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(Dix heures douze minutes)
Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'aménagement et des équipements arrive
à Québec pour compléter son mandat de consultation
générale portant sur la levée du moratoire sur la
conversion des immeubles locatifs en copropriété divise. Il
s'agit de notre dernière journée de consultation et, avant
d'amorcer l'audition des groupes, j'aimerais demander au secrétaire de
la commission s'il y a des modifications quant à la composition de la
commission pour sa dernière séance.
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Pour cette
séance, M. Gauvin (Montmagny-L'Iïslet) sera remplacé par M.
Leclerc (Taschereau). Tous les autres remplacements temporaires se
poursuivent.
Le Président (M. Rochefort): Ils sont maintenus?
Le Secrétaire: Oui.
Le Président (M. Rochefort): Cela va.
Je vois que le premier groupe invité, c'est-à-dire les
représentants de la ville de Québec, est déjà
installé à la table des témoins et, sans plus tarder, je
veux vous souhaiter la bienvenue et je vous demanderais, pour l'information des
membres de la commission de même que pour le Journal des débats,
de vous présenter et, par la suite, de prendre une quinzaine de minutes
pour nous faire la présentation de votre mémoire, en vous
rappelant que les membres de la commission ont déjà reçu
et lu votre mémoire et que nous souhaiterions conserver une part de
temps pour permettre des discussions entre les membres de la commission et
chacun d'entre vous.
Ville de Québec
M. Vézina (Yvon): Merci, M. le Président. Pour
faire suite à votre demande, je me présente immédiatement.
Je m'appelle Yvon Vézina. Je suis conseiller municipal à la ville
de Québec et membre du comité exécutif. Il me fait plaisir
également de vous présenter mes collègues qui
m'accompagnent ce matin. À ma gauche, M. Gilles Gagnon qui est
également conseiller municipal, membre du comité exécutif
de la ville de Québec et membre de la Commission d'urbanisme de la ville
de Québec. À mon extrême gauche, M. Jean-Paul Bourret,
directeur général adjoint à notre ville et, à ma
droite, M. Benoît Beaulieu, un expert du service d'urbanisme et plus
spécifiquement affecté à la division de l'habitation.
Bonjour à vous, M. le ministre, ainsi qu'à vous tous,
mesdames et messieurs, membres de la commission de l'aménagement et des
équipements. Mes collègues et moi-même sommes heureux
d'avoir été invités à vous faire part du point de
vue de la ville de Québec concernant la levée du moratoire sur la
conversion des immeubles locatifs en copropriété divise. Dans
l'exposé qui va suivre, nous allons reprendre l'essentiel des
commentaires formulés dans le mémoire que nous vous avons
transmis dernièrement.
Examinons d'abord la situation de la ville de Québec. Comme la
plupart des villes-centres, Québec possède un parc de logements
locatifs assez élevé. En 1981, 71 % des 65 600 logements de
Québec, soit 46 600, étaient occupés par un locataire.
Dans l'ensemble de la région métropolitaine de Québec, ce
pourcentage était de 49,5 %. Toutefois, dans un cas comme dans l'autre,
ces taux étaient à la baisse.
À Québec, le parc de logements locatifs est
concentré plus particulièrement dans les anciennes limites
municipales, où l'on retrouve près de 88 % des logements de
Québec occupés par un locataire, soit 41 000 logements.
D'autre part, le stock locatif de Québec comporte environ 7000
logements sociaux répartis de façon à peu près
égale entre les logements coopératifs et sans but lucratif et les
logements à loyer modique de type HLM. Cette partie des logements
locatifs ne sera pas touchée par la levée du moratoire.
Ces quelques chiffres suffisent à démontrer toute
l'importance que prend la levée du moratoire sur la conversion des
immeubles locatifs en copropriété divise, pour les
autorités de la ville, puisque cette levée pourrait toucher
directement ou indirectement six ménages sur dix de la ville de
Québec.
Cependant, ce ne sont pas tous les ménages locataires qui
pourront avoir accès à la propriété de leur
logement ou d'un autre logement converti.
Nous estimons que la clientèle potentielle susceptible de
profiter de la conversion et ayant les moyens de le faire se situerait entre
3500 et 7700 ménages.
D'autre part, selon une étude citée en page 24 du document
provincial, on estime à environ 5 % la proportion du stock locatif qui
serait converti après cinq ans. Compte tenu du stock de logements
locatifs de Québec en 1981 - les chiffres les plus récents que
nous avons - auquel on soustrait le parc de logements sociaux, on estime, selon
la même hypothèse, qu'environ 2000 logements pourraient être
convertis dans les cinq années suivant la levée du moratoire.
Passons maintenant aux attentes municipales. Depuis plusieurs
années, la ville de Québec a déployé de nombreux
efforts en vue de revitaliser et revaloriser son centre-ville. Les
résultats du recensement de 1986 sont venus valider ces efforts puisque,
pour la première fois depuis 20 ans, la population du centre-ville de
Québec a augmenté, passant de 20 913 en 1981 à 21 924 en
1986, soit une hausse de 4,8 %.
Si le gouvernement provincial perçoit avant tout la conversion
comme une façon de faciliter l'accession à la
propriété, nous, de la ville de Québec, y voyons aussi une
mesure favorisant la régénérescence des quartiers,
susceptible de venir appuyer les efforts déployés au cours des
dernières années.
On peut relier à la conversion trois principaux avantages. Le
premier est une diversification dans les modes de tenure, ce que la ville a
toujours préconisé. Cette diversification augmente le choix des
propriétés à prix abordable et, de ce fait, permet de
retrouver, en milieu urbain, des conditions de vie et des coûts de
logements concurrentiels avec ceux qu'offrent les logements de banlieue. Le
deuxième avantage est une amélioration du climat
général des quartiers. L'accession à la
propriété favorise une plus grande implication des gens dans
leurs conditions de logement, de même que dans leur milieu de vie,
entraînant généralement une plus grande stabilité
des ménages, laquelle se traduira souvent pas un meilleur
équilibre socio-économique des quartiers. Finalement, le
troisième avantage lié à la conversion est une
augmentation de l'entretien et de la restauration des logements, lors de la
prise en charge par les ménages de leurs conditions de logement. De
plus, nous croyons que la conversion pourrait se révéler un moyen
efficace d'effectuer la restauration de certains bâtiments qui,
autrement, ne seraient pas rentables.
Face à ces considérations, la ville souhaite que la
levée du moratoire permette à un nombre plus élevé
de ménages de devenir propriétaires et ce, d'une manière
beaucoup plus rapide qu'uniquement par la construction de condominiums
neufs.
Elle souhaite également que la levée du moratoire
entraîne une augmentation des travaux de restauration domiciliaire,
principalement dans les cas où les formes actuelles de
propriété ne permettent pas d'effectuer une restauration qui soit
rentable.
Le dernier souhait municipal est que la levée du moratoire
réduise les impacts négatifs de la conversion sur les
locataires.
Nous allons vous faire part de nos commentaires sur les propositions
gouvernementales. Bien que les attentes municipales énoncées
précédemment aient été élaborées en
considérant les avantages que peut apporter la conversion des immeubles
locatifs en copropriété divise, la ville de Québec est
consciente que la conversion comporte également son lot
d'inconvénients. C'est pour les minimiser qu'elle est en accord avec les
mesures restrictives énoncées dans le document gouvernemental.
Entre autres, ces mesures devraient imprimer un rythme lent à la
conversion et, ainsi, ne pas créer de pressions trop fortes sur le parc
de logements locatifs.
Voyons d'abord les mesures visant à la protection des locataires.
Au cours des derniers jours, plusieurs organismes se sont opposés
à la levée du moratoire en invoquant le manque de protection
accordé aux locataires. Toutefois, nous n'avons entendu ou lu, du moins
dans les médias, au cours de la semaine, aucun commentaire de la part de
ces organismes sur le droit au maintien dans les lieux pour une période
illimitée, ou encore, aucun argument étoffé relativement
à la contestation de cette importante mesure. Pour nous de la ville de
Québec, dans les circonstances, face à la reconnaissance de ce
principe fondamental en matière de relations locataires-locateurs, nous
sommes de nature à rassurer les locataires contre les évictions.
C'est principalement à cause de cela que la ville de Québec se
prononce pour la levée du moratoire.
Je fais ici une parenthèse. C'est un point qui, tout au long des
délibérations - je ne sais pas, nous n'étions pas à
Montréal -ne nous a pas paru faire l'objet d'une attention soutenue de
la part de tous les participants qui vous ont présenté les
mémoires, du moins, en tout cas, dans ce qu'on a vu dans les
médias. On y attache enfin une importance capitale parce que -nous
allons y revenir - nous croyons que le Québec ce sera peut-être un
des seuls endroits en Amérique du Nord où on propose d'avoir un
droit illimité. Sur le continent nord-américain, ces droits ont
été limités souvent pour des périodes de deux ans
ou de cinq ans tout au plus. On croit que cette mesure est assez importante
pour ne faire paniquer personne dans les circonstances. Ce droit au maintien
dans les lieux pour une période illimitée, auquel s'ajouterait
un
contrôle de la hausse des loyers par la Régie du logement,
nous apparaît la meilleure façon d'éviter que les
locataires soient délogés massivement. Il faudra toutefois, et
nous insistons particulièrement sur ce point, donner à la
Régie du logement toutes les ressources nécessaires afin
d'appliquer ces mesures et, ainsi, faire en sorte qu'elles ne demeurent pas
lettre morte.
Rappelons également que les locataires occupant un logement
propriété d'une personne morale sont déjà
prémunis contre les reprises de possession et bénéficient,
par conséquent, d'un droit illimité au maintien dans les
lieux.
Une autre mesure visant la protection des locataires est d'interdire les
travaux de restauration majeurs autres qu'urgents, nécessitant
l'évacuation du locataire, lorsque ces travaux sont
exécutés dans le but d'évincer les locataires et, ainsi,
de faciliter la conversion.
Si, du point de vue de la protection des locataires, cette mesure est
des plus appropriées, nous croyons qu'elle ira à l'encontre d'une
des attentes municipales, soit une augmentation des travaux de restauration et
d'entretien. En effet, nous pensons que plusieurs propriétaires
pourraient ne pas entreprendre de tels travaux afin de ne pas encourir les
peines monétaires prévues dans le document ou encore se voir
interdire l'autorisation de convertir plus tard leur immeuble. Toutefois, les
pratiques actuelles relatives aux travaux de restauration majeurs - surtout
dans certaines régions de la province et particulièrement dans la
grande métropole - nous démontrent la nécessité
d'une telle mesure. Elle aussi devrait permettre de sécuriser les
locataires.
Notre dernier commentaire en regard de la protection des locataires a
trait à l'instauration d'un guichet spécial à la
Régie du logement afin de fournir toute l'aide nécessaire aux
personnes âgées ou handicapées.
Nous sommes d'accord avec cette mesure et nous croyons, de plus, que
tous les locataires devraient avoir accès à ce service. Nous
croyons que l'achat d'une première propriété comporte une
part d'inconnu pour toute personne. L'achat en copropriété divise
en comporte davantage. Ce guichet spécial devrait donc, à notre
avis, être accessible à tout ménage touché par la
conversion et non uniquement aux personnes âgées ou
handicapées.
Examinons maintenant les mesures visant la protection des
acquéreurs. Si, au cours des derniers jours, la plupart des commentaires
rapportés traitaient de la protection des locataires, nous croyons qu'il
est tout aussi important d'accorder une protection adéquate aux futurs
acquéreurs dont ce sera souvent la première
propriété. Cette protection devrait être équivalente
à celle qu'accorde la loi sur la protection du consommateur. Le logement
doit être considéré comme un bien de consommation.
Nous sommes d'accord pour ne pas soumettre les immeubles convertis
à des normes physiques particulières. Nous croyons qu'on ne doit
pas tenter de modifier la qualité des bâtiments à convertir
pour en faire des logements plus luxueux, mieux insonorisés, mieux
isolés, etc.
Quant au rapport d'expert qui devrait être remis à tout
acquéreur éventuel, nous croyons qu'il devrait porter sur
l'ensemble de l'immeuble et non uniquement sur les parties communes. Ceci est
bien important. Ce rapport devrait être équivalent à un
rapport d'évaluateur, afin de pouvoir servir aux acquéreurs lors
de leur demande de financement hypothécaire. Le contenu de ce rapport
d'expert devrait être déterminé par voie législative
et être aussi détaillé que possible.
Nous croyons que l'acquéreur éventuel,
particulièrement celui pour qui c'est l'achat d'une première
propriété, doit obtenir la meilleure information possible avant
de prendre sa décision. On devrait également indiquer clairement,
dans le rapport d'expert, la méthode ayant conduit à
l'évaluation et son degré de précision.
Par ailleurs, le document du gouvernement demeure muet sur
l'identification de l'expert accrédité pour faire ce rapport. Il
y aurait donc lieu, dans la loi, de clarifier ce point. Ce rôle pourrait
être confié à des professionnels dont c'est le rôle
traditionnel, par exemple, les architectes, les ingénieurs, les
évaluateurs agréés ou autres.
Pour ce qui de l'obligation de produire un prospectus, nous ne voyons
pas pourquoi on devrait la restreindre aux immeubles de cinq unités ou
plus. Une protection adéquate des acquéreurs commande un
traitement égal pour tous. Le prospectus devrait donc être une
mesure obligatoire dans tous les cas de conversion.
Nous croyons également que cette proposition ne sera efficace que
dans les mesures où la loi déterminera le contenu obligatoire du
prospectus, les catégories de personnes ou organismes autorisés
à le rédiger et un organisme de surveillance gouvernemental qui
devrait en approuver le contenu. Bien que ces mesures additionnelles
alourdissent le processus de conversion, nous voyons que c'est là la
seule façon de rendre opérationnelle l'exigence d'un
prospectus.
Regardons, en troisième lieu, les mesures visant la protection du
parc de logements locatifs. Le gouvernement énonce que, si le suivi du
rythme de conversion au l'arrivée de problèmes liés
à des conjonctures économiques et sociales devait
révéler des tensions dans certains segments du marché, il
serait possible d'intervenir rapidement afin de limiter ou d'interdire la
conversion dans ce secteur.
Le seul énoncé de ce principe est, à notre avis,
insuffisant. Afin que cette intervention soit rapide et efficace, nous croyons
que la loi devra prévoir spécifiquement quelles pourraient
être les mesures applicables. À notre avis, la seule interdiction
de convertir ou l'imposition d'un moratoire partiel ne ferait qu'augmenter les
risques de spéculation dans ces zones.
Vous avez eu également ce message à Montréal, entre
autres, de la ville de Montréal. Il faudrait prévoir, dans ces
cas, des programmes spéciaux d'intervention touchant la construction de
logements destinés à des ménages à revenu
modéré, la conversion ou le recyclage d'immeubles pour des
coopératives ou des organismes sans but lucratif, ou encore des
programmations spéciales de supplément au loyer ou
d'allocation-logement applicables dans ces zones.
De plus, le gouvernement devrait nommer un organisme responsable du
suivi de l'évolution du rythme de conversion et prévoir les fonds
nécessaires pour ce faire. Étant donné notre accord avec
la proposition du gouvernement de désigner la Régie du logement
pour accorder ou refuser l'autorisation de convertir, nous croyons que cet
organisme devrait aussi être chargé du suivi de l'évolution
du rythme de conversion. À cette fin, on devra s'assurer que la
Régie dispose des ressources nécessaires pour remplir
adéquatement ce rôle. On devrait accorder ou refuser
également aux municipalités le rôle d'interlocuteur
privilégié dans les mesures avancées par la régie
en vue d'éliminer ces tensions.
Par ailleurs, nous croyons que pour rencontrer les objectifs provinciaux
et les attentes municipales, il faut que la levée du moratoire
s'inscrive dans le cadre d'une éventuelle politique globale de
l'habitation, attendue depuis longtemps. C'est pourquoi, nous proposons
certaines mesures complémentaires.
Tel que mentionné précédemment, la ville de
Québec voit dans la conversion, un moyen de
régénérer les quartiers, alors que le gouvernement
provincial la perçoit d'abord comme un moyen d'aide à l'accession
à la propriété. Compte tenu du rythme lent de conversion
anticipé pour les cinq prochaines années et de l'ensemble des
mesures restrictives élaborées par le document gouvernemental,
auxquelles la ville accorde son appui, nous croyons qu'il faudra instaurer des
mesures additionnelles en vue d'appuyer l'accession à la
propriété et la régénérescence des
quartiers. (10 h 30)
Concernant l'accession à la propriété, il y a donc
lieu de mettre sur pied des mesures permettant d'élargir le bassin de
clientèles potentielles. À cette fin, nous suggérons de
mettre en place un programme d'accession à la propriété
permettant aux ménages ayant peu d'épargnes de pouvoir
accéder au financement.
De plus, dans le but de favoriser l'acquisition de logements convertis
par les locataires en place, il y a lieu de leur faciliter la tâche en
leur permettant d'avoir accès à une assistance technique qui
pourrait être dispensée par les groupes de ressources techniques,
communément appelés GRT, qui ont acquis, dans le domaine de la
conversion, une expertise de premier ordre.
Il y a lieu, d'autre part, de modifier le programme d'aide à la
restauration Canada-Québec en élargissant les conditions
d'admission et en le rendant plus généreux. Finalement, un
programme d'allocation-logement devrait progressivement être
instauré afin de limiter à un niveau acceptable le taux d'efforts
des ménages pouvant habiter ces logements.
En conclusion, M. le Président, nous allons vous faire part de
nos recommandations en vue de lever le moratoire. D'abord et encore une fois,
nous précisons les principaux points qui font que nous nous
prononçons en faveur de cette levée. Ces points sont le droit au
maintien dans les lieux pour une période illimitée - je vous
avoue que nous y apportons une attention tout à fait particulière
- également, une protection adéquate des acquéreurs, en
leur fournissant une information la plus complète possible et l'octroi
à la Régie du logement de toutes les ressources
nécessaires, en vue de mettre en oeuvre toutes les mesures
préconisées dans le livre blanc du gouvernement et celles que
nous vous proposons.
Nous proposons de lever le moratoire et de le remplacer par une loi
adaptant la plupart des mesures d'encadrement proposées dans le livre
blanc du gouvernement; d'instaurer un guichet spécial à la
Régie du logement afin de fournir toute l'assistance nécessaire
à toute personne touchée par la conversion; d'obliger le
propriétaire convertisseur à fournir, à tout
acquéreur éventuel, un rapport d'expert portant sur toutes les
parties de l'immeuble et non pas seulement sur les parties communes;
d'énoncer, dans la loi, le contenu obligatoire de ce rapport d'expert,
la méthode ayant conduit à l'évaluation qu'il contient et
à son degré de précision; de même que d'identifier
les catégories de personnes ou organismes accrédités en
vue de le rédiger; de rendre obligatoire la production d'un prospectus
quelle que soit la taille de l'immeuble touché; de déterminer les
contenus obligatoires de ce prospectus; de nommer un organisme gouvernemental
chargé de vérifier la conformité du contenu du prospectus
aux exigences légales et de l'approuver; de prévoir les mesures
spécifiques applicables en vue de réduire les tensions qui
pourraient
survenir dans certains segments du marché locatif; enfin,
d'accorder à la Régie du logement - et c'est encore bien
important - le mandat d'effectuer le suivi de l'évolution du rythme de
conversion. Nous soulignons ici encore l'importance d'accorder à cet
organisme les ressources nécessaires en vue de remplir
adéquatement les nouvelles fonctions qui lui seront dévolues et,
ainsi, d'assurer une protection réelle aux locataires touchés par
la conversion. Nous proposons d'assurer aux municipalités l'accès
aux analyses de la régie - c'est bien important -et de leur accorder le
rôle d'interlocuteurs privilégiés dans l'élaboration
de propositions en vue d'éliminer les tensions dans certains segments du
marché. Je pense que les municipalités sont bien placées
pour être capables de jouer ce rôle d'interlocuteur auprès
de la Régie du logement et également avec elle.
Nous croyons utile de répéter ici qu'à notre avis,
la conversion devrait s'inscrire dans une politique globale d'habitation et
qu'à cette fin il y aurait lieu de mettre en place un programme
d'accession à la propriété, de favoriser l'accès de
ces locataires à une assistance technique dispensée par les
groupes de ressources techniques, comme nous l'avons dit tout à l'heure,
de modifier te programme d'aide à la restauration Canada-Québec -
nous le souhaitons de tout coeur, on sait qu'il y a des pourparlers en cours -
d'instaurer progressivement un programme d'allocation-logement afin de limiter
à un niveau acceptable le taux d'efforts des ménages pouvant
habiter ces logements.
En terminant, nous tenons à vous remercier, encore une fois, M.
le Président et messieurs et mesdames de la commission, de nous avoir
permis de venir nous exprimer sur ce sujet. Nous espérons que nos
commentaires permettront de vous aider, face à la décision que
vous aurez à prendre relativement à la levée du moratoire,
afin de respecter les droits de tous ceux et celles qui seront touchés
par la conversion. Nous demeurons à votre disposition pour toute
question relative à notre position sur ce sujet. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Rochefort): Merci de votre
présentation. M. le ministre.
M. Bourbeau: On a combien de temps?
Le Président (M. Rochefort): Treize minutes.
M. Bourbeau: Je remercie les représentants de la ville de
Québec de leur présentation. Nous comprenons, à la lecture
du mémoire de la ville de Québec, qu'elle est essentiellement
favorable à la levée du moratoire. Est-ce bien cela?
M. Vézina: Oui, M. le ministre.
M. Bourbeau: Bon! Je vous fais répéter parce que
vous pouvez vous attendre, lorsque l'Opposition va prendre la parole, que le
député de Shefford va dire que j'ai mal saisi la lecture du
rapport et qu'effectivement vous êtes contre, que c'est moi qui
l'interprète mal! Alors, au moins, on va avoir cela au Journal des
débats.
M. Vézina: M. le ministre, nous sommes favorables, mais
toujours, bien sûr, avec certaines mesures...
Des voix: Ah! Ah!
M. Vézina: ...que nous avons ajoutées et dont vous
avez pris connaissance dans notre mémoire.
M. Bourbeau: Et auxquelles je viens! Mais quand ce sont des
mémoires qui sont contre, on ne fait jamais ces mêmes
distinctions. On remarque une chose, il n'y a personne qui est vraiment
totalement contre, ni personne qui est totalement pour. Les gens sont
plutôt contre ou plutôt pour et avec des améliorations. Bien
sûr, on nous suggère une panoplie d'améliorations et c'est
justement l'avantage de ces consultations. Cela nous permet de voir encore
davantage, si on avait besoin de le faire, quels sont les vrais
problèmes sur le plancher des vaches. Également, cela nous permet
d'entrevoir des avenues de solution à la lumière des expertises
des gens qui se présentent devant nous.
Alors, vous y êtes favorables parce que vous affirmez que cela va
permettre une meilleure accessibilité à la
propriété pour les ménages locataires. Vous parlez de
l'importance, également, de faire des travaux de restauration pour
améliorer et conserver le stock locatif. Finalement, vous
suggérez que le gouvernement mette sur pied des programmes d'aide pour
améliorer le stock locatif et pour permettre l'accès à la
propriété.
Dans son mémoire à la commission, dans les propositions
qu'elle a faites, la ville de Montréal a laissé entendre qu'elle
serait intéressée à avoir un mot à dire dans la
possible conversion d'immeubles. Elle parlait de permettre la conversion dans
des cas précis. Dans votre esprit, comment voyez-vous cette idée
de la possibilité ou de l'opportunité que les
municipalités aient un mot à dire dans les conversions en
copropriété? Par exemple, croyez-vous que les
municipalités devraient être en mesure d'imposer sur leur
territoire des limites, soit géographiques ou autres, aux conversions
d'immeubles en copropriété?
M. Vézina: M. le ministre, lors de
l'approbation de notre mémoire, nous avons
considéré cette hypothèse. Nous en sommes venus à
la conclusion... Remarquez bien qu'on dit toujours que Montréal est une
grande ville; c'est une grande métropole. Les Montréalais nous
disent toujours: lorsqu'on vient à Québec, on vient à la
campagne. Mais, Québec est quand même une ville de taille moyenne;
il y en a d'autres également en province. Ceci est dit sans
méchanceté! On sait...
Le Président (M. Rochefort): On se croirait en plein coeur
des séries éliminatoires de fin de saison au hockey.
M. Vézina: On dit que, bien sûr, Montréal est
une ville un peu particulière, c'est une grande métropole. Elle
peut, effectivement, vivre... Nous avons suivi les délibérations,
d'un peu loin, cette semaine, par l'entremise des médias. Effectivement,
nous avons discuté quelque peu, je dois vous dire, avec quelques
représentants de la ville de Montréal. Eux voient le
problème un peu différemment de nous. En fin de compte, on peut
en arriver aux mêmes fins. Eux demandent, si je comprends bien, la
levée du moratoire par voie de veto et dire: À notre demande,
c'est nous qui...
Je vous avoue qu'à Québec, nous ne sommes pas tout
à fait du même avis. On croit que cette levée du moratoire
-d'ailleurs, on en fait part dans notre mémoire et également dans
le texte que je viens de vous livrer - faite d'une façon partielle par
chacune des municipalités, pourra entraîner tout aussi bien autant
de problèmes, sinon plus, créer autant de spéculation, en
fait, dans certains secteurs. Remarquez bien que je parle au plan provincial.
Montréal peut vivre, surtout dans son centre-ville, certains
problèmes particuliers, mais nous n'y croyons pas beaucoup.
Enfin, nous croyons que si le moratoire doit être levé, il
devrait l'être d'une façon générale tout en
étant bien encadré par des mesures législatives,
c'est-à-dire de bien encadrer la position, la levée du moratoire
afin qu'on laisse aussi agir les forces du marché et que, de cette
façon, l'offre et la demande viennent naturellement s'équilibrer.
C'est ça qu'on a écrit ici. On se dit: La municipalité
pourrait établir des quotas. C'est bien beau, mais on n'est pas
sûr de cela. Nous craignons également que, de cette façon,
les municipalités se fassent accuser d'être à la solde des
spéculateurs, comme je vous le faisais remarquer, et ce, peu importent
les quotas fixés. Les quotas, également, entraîneraient
peut-être les prix à la hausse, au profit des spéculateurs.
Alors, pour ces diverses raisons, je vous avoue que nous ne sommes pas
tellement favorables à cette proposition qui vous a été
formulée. Nous vous donnons notre commentaire d'une façon franche
et sincère.
M. Bourbeau: Je ne m'attendais pas à autre chose. Un
problème qui subsiste avec la situation actuelle, c'est qu'on a un
moratoire qui interdit la conversion en copropriété et que,
pourtant, il se fait des conversions en copropriété. Il s'en fait
essentiellement de deux façons. Premièrement, d'une façon
que je qualifierais de légale, qui est la voie de l'indivision, en ce
que des gens achètent à deux, trois ou quatre des duplex, triplex
ou quadruplex et délogent tous les locataires en reprenant possession
chacun d'un appartement. Après cela, on convertit en
copropriété et on vend les appartements un par un. C'est une
façon de convertir actuellement. Dans la proposition gouvernementale
globale, on propose d'interdire justement la reprise de possession dans ces
cas, dans les cas d'indivision des immeubles de moins de cinq logements.
Comment réagissez-vous par rapport à cette proposition?
M. Vézina: Nous réagissons très bien parce
que vous avez raison. Actuellement, il n'y a pas d'encadrement et, même
à Québec, nous vivons cette situation. Nous ne la vivons
peut-être pas d'une façon aussi grande que Montréal peut la
vivre, mais nous la vivons dans certains quartiers, entre autres, dans le
quartier Montcalm ou tes quartiers de la haute-ville, non pas à grande
échelle, mais nous vivons cette situation. Alors, on se dit - et nous
sommes d'accord avec vous également, M. le ministre - que si vous
légiférez d'une façon bien correcte et bien
encadrée avec des mesures très strictes, nous allons y arriver
à cette levée du moratoire sans qu'il y ait une débandade,
sans qu'il y ait une course folle. C'est parce qu'on s'est aperçu cette
semaine, en écoutant tous les propos venant de Montréal, que,
demain matin, si la levée du moratoire se fait, tout le monde se ramasse
dans la rue, tous les locataires, parce que tout le monde va enregistrer une
demande de conversion de la propriété.
M. le ministre, nous sommes d'accord avec ces propositions pour autant
que vous légiférez parce que, présentement, en ayant une
législation oui, mais qui laisse encore des trous, une passoire, on sait
qu'il y aura peut-être... Vous savez, les Québécois - je ne
veux pas être méchant - on est parfois des spécialistes
à essayer de contourner toujours nos lois et règlements. Il ne
faudrait quand même pas prendre tous les Québécois pour des
gens du même acabit. Il y a quelques cas d'exception. En
général, les Québécois sont capables de respecter
les lois et de faire les choses d'une façon civilisée et ce, nous
y croyons à savoir que nous pouvons respecter les lois, cela se fait
partout en
Amérique du Nord. Quand vous nous donnez le droit
illimité, on trouve cela important parce que, je vous le disais tout
à l'heure, nous ne le trouvons pas en Amérique du Nord; je ne
sais pas si cela s'est dit cette semaine. Sur le continent
nord-américain, habituellement, cette levée de moratoire se fait
pour une période de deux ans, le droit du maintien dans les lieux, pour
le locataire, est très limité: deux ans ou cinq ans.
Partant de là, on se dit, M. le ministre, si vous nous donnez une
loi qui est bien appropriée, bien juste, tout cela se fera dans les
règles et sans que personne ne soit délogé, cela se fera
ni au détriment des uns, ni au détriment des autres.
M. Bourbeau: Ce que vous me dites, c'est que le droit au maintien
illimité dans les lieux, pour les locataires, que l'on propose, est
supérieur à ce qu'on retrouve partout dans les autres
juridictions en Amérique. (10 h 45)
L'autre façon de contourner le moratoire, qui est assez
utilisée présentement à Montréal, dans certains
secteurs, c'est le biais des réparations majeures - on parle de
réparations majeures qui ne sont pas urgentes ou nécessaires,
parce qu'on ne peut pas faire grand-chose si le toit coule et si l'eau entre
dans la maison, il ne faut quand même pas commencer à faire des
procès de trois ans pour savoir si on va réparer le toit - mais
supposons qu'un propriétaire décide qu'il veut faire des
réparations à sa propriété qui ne sont ni urgentes,
ni nécessaires, mais qui sont utiles, le problème qui se propose,
avec la législation actuelle, c'est qu'il peut envoyer un avis à
un locataire et, dix jours après, lui demander de sortir. Si la sortie
est pour plus d'une semaine, le préavis doit être d'un mois. Au
bout d'un mois, le locataire doit être sorti avec armes et bagages pour
une période de temps qui peut durer plusieurs mois, si les travaux sont
importants. Au terme des travaux, bien sûr, il est très rare que
le locataire revienne. D'abord, il ne veut pas encourir un deuxième
déménagement et, ensuite, on tente de lui demander un loyer
beaucoup plus cher - les locataires ne sont pas toujours au courant de tous
leurs droits -en pratique, cela aura pour effet de vider la
propriété de ses locataires. Dans ce cas, le propriétaire
peut ou bien le relouer - et il le reloue souvent à des loyers beaucoup
plus importants qu'il ne devrait, même en tenant compte du coût des
réparations - ou bien s'adresser à la Cour supérieure et
obtenir le droit de convertir en copropriété.
Plusieurs des intervenants nous ont demandé de regarder ce
problème et de donner au locataire le droit de discuter, de mettre en
doute et, peut-être même, de contester l'opportunité, pour
un propriétaire, de faire des travaux majeurs autres qu'urgents.
Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Vézina; M. le ministre, du fait que j'ai une équipe
avec moi et que nous avons travaillé ensemble, je suis heureux que vous
me posiez la question. Je vous donne seulement un élément de
réponse et je demande à mon collègue, M. Beaulieu,
urbaniste, de vous donner également leur version des faits.
Je fais une parenthèse en réponse à votre
interrogation, en disant: d'où l'importance pour le gouvernement de
donner des pouvoirs et des ressources à la Régie du logement. Si
on dit que la Régie du logement devra avoir un guichet unique et qu'elle
devra exercer un contrôle, il faut que celle-ci ait des ressources lui
permettant de vraiment contrôler toute cette question.
Maintenant, je vais demander à M. Beaulieu, du Service
d'urbanisme, de répondre de façon un petit peu plus
élaborée à votre question.
M. Beaulieu (Benoît): Effectivement, il est vrai que cela
pourrait être une solution de permettre au locataire de contester
l'opportunité des travaux. Encore là, il y aura peut-être
des contestations et les locataires reviendront en disant: La régie est
toujours du côté des propriétaires. Ou moment que la
régie va accorder des travaux majeurs, on va juger que, oui, il y a lieu
d'en faire. Est-ce qu'on peut, de cette façon, encore là, venir
limiter le droit de propriété et dire au propriétaire: Ce
n'est pas le temps de faire des travaux majeurs? Je ne vois pas tout à
fait comment on pourrait le contester. Je suis en faveur que le locataire
puisse contester l'opportunité des travaux, car il y a toujours la
question de l'évincement du locataire, tel que c'est mentionné
dans le livre blanc. Je pense que c'est peut-être le point le plus
difficile d'application de prouver que les travaux sont faits dans le but
d'évincer les locataires. Il ne faut pas oublier non plus qu'il n'y a
jamais de restriction au retour possible du locataire. Le locataire est
toujours libre de revenir. Je pense qu'à ce sujet, la question serait
d'apporter une attention particulière, après les travaux,
à la façon dont la régie comptabilise et permet à
un propriétaire de transmettre les coûts au locataire.
Actuellement, la régie a des formulaires. On peut calculer, on peut
estimer combien le loyer peut coûter à la suite de certains
travaux de restauration. Je pense que, dans la levée du moratoire, il va
falloir apporter une intention particulière à cela. Il faut
donner le droit au maintien dans les lieux pour une période
illimitée et c'est toujours à l'intérieur de la
capacité de payer du locataire. Si on permet au propriétaire de
faire des travaux majeurs et que, par la suite, le locataire se trouve avec des
augmentations de 100 $, 150 $ par
mois, ce ne sont pas tous les locataires comme cela, à
l'intérieur d'une période de deux ou trois mois qui pourront
payer. Je ne pense pas en tout cas. À mon avis, c'est un point à
surveiller. Il va falloir réévaluer la façon de
transmettre au locataire les augmentations de loyer à la suite de
travaux de réparations.
Pour ce qui est de permettre au locataire de contester les travaux de
réparation, je pense que cela pourrait être une solution.
Le Président (M. Rochefort): Merci. M. le
député de Shefford maintenant.
M. Paré: Oui, merci, M. le Président. Je vous
souhaite la bienvenue. Je dois vous dire que vous avez un très bon
mémoire qui mérite d'être considéré. Je ne
ferai pas de différence entre Montréal et Québec. Je vais
plutôt faire un rapprochement. S'il y a des municipalités qui
seront touchées, ce seront spécialement Montréal et
Québec. C'est évident. Vous allez m'excuser si j'ai un
préambule un peu long, c'est que, malheureusement, on a douze minutes
pour' discuter. Cela ne donne pas grand temps et vous avez touché
tellement de sujets que je voudrais les toucher aussi avant qu'on passe
directement à des questions.
Premier point, vous dites: Oui, on est d'accord avec la levée du
moratoire, parce qu'il y a des objectifs et que cela pourrait aider, à
condition que... Je pense que c'est bon de le dire. Il faut le mentionner. Dans
une de vos dernières recommandations, vous avez parlé, entre
autres, d'une politique globale d'habitation. Vous dites: Cela prend des
programmes d'aide à l'accès à la propriété
pour que cela puisse se concrétiser, et on sait que tous les programmes
d'aide qui existaient ont été abolis depuis un an. Vous dites que
cela prend l'appui des groupes de ressources techniques. C'est indispensable
pour aider ceux qui sont déjà en place. Vous savez qu'on a
annoncé la fin de l'aide aux groupes de ressources techniques d'ici
à trois ans.
Cela prend des programmes de rénovation. Vous avez dit en
même temps que PARCQ n'est presque pas applicable. Cela prendrait des
mesures. Quand on parle de cela, on ne parle pas d'un cas isolé. On
s'aperçoit que cela touche à tout. Nous, ce qu'on dit - quand je
dis nous, je parle d'à peu près tous les intervenants sans
exception - c'est que, puisqu'on sait qu'il y a des trous dans l'application du
moratoire actuel, corrigez-les immédiatement - et le ministre a en pris
l'engagement dès le mois d'octobre. Quand on aura corrigé cela,
est-ce qu'on doit lever le moratoire ou emprunter une démarche
plutôt logique, puisque que le ministre a dit qu'il déposerait un
document, avant la fin de l'année, sur une politique globale? Est-ce
qu'on ne doit pas avoir une politique globale avant de toucher au moratoire
qui, lui, touche tous les autres programmes d'habitation? Vous l'avez
spécifié vous-mêmes.
C'était le premier point. D'ailleurs, quand on dit que
l'objectif, c'est l'accès à la propriété pour les
plus démunis, je dois vous dire... Je vais citer le document de
l'Association des propriétaires du Québec, deux phrases qui
disent: "La levée du moratoire ne permettra l'accessibilité...
qu'à un nombre restreint de locataires, ceux qui ont déjà
probablement les moyens d'être propriétaires." Dans leur
conclusion: "Le ministère, avec le projet de loi tel qu'exprimé
présentement, atteindra exactement les résultats contraires
à ceux visés." Là je ne sais pas. Je cite tout simplement,
quand on va au fond du dossier comme tel avec des objectifs qui sont un peu
contradictoires.
Quand vous avez dit, et je comprends, que vous ne pouviez pas être
à Montréal, même ceux de Montréal n'ont pas pu
suivre parce que ce furent des journées intensives. Les gens ont autre
chose à faire. Nous, on est payés pour le faire. Quand vous
dites: Est-ce qu'on est allé au fond du dossier sur le droit
illimité du maintien dans les lieux? Je dois vous dire, tous en ont
parlé, je pense, presque sans exception. Je ne pense pas qu'il y ait un
groupe qui n'en ait pas parlé. Ce qui se dégage de cela - je
pense que le ministre va le reconnaître, ce n'est peut-être pas son
idée, mais c'est ce qui s'est dégagé - c'est que
théoriquement, c'est de toute beauté; mais, en pratique, c'est
autre chose.
Cela a été confirmé par des études, cela a
été confirmé par toutes sortes d'analyses, mais surtout
par le vécu des gens de tous les quartiers centraux de Montréal.
Oui, c'est beau de dire qu'on a un droit illimité, mais à
condition qu'on ait la capacité de payer. C'est évident que
dès qu'on va transformer ou permettre la transformation et que, dans un
immeuble, il y a déjà quelques appartements qui sont vendus -
vous le savez, vous êtes du domaine municipal - il y a une augmentation
considérable des taxes qui sera transposée sur le logement.
Augmentation de taxes, frais communs, frais de conversion, ce sont des frais
qui seront transposés. Et la rénovation est permise avant, mais
elle le sera aussi dès qu'une majorité décidera
d'entreprendre des travaux majeurs. Les prix vont tellement augmenter que ceux
qui ont déjà de la misère à arriver n'auront pas
d'autre choix que d'abandonner leur droit et de partir. En plus, il faut
être logique. Pour des gens qui veulent devenir propriétaires ou
qui veulent s'installer ici, en banlieue du Vieux-Québec ou du
Parlement, qu'est-ce que ce sera de vouloir acheter ce droit pour
2000 $, 3000 $, 4000 $ et même 5000 $, pour avoir le logis qu'ils
désirent. Donc, l'achat du droit de maintien.
Quant aux pressions; il y a de gens qui sont venus me dire qu'ils ont
vécu cela et que c'est intenable, dans un même milieu, d'avoir des
propriétaires, des copropriétaires, des locataires avec une
protection et des locataires de deuxième niveau sans protection. Comment
vivre cela à l'intérieur? La pression devient tellement forte
que, finalement, les gens partent. J'ai un chiffre qui a été
amené par Bell Canada - vous m'excuserez, je n'ai pas les chiffres de
Québec mais ceux de Montréal: 100 000 déménagements
en 1987. Donc, s'il y a 100 000 personnes, cette année, qui sont
déménagées cela voudrait dire, si c'est ainsi chaque
année, 100 000 personnes qui perdent leur droit illimité d'un
seul coup par année.
M. Bourbeau: Quand même! M. Paré: Bien, je
m'excuse.
M. Bourbeau: Ce ne sont pas tous des locataires, ceux qui
déménagent, ce peut être des propriétaires
aussi.
M. Paré: En tout cas, la plupart. De toute façon,
100 000 est un chiffre important en nombre de déménagements
annuels. Il ne faut pas oublier cela. Ce sera quoi le rythme de perte de ce
droit illimité? Donc, c'est très beau, théoriquement.
M. Bourbeau: Ils ne déménagement pas tous dans des
condos. Ils peuvent déménager dans d'autres...
Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous
plattl
M. Paré: J'ai douze minutes. Vous avez refusé qu'on
ait le temps nécessaire pour discuter avec les gens. J'aimerais avoir
mon temps pour avoir la chance de discuter avec les gens.
M. Bourbeau: II faut quand même dire des choses
sensées.
M. Paré: Vous avez dit aussi, et je comprends, qu'il n'y
aura probablement pas beaucoup de transformations, en tout cas, pas autant que
certaines personnes le disent. Sauf que moi, je dois vous dire que 1 % de
conversion, dans des quartiers centraux, je n'y crois pas. Ce qu'on dit sur
cela, c'est que cela fera baisser les prix. Tout nous prouve, à l'heure
actuelle, que c'est le contraire. Cela ne fait pas baisser le prix des
appartements. La preuve, regardez tout ce qui se bâtit, ici, en logements
neufs. Cela se bâtit comme jamais et les prix augmentent comme jamais. Ce
sera la même chose; la preuve, pour ce qui a déjà
été transformé, il y a des augmentations de prix. Donc,
les gens ne peuvent pas. Il ne faut pas oublier quelque chose. L'accès
à la propriété c'est bien beau, mais c'est prouvé
par ce qui s'est fait ailleurs dans les grandes villes, on a eu des exemples
à New York et à Paris, entre autres, que cela a fait en sorte que
la majorité des appartements vendus en copropriété
étaient reloués mais à un prix supérieur de
beaucoup et que les gens qu'on a déplacés ont été
déplacés dans des banlieues où, finalement, cela leur
coûte plus cher.
J'aurais une première question. Étant donné que
vous êtes du domaine municipal, j'aimerais savoir quel point de vue vous
partagez finalement concernant la taxation. On retrouve dans le mémoire
de l'Union des municipalités du Québec et je cite: "La
fiscalité municipale. La conversion d'un immeuble en
copropriété entraîne généralement une hausse
significative d'évaluation.
Cette hausse n'est que le reflet de la valeur marchande de l'immeuble.
En effet, l'évaluation municipale est basée sur cette valeur
marchande. Il s'agit d'un élément fondamental de la
fiscalité municipale.
Pour l'Union des municipalités du Québec, il est essentiel
que les règles régissant l'évaluation des
copropriétés ne remettent pas en cause ces principes." C'est le
document de l'Union des municipalités du Québec.
Par contre, le document de la Chambre des notaires du Québec dit:
"C'est une pratique courante pour les municipalités de réviser
à la hausse l'évaluation municipale d'un immeuble converti.
À notre avis, cette hausse de l'évaluation foncière
résultant de la conversion est inacceptable."
Vous, du conseil municipal de Québec, à laquelle des deux
versions vous adhérez? Le maintien de la fiscalité municipale
telle qu'elle est, donc une augmentation considérable des taxes pour les
locataires en place, pour les nouveaux acquéreurs, cela veut dire une
augmentation généralisée pour tous les quartiers à
ce moment-là, ou la version de la Chambre des notaires qui dit que c'est
inacceptable et qui demande qu'on révise la fiscalité
municipale?
M. Vézina: Bon, M. le député, vous nous avez
dit également beaucoup de choses. Nous vous en avons dit beaucoup, mais
vous nous en avez dit beaucoup. Bien sûr qu'au tout départ,
suivant la position qu'on adopte, on peut seulement dire: Écoutez, la
levée du moratoire est inacceptable dans les conditions actuelles, et il
faut garder le statu quo. Cela fait douze ans que cela dure au Québec.
Il faut penser également à toutes les classes de la
société. Cela fait dix ans que je suis conseiller municipal dans
un
district résidentiel ouvrier du bas de la ville et j'ai
été directeur de caisse dans un endroit où il y avait des
petits travailleurs. J'ai toujours conçu qu'il fallait que je travaille
pour tout le monde et non pas seulement pour les plus démunis. Les plus
démunis, on doit leur apporter une attention particulière, c'est
notre devoir de le faire. Mais on ne doit pas le faire toujours au
détriment de tous ceux dont on pense, dès qu'ils travaillent dans
l'immobilier ou dans d'autres domaines, que ce sont des gros méchants,
des spéculateurs ou des gens qui exploitent les autres d'une
façon éhontée. Partant de là, cela dépend du
point de vue où on se place. (11 heures)
Tout d'abord, je reprends quand vous nous dites: Vous ne trouvez pas que
c'est prématuré? Si on pouvait le faire dans le cadre global
d'une politique éventuelle de l'habitation, ce serait peut-être
plus sécuritaire. L'un ne va pas sans l'autre. Je me dis: Pourquoi ne
pourrions-nous pas également procéder à la levée du
moratoire si M. le ministre - peut-être qu'il vous en a fait part cette
semaine - a apparemment l'intention de procéder à des
consultations dès l'automne? Je pense qu'il faut en venir là. Je
pense que vous êtes d'accord; vous avez bien dit: Nous sommes d'accord
avec toutes les mesures nécessaires pour pouvoir vraiment baliser tout
ce domaine d'accession à la propriété si on veut vraiment
qu'il n'y ait pas de déséquilibre entre les plus démunis
et ceux qui ne le sont pas. Mais également, à quel titre est-ce
qu'on pourrait ou qu'on devrait empêcher une certaine classe de la
société qui pourrait... On dit toujours, comme je le faisais
remarquer, qu'on est un peuple de locataires qui auraient la chance de devenir
propriétaires. Sur quelles raisons devrait-on se baser pour
empêcher les locataires de devenir propriétaires s'ils le
désirent, à un coût qui pourrait être plus abordable
que la construction de condominiums neufs? Je pense que nous y croyons
également, M. le député.
Quand vous nous parlez de la taxation, bien sûr que, à cet
effet, je vous avoue que nous acquiesçons dans le même sens que le
document qui a été livré à Montréal par
l'Union des municipalités. Nous ne pouvons pas faire autrement. Ne voyez
pas là le fait que le maire de notre Ville est actuellement le
président de l'UMQ. Il n'y a eu aucune collusion. Mais nous allons dans
le même sens à cet effet. Je ne partage pas tout à fait les
propos tenus par MM. les membres de la Chambre des notaires.
Tout cela pour vous dire, concernant l'assiette fiscale, bien sûr,
que les municipalités sont généralement favorables.
Pourquoi pas?
Maintenant, il faut, bien entendu, que tout cela soit
pondéré, mesuré. Je vous donne seulement un exemple de ce
qui peut arriver chez nous. Présentement, nous sommes, à
Québec, à la veille du dépôt d'un nouveau rôle
d'évaluation qui, je vous l'avoue, nous inquiète un peu,
beaucoup. On attend cela avec beaucoup d'appréhension. Que la
levée du moratoire se fasse ou non, indépendamment de cela, on
est en face de hausses de taxes qui pourraient survenir inévitablement
dans certains quartiers et cela nous fait peur. Alors, c'est le marché,
en fait, c'est la question du libre-échange du marché qui va
faire ce rapport de forces.
Tout cela pour vous dire que, si je prends vos arguments,
considérant qu'on vit dans un marché de libre entreprise, il faut
faire attention également, s'il y a des hausses tellement indues, qu'on
ne trouve pas preneur, qu'il n'y ait pas d'intérêt pour les gens
qui vont convertir ou qui vont... Vous nous dites: II est prouvé qu'il y
a des hausses qui sont inacceptables. J'en conviens. Dans mon secteur, M. le
député, il y a 25 ans, les logements se louaient entre 75 $ et
100 $ par mois et c'étaient des gros logements. Aujourd'hui, je dis
à mes gens de Saint-Sauveur: Ne vous attendez pas d'avoir des logements
qu'on va restaurer avec le programme qu'on avait antérieurement - sous
votre administration, M. le député, qui a été
très bien, comme sous l'administration actuelle - le programme de
restauration Québec-municipalités, la SHQ-municipalités,
PAREL et Loginove. Nous avons fait des choses extraordinaires.
On a dît: On a chassé les gens de leur milieu. Je vous
avoue que je suis un parmi ceux qui se sont toujours élevés
contre cela. Il y a sûrement eu des évictions, des gens qui n'ont
pas été capables de suivre le courant, mais, en
général, je regrette, selon moi qui vis depuis 50 ans dans un
quartier ouvrier, qui équivaut à peu près au quartier
Saint-Henri à Montréal et au quartier Saint-Charles, il n'y a pas
eu d'évictions massives qui ont fait que les gens ont été
expulsés. Jamais, on n'a pu me prouver... Je me suis toujours battu au
conseil de ville de Québec en disant: Prouvez-moi, avec chiffres
à l'appui... On me donnait des chiffres, mais je disais: Donnez-moi donc
les vraies sources, les preuves, et je n'ai jamais eu de réponse.
C'est beau citer des chiffres et dire qu'on va chasser les gens les plus
démunis. Nous sommes là également pour les
protéger. On doit protéger et informer ces gens-là. On
doit voir à leur transmettre l'information nécessaire. Est-ce
qu'on doit les prendre par la main et les conduire à la Régie du
logement pour prendre connaissance de leurs droits? C'est une autre affaire. M.
le Président, je vois que je suis peut-être long dans ma
réponse, mais je voulais vous faire part de mes...
Le Président (M. Rochefort): Je ne
porte pas de jugement sur la durée de votre réponse. C'est
simplement que le temps alloué aux deux formations politiques est
expiré. C'est ce que je voulais indiquer à tout le monde.
Maintenant, M. le ministre, un court mot de la fin?
M. Bourbeau: Oui, M. le Président. Tout en soulignant aux
membres de cette commission et, plus particulièrement, au
député de Shefford que nous n'avons pas mis fin au programme
d'aide -aux ressources techniques. Nous avons annoncé le maintien du
réseau de base des GRT, mais avec des modifications quant au financement
pour l'avenir qui s'orienterait plutôt vers des formes différentes
et autonomes de financement. Tout en spécifiant que j'ai annoncé
une politique globale d'habitation pour les prochains mois, je rappelle au
député de Shefford, pour la énième fois, qu'en neuf
ans, l'ancien gouvernement n'a pas trouvé le temps d'en pondre une. Je
souligne que, s'il y a 100 000 déménagements par année, de
ce nombre, il y a des propriétaires qui déménagent et il y
a des locataires qui s'en vont dans d'autres immeubles locatifs, donc qui n'ont
pas droit au maintien illimité dans les lieux et qui trouveront
toujours, dans les immeubles locatifs, la possibilité d'en avoir si ces
immeubles sont convertis. Je souligne que ce sont seulement les locataires qui
quitteraient un condo converti pour déménager dans d'autres
logements convertis en condo qui ne retrouveraient pas leur droit au maintien
illimité dans les lieux, soit à peu près 0,5 % du stock
locatif à Montréal. On est donc loin des drames que vous
évoquiez.
Je tiens à féliciter la ville de Montréal... la
ville de Québec - je ne retournerai pas dans les problèmes
Nordiques-Canadiens, je vais rester à la ville de Québec - pour
son mémoire positif, réaliste, pragmatique et qui dénote
une connaissance évidente de la problématique de l'habitation. On
connaît l'expérience que vous avez dans ce domaine. Je vous
répète, comme vous l'avez bien saisi, que notre intention est,
comme la vôtre d'ailleurs, je pense, de favoriser autant que possible
l'accès à la propriété à tous les
ménages québécois, mais en reconnaissant que ce sont
surtout les ménages les plus jeunes qui souhaitent accéder
à la propriété; en rappelant que, si on avait levé
le moratoire en 1978-1979 ou en 1981-1982, au moment où l'immobilier
était effondré, on aurait permis à des dizaines de
milliers de Québécois d'accéder à la
propriété pour une chanson, en leur donnant la possibilité
de réaliser des aubaines, car il y avait beaucoup d'aubaines sur le
marché à ce moment-là et, aujourd'hui, ces couples
seraient en mesure de contrôler leur propre milieu de vie.
Je vous réitère quand même que notre objectif est
également, en plus de l'accession à la propriété,
d'accroître la protection des locataires et c'est pour cela que j'ai
annoncé que, dès cet automne, j'ai l'intention de suggérer
au Conseil des ministres et à l'Assemblée nationale des
modifications à la loi 107 pour accroître le rôle de la
Régie du logement. Tous les gens de la Régie du logement,
derrière moi, sont très heureux de vous entendre
reconnaître l'importance de cette régie et suggérer
d'accroître ses pouvoirs. Nous allons certainement augmenter et resserrer
les droits des locataires, surtout contre l'éviction et la reprise de
possession intempestive. De cette façon, je pense que nous pourrons
atteindre les objectifs que nous avons annoncés et auxquels, je
comprends, vous souscrivez dans une très large mesure. Je vous
remercie.
Le Président (M. Rochefort): Merci. M. le
député de Shefford, de brèves remarques de
conclusion.'
M. Paré: Merci, M. le Président. Je dois dire que
le discours du ministre était un peu différent certains soirs
à Montréal où, voyant finalement les conséquences
de la loi actuelle dans des quartiers de cette ville, il a pris le ferme
engagement de légiférer dès la reprise des travaux pour
changer non pas nécessairement la levée du moratoire - ce n'est
pas l'engagement qu'il a pris - mais au moins modifier les trous dans la loi
actuelle. Je dois dire qu'il reconnaissait que plus de gens souffraient que ce
qu'on semble dire ce matin.
Quant le ministre disait tantôt: Si le moratoire avait
été levé au début des années quatre-vingt,
il y aurait eu des "bargains" à faire, ceux qui auraient pu profiter de
ces achats à taux réduit l'auraient fait sur le dos des plus
démunis. Ce n'était pas le temps d'acheter, en 1981-1982, pour
les petits propriétaires, alors que le taux d'intérêt
était à 22 % et que les gens étaient obligés de
vendre. Cela veut dire que ce ne sont que les riches qui auraient
acheté, et cela, sur le dos des plus démunis.
Ceci dit, je dois vous dire que je vous remercie beaucoup. Cela me fait
beaucoup de peine qu'on n'ait pas eu le temps de discuter davantage. J'aurais
eu plusieurs autres questions. J'espère qu'on aura la chance d'en
discuter autrement. Comme vous, dans votre mémoire, moi aussi j'ai une
inquiétude sur le fameux suivi de la levée du moratoire. On n'a
rien de précis là-dessus. On pourra toujours y revenir par
correctifs. Sauf que quand le mal est fait, on est mieux d'y aller par la
prévention, à mon avis. On peut présumer des choses, on
peut penser que cela ne se fera pas tellement, sauf que je dois vous dire que,
connaissant le cas des gens de mon coin et le cas de plusieurs
autres personnes... Des édifices qui étaient
évalués globalement à 70 000 $, 75 000 $ sont maintenant
évalués à peu près le même prix par logement
parce qu'ils sont en copropriété. Vous savez comme moi que la
"gentrification" se fait beaucoup dans les quartiers centraux. Cela ne se fait
peut-être pas sur une base catastrophique mais, avec la levée du
moratoire, avec la permission de le faire, ce sera une petite mine d'or, au
tout début - vous le savez - pour certaines personnes dans des quartiers
comme celui-ci. Là, il y a des gens qui risquent de souffrir. On
corrigera par la suite, mais, quand quelqu'un a déménagé,
quand quelqu'un a été expulsé de son logement - je vous ai
énuméré les façons qu'on va utiliser - quand c'est
fait... Il est bien plus facile de prévenir, surtout quand on est
à quelques mois d'une consultation sur une politique de la famille et
sur une politique de l'habitation. On est mieux de prévenir que de
guérir.
Je vous remercie beaucoup. Effectivement, vous avez des recommandations
qui méritent d'être étudiées avant qu'une loi... ou
avant qu'on décide de lever le moratoire. Ou moins, il faudrait qu'on
insère certaines de vos recommandations. Merci.
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le
député. Pour le mot de la fin, M. Vézina.
M. Vézina: M. le Président, mes collègues et moi
sommes heureux d'être venus vous rencontrer. Cela nous a permis de nous
exprimer sur ce sujet. J'ai bien apprécié les commentaires de M.
le ministre ainsi que ceux de M. Paré, porte-parole de l'Opposition. Je
pense qu'il y a des points de vue qui peuvent être partagés. On ne
doit . pas nécessairement être tout à fait d'accord, mais
je pense qu'on doit les prendre en considération. Vous soulevez des
inquiétudes, M. Paré et M. le ministre. Mais, M. le
Président Rochefort, vous qui avez présidé, au tout
début, l'étude du livre vert Se loger au Québec -
je m'en souviens très bien, on vous avait adressé un
mémoire en ce temps-là - on veut seulement vous dire que nous
sommes cohérents avec notre position de 1985.
On vous disait, dans notre mémoire de la ville de Québec
sur le livre vert Se loger au Québec, que nous
étions en faveur de la levée du moratoire. Aujourd'hui, nous
sommes venus vous dire dans quelles conditions cela doit se faire. Nous sommes
heureux de l'avoir fait. Nous vous remercions encore une fois. Nous voulons
vous dire que vous pouvez compter sur notre collaboration en tout temps. Si,
toutefois, il survenait des choses, nous serons à votre disposition pour
vraiment échanger nos points de vue avec les membres de la
Législature.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie infiniment
de votre participation et de votre contribution à nos travaux.
J'aimerais maintenant inviter les représentants du Mouvement des
caisses populaires et d'économie Desjardins à prendre place
à la table des invités, s'il vous plaît.
Messieurs, je vous souhaite la bienvenue parmi nous. Je vous demanderais
de vous présenter pour l'information de l'ensemble des membres de la
commission et du Journal des débats. J'aimerais attirer votre
attention sur les quinze minutes prévues pour vous permettre de faire
votre présentation. Les membres de la commission ont reçu votre
mémoire et ils ont eu l'occasion d'en prendre connaissance. Ils
souhaitent conserver un certain nombre de minutes pour discuter avec vous.
Bienvenue!,
Mouvement des caisses populaires et d'économie
Deajardins
M. Bergeron (Jean-Eudes): Merci, M. le Président, on va
essayer de répondre à vos exigences. Tout d'abord, mon nom est
Jean-Eudes Bergeron. Je suis président du conseil d'administration de la
la Société d'habitation Desjardins ainsi que du conseil
d'administration de la Confédération des caisses populaires. Je
représente la confédération à cette corporation
spécialisée en habitation. M. Irénée Bonnier,
président-directeur général de la Société
d'habitation Desjardins et M. Gilles Fortin, responsable des programmes en
habitation dans cette société-là aussi. (11 h 15)
Je dois vous dire que la Société d'habitation Desjardins
est un organisme provincial appartenant au Mouvement Desjardins qui chapeaute
six sociétés régionales en habitation, lesquelles
sociétés chapeautent aussi environ 40 sociétés
locales ou sectorielles au Québec. On s'est donné une structure
spécialisée, spécialement pour le développement de
l'habitation et essayer d'apporter une contribution sur le plan social dans
chacun de nos milieux.
Je dois vous dire, aussi, que les recommandations sont le fruit
d'études, mais aussi de consultations de gens impliqués dans les
structures en habitation, soit régionales ou locales.
Je fais un bref rappel des recommandations pour passer rapidement aux
questions, M. le Président.
Compte tenu de ces orientations sociales et économiques, et ayant
en filigrane le contenu de notre mémoire d'avril dernier, le Mouvement
Desjardins suggère que la levée du moratoire soit fermement
appuyée sur les quatre principes directeurs suivants: Faciliter
l'accessibilité à la propriété, s'assurer d'une
qualité décente de conversion, respecter un processus
démocratique dans la conversion et favoriser la protection des
plus démunis.
En tenant compte de ce qui précède et du contenu de notre
mémoire du mois d'avril, nous vous soumettons les recommandations
suivantes: Qualité physique de l'immeuble: l'absence de normes physiques
particulières laisse place à toutes sortes d'abus qui
occasionneront des contraintes et de l'anxiété chez les
locataires à revenu modéré qui habitent des logements de
qualité douteuse, même si ces logements rencontrent les normes de
qualité et de sécurité existantes.
Nous recommandons, par rapport à ce
phénomène-là, que l'obtention d'un certificat de
convertibilité soit préalable au processus de conversion et avant
la demande d'autorisation à la Régie pour enregistrer la
déclaration de copropriété; que des critères
précis soient établis pour qualifier l'immeuble à
être converti; que cette démarche essentielle de qualification
s'inscrive avant la remise au locataire de l'avis d'intention de convertir; que
l'appréciation de la qualité physique de l'immeuble le rendant
apte ou pas à la conversion, soit intégrée au rapport
d'experts déjà exigé; que dans le cas d'une
non-qualification physique de l'immeuble pour la conversion, la Régie du
logement soit investie de pouvoirs additionnels pour refuser la mise en marche
du processus légal de conversion; que l'on précise le type
d'expert, de firme ou d'organisme qui serait autorisé, après
accréditation, en vue de qualifier l'immeuble ainsi que l'état
général de ces principales composantes; que les coûts
reliés à la subdivision cadastrale et à la
déclaration de copropriété soient
contrôlés.
Maintenant, sur le chapitre de la protection du locataire occupant, le
droit au maintien dans les lieux tel que proposé, nous apparaît
être un extrême. Cette dimension assure très bien la
protection du locataire occupant. Cependant, nous sommes
préoccupés par son aspect démocratique. En
conséquence, nous proposons: que les deux-tiers des locataires
consentent à acheter leur logement avant qu'une demande soit faite
à la régie, afin d'autoriser l'enregistrement d'une
déclaration de copropriété; que le maintien dans les lieux
soit garanti pour deux ans minimum ou pour une période correspondant au
nombre d'années d'occupation du logement, à partir de la date
d'autorisation de la régie; que le maintien dans les lieux pour une
période illimitée soit garanti aux personnes âgées,
handicapées et autres cas particuliers.
Maintenant, en ce qui regarde le droit de préemption, nous
recommandons: qu'une clause de transférabilité du droit de
préemption à un OSBL, à la demande du locataire occupant,
soit incluse.
Incitation à l'accessibilité à la
propriété. Nous favorisons l'achat de leur logement par les
locataires déjà en place. Le Mouvement Desjardins
expérimente présentement, dans son réseau, de nouvelles
formules de financement qui permettraient de faciliter l'accessibilité
à la copropriété.
Nous recommandons: que la réglementation favorise la conversion
par la voie d'organismes sans but lucratif ou de coopératives; qu'un
programme d'aide gouvernementale à la réfection des immeubles
convertis soit élaboré pour le bénéfice des futurs
acquéreurs afin de les aider à supporter les coûts
inhérents à la conversion.
Le Mouvement Desjardins croit que l'orientation générale
de la réglementation proposée en vue de la levée du
moratoire sur la conversion de logements locatifs en copropriété
est sur la bonne voie.
Nos recommandations contenues dans la présente pourront, nous
l'espérons, permettre d'enrichir cette opération de conversion
d'éléments positifs en vue de faciliter l'accessibilité
à la propriété dans un processus des plus
démocratiques pour tous.
Le réseau Desjardins, avec l'appui de ses structures
régionales ou locales en habitation ainsi que les instruments financiers
à sa disposition, pourra être un des éléments
positifs dans l'atteinte des objectifs poursuivis par la levée du
moratoire sur la conversion des logements locatifs en
copropriété.
Si je fais un bref résumé, on est pour la levée du
moratoire, on est pour le maintien illimité des personnes
âgées et handicapées. Pour les autres qui sont un peu plus
jeunes et peut-être moins défavorisées, on veut quand
même une limite minimale de deux ans ou l'équivalent
d'années d'occupation, mais assujetties, bien entendu, à des
conditions qui vont faire que le contrôle sera beaucoup plus grand.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie de votre
présentation et aussi de votre collaboration au respect de nos
règles pour permettre aux membres d'avoir suffisamment de temp3 pour
discuter avec vous. Sur ce, je reconnais le ministre responsable de
l'Habitation.
M. Bourbeau: Oui, M. le Président, je vous saurais
gré de reconnaître le député de Louis-Hébert
qui aimerait questionner nos invités.
Le Président (M. Rochefort): Ce que je fais
immédiatement. M. le député de Louis-Hébert, je
vous cède la parole.
M. Doyon: Merci, M. le Président, je n'en attendais pas
moins de vous.
Le Président (M. Rochefort): Vous avez
une capacité de déduction fort élevée.
M. Doyon: Ha! Ha! Quelques mots, M. le Président, pour
souhaiter la bienvenue aux membres de la Société d'habitation
Desjardins dont le représentant vient de nous faire un exposé
extrêmement intéressant. Venant d'eux, avec l'expertise qu'ils
ont, il va sans dire que nous avons tout intérêt, comme membres de
la commission, à prêter une oreille très attentive à
leurs propos. Il nous font un certain nombre de réflexions qui nous
permettent de voir de quelle façon le projet ministériel pourrait
être bonifié. C'est dans ce sens-là que cette commission
parlementaire s'est tenue depuis quatre jours maintenant à
Montréal et que, aujourd'hui, on est à Québec.
Inutile de dire que la Société d'habitation Desjardins
sait ,de quoi elle parle et, particulièrement, son expertise dans le
domaine financier peut nous être très utile. C'est un
problème qui a été soulevé à plusieurs
reprises, que les futurs acquéreurs n'auront pas le capital
nécessaire pour devenir propriétaires, et la mise de fonds
nécessaire va leur manquer.
Vous nous avez laissé entendre que vous étiez en train de
fouiller cet aspect des choses. Votre étude est-elle suffisamment
approfondie, suffisamment avancée, pour nous dire quels sont les
éléments de solution que vous pouvez actuellement envisager, sans
avoir rien de déterminé, pour permettre justement à des
gens qui ont des revenus assez modestes finalement de devenir
propriétaire du logement qu'ils occupent et qu'ils veulent acheter?
M. Bergeron: Je demanderais à M. Bonnier qu'il vous donne
quelques exemples concrets d'expériences vécues.
M. Bonnier (Irénée): Merci, M. le Président.
Je pense que, peut-être, deux types de ménages vont profiter de
l'offre qui leur sera faite d'acquérir leur propriété. Il
y a ceux qui ont peut-être de la difficulté à arriver et
pour lesquels, supposons une norme de 25 % de leur revenu brut serait
sensiblement dépassée. Dans ce cas, il faudrait peut-être
songer - on le souligne dans le mémoire - à ce que le
gouvernement pense à venir en aide d'une façon concrète et
financière à un certain nombre de ménages. Quant aux
autres, nous expérimentons actuellement dans une de nos régions
une formule qu'on appelle option propriétaire. C'est une formule de
travail et d'expertise seulement où les individus n'ont pas à
déposer ou avoir dans leurs goussets une mise de fonds. En fait, c'est
que le loyer, pendant une période X qui pourrait être de trois
ans, plus ou moins, va servir à la mise de fonds par après,
c'est-à-dire que des locataires qui n'auraient pas le capital suffisant
pour faire leur mise de fonds pourraient l'acquérir sur une
période X d'années. Entre-temps, évidemment,
l'unité de logement peut appartenir à une habitation populaire
régionale ou un organisme administratif quelconque. Nous faisons une
expérience semblable, actuellement, dans une région du
Québec. Elle semble être concluante. Au cours de l'automne, c'est
l'intention du mouvement d'essayer de répartir cette expérience
à travers la province. Donc, les caisses populaires seraient en mesure
d'aviser les gens qui veulent devenir copropriétaires sur ces
possibilités et même, de leur aider financièrement à
résoudre leurs problèmes.
M. Doyon: Dans ce domaine, est-ce qu'il serait concevable que les
caisses consentent un prêt pour la mise de fonds initiale
nécessaire, ce qui permettrait au futur propriétaire d'emprunter
la totalité du montant d'achat, étant entendu que le gouvernement
pourrait - je lance tout simplement l'idée pour connaître votre
réaction - garantir cette deuxième hypothèque, par exemple
pour les 10 % qui manquent, le gouvernement prenant les arrangements qu'il faut
pour que ces 10 % ou cette mise de fonds initiale puisse être
remboursée lors de la vente ou de la disposition du logement par le
nouveau propriétaire dans X nombre d'années, dans dix ans ou
quinze ans? Est-ce que les caisses seraient prêtes à
considérer de devenir deuxième créancier
hypothécaire dans de telles circonstances? C'est une solution que vous
pourriez regarder.
M. Bonnier: Oui, s'il y a une garantie gouvernementale en
deuxième hypothèque, c'est sûr que c'est fort
intéressant.
Une voix: ...
Des voix: Haî Ha! Ha!
M. Doyon: En plus de cela, c'est une très bonne garantie,
surtout depuis le 2 décembre.
M. Bonnier: Jusqu'à nouvel ordre, nous avons
confiance.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Doyon: Elle est meilleure depuis le 2 décembre, si vous
me permettez de vous le dire.
M. Bonnier: Nous avons confiance que le gouvernement serait
capable... Je pense que c'est une des formules intéressantes. Remarquez
bien que dans la formule dont je parlais tout à l'heure, à toutes
fins utiles, c'est que la caisse, au point de départ, prête
pratiquement... Elle acquiert la propriété.
Donc, c'est 100 % du coût. Mais, par le fait que je paie un loyer
pendant trois ans, cela peut être applicable sur ma mise de fonds. La
formule que vous suggérez est une bonne formule. Nous avons d'autres
formules qui s'appellent, supposons des fonds de développement et qui
sont en opération aussi dans une région particulière du
Québec et qui pourraient peut-être être utilisées
pour aider les gens avec une garantie de deuxième hypothèque.
M. Doyon: Maintenant, il y a quelques points que j'aimerais tirer
au clair avec vous autres. Vous parlez d'obtenir une expertise dans le domaine
de la qualité de la bâtisse à être acquise. À
ce moment-là, évidemment... Vous remarquerez que dans le document
ministériel, il n'en est pas question. Le but de tout cela - cela a
été étudié - c'est d'éviter d'augmenter les
coûts pour le futur acquéreur parce que plus on demande
d'expertises, plus on demande à des gens qui s'y connaissent, que ce
soit des architectes, des ingénieurs ou tous ces gens-là, tous
ces gens ont des frais qui doivent être refilés au nouvel
acquéreur. Est-ce que vous avez fait une évaluation de ce que
cela voulait dire comme coût, ces expertises ou si vous êtes...
Est-ce que vous savez ce que cela représenterait comme augmentation des
coûts pour le futur acquéreur?
M. Bonnier: Je vais demander à M. Fortin...
M. Doyon: Oui.
M. Bonnier: ...de répondre à cette question parce
qu'il connaît très bien le côté technique.
M. Doyon; Oui. (11 h 30)
M. Fortin (Gilles): C'est bien sûr que cela peut hausser
des coûts, mais cela peut éliminer des coûts par la suite.
On a des lois au Québec qui protègent le consommateur. On se
dît qu'au départ la plupart des problèmes peut-être
que l'on soulève de part et d'autre face à la levée du
moratoire pourraient être justement éliminés, contraints et
cernés si, justement, ce rapport d'expert au préalable de tout
l'engagement du processus de conversion était fait. Quant aux
coûts on sait que c'est en relation avec les travaux qui se font. On sait
aussi qu'au Québec le monde de l'habitation est surnormalisé, il
y a beaucoup de règlements et de contraintes. Il ne s'agirait
peut-être pas d'en venir à ajouter d'autres normes et d'autres
contraintes, il s'agirait peut-être, comme on l'a fait pour des
programmes comme Loginove et PARCQ, de s'assurer de la solidité de la
bâtisse, de sa sécurité et de sa salubrité. On sait
qu'il y a beaucoup de bâtisses en location qui ne sont absolument pas
propres à être vendues à des gens qui veulent
acquérir - je pense que c'est l'objet de l'accès à la
propriété - un bien qui dans le futur leur apporterait une
plus-value. Alors, au départ sur la question précise que vous
avez posée c'est assez difficile d'en évaluer le coût
exact. Je pense qu'il ne serait certainement pas plus élevé que
le coût du rapport d'expert qui est déjà demandé
dans le livre blanc. Il s'agirait tout simplement de le cerner un peu plus et
le situer à un meilleur endroit dans le processus de conversion.
M. Bonnier: J'aimerais ajouter ceci. M. le Président.
L'opération de la levée du moratoire pour permettre une
accessibilité à la propriété beaucoup plus vaste
est recommandable, mais à certaines conditions, comme on le disait, et
en particulier ceci: II ne faudrait pas que des gens fassent de mauvaises
expériences. Il y a des gens qui vont avoir foi en leur
propriétaire et qui vont avoir foi peut-être au gouvernement et
qui vont avoir foi à différents organismes mais c'est à
eux, à partir d'un rapport, d'un certificat de convertibilité qui
d'ailleurs va être payé par le propriétaire actuel et non
pas par les futurs propriétaires, de faire un choix normal. Vous vous
rappelez sans doute que l'INRS a fait une étude - c'était dans
Laval, je crois - il y a quelques années, sur les faillites qui sont
arrivées dans le domaine de la copropriété. Cela peut
arriver. Des gens croyaient acheter une unité de logement de la
même façon qu'ils achètent leur propre bungalow et
étaient découragés d'entendre les bruits du voisin,
étaient découragés de voir qu'ils avaient à
partager des coûts communs qu'ils ne connaissaient pas au point de
départ et étaient également découragés de
voir que l'administration réelle de cette copropriété
était mal faite. Quand on parle de certificat de convertibilité
cela regarde les lieux physiques, c'est bien sûr, mais cela va regarder
aussi les engagements que ces gens devront prendre en toute liberté et
en connaissance de cause. C'est fondamental cela.
M. Doyon: Je comprends très bien les avantages qu'il y a
là mais mon inquiétude c'était par rapport aux
coûts. Le temps passe rapidement, M. le Président. Vous me
permettrez une autre question. Il semble subsister une certaine
ambiguïté quand on parle de moyens de procéder favorablement
au transfert de propriété aux locataires. Vous avez
mentionné que cela pourrait se faire par le biais des
coopératives. Dans mon idée, les coopératives, c'est une
forme de propriété collective et non individuelle. Je me demande
quand vous parlez de cette formule si vous parlez des coopératives dans
le sens de coopératives de capitalisation où
les gens mettraient en commun leurs fonds ou si vous pariez de
coopératives au sens strict comme on l'entend, comme elles existent
actuellement. Dans quel sens entendez-vous cette formule de coopératives
que vous avez mentionnée dans le résumé de votre
mémoire?
M. Bonnier: M. le Président, ce sont vraiment des formules
de coopératives et de capitalisation. Les formules actuelles sont des
coopératives dites locatives. Cela ne change pas grand-chose à
mon avis. C'est un peu mieux, mais cela ne change pas, fondamentalement. Ce
sont des coopératives de même que les OSBL; cela pourrait, par la
formule des OSBL et des coopératives avec capitalisation être un
moyen terme. Par exemple, si vous trouvez qu'à la longue, libérer
totalement la levée du moratoire cela pourrait être dangereux,
vous pourriez peut-être dire: On va avoir un moyen terme pendant deux
ans. On va surtout essayer d'intéresser les gens à ce qu'ils se
regroupent sous forme d'OSBL, organismes sans but lucratif, ou de
coopératives avec capitalisation. C'est comme cela qu'on le
suggère.
M. Doyon: M. le Président. Il me reste quelques minutes.
Je sais que mon collègue de Taschereau a quelques questions à
poser. Maintenant, si les gens de l'Opposition peuvent procéder
maintenant ou après, c'est comme ils le voudront.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Louis-Hébert dans un respect de... Il y a consentement à M. le
député de Taschereau.
M. Leclerc: Merci. Je voudrais d'abord saluer M. Bonnier qui fut
mon prédécesseur... Est-ce qu'il y avait consentement? Oui, cela
va. Je voudrais le saluer de façon particulière puisqu'il fut mon
prédécesseur dans Taschereau et qu'il fut d'ailleurs le premier
député du comté de Taschereau puisqu'il a
été inscrit sur la carte électorale en 1973,
l'année de son élection.
Un petit peu dans le même sens que mon collègue de
Louis-Hébert, je voudrais poser une question, puisque votre premier
principe est de faciliter l'accessibilité à la
propriété. Avec le temps, je me suis rendu compte que dans mon
comté notamment - et cela doit être vrai ailleurs - il y a des
secteurs du comté, et je vais prendre l'exemple du Vieux-Québec,
où les caisses populaires et les banques - ce n'est pas un reproche que
je fais exclusivement aux caisses populaires - sont tellement exigeantes dans
leurs garanties ou dans la mise de fonds initiale que, dans
l'éventualité où le moratoire soit levé et
où les gens voudront se porter acquéreur de condos dans le
Vieux-
Québec, il m'apparatt, dans les circonstances actuelles, que ce
seront exclusivement les gens qui feront de grosses mises de fonds, connaissant
à l'avance les exigences des caisses populaires et des banques dans le
Vieux-Québec...
Ma question est la suivante: y a-t-il des moyens à envisager pour
qu'il n'y ait pas une si grande différence entre les secteurs? Vous avez
sans doute des raisons pour lesquelles vous êtes beaucoup plus exigeants
dans le Vieux-Québec qu'ailleurs. Mais, n'étant pas du
système bancaire, je vous avoue que je ne connais pas ces raisons. Pour
ma part, j'ai bien peur que, dans le Vieux-Québec en tout cas, si les
banques et les caisses populaires gardent les exigences qu'elles ont
actuellement, seulement les gens fortunés pourront s'y procurer des
appartements.
M. Bergeron: C'est sûr que la tradition très
conventionnelle voulant qu'il n'y ait qu'une seule hypothèque, on est
obligé d'avoir des exigences beaucoup plus grandes. Dans des cas
où on veut favoriser les moins-nantis, le risque est plus grand. C'est
pour cela qu'on dit qu'on peut faire notre part de ce côté en tant
qu'institution financière, à condition qu'il y ait un certain
encadrement légal pour nous aider, qu'on parle de certificat ou des
différentes conditions qu'on a posées.
Si on ajoutait ces conditions dans la loi, cela rendrait sûrement
la tâche plus facile pour que la dimension financière soit dans
des normes respectables. En fait, il reste quand même qu'il y a des
risques considérables. Prenez la crise économique qu'on a connue
durant laquelle des gens rapportaient leur clef sur le bureau du directeur de
la caisse, n'étant plus intéressés à continuer
à...
M. Leclerc: Pourquoi ces risques sont-ils plus
considérables dans le Vieux-Québec qu'ailleurs? C'est ce que je
ne comprends pas. Ce sont les différences entre un secteur particulier
de mon comté par rapport à l'ensemble de la région. Ces
différences, dans l'éventualité de la levée du
moratoire, vont sûrement demeurer et je ne vois pas pourquoi vous
changeriez vos critères. Un de vos principes est de dire: Facilitons
l'accessibilité à la propriété. Dans les
circonstances actuelles dans le Vieux-Québec, il est faux de
prétendre que les gens aient l'accessibilité à la
propriété, puisque les institutions financières dans leur
ensemble, y compris les caisses populaires, sont beaucoup plus difficiles dans
leurs critères d'acceptation.
M. Bergeron: Je me souviens du Lac-Saint-Jean - je ne connais pas
tellement le Vieux-Québec - et, chez nous, c'est
différent. Le marché de la propriété est
possiblement différent et peut-être aussi la stabilité de
cette population. Mais, encore là, je ne connais pas assez le quartier
auquel vous faites allusion. Une chose est certaine, les caisses populaires
prennent de très grands risques et elles ont toujours tendance à
aller dans ce sens, mais à des limites qui sont quand même
respectables.
Si, par des mesures légales et par des programmes
gouvernementaux, on vient nous appuyer quelque peu, on pourra sûrement
aller plus loin quant aux risques.
M. Leclerc: Notre temps est écoulé. Je vous
remercie.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
député de Taschereau. Je vais maintenant reconnaître M. le
député de Shefford.
M. Paré: Merci, M. le Président. Je vous souhaite
la bienvenue à la commission. Je dois vous dire que je n'en ai pas pour
longtemps, parce que mon collègue de Dubuc veut aussi intervenir. Je
vais quand même vous poser quelques questions. Je vous remercie pour
l'intérêt que vous portez face à vos sociétaires
pour un des sujets qui est fondamental pour eux: le logement. Dans votre
mémoire, vous soulevez des points très importants et qui nous
préoccupent. Je pense que cela est important. Vous montrez un souci pour
la qualité de l'immeuble. Je dois vous dire, pour ce que j'ai entendu
comme commentaire, qu'il y a beaucoup de gens qui s'inquiètent aussi de
la qualité de l'immeuble et de l'effet de la levée du moratoire.
Cela répondrait peut-être en partie à la question du
député qui m'a précédé.
Des gens s'inquiètent de la qualité de l'immeuble, s'il y
avait levée du moratoire tel que proposé parce que,
premièrement, il y aurait des gens qui auraient tout avantage à
laisser détériorer le stock de logements locatifs, pour que les
gens quittent et qu'ensuite comme ils se libèrent, on puisse
transformer. On ne paie même pas de droits d'achat de départ ou
quoi que ce soit. Les gens s'en vont parce que, finalement, ce n'est plus
vivable.
Quant à l'autre inquiétude, et ça répondrait
à mon avis en partie à la question du député de
Taschereau, c'est que si les gens à revenus modestes ou très
moyens vraiment qui ont à peine le strict minimum disons pour
accéder à la propriété dans le quartier où
cela prend de la rénovation, achètent, ils vont réussir
à faire leurs paiements et ils n'auront plus les moyens d'entretenir.
C'est à ce moment-là que surviennent les problèmes de
détérioration. Il est propriétaire, mais il n'a plus les
moyens de rénover.
Je me rappelle avoir entendu - ça ne vient pas de moi, ça
vient de quelqu'un qui, je pense, s'y connaît - M. Pépin, hier, de
l'Association des propriétaires du Québec qui disait que sur 20
ans, ça coûte aussi cher en rénovation que l'achat de la
maison. Donc, celui qui a à peine les moyens de payer, il fait quoi? Il
laisse détériorer son logement. Je vous rejoins sur
l'accès à la propriété. Je suis tout à fait
d'accord. Si tous les Québécois pouvaient être
propriétaires, je serais le gars le plus heureux du monde. Si ça
prenait juste un coup de baguette on le ferait, sauf qu'il faut être
réaliste. On sait très bien qu'il y a des gens qui ne peuvent pas
et il y a des gens qui ne veulent pas, il y en a qui ne peuvent vraiment pas.
Des chiffres nous ont été fournis. Je ne me souviens plus par
quel groupe, je pense que c'était à Côte-des-Neiges.
Même l'Association de l'immeuble du Québec a apporté des
chiffres que vous pourrez confirmer ou infirmer ou contrecarrer, mais, elle a
donné des chiffres éloquents. On peut bien vouloir rendre tout le
monde propriétaire, sauf qu'ils ont donné des chiffres. Pour
Côte-des-Neiges, en tout cas, ils disaient qu'un logis de 300 $, s'ils
pouvaient l'acheter à 40 000 $, ça monterait des paiements
d'à peu près 625 $ par mois. Imaginez-vous la personne qui n'a
pas les moyens, qui a de la misère à arriver, à boucler
les deux bouts, à 300 $ par mois elle arrive à peine. Si elle
veut l'acquérir, c'est 625 $ au minimum.
Je pense que l'Association de l'immeuble du Québec nous dit les
mêmes chiffres. C'est sûr que sur le tableau qui nous a
été présenté ça monterait à 412 $ par
mois, pour un immeuble de 40 000 $ avec un financement à 90 %, 10 %
d'intérêts. C'est beau de donner des chiffres. Sauf qu'en
discutant, on s'est aperçu que, concernant les chiffres, il manquait des
choses importantes. Entre autres, on ne tenait pas compte du capital de
départ qu'il fallait avoir et des intérêts à payer
là-dessus. On ne tenait pas compte des rénovations. On ne tenait
pas compte de l'entretien. On se retrouve probablement - je ne sais pas si vous
pouvez nous dire si c'est vrai ou pas - au-dessus de 600 $ par mois. Pour
quelqu'un qui a le strict minimum, on est obligé de se rendre compte que
tout le monde malheureusement ne peut pas devenir propriétaire.
Là-dessus, je vais poser une question. Vous dites, à un
moment donné - aux pages 2 et 3; à la page 2 - que finalement le
droit d'occupation au maintien illimité pourrait être
limité à deux ans ou en tout cas à l'équivalence.
Un temps qui serait calculé en fonction du nombre d'années. Vous
arrivez à la page 3 sur une mesure qui est très précise,
celle-là. Nous favorisons l'achat de leurs logements par les locataires
déjà en place. Je dois vous dire que c'est une
mesure qui a été amenée par l'Union des
municipalités du Québec, par la Fédération des
travailleurs du Québec, de façon très précise. Il
faut que ce soit limité aux locataires en place. À la page 2, il
est déjà limité. À la page 3, il est
catégorique. Que favorisez-vous? Est-ce que c'est l'accession à
la propriété du logement par le locataire qui est dans les lieux
ou ouvert à tout le monde, comme la proposition du ministre à
l'heure actuelle?
M. Bergeron: Bien, on dit, on parle des deux tiers aussi. Il peut
arriver, dans une bâtisse où il y a plusieurs locataires, que
certaines personnes n'ont pas les moyens du tout et qu'ils ne sont pas
intéressés à devenir copropriétaires. Si on veut
que ce soit la totalité qui devienne propriétaire, on vient de
brimer qui? Ceux qui auraient les moyens et le désir. C'est pour cela
qu'on dit que si les deux tiers des locataires sont intéressés
à être propriétaires, on devrait, à cause du
principe de l'accessibilité, leur donner une chance. Si, par exemple, il
y en a un qui ne veut pas et que tout le projet tombe à l'eau, je ne
pense pas qu'on favorise tellement la démocratisation des logements. (11
h 45)
Par rapport à vos coûts de tantôt, qu'une
bâtisse soit administrée par un étranger ou par les gens du
milieu, je pense qu'il y a un certain nombre de dépenses qui sont
exactement les mêmes. On a prêché longtemps qu'on veut la
prise en charge de l'économie par nos gens; on veut que les gens soient
responsables. En tout cas, je crois énormément que la
copropriété peut diminuer, à court et à moyen
terme, les coûts de location, surtout si on n'exige pas en partant une
mise de fonds considérable. S'il y a des structures de soutien...
On parle des OSBL. On vit une expérience dans Lanaudière.
On a une société qui permet le financement temporaire d'une
bâtisse pendant que les gens paient un loyer et, tranquillement, s'en
vont vers la copropriété. Je pense qu'il faut des mesures
transitoires. À partir du moment où cela ne demande pas, en
partant, une mise de capital importante et que les gens qui sont locataires
veulent devenir propriétaires et y mettent de l'énergie, leur
intelligence et leur dévouement au service de leur bâtisse,
à court et à moyen terme, il y a des économies à
faire pour ces gens. Ils peuvent donner une plus-value à leur
habitation. Ils peuvent se sentir pas mal plus chez eux.
Il y a tous les avantages à être copropriétaire.
C'est une valeur fondamentale qui n'est pas facile, mais ce n'est pas en
mettant des murs considérables qu'on va favoriser cela. Je pense qu'il y
a des risques à prendre, qu'il y a des moyens à se donner. Il y a
des programmes. Il faut une volonté gouvernementale et des
sociétés comme
Desjardins et les autres. Il faut croire à cette valeur et
prendre les moyens pour y arriver.
M. Paré: Je partage votre opinion là-dessus, sauf
que, comme je vous l'ai dit, en tant que législateurs, nous devons tenir
compte de la réalité des gens. C'est vrai qu'en fin de compte,
par la responsabilisation et par l'accumulation d'actifs, il y a avantage
à devenir propriétaire; personne ne conteste cela, mais pour ceux
qui le peuvent. Le pire, c'est qu'il y aura des victimes qui ne seront pas
seulement les gens déplacés, les gens maintenus dans les lieux.
Dans un quartier comme celui-ci, si cela se fait sur une échelle le
moindrement importante, cela veut dire une augmentation générale
des loyers à cause de l'augmentation de l'évaluation, même
pour les édifices qui ne seront pas concernés. Cela veut dire,
pour Montréal et Québec, dans le centre-ville, une augmentation
générale des loyers pour tout le monde; il faut bien le
savoir.
Est-ce qu'on est d'accord, comme législateurs, pour imposer cela
aux gens, juste parce qu'on ne fait pas d'investissement majeur? Tout ce qu'on
fait, c'est que, par une décision, on amène une hausse de
l'évaluation qui finira par toucher même des gens qui ne seront
pas déménagés. Vous me parlez d'une majorité de
locataires...
M. Bergeron: J'aimerais bien vous suivre. Par exemple,
pourriez-vous me démontrer comment la décision d'une
possibilité de développement en copropriété
amènerait nécessairement une nouvelle évaluation des
bâtisses non concernées?
M. Paré: Cela a été soulevé dans une
discussion sur Montréal. Dans un quartier où il y aura plusieurs
maisons de touchées... Je prendrais n'importe quelle rue. Une rue a 25
maisons - des bouts de rue, ici, qui ne sont pas très longs - et 8
à 10 maisons sont converties. Une hausse de l'évaluation se
répercute sur l'ensemble du secteur immobilier. En plus, cela
amène ce qu'on appelle la gentrification, donc, une transformation des
commerces. Finalement, tout le reste amène une augmentation. Je ne me
souviens plus si ce sont les représentants de Montréal, dans leur
mémoire, qui reconnaissaient implicitement: Levée du moratoire,
augmentation de taxes pour les gens directement concernés. Mais cela se
répercute sur les bâtisses d'à côté parce que
l'évaluation vient augmenter... Tantôt, je donnais l'exemple d'une
maison évaluée à 80 000 $ qui, du jour au lendemain,
aurait quatre logements. Elle passerait à quatre fois 80 000 $ parce
que, selon l'évaluation, chaque logement deviendrait une
propriété. Donc, l'évaluation vient d'être
multipliée.
Si l'immeuble à côté de chez vous
passe de 80 000 $ à 320 000 $, c'est évident que votre
propriété vient de prendre de la valeur. Il faut
reconnaître cela, je ne dis pas qu'elle va augmenter
considérablement la première année et autant que la maison
voisine, mais il y a effectivement, il faut le reconnaître, une
augmentation générale, donc, une augmentation
générale des loyers. Et je dois vous dire oui pour la
propriété - et je vous donne la parole tout de suite - sauf qu'il
ne faut pas oublier que si c'est une forme d'aide avec laquelle nous sommes
tout à fait d'accord, la copropriété, parce qu'il faut se
partager cela, il y a d'autres façons de devenir propriétaires.
Il y a le moyen de la copropriété dans des édifices qui
sont bâtis à partir de maintenant, qui ne reviendront probablement
pas plus cher que ceux dans des quartiers aussi en voie de spéculation
que le Vieux-Québec et ce qui est vraiment périphérique.
Vous voulez compléter...
M. Bergeron Oui, en fait, je pense que notre défi sera d'enrichir
cette idée du certificat de convertibilité avec une expertise qui
est posée et ce, le plus tôt possible. Je dis: Si on pouvait
favoriser les locataires, les inviter à faire une demande rapidement,
pour obtenir un certificat de convertibilité, peut-être que cela
se situerait à une date donnée, à un bilan de l'immeuble
et je pense que ce qu'il faut essayer d'enrichir, c'est tout le
préalable pour éviter les spéculations ou les fluctuations
de marché. Cela pourrait être à court terme.
C'est-à-dire que toute personne qui est locataire et qui est
intéressée à devenir propriétaire devrait
s'inscrire à la Régie du logement le plus vite possible pour
qu'il y ait un bilan, une expertise de faite de la propriété et
si, par la suite, à cause de transformations, la valeur marchande veut
jouer, au moins, il y aura eu une date, à un moment donné,
où on pourra... Il faudrait avoir un rapport d'évaluation avant
que ce phénomène d'augmentation ne se produise.
En tout cas, je m'exprime bien mal, mais je veux dire que c'est dans les
prérequis, qu'il va falloir prévoir des dangers comme
celui-là et ce n'est pas en se mettant la tête dans le sable qu'on
va régler le problème. Je pense que c'est en essayant d'implanter
le plus de mécanismes possible pour protéger le locataire. Et je
pense qu'on devrait être assez intelligents pour en trouver
quelques-uns.
M. Paré: Sauf que, vous savez, si on faisait un calcul, on
se rendrait compte qu'il y a des propriétaires qui ne font pas beaucoup
de revenus avec leurs logements en fin d'année, mais cela leur permet
d'être propriétaires, d'être chez eux, d'être
autonomes. Par exemple, un individu qui a un immeuble de trois ou quatre
étages dans le coin ici et qui ne pense même pas à la
conversion, parce qu'il est bien et qu'il n'a pas de difficulté avec ses
locataires... Parce que, peu importe ce dont on parle, il n'y a pas de mauvais
propriétaire et de mauvais locataire en général. Moi, je
fais confiance aux gens, ce sont tous des gens qui veulent l'harmonie. Il y a
des exceptions comme n'importe où, mais cela va bien. Alors, on lui dit
du jour au lendemain: Tu as maintenant la possibilité de vendre et cela
veut dire que tu peux aller chercher trois à quatre fois d'une "shot"
quasiment 200 000 $.
Je dois vous dire: On va donner la tentation à beaucoup de gens,
il faut le prévoir. Quand vous dites que les gens se
dépêchent à aller s'enregistrer, je dois vous dire que si
j'avais un ou deux immeubles dans les rues des environs, dès le
lendemain de la levée du moratoire, j'irais m'enregistrer et j'enverrais
un avis de conversion, même si je n'avais pas l'intention de le faire.
Cela me permettrait d'enclencher déjà le processus et de savoir
que, si j'ai une bonne occasion de vendre, je vais le faire.
Déjà, on vient non seulement d'ouvrir la porte à plusieurs
ventes, mais on vient de causer de l'insécurité. Imaginez-vous le
nombre de gens qui sont dans leur logement ici, dans les environs, depuis 10,
20, 30 et 40 ans et à qui on va dire: À partir de maintenant,
vous n'avez plus rien de sûr parce que, si je réussis à
vendre demain, vous pourrez partir.
Une dernière préoccupation...
M. Bonnier: Je m'excuse, M. le Président, mais nous, on
insiste beaucoup -je pense que vous êtes d'accord là-dessus aussi
- pour que ce soit offert aux locataires et non pas à des gens de
l'extérieur, ce qui est fort différent. Deuxièmement, si
je prends une propriété normale, lorsque je suis
propriétaire d'un immeuble locatif, mes revenus de loyers doivent
correspondre à un certain ratio par rapport au coût réel de
ma propriété. Si c'est de 300 $ à 600 $, je pense que cela
n'arrivera pas, parce que mon ratio ne peut pas être si
éloigné du montant de 600 $ prépondérant. Mais ce
que vous dites est vrai, cependant: la copropriété entraîne
des coûts additionnels. C'est ce que disait M. Bergeron. Il faut, au
préalable, bien informer les locataires et si, par exemple, le
gouvernement disait qu'il compterait sur les caisses populaires pour faire ce
travail-là avec lui, on serait prêts à le faire parce, que
c'est la condition fondamentale: il faut que personne ne se sente
lésé et mal informé car, après cela, c'est
grave.
M. Paré: Vous avez raison, là-dessus, on se
rejoint. Sauf qu'entre la bonne information et la protection effective il y a
une marge et, nous, on ne la retrouve pas là-dedans.
C'est cela qu'on essaie de dire, il faut qu'il y ait des protections.
Mettons-les, sinon... Est-ce que j'ai encore...
Le Président (M. Saint-Roch): Malheureusement, M. le
député de Shefford, le temps est écoulé.
M. Paré: Merci.
Le Président (M. Saint-Roch): Alors, nous en sommes aux
brèves remarques de conclusion. Je vais reconnaître M. le
ministre.
M. Bourbeau: Je suis heureux de constater que le mémoire
de la Société d'habitation Desjardins est plutôt favorable
à la levée du moratoire et qu'il propose des modalités
susceptibles d'améliorer, d'une certaine façon, la proposition
gouvernementale.
Votre position nous paraît cohérente et certainement
très bien articulée. Je me suis inscrit dans les objectifs du
Mouvement Desjardins qui, déjà, est quelque peu associé
à la Société d'habitation du Québec et au
gouvernement dans la réalisation de certains programmes
d'habitation.
Le Mouvement Desjardins est un collaborateur précieux de la SHQ
dans la livraison de certains programmes et je tiens à le souligner. Ce
sont des relations d'affaires, avec tout ce que cela comporte évidemment
de négociations à l'occasion, mais je pense qu'elles sont
excellentes et sur une base d'affaires comme on les aime. Quant à nous,
nous n'avons qu'à nous féliciter de cette collaboration du
Mouvement Desjardins.
Je peux vous assurer que le point de vue que vous avez
développé devant nous, nous l'avons entendu avec nos oreilles
grandes ouvertes et que nous allons en tenir compte dans l'élaboration
du projet final que j'ai l'intention de déposer à
l'Assemblée nationale dès cet automne.
Je vous remercie.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Shefford.
M. Paré: Oui, à mon tour, je vous remercie. Comme
je vous le disais, vous avez présenté des sujets qui sont
très préoccupants. J'aurais aimé qu'on puisse discuter une
recommandation qui me semble très intéressante, soit de permettre
la transférabilité du droit de préemption à un
organisme sans but lucratif, à une coopérative. Cela, nous en
avons parlé aussi à Montréal, sauf que autant la FECHIM
que les GRT que d'autres coopératives sont venus nous dire que, de
façon technique, ce n'est même pas faisable, malheureusement, dans
la proposition qu'il y a là, parce qu'on donne un mois d'avis. Les
programmes existants sont à date fixe et le budget est tellement
limité que... J'aimerais que cela soit retenu, sauf que de la
façon qu'on diminue les budgets, y compris pour les GRT, ne rêvons
pas en couleur, cela ne semble pas du tout être dans l'orientation. Mais
à force de répéter, peut-être qu'on va finir par
convaincre le ministre que les coopératives sont une forme d'accession
à la propriété, pour les plus démunis, qui doit
être retenue. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Rochefort): Le mot de la fin.
M. Bergeron: Je remercie tous les membres de la commission de
leur écoute et nous sommes très heureux que notre
dépôt soit bien considéré. Je pense qu'on est
toujours prêts à collaborer. C'est sûr que, dans un
mémoire, on ne peut pas tout écrire, mais on a un vécu
quand même qui comporte plusieurs expériences, dans le Mouvement
Desjardins, qui pourrait peut-être, pour ce qui est des gens qui auront
à travailler à des modalités, leur fournir des
informations précieuses, concrètement dans la préparation
des modalités que vous prévoirez. Merci beaucoup.
Corporation des propriétaires immobiliers du
Québec
Le Président (M. Rochefort): Merci, encore une fois, de
votre présence parmi nous.
J'appellerais maintenant la Corporation des propriétaires
immobiliers du Québec à la table des témoins.
Donc, bienvenue à vous trois. Pour l'information des membres de
la commission, je vous demanderais de vous présenter et, par la suite,
d'utiliser la quinzaine de minutes à votre disposition pour nous
présenter les points essentiels de votre mémoire, s'il vous
plaît. (12 heures)
M. Riverin (Michel): M. le Président, M. le ministre,
membres de cette commission, mon nom est Michel Riverin, directeur
général de CORPIQ, la Corporation des propriétaires
immobiliers du Québec. À ma gauche m'accompagnent aujourd'hui M.
Pierre Galipeau, président de la corporation, et Mme Martine
Charbonneau, qui est adjointe au directeur général.
Dans notre présentation, M. le Président - vous avez tous
pris connaissance de notre mémoire - nous procéderons avec une
brève introduction et nous exposerons particulièrement les points
saillants et les recommandations que CORPIQ a vus à l'intérieur
du projet gouvernemental.
Alors, nous voulons signaler aux membres de cette commission que
l'approche
de CORPIQ se veut essentiellement positive et s'inscrit, dans toute la
mesure du possible, dans le respect du gouvernement, des lois, des locataires
et de toute la société. Ainsi, CORPIQ souhaite un dialogue
constructif et un échange véritable entre tous les intervenants
qui recherchent un mieux-être collectif et qui désirent participer
à la définition d'un véritable consensus social en regard
des politiques qui président à l'établissement des
règles régissant l'habitation au Québec.
Enfin, il nous apparaît important de préciser que CORPIQ
est l'organisme le plus représentatif des propriétaires
immobiliers, ayant son siège social à Québec, un bureau
à Trois-Rivières et également à Montréal.
Elle compte 3000 membres, lesquels proviennent autant de Québec, de
Rimouski, de Montréal que du SaguenayLac-Saint-Jean et partout
dans la province.
CORPIQ souscrit au principe énoncé et aux objectifs
poursuivis, mais à des conditions autres que celles proposées et
ce, afin que toute nouvelle législation ne vienne pas encore
réduire l'exercice du droit de propriété.
Cependant, les différentes mesures proposées par le
gouvernement ne permettent pas de concilier les différents objectifs
visés et il y a lieu de proposer des modifications importantes afin
d'atteindre le but ultime indiqué dans le document Lever le
moratoire: une décision qui s'impose.
Nous continuons avec les points qui nous apparaissent les plus
importants d'abord, le droit au maintien dans les lieux pour une période
illimitée. CORPIQ propose une modification de la mesure en question qui,
nous le croyons, respecte à la fois le droit de propriété
de l'investisseur et le droit à l'habitation du locataire. Nous
proposons que le droit au maintien dans les lieux soit limité dans le
temps, que cette limite soit liée au nombre d'unités converties,
pour éviter toute ambiguïté et divergence
d'intérêts, dès que la majorité, soit les deux tiers
des unités, sera convertie. Les mécanismes de reprise de
possession pour les unités restantes s'appliqueront, tel que
prévu dans les articles 1659 à 1659.8 du Code civil de la
province de Québec, le législateur ayant prévu à
cet effet des conditions de dédommagement justes et raisonnables,
à titre de compensation pour toute relocalisation.
Deuxième remarque, en regard des réparations majeures.
Quant au souci indiqué dans le document: Lever le moratoire: une
décision qui s'impose, en regard des abus engendrés par les
réparations majeures, nous devons souligner à cette commission
que les plus récentes statistiques publiées à cet effet
par la Régie du logement n'indiquent aucunement l'existence d'une telle
situation dans le marché immobilier au Québec.
Relativement aux augmentations de loyer, CORPIQ propose que le
législateur retienne plutôt les mécanismes
déjà prévus à cet effet dans le Code civil, bien
que cette méthode de fixation nous apparaisse incomplète et
insuffisante.
Le droit de préemption. CORPIQ propose que le droit de
préemption ne puisse être exercé qu'une seule fois par le
locataire et que ce dernier dispose de 30 jours pour signifier son acceptation
d'acheter son unité de logement. Si le locataire ne répond pas,
qu'il soit présumé avoir refusé l'offre. Les mesures de
reprise de possession prévues dans le Code civil redeviendraient
effectives après le délai de 30 jours.
Quant au rapport d'expert, CORPIQ propose, dans un but de simplification
et de compréhension de ce rapport, que la présentation du rapport
soit normalisée et que ce dernier soit préparé en
conformité avec le Code du bâtiment actuellement en vigueur.
Permettez-moi d'ouvrir ici une parenthèse. Tout, au
Québec, n'est pas convertissable. Donc, la conversion devrait
répondre à un critère minimal: celui de respecter le Code
du bâtiment. Nous proposons également d'utiliser le service
actuellement en vigueur, soit la direction générale de
l'inspection du bâtiment, et que, par exemple, les experts
autorisés à produire le rapport en question soient les
inspecteurs de ladite direction générale.
L'indivision et le maintien dans les lieux. Nous proposons que les
propriétaires indivis soient soumis aux mêmes règles que
tous les propriétaires immobiliers pour convertir leurs immeubles en
copropriété divise et également pour la reprise de
possession de leurs logements. Nous nous permettons ici de rappeler que les
dispositions relatives à la reprise de possession sont
déjà prévues dans le Code civil de la province.
CORPIQ propose également de limiter aux éléments
nécessaires les informations que doit contenir le prospectus. Nous
proposons également, afin de diminuer les coûts afférents
à ce prospectus, de remplacer, dans la liste des informations, le mot
"plan" par le mot "esquisse".
En regard de la protection du parc de logements locatifs, CORPIQ propose
que les organismes décisionnels actuellement en place, soit les
municipalités, conservent leur champ de compétence en
matière d'aménagement et ce, en conformité avec les plans
directeurs de ces municipalités.
Enfin, quant à l'autorisation de convertir, CORPIQ propose que
toute décision rendue par la Régie du logement soit sujette
à un droit d'appel.
Enfin, la conclusion - qui va faire sourire l'honorable ministre - c'est
tout simplement une sollicitation à participer à
l'ébauche des politiques de l'habitation au Québec que
nous avons voulu signifier là, et nous l'avons dit en toute
déférence envers le ministre. Nous vous remercions de votre bonne
attention et nous sommes à votre disposition pour quelques
questions.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie pour votre
présentation. M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, je vous saurais gré
de reconnaître le député de Nicole t.
Le Président (M. Rochefort): M. le député de
Nicolet.
M. Richard: Merci, M. le Président. Après avoir
regardé attentivement votre document, on s'aperçoit que
l'ensemble de votre mémoire porte sur de nouvelles propositions
relatives au droit au maintien dans les lieux, aux réparations majeures,
à l'augmentation du loyer, au droit de préemption, au rapport
d'expert et autres mesures, à la protection du parc locatif et à
l'autorisation de convertir.
Vos principaux points visent effectivement à limiter le droit au
maintien dans les lieux dans le temps et que cette limite soit liée au
nombre d'unités converties. Vous dites que, dès que les deux
tiers le sont, le droit de reprise de possession avec compensation... Vous
parlez aussi de normaliser le rapport d'expert et que cela soit fait par la
Direction générale de l'inspection du ministère du
Travail, que la protection du parc locatif soit laissée aux
municipalités qui ont déjà compétence en
matière d'aménagement et vous parlez de permettre aussi un appel
des décisions de la régie en matière de conversion. J'ai
une question toute simple: Quel serait le rôle des municipalités
dans la protection du parc de logements?
M. Riverin: À l'heure actuelle, pour ce qui est des
conversions - c'est actuellement permissible pour des unités de quatre
logements et moins avec reprise de possession -on voit mieux les
municipalités déterminer ce qui peut être convertissable
dans certains secteurs ou non que le gouvernement dans l'ensemble du
Québec. C'est l'objectif visé par notre remarque,
c'est-à-dire que, comme les municipalités ont des pians
d'aménagement et des organismes qui les regroupent habituellement sous
forme de communautés urbaines de façon régionale, elles
sont plus près de la réalité quotidienne que le
législateur provincial.
M. Richard: Cela va. Votre document était relativement
clair. On vous remercie à l'avance de l'offre que votre corporation nous
a faite d'utiliser éventuellement vos expertises. Merci, monsieur,
d'avoir présenté votre mémoire.
Le Président (M. Rochefort): M. le député de
Shefford.
M. Paré: Oui, merci. C'est vrai que c'était clair.
Moi aussi, je vous remercie de la présentation de votre mémoire
qui fait voir des points de façon claire et précise. Je partage
l'idée de votre dernier paragraphe, à savoir que la consultation
a toujours sa place et qu'elle exempte la confrontation et, souvent, la
correction de documents. J'espère qu'elle sera passablement importante
d'ici au mois d'octobre.
Une première petite question. Vous dites que vous voulez limiter
- je le retrouve quelque part - le droit de préemption à
seulement une fois à l'intérieur des 30 jours. Je vais vous poser
la question aussi directement que votre mémoire présente ces
propositions. Ne trouvez-vous pas qu'il s'agit là d'une très
bonne façon de pouvoir tout simplement expulser les gens en faisant le
plus d'argent possible? On peut bien, comme propriétaire,
négocier un prix très élevé afin d'être
sûr que le locataire ne pourra pas l'accepter. Au bout de 30 jours, son
délai est expiré et cette "seule fois" est passée.
À ce moment-là, pour s'en débarrasser, on peut très
bien vouloir négocier à 60 000 $ et revendre à quelqu'un,
à qui on veut bien le céder à 40 000 $, le 32e jour de
l'avis d'intention.
M. Galipeau (Pierre): C'est assez difficile d'encadrer cela
arbitrairement. Tantôt, on disait: Le but de la levée du moratoire
est tout simplement de donner accès à la propriété.
On écoute depuis tantôt et on lit ce qui est écrit depuis
le commencement et, au fond, on se demande pourquoi les gens seraient
intéressés à devenir propriétaires, alors que les
propriétaires sont en train de perdre de plus en plus de droits. Ils ont
investi de l'argent dans l'immobilier, que ce soit pour un, deux ou dix
logements, et on est en train de leur dire: Vous voulez améliorer
l'investissement que vous avez fait pour avoir un retour plus potable sur votre
investissement; non, le locataire a une priorité sur vous et il ne vous
permettra pas d'améliorer l'investissement que vous avez fait. Force
nous est de constater: Pourquoi serait-on propriétaire? On est mieux
d'être locataire et garder le choix.
Dans le parc immobilier de la province de Québec, on dit: Si on a
les moyens de se payer un logement à 150 $ ou à 500 $ par mois,
on sera certain qu'en fin de compte on ne pourra plus jouer dans ce domaine. On
va dire: C'est gelé, le propriétaire ne peut plus augmenter par
d'autres mécanismes que ceux prévus par la Régie du
logement. Il ne
pourra plus faire des travaux d'amélioration pour l'ensemble de
son immeuble dans le but d'augmenter sa rentabilité ou la valeur de son
immeuble. On ne lui permettra plus de faire cela. Donc, quelle est
l'utilité ou le besoin pour une personne de devenir
propriétaire?
On parle du droit de préemption. Peut-être qu'il est
limité à 30 jours, mais il va falloir qu'à un moment
donné cela arrête quelque part et qu'on dise: On veut augmenter et
améliorer le parc locatif, où arrête-t-on? Est-ce qu'on
laisse une portion des locataires dans les immeubles et une portion des
propriétaires qui auront un intérêt pour leur logement,
pour leur situation et qui veulent améliorer leurs conditions de vie?
À côté d'eux, il y aura un locataire qui n'aura pas
d'intérêt pour son logement ou pour la communauté. À
long et à moyen terme, mais plutôt à long terme, on verra
le parc immobilier commencer à se détériorer.
On parle de prix. Comme vous le disiez tantôt, un immeuble de
trois logements qui vaut 80 000 $ qu'on convertira demain matin et qui vaudra
trois fois 80 000 $... Permettez-moi de vous corriger. Si cela coûte
aujourd'hui 80 000 $, cela veut dire que l'on parle de la valeur de
remplacement de l'immeuble. On sera toujours sur la même base. Un
immeuble que voua pouvez vendre aujourd'hui 80 000 $, ce n'est pas parce qu'il
sera converti en copropriété qu'il vaudra 360 000 $. Je regrette,
mais si cela coûte cela... On pense toujours à prendre de vieux
immeubles ou des immeubles existants pour les convertir. Si on monte le prix
à 360 000 $, c'est donc qu'on a réinvesti de l'argent dans
l'immeuble. Il y aura une certaine spéculation, je vous le
concède, à l'exception qu'on ne fera pas tripler la valeur d'un
immeuble. Quand on regarde la valeur marchande actuelle... L'offre et la
demande de logements demeure toujours la même.
M. Paré: Je ne me souviens pas du cas précis, mais
je pourrais vous rappeler un cas, à Montréal, qui nous a
été amené. La valeur d'un immeuble est passée de
600 000 $ ou 700 000 $ à 900 000 $ pour être revendu
immédiatement ou presque 1 200 000 $ ou 1 300 000 $. Je dois vous dire
qu'on n'en a peut-être pas toujours conscience parce que ce n'est pas
dans les journaux, mais, vente, revente et spéculation, dans certains
quartiers, c'est une réalité au moment où on se parle.
Dans une de vos propositions, vous dites aussi - attendez un peu: La CORPIQ
propose que ce droit soit limité dans le temps. Dès que la
majorité des deux tiers des unités sera convertie, des
mécanismes de reprise de possession pour les unités restantes
s'appliqueront. Vous savez très bien que c'est une mesure qui va
complètement à l'encontre d'un des objectifs qui est
spécifié, le maintien du stock de logements locatifs ou, en tout
cas, une certaine conservation. À ce moment-là, on n'en a plus.
Le stock de logements locatifs va aller, dans certains quartiers, en diminuant
continuellement, sans mesure de protection quelconque, si je comprends bien.
(12 h 15)
M. Galipeau: C'est exactement ce qu'on peut voir au point de vue
gestion, si vous regardez l'ensemble. Je ne vois pas de crainte à long
terme que de penser que les immeubles peuvent valoir trois fois la valeur. Ce
à quoi vous faisiez allusion tantôt, ce n'est pas dans la
région de Montréal. C'était dans la région de
Toronto. C'est chez Cadillac Fairview où cela s'est fait en l'espace
d'un an et demi, des valeurs astronomiques. Mats c'était par un
mécanisme de contrôle des loyers, ou de contrôle des
coûts qui est différent en Ontario comparé au
Québec. Je veux dire en plus qu'un cas d'exception ne vient pas
confirmer une règle du jeu.
M. Paré: Les gens qui sont venus, qui formaient toute une
délégation à Montréal -Côte-des-Neiges,
Notre-Dame-de-Grâce, Mont-Royal et tout cela - c'est chez nous. C'est
à Montréal au Québec - les cas étaient
précis avec des annonces dans les journaux -ce n'est pas à
Toronto, le cas de 1 400 000 $ dont je vous parle. C'est un des cas. Pour
celui-là, il y avait des chiffres. Mais il y en avait un paquet d'autres
où on nous montrait copie dans le mémoire de l'appartement
à vendre en condominium à des prix qui, je dois vous le dire, ne
sont pas accessibles à beaucoup de gens. Vous allez me dire que ce sont
des cas précis. Peut-être. Sauf qu'il faut être conscient
que cela existe.
M. Riverin: On peut souligner que ce n'est pas une règle
générale qui s'applique à l'ensemble du parc immobilier du
Québec. Certains secteurs peuvent être plus touchés que
d'autres, mais ce n'est pas une règle qu'on pourra appliquer, je ne sais
pas, dans le West-Island, ou encore dans certaines parties de la région
de Québec, ici. Je vois mal comment Sainte-Foy, avec le parc immobilier
qu'il y a là dans le moment, qui est principalement composé
d'immeubles à logements locatifs de 12, 16, 28 et 50 unités,
où les valeurs pourraient tripier, quadrupler, du fait d'une
possibilité de transformation en copropriété...
M. Paré: J'aurais une dernière question. Vous dites
à la page 7: CORPIQ propose que des organismes décisionnels
actuellement en place (les municipalités) conservent leur champ de
compétence en matière d'aménagement et ce, en
conformité avec le plan
directeur de ces municipalités. Cela étant dit, ne
reconnaissez-vous pas que la proposition de Montréal serait plus
applicable en fonction de ce principe que la proposition du ministre qu'on a
ici sur la table aujourd'hui?
M. Galipeau: II faudrait connaître la proposition de
Montréal.
M. Paré: En fait, la proposition de Montréal,
c'était qu'il n'y ait pas de levée de moratoire et que la
possibilité de convertir en copropriété demeure
exceptionnelle et, à ce moment, les municipalités pourraient
intervenir dans les cas d'exception, les autoriser ou, en tout cas, participer
à la décision.
M. Galipeau: Cela revient un peu à ce qu'on disait au
début. On préférerait que les municipalités s'en
occupent, étant donné que le gouvernement voit l'ensemble de la
province de Québec et chaque municipalité peut être
différente. La situation à Montréal n'est pas la situation
qui prévaut à Québec. Nous sommes d'accord, à ce
moment, en disant: Les municipalités auraient peut-être des
règles du jeu différentes de celles que le gouvernement peut
avoir.
M. Paré: Oui. Avez-vous autre chose à ajouter?
M. Riverin: Non, monsieur.
M. Paré: Votre document est très clair, comme je
vous le disais tantôt. J'avais quelques petites choses à faire
préciser. Vous l'avez très bien fait. Cela répond à
mes questions. Je reviendrai après, si le ministre veut faire quelques
commentaires.
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le
député de Shefford. M. le ministre.
M. Bourbeau: Sommes-nous rendus aux remarques finales?
Le Président (M. Rochefort): II reste du temps aux deux
formations politiques, sauf que c'est à vous de décider de
l'utilisation que vous en ferez.
M. Bourbeau: Si le député de Shefford est
prêt à faire ses remarques finales, je serais prêt.
M. Paré: On a répondu à mes questions.
M. Bourbeau: M. le Président, je veux souligner simplement
que le rapport de la CORPIQ est un rapport intéressant. C'est un autre
mémoire qui appuie d'une façon générale la
levée du moratoire. Je conçois que le député de
Shefford va sûrement dire que son interprétation à lui ne
va pas dans le même sens. C'est de bonne guerre quand on est dans
l'Opposition. Vous avez une expérience pertinente de l'immobilier. Vous
faites des recommandations aussi qui sont intéressantes. Nous en
tiendrons sûrement compte lorsque nous rédigerons le document
final que j'entends déposer à l'automne à
l'Assemblée nationale. Merci.
Le Président (M. Rochefort): Merci. M. le
député de Shefford.
M. Paré: Vous avez raison, M. le ministre. Les gens en
face sont d'accord avec la levée du moratoire. Je ne dirai pas le
contraire. Sauf que je vous ferai remarquer que les gens disent quand
même, que dans votre proposition - à la lecture du mémoire,
si je me rappelle bien - il y a trop de réglementation, qui vient
compliquer les choses.
Deuxièmement - je pense que c'est important - on peut dire que
oui, le mémoire est favorable, sauf que, comme les gens l'ont dit
tantôt, si on applique ce qu'il y a dans le mémoire qui nous est
présenté, on n'obtiendra pas satisfaction.
Un des objectifs qu'on veut atteindre c'est, entre autres, une certaine
protection en ce qui concerne le stock de logements locatifs. À mon
avis, on peut avoir des mémoires qui soient favorables sauf qu'il faut
toujours garder en tête, quand on veut légiférer, les
objectifs fondamentaux qu'on s'est fixés au départ. Lorsqu'ils ne
sont plus respectés, il faut se demander si on change les objectifs ou
bien, finalement, si on tient compte plus ou moins des recommandations.
En tout cas, je dois vous dire que votre mémoire est clair,
très très clair; tous l'ont compris très rapidement. On
sait finalement... Votre position, je la respecte beaucoup. Je dois vous dire
que j'analyse toujours en fonction des objectifs qui ont été
établis au début et j'essaie de voir si, oui ou non, on y
répond. C'est à la suite des discussions, comme on vient de le
faire, qu'on réussit à voir si cela répond ou non. C'est
encore une question d'interprétation, mais cela m'a fait plaisir de
discuter avec vous.
Le Président (M. Rochefort): Merci. Pour le mot de la
fin.
M. Galipeau: La corporation vous remercie de lui avoir
donné la chance d'exposer son point de vue ici à la commission.
Non seulement on demeure à votre disposition s'il y avait d'autres
informations, mais nous désirerions participer beaucoup plus activement
soit à l'élaboration, soit à la consultation, comme on l'a
fait dans le passé. Je vous remercie.
Mouvement des consommateurs handicapés du
Québec
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie de votre
participation à nos travaux et j'inviterais maintenant à prendre
place à la table nos invités, les représentants du
Mouvement des consommateurs handicapés du Québec. Bienvenue parmi
nous.
Pour l'information des membres de la commission, je vous demanderais de
vous présenter et de prendre la quinzaine de minutes à votre
disposition pour nous présenter les points essentiels de votre
mémoire puisque, comme j'ai eu l'occasion de le répéter,
votre mémoire a été reçu et lu par l'ensemble des
membres de la commission avant aujourd'hui.
M. Gagnon (François): Merci, M. le Président.
Bonjour à tout le monde. Mon nom est François Gagnon. Je suis
vice-président du Mouvement des consommateurs handicapés du
Québec, qui est une association provinciale, et Monique Couillard est la
présidente du mouvement. Pour la présentation, on avait
pensé procéder à une lecture assez rapide en apportant des
commentaires sur des points spécifiques et, s'il y avait des
éclaircissements par la suite, on...
Le Président (M. Rochefort): Écoutez, en ce qui
nous concerne, la forme de votre présentation est la vôtre, sauf
qu'on souhaiterait que vous réussissiez à le faire dans la
quinzaine de minutes qui est à votre disposition.
M. Gagnon: D'accord. Le Mouvement des consommateurs
handicapés du Québec, fondé en 1979, est
présentement le seul regroupement d'associations locales de personnes
handicapées qui existe au Québec.
Notre but est d'assurer la protection du consommateur handicapé
face au marché des biens et des services et de faire entendre la voix
des personnes handicapées partout où des décisions sont
prises concernant leur mieux-être individuel et collectif.
Nous sommes affiliés à la Coalition des organismes
provinciaux ombudsman des handicapés (COPOH), qui est un organisme
pancanadien, et nous nous faisons l'ardent défenseur du modèle de
vie autonome, lequel s'oppose au modèle médical,
omniprésent dans l'industrie de la réadaptation. Le modèle
de vie autonome se caractérise par l'abandon du rôle de patient au
profit de celui de consommateur à part entière.
Tous les membres du MCHQ sont des associations locales, ouvertes
à tous les types de déficiences physiques ou sensorielles, dont
les actions portent sur différents aspects de la vie en
société, comme le transport, l'habitation, l'éducation et
l'accessibilité.
Pour ce qui est du dossier qui nous touche particulièrement, en
ce qui concerne la levée du moratoire sur les condominiums, on ne
prétend pas avoir une expertise comme celle d'autres groupes
d'associations de locataires, sauf qu'en ce qui touche les besoins essentiels
des personnes handicapées on pense être en mesure de donner
l'expertise qui est la plus complète sur cela.
Le mouvement est donc ce lieu privilégié où les
consommateurs handicapés ont choisi d'agir dans le but
d'améliorer leurs conditions de vie, ce qui inclut, entre autres, leurs
conditions de logement et les obstacles de toutes sortes qu'ils doivent
surmonter pour pouvoir s'en procurer un ou pouvoir le conserver.
Depuis quelques années, on a vu l'apparition en grand nombre -
cela a poussé comme des champignons - de la formule des condominiums,
qui est quand même assez populaire.
Le retour vers les quartiers centraux des villes d'une partie de la
population plus aisée financièrement fit en sorte que ces
quartiers devinrent des lieux privilégiés pour le
développement de cette formule d'habitation dont l'objectif premier
était de permettre à plus de ménages d'accéder
à la propriété. nous trouvons que l'objectif de
l'accession à la propriété est quand même un
objectif louable, sauf que, comme on le verra plus tard, on se dit, en ce qui
nous concerne, que ce n'est pas évident qu'il y a une forte proportion
de la population handicapée qui est en mesure d'accéder à
la propriété.
Nous croyons qu'à court terme cette pratique aura pour effet
d'éliminer des quartiers centraux les populations moins bien nanties qui
y trouvent actuellement des services qu'elles ne pourront que très
difficilement retrouver ailleurs.
À maintes reprises, la construction ou la conversion des
immeubles s'est faîte au détriment de l'accessibilité. Une
telle façon de procéder va à l'encontre des objectifs du
gouvernement qui visent à rendre la société accessible aux
personnes handicapées. Les immeubles convertis jusqu'ici furent souvent
des bâtiments assez récents, présentant déjà
un minimum d'accessibilité. La conversion de ces immeubles et leur vente
à des prix faramineux obligèrent bon nombre de personnes
handicapées à quitter leur logement et à s'éloigner
des services dont elles avaient besoin.
Le phénomène des incapacités significatives et
persistantes n'est pas le lot d'une petite minorité sociale, comme on a
souvent tendance à le croire. C'est une réalité
susceptible de rejoindre la majorité de la population à un moment
ou l'autre de son existence. Son incidence augmente de façon
considérable avec le vieillissement.
Les principaux obstacles que l'on doive
surmonter pour pouvoir se procurer un logement lorsqu'on est une
personne handicapée sont, outre les barrières architecturales qui
sont toujours présentes, les réglementations et les normes qui ne
tiennent pas compte des phénomènes reliés aux
incapacités ou qui ne sont carrément pas mises en application,
ainsi que les attitudes et les comportements de rejet ou de discrimination dont
les personnes handicapées sont l'objet. Il faut savoir que, lorsqu'on
est à la recherche d'un logement, aussitôt qu'on vérifie
l'accessibilité de la bâtisse et qu'on mentionne qu'on est une
personne en fauteuil roulant, souvent, l'établissement passe d'aucune
marche à quatre marches parce que le propriétaire n'est pas
intéressé à avoir un locataire handicapé dans son
immeuble.
Un logement habitable c'est un logement... On parle, nous,
d'accessibilité, mais on parle aussi d'un concept d'habitabilité
qui fait que la personne peut vaquer à toutes ses occupations à
l'intérieur d'un logement comme tout le monde. Ce qu'on dit, c'est
qu'une porte plus large à une chambre de bains avec des barres d'appui,
cela ne constitue pas nécessairement un logement habitable pour autant.
Pourquoi la personne handicapée n'aurait-elle pas le droit d'ouvrir et
de fermer elle-même ses fenêtres, de pouvoir utiliser les armoires
de la cuisine? Pourquoi, aussi, devrait-elle payer sans cesse plus cher pour
pouvoir circuler dans son logement dont les couloirs et les pièces se
doivent d'être plus grands.
À voir la façon dont se développe l'architecture
des condos, on risque de voir les personnes habitant ces lieux se retrouver en
perte d'autonomie dans des logements devenus non accessibles»
Après avoir été forcées de vivre pendant de
nombreuses années en marge de la société, les personnes
handicapées en vinrent à considérer le logement social
comme un tremplin pouvant leur permettre de s'intégrer au courant
sociétal pour ainsi devenir des contribuables par l'emploi, la
consommation des biens et des services, le paiement des impôts directs et
indirects.
Pour de nombreuses personnes handicapées, le logement constitue
le principal obstacle environnemental à leur participation active
à la vie de société. Des conditions d'habitation ne
répondant pas aux besoins réels des personnes handicapées
peuvent dramatiquement saper leurs efforts d'intégration tout en les
maintenant dans un style de vie sans cesse dépendant. Grâce
à des logements accessibles et à des caractéristiques
d'habitation utilisables, les personnes handicapées pourront
s'épanouir en menant une vie autonome. il incombe donc aux
décideurs des différents paliers de gouvernement de veiller
à ce que les normes minimales d'habitabilité deviennent des
prérequis obligatoires dans toutes les initiatives de logement.
Là, on ne parlera pas de l'inefficacité du moratoire parce
que je pense que cela a dû vous être présenté
à maintes reprises. Nous passons au contexte politique. L'objectif
premier visé par les différents paliers de gouvernement, dans les
années en cours, est de faire en sorte de mettre fin à
l'Etat-providence. Le prétexte utilisé est de faire valoir le
besoin de rationaliser les services offerts par l'État. On assiste de
plus en plus au désengagement de l'État, pour se retrouver entre
les mains du pouvoir, de la richesse et du secteur privé.
Le secteur de l'habitation n'échappe pas à cette
règle. L'orientation proposée par le gouvernement, consistant
à favoriser l'accession à la propriété,
réinstaure un marché de libre concurrence auquel n'échappe
pas le parc des logements à prix abordable. La situation actuelle,
même avec un moratoire sur la conversion en condominium, affecte
dramatiquement les personnes à faible revenu. Les perspectives d'emploi
demeurent très minces pour les personnes handicapées.
L'inefficacité des plans d'embauche et l'inaccessibilité
architecturale des entreprises font que celles-ci se retrouvent, dans une forte
proportion, sans emploi - on parle d'environ 90 % - et, dans plusieurs cas, les
personnes handicapées qui se sont trouvé un emploi sur le
marché régulier du travail sont souvent des personnes ayant des
handicaps très légers.
Comme toutes les personnes à faible revenu, les personnes
handicapées sont souvent victimes de harcèlement et de
discrimination. Conséquemmeht, elles perdent souvent, ainsi, toute
chance de pouvoir continuer à vivre dans leur logement. Comme elles ne
peuvent, la plupart du temps, se reloger aux mêmes conditions, elles
quittent leur quartier ou cohabitent à plusieurs dans un même
appartement. Curieusement, le phénomène de la cohabitation semble
coïncider avec les nouvelles lignes directrices des plans de services de
l'Office des personnes handicapées du Québec concernant
l'adaptation de domiciles. En effet, depuis octobre 1986, l'aide
matérielle et financière est accordée seulement dans le
cas de logements ou propriétés habités par un minimum de
deux personnes handicapées. (12 h 30)
Les impacts de la conversion. On parle comme tout le monde de la
spéculation, ce qui fait que la recherche d'un logement, les coûts
de location ont augmenté de façon assez considérable. Il y
a une diminution du stock de logements locatifs. C'est très difficile
pour une personne handicapée présentement, surtout dans les
centres urbains comme Montréal et Québec, de trouver un logement
qui corresponde aux moyens financiers et à des conditions
d'habitabilité qui soient conformes aux normes
d'accessibilité préétablies. Ce qu'on dit, entre autres,
c'est que l'accession à la propriété n'est pas
évidente pour la population qu'on dessert.
Pour terminer, voici nos recommandations. Dans le but de permettre aux
personnes handicapées de se procurer un logement à prix abordable
et de leur garantir le droit au maintien dans le milieu qu'elles ont choisi,
nous recommandons que la conversion des immeubles ne se fasse pas au
détriment de l'accessibilité, ce qui irait directement à
l'encontre des objectifs du gouvernement; que, dans le cas de
rénovations majeures d'un logement habité par une personne
handicapée, celui-ci soit rendu complètement accessible et
habitable -on parle des armoires, des couloirs et non pas nécessairement
seulement de la chambre de bains et de la porte d'entrée - que, dans les
cas où des rénovations majeures sont faites, les dépenses
occasionnées par la relocalisation temporaire du locataire
handicapé soient assumées par le propriétaire; que les
mesures envisagées dans le but d'assurer une protection additionnelle
aux personnes handicapées, contenues dans le document: Lever le
moratoire: une décision qui s'impose, soient implantées de
concert et en consultation avec le MCHQ.
Ce qu'on offre aux instances décisionnelles, c'est justement de
participer, par le biais d'une consultation, à la mise sur pied de
mesures qui vont assurer à la personne handicapée de pouvoir
conserver ou acquérir un logement habitable. On veut le faire de concert
avec les gens de la SHQ ou les instances décisionnelles. En gros, on
pense que cela devient essentiel et que même les formules d'habitation,
comme les coopératives d'habitation, devraient être
encouragées en ce sens, parce que cela devient une formule palliative au
manque de logements qui est réel ces temps-ci.
En terminant, on veut remercier la commission de nous avoir entendus. Je
pense qu'on est le seul regroupement de personnes handicapées à
s'être prononcé sur la question. On croyait cela essentiel parce
que la conversion en copropriété va vraiment à l'encontre
de l'autonomie de la personne. C'est très difficile de se loger,
aujourd'hui, pour une personne qui sort d'une institution. On craint que les
mesures et la façon dont cela se développe présentement
soient un peu une espèce de retour à l'institution pour certaines
personnes dont le handicap est assez lourd. On vous remercie.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie de votre
présentation. M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, M. le député
de Nicolet aimerait poser quelques questions.
Le Président (M. Rochefort): Oui. M. le
député de Nicolet, vous avez la parole.
M. Richard: M. le Président, M. Gagnon, Mme Couillard,
sincères mercis pour votre mémoire.
La vue d'ensemble de votre mémoire, si on en a bien perçu
les orientations, était relativement claire. On voit que, sans vous
opposer formellement à la levée du moratoire, votre organisme ne
voit pas les bénéfices que les personnes handicapées
peuvent retirer de la conversion en copropriété. Vous soutenez
aussi qu'environ 90 % des personnes handicapées sont évidemment
sans emploi, malheureusement, et doivent vivre dans des conditions
économiques peu enviables.
Vous soulignez aussi dans votre document que, sauvent victime de
harcèlement et de discrimination, le groupe que vous représentez
craint que le stock locatif ne soit réduit par l'effet de la conversion,
accentuant ainsi les problèmes de logement pour les personnes
handicapées, dans tout le Québec. Donc, vous recommandez des
mesures qui visent à procurer des logements à prix abordable et
permettant une plus grande accessibilité physique, ce que vous souteniez
tout à l'heure, c'est-à-dire les rampes d'accès, les
portes, les lavabos, etc., de façon que les personnes handicapées
puissent avoir de plus en plus accès à un logement
décent.
Ma question est: Est-ce que vous pensez que des normes
d'accessibilité devraient être imposées aux convertisseurs
afin de permettre le plus largement possible aux gens de votre groupe, aux
personnes handicapées, de vivre dans des logements tout à fait
adaptés à leurs besoins?
M. Gagnon: Ce qu'on peut dire là-dessus, c'est qu'il y a
des études qui ont été faites et qui démontrent que
dans le cas d'un logement adapté aux personnes handicapées,
principalement aux personnes se véhiculant en fauteuil roulant, les
personnes non handicapées réussissent à y vivre et
trouvent que la formule architecturale de ce qu'on propose est quand même
assez facilitante. Ce qu'on dit là-dessus, c'est que la façon
dont les condominiums sont développés en "split-levels" - on voit
souvent des marches - si la personne qui en fait l'achat, du jour au lendemain,
à la suite d'un accident ou d'une maladie quelconque, se retrouve
handicapée, comment fonctionne-t-elle dans ce logement? Cela implique
des coûts supplémentaires. On serait peut-être mieux de
prévenir que de se retrouver dans une situation où les gens ne
pourront plus vivre dans les logements qui n'auront pas été
conçus en fonction de cette éventualité.
M. Richard: M. le Président, mon collègue, le
député de Taschereau, aurait une question à poser au
groupe, si vous n'avez pas d'objection, sans faire l'alternance.
Le Président (M. Rochefort): Vous n'avez pas d'objection?
Parfait. M. le député de Taschereau.
M. Leclerc: Merci. Je voudrais, à mon tour, souligner la
présence de M. Gagnon et de Mme Couillard, des gens de mon comté,
qui, malgré le fait qu'ils aient été aux prises avec un
problème assez sérieux la dernière semaine - il sont
passés au feu, M. le ministre - ont quand même pu venir nous
rencontrer pour nous présenter leur mémoire.
Je profite de l'occasion, M. le ministre, pour vous faire savoir que ces
gens ont présenté un projet de coop - et je sais que M.
Arseneault écoute attentivement - de 18 unités pour personnes
handicapées dans mon comté, et je suis sûr que ce projet
sera étudié avec beaucoup d'attention. Ceci dit, puisque vous
semblez demander des normes d'accessibilité physique, est-ce qu'on peut
vraiment exiger cela du secteur privé, alors que, même dans mon
comté, il y a des centres Travail-Québec qui ne sont même
pas accessibles aux personnes handicapées? Je vous avoue que, dans mes
souliers de parlementaire, je me verrais mal d'imposer cela au secteur
privé alors que nous, du public, n'avons même pas réussi,
au cours des ans, à faire en sorte que nos... Est-ce que j'ai la parole,
M. le Président?
Le Président (M. Rochefort): Oui, M. le
député.
M. Leclerc: Merci. C'est, en gros, ma question. Branchez-vous sur
la margarine, M. le député de Lévis. On parlera des
biscuits ensuite.
M. Garon: Mettez-vous de la margarine dans vos biscuits ou du
beurre?
Le Président (M. Rochefort): M. le député de
Lévis, s'il vous plaît!
Une voix? M. le député de Lévis s'est
récemment converti à la margarine.
Le Président (M. Rochefort): Oui, mais je voudrais
être certain que tout le monde ne s'en mêle pas. Vous avez la
parole.
M. Gagnons On trouve dommage que, dans certaines institutions du
gouvernement, on n'aient pas les services adéquats auxquels on aurait
droit. Je pourrais citer en exemple lorsqu'on on a rencontré M. Sirros,
responsable de l'Office des personnes handicapées du Québec. Pour
entrer dans les bureaux de M. Sirros, c'est très accessible, sauf
qu'à un moment donné, si le besoin se fait sentir d'aller
à la salle de bains, ce n'est plus possible. Ce qu'on demande à
ce sujet, puisque la réglementation qui devait faire suite à la
mise en application de la loi 9 n'a pas suivi, ce qui fait que les services ne
sont pas tenus d'être...
Quand on parle d'accessibilité dans la loi, cela se limite
à une rampe d'accès à la porte d'entrée; une fois
rendu à l'intérieur, on voit parfois des immeubles publics avec
trois marches et l'ascenseur un peu plus loin. C'est parce que la
réglementation n'a pas été appliquée et c'est ce
qu'on demande au gouvernement. Je pense que ce serait peut-être une bonne
initiative du gouvernement de donner l'exemple au secteur privé parce
que, tant que cela ne sera pas fait du côté des institutions
gouvernementales, comment voulez-vous exiger que l'entreprise privée
mette en application des réglementations et des normes
d'accessibilité qui correspondent aux besoins réels des personnes
handicapées?
M. Garon: ...de Québec ou de Montréal? M. Gagnon:
Pardon?
Le Président (M. Rochefort): M. le député de
Lévis, vous n'avez pas la parole.
M. Garon: Je pose seulement une question.
Le Président (M. Rochefort): Non. M. le
député de Lévis, je vous reconnaîtrai avec plaisir
en temps et lieu.
Une voix: ...consentement.
Mme Couillard (Monique): M. le Président, me
permettez-vous d'ajouter quelque chose?
Le Président (M. Rochefort): Oui, madame.
Mme Couillard: Ce matin, on n'a pas, en venant ici, la
réponse à toutes les questions non plus. Ce n'est pas une
opposition systématique au moratoire qu'on est venu faire non plus. Ce
qu'on est venu dire à nos gouvernants, dans le fond, c'est qu'il y a un
problème dans le milieu des personnes handicapées à qui,
depuis dix ans, on a fait subir tout un processus d'intégration et de
normalisation et, aujourd'hui, ces travailleurs, des pères et des
mères de famille, des contribuables, se retrouvent confrontés et
intégrés dans une société qui, elle, ne s'est pas
normalisée. Bien sûr, la levée du moratoire est, pour nous,
un problème en perspective, car la majorité des personnes
handicapées, il faut quand même le dire, vit sous le seuil de la
pauvreté. Si on leur dit demain matin: Vous allez acheter un loge-
ment - c'est bien beau - de 40 000 $, je ne suis pas sûre que
beaucoup puissent se permettre cela.
C'est un côté du problème. Il reste encore le
problème de l'accessibilité et aussi, comme François
Gagnon le mentionnait tout à l'heure, celui de l'habitabilité. Il
faut comprendre que l'accessibilité ne signifie pas toujours une porte
de chambre de bains assez large pour pouvoir y entrer et une barre d'appui
qu'on met ici et là. Ce sont tous des problèmes qui sont
vécus par les personnes hadicapées et la crainte de notre
mouvement consiste à dire: Demain matin, s'il y a levée du
moratoire, qu'est-ce que cela va amener comme conséquences dans le
milieu des personnes handicapées? Il faut penser aussi qu'aujourd'hui on
est une minorité, mais vous savez comme moi que la population est
vieillissante et que, demain, il y aura beaucoup plus de personnes en perte
d'autonomie qui auront besoin elles aussi de logements adaptés, de
logements accessibles tant physiquement que financièrement.
Maintenant, peut-être que, comme le disait M. le
député de Taschereau, M. Leclerc, une des solutions qui pourrait
être facilement envisageable pour nous pour le moment serait que le
gouvernement favorise des projets, par exemple, de coopératives,
où se retrouveront non pas seulement des personnes handicapées,
parce qu'on trouve que c'est une formule ghetto, mais des familles - parce
qu'aujourd'hui les personnes handicapées sont mariées, elles ont
des enfants - des familles où il y aura une personne handicapée,
que ce soit le père, la mère ou encore un enfant. Cela peut
être une solution envisagée pour le moment mais,
évidemment, on n'a pas la réponse. C'est plutôt un cri
d'alarme qu'on est venu lancer ce matin en vous disant: Bon, si le moratoire
est levé et que, demain, c'est appliqué, nous, qu'est-ce qu'on
devient là-dedans? C'est ce que je voulais ajouter.
Le Président (M. Rochefort): M. le député de
Shefford.
M. Paré: Merci, M. le Président.
Je vous remercie du témoignage que vous apportez ce matin. Vous
dites que vous êtes le seul groupe, finalement, à s'être
présenté pour représenter les personnes handicapées
du Québec. Je trouve important qu'on ne vous oublie pas.
Il y a d'autres groupes qui sont venus. Entre autres, vous parliez d'une
population vieillissante, plusieurs groupes représentant les
aînés du Québec sont venus à Montréal, parce
qu'effectivement, c'est une population importante qui a des
préoccupations et des besoins spécifiques et qui méritent
qu'on les considère dans les décisions qu'on prendra. Parce que,
peu importe la décision qu'on prendra, il y a des gens qui vont
écoper.
Il faudrait que tout le monde puisse se faire entendre de façon
qu'on soit sensibilisé aux conséquences des gestes qu'on va poser
et vous êtes justement une clientèle qui risque d'être la
plus touchée, je vous le dis tel que je le pense, et ce serait dommage.
J'espère qu'on va tenir compte de vos demandes et, surtout, de vos
inquiétudes. Quand le député de Taschereau disait qu'il
espère une réponse pour un projet dans son comté; moi
aussi, j'en attend une, sauf que cela fait deux ans. J'espère avoir une
réponse positive cette année, sinon, cela va aller à
l'année prochaine.
On peut bien vouloir faire vivre d'espoir les gens, mais l'espoir qui
traîne trop longtemps peut devenir du désespoir. À ce
moment-là, c'est très malheureux et il ne faudrait pas que ce
soit ainsi.
Vous avez présenté une argumentation qui est importante et
que je vais reprendre avant de poser des questions.
C'est vrai qu'il y a un processus. Quand on lit votre mémoire -
vous en avez sauté des bouts, c'est correct - on s'aperçoit qu'il
y a une philosophie que le gouvernement a amenée au cours des
dernières années qui est la désinstitutionnalisation et le
maintien de plus en plus à domicile. Donc, le gouvernement d'une main,
finalement, avec l'idée d'un ministère, favorise une
politique.
Vous disiez tantôt dans la présentation, M. Gagnon, qu'on
retrouve dans les milieux centraux, finalement, tous les services. Ils sont
à proximité, ils sont plus proches, donc, la politique du
ministère de la Santé et des Services sociaux doit faire en sorte
qu'on intègre les gens non pas en les envoyant en banlieue, mais en les
gardant dans les centres de façon qu'ils puissent s'intégrer de
façon effective dans leur milieu de vie, là où il y a de
l'activité et des services.
La politique du ministère va vraiment dans le sens qu'on vient de
discuter. Mais la politique qu'on propose maintenant fait en sorte de changer
les populations. En tout cas, le risque qu'on y voit, c'est de changer les
populations déjà en place dans les milieux centraux. Ceux qui
vont être appelés à partir, c'est sûr, si l'un des
objectifs établis est l'accès à la
propriété, ce sont ceux qui ne peuvent accéder à la
propriété.
Vous avez donné le chiffre de 90 % des personnes
handicapées qui n'ont pas d'emploi régulier, donc, qui vivent de
prestations et les prestations sont très peu indexées. Alors
qu'au cours des discussions -vous étiez ici ce matin - vous avez vu
qu'il y a la certitude que les loyers vont augmenter. Cela veut dire que, pour
les classes les plus démunies qui vivent de prestations, le projet de
loi n'apporte aucune possibilité d'accès à la
propriété, parce que cela ne donne pas plus d'argent à
personne, cela amène seulement une augmentation des coûts de
logement. Donc, ou on sort moins, on se
prive et on ne se paie même pas le nécessaire, ou on s'en
va en banlieue où on espère qu'on va payer moins cher pour garder
le même montant de dépenses, mais les dépenses vont nous
coûter mauditement plus cher parce qu'il va falloir se déplacer
maintenant pour venir chercher dans les centres-villes ce dont on a besoin.
À la lecture du document, est-ce que votre organisme a
trouvé au moins un avantage à la levée du moratoire tel
que proposé? Et, si oui, lequel ou lesquels?
Tantôt, vous avez dit: On vient parce qu'il peut y avoir des
inconvénients - je pense que c'est le mot que vous avez utilisé -
à la levée du moratoire. Vous êtes soucieux et inquiets de
cela. Donc, vous vous préoccupez des inconvénients, mais est-ce
que vous avez au moins trouvé des avantages? (12 h 45)
M. Gagnon: Un avantage que je mentionnais au début, c'est
que le principe d'accession à la propriété est un principe
louable pour des gens qui peuvent accéder à la
propriété. Mais, compte tenu de la population qu'on vise, on dit
au gouvernement que cela va prendre des mesures d'encadrement. C'est un appel
à la prudence qu'on fait, en réalité. On dit: L'accession
à la propriété n'est pas pensable - comme vous l'avez dit
tout à l'heure - pour presque la totalité de la population
handicapée du Québec. Mais le fait d'accéder à la
propriété, le fait d'acquérir quelque chose, c'est
positif. Ce qu'on fait, c'est un appel à la prudence.
Tantôt, on disait qu'en éloignant les personnes à
faible revenu des quartiers centraux on les éloignait automatiquement
des services. On peut donner un exemple. Dans les centres-villes des deux
principales villes, Québec et Montréal, les trottoirs ont
été aménagés. En banlieue, aussitôt qu'on
s'éloigne des centres-villes, il est très difficile de circuler
sur le trottoir pour une personne qui se déplace en fauteuil roulant. Il
y a toutes sortes de services qui ont été concentrés dans
les centres urbains et dans les centres-villes.
À un moment donné, on parlait de la crainte de la
difficulté de trouver un logement locatif. On pourrait aller plus loin
que de dire que c'est une crainte. C'est une constatation qu'on a faîte.
Au cours des derniers mois, cela s'est développé de façon
incroyable. Moi-même, je suis à la recherche d'un logement et je
n'ai encore rien trouvé dans le centre-ville de Montréal parce
que je veux rester dans le quartier. Les prix ont monté de façon
incroyable. C'est la réalité, c'est une constatation qu'on a
faite. Et c'est un appel à la prudence que l'on fait dans ce sens.
M. Paré: Est-ce que votre appel à la prudence ne
serait pas justement, étant donné que le ministre a
déjà annoncé son intention de déposer un document
sur une politique d'habitation, de demander au gouvernement d'élaborer
d'abord une politique d'habitation? Le premier ministre a parlé, au
cours des derniers jours, d'amener une politique ou, en tout cas, une
discussion sur la possibilité d'une politique de la famille. Parmi les
problèmes que vous vivez, vous avez soulevé la cohabitation. Je
dois vous dire que je ne suis pas sûr que maintenant il y ait beaucoup de
gens qui soient sensibles à ce problème. Au contraire, on semble
même vouloir l'imposer. Ce n'est plus drôle quand on dit qu'on
impose à des citoyens à part entière de vivre avec
d'autres pour faire des économies. Je trouve cela inquiétant.
On se rend compte que la levée du moratoire aura des effets
sociaux terribles. Cela touche beaucoup de gens. Cela ne peut pas être
traité comme si cela ne dérangeait personne. À ce
moment-là, est-ce que l'appel à la prudence ne serait pas
justement de dire au gouvernement: Amenez-nous une véritable politique
d'habitation qui tienne compte du volet de la famille et qu'à
l'intérieur de cela on tienne compte de la possibilité de lever
le moratoire ou non. On a le droit, comme gouvernement, de
préserver des quartiers pour la location et cela n'empêche pas la
copropriété dans des édifices neufs, même dans ces
quartiers et dans des quartiers qui sont proches. Ce n'est pas un rejet de la
copropriété, il faut être bien clair. On s'oppose à
la levée du moratoire pour la conversion des immeubles
déjà locatifs. Il ne s'agit pas d'empêcher la
copropriété dans des immeubles qui sont déjà vides.
Cela peut se faire. On le fait à Montréal. Vous le savez, vous
dites que vous y cherchez un logement, donc vous connaissez bien
Montréal. Cela se fait dans des entrepôts vides, cela se fait dans
d'anciennes usines. Il y a moyen de favoriser la copropriété sans
déloger des gens.
Je pense que votre appel à la prudence est bien parce que les
gestes qu'on va poser auront des effets, comme je vous le disais tantôt,
sur toute la population. Je ne suis pas sûr que les gens sont
sensibilisés au fait que tout le monde sera touché ou presque,
tous les locataires, peu importe, qu'ils déménagent ou non. Pour
les gens qui seront déplacés, ce sera pire, surtout dans votre
cas. Je dois vous dire que cela m'a sensibilisé, le fait que vous
parliez des trottoirs. On n'y pense pas assez souvent parce qu'on n'en a pas
besoin. C'est vrai, dans les centres-villes on retrouve des aménagements
qui ont peut-être été imposés, mais qui sont faits
alors qu'on ne les retrouve pas ailleurs. Finalement, on aura fait des
aménagements qui ne seront plus utilisés si on vous
déplace; cela n'a pas de bon sens.
Qu'est-ce que vous pensez de la proposition qu'on retrouve dans le
document sur le guichet spécial de la Régie du logement? Est-ce
que, pour vous, c'est une sécurité?
M. Gagnon: On a étudié le document sommairement. La
recommandation qu'on fait au gouvernement et à M. le ministre est la
suivante. Avant de parler de mesures - on parlait de mesures protectrices et
d'instaurer un guichet - on aimerait que ce soit fait en consultation et de
concert avec nous. Nous sommes prêts à collaborer et à
mettre en place des mécanismes qui permettront de s'assurer d'une
certaine protection et de mesures qui n'iront pas à l'encontre des
objectifs du gouvernement qui visent l'intégration sociale. Ce qu'on
demande, l'objectif premier de nos recommandations justement, c'est de
participer avec le gouvernement à mettre sur pied des mécanismes,
des mesures favorisant les personnes handicapées.
M. Paré: Vous dites que vous vous cherchez un appartement
à Montréal et que vous avez beaucoup de difficultés
à en trouver. Premièrement, ou ils ne sont pas adaptés, ou
ils ne sont pas disponibles, ou les coûts ont augmenté
considérablement. Est-ce que, depuis l'annonce de la levée du
moratoire, c'est plus difficile à trouver? Cela fait déjà
un certain temps que vous cherchez? Est-ce que, dans des quartiers
maintenant... Parce que vous dites que vous ne voulez pas changer de quartier.
Est-ce que c'est plus difficile maintenant que ce ne l'était il y a
quelques années?
M. Gagnon: Cela n'a jamais été facile, sauf qu'on
se rend compte que cela devient de plus en plus difficile, principalement si on
parle de la région de Montréal, entre autres, dans les quartiers
de Saint-Jacques et du centre-sud, où il y a un fort bassin de
population handicapée. On sent des augmentations de loyer qui commencent
à être assez considérables et les gens sont plus ou moins
en mesure de payer. Ce qu'on craint aussi, c'est ceci: il y a des politiques
qui ont été mises sur pied au cours des dernières
années comme, par exemple, le supplément au loyer de la SHQ. On
se dit: II y aurait un besoin supplémentaire et il y a des gens
présentement qui sont en attente, en institution, pour pouvoir
intégrer un logement. Premièrement, il manque de logements.
Deuxièmement, il manque d'argent pour ce qui est du supplément au
loyer. On se dit: Est-ce qu'il s'agit du retrait progressif des mesures qui ont
été mises en application dans le passé, des programmes
spéciaux qui avaient été mis en application pour favoriser
la désinstitutionnalisation et amener les gens à vivre dans des
logements?
Ce sont des craintes qu'on a.
M. Paré: Je vous remercie beaucoup et j'espère
qu'on va en tenir compte lorsqu'on prendra des décisions, effectivement,
afin que des clientèles qui ne sont déjà pas les plus
choyées ne soient pas pénalisées davantage.
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le
député. Y a-t-il quelqu'un du côté
ministériel? M. le ministre.
M. Bourbeau: Oui. Simplement pour remercier les
représentants du Mouvement des consommateurs handicapés du
Québec de l'intérêt qu'ils portent à la question.
Nous nous intéressons déjà, à la SHQ, au
problème du logement des personnes handicapées puisque nous avons
un volet du programme PARCQ qui s'adresse à cette clientèle. Nous
avons l'intention de continuer et même d'accentuer nos efforts, dans le
but non seulement de faciliter l'accès, mais également de
faciliter l'évolution, à l'intérieur des HLM, des
personnes handicapées. Je peux vous assurer que les propositions que
vous faites, on en tiendra compte lorsque nous aurons à prendre des
décisions relativement au projet qui est devant nous. Merci.
Le Président (M. Rochefort): M. le député de
Shefford, avez-vous des remarques finales?
M. Paré: En vous remerciant d'être venus nous faire
part de vos préoccupations et de vos inquiétudes, je conclus en
disant: M. le ministre, vous savez combien le programme PARCQ est
dénoncé, combien c'est un recul pour tes personnes
handicapées, comparativement à ce qui existait lorsque les
services étaient fournis par l'Office des personnes handicapées,
avant que l'on décide de faire le transfert.
M. Bourbeau: II n'y a pas de transfert.
M. Paré: Je ne veux pas revenir là-dessus, on a eu
des discussions. Mais on sait à quel point c'est plus difficile et qu'il
y a moins d'aide maintenant, parce que j'ai des dossiers précis dans mon
comté que je pourrais vous détailler, mais je pense que ce n'est
ni la place et ni le temps.
Je vous remercie. Vous amenez une préoccupation qui touche
beaucoup de gens et c'est notre devoir d'en tenir compte. Merci beaucoup.
Le Président (M. Rochefort): Pour le mot de la fin,
à votre tour.
M. Gagnon: Tout ce qu'on veut dire, c'est qu'on remercie les gens
de la commission de nous avoir permis de nous
faire entendre. Je pense que ce qui est à considérer,
c'est que notre groupement est contrôlé, dirigé
essentiellement par des personnes handicapées, ce qui est assez unique
au Québec. On se dit: Si, avant d'établir des politiques face
à l'habitation ou à tout autre secteur, cela faisait partie de
l'idée des décideurs de consulter réellement ceux qui
vivent les problèmes et non pas, comme l'a déjà dit un
certain ministre, de consulter des gens qui travaillent dans des bureaux, des
fonctionnaires, ce serait déjà un plus pour nous.
Le Président (M. Rochefort): Merci de votre
présence parmi nous. Sur ce, la commission ajourne ses travaux
jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 55)
(Reprise à 14 h 7)
Le Président (M. Richard): À l'ordre, s'il vous
plaît! J'aimerais vous rappeler le mandat de la commission qui est une
consultation générale portant sur la levée du moratoire en
ce qui concerne la conversion des immeubles locatifs en
copropriété divise.
J'inviterais, s'il vous plaît, les gens du Rassemblement populaire
de Québec à prendre place.
Rassemblement populaire de Québec
Mme Viger (Françoise): M. le Président, je suis
Françoise Viger, conseillère à la ville, du Rassemblement
populaire dans Limoilou. Je vous présente mon collègue, M.
Jacques Fiset, qui est responsable et spécialiste du dossier de
l'habitation pour le Rassemblement populaire.
Le Président (M. Richard): Je m'excuse, madame. Avant que
vous commenciez, j'aimerais seulement vous rappeler que vous avez quinze
minutes pour présenter votre exposé. Quand il restera seulement
quelques minutes, je vous ferai signe et vous devrez, si vous n'êtes pas
rendue à votre conclusion, conlure.
Mme Viger: D'accord.
Le Président (M. Richard): À vous, madame.
Mme Viger: Merci. M. le Président de la commission, M. le
ministre responsable de l'Habitation, messieurs les membres de cette
commission, je vous remercie de permettre au Rassemblement populaire, qui est
le parti de l'opposition officielle à la ville de Québec, de vous
présenter son mémoire sur la levée du moratoire sur la
conversion des immeubles locatifs en copropriété divise.
Nous entendons faire valoir, par ce mémoire, les principes qui
sous-tendent les mesures qui touchent la majorité des citoyens et
citoyennes de la ville de Québec, c'est-à-dire les locataires car
ce sont évidemment eux qui seront touchés par ce projet de
loi.
En gros, le Rassemblement populaire préférerait que le
gouvernement opte pour une porte close qui s'ouvre seulement pour qui a les
clés, au lieu d'opter, comme c'est le cas présentement, pour une
porte ouverte difficile à refermer parce que trop de gens auront le pied
dans la porte.
La ville de Québec compte 71 % de locataires concentrés
majoritairement dans les anciennes limites de la haute ville, dans la basse
ville et Limoilou. La commission Lapointe a clairement fait ressortir que le
pourcentage élevé de locataires à Québec
était attribuable au niveau de revenu moyen des ménages, qui est
le plus bas des villes de la communauté urbaine après la ville de
Vanier.
À l'occasion de la présentation de notre mémoire
sur l'habitation, dans le cadre de la consultation sur le plan directeur
d'urbanisme de la ville de Québec, c'est cette prédominance des
locataires dans notre ville qui, dès mai dernier, avait amené
notre parti à presser l'administration Pelletier de s'opposer à
la levée du moratoire.
Aujourd'hui, après avoir étudié en détail
les mesures prévues pour protéger les locataires, nous croyons
toujours, comme la grande majorité des organismes qui se sont
exprimés à Montréal, depuis le début de la semaine,
que la levée du moratoire risque d'être une passoire. Parce que le
logement au Québec devrait d'abord être vu comme un droit et non
comme un bien de consommation, comme l'affirme le mémoire de la ville de
Québec, et surtout parce que la levée du moratoire ne rendra pas
plus riches les locataires qui coupent sur l'épicerie pour se loger. Il
ne faut pas être dupes des promesses de relance économique et
d'accès facilité à la propriété que
véhiculent les partisans de la levée du moratoire. À ce
moment-ci, j'aimerais passer la parole à Jacques Fiset qui va commenter
les mesures d'encadrement de cette levée du moratoire.
M. Fiset (Jacques): Les commentaires que je vais faire sur les
mesures proposées sont tous basés sur un constat premier qui est
que tant et aussi longtemps que la défense des locataires reposera sur
leurs propres épaules, tel que le principe de la loi 107 le fait
actuellement, on ne peut pas accepter une levée du moratoire. C'est dans
ce sens que les commentaires qu'on va faire sur les mesures seront plus ou
moins acceptables.
Par exemple, en ce qui concerne la question des réparations
majeures, on trouve intéressants les éléments de cette
proposition parce que, effectivement, depuis des années, les
associations de locataires demandaient une modification des délais pour
ce qui est des réparations majeures. On considère que cette
mesure devrait être adoptée non pas seulement pour la
transformation en condas, mais précisément pour l'ensemble des
logements. Donc, que les délais possibles soient plus adaptés
à la situation.
En ce qui concerne le droit au maintien dans les lieux, comme cela a
déjà été dit, je pense, par plusieurs groupes qui
se sont présentés ici, on trouve que si ce qui a
été dit théoriquement est vrai, ce serait
intéressant. On sait très bien qu'en pratique, il n'y a personne
qui va acheter un logement s'il n'a pas déjà un truc dans la
tête pour réussir à mettre la personne dehors. Donc, on
pense que si on était acculés à cette situation, il y
aurait minimalement trois mesures qui devraient accompagner cette chose.
Premièrement, que l'information ne soit pas transmise par le
propriétaire, mais qu'elle soit transmise par un tiers, et on pensait
à la Régie du logement à ce moment, parce que le
propriétaire va dire ce qu'il veut bien dire concernant les droits du
locataire. Deuxièmement, à partir du moment où l'avis
serait acquis, que toute transaction doive passer devant la Régie du
logement, sans cela il va se passer un tas de trucs au désavantage du
locataire. Troisièmement, il faudrait qu'en même temps que des
avis seraient permis aux propriétaires pour transformer leur logement,
les associations locales de locataires soient avisées de tous ces
dossiers et qu'elles servent de défense aux locataires.
Concernant le maintien dans les lieux dans les cas d'indivision, on
trouve effectivement qu'il faudrait que la mesure proposée soit
adoptée mais pour permettre de bloquer complètement cette
échappatoire actuelle du moratoire.
Concernant la jouissance paisible des lieux, évidemment, pour
nous, c'est surtout là que le bât blesse, c'est-à-dire que
tout va se passer au chapitre du harcèlement. On pense que les mesures
proposées partent de la prémisse que les locataires vont se
défendre. On sait déjà, d'après une enquête
qu'on a citée ici, que 35 % des femmes -l'enquête avait
été faite spécialement auprès des femmes - ont
réagi par une attitude de passivité totale vis-à-vis du
harcèlement. Ce n'est pas demain que cela va changer. Donc, tant et
aussi longtemps que la défense des locataires reposera uniquement sur
leurs épaules, ce n'est pas acceptable.
Concernant maintenant la protection additionnelle aux personnes
âgées et handicapées, on trouve qu'il y a des
catégories de personnes qui sont oubliées, parmi celles
discriminées, dans la question du logement. On pense aux
minorités visibles. Elles ont beaucoup de difficultés à se
trouver un logement. On pense aussi aux femmes seules et
particulièrement aux femmes seules avec des enfants, qui sont parmi
celles qui ont le plus de difficulté à se trouver un logement
adéquat.
Concernant les augmentations de loyer, dans le fond, on revient à
la question du harcèlement. C'est par le biais du harcèlement
qu'on obtient les augmentations de loyer. On souligne que même_si
actuellement, les statistiques démontrent que peu de locataires se
prévalent de la Régie du logement pour contester les hausses de
loyer, c'est se mettre la tête dans le sable que d'affirmer, à la
suite de cela, que les locataires sont satisfaits des hausses de loyer qui leur
sont données. En réalité, une majorité de
locataires ont tellement peur des conséquences de la contestation de
leur augmentation de loyer qu'ils aiment mieux acheter la paix en payant leur
augmentation.
Concernant le droit de préemption, on considère que c'est
un droit qui n'est pas réel pour une grande partie des locataires.
D'ailleurs, on le voit très bien défini dans le mémoire de
la ville de Québec, il y a une grande majorité des locataires qui
ne peuvent pas penser acheter le logement dans lequel ils sont. Donc, c'est
évident que si on en arrivait à cette situation, il faudrait,
pour permettre un véritable droit de préemption, qu'il y ait,
accompagnant ce droit, un programme d'accès à la
propriété pour les familles à faible revenu, sinon ce
n'est pas un véritable droit de préemption.
Concernant la protection du parc locatif, on considérait que le
document présenté par le ministère ne donnait pas de
véritables mesures en ce sens. Dans le fond, ce qu'on disait, c'est:
Ouvrons les portes toutes grandes et s'il y a trop de monde qui se pile sur les
pieds dans la porte, on va essayer de la refermer par la suite. J'ai
l'impression que c'est un non-sens. Il faudrait plutôt, si on en arrivait
à cette situation, donc, procéder dans le sens inverse, ouvrir la
petite porte et tranquillement, si on ne se pile pas trop sur les pieds dans la
petite porte, on pourra peut-être ouvrir la grande porte. Je
procéderais dans le sens inverse. Voilà1. Donc, en
conclusion, Françoise va terminer.
Mme Viger: Donc, compte tenu de ce qui vient d'être
exposé, il est plutôt triste de voir que la ville de Québec
s'aligne avec la minorité favorable à la levée du
moratoire. Cette minorité, on le sait, se compose surtout des organismes
qui représentent des intérêts très
intéressés dans la levée du moratoire. Je pense, entre
autres, à l'Association de l'immeuble du Québec, à la
CORPIQ, etc. Ces organismes
ne font rien d'autre - je le concède, c'est tout à fait
leur droit - que de défendre les intérêts de leurs membres.
Là où il y a quelque chose qui ne tourne pas rond, c'est lorsque
la ville de Québec, contrairement à la ville de Montréal,
semble plus sensible au lobbying des convertisseurs en condominiums qu'au droit
de la majorité des payeurs de taxes, qui sont les locataires
actuellement. L'administration du Progrès civique du maire Pelletier
aura des comptes à rendre sur ce point.
En conclusion, je dirais que tout le monde s'entend pour dire qu'onze
ans, c'est un peu long pour un moratoire et qu'il est temps pour le
gouvernement de faire son nid par une véritable politique de
l'habitation axée sur le droit au logement et la capacité de
payer des gens. Nous espérons donc que le gouvernement du Québec
sera sensible à l'opinion majoritaire qui se dégage des
mémoires soumis à cette commission parlementaire. Ce dont les
locataires des quartiers centraux des grandes villes, comme Québec et
Montréal, ont besoin, ce n'est pas un feu jaune où tout le monde,
pressé de faire une piastre vite, est tenté de passer. Ce qui va
dans le sens du bien commun, c'est un feu rouge amélioré. Merci,
messieurs.
Le Président (M. Richard): Merci, madame. J'ai
l'impression que vous ne faites pas partie du "fan club" du maire de
Québec, M. Jean Pelletier.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Le Président (M. Richard): Excusez, ce n'était pas
une question. Je transfère la parole à M. le ministre, qui a un
commentaire.
M. Bourbeau: Oui. Je crois que le député de
Sainte-Anne aimerait poser des questions aux représentants du parti du
Rassemblement populaire de Québec.
Le Président (M. Richard): Alors, vous avez la parole M.
le député de Sainte-Anne.
M. Polak: Merci M. le Président. D'abord, je voudrais
remercier les représentants du Rassemblement populaire d'être
venus ici pour présenter leur mémoire. Je note une énorme
différence entre les auditions de Montréal et de Québec.
Nous siégeons, vous savez, depuis lundi et peut-être que vous
êtes plus polis à Québec qu'on ne l'est à
Montréal. J'ai noté avec plaisir que, dans votre mémoire,
vous félicitez le ministre pour les mesures positives. Tout de
même, si on n'est pas d'accord de temps en temps ou souvent avec quelques
principes, j'ai noté qu'il n'y avait pas assez de félicitations
pour les mesures très posititives, mais vous le faites et je
l'apprécie beaucoup. J'ai quelques questions. À Montréal,
un élément important qui est apparu pendant les auditions, c'est
qu'il y a à Montréal, sans doute à Québec aussi, un
nombre de personnes qui vivent, disons, en indivision. On m'a même dit
que M. Fiset demeure dans un tel état au point de vue de l'habitation,
mais je ne sais pas, parce que je ne le connais pas, c'est seulement une
rumeur. Si on a, dans un même édifice, trois ou quatre familles
ensemble en indivision, que pensez-vous de donner à ces personnes la
chance d'aller en divis? Quant à moi, de la manière dont j'ai
compris cela à Montréal, cela ne crée pas de
problème pour le locataire parce qu'il n'y en a pas de locataire, ils
sont déjà ensemble en indivis. Comme cela, on pourrait
éviter la complication du grand problème d'être en indivis
avec la responsabilité conjointe, etc. Peut-être que M. Fiset
pourrait commenter cela.
M. Fiset: Le parti n'a pas de position particulière
là-dessus sauf que, puisque vous parlez de mon cas personnel, je vais
vous dire que nous avons choisi de poursuivre en indivis. Cela peut vous dire
que, personnellement, je ne me pose pas la question de la même
façon. Si, effectivement, il n'y a aucun inconvénient, s'il n'y a
pas de conséquences pour des gens à faible revenu, je ne vois pas
pourquoi des mesures ne seraient pas adoptées. C'est un peu dans ce
sens-là que la ville de Montréal proposait des exceptions. Ce qui
nous préoccupe, c'est que des gens soient victimes du fait que d'autres
tirent des profits d'une marchandise - parce qu'ils la considèrent comme
une marchandise - qui est le logement. Nous ne voulons pas que le logement
continue à être considéré comme une marchandise, on
veut qu'il soit considéré comme un droit essentiel.
M. Polak: Vous dites "à condition que cela ne touche pas
le droit d'une autre personne"...
M. Fiset: Exactement.
M. Polak: ...si c'est pour régulariser une situation
interne dont les membres peuvent bénéficier, ni plus ni moins,
tant mieux pour tout le monde.
M. Fiset: Voilà.
M. Polak: D'accord. J'ai noté qu'à Montréal,
énormément de groupements, d'associations de locataires de
quartiers sont venus avec des mémoires bien structurés et qu'il
n'y en a pas à Québec. Est-ce que vous jouez un peu ce
rôle-là? Est-ce que le sujet est moins chaud à
Québec qu'à Montréal, indépendamment de la grandeur
de la ville?
M. Fiset: Indépendamment de la grandeur... Ha! Ha! Ha!
Non, tout simplement, je connais beaucoup d'associations qui travaillent
à la défense des locataires ici, à Québec et qui
font partie de regroupements provinciaux lesquels ont choisi de faire la
présentation de Leur mémoire à Montréal. Je pense,
par exemple," au Front d'action populaire en réaménagement urbain
et le Regroupement des comités-logements associations des locataires qui
ont présenté leur mémoire. Je connais des groupes qui en
font partie ici, à Québec. Je pense qu'il avait été
dit, à un moment donné, que la commission accepterait des
mémoires des associations provinciales et non pas de leurs membres, s'il
y avait déjà eu une présentation provinciale. Donc, dans
ce sens-là, je pense qu'il a été choisi par plusieurs
groupes de présenter leur vision des choses par le biais de leur
association provinciale et de le faire à Montréal.
M. Polak: À la page 4 de votre document, vous faites
référence aux mesures spéciales pour les personnes
âgées ou handicapées. Oisons que c'est le guichet
spécial de la Régie du logement ou un service spécial pour
certaines catégories de personnes. On en a discuté à
Montréal à plusieurs occasions. J'aimerais avoir vos commentaires
là-dessus. Certains ont dit qu'ils y voyaient un problème,
à savoir que le personnel qui est là maintenant n'a pas assez
d'expertise. Croyez-vous que si des gens venaient du milieu - et je parle du
milieu des locataires - cela renforcerait ce système d'aide à ces
personnes?
M. Fiset: Effectivement, je trouve l'idée
intéressante parce que, dans notre mémoire, on souligne, à
un moment donné, que, justement, si on en arrivait à lever le
moratoire, on trouverait nécessaire que tous les dossiers de chaque
immeuble où le droit à la conversion est acquis soient transmis
à l'association de locataires locale. On pense que,
précisément, les mieux placés pour défendre les
locataires, ce sont encore ceux des associations qui ont une expertise
très élaborée à ce sujet. Même actuellement,
je pense que, à la régie, un représentant d'une
association de locataires ne peut même pas se présenter pour aider
un locataire à se défendre et parler à sa place, si le
locataire n'a pas les moyens d'avoir un avocat ou ne veut pas en avoir un. Si
on était capable d'aller dans ce sens, je pense que ce serait
intéressant, ce serait un gain pour les locataires que leurs propres
associations puissent servir à leur propre défense, à
l'intérieur même de la démarche.
M. Polak: D'accord. Il y a un autre problème concernant le
service spécial qui a été mentionné à
Montréal. C'est que souvent, les personnes qu'on veut aider le plus ne
sont peut-être pas en mesure de se rendre à la régie.
Prenons, par exemple, les personnes handicapées. Je ne sais pas quelle
est la situation à Québec au point de vue de leur transport, pour
se déplacer de chez elles à la régie. Par exemple, pour
les personnes âgées qui voyagent difficilement, disons, s'il y a
une mauvaise température, etc., cela pourrait créer un
problème. Avez-vous des idées, des commentaires à ce
sujet?
M. Fiset: Je comprends mal votre question. Vous voulez savoir
si...
M. Polak: À Montréal, on disait justement que le
problème, pour les personnes que le gouvernement voulait aider - comme
les personnes âgées et les personnes handicapées - par un
service spécial à la Régie du logement était le
transport, que la distance entre leur demeure et la régie était
grande, qu'elles avaient un problème pour se rendre à la
régie.
M. Fiset: Effectivement, je pense que le problème est le
même à Québec parce que, d'abord, la situation des bureaux
de la régie est assez excentrique par rapport au centre-ville, alors
qu'on sait que la clientèle la plus touchée par ce besoin, ce
sont les gens du centre-ville. Je pense qu'effectivement, la régie,
comme tout service gouvernemental, de toute façon, qui veut être
adapté et proche de ceux qu'il a à desservir, devrait être
proche de ceux qui ont besoin de ces services. Si on calcule que c'est dans le
centre-ville de Québec que les besoins sont les plus
élevés, il devrait y avoir au moins des guichets, si les services
ne sont pas là.
M. Polak: Merci. Avez-vous eu, à Québec, des cas de
ces harcèlements dont on a fait grand état? À
Montréal, il y en a beaucoup. Dans toutes sortes de quartiers, il y a
des gens qui tentent de prendre possession de l'immeuble, de mettre le
locataire dehors par tous les moyens légaux ou illégaux et
ensuite, de convertir cela illégalement en condo. Est-ce que la
situation existe ou non à Québec?
M. Fiset: Je pense que la situation n'existe peut-être pas
au même taux qu'à Montréal parce que, de toute
façon, il y a aussi que la concentration est moins grande. Mais je pense
que déjà, dans les associations de locataires, il y a beaucoup de
cas qui ont été rapportés, dans des quartiers en
particulier où, effectivement, cela s'est fait. Mais ce n'est pas
évident non plus que tous les cas de harcèlement vont
forcément être rapportés à une association de
locataires ou qu'on va en entendre parler. D'autant plus, je pense, que si,
dans un quartier, le mouve-
ment démarre seulement, on en entend moins parler, parce qu'avant
qu'il se crée un mouvement de réaction, il faut qu'il y ait un
certain volume de harcèlement dans un quartier donné pour qu'une
réaction apparaisse au public. Je pense qu'à Québec, dans
beaucoup de quartiers, on est encore à la phase de démarrage, si
je puis dire, de sorte qu'il n'y a peut-être pas encore eu de mouvement
de réaction, mais que déjà, je pense, on pourrait trouver
des cas comme cela dans les associations de locataires.
M. Polak: Je vous remercie beaucoup. M. le Président, je
voudrais réserver les quelques minutes qui restent pour le
député de Taschereau.
Le Président (M. Richard): À cause du principe
d'alternance, est-ce que M. le député de Shefford est
d'accord?
M. Paré: Oui, oui.
Le Président (M. Richard): Vous n'avez pas d'objection?
Alors, M. le député de Taschereau, allez-y pour une courte
question.
M. Leclerc: Je remercie l'Opposition. J'ai quelques brèves
questions. Je pense que vous convenez que la situation actuelle ne peut plus
durer, avec un moratoire facilement contournable comme il l'est actuellement.
On est d'accord pour dire que cela ne peut plus durer. Je voudrais
vérifier tout de même, surtout avec M. Fiset, puisqu'on est du
même comté, la lecture que j'essaie de faire de la situation.
Est-ce que j'ai raison de penser que les quartiers de la basse ville de
Québec devraient être moins touchés par la levée du
moratoire que ceux, par exemple, du comté de Jean-Talon?
M. Fiset: On sait qu'actuellement, le mouvement est plus
répandu dans Montcalm. D'ailleurs, les études qui ont
été faites par le Département de sociologie de
l'Université Laval l'ont été dans le secteur Montcalm, en
particulier sur la rue Aberdeen, et ont démontré que la
transformation de logements, dans cette rue, avait créé une
augmentation de 800 % du coût des logements. C'est une étude qui
date de 1983 ou 1984. C'est vrai que le mouvement est plus apparent, plus large
dans un quartier comme te quartier Montcalm à Québec, mais,
connaissant la situation dans la basse ville, ce mouvement n'y est pas
complètement absent non plus. Je pense que, un peu comme j'ai entendu
des réactions ce matin, c'est évident que quelqu'un qui n'y a pas
pensé, dans la perspective de la levée du moratoire, va
peut-être y penser. Là, ce n'est pas évident que le
mouvement ne se répandrait pas dans la basse ville, alors que, je me
dis, déjà en basse ville, il y a des choses qui ont
commencé à se faire et qui devraient être
encouragées à la place, c'est-à-dire la transformation en
coopérative, qui est une autre forme de propriété, mais
c'est une propriété collective qui est très
intéressante et accessible en même temps aux gens à faible
revenu.
M. Leclerc: On attend, d'ailleurs, des nouvelles de cela
très bientôt.
M. Fiset: En effet.
M. Leclerc: Je pense qu'on se connaît, je sais que vous
êtes très collé au milieu et que vous savez très
bien ce qui se passe. Est-ce que je pourrais savoir si vous avez trouvé,
dans les citoyens que vous avez consultés, des gens qui vous auraient
dit: De mon côté, cela m'intéresserait peut-être
d'acquérir mon loyer? Quelle est la lecture que vous faites de la
situation? J'en ai rencontré quelques-uns qui étaient contre la
levée du moratoire, j'ai rencontré des gens qui étaient
pour aussi. Je pense qu'il ne faut pas oublier ceux qui se disent: Cela fait 20
ans que je paie à mon propriétaire tant par mois et, dans le
fond, c'est moi qui fait ses paiements à la banque. Il faut quand
même se le dire. Je pense qu'il est bien que vous portiez l'essentiel de
votre mémoire sur les gens qui pourraient être lésés
par la levée du moratoire. Je vous en félicite, sauf que je pense
qu'il ne faut pas oublier non plus ceux qui pourraient avoir l'intention de se
prévaloir de cela, si cela pouvait se faire au détriment de
personne. (14 h 30)
M. Fiset: Effectivement, je pense que plusieurs personnes
pourraient être intéressées, mais ce n'est pas
forcément le mode de tenure qui les intéresse en premier lieu;
c'est d'avoir un logement qu'ils sont capables de payer et dont ils peuvent
être responsables eux-mêmes. Je reprends mon cas personnel, vu
qu'on en a parlé tantôt. Si je suis en copropriété
indivise, c'est que j'ai voulu, à la suite d'une longue histoire qui
s'est passée dans la maison, avec l'ensemble des locataires, transformer
notre maison en coopérative. Les démarches étant trop
longues et le propriétaire nous obligeant à une réponse
trop courte, on a préféré, à ce moment-là,
vu que nous étions tous là - on n'a mis personne dehors - acheter
notre maison en indivision. Que ce soit en indivision ou en coopérative,
de toute façon, on fonctionne en coopérative. Ce n'est pas le
mode de tenure qui nous intéresse, ce sont les résultats. Je
réagis à cela en disant: Ce qui m'intéresse, par rapport
à la levée du moratoire, c'est surtout, d'abord et avant tout, la
protection du fait que les gens ont des logements, qu'ils vivent dans un
quartier et qu'ils ont droit à cela autant que n'importe qui. C'est cela
que je veux
protéger. Si on ne lève pas le moratoire, si on garde le
feu rouge, comme Françoise l'a demandé tantôt, et qu'on ne
permet pas de reprise de possession, il reste que l'achat en
copropriété indivise par une série de locataires
présents dans une maison et que la transformation en coopérative
vont quand même rester possibles. Sauf qu'il n'y aura pas de crainte chez
les locataires d'être évincés et qu'il n'y aura pas
d'angoisse générale de ce côté. C'est cela qu'il
faut éviter. Je pense que, s'il y avait une levée du moratoire
demain matin, il y en aurait une "gang" qui dormirait mal.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Taschereau. M. le député de Shefford.
M. Paré: Merci, M. le Président. Bienvenue à
cette commission pour nous faire valoir les points de vue du Rassemblement
populaire de Québec. Au départ, je vous félicite pour les
images que vous avez trouvées. C'est souvent par les choses les plus
simples qu'on finit par voir les choses les plus graves. J'espère que la
lumière jaune et la lumière rouge vont éclairer certaines
personnes, spécialement du côté rouge. L'image est
très bonne. Le seul fait d'avoir eu une annonce
prématurée, cela a justement fait accélérer les
choses. On en a eu des preuves au cours des dernières journées et
je suis sûr que Québec n'a pas fait exception à cela.
L'image est très bonne.
Il y en a aussi une autre que vous avez utilisée et qu'il est bon
de rappeler. Il s'agit de la porte ouverte qu'on ferme ou de la porte
fermée qu'on entrouve et vice versa. En fait, c'est tout à fait
contraire et cela n'a absolument pas les mêmes résultats. Si je
comprends l'explication que vous avez donnée, vous adhérez
à la proposition de la ville de Montréal et vous êtes pour
une implication de la ville dans les exceptions qui pourraient être
données. J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus.
M. Fiset: Pas tout à fait, justement. C'est-à-dire
qu'on accepterait l'implication de la municipalité à une
condition: que, dans la ville de Québec, on ait droit au
référendum. Dans la situation actuelle, étant donné
que ceux qui sont au pouvoir sont pour la levée du moratoire, si on les
laisse intervenir pour choisir où on va le lever et où on ne le
lèvera pas, ils vont le lever partout. Nous accepterions la
possibilité de l'intervention de la municipalité à la
condition qu'il y ait un droit au référendum et que les gens des
quartiers aient un mot à dire là-dedans.
M. Paré: Au lieu d'un référendum, est-ce que
cela pourrait être une espèce de réglementation très
claire, très simple, connue de tout le monde? À savoir, si un
propriétaire est prêt à vendre et que la totalité -
100 % - des locataires sont prêts à acheter de façon
individuelle ou collective, s'il y a une coopérative et que cela ne
dérange pas les plans d'aménagement de la municipalité,
qu'à ce moment-là, cela pourrait être accordé. Ce
seraient des exceptions connues d'avance, réglementées d'avance,
où, finalement, il n'y aurait pas de problème et où on ne
délogerait personne.
M. Fiset: Oui, dans cette situation... C'est pour cela que je
trouve que l'intervention de la municipalité est possible, à la
condition que ce soit une municipalité qui fonctionne dans
l'intérêt de ses citoyens. Si, à un moment donné, la
pression de certains promoteurs pouvait faire que, dans un coin donné,
on donne la permission et que, ailleurs, on ne la donne pas et que ce soit...
Il s'agit de savoir qui aura du poids vis-à-vis de la
municipalité pour qu'elle intervienne. Il ne nous apparaît pas
encore évident, à Québec, que le poids soit du
côté des citoyens.
M. Paré: Justement, en revenant sur ce point, qui aura le
poids, les pressions, etc., en fait, il faut aussi se poser la question
présentement, à savoir qui va acheter? C'est important, dans les
loyers déjà habités, de savoir qui va acheter. Si c'est un
locataire qui veut devenir propriétaire, normalement, il n'aura pas les
moyens de payer à deux places. Cela voudrait dire que s'il achète
un logement et que ce n'est pas le sien, parce que le projet de loi ne dit pas
que ce doit être son logement, ce peut être n'importe quel logement
de n'importe qui, s'il veut en acheter un autre et qu'il l'a choisi, c'est
qu'il veut aller y habiter. Si ce n'est pas quelqu'un qui veut aller y habiter,
c'est quelqu'un qui veut acheter le loyer d'un autre parce qu'il est bien
situé et qu'il veut faire de l'argent avec. Donc, d'une façon ou
d'une autre, le locataire en place devient -je n'ai pas trouvé le mot,
il vient de discussions qu'on a eues cette semaine - un obstacle. Vous avez
mentionné tantôt, dans votre document, le harcèlement.
Est-ce que vous pensez que, s'il y avait levée du moratoire, le
harcèlement serait diminué avec les mesures qu'on a
apportées ou, au contraire, risquerait d'augmenter?
M. Fiset: En tout cas, dans la réflexion qu'on a faite
autour de la levée du moratoire c'est la pierre d'achoppement de tout.
C'est que s'il y a levée du moratoire, c'est évident, il n'y a
personne qui va tenter de vendre un logement, dans lequel il y a un locataire
qui ne veut pas l'acheter, sans donner, au moins, à l'acheteur un petit
truc pour réussir à mettre le locataire dehors et vice versa,
c'est-à-dire qu'il n'y a personne
qui va acheter un logement pour l'habiter sans, déjà,
avoir en tête un truc pour le mettre dehors et, le moindre de ces trucs,
comme on dit dans le mémoire, ce serait d'acheter le locataire,
d'acheter son départ. Comme on sait que les gens à faible revenu
sont ceux qui n'achèteront pas leur logement, n'étant pas
capables, une offre de quelques milliers de dollars, pour quelqu'un qui est sur
le bien-être, c'est très alléchant, mais très en bas
de ce que vaut son droit d'être là et la jouissance qu'il a du
logement qui le satisfait pour le moment, mais il va se laisser acheter parce
qu'à court terme, il a un bénéfice et, probablement, qu'il
est mal situé pour savoir quel est le profit qu'il perd à long
terme, donc, il va se laisser acheter. Je pense que la faille concernant le
harcèlement est surtout là, cela concerne le droit au maintien
dans les lieux pour une période illimitée.
M. Paré: Je dois vous dire, par exemple, qu'il a
été longuement question du harcèlement. Vous êtes
l'avant-dernier groupe, mais sur les 48 groupes qu'on a entendus jusqu'à
maintenant, c'est revenu régulièrement. Et je dois vous dire que
sur le harcèlement, il a été question largement de la
formule ou de la possibilité d'achat du départ. Même M. le
ministre avait dit, à un moment donné, que cela pouvait
être possible, donc acceptable. Cela a été
dénoncé par tous les groupes, et il y en a qui ont aussi
demandé de définir et d'inclure dans la loi le
harcèlement, pour que cela devienne une mesure qui puisse être
contestée et qui puisse amener des pénalités.
On a demandé que le harcèlement soit défini. Les
groupes ont demandé que l'achat soit inclus dans la description de
harcèlement, mais là où on a eu surtout quelque chose
d'important - cela ne veut pas dire que le reste de l'était pas - et qui
est une vision juridique ou, en tout cas, qui va dans ce sens-là et qui
mérite d'être connu, c'est lorsque le président de la
Commission des droits de la personne est venu déclarer que, pour lui,
cette forme de harcèlement était inacceptable. Donc, il faudrait
savoir, si jamais le ministre décide d'aller de l'avant, qu'il faut
aviser ceux qui veulent acheter un logement que cette façon de faire,
pour mettre à l'extérieur du loyer un locataire, cette forme
d'offre d'achat est inacceptable selon la Commission des droits de la
personne.
Ce matin, il y a des gens de Québec qui sont venus nous dire - je
fais des comparaisons entre Montréal et Québec - que le
problème se vivait très intensément à
Montréal, et on en a eu la preuve, mais que cela touchait bien plus
Montréal et qu'à Québec, ce n'était probablement
pas un mouvement très fort. Pensez-vous la même chose?
M. Fiset: Je pense que la comparaison se fait simplement en
termes de population des deux villes. Pour mai, le mouvement a la même
importance si on travaille par tête de pipe, et, de toute façon,
dans la perspective d'une levée de moratoire, c'est évident qu'il
va y avoir un mouvement de publicisation de ce mode de transformation qui va
faire que même si, dans une municipalité, il y a peu de gens de
touchés, cette quantité de gens va augmenter à court terme
et on pense que c'est inacceptable dans la situation actuelle.
M. Paré: Et, de toute façon, simplement pour
continuer un peu la discussion que vous aviez entreprise tantôt avec le
député de Taschereau, est-ce que les gens de la basse ville vont
être aussi touchés? À Montréal, on a entendu dire
que cela aura une espèce d'effet de vague comme une pierre qu'on lance.
C'est sûr que les gens d'ici, du quartier Saint-Roch ou du quartier
Montcalm sont touchés. On déplace des gens qui s'en vont un peu
plus loin et, finalement, on déplace du monde partout. Ceux qui se
déplacent, ce sont ceux qui n'ont pas les moyens de rester. Donc, on
étend la misère où s'en vont les plus démunis.
L'exemple était donné, entre autres, des gens du
Plateau-Mont-Royal, du quartier Centre-Sud à Montréal, de
Maisonneuve qu'on déplace et qui s'en vont à Villeray ou à
Montréal-Nord et, quand il n'y a plus de place, s'en vont à ville
de Laval. À un moment donné, c'est toute une population qu'on
déplace. Autant, pendant des années, les gens ayant de l'argent
s'en allaient en banlieue dans de beaux bungalows avec du gazon à n'en
plus finir qu'ils passaient leurs samedis à tondre et les gens du
centre-ville restaient dans des logis plus ou moins acceptables autant,
maintenant que la mode est à l'inverse, on veut renvoyer ceux de la
ville, non pas dans des bungalows gazonnés, mais là où ils
peuvent trouver un logement économique. C'est un danger qu'il faut
prévoir, je pense.
Vous souhaitez, dans votre mémoire, que chaque avis de
transformation soit transmis à l'association locale de locataires afin
que cette dernière puisse informer adéquatement les locataires de
leurs droits et leur apporter de l'aide si nécessaire. Je dois dire,
pour répondre à la question de tantôt de mon
collègue de Sainte-Anne, qu'il y a, à Québec, et j'en
connais plusieurs, des associations de locataires très actives qui,
d'ailleurs, depuis plusieurs mois, ont fait valoir leur point de vue sur la
levée du moratoire, entre autres, sur l'Année internationale des
sans-abri et sur les problèmes vécus par les itinérants de
la basse ville de Québec. Du fait que vous indiquez cela dans votre
mémoire, est-ce que vous adhérez à une proposition qui
nous a été faite par différents groupes, dont les
centrales syndicales, je pense, demandant qu'il y ait une reconnaissance
officielle avec une aide possible aux associations de locataires?
M. Fiset: Oui, exactement. Si on reconnaît ce rôle
aux associations de locataires, on leur donne un mandat qui ne s'exerce pas
toujours bénévolement, c'est bien évident. Pour moi, il y
a une conséquence immédiate à cela.
M. Paré: C'est donc implicite. M. Fiset: Oui.
M. Paré: Une dernière question, car il ne doit pas
me rester grand temps de toute façon.
Le Président (M. Richard): Effectivement, vous êtes
à la lumière jaune, pour aller dans le même sens que le
début de votre intervention. "
M. Paré: Je vais me dépêcher. Vous avez dit
que, quand les gens sont déplacés, il y a une augmentation des
loyers. Dans votre idée, est-ce que des quartiers vont connaître
une augmentation généralisée des loyers si plusieurs - je
ne dis pas la totalité ou la majorité - conversions s'effectuent
sur une rue ou dans un quartier?
M. Fiset: Je suis d'accord avec le phénomène dont
vous avez parlé plusieurs fois, d'autant plus que des études ont
été faites. Je vous parlais de l'étude
réalisée sur la rue Aberdeen où la valeur marchande des
maisons non transformées, mais intercalées dans une série
de maisons transformées qui devenaient majoritaires, a évidemment
subi la même hausse que les autres maisons. C'est ce qui nous
inquiète particulièrement.
S'il y avait levée du moratoire ici, à Québec, le
dépôt du nouveau rôle d'évaluation qui sera fait dans
quelque temps aurait un effet de bombe dans certains quartiers qui seront plus
touchés que d'autres, compte tenu déjà des effets des
transformations sporadiques qui se sont produites par le biais du trou qu'il y
avait dans le moratoire. Donc, ces quartiers sont déjà
affectés par le dépôt du nouveau rôle
d'évaluation. S'il y avait levée du moratoire, ce serait la folie
furieuse, ce serait une bombe dans ces quartiers. Je comprends mal que la ville
de Québec s'inquiète justement des hausses de taxes mais, avec le
groupement des municipalités, qu'elle accepte qu'il doive y avoir des
hausses selon la valeur marchande et, même si ces hausses seront
absolument incroyables dans certains quartiers de Québec, qu'elle
veuille bien qu'il y en ait, en même temps qu'elle s'inquiète. Je
comprends mal sa situation.
Le Président (M. Richard): Merci. M. le ministre, est-ce
que vous avez un commentaire pour terminer?
M. Bourbeau: Oui. Je veux simplement remercier les intervenants
de leur mémoire. Je reconnais qu'ils ont su allier les arguments
techniques et politiques dans un heureux mariage qu'on a su bien décoder
et je leur affirme que la prise de position qu'ils ont défendue sera
considérée, comme toutes les autres, Iors de la décision
que prendra éventuellement le gouvernement sur cette question. Merci.
(14 h 45)
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. M. le
député de 5hefford.
M. Paré: Oui, merci beaucoup. Moi aussi je vous remercie.
Pour un parti politique, s'occuper de problèmes fondamentaux, ce n'est
pas faire de la politique, c'est faire son devoir. Je trouve bien correct que
vous veniez prendre la défense de ceux que vous avez choisi de
défendre. Je dois vous dire que vous êtes loin d'être le
seul parti politique à avoir pris une position dans le sens que vous la
prenez, il y a même, de l'autre côté, des
députés qui, je l'espère, vont réussir à
convaincre leur caucus qu'il y a des dangers imminents qui auront des
conséquences désastreuses si ce projet de loi passe tel quel. Je
vous remercie beaucoup et j'espère qu'on va tenir compte de vos
commentaires dans les politiques amenées à l'automne.
Le Président (M. Richard): Merci. Vous avez quelques
secondes pour vos meilleurs voeux.
Mme Viger: Moi aussi, je vous remercie. Je vous remercie du temps
que vous nous avez donné pour exposer notre point de vue sur la
levée du moratoire. J'espère aussi que la décision que
vous allez prendre sera dans l'intérêt de la majorité des
citoyens d'une grande ville comme Québec.
Le Président (M. Richard): Merci de votre présence.
J'appellerais, s'il vous plaît, immédiatement, les
représentants de la Chambre des notaires. Messieurs, nous vous laissons
la parole. Je présume que vous êtes des notaires. Maintenant, vous
et vos collègues allez vous identifier sûrement. Même si
vous êtes notaires, vous avez quinze minutes. Si jamais vous osiez les
dépasser, on osera sûrement vous le spécifier. Alors, vous
avez la parole.
Chambre des notaires
M. Lambert (Jean): Merci, M. le Président. Rapidement, je
vais vous présenter les deux notaires - effectivement, vous avez
bien présumé « qui m'accompagnent. Tout d'abord,
à ma droite, le notaire Laurence Charest, recherchiste et juriste au
service de la recherche et de l'information de la Chambre des notaires. il fut
responsable de ce dossier non seulement pour la présentation de ce
mémoire, mais également lorsque, du temps du ministre Rochefort,
nous avions travaillé au document Se loger au Québec et aussi
lors des rencontres qui ont eu lieu depuis avec les représentants du
gouvernement- À ma gauche, le directeur du service de la recherche et de
l'information de la Chambre des notaires, le notaire Julien MacKay.
M. le Président, notre présentation comportera deux
volets. On va essayer de procéder rapidement, quitte à
compléter au moment des questions. Le premier volet est plutôt
politique, dans un sens large, et l'autre volet, ce sont des
considérations d'ordre un peu plus technique. Si on a bien
écouté les mémoires qui ont été
présentés au cours de la semaine, on peut conclure que tout le
monde est contre la levée du moratoire "à moins que". Moi, je
serais tenté de dire que les gens sont pour "pourvu que",
c'est-à-dire que je considère que le verre est à
moitié plein plutôt qu'à moitié vide. Je souligne
également que le débat intéresse tout le Québec et
non pas seulement Montréal. En effet, plusieurs villes du Québec
comptent des immeubles susceptibles d'être convertis.
M. le Président, rapidement pour vous dire que le droit de
propriété est un droit fondamental. D'ailleurs, on travaille
à l'insérer dans la charte canadienne. C'est d'ailleurs le
meilleur moyen connu de contrer les désavantages du fait de ne pas
contrôler et ne pas maîtriser son lieu d'habitation et
l'environnement qui lui est immédiat. C'est pourquoi nous posons la
question: Faut-il conserver un Québec de locataires? Une question
intéressante: Pourquoi, par exemple, à Terre-Neuve qui, à
plusieurs égards, est considérée comme une province pas
trop favorisée et dont le revenu moyen du citoyen est inférieur
de beaucoup au nôtre, 82 % des citoyens sont propriétaires de leur
lieu d'habitation? Pourquoi y en a-t-il 65 % à Toronto? Pourquoi y en
a-t-il une proportion plus élevée dans les autres villes
canadiennes? Pourquoi en Australie, par exemple, un pays semblable au
nôtre, au revenu moyen semblable au nôtre, à Sydney et
à Melbourne, les ménages sont propriétaires à 72 %
de leur lieu d'habitation, alors qu'à Montréal cela force pour
qu'il y en ait 25 %? Serait-ce que les Québécois ont une
espèce d'infériorité congénitale? Je pense qu'il
faut faire attention de revenir à un style qu'on a déjà
connu.
Je regarde, par exemple, l'une des merveilleuses réalisations des
dernières années concernant la propriété, par
actions, des Québécois de l'infrastructure industrielle et
commerciale du Québec. Je me rappelle d'une période où on
mettait les citoyens en garde de peur qu'ils ne perdent leur argent à la
Bourse! Mon Dieu, que c'était dangereux! Pourtant, M. Parizeau - et il
faut lui en être très reconnaissant - avec un programme
gouvernemental approprié, a donné le goût aux
Québécois d'être propriétaires de leurs entreprises
et, aujourd'hui, on est en train d'excéder toutes les autres
régions du Canada en termes de propriété de nos
entreprises, avec tous les effets que cela a entraînés.
Je ne vois pas en vertu de quelle idéologie, M. le
Président, on priverait les Québécois de l'accès
à la propriété, dans le respect de tous. Il y a des
avantages collectifs qui vous ont été dits. Je reprends, par
exemple, un terme qui a été lancé par un certain Dr
Camille Laurin: La responsabilisation du citoyen. Il me semble que cela veut
dire quelque chose. La stabilité sociale, les avantages en termes de
création d'emplois, d'amélioration du parc résidentiel, je
pense que ce sont des avantages qui sont concrets. Ils sont réels. Les
études du livre vert du ministre Rochefort le stipulaient clairement. Au
plan individuel, le meilleur moyen de contrer l'inflation des loyers, c'est
bien de contrôler, d'être propriétaire. Moi, je n'ai jamais
entendu parler de propriétaires qui s'insurgeaient contre la hausse des
loyers de leur maison. Au plan personnel, l'accumulation de la valeur du
capital net de la maison constitue, pour la grande majorité des citoyens
canadiens, l'actif le plus précieux de leur patrimoine. En vertu de
quelle idéologie priverait-on les Québécois de pouvoir
accumuler cette valeur de capital? On conçoit que, lorsqu'on change tes
règles du jeu, c'est-à-dire en levant le moratoire, il risque d'y
avoir une situation dangereuse et préjudiciable aux droits des
locataires. C'est pourquoi la Chambre, en appuyant l'objectif du ministre, a
dit qu'il fallait respecter, et rigoureusement, le droit des locataires.
C'est pourquoi, même si la notion du droit au maintien pour une
période illimitée, à première vue, paraît
excessive - cela a donné lieu chez nous à des débats
passionnés - on s'est quand même rangé et on a
appuyé le ministre sur cette position parce qu'on pense qu'il faut, dans
une action aussi importante que celle que le gouvernement s'apprête
à faire, avoir des compromis et, probablement, mettre un frein à
des ardeurs qui pourraient porter préjudice.
On avait suggéré, lors d'une rencontre avec un groupe de
travail ministériel, il y a plus d'un an, la création de ce
fameux guichet et cela a été retenu. On a mentionné
toutefois, à l'époque, qu'on voulait que tous les locataires y
aient accès et non
pas uniquement les personnes âgées ou les personnes
handicapées. On parlait vraiment de tous les locataires qui peuvent
être touchés par un projet de conversion ou par des
réparations majeures qui, dans le fond, servent de prétexte. Ce
qu'on a dit, dans notre mémoire - dont j'ai donné copie,
malheureusement, M. Paré, à M. Garon, je ne sais pas s'il vous
l'a remis - c'est: II faut effectivement que la protection ne soit pas
seulement un droit théorique. C'est pourquoi, on dit: II faut que ce
guichet soit pourvu et bien pourvu de ressources. II faut, par exemple, qu'il y
ait un numéro de téléphone distinct de celui de la
Régie du logement pour les autres cas. Quand vous êtes locataire
et que vous recevez un avis, vous cherchez à avoir une information
impartiale et, lorsque vous avez continuellement une ligne occupée, cela
ne vous aide pas beaucoup. C'est pourquoi, on dit qu'il faut qu'il y ait des
gens, il faut qu'il y ait des ressources qui soient là. Il faut que la
protection soit significative. Même si on perçoit qu'il y aura
abus au moment de la levée du moratoire, il faudrait peut-être
avoir du personnel 24 heures par jour pour protéger les gens contre le
harcèlement.
On s'aperçoit, finalement, M. le Président, lorsqu'on
regarde cela, que le besoin d'une politique intégrée en
matière d'habitation devient crucial. C'est pourquoi nous avons
suggéré que le gouvernement prenne carrément le parti de
l'accès à la propriété et le favorise; qu'il
favorise les centres bâtis au détriment des banlieues qui ont
commencé encore à se propager sur les meilleures terres agricoles
du Québec; qu'il y ait une formule arrêtée avec les
institutions financières du Québec - le Mouvement Desjardins y
est favorable - car cela représente 80 % des hypothèques
résidentielles au Québec. Alors, ce n'est pas n'importe qui.
Pourquoi ne mettrait-on pas une formule originale, comme cela s'est fait
par exemple dans les milieux agricoles, pour permettre l'accès à
la propriété agricole ou pour protéger les agriculteurs
contre des situations adverses? Pourquoi, à ce moment, n'assoirait-on
pas les intervenants du crédit avec le gouvernement pour mettre au point
des formules originales pour justement permettre que les locataires
bénéficient concrètement de cette levée du
moratoire? On propose même que, pour les 55 ans et plus et les personnes
handicapées, il y ait un programme précis et audacieux d'aide
quitte à ce que le gouvernement se rembourse, lors de la revente, des
deniers qu'il aura avancés à ces gens pour leur permettre d'avoir
accès.
En conclusion sur ce volet, on peut dire qu'en 1971, 35 % des
ménages locataires du Québec, soit à peu près 300
000, pouvaient accéder à la propriété de leur
résidence. En 1983 - ce sont les chiffres du livre vert - c'était
15 % seulement, soit 167 000. Faut-il attendre encore? En 1983, le prix moyen
d'une habitation était de 50 000 $ pour une unifamiliale. Si le prix de
l'habitation avait été réduit à 30 000 $ - on voit
qu'il faut chercher autre chose que l'unifamiliale - la proportion de 15 %
aurait grimpé à 42 % de locataires pouvant accéder
à la propriété. Si on baissait le coût à 15
000 $, 64 % des locataires pourraient exercer un choix et devenir
propriétaires, s'ils le désiraient. Si on regarde comment cela
peut s'exprimer concrètement - ce sont toujours des statistiques
tirées du livre vert Se loger au Québec - pour un duplex c'est 31
280 $; pour un triplex, 22 000 $. Alors, on voit déjà que la
tendance est à quatre et plus: 13 000 $. De 1976 à 1983, 10 000
unités ont été transformées, si on peut dire, par
la technique de la copropriété indivise. C'est donc qu'il y a un
besoin sur le marché qui, freiné par le moratoire, a
trouvé une autre façon de s'exprimer, mais on sait tous les
dangers que cela comporte. 90 %, d'ailleurs, de ces unités se retrouvent
dans des immeubles de quatre logements et moins, toujours selon les chiffres du
livre vert.
Je pense, M. le Président, qu'il faut cesser de chercher la
compagnie aérienne qui garantira que ses avions ne tomberont pas, cela
n'existe pas. C'est sûr qu'il y aura toujours un risque, quelle que soit
l'action sociale. Je pense que, si on attend, on va priver les
Québécois qui veulent devenir propriétaires. Je suis
certain que, dans les 50 % de Québécois qui ne sont pas
propriétaires, il y en a un bon nombre qui, si on leur offre la
possibilité avec un programme intelligent d'accès pour les aider,
vont vouloir le devenir. Pourquoi serait-on différent des autres dans le
monde? Je pense que la population du Québec s'attend, M. le
Président, qu'on cesse de la sous-estimer et de la considérer
continuellement comme incapable. Qu'on lui fasse confiance! Évidemment,
on reconnaît que, dans cette population, il y aura des secteurs qui, eux,
auront besoin d'être protégés, cela est vrai.
Si on analyse rapidement les aspects plus techniques, M. le
Président...
Le Président (M. Richard): Je vous mentionnerais qu'il
vous reste quelques minutes.
M. Lambert: Parfait. On va essayer d'y revenir. Alors, j'ai
déjà parlé...
Le Président (M. Richard): J'admets que vous êtes
habitué à des contrats notariés, vous.
M. Lambert: Eh oui!
Le Président (M. Richard): Allez! Allez!
M. Lambert: Nous croyons, M. le Président, que le droit au
maintien dans les lieux pour une période illimitée, avec un
support actif et concret de la Régie du logement, sera une mesure
susceptible d'enrayer les abus qu'on a connus avec un moratoire, finalement,
qui ne les a pas empêchés. Il faut comprendre que le moratoire...
D'ailleurs, tous les gens qui sont intervenus devant cette commission, tout le
monde réfléchit en termes de la situation actuelle. Mais on
oublie que la situation actuelle est une situation anormale, d'une
rareté créée par un moratoire où,
évidemment, ceux qui réussissent à passer à travers
ont une denrée qui est tellement rare qu'elle s'offre qu'aux riches ou
à ceux qui ont de l'argent. (15 heures)
Dès l'instant où les 400 000 ou les 500 000 unités
de logement au Québec peuvent être vendues demain matin, vous ne
me ferez pas accroire que ce seront seulement des riches, ce sera tout le
monde, ce seront ceux qui les occupent. Ce ne sont pas les Martiens qui vont
venir les acheter, ce sont les locataires, les gens qui vivent au
Québec.
Il faut faire attention de ne pas s'imaginer que la situation que nous
vivons actuellement et que le gouvernement du Québec... Peu importe que
ce soit celui en place ou l'autre qui a ouvert le débat sur Se loger
au Québec, on s'aperçoit qu'il faut la régler, cette
situation; il faut l'envisager en faisant appel à l'intelligence et, je
dis aussi, à la confiance qu'on peut avoir dans notre population. Le
droit d'occuper son lieu d'habitation pour une période illimitée,
concrètement appuyé par l'effectif de la Régie du
logement, est la meilleure police d'assurance.
L'encadrement pour les réparations majeures. Ici, techniquement,
on vous demanderait de préciser où commence le délai de
trois ans... des travaux ou du premier refus d'une demande qui pourrait
être présentée deux, trois ou quatre ans après les
travaux. À ce moment-là, cela nous reporte à cinq, six,
huit ans. Là-dessus, il y a une précision à faire. Mais,
encore là, nous, on trouve que trois ans, c'est peut-être long,
mais si l'ensemble des locataires est d'accord avec ces travaux et cette
conversion... Là, le projet ne permet pas cela.
On avait un exemple tantôt des gens qui nous ont
précédés où les locataires ont
décidé, dans l'ensemble de l'immeuble, de devenir
propriétaires. Pourquoi ce principe-là ne s'appliquerait-il pas?
Si les locataires ne veulent pas, parfait, on bloque, mais s'ils veulent,
pourquoi les surprotéger contre eux finalement, contre leur
volonté?
Le Président (M. Richard): Pour conclure, s'il vous
plaît!
M. Lambert: Disons que, sur les aspects techniques, le
mémoire a été présenté, j'espère
qu'il a été lu. Nous pensons aussi avoir recours à
l'arbitrage pour régler. Nous croyons également - on en a
parlé - à l'intervention d'une personne impartiale pour informer
et prendre la volonté. Alors, si un propriétaire veut convertir,
il ne faudrait pas que ce soit lui qui ait mission de tordre les bras pour
obtenir les consentements, il faudrait confier à une personne autre de
constater ce consentement-là, peut-être même avec une
assemblée d'information obligatoire lorsque l'immeuble comptera plus que
cinq unités, etc.
Alors, je pense que c'est cela. S'il y a des questions à cette
étape, je pense qu'on pourrait y répondre. Merci.
Le Président (M. Richard): Merci, monsieur.
Avant de céder la parole à M. le ministre des Affaires
municipales et responsable de l'Habitation du Québec, je souhaite la
bienvenue au groupe de visiteurs que nous avons ici dans le cadre, je crois, du
sommet de la francophonie qui doit se tenir très prochainement à
Québec. Alors, je vous souhaite la bienvenue au nom des membres de la
commission et j'aimerais, pour votre gouverne, vous informer que la commission
qui siège est une consultation générale portant sur la
levée du moratoire sur la conversion des immeubles locatifs en
copropriété divise au Québec.
Alors, M. le ministre des Affaires municipales et responsable de
l'Habitation, vous avez la parole.
M. Bourbeau: M. le Président, il me fait plaisir de saluer
les représentants de la Chambre des notaires qui, je dois le dire, sont
les derniers à venir s'exprimer devant la commission sur ce sujet. Cela
peut avoir des avantages et des inconvénients. Les inconvénients,
c'est peut-être que les membres de la commission sont un peu
épuisés après cinq jours de travaux qui se sont poursuivis
jusqu'à minuit, tous les jours de la semaine, sauf hier. Par contre,
cela peut avoir l'avantage de permettre à celui qui présente le
dernier mémoire de laisser une impression qui va peut-être durer
plus longtemps, puisqu'on n'en aura pas d'autres après pour venir en
ternir la mémoire.
La Chambre des notaires est certainement éminemment
compétente pour venir parler de conversion d'immeubles locatifs en
copropriété. Sa science et sa compétence sont reconnues,
c'est une corporation professionnelle qui a, je pense, auprès du peuple
québécois, beaucoup de crédibilité. Pour avoir lu
le mémoire, je dois reconnaître qu'il s'agit, encore là,
d'un travail extrêmement bien fait et bien pensé.
La chambre se pose carrément en
faveur du droit à l'accès à la
propriété et plaide d'une façon éloquente,
d'ailleurs, pour permettre au plus grand nombre de Québécois
possible d'accéder à la propriété de leur logement.
C'est un objectif que nous partageons et que nous avons, je crois, bien
décrit dans le document gouvernemental.
Le problème qui se pose entre l'objectif recherché et la
réalité, c'est que, tout le monde le reconnaît, même
dans la meilleure des hypothèses, il n'est pas possible que tous les
Québécois accèdent à la propriété:
soit qu'ils ne le puissent pas ou même qu'ils ne le veuillent pas. Dans
ces conditions, on se doit de s'assurer que ceux, parmi les locataires, qui ne
pourraient pas ou ne voudraient pas accéder à la
propriété puissent continuer à vivre dans leur logement
sans être perturbés par le changement de statut juridique de
l'immeuble et sans subir non plus des hausses de loyer qui ne seraient pas
acceptables. Pour parer à ces difficultés, on nous dit: II n'y a
pas de problème, si le gouvernement veut favoriser l'accès
à la propriété, amenez-nous des programmes d'aide.
Nous pensions, lorsque nous avons écrit le document - nous le
pensons toujours - que la situation telle qu'elle existe présentement
devrait permettre à un certain nombre de locataires d'accéder
à la propriété avec les mesures que nous proposons, sans
qu'il y ait besoin d'une intervention gouvernementale. Il y a donc une
quantité de locataires au Québec... Les sondages et
enquêtes qu'a fait faire la Régie du logement indiquent qu'il
existe un pourcentage de Québécois qui peuvent et qui veulent
accéder à la propriété, même par
l'intermédiaire de la conversion en copropriété, sans
qu'ils aient besoin pour ce faire d'un programme gouvernemental.
Évidemment, comme gouvernement, nous voulons, au départ en tout
cas, tenter de les aider, tout en reconnaissant qu'il y en a d'autres qui
auraient besoin d'une subvention gouvernementale et d'une aide gouvernementale
pour pouvoir accéder à la propriété et d'autres
qui, probablement, ne pourraient ou ne voudraient pas y accéder de toute
façon.
C'est cela qu'on doit constater quand on est chargé de diriger
cette barque, car, il y a les objectifs, il y a ce qui est souhaité par
tout le monde; même l'Opposition, à l'occasion, se déclare
en faveur de l'accès a la propriété. Mais la
réalité des faits nous oblige à tenir compte des
problèmes appréhendés à l'égard d'un groupe
de locataires qui est quand même très important au Québec
et surtout, on doit le dire, dans la ville de Montréal.
J'aimerais peut-être commencer par une réponse à la
question qui a été posée par la Chambre des notaires. Dans
l'optique de la proposition gouvernementale, le délai de trois ans court
à partir de la date du refus de l'autorisation de la Régie du
logement et non pas à partir de la date de l'exécution des
travaux. La raison est qu'il serait difficile d'abord, si on parle de travaux,
de savoir si on parle du début ou de la fin des travaux. On sait comment
cela peut être difficile d'établir la fin des travaux dans un
autre contexte.
D'autre part, cela pourrait permettre des abus, si on parlait des
travaux. On pourrait penser, par exemple, à un promoteur qui ferait des
travaux importants en évinçant les locataires et qui mettrait ses
logements en vente en disant à des gens: On va vous consentir une
promesse de vente, venez signer un bail de trois ans et, dans trois ans, on
aura la conversion automatique à la régie et, là, vous
pourrez acheter les unités que vous aurez louées en attendant.
Cela aurait évidemment le désavantage d'être un
contournement déguisé de l'objectif que nous recherchons qui est
d'éviter, à l'occasion des travaux majeurs, qu'on puisse
évincer des locataires dans le but de préparer l'immeuble pour la
conversion. Nous avons donc décidé de choisir la date du refus de
la régie comme date à partir de laquelle comptera la
pénalité pour avoir cherché à évincer des
locataires en vue de convertir l'immeuble. Cette réponse vous
satisfait-elle ou si vous voulez commenter?
M. Lambert: Enfin, il faudrait savoir de quel refus il s'agit.
S'agirait-îl du refus d'une demande de conversion?
M. Bourbeau: C'est cela.
M. Lambert: Mais je croyais que, dans la proposition
ministérielle que nous avons vue, la régie avait peu de
discrétion à refuser pour autant qu'elle constate que les
locataires ont été avisés et qu'il y a eu un certain
déroulement. À ce moment-là, il n'y a pas de
discrétion. Je comprends qu'on veuille situer la protection d'une
façon claire, mais je pense qu'on devrait stipuler un délai
à partir de la date où on demande au locataire d'évacuer.
C'est une date qui devient précise.
En d'autres termes, on dit à quelqu'un: Si vous faites des
réparations majeures, dites-vous qu'à compter de la date
où vous avez demandé à des locataires de sortir pour faire
ces améliorations, vous en aurez pour trois ans où cela ne sert
à rien, ne venez pas nous demander une autorisation de conversion, an
vous la refuse. Sinon, si c'est trois ans d'un refus, c'est qu'il peut y avoir
des travaux majeurs qui ont été faits. Après deux ou trois
ans, si le propriétaire, même de concert avec les locataires,
demande et se voit refuser, à ce moment-là, il est gelé
pour un autre trois ans. Alors, on n'a plus de fin dans le temps avec cela. Il
me semble
qu'il y a une espèce d'imprécision qu'il y aurait avantage
à clarifier. Je pense qu'il y a moyen de concilier l'objectif de
protection qu'on veut. À un moment donné, il y a sûrement
une date, soit la date où le promoteur ou le propriétaire dit:
Vous devez quitter pour fins de réparations et, à compter de
cette date, il y a trois ans où il ne peut pas être
autorisé à convertir.
M. Bourbeau: Oui, mais les travaux de réparations peuvent
durer un an. Le propriétaire peut offrir ses logements en vente au bout
d'un an, pendant les travaux, et dire aux locataires: Voici, je vous vends les
logements, vous me signez une promesse d'achat. Entre-temps, vous signez un
bail de deux ans. Il pourrait même ajouter comme "kicker": 10 % du loyer
que vous paierez pendant deux ans sera appliqué au prix de vente et, au
bout de deux ans, on aura automatiquement l'autorisation de la régie.
Effectivement, on aura contourné l'objectif gouvernemental qui est
d'éviter qu'on se serve de réparations majeures pour
évincer les locataires et, ainsi, préparer l'immeuble à la
conversion. C'est l'objectif.
Cela n'empêche absolument pas un propriétaire de faire
toutes les réparations majeures qu'il veut et, même,
d'évincer les locataires pour fins de réparations majeures.
Cependant, s'il le fait dans le but de préparer l'immeuble à la
conversion, la régie fera enquête pour interroger les locataires;
elle fera venir des témoins. Si elle en vient à la conclusion que
c'est cela qui a été fait, elle refusera l'autorisation pour
trois ans. Évidemment, c'est une question de fait. II n'y a pas deux
faits pareils. Vous connaissez l'ingéniosité des promoteurs et
des propriétaires. Il s'agira d'apprécier chaque cause au
mérite.
M. Lambert: Je souligne quand même qu'il devrait y avoir la
possibilité que cette autorisation soit donnée si les locataires
sont d'accord avec le projet. Cet accord, toutefois, ne doit pas être
laissé, ne doit pas être recueilli par le propriétaire; il
faut qu'il y ait vraiment un tiers impartial pour le recueillir, pour
éviter les pressions.
M. Bourbeau: Je viens de le dire. La régie va traiter
chaque cas particulièrement. Si, par exemple, vous dites que les
locataires sont tous d'accord et que ce sont tous des locataires qui ont
signé une promesse d'achat, que ce sont des propriétaires en
puissance, qu'ils n'attendent que le délai de trois ans pour acheter, on
n'est plus en présence de locataires de bonne foi, si je puis dire. Ce
sont des locataires qui n'attendent que le délai pour convertir. C'est
ce genre de situation que nous avons voulu tenter d'éviter. Je pense que
vous comprenez un peu notre point de vue. Maintenant, il est possible qu'on
puisse regarder le vôtre pour voir s'il y a des améliorations
qu'on peut apporter à la proposition.
Je ne voudrais pas prendre tout le temps. Combien de temps reste-t-il,
M. le Président?
Le Président (M. Rochefort): ...minutes, M. le
ministre.
M. Bourbeau: Je ne voudrais pas qu'on passe tout le temps
là-dessus. J'ai une courte question. Nous avons tenté dans le
document de corriger certains abus qui existent présentement. Je ne
parle plus de conversion, je parle plutôt des relations
locataire-locateur, soit des mesures pour contrer le harcèlement. Tout
à l'heure, vous avez fait allusion à cela, soit le guichet unique
à la Régie du logement, possibilité de recours à la
Commission des droits de la personne. Nous avons tenté de corriger aussi
un état de fait qui existe, où la reprise de possession est
utilisée systématiquement dans l'indivision pour fins de
spéculation et de revente à des tiers et non pas pour les fins de
l'acheteur. La proposition gouvernementale vise à appliquer à
tous les immeubles la prohibition de reprise de possession dans les cas
d'habitations de moins de cinq unités. Que pensez-vous de ces mesures?
(15 h 15)
M. Lambert: On avait suggéré le guichet unique pour
le harcèlement. On vous suggère même de l'élargir
à tous les locataires qui peuvent être touchés soit par un
projet de conversion, soit par des réparations majeures. Je disais
tantôt qu'il faut non seulement laisser un accès théorique,
mais il faut que cela rime à du concret, c'est-à-dire qu'il faut
qu'il y ait des ressources, il faut que ce soit facilement accessible. Il faut
aussi que des pouvoirs soient donnés pour permettre des sanctions. Que
ce soit par la Régie du logement ou par la Cour provinciale, je pense
qu'on pourra trouver le moyen.
Il faut qu'il y ait de la rapidité, de la
célérité. C'est là, dans le fond, le gros du
problème. Les locataires avaient un droit théorique mais, quand
arrivait le temps de s'informer, il n'y avait jamais moyen d'avoir quelqu'un et
quand le temps arrivait de faire protéger leurs droits ils
étaient dans un dédale de procédures à n'en plus
finir, ils se décourageaient et ils partaient. C'est cela qu'il faut
éviter. C'est clair. C'est cela qui s'est passé. Or, dès
l'instant où les gens savent qu'ils peuvent avoir recours rapidement et
efficacement à de l'information et qu'il y aura aussi une intervention
s'il y a du harcèlement, des abus, avec des dommages ou même des
pénalités presque d'ordre criminel pour celui qui sera
responsable, je crois qu'on aura réglé le gros du
problème.
Maintenant, faut-il aller jusqu'à
l'interdiction d'offrir à un locataire d'acheter son
départ? Moi, je trouve que cela commence à aller loin! Si on
adoptait cette philosophie, on interdirait à bien des gens d'emprunter
sous prétexte qu'ils pourraient se faire avoir. Il y a des limites! Je
pense qu'il s'agit de mettre en place un système raisonnable de
protection et d'information. Mais si, après cela, un individu veut
quitter moyennant tel montant, il est libre. Il a le choix entre rester
là d'une façon illimitée et partir. Là, c'est son
choix. Il va falloir cesser, à un moment donné, d'intervenir
continuellement en disant au citoyen: Tu sais, tu n'as pas fait un choix
éclairé. Nous pensons que tu n'aurais pas dû accepter. Je
pense que ce n'est pas correct, cela.
M. Bourbeau: En ce qui concerne le processus de conversion, vous
suggérez, plutôt que d'utiliser la Régie du logement pour
surveiller le processus de conversion, que cette tâche soit
confiée aux notaires. Evidemment, l'une des tâches qu'aurait
à effectuer la Régie du logement lors de cette décision ou
de ce travail, ce serait de s'assurer justement qu'il n'y ait pas eu de
réparations majeures faites précédemment
évinçant des locataires dans le but de convertir l'immeuble en
copropriété. Le notaire, je présume, serait chargé
de faire l'enquête et demanderait un affidavit du vendeur etc.
M. Lambert: II faudrait vérifier s'il y a lieu. Si vous me
le permettez, M. le ministre, juste pour éclairer cette partie...
M. Bourbeau: Est-ce qu'il reste du temps, M. le Président?
Si j'arrête de vous parler...
M. Lambert: D'accord, parfait! Allez-y!
M. Bourbeaut ...le président ne me laissera pas finir ma
question.
Le Président (M. Rochefort): Cela n'arrive jamais
mais...
M. Bourbeau: J'aime autant terminer ma question, sans cela...
Le Président (M. Rochefort): II ne faut pas s'exposer
inutilement.
M. Bourbeau: Ce que je vous demande, c'est ceci: Qu'est-ce qui
arriverait, par exemple, si un litige survenait entre le propriétaire et
le locataire devant le notaire ou s'ils ne s'entendaient pas et que le notaire
devenait un peu arbitre ou juge? Est-ce qu'à ce moment on devrait
demander à la Régie du logement d'intervenir pour surveiller le
travail du notaire? Ce serait un peu compliqué. Le notaire n'a pas le
même caractère, si je puis dire, de tribunal administratif que
peut avoir la Régie du logement. Est-ce que vous ne pensez pas que cela
pourrait créer des problèmes au notaire d'avoir à jouer ce
rôle?
M. Lambert: Non. D'abord, permettez-moi de situer la raison
fondamentale pour laquelle on a suggéré cela. Dans la
vérification purement de faits on a un officier public - c'est une
particularité de notre système de lois - qui est le notaire. On
pense qu'il est capable de s'acquitter de cette tâche. Cela veut dire
qu'on ne noie pas la Régie du logement dans un paquet de papiers.
Pendant que la Régie du logement n'est pas noyée, on concentre
les ressources de la Régie du logement de sorte que le guichet
fonctionne afin qu'on puisse intervenir. C'est cette raison. Le fardeau
financier des vérifications, etc., reviendra au propriétaire
convertisseur quand il paiera les honoraires du notaire. C'est la raison pour
laquelle on a suggéré cela.
Le problème survient - le notaire doit vérifier avant de
procéder dans ces étapes -à un moment donné, s'il y
a eu plainte des locataires ou dénoncement auprès de la
Régie du logement qu'il y a eu des réparations.
Deuxièmement, il y a une demande au propriétaire de faire une
déclaration assermentée comme quoi il n'a pas
procédé à des réparations majeures. D'ailleurs, le
notaire envoie obligatoirement un avis à chacun des locataires demandant
une réponse à son bureau et non pas au propriétaire: Y
a-t-il eu des réparations? Je pense qu'à ce moment il y a un
ensemble de moyens qui vont finir par faire dire: Oui, effectivement, il y en a
eu. C'est un peu comme quand survient un problème dans une transaction
et que les parties, dans notre bureau, ne sont pas d'accord. Cela ne fonctionne
pas, on arrête toute l'affaire et on dit: Allez devant les tribunaux. Ou
on dira: Écoutez, allez trancher votre différend à la
régie. Mais ce qui arrive, c'est que n'aboutiront à la
régie que les cas que la régie aura à régler. Elle
pourra concentrer vraiment ses énergies là où il y a des
problèmes. Là où il n'y en aura pas, c'est le secteur
privé qui s'en acquittera.
Moi, je pense que c'est tout à fait raisonnable de concevoir que
cela puisse se faire ainsi. Le notaire a te statut d'officier public, a une
responsabilité. Je pense que, si on regarde la fiche professionnelle du
notaire, on peut lui faire confiance.
Le Président (M. Rochefort): Merci. M. le
député de Shefford, s'il vous plaît.
M. Paré: Merci, M. le Président. À mon tour
aussi, je vous souhaite la bienvenue. Vous êtes le dernier, mais le
dernier n'est pas le moindre pour autant. Je dois vous dire
que j'ai lu votre mémoire, même si je ne l'ai eu que ce
matin, et je l'ai beaucoup annoté. Il contient des choses très
intéressantes. La preuve, c'est que je vous ai déjà
cité dans la première présentation de ce matin. Mais je
vais quand même, si vous me le permettez, reprendre en très grande
partie ce que vous avez cité au début, parce que je pense que
cela en vaut la peine. La décision qu'on va prendre, c'est une
décision politique. Cela touche de grandes orientations qu'on peut
prendre comme législateurs. Je dois vous dire que si tous les
Québécois pouvaient être propriétaires - je l'ai dit
et je vais le répéter, c'était dans mon discours
d'introduction - je serais le gars le plus heureux du monde. Il faut faire en
sorte, comme gouvernement, de permettre cela au maximum.
Là-dessus, je dois dire qu'on est content d'une certaine
façon qu'au moins, maintenant, au Québec, on soit
propriétaires à 53 % de nos logements. Disons qu'on a fait un
grand pas grâce à des programmes qui existaient, qui avaient
été mis sur pied. Malheureusement, ils viennent d'être
abolis. Le ministre peut les dénoncer, ces programmes, y compris
Corvée-habitation. Il dit que ce sont des gens qui avaient les moyens.
J'ai deux choses à dire là-dessus. Ce sont des gens qui avaient
les moyens, Corvée-habitation, mais ils ne se seraient pas bâtis
à cette période, avec le taux d'intérêt du moment,
sans la garantie gouvernementale. Donc, il était à point. Qu'on
l'ait abandonné dans le temps, c'est correct, mais il ne faut pas
dénoncer des programmes qui étaient ponctuels au moment où
ils devaient arriver.
Que le ministre dise: Cela aidait des gens qui étaient en moyens,
c'est reconnu que cela aide des gens qui sont en moyens à devenir
propriétaires.
M. Bourbeau: Oui, mais c'est vous qui l'avez aboli.
Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.
M. Bourbeau: Oui, mais il dit qu'on a aboli
Corvée-habitation. C'est vous autres qui l'avez aboli.
Le Président (M. Rochefort): M. le ministre, vous allez
avoir du temps tantôt pour dire tout ce que vous voulez, y compris pour
exprimer vos désaccords et divergences de points de vue avec M. le
député de Shefford.
M. Bourbeau: M. le Président...
Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.
M. Paré: Bon, je vais poursuivre là-dessus. C'est
dommage parce que c'est très sérieux, ce qu'on est en train de
discuter. Il faut permettre aux gens de devenir propriétaires et c'est
une formule pour aider les gens. C'est reconnu, on permet à des gens
à revenus moyens de - devenir propriétaires. Là-dessus,
s'il n'y avait pas d'autre façon, ce serait impensable de vouloir
bloquer ou retarder cette formule. Il y en a d'autres. La preuve, c'est que
ça se bâtit énormément et qu'il y a des gens qui
continuent à acquérir, sinon on arrêterait de
construire.
Cela ne veut pas dire non plus qu'on est contre la
copropriété. Je dois vous dire qu'au contraire je serais mal
placé pour être contre. J'ai un condominium. Oui, c'est une
formule intéressante et qu'il faut favoriser. Là où on a
un problème... Ce n'est pas une question d'idéologie de vouloir
parler contre la levée du moratoire. Ce n'est pas une question
d'idéologie. Vous demandiez: C'est quelle idéologie? Ce n'est pas
l'idéologie de la défense de la location, du locataire. Si on en
parle ici, c'est en fonction d'individus qui sont locataires et qui sont
menacés. C'est là toute la différence du monde. Quand vous
avez comparé cela à un avion, je dois vous dire que les chances
de tomber en avion, les malchances, les risques de tomber en avion sont
très limités, et heureusement. Sauf que dans le choix de lever le
moratoire les risques de pénaliser des gens sont connus, ils sont
évalués par bien du monde et on sait qu'on va déplacer du
monde. Est-ce que, comme législateurs, on a le droit de laisser faire
cela? Ne doit-on pas prendre des mesures plutôt? Parce que, si on ne
prend pas des mesures pour empêcher le mal qu'on va faire à
certaines personnes - je ne dis pas globalement et à tout le monde -
c'est nous, comme société, qui allons devoir le payer très
cher.
D'ailleurs, on est dans l'Année internationale du logement des
sans-abri. On voit qu'à Montréal il y a 10 000 itinérants.
C'est effrayant, dans une société moderne nord-américaine,
qu'il y ait cela à Montréal. Je ne suis pas content de voir cela.
Je ne voudrais pas qu'il y en ait plus. Dans ce temps-là, il faut que
des mesures soient apportées. Vous avez dit quelque chose que je partage
à 100 %: il y a urgence d'avoir une politique globale le plus rapidement
possible. Nous, ce qu'on dit - quand je parle de nous, je parle de l'ensemble
des intervenants, car je pense que "politique globale", c'est venu à la
bouche de tous les intervenants, sans exception - c'est qu'il faut avoir une
politique globale de l'habitation -et cela comprend le logement.
Le ministre nous dit qu'on va nous consulter à l'automne. Est-ce
qu'on peut prendre le risque de lever le moratoire en sachant que cela aura des
conséquences
néfastes pour des gens? N'est-il pas préférable
d'attendre un peu, quelques mois? C'est le message qu'on passe au ministre.
À l'intérieur de cette politique, les gens seront
consultés et on sera en mesure, dans une politique globale du logement
et de l'habitation, de dire que, si des gens sont pénalisés, on
aura d'autres formules, d'autres programmes et d'autres moyens de les aider
d'une façon quelconque, alors que présentement, il n'y a pas de
programme pour ce faire. Cela aussi, vous l'aviez spécifié. Oui,
il faut des programmes d'aide si l'on veut que les gens accèdent plus
à la propriété. En tout cas, il y a un certain nombre de
personnes qu'il faut aider. Cela prend des programmes d'aide. Un programme
d'aide pour aider quelqu'un à accéder à la
propriété coûte moins cher que de déplacer des gens
et être, par la suite, obligé de payer pour leur donner des
services essentiels, car on parle de désinstitutionnalisation et de
maintien à domicile. Si, comme le disaient les personnes
handicapées ce matin, on les déplace ailleurs, on risque de payer
plus cher comme société.
J'ai été long un peu là-dessus, mais je trouvais
cela important. Quant à moi, c'est oui à la
propriété et oui à la copropriété. Vous avez
cité l'exemple des REA pour permettre à des
Québécois d'aller sur le marché boursier. Je dois vous
dire que je trouve cela extraordinaire parce que je me réjouis aussi
que, comme société ou comme individu, locataire ou
propriétaire - même des locataires - on ait choisi d'investir
plutôt dans un REA. En tant que collectivité, on doit devenir
propriétaire de son économie. Je ne fais pas de politique mais,
d'un autre côté, on veut même aller encore plus loin que
cela quant à la possession de nos pouvoirs, de nos droits et notre
propriété collective.
Oui à la propriété, au maximum, mais jamais sur le
dos des plus démunis. On le sait, les gens sont venus nous le dire et on
connaît la réalité des choses. Si on laisse aller, des gens
vont en souffrir.
Je vais vous montrer à quel point c'est complexe et difficile.
Vous avez cité l'exemple des caisses populaires. Oui, il faut s'asseoir.
Corvée-habitation est la preuve qu'on est capable de s'asseoir pour se
parler. Il n'y a malheureusement pas eu beaucoup de consultation.
Votre mémoire contient une recommandation que j'ai volontairement
citée ce matin et qui concerne la fiscalité municipale. Vous
l'avez mise là avec de bonnes intentions, dans le sens qu'on a la
conviction, presque de façon unanime, que si on n'y touche pas les
locataires même les plus démunis ne seront pas les seuls à
être pénalisés par des augmentations de loyers; cela
affectera même les gens qui ne seront pas concernés par la
copropriété, ceux des immeubles voisins. Donc, ce que vous
demandez là est important. Mais vous avez vu la réaction de
l'Union des municipalités du Québec. Il n'est pas question d'y
toucher. On est coincé là-dedans et, sachant très bien
qu'il faut que des mesures soient implantées pour protéger, on
sait d'avance que des intervenants ne peuvent ou ne veulent pas embarquer, pour
toutes sortes de raisons. Je ne dis pas qu'ils ont tort ou raison. Je vous
parle de la complexité de toucher un dossier aussi fondamental.
Je vous écoutais tantôt et je voudrais vous poser une
première question là-dessus. Vous avez dit: On a
été consulté et on a retenu. Si je comprends bien, vous
avez été parmi ceux qui ont été consultés
quant à la levée du moratoire.
M. Lambert: Je vais répondre rapidement. Au moment de la
consultation sur le livre vert par le ministre du temps, M. Rochefort, nous
avions fait des propositions. Par la suite, lorsque le ministère a
continué son travail, nous avons été invités
à répondre à des questions d'ordre plus technique,
à préciser des choses que nous avions mises là-dedans.
Nous n'avons fait que cela.
À ce moment-là, on avait suggéré le guichet
parce que les gens... Notre groupe de travail a continué sa
réflexion et s'est demandé comment répondre au
problème de la protection concrète des droits et c'est là
qu'on a pensé au guichet spécialisé. J'ai
terminé.
M. Paré: À la page 8, vous avez souligné un
titre: Privilégier les locataires occupants intéressés
à accéder à la propriété. Seriez-vous
prêts, dans une première étape, à aller dans le sens
d'autres mémoires soumis par l'Union des municipalités du
Québec, la Fédération des travailleurs du Québec et
d'autres, soit que ce soit limité à l'accession à son
logement plutôt qu'à un logement? Si c'est à un logement,
cela implique le déplacement d'un autre individu qui lui n'a pas...
M. Lambert: Non, non. On se comprend très bien, c'est le
logement occupé par le locataire. C'est clair.
M. Paré: Oui, oui.
M. Lambert: C'est sûr que c'est clair.
M. Paré: Votre idée, c'est d'abord son
logement...
M. Lambert: Mais oui!
M. Paré: ...auquel il peut accéder.
M. Lambert: Oui.
M. Paré: D'accord. Sauf...
(15 h 30)
M. Lambert: C'est clair, sans cela, cela perd beaucoup de sa
signification. La personne qui vit dans un milieu... Effectivement, on dit:
S'il y a une transformation de l'immeuble dans lequel cette personne occupe une
unité, il faut qu'elle ait le droit de dire: Non, moi, je continue
à demeurer dans cette unité comme locataire. C'est clair que
c'est cela.
M. Paré: Oui, mais...
M. Lambert: Par contre, si la personne... Je m'exuse. Mais par
contre, si on offre à cette personne le droit de devenir
propriétaire, c'est propriétaire de son logement. Donc, on doit,
à ce moment-là, favoriser l'accès à la
propriété du logement qu'elle occupe, si c'est ce qu'elle veut.
Elle dit: Moi, j'aime vivre ici mais on m'offre une nouvelle formule. Au lieu
de continuer à payer un loyer qui augmentera tout le temps dans
l'avenir, on m'offre une formule où, là, je vais peut-être
avoir un meilleur contrôle. Cela va me permettre d'investir,
peut-être de transformer cela plus à mon goût, etc., mais
c'est là où je veux continuer à demeurer. Certainement que
c'est cela qu'il faut protéger.
M. Paré: D'accord. Donc, privilégier les locataires
occupants dans leur logement, sauf qu'on sait très bien que la
levée du moratoire, cela le prémunit ou cela... Là, cela a
été contesté. Cela lui donne un droit de
préemption, de premier refus, c'est évident, et un maintien
illimité contestable mais, en tout cas, un droit sauf que, si lui ne
veut pas, s'il y a là une majorité, là on va
déplacer du monde.
M. Lambert: Non, cela n'est pas ce qu'on a dit.
M. Paré: Non?
M. Lambert: Non, ce n'est pas cela du tout.
M. Paré: Vous ne parlez pas, à un moment
donné... Je dois vous dire...
M. Lambert: Non, non, quand on parle de la majorité, c'est
uniquement le cas où, par exemple, vous avez un ensemble de locataires
dans un immeuble, une majorité qui dit: Oui, nous, on voudrait devenir
propriétaires de notre unité, mais vous en avez...
M. Paré: Oui.
M. Lambert: Je vais vous donner un exemple: un immeuble où
il y a huit unités de logement. Il y en a cinq qui disent: Nous, nous
voulons devenir propriétaires, on est prêt à faire des
travaux et admettre cela. Les trois autres disent: Nous, on veut juste
continuer d'être locataires. Ce qu'on veut, c'est autoriser la conversion
parce que les locataires le veulent, il y a une majorité qui le veut,
mais cela ne veut pas dire de mettre les trois autres dehors. Non, les autres
ont le droit de continuer leur possession illimitée, ils ont le droit de
demeurer locataires tant qu'ils le voudront, dans cet endroit-là.
M. Paré: Mais c'est là où, finalement, par
contre, le droit de maintien illimité prend une signification beaucoup
moins forte quand on sait - parce que vous allez certainement le
reconnaître - que cela veut dire une augmentation du loyer. Un autre
argument a été apporté par des gens qui le vivent ou qui
l'ont vécu, c'est la pression. Il y a même des groupes qui
demandent d'évaluer sérieusement la faisabilité de ce
covoisinage de différents types à l'intérieur d'un
même immeuble. Je ne pense pas qu'on l'ait beaucoup exploré. Il y
a des craintes et cela mérite vraiment d'être regardé plus
à fond. Me reste-t-il passablement de temps? Deux minutes?
Un dernier point et vous pourrez commenter le tout. Vous avez
parlé de harcèlement. Vous dites que vous trouvez inacceptable de
reconnaître l'achat du droit de départ comme du
harcèlement. Je dois vous dire toute l'importance qu'on en parle, qu'on
en discute, qu'il y ait consultation et politique connue de tout le monde;
sinon, on se ramasse avec des interprétations, comme on en entend depuis
le début, où des gens en parlent comme quelque chose de tout
à fait acceptable, d'autres de tout à fait inacceptable. Il va
vraiment falloir finir par s'entendre sur une description, un contenu de ce
qu'on entend par harcèlement qui sait clair et précis. C'est pour
tout le monde, ce qui n'est pas le cas présentement.
Vous avez le droit à votre point de vue, que je respecte tout
à fait, de dire que cela fait partie du marchandage, de la
négociation. Je ne dis pas que je le partage, je dis que je le respecte.
Par contre, d'autres gens trouvent, et non les moindres -le président de
la Commission des droits de la personne - que cela est tout à fait
inacceptable. Il est temps que les gens s'assoient à la même
table. Là, on s'est assis à la même table, mais non en
même temps, donc, on a reçu... Nous, on a eu la chance de
discuter, mais les groupes qui avaient d'autres versions ne sont pas ici. Il
est temps, je pense, que tous les gens soient assis à la même
table pour discuter et qu'on sorte avec une véritable politique du
logement; sinon, on ne s'en sortira jamais.
M. Lambert: Alors, rapidement. Premièrement, quant aux
programmes, ce n'est pas seulement ceux du gouvernement actuel, de celui qui
l'a précédé, on peut remonter même à M.
Duplessis avec son programme de 1948. Vous avez parlé de
Corvée-habitation, on avait été impliqué
là-dedans. Il faut comprendre - c'est ce qui est arrivé sauvent
dans les programmes - que, dans le fond, ce n'était pas pour aider
à l'accession, c'était pour repartir la construction. Ce qu'on
dit, c'est que tous ces programmes ont été faits à la
pièce tout le temps et, dans le fond, avec un objectif principal qui
était autre que l'habitation.
Cela avait des conséquences favorables, je vous l'accorde, mais
ce qu'on dit, nous, c'est ceci: Regardons finalement l'habitation et voyons les
programmes existants qui auront comme objectif principal de favoriser
l'accès. C'est ce qu'on a dit. Je pense qu'on se comprend
là-dessus. Quand je vous parlais de l'avion, même s'il n'en tombe
pas souvent, placez-vous au pied de l'avion et demandez aux gens s'ils ont
peur? Je pense que vous allez avoir huit personnes sur dix qui vont vous dire
qu'elles ont peur de rentrer dans l'avion sachant très bien que l'avion
ne tombera pas. Alors, c'est ce que je dis, il faut faire attention entre la
peur et la réalité. Il en tombera tout le temps, des avions. Par
contre, il reste qu'il est impensable aujourd'hui de concevoir notre monde sans
l'aviation. Je ferme la parenthèse.
Attendre? C'est vrai, je pense qu'il est question de quelques mois. M.
le député, cela fait déjà dix, onze, douze ans - je
m'excuse - le moratoire. Je pense que c'est l'affaire de quelques mois. Oui,
mais si on est encore pour attendre des années... Vous avez vu les
chiffres publiés dans la région de Montréal. Il y a un
moratoire. Une spéculation foncière s'est faite. Les prix ont
augmenté de 27 % et on sait que, dans certains cas, c'est pas mal plus
que cela, c'est de 100 %. Cela va se répercuter. Peu importe que le
citoyen occupe son unité comme propriétaire ou qu'il continue
comme locataire, cela va se répercuter. Ceux qui ont acheté, il
va falloir qu'ils refilent ce prix-là ou bien ils vont craquer, ils vont
faire faillite et, socialement, ce sont les mécanismes, les institutions
bancaires, la caisse populaire qui perdra sa créance. Donc, comme
sociétaire, j'aurai moins d'argent. Il y a quelqu'un qui paie. Arrangez
cela de la manière que vous voulez, si ce n'est pas d'une façon,
c'est de l'autre. Mais, socialement, on va payer et, en fin de compte, le
consommateur paie.
Je pense qu'il est temps qu'on soit clair là-dessus.
L'ambiguïté qui a régné au cours des dernières
années au sujet d'une prise de position directe sur l'accès
à la propriété a peut-être favorisé cela,
mais pas juste cela. Il y a tout un contexte nord- américain de
spéculation foncière qu'il faut regarder. On ne vit pas en vase
clos. C'est cela qu'on dit. Il ne faut pas attendre que cela devienne... Les
chiffres le prouvent: en 1971, 300 000 ménages...
Le Président (M. Richard): Je m'excuse, maître. Je
vous demanderais de conclure, s'il vous plaît.
M. Lambert: ...35 000 pouvaient y accéder; en 1983, il n'y
en avait plus que 15 %. Combien y en aura-t-il demain?
Le Président (M. Richard): Merci, maître. M. le
ministre, vous avez un commentaire pour terminer?
M. Bourbeau: C'est simplement pour remercier les
représentants de la Chambre des notaires pour leur importante
contribution au débat. Nous n'avons malheureusement pas eu le temps de
passer en revue toutes et chacune des propositions de la Chambre des notaires.
Je peux vous dire que nous avons lu votre mémoire avec attention, nos
fonctionnaires aussi. Nous sommes en train d'analyser l'ensemble de toutes les
propositions qui nous ont été faites par tous les intervenants
sur chaque sujet de façon à dégager un tableau d'ensemble
de la question. Comme je l'ai dit à quelques reprises, dans les
prochaines semaines, j'ai l'intention de soumettre un projet de loi à
l'Assemblée nationale. L'Opposition m'a assuré qu'on pourrait
l'adopter un, deux, trois le même jour. J'ai hâte de voir cela. Ce
serait une première, en tout cas, une première fois pour moi, au
cours de mes sept années à l'Assemblée nationale, de voir
cela.
M. Paré: Un bon programme.
M. Dufour: Cela dépendait de vous autres, avant.
M. Bourbeau: L'expérience aidant, je ne pense pas qu'il en
sera ainsi. On trouvera certainement le moyen de critiquer le projet de loi.
Mais je peux vous assurer que nous avons la ferme intention de
légiférer à l'automne sur cette affaire pour tenter de
mieux protéger les locataires et d'aider autant que possible ceux qui
voudraient accéder à la propriété. Merci.
Le Président (M. Rochefort): M. le député de
Shefford, vos conclusions.
M. Paré: Oui. Merci, M. le Président.
Comme je vous l'ai dit tantôt, vous êtes le dernier groupe,
mais on a eu le temps de lire votre mémoire. On va certainement aussi
s'y référer à plusieurs occasions, spécialement si
on a à légiférer à
l'automne. Je vous remercie beaucoup, en espérant que le ministre
va effectivement légiférer à l'automne dans le bon
sens.
Le Président (M. Rochefort); Le mot de la fin?
M. Lambert: M. Rochefort, du temps qu'il était ministre,
avait dit: II faut faire appel à l'imagination. Moi, je complète
en disant: Faisons appel à la confiance qu'on peut avoir en nous, dans
le peuple québécois. Je conclus en disant que la Chambre des
notaires offre sa collaboration, au-delà de toute ligne partisane, aux
travaux du législateur dans ce domaine. Merci.
Le Président (M. Rochefort): Merci infiniment de votre
présence parmi nous.
Donc, ceci met fin à la participation de l'ensemble des groupes
et des individus qui avaient demandé à se faire entendre par
notre commission dans le cadre de sa consultation générale.
Avant d'accorder la période prévue de quinze minutes aux
deux formations politiques pour conclure nos travaux, à la suite d'un
consentement intervenu, je voudrais déposer formellement dans les
documents de la commission le mémoire de l'Ordre des
arpenteurs-géomètres du Québec - identifié 24M -
qui nous avait été envoyé par cet ordre professionnel.
Compte tenu de circonstances et de raisons qui leur sont propres, ils n'ont pas
pu se présenter parmi nous. Mais ils nous ont demandé que leur
mémoire soit déposé formellement et contenu dans les
documents officiels de la commission pour le mandat que nous achevons cet
après-midi.
Je demanderais donc aux deux formations politiques, tel que prévu
par le mandat que nous nous étions donné, d'utiliser chacune
successivement une période de quinze minutes pour clôturer les
travaux de notre commission.
M. le ministre.
Conclusions
M. Bourbeau: M. le Président, chers amis, nous arrivons
maintenant à la fin de nos travaux, après avoir passé cinq
longues journées...
Le Président (M. Rochefort): Je m'excuse, M. le ministre,
mais on m'informe qu'il y avait une entente et que d'après celle-ci, la
conclusion serait amorcée par l'Opposition pour être vraiment
conclue par vous mais...
M. Bourbeau: Je m'excuse, M. le Président, mais je...
Le Président (M. Rochefort): ...je suis ouvert à
toute modification de cette entente...
M. Bourbeau: Oui.
Le Président (M. Rochefort): ...si tel est le cas.
M. Bourbeau: Puisque nous sommes à la fin de nos travaux,
M. le Président, il me fait plaisir de céder la parole au
député de Shefford.
M. Garon: D'après moi, le ministre a peur qu'on s'en
aille.
Le Président (M. Rochefort): M. le député de
Shefford.
M. Bourbeau: C'est ce que j'allais dire.
M. Garon: M. le Président, je pense que le ministre doit
avoir peur qu'on s'en aille quand il va parler.
Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Shefford, pour vos remarques
finales.
M. Roger Paré
M. Paré: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Mes
premiers mots vont certainement aller en remerciements à tous ceux -ils
sont moins nombreux, c'est sûr, parce qu'on a dû se déplacer
et cela dure depuis cinq jours maintenant - qui ont pris le temps et les
énergies pour effectivement nous produire des mémoires, venir
nous les présenter et discuter avec nous souvent à des heures
tardives.
Je remercie aussi le personnel de la commission qui, ici mais
spécialement à Montréal, a fait des heures très
longues en soirée. Donc, très souvent, dans leur cas, à
cause des fins de travaux, c'était en pleine nuit.
Je dois dire maintenant, sur le fond, que mes préoccupations et
mes inquiétudes du début se sont confirmées davantage et
que ma conclusion, lors de mon discours d'ouverture, qui disait qu'il y a une
décision qui s'impose, c'est de maintenir le moratoire et de le rendre
efficace, cela se confirme davantage en fonction de tout ce que j'ai entendu au
cours de la semaine. Il y a des choses qui sont ressorties clairement et quand
ce n'était pas de façon unanime, c'était de façon,
en tout cas, où il y avait un consensus qui était très
large. Les problèmes maintenant sont très connus et sont bien
identifiés en ce qui concerne l'expression qu'on utilise et selon
laquelle le moratoire est une "passoire".
Une autre chose aussi est ressortie clairement, c'est qu'il y a des
solutions qui
sont réalisables à très court terme pour corriger
cette situation. D'ailleurs, on peut même les identifier en termes de
chiffres en parlant d'articles et de loi. Le ministre nous a dit qu'il
était prêt à intervenir rapidement au mois d'octobre et si
c'est sur cela, un, deux, trois à l'Assemblée nationale, on sera
d'accord.
Ce qui est sorti de bien clair aussi, c'est qu'il y a une demande - et
celle-là est unanime - c'est celle d'une politique globale de
l'habitation. Sur cela, beaucoup de gens nous ont dit qu'ils n'avaient jamais
eu la chance, malheureusement, d'être consultés. M. le ministre,
il faut prouver maintenant que ces gens ne sont pas venus pour rien. Comment
pourrait-on convoquer des gens en commission si on ne tient pas compte de Ieurs
demandes à l'avenir? Alors, cette fois-ci, dans cette commission, il y a
quelque chose qui est unanime chez tous les intervenants, c'est le besoin d'une
politique globale de l'habitation. Donc, il faut prouver à ces gens que
ce qu'ils viennent dire en commission, c'est retenu. Et quand il y a
unanimité, il faut y répondre, sinon les gens ne se
déplaceront plus.
Ce que nous avons aussi entendu de la part des intervenants, c'est que
les personnes du troisième âge, de façon unanime, sont
contre la levée du moratoire et sont inquiètes. Les personnes
handicapées qui étaient représentées ici cet
avant-midi par leur groupe sont venues nous dire aussi qu'elles étaient
contre parce qu'elles étaient craintives et qu'elles voyaient plus de
risques que de chances de vie meilleure pour elles. Les locataires aussi se
sont fait entendre en disant qu'ils s'y opposaient, pour la défense de
leurs membres. La ville de Montréal est contre la proposition telle
qu'elle est sur la table et nous propose une formule qui, à mon avis, va
permettre aussi l'accès à la propriété dans
certains cas, mais en pénalisant beaucoup moins de gens et en laissant
des possibilités quand même non pas de contourner la loi mais
d'accepter des exceptions.
Il y a là les représentants de l'Association des
propriétaires du Québec et la Ligue des propriétaires du
Québec qui disent - cela est bon, je vais les citer parce que ce n'est
pas long - et c'est clair: "La levée du moratoire ne permettra
l'accessibilité à un logement qu'à un nombre restreint de
locataires, ceux qui ont déjà probablement les moyens
d'être propriétaires." Dans la conclusion, le ministre, avec le
projet de loi tel qu'exprimé présentement, atteindra exactement
les résultats contraires à ceux visés. Donc, il faut faire
attention, et ce sont des gens de la construction qui viennent affirmer des
choses semblables en commission. (15 h 45)
II y a l'Union des municipalités du
Québec, la Fédération des travailleurs du
Québec et la Chambre d'immeuble qui, elles, demandent que l'accès
à la propriété soit limité aux locataires en
place.
Il y en a quelques-uns qui adhèrent individuellement à la
proposition ou pour régler des cas particuliers, entre autres, celui du
manoir Barrington. Je l'ai dit et je le répète, ce serait
impensable d'amener une politique globale ou des changements en habitation pour
régler un ou quelques cas qui sont tout à fait spécifiques
et qui peuvent se régler par bill privé.
D'autres y adhèrent tout simplement en demandant des changements
majeurs ou en souhaitant à quelques occasions des objectifs qui,
finalement, vont tout à fait à l'opposé des objectifs
qu'on s'était fixés au tout début du livre sur la
proposition gouvernementale. Donc, on peut dire qu'on est pour, 3auf que quand
on lit le mémoire on s'aperçoit qu'en y allant et en amenant
certains changements, on n'atteindra absolument pas les objectifs qu'on s'est
fixés, soit la protection du stock de logements locatifs et
l'accessibilité à la propriété pour un plus grand
nombre.
Il y a donc des consensus et au moins un se dégage, soit une
politique globale en matière d'habitation. Il fut aussi
généralement reconnu qu'une pareille décision provoquera
une augmentation généralisée des loyers dans les secteurs
centraux spécialement de Montréal et de Québec. C'est
important, je pense, d'insister là-dessus. C'est vrai que les gens ne
courent pas dans le métro présentement à propos de la
levée du moratoire et de la commission qui se tient présentement.
Je pense que la population en générai n'est pas consciente du
danger qui la menace. Il faut le dire. Cela a été reconnu par les
intervenants, les gens du milieu financier ce matin. Et même les gens
dans les quartiers où l'on pense qu'on ne sera pas touché,
même les gens dans les immeubles qui ne seront pas convertis vont voir
leur loyer augmenter par une décision qu'on peut prendre ici, soit la
levée du moratoire, pour les raisons qu'on a exprimées tout au
cours de la semaine.
L'augmentation des taxes sur les immeubles convertis va
générer, dans certains coins, une augmentation de
l'évaluation foncière et ce, pas seulement pour l'édifice
touché. Cela, on l'a vu dam des quartiers centraux spécialement
à Montréal.
On amène une évaluation généralisée
et cela, c'est sûr que c'est payant collectivement pour une
municipalité. Les municipalités, d'ailleurs, ne veulent pas
changer le mode de facturation des taxes ou de calcul de l'évaluation.
C'est payant, collectivement, pour une municipalité, mais cela veut dire
que cela coûte plus cher individuellement pour les propriétaires.
Donc,
il y a une menace pour les gens de Montréal et de Québec,
globalement: l'augmentation généralisée de taxes, ce qui
veut dire augmentation de loyer. Une levée du moratoire voudrait dire
à très très court terme une augmentation
généralisée des loyers, spécialement pour les deux
grandes régions métropolitaines de Montréal et
Québec.
Il faut aussi reconnaître - et cela a été
amené par plusieurs gens - que l'accès à la
propriété désirée sera très très
limité à cause des coûts mensuels que cela amènera,
sauf pour ceux qui ont déjà les moyens, à moins qu'il n'y
ait des programmes d'aide. Et cela aussi, c'est impartant. J'ai cité des
chiffres aujourd'hui qui venaient d'associations et qui n'ont pas
été contredits par les gens qui viennent du milieu de
l'habitation et par les gens qui viennent de l'Association de l'immeuble du
Québec. Ces chiffres nous ont prouvé que c'est évident que
les gens qui pourraient accéder à la propriété dans
ces logements auraient une augmentation passablement importante du coût
du loyer mensuel, c'est-à-dire du paiement mensuel.
La Chambre d'immeuble nous parlait d'une augmentation plus ou moins
importante, sauf qu'elle a reconnu qu'il y avait des coûts importants qui
avaient été omis dans cette étude. On les retrouve dans
les journaux, ces chiffres-là, et cela donne à entendre qu'au
bout de sept ou huit ans, on va avoir une diminution si on est
propriétaire et le contraire si on demeure locataire. Mais quand on
tient compte des coûts qui ont été ignorés - et
c'est bon de les rappeler - entre autres le capital de départ que cela
prend, l'intérêt sur ce capital de départ, l'entretien, la
rénovation et les frais de transformation en copropriété,
cela veut dire que les chiffres à ce moment-là sont
complètement changés. Il ne faudrait pas donner des illusions
à des gens quand les chiffres, finalement, ne sont pas complets.
Tous les groupes, M. le ministre, vous ont parlé de programmes
d'aide. C'est important des programmes d'aide, sinon on risque de mettre des
gens dans la misère en voulant les aider. Et on risque aussi - cela a
été amené par plusieurs personnes - d'amener une
détérioration du bâti dans les centres-villes.
Détérioration parce que les propriétaires actuels auront
tout avantage à laisser se détériorer leurs logements de
façon que les locataires s'en aillent. Donc, on évite un paquet
de procédures.
Détérioration aussi parce que les gens qui voudront
accéder à la propriété en n'en ayant pas les moyens
vont à peine réussir à s'acquitter de leurs nouveaux
paiements et n'auront pas les moyens de faire, spécialement s'ils sont
dans des édifices qui en demandent, des rénovations. On sait
très bien que les municipalités - même Québec qui
est d'accord avec la levée du moratoire - ce matin, sont venues dire
que, pour ce qui est du programme PARCQ, cela prend des améliorations.
Ce ne serait pas possible à quelqu'un qui réussit à peine
à arriver de pouvoir profiter du programme PARCQ en ayant des
dépenses de plus à payer.
Cela prend absolument des programmes d'aide. Comme je le disais
tantôt au dernier intervenant, un programme d'aide à
l'accès à la propriété, c'est plutôt un
placement pour le gouvernement. C'est plutôt un investissement parce que
cela va se traduire par une économie en mesures sociales pour d'autres
ministères, que ce soit celui de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu ou celui de la Santé et des Services
sociaux. Il a été reconnu aussi que l'annonce
prématurée a fait en sorte d'empirer la situation dans plusieurs
coins de Montréal et de Québec, spécialement à
Montréal où vous avez été témoins de
scènes qui n'étaient pas du cinéma, mais qui
étaient vécues par des gens, des situations de
désespoir.
Les mesures proposées ne sont pas suffisantes et sont facilement
contournables -on l'a vu par des exemples qui sont même vécus
présentement - que ce soit le maintien dans les lieux ou la protection
du stock de logements locatifs, qui, finalement, dans des secteurs où on
ne peut plus bâtir, va diminuer. Il y a déplacement de la
clientèle la plus démunie au profit d'une clientèle qui
est plus en moyens. À mon avis, à ce moment-ci, on doit conclure
que le ministre n'a pas d'autre choix que de retirer son projet, s'il veut
répondre au consensus qui se dégage de cette semaine de
commission parlementaire et passer à l'action.
On ne demande pas de retirer tout simplement le projet qui est sur la
table. On demande de passer à l'action. C'est faisable. Il y a des
consensus en ce sens aussi, auxquelles on adhère. Je suis convaincu, M.
le ministre, que c'est dans l'intérêt de toute la population du
Québec. La meilleure façon de passer à l'action, c'est de
légiférer, tel que promis, durant le mois d'octobre; c'est aussi
un engagement, avec une date bien précise, pour corriger la situation
actuelle et rendre le moratoire effectif.
Maintenant qu'on a identifié les lacunes, qu'on sait que c'est
une passoire et que les gens sont venus nous faire des recommandations pour
qu'on arrête la passoire, qu'on corrige immédiatement cette
situation pour préserver le stock de logements locatifs et permettre aux
plus démunis de vivre en sécurité et non pas en
état d'inquiétude comme on l'a vu, ce qui est vécu surtout
par des groupes particuliers, par les personnes de l'âge d'or, entre
autres, il y a moyen de passer à Faction en corrigeant cela. Ce qui ne
met pas en cause l'accessibilité à la propriété
sous d'autres formes.
II faut présenter, tel que promis, un document d'orientation sur
une politique globale en matière d'habitation. Si on fait cela à
l'automne et si le premier ministre tient parole et nous amène, à
l'automne aussi, une discussion sur une politique de la famille, il serait
totalement impensable et inacceptable qu'on lève le moratoire, ce qui va
créer des problèmes sociaux qu'il faudra ensuite essayer de
corriger par des politiques globales. Comme il s'agit d'une question de temps
limité, il vaut mieux avoir une politique globale de la famille, avoir
une politique globale, ou au moins, des discussions, des consultations, une
orientation en matière de logements et d'habitation avant d'aller de
l'avant avec la levée du moratoire parce que - et cela, tout le monde
l'a dit, je pense, sans exception - la levée du moratoire,
l'accès à la propriété par la
copropriété, c'est un facteur, c'est une facette d'une politique
de l'habitation et du logement.
C'est un moyen, donc, on ne peut pas le traiter maintenant,
isolément et surtout, on ne peut pas le traiter en priorité. Ce
serait impensable. Je pense que socialement, économiquement, on ferait
une erreur. Économiquement pour les plus démunis et
économiquement comme société, parce qu'on serait
obligés de payer d'une autre façon les conséquences de ce
geste qui serait posé.
En conclusion - vous me dites que mon temps est écoulé,
malheureusement - je dis, comme je l'ai dit au tout début: Qui, nous
sommes d'accord avec l'accession à la propriété pour le
plus grand nombre. Oui, nous sommes d'accord avec cette forme qu'est la
copropriété. Ce qu'on ne peut pas accepter, par exemple, c'est
que ce soit amené de la façon proposée par le document du
ministre. On ne peut pas accepter que cela se fasse sur le dos des plus
démunis. Cela devra se faire après une véritable
consultation, ce qui voudra dire l'aboutissement d'une véritable
politique de l'habitation au Québec. Merci, beaucoup.
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le
député de Shefford. Maintenant, M. le ministre, pour votre
conclusion. Vous avez quinze minutes.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Ainsi, dit le renard, et les flatteurs d'applaudir.
M. le Président, vous me permettrez, au terme de no3 travaux, de
remercier tous ceux qui ont contribué au succès, dois-je dire, de
cette commission parlementaire, tous les groupes et les organismes qui se sont
déplacés pour venir nous soumettre leurs propositions et leurs
points de vue sur la question. Je peux les assurer que nous tiendrons compte de
toutes les recommandations qui nous ont été faites.
Je tiens à féliciter les membres de la commission, des
deux côtés de cette table, pour leur intérêt et je
dirais même pour leur endurance, étant donné que nous avons
dû travailler jusqu'à tard dans la soirée et au
début de la nuit et même, souvent, après minuit, quelques
soirs, pour entendre les intervenants qui se sont présentés
devant nous.
J'aimerais remercier et féliciter M. le président de la
commission pour son objectivité, ainsi que ses nombreux assistants qui
se sont succédé sur le fauteuil présidentiel au cours de
ces jours. J'aimerais également féliciter les membres du
secrétariat et le secrétaire de la commission qui ont vu à
ce que l'intendance soit assurée sans faille.
Je tiens particulièrement à remercier mes
collègues, les députés de la partie gouvernementale, qui
ont travaillé fort, qui ont écouté et qui ont
étudié et qui ont démontré une étonnante
solidarité au cours des jours que nous avons traversés.
Finalement, je tiens à remercier les fonctionnaires qui
m'accompagnent depuis le début, les représentants de la
Société d'habitation du Québec, dont le président
qui n'a pas quitté son fauteuil pendant ces cinq jours pour montrer
l'intérêt qu'il porte à la question, tous les
représentants de la Régie du logement, la présidente, la
vice-présidente et tous les autres qui les accompagnent, eux aussi
témoignant, par leur présence assidue, de l'intérêt
qu'ils portent à cette question. Je remercie également les
membres de mon cabinet qui ont aussi assisté à tous les
travaux.
Certains refrains sont revenus plus souvent que d'autres au cours de ces
jours. Le député de Shefford, tout à l'heure, est venu
encore une fois parler du problème d'une politique de l'habitation.
C'est évident que c'est un point de vue que nous avons entendu
fréquemment au cours de ces jours, qu'il est temps que le gouvernement
accouche d'une politique générale en matière
d'habitation.
M. le Président, tout en soulignant pour la nième fois que
le précédent gouvernement, pendant neuf ans, n'a pas
trouvé le temps d'accoucher d'un seul document d'orientation ou d'une
seule politique de l'habitation et qu'il est très mal placé pour
nous le reprocher après quelques mois de pouvoir, je tiens à dire
que nous travaillons présentement sur un tel document que j'ai
l'intention de déposer au cours des prochains mois.
On doit reconnaître qu'avant de présenter un tel document
il faut procéder à des consultations. Nous avons utilisé,
bien sûr, ce qui était déjà sur la table, les
renseignements compris dans le livre vert Se loger au Québec. Nous avons
procédé à nos propres consultations. Nous avons
procédé à
une période de réflexion. Nous sommes présentement
en train de rédiger des documents. (16 heures)
La consultation que nous terminons aujourd'hui nous aura permis
également de confronter nos idées avec celles de ceux qui se sont
présentés devant nous. Je pense qu'on peut dire qu'au cours des
prochains mois on pourra finalement présenter à la population des
éléments d'une politique gouvernementale.
Pendant ce temps, la terre ne peut pas arrêter de tourner. C'est
la raison pour laquelle nous avons déjà déposé, il
y a quelques mois, le document que nous avons devant nous qui s'intitule Lever
le moratoire, une décision qui s'impose. On nous l'a reproché. On
aurait voulu que le gouvernement cesse complètement toute
activité dans le secteur de l'habitation au cours des derniers mois et
des prochains mois pour attendre que, finalement, une politique de l'habitation
ou un document d'orientation soit déposé sur la table, M. le
Président, si l'ancien gouvernement avait fait cela, il n'aurait
strictement rien fait pendant neuf ans dans l'habitation au Québec,
parce qu'il n'a jamais déposé de document. Alors, nous avons
travaillé au document d'orientation et, en même temps, nous avons
pris des décisions qui, justement, se placent dans la ligne de
pensée que nous avons.
Le député de Shefford dit que nous avons aboli des
programmes d'habitation. Tout en lui rappelant amicalement que le programme
Corvée-habitation n'a pas été aboli par le présent
gouvernement mais par le précédent et tout en reconnaissant que
Corvée-habitation en son temps a fait, oeuvre utile, je lui soulignerai
que, dans la même ligne de pensée qui a conduit l'ancien
gouvernement à abolir Corvée-habitation, nous avons aboli, au
début de 1986, les programmes PAAPR et Êquerre qui, comme
Corvée-habitation, étaient des programmes conjoncturels qui
avaient été mis en place pour tenter de faire redémarrer
l'économie durant la période de crise que le Québec a
connue au cours des années 1981-1982.
Ces programmes n'ont pas tous atteint leur objectif et, lors de leur
abolition, j'ai bien indiqué que, par exemple, le programme PAAPR, avec
les quelque 120 000 000 $ que nous lui avons consacrés, n'aura pas
vraiment atteint ses objectifs qui étaient multiples.
L'évaluation qu'en a faite la SHQ au moment de son abolition
était à savoir qu'il était grandement temps d'y mettre
fin. Ne citons, par exemple, que le volet nataliste du programme qui a
coûté plusieurs dizaines de millions de dollars et qui n'a
absolument pas atteint son objectif, puisqu'on n'a constaté, dans ce
programme, aucune espèce d'augmentation du rythme des naissances par
rapport à la situation qui existe ailleurs au Québec.
Le programme Équerre, quant à lui, lorsque nous l'avons
aboli, 88 % des récipiendaires des subventions ont dit que, même
sans subvention, ils auraient fait les mêmes travaux. C'est donc dire que
les quelque 60 000 000 $ qui ont été consacrés auraient
probablement été mieux utilisés ailleurs. L'abolition de
ces programmes n'a pas empêché le Québec de
connaître, au cours de 1986, la meilleure année en ce qui concerne
les mises en chantier au Québec depuis 1976. Jamais depuis 1976 le
Québec n'avait connu 60 000 mises en chantier. C'est assez
étonnant de constater que les deux meilleures années de la
dernière décennie ont été les années 1976 et
1986: la dernière année du premier mandat de M. Bourassa et la
première année de son deuxième mandat, M. le
Président.
M. le Président, le gouvernement n'a pas fait qu'abolir des
programmes d'habitation. Il a également implanté de nouveaux
programmes. À la suite de la décision politique que nous avons
prise d'effectuer un virage en matière d'habitation vers les plus
démunis, de cesser de subventionner les gens qui ont les moyens
financiers plus élevés pour se concentrer sur ceux qui ont les
moyens les moins élevés, nous avons mis sur pied de nouveaux
programmes. Nous avons, par exemple, mis sur pied le programme de
supplément au loyer dans le secteur locatif privé. On nous l'a
reproché. Cependant, avec cela, nous réussissons à loger
deux fois plus de démunis, des gens qui sont sur les listes d'attente,
des familles sur liste d'attente, dans nos HLM, dans nos offices municipaux
d'habitation, deux fois plus avec cette formule que nous ne pouvons le faire
dans les HLM que nous construisons nous-mêmes. Mais nous n'abolissons pas
pour autant le programme de construction des HLM, nous ajoutons ce programme
à ceux qui existent présentement.
Nous avons augmenté le nombre de HLM que nous construisons pour
les personnes âgées et les familles. Nous en faisons plus que sous
l'ancien gouvernement. Nous avons continué le programme d'aide au
logement sans but lucratif privé pour les coops et les OSBL. Nous venons
justement d'annoncer 930 unités pour ces groupes. Nous avons mis sur
pied pour l'année des sans-abri le programme pour les sans-abris 13 000
000 $ d'investissements en capital et 2 500 000 $ pour les organismes qui
s'occupent des sans-abri. Le programme PARCQ, un nouveau programme de
restauration qu'on a critiqué de l'autre côté, mais qui
avait... C'est sûr qu'au début, il y a eu des problèmes
pour mettre ce programme en vigueur. Mais, quand on considère que le
programme Loginove avait pris quatre années pour démarrer, je
pense qu'après quelques mois déjà, le programme PARCQ est
en train de prendre son envol
avec les correctifs que nous lui avons apportés.
M. le Président, je pourrais continuer dans la nomenclature des
programmes. Je pourrais parler des programmes des Inuit, des autochtones.
Finalement, le nouveau gouvernement n'a pas de leçon à recevoir
de l'ancien; nous faisons 37 % de plus d'unités en 1987 pour les
ménages les plus démunis que ce qu'on faisait avec les anciennes
ententes.
M. le Président, je constate à la fin de nos travaux que,
finalement, aucun groupe ne s'est déclaré complètement en
faveur de la position gouvernementale et aucun groupe, non plus, ne l'a
complètement rejetée. Il ne fallait pas s'attendre à autre
chose puisque nous sommes justement ici pour demander des suggestions et on
nous a suggéré une foule d'améliorations dont nous
tiendrons compte.
M. le Président, ce qui est important, ce n'est pas que la
proposition du gouvernement reçoive des éloges unanimes ou que le
ministre ait eu ou non raison de déposer sa proposition. Ce qui compte,
c'est qu'on ait le courage d'exposer publiquement le problème,
d'entendre les points de vue de tous les intéressés: locataires,
professionnels, groupes de citoyens âgés, etc. Le livre blanc du
gouvernement a eu au moins le mérite de provoquer la réflexion et
la discussion publique sur des sujets aussi brûlants d'actualité
que les limites et les contraintes du droit de propriété et du
droit au logement. Une chose est devenue évidente. La situation actuelle
est devenue inacceptable et ce sont les mots mêmes qu'a prononcés
la ville de Montréal par la bouche de ses représentants. Or, la
situation actuelle, qui est inacceptable, est celle vécue sous l'empire
du moratoire. La question à poser est donc la suivante: Doit-on
conserver le moratoire et continuer à vivre la situation actuelle ou
bien ne devrait-on pas plutôt changer complètement le
régime et le remplacer par une formule plus susceptible de mieux
protéger les locataires tout en permettant l'accès à la
propriété là où un consensus pourrait favoriser
cette formule?
Ce qui est évident, c'est que la problématique n'est pas
la même à Montréal qu'en province, dans les villes
qu'à la campagne, que l'accès à la propriété
n'a pas la même importance pour les personnes âgées qu'il ne
l'a pour les jeunes couples. S'il convient de favoriser l'accès à
la propriété pour les locataires qui le désirent, il est
tout aussi important d'assurer aux locataires qui souhaitent le demeurer la
meilleure protection possible contre les abus dont ils sont, hélas, trop
souvent victimes, soit le harcèlement, l'intimidation et les
évictions sauvages.
Personne ne me croirait si j'osais affirmer que j'avais, en entrant dans
cette galère, la prétention de croire que le document de
propositions ferait l'unanimité. Je connais trop bien ce dossier pour
avoir prévu que même les propriétaires et autres groupes
naturellement portés à favoriser la mesure trouveraient quand
même le moyen de la critiquer. Si j'avais eu le moindre doute à ce
sujet, l'expérience vécue par d'autres, lors de la consultation
sur le livre vert Se loger au Québec, ne me laissait aucune
illusion à ce sujet. La solution la plus facile aurait été
de ne rien faire, de me fermer les yeux, de m'enfouir la tête dans le
sable et d'abandonner les locataires à leur sort, tout en condamnant de
nombreux locataires à ne jamais pouvoir accéder à la
propriété.
Cela ne convient ni à ma façon de voir les choses ni
à mon tempérament. On ne m'a pas confié la
responsabilité du dossier de l'habitation au Québec pour en
devenir le fossoyeur. Je refuse de fermer les yeux et de laisser
dégrader une situation, un état de fait qui devient de plus en
plus intolérable. La proposition gouvernementale ne rallie
peut-être pas l'approbation générale. Elle peut même
faire l'objet d'une forte opposition dans certains quartiers de la ville de
Montréal. Elle aura eu, au moins, le mérite de provoquer chez
tous une profonde réflexion, de permettre à tous les points de
vue de se faire entendre afin de nous permettre d'améliorer, de bonifier
et même peut-être de modifier la proposition originale.
Qu'on se rassure. Le gouvernement du Québec n'a pas
été élu pour brimer les citoyens du Québec mais, au
contraire, pour les aider à améliorer leurs conditions de vie.
Nous n'avons pas l'intention, par inaction, de contribuer à intensifier
le phénomène d'éviction ou de harcèlement des
locataires. Au contraire, la proposition gouvernementale contient toute une
série de mesures visant à augmenter la protection des locataires.
Je répète mon intention ferme de déposer dans quelques
semaines, à l'Assemblée nationale, un projet de loi dont
l'adoption permettra d'atteindre les objectifs que nous recherchons.
Je termine, M. le Président, en disant que nous verrons, dans les
prochaines semaines, comment nous pourrons, tout en respectant la
diversité de la réalité québécoise et
également de la réalité montréalaise, concilier cet
objectif majeur de mieux protéger les locataires avec notre
volonté de permettre à des Québécois à
revenus modestes, des jeunes couples en particulier, d'accéder à
la propriété de leur logement. Je ne doute pas que nous pourrons
réussir à trouver une solution satisfaisante pour les uns comme
pour les autres. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie, M. le
ministre. En terminant, vous
me permettrez à mon tour de remercier tous les gens de leur
participation active à nos travaux. Je voudrais remercier tous les
groupes et les individus qui se sont présentés devant nous. Vous
me permettrez sûrement, messieurs et mesdames de la commission, de
remercier particulièrement ceux qui ont travaillé a bout de bras,
tout au cours des dernières semaines, pour nous permettre de
siéger pendant quatre jours à Montréal.
Je vous rappelle que c'est la première fois qu'une commission
siège pendant une aussi longue période à
l'extérieur du parlement et que cela a impliqué beaucoup de temps
supplémentaire, notamment pour le secrétaire de la commission, M.
Chouinard, et ses collaborateurs. Je pense qu'il faut souligner le travail
absolument extraordinaire du secrétaire de la commission et de son
personnel, du personnel du Journal des débats et de l'ensemble des
services de l'Assemblée nationale. Ils nous ont permis de siéger
confortablement, dans un cadre satisfaisant et de remplir tous notre mandat
dans un lieu très différent de nos lieux habituels de
travail.
Avant d'ajourner nos travaux sine die, je me permets de rappeler
à tous ceux qui sont membres de la commission à caractère
un peu plus permanent que nous nous retrouverons mardi prochain, è 10
heures, à Montréal aussi, dans le cadre de la consultation que
nous devons mener sur le document gouvernemental relatif au financement du
transport en commun dans la grande région de Montréal.
J'ajourne donc nos travaux sine die. Je vous rappelle toutefois que nous
nous reverrons dans un autre cadre, mardi, à Montréal. Merci.
(Fin de la séance à 16 h 12)