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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Thursday, November 26, 1987 - Vol. 29 N° 95

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi 62 — Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile


Étude détaillée du projet de loi 87 — Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil


Journal des débats

 

(Quinze heures quarante-quatre minutes)

Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'aménagement et des équipements entreprend maintenant ses travaux pour procéder à l'étude détaillée du projet de loi 62, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile. M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. I! y a un seul remplacement pour le projet de loi 62.

M. Paradis (Matapédia) sera remplacé par M. Bradet (Charlevoix).

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le secrétaire. Je vais maintenant reconnaître M. le ministre pour des remarques préliminaires.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, cela a déjà été fait lors de la deuxième lecture et je pourrais, dès à présent, répondre aux questions du député de Lévis.

Projet de loi 62

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le ministre. M. le député de Lévis.

Discussion générale

M. Garon: M. le Président, j'aurais voulu poser quelques questions. Ce n'est pas un projet de loi qui demande beaucoup d'étude en commission parlementaire puisqu'il n'y a qu'un seul article. Simplement, il amende la Loi sur l'assurance automobile. Dans la Loi sur l'assurance automobile, sous le titre V qui concerne les dispositions financières, au chapitre I, Financement de la régie, on indique différentes façons... Et, au chapitre II, Versement au fonds consolidé du revenu, cette nouvelle disposition de la loi va venir s'ajouter à un article. Il y a une question que je voudrais poser au ministre. Comme il y a eu un article qui a été ajouté l'an dernier, en 1986 - l'article 3 du Chapitre 28 de 1986 - pour permettre à la régie de verser 60 000 000 $ par année, qui peuvent être indexés selon différentes modalités maintenant inscrites dans la loi, cela veut donc dire au minimum 60 000 000 $ par année. Cela pourrait même être plus dans les années à venir, selon ce que décrétera le gouvernement. On parle maintenant d'une ponction de 100 000 000 $ cette année et l'an prochain. Dans votre discours de deuxième lecture, vous avez dit que cela n'affecterait pas les montants à payer par les assurés. Je me demande comment vous pouvez affirmer qu'une ponction de 400 000 000 $ qui va être faite sur 1986, 1987 et 1988... Trois fois 60 000 000 $ pour les services de santé, cela fait 180 000 000 $ et comme cela peut être indexé... Je ne sais pas si cela l'a été, cette année. L'an passé, cela devait être 60 000 000 $, mais en 1987, c'était 63 567 000 $ et en 1988, cela pourrait être indexé encore un peu plus, de 65 000 000 $ à 70 000 000 $. Cela veut donc dire près de 400 000 000 $ pour 1986, 1987 et 1988.

J'ai le sentiment qu'on ne peut pas soutirer d'une caisse 400 000 000 $ sans que cela n'apparaisse éventuellement dans les primes qui vont être payées par les assurés ou, encore, dans les prestations qui seront versées aux assurés. Je comprends que c'est le ministre des Finances qui a décidé cela. Je ne sais pas s'il a consulté le Conseil des ministres ou s'il vous a consulté parce que, parfois, les ministres des Finances consultent, des fois, ils ne consultent pas, des fois, on l'apprend par les journaux. Cela dépend des cas. Ils ne sont pas tous pareils dans tous les cas. Ils peuvent le dire à un et ne pas le dire à l'autre, etc. Je me demande quelles sont les études qui ont été faites, soit chez vous, soit à la Régie de l'assurance automobile, soit au ministère des Finances pour qu'on puisse dire qu'on peut soutirer 400 000 000 $ de la caisse, sur trois ans, sans que cela affecte les prestations payées aux assurés ou les primes payées par les assurés.

M. Côté (Charlesbourg): D'abord, je pense qu'il y a peut-être une distinction très nette à faire entre les 60 000 000 $ du départ, qui étaient... J'avais eu l'occasion de l'effleurer un peu en réplique, mais je pense que le député de Lévis était occupé à d'autres activités.

M. Garon: En 1986?

M. Côté (Charlesbourg): Non, je veux dire dans la réplique à ce moment-ci, il y a quelques jours, sur le projet 62. Cela a été fait mardi soir, avant le souper, et je pense que vous étiez à Rimouski ou à l'extérieur pour vos fonctions.

M. Garon: Mardi, oui. Mardi dernier.

M. Côté (Charlesbourg): J'ai eu l'occasion de toucher à ces questions-là et, finalement, les 60 000 000 $, indexés au cours des prochaines années, font suite à une décision qui était contenue dans le budget de 1985-1986, dans votre dernier budget. Je peux peut-être la lire au député de Lévis. À la page 7 des renseignements supplémentaires, il était dit ceci: "Désormais, les coûts des services de santé consécutifs aux accidents routiers devront être assumés par les assurés de la Régie de l'assurance automobile du Québec. Jusqu'à maintenant, ces frais étaient en grande partie pris en charge par les programmes administrés par la Régie de l'assurance-maladie ou encore par les établissements du réseau des

affaires sociales. Cette mesure aura pour effet de faire payer par les usagers du système routier plutôt que par l'ensemble des contribuables des coûts de quelque 40 000 000 $ découlant des accidents routiers."

C'était, à ce moment-là, 40 000 000 $ qui étaient prévus pour six mois; donc, cela aurait été, annuellement, 80 000 000 $. Des négociations étaient entamées, avant même que j'arrive, entre les autorités de la régie et le ministère des Affaires sociales pour s'entendre sur un montant annuel qui a été établi, après ces négociations, à la satisfaction des Affaires sociales et de la régie, à 60 000 000 $ indexés au cours des prochaines années, sans que cette base-là puisse être touchée avant les cinq prochaines années.

M. Garon: Trois ans.

M. Côté (Charlesbourg): Trois ans.

M. Garon: En 1989, je pense.

M. Côté (Charlesbourg): D'accord. À ce moment-là, la base sera revue puisqu'on était un peu dans l'expectative et qu'on a tenté du mieux qu'on pouvait de déterminer cette base-là. Donc, c'est quand même 180 000 000 $, on peut dire 200 000 000 $ grosso modo, avec l'indexation au cours des prochaines années. Effectivement, si c'était une assurance privée, comme c'était le cas, auparavant, les coûts d'hospitalisation auraient été payés par... C'est le principe qui guidait, finalement, cette décision-là. C'est inclus à l'intérieur des études qu'on fait à la Régie de l'asurance automobile.

Quant à l'autre montant de 200 000 000 $ qui, lui, est prévu par ce projet de loi, j'ai eu l'occasion de le dire, dans le rapport annuel de la Régie de l'assurance automobile daté du 31 mai qui a été déposé à l'Assemblée, il y avait un paragraphe qui disait ce qui était, finalement, le message du président de la Régie de l'assurance automobile. On le retrouve à la page 9 du rapport annuel; on disait ceci: "La réserve de stabilisation, qui est assimilable en partie aux surplus accumulés, passe de 525 700 000 $ en 1985 à 654 100 000 $ en 1986. Il est également normal que ces sommes retournent, au cours des prochaines années, aux usagers de la route notamment sous forme de réduction ou de plus faibles progressions de contributions d'assurance et sous forme d'immobilisations en matière de sécurité routière. "Les autorités de la régie ont donc recommandé au ministre des Transports, M. Marc-Yvan Côté, et au gouvernement de consacrer, à même cette réserve, une somme de 200 000 000 $ à des immobilisations en sécurité routière sur tout le réseau routier du Québec."

Ce n'est pas le fait que ce soit à l'intérieur de cela qui fait que ce soit le ministre qui ait commandé cela. C'était la volonté de la Régie de l'assurance automobile de l'inclure dans le mémoire qui a été déposé à l'Assemblée nationale. Quant à savoir si c'est le ministre des Finances ou si ce sont d'autres personnes qui sont intervenues, à l'insu ou pas du ministre responsable... La situation s'est présentée comme suit J'ai eu l'occasion de rencontrer M. Vézina, le président, qui est venu me faire un rapport sur l'état des finances de la Régie de l'assurance automobile et déposer ce qu'il avait en main à l'époque, un bilan financier de la régie. C'était aux alentours de la fin de mars dans le cadre de la préparation budgétaire et des problèmes reliés au réseau routier un peu partout à travers le Québec. C'est lui-même qui m'a proposé l'idée de prendre 200 000 000 $ a même la réserve de stabilisation et de l'Investir dans le réseau routier, ce qui, par la suite, si mes souvenirs sont bons, a été entériné par le conseil d'administration de la Régie de l'assurance automobile dans une décision du 9 avril 1987. Par la suite, cela a été véhiculé au ministre des Finances et au premier ministre, qui ont accepté de l'inclure dans le budget. C'est un peu comme cela que cela s'est passé. Moi, je tenais pour acquis que ces mesures n'affecteraient pas à la hausse d'éventuelles contributions des assurés de l'assurance automobile, de un, et, de deux, qu'il y avait aussi une mesure qui l'accompagnait, soit 50 000 000 $ de réduction des primes d'assurance automobile, qui devaient être inclus aussi dans le budget. Donc, deux mesures: celle de retourner les économies de 1986 par rapport à 1985, retourner ces 50 000 000 $ aux usagers, principalement en ce qui concerne les véhicules de promenade - donc, les permis et les plaques - et faire en sorte que le montant de 200 000 000 $, quant à lui, n'affecte pas d'éventuelles hausses de primes d'assurance automobile. M. Vézina qui est ici, avec moi, peut le confirmer. C'était la garantie que j'avais des autorités de la Régie de l'assurance automobile. C'est comme cela que cela s'est passé.

M. Garon: Je comprends ce que vous me dites là. Mais si on fait payer les assurés pour l'entretien des chemins, sous le couvert de la sécurité routière, comme l'entretien de l'asphalte, par exemple, ce n'est pas à titre d'assurés normalement qu'on devrait déterminer cela. Un assuré paie un montant fixe pour son permis et son immatriculation, alors que l'usure est en fonction du millage. Il me semble que cela devrait être beaucoup plus à l'usager des routes de payer pour l'entretien des routes parce que, moi, si je fais 100 000 milles par année avec un camion, à mon avis, je vais payer plus cher qu'un gars ou une femme qui a un véhicule pour aller à son travail et qui fait peut-être bien 6000, 7000 ou 10 000 kilomètres par année. C'est pour cela que je trouve que cela n'est pas normal qu'on fasse payer les assurés sans tenir compte de l'usage qui est fait par celui qui est propriétaire ou qui conduit une automobile ou un camion.

M. Côté (Charlesbourg): I! y a eu d'autres alternatives d'inventoriées, d'examinées, avant ma rencontre avec M. Vézina, qui visaient à faire l'inventaire de ce qui pourrait être adopté comme mesures pour faire tout cela. Ces mesures ne sont pas toujours très convaincantes. On réussit toujours difficilement à les asseoir, à bien les identifier, à bien faire en sorte d'atteindre ce qu'on veut. Cependant, en parallèle de tout cela, j'ai eu des rencontres avec beaucoup de personnes préoccupées de sécurité routière et, en particulier, des représentants des départements de santé communautaire qui se sont donné comme vocation de réduire le nombre d'accidents de la route au Québec, au cours des cinq prochaines années. Dans les discussions que j'ai eues avec eux, ils ont mis beaucoup d'emphase sur les points noirs, en disant: des points noirs sont l'objet d'accidents nombreux.

On peut difficilement, compte tenu des systèmes qu'on a maintenant, bien identifier les points noirs. Dans les rapports de police ou de ce que nous savons maintenant, on est à un kilomètre près de l'accident Cela peut arriver. On n'est jamais capable de déterminer de manière très précise l'endroit exact où l'accident s'est produit ou de nombreux accidents se sont produits, ce qui pourrait déterminer que c'est un point noir, compte tenu de la conception géométrique, compte tenu de toute une série de mesures ou de comportements qui font que cela devient un point noir. Les départements de santé communautaire nous ont dit: Vous devriez investir davantage d'argent pour éliminer ces points noirs et faire en sorte qu'il y ait moins d'accidents. Ce serait un bon investissement. C'est comme cela que c'est parti. Des sommes d'argent ont été Investies au sujet de ces points noirs.

Au ministère des Transports, le sujet des points noirs est tabou. On demandait des rapports, on demandait où étaient les points noirs. Personne ne voulait les sortir. Ils étaient cachés quelque part. Ils disaient: On ne voudrait pas sortir cela, cela pourrait vouloir signifier tantôt qu'on a fait une mauvaise "job". Il reste que le point noir est là pareil. On leur a dit: Vous allez sortir les points noirs, et on va tenter de les corriger au fur et mesure qu'on est capable de le faire. Avec une plus grande complicité des corps policiers au Québec, avec une nouvelle formule maintenant quant à l'identification de l'endroit exact, au pied près où se situe l'accident, on va être capable de déterminer les correctifs à apporter dans certains endroits. Comme je l'ai dit tantôt, cela peut être une erreur de conception, cela peut être parce que cela a été mal fait, toute une série de problèmes qui, comme ceux-là, nous mettent dans des situations dangereuses.

C'est vrai pour les points noirs, c'est vrai pour les téléphones d'urgence sur les routes à la suite de l'abolition des péages sur les autoroutes 10 et 15. Un sentiment d'insécurité s'est développé parmi la population. Auparavant, on se disait: Au moins, au péage, on est sûr qu'il y a quelqu'un en tout temps, à qui on peut se rapporter, à qui on peut dire qu'on est en difficulté. Cela donnait une certaine notion de sécurité. A partir du moment où les péages sont disparus, on s'est retrouvé dans des situations très inquiétantes pour les gens. On a commencé à parler de téléphones d'urgence, à tenter de trouver les meilleures formules où les gens pourraient emprunter la 15, la 10 en toute sécurité et, en tout temps, savoir que, à tant de kilomètres, il y a un téléphone d'urgence raccordé soit avec la Sûreté du Québec ou avec un autre corps policier. Il y aura toujours quelqu'un au téléphone pour être capable de vous venir en aide. C'est un autre élément qui fait directement appel à la sécurité routière et qui peut rendre service à la population. Il y en a d'autres.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Vézina.

M. Vézina (Jean-P.): Si vous me permettez, M. le Président, je vais revenir un peu sur la situation financière et, pour le bénéfice du député de Lévis, tenter d'examiner un peu plus pourquoi on en est venu à cette recommandation au gouvernement. Première chose, il faut distinguer, je pense, les dépenses courantes d'une année et ce qu'on a mis en réserve pour faire face à tous les indemnisés dans l'avenir. Au sujet des dépenses courantes, on s'est retrouvé en 1986 avec une augmentation des revenus beaucoup plus élevée que ce qui avait été prévu. Le parc a augmenté. Donc, plus de gens se font immatriculer, plus de gens prennent leurs permis, d'où une augmentation assez sensible de revenus sur ce plan et aussi sur le plan des rendements. (16 heures)

À l'heure actuelle, nous avons des taux de rendement nets qui sont de l'ordre de 7 %, 8 %. C'est du jamais vu. D'habitude les rendements nets se situent entre 2 % et 3 %, et vous ajoutez l'inflation. Autrement dit, à ce moment-ci, compte tenu de l'inflation qui est à 4 %, on devrait normalement avoir des taux d'intérêt autour de 7 % au maximum. Ce n'est pas ça qu'on a. C'est beaucoup plus élevé. Donc, aussi, des revenus de placements très intéressants. Du côté revenu, une augmentation beaucoup plus élevée que prévu.

Sur le plan des dépenses, l'année 1986 a été la meilleure année pour la sécurité routière au Québec si on tient compte, bien sûr, du kilométrage parcouru et si on tient compte du parc. Si bien que la Régie de l'assurance automobile a épargné aussi 50 000 000 $ de ce côté-là, en indemnités parce qu'on a eu moins de morts, soit 1050 morts au lieu d'environ 1300, et aussi moins de blessés, soit 8 % moins de blessés. On s'est retrouvé - alors qu'au début de l'année,- on pensait qu'on se retrouverait avec un déficit - avec un surplus d'opération même si on

payait les 60 000 000 $ pour les frais de santé. Nous nous sommes dit: On devrait tout de suite recommander au gouvernement de baisser les contributions d'assurance puisqu'il faut faire comprendre aux automobilistes que la sécurité, c'est payant. Quand ça va mal, on augmente. Pourquoi lorsque ça va bien, ne diminue-t-on pas? C'est un peu le principe.

De là, la proposition pour diminuer les contributions de 50 000 000 $ en disant qu'on serait capable de faire face à la musique quand même. L'année 1987 achève, et je peux vous dire que la situation financière est encore très saine, même si on paie 63 500 000 $ pour les frais de santé, cette année. Voilà pour la situation à court terme. C'est la situation qui va continuer à se répéter d'année en année.

La situation à long terme. On est une compagnie qui s'apparente bien plus à une compagnie d'assurance-vie qu'à une compagnie d'assurances générales puisque, effectivement, ce qu'on paie, c'est du remplacement de revenu dans le temps. Donc, on paie des rentes d'invalidité. En payant des rentes, il faut mettre les sommes nécessaires dans une réserve de stabilisation cette année pour couvrir toutes les indemnités des gens qui ont été victimes de la route en 1987. De plus, ces montants-là - je vous le souligne, M. le député - sont indexés chaque année. On a alors une contrainte additionnelle par rapport aux compagnies d'assurance-vie. C'est que, non seulement on doit prévoir ce que nos placements vont rapporter, mais de plus, c'est indexé. Imaginez-vous que c'est complexe! Quel sera le taux d'inflation dans dix ans, dans quinze ans ou dans vingt ans? Ce qu'on fait, c'est qu'à la fin de chaque année, on réétudie la réserve actuarielle et on se demande avec nos actuaires si les sommes qui sont là sont suffisantes pour faire face à tous nos engagements futurs. Or, on s'aperçoit, depuis deux ou trois ans, que l'inflation est beaucoup moins élevée que prévu; on est autour de 4 %. Quand on prévoit 5 % et qu'on gagne 1 %, c'est 31 000 000 $ qu'on économise. Suivant les critères économiques, on a besoin de moins d'argent pour faire face à nos engagements puisque l'inflation augmente moins vite. Par ailleurs, nos placements, comme je l'ai dit il y a un instant, rapportent nettement davantage. Si bien que, pour l'année 1986, on a fait un redressement de la réserve actuarielle de 152 000 000 $, 151 700 000 $ à peu près. Qu'est-ce que ça veut dire? Cela veut dire qu'on s'est rendu compte que, compte tenu des critères économiques, on épargnait 51 000 000 $ juste sur les critères économiques, et compte tenu aussi des efforts que la régie fait en matière de réadaptation des blessés. Le secteur privé n'en fait pas, mais je vous rappelle que le secteur privé paie des forfaitaires. Une fois qu'un forfaitaire a été payé, on ne revoit pas le client.

Nous, on est intéressé à ce que le client retourne sur le marché du travail. Donc, on a développé toute une série de programmes visant à réadapter les gens. On s'aperçoit que ces efforts de réadaptation... Quand on prend quelqu'un qu'on payait 35 000 $ par année, indexés toute sa vie - c'est 750 000 $ à 800 000 $ qu'on aurait payé - et qu'on réussit à le mettre sur le marché du travail, c'est 800 000 $ que l'on vient d'épargner.

Le taux de persistance et la gravité des blessures ont diminue de moitié depuis 1978, dans les véhicules de promenade. Autrement dit, avec les efforts de réadaptation qu'on fait, on arrive à remettre des gens sur le marché du travail. Au départ, les actuaires avaient prévu, selon l'étude de ce qui s'était passé dans le secteur privé, qu'il y aurait entre 2,5 % et 3 % des gens qui émargeraient au régime après cinq ans. On s'en va vers 1,5 % à ce moment-ci. Bien sûr, les cinq premières années, on ne le sait pas. Mais, la sixième, on commence à avoir une information Mais là, on a neuf ans. Si bien qu'on s'aperçoit qu'avec nos efforts, on arrive à diminuer très sensiblement la gravité des blessures et le nombre des personnes qui persistent dans le régime. On est allé chercher 58 000 000 $ là-dessus.

Autrement dit nos actuaires disent: On va glisser tranquillement vers 1 500 000 $, il y a 58 000 000 $ dans la réserve dont on n'aura jamais besoin. Si bien qu'on se retrouvait à la fin de l'année, encore une fois, avec un redressement de la réserve de 152 000 000 $ et, entre la réserve de stabilisation et les opérations courantes, il y a une réserve qu'on appelle de stabilisation. Cela fait le pont entre les deux. Qu'on ait une réserve de stabilisation de 10 %, cela peut aller, mais là on était rendu à 658 000 000 $ si ma mémoire est bonne, 654 000 000 $ de réserve de stabilisation.

Alors, voilà qu'on avait un problème sur les bras, un problème assez intéressant, j'aime mieux le mien que celui de certaines régies, mais en tout cas...

M. Garon: Si on arrêtait là.

M. Vézina: Vous me permettez de finir, on va y revenir. On s'est dit: On a un problème sûrement et ce qu'on peut faire pour cela, c'est de diminuer les primes, dans l'avenir. Bien sûr, on commence à le faire, cette année, en baissant de 50 000 000 $.

En même temps, M. le député, vous vous rappelez que le secteur privé de l'assurance, lorsqu'on a étatisé le régime d'assurances - vous l'avez rappelé il y a un instant - disait: Ce n'est pas comparable, vous ne payez pas les services de santé. Il y a une décision gouvernementale de 1985 qui dit: La régie devra payer. Mais, de plus en plus, on nous répétait: Vous n'avez pas payé pour les années depuis 1978. Nous, on s'est dit: Effectivement, il y a quelqu'un qui va nous réclamer cette facture à un moment donné et on peut très bien prendre 200 000 000 $ dans la réserve de stabilisation et l'affecter à des

immobilisations en matière de sécurité routière. Là, c'est sûr que cela profitera aux automobilistes.

Tandis que si, à la suite d'une décision gouvernementale, à un moment donné, on vient chercher 200 000 000 $ et qu'on l'envoie dans le fonds consolidé, ce n'est pas sûr du tout que cela va profiter aux automobilistes. Entre nous, les 60 000 000 $, ce sont les frais de santé; en principe, ils sont pour des coûts de santé, mais si on donnait 200 000 000 $ dans le fonds consolidé, il n'est pas sûr que... On s'est dit: On serait bien mieux de prendre les devants; on va s'organiser pour que cela ait un effet très minime sur notre réserve de stabilisation parce qu'on s'est engagé à verser 200 000 000 $ chaque année budgétaire du gouvernement, mais en ce qui concerne la régie, cela a un effet pour trois ans, car on n'a pas la même année financière. Alors donc, on paie 50 000 000 $ en 1987, 75 000 000 $ en 1988 sur l'année financière et le reste sur l'année... C'est une répartition sur trois ans et cela va très peu affecter la réserve de stabilisation. Encore une fois, cette année, on va augmenter la réserve de stabilisation parce qu'on continue dans la même traînée quant à l'effet des critères économiques et de la gravité des blessures.

Alors, voilà pourquoi on a recommandé cela. Je ne sais pas si cela éclaire le débat mais...

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Lévis.

M. Garon: Vous dites au fond que vous avez épargné de l'argent à l'administration, je comprends. Moi, j'ai vu quelqu'un, comprenez-vous, qui est venu à mon bureau, qui s'est fait couper les deux jambes par une automobile. Là, vous lui dites: Tu peux avoir des grandes prothèses ou des petites, choisis. Mais tu ne peux pas avoir les deux. Le gars, quand il est dans la maison chez lui... On me dit que, lui, il se promène avec de grandes prothèses... S'il avait de petits bottillons qui se mettent à partir des genoux, cela serait plus pratique pour monter les escaliers que d'avoir de grandes prothèses. Moi, je vous dis ce qu'on m'a dit: cela a été refusé. Il a le droit à une, il choisit.

Après cela, au bout de cinq ans, vous avez des gens à qui vous ne payez plus le même montant.

M. Vézina: Ce n'est pas moi qui vous dis cela.

M. Garon: Oui, je comprends, mais vous présumez que le gars a un job. Moi, j'ai vu des gens à qui on a dit: Vous pourriez toujours être gardien de terrain de stationnement. C'est théorique, car vous savez que, dans la région de Québec, les gardiens de stationnement, cela ne pleut pas. On ne peut dire à 5000 personnes d'être gardiens de stationnement. Si vous étiez gardien de stationnement vous auriez 13 000 S par année, on devrait vous payer 18 000 $, donc, on vous paie la différence de 5000 $. Sauf que des terrains de stationnement payants, il n'y en a pas dans mon comté. Je n'en connais pas. Ce sont tous des stationnements non payants, où il n'y a pas de gardien. Si un gars vit à Saint-Philémon de Bellechasse, à moins qu'il ne déménage à Montréal pour être gardien de stationnement, il ne gardera rien. C'est là qu'on économise, c'est une faute enfin... On économise mais en faisant crever des gens, à toutes fins utiles, qui n'ont pas la possibilité de se trouver un emploi dans ce domaine.

M. Côté (Charlesbourg): Si le député de Lévis me permet. Je pense que c'est un cas, en partie du moins, qu'il avait soulevé lorsqu'on a eu l'avant-projet de loi en commission parlemen-tair et qui fait appel à la Loi sur l'assurance automobile, quant aux critères d'indemnisation des victimes et au remplacement ou à la fourniture d'un certain nombre de besoins de l'accidenté.

M. Garon: Mais c'est ce qu'il dit qu'il fait. M. Côté (Charlesbourg): Non, non.

M. Garon: Le président vient de nous dire qu'il économise de l'argent.

M. Côté (Charlesbourg): Non. Ce n'est pas là-dessus.

M. Garon: Le critère économique, c'est quoi?

M. Côté (Charlesbourg): Ce n'est pas là-dessus, il faut faire attention.

M. Garon: On économise de l'argent dans l'administration.

M. Côté (Charlesbourg): Au-delà des débats politiques, je pense que le député de Lévis est capable de comprendre. D'abord, on va l'avoir le débat là.

À la suite de l'avant-projet de loi qu'on a déposé, qu'on a étudié ensemble en commission parlementaire, là où l'on a rencontré les parties tel que convenu, j'envisage la possibilité de déposer avant les fêtes le projet de loi à l'Assemblée nationale, modifié en tenant compte de la commission parlementaire. Vous allez voir qu'il y a un certain nombre de choses qui ont été retenues à ce moment-là, on a pris en considération des ajustements à la Loi sur l'assurance automobile. Je pense que la régie est toujours ouverte pour bonifier un certain nombre de choses, il n'y a pas de problèmes. Dire que l'argent qui a été économisé sur le plan administratif, l'a été dans ce sens-là, c'est faux, parce que c'est la loi actuelle qui est administrée à

partir de ce qu'on a dedans. À partir du moment où elle aura été changée, elle sera plus généreuse ou elle sera moins généreuse, selon la volonté du législateur de la changer, et, à ce moment-là, cela s'appliquera. Mais ce n'est pas en appliquant, de la manière la plus rigide, la Loi sur l'assurance automobile qu'il y a de cet argent-là qui a été économisé.

Il y a de l'argent qui a été économisé... Non, non...

M. Garon: C'est cela que les gens nous disent dans nos comtés.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, mais cela, c'est un autre débat. Il faut faire attention. Il y a M. Mongrain, aussi, à Sherbrooke, qui dit bien des affaires qu'il ne connaît pas. Cela, ça fait partie d'un autre débat, quand quelqu'un peut, de manière très démagogique charroyer des dossiers...

M. Garon: C'est vrai ce que je vous dis, si, au bout de cinq ans, on dit à quelqu'un: Si vous étiez gardien d'un terrain de stationnement, vous gagneriez tant.

M. Côté (Charlesbourg): Oui?

M. Garon: Sauf qu'il n'y en a pas de terrain de stationnement à garder.

M. Côté (Charlesbourg): Je comprends le point du député de Lévis. Ce que je lui dis, c'est que, actuellement, la régie n'a pas d'autre choix que d'appliquer la loi qui est là.

M. Garon: La loi ne dit pas de faire cela.

M. Côté {Charlesbourg): Non, non. La loi ou les règlements qui en découlent. Je pense que les gens de la régie l'on dit à tous les groupes qu'on a rencontrés, ici, aux groupes qu'on a rencontrés, soit à l'aide juridique, par la suite, tel qu'on s'était engagé, soit au Barreau, et à Mme Dolment qui représentait le RAIF. On s'est expliqué. On s'est donné des explications, et ils ont été à même de constater que les gens de la Régie de l'assurance automobile ont appliqué la loi et les règlements et qu'ils tentent de les appliquer au meilleur de leurs connaissances. On a expliqué aussi qu'on avait besoin d'un certain nombre de bonifications pour être capable, finalement, d'en donner un peu plus à ceux qui sont victimes de cela, et que, s'il y a d'autres situations de ce genre, on est loin d'être fermé à ce qu'on puisse faire certaines modifications. Moi, je suis très ouvert à cela, qu'on en retourne davantage à celui qui est victime. Il en a déjà assez d'être la victime d'un accident de la route pour qu'on ne le prive pas de ce que la loi lui permet. Je ne crois pas que ce soit ce que la régie fasse, mais il y a des cas, effectivement... Vous allez voir, lorsque vous allez revoir le projet de loi, vous allez vous apercevoir que cela a été une commission parlementaire qui nous a permis de faire un pas en avant très important dans la reconnaissance de certains droits à des individus. C'est un débat, cela, qu'on pourra facilement avoir au moment où l'on abordera la Loi sur l'assurance automobile, lorsqu'on l'étudiera. C'est un cas qui relève davantage de cela.

Voici ce que la régie dit: Nous avons fait des économies sur le plan administratif, parce que nous avons fait des choix de réhabilitation de personnes, au lieu de considérer qu'on les payait à vie, et cela, pour le plus grand bénéfice de la personne, elle-même, qui doit se sentir beaucoup mieux dans sa peau, une fois réhabilitée, que d'être dépendante du Régime d'assurance automobile pendant toute sa vie. Cela, on peut dire que c'est une décision administrative de la régie, qui a rapporté des dividendes et qui a fait en sorte que, sur le plan financier, la régie a fait des gains.

L'autre geste, sur le plan administratif, qui a rapporté des dividendes à la régie, ce sont ses placements, en étant davantage présente ou en insistant auprès de la Caisse de dépôt pour que l'argent de la Régie de l'assurance automobile soit mieux placé et rapporte davantage. Cela, c'est un autre élément. Sans contredit, il y a un troisième élément très important. Lorsqu'on dit: 24 % de moins d'accidents en 1986 qu'en 1985, cela témoigne très nettement. Et cela, ces 50 000 000 $, on les a pris et on les a retournés directement aux usagers en disant: Voici, c'est dû à votre comportement, il y a eu moins d'accidents, c'est à vous qu'on le retourne. Et il n'est pas retourné, dans la mesure où cela se maintient, pour qu'on retourne le chercher. Si le bilan routier se maintient, cela va se maintenir. Pour faire comprendre à l'individu que, si les accidents augmentent, cela va monter. Si cela baisse, cela va baisser. Moi, je suis encore prêt cette année, dans la mesure où l'on peut en arriver à boucler l'année avec encore une baisse du taux des accidents, à encore le retourner aux usagers. Cela m'apparaît être très important.

Maintenant, le débat de fond. Si j'ai bien compris les propos du député de Lévis, lorsqu'il a abordé la question en deuxième lecture, il a dit: Vous auriez pu avoir fait un choix autre que celui-là. Les 100 000 000 $ ou les 200 000 00 $, vous auriez pu décider de les retourner à l'usager sous d'autres formes ou aller chercher ailleurs l'argent que vous vouliez avoir pour les routes sur le plan de la sécurité routière. (16 h 15)

C'est vrai. C'est un choix que, finalement, le gouvernement a fait, conseillé par la Régie de l'assurance automobile. Ce qu'il ne faudra jamais perdre de vue, c'est que les 200 000 000 $ ne sont pas récurrents, alors que toute mesure qui vise à baisser les primes, elle, est récurrente dans le temps. Les 200 000 000 $, eux, sont étalés sur trois ans: 50 000 000 $, 75 000 000 $ et 75 000 000 $, et cela n'a pas d'effet de

récurrence. C'est cela finalement le dilemme qui nous a été posé à un certain moment donné. On l'a fait récurrent, lorsque les accidents, eux, qui ont des effets récurrents, ont baissé, alors que, pour la réserve de stabilisation, elle, à la suite des recommandations, des analyses des actuaires et à la recommandation du conseil d'administration de la Régie de l'assurance automobile par l'entremise de M. Vézina, cela nous est apparu être un choix que le gouvernement pouvait faire. Et on l'a fait à ce moment-là. Il peut être discutable, c'est clair, et c'est le rôle de chacun de discuter, mais c'est un choix qu'on a fait.

M. Garon: Sauf qu'il y a l'affaire de dire aux gens après cinq ans... Je ne sais pas ce que c'est la réhabilitation dont on parle, mais, s'il s'agit de dire à quelqu'un au bout de cinq ans: Tu pourrais garder un terrain de stationnement, il n'y a pas de réhabilitation là-dedans, sauf qu'on vient de sauver 13 000 $ ou 12 000 $ selon qu'on évalue le salaire d'un gardien de terrain de stationnement à 12 000 $ ou à 13 000 $.

M. Vézina: Mais, M. le député, la loi dit que la régie doit remplacer le revenu d'un individu qui n'est apte durant les premiers cinq ans à occuper l'emploi qu'il occupait au moment de l'accident. Après cinq ans, la loi nous oblige à examiner si l'individu est apte à occuper un emploi, peu importe lequel. On n'a, nous, aucunement la responsabilité de trouver un emploi à un individu. Ce qu'on essaie de voir - ce sont les médecins qui déterminent cela - à partir d'une classification fédérale des emplois, c'est, effectivement, compte tenu de ce qui lui reste comme capacité physique ou capacité intellectuelle, de savoir s'il est apte à quelque emploi que ce soit. Ce n'est pas comme vous dites, s'il est apte à un emploi de gardien de stationnement et puis qu'il n'y en a pas dans la région. On ne prétend jamais cela. On essaie de voir s'il pourrait effectivement obtenir un emploi du type de gardien de stationnement tout simplement et on fait la différence de revenu. Ce qu'on propose dans le prochain projet de loi, c'est, en plus, de lui donner un temps de réadaptation entre les deux. Alors, il n'y a jamais personne qui prétend que quelqu'un peut faire telle ou telle job. Ce n'est jamais comme ça que cela se passe.

M. Garon: Non, mais on assiste à cela comme tendance depuis quelque temps. Il y a deux organismes qui font cela, la CSST et la Régie de l'assurance automobile. Alors ce sont des emplois théoriques. Si on voulait être plus malin, on pourrait dire que quelqu'un est apte à être astronaute, mais cela voudrait dire quoi. Pour faire des expériences? Dans les voyages interplanétaires, il pourrait servir de cobaye, cela rapporterait tant. Il pourrait donner du sang. En Haïti, les gens donnent du sang pour 50 $ chaque fois, mais ils ne doivent plus en donner maintenant avec les problèmes récents de la qualité du sang. Mais, quand vous dites à quelqu'un, dans un endroit où il n'y a pas de terrains de stationnement, qu'il serait apte à être gardien de stationnement, c'est théorique, c'est comme si vous disiez, par exemple, qu'il pourrait être garçon d'ascenseur dans Bellechasse. Je ne connais pas d'édifices qui aient des ascenseurs dans Bellechasse. Cela ne veut rien dire au fond.

M. Vézina: M. le député, encore une fois...

M. Garon: C'est cela que je veux dire, on fait référence à des emplois qui sont impossibles à trouver dans...

M. Vézina: M. le député, encore une fois, ce n'est pas tellement l'emploi, c'est la capacité à occuper quelque chose d'un emploi. C'est sûr qu'on ne dira pas à un gars de Montréal qu'il est apte à être pêcheur, parce que, de la pêche en haute mer, il n'y en a pas beaucoup à Montréal. On tente effectivement de déterminer un emploi qui, dans une région donnée, existe. Il peut arriver des circonstances, comme l'exemple du terrain de stationnement, où cela ne se prête pas dans une localité donnée. Ce n'est pas tellement le type d'emploi, c'est la capacité d'un individu à occuper un emploi. Autrement, le choix qu'on a, c'est de payer sa vie durant.

M. Côté (Charlesbourg): D'accord. Je sais que le député de Lévis est un gars de terrain. Je l'ai croisé assez souvent sur le terrain, en particulier - cela lui rappellera des souvenirs - dans Mégantic-Compton, lors de la première partielle en 1980. Puis, je sais que c'est un gars qui aime aller au fond des choses pour savoir ce qui se passe. Moi, je peux vous lancer une invitation. Votre individu de Lévis, dans la mesure où il serait possible d'obtenir de lui l'autorisation d'avoir accès à son dossier, on va partir tous les deux, puis on ira à la Régie de l'assurance automobile avec ce cas-là, puis on le passera à l'intérieur de la Régie de l'assurance automobile pour voir comment cela se passe, comment cela se fait. Moi, je suis très ouvert à cela et je pense qu'en l'illustrant d'un cas ou de deux, ou de trois, il n'y a pas de problème là-dedans, dans la mesure où cela ne brime pas le droit d'un individu.

M. Garon: Dans les petites bottes dont je vous parlais.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, moi, je suis prêt à cela.

M. Garon: II a droit à une prothèse, pas deux.

M. Vézina: À n'importe quel temps.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, après cela, on

va aller le voir et si, effectivement, dans ces cas-là, il y a des réajustements à faire, étant donné un cas bien précis qui pourrait avoir des répercussions sur d'autres, je suis très ouvert à cela. Je suis prêt à le faire. Finalement, c'est peut-être la meilleure chose à faire que d'aller voir dans la machine comme cela se passe avec un cas. Il n'y aucun problème de ce côté-là.

Si on découvre effectivement qu'il y a des choses qui se passent, non pas de mauvaise foi, car cela pourrait être de mauvaise foi, et qui ne sont pas correctes, compte tenu de ce qu'on a à faire, je ne demande pas mieux que de réajuster les choses. Je suis prêt à faire cela avec le député de Lévis, n'importe quand.

M. Vézina: Et vous avez tout mon appui, M. le ministre.

M. Garon: Je vois deux cas précis. Je suis intéressé et j'accepte l'offre. Ce sont deux cas précis qui, je pense, permettent d'épargner beaucoup d'argent. Je serais prêt à aller au fond des choses avec le ministre et le président de la régie pour le bénéfice de ces personnes-là.

M. Côté (Charlesbourg): Et peut-être aussi d'autres qui sont dans la même situation. Ce qu'il faut voir là-dedans, c'est que, d'abord, il n'est pas facile de connaître tous les méandres de l'application d'une telle loi ou des règlements qui en découlent. Je l'ai vécu depuis maintenant deux ans que j'essaie d'en apprendre le plus possible, et je comprends l'individu qui, à l'autre bout, a peut-être des interprétations différentes, compte tenu des informations qu'il reçoit, ou qui vit des situations passablement difficiles.

J'ai encore fraîche à la mémoire une intervention d'un individu qui se plaignait du fait que celui qui avait occasionné la mort de son épouse était presque mieux traité qu'il ne l'était, lui, pour son épouse. On s'est dit que des gestes criminels étaient posés à certains égards et qu'on devrait peut-être regarder un niveau plus appréciable, plus élevé d'intervention ou de poursuites éventuelles, compte tenu de la gravité des délits. En tout cas, il y a de bonnes chances qu'on retrouve des choses à ce sujet, au moment où on se reverra pour la Loi sur l'assurance automobile. Ce sont des choses auxquelles, si on n'avait pas tenu de commission parlementaire pour l'avant-projet de loi, on aurait peut-être été un peu moins sensibilisé. D'autres phénomènes qui nous ont été démontrés ici ont été retenus, et ils auront leur application.

Si, dans une expérience comme celle-là, on trouve autre chose, je n'ai jamais, depuis deux ans que je suis là, vu une fermeté de la part de la Régie de l'assurance automobile à vouloir régler des dossiers. J'ai frais à la mémoire un cas en particulier d'un individu de la rive sud de Montréal qui m'a écrit pour se plaindre du traitement tout à fait horrible que lui a fait la Régie de l'assurance automobile. Ce que j'ai fait, et ce n'était pas selon les règles normales, j'ai convoqué le vice-président à la réadaptation de la régie à mon bureau et j'ai fait venir l'individu. Il est arrivé presque avec sa porte d'auto de l'accident, un carcan au cou et toute une démonstration très très évidente. On a mis beaucoup de bonne foi pour tenter de voir ce qu'on pouvait faire pour voir si, effectivement, il y avait des injustices. On a tout fait. On a tout fait pour tenter de lui donner satisfaction. On n'a pas réussi à lui donner satisfaction parce que, parfois, c'est impossible. C'était impossible, étant donné la loi et aussi les limites du système. C'est un peu cela qu'il faut comprendre. La personne qui est venue nous rencontrer l'a fait de bonne foi et elle ne voulait pas nécessairement abuser elle-même du système, mais elle avait la conviction profonde qu'elle avait été lésée dans ses droits et qu'il y avait une incompréhension, malgré le fait que cette personne avait pu passer devant 20 médecins. Je suis convaincu que, avec l'expérience que vous avez vécue au pouvoir durant neuf ans, vous en avez vécu de ces cas-là. Il y a des choses qui ne peuvent pas se régler, parce que l'espoir est beaucoup trop grand par rapport à ce qui peut être donné, compte tenu des textes législatifs.

Au-delà de cela, j'ai à m'assurer que les gens de la Régie de l'assurance automobile les appliquent de manière conforme à l'esprit de la loi et des règlements. S'il y a des choses, au chapitre des lois et des règlements, qui sont inadéquates, à ce moment-là, c'est à l'homme politique de prendre ses décisions et d'apporter des corrections, avec les conseils, bien sûr, des gens de la régie pour en voir toutes les implications. On en a fait six à l'avant-projet de loi. Là-dessus, ce n'était pas majeur, on l'avait dit, comme réforme, mais, au moins, il fallait régler un certain nombre de problèmes et d'irritants qu'il y avait. S'il y en a d'autres, on va les régler. Soyez sûrs que vous allez avoir mon concours pour être capables de les régler. C'est peut-être par ces cas d'individus, en cheminant à l'intérieur de la boite, qu'on va être capable de voir si, effectivement, ils ont été bien traités ou mal traités.

M. Garon: Je veux bien croire que c'est la meilleure manière: de vérifier des cas avec des faits. La loi est théorique, les règlements sont souvent pensés pour économiser. Mais les gens qui se sont assurés sont souvent mal pris, une fois qu'ils ont eu un accident, ils sont vraiment mal pris. Quand on fait des projets, il faut imaginer le plus de scénarios d'accidents ou d'hypothèses possible, mais on ne peut pas toujours tous les imaginer. Avec l'expérience des années, on peut - je suis d'accord avec le ministre là-dessus - revoir d'abord les règlements, parce que c'est plus facile, et les articles de loi en conséquence.

Alors, je vais faire relever les cas en question. Je suis content de cela, parce que, pour

les cas précis qu'on m'a mentionnés, on m'a dit que, selon le règlement, on n'avait pas droit à plus d'une prothèse. Ça, c'est une économie, mais j'imagine quelqu'un à qui il ne reste qu'une partie des deux jambes mettre le gros "kit" tout le temps, alors qu'il est assis, je suppose, dans le salon. Ce doit être fatigant d'avoir une grosse prothèse au complet et, quand il doit aller aux toilettes, s'il lui faut mettre un gros "kit" à chaque fois et l'enlever, cela peut être pénible, alors qu'une prothèse additionnelle pour les petits déplacements à l'intérieur pourrait faire l'affaire. C'est un cas dont je parlais tantôt. Ce qu'on m'a dit à ce moment-là, c'est qu'on refuse deux prothèses.

M. Côté (Charlesbourg): Pour être bien sûr qu'on puisse sortir le dossier comme il faut, avec l'autorisation de l'individu, j'imagine que, s'il est allé vous voir, c'est qu'il vous donnait automatiquement l'autorisation de vérifier son dossier.

M. Garon: C'est-à-dire d'écrire et de faire des représentations en son nom.

M. Côté (Charlesbourg): II n'y a aucun problème. À partir du moment où on peut l'avoir, si on peut trouver du temps avant les fêtes pour aller à la régie, on va y aller avant les fêtes, sinon dès la première journée de janvier. S'il le faut, on ira un samedi. Vous êtes habitué à des semaines de travail de plus de cinq jours.

M. Garon: Oui, je suis habitué à sept jours.

M. Côté (Charlesbourg): J'ai connu les semaines de travail de l'ex-ministre de l'Agriculture et je suis nettement convaincu que ce n'était pas cinq jours, ni six jours, ni six jours et demi, mais davantage sept jours.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Montmagny-L'lslet.

M. Gauvin: J'aimerais juste ajouter quelque chose pour, peut-être, l'expliquer au député de Lévis. C'est que j'ai dans mon comté un problème de petites bottes et de grosses bottes, mais avec la Régie de l'assurance-maladie. C'est la règle qui s'applique, apparemment, à tout le monde qu'on a essayé d'aider. Je pense qu'il n'y a pas seulement qu'à la Régie de l'assurance automobile, et cela nous Intéresse drôlement de voir ce qui se passe dans le cas dont vous parlez.

M. Garon: Moi, ce qu'on m'a dit, et c'est l'expérience dans le comté, c'est que, de plus en plus, la Régie de l'assurance automobile et la CSST ont tendance à appliquer les mêmes critères et à s'orienter vers la même administration de leur loi, à des fins d'économie.

M. Côté (Charlesbourg): Moi, en tout cas...

M. Garon: Là, je vous le dis.

M. Côté (Charlesbourg): Moi, je peux vous dire une chose, c'est qu'effectivement, dans l'avant-projet de loi, nous avons dû avoir des négociations avec la CSST. Avec les nouvelles dispositions qui vont venir du projet de loi qui sera déposé, avec la CSST et avec la Régie de l'assurance automobile du Québec, je peux vous dire qu'il y a des choses qui ne peuvent pas s'harmoniser et qui ne s'harmoniseront pas non plus avec elle. Dans des cas comme ceux-là, de bottines, de petites et de grosses bottines ou de petite et de grosse prothèse, il y a peut-être un lien avec la Régie de l'assurance-maladie du Québec, et il y a moyen de leur parier et d'harmoniser nos choses, non pas au détriment de ceux qui en ont besoin, mais avec des critères qui vont tenir compte davantage du cas de chacun des individus. Je pense que ce sont des choses qui peuvent être définitivement réglées, mais on va le voir à l'usure du cas et à l'usage, lorsqu'on pourra l'examiner. Je suis convaincu que cela peut être très instructif pour tout le monde. S'il y a des réajustements à faire, on va les faire.

M. Garon: Est-ce, qu'il y a eu des directives à ces organismes à des fins d'économie, soit du ministre, soit du Trésor? Parfois, le Trésor donne ses directives directement au niveau de l'administration et le ministre ne l'apprend que plus tard.

M. Côté (Charlesbourg): Non, dans ce cas-ci, le Trésor est bien informé que, pour ce qui est sous la responsabilité du ministre des Transports, c'est au ministre des Transports qu'il doit donner les directives. (16 h 30)

M. Garon: II pouvait y avoir les mêmes directives, mais, des fois, il s'essayait pareil. C'est pour cela que je demande s'il s'est essayé.

M. Côté (Charlesbourg): Non, ils me connaissent très bien au Trésor et ils n'ont pas osé essayer. Dans ce cas-là, cela a toujours été très clair. M. Vézina peut vous le confirmer lui-même, en aucune manière dans l'administration de la Régie de l'assurance automobile, le ministre n'est intervenu. Le ministre actuel a eu comme politique de rencontrer régulièrement le président, M. Vézina, et de faire le tour des dossiers, chez lui, dans tous les cas. Lorsqu'on s'est rencontré en janvier 1986 pour la première fois, un certain nombre de dossiers ont été mis sur la table. Il y avait des priorités, selon l'évaluation qu'en avaient faite M. Vézina et le conseil d'administration. J'ai dit: Parfait, on va s'embarquer là-dedans, on va travailler. Faites-moi des recommandations et je vous dirai si je suis capable de vivre avec sur le plan politique et de les défendre auprès de mes collègues pour que cela devienne loi ou règlement.

Depuis ce temps-là, c'est à un rythme presque infernal qu'on règle des dossiers, toujours sur des propositions venant du conseil d'administration de la Régie de l'assurance automobile et vérifiées auprès de moi. Dans la mesure où c'est oui, c'est oui, dans la mesure où c'est non, c'est non, avec des axes d'orientation ou de recherche sur des solutions qui tantôt me plaisent, tantôt ne me plaisent pas, mais qu'il faut faire. À partir du moment où on s'est entendu et qu'on passe, je ne suis intervenu en aucune manière dans l'administration. Ce n'est pas mon intention d'intervenir non plus, parce qu'il y a là des gens qui sont responsables. À l'occasion, lorsque des gens me transmettent des cas qui relèvent de l'administration, ils sont toujours dirigés à la régie pour recevoir l'information. Dans mon cas, il n'y a jamais eu de directive sur ce plan. Ils sont assez grands pour faire leur administration. S'il la font mal, ils se feront cogner sur les doigts; s'ils la font bien, il faudra leur dire qu'ils la font bien. Jusqu'à maintenant, ils la font bien. C'est comme cela qu'on a fonctionné. M. Vézina est bien libre de vous dire ce qu'il en pense, son vécu. C'est comme cela que cela se passe.

M. Vézina: C'est un fait.

M. Garon: Est-ce qu'il y a eu des demandes, à quelque niveau que ce soit, d'harmonisation de l'application des lois de la Régie de l'assurance automobile et de la CSST - parce que, dans un cas, il s'agit d'accidents du travail et, dans l'autre, d'accidents d'automobile - ou pour que, dans les mesures de réparation de dommages ou de rémunération des gens qui sont victimes soit d'accidents du travail, soit d'accidents d'automobile, il y ait harmonisation dans la façon d'administrer ces lois?

M. Côté (Charlesbourg): D'abord, vous vous souviendrez de l'adoption de la loi 42, sous votre gouvernement, qui était la nouvelle loi de la CSST, celle qui a arbitré un certain nombre de dossiers qui étaient en litige. C'est toujours cette loi qui s'applique à la CSST et qui a tranché un certain nombre de débats. Lorsqu'on a introduit l'avant-projet de loi dans les différents comités ministériels pour discussion, effectivement, il y a eu des questions. La manière dont cela fonctionne, c'est que les secrétariats analysent les propositions que les ministres font et, à l'occasion, font des suggestions qui sont discutées autour d'une table de comité ministériel avant d'en arriver à les proposer au Conseil des ministres pour adoption et, par la suite, sur le plan législatif, au comité de législation.

Il y a eu des discussions, en particulier, de la part de mon collègue Pierre Paradis, qui, lui, a la responsbilité de la CSST, soit une proposition de faire le maximum d'efforts pour qu'il y ait harmonisation entre - du moins si c'était possible - la CSST et la Régie de l'assurance automobile. Un certain travail a été fait de ce côté-là, de la même manière qu'on a demandé de le faire à la Régie de l'assurance-maladie du Québec. On a fait un certain cheminement. Il y a eu des rencontres. Il y a eu des rencontres avec la Régie de l'assurance-maladie du Québec. On me dit que, dans la nouvelle version du projet de loi qui sera déposé, à peu près tout est arrimé avec la Régie des rentes du Québec, et qu'au niveau de la CSST, il y a des choses incompatibles et qui ne seront jamais compatibles. Dans la mesure où des choses peuvent être compatibles, il est souhaitable et normal que les interventions de l'un et de l'autre puissent se faire à partir d'à peu près les mêmes critères. Quant à n'être pas compatible, il y a des choses qui, effectivement, ne le sont pas et ne le seront jamais. C'est dans ce contexte que cela s'est passé. Il y a des réunions assez régulières entre la CSST, la Régie de l'assurance automobile et la Régie des rentes.

M. Garon: Depuis longtemps?

M. Côté (Charlesbourg): Écoutez, à tout le moins depuis que j'ai rencontré M. Vézina en janvier 1986. Il m'avait dit à l'époque qu'il y avait deux dossiers extrêmement importants auxquels la régie tenait. C'était le Code de la sécurité routière, version un et version deux: soit, premièrement, les délits causés par l'alcool, deuxièmement le code au complet. Et, par la suite, il y aurait certains ajustements à la Loi sur l'assurance automobile. J'avais donné mes priorités. Quant à moi, c'était effectivement de régler le code un et le code deux, et, par la suite, entamer le travail concernant l'assurance automobile. C'est particulièrement depuis qu'on a présenté l'avant-projet de loi devant les comités ministériels, qu'il y en a. J'imagine qu'il devait y en avoir auparavant aussi.

M. Vézina: M. le ministre, je suis là depuis novembre 1983. Il y a eu, je pense, plusieurs directives de tenter d'harmoniser, sous l'ex-gouvernement comme sous celui-ci. Chaque fois, on a tenté de faire un bout de chemin. Avec 42, d'une certaine façon, on s'est éloigné. Là, on tente de se rapprocher. Mais il y a des choses, comme disait M. le ministre, qui ne pourront jamais être harmonisées. Nous, nous couvrons l'ensemble des gens de la société, pas seulement ceux qui travaillent, mais aussi les personnes âgées comme les jeunes. Alors, il y a des choses qui ne s'harmoniseront jamais. Cela dit, on fait le maximum pour tenter de s'harmoniser. Il faut dire aussi que la situation financière des uns et des autres n'est pas pareille.

Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

M. Garon: C'est parce que, dans la Loi sur

les accidents du travail, on paie beaucoup moins au Québec qu'en Ontario aussi. Malgré tout ce qu'avaient dit les libéraux dans l'Opposition, le document de mars 1986 démontre qu'au Québec on paie considérablement moins qu'en Ontario, qu'on payait moins qu'en Ontario pour les accidents du travail.

M. Côté (Charlesbourg): À la CSST?

M. Garon: Oui. Par 100 $ de salaire, en Ontario, on payait 2,75 $, au Québec, à peu près 2,04 $ ou quelque chose comme ça.

M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, il y a des signes très heureux. On a vu dans les journaux...

M. Garon: Mais là, vous allez rattraper le terrain, parce que vous avez augmenté les tarifs de la CSST considérablement depuis deux ans.

M. Côté (Charlesbourg): Moi, ce que J'ai compris des entrepreneurs que j'ai rencontrés avant il y a deux ans, c'est qu'ils se plaignaient déjà que les tarifs étaient... La grille tarifaire avait été si suffisamment généreuse à leur égard que plusieurs d'entre eux étaient en difficulté financière.

M. Garon: Vous les avez augmentés pas mal pareil.

M. Côté (Charlesbourg): Écoutez là...

M. Garon: Vous êtes en train de rattraper l'Ontario.

M. Côté (Charlesbourg): II y a une chose qui est certaine, c'est qu'à partir du moment où il y a un déficit de la nature de celui de la CSST... À part de cela, ce ne sont pas nos affaires. Vous m'amenez sur un terrain qui dépend davantage de mon collègue et qui est une responsabilité ministérielle aussi du gouvernement. Mais, quant à moi, je suis très heureux d'avoir la responsabilité de la Régie de l'assurance automobile qui, comme vous pouvez le constater, a un bilan tout à fait impressionnant quant à sa gestion.

M. Garon: Non, mais ce qui peut arriver, par exemple, c'est que le premier ministre, voyant que vous pouvez verser des 100 000 000 $ comme ça au Trésor, peut vous donner la responsabilité de la CSST pour que vous essayiez de faire la même chose.

M. Côté (Charlesbourg): Mon collègue, M. Paradis, s'occupe de ça de manière admirable, et déjà, ce qu'on a vu dans les journaux cette semaine et la semaine dernière présage d'une situation qui méritait d'être redressée. On parle maintenant d'un déficit qui aurait diminué de 175 000 000 $ ou 300 000 000 $. Je pense que c'est assez appréciable.

M. Garon: II faudrait que vous lisiez le dernier rapport du Vérificateur général qui vient de sortir aujourd'hui pour l'année qui se termine le 31 mars 1987. Il dit le contraire à la page 59.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, mais il portait peut-être un jugement sur bien des années antérieures.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Non, non, c'est en cours, l'année 1986-1987 comparée à l'année précédente.

M. Côté (Charlesbourg): Mais une chose est certaine, c'est qu'il y a eu du travail de fait. Et, selon ce qui a été dit dans les journaux dernièrement quant à la résorption du déficit de la CSST, il y a quand même un pas en avant et dans la bonne direction. C'est davantage de ça dont on doit se réjouir. C'est dans la bonne direction.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Hyacinthe, sur le projet de loi 62.

M. Messier: Oui, et aussi au nom de la CSST.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous cède la parole.

M. Messier: Je voudrais juste témoigner. J'ai été dix ans à la Commission de la santé et de sécurité du travail, et, effectivement, avant décembre 1985, les employeurs contestaient leur taux de cotisation, qui était très élevé. À ce chapitre, les employeurs se sont toujours plaints des taux de cotisation. Ils sont plus hauts maintenant, mais il faut rattraper le déficit qui a été encouru sous votre gouverne. Pour en revenir au projet de loi 62, je pense que cela prend de grands principes d'harmonisation, et laissez-moi vous dire que lorsque j'étais à la Commission de la santé et de la sécurité du travail, comme administrateur de trois bureaux, Valleyfield, Granby et Sorel, on avait ces disparités-là entre la Régie de l'assurance automobile du Québec et la CSST. Lorsqu'un fonctionnaire se fait dire qu'à la régie on a le droit à cela et qu'à la CSST on a droit à telle chose, en matière d'application des lois en question, c'est très dur pour lui de dire à un citoyen qu'il y a deux classes de citoyens au Québec: celle de la Régie de l'assurance automobile du Québec et celle des accidentés du travail. Je pense que si on est capable d'harmoniser les deux projets de loi en ce qui a trait aux principes d'indemnisation, au remplacement du revenu, même chose en ce qui concerne la réadaptation sociale, il faut opter

pour cette voie.

M. Côté (Charlesbourg): C'est ce qu'on tente de faire dans la mesure du possible parce que les clientèles ne sont pas les mêmes. C'est sûr que pour les mêmes clientèles, c'est ce qu'on tente de faire et que le travail va continuer dans ce sens. Je pense qu'il y a une collaboration amorcée qui est très heureuse; il s'agit de continuer dans ce sens.

M. Messier: Un exemple, un camionneur qui subit un accident de la route devrait avoir les mêmes prestations qu'un voyageur régulier. Évidemment, c'est la CSST qui va payer dans un cas, et dans l'autre, c'est la Régie de l'assurance automobile du Québec.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, sauf que, dans un cas, la loi 42 a départagé la responsabilité des uns et des autres et il y a une incompréhension actuellement en ce qui concerne certains intervenants nouveaux dans le dossier - je ne parle pas du député de Saint-Hyacinthe - parce que c'est un débat qui a cours actuellement en ce qui a trait aux entrepreneurs...

M. Garon: C'est une partie du problème, une cause du problème sans doute parce qu'il était à la CSST lui-même avant d'être député. Il a dit que c'était là qu'il y avait des problèmes. On avait des libéraux dans l'administration qui créaient des problèmes.

M. Côté (Charlesbourg): D'accord, non, non, mais ce que ...

M. Messier: Le jeu était pas mal de votre côté.

M. Côté (Charlesbourg): II en restait un peu moins, après neuf ans, il en restait un peu moins.

M. Messier Je peux vous en nommer quelques-uns qui sont de votre côté.

M. Côté (Charlesbourg): Tout cela pour vous dire: Vous vous souviendrez que M. Alarie de l'ACQ, lorsqu'il s'est présenté à l'étude de l'avant-projet de loi, en a discuté aussi et a soulevé cette question. Depuis, j'ai organisé une rencontre entre M. Alarie et la Régie de l'assurance automobile, et, selon les informations reçues, il a un peu mieux compris la situation, puisqu'elle n'était pas très claire dans son esprit à l'époque. En l'invitant à la régie pour voir comment cela se passait, on a réussi a éclaircir le dossier. Il peut y avoir encore des divergences entre eux et nous quant aux responsabilités des uns et des autres, mais il y a une meilleure compréhension du fonctionnement et un peu plus de compréhension quant à savoir pourquoi cela fonctionne de cette façon.

Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que ceci conclut les remarques?

M. Garon: Je me demandais s'il y avait des tentatives d'harmonisation, car souvent ces tentatives d'harmonisation ont pour but d'économiser des fonds et de payer moins les assurés, dans un cas comme dans l'autre. On sait que quelqu'un qui est victime d'un accident du travail ou d'un accident d'automobile - il y a des accidents mineurs dans les deux cas, mais il y en a des majeurs aussi - dans les deux cas, parfois, les gens sont vraiment mal pris après cela et sont un peu découragés. On n'a qu'à voir, par exemple, l'accident qui est arrivé à M. Vachon aux États-Unis qui n'est pas considéré comme un "feluet" et qui a un bon moral. On a lu dans les journaux qu'à un moment donné il était démoralisé. Il est connu, il dit qu'il a eu des milliers de lettres d'encouragement de gens qui ont dit-Bravo, vous tenez le coup, vous servez d'exemple aux autres. On a un exemple de quelqu'un qui est reconnu comme étant une personne vigoureuse, avec une force de caractère, et il a trouvé cela dur. Et il y a des gens qui sont déjà mal pris, des gens qui ne sont pas riches, qui sont dans des situations encore plus difficiles à cause d'un accident du travail ou d'un accident d'automobile. Moi je pense que, traditionnellement, les juges qui interprètent des lois de jurisprudence dans le domaine de l'assurance, sont toujours, dans le cas de doute ou dans une zone grise, en faveur de l'assuré et non pas en faveur de la compagnie. Le juge dit: S'il y a un doute dans l'interprétation, on ne doit pas essayer d'épargner l'argent de la compagnie au détriment d'un homme, d'une femme, d'une famille qui sont seuls, et on doit donner l'avantage à des personnes qui sont dans le besoin. Alors, c'est pour cela que je pose ces questions-là, pour qu'on puisse voir... (16 h 45)

Je sais que le gouvernement aime à dire qu'il a une bonne gestion, qu'il économise beaucoup, etc. Moi, ma tâche, c'est de vérifier s'il n'économise pas sur le dos du monde. Et c'est pour cela que je veux vérifier le plus possible. D'autant plus que je sais qu'un ministre peut vouloir telle et telle chose, mais qu'il peut y avoir un autre aspect... On le voit dans le rapport du Vérificateur général. Le Conseil du trésor, dans certains cas, ne joue pas ce rôle comme il voudrait toujours le jouer. On prend le cas de Chinic. on en parle ici, on parle du Conseil du trésor. On n'a pas l'air à le féliciter, là-dedans.

C'est pour cela que, dans ces cas-là, il faut vérifier quel est le fonctionnement et on en a eu l'occasion lors de l'étude des projets de lois. D'ailleurs, je voudrais remercier le ministre d'avoir accepté qu'on fonctionne de cette façon-là. On peut fonctionner d'une autre façon, mais ce n'est pas agréable, parfois, de faire des

amendements et tout cela, pour pouvoir avoir du temps de parole. Au contraire, je suis content qu'il y ait cette ouverture. Il y a des choix politiques. Moi, je ne peux pas empêcher le gouvernement élu de gouverner. On peut diverger d'opinions. Je l'ai manifesté, en deuxième lecture, sur le fait que je pense que c'est un mauvais choix de prendre l'argent des assurés aux fins du projet de loi mentionné, de prendre 100 000 000 $ dans la caisse, pour l'entretien routier. Alors, je pense que c'est ceux qui utilisent les routes, qui roulent le plus souvent - c'est-à-dire ceux qui paient de la gazoline, normalement, à ces fins-là - qui devraient payer. Donc, ceux qui utilisent beaucoup les routes devraient payer plus que ceux qui les utilisent moins, etc., pour l'usure de l'asphalte ou pour des raisons semblables, parce qu'il y a un rapport entre les deux. Tandis que l'assurance, c'est une autre chose.

Je peux aller sur la route pour faire des centaines de milliers de milles, sans faire d'accident et payer mes primes, et aller sur la route, une fois, pour 10 kilomètres et me faire tuer ou être Invalide pour la vie. On n'est pas dans le même genre de rapport, quand on est dans le domaine de l'assurance, dans le domaine de l'entretien des routes, même à des fins de sécurité. C'est pour cela que je vous disais que je pense que c'est un mauvais principe de prendre l'argent du fonds d'assurance. Moi, je pense qu'on aurait dû utiliser les fonds pour baisser davantage les primes ou augmenter les prestations aux assurés ou élargir les secteurs où l'on pense que les gens se font serrer un peu. C'est vrai qu'on en a parlé à la commission parlementaire qui a siégé avant l'ouverture de la session. Les gens sont venus faire des représentations, et le ministre a indiqué qu'il acceptait de rencontrer les gens pour faire de nouvelles propositions, par la suite. On va les avoir avant les fêtes. Donc, cela veut dire qu'on va avoir le temps de les regarder tranquillement. C'est bien de donner une période de temps pour que les gens puissent réagir, parce que, même avec des projets de loi qui procèdent d'une bonne intention, on peut, dans sa rédaction, mal couvrir ce qu'on veut couvrir. Ensuite, il y a l'application de la loi. L'application de la loi peut être faite de façon abusive; la loi ne peut pas être appliquée ou être difficilement administrable. C'est ce que j'entends dire un peu, aussi, dans certains cas de lois qu'on devra étudier, sans doute, dans les prochains jours. Et, certaines personnes s'inquiètent de l'administration de la loi, même si celle-ci ne semble pas mauvaise, au départ, sur les principes, son administration, est une autre affaire.

Alors, je voudrais indiquer, comme on avait dit qu'on devait continuer jusqu'à 17 heures, que je pourrais parler des heures sur le projet. C'est un choix gouvernemental, et il a été fait de cette façon-là. Je ne peux pas empêcher le gouvernement de faire son choix, même si je ne suis pas d'accord sur cette façon de faire. Le ministre n'a pas d'autre choix, par responsabilité ministérielle, que de dire qu'il est d'accord. Plus tard, quand il sera à sa retraite et que je serai à ma retraite, on pourra parler et il pourra me dire, peut-être: Je ne pouvais pas le dire, mais j'étais de ton avis plus que de celui du gouvernement ou du ministre des Finances. Mais comme la solidarité oblige à faire partie d'une équipe, un peu comme des chevaux qu'on attelle et qui ne choisissent pas leur partenaire pour tirer la voiture. C'est comme cela, la politique. SI le ministre est prêt à procéder au vote, on serait prêt à procéder au vote.

M. Côté (Charlesbourg): Peut-être deux minutes si le député me le permet. Je pense que, finalement, on a bien couvert le sujet quant aux intentions et aux choix politiques que le gouvernement a pu faire et qui peuvent ne pas être dans la ligne de pensée de ce que l'Opposition souhaitait. Je pense qu'il a été clairement exprimé au moment de la deuxième lecture que vous autres, vous auriez fait autre chose que ce qu'on a fait.

On a tenté de répondre aux trois niveaux possibles d'intervention: la réduction des primes, l'augmentation du retour de certains avantages en prestations et la route. Finalement, on a diminué les primes d'assurance de 50 000 000 $. Dans la mesure où le projet de loi déposé sera accepté, on va retourner au-delà de 40 000 000 $, 46 000 000 $ et peut-être même près de 50 000 000 $ aux assurés. Cela leur appartient. Je pense que c'était très clair quand on en a parlé. Finalement, on a prévu de l'argent pour les routes aussi. C'est un "mix" des trois qui fait qu'en fin de compte chacune de ces interventions a un côté positif.

L'obligation qu'on avait et la difficulté qu'il y avait, c'était que la réserve de stabilisation ne peut pas être affectée à du récurrent, sinon on n'en sortirait jamais. On ne peut pas prendre aujourd'hui des engagements en fonction d'un montant de 200 000 000 $ disponible. Il l'est maintenant, mais, à partir du moment où il est utilisé, il ne l'est plus. Il ne reviendra pas l'année prochaine, en tout cas. Il peut revenir, mais c'est hypothétique. C'est un peu cela qui était notre choix. Je l'ai fait, je veux le répéter pour que nos mémoires politiques s'en souviennent et que ce soit consigné au Journal des débats, je l'assume surtout parce que la Régie de l'assurance automobile a pris l'initiative de nous le suggérer, compte tenu de sa connaissance et de son vécu au regard de la Loi sur la Régie de l'assurance automobile. On l'a fait dans ce sens. Je partage en tout point la décision qui a été prise par le gouvernement, c'est même moi qui l'ai enclenchée au bureau du premier ministre et au bureau du ministre des Finances, et effectivement, je l'assume. Je sais que le député de Lévis ne voulait pas me prêter des intentions dans ce cas.

M. le Président, je veux remercier le député de Lévis pour sa compréhension et lui dire que mon attitude, à la commission parlementaire, est exactement la même que j'ai toujours eue avec Mme Harel qui le précédait comme critique, et sera la même dans tous les projets de loi que nous aurons, peu Importent les choix politiques que chacun pourra faire, soit oui, soit non. Je pense que c'est une sorte d'ouverture quant à l'information et à la qualité de l'information aussi, qui est indispensable aux hommes politiques pour qu'ils soient capables de prendre des décisions éclairées quant au soutien ou au non-soutien, en tout ou en partie, des mesures prises par le gouvernement. C'est dans cette optique que j'ai travaillé depuis que j'ai des responsabilités ministérielles. Peu importe ce qui arrivera, que les débats soient plus ou moins orageux parfois, chacun a un rôle politique à jouer, compte tenu de sa situation en Chambre et de ses convictions profondes aussi. Je veux donc assurer le député de Lévis de mon entière collaboration sur ce plan.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Lévis.

M. Garon: Dans cette perspective, est-ce qu'il serait possible d'avoir une copie du document que vous avez fait parvenir à la Régie de l'assurance automobile pour recommander cela.

M. Côté (Charlesbourg): Je peux vous envoyer une copie de la décision du conseil d'administration de la Régie de l'assurance automobile.

M. Garon: Non. C'est l'argumentation. Il a dû y avoir, avec ce...

M. Côté (Charlesbourg): Cela a été verbal, au moment d'une rencontre. Il n'y a pas eu de document comme tel. Il y a la décision du conseil d'administration sur ce plan. Cela a été une rencontre...

M. Garon: II n'y a pas eu d'analyse pour établir...

M. Côté (Charlesbourg): Non.

M. Garon: Vous disiez tantôt que les coûts...

M. Côté (Charlesbourg): Oui, c'est à partir...

M. Garon: II n'y aurait pas de coûts éventuels.

M. Côté (Charlesbourg): Non, pas d'augmentation. Cela n'aurait pas d'effet sur l'augmentation des primes d'assurance automobile.

M. Garon: Pour cela, la régie a dû se référer à des études. En vertu de l'article 150 et des suivants, il y a des analyses actuarielles...

M. Côté (Charlesbourg): La manière dont cela s'est passé est la suivante. À partir du moment où M. Vézina a eu entre les mains le bilan de l'année et en a saisi le conseil d'administration - je crois que c'est en mars que vous l'avez obtenu, je pourrais peut-être préciser la date par les ordres du jour - c'est avec ce bilan financier qu'on sautait aux conclusions qu'il y avait des possibilités à ce niveau. C'est comme cela que ça s'est passé. Finalement, c'est à la lumière de l'expertise qu'ils ont maintenant depuis neuf ans en termes d'administration de la Régie de l'assurance automobile et avec le conseil d'administration qui est informé de tout ce qui se passe à la régie que cette initiative a été prise et transmise au ministre responsable.

Étude détaillée

Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'article 1 du projet de loi 62 est adopté?

M. Garon: Sur division.

Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'article 2 est adopté?

M. Garon: Sur division.

Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que le titre du projet de loi 62, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile, est adopté?

M. Garon: Le titre du projet? Sur division puisque le titre...

Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'ensemble...

M. Garon: S'il n'y avait pas d'article 1, il n'y aurait pas besoin de titre.

Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'ensemble du projet de loi 62 est adopté?

M. Garon: Sur division.

Le Président (M. Saint-Roch): La commission de l'aménagement et des équipements, ayant maintenant terminé cette partie, suspend ses travaux jusqu'à 20 heures ce soir, ici même.

(Suspension de la séance à 16 h 56)

(Reprise à 20 h 11)

Projet de loi 87

Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de l'aménagement et des équipements poursuit ses travaux pour procéder à l'étude détaillée du projet de loi 87, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil.

Est-ce que nous avons des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Il y a deux remplacements. M. Charbonneau (Verchères) sera remplacé par M. Paré (Shefford) et Mme

Juneau (Johnson) sera remplacée par M. Blais (Terrebonne).

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le secrétaire. M. le ministre, est-ce qu'il y a des remarques préliminaires?

Remarques préliminaires M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Oui, M. le Président. Il nous fait plaisir de nous retrouver ce soir pour procéder à l'étude article par article du projet de loi 87, Loi modifiant la Loi sur la . Régie du logement et le Code civil. Comme vous le savez si bien, M. le Président, ce projet de loi a pour objet de modifier la Loi sur la Régie du logement et le Code civil afin de prévoir les cas où la conversion d'immeubles locatifs en copropriété divise est interdite et ceux où elle peut être autorisée. Il prévoit également des mesures pour protéger les locataires contre le harcèlement, la reprise de possession et l'évacuation injustifiée du logement lors de travaux.

J'aimerais souligner, pour le bénéfice des gens de la commission, que je suis accompagné par des fonctionnaires de la Régie du logement. À ma gauche, Mme Louise Thibault qui est la présidente, derrière moi, Mme Nicole Archambault, la vice-présidente, et Mme Céline Topp qui est également l'une des cadres de l'organisme.

Une voix:...

M. Bourbeau: Ah! Nous avons également un observateur du KGB, du ministère de la Justice, M. Richard Tremblay.

J'ai un trou de mémoire, M. le Président. Je vais laisser la parole à l'Opposition, avec votre consentement.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le ministre. M. le député de Shefford.

M. Paré: Oui, M. le Président, j'aurais moi aussi des notes préliminaires, mais j'aimerais, si vous le permettez, laisser la parole au député de Terrebonne qui m'accompagne, car il a une intervention en Chambre dans quelques minutes.

Le Président (M. Saint-Roch): Je cède maintenant la parole à M. le député de Terrebonne.

M. Yves Blais

M. Blais: Merci, M. le Président. Il m'est très agréable de venir aider mon confrère de Shefford sur cette loi prénommée 87, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil. Comme introduction, j'aimerais vous dire que, cet après-midi, en Chambre, j'ai parlé d'une loi qui touche les services sociaux et les directeurs d'hôpitaux. Nous avons reproché au gouvernement, dans cette loi, d'amener une solution partielle, parce que la flèche ne se dirigeait que contre les directeurs d'hôpitaux, et nous aurions aimé mieux, à ce moment-là, que le gouvernement regarde la chose de façon globale, c'est-à-dire qu'il regarde toutes les sociétés d'État, tous les hauts fonctionnaires de ces sociétés autant pour Hydro-Québec, pour le secteur de l'éducation que pour les services sociaux. Cette loi n'avait de flèches que sur une seule cible et cette cible pouvait nous paraître, à nous, de l'extérieur, et aux gens qui nous regardent - oui, oui, c'est juste une introduction d'une minute - mal dirigée et faire une cible de gens qui, en réalité, ne sont pas nécessairement vulnérables. J'ai blâmé cela.

Encore aujourd'hui, je voudrais m'adresser, non pas à Mme la ministre elle-même mais à la philosophie que cette ministre-là est obligée de représenter. Je vais être obligé de dire exactement la même chose ici. Le ministre - et je disais à madame aujourd'hui qu'elle est comme un oiseau sur la branche dans la volière du parti au pouvoir - est, lui aussi, dans cette loi-là, l'oiseau qui porte la responsabilité de l'habitation et des affaires municipales. Il est entendu que cette loi porte, de façon générale, juste sur la conversion des édifices en place en condos. On se le dit là, c'est ça le principal là-dedans. Montréal doit le faire à la pièce par exception et le reste du Québec devra le faire selon son bon vouloir. Cela revient un peu à cela. C'est comme cela que je l'ai compris. Je trouve cela très curieux quand on sait que les condos sont en fait le lieu de prédilection des "dinks", des "yuppies" et des personnes âgées. En gros, c'est cela. À 96 %, les condos qui sont des appartements beaucoup plus dispendieux, de façon générale, qu'une simple maison et sont beaucoup plus petits - parfois, ils ont une chambre, des fois deux, mais rarement trois - sont les lieux de prédilection des "yuppies", des "dinks" et des personnes âgées à la retraite.

Je n'ai rien contre ces gens. Ils ont le droit de vivre quelque part. Mais, depuis quel-

ques années, les condos se sont multipliés. Avant d'établir une politique de développement et de transformation des habitations déjà sur notre territoire, j'ai l'Impression que tout ceci devrait être subordonné à la politique familiale et à la politique de natalité dont le gouvernement se dit le grand défenseur. Ce n'est qu'une branche du mille-pattes qu'est la politique familiale. De la façon dont les condos sont conçus, cela n'ouvre pas la porte au troisième enfant. Cela va être plus facile à comprendre pour tout le monde. Ce n'est pas une porte ouverte vers une famille un peu plus nombreuse. On ne se reproduit pas assez au Québec.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais: C'est sûr qu'on ne se reproduit pas assez. Mais si le gouvernement est sincère dans sa volonté d'une politique qui fait que la population du Québec augmente, avec l'immigration, bien sûr, mais aussi parce que les gens... Si deux personnes se marient, pour que ce soit l'équivalent, il faut avoir au moins deux enfants. Pour qu'on devienne plus nombreux, il faut que ce soit plus que deux. Et la moyenne n'est pas observée actuellement à travers le Québec. Les condos sont, dans le contexte actuel, une façon de favoriser les "dinks", les "yuppies". Et vous savez ce que sont les "dinks"? "Double Indemnity No Kids". C'est cela, un "dink" aujourd'hui. Alors, le ministre est obligé d'adopter cette loi parce qu'on lui ordonne de le faire au cabinet. Mais, j'aurais aimé qu'il aille défendre le fait que la politique familiale devrait l'emporter sur des cataplasmes de ce genre. C'est un cataplasme que de ne parler que des condos. Les condos sont presque des arrêts pour la natalité, en fait...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Blais:: ...parce que la plupart de ces condos n'ont pas assez de pièces pour recevoir une famille de deux ou trois enfants. Donc, cette chose devrait être subordonnée à la politique familiale. Cela cause un problème, surtout dans les grands centres urbains.

Vous savez, M. le ministre, qu'il y a 1 400 000 terrains vacants au Québec, dézonés, prêts pour la construction. En plus, il y a 410 000 terrains au Québec qui sont déjà viabilisés. C'est du terrain, ça! Si on bâtissait des maisons juste sur les 410 000 terrains viabilisés, à deux personnes seulement qui achèteraient, cela fait 820 000 personnes, sans dézoner, sans "condosiser", sans "condosiser". Alors, personnellement, je ne vois pas pourquoi on ne laisse pas au moins encore le moratoire tel qu'il est. Je ne comprends pas, surtout si on dit qu'on veut une politique nataliste, qu'on veut protéger la famille et permettre que le Québec soit autosuffisant au moins du côté population.

Je reproche au gouvernement, à ce moment- là, de faire... J'en avais une cet après-midi, à la pièce, une autre, ce soir avec le député de Shefford. Il va vous parler encore plus que moi, c'est bien sûr.

M. Bourbeau: Vous ne pariez pas sérieusement?

M. Blais:: Je suis très sérieux, M. le ministre. Est-ce que vous croyez que c'est logique qu'on y aille à la pièce dans une politique globale de la famille, qu'on amène quelques cataplasmes comme cela? Une politique est supposée être conçue de façon globale. On a une politique familiale ou on n'en a pas. Et les condos sont un frein au développement de la famille. Quelqu'un achète un condo, il se marie, arrive là, il y a des fois une chambre, une deuxième chambre, un enfant, et cela reste comme ça. Il y en a qui en ont deux, bien sûr, mais qui a les moyens d'acheter des condos à trois chambres qui coûtent 283 000,36 $. Il n'y en a pas beaucoup. Il n'y en a vraiment pas beaucoup. C'est un frein au développement normal que le gouvernement actuel nous dit qu'il a. C'est le développement de la famille et de la reproduction au Québec.

De plus, dans les grands centres urbains, vous le savez, vous avez certainement fait des consultations. Vous en avez fait à Montréal, l'été passé. Vous vous êtes promené. Les gens vous ont certainement dit, M. le ministre, que, dans un certain coin d'une grande ville, il se bâtit des condos et que les gens qui habitaient ce coin-là n'ont pas les moyens, à 98 %, de rester dans le même coin parce que lorsque les logements deviennent des condos, ils ne sont pas capables de les acheter et d'en payer les frais communs.

Donc, on garroche nos gens qui étaient en ville et qui développaient une famille, on les envoie à la campagne. Là, à la campagne, on arrive dans des loyers, il y a juste 400 000 lots de viabilisés. On arrive à la campagne, on est obligé de reconstruire des écoles pendant que les écoles des grandes villes se vident. Et c'est toujours l'ensemble des Québécois qui paient pour cela. Il n'y a pas de service d'aqueduc, de routes, d'écoles, de transport des écoliers. Il y a des conséquences graves à légiférer à la pièce. SI j'étais donc ministre dans ce gouvernement-là - mais je ne peux pas parce que vous ne partagez pas le même idéal que moi, mais ce n'est pas parce que je n'en ai pas la capacité, je l'aurais, c'est l'idéal que je ne trouve pas de l'autre côté - que je dirais donc au cabinet: Arrêtez donc de nous faire légiférer à la pièce! Il y a des politiques globales qui commandent à un gouvernement en place de ne pas faire de cataplasmes de façon intempestive. On veut faire une politique familiale et on vient de nommer un ministre, il y a quelques mois, pour s'occuper de la politique familiale. Mais pensez-vous que l'ouvrage et l'orientation de ce ministre-là avec des morceaux à la pièce comme cela? Pensez-

vous que son travail n'est pas atrophié avant de partir? Il est complètement atrophié. Oui... M. le ministre, il regarde l'heure. Ce n'est pas l'heure, c'est le projet de loi qu'il faut regarder. Il ne devrait pas être là, il ne devrait pas être devant nous parce qu'il est un empêchement à la famille...

Des voix: Ha. ha, ha!

M. Blais:: ...c'est ce qu'il est ce projet de loi, et il brime... Ensuite, les gens ne peuvent pas habiter dans ces condos que vous construisez dans les grandes villes. Les gens ne peuvent pas. Qu'est-ce qui arrive? Ils s'en vont dans des taudis de plus en plus nauséabonds, inhabitables, avec des murs craquelés. Et ensuite qu'est-ce qui arrive? Ils réclament des HLM parce qu'on leur a enlevé leur logement qui était plus ou moins salubre, souvent, mais au moins habitable. Ils sont obligés de se réfugier dans moins bon. Et les gens qui ont des gros salaires, des doubles salaires s'en vont dans des condos. Donc, encore socialement, on est obligé de se cotiser pour doubler, tripler le nombre nécessaire de HLM. Encore là, les HLM devraient faire partie de la politique familiale. J'ai peine à le croire, M. le ministre. Vous, vous êtes obligé, on vous commande de le faire, c'est bien sûr, et vous livrez dans les circonstances la commande qu'on vous a demandé de livrer. Que voulez-vous? Un livreur, c'est un livreur. Mais, à la base, quand vous êtes autour de la table au cabinet, un petit coup de poing sur la table pour dire que le développement des condos à travers le territoire québécois fait partie intégrante de la politique familiale, et qu'on ne devrait jamais arriver avec une loi comme celle-là avant que la politique globale de la famille soit établie, pensez-vous que cela ne vous ferait pas pousser les cheveux un peu? Je suis persuadé que cela vous donnerait du toupet au moins au Conseil des ministres parce que c'est logique de le demander. Je suis persuadé...

M. Bourbeau: Question de règlement, M. le Président. Je considère que le député de Terre-bonne a du front tout le tour de la tête de parler du ministre qui n'a pas de toupet, M. le Président.

Le Président (M. Saint-Roch): Alors, cela n'étant pas une question de règlement, M. le député de Terrebonne, vous pouvez poursuivre.

M. Blais:: Non, mais c'était au sens figuré, bien sûr, je suis persuadé que, même si le ministre est allé à la guerre longtemps et qu'on voit qu'il est allé au front, il l'a pris au deuxième sens du mot. Je suis persuadé de ça. Mes propos ne sont pas guerriers du tout. Je suis plutôt pour la noblesse, la complicité, la délicatesse et la paix. Bon, mais ça...

M. Bourbeau: Vous me permettrez de poser une question.

M. Blais:: Avec plaisir.

M. Bourbeau: Est-ce que le député comprend l'anglais?

M. Blais:: Ah oui! ah oui!

M. Bourbeau: II y a un proverbe qui dit: "Grass does not grow on a busy street."

M. Blais:: Oui, cela arrive. Mais le monde m'accuse souvent d'être mal peigné, mais, pour l'être, il faut d'abord avoir des cheveux.

Mais il arrive ceci. Dans la politique familiale, j'aimerais que le ministre donne un coup de poing sur la table et le dise... Dût-il le demander à son confrère pour voir si la politique familiale doit être élaborée en comprenant le développement des condominiums. Dût-il le demander! Je pense qu'il y en a qui ont tracé la voie en ce domaine et que le ministre devrait les consulter avant, parce qu'il y a des choses sérieuses qui se disent souvent sur un ton badin pour que le message passe mieux. Mais c'est grave de légiférer à la pièce parce que, là, on fait juste suivre le mouvement. Dans tous les domaines, le gouvernement suit un mouvement cataplasme pour qu'il n'y ait pas de trop grosses evaporations de critiques sociales. Mais, à force de mettre des cataplasmes sur un tuyau fendillé, un bon jour, tout va voler en éclats. Et là, c'est l'ensemble des Québécoises et des Québécois qui vont y perdre.

Alors, M. le Président, j'aimerais conclure sur ça... Combien me reste-t-il de temps?

Une voix: Continuez c'est tellement bon!

Une voix: Sept minutes.

M. Blais:: Les sept péchés capitaux.

Une voix: ...peuvent le faire.

M. Blais:: M. le ministre, en longue conclusion, j'aimerais vous dire ceci. Un gouvernement en place doit chercher une société juste pour que la richesse collective trouve une distribution équitable. Lorsque les politiques globales ne sont pas établies avant d'arriver avec des projets de loi quels qu'ils soient - et c'en est un exemple patent - c'est impossible, impossible que l'histoire donne... Souvenez-vous de 1970 à 1976, l'histoire parle encore des cataplasmes de l'époque. Et, aujourd'hui, est-ce qu'on s'oriente encore vers des lois de cataplasme et que personne... On a dit dans les journaux dernièrement qu'à laisser aller les choses et à ne réparer que les petits orifices qui se présentent devant nous, lorsque le tuyau crèvera, le Québec n'aura plus d'armes pour subir la catastrophe.

Une voix: Amen.

M. Blais:: Cela se dit, mais, surtout ça se comprend. Il faut le comprendre. Vous savez, on ne passe pas de l'enfer au paradis juste en une phrase. Je ne veux pas dire qu'actuellement ce projet-là c'est l'enfer, mais c'est loin d'être le paradis.

Une voix: C'est bien dit

M. Blais:: C'est loin d'être le paradis. Loin, loin d'être le paradis. Alors, moi, M. le ministre, si j'étais vous, si j'avais votre autorité - je ne dis pas si j'étais vous - si j'avais votre autorité au sein de ce gouvernement, je retournerais au cabinet et je dirais: C'est illogique, c'est intempestif de présenter un projet de ce genre. Il faudrait au moins tenir le moratoire un bon laps de temps encore pour donner le temps au ministre délégué à la Famille de préparer une politique globale. Et c'est dans la globalité qu'on reconnaît les grands hommes, et non pas dans les détails. Ce n'est pas dans les détails. C'est dans la globalité des oeuvres de quelqu'un. La politique de la famille - je l'ai dit tantôt - c'est un mille-pattes. Ces mille pattes-là il faut qu'elles soient sur la même table au même moment pour que la bête avance. Présentement, on les présente patte par patte, et, en plus, certaines ont des cataplasmes ou des fêlures à leur base. C'est un projet de loi fêlé à sa base, et, M. le ministre, je ne vous en tiens pas responsable, parce que, quand on est porteur d'une commande, on la livre.

M. le Président, sur ces bons mots, j'encourage quand même le ministre à regarder à fond le projet de loi et à aller supplier le cabinet de le mettre de côté et attendre que l'élaboration d'une politique plus globale vienne sur la table avant de faire des projets comme celui-ci. Merci beaucoup, M. le Président (20 h 30)

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le député de Terrebonne. M. le député de Shefford.

M. Roger Paré

M. Paré: Â moins que le ministre ne veuille répondre? Non?

Merci, M. le Président Moi non plus, je ne referai pas l'historique que j'ai fait en deuxième lecture, loin de moi cette intention! De toute façon, je n'en ai pas le temps. On a un temps très limité, sauf que, sur un ton différent, mais avec la même conviction, je sais très bien que ce n'est pas pour la galerie ni pour la salle, mais juste pour essayer de vous convaincre. Je trouve que le projet de loi devant nous, ce soir, est fondamental. On change les sociétés, et il faut en être bien conscient. On change des sociétés avec des décisions prises dans des Parlements, et des erreurs ont été commises dans le passé. Je me demande si on n'est pas en train d'en faire une, et je vous le dis tel que je le pense et tel que je le ressens. Vous allez me dire: Ah! Globalement, les gens sont satisfaits. Je dois vous dire que j'ai été absent pendant deux jours cette semaine, pas de la vie politique, mais de l'Hôtel du Parlement, et que je suis allé rencontrer des groupes.

Je dois vous dire qu'ils ont la même inquiétude que celles manifestées lors de la commission parlementaire à Montréal. C'est évident qu'on reconnaît tous, moi le premier, et, dans votre discours de deuxième lecture, vous m'avez même cité comme étant favorable. Non, je ne suis pas favorable au projet de loi. Je suis favorable à certains pas dans la bonne direction, et tout le monde dit cela, en risquant même que si jamais... On ne peut pas faire une obstruction à la gang qu'on est et au temps où on est dans l'année, de toute façon. Mais la crainte serait que, si on fait une obstruction, et des groupes me l'ont dit, et je vous le dis tel que je le sens et que je l'ai vécu, on risquerait de ne pas faire quelques pas dans la bonne direction. Mais, au-delà des gestes qu'on pose dans le bon sens, on va amener des inquiétudes de changements de société, y compris a Montréal et spécialement dans les grandes municipalités.

Vous savez, on parle de qualité de vie et d'originalité à Montréal. Le premier ministre Bourassa était bien content de dire que, dans l'entente du lac Meech, on est une société distincte. Une société distincte, c'est au-delà de la culture et au-delà de la langue, c'est dans la façon de vivre. Et la façon de vivre qu'ont les Québécois, c'est une différence fondamentale et majeure. Il faudrait faire attention de ne pas tous passer dans le même entonnoir, à un moment donné, car je ne suis pas sûr que, les Québécois et nous ici autour de la table, nous serions heureux de vivre de la même façon que les gens de Toronto et de Vancouver. Je me rappelle que des gens ont dit en commission parlementaire, non pas des gens du Parti québécois, mais des gens du milieu des affaires à qui on avait demandé: Si on lève le moratoire et qu'on permet cette spéculation en cours d'ailleurs... On n'a qu'à regarder l'augmentation de l'évaluation municipale qui est catastrophique, on va limiter... Vous allez me dire: Oui, on va probablement limiter les hausses de taxes en diminuant les taux, mais l'évaluation demeure quand même là. Donc, pour accéder à la propriété, ce n'est pas une question de taxes, c'est une question d'évaluation.

Des gens ont dit: Cela risque de nous amener comme à Toronto. On était tout fier de dire que, parmi les avantages économiques, les avantages pour attirer des entreprises au Québec, spécialement dans la région de Montréal, une étude faite en 1985 disait que la meilleure place pour attirer les industries de haute technologie, c'était la grande région métropolitaine de Montréal. Parmi ces facteurs, il y avait, entre autres, la qualité de vie et le bas taux pour être

capable d'acquérir une propriété, parce que ce qui valait, à ce moment-là, environ 70 000 $ à Montréal en valait 150 000 $ à Toronto. Qu'est-ce que cela va nous donner d'avoir des augmentations du salaire minimum et des augmentations des salaires moyens si, en fin de compte, à cause de la spéculation et des lois qu'on a adoptées, on change les possibilités et la capacité des Québécois d'accéder à la propriété? Je vous le dis, cela m'inquiète.

Qu'a fait la copropriété, ailleurs? Je l'ai déjà dit et je le répète: Oui, c'est un bon mode d'accession a la propriété, mais pas sur le dos des plus démunis. Et on l'a fait dans des municipalités et dans des métropoles du monde entier. Quel résultat qu'est-ce que cela a donné? Il me semble qu'on a attendu assez longtemps pour prendre l'exemple des autres, pour ne pas faire les mêmes erreurs. À Paris, 75 % des condominiums sont maintenant en location. Qu'est-ce que cela a donné qu'un logement devienne un autre logement en copropriété, sinon probablement de doubler le loyer mensuel. On n'a pas avancé. Qu'est-ce que cela a donné à New York? Cela a donné le Bronx. Des gens ont dû quitter leur milieu de vie à New York pour s'en aller dans des banlieues, pas pour payer moins cher, mais pour avoir des conditions de vie différentes. Vous êtes certainement allé voir, sinon allez-y avant de l'adopter, et vous allez vous apercevoir que vivre dans ses immenses buildings, pour ne pas utiliser d'autres mots, d'une vingtaine ou d'une trentaine d'étages, où tous les blocs se ressemblent et où la seule chose qui fait la différence, c'est le numéro sur la porte, je ne voudrais pas qu'on finisse par vivre comme cela dans la région métropolitaine. On a la chance d'avoir une qualité de vie par une différence avec les autres métropoles américaines et une grande métropole du monde qu'on doit préserver. Ce n'est pas vrai que le développement doit passer juste par grossir, par densifier, par spéculer... Dans une société, on est responsable de la qualité et de la préservation. Notre rôle comme législateur est de préserver la qualité, spécialement pour les plus démunis; donc, aider pour qu'ils soient mieux et non pas faire en sorte qu'ils soient pires. Je pense que c'est cela qu'on va faire. Je vous le dis parce que je le pense. Donc, je ne vois pas là-dedans en quoi on va améliorer quelque chose.

Lors de la commission parlementaire, des consensus avaient été établis, vous le savez très bien. Oui, il y avait urgence à corriger, à amener des mesures positives comme celles qu'on retrouve dans la loi 87. On l'avait dit: II y avait urgence à agir parce qu'il y avait des trous dans les lois actuelles et dans le moratoire, ce qui faisait en sorte que, finalement, cela devenait presque une jungle. Donc, ce n'était pas acceptable. Il fallait apporter des correctifs. Là-dessus, on y est à 100 milles à l'heure. Mais il y avait aussi un autre consensus unanime qui disait: Avant de lever le moratoire parce que c'est fondamental dans une politique de l'habitation, c'est fondamental parce que c'est le mode de propriété, c'est le mode de logement et c'est le mode de délogement aussi des citoyens, on a tous dit de façon unanime - et quand je dis "on", je m'exclus, je parle des gens venus témoigner en commission parlementaire - on a dit de façon unanime: Cela prend une politique globale d'habitation avant de lever le moratoire.

La plupart ont dit comme a aussi dit mon collègue de Terrebonne tantôt: Une politique de la famille - parce que c'est inclus dedans - si le logement, l'habitation devient quelque chose de déjà réglé, je ne suis pas sûr qu'on va être capable d'avoir une politique nataliste, de qualité de vie et une politique de responsabilisation des parents si, finalement, on a même délogé les parents de leur milieu de vie naturel. Je trouve cela inquiétant. On a dit en commission parlementaire: II faut une politique d'habitation et une politique de la famille avant de lever le moratoire. Pourtant, ce n'est pas ce qu'on a fait. On nous apporte des correctifs sur les trous actuels dans l'habitation, mais directement reliés à la levée du moratoire. Je dois vous dire, qu'au nom de l'Opposition, je ne peux pas embarquer là-dedans. Je ne peux pas embarquer là-dedans parce que, si on règle certains petits problèmes, on s'en vient complètement chambarder l'ensemble du secteur de l'habitation. Je suis sûr que, lorsque je dis cela, je ne me trompe pas beaucoup.

Un autre consensus portait sur la possibilité de permettre à ceux qui ne veulent pas ou qui ne peuvent pas devenir propriétaire individuel de pouvoir le devenir d'une façon collective. On ne la retrouve pas là-dedans. Dans le dépôt du document, Lever le moratoire, une décision qui s'impose, on avait mis des objectifs. On avait mis l'objectif d'accès à la propriété et de protéger le stock de logements locatifs. Dans la loi, à la suite de la commission parlementaire où on est venu nous montrer directement d'une façon franche et non équivoque qu'il y avait des problèmes, on se retrouve maintenant avec les objectifs qui sont: protection du locataire et protection du stock de logements locatifs. Mais c'est discutable sur la façon dont on veut atteindre les objectifs. Déjà, on parle beaucoup moins d'accès à la propriété là-dedans. Cela semble moins important, alors que cela semblait urgent d'agir, le 19 juin 1986, quand le ministre l'a annoncé une année d'avance. L'urgence était de permettre l'accès à la propriété. Maintenant, l'accès à la propriété vient de prendre une débarque. C'est moins important. Cela ne semble plus être une urgence, alors que cela l'était il y a une année. Je vois que, lorsqu'on veut passer quelque chose, qu'on veut tellement qu'on en change les objectifs et la façon de le faire et on prend tous les moyens. Cela m'inquiète davantage-

Sans badiner, je n'ai pas la façon de faire des farces comme le députe de Terrebonne pour

passer un message sérieux, je vais le dire très sérieusement? On avait l'intention de lever le moratoire, mais, en même temps, on avait l'ordre de ne pas faire de vagues. C'est reconnu dans la société. A l'heure actuelle, il ne faut pas faire de vagues, parce que la politique doit être quelque chose de calme. Il ne faut pas déranger les gens.

En commission parlementaire, on s'est aperçu que lever le moratoire d'une façon franche, directe et unilatérale, cela aurait soulevé des gens. Comment fait-on? Sans être jongleur, mais juste spectateur, avec l'intention de le lever et les réactions que cela aurait soulevées, j'aurais agi exactement de la façon dont le ministre a agi dans la loi 87, c'est-à-dire deux poids, deux mesures, c'est-à-dire essayer de satisfaire tout le monde, mais, en même temps, réaliser l'objectif qu'on s'est fixé de lever le moratoire. C'est exactement cela qu'on est en train de faire. Deux poids, deux mesures. Dans quel sens? Dans le sens que la ville de Montréal s'est opposée, la Communauté urbaine de Montréal s'est opposée. Il est venu des gens de Notre-Dame-de-Grâce, de Westmount, de l'est de Montréal, des gens de Verdun, des gens de tous les coins. Finalement, les gens de Montréal, globalement, sont venus s'opposer. Les autres municipalités: non, ou, en tout cas, pas d'une façon organisée, franche et directe. À Québec, la municipalité est d'accord. Mais on a fait plaisir à tout le monde sans se préoccuper d'une politique d'habitation, sans se préoccuper d'une politique familiale, sans se préoccuper des Inquiétudes soulevées et même des cas décriés par les gens venus faire valoir leurs points de vue, autant à Montréal, qu'à Québec.

Cependant, à Québec, on a semblé ne pas contester avec la même vigueur, en semblant représenter autant de personnes qu'à Montréal, toutes proportions gardées. Il ne faudrait pas oublier que des groupes nationaux sont venus faire valoir leurs points de vue, à Montréal, mais au nom des gens de tout le Québec. Donc, ils ne sont pas revenus à Québec. À Québec, on a frappé surtout des groupes locaux. Il y avait des groupes qui représentaient beaucoup de gens qui ont de l'argent à faire avec la transformation, dont la ville de Québec. Et, cela, c'est reconnu.

Les municipalités ont un coup d'argent extraordinaire, facile et rapide avec la transformation. Donc, Québec, qui a des problèmes financiers, qui attend une réponse d'un de vos collègues, qui ne vient pas, trouve une façon pas trop compliquée d'aller chercher des revenus. C'est la transformation, et, maintenant, on le permet. Et je dois vous dire que ce qu'on est en train de faire, encore une fois, aussi, c'est de transférer une responsabilité aux municipalités, leur transférer la patate chaude. Le ministre me fait signe que oui. Sauf que l'habitation, c'est trop important, à mon avis, pour que Québec n'en garde pas la responsabilité. Ce n'est pas un manque de confiance envers les municipalités.

C'est une question d'équité. C'est une question d'homogénéité sur le territoire.

Et si, malgré un rapport des sages qui demandaient l'abolition de la Régie du logement, vous avez décidé de ne pas l'abolir et, au contraire, de lui donner plus de pouvoirs, c'est que vous avez jugé que, soit au niveau des MRC ou à celui des municipalités, il y avait un danger au sujet des relations locataires-locateurs. On a décidé de conserver, à Québec, le pouvoir, l'administration et le fonctionnement de la Régie du logement. On trouvait cela majeur et important. Et là, dans un secteur aussi important qui vient toucher les locataires et les locateurs, le droit de propriété et même le droit de demeurer, on est prêt à transférer cela aux municipalités sur une base qui peut être complètement différente d'une ville à l'autre, d'un quartier à l'autre.

Donc, on transfère, encore une fois, aux municipalités, une autre responsabilité, sans transfert financier. En tout cas, ce n'est pas annoncé. Mais, ce qui compte, ce n'est même pas le transfert financier, c'est le fait qu'on va vivre maintenant des situations différentes, qu'on soit de Longueuil, de Montréal et de Laval, et qu'on vienne faire en sorte de ne pas traiter Montréal, la Communauté urbaine de Montréal, comme si c'était un territoire à part du reste du Québec. Les Québécois sont des gens égaux et ils doivent avoir les mêmes pouvoirs, les mêmes possibilités, les mêmes chances, peu importe qu'ils soient Montréalais, Québécois, Granbyens ou de n'importe quel coin du Québec. Il y a un Québécois avec des chances égales, peu importe où il se retrouve. Au niveau municipal, il doit y avoir la même chose. On ne doit pas commencer, pour des choses aussi fondamentales que le logement, à faire des différences entre les gens de l'agglomération montréalaise et les gens des autres régions. Cela m'inquiète. Et, en plus, par des pouvoirs qui sont semblables. C'est une question d'image pour ne pas choquer, pour ne pas soulever.

Ce qu'on fait, c'est qu'on donne à peu près les mêmes pouvoirs. On le dit de façon contraire et différente, mais le fait de le dire comme cela, on sait qu'on ne choquera personne et qu'on n'amènera pas de manifestations ou de levée de boucliers. On dit à Montréal: Pas de levée de moratoire, sauf par dérogation. Donc, cela veut dire que les gens de la Communauté urbaine de Montréal peuvent le lever comme ils veulent, par dérogation. Au reste du Québec, on leur dit: Le moratoire n'existe plus, mais, si vous voulez le limiter ou l'empêcher, vous passez une réglémentation. Pourquoi ne dit-on pas la même chose à tout le monde puisqu'on va arriver au même résultat? Au départ, qu'on dise au moins la même chose à tout le monde. Je pense que c'est honnête et que c'est respectueux envers les élus municipaux. Tous les élus municipaux l'ont été démocratiquement. Ils doivent avoir les mêmes pouvoirs. On doit leur parier avec le même

langage. Ce n'est pas cela qu'on fait. Et, mon inquiétude est de savoir comment on va le vivre à Québec et à Montréal? (20 h 45)

J'ai commencé par Québec. Je n'ai pas beaucoup de temps. Québec, aussi, a été citée, je pense, par tous les groupes, en tout cas, par les groupes nationaux. Le danger, pour la ville de Québec, toutes proportions gardées, est aussi grand sinon plus qu'à Montréal, dans les quartiers centraux. Donc, pourquoi on oublie Québec, alors que, non seulement le danger est à nos portes, mais que c'est commencé. C'est tellement commencé que je vous ai cité une lettre d'une citoyenne qui habite pas loin de l'Hôtel du Parlement et qui est menacée d'éviction. Je dois vous dire que, depuis le dépôt de la loi, elle ne doit certainement pas se sentir en sécurité, y compris les gens du même édifice, parce que, là, on vient de permettre, connaissant la volonté politique des élus municipaux de Québec, d'aller dans ce sens-là. Ils sont même venus nous le dire en commission parlementaire. Alors, imaginez-vous les déménagements qui vont se faire ici parce que ce sera autorisé.

Vous saviez l'inquiétude qui était manifestée sur l'augmentation automatique qui arrivera au logement. On va y revenir à l'étude article par article. L'augmentation des coûts va se répercuter et les locataires vont devoir partir de toute façon. Les gens qui déjà mettent 30 %, 35 % et 40 % de leur revenu en logement, il s'agit d'augmenter un peu et ils ne pourront plus rester. Ils vont devoir déménager dans d'autres quartiers. Donc, ce n'est pas par choix, c'est par obligation.

À Montréal, il est déjà question à la suite d'échanges que j'ai eus et des choses que j'ai entendu dire et qui se sont confirmées, d'ici à quelque temps, de diviser le territoire en une douzaine d'arrondissements. Ce sera en termes d'arrondissements, en termes de quartiers, en termes d'unités; ce sera cas par cas pour les citoyens, je ne parle même plus des Québécois sur le territoire du Québec, je parle des Québécois sur le territoire de Montréal. Même les Montréalais n'auront plus maintenant possibilité égale en termes de locataires, en termes d'accès à la propriété. Tout dépendra s'ils sont sur la bonne rue, dans le bon arrondissement. Ce sera maintenant discrétionnaire aux municipalités. Imaginez-vous la pression quand les gens sauront qu'à Lavai et à Longueil, ils peuvent faire ce qu'ils veulent y compris les spéculateurs. À Montréal, ils pourront, s'ils réussissent à faire de bonnes pressions, à changer un arrondissement... Quand une municipalité de la Communauté urbaine de Montréal décidera - que ce soit Rivière-des-Prairies, que ce soit Verdun, Montréal - que, sur son territoire, elle a une politique différente, pour amener plus de développement pour attirer davantage des gens de l'extérieur ou des gens de Montréal, il y aura une politique différente pour chacune des municipalités.

Cela pourrait même aller - et je ne pense pas charrier, mais il faut tout envisager ici - jusqu'à faire en sorte que la ville de Verdun, pour moderniser davantage, attirer plus de gens, prendre plus d'importance dans le sens de la Communauté urbaine de Montréal, ait un programme de rénovations, comme il y en a un pour bonifier PAQ. Un programme encore plus généreux si cela aboutissait à de la copropriété. Qu'est-ce qu'on a à faire? Rien, parce qu'on est en train de transférer, du ministre à la Société d'habitation du Québec, les pouvoirs, des programmes de rénovation et, surtout, maintenant, des programmes où les objets de décision en matière de conversion aux municipalités de façon indépendante, individuelle, comme des rivales peut-être sur l'île de Montréal pourront, à partir de maintenant, décider d'aller s'arracher une clientèle. Et quand on s'arrache une clientèle au prix du développement et de la spéculation, quand on connaît la situation des plus démunis à Montréal, quand on sait que plus de 70 % sont des locataires et que, de ce nombre-là - on le retrouve dans Lever le moratoire, une décision qui s'impose - plus de 80 % ne sont pas intéressés à devenir propriétaires, c'est Inquiétant. C'est inquiétant pour ce qui arrivera. Je pense qu'on aurait dû, comme a dit mon collègue de Terrebonne, avant de lever le moratoire, si jamais c'était cela qui était la bonne décision, faire au moins deux choses. Une qui a été dénoncée, c'est le manque d'étude. Il n'y avait pas d'étude dans le livre qui a été déposé, et là, on vous amène une loi qui n'est pas plus reliée à des études. Donc, sans étude, c'est une première inquiétude à mon avis, surtout sans politique globale d'habitation.

Cela va nous donner quoi à l'avenir une politique globale d'habitation ou une politique de la famille? De venir corriger des erreurs qu'on est en train de passer; donc, au printemps prochain, on corrigera des erreurs qu'on est en train de légiférer présentement en hiver. Je vous le dis le plus sincèrement du monde parce que je le pense et que les gens sont venus nous le dire. Je suis allé en rencontrer cette semaine pour voir si j'étais le seul à penser cela. Je me rends compte que je suis peut-être le porte-parole de bien plus de gens que vous ne pensez. Je n'irai pas faire d'assemblées publiques à Montréal pour les soulever. Je veux essayer de soulever votre intérêt sur le fait qu'il y a un danger. Il ne faudrait pas attendre d'être obligé d'aller arracher aux villes un pouvoir qu'on leur a donné, parce qu'on va s'apercevoir que cela va être appliqué comme une mesure de compétition entre les villes, l'une par rapport à l'autre, surtout dans les grandes agglomérations métropolitaines. Surtout, ici, dans la ville de Québec, des gens démunis, des gens isolés ne pourront peut-être pas se regrouper, ne pourront peut-être même pas être en mesure de profiter des règlements, et surtout, du fait qu'il n'existe pas de véritables

mesures de protection pour les locataires, ils seront délogés. On fera des gens de plus en plus pauvres et de plus en plus malheureux au Québec. Vous allez me dire que ce n'est pas une majorité. Sauf que notre rôle est de s'occuper des plus démunis aussi, et même peut-être en priorité. Dans le projet de loi, ce n'est pas eux qu'on aide.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le député de Shefford. M. le ministre.

M. André Bourbeau (réplique)

M. Bourbeau: M. le Président, je n'ai pas jugé bon tantôt de répliquer à l'intervention du député de Terrebonne parce qu'il n'y avait vraiment rien de substantiel et qu'il était manifeste qu'il était venu simplement écouler vingt minutes du temps de la commission pour disparaître, aussitôt son boniment terminé. Évidemment, l'intervention du député de Shefford est plus substantielle et traite du sujet.

Je suis toujours un peu étonné d'entendre le député de Shefford lorsqu'il prend la parole sur des sujets d'habitation. Je dois dire qu'a priori on est porté à lui faire confiance et à admettre, à l'entendre qu'il semble très convaincu de ce qu'il dit. Quant à moi, je suis toujours porté à écouter ses discours avec beaucoup d'attention. Il semble sincère dans ses propos. Je me demande toujours si vraiment il croit exactement ce qu'il dit ou si c'est le manque d'expérience, le manque de vision qui l'empêche de voir les choses de la même façon que nous. De toute façon, je reconnais que les propos du député de Shefford émanent de ses convictions profondes et j'aimerais bien pouvoir le convaincre d'une autre vision des choses. Je ne désespère pas de pouvoir y arriver un jour.

Je relèverai seulement certains des propos qu'il a tenus. Le député de Shefford nous parle de la façon de vivre des Québécois. Nous sommes un peuple qui avons nos propres habitudes. Ce n'est pas la même chose au Québec qu'ailleurs. Je reconnais que les Québécois ont leur spécificité. C'est ce qui fait d'ailleurs un des charmes de notre société. Il reste que, au Québec, en dehors de la ville de Montréal et de la ville de Québec, en dehors des grands centres, la plupart des Québécois sont des propriétaires. Nous avons à peu près le même taux de propriétaires au Québec que dans d'autres provinces, sauf que le problème se pose dans les grands centres où on a un nombre de locataires beaucoup plus important, spécialement à Montréal.

Je ne considère pas qu'il soit normal que dans une ville comme Montréal, nous ayons tout près de 80 % des gens qui soient des locataires. Je ne pense pas que, si cela reflète la situation qu'un grand nombre de gens soient des locataires à Montréal, cela doit nécessairement demeurer ainsi. Est-ce que, parce que, traditionnellement, les Montréalais ont été des locataires, on doit dire que c'est leur façon de vivre et qu'ils doivent nécessairement le demeurer? J'aime à penser que les Montréalais et les Montréalaises, si on pouvait rendre disponibles et accessibles des logements pour les loger, dans une certaine proportion, souhaiterait passer du statut de locataire au statut de propriétaire. Je refuse de penser que, parce que la tradition a fait en sorte que les Montréalais soient majoritairement locataires, on doive nécessairement les condamner à le demeurer.

Le député de Shefford mentionne que l'inflation qui a sévi au cours de derniers mois et des dernières années a rendu presque impossible l'acquisition de propriétés pour les gens qui sont locataires. Je reconnais que c'est exact, que l'inflation a sévi d'une façon très importante au cours de ces derniers temps. C'est justement parce qu'on risque de voir cette situation continuer à se développer, à se maintenir, qu'il faut un jour permettre aux Québécois d'accéder à la propriété avant qu'il soit trop tard. Si on avait permis aux Québécois d'accéder à la propriété en 1977-1978, alors que la valeur des immeubles a chuté dramatiquement après l'arrivée au pouvoir du Parti québécois, à ce moment-là, les Québécois auraient pu accéder à la propriété de logements à très bon compte. Le phénomène s'est produit de nouveau en 1982-1983, lors de la récession qui a frappé le Québec. Encore là, si le moratoire avait été levé, on aurait pu accéder à la propriété de logements de bonne qualité à des coûts vraiment exceptionnels. J'ai souvenance d'avoir vu, ayant pratiqué la profession de notaire, des immeubles se vendre à des coûts vraiment ridicules par rapport à la valeur qu'ils ont aujourd'hui. Et c'est malheureux qu'on n'ait pas pu profiter à ce moment-là de ces circonstances pour permettre à nos Québécois d'accéder à la propriété.

Aujourd'hui, les prix ont monté. Cependant, par les temps qui courent, on se rend compte que le taux de vacance augmente, et il n'est pas impossible que, dans les prochains mois dans la prochaine année, on ait une diminution de l'évaluation des immeubles et que ce soit très propice à l'acquisition de logements par les locataires. L'immobilier étant ce qu'il est, on sait que, sur une période de temps, que cela prenne cinq, dix ou quinze ans, tout logement, tout immeuble acquis prendra nécessairement de la valeur. Et cette valeur peut s'accumuler au profit d'un spéculateur, d'une grosse compagnie, mais elle peut s'accumuler aussi au profit de Québécois et de Québécoises à moyens très modestes qui, s'ils ont la chance d'être propriétaires, pourront accumuler du capital. Je pense que le député de Shefford ne peut demeurer insensible à ces propos. Si on peut faciliter l'accès à la propriété à ces Québécois et à ces Québécoises à revenus modestes ou moyens, je pense qu'on aura fait oeuvre utile.

Je signale au député de Shefford que cette spéculation, qu'il condamne et qu'il déplore, se

produit dans le système actuel qui existe tel que nous l'avons présentement avant l'adoption de la loi, système qui existait sous le Parti québécois aussi, et que c'est la législation en cours depuis quelques années qui a permis ou qui... En fait, c'est sous cette législation que la spéculation sévit et ce n'est pas le projet de loi que nous avons devant nous qui va augmenter la spéculation parce que, entre autres, nous consolidons la position des locataires. Ce n'est certainement pas une mesure pour augmenter la spéculation. Au contraire, je dirais que, si certains propriétaires voulaient profiter de situations pour tenter d'évincer des locataires pour augmenter la valeur de leur immeuble, ils viennent de recevoir un préavis que cela va être difficile dorénavant d'évincer des locataires. Donc, je pense que nous passons à des mesures qui devraient avoir pour effet de contrer la spéculation plutôt que de l'augmenter.

Un autre point que je voudrais souligner, c'est que le député de Shefford nous fait un grief d'arriver avec une solution qui ne traite pas toutes les régions du Québec sur le même pied. Il nous dit: Nous avons deux poids, deux mesures. Moi, ce que je réponds au député... Le député dit: Vous êtes un peu opportuniste, vous avez regardé ce que les gens sont venus dire devant la commission parlementaire et vous tentez de faire plaisir à tout le monde. C'est à peu près les mots qu'il a prononcés. C'est une façon de voir les choses qui n'est pas très flatteuse pour le ministre des Affaires municipales et pour le gouvernement, mais on peut voir le problème sous cet angle-là. On pourrait également dire que c'est un projet de loi très réaliste qui tente d'être le reflet de la situation telle qu'elle existe au Québec.

Le député, tantôt, s'est fait l'avocat d'une solution unique pour le Québec, d'une solution qui traiterait toutes les régions du Québec, d'une solution mur à mur pour l'ensemble du Québec. Alors, je dis au député de Shefford que, si jamais Dieu lui prête une assez longue vie, qu'il accède à des fonctions ministérielles et que, par hasard, son futur chef lui confie les responsabilités du ministère des Affaires municipales, il devra changer de philosophie, et très rapidement, parce que les municipalités du Québec, les régions du Québec vont lui dire que le Québec n'est pas pareil partout et que les solutions mur à mur, cela ne passe plus au Québec. La réglementation qui fait que c'est la même chose partout, de Granby à Chicoutimi, du Bas-du-Fleuve jusqu'en Abitibi, cela ne fonctionne plus. (21 heures)

Le Québec n'est pas pareil partout et on doit s'ajuster à la réalité québécoise. La réalité québécoise, surtout en habitation, n'est pas la même à Montréal qu'en province. Ce n'est pas du tout la même problématique. C'est ce que les gens sont venus nous dire en commission parlementaire. C'est vrai, le député l'a dit. On nous a dit: À Montréal, cela se passe de telle façon.

L'ensemble des autres municipalités au Québec nous a dit: Non, chez nous, ce n'est pas de la même façon que cela se passe. Les problèmes ne sont pas les mêmes, donc les solutions ne peuvent pas être les mêmes. C'est une question de philosophie. Le député a une conception technocratique et centralisatrice de la politique. Nous, nous avons une philosophie différente qui, je pense, reflète davantage la diversité du Québec.

Maintenant, le député s'inquiète beaucoup du projet de loi. Il prétend que la loi n'a pas été précédée d'études. Je dirais que, s'il y a un dossier qui a fait l'objet d'études et qui a aussi été le résultat de la compilation des études faites par d'autres dans d'autres pays, non seulement en Amérique, mais en Europe, c'est bien ce dossier-ci. Nous avons pris beaucoup de temps à présenter le projet de loi. Le député nous l'a même reproché à de nombreuses reprises. Mais je dirais qu'il y a peu de lois qui ont été présentées depuis quelques années à l'Assemblée nationale qui ont fait l'objet d'autant d'études et d'une préparation aussi minutieuse. Nous avons consulté pratiquement tout ce qui s'est écrit sur le sujet en Occident. Nous avons des piles d'études à la Régie du logement et à la Société d'habitation du Québec. Nous avons dépouillé tout ce qui s'est fait, tout ce qui s'est écrit. Nous avons même été faire un voyage, aux frais des contribuables - je n'ai pas honte de le dire - l'an dernier avec le président de la Société d'habitation du Québec pour interroger sur place des hauts fonctionnaires de certains pays pour connaître les problèmes d'habitation, pour comprendre et tenter de connaître comment on résolvait sur place les problèmes de relation entre locateurs et locataires, les problèmes de contrôle de logements, les problèmes de transformation en copropriété dans plusieurs pays européens. Nous avons tiré nos conclusions. Je dirais que s'il y a une loi qui n'est pas improvisée, c'est bien celle que nous avons devant nous.

Maintenant, quant aux inquiétudes du député, j'espère qu'il les partage avec lui-même, parce que je ne vois vraiment pas beaucoup de gens dans la société, qui semblent les partager, que ce soit les groupes de locataires, que ce soit les propriétaires que j'ai rencontrés, que ce soit les chroniqueurs spécialisés ou les éditorialistes. Il semble que, d'une façon générale, on soit satisfait du projet de loi et qu'il n'y ait pas beaucoup d'appréhensions présentement dans la société quant au projet de loi que nous avons devant nous.

M. le Président, j'ai été un peu long, moins long que le député de Shefford et surtout moins long que le député de Terrebonne, mais je pensais qu'il était important de replacer les propos que j'ai entendus dans un contexte un peu plus réaliste. Merci.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le

ministre. Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui veulent intervenir? M. le député de Shefford?

Discussion générale

M. Paré: De toute façon, cela va revenir en cours de route, à l'étude article par article, mais si on peut le passer tout de suite, cela va peut-être accélérer le reste. Vous dites que c'est comme si on essayait de vendre ou de louanger la proportion de locataires à Montréal et la situation d'être locataires, ce n'est absolument pas le cas et vous le savez très bien. Je l'ai dit et répété à maintes reprises, l'Idéal serait que tous ceux qui le veulent puissent être propriétaires, sauf que ce n'est pas la situation et, dans le projet de loi, on ne retrouve rien qui va favoriser l'accès à la propriété, à mon avis. Quand vous dites qu'on aurait pu profiter de certaines années creuses' pour favoriser l'accès à la propriété, je vais vous dire que ce n'est pas quand cela va mal que les gens ont les moyens, spécialement les plus démunis qui ne sont pas certains de leur job. Toutefois, grâce à la mise en place de programmes depuis 1976, il y a maintenant de 53 % à 55 % des gens qui sont propriétaires. Il y a quand même eu des programmes qui ont permis aux gens de devenir propriétaires, mais il n'en existe plus de ces programmes-là.

Donc, oui pour l'accès à la propriété, mais pas sur le dos des autres personnes et avec des programmes d'accès qui, selon ce que vous nous avez laissé entendre, viendraient. On ne le retrouve pas là-dedans. Probablement que cela va venir plus tard, seulement au prochain budget. Sauf que, d'ici là, il peut y avoir des changements qui vont se faire de façon importante dans certains quartiers, dans certains coins.

Vous disiez dans vos remarques que, finalement, vous reconnaissiez que l'inflation avait été passablement énorme, mais je ne vous parle pas d'inflation. L'inflation, cela a été une moyenne de 4 % et quelque chose. Je ne parle pas d'inflation, je parle de spéculation. L'augmentation, c'est sur le prix des maisons à Montréal, qui a été de 18 %, 20 %, 22 %, 30 %, 40 % et même de 200 % dans certains cas, sur les mêmes bâtisses en l'espace d'une année. Vous connaissez certainement des cas, sinon je peux vous en montrer qui ont augmenté de 200 % en l'espace de deux ou trois ventes. Ce n'est pas de l'inflation, mais de la spéculation. Cela se passe encore et cela va certainement se passer malgré ce qu'on vient de présenter, à mon avis, parce que ce sera encore... On y reviendra dans un article. Je vous ai déjà soumis une façon, qu'on a trouvée à Montréal, de contourner la loi qui n'est même pas adoptée. En plus, il peut y avoir des arrondissements où ce sera levé, donc cela va se faire de toute façon. Je ne parle donc pas d'inflation, mais de spéculation. La spéculation n'a jamais été aussi forte que depuis qu'on a manifesté l'intention de lever le moratoire. Vous allez être obligé de le reconnaître.

M. Bourbeau: M. le Président, je me rends compte que j'ai peut-être, par erreur, tout à l'heure employé le mot "inflation" alors que, manifestement, je faisais allusion à la spéculation foncière. Alors, je remercie le député d'avoir porté à mon attention cette erreur que j'ai pu faire dans les mots que j'ai prononcés.

Maintenant, pour ce qui est d'une politique d'habitation, le député sait fort bien que nous sommes en train de préparer une politique d'habitation qui intégrera, bien sûr, la philosophie véhiculée par le projet de loi devant nous. Pour ce qui est des programmes d'aide à l'accès à la propriété, évidemment, avant de pouvoir parler de programmes d'accès à la propriété, il faut au moins que le cadre juridique permette l'accès à la propriété dans les logements existants. Alors, la démarche que nous faisons maintenant, c'est de planifier une loi, d'adopter une loi qui permettra éventuellement l'accès à la propriété de logements existants. Si le gouvernement décide ultérieurement d'annoncer des programmes d'aide, la loi pourra permettre justement l'accès à la propriété dans des logements du type de ceux dont on parle présentement.

Étude détaillée

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre.

Sur ces remarques, j'appelle maintenant l'article 1.

M. Bourbeau: J'aurais certains commentaires à faire sur l'article 1, M. le Président.

M. Paré: Est-ce que je peux juste poser une question de règlement ou de fonctionnement? Prenez-le comme vous voulez, M. le Président. Étant donné qu'il y a onze articles, mais énormément de paragraphes qui sont tous très importants parce qu'on touche des articles d'autres lois et qu'il y a même des amendements qui ne viennent pas modifier un article, mais un paragraphe d'un article, j'aimerais qu'on l'étudié paragraphe par paragraphe.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vais appeler l'article 1. Lorsque nous serons rendus à ce à quoi vous vous référez, M. le député de Shefford, à l'article 2, s'il y a consentement de la commission, on pourra appeler 51, 52, 53, 54, etc.

M. Paré: D'accord. Cela va.

Le Président (M. Saint-Roch): Sur ce, nous revenons maintenant à l'article 1. M. le ministre.

Loi sur la Régie du logement

M. Bourbeau: La Régie du logement a juridiction exclusive pour décider des demandes relatives à la section de la loi qui contient les dispositions particulières à la conservation des logements. En conséquence, la régie, à l'exclusion de tout autre tribunal, doit décider de toute demande relative à la conversion d'un immeuble locatif en copropriété divise. Toutefois, de par sa loi constitutive, la régie a comme mandat d'agir et d'intervenir seulement dans le cadre des relations locataires et locateurs. L'article 1 du projet de loi soustrait donc de la juridiction de la Régie du logement les demandes découlant de la sous-section sur la conversion visant à faire sanctionner l'inexécution d'une obligation du vendeur vis-à-vis de l'acheteur ou vice versa.

Ainsi, ce n'est pas devant la régie, mais devant les cours de justice ordinaires que devront s'exercer les recours découlant du défaut du vendeur de remettre à l'acquéreur éventuel d'un logement le rapport d'expert ou la Circulaire d'information, articles 54.5 et 54.6, alinéa 4, et le défaut du locataire ayant décidé d'exercer son droit de préemption, de passer l'acte de vente dans le délai prévu, article 54.6, alinéa 3. Il en va de même si l'acheteur demande, en vertu de l'article 54.10, la réduction de ses obligations, généralement la diminution du prix de vente.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Shefford.

M. Paré: Cela va pour l'article 1.

Le Président (M. Saint-Roch): L'article 1 est-il adopté?

M. Paré: Adopté.

Le Président (M. Saint-Roch): J'appelle maintenant l'article 2, le sous-article 51.

M. Bourbeau: M. le Président, j'aurais un amendement.

Le Président (M. Saint-Roch): Oui, et nous avons un papillon.

M. Bourbeau: J'aimerais faire un commentaire en premier lieu. Je présenterai l'amendement ensuite.

Cet article établit le cadre général dans lequel pourra s'effectuer dorénavant la conversion en copropriété divise. Le premier alinéa maintient la nécessité d'obtenir l'autorisation de la Régie du logement pour pouvoir convertir un immeuble comportant un logement, mais étend cette juridiction aux immeubles en ayant déjà comporté un au cours des dix années précédant la demande. Cette juridiction accrue empêchera le recours au jugement déclaratoire de la Cour supérieure qui permet actuellement de convertir lorsque l'immeuble ne comporte plus de locataire à la suite de travaux majeurs ou de circonstances ayant conduit à leur départ. On bloque ainsi une des échappatoires au moratoire actuel où ce trou dans la Loi sur la Régie du logement constituait une invitation à l'éviction des locataires pour pouvoir convertir.

M. le Président, j'aimerais proposer...

Je vais continuer, M. le Président. Le deuxième alinéa vise à interdire la conversion pour des raisons évidentes: des immeubles qui bénéficient d'aide dans le cadre d'un programme gouvernemental, le but de cette aide étant de constituer un parc de logements pour des clientèles spécifiques.

Les anciens troisième et quatrième alinéas, réunis par le papillon que je vais proposer en un seul alinéa, instaurent un double régime de conversion afin, d'une part, de mieux protéger le parc de logements locatifs et, d'autre part, de respecter les voeux des municipalités et de leur confier une responsabilité en matière de contrôle de la conversion sur leur territoire puisqu'elles sont les mieux placées pour juger de son opportunité. Ce double régime vise à interdire la conversion dans les municipalités de la Communauté urbaine de Montréal, sauf dérogation accordée par résolution du conseil s'il est convaincu de son opportunité. L'article 54.11 réfère ici à la procédure que devra suivre le conseil pour accorder une telle dérogation.

Le double régime vise également à permettre la conversion dans les autres municipalités, mais leur permettre d'adopter un règlement pour restreindre ou soumettre la conversion à certaines conditions, dont le consentement du conseil qui pourra juger de l'opportunité de la conversion. L'article 54.12 réfère ici à la procédure à suivre pour des municipalités.

Finalement, la dernière phrase de cet article vise à soustraire les indivisaires qui occupent tous les logements de leur immeuble de la juridiction municipale puisqu'il n'y a plus de logements locatifs à protéger. Cependant, les indivisaires devront demander l'autorisation de convertir en copropriété divise à la Régie du logement afin que cette dernière s'assure qu'il n'y a pas eu de reprise de possession illégale, comme nous le verrons à l'article 54.2. Le dernier alinéa de l'actuel article 51, relatif à la radiation possible d'un enregistrement de déclaration de copropriété sans l'autorisation de la régie, se retrouvera plutôt à l'article 54.8 par souci de regrouper ensemble les articles accordant des recours.

M. le Président, l'amendement que je voudrais apporter à l'article 2 réfère à l'article 51 de la Loi sur la Régie du logement et consiste à réunir les deux derniers alinéas en un seul.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre.

M. le député de Shefford.

M. Bourbeau: M. le Président...

Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.

M. Bourbeau: Les raisons de cet alinéa qui propose de réunir les deux derniers alinéas en un seul, c'est que cette modification est nécessaire pour réunir les troisième et quatrième alinéas en un seul afin de permettre dans les municipalités de la Communauté urbaine de Montréal comme dans les autres municipalités la conversion en copropriété divise d'un immeuble dont tous les logements sont occupés par des propriétaires indivis. Ceux-ci ne seront pas obligés de passer par la municipalité étant donné qu'il n'y a plus de locataire dans les lieux et qu'il ne s'agit que de passer pour les indivisaires occupants à un système d'organisation juridique différent. Ceci était l'intention de départ comme en fait foi l'information que nous avons donnée à la sortie du projet de loi. Malheureusement, elle ne s'est pas traduite ici en raison d'une erreur dans l'impression du projet.

Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a des commentaires?

M. le député de Shefford.

M. Paré: Est-ce qu'on discute sur l'amendement?

Le Président (M. Saint-Roch): Sur l'amendement. (21 h 15)

M. Paré: Le fait de réunir finalement les deux derniers alinéas en un seul, on dit: "elle est interdite dans les municipalités de la Communauté urbaine de Montréal, sauf, c'est exactement ce que je disais tantôt: Montréal, non, sauf; et l'autre: les autres municipalités du Québec, oui, mais. Finalement, on les regroupe. On vient confirmer ce que je disais tantôt. On donne le même pouvoir aux municipalités de décider sur leur territoire. Donc, on transfère une responsabilité qui relevait de Québec aux municipalités, le même pouvoir finalement à toutes les municipalités sauf que, dans la vision, dans le discours, dans ce qui a été dit, ce qui a été publicisé, ça laisse entendre qu'on a exclu Montréal. On lui donne un traitement différent. On lui donne, d'une certaine façon, un traitement différent dans le sens qu'elle doit aller par dérogation alors que les autres doivent aller par règlement. Par dérogation pour le permettre, alors que l'autre, c'est par dérogation pour l'empêcher. Les deux municipalités...

M. Bourbeau: Je voudrais signaler au député qu'il ne parle pas présentement sur l'amendement. Vous pariez sur le fond.

M. Paré: Sur l'amendement.

M. Bourbeau: Bien non l'amendement. M. le Président, je soulève une question de règlement.

M. Paré: Réunir les deux derniers alinéas.

M. Bourbeau: L'amendement ne fait que réunir les deux derniers alinéas pour faire en sorte que la dernière phrase du dernier paragraphe "le présent alinéa ne s'applique pas à l'immeuble dont tous les logements sont occupés par des propriétaires indivis" s'applique non seulement aux immeubles qui sont situés hors la CUM mais également à la CUM. L'amendement vise seulement à dire que les proriétaires indivis, ceux qui sont en indivision actuellement dans des immeubles où il n'y a aucun locataire, seulement des propriétaires indivis occupants, ces gens-là n'auront pas besoin de passer par la municipalité. Ils pourront se diriger directement à la Régie du logement. Et ce privilège-là s'applique non seulement aux gens hors CUM mais également à la CUM.

Je ne veux pas empêcher le député de parler sur le fond du projet de loi, mais en ce qui concerne l'alinéa, c'est uniquement pour les indivisaires.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci de ces explications, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres questions sur l'amendement?

M. Paré: Non, sur l'amendement ça va aller. Je reviendrai sur le fond du...

Le Président (M. Saint-Roch): Cela va. Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Paré: Adopté.

Le Président (M. Saint-Roch): Nous en revenons à l'article 51 de la Loi sur la Régie du logement.

M. Paré: Moi aussi j'aurais un amendement. D'accord. Donc, sur le fond. Je vais continuer ce que j'avais commencé à dire. Par ces deux paragraphes-là - je vais continuer sur ceux-là et je reviendrai sur les autres tantôt - on vient reconnaître que finalement, toutes les municipalités pourront se retrouver exactement avec le même régime. Il pourrait arriver que Montréal décide que pour tel arrondissement, il n'y a pas de problème. Longueuii pourrait décider de la même façon que pour tel arrondissement, il n'y a pas de problème parce qu'ils n'ont pas présenté une réglementation l'interdisant, alors que l'autre va présenter des dérogations pour le permettre.

Donc, c'est un pouvoir qu'on transfère aux municipalités mais on le transfère comme si c'était différent, comme je vous le disais tantôt, parce que ça passe mieux. Cela permet à Montréal de dire qu'elle a obtenu gain de cause, sauf que je me rappelle ce que la ville de Montréal avait dit en commission parlementaire. Elle

n'avait pas demandé la totale responsabilité. Elle avait demandé d'être consultée, d'avoir son mot à dire dans une responsabilité qui relèverait d'un organisme, la Régie du logement, alors que ce qu'on dit maintenant: On en donne plus - la petite phrase populaire - que le client n'en demande. C'est bien sûr que Montréal ne refusera pas quelque chose qu'on lui donne comme ça. Québec ne refusera pas non plus un pouvoir qu'on lui donne comme ça puisqu'elle l'avait demandé. Québec avait demandé qu'on lève le moratoire, pas nécessairement la responsabilité, la levée du moratoire, pour s'assurer qu'on n'aura pas de critiques là-dessus. C'est normal qu'il n'y ait pas de critiques quand on demande - je ne sais pas moi - une tarte au sucre et qu'on nous l'apporte avec deux boules de crème glacée. Normalement, si le client ne veut pas la crème glacée, il va la mettre de côté mais il a sa tarte. Là, c'est un peu la même chose, sauf que J'aimerais que vous m'expliquiez - je pense que c'est important que les citoyens le sachent - le contrôle. Autrement dit, il n'y aura aucun contrôle, peu importe ce qui va se passer dans les municipalités. Cela devient de responsabilité municipale. Qu'il y ait des municipalités, à un moment donné... C'est sûr qu'on met, à un moment donné, en tenant compte de certains critères... Sauf qu'en tenant compte, ça demeure sous la... Étant donné qu'on ne dit pas que le ministère, la Société d'habitation du Québec ou la Régie du logement peuvent avoir un droit de regard sur la réglementation ou la dérogation, ça pourrait être n'importe quoi. Donc s'il y a exagération... Si, à un moment donné, Montréal décidait que, pour toutes sortes de raisons, son taux de vacance admissible est de 0,5 %, pour pouvoir concurrencer Laval et Longueuil, parce que les citoyens ne seront plus considérés de la même façon, qui pourra intervenir quand on sait qu'à l'heure actuelle, quand la Régie du logement devra considérer la réglementation d'une municipalité ou la dérogation en vertu d'un avis ou d'une demande, elle devra seulement regarder si, dans la demande, l'avis de conversion est conforme à la réglementation. Donc, elle n'a aucun contrôle sur la réglementation ou la dérogation, mais seulement un droit de regard sur la conformité de l'avis avec la réglementation.

Cela veut dire que, finalement, il y a responsabilité totale, mais s'il y a exagération, que fera-t-on? On fera une loi spéciale pour s'en prendre à une ou à quelques municipalités ou une loi qui viendra défaire cela en disant que le gouvernement reprend la responsabilité parce qu'on s'aperçoit qu'il y a exagération. La Régie du logement n'a aucun droit de regard, à mon avis - si je me trompe, dites-le moi - tel que cela est libellé, tel que je l'interprète, aucun droit de regard sur aucune décision municipale. Le seul droit de regard de la Régie du logement concerne la conformité de l'avis de conversion.

Si c'est cela, Je veux seulement que cela me soit confirmé, mais je n'en démord pas: premiè- rement, ce qu'on est en train de faire, c'est donner un pouvoir qu'on avait aux municipalités. Ce n'est pas le fait de céder qui n'est pas correct, c'est le fait de s'en laver les mains et de remettre cette situation qui, à plus d'un point de vue maintenant est suffisamment chaude, aux municipalités qui devront maintenant trouver une façon de la régler sur leur territoire, sachant très bien que c'est plus facile pour des groupes de citoyens, des associations de faire des pressions ou d'amener des changements à des règlements municipaux, à des décisions municipales, aux conseils municipaux, que de venir faire des pressions ou de demander des modifications à Québec.

On sait ce que cela veut dire comme changement à Québec. Cela veut dire une nouvelle loi, un "bill" privé qu'il faut attendre, un "bill" omnibus à un moment donné en cours d'année ou cela veut dire une loi privée pour changer la loi d'une municipalité. Or, ce n'est plus cela. La municipalité n'a pas à venir chercher d'autorisation par le biais de la loi. On lui donne la liberté totale, si ses citoyens ne sont pas d'accord, nous, on n'aura plus de moyen d'intervention, si les citoyens veulent, on sait à quel point c'est facile et vous en êtes bien conscients, demander à une municipalité un changement de règlement de zonage.

La preuve, c'est que, chez nous comme ailleurs, des demandes de modifications au zonage, cela se fait sur une base presque, tout dépend de la fréquence à laquelle les conseils municipaux siègent, hebdomadaire ou mensuelle. Il s'agit d'avoir les avis, de les annoncer et ensuite de les voter. Cela se passe régulièrement et il y a des exemples selon quoi cela ne se passe pas seulement dans des petites municipalités où, très souvent, il n'y a même pas de quotidien, de poste de radio et où, finalement, l'information passe par un hebdo quand il n'est pas trop tard, en tout cas, si les gens ne l'ont pas vu, c'est passé. Mais, même dans des villes comme Québec, vous avez vu ce qui s'est passé avec l'îlot Saint-Patrick, vous voyez ce qui se passe avec la "Grande Place" ici, en bas, ce sont des règlements de zonage et, même s'il y a des groupes qui finalement amènent des objections, cela n'empêche pas qu'on le fait quand même. Donc, des changements municipaux a la réglementation de zonage, c'est quelque chose en soi de passablement facile, beaucoup plus facile qu'une loi à Québec.

On donne des pouvoirs aux municipalités dans ce sens-là sans contrôle de personne, à moins que je ne me trompe. C'est libre aux municipalités d'amener la réglementation et finalement, en plus de donner un pouvoir, on donne le même pouvoir à toutes les municipalités, mais on le dit d'une façon différente pour arriver au même résultat. Donc, la Communauté urbaine de Montréal finalement n'a pas de cadeau en soi plus que le reste. Ce sont exactement les mêmes pouvoirs. On le dit d'une façon différente

dans la loi, on laisse entendre que c'est différent, alors que, à mon avis, non pas nécessairement quand on lit le texte, mais quand on regarde les résultats sur le terrain, comment cela va se passer en réalité dans les municipalités, elles auront les mêmes pouvoirs, une va passer une réglementation pour interdire, l'autre, pour permettre, pour arriver au même résultat en fin de compte.

Je ne sais pas si je dois continuer et le ministre répondra à cette question-là, mais j'ai une question, et je pourrai continuer ensuite sur d'autres points. Est-ce que c'est l'interprétation que je donne qui est juste, que le seul organisme qui ait un droit de regard sur la réglementation des municipalités, autant de la Communauté urbaine de Montréal que les autres, c'est en regardant la réglementation en conformité avec l'avis, mais rien d'autre sur le fond de la réglementation.

M. Bourbeau: L'avis. Quel avis?

M. Paré: L'avis de conversion. On dit plus loin que la Régie du logement, avant d'émettre l'autorisation, devra s'assurer que l'avis de conversion est conforme à la réglementation municipale.

M. Bourbeau: Ce qu'il est important de comprendre, c'est qu'il y a deux niveaux de décision dans le processus de conversion. Je vais revenir sur les propos du député de Shefford, parce que c'est quand même important, c'est le coeur même du sujet. Nous avons choisi, bien sûr, un double régime. Je signale quand même au député que le système n'est pas le même sur le territoire de la CUM qu'en dehors du territoire de la CUM. Bien sûr, l'action des municipalités pourrait éventuellement faire en sorte que le résultat soit le même. Au départ, on ne part pas d'une problématique semblable. Ce qui est certain, c'est que, sur le territoire de la CUM, à moins que les municipalités n'interviennent, il n'y a pas de conversion possible. Cela prend une action positive de la part d'une municipalité pour qu'il puisse y avoir conversion. Or, en dehors du territoire de la CUM, c'est l'inverse qui se produit. La règle générale, c'est que la conversion est permise et que cela prend une action positive d'une municipalité pour que la conversion soit réduite, voire même pratiquement interdite. On procède d'une position de départ diamétralement opposée.

Les deux instances qui ont à se prononcer, à supposer que les municipalités veuillent bien s'intéresser à la chose, ce sont le niveau municipal et la Régie du logement. Les municipalités, dans les préoccupations qu'elles auront à l'égard de ces problèmes, s'occuperont essentiellement de la protection du stock locatif. C'est autour de cela que porte la préoccupation de la municipalité. Le règlement municipal qui devra être voté contiendra des critères qui viseront à assurer la protection du parc locatif. Dans ce sens, l'avis d'intention de convertir qui sera envoyé par le propriétaire à ses locataires ne fera pas l'objet d'analyse de la part de la Régie du logement, pour savoir si les critères qui tournent autour des règlements municipaux auront été respectés. Ce n'est pas le problème de la Régie du logement de savoir si les règlements municipaux sont respectés - des règlements de zonage, de construction, etc.

La Régie du logement va se préoccuper de savoir si un avis a été envoyé, s'il contenait les mentions obligatoires, c'est-à-dire: avis au locataire de l'intention de convertir, information au locataire de ses droits en tant que locataire du fait qu'il obtient, à partir de ce moment-là, le droit au maintien dans les lieux pour une période illimitée, envoi d'une copie de l'avis à la Régie du logement pour qu'elle soit informée dès ce moment-là, interdiction au propriétaire de faire des travaux majeurs à partir de ce moment-là, autres que ceux qui sont urgents ou nécessaires, ou des travaux de conservation. Bref, la Régie du logement va se préoccuper de ces choses-là. Mais, les problèmes de conformité aux règlements munipaux, cela ne regarde pas en soi la Régie du logement. (21 h 30)

M. Paré: Cela répond exactement à ce que je disais. Chaque municipalité, de façon très autonome, applique une politique d'habitation ou de logement. Même si on a trouvé que la Régie du logement avait sa place sur le plan des relations locataires-locateurs, la municipalité a un mot très important à dire parce que, parmi les facteurs qui risquent de perturber, de changer des situations ou des relations entre les deux, il y a la réglementation en fonction de l'autorisation de convertir dans les municipalités spécialement de la Communauté urbaine de Montréal. Et dans les municipalités de la Communauté urbaine de Québec, en ne faisant rien. Mais, dans le cas de la communauté urbaine de Montréal, c'est en permettant la conversion. Donc, cela veut dire que la régie appliquera ce qui est de politique québécoise provinciale, sauf quand il s'agira d'une réglementation spécifique à la transformation, qui devient maintenant une réglementation municipale.

M. Bourbeau: M. le Président, je voudrais simplement dire au député qu'il ne faut quand même pas qu'on s'avance dans une forêt où tout serait entremêlé. Il faut quand même que les responsabilités de chacun soient connues et clairement établies. C'est pour cela que nous avons choisi de faire en sorte que les responsabilités de la municipalité soient axées sur la protection du parc locatif et que celles de la Régie du logement soient axées sur la protection du droit des locataires. Chacun des deux organismes aura son champ d'activité très clairement établi et ses objectifs.

Maintenant, je suis étonné que le député s'étonne que nous continuions à conférer à la municipalité ces pouvoirs en matière de protection du parc locatif. Ce sont les municipalités au Québec, actuellement, qui s'occupent de ces choses-là. Les règlements municipaux sont là justement pour protéger la société contre les abus, au titre de la construction des immeubles. La salubrité des maisons, des immeubles serait l'objet aussi des préoccupations du monde municipal. Quand on veut construire, on doit demander un permis de construction. C'est la municipalité qui s'occupe de cela, ce n'est pas la Régie du logement. Même en matière de démolition, la Loi sur la Régie du logement permet de transférer aux municipalités l'autorité en matière de démolition et la ville de Montréal exerce, actuellement, ce pouvoir. C'est nettement une préoccupation d'ordre municipal que de voir au secteur de la construction immobilière, de la réglementation des permis de construction. Quand on veut faire des modifications, on demande un permis également à la municipalité. Les inspecteurs municipaux vérifient les constructions.

Bref, on n'invente rien, dans le projet de loi, en disant que c'est la municipalité qui, traditionnellement, au Québec, a la responsabilité du parc locatif, du stock de logements. Cela a toujours été ainsi, d'une façon générale. Et on ne fait que confirmer ce rôle très important des municipalités dans ce domaine. Je dirais au député qu'à mon avis, les municipalités sont très bien équipées pour s'acquitter de cette tâche. Elles sont beaucoup plus présentes sur leur territoire que peuvent l'être quelques fonctionnaires de la Régie du logement. Le député ne semble pas avoir beaucoup d'admiration pour la fonction d'élu municipal, il ne semble pas leur accorder beaucoup de crédit non plus et ne semble surtout pas leur faire beaucoup confiance.

Je ne suis pas de cette école de pensée. Je pense que les élus municipaux sont des élus comme nous, qui doivent convaincre leurs concitoyens de leur compétence et de leur probité. Leurs concitoyens et leurs électeurs sont encore plus près d'eux que de nous et peuvent les suivre à la trace, journellement, pour s'assurer qu'ils s'acquittent bien de leur travail. On dit que c'est le gouvernement qui est le plus proche du peuple et peut-être celui aussi qui est le plus sensible aux préoccupations immédiates des concitoyens. Enfin, c'est celui dont le temps de réponses est le plus rapide, certainement, en tout cas, aux problèmes des citoyens.

Je pense que les élus municipaux sont certainement mieux placés pour s'occuper de ces choses-là que les fonctionnaires du gouvernement du Québec, confortablement assis derrière leurs pupitres, les pieds installés sur des tapis moelleux et qui, souvent, n'ont pas beaucoup le temps d'aller faire l'inspection des bâtiments dans chaque municipalité du Québec. Alors, je dis au député que, à mon avis, il est préférable de confier aux municipalités cette responsabilité-là.

Et je signale au député que le Québec n'innove pas en confiant aux municipalités des responsabilités en cette matière. D'autres, avant nous, l'ont fait. L'Ontario le fait depuis longtemps. Les États américains le font: l'État de New-York le fait également. Et je suis convaincu que si l'on faisait une étude exhaustive, on trouverait plusieurs juridictions où le palier municipal s'occupe des questions de conversion.

Bref, M. le Président, je pense que la façon dont nous avons rédigé le projet de loi, est la bonne façon. Il semble, de toute façon, que notre point de vue est partagé par la plupart des observateurs et la voix que fait entendre le député de Shefford me semble un peu ce qu'on appelle la voix de celui qui crie dans le désert.

M. Paré: Seulement quelques petits commentaires là-dessus avant de revenir sur une autre question.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Shefford.

M. Paré: Je dois vous dire que vous pouvez interpréter, sauf que ce que j'ai dit tantôt, ce n'est pas une question de manque de confiance. Nous, je pense qu'on a reconnu de façon très large, et légale à part de cela, la confiance qu'on avait dans les élus municipaux en leur donnant de plus en plus de pouvoir par la fiscalité municipale. Je ne reviendrai pas sur tout ce qui a été fait pour reconnaître les élus municipaux comme des gens supercompétents. Je ne veux pas faire de comparaison entre les élus municipaux et les fonctionnaires, je pense que ce sont tous des gens extraordinaires qui font leur maximum. Pour avoir fait affaire avec des fonctionnaires de plusieurs ministères, y compris l'Habitation et la Société d'habitation du Québec, ils font une maudite bonne "job". Donc, je ne veux pas dire qu'un est meilleur que l'autre, je pense qu'ils sont tous bons et j'ai confiance dans les élus municipaux. Vous n'avez pas besoin d'avoir peur, j'étais avec ceux de chez-nous, hier, et je dois vous dire que je pense qu'ils ont une vision de l'avenir beaucoup plus planifiée, élaborée et beaucoup plus solide que le gouvernement du Québec à l'heure actuelle. Parce qu'ils sont en train de faire la planification sur 25 ans, ce que nous, on ne fait même pas pour cinq jours, ici. Vous ne me ferez pas dire que je n'ai pas confiance dans les élus municipaux.

Ce que je dis: Vous pouvez dire qu'on n'innove pas; moi, je vous dis qu'on innove. Quand vous dites que c'était déjà la responsabilité des Affaires municipales, je dis non. La preuve, c'est qu'on est obligé par une loi de leur céder ce pouvoir, cette responsabilité qu'ils n'avaient pas. Si c'est vrai qu'ils ont la responsabilité de la rénovation, de l'aménagement et de la construction dans leur municipalité, on touche là les relations locataires-locateurs. C'est une responsabilité que nous avions, comme gouverne-

ment, par la Régie du logement. Il faudrait faire attention. C'est vrai que cela semble être une zone grise, mais elle était bien définie, claire, bien acceptée par les autorités municipales. La preuve, c'est que les municipalités ne nous ont pas demandé ce champ de responsabilité qu'on est en train de leur donner. On peut donc tenir des discours comme cela, sauf que les élus municipaux sont des gens compétents. Je n'ai pas de crainte là-dessus, sauf qu'un des risques, premièrement, c'est que les pressions soient plus fortes. Des gens peuvent céder plus facilement qu'à Québec. Cela cède même jusqu'à Québec. Imaginez-vous, dans les municipalités avec des projets d'Investissement considérables, comment on peut changer. On le voit dans les municipalités par des changements de zonage pour des projets intéressants. Cela, c'est la première des choses.

La deuxième, c'est que non seulement dans toutes les municipalités sur le grand territoire québécois, mais même seulement sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal, on risque de se ramasser avec une panoplie de règlements différents entre municipalités. Je prends un exemple avant de revenir sur un autre sujet. Dans la ville de Montréal, si on décidait maintenant qu'on permet la conversion par arrondissement, si le citoyen qui est d'un côté de la rue Papineau par rapport à son voisin de l'autre côté de la rue Papineau, n'a pas le même droit, le même pouvoir, la même chance d'accès à la copropriété parce qu'il n'est pas dans le bon arrondissement, comment expliquer cela, faire accepter aux gens cette façon de faire? Imaginez le problème que vont avoir les élus municipaux alors que ce sera de notre faute, parce que, de loin, on aura décidé de se décharger du problème. Je trouve cela inquiétant. C'est cela que je voulais vous soumettre.

Donc, ce n'est pas que je n'ai pas confiance dans les élus municipaux, c'est qu'ils risquent d'avoir des problèmes graves parce qu'on est en train de faire dans les municipalités un règlement qui sera différent d'une municipalité à l'autre et peut-être même d'un quartier à l'autre. On va faire en sorte que ce ne sera pas pareil sur le territoire québécois. Donc, les citoyens ne se sentiront pas avec les mêmes possibilités parce qu'ils ne seront pas sur la même rue, dans la même ville. De plus, ce sont des rues qui séparent les municipalités de la Communauté urbaine de Montréal. Ce n'est pas toujours un fleuve et ce ne sont pas toujours des distances de 15 ou 20 milles comme on retrouve en province. C'est une rue qui les sépare.

Là, ils vont se retrouver avec des capacités ou des possibilités qui seront différentes parce que, de bonne foi probablement et j'en suis sûr, les élus municipaux auront décidé une telle réglementation. C'est leur rôle de le faire. C'est eux qui ont fait du zonage commercial, industriel, résidentiel. Là, ils auront peut-être un zonage de plus qui sera du cas par cas ou qui sera par genre d'immeuble: des triplex, des duplex. C'est eux qui prendront une décision en fonction du mode de logement, des arrondissements, des quartiers, en fonction de... on verra bien. En fonction des immeubles peut-être. Vous vous rappelez que les gens de la municipalité de Montréal étaient venus dire que si une majorité de locataires dans un immeuble était favorable, on pourrait aller de l'avant. Cela voudrait dire que sur quinze...

Une voix: C'est un exemple?

M. Paré: Oui, c'est un exemple, mais c'est un exemple qui amenait quelque chose de faisable et on s'est basé là-dessus. Il en a été question, on en a même discuté et c'est là-dessus que d'autres groupes sont venus nous dire leur inquiétude. Sur quinze logements, s'il y a huit locataires qui sont d'accord, on transforme. Là, on se ramasse avec sept locataires qui ne sont peut-être pas satisfaits, qui ont un droit de préemption - mais cela, on va y revenir plus loin parce que je sais qu'on est limités, sur cela, on y reviendra - il y aura un autre genre de problème.

Une autre question que je veux vous poser concerne le premier paragraphe de l'article 51. On veut protéger maintenant, c'est-à-dire qu'il faut faire en sorte de reconnaître un édifice qui a eu des logements au cours des dix dernières années, sauf que, comme on n'a pas d'enregistrement des baux, l'historique de cela n'est pas facile à faire. Ce qui me fait penser que vous me donniez l'exemple tantôt qu'on n'innove pas, qu'en Ontario, ils l'ont déjà. Moi, je vous dis: Si vous êtes prêts à suivre ce qui se passe ailleurs, au Manitoba, je pense, et en Ontario, il y a l'enregistrement des baux, si on veut vraiment appliquer, pour quelle raison on ne l'applique pas? Si l'exemple de l'Ontario est bon dans certains cas, pourquoi il ne l'est pas dans ce cas-ci? Cela viendrait faire en sorte que l'historique des logements serait enregistré, reconnu d'une façon formelle.

M. Bourbeau: M. le Président, le député de Shefford m'étonne, je ne sais pas s'il s'est promené un peu dans le Québec. Je pense qu'il n'est jamais sorti de Granby. Il vient de nous dire, tout à l'heure, que ce sera épouvantable parce que, dans chaque municipalité, on aura une réglementation différente, que même dans chaque quartier d'une municipalité, on aura une réglementation différente. Mais, M. le Président, c'est ce qui existe actuellement, le député n'a pas voyagé. Dans les municipalités au Québec, les règlements de zonage ne sont pas les mêmes d'une municipalité à l'autre. Même dans les quartiers de Montréal, on n'a pas des zonages identiques, quand on achète sur une rue, on a un zonage unifamilial, la rue suivante, on a un zonage appartement. On n'a pas le droit de construire n'importe quoi, n'importe où, c'est

cela, le zonage, ce sont les règlements de construction. Ce sont justement toujours des règlements qui s'adaptent à une conjoncture locale. Donc, on n'Innove pas en disant que le moratoire va suivre le même pattern. C'est cela, actuellement, le zonage au Québec.

Dans les cas de démolition, par exemple, actuellement, les règlements font en sorte que les municipalités procèdent cas par cas: chaque cas est étudié à son mérite. On n'innove pas là non plus, les règlements d'urbanisme ne sont pas les mêmes dans les municipalités, on a des schémas d'aménagement. Il n'y a aucun des 95 schémas d'aménagement au Québec qui ressemble à un autre; on a respecté la particularité de chacune des régions et les règlements d'urbanisme locaux et de construction qui vont éventuellement être adoptés par les municipalités locales, mais s'inspirant des objectifs du schéma, vont également avoir des particularités propres. Donc, je ne vois pas pourquoi on voudrait, en matière de conversion en copropriété, avoir une solution mur à mur, unique, alors que l'économie même de nos habitudes en cette matière veut que, dans chaque municipalité, on ait des règles différentes et même que, dans chaque quartier, on ait des zonages différents.

Bref, je ne comprends pas la philosophie centralisatrice à outrance et je dirais même social-démocrate que véhicule le député de Shefford. C'est vraiment "le coat sur le rack" pour tout le monde, la même chose, aucun changement. Cela ne s'inspire pas du tout de notre politique et je ne pense pas qu'actuellement, les municipalités du Québec soient en demande pour une législation de ce type-là.

Maintenant quant à l'enregistrement des baux, le député nous dit: En Ontario, on enregistre les baux, pourquoi ne faites-vous pas la même chose? Je dirai qu'on n'est pas obligés de prendre ce qu'il y a de plus mauvais ailleurs. On essaie de s'inspirer de ce qu'il y a de mieux et ce qu'il y a de plus mauvais, on le laisse là. L'Ontario a choisi depuis un certain temps d'adopter une politique en matière de contrôle des loyers qui n'est pas la nôtre. J'étais, il y a quelques mois, à une réunion où il y avait le ministre de l'Habitation de l'Ontario et il y avait toute une série de gens: des experts en immobilier et des gens de la Société canadienne d'hypothèques et de logement. À un moment donné, un de ceux qui ont pris la parole a dit devant le ministre de l'Ontario que, selon eux, la situation qui prévalait au Québec était de beaucoup supérieure en matière de relations entre locataires et locateurs qu'en Ontario. On a cité le Québec en exemple comme ayant un système de beaucoup préférable en ce sens qu'en Ontario, on contrôle tous les logements d'une façon identique et que c'est une solution qui est générale, alors qu'au Québec, on laisse la place à la négociation de gré à gré entre le propriétaire et le locataire, on favorise les consensus entre les parties sans qu'il y ait lieu d'intervention de l'État. On favorise la conciliation, la négociation et l'atteinte de consensus. Ce n'est que lorsqu'il y a absence de consensus que la régie intervient a posteriori pour régler les problèmes que les parties n'ont pas réussi à régler entre elles. (21 h 45)

Je trouve cette solution drôlement plus intéressante qu'une solution étatique, interventionniste qui traite tout le monde sur le même pied, qui ne tient pas compte des particularités propres à chaque immeuble ou à chaque situation. Quant à moi, j'estime que la solution qui prévaut actuellement au Québec est de loin la meilleure. Elle laisse libre cours à la négociation volontaire entre les parties et l'État n'intervient qu'à défaut d'entente. Cela m'apparaît une solution préférable et je ne vais certainement pas recommander au gouvernement d'instaurer une solution comme celle qui est actuellement instaurée en Ontario.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le député de Shefford, d'autres commentaires?

M. Paré: Oui, merci. Quand vous parliez de politiques supersocialisante, je dois simplement vous dire que ce qu'on demande, ce n'est rien de spécial, ce n'est pas un grand changement, finalement, c'est le statu quo. Il ne faut pas oublier que le moratoire avait été décrété par le Parti libéral en 1975 et que c'est une responsabilité de la Régie du logement, donc indirectement du gouvernement du Québec. Ce n'est pas un changement dans une forme centralisatrice qu'on demande, c'est le maintien de la situation actuelle. Ce n'est pas du tout la même chose, donc ce n'est pas une politique pour renforcer les pouvoirs du gouvernement qu'on demande, c'est de garder la situation qui est très bonne actuellement. Quand vous dites: On n'est pas obligés de copier l'Ontario, c'est le discours qu'on tient aussi. Sauf qu'on trouve un peu drôle que, très souvent, ce soit présenté comme la situation idéale, mais que, quand cela vient protéger davantage, on dise: Non, ce n'est pas vrai que l'Ontario, c'est toujours idéal.

Je suis bien d'accord pour reconnaître avec vous que ce n'est pas toujours idéal, mais ne vous servez pas de l'exemple de l'Ontario seulement quand cela fait l'affaire.

M. Bourbeau: Quand c'est bon.

M. Paré: Quand c'est bon, sauf qu'on se rend compte que ce n'est pas bon souvent, c'est bon une fois de temps en temps et on l'utilise, mais quand, nous, on le prend comme comparaison pour d'autres avantages, ce n'est plus tellement bon et j'ai l'impression que la référence sera de moins en moins bonne, en tout cas, je l'espère.

Mais, pour ne pas manquer de temps et comme on doit discuter, moi aussi, j'aurais

maintenant un amendement à apporter, toujours sur l'article 51. Je vais attendre qu'il soit distribué pour le lire.

M. Bourbeau: Si le député voulait déposer tous ses amendements d'un seul coup, on pourrait peut-être les regarder avant. Est-ce qu'il y en a d'autres?

M. Paré: C'est possible. M. Bourbeau: Ah, bon!

M. Paré: Mais je ne pourrais pas vous les déposer tout de suite. À la prochaine séance, probablement. Bon, il s'agit ici de faire, je ne sais pas si vous voulez le lire, M. le Président..

Le Président (M. Saint-Roch): L'amendement est celui-ci: "L'article 51, introduit par l'article 2 du projet de loi, est modifié par le remplacement du texte proposé après les mots: "société municipale d'habitation* du deuxième alinéa, par les mots: "ou si un immeuble a été construit, acquis, restauré ou rénové dans le cadre d'un programme gouvernemental d'aide à l'habitation."

M. Paré: Bon. Je peux vous donner l'explication de l'amendement.

Le Président (M. Saint-Roch): Je m'excuse, M. le député. Votre amendement est recevable.

M. Paré: Merci, M. le Président. Je m'excuse, j'étais parti trop vite. Le temps fuit aussi.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous cède la parole, M. le député de Shefford.

M. Paré: À l'heure actuelle, dans le deuxième alinéa de l'article 51 tel qu'on le retrouve dans le projet de loi 87, on dit: "La conversion est interdite si l'immeuble est la propriété d'une coopérative d'habitation, d'un organisme sans but lucratif ou d'une société municipale d'habitation et s'il a été construit, acquis, restauré ou rénové dans le cadre d'un programme gouvernemental d'aide à l'habitation." Donc, cela veut dire que les coopératives, les OSBL, organismes sans but lucratif et les sociétés municipales qui ont reçu de l'aide n'ont pas droit à la conversion. Par contre, cela voudrait dire que toutes les autres bâtisses qui, elles aussi, ont profité des programmes d'aide, auraient droit à la conversion. Donc, il y a deux poids, deux mesures ou, en tout cas, une possibilité pour les édifices du secteur privé, pour les propriétaires privés ou les sociétés privées, même s'ils ont profité des programmes d'aide à l'habitation. Normalement et couramment - et je pense que c'est toujours basé là-dessus - quand il y a des programmes d'aide à la restauration comme PARCQ, entre autres, il y a des clauses pour dire qu'il faut conserver le logement locatif. Quand on donne des program- mes d'aide à la restauration, c'est pour le volet propriétaire ou le volet locatif. Quand on a donné une aide financière ou une subvention à un propriétaire pour lui permettre de rénover sa bâtisse en location, ses logements, cela veut dire qu'il a profité, finalement, d'une aide de l'État. Cela ne devrait pas lui permettre maintenant, à même cette aide financière gouvernementale, de transformer son immeuble en copropriété. Pour les coopératives, on a cette restriction. Vous allez me dire: Oui, la loi coopérative est différente, elle empêche, de toute façon, des transformations. Sauf qu'on a vu l'exemple de Clover Dale à Pierrefonds, les Jardins Lasalle où, finalement, à cause du Code civil, on a pu le faire. Ce n'est pas un exemple qu'on veut ramener nécessairement. Ce n'est surtout pas un exemple qu'on veut revivre, mais cela s'est fait.

Donc, qu'on le mette là, je ne dis pas que je suis contre, je suis prêt à le considérer, sauf que je me demande pour quelle raison on ignore les autres. Le programme d'aide était fait dans le sens d'une meilleure vie, d'une meilleure condition de logement pour les locataires, on aidait le propriétaire non pas pour qu'il vende, mais pour maintenir son édifice, ses logements dans un état plus acceptable, pour permettre à ses locataires d'avoir de meilleures conditions de vie. Le propriétaire a profité de l'argent de l'ensemble des contribuables par une subvention. Il a profité de cela comme propriétaire, donc son avoir, globalement, a augmenté. Mais il y avait des clauses. En tout cas, dans l'esprit des programmes, c'était pour conserver des logements locatifs. Donc, on aidait - on mettait même des clauses - à la condition qu'on n'augmente pas de façon démesurée les logements. Dans PARCQ, on allait même plus loin, on disait: À la condition que cela reste locatif pendant quinze ans, et on a ramené cela à cinq ans. Mais il y a une préoccupation dans l'aide de l'État normalement, la préoccupation d'amener le maintien du stock de logements locatifs. Donc, on aide le propriétaire à rénover ses logements non pas pour faciliter la vente en copropriété, mais pour permettre que le locataire vive mieux, avec une augmentation moindre du loyer.

Si l'esprit de la loi était celui-là, l'esprit des programmes d'aide à la rénovation: de meilleures conditions de logement à des coûts abordables et permettre au propriétaire d'investir dans les logements pour les louer pas trop cher ou, en tout cas, que l'augmentation soit plus acceptable, à mon avis, on ne peut pas dire maintenant que l'argent qu'on a donné en subventions va donner un avantage de plus au propriétaire pour faciliter la vente en copropriété. Je pense que si l'esprit du deuxième paragraphe, c'est ce qu'on veut à l'heure actuelle, on doit avoir le même esprit pour le propriétaire privé ou l'entreprise privée qui a bénéficié des programmes d'aide à la restauration. La restauration, c'était pour lui donner plus dans son Investissement et l'inciter à investir. Il y a des

programmes qui ont été amenés pour inciter à la rénovation, à la construction et au développement économique par ce secteur d'activité, mais il y avait toujours cette préoccupation du locataire avec des critères bien déterminés. Si l'esprit des programmes d'aide était de maintenir des logements locatifs de qualité, de maintenir les logements locatifs à un prix abordable, à ce moment-là, je pense que maintenant on doit reconnaître ce but et qu'on doit limiter la conversion et l'empêcher pour ceux qui ont bénéficié de l'aide de l'État pour la rénovation. C'est l'amendement que je propose.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, le député nous apporte un amendement, comme cela, qui est quand même important. Je dois dire que, pour l'instant, je ne suis certainement pas prêt, à moins de dire au député qu'on refuse l'amendement purement et simplement, à en discuter sans avoir eu l'occasion de l'étudier de façon plus approfondie. Je pense qu'on peut suspendre l'étude de l'amendement et on y reviendra lors d'une séance subséquente. Je vois que la séance s'achève. À moins qu'on ne suspende tout de suite. Pour l'instant je ne suis pas prêt à recevoir l'article. Il faudrait qu'on l'étudie d'une façon plus approfondie.

Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de Shefford.

M. Paré: Je remercie le ministre de l'ouverture qu'il manifeste. J'aimerais mieux qu'on suspende les travaux sur l'article 51, étant donné que le temps est écoulé, j'ai l'impression.

M. Bourbeau: M. le député va faire un autre discours de cinq minutes sur son amendement, M. le Président, et étant donné qu'il est 21 h 55, il n'y a aucune chance qu'on puisse passer à un article avant l'ajournement à 22 heures, j'en suis convaincu.

M. Paré: J'aimerais beaucoup plus qu'on suspende et que vous preniez le temps de regarder la faisabilité de la proposition qui est là, plutôt que de la rejeter pour sauver du temps, étant donné qu'il reste à peine quatre minutes.

M. Bourbeau: Le député sait qu'on prend toujours très au sérieux ses remarques et ses suggestions, M. le Président. Nous allons prendre le temps d'étudier en profondeur son amendement. Je l'enjoins, si le député veut vraiment travailler dans le but d'améliorer le projet de loi et ne pas perdre le temps de la commission, de nous envoyer le plus tôt possible ses autres amendements, s'il en a, de façon qu'on puisse être en mesure de réagir.

M. Paré: Oui, M. le ministre, on va faire en sorte que cela se produise ainsi.

Le Président (M. Saint-Roch): Étant maintenant arrivés à la fin du temps qui nous est alloué, nous ajournons maintenant nos travaux sine die.

(Fin de la séance à 21 h 55)

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