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(Neuf heures quarante-deux minutes)
Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'aménagement et des équipements
entreprend ses travaux ce matin dans le but de tenir une consultation
générale sur un document gouvernemental déposé par
le ministre responsable de l'Habitation et député de Laporte, M.
Bourbeau, portant sur la levée du moratoire sur la conversion des
immeubles locatifs en copropriété divise. Le ministre a
déposé un document gouvernemental, il y a déjà un
certain temps. Par la suite, l'Assemblée nationale a donné mandat
à la commission de l'aménagement et des équipements de
tenir une consultation générale afin de permettre à
l'ensemble des groupes et des individus intéressés à se
faire entendre devant les membres de la commission, afin de permettre à
ces derniers de se faire une idée précise de toutes les
implications de la levée du moratoire et des mesures d'accompagnement
contenues au document gouvernemental présenté et
déposé par le ministre responsable de l'Habitation.
Nous tenons cette séance, ces séances, puisque nous
siégerons lundi, mardi, mercredi et jeudi à Montréal et
vendredi à Québec... Nous tenons quatre jours d'audition à
Montréal pour des raisons fort évidentes, même s'il s'agit
d'une procédure fort exceptionnelle pour une commission de
l'Assemblée nationale. Cette commission se déroule pendant quatre
jours à Montréal parce qu'il s'agit d'un problème qui
concerne principalement les Montréalais et les Montréalaises.
C'est ce qui a amené une décision conjointe des membres de la
commission de tenir quatre des cinq jours de séance de nos travaux dans
la région qui, normalement, sera la plus concernée par les
décisions qui suivront les audiences que tiendra la commission de
l'aménagement et des équipements sur ces questions.
J'indique immédiatement que nous nous sommes donné un
horaire très chargé puisque plus d'une cinquantaine de groupes
ont manifesté l'intention de participer a nos travaux et que le mandat
que l'Assemblée nationale nous avait donné était de
consacrer cinq jours de nos activités à ce dossier. C'est ce qui
a amené la commission à décider d'un horaire très
chargé, d'un horaire contraignant pour tous et qui impliquera beaucoup
de discipline, beaucoup de respect des règles que nous nous sommes
données. J'interviens plus directement auprès des parlementaires
membres de la commission. Puisque vous avez tous participé aux
décisions entourant les horaires de travail, je vais faire appel
à votre collaboration encore plus précieuse et plus soutenue que
ce que vous nous donnez habituellement, ce qui est déjà
très bien. Mais compte tenu du cadre plus restreint que ce qu'on a
habituellement, cela va demander une collaboration encore plus soutenue de la
part de chacun et chacune d'entre vous pour nous permettre de répondre
aux horaires que nous nous sommes donnés, d'une part, parce que nous
n'avons pas de possibilité de les dépasser et,
deuxièmement, par respect envers les groupes et les individus qui ont
demandé à se présenter devant nous et que nous avons
décidé de recevoir.
J'indique immédiatement que l'horaire de la journée est le
suivant. On le donnera aussi au début de chaque séance, le matin.
Dans un premier temps, ce matin, il y aura des remarques préliminaires
de la part du ministre responsable de l'Habitation. Ensuite, il y aura les
remarques préliminaires du porte-parole de l'Opposition dans le secteur
de l'habitation, soit le député de Shefford, M. Paré. Par
la suite, nous entendrons pour une période d'une heure et trente, les
représentants de la ville de Montréal. Pour chacune des
enveloppes que j'énumérerai, ce sera toujours réparti en
périodes, soit un tiers de la période de temps
réservé à la présentation de l'organisme ou de
l'individu qui se présente devant nous; un tiers du temps de l'enveloppe
est réservé au parti ministériel pour des échanges
avec le groupe ou les individus et une autre période d'un tiers sera
réservée à l'Opposition pour des échanges
également avec les groupes ou les individus.
Voici, donc, les groupes qui seront entendus dans l'ordre suivant,
aujourd'hui: Ville de Montréal, pour une période d'une heure et
trente. Par la suite, tous les groupes qui suivent pour une période 45
minutes, dans l'ordre: l'Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec; le Regroupement d'organismes populaires
d'Hochelaga-Maisonneuve; la Commission des droits de la personne; l'Association
communautaire de Notre-Dame-de-Grâce; Information Ressources Femmes
et
Logement} The Redfern Tenants' Association; l'Association des
étudiants aux études supérieures de l'Université
McGill et, conjointement, l'Association des étudiants de
l'Université McGill; l'Union des municipalités régionales
de comté et des municipalités locales du Québec Inc.; la
Commission des services juridiques et l'Association des consommateurs du Canada
(section Québec).
Voilà le menu de la journée. Je rappelle aussi que nous
suspendrons nos travaux de 13 heures à 15 heures et de 18 heures
à 20 heures, pour les périodes de repas et de rencontres
parallèles. Je vous indique, également, qu'en respectant
rigoureusement nos horaires, l'ordre de comparution des groupes que je viens de
présenter, nous mènerait à la fin de nos travaux à
23 heures, ce soir. Je peux vous dire, tout de suite, qu'on est presque 15
à 17 minutes en retard sur les horaires prévus. C'est tout
simplement pour vous indiquer qu'on va devoir fonctionner rondement, tout en
permettant aux groupes et aux individus, qui sont ici présents, d'avoir
le temps de s'exprimer et de bien sensibiliser Jes membres de la commission aux
points les plus importants de leur présentation.
Avant d'entreprendre véritablement nos travaux, je demanderais au
secrétaire de la commission, M. Chouinard, de nous indiquer s'il y a des
remplacements quant aux membres de la commission.
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme
Bélanger (Mégantic-Compton) sera remplacée par M. Polak
(Sainte-Anne); M. Charbonneau (Verchères) sera remplacé par M.
Boulerice (Saint-Jacques); Mme Juneau (Johnson) sera remplacée par M.
Paré (Shefford); M. Paradis (Matapédia) sera remplacé par
M. Laporte (Sainte-Marie). C'est tout, M. le Président.
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le
secrétaire. J'indique également qu'à la suite d'une
entente intervenue entre les formations politiques et du consentement des
membres du parti ministériel, Mme Harel, députée de
Maisonneuve, participera à nos travaux, avec le droit de parole comme
pour tous les autres membres de la commission.
Sans plus tarder, j'inviterais le ministre responsable de l'Habitation
à nous faire ses commentaires préliminaires. M. le ministre.
Remarques préliminaires M. André
Bourbeau
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Mesdames, messieurs
les députés et membres de la commission parlementaire, mesdames
et messieurs. Je voudrais d'abord souhaiter la bienvenue à nos
concitoyens et concitoyennes qui, durant la prochaine semaine, viendront,
à titre individuel ou à titre de représentant d'organisme
intéressé au secteur de l'habitation, présenter leur
position quant à la levée du moratoire sur la conversion des
immeubles locatifs en copropriété.
L'importance que revêt, pour les grandes régions urbaines
de Montréal et de Québec, cette proposition de lever le moratoire
et d'encadrer la conversion par des mesures efficaces de protection des
locataires, des acquéreurs et du parc de logements locatifs explique
notre présence ici à Montréal pour les quatre prochains
jours, et notre venue à Québec pour la dernière
journée des audiences, soit vendredi.
Je suis particulièrement heureux d'avoir pu répondre au
souhait de plusieurs groupes qui désiraient être entendus à
Montréal et je remercie les membres de la commission d'avoir permis la
tenue de cette commission hors les murs habituels du parlement de
Québec. J'aimerais également remercier le personnel de la
commission qui nous assistera au cours de ces auditions et, surtout, le
remercier pour l'organisation matérielle ici, à
Montréal.
M, le Président, le 12 mai dernier, je rendais public un document
de consultation sur les mesures d'encadrement de la conversion en
copropriété, intitulé Lever le moratoire: une
décision qui s'impose. Les réactions au lendemain de la
sortie de ce document m'ont permis de constater que les journalistes et les
analystes de nos grands quotidiens souscrivaient à la levée du
moratoire et à son objectif d'accès à la
propriété, certains voyant également, dans les mesures
proposées, un biais favorisant nettement les locataires.
Ce biais en faveur d'une protection accrue des locataires à
l'occasion de la conversion de leurs logements en copropriétés,
je suis heureux qu'il soit reconnu. C'est d'ailleurs sous cette enseigne d'une
protection blindée des locataires que j'annonçais, lors du sommet
économique de Montréal en juin 1986, la levée du moratoire
et la consultation que nous entreprenons, aujourd'hui, sur les mesures
d'encadrement de la conversion.
Cette décision de lever le moratoire et de protéger les
locataires n'était pas le fruit du hasard. Vous me permettrez, M. le
Président, de faire ici un bref rappel historique. Ce lien,
nécessaire entre la conversion d'un immeuble locatif et la protection
des locataires, avait été identifié par nombre
d'études et de rapports et constituait la base d'un consensus parmi la
grande majorité des intervenants en matière d'habitation qui, au
fil des ans, et particulièrement au sommet économique de
Montréal et lors de la consultation sur le livre vert Se loger au
Québec, se sont prononcés sur la question.
En effet, à la suite du moratoire, une
mesure temporaire décrétée par le gouvernement en
1975 è la demande du ministre de la Justice de l'époque, M.
Gérard-D. Levesque, les études, les rapports et les analyses se
sont succédé. En mars 1976, le rapport Legault sur l'habitation
recommandait diverses mesures d'encadrement pour accompagner la levée du
moratoire, dont la protection des locataires.
En 1980, la Loi sur la Régie du logement était mise en
vigueur et prévoyait l'adoption d'un règlement qui permettrait
à cet organisme d'autoriser la conversion et de fixer les conditions de
protection des locataires et des acquéreurs. C'est l'absence de ce
règlement qui constitue dans les faits notre moratoire actuel. En 1981,
on intervenait pour interdire la reprise de possession d'un logement par un
propriétaire indivis dans les immeubles de cinq logements et plus.
En 1982, un groupe de travail du ministère de la Justice sur la
copropriété recommandait également la levée du
moratoire avec des mesures de protection. Finalement, en 1984, paraissait le
livre vert, Se loger au Québec, qui suggérait également la
levée du moratoire avec des mesures d'encadrement de la conversion qui
protégeaient les locataires. Ainsi, à la fin de 1985, prenant en
main la responsabilité de l'Habitation au sein du gouvernement, je
faisais le constat suivant: Premièrement, les rapports et les
études reçus au cours des dernières années
concluaient à la nécessité de mesures d'encadrement pour
assurer la protection des locataires, des acquéreurs et du parc locatif;
deuxièmement, les résultats de la consultation sur le livre vert
Se loger au Québec indiquaient, de façon générale,
une volonté de favoriser l'accès à la
propriété par la levée du moratoire, tout en
protégeant adéquatement le locataire qui ne peut ou ne
désire pas acheter son logement; troisièment, le moratoire se
révélait inefficace et rendait la situation de nombreux
locataires difficile. En effet, face à la demande croissante pour la
copropriété, certaines voies de contourneraient étaient
maintenant empruntées.
Par exemple, à la suite de diverses circonstances: incendie,
reconstruction, réfections majeures et travaux majeurs, l'immeuble se
trouvant vidé de ses locataires, le propriétaire pouvait profiter
de cette occasion pour le transformer en copropriété et, d'autre
part, la possibilité de reprendre possession de logements dans les
immeubles de quatre logements et moins, alors que le moratoire était
toujours maintenu, a retransformé l'achat en copropriété
indivise en véritable opération immobilière dans certains
quartiers.
Enfin, le Québec était seul à maintenir un
moratoire durant une si longue période de temps, onze ans. Aux
États-Unis, cette technique du moratoire avait été
utilisée dans certains États pour des périodes beaucoup
plus courtes. Le Québec pouvait donc bénéficier de
l'expérience de ses voisins pour élaborer des mesures
d'encadrement appropriées.
Cette expérience, nous pouvions également la puiser
auprès d'autres provinces canadiennes et certains pays d'Europe
où la tradition de copropriété est ancrée depuis
fort longtemps. C'est dans ce contexte que je répondais favorablement
à la proposition de la ville de Montréal de lever le moratoire
sur la conversion lors du sommet économique de Montréal, en juin
1986.
Est-il besoin de rappeler qu'à cette table du sommet
économique de Montréal, la majorité des partenaires
socio-économiques de la ville et, la ville elle-même à
l'époque, souhaitaient la levée du moratoire avec des mesures
d'encadrement? Au nombre de ses partenaires en faveur de la levée du
moratoire, l'on retrouvait le Bureau de commerce de Montréal, la Chambre
de commerce de Montréal, l'Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec, la Fédération des caisses
populaires Desjardins de Montréal et de l'Ouest du Québec,
l'Ordre des architectes du Québec, l'Office municipal d'habitation de
Montréal.
De leur côté, le Conseil des travailleurs et travailleuses
de Montréal, le Regroupement des comités de logements et des
associations de locataires, la table des GRT de Montréal et la
Fédération des coopératives d'habitation de l'île de
Montréal, de même que le Conseil centrai de Montréal ne
mettaient pas de côté l'idée de la levée du
moratoire exigeant toutefois des garanties plus importantes au plan de la
protection du parc des logements locatifs à bas prix, alors que, de son
côté, la Fédération de l'âge d'or du
Québec s'opposait à la levée du moratoire, du moins,
jusqu'au moment de la création d'une banque de logements à prix
raisonnables.
Le document de propositions sur la levée du moratoire, qui vous a
été soumis et qui fait l'objet de la présente commission
parlementaire, vise donc à refaire le tour de la question auprès
de l'ensemble des intervenants. Si, d'une part, nous devons examiner chacune
des mesures d'encadrement proposées, nous devons également nous
poser la question: Le Québec peut-il être un pays de
propriétaires?
Cette question, je la tire d'un ouvrage, paru en mars dernier, sur la
question de la conversion en copropriété sous la plume de Mme
Francine Dansereau, de l'INRS-urbanisation et de M. Daniel L'Écuyer,
urbaniste. En proposant la levée du moratoire sur la conversion des
immeubles locatifs, il s'agit, en tout premier lieu, de permettre à des
ménages locataires d'accéder à la propriété
dans les centres urbains, plutôt que
de les délaisser au profit des banlieues.
On doit également s'interroger sur la capacité de notre
société de permettre à des ménages locataires
d'accéder à la propriété sous ces nouvelles
formules de copropriété divise ou indivise, tout en
protégeant adéquatement les locataires en place qui ne peuvent ou
ne désirent pas accéder à la propriété.
D'autres semblent y être parvenus, dont la France et de nombreux
États américains et provinces canadiennes. Les mesures qui nous
sont présentées, dans le document, sont nombreuses. Pour les
remettre en mémoire, on peut les résumer ainsi: D'abord, pour
protéger les locataires.
Premièrement, le droit au maintien dans les lieux pour une
période illimitée. L'acheteur d'un logement, qu'il soit un
indivisaire ou un copropriétaire divis, ne pourrait pas reprendre
possession du logement. Tous les locataires bénéficieraient donc
d'une meilleure protection et ne pourraient être forcés de quitter
leur logement par la conversion en copropriété ou par l'achat par
des propriétaires indivis. (10 heures)
Deuxièmement, une protection additionnelle aux personnes
igées ou handicapées, par l'ouverture d'un guichet spécial
à la Régie du logement. Ce guichet leur offrirait des services
privilégiés d'information et de conciliation et pourrait signaler
a la Commission des droits de la personne les problèmes de
harcèlement ou d'exploitation qui lui sont rapportés.
Troisièmement, une protection accrue lors des travaux majeurs qui
peuvent survenir, et ce, même en l'absence de conversion. Cette
protection qui s'appliquerait à tous les locataires se résume par
une indemnité automatique qui leur serait versée par un
propriétaire lors d'une évacuation temporaire de plus d'une
semaine pour réaliser des travaux et des améliorations majeurs
et, par un pré-avis de trois mois plutôt que d'un mois, comme cela
est prévu actuellement.
Quatrièmement, une assurance contre le harcèlement durant
le processus de conversion. Le propriétaire convertisseur ne pourrait
pas entreprendre des travaux autres que ceux d'entretien courant ou ceux de
nature urgente et nécessaire à la conversion de l'immeuble, sans
demander l'autorisation de la régie. De plus, une poursuite
pénale pourrait être intentée à l'endroit d'un
locateur qui userait de harcèlement pour arriver à ses fins.
Cinquièmement, une possibilité pour le locataire de
recouvrer des dommages-intérêts et des dommages exemplaires d'un
propriétaire qui effectue des améliorations ou des
réparations majeures dans le but de l'évincer et de passer outre
aux règles de conversion. La Régie du logement se verrait
également accorder le pouvoir de refuser l'autorisation de convertir a
un propriétaire qui aurait effectué de tels travaux majeurs dans
le but de préparer l'immeuble à la conversion et d'évincer
les locataires.
Tous les propriétaires qui désireraient convertir leur
immeuble, qu'il soit occupé ou non par des locataires, devraient en
faire la demande à la régie. Puis, pour favoriser l'accès
à la propriété du locataire occupant, le
propriétaire serait obligé, avant d'accepter une offre d'achat
présentée par un acquéreur extérieur, de lui offrir
d'acheter son logement au même prix et aux mêmes conditions.
La protection des acquéreurs, maintenant, serait quant à
elle assurée par une information adéquate sur la qualité
du bâtiment et sur la gestion du projet. Un rapport d'experts serait
remis à tout acquéreur éventuel. De plus, dans les
immeubles de cinq logements et plus, un prospectus serait également
remis à l'acheteur éventuel.
Afin de maintenir les coûts au prix le moins élevé
possible, aucune réparation ne serait exigée avant la conversion.
Il appartiendrait aux nouveaux copropriétaires d'améliorer leur
logement et leurs immeubles à leur rythme et selon leurs moyens.
Cependant, le rapport d'experts leur fournirait toute l'information
nécessaire à une prise de décision éclairée,
cela avant d'acheter.
Finalement, la protection du stock locatif serait assurée d'abord
par le fait que le locataire demeurerait dans les lieux pour une période
illimitée. Cette mesure de protection complète du droit au
maintien dans les lieux assurerait un rythme lent à la conversion. Par
ailleurs, un suivi attentif du rythme de conversion nous permettrait
d'intervenir au besoin dans certains secteurs du marché locatif si des
tensions importantes devaient apparaître.
La quantité des mémoires déposés, soit plus
d'une cinquantaine, prouve hors de tout doute, s'il fallait encore le
démontrer, toute l'importance accordée à la question de la
conversion en copropriété. À la lecture de ces
mémoires, j'ai pu constater que, pour plusieurs des groupements,
l'occasion de cette commission parlementaire a été prise pour
adresser au gouvernement des demandes qui touchent d'autres secteurs de
l'habitation. Souvent, la question de la levée du moratoire est
subordonnée dans ces mémoires à la mise en place, par le
gouvernement, du programme d'aide financière aux groupes de ressources
techniques, aux associations de locataires, aux coopératives
d'habitation ou aux organismes sans but lucratif et, de budgets accrus
alloués aux logements sociaux et aux HLM. Je remercie tous ces
organismes.
C'est de bonne guerre que d'attirer
également l'attention des membres de la commission sur ces
questions. Cela dit, j'ai constaté également avec satisfaction
qu'indépendamment de la position des groupes sur la levée du
moratoire, chacun a pris soin d'analyser à fond les mesures
proposées. Beaucoup d'entre elles semblent retenir l'attention des
intervenants. On souhaite les voir adopter avec ou sans modification et cela,
indépendamment de l'issue des discussions entourant la levée du
moratoire.
Cette commission sers l'occasion pour moi d'une discussion franche et
ouverte avec chacun des intervenants, afin de bien comprendre les positions
exprimées et les recommandations. Il sera sans doute difficile de
satisfaire chacun des intervenants et de donner suite à toutes les
recommandations formulées. Mais, j'écouterai avec beaucoup
d'attention les présentations de chacun, afin de tenir compte des
opinions exprimées.
M. le Président, chers amis, le document intitulé Lever le
moratoire: une décision qui s'impose est une proposition qui vise
à corriger une situation reconnue comme étant inacceptable par la
majorité des intervenants. Cette proposition est le fruit d'un long
travail et d'une immense expertise. Elle n'a pas la prétention
d'être parfaite.
Le but de l'exercice que nous commençons aujourd'hui est de
tenter justement de l'améliorer. Ces améliorations pourraient
être mineures, mais elles pourraient également être
majeures, selon la qualité des propositions qui pourraient nous
être faites. Je dis donc que tout est ouvert, nos esprits comme
également nos coeurs.
Je souhaite, à nouveau, la bienvenue a chacun des intervenants,
étant assuré que les propos que nous entendrons nous permettront
de répondre de mieux en mieux aux besoins de l'ensemble des
ménages québécois en matière d'habitation. Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie, M. le
ministre. J'inviterai maintenant le porte-parole de l'Opposition dans le
domaine de l'habitation, M. le député de Shefford, à
prendre la parole et à nous présenter ses remarques
préliminaires. M. le député.
M. Roger Paré
M. Paré: Merci, M. le Président. Je voudrais tout
d'abord remercier toutes les personnes et tous les groupes qui ont pris le
temps de préparer un mémoire et qui, cette semaine, prendront
aussi le temps de venir en discuter avec nous, et ce, en pleine période
estivale.
Espérons que le ministre, malgré sa volonté
très clairement exprimée de lever le moratoire, puisque ça
s'intitule "une décision qui s'impose", tiendra compte des craintes, des
suggestions et des objections contenues dans les mémoires et, par le
fait même, acceptera de retirer son projet, tel que proposé, et
ce, à la demande de presque tous les intervenants. Quant à nous,
nous dénonçons la façon de procéder du ministre sur
un sujet aussi important que la levée du moratoire.
Rappelons tout d'abord que c'est le 19 juin 1986 que le ministre a
annoncé, d'une façon qui semblait définitive, la
levée du moratoire pour le 1er juillet 1987, et ce, sans consultation -
plusieurs groupes l'ont exprimé d'ailleurs - ce qui a eu comme effet de
provoquer plus de reprises de possession et d'évacuations pour
réparations majeures.
Le ministre lui-même le reconnaît dans son document à
la page 31 où il est spécifié qu'on observe un
accroissement des demandes produites à la régie, de 532 en 1985
à 844 en 1986. Après avoir accepté la tenue d'une
commission parlementaire, le ministre l'a reportée à deux
occasions. D'abord prévue pour février, elle a été
reportée en mai et, maintenant, elle est reportée en plein
été au mois d'août.
En plus, voilà que le ministre limite le temps d'intervention de
chacun des intervenants à 45 minutes, alors que, d'habitude et de
coutume, on se donne une heure d'échanges avec les intervenants quand on
considère que le sujet est très important. Mais ce qui est pire
encore - cela a été rapporté par plusieurs intervenants
aussi - on ne retrouve dans ce document aucune étude complète,
aucune prévision sur les conséquences possibles et probables pour
les locataires de Montréal et de Québec spécialement.
Cela, le ministre le reconnaît lui-même à la page 57
de son mémoire où c'est cité - je vous le lis - : "Si le
suivi du rythme de conversion ou l'arrivée de problèmes
liés è des conjonctures économiques et sociales devaient
révéler des tensions dans certains segments du marché
locatif, il serait possible d'intervenir rapidement afin de limiter ou
d'interdire la conversion dans ces secteurs". Rien de précis, mesures
vagues.
Encore une fois, on préfère dire qu'on interviendra pour
corriger au lieu de prévenir. Nous savons déjà ce que
donnent des gestes posés trop rapidement sans évaluation
précise des conséquences. On n'a qu'à se rappeler la
Raffinerie de sucre du Québec; on n'a qu'à se rappeler Quebecair
où le ministre responsable a reconnu lui-même que, dans ce
dossier, le gouvernement s'était fait passer un sapin.
M. le Président, je vous dis qu'on ne peut pas se faire passer un
sapin en habitation, parce que trop de gens sont menacés, et parmi les
plus démunis de la société. C'est vrai qu'on a
déplacé beaucoup de gens dans le passé pour des routes ou
pour des édifices importants dans les centres-villes, mais on
déplaçait tout le
monde parce qu'il fallait moderniser, disait-on. Le prochain grand
déplacement que l'on propose est d'évincer des gens pour les
remplacer par d'autres personnes qui ont plus de moyens. C'est
inacceptable.
Dans le document, on retrouve deux objectifs contradictoires.
Premièrement, on parle d'accès à la
propriété. Deuxièmement, on parle de la protection du
stock de logements locatifs. C'est totalement impossible. On ne peut pas en
même temps manger le gâteau et le garder. L'accès à
la propriété par la levée du moratoire s'effectuera au
détriment des locataires, c'est-à-dire en diminuant le stock de
logements locatifs. C'est, précisément, qu'on permet à des
gens qui ont les moyens de prendre la place de gens démunis qui n'ont
pas les moyens ou la volonté de devenir propriétaires.
La levée du moratoire sur la conversion des immeubles locatifs en
copropriété divise est, à mon avis, un sujet beaucoup trop
important pour être traité isolément. II s'agit d'un
élément majeur d'une véritable politique du logement.
Cette décision peut toucher près de 80 % de la population de
Montréal et plus de 50 % de la population de Québec. Pourtant, le
ministre nous avait promis une politique de l'habitation au début du
printemps. Rien n'a été fait. À moins que le ministre nous
ait déjà annoncé sans tambour ni trompette et,
évidemment sans consultation, sa véritable politique de
l'habitation. On pouvait lire dans le journal Habitabec, le 25 avril 1986:
Depuis que le Parti libéral du Québec a été
porté au pouvoir, on s'applique à modifier le rôle de
l'État, que l'on veut beaucoup moins interventionniste. En somme, par le
biais de la déréglementation, on veut redonner à
l'entreprise privée la place qui lui revient sur le marché de la
concurrence, de préciser l'ancien notaire.
Ainsi, une à une, des mesures ont été prises.
Mesures plutôt discriminatoires face aux locataires et surtout face aux
plus démunis. Je vais citer quelques prises de décision qui ont
été annoncées. Premièrement, l'abolition du
ministère et ce, malgré les objections du milieu. L'abolition du
programme d'accès à la propriété. On parle
précisément d'accès à la propriété
encore aujourd'hui. L'annonce de la fin progressive de l'aide aux groupes de
ressources techniques. La diminution des budgets attribués aux
coopératives d'habitation et aux organismes sans but lucratif. La
diminution dans la construction de logements HLM.
M. le ministre, vous pourrez intervenir un peu plus tard
là-dessus. On a les chiffres. Les gens de la salle pourront enfin savoir
qui dit vrai, M. le ministre. Je vous en prie.
Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous
plalti M. le ministre, s'il vous plaît! Vous avez eu vos 18 minutes pour
prendre la parole. Je vous demande de respecter le temps de parole du
député de Shefford. Vous aurez d'autres moments, par la suite,
pour intervenir. Et on vous reconnaîtra.
M. Bourbeau: Je comprends, M. le Président, mais la
vérité a quand même ses droits.
Le Président (M. Rochefort): M. le ministre, s'il vous
plaît! M. le député, je vous demande de poursuivre.
M. Paré: Je veux seulement rappeler au ministre que la
quantité des HLM bâtie en 1986 est inférieure a celle
construite en 1985.
M. Bourbeau: Elle est supérieure. La vérité
a ses droits, M. le Président.
M. Paré: De plus...
Le Président (M. Rochefort): M. le ministre, je vous
demande une fois de plus de demander la parole et on vous reconnaîtra en
temps et lieu. Vous pourrez ainsi vous exprimer comme vous avez pu le faire
tantôt. Mais le droit de parole appartient maintenant, tel que
décidé par les membres de la commission, lors d'une
réunion à laquelle vous avez participé de même
qu'aux décisions auxquelles vous avez participé, au
député de Shefford. Je vous demande de le laisser
s'exécuter, comme l'ensemble des membres de la commission vous ont
permis de le faire tantôt. M. le député de Shefford.
M. Bourbeau: M. le Président, je voudrais dire quelques
mots sur votre question de règlement. Je veux bien respecter totalement
le droit de parole du député de Shefford et je vais le faire,
comme il l'a fait d'ailleurs dans mon cas. Cependant, je ne peux pas accepter
que le député de Shefford dise des choses qui sont totalement
contraires à la vérité.
Le Président (M. Rochefort): M. le ministre...
M. Bourbeau: Je m'élèverai à chaque
fois.
Le Président (M. Rochefort): M. le ministre, s'il vous
plaît! Vous savez très bien qu'il ne s'agit pas d'une question de
règlement. Votre expérience de parlementaire vous l'a appris. Je
vous demande, M. le ministre, de respecter le droit de parole du
député de Shefford et l'intervention sur le règlement que
j'ai faite. M. le député de Shefford.
M. Bourbeau: M. le Président...
Le Président (M. Rochefort): Non, M. le ministre.
J'espère qu'on ne fera pas une commission sur les procédures, ce
matin. M. le député de Shefford, s'il vous plaît! (10 h
15)
M. Paré: Merci, M. le Président. Ce n'est pas la
première fois que le ministre m'interrompt là-dessus. Je me
souviens, lors d'une autre commission, sur le programme PARCQ, le ministre
disait qu'on avait pu investir davantage en 1986 alors que, lorsque les budgets
ont été amenés et qu'on a pu étudier les
crédits, aucun sou n'avait été dépensé.
Je reviens maintenant aux décisions du ministre depuis qu'il a
décidé qu'il y avait moins d'implications dans le logement au
Québec par le ministère qui n'existe plus, soit dit en passant.
On annonce aussi une nouvelle réglementation pour raccourcir la liste
d'attente dans les HLM et cela, pour mieux cacher les besoins et la
misère qu'il y a en habitation au Québec. Il y a eu aussi la
disparition du programme Loginove et son remplacement par le nouveau programme
PARCQ qui est beaucoup moins généreux et difficilement
applicable. Et maintenant, on annonce la levée du moratoire. On peut
continuer. Hier, les jeunes libéraux en congrès ont voté
contre une résolution proposant l'augmentation de l'aide aux logements
sociaux.
M. le Président, de ce côté-ci, nous sommes en
accord pour permettre au plus grand nombre possible de Québécois
d'accéder à la propriété. D'ailleurs, c'est sous
l'ancien gouvernement du Parti québécois et grâce aux
programmes qu'on avait élaborés qui, malheureusement, ont tous
été abolis que, pour la première fois, une majorité
de Québécois pouvait se dire propriétaire de son logement
au Québec. Nous considérons aussi que la
copropriété est une très bonne formule qui, d'ailleurs,
est de plus en plus utilisée. Je vous rappellerai ainsi que près
de 24 % des logements multiples commencés, donc en construction au cours
des mois de janvier et février 1987 dans la région de
Montréal, étaient des copropriétés. Le ministre
espère que la levée du moratoire permettra au marché
immobilier d'être inondé de logements à vendre pour faire
baisser les prix. En même temps, il croit qu'à peine 1 % du stock
de logements locatifs sera converti en cinq ans. À mon avis, le ministre
n'est pas réaliste. Il ne tient pas compte de ce qui se passe
réellement. Si seulement 1 % se transforme, les prix seront plutôt
à la hausse. Nous savons très bien que le pourcentage sera
beaucoup plus élevé dans les quartiers centraux des villes de
Montréal et Québec et que les prix iront, de toute façon,
en augmentant. Il s'agit de constater l'augmentation des prix des maisons
neuves et des maisons usagées. C'est plus de 20 % depuis un an
malgré une augmentation considérable du nombre de logements
disponibles. Nous n'avons qu'è regarder dans les quartiers centraux de
Montréal et Québec à quel prix, en proportion, se vendent
présentement les maisons usagées. C'est loin d'être ce que
le ministre prétend et ce, malgré le moratoire.
En ce qui concerne le droit de préemption proposé, il sera
totalement impraticable. Premièrement, le délai est trop court.
Deuxièmement, il n'y a aucun programme d'aide. Le ministre peut bien
laisser une porte ouverte à la possibilité qu'il y en ait de
nouveau, sauf que la résolution d'hier nous laisse plutôt
inquiets. On sait aussi que la très très grande majorité
des locataires de Montréal ne veut pas ou ne peut pas devenir
propriétaire. Tel que proposé en plus dans le dossier, on sait
très bien que la propriété collective, c'est-à-dire
par les biais de coopératives d'habitation ou des organismes sans but
lucratif, devient impossible. Donc, ce secteur deviendra de plus en plus
marginal.
Le maintien dans les lieux pour une période illimitée est
une belle théorie, mais que la pratique aura tôt fait de
contourner. Qui voudra acheter un logement? Un locataire. Un locataire qui
voudra accéder à la propriété, mais pour y
résider, ou un spéculateur qui veut louer, avec évidemment
plus de profit. Donc, d'une façon ou d'une autre, le locataire en place
devra ou bien quitter son loyer ou subir une augmentation considérable
des coûts par les moyens déjà connus et qui pourront
continuer à s'appliquer malgré les propositions contenues dans le
document du ministre.
Nous sommes convaincus, de ce côté-ci que la levée
du moratoire amènera une hausse de loyer importante pour les locataires
utilisant leur droit au maintien dans les lieux. Premièrement, a cause
d'une augmentation considérable des taxes et aussi à cause des
coûts qui seront reliés à la transformation et aux frais de
rénovation, puisque cela sera toujours permis soit avant l'avis
d'intention ou soit lorsqu'une majorité des logements sera
possédée par des copropriétaires. De plus, ce
phénomène provoquera une hausse généralisée
des loyers dans les quartiers centraux de Montréal et de Québec.
Je crois que les députés qui sont ici et qui représentent
ces secteurs de Montréal sont en mesure de le confirmer.
M. le Président, à cause du manque d'étude
complète, a cause de l'absence de programmes d'aide d'accès
à la propriété et ce, autant sur une base individuelle que
collective, à cause d'une protection insuffisante et d'une protection
réelle pour les locataires, è cause de l'absence de
précision sur le contrôle qui suivra et, a cause du manque d'une
véritable politique
globale de l'habitation et du logement au Québec, nous croyons
qu'une décision s'impose: maintenir le moratoire et le rendre
efficace.
Je voudrais conclure en disant qu'on trouverait très dommage que,
dans le cadre de l'Année internationale du logement des sans-abri, on
vienne semer la crainte et l'incertitude dans un secteur qui fonctionne
passablement bien et ce, pour environ 80 % de la population de Montréal
et 50 % de celle de la ville de Québec. Comment ce gouvernement peut-il
parler de sa détermination d'élaborer une politique de la famille
et, en même temps, permettre de déloger les gens au profit de ta
spéculation? M. le Président, je réitère que nous
demandions au ministre de maintenir le moratoire et de le rendre efficace.
Merci.
Auditions
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie, M. le
député de Shefford. L'étape des remarques
préliminaires étant complétée, j'inviterais sans
plus tarder le premier groupe prévu à notre horaire à se
présenter devant nous. J'appelle donc les représentants de la
ville de Montréal à prendre place à la table des
témoins.
Bienvenue, M. Fainstat, M. Gardiner et M. Lavallée. Je vous
rappelle que vous avez une période de 30 minutes pour nous
présenter le mémoire des autorités montréalaises.
Par la suite, une période d'échanges de 30 minutes avec les
membres du parti ministériel et une de 30 minutes avec les membres du
parti de l'Opposition vous permettront de clarifier un certain nombre de points
ou de répondre à des questions précises touchant d'autres
aspects du dossier que soulèveraient des membres de la commission. Je
vous invite donc immédiatement à nous faire la
présentation de votre mémoire.
M. Fainstat (Michael): M. le Président de la commission,
M. le ministre, M. le critique de l'Opposition, messieurs et mesdames membres
de la commission parlementaire de l'aménagement et des
équipements, je souhaite premièrement la bienvenue à
Montréal, la métropole du Québec, à tous les
membres de la commission parlementaire. Je voudrais remercier le ministre
d'avoir convoqué ces audiences sur la levée du moratoire, ici
à Montréal, ce qui facilite grandement la présence d'un
plus grand nombre d'intervenants.
Je vous présente M. John Gardiner, à ma gauche, membre du
comité exécutif, responsable du dossier de l'habitation et du
développement urbain, et le conseiller André Lavallée,
président de la Commission de l'aménagement, de l'habitation et
des travaux publics du conseil de la ville de Montréal. Je cède
la parole à M. Gardiner.
Ville de Montréal
M. Gardiner (John): M. le Président, membres de la
commission, le libre exercice de la propriété est une valeur bien
ancrée au Québec. Par ailleurs, la protection des
intérêts des citoyens vulnérables en raison de leur
condition économique ou physique est un objectif démocratique
endossé par la population québécoise.
Ces choix de société sont parfois difficilement
réconciliables et la levée du moratoire en est un exemple.
Certains militent en faveur d'une levée du moratoire afin, disent-ils,
de consacrer le droit au libre exercice de la propriété. Les
autres leur répondent que leur logement n'est pas à vendre.
D'autres, enfin, continuent à profiter des failles de la loi actuelle et
procèdent à des évictions déguisées. C'est
tout à fait réel.
Quoique tout le monde convienne que la situation ne peut plus durer, la
difficulté de faire consensus sur la levée du moratoire est telle
qu'il faut une bonne dose de courage politique pour s'y consacrer.
En ce sens, nous tenons à remercier le ministre responsable de
l'Habitation, M. Bourbeau, de s'être compromis publiquement en faisant
une proposition qui, c'est certain, sera analysée par tous les
intéressés dont la ville de Montréal.
La levée du moratoire est incontestablement discutée et
discutable et la réflexion de M. Bourbeau, telle qu'elle apparaît
dans le document de proposition du gouvernement, constitue une contribution
significative en vue de l'adoption éventuelle d'une politique claire en
matière de conversion d'immeubles en copropriété
divise.
Convenons dès le départ que la fausse
étanchéité du régime actuel en rend le prolongement
inacceptable, que l'on soit locataire ou propriétaire.
Le moratoire est, par définition, une mesure ponctuelle et
temporaire. Il ne devrait être qu'une parenthèse permettant au
gouvernement et aux différents intervenants du milieu de faire le choix
d'une politique permanente en matière de conversion des immeubles en
copropriété divise.
Il y a maintenant près de douze ans que le Québec
réfléchit au rythme des fluctuations du marché immobilier.
Une décision doit être prise.
L'incertitude que nourrit l'existence du moratoire, jointe aux
anticipations innombrables qui découlent de l'annonce de sa levée
prochaine, et cela depuis juin 1986, au Sommet économique de
Montréal, ne laisse d'autre choix a l'État que d'agir. Pourtant,
il faut se garder d'improviser, compte tenu de la nature du dossier.
Dans ce contexte, la priorité consiste indiscutablement à
apporter des modifications au Code civil. Il faut éliminer les failles
qui
sont les voies de contournement, telle la reprise de possession dans le
cas des bâtiments de quatre logements et moins, les évictions
faites è l'occasion de travaux majeurs et la portée du mot
"logement", galvaudé par les cours depuis quelques années
maintenant.
De ce fait, le resserrement du cadre légal afin d'assurer la
protection complète des locataires, reçoit notre assentiment.
Nous sommes d'autant plus heureux que M. Bourbeau en ait fait l'un de
ses postulats de base dans le cadre de sa réflexion.
Le deuxième postulat du ministre, visant à favoriser
l'accès à la propriété, nous paraît, par
ailleurs, devoir être remis en question. Quoique l'intention soit louable
et que notre administration veuille, elle aussi, permettre au plus grand nombre
de citoyens et citoyennes de pouvoir contrôler leur milieu de vie, il
n'est pas évident que le simple fait de lever le moratoire
accroîtra un tant soit peu de façon significative, l'accès
à la propriété.
Tous conviendront que l'accès à la propriété
exige une capacité financière de base. Or, les statistiques
prouvent qu'une partie importante des locataires de Montréal n'ont pas
cette capacité minimale.
A ce titre, mentionnons qu'à Montréal, 326 000
ménages sont locataires, soit 32 % du total des locataires de la
province de Québec, qu'ils représentent, selon les
dernières données disponibles, 78 % de l'ensemble des
ménages montréalais, que de ceux-là, près de 90 000
ménages reçoivent de l'aide sociale.
Enfin, près de 300 000 personnes habitant Montréal vivent
en-dessous du seuil de la pauvreté.
À cette réalité s'ajoute le fait que 72 000
personnes âgées de 65 ans et plus, soit 13 % de la population
montréalaise, vivent principalement de leur pension gouvernementale et
que près de 45 000 familles monoparentales résident à
Montréal.
Cette réalité montréalaise guide les choix de notre
administration et nous croyons que la décision du gouvernement, dans le
cadre de la levée du moratoire, doit en tenir compte. Deux raisons nous
motivent; d'une part, une vision à plus long terme nous amène
à croire que les particularités montréalaises n'iront pas
en s'atténuant; d'autre part, l'impact de la levée du moratoire
se répercutera principalement dans les grands centres urbains dont
Montréal. (10 h 30)
En outre, la levée du moratoire est, quant à nous, un
prétexte qui met en veilleuse la principale question qu'il faut se
poser: oui ou non, voulons-nous permettre partout, pour tout immeuble et en
tout temps, la conversion d'immeubles en copropriété divise au
Québec?
Le document ministériel est muet sur cette question. Il semble,
en effet, que pour le gouvernement, l'accès à la
copropriété divise sait la conséquence directe de la
levée du moratoire. Il nous apparaît que ce raisonnement est
fondé sur de mauvaises prémisses, puisque le moratoire est
essentiellement un carcan juridique, alors que la copropriété
divise, elle, est un mode de propriété.
Plusieurs considérations ont contribué à notre
réflexion. Ainsi, comme pour nous la conversion n'est pas en soi un
programme d'accès à la propriété et que, de plus,
les particularités socio-économiques des Montréalais et
Montréalaises nécessitent une protection adéquate pour les
locataires, la conversion en copropriété n'aura pas, dans les
faits, l'impact positif que le ministre anticipe.
Il importe, de notre point de vue, d'éliminer dans un premier
temps ce carcan juridique. Dans un deuxième temps et concurremment, il
faudrait établir les règles qui encadreront la diversification
des choix favorisant véritablement l'accès à la
propriété.
À la lumière de ces considérations, nous
répondons qu'il ne faut pas ouvrir partout, en tout temps et pour tout
type de bâtiment, la possibilité de convertir en
copriété divise. Il faut plutôt y aller par exception.
Par le biais du présent mémoire, Montréal veut
contribuer positivement à la mise en place des mesures préalables
à la conversion des immeubles en copropriété divise, le
but avoué étant de donner priorité à la protection
des locataires.
D'entrée de jeu, il nous faut expliquer que notre
présentation se fera en deux temps. La première étape
consiste à articuler nos propositions visant la conversion
éventuelle de certains bâtiments.
En second lieu, nous nous attarderons plus spécifiquement sur le
document de travail déposé par le ministre. L'analyse est
ponctuée de recommandations et même de questions.
Comme chacun le sait, la fébrilité du marché
immobilier au cours des dernières années rend presque impossible
l'établissement d'un portrait exact de la situation qui prévaut
è Montréal.
Sans avoir pu décortiquer toutes les composantes
socio-démographiques du logement à Montréal, nous savons
qu'il faut éviter que les interventions publiques accentuent le rythme
des bouleversements qui s'y remarquent: évictions, spéculations,
incertitudes.
Ce souci nous a d'ailleurs largement dicté notre choix de ne pas
favoriser l'ouverture généralisée du marché de la
conversion en copropriété divise. Sans nier que le projet
ministériel soit intéressant, nous croyons qu'il est susceptible
de créer
une psychose de la conversion qui ne ferait qu'envenimer la
situation.
Au-delà des statistiques et des projections, il faut admettre que
le comportement du marché immobilier repose sur une mentalité
collective qui est aussi insondable que préoccupante. Dans ce contexte,
nous appréhendons, à la lumière de certaines
expériences étrangères et des pronostics de plusieurs, les
conséquences de l'ouverture généralisée de ce
nouveau marché immobilier.
Nous sommes convaincus que le fait de lever le moratoire, tel
qu'indiqué par les propositions ministérielles,
n'entraînera pas un plus large accès à la
propriété. En effet, la levée du moratoire ne rend pas les
locataires plus riches, alors que pour acheter un condominium, il faut avoir
les moyens financiers requis.
Le scénario du gouvernement qui veut que l'accès à
ia copropriété divise ait pour effet de permettre à
plusieurs locataires d'accéder à la propriété nous
apparaît peu vraisemblable.
L'accès à la propriété est essentiellement
une question de capacité financière. Or, les conditions
socio-économiques de la population montréalaise démontre
clairement que les locataires optent souvent pour cette forme de logement en
raison de la fragilité de leur situation financière. Si l'on
décide d'être propriétaire, il n'est pas certain que l'on
soit toujours locataire par choix.
De ce fait, si le gouvernement veut véritablement favoriser
l'accès à la propriété, que l'on envisage les
constructions neuves ou existantes, il devrait faire davantage. Pour être
crédible, il doit mettre en place une série de programmes de
soutien financier visant à permettre au plus grand nombre
d'accéder à la propriété.
Ces réflexions nous incitent à penser que le simple fait
de permettre la copropriété divise n'aura pas de
conséquences véritables quant à un meilleur accès
è la propriété.
Nous croyons que la réaction des propriétaires serait
à l'inverse de celle des locataires. En effet, nous prévoyons que
dès que les propriétaires auront compris les incidences de la
proposition ministérielle, toujours dans l'hypothèse où
elle serait adoptée en son entier, ils concluront qu'il est de leur
intérêt de convertir rapidement, quitte à attendre deux ou
trois ans avant de mettre en vente les unités subdivisées.
Ainsi, comme le droit au maintien illimité dans les lieux ne vaut
que pour les locataires de première génération, alors que
près de 90 000 ménages de l'île de Montréal
déménagent annuellement, on verra que le temps servira les
propriétaires prévoyants qui convertiront rapidement.
Dans un tel cas, l'on risque d'être confronté, à
moyen terme, à un excédent d'unités converties qui devra
demeurer sur le marché locatif. Les nouveaux locataires de ces
unités converties ne jouiront d'aucune mesure de protection
particulière.
De plus, le loyer de ces unités augmentera puisque chaque
unité sera évaluée distinctement. Or, la preuve est faite
que le total de l'évaluation de chacune des unités est
supérieur à l'évaluation de l'immeuble faite
globalement.
Nous ne voulons pas que la levée de l'embargo juridique
crée chez les propriétaires et les investisseurs un mirage
d'avantages financiers qui dépasse les capacités des
acheteurs.
Nous ne voulons pas non plus que, sur la foi de telles anticipations,
plusieurs propriétaires convertissent leur immeuble et plongent de ce
fait un grand nombre de locataires dans l'incertitude, quelles que soient les
mesures de protection disponibles. Dans un tel contexte, les
propriétaires convertisseurs pourraient avoir la tentation de harceler
les locataires. Nous reviendrons sur ce concept.
Bref, afin de ne pas ouvrir à l'avenir le soin de nous donner
raison, dans l'hypothèse d'une application de l'ensemble des
propositions ministérielles, il faut envisager la possibilité de
permettre que la conversion en copropriété divise soit
globalement interdite avec, en corollaire, des mesures d'exception qui
permettront la conversion à certaines conditions. Pour nous cela
implique le retrait du projet de loi tel que présenté.
Sans avoir articulé notre proposition dans toute sa
mécanique, il importe d'illustrer le cadre juridique d'une telle
politique de conversion.
Dans un premier temps, le moratoire devrait être
relégué aux oubliettes. La loi devrait être modifiée
pour interdire la conversion des immeubles en copropriété divise.
Cette interdiction serait pondérée par des mesures d'exception
qui permettraient, dans certains cas, d'aller à l'encontre de la
règle générale. Pour ce faire, la loi ou l'un de ses
règlements énuméreraient une série de
critères dont le propriétaire devrait faire la preuve avant de
pouvoir convertir.
Les mesures énumérées seraient limitatives mais pas
nécessairement toutes cumulatives. Ainsi, l'on peut imaginer qu'il
faudrait que deux ou trois conditions préalables soient acquises afin
que la conversion soit permise. Les critères et leur nombre pourraient
varier selon que la conversion se fasse dans un quartier ou pour un type
d'immeuble. À titre d'exemple, soulignons le cas où une
majorité significative de locataires habitant un immeuble, désire
se porter acquéreure. Dans un tel cas, la conversion devient
opportune.
Les municipalités seraient, en outre, investies du premier droit
de regard sur l'adéquation des critères préalables
à la
conversion. Ainsi, l'on pourrait exiger du propriétaire
requérant qu'il obtienne de la municipalité dans laquelle
l'immeuble est sis un certificat de convertibilité. Cette
démarche, pour être efficace, devrait précéder le
recours à la Régie du logement dont nous reconnaissons
d'emblée la compétence en de telles matières. Les
municipalités devraient émettre le certificat ou remettre au
requérant un écrit stipulant son refus.
De plus, pour les municipalités qui ne désirent pas
intervenir, elles devraient avoir l'obligation de le signifier par écrit
à chaque requérant. Cet avis de non-intervention serait
assimilé à l'octroi du certificat. Par la suite et dans la mesure
où le requérant désire continuer la conversion, il devrait
se présenter à la régie qu'il ait ou non obtenu le
certificat.
Dans le cas où le requérant demande à la
régie d'enregistrer la conversion de son immeuble alors qu'il n'a pas
obtenu le certificat municipal, la régie devrait signifier copie de la
requête è la ville qui pourrait intervenir pour faire la preuve de
ces prétentions. La loi reconnaîtrait l'intérêt
juridique de la ville.
Voilà brièvement le cadre juridique de notre proposition
qui identifie le rôle que les municipalités devraient jouer lors
de la subdivision d'un immeuble en copropriété.
Évidemment, quoique nous soyons silencieux sur le rôle des
locataires à l'intérieur d'une telle démarche, il est
indiscutable que nous prévoyons que tous les locataires concernés
puissent se faire entendre.
Nous, nous proposons maintenant d'analyser les propositions
gouvernementales, telles qu'elles sont formulées dans le document
Lever le moratoire; une décision qui s'impose.
Notre cheminement respecte celui qui fut suivi dans le document de
travail déposé; conséquemment, nous allons aborder, dans
l'ordre, chacune des mesures d'encadrement proposées.
Dès qu'il fut question de lever le moratoire, la
préoccupation de M. Bourbeau a toujours été clairement
exprimée: prévoir des mesures de protection pour l'ensemble des
locataires. Son document est le reflet fidèle de cette
préoccupation puisqu'il propose la mise en place d'une série de
mesures dont la plus populaire est certes le maintien dans les lieux pour une
période illimitée.
Revenons sur les deux points que nous avons abordés en
introduction, soit la nécessité d'empêcher que, par le
biais des réparations majeures autres qu'urgentes, et par la reprise de
possession, certains propriétaires réussissent à
évincer les locataires. Ces pratiques malheureuses trop souvent
utilisées sont inacceptables. Nous sommes d'ailleurs fort heureux de
constater que M. Bourbeau s'apprête à intervenir
législativement afin d'empêcher qu'elles ne se perpétuent.
Nous n'insisterons jamais assez sur l'urgence d'agir, même si la mise en
place de la politique de conversion des immeubles en copropriété
divise n'est pas encore achevée.
Puisque l'encadrement des réparations majeures vise è
protéger tous les types de locataires quelles que soient les
caractéristiques juridiques attachées à leur logement, son
adoption ne doit pas être tributaire de la levée du moratoire.
Les chiffres plaident clairement en faveur d'une telle intervention
immédiate.
En effet, durant les cinq premiers mois de cette année, il y a eu
à la Régie du logement pour l'île de Montréal, 644
demandes relatives à l'article 1653.1 du Code civil.
Cela représente une augmentation de 61 % par rapport à la
même période l'année dernière. Presque la
moitié de ces demandes provient du secteur centre de l'île. Par
ailleurs, depuis 1981, le nombre de demandes a plus que doublé au
Québec, et celles-ci se concentrent de plus en plus sur l'île de
Montréal; 83 % en 1984, 92 % en 1986.
Si ces données ne constituent pas un inventaire exhaustif de
toutes les évictions, elles représentent néanmoins une
indication de la situation à laquelle sont confrontés certains
locataires.
Nommons les trois mesures envisagées par le ministre, afin de
pallier la situation des évacuations temporaires de locataires en raison
de réparations majeures, qui nous semblent satisfaisantes: le
prolongement du délai d'avis qui passe d'un è trois mois;
l'obligation faite au propriétaire - locateur, convertisseur ou indivis
- de verser une indemnité au locataire évacué
temporairement; l'extension des pouvoirs de la Régie du logement lui
permettant de condamner les contrevenants des dommages-intérêts
exemplaires.
Toutefois, nous croyons que tout propriétaire devrait être
légalement obligé, lorsqu'il n'y a pas d'entente possible entre
lui et son locataire, de présenter un avis de réparations ou
d'améliorations majeures autres qu'urgentes à la Régie du
logement dans le but d'obtenir l'autorisation d'évincer le locataire. En
d'autres termes, ce que nous proposons, c'est tout simplement le renversement
de la démarche qui, jusqu'à présent, relevait de
l'initiative du locataire et pour laquelle il y a actuellement des
précédents dans la loi de la régie en ce qui concerne le
coût d'occupation.
Cette mesure offre l'avantage de saisir la Régie du logement du
litige en lui permettant du coup de contrôler les autres mesures qui nous
sont proposées. (10 h 45)
Par ailleurs, nous croyons qu'il y aura
lieu d'apporter quelques précisions à l'égard du
recours déjà reconnu aux locataires de loger une plainte à
la régie dans la mesure où ils estiment abusifs les travaux
d'améliorations qui leur sont proposés. Nous aimerions voir
préciser d'une manière plus concrète les critères
à partir desquels il serait possible à la Régie du
logement de statuer en pareil cas.
Il nous apparaît essentiel que, dans la présente
démarche, la protection la plus complète des locataires soit la
prémisse de base. Le droit au maintien dans les lieux pour une
période illimitée rejoint tout è fait nos propres
préoccupations. Les mesures énumérées
ci-après et avec lesquelles nous sommes d'accord ont l'avantage de
couvrir à la fois la copropriété divise et indivise, ce
qui, dans les faits, est un élargissement de la protection actuelle des
locataires, entre autres: l'obligation pour le propriétaire
convertisseur d'émettre un avis d'intention de convertir; l'interdiction
au propriétaire convertisseur de prendre possession d'un logement
à partir du moment où l'avis d'intention est émis;
l'interdiction à l'acheteur d'un logement converti en
copropriété de reprendre possession du logement et l'interdiction
au propriétaire d'une partie indivise d'un immeuble locatif de reprendre
possession des logements, quel que soit le nombre de logements que comporte
l'immeuble. Cela s'applique, bien sûr, à partir du deuxième
copropriétaire.
Nous aimerions également attirer votre attention sur un
problème encore plus préoccupant: les locataires de
deuxième génération. Si les modalités
proposées améliorent considérablement la protection des
locataires d'un bâtiment faisant l'objet d'une demande d'autorisation de
conversion, elles négligent par ailleurs la protection des
ménages qui loueront des logements une fois l'avis de conversion
émis. Aucune disposition ne peut empêcher un propriétaire
de convertir son immeuble selon les exigences prévues et d'attendre,
avant de procéder à la mise en vente des unités, que le
taux de roulement normal fasse en sorte que les locataires de seconde
génération deviennent majoritaires. Or, nous avons la conviction
que bon nombre de propriétaires suivront ce scénario.
De ce fait, risquons-nous de nous retrouver d'ici peu dans la situation
conflictuelle qui prévalait il y a près de douze ans?
Au surplus, un bâtiment dont la conversion est autorisée et
dans lequel se retrouve une majorité de locataires de deuxième
génération aura une valeur marchande beaucoup plus grande qu'un
bâtiment occupé principalement par des locataires de
première génération.
Le document de proposition fait référence à ce
phénomène lorsqu'il est fait mention en page 53 - et je cite:
"À la suite d'une conversion, l'évaluation municipale pourrait
augmenter et, par conséquent, la facture des taxes être
appelée à grimper. Cette hausse de l'évaluation municipale
pourrait affecter le locataire désirant acheter son logement. Par
contre, s'il arrivait que plusieurs logements de l'immeuble converti continuent
d'être occupés par des locataires ayant droit au maintien dans les
lieux pour une période illimitée, cela pourrait avoir un impact
à la baisse sur la valeur de l'immeuble. Dans les faits, ce dernier
conserverait en grande partie son statut locatif. ", et j'ajoute, même
converti.
Le ministre propose que nous portions une attention particulière
à l'application des méthodes d'évaluation foncière,
de façon à tenir compte de l'impact sur la valeur réelle
de l'immeuble du droit au maintien dans les lieux.
Risquons-nous de voir apparaître un concept d'évaluation
foncière variée à plus ou moins longue
échéance? Cette perspective, quoique étonnante
aujourd'hui, pourrait nous séduire dans un autre contexte. Une
protection adéquate des locataires des générations
subséquentes oblige à imaginer des scénarios de solutions
additionnels, ce que l'on ne retrouve pas dans la proposition
ministérielle.
Plusieurs propriétaires seront tentés d'utiliser le
harcèlement à l'endroit des locataires pour contourner la
protection que représente le maintien dans les lieux. Plus les
locataires sont protégés, plus il est important de
prévenir le harcèlement. Or, c'est un mandat colossal que de
tenter d'imaginer des mécanismes accessibles qui atteindront
véritablement le but visé. Nous admettons d'emblée qu'il
n'y a pas de solution miracle et que les mesures proposées par le
ministre en valent bien d'autres. Toutefois, certaines de ces mesures nous
causent un problème, alors que d'autres gagneraient à être
resserrées pour être efficaces.
Il faut rappeler que le harcèlement est l'épée de
Damoclès qui pend au-dessus de la tête de tous les locataires qui
se prévaudront de leur droit au maintien dans les lieux. D'ailleurs,
pendant les audiences publiques tenues à Montréal aux mois de mai
et juin par la Commission de l'aménagement, de l'habitation et des
travaux publics du conseil municipal, le harcèlement est ressorti comme
la première préoccupation des locataires, principalement chez les
personnes âgées. Afin que les mesures proposées pour
éviter le harcèlement soient des outils que les locataires
puissent utiliser facilement, il faut qu'elles soient le moins
"judiciarisées" possible. Partant de cet objectif, il demeure qu'il faut
prévoir le cas où seuls les tribunaux pourront intervenir.
Le ministre propose que le locataire
harcelé puisse entreprendre, par le biais d'une
dénonciation, une poursuite pénale à l'endroit du
locateur. L'idée est intéressante, mais nous pensons que le
processus pénal est trop souvent éprouvant pour les
dénonciateurs qui doivent assumer le fardeau de la preuve. Il faudrait,
au minimum, prévoir des cas où, a la suite de la preuve faite de
certains comportements d'un locateur, le fardeau de la preuve soit
renversé. Quoique nous n'ayons pas identifié ces comportements,
nous croyons que la chose est faisable. Ces renversements de fardeau
soulageraient les locataires du devoir de constituer une preuve juridiquement
recevable et permettrait en plus de rendre la mesure moins rébarbative.
Dans le cas contraire, la justice pénale étant ce qu'elle est,
peu de locataires victimes de harcèlement auront le courage d'affronter
le processus judiciaire.
Quant à l'exigence qui est faite au propriétaire
convertisseur d'envoyer au locataire un avis de 24 heures visant à
l'informer de toute visite du logement par des professionnels pour fins
d'expertise dans le choix de la conversion, nous agréons.
Mais, pour assurer que les visiteurs soient véritablement des
professionnels dont les services sont requis dans le cadre de la conversion,
nous suggérons que l'avis contienne le nom de l'expert ou de la firme
qui l'emploie. C'est là, à notre avis, la seule façon de
permettre au locataire de vérifier l'identité du visiteur et de
comprendre que le mandat de ce dernier est lié è la
conversion.
En outre, l'on comprend de cette proposition que seules les visites
effectuées dans le cadre de la conversion seront autorisées et
que, dès que la conversion sera effectuée, aucune autre visite ne
sera permise.
En ce qui concerne le cas des personnes âgées ou
handicapées, nous retenons l'idée d'un guichet spécial.
Nous présumons que la notion de guichet est entendu dans un cadre plus
large, incluant notamment un service téléphonique
particularisé. L'idée de ce guichet pour les personnes
âgées ou handicapées est souhaitable, mais ce qu'il faut
surtout pour aider ces personnes, ainsi que les ménages a revenu
modeste, c'est un soutien technique efficace. Bien connaître ses droits
et savoir comment les faire valoir représentent pour plusieurs un
défi insurmontable. Par ailleurs, nous comprenons que la mise en place
d'un tel soutien technique peut être administrativement parlant lourde et
coûteuse. Mais c'est là le prix à payer pour une politique
généralisée de conversion en
copropriété.
Quant aux références qui pourraient être faites
à là Commission des droits de la personne, nous en saisissons mal
ta signification.
Qui portera un plainte? Comment pourra-t-on juger que le
harcèlement est discriminatoire en ce qu'il est fait pour des motifs
d'âge ou de handicap physique?
Cela dit, nous croyons que ni le guichet, ni le recours a la Commission
des droits de la personne ne soient des mesures efficaces, voire même
réalistes. Cet état de choses est d'autant plus inquiétant
que la population québécoise vieillit très rapidement,
à tel point que, selon les dernières prévisions
démographiques, Montréal abritera, à la fin du
siècle, 20 % de personnes âgées. Une solution envisageable
serait, pour protéger les personnes âgées et
handicapées, d'imposer, comme condition préalable à la
conversion, l'obligation pour le convertiseur de prendre des mesures afin de
relocaliser ces personnes dans des logements de même qualité, a
coût comparable et situés dans le même quartier.
Nous sommes conscients des limites de cette proposition, puisqu'il sera
en effet possible, par cette caractérisation de locataires, que les
locateurs soient de plus en plus réticents a leur louer des logements.
Mais nous croyons que, si la conversion est faite par exception, selon notre
proposition, l'on pourrait réussir à éviter une telle
éventualité.
Sur le droit de préemption, deux petites remarques. La
première, pour féliciter le ministre d'avoir livré la
marchandise en reconnaissant l'intérêt premier des locataires;
deuxièmement, en respectant l'esprit de la proposition
ministérielle, nous pensons qu'un délai de six mois devrait
être accordé aux locataires afin qu'ils puissent prendre une
décision éclairée quant à l'acquisition de leur
logement.
Le délai commencerait à courir du jour de la date de
réception de l'avis de conversion. Évidemment, toute offre
d'achat acceptée avant l'autorisation de la régie devrait
être conditionnelle à celle-ci sous peine de nullité, et
ce, quel que soit l'acheteur.
En rétrospective, que l'on parle des recours judiciaires, des
avis de 24 heures, des guichets spéciaux, de l'accès à la
commission québécoise des droits et libertés de la
personne, de la protection des personnes âgées ou
handicapées et du droit de préemption, la conclusion s'impose
d'elle-même.
Un véritable choix en faveur de la protection des locataires et
des personnes qui sont les plus vulnérables nous oblige a assortir la
conversion en copropriété de mesures telles qu'elle en devient
impraticable. Afin de ne pas en arriver à cette extrême limite, la
solution demeure de ne permettre la conversion que dans des cas
préétablis, ce que nous proposons.
La protection de l'acquéreur en copropriété est
pertinente tant lors de l'achat d'un logement existant que lors de
l'achat d'un nouveau logement. Le cadre juridique actuel de la
copropriété crée de nombreux problèmes; les uns
sont liés aux pratiques du constructeur ou du vendeur, les autres,
à la gestion de l'immeuble. Plusieurs acheteurs en
copropriété vivent des situations difficiles après coup.
Quant aux autres mesures que propose le gouvernement, nous les trouvons
adéquates et nous souhaitons les voir appliquées aussi aux
nouvelles constructions.
Globalement, tous reconnaissent que la conversion de logements en
copropriété n'entraîne pas une perte significative de
logements locatifs. Cependant, certains secteurs où le marché
immobilier est très actif souffriront particulièrement de cette
pratique. Aux États-Unis, à peine 1 % du parc locatif a
été converti, a l'échelle nationale, sur une
période de dix ans. Par ailleurs, ce pourcentage s'élève
à 6 % dans certaines régions métropolitaines. Dans
certains secteurs urbains, tel le centre-ville de Washington, le taux est de 7
%. Il semble clair que la conversion se concentre et, pour illustrer ce
phénomène, rappelons les propos de Daniel L'Écuyer: "Les
vieux quartiers stables offrent un milieu de choix pour les conversions. Ces
quartiers comme Outremont et Notre-Dame-de-Grâce, è
Montréal, correspondent très bien à cette description.
Là aussi, les résidences sont en bon état et ne
nécessitent que quelques améliorations de type cosmétique.
Enfin, le phénomène se fait ressentir dans les vieux quartiers
centraux en voie de revivification. À ce moment, les conversions jouent
un rôle dans le processus de transformation sociale et physique du
quartier. "Des quartiers comme le Plateau Mont-Royal, Saint-Louis et
Pointe-Saint-Charles traduisent cette réalité pour
Montréal. La plupart du temps, on assiste à des
rénovations majeures. Souvent, le phénomène de conversion
se concentre dans quelques quartiers de ce type et c'est à ce moment que
les problèmes de délogement sont les plus durement vécus."
(11 heures)
La ville de Montréal, comme toutes les autres
municipalités, doit s'assurer que ses citoyens puissent se loger
convenablement. En raison de la forte proportion de locataires à
Montréal, de leurs conditions socio-économiques et de
l'importance relative des personnes âgées, la sauvegarde d'un parc
locatif à prix abordables demeure une priorité.
Nous désirons donc maintenir, dans tous les secteurs de la ville,
un équilibre dans la composition socio-économique des
ménages, d'une part, et, d'autre part, nous assurer que le parc
immobilier puisse satisfaire le mieux possible les besoins futurs. À cet
égard, le consensus social justifie nos préoccupations.
Or, les secteurs où cet équilibre est le plus
précaire correspondent sensiblement aux secteurs où la
conversion, par le biais de l'indivision, a été, au cours des
dernières années, la plus active. Ces secteurs sont aussi ceux
où les taux de vacance sont les plus faibles et où les pressions
sur l'augmentation des prix sont les plus fortes.
Plusieurs quartiers centraux vivent déjà des pressions de
"gentrification" et de "retour à la ville". En s'appuyant sur ces faits,
nous appréhendons l'impact des pressions supplémentaires que
pourrait exercer une politique de conversion généralisée.
Non seulement assisterons-nous à un changement rapide de la composition
socio-économique des ménages dans ces quartiers, mais
verrons-nous, en même temps, une baisse appréciable du nombre de
logements à prix abordable et, par conséquent, à des
pressions accrues pour augmenter l'offre en logements sociaux.
Nous sommes certains que le projet sous étude entraînerait,
immédiatement après la levée du moratoire, des impacts
négatifs qu'il faudrait freiner. De ce fait, nous nous interrogeons sur
la pertinence de mettre sur pied une mécanique complexe qu'il faudrait
ensuite contenir.
En terminant, nous aimerions porter à l'attention du ministre et
des membres de cette commission la nécessité de situer le
présent débat dans une perspective d'ensemble quant aux
préoccupations que nous devons tous avoir en matière
d'habitation.
Ces préoccupations s'instruisent des leçons que nous
tirons des divers programmes qui, dans le passé, ont affecté le
marché immobilier, qu'il s'agisse de l'Opération 20 000
logements, de Loginove ou de Corvée-habitation, le constat principal que
nous devons faire, c'est qu'ils n'ont pas modifié radicalement le
portrait du mode d'occupation et qu'à ce titre, Montréal est
toujours une ville de locataires.
Assimiler la levée du moratoire à une mesure
d'accessibilité à la propriété fausse,
d'entrée de jeu, les horizons que nous devons avoir en matière
d'habitation. Nous oublions trop facilement le fossé qui existe entre
les capacités financières des ménages et la
possibilité véritable et réelle d'accéder à
la propriété.
On n'insistera jamais assez sur la spécificité
montréalaise lorsque l'on traite d'habitation, de même que l'on ne
retiendra jamais suffisamment la pression que les caractéristiques
démographiques de l'ensemble de la société
québécoise, tout particulièrement la baisse du taux de
natalité et le vieillissement de la population, exercent sur le parc
résidentiel.
Il est nécessaire, dans cette perspective, de diversifier, , les
formes d'accession à la propriété, tout en recherchant une
amélioration des conditions
d'habitation, quel qu'en soit le mode d'occupation. En même temps,
il importe, dans cette perspective, de pallier le handicap financier des
locataires, qui demeure l'obstacle principal au passage du locatif à la
propriété.
Il faut également voir à augmenter le nombre et la
qualité des logements accessibles aux ménages à faible et
moyen revenus HLM, coopératives et autres. Il faut se préoccuper
de trouver les meilleurs moyens de satisfaire l'ensemble des besoins, tout en
respectant les choix des intéressés. En ce sens, la
copropriété en est un, à la condition expresse que son
développement n'ait pas d'effets négatifs sur la satisfaction de
tous les autres besoins en matière d'habitation, Quelle que soit l'issue
du présent débat, nous n'aurons couvert, dans les faits, qu'un
aspect de l'habitation. Pour que le présent exercice soit valable, il
faut qu'il y ait enfin une vaste réflexion sur tous les autres
éléments autour desquels doit s'articuler une politique
cohérente d'habitation au Ouébec. Si je comprends bien M. le
ministre, celui-ci nous invite justement à faire cet exercice avec toute
la province.
Comment conclure sans convenir de nouveau que la levée du
moratoire est un sujet fort délicat? Il demeure d'autres aspects de
cette question, telle qu'elle est traitée par le gouvernement, qu'il
faudra discuter tôt ou tard. Qu'il nous suffise de souligner la question
de la cohabitation d'intérêts divergents dans un même
immeuble, soit: l'intérêt des propriétaires investisseurs,
l'intérêt des copropriétaires résidents,
l'intérêt des locataires de première
génération et l'intérêt des locataires de
deuxième génération. Un tel mariage de raison risque fort
de causer des problèmes que vous êtes à même
d'imaginer.
Dans un autre ordre d'idée, et quoique nous ayons
été laconiques à ce sujet, le projet d'ensemble n'a pas
vraiment saisi la réalité du marché actuel de
l'immobilier. Son évolution au cours des deux ou trois dernières
années a montré des signes d'une très grande
nervosité. Nous sommes convaincus, si elle pouvait être prise en
considération, que cela ferait mentir bon nombre des études et
analyses dont on nous a fait part.
Compte tenu de l'ensemble des conséquences dites et non dites que
pourrait avoir le droit général de subdivision en
copropriété, même balisé, nous ne pouvons acquiescer
à la proposition gouvernementale: parce que les mesures proposées
pour protéger les locataires nous apparaissent déficientes, parce
qu'en raison des conditions de marché et des caractéristiques
socio-économiques des locataires de Montréal, la levée du
moratoire n'atteindra pas l'objectif premier du ministre qui est de faciliter
l'accession à la propriété, parce que l'association de la
levée du moratoire et de la copropriété divise crée
une psychose qui sert mal tout le marché locatif au Québec. Cela
nous a d'ailleurs motivés à proposer une toute autre
approche.
Même si cette approche vise à désamorcer les mesures
de contournement et è empêcher la subdivision en
copropriété sauf exception, nous convenons qu'elle n'est pas,
elle non plus, sans reproches. Nous estimons, néanmoins, qu'à
défaut d'avoir tous les avantages, elle offre le moins
d'inconvénients. Sa principale qualité est de passer un message
clair et apaisant pour les locataires et pour les propriétaires. Dans la
mesure où le climat social qui en résultera sera plus serein, les
conversions par exception se feront dans un meilleur esprit.
Sans présumer de la formule qui sera retenue par le ministre
responsable de l'Habitation et le gouvernement, il importe que les dispositions
législatives soient adoptées dès la prochaine session
parlementaire, afin d'endiguer l'hémorragie des évictions faites
sous prétexte des travaux majeurs et de la reprise de possession.
Évidemment, dans le cadre de nos propositions, le calendrier de
mise en place impose que le carcan que constitue le moratoire soit
effacé du vocabulaire québécois afin d'être
remplacé par une loi claire qui interdise la subdivision de
bâtiments résidentiels en copropriété et que cette
loi soit assortie d'exceptions, lesquelles resteront à déterminer
par règlement, que les municipalités soient appelées a
travailler de concert avec le gouvernement afin d'identifier les
critères permettant la conversion.
Évidemment, Montréal s'engage à consulter sa
population, afin de convenir des critères susceptibles de créer
le plus large consensus possible.
En dernière analyse, nous sommes convaincus que cette commission
parlementaire est un exercice de réflexion collective qui permettra
d'enrichir le point de vue de tous les intéressés. Finalement,
nous souhaitons qu'elle renverra a l'oubli le débat trop longtemps
campé à sa première expression, à savoir: pour ou
contre la levée du moratoire.
M. le Président, M. le ministre, M. le critique de l'Opposition
et M. les membres de la commission et tous ceux qui sont présents
aujourd'hui, nous vous remercions très sincèrement pour ta
qualité de votre écoute. Nous sommes prêts à
répondre à vos questions.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie de votre
présentation. Compte tenu des ententes intervenues jusqu'à
maintenant et compte tenu du temps pris par les autorités de
Montréal pour nous faire la présentation de leur document, il
reste 42
minutes, donc 21 minutes à chacune des deux formations
politiques. M. le ministre,
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Le mémoire de
la ville de Montréal se termine par des félicitations aux membres
de la commission pour la qualité de leur écoute. Moi, je
commencerai par féliciter la ville de Montréal pour la
qualité du document qu'elle nous a présenté. C'est un
document dont on doit louer la qualité non seulement quant au fond, mais
également quant à la forme. Il est toujours intéressant de
lire un document qui, manifestement, est préparé par des gens qui
connaissent le dossier, mais il est doublement intéressant de le lire
quand les choses sont bien dites. Or, je dois vous féliciter parce que
c'est un document clair, qui se lit facilement et qui donne votre position.
M. le Président, je me permettrai, dans un premier temps, de
faire quelques commentaires pour ensuite poser quelques questions aux
représentants de la ville de Montréal. Je suis heureux de
constater que la ville de Montréal reconnaît que le prolongement
du régime actuel, donc, le maintien du moratoire, est inacceptable et
que la conversion d'immeubles en copropriété divise pourrait
être acceptable dans certaines circonstances. De plus, je constate
également avec une certaine satisfaction que la plupart des mesures que
nous proposons peuvent être agréées par la ville ou sont
déclarées comme telles, reconnaissant que la ville
suggère, dans certains cas, des améliorations. Je conclus donc
que nous avons le même objectif et essentiellement les mêmes
préoccupations. Toutefois, la mécanique d'application est
différente. La ville souhaite interdire la conversion d'immeubles, mais
avec des exceptions qui feraient l'objet de discussions avec les
municipalités. Le gouvernement, quant à lui, propose la
démarche inverse, soit de permettre la conversion mais avec des
exceptions qui sont contenues dans le document. Je vous rappelle que ce sont
des exceptions qui existent dans le cas, par exemple, de réparations
majeures où un locateur aurait expulsé des locataires, auquel cas
la Régie du logement refuserait la conversion. Donc, c'est une
exception.
Il y a également des exceptions prévues à la page
57 du document. C'est probablement l'un des paragraphes les plus importants
lequel, je pense, n'a pas été lu avec autant d'attention par la
plupart des gens qui se sont penchés sur la question. Le dernier
paragraphe de la page 57 est extrêmement important et se voulait, pour
nous, une façon importante de dire que, dans bien des cas, il ne
pourrait pas y avoir de conversion. Vous me permettrez de lire ce paragraphe:
"Si le suivi du rythme de conversion ou l'arrivée de problèmes
liés à des conjonctures économiques et sociales -
j'insiste sur le mot "sociales" - devait révéler des tensions
-j'insiste sur le mot "tensions" - dans certains segments du marché
locatif, il serait possible d'intervenir rapidement afin de limiter ou
d'interdire la conversion dans ces secteurs".
Il est donc évident que, dans notre proposition, cette mesure
dont je viens de parler, et qui est proposée au même titre que
toutes les autres, visait en sorte de dire: On pourrait faire des conversions
mais avec des exceptions. Ces exceptions pourraient être importantes, tel
que je viens de le signaler à la lecture du paragraphe de la page 57.
Donc, la ville nous dit: Nous préférons une démarche selon
laquelle on commencerait par dire que c'est interdit, sauf dans les situations
où ce serait permis, situations qui seraient déterminées
à l'avance par règlement. Nous avions dit et nous disons que nous
préférons... En fait, la proposition gouvernementale dit: Ce sera
permis, sauf quand ce sera défendu. Mais je conclus que, finalement,
l'objectif souhaité est le même, c'est-à-dire permettre,
dans certains cas, à des locataires d'accéder à la
propriété tout en consolidant et en renforçant les droits
des locataires d'être maintenus dans les lieux et d'être
débarrassés du harcèlement et des autres problèmes
qui sont les leurs.
Une autre remarque. On laisse entendre, à quelques endroits dans
votre document, que la proposition gouvernementale voit, dans la levée
du moratoire, la garantie de l'accession à la propriété.
Je ne pense pas qu'on puisse faire dire exactement cela au document. Nous ne
pensons pas, et je le ne crois pas, que le document ait dit que la levée
du moratoire est une garantie d'accession à la propriété
et que c'est la seule et unique façon d'y accéder. Je pense
plutôt que la levée du moratoire est l'un des facteurs qui
pourraient contribuer à faciliter l'accès à la
propriété à des locataires qui n'ont pas actuellement les
moyens d'y accéder. Dans ce sens, j'aimerais citer un paragraphe du
livre vert, Se loger au Québec, document qui était quand
même important à son époque et qui a fait ta somme de la
pensée et du gouvernement de l'époque et des intervenants du
milieu à ce moment-là. Ce livre vert disait, à ce sujet,
que l'encouragement à l'accession à la propriété
passe également par une meilleure accessiblité aux
différentes formules de propriété. La simplification et
l'uniformisation du régime de la copropriété va dans ce
sens. (11 h 15)
C'est dans cet esprit que nous avons proposé la conversion des
immeubles locatifs comme étant l'une des façons d'accéder
à la propriété.
Si vous voulez bien, j'aimerais maintenant poser quelques questions. On
ne peut pas éviter de poser des questions sur le problème des
réparations majeures. Des réparations majeures, c'est un fait, il
y en a.
Je signale, en passant, a la ville, que chaque fois que quelqu'un fait
des réparations majeures, cela prend un permis de la ville de
Montréal; donc, je ne dirai pas que la ville est complice dans tous les
cas, mais elle autorise les réparations, puisqu'il faut un permis. On
peut dire qu'il y a deux types de réparations. Il y a des
réparations majeures reconnues comme étant nécessaires et
urgentes et d'autres réparations qui sont majeures mais non pas
nécessaires et urgentes. Certains individus, je dirais même
certains groupes, voudraient qu'on ne puisse pas permettre des
réparations majeures, è moins qu'elles ne soient urgentes ou
nécessaires. On retrouve cela quelque part. Ce n'est pas la position de
la ville de Montréal, je ne l'ai pas lue comme telle. Il
m'apparaît que, si l'on commence à empêcher des
propriétaires de faire des réparations importantes et même
majeures è leur immeuble è moins que ce ne soit devenu une
urgence nationale, on va se retrouver éventuellement avec un stock
locatif en totale décrépitude, puisque, si l'on attend que les
toitures commencent à s'écrouler ou qu'on soit dans une situation
de catastrophe pour permettre des réparations, on va se retrouver, par
exemple, comme en Angleterre, où le stock locatif est totalement
déprimé et en très mauvais état, avec les
problèmes que cela comporte.
J'aimerais entendre la ville de Montréal au sujet des
réparations majeures. Je présume qu'elle n'est pas opposée
à ce que le régime permette des réparations majeures,
même si elles ne sont pas nécessaires ou urgentes.
M. Gardiner: M. le ministre, si vous me permettez de
répondre d'abord à vos commentaires d'ordre
général. Nous pensons qu'il y a une différence importante
entre généraliser la levée du moratoire, écrire des
exceptions et permettre à la régie de statuer plutôt que...
Il y a une différence entre cela et faire que le moratoire devienne une
loi qui empêche les subdivisions, sauf dans des cas qu'on vous invite
à discuter, peut-être avec l'ensemble des municipalités,
mais, au moins, avec la ville de Montréal. On en fait mention d'un dans
le texte, è savoir: une majorité significative. Peut-être y
aura-t-il une question dans ce sens-là, tantôt?
En effet, notre proposition, c'est de dire, fermez les
échappatoires immédiatement, la reprise de possession, les
travaux majeurs et de concurremment introduire un nouvel article dans le Code
civil qui empêche la subdivision en copropriété permettant
tout de même de légiférer par le biais de règlement
pour des exceptions.
Nous pensons que c'est différent. Cela peut atteindre
peut-être les mêmes objectifs, je le souhaite, mais c'est
différent. En ce qui concerne les réparations majeures, bien
sûr, il y a des réparations majeures à faire à
Montréal. Il faut dire que, depuis quelques années, beaucoup de
réparations majeures ont été faites dans les duplex,
triplex, quadruplex. Il y a peut-être un marché qui existe
actuellement dans les maisons d'appartements, dans les nouvelles constructions
depuis la deuxième guerre. Il y a des immeubles qui ont besoin de
considérations importantes. Nous ne voulons pas et nous ne pensons pas
qu'on peut empêcher un propriétaire de faire des travaux majeurs,
mais il faudrait tout de même apprivoiser la situation. Ce que nous
proposons, c'est une entente entre le propriétaire et le locataire
à défaut de quoi, la régie aura à statuer.
La ville de Montréal, dans le passé, non seulement
reconnaissait la nécessité de faire des réparations
majeures ou que les propriétaires en fassent, mais elle donnait des
subventions sans discrimination. Or, nous savons que le gouvernement provincial
a accepté, au mois de juin, d'amender la Charte de la ville de
Montréal pour que, justement, notre politique de subvention à la
restauration soit complémentaire à un programme
provincial-fédéral PARCQ actuellement. Loginove aurait
été dans le temps ce qui nous permettait de choisir certains
types de logement, qui nous permettait de choisir certains types de tenures,
qui nous permettait d'étendre vos propres critères de
contrôle de loyer suite aux travaux. Nous allons, effectivement, adopter
un règlement dans ce sens-là lors du prochain conseil municipal.
On ne peut pas l'imposer aux propriétaires. On ne peut pas obliger les
propriétaires d'avoir recours à des programmes de subvention. Il
faudrait permettre tout de même à l'occupant de questionner la
nécessité de ces travaux-là et d'avoir recours à
des tiers puisque cette personne pourrait être victime de l'initiative
d'un propriétaire.
M. Bourbeau: M. Gardiner, vous parlez justement... On vient de
parler des exceptions où l'on pourrait convertir. Vous parlez d'une
série de critères dont les propriétaires devraient faire
la preuve, avant de pouvoir obtenir la permission de convertir. D'ailleurs, en
page 39, vous dites que même les municipalités seraient
appelées à travailler de concert avec le gouvernement afin
d'identifier les critères permettant la conversion. On aimerait savoir
ce que vous avez exactement à l'esprit quand vous parlez de ces
critères-là. Pourriez-vous nous énumérer certains
de ces critères-là, car c'est effectivement la base de la
proposition?
M. Gardiner: La proposition que nous faisons vise à
empêcher la subdivision, sauf dans une situation d'exception. Ces
exceptions devront être définies par le
gouvernement, mais, on l'espère, en consultation avec les
premiers concernés, entre autres, la ville. Nous mentionnons un cas,
soit une majorité significative dans un duplex ou dans un triplex, on
aura des problèmes, j'en conviens. C'est justement pourquoi on devrait
s'asseoir à une même table pour en discuter. Dans notre esprit,
quand on est rendu à une situation de duplex, tripex, quadruplex, pour
nous, la majorité significative sera dans le cadre d'un projet
acceptable et dans l'intérêt de la majorité des occupants.
Sachant qu'il y a une ou deux personnes qui ne voudraient pas l'accepter, il
faudrait prévoir des compensations pour ces personnes. II faudrait les
prévoir, que ce soit un autre logement ou que la compensation soit
pécuniaire. On ne voudrait pas que la minorité empêche un
accès à la propriété, mais il faut tout de
même savoir que cette personne risque d'être lésée
dans ses droits d'occuper un même quartier. Il faudrait prévoir
des mécanismes. Ce sont des choses sur lesquelles actuellement nous
travaillons activement.
On a fait allusion à une considération qui pourrait
être celle du taux de vacance dans un secteur donné. Cela pourrait
être un critère. Bien sûr, dans la mesure où vous
imaginez aller du locatif à la copropriété collective, les
coopératives ou les OSBL, ce sont des conversions aussi qu'on pourrait
prévoir dans la loi. Elles sont déjà prévues
d'ailleurs. Il y a des mécanismes de gré à gré
qu'on devrait discuter, mais un gré à gré dans lequel il
n'y a pas de harcèlement parce qu'il y a un droit d'occupation. C'est
uniquement dans le cas où le cadre juridique permettrait la conversion
qu'il y aura discussion sur cette question avec les personnes
concernées. Mais les locataires, bien sûr, pourront rester. On
change fondamentalement le fardeau, je crois, dans cette situation. Ce sont des
exemples, ce sont des hypothèses que nous serions prêts à
discuter avec le gouvernement, mais, dans un cadre
généralisé de non-subdivision.
M. Bourbeau: Dans votre proposition, vous dites: Dans certains
cas, il pourrait y avoir subdivision ou copropriété. On vient de
parler des critères. Il pourrait y en avoir un certain nombre de
définis à l'avance. Vous dites que, dans ces cas, les
propriétaires devraient se présenter à la ville pour
obtenir un certificat de convertibilité. Ce certificat serait issu
à partir de quoi? Quels seraient vos guides pour émettre un
certificat? Est-ce que vous auriez un règlement municipal qui vous
autoriserait ou un guide technique? Comment procéderiez-vous pour
déterminer qui obtiendrait le certificat de convertibilité?
M. Gardiner: Je pense que cela aussi est à discuter. Bien
sûr, on voit un rôle pour la municipalité. Dans un premier
temps, on demanderait aux propriétaires de s'adresser à la ville
pour voir si la demande dans le secteur, dans le quartier, en ce qui concerne
l'immeuble, est conforme aux exceptions qu'on aura définies
conjointement et sur lesquelles vous auriez légiféré en
temps et lieu. Si les exceptions comportent un rôle pour la
municipalité d'étudier la convertibilité de l'immeuble sur
le plan physique, c'est un rôle aussi qu'une municipalité comme
Montréal, du moins, pourrait jouer. J'imagine que beaucoup de
municipalités pourraient le jouer. Finalement, dans notre proposition,
on permettrait à la ville d'être partie intéressée a
la décision à la régie et d'être en mesure de donner
son opinion, son avis sur la situation.
M. Bourbeau: Justement, a ce sujet, supposons qu'un
propriétaire ne reçoit pas son certificat de
convertibilité de la ville et s'adresse à la régie,
puisque vous admettez qu'il pourrait quand même s'adresser à la
régie, vous dites, à ce moment: Nous voulons que la ville puisse
se faire entendre devant la régie pour faire valoir son point de
vue.
M. Gardiner: Oui.
M. Bourbeau: Supposons que, malgré les
représentations de la ville, la régie en venait à la
conclusion qu'elle devrait quand même autoriser la conversion dans un cas
comme cela, dois-je comprendre que la ville accepterait la décision de
la régie à ce m ornent-là? (11 h 30)
M. Gardiner: Oui. Je présume que la régie
interpréterait bien le règlement qu'on demande au gouvernement de
se donner, le règlement qui porterait sur le peu d'exceptions à
une loi généralisée de non-subdivision. Dans ce cas qu'on
pourrait appeler un "judgement call", la ville se rallierait, bien sûr,
à la décision d'un tribunal administratif. Au point de
départ, il s'agit de s'entendre sur le règlement qui fait
exception à la loi générale.
M. Bourbeau: II nous reste très peu de temps.
Malheureusement, le temps passe très vite, je crois qu'il ne reste
qu'une couple de minutes. Le président me fait déjà des
signes. J'aurais aimé poser bien d'autres questions. De toute
façon, je note que, sur l'avis de 24 heures pour visiter les lieux, vous
faites une proposition d'identifier le nom du visiteur et cela m'apparaît
une bonne suggestion. Je suis d'accord avec le préavis de trois mois
dans le cas de réparations majeures.
Quant au droit de préemption, vous voudriez qu'on prolonge de six
mois la décision du locataire d'acheter ou de ne pas acheter. Je me
demande si c'est réaliste de laisser une vente en suspens pendant
six
mois. Cela n'aurait-il pas pour effet de faire tomber les ventes? Un
acheteur qui devra attendre six mois pour savoir si son offre d'achat est
acceptée parce que, pendant ces six mois, on attend la décision
du locataire, cela peut être assez difficile un régime qui
retarderait d'aussi longtemps la conclusion d'une vente.
Je vais finalement terminer avec le harcèlement car je vois que
notre temps est pratiquement écoulé. Je signalerais simplement
que, dans la proposition, nous disons ceci: Il y aurait un guichet unique
à la Régie du logement - et nous avons l'intention de l'instituer
- où des gens seraient uniquement affectés aux plaintes qui
seraient portées par des personnes âgées ou
handicapées et ils verraient à leur donner les conseils ou
l'information adéquate. Si on se retrouvait dans des cas où du
harcèlement était en cause, nous avons déjà eu des
discussions avec la Commission des droits de la personne qui possède les
pouvoirs d'enquête et même ceux de prendre des procédures.
Évidemment, dans ces cas-là, c'est la commission qui prend
à son compte les frais de l'enquête et de la procédure.
À un moment donné, vous dites que, finalement, les locataires
n'ont pas les moyens de débourser les frais judiciaires encourus par ces
contestations. Si ce système est mis en place et que c'est la Commission
des droits de la personne qui prend à son compte les enquêtes et
les poursuites, ne trouvez-vous pas que, finalement, avec une bonne information
véhiculée auprès des locataires, ce serait une
façon - enfin, ce n'est peut-être pas la perfection même -
une amélioration sensible pour tenter de combattre le
harcèlement?
M. Gardiner: Oui, dans ce contexte, c'est possible que ce soit
plus efficace qu'on l'a peut-être indiqué au document. Toutefois,
notre position demeure, et c'est la toile de fond de notre document. Qu'il n'y
ait pas de subdivision en copropriété, qu'il n'y ait pas
d'éviction par ce fait même, qu'il n'y ait pas de
harcèlement par, ce fait même, dans les cas d'exception que l'on
voudrait définir avec vous, il y a bien sûr des mesures
compensatoires à mettre en place. Dans ce contexte, que le recours soit
défrayé ou non par l'État ou par le tribunal, on va le
minimiser comme il se doit.
Le Président (M. Rochefort): Merci. Le temps à la
disposition du ministre est écoulé. M. le ministre me demande la
permission d'ajouter une question et je voudrais savoir s'il y a entente de la
part des membres de la commission pour dépasser l'enveloppe de temps que
nous nous étions accordée pour nous entretenir avec les
représentants de Montréal. M. le député de
Shefford.
M. Paré: Ce sera paritaire.
Le Président (M. Rochefort): M. le ministre, le temps que
vous prendrez sera ajouté à l'enveloppe de temps de l'Opposition.
C'est la condition au consentement de l'Opposition.
M. Bourbeau: Bon, d'accord. Une seule question. II semble y avoir
une contradiction. À la page 26. vous dites - et je voulais terminer sur
la question du guichet spécial pour les personnes âgées -
au deuxième paragraphe: "L'idée de ce guichet spécial pour
les personnes âgées ou handicapées est souhaitable..." Mais
vous dites également qu'elles ont besoin d'un soutien technique
efficace. Or, le guichet spécial vise justement à fournir un
soutien technique et c'est indiqué dans la proposition. À la page
suivante, au deuxième paragraphe, vous dites: "Cela dit, nous croyons
que ni le guichet ni le recours à la Commission des droits de ta
personne ne soient des mesures efficaces voire même réalistes".
Comment cela peut-il être à la fois non réaliste et
souhaitable? Il me semble que, si c'est souhaitable, cela ne peut être
non réaliste ou irréaliste. Est-ce qu'il n'y a pas une certaine
ambiguïté dans votre position, là-dessus?
M. Gardiner: Nous croyons que ce guichet devrait exister, cela
devrait être un service à la Régie du logement. Toutefois,
dans un contexte de levée généralisée, nous croyons
que ce service ne répondra pas aux besoins appréhendés
dans notre rapport. D'une part, c'est un service qui devrait exister et,
d'autre part, dans le contexte de la proposition ministérielle, nous ne
croyons pas que cela répondrait adéquatement aux besoins.
M. Bourbeau: Vous me dites que c'est souhaitable mais que, dans
le contexte d'une levée du moratoire généralisée ou
d'une conversion généralisée, le système serait
débordé, le guichet serait débordé.
M. Gardiner: C'est cela. Vous comprenez que nous commentons dans
la deuxième partie l'ensemble des propositions et nous proposons d'aller
de l'avant immédiatement. Nous croyons que beaucoup de ces choses
doivent être mises en place, même si nous n'allons pas, tel que
nous le proposons, de l'avant sur la généralisation de la
subdivision.
M. Bourbeau: Très bien, merci.
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le ministre. M. le
député de Shefford.
M. Paré: Merci, M. le Président, très
rapidement afin de laisser la chance à mes
collègues de poser quelques questions. Je voudrais tout d'abord
féliciter les autorités municipales pour la présentation
de leur mémoire qui est vraiment bien étoffé, avec des
chiffres et des perspectives sur des conséquences possibles et probables
de la levée du moratoire. Je voudrais féliciter aussi le conseil
municipal pour sa préoccupation, depuis moins d'un an qu'il est au
pouvoir, en matière d'habitation. On a vu des documents sur lesquels on
s'est penché longuement parce que cela relève d'un souci vraiment
sérieux de s'occuper d'habitation et surtout de consulter la population,
parce que le conseil actuel a rencontré les gens des quartiers, a
élaboré même des stratégies, a pris des positions
face à la levée du moratoire qui étaient
déjà connues et qu'on retrouve, aujourd'hui, d'une façon
plus précise et plus concise.
Donc, félicitations pour votre préoccupation envers
l'habitation et pour votre mémoire. Ce que je constate, c'est
qu'effectivement votre mémoire est clair dans le sens qu'il va
totalement à l'encontre de la proposition, Lever le du moratoire: une
décision qui s'impose, puisque, a la page 12, on y retrouve la
possibilité de permettre que la conversion en copropriété
divise soit globalement interdite avec, en corollaire, des mesures d'exception
qui permettront la conversion à certaines conditions. C'est tout
à fait l'inverse, c'est non, sauf dans certains cas. Je vais en profiter
pour vous dire jusqu'à quel point il peut y avoir d'excellents exemples
d'exceptions. Dans Milton Park, nous avons une copropriété qui
est une exception; les copropriétaires sont des coopératives et
des organismes sans but lucratif. Donc, c'est un exemple qui pourrait
être retenu en fonction de la proposition de la ville de Montréal.
C'est totalement a l'inverse de la proposition puisque, entre tout permettre et
avoir certaines mesures de précaution pour les locataires et dire: C'est
défendu, sauf lorsque c'est justifiable et que la ville peut
intervenir... Connaissant maintenant, à la suite des documents que j'ai
lus et de votre présentation, non seulement l'intérêt que
vous avez pour l'habitation mais la connaissance approfondie du dossier de
Montréal, je dois vous dire, dans le cas de Montréal
spécifiquement, que je n'aurais pas d'objection à ce qu'on vous
délègue effectivement l'administration en très grande
partie d'une politique d'habitation sur laquelle il y aurait interdiction, mais
des exceptions sur lesquelles vous auriez à intervenir.
J'ai une seule question pour le moment et, si j'ai le temps, j'y
reviendrai. Vous avez beaucoup de craintes sur la levée du moratoire
quant à la psychose que cela pourrait entraîner. On fait des
comparaisons avec les États-Unis ou ailleurs, mais on les fait toujours
de façon globale, alors que vous avez soulevé quelque chose qui
est fondamental, c'est qu'il faut comparer des choses semblables, donc, des
quartiers. On connaît déjà ce qui est arrivé entre
autres sur le Plateau Mont-Royal et ce qui se passe de plus en plus dans
d'autres quartiers, Pointe Saint-Charles ou centre sud. J'aimerais très
rapidement que vous nous disiez, selon vous, si on levait le moratoire, tel
qu'il est proposé dans le document du ministre, quelles seraient les
conséquences visibles, très rapidement, à
Montréal?
M. Gardiner: Vous comprendriez que notre position découle
de l'application d'un règlement temporaire depuis presque douze ans
maintenant. Notre évaluation de cette situation est qu'une situation
généralisée même assortie de balises n'est pas un
contexte qu'on a connu à Montréal sauf pour une période en
1975. Dans ce contexte, votre question est un peu hypothétique. Je pense
qu'on pourrait, selon les expériences connues dans d'autres villes mais
surtout à Montréal dans le contexte d'un moratoire inefficace,
faire des extrapolations. Je pense qu'il y aurait recours, bien sûr,
à la vente en subdivision dans les duplex, triplex et quadruplex qui
sont très populaires pour une population généralement non
résidente des quartiers visés, chose qui s'est faite dans
l'indivision pendant quatre ou cinq ans; normalement, cela irait dans ce
sens.
Il y aurait, quant à moi, ruée sur les cinq et plus qui y
ont généralement échappé ou pour lesquels on n'a
pas trouvé d'échappatoires efficaces pendant l'existence du
moratoire. C'est généralement les banques, quant à moi,
qui appliquaient te moratoire et non pas le règlement, parce qu'il y
avait hésitation à financer l'exercice de conversion en
indivision dans les cinq et plus. On pouvait, mais on ne voulait pas. J'ai
vécu dans mon quartier tout de même des phénomènes
de société en commandite dans des immeubles de cinq et plus. Je
pense qu'il y aurait une ruée vers cela.
Il faut savoir, par exemple, que les personnes qu'on a chassées
des duplex, triplex et quadruplex, qui n'ont pas quitté leur quartier,
ont accepté de vivre dans moins d'espace et dans des bâtiments
verticaux. C'est le rôle qu'y joue le logement locatif de cinq et plus ou
les gratte-ciel aujourd'hui. C'est de cette façon que les gens ont pu
rester dans leur quartier. Ce sont des immeubles qui ont été
construits en copropriété divise mais qu'on n'a pas pu toucher
dans le contexte actuel du moratoire. J'ai beaucoup, et beaucoup, le sentiment
sinon la crainte que ce serait une cible importante, un gratte-ciel dans le
centre-ville, avec les perspectives de vue, qu'on peut vendre en condominiums
mais qui est actuellement en location, ce qui a permis à des gens de
rester dans le quartier même
s'ils ont été chassés de leur maison en
rangée et n'ont pas pu en trouver d'autres dans le secteur. Je pense que
cela peut être une nouvelle cible. C'est tout de même
hypothétique. Nous faisons référence au
harcèlement, aux personnes exerçant ces droits limités
d'occupation et à leur situation précaire. Nous parlons de la
deuxième génération et la mixité de la
première génération et de la deuxième
générations, les droits de l'un par rapport aux droits de
l'autre, des propriétaires qui vivront dans un immeuble avec la
première génération et la deuxième
génération. Nous recommandons fortement au gouvernement que la
situation soit "clean", qu'il n'y ait pas de conversion, sauf dans des cas
d'exception a définir. Il y a des exceptions, nous le croyons, qui
seront acceptables pour tous les intervenants. Merci.
M. Paré: Oui. Juste un petit commentaire très
rapide. Vous demandez que cela se fasse par loi mais ce serait finalement
l'équivalent du maintien du moratoire, et que ce soit efficace et
respecté. Pour que ce soit - excusez l'expression, mais vous l'avez
utilisée - "clean", qu'on enlève le mot "moratoire" et qu'on y
aille d'une façon législative. (11 h 45)
M. Gardiner: II y a un droit de convertir aujourd'hui et un
règlement qui empêche qu'on exerce ce droit, bien que la situation
qu'on a connue, ce soient les échappatoires qui ont fait le dommage en
termes d'éviction dans la zone centrale de Montréal, pour ne pas
parler d'autres secteurs. Nous proposons qu'on remette aux oubliettes la
question d'un règlement temporaire qui empêche un droit et que
l'on regarde le droit qui existe dans le Code civil. On propose que ce droit
soit enlevé sauf dans le cas d'exceptions à définir. M. le
ministre a indiqué qu'une discussion en ce sens serait acceptable.
M. Paré: Merci.
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le
député. Si vous le permettez j'aurais aussi deux questions
à poser aux représentants de la ville de Montréal. Mon
temps sera pris sur le temps de l'Opposition.
Dans un premier temps, très souvent, et cela a été
le cas dans l'intervention d'ouverture du ministre, on nous présente un
peu, nous, les Québécois et particulièrement les
Montréalais, comme étant l'un des rares, sinon l'unique, cas
d'exception qui restent dans le monde occidental organisé, auquel on est
habitué de se référer: l'ensemble canadien, les
États-Unis, la France, l'Angleterre et ailleurs, a avoir des
règles qui empêchent la conversion d'immeubles locatifs en
copropriété. C'est un élément, je n'irais pas
jusqu'à dire un argument mis de l'avant comme un argument majeur, mais
c'est un élément qui est souvent cité dans le débat
pour situer l'ensemble de l'intervention gouvernementale. J'aimerais savoir
justement de la part des autorités municipales de Montréal, et,
en même temps, des responsables des questions d'habitation à
Montréal! comment réagissez-vous quand vous entendez cet argument
cité souvent, a savoir qu'il reste à peu près seulement
ici, au Québec et particulièrement à Montréal,
où c'est impossible de le faire, puisqu'ailleurs, selon les
évaluations qu'on entend de part et d'autre selon le cas, souvent on
nous dit: Cela s'est fait avec satisfaction, donc, pourquoi ne pas le faire
ici? Comment réagissez-vous en tant qu'administration municipale de
Montréal devant un tel argument? Cela vous fait quoi de vous faire dire
qu'il reste vous autres comme exception?
M. Gardiner: La ville de Montréal comme exception?
Le Président (M. Rochefort): Le
Québec, mais compte tenu de l'importance du nombre de locataires
à Montréal.
M. Gardiner: Je pense que votre document, quand vous étiez
ministre, M. Rochefort, et le présent document indiquent qu'en effet,
pour la province de Québec et la province de l'Ontario - on regarde de
ce côté, vers l'Ouest, pour faire des comparaisons - le
pourcentage de propriétaires ou de locataires sont semblables dans les
deux provinces. C'est 52 %, 53%. C'est peut-être 47 %. C'est l'un ou
l'autre. Les pourcentages sont très semblables pour les deux.
Montréal est un peu différent.
Le Président (M. Rochefort)s Mais cela dit... Allez-y.
M. Gardiner: Je dis qu'en ce qui concerne notre administration,
le droit à l'occupation est la question fondamentale: le droit pour les
gens de vivre là où ils ont choisi de vivre, dans le logement
qu'ils ont choisi d'occuper et dans le quartier qu'ils ont choisi. Ce n'est pas
une proposition non plus qui empêche, dans notre esprit, la
mobilité souhaitée. Il n'est pas seulement question
d'échanger le logement locatif qui, historiquement, est toujours
maintenu en location contre un autre logement en location qui est toujours
maintenu dans cette situation. Je pense que, de notre côté, on
aimerait effectivement que plus de personnes aient une mainmise sur la
propriété ou deviennent propriétaires. Je sais, pour
l'avoir étudié du point de vue historique, qu'en 1945-1946,
à la fin de la Seconde Guerre mondiale, 90 % des Montréalais
étaient des locataires et que, 40 ans plus tard, 78 % le
sont. C'est douze points de différence et cela après des
investissements de millions et de millions de dollars directement dans des
soi-disant programmes d'accès a la propriété qui ont
développé nos banlieues plutôt que la ville de
Montréal, pour ne pas parler des abris fiscaux. Alors, il faut dire que
le mouvement est très lent. Le droit à l'occupation est une chose
importante. Nous sommes prêts et nous le faisons actuellement.
M. le ministre et le critique de l'Opposition nous ont tous deux
félicités pour la qualité du rapport. Il faut dire que ce
sont des personnes de nos services des modules d'habitation et d'autres qui ont
préparé ce document. Ces personnes vont nous préparer
aussi ce que nous aimerions appeler un programme intégré en
matière d'habitation, la conversion étant un
élément émotif, un élément important et
même un élément d'actualité, mais un
élément tout de même parmi beaucoup d'autres
considérations. Nous allons nous intéresser è la question
de l'accès à la propriété. En ce qui me concerne,
l'accès peut se faire de gré à gré en respectant
les personnes. On peut introduire la notion de fonds de compensation pour que
certaines personnes accèdent à la propriété et que
d'autres soient compensées dans cette situation. 11 y a tout de
même des réalisations à but non lucratif qui se faisaient
à un certain rythme - aujourd'hui, on se demande si le rythme sera
maintenu - qu'on appelle des coopératives et des OSBL. Il y a
l'ouverture qu'on a mentionnée tantôt sur une base
hypothétique, qui consiste à considérer les taux de
vacance pour permettre certaines conversions, mais, c'est un objectif qu'on
voudrait poursuivre. Je pense qu'il faudrait qu'on aille du côté
ministériel et de notre côté pour mettre sur pied, une fois
pour toutes, un programme d'accès - c'est là qu'on devrait
généraliser - généralisé à la
propriété. Là-dessus, on est ouverts. Vu que le rôle
de la redistribution de la richesse dans notre société appartient
au gouvernement supérieur, nous sommes prêts à
développer des idées et nous asseoir avec vous pour tenter de les
concrétiser.
Le Président (M. Rochefort): Merci. J'ai une
deuxième question qui a trait a un sujet qui a déjà
été abordé depuis que vous avez commencé votre
présentation. Cela a trait à toute cette question de la
protection du parc locatif. On sait que c'est une des conséquences
importantes qui est souvent soulevée, c'est-à-dire l'effet direct
qu'aurait, sur le parc de logement, donc sur le parc locatif, la levée
du moratoire, soit la réduction du nombre de logements sous forme
locative, lesquels seraient réservés de plus en plus aux citoyens
les plus démunis de notre société. Vous le soulevez dans
votre mémoire. Le ministre vous a rappelé, en réaction
à cet élément que vous avez abordé, la
recommandation contenue dans son livre blanc, à la page 57, qui est
justement, et je la relis: "Si le suivi du rythme de conversion ou
l'arrivée de problèmes liés à des conjonctures
économiques et sociales devaient révéler des tensions dans
certains segments du marché locatif, il serait possible d'intervenir
rapidement afin de limiter ou d'interdire la conversion dans ces secteurs." Le
ministre a resservi cet argument devant une des objections, soit la protection
du parc de logements locatif que vous aviez mis de l'avant dans votre
mémoire. J'aimerais savoir si, pour vous, la réponse qu'on
retrouve dans le document gouvernemental à la page 57, et que je viens
de relire est suffisante pour nous donner toutes les garanties quant à
une protection du parc de logements locatif dans l'hypothèse de la
levée du moratoire sur la conversion des immeubles locatifs en
copropriété.
M. Gardiner: Nous pensons qu'il faut donner un message clair et
sans équivoque disant que le parc résidentiel ne doit pas
être subdivisé et mis en vente appartement par appartement ou
étage par étage et qu'on définira les quelques exceptions
à ce règlement qui permettraient aux tribunaux administratifs, en
temps et lieu, de statuer sur ma demande, à savoir si elle correspond
à l'exception oui ou non, tout en permettant, selon notre suggestion,
l'intervention et un rôle de premier intéressé à la
ville de Montréal. Nous croyons que l'inverse, soit
généraliser le droit et baliser son application, ferait en sorte
qu'on serait appelé constamment à légiférer sur
l'application la plus large possible par les premiers intéressés
à la conversion, à savoir le propriétaire, le
développeur, le promoteur, et à tenter de voir si cela est abusif
ou respecte les balises qu'on aurait mises en place. C'est une situation qui
est, pour nous, très différente de la proposition qu'on met sur
la table bien que les objectifs de l'un et de l'autre soient les mêmes:
protéger les locataires, protéger le parc locatif, donner des
droits accrus aux occupants.
Les objectifs pourraient être semblables mais nous croyons
sincèrement qu'il y a une différence importante dans notre
approche et qui est dans l'intérêt de l'ensemble des occupants des
logements à Montréal et, au premier chef, des locataires.
Le Président (M. Roehefort): Je vous remercie. Maintenant,
je voudrais reconnaître Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Oui, merci, M. le Président. Je sais que le
député de Saint-Jacques et quelques autres de mes
collègues veulent aussi intervenir.
Je veux, comme députée de Maisonneuve,
députée du bas de la ville et députée d'un quartier
considéré comme faisant partie des quartiers centraux dont on
parle et aussi comme Montréalaise vous dire ma plus vive et ma plus
grande satisfaction à l'égard du mémoire que vous avez
déposé. J'en ai pris connaissance ce matin évidemment,
puisque, un peu comme toutes les personnes ici présentes à cette
commission parlementaire ainsi que les membres de la commission, nous en avons
pris connaissance en même temps au moment où vous en faisiez la
lecture.
Je dois vous dire que je n'avais pas vraiment d'appréhension. Je
me disais bien que l'administration municipale actuelle allait prendre partie
en faveur des citoyens les plus vulnérables et certainement ceux qui, de
condition modeste, habitent les quartiers de Montréal. Je dois vous dire
que votre mémoire m'est apparu vraiment d'une expertise
extrêmement éloquente. La démonstration que vous en avez
fait notamment nous amène à admettre que reconnaître un
droit n'en donne pas les conditions d'exercice. Parmi les différences
entre la position que vous nous exprimez ce matin et celle contenue dans ce
document, fondamentalement, je pense qu'il y a une question d'objectif. Vous
dites: L'objectif, c'est l'amélioration des conditions d'habitation quel
qu'en soit le mode d'occupation. Tandis que, dans ce document, l'objectif est
dit comme étant l'accès à la propriété, un
peu quelles qu'en soient les conséquences. Je pense que
l'élément le plus majeur, c'est lorsque vous nous dites: C'est
à cause d'un handicap financier s'il n'y a pas le passage du locatif
à la propriété. L'obstacle majeur est d'abord financier
avant d'être juridique. Je reconnais également comme modification,
je pense - je ne sais si vous interviendrez sur ces constatations que je fais
de votre mémoire - qu'il n'y a pas simplement une différence pour
ce qui est des ojbectifs a poursuivre mais aussi des attitudes.
Immédiatement après votre présentation le ministre a dit:
Nous avons prévu, en page 57, que, s'il y avait des problèmes,
nous aviserions. Alors, son attitude est: Attendons les problèmes, nous
aviserons. Votre attitude est: Prévoyons les problèmes, nous les
éviterons. Je pense que c'est absolument fondamental.
Je note également, comme mesure importante, que vous souhaitez
vraiment qu'il y ait un renversement du fardeau de la preuve dans bien des
occasions pour que cela ne repose pas toujours sur les épaules du
locataire et que les perspectives d'une victoire à ta Régie du
logement ne soient pas aléatoires au risque des représailles
qu'elles peuvent entraîner, d'une part; d'autre part, je pense que
l'élément important que je retiens, c'est que vous souhaitez que
le gouvernement agisse législativement en faveur de l'encadrement des
réparations majeures immédiatement sans attendre
nécessairement la politique globale en matière de subdivision ou
en matière de droit de conversion. C'est parmi les
éléments-Un élément m'a étonnée. Je
vous le cite tout de suite. C'est votre suggestion. Je crois qu'on la retrouve
à la page 31 ou 33 de votre mémoire. Elle concerne la
relocalisation des personnes handicapées ou des personnes
âgées, dans les quartiers, par les propriétaires
investisseurs qui auraient à les déloger. La difficulté
que cela représente, dans les quartiers centraux, c'est qu'il n'y a plus
de terrains. Comment appliquer une recommandation comme celle-là? Vous
dites, avec raison, que si l'on compare avec ce qui s'est fait... Moi aussi,
j'insiste, comme le ministre l'a fait d'ailleurs, pour dire combien non
seulement la conceptualisation de votre mémoire est remarquable, mais la
formulation aussi. Vous insistez pour dire que la conversion se fait de
façon accélérée dans certains secteurs. Cela s'est
passé ailleurs et cela aurait toutes les chances, comme scénario,
de se passer ici. Cela va se passer dans des quartiers centraux où,
justement, il n'y a pas de terrains. Alors, une recommandation comme celle que
l'on retrouve je ne sais plus à quelle page exactement, je pense que
c'est à la fin dans vos recommandations... Oui, c'est à la page
27. Comme solution envisageable, ce serait d'imposer ...Oui, je termine pour
que vous puissiez... (12 heures)
Le Président (M. Rochefort): M. Gardiner, peut-être
que vous avez un commentaire à faire à la suite des commentaires
de Mme la députée de Maisonneuve? Ce sera d'ailleurs, je vous
l'indique immédiatement, le commentaire de conclusion.
M. Gardiner: Ce serait... D'accord, cela sert de conclusion?
Le Président (M. Rochefort): Bien, de conclusion aux
échanges avec l'Opposition. Par la suite, on vous permettra de prendre
quelques...
M. Gardiner: D'abord, c'est une proposition dans un cas
d'exception où la conversion serait permise et ce serait une des
obligations à respecter, je crois, bien que je sache personnellement que
ce n'est pas nécessairement facile de le faire. Là où cela
devrait se faire, je pense que c'est au promoteur, au développeur, de
voir à ce que ce critère soit réalisé, quitte
à ce que la conversion permise ne soit pas réalisable. Je dois
dire... Est-ce que c'est...
Le Président (M. Rochefort): On va vous redonner quelques
minutes tantôt, c'était par rapport à la question de Mme la
députée de Maisonneuve. Cela va? Or donc, le temps
écoulé à la disposition de l'Opposition comme au parti
ministériel est expiré, sur ce, M. le ministre, vous avez un mot
de conclusion?
M. Bourbeau: Oui, c'est simplement pour, à nouveau,
remercier la ville de Montréal de sa contribution substantielle au
débat que nous entreprenons aujourd'hui et pour l'assurer que les propos
tenus par ses représentants et les écrits qu'ils nous laissent
seront considérés très attentivement par le gouvernement
et par le ministre dans l'élaboration de la proposition gouvermentale
qui sera éventuellement - probablement, je présume - soumise
à l'Assemblée nationale cet automne.
Le Président (M. Rochefort): M. le député de
Shefford.
M. Paré: Oui, seulement aussi pour remercier les
représentants de la ville de Montréal pour leur présence
ici, ce matin, afin d'échanger des propos avec nous et aussi pour la
présentation et la qualité de leur mémoire.
Le Président (M. Rochefort): M.
Fainstat.
M. Fainstat: Je veux remercier encore tous les membres de la
commission pour leur écoute attentive et efficace. Je veux simplement
répéter que nous sommes toujours disponibles encore. Nos
fonctionnaires et nos spécialistes sont toujours disposés
à travailler de concert avec les fonctionnaires du gouvernement. Vous
pourrez compter sur notre coopération, parce que nous cherchons une
solution aux problèmes que nous avons soulevés. Nous avons les
mêmes buts, il s'agit de trouver la façon la plus efficace, la
plus humaine et la plus juste afin d'arriver a ces mêmes buts que nous
partageons.
Le Président (M. Rochefort): À mon tour, je veux
vous remercier, M. Fainstat, M. Gardiner et M. Lavallée, de votre
participation à nos travaux et de votre contribution substantielle
à l'information des membres de la commission. Merci.
Sans plus tarder, j'aimerais inviter maintenant les représentants
de l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec
à se présenter devant nous. M. Beaudoin Rousseau, nous vous
souhaitons la bienvenue parmi nous. Je vous demanderais, pour l'information des
membres de la commission et pour le service de transcription de nos
échanges, de nous présenter les personnes qui vous accompagnent.
Par la suite, vous aurez une période de quinze minutes pour nous faire
la présentation des points de vue de votre association face au dossier
qui nous réunit ce matin.
Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec
M. Beaudoin Rousseau (Omer): Merci, M. le Président. MM.
les membres de cette commission, M. le ministre, M. le critique de
l'Opposition, contrairement à la ville de Montréal, je pense que
nous avons besoin de présenter un peu notre organisme. Il s'agit de
l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, un
organisme sans but lucratif qui représente plus de 7700 entreprises
réparties à travers le Québec, dont treize
régionales qui portent le nom de APCHQ. D'autres associations sont
affiliées, notamment la Fédération provinciale du
bâtiment et de l'habitation du Québec de même que la
Société québécoise des manufacturiers
d'habitations.
Essentiellement, l'association provinciale est un organisme de
représentation et aussi de services. Or, concernant les services, je
voudrais simplement dire quelques mots, à savoir que nous avons
institué, depuis 1976, la Garantie des maisons neuves et qu'à ce
chapitre, nous avons enregistré plus de 125 000 unités
d'habitation. Et, aussi, la preuve que nous sommes un organisme
représentatif d'environ 80 % de tout ce qui se fait comme logement au
Québec, dans le cadre de Corvée-habitation, l'APCHQ a
enregistré à son programme 95 % des unités.
Cela dit, d'ailleurs, une première au Canada a été
introduite par l'APCHQ, en 1985, par l'instauration du programme Garantie
rénovation. Donc, je pense que c'est un mérite, en ce qui
concerne l'organisation, dans le but de mieux protéger le consommateur
qui transige avec des entrepreneurs en construction.
Enfin, je dirai aussi que l'APCHQ s'intéresse à la
recherche puisque, actuellement, elle administre le programme R-2000,
c'est-à-dire des maisons à haut rendement
énergétique. Alors, vous comprendrez que les raisons qui nous
motivent sont que, tout simplement, les premiers intéressés dans
la conversion ou la levée du moratoire sont aussi les entrepreneurs qui
auront à exécuter les travaux dans l'industrie de la
construction.
Alors, sur ce, je vous présente, à ma droite, M. Serge
Crochetière qui est conseiller principal de l'organisation et M. Gilles
Doyon. Je laisse le soin à M. Serge Crochetière de
présenter les prises de position de l'organisme et de les commenter.
Alors, M. Crochetière.
Le Président (M. Rochefort): M.
Crochetière, en vous rappelant que vous avez une quinzaine de
minutes.
M. Crochetière (Serge): Oui, M. le Président, M. le
Président, M. le ministre, membres de la commission, comme je n'ai que
quinze minutes, je ne procéderai pas è la lecture, je vais
seulement vous expliquer, dans un premier temps, comment on a abordé le
dossier. Le document de consultation, quant à nous, était un
énoncé de principe è l'effet qu'on voulait lever le
moratoire tout en conservant trois grands objectifs, c'est-à-dire,
premièrement, la protection des locataires, avec deux volets: le droit
au maintien dans les lieux et le droit de préemption;
deuxièmement, le droit des acquéreurs subséquents et,
troisièmement, les mécanismes d'ajustement ou
d'assouplissement.
Notre mémoire s'est basé un peu là-dessus. Au tout
début, en termes d'appréciation quant au document qui nous a
été soumis, je dois dire que la position de principe de
l'association et je le répète -elle a été, dans le
passé, plusieurs fois exprimée - c'est que nous sommes pour la
levée du moratoire parce que nous avons toujours favorisé
l'accession à la propriété sous toutes ses formes.
Cependant, quant à la présentation du document de consultation,
nous avons émis certaines réserves relativement aux statistiques,
études qui y étaient démontrées parce que,
notamment en ce qui a trait au service économique, on n'arrivait pas
è y retrouver des garanties de scénarios futurs qui pourraient se
réaliser après la levée du moratoire. Quant à un
second aspect du document de présentation, évidemment, il y avait
l'expression de la volonté de lever le moratoire, mais pour ce qui est
des modalités concrètes, on dit qu'il faudrait qu'il y ait un
texte législatif. Nous sommes d'autant plus persuadés de cela
après avoir entendu les autorités de la ville de Montréal.
Si jamais le législateur allait modifier les textes, notamment en allant
jusqu'au Code civil, il faudrait absolument qu'il y ait une autre commission
parce que certaines des positions qui pourraient y être reprises auraient
un effet direct sur la construction. Notamment, si on touche à tout
l'aspect des réparations majeures, il est d'une importance primordiale
pour les entrepreneurs de savoir dans quel contexte cela peut se faire.
Alors, c'est pour ce qui est des aspects généraux de la
perception du document de consultation. Maintenant, quant au but que tente de
rejoindre le document c'est-à-dire, en premier lieu, la protection des
locataires. La première mesure qui est exprimée, c'est le droit
au maintien dans les lieux. Or, le droit au maintien dans les lieux pour une
période illimitée, une protection blindée, nous devons
malheureusement vous dire qu'on n'y croit pas. Je ne sais pas si on peut dire
qu'on fait "confiance" - entre guillemets -dans l'esprit d'initiative ou
l'imagination des promoteurs ou des spéculateurs, mais
l'expérience nous a prouvé qu'il est à peu près
impensable et impossible d'avoir un texte législatif qui pourrait faire
face à toutes les situations sans, d'autre part, créer des
iniquités.
Alors, on dit: Plutôt que de tenter l'impossible, notre approche
serait d'établir des règles du jeu plus brèves dans le
temps mais plus sécurisantes pour les locataires et aussi pour les
investisseurs, afin qu'ils sachent à l'avance quelles sont les
règles du jeu. L'effet aussi du droit au maintien dans les lieux pour
une période illimitée, quant à nous, là-dessus,
nous rejoignons les éléments avancés par la ville de
Montréal. Nous croyons sincèrement que cela risque d'inciter
davantage de propriétaires à faire usage de la
transformation.
Par exemple, si, personnellement, j'avais quelqu'un qui me consultait
à le suite de l'adoption du document tel qu'il a été
présenté dans les règlements, je lui dirais:
Écoute, tu as un immeuble de six logements sur le Plateau Mont-Royal,
procède immédiatement à la transformation en
copropriété, cela ne te coûte presque rien et les avantages
sont énormes. Tu as un droit acquis. Si, éventuellement, tes taux
d'intérêt augmentent, tu pourras vendre un seut des logements s'il
est libéré et le droit de préemption dans ce contexte est
beaucoup moins grand à supporter. Or, nous croyons vraiment que cela
pourrait avoir comme effet non pas de retarder, mais d'inciter à une
plus grande conversion, et pas nécessairement pour expulser les
locataires immédiatement. Mais uniquement, en termes statistiques, on
pourrait avoir plus de conversions que ce qu'on pourrait prévoir.
Dans un deuxième temps, nous croyons que cela ralentirait
l'incitation des propriétaires à faire des réparations et,
dans certains cas, troisièmement, cela pourrait même les inciter
à attendre des dégradations plus grandes pour qu'on puisse
considérer que les travaux sont urgents et donc, forcer les gens
à les faire. Évidemment, je ne suis pas là pour commenter
le mémoire de la ville de Montréal, mais par rapport aux
propositions qu'elle a avancées, ce serait très risqué
d'interdire ou d'amener des mesures de contrainte quant aux travaux à
apporter sur les immeubles, parce que cela pourrait inciter les
propriétaires à laisser l'immeuble se dégrader pour
être forcé, finalement, par la ville elle-même, qui
enverrait des avis pour que soient faits ces travaux qu'elle aurait
refusés deux ans auparavant. Nous ne croyons pas qu'il soit judicieux
d'intervenir de cette façon.
Parce que nous ne croyons pas à une protection blindée,
nous disons: Pourquoi ne
pas avoir une approche pragmatique qui empêcherait un trop grand
nombre d'individus de changer la vocation de leur immeuble pour en faire des
copropriétés divises uniquement pour attendre qu'un jour, cela
puisse être plus payant pour eux. Mettons des conditions qui satisfassent
le propriétaire promoteur, c'est-à-dire qu'il connaisse
exactement quelles sont les règles du jeu, qu'il établisse ou
qu'il puisse établir d'avance quels sont ses risques financiers et
quelle est la rentabilité qu'il pourra en retirer tout en nous assurant
que les locataires pourront être prévenus à l'avance et en
retirer une compensation. Je dois ici établir que, quant à nous,
le droit au maintien dans les lieux est un droit qui existe mais qui ne prime
pas le droit de propriété. Le droit au maintien dans les lieux ne
doit pas non plus, sous cette forme, devenir un droit d'appropriation des
immeubles.
Le scénario que nous avons envisagé est d'établir
un délai de deux ans qui gèlerait toute conversion et qui aurait
pour mérite, dès maintenant, d'empêcher une conversion pour
les deux prochaines années - on verra tantôt les mécanismes
d'assouplissement - et de permettre au marché de s'ajuster. Dans un
premier temps, quiconque voudrait procéder à une transformation
devrait envoyer un avis à tous ses locataires et, subséquemrnent,
déposer sa requête pour demander l'autorisation en conversion
auprès de la Régie du logement. Cette requête devrait
être assortie de la liste exhaustive des locataires occupants, au moment
de la demande de conversion, ainsi que de la copie des baux.
Deuxièmement, nous préconisons que le promoteur
propriétaire soit tenu de payer une compensation équivalent
à trois mois de loyer et qu'il fournisse caution à la
régie de pouvoir payer ce montant. La raison pour laquelle nous
préconisons trois mois, c'est que nous demandons aussi que, pendant les
deux années d'attente pour la transformation, il n'y ait aucune hausse
de loyer. Alors, nous avons considéré que trois mois
capitalisés devraient normalement équivaloir à peu
près à l'augmentation que le locataire devrait avoir à
subir lorsqu'il déménagera dans trois ans. Entre-temps, il ne
subirait aucune augmentation pendant deux ans. Cela fait trois ans à la
charge du promoteur propriétaire pour s'assurer que le locataire n'aura
pas à subir des hausses. En plus, il devra lui défrayer ses
coûts de déménagement. Trois ans, cela nous apparaît
une mesure juste, parce que nous ne considérons pas non plus que le
propriétaire doive supporter seul la charge sociale de gens à
revenu moins important et nous ne discutons pas du cas des gens qui, eux, avec
un revenu suffisamment important, choisissent de demeurer locataires. C'est un
autre débat que celui-là. (12 h 15)
Après trois ans, si l'État considère qu'on doive
aider ces gens-là, l'aide au maintien dans les lieux devrait
plutôt se traduire par une aide à la personne, pour aider les
défavorisés à payer. Ce n'est pas au propriétaire
à supporter indéfiniment la charge de locataires, qui eux ne sont
pas capables de suivre le cours économique de la location dans
l'immeuble qu'il possède. Or, c'est la démarche que nous
préconisons. De plus, évidemment, il y aura un droit de
préemption pour le locataire occupant dont le nom aurait
été dénoncé à la régie et il pourrait
aussi, ce même locataire occupant, se prévaloir de
l'indemnité de trois mots, à titre de dépôt, s'il
voulait acheter l'unité transformée en copropriété
qu'il occupe.
C'est, encore une fois, l'attitude ou la solution que nous
considérons la plus juste et la plus déterminante dans les
circonstances. Cependant, si le législateur passait outre à notre
approche quant aux recommandations contenues dans le document, on demanderait
de clarifier certains points particuliers, notamment, le délai de trois
ans après un premier refus. S'il n'y a pas eu de premier refus, à
partir de quand les trois ans seront-ils calculés? Est-ce que cela sera
à compter de la demande de transformation ou à compter des
travaux? Le texte est ambigu à cet égard.
D'autre part, il faudrait aussi interdire au locataire occupant de
céder son bail. Je parle de cession de bail et non pas de sous-location.
La loi prévoit des cessions de bail actuellement et il ne faudrait pas
que, par ce biais-là, les locataires spéculent sur le droit au
maintien dans les lieux et s'enrichissent aux dépens du
propriétaire. Ce qu'on voudrait interdire à l'un ne devrait pas
bénéficier à l'autre, en contrepartie. Enfin, il faudrait
s'assurer que toutes les dispositions concernant la copropriété
divise, la copropriété indivise, la gestion et l'administration
des immeubles prévues dans le projet de loi 20 qui a été
adopté en deuxième lecture et dont on ignore désormais
quel sera le sort, il faudrait s'assurer, dis-je, que les dispositions au
projet de loi 20 soient traitées en fonction de la vocation ou de
l'orientation qu'on va donner à cette nouvelle loi.
Enfin, concernant la protection des locataires, si on entend modifier
les méthodes d'évaluation foncière pour donner des
avantages fiscaux, il faut faire attention que cela ne vienne pas perturber le
marché de la construction neuve, c'est-à-dire, avoir un
système de deux poids, deux mesures, un système fiscal
inéquitable pourrait être désastreux dans certaines
circonstances pour la construction neuve. Alors, il faudrait absolument en
tenir compte si on voulait introduire des méthodes d'évaluation
particulières dans ces cas-là.
Ce sont là nos recommandations et nos
commentaires concernant la protection des locataires.
Quant à la protection des acquéreurs, ici on va
peut-être être un peu prétentieux ou vous paraître
prétentieux, mais nous considérons que, quant à la
protection des acheteurs, nous sommes ceux qui avons la meilleure
expérience dans ce domaine et les recommandations du document de
consultation, M. le ministre, sont inapplicables.
Je vais vous donner un exemple. Vous avez une grosse conciergerie de 150
unités de logements, prenons le cas de la place Simpson, au
centre-ville, qui n'est pas encore vendue. Cela fait quatre ans qu'il y a eu un
gel, les ventes se font seulement lorsque les locataires libèrent. Votre
expertise, celle qui a été faite au moment de la demande de
modifications, a été faite il y a cinq ans. Quant aux vices
cachés, ceux qui vont avoir été acceptés, ce qu'il
y aurait ou ce qu'il n'y aurait pas eu dans l'expertise, est-ce que cela va
bénéficier à ceux qui vont acheter six ans plus tard?
Comment va-t-on traiter le droit de gestion? Qui sera l'administrateur? Est-ce
que ce sera le promoteur qui va continuer? Alors, je vous le dis, cela risque
de créer plus de problèmes.
Nos recommandations à ce sujet sont, dans un premier temps, qu'il
y ait obligation tout simplement de fournir un plan du gros oeuvre et, dans un
second temps, qu'il y ait dans les cas de transformation, obligation de fournir
la garantie d'un programme de rénovation, dont celui de l'Association
provinciale des constructeurs d'habitations du Québec.
Enfin, quant aux mécanismes d'assouplissement - puisqu'on me fait
signe que mon temps achève - nous parlerons de la protection du parc
locatif. Or, nous considérons que, évidemment, cela prend des
mécanismes d'assouplissement. Alors, on dit: Pourquoi ne pas donner aux
municipalités le pouvoir d'établir des zones d'interventions
privilégiées sur chacun de leur territoire ainsi que des quotas
alliés à notre proposition, ce qui prendrait deux ans avant de
voir les premières conversions? Chacune des municipalités
pourrait définir sa politique sur son territoire et adopter les mesures
appropriées pour permettre ou limiter la-conversion. En gros, ce sont
les positions exprimées dans notre mémoire. Merci.
Le Président (M. Rochefort): M.
Crochetière, je vous remercie de votre présentation. M. le
ministre pour une quinzaine de minutes.
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai l'un de mes
collègues qui va vous poser des questions. Je voudrais simplement faire
deux ou trois remarques pour tenter d'éclaircir le dossier le plus
possible. Alors, l'interdiction qui serait faite à un
propriétaire de demander une nouvelle autorisation au cas où il y
aurait un refus de la part de la Régie du logement, c'est de trois ans
à partir de la date du refus de la Régie du logement, non pas de
la date des travaux. Par exemple, si un propriétaire a effectué
des réparations majeures et a évincé des locataires dans
le but de préparer l'immeuble à la conversion, donc, à ce
moment, si la Régie du logement en vient à la conclusion que
c'est ce qu'il a fait, elle statuerait son refus et ce refus entraînerait
l'impossibilité de convertir pour trois ans à partir de ce
moment. C'est la proposition gouvernementale.
M. Crochetière: C'est de l'intérêt de tout le
monde d'aller demander le plus rapidement possible sa conversion pour pouvoir
bénéficier du trois ans.
M. Bourbeau: Non. C'est-à-dire que, si on a de la
conversion, on doit convertir dans l'année qui suit, sans quoi, le
permis n'est plus valable. Donc, on ne peut pas traîner
indéfiniment.
M. Crochetière: Un refus automatique et trois ans
après on retournerait.
M. Bourbeau: Trois ans après, on retournerait.
M. Crochetière: D'accord.
M. Bourbeau: Si trois ans après on avait encore fait le
même petit jeu, on aurait un autre refus pour trois ans encore.
M. Crochetière: D'accord.
M. Bourbeau: Maintenant, les droits des sous-locataires. Notre
compréhension, c'est que tes sous-locataires, s'il y a une cession de
bail, auraient les mêmes droits que le locataire. Si le locataire a un
droit de préemption ou un droit de maintien dans les lieux, son
sous-locataire a le même droit.
M. Crochetière: M. le ministre, l'expérience nous
prouve qu'ils vendent les clés. Il y a certaines grandes conciergeries
où cela se vend jusqu'à 15 000 $, 20 000 $ ou 25 000 $. Je ne
crois pas que le législateur puisse envisager cela, parce que ce qu'il
veut faire pour protéger les petits immeubles va avoir des
conséquences beaucoup plus grandes dans les grands immeubles du
centre-ville.
M. Bourbeau: Je comprends que, de votre point de vue, il y a des
problèmes. Il y a également des problèmes, semble-t-il,
avec la protection des acquéreurs. Les mesures que nous proposons ne
vous semblent pas adéquates. Nous proposons un rapport
d'expert et un prospectus. Je veux reconnaître d'emblée la
grande expertise de l'APCHQ dans tous ces domaines. Alors, dans les semaines
à venir, lorsque nous procéderons à des consultations pour
fignoler notre propre position è la suite de toutes les demandes et de
toutes les interventions qui seront faites ici, sûrement que vous aurez
l'occasion de nous faire valoir vos points de vue d'une façon encore
plus directe sur les questions où il semblerait y avoir des divergences
de vue importantes entre l'APCHQ et le gouvernement.
M. Crochetière: C'est parce qu'on a vécu ces
problèmes en mettant sur pied nos programmes de rénovation dans
des immeubles existants, pour les convertir en copropriété, dans
les cas où cela se faisait.
M. Bourbeau: Nous sommes là justement pour vous entendre
et pour voir comment on pourrait bonifier la proposition.
M. Crochetière: On va vous donner notre garantie.
M. Bourbeau: Finalement, une dernière question. Enfin, je
remarque que ce que nous disons, dans notre proposition, c'est que nous voulons
que les locataires aient un droit au maintien dans les lieux, pour une
période illimitée. On parle, bien sûr, du locataire en
place au moment où la Régie du logement rend son autorisation.
Vous nous dites que le système n'est pas à votre goût et
que vous en avez un meilleur. Vous nous dites que les locataires auraient une
protection de deux ans ou peut-être de trois ans. J'ai lu deux ans, mais
vous semblez dire trois ans.
M. Crochetière: La demande dans le nouveau renouvellement,
dans certains cas, pourrait aller jusqu'à deux ans et onze mois.
M. Bourbeau: Disons entre deux et trois ans et, après
cela, le locataire devrait quitter moyennant un paiement de trois mois de
loyer. Je trouve que finalement, en toute déférence pour votre
position, la position gouvernementale donne beaucoup plus de protection au
locataire, puisque le droit au maintien dans les lieux est illimité,
donc perpétuel si je peux dire, pour ce locataire. Alors que vous, vous
le mettez à la porte au bout de trois ans, finalement.
M. Crochetière: Oui, pour deux considérations.
Premièrement, on dit que, effectivement, il appartient a l'État,
après trois ans, de supporter les coûts de maintien dans les
lieux, si l'État le veut, d'une part. D'autre part, on ne croit pas, M.
le ministre, qu'il n'y aura personne qui ne trouvera pas de solution pour
expulser vos locataires qui vont avoir sur papier, un droit au maintien dans
les lieux pour une période illimitée. On peut se tromper.
Souhaitons qu'on se trompe. Mais on pourrait imaginer des scénarios
où des gens réussiront quand même à expulser des
locataires. À ce moment-là, ils n'auront rien, aucun
bénéfice, alors que notre proposition, croyons-nous, a le
mérite au moins de leur assurer une protection de base.
M. Bourbeau: Ce sera évidemment à la formule
gouvernementale de prévoir que les locataires soient parfaitement
informés de leurs droits et qu'ils puissent se défendre
correctement contre les mauvais propriétaires qui voudraient les
expulser ou les harceler, je présume.
M. Crochetière: Je n'ai pas parlé de mauvais, j'ai
parlé peut-être de pulsions économiques ou d'impulsions qui
pourraient amener certains propriétaires à agir de façon
à contourner la loi, tout en restant dans la légalité. Je
n'ai pas parlé de harcèlement.
M. Bourbeau: Comme cela se fait présentement.
M. Crochetière: Comme cela se fait présentement. On
a déjà trouvé des trous et on risque d'en trouver
encore.
M. Bourbeau: Alors, on vous demandera conseil pour tenter de les
boucher.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Crochetière: Tout dépend de qui retiendra nos
services. Ha! Ha! Ha!
M. Bourbeau: Je crois que le député de
Louis-Hébert aurait des questions à poser.
Le Président (M. Rochefort): Oui. Je vous remercie, M. le
ministre.
À moins que !a commission décide de fonctionner autrement,
on va y aller par alternance. M. le député de Shefford et
ensuite, évidemment, je retiendrai le nom du député de
Louis-Hébert.
M. le député de Shefford.
M. Paré: Merci, M. le Président. Bienvenue aux gens
de l'association. Je dois vous dire que je n'aî malheureusement pas eu le
temps de le lire. Comme on n'en a pas fait la lecture, je vais échanger
selon les commentaires et les remarques que vous avez faits. J'espère
que cela sera toujours en ligne directe avec le contenu du mémoire que
j'ai reçu seulement ce matin. Mais il y a une chose que je tiens
à faire au tout départ, c'est de féliciter l'Association
provinciale des constructeurs d'habitations du Québec pour son plan de
garantie. Je pense que c'est bon de l'amener parce que vous devancez même
le gouvernement qui devrait
mettre en application la loi 53 sur le bâtiment qui permettrait
justement les plans de garantie. Mais le gouvernement ne Ta pas fait. Donc, on
ne peut pas faire autrement que de reconnaître ce que votre association a
fait et la féliciter, dans ce sens, pour la protection du
consommateur.
Ma première question. Vous avez, lors de votre exposé,
à quelques reprises, parlé des effets sur la construction de
logements neufs. J'aimerais qu'on puisse élaborer là-dessus. Si
le moratoire était levé, tel qu'on le retrouve dans la
proposition gouvernementale, que le permis soit accordé à tout le
monde et qu'il se produise une inondation du marché de logements
à vendre, quels seraient, à votre avis, les effets sur la
construction et les logements neufs?
M. Crochetière: Encore une fois, j'ai pris la peine de
dire, au début, que nous n'avions pas de scénario qui puisse nous
dire quel serait le résultat. Mais, imaginons celui susceptible de se
produire. C'est-à-dire qu'actuellement, le droit au maintien pour une
période illimitée pourrait inciter un grand nombre de
propriétaires à demander immédiatement la conversion. Avec
les années, cela ne serait pas nécessairement des logements qu'on
retrouverait pour fins de vente sur le marché. Cependant, si on s'en
rapporte aux études démographiques et aux besoins futurs du
Québec dans les années quatre-vingt-dix, on parle d'une chute du
besoin qui se situerait peut-être a 25 000 ou 26 000 unités par
année. Si au cours des ans, d'ici 1992 à 1995, on a
accumulé en milieu urbain 10 000 unités susceptibles d'être
vendues, dans un contexte où on a une demande décroissante, une
courbe démographique à peu près stable, avec une
population vieillissante, il est évident que si vous amenez 7000, 8000
ou 9000 unités à vendre dans ce marché, les autres ne se
construiront pas. Vous allez peut-être en construire, à la marge,
2000 de moins parce qu'il va y avoir évidemment un jeu, soit
l'attraction du neuf par rapport à l'existant, contre le centre-ville
par rapport à la banlieue. Mais, si on tient compte de tous ces
éléments, il est impensable qu'il n'y ait pas une interrelation.
Il y a aussi tout l'aspect du travail qui est fait dans la rénovation.
C'est un marché qui est souvent beaucoup plus accessible au travail au
noir. Il y a eu des tentations de la part du gouvernement, à
différentes époques, de permettre des conditions de travail
différentes dans l'existant par rapport au neuf. Tout cela nous fait
craindre qu'on vienne créer un marché privilégié
dans l'existant. Ne serait-ce aussi, comme on le soulignait tantôt, que
la question d'équité fiscale, si on vient établir des
conditions de taxation différentes dans l'existant par rapport au neuf.
Encore là, il va falloir qu'on mesure tous ces éléments.
C'est dans ce contexte qu'on dit qu'il y a one interrelation entre les deux et,
de favoriser librement une trop grande accession ou un trop grand apport
d'existant par rapport au neuf, cela ne peut que créer de la distorsion
sur le marché. C'est pourquoi on préconise une approche plus
lente, plus graduelle. (12 h 30)
M. Paré: Est-ce que vous croyez à
l'énoncé qu'on retrouve dans le document ministériel qui
dit que le fait qu'on permette globalement la levée du moratoire va
probablement amener beaucoup de logements à vendre et va amener une
baisse du prix de vente? Est-ce que vous croyez, effectivement, parce qu'il
risque d'avoir beaucoup de logements à vendre - on sait que cela
affectera les quartiers très populaires de Montréal et
Québec particulièrement - que cela va faire baisser les prix?
M. Crochetière: Cela se pourrait. Le scénario que
je viens de vous décrire, dans une concurrence entre te neuf et
l'existant, aurait un effet à la baisse sur les prix. En contrepartie,
on peut dire que, quand on transforme, cela vaut plus cher normalement qu'au
niveau locatif. En contrepartie, les taxes sont plus élevées et,
graduellement, les loyers sont plus élevés. La valeur
économique des immeubles en location étant plus
élevée, est-ce qu'il n'y aura pas, par effet
d'enchaînement, un accroissement de la valeur du neuf ou des logements?
Je ne peux pas vous répondre comme cela, oui ou non. Je vous dis que
cela se peut.
M. Paré: Certains objectifs sont poursuivis. On parle
d'accès à la propriété et de protection des
locataires. C'est à peu près, grosso modo, les objectifs majeurs
qu'on veut privilégier. On retrouve dans votre dossier que la commission
est peut-être prématurée - comme je vous le dis, je l'ai lu
très vite - aussi, le manque d'études d'impact sur les
conséquences de la levée du moratoire. Pour être capable
d'atteindre les objectifs qu'on s'est fixés, est-ce qu'il ne serait pas
plus simple, est-ce qu'on n'obtiendrait pas plus rapidement satisfaction si,
tout simplement, on amenait un meilleur programme de rénovation avec
protection aux locataires et un programme d'accès à la
propriété pour les locataires qui ont les moyens? Est-ce qu'on ne
serait pas mieux de privilégier des programmes d'aide plutôt que
de venir perturber le marché?
M. Crochetière: Encore là, il faudrait faire
attention au fait que les programmes d'aide soient des aides à la
personne et non pas en fonction de la tenure ou de la structure dans laquelle
ils se trouvent. Autrement, vous allez perturber le marché si vous
favorisez un programme d'aide à
l'accession au logement existant- Les gens vont aller chercher cette
forme d'aide plutôt que d'aller chercher du neuf. Aussi, tous les
problèmes de l'indivision vont inévitablement se
perpétuer. Alors, encore une fois, je regrette, mais je ne suis pas
capable de vous dire spécifiquement si c'est blanc ou noir. Cela
crée des problèmes, cela crée des distorsions sur le
marché, quelle que soit la mesure qu'on va prendre. Si vous me dites:
Est-ce que cela ne serait pas mieux pour le marché qu'on gèle
è toutes fins utiles toute transformation? Nous disons: non.
M. Paré: Quand je spécifiais un programme d'aide
d'accès à la propriété, je parlais d'un programme
universel avec le choix au futur acquéreur entre le quartier de son
choix, entre l'ancien et le nouveau en matière de logement. Est-ce que
cela n'est pas plus simple et n'est-ce pas la meilleure façon de
favoriser l'accès à la propriété sans amener de
perturbations majeures dans certains quartiers?
M. Crochetière: On a toujours été favorable
à cela, soit un programme d'accès à la
propriété.
M. Paré: Vous amenez une proposition qui a l'avantage
d'être très claire, je dois le dire. Au départ, nous ne
pouvons pas contester cela. Ce n'est pas...
Une voix: Une franchise brutale.
M. Paré: ...une franchise brutale, comme dit ma
collègue, effectivement. Un montant est accordé pour une
période délimitée. On ne peut pas demander quelque chose
de plus clair. Mais il y a une préoccupation dans les objectifs qui est
la protection des locataires. À votre avis, si cela se faisait, quels
seraient les effets sur le stock du marché locatif?
M. Crochetière: Dans le cadre de notre proposition?
M. Paré: De votre proposition.
M. Crochetière: Nous pensons que ce seront les vrais
transformateurs qui vont s'en prévaloir. Avec deux ans d'avance,
même à trois ans, avec un prix préétabli, cela ne
sera plus M. Tout-le-monde qui va prendre le risque d'essayer de transformer
son triplex. Donc, l'impact va être moins grand de deux façons,
parce que vous aurez seulement ceux qui vont avoir analysé le
marché et cela va être limité aussi dans des
circonscriptions bien particulières. On n'ira pas faire cela à
Saint-Glinglin ou a 35 milles des centres-villes urbains. C'est sûr que
cela va rester, à ce moment, un élément bien
déterminé, premièrement. Deuxièmement, il ne faut
pas oublier qu'on a assorti cela à un pouvoir aux municipalités
de déterminer les points d'impact et des quotas. Pendant deux ans, avant
de demander à la régie la requête pour la transformation,
on doit aller à la municipalité pour avoir son certificat
d'admissibilité, non pas en termes de structure mais en termes de quota
et de région. La ville ou la municipalité qui
considérerait que l'impact de la nouvelle législation est trop
grand diminuerait tout simplement ses zones d'intervention et ses quotas et,
seuls les véritables promoteurs, encore une fois, seraient
intéressés. Quant au droit au maintien dans les lieux, on peut en
discuter socialement et économiquement aussi. Mais, on a dit, dès
le départ, que le droit au maintien dans les lieux ne devait pas primer
le droit de propriété et que le coût social après un
délai de trois ans, plus les déboursés de trois mois, plus
les déboursés des frais de demande devraient revenir à
l'État et non pas au propriétaire de cet immeuble. On peut
discuter de la pertinence de notre position mais je pense que c'est à
partir de là que nous développons le scénario
d'intervention en matière de levée du moratoire.
M. Paré: Ce serait tout pour le moment.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie M. le
député. Je reconnais maintenant M. le député de
Louis-Hébert, en vous rappelant qu'il reste neuf minutes à votre
formation politique. M. le député de Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. La position qui nous est
exposée par l'association est très intéressante -
peut-être que le micro est un peu loin - nous en prenons bonne note. Je
la compare avec celle qui a été exposée par la ville de
Montréal tout a l'heure - je pense que vous avez eu l'occasion d'y
assister - qui avait une vision des choses tout à fait
différente. En fait, l'analyse que vous faites du document gouvermental
propose une certaine modification sur des modalités. Sur le fond,
c'est-à-dire sur la nécessité de poser des gestes qui
soient de nature à lever globalement le moratoire quitte à
l'encadrer, à le baliser, je pense que vous acceptez cette position de
la ville de Montréal. J'aimerais avoir votre réaction à la
position. On connaît votre réaction à la position
gouvernementale, on en prend bonne note. Comment réagissez-vous à
ce que la ville de Montréal propose, c'est-à-dire de conserver le
moratoire et de l'assortir d'un certain nombre d'exceptions? Est-ce que c'est
une façon de faire les choses qui vous paraisse acceptable? Quelle est
votre réaction à cet égard?
M. Crochetière: En premier lieu - là je parle
personnellement parce que je n'ai pas eu le temps de consulter mes
collègues - je crois que, si on fait cela, cela ne fera que reporter la
discussion dans deux, trois ou quatre ans ou bien, les modalités comme
telles devront être rétablies. L'essence même de leur
position résiderait dans les modalités et les porte-parole n'en
ont exposé aucune. Juste a titre d'illustration, on dit: Plus de
moratoire, mais plus de droit à la conversion, si ce n'est dans des cas
bien particuliers qui pourraient être des cas où il y aurait des
caractéristiques physiques et particulières. En contrepartie, on
dit: On ne se servira plus du tout des droits de transformation et de
réparations autres que majeures sans l'autorisation de la régie.
On va être dans un beau cercle vicieux. Qu'est-ce qu'on va faire pour
arriver à les transformer si pour pouvoir les transformer il faut
physiquement faire des travaux, mais que ces travaux ne sont pas permis juste
au cas où la régie pourrait intervenir? Quelle est l'expertise et
l'expérience de la Régie du logement en matière de
construction ou de rénovation? Est-ce qu'à ce moment il ne sera
pas plus avantageux... Si j'ai un triplex dans un quartier centre de
Montréal, juste à la limite, je ne serai jamais assez fou pour
aller le réparer si je veux le transformer. De façon bien
concrète, il ne faut pas non plus être angélique et penser
que les gens vont jouer le jeu du gouvernement, s'ils veulent transformer.
C'est faux. Alors, ils vont le laisser se dégrader jusqu'à ce que
la ville elle-même intervienne pour te dire de faire les transformations.
Tu as un certificat de la ville, tu vas à la régie et tu dis: II
faut que je fasse des transformations, la ville m'y oblige. En même
temps, tu dis: Bien, je rentre dans les critères de la ville de
Montréal, parce que, comme j'ai fait les transformations, physiquement,
j'ai la même chose. Est-ce que c'est à cela qu'on va en arriver?
Vous me demandez de commenter ta position de la ville de Montréal. La
ville de Montréal parlait d'un droit à rester dans le quartier,
un droit au maintien dans les lieux. Il y a un droit au maintien dans les
lieux, mais je ne l'ai jamais vu exprimé autrement que socialement et
peut-être même moralement, le droit de permettre aux gens de
choisir le quartier où ils veulent habiter. Mais ce n'est pas un droit
établi et absolu au point que tous les autres droits traditionnels de
propriété doivent s'estomper devant lui. On parle de quoi? Encore
une fois, je ne peux pas commenter toute la proposition de la ville de
Montréal, quant à moi, elle n'en a pas fait. Ses porte-parole ont
énoncé un principe mais ils n'ont pas dit comment il
s'appliquerait.
M. Doyon: En fait, ce que vous mettez en cause, c'est l'absence
de précision sur la proposition. C'est-à-dire que le rejet de la
proposition gouvernementale par la ville de Montréal est une chose, mais
la proposition concrète qu'elle voudrait faire nous laisse un peu dans
le vague.
M. Crochetière: On refuse la proposition telle qu'elle
nous est faite; on demande le gel et on déterminera des cas d'exception
plus tard conjointement à cela.
M. Doyon: Cela veut dire que c'est le statu quo.
M. Crochetière: C'est encore pire, parce qu'ils demandent
en plus de libérer la nouvelle législation de contrainte, pour
intervenir au chapitre des travaux. C'est très dangereux, parce que ce
n'est pas tout le monde qui fait des travaux pour convertir en
copropriété, ce n'est pas vrai. La plupart des gens n'ont pas
l'intention de convertir en copropriété, ils veulent
réparer leur maison. Souvent, ils y habitent ou souvent ils la
possèdent depuis 15 ou 20 ans et en retirent un profit et ils veulent
avoir une bonne valeur et ils sont fiers de leur bâtisse. Vont-Us
être, à chaque fois, obligés d'aller à la
régie pour demander s'ils peuvent changer les cadres de fenêtres?
Cela ne se tient pas.
M. Doyon: Avec le risque d'une détérioration
éventuelle du parc immobilier.
M. Crochetière: C'est sûr. C'est évident.
Vous ne pouvez pas mettre tout le fardeau sur les épaules des
propriétaires pour garder le plus de valeur possible à leurs
immeubles. Ce n'est pas vrai. Les gens vont se dire: Quant à aller
à la régie chaque année pour peinturer mes fenêtres,
je vais attendre aux cinq ans, c'est moins astreignant de me présenter a
ta régie quand j'en ai 20 à faire faire a la fois.
M. Doyon: En ce qui concerne les règles que vous voulez
avoir c'est-à-dire le droit de maintien illimité, vous n'y croyez
pas pour des raisons que vous nous avez expliquées. Vous voulez le voir
assorti d'un certain... Vous voulez des règles définies aussi
bien pour le propriétaire que pour l'acquéreur éventuel,
que tout le monde sache à quoi s'en tenir, c'est-à-dire que vous
parlez de deux ans, quelque chose entre deux et trois ans. Est-ce que cette
règle de deux à trois ans serait immuable dans ce sens qu'il n'y
aurait pas possibilité pendant les deux ou trois prochaines
années de procéder à aucune conversion en
copropriété divise ou si à l'intérieur de ces
règles-là, en cas d'unanimité ou en cas d'accord entre les
parties, il ne pourrait pas se faire des transformations, des conversions qui
pourraient être acceptables à tout le monde?
M. Crochetière: Si le législateur voulait assouplir
cette règle, d'accord. Notre position était plus rigide que celle
que vous venez d'exprimer. On croyait que les deux ans pourraient être un
prérequis pour permettre à tout le monde de s'ajuster, mais
peut-être que dans certains cas vous pourriez l'assouplir davantage.
M. Doyon: En ce qui concerne, on en disait un mot tout à
l'heure, les risques de détérioration du parc résidentiel,
avez-vous une expertise dont vous seriez en mesure de nous faire part? Quelle
est ta situation actuelle du parc immobilier en ce qui a trait aux
réparations requises et concernant sa valeur, est-ce qu'il
s'améliore, est-ce qu'il se détériore? Qu'est-ce qu'il se
passe actuellement? Est-ce que vous êtes en mesure de nous informer
là-dessus?
M. Crochetière: Personnellement, je n'ai aucune
statistique, je ne sais pas si le service économique... Non, on n'a pas
fait l'analyse de cela.
M. Doyon: Vous n'avez aucune donnée là-dessus.
Est-ce que vous pensez que le fait de lever le moratoire, selon des
modalités qu'on est en train de discuter ensemble, aurait pour effet
éventuel d'améliorer l'état du parc immobilier? Avez-vous
étudié cette possibilité, cette éventualité?
Est-ce que la levée du moratoire aurait un effet sur la qualité
du parc résidentiel au Québec?
M. Croehetière: Écoutez, les seules conversations
que j'ai eues avec les gens du service économique font état que
cela dépend de la structure ou du type de logement. Dans certains
immeubles, d'abord, certains n'ont pas besoin - on parle des grosses
conciergeries de béton - de transformation. Alors, à ce niveau,
l'impact serait sûrement petit. Dans certains quartiers, je pense, par
exemple, autour du Carré Saint-Louis, la transformation et la
rénovation ont déjà été faites, alors, cela
ne changerait pas grand-chose.
Dans d'autres quartiers où vraiment c'est plus
dégradé mais où il y a de bonnes localisations, là,
oui, l'impact serait plus grand. De là à vous donner des
chiffres, c'est impossible. Mais, par déduction et par des conversations
qu'on a eues à ce niveau, cela dépendrait du type de structure et
de sa localisation pour savoir si cela inciterait ou non les gens. Il est
certain, cependant, qu'il n'y aurait pas de dégradation amenée,
cela n'aurait pas un effet incitatif à laisser se dégrader, donc,
on peut croire que cela serait, au moins, l'équivalent à ce que
c'est aujourd'hui et avec de bonnes chances que cela apporterait un peu
d'amélioration au stock de logements. Est-ce que mon temps est
terminé?
(12 h 45)
Le Président (M. Rochefort): M. le député,
il vous reste 24 secondes.
M. Doyon: Alors, tout simplement pour remercier les
représentants de l'Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec. Son mémoire est extrêmement
intéressant; ses points de vue, son expertise aussi, nous en tiendrons
compte. Je vous remercie des précisions que vous nous avez
apportées.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie, M. le
député de Louis-Hébert.
Quant à moi, je me suis inscrit pour vous poser une question.
Vous abordez la question de l'état du parc de logements locatif dans
l'hypothèse de la levée du moratoire agrémentée des
conditions qu'on retrouve au document gouvernemental. Vous avez
précisé notamment, à l'occasion des échanges, une
des raisons de la dégradation, selon vous, de l'état du parc
locatif étant donné qu'il y a tout le lien des
possibilités d'expulsion de locataires s'il y a des réparations
majeures à effectuer, que cela, c'est un moyen qui peut mener à
l'expulsion des locataires. J'aimerais savoir si vous avez évalué
l'autre facette possible de dégradation du parc des immeubles locatif
dans le cadre de la levée du moratoire selon ce qui est proposé
et qui serait la suivante. Dans la mesure où effectivement le moratoire
est levé, qu'il y a effectivement un marché, il y a fort à
parier que ce sont les meilleurs logements qui vont partir les premiers et qui
vont être achetés par les locataires les mieux nantis. Donc,
inversement en conséquence, on va se retrouver avec un parc de logements
locatif réduit, mais réduit aux moins bons logements et
réduit aux locataires les moins fortunés.
Est-ce que vous n'avez pas l'impression que cet état de fait aura
aussi pour effet de nous placer dans une situation où, à moyen
terme, on va se retrouver avec des logements qui vont, au fur et à
mesure devenir des taudis et que compte tenu de l'état de
dégradation progressif que connaîtront ces logements, on risque de
se retrouver dans une situation où l'État devra intervenir par
des programmes dynamiques, des programmes actifs de subventions à la
rénovation pour éviter qu'on se retrouve avec un parc locatif de
plus en plus composé de taudis et non pas de logements comme ceux qu'on
connaît actuellement?
Est-ce que vous avez regardé cette
hypothèse-là?
M. Crochetière: On ne l'a pas examinée de cette
façon-là, c'est-à-dire qu'évidemment, on a
exprimé notre crainte que cela ait comme conséquence de
dégrader, et ce que vous dites c'est la
dégradation du stock de logements en qualité ou en
localisation. C'est peut-être vrai, d'un autre côté, il
faudrait considérer que, si le coût pour acquérir ces
logements-là donne plus de valeur, vous allez peut-être pouvoir
louer à un taux plus élevé ceux qui se trouvent juste en
périphérie. Donc, encore une fois, il faut essayer d'avoir une
meilleure valeur économique pour entretenir ce stock locatif qui va
demeurer, parce que tous les immeubles ne seront pas convertis.
Je ne crois pas que cela ait un effet tellement grand, et, que dans cinq
ans ou dans huit ans on soit obligé d'arriver avec des programmes
gouvernementaux pour empêcher la dégradation de la qualité
du stock locatif. Personnellement, encore là, on ne l'a pas
étudié, mais je ne croirais pas que la conséquence a court
et à moyen terme soit si grande que cela.
Le Président (M. Rochefort): Je ne veux pas argumenter
longuement...
M. Crochetière: Non, c'est possible que je me trompe.
Le Président (M. Rochefort): Pour suivre votre
raisonnement, vous dites oui mais, ceux qui vont être autour, les
logements qui vont demeurer locatifs, mais qui vont être autour de ce qui
aura été transformé, eux autres, compte tenu de la valeur
importante qu'ils vont avoir prise, il va donc y avoir une capacité
financière de les entretenir. Mais, justement, la troisième et la
quatrième "gang", il n'y a pas possibilité qu'on se retrouve dans
cette situation-là, selon vos expériences?
M. Crochetière: Là, déjà,
normalement, la valeur relative est excentrique jusqu'à un certain
point. Vous avez un cercle autour du centre urbain qui se dégrade et
ensuite vous reprenez une certaine forme de valorisation, je veux dire qu'on
s'éloigne de cela. Par exemple, si vous êtes près de la
Place Ville-Marie ou si vous êtes à Westmount, cela a une grande
valeur. Si vous vous en éloignez, jusqu'à un certain point cela
se dégrade et, après cela, si vous revenez vers la banlieue ou
des zones encore plus excentriques, la valeur augmente. On parle des quartiers
Rosemont et Ahuntsic; entre les deux, il y a des quartiers qui sont plus
défavorisés. D'abord, convertir en copropriété,
cela ne serait pas partout où les gens iraient se loger, cela serait,
encore une fois, concentré davantage vers les centres-villes et
peut-être que cela aurait pour effet de reculer davantage ces zones
tampons, mais cela aurait pour effet d'accroître en termes d'importance,
d'un nombre de grandeur spatiale, ces unités-là, je ne sais pas,
je ne pense pas.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie. Cela met
donc fin à la période consacrée aux échanges. M, le
ministre, en conclusion.
M. Bourbeau: Je voudrais remercier nos amis de l'APCHQ de leur
importante contribution su débat. L'association est reconnue comme un
interlocuteur de premier ordre dans le domaine de l'habitation. Les gens de la
SHQ et moi avons l'occasion de la consulter très fréquemment.
Encore aujourd'hui, son mémoire est à la hauteur de son
expertise. Merci.
Le Président (M. Rochefort): M. le député de
Shefford.
M. Paré: Moi aussi, je vous remercie. Ce fut très
intéressant. Je dois dire que je vais lire votre mémoire avec
beaucoup d'attention, parce qu'effectivement, vous apportez une facette du
problème de l'habitation, côté construction, qui doit
absolument être considérée de façon prioritaire.
Merci beaucoup.
Le Président (M. Rochefort): Pour le mot de la fin? Cela
va?
M. Crochetière: Non, merci. Cela va.
Le Président (M. Rochefort): À mon tour, je veux
vous remercier au nom de tous les membres de la commission pour votre
participation et votre contribution à nos travaux. Merci.
J'inviterais immédiatement les représentants du
Regroupement d'organismes populaires d'Hochelaga-Maisonneuve à prendre
place devant nous. Pendant qu'ils le font, je veux informer les membres de la
commission d'une entente intervenue entre les différentes formations
politiques, relativement à nos travaux. Compte tenu des contraintes de
notre horaire et des retards que nous avons déjà pris et afin
d'éviter d'accueillir nos derniers intervenants dans la nuit, nous
allons immédiatement procéder, tel que prévu, à
l'audition du Regroupement d'organismes populaires d'Hochelaga-Maisonneuve.
Nous reprendrons nos travaux à 15 heures, quelle que soit l'heure de
l'ajournement, pour essayer de reprendre le retard accumulé
jusqu'à maintenant.
Sans plus tarder, je vous souhaite la bienvenue. Pour l'information des
membres de la commission de même que pour le Journal des débats,
je vous demanderais de vous présenter et de présenter les
personnes qui vous accompagnent. Par la suite, sans plus tarder, veuillez nous
présenter, en une quinzaine de minutes, votre position quant au document
gouvernemental qui a été déposé.
Mme Latreille (Gisèle): Gisèle Latreille.
Je suis travailleuse communautaire dans le quartier
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Carrier (Marie); Marie Carrier, de l'AQDR
d'Hochelaga-Maisonneuve et du collectif.
Mme Dubé (Angelina): Angelina Dubé, de
l'Association des locataires d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Ménard (Ginette): Ginette Ménard. Je fais
partie du Carrefour familial qui est aussi membre du Collectif en
aménagement urbain d'Hochelaga-Maisonneuve. Je fais aussi partie du
comité de pastorale sociale d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Blanchet (Monique): Monique Blanchet, Services à
l'habitation d'Hochelaga-Maisonneuve, groupe de ressources techniques dans le
quartier.
Le Président (M. Rochefort): Merci.
Regroupement d'organismes populaires
d'Hochelaga-Maisonneuve
Mme Latreille: M. le Président, mesdames et messieurs
membres de la commission parlementaire. Nous avons intitulé notre
mémoire "Pour une décision qui s'impose... énoncer une
politique globale d'accès au logement pour tous". Ce mémoire est
appuyé par 25 groupes communautaires du quartier Hochelaga-Maisonneuve.
La liste mentionnant le nom de chacun de ces groupes a été remise
au président de cette commission. Pour la majorité des
résidents d'Hochelaga-Maisonneuve, les droits légaux
d'occupation, leurs droits social et moral liés à l'occupation de
leur logement, sont prioritaires aux droits de propriété. C'est
pourquoi nous avons intitulé ainsi notre mémoire.
Nous croyons toutefois que c'est dans une tentative d'éviter que
se perpétue l'actuel fouillis provoqué par l'annonce de la
levée du moratoire que le gouvernement veut réglementer la
conversion de logements locatifs en copropriété. Il est certain
que, sans l'énoncé d'une politique d'accès au logement qui
définirait clairement les objectifs à atteindre et les moyens
pour y parvenir, nous ne saurons jamais où nous mènera cette
décision qui, selon le gouvernement, s'impose, c'est-à-dire lever
le moratoire.
En l'absence d'une telle politique, nous vous soulignons notre
hésitation à considérer les mesures d'encadrement et de
protection qui sont proposées comme étant satisfaisantes et
rassurantes pour notre population quoiqu'elles nous apparaissent fort
séduisantes, ces mesures de protection...
Nous tenons à ce que soit maintenu le moratoire tant et aussi
longtemps que nous ne serons pas convaincus de l'efficacité de
l'encadrement proposé. Nous tenons à ce que soient
protégés par vos mesures; 1° le parc de logements à
coût raisonnable dans Hochelaga-Maisonneuve; 2° les locataires
évincés de leur logement pour reprise de possession à la
suite des transformations en copropriétés indivises; 3° les
locataires harcelés par la réalisation de rénovations et
de réparations majeures dans leur logement; 4° les locataires
subissant divers méfaits économiques d'une spéculation
immobilière incontrôlée et éhontée. Ces
méfaits provoquant de l'insécurité et de la privation dans
des besoins aussi essentiels que l'alimentation, l'habillement et
l'éducation; 5° les locataires qui portent toujours le fardeau de se
défendre actuellement.
Nous vous présentons quatre citoyennes du quartier qui
témoignent des difficultés vécues par des résidents
d'Hochelaga-Maisonneuve. Ces citoyennes appréhendent des failles dans
l'application de la réglementation proposée s'il y a levée
du moratoire. Les exemples apportés nous invitent tous à en
considérer la pertinence en vue de prévenir les risques
engendrés par l'annonce de la levée du moratoire. La
première présentation est faite par Mme Marie Carrier de l'AQDR
d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Carrier: M. le Président, si je suis ici aujourd'hui,
c'est après avoir eu, pendant quatre ans, des problèmes de
logement. À 70 ans, à cause d'un incendie, je suis
délogée d'un logis qui me satisfaisait compte tenu du loyer que
je payais. Je suis restée, je ne suis pas une déménageuse
ni une personne instable. À mon âge, on ne déménage
plus par plaisir. Étant sinistrée et me voyant dans
l'impossibilité de me trouver rapidement un autre logement, je m'adresse
au groupe des sinistrés. On me répond: II n'y a pas de
disponibilité dans les HLM. Or, j'étais éprouvée
par cet incendie et je ne me trouvais plus en forme, comme jadis, pour
dépenser beaucoup d'énergie dans un déménagement.
Je suis donc sur le trottoir. Avec l'aide de gens charitables du voisinage,
j'ai pu entreposer tous mes effets et j'ai dû aller me loger en chambre
pour cinq mois. Je devais alors payer en plus pour prendre mes repas à
l'extérieur.
Une fois les réparations nécessitées par l'incendie
terminées, je suis retournée dans mon logement mais j'ai dû
subir une augmentation de 105 $ par mois. Un an après, le
propriétaire me réclame une autre augmentation de 50 $; le
connaissant bien, je lui ai dit: Je n'accepte pas ton augmentation à
moins que tu ne la réduise de moitié. Et de peur d'être
obligée de déménager à nouveau, j'ai accepté
les 25 $ d'augmentation. Je découvre pendant l'hiver que la
réparation a été mal faite, le loge-
ment est encore moins isolé qu'avant et je suis obligée de
déménager. Je doute que l'on inspecte convenablement les
logements rénovés, car je me trouve dans un nouveau logement, lut
aussi fraîchement rénové, mais qui m'occasionne des
dépenses de chauffage trop lourdes pour mes moyens. Je me demande
quelles mesures de contrôle les gouvernements imposent aux
rénovateurs afin de nous protéger, nous qui ne sommes pas des
inspecteurs de travaux de rénovations. Nous nous sentons
exploités par les propriétaires. Il ne m'apparaît pas
convenable que l'on blâme des personnes âgées entre 70 et 75
ans de ne pas connaître les nouvelles techniques en habitation.
Après trois déménagements, je décide de
chercher un HLM. Je fais des pressions, on m'aide beaucoup et je suis rendue
dans un HLM. Là, je n'aurai pas peur d'un nouveau propriétaire
qui va m'évincer pour prendre le logement, quoiqu'il n'y a pas vraiment
beaucoup de propriétaires dans notre quartier qui habitent leur propre
maison. La majorité des gens sont de l'extérieur. Ce que j'ai
trouvé de pire dans tout cela, c'est que le droit des locataires
âgés, qui se sentent bien dans leur quartier, qui se lient
d'amitié avec des voisins et qui s'habituent aux services de leur
environnement, ne représente rien pour les législateurs et les
spéculateurs. Le temps de résidence dans le milieu est
bafoué par les propriétaires, mais c'est bien important pour une
personne âgée. Je suis plus en sécurité dans mon
HLM, mais bien d'autres personnes âgées, de ma connaissance,
vivent encore beaucoup d'insécurité. (13 heures)
II faudrait conserver de petits logements locatifs, à prix
abordables, dans chacun des secteurs de notre quartier, que ce soient des HLM
ou autres, pour que les personnes âgées ne soient pas
déracinées lorsqu'elles sont obligées de
déménager. Enfin, si on accorde des privilèges aux
personnes âgées dans votre loi, même si ce peut être
bon d'avoir des guichets spéciaux pour personnes âgées, ne
craignez-vous pas que les propriétaires hésitent à louer
à des personnes âgées parce qu'ils seront plus
contrôlés? Je termine en demandant à tous ceux qui
signeront pour la levée du moratoire, qu'ils n'oublient pas que la
majorité des personnes âgées est là. Merci.
Mme Latreille: La deuxième présentation est faite
par Mme Angelina Dubé de l'Association des locataires
d'Hochelaga-Maîsonneuve.
Mme Dubé: M. le Président, l'Association des
locataires Hochelaga-Maisonneuve est un organisme à but non lucratif
établi depuis 1932 sous la troisième partie de la Loi sur les
compagnies. Son local est situé au 1691 du boulevard Pie IX dans le
Pavillon d'éducation communautaire.
L'organisme est composé de 150 membres dont l'âge varie
entre 30 et 45 ans. Parmi ceux-ci, nous retrouvons sept personnes
siégeant au conseil d'administration et des bénévoles
actifs. Hochelaga-Maisonneuve, au début des années 1900,
appelé "quartier ouvrier", aujourd'hui vieux de plus de 100 ans, est
devenu au fil des ans un quartier populaire majoritairement composé de
locataires.
Les locataires ont perdu des acquis importants au cours de ces
décennies. L'arrivée de l'autoroute Ville-Marie a vu
disparaître 1300 logements décents, grands et accessibles aux
faibles revenus. On leur donne, en guise de compensation les logements dits
sociaux: les HLM, dont la liste d'attente est aussi longue que l'autoroute
Ville-Marie? les coopératives d'habitation, dont l'accessibilité
est très restreinte. Le logement n'est-il pas un besoin vital? Pourtant,
les locataires d'Hochelaga-Maisonneuve y vivent mille et un problèmes,
tels que hausses de loyer abusives, réparations, harcèlement,
rénovations, évictions.
Voici des exemples de hausse de loyer abusive. Vous n'avez pas les
chiffres dans le mémoire, il a fallu faire des recherches dans nos
dossiers. Une locataire de la rue Jeanne-d'Arc, en 1985, a vu son loyer passer
de 165 $ à 300 $ par mois. Une autre locataire de la rue Adam, a vu son
loyer passer de 250 $ à 375 $ par mois.
Attentive aux problèmes des locataires, groupe fondateur du
collectif en aménagement urbain, membre du Front d'action populaire en
réaménagement urbain et à la suite de l'annonce de la
levée du moratoire fait par M. André Bourbeau, ministre des
Affaires municipales du gouvernement libéral, l'Association des
locataires d'Hochelaga-Maisonneuve a relevé des statistiques sortant de
quelque 1000 dossiers traitant de problèmes vécus par les
locataires du quartier. Ces statistiques nous permettent de souligner ce qui
suit. Nous avons divisé en deux tranches de trois ans ces statistiques.
Il y a trois fois plus de harcèlement et de discrimination dans les
trois dernières années que les trois précédentes;
les trois dernières années étant 1985, 1986 et 1987;
réparations, rénovations majeures: plus que le double dans les
trois dernières années; évictions: neuf fois plus en 1985,
1986 et 1987; changements de propriétaires: quinze fois plus que les
trois années précédentes.
La levée du moratoire, un atout pour qui? Pour une
minorité ou une majorité de la population? Seront payées
à quel prix les rénovations, évictions, transformations
occasionnées par l'actuelle annonce de la levée du moratoire?
Merci.
Mme Latreille: Nous passons maintenant à la
troisième présentation qui est faite par Mme Monique Blanchet des
Services è l'habitation Hochelaga-Maisonneuve et du groupe de ressources
techniques.
Mme Blanchet: En accord avec la position prise par la
coordination nationale des GRT et le Collectif en aménagement urbain
Hochelaga-Maisonneuve, nous pouvons constater que le gouvernement
libéral et le ministre Bourbeau n'ont encore proposé aucune
politique de l'habitation mais bien des mesures a la pièce ayant une
forte tendance vers le marché privé, plutôt qu'une aide aux
populations des classes ouvrières comme celles de notre quartier.
En effet, depuis deux ans, nous assistons à une
dégringolade des mesures sociales envers le logement, à savoir la
signature d'une entente entre les gouvernements fédéral et
provincial qui réduit considérablement le nombre de logements et
qui, en plus, écarte les ménages gagnant entre 16 000 $ et 20 000
$. Cette mesure est encore plus dramatique dans notre quartier puisqu'elle
atteint directement la clientèle majoritaire des coops
d'Hochelaga-Maisonneuve. Selon une étude faite par Mme Christine Darnme
aux services à l'habitation, en 1985, 50 % des familles qui composent
les coops d'Hochelaga-Maisonneuve ont des revenus faibles ou très
faibles, moins de 20 000 $. Ces familles sont celles que la formule
coopérative a le plus rejoint dans leurs besoins et attentes: 58,3 % des
ménages gagnant moins de 16 000 $ sont logés dans des coops
d'habitation en rénovation, comparativement à 40 %, en
coopérative d'habitation en construction neuve.
La mise en place d'un supplément au loyer québécois
pour le marché privé, mesure qui favorisera, encore une fois,
dans notre quartier, les pressions exercées par les propriétaires
sur les locataires en place et incitera à spéculer sur leur dos.
D'ailleurs, des études démontrent très bien que cette
réglementation profite plus aux propriétaires qu'aux locataires.
De plus, encore une fois, l'odieux des recours reviendra au locataire qui devra
recourir sans cesse à la régie pour se protéger. Au fil
des années, arrivera ce qui se passe aujourd'hui: le locataire
excédé par ces multiples démarches partira vivre
ailleurs.
Diminution des subventions aux GRT et disparition des programmes de
subvention en rénovation. Ce problème est d'autant plus grave
pour notre quartier puisque c'est la seule mesure qui répondait au
maintien des gens dans leur milieu. Des chiffres à l'appui le
démontrent: 46 % des membres qui habitent des unités de
rénovation habitaient le logement avant qu'ils ne fassent partie de la
coopérative et 50 % des membres de coops rénovées
habitaient le quartier avant de se joindre à la coopérative. De
1976 à 1987, sur 466 logements coopératifs dans Hochelaga, 37 %
sont des logements rénovés. Depuis 1986, aucun projet de coop en
rénovation n'a vu le jour, faute de programme adéquat et non pas
faute de demandes en provenance des gens.
Au contraire, les logements en constructions neuves ont augmenté
durant la deuxième période de cette décennie. Ce fut une
bonne chose puisque cela a permis l'accessibilité à la formule
coop è plus de familles, il ne faut pas le nier. Mais il est
évident que les programmes pour les projets en construction neuve ne
favorisent pas le maintien des gens dans leur quartier, surtout dans
Hochelaga-Maisonneuve, puisqu'à peine 30 % des gens peuvent y
adhérer, en fonction de leurs revenus, et que les autres doivent
absorber les coûts du loyer qui sont de plus en plus
élevés. Les loyers, en 1987, d'une des coopératives, soit
la coopérative "Bonheur d'occasion", sans services, sont pour une
chambre, de 355 $; pour deux chambres, 425 $; trois chambres, 460 $; quatre
chambres, 495 $. Ce qui est très loin d'être accessible pour les
familles de notre quartier.
Si ces familles d'Hochelaga-Maisonneuve trouvent, en ce moment, les
loyers trop coûteux, comment parviendront-elles à accéder
à l'achat de leur logement? Ce sera impossible. Elles seront donc
évincées pour faire place à de nouveaux venus, encore une
fois. Bien sûr, M. Bourbeau fera état des coops catégorie
1, dans le programme SHQ qui est offert pour une clientèle à
faible revenu. Mais, encore là, une catégorie de la
clientèle est évincée, celle des 18 000 $-25 000 $ qui ne
peut accéder à ces logements et la demande est loin de
répondre aux besoins de notre quartier. Nous avons plus de 300 noms de
personnes à faible revenu qui voudraient avoir un logement en
coopérative et, cette année, il y a eu à peu près
250 unités.
De plus, la clientèle des 18 000 $ à 25 000 $ était
celle que nous appelions nos "leaders" dans les coopératives.
Habituellement, c'est l'ouvrier ou le technicien et c'est lui qui est
évincé dans le moment. Où irons donc ces familles? En
construction neuve du programme fédéral, le loyer est de plus en
plus élevé. En construction neuve du programme provincial, elles
ne sont pas admissibles. En rénovation? II n'y a pas de programme
adéquat actuellement. Ce n'est pas l'accessibilité a devenir
propriétaire de leur logement qui réglera le problème
puisque, financièrement, il y a de forts risques que ce soit impossible
pour elles. Un triplex se vendant 150 000 $ dans le quartier
Hochelaga-Maisonneuve, cela suppose une hypothèque de 50 000 $ pour un
logement, plus les taxes, les réparations et
l'entretien, donc un coût mensuel trop élevé pour
les familles de notre quartier, puisqu'elles sont actuellement incapables
d'absorber les coûts de loyer de certains projets de coop. Et il n'y a
donc aucune mesure d'aide pour compenser la capacité des familles.
Nous réitérons donc que, dans notre quartier, la
propriété collective, les coops et les OSBL offrent la meilleure
garantie de sécurité d'occupation. Ces modes d'occupation des
logements sont bien adaptés aux ménages à revenu faible et
modéré, notamment les personnes âgées,
handicapées, les familles monoparentales et les jeunes. Ces formes de
propriétés collectives assurent le maintien dans les lieux des
locataires a bas revenu, surtout lorsqu'il y a des programmes adéquats
en rénovation. Elles permettent de maintenir un parc de logements
locatif dont les coûts de location sont raisonnables, en plus de ralentir
!es tendances spéculatives du marché privé. Elles
permettent l'accès à un mode d'occupation orienté vers la
prise en charge collective des conditions de logement, donc des conditions
moins lourdes pour chaque personne. Elles offrent une garantie du maintien en
bon état du patrimoine immobilier et sont souvent le seul moyen des
ménages à revenu faible et modéré de prendre
possession des logements.
Pour nous, dans Hochelaga-Maisonneuve, lever le moratoire n'est pas une
décision qui s'impose. Ce qui s'impose, à notre avis, c'est une
véritable politique d'accès au logement pour tous, avec le droit,
pour chaque famille, de demeurer dans son logement, sans subir de pression
extérieure, à un prix abordable et selon la forme de
propriété désirée: coop, HLM, locataire ou
copropriété, cela avec la pleine assurance de pouvoir
elle-même en décider la forme.
Mme Latreille: Vous trouverez des tableaux en annexe.
La quatrième présentation sera faite par Mme Ginette
Ménard, du Carrefour familial Hochelaga.
Le Président (M. Rochefort): Si vous le permettez, madame,
je veux vous souligner que vous avez déjà passablement
dépassé le temps mis à votre disposition pour la
présentation. À la suite d'un accord intervenu entre les membres
de la commission, nous allons vous permettre de poursuivre, mais dans la mesure
du possible, puisque le temps que vous allez prendre sera réduit
d'autant dans les enveloppes de temps prévues pour les échanges.
Je vous demanderais peut-être d'essayer de résumer un peu vos
présentations, pour qu'on conserve une période de temps à
la disposition des deux formations politiques pour permettre des
échanges, compte tenu des horaires retenus.
Mme Latreille: Mme Ménard connaît très bien
ce qu'elle a apporté et je pense que cela va se faire assez rapidement,
si vous nous permettez de poursuivre.
Le Présidant (M. Rochefort): Oui.
Mme Ménard: Je fais partie du groupe le Carrefour familial
Hochelaga-Maisonneuve. C'est un groupe d'entraide familiale et
d'éducation populaire. II est aussi membre du Collectif en
aménagement urbain Hochelaga-Maisonneuve.
Le Carrefour familial Hochelega-Maisonneuve est un lieu où se
regroupent les familles du quartier afin d'améliorer ensemble leurs
conditions de vie. On rejoint environ 400 à 500 familles par
année. Les gens qui viennent sont surtout des femmes, chefs de famille,
bénéficiaires de l'aide sociale et à revenu très
modeste. Nous sommes donc en contact avec la réalité dramatique
qu'est le logement.
Les femmes seules avec des enfants éprouvent beaucoup de
difficultés à se trouver un logement. Il y a des angoisses aussi
qu'elles peuvent rencontrer souvent. Des gens viennent aussi nous dire qu'il y
a beaucoup de hausses du coût des loyers; les prix varient
peut-être de 400 $ à 650 $ et, pour des familles du quartier,
c'est beaucoup trop. Les gens quittent le quartier et d'autres choisissent la
cohabitation à deux familles. On voit des expulsions pour
rénovation et reprise de possession, du harcèlement et des
menaces. Il existe encore des logements mal entretenus et ne répondant
pas au code du logement. Il en résulte de la malnutrition parce qu'il
faut de 40 % à 57 % du revenu pour payer le loyer. Du stress est
vécu dans les relations familiales. Ensemble, nous essayons de trouver
des solutions adéquates et nous nous entraidons mutuellement.
Je voudrais vous raconter un peu mon vécu depuis les derniers
mois, mais je voudrais que vous ayez derrière la tète, par
exemple, le vécu des quartiers Plateau Mont-Royal, Saint-Henri, Pointe
Saint-Charles, et peut-être que le prochain sera Hochelaga-Maisonneuve
où je demeure. (13 h 15)
J'habite dans un triplex d'Hochelaga-Maisonneuve, dans un
deuxième étage, qui a été vendu, au printemps, pour
80 000 $ et, trois semaines après, il a été revendu pour
135 000 $. J'ai maintenant quatre nouveaux copropriétaires. Â ma
première rencontre avec eux, ils m'ont donné un avis d'expulsion
pour juillet 1987, même si ce n'était pas dans les lois.
S'apercevant que je connaissais un peu mes droits, ils m'ont
envoyé une augmentation de 100 % pour le loyer. Par la suite, même
si j'ai persisté à demeurer dans les lieux, j'ai subi de
l'intimidation, du
harcèlement, des menaces, des travaux la nuit; on m'a
menacée de feu, de vol, de vandalisme, de dégâts, de
dégâts d'eau. Pour les vols, il y a eu des petits larcins qui se
sont faits dans la maison comme telle, il y a eu du courrier de volé,
des choses comme cela. Par la suite, j'ai reçu un avis de
réparation majeure. Cela a occasionné la perte d'une
pièce, une chambre, et de services, je n'ai plus de hangar, et
même si les propriétaires ne devaient pas entrer dans mon logement
à la suite d'un avis de la régie, il y avait quand même
intrusion.
Cela m'a occasionné aussi beaucoup de surcroît de travail.
Il y a eu aussi perte de jouissance des lieux, parce que, quand on vit dans la
poussière pendant quelques mois - ce n'est pas encore terminé -
ce n'est pas tellement intéressant d'inviter des gens et de vivre dans
ces lieux-là, c'est souvent très démoralisant,
II y a eu des délais qui n'ont pas été
respectés, donc, j'ai été obligée d'aller à
la régie plusieurs fois. J'ai eu des problèmes aussi avec la
régie, parce que cela m'a pris, la première fois, et
c'était ma première expérience une heure et quart pour que
la dame qui était là prenne seulement ma demande comme telle. Par
la suite, quand j'ai rencontré le régisseur, comme les
propriétaires demandaient de relocaliser la salle de bains dans une
autre pièce, le régisseur m'a dit: Vous devriez être
contente, vous allez avoir une salle de bains neuve. Mais cela s'est fait le 5
mai et les travaux ne sont pas encore terminés. Les propriétaires
m'ont dit que la prochaine étape, ce sera sûrement la cuisine qui
sera à refaire. Donc, je serai peut-être jusqu'à la fin de
l'année, jusqu'en juillet 1988 dans la même situation.
Le seul recours qu'il me restait, c'était de faire une retenue de
loyer, mais je pense que cela ne les dérange pas tellement. Face
à cela, j'ai dû me déplacer plusieurs fois pour
connaître mes droits, faire appel à la régie, ce sont des
démarches qui sont longues, interminables. Il me faut des
témoins, des photos, des lettres enregistrées, des
dépenses supplémentaires. Même, les propriétaires
disent que, pour eux, les travaux sont terminés et que, donc, pour la
finition, c'est à moi à payer les frais.
Je suis devenue, à cause des événements, beaucoup
plus fatiguée, irritable, nerveuse, inquiète et insecure. Je ne
me sens pas réellement protégée par les lois actuelles, je
ne me sens pas non plus chez moi et ce, peut-être, jusqu'en juillet
1988.
Voici les conséquences du droit accordé actuellement aux
propriétaires de copropriétés indivises qui se
préparent a venir habiter mon logement, à moins que la maison ne
soit revendue.
J'aurais deux questions à poser au ministre. Ce serait: S'il y a
la levée du moratoire comme telle, quelles protections aux locataires
habitant un logement situé dans une copropriété indivise
seront prévues? Y aura-t-il des changements quant à la reprise de
possession, c'est-è-dire un seul propriétaire d'une
copropriété indivise aura-t-il, à ce moment, le droit
d'évincer un locataire?
L'autre question serait: Si la copropriété se change en
condominium, l'avis d'éviction reçu devant être effectif en
juillet 1988 sera-t-il encore légal? Aurai-je alors le droit d'acheter
mon logement? Je ne crois pas que ce soit une possibilité pour la
plupart des résidents d'Hochelaga-Maisonneuve qui sont
défavorisés sur le plan pécuniaire. La lenteur du
gouvernement à établir de réelles mesures de protection
des locataires face aux spéculateurs immobiliers coûte cher en
énergie et en argent aux citoyens des milieux populaires. Ce sont eux
qui souhaitent aussi que soit protégé le stock de logements
locatif dans Hochelaga-Maisonneuve. Puisqu'on sait qu'il y a à peu
près 30 % des logements, dans Hochelaga-Maisonneuve, qui ont besoin de
réparations majeures, 60 % des établissements ayant
été construits avant 1940, il est important de prévoir des
logements libres pour les personnes qui doivent temporairement quitter leur
logement.
Mme Latreille: Le bon motif du gouvernement de vouloir faciliter
l'accès à la propriété, nous le mettons en doute.
Et la réponse que nous réclamons ne nous apparaîtra donc
plausible que dans le contexte d'une politique d'accès au logement pour
tous. Nous savons, bien sûr, que l'actuelle crise de spéculation
que nous vivons dans Hochelaga-Maisonneuve n'existe pas que chez nous, mais
nous déplorons que la "gentrification" qui s'installe chez nous et les
progrès qui devraient en découler engendrent, malgré la
débrouillardise bien connue de nos citoyens, tant
d'insécurité, de dépenses essouflantes d'énergie,
dans des recours où le fardeau de la défense pèse lourd et
revient au locataire, du stress dans les relations familiales et même de
la malnutrition parce que, le loyer étant une dépense fixe, on
coupe dans l'alimentation souvent, chez nous. 26 % des cas d'hospitalisation,
à l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, sont causés par la
malnutrition de nos citoyens. On voit un rapport évident entre le
coût élevé des logements, la capacité de payer de
nos résidents et ce qui leur reste pour l'alimentation. On a un taux de
bébés naissants avec un poids inférieur à la
moyenne qui est équivalent à celui qu'on trouve au Pérou
ou en Chine.
En tant que société, nous avons des choix à faire.
Dans Hochelaga-Maisonneuve, nous avons toujours su innover et peut-être
qu'ensemble, les citoyens de notre quartier et les divers paliers du
gouvernement qui
sont concernés par le, logement, nous arriverons à faire
des choix qui s'imposent pour réduire l'écart entre les riches et
les pauvres. Nos citoyens ne seront pas plus riches parce que vous voulez
favoriser l'accès à la propriété.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie. Il reste
quinze minutes pour la période des échanges, c'est-à-dire
sept minutes trente secondes par formation politique. M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, Je fais une observation et
je vais passer la parole à un de mes collègues. La situation qui
a été décrite par les différentes intervenantes
indique bien que la situation présente est inacceptable. Les
calamités dont on nous a fait I'énumeration se produisent dans le
contexte de la situation telle qu'elle existe présentement. C'est donc
dire que la ville de Montréal a raison quand elle dit que le maintien du
moratoire est inacceptable puisque c'est ce qui permet la situation telle
qu'elle est présentement. Il faut donc remplacer ce système par
un système qui va mieux protéger les locataires. C'est ce que
nous voulons faire avec les mesures additionnelles de protection que nous avons
insérées dans te document. On nous a posé quelques
questions tout à l'heure. J'ai noté. On nous parle des
propriétaires indivis. Est-ce qu'un seul propriétaire indivis
pourrait évincer, je pense... Je n'ai pas très bien compris la
question. Pourriez-vous la répéter?
Mme Ménard: Les locataires. Dans la loi, il y avait le
fait qu'un copropriétaire aurait le droit d'évincer un locataire
comme tel.
M. Bourbeau: Dans le système actuel, dans les
édifices de quatre logements et moins, on peut évincer des
locataires si on est un propriétaire indivis. Cela veut dire que si deux
personnes achètent un immeuble ensemble, chacune d'elle peut
évincer un locataire. Donc, ce sont deux locataires qui sont
évincés. Si trois personnes achètent ensemble, chacune des
trois peut évincer un locataire. C'est ce qu'on appelle l'indivision.
S'il n'y a qu'un acheteur, on n'est plus en indivision. Pour être
indivis, il faut être au moins deux. S'il n'y a qu'un propriétaire
de l'immeuble, que ce soit un duplex, un triplex ou un quadruplex, ce
propriétaire a le droit d'évincer un locataire pour ses fins
à lui. Cela existe dans le système actuel. Il a toujours
été reconnu qu'un propriétaire peut prendre un logement
pour lui-même. La seule exception qui existera à partir de
maintenant, si notre proposition est acceptée, c'est que même cela
ne sera plus permis après la conversion. Si la proposition est
acceptée, nous proposons d'interdire à un propriétaire
d'un immeuble converti, même à un propriétaire seul, de
déloger un locataire pour les fins du propriétaire. Ce serait la
première fois que cela se ferait où il y a une interdiction
totale pour un propriétaire d'évincer un locataire. Dans le
système actuel, un propriétaire seul, qui est propriétaire
de tout l'immeuble, peut évincer un locataire pour ses fins à
lui. Il y a des exceptions pour sa famille immédiate si elle
dépend de lui. Alors, c'est la situation qui existe présentement.
Également, deux propriétaires peuvent évincer s'ils sont
en indivision deux locataires, etc. Nous proposons de bloquer également
la possibilité que les propriétaires indivis puissent chacun
évincer des locataires. Autrement dit, si deux personnes sont
propriétaires d'un duplex, ils ne pourront pas évincer ni l'un ni
l'autre. Si trois personnes sont propriétaires d'un triplex, aucune des
trois ne pourra évincer. Ce sont les améliorations que nous
proposons dans la position gouvernementale.
Maintenant je voudrais simplement terminer en disant: On nous dit que le
gouvernement a fait beaucoup de bévues, semble-t-il, en matière
d'habitation pour ne pas aider les citoyens. Je voudrais simplement vous
signaler que la nouvelle entente que nous avons signée avec le
gouvernement fédéral fait en sorte de concentrer l'essentiel des
fonds publics vers les citoyens les plus démunis de la
société, ceux qui ont le moins les moyens de s'en sortir.
Étant donné qu'il y a une certaine somme d'argent disponible pour
l'habitation et qu'on n'a pas des budgets illimités, nous voulons en
premier lieu venir en aide aux plus démunis de la société.
Dans ce sens, je vous signale que dans l'année 1987 nous faisons 37 % de
plus de logements sociaux, des HLM, que précédemment. Donc, dans
l'année 1987, il y aura 37 % de plus de logements faits pour des
démunis, construits pour des démunis, au Québec que ce qui
se faisait précédemment. Donc, il ne faut pas dire qu'on n'en
fait moins, on en fait plus pour des gens qui ne sont pas financièrement
à l'aise.
Le supplément au loyer que nous avons annoncé dans le
secteur privé, ce sont des HLM et les gens qui vont y être
logés sont des démunis aussi. Cela ne leur coûtera pas un
sou de plus que s'ils étaient dans un HLM public. C'est la même
chose, les mêmes normes et les mêmes critères. Le
propriétaire ne fera pas la passe, parce que le loyer qui va être
payé en tout, c'est exactement le même loyer qu'ils paient
présentement et c'est pour cinq ans. C'est la SHQ et l'office municipal
qui va diseuter avec le propriétaire, ce qui veut dire qu'il va
peut-être être même mieux équipé pour diseuter,
parce que l'office municipal ou la SHQ va être plus solide pour
résister au propriétaire, s'il veut faire le fou, qu'un
locataire seul. Donc, le locataire va être protégé
face au propriétaire par la SHQ, par l'office municipal. Les locataires
qui vont être là sont des démunis. Ils ne vont payer que 25
% de leur revenu, exactement comme dans un HLM. Donc, il ne faudrait pas
décrier la formule. Elle nous permet d'en faire deux fois plus qu'avec
les HLM ordinaires. Autrement dit, avec l'argent que cela nous coûte pour
faire un HLM ordinaire, on en fait deux dans la formule du supplément au
loyer. Donc, deux familles vont être logées en même temps
plutôt qu'une. Je pense que c'est un avantage, on en fait deux fois
plus.
Maintenant, je pourrais continuer sur le reste mais comme on n'a peu de
temps, je vais laisser continuer mon collègue, avec la permission du
président, le député de Sainte-Marie.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie M. le
ministre. Il reste une minute et trente secondes à votre formation
politique. Dans le cadre de l'alternance, je vais donner la parole au
député de Shefford et, par la suite, j'accorderai la minute et
trente secondes au député de Sainte-Marie. M. le
député de Shefford.
M. Paré: Merci, M. le Président. Alors, Mme
Dubé, Mme Carrier, Mme Latreille, Mme Ménard et Mme Blanchet, je
vais juste vous remercier pour vos témoignages. Etant donné que
le temps est tellement limité, je vais laisser immédiatement la
parole à ma collègue, Mme la députée de
Maisonneuve.
Le Président (M. Rochefort): Je veux vous indiquer que je
suis lié par l'alternance...
M. Paré: Allez.
Le Président (M. Rochefort): ... alors, je vais
reconnaître le député de Sainte-Marie pour une minute et
trente secondes. M. le député de Sainte-Marie.
M. Bourbeau: On pourrait fort bien laisser l'occasion de
continuer à...
Le Président (M. Rochefort): Oui, mais je ne voudrais pas
qu'on dépense nos précieuses minutes à discuter...
M. Bourbeau: On ne les dépensera pas.
Le Président (M. Rochefort): ...qui a la parole, je vous
donne la parole, M. le député.
M. Laporte: Merci M. le Président. Premièrement et
très rapidement, je tiens à remercier effectivement le
regroupement pour le style de témoignage qu'il a apporté è
la commission et cela pour plusieurs raisons, dont entre autres, je pense, le
plus important et le plus particulier, afin de permettre aux membres de la
commission, aux ministres et au président de prendre témoignage
justement de cas vécus particuliers comme tous ceux qui ont
été énumérés tantôt. Je pense que cela
est très révélateur de ce qui peut se produire dans un
quartier particulier et de ce qui peut se produire de façon
concrète. Je pense que cet avantage va permettre justement de mieux
visualiser ou, à tout le moins, de mieux comprendre ce qui est
vécu dans nos quartiers. (13 h 30)
Étant donné que le temps est limité, je me
permettrais de poser certaines questions sur les possibilités dues
justement aux cas évoqués et les propositions que vous comptez
avancer. Vous dites entre autres, en regard du supplément au loyer dont
le ministre a fait part tantôt, que vous n'étiez pas d'accord ou,
à tout le moins, que vous sembliez en désaccord avec cette
proposition. Avez-vous examiné le pour et le contre? Avez-vous
également des propositions de rechange? Vous avez mentionné,
concernant les rénovations majeures, qu'il existe des problèmes
et, on doit constater et convenir effectivement qu'il y a de sérieux
problèmes dans notre secteur à ce chapitre. Des propositions sont
avancées. Je ne sais pas si vous vous êtes effectivement
penchées là-dessus. Peut-on apporter des solutions autres en
regard de cela? Est-ce que ce qui est proposé par rapport à ce
qui existe déjà rencontre votre assentiment sans
nécessairement regarder dans l'avis de moratoire? J'aurais aimé
vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Rochefort): Je vous demanderais de
répondre brièvement, s'il vous plaît.
Mme Latreille: Nous ne nous sommes pas opposés à un
supplément au loyer. Notre population la plus démunie consacre en
moyenne 45,5 % de son revenu au logement. Avec les services, cela va
jusqu'à 57 % dans bien des cas, dans le cas de tous les assistés
sociaux. Chez nous, presque 10 000 personnes crèvent de faim. Vous
comprenez bien que ce que l'on demande, c'est du logement social. On veut plus
de HLM, plus de coopératives. S'il n'y a plus de terrain pour en
bâtir, il faudrait peut-être penser à
l'achat-restauration-rénovation avec une forme de supplément au
loyer pour les gens, ou l'achat-restauration-HLM par les offices municipaux
d'habitation.
On aimerait aussi que des mesures exemplaires de dommages et
intérêts soient imposées au propriétaire qui
contreviendrait aux lois qui devraient actuellement protéger les
locataires. On veut que la protection soit renforcée pour les locataires
habitant des
immeubles de cinq logements ou moins, incluent un bon contrôle des
projets de rénovation en assurant une inspection des travaux, la
qualité et une évaluation plus réelle des coûts. Je
le répète, nous attendons l'imposition de mesures de dommages qui
soient exemplaires pour les propriétaires qui seront contrevenants aux
lois qui doivent protéger les locataires. Je trouve que ces mesures
aideraient les gens de notre quartier.
On aimerait également, peut-être en collaboration avec les
offices municipaux, que des logements temporaires soient disponibles pour ceux
qui seront délogés de leur logement. Je crois qu'on n'a plus de
temps.
Le Président (M. Rochefort): Concluez, madame. Cela
va?
Mme Latreille: Oui.
Le Président (M. Rochefort): Sur ce, je reconnais Mme la
députée de Maisonneuve. Vous avez sept minutes pour vos
échanges.
Mme Harel: Très bien, M. le Président. D'abord, ce
n'est pas sans raison, je pense, que le mémoire est
présenté par des femmes du quartier. Très majoritairement,
c'est un quartier où l'on compte statistiquement le double de la moyenne
du Québec en ce qui concerne la catégorie des veuves, où
l'on compte actuellement 18 % de personnes âgées et où
près du tiers des familles sont monoparentales. C'est une expertise que
le ministre aurait intérêt à écouter attentivement.
Si on pense que cela ne l'a pas ébranlé, je pense que plusieurs
de ses collègues ont peut-être mieux compris ce qu'était la
réalité d'un quartier du bas de la ville de Montréal.
J'espère et je souhaite que le ministre n'adoptera pas l'attitude
de défendre son projet coûte que coûte envers et contre tous
ceux et celles qui viendront. S'il est ici pendant quatre jours, cela doit
être pour écouter ce que le monde qui vit les problèmes a
à lui dire, non pas pour adopter comme attitude de ne défendre
que son projet. On ne peut accepter de faire travestir la position qu'a prise
la ville de Montréal ce matin; elle était très claire:
c'était non à la subdivision, et ce n'est que l'exception qui
était envisagée par la ville de Montréal.
Les questions que je veux vous poser sont à cet effet et
concernent la protection. La ville a beaucoup parlé de la
deuxième génération. Tantôt, le ministre a dit
concernant les HLM: On a eu 37 % de plus de logements sociaux en 1987. Il faut
constater que, dans la programmation qu'il a annoncée pour
l'année 1987 et qu'il a rendue publique pour la Société
d'habitation du
Québec, il a décidé de n'inscrire la construction
d'aucune nouvelle unité dans Hochelaga-Maisonneuve. Alors, les 37 % ne
sont pas dans un quartier qui, pourtant, vit une situation de crise. Le
logement est en crise en grande partie à cause de la spéculation.
Quand vous disiez, Mme Ménard, que votre logement était
passé de 80 000 $ à 135 000 $ en l'espace de trois semaines,
c'est une réalité qui n'est pas exceptionnelle.
Cette situation de crise commanderait une attitude interventionniste
pour pallier cette réalité en n'oubliant pas qu'aucune
unité de supplément au loyer, même en HLM privé,
n'est prévue dans le bas de la ville, dans ce quartier
d'Hochelaga-Maisonneuve, et en n'oubliant pas que cela ne comble pas le
problème de la vétusté. Il y a une combinaison de
facteurs. Il y a un manque de revenu, mais, en même temps, il y a un
problème de vétusté de logements où la
moitié ont été construits avant 1920. La combinaison des
deux - et c'est là-dessus que j'aimerais vous entendre - vous parliez
tantôt d'achat-rénovation-restauration... Est-ce que vous avez,
pour l'avantage du ministre peut-être, des programmes à lui
suggérer d'achat-restauration-rénovation, j'imagine,
peut-être en matière de HLM ou en matière de coop, qui
permettraient de pallier le problème que vous avez éloquemment
décrit dans un secteur aussi densément habité que le bas
de la ville?
Ma dernière question concerne la politique familiale. Le ministre
dits On aide les plus démunis. J'aimerais vous entendre sur la question
des travailleurs et travailleuses à salaire minimum, ceux qui sont dans
les manufactures de l'est de Montréal. Est-ce qu'il y a des programmes
qui permettent à ces personnes de se loger convenablement, de se loger
aussi en conformité de ce qu'on peut souhaiter que soit une politique
familiale en matière d'habitation?
La deuxième génération, les gens qui vous ont
précédés ont dit: Les spéculateurs ont
trouvé facilement à contourner le maintien de façon
illimitée que prévoit le ministre en achetant les locataires, en
achetant leurs droits d'occupation illimitée par une cession de bail.
Compte tenu de ce que vous écrivez, vous avez le sentiment que des
personnes démunies seraient susceptibles de vendre ce droit
d'aînesse qu'elles auraient en première génération
mais qui serait fini pour celles qui les suivraient.
Mme Latreille: Je vous avoue, madame, que cela nous
répugne un peu d'étaler ici tout ce qu'on peut entrevoir de
harcèlement, de pression sur les locataires du quartier qui seraient
sollicités par un propriétaire pour que le logement soit
transformé en habitation à vendre. On a déjà vu ce
qui se passait dans le cas de Ginette où la
spéculation qui a eu lieu dans sa maison, actuellement, ce sont
quatre propriétaires en copropriété indivise qui sont les
propriétaires. Sa soeur qui habitaient le troisième a fui
plutôt que de défendre ses droits parce qu'elle en avait assez de
vivre sous le harcèlement, de vivre dans la crainte comme elle vivait
depuis deux mois. Mais qui nous dit que ces quatre copropriétaires ne
décideront pas de vendre leur logement, de le vendre ensuite en condo?
Là-dessus, on demande au gouvernement de porter une attention au fait
que si Ginette, elle, voulait l'acheter son logement, après tout ce
qu'elle aura vécu, est-ce qu'elle a une possibilité morale,
sociale et légale de continuer à habiter le logement qu'elle aime
et qu'elle habite depuis longtemps? Est-ce que le droit de
propriété accordé par la levée du moratoire va
être prioritaire au point de la déloger? Elle n'aura pas les
moyens financiers d'acheter son logement. Ce que je trouve et ce que je
dénonce, c'est que dans les mesures d'encadrement du ministre il n'y a
aucun programme d'aide qui accompagne ces mesures d'encadrement. C'est pour
cela que nous doutons beaucoup et que nous n'accordons pas de
préjugé favorable au projet du ministre parce qu'aucun programme
d'aide n'accompagne les mesures d'encadrement qu'il a proposées.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie. Il vous
reste quarante-cinq secondes Mme la député de Maisonneuve.
Mme Harel: Oui, je les offre à Mme Blanchet. J'ai
l'impression que vous vouliez ajouter quelque chose.
Mme Blanchet: Vous nous aviez demandé tout è
l'heure s'il y avait des programmes pour achat-rénovation, pour le
moment il n'en existe pas. Mais ce que nous, les groupes de ressources
techniques ainsi que la Fédération des coopératives de
Montréal et tous les groupes qui travaillent dans le logement, avons
offert maintes et maintes fois au gouvernement du Québec ainsi
qu'à la ville de Montréal, c'est de travailler à
l'implantation d'un nouveau programme de rénovation. Nous sommes
convaincus que, dans nos quartiers, c'est une solution. Je ne dis pas la
solution, mais l'une des solutions au maintien des gens dans les lieux,
à des conditions qui leur permettraient financièrement de vivre
dans ces logements.
Tout à l'heure, on parlait aussi des familles à revenu
moyen, nos ouvriers qui composent le quartier Hocheiaga-Maîsonneuve et
d'autres quartiers. On dit dans les statistiques que le seuil de
pauvreté au Canada, c'est une famille qui gagne 20 000 $: une famille de
deux enfants dont le revenu est d'environ 20 000 $ vit sous le seuil de la
pauvreté. Comment les familles de notre, quartier d'ouvriers qui gagnent
a peu près cela feront-elles pour accéder à la
propriété? Les mesures qu'on donne aux locataires ne sont pas,
à notre avis en tout cas, comme Gisèle l'a dit, des mesures
efficaces pour les protéger. Si une maison de trois logements est vendue
et qu'il y a deux copropriétaires, un peu comme Mme Ménard en a
fait mention, comment pensez-vous que l'ouvrier ou la famille se retrouvera
entre ces deux copropriétaires qui pousseront constamment pour que des
rénovations soient faites, pour que les maisons soient
améliorées, alors qu'il n'aura même pas l'argent au
départ pour acheter son logement? En plus, les travaux commenceront
à se faire et il n'aura pas plus l'argent non plus. Les hausses, ce sera
toujours lui qui les aura sur le dos. Je ne sais pas comment tout cela
s'articule, mais ce sont des grosses questions qu'on se pose ici.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie, madame. Un
mot de la fin, M. le ministre.
M. Bourbeau: Oui, je voudrais remercier les gens
d'Hochelaga-Maisonneuve et leur dire que, dans la situation actuelle, le
locataire d'un immeuble comme celui dont vous avez parlé peut être
évincé par un des copropriétaires. Dans la proposition que
nous faisons, le locataire aura le droit au maintien dans les lieux d'une
façon indéfinie, perpétuelle - je parle pour Ginette.
Également, si le logement est vendu, vous avez le droit de premier
refus; on ne peut pas le vendre à quelqu'un d'autre sans vous l'offrir.
Donc, la proposition vous offre deux droits que vous n'avez pas
présentement, car, dans la situation actuelle, vous pouvez être
évincé par un propriétaire indivis.
Pour ce qui est des rénovations, je dirai que nous avons
plusieurs programmes: un programme d'achat-restauration sans but lucratif
privé, nous venons d'accorder 900 unités à des groupes de
ressources techniques et les OSBL; nous en avons 200 dans le programme pour les
sans-abri et également, pour les OSBL, les groupes de ressources
techniques et les coops, surtout de la catégorie 1; en
rénovation, nous avons le programme PARCQ qui s'occupe des
rénovations; vous pouvez également rénover des immeubles.
Je pense que nous avons actuellement un éventail de programmes qui
s'appliquent aux gens sous le seuil de la pauvreté ou aux alentours du
seuil de la pauvreté.
Finalement, je dis aux gens d'Hochelaga-Maisonneuve que nous avons
récemment accordé dix unités de supplément au loyer
dans le secteur privé, quoi qu'en dise la députée qui vous
représente et qui ne semble pas au courant. Alors, cela fera au moins
dix familles de plus de votre quartier
qui pourront se loger dans des logements à des loyers qui
représenteront 25 % de ieur revenu. Merci.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie. M. le
député de Shefford.
M. Paré: Oui, très rapidement pour vous remercier.
Je n'ai pas l'intention de faire le tour et de commenter tout ce qu'a dit le
ministre, sauf que vous serez les premiers juges dans vos quartiers pour voir
si les programmes répondent réellement à vos besoins. Je
pense que le programme PARCQ a fait ses preuves de non-applicabilité en
1986. On verra, en 1987, à l'étude des crédits. Le
ministre nous dit finalement qu'il vous accorde de nouveaux droits, mais vous
avez tout à fait raison, des droits sans moyen pour les exercer, cela ne
vaut rien.
Je vous remercie beaucoup des témoignages que vous avez
apportés et vous pouvez être sûrs qu'on va les utiliser au
bon moment.
Le Président (M. Rochefort): Merci de votre
présence parmi nous.
Sur ce, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures. Je
vous rappelle l'importance d'être à l'heure à 15 heures.
Vous pouvez laisser vos documents sur place; ils seront gardés sous
surveillance pour la durée du repas.
La commission suspend donc ses travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance è 13 h 45)
(Reprise à 15 h 8)
Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'aménagement et des équipements reprend
ses travaux dans le cadre de la consultation générale qu'elle
mène sur le document gouvernemental concernant la levée du
moratoire sur la conversion des immeubles locatifs en copropriété
divise.
J'inviterais maintenant les représentants de la Commission des
droits de la personne, qui sont devant nous, à nous faire leur
exposé. Je vous rappelle que vous avez une quinzaine de minutes pour
nous faire la présentation de votre mémoire. Ensuite, chacune des
deux formations politiques jouira d'une période d'une quinzaine de
minutes pour échanger des propos avec vous. Alors, bienvenue parmi nous
et, sans plus tarder, je vous demanderais de nous faire la présentation
de vos opinions.
Commission des droits de la personne
M. Lachapelle (Jacques): Merci, M. le Président. Je me
permets de m'identifier, pour les auditeurs, Jacques Lachapelle,
président de la Commission des droits de la personne; également,
Mme Renée Lescop, de la direction de la recherche à la Commission
des droits de la personne.
D'abord, je voudrais remercier les membres de cette commission de nous
permettre de faire entendre le point de vue de la commission sur la
levée du moratoire sur la conversion des immeubles locatifs en
copropriété divise. Je pense que c'est une question
économique extrêmement importante. C'est aussi une question qui
touche de très près les droits et les libertés de la
personne. D'ailleurs, il y a une partie de la Charte des droits et
libertés qui touche aux droits économiques et sociaux.
Je pense que le gouvernement est conscient que la levée du
moratoire est importante et je pense que cette commission est également
très réceptive aux suggestions qui seront faites, puisqu'un livre
blanc est déposé ici pour discussion. Le moindre faux pas dans ce
domaine pourrait nous entraîner et pourrait avoir des conséquences
déplorables qu'il faudra, tôt ou tard, réparer si jamais on
le faisait. Alors, je crois qu'il est important de réfléchir sur
cette question avant de faire quelque mouvement que ce soit.
Le document qui a été présenté par la
Commission des droits de la personne ne fait des commentaires que sur la
levée du moratoire comme telle et sur les conditions autour de la
levée du moratoire. Avec votre permission, puisque nous avons une
quinzaine de minutes, j'aimerais demander à Mme Lescop de nous
présenter une partie qui n'est pas incluse dans le mémoire remis
aux membres de la commission et qui a trait è certains
éléments factuels de ce dossier, certains éléments
économiques concernant plus particulièrement les personnes
âgées.
Alors, j'imagine, M. le Président, que nous ne voyez pas
d'objection à ce que Mme Lescop nous fasse cet exposé.
Le Président (M. Rochefort): Bien au contraire.
M. Lachapelle: Merci.
Le Président (M. Rochefort): Madame.
Mme Lescop (Renée): Merci, M. Lachapelle. Je voulais tout
simplement faire ressortir, en quelques minutes, les deux genres de
problèmes concernant le logement, plus particulièrement la
discrimination en matière de logement, que les travaux de la commission
ont permis de dégager.
Le premier problème en est un d'accessibilité
financière; c'est un problème économique. Le second
problème, c'est un problème de conservation des logements, un
problème dont la dimension est beaucoup plus
juridico-sociale.
Pour ce qui est de l'accessibilité financière, je pense
que je n'apprendrai rien à personne en disant que,
particulièrement à Montréal, les loyers ont
augmenté de 32,5 %, selon les chiffres qui nous ont été
fournis par la Régie du logement, depuis 1981, une augmentation qui est
au moins de deux à trois fois plus élevée que
l'augmentation des prix à la consommation et une augmentation
nécessairement beaucoup plus élevée que l'augmentation des
revenus des particuliers. Parmi ces particuliers, je pense qu'il faudrait
souligner les personnes âgées dont le revenu moyen - il faut aussi
ne pas l'oublier - est, pour les hommes en 1985, de 11 885 $ par année
et, pour les femmes, de 7 265 $ par année. Donc, ces loyers à
Montréal sont de plus en plus élevés et de plus en plus
difficiles à assumer financièrement pour les personnes à
revenu faible ou fixe.
Le deuxième problème, c'est celui de la conservation des
logements. Il est lié a la difficulté en réalité
d'exercer un droit qui est pourtant reconnu au Code civil à l'article
1657, celui du droit au maintien dans les lieux en raison, en particulier, des
nombreuses limitations dont ce droit est assorti. Le locataire risque de perdre
ou de quitter son logement pour les raisons prévues par la loi, soit la
démolition, la reprise de possession, les réparations majeures,
le changement d'affectation, les subdivisions et bientôt, si le moratoire
est levé, la conversion en copropriété,
Le document ministériel dont nous avons pris connaissance a pris
acte de ces deux problèmes, économique et juridique, et il a
formulé des propositions de solution. Ces solutions,
particulièrement sur le deuxième problème, la
reconnaissance du droit au maintien de façon illimitée, sont un
progrès par rapport à la situation actuelle, mais je pense qu'il
est illusoire de penser - et cela serait se faire beaucoup d'illusions -
qu'elles règlent tout. Le problème de la hausse du coût des
loyers à Montréal, en particulier, est un problème qui
reste entier malgré les propositions contenues dans le document
ministériel, il reste entier pour les locataires à faible revenu.
Ceux-ci sont encore devant la même alternative qui est la suivante: ou
bien ils acceptent les hausses de loyer et ils vivent avec mais doivent
consacrer de 50 % à 60 % de leur revenu au loyer, ces données ont
été mises en lumière récemment par la
Société de Saint-Vincent-de-Paul, par divers organismes, ou bien
lorsqu'ils ne peuvent vraiment assumer ces augmentations de loyer, c'est le
déménagement forcé, c'est le déracinement d'un
quartier où on a souvent habité et, pour les personnes
âgées, je pense que le problème est particulièrement
aigu.
Sur le plan de la reconnaissance du droit au maintien dans les lieux de
façon illimitée, je pense que là aussi il ne faut pas se
faire trop d'illusions sur la protection qu'offre la législation. Cela
ne changera pas non plus le fait que bien souvent le locataire,
particulièrement le locataire peu informé, la personne
âgée, est mis devant le fait accompli, il n'a pas le temps de se
retourner que les délais sont déjà écoulés.
L'évacuation temporaire est souvent synonyme de
déménagement et aussi cette protection que lui reconnaît la
loi repose sur deux préalables qui, dans le cas de certains locataires,
font malheureusement défaut. Préalable premier, l'information.
Beaucoup de locataires ne sont pas informés sur leurs droits. Le
deuxième préalable, c'est la capacité et la volonté
aussi d'exercer les recours qui nous sont reconnus par la loi. Vous le savez,
les recours sont limités. Ils sont extrêmement complexes; en fait,
dans notre système tout repose sur le locataire, y compris le fardeau de
la preuve. Il est donc bien difficile pour ces locataires, onéreux et
coûteux en énergie et en temps d'exercer ces droits.
Je pense qu'il ne faudrait pas oublier ceux qui sont les plus
menacés actuellement par la levée du moratoire, ceux qui sont
menacés de quitter leur logement, soit pour des raisons
économiques parce qu'ils ne peuvent plus en assumer les loyers, soit
pour toutes sortes de raisons qui sont prévues par la loi, la
démolition, les réparations et bientôt la conversion en
copropriété. Je pense que la question à se poser, c'est:
Est-ce que cette protection supplémentaire qu'on veut leur accorder va
véritablement changer quelque chose à cet égard?
Le Président (M. Rochefort) M.
Lachapelle.
M. Lachapelle: Je me permets de présenter le
mémoire de la commission. La commission s'intéresse à ce
dossier, entre autres, pour trois raisons: la première, c'est que la
Charte des droits et libertés de la personne donne des protections
spéciales aux personnes âgées et aux personnes
handicapées. Une deuxième - je pense que c'est important de le
souligner de façon précise, - c'est l'article 6 qui donne
à toute personne le droit à la jouissance paisible, à la
libre disposition de ses biens, sauf, bien sûr, dans la mesure
prévue par la loi. Il est important de le souligner parce que la charte
reconnaît des droits à des personnes susceptibles de subir de la
discrimination, mais également à toute personne, donc à
des propriétaires aussi, à la libre disposition de leurs
biens.
Le document ministériel propose expressément comme mesure,
- c'est le troisième point, - que les dossiers d'exploitation concernant
les personnes âgées
et les personnes handicapées soient référés
à la Commission des droits de la personne pour enquête. Donc, sur
ce chapitre, la Commission des droits de la personne est vivement
intéressée par ce dossier.
Je souligne également que, concernant cette seconde proposition,
la commission a un pouvoir d'enquête selon l'article 10 de la Charte des
droits et libertés de la personne en matière de discrimination,
en matière de harcèlement.
Pour entrer de plein pied dans les sujets qui nous intéressent,
les articles 10.1 et 48 établissent la juridiction de la Commission des
droits de la personne. L'article 10.1 indique: "Nul ne peut harceler une
personne en raison de l'un des motifs visés dans l'article 10".
L'article 10, on le sait, mentionne l'âge et mentionne le handicap.
Également, ce harcèlement, on pourrait le définir de la
façon suivante. Il s'agit d'une conduite se manifestant, entre autres,
par des paroles, des actes ou des gestes répétés, à
caractère vexatoire ou méprisant, à l'égard d'une
personne ou d'un groupe de personnes en raison par exemple de sa condition
sociale, de son âge ou de son handicap.
L'autre article sur lequel la commission peut intervenir par voie
d'enquête, c'est en matière d'exploitation. L'article 48
mentionne: 'Toute personne âgée ou toute personne
handicapée a droit d'être protégée contre toute
forme d'exploitation".
L'exploitation, la commission l'a déjà définie dans
ses documents. Pour qu'il y ait exploitation d'une personne âgée
ou handicapée, trois conditions doivent être réunies. Que
cette personne âgée ou handicapée subisse un
préjudice moral ou matériel de la part d'une autre personne ou
d'un organisme. Que son âge avancé ou son handicap l'affecte au
plan physique, mental ou psychologique au point de la placer dans une situation
de dépendance. Finalement, que la personne ou l'organisme mis en cause
mette à profit cette situation de dépendance et lui cause tel
préjudice. La commission a, en vertu de la charte, le pouvoir de faire
enquête sur ces plaintes de harcèlement et d'exploitation.
Les mesures de protection en faveur des locataires. Les mesures de
protection qui sont prévues dans le cadre de la levée du
moratoire sur la conversion en copropriété sont-elles des
garanties suffisantes aux personnes vulnérables au harcèlement et
a l'exploitation et désirant exercer leur droit au maintien dans les
lieux?
Premièrement, les mesures contre la reprise de possession. Il est
à noter que dans le projet proposé par le document
ministériel, l'exercice du droit à la reprise de possession n'est
interdit qu'à partir du moment où l'avis de l'intention de
convertir est émis au locataire. Rien ne semble donc empêcher le
propriétaire de se prévaloir de ce droit avant d'émettre
l'avis de conversion tel qu'exigé dans le projet. Ce dernier demeure en
effet silencieux sur les mesures qui pourraient être prises à
rencontre des propriétaires qui reprendraient possession des logements
en évinçant les locataires qui s'y trouvent et procèdent
ensuite à la conversion de leur immeuble en copropriété
divise. Dans l'état actuel de la législation, l'exercice du droit
à la reprise de possession par le propriétaire est assujetti
à un certain nombre de conditions qu'on retrouve dans la loi: celle de
donner un avis de six mois avant l'expiration du bail; celle, en cas de refus
du locataire de quitter le logement, de demander l'autorisation de la
régie dans le mois du refus et de démontrer qu'il est de bonne
foi et qu'il entend réellement reprendre possession du logement et qu'il
ne s'agit pas d'un prétexte pour atteindre d'autres fins. Une telle
disposition ne s'applique cependant que si le locataire refuse de quitter les
lieux. Mais si un locataire est docile, comme cela peut être le cas des
personnes âgées ou handicapées ou de certains immigrants,
et a déjà quitté les lieux, il faudrait prévoir,
nous pensons, une disposition lui garantissant que le propriétaire
n'aura pas recouru au moyen détourné de l'exercice du droit a la
reprise de possession pour procéder à la conversion.
On devrait, en conséquence, refuser l'autorisation de la
conversion pour la période de trois ans dans le cas où le
propriétaire évince ses locataires sous le prétexte de
reprendre possession de son immeuble et a demandé ladite autorisation en
question en évitant ainsi de donner l'avis préalable requis aux
locataires.
Deuxièmement, les mesures contre l'éviction de locataires
pour cause de réparations urgentes. Les propositions du ministre visant
à décourager le contournement des règles de conversion
n'apparaissent pas s'appliquer au cas où il y a résiliation du
bail parce que le logement, selon le locateur, est devenu impropre à
l'habitation et qu'il y a lieu de procéder a des réparations
urgentes. Dans ce cas, le locataire dispose de la possibilité de
soumettre la demande à la régie. Cette dernière peut
déclarer d'office que le logement est impropre à l'habitation et
statuer sur le loyer, fixer les conditions nécessaires à la
protection des droits des locataires et, le cas échéant, ordonner
que le logement soit rendu propre à l'habitation.
Le problème dans ce cas, comme dans la situation où le
propriétaire décide de faire des réparations majeures, est
que le locataire est souvent mis devant le fait accompli. De gré ou de
force, il est souvent obligé de quitter les lieux, le temps que les
réparations soient terminées et que le logement, bien sur,
redevienne propre à
l'habitation.
À défaut d'une ordonnance du tribunal qui ne peut avoir
lieu que sur l'initiative du locataire, le harcèlement ou l'intimidation
aboutissent souvent au même résultat.
Selon les propositions du ministre, seules les réparations
majeures autres qu'urgentes, ayant nécessité l'évacuation
des locataires et qui ont été effectuées dans le but de
préparer l'immeuble à la conversion et d'évincer les
locataires, peuvent justifier de la part de la Régie du logement un
refus d'autorisation de conversion en copropriété ou un
recouvrement en dommages-intérêts de la part des locataires.
Nous estimons que les réparations majeures mais urgentes et qui
aboutissent au même résultat, à savoir l'éviction
des locataires pour pourvoir procéder à une conversion devraient
également justifier un refus d'autorisation de la conversion en
copropriété.
Troisième élément, les mesures contre la hausse des
coûts d'occupation ou la hausse de prix de vente à la suite de
travaux effectués dans le cadre d'une conversion. Même à
supposer que la limite imposée par la Régie du logement à
la hausse du loyer occasionnée dans le cadre d'une conversion soit
scrupuleusement respectée, celle-ci représente néanmoins
un fardeau financier difficile à supporter pour les personnes à
revenu faible et fixe, ce qui est le cas d'un nombre important de personnes
âgées ou handicapées. Je répète encore une
fois que 60 % des personnes âgées vivent actuellement sous le
seuil de la pauvreté. Pour elles, l'alternative est la suivante: ou bien
elles acceptent ces hausses de loyer et elles consacrent une part de plus en
plus grande de leur revenu au logement - jusqu'à 50 % et même 60 %
- réservant une part congrue de leur revenu à l'alimentation, au
vêtement et au loisir, ou elles refusent ces hausses de loyer et elles
n'ont d'autre choix que de déménager, se déracinant d'un
logement et souvent d'un quartier où elles ont vécu une grande
partie de leur vie.
De plus, on dit que la conversion des immeubles locatifs en
copropriété divise aura certes pour effet de permettre à
une certaine catégorie de locataires d'accéder à la
propriété. Cependant, pour les locataires à revenu
modeste, cet accès n'est qu'illusoire, d'autant que la
propriété divise commande un prix de vente inabordable et est
généralement assujettie à un impôt foncier plus
élevé; la majorité des locataires âgés ou
handicapés étant incapables d'acheter les logements ainsi
convertis seront donc obligés de quitter les lieux qu'ils habitent.
Même si la commission ne se sent pas en mesure de proposer des
recommandations à ce stade, elle souhaiterait néanmoins attirer
l'attention des autorités publiques sur les sérieuses
conséquences auxquelles auront à faire face les personnes
démunies à la suite de l'augmentation des coûts de location
que la levée du moratoire risque d'entraîner.
Quatrièmement, les mesures contre le harcèlement et
l'exploitation des personnes âgées ou handicapées. Les
propriétaires convertisseurs, mettant à profit la situation de
dépendance dans laquelle se trouvent certaines catégories de
personnes et de surcroît à faible revenu, ont souvent recours a
toute forme de harcèlement en vue de créer un climat
d'intimidation les forçant à quitter les lieux. En octobre 1986,
400 membres de l'Association of tenants against conversion in condos, tous des
résidents entre 65 et 75 ans de Côte-Saint-Luc, avaient
dénoncé les multiples formes d'intimidation qu'ils subissaient
lors des rénovations: ascenseurs qui arrêtent de fonctionner,
chauffage fermé, hausse de loyer, bruits de nettoyage par jets de sable
sur les murs extérieurs, rénovations qui se font dans l'immeuble
à l'étage au-dessus, etc.
La suggestion du ministre de référer, pour enquête,
è la Commission des droits de la personne les dossiers de
harcèlement et d'exploitation des locataires âgés ou
handicapés par les propriétaires convertisseurs ou par les
nouveaux acquéreurs est sûrement une bonne initiative, d'autant
plus qu'il est déjà prévu dans la loi que la commission
puisse faire enquête. Je pense, toutefois, que la suggestion de guichet
unique est une amélioration sur la situation où la Régie
du logement pourra peut-être davantage vérifier les
possibilités qu'il y ait exploitation de ces personnes.
Cependant, il ne faudrait pas penser qu'une telle suggestion constitue
la seule solution adéquate au problème. En effet,
l'expérience de la commission dans les enquêtes sur les cas
d'exploitation des personnes âgées dans d'autres domaines que le
logement a pu démontrer que ces personnes, se trouvant souvent dans une
situation d'intimidation, de peur, de dépendance, peuvent difficilement
aider les enquêteurs à constituer des éléments de
preuve suffisants pour convaincre du bien-fondé de leurs plaintes. Ceci
est encore plus vrai s'agissant des situations de harcèlement et
d'exploitation dans le secteur du logement qui sont, dans la plupart des cas,
comme on vient de le noter, d'ordre psychologique. Dans ces conditions, y
aurait-il lieu d'évaluer la portée réelle d'une telle
suggestion et d'envisager en conséquence les moyens de la rendre plus
efficace?
À cet égard, la commission voudrait davantage mettre
l'accent sur le problème vécu particulièrement par les
groupes de personnes protégés par la charte. En cas de conversion
ne respectant pas les conditions que requiert la réglementation, c'est
toujours au locataire qu'incombe le fardeau de prouver l'utilisation de moyens
détournés
auxquels a pu recourir le propriétaire. Dans un tel contexte, les
personnes âgées ou handicapées, particulièrement
celles à faible revenu, mériteraient, selon la commission, une
attention individualisée de la part de la régie pour la
constitution de dossiers solides et ce, pour les raisons ci-après: a)
leur état de dépendance et de vulnérabilité.
Davantage que d'autres locataires en raison de leur état de
dépendance matérielle et psychologique, les répercussions
d'un déménagement éventuel leur sont insupportables. Un
bon nombre d'entre elles vivent actuellement sous la menace de devoir quitter
leur logement pour des raisons économiques d'abord parce qu'elles ne
peuvent plus en assumer le loyer - il faut noter, comme le disait tantôt
Mme Lescop, que les loyers ont augmenté de 32,5% depuis 1981 alors que
le revenu des personnes âgées n'a pas augmenté dans les
mêmes proportions, et même en très faible proportion - et
pour toutes sortes d'autres raisons telles que la démolition, des
réparations majeures, les changements d'affectation ainsi que la reprise
éventuelle des conversions en copropriété divise. Le droit
au maintien dans les lieux est d'autant plus important dans leur cas que leur
logement constitue pour elles non seulement un gîte mais leur univers
principal. b) ignorance de leurs droits et des recours existants. On s'en rend
compte à la commission, beaucoup de personnes âgées ou
handicapées locataires ne connaissent pas leurs droits dans le secteur
du logement comme ailleurs. Celle ou celui qui ne connaît pas ses droits
et ses recours est la victime toute désignée de certains
propriétaires qui pourraient en profiter pour agir en toute
impunité et sans égard à la loi. (15 h 30)
II faut noter aussi la complexité des recours. L'utilisation des
divers recours prévus dans le projet demande une énergie et une
combativité que certains locataires âgés n'ont pas ou n'ont
plus envie d'investir à de telles fins. Pour faire face à un
propriétaire qui a décidé de convertir son immeuble en
copropriété divise, il faut avoir beaucoup d'audace et être
bien armé pour ne pas succomber aux pressions et au harcèlement
qui ne manqueront pas d'être faits dans certains cas. Les personnes
âgées ou handicapées sont particulièrement
vulnérables à cet égard. Sans l'aide supplémentaire
que nécessite une telle situation, il est fort à parier que peu
d'entre elles seront en mesure d'utiliser les recours qu'on mettra à
leur disposition.
L'argument avancé dans le projet ministériel pour
écarter la possibilité d'une telle protection n'est pas tout
à fait convaincant. On y dit en effet: "II .faut être conscient
que multiplier les mesures visant à protéger de façon
particulière une clientèle distincte a souvent pour effet de lui
rendre difficile la recherche d'un logement."
Mais comme la Charte des droits et libertés de la personne
interdit la discrimination fondée sur l'âge ou le handicap, entre
autres, dans le secteur du logement, la commission veillera à ce que la
difficulté mentionnée dans le document ministériel soit
évitée à l'occasion de l'examen des plaintes qui lui sont
adressées par les personnes concernées. Lors des enquêtes
qu'elle sera appelée à faire sur chacun des cas, il lui reviendra
d'entamer la procédure en vue de faire respecter, s'il y a lieu, leur
droit de ne pas subir de discrimination dans la recherche d'un logement.
En faisant ces commentaires sur le document ministériel, la
commission aimerait rappeler qu'il n'est pas de son intention de particulariser
démesurément les problèmes d'un groupe par rapport
à ceux d'un autre ou même d'imposer les intérêts d'un
groupe à ceux d'un autre ou de généraliser à
l'ensemble d'un groupe une situation qui n'affecterait pas
nécessairement tous les membres de ce groupe au risque de créer
une sorte de ghetto pour ces personnes. Les droits inscrits dans la charte
s'appliquent en effet à toute personne, qu'elle soit propriétaire
ou locataire. Si la commission a mis l'accent dans son mémoire sur les
personnes âgées ou handicapées, c'est d'abord et avant tout
parce que le document ministériel l'y invite implicitement en lui
rappelant son mandat en cas d'exploitation et de harcèlement de ces
personnes. Cependant, les recommandations qui suivent peuvent très bien
s'appliquer à toute personne locataire qui, dans le cadre d'une
conversion en copropriété divise, risque de subir de
l'exploitation ou du harcèlement.
On pourrait faire état des recommandations de la commission.
Compte tenu des difficultés que rencontrent souvent les locataires,
surtout ceux parmi eux qui sont âgés ou handicapés,
à faire respecter leurs droits reconnus par la loi, les recommandations
les plus importantes de la commission portent sur l'importance de sensibiliser
ces personnes à leurs droits, au contenu exact de ceux-ci et de
prévoir également un mécanisme de soutien individuel dans
l'exercice de ces mêmes droits. Ces recommandations sont donc les
suivantes: 1° s'assurer qu'à l'occasion de chaque conversion, les
locataires concernés soient dûment sensibilisés è
leurs droits et bien informés de leur contenu et des divers recours
qu'ils ont à leur disposition et leur fournir te soutien
nécessaire et au besoin individualisé à l'exercice de ces
droits et de ces recours. De plus, la loi qui serait adoptée à la
suite des mesures d'encadrement proposées avant la levée du
moratoire devrait recevoir toute la publicité requise et
être portée à la connaissance du grand public dans
un langage simple et accessible à tous. 2° accorder au locataire le
droit d'exiger que toute entente qu'il conclut avec le propriétaire dans
le cadre d'une conversion soit notariée et porte minute. Nous croyons
qu'avec la présence d'un notaire ou d'une personne ayant des
connaissances juridiques, on pourrait informer adéquatement toute
personne de tous ses droits pour qu'elle ne soit pas inquiète lors de la
signature d'un tel document.
Les autres recommandations que nous faisons portent
particulièrement sur certaines mesures d'encadrement qui devraient
s'ajouter à celles proposées dans le document ministériel:
3° refuser l'autorisation de la conversion dans le cas où le
propriétaire reprend possession des logements de son immeuble
après en avoir évincé ses locataires et désire
procéder ensuite à une conversion en évitant ainsi de
donner à ces derniers l'avis d'intention de convertir
préalablement requis. Comme dans les cas mentionnés dans le
document ministériel, ce refus d'autorisation devrait être pour
une période de trois ans.
Enfin, 4° refuser l'autorisation de conversion en cas
d'éviction de locataires pour travaux urgents nécessités
par l'état du logement devenu impropre à l'habitation, si ces
travaux, bien sûr, ont fourni au propriétaire le prétexte
pour convertir son immeuble en copropriété divise. Ce refus
d'autorisation vaudrait également pour une période de trois
ans.
Je conclus, M. le Président, en réitérant notre
inquiétude face à la levée du moratoire pour ce qui est
des personnes protégées par la Charte des droits et
libertés de la personne, particulièrement les personnes
âgées, les personnes handicapées et les personnes ayant un
statut social précaire. Je voudrais également vous indiquer que
la Commission des droits de la personne s'intéresse à cette
question, s'est intéressée plus particulièrement à
la question de la location pour ce qui est des minorités ethniques et
que nous sommes à préparer une documentation sur ce sujet
à la suite d'enquêtes que nous avons menées dans divers
secteurs de la ville de Montréal. Nous sommes heureux de constater que
le ministre a l'intention d'adopter une politique plus globale concernant le
logement. Là-dessus, nous aurons sûrement des commentaires
à faire concernant la discrimination que peuvent subir certains groupes
ethniques dans la région de Montréal par rapport aux questions de
logement.
Nous sommes heureux d'avoir contribué, nous l'espérons,
quelque peu aux travaux de votre commission. Nous vous remercions, M. le
Président.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Lachapelle. Je
tiens à rappeler aux membres de la commission qu'il reste 18 minutes.
Donc, nous répartirons le temps uniformément: 9 minutes pour
chaque côté.
M. le ministre, je vous cède la parole.
M. Bourbeau: J'ai un commentaire. Je félicite la
commission pour la présentation de son mémoire. La commission
nous indique comment il est difficile de démontrer les cas de
harcèlement et de discrimination envers les personnes âgées
ou handicapées. La commission réaffirme dans son mémoire
que dans le régime actuel, un propriétaire peut reprendre
possession des logements de son immeuble après en avoir
évincé ses locataires. On a peut-être mal saisi ce que vous
voulez dire, mais dans le régime actuel, il n'est pas possible pour un
propriétaire d'évincer des locataires pour reprendre possession
des logements sauf pour un logement, le logement que veut occuper le
propriétaire lui-même ou encore pour des membres de sa famille
selon des modalités bien précises qui sont
déterminées par la Régie du logement. II y a
également l'interdiction pour une personne morale d'évincer tout
locataire, quel qu'il soit. Il y a aussi l'interdiction pour des
propriétaires indivis d'évincer des locataires quand il s'agit
d'un immeuble de cinq logements ou plus. Alors, je ne pense pas qu'on puisse
dire qu'actuellement, un propriétaire peut évincer ses locataires
pour convertir.
M. Lachapelle: On sait, M. le ministre, comment certains
propriétaires ont pu manoeuvrer dans le passé pour... Je
comprends que vous indiquiez que...
M. Bourbeau: Oui.
M. Lachapelle: ...des propriétaires indivis ne peuvent
pas...
M. Bourbeau: Je comprends ce que vous voulez dire, sauf que vous
utilisez l'expression "reprise de possession".
M. Lachapelle: D'accord.
M. Bourbeau: Or, la reprise de possession est connue comme
étant le geste d'un propriétaire qui dit à un locataire:
Veuillez sortir...
M. Lachapelle: Je veux reprendre.
M. Bourbeau: ...je veux prendre le logement.
M. Lachapelle: Oui.
M. Bourbeau: Finalement, j'ai une seule question. Dans le
document, on parle de la possibilité que la Régie du logement,
à
même son guichet unique qui sera mis en place pour s'occuper des
personnes âgées et des personnes handicapées, puisse vous
référer les cas de harcèlement qui lui seront
signalés. Êtes-vous en mesure d'agir si jamais la Régie du
logement ou lorsque que la Régie du logement vous dira: Voici, il y a
des cas de harcèlement; à tel endroit, on a tout lieu de croire
qu'il y s du harcèlement? Serez-vous en mesure d'agir, de faire
enquête et de prendre action le cas échéant?
M. Lachapelle: Je pense qu'on doit préciser qu'il s'agit
non seulement de cas de harcèlement mais d'exploitation, ce qui est
quand même un domaine un peu particulier. Mais on imagine que les cas
d'exploitation résultent d'abord et souvent de cas de
harcèlement. Ce qu'on vous mentionne sur cette question, c'est que les
preuves en pareils cas ne sont pas faciles. Je passe à la
première partie de votre question: Est-ce que la commission pourra agir?
Oui, bien sûr. Elle fera enquête. Je ne pourrais pas vous affirmer
que dans l'état actuel des effectifs de la commission, si on nous
faisait parvenir quelques centaines de dossiers en même temps, on
pourrait avec quelque 25 enquêteurs actuellement couvrir l'ensemble de
toutes ces plaintes. Encore une fois, il s'agit peut-être d'une
disposition administrative qu'on pourra régler éventuellement
avec le ministère de la Justice. Ce qu'on peut vous dire, c'est que la
commission fera enquête lorsqu'on nous saisira des dossiers. Il sera
important, je pense, préalablement, qu'avec la Régie du logement,
on puisse informer les personnes sur la tenue et comment monter un dossier pour
être véritablement efficace. Souvent, malheureusement, des
personnes âgées nous arrivent avec des bribes d'information: J'ai
subi du harcèlement. Oui, mais comment? Bien, telle journée.
C'est souvent très vague. Ces dossiers sont extrêmement difficiles
à monter parce que les personnes, souvent, sont très
démunies et elles n'ont pas pris les précautions
nécessaires, soit de prendre des notes sur les événements
qui sont produits. C'est très vague. Les événements
récents se chevauchent parfois avec des événements
passés. C'est très difficile. Je pense qu'il faudra
véritablement s'entendre avec la Régie du logement sur un gabarit
de preuve pour nous permettre ensuite d'être efficaces.
D'autre part, je comprends aussi que même si on parle de guichet
unique, cela n'empêcherait pas toute personne de venir porter plainte
à la commission, la 'charte n'étant pas amendée; à
moins qu'on ne l'amende et qu'on dise: II n'y aura qu'un guichet unique. Je
pense qu'il serait intéressant que ces plaintes soient filtrées
d'abord par la Régie du logement et que celle-ci, justement, prenne des
cas qui lui semblent intéressants. Dans un tel contexte, la commission
pourra agir. Mais encore une fois, la preuve demeure extrêmement
difficile.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Lachapelle. Je
cède maintenant la parole à M. le député de
Shefford.
M. Paré: Merci, M. le Président, Moi aussi, je vous
remercie de la présentation de votre mémoire. Même si je
l'avais lu, je dois dire qu'en écoutant les commentaires que vous avez
faits, j'ai le goût de discuter avec vous en réfléchissant
tout haut. On parle beaucoup, maintenant, d'un des objectifs qui est
l'accès à la propriété. Donc, on parle de futurs
propriétaires. On parle de l'accès à la
propriété comme de la situation idéale. Sauf qu'il ne faut
pas oublier qu'il existe et qu'il existera toujours des locataires. C'est un
choix et il faut respecter cela. Je pense que vous êtes bien
placés pour le respect des choix des individus. Les locataires sont
souvent là par choix et malheureusement, très souvent aussi, par
obligation. Je pense qu'il faut absolument respecter cela. Avec les chiffres
que vous nous avez donnés sur la situation des personnes
âgées, cela ne va pas en s'améliorant, au contraire. Donc,
depuis 1981, la situation des personnes âgées s'est
détériorée grandement, au point où pour la
majorité, l'accès à la propriété est
utopique et impensable. En même temps, ce que les gouvernements proposent
et suggèrent et ce qu'on apporte comme projet, c'est le maintien
à domicile et la désinstitutîonnali-sation. À un
moment donné, il va falloir être constant, il va falloir
être logique dans ce que l'on fait comme gouvernement et ne pas aller en
vase clos: un ministère dans une direction et l'autre
complètement dans une autre. Là, on veut
désinstitutionnaliser et garder les gens chez eux. On demande au
ministère de la Santé et des Services sociaux de donner davantage
pour garder les gens chez eux et, en même temps, on amène avec
cette espèce d'idole de propriété une espèce de
sens tout à fait contraire qui fait que là, maintenant, on va
plutôt favoriser les propriétaires. Et pour les locataires, il y
aura plutôt un risque ou je pense une certitude de déplacement
pour les personnes les plus vulnérables. On sait que pour les personnes
âgées, l'un des graves problèmes, c'est justement
l'insécurité. Si on les déloge, on vient de compliquer
terriblement la vie de ces gens. Pour le ministère de la Santé et
des Services sociaux, c'est augmenter considérablement les
problèmes et les coûts. J'avais le goût de
réfléchir tout haut. C'est en vous écoutant, finalement,
que cela m'est venu. C'est pour cela que tes échanges, c'est important.
Comme orientation gouvernementale, je trouve qu'on est en train de
s'"écartiller"; on va se ramasser avec des problèmes beaucoup
plus graves au niveau
social que ce qu'on va avoir comme gain économique de l'autre
côté. Moi, cela me convainc juste davantage que la proposition ne
tient pas.
J'aurais une question à poser mais comme c'est limité, je
vais plutôt essayer de vous en poser quelques-unes en même temps.
On dit que ceia prend un guichet unique pour les personnes âgées
et les personnes handicapées. Je vous pose la question parce que cela a
été même soulevé ce matin. Est-ce qu'on ne risque
pas de venir pénaliser davantage ces clientèles les plus
vulnérables en faisant en sorte qu'il y ait une protection en plus?
Est-ce que cela va vouloir dire que les propriétaires bailleurs qui
acceptent dans leur logis ou leur loyer cette clientèle plus
vulnérable seront moins portés à l'accepter? C'est ma
première question. La deuxième: On dit que comme tâche ou
comme responsabilité du guichet unique, c'est de fournir beaucoup
d'information, que ces gens connaissent leurs droits et ce qu'ils ont comme
possibilité de recours, C'est beau de donner de l'information mais
regardons à la page 8 ce que vous avez souligné comme points:
leur état de dépendance et de vulnérabilité,
l'ignorance de leurs droits et des recours existants et la complexité
des recours. Est-ce que vraiment, pour venir en aide à ces gens,
même si cela prend beaucoup d'informations et de connaissances de leurs
droits et recours, cela ne prend pas plus que cela? Le plus, est-ce que ce ne
serait pas, pour être capable de passer à travers tout cela, une
aide technique? Si oui, je ne pense pas que ce soit la Régie du logement
qui puisse fournir une aide technique, puisque la Régie du logement est
là pour trancher et la commission pour faire des enquêtes. Donc,
ce ne pourra pas être ia commission non plus. Est-ce que, si on veut
vraiment aller au-delà des souhaits pour aider ces deux
clientèles, il ne faudrait pas qu'il y ait une aide technique qui soit
légalement reconnue à ces gens et qui serait fournie par d'autres
associations qui pourraient être les groupes de ressources techniques ou
les associations de locataires? (15 h 45)
Le Président (M. Saint-Roch): M. Lachapelle.
M. Lachapelle: C'est l'essence, finalement, de notre
première recommandation. Quand on parle de sensibiliser les personnes et
qu'on parle d'un support individualisé, nous croyons que ces personnes
ne peuvent recevoir comme cela de l'information en vrac, même sur de
beaux papiers bien faits, bien dégagés et bien colorés.
Nous croyons que chaque personne qui se présente à la
régie avec un problème spécifique doit recevoir un support
individualisé, ce qui va supposer un nombre important de personnes pour
l'aider.
Pour ce qui est de la question du guichet unique, quant à nous,
on trouvait la formule intéressante, soit une espèce de filtre
avant de se rendre à la Commission des droits de la personne pour bien
indentifier et bien cerner le sujet. Cela nous apparaissait un moyen
intéressant pour avoir une information cohérente et
complète. Bien sûr, la Commission des droits de la personne pourra
recevoir toute personne. Je le mentionnais tantôt parce que la charte a
déjà un article 48 qui précise bien qu'une personne
âgée ou handicapée qui subit de l'exploitation peut
s'adresser à la commission. Alors, le guichet ne sera pas en principe
unique même si, formellement, on l'aura établi de cette
façon.
Encore une fois, je suis également de votre avis. Ces personnes
doivent recevoir un support individualisé. Les éléments
qu'on indique dans notre document en font état. On doit vous dire
qu'à la commission, on a eu des cas extrêmement pénibles de
personnes exploitées et même des personnes qu'on voulait aider et
qu'on a été obligé d'aider malgré elles en prenant
des injonctions devant les tribunaux pour les faire sortir d'endroit où
elles étaient exploitées. Ces personnes ne voulaient pas sortir,
parce qu'elles se disaient bien, même exploitées. Alors, on
imagine bien que ces personnes exploitées ne viendront pas à la
commission ni à la Régie du logement et ces cas nous
inquiètent beaucoup. Évidemment, ils ne seront pas là par
milliers. Il ne s'agit pas d'avoir des milliers d'injustices pour crier
à l'injustice. Il y en aura et cela nous inquiète
énormément. Je pense encore une fois que le support
individualisé et technique sera très important. Je ne me
prononcerai pas à savoir si la régie sera en conflit
d'intérêts si c'est elle qui le donne. Quant à moi, c'est
une question qui relève administrativement de la régie.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Shefford.
M. Paré: J'aimerais avoir vos commentaires sur le principe
du rachat du droit du maintien à domicile. On sait que cela a
été aussi soulevé et que le ministre a même
déclaré que c'était en soi une chose tout à fait
acceptable sinon une bonne chose. De toute façon, que ce soit l'un ou
l'autre qui soit dans le logement, il est habité et un pour un, cela
veut dire le même nombre de personnes qui demeure dans un logement. Donc,
quand quelqu'un veut faire le rachat, que ce soit le propriétaire actuel
ou le copropriétaire à la suite de la transaction, il
décide d'aller voir la personne âgée, la personne
handicapée ou n'importe lequel des locataires en place et de lui offrir
un montant quelconque. Que pensez-vous de ce principe de rachat du droit de
propriété,
quand on sait très bien qu'en fin de compte, c'est une personne
démunie et que quand elle l'aura dépensé, elle n'en aura
plus, et le stock du marché locatif aura diminué?
M. Lachapelle: Ma première réaction est quasi
viscérale, j'allais dire. Cela m'apparaît quasi inacceptable qu'on
puisse négocier ce droit avec une somme d'argent. Si une personne
désire demeurer dans son logement parce que c'est son choix, on ne
devrait pas la placer devant le choix de recevoir un montant d'argent. Je dois
vous avouer qu'avec les quelques études que nous avons faites sur ce
sujet, cela serait inquiétant de proposer qu'on puisse racheter ce
droit. Je ne sais pas si Mme Lescop a des commentaires aussi sur cette...
Mme Lescop: Je pense que cela se fait couramment maintenant et
qu'on rachète pour pas cher.
Le Président (M. Saint-Roch): Je m'excuse, M. le
député de Shefford, mais le temps alloué è votre
formation est écoulé. Je cède maintenant la parole
à M. le député de Saint-Hyacinthe tout en lui rappelant
qu'il a quatre minutes et trente secondes.
M, Messier: Merci, M. le Président.
Juste une question avant de vous remercier. Le fait de garantir le droit
au maintien dans les lieux pour une durée illimitée, est-ce que
vous croyez que c'est une garantie suffisante pour protéger les
locataires?
M. Lachapelle: À notre avis, seulement cette
disposition-là n'est pas suffisante. Pour ce qui est des personnes
âgées, la crainte que nous avons, c'est qu'on pourrait convertir
quand même sans faire directement du harcèlement. On comprend que
les autres locataires peuvent entreprendre des travaux, on comprend qu'ils
auraient le goût d'améliorer leur environnement. Est-ce que les
personnes qui sont en place auront certaines garanties que toutes ces
améliorations ne seront pas appliquées éventuellement dans
leur loyer, que tous ces travaux-là vont se faire dans le respect de
certaines personnes qui, justement, sont des personnes âgées qui
ne peuvent pas subir du bruit, etc.? Ce n'est pas suffisant. Nous pensons qu'il
devrait y avoir, avec cela, d'autres conditions. Je dois vous avouer que je ne
suis pas un spécialiste en ces matières, mais ce n'est
probablement pas suffisant que de ne garantir strictement cela.
Mais encore une fois, si on veut lever le moratoire, il faut comprendre
que ce ne sera pas sans certains inconvénients. Il faut les minimiser le
plus possible. On comprend que, si on veut permettre à des locataires
d'accéder à la propriété, il y aura certains
inconvénients. Je dois vous dire encore une fois que, si la personne
qu'on représente plus particulièrement est une personne
handicapée et âgée, il va falloir trouver d'autres moyens
pour la protéger.
M. Messier: J'aimerais vous remercier au nom du ministre, au nom
de notre formation...
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
député de Saint-Hyacinthe.
M. le ministre, de brèves remarques de conclusion.
M. Bourbeau: Oui, simplement pour remercier les
représentants de la Commission des droits de la personne de leurs
interventions. Je pense que c'est un organisme qui peut être
appelé a jouer un rôle important dans la guerre que nous
entreprenons afin de tenter de contrer les mesures de harcèlement dont
sont victimes les personnes âgées. Nous sommes bien au courant que
c'est un problème qui s'aggrave continuellement et c'est la raison pour
laquelle nous avons tenté de trouver des façons de s'attaquer
à ce problème-là et une des façons, bien sûr,
pourrait passer par une aide, ou un recours, plutôt, à la
Commission des droits de la personne.
Alors, espérons qu'ensemble on pourra livrer une lutte
victorieuse autant que possible, en tout cas, a ce fléau que constitue
le harcèlement à l'égard des personnes
âgées.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre.
M. le député de Shefford.
M. Paré: Très rapidement; M. Lachapelle et Mme
Lescop, merci beaucoup pour l'éclairage important que vous avez
donné sur ce côté humain qu'on doit absolument toujours
avoir en tête au cours de nos débats et surtout lorsqu'on sera
à l'Assemblée nationale pour décider finalement de
l'avenir de ces gens-là. La levée du moratoire, c'est une belle
expression, mais c'est sur le terrain que c'est important et s'il y a des gens
bien placés pour connaître les conséquences et voir les
malheurs des gens qui doivent subir nos décisions, vous êtes
à peu près les mieux placés. C'est important que vous
soyez venus et que vous nous ayez sensibilisés au problème que
vivent ces gens-là et des dangers que constitue la proposition qui est
sur la table présentement. Merci.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Shefford. M. Lachapelle,
M. Lachapelle: Merci. Nous vous
souhaitons bonne chance dans vos réflexions, en espérant
que vous trouverez toutes les lumières pour protéger ces
personnes. Merci.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie de votre
témoignage au nom de la Commission des droits de la personne.
Je demanderais maintenant aux représentants de l'Association
communautaire de Notre- Dame-de-Grace de prendre place.
Dans un premier temps, j'aimerais vous souhaiter la bienvenue ici, aux
travaux de la commission de l'aménagement et des équipements. Je
demanderais maintenant à M. Ross Stitt de bien vouloir identifier les
gens qui l'accompagnent.
Association communautaire de
Notre-Dame-de-Grace
M. Stitt (Ross): Oui, bonjour, monsieur. We are going to present
a brief in English, so we hope that everybody can understand. On my right is
Myrtle Ellis; she has been a longtime executive member of our association and
she is one of the founders of one of the former groups that represented our
group prior to a merger. On my far right is Louise Poisson, who is a social
animator with our association.
Le Président (M. Saint-Roch): I would like to thank you,
Mr. Stitt, and you can proceed now. I would like to remind you that we have a
very long schedule today so, I would like to invite you, if possible, to remain
within the fifteen minutes that we will allow you to present your
documents.
M. Stitt: Basically, what we want to do today is to present a
similar brief to the one that was presented to the City of Montreal on June,
1987. I think what I will do is to try to summarize that brief as best I can
without making it boring for people who are listening.
The Quebec Government is in the process of lifting restrictions on
converting rental units into condos.
As we stated in our letter of October 28, 1987 to M. André
Bourbeau, we are strongly against lifting the moratorium which has been in
effect since 1975. After having read the document entitled "Lifting the
Moratorium... A Necessary Decision", we are still strongly opposed to the
lifting of the ban despite the hard work by the Government to convince us
otherwise. Why is the Government proposing this?
They are citing as reasons: the lack of supply of home ownership for
moderate income persons; therefore potential new home buyers are either
continuing to rent or are moving to the suburbs. Also, to replace the
moratorium with more effective measures that will stop landlords for getting
around the law.
We question whether the lifting of the moratorium would grant access to
home ownership from moderate income tenants. In fact, the Lapointe, Cyr study
states that the cost of a converted unit would only be 10 % to 20 % less than
the cost of a brand new condominium. In NDG, the majority of new condos that
are presently on the market start at 78 000 $ a year. Therefore, a converted
unit would cost anywhere from 63 000 $ to 70 000 $ a year plus appliances,
notary fees, welcome tax, certification of location, property taxes, heating
and condo fees.
The type of income that would be required to afford this scenario would
be approximately 50 000 $ per year if the standard 25 % of gross income is kept
for housing. This would eliminate the vast majority of present tenants from
buying converted condominiums and would undermine the Minister's premise to
give moderate income earners the chance to be home owners.
In a 1980 Housing and Urban Development (HUD) Study, it was stated that
58 % of tenants were evicted upon conversion. The types to move out were the
elderly and younger households. In general, they move into poorer quality
housing. The percentage of income on housing would have more than doubled had
they bought.
We do not buy the Minister's proposal of a package deal to better
protect tenants against present abuses of the current moratorium. Currently
landlords temporarily vacate their buildings for so-called major repairs, under
the famous article 1653. This is de facto eviction since most tenants do not
move back due to major inconveniences.
This results in empty buildings available for sale as condos, whether
renovated or not, and the loss of rental units.
We demand the protection of tenants via reforms of article 1653 and also
repossession of units in buildings of four units and less. We demand action
now.
Our association has compiled abuses that tenants have suffered under
this present law and the numbers affected are in the hundreds.
Although the Government cites studies that imply that the percentage of
rental stock will not diminish if apartments are converted, it seems very
plausible that the rental stock will decrease due to a shift to ownership from
rentals. In addition, as apartments are emptied due to tenant movement, they
will be sold and this should have a negative impact on the rental stock.
We would also like to highlight the potentials of abuse, not just to
seniors and disabled but to all tenants. Can the régie protect tenants
against indue pressure to purchase or evacuate? In the Dansereau-
Godbout Study 1981 the vulnerability of elderly and retired tenants who
were afraid of eviction was emphasized. In fact, these people felt forced to
buy their units. This is unacceptable. This same study stated that occupancy
costs increased from 45 % to 123 %. (16 heures)
To conclude, we again reiterate our opposition to the lifting of the
moratorium. We want it maintained. We insist that the Government close the
loopholes and stop tenants being evicted for major repairs and phony
repossessions.
Mr. Bourbeau has stated that nothing will change the Government's mind
in its1 intent to lift the moratorium, unless of course the citizens
take to the streets in opposition. If the moratorium is lifted, then we
strongly recommend the use of Mr. Bourbeau1 s suggestion. Let us ail
take to the streets and protest!
The Government is proposing a seven point procedure: 1) Notice of intent
to tenants. (No repossession after this) 2) Having a condo cadastral
subdivision plan and a declaration of co-ownership declared. 3) Request the
régie for authorization to register the declaration of co-ownership. 4)
If all is in order, register this declaration within the same year. 5) Submit
an expert's report to buyers. (No physical alteration required). 6) Submit a
prospectus (five or more) to buyers which describes the chief building
components, operations and administration. 7) The tenant has a priority
opportunity to buy. If not interested, the tenant has an unlimited time limit
and the right to remain.
If the Government refuses to keep the present freeze on conversion, we
recommend that: 1) Not only should temporarily evacuated tenants receive
compensation for moving costs to and from temporary premises, but they should
receive damages for inconvenience, storage of goods if needed, meals, packing
and unpacking of household goods, moving insurance, disconnection and
re-connection of services, additional travel expenses, differences in rent,
hotel costs, if no temporary apartment can be found, and perhaps for welfare
recipients, an amendment to the Welfare Act that permits them not to have a new
lease in order for them to continue to receive benefits. For disabled persons
or sick persons, a special indemnity which would cover additional costs that
they might have such as transportation, home care, etc.
The law should ensure that tenants receive at least half and preferably
two thirds of these estimated costs in advance, prior to evacuation. 2) Good
faith of landlord when asking for permission to allow temporary evacuation for
major repairs should be shown and proven before the régie, for example,
permits, feasibility studies, good landlord/tenant history, no conflicts on
previous repossession attempts. 3) To authorize the régie to rule on all
major improvements repairs and force owners to apply for such authorization to
take away the burden from the tenant to contest within ten days. During this
authorization process, any landlord, who has done major repairs in the last
five years, should be refused. How do you prove bad faith, that the reason for
major repairs was to prepare the building for conversion? 4) Punitive damages
is a good idea but should be well defined in the law. How much and under what
conditions' 5) To extend the required notice from 24 hours to inform tenants of
professionals entering their dwelling for purposes of expert assessment
required to convert a rental building into a condominium to one week (seven
days). 6) The régie should be in charge of punitive penalties for
harassment. They could use the services of the Human Rights Commission or other
government bodies. 7) What could prevent an owner from causing damage to his
building that would require urgent repairs ans also temporary evacuation? Would
he or she be allowed to convert to condominiums if the tenants did not return
as is the situation now? This could encourage criminal acts. 8) More
clarification is needed as to the tenant having right of preemption. Before he
has decided on the offer, and another offer is made to the owner, the landlord
must then offer the unit at the same price and conditions to the tenant. This
could lead to price-fixing and collaboration between the bidder and the owner
and could put pressure and tension on the tenant to make a quick or bad
decision. This could lead to increased speculation. 9) Extend the time period
to three months from one month to respond to an offer to purchase by the tenant
and to clarify whether or not a new owner would be allowed to do major repairs
that would force the temporary evacuation of the residing tenant. How soon? 10)
Submission of a prospectus to any prospective buyer should be required for
buildings that contain four units or less. 11) While owners/convertors are
requesting authorization from the régie, a hearing should be called so
that all the tenants have the right to be heard and the interest of all tenants
to purchase should be carefully considered before authorization is granted.
On November 28, 19B6, we wrote a
press release and the heading of it was "Neighborhood Association Forms
Evicted Tenants Committee". It reads: "Since so many tenants have recently been
exposed to the application of an unjust law (article 1653), the NDG
Neighborhood Association has decided to form a sub-committee of tenants that
have suffered or are suffering due to its application. The new group is named
ETR 1653, or "Evicted Tenants for Reform of Article 1653". Under the present
law, a landlord can force tenants to temporarily evacuate for a period of more
than one week upon giving an advance notice of one month. The law states that
the tenants do no have the right to contest the nature or the expediency of the
work. But they can apply at the régie within ten days of receipt to have
an immoderate condition suppressed or modified. "What this means in application
is that an owner can rid himself (herself) of tenants that he (she) does not
like, in the middle of winter, by sending a notice to evacuate for three or
four months within one month's time. An owner could try to have you out on
Christmas Day if the notice is sent on November 25th. You can eat your turkey
in the street. In most cases, the landlord is in bad faith and this is a tactic
to get rid of tenants that are paying lower rents or stick up for their rights.
Most tenants will not contest and a lot just decide to move rather than contest
at the régie or ask for compensation themselves. If they contest
immoderate conditions, usually the Board will allow the work to be done
(despite proof that no real work is needed) and will set conditions such as
compensation for moving both ways and any difference in rents at the new
location. This is extremely unfair. Where do tenants find apartments to live in
for four months in the middle of winter? It disrupts their whole lives and we
would like to see the politicians exposed to this harassment and anguish for
awhile. Believe me, they would reform this law very quickly. "Some recent
examples of abuse under this law: "1) 3410, 3420 Kensington, where tenants are
still legally fighting a régie decision to evacuate for four months.
Only six tenants paying lower rents received the evacuation notice, and in the
meantime, the owner is signing new leases on empty apartments for close to
double the former rents. He - the owner - testified that he had to empty the
whole building to do the work and then goes ahead and re-rents at ridiculous
rents. "2) 6240 Sherbrooke St. West, régie granted an evacuation of one
month's duration even though the owner did not show up at the hearing. Owner is
known to constantly make false demands at régie just to scare the
tenants. "3) 5550 Côte St. Luc Rd. Régisseur refused to accept the
owner's request for temporary evacuation. Only a few tenants that had contested
rent increases got this notice. The new owner is also threatening to do major
repairs. "4) 2372 Wilson. Régisseur refused to accept owner's request
since no city permits had been issued and no construction contracts had been
signed. Despite this temporary victory, all 40 tenants have moved out. "5) 2259
Prud'homme. Régisseur granted an almost three month evacuation period
but delayed this evacuation for one month until January 6, so the tenant could
spend Christmas in his apartment. Owner went ahead and re-rented his apartment
once he had left."
And it states, at the bottom of this press release, that we would like
all tenants that have been affected by this law to contact us at our
office.
I would just like to summarize a letter wrote to Mr. Bourbeau on October
28, 1986. "Dear Minister: Our Association has been working in the defense of
tenants, rights and housing issues for ten years now. We presented briefs to
Parliament when the present legislation, Bill 107, was being formulated. Upon
hearing that your Government is seriously considering lifting the present
moratorium that exists preventing the conversion of apartment buildings of five
units and more into condominiums (Bill 20, articles 136.1, 136.2), we would
like to state the following: "1) This proposal is totally unacceptable and on
behalf of our five hundred members, and the tenant population at large, we wish
to state our contestation to it. "2) In May, we began to circulate a petition
against the lifting of the ban, and that the ban should be enlarged to protect
buildings of four units and less. At present, we have collected a thousand
signatures. Conversion of present rental units irregardless of the amount of
units in the building to condominiums is totally unacceptable. "3) We have
formed a coalition with several other groups and senior citizens' associations
to pressure (the Government the numbers of individuals that are represented by
these groups number in the tens of thousands). "4) We do not believe that the
Government is capable of protecting tenants in their buildings (if condo
conversion is allowed) against harassment, intimidation, etc., by speculative
owners. In fact, we see that the present law is very weak in protecting tenants
now and we demand immediate reform of article 1653 where an owner can throw
tenants out in the middle of winter to do so-called needed major
repairs upon giving one month's notice. We have seen many recent
examples of abuse and tenant harassment under this clause and will be
forwarding to you specific examples of this in the future. In addition, there
have been thousands of illegal conversions in Montreal as the law has allowed
owners to rid themselves of tenants and they demolish their apartments to make
condos. "5) There are more than enough condo units on the market for those who
wish, or can afford, to purchase one- Do not displace tenants for this reason.
Surveys have shown that only 13 % of tenants would be interested in buying
their unit and this figure is highly questionable. 78 % of the local population
are tenants and we will put a stop to economic self-interest groups influencing
the government at the expense of this population. "6) Lifting the freeze will
not open up access to home ownership. Most cannot afford to buy their unit
(even if they could, what about their freedom of choice?. "7) We would like a
formal invitation to any and all consultations that you will be holding this
year or next. In fact, we wish to meet with you anyway, even if consultations
will not be held. "8) We urge the Government to spend more funds on subsidized
housing units for low income earners. Thousands are on waiting lists and this
is not acceptable. Rrant subsidies are not that effective in maintaining
decent, affordable housing. 'In conclusion, we insist on the seriousness of
this matter and look forward to meeting with you in the future. Sincerely."
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le ministre.
M. Bourbeau: Oui, M. le Président. I will try to say that
in English, although I am not as familiar with that language as with the French
language. I will do my best.
Every group that comes before us puts before us its case and we attach
more or less credibility depending on whatever is said and the way that it is
said. I must say that I am really disturbed to read in your brief a sentence
that quotes me in a way that is completely against reality. You say: "Mr.
Bourbeau has stated that nothing will change the Government's mind in its
intent to lift the moratorium, unless of course, the citizens take to the
streets in opposition." The word that really comes to my mind is
"démagogie", I do not know what that is in English, but I presume you
must know what that means.
If you look at the document that we have deposited, in the foreword, it
is an invitation for you to come here and it is said: "Interested parties are
invited to comment on theses measures with the assurance that their comments
will be taken into consideration when the final draft is being prepared. My
signature is right underneath. Now, if you read that carefutly, how can you
afterwards, come and say that I declared that there was nothing that would
change my mind or anything like that? Is that not contradictory?
M. Stitt: What I was referring to was when you were on CJAD, I
believe, back in February, those are the comments that you made at the time on
the radio.
M. Bourbeau: I take exception to that. I was on CJAD and I have
never entertained the opinion that our proposition was "coulée dans le
béton" - how do you say that in English?
M. Stitt: Fixed forever in concrete.
M. Bourbeau; Fixed forever in concrete. I did say in the foreword of the
document that we were here to consult. This morning, in my opening remarks, I
made it very clear that we were here to consult and that the document we had,
which was a document for discussion, could be improved, could be modified; not
even slightly, but it could be modified substantially if need be. So, I do not
think really that the attitude you are taking here is one that is compatible
with a sound discussion. I think it is agressive, unnecessarily agressive. (16
h 15)
M. Stitt: I do not believe it is agressive, but if you are
questioning, if you are saying you did not say those things on the radio in
February, I guess there is only one way we can solve that. I do not have a
transcript of the whole program that was aired at the time, but I made notes by
listening to that and, in fact, I spoke to you. I was one of the callers on
that show and you were very ironclad in saying that the Government is going
ahead with lifting the moratorium and basically, nothing was going to change
your mind or the Government's mind, except perhaps if you got so much
opposition and the citizens of Montreal took to the streets. If you want, I can
approach CJAD and try to get a transcript of the show, but...
M. Bourbeau: May I have some...? It is your word against mind and
I flatly deny having said that. It is impossible. I would never have said words
like that, it is not like me. Furthermore, at that time, there was no proposal.
The proposal was tabled in April and you are referring to something in
February. So, I could not refer to any proposal in February since there was no
written proposal.
M. Stitt: You kept promissing at the time that a proposal was
coming out shortly by the Government, but as far as the Government's position
on conversion, you made it very clear that the Governement was intending to go
ahead with it.
M. Bourbeau: We intended to deposit a proposal. Sure, that I did
say.
M. Stitt: You were questioned by many tenants as to: Would the
Government change their mind? And you stated very strongly and sincerely: No,
the Government is going ahead with it. The form of the proposal might change,
but the Government wanted to lift the moratorium.
M. Bourbeau: That is the danger of coming here and citing on a
paper something you heard over the radio. It is very easy to twist the facts.
While I could have said that the intention was to come up and deposit a
proposal or the intention was to deposit a proposal for lifting the moratorium,
you tend to say that I said that we would not change anything in our proposal
when the proposal did not even exist. It is very difficult. The intention was
to come here and we did, afterwards, deposit a proposal.
Anyway, I am not going to spend the day on this. I just wanted to say
that this is not really the proper way to get into a serious discussion on that
matter.
M. le Président, je vous laisserais sur cette mise au point et,
subséquemment, mon collègue, le député de
Sainte-Anne, a l'intention de poser des questions.
Le Président (M. Rochefort): Oui. Je vous remercie, M. le
ministre.
Je veux rappeler aux membres de la commission que nous avons retenu les
services d'un membre du secrétariat des commissions, M. Comeau, pour les
groupes ou les membres de la commission qui voudraient profiter des services
d'un traducteur. Sur ce, je reconnais M. le député de
Saint-Jacques.
M. Boulerice: Mrs. Ellis, Mrs. Poisson and Mr. Stitt, on behalf
of my colleagues, I just want to say that I am sorry the Minister welcome you
that way. I do not feel that you are demagogues, as he said, but you are
concerned citizens and after reading your memorandum, we can say that you are
practical because you have a knowledge of what I call the field action that
makes your remarks and recommendations very accurate to our standards. Thanks
for doing it.
If I am right, when I read your memorandum, you pointed out that old age
and handicapped people are the first victims of it. Even a so-called special
wicket could be opened at the régie, which is, on one side costly and
will not solve any problems. There are more problems than that problems old age
and handicapped peoples are facing, such as health and psychological problems
and damage to there health coming from the stress of being evicted, or having
the sentiment that they could be evicted from their dwelling where they have
been living for a couple of years, specially in such an area as yours, which rs
NDG. I know it very well because I lived in that area, as my boss did. As a
matter of fact, you probably know that he was born and raised in NDG.
There is one point that people have also pointed out if we lift that
moratorium. How do you say it in English? Thank you. Since I am in Quebec City
I am losing my English. That does not mean that I should be defeated and go
back to Montreal to learn it back.
Now since the stock of apartments will not be any higher, it will
stretch.
There is another problem coming also. You probably know that we have
just ended another parliamentary commission on immigration. On both parts, we
agreed that immigration levels should be raised here, in Quebec, to face
"dénatalité" and all those problems. So, do you feel that with
the lifting of the moratorium, as the Minister pointed out, we could come to a
kind of crash which is going to be "fight for your own flat", because we are
going to have a housing problem in Montreal? Do you agree with that assertion
which 1 am making on behalf of my colleagues?
M. Stitt: I think that we have a housing crisis right now.
M. Boulerice: ...one of the lowest in North America, I guess.
M. Stitt: Well, perhaps some people look at the vacancy rate and
say that it is above 1 %. Therefore, that makes it a healthy rental market. We
would argue, on the contrary, that tenants are spending a higher percentage of
their income on rents. Nobody is building new apartments for rental and, if
they are building new buildings -there are very few going up - they are not
under rent control anyway for the first five years, so they can ask whatever
the market will bear. So, as far as decent affordable apartment units are
concerned, there are very few in Montreal, specially in our area and in other
areas as well. So, it is a big problem for people who are earning under 25 000
$ or 30 000 $ a year. We know that the vast majority of Quebec' households, not
just Montreal, but Quebec households are spending well over 25 % of their
income on rents.
M. Boulerice: There is a kind of
folklore - we are going to see that with The Redfern Tenants'
Association coming a little later today - saying that if you live in the
Westmount area or NDG, you are rich, which, 1 do not believe because I face it.
You are not specially rich, except maybe if you are just uphill. You mentioned
a couple of addresses and I can picture those places. Could you go into it
deeper and tell me the situation in NDG right now, in terms of old age
population and handicapped people?
M. Stitt: Historically, NDG has one of the highest percentages of
senior citizens in Canada. There have been various comparisons between NDG and
Victoria, B.C., where there is a large percentage of seniors. Most of the time,
they say we are number two in the country as far as having a concentration of
senior citizens, which is about 18 %. As far as the disabled are concerned, I
am not sure of the statistics for that. I do not have the statistics on how
many disabled people live in NDG, but recent figures have quoted that 20 % of
all citizens are below the federal poverty line; one fifth of the population is
below the poverty line. So, that certainly dispels the myth that Westend
Montrealers are moderate or wealthy residents.
M. Boulerice: Yes, please Mrs. Poisson.
Mme Poisson (Louise): They also state that i7 % of the families
come from single parents families.
M. Boulerice: 17 %.
Mme Poisson: Familles monoparentales, 17 % à
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Boulerice: 17 %. Mme Poisson: 17 %, oui.
M. Boulerice: Well, this is very significative. 1 guess that you
have been working as an association... First, you were the NDG Block
Association, I guess, a couple of years ago.
M. Stittî NDG Block, NDG Tenants, two groups.
M. Boulerice: So, you have been working as least for ten years.
Just to make us aware of the problem you are really facing, people are probably
going to your association as the resource they know in your area. How many
cases did you have, let us say, for the last year?
M. Stitt: We get over 10 000 phone calls a year and we probably
get 550 or 600 in-office visits a year.
M. Boulerice: OK. Do you agree with me, Mr. Stitt, that if
housing is an economical preoccupation, it is also, first and basically, a
social right. That is my stand. I am asking you if you stand with me on that
issue. If so, you are... And I did not ask for it, it just happened like that.
You will be m a by-election a few weeks from now. Is your association asking
the candidates to stand firmly and clearly on that, because it concerns your
population?
M. Stitt: To respond to the first part of the question, out
association and the two former associations have always publicly stated that
housing is a social right, not a privilege. And, with linkups with other
housing associations in Montreal, other tenant groups, I think we all basically
have that philosophy. As far as the upcoming by-election in NDG is concerned, I
have been on holidays for the last few weeks, so I have not really spoken to
any candidate, personalty or otherwise. I am a little bit out of touch, but I
believe that the local NDP candidate has come out against condo conversions. I
do not know about the Liberals; I do not think that the Liberals have chosen a
candidate yet, so I do not know what their position is or what the candidate's
position will be, but I think that it will become an election issue, yes.
Mme Poisson: Yesterday, at Sunday in the park, Myrtle was there
and I was there, there was Mrs. Guay who is a candidate running for the
by-election; she represents the NDP. She told us that she was supporting our
group. But we did not ask for her support, she offered it to our association
and she is here today.
M. Boulerice: OK. We quite often read that there is a right to
property. I do believe that there is also a right not to be a house-owner. It
was my choice for many years and some people, not only for economical reasons
but for their own interests, prefer to invest their money into travelling or
things like that. So, there is also a right to being a tenant. Do you agree
with us when we say that the solution is not what is actually proposed in kind
of opposing the right to property to the right to be a tenant, but to try to
make a conciliation of the two? If you were there this morning, someone said
that "primauté" - I do not what the word is again...
M. Stitt: Priority.
M. Boulerice: ...priority should be on property. For those who
want it, okay, but for those who do not want it, not only those who cannot do
it but also those who do not want it because this is their right, I do not
think that we can go on with that kind of assumption.
Mme Poisson: There might be a lot of people who may want to have
a greater ownership, including speculators and investors. For the people who
cannot afford to buy when these speculators or investors are on the way, it
makes it very hard for them. So, you have to take that into consideration, the
ones who may afford it. Finally, they are going to eliminate the rights of the
ones who cannot take the advantage of buying or who do not have the capacity to
buy. I do not know if it is clear.
M. Boulerice: Yes.
Mme Poisson: I too am better off in French than in English.
M. Boulerice: OK. Thank you for coming. I was pleased to see you.
I mean we were pleased to see you. I am the one who expressed it, but I guess
that my colleagues all agree with me.
M. Stitt: Just to finish off that one point, it is interesting
because I think that our present system and the capitalist system in general
put the priorities of the people who have the money, to buy housing or anything
else, ahead of the interests of the majority of the people who are falling into
those circumstances. Every day, we look at examples, in the media, in the
world, but I do not think that we are here to debate changing the political
structure even though it is involved in all this for sure; it is the basis for
it all. (16 h 30)
I think that what our group wants to do is protect tenants, the majority
of the citizens who are tenants. We do not. have anything against access to
home ownership, we believe it exists right now. The problem is that I do not
believe that the Government feels, if they lift the moratorium... 1 think the
Government may believe that access to home ownership will open up, but we
question that highly and we say: To whom? Will these condos be 30 000 $? And,
even if they are, who can afford that? It sounds good, it sounds nice, 30 000 $
for a condo, that is not very expensive compared to the new condos, but when
you look at the amount of money you need to put a down paiyment, the increase
you put out every month on all the condo fees, etc., you would still need a
hefty over 30 000 $ to afford a unit at 40 000 $ or 50 000 $.
Le Président (M. Rochefort): Cela va? 'M. le
député de Saint-Jacques.
M. Boulerice: Thank you again.
Le Président (M. Rochefort): Merci. M. le
député de Sainte-Anne.
M. Polak: Merci, M. le Président. Mr. Stitt, two
preliminary remarks. I have studied your brief and I think that there are a lot
of very good points in there. It is unfortunate... I want to support the
Minister in this, because I have had my differences of opinion with the
Minister, but I can assure you that he is simply not the type to make that
statement: "...unless the citizens take to the streets in opposition. I find
that paragraph unfortunate... I would like to see you possibly withdraw it
because even if he may have used the words, it is simply not his intent. I know
him well enough for that. I am more interested in the contents of your brief
than in that one little paragraph which could perhaps upset him little bit and
I agree With him that a paragraph like that one should not be in there, but
perhaps you did not intend to do it.
The second point that my colleague made is the partisan part of
politics. I would have wished that we could avoid that because, really, we are
here in consultation. I think that the Minister is a big enough man, if change
has to be made, to accept changes for the better or what the population
believes is best. That is the reason why I got on this committee because I feel
strongly about this issue and I think that it is very interesting to listen to
all the briefs, to all the persons who appear here and that we will all learn
together. So, I know that my good friend from Saint-Jacques is worried about
the bu-election in NDG. I do not blame him because his own leader has already
said that they are going to finish third.
To me, this should be above partisan politics. This is an issue that
concerns us all and I want to talk just about the contents of your brief. How
many members does your association have, roughly?
M. Stitt: 450.
M. Polak: Are most of them elderly people who have problems or
are on fixed incomes, or is it made up of a certain group of people?
M. Stitt: We have quite a mix, I would say. We have a lot of
senior citizens, a lot of welfare recipients. We have some tenants that are not
necessarily below the poverty line as well. Most of the members all at one time
have had trouble with the landlord, or with rent increases, or with repairs or
with lack of maintenance. At one point during our history, they have come to us
for help.
M. Polak: Have you consulted your members as to how far they have
expressed
an interest to buy, when the chance is given, the apartment in which
they live now and turn it over once it becomes a condominium?
M. Stitt: We have not heard from any of our members, not one
member, an interest to buy a converted apartment unit. In fact, we have not
heard from any tenant in NDG who is not even not a member of our group of any
desire to buy a converted unit.
M. Polak: Do you have any prices of condominiums now in NDG? More
particularly, I would like to know if there are instances where an apartment
has been turned over into a condominium. Let us say the tenant was kicked out
of there or perhaps by legal means who was no longer there or whatever
happened, a fire, anything like that, and it became a condo. What are the
average prices in NDG?
Mme Ellis (Myrtle); I can tell you about the one that I was
evicted from ten years ago when the group helped me at the YMCA. There were
just... And then, we eventually formed the tenants' association. Those are
condominiums today. It was foreign investment that came in here.
He lied; he produced a wife and child. The child could have been his,
but the girl was not his wife. I lost my case and it was only after that, and I
had to store my things. I had been there 26 years. Our rent had always been
paid on time. I was a widow and also 1 had had an accident while on duty at the
Reddy hospital. I was using two canes at the time and I was only given five
months notice that he wanted to move in to my apartment. He never moved in, he
remodeled the apartment and got twice as much rent. I had gone to the Rental
Board frequently even after my husband died. There are the condominiums on
Grand Boulevard, next to a bank, all sorts of stores, ideal, and there are a
lot of handicapped people and there are a lot of seniors in that district. They
cannot afford to pay their 95 000 $ for 3 1/2 and you have to pay for
maintenance, 115 000 $. The things is, who are taking them? Not senior people.
The young people who both have jobs are the only ones really moving into that
building.
M. Polak; You mentioned before, Mr. Stitt, the vacancy rate. What
is the vacancy rate right now in apartments in NDG? Are you aware of that? Let
us say, is it bad? Let us suppose that people have to leave their apartment,
whatever the reason is they would automatically be forced to take apartments
elsewhere for much more money or is there a readily available market in the
same type of housing?
M. Stitt: I would say that it is about 1,5 % without having any
statistics to back that up. But I would say that to find a decent affordable
apartment, it is much lower, well below 1 %, and by affordable, 1 mean there
are vacancy rates in buildings with cockroaches and balconies falling down and
everything else. But, try to find a half decent 4 1/2 for 400 $, and good
luck!
M. Polak: You mentioned the yardstick and I have always heard of
25 % of the gross income being spent on housing. That is roughly what everyone
goes by. In your group of members, do you have statistics on the percentage of
the gross income that they are spending on housing now?
M. Stitt: No, we do not. We can only go by our experience. A lot
of people do not want to tell us how much money they make. But we can tell
based on whether they are welfare recipients: We know that they are paying 40 %
or 50 % on housing, specially the ones under 30 years. They are living together
just to pay the rent and, even then, they are paying 40 % or 50 % on housing.
But most of the seniors on pensions stay around 25 % or 30 %, I would say.
There are exceptions, but...
M. Polak: One last question. You discussed the right of
preemption. I found interesting the point that you seem to make, that is how
can you stop a prospective purchaser from going to the owner and offering
perhaps an artificially high price and then going to the tenant who says: Look,
I cannot buy for that price, and perhaps the actual sale is going through for
another amount. Is that the point? Could you elaborate a bit on that?
M. Stitt: We believe there would be automatic price fixing
involved. If the tenant has the first choice, there is nothing to stop an owner
from saying: Well, I am offering you the first choice to buy, but Mr. and Mrs.
So-and-So next door, or down the street, or I have heard from somebody else,
that they are willing to give me X amount of dollars. So, right away, you are
offering the place to the tenant, but you are setting a price, perhaps
artificially high or whatever, so the tenant is going to be intimidated by that
and say: Well, I cannot afford that, or: If that is what the market is, I will
have to move, I guess.
M. Polak: In the document of the Minister on lifting the
moratorium, have you read the section concerning major repairs and the
improvements that he is suggesting to try to plug that hole? Do you find that
it goes far enough, not far enough? What is your evaluation of that?
M. Stitt: What section are you referring to specifically?
M. Polak: I am talking...
M. Stitt: It seems that everything in this paper is tied in with
the lifting of the moratorium. So, if we are not talking about lifting the
moratorium, I do not think that there is anything in this paper that talks
specifically about major repairs and changing 1653.
M. Polak: I understand that my time has passed, so I will have to
continue my discussion with you in the corridor.
Le Président (M. Rochefort): Parfait, merci. II reste deux
minutes à l'Opposition.
M. Boulerice: Just to say, Mr. Stitt, Mrs. Ellis and Mrs.
Poisson, that I really want to express our high appreciation of your comments
and concern. I hope that some Crown people will have the courage to stand on
this issue. If not, I am sure you will force or even push them.
I would like to say that my father was a humble taxi driver, so I know
what my background is. If having convictions is partisan, some people will call
me that until I die, probably. But I will live with that!
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le
député. M. le ministre, le mot de la fin.
M. Bourbeau: 1 would like to thank the NDG Neighbourhood
Association for their brief. I can assure them that we will study it - as we
have already done it - very carefully and, whenever we take a decision, your
comments will be taken into consideration.
M, Stitt: Thank you. We would like to present you with 1700
signatures against the lifting of the moratorium and to expand it to include
units of 4 and less.
Le Président (M. Rochefort): Merci. Sur ce, je remercie
l'association.
J'inviterais immédiatement le groupe Information ressources
femmes et logement à se présenter a la table des témoins,
s'il vous plaît.
Bienvenue parmi nous. Je vous demanderais de vous présenter,
ainsi que les personnes qui vous accompagnent pour l'information des membres de
la commission et du Journal des débats. Par la suite, je vous
demanderais de vous en tenir aux quinze minutes qui vous ont été
réservées. Je me permets de dire - cela ne s'applique pas
qu'à vous et pas à partir de vous, mais je pense qu'il est
important de le dire pour vous comme pour l'ensemble de ceux et de celles qui
vous suivront - que les membres de la commission ont reçu vos
mémoires et en ont pris connaissance. Donc, je pense que les quinze
minutes qui vous sont réservées peuvent être souvent
l'occasion d'accentuer ou de relever les points qui vous semblent les plus
importants dans votre présentation ou qui ont été
soulevés avant que votre tour ne vienne pour vraiment peut-être
préciser à nouveau le fond de votre pensée.
Information Ressources Femmes et Logement
Mme Mondor (Françoise): Je me présente,
Françoise Mondor; à ma droite, Geneviève Daudelin, Sylvie
Poirier, Ruth Pilote et Francine Léonard.
Il serait à propos de discuter du bien-fondé de la
levée du moratoire, puisque nous doutons sérieusement que ce soit
une décision qui s'impose pour les motifs que vous mentionnez à
la page 7 du document. D'abord, on ne vise finalement qu'une catégorie
de locataires désireux de s'approprier leur propre logement et qui sont
en mesure de l'acheter par leurs propres moyens. Enfin, il nous semble
illogique et tortueux de voir qu'il faille passer par la levée du
moratoire pour envisager des mesures d'encadrement plus efficaces.
Ce que nous retenons à la lecture de ce document, c'est qu'on
évite encore soigneusement d'établir une véritable
politique globale du logement. En effet, on reconduit d'une façon
à peine voilée la nécessité de diversifier les
choix d'accès aux logements publics et privés. De même, on
élude ta capacité réelle de payer de tous les
ménages locataires. (16 h 45)
Le droit au logement pour tous et pour toutes étant une cause
déjà fort bien défendue, nous avons choisi de nous
attarder sur un point précis qui ne manque certes pas de
visibilité dans le document, mais qui demeure somme toute obscur,
d'autant plus pour les personnes qui ont une certaine expertise en la
matière. Il s'agit des mesures visant à protéger les
locataires contre le harcèlement possible de la part des
propriétaires.
Que l'on soit pour ou contre la levée du moratoire, la protection
des locataires devrait constituer un enjeu de premier ordre dans toute
politique gouvernementale sur l'habitation. Non seulement parce que les
locataires composent la moitié de la population totale du Québec
mais aussi parce qu'ils dépendent des conditions fluctuantes du
marché de l'offre de logement.
Les mesures énoncées dans le document pour tenter de les
protéger plus efficacement demeurent somme toute évasives et
force est de constater qu'avec la levée du moratoire, la question de la
protection des locataires
devient particulièrement épineuse. Vous avez la franchise
de l'admettre s votre façon dans le document. Vous utilisez ouvertement
et à plusieurs reprises le terme "harcèlement". Cela prouve
à tout le moins que vous reconnaissez l'existence de cette
réalité dans le vécu des locataires. Mais quelles mesures
nous apportez-vous? Moult ambiguïtés apparaissent. Nous tenterons
donc de les relever systématiquement afin que vous soyez à
même de constater entre autres tout l'imbroglio juridique entourant la
question du harcèlement et nous irons plus loin en qualifiant cet
imbroglio de vide juridique tout simplement.
Tout d'abord, on énonce à la page 3 qu'on vise "à
assurer aux locataires une protection maximale dont un droit au maintien dans
les lieux pour une durée illimitée". Mais attention, ce droit
n'est pas nécessairement universel car plus loin, aux pages 9 et 49, il
est spécifié qu'il ne sera accordé qu'aux locataires
déjà en place qui auront reçu un avis d'intention de
conversion de la part du propriétaire. La porte reste ainsi ouverte au
harcèlement possible de la part du propriétaire bien avant que
l'avis d'intention de conversion soit déposé par ledit
propriétaire.
Une deuxième ambiguïté apparaît à la
page 9. On croit protéger le locataire en interdisant "à
l'acheteur du logement converti en copropriété de reprendre
possession du logement tant et aussi longtemps que le locataire en place au
moment de l'autorisation de la régie désire demeurer dans les
lieux". À toutes fins utiles, on devrait interdire tout achat de
logement pour conversion en copropriété tant et aussi longtemps
que le locataire dudit logement désire demeurer dans les lieux. Car qui
sont ceux qui auront les moyens d'acheter un logement sans l'habiter? C'est
à partir de ce moment, entre autres, que le locataire peut Être
harcelé sous de multiples formes non seulement par l'acheteur
éventuel mais aussi par le propriétaire de l'immeuble ou encore
par les éventuels copropriétaires de l'immeuble. Le
harcèlement peut prendre la forme d'intimidations de toutes sortes.
Certains propriétaires vont même jusqu'à acheter le
départ des locataires. C'est ce qu'on appelle communément un
dédommagement. Peut-on imaginer que le montant que le locataire aura
reçu peut réellement compenser les préjudices subis et la
perte de son logement? Retrouva-t-il mieux ailleurs'? L'offre en logement
locatif sera-t-elle suffisante à plus ou moins long terme avec la
levée du moratoire?
Une troisième ambiguïté apparaît à la
page 8 lorsque vous mentionnez la présence de "certains recours à
la Régie du logement en vue de se prémunir contre le
harcèlement que peut exercer un propriétaire". En
réalité, ces recours sont pratiquement inexistants.
Nous sommes surprises de constater que nos représentants
gouvernementaux puissent véhiculer des faussetés en gonflant
à tort les pouvoirs de la Régie du logement en cette
matière. Le concept de harcèlement n'apparaît en aucune
façon dans la loi sur le logement, car le harcèlement n'a jamais
été défini comme étant un délit en soi au
sens strict de la loi. Par exemple, lorsque vous téléphonez
à la Régie du logement et que vous énoncez le terme
"harcèlement" dans le but de déposer une plainte de cet ordre
contre votre propriétaire, automatiquement on vous réfère
à la Commission des droits de la personne. Nous discuterons plus loin de
ce recours possible. Le mot "harcèlement" n'existant pas au terme de la
loi sur le logement il n'est donc pas recevable à la Régie du
logement. Il faut avoir recours au vocable suivant: "perte de la jouissance
paisible des lieux" si vous voulez que la Régie du logement prenne en
considération votre plainte. On peut facilement imaginer le nombre de
locataires qui, faute de connaître le jargon propre à la
régie, laissent tomber leur plainte après cette première
tentative soit parce qu'il est impossible de se faire comprendre soit par peur
de procédure laborieuse si on les relègue à une autre
institution gouvernementale. Il faut être drôlement combatif et
informé pour vouloir et pour pouvoir poursuivre les
démarches.
Il est très important de rappeler et d'insister sur le fait que
le harcèlement est le plus souvent une combinaison de multiples actes ou
paroles préjudiciables qui justifie en elle-même son
appellation.
On ne peut passer sous silence la peur souvent justifiée des
représailles de la part du propriétaire. Cette même peur
constitue un premier obstacle à l'utilisation des recours. Le second
obstacle est inhérent à la nature même du
harcèlement. Comment accumuler suffisamment de preuves
irréfutables quand les actions répréhensibles sont
commises le plus souvent de façon insidieuse et cachée? Avec tout
ce que les démarches actuelles impliquent de la part des locataires
harcelés, on peut facilement comprendre la réaction de la
majorité d'entre eux qui préféreront endurer en silence la
situation quitte, en fin de compte, à déménager.
Ainsi, le harcèlement entre dans la normalité du quotidien
particulièrement chez les plus démunis socialement et
économiquement. C'est un non-sens en soi.
Pour conclure sur la question des recours possibles à la
régie, il nous apparaît impérieux d'abord de définir
une fois pour toutes le concept de harcèlement, de l'inscrire dans la
loi sur le logement et, en prenant bien soin d'envisager les multiples formes
que peut sous-tendre ce délit.
Il est également impérieux de prévoir des
pénalités exemplaires envers les
propriétaire ou leurs intermédiaires qui outrepasseraient
leurs droits au détriment des locataires.
Mme Poirier (Sylvie): Une quatrième ambiguïté
apparaît à la page 10 et est reprise à la page 51 lorsque
vous énoncez des mesures complémentaires à celles
supposément existantes. Nous relevons d'abord la mesure suivante:
"Prévoir une poursuite pénale à l'endroit d'un locateur
qui userait de harcèlement pour arriver à ses fins". Sans
changement effectif en faveur d'une reconnaissance officielle de ce
délit, cette mesure s'avère vide de sens et jette de la poudre
aux yeux de ceux et celles qui ignorent l'imbroglio juridique qui entoure la
notion précise de harcèlement.
Enfin, il serait nécessaire que vous puissez démontrer
clairement à quelle démarche précise on doit s'attendre
s'il y a poursuite pénale. Cette poursuite serait entreprise sous
quelles conditions, par qui et avec l'aide de qui? Combien en
coûtera-t-i! au locataire harcelé? S'agit-il d'une poursuite
à la Cour provinciale? Quelle sera l'apport de la régie?
Une cinquième ambiguïté apparaît dans
l'énoncé de la seconde mesure complémentaire à la
section 6.1.4: "...Pour réaliser d'autres types de travaux, l'obliger
(le propriétaire) à s'adresser à la Régie du
logement et à en démontrer l'utilité immédiate pour
les locataires. Maintenir cette contrainte jusqu'au moment où les
acquéreurs deviendraient majoritaires à l'assemblée des
copropriétaires". Pourquoi en serait-il ainsi, puisqu'un de vos grands
objectifs est de protéger justement le locataire qui désire
rester dans les lieux contre toute hausse de loyer abusive et contre toute
éventualité de harcèlement? Que devient donc le droit du
locataire a la jouissance paisible des lieux? Cette contrainte devrait
être maintenue même si les locataires composent une minorité
au sein de l'immeuble.
Une sixième ambiguïté apparaît dans la
troisième mesure complémentaire énoncée à la
page 10 et reprise également à la page 52. L'exigence de l'envoi
d'un avis de 24 heures au locataire dans le cas de visite des lieux par des
professionnels ne constitue pas une mesure complémentaire en soi.
Celle-ci existe déjà dans les termes de la loi aux articles
1654.1 et 1622; législation sur le logement locatif.
Une septième ambiguïté apparaît à la
page 10 et est reprise à la page 52 lorsque vous entrevoyez
l'établissement d'un "guichet spécial à la Régie du
logement afin de fournir l'aide nécessaire aux personnes
âgées ou handicapées" contre le harcèlement que peut
subir cette catégorie de locataires en particulier.
Nous constatons que vous êtes sensibilisés aux
problèmes que peut rencontrer cette couche de la population en
particulier, mais le harcèlement est un préjudice que tous les
ménages locataires sont susceptibles de rencontrer. L'information et
l'aide doivent donc être universalisées.
Mais quelle information et quelle aide pourra-t-on efficacement fournir
par ce guichet spécial si on ne prévoit aucune reconnaissance
légale du concept de harcèlement? L'établissement d'un
guichet spécial demeurera une mesure bidon tant et aussi longtemps que
l'information et l'aide souhaitées se baseront sur l'imbroglio
juridique, sur la rengaine des poursuites à la pièce et des
ordonnances sans pénalité. Ce n'est qu'après la
reconnaissance légale du délit de harcèlement qu'on
pourrait prévoir des moyens d'information et d'aide largement
publicisés et accessibles à tous et à toutes.
Une huitième ambiguïté apparaît à la
page 10 à l'intérieur même de la mesure concernant le
guichet spécial: "Ce guichet spécial pourrait leur offrir (aux
personnes âgées et handicapées), notamment, des services
privilégiés d'information et de conciliation et pourrait signaler
à la Commission des droits de la personne, en vue d'une enquête,
les problèmes de harcèlement et d'exploitation qui lui sont
rapportés". Il est effectivement possible de recourir à la
Commission des droits de la personne dans le cas notamment de ces deux
catégories de population, puisque le harcèlement est inclus dans
la Charte québécoise des droits et libertés de la personne
à l'article 10.1. Mais on se demande pourquoi la clientèle
privilégiée du guichet spécial n'engloberait pas
également toutes les personnes visées dans l'article 10 de cette
même charte. Quoi qu'il en soit, si on dépose une plainte à
la CDPQ, il faut d'abord faire la preuve que la personne est harcelée
pour les motifs de discrimination stipulés dans cette charte. Et ce
n'est qu'une fois cette preuve établie qu'il faudra prouver qu'il y a
bel et bien eu harcèlement. C'est une démarche fastidieuse et, a
notre connaissance, aucune personne n'a jusqu'à maintenant
utilisé ce recours parce qu'apporter la preuve formelle d'une
discrimination représente déjà une démarche
très complexe et très longue au départ. Durant tout ce
temps, tous ceux et celles qui sont incapables de fournir la preuve de
discrimination et tous ceux et celles qui sont harcelés sans pour autant
être l'objet de discrimination se retrouvent dans un véritable "no
man's land" juridique total.
En définitive, si la volonté du ministère est de
décourager réellement le harcèlement, il importe au plus
haut point de le définir le plus clairement passible. Le
harcèlement doit être considéré comme un
délit aux termes de la loi. C'est la première étape
nécessaire à l'élaboration de mesures appropriées
pour résoudre ce problème.
Le document que vous nous soumettez
témoigne de l'incompréhension dont vous faites preuve face
au harcèlement subi par trop de locataires. Les mesures proposées
pour contrer le harcèlement sont insuffisantes et ambiguës. Elles
ne tiennent pas compte de la réalité du harcèlement ni des
pressions, de la peur et du silence qu'il accompagne trop souvent.
À notre sens, des mesures plus sévères doivent
être envisagées pour décourager les propriétaires
harceleurs et les démarches pour utiliser les recours doivent être
simplifiées. Ceci est à la portée de votre
ministère et serait cohérent avec les objectifs que vous dites
poursuivre.
Avant de passer à la période de questions, nous aimerions
vous faire entendre brièvement les commentaires d'une chef de famille
monoparentale victime de harcèlement en matière de logement
depuis trois ans. En plus d'avoir subi de nombreuses formes de
harcèlement, elle a dû se présenter au tribunal de la
régie a cinq reprises, entre autres pour trois tentatives
d'éviction abordées à chaque fois en des termes
différents.
Sur les cinq causes de régie, quatre de ces causes ont
été gagnées, mais ces gains de causes n'ont fait que
retarder l'échéance finale de son sort, en l'occurrence, Mme
Léonard a dû quitter le logement qu'elle habitait et qu'elle avait
choisi d'habiter. À l'heure actuelle, Mme Léonard a pour
résidence fixe le ciel étoilé et fier de la ville de
Montréal. Il est à noter que par la nature de ce bref
exposé, on a l'impression sincère que cela répondra
à certaines de vos questions. Mme Léonard.
Le Président (M. Rochefort): Brièvement, s'il vous
plaît, madame.
Mme Léonard (Francine): Oui. Je suis chef d'une famille de
trois enfants avec un revenu de 833 $ par mois dont 413 $ de l'aide sociale.
Travailler m1 insécurise beaucoup parce que je ne peux
espérer mieux. Si j'enlève les services fournis par la carte de
bien-être, j'en aurais probablement moins. Je suis seule pour
élever mes trois enfants: seule pour les problèmes
d'école, seule pour l'entretien de la maison, seule pour faire
l'épicerie, seule pour tout ce qui concerne la maison et
l'équilibre psychologique de la famille.
Je suis le pilier de ma famille. Si je n'étais pas là, la
famille n'existerait plus telle qu'elle est maintenant. Le logement a
été un gros problème pour moi. Lorsque mon mari est parti,
mon propriétaire a tout essayé pour me mettre a la porte. En
trois ans, j'ai gagné cinq causes devant la régie. Je les ai
gagnées parce que j'avais la force de me battre et que c'était
dans mon caractère. (17 heures)
D'autres préfèrent s'en aller lorsqu'elles font face aux
menaces et au harcèlement. Je dis "elles" parce qu'il est plus facile de
menacer une femme.
J'ai eu des menaces. J'en ai eu de toutes les sortes. Des
téléphones anonymes, par exemple. Il entrait dans ma maison avec
sa clé. J'ai demandé l'aide de la police. La police ne pouvait
rien faire, disait-elle, parce qu'il était censément chez lui.
J'ai demandé à la régie s'il avait le droit de faire cela.
On m'a dit non. Sauf que la police ne voulait pas faire de rapport. J'ai subi
toutes sortes de choses semblables. Il y a eu des voisins qui ont
été montés contre moi. Ils m'attendaient dans l'escalier
à chaque fois que je montais. Je n'avais pas de témoin.
J'étais seule. J'ai dû subir tout cela en même temps que ma
séparation. De plus, j'étais seule pour élever mes
enfants.
Il y a quelques mois, la maison a été vendue. Le
propriétaire voulait faire des rénovations. Il m'a dit qu'a la
suite de cela, le montant du loyer serait augmenté à 450 $. Comme
je n'avais pas les moyens de rester là, je suis allée a la
régie. J'ai demandé un dédommagement et j'ai
accepté de partir. II est vrai que j'ai reçu un
dédommagement mais cela ne me donnait pas un logement. Je n'ai donc pas
eu de logement. Je suis allée voir partout. Tous les prix des logements
variaient entre 350 $ et 450 $. Ce n'étaient pas pour des logements
neufs, mais pour des taudis, des cabanes. Sans savoir si je ne vivrais pas la
même chose l'année suivante, parce que si un propriétaire
décide de rénover, c'est encore le même problème qui
recommence. Je ne savais plus quoi faire. J'ai écrit une lettre dans le
journal. Je ne voyais pas d'autres solutions. J'en étais rendue à
penser de placer mes enfants parce qu'il fallait que je quitte et je n'avais
pas de logement. C'était la seule solution que j'avais.
II y avait aussi celle de mettre le feu dans mon logement pour avoir un
HLM. Cela faisait trois ans que j'attendais mais on disait que mon cas
n'était pas urgent. On m'a dit que la seule urgence qu'il pouvait y
avoir était que le feu prenne. À ce moment-là, on a un
logement d'urgence. Mais je suis trop honnête, je ne suis pas capable de
faire cela. Ce qui fait que j'ai décidé d'écrire ma lettre
pour essayer de soulever l'opinion publique. J'ai demandé l'aide de ma
députée, Mme Louise Harel, qui a tout fait pour essayer de
m'aider. Elle m'a envoyé des lettres d'appui. Cela n'a absolument rien
donné. J'ai demandé un logement dans une coop. Ce qui est
arrivé, c'est que ma lettre parue dans le journal m'a fait
connaître dans une coop. Là, j'ai eu une place au mois d'octobre.
Mais en attendant, je suis dans la rue. Je suis allée passer
l'été dans un camp familial. C'est un camp familial où je
vais passer mes vacances à chaque année. Je
payais une pension pour la nourriture. Pour compenser
l'hébergement, j'ai fait du bénévolat. Pendant ce
temps-là, je payais un loyer pour mes meubles qui sont en entreposage
à Montréal.
Je vous le dis bien franchement, je me sens comme si j'étais
complètement dépouillée, comme si j'avais tout perdu.
Excusez-moi mais c'est parce que je revis des choses qui ont été
très pénibles. J'ai dû subir tout cela pendant trois ans.
J'étais seule pour lutter contre cela. Il est urgent que vous fassiez
quelque chose. Il y a d'autres femmes qui sont dans la même situation et
qui ne sont pas capables de se défendre. Faites quelque chose avant
qu'il soit trop tard parce que, bientôt, il y aura des familles
complètes dans la rue et des familles monoparentales en particulier.
Elles sont seules. Elles n'ont personne. Elles ne peuvent pas avoir de
témoin. Quant à moi, même si j'ai eu un logement dans une
coop, j'ai décidé de continuer à lutter. Mais je suis
épuisée. Je suis à bout. Mais tant qu'il n'y aura pas des
règlements sévères qui serviront à quelque chose,
je ne lécherai pas, je vais continuer à lutter pour cela. Je vais
en soulever du monde et je vais en écrire des lettres. Je n'ai pas fini
d'en écrire des lettres.
M. le ministre, les lois que vous faites pour éliminer les femmes
de vos HLM, je ne sais pas ce que vous avez dans la tète mais vous
n'êtes sûrement pas conscient de ce que vous faites. Je suis une
femme, d'accord. Je suis seule avec trois enfants. Mon mari m'a laissée.
Je ne vais pas travailler? Non, parce que mes enfants ont le droit d'avoir une
mère même s'ils n'ont pas un père. Mais pendant ce
temps-là, je n'ai pas de logement. Mon logement n'est toujours pas
rénové. Il n'est toujours pas loué. Mais je ne peux pas le
prouver. Je ne peux pas le prouver parce que pour cela, il faudrait que j'entre
dans le logement et je n'ai plus de clé. J'aurais droit à 500 $
de plus mais je ne peux pas l'avoir. Mais comme c'est là, mon logement
n'est toujours pas rénové et je suis dans la rue pendant ce
temps-là. Je vais aller vivre chez ma mère pour les deux ou trois
prochaines semaines. Cela dépend. Je suis censée avoir mon
logement en octobre. 'Mais pendant ce temps, mes enfants sont inscrits à
l'école à Montréal. Il va falloir que j'aille les
reconduire à chaque matin de Pointe-aux-Trembles à
Montréal, pour qu'ils puissent aller à l'école. Il va
falloir que je fasse cela matin et soir, jusqu'à ce que j'aie mon
logement dans la coop. En plus, j'ai deux déménagements à
payer. Parce que j'ai dû faire déménager mes meubles pour
les mettre en entreposage et je dois les faire déménager de
l'entreposage à la coop.
Si vous jugez que c'est ça la justice... Je suis une femme seule,
d'accord, mais j'ai autant de droits qu'une femme mariée.
J'estime même que j'ai plus de mérite par le fait que je
suis seule pour tout faire. N'oubliez pas que dans mes mains repose le sort de
mes enfants. C'est moi qui les éduque. C'est moi qui vais en faire des
citoyens plus tard, des électeurs aussi. Je suis impartante et je
n'admets pas que la Commission des droits de la personne ignore cela. On parle
des gens âgés en situation défavorisée, mais que
fait la femme pendant ce temps-là? Elle attend toujours, c'est tout.
J'ai fini.
Mme Poirier: C'est important pour nous de laisser la parole
à Mme Léonard parce que la commission de l'aménagement et
des équipements est pour elle une instance, une occasion de se faire
entendre, également. Merci.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie de votre
présentation. M. le ministre, il reste 23 minutes, me dit-on, ce qui
fait onze minutes et demie par formation politique.
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Il est toujours
émouvant d'entendre des témoignages comme celui que nous venons
d'entendre. Ce n'est pas une mince affaire que d'être responsable d'un
dossier comme celui-là. Vous reconnaîtrez qu'il aurait
été beaucoup plus facile pour nous de ne pas toucher à
cela du tout, de maintenir le statu quo, de tenir toute cette
question-là à douze pieds avec une perche de douze pieds et de ne
pas du tout remuer ces cendres.
La situation que vous décrivez, madame, est une situation qui
existe maintenant. Elle existe depuis longtemps, elle n'est pas nouvelle et
elle se détériore avec le temps. C'est justement parce qu'on a
pris connaissance de cette situation-là, qui va en s'empirant, que j'ai
décidé de prendre le taureau par les cornes et de tenter
d'articuler une proposition qui viserait à améliorer la situation
actuelle. Vous parlez du harcèlement. C'est sûr que le
harcèlement existe, je le sais. D'ailleurs, si je ne le savais pas,
votre témoignage me l'apprendrait, me le confirmerait. D'autres groupes
nous le disent aussi, et on le sait par les gens qui viennent nous voir dans
nos bureaux de comté et par les confidences que l'on reçoit
à gauche et à droite.
Dans le document ici nous tentons de contrer la question du
harcèlement et d'améliorer les mesures. Il me semble que vous
trouviez que ce que l'on propose n'est pas suffisant. Tant mieux! vous
êtes là et vous nous faites des propositions additionnelles. Nous
allons en prendre note, mais il faut quand même reconnaître que ce
que nous faisans est peut-être timide un peu, ce n'est peut-être
pas suffisant, mais c'est quand même une amélioration sur le
statu
quo, sur ce qui existait avant. Par exemple, nous disons: Pour les
personnes âgées - cela n'est pas votre cas manifestement - et les
personnes handicapées, guichet spécial à la Régie
du logement; ce qui n'existe pas, donc un service personnalisé et
préparation de dossiers et entente avec la Commission des droits de la
personne pour faire des enquêtes et des poursuites. Déjà
c'est un pas significatif en avant. Ce n'est peut-être pas
l'idéal, mais il n'y avait rien avant. Donc, c'est déjà
quelque chose.
Concernant les cas de harcèlement autres que pour les personnes
âgées, il n'y a rien qui interdise que le guichet spécial
s'occupe de tous les harcèlements, incidemment. Nous avons pensé
faire un guichet spécial pour les personnes âgées, mais on
pourrait très bien concevoir un guichet spécial qui serait pour
tous les cas de harcèlement; personnes âgées ou autres. Je
ne mets pas de côté cette possibilité-là.
Nous avons prévu, dans ces cas-là, des poursuites
pénales à l'endroit du locateur qui userait de harcèlement
pour arriver à ses fins. Encore là, cela pourrait être la
Commission des droits de ta personne et rien n'interdit que l'on puisse
également référer ces cas-là à la Commission
des droits de la personne, auxquels cas c'est la commission qui prend à
ses frais les poursuites et les enquêtes. On parlait tantôt des
efforts, des coûts et de la difficulté pour les locataires de se
défendre eux-mêmes. Alors, voilà des possibilités,
nous les évoquons, c'est par écrit. Nous avons pris la peine d'y
réfléchir, de consulter et d'écrire cela. Vous devez au
moins reconnaître que nous avons le mérite de mettre les faits sur
la table, de proposer des choses qui sont probablement imparfaites - et vous
nous le soulignez - mais qui indiquent notre volonté d'apporter des
changements.
De plus, tout à l'heure, madame faisait état de ses
problèmes et de ses efforts pour trouver un logement. Je déplore
que vous n'ayez pas réussi à trouver de logement. Je dirai
simplement que depuis un an et demi que je suis à la direction de
l'Habitation, nous avons signé de nouvelles ententes avec le
gouvernement fédéral sur l'habitation sociale. Ce qu'il y a de
nouveau dans ces ententes-là par rapport aux ententes
précédentes, c'est que nous avons l'intention - et c'est inscrit
dans l'entente - de faire en sorte de diriger la majorité des fonds
disponibles vers les cas les plus patents et les plus criants d'injustices vers
les personnes les plus démunies financièrement. Si on tente de
venir en aide à tout le monde en même temps, finalement, on risque
de venir en aide à des gens qui ont des revenus supérieurs et de
ne pas venir en aide à ceux dont les revenus sont inférieurs.
Alors, nous avons dit: Parmi tous ceux qui ont des besoins de logement, nous
allons commencer par venir en aide à ceux qui sont vraiment au bas de
l'échelle; c'est là que les besoins sont les plus criants.
Or, les nouvelles ententes que nous avons signées vont
carrément dans cette direction: priorité absolue à ceux
qui sont au bas de l'échelle en matière de revenu. Je
présume que Mme Léonard doit se situer là-dedans,
puisqu'elle semble être dans ce cas. Normalement, vous seriez sur la
liste privilégiée des gens accessibles à des HLM. Le
nouveau programme de supplément au loyer, que j'ai annoncé il y a
un mois dans le secteur locatif privé, devrait également
s'appliquer à vous.
Maintenant, les critères d'admission dans les HLM sont en
fonction de ces ententes. Je suis un peu déçu, en fait,
très déçu de voir qu'on interprète assez mal,
finalement, l'intention du gouvernement. Les critères, actuellement en
usage dans les offices municipaux d'habitation, privilégient
systématiquement la femme seule avec des enfants, les familles
monoparentales. Il y a un accent positif absolu en faveur de la famille
monoparentale. Les critères, actuellement en vigueur, font en sorte que,
dans les listes d'attente de familles, c'est systématiquement les
familles monoparentales qui se retrouvent en haut de la liste, à cause
de l'accent qu'il y a dans le règlement.
Je suis complètement estomaqué de voir des gens qui
viennent nous dire: Vous discriminez les familles monoparentales. Regardez les
règlements, c'est l'inverse qui se produit. Tous les règlements
sont faits de telle sorte qu'ils privilégient systématiquement
les familles monoparentales. Je pense qu'il est incorrect de venir affirmer
que, finalement, le gouvernement s'attaque à la famille monoparentale,
c'est l'inverse; les règlements font l'inverse.
Nous avons simplement dit que si tout se passe comme prévu dans
les règlements, nous devrions avoir, théoriquement, 100 % de
familles monoparentales dans nos HLM. C'est là que l'expérience
pilote, que nous avons menée, nous a indiqué que cela peut causer
des problèmes à l'occasion, le fait de n'avoir que des femmes
seules dans un édifice de 25, 30 ou 50 logements. On nous a
suggéré -c'est une suggestion qui a été faite - de
permettre aux offices municipaux d'habitation de pouvoir admettre les couples
démunis -forcément, il faut que ce soit tous des démunis -
avec les familles monoparentales afin d'apporter un certain équilibre,
une sorte de sécurité, etc. C'est une suggestion qui a
été faîte par les offices municipaux d'habitation qui ont
fait l'objet du projet pilote. Cette suggestion est dans le public.
Maintenant, c'est possible - vous avez peut-être plus
d'expérience que moi dans ce domaine précis - que cela ne cause
pas de problème que de n'avoir que des femmes
clans un édifice HLM. J'aimerais vous entendre là-dessus.
Est-ce que, effectivement, cela cause des problèmes?
Mme Léonard: Je ne vois pas pourquoi il y aurait une
différence entre les hommes et les femmes. Il y a des femmes qui sont
capables de changer une ampoule électrique et il y a des hommes qui ne
sont pas capables. Je ne vois pas quelle différence cela fait si c'est
un homme qui est locataire plutôt qu'une femme. Je n'en vois pas, en tout
cas. Si vous, vous faites de la discrimination, je ne suis pas prête
à en faire.
M. Bourbeau: La discrimination qui existe présentement,
c'est une discrimination positive.
Mme Léonard: Oui! C'est l'égalité pour les
deux, c'est cela qui est supposé d'être, selon la charte des
droits...
M. Bourbeau: Oui, égalité pour les deux, je suis
d'accord, sauf que si, dans les règlements, il existe des
critères de revenus, d'enfants, etc., les critères sont faits de
telle façon que lorsqu'on additionne les points, une famille
monoparentale a plus de points qu'une famille ordinaire; autrement dit, parce
qu'il y a des problèmes additionnels, dont vous avez parlé
tantôt, ceux-ci se traduisent par des points. Donc, en considérant
le dossier d'une famille monoparentale - ce n'est pas de la discrimination,
c'est l'addition des points -cela fait en sorte qu'il y a plus de points pour
une famille monoparentale à cause du contexte d'isolement, etc. Cela
fait en sorte de privilégier les familles monoparentales.
Donc, je pense que c'est un point de vue qui vaut la peine d'être
dit.
Mme Léonard: Maintenant, est-ce que c'est vrai ou si ce
n'est pas vrai que des femmes attendent depuis huit ans pour avoir un logement
et qu'elles n'en ont pas encore? Vous ne trouvez pas que les points ne donnent
pas grand-chose. (17 h 15)
M. Bourbeau: Écoutez, les listes d'attente sont longues,
c'est évident. Ce sont des listes d'attente de points et non pas de
temps. Autrement dit, vous, vous avez un problème. Vous perdez votre
mari, etc. Votre situation change un bon jour. Vous faites
réévaluer votre demande et votre nombre de points peut augmenter
substantiellement d'une journée à l'autre, de sorte que vous
pouvez passer de la cinquantième place sur la liste d'attente à
la première place, du jour au lendemain.
Mme Léonard: C'est ce que j'ai fait. Cela n'a rien
changé.
M. Bourbeau: Bon, parce que les points sont plus grands. La
question de la période de temps depuis laquelle vous attendez n'a rien
à voir avec l'accessibilité. Il y a rirs gens qui peuvent avoir
fait une demande il y a quinze ans et qui n'entreront jamais, parce qu'ils
n'auront jamais un nombre de points suffisants. Par exemple, s'ils ont des
revenus supérieurs, ils gagnent un peu plus d'argent, évidemment,
ils passent après. Mais quelqu'un qui se trouve dans une situation
d'être vraiment démuni...
Mme Léonard: Comme dans mon cas quoi!
M. Bourbeau: ...du jour au lendemain, je suis convaincu que votre
nombre de points, si vous faites réévaluer - vous devriez
demander une réévaluation par l'Office municipal de l'habitation
- peut augmenter substantiellement à la suite de faits nouveaux qui
surgissent.
Mme Léonard: Je me suis fait dire que mon cas
n'était pas un cas d'urgence, que cela ne changeait absolument rien
à mon dossier du fait que je me faisais mettre à la porte.
M. Baurbeau: Là, je ne connais pas tous les détails
de votre cas. Il faudrait l'examiner.
Mme Poirier: Ce serait opportun de revenir au concept de
harcèlement et au mémoire, s'il vous plaît.
M. Bourbeau: Ce n'est quand même pas étranger. De
toute façon, on va terminer sur cela. Je pense qu'il n'a pas
été inutile de discuter de cela. En ce qui concerne la question
du harcèlement, évidemment certaines mesures dans la proposition
sont une amélioration sur la situation présente. Â la
lecture de votre mémoire, je vois des propositions
d'amélioration. Est-ce qu'il y a d'autres propositions que vous aimeriez
faire et que nous pourrions discuter avant que nous terminions nos
échanges?
Mme Pilote (Ruth): À partir du cas de Francine
Léonard, je voudrais vous montrer à quel point une situation de
harcèlement est une situation cul-de-sac. Francine est allée cinq
fois à la Régie du logement, elle s'est vraiment battue. Elle a
subi du harcèlement de la part de son propriétaire qui revenait
et qui supposément voulait faire une reprise de possession et qui, en
dernier, l'a évincée pour une raison de rénovations
majeures. La cinquième fois, si Francine avait pu invoquer le
harcèlement pour défendre son cas, probablement que le
propriétaire aurait été reconnu comme étant de
mauvaise foi. Le harcèlement n'étant pas défini dans la
loi sur
le logement on n'a pas pu, du tout, défendre son cas en parlant
de harcèlement. Ce qui fait que Francine se retrouve maintenant dans la
rue avec ses trois enfants. Alors, il est très important, je pense, que
le concept de harcèlement soit inclus dans la loi sur le logement.
M, Bourbeau: Seulement une réponse. Je suis content que vous me
disiez cela parce que c'est exactement ce que nous nous proposons de faire. Si
la commission et les gens qui viennent ici nous laissent déposer
à l'automne - enfin, si le gouvernement décide de le faire aussi
- un projet de lot pour régler l'ensemble de ces problèmes, notre
intention est d'introduire dans la loi le concept du harcèlement de
façon à donner une poignée, si je peux dire, è ceux
qui vont se présenter devant la Régie du logement. Dans ce sens,
nous nous proposons de faire ce que vous souhaitez. Je vous suggère, si
vous avez encore des améliorations à nous proposer, de le faire,
puisque nous avons l'intention de nous diriger dans ce sens.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie. M. le
député de Shefford. En vous rappelant que vous avez onze minutes
et demie.
M. Paré: C'est très court. Je vais essayer
d'être très bref. Je trouve que la présentation que vous
avez faite est particulièrement importante. Vous avez touché
à des points majeurs qui portent à interprétation. C'est
là qu'il faut être clair et dire la même chose, peu importe
où l'on se trouve. Je vais rapporter des interprétations que le
ministre vient de faire. Entre autres, on veut diminuer les risques de
harcèlement. Je dis que ce qui est là va augmenter. Je partage
votre opinion sur cela.
Premièrement vous posez la vraie question: Oui va se porter
acquéreur des logements? Ce sont des gens qui veulent y demeurer. Si ce
sont des locataires actuels qui ont un peu de comptant, ils vont vouloir
devenir propriétaires pour s'en aller dans le logement. Donc, il va
falloir que le locataire qui est là quitte par tous les moyens. Si ce ne
sont pas des gens qui sont locataires qui veulent devenir propriétaires,
ce sont des spéculateurs, ce sont des gens qui veulent faire des profits
avec un logement. Un profit, cela veut dire le plus grand profit possible. Cela
voudra dire faire augmenter le loyer par toutes les formules qu'on
connaît: les taxes, les rénovations et là, on augmente les
loyers et, finalement, on fait partir les gens qui n'ont pas les moyens de
payer plus cher. Donc, la mesure qui est proposée va faire en sorte que
le harcèlement va augmenter, à mon avis. De plus, les gens qui
veulent devenir propriétaires vont faire augmenter le
harcèlement. Maintenant que c'est défendu, moins de gens veulent
convertir. Si, demain matin, on dit: On lève le moratoire, tout le monde
peut tout vendre. Le ministre espère que le marché va être
inondé de logements à vendre, que des propriétaires qui
n'y avaient même pas pensé vont devenir intéressés.
Donc, même là où cela va bien, les relations
locataires-propriétaires risquent de s'envenimer dès demain
matin, si on lève cela. On va multiplier le harcèlement par je ne
sais combien. Il faut faire attention. À mon avis, ce dont on discute
est majeur. C'est le premier point que je voulais toucher.
Le deuxième point, pour vous montrer à quel point
l'interprétation... Il faut dire la même chose, peu importe
où l'on se trouve. Vous considérez avec raison que de vouloir
acheter le départ, c'est du harcèlement. Les gens qui ont
été entendus avant vous, les gens de la Commission des droits de
la personne ont dit que c'était un geste inacceptable. À
l'Assemblée nationale, le ministre a dit que c'était tout
à fait normal. Peu importe qu'on achète un départ, ce sera
un locataire pour un autre, une personne pour une autre, cela ne change rien:
un égale un, en termes de gens qui respirent. Sauf que ce n'est pas
comme cela qu'il faut voir la chose. Je le vois plutôt de votre
façon: un achat de départ à des gens qui n'ont pas les
moyens, c'est du harcèlement, il va falloir le reconnaître.
L'interprétation du ministre, c'est que ce n'est pas du
harcèlement, c'est correct, cela fait partie du marchandage, cela fait
partie de la libre entreprise. C'est le deuxième point que je voulais
toucher.
Le troisième point: les listes d'attente. Vous avez raison, M. le
ministre, vous venez de dire que la réglementation actuelle favorise -
entre guillemets - les femmes chef de famille monoparentale. Cela n'est pas de
la discrimination. Quand on révalue comme cela, au départ, on
fausse les règles du jeu. Ce n'est pas de la discrimination, c'est un
programme qui existe pour aider les plus démunis. Si, dans notre
société, les plus démunis, ce sont les femmes chef de
famille monoparentale, il est normal que ce soient celles qu'on va aider en
premier. Si on n'accepte pas cela, là on fait de la discrimination. Ce
serait vraiment inacceptable de vouloir faire de la discrimination pour
pénaliser les plus démunis. C'est inacceptable. Cela me rassure
que vous disiez aujourd'hui - parce que les écrits restent ici
habituellement parce que nous sommes enregistrés - que c'est juste une
proposition qu'on est prêt à regarder. J'espère que, comme
vous avez dit, vous êtes content d'avoir entendu des faits vécus
pour être capable... Avant de prendre une décision,
j'espère que vous allez en tenir compte. La dernière fois qu'on
en a parlé à l'Assemblée nationale, votre discours
était la
défense de la nouvelle réglementation. Je vous disais
là-dessus: s'il y a de l'insécurité parce qu'il y a
seulement des femmes; au lieu de pénaliser les femmes, on s'organise
comme gouvernement pour amener des mesures de sécurité de plus
dans les HLM. Ce sont des commentaires que je voulais amener parce que le
mémoire qui est présenté est important, puisqu'il touche
une clientèle vraiment importante et parmi les plus démunies.
Une seule autre question, parce que je veux laisser aussi ma
collègue de Maisonneuve, qui a demandé la parole, poser des
questions. Quant au guichet, vous demandez qu'il soit ouvert à toutes
les personnes victimes de harcèlement. Je vous pose à nouveau la
question que j'avais posée précédemment aux gens de la
Commission des droits de la personne: le fait de limiter de toute façon
à des groupes ne risque-t-il pas même de pénaliser
davantage les groupes qu'on veut aider?
Mme Daudelin (Geneviève): Je pense qu'il faut avoir des
moyens de se défendre. Quand on dit que le guichet spécial ne
devrait pas être réservé qu'aux personnes
âgées et handicapées, c'est parce qu'on trouve que les
personnes qui auraient besoin d'une aide plus efficace que celle que la
régie est en mesure de donner actuellement, c'est beaucoup plus large
que ces clientèles-là. On travaille avec des femmes locataires,
des femmes qui ont d'énormes problèmes de harcèlement et
qui ont toutes les difficultés du monde à se défendre et
à se faire entendre à la régie parce que, justement, le
thème n'est pas recevable au téléphone même; elles
sont référées ailleurs et elles sont comme des balles de
ping-pong sur une table. C'est aussi bête que cela. Quand on parle de
guichet spécial, on pose mal le problème. En fait, la
régie répond assez souvent très mal aux problèmes
réels que vivent les personnes et ce serait cela qui devrait être
changé. On devrait aussi simplifier les recours et ce serait
déjà quelque chose d'énorme.
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le
député de Shefford. Compte tenu qu'il ne reste plus de temps du
côté du parti ministériel, je reconnaîtrai un autre
membre de la formation de l'Opposition. Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. J'avais eu l'occasion
de prendre connaissance du document sur l'enquête femmes et logements que
vous aviez publié l'an dernier déjà - il y a donc un an,
bien avant que les intentions du ministre ne soient communiquées -
portant sur la discrimination, le harcèlement et le harcèlement
sexuel.
J'ai eu l'occasion aussi, à maintes reprises, d'en discuter avec
Francine Léonard et je la remercie pour le courage qu'elle a eu de venir
nous illustrer la réalité qui est vécue. J'aimerais
d'abord constater que c'est un dialogue de sourds. J'ai l'impression d'avoir
assisté à un dialogue de sourds, pas seulement dans le cas de
votre présentation de mémoire. Vous dites au ministre: II y a des
problèmes de harcèlement qu'il faut définir. Le ministre
dit: Justement, dans ma réforme, je vais le définir. Mais ce
qu'il omet de dire, c'est que sa réforme va augmenter les occasions et
va multiplier les possibilités de harcèlement. Mais, là,
vous allez avoir une définition. Quelle chance! Parce qu'il ne faut
jamais oublier que la reconnaissance d'un droit, par exemple, la
définition du harcèlement n'entraîne pas pour autant les
conditions d'exercice du recours.
Vous avez une bonne définition du harcèlement, tant mieux,
et je pense que vous avez raison d'attirer notre attention là-dessus.
Mais, ne pas avoir de harcèlement, c'est mieux que la définition.
Je pense qu'en ce qui concerne cette question de la discrimination possible ou
envisagée quant à l'accès des femmes chef de famille dans
les HLM...
J'ai devant moi les comptes rendus de l'Assemblée nationale, 19
mai 1987. C'est leJournal des débats, très officiel. Le
ministre ne parle pas des familles monoparentales; il parle des femmes chef de
famille monoparentale. Dire qu'il y a des critères qui
privilégient la famille et que la combinaison de ces critères
fait que les familles monoparentales sont priviligiées dans les HLM,
c'est un critère. Cela s'appelle l'action positive en faveur des
familles monoparentales, sans oublier qu'on peut être un homme chef de
famille comme une femme chef de famille.
Ce sont les familles monoparentales qu'on privilégie. Mais je
vous assure - je ne veux pas vous le lire, parce qu'on n'a pas beaucoup de
temps - que le ministre ne parle que des femmes chef de famille. Il dit, par
exemple: Dans certains HLM où il n'y a que des personnes
âgées, des femmes seules dans une proportion de 99 %, il y a un
problème. C'est la même chose quand il n'y a que des femmes seules
ou des femmes chef de famille monoparentale avec des enfants dans les HLM pour
familles à faible revenu. Il y a un problème qui se crée,
etc.
Si on reprend les propos que le ministre tenait à l'égard
de Mme Léonard en l'invitant à se représenter devant
l'office s'il y a des faits nouveaux, je pense qu'il faut que le ministre s'en
rende compte, je le souhaite, pendant les jours qu'il va passer à
Montréal, ce n'est pas un cas d'exception, Mme Léonard. Mme
Léonard, pour l'Office municipal de l'habitation de Montréal, ce
n'est pas un cas d'exception qu'on révise, parce que sa situation se
renouvelle, parce
qu'elle a un avis d'éviction et qu'elle est chef de famille. Ce
sont des centaines - je n'exagère pas - d'avis d'éviction avec
des chefs de famille.
J'ai vu des personnes âgées qui habitaient depuis 48 ans
leur quartier, qui avaient 72 ans, qui faisaient face à des avis
d'éviction et qui, de toute façon, n'allaient pas au bout de ces
avis d'éviction. Ces avis se révélaient faux dans la
majorité des cas. Mats, de toute façon, ces gens
âgés ne tolèrent pas d'être en mauvais termes avec le
propriétaire.
Alors, le ministre dit: Je vais améliorer la situation. Il n'a
pas tort quand il dit: La situation se dégrade. Mais si on ne faisait
rien, la situation continuera de se détériorer. Mais le
problème, c'est que sa solution, c'est pire. C'est un remède qui
va tuer le cheval. Cela ne va pas améliorer, cela va empirer, parce que
si le ministre est sincère, il va envisager des mesures où il va
intensifier, il va faciliter l'intensification du logement social et il va
assurer la participation plus grande du gouvernement dans la construction de
logements.
M. le ministre, Mme Léonard est dans un quartier où, pour
l'année qui vient, vous n'avez prévu aucune nouvelle unité
de logement social, ni coop. Vous allez me sortir vos dix nouvelles
unités de logements privés, dix nouvelles unités dont vous
m'avez informée aujourd'hui, dix nouvelles unités de HLM
privés.
Je regrette infiniment, M. le ministre, on est dans un quartier
où il y a des centaines de personnes qui sont en attente d'un logement
convenable. C'est un peu la réaction que je souhaite avoir de vous:
Est-ce qu'une définition est satisfaisante? Est-ce qu'une seule
définition vous suffirait?
Mme Poirien En fait, une seule définition ne serait effectivement
satisfaisante. Dans les dernières lignes du mémoire que nous
avons déposé à la commission, on répète que
des mesures plus sévères doivent être envisagées et
que les démarches pour utiliser les recours doivent être
simplifiées et doivent être accessibles. (17 h 50)
C'est à notre sens très important, qu'il y ait ou non
levée du moratoire, qu'il puisse à l'heure actuelle y avoir un
concept et une définition de harcèlement aux termes de la loi et
des mesures pour appliquer les poursuites pénales à envisager.
C'est la recommandation la plus ultime que l'on a à déposer
ici.
Le Président (M. Richard): Puisque le temps est
expiré, nous vous remercions sincèrement de nous avoir
présenté ce mémoire. Nous demanderions à l'autre
groupe... M. le ministre?
M. Bourbeau: J'aimerais que l'on puisse leur dire bonjour avant
de partir. J'espère que vous ne voulez pas briser la tradition.
Le Président (M. Richard): Je n'ai aucune objection. On
voudrait vous souhaiter des voeux avant que vous quittiez. M. le ministre.
M. Bourbeau: Si vous tenez à avoir une longue vie, M. le
Président, il faudrait respecter la tradition.
Le Président (M. Richard): C'est ce qui s'appelle
créer de la jurisprudence.
M. Bourbeau: J'aimerais simplement dire au groupe Information
Ressources Femmes et Logement qu'il m'apparaît que ce que nous nous
proposons de faire va exactement dans le sens de ce que vous nous proposez,
c'est-à-dire introduire dans la loi le concept du harcèlement et
améliorer sensiblement les mesures qui pourront être prises dans
les cas de harcèlement. Il est possible, comme je l'ai dit
précédemment, que ce que nous proposons maintenant ne soit pas
très clair. Cela ne vous a peut-être pas apparu aussi clair que je
vous le dis maintenant, mais déjà le document qui
forcément était incomplet contenait les prémisses de ce
que je viens de vous dire. Je ne peux pas penser autrement que vous allez vous
réjouir de la décision du gouvernement de finalement bouger dans
ce domaine-là quand on sait que cela fait des années que les
gouvernements ne font rien pour contrer le harcèlement, y compris, bien
sûr, le gouvernement de nos gens d'en face qui aujourd'hui
déchirent leurs vêtements devant la situation qui existe.
Merci.
Mme Poirier: Si ce n'est pas le cas, une fois la décision
prise, si nous ne sommes pas réjouies, soyez assuré que nous
irons vous rencontrer à nouveau pour vous faire part de nos commentaires
ultérieurs.
M. Bourbeau: Vous viendrez me harceler.
Le Président (M. Richard): Merci. M. le
député de Shefford, vous aviez un commentaire?
M. Paré: Oui, très court pour dire qu'à
écouter le ministre passer ses commentaires, j'ai l'impression qu'il est
en train de faire accroire aux gens en face, que le cheval blanc de
Napoléon est noir. C'est plutôt bizarre et c'est comme cela depuis
le matin.
Je vais conclure en vous remerciant infiniment de votre
présentation. Vous avez apporté un éclairage très
important, je dois dire, sur plusieurs sujets. Vous pouvez être
sûres qu'on va en tenir compte lors de
l'élaboration autant de la politique sur la
copropriété que sur d'autres qui sont plus un
élément social d'habitation. Merci beaucoup.
Le Président (M. Richard): Merci d'avoir été
là.
Je présente le prochain groupe The Redfern Tenants' Association,
représenté par Mme Wendy Gillanders.
Nous débutons immédiaternent. Nous vous souhaitons la plus
cordiale des bienvenues. Vous aurez évidemment à présenter
vos collègues. Vous connaissez la procédure, vous avez quinze
minutes pour présenter votre document. Vous n'êtes pas
obligé de les prendre, c'est bien évident. Vous ne pouvez pas
excéder quinze minutes, mais vous avez droit à moins de quinze.
Vous présentez immédiatement votre document et les personnes qui
sont avec vous. Madame.
The Redfern Tenants Association
Mme Gillanders (Wendy): Good afternoon. First of all, I would
like to take this opportunity to thank you for...
Le Président (M. Richard): I repeat in English: You need
to use only fifteen minutes, not more. You can use less. Go on.
Mme Gillanders: Good afternoon. First of all, I would like to
thank you for the opportunity to present our brief. I would like to begin by
introducing the members. On my left, I have Mrs. Honey Dresner, who is our
executive in communications, Mme Jeannine Dorland, who is our
secretary-treasurer; on my right is Mrs. Kyra Emo, our vice-president, and Mrs.
Jane Nicholson, building representative. My name is Wendy Giltanders, I am the
president of the Redfern Tenants' Association.
Mrs. Emo, would you begin?
Mme Emo (Kyra): Thank you. In response to "Llifting the
Moratorium: a Necessary Decision. As tenants residing in apartment buildings
within the City of Westmount, we are deeply concerned over the proposal to lift
the moratorium currently in effect on condominium conversion and we would like
to reply to the Honourable Minister Bourbeau's invitation to comment on the
white paper by raising the following issues which directly affect the
condition, the guarantees and the welfare of our lives by this proposal.
The City of Westmount's population is approximately 20 000, 57 % of
which are tenants in rental dwellings of five or more units. Therefore, the
proposal to allow the conversion of existing rental units into condominiums
would have a deep and lasting effect on slightly more than half the population
of the City of Westmount.
We wish to address not only the ramifications that this proposed lifting
would have on the lives of all tenants, but also the loopholes in the existing
legislation that have lead to the present situation of uncertainty, anxiety and
upheaval for many tenants through the use of harassment tactics and the
violation of Article 1653, whereby tenants may be temporarily evicted on the
grounds of major renovations.
We strongly feel, in addition to the provision of complete protection to
all tenants ensuring the protection of their rights in the event of the lifting
of the moratorium, that immediate and necessary measures should be established
to prevent the use of harassment, pressure tactics, and/or the misuse of
Article 1653 by unscrupulous speculators who empty apartment buildings either
in anticipation of converting to condominiums or with the intention to increase
the sale value of property in the wake of the active but inflated real estate
market that currently exists on the Island of Montreal.
Under present laws, there is little or no protection available to
tenants who suddenly find themselves innocent victims of speculators. When
confronted by a sudden change in their home environment, some tenants relocate
at their own expense while others organize themselves in an attempt to protect
their homes. However, very few tenants have the stamina, sophistication, access
to resources, or the self confidence to organize and seek the help they need to
deal with the problems that arise when a landlord wishes to replace a tenant or
to convert a building. And if they do, they become bewildered, frustrated, and
angry when they find themselves belittled and unprotected by the present tenant
legislation. They are being forced from their homes without choice, desire or
say in the matter. A small proportion of those who are still able, through
exhausting legal battles and quite often staggering legal fees, to forestall
the immediate eviction or to regain their acquired rights are still uncertain
about their future and what effect the lifting of the moratorium will have on
them.
Many fear that they will be forced to make a sudden and irreparable
decision as to whether or not to buy the unit. The vast majority, especially
those living on limited or fixed incomes as is generally the case with the
young, the elderly, the retired, the one-parent family, the single-income
person or family, or those already bearing previous financial obligations, feel
they will be coerced into making a decision to either place themselves in
potential financial debt by something they are simply not able to afford or
else be forced to relocate their home. Most likely, given the economic
status
of many areas, they will also be uprooted from the environment where
they have resided, many for most of their lives. Should they opt to stay and
continue to reside as tenants in a converted building, the present day
legislation and laws still leave them vulnerable to the same loopholes that
allow current landlords to use harassment or the application of Article 1653 to
evict tenants.
Therefore, we strongly urge the Honourable Minister Bourbeau, the
Government of Québec and all parties concerned to listen to and act on
the following issues which we, tenants and private citizens whose lives and
futures will be directly affected by the action of lifting the present
moratorium on condominium conversion, believe require immediate and strong
legislation to protect our homes, our environment and our rights.
Mme Gillanders: The next section deals with harassment. Page 8 of
the White Paper states that "conversion is likely to result in situations
favorable to harassment". Pages 10 and 51 contain the recommendation to
discourage harassment and to discourage landlords from putting pressure on
tenants, saying that the "following action could be taken" or "might be
envisaged: To provide for criminal proceedings in cases where landlords use
harassment to achieve their purposes". 1. The white paper clearly acknowledges
the fact that harassment as a technique to persuade tenants to vacate buildings
is more than probable should the moratorium be lifted. However, as is generally
the circumstance when something is anticipated, people prepare in advance for
its possibility. The proposal of the Provincial Government to lift the
moratorium was made public more than a year ago. We contend that a number of
individuals or parties have already made plans and have begun to employ
questionable methods to empty buildings on the assumption that they will be
permitted to convert these buildings once the official ruling has been passed.
Harassment is occurring now, in advance, and steps to investigate these cases
should be taken now. The recommendation of the White Paper to "possibly"
provide for criminal proceedings when landlords use pressure to force tenants
to leave should be instituted and regulated now, not after the moratorium has
been lifted. By then the buildings will be have been emptied. 2. Page 8 of the
White Paper states: "At present, tenants can protect themselves from harassment
by landlords by taking legal action at the Régie du logement. They can
thus request authorization to withold or deposit their rent, fulfilment in kind
of the landlord's obligation, damages or reductions in rent." Under present
tenant legislation, the use of the word "harassment" is not defined and as a
charge is not covered by any known law with regard to tenant-landlord
relationships. It can only be "tacked on" to a direct action that is being
contested under the judicial system. The official definition of the word
"harass" in the Merriam-Webster dictionary states "to worry and impede by
repeated raids, to annoy continually". It is, therefore, not a case of one
isolated incident, but rather a series of incidents. Although tenants have the
right to legal recourse through the Régie du logement, they would have
to apply to the régie on a continual basis for each separate incident,
but they cannot contest the situation of harassment by itself. Therefore,
harassment, and its use or application, must be clearly defined and recognized
as a separate issue; one that is subject to independent administration of
justice. 3. Harassment is a complex issue. Some cases are overt and blatant,
others more subtle, and therefore their intention difficult to prove. Some
examples follow on the next few pages. They are different types of technics
that might be used for harassment. I will not go into at this point but there
is a couple pages of them.
These are only some of the harassment tactics employed to force tenants
to move out, each one containing many issues, each requiring a separate action.
Under present day legislation, the burden is placed on the tenant to pursue
legal avenues in order to resolve each one. These harassment techniques are not
employed all at one time, but are ongoing and relentless. The tenant has no
alternative but to apply to the régie for each individual incident and
in each case, it is also the obligation of the tenant to provide sufficient
evidence in the form of witnesses, documents, affidavits, etc., to prove that
there has been an abuse of justice. This is often extremely difficult to do,
and requires a great deal of time, effort and expense. 4. Furthermore, because
harassment is not clearly defined, many forms of it border on the edge of civil
versus criminal jurisdictions and are, therefore, often lost between two
different judicial systems. We commend the Government of Québec for
acknowledging that harassment would possibly be applied under the Criminal
Code; however, the use of the words "could be" or "might be" does not reassure
those tenants who are being subjected now to this form of abuse.
(17 h 45) 5. Many acts of harassment violate the Québec Human
Charter of Rights which grants fundamental freedoms and rights to each and
every individual, regardless of their status in life. Yet, as tenants who are
subjected to harassment, we are not
receiving these rights as so stipulated and guaranteed by the Government
of Québec because loopholes exist in the law.
In summation, we strongly urge the Government of Québec to: A.
Define harassment and its application, B. Recognize harassment as a separate
issue and one that is subject to independent administration of justice, C.
Acknowledge harassment as a reality now by investigating suspected cases, O.
Put a stop to it now by legislating it into the Criminal Code and provide
strong deterrents by making it an indictable offense, E. Condemn offenders of
this crime to pay severe damages which victims may petition for.
Mme Dorland (Jeannine): Je vais maintenant passer à une
considération et discussion de l'article 1653, mais je vais continuer en
anglais parce que je ne suis pas très bonne dans la traduction
simultanée de notre document.
Temporary eviction for renovation. Article 1653 of the Civil Code which
addresses itself to major improvements other than urgent repairs, setting
criteria under which such work would be carried out and allowing for temporary
eviction of tenants, was designed to give owners the opportunity to improve
their property. However, with the proposed lifting of the moratorium as well as
an inflated real estate market, abuses of the most blatant kind have already
taken place through the use and abuse of this article. This is substantiated by
the White Paper on page 46 where it states "abuses have occurred" and goes on
to acknowledge that "this situation is likely to continue after the moratorium
is lifted". The proposed measures envisaged to protect - and 1 underline, je
souligne l'emploi du terme "envisagées" - the tenants from this abuse
are covered on page 47. 1. Under present legislation, unscrupulous speculators
already have the ability to use this clause to empty buildings willy-nilly,
holus-bolus, on the pretext of major renovations and, once emptied, they then
have the right to apply to Superior Court for permission to convert. Abuses of
this article are alreday common throughout the Island of Montreal. Although
several of the recommendations put forth in the White Paper to protect tenants
from misuse of this article are laudable, unless they are put into effect
immediately, they will not serve the purpose for which they were intended, as
buildings will be and are being emptied and converted even prior to the lifting
of the moratorium. Therefore, until such time as there is an official ruling on
the lifting of the moratorium and until protective measures against this abuse
can be guaranteed, we recommend that a freeze on Article 1653 be implemented at
once. 2. Indeed, one of the weakest parts of Article 1653 is that tenants
cannot contest the nature or the very expediency of the proposed work and,
therefore, this clause can be invoked without any say whatsoever on their part.
I remind you that, although a lease has been signed in good faith, a legalized
contract - and I repeat contract -to which both parties are henceforth bound,
owners have the ability, through Article 1653, to break the lease without any
allowable contestation from tenants by temporarily evicting them. Statistics
show that more than 90 % of tenants who leave the premises do not return. Deux
minutes?
Deux minutes, d'accord. Je vais tenter de résumer la balance de
cette section.
Je passerai donc à nos recommandations concernant l'article 1653.
We commend the City of Montreal's planned by-law for subsidized renovations
which will require landlords to produce an agreement with their tenants showing
that the two sides agree to the renovations and we stongiy urge that this
clause be added to Article 1653 as a protection to tenants.
We recommend furthermore that provisions be instituted whereby tenants
can be reassured that they will receive compensation when they are required to
evacuate their premises.
In conclusion, on this particular section, we strongly urge the
Government of Québec to: firstly, put a freeze on Article 1653 until
such time as the official ruling on the moratorium has been made and protective
measures against its abuse can be guaranteed to tenants. We furthermore
respectfully submit that you add a clause that renovations or repairs must be
agreeable to both parties, tenant and landlord, since they are both parties to
the contract that has been signed.
Thirdly, we submit that you follow through on a recommendation to
provide complete protection to tenants by implementing protective measures for
those who are temporarily evicted. Finally, we request that you provide strong
deterrents to any misuse or abuse of Article 1653.
Mme Gillanders: In conclusion, we would just like to say that we
recommend and we strongly urge the Government of Québec to: 1. Put an
immediate stop to harassment of innocent victims by taking the necessary
measures to prevent its occurrence, 2. Put an immediate freeze on Article 1653
until such time as the official ruling on the moratorium has been made and
protective measures against abuses can be guaranteed to tenants, 3. Continue
the moratorium on condominium conversion. Thank you.
Le Président (M. Richard): Thank you
for your efforts. M, le ministre.
M. Bourbeau: Combien de temps avons-nous?
Le Président (M. Richard): Quinze minutes.
M. Bourbeau: Mr. Chairman, it is with pleasure that I welcome
again the representatives of the Redfern Tenants1 Association of
Westmount, whom I had the pleasure to see last week, in a meeting that was
short, but fruitful somehow.
I am quite aware that one of the main problems of your association is
the question of harassment. I have read with much interest your brief, as well
as the other black document that you left with me. I have looked at it very
carefully, as I promised I would do, including all the nice pictures you left
in it.
I must say that it is quite convincing. Yhe renewal notice is quite
shocking. I would have been shocked myself to get a notice of renewal saying
that my rent has increased from 535 $ to 1150 $, starting...
Mme Gillanders: That was a month ago, it has now been increased
to 1240 $.
M. Bourbeau: ...October 1st next. I cannot understand how such a
raise can be justified in front of the Régie du logement. I do hope that
the person who got this notice knows what to do with it. I hope, anyway, you
will tell her.
The question of harassment was discussed with the previous group; I
presume you were a witness to these discussions and that you have probably took
note of the fact that I did say that our intention is, indeed, to introduce in
a forthcoming legislation, a definition of harassment as you asked us to do, in
order to give the people a chance to better protect themselves in front of the
Régie du logement. Any comment with respect to this declaration that I
have made before? Are you satisfied with this undertaking that I have made?
Mme Gillanders: We are mainly concerned that something be done
now, that nothing until the moratorium is lifted... If there are any measures
to be put in, these measures have to be put in now. It is occurring now.
M. Bourbeau: I understand, but in order to be able to introduce
the definition of harassment in the law and measures that go with it, we have
to amend the law; this is a law. And the House is not resuming its session
until October 20th; that is when the House will reconvene.
Then, in the weeks that will follow, there will be a "projet de loi"; a
draft bill will be deposited and hopefully adopted with the help of the
Opposition. I presume that they will cooperate on this. So, the earliest
possible date at which a bill could be adopted, embodying these changes, will
be sometimes in November or December of this year. We cannot amend a law
otherwise than with another law.
The same comment would apply to any possible freeze on Article 1653. We
cannot freeze the law in any other way than by introducing a new law that will
contradict the first one or modify it or abolish it. So, you do realize that it
is physically impossible for me, today, to declare single-handedly that there
is a freeze on Article 1653; we would have the Opposition up in arms and
telling me that I am a dictator. It has to go through the House.
Mme Dorland: M. Bourbeau ou M. le ministre, je pourrais
répondre a cela. J'ai eu une longue discussion avec M. Marcel
Côté, ce matin, concernant cette question précise. Pour
nous, c'est une question d'urgence et de rapidité. On peut vous citer
des cas de harcèlement chez nous qui existent depuis deux ans
déjà. Dans mon cas personnel - j'ai pris la section sur l'article
1653 - j'ai été le premier membre de notre association à
recevoir ces fameux avis qui me demandaient d'évacuer mon logement.
C'est le 31 juillet qu'on m'a demandé d'évacuer mon logement
à cause d'une inondation qui a été causée par une
voisine. Alors, voyez-vous, nous avons déjà
développé la mentalité de victime. Nous avons
été assujettis a toutes sortes de formes de harcèlement et
de mesures arbitraires, etc. Alors, on a un sentiment d'urgence. On veut voir
cette loi modifiée et sanctionnée sans délai, aussi
rapidement que possible. J'ai posé la question ce matin à mon
collègue, M. Côté: Si je me retrouve dans la rue au mois de
septembre, à la suite d'une décision de la Régie du
logement, qu'est-ce que je vais faire?
M. Bourbeau: Écoutez, je vous dis deux choses: Oui, nous
avons l'intention d'intervenir par voie législative pour prévenir
le harcèlement en introduisant, dans la loi, les articles qu'il faut. Je
vous dis que je le ferai dans les meilleurs délais que me permet la loi.
Si je vous disais, ce matin, que la loi sera amendée au mois
d'août ou au mois de septembre, là, je ne serais certainement pas
honnête puisque c'est impossible de le faire tant que l'Assemblée
nationale ne se réunira pas. Dans votre document, vous faites un
ensemble de propositions, relativement au harcèlement, qui reprennent,
pour une bonne partie, les objectifs que nous avons nous-mêmes
établis dans le document que nous avons déposé. Vous ne
nous parlez pas, dans votre
mémoire, du guichet spécial à la Régie du
logement pour les personnes âgées ou handicapées, ni des
enquêtes que la Commission des droits de la personne pourrait être
appelée à faire. Est-ce que vous avez examiné la
pertinence de ces propositions?
Mme Dorland: Une seconde, s'il vous plaît, M. le
ministre.
M. Bourbeau: Well, I may just say it in English. In the brief, in
our submission, we propose to establish a special Régie du logement
service to provide the necessary assistance to the elderly and the disabled, a
special counter for them. Furthermore, we say that this service could, among
other things, provide particular assistance and information, and conciliation
and also a notify the Commission des droits de la personne of any harassment or
exploitation problems reported with a view to an investigation. This morning,
la Commission des droits de la personne said that, indeed, they have the
possibility of making such investigations and taking action. So, I would just
like to know whether you have studied our proposal and whether you agree with
it. (18 heures)
Mme Gillanders: We definitely want to see investigation on
harassment cases, but I think what is bothering a lot of us is that the words
are "possibly" and "could be." There is nothing definite. We have endured a lot
of sympathy from a lot of departments, from legal counsel to Régie du
logement, from fire departments, police departments, city hall, we have had a
lot of sympathy, but sympathy has not done anything for us. It has not solved
the problem.
M. Bourbeau: I have much sympathy for you also. However, you have
to realize that my being here in charge of these dossiers is rather recent.
Before tackling such a very delicate problem, an important problem, we have to
study the situation and the document that we have here did not take a few days
to draft. It is the result of a year of studies and preparation. I do not think
you can blame us for not having moved as soon as we were elected on this
subject. It is slow, but it is the time that it took us to really be able to go
around the whole problem.
Now, you say that we have possibly some loose words in our wording. It
is not that our intention is not there. It is just that if we are categoric in
saying that this is what we are going to do, people are going to say: So, your
mind is already made up and you are consulting us for nothing. So, we use these
words to make sure that the people know that we are ready to listen, to hear
and to improve our proposition. So, you should not take these words as being a
sign of no interest on our part. It is because we want to be democratic about
it.
Mme Dresner (Honey); M. le ministre des Affaires municipales, mesdames
et messieurs, j'aimerais vous faire part un peu de nos frustrations et de nos
inquiétudes parce qu'on vit une situation difficile depuis très
longtemps. En plus d'être frustrés et un peu insatisfaits de la
longueur des procédures et du manque ou de l'absence de rapidité
dans cette affaire, c'est un problème de juridiction. On doit faire face
à des juridictions différentes. Il y a la Cour supérieure
ici, il y a la régie là, on va à la police qui constate
que c'est une autre juridiction. Il y a tant de créneaux, il y a tant
dé trous à remplir. C'est cela qui nous frustre te plus.
Étant donné tous les bouleversements qu'on à subis,
toute la frustration, je pense que vous n'avez aucune idée... Il faut
vraiment vivre cette situation pour comprendre cette réalité. On
est au moins chanceux d'avoir des réseaux, soit des professionnels, des
gens qu'on connaît, il y a des avenues de redressement, si vous voulez,
mais, même avec ces ressources, c'est pratiquement impossible de
résoudre le problème, c'est une frustration continue à
cause des lois existantes. Nous n'avons pas l'expertise professionnelle,
légale, politique, ainsi que financière pour combattre cela.
M. Bourbeau: II suffit de regarder le document que vous m'avez
remis pour comprendre ce qu'est le harassement. I mean, just by looking at the
various documents you handed out to me, there is already a good lesson on what
harassment is all about, I would say.
Since we have a litte time, I would like to talk about these major
renovations. You describe the situation as follows: you say that some owners,
thinking that the moratorium will be lifted, are already evicting tenants,
preparing for eventual conversion. You know that when they apply for
conversion, if the proposal is enacted into legislation, they will have to
prove, I mean the Regie du logement will make an inquiry ,and if it is proved
that they did expel tenants for purposes of major renovations and this in order
to prepare for conversion, they will be refused condo conversion. This is on
page 47 of our proposal. We propose to refuse to authorize a building
conversion when major improvements or repairs other than urgent repairs
requiring the evacuation of tenants were carried out in order to prepare the
building for conversion and to evict the tenants.
So, I think that these owners should know by now, if they do not, that
they will just meet with a cement wall if they come to the Régie du
logement after having
evicted tenants. Therefore, they may not have the success they think
they will have.
Mme Gillanders: I appreciate your answer, Mr. Bourbeau, but I
would like to point out that in our documents supporting that, you will find in
The Westmount Examiner of March 26th that our owner has already not ruled out
the possibility of condo conversion and her answer also is that if we do not
accept what they do, we can leave. And your proposal that they will not be
allowed to convert is for them. But that is not going to help us if we are
already gone, if we have been evicted. It will not serve us any purpose.
M. Bourbeau: I have read this. I have seen the newspaper article
in your brief. What I would like to say is that with the present system, the
way the system works right now, your owner can probably convert if he is
successful in emptying the_ building by whatever measures he is using. You know
that, right now, whenever a building is empty, the owner can convert, in the
present system, with the moratorium the way it exists right now.
I do not think that this is satisfactory to you and it is not
satisfactory to me either. So, this morning, we talked to the officials of the
City of Montreal and they agreed that it is not acceptable. They said that the
keeping of the moratorium is unacceptable and I share that view. We cannot keep
on with the system the way it is right now because this moratorium is not
capable anymore of protecting tenants.
So, the City of Montreal has suggested to replace it by a new system
whereby there would be a more general freeze on condo conversion with the
possibility of exceptions where some owners could convert, if some criteria are
met. These criteria have not been defined but there would probably be cases
where a majority of tenants would agree to conversion or where some other
criteria would be met. What is your reaction to this proposition of the City of
Montreal?
Mme Gillanders: Well, I was about to ask you a question, Mr.
Bourbeau, and that has to do with certain fundamental premises and assumptions
that underline your White Paper. One certainly emerges from the reading of your
paper with the very strong inference that there is a clamour in the Province of
Quebec, there is a clamour in the City of Montreal amongst current tenant
consumers, people who are not currently owners of property, to own their own
units. And I am not satisfied. I grant it to you, I have not read all of your
back-up presentations. I know that you have undertaken extensive research,
consultation and that you have done polls and so on. But one figure did stand
out in my mind from your White Paper and that is that 16 % of those polled in
the survey that you undertook were "peu intéressés". 28 %? I read
16 %. I will have to find that.
Le Président (M- Richard): J'aimerais vous faire part que
le temps de la partie ministérielle est terminé. C'est maintenant
au parti de l'Opposition. M. le député de Saint-Jacques, si vous
avez des questions, s'il vous plaît.
M. Boulerice: Yes. First, I have to congratulate you for your
memorandum. It is not the time you take to write it down that matters, it is
the ideas in it. Probably for less money and in a shorter time you have put
more in your memorandum than the so-called best-seller the minister is
spreading around.
You are telling us things that are very interesting. For example, you
said that 57 % of Westmounters are tenants. Again, as I said this morning, it
really kills the old folklore about Westmount and tells us that we are now
really facing a Greater Montreal problem with loosing. That is why, as the
Opposition, we requested that the commission sit in Montreal, so we could hear
you and listen to what you had to say or to what you have to say.
I am going to go by "absurdo", if you allow me. Anyone can answer. Can
one of you afford to go and live at 285, Clark Street, where the penthouse
condo is up to 1 300 000 $? Good gracious: I thought it was an ad for an Upper
Manhattan apartment! I thought I was reading the Architectural Digest. But no,
it is next block from here. So, if you are evicted, can you go and live
there?
Mme Dresher: Seeing as I am the most likely one to be evicted, I
can tell you that I cannot even afford to go and live in the toilet, never mind
the penthousel
M. Boulerice: Yes. I was sure about it. Neither can I. I wish we
could but we cannot, so... If we are evicted, that is what will happen. The
Minister says that he cannot legislate on Article 1653. You know, the Minister
could stand in the House and do, as we say in French, "une déclaration
ministérielle". That has the force of a law. He could do that. So when
he says that he cannot do anything about it, I am sorry, but I just do not
believe him. He sticks to his unique wicket for senior citizens and handicapped
people, pretending, as my collegues, say, that Napoleon's black horse is white
or Napoleon's white horse is black, no matter what it is, that It is really
solving the problems.
First, most senior citizens... Well, they
will probably try to call and the line is busy, of course, because there
are a lot of people doing it. Can they go and take the bus up to it? I do not
think this is a great solution. I mean, that it is not the end of the world
with that wicket. I am not very much impressed with it. If I look at his so
called best-seller, the only question I am asking myself is: Where is the
beef» as we say? Do you feel that you will have better protection if his
law is voted?
Mme Gillanders: Are you asking if we would be more protected if
the moratorium is lifted? I did not catch your question.
M. Boulerice: What I am saying is that everybody describes the
situation right now as kind of critical. We are all having problems, right? The
Minister comes with his solution. I am asking him: Where is the beef? He is
probably going to give me an answer some day, a correct one, I hope. You have
one memorandum, you have read that book, you have met him. Do you feel that the
situation will make that we will be better off with this, tomorrow, if it is
voted?
Mme Dresner: Mme Dorland va répondre à cela.
Mme Dorland: Je reprends l'histoire du guichet. J'aurai 65 ans
l'année prochaine et je suis un peu handicapée. Qu'est-ce que
sera ce guichet? II y aura des queues. Il faudra un immeuble entier pour
contenir tous les gens qui auront des problèmes. Cet aspect de
l'histoire du guichet, que M. le ministre a l'air de prôner comme
très efficace, je ne peux pas imaginer cela. Je trouve cela absolument
irréaliste. Cette loi ne me protège absolument pas. Enfin, le
moratorium... Comment dit-on? Abaisser le... Non, pas abaisser.
Une voix: Enlever?
Mme Dorland: Non. Comment est-ce qu'on dit?
Une voix: Lever le moratoire?
Mme Dorland: Supprimer le moratoire. Je ne trouve pas le mot
parce que je pense en anglais. Que le moratoire soit supprimé, en ce qui
me concerne, je ne me sens absolument pas protégée, d'aucune
façon.
M. Boulerice: About harassment, you want it to be precise in the
law and you even used Webster's to describe it, which is fair, of course. You
also have said about harassment that it should be included the Criminal
Code.
Mme Dorland: Have you ever been harassed?
M. Boulerice: What?
Mme Dorland: Have you ever been harassed...
M. Boulerice: Yes.
Mme Dorland: ...and had to live through something like that?
M. Boulerice: Yes. But let me tell you that is not what you are
doing to me right now. I just want to say that I do agree with you about it, I
mean this sexual harassment. People are convinced that it should be included
the Criminal Code. I know what the psychological damages of harassment are. We
saw that lady who came in, a few minutes ago, and went into tears because it
reminded her of so many bad moments she had to go through because of all those
harassments.
Mme Dresner: Si je peux répondre à votre
question... Pardon.
Mme Nicholson (Jane): We may not be as emotional and you may not
see our emotions, but we have suffered incredibly. We are simple people, we are
working people. We are nearly all working people, there are some elderly
people. And I hear a lot of talk about elderly people. I am sympathetic to
elderly people and to young people. But, nevertheless, there is a lot of young
people who cannot take it anymore. I do not consider myself old, but I know
that my life has been made hell, it has been turned upside down. I am a single
parent. I have tried to help the others and tried to organize. But it is
pathetic. We expected... Maybe people think that it happens in other parts of
the city. Westmount, supposedly, is a better part of the city. But we are right
beside Westmount City Hall and nobody can do anything. The police can not do
anything, it is a civil matter. The fire department can not do anything. There
are rules and regulations. We are having to get out there. We are spending our
evenings, our weekends, our nights trying to organize things, trying to improve
things, trying to find out how the law works.
How can the elderly defend themselves when we, the strong, the working
people cannot manage to defend ourselves? We have to spend our money at the
court, we have to spend our time, trying to organize people. Some people are
afraid, they do not want to participate, they do not want to put their name on
anything because they will be sued. There are already three of us being sued
for libel. I understand very much the emotions of this woman who was here today
because
we have suffered a great deal and we do not know what the solutions are.
We want you to find the solutions. We want you to help us. We do know the
problems, we know them very strongly. All of us could become very emotional but
the thing is, it is not the time or the place, but we do feel very
strongly.
M. Boulerice: I am going to go with a statement. We stand with
you on that point to include it into the Criminal Code.
Mme Nicholson: I think it is time that people pay for that kind
of behaviour that they are dishing out. I do not think that people should make
money on the backs of others and that simple people who do not know how to
defend themselves should have to go through this day in and day out. It is
increadible.
Mme Dresher: C'est cela, le problème. Ces problèmes
sont inexorables. Ils continuent tous les jours. On se lève le matin, on
rentre chez soi et on a peur que les portes soient enfoncées, que
quelqu'un soit la, que quelqu'un soit dans nos casiers, qu'il y ait un autre
assaut physique, qu'il y ait une autre voiture déplacée du
garage. C'est une série de gestes, d'actes qui sont absolument
flagrants, qui sont inexorables et qui ne sont pas contrôlables par nous.
Il y a trop de créneaux dans les juridictions respectives. Juste le fait
d'essayer de combattre cela exige d'aller consulter des avocats, entraîne
des frais absolument extraordinaires.
M. Boulerice:...even psychologists and all that stuff?
Mme Nicholson: Even psychologists.
Mme Dresner: Je suis partie un mois en Europe. J'ai fait des
procurations pour toutes mes voisines au cas où je recevrais une lettre
recommandée pour éviction temporaire, pour n'importe quel
problème. Dans une démocratie, on ne peut même plus partir
en voyage parce qu'on a peur de ne plus retrouver son logement à son
retour. C'est quand même terrible! On est arrivé au point
où on a fait installer des "screamers", dans une vingtaine
d'appartements parce que des portes ont été enfoncées, des
clés ont disparu et on a peur que quelqu'un entre dans notre appartement
durant notre absence. Vous voyez vraiment que ce n'est pas Manhattan
réchauffé, c'est quelque chose de très particulier ici
à Montréal.
M. Boulerice: Mr. Goodbar.
Mme Dresher: L'analogie n'est pas trop trop loin.
M. Boulerice: Sorry. The chairman has just told me that I only
have two or three minutes to go. Three minutes. So again, thank you for coming.
Congratulations for your work at a cheap price, in a short period of time, but
on many stands much better again is what I have said about that book. I do not
think that we are going to give the Minister more time than I have left to
change the law. Thank you for coming in and let us know what other problems we
are facing right now.
What I find great and I might try to reverse the sentence and use it for
all of us: Tenants of all Montreal, let us unite, because that is what we need
right now. Thank you.
Mme Nicholson: There is one thing more we want to mention. We are
just one building in Westmount that has this problem. We are now in the process
of forming a common front and we are very much aware that many many buildings
have the same types of problems and we just do not seem to find any solution.
But we are not going to give up. So people are going to have to do something
about it.
Le Président (M. Richard): Bien. M. le ministre, pour le
mot de la fin.
M. Bourbeau: Yes. It was a pleasure to meet again with the people
of the Redfern Tenants' Association. I must say that I am a little disappointed
that our friend, le député de Saint-Jacques, only found time to
make jokes, but this is quite standard with him. This is a very serious
problem.
In our proposal, we tried to improve the situation. Obviously, I can see
by your answers to the questions of the député de Saint-Jacques
that you prefer the status quo to what we are proposing, but I am not happy
with your answer. I am not going to settle with the status quo personally,
because Ï think that there are things which we can do, and we will do, to
improve the situation as far as harassment is concerned and I am certain that
you cannot object to us improving the law in order to try to give more
possibilities to fight harassment. We have said that we would like the
Régie du logement to have a special place where harassed people could
receive special treatment. We are told that this is not a good solution, so we
will try again. We will put it back on the drawing board and see whether we can
improve upon this.
We will try to bring the Commission des droits de la personne in the
case. I do not know whether you like it or not. I do not think that we have
commented on this. 1 am determined to find ways to improve the situation and I
hope that you will help us to improve a plan which obviously is not enough
for you.
Finally, I will say that, as far as the Criminal Code is concerned, it
is probably a good thing to have it amended also, but this is of Federal
jurisdiction, as you know, and you would have to see your Federal MP to put
pressure on the Federal Government to amend the Criminal Code in that way.
Thank you.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. M. le
député de Saint-Jacques, pour un mot final.
M. Boulerice: Our stand this morning, at the very beginning, was
to maintain the moratorium, but to make it really effective by all means and
ways. As far as putting it into the Criminal Code, I will just say to our
colleague, who pretends to be a good negotiator with the Federal Government to
which we all still belong: Well, use your so-called forces. And about making
jokes, I do it sometimes to calm myself in front of stubborn attitudes.
Le Président (M. Richard): Merci de votre présence
et de la présentation de votre mémoire. J'ai l'impression que
vous voulez dire quelque chose. I imagine you want to say something?
Mme Gillanders: I just want to say thank you to everybody. We
still stand on what we stated. We still would like to see something done
immediately about harassment. We still want to see Article 1653 frozen and we
still take a stand that the moratorium should be maintained. We are living
through this now, please help us have some justice done. Thank you!
Le Président (M. Richard); Thank you very much for being
here. Nous supendons les travaux jusqu'à 20 heures. Bon appétit a
chacun d'entre vous. Vous pouvez laisser vos documents sur les tables, il n'y a
aucun problème.
(Suspension de la séance à 18 h 26)
(Reprise à 20 h 11)
Le Président (M. Richard): Mesdames et messieurs, la
commission de l'aménagement et des équipements reprend ses
travaux de consultation générale portant sur la levée du
moratoire sur la conversion des immeubles locatifs en copropriété
divise.
Le groupe que nous entendrons est l'Association des étudiants aux
études supérieures de l'Université McGill et l'Association
des étudiants de l'Université McGill.
Je tiens à vous répéter que vous avez quinze
minutes pour présenter votre mémoire. Je vais être assez
sévère; quand il va rester deux minutes - et c'est d'ailleurs
chronométré - on va vous le signifier. Si votre texte est plus
long que cela, il faudra aller directement à la conclusion. Cela va? Par
la suite, les membres du Parlement, autant de l'Opposition que du pouvoir,
auront chacun quinze minutes pour vous poser des questions.
Is it necessary to repeat in English?
Des voix: No, no.
Le President (M. Richard): Wonderful!
The only thing I want to say in English, just in case, is: Fifteen
minutes, not more. You can use less. Go on.
Association des étudiants aux études
supérieures de
l'Université McGill et Association des
étudiants
de l'Université McGill
M. Schultze (David): Merci.
Le Président (M. Richard): Vous présentez votre
délégation en premier.
M. Schultze: C'est cela. Je m'appelle David Schultze. J'ai
été le, vice-président aux affaires externes de
l'Association des étudiants aux études supérieures de
l'Université McGill. À ma droite, M. Daniel Teneunbaum, l'actuel
président de l'Association des étudiants de l'Université
McGill qui regroupe l'ensemble de la population étudiante de McGill;
à ma gauche, Mme Maria Battaglia, la vice-présidente aux affaires
universitaires, et, à mon extrême gauche, M. André Couture,
l'actuel vice-président aux affaires externes de l'Association des
étudiants aux études supérieures.
D'abord, j'aimerais souligner que notre mémoire parle uniquement
de la situation des étudiants è l'Université McGill, mais
nous croyons que ses conclusions s'appliquent également aux autres
étudiants, surtout aux étudiants du centre de Montréal,
notamment de l'Université du Québec à Montréal, de
Concordia, du Cégep du Vieux-Montréal et de Dawson College.
Evidemment, à cause de nos contraintes de temps et de ressources, notre
analyse porte sur les étudiants de McGill, mais je pense que les
problèmes qu'on décrit et les solutions que l'on suggère
s'appliquent à l'ensemble de la population étudiante en tant que
locataire.
J'ajouterai même que, probablement, la situation pour les
étudiants de l'UQAM est pire, étant donné qu'à ma
connaissance, c'est la seule université à Montréal qui
n'ait aucune résidence étudiante.
D'après ce que vous avez compris dans le mémoire, il y a
déjà une énorme pression sur la population
étudiante qui habite les quartiers du centre de Montréal. Ces
étudiants habitent ces quartiers pour être près de leur
campus et, actuellement, ces quartiers étant à la mode, il y a de
plus en plus de gens qui veulent y habiter. Ils ont des revenus beaucoup plus
grands que les étudiants. il y a donc'une concurrence pour une
quantité limitée de logements. Donc, nous avons peur que les
étudiants sortent perdants.
Vous trouverez dans le mémoire un ensemble de propositions.
J'aimerais commencer par souligner la première proposition dans laquelle
nous reprochons quelque peu au gouvernement de reconnaître lui-même
les lacunes de l'actuel moratoire sans les résoudre jusqu'à une
politique plus complète quant au moratoire.
Si vous, les membres du gouvernement, reconnaissez qu'il existe un
problème, on vous suggère, on vous demande de le résoudre
au plus vite parce que ce sont nos membres, ce sont nos collègues qui en
souffrent actuellement. Je ne pense pas qu'on puisse attendre des solutions
plus lointaines.
Pour le reste, on reprend les recommandations du Regroupement des
comités logement et associations de locataires pour des gels sur la
conversion dans les quartiers où le taux de vacance ne dépasse
pas les 3 %. Je pense que cela impliquerait l'ensemble des quartiers entourant
les campus universitaires. Nous insistons beaucoup sur la proposition 3 qui
parle d'élargir la juridiction de la Régie du logement aux
logements inoccupés. C'est un point sur lequel on va revenir. C'est
important de comprendre que le document qu'a publié le ministère
parle toujours d'un droit de locataire qui passe par l'individu. Il ne comprend
pas les locataires comme groupe social, alors que les étudiants, comme
locataires individuels, changent souvent d'appartement.
Une réglementation qui protège uniquement leurs droits au
moment ou ils sont dans ces appartements ne les protège pas beaucoup.
Si, par exemple, on est forcé de retourner à
Rivière-du-Loup pour l'été, un droit de préemption
n'aide pas beaucoup.
Pour terminer, j'insisterai sur l'importance que, dans une plus grande
politique du logement le gouvernement considère la situation des
étudiants. Si vous ne la considérez pas, ces étudiants
vont concurrencer les autres clientèles à faible revenu,
c'est-à-dire que n'importe quelle politique de logement social qui ne
tient pas compte des étudiants risque d'être défaite par la
concurrence qu'ils livrent aux autres ménages a faible revenu.
M. Couture (André): Merci, David. Pour continuer notre
présentation, je parierai un peu du rôle des universités
dans la ville de Montréal, surtout de McGill. Comme David l'a dit avant,
cela s'applique à l'autre université sur l'île de
Montréal.
Le record de McGill concernant les logements louables près du
campus est vraiment choquant. Premièrement, l'expansion de ses propres
départements est malheureusement défavorable aux locataires des
logements de McGill. Pire, il y a la politique que l'université a de
vendre son immobilier, incluant des logements louables et convenables pour les
étudiants, aux développeurs privés. Par exemple, sur la
rue Peel, où les étudiants, enseignants et autres gens habitaient
tout près de l'hôtel Shangrila, McGill a vendu un immeuble qui est
maintenant complètement détruit. L'exemple le plus frappant est
l'édifice le Marlborough sur Milton, angle Université, un
immeuble d'environ 150 locataires avant, la plupart étudiants, qui a
été vendu et qui est maintenant un complexe magnifique de
condominiums complètement ou presque complètement inaccessibles
aux étudiants. C'est un exemple frappant de la politique de McGill.
Je souligne qu'avec les pressions fiscales dont McGill et toutes les
autres universités souffrent, on peut le comprendre, c'est une politique
a laquelle ils sont vraiment forcés pour... Les pressions fiscales les
ont vraiment forcées à vendre ces immeubles pour de l'argent.
Quand même, pour les étudiants, ce n'était pas une excuse
vraiment,
Concordia's record is not much better. We all have heard of the library
expansion project on Bishop Street, where a lot of students were moved out of
the building in order for expansion of the library at that point without any
consideration regarding where they were supposed to live. It is an example of
how this policy is not just a McGill policy, it certainly applies to the other
universities.
Now, what we - as David outlined in his recommendation - would like to
see the Provincial Government do is to exercise the powers that it does have
over real estate in the Montreal area. We all know the example of the
provincial pressures on the Museum of Fine Arts, giving the Museum of Fine Arts
the power to expropriate land across the street to expand the museum. We would
like to see the Provincial Government use these powers in a similar situation
for universities. The financial powers that the Provincial Government has over
the universities are well known and we would like to see both of these
responsibilities of the Provincial Government exercised in tandem to benefit
students on the Island of Montreal who are, after all, the future citizens,
taxpayers, voters and what have you of the province.
Mme Battaglia (Maria): Thank you André. Depuis les
années soixante-dix, il n'y a quasiment pas eu d'études au sujet
des besoins en logements des étudiants, malgré le fait qu'ils
constituent un grand marché d'hébergement dans le centre urbain.
Les étudiants qui n'ont pas l'aide de leur famille
préfèrent habiter aussi près du campus que possible,
à cause de leurs études intenses et de l'utilisation qu'ils font
des laboratoires parfois jusqu'à douze heures de suite. Pour ces
raisons, il est nécessaire d'habiter aussi près du campus que
possible.
L'hébergement pour les étudiants, au Québec, est
absolument insuffisant. En 1981, par exemple, la province entière a
logé seulement 13 460 personnes entre 15 ans et 34 ans. Il faut noter
que ces jeunes n'étaient pas tous des étudiants. Seulement
à McGill, en 1986-1987, il y avait 10 276 étudiants qui
provenaient d'autres provinces.
Présentement à McGill, le manque d'hébergement est
devenu critique. Les résidences de McGill contiennent au maximum 1114
lits. Un nombre absolument inacceptable puisque, dès le 4 mai, il y
avait 5000 demandes de chambres dans les résidences à McGill.
The right of tenants in Quebec is an almost perpetual right. However,
where students are concerned, there is a deficiency in the present law. Due to
the students' high mobility rate, the change of tenants offers landlords the
possibility of vacating the premises and renovating the building. If the
moratorium is lifted, one could expect that most of these apartments would be
for sale as condominiums by the summer of 1988.
The right of preemption is useless to students, since most students
cannot afford to buy condominiums; few condos are owned by young people in
Canada. A 1984 national market study prepared by the Canada Mortgage and
Housing Corporation revealed that 47,8 % of condo owners are between the ages
of 40 and 65. Furthermore, another 22,5 % were over the age of 65. The average
condo household income was more than 38 000 $, more than twice the average
household for young Quebeckers.
Another concern with students is the quality of student life. There are
three universities in the downtown area and two cegeps, all competing for
student housing. By losing students from outside the city or province due to a
lack of affordable housing, we would be losing the national character of our
university.
The problem is not going unnoticed by many members of the McGill
community and many have voiced their concern for this matter. For example, the
university's off campus housing service has increased its staff this summer to
help students find suitable housing space. The McGill senate on nonresident
housing has prepared a report which looks at a scheme to improve the quality of
student life by accommodating a wide variety of students, including married
students, disabled and students with children in a financially self-sustaining
project. However, for such a project to be feasible, there is a need for
buildings and for funding.
Last but not least, the Student Society of McGill University has
established a student housing task force to look into the range of possible
solutions to the problem in the vicinity of McGill Campus. The committee would
prefer that the Quebec Government had a coherent housing policy to which we
could contribute rather than introducing a harmful policy whose damage we would
have to spend our time trying to repair
Merci, messieurs. Si vous avez des questions è poser, nous serons
très heureux d'y répondre.
Le Président (M. Richard): Merci. On vous félicite,
vous êtes à l'intérieur des quinze minutes.
Thank you for those minutes.
M. le ministre.
M. le député de Sainte-Anne.
M. Polak: Merci beaucoup, M. le Président. Just trying to
stay within the time frame. First of all, I read the memoir and I am very
impressed by the "prestations" of the students. I just have a few questions and
I ask the ones in English according to the text in English; if it is in French
according to the text in French. You mentioned a percentage of 3 % vacancy on
page 8 of your memoir. How did you take this percentage? I know it is less than
3 % now. But why did you say that the safeguard should be 3 %?
M. Schultze: It was a percentage... That is a recommendation we
borrowed from le Regroupement des comités logement et associations de
locataires. My understanding is that 3 % is seen as the sign of a healthy
housing market, that it ensures, that it takes into account a certain amount of
moving in and moving out, and accessibility of housing.
M. Polak: Okay.
M. Schultze: Something like the 3 % unemployment that is supposed
to be full employment.
M. Polak: Thank you. On page 2, you talked about the rents that
the students are paying. You go from 1982 to 1987, you give some very
interesting statistics concluding that the students are really now paying an
average of 50 % increase in five years. Those are figures that you have taken
from actual figures from students who are residing
in apartments?
M. Schultze: To explain the methodology, at the end of the year there
are always dozens, if not hundreds of students who are leaving the city for the
summer; they try to sublet their apartments. One of the ways by which they try
to sublet them is to put classified ads in the McGill Daily. So, in the
last issue of any school year of the McGill Daily usually has dozens of
advertisements for sublets. So, what we did was to take these advertisements
from five years, break them down by size of apartment and calculate the average
rent. In the column N, you see the size of the sample. While it is not a
perfect sample, I think it indicates a general pattern which is an extremely
sharp increase in rents.
M. Polak: Another question is that you mention on page 6 the
protection of the individual tenant. As you know, the Minister has stated in
his document that the tenant in place will be protected and has the right to
stay. Of course, I understand that in the case of a student, it changes almost
from year to year, or two years to two years, depending on which faculty he or
she is at. Do you suggest - you did not mention it in your document - that the
Minister should sort of... Because his intent is to protect the tenant.
Sometimes, I criticize the Minister, but I have to give him credit too when he
says: I want to protect the tenant in place. He has said that the tenant is
protected forever and Ï agree whole-heartedly with that. But in case of
students, do you suggest sort of an exception for that particular category?
M. Schultze: Myself, I have trouble seeing that that would be
feasible, which is why we included the recommendation that areas with vacancy
rates below 3 % not have any conversion of apartments to condominiums.
Just a note on a point. The members of the committee could in one
minute's walk from this hotel find buildings that each year see dozens of
students move in and dozens of students move out. Many of the students have no
choice but to move out. They have to return home for the summer and home is
outside of Montreal. Now, I understand the motives of the Minister in
protecting individual tenants but these apartments are in an area that is
extremely attractive to prospective condominium owners which also happens to be
the closest to McGill University and if the proposals that have so far been
presented by the Minister go through, I think that we can only expect that
almost all of those apartments will be condominiums within months of the
students departure.
M. Polak: Last question, and then I will gladly turn, it over to
the very bilingual MNA for Saint-Jacques. He is always complaining about the
fact that we do not protect French; he is bilingual, so I do not blame him
because he is protected already: He knows English very well. (20 h 30)
I found it interesting when you said, on page 1 of your memoir, that
where you live used to be known as McGill Ghetto and now, it is called
"Durocher Village" or maybe village, depending on... He would say "village" in
English and I say "village" in French.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Polak: Could you just comment because, to me, it was a little
bit ironic when you sort of said: Look what happens. You are pushed out and the
rich are taking over. Is that what you tried to say?
M. Schultze: That is exactly a bloc from this apartment. A few
weeks ago or rather in the spring, I was walking around in this area with some
friends on a nice warm Sunday afternoon and we walked down, I think, Aylmer or
Hutchison just below Pine. We passed the building with a sign that said: "Open
House". You know... Whatever "Open House" is in French. We recognized the
place. I knew students that had lived there. I think they were six or seven
sharing the place. It was a very nice place. Since then...
I suppose perhaps some of you might be interested in buying half of it
for 195 000 $. Unfortunately, on a bursary, I cannot afford to buy it at 195
000 $.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Polak: Okay. Thank you very much. Merci beaucoup, M. le
Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Sainte-Anne.
M. le député de Saint-Jacques.
M. Boulerice: "Que dice el deputado de Sainte-Anne no es
importante."
Ce que le député de Sainte-Anne a dit tantôt quant
à mes compétences linguistiques, ce n'est pas important. Je ne
sais pas quel phénomène, je ne sais pas si c'est votre jeunesse
qui a provoqué un grand mouvement de détente dans cette
commission qui a été peut-être auparavant un peu tendue,
surtout quand j'ai dit au ministre que son livre n'était pas ce que
j'appelais un "best-seller". Donc, vous avez provoqué une certaine
détente qui n'est pas à sous-estimer. D'une façon beaucoup
plus sérieuse, je voudrais effectivement vous féliciter
d'être venus intervenir à cette commission.
Je sais que vous appartenez à une organisation qui est
spécifiquement rattachée à l'Université McGill mats
je pense que la qualité de votre mémoire vous donne -comment
dirais-je pour essayer d'employer un mot français - du crédit qui
déborde très largement celui d'uniquement une
représentation de l'Université McGilI. Je pense que vous situez
très bien la problématique vécue au niveau des
étudiants. Vous avez parlé, dans votre présentation
verbale comme dans le mémoire écrit que vous avez transmis, de la
présence de votre université, McGill, de celle de l'UQAM
d'ailleurs qui est dans Saint-Jacques, de Dawson, du Vieux-Montréal en
omettant, mais je vous pardonnerai cela bien volontiers, l'Institut de tourisme
et d'hôtellerie du Québec qui regroupe aussi un nombre
d'étudiants dont la quasi-totalité vient de l'extérieur de
Montréal et pour qui, effectivement, se pose le problème que vous
faites valoir, à savoir qu'ils doivent quitter l'été, et
le problème de rétention que cela peut constituer pour eux.
Au-delà du moratoire comme tel... Si je comprends bien ce que
vous dites, c'est que vous êtes contre la levée du moratoire et
que vous ne voulez pas de moratoire. Vous parlez du renforcement des mesures de
protection. Est-ce que je dois comprendre que ce qui est proposé
là-dedans ne constitue pas à vos yeux des mesures de renforcement
qui seront efficaces pour le point de vue que vous faites valoir?
M. Schultze: Comme j'ai déjà essayé de
l'exprimer, je ne porterai pas de jugement pour l'ensemble de la population
"locatrice", mais pour ce qui est de la population étudiante, ce qui est
proposé dans le document ne la protège pas d'une façon
adéquate.
M. Boulerice: La majorité des intervenants qui se sont
présentés durant la journée ont fait part d'un certain
"harassment"...
Une voix: Harcèlement.
M. Boulerice: Je m'excuse. "Harassment", c'est le mot anglais.
Est-ce que vous avez des cas où des propriétaires ont
effectivement profité de votre condition d'étudiant, donc avec
des ressources financières limitées, pour faire
véritablement du harcèlement, harassment is the word he used.
M. Schultze: Je pense que l'un des meilleurs exemples qu'on
pourrait donner serait le cas du bâtiment de Marlborough que M. Couture a
cité. Je ne sais pas s'il aimerait décrire la situation.
M. Couture: Comme vous êtes déjà au courant
que, dans ma présentation, on donne le rapport, effectivement, oui, le
Marlborough est un excellent exemple de cet harcèlement des locataires
dans les lieux. Après que le Marlborough ait été vendu, le
nouveau propriétaire a donné avis aux locataires de plusieurs
appartements qu'il faisait des réparations majeures. Alors, ils avaient
un mois pour quitter. La plupart sont partis mais il y en a quand même,
je pense que c'est six ou sept, qui sont restés pour se battre. Je ne
connais pas leur situation en ce moment, mais je pense qu'ils ont perdu leur
bataille. C'est vraiment un exemple, primo, qu'on a des étudiants qui
souffrent d'une politique inadéquate. La politique proposée
n'aura presque pas d'effets sur les étudiants. Alors, on voit une grande
lacune dans les deux politiques.
M. Boulerice: J'ai lu la statistique qui est vraiment
époustouflante, à savoir le nombre de demandes qui avaient
été présentées, à ce que vous appelez le
"Off Campus Housing Service", avec une courbe ascendante vraiment incroyable.
Je ne sais pas, je vous pose la question: Est-ce qu'à ce service, on a
poussé l'étude jusqu'à être capable de
déterminer si les conditions de logerneht extrêmement difficiles
qui peuvent exister pour les étudiants ont été
jusqu'à être significatives dans le taux d'abandon scolaire ou
d'abandon universitaire, enfin, vous me comprenez?
M. Schultze: Je ne pense pas qu'on puisse vraiment
répondre à cette question. En effet, on a constaté qu'en
ce qui touche les statistiques, les renseignements sont extrêmement
limités. Il ne serait pas possible de faire des liens de ce genre. Il
serait peut-être à noter que malgré le fait qu'il y ait une
augmentation évidente des loyers à Montréal, je ne pense
pas qu'il y ait eu une augmentation semblable des prêts et bourses.
M. Boulerice: C'est vous qui dites cela. Je suis très
content de vous l'entendre dire. Mais c'est un débat qu'on pourra avoir
dans une autre commission avec un autre ministre.
Le Président (M. Richard): Vous changez un peu de
dossier.
M. Boulerice: Vous changez un peu de dossier. Non, vous avez
à juste propos, je pense, fait état de cela, comme du
sous-financement chronique des universités qu'a dénoncé
d'ailleurs ma collègue, Mme Blackburn, députée de
Chicoutimi. Cela demeure toujours dans le portrait.
Dans les recommandations, vous dites prévoir la construction de
logements pour étudiants dans le cadre d'un programme de logement social
pour les ménages à faible
revenu. Vous l'incluez dans la notion de ménage à faible
revenu. Je vous avoue que cela m'a... Que vous n'ayez pas spécifiquement
fait état d'habitations étudiantes mais bien de l'inclure dans un
programme dit pour ménages à faible revenu.
M, Schultze: Ce n'est pas pour dire qu'on souhaiterait
l'intégration d'étudiants particuliers dans des HLM. C'est pour
dire que c'est quand même une population è faible revenu. Ce que
l'on tient à vous signaler c'est d'ailleurs une conclusion qu'a
tirée une commission en Ontario, il y a quinze ans, qui est citée
a la page 7 - c'est que cela fait partie d'une clientèle a faible
revenu. Je pense que ce qu'on verrait si ce moratoire est levé sous les
conditions énoncées dans le document du ministère, c'est
que les étudiants sont prêts è payer de plus grands
montants parce que c'est temporaire et, je pense, qu'on peut supporter les
choses mieux quand c'est temporaire. Je pense qu'ils vont commencer, de plus en
plus, à concurrencer les autres populations à faible revenu.
Déjà, il y a des étudiants de McGill -cela va
peut-être vous surprendre - qui habitent la Petite Bourgogne, Verdun,
même Pointe-Saînt-Charles, Saint-Henri, il y en a beaucoup à
Saint-Henri. Ce qu'on dit, c'est que si, dans une plus grande politique de
logement social, vous ne prévoyez pas les besoins des étudiants,
comme je l'ai dit, cela risque de défaire cette politique, parce qu'il y
aura comme une demande pour du logement peu coûteux dont on n'aura pas
tenu compte qui va défaire l'ensemble de la politique.
Je veux dire, on ne veux pas voir qu'il y a des étudiants qui
s'opposent à des familles bénéficiaires d'aide sociale
pour avoir des appartements pas cher, ce qui pourrait se produire.
M. Boulerice: Mlle Battaglia, gentlemen, thank you. Je ne sais
pas si mes autres collègues veulent...
Le Président (M. Richard); Cela va? Est-ce que vous avez des
commentaires, M. le ministre, en terminant?
M. Bourbeau: M. le Président, deux commentaires.
Premièrement, le très ineffable député de
Saint-Jacques a fait allusion, tout à l'heure, au document
gouvernemental en le traitant de best-seller, évidemment, en riant un
peu, parce qu'il croyait que le document n'était pas très
populaire. J'aimerais l'informer, de même que les autres membres de la
commission, que non seulement le document a été populaire, mais
on a dû procéder à une réimpression è la
suite de sa très grande popularité.
À la première impression, nous avions fait 2500 copies
françaises et 750 anglaises. Nous avons dû réimprimer 1500
copies françaises et 300 anglaises. Voilà, pour répondre
au député de Saint-Jacques. Deuxièmement, j'aimerais
féliciter les étudiants de l'Université McGill.
I would like to congratulate you for your brief and tell you that if I
did not personally intervene, it is because 1 am in a conflict of interest as
far as McGill is concerned, since I am a McGill graduate myself and I have a
daughter who is studying presently at McGill. So, I selected not to get
involved. Congratulations!
Le Président (M. Richard): Des commentaires, M. le
député?
M. Boulerice: Je terminerai, M. le Président, en disant
qu'effectivement, l'augmentation de diffusion subit la même courbe que
les oppositions au livre, ce qui ne m'étonne pas, et effectivement, le
ministre le confesse aussi spontanément. Mais, néanmoins,
toujours sur l'essentiel, puisqu'il semble se préoccuper de
l'accessoire, je pense que vous nous avez fait connaître un point de vue
extrêmement pertinent et surtout extrêmement
intéressant.
Soyez certains que mes collègues et moi prenons très bonne
note de vos considérations. D'ailleurs, je me chargerai personnellement
de faire le relais avec notre porte-parole pour ce qui est des questions
d'enseignement supérieur, la députée de Chicoutimi, Mme
Blackburn. Je vous remercie de nouveau, Mlle Battaglia et messieurs.
Le Président (M. Richard): Je vous remercie bien de votre
présence.
Maintenant, nous appellerons le prochain groupe, l'Union des
municipalités régionales de comté et des
municipalités locales du Québec, ce qu'on appelle l'UMRCQ,
représentée par M. Georges Filion, son vice-président, et
M. Roger Langlais, conseiller technique. Ah non!
Mme Martel (Gaétane): M. Filion est absent et c'est moi
qui le remplace.
Le Président (M. Richard): Ah bon. C'est votre droit le
plus strict. Prenez donc place, s'il vous plaît. Je n'ai rien contre M.
Filion, mais cela va sûrement faire l'affaire.
Mme Martel: Merci beaucoup.
Le Président (M. Richard): Vous vous identifiez, s'il vous
plaît et vous présentez votre collègue. Je tiens à
répéter, à vous aussi, que vous avez quinze minutes
chronométrées. Vous n'êtes pas obligés de faire
quinze minutes, évidemment, mais à
deux minutes près, je vous aviserai pour vous mentionner le
délai qu'il vous reste. Donc, quand je vous avertirai, il faudra sauter
à la conclusion pour permettre aux deux groupes d'Intervenants de
pouvoir, eux aussi, utiliser leur période pour vous questionner sur
votre document. On y va?
Mme Martel: Mon nom est Gaétane Martel. Je suis
responsable du service de recherche à l'union et mon collègue est
Me Roger Langlais qui est conseiller technique pour nous dans ce dossier.
Le Président (M. Richard): Merci, à vous la parole,
madame.
Union des municipalités
régionales
de comté et des municipalités
locales
du Québec Inc.
Mme Martel: Je vais vous faire un résumé de notre
mémoire. L'UMRCQ a déjà fait connaître son point de
vue sur la levée du moratoire dans le cadre de la consultation et de la
table de concertation Québec-municipalités. (20 h 45)
L'UMRCQ souscrit à l'objectif de lever le moratoire dans le
respect et la protection des droits des locataires en place. Cependant, il nous
semble que les modalités proposées pour atteindre les objectifs
risquent de créer un régime où, précisément,
ceux qui doivent le plus bénéficier de protection seront les plus
désavantagés.
La garantie de maintien dans tes lieux. Le locataire qui
bénéficiera de cette protection devra subir les
inévitables conflits que l'on retrouve dans les immeubles en
copropriété où cohabitent des copropriétaires et
des locataires. Relativement à l'étendue de la protection
conférée aux locataires en place, s'applique-t-elle exclusivement
au signataire du bail? Le conjoint ou le conjoint de fait ou encore toutes les
personnes occupant les lieux lors de l'introduction de la demande de
conversion, pourront-elles bénéficier de cette garantie?
La protection s'appliquera-t-elle aussi aux héritiers ou au
conjoint dont l'époux ou l'épouse décède? Les
occupants des lieux auront-ils le droit de sous-louer leur logement et de
continuer à bénéficier de la protection de la loi? La
protection s'appliquera-t-elle aussi à un occupant qui, au moment de
l'introduction de la demande de la conversion, occupait un logement è
titre de sous-locataire?
Étendre le principe de la garantie de maintien dans les lieux
à toutes les personnes l'occupant lors de l'introduction de la demande
de conversion constituerait, à notre avis, une mesure trop large.
D'autre part, il nous semble que le ministre devrait statuer sur la question du
droit de l'un des conjoints, à la suite de la rupture du mariage ou au
décès de l'autre, de bénéficier des avantages du
maintien dans les lieux.
De même, il y aurait avantage à clarifier la situation du
sous-locataire qui occupe les lieux lors de l'introduction de la demande de
conversion auprès de la régie.
De la même façon, le règlement sur la conversion
devra statuer sur le droit des locataires en place de sous-louer leur logement.
Le projet de levée du moratoire propose de consentir un traitement
particulier aux logements occupés par des locataires en ce qui a trait
aux taxes municipales que devront supporter les locataires de ces
logements.
Toute tentative de modifier le système d'évaluation et de
taxation foncière actuel risque de cornplexifier un processus
déjà suffisamment lourd pour ce qui est de l'évaluation
municipale, en plus de menacer les principes d'équité et de
parité.
Avant de tenter de modifier le régime de taxation foncière
pour la copropriété divise, il importe, dans un souci
d'équité collective, de s'assurer que les
copropriétés indivises, environ 15 000 logements au
Québec, paient leur juste part d'impôts fonciers.
Les auteurs du rapport sur la levée du moratoire proposent que la
protection du locataire soit assortie d'un droit de préemption en
fonction du locataire sur l'achat de son logement.
Les auteurs du rapport proposent qu'aucune nouvelle norme touchant la
qualité physique du logement ne soit applicable aux logements convertis,
sauf celles ayant trait à la protection contre l'incendie. En somme, on
dit que le logement, sur lequel un minimum de travaux auront été
faits, devra coûter moins cher à l'achat et que, par
conséquent, plus de locataires dont les revenus sont plus faibles
pourront se permettre d'acheter ainsi leur logement.
Mais qu'adviendra-t-il, dans un ou deux ans, lorsque des travaux
importants devront être entrepris et que des locataires-acheteurs devront
consentir à payer des sommes importantes? Ce problème pourrait
être compliqué du fait que les locataires, pour acheter, auront
dû consentir à un taux d'efforts accrus pour rembourser une
hypothèque et pour payer des taxes foncières augmentées.
L'arrivée de dépenses imprévues, dans ces conditions, ne
peut qu'occasionner une pression intolérable sur le budget du
ménage qui aura à faire le passage du statut de locataire a celui
de propriétaire.
Mais ce qui est plus fondamental dans cette approche du problème,
c'est que l'on défavorisera ainsi les locataires les plus démunis
ou ceux qui appartiennent aux groupes les plus âgés et que l'on
empêchera ces clientèles, dans les faits, d'acheter leur logement
par peur de voir mettre en péril
l'équilibre financier de leur ménage.
L'autre question fondamentale, c'est le fait qu'on ne profite pas de la
levée du moratoire pour encourager et promouvoir un vaste effort de
remise en état du parc locatif.
Une remise en état ordonnée et
accélérée du parc locatif au moyen de la levée du
moratoire ferait davantage pour réduire l'éviction des locataires
que la situation actuelle, qui conduit inévitablement à devoir
envisager la démolition de plusieurs logements devenus inhabitables au
cours des prochaines années et qui entraînera des
déplacements forcés de locataires.
La récupération par le règlement sur la conversion
des pratiques de rachat du droit d'occupation que l'on retrouve sur le
marché de la conversion et l'établissement d'un prix minimal de
rachat en fonction de la durée d'occupation antérieure du
logement par le ménage locataire s'inscrirait dans le sens du principe
général de protection du droit des locataires en place de
continuer a occuper les lieux a titre de locataire. Vous me permettez, une
seconde.
Le Président (M. Richard): II vous reste encore un peu de
temps, madame. Prenez cela "relax".
Mme Martel: Merci. Cette formule permettrait que le principal
obstacle, surtout d'ordre financier pour le locataire, soit
éliminé et lui permette d'acheter son logement s'il le
désire.
Oui plus est, ce mécanisme permettrait aux locataires de monnayer
et convertir en mise de fonds, la valeur de leur droit d'occupation en fonction
de la durée de leur occupation antérieure.
Pour le locataire qui, pour acheter, monnayera sa durée
d'occupation antérieure, le prix d'achat ne serait pas supérieur
de beaucoup à celui qu'il aurait effectivement déboursé
pour acquérir un logement non remis aux normes. Cependant, il aura
l'assurance de devenir propriétaire d'un logement dont les principales
composantes ont été remises à neuf et pourra mieux
prévoir, dans son budget de ménage, les dépenses
reliées à l'entretien pour le futur.
La transformation de la durée antérieure d'occupation en
valeur monnayable ouvre davantage de possibilités aux locataires
puisqu'ils peuvent soit acheter le logement qu'ils occupent, soit vendre leur
droit d'occupation et utiliser l'indemnité reçue pour acheter un
autre logement ou pour se reloger ailleurs dans le parc locatif.
Pour éviter que l'on ait recours à des travaux majeurs
pour évincer des locataires, le locataire évincé pour
travaux majeurs pourrait disposer du droit de réclamer le paiement de
l'indemnité pour occupation antérieure, dans le cas où le
propriétaire procéderait à la conversion sans lui avoir
permis ou offert de réintégrer son ancien logement è la
suite de travaux majeurs.
La complexité du processus suggéré par les auteurs
du rapport sur la conversion aura l'effet de réduire
l'intérêt des propriétaires qui envisageraient la
conversion de logements locatifs. On constate rapidement que les
formalités et les exigences reliées à la levée du
moratoire constituent un domaine pour les spécialistes de la conversion
et nécessiteront le recours à des conseils professionnels. La
récupération par le règlement des activités de
conversion dans le domaine de l'indivis aura l'effet de réduire le
niveau des activités dans ce domaine qui a été florissant
au cours des dernières années.
En conclusion, il nous apparaît, avant de proposer pour adoption
un projet de règlement sur la conversion en copropriété,
qu'un examen en profondeur des mécanismes proposés devrait
être entrepris avec les objectifs suivants: simplifier les
mécanismes; permettre le couplage de la remise en état des
bâtiments locatifs et de la conversion en copropriété;
articuler un mécanisme qui permette véritablement aux locataires
de choisir entre la vente de leur droit au maintien dans les lieux et
l'application è l'achat de leur logement de la valeur monétaire
de ce droit; examiner en profondeur les conséquences et les effets de
récupérer, au moyen du règlement, le contrôle des
achats du droit d'occupation sur le marché de la conversion, en
considérant particulièrement l'opportunité de lier
l'indemnité à payer au temps antérieur d'occupation des
lieux par les locataires; préciser les modalités et les
règles d'application de la garantie de maintien dans les lieux des
locataires, une fois la conversion réalisée,
particulièrement en ce qui a trait aux conjoints, aux sous-locataires,
et préciser la portée et l'étendue de ces
règles.
Dans cette démarche de reformulation des règles touchant
la levée du moratoire sur la conversion, l'UMRCQ vous offre sa
collaboration et sera heureuse d'appuyer, auprès de ses membres, toute
initiative favorisant l'accession à la propriété pour les
ménages et les occupants du parc locatif. Merci.
Le Président (M. Richard): Merci, madame, M. le ministre,
est-ce que vous avez des questions ou des commentaires a la suite du document
présenté par l'UMRCQ?
M. Bourbeau: Oui. Il me fait plaisir de saluer de nouveau nos
interlocuteurs privilégiés qu'est l'UMRCQ. Nous avions l'occasion
de les rencontrer, il y a une dizaine de jours, en d'autres lieux, pour
discuter d'autres sujets. L'UMRCQ est certainement un organisme très
représentatif
d'une large partie du Québec, puisqu'elle compte environ 1200
municipalités membres sur les quelque 1500 que compte le Québec.
Je remarque d'une façon générale que l'UMRCQ se prononce
en faveur de la levée du moratoire, ainsi qu'en faveur, bien sûr,
de la protection accrue... Pardon, M. le député de
Jonquière, est-ce que vous avez des remarques à faire à ce
stade-ci?
M. Dufour: Oui, il faut le lire comme il faut.
M. Bourbeau: Ah bon! Alors, l'UMRCQ, dis-je, se prononce en
faveur de la levée du moratoire et de la protection accrue des droits
des locataires en place. D'une façon générale, vous
suggérez des modifications à la proposition gouvernementale. Nous
avions, dans la proposition gouvernementale, préféré des
mesures qui n'inciteraient pas aux réparations, majeures ou non,
préalablement a la conversion, en pensant que, si nous voulions
favoriser l'accès à la propriété par des locataires
à revenu modeste, il n'était pas souhaitable de gonfler le prix
des appartements par des réparations préalables à la
conversion de façon que, justement, les gens à revenu modeste ou
moyen puissent se permettre financièrement l'achat d'un logement, quitte
à laisser ensuite aux locataires, après conversion, le loisir de
modifier ou d'améliorer leur logement à mesure que leurs moyens
financiers leur permettraient de le faire.
Vous semblez suivre un cheminement différent. Vous
prétendez plutôt qu'on devrait encourager les travaux avant la
restauration. Est-ce que vous pensez qu'en ce faisant, on bloquerait, si je
puis dire, le chemin ou la voie à un nombre important de
Québécois qui ne pourraient pas, à cause du prix plus
important qui serait certainement demandé par les vendeurs,
accéder à la propriété?
M. Langlais (Roger): Si vous permettez, M. le ministre, je vais
tenter de répondre à cette question. Dans l'achat d'une
propriété immobilière, il y a des moments importants. Le
moment le plus important est celui où l'on réalise la
première acquisition. C'est à ce moment que l'on négocie
le financement hypothécaire. Les créanciers hypothécaires
acceptent de prêter sur des immeubles qui ont une valeur d'emprunt
reconnue. Si on a affaire à un logement qui a besoin de
réparations majeures, les prêteurs vont être beaucoup plus
réticents à offrir du financement.
On s'est dit, finalement, que ce qui est important, c'est la
mensualité de l'emprunteur. Il s'agit de savoir s'il sera capable ou non
de payer cette mensualité. La façon dont le projet
présente le système actuellement, c'est que l'achat est
réalisé et qu'ensuite, comme vous le dites, le locataire aurait
le loisir d'apporter des modifications ou des ajouts. Dans certains cas, je
pense qu'il n'en aura pas le loisir. Il sera obligé de le faire. Si la
toiture coule, si la plomberie casse, si le système de chauffage doit
être remplacé, ce sont des obligations immédiates,
auxquelles il doit répondre. Souventefois, il n'a pas les moyens
financiers de réaliser ces travaux. Si le logement était remis en
état au moment où le locataire y entre comme propriétaire,
il aurait la possibilité d'éviter ces réparations
majeures...
M. Bourbeau: Mais le rapport de l'expert le lui aurait dit...
M. Langlais: ...d'avoir une relative sécurité pour
s'adapter à son nouveau mode de vie, qui est celui d'un
propriétaire, de s'adapter aussi à des paiements accrus du fait
de son achat. Si, de plus, il y avait des frais additionnels imprévus,
nous pensons que cela pourrait créer des problèmes majeurs.
M. Bourbeau: Évidemment, il y a deux cas qui peuvent se
produire. Ou bien on parle de réparations majeures, ou on parle de
réparations mineures ou d'entretien normal. Si ce sont des
réparations mineures ou d'entretien normal, vraisemblablement, cela
n'affecterait pas la valeur d'emprunt, si je puis dire, du logement. Cela
n'empêcherait pas un acheteur de trouver un prêt
hypothécaire. D'autre part, il est possible, par exempte, qu'un jeune
couple, qui achète un logement, n'ait pas les moyens financiers la
première ou la deuxième année de réparer ou de
faire des améliorations importantes, mais il est possible
qu'après un certain nombre d'années, il ait amassé un
capital lui permettant d'améliorer la qualité de son logement.
(21 heures)
Si on parle de réparations majeures, le rapport d'expert, qui
sera obligatoire avant l'achat devra indiquer quelles réparations
majeures devront être faites au cours des cinq premières
années. À ce moment, les acheteurs achèteront en
connaissance de cause. Enfin," - il nous apparaissait qu'ils
achèteraient en connaissance de cause ayant en main un rapport d'expert
qui leur donnerait un aperçu des réparations devant être
effectuées au cours des cinq prochaines années, et des
coûts inhérents à ces réparations.
Dans ces conditions, ne pensez-vous pas qu'un acheteur pourrait quand
même avoir une bonne idée de ce qui l'attend et se préparer
en conséquence?
M. Langlais: II va savoir à quoi s'attendre, mais il ne
saura pas passer à travers sur le plan financier. C'est ça qui
est le problème. C'est qu'une fois que vous avez placé une
première hypothèque sur un
immeuble, comment en placer une deuxième pour faire des
réparations. C'est très complexe et très compliqué.
Vous créez toutes sortes de problèmes.
M. Bourbeau: D'abord, les hypothèques de cinq ans sont de
plus en plus rares. Deuxièmement, il arrive très souvent
qu'à l'occasion d'un refinancement le propriétaire
présente à son prêteur la garantie et une offre de
soumission d'un entrepreneur pour faire des réparations pour 5000 $, par
exemple, ou 10 000 $ et obtient l'hypothèque sur la valeur
améliorée du logement.
M. Langlais: II faut le faire au départ, justement. C'est
cela le point qu'on tente de démontrer. Si ça coûte 5000 $
ou 10 000 $ pour le restaurer ce logement, mettons les, ça va
coûter 80 $ ou 100 $ par mois de plus.
M. Bourbeau: II n'y a rien qui dit qu'au moment de l'achat, le
locataire ait les moyens financiers de payer une hypothèque plus
élevée. Mais, après deux ou trois années, surtout
si on parle de couples relativement jeunes, l'enquête de la Régie
du logement indique que l'intérêt des locataires è
Montréal, dans une proportion importante et surtout chez des jeunes
couples, au bout de deux ou trois ans, les moyens financiers
s'améliorant, il est possible qu'on ait la possibilité de payer
une hypothèque un peu plus élevée, ce dont on n'avait pas
les moyens quelques années auparavant... Enfin, c'est une façon
d'en discuter.
Vous parlez, dans votre mémoire, au sujet des réparations
majeures, des dépenses imprévues qui pourraient survenir
après. Je relis mes notes. On en a parlé tout à l'heure.
Je vous ai parlé du rapport d'expert. Ce matin, la ville de
Montréal, dans son mémoire a fait allusion, a proposé une
formule. Elle proposait que les propriétaires, qui voudraient convertir,
s'adressent en premier lieu à la municipalité pour obtenir ce que
la ville appelle un certificat de convertibilité. J'aimerais savoir ce
que vous en pensez. Évidemment, c'est un peu tôt pour
réagir, mais que pensez-vous de la possibilité que les
municipalités en règle générale soient
associées au processus de conversion?
M. Langlais: Je pense que l'idée est intéressante,
M. le ministre. Sans vouloir engager l'UMRCQ, j'imagine qu'il va y avoir des
frais associés a cela, et la ville va devoir s'équiper d'experts
pour évaluer la convertibilité ou la non-convertibilité de
certains logements. Elle va certainement chercher quelqu'un à qui
présenter la note pour ces services. Cela dit, je pense que la ville
pourrait intervenir et cela est dans le cadre d'une visée plus large
où on chercherait à remettre en état le parc locatif ou le
parc d'habitation en général. Dans ce sens, je pense que les
municipalités ont intérêt et à participer a ce
processus.
M. Bourbeau: Évidemment, la on spécule puisque
c'est un concept nouveau qui a été avancé par la ville.
Mais, par exemple, supposons qu'une municipalité décide de
s'impliquer et pose comme condition à son approbation que justement des
réparations soient faites, cela pourrait être une hypothèse
qu'une municipalité dans un règlement municipal accepte de
filtrer, si je peux dire, les demandes ou d'émettre des certificats de
convertibilité et qu'elle pose comme condition une remise en état
des logements, par exemple.
Mme Martel: En fait, ce qu'on disait dans notre mémoire
finalement, c'est que comme condition première, c'est de remettre en
état le logement et après permettre la conversion, le tout
chapeauté par la municipalité. C'est ce que vous voulez dire, si
je comprends bien.
M. Bourbeau: Cela pourrait être une possibilité,
oui. Ou encore, est-ce que par hasard, vous nous proposeriez de confier
à la MRC dans les régions du Québec le soin de
gérer les certificats de convertibilité?
Mme Martel: Aux MRC? Mon président n'est pas ici.
M, Bourbeau: Bon, alors je pense que je vais retirer ma question. On
pourrait peut-être... Mais étant donné qu'on a devant nous
des représentants des MRC, évidemment, je pose une question
hypothétique. Je tente de voir quelles sont les réactions de
l'UMRCQ à la proposition de la ville de Montréal.
Mme Martel: La réponse est assez générale.
Je pense que vous connaissez le point de vue de l'UMRCQ sur le rôle des
futures MRC. Je pense que cela vous amène à tirer des
conclusions.
M. Bourbeau: Etant donné les conclusions de nos assises il
y a dix jours, il faudrait bien que toutes les municipalités locales
soient consentantes pour transférer è la MRC cette
responsabilité.
Une voix: ...
M. Bourbeau: Oui, M. le Président, merci de votre
préavis.
Vous parlez, dans votre mémoire, de la possibilité de
monnayer le droit au maintien dans les lieux. À votre avis, le profit de
la vente du droit au maintien dans les lieux serait-il suffisant pour permettre
aux
locataires de se relocaliser sans problème sur le marché
du logement?
M. Langlais: Ce ne serait peut-être pas suffisant, mais ce
serait mieux que rien du tout. Ce qu'on vise dans cela, c'est de dire: En
donnant aux locataires le droit au maintien dans les lieux, on vient de
créer une valeur pour ce locataire, on vient de créer quelque
chose qui est monnayable. On dit qu'il faudrait que ce locataire puisse
éventuellement monnayer cela dans des conditions où il puisse en
bénéficier et qu'il ne se fasse pas avoir au change par des
convertisseurs un peu trop entreprenants, comme je l'ai vu dans le
passé, dans le cas de l'indivis particulièrement. Des gens sont
entrés dans un appartement, la veille de Noël, à 9 heures le
matin et en sont sortis à 11 heures le soir. Ils les avaient tous
attachés et cela avait coûté 900 $ par tête. Cela
s'est fait, M. le ministre, et cela continue de se faire, surtout quand on a
affaire a des ménages économiquement faibles. Ils sont beaucoup
plus sensibles à la présentation de chèques de 1000 $, de
1500 $ et de 2000 $. On dit: Le ministre devrait prescrire le montant minimal
en dessous duquel on ne peut pas aller. Ainsi, cette valeur pourrait être
transférée au locataire. Il s'agira d'établir ce chiffre
à un montant qui puisse constituer un avoir substantiel pour ce
locataire qui lui permette de faire sa mise de fonds, soit sur ce logement,
soit sur un autre logement dans un autre immeuble converti, soit sur un
bungalow en banlieue. Pour répondre à votre question, ce serait
certainement un bon bout de chemin vers une mise de fonds complète.
M. Bourbeau: Vous dites que le règlement pourrait
prescrire le montant minimal. Évidemment, cela n'exclurait pas, dans
votre esprit, que le locataire puisse demander plus que le minimum requis.
M. Langlais: En dessous duquel on ne peut pas aller.
M. Bourbeau: Qu'est-ce qui pourrait nous assurer que le
propriétaire ne présenterait pas quand même un
chèque inférieur au minimum et que le locataire ne serait pas
quand même tenté d'accepter un chèque inférieur, par
exemple? Quelle façon aurions-nous de nous garantir contre des abus?
M. Langlais: II y a peut-être des mécanismes comme
celui de la Régie du logement par lesquels le locataire pourrait tout
simplement dire: Écoutez, on m'a offert un chèque de tant, ce qui
est en dessous du montant minimum requis, je veux m'en plaindre. Cela pourrait
être une chose qui est contre l'ordre public - si l'on veut - qu'on
pourrait toujours faire rescinder et contre laquelle on pourrait toujours se
plaindre.
M. Bourbeau: Autrement dit, vous nous dites: Si,
subséquemment, le locataire a été payé moins que le
minimum requis, il pourrait toujours revenir et exiger le vrai montant, un peu
comme le locataire qui, actuellement, signe un bail à un loyer
supérieur et qui se rend ensuite compte que le loyer est
inférieur; il peut revenir et faire diminuer le montant de son bail.
M. Langlais: C'est analogue, oui.
M. Bourbeau: Au fond, ce qui est proposé actuellement,
c'est un droit illimité au maintien dans les lieux. Est-ce que cette
valeur de monnaie dont vous parlez ne pourrait pas être utilisée
par le locataire pour faire baisser le prix d'achat du logement qu'il occupe
lui-même?
M. Langlais: À titre de locataire ou d'acheteur?
M. Bourbeau: À titre d'acheteur. Par exemple...
M. Langlais: C'est précisément ce qu'on
suggère dans notre mémoire. On dit que cela peut servir à
trois choses: soit à acheter le logement qu'on occupe; soit à
acheter un logement ailleurs que dans l'immeuble et partir avec son
indemnité; cela peut aussi servir de pénalité pour le
propriétaire qui évince des locataires pour travaux majeurs. Si
le locataire est évincé pour des travaux majeurs, cela donne
ouverture à son droit de réclamer la pénalité si le
propriétaire ne le réintègre pas dans son logement
à la fin des travaux ou - j'irais même plus loin que cela - s'il
ne convient de modalités acceptables au locataire pour
réintégrer son logement, il va devoir payer cette
indemnité qui, dans ce cas, pourrait même être plus forte.
On crée donc une valeur et on la transfère au locataire.
M. Bourbeau: Deux commentaires seulement, puisque mon temps est
terminé. Dans certaines entrevues que j'ai données, j'ai
parlé de ce droit au maintien dans les lieux et du droit de
préemption comme étant un "bargaining power", si vous voulez, que
nous offrons au locataire pour lui permettre de négocier avec le
propriétaire un prix à rabais, si on peut dire, de son logement
ou, enfin, lui permettre d'avoir les moyens d'acheter un autre logement.
Je pense que, dans ce sens-là, votre proposition rejoint à
peu près ce que j'ai dit à plusieurs reprises. C'est que dans la
proposition gouvernementale, il y avait un genre de "bargaining power" pour
le
locataire; c'était pour lui permettre de mieux affronter, si je
peux m'exprîmer ainsi, un propriétaire qui serait trop exigeant
sur le prix de vente de son logement.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre.
Maintenant, je cède la parole è M. le député de
Shefford.
M. Paré: Merci, M. le Président. Très
rapidement, parce que mon collègue responsable des affaires municipales
aimerait vous poser quelques questions. Je vous remercie aussi pour la
présentation de votre mémoire; c'est vrai que vous
représentez beaucoup de gens au Québec et c'est important qu'on
ait votre point de vue.
J'aimerais juste revenir sur le dernier point qui a été
discuté, sur lequel vous venez d'échanger avec M. le ministre des
Affaires municipales. C'est sur le pouvoir de monnayer justement ce droit de
maintien dans les lieux. Je dois vous dire qu'il en a été
passablement question cet après-midi, justement de pouvoir vendre ce
droit qui est acquis. Je dois vous dire que le président de la
Commission des droits de la personne, qui était ici, a
déclaré cette mesure tout à fait irrecevable et
inacceptable. Les groupes, qui sont venus dénoncer le
harcèlement, considèrent que ce monnayage est une des principales
causes de harcèlement, que c'est injustifiable et inacceptable.
Je dois vous le dire, je me rends compte que vous n'étiez pas
là cet après-midi, mais c'est bon de le savoir parce que les
groupes le dénoncent. Effectivement, on a eu le témoignage de
gens qui ont vécu du harcèlement. C'est une cause de plus de
harcèlement qu'on amène parce que si l'on permet à tous
les logements d'être à vendre du jour au lendemain et que ceux qui
veulent les acheter veulent y demeurer immédiatement ou des gens qui
veulent faire de l'argent en location, ils vont vouloir être capables de
louer à qui ils veulent et au prix qu'ils veulent. Et payer un certain
montant pour libérer le logement, c'est une forme de harcèlement
puisqu'on va vouloir acheter un droit qui est acquis, en vertu de la loi, par
quelqu'un.
Alors, on peut en discuter beaucoup, sauf qu'il va certainement y avoir
beaucoup d'autres intervenants là-dessus, beaucoup de contestations, je
dois vous le dire. J'imagine que c'est venu par les associations ds locataires,
par des groupes de résidents et cela va certainement venir par les
groupes de l'âge d'or et par les personnes âgées, demain. On
pourra en discuter. On a votre version. Vous voulez qu'on en tienne compte
comme d'une mesure positive. Je dois vous dire et il est bon de savoir, en ce
qui concerne la Commission des droits de la personne, que c'est vu non
seulement comme une mesure négative mais inacceptable.
J'ai une question è poser avant de laisser la parole...
M. Bourbeau: ...des nuances.
M. Paré: On aura des nuances, on aura certainement la
chance d'en discuter très longtemps...
M. Bourbeau: Vous affirmez des choses, il y a des nuances.
M. Paré: ...au cours des journées qu'il nous reste,
mais les questions étaient directes cet après-midi.
J'ai une seule question. Vous dites, en commençant votre
mémoire, oui à la levée du moratoire. Tout au long de
votre exposé, vous demandez qu'on rajoute des choses, qu'on simplifie
les mécanismes, que la levée du moratoire soit accompagnée
par une remise en état du stock locatif, de logements, ce qui n'est pas
abordé dans le document, qu'on aurait besoin - cela finit comme cela -
d'un examen en profondeur des mécanismes et qu'il y a des
inquiétudes face à la cohabitation de copropriétaires ou
de locataires, de locataires au premier niveau et, au deuxième niveau;
vous avez aussi des inquiétudes là-dessus. Donc, vous dites oui,
mais vous avez une foule d'inquiétudes. En fonction de quoi dites-vous
oui? Qu'est-ce qui vous porte à dire, tout d'abord, oui? Quels sont les
points favorables qui justifient que malgré ce nombre
élevé de craintes» d'inquiétudes et même de
points négatifs, vous favorisez la levée du moratoire?
M. Langlais: Je pense que les commentaires sont de deux ordres
là-dessus. Je pense que, d'abord, la copropriété, c'est
quelque chose de relativement récent au Québec; cela date de
1969. C'est un phénomène qui est installé un peu partout
dans toutes les sociétés. C'est appelé à
progresser, à s'établir et à se consolider. Alors, on
serait un petit peu spéciaux que de ne pas aller dans cette voie. Il
semble que c'est ce vers quoi on se dirige. C'est le premier commentaire. La
conversion n'est que la poursuite de la tendance à la
copropriété ou au fractionnement de la propriété en
unités divises, ce qui est amorcé et qui se continue. (21 h
15)
Le deuxième commentaire, c'est que le parc locatif... Il y a des
raisons historiques è la constitution du parc locatif dans les grands
centres urbains, comme Montréal, Québec, Sherbrooke, Hull, etc.
Est-ce que la société d'aujourd'hui est encore une
société qui veut être locataire, qui continue è
être locataire? J'ai l'impression qu'un mouvement vers l'accès
à la propriété s'est développé et prend de
l'ampleur depuis plusieurs années. Pourquoi les gens qui habitent dans
les
milieux urbains ne pourraient-ils pas profiter de ce
mouvement-là? On se dit: Plus ils pourront en profiter tôt, mieux
ils pourront faire une meilleure transaction, si on veut. Plus on retarde, plus
les gens voient venir le phénomène et ils se positionnent en
conséquence et là, l'inflation s'installe peu à peu dans
ce domaine-là. Si on faisait la promotion, et qu'on libéralisait
en permettant la conversion en copropriété, cela permettrait
à des groupes de locataires d'accéder à la
propriété et de continuer à résider en milieu
urbain. Ce sont essentiellement les deux ordres de raisons que je vois.
Le Président (M. Richard): Je cède maintenant la
parole à M. le député de Jonquière.
M. Dufour: Bonjour. Je vous félicite du travail que vous
avez fait pour venir présenter ce mémoire. J'ai l'impression que
l'Union des municipalités régionales de comté et des
municipalités locales aura de la misère à suivre le
ministre quelque peu, vu qu'on a eu des problèmes avec la loi 43 parce
qu'il y a eu ni oui ni non. Je ne sais pas si c'était un oui, mais il y
a eu des problèmes quelque part. Là je lis votre mémoire
et, pour moi, c'est un oui très mitigé. D'abord, je pense que
dans le moratoire vous y allez très délicatement, et ce que vous
touchez surtout du doigt, c'est que les facilités d'accès
à la propriété devraient être augmentées,
parce que cela ne donne pas plus l'accès à la
propriété. Cela ne met pas plus d'argent dans les poches du
contribuable ou du locataire parce qu'il y a une levée du moratoire. Je
pense que de ce côté-là, il faut être clair, cela ne
donne pas plus d'argent.
Deuxièmement, vous dites: On devrait améliorer le parc
locatif. Tout le monde est d'accord. Vous comprenez qu'actuellement, depuis un
an et demi, on n'a pas amélioré le parc locatif à mes
yeux, parce que ce que l'on a donné de possibilités à des
gens, avec très peu de moyens financiers, d'améliorer des
logements avec des réparations majeures, quand on sait que ces
gens-là sont sous le seuil de la pauvreté et que s'ils le font,
ils se priveront de quelque chose, la preuve en est que des gens fournissent
pour leur logement, actuellement, plus de 50 % de leurs revenus et ce ne sont
pas des cas d'exception. Cela semble être des cas assez répandus
au Québec. Donc, à ce moment-là on n'a pas à
s'interroger longuement. Vous avez une expertise comme représentants des
municipalités, mais votre expertise est beaucoup plus probante à
mes yeux dans les problèmes vécus sur le plancher. Actuellement,
ce que vous dites c'est qu'il n'y a pas de politique d'habitation au
Québec. C'est clair, il n'y a pas de politique d'habitation. Vous
tentez... en disant: II devrait y avoir de l'accès à la
propriété, mais il n'y a pas de programme de
suggéré. Vous dites: On devrait améliorer le parc locatif.
Ce n'est pas avec une mesure, parce qu'on a toujours le tiroir miracle, le
guichet unique qui fait qu'on a juste à tirer sur un piton et tout le
monde va régler son problème. Je ne pense pas que ce soit comme
cela que l'on doive voir cela. Dans le logement, il y a toutes sortes de
possibilités, il y a une panoplie que l'on peut appeler des
coopératives, que l'on peut appeler des condominiums. Cela peut
être une partie de solution du problème. Mais, il y a beaucoup
d'autres choses et d'autres événements qui font qu'historiquement
les gens au Québec pourraient se loger d'une façon ou de l'autre,
selon leurs propres choix.
Donc, quand on s'appuie sur le mémoire de Montréal, comme
le ministre a dit tout à l'heure, il semble dire que Montréal
s'est prononcé pour la levée du moratoire, ce que je n'ai pas
compris. Probablement qu'on n'a pas suivi les mêmes cours et qu'on n'a
pas les mêmes cours de lecture. Moi, j'ai compris qu'ils disaient non,
que Montréal disait: La levée du moratoire, au lieu de la faire
par un décret, changez cela et mettez cela dans la loi. Vous
procéderez par des cas d'exception.
Le ministre depuis ce matin nous dit: Montréal a dit oui. Le
ministre se cherche des alliés depuis ce matin et quand on regarde tout
ce qui nous a été présenté depuis ce matin, on se
rend compte qu'il n'y a pas beaucoup d'alliés, parce qu'il y a tellement
de restrictions vis-à-vis de cette décision que cela amène
quelques tollés de protestations. Comme les mesures proposées
sont incomplètes, personne ne veut s'embarquer la-dedans. Je comprends
que quelqu'un ne veuille pas faire partie d'un voyage s'il ne sait pas s'il
aura son billet de retour. Là, le billet c'est le billet de dehors,
c'est la porte qu'il lui offre.
M. le Président, j'ai le droit de parole, j'ai le droit de poser
des questions ou de faire des constatations.
Le Président (M. Richard): Vous avez la parole, M. le
député de Jonquière.
M. Dufour: C'est la première fois. Le ministre a beau ne
pas aimer cela, cela ne me dérange pas. Il faut lui dire des
vérités. De temps en temps il faut lui en dire. Il ne les
comprend pas, mais on lui en dit quand même. Je vous dis qu'actuellement
la réponse à cela, à la levée du moratoire, c'est
que depuis ce matin les gens viennent nous dire: Non à la levée
du moratoire... Vous ne nous ouvrez pas de porte; vous nous ouvrez seulement la
porte pour qu'on prenne le chemin de la rue. C'est cela que les gens viennent
nous dire depuis ce matin. Je pense que, vis-à-vis de l'Union des
municipalités
régionales de comté et les autorités locales, vous
avez des mesures tout de même intéressantes. Vous commencez
à inventorier un certain nombre d'actions qui pourraient faciliter
l'accès à la propriété par d'autres mesures qui ne
sont pas nécessairement la levée du moratoire. Cela pourrait
être des mesures fiscales, cela pourrait être des crédits
d'impôt, cela pourrait être aussi une autre mesure. On ne
soulignera pas au ministre comment il pourrait faire; on espère qu'il le
sait. Il ne les a pas sorties nulle part, ces mesures, il les a laissées
cachées. Lorsque mon collègue a parlé, c'est
peut-être ce point-là qui m'a frappé le plus dans votre
mémoire, c'est le droit de location de quelqu'un, la durée d'une
propriété... le maintien dans la propriété. Le
groupe des droits de la personne est venu nous dire que c'est un droit qui est
presque inaliénable pour eux. Ce serait difficilement acceptable et, en
fait, cela cause du harcèlement. On a eu aussi des groupes
défavorisés qui sont venus nous dire la même chose, dans
leurs mots. Il y a des gens qui ont été victimes de
harcèlement. Tout cela fait que les gens, même s'ils ont un peu
d'argent sur le coup, cela ne les met pas dans la même situation. Des
fois, l'appât du gain fait qu'on voit tout en rose, qu'on oublie le
coût du déménagement, la réinstallation, le
changement de quartier. Il y a des problèmes sociaux trop grands. Je
comprends que dans le moratoire on dise qu'on va laisser ce droit, il faudrait
tout de même qu'on explique quelque part ce que c'est. Vous,
vis-à-vis de ce que nous on prétend, les arguments qui ont
été apportés, est-ce que vous avez l'impression que ce que
vous avancez doit être maintenu ou si cela mérite plus de
recherche de votre part ou de notre part?
Une voix: De la part du ministre surtout.
M. Langlais: Vous voulez que je réponde?
M. Dufour: Moi, je n'essaierai pas de vous faire dite... Si vous
me dites...
M. Bourbeau: On avait une question. Ha! Ha!
M. Dufour: Je vais essayer de vous dire... Non, j'ai
regardé ce que le ministre...
Je peux vous dire que le ministre est dangereux.
M. Bourbeau: On a passé proche d'avoir une question.
M. Dufour: Je veux dire comment le ministre est dangereux. Il a
essayé de vous faire répondre a la place des élus. Vous
n'êtes pas des élus que je sache. Je connais Me Gaétane
Martel depuis de nombreuses années. Elle n'est pas éiue, elle a
été sage, elle n'a pas répondu. Vous non plus, je ne vous
reconnais pas comme un élu. Le ministre a essayé de vous faire
vous prononcer au nom de l'Union des municipalités régionales de
comté. Avez-vous déjà vu cela un ministre qui essaie de
vous embarrasser? Je vais vous demander de répondre dans la mesure de ce
que vous savez, à l'intérieur de ce que vous nous avez
présenté.
M. Bourbeau: Vous ne posez pas de question.
M. Dufour: M. le ministre, je vous ai laissé parler toute
la journée. On vous subit suffisamment, vous pouvez nous laisser la
paix. Qu'il nous laisse la paix, un peu.
M. Langlais: Me permettriez-vous de faire un commentaire sur
l'histoire du harcèlement? Je pense que, précisément, ce
qu'on propose c'est d'établir un prix minimum pour partir la
négociation pour ceux qui souhaitent, qui acceptent et qui veulent
vendre leurs droits. Ce qui se passe actuellement, dans le contexte
d'aujourd'hui, c'est qu'il n'y a pas de prix minimum. N'importe qui, qui entre
et offre 500 $ à un locataire dans le besoin, risque d'avoir une
signature au bas de la feuille. On va le protéger ce locataire en
disant: Tu n'as pas le droit de vendre en bas de 5000 $, 6000 $ ou 10 000 $, un
chiffre qu'on déterminera. Cela va peut-être limiter le
harcèlement ou ils vont les harceler pour leur en donner plus;
là, c'est une autre paire de manches. C'était juste pour
rétablir... Dans ce cadre, je ne sais pas si la Commission des droits de
la personne s'est prononcée sur cette question
précisément.
M. Dufour: Cela pourrait être un meilleur encadrement qui
permette de mieux déceler malgré que ce ne soit pas facile.
Le Président (M. Richard): Je tiens à vous
mentionner qu'il reste une minute et une fraction...
Une voix: II reste une petite minute.
Une voix: De toute façon, le ministre a
dépassé son temps.
Le Président (M. Richard): Vous aviez un autre
commentaire, M. le député de Jonquière?
M. Dufour: Dans les programmes qui ont été
annoncés depuis un an avec le nouveau gouvernement ancien, est-ce
que
vous sentez chez vos membres une amélioration du parc de
logements, actuellement au Québec... Cela peut être des logements
de propriétaires comme de locataires. Est-ce que vous sentez cela de la
part de vos membres? Est-ce que vous sentez des difficultés avec le
programme PARCQ, actuellement? Vous avez parlé d'améliorer le
locatif, le logement. Avec ce programme, est-ce que vous sentez... Est-ce que
vous pouvez répondre là-dessus?
Mme Martel: Je peux vous répondre pour ce que vous m'avez
demandé sur le programme PARCQ. Je peux vous dire que nos membres nous
avaient fait part de certains commentaires sur l'administration de ce
programme, entre autres les critères d'admission et le rôle des
MRC, relativement au programme. À la suite d'une rencontre entre nos
représentants et ceux de la Société d'habitation du
Québec, des améliorations ont été apportées
et ont satisfait nos représentants élus.
Pour ce qui est de toute la question du parc locatif je pourrais laisser
mon collègue répondre. Il est spécialisé
là-dedans.
M. Langlais: Je ne suis pas un élu.
M. Dufour: Constatation. Vous êtes libre de répondre
ou pas.
M. Boulerice: Chanceux, va!
M. Langlais Cela dit, l'amélioration du parc locatif,
c'est quelque chose de difficilement mesurable. C'est mesurable sur une longue
période et c'est aussi une tâche gigantesque quand on regarde
l'état du parc immobilier au Québec qui a besoin d'infusions
massives, de transfusions massives pour être remis en bon état,
particulièrement dans des milieux comme Montréal et
Québec. C'est extrêmement difficile de mesurer
l'amé-lioration de ce parc-là avant d'y avoir injecté des
millions et des millions. À ce titre-là, je pense qu'il n'y a pas
eu récemment d'injections suffisantes pour qu'on puisse mesurer le
progrès.
Le Président (M. Richard): Le temps est donc
écoulé. Il vous a été emprunté par un
non-élu.
M. le ministre, vous avez un commentaire pour terminer?
M. Bourbeau: Oui, M. le Président, nous soulignons
l'incohérence du député de Jcnquière qui nous
reproche de poser des questions à des non-élus, alors que ce sont
les seuls qui sont devant nous, et qu'il se permet de faire exactement la
même chose en demandant des commentaires sur un programme d'habitation
qui n'a rien à voir avec la levée du moratoire. Également,
nous soulignons que le ministre n'a pas besoin de solliciter des appuis
puisque, seulement aujourd'hui, nous avions l'APCHQ pour appuyer notre
position, la Commission des droits de la personne, l'UMRCQ maintenant, et nous
aurons tantôt l'Association des consommateurs du Canada, bref, autant
d'organismes qui sont très représentatifs et qui appuient d'une
façon générale la proposition gouvernementale. Je me
permets de remercier nos gens de l'UMRCQ pour une contribution substantielle,
tout en notant qu'il s'agit là d'un organisme qui ne représente
pas un groupuscule ou une conciergerie donnée mais 1200 des 1500
municipalités du Québec, donc la très grande partie, 80 %
des municipalités du Québec. C'est donc un témoignage
important que nous accueillons comme tel. Merci.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre.
M. le député de Shefford.
M. Paré: Merci, M. le Président. Je veux vous
remercier aussi. C'est un sujet important et je dois vous dire que tout le
monde, de façon unanime, est d'accord avec l'accès à la
propriété. On reconnaît même que la
copropriété est une des bonnes façons. D'ailleurs on l'a
dit ce matin à l'ouverture. Dans le logement neuf, au début de
l'année, 24 % des mises en chantier étaient en
copropriété. Donc, nous sommes d'accord. Là où il
faut maintenant s'entendre entre nous, c'est à savoir si, en le faisant
sur le dos des plus démunis, en le faisant sur le dos des locataires
actuels, on a la bonne voie. Je dois vous dire, contrairement au ministre qui
est en train de nous faire accroire que le cheval blanc de Napoléon est
noir, qu'il n'a pas eu autant d'appuis qu'il semble le dire parce que... Il
semble dire que tous les autres groupes n'étaient pas importants. Je
trouve que tous les groupes sont importants, ceux qui représentent les
étudiants de McGill ce sont des dizaines de milliers de jeunes et tous
les groupes de locataires et les autres qui sont venus, tous les groupes sont
importants. À Montréal, les groupes de locataires
représentent 80 % de la population et, au-delà de la
représentativité des groupes, aucun groupe n'est venu dire: C'est
une bonne façon, allez-y, on adhère à ça. Ils sont
tous venus nous dire, certains carrément, non, et d'autres: C'est un
danger. D'autres: Oui, mais à certaines conditions qui viennent modifier
largement la proposition, à la condition qu'il y ait
énormément de choses qui soient corrigées, changées
ou modifiées.
Je ne veux pas peser maintenant, parce qu'on commence. On va tenir
compte de votre mémoire comme de tous les autres mémoires et on
vous remercie d'être venus ce soir. Je vous répète
simplement en
terminant que nous sommes aussi pour l'accès à la
propriété mais nous voudrions bien que le fait de le permettre
à plus de gens ne vienne pas pénaliser d'autres personnes dans la
société. (21 h 30)
Le Président (M. Richard): Merci, M, le
député de Shefford. Madame, je tiens à vous mentionner que
M. Filion était très bien représenté par vous.
Merci beaucoup,
J'inviterais l'autre groupe, l'Association des consommateurs du Canada
(section Québec), à prendre place, s'il vous plaît, pour la
présentation de son mémoire.
Une voix: C'est la Commission des services juridiques, M. le
Président.
Le Président (M. Richard): Je l'ai passée? Ah! je
m'excuse. Je ne voulais pas énerver qui que ce soit. On "rewind" un peu.
La Commission des services juridiques représentée par Me Georges
Massol. Il y a encore une erreur là? Il y a deux noms. Est-ce que vous
êtes vraiment ceux qui représentez la Commission des services
juridiques?
Une voix: Ceux-là, oui.
Le Président (M. Richard): Ah bon! Je vous
félicite. S'il vous plaît, vous vous identifiez. Dans un premier
temps, vous présentez vos collègues et je vous le
répète aussi - je pense que vous avez compris tout à
l'heure, vous étiez là - vous avez quinze minutes pour
présenter votre mémoire et par la suite, les gens vous
interrogeront. C'est à vous.
Commission des services juridiques
M. Lafontaine (Yves): Merci, M. le Président. Nous
remercions la commission de nous permettre de nous faire entendre. Mon nom est
Yves Lafontaine, Je suis président de la Commission des services
juridiques. À ma droite, j'ai Me Georges Massol du service de recherche
et, à ma gauche, Me Pierre-Yves Bourdeau, du même service de
recherche. Le mémoire a été conçu par des avocats
de différentes régions du réseau de t'aide juridique et il
est endossé par la Commission des services juridiques. Je vais demander
à Me Massol de faire la présentation du mémoire et les
deux pourront répondre à vos questions par la suite. Allez
Georgesl
M. Massol (Georges): Bonsoir. Vu que le temps presse un peu, nous
allons passer immédiatement aux deux points qui ont attiré notre
attention dans le document présenté par le ministre.
Les deux principaux objectifs visés par la réforme:
d'abord, favoriser l'accès à la propriété -
évidemment, je répète des choses que vous savez - et
deuxièmement, protéger le locataire en place. Nous croyons que
ces deux objectifs ne sont pas nécessairement compatibles. Cela peut
être très incompatible, on le verra dans les commentaires qui
suivront.
Nous allons commencer avec le deuxième objectif, soit la
protection des locataires en place. On invoque d'abord dans le document que le
moratoire présentement est inefficace et fait l'objet de contournements
divers et que certains locateurs ont trouvé la façon de
contourner ce moratoire. C'est la raison fondamentale de l'intention de lever
le moratoire. Nous croyons que ce n'est pas parce que quelque chose fait
l'objet d'un contournement qu'on doive nécessairement l'adopter ou
encore le valider. Au contraire, il faut renforcer les mesures pour que le
contournement cesse.
Je vais prendre l'exemple d'un arrêt au coin d'une rue qui ne
serait pas respecté par un ensemble d'automobilistes, Est-ce qu'on va
enlever l'arrêt parce qu'il n'est pas respecté ou si on va
plutôt mettre des policiers pour le faire respecter? Va-t-on prendre des
mesures nécessaires afin que cet arrêt soit respecté? Je
pense qu'ici, le point fondamental avec lequel on est d'accord dans le
document, c'est celui qui dit qu'il y a un contournement des règles
prévues en matière de logement, en matière de reprise de
possession et en matière de réparations majeures. Si l'intention
du gouvernement est de protéger le locataire convenablement, comme c'est
l'un des objectifs principaux, je ne pense pas que l'on doive valider une
pratique dommageable. Il faut plutôt renforcer la protection des
locataires en réglementant davantage le cas des réparations
majeures et des prises de possession.
Le projet comme tel nous semble être une pièce du
casse-tête. C'est une pièce importante. Cela peut être une
solution. Malheureusement, on doit avoir à notre disposition les autres
composantes du casse-tête. Actuellement, on étudie une
pièce seulement du casse-tête. On n'est pas en mesure de voir si
l'ensemble des mesures protectrices s'avéreront efficaces.
L'adoption de ce document ne résout qu'une facette du
problème, soit l'accès à la propriété. Mais
on ne dit pas que la protection des locataires en sera automatiquement
assurée. Nous croyons que le gouvernement devrait plutôt consacrer
ses énergies à adopter une législation globale en
matière de logement, particulièrement pour réparer je ne
dirais pas les erreurs mais les oublis du passé qui ont mené
à une certaine détérioration en matière de
logement, en matière de reprise de possession et en matière de
réparations majeures. Le document énonce et reconnaît qu'il
y a des
contournements. Je crois qu'il faut d'abord corriger ces errements et,
par la suite, adopter une politique globale pour y inclure une levée de
moratoire, s'il y a lieu. Dans le contexte actuel, nous croyons que c'est
prématuré.
Les mesures de protection, puisqu'on en parle - c'est l'un des objectifs
du document - se révèlent, è notre avis,
complètement inefficaces, illusoires et temporaires. Inefficaces parce
qu'on pourra passer à côté, illusoires parce que c'est
pratiquement consacrer la pratique actuelle et temporaires parce que le
locataire qui va bénéficier de la protection mourra un jour,
cédera son logement à quelqu'un d'autre, partira pour x raison et
ce droit à l'occupation et au maintien dans les lieux ne pourra
bénéficier à ses ayants droit, aux autres personnes ou
à ses sous-locataires, comme quelqu'un l'a souligné tout è
l'heure. C'est quelque chose de très temporaire.
On a parlé tout è l'heure de "package deal". C'est un peu
l'impression que le document nous donne. Il s'agirait, en fin de compte, de
privilégier d'abord le deuxième objectif qui est l'accès
à la propriété. Mais ce deuxième objectif peut
être incompatible avec le premier. Voici pourquoi. Premièrement,
nous croyons que la Commission des services juridiques qui représente
environ 240 000 bénéficiaires au Québec n'a aucun avantage
ou en tout cas la clientèle n'a aucun avantage è ce que la
levée du moratoire s'effectue.
Il y a 240 000 bénéficiaires de l'aide juridique au
Québec. Le revenu moyen doit se situer, en vertu de la Loi sur l'aide
juridique, à 11 000 $ par année. Selon le Conseil national du
bien-être social, tous les bénéficiaires de l'aide
juridique vivent donc sous le seuil de la pauvreté. 92 % des
bénéficiaires de l'aide juridique sont locataires; à
Montréal, 98 % des bénéficiaires de l'aide juridique sont
locataires. 2 % ont déjà accédé à la
propriété dans des temps plus cléments. Actuellement,
compte tenu du marché qui est effarouché, je ne pense pas que les
locataires à 11 000 $ par année de revenu en moyenne pourront
bénéficier de ce droit.
Le document Lever le moratoire spécifie, à un
moment donné, que les institutions financières accordent du
financement si le prix de vente de l'unité est plus petit ou égal
à deux fois et demie les revenus du ménage. Pour suivre la courbe
de notre clientèle, à 11 000 $ par année de revenu, le
bénéficiaire de l'aide juridique pourra s'offrir une unité
de logement d'une valeur maximale de 27 500 $. Je ne pense pas qu'il y ait de
ioqement confortable à ce prix-là. Je pense même que,
à un prix inférieur à 50 000 $ actuellement à
Montréal, il ne faut pas y penser. À cela, il faut ajouter que la
taille de la famille n'est pas comptée. Il peut s'agir d'une famille
avec dépendance. En plus de cela, il y a les charges foncières,
l'augmentation du coût des assurances, du coût du chauffage, il y a
les déménagements, les taxes de mutation et j'en passe.
Nous ne croyons réellement pas que notre clientèle puisse
bénéficier de l'accès à la propriété.
C'est pourquoi les recommandations concernant la protection des
acquéreurs ne feront évidemment pas l'objet de commentaires de
notre part.
Le projet ne contient malheureusement pas d'indication de subvention qui
puisse permettre au présent locataire d'accéder à la
copropriété. C'est regrettable. Cela aurait peut-être
été une façon de tempérer la rigidité du
projet.
Le principe d'accès à la propriété, à
notre avis, entrera en plus en nette contradiction avec celui de la protection
du locataire lorsque l'acquéreur ne pourra occuper le logement qu'il
vient d'acheter. Je vous donne l'exemple de l'individu qui vient
d'acquérir un logement et qui est un ancien locataire. Il voudra
reprendre le logement qu'il vient d'acquérir, mais le locataire qui
occupe présentement...
Le Président (M. Richard): Votre temps n'est pas
terminé.
M. Massol: Merci. Ha! Ha! Ha!
M. Boulerice: Pour qui sonne le glas. Ha! Ha! Ha!
M. Massol: Je vais continuer mon exemple.
M. Bourbeau: Le député de Saint-Jacques prend son
air de croque-mort!
M. Massol: La cloche continue.
Une voix: Est-ce qu'il y a un vote?
M. Massol: Oui, il n'y a pas un vote?
Une voix: C'est pour le quorum?
Le Président (M. Richard): Ha! Ha! Ha!
M. Massol: Je vais attendre que la cloche cesse de sonner. Je
vais continuer?
Des voix: ...
M. Massol: C'est cela. Cela va faire comme à Ottawa il y a
quelques années. La situation très problématique, c'est la
situation où une personne achète une unité de logement
qu'elle n'occupe pas. Cela laissera au locataire occupant le droit sacré
de rester là. Alors, le pauvre locataire qui s'est acheté une
unité ailleurs ne pourra pas
occuper son logement.
Qu'est-ce qui va arriver è ce moment-là? Le locataire qui
bénéficie du droit au maintien dans les lieux passera pour qui?
II passera pour celui qui veut faire le trouble, pour celui qui empêche
l'ancien locataire d'accéder è la propriété. On
peut imaginer les tensions qui vont exister entre un acquéreur et un
locataire, dans ce cas, et l'acquéreur, ce sera un ancien locataire.
Rapidement, notre opinion là-dessus, c'est que, d'abord, il n'y a
pas d'urgence. Le ministre, dans le document et dans les diverses
déclarations, a laissé entendre qu'il y avait urgence. Cela fait
onze ans que le moratoire a été imposé. Je pense que le
fait que cela fasse onze ans que le moratoire existe, ce n'est pas un taux non
enviable, comme un taux de criminalité dans une ville ou un taux de
chômaqe. Que, dans d'autres provinces, cela fasse un mois, deux ans,
trois ans ou quatre ans, ce n'est pas grave.
Je pense que ce qui est important, c'est d'assurer la protection des
locataires ou des plus démunis. Alors, à notre avis, le moratoire
- nous le disons clairement -devrait subsister et des mesures additionnelles
devraient même être adoptées pour renforcer la protection
des locataires, particulièrement au chapitre des réparations
majeures et des reprises de possession.
Si, néanmoins, le gouvernement devait persister, nous
suggérons qu'une aide soit possible à l'accès à la
propriété par des subventions, l'augmentation des habitations
è loyer modique pour permettre que le parc locatif augmente et
l'incitation aux propriétaires désirant conserver la nature
locative de leur immeuble, par exemple, par des subventions qui ressembleraient
è celles octroyées par le programme fédéral
PAREL.
Dans ce cadre, le locateur ou le propriétaire recevrait une
subvention è charge de conserver sa valeur locative pendant dix ans.
Enfin, comme vous pouvez le constater dans notre mémoire, je pense que
si le gouvernement devait persister, on devrait accorder à la
Régie du logement un véritable pouvoir de déterminer dans
chaque cas si le parc locatif est en danger et non pas, comme le document
Lever le moratoire le laisse entendre, s'il y a des problèmes,
qu'il y ait intervention rapide.
C'est très flou. On ne donne pas à un organisme qui est
déjà reconnu, a un tribunal en plus, le pouvoir d'adjuger
spécialement dans chaque cas et de déterminer si le parc locatif
est en danger.
À ce moment-là, la Régie du logement ne deviendrait
pas seulement une espèce de tribunal qui adjugera sur des règles
techniques: Est-ce que le convertisseur a envoyé tel avis? Est-ce qu'il
a envoyé son rapport d'expert? C'est trop simple comme mécanisme
pour assurer la protection des locataires occupants.
Enfin, la Régie du logement, comme nous le mentionnions dans
notre rapport, pourrait avoir des pouvoirs qui sont similaires è ceux de
la Commission de protection du territoire agricole. Merci.
Le Président (M. Richard): Merci, monsieur. M. le
député de Louis-Hébert.
M. Doyon: L'exposé qui vient de nous être fait, M.
le Président, est intéressant dans le sens qu'il nous permet
d'entendre, de la part de gens qui sont près de certaines situations qui
sont vécues quotidiennement, quels sont les problèmes qui sont
rencontrés. (21 h 45)
On nous fait valoir que la levée du moratoire n'est pas une
urgence. C'est là une question d'opinion et d'appréciation. Vous
me permettrez de diverger d'opinion. Je pense que le ministre a suffisamment
expliqué qu'un moratoire est essentiellement une mesure temporaire dont
on doit éventuellement pouvoir voir la fin. Le fait de la
perpétuer indéfiniment ne règle pas le problème. Il
faut trouver des solutions. C'est dans ce sens que la commission parlementaire
qui se tient ces jours-ci è Montréal est extrêmement
importante. Elle permet de voir comment les problèmes se posent et
d'envisager un certain nombre de solutions. II est bon de souligner que le
ministre a mentionné à plusieurs reprises qu'il est ouvert
à des suggestions, à des recommandations et à des
modifications, si nécessaire.
Dans votre mémoire, vous nous faites valoir que
l'accessibilité à la propriété ne sera pas garantie
parce que les gens que vous desservez n'ont pas les revenus nécessaires
et qu'ils se trouvent en difficultés financières quasi
permanentes. Dans ces circonstances, l'accès à la
propriété leur est de ce fait interdit ou, à toutes fins
utiles, rendu très difficile.
Je voudrais savoir de vous, par les contacts que vous avez avec les gens
que vous rencontrez et que vous desservez, s'il n'y a pas un désir chez
cette clientèle d'avoir accès d'une manière ou d'une autre
à la propriété. Au moins, est-ce qu'on peut s'entendre sur
une chose, soit qu'il y a un nombre considérable de personnes - je le
crois jusqu'à preuve du contraire - pour qui la propriété
foncière ou immobilière est un but qu'elles poursuivent soit
consciemment ou inconsciemment?
M. Bourdeau (Pierre-Yves); Essentiellement, le désir de
notre clientèle est de vivre dans des logements convenables à des
prix abordables. C'est leur désir essentiel. Ce qui va arriver par la
levée du moratoire, c'est que, précisément, on va avoir
des nouvelles embûches qui seront mises de l'avant. Ce sont encore les
locataires à faible revenu qui
en seront les victimes. Je pense que la seule solution pour le
gouvernement en ce moment, avant d'instaurer ou de favoriser l'accès
à la propriété pour des gens à revenu moyen, c'est
d'instaurer des politiques qui vont permettre à des gens à faible
revenu de pouvoir vivre convenablement. Il ne faut pas se faire d'illusion, les
conditions de vie dans les grandes villes, pour les gens à faible
revenu, se détériorent.
Lorsqu'on voit, dans le livre blanc, que le ministre nous indique qu'il
y a possiblement exode des gens vers les banlieues parce qu'il n'y a plus de
possibilité d'accéder à la propriété
à Montréal, nous, ce que nous prétendons, c'est que cela
va entraîner un exode des gens à faible revenu vers les banlieues.
Plus nous avançons vers l'an 2000, plus les grandes villes modernes
comme Montréal vont devenir inaccessibles aux gens à faible
revenu, s'il n'y a pas une politique du logement mise sur pied. Avant
d'édifier une structure comme celle permettant l'accès à
la propriété pour les gens à revenu moyen, je pense qu'il
faut mettre des fondations. Les fondations, c'est la majorité des
citoyens, et que je sache, la majorité des citoyens à
Montréal, en ce moment, ce sont les locataires.
M. Doyon: Indirectement, vous remettez en question la protection
déclarée par le ministre et dont il fait état dans son
document concernant ce qu'il appelle une protection blindée contre
l'éviction, en faveur des locataires. En quoi voyez-vous des failles
dans la proposition ministérielle qui vise précisément
à préserver le maintien du droit è habiter un endroit
comme locataire? Est-ce qu'il y a actuellement des failles qui vous paraissent
évidentes? Le ministre reconnaît lui-même qu'il y a
actuellement une situation qui permet à certains investisseurs,
promoteurs ou appelons-les comme on voudra, de profiter de certaines failles
dans la loi ou dans la réglementation pour pouvoir faire des
conversions. Le ministre a déclaré dans son document, à
cet effet, que son action ou son intention visait premièrement à
boucher ces trous. D'un autre côté, il s'agit de bien encadrer
toute cette démarche de conversion. Quelles sont les failles que vous
voyez dans ce blindage que nous voulons et que nous considérons comme
désirable en faveur des locataires, contre l'éviction?
M. Bourdeau: Essentiellement, les failles que l'on voit sont...
Premièrement, il y en a une très évidente que j'ai pu voir
dans le livre blanc. Une fois que le logement est converti en
copropriété, une fois que les acquéreurs sont devenus
propriétaires d'un logement, entre autres, au chapitre des travaux
majeurs, qu'arrive-t-il? Il ne faut pas se le cacher, l'accès à
la propriété sans possibilité d'occuper le logement, c'est
de la bouillie pour les chats. Il n'y a personne qui va acheter un logement
sans avoir la possibilité de l'occuper. Cela veut dire qu'on a beau
instaurer n'importe quelle politique de protection qu'on voudra bien à
l'intérieur d'une législation, je pense qu'il faut savoir comment
cela se passe dans les quartiers défavorisés pour se rendre
compte que la législation n'atteint pas habituellement... Les gens n'ont
pas la possibilité de revendiquer leurs droits. Ils tentent de sauver
leur peau quotidiennement, c'est ce qu'ils font.
Lorsqu'on voit des propriétaires, des promoteurs se promener dans
les logements et faire signer des renonciations à des locataires
moyennant un mois de loyer gratuit pour qu'ils renoncent à leur droit au
maintien dans les lieux, ce sont là des choses qu'on voit
quotidiennement dans les quartiers défavorisés. C'est là
un exemple.
C'est évident que la législation ne pourra jamais
prévoir toutes les possibilités, mais il ne faut pas non plus
rajouter des possibilités pour permettre à des promoteurs de se
servir de la législation et de carrément mettre de
côté le droit au maintien dans les lieux qui est mis de l'avant
par le ministre. Nous, on y croit au droit au maintien dans les lieux, il n'y a
pas de problème. On est d'accord sur la question des travaux majeurs -
je pense qu'il y a de grands problèmes - et la question des reprises de
possession aussi, sauf que nous ne pensons pas que c'est avec une levée
du moratoire qu'on va en arriver à améliorer la protection des
locataires. Effectivement, ce que nous visons, c'est l'amélioration de
la qualité de vie de tous les locataires, particulièrement
à Montréal qui regroupe la majorité.
M. Doyon: Les inquiétudes que vous manifestez sont de la
nature de la tension que vous envisagez entre le nouveau propriétaire
non occupant et le locataire qui, comme il en aurait le droit, continuerait
d'occuper son logement et qui, à ce moment, pourrait se voir
blâmé de priver une autre personne qui a acheté ce logement
dans le but de l'occuper et de le faire.
Ne pensez-vous pas que c'est là une situation qui est
pratiquement inévitable dans le sens que quelqu'un qui occupe un
logement qui est désirable et peut-être convoité par
d'autres de ce fait prive quelqu'un d'autre de l'occuper? Il y a des gens qui
peuvent convoiter des logements, c'est normal de le faire. À ce moment,
la situation que vous envisagez existe déjà à toutes fins
utiles.
M. Bourdeau: On en vient tout le temps à la même
situation: les gens qui n'ont pas d'argent par rapport à ceux qui en
ont. C'est évident que c'est la loi du plus fort souvent qui l'emporte
et la loi du plus fort, c'est
souvent la loi de celui qui a le fric. En encourageant une levée
du moratoire, je pense qu'on encourage une possibilité pour des gens qui
ont les moyens. Je n'ai rien contre la classe moyenne sauf que la classe
moyenne aux dépens de la classe des favorisés, j'ai mes
réserves.
M. Doyon: Je n'ai pas d'autres questions pour le moment, M. le
Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député. M. le député de Shefford.
M. Paré: Merci, M. le Président. Je ne voudrais pas
répondre au député de Louis-Hébert, mais je pense
que tout le monde veut aller au ciel et tout le monde veut avoir une Cadillac.
Mais entre vouloir et pouvoir, il y a une grosse différence. C'est toute
la différence entre pouvoir accéder à la
propriété ou non. Je dois dire que je considère que votre
organisme est très représentatif. Ce n'est vraiment pas un petit
groupe. Avec 235 845 personnes qui ont recours à vos services, je pense
qu'on peut dire que vous savez de quoi vous parlez. Vous êtes très
représentatifs et je trouve cela intéressant.
Quand on parle aussi d'objectifs contradictoires, c'est exactement ce
qu'on dit depuis le matin. On ne peut pas garder le gâteau et le manger
en même temps. C'est ce qu'on dit. Ou on préserve le stock de
logements locatifs parce qu'il y a une population pour cela ou on
pénalise cette population comme cela s'est fait à New York et
à Paris: on les envoie en banlieue. Si c'est cela qu'on veut faire,
qu'on le dise franchement. Qu'on n'essaie pas de jouer sur les deux tableaux et
qu'on ne fasse pas passer un paysage d'automne pour un Picasso si ce n'est pas
un paysage d'automne et que c'est un Picasso. Il va falloir, à un moment
donné, être franc.
Si on a décidé que ce qu'on voulait favoriser c'est
l'accès à la propriété ou la spéculation,
qu'on le dise mais qu'on ne dise pas en même temps qu'on veut
préserver quand on n'a même pas des mesures de préservation
à l'intérieur du projet qui est soumis. C'est cela l'affaire.
C'est aussi clair que cela. Vous aviez raison tantôt. L'image
était très bonne. Ce n'est pas parce qu'on déjoue des lois
ou qu'on passe à côté de règlements qu'on est
obligé maintenant de dire qu'on va aller dans ce sens. Au contraire, on
prend des mesures pour les faire respecter.
C'est ce qu'on entend dire depuis ce matin par la plupart des groupes.
Soyez bien conscients de cela. Le premier groupe de tous, la ville de
Montréal, c'est ce qu'elle demande. Les groupes qui sont venus, cet
après-midi, c'est ce qu'ils demandent. La Commission des droits et
libertés de la personne, c'est ce qu'elle demande: qu'on respecte les
règlements et qu'on fasse en sorte que si à l'heure actuelle il y
a des gens parmi les plus démunis qui sont pénalisés, s'il
y a des gens qui souffrent de harcèlement, qu'on prenne des mesures pour
arrêter cela au lieu de dire: On va lever le moratoire et ça va en
amener un peu plus. Mais on va dire: On va essayer que ça n'en
amène pas trop de plus. C'est un peu ça qu'on est en train de
faire. Cela n'a pas de bon sens.
C'est un peu cela aussi si on veut utiliser une autre image qui a
été utilisée par mon collègue de Saint-Jacques.
Oui, il y a un malaise, il y a un problème qui est grave. Et on dit: Au
lieu de le corriger et d'arrêter l'inondation qui s'en vient, on va
tellement donner de pilules au patient qu'on va lui donner une dose pour un
cheval et on va le tuer. Cela n'a pas de bon sens.
Ce que vous amenez ici, je dois dire que c'est très important.
Vous avez amené deux points sur lesquels je veux revenir.
Le premier, c'est quand vous dites qu'il n'y a pas d'urgence. Vous avez
raison, effectivement. Il n'y a pas d'urgence. Il n'y a personne qui crie
à l'heure actuelle. I! y a peut-être des gens qui voudraient
devenir propriétaires et ils le seraient si on n'avait pas aboli les
programmes d'accès à la propriété
résidentielle, mais on les s abolis. Il n'y a pas d'urgence. Il n'y a
pas non plus, au moment où l'on se parle, nécessairement un
manque de logis, sauf peut-être dans des coins où justement il
faut arrêter l'hémorragie parce qu'ailleurs il y a des surplus de
logements disponibles avec la construction qu'on connaît
présentement. Donc, il n'y a pas d'urgence. C'est un point, je pense,
qui est important.
L'autre, on le retrouve à la page 4 de votre mémoire. Je
vais le lire, ce n'est pas très long; c'est tellement l'essence
même de la discussion qu'on est en train de tenir: "À l'aube de
l'an 2000, le problème principal au Québec,
particulièrement dans les grandes villes, dans le domaine du logement,
ne se situe pas au niveau de faciliter l'accès a la
propriété aux personnes à revenu moyen qui, de toute
façon, peuvent se payer un logement convenable. Le problème se
situe beaucoup plus au niveau de l'accès à un logement convenable
à un prix abordable." C'est là que se situe le problème.
Je pense que vous êtes bien placés pour en témoigner. Je
dois dire que je trouve cela intéressant.
J'aurais une question à vous poser et je reviendrai tantôt.
J'ai remarqué que vous étiez dans la salle. Vous avez entendu les
mémoires qui ont été présentés avant. Il y
en a qui le proposent comme une mesure tout à fait inacceptable et
d'autres le proposent même comme quelque chose de payant et de positif.
Considérez-vous que l'achat du droit au maintien est une formule
de harcèlement?
M. Bourdeau: Pouvez-vous répéter, s'il vous
plaît?
M, Paré: Oui. Considérez-vous que ce qui a
été proposé par le groupe avant vous, soit de pouvoir
monnayer le droit de maintien dans les lieux, c'est en fait une façon de
harceler les gens?
M. Lafontaine: Mon opinion personnelle, bien entendu, parce qu'on
n'a pas eu le temps d'en discuter au préalable, c'est que notre
clientèle va prendre tout ce qu'elle va être capable de prendre au
moment où cela va se présenter, sans même penser au
lendemain. Cela est très clair pour les connaître eux autres. Ils
vivent au jour le jour et ils attendent le prochain chèque qui entre. Et
si jamais ils voient l'odeur d'un chèque, vous pouvez être
sûrs qu'ils vont sauter dessus, peu importe ce qui arrivera. On gagnera
peut-être à la loterie ou il y aura peut-être quelque chose
qui va se passer demain matin. En tout cas, c'est le réflexe que j'ai,
là. Mais pour les connaître, je vais vous dire qu'ordinairement,
c'est ce qu'ils font. Ils vont prendre ce qui va passer. Légal ou pas,
minimum ou pas, est-ce que c'est au-delà de ce que la
réglementation prévoit ou si c'est en dessous, cela ne leur fait
pas grand-chose.
M. Paré: J'ai une autre question. Dans votre
mémoire à la page 15, sous le titre Les personnes
âgées ou handicapées, on parle de ce fameux guichet
spécial. Vous finissez votre paragraphe en disant: "Nous croyons que
c'est faire preuve d'une méconnaissance totale de la
réalité que de suggérer la création d'un guichet
spécial à la Régie du logement pour protéger les
personnes âgées ou handicapées." J'aimerais que vous
commentiez cela de façon un peu plus élaborée.
M. Bourdeau: Ce qu'on a dit là, essentiellement, on l'a
repris des intentions du ministre qui sont dans le document. Je me demande
c'est quoi, un guichet spécial. Cela veut dire qu'on va aller à
la Régie du logement et qu'il va y avoir une personne qui va être
là et qui va dire: Voici une personne âgée. Voulez-vous
nous faire part de votre problème? Nous allons vous aider. Je pense
qu'il faut connaître comment cela fonctionne. Les personnes
âgées qui sont victimes de harcèlement, avant qu'elles se
présentent à la Régie du logement et puissent consulter
peut-être un fonctionnaire à un quichet spécial, il y a
toute une série d'événements qui vont se passer. Et on a
beaucoup plus de chances de retrouver cette personne âgée
délogée de son logement avant qu'elle se présente au
guichet spécial de la Régie du logement, (22 heures)
M. Paré: Vous dites aussi qu'on apporte
présentement un sujet important qui est la levée du moratoire,
mais vous dites que c'est effectivement juste un facteur dans une grande
politique d'habitation ou de logement. Il n'a pas été question de
défendre la copropriété comme telle. Ce dont il est
question présentement, ce sont des logements déjà
occupés par des locataires. Donc, ce que vous dites, ce serait
impensable de régler cela sans qu'il y ait une politique globale
d'habitation. En attendant, plutôt qu'à la proposition qui est sur
la table, est-ce que vous seriez plus favorable à la proposition de la
ville de Montréal déposée ce matin qui dit qu'au lieu de
permettre la levée du moratoire avec certaines balises, on interdise
totalement le logement locatif? On verra les cas d'exception. Après une
politique d'habitation, on pourra rajuster.
M. Massol: On ne peut pas réagir à cela, parce que
vous m'apprenez à l'instant la position de la ville de Montréal.
Il m'est difficile de commenter cela. Pour répondre au début de
votre question, je pense qu'en ce qui concerne la politique globale, on
retrouve suffisamment d'éléments ou de suggestions dans notre
mémoire. J'en ai fait mention dans mon exposé également
lorsque je parlais de subventions pour l'accès à la
propriété ou encore l'adjudication par un tribunal
compétent, comme la Régie du logement, de chaque cas, de faire du
cas par cas pour s'assurer que le parc locatif n'est pas en danger. Je pense
que vous avez là un élément pour répondre à
votre question d'une politique globale de logement et non pas seulement...
également les HLM. Vous avez une batterie de mesures que j'ai
énoncées tout à l'heure, par exemple, l'encouragement pour
les propriétaires qui désirent maintenir la nature locative de
leur logement. Enfin, il y a plusieurs incitations, plusieurs politiques,
plusieurs mesures qui peuvent être coordonnées pour permettre que
le marché immobilier s'émancipe, qu'il y ait création
d'emplois, que les entrepreneurs en tirent bon compte - personne n'est contre
la vertu - mais qu'en même temps, les droits des locataires ne soient pas
en péril. Actuellement, ce dont nous avons peur, c'est que les droits
des locataires soient en péril. Il n'y a pas de sommes qui sont
versées; c'est tout simplement un transfert d'un endroit à un
autre. Il n'y a pas de création proprement dite de logements. Je crois
que le document que nous vous avons proposé contient une amorce de
suggestion à cet effet.
M. Paré: Merci. Je partage tout à fait les craintes
que vous avez soulevées dans votre mémoire.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Shefford. Je cède la parole à M. le
député de Sainte-Marie.
M. Laporte: Merci, M. le Président. La commission des
services juridiques a effectivement, en vertu de son expertise de recherche de
toute la jurisprudence qui concerne les décisions qui ont
été rendues par la Régie du logement... On a pu voir
à quelques reprises ce qu'ils ont fait là-dessus. Il y s des
avocats qui plaident selon la clientèle que vous représentez.
J'aurais trois questions relatives à cette expertise
particulière que vous possédez. L'une a trait aux pouvoirs
actuels de la Régie du logement et à la façon dont ce
pouvoir est exercé par rapport à des propositions visant la
levée du moratoire, d'une part. Vous semblez d'ailleurs, par rapport aux
propositions, émettre ce que la jurisprudence a un peu
dégagé de façon générale. Dans un cadre
global d'une levée de moratoire et de protection des locataires,
j'aimerais entendre la commission là-dessus.
La deuxième question: Est-ce que votre service s'est
penché sur ce qu'on pourrait appeler des ententes de gré à
gré? ïl y a plusieurs associations qui, tout au cours de la
journée - et moi-même par rapport à mon comté - ont
fait état du harcèlement systématique, qui dépasse
pratiquement une compréhension très normale. J'aimerais savoir si
effectivement la Commission des services juridiques s'est penchée sur ce
qui peut constituer des ententes de gré à gré et quelles
seraient les solutions de rechange à cet effet, ne serait-ce que
juridiquement?
La troisième question concerne l'élément de
l'opportunité des travaux, dans le sens que vous avez émis
l'opinion qu'on devrait avoir la possibilité de contester cette
opportunité.
En faisant toujours référence à des groupes qui
sont passés aujourd'hui, la grande majorité, d'une part semblait
dire que, de façon concrète, cela causait des problèmes
tandis que l'association des constructeurs disait que ce serait tellement
onéreux qu'on allait détériorer le stock de logements si
on amenait une nouvelle mesure comme cela. J'aimerais avoir vos
réactions sur ces trois points-là, pour l'instant.
M. Massol: Je vais tenter de répondre à la
première question et je laisserai l'occasion à mon
collègue de répondre aux deux dernières à cause de
son expérience particulière. Si j'ai bien compris, votre
première question concernait le cas des réparations majeures, des
observations et des commentaires qui sont contenus dans notre
mémoire.
Dans le document de travail: "Levée du moratoire"... la question
des réparations majeures intervient à deux étapes: avant,
d'abord, l'intention du propriétaire de convertir et, après, la
décision ou l'avis de conversion. Il me fait plaisir que vous me posiez
la question parce que, depuis tout a l'heure, on parle de toutes sortes de
choses mais on oublie de parler des protections légales. On est, avant
tout, des avocats et je pense que c'est important qu'on mette l'accent sur les
mesures de protection qui pourraient être efficaces mais qui nous
semblent non efficaces à cause justement de la pratique actuellement qui
est en vigueur dans le milieu.
Dans le cas des réparations, avant l'avis du propriétaire
qui va convertir, il nous semble qu'il y a eu des améliorations dans le
projet. On prolonge certains délais, etc., sauf qu'il n'y a pas de
présomption que lorsqu'il y aura réparation majeure - je
n'entends pas réparation urgente - et qu'il y a par la suite, une
conversion, il n'y a pas de présomption que cette réparation
majeure sera faite pour évincer le locataire dans le but de convertir le
logement. Ce sera plutôt le locataire qui aura le fardeau de prouver que
la réparation majeure a été faite dans l'unique but de
l'évincer pour que le logement soit converti. Nous pensons qu'il devrait
y avoir renversement de vapeur. Dès qu'il y a réparation majeure
et qu'il y a, dans un intervalle rapproché, un avis pour fins de
travaux, il devrait y avoir une présomption que cela a été
fait en vue d'une transformation en copropriété.
Pour ce qui est des réparations majeures après l'avis, la
même remarque s'applique. Il faudrait prévoir une
présomption qui ferait en sorte que le propriétaire de
l'unité qu'il n'occupe pas et qui veut faire des réparations
majeures doive prendre les devants pour aller devant la Régie du
logement demander l'autorisation d'effectuer ces réparations majeures
qui ne sont pas urgentes. Dans le projet, on ne distingue pas et on ne propose
pas une telle intervention.
Je vais laisser mon collègue répondre aux deux autres
questions.
Le Président (M. Richard): ... parce qu'il reste deux
minutes.
M. Bourdeau: Uniquement quant à votre troisième
point sur la possibilité pour un locataire de contester la nature et
l'opportunité des travaux, par expérience, je sais que c'est la
seule façon pour un locataire de contrôler les visées un
peu douteuses soit de propriétaire, soit de promoteur. On voit
très souvent des locataires de logement habitable, sans être
luxueux, recevoir des avis pour la rénovation de leur logement. Je pense
qu'en donnant aux locataires la possibilité de contester la nature et
l'opportunité des travaux, en démontrant qu'ils ne sont
absolument pas
nécessaires pour permettre à un locataire de vivre dans un
logement convenable, cela pourrait mettre un frein assez net au désir
d'un propriétaire de vouloir transformer son logement en habitation
luxueuse et d'en expulser un locataire.
Quant à votre deuxième point, soit l'entente de gré
à gré, si j'ai pu bien comprendre, vous me corrigerez, c'est
peut-être une entente de gré à gré entre locateur et
locataire pour éviter des problèmes de harcèlement,
M. Laporte: Principalement, ce qui était constaté,
ce qui nous a été dit et ce que nous constatons bien souvent dans
nos comtés, ce sont effectivement des problèmes de
harcèlement occasionnés par des ententes de gré à
gré. J'aurais aimé savoir si la commission s'est penchée
sur cela. Face à cela, est-ce qu'elle a des propositions ou...
M. Bourdeau: C'est bien évident que lorsqu'un locataire
vient nous voir parce qu'il a un problème avec son propriétaire
soit à la suite de travaux majeurs ou des reprises de possession, c'est
sûr qu'il y a des possibilités d'entente de gré à
gré. Pourquoi y a-t-il des possibilités d'entente? C'est parce
que le rapport de force a été rétabli, c'est-à-dire
que le locataire démuni est représenté par un avocat face
au promoteur. À ce moment-là, il y a des possibilités
d'entente de gré à gré, mais ce n'est pas cela le
problème. Le problème, ce sont les locataires qui ne consultent
pas des avocats. La grosse majorité des locataires ne consulte pas les
avocats et est prise pour négocier, seule, avec un promoteur qui est
beaucoup plus équipé. C'est là, le problème.
L'entente de gré à gré, quand le rapport de force
est égal, cela va. Mais, quand il n'y a pas de rapport de force
possible, oubliez cela.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Sainte-Marie. M. le député de
Saint-Jacques.
M. Boulerice: Messieurs, au départ, je suis content, que
vous ayez, en tout cas jusqu'à l'heure qu'il est, échappé
au "trudeauisme" qualificatif de groupuscule. Le mot va peut-être vous
étonner; j'ai l'impression que vous avez une vision planétaire de
ce phénomène. J'ai l'impression que vous avez regardé
ailleurs ce qui s'est passé. Mon collègue vous a cité New
York. On y a vu un phénomène, en tout cas tout au moins,
très nord américain, mais qui existe en Europe. Dans les
années cinquante et soixante-dix, on a créé les banlieues,
donc une deuxième structure qui, entre parenthèses, nous
coûte très cher. Voilà l'année 1970 qui commence:
crise du pétrole, retour au centre-ville, etc. On avait, d'ailleurs,
laissé dégrader, è ce moment-là, les
centres-villes. Voilà, effectivement, que se produit - l'exemple de New
York était pertinent... On est en train de faire un gigantesque
Manhattan, une expulsion vers les anciennes banlieues. On est en train de
créer - je regrette le mot, mais quand on l'a vu et je pense que vous
l'avez vu... On risque de créer, comme vous l'avez dit, un
dépotoir humain comme Bronx. On n'a pas réglé d'ailleurs,
depuis 20 ans, ce problème. On a créé un problème
encore beaucoup plus grand à ce chapitre. J'en faisais la remarque
à mon collègue, d'origine néerlandaise concernant le
magnifique quartier où habitait Gordan, un quartier populaire, dont on a
complètement évacué la population.
Vous avez dénoncé le guichet unique. Quand des gens
arrivent à mon bureau de comté avec des problèmes
d'habitation, pour 90 % d'entre eux il est trop tard. Comme on le dit en bon
québécois, ils sont déjà faits. Un tel a un
problème et, à un moment donné, dans le questionnement,
ils me sortent un papier et ils ont signé quelque chose. Ils ne
connaissent pas les droits qu'ils ont... Je peux, quelques fois, leur parler de
l'aide juridique, je le regrette pour vous, quoique vous êtes très
connus, ils disent: Ah, je ne savais pas que j'étais admissible. Ah!
Commission des droits de la personne, je ne le savais pas. Ah! tel organisme,
je ne le savais pas. La question que j'allais peut-être vous poser: Dans
des cas de logements comme cela, les gens qui vous arrivent, est-ce qu'ils vous
arrivent aussi dans presque 90 % des cas alors qu'il est déjà
trop tard? La solution du guichet n'est que bureaucratique et ne réglera
absolument rien.
M. Bourdeau: Oui, cela peut arriver qu'il soit trop tard,
effectivement. C'est pour cela qu'entre autres, pour la signature d'ententes...
Les gens arrivent souvent avec des ententes déjà signées.
On propose, dans le document, un article très clair dans la loi qui
rendrait toute renonciation au droit de maintien dans les lieux, toute
possibilité de renonciation comme allant à l'encontre de l'ordre
public. Il faudrait qu'il y ait un article très clair dans la loi... Et
je pense qu'avec un article dans la loi qui soit clair à ce sujet, on
pourrait revenir sur des ententes qui ont été signées
à rabais par des locataires et qui, par la suite, regrettent leur
signature. Souvent, il est trop tard.
M. Boulerice: Dernière question, très
brièvement. Il y a des intervenantes qui sont venues cet
après-midi et qui ont recommandé que le harcèlement soit
défini, soit inclus dans le Code criminel. Qu'en pensez-vous?
M. Bourdeau: Je ne pense pas que cela ait un rapport. Le
harcèlement, c'est une
question de fait laissée à l'appréciation du
tribunal. Chaque cas est un cas d'espèce. Que ce soit
spécifié dans le Code criminel... Il y a des problèmes
constitutionnels en plus, comme le dit Me Lafontai-ne.
M. Boulerice: Oui, mais on est habitué depuis quelques
années, au Québec. Merci, messieurs.
Une voix: Si vous voulez avoir un moratoire qui dure, c'est la
façon.
M. Boulerice: Un moratoire là-dessus, oui.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Saint-Jacques. Maintenant, M. le ministre, avez-vous un
commentaire final?
M. Bourbeau: Oui. Simplement pour remercier les
représentants de la Commission des services juridiques pour leur
contribution.
Le Président (M. Richard): Merci. M. le
député de Shefford, vous avez un commentaire final?
M. Paré: Très court. C'est pour vous remercier
aussi. Je dois vous dire que lorsqu'on va en reparler à Québec...
J'espère qu'on aura l'occasion, en commission, de reparler du vrai
problème, celui de la page 4 que vous avez abordé de façon
très précise. On va certainement le ramener pour en discuter
entre nous. Je vous remercie. (22 h 15)
Le Président (M. Richard): Merci, messieurs, d'avoir
été présents et d'avoir présenté votre
document. Maintenant, et là c'est vraiment le cas, l'Association des
consommateurs du Canada, (section Québec) peut prendre place. Je
m'excuse de vous avoir fait faire cet exercice tout à l'heure. Bonsoir
mesdames, monsieur. Je vous laisserai le soin de présenter vos
collègues. Vous avez effectivement quinze minutes pour présenter
votre mémoire. Quand arriveront les dernières minutes - vous avez
compris tout à l'heure - on vous avise pour permettre à nos
collègues des deux partis de vous questionner. Vous commencez.
M. Carouzet (Jacques): Jacques Carouzet, président de
l'Association des consommateurs du Canada (section Québec). Mme
Brisebois, vice-présidente de l'association (section Québec) et
Mme Che-vrier, membre du comité exécutif de l'association.
Le Président (M. Richard): Bienvenue. Vous avez la parole
pour les quinze prochaines minutes au maximum.
Association des consommateurs du Canada (section
Québec)
M. Carouzet: En tant que président, je voudrais d'abord
présenter la philosophie générale de l'association face au
projet qui nous est présenté.
Tout d'abord, je voudrais présenter les grands principes.
L'Association des consommateurs du Canada est favorable à l'adoption,
enfin à l'adoption d'un projet qui mette fin au moratoire. Un moratoire
est, par sa nature, effectivement temporaire. Il y a aussi une raison de fond
qui fait que nous pensons que le moratoire, en somme, est une restriction au
droit fondamental de Sa propriété. Il ne faut quand même
pas oublier que le droit de propriété est le droit le plus absolu
soit celui de disposer de ce qui vous appartient. Évidemment, dans ce
sens-là, le moratoire, c'est-à-dire la restriction à
partager un immeuble qui vous appartient, à le diviser, pour pouvoir
ensuite le revendre est quand même une restriction importante au droit de
propriété. C'est cela, le principe. Dans une
société démocratique du type dans lequel nous vivons,
c'est un principe qui, malgré toutes les restrictions qu'on peut y
apporter, et de toutes les façons pour diverses raisons, reste valable,
peut être évidemment, pas tel quel, mais enfin c'est quand
même le principe.
Il y a des raisons qui militent pour maintenir ce principe, notamment
une raison qu'on a alléguée de diverses sources, c'est qu'on a
remarqué - cela est un fait que tout le monde peut constater - que les
gens qui sont propriétaires de leur logement, en général,
vu que le logement leur appartient, prennent un soin plus méticuleux de
leur logement, de leur propriété, font des réparations
etc. et ont tendance à le maintenir en meilleure condition. C'est quand
même... On a dit qu'il y a un parc immobilier qu'il faut entretenir,
investir de l'argent pour le maintenir en condition convenable. Le droit de la
propriété, c'est le droit de disposer de la
propriété pour pouvoir diviser éventuellement les
immeubles d'habitation et ces choses-là. Cela fait partie des mesures
auxquelles on peut penser pour entretenir, pour garder en bonne condition le
parc immobilier de la province. C'est une chose.
Pour cela, est-ce que l'association est, à ce moment-là,
pour un droit absolu de pouvoir subdiviser ses propriétés pour
pouvoir faire... Non. L'Association des consommateurs du Canada veut quand
même... On ne vit pas en somme selon la loi de la jungle. Si on permet
à chacun de disposer de sa propriété de la manière
la plus absolue, sans aucune restriction, il est bien évident que
ça va aboutir à des abus criants et à des abus qui,
d'ailleurs, existent déjà.
Je pense que même si nous sommes en principe pour le droit des
gens de disposer de leur propriété, de subdiviser leurs
appartements et de les revendre, ils doivent quand même observer
certaines règles qui sont nécessaires dans une
société civilisée.
Il faut également tenir compte du contexte dans lequel nous
vivons, notamment à Montréal. Je pense que, à
Montréal, plus encore que dans les autres régions du
Québec et du Canada, nous avons un nombre important de locataires qui
vivent actuellement - des fois depuis très longtemps - dans un logement.
Parmi ces locataires, il peut y avoir des gens qui sont malades, qui sont
handicapés. Enfin, il y a toutes sortes de gens qui vivent dans des
logements. Evidemment, sous prétexte de laisser le propriétaire
enfin jouir de sa propriété, il ne serait pas question de les
mettre dehors d'un seul coup et de ne pas leur accorder d'indemnité et
de se conduire avec eux comme des sauvages.
Pour ces raisons, il faut évidemment prendre certaines
précautions et ménager les transitions, favoriser peut-être
l'accès à la propriété pour les locataires, mais
pour ceux qui ne le peuvent pas, il faut quand même observer certaines
règles. Parmi ces règles, vous avez devant vous le mémoire
que nous vous avons présenté. Il y a un certain nombre de
règles auxquelles on peut penser, par exemple, si un locataire est
obligé de déménager. Il ne faut pas se le cacher, il y a
une chose qui est quand même importante et qu'on a déjà
remarquée. Dans le moratoire qui existait jusqu'à maintenant, il
y avait - comme on l'a remarqué souvent -un nombre important de failles
qui permettait à un propriétaire de se livrer à certains
abus.
La plus grande faille, je pense, c'étaient les dispositions de la
loi qui permettaient au propriétaire d'effectuer des réparations
majeures dans son logement et pratiquement, donc, de mettre un locataire
à la porte, de le mettre dans la rue pour effectuer ses
réparations majeures.
J'ai même vu, en tant qu'avocat, certaines situations qui,
malheureusement, n'étaient pas isolées, qui se sont
répétées à maintes occasions. Le système est
très simple. Le propriétaire veut récupérer son
logement pour une raison ou pour une autre. Alors, il dit: Je vais faire des
réparations majeures dans mon logement. Donc, il envoie un avis au
locataire de quitter les lieux. Certaines dispositions de la loi permettent au
locataire d'avoir certains recours, de discuter des modalités, etc.
Néanmoins, le propriétaire a un droit absolu qui lui a
été donné par la loi d'effectuer ces réparations.
Naturellement, les réparations avaient pour premier effet de rendre
impossible l'habitation du logement. Le locataire, avec plus ou moins
d'indemnisation - plutôt moins que plus -était obligé de
quitter les lieux. On constate - ce sont les statistiques qui le disent - qu'il
ne les réintègre que dans une proportion de
Donc, il y a seulement 4 % ou 5 % des locataires qui quittent un
logement pour des raisons de réparations qui le
réintègrent ensuite. Donc, c'est une grosse faille du
système qui existe actuellement. Je pense que ce serait dans le projet.
C'est un abus vraiment criant et qui devrait être corrigé.
Pour remédier à cet excès, je pense qu'il y a
certaines choses. On a parlé d'un montant statutaire, d'un montant de
dommage qui, par exemple, serait minimal et au-dessous duquel on ne pourrait
pas aller. Ce serait une solution de fixer un montant forfaitaire par la loi.
Donc, le locataire ne pourrait pas signer une renonciation. Comme la Commission
des services juridiques l'a dit auparavant, il y avait à ce moment
beaucoup d'abus qui se faisaient, il y avait des renonciations qui se signaient
d'une façon vraiment très rapide. C'étaient là des
causes d'abus.
Il y a d'autres moyens de remédier aux abus. La
possibilité pour le locataire évidemment, c'est très
intéressant - de pouvoir être lui-même propriétaire
du logement qui va être divisé. Cela serait intéressant
mais à condition que le locataire ait évidemment la
possibilité de racheter son logement. Ici encore, cela suppose un grand
nombre de modalités, des modalités diverses. Il pourrait y avoir
nécessité d'imagination au niveau législatif pour
encourager le locataire, è devenir propriétaire et éviter
que le prix du logement soit beaucoup supérieur à ce qu'il est en
réalité pour évincer le locataire. Cela supposerait un
contrôle du prix du logement, un contrôle de la valeur exacte des
travaux qui vont être effectués dans le logement, de la valeur
supplémentaire que cela peut conférer au logement. Pourquoi le
locataire ne pourrait-il pas discuter auparavant avec le propriétaire'?
Est-ce qu'il y a une disposition qui permet au locataire de discuter de la
valeur des travaux, de savoir si le locataire pourra payer, quelle va
être la valeur qui va être ajoutée au logement, si le
locataire pourra payer ces travaux? S'il ne le peut pas, peut-être
qu'à ce moment on pourrait lui permettre d'acheter le logement tel qu'il
est, sans les travaux. C'est aussi une solution qui peut être valable. Il
y a évidemment la solution du maintien dans les lieux qui pourrait
s'appliquer, le maintien dans les lieux suivant le système actuel mis en
vigueur par la Régie du logement. Ce sont là diverses mesures
auxquelles ont peut penser.
D'autres remarques. En somme, cela résume d'une façon
générale la position de l'Association des consommateurs du
Canada. C'est une position différente de la position
de la Commission des services juridiques qui, elle, était
opposée complètement aux droits des propriétaires. Nous ne
sommes pas opposés à la levée du moratoire mais nous
voulons simplement que les abus qui peuvent résulter de cette
levée soient corrigés par une législation
adéquate.
Je vais passer la parole à Mme Brisebois qui va nous donner
quelques précisions supplémentaires sur la levée du
moratoire.
Mme Brisebois (Lucille): Merci, M. Carouzet. On a certaines
inquiétudes. Dans le cas, par exemple, où la Régie du
logement, se prévalant de l'article 1625, du Code civil donne au
propriétaire la permission de faire des réparations, de graves
problèmes se posent pour le locataire. S'il est incapable de payer le
prix demandé pour le logement rénové, il sera privé
de son droit de préemption. Sera-t-il privé aussi de
dédommagement? Sera-t-il privé de son droit de maintien dans le
logement? Sera-t-il obligé d'aller demeurer dans un logement de moindre
qualité? Il ne faut pas se le cacher. Il y a quand même un fort
grand nombre de ménages qui ne peuvent pas se permettre d'acheter un
logement. Mais nous ne sommes pas aussi pessimistes que nos
prédécesseurs qui, en réalité, parlaient pour la
population des bénéficiaires. Il y a quand même des gens
à Montréal qui travaillent et qui ont les moyens de s'acheter un
logement si l'occasion leur en est donnée.
Ce à quoi on pensait, ce serait que le locataire puisse acheter
son logement dans lequel il vit sans qu'il soit rénové. On dit
aussi que si sa situation financière ne lui permet pas d'acheter le
logement, il ne devrait pas avoir à subir les rénovations. Cela
serait un point parce qu'une fois que les rénovations sont permises,
c'est entendu que le locataire ne pourra probablement pas retourner dans son
logement parce que le prix demandé va être trop
élevé. C'est là qu'il y a des problèmes. Ce sont
là des préoccupations. Nous sommes d'avis que pour éviter
de léser les locataires de leurs droits, la législation doit,
premièrement, prévoir une indemnité pour le locataire
évacué de son logement pour incapacité de payer en cas de
conversion ou de rénovation. Cela pourrait être trois mois de
loyer plus les frais de déménagement avec factures è
l'appui. On parle d'un montant forfaitaire aussi. Notre président en a
parlé. Ce serait à régler et ce serait aussi
compliqué comme on en parlait tantôt. Mais, cela se fait. On ne
peut pas se cacher que cela fie fait dans le moment. Il y a des gens, dans le
moment, qui acceptent des montants pour quitter un logement. (22 h 30)
La loi devrait aussi donner au locataire au moins - ce ne sera pas long
- six mois pour se réinstaller ailleurs. Ce serait une
amélioration parce que dire à un bonhomme: Dans une semaine, tu
t'en vas et tu ne reviens plus dans ton logement, comme c'est indiqué
déjà dans le code, ce n'est pas suffisant. L'autre raison dont on
a parlé, c'est le fait qu'il faut que cela se fasse lentement. Pour
l'économie de la province de Québec, on trouve que c'est
important qu'il y ait de la rénovation, qu'il y ait des conversions
aussi, mais d'une façon civilisée. Il faut quand même
penser qu'il y a moyen d'aider les gens à s'informer. Il faut une
campagne de publicité pour aider le monde à trouver exactement,
savoir ce que sont leurs droits. Le droit de maintien dans les lieux pour une
période limitée. Le droit de se défendre contre le
harcèlement. Cela existe. Il y a des avocats de l'aide juridique pour
défendre ces gens. Des droits de préemption d'achat du logement.
La possibilité du propriétaire ou de l'acheteur éventuel
de possession du logement. Si les gens sont informés et qu'il y a des
moyens pour se défendre... On sait que la situation n'est pas
drôle pour les locataires. On a de la sympathie. Devant la
spéculation éhontée qui se fait de nos logements dans le
moment, tout le monde a des problèmes. On apprécie qu'on ait
accepté de geler les évaluations. Cela vient tard. On ne sait pas
ce que cela va faire au compte de taxes, mais tout le monde a des
problèmes. Il faut en sortir.
Cela m'étonne que les gens disent qu'on n'a pas de politique du
logement. Quand même, ici au Québec, on dépend encore un
peu du gouvernement fédéral pour l'habitation. On sait qu'il a
une politique. Nécessairement, on dépend de cela. Quand il y a
des subventions qui sont données, bien souvent ce sont des projets
conjoints. On apprécie, par exemple, qu'au lieu de donner, comme ils ont
fait depuis 1970, des subventions pour s'acheter des maisons à des gens
qui ont déjà les moyens de les acheter... Cela n'avait pas
d'allure, mais cela a amélioré le stock de maisons.
D'après nous - je suis cette situation depuis 1970 - le stock des
maisons est mieux qu'il n'a jamais été au Québec et il ne
faut pas se laisser quand même... On a des maisons qui sont
améliorées, mais ça peut continuer et ça peut
générer des emplois. C'est dans ce sens que nous sommes pour la
conversion.
Le Président (M. Richard): Je m'excuse, madame, vous
étiez bien partie. La dernière seconde a été
étirée un peu.
Mme Brisebois: Je m'excuse d'avoir exagéré.
Le Président (M. Richard): Non, non, aucun
problème.
Mme Brisebois: II faut vous dire ces
choses.
Le Président (M. Richard): Vous êtes ici pour qu'on
vous entende, effectivement. Maintenant, c'est M. le député de
Sainte-Anne qui... M. le ministre?
M. Bourbeau: Non. J'ai cédé mon droit de parole au
député de Sainte-Anne.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Merci beaucoup. Juste trois petites questions. À
la page 2 de votre mémoire, vous parlez de spéculation. Vous
dites: "Les propriétés atteignent des prix inaccessibles à
d'autres que les bien nantis. Cela joue contre le principe qui nous
préoccupe ici, celui de l'accès à la
propriété pour les Québécois. Nous comptons sur nos
dirigeants provinciaux et fédéraux pour mettre fin à cette
situation..." Avez-vous des suggestions pour mettre fin à cela? Vous
donnez le problème et vous n'avez pas une piste de solution. En
avez-vous une?
Mme Brisebois: Est-ce que je peux?
Le Président (M. Richard): Oui, madame.
Une voix: A llez-y.
Mme Brisebois: II y a une chose que j'ai suggérée
ici. C'était une idée. Les propriétés qui sont
mises sur le marché - j'ai fait de l'immeuble pendant cinq ans - je peux
vous dire que le prix demandé, on dit que c'est libre, mais à peu
près tout ce qu'on peut acheter sur le marché dans le moment qui
n'a pas vraiment un prix attaché, c'est une maison. Le courtier devrait,
il me semble, avoir le bon sens de voir à ce que le prix demandé
sur une maison soit réel. Je dis que ce prix pourrait être
déterminé par un évaluateur professionnel. Cela aiderait
dans le milieu. Il n'y a absolument pas de loi. Il n'y a rien qui concerne
l'immeuble. On n'est protégé en aucune façon. Depuis
l'adoption de ta Loi sur la protection du consommateur en 1972 qu'on demande
d'avoir un volet sur l'immeuble pour protéger les gens, et il n'y en a
pas encore et on espère que cela s'en vient.
M. Polak: Deuxième question. À la page 8, vous
dites et je cite: "Les propriétaires-convertisseurs trouvant à la
conversion de leurs logements des profits très intéressants
doivent dédommager les gens lésés par leurs
décisions." C'est un bel énoncé de principe, mais que veut
dire dédommager? De quelle manière? Avez-vous des formules ou des
suggestions?
Mme Brisebois: Oui, mais comme je l'ai dit tantôt, cela
pourrait être - M. Carouzet a quelque chose aussi à dire
là-dessus - trois mois de loyer. Dans les cas d'expropriation par
exemple, on donne trois mois de loyer et les frai9 de
déménagement. Je pense que cela aiderait quand même... On
dit que la personne locataire devrait avoir au moins six moisi pour se reloger,
dans les seuls cas où la régie permettrait ces
réparations. Dans notre mémoire, nous disons que si le locataire
ne peut acheter le logement, il ne devrait pas y avoir de rénovations,
il ne devrait pas être obligé de les subir. On ne devrait pas le
mettre dehors pour cela. C'est là qu'est la différence. S'il ne
peut acheter parce qu'il n'en a pas les moyens, qu'on le laisse là
tranquille, mais qu'on n'augmente pas son loyer pour l'évincer. C'est
cela le point. C'est mon idée. M. le président a peut-être
quelque chose à vous dire.
M. Carouzet: Oui. Il y a une chose. Souvent, le
propriétaire est tenté d'abuser et de faire des travaux pour
revendre la propriété qui n'ont pas pour but... Il y a une
différence entre des travaux qui améliorent, qui donnent en somme
une espèce de plus-value au logement, et des travaux qui sont faits pour
revendre. C'est différent. Vous ne ferez pas la même chose si vous
voulez améliorer le confort d'un logement ou si vous voulez le vendre.
Il y a des travaux de la façade, de la cuisine, il y a des points de
marketing qui sont très bons pour...
Si, à ce moment-là, on fait évaluer, on recommande
de le faire faire par un évaluateur professionnel pour avoir la
plus-value réelle du logement. Si on obtient la plus-value réelle
du logement, à ce moment-là, on peut déterminer
l'augmentation raisonnable du loyer qui doit être accordé pour
cela. Là-dessus, on en vient à une jurisprudence bien
établie, puisque c'est à la Régie du logement de voir
à fixer le loyer en fonction des travaux qui ont été
effectués. Je pense qu'on évitera là pas mal d'abus.
M. Polak: Une dernière question, juste par
curiosité personnelle. Vous parlez de l'Association des consommateurs du
Canada au Québec. 18 300 membres. Combien de membres avez-vous au
Québec?
Une voix: ...18 300 membres au Québec.
Mme Brisebois: C'est cela, 16 300 membres au Québec...
M. Polak: Juste au Québec?
Mme Brisebois: ...dans le moment et environ 160 000 au
Canada.
M. Polak: 18 300 membres qui paient une cotisation au
Québec. Quelle sorte de gens sont-ils? Avez-vous des personnes
âgées là-dedans, des petits salariés ou, comme
madame, des courtiers en immeuble? Quelle sorte de gens se retrouvent
là-dedans?
M. Carouzet: Il y a toutes sortes de gens. Notre clientèle
est très variée. Il y a pas mal de gens âgés, car
ces gens-là sont évidemment plus intéressés par les
problèmes de consommation ayant un revenu fixe. D'autre part, ils ont le
temps de marchander, de vérifier, etc. Donc, on a pas mal de gens
âgés et on a également des gens plus jeunes. Je pense que
c'est assez bien réparti dans toutes les couches de la population.
M. Polak: D'accord, merci. M. Carouzet: Merci.
Le Président (M, Richard): Merci. M. le député de
Shefford.
M. Paré: Oui, merci, M. le Président. L'Association
des consommateurs du Canada regroupe 18 300 membres au Québec. Je vous
ai entendue, Mme Brisebois, à plusieurs occasions, dire: C'est une
idée de moi...
Mme Brisebois: ... Je ne suis pas...
M. Paré: Non, non. Je voudrais seulement compléter
ma question. Vous avez préparé ce mémoire. A-t-il
été soumis au 18 300 membres? Y a-t-il eu une consultation?
Des voix: Ha! Ha!
M. Paré: Un instant! Un instant!
Mme Brisebois: Non. Cela n'a pas été... Je dois
surtout vous dire qu'on n'a pas de subvention du gouvernement du Québec
et on n'a pas les moyens de faire cela.
Une voix: ... Vous avez fait... Des voix: Oh! Oh!
Mme Brisebois Non, l'office de la protection...
M. Paré: Je voudrais juste savoir... Un instant! Est-ce
que je peux compléter ma question?
Le Président (M. Richard): À l'ordre!
Mme Brisebois: C'est le comité provincial de l'habitation
qui l'a préparé. Moi, j'en fais partie, Mlle Chevrier aussi; il y
a d'autres personnes qui font partie de notre conseil d'administration et qui
ont des compétences, aussi mais qui ne peuvent pas être ici ce
soir. On n'a pas fait ce genre de travail, parce que, d'abord 18 000 personnes,
c'est beaucoup. On n'a pas de subvention de la province de Québec de
l'Office de la protection du consommateur. On n'a pas les moyens de faire ce
genre de chose.
M Carouzet: Je dois dire que c'est suivant le type d'organisation que
nous avons. Évidemment, c'est un type d'organisation démocratique
qui vient de la base où on essaie d'avoir des échanges de haut
jusqu'en bas et de bas en haut. Evidemment, on n'est pas capable de consulter
sur chaque question 18 300 personnes. Vous me demandez cela. Est-ce que ce
serait vraiment possible de faire une chose pareille? Même si on mettait
cela dans notre bulletin qui est publié, on aurait certaines
réponses. On va peut-être avoir un dixième de
réponses, on en tient compte, c'est très intéressant, mais
généralement, les gens ne nous répondent pas, même
un dixième, c'est beau sur certaines choses. Cela donne quand même
une idée, mais c'est surtout de la manière dont nous sommes
organisés. Il y a des élections qui se tiennent tous les ans pour
les membres du bureau exécutif, etc., qui viennent de la base. On a des
sous-sections qui représentent... On a essayé de prendre la
température un peu partout. On tient compte évidemment, on essaie
le plus possible de faire des tests sur toutes les questions. Cela, c'est une
question, il y en a bien d'autres. On essaie de faire des tests pour savoir ce
que les gens en pensent et, ensuite, on essaie de résumer l'opinion des
consommateurs qui sont un groupe spécial. C'est un groupe qui est
différent de celui que vous avez entendu auparavant, le groupe des
avocats des services communautaires. Nous, on n'a pas la même
clientèle et notre opinion se reflète dans ce que nous
disons.
M. Paré: Est-ce que vous avez des contacts
spéciaux, soit avec l'Association des consommateurs du Québec,
soit avec la Fédération des ACEF?
M. Carouzet: L'Association des consommateurs du Québec,
historiquement, est partie de notre association, c'est-à-dire
qu'à un moment donné, nous étions la seule association.
Cette association s'est formée à côté de nous et,
finalement, il y a eu un moment où elle nous représentait pour le
Québec. Il s'est produit un schisme en 1983 et l'association du
Québec s'est séparée; maintenant, nous sommes deux
associations.
M. Bourbeau: ...se trouve être la principale
association?
Une voix: C'est cela.
M. Paré: Petite ambiguïté en fonction de ce
que je peux lire dans votre texte et des commentaires que vous avez faits
tantôt et qu'on retrouve aussi ailleurs. Vous dites que vous êtes
d'accord avec la levée du moratoire parce que vous trouvez qu'il est
tout à fait normal de reconnaître le droit du propriétaire
de partager son immeuble; je l'ai pris en note quand vous l'avez dit, parce que
je trouvais cela important. Le droit de partager son immeuble est un droit que
possède un propriétaire. Par contre, à la première
page de votre mémoire, on lit: "Le prix demandé pour une maison
ou un immeuble inscrit chez un courtier devrait être établi par un
évaluateur professionnel." Est-ce que vous n'allez pas contre la
liberté du droit de propriété?
M. Carouzet: Comme je l'ai expliqué, j'ai commencé
par émettre le principe, mais peu de temps après, j'ai dit qu'on
ne pouvait pas admettre le principe purement et simplement; il fallait des
garde-fous, il fallait des limitations. Donc, ce que vous avez lu fait partie
des limitations. Si on admet le principe, comme je l'ai dit au début, on
va vivre dans un pays de sauvages, chacun a le droit de faire ce qu'il veut,
etc. On vit dans une société civilisée. Les locataires qui
vivent dans les logements sont aussi des gens qu'il faut respecter. On ne peut
pas les mettre dehors. Si on appliquait le principe tel quel, cela conduirait
à des solutions impossibles. C'est pour cela que le principe doit
être tempéré. C'est un travail législatif assez
délicat de concilier deux choses qui... C'est intéressant parce
que le groupe qui est passé avant nous a conclu que la levée du
moratoire était inconciliable avec la protection des locataires, etc.
Nous, nous croyons justement que ce n'est pas inconciliable, bien qu'il
faudrait essayer de le concilier. Je sais que c'est un travail délicat
mais, à la différence du groupe qui nous a
précédés, nous pensons que c'est possible et qu'il y a
moyen. Nous avons proposé certaines solutions. On peut penser à
d'autres solutions mais je pense que c'est là qu'il faut chercher la
solution au problème qu'on a devant nous. (22 h 45)
M. Paré: Sans chercher de solution, j'identifie une raison
que vous énumérez à la page 2 pour la levée du
moratoire. Quand on lit, cela semble être cela qui accroche:
"L'Association des consommateurs du Canada est d'avis que le moratoire doit
être levé car, de toute façon, des propriétaires ont
trouvé le moyen de le contourner pour en venir à leurs fins et
convertir leurs immeubles et forcer les locataires à quitter leur
logement sans les dédommager." Donc, vous dites qu'il faut le lever.
Étant donné -exactement ce que le groupe a dénoncé
avant vous - qu'on a trouvé la façon de le contourner,
enlevons-le. Est-ce que cela voudrait dire que parce qu'il y a des gens qui
passent sur les stops on va les enlever?
Ne pensez-vous pas justement que si vous voulez préserver les
consommateurs les plus démunis - parce qu'on retrouve ça à
la toute fin où vous dites: "Nous espérons que la levée du
moratoire se fera de façon à ne pas léser les moins bien
nantis." Ne pensez-vous pas que c'est contradictoire et qu'au contraire il
faudrait empêcher l'utilisation faite présentement par ceux qui
enlèvent des droits aux plus démunis?
M. Carouzet: J'ai expliqué au début que dans le
moratoire actuel il y avait des failles. J'en ai signalé une qui me
paraissait énorme. Je pense que dans le projet de levée du
moratoire on peut... J'ai suggéré qu'il y ait des mesures pour
empêcher les failles qui existaient dans l'ancien système. Donc,
on peut interpréter ce qui est dit à la page 2 dans le sens qu'il
faut corriger et améliorer la loi de façon que, même si on
admet le principe que le moratoire doit être levé, essayer de
corriger les failles pour éviter quand même les abus. C'est ce que
nous voulons. Nous voulons lever le moratoire mais éviter les abus les
plus criants et faire que les choses se passent d'une manière
civilisée, ce qui n'est pas le cas actuellement. C'est dans ce
sens-là qu'on peut interpréter.
Il y a peut-être un semblant de contradiction. Je ne sais pas si
vous comprenez ce que je veux dire, mais nous pensons qu'on pourrait en
profiter pour éviter les abus qui se produisent déjà et
essayer de les corriger.
M. Paré: Dans les mesures pour corriger, quand on parle de
droit de maintien illimité pour les locataires actuels, en page 5 dans
le premier point où il y a une description de cinq points: Le droit de
maintien pour une période illimitée. Donc, c'est une suggestion
qui est faite et à laquelle vous adhérez. Par contre, quand on
arrive à la page 5, on dit: Il pourra aussi être dans
l'impossibilité de payer le loyer qu'on lui demandera pour le logement
si celui-ci a été rénové avec le consentement de la
Régie du logement. Le privera-t-on alors de son droit de maintien dans
les lieux? La loi devrait prévoir une indemnité pour le
locataire, le propriétaire devant lui verser une indemnité pour
lui permettre de s'installer ailleurs, aux mêmes conditions de
qualité de vie. On devrait lui donner au moins six mois pour se
réinstaller. La proposition dit que c'est le maintien pour une
période illimitée. À la page 3 et à la page 5 vous
arrivez avec une autre proposition qui est un délai de six mois, puis on
le dédommage et on l'installe ailleurs.
Mme Brisebois: Vous avez deux situations dans ça. Celle de
la rénovation et celle de conversion. Ce sont deux choses. J'ai
écrit le mémoire avec le consentement de tout le monde. Ils l'ont
tous lu et vous pouvez être sûr que... Il faut penser que les
règles ne sont pas exactement les mêmes. On dit que dans les cas
de conversion, s'il ne peut pas acheter le logement il ne devrait pas avoir
à subir les réparations.
Par contre, la régie peut avoir le pouvoir, parce qu'il en est
question dans votre proposition, de donner... À part cela, il y a un
article dans le Code civil qui dit que le locataire doit subir ces
réparations. Si la régie donne au propriétaire - c'est
dans un cas comme cela - la permission de faire ces
réparations-là et même qu'il peut évacuer son
locataire, c'est à ce moment-là qu'il doit être
protégé. À ce moment-là, il serait pris vite son
droit de maintien dans les lieux; la régie dit au propriétaire de
réparer. C'est très complexe cette affaire-là, je le sais,
mais il faut penser que ce n'est pas tout à fait la même situation
si le propriétaire rénove ou si le propriétaire a la
permission de convertir le logement, c'est pour cela que vous voyez cette...
Alors, c'est cela qui nous inquiète le plus. C'est qu'au moment
justement où la permission est donnée par la régie se
prévalant de l'article du Code civil, si elle donne la permission de
faire des réparations et qu'il est évacué, c'est là
que le locataire est le plus lésé. À ce moment-là,
il va être privé de son droit de préemption parce qu'il
aura le droit de l'acheter, mais il n'a pas l'argent, il ne peut pas l'acheter.
Premièrement, il est privé de son droit de préemption, si
la loi ne dit pas... nous autres, ce qu'on vous demande, c'est d'avoir un
dédommagement parce qu'autrement il va être mis dehors sans
dédommagement; c'est la raison aussi pour laquelle on demande la
levée du moratoire parce que d'après cet article, on dit que le
locataire doit subir, mais on ne dit pas qu'il doit être
dédommagé; c'est la raison pour laquelle cela doit être
inclus là-dedans. Il faut comprendre que la régie aussi a
donné le droit, a vraiment mis en place le principe fondamental que le
locataire doit rester. On doit respecter ce droit-là aussi de le laisser
dans son logement, mais je vois qu'il ne faut pas qu'il soit obligé
d'aller demeurer ailleurs dans un logement de moindre qualité; il faut
absolument qu'il ait de la protection. C'est très complexe et on compte
sur vous pour protéger ce locataire-là. Ce serait peut-être
une façon justement d'arriver à obtenir une politique de
protection du locataire dans l'habitation.
Le Président (M.
Richard); Merci madame, je
céderais la parole à M. le député de
Lévis.
Il reste seulement quelques minutes dans le temps alloué.
M. Garon: Ce ne sera pas long.
J'ai été surpris au début de votre intervention de
constater, M. Carouzet, que vous avez parlé du droit de
propriété comme d'un droit très absolu. C'était
vrai dans le temps de Napoléon, mais aujourd'hui on parle beaucoup plus
du droit de propriété comme un droit de plus en plus
limité par des droits collectifs, des droits communautaires ou des
droits de zonage, etc. Je pensais que c'était par enthousiasme que vous
avez commencé votre..., mais croyez-vous vraiment que le droit de
propriété est un droit très absolu?
M. Carouzet: Je n'ignore pas qu'il est rogné de toutes les
façons possibles et imaginables. C'est peut-être pour cela
justement que j'ai voulu le rappeler, parce qu'on a tendance à l'oublier
complètement et à penser que le propriétaire finalement
est obligé de passer par toutes sortes de juridictions ou quasi
juridiction pour avoir le droit de faire ce qu'il veut avec ce qu'il a et c'est
pour cela, je voulais rappeler cela.
Si on ne lève pas le moratoire, cela peut avoir certains
inconvénients. Il y a des gens qui attendent pour acheter des
appartements ou des logements. Ces gens-là, s'ils ne peuvent pas les
acheter et puis si dans la province on leur oppose des lois qui vont les
empêcher complètement de, vous savez, qui vont limiter le droit de
propriété, qu'est-ce qu'ils vont faire, aller porter leurs
capitaux ailleurs que dans la province, ils vont aller en Ontario ou ailleurs.
Est-ce que cela va être notre intérêt? Il faut aussi penser
à cela lorsqu'on fait une législation; il faut bien penser aux
droits des gens qui habitent dans les lieux, mais il faut aussi penser aux
droits des gens qui voudraient acheter des logements ou des
propriétés et qui ne peuvent pas le faire et qui ne pourront pas
le faire. Ce sont aussi des consommateurs au sens de... il n'y a pas que les
locataires qui sont consommateurs. Les propriétaires et les gens qui
veulent acheter des condominiums sont aussi des consommateurs dans un sens.
Nous, on représente tout le monde.
M. Garon: Vous ne pensez pas que le droit de
propriété est limité ailleurs? On n'a pas inventé
cela au Québec; on a plutôt imité les autres
là-dedans, qui ont limité le droit de propriété
bien avant nous.
M. Carouzet: En tout cas, il faut quand même rester... On
n'est quand même pas dans un pays complètement socialiste, comme
cela existe dans d'autres pays. Il faut quand même... On est dans un
système d'équilibre entre certaines classes et d'autres, etc.
Notre association essaie justement de contrebalancer un peu d'un
côté et de l'autre, de chercher une certaine harmonie.
Je pense que c'est une bonne chose. On a un certain système
démocratique. D'autres pays ont d'autres systèmes, mais nous
avons un système et on le voit comme cela. On le voit au nom des
consommateurs qui sont parfois des locataires et, d'autres fois, des
propriétaires. Il ne faut pas oublier cela-La Commission des services
juridiques voyait cela d'une autre façon, ses clients étant
uniquement des locataires. Mais je pense que, pour nous, les consommateurs sont
une autre classe de gens.
Le Président (M. Richard): M. Carouzet, je céderais
la parole, pour la dernière question, à M. le
député de Jonquière, si vous le permettez.
M. Dufour: II y a peut-être un point que je soulignerai
sans vous poser de question. On pourrait plutôt envisager un taux de
taxation foncière distinct. Peut-être pourrait-on en reparler
après la commission parlementaire. Ce n'est pas là-dessus que mon
intervention portera.
Vous dites qu'à un moment donné il y a de la
spéculation. À mon sens, la spéculation est faite par du
monde, par des gens d'affaires, en principe. L'entreprise privée fait
partie du monde des affaires. Vous dites, après tout ce que vous nous
avez expliqué, que vous êtes pour l'entreprise privée et
aussi pour la levée du moratoire, vous finissez votre mémoire
avec un voeux qui me semble un voeux pieux. Tout ce que vous avez dit c'est:
Espérons que les problèmes causés par la
spéculation sur nos logements seront réglés avec la
collaboration des gouvernements provincial, municipaux et du monde des
affaires, avec une protection accrue pour les consommateurs payeurs de taxes de
plus en plus élevées. Vous dites, dans cette phrase, que c'est le
monde des affaires qui travaille sur la spéculation, qui fait la
spéculation, et vous espérez qu'il va comprendre le bon sens sans
que rien ne se produise. Vous dites: Donnez-leur l'occasion de faire de la
spéculation, parce qu'on va vendre les condos; on lève le
moratoire, donc il y a des chances que la spéculation embarque
là-dedans. Vous dites: Avec tout cela, on espère, malgré
tout, que le monde des affaires va comprendre et je ne sais pas comment vous
arrivez à cette conclusion. Comment le monde des affaires va-t-il
comprendre qu'il doit arrêter de spéculer d'un coup sec?
Mme Brisebois: Je ne vois rien sur le monde des affaires. Vous
dites... Où cela, monsieur?
M. Carouzet: Où est-ce que... Mme Brisebois:
À la page 8?
M. Dufour: C'est à la conclusion, aux trois ou quatre
dernières lignes.
M. Carouzet: Ah oui! Du monde des affaires...
Mme Brisebois: Dans le monde des affaires...
M. Dufour: Cela n'a pas de bon sens.
Mme Brisebois: ...c'est quand même... On sait que cela
prend aussi la coopération de tout le monde pour cela. Regardez, on sait
que, depuis qu'on a écrit cela, vous êtes arrivés, en
collaboration avec les gens des municipalités, à geler la
spéculation. On ne sait pas encore trop trop ce que cela va faire. ,Le
monde des affaires peut inclure aussi les banques. C'est le monde des affaires
qui fait la spéculation. La spéculation dont on parle... Ce qui
arrive dans le moment... J'ai justement un article ici d'une compagnie
d'immeubles, la compagnie Lepage, qui a défendu à ses agents
immobiliers de vendre une maison avant que l'acte de la dernière vente
soit signé. II se passe des choses, de ce temps-là, qui n'ont pas
d'allure. Ce sont des prix. Les maisons et les immeubles se vendent à
des prix absolument irréels. Il faut la collaboration de tout le monde
en ce sens que, quand vous faites des évaluations... Vous savez, cela
fait depuis environ 1970 que je fais partie des commissions nationales de
l'habitation. J'ai vu pas mal tout ce qui s'y est passé, tout le temps.
Quand le gouvernement fait des réunions, il invite tout le monde; il
invite les entrepreneurs. Le monde des affaires, cela peut être des
constructeurs, des banquiers, etc. Cela prend la collaboration de tout le monde
pour arriver à faire quelque chose. J'ai eu connaissance, lors d'une
réunion pour inviter tout le monde à se rencontrer pour essayer
de faire quelque chose au sujet de la Loi sur l'intérêt, et je
vous assure que cela n'a pas été bien long, le monde des affaires
avait fait son jeu...
Le Président (M. Richard): Je m'excuse, madame...
Mme Brisebois: ...et on n'a pas eu de changement.
Le Président (M, Richard): Je vous demanderais de
terminer. Merci, M. le député de Jonquière. M. le
ministre, est-ce que vous avez un commentaire pour terminer?
M. Bourbeau: Oui, M. le Président. Un mot de la fin pour
remercier l'Association des consommateurs du Canada (section Québec) de
sa contribution, pour souligner
que cet organisme très représentatif compte 18 300 membres
au Québec. Bien sûr, on comprend que chacun des 18 300 membres n'a
pas été consulté individuellement pour ce mémoire.
C'est un organisme représentatif et démocratiquement élu.
D'ailleurs, de la même façon que vous n'avez pas consulté,
de la même façon, le député de Shefford n'a pas
consulté chacun de ses 38 000 électeurs avant de poser sa
question au début de... Je pense que s'il les avait consultés, il
n'aurait pas posé la question. D'ailleurs, je pense qu'il l'a
regrettée ensuite.
Enfin, je conclus en notant que cet organisme important qui
représente un grand nombre de citoyens du Québec voit les choses
de la même façon que le gouvernement. Je souligne une très
grande similitude entre les vues de l'Association des consommateurs du Canada
(section Québec) et la proposition gouvernementale. Je dois dire que je
me réjouis de cette situation. Et, selon le voeu que vous avez
formulé et selon le voeu que nous formulons, nous espérons que
nous en viendrons à une proposition améliorée. Nul doute
que nous pourrons améliorer cette proposition qui ira dans le sens de
protéger à la fols les locataires, les acquéreurs et le
parc locatif. Merci.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. M. le
député de Shefford, vous avez un commentaire à faire?
M. Paré: Oui, très court. Je vous remercie, moi
aussi, entre autres de votre patience. Il est 23 heures et, intervenir à
cette heure-là, ce n'est pas facile. J'ai aussi lu avec beaucoup
d'attention9 Mme Brisebois, le dossier que vous avez soumis à
votre comité. Je prends note qu'il ne s'agit pas, par contre, d'un appui
de quelque nature que ce soit de l'Association des ACEF du Québec ou de
l'Association des consommateurs du Québec. C'est vraiment le groupe de
l'habitation de l'Association des consommateurs du Canada (section
Québec)...
Mme Brisebois: Des associations, cela n'existe pas, vous
savez.
M. Paré: Je vais juste conclure en disant qu'il s'agit
d'un mémoire présenté par votre comité. A sa
lecture et à la suite des échanges que j'ai eus, vous dites que
vous êtes en faveur de la levée du moratoire par plusieurs
paragraphes contradictoires à la suite desquels vous finissez par
conclure: Il s'agit de s'asseoir et de s'entendre. Donc, vous espérez
que tout le monde va s'asseoir et finir par trouver enfin un consensus. C'est
ce que j'en ai déduit en vous entendant dire à plusieurs
reprises: Vous savez, il faut qu'on s'entende, il faut qu'on se parle, il faut
qu'on finisse par trouver des solutions. Vous nous invitez à trouver une
solution. J'ai pris bonne note de vos commentaires et je vous remercie
d'être venus ici ce soir.
Le Président (M. Richard): Merci, mesdames et messieurs,
de nous avoir présenté votre mémoire.
Nous ajournons maintenant nos travaux jusqu'à demain 10 heures,
au même endroit. Petit détail technique: Vous avez le droit de
ramener vos documents afin qu'on puisse faire un nettoyage pour demain
matin.
(Fin de la séance à 23 heures)