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(Quinze heures quarante-quatre minutes)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission de l'aménagement et des équipements
entreprend maintenant ses travaux pour procéder à l'étude
détaillée du projet de loi 62, Loi modifiant la Loi sur
l'assurance automobile. M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des
remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. I! y a un seul
remplacement pour le projet de loi 62.
M. Paradis (Matapédia) sera remplacé par M. Bradet
(Charlevoix).
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
secrétaire. Je vais maintenant reconnaître M. le ministre pour des
remarques préliminaires.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, cela
a déjà été fait lors de la deuxième lecture
et je pourrais, dès à présent, répondre aux
questions du député de Lévis.
Projet de loi 62
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
ministre. M. le député de Lévis.
Discussion générale
M. Garon: M. le Président, j'aurais voulu poser quelques
questions. Ce n'est pas un projet de loi qui demande beaucoup d'étude en
commission parlementaire puisqu'il n'y a qu'un seul article. Simplement, il
amende la Loi sur l'assurance automobile. Dans la Loi sur l'assurance
automobile, sous le titre V qui concerne les dispositions financières,
au chapitre I, Financement de la régie, on indique différentes
façons... Et, au chapitre II, Versement au fonds consolidé du
revenu, cette nouvelle disposition de la loi va venir s'ajouter à un
article. Il y a une question que je voudrais poser au ministre. Comme il y a eu
un article qui a été ajouté l'an dernier, en 1986 -
l'article 3 du Chapitre 28 de 1986 - pour permettre à la régie de
verser 60 000 000 $ par année, qui peuvent être indexés
selon différentes modalités maintenant inscrites dans la loi,
cela veut donc dire au minimum 60 000 000 $ par année. Cela pourrait
même être plus dans les années à venir, selon ce que
décrétera le gouvernement. On parle maintenant d'une ponction de
100 000 000 $ cette année et l'an prochain. Dans votre discours de
deuxième lecture, vous avez dit que cela n'affecterait pas les montants
à payer par les assurés. Je me demande comment vous pouvez
affirmer qu'une ponction de 400 000 000 $ qui va être faite sur 1986,
1987 et 1988... Trois fois 60 000 000 $ pour les services de santé, cela
fait 180 000 000 $ et comme cela peut être indexé... Je ne sais
pas si cela l'a été, cette année. L'an passé, cela
devait être 60 000 000 $, mais en 1987, c'était 63 567 000 $ et en
1988, cela pourrait être indexé encore un peu plus, de 65 000 000
$ à 70 000 000 $. Cela veut donc dire près de 400 000 000 $ pour
1986, 1987 et 1988.
J'ai le sentiment qu'on ne peut pas soutirer d'une caisse 400 000 000 $
sans que cela n'apparaisse éventuellement dans les primes qui vont
être payées par les assurés ou, encore, dans les
prestations qui seront versées aux assurés. Je comprends que
c'est le ministre des Finances qui a décidé cela. Je ne sais pas
s'il a consulté le Conseil des ministres ou s'il vous a consulté
parce que, parfois, les ministres des Finances consultent, des fois, ils ne
consultent pas, des fois, on l'apprend par les journaux. Cela dépend des
cas. Ils ne sont pas tous pareils dans tous les cas. Ils peuvent le dire
à un et ne pas le dire à l'autre, etc. Je me demande quelles sont
les études qui ont été faites, soit chez vous, soit
à la Régie de l'assurance automobile, soit au ministère
des Finances pour qu'on puisse dire qu'on peut soutirer 400 000 000 $ de la
caisse, sur trois ans, sans que cela affecte les prestations payées aux
assurés ou les primes payées par les assurés.
M. Côté (Charlesbourg): D'abord, je pense qu'il y a
peut-être une distinction très nette à faire entre les 60
000 000 $ du départ, qui étaient... J'avais eu l'occasion de
l'effleurer un peu en réplique, mais je pense que le
député de Lévis était occupé à
d'autres activités.
M. Garon: En 1986?
M. Côté (Charlesbourg): Non, je veux dire dans la
réplique à ce moment-ci, il y a quelques jours, sur le projet 62.
Cela a été fait mardi soir, avant le souper, et je pense que vous
étiez à Rimouski ou à l'extérieur pour vos
fonctions.
M. Garon: Mardi, oui. Mardi dernier.
M. Côté (Charlesbourg): J'ai eu l'occasion de
toucher à ces questions-là et, finalement, les 60 000 000 $,
indexés au cours des prochaines années, font suite à une
décision qui était contenue dans le budget de 1985-1986, dans
votre dernier budget. Je peux peut-être la lire au député
de Lévis. À la page 7 des renseignements supplémentaires,
il était dit ceci: "Désormais, les coûts des services de
santé consécutifs aux accidents routiers devront être
assumés par les assurés de la Régie de l'assurance
automobile du Québec. Jusqu'à maintenant, ces frais
étaient en grande partie pris en charge par les programmes
administrés par la Régie de l'assurance-maladie ou encore par les
établissements du réseau des
affaires sociales. Cette mesure aura pour effet de faire payer par les
usagers du système routier plutôt que par l'ensemble des
contribuables des coûts de quelque 40 000 000 $ découlant des
accidents routiers."
C'était, à ce moment-là, 40 000 000 $ qui
étaient prévus pour six mois; donc, cela aurait
été, annuellement, 80 000 000 $. Des négociations
étaient entamées, avant même que j'arrive, entre les
autorités de la régie et le ministère des Affaires
sociales pour s'entendre sur un montant annuel qui a été
établi, après ces négociations, à la satisfaction
des Affaires sociales et de la régie, à 60 000 000 $
indexés au cours des prochaines années, sans que cette
base-là puisse être touchée avant les cinq prochaines
années.
M. Garon: Trois ans.
M. Côté (Charlesbourg): Trois ans.
M. Garon: En 1989, je pense.
M. Côté (Charlesbourg): D'accord. À ce
moment-là, la base sera revue puisqu'on était un peu dans
l'expectative et qu'on a tenté du mieux qu'on pouvait de
déterminer cette base-là. Donc, c'est quand même 180 000
000 $, on peut dire 200 000 000 $ grosso modo, avec l'indexation au cours des
prochaines années. Effectivement, si c'était une assurance
privée, comme c'était le cas, auparavant, les coûts
d'hospitalisation auraient été payés par... C'est le
principe qui guidait, finalement, cette décision-là. C'est inclus
à l'intérieur des études qu'on fait à la
Régie de l'asurance automobile.
Quant à l'autre montant de 200 000 000 $ qui, lui, est
prévu par ce projet de loi, j'ai eu l'occasion de le dire, dans le
rapport annuel de la Régie de l'assurance automobile daté du 31
mai qui a été déposé à l'Assemblée,
il y avait un paragraphe qui disait ce qui était, finalement, le message
du président de la Régie de l'assurance automobile. On le
retrouve à la page 9 du rapport annuel; on disait ceci: "La
réserve de stabilisation, qui est assimilable en partie aux surplus
accumulés, passe de 525 700 000 $ en 1985 à 654 100 000 $ en
1986. Il est également normal que ces sommes retournent, au cours des
prochaines années, aux usagers de la route notamment sous forme de
réduction ou de plus faibles progressions de contributions d'assurance
et sous forme d'immobilisations en matière de sécurité
routière. "Les autorités de la régie ont donc
recommandé au ministre des Transports, M. Marc-Yvan Côté,
et au gouvernement de consacrer, à même cette réserve, une
somme de 200 000 000 $ à des immobilisations en sécurité
routière sur tout le réseau routier du Québec."
Ce n'est pas le fait que ce soit à l'intérieur de cela qui
fait que ce soit le ministre qui ait commandé cela. C'était la
volonté de la Régie de l'assurance automobile de l'inclure dans
le mémoire qui a été déposé à
l'Assemblée nationale. Quant à savoir si c'est le ministre des
Finances ou si ce sont d'autres personnes qui sont intervenues, à l'insu
ou pas du ministre responsable... La situation s'est présentée
comme suit J'ai eu l'occasion de rencontrer M. Vézina, le
président, qui est venu me faire un rapport sur l'état des
finances de la Régie de l'assurance automobile et déposer ce
qu'il avait en main à l'époque, un bilan financier de la
régie. C'était aux alentours de la fin de mars dans le cadre de
la préparation budgétaire et des problèmes reliés
au réseau routier un peu partout à travers le Québec.
C'est lui-même qui m'a proposé l'idée de prendre 200 000
000 $ a même la réserve de stabilisation et de l'Investir dans le
réseau routier, ce qui, par la suite, si mes souvenirs sont bons, a
été entériné par le conseil d'administration de la
Régie de l'assurance automobile dans une décision du 9 avril
1987. Par la suite, cela a été véhiculé au ministre
des Finances et au premier ministre, qui ont accepté de l'inclure dans
le budget. C'est un peu comme cela que cela s'est passé. Moi, je tenais
pour acquis que ces mesures n'affecteraient pas à la hausse
d'éventuelles contributions des assurés de l'assurance
automobile, de un, et, de deux, qu'il y avait aussi une mesure qui
l'accompagnait, soit 50 000 000 $ de réduction des primes d'assurance
automobile, qui devaient être inclus aussi dans le budget. Donc, deux
mesures: celle de retourner les économies de 1986 par rapport à
1985, retourner ces 50 000 000 $ aux usagers, principalement en ce qui concerne
les véhicules de promenade - donc, les permis et les plaques - et faire
en sorte que le montant de 200 000 000 $, quant à lui, n'affecte pas
d'éventuelles hausses de primes d'assurance automobile. M. Vézina
qui est ici, avec moi, peut le confirmer. C'était la garantie que
j'avais des autorités de la Régie de l'assurance automobile.
C'est comme cela que cela s'est passé.
M. Garon: Je comprends ce que vous me dites là. Mais si on
fait payer les assurés pour l'entretien des chemins, sous le couvert de
la sécurité routière, comme l'entretien de l'asphalte, par
exemple, ce n'est pas à titre d'assurés normalement qu'on devrait
déterminer cela. Un assuré paie un montant fixe pour son permis
et son immatriculation, alors que l'usure est en fonction du millage. Il me
semble que cela devrait être beaucoup plus à l'usager des routes
de payer pour l'entretien des routes parce que, moi, si je fais 100 000 milles
par année avec un camion, à mon avis, je vais payer plus cher
qu'un gars ou une femme qui a un véhicule pour aller à son
travail et qui fait peut-être bien 6000, 7000 ou 10 000 kilomètres
par année. C'est pour cela que je trouve que cela n'est pas normal qu'on
fasse payer les assurés sans tenir compte de l'usage qui est fait par
celui qui est propriétaire ou qui conduit une automobile ou un
camion.
M. Côté (Charlesbourg): I! y a eu d'autres
alternatives d'inventoriées, d'examinées, avant ma rencontre avec
M. Vézina, qui visaient à faire l'inventaire de ce qui pourrait
être adopté comme mesures pour faire tout cela. Ces mesures ne
sont pas toujours très convaincantes. On réussit toujours
difficilement à les asseoir, à bien les identifier, à bien
faire en sorte d'atteindre ce qu'on veut. Cependant, en parallèle de
tout cela, j'ai eu des rencontres avec beaucoup de personnes
préoccupées de sécurité routière et, en
particulier, des représentants des départements de santé
communautaire qui se sont donné comme vocation de réduire le
nombre d'accidents de la route au Québec, au cours des cinq prochaines
années. Dans les discussions que j'ai eues avec eux, ils ont mis
beaucoup d'emphase sur les points noirs, en disant: des points noirs sont
l'objet d'accidents nombreux.
On peut difficilement, compte tenu des systèmes qu'on a
maintenant, bien identifier les points noirs. Dans les rapports de police ou de
ce que nous savons maintenant, on est à un kilomètre près
de l'accident Cela peut arriver. On n'est jamais capable de déterminer
de manière très précise l'endroit exact où
l'accident s'est produit ou de nombreux accidents se sont produits, ce qui
pourrait déterminer que c'est un point noir, compte tenu de la
conception géométrique, compte tenu de toute une série de
mesures ou de comportements qui font que cela devient un point noir. Les
départements de santé communautaire nous ont dit: Vous devriez
investir davantage d'argent pour éliminer ces points noirs et faire en
sorte qu'il y ait moins d'accidents. Ce serait un bon investissement. C'est
comme cela que c'est parti. Des sommes d'argent ont été Investies
au sujet de ces points noirs.
Au ministère des Transports, le sujet des points noirs est tabou.
On demandait des rapports, on demandait où étaient les points
noirs. Personne ne voulait les sortir. Ils étaient cachés quelque
part. Ils disaient: On ne voudrait pas sortir cela, cela pourrait vouloir
signifier tantôt qu'on a fait une mauvaise "job". Il reste que le point
noir est là pareil. On leur a dit: Vous allez sortir les points noirs,
et on va tenter de les corriger au fur et mesure qu'on est capable de le faire.
Avec une plus grande complicité des corps policiers au Québec,
avec une nouvelle formule maintenant quant à l'identification de
l'endroit exact, au pied près où se situe l'accident, on va
être capable de déterminer les correctifs à apporter dans
certains endroits. Comme je l'ai dit tantôt, cela peut être une
erreur de conception, cela peut être parce que cela a été
mal fait, toute une série de problèmes qui, comme ceux-là,
nous mettent dans des situations dangereuses.
C'est vrai pour les points noirs, c'est vrai pour les
téléphones d'urgence sur les routes à la suite de
l'abolition des péages sur les autoroutes 10 et 15. Un sentiment
d'insécurité s'est développé parmi la population.
Auparavant, on se disait: Au moins, au péage, on est sûr qu'il y a
quelqu'un en tout temps, à qui on peut se rapporter, à qui on
peut dire qu'on est en difficulté. Cela donnait une certaine notion de
sécurité. A partir du moment où les péages sont
disparus, on s'est retrouvé dans des situations très
inquiétantes pour les gens. On a commencé à parler de
téléphones d'urgence, à tenter de trouver les meilleures
formules où les gens pourraient emprunter la 15, la 10 en toute
sécurité et, en tout temps, savoir que, à tant de
kilomètres, il y a un téléphone d'urgence raccordé
soit avec la Sûreté du Québec ou avec un autre corps
policier. Il y aura toujours quelqu'un au téléphone pour
être capable de vous venir en aide. C'est un autre élément
qui fait directement appel à la sécurité routière
et qui peut rendre service à la population. Il y en a d'autres.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Vézina.
M. Vézina (Jean-P.): Si vous me permettez, M. le
Président, je vais revenir un peu sur la situation financière et,
pour le bénéfice du député de Lévis, tenter
d'examiner un peu plus pourquoi on en est venu à cette recommandation au
gouvernement. Première chose, il faut distinguer, je pense, les
dépenses courantes d'une année et ce qu'on a mis en
réserve pour faire face à tous les indemnisés dans
l'avenir. Au sujet des dépenses courantes, on s'est retrouvé en
1986 avec une augmentation des revenus beaucoup plus élevée que
ce qui avait été prévu. Le parc a augmenté. Donc,
plus de gens se font immatriculer, plus de gens prennent leurs permis,
d'où une augmentation assez sensible de revenus sur ce plan et aussi sur
le plan des rendements. (16 heures)
À l'heure actuelle, nous avons des taux de rendement nets qui
sont de l'ordre de 7 %, 8 %. C'est du jamais vu. D'habitude les rendements nets
se situent entre 2 % et 3 %, et vous ajoutez l'inflation. Autrement dit,
à ce moment-ci, compte tenu de l'inflation qui est à 4 %, on
devrait normalement avoir des taux d'intérêt autour de 7 % au
maximum. Ce n'est pas ça qu'on a. C'est beaucoup plus
élevé. Donc, aussi, des revenus de placements très
intéressants. Du côté revenu, une augmentation beaucoup
plus élevée que prévu.
Sur le plan des dépenses, l'année 1986 a été
la meilleure année pour la sécurité routière au
Québec si on tient compte, bien sûr, du kilométrage
parcouru et si on tient compte du parc. Si bien que la Régie de
l'assurance automobile a épargné aussi 50 000 000 $ de ce
côté-là, en indemnités parce qu'on a eu moins de
morts, soit 1050 morts au lieu d'environ 1300, et aussi moins de
blessés, soit 8 % moins de blessés. On s'est retrouvé -
alors qu'au début de l'année,- on pensait qu'on se retrouverait
avec un déficit - avec un surplus d'opération même si
on
payait les 60 000 000 $ pour les frais de santé. Nous nous sommes
dit: On devrait tout de suite recommander au gouvernement de baisser les
contributions d'assurance puisqu'il faut faire comprendre aux automobilistes
que la sécurité, c'est payant. Quand ça va mal, on
augmente. Pourquoi lorsque ça va bien, ne diminue-t-on pas? C'est un peu
le principe.
De là, la proposition pour diminuer les contributions de 50 000
000 $ en disant qu'on serait capable de faire face à la musique quand
même. L'année 1987 achève, et je peux vous dire que la
situation financière est encore très saine, même si on paie
63 500 000 $ pour les frais de santé, cette année. Voilà
pour la situation à court terme. C'est la situation qui va continuer
à se répéter d'année en année.
La situation à long terme. On est une compagnie qui s'apparente
bien plus à une compagnie d'assurance-vie qu'à une compagnie
d'assurances générales puisque, effectivement, ce qu'on paie,
c'est du remplacement de revenu dans le temps. Donc, on paie des rentes
d'invalidité. En payant des rentes, il faut mettre les sommes
nécessaires dans une réserve de stabilisation cette année
pour couvrir toutes les indemnités des gens qui ont été
victimes de la route en 1987. De plus, ces montants-là - je vous le
souligne, M. le député - sont indexés chaque année.
On a alors une contrainte additionnelle par rapport aux compagnies
d'assurance-vie. C'est que, non seulement on doit prévoir ce que nos
placements vont rapporter, mais de plus, c'est indexé. Imaginez-vous que
c'est complexe! Quel sera le taux d'inflation dans dix ans, dans quinze ans ou
dans vingt ans? Ce qu'on fait, c'est qu'à la fin de chaque année,
on réétudie la réserve actuarielle et on se demande avec
nos actuaires si les sommes qui sont là sont suffisantes pour faire face
à tous nos engagements futurs. Or, on s'aperçoit, depuis deux ou
trois ans, que l'inflation est beaucoup moins élevée que
prévu; on est autour de 4 %. Quand on prévoit 5 % et qu'on gagne
1 %, c'est 31 000 000 $ qu'on économise. Suivant les critères
économiques, on a besoin de moins d'argent pour faire face à nos
engagements puisque l'inflation augmente moins vite. Par ailleurs, nos
placements, comme je l'ai dit il y a un instant, rapportent nettement
davantage. Si bien que, pour l'année 1986, on a fait un redressement de
la réserve actuarielle de 152 000 000 $, 151 700 000 $ à peu
près. Qu'est-ce que ça veut dire? Cela veut dire qu'on s'est
rendu compte que, compte tenu des critères économiques, on
épargnait 51 000 000 $ juste sur les critères économiques,
et compte tenu aussi des efforts que la régie fait en matière de
réadaptation des blessés. Le secteur privé n'en fait pas,
mais je vous rappelle que le secteur privé paie des forfaitaires. Une
fois qu'un forfaitaire a été payé, on ne revoit pas le
client.
Nous, on est intéressé à ce que le client retourne
sur le marché du travail. Donc, on a développé toute une
série de programmes visant à réadapter les gens. On
s'aperçoit que ces efforts de réadaptation... Quand on prend
quelqu'un qu'on payait 35 000 $ par année, indexés toute sa vie -
c'est 750 000 $ à 800 000 $ qu'on aurait payé - et qu'on
réussit à le mettre sur le marché du travail, c'est 800
000 $ que l'on vient d'épargner.
Le taux de persistance et la gravité des blessures ont diminue de
moitié depuis 1978, dans les véhicules de promenade. Autrement
dit, avec les efforts de réadaptation qu'on fait, on arrive à
remettre des gens sur le marché du travail. Au départ, les
actuaires avaient prévu, selon l'étude de ce qui s'était
passé dans le secteur privé, qu'il y aurait entre 2,5 % et 3 %
des gens qui émargeraient au régime après cinq ans. On
s'en va vers 1,5 % à ce moment-ci. Bien sûr, les cinq
premières années, on ne le sait pas. Mais, la sixième, on
commence à avoir une information Mais là, on a neuf ans. Si bien
qu'on s'aperçoit qu'avec nos efforts, on arrive à diminuer
très sensiblement la gravité des blessures et le nombre des
personnes qui persistent dans le régime. On est allé chercher 58
000 000 $ là-dessus.
Autrement dit nos actuaires disent: On va glisser tranquillement vers 1
500 000 $, il y a 58 000 000 $ dans la réserve dont on n'aura jamais
besoin. Si bien qu'on se retrouvait à la fin de l'année, encore
une fois, avec un redressement de la réserve de 152 000 000 $ et, entre
la réserve de stabilisation et les opérations courantes, il y a
une réserve qu'on appelle de stabilisation. Cela fait le pont entre les
deux. Qu'on ait une réserve de stabilisation de 10 %, cela peut aller,
mais là on était rendu à 658 000 000 $ si ma
mémoire est bonne, 654 000 000 $ de réserve de stabilisation.
Alors, voilà qu'on avait un problème sur les bras, un
problème assez intéressant, j'aime mieux le mien que celui de
certaines régies, mais en tout cas...
M. Garon: Si on arrêtait là.
M. Vézina: Vous me permettez de finir, on va y revenir. On
s'est dit: On a un problème sûrement et ce qu'on peut faire pour
cela, c'est de diminuer les primes, dans l'avenir. Bien sûr, on commence
à le faire, cette année, en baissant de 50 000 000 $.
En même temps, M. le député, vous vous rappelez que
le secteur privé de l'assurance, lorsqu'on a étatisé le
régime d'assurances - vous l'avez rappelé il y a un instant -
disait: Ce n'est pas comparable, vous ne payez pas les services de
santé. Il y a une décision gouvernementale de 1985 qui dit: La
régie devra payer. Mais, de plus en plus, on nous
répétait: Vous n'avez pas payé pour les années
depuis 1978. Nous, on s'est dit: Effectivement, il y a quelqu'un qui va nous
réclamer cette facture à un moment donné et on peut
très bien prendre 200 000 000 $ dans la réserve de stabilisation
et l'affecter à des
immobilisations en matière de sécurité
routière. Là, c'est sûr que cela profitera aux
automobilistes.
Tandis que si, à la suite d'une décision gouvernementale,
à un moment donné, on vient chercher 200 000 000 $ et qu'on
l'envoie dans le fonds consolidé, ce n'est pas sûr du tout que
cela va profiter aux automobilistes. Entre nous, les 60 000 000 $, ce sont les
frais de santé; en principe, ils sont pour des coûts de
santé, mais si on donnait 200 000 000 $ dans le fonds consolidé,
il n'est pas sûr que... On s'est dit: On serait bien mieux de prendre les
devants; on va s'organiser pour que cela ait un effet très minime sur
notre réserve de stabilisation parce qu'on s'est engagé à
verser 200 000 000 $ chaque année budgétaire du gouvernement,
mais en ce qui concerne la régie, cela a un effet pour trois ans, car on
n'a pas la même année financière. Alors donc, on paie 50
000 000 $ en 1987, 75 000 000 $ en 1988 sur l'année financière et
le reste sur l'année... C'est une répartition sur trois ans et
cela va très peu affecter la réserve de stabilisation. Encore une
fois, cette année, on va augmenter la réserve de stabilisation
parce qu'on continue dans la même traînée quant à
l'effet des critères économiques et de la gravité des
blessures.
Alors, voilà pourquoi on a recommandé cela. Je ne sais pas
si cela éclaire le débat mais...
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Lévis.
M. Garon: Vous dites au fond que vous avez épargné
de l'argent à l'administration, je comprends. Moi, j'ai vu quelqu'un,
comprenez-vous, qui est venu à mon bureau, qui s'est fait couper les
deux jambes par une automobile. Là, vous lui dites: Tu peux avoir des
grandes prothèses ou des petites, choisis. Mais tu ne peux pas avoir les
deux. Le gars, quand il est dans la maison chez lui... On me dit que, lui, il
se promène avec de grandes prothèses... S'il avait de petits
bottillons qui se mettent à partir des genoux, cela serait plus pratique
pour monter les escaliers que d'avoir de grandes prothèses. Moi, je vous
dis ce qu'on m'a dit: cela a été refusé. Il a le droit
à une, il choisit.
Après cela, au bout de cinq ans, vous avez des gens à qui
vous ne payez plus le même montant.
M. Vézina: Ce n'est pas moi qui vous dis cela.
M. Garon: Oui, je comprends, mais vous présumez que le
gars a un job. Moi, j'ai vu des gens à qui on a dit: Vous pourriez
toujours être gardien de terrain de stationnement. C'est
théorique, car vous savez que, dans la région de Québec,
les gardiens de stationnement, cela ne pleut pas. On ne peut dire à 5000
personnes d'être gardiens de stationnement. Si vous étiez gardien
de stationnement vous auriez 13 000 S par année, on devrait vous payer
18 000 $, donc, on vous paie la différence de 5000 $. Sauf que des
terrains de stationnement payants, il n'y en a pas dans mon comté. Je
n'en connais pas. Ce sont tous des stationnements non payants, où il n'y
a pas de gardien. Si un gars vit à Saint-Philémon de Bellechasse,
à moins qu'il ne déménage à Montréal pour
être gardien de stationnement, il ne gardera rien. C'est là qu'on
économise, c'est une faute enfin... On économise mais en faisant
crever des gens, à toutes fins utiles, qui n'ont pas la
possibilité de se trouver un emploi dans ce domaine.
M. Côté (Charlesbourg): Si le député
de Lévis me permet. Je pense que c'est un cas, en partie du moins, qu'il
avait soulevé lorsqu'on a eu l'avant-projet de loi en commission
parlemen-tair et qui fait appel à la Loi sur l'assurance automobile,
quant aux critères d'indemnisation des victimes et au remplacement ou
à la fourniture d'un certain nombre de besoins de
l'accidenté.
M. Garon: Mais c'est ce qu'il dit qu'il fait. M.
Côté (Charlesbourg): Non, non.
M. Garon: Le président vient de nous dire qu'il
économise de l'argent.
M. Côté (Charlesbourg): Non. Ce n'est pas
là-dessus.
M. Garon: Le critère économique, c'est quoi?
M. Côté (Charlesbourg): Ce n'est pas
là-dessus, il faut faire attention.
M. Garon: On économise de l'argent dans
l'administration.
M. Côté (Charlesbourg): Au-delà des
débats politiques, je pense que le député de Lévis
est capable de comprendre. D'abord, on va l'avoir le débat
là.
À la suite de l'avant-projet de loi qu'on a déposé,
qu'on a étudié ensemble en commission parlementaire, là
où l'on a rencontré les parties tel que convenu, j'envisage la
possibilité de déposer avant les fêtes le projet de loi
à l'Assemblée nationale, modifié en tenant compte de la
commission parlementaire. Vous allez voir qu'il y a un certain nombre de choses
qui ont été retenues à ce moment-là, on a pris en
considération des ajustements à la Loi sur l'assurance
automobile. Je pense que la régie est toujours ouverte pour bonifier un
certain nombre de choses, il n'y a pas de problèmes. Dire que l'argent
qui a été économisé sur le plan administratif, l'a
été dans ce sens-là, c'est faux, parce que c'est la loi
actuelle qui est administrée à
partir de ce qu'on a dedans. À partir du moment où elle
aura été changée, elle sera plus généreuse
ou elle sera moins généreuse, selon la volonté du
législateur de la changer, et, à ce moment-là, cela
s'appliquera. Mais ce n'est pas en appliquant, de la manière la plus
rigide, la Loi sur l'assurance automobile qu'il y a de cet argent-là qui
a été économisé.
Il y a de l'argent qui a été économisé...
Non, non...
M. Garon: C'est cela que les gens nous disent dans nos
comtés.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, mais cela, c'est un
autre débat. Il faut faire attention. Il y a M. Mongrain, aussi,
à Sherbrooke, qui dit bien des affaires qu'il ne connaît pas.
Cela, ça fait partie d'un autre débat, quand quelqu'un peut, de
manière très démagogique charroyer des dossiers...
M. Garon: C'est vrai ce que je vous dis, si, au bout de cinq ans,
on dit à quelqu'un: Si vous étiez gardien d'un terrain de
stationnement, vous gagneriez tant.
M. Côté (Charlesbourg): Oui?
M. Garon: Sauf qu'il n'y en a pas de terrain de stationnement
à garder.
M. Côté (Charlesbourg): Je comprends le point du
député de Lévis. Ce que je lui dis, c'est que,
actuellement, la régie n'a pas d'autre choix que d'appliquer la loi qui
est là.
M. Garon: La loi ne dit pas de faire cela.
M. Côté {Charlesbourg): Non, non. La loi ou les
règlements qui en découlent. Je pense que les gens de la
régie l'on dit à tous les groupes qu'on a rencontrés, ici,
aux groupes qu'on a rencontrés, soit à l'aide juridique, par la
suite, tel qu'on s'était engagé, soit au Barreau, et à Mme
Dolment qui représentait le RAIF. On s'est expliqué. On s'est
donné des explications, et ils ont été à même
de constater que les gens de la Régie de l'assurance automobile ont
appliqué la loi et les règlements et qu'ils tentent de les
appliquer au meilleur de leurs connaissances. On a expliqué aussi qu'on
avait besoin d'un certain nombre de bonifications pour être capable,
finalement, d'en donner un peu plus à ceux qui sont victimes de cela, et
que, s'il y a d'autres situations de ce genre, on est loin d'être
fermé à ce qu'on puisse faire certaines modifications. Moi, je
suis très ouvert à cela, qu'on en retourne davantage à
celui qui est victime. Il en a déjà assez d'être la victime
d'un accident de la route pour qu'on ne le prive pas de ce que la loi lui
permet. Je ne crois pas que ce soit ce que la régie fasse, mais il y a
des cas, effectivement... Vous allez voir, lorsque vous allez revoir le projet
de loi, vous allez vous apercevoir que cela a été une commission
parlementaire qui nous a permis de faire un pas en avant très important
dans la reconnaissance de certains droits à des individus. C'est un
débat, cela, qu'on pourra facilement avoir au moment où l'on
abordera la Loi sur l'assurance automobile, lorsqu'on l'étudiera. C'est
un cas qui relève davantage de cela.
Voici ce que la régie dit: Nous avons fait des économies
sur le plan administratif, parce que nous avons fait des choix de
réhabilitation de personnes, au lieu de considérer qu'on les
payait à vie, et cela, pour le plus grand bénéfice de la
personne, elle-même, qui doit se sentir beaucoup mieux dans sa peau, une
fois réhabilitée, que d'être dépendante du
Régime d'assurance automobile pendant toute sa vie. Cela, on peut dire
que c'est une décision administrative de la régie, qui a
rapporté des dividendes et qui a fait en sorte que, sur le plan
financier, la régie a fait des gains.
L'autre geste, sur le plan administratif, qui a rapporté des
dividendes à la régie, ce sont ses placements, en étant
davantage présente ou en insistant auprès de la Caisse de
dépôt pour que l'argent de la Régie de l'assurance
automobile soit mieux placé et rapporte davantage. Cela, c'est un autre
élément. Sans contredit, il y a un troisième
élément très important. Lorsqu'on dit: 24 % de moins
d'accidents en 1986 qu'en 1985, cela témoigne très nettement. Et
cela, ces 50 000 000 $, on les a pris et on les a retournés directement
aux usagers en disant: Voici, c'est dû à votre comportement, il y
a eu moins d'accidents, c'est à vous qu'on le retourne. Et il n'est pas
retourné, dans la mesure où cela se maintient, pour qu'on
retourne le chercher. Si le bilan routier se maintient, cela va se maintenir.
Pour faire comprendre à l'individu que, si les accidents augmentent,
cela va monter. Si cela baisse, cela va baisser. Moi, je suis encore prêt
cette année, dans la mesure où l'on peut en arriver à
boucler l'année avec encore une baisse du taux des accidents, à
encore le retourner aux usagers. Cela m'apparaît être très
important.
Maintenant, le débat de fond. Si j'ai bien compris les propos du
député de Lévis, lorsqu'il a abordé la question en
deuxième lecture, il a dit: Vous auriez pu avoir fait un choix autre que
celui-là. Les 100 000 000 $ ou les 200 000 00 $, vous auriez pu
décider de les retourner à l'usager sous d'autres formes ou aller
chercher ailleurs l'argent que vous vouliez avoir pour les routes sur le plan
de la sécurité routière. (16 h 15)
C'est vrai. C'est un choix que, finalement, le gouvernement a fait,
conseillé par la Régie de l'assurance automobile. Ce qu'il ne
faudra jamais perdre de vue, c'est que les 200 000 000 $ ne sont pas
récurrents, alors que toute mesure qui vise à baisser les primes,
elle, est récurrente dans le temps. Les 200 000 000 $, eux, sont
étalés sur trois ans: 50 000 000 $, 75 000 000 $ et 75 000 000 $,
et cela n'a pas d'effet de
récurrence. C'est cela finalement le dilemme qui nous a
été posé à un certain moment donné. On l'a
fait récurrent, lorsque les accidents, eux, qui ont des effets
récurrents, ont baissé, alors que, pour la réserve de
stabilisation, elle, à la suite des recommandations, des analyses des
actuaires et à la recommandation du conseil d'administration de la
Régie de l'assurance automobile par l'entremise de M. Vézina,
cela nous est apparu être un choix que le gouvernement pouvait faire. Et
on l'a fait à ce moment-là. Il peut être discutable, c'est
clair, et c'est le rôle de chacun de discuter, mais c'est un choix qu'on
a fait.
M. Garon: Sauf qu'il y a l'affaire de dire aux gens après
cinq ans... Je ne sais pas ce que c'est la réhabilitation dont on parle,
mais, s'il s'agit de dire à quelqu'un au bout de cinq ans: Tu pourrais
garder un terrain de stationnement, il n'y a pas de réhabilitation
là-dedans, sauf qu'on vient de sauver 13 000 $ ou 12 000 $ selon qu'on
évalue le salaire d'un gardien de terrain de stationnement à 12
000 $ ou à 13 000 $.
M. Vézina: Mais, M. le député, la loi dit
que la régie doit remplacer le revenu d'un individu qui n'est apte
durant les premiers cinq ans à occuper l'emploi qu'il occupait au moment
de l'accident. Après cinq ans, la loi nous oblige à examiner si
l'individu est apte à occuper un emploi, peu importe lequel. On n'a,
nous, aucunement la responsabilité de trouver un emploi à un
individu. Ce qu'on essaie de voir - ce sont les médecins qui
déterminent cela - à partir d'une classification
fédérale des emplois, c'est, effectivement, compte tenu de ce qui
lui reste comme capacité physique ou capacité intellectuelle, de
savoir s'il est apte à quelque emploi que ce soit. Ce n'est pas comme
vous dites, s'il est apte à un emploi de gardien de stationnement et
puis qu'il n'y en a pas dans la région. On ne prétend jamais
cela. On essaie de voir s'il pourrait effectivement obtenir un emploi du type
de gardien de stationnement tout simplement et on fait la différence de
revenu. Ce qu'on propose dans le prochain projet de loi, c'est, en plus, de lui
donner un temps de réadaptation entre les deux. Alors, il n'y a jamais
personne qui prétend que quelqu'un peut faire telle ou telle job. Ce
n'est jamais comme ça que cela se passe.
M. Garon: Non, mais on assiste à cela comme tendance
depuis quelque temps. Il y a deux organismes qui font cela, la CSST et la
Régie de l'assurance automobile. Alors ce sont des emplois
théoriques. Si on voulait être plus malin, on pourrait dire que
quelqu'un est apte à être astronaute, mais cela voudrait dire
quoi. Pour faire des expériences? Dans les voyages
interplanétaires, il pourrait servir de cobaye, cela rapporterait tant.
Il pourrait donner du sang. En Haïti, les gens donnent du sang pour 50 $
chaque fois, mais ils ne doivent plus en donner maintenant avec les
problèmes récents de la qualité du sang. Mais, quand vous
dites à quelqu'un, dans un endroit où il n'y a pas de terrains de
stationnement, qu'il serait apte à être gardien de stationnement,
c'est théorique, c'est comme si vous disiez, par exemple, qu'il pourrait
être garçon d'ascenseur dans Bellechasse. Je ne connais pas
d'édifices qui aient des ascenseurs dans Bellechasse. Cela ne veut rien
dire au fond.
M. Vézina: M. le député, encore une
fois...
M. Garon: C'est cela que je veux dire, on fait
référence à des emplois qui sont impossibles à
trouver dans...
M. Vézina: M. le député, encore une fois, ce
n'est pas tellement l'emploi, c'est la capacité à occuper quelque
chose d'un emploi. C'est sûr qu'on ne dira pas à un gars de
Montréal qu'il est apte à être pêcheur, parce que, de
la pêche en haute mer, il n'y en a pas beaucoup à Montréal.
On tente effectivement de déterminer un emploi qui, dans une
région donnée, existe. Il peut arriver des circonstances, comme
l'exemple du terrain de stationnement, où cela ne se prête pas
dans une localité donnée. Ce n'est pas tellement le type
d'emploi, c'est la capacité d'un individu à occuper un emploi.
Autrement, le choix qu'on a, c'est de payer sa vie durant.
M. Côté (Charlesbourg): D'accord. Je sais que le
député de Lévis est un gars de terrain. Je l'ai
croisé assez souvent sur le terrain, en particulier - cela lui
rappellera des souvenirs - dans Mégantic-Compton, lors de la
première partielle en 1980. Puis, je sais que c'est un gars qui aime
aller au fond des choses pour savoir ce qui se passe. Moi, je peux vous lancer
une invitation. Votre individu de Lévis, dans la mesure où il
serait possible d'obtenir de lui l'autorisation d'avoir accès à
son dossier, on va partir tous les deux, puis on ira à la Régie
de l'assurance automobile avec ce cas-là, puis on le passera à
l'intérieur de la Régie de l'assurance automobile pour voir
comment cela se passe, comment cela se fait. Moi, je suis très ouvert
à cela et je pense qu'en l'illustrant d'un cas ou de deux, ou de trois,
il n'y a pas de problème là-dedans, dans la mesure où cela
ne brime pas le droit d'un individu.
M. Garon: Dans les petites bottes dont je vous parlais.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, moi, je suis prêt
à cela.
M. Garon: II a droit à une prothèse, pas deux.
M. Vézina: À n'importe quel temps.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, après cela,
on
va aller le voir et si, effectivement, dans ces cas-là, il y a
des réajustements à faire, étant donné un cas bien
précis qui pourrait avoir des répercussions sur d'autres, je suis
très ouvert à cela. Je suis prêt à le faire.
Finalement, c'est peut-être la meilleure chose à faire que d'aller
voir dans la machine comme cela se passe avec un cas. Il n'y aucun
problème de ce côté-là.
Si on découvre effectivement qu'il y a des choses qui se passent,
non pas de mauvaise foi, car cela pourrait être de mauvaise foi, et qui
ne sont pas correctes, compte tenu de ce qu'on a à faire, je ne demande
pas mieux que de réajuster les choses. Je suis prêt à faire
cela avec le député de Lévis, n'importe quand.
M. Vézina: Et vous avez tout mon appui, M. le
ministre.
M. Garon: Je vois deux cas précis. Je suis
intéressé et j'accepte l'offre. Ce sont deux cas précis
qui, je pense, permettent d'épargner beaucoup d'argent. Je serais
prêt à aller au fond des choses avec le ministre et le
président de la régie pour le bénéfice de ces
personnes-là.
M. Côté (Charlesbourg): Et peut-être aussi
d'autres qui sont dans la même situation. Ce qu'il faut voir
là-dedans, c'est que, d'abord, il n'est pas facile de connaître
tous les méandres de l'application d'une telle loi ou des
règlements qui en découlent. Je l'ai vécu depuis
maintenant deux ans que j'essaie d'en apprendre le plus possible, et je
comprends l'individu qui, à l'autre bout, a peut-être des
interprétations différentes, compte tenu des informations qu'il
reçoit, ou qui vit des situations passablement difficiles.
J'ai encore fraîche à la mémoire une intervention
d'un individu qui se plaignait du fait que celui qui avait occasionné la
mort de son épouse était presque mieux traité qu'il ne
l'était, lui, pour son épouse. On s'est dit que des gestes
criminels étaient posés à certains égards et qu'on
devrait peut-être regarder un niveau plus appréciable, plus
élevé d'intervention ou de poursuites éventuelles, compte
tenu de la gravité des délits. En tout cas, il y a de bonnes
chances qu'on retrouve des choses à ce sujet, au moment où on se
reverra pour la Loi sur l'assurance automobile. Ce sont des choses auxquelles,
si on n'avait pas tenu de commission parlementaire pour l'avant-projet de loi,
on aurait peut-être été un peu moins sensibilisé.
D'autres phénomènes qui nous ont été
démontrés ici ont été retenus, et ils auront leur
application.
Si, dans une expérience comme celle-là, on trouve autre
chose, je n'ai jamais, depuis deux ans que je suis là, vu une
fermeté de la part de la Régie de l'assurance automobile à
vouloir régler des dossiers. J'ai frais à la mémoire un
cas en particulier d'un individu de la rive sud de Montréal qui m'a
écrit pour se plaindre du traitement tout à fait horrible que lui
a fait la Régie de l'assurance automobile. Ce que j'ai fait, et ce
n'était pas selon les règles normales, j'ai convoqué le
vice-président à la réadaptation de la régie
à mon bureau et j'ai fait venir l'individu. Il est arrivé presque
avec sa porte d'auto de l'accident, un carcan au cou et toute une
démonstration très très évidente. On a mis beaucoup
de bonne foi pour tenter de voir ce qu'on pouvait faire pour voir si,
effectivement, il y avait des injustices. On a tout fait. On a tout fait pour
tenter de lui donner satisfaction. On n'a pas réussi à lui donner
satisfaction parce que, parfois, c'est impossible. C'était impossible,
étant donné la loi et aussi les limites du système. C'est
un peu cela qu'il faut comprendre. La personne qui est venue nous rencontrer
l'a fait de bonne foi et elle ne voulait pas nécessairement abuser
elle-même du système, mais elle avait la conviction profonde
qu'elle avait été lésée dans ses droits et qu'il y
avait une incompréhension, malgré le fait que cette personne
avait pu passer devant 20 médecins. Je suis convaincu que, avec
l'expérience que vous avez vécue au pouvoir durant neuf ans, vous
en avez vécu de ces cas-là. Il y a des choses qui ne peuvent pas
se régler, parce que l'espoir est beaucoup trop grand par rapport
à ce qui peut être donné, compte tenu des textes
législatifs.
Au-delà de cela, j'ai à m'assurer que les gens de la
Régie de l'assurance automobile les appliquent de manière
conforme à l'esprit de la loi et des règlements. S'il y a des
choses, au chapitre des lois et des règlements, qui sont
inadéquates, à ce moment-là, c'est à l'homme
politique de prendre ses décisions et d'apporter des corrections, avec
les conseils, bien sûr, des gens de la régie pour en voir toutes
les implications. On en a fait six à l'avant-projet de loi.
Là-dessus, ce n'était pas majeur, on l'avait dit, comme
réforme, mais, au moins, il fallait régler un certain nombre de
problèmes et d'irritants qu'il y avait. S'il y en a d'autres, on va les
régler. Soyez sûrs que vous allez avoir mon concours pour
être capables de les régler. C'est peut-être par ces cas
d'individus, en cheminant à l'intérieur de la boite, qu'on va
être capable de voir si, effectivement, ils ont été bien
traités ou mal traités.
M. Garon: Je veux bien croire que c'est la meilleure
manière: de vérifier des cas avec des faits. La loi est
théorique, les règlements sont souvent pensés pour
économiser. Mais les gens qui se sont assurés sont souvent mal
pris, une fois qu'ils ont eu un accident, ils sont vraiment mal pris. Quand on
fait des projets, il faut imaginer le plus de scénarios d'accidents ou
d'hypothèses possible, mais on ne peut pas toujours tous les imaginer.
Avec l'expérience des années, on peut - je suis d'accord avec le
ministre là-dessus - revoir d'abord les règlements, parce que
c'est plus facile, et les articles de loi en conséquence.
Alors, je vais faire relever les cas en question. Je suis content de
cela, parce que, pour
les cas précis qu'on m'a mentionnés, on m'a dit que, selon
le règlement, on n'avait pas droit à plus d'une prothèse.
Ça, c'est une économie, mais j'imagine quelqu'un à qui il
ne reste qu'une partie des deux jambes mettre le gros "kit" tout le temps,
alors qu'il est assis, je suppose, dans le salon. Ce doit être fatigant
d'avoir une grosse prothèse au complet et, quand il doit aller aux
toilettes, s'il lui faut mettre un gros "kit" à chaque fois et
l'enlever, cela peut être pénible, alors qu'une prothèse
additionnelle pour les petits déplacements à l'intérieur
pourrait faire l'affaire. C'est un cas dont je parlais tantôt. Ce qu'on
m'a dit à ce moment-là, c'est qu'on refuse deux
prothèses.
M. Côté (Charlesbourg): Pour être bien
sûr qu'on puisse sortir le dossier comme il faut, avec l'autorisation de
l'individu, j'imagine que, s'il est allé vous voir, c'est qu'il vous
donnait automatiquement l'autorisation de vérifier son dossier.
M. Garon: C'est-à-dire d'écrire et de faire des
représentations en son nom.
M. Côté (Charlesbourg): II n'y a aucun
problème. À partir du moment où on peut l'avoir, si on
peut trouver du temps avant les fêtes pour aller à la
régie, on va y aller avant les fêtes, sinon dès la
première journée de janvier. S'il le faut, on ira un samedi. Vous
êtes habitué à des semaines de travail de plus de cinq
jours.
M. Garon: Oui, je suis habitué à sept jours.
M. Côté (Charlesbourg): J'ai connu les semaines de
travail de l'ex-ministre de l'Agriculture et je suis nettement convaincu que ce
n'était pas cinq jours, ni six jours, ni six jours et demi, mais
davantage sept jours.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Montmagny-L'lslet.
M. Gauvin: J'aimerais juste ajouter quelque chose pour,
peut-être, l'expliquer au député de Lévis. C'est que
j'ai dans mon comté un problème de petites bottes et de grosses
bottes, mais avec la Régie de l'assurance-maladie. C'est la règle
qui s'applique, apparemment, à tout le monde qu'on a essayé
d'aider. Je pense qu'il n'y a pas seulement qu'à la Régie de
l'assurance automobile, et cela nous Intéresse drôlement de voir
ce qui se passe dans le cas dont vous parlez.
M. Garon: Moi, ce qu'on m'a dit, et c'est l'expérience
dans le comté, c'est que, de plus en plus, la Régie de
l'assurance automobile et la CSST ont tendance à appliquer les
mêmes critères et à s'orienter vers la même
administration de leur loi, à des fins d'économie.
M. Côté (Charlesbourg): Moi, en tout cas...
M. Garon: Là, je vous le dis.
M. Côté (Charlesbourg): Moi, je peux vous dire une
chose, c'est qu'effectivement, dans l'avant-projet de loi, nous avons dû
avoir des négociations avec la CSST. Avec les nouvelles dispositions qui
vont venir du projet de loi qui sera déposé, avec la CSST et avec
la Régie de l'assurance automobile du Québec, je peux vous dire
qu'il y a des choses qui ne peuvent pas s'harmoniser et qui ne s'harmoniseront
pas non plus avec elle. Dans des cas comme ceux-là, de bottines, de
petites et de grosses bottines ou de petite et de grosse prothèse, il y
a peut-être un lien avec la Régie de l'assurance-maladie du
Québec, et il y a moyen de leur parier et d'harmoniser nos choses, non
pas au détriment de ceux qui en ont besoin, mais avec des
critères qui vont tenir compte davantage du cas de chacun des individus.
Je pense que ce sont des choses qui peuvent être définitivement
réglées, mais on va le voir à l'usure du cas et à
l'usage, lorsqu'on pourra l'examiner. Je suis convaincu que cela peut
être très instructif pour tout le monde. S'il y a des
réajustements à faire, on va les faire.
M. Garon: Est-ce, qu'il y a eu des directives à ces
organismes à des fins d'économie, soit du ministre, soit du
Trésor? Parfois, le Trésor donne ses directives directement au
niveau de l'administration et le ministre ne l'apprend que plus tard.
M. Côté (Charlesbourg): Non, dans ce cas-ci, le
Trésor est bien informé que, pour ce qui est sous la
responsabilité du ministre des Transports, c'est au ministre des
Transports qu'il doit donner les directives. (16 h 30)
M. Garon: II pouvait y avoir les mêmes directives, mais,
des fois, il s'essayait pareil. C'est pour cela que je demande s'il s'est
essayé.
M. Côté (Charlesbourg): Non, ils me connaissent
très bien au Trésor et ils n'ont pas osé essayer. Dans ce
cas-là, cela a toujours été très clair. M.
Vézina peut vous le confirmer lui-même, en aucune manière
dans l'administration de la Régie de l'assurance automobile, le ministre
n'est intervenu. Le ministre actuel a eu comme politique de rencontrer
régulièrement le président, M. Vézina, et de faire
le tour des dossiers, chez lui, dans tous les cas. Lorsqu'on s'est
rencontré en janvier 1986 pour la première fois, un certain
nombre de dossiers ont été mis sur la table. Il y avait des
priorités, selon l'évaluation qu'en avaient faite M.
Vézina et le conseil d'administration. J'ai dit: Parfait, on va
s'embarquer là-dedans, on va travailler. Faites-moi des recommandations
et je vous dirai si je suis capable de vivre avec sur le plan politique et de
les défendre auprès de mes collègues pour que cela
devienne loi ou règlement.
Depuis ce temps-là, c'est à un rythme presque infernal
qu'on règle des dossiers, toujours sur des propositions venant du
conseil d'administration de la Régie de l'assurance automobile et
vérifiées auprès de moi. Dans la mesure où c'est
oui, c'est oui, dans la mesure où c'est non, c'est non, avec des axes
d'orientation ou de recherche sur des solutions qui tantôt me plaisent,
tantôt ne me plaisent pas, mais qu'il faut faire. À partir du
moment où on s'est entendu et qu'on passe, je ne suis intervenu en
aucune manière dans l'administration. Ce n'est pas mon intention
d'intervenir non plus, parce qu'il y a là des gens qui sont
responsables. À l'occasion, lorsque des gens me transmettent des cas qui
relèvent de l'administration, ils sont toujours dirigés à
la régie pour recevoir l'information. Dans mon cas, il n'y a jamais eu
de directive sur ce plan. Ils sont assez grands pour faire leur administration.
S'il la font mal, ils se feront cogner sur les doigts; s'ils la font bien, il
faudra leur dire qu'ils la font bien. Jusqu'à maintenant, ils la font
bien. C'est comme cela qu'on a fonctionné. M. Vézina est bien
libre de vous dire ce qu'il en pense, son vécu. C'est comme cela que
cela se passe.
M. Vézina: C'est un fait.
M. Garon: Est-ce qu'il y a eu des demandes, à quelque
niveau que ce soit, d'harmonisation de l'application des lois de la
Régie de l'assurance automobile et de la CSST - parce que, dans un cas,
il s'agit d'accidents du travail et, dans l'autre, d'accidents d'automobile -
ou pour que, dans les mesures de réparation de dommages ou de
rémunération des gens qui sont victimes soit d'accidents du
travail, soit d'accidents d'automobile, il y ait harmonisation dans la
façon d'administrer ces lois?
M. Côté (Charlesbourg): D'abord, vous vous
souviendrez de l'adoption de la loi 42, sous votre gouvernement, qui
était la nouvelle loi de la CSST, celle qui a arbitré un certain
nombre de dossiers qui étaient en litige. C'est toujours cette loi qui
s'applique à la CSST et qui a tranché un certain nombre de
débats. Lorsqu'on a introduit l'avant-projet de loi dans les
différents comités ministériels pour discussion,
effectivement, il y a eu des questions. La manière dont cela fonctionne,
c'est que les secrétariats analysent les propositions que les ministres
font et, à l'occasion, font des suggestions qui sont discutées
autour d'une table de comité ministériel avant d'en arriver
à les proposer au Conseil des ministres pour adoption et, par la suite,
sur le plan législatif, au comité de législation.
Il y a eu des discussions, en particulier, de la part de mon
collègue Pierre Paradis, qui, lui, a la responsbilité de la CSST,
soit une proposition de faire le maximum d'efforts pour qu'il y ait
harmonisation entre - du moins si c'était possible - la CSST et la
Régie de l'assurance automobile. Un certain travail a été
fait de ce côté-là, de la même manière qu'on a
demandé de le faire à la Régie de l'assurance-maladie du
Québec. On a fait un certain cheminement. Il y a eu des rencontres. Il y
a eu des rencontres avec la Régie de l'assurance-maladie du
Québec. On me dit que, dans la nouvelle version du projet de loi qui
sera déposé, à peu près tout est arrimé avec
la Régie des rentes du Québec, et qu'au niveau de la CSST, il y a
des choses incompatibles et qui ne seront jamais compatibles. Dans la mesure
où des choses peuvent être compatibles, il est souhaitable et
normal que les interventions de l'un et de l'autre puissent se faire à
partir d'à peu près les mêmes critères. Quant
à n'être pas compatible, il y a des choses qui, effectivement, ne
le sont pas et ne le seront jamais. C'est dans ce contexte que cela s'est
passé. Il y a des réunions assez régulières entre
la CSST, la Régie de l'assurance automobile et la Régie des
rentes.
M. Garon: Depuis longtemps?
M. Côté (Charlesbourg): Écoutez, à
tout le moins depuis que j'ai rencontré M. Vézina en janvier
1986. Il m'avait dit à l'époque qu'il y avait deux dossiers
extrêmement importants auxquels la régie tenait. C'était le
Code de la sécurité routière, version un et version deux:
soit, premièrement, les délits causés par l'alcool,
deuxièmement le code au complet. Et, par la suite, il y aurait certains
ajustements à la Loi sur l'assurance automobile. J'avais donné
mes priorités. Quant à moi, c'était effectivement de
régler le code un et le code deux, et, par la suite, entamer le travail
concernant l'assurance automobile. C'est particulièrement depuis qu'on a
présenté l'avant-projet de loi devant les comités
ministériels, qu'il y en a. J'imagine qu'il devait y en avoir auparavant
aussi.
M. Vézina: M. le ministre, je suis là depuis
novembre 1983. Il y a eu, je pense, plusieurs directives de tenter
d'harmoniser, sous l'ex-gouvernement comme sous celui-ci. Chaque fois, on a
tenté de faire un bout de chemin. Avec 42, d'une certaine façon,
on s'est éloigné. Là, on tente de se rapprocher. Mais il y
a des choses, comme disait M. le ministre, qui ne pourront jamais être
harmonisées. Nous, nous couvrons l'ensemble des gens de la
société, pas seulement ceux qui travaillent, mais aussi les
personnes âgées comme les jeunes. Alors, il y a des choses qui ne
s'harmoniseront jamais. Cela dit, on fait le maximum pour tenter de
s'harmoniser. Il faut dire aussi que la situation financière des uns et
des autres n'est pas pareille.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions?
M. Garon: C'est parce que, dans la Loi sur
les accidents du travail, on paie beaucoup moins au Québec qu'en
Ontario aussi. Malgré tout ce qu'avaient dit les libéraux dans
l'Opposition, le document de mars 1986 démontre qu'au Québec on
paie considérablement moins qu'en Ontario, qu'on payait moins qu'en
Ontario pour les accidents du travail.
M. Côté (Charlesbourg): À la CSST?
M. Garon: Oui. Par 100 $ de salaire, en Ontario, on payait 2,75
$, au Québec, à peu près 2,04 $ ou quelque chose comme
ça.
M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, il y a des
signes très heureux. On a vu dans les journaux...
M. Garon: Mais là, vous allez rattraper le terrain, parce
que vous avez augmenté les tarifs de la CSST considérablement
depuis deux ans.
M. Côté (Charlesbourg): Moi, ce que J'ai compris des
entrepreneurs que j'ai rencontrés avant il y a deux ans, c'est qu'ils se
plaignaient déjà que les tarifs étaient... La grille
tarifaire avait été si suffisamment généreuse
à leur égard que plusieurs d'entre eux étaient en
difficulté financière.
M. Garon: Vous les avez augmentés pas mal pareil.
M. Côté (Charlesbourg): Écoutez
là...
M. Garon: Vous êtes en train de rattraper l'Ontario.
M. Côté (Charlesbourg): II y a une chose qui est
certaine, c'est qu'à partir du moment où il y a un déficit
de la nature de celui de la CSST... À part de cela, ce ne sont pas nos
affaires. Vous m'amenez sur un terrain qui dépend davantage de mon
collègue et qui est une responsabilité ministérielle aussi
du gouvernement. Mais, quant à moi, je suis très heureux d'avoir
la responsabilité de la Régie de l'assurance automobile qui,
comme vous pouvez le constater, a un bilan tout à fait impressionnant
quant à sa gestion.
M. Garon: Non, mais ce qui peut arriver, par exemple, c'est que
le premier ministre, voyant que vous pouvez verser des 100 000 000 $ comme
ça au Trésor, peut vous donner la responsabilité de la
CSST pour que vous essayiez de faire la même chose.
M. Côté (Charlesbourg): Mon collègue, M.
Paradis, s'occupe de ça de manière admirable, et
déjà, ce qu'on a vu dans les journaux cette semaine et la semaine
dernière présage d'une situation qui méritait d'être
redressée. On parle maintenant d'un déficit qui aurait
diminué de 175 000 000 $ ou 300 000 000 $. Je pense que c'est assez
appréciable.
M. Garon: II faudrait que vous lisiez le dernier rapport du
Vérificateur général qui vient de sortir aujourd'hui pour
l'année qui se termine le 31 mars 1987. Il dit le contraire à la
page 59.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, mais il portait
peut-être un jugement sur bien des années antérieures.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Garon: Non, non, c'est en cours, l'année 1986-1987
comparée à l'année précédente.
M. Côté (Charlesbourg): Mais une chose est certaine,
c'est qu'il y a eu du travail de fait. Et, selon ce qui a été dit
dans les journaux dernièrement quant à la résorption du
déficit de la CSST, il y a quand même un pas en avant et dans la
bonne direction. C'est davantage de ça dont on doit se réjouir.
C'est dans la bonne direction.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le
député de Saint-Hyacinthe, sur le projet de loi 62.
M. Messier: Oui, et aussi au nom de la CSST.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous cède la
parole.
M. Messier: Je voudrais juste témoigner. J'ai
été dix ans à la Commission de la santé et de
sécurité du travail, et, effectivement, avant décembre
1985, les employeurs contestaient leur taux de cotisation, qui était
très élevé. À ce chapitre, les employeurs se sont
toujours plaints des taux de cotisation. Ils sont plus hauts maintenant, mais
il faut rattraper le déficit qui a été encouru sous votre
gouverne. Pour en revenir au projet de loi 62, je pense que cela prend de
grands principes d'harmonisation, et laissez-moi vous dire que lorsque
j'étais à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, comme administrateur de trois bureaux,
Valleyfield, Granby et Sorel, on avait ces disparités-là entre la
Régie de l'assurance automobile du Québec et la CSST. Lorsqu'un
fonctionnaire se fait dire qu'à la régie on a le droit à
cela et qu'à la CSST on a droit à telle chose, en matière
d'application des lois en question, c'est très dur pour lui de dire
à un citoyen qu'il y a deux classes de citoyens au Québec: celle
de la Régie de l'assurance automobile du Québec et celle des
accidentés du travail. Je pense que si on est capable d'harmoniser les
deux projets de loi en ce qui a trait aux principes d'indemnisation, au
remplacement du revenu, même chose en ce qui concerne la
réadaptation sociale, il faut opter
pour cette voie.
M. Côté (Charlesbourg): C'est ce qu'on tente de
faire dans la mesure du possible parce que les clientèles ne sont pas
les mêmes. C'est sûr que pour les mêmes clientèles,
c'est ce qu'on tente de faire et que le travail va continuer dans ce sens. Je
pense qu'il y a une collaboration amorcée qui est très heureuse;
il s'agit de continuer dans ce sens.
M. Messier: Un exemple, un camionneur qui subit un accident de la
route devrait avoir les mêmes prestations qu'un voyageur régulier.
Évidemment, c'est la CSST qui va payer dans un cas, et dans l'autre,
c'est la Régie de l'assurance automobile du Québec.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, sauf que, dans un cas,
la loi 42 a départagé la responsabilité des uns et des
autres et il y a une incompréhension actuellement en ce qui concerne
certains intervenants nouveaux dans le dossier - je ne parle pas du
député de Saint-Hyacinthe - parce que c'est un débat qui a
cours actuellement en ce qui a trait aux entrepreneurs...
M. Garon: C'est une partie du problème, une cause du
problème sans doute parce qu'il était à la CSST
lui-même avant d'être député. Il a dit que
c'était là qu'il y avait des problèmes. On avait des
libéraux dans l'administration qui créaient des
problèmes.
M. Côté (Charlesbourg): D'accord, non, non, mais ce
que ...
M. Messier: Le jeu était pas mal de votre
côté.
M. Côté (Charlesbourg): II en restait un peu moins,
après neuf ans, il en restait un peu moins.
M. Messier Je peux vous en nommer quelques-uns qui sont de votre
côté.
M. Côté (Charlesbourg): Tout cela pour vous dire:
Vous vous souviendrez que M. Alarie de l'ACQ, lorsqu'il s'est
présenté à l'étude de l'avant-projet de loi, en a
discuté aussi et a soulevé cette question. Depuis, j'ai
organisé une rencontre entre M. Alarie et la Régie de l'assurance
automobile, et, selon les informations reçues, il a un peu mieux compris
la situation, puisqu'elle n'était pas très claire dans son esprit
à l'époque. En l'invitant à la régie pour voir
comment cela se passait, on a réussi a éclaircir le dossier. Il
peut y avoir encore des divergences entre eux et nous quant aux
responsabilités des uns et des autres, mais il y a une meilleure
compréhension du fonctionnement et un peu plus de compréhension
quant à savoir pourquoi cela fonctionne de cette façon.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que ceci conclut les
remarques?
M. Garon: Je me demandais s'il y avait des tentatives
d'harmonisation, car souvent ces tentatives d'harmonisation ont pour but
d'économiser des fonds et de payer moins les assurés, dans un cas
comme dans l'autre. On sait que quelqu'un qui est victime d'un accident du
travail ou d'un accident d'automobile - il y a des accidents mineurs dans les
deux cas, mais il y en a des majeurs aussi - dans les deux cas, parfois, les
gens sont vraiment mal pris après cela et sont un peu
découragés. On n'a qu'à voir, par exemple, l'accident qui
est arrivé à M. Vachon aux États-Unis qui n'est pas
considéré comme un "feluet" et qui a un bon moral. On a lu dans
les journaux qu'à un moment donné il était
démoralisé. Il est connu, il dit qu'il a eu des milliers de
lettres d'encouragement de gens qui ont dit-Bravo, vous tenez le coup, vous
servez d'exemple aux autres. On a un exemple de quelqu'un qui est reconnu comme
étant une personne vigoureuse, avec une force de caractère, et il
a trouvé cela dur. Et il y a des gens qui sont déjà mal
pris, des gens qui ne sont pas riches, qui sont dans des situations encore plus
difficiles à cause d'un accident du travail ou d'un accident
d'automobile. Moi je pense que, traditionnellement, les juges qui
interprètent des lois de jurisprudence dans le domaine de l'assurance,
sont toujours, dans le cas de doute ou dans une zone grise, en faveur de
l'assuré et non pas en faveur de la compagnie. Le juge dit: S'il y a un
doute dans l'interprétation, on ne doit pas essayer d'épargner
l'argent de la compagnie au détriment d'un homme, d'une femme, d'une
famille qui sont seuls, et on doit donner l'avantage à des personnes qui
sont dans le besoin. Alors, c'est pour cela que je pose ces
questions-là, pour qu'on puisse voir... (16 h 45)
Je sais que le gouvernement aime à dire qu'il a une bonne
gestion, qu'il économise beaucoup, etc. Moi, ma tâche, c'est de
vérifier s'il n'économise pas sur le dos du monde. Et c'est pour
cela que je veux vérifier le plus possible. D'autant plus que je sais
qu'un ministre peut vouloir telle et telle chose, mais qu'il peut y avoir un
autre aspect... On le voit dans le rapport du Vérificateur
général. Le Conseil du trésor, dans certains cas, ne joue
pas ce rôle comme il voudrait toujours le jouer. On prend le cas de
Chinic. on en parle ici, on parle du Conseil du trésor. On n'a pas l'air
à le féliciter, là-dedans.
C'est pour cela que, dans ces cas-là, il faut vérifier
quel est le fonctionnement et on en a eu l'occasion lors de l'étude des
projets de lois. D'ailleurs, je voudrais remercier le ministre d'avoir
accepté qu'on fonctionne de cette façon-là. On peut
fonctionner d'une autre façon, mais ce n'est pas agréable,
parfois, de faire des
amendements et tout cela, pour pouvoir avoir du temps de parole. Au
contraire, je suis content qu'il y ait cette ouverture. Il y a des choix
politiques. Moi, je ne peux pas empêcher le gouvernement élu de
gouverner. On peut diverger d'opinions. Je l'ai manifesté, en
deuxième lecture, sur le fait que je pense que c'est un mauvais choix de
prendre l'argent des assurés aux fins du projet de loi mentionné,
de prendre 100 000 000 $ dans la caisse, pour l'entretien routier. Alors, je
pense que c'est ceux qui utilisent les routes, qui roulent le plus souvent -
c'est-à-dire ceux qui paient de la gazoline, normalement, à ces
fins-là - qui devraient payer. Donc, ceux qui utilisent beaucoup les
routes devraient payer plus que ceux qui les utilisent moins, etc., pour
l'usure de l'asphalte ou pour des raisons semblables, parce qu'il y a un
rapport entre les deux. Tandis que l'assurance, c'est une autre chose.
Je peux aller sur la route pour faire des centaines de milliers de
milles, sans faire d'accident et payer mes primes, et aller sur la route, une
fois, pour 10 kilomètres et me faire tuer ou être Invalide pour la
vie. On n'est pas dans le même genre de rapport, quand on est dans le
domaine de l'assurance, dans le domaine de l'entretien des routes, même
à des fins de sécurité. C'est pour cela que je vous disais
que je pense que c'est un mauvais principe de prendre l'argent du fonds
d'assurance. Moi, je pense qu'on aurait dû utiliser les fonds pour
baisser davantage les primes ou augmenter les prestations aux assurés ou
élargir les secteurs où l'on pense que les gens se font serrer un
peu. C'est vrai qu'on en a parlé à la commission parlementaire
qui a siégé avant l'ouverture de la session. Les gens sont venus
faire des représentations, et le ministre a indiqué qu'il
acceptait de rencontrer les gens pour faire de nouvelles propositions, par la
suite. On va les avoir avant les fêtes. Donc, cela veut dire qu'on va
avoir le temps de les regarder tranquillement. C'est bien de donner une
période de temps pour que les gens puissent réagir, parce que,
même avec des projets de loi qui procèdent d'une bonne intention,
on peut, dans sa rédaction, mal couvrir ce qu'on veut couvrir. Ensuite,
il y a l'application de la loi. L'application de la loi peut être faite
de façon abusive; la loi ne peut pas être appliquée ou
être difficilement administrable. C'est ce que j'entends dire un peu,
aussi, dans certains cas de lois qu'on devra étudier, sans doute, dans
les prochains jours. Et, certaines personnes s'inquiètent de
l'administration de la loi, même si celle-ci ne semble pas mauvaise, au
départ, sur les principes, son administration, est une autre
affaire.
Alors, je voudrais indiquer, comme on avait dit qu'on devait continuer
jusqu'à 17 heures, que je pourrais parler des heures sur le projet.
C'est un choix gouvernemental, et il a été fait de cette
façon-là. Je ne peux pas empêcher le gouvernement de faire
son choix, même si je ne suis pas d'accord sur cette façon de
faire. Le ministre n'a pas d'autre choix, par responsabilité
ministérielle, que de dire qu'il est d'accord. Plus tard, quand il sera
à sa retraite et que je serai à ma retraite, on pourra parler et
il pourra me dire, peut-être: Je ne pouvais pas le dire, mais
j'étais de ton avis plus que de celui du gouvernement ou du ministre des
Finances. Mais comme la solidarité oblige à faire partie d'une
équipe, un peu comme des chevaux qu'on attelle et qui ne choisissent pas
leur partenaire pour tirer la voiture. C'est comme cela, la politique. SI le
ministre est prêt à procéder au vote, on serait prêt
à procéder au vote.
M. Côté (Charlesbourg): Peut-être deux minutes
si le député me le permet. Je pense que, finalement, on a bien
couvert le sujet quant aux intentions et aux choix politiques que le
gouvernement a pu faire et qui peuvent ne pas être dans la ligne de
pensée de ce que l'Opposition souhaitait. Je pense qu'il a
été clairement exprimé au moment de la deuxième
lecture que vous autres, vous auriez fait autre chose que ce qu'on a fait.
On a tenté de répondre aux trois niveaux possibles
d'intervention: la réduction des primes, l'augmentation du retour de
certains avantages en prestations et la route. Finalement, on a diminué
les primes d'assurance de 50 000 000 $. Dans la mesure où le projet de
loi déposé sera accepté, on va retourner au-delà de
40 000 000 $, 46 000 000 $ et peut-être même près de 50 000
000 $ aux assurés. Cela leur appartient. Je pense que c'était
très clair quand on en a parlé. Finalement, on a prévu de
l'argent pour les routes aussi. C'est un "mix" des trois qui fait qu'en fin de
compte chacune de ces interventions a un côté positif.
L'obligation qu'on avait et la difficulté qu'il y avait,
c'était que la réserve de stabilisation ne peut pas être
affectée à du récurrent, sinon on n'en sortirait jamais.
On ne peut pas prendre aujourd'hui des engagements en fonction d'un montant de
200 000 000 $ disponible. Il l'est maintenant, mais, à partir du moment
où il est utilisé, il ne l'est plus. Il ne reviendra pas
l'année prochaine, en tout cas. Il peut revenir, mais c'est
hypothétique. C'est un peu cela qui était notre choix. Je l'ai
fait, je veux le répéter pour que nos mémoires politiques
s'en souviennent et que ce soit consigné au Journal des débats,
je l'assume surtout parce que la Régie de l'assurance automobile a pris
l'initiative de nous le suggérer, compte tenu de sa connaissance et de
son vécu au regard de la Loi sur la Régie de l'assurance
automobile. On l'a fait dans ce sens. Je partage en tout point la
décision qui a été prise par le gouvernement, c'est
même moi qui l'ai enclenchée au bureau du premier ministre et au
bureau du ministre des Finances, et effectivement, je l'assume. Je sais que le
député de Lévis ne voulait pas me prêter des
intentions dans ce cas.
M. le Président, je veux remercier le député de
Lévis pour sa compréhension et lui dire que mon attitude,
à la commission parlementaire, est exactement la même que j'ai
toujours eue avec Mme Harel qui le précédait comme critique, et
sera la même dans tous les projets de loi que nous aurons, peu Importent
les choix politiques que chacun pourra faire, soit oui, soit non. Je pense que
c'est une sorte d'ouverture quant à l'information et à la
qualité de l'information aussi, qui est indispensable aux hommes
politiques pour qu'ils soient capables de prendre des décisions
éclairées quant au soutien ou au non-soutien, en tout ou en
partie, des mesures prises par le gouvernement. C'est dans cette optique que
j'ai travaillé depuis que j'ai des responsabilités
ministérielles. Peu importe ce qui arrivera, que les débats
soient plus ou moins orageux parfois, chacun a un rôle politique à
jouer, compte tenu de sa situation en Chambre et de ses convictions profondes
aussi. Je veux donc assurer le député de Lévis de mon
entière collaboration sur ce plan.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Lévis.
M. Garon: Dans cette perspective, est-ce qu'il serait possible
d'avoir une copie du document que vous avez fait parvenir à la
Régie de l'assurance automobile pour recommander cela.
M. Côté (Charlesbourg): Je peux vous envoyer une
copie de la décision du conseil d'administration de la Régie de
l'assurance automobile.
M. Garon: Non. C'est l'argumentation. Il a dû y avoir, avec
ce...
M. Côté (Charlesbourg): Cela a été
verbal, au moment d'une rencontre. Il n'y a pas eu de document comme tel. Il y
a la décision du conseil d'administration sur ce plan. Cela a
été une rencontre...
M. Garon: II n'y a pas eu d'analyse pour établir...
M. Côté (Charlesbourg): Non.
M. Garon: Vous disiez tantôt que les coûts...
M. Côté (Charlesbourg): Oui, c'est à
partir...
M. Garon: II n'y aurait pas de coûts éventuels.
M. Côté (Charlesbourg): Non, pas d'augmentation.
Cela n'aurait pas d'effet sur l'augmentation des primes d'assurance
automobile.
M. Garon: Pour cela, la régie a dû se
référer à des études. En vertu de l'article 150 et
des suivants, il y a des analyses actuarielles...
M. Côté (Charlesbourg): La manière dont cela
s'est passé est la suivante. À partir du moment où M.
Vézina a eu entre les mains le bilan de l'année et en a saisi le
conseil d'administration - je crois que c'est en mars que vous l'avez obtenu,
je pourrais peut-être préciser la date par les ordres du jour -
c'est avec ce bilan financier qu'on sautait aux conclusions qu'il y avait des
possibilités à ce niveau. C'est comme cela que ça s'est
passé. Finalement, c'est à la lumière de l'expertise
qu'ils ont maintenant depuis neuf ans en termes d'administration de la
Régie de l'assurance automobile et avec le conseil d'administration qui
est informé de tout ce qui se passe à la régie que cette
initiative a été prise et transmise au ministre responsable.
Étude détaillée
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'article 1 du
projet de loi 62 est adopté?
M. Garon: Sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'article 2 est
adopté?
M. Garon: Sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que le titre du
projet de loi 62, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile, est
adopté?
M. Garon: Le titre du projet? Sur division puisque le
titre...
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'ensemble...
M. Garon: S'il n'y avait pas d'article 1, il n'y aurait pas
besoin de titre.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'ensemble du
projet de loi 62 est adopté?
M. Garon: Sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): La commission de
l'aménagement et des équipements, ayant maintenant terminé
cette partie, suspend ses travaux jusqu'à 20 heures ce soir, ici
même.
(Suspension de la séance à 16 h 56)
(Reprise à 20 h 11)
Projet de loi 87
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'aménagement et des équipements poursuit
ses travaux pour procéder à l'étude
détaillée du projet de loi 87, Loi modifiant la Loi sur la
Régie du logement et le Code civil.
Est-ce que nous avons des remplacements, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Il y a deux
remplacements. M. Charbonneau (Verchères) sera remplacé par M.
Paré (Shefford) et Mme
Juneau (Johnson) sera remplacée par M. Blais (Terrebonne).
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
secrétaire. M. le ministre, est-ce qu'il y a des remarques
préliminaires?
Remarques préliminaires M. André
Bourbeau
M. Bourbeau: Oui, M. le Président. Il nous fait plaisir de
nous retrouver ce soir pour procéder à l'étude article par
article du projet de loi 87, Loi modifiant la Loi sur la . Régie du
logement et le Code civil. Comme vous le savez si bien, M. le Président,
ce projet de loi a pour objet de modifier la Loi sur la Régie du
logement et le Code civil afin de prévoir les cas où la
conversion d'immeubles locatifs en copropriété divise est
interdite et ceux où elle peut être autorisée. Il
prévoit également des mesures pour protéger les locataires
contre le harcèlement, la reprise de possession et l'évacuation
injustifiée du logement lors de travaux.
J'aimerais souligner, pour le bénéfice des gens de la
commission, que je suis accompagné par des fonctionnaires de la
Régie du logement. À ma gauche, Mme Louise Thibault qui est la
présidente, derrière moi, Mme Nicole Archambault, la
vice-présidente, et Mme Céline Topp qui est également
l'une des cadres de l'organisme.
Une voix:...
M. Bourbeau: Ah! Nous avons également un observateur du
KGB, du ministère de la Justice, M. Richard Tremblay.
J'ai un trou de mémoire, M. le Président. Je vais laisser
la parole à l'Opposition, avec votre consentement.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
ministre. M. le député de Shefford.
M. Paré: Oui, M. le Président, j'aurais moi aussi
des notes préliminaires, mais j'aimerais, si vous le permettez, laisser
la parole au député de Terrebonne qui m'accompagne, car il a une
intervention en Chambre dans quelques minutes.
Le Président (M. Saint-Roch): Je cède maintenant la
parole à M. le député de Terrebonne.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci, M. le Président. Il m'est très
agréable de venir aider mon confrère de Shefford sur cette loi
prénommée 87, Loi modifiant la Loi sur la Régie du
logement et le Code civil. Comme introduction, j'aimerais vous dire que, cet
après-midi, en Chambre, j'ai parlé d'une loi qui touche les
services sociaux et les directeurs d'hôpitaux. Nous avons reproché
au gouvernement, dans cette loi, d'amener une solution partielle, parce que la
flèche ne se dirigeait que contre les directeurs d'hôpitaux, et
nous aurions aimé mieux, à ce moment-là, que le
gouvernement regarde la chose de façon globale, c'est-à-dire
qu'il regarde toutes les sociétés d'État, tous les hauts
fonctionnaires de ces sociétés autant pour Hydro-Québec,
pour le secteur de l'éducation que pour les services sociaux. Cette loi
n'avait de flèches que sur une seule cible et cette cible pouvait nous
paraître, à nous, de l'extérieur, et aux gens qui nous
regardent - oui, oui, c'est juste une introduction d'une minute - mal
dirigée et faire une cible de gens qui, en réalité, ne
sont pas nécessairement vulnérables. J'ai blâmé
cela.
Encore aujourd'hui, je voudrais m'adresser, non pas à Mme la
ministre elle-même mais à la philosophie que cette
ministre-là est obligée de représenter. Je vais être
obligé de dire exactement la même chose ici. Le ministre - et je
disais à madame aujourd'hui qu'elle est comme un oiseau sur la branche
dans la volière du parti au pouvoir - est, lui aussi, dans cette
loi-là, l'oiseau qui porte la responsabilité de l'habitation et
des affaires municipales. Il est entendu que cette loi porte, de façon
générale, juste sur la conversion des édifices en place en
condos. On se le dit là, c'est ça le principal là-dedans.
Montréal doit le faire à la pièce par exception et le
reste du Québec devra le faire selon son bon vouloir. Cela revient un
peu à cela. C'est comme cela que je l'ai compris. Je trouve cela
très curieux quand on sait que les condos sont en fait le lieu de
prédilection des "dinks", des "yuppies" et des personnes
âgées. En gros, c'est cela. À 96 %, les condos qui sont des
appartements beaucoup plus dispendieux, de façon générale,
qu'une simple maison et sont beaucoup plus petits - parfois, ils ont une
chambre, des fois deux, mais rarement trois - sont les lieux de
prédilection des "yuppies", des "dinks" et des personnes
âgées à la retraite.
Je n'ai rien contre ces gens. Ils ont le droit de vivre quelque part.
Mais, depuis quel-
ques années, les condos se sont multipliés. Avant
d'établir une politique de développement et de transformation des
habitations déjà sur notre territoire, j'ai l'Impression que tout
ceci devrait être subordonné à la politique familiale et
à la politique de natalité dont le gouvernement se dit le grand
défenseur. Ce n'est qu'une branche du mille-pattes qu'est la politique
familiale. De la façon dont les condos sont conçus, cela n'ouvre
pas la porte au troisième enfant. Cela va être plus facile
à comprendre pour tout le monde. Ce n'est pas une porte ouverte vers une
famille un peu plus nombreuse. On ne se reproduit pas assez au
Québec.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Blais: C'est sûr qu'on ne se reproduit pas assez. Mais
si le gouvernement est sincère dans sa volonté d'une politique
qui fait que la population du Québec augmente, avec l'immigration, bien
sûr, mais aussi parce que les gens... Si deux personnes se marient, pour
que ce soit l'équivalent, il faut avoir au moins deux enfants. Pour
qu'on devienne plus nombreux, il faut que ce soit plus que deux. Et la moyenne
n'est pas observée actuellement à travers le Québec. Les
condos sont, dans le contexte actuel, une façon de favoriser les
"dinks", les "yuppies". Et vous savez ce que sont les "dinks"? "Double
Indemnity No Kids". C'est cela, un "dink" aujourd'hui. Alors, le ministre est
obligé d'adopter cette loi parce qu'on lui ordonne de le faire au
cabinet. Mais, j'aurais aimé qu'il aille défendre le fait que la
politique familiale devrait l'emporter sur des cataplasmes de ce genre. C'est
un cataplasme que de ne parler que des condos. Les condos sont presque des
arrêts pour la natalité, en fait...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Blais:: ...parce que la plupart de ces condos n'ont pas assez
de pièces pour recevoir une famille de deux ou trois enfants. Donc,
cette chose devrait être subordonnée à la politique
familiale. Cela cause un problème, surtout dans les grands centres
urbains.
Vous savez, M. le ministre, qu'il y a 1 400 000 terrains vacants au
Québec, dézonés, prêts pour la construction. En
plus, il y a 410 000 terrains au Québec qui sont déjà
viabilisés. C'est du terrain, ça! Si on bâtissait des
maisons juste sur les 410 000 terrains viabilisés, à deux
personnes seulement qui achèteraient, cela fait 820 000 personnes, sans
dézoner, sans "condosiser", sans "condosiser". Alors, personnellement,
je ne vois pas pourquoi on ne laisse pas au moins encore le moratoire tel qu'il
est. Je ne comprends pas, surtout si on dit qu'on veut une politique nataliste,
qu'on veut protéger la famille et permettre que le Québec soit
autosuffisant au moins du côté population.
Je reproche au gouvernement, à ce moment- là, de faire...
J'en avais une cet après-midi, à la pièce, une autre, ce
soir avec le député de Shefford. Il va vous parler encore plus
que moi, c'est bien sûr.
M. Bourbeau: Vous ne pariez pas sérieusement?
M. Blais:: Je suis très sérieux, M. le ministre.
Est-ce que vous croyez que c'est logique qu'on y aille à la pièce
dans une politique globale de la famille, qu'on amène quelques
cataplasmes comme cela? Une politique est supposée être
conçue de façon globale. On a une politique familiale ou on n'en
a pas. Et les condos sont un frein au développement de la famille.
Quelqu'un achète un condo, il se marie, arrive là, il y a des
fois une chambre, une deuxième chambre, un enfant, et cela reste comme
ça. Il y en a qui en ont deux, bien sûr, mais qui a les moyens
d'acheter des condos à trois chambres qui coûtent 283 000,36 $. Il
n'y en a pas beaucoup. Il n'y en a vraiment pas beaucoup. C'est un frein au
développement normal que le gouvernement actuel nous dit qu'il a. C'est
le développement de la famille et de la reproduction au
Québec.
De plus, dans les grands centres urbains, vous le savez, vous avez
certainement fait des consultations. Vous en avez fait à
Montréal, l'été passé. Vous vous êtes
promené. Les gens vous ont certainement dit, M. le ministre, que, dans
un certain coin d'une grande ville, il se bâtit des condos et que les
gens qui habitaient ce coin-là n'ont pas les moyens, à 98 %, de
rester dans le même coin parce que lorsque les logements deviennent des
condos, ils ne sont pas capables de les acheter et d'en payer les frais
communs.
Donc, on garroche nos gens qui étaient en ville et qui
développaient une famille, on les envoie à la campagne.
Là, à la campagne, on arrive dans des loyers, il y a juste 400
000 lots de viabilisés. On arrive à la campagne, on est
obligé de reconstruire des écoles pendant que les écoles
des grandes villes se vident. Et c'est toujours l'ensemble des
Québécois qui paient pour cela. Il n'y a pas de service
d'aqueduc, de routes, d'écoles, de transport des écoliers. Il y a
des conséquences graves à légiférer à la
pièce. SI j'étais donc ministre dans ce gouvernement-là -
mais je ne peux pas parce que vous ne partagez pas le même idéal
que moi, mais ce n'est pas parce que je n'en ai pas la capacité, je
l'aurais, c'est l'idéal que je ne trouve pas de l'autre
côté - que je dirais donc au cabinet: Arrêtez donc de nous
faire légiférer à la pièce! Il y a des politiques
globales qui commandent à un gouvernement en place de ne pas faire de
cataplasmes de façon intempestive. On veut faire une politique familiale
et on vient de nommer un ministre, il y a quelques mois, pour s'occuper de la
politique familiale. Mais pensez-vous que l'ouvrage et l'orientation de ce
ministre-là avec des morceaux à la pièce comme cela?
Pensez-
vous que son travail n'est pas atrophié avant de partir? Il est
complètement atrophié. Oui... M. le ministre, il regarde l'heure.
Ce n'est pas l'heure, c'est le projet de loi qu'il faut regarder. Il ne devrait
pas être là, il ne devrait pas être devant nous parce qu'il
est un empêchement à la famille...
Des voix: Ha. ha, ha!
M. Blais:: ...c'est ce qu'il est ce projet de loi, et il brime...
Ensuite, les gens ne peuvent pas habiter dans ces condos que vous construisez
dans les grandes villes. Les gens ne peuvent pas. Qu'est-ce qui arrive? Ils
s'en vont dans des taudis de plus en plus nauséabonds, inhabitables,
avec des murs craquelés. Et ensuite qu'est-ce qui arrive? Ils
réclament des HLM parce qu'on leur a enlevé leur logement qui
était plus ou moins salubre, souvent, mais au moins habitable. Ils sont
obligés de se réfugier dans moins bon. Et les gens qui ont des
gros salaires, des doubles salaires s'en vont dans des condos. Donc, encore
socialement, on est obligé de se cotiser pour doubler, tripler le nombre
nécessaire de HLM. Encore là, les HLM devraient faire partie de
la politique familiale. J'ai peine à le croire, M. le ministre. Vous,
vous êtes obligé, on vous commande de le faire, c'est bien
sûr, et vous livrez dans les circonstances la commande qu'on vous a
demandé de livrer. Que voulez-vous? Un livreur, c'est un livreur. Mais,
à la base, quand vous êtes autour de la table au cabinet, un petit
coup de poing sur la table pour dire que le développement des condos
à travers le territoire québécois fait partie
intégrante de la politique familiale, et qu'on ne devrait jamais arriver
avec une loi comme celle-là avant que la politique globale de la famille
soit établie, pensez-vous que cela ne vous ferait pas pousser les
cheveux un peu? Je suis persuadé que cela vous donnerait du toupet au
moins au Conseil des ministres parce que c'est logique de le demander. Je suis
persuadé...
M. Bourbeau: Question de règlement, M. le
Président. Je considère que le député de
Terre-bonne a du front tout le tour de la tête de parler du ministre qui
n'a pas de toupet, M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): Alors, cela n'étant
pas une question de règlement, M. le député de Terrebonne,
vous pouvez poursuivre.
M. Blais:: Non, mais c'était au sens figuré, bien
sûr, je suis persuadé que, même si le ministre est
allé à la guerre longtemps et qu'on voit qu'il est allé au
front, il l'a pris au deuxième sens du mot. Je suis persuadé de
ça. Mes propos ne sont pas guerriers du tout. Je suis plutôt pour
la noblesse, la complicité, la délicatesse et la paix. Bon, mais
ça...
M. Bourbeau: Vous me permettrez de poser une question.
M. Blais:: Avec plaisir.
M. Bourbeau: Est-ce que le député comprend
l'anglais?
M. Blais:: Ah oui! ah oui!
M. Bourbeau: II y a un proverbe qui dit: "Grass does not grow on
a busy street."
M. Blais:: Oui, cela arrive. Mais le monde m'accuse souvent
d'être mal peigné, mais, pour l'être, il faut d'abord avoir
des cheveux.
Mais il arrive ceci. Dans la politique familiale, j'aimerais que le
ministre donne un coup de poing sur la table et le dise... Dût-il le
demander à son confrère pour voir si la politique familiale doit
être élaborée en comprenant le développement des
condominiums. Dût-il le demander! Je pense qu'il y en a qui ont
tracé la voie en ce domaine et que le ministre devrait les consulter
avant, parce qu'il y a des choses sérieuses qui se disent souvent sur un
ton badin pour que le message passe mieux. Mais c'est grave de
légiférer à la pièce parce que, là, on fait
juste suivre le mouvement. Dans tous les domaines, le gouvernement suit un
mouvement cataplasme pour qu'il n'y ait pas de trop grosses evaporations de
critiques sociales. Mais, à force de mettre des cataplasmes sur un tuyau
fendillé, un bon jour, tout va voler en éclats. Et là,
c'est l'ensemble des Québécoises et des Québécois
qui vont y perdre.
Alors, M. le Président, j'aimerais conclure sur ça...
Combien me reste-t-il de temps?
Une voix: Continuez c'est tellement bon!
Une voix: Sept minutes.
M. Blais:: Les sept péchés capitaux.
Une voix: ...peuvent le faire.
M. Blais:: M. le ministre, en longue conclusion, j'aimerais vous
dire ceci. Un gouvernement en place doit chercher une société
juste pour que la richesse collective trouve une distribution équitable.
Lorsque les politiques globales ne sont pas établies avant d'arriver
avec des projets de loi quels qu'ils soient - et c'en est un exemple patent -
c'est impossible, impossible que l'histoire donne... Souvenez-vous de 1970
à 1976, l'histoire parle encore des cataplasmes de l'époque. Et,
aujourd'hui, est-ce qu'on s'oriente encore vers des lois de cataplasme et que
personne... On a dit dans les journaux dernièrement qu'à laisser
aller les choses et à ne réparer que les petits orifices qui se
présentent devant nous, lorsque le tuyau crèvera, le
Québec n'aura plus d'armes pour subir la catastrophe.
Une voix: Amen.
M. Blais:: Cela se dit, mais, surtout ça se comprend. Il
faut le comprendre. Vous savez, on ne passe pas de l'enfer au paradis juste en
une phrase. Je ne veux pas dire qu'actuellement ce projet-là c'est
l'enfer, mais c'est loin d'être le paradis.
Une voix: C'est bien dit
M. Blais:: C'est loin d'être le paradis. Loin, loin
d'être le paradis. Alors, moi, M. le ministre, si j'étais vous, si
j'avais votre autorité - je ne dis pas si j'étais vous - si
j'avais votre autorité au sein de ce gouvernement, je retournerais au
cabinet et je dirais: C'est illogique, c'est intempestif de présenter un
projet de ce genre. Il faudrait au moins tenir le moratoire un bon laps de
temps encore pour donner le temps au ministre délégué
à la Famille de préparer une politique globale. Et c'est dans la
globalité qu'on reconnaît les grands hommes, et non pas dans les
détails. Ce n'est pas dans les détails. C'est dans la
globalité des oeuvres de quelqu'un. La politique de la famille - je l'ai
dit tantôt - c'est un mille-pattes. Ces mille pattes-là il faut
qu'elles soient sur la même table au même moment pour que la
bête avance. Présentement, on les présente patte par patte,
et, en plus, certaines ont des cataplasmes ou des fêlures à leur
base. C'est un projet de loi fêlé à sa base, et, M. le
ministre, je ne vous en tiens pas responsable, parce que, quand on est porteur
d'une commande, on la livre.
M. le Président, sur ces bons mots, j'encourage quand même
le ministre à regarder à fond le projet de loi et à aller
supplier le cabinet de le mettre de côté et attendre que
l'élaboration d'une politique plus globale vienne sur la table avant de
faire des projets comme celui-ci. Merci beaucoup, M. le Président (20 h
30)
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Terrebonne. M. le député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Â moins que le ministre ne veuille
répondre? Non?
Merci, M. le Président Moi non plus, je ne referai pas
l'historique que j'ai fait en deuxième lecture, loin de moi cette
intention! De toute façon, je n'en ai pas le temps. On a un temps
très limité, sauf que, sur un ton différent, mais avec la
même conviction, je sais très bien que ce n'est pas pour la
galerie ni pour la salle, mais juste pour essayer de vous convaincre. Je trouve
que le projet de loi devant nous, ce soir, est fondamental. On change les
sociétés, et il faut en être bien conscient. On change des
sociétés avec des décisions prises dans des Parlements, et
des erreurs ont été commises dans le passé. Je me demande
si on n'est pas en train d'en faire une, et je vous le dis tel que je le pense
et tel que je le ressens. Vous allez me dire: Ah! Globalement, les gens sont
satisfaits. Je dois vous dire que j'ai été absent pendant deux
jours cette semaine, pas de la vie politique, mais de l'Hôtel du
Parlement, et que je suis allé rencontrer des groupes.
Je dois vous dire qu'ils ont la même inquiétude que celles
manifestées lors de la commission parlementaire à
Montréal. C'est évident qu'on reconnaît tous, moi le
premier, et, dans votre discours de deuxième lecture, vous m'avez
même cité comme étant favorable. Non, je ne suis pas
favorable au projet de loi. Je suis favorable à certains pas dans la
bonne direction, et tout le monde dit cela, en risquant même que si
jamais... On ne peut pas faire une obstruction à la gang qu'on est et au
temps où on est dans l'année, de toute façon. Mais la
crainte serait que, si on fait une obstruction, et des groupes me l'ont dit, et
je vous le dis tel que je le sens et que je l'ai vécu, on risquerait de
ne pas faire quelques pas dans la bonne direction. Mais, au-delà des
gestes qu'on pose dans le bon sens, on va amener des inquiétudes de
changements de société, y compris a Montréal et
spécialement dans les grandes municipalités.
Vous savez, on parle de qualité de vie et d'originalité
à Montréal. Le premier ministre Bourassa était bien
content de dire que, dans l'entente du lac Meech, on est une
société distincte. Une société distincte, c'est
au-delà de la culture et au-delà de la langue, c'est dans la
façon de vivre. Et la façon de vivre qu'ont les
Québécois, c'est une différence fondamentale et majeure.
Il faudrait faire attention de ne pas tous passer dans le même entonnoir,
à un moment donné, car je ne suis pas sûr que, les
Québécois et nous ici autour de la table, nous serions heureux de
vivre de la même façon que les gens de Toronto et de Vancouver. Je
me rappelle que des gens ont dit en commission parlementaire, non pas des gens
du Parti québécois, mais des gens du milieu des affaires à
qui on avait demandé: Si on lève le moratoire et qu'on permet
cette spéculation en cours d'ailleurs... On n'a qu'à regarder
l'augmentation de l'évaluation municipale qui est catastrophique, on va
limiter... Vous allez me dire: Oui, on va probablement limiter les hausses de
taxes en diminuant les taux, mais l'évaluation demeure quand même
là. Donc, pour accéder à la propriété, ce
n'est pas une question de taxes, c'est une question d'évaluation.
Des gens ont dit: Cela risque de nous amener comme à Toronto. On
était tout fier de dire que, parmi les avantages économiques, les
avantages pour attirer des entreprises au Québec, spécialement
dans la région de Montréal, une étude faite en 1985 disait
que la meilleure place pour attirer les industries de haute technologie,
c'était la grande région métropolitaine de
Montréal. Parmi ces facteurs, il y avait, entre autres, la
qualité de vie et le bas taux pour être
capable d'acquérir une propriété, parce que ce qui
valait, à ce moment-là, environ 70 000 $ à Montréal
en valait 150 000 $ à Toronto. Qu'est-ce que cela va nous donner d'avoir
des augmentations du salaire minimum et des augmentations des salaires moyens
si, en fin de compte, à cause de la spéculation et des lois qu'on
a adoptées, on change les possibilités et la capacité des
Québécois d'accéder à la propriété?
Je vous le dis, cela m'inquiète.
Qu'a fait la copropriété, ailleurs? Je l'ai
déjà dit et je le répète: Oui, c'est un bon mode
d'accession a la propriété, mais pas sur le dos des plus
démunis. Et on l'a fait dans des municipalités et dans des
métropoles du monde entier. Quel résultat qu'est-ce que cela a
donné? Il me semble qu'on a attendu assez longtemps pour prendre
l'exemple des autres, pour ne pas faire les mêmes erreurs. À
Paris, 75 % des condominiums sont maintenant en location. Qu'est-ce que cela a
donné qu'un logement devienne un autre logement en
copropriété, sinon probablement de doubler le loyer mensuel. On
n'a pas avancé. Qu'est-ce que cela a donné à New York?
Cela a donné le Bronx. Des gens ont dû quitter leur milieu de vie
à New York pour s'en aller dans des banlieues, pas pour payer moins
cher, mais pour avoir des conditions de vie différentes. Vous êtes
certainement allé voir, sinon allez-y avant de l'adopter, et vous allez
vous apercevoir que vivre dans ses immenses buildings, pour ne pas utiliser
d'autres mots, d'une vingtaine ou d'une trentaine d'étages, où
tous les blocs se ressemblent et où la seule chose qui fait la
différence, c'est le numéro sur la porte, je ne voudrais pas
qu'on finisse par vivre comme cela dans la région métropolitaine.
On a la chance d'avoir une qualité de vie par une différence avec
les autres métropoles américaines et une grande métropole
du monde qu'on doit préserver. Ce n'est pas vrai que le
développement doit passer juste par grossir, par densifier, par
spéculer... Dans une société, on est responsable de la
qualité et de la préservation. Notre rôle comme
législateur est de préserver la qualité,
spécialement pour les plus démunis; donc, aider pour qu'ils
soient mieux et non pas faire en sorte qu'ils soient pires. Je pense que c'est
cela qu'on va faire. Je vous le dis parce que je le pense. Donc, je ne vois pas
là-dedans en quoi on va améliorer quelque chose.
Lors de la commission parlementaire, des consensus avaient
été établis, vous le savez très bien. Oui, il y
avait urgence à corriger, à amener des mesures positives comme
celles qu'on retrouve dans la loi 87. On l'avait dit: II y avait urgence
à agir parce qu'il y avait des trous dans les lois actuelles et dans le
moratoire, ce qui faisait en sorte que, finalement, cela devenait presque une
jungle. Donc, ce n'était pas acceptable. Il fallait apporter des
correctifs. Là-dessus, on y est à 100 milles à l'heure.
Mais il y avait aussi un autre consensus unanime qui disait: Avant de lever le
moratoire parce que c'est fondamental dans une politique de l'habitation, c'est
fondamental parce que c'est le mode de propriété, c'est le mode
de logement et c'est le mode de délogement aussi des citoyens, on a tous
dit de façon unanime - et quand je dis "on", je m'exclus, je parle des
gens venus témoigner en commission parlementaire - on a dit de
façon unanime: Cela prend une politique globale d'habitation avant de
lever le moratoire.
La plupart ont dit comme a aussi dit mon collègue de Terrebonne
tantôt: Une politique de la famille - parce que c'est inclus dedans - si
le logement, l'habitation devient quelque chose de déjà
réglé, je ne suis pas sûr qu'on va être capable
d'avoir une politique nataliste, de qualité de vie et une politique de
responsabilisation des parents si, finalement, on a même
délogé les parents de leur milieu de vie naturel. Je trouve cela
inquiétant. On a dit en commission parlementaire: II faut une politique
d'habitation et une politique de la famille avant de lever le moratoire.
Pourtant, ce n'est pas ce qu'on a fait. On nous apporte des correctifs sur les
trous actuels dans l'habitation, mais directement reliés à la
levée du moratoire. Je dois vous dire, qu'au nom de l'Opposition, je ne
peux pas embarquer là-dedans. Je ne peux pas embarquer là-dedans
parce que, si on règle certains petits problèmes, on s'en vient
complètement chambarder l'ensemble du secteur de l'habitation. Je suis
sûr que, lorsque je dis cela, je ne me trompe pas beaucoup.
Un autre consensus portait sur la possibilité de permettre
à ceux qui ne veulent pas ou qui ne peuvent pas devenir
propriétaire individuel de pouvoir le devenir d'une façon
collective. On ne la retrouve pas là-dedans. Dans le dépôt
du document, Lever le moratoire, une décision qui s'impose, on avait mis
des objectifs. On avait mis l'objectif d'accès à la
propriété et de protéger le stock de logements locatifs.
Dans la loi, à la suite de la commission parlementaire où on est
venu nous montrer directement d'une façon franche et non
équivoque qu'il y avait des problèmes, on se retrouve maintenant
avec les objectifs qui sont: protection du locataire et protection du stock de
logements locatifs. Mais c'est discutable sur la façon dont on veut
atteindre les objectifs. Déjà, on parle beaucoup moins
d'accès à la propriété là-dedans. Cela
semble moins important, alors que cela semblait urgent d'agir, le 19 juin 1986,
quand le ministre l'a annoncé une année d'avance. L'urgence
était de permettre l'accès à la propriété.
Maintenant, l'accès à la propriété vient de prendre
une débarque. C'est moins important. Cela ne semble plus être une
urgence, alors que cela l'était il y a une année. Je vois que,
lorsqu'on veut passer quelque chose, qu'on veut tellement qu'on en change les
objectifs et la façon de le faire et on prend tous les moyens. Cela
m'inquiète davantage-
Sans badiner, je n'ai pas la façon de faire des farces comme le
députe de Terrebonne pour
passer un message sérieux, je vais le dire très
sérieusement? On avait l'intention de lever le moratoire, mais, en
même temps, on avait l'ordre de ne pas faire de vagues. C'est reconnu
dans la société. A l'heure actuelle, il ne faut pas faire de
vagues, parce que la politique doit être quelque chose de calme. Il ne
faut pas déranger les gens.
En commission parlementaire, on s'est aperçu que lever le
moratoire d'une façon franche, directe et unilatérale, cela
aurait soulevé des gens. Comment fait-on? Sans être jongleur, mais
juste spectateur, avec l'intention de le lever et les réactions que cela
aurait soulevées, j'aurais agi exactement de la façon dont le
ministre a agi dans la loi 87, c'est-à-dire deux poids, deux mesures,
c'est-à-dire essayer de satisfaire tout le monde, mais, en même
temps, réaliser l'objectif qu'on s'est fixé de lever le
moratoire. C'est exactement cela qu'on est en train de faire. Deux poids, deux
mesures. Dans quel sens? Dans le sens que la ville de Montréal s'est
opposée, la Communauté urbaine de Montréal s'est
opposée. Il est venu des gens de Notre-Dame-de-Grâce, de
Westmount, de l'est de Montréal, des gens de Verdun, des gens de tous
les coins. Finalement, les gens de Montréal, globalement, sont venus
s'opposer. Les autres municipalités: non, ou, en tout cas, pas d'une
façon organisée, franche et directe. À Québec, la
municipalité est d'accord. Mais on a fait plaisir à tout le monde
sans se préoccuper d'une politique d'habitation, sans se
préoccuper d'une politique familiale, sans se préoccuper des
Inquiétudes soulevées et même des cas décriés
par les gens venus faire valoir leurs points de vue, autant à
Montréal, qu'à Québec.
Cependant, à Québec, on a semblé ne pas contester
avec la même vigueur, en semblant représenter autant de personnes
qu'à Montréal, toutes proportions gardées. Il ne faudrait
pas oublier que des groupes nationaux sont venus faire valoir leurs points de
vue, à Montréal, mais au nom des gens de tout le Québec.
Donc, ils ne sont pas revenus à Québec. À Québec,
on a frappé surtout des groupes locaux. Il y avait des groupes qui
représentaient beaucoup de gens qui ont de l'argent à faire avec
la transformation, dont la ville de Québec. Et, cela, c'est reconnu.
Les municipalités ont un coup d'argent extraordinaire, facile et
rapide avec la transformation. Donc, Québec, qui a des problèmes
financiers, qui attend une réponse d'un de vos collègues, qui ne
vient pas, trouve une façon pas trop compliquée d'aller chercher
des revenus. C'est la transformation, et, maintenant, on le permet. Et je dois
vous dire que ce qu'on est en train de faire, encore une fois, aussi, c'est de
transférer une responsabilité aux municipalités, leur
transférer la patate chaude. Le ministre me fait signe que oui. Sauf que
l'habitation, c'est trop important, à mon avis, pour que Québec
n'en garde pas la responsabilité. Ce n'est pas un manque de confiance
envers les municipalités.
C'est une question d'équité. C'est une question
d'homogénéité sur le territoire.
Et si, malgré un rapport des sages qui demandaient l'abolition de
la Régie du logement, vous avez décidé de ne pas l'abolir
et, au contraire, de lui donner plus de pouvoirs, c'est que vous avez
jugé que, soit au niveau des MRC ou à celui des
municipalités, il y avait un danger au sujet des relations
locataires-locateurs. On a décidé de conserver, à
Québec, le pouvoir, l'administration et le fonctionnement de la
Régie du logement. On trouvait cela majeur et important. Et là,
dans un secteur aussi important qui vient toucher les locataires et les
locateurs, le droit de propriété et même le droit de
demeurer, on est prêt à transférer cela aux
municipalités sur une base qui peut être complètement
différente d'une ville à l'autre, d'un quartier à
l'autre.
Donc, on transfère, encore une fois, aux municipalités,
une autre responsabilité, sans transfert financier. En tout cas, ce
n'est pas annoncé. Mais, ce qui compte, ce n'est même pas le
transfert financier, c'est le fait qu'on va vivre maintenant des situations
différentes, qu'on soit de Longueuil, de Montréal et de Laval, et
qu'on vienne faire en sorte de ne pas traiter Montréal, la
Communauté urbaine de Montréal, comme si c'était un
territoire à part du reste du Québec. Les Québécois
sont des gens égaux et ils doivent avoir les mêmes pouvoirs, les
mêmes possibilités, les mêmes chances, peu importe qu'ils
soient Montréalais, Québécois, Granbyens ou de n'importe
quel coin du Québec. Il y a un Québécois avec des chances
égales, peu importe où il se retrouve. Au niveau municipal, il
doit y avoir la même chose. On ne doit pas commencer, pour des choses
aussi fondamentales que le logement, à faire des différences
entre les gens de l'agglomération montréalaise et les gens des
autres régions. Cela m'inquiète. Et, en plus, par des pouvoirs
qui sont semblables. C'est une question d'image pour ne pas choquer, pour ne
pas soulever.
Ce qu'on fait, c'est qu'on donne à peu près les
mêmes pouvoirs. On le dit de façon contraire et différente,
mais le fait de le dire comme cela, on sait qu'on ne choquera personne et qu'on
n'amènera pas de manifestations ou de levée de boucliers. On dit
à Montréal: Pas de levée de moratoire, sauf par
dérogation. Donc, cela veut dire que les gens de la Communauté
urbaine de Montréal peuvent le lever comme ils veulent, par
dérogation. Au reste du Québec, on leur dit: Le moratoire
n'existe plus, mais, si vous voulez le limiter ou l'empêcher, vous passez
une réglémentation. Pourquoi ne dit-on pas la même chose
à tout le monde puisqu'on va arriver au même résultat? Au
départ, qu'on dise au moins la même chose à tout le monde.
Je pense que c'est honnête et que c'est respectueux envers les
élus municipaux. Tous les élus municipaux l'ont été
démocratiquement. Ils doivent avoir les mêmes pouvoirs. On doit
leur parier avec le même
langage. Ce n'est pas cela qu'on fait. Et, mon inquiétude est de
savoir comment on va le vivre à Québec et à
Montréal? (20 h 45)
J'ai commencé par Québec. Je n'ai pas beaucoup de temps.
Québec, aussi, a été citée, je pense, par tous les
groupes, en tout cas, par les groupes nationaux. Le danger, pour la ville de
Québec, toutes proportions gardées, est aussi grand sinon plus
qu'à Montréal, dans les quartiers centraux. Donc, pourquoi on
oublie Québec, alors que, non seulement le danger est à nos
portes, mais que c'est commencé. C'est tellement commencé que je
vous ai cité une lettre d'une citoyenne qui habite pas loin de
l'Hôtel du Parlement et qui est menacée d'éviction. Je dois
vous dire que, depuis le dépôt de la loi, elle ne doit
certainement pas se sentir en sécurité, y compris les gens du
même édifice, parce que, là, on vient de permettre,
connaissant la volonté politique des élus municipaux de
Québec, d'aller dans ce sens-là. Ils sont même venus nous
le dire en commission parlementaire. Alors, imaginez-vous les
déménagements qui vont se faire ici parce que ce sera
autorisé.
Vous saviez l'inquiétude qui était manifestée sur
l'augmentation automatique qui arrivera au logement. On va y revenir à
l'étude article par article. L'augmentation des coûts va se
répercuter et les locataires vont devoir partir de toute façon.
Les gens qui déjà mettent 30 %, 35 % et 40 % de leur revenu en
logement, il s'agit d'augmenter un peu et ils ne pourront plus rester. Ils vont
devoir déménager dans d'autres quartiers. Donc, ce n'est pas par
choix, c'est par obligation.
À Montréal, il est déjà question à la
suite d'échanges que j'ai eus et des choses que j'ai entendu dire et qui
se sont confirmées, d'ici à quelque temps, de diviser le
territoire en une douzaine d'arrondissements. Ce sera en termes
d'arrondissements, en termes de quartiers, en termes d'unités; ce sera
cas par cas pour les citoyens, je ne parle même plus des
Québécois sur le territoire du Québec, je parle des
Québécois sur le territoire de Montréal. Même les
Montréalais n'auront plus maintenant possibilité égale en
termes de locataires, en termes d'accès à la
propriété. Tout dépendra s'ils sont sur la bonne rue, dans
le bon arrondissement. Ce sera maintenant discrétionnaire aux
municipalités. Imaginez-vous la pression quand les gens sauront
qu'à Lavai et à Longueil, ils peuvent faire ce qu'ils veulent y
compris les spéculateurs. À Montréal, ils pourront, s'ils
réussissent à faire de bonnes pressions, à changer un
arrondissement... Quand une municipalité de la Communauté urbaine
de Montréal décidera - que ce soit Rivière-des-Prairies,
que ce soit Verdun, Montréal - que, sur son territoire, elle a une
politique différente, pour amener plus de développement pour
attirer davantage des gens de l'extérieur ou des gens de
Montréal, il y aura une politique différente pour chacune des
municipalités.
Cela pourrait même aller - et je ne pense pas charrier, mais il
faut tout envisager ici - jusqu'à faire en sorte que la ville de Verdun,
pour moderniser davantage, attirer plus de gens, prendre plus d'importance dans
le sens de la Communauté urbaine de Montréal, ait un programme de
rénovations, comme il y en a un pour bonifier PAQ. Un programme encore
plus généreux si cela aboutissait à de la
copropriété. Qu'est-ce qu'on a à faire? Rien, parce qu'on
est en train de transférer, du ministre à la
Société d'habitation du Québec, les pouvoirs, des
programmes de rénovation et, surtout, maintenant, des programmes
où les objets de décision en matière de conversion aux
municipalités de façon indépendante, individuelle, comme
des rivales peut-être sur l'île de Montréal pourront,
à partir de maintenant, décider d'aller s'arracher une
clientèle. Et quand on s'arrache une clientèle au prix du
développement et de la spéculation, quand on connaît la
situation des plus démunis à Montréal, quand on sait que
plus de 70 % sont des locataires et que, de ce nombre-là - on le
retrouve dans Lever le moratoire, une décision qui s'impose - plus de 80
% ne sont pas intéressés à devenir propriétaires,
c'est Inquiétant. C'est inquiétant pour ce qui arrivera. Je pense
qu'on aurait dû, comme a dit mon collègue de Terrebonne, avant de
lever le moratoire, si jamais c'était cela qui était la bonne
décision, faire au moins deux choses. Une qui a été
dénoncée, c'est le manque d'étude. Il n'y avait pas
d'étude dans le livre qui a été déposé, et
là, on vous amène une loi qui n'est pas plus reliée
à des études. Donc, sans étude, c'est une première
inquiétude à mon avis, surtout sans politique globale
d'habitation.
Cela va nous donner quoi à l'avenir une politique globale
d'habitation ou une politique de la famille? De venir corriger des erreurs
qu'on est en train de passer; donc, au printemps prochain, on corrigera des
erreurs qu'on est en train de légiférer présentement en
hiver. Je vous le dis le plus sincèrement du monde parce que je le pense
et que les gens sont venus nous le dire. Je suis allé en rencontrer
cette semaine pour voir si j'étais le seul à penser cela. Je me
rends compte que je suis peut-être le porte-parole de bien plus de gens
que vous ne pensez. Je n'irai pas faire d'assemblées publiques à
Montréal pour les soulever. Je veux essayer de soulever votre
intérêt sur le fait qu'il y a un danger. Il ne faudrait pas
attendre d'être obligé d'aller arracher aux villes un pouvoir
qu'on leur a donné, parce qu'on va s'apercevoir que cela va être
appliqué comme une mesure de compétition entre les villes, l'une
par rapport à l'autre, surtout dans les grandes agglomérations
métropolitaines. Surtout, ici, dans la ville de Québec, des gens
démunis, des gens isolés ne pourront peut-être pas se
regrouper, ne pourront peut-être même pas être en mesure de
profiter des règlements, et surtout, du fait qu'il n'existe pas de
véritables
mesures de protection pour les locataires, ils seront
délogés. On fera des gens de plus en plus pauvres et de plus en
plus malheureux au Québec. Vous allez me dire que ce n'est pas une
majorité. Sauf que notre rôle est de s'occuper des plus
démunis aussi, et même peut-être en priorité. Dans le
projet de loi, ce n'est pas eux qu'on aide.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Shefford. M. le ministre.
M. André Bourbeau (réplique)
M. Bourbeau: M. le Président, je n'ai pas jugé bon
tantôt de répliquer à l'intervention du
député de Terrebonne parce qu'il n'y avait vraiment rien de
substantiel et qu'il était manifeste qu'il était venu simplement
écouler vingt minutes du temps de la commission pour disparaître,
aussitôt son boniment terminé. Évidemment, l'intervention
du député de Shefford est plus substantielle et traite du
sujet.
Je suis toujours un peu étonné d'entendre le
député de Shefford lorsqu'il prend la parole sur des sujets
d'habitation. Je dois dire qu'a priori on est porté à lui faire
confiance et à admettre, à l'entendre qu'il semble très
convaincu de ce qu'il dit. Quant à moi, je suis toujours porté
à écouter ses discours avec beaucoup d'attention. Il semble
sincère dans ses propos. Je me demande toujours si vraiment il croit
exactement ce qu'il dit ou si c'est le manque d'expérience, le manque de
vision qui l'empêche de voir les choses de la même façon que
nous. De toute façon, je reconnais que les propos du
député de Shefford émanent de ses convictions profondes et
j'aimerais bien pouvoir le convaincre d'une autre vision des choses. Je ne
désespère pas de pouvoir y arriver un jour.
Je relèverai seulement certains des propos qu'il a tenus. Le
député de Shefford nous parle de la façon de vivre des
Québécois. Nous sommes un peuple qui avons nos propres habitudes.
Ce n'est pas la même chose au Québec qu'ailleurs. Je reconnais que
les Québécois ont leur spécificité. C'est ce qui
fait d'ailleurs un des charmes de notre société. Il reste que, au
Québec, en dehors de la ville de Montréal et de la ville de
Québec, en dehors des grands centres, la plupart des
Québécois sont des propriétaires. Nous avons à peu
près le même taux de propriétaires au Québec que
dans d'autres provinces, sauf que le problème se pose dans les grands
centres où on a un nombre de locataires beaucoup plus important,
spécialement à Montréal.
Je ne considère pas qu'il soit normal que dans une ville comme
Montréal, nous ayons tout près de 80 % des gens qui soient des
locataires. Je ne pense pas que, si cela reflète la situation qu'un
grand nombre de gens soient des locataires à Montréal, cela doit
nécessairement demeurer ainsi. Est-ce que, parce que,
traditionnellement, les Montréalais ont été des
locataires, on doit dire que c'est leur façon de vivre et qu'ils doivent
nécessairement le demeurer? J'aime à penser que les
Montréalais et les Montréalaises, si on pouvait rendre
disponibles et accessibles des logements pour les loger, dans une certaine
proportion, souhaiterait passer du statut de locataire au statut de
propriétaire. Je refuse de penser que, parce que la tradition a fait en
sorte que les Montréalais soient majoritairement locataires, on doive
nécessairement les condamner à le demeurer.
Le député de Shefford mentionne que l'inflation qui a
sévi au cours de derniers mois et des dernières années a
rendu presque impossible l'acquisition de propriétés pour les
gens qui sont locataires. Je reconnais que c'est exact, que l'inflation a
sévi d'une façon très importante au cours de ces derniers
temps. C'est justement parce qu'on risque de voir cette situation continuer
à se développer, à se maintenir, qu'il faut un jour
permettre aux Québécois d'accéder à la
propriété avant qu'il soit trop tard. Si on avait permis aux
Québécois d'accéder à la propriété en
1977-1978, alors que la valeur des immeubles a chuté dramatiquement
après l'arrivée au pouvoir du Parti québécois,
à ce moment-là, les Québécois auraient pu
accéder à la propriété de logements à
très bon compte. Le phénomène s'est produit de nouveau en
1982-1983, lors de la récession qui a frappé le Québec.
Encore là, si le moratoire avait été levé, on
aurait pu accéder à la propriété de logements de
bonne qualité à des coûts vraiment exceptionnels. J'ai
souvenance d'avoir vu, ayant pratiqué la profession de notaire, des
immeubles se vendre à des coûts vraiment ridicules par rapport
à la valeur qu'ils ont aujourd'hui. Et c'est malheureux qu'on n'ait pas
pu profiter à ce moment-là de ces circonstances pour permettre
à nos Québécois d'accéder à la
propriété.
Aujourd'hui, les prix ont monté. Cependant, par les temps qui
courent, on se rend compte que le taux de vacance augmente, et il n'est pas
impossible que, dans les prochains mois dans la prochaine année, on ait
une diminution de l'évaluation des immeubles et que ce soit très
propice à l'acquisition de logements par les locataires. L'immobilier
étant ce qu'il est, on sait que, sur une période de temps, que
cela prenne cinq, dix ou quinze ans, tout logement, tout immeuble acquis
prendra nécessairement de la valeur. Et cette valeur peut s'accumuler au
profit d'un spéculateur, d'une grosse compagnie, mais elle peut
s'accumuler aussi au profit de Québécois et de
Québécoises à moyens très modestes qui, s'ils ont
la chance d'être propriétaires, pourront accumuler du capital. Je
pense que le député de Shefford ne peut demeurer insensible
à ces propos. Si on peut faciliter l'accès à la
propriété à ces Québécois et à ces
Québécoises à revenus modestes ou moyens, je pense qu'on
aura fait oeuvre utile.
Je signale au député de Shefford que cette
spéculation, qu'il condamne et qu'il déplore, se
produit dans le système actuel qui existe tel que nous l'avons
présentement avant l'adoption de la loi, système qui existait
sous le Parti québécois aussi, et que c'est la législation
en cours depuis quelques années qui a permis ou qui... En fait, c'est
sous cette législation que la spéculation sévit et ce
n'est pas le projet de loi que nous avons devant nous qui va augmenter la
spéculation parce que, entre autres, nous consolidons la position des
locataires. Ce n'est certainement pas une mesure pour augmenter la
spéculation. Au contraire, je dirais que, si certains
propriétaires voulaient profiter de situations pour tenter
d'évincer des locataires pour augmenter la valeur de leur immeuble, ils
viennent de recevoir un préavis que cela va être difficile
dorénavant d'évincer des locataires. Donc, je pense que nous
passons à des mesures qui devraient avoir pour effet de contrer la
spéculation plutôt que de l'augmenter.
Un autre point que je voudrais souligner, c'est que le
député de Shefford nous fait un grief d'arriver avec une solution
qui ne traite pas toutes les régions du Québec sur le même
pied. Il nous dit: Nous avons deux poids, deux mesures. Moi, ce que je
réponds au député... Le député dit: Vous
êtes un peu opportuniste, vous avez regardé ce que les gens sont
venus dire devant la commission parlementaire et vous tentez de faire plaisir
à tout le monde. C'est à peu près les mots qu'il a
prononcés. C'est une façon de voir les choses qui n'est pas
très flatteuse pour le ministre des Affaires municipales et pour le
gouvernement, mais on peut voir le problème sous cet angle-là. On
pourrait également dire que c'est un projet de loi très
réaliste qui tente d'être le reflet de la situation telle qu'elle
existe au Québec.
Le député, tantôt, s'est fait l'avocat d'une
solution unique pour le Québec, d'une solution qui traiterait toutes les
régions du Québec, d'une solution mur à mur pour
l'ensemble du Québec. Alors, je dis au député de Shefford
que, si jamais Dieu lui prête une assez longue vie, qu'il accède
à des fonctions ministérielles et que, par hasard, son futur chef
lui confie les responsabilités du ministère des Affaires
municipales, il devra changer de philosophie, et très rapidement, parce
que les municipalités du Québec, les régions du
Québec vont lui dire que le Québec n'est pas pareil partout et
que les solutions mur à mur, cela ne passe plus au Québec. La
réglementation qui fait que c'est la même chose partout, de Granby
à Chicoutimi, du Bas-du-Fleuve jusqu'en Abitibi, cela ne fonctionne
plus. (21 heures)
Le Québec n'est pas pareil partout et on doit s'ajuster à
la réalité québécoise. La réalité
québécoise, surtout en habitation, n'est pas la même
à Montréal qu'en province. Ce n'est pas du tout la même
problématique. C'est ce que les gens sont venus nous dire en commission
parlementaire. C'est vrai, le député l'a dit. On nous a dit:
À Montréal, cela se passe de telle façon.
L'ensemble des autres municipalités au Québec nous a dit:
Non, chez nous, ce n'est pas de la même façon que cela se passe.
Les problèmes ne sont pas les mêmes, donc les solutions ne peuvent
pas être les mêmes. C'est une question de philosophie. Le
député a une conception technocratique et centralisatrice de la
politique. Nous, nous avons une philosophie différente qui, je pense,
reflète davantage la diversité du Québec.
Maintenant, le député s'inquiète beaucoup du projet
de loi. Il prétend que la loi n'a pas été
précédée d'études. Je dirais que, s'il y a un
dossier qui a fait l'objet d'études et qui a aussi été le
résultat de la compilation des études faites par d'autres dans
d'autres pays, non seulement en Amérique, mais en Europe, c'est bien ce
dossier-ci. Nous avons pris beaucoup de temps à présenter le
projet de loi. Le député nous l'a même reproché
à de nombreuses reprises. Mais je dirais qu'il y a peu de lois qui ont
été présentées depuis quelques années
à l'Assemblée nationale qui ont fait l'objet d'autant
d'études et d'une préparation aussi minutieuse. Nous avons
consulté pratiquement tout ce qui s'est écrit sur le sujet en
Occident. Nous avons des piles d'études à la Régie du
logement et à la Société d'habitation du Québec.
Nous avons dépouillé tout ce qui s'est fait, tout ce qui s'est
écrit. Nous avons même été faire un voyage, aux
frais des contribuables - je n'ai pas honte de le dire - l'an dernier avec le
président de la Société d'habitation du Québec pour
interroger sur place des hauts fonctionnaires de certains pays pour
connaître les problèmes d'habitation, pour comprendre et tenter de
connaître comment on résolvait sur place les problèmes de
relation entre locateurs et locataires, les problèmes de contrôle
de logements, les problèmes de transformation en
copropriété dans plusieurs pays européens. Nous avons
tiré nos conclusions. Je dirais que s'il y a une loi qui n'est pas
improvisée, c'est bien celle que nous avons devant nous.
Maintenant, quant aux inquiétudes du député,
j'espère qu'il les partage avec lui-même, parce que je ne vois
vraiment pas beaucoup de gens dans la société, qui semblent les
partager, que ce soit les groupes de locataires, que ce soit les
propriétaires que j'ai rencontrés, que ce soit les chroniqueurs
spécialisés ou les éditorialistes. Il semble que, d'une
façon générale, on soit satisfait du projet de loi et
qu'il n'y ait pas beaucoup d'appréhensions présentement dans la
société quant au projet de loi que nous avons devant nous.
M. le Président, j'ai été un peu long, moins long
que le député de Shefford et surtout moins long que le
député de Terrebonne, mais je pensais qu'il était
important de replacer les propos que j'ai entendus dans un contexte un peu plus
réaliste. Merci.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
ministre. Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui veulent
intervenir? M. le député de Shefford?
Discussion générale
M. Paré: De toute façon, cela va revenir en cours
de route, à l'étude article par article, mais si on peut le
passer tout de suite, cela va peut-être accélérer le reste.
Vous dites que c'est comme si on essayait de vendre ou de louanger la
proportion de locataires à Montréal et la situation d'être
locataires, ce n'est absolument pas le cas et vous le savez très bien.
Je l'ai dit et répété à maintes reprises,
l'Idéal serait que tous ceux qui le veulent puissent être
propriétaires, sauf que ce n'est pas la situation et, dans le projet de
loi, on ne retrouve rien qui va favoriser l'accès à la
propriété, à mon avis. Quand vous dites qu'on aurait pu
profiter de certaines années creuses' pour favoriser l'accès
à la propriété, je vais vous dire que ce n'est pas quand
cela va mal que les gens ont les moyens, spécialement les plus
démunis qui ne sont pas certains de leur job. Toutefois, grâce
à la mise en place de programmes depuis 1976, il y a maintenant de 53 %
à 55 % des gens qui sont propriétaires. Il y a quand même
eu des programmes qui ont permis aux gens de devenir propriétaires, mais
il n'en existe plus de ces programmes-là.
Donc, oui pour l'accès à la propriété, mais
pas sur le dos des autres personnes et avec des programmes d'accès qui,
selon ce que vous nous avez laissé entendre, viendraient. On ne le
retrouve pas là-dedans. Probablement que cela va venir plus tard,
seulement au prochain budget. Sauf que, d'ici là, il peut y avoir des
changements qui vont se faire de façon importante dans certains
quartiers, dans certains coins.
Vous disiez dans vos remarques que, finalement, vous reconnaissiez que
l'inflation avait été passablement énorme, mais je ne vous
parle pas d'inflation. L'inflation, cela a été une moyenne de 4 %
et quelque chose. Je ne parle pas d'inflation, je parle de spéculation.
L'augmentation, c'est sur le prix des maisons à Montréal, qui a
été de 18 %, 20 %, 22 %, 30 %, 40 % et même de 200 % dans
certains cas, sur les mêmes bâtisses en l'espace d'une
année. Vous connaissez certainement des cas, sinon je peux vous en
montrer qui ont augmenté de 200 % en l'espace de deux ou trois ventes.
Ce n'est pas de l'inflation, mais de la spéculation. Cela se passe
encore et cela va certainement se passer malgré ce qu'on vient de
présenter, à mon avis, parce que ce sera encore... On y reviendra
dans un article. Je vous ai déjà soumis une façon, qu'on a
trouvée à Montréal, de contourner la loi qui n'est
même pas adoptée. En plus, il peut y avoir des arrondissements
où ce sera levé, donc cela va se faire de toute façon. Je
ne parle donc pas d'inflation, mais de spéculation. La
spéculation n'a jamais été aussi forte que depuis qu'on a
manifesté l'intention de lever le moratoire. Vous allez être
obligé de le reconnaître.
M. Bourbeau: M. le Président, je me rends compte que j'ai
peut-être, par erreur, tout à l'heure employé le mot
"inflation" alors que, manifestement, je faisais allusion à la
spéculation foncière. Alors, je remercie le député
d'avoir porté à mon attention cette erreur que j'ai pu faire dans
les mots que j'ai prononcés.
Maintenant, pour ce qui est d'une politique d'habitation, le
député sait fort bien que nous sommes en train de préparer
une politique d'habitation qui intégrera, bien sûr, la philosophie
véhiculée par le projet de loi devant nous. Pour ce qui est des
programmes d'aide à l'accès à la propriété,
évidemment, avant de pouvoir parler de programmes d'accès
à la propriété, il faut au moins que le cadre juridique
permette l'accès à la propriété dans les logements
existants. Alors, la démarche que nous faisons maintenant, c'est de
planifier une loi, d'adopter une loi qui permettra éventuellement
l'accès à la propriété de logements existants. Si
le gouvernement décide ultérieurement d'annoncer des programmes
d'aide, la loi pourra permettre justement l'accès à la
propriété dans des logements du type de ceux dont on parle
présentement.
Étude détaillée
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre.
Sur ces remarques, j'appelle maintenant l'article 1.
M. Bourbeau: J'aurais certains commentaires à faire sur
l'article 1, M. le Président.
M. Paré: Est-ce que je peux juste poser une question de
règlement ou de fonctionnement? Prenez-le comme vous voulez, M. le
Président. Étant donné qu'il y a onze articles, mais
énormément de paragraphes qui sont tous très importants
parce qu'on touche des articles d'autres lois et qu'il y a même des
amendements qui ne viennent pas modifier un article, mais un paragraphe d'un
article, j'aimerais qu'on l'étudié paragraphe par paragraphe.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vais appeler l'article 1.
Lorsque nous serons rendus à ce à quoi vous vous
référez, M. le député de Shefford, à
l'article 2, s'il y a consentement de la commission, on pourra appeler 51, 52,
53, 54, etc.
M. Paré: D'accord. Cela va.
Le Président (M. Saint-Roch): Sur ce, nous revenons
maintenant à l'article 1. M. le ministre.
Loi sur la Régie du logement
M. Bourbeau: La Régie du logement a juridiction exclusive
pour décider des demandes relatives à la section de la loi qui
contient les dispositions particulières à la conservation des
logements. En conséquence, la régie, à l'exclusion de tout
autre tribunal, doit décider de toute demande relative à la
conversion d'un immeuble locatif en copropriété divise.
Toutefois, de par sa loi constitutive, la régie a comme mandat d'agir et
d'intervenir seulement dans le cadre des relations locataires et locateurs.
L'article 1 du projet de loi soustrait donc de la juridiction de la
Régie du logement les demandes découlant de la sous-section sur
la conversion visant à faire sanctionner l'inexécution d'une
obligation du vendeur vis-à-vis de l'acheteur ou vice versa.
Ainsi, ce n'est pas devant la régie, mais devant les cours de
justice ordinaires que devront s'exercer les recours découlant du
défaut du vendeur de remettre à l'acquéreur
éventuel d'un logement le rapport d'expert ou la Circulaire
d'information, articles 54.5 et 54.6, alinéa 4, et le défaut du
locataire ayant décidé d'exercer son droit de préemption,
de passer l'acte de vente dans le délai prévu, article 54.6,
alinéa 3. Il en va de même si l'acheteur demande, en vertu de
l'article 54.10, la réduction de ses obligations,
généralement la diminution du prix de vente.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Shefford.
M. Paré: Cela va pour l'article 1.
Le Président (M. Saint-Roch): L'article 1 est-il
adopté?
M. Paré: Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): J'appelle maintenant
l'article 2, le sous-article 51.
M. Bourbeau: M. le Président, j'aurais un amendement.
Le Président (M. Saint-Roch): Oui, et nous avons un
papillon.
M. Bourbeau: J'aimerais faire un commentaire en premier lieu. Je
présenterai l'amendement ensuite.
Cet article établit le cadre général dans lequel
pourra s'effectuer dorénavant la conversion en copropriété
divise. Le premier alinéa maintient la nécessité d'obtenir
l'autorisation de la Régie du logement pour pouvoir convertir un
immeuble comportant un logement, mais étend cette juridiction aux
immeubles en ayant déjà comporté un au cours des dix
années précédant la demande. Cette juridiction accrue
empêchera le recours au jugement déclaratoire de la Cour
supérieure qui permet actuellement de convertir lorsque l'immeuble ne
comporte plus de locataire à la suite de travaux majeurs ou de
circonstances ayant conduit à leur départ. On bloque ainsi une
des échappatoires au moratoire actuel où ce trou dans la Loi sur
la Régie du logement constituait une invitation à
l'éviction des locataires pour pouvoir convertir.
M. le Président, j'aimerais proposer...
Je vais continuer, M. le Président. Le deuxième
alinéa vise à interdire la conversion pour des raisons
évidentes: des immeubles qui bénéficient d'aide dans le
cadre d'un programme gouvernemental, le but de cette aide étant de
constituer un parc de logements pour des clientèles
spécifiques.
Les anciens troisième et quatrième alinéas,
réunis par le papillon que je vais proposer en un seul alinéa,
instaurent un double régime de conversion afin, d'une part, de mieux
protéger le parc de logements locatifs et, d'autre part, de respecter
les voeux des municipalités et de leur confier une responsabilité
en matière de contrôle de la conversion sur leur territoire
puisqu'elles sont les mieux placées pour juger de son
opportunité. Ce double régime vise à interdire la
conversion dans les municipalités de la Communauté urbaine de
Montréal, sauf dérogation accordée par résolution
du conseil s'il est convaincu de son opportunité. L'article 54.11
réfère ici à la procédure que devra suivre le
conseil pour accorder une telle dérogation.
Le double régime vise également à permettre la
conversion dans les autres municipalités, mais leur permettre d'adopter
un règlement pour restreindre ou soumettre la conversion à
certaines conditions, dont le consentement du conseil qui pourra juger de
l'opportunité de la conversion. L'article 54.12 réfère ici
à la procédure à suivre pour des municipalités.
Finalement, la dernière phrase de cet article vise à
soustraire les indivisaires qui occupent tous les logements de leur immeuble de
la juridiction municipale puisqu'il n'y a plus de logements locatifs à
protéger. Cependant, les indivisaires devront demander l'autorisation de
convertir en copropriété divise à la Régie du
logement afin que cette dernière s'assure qu'il n'y a pas eu de reprise
de possession illégale, comme nous le verrons à l'article 54.2.
Le dernier alinéa de l'actuel article 51, relatif à la radiation
possible d'un enregistrement de déclaration de copropriété
sans l'autorisation de la régie, se retrouvera plutôt à
l'article 54.8 par souci de regrouper ensemble les articles accordant des
recours.
M. le Président, l'amendement que je voudrais apporter à
l'article 2 réfère à l'article 51 de la Loi sur la
Régie du logement et consiste à réunir les deux derniers
alinéas en un seul.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre.
M. le député de Shefford.
M. Bourbeau: M. le Président...
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Bourbeau: Les raisons de cet alinéa qui propose de
réunir les deux derniers alinéas en un seul, c'est que cette
modification est nécessaire pour réunir les troisième et
quatrième alinéas en un seul afin de permettre dans les
municipalités de la Communauté urbaine de Montréal comme
dans les autres municipalités la conversion en copropriété
divise d'un immeuble dont tous les logements sont occupés par des
propriétaires indivis. Ceux-ci ne seront pas obligés de passer
par la municipalité étant donné qu'il n'y a plus de
locataire dans les lieux et qu'il ne s'agit que de passer pour les indivisaires
occupants à un système d'organisation juridique différent.
Ceci était l'intention de départ comme en fait foi l'information
que nous avons donnée à la sortie du projet de loi.
Malheureusement, elle ne s'est pas traduite ici en raison d'une erreur dans
l'impression du projet.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a des
commentaires?
M. le député de Shefford.
M. Paré: Est-ce qu'on discute sur l'amendement?
Le Président (M. Saint-Roch): Sur l'amendement. (21 h
15)
M. Paré: Le fait de réunir finalement les deux
derniers alinéas en un seul, on dit: "elle est interdite dans les
municipalités de la Communauté urbaine de Montréal, sauf,
c'est exactement ce que je disais tantôt: Montréal, non, sauf; et
l'autre: les autres municipalités du Québec, oui, mais.
Finalement, on les regroupe. On vient confirmer ce que je disais tantôt.
On donne le même pouvoir aux municipalités de décider sur
leur territoire. Donc, on transfère une responsabilité qui
relevait de Québec aux municipalités, le même pouvoir
finalement à toutes les municipalités sauf que, dans la vision,
dans le discours, dans ce qui a été dit, ce qui a
été publicisé, ça laisse entendre qu'on a exclu
Montréal. On lui donne un traitement différent. On lui donne,
d'une certaine façon, un traitement différent dans le sens
qu'elle doit aller par dérogation alors que les autres doivent aller par
règlement. Par dérogation pour le permettre, alors que l'autre,
c'est par dérogation pour l'empêcher. Les deux
municipalités...
M. Bourbeau: Je voudrais signaler au député qu'il
ne parle pas présentement sur l'amendement. Vous pariez sur le fond.
M. Paré: Sur l'amendement.
M. Bourbeau: Bien non l'amendement. M. le Président, je
soulève une question de règlement.
M. Paré: Réunir les deux derniers
alinéas.
M. Bourbeau: L'amendement ne fait que réunir les deux
derniers alinéas pour faire en sorte que la dernière phrase du
dernier paragraphe "le présent alinéa ne s'applique pas à
l'immeuble dont tous les logements sont occupés par des
propriétaires indivis" s'applique non seulement aux immeubles qui sont
situés hors la CUM mais également à la CUM. L'amendement
vise seulement à dire que les proriétaires indivis, ceux qui sont
en indivision actuellement dans des immeubles où il n'y a aucun
locataire, seulement des propriétaires indivis occupants, ces
gens-là n'auront pas besoin de passer par la municipalité. Ils
pourront se diriger directement à la Régie du logement. Et ce
privilège-là s'applique non seulement aux gens hors CUM mais
également à la CUM.
Je ne veux pas empêcher le député de parler sur le
fond du projet de loi, mais en ce qui concerne l'alinéa, c'est
uniquement pour les indivisaires.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci de ces explications,
M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres questions sur l'amendement?
M. Paré: Non, sur l'amendement ça va aller. Je
reviendrai sur le fond du...
Le Président (M. Saint-Roch): Cela va. Est-ce que
l'amendement est adopté?
M. Paré: Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): Nous en revenons à
l'article 51 de la Loi sur la Régie du logement.
M. Paré: Moi aussi j'aurais un amendement. D'accord. Donc,
sur le fond. Je vais continuer ce que j'avais commencé à dire.
Par ces deux paragraphes-là - je vais continuer sur ceux-là et je
reviendrai sur les autres tantôt - on vient reconnaître que
finalement, toutes les municipalités pourront se retrouver exactement
avec le même régime. Il pourrait arriver que Montréal
décide que pour tel arrondissement, il n'y a pas de problème.
Longueuii pourrait décider de la même façon que pour tel
arrondissement, il n'y a pas de problème parce qu'ils n'ont pas
présenté une réglementation l'interdisant, alors que
l'autre va présenter des dérogations pour le permettre.
Donc, c'est un pouvoir qu'on transfère aux municipalités
mais on le transfère comme si c'était différent, comme je
vous le disais tantôt, parce que ça passe mieux. Cela permet
à Montréal de dire qu'elle a obtenu gain de cause, sauf que je me
rappelle ce que la ville de Montréal avait dit en commission
parlementaire. Elle
n'avait pas demandé la totale responsabilité. Elle avait
demandé d'être consultée, d'avoir son mot à dire
dans une responsabilité qui relèverait d'un organisme, la
Régie du logement, alors que ce qu'on dit maintenant: On en donne plus -
la petite phrase populaire - que le client n'en demande. C'est bien sûr
que Montréal ne refusera pas quelque chose qu'on lui donne comme
ça. Québec ne refusera pas non plus un pouvoir qu'on lui donne
comme ça puisqu'elle l'avait demandé. Québec avait
demandé qu'on lève le moratoire, pas nécessairement la
responsabilité, la levée du moratoire, pour s'assurer qu'on
n'aura pas de critiques là-dessus. C'est normal qu'il n'y ait pas de
critiques quand on demande - je ne sais pas moi - une tarte au sucre et qu'on
nous l'apporte avec deux boules de crème glacée. Normalement, si
le client ne veut pas la crème glacée, il va la mettre de
côté mais il a sa tarte. Là, c'est un peu la même
chose, sauf que J'aimerais que vous m'expliquiez - je pense que c'est important
que les citoyens le sachent - le contrôle. Autrement dit, il n'y aura
aucun contrôle, peu importe ce qui va se passer dans les
municipalités. Cela devient de responsabilité municipale. Qu'il y
ait des municipalités, à un moment donné... C'est
sûr qu'on met, à un moment donné, en tenant compte de
certains critères... Sauf qu'en tenant compte, ça demeure sous
la... Étant donné qu'on ne dit pas que le ministère, la
Société d'habitation du Québec ou la Régie du
logement peuvent avoir un droit de regard sur la réglementation ou la
dérogation, ça pourrait être n'importe quoi. Donc s'il y a
exagération... Si, à un moment donné, Montréal
décidait que, pour toutes sortes de raisons, son taux de vacance
admissible est de 0,5 %, pour pouvoir concurrencer Laval et Longueuil, parce
que les citoyens ne seront plus considérés de la même
façon, qui pourra intervenir quand on sait qu'à l'heure actuelle,
quand la Régie du logement devra considérer la
réglementation d'une municipalité ou la dérogation en
vertu d'un avis ou d'une demande, elle devra seulement regarder si, dans la
demande, l'avis de conversion est conforme à la réglementation.
Donc, elle n'a aucun contrôle sur la réglementation ou la
dérogation, mais seulement un droit de regard sur la conformité
de l'avis avec la réglementation.
Cela veut dire que, finalement, il y a responsabilité totale,
mais s'il y a exagération, que fera-t-on? On fera une loi
spéciale pour s'en prendre à une ou à quelques
municipalités ou une loi qui viendra défaire cela en disant que
le gouvernement reprend la responsabilité parce qu'on s'aperçoit
qu'il y a exagération. La Régie du logement n'a aucun droit de
regard, à mon avis - si je me trompe, dites-le moi - tel que cela est
libellé, tel que je l'interprète, aucun droit de regard sur
aucune décision municipale. Le seul droit de regard de la Régie
du logement concerne la conformité de l'avis de conversion.
Si c'est cela, Je veux seulement que cela me soit confirmé, mais
je n'en démord pas: premiè- rement, ce qu'on est en train de
faire, c'est donner un pouvoir qu'on avait aux municipalités. Ce n'est
pas le fait de céder qui n'est pas correct, c'est le fait de s'en laver
les mains et de remettre cette situation qui, à plus d'un point de vue
maintenant est suffisamment chaude, aux municipalités qui devront
maintenant trouver une façon de la régler sur leur territoire,
sachant très bien que c'est plus facile pour des groupes de citoyens,
des associations de faire des pressions ou d'amener des changements à
des règlements municipaux, à des décisions municipales,
aux conseils municipaux, que de venir faire des pressions ou de demander des
modifications à Québec.
On sait ce que cela veut dire comme changement à Québec.
Cela veut dire une nouvelle loi, un "bill" privé qu'il faut attendre, un
"bill" omnibus à un moment donné en cours d'année ou cela
veut dire une loi privée pour changer la loi d'une municipalité.
Or, ce n'est plus cela. La municipalité n'a pas à venir chercher
d'autorisation par le biais de la loi. On lui donne la liberté totale,
si ses citoyens ne sont pas d'accord, nous, on n'aura plus de moyen
d'intervention, si les citoyens veulent, on sait à quel point c'est
facile et vous en êtes bien conscients, demander à une
municipalité un changement de règlement de zonage.
La preuve, c'est que, chez nous comme ailleurs, des demandes de
modifications au zonage, cela se fait sur une base presque, tout dépend
de la fréquence à laquelle les conseils municipaux
siègent, hebdomadaire ou mensuelle. Il s'agit d'avoir les avis, de les
annoncer et ensuite de les voter. Cela se passe régulièrement et
il y a des exemples selon quoi cela ne se passe pas seulement dans des petites
municipalités où, très souvent, il n'y a même pas de
quotidien, de poste de radio et où, finalement, l'information passe par
un hebdo quand il n'est pas trop tard, en tout cas, si les gens ne l'ont pas
vu, c'est passé. Mais, même dans des villes comme Québec,
vous avez vu ce qui s'est passé avec l'îlot Saint-Patrick, vous
voyez ce qui se passe avec la "Grande Place" ici, en bas, ce sont des
règlements de zonage et, même s'il y a des groupes qui finalement
amènent des objections, cela n'empêche pas qu'on le fait quand
même. Donc, des changements municipaux a la réglementation de
zonage, c'est quelque chose en soi de passablement facile, beaucoup plus facile
qu'une loi à Québec.
On donne des pouvoirs aux municipalités dans ce sens-là
sans contrôle de personne, à moins que je ne me trompe. C'est
libre aux municipalités d'amener la réglementation et finalement,
en plus de donner un pouvoir, on donne le même pouvoir à toutes
les municipalités, mais on le dit d'une façon différente
pour arriver au même résultat. Donc, la Communauté urbaine
de Montréal finalement n'a pas de cadeau en soi plus que le reste. Ce
sont exactement les mêmes pouvoirs. On le dit d'une façon
différente
dans la loi, on laisse entendre que c'est différent, alors que,
à mon avis, non pas nécessairement quand on lit le texte, mais
quand on regarde les résultats sur le terrain, comment cela va se passer
en réalité dans les municipalités, elles auront les
mêmes pouvoirs, une va passer une réglementation pour interdire,
l'autre, pour permettre, pour arriver au même résultat en fin de
compte.
Je ne sais pas si je dois continuer et le ministre répondra
à cette question-là, mais j'ai une question, et je pourrai
continuer ensuite sur d'autres points. Est-ce que c'est l'interprétation
que je donne qui est juste, que le seul organisme qui ait un droit de regard
sur la réglementation des municipalités, autant de la
Communauté urbaine de Montréal que les autres, c'est en regardant
la réglementation en conformité avec l'avis, mais rien d'autre
sur le fond de la réglementation.
M. Bourbeau: L'avis. Quel avis?
M. Paré: L'avis de conversion. On dit plus loin que la
Régie du logement, avant d'émettre l'autorisation, devra
s'assurer que l'avis de conversion est conforme à la
réglementation municipale.
M. Bourbeau: Ce qu'il est important de comprendre, c'est qu'il y
a deux niveaux de décision dans le processus de conversion. Je vais
revenir sur les propos du député de Shefford, parce que c'est
quand même important, c'est le coeur même du sujet. Nous avons
choisi, bien sûr, un double régime. Je signale quand même au
député que le système n'est pas le même sur le
territoire de la CUM qu'en dehors du territoire de la CUM. Bien sûr,
l'action des municipalités pourrait éventuellement faire en sorte
que le résultat soit le même. Au départ, on ne part pas
d'une problématique semblable. Ce qui est certain, c'est que, sur le
territoire de la CUM, à moins que les municipalités
n'interviennent, il n'y a pas de conversion possible. Cela prend une action
positive de la part d'une municipalité pour qu'il puisse y avoir
conversion. Or, en dehors du territoire de la CUM, c'est l'inverse qui se
produit. La règle générale, c'est que la conversion est
permise et que cela prend une action positive d'une municipalité pour
que la conversion soit réduite, voire même pratiquement interdite.
On procède d'une position de départ diamétralement
opposée.
Les deux instances qui ont à se prononcer, à supposer que
les municipalités veuillent bien s'intéresser à la chose,
ce sont le niveau municipal et la Régie du logement. Les
municipalités, dans les préoccupations qu'elles auront à
l'égard de ces problèmes, s'occuperont essentiellement de la
protection du stock locatif. C'est autour de cela que porte la
préoccupation de la municipalité. Le règlement municipal
qui devra être voté contiendra des critères qui viseront
à assurer la protection du parc locatif. Dans ce sens, l'avis
d'intention de convertir qui sera envoyé par le propriétaire
à ses locataires ne fera pas l'objet d'analyse de la part de la
Régie du logement, pour savoir si les critères qui tournent
autour des règlements municipaux auront été
respectés. Ce n'est pas le problème de la Régie du
logement de savoir si les règlements municipaux sont respectés -
des règlements de zonage, de construction, etc.
La Régie du logement va se préoccuper de savoir si un avis
a été envoyé, s'il contenait les mentions obligatoires,
c'est-à-dire: avis au locataire de l'intention de convertir, information
au locataire de ses droits en tant que locataire du fait qu'il obtient,
à partir de ce moment-là, le droit au maintien dans les lieux
pour une période illimitée, envoi d'une copie de l'avis à
la Régie du logement pour qu'elle soit informée dès ce
moment-là, interdiction au propriétaire de faire des travaux
majeurs à partir de ce moment-là, autres que ceux qui sont
urgents ou nécessaires, ou des travaux de conservation. Bref, la
Régie du logement va se préoccuper de ces choses-là. Mais,
les problèmes de conformité aux règlements munipaux, cela
ne regarde pas en soi la Régie du logement. (21 h 30)
M. Paré: Cela répond exactement à ce que je
disais. Chaque municipalité, de façon très autonome,
applique une politique d'habitation ou de logement. Même si on a
trouvé que la Régie du logement avait sa place sur le plan des
relations locataires-locateurs, la municipalité a un mot très
important à dire parce que, parmi les facteurs qui risquent de
perturber, de changer des situations ou des relations entre les deux, il y a la
réglementation en fonction de l'autorisation de convertir dans les
municipalités spécialement de la Communauté urbaine de
Montréal. Et dans les municipalités de la Communauté
urbaine de Québec, en ne faisant rien. Mais, dans le cas de la
communauté urbaine de Montréal, c'est en permettant la
conversion. Donc, cela veut dire que la régie appliquera ce qui est de
politique québécoise provinciale, sauf quand il s'agira d'une
réglementation spécifique à la transformation, qui devient
maintenant une réglementation municipale.
M. Bourbeau: M. le Président, je voudrais simplement dire
au député qu'il ne faut quand même pas qu'on s'avance dans
une forêt où tout serait entremêlé. Il faut quand
même que les responsabilités de chacun soient connues et
clairement établies. C'est pour cela que nous avons choisi de faire en
sorte que les responsabilités de la municipalité soient
axées sur la protection du parc locatif et que celles de la Régie
du logement soient axées sur la protection du droit des locataires.
Chacun des deux organismes aura son champ d'activité très
clairement établi et ses objectifs.
Maintenant, je suis étonné que le député
s'étonne que nous continuions à conférer à la
municipalité ces pouvoirs en matière de protection du parc
locatif. Ce sont les municipalités au Québec, actuellement, qui
s'occupent de ces choses-là. Les règlements municipaux sont
là justement pour protéger la société contre les
abus, au titre de la construction des immeubles. La salubrité des
maisons, des immeubles serait l'objet aussi des préoccupations du monde
municipal. Quand on veut construire, on doit demander un permis de
construction. C'est la municipalité qui s'occupe de cela, ce n'est pas
la Régie du logement. Même en matière de démolition,
la Loi sur la Régie du logement permet de transférer aux
municipalités l'autorité en matière de démolition
et la ville de Montréal exerce, actuellement, ce pouvoir. C'est
nettement une préoccupation d'ordre municipal que de voir au secteur de
la construction immobilière, de la réglementation des permis de
construction. Quand on veut faire des modifications, on demande un permis
également à la municipalité. Les inspecteurs municipaux
vérifient les constructions.
Bref, on n'invente rien, dans le projet de loi, en disant que c'est la
municipalité qui, traditionnellement, au Québec, a la
responsabilité du parc locatif, du stock de logements. Cela a toujours
été ainsi, d'une façon générale. Et on ne
fait que confirmer ce rôle très important des municipalités
dans ce domaine. Je dirais au député qu'à mon avis, les
municipalités sont très bien équipées pour
s'acquitter de cette tâche. Elles sont beaucoup plus présentes sur
leur territoire que peuvent l'être quelques fonctionnaires de la
Régie du logement. Le député ne semble pas avoir beaucoup
d'admiration pour la fonction d'élu municipal, il ne semble pas leur
accorder beaucoup de crédit non plus et ne semble surtout pas leur faire
beaucoup confiance.
Je ne suis pas de cette école de pensée. Je pense que les
élus municipaux sont des élus comme nous, qui doivent convaincre
leurs concitoyens de leur compétence et de leur probité. Leurs
concitoyens et leurs électeurs sont encore plus près d'eux que de
nous et peuvent les suivre à la trace, journellement, pour s'assurer
qu'ils s'acquittent bien de leur travail. On dit que c'est le gouvernement qui
est le plus proche du peuple et peut-être celui aussi qui est le plus
sensible aux préoccupations immédiates des concitoyens. Enfin,
c'est celui dont le temps de réponses est le plus rapide, certainement,
en tout cas, aux problèmes des citoyens.
Je pense que les élus municipaux sont certainement mieux
placés pour s'occuper de ces choses-là que les fonctionnaires du
gouvernement du Québec, confortablement assis derrière leurs
pupitres, les pieds installés sur des tapis moelleux et qui, souvent,
n'ont pas beaucoup le temps d'aller faire l'inspection des bâtiments dans
chaque municipalité du Québec. Alors, je dis au
député que, à mon avis, il est préférable de
confier aux municipalités cette responsabilité-là.
Et je signale au député que le Québec n'innove pas
en confiant aux municipalités des responsabilités en cette
matière. D'autres, avant nous, l'ont fait. L'Ontario le fait depuis
longtemps. Les États américains le font: l'État de
New-York le fait également. Et je suis convaincu que si l'on faisait une
étude exhaustive, on trouverait plusieurs juridictions où le
palier municipal s'occupe des questions de conversion.
Bref, M. le Président, je pense que la façon dont nous
avons rédigé le projet de loi, est la bonne façon. Il
semble, de toute façon, que notre point de vue est partagé par la
plupart des observateurs et la voix que fait entendre le député
de Shefford me semble un peu ce qu'on appelle la voix de celui qui crie dans le
désert.
M. Paré: Seulement quelques petits commentaires
là-dessus avant de revenir sur une autre question.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Shefford.
M. Paré: Je dois vous dire que vous pouvez
interpréter, sauf que ce que j'ai dit tantôt, ce n'est pas une
question de manque de confiance. Nous, je pense qu'on a reconnu de façon
très large, et légale à part de cela, la confiance qu'on
avait dans les élus municipaux en leur donnant de plus en plus de
pouvoir par la fiscalité municipale. Je ne reviendrai pas sur tout ce
qui a été fait pour reconnaître les élus municipaux
comme des gens supercompétents. Je ne veux pas faire de comparaison
entre les élus municipaux et les fonctionnaires, je pense que ce sont
tous des gens extraordinaires qui font leur maximum. Pour avoir fait affaire
avec des fonctionnaires de plusieurs ministères, y compris l'Habitation
et la Société d'habitation du Québec, ils font une maudite
bonne "job". Donc, je ne veux pas dire qu'un est meilleur que l'autre, je pense
qu'ils sont tous bons et j'ai confiance dans les élus municipaux. Vous
n'avez pas besoin d'avoir peur, j'étais avec ceux de chez-nous, hier, et
je dois vous dire que je pense qu'ils ont une vision de l'avenir beaucoup plus
planifiée, élaborée et beaucoup plus solide que le
gouvernement du Québec à l'heure actuelle. Parce qu'ils sont en
train de faire la planification sur 25 ans, ce que nous, on ne fait même
pas pour cinq jours, ici. Vous ne me ferez pas dire que je n'ai pas confiance
dans les élus municipaux.
Ce que je dis: Vous pouvez dire qu'on n'innove pas; moi, je vous dis
qu'on innove. Quand vous dites que c'était déjà la
responsabilité des Affaires municipales, je dis non. La preuve, c'est
qu'on est obligé par une loi de leur céder ce pouvoir, cette
responsabilité qu'ils n'avaient pas. Si c'est vrai qu'ils ont la
responsabilité de la rénovation, de l'aménagement et de la
construction dans leur municipalité, on touche là les relations
locataires-locateurs. C'est une responsabilité que nous avions, comme
gouverne-
ment, par la Régie du logement. Il faudrait faire attention.
C'est vrai que cela semble être une zone grise, mais elle était
bien définie, claire, bien acceptée par les autorités
municipales. La preuve, c'est que les municipalités ne nous ont pas
demandé ce champ de responsabilité qu'on est en train de leur
donner. On peut donc tenir des discours comme cela, sauf que les élus
municipaux sont des gens compétents. Je n'ai pas de crainte
là-dessus, sauf qu'un des risques, premièrement, c'est que les
pressions soient plus fortes. Des gens peuvent céder plus facilement
qu'à Québec. Cela cède même jusqu'à
Québec. Imaginez-vous, dans les municipalités avec des projets
d'Investissement considérables, comment on peut changer. On le voit dans
les municipalités par des changements de zonage pour des projets
intéressants. Cela, c'est la première des choses.
La deuxième, c'est que non seulement dans toutes les
municipalités sur le grand territoire québécois, mais
même seulement sur le territoire de la Communauté urbaine de
Montréal, on risque de se ramasser avec une panoplie de
règlements différents entre municipalités. Je prends un
exemple avant de revenir sur un autre sujet. Dans la ville de Montréal,
si on décidait maintenant qu'on permet la conversion par arrondissement,
si le citoyen qui est d'un côté de la rue Papineau par rapport
à son voisin de l'autre côté de la rue Papineau, n'a pas le
même droit, le même pouvoir, la même chance d'accès
à la copropriété parce qu'il n'est pas dans le bon
arrondissement, comment expliquer cela, faire accepter aux gens cette
façon de faire? Imaginez le problème que vont avoir les
élus municipaux alors que ce sera de notre faute, parce que, de loin, on
aura décidé de se décharger du problème. Je trouve
cela inquiétant. C'est cela que je voulais vous soumettre.
Donc, ce n'est pas que je n'ai pas confiance dans les élus
municipaux, c'est qu'ils risquent d'avoir des problèmes graves parce
qu'on est en train de faire dans les municipalités un règlement
qui sera différent d'une municipalité à l'autre et
peut-être même d'un quartier à l'autre. On va faire en sorte
que ce ne sera pas pareil sur le territoire québécois. Donc, les
citoyens ne se sentiront pas avec les mêmes possibilités parce
qu'ils ne seront pas sur la même rue, dans la même ville. De plus,
ce sont des rues qui séparent les municipalités de la
Communauté urbaine de Montréal. Ce n'est pas toujours un fleuve
et ce ne sont pas toujours des distances de 15 ou 20 milles comme on retrouve
en province. C'est une rue qui les sépare.
Là, ils vont se retrouver avec des capacités ou des
possibilités qui seront différentes parce que, de bonne foi
probablement et j'en suis sûr, les élus municipaux auront
décidé une telle réglementation. C'est leur rôle de
le faire. C'est eux qui ont fait du zonage commercial, industriel,
résidentiel. Là, ils auront peut-être un zonage de plus qui
sera du cas par cas ou qui sera par genre d'immeuble: des triplex, des duplex.
C'est eux qui prendront une décision en fonction du mode de logement,
des arrondissements, des quartiers, en fonction de... on verra bien. En
fonction des immeubles peut-être. Vous vous rappelez que les gens de la
municipalité de Montréal étaient venus dire que si une
majorité de locataires dans un immeuble était favorable, on
pourrait aller de l'avant. Cela voudrait dire que sur quinze...
Une voix: C'est un exemple?
M. Paré: Oui, c'est un exemple, mais c'est un exemple qui
amenait quelque chose de faisable et on s'est basé là-dessus. Il
en a été question, on en a même discuté et c'est
là-dessus que d'autres groupes sont venus nous dire leur
inquiétude. Sur quinze logements, s'il y a huit locataires qui sont
d'accord, on transforme. Là, on se ramasse avec sept locataires qui ne
sont peut-être pas satisfaits, qui ont un droit de préemption -
mais cela, on va y revenir plus loin parce que je sais qu'on est
limités, sur cela, on y reviendra - il y aura un autre genre de
problème.
Une autre question que je veux vous poser concerne le premier paragraphe
de l'article 51. On veut protéger maintenant, c'est-à-dire qu'il
faut faire en sorte de reconnaître un édifice qui a eu des
logements au cours des dix dernières années, sauf que, comme on
n'a pas d'enregistrement des baux, l'historique de cela n'est pas facile
à faire. Ce qui me fait penser que vous me donniez l'exemple
tantôt qu'on n'innove pas, qu'en Ontario, ils l'ont déjà.
Moi, je vous dis: Si vous êtes prêts à suivre ce qui se
passe ailleurs, au Manitoba, je pense, et en Ontario, il y a l'enregistrement
des baux, si on veut vraiment appliquer, pour quelle raison on ne l'applique
pas? Si l'exemple de l'Ontario est bon dans certains cas, pourquoi il ne l'est
pas dans ce cas-ci? Cela viendrait faire en sorte que l'historique des
logements serait enregistré, reconnu d'une façon formelle.
M. Bourbeau: M. le Président, le député de
Shefford m'étonne, je ne sais pas s'il s'est promené un peu dans
le Québec. Je pense qu'il n'est jamais sorti de Granby. Il vient de nous
dire, tout à l'heure, que ce sera épouvantable parce que, dans
chaque municipalité, on aura une réglementation
différente, que même dans chaque quartier d'une
municipalité, on aura une réglementation différente. Mais,
M. le Président, c'est ce qui existe actuellement, le
député n'a pas voyagé. Dans les municipalités au
Québec, les règlements de zonage ne sont pas les mêmes
d'une municipalité à l'autre. Même dans les quartiers de
Montréal, on n'a pas des zonages identiques, quand on achète sur
une rue, on a un zonage unifamilial, la rue suivante, on a un zonage
appartement. On n'a pas le droit de construire n'importe quoi, n'importe
où, c'est
cela, le zonage, ce sont les règlements de construction. Ce sont
justement toujours des règlements qui s'adaptent à une
conjoncture locale. Donc, on n'Innove pas en disant que le moratoire va suivre
le même pattern. C'est cela, actuellement, le zonage au
Québec.
Dans les cas de démolition, par exemple, actuellement, les
règlements font en sorte que les municipalités procèdent
cas par cas: chaque cas est étudié à son mérite. On
n'innove pas là non plus, les règlements d'urbanisme ne sont pas
les mêmes dans les municipalités, on a des schémas
d'aménagement. Il n'y a aucun des 95 schémas d'aménagement
au Québec qui ressemble à un autre; on a respecté la
particularité de chacune des régions et les règlements
d'urbanisme locaux et de construction qui vont éventuellement être
adoptés par les municipalités locales, mais s'inspirant des
objectifs du schéma, vont également avoir des
particularités propres. Donc, je ne vois pas pourquoi on voudrait, en
matière de conversion en copropriété, avoir une solution
mur à mur, unique, alors que l'économie même de nos
habitudes en cette matière veut que, dans chaque municipalité, on
ait des règles différentes et même que, dans chaque
quartier, on ait des zonages différents.
Bref, je ne comprends pas la philosophie centralisatrice à
outrance et je dirais même social-démocrate que véhicule le
député de Shefford. C'est vraiment "le coat sur le rack" pour
tout le monde, la même chose, aucun changement. Cela ne s'inspire pas du
tout de notre politique et je ne pense pas qu'actuellement, les
municipalités du Québec soient en demande pour une
législation de ce type-là.
Maintenant quant à l'enregistrement des baux, le
député nous dit: En Ontario, on enregistre les baux, pourquoi ne
faites-vous pas la même chose? Je dirai qu'on n'est pas obligés de
prendre ce qu'il y a de plus mauvais ailleurs. On essaie de s'inspirer de ce
qu'il y a de mieux et ce qu'il y a de plus mauvais, on le laisse là.
L'Ontario a choisi depuis un certain temps d'adopter une politique en
matière de contrôle des loyers qui n'est pas la nôtre.
J'étais, il y a quelques mois, à une réunion où il
y avait le ministre de l'Habitation de l'Ontario et il y avait toute une
série de gens: des experts en immobilier et des gens de la
Société canadienne d'hypothèques et de logement. À
un moment donné, un de ceux qui ont pris la parole a dit devant le
ministre de l'Ontario que, selon eux, la situation qui prévalait au
Québec était de beaucoup supérieure en matière de
relations entre locataires et locateurs qu'en Ontario. On a cité le
Québec en exemple comme ayant un système de beaucoup
préférable en ce sens qu'en Ontario, on contrôle tous les
logements d'une façon identique et que c'est une solution qui est
générale, alors qu'au Québec, on laisse la place à
la négociation de gré à gré entre le
propriétaire et le locataire, on favorise les consensus entre les
parties sans qu'il y ait lieu d'intervention de l'État. On favorise la
conciliation, la négociation et l'atteinte de consensus. Ce n'est que
lorsqu'il y a absence de consensus que la régie intervient a posteriori
pour régler les problèmes que les parties n'ont pas réussi
à régler entre elles. (21 h 45)
Je trouve cette solution drôlement plus intéressante qu'une
solution étatique, interventionniste qui traite tout le monde sur le
même pied, qui ne tient pas compte des particularités propres
à chaque immeuble ou à chaque situation. Quant à moi,
j'estime que la solution qui prévaut actuellement au Québec est
de loin la meilleure. Elle laisse libre cours à la négociation
volontaire entre les parties et l'État n'intervient qu'à
défaut d'entente. Cela m'apparaît une solution
préférable et je ne vais certainement pas recommander au
gouvernement d'instaurer une solution comme celle qui est actuellement
instaurée en Ontario.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le
député de Shefford, d'autres commentaires?
M. Paré: Oui, merci. Quand vous parliez de politiques
supersocialisante, je dois simplement vous dire que ce qu'on demande, ce n'est
rien de spécial, ce n'est pas un grand changement, finalement, c'est le
statu quo. Il ne faut pas oublier que le moratoire avait été
décrété par le Parti libéral en 1975 et que c'est
une responsabilité de la Régie du logement, donc indirectement du
gouvernement du Québec. Ce n'est pas un changement dans une forme
centralisatrice qu'on demande, c'est le maintien de la situation actuelle. Ce
n'est pas du tout la même chose, donc ce n'est pas une politique pour
renforcer les pouvoirs du gouvernement qu'on demande, c'est de garder la
situation qui est très bonne actuellement. Quand vous dites: On n'est
pas obligés de copier l'Ontario, c'est le discours qu'on tient aussi.
Sauf qu'on trouve un peu drôle que, très souvent, ce soit
présenté comme la situation idéale, mais que, quand cela
vient protéger davantage, on dise: Non, ce n'est pas vrai que l'Ontario,
c'est toujours idéal.
Je suis bien d'accord pour reconnaître avec vous que ce n'est pas
toujours idéal, mais ne vous servez pas de l'exemple de l'Ontario
seulement quand cela fait l'affaire.
M. Bourbeau: Quand c'est bon.
M. Paré: Quand c'est bon, sauf qu'on se rend compte que ce
n'est pas bon souvent, c'est bon une fois de temps en temps et on l'utilise,
mais quand, nous, on le prend comme comparaison pour d'autres avantages, ce
n'est plus tellement bon et j'ai l'impression que la référence
sera de moins en moins bonne, en tout cas, je l'espère.
Mais, pour ne pas manquer de temps et comme on doit discuter, moi aussi,
j'aurais
maintenant un amendement à apporter, toujours sur l'article 51.
Je vais attendre qu'il soit distribué pour le lire.
M. Bourbeau: Si le député voulait déposer
tous ses amendements d'un seul coup, on pourrait peut-être les regarder
avant. Est-ce qu'il y en a d'autres?
M. Paré: C'est possible. M. Bourbeau: Ah, bon!
M. Paré: Mais je ne pourrais pas vous les déposer
tout de suite. À la prochaine séance, probablement. Bon, il
s'agit ici de faire, je ne sais pas si vous voulez le lire, M. le
Président..
Le Président (M. Saint-Roch): L'amendement est celui-ci:
"L'article 51, introduit par l'article 2 du projet de loi, est modifié
par le remplacement du texte proposé après les mots:
"société municipale d'habitation* du deuxième
alinéa, par les mots: "ou si un immeuble a été construit,
acquis, restauré ou rénové dans le cadre d'un programme
gouvernemental d'aide à l'habitation."
M. Paré: Bon. Je peux vous donner l'explication de
l'amendement.
Le Président (M. Saint-Roch): Je m'excuse, M. le
député. Votre amendement est recevable.
M. Paré: Merci, M. le Président. Je m'excuse,
j'étais parti trop vite. Le temps fuit aussi.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous cède la
parole, M. le député de Shefford.
M. Paré: À l'heure actuelle, dans le
deuxième alinéa de l'article 51 tel qu'on le retrouve dans le
projet de loi 87, on dit: "La conversion est interdite si l'immeuble est la
propriété d'une coopérative d'habitation, d'un organisme
sans but lucratif ou d'une société municipale d'habitation et
s'il a été construit, acquis, restauré ou
rénové dans le cadre d'un programme gouvernemental d'aide
à l'habitation." Donc, cela veut dire que les coopératives, les
OSBL, organismes sans but lucratif et les sociétés municipales
qui ont reçu de l'aide n'ont pas droit à la conversion. Par
contre, cela voudrait dire que toutes les autres bâtisses qui, elles
aussi, ont profité des programmes d'aide, auraient droit à la
conversion. Donc, il y a deux poids, deux mesures ou, en tout cas, une
possibilité pour les édifices du secteur privé, pour les
propriétaires privés ou les sociétés
privées, même s'ils ont profité des programmes d'aide
à l'habitation. Normalement et couramment - et je pense que c'est
toujours basé là-dessus - quand il y a des programmes d'aide
à la restauration comme PARCQ, entre autres, il y a des clauses pour
dire qu'il faut conserver le logement locatif. Quand on donne des program- mes
d'aide à la restauration, c'est pour le volet propriétaire ou le
volet locatif. Quand on a donné une aide financière ou une
subvention à un propriétaire pour lui permettre de rénover
sa bâtisse en location, ses logements, cela veut dire qu'il a
profité, finalement, d'une aide de l'État. Cela ne devrait pas
lui permettre maintenant, à même cette aide financière
gouvernementale, de transformer son immeuble en copropriété. Pour
les coopératives, on a cette restriction. Vous allez me dire: Oui, la
loi coopérative est différente, elle empêche, de toute
façon, des transformations. Sauf qu'on a vu l'exemple de Clover Dale
à Pierrefonds, les Jardins Lasalle où, finalement, à cause
du Code civil, on a pu le faire. Ce n'est pas un exemple qu'on veut ramener
nécessairement. Ce n'est surtout pas un exemple qu'on veut revivre, mais
cela s'est fait.
Donc, qu'on le mette là, je ne dis pas que je suis contre, je
suis prêt à le considérer, sauf que je me demande pour
quelle raison on ignore les autres. Le programme d'aide était fait dans
le sens d'une meilleure vie, d'une meilleure condition de logement pour les
locataires, on aidait le propriétaire non pas pour qu'il vende, mais
pour maintenir son édifice, ses logements dans un état plus
acceptable, pour permettre à ses locataires d'avoir de meilleures
conditions de vie. Le propriétaire a profité de l'argent de
l'ensemble des contribuables par une subvention. Il a profité de cela
comme propriétaire, donc son avoir, globalement, a augmenté. Mais
il y avait des clauses. En tout cas, dans l'esprit des programmes,
c'était pour conserver des logements locatifs. Donc, on aidait - on
mettait même des clauses - à la condition qu'on n'augmente pas de
façon démesurée les logements. Dans PARCQ, on allait
même plus loin, on disait: À la condition que cela reste locatif
pendant quinze ans, et on a ramené cela à cinq ans. Mais il y a
une préoccupation dans l'aide de l'État normalement, la
préoccupation d'amener le maintien du stock de logements locatifs. Donc,
on aide le propriétaire à rénover ses logements non pas
pour faciliter la vente en copropriété, mais pour permettre que
le locataire vive mieux, avec une augmentation moindre du loyer.
Si l'esprit de la loi était celui-là, l'esprit des
programmes d'aide à la rénovation: de meilleures conditions de
logement à des coûts abordables et permettre au
propriétaire d'investir dans les logements pour les louer pas trop cher
ou, en tout cas, que l'augmentation soit plus acceptable, à mon avis, on
ne peut pas dire maintenant que l'argent qu'on a donné en subventions va
donner un avantage de plus au propriétaire pour faciliter la vente en
copropriété. Je pense que si l'esprit du deuxième
paragraphe, c'est ce qu'on veut à l'heure actuelle, on doit avoir le
même esprit pour le propriétaire privé ou l'entreprise
privée qui a bénéficié des programmes d'aide
à la restauration. La restauration, c'était pour lui donner plus
dans son Investissement et l'inciter à investir. Il y a des
programmes qui ont été amenés pour inciter à
la rénovation, à la construction et au développement
économique par ce secteur d'activité, mais il y avait toujours
cette préoccupation du locataire avec des critères bien
déterminés. Si l'esprit des programmes d'aide était de
maintenir des logements locatifs de qualité, de maintenir les logements
locatifs à un prix abordable, à ce moment-là, je pense que
maintenant on doit reconnaître ce but et qu'on doit limiter la conversion
et l'empêcher pour ceux qui ont bénéficié de l'aide
de l'État pour la rénovation. C'est l'amendement que je
propose.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, le député nous
apporte un amendement, comme cela, qui est quand même important. Je dois
dire que, pour l'instant, je ne suis certainement pas prêt, à
moins de dire au député qu'on refuse l'amendement purement et
simplement, à en discuter sans avoir eu l'occasion de l'étudier
de façon plus approfondie. Je pense qu'on peut suspendre l'étude
de l'amendement et on y reviendra lors d'une séance subséquente.
Je vois que la séance s'achève. À moins qu'on ne suspende
tout de suite. Pour l'instant je ne suis pas prêt à recevoir
l'article. Il faudrait qu'on l'étudie d'une façon plus
approfondie.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Shefford.
M. Paré: Je remercie le ministre de l'ouverture qu'il
manifeste. J'aimerais mieux qu'on suspende les travaux sur l'article 51,
étant donné que le temps est écoulé, j'ai
l'impression.
M. Bourbeau: M. le député va faire un autre
discours de cinq minutes sur son amendement, M. le Président, et
étant donné qu'il est 21 h 55, il n'y a aucune chance qu'on
puisse passer à un article avant l'ajournement à 22 heures, j'en
suis convaincu.
M. Paré: J'aimerais beaucoup plus qu'on suspende et que
vous preniez le temps de regarder la faisabilité de la proposition qui
est là, plutôt que de la rejeter pour sauver du temps,
étant donné qu'il reste à peine quatre minutes.
M. Bourbeau: Le député sait qu'on prend toujours
très au sérieux ses remarques et ses suggestions, M. le
Président. Nous allons prendre le temps d'étudier en profondeur
son amendement. Je l'enjoins, si le député veut vraiment
travailler dans le but d'améliorer le projet de loi et ne pas perdre le
temps de la commission, de nous envoyer le plus tôt possible ses autres
amendements, s'il en a, de façon qu'on puisse être en mesure de
réagir.
M. Paré: Oui, M. le ministre, on va faire en sorte que
cela se produise ainsi.
Le Président (M. Saint-Roch): Étant maintenant
arrivés à la fin du temps qui nous est alloué, nous
ajournons maintenant nos travaux sine die.
(Fin de la séance à 21 h 55)