensons pas que c'est avec une levée du moratoire qu'on va en arriver à améliorer la protection des locataires. Effectivement, ce que nous visons, c'est l'amélioration de la qualité de vie de tous les locataires, particulièrement à Montréal qui regroupe la majorité.

M. Doyon: Les inquiétudes que vous manifestez sont de la nature de la tension que vous envisagez entre le nouveau propriétaire non occupant et le locataire qui, comme il en aurait le droit, continuerait d'occuper son logement et qui, à ce moment, pourrait se voir blâmé de priver une autre personne qui a acheté ce logement dans le but de l'occuper et de le faire.

Ne pensez-vous pas que c'est là une situation qui est pratiquement inévitable dans le sens que quelqu'un qui occupe un logement qui est désirable et peut-être convoité par d'autres de ce fait prive quelqu'un d'autre de l'occuper? Il y a des gens qui peuvent convoiter des logements, c'est normal de le faire. À ce moment, la situation que vous envisagez existe déjà à toutes fins utiles.

M. Bourdeau: On en vient tout le temps à la même situation: les gens qui n'ont pas d'argent par rapport à ceux qui en ont. C'est évident que c'est la loi du plus fort souvent qui l'emporte et la loi du plus fort, c'est

souvent la loi de celui qui a le fric. En encourageant une levée du moratoire, je pense qu'on encourage une possibilité pour des gens qui ont les moyens. Je n'ai rien contre la classe moyenne sauf que la classe moyenne aux dépens de la classe des favorisés, j'ai mes réserves.

M. Doyon: Je n'ai pas d'autres questions pour le moment, M. le Président.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député. M. le député de Shefford.

M. Paré: Merci, M. le Président. Je ne voudrais pas répondre au député de Louis-Hébert, mais je pense que tout le monde veut aller au ciel et tout le monde veut avoir une Cadillac. Mais entre vouloir et pouvoir, il y a une grosse différence. C'est toute la différence entre pouvoir accéder à la propriété ou non. Je dois dire que je considère que votre organisme est très représentatif. Ce n'est vraiment pas un petit groupe. Avec 235 845 personnes qui ont recours à vos services, je pense qu'on peut dire que vous savez de quoi vous parlez. Vous êtes très représentatifs et je trouve cela intéressant.

Quand on parle aussi d'objectifs contradictoires, c'est exactement ce qu'on dit depuis le matin. On ne peut pas garder le gâteau et le manger en même temps. C'est ce qu'on dit. Ou on préserve le stock de logements locatifs parce qu'il y a une population pour cela ou on pénalise cette population comme cela s'est fait à New York et à Paris: on les envoie en banlieue. Si c'est cela qu'on veut faire, qu'on le dise franchement. Qu'on n'essaie pas de jouer sur les deux tableaux et qu'on ne fasse pas passer un paysage d'automne pour un Picasso si ce n'est pas un paysage d'automne et que c'est un Picasso. Il va falloir, à un moment donné, être franc.

Si on a décidé que ce qu'on voulait favoriser c'est l'accès à la propriété ou la spéculation, qu'on le dise mais qu'on ne dise pas en même temps qu'on veut préserver quand on n'a même pas des mesures de préservation à l'intérieur du projet qui est soumis. C'est cela l'affaire. C'est aussi clair que cela. Vous aviez raison tantôt. L'image était très bonne. Ce n'est pas parce qu'on déjoue des lois ou qu'on passe à côté de règlements qu'on est obligé maintenant de dire qu'on va aller dans ce sens. Au contraire, on prend des mesures pour les faire respecter.

C'est ce qu'on entend dire depuis ce matin par la plupart des groupes. Soyez bien conscients de cela. Le premier groupe de tous, la ville de Montréal, c'est ce qu'elle demande. Les groupes qui sont venus, cet après-midi, c'est ce qu'ils demandent. La Commission des droits et libertés de la personne, c'est ce qu'elle demande: qu'on respecte les règlements et qu'on fasse en sorte que si à l'heure actuelle il y a des gens parmi les plus démunis qui sont pénalisés, s'il y a des gens qui souffrent de harcèlement, qu'on prenne des mesures pour arrêter cela au lieu de dire: On va lever le moratoire et ça va en amener un peu plus. Mais on va dire: On va essayer que ça n'en amène pas trop de plus. C'est un peu ça qu'on est en train de faire. Cela n'a pas de bon sens.

C'est un peu cela aussi si on veut utiliser une autre image qui a été utilisée par mon collègue de Saint-Jacques. Oui, il y a un malaise, il y a un problème qui est grave. Et on dit: Au lieu de le corriger et d'arrêter l'inondation qui s'en vient, on va tellement donner de pilules au patient qu'on va lui donner une dose pour un cheval et on va le tuer. Cela n'a pas de bon sens.

Ce que vous amenez ici, je dois dire que c'est très important. Vous avez amené deux points sur lesquels je veux revenir.

Le premier, c'est quand vous dites qu'il n'y a pas d'urgence. Vous avez raison, effectivement. Il n'y a pas d'urgence. Il n'y a personne qui crie à l'heure actuelle. I! y a peut-être des gens qui voudraient devenir propriétaires et ils le seraient si on n'avait pas aboli les programmes d'accès à la propriété résidentielle, mais on les s abolis. Il n'y a pas d'urgence. Il n'y a pas non plus, au moment où l'on se parle, nécessairement un manque de logis, sauf peut-être dans des coins où justement il faut arrêter l'hémorragie parce qu'ailleurs il y a des surplus de logements disponibles avec la construction qu'on connaît présentement. Donc, il n'y a pas d'urgence. C'est un point, je pense, qui est important.

L'autre, on le retrouve à la page 4 de votre mémoire. Je vais le lire, ce n'est pas très long; c'est tellement l'essence même de la discussion qu'on est en train de tenir: "À l'aube de l'an 2000, le problème principal au Québec, particulièrement dans les grandes villes, dans le domaine du logement, ne se situe pas au niveau de faciliter l'accès a la propriété aux personnes à revenu moyen qui, de toute façon, peuvent se payer un logement convenable. Le problème se situe beaucoup plus au niveau de l'accès à un logement convenable à un prix abordable." C'est là que se situe le problème. Je pense que vous êtes bien placés pour en témoigner. Je dois dire que je trouve cela intéressant.

J'aurais une question à vous poser et je reviendrai tantôt. J'ai remarqué que vous étiez dans la salle. Vous avez entendu les mémoires qui ont été présentés avant. Il y en a qui le proposent comme une mesure tout à fait inacceptable et d'autres le proposent même comme quelque chose de payant et de positif. Considérez-vous que l'achat du droit au maintien est une formule

de harcèlement?

M. Bourdeau: Pouvez-vous répéter, s'il vous plaît?

M, Paré: Oui. Considérez-vous que ce qui a été proposé par le groupe avant vous, soit de pouvoir monnayer le droit de maintien dans les lieux, c'est en fait une façon de harceler les gens?

M. Lafontaine: Mon opinion personnelle, bien entendu, parce qu'on n'a pas eu le temps d'en discuter au préalable, c'est que notre clientèle va prendre tout ce qu'elle va être capable de prendre au moment où cela va se présenter, sans même penser au lendemain. Cela est très clair pour les connaître eux autres. Ils vivent au jour le jour et ils attendent le prochain chèque qui entre. Et si jamais ils voient l'odeur d'un chèque, vous pouvez être sûrs qu'ils vont sauter dessus, peu importe ce qui arrivera. On gagnera peut-être à la loterie ou il y aura peut-être quelque chose qui va se passer demain matin. En tout cas, c'est le réflexe que j'ai, là. Mais pour les connaître, je vais vous dire qu'ordinairement, c'est ce qu'ils font. Ils vont prendre ce qui va passer. Légal ou pas, minimum ou pas, est-ce que c'est au-delà de ce que la réglementation prévoit ou si c'est en dessous, cela ne leur fait pas grand-chose.

M. Paré: J'ai une autre question. Dans votre mémoire à la page 15, sous le titre Les personnes âgées ou handicapées, on parle de ce fameux guichet spécial. Vous finissez votre paragraphe en disant: "Nous croyons que c'est faire preuve d'une méconnaissance totale de la réalité que de suggérer la création d'un guichet spécial à la Régie du logement pour protéger les personnes âgées ou handicapées." J'aimerais que vous commentiez cela de façon un peu plus élaborée.

M. Bourdeau: Ce qu'on a dit là, essentiellement, on l'a repris des intentions du ministre qui sont dans le document. Je me demande c'est quoi, un guichet spécial. Cela veut dire qu'on va aller à la Régie du logement et qu'il va y avoir une personne qui va être là et qui va dire: Voici une personne âgée. Voulez-vous nous faire part de votre problème? Nous allons vous aider. Je pense qu'il faut connaître comment cela fonctionne. Les personnes âgées qui sont victimes de harcèlement, avant qu'elles se présentent à la Régie du logement et puissent consulter peut-être un fonctionnaire à un quichet spécial, il y a toute une série d'événements qui vont se passer. Et on a beaucoup plus de chances de retrouver cette personne âgée délogée de son logement avant qu'elle se présente au guichet spécial de la Régie du logement, (22 heures)

M. Paré: Vous dites aussi qu'on apporte présentement un sujet important qui est la levée du moratoire, mais vous dites que c'est effectivement juste un facteur dans une grande politique d'habitation ou de logement. Il n'a pas été question de défendre la copropriété comme telle. Ce dont il est question présentement, ce sont des logements déjà occupés par des locataires. Donc, ce que vous dites, ce serait impensable de régler cela sans qu'il y ait une politique globale d'habitation. En attendant, plutôt qu'à la proposition qui est sur la table, est-ce que vous seriez plus favorable à la proposition de la ville de Montréal déposée ce matin qui dit qu'au lieu de permettre la levée du moratoire avec certaines balises, on interdise totalement le logement locatif? On verra les cas d'exception. Après une politique d'habitation, on pourra rajuster.

M. Massol: On ne peut pas réagir à cela, parce que vous m'apprenez à l'instant la position de la ville de Montréal. Il m'est difficile de commenter cela. Pour répondre au début de votre question, je pense qu'en ce qui concerne la politique globale, on retrouve suffisamment d'éléments ou de suggestions dans notre mémoire. J'en ai fait mention dans mon exposé également lorsque je parlais de subventions pour l'accès à la propriété ou encore l'adjudication par un tribunal compétent, comme la Régie du logement, de chaque cas, de faire du cas par cas pour s'assurer que le parc locatif n'est pas en danger. Je pense que vous avez là un élément pour répondre à votre question d'une politique globale de logement et non pas seulement... également les HLM. Vous avez une batterie de mesures que j'ai énoncées tout à l'heure, par exemple, l'encouragement pour les propriétaires qui désirent maintenir la nature locative de leur logement. Enfin, il y a plusieurs incitations, plusieurs politiques, plusieurs mesures qui peuvent être coordonnées pour permettre que le marché immobilier s'émancipe, qu'il y ait création d'emplois, que les entrepreneurs en tirent bon compte - personne n'est contre la vertu - mais qu'en même temps, les droits des locataires ne soient pas en péril. Actuellement, ce dont nous avons peur, c'est que les droits des locataires soient en péril. Il n'y a pas de sommes qui sont versées; c'est tout simplement un transfert d'un endroit à un autre. Il n'y a pas de création proprement dite de logements. Je crois que le document que nous vous avons proposé contient une amorce de suggestion à cet effet.

M. Paré: Merci. Je partage tout à fait les craintes que vous avez soulevées dans votre mémoire.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député de Shefford. Je cède la parole à M. le député de Sainte-Marie.

M. Laporte: Merci, M. le Président. La commission des services juridiques a effectivement, en vertu de son expertise de recherche de toute la jurisprudence qui concerne les décisions qui ont été rendues par la Régie du logement... On a pu voir à quelques reprises ce qu'ils ont fait là-dessus. Il y s des avocats qui plaident selon la clientèle que vous représentez.

J'aurais trois questions relatives à cette expertise particulière que vous possédez. L'une a trait aux pouvoirs actuels de la Régie du logement et à la façon dont ce pouvoir est exercé par rapport à des propositions visant la levée du moratoire, d'une part. Vous semblez d'ailleurs, par rapport aux propositions, émettre ce que la jurisprudence a un peu dégagé de façon générale. Dans un cadre global d'une levée de moratoire et de protection des locataires, j'aimerais entendre la commission là-dessus.

La deuxième question: Est-ce que votre service s'est penché sur ce qu'on pourrait appeler des ententes de gré à gré? ïl y a plusieurs associations qui, tout au cours de la journée - et moi-même par rapport à mon comté - ont fait état du harcèlement systématique, qui dépasse pratiquement une compréhension très normale. J'aimerais savoir si effectivement la Commission des services juridiques s'est penchée sur ce qui peut constituer des ententes de gré à gré et quelles seraient les solutions de rechange à cet effet, ne serait-ce que juridiquement?

La troisième question concerne l'élément de l'opportunité des travaux, dans le sens que vous avez émis l'opinion qu'on devrait avoir la possibilité de contester cette opportunité.

En faisant toujours référence à des groupes qui sont passés aujourd'hui, la grande majorité, d'une part semblait dire que, de façon concrète, cela causait des problèmes tandis que l'association des constructeurs disait que ce serait tellement onéreux qu'on allait détériorer le stock de logements si on amenait une nouvelle mesure comme cela. J'aimerais avoir vos réactions sur ces trois points-là, pour l'instant.

M. Massol: Je vais tenter de répondre à la première question et je laisserai l'occasion à mon collègue de répondre aux deux dernières à cause de son expérience particulière. Si j'ai bien compris, votre première question concernait le cas des réparations majeures, des observations et des commentaires qui sont contenus dans notre mémoire.

Dans le document de travail: "Levée du moratoire"... la question des réparations majeures intervient à deux étapes: avant, d'abord, l'intention du propriétaire de convertir et, après, la décision ou l'avis de conversion. Il me fait plaisir que vous me posiez la question parce que, depuis tout a l'heure, on parle de toutes sortes de choses mais on oublie de parler des protections légales. On est, avant tout, des avocats et je pense que c'est important qu'on mette l'accent sur les mesures de protection qui pourraient être efficaces mais qui nous semblent non efficaces à cause justement de la pratique actuellement qui est en vigueur dans le milieu.

Dans le cas des réparations, avant l'avis du propriétaire qui va convertir, il nous semble qu'il y a eu des améliorations dans le projet. On prolonge certains délais, etc., sauf qu'il n'y a pas de présomption que lorsqu'il y aura réparation majeure - je n'entends pas réparation urgente - et qu'il y a par la suite, une conversion, il n'y a pas de présomption que cette réparation majeure sera faite pour évincer le locataire dans le but de convertir le logement. Ce sera plutôt le locataire qui aura le fardeau de prouver que la réparation majeure a été faite dans l'unique but de l'évincer pour que le logement soit converti. Nous pensons qu'il devrait y avoir renversement de vapeur. Dès qu'il y a réparation majeure et qu'il y a, dans un intervalle rapproché, un avis pour fins de travaux, il devrait y avoir une présomption que cela a été fait en vue d'une transformation en copropriété.

Pour ce qui est des réparations majeures après l'avis, la même remarque s'applique. Il faudrait prévoir une présomption qui ferait en sorte que le propriétaire de l'unité qu'il n'occupe pas et qui veut faire des réparations majeures doive prendre les devants pour aller devant la Régie du logement demander l'autorisation d'effectuer ces réparations majeures qui ne sont pas urgentes. Dans le projet, on ne distingue pas et on ne propose pas une telle intervention.

Je vais laisser mon collègue répondre aux deux autres questions.

Le Président (M. Richard): ... parce qu'il reste deux minutes.

M. Bourdeau: Uniquement quant à votre troisième point sur la possibilité pour un locataire de contester la nature et l'opportunité des travaux, par expérience, je sais que c'est la seule façon pour un locataire de contrôler les visées un peu douteuses soit de propriétaire, soit de promoteur. On voit très souvent des locataires de logement habitable, sans être luxueux, recevoir des avis pour la rénovation de leur logement. Je pense qu'en donnant aux locataires la possibilité de contester la nature et l'opportunité des travaux, en démontrant qu'ils ne sont absolument pas

nécessaires pour permettre à un locataire de vivre dans un logement convenable, cela pourrait mettre un frein assez net au désir d'un propriétaire de vouloir transformer son logement en habitation luxueuse et d'en expulser un locataire.

Quant à votre deuxième point, soit l'entente de gré à gré, si j'ai pu bien comprendre, vous me corrigerez, c'est peut-être une entente de gré à gré entre locateur et locataire pour éviter des problèmes de harcèlement,

M. Laporte: Principalement, ce qui était constaté, ce qui nous a été dit et ce que nous constatons bien souvent dans nos comtés, ce sont effectivement des problèmes de harcèlement occasionnés par des ententes de gré à gré. J'aurais aimé savoir si la commission s'est penchée sur cela. Face à cela, est-ce qu'elle a des propositions ou...

M. Bourdeau: C'est bien évident que lorsqu'un locataire vient nous voir parce qu'il a un problème avec son propriétaire soit à la suite de travaux majeurs ou des reprises de possession, c'est sûr qu'il y a des possibilités d'entente de gré à gré. Pourquoi y a-t-il des possibilités d'entente? C'est parce que le rapport de force a été rétabli, c'est-à-dire que le locataire démuni est représenté par un avocat face au promoteur. À ce moment-là, il y a des possibilités d'entente de gré à gré, mais ce n'est pas cela le problème. Le problème, ce sont les locataires qui ne consultent pas des avocats. La grosse majorité des locataires ne consulte pas les avocats et est prise pour négocier, seule, avec un promoteur qui est beaucoup plus équipé. C'est là, le problème.

L'entente de gré à gré, quand le rapport de force est égal, cela va. Mais, quand il n'y a pas de rapport de force possible, oubliez cela.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député de Sainte-Marie. M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Messieurs, au départ, je suis content, que vous ayez, en tout cas jusqu'à l'heure qu'il est, échappé au "trudeauisme" qualificatif de groupuscule. Le mot va peut-être vous étonner; j'ai l'impression que vous avez une vision planétaire de ce phénomène. J'ai l'impression que vous avez regardé ailleurs ce qui s'est passé. Mon collègue vous a cité New York. On y a vu un phénomène, en tout cas tout au moins, très nord américain, mais qui existe en Europe. Dans les années cinquante et soixante-dix, on a créé les banlieues, donc une deuxième structure qui, entre parenthèses, nous coûte très cher. Voilà l'année 1970 qui commence: crise du pétrole, retour au centre-ville, etc. On avait, d'ailleurs, laissé dégrader, è ce moment-là, les centres-villes. Voilà, effectivement, que se produit - l'exemple de New York était pertinent... On est en train de faire un gigantesque Manhattan, une expulsion vers les anciennes banlieues. On est en train de créer - je regrette le mot, mais quand on l'a vu et je pense que vous l'avez vu... On risque de créer, comme vous l'avez dit, un dépotoir humain comme Bronx. On n'a pas réglé d'ailleurs, depuis 20 ans, ce problème. On a créé un problème encore beaucoup plus grand à ce chapitre. J'en faisais la remarque à mon collègue, d'origine néerlandaise concernant le magnifique quartier où habitait Gordan, un quartier populaire, dont on a complètement évacué la population.

Vous avez dénoncé le guichet unique. Quand des gens arrivent à mon bureau de comté avec des problèmes d'habitation, pour 90 % d'entre eux il est trop tard. Comme on le dit en bon québécois, ils sont déjà faits. Un tel a un problème et, à un moment donné, dans le questionnement, ils me sortent un papier et ils ont signé quelque chose. Ils ne connaissent pas les droits qu'ils ont... Je peux, quelques fois, leur parler de l'aide juridique, je le regrette pour vous, quoique vous êtes très connus, ils disent: Ah, je ne savais pas que j'étais admissible. Ah! Commission des droits de la personne, je ne le savais pas. Ah! tel organisme, je ne le savais pas. La question que j'allais peut-être vous poser: Dans des cas de logements comme cela, les gens qui vous arrivent, est-ce qu'ils vous arrivent aussi dans presque 90 % des cas alors qu'il est déjà trop tard? La solution du guichet n'est que bureaucratique et ne réglera absolument rien.

M. Bourdeau: Oui, cela peut arriver qu'il soit trop tard, effectivement. C'est pour cela qu'entre autres, pour la signature d'ententes... Les gens arrivent souvent avec des ententes déjà signées. On propose, dans le document, un article très clair dans la loi qui rendrait toute renonciation au droit de maintien dans les lieux, toute possibilité de renonciation comme allant à l'encontre de l'ordre public. Il faudrait qu'il y ait un article très clair dans la loi... Et je pense qu'avec un article dans la loi qui soit clair à ce sujet, on pourrait revenir sur des ententes qui ont été signées à rabais par des locataires et qui, par la suite, regrettent leur signature. Souvent, il est trop tard.

M. Boulerice: Dernière question, très brièvement. Il y a des intervenantes qui sont venues cet après-midi et qui ont recommandé que le harcèlement soit défini, soit inclus dans le Code criminel. Qu'en pensez-vous?

M. Bourdeau: Je ne pense pas que cela ait un rapport. Le harcèlement, c'est une

question de fait laissée à l'appréciation du tribunal. Chaque cas est un cas d'espèce. Que ce soit spécifié dans le Code criminel... Il y a des problèmes constitutionnels en plus, comme le dit Me Lafontai-ne.

M. Boulerice: Oui, mais on est habitué depuis quelques années, au Québec. Merci, messieurs.

Une voix: Si vous voulez avoir un moratoire qui dure, c'est la façon.

M. Boulerice: Un moratoire là-dessus, oui.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député de Saint-Jacques. Maintenant, M. le ministre, avez-vous un commentaire final?

M. Bourbeau: Oui. Simplement pour remercier les représentants de la Commission des services juridiques pour leur contribution.

Le Président (M. Richard): Merci. M. le député de Shefford, vous avez un commentaire final?

M. Paré: Très court. C'est pour vous remercier aussi. Je dois vous dire que lorsqu'on va en reparler à Québec... J'espère qu'on aura l'occasion, en commission, de reparler du vrai problème, celui de la page 4 que vous avez abordé de façon très précise. On va certainement le ramener pour en discuter entre nous. Je vous remercie. (22 h 15)

Le Président (M. Richard): Merci, messieurs, d'avoir été présents et d'avoir présenté votre document. Maintenant, et là c'est vraiment le cas, l'Association des consommateurs du Canada, (section Québec) peut prendre place. Je m'excuse de vous avoir fait faire cet exercice tout à l'heure. Bonsoir mesdames, monsieur. Je vous laisserai le soin de présenter vos collègues. Vous avez effectivement quinze minutes pour présenter votre mémoire. Quand arriveront les dernières minutes - vous avez compris tout à l'heure - on vous avise pour permettre à nos collègues des deux partis de vous questionner. Vous commencez.

M. Carouzet (Jacques): Jacques Carouzet, président de l'Association des consommateurs du Canada (section Québec). Mme Brisebois, vice-présidente de l'association (section Québec) et Mme Che-vrier, membre du comité exécutif de l'association.

Le Président (M. Richard): Bienvenue. Vous avez la parole pour les quinze prochaines minutes au maximum.

Association des consommateurs du Canada (section Québec)

M. Carouzet: En tant que président, je voudrais d'abord présenter la philosophie générale de l'association face au projet qui nous est présenté.

Tout d'abord, je voudrais présenter les grands principes. L'Association des consommateurs du Canada est favorable à l'adoption, enfin à l'adoption d'un projet qui mette fin au moratoire. Un moratoire est, par sa nature, effectivement temporaire. Il y a aussi une raison de fond qui fait que nous pensons que le moratoire, en somme, est une restriction au droit fondamental de Sa propriété. Il ne faut quand même pas oublier que le droit de propriété est le droit le plus absolu soit celui de disposer de ce qui vous appartient. Évidemment, dans ce sens-là, le moratoire, c'est-à-dire la restriction à partager un immeuble qui vous appartient, à le diviser, pour pouvoir ensuite le revendre est quand même une restriction importante au droit de propriété. C'est cela, le principe. Dans une société démocratique du type dans lequel nous vivons, c'est un principe qui, malgré toutes les restrictions qu'on peut y apporter, et de toutes les façons pour diverses raisons, reste valable, peut être évidemment, pas tel quel, mais enfin c'est quand même le principe.

Il y a des raisons qui militent pour maintenir ce principe, notamment une raison qu'on a alléguée de diverses sources, c'est qu'on a remarqué - cela est un fait que tout le monde peut constater - que les gens qui sont propriétaires de leur logement, en général, vu que le logement leur appartient, prennent un soin plus méticuleux de leur logement, de leur propriété, font des réparations etc. et ont tendance à le maintenir en meilleure condition. C'est quand même... On a dit qu'il y a un parc immobilier qu'il faut entretenir, investir de l'argent pour le maintenir en condition convenable. Le droit de la propriété, c'est le droit de disposer de la propriété pour pouvoir diviser éventuellement les immeubles d'habitation et ces choses-là. Cela fait partie des mesures auxquelles on peut penser pour entretenir, pour garder en bonne condition le parc immobilier de la province. C'est une chose.

Pour cela, est-ce que l'association est, à ce moment-là, pour un droit absolu de pouvoir subdiviser ses propriétés pour pouvoir faire... Non. L'Association des consommateurs du Canada veut quand même... On ne vit pas en somme selon la loi de la jungle. Si on permet à chacun de disposer de sa propriété de la manière la plus absolue, sans aucune restriction, il est bien évident que ça va aboutir à des abus criants et à des abus qui, d'ailleurs, existent déjà.

Je pense que même si nous sommes en principe pour le droit des gens de disposer de leur propriété, de subdiviser leurs appartements et de les revendre, ils doivent quand même observer certaines règles qui sont nécessaires dans une société civilisée.

Il faut également tenir compte du contexte dans lequel nous vivons, notamment à Montréal. Je pense que, à Montréal, plus encore que dans les autres régions du Québec et du Canada, nous avons un nombre important de locataires qui vivent actuellement - des fois depuis très longtemps - dans un logement. Parmi ces locataires, il peut y avoir des gens qui sont malades, qui sont handicapés. Enfin, il y a toutes sortes de gens qui vivent dans des logements. Evidemment, sous prétexte de laisser le propriétaire enfin jouir de sa propriété, il ne serait pas question de les mettre dehors d'un seul coup et de ne pas leur accorder d'indemnité et de se conduire avec eux comme des sauvages.

Pour ces raisons, il faut évidemment prendre certaines précautions et ménager les transitions, favoriser peut-être l'accès à la propriété pour les locataires, mais pour ceux qui ne le peuvent pas, il faut quand même observer certaines règles. Parmi ces règles, vous avez devant vous le mémoire que nous vous avons présenté. Il y a un certain nombre de règles auxquelles on peut penser, par exemple, si un locataire est obligé de déménager. Il ne faut pas se le cacher, il y a une chose qui est quand même importante et qu'on a déjà remarquée. Dans le moratoire qui existait jusqu'à maintenant, il y avait - comme on l'a remarqué souvent -un nombre important de failles qui permettait à un propriétaire de se livrer à certains abus.

La plus grande faille, je pense, c'étaient les dispositions de la loi qui permettaient au propriétaire d'effectuer des réparations majeures dans son logement et pratiquement, donc, de mettre un locataire à la porte, de le mettre dans la rue pour effectuer ses réparations majeures.

J'ai même vu, en tant qu'avocat, certaines situations qui, malheureusement, n'étaient pas isolées, qui se sont répétées à maintes occasions. Le système est très simple. Le propriétaire veut récupérer son logement pour une raison ou pour une autre. Alors, il dit: Je vais faire des réparations majeures dans mon logement. Donc, il envoie un avis au locataire de quitter les lieux. Certaines dispositions de la loi permettent au locataire d'avoir certains recours, de discuter des modalités, etc.

Néanmoins, le propriétaire a un droit absolu qui lui a été donné par la loi d'effectuer ces réparations. Naturellement, les réparations avaient pour premier effet de rendre impossible l'habitation du logement. Le locataire, avec plus ou moins d'indemnisation - plutôt moins que plus -était obligé de quitter les lieux. On constate - ce sont les statistiques qui le disent - qu'il ne les réintègre que dans une proportion de

Donc, il y a seulement 4 % ou 5 % des locataires qui quittent un logement pour des raisons de réparations qui le réintègrent ensuite. Donc, c'est une grosse faille du système qui existe actuellement. Je pense que ce serait dans le projet. C'est un abus vraiment criant et qui devrait être corrigé.

Pour remédier à cet excès, je pense qu'il y a certaines choses. On a parlé d'un montant statutaire, d'un montant de dommage qui, par exemple, serait minimal et au-dessous duquel on ne pourrait pas aller. Ce serait une solution de fixer un montant forfaitaire par la loi. Donc, le locataire ne pourrait pas signer une renonciation. Comme la Commission des services juridiques l'a dit auparavant, il y avait à ce moment beaucoup d'abus qui se faisaient, il y avait des renonciations qui se signaient d'une façon vraiment très rapide. C'étaient là des causes d'abus.

Il y a d'autres moyens de remédier aux abus. La possibilité pour le locataire évidemment, c'est très intéressant - de pouvoir être lui-même propriétaire du logement qui va être divisé. Cela serait intéressant mais à condition que le locataire ait évidemment la possibilité de racheter son logement. Ici encore, cela suppose un grand nombre de modalités, des modalités diverses. Il pourrait y avoir nécessité d'imagination au niveau législatif pour encourager le locataire, è devenir propriétaire et éviter que le prix du logement soit beaucoup supérieur à ce qu'il est en réalité pour évincer le locataire. Cela supposerait un contrôle du prix du logement, un contrôle de la valeur exacte des travaux qui vont être effectués dans le logement, de la valeur supplémentaire que cela peut conférer au logement. Pourquoi le locataire ne pourrait-il pas discuter auparavant avec le propriétaire'? Est-ce qu'il y a une disposition qui permet au locataire de discuter de la valeur des travaux, de savoir si le locataire pourra payer, quelle va être la valeur qui va être ajoutée au logement, si le locataire pourra payer ces travaux? S'il ne le peut pas, peut-être qu'à ce moment on pourrait lui permettre d'acheter le logement tel qu'il est, sans les travaux. C'est aussi une solution qui peut être valable. Il y a évidemment la solution du maintien dans les lieux qui pourrait s'appliquer, le maintien dans les lieux suivant le système actuel mis en vigueur par la Régie du logement. Ce sont là diverses mesures auxquelles ont peut penser.

D'autres remarques. En somme, cela résume d'une façon générale la position de l'Association des consommateurs du Canada. C'est une position différente de la position

de la Commission des services juridiques qui, elle, était opposée complètement aux droits des propriétaires. Nous ne sommes pas opposés à la levée du moratoire mais nous voulons simplement que les abus qui peuvent résulter de cette levée soient corrigés par une législation adéquate.

Je vais passer la parole à Mme Brisebois qui va nous donner quelques précisions supplémentaires sur la levée du moratoire.

Mme Brisebois (Lucille): Merci, M. Carouzet. On a certaines inquiétudes. Dans le cas, par exemple, où la Régie du logement, se prévalant de l'article 1625, du Code civil donne au propriétaire la permission de faire des réparations, de graves problèmes se posent pour le locataire. S'il est incapable de payer le prix demandé pour le logement rénové, il sera privé de son droit de préemption. Sera-t-il privé aussi de dédommagement? Sera-t-il privé de son droit de maintien dans le logement? Sera-t-il obligé d'aller demeurer dans un logement de moindre qualité? Il ne faut pas se le cacher. Il y a quand même un fort grand nombre de ménages qui ne peuvent pas se permettre d'acheter un logement. Mais nous ne sommes pas aussi pessimistes que nos prédécesseurs qui, en réalité, parlaient pour la population des bénéficiaires. Il y a quand même des gens à Montréal qui travaillent et qui ont les moyens de s'acheter un logement si l'occasion leur en est donnée.

Ce à quoi on pensait, ce serait que le locataire puisse acheter son logement dans lequel il vit sans qu'il soit rénové. On dit aussi que si sa situation financière ne lui permet pas d'acheter le logement, il ne devrait pas avoir à subir les rénovations. Cela serait un point parce qu'une fois que les rénovations sont permises, c'est entendu que le locataire ne pourra probablement pas retourner dans son logement parce que le prix demandé va être trop élevé. C'est là qu'il y a des problèmes. Ce sont là des préoccupations. Nous sommes d'avis que pour éviter de léser les locataires de leurs droits, la législation doit, premièrement, prévoir une indemnité pour le locataire évacué de son logement pour incapacité de payer en cas de conversion ou de rénovation. Cela pourrait être trois mois de loyer plus les frais de déménagement avec factures è l'appui. On parle d'un montant forfaitaire aussi. Notre président en a parlé. Ce serait à régler et ce serait aussi compliqué comme on en parlait tantôt. Mais, cela se fait. On ne peut pas se cacher que cela fie fait dans le moment. Il y a des gens, dans le moment, qui acceptent des montants pour quitter un logement. (22 h 30)

La loi devrait aussi donner au locataire au moins - ce ne sera pas long - six mois pour se réinstaller ailleurs. Ce serait une amélioration parce que dire à un bonhomme: Dans une semaine, tu t'en vas et tu ne reviens plus dans ton logement, comme c'est indiqué déjà dans le code, ce n'est pas suffisant. L'autre raison dont on a parlé, c'est le fait qu'il faut que cela se fasse lentement. Pour l'économie de la province de Québec, on trouve que c'est important qu'il y ait de la rénovation, qu'il y ait des conversions aussi, mais d'une façon civilisée. Il faut quand même penser qu'il y a moyen d'aider les gens à s'informer. Il faut une campagne de publicité pour aider le monde à trouver exactement, savoir ce que sont leurs droits. Le droit de maintien dans les lieux pour une période limitée. Le droit de se défendre contre le harcèlement. Cela existe. Il y a des avocats de l'aide juridique pour défendre ces gens. Des droits de préemption d'achat du logement. La possibilité du propriétaire ou de l'acheteur éventuel de possession du logement. Si les gens sont informés et qu'il y a des moyens pour se défendre... On sait que la situation n'est pas drôle pour les locataires. On a de la sympathie. Devant la spéculation éhontée qui se fait de nos logements dans le moment, tout le monde a des problèmes. On apprécie qu'on ait accepté de geler les évaluations. Cela vient tard. On ne sait pas ce que cela va faire au compte de taxes, mais tout le monde a des problèmes. Il faut en sortir.

Cela m'étonne que les gens disent qu'on n'a pas de politique du logement. Quand même, ici au Québec, on dépend encore un peu du gouvernement fédéral pour l'habitation. On sait qu'il a une politique. Nécessairement, on dépend de cela. Quand il y a des subventions qui sont données, bien souvent ce sont des projets conjoints. On apprécie, par exemple, qu'au lieu de donner, comme ils ont fait depuis 1970, des subventions pour s'acheter des maisons à des gens qui ont déjà les moyens de les acheter... Cela n'avait pas d'allure, mais cela a amélioré le stock de maisons. D'après nous - je suis cette situation depuis 1970 - le stock des maisons est mieux qu'il n'a jamais été au Québec et il ne faut pas se laisser quand même... On a des maisons qui sont améliorées, mais ça peut continuer et ça peut générer des emplois. C'est dans ce sens que nous sommes pour la conversion.

Le Président (M. Richard): Je m'excuse, madame, vous étiez bien partie. La dernière seconde a été étirée un peu.

Mme Brisebois: Je m'excuse d'avoir exagéré.

Le Président (M. Richard): Non, non, aucun problème.

Mme Brisebois: II faut vous dire ces

choses.

Le Président (M. Richard): Vous êtes ici pour qu'on vous entende, effectivement. Maintenant, c'est M. le député de Sainte-Anne qui... M. le ministre?

M. Bourbeau: Non. J'ai cédé mon droit de parole au député de Sainte-Anne.

Le Président (M. Richard): M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: Merci beaucoup. Juste trois petites questions. À la page 2 de votre mémoire, vous parlez de spéculation. Vous dites: "Les propriétés atteignent des prix inaccessibles à d'autres que les bien nantis. Cela joue contre le principe qui nous préoccupe ici, celui de l'accès à la propriété pour les Québécois. Nous comptons sur nos dirigeants provinciaux et fédéraux pour mettre fin à cette situation..." Avez-vous des suggestions pour mettre fin à cela? Vous donnez le problème et vous n'avez pas une piste de solution. En avez-vous une?

Mme Brisebois: Est-ce que je peux?

Le Président (M. Richard): Oui, madame.

Une voix: A llez-y.

Mme Brisebois: II y a une chose que j'ai suggérée ici. C'était une idée. Les propriétés qui sont mises sur le marché - j'ai fait de l'immeuble pendant cinq ans - je peux vous dire que le prix demandé, on dit que c'est libre, mais à peu près tout ce qu'on peut acheter sur le marché dans le moment qui n'a pas vraiment un prix attaché, c'est une maison. Le courtier devrait, il me semble, avoir le bon sens de voir à ce que le prix demandé sur une maison soit réel. Je dis que ce prix pourrait être déterminé par un évaluateur professionnel. Cela aiderait dans le milieu. Il n'y a absolument pas de loi. Il n'y a rien qui concerne l'immeuble. On n'est protégé en aucune façon. Depuis l'adoption de ta Loi sur la protection du consommateur en 1972 qu'on demande d'avoir un volet sur l'immeuble pour protéger les gens, et il n'y en a pas encore et on espère que cela s'en vient.

M. Polak: Deuxième question. À la page 8, vous dites et je cite: "Les propriétaires-convertisseurs trouvant à la conversion de leurs logements des profits très intéressants doivent dédommager les gens lésés par leurs décisions." C'est un bel énoncé de principe, mais que veut dire dédommager? De quelle manière? Avez-vous des formules ou des suggestions?

Mme Brisebois: Oui, mais comme je l'ai dit tantôt, cela pourrait être - M. Carouzet a quelque chose aussi à dire là-dessus - trois mois de loyer. Dans les cas d'expropriation par exemple, on donne trois mois de loyer et les frai9 de déménagement. Je pense que cela aiderait quand même... On dit que la personne locataire devrait avoir au moins six moisi pour se reloger, dans les seuls cas où la régie permettrait ces réparations. Dans notre mémoire, nous disons que si le locataire ne peut acheter le logement, il ne devrait pas y avoir de rénovations, il ne devrait pas être obligé de les subir. On ne devrait pas le mettre dehors pour cela. C'est là qu'est la différence. S'il ne peut acheter parce qu'il n'en a pas les moyens, qu'on le laisse là tranquille, mais qu'on n'augmente pas son loyer pour l'évincer. C'est cela le point. C'est mon idée. M. le président a peut-être quelque chose à vous dire.

M. Carouzet: Oui. Il y a une chose. Souvent, le propriétaire est tenté d'abuser et de faire des travaux pour revendre la propriété qui n'ont pas pour but... Il y a une différence entre des travaux qui améliorent, qui donnent en somme une espèce de plus-value au logement, et des travaux qui sont faits pour revendre. C'est différent. Vous ne ferez pas la même chose si vous voulez améliorer le confort d'un logement ou si vous voulez le vendre. Il y a des travaux de la façade, de la cuisine, il y a des points de marketing qui sont très bons pour...

Si, à ce moment-là, on fait évaluer, on recommande de le faire faire par un évaluateur professionnel pour avoir la plus-value réelle du logement. Si on obtient la plus-value réelle du logement, à ce moment-là, on peut déterminer l'augmentation raisonnable du loyer qui doit être accordé pour cela. Là-dessus, on en vient à une jurisprudence bien établie, puisque c'est à la Régie du logement de voir à fixer le loyer en fonction des travaux qui ont été effectués. Je pense qu'on évitera là pas mal d'abus.

M. Polak: Une dernière question, juste par curiosité personnelle. Vous parlez de l'Association des consommateurs du Canada au Québec. 18 300 membres. Combien de membres avez-vous au Québec?

Une voix: ...18 300 membres au Québec.

Mme Brisebois: C'est cela, 16 300 membres au Québec...

M. Polak: Juste au Québec?

Mme Brisebois: ...dans le moment et environ 160 000 au Canada.

M. Polak: 18 300 membres qui paient une cotisation au Québec. Quelle sorte de gens sont-ils? Avez-vous des personnes âgées là-dedans, des petits salariés ou, comme madame, des courtiers en immeuble? Quelle sorte de gens se retrouvent là-dedans?

M. Carouzet: Il y a toutes sortes de gens. Notre clientèle est très variée. Il y a pas mal de gens âgés, car ces gens-là sont évidemment plus intéressés par les problèmes de consommation ayant un revenu fixe. D'autre part, ils ont le temps de marchander, de vérifier, etc. Donc, on a pas mal de gens âgés et on a également des gens plus jeunes. Je pense que c'est assez bien réparti dans toutes les couches de la population.

M. Polak: D'accord, merci. M. Carouzet: Merci.

Le Président (M, Richard): Merci. M. le député de Shefford.

M. Paré: Oui, merci, M. le Président. L'Association des consommateurs du Canada regroupe 18 300 membres au Québec. Je vous ai entendue, Mme Brisebois, à plusieurs occasions, dire: C'est une idée de moi...

Mme Brisebois: ... Je ne suis pas...

M. Paré: Non, non. Je voudrais seulement compléter ma question. Vous avez préparé ce mémoire. A-t-il été soumis au 18 300 membres? Y a-t-il eu une consultation?

Des voix: Ha! Ha!

M. Paré: Un instant! Un instant!

Mme Brisebois: Non. Cela n'a pas été... Je dois surtout vous dire qu'on n'a pas de subvention du gouvernement du Québec et on n'a pas les moyens de faire cela.

Une voix: ... Vous avez fait... Des voix: Oh! Oh!

Mme Brisebois Non, l'office de la protection...

M. Paré: Je voudrais juste savoir... Un instant! Est-ce que je peux compléter ma question?

Le Président (M. Richard): À l'ordre!

Mme Brisebois: C'est le comité provincial de l'habitation qui l'a préparé. Moi, j'en fais partie, Mlle Chevrier aussi; il y a d'autres personnes qui font partie de notre conseil d'administration et qui ont des compétences, aussi mais qui ne peuvent pas être ici ce soir. On n'a pas fait ce genre de travail, parce que, d'abord 18 000 personnes, c'est beaucoup. On n'a pas de subvention de la province de Québec de l'Office de la protection du consommateur. On n'a pas les moyens de faire ce genre de chose.

M Carouzet: Je dois dire que c'est suivant le type d'organisation que nous avons. Évidemment, c'est un type d'organisation démocratique qui vient de la base où on essaie d'avoir des échanges de haut jusqu'en bas et de bas en haut. Evidemment, on n'est pas capable de consulter sur chaque question 18 300 personnes. Vous me demandez cela. Est-ce que ce serait vraiment possible de faire une chose pareille? Même si on mettait cela dans notre bulletin qui est publié, on aurait certaines réponses. On va peut-être avoir un dixième de réponses, on en tient compte, c'est très intéressant, mais généralement, les gens ne nous répondent pas, même un dixième, c'est beau sur certaines choses. Cela donne quand même une idée, mais c'est surtout de la manière dont nous sommes organisés. Il y a des élections qui se tiennent tous les ans pour les membres du bureau exécutif, etc., qui viennent de la base. On a des sous-sections qui représentent... On a essayé de prendre la température un peu partout. On tient compte évidemment, on essaie le plus possible de faire des tests sur toutes les questions. Cela, c'est une question, il y en a bien d'autres. On essaie de faire des tests pour savoir ce que les gens en pensent et, ensuite, on essaie de résumer l'opinion des consommateurs qui sont un groupe spécial. C'est un groupe qui est différent de celui que vous avez entendu auparavant, le groupe des avocats des services communautaires. Nous, on n'a pas la même clientèle et notre opinion se reflète dans ce que nous disons.

M. Paré: Est-ce que vous avez des contacts spéciaux, soit avec l'Association des consommateurs du Québec, soit avec la Fédération des ACEF?

M. Carouzet: L'Association des consommateurs du Québec, historiquement, est partie de notre association, c'est-à-dire qu'à un moment donné, nous étions la seule association. Cette association s'est formée à côté de nous et, finalement, il y a eu un moment où elle nous représentait pour le Québec. Il s'est produit un schisme en 1983 et l'association du Québec s'est séparée; maintenant, nous sommes deux associations.

M. Bourbeau: ...se trouve être la principale association?

Une voix: C'est cela.

M. Paré: Petite ambiguïté en fonction de ce que je peux lire dans votre texte et des commentaires que vous avez faits tantôt et qu'on retrouve aussi ailleurs. Vous dites que vous êtes d'accord avec la levée du moratoire parce que vous trouvez qu'il est tout à fait normal de reconnaître le droit du propriétaire de partager son immeuble; je l'ai pris en note quand vous l'avez dit, parce que je trouvais cela important. Le droit de partager son immeuble est un droit que possède un propriétaire. Par contre, à la première page de votre mémoire, on lit: "Le prix demandé pour une maison ou un immeuble inscrit chez un courtier devrait être établi par un évaluateur professionnel." Est-ce que vous n'allez pas contre la liberté du droit de propriété?

M. Carouzet: Comme je l'ai expliqué, j'ai commencé par émettre le principe, mais peu de temps après, j'ai dit qu'on ne pouvait pas admettre le principe purement et simplement; il fallait des garde-fous, il fallait des limitations. Donc, ce que vous avez lu fait partie des limitations. Si on admet le principe, comme je l'ai dit au début, on va vivre dans un pays de sauvages, chacun a le droit de faire ce qu'il veut, etc. On vit dans une société civilisée. Les locataires qui vivent dans les logements sont aussi des gens qu'il faut respecter. On ne peut pas les mettre dehors. Si on appliquait le principe tel quel, cela conduirait à des solutions impossibles. C'est pour cela que le principe doit être tempéré. C'est un travail législatif assez délicat de concilier deux choses qui... C'est intéressant parce que le groupe qui est passé avant nous a conclu que la levée du moratoire était inconciliable avec la protection des locataires, etc. Nous, nous croyons justement que ce n'est pas inconciliable, bien qu'il faudrait essayer de le concilier. Je sais que c'est un travail délicat mais, à la différence du groupe qui nous a précédés, nous pensons que c'est possible et qu'il y a moyen. Nous avons proposé certaines solutions. On peut penser à d'autres solutions mais je pense que c'est là qu'il faut chercher la solution au problème qu'on a devant nous. (22 h 45)

M. Paré: Sans chercher de solution, j'identifie une raison que vous énumérez à la page 2 pour la levée du moratoire. Quand on lit, cela semble être cela qui accroche: "L'Association des consommateurs du Canada est d'avis que le moratoire doit être levé car, de toute façon, des propriétaires ont trouvé le moyen de le contourner pour en venir à leurs fins et convertir leurs immeubles et forcer les locataires à quitter leur logement sans les dédommager." Donc, vous dites qu'il faut le lever. Étant donné -exactement ce que le groupe a dénoncé avant vous - qu'on a trouvé la façon de le contourner, enlevons-le. Est-ce que cela voudrait dire que parce qu'il y a des gens qui passent sur les stops on va les enlever?

Ne pensez-vous pas justement que si vous voulez préserver les consommateurs les plus démunis - parce qu'on retrouve ça à la toute fin où vous dites: "Nous espérons que la levée du moratoire se fera de façon à ne pas léser les moins bien nantis." Ne pensez-vous pas que c'est contradictoire et qu'au contraire il faudrait empêcher l'utilisation faite présentement par ceux qui enlèvent des droits aux plus démunis?

M. Carouzet: J'ai expliqué au début que dans le moratoire actuel il y avait des failles. J'en ai signalé une qui me paraissait énorme. Je pense que dans le projet de levée du moratoire on peut... J'ai suggéré qu'il y ait des mesures pour empêcher les failles qui existaient dans l'ancien système. Donc, on peut interpréter ce qui est dit à la page 2 dans le sens qu'il faut corriger et améliorer la loi de façon que, même si on admet le principe que le moratoire doit être levé, essayer de corriger les failles pour éviter quand même les abus. C'est ce que nous voulons. Nous voulons lever le moratoire mais éviter les abus les plus criants et faire que les choses se passent d'une manière civilisée, ce qui n'est pas le cas actuellement. C'est dans ce sens-là qu'on peut interpréter.

Il y a peut-être un semblant de contradiction. Je ne sais pas si vous comprenez ce que je veux dire, mais nous pensons qu'on pourrait en profiter pour éviter les abus qui se produisent déjà et essayer de les corriger.

M. Paré: Dans les mesures pour corriger, quand on parle de droit de maintien illimité pour les locataires actuels, en page 5 dans le premier point où il y a une description de cinq points: Le droit de maintien pour une période illimitée. Donc, c'est une suggestion qui est faite et à laquelle vous adhérez. Par contre, quand on arrive à la page 5, on dit: Il pourra aussi être dans l'impossibilité de payer le loyer qu'on lui demandera pour le logement si celui-ci a été rénové avec le consentement de la Régie du logement. Le privera-t-on alors de son droit de maintien dans les lieux? La loi devrait prévoir une indemnité pour le locataire, le propriétaire devant lui verser une indemnité pour lui permettre de s'installer ailleurs, aux mêmes conditions de qualité de vie. On devrait lui donner au moins six mois pour se réinstaller. La proposition dit que c'est le maintien pour une période illimitée. À la page 3 et à la page 5 vous arrivez avec une autre proposition qui est un délai de six mois, puis on le dédommage et on l'installe ailleurs.

Mme Brisebois: Vous avez deux situations dans ça. Celle de la rénovation et celle de conversion. Ce sont deux choses. J'ai écrit le mémoire avec le consentement de tout le monde. Ils l'ont tous lu et vous pouvez être sûr que... Il faut penser que les règles ne sont pas exactement les mêmes. On dit que dans les cas de conversion, s'il ne peut pas acheter le logement il ne devrait pas avoir à subir les réparations.

Par contre, la régie peut avoir le pouvoir, parce qu'il en est question dans votre proposition, de donner... À part cela, il y a un article dans le Code civil qui dit que le locataire doit subir ces réparations. Si la régie donne au propriétaire - c'est dans un cas comme cela - la permission de faire ces réparations-là et même qu'il peut évacuer son locataire, c'est à ce moment-là qu'il doit être protégé. À ce moment-là, il serait pris vite son droit de maintien dans les lieux; la régie dit au propriétaire de réparer. C'est très complexe cette affaire-là, je le sais, mais il faut penser que ce n'est pas tout à fait la même situation si le propriétaire rénove ou si le propriétaire a la permission de convertir le logement, c'est pour cela que vous voyez cette... Alors, c'est cela qui nous inquiète le plus. C'est qu'au moment justement où la permission est donnée par la régie se prévalant de l'article du Code civil, si elle donne la permission de faire des réparations et qu'il est évacué, c'est là que le locataire est le plus lésé. À ce moment-là, il va être privé de son droit de préemption parce qu'il aura le droit de l'acheter, mais il n'a pas l'argent, il ne peut pas l'acheter. Premièrement, il est privé de son droit de préemption, si la loi ne dit pas... nous autres, ce qu'on vous demande, c'est d'avoir un dédommagement parce qu'autrement il va être mis dehors sans dédommagement; c'est la raison aussi pour laquelle on demande la levée du moratoire parce que d'après cet article, on dit que le locataire doit subir, mais on ne dit pas qu'il doit être dédommagé; c'est la raison pour laquelle cela doit être inclus là-dedans. Il faut comprendre que la régie aussi a donné le droit, a vraiment mis en place le principe fondamental que le locataire doit rester. On doit respecter ce droit-là aussi de le laisser dans son logement, mais je vois qu'il ne faut pas qu'il soit obligé d'aller demeurer ailleurs dans un logement de moindre qualité; il faut absolument qu'il ait de la protection. C'est très complexe et on compte sur vous pour protéger ce locataire-là. Ce serait peut-être une façon justement d'arriver à obtenir une politique de protection du locataire dans l'habitation.

Le Président (M. Richard); Merci madame, je céderais la parole à M. le député de Lévis.

Il reste seulement quelques minutes dans le temps alloué.

M. Garon: Ce ne sera pas long.

J'ai été surpris au début de votre intervention de constater, M. Carouzet, que vous avez parlé du droit de propriété comme d'un droit très absolu. C'était vrai dans le temps de Napoléon, mais aujourd'hui on parle beaucoup plus du droit de propriété comme un droit de plus en plus limité par des droits collectifs, des droits communautaires ou des droits de zonage, etc. Je pensais que c'était par enthousiasme que vous avez commencé votre..., mais croyez-vous vraiment que le droit de propriété est un droit très absolu?

M. Carouzet: Je n'ignore pas qu'il est rogné de toutes les façons possibles et imaginables. C'est peut-être pour cela justement que j'ai voulu le rappeler, parce qu'on a tendance à l'oublier complètement et à penser que le propriétaire finalement est obligé de passer par toutes sortes de juridictions ou quasi juridiction pour avoir le droit de faire ce qu'il veut avec ce qu'il a et c'est pour cela, je voulais rappeler cela.

Si on ne lève pas le moratoire, cela peut avoir certains inconvénients. Il y a des gens qui attendent pour acheter des appartements ou des logements. Ces gens-là, s'ils ne peuvent pas les acheter et puis si dans la province on leur oppose des lois qui vont les empêcher complètement de, vous savez, qui vont limiter le droit de propriété, qu'est-ce qu'ils vont faire, aller porter leurs capitaux ailleurs que dans la province, ils vont aller en Ontario ou ailleurs. Est-ce que cela va être notre intérêt? Il faut aussi penser à cela lorsqu'on fait une législation; il faut bien penser aux droits des gens qui habitent dans les lieux, mais il faut aussi penser aux droits des gens qui voudraient acheter des logements ou des propriétés et qui ne peuvent pas le faire et qui ne pourront pas le faire. Ce sont aussi des consommateurs au sens de... il n'y a pas que les locataires qui sont consommateurs. Les propriétaires et les gens qui veulent acheter des condominiums sont aussi des consommateurs dans un sens. Nous, on représente tout le monde.

M. Garon: Vous ne pensez pas que le droit de propriété est limité ailleurs? On n'a pas inventé cela au Québec; on a plutôt imité les autres là-dedans, qui ont limité le droit de propriété bien avant nous.

M. Carouzet: En tout cas, il faut quand même rester... On n'est quand même pas dans un pays complètement socialiste, comme cela existe dans d'autres pays. Il faut quand même... On est dans un système d'équilibre entre certaines classes et d'autres, etc. Notre association essaie justement de contrebalancer un peu d'un côté et de l'autre, de chercher une certaine harmonie.

Je pense que c'est une bonne chose. On a un certain système démocratique. D'autres pays ont d'autres systèmes, mais nous avons un système et on le voit comme cela. On le voit au nom des consommateurs qui sont parfois des locataires et, d'autres fois, des propriétaires. Il ne faut pas oublier cela-La Commission des services juridiques voyait cela d'une autre façon, ses clients étant uniquement des locataires. Mais je pense que, pour nous, les consommateurs sont une autre classe de gens.

Le Président (M. Richard): M. Carouzet, je céderais la parole, pour la dernière question, à M. le député de Jonquière, si vous le permettez.

M. Dufour: II y a peut-être un point que je soulignerai sans vous poser de question. On pourrait plutôt envisager un taux de taxation foncière distinct. Peut-être pourrait-on en reparler après la commission parlementaire. Ce n'est pas là-dessus que mon intervention portera.

Vous dites qu'à un moment donné il y a de la spéculation. À mon sens, la spéculation est faite par du monde, par des gens d'affaires, en principe. L'entreprise privée fait partie du monde des affaires. Vous dites, après tout ce que vous nous avez expliqué, que vous êtes pour l'entreprise privée et aussi pour la levée du moratoire, vous finissez votre mémoire avec un voeux qui me semble un voeux pieux. Tout ce que vous avez dit c'est: Espérons que les problèmes causés par la spéculation sur nos logements seront réglés avec la collaboration des gouvernements provincial, municipaux et du monde des affaires, avec une protection accrue pour les consommateurs payeurs de taxes de plus en plus élevées. Vous dites, dans cette phrase, que c'est le monde des affaires qui travaille sur la spéculation, qui fait la spéculation, et vous espérez qu'il va comprendre le bon sens sans que rien ne se produise. Vous dites: Donnez-leur l'occasion de faire de la spéculation, parce qu'on va vendre les condos; on lève le moratoire, donc il y a des chances que la spéculation embarque là-dedans. Vous dites: Avec tout cela, on espère, malgré tout, que le monde des affaires va comprendre et je ne sais pas comment vous arrivez à cette conclusion. Comment le monde des affaires va-t-il comprendre qu'il doit arrêter de spéculer d'un coup sec?

Mme Brisebois: Je ne vois rien sur le monde des affaires. Vous dites... Où cela, monsieur?

M. Carouzet: Où est-ce que... Mme Brisebois: À la page 8?

M. Dufour: C'est à la conclusion, aux trois ou quatre dernières lignes.

M. Carouzet: Ah oui! Du monde des affaires...

Mme Brisebois: Dans le monde des affaires...

M. Dufour: Cela n'a pas de bon sens.

Mme Brisebois: ...c'est quand même... On sait que cela prend aussi la coopération de tout le monde pour cela. Regardez, on sait que, depuis qu'on a écrit cela, vous êtes arrivés, en collaboration avec les gens des municipalités, à geler la spéculation. On ne sait pas encore trop trop ce que cela va faire. ,Le monde des affaires peut inclure aussi les banques. C'est le monde des affaires qui fait la spéculation. La spéculation dont on parle... Ce qui arrive dans le moment... J'ai justement un article ici d'une compagnie d'immeubles, la compagnie Lepage, qui a défendu à ses agents immobiliers de vendre une maison avant que l'acte de la dernière vente soit signé. II se passe des choses, de ce temps-là, qui n'ont pas d'allure. Ce sont des prix. Les maisons et les immeubles se vendent à des prix absolument irréels. Il faut la collaboration de tout le monde en ce sens que, quand vous faites des évaluations... Vous savez, cela fait depuis environ 1970 que je fais partie des commissions nationales de l'habitation. J'ai vu pas mal tout ce qui s'y est passé, tout le temps. Quand le gouvernement fait des réunions, il invite tout le monde; il invite les entrepreneurs. Le monde des affaires, cela peut être des constructeurs, des banquiers, etc. Cela prend la collaboration de tout le monde pour arriver à faire quelque chose. J'ai eu connaissance, lors d'une réunion pour inviter tout le monde à se rencontrer pour essayer de faire quelque chose au sujet de la Loi sur l'intérêt, et je vous assure que cela n'a pas été bien long, le monde des affaires avait fait son jeu...

Le Président (M. Richard): Je m'excuse, madame...

Mme Brisebois: ...et on n'a pas eu de changement.

Le Président (M, Richard): Je vous demanderais de terminer. Merci, M. le député de Jonquière. M. le ministre, est-ce que vous avez un commentaire pour terminer?

M. Bourbeau: Oui, M. le Président. Un mot de la fin pour remercier l'Association des consommateurs du Canada (section Québec) de sa contribution, pour souligner

que cet organisme très représentatif compte 18 300 membres au Québec. Bien sûr, on comprend que chacun des 18 300 membres n'a pas été consulté individuellement pour ce mémoire. C'est un organisme représentatif et démocratiquement élu. D'ailleurs, de la même façon que vous n'avez pas consulté, de la même façon, le député de Shefford n'a pas consulté chacun de ses 38 000 électeurs avant de poser sa question au début de... Je pense que s'il les avait consultés, il n'aurait pas posé la question. D'ailleurs, je pense qu'il l'a regrettée ensuite.

Enfin, je conclus en notant que cet organisme important qui représente un grand nombre de citoyens du Québec voit les choses de la même façon que le gouvernement. Je souligne une très grande similitude entre les vues de l'Association des consommateurs du Canada (section Québec) et la proposition gouvernementale. Je dois dire que je me réjouis de cette situation. Et, selon le voeu que vous avez formulé et selon le voeu que nous formulons, nous espérons que nous en viendrons à une proposition améliorée. Nul doute que nous pourrons améliorer cette proposition qui ira dans le sens de protéger à la fols les locataires, les acquéreurs et le parc locatif. Merci.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. M. le député de Shefford, vous avez un commentaire à faire?

M. Paré: Oui, très court. Je vous remercie, moi aussi, entre autres de votre patience. Il est 23 heures et, intervenir à cette heure-là, ce n'est pas facile. J'ai aussi lu avec beaucoup d'attention9 Mme Brisebois, le dossier que vous avez soumis à votre comité. Je prends note qu'il ne s'agit pas, par contre, d'un appui de quelque nature que ce soit de l'Association des ACEF du Québec ou de l'Association des consommateurs du Québec. C'est vraiment le groupe de l'habitation de l'Association des consommateurs du Canada (section Québec)...

Mme Brisebois: Des associations, cela n'existe pas, vous savez.

M. Paré: Je vais juste conclure en disant qu'il s'agit d'un mémoire présenté par votre comité. A sa lecture et à la suite des échanges que j'ai eus, vous dites que vous êtes en faveur de la levée du moratoire par plusieurs paragraphes contradictoires à la suite desquels vous finissez par conclure: Il s'agit de s'asseoir et de s'entendre. Donc, vous espérez que tout le monde va s'asseoir et finir par trouver enfin un consensus. C'est ce que j'en ai déduit en vous entendant dire à plusieurs reprises: Vous savez, il faut qu'on s'entende, il faut qu'on se parle, il faut qu'on finisse par trouver des solutions. Vous nous invitez à trouver une solution. J'ai pris bonne note de vos commentaires et je vous remercie d'être venus ici ce soir.

Le Président (M. Richard): Merci, mesdames et messieurs, de nous avoir présenté votre mémoire.

Nous ajournons maintenant nos travaux jusqu'à demain 10 heures, au même endroit. Petit détail technique: Vous avez le droit de ramener vos documents afin qu'on puisse faire un nettoyage pour demain matin.

(Fin de la séance à 23 heures)

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