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(Onze heures trente minutes)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'aménagement et des équipements reprend
maintenant ses travaux pour poursuivre l'étude du projet de loi 87, Loi
modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil.
Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?
Projet de loi 87
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Dufour
(Jonquière) sera remplacé par M. Paré (Shefford).
Loi sur la Régie du logement (suite)
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
secrétaire.
Au moment de notre ajournement, nous en étions à
l'amendement déposé par M. le député de Shefford.
Il se lit comme suit: "L'article 51, introduit par l'article 2 du projet de
loi, est modifié par le remplacement du texte proposé,
après les mots "Société municipale d'habitation" du
deuxième alinéa, par les mots "ou si un immeuble a
été construit, acquis, restauré ou rénové
dans le cadre d'un programme gouvernemental d'aide à l'habitation".
M. Bourbeau: Le député de Shefford a
expliqué son amendement et on était rendu à la
réplique, si je comprends bien, à savoir la position du ministre
sur l'amendement.
M. Paré: Oui, M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, on a eu l'occasion
d'examiner attentivement le projet d'amendement qu'a proposé le
député de Shefford à l'article 51, qui vise à
remplacer le mot "et" par le mot "ou". Évidemment, cela semble assez
banal et insignifiant de remplacer le mot "et" par le mot "ou" et, a priori, on
pourrait penser que cette modification n'a pas une très grande
importance. Mais elle a une Importance certaine si on considère qu'en
remplaçant le mot "et" par le mot "ou" on vient limiter de façon
très importante la possibilité de conversion d'immeubles et,
forcément, d'accession à la propriété.
Dans l'état actuel des choses, avec l'article 51 tel qu'il
existe, pour que la conversion soit interdite, il faut que les deux
éléments se retrouvent en même temps, c'est-à-dire
que l'Immeuble soit la propriété d'une coopérative
d'habitation, d'un organisme sans but lucratif ou d'une société
municipale d'habitation et qu'en même temps ces immeubles aient
été construits. acquis, restaurés ou rénovés
dans le cadre d'un programme gouvernemental d'aide à l'habitation.
Si on remplace le mot "et" par le mot "ou", il s'agira que l'un des deux
éléments soient présents pour que la conversion ne soit
pas permise. Même si on se retrouvait devant une situation où les
locataires, la municipalité ou la Régie du logement
étaient d'accord, dans tous ces cas, il s'agirait que l'un des deux
éléments soit présent pour qu'on ne permette pas à
des citoyens d'accéder à la propriété contre leur
bon jugement.
M. le Président, en interdisant la conversion en
copropriété de tout immeuble appartenant à une
coopérative, un organisme sans but lucratif, communément
appelé un OSBL, ou une société municipale d'habitation
ayant reçu une subvention gouvernementale dans le cadre d'un programme
d'aide à l'habitation, le gouvernement veut s'assurer que les logements
qui sont la propriété d'un organisme communautaire conservent
cette vocation et que leur vente éventuelle ne profite indûment
à certains locataires. Ces organismes, en effet, ont eu accès
à des programmes de subvention qui leur étaient souvent
réservés du fait de leur vocation communautaire. Il y aurait donc
un genre de bris de contrat, si je peux dire, si cette vocation était
remise en cause, comme dans le cas de m dont l'exemple nous a été
cité récemment.
Par ailleurs, la demande formulée par le député de
Shefford d'étendre cette interdiction à tous les immeubles
appartenant à des individus ou à des corporations privées
qui auraient bénéficié de subventions dans le cadre d'un
programme gouvernemental d'aide à l'habitation nous apparaît
inutile ou même inacceptable pour les raisons suivantes.
En premier lieu, si l'objectif poursuivi est d'assurer le droit au
maintien dans les lieux pour les locataires, je souligne au
député que le projet de loi que nous avons devant nous y pourvoit
déjà... Deuxièmement, le programme d'aide à la
restauration Canada-Québec, le PARCQ, prévoit déjà
un engagement d'une durée minimale de cinq ans de la part du
propriétaire de ne pas transformer l'immeuble ni changer en tout ou en
partie sa vocation résidentielle; donc, on ne peut transformer un
immeuble en chambres, par exemple, et on ne peut faire autre chose de sa
vocation résidentielle qu'un immeuble résidentiel. On ne pourrait
pas, par exemple, le transformer en immeuble commercial. Également, une
autre condition du PARCQ: ne pas évincer un locataire pour reprendre
possession d'un logement loué ou d'une chambre louée pour s'y
loger ou pour y loger un parent, c'est-à-dire un ascendant, un
descendant, frère, soeur, beau-frère, belle-soeur, gendre, bru,
beau-père, belle-mère, beau-fils, belle-fille ou autre parent
dont il est le princical soutien. Le PARCQ prévoit
l'obligation de conserver le mode locatif des logements ou des chambres.
Une autre exigence: obtenir le consentement au préalable de la SHQ avant
de vendre l'immeuble. Je souligne que le propriétaire qui ne respecte
pas ces engagements doit rembourser la partie non gagnée de l'aide
financière. Je rappelle au député que, dans le programme
Loginov, les engagements du propriétaire se limitaient et pour une
période de cinq ans seulement à deux choses: ne pas reprendre
possession d'un logement pour s'y loger ou ne pas vendre le bâtiment,
sauf si l'acquéreur ne reprenait pas possession d'un logement. Donc,
dans le PARCQ, on va plus loin dans les embûches que l'on met au
propriétaire. Également, on va plus loin dans la protection du
locataire à l'égard de son logement.
Je soulignerais également au député que
l'amendement proposé pourrait entraîner l'interdiction de
conversion pour un immeuble ayant reçu une subvention minime dans le
cadre, par exemple, du programme Équerre. La subvention maximale
possible était de 3000 $ par logement pour un bâtiment ayant au
maximum cinq logements et/ou la subvention moyenne était de beaucoup en
deçà ou inférieure à 3000 $. Je signalerais
également que l'amendement proposé pourrait aussi signifier
l'interdiction de convertir un immeuble pour un OSBL. Par exemple, le cas d'une
communauté religieuse qui n'aurait jamais reçu de subvention
gouvernementale à l'habitation pour l'édifice en question,
pourquoi lui serait-il interdit de convertir en copropriété si
c'était son voeu et le voeu des locataires qui l'habiteraient.
Également, l'amendement proposé constituerait enfin une sorte de
désincitation à restaurer ou à rénover un immeuble
avec l'aide gouvernementale.
Pour toutes ces raisons, M. le Président, nous nous voyons dans
l'obligation de refuser l'amendement proposé par le député
de Shefford.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. Y
a-t-il d'autres interventions?
M. Paré: Oui.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Shefford.
M. Paré: Avec les explications que vient de donner le
ministre, cela ramène exactement les craintes que j'exprimais au
dépôt de la motion ou du changement d'amendement Le ministre dit:
Cela pourrait, avec l'amendement proposé, empêcher la conversion
des OSBL en copropriétés. J'espère qu'il n'est pas dans
l'intention du ministre que cela se produise régulièrement ou
fréquemment. Je ne pense pas que ce soit dans l'intérêt ou
que ce soit la volonté exprimée - pas les groupes que j'ai
rencontrés en tout cas - dans le domaine des coopératives
d'habitation ou des organismes sans but lucratif qu'il y ait des
transformations en copropriétés de ce genre de bâtisses ou
ce genre de propriétés collectives qui font en sorte que c'est un
secteur qui, en fait, permet de retirer du marché spéculatif une
partie du logement. Avec ce que vous venez de dire, cela veut dire - si
j'interprète bien - que des coopératives ou des organismes sans
but lucratif pourront se transformer en copropriété si ces
mêmes coopératives n'ont pas eu d'aide gouvernementale. Par
contre, si elles n'en ont pas eu, il n'y a pas de problème.
J'espère que le but du projet de loi n'est pas d'en venir justement
à la transformation en copropriété pour les organismes
sans but lucratif. Parce que, s'il y a des groupes qui se sont
constitués en coopérative, en organisme sans but lucratif,
c'était pour avoir une propriété collective et non
individuelle de leurs logements et c'était pour retirer du marché
spéculatif l'immeuble ou le groupe d'immeubles qui est constitué
en coopérative ou en organisme sans but lucratif. Ça c'est le
premier point et c'est un peu ce que vous confirmez. Vous dites que c'est pour
exempter que d'autres cas comme Cloverdale ou Jardins LaSaile ne se
reproduisent. J'ai l'impression qu'on ouvre plutôt la porte de
façon que ça se fasse sur une base acceptable et légale.
Si on dit: Ça va être interdit pour ceux qui sont liés par
le "et" du paragraphe en disant que "si cela a été construit,
acquis, restauré ou rénové dans le cadre d'un programme
gouvernemental d'aide à l'habitation" pour eux autres, c'est impossible,
mais s'il y en avait d'autres, c'est possible, plus de problèmes. Si
j'ai bien compris la dernière partie de votre intervention, c'est ce que
ça veut dire. Donc, ça ouvre la porte encore à plus de
conversions en copropriété qui pouvaient être
détectées par les organismes qui se sentent lésés,
c'est-à-dire, coopératives et OSBL, dans ce projet de loi. De ce
côté-là, cela vient juste renforcer le fait qu'il faut
aller plus loin dans la protection de ce genre de propriétés
collectives.
L'autre affaire. Vous dites: L'entreprise privée, il ne faudrait
pas l'Inclure parce que ce n'est pas parce qu'ils ont eu de l'aide, y compris
d'Équerre ou des petits programmes, qu'il faut les empêcher et la
raison que vous apportez, c'est que, dans les programmes d'aide existants, il y
a déjà une contrainte ou des contraintes. Effectivement, vous
avez raison; il y a des contraintes. Vous avez donné l'exemple du PARCQ.
Sauf que, y a-t-il quelque chose de plus facilement changeable que des
règlements de programmes? Ça, vous le savez très bien au
point où, quand PARCQ est entré en vigueur, il n'y a pas eu de
prépublication, juste une annonce comme quoi le programme était
là avec les critères qui étaient assignés dans
l'entente-cadre fédérale-provinciale. Donc, le programme
étant mené, les autres programmes pourront arriver comme
ça sauf que, à l'avenir, il pourra arriver des programmes sans
contrainte. Et, c'est tellement vrai et ça prend tellement peu de
consultation que, déjà, le programme PARCQ a subi des
modifications et une modification dans
le sens de la discussion que l'on tient ce matin qui est très
importante, c'est la tenure en logements locatifs pour quinze ans
apportée à la présentation du PARCQ qui est passée
de quinze ans à cinq ans. Cela s'est fait à la suite
d'échanges mais il n'y a pas eu de prépublication. On a appris un
bon matin,... Beaucoup de municipalités de groupes, de
propriétaires, beaucoup de gens disaient que ce programme était
inapplicable. L'un des facteurs c'est, entre autres, du quinze ans à
cinq ans; donc, la décision a été prise. On a appris, un
bon matin, que cela s'est passé de quinze ans à cinq ans.
Quand vous dites: L'entreprise privée qui est propriétaire
et qui loue. On n'a pas besoin de mettre dans la loi l'Interdiction puisqu'on
la retrouve déjà dans des programmes y compris dans le PARCQ et
c'est celui que vous avez utilisé passablement pour donner des exemples
comme quoi des programmes viennent déjà apporter la protection
que moi je veux apporter d'une façon juridique. Je viens de vous
expliquer que cela ne tient pas parce que le programme est trop facilement
changeable. Je vous ramène l'exemple dans le même PARCQ où
c'est trop facilement changeable; cela n'a même pas besoin de
prépublication, cela n'a pas besoin de consultation. On apporte les
changements comme on le veut et, comme ceci, cela veut dire que la contrainte
du maintien de la tenure en logements locatifs ne tient pas. Si elle tient,
c'est une façon limitée pour le moment dans le PARCQ,
c'est-à-dire cinq ans.
Donc, il n'y a pas de garanties à moyen terme et encore moins
à long terme. Cela veut dire qu'on ne peut pas compter sur la
réglementation des programmes pour amener la sécurité que
je veux en ce qui concerne l'un des objectifs de votre projet de loi qui est le
maintien du stock de logements locatifs. En fonction de ce que vous avez dit,
le stock va diminuer, c'est sûr, mais il risque même de diminuer
plus vite maintenant parce que, par le "et", on exclut et on
amène deux genres de coopératives et OSBL, et pour l'entreprise
privée, on refuse d'y rajouter d'autres contraintes que des contraintes
amenées par les programmes. Lors de la présentation de mon
amendement, je vous ai dit: Quand on dépose ou quand on offre à
des citoyens des programmes de restauration, la volonté que j'ai
toujours sentie derrière cela et dans le discours et dans la lecture que
l'on peut faire des programmes d'aide, il y a une préoccupation de
maintien du stock de logements locatifs. Il faut que cela demeure, c'est pour
aider les locataires à être mieux logés à des prix
abordables. Donc, on aide le propriétaire, mais en maintenant du
logement locatif. Si on ne met pas ceci, cela veut dire que ce n'est pas vrai
qu'on va maintenir le stock de logements locatifs. C'est plus l'inverse. C'est
qu'on va aider la conversion en aidant des propriétaires à faire
des changements subventionnés quand la contrainte comme l'exemple du
PARCQ de cinq ans va être écoulée. A ce moment, il pourra
transformer... Les logements auront été améliorés
avec l'aide de l'État au bénéfice du propriétaire
qui vendra en copropriété. Mais au-delà de cela, cela
ramène l'exemple que j'ai amené et que vous n'avez pas contredit.
Au contraire, je pense que cela vient l'affirmer. (11 h 45)
Cela voudrait dire - je prends l'exemple de I'île de
Montréal - que les municipalités pourraient décider
d'enclencher une espèce de processus de guerre pour attirer le plus de
gens dans leur municipalité: la guerre au développement, la lutte
au développement, pas la guerre, mais plutôt l'attrait. C'est
l'inverse, l'attrait au développement sur leur territoire et faire en
sorte qu'il n'y aurait pas les mêmes règlements. Ils n'utiliseront
pas la même façon de retirer l'interdiction par les pouvoirs qui
leur sont donnés par la loi. Donc, déjà, il y aurait des
règlements différents.
Mais, en plus - je ramène l'exemple que j'utilisais - cela veut
dire que des municipalités pourraient utiliser des programmes d'aide
pour inciter la rénovation, ce qui ferait en sorte que ce serait plus
avantageux pour profiter des programmes d'aide aménagés et
pouvoir transformer en copropriété.
Donc, l'argent d'aide aux logements pourrait devenir des programmes
d'aide, de subventions à la transformation. Vous allez me dire: C'est
étirer, c'est charrier un peu. Je ne pense pas que ce soit charrier.
C'est possible parce que si, dans sa réglementation, une
municipalité décidait qu'elle ajoute au PARCQ - l'exemple existe
déjà à Verdun - 5000 $ par logement, cela pourrait
être plus que ça. Il pourrait avoir une concurrence entre les
municipalités. Verdun décide qu'elle veut se développer
plus rapidement et elle veut rénover son stock de logements locatifs: 10
000 S par logement en plus de ce que PARCQ donne déjà pour
améliorer les logements.
Dans sa réglementation, on dit qu'on n'empêchera pas la
transformation en copropriété sur le territoire. La seule
contrainte, c'est la période de cinq ans de PARCQ qui peut être
modifiée en cours de route, puisqu'il est déjà
passé de quinze à cinq ans. Il pourrait l'être encore, mais
même s'il ne l'était pas, cela veut dire que, dans cinq ans, vous
n'êtes plus tenu à autre chose que la façon dont on va
utiliser la dérogation qui sera apportée par la
municipalité pour permettre la conversion.
Donc, c'est un règlement de dérogation qui permet tout
simplement... qui pourrait être très large, même
peut-être plus large que dans des municipalités à
l'extérieur de la Communauté urbaine de Montréal. On
pourrait permettre la transformation. Donc, quand la période de cinq ans
est finie, c'est évident qu'ils vont avoir profité de la
subvention, non pour protéger le stock de logements locatifs. Ce serait
même un incitatif.
Le propriétaire se dira: Je suis aussi bien de faire les
rénovations et profiter de la subven-
tion. Je suis lié seulement pour cinq ans avec mes locataires et,
après cela, on fera la transformation en copropriété dans
six ans. C'est la crainte que j'ai. Si on n'inclut pas cela, ça voudrait
dire que les programmes d'aide à l'amélioration du stock de
logements locatifs qui était faite dans le but d'améliorer les
conditions de logements pour les locataires à des prix abordables,
puisqu'on partage avec le propriétaire une partie des coûts...
cela voudrait dire que, à l'inverse, cela pourrait inciter davantage,
parce que des maisons transformées, des maisons rénovées,
ce sont, en général, les premières qui sont
transformées, parce que cela coûte moins cher et parce que c'est
un incitatif à la qualité...
Quand on veut s'acheter un logement.. Je pourrais vous donner des
exemples de logements, ici, dans les centres de Québec ou de
Montréal. La personne qui veut s'acheter une copropriété
pour être proche de l'Hôtel du Parlement ou être proche du
centre-ville de Montréal, être proche des équipements et
des services, elle va préférer un logement déjà
rénové. Elle risquera même de le payer moins cher si le
propriétaire a eu une subvention. Cela peut être un incitatif de
plus à la transformation en copropriété.
Donc, cela veut dire que d'autres programmes d'aide à la
restauration peuvent être un incitatif de plus à la transformation
en copropriété. On n'aura atteint ni les objectifs du programme
d'aide à la restauration au locataire et au locateur, ni un des
objectifs du projet de loi 87, qui est devant nous ce matin, de protéger
le stock de logements locatifs. Donc, on donne plus de protection à
certaines coopératives et à certains OSBL par rapport à
d'autres. On donne assurément plus de possibilités et de chances
aux propriétaires privés qu'aux coopératives ou aux
organismes sans but lucratif.
Encore une fois, dans ce projet de loi, on s'en vient diviser davantage,
segmenter davantage le marché existant dans l'habitation comme on le
fait, il y a Montréal par rapport aux autres municipalités de la
Communauté urbaine de Montréal, la communauté par rapport
aux municipalités. Et, en plus, comme on va le voir un peu plus loin, on
fait une division entre les locataires eux-mêmes un peu partout dans la
ville.
Vous me dites que j'ai terminé mon temps, malheureusement,
là-dessus. Je maintiens qu'on devrait inclure l'amendement qui est
proposé de façon à traiter sur un pied
d'égalité les coopératives et les OSBL qui se sont
constitués avec des programmes d'aide et l'entreprise privée qui
s'est aussi rénovée avec des programmes d'aide du gouvernement,
puisque les programmes d'aide étaient faits pour protéger le
stock de logements locatifs.
Donc, si on n'inclut pas cela, cela veut dire qu'on ne va pas dans le
sens de l'intention manifestée dans le discours disant qu'on veut
préserver le stock de logements locatifs. Parce qu'en refusant cet
amendement, on vient enlever une des protections qui viendraient confirmer le
discours qu'on tient dans ce sens-là.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Shefford. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M.
le ministre?
M. Bourbeau: Oui, M. le Président. Le député
de Shefford a l'habileté de prendre un point de son raisonnement et de
le sortir du contexte général du projet de loi dans lequel on est
pour tenter de brandir des épouvantails. Ce que le député
de Shefford oublie de faire, c'est de regarder l'ensemble du projet de loi et
la situation telle qu'elle existe présentement.
Nous sommes en train non pas d'affaiblir la position des locataires,
mais de la renforcer. Le député sait que, dans le projet de loi
que nous avons devant nous, nous renforçons la position des locataires
à plus d'un titre: contre les abus, contre l'intimidation, contre la
reprise de possession, lors des travaux de restauration majeurs. Même
s'il devait y avoir éventuellement des conversions approuvées par
la municipalité ou par la Régie du logement, le
député sait fort bien que le locataire est protégé.
Son droit au maintien dans les lieux est là pour une période
indéfinie. On va jusqu'à interdire à un acheteur la
reprise de possession. Donc, le statut locatif est protégé d'une
façon pratiquement absolue. Maintenant, en plus de cela, dans les
programmes existants, comme le PARCQ, on a prévu des clauses qui vont
protéger les locataires contre des hausses de loyer et
évidemment, contre la conversion éventuelle aussi.
Dans le PARCQ, je le disais tout à l'heure, il est interdit de
transformer l'immeuble, de changer en tout ou en partie sa vocation
résidentielle, il y a toute une série de conditions qui sont
imposées par la SHQ et qui vont bien au-delà de ce que l'ancien
gouvernement imposait dans le programme Loginov.
Le député voudrait qu'on attache tous les individus qui
ont reçu la moindre subvention de telle sorte qu'ils ne puissent pas
éventuellement convertir leur immeuble en copropriété. On
parlait tout à l'heure d'une coopérative. Prenons l'exemple d'une
coopérative qui aurait fait l'acquisition d'un immeuble sans subvention
gouvernementale. Il n'est pas essentiel qu'une coopérative ait une
subvention gouvernementale. Dans le passé, on a vu des
coopératives se former spontanément et voir à
l'intérêt mutuel de leurs membres. SI on acceptait la proposition
du député, cela voudrait dire qu'une coopérative qui
aurait fait l'acquisition d'un immeuble et qui l'aurait financé
elle-même sans subvention ne pourrait pas décider un jour,
à l'unanimité de tous ses membres, de convertir l'immeuble en
copropriété au bénéfice de chaque membre
individuellement. Je ne comprends pas en vertu de quel principe le
député de Shefford pourrait s'opposer à ce que tous les
coopérants, dans un
immeuble, puissent acquérir un logement chacun, si c'était
leur souhait. Pourquoi empêcherait-on des gens qui le désireraient
et qui seraient collectivement propriétaires d'un immeuble de se
partager l'immeuble, s'ils le désirent? En vertu de quel principe, de
quelle sacro-sainte donnée, provenant de je ne sais où,
interdirait-on à des gens qui sont collectivement propriétaires
d'un bien de se le partager, si c'est leur désir? Il me semble que ce
serait vraiment injuste et inéquitable envers ces gens de le faire.
Je vais vous donner un autre exemple, tout à l'heure, d'une
communauté religieuse qui n'aurait également pas reçu de
subvention et qui désirerait convertir son immeuble en
copropriété pour le bénéfice des locataires
existants. Supposons que les locataires existants étaient d'accord et
que la municipalité, ayant fait les vérifications, constatait cet
accord et donnait son autorisation, pourquoi le législateur viendrait-il
l'interdire? Est-ce que le député de Shefford s'oppose au fait
que les Québécois et - pour prendre l'expression consacrée
- les Québécoises puissent éventuellement avoir
accès à la propriété? Est-ce qu'on vit dans un pays
à ce point socialiste qu'on l'interdise? Pourquoi, si les citoyens le
veulent et que cela fait l'affaire de tout le monde, nous, le
législateur, par des lois tatillonnes, viendrait-on l'interdire? Je ne
veux pas fermer la porte à la possibilité, pour des gens de chez
nous, pour des Québécois, d'accéder à la
propriété.
Le député sait fort bien que le projet de loi a un double
objectif qui est la consolidation des droits des locataires, la
répression de bien des abus et, également, une ouverture sur la
conversion en copropriété, éventuellement, ou sur
l'accession à la propriété pour des locataires qui
voudraient avoir accès à la propriété d'un
logement. Je ne peux certainement pas consentir à introduire, dans le
projet de loi du gouvernement, des clauses qui viendraient défaire ce
qu'on cherche à faire, c'est-à-dire favoriser l'accession
à la propriété.
Je souligne au député que les modifications au PARCQ qui
ont été apportées l'ont été à la
suite de demandes urgentes et pressantes venant de bien des milieux, y compris
du député de Shefford qui nous a demandé à
plusieurs reprises de relâcher les règles en vigueur au PARCQ. Or,
pourquoi ces règles étaient-elles là? Justement, nous
avions voulu protéger les locataires peut-être même
au-delà de ce qui était raisonnable ou de ce qui était
possible. Et le marché a réagi de façon telle que le volet
locatif du PARCQ ne recevait pas une très grande audience.
Peut-être étions-nous allés trop loin dans le resserrement
des normes pour tenter de protéger les locataires contre
d'éventuelles hausses de loyer, mais nous l'avions fait de bonne foi. Il
est plus facile de relâcher, après coup, des règles trop
sévères que de faire l'inverse. À la demande pressante de
presque tous les milieux, y compris l'Opposition, nous avons nous-mêmes
pressé le gouvernement fédéral, car la décision
comportait également celle du fédéral. C'est le
gouvernement du Québec qui a insisté auprès du
fédéral pour que ces règles soient relâchées.
Le fédéral y a finalement consenti, notre partenaire dans ce
dossier-là, et nous avons procédé le plus rapidement
possible, puisque c'était considéré comme une mesure
d'urgence.
Je signale au député que la période qui a
été indiquée comme liant le propriétaire n'est pas
nécessairement de cinq ans. Il s'agit de cinq ans si la subvention est
de 10 000 $ ou moins. Mais si la subvention excède 10 000 $ par
unité de logement, on ajoute une année par 1000 $. Donc, la
période durant laquelle on "attache" - entre guillements - le
propriétaire en vertu d'une convention peut être de six ans, sept
ans ou huit ans.
M. le Président, cela termine les remarques que j'avais à
faire au sujet de l'amendement qui est devant nous.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci. M. Paré:
Un commentaire...
Le Président (M. Saint-Roch): En vous rappelant, M. le
député de Shefford, qu'il vous reste une minute et dix secondes
pour parler sur l'amendement.
M. Paré: Je vous demanderais la permission de prendre
quelques minutes de plus plutôt que d'amener un sous-amendement qui
étirerait le temps pour rien, M. le ministre, si vous êtes
d'accord. J'aimerais qu'on prolonge de quelques minutes pour un commentaire et
une question. La question irait dans le sens d'un sous-amendement, mais au lieu
de le déposer officiellement, on en discuterait pour ne pas le faire
inutilement. (12 heures)
M. Bourbeau: M. le Président, nous n'allons pas faire de
guerre de procédure. Contrairement à son collègue, le
député de Terrebonne, qui était venu ici pour faire perdre
le temps de la commission, si le député de Shefford discute
intelligemment, M. le Président, on ne fera pas de
procédurite.
Le Président (M. Saint-Roch): Vu qu'il y a consentement,
M. le député de Shefford, je vous cède maintenant la
parole.
M. Paré: Merci, M. le Président. Ce que je veux
vous dire en réponse à ce que vous avez demandé
tantôt à savoir si nous sommes socialisants au point
d'empêcher les gens d'accéder à la propriété,
c'est évidemment non. Mais il faut être constant dans le discours
qu'on tient, dans les buts et les objectifs qu'on poursuit.
Je me rappelle le discours qu'on tenait au salon rouge, il n'y a pas
très longtemps, sur le cas de Milton Park. Vous vous rappellerez que
le
discours allait complètement à l'opposé de ce que
vous avez dit tantôt, si je me rappelle bien, même si je n'ai pas
le Journal des débats pour vérifier ici. Mais on disait:
Oui, il faut l'adopter. Je me rappelle à quel point on voulait adopter
cette loi pour venir régler une situation, pour empêcher que les
coopératives et les organismes sans but lucratif passent justement en
copropriété, pour empêcher la spéculation dans un
coin aussi spéculatif que ce quartier de Milton Park. À ce
moment-là, on disait: - quand je dis on, je parle de l'ensemble des
intervenants, y compris le côté ministériel - II faut
adopter cette loi parce qu'il faut justement empêcher que les
sociétaires des coopératives et les administrateurs des
organismes sans but lucratif décident de transformer nos
coopératives et nos organismes sans but lucratif en
copropriétés divises et indivises. Il faut empêcher que
cela ne devienne spéculatif et que cela aille à des
propriétaires individuels.
À ce moment-là, c'est ce qu'on voulait, et, ce que je veux
encore aujourd'hui par cet amendement, c'est empêcher qu'on puisse le
faire. Sinon, cela voudra dire que des coopératives pourront se
transformer. Vous allez me dire: Oui, mais dans Milton Park, ils ont eu des
subventions. Je suis bien prêt à le reconnaître. Je puis
vous dire que Cloverdale et les Jardins LaSalle aussi, mais cela n'a pas
empêché de se faire parce que le Code civil ne peut pas
l'empêcher, d'après ce que je peux voir. Donc, on est
coincés avec des exemples des deux côtés.
Je dis que si, à ce moment-là, on trouvait important
d'empêcher cette possibilité de transformer le logement collectif
en logement privé individuel, on devrait avoir cette même
préoccupation aujourd'hui. Milton Park est un exemple, mais ce pourrait
être dans d'autres quartiers où des coopératives n'ont pas
eu d'aide. Mais c'est du logement collectif et le logement collectif a des
avantages. Je ne ferai pas l'apologie du système coopératif
même si j'y crois énormément, mais cela a des avantages,
entre autres, celui de retirer du marché spéculatif des
immeubles, donc de permettre un frein à l'augmentation qui est de ce
temps-là effrénée. C'est le commentaire que je voulais
passer.
Il faut faire attention, je ne veux empêcher l'accès
à la propriété individuelle pour personne. C'est pour cela
que je demande un programme d'accès à la propriété
pour les citoyens. Je suis favorable aux logements coopératifs pour ceux
qui veulent accéder d'une façon collective et ici, on ne retrouve
rien dans ce programme-là qui le favorise; au contraire, tout ce qu'il y
a dans ce programme empêche le développement des
coopératives. Cela ne va dans aucun sens pour les aider, mais cela va
dans le sens de l'empêcher parce qu'avec les délais que l'on
donne, c'est impossible de devenir collectivement propriétaire d'une
bâtisse qui pourrait être offerte en vente aux locataires. On y
reviendra dans des articles subséquents.
Donc, on le sait très bien, sauf qu'au-delà de cela, en
plus, on ne leur donne pas l'équité par rapport aux autres
logements en refusant cet amendement. Le sous-amendement que je vous apporte
verbalement, plutôt que de le déposer et que l'on ait encore 20
minutes à parler là-dessus, est le suivant. SI vous dites que
PARCQ protège au minimum cinq ans et que cela peut aller jusqu'à
dix ans, vous y croyez puisque vous l'avez amené dans PARCQ. Pour quelle
raison on n'accepterait pas l'amendement que j'apporte en y indiquant une date?
Ce serait un moindre mal, je pense, pour l'ensemble. Vous dites que c'est cinq
ans pour 10 000 $ et moins et que cela peut aller par tranches de 1000 $. Pour
quelle raison on ne dirait pas, au moins pour les édifices... Si vous
voulez protéger le stock de logements locatifs, si vous voulez, comme
vous disiez encore dernièrement à je ne sais quelle association -
je lisais cela dans les journaux - vous donner le temps, parce qu'il y a des
dizaines de milliers de logements de vacants et qu'il ne faudrait pas que cela
amène une transformation rapide... Vous dites que la loi empêchera
que cela se fasse à la course et sur une grande échelle. Ce
serait un moyen, si on disait que l'amendement proposé serait pour ceux
qui ont eu de l'aide au cours des dix dernières années. À
ce moment-là, on s'assure de se donner encore plus de temps pour que
cela ne vienne pas complètement perturber le marché locatif
actuel, si on avait une contrainte semblable.
Donc, sans en faire un amendement écrit, je vous le propose et
j'attends vos commentaires.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, le député de
Shefford a choisi de se référer au dossier de Milton Park pour
expliciter son point de vue. Or, dans le dossier de Milton Park, nous avons un
bon exemple d'organismes, en partie sans but lucratif et en partie coop,
qui ont été avantagés par des subventions
extrêmement généreuses. Quand je dis extrêmement
généreuses, je pèse mes mots. Cela a probablement
été un des projets les plus choyés par les gouvernements
au Canada: le gouvernement fédéral et celui du Québec. Ce
qui a même fait dire à certains dans le milieu que c'est un peu
gênant, le genre de subventions qui ont été
accordées dans Milton Park, par rapport au dépassement des prix
maximum permis par les règlements.
Or, justement, nous avons le cas, dans Milton Park, d'organismes
coopératifs et d'OSBL qui ont été restaurés avec
des fonds gouvernementaux. C'est pour cela que nous avons proposé et -
conjointement avec l'Opposition, d'ailleurs - accepté le projet de loi.
C'était justement un cas qui cadre bien avec l'article 51 tel que
proposé par le gouvernement. Et c'est la particule "et" dans ce cas-ci,
parce qu'il y a les deux éléments. C'est un organisme sans
but
lucratif qui a reçu des subventions gouvernementales très
généreuses et il aurait été, à proprement
parier, scandaleux que des individus puissent s'accaparer le
bénéfice de ces très importantes subventions. Je signale
au député que des cas comme Cloverdale, dont il parlait tout
à l'heure, ne pourront plus se produire dorénavant avec le projet
de loi que nous avons devant nous en ce sens que les gens qui
achèteraient le projet Cloverdale ne pourraient pas convertir ces
logements-là en copropriétés puisqu'il s'agit là
aussi d'immeubles qui ont fait l'objet de subventions généreuses
de la part de programmes gouvernementaux.
Mais je reviens à la question fondamentale: pourquoi
interdirait-on, dans le cas où il n'y a pas eu de subvention, à
des coopératives de se transformer en copropriétés? Le
système coopératif a de grands avantages, j'en conviens, en ce
sens qu'il permet de conserver le mode locatif à des immeubles, mais,
dans la mesure où tous les locataires décident de quitter le
groupe des locataires et de devenir propriétaires, le parc de logements
locatifs n'y perd pas, en ce sens qu'on peut avoir 20 locataires qui, un jour,
deviennent 20 propriétaires: on vient de perdre 20 logements locatifs
mais on vient de perdre 20 locataires aussi. Donc, la proportion
locataires-propriétaires demeure la même.
Je reprends encore mon exemple en disant que ce ne serait certainement
pas dans l'intérêt public, à mon avis, que d'interdire
à de tels coopérateurs l'accession à la
propriété. Je pense qu'il n'y a aucune mesure entre le genre
d'aide qui est apporté par l'État aux coopératives ou qui
l'a été et le genre d'aide qui a pu être apporté aux
individus dans des programmes comme Équerre, par exemple. Dans le cas
des OS8L et des coopératives, c'est une aide importante, permanente,
récurrente, sur un grand nombre d'années et qui, en fait, fait
passer un logement qui, normalement, aurait coûté 600 $ à
650 $ par mois - c'est le coût d'un logement restauré avec tous
les services - à 350 $ ou 400 $ par mois. C'est donc une
réduction substantielle et pour une très longue période
d'années qui va jusqu'à 35 ans. On peut dire que l'État
est vraiment venu à l'aide de l'individu, non seulement d'une
façon ponctuelle, mais d'une façon permanente et c'est dans ce
sens-là qu'on dit que ce serait, à proprement parler, Injuste et
inéquitable de permettre à des individus de pouvoir profiter
d'une telle situation.
Dans le cas d'une subvention ponctuelle faite dans le cadre d'un
programme comme Équerre, par exemple, la situation n'est absolument pas
comparable et ce serait, à mon sens, abusif que d'étendre
à ces cas-là l'interdiction qui existera si on conserve la
particule 'et" plutôt que d'introduire la particule "ou".
Voilà, M. le Président, pourquoi je ne peux accepter les
amendements du député de Shefford.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Gouin.
M. Rochefort: Merci, M. le Président, j'essaie de suivre
les différents raisonnements qui sont développés entourant
le fond du deuxième paragraphe de l'article 51. Je comprends que la
discussion soit un peu, semble-t-il - à mes yeux, en tout cas -
difficile à tenir parce qu'il y a beaucoup de principes distincts les
uns des autres qui sont discutés en même temps et
mêlés dans un genre de macédoine. On oppose des principes
d'un ordre à des principes d'un autre ordre. C'est évident que ce
sera compliqué d'arriver à une solution très
spécifique par rapport aux différents objectifs qu'on vise.
Je n'ai pas l'intention d'aborder l'ensemble des questions qui ont
été soulevées entourant cela. Mais, en ce qui me
concerne, je pense qu'il y a un principe fondamental qui devrait être
reconnu et qui, dans le discours du ministre, est appliqué exclusivement
aux coopératives d'habitation, aux organismes sans but lucratif ou aux
sociétés municipales, soit le principe que, quand un logement est
acquis, construit, restauré ou rénové - pour reprendre les
termes mêmes du projet de loi - dans le cadre d'un programme
gouvernemental d'aide à l'habitation, quand c'est pour des
coopératives, des OSBL ou des sociétés municipales
d'habitation, le ministre dit: Là, ils n'ont pas le droit de convertir.
Pourquoi, dans le secteur privé, à partir des mêmes
programmes, les logements ont été construits, acquis,
restaurés ou rénovés dans le cadre d'un programme
gouvernemental d'aide à l'habitation, ils pourraient là
être transformés en copropriétés? Pourquoi deux
régimes différents entre le secteur qu'on peut appeler
communautaire ou parapublic qui, lui. parce qu'il est aidé de
l'État, n'a pas le droit de convertir et le secteur privé qui,
lui, a le droit d'être aidé de l'État et, au fond, n'est
pas contraint aux mêmes règles que le secteur communautaire ou
parapublic ou péripublic?
En ce sens, je pense qu'il y a une iniquité qui n'est pas
acceptable. Je comprends l'argumentation que développe le ministre, par
exemple, sur le programme Équerre. On va être capable de
légiférer en tenant compte de ce genre de situation. Il pourra
être possible de mettre un quantum, mais je ne vois absolument pas
pourquoi quelqu'un, dans le secteur privé, qui aurait
bénéficié de subventions importantes ne serait pas
astreint aux mêmes contraintes législatives et non pas uniquement
réglementaires comme dans le cas de PARCQ, par exemple.
Là-dessus, je suis très bien le député de Shefford.
Un règlement peut se modifier du bout des doigts sans débat
public et même, souvent, sans que trop de gens s'en aperçoivent,
alors que ce n'est pas le cas dans les projets de loi publics qui permettent au
moins un débat etc. et donc, qui forcent tout le monde à
justifier les décisions qui sont prises.
Dans ce sens, il est évident que, quant aux principes, je pense
qu'il est admissible que l'on
fasse un régime pour les organismes communautaires ou parapublics
ou péripublics qui ne soit pas le même que celui qui est fait aux
entreprises privées. D'autant plus que le ministre nous tient comme
discours que son projet de loi a pour but de tenir compte du passé pour
mieux protéger des locataires dans l'avenir. On sait très bien
qu'il y a eu beaucoup de transformations qui se sont faites à partir de
programmes de subventions dans le passé. En ce sens, je pense que si
l'on veut que des gestes et que le projet de loi soient conformes au discours,
on devrait refaire, au fond, l'article - je comprends que cela peut être
compliqué, à partir d'amendements et de sous-amendements - pour
qu'il y ait un même principe pour le secteur public ou péripublic
ou communautaire que celui qui sera appliqué au secteur privé et
que, lorsque des programmes d'un certain niveau ont aidé à la
construction, à l'acquisition, à la restauration ou
à la rénovation d'un logement, celui-ci ne puisse être
transformé en copropriété.
Je répète que, comme le député de Shef-ford,
je ne me satisfais pas des règles qui existent dans PARCQ parce que,
d'abord, cinq ans, ce n'est pas très long pour certaines subventions,
même si on ajoute un an par 1000 $ de subventions gouvernementales et,
d'autre part, c'est trop facile de modifier un règlement sans
débat public et sur le coin de la table. Le projet de loi doit
prévoir ce genre de situation. C'est une question
d'équité, justement, de faire en sorte qu'il n'y ait pas de
distinction philosophique gouvernementale à l'endroit d'une forme de
tenure par rapport à une autre dans le domaine de l'habitation.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Gouin. M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, je comprends très
bien les propos du député de Gouin. Je ne nie pas
l'importance de la philosophie, mais il y a aussi la réalité des
faits qui est que la situation ne se présente pas de la même
façon quand on regarde l'Importance des subventions accordées aux
OSBL, au secteur coopératif et l'importance des subventions
accordées au secteur privé. L'État privilégie
systématiquement le secteur non lucratif et le secteur coopératif
avec des subventions massives qui non seulement ne portent pas sur une
période à court terme mais qui portent sur une période
à long terme. On débourse des sommes d'argent importantes et sur
des périodes de temps qui vont jusqu'à 35 années pour
permettre à des gens, dans le secteur communautaire ou coopératif
ou des OSBL, de se loger à des conditions financières
extrêmement intéressantes. C'est pour cela que, dans le projet de
loi, on ne peut pas permettre que ces gens puissent profiter personnellement de
la plus-value d'un immeuble qui a été financé justement
parce que les fins étaient communautaires.
Quand on parle des subventions qui sont accordées au secteur
privé, il s'agit de montants extrêmement minimes, minuscules
même, par rapport aux montants qui sont accordés à l'autre
système, quand on parle d'une subvention de 1000 $ ou de 1500 $ dans
Équerre, quand on parle d'une subvention moyenne, dans PARCQ, de 3000 $
à 4000 $.
Les sommes d'argent qui sont accordées pour le logement
coopératif, si on regarde la période de 35 ans,
représentent des centaines de milliers de dollars comparativement
à quelques milliers seulement. Alors, on ne peut pas parler de la
même chose. Quand l'État vient donner un coup de pouce à un
propriétaire pour changer ses fenêtres dans le programme
Équerre, on ne peut pas décemment lui attacher les mains pendant
25 ans parce que, souvent, ces subventions ont été faites
également pour parer à une conjoncture économique
difficile. Donc, l'État avait un intérêt à
créer de l'emploi à ce moment. Je ne pense pas que, sur le
terrain, on puisse comparer les deux situations. Elle ne sont pas
comparables.
D'autre part - je reviens encore là-dessus - la proposition du
député de Shefford, en substituant la particule "ou" à la
particule "et", aurait pour effet d'interdire à des coopératives
qui n'auraient pas reçu de subvention de pouvoir permettre à
leurs membres d'accéder à la propriété. Je
répète encore que ce principe est également très
important. Il n'y a absolument rien au monde qui peut nous justifier
d'interdire à des individus membres d'une coopérative de
décider collectivement et "coopérativement" - si je peux
m'exprimer ainsi de se partager l'immeuble coopératif, puisque
ces gens-là n'auraient pas reçu de subvention gouvernementale et
décideraient tout à coup de transformer le mode de
propriété de leur immeuble. Alors, dans ces conditions-là,
on viendrait brimer ces gens-là d'un droit qui, à mon sens, doit
leur être conservé. Avec toute déférence pour
l'opinion de nos amis d'en face, M. le Président, je continue à
maintenir qu'on ne peut pas accepter l'amendement.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre.
Est-ce qu'il y a d'autres interventions à l'amendement proposé
par M. le député de Shefford? Est-ce que l'amendement
proposé par M. le député de Shefford est
adopté?
M. Bourbeau: Hélas! non, M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): L'amendement étant
maintenant rejeté, nous en venons à l'article 51.
Conversion d'un immeuble locatif en
copropriété divise
M. Paré: Sur l'article 51, j'ai envie de vous proposer un
autre amendement, M. le Président - et vous me direz s'il est recevable
- de façon à clarifier la discussion qu'on vient de faire. Si,
à la place de la proposition que j'avais
amenée, l'amendement se lisait comme suit: "L'article 51,
introduit par l'article 2 du projet de loi, est modifié par l'ajout,
après le deuxième alinéa, du paragraphe suivant: "La
conversion est aussi interdite si un immeuble a été construit,
acquis, restauré ou rénové dans le cadre d'un programme
gouvernemental d'aide à l'habitation au cours des dix dernières
années."
Pour vous donner l'explication et la différence fondamentale
qu'il y a entre ce que j'apporte et ce qu'il y avait, c'est qu'une grande
partie de la discussion, de l'interprétation ou de la déduction
du ministre reposait sur le "et/ou" par rapport aux coopératives. Je
reconnais son inquiétude là-dessus. Là, comme ce sont deux
choses, à mon avis, qu'on peut considérer comme totalement
différentes, on traite, dans le paragraphe actuellement soumis, des
coopératives en disant que les coopératives, OSBL et organismes
comme les sociétés municipales d'habitation qui ont eu de l'aide
n'ont pas le droit de convertir, c'est une chose.
Donc, on ne touche pas à "et/ou". On ajoute un paragraphe qui
concerne les autres propriétaires privés en leur amenant le
même principe que celui qui est dans ce paragraphe-ci. Donc, on ne joue
plus sur "et/ou", coopératives aidées coopératives non
aidées. Les coopératives ont maintenant conservé la
décision gouvernementale qu'on retrouve dans le paragraphe 2°. Mais
on amènerait, à mon avis, la préoccupation que nous, nous
avons de l'interdire pour l'entreprise privée qui a
bénéficié de cette même aide en la limitant dans le
temps.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que je pourrais avoir
copie de votre amendement, M. le député de Shefford?
M. Bourbeau: M. le Président, le député de
Shefford, selon ma compréhension de nos procédures, n'a pas fait
d'amendement. Il s'est simplement enquis auprès de la présidence
si un tel amendement serait acceptable. Il a demandé au président
de lui dire si cet amendement serait acceptable s'il le proposait. Alors, vous
semblez dire que l'amendement est proposé et accepté.
Je voudrais simplement savoir si, effectivement, il y a un amendement ou
si le député de Shefford va à la pêche avec son
amendement...
M. Paré: Non, je vais le déposer et, comme cela,
cela nous permettra, si vous me donnez le temps de l'écrire...
M. Bourbeau: ...tout en soulignant au député de
Shefford que nous avons déjà fait le débat sur son
amendement tout à l'heure, parce qu'il nous avait dit qu'il ne
déposerait pas un tel amendement et il a demandé le consentement
de la commission pour faire le débat sur son amendement qu'il n'avait
pas déposé à ce moment-là. Je souligne au
député qu'il nous a surpris un peu notre bonne foi, tout à
l'heure, en nous demandant du temps supplémentaire en nous disant qu'en
lui accordant du temps supplémentaire, ce à quoi il avait droit,
cela nous priverait du bonheur d'avoir son sous-amendement. M. le
Président, le député de Shefford est en train de faire
l'un et l'autre et, dans ce sens-là, il manque à sa parole qu'il
nous avait donnée tout à l'heure.
M. Paré: Sur la question de règlement, pendant que
j'écris, vous allez me permettre de donner mes commentaires. Quand j'ai
demandé tantôt de continuer, la discussion tournait autour de
l'ajout des années alors que ce que j'introduis maintenant, c'est
à la suite des discussions qu'on a eues à trois sur la question
d'équité, l'entreprise privée par rapport au logement
collectif. Et là où c'est fondamental, c'est qu'il ne s'agit plus
de changer quoi que ce soit dans le paragraphe concernant les
coopératives ou OSBL II s'agit maintenant de dissocier les deux, d'avoir
un paragraphe qui concerne les coopératives et un paragraphe qui
concerne l'entreprise privée. On ne joue pas avec l'argumentation que
vous avez utilisée correctement. Le "et" et le "ou", cela vient de
disparaître, puisqu'un des points majeurs sur lequel vous contestez
l'amendement, c'était le fait qu'on vienne empêcher des organismes
sans but lucratif de se convertir s'ils n'ont pas eu d'aide, alors que le
discours sera complètement différent puisqu'il s'agit
d'équité entre deux secteurs de logements locatifs et non pas
entre les coopératives elles-mêmes. Donc, l'amendement porte plus
sur le "et/ou" maintenant que sur ce que je vous avais dit, sur les
années.
M. Bourbeau: Est-ce que l'amendement est accepté, M. le
Président?
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre, dans mes
fonctions de président...
M. Bourbeau: Vous n'en êtes pas saisi encore.
Le Président (M. Saint-Roch): ...je dois être saisi
de l'amendement avant de statuer s'il est recevable ou non.
M. Paré: Dans une minute.
Le Président (M. Saint-Roch): La commission va suspendre
ses travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 12 h 22)
(Reprise à 12 h 24)
Le Président (M. Saint-Roch): La commission reprend
maintenant ses travaux. L'amende-
ment proposé par M. le député de Shefford se lit
comme suit: L'article 51 introduit par l'article 2 du projet de loi est
modifié par l'ajout, après le deuxième alinéa, du
paragraphe suivant: La conversion est aussi interdite si un immeuble a
été construit, acquis, restauré ou rénové
dans le cadre d'un programme gouvernemental d'aide à l'habitation au
cours des dix dernières années.
L'amendement introduisant la notion de restriction pour les dix
dernières années, je le déclare recevable.
M. Paré: La discussion a eu lieu, je n'ai pas l'intention
de prendre vingt minutes là-dessus, sauf que je trouve que l'article 51
en soi, dans sa totalité, est fondamental pour le projet de loi et
l'habitation en soi, et le paragraphe qu'on touche maintenant l'est aussi,
parce qu'il touche la conversion, la permission ou l'interdiction de
conversion.
Il y en a d'autres en ce qui touche les municipalités, mais il y
en a une touchant les organismes qui ont été aidés. Vous
avez trouvé suffisamment important d'introduire dans la loi un
paragraphe qui l'interdit pour une tenure de logements qui ont
été subventionnés. Question d'équité, comme
disait mon collègue de Gouin tantôt: Pourquoi cette
équité n'est pas ramenée au niveau du propriétaire
privé d'un immeuble locatif? Il y a aussi des programmes d'aide qui sont
passablement généreux et qui permettent la conversion.
Très rapidement, en vous rappelant ce que je vous disais tantôt,
quant à la philosophie qui amène les programmes d'aide - le PARCQ
en est un - il y a un point qu'on juge très important de
spécifier, c'est de garder le logement locatif après
rénovation. Si on a la volonté d'aider que les locataires soient
mieux logés, sans un coût prohibitif, on aide le
propriétaire. Il faut l'aider, non pas à transformer, il faut
l'aider à conserver en location, avec l'aide de l'État. Si on est
prêt à mettre un règlement dans un simple programme, c'est
qu'on doit avoir la détermination que cela s'applique et qu'on conserve
le stock de logements locatifs. La préservation du stock de logements
locatifs est un des buts visés par le projet de loi 87, et une
façon de ralentir la conversion. À mon avis, un moyen tangible,
pratique et efficace de réussir, c'est de limiter. Il n'y pas beaucoup
d'autres façons de limiter à part celle-là. Si on veut
limiter, on se donne des moyens. Tantôt, vous m'avez dit: Oui, mais les
locataires sont déjà amplement protégés. On l'a dit
et moi aussi, je l'ai dit, là-dedans, il y a des mesures qui sont
positives, bonnes, passables et acceptables; excellentes, on le verra quand on
y arrivera tantôt, c'est votre qualificatif à vous. Mais il y a de
bonnes mesures, on le reconnaît, sauf qu'à la commission, vous le
savez, il est ressorti régulièrement - on va en discuter
tantôt - que ce sont des mesures qui sont contoumables ou, en tout cas,
qui vont finir par ne pas avoir l'effet qu'on veut leur donner à la
suite des coûts de logements.
Mais, les gens qui sont déjà en place, dans des logements
qui sont restaurés et rénovés, et qui sont capables de
vivre avec les augmentations actuelles puisqu'ils sont déjà des
locataires, pour quelle raison viendrait-on changer leur situation? C'est cela
qu'on ne voudrait pas changer. Habituellement, je vous le disais tantôt,
les gens qui sont dans des logements rénovés et restaurés,
à ce moment-ci, espèrent y rester longtemps parce qu'ils ont eu
des augmentations qu'ils sont capables d'absorber. Les propriétaires
savaient très bien, quand ils ont adhéré au programme que
c'était pour les conserver en logements locatifs. Si la volonté a
été exprimée au moment où le programme a
été mis sur pied, au moment où les propriétaires
ont fait une demande et ont adhéré au programme, il faudrait le
poursuivre. Il faudrait le conserver, à mon avis. Et c'est une question
d'équité entre les coopératives, les OSBL et l'entreprise
privée. C'est une question de reconnaissance de la philosophie des
programmes. C'est le maintien du stock de logements locatifs. Cela respecte un
des buts du projet de loi de maintenir et de faire en sorte que la
transformation se fasse le moins rapidement possible ou, en tout cas, qu'on
touche le moins de gens possible si on veut maintenir le stock de logements
locatifs.
Donc, voilà, à mon avis, une belle occasion de prouver que
les principes qu'on défend dans le discours, dans l'explication qu'on
donne du projet de loi se concrétisent et fassent en sorte que,
finalement, on protège le stock de logements locatifs, qu'on va exempter
toute augmentation aux locataires qui en ont déjà eu une parce
que leurs logements ont été rénovés et qu'on les
assure que, pour un minimum de dix ans, il ne seront pas
dérangés. Vous savez très bien que, dans une maison
où il y a eu des restaurations, ces gens ont déjà
été dérangés pendant le temps des restaurations.
Ils ont eu à subir une augmentation du coût des loyers. Et si
maintenant on permet la transformation de ces logements, cela veut dire encore
un autre dérangement. Ils risquent d'être les premiers
touchés parce que ce sont les bâtisses les plus susceptibles
d'attirer les gens qui n'ont pas le goût de faire des travaux,
d'entreprendre des rénovations, mais d'accéder à un
logement dans un coin populaire pour la copropriété, surtout
à Montréal ou à Québec où la loi le
permettrait maintenant presque automatiquement à la suite de l'adoption
en troisième lecture et l'entrée en vigueur du projet de loi.
Je ne veux pas prolonger davantage, mais je veux dire que je trouve
important qu'on déplace maintenant la discussion sur l'esprit que je
voulais apporter, qui n'est pas le "et/ou" quant aux coopératives, mais
l'équité des coopératives par rapport à
l'entreprise privée.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, quand. l'État vient
en aide, d'une façon ponctuelle, à la restauration, parce que
c'est ce dont nous parlons, les programmes d'aide à la restauration, il
le fait dans un but souvent multiple. Cela peut être un but qui vise
à stimuler l'activité économique en période de
récession, comme en 1982-1983 avec Équerre, PARCQ et
Corvée-habitation. Cela peut être, comme on a vu dans le PARCQ,
pour tenter d'introduire un volet nataliste à un programme d'habitation.
Plusieurs raisons peuvent justifier l'État de venir en aide à la
rénovation et à la restauration des immeubles locatifs.
L'objet de cette aide n'est pas nécessairement le même que
lorsque l'État vient en aide d'une façon massive à un
groupe sans but lucratif ou à un groupe coopératif, alors que
l'objet est manifestement d'aider ces gens à prendre en charge leurs
conditions de logement sur une base permanente en leur consentant des
réductions substantielles de loyer sur une longue période
d'années. Si on devait donner suite à la proposition du
député de Shefford, il y a une foule de problèmes, que le
député de Shefford n'a peut-être pas vus, qui se
poseraient. Sur le plan administratif, est-ce qu'on peut voir, par exemple,
comment on pourrait contrôler, qui devrait contrôler la demande de
conversion en copropriétés, à quel niveau le
contrôle devrait se faire pour savoir si oui ou non tel ou tel individu
a, un jour ou l'autre, au cours des dix dernières années,
profité d'une subvention qui aurait pu venir soit du gouvernement
fédéral, provincial ou même municipal, si j'en crois les
propos du député de Shefford. Quelle a été
l'importance de la subvention par rapport à l'immeuble? Si la subvention
avait été minime, 500 $ par exemple, un montant relativement
minime par rapport à la valeur de l'immeuble? Qu'arriverait-il à
l'égard de tous ces gens qui ont, de bonne foi, accepté une
subvention il y a deux, trois, quatre ou cinq ans, ne sachant pas qu'ils
seraient pénalisés rétroactivement par une mesure comme
celle que l'on propose présentement? Qu'arriverait-il si le
propriétaire a changé et que le propriétaire actuel n'a
pas bénéficié de la subvention et a payé le plein
prix pour l'immeuble? Est-ce qu'on va pénaliser des gens qui aujourd'hui
n'ont pas eux-mêmes profité de la subvention et, forcément,
causer un préjudice à leur endroit? Une autre question. Quelle
sanction aurait-on si, par mégarde, il se faisait une conversion et si,
de bonne foi, personne ne réalisait que, il y a neuf ans, une subvention
de quelques centaines de dollars a été octroyée ou
perçue par un propriétaire et que, malgré cela, la
conversion a été accordée? Est-ce qu'on va
rétroactivement annuler la conversion, toutes les ventes? Un amendement
comme celui que propose le député de Shefford a de nombreuses
conséquences et on ne peut pas, comme cela, sur le coin de la table,
fignoler un amendement sans prévoir tous et chacun des effets que
pourrait amener un tel amendement. M. le Président, dans ces conditions,
je ne vois pas pourquoi j'accepterais un tel amendement.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le
député de Gouin.
M. Rochefort: Un commentaire, M. le Président. Suspendons
et rassortons la transcription de l'intervention que vient de faire le ministre
et qu'il nous explique comment il répond à chacune des questions
qu'il a soulevées, quant à l'actuel paragraphe 2, concernant les
coopératives, les organismes sans but lucratif et les
sociétés municipales d'habitation. Qu'il nous explique en
fonction des droits acquis, en fonction de pénalités, comment on
appliquerait les sanctions. Les mêmes objections s'appliquent. Pourquoi
deux régimes?
M. Bourbeau: M. le Président, je pense avoir
répondu à cette question-là au cours des dernières
vingt minutes d'interventions que j'ai faite.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. Y
a-t-il d'autres interventions?
M. Paré: Oui.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Shefford.
M. Paré: Quand on vote comme cela, article par article,
dans un projet de loi, on ne retrouve pas la réglementation, on trouve
l'orientation que l'on veut se donner, les grands principes que l'on veut
défendre. Une question de réglementation, maintenant, comment
cela s'applique? Je me souviens que l'on pose souvent des questions. Pour
certains projets de loi, on exige de voir la réglementation parce que
l'application nous inquiète, mais ce n'est jamais déposé,
même si l'idéal serait que la réglementation soit
déposée en même temps que la législation, mais ce
n'est pas le cas. C'est la première des choses.
La deuxième, quand vous dites: Un nouveau propriétaire,
qui a acquis de bonne foi un édifice ou des gens qui ont
adhéré à un programme d'aide à la restauration,
à la rénovation, ne pouvaient pas savoir qu'ils seraient
limités. Je vais vous rappeler une chose: Autant le propré-taire
qui a décidé de profiter d'un programme d'aide, autant un nouveau
propriétaire qui a acquis un édifice rénové
savaient très bien qu'ils ne pouvaient pas convertir en
copropriété divise, parce que la loi le défendait, donc ce
n'est pas une surprise. Ce que l'on fait ici, c'est de permettre quelque chose
qui n'existe pas ou qui n'existait pas au moment de l'achat. Donc c'est un
pouvoir de plus que l'on donne. Cela ne limite en rien le geste qui a
été posé au moment où ils ont acquis la
propriété. On ne vient pas leur
enlever quelque chose qu'ils avaient. Ils n'avaient pas le droit de
convertir; donc ils ne sont pas pénalisés en soi du fait que l'on
perpétue l'interdiction qu'il y avait déjà. Ce n'est pas
vrai qu'on les pénalise dans le sens du geste qu'ils ont posé.
Quelqu'un qui a acheté une maison de quatre logements en 1985 n'avait
pas le droit de convertir en copropriété. Qu'on lui dise qu'il
n'a pas plus le droit maintenant, on ne vient pas lui enlever quelque chose
qu'il avait acquis ou lui faire une surprise. On s'en vient tout simplement le
continuer pour une période de temps puisque, comme les
coopératives, il a profité de subventions, de l'aide de
l'État.
Ce sont les commentaires que j'avais à faire à la suite de
la réponse du ministre.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Shefford. Y a-t-il d'autres interventions?
L'amendement proposé par M. le député de Shefford
est-il adopté? Rejeté.
Nous revenons maintenant à l'article 51, rappelant aux deux
formations que, M. le député de Shefford, vous avez maintenant 1
minute 30 à votre disposition et, M. le ministre, 6 minutes 45, sur le
fond de l'article 51. Y a-t-il d'autres interventions?
M. Paré: En 1 minute 30, on n'a pas le temps de dire
grand-chose. Effectivement, c'est fondamental ce que l'on retrouve dans cet
article. Ce sont des principes touchés et majeurs: Transfert de
responsabilités aux municipalités, divergence dans la loi, la
Communauté urbaine de Montréal par rapport aux autres
municipalités du Québec, divergence dans l'application de la loi
des coopératives OSBL par rapport à l'entreprise privée
pour la possibilité de conversion. On touche les choses fondamentales
avec lesquelles il faudra vivre plus tard et qui seront peut-être
citées en exemple. J'espère que ce sera du bon côté,
mais je ne suis pas certain. En fin de semaine, j'écoutais, lors d'un
colloque sur l'Année internationale des sans-abri, M. Lavallée du
RCM à Montréal, qui disait que la ville n'est pas prête
à prendre n'importe quelle responsabilité qu'on lui
transfère d'une façon directe ou indirecte, sans faire allusion
à ce projet de loi spécifiquement, mais que la ville
n'était plus prête et même un peu tannée de prendre
des responsabilités au nom du gouvernement qui se désengage. Cela
en est une belle mesure finalement, à mon avis, parce qu'on lui
transfère la patate chaude de la conversion.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Shefford. M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, je ne peux pas faire
autrement que de relever les derniers propos du député de
Shefford. Je ne sais pas de qui parle le député de Shefford. Je
ne sais pas si ce M. Lavallée était autorisé à
parler au nom du
RCM ou du Conseil de ville de Montréal, mais le
député de Shefford peut se référer à la
position officielle de la ville de Montréal lors de la commission
parlementaire où elle a spécifiquement demandé de pouvoir
avoir l'autorisation de vérifier les conversions en
copropriétés. C'est la ville de Montréal qui a demande
qu'on instaure un système à peu près analogue à
celui que nous avons présentement devant nous. Alors, je ne comprends
pas pourquoi, d'une part, la ville de Montréal, par
l'intermédiaire de M. Lavallée que je ne connais pas... enfin,
que je connais peut-être de nom, viendrait dire qu'elle est
fatiguée de se faire transférer des patates chaudes et des
responsabilités dont elle ne veut pas, alors que la preuve est à
l'inverse et que la ville de Montréal a demandé
spécifiquement de détenir le pouvoir d'autoriser les conversions
selon des critères qu'elle voudra bien indiquer dans son
règlement. Alors, là, il y a une contradiction flagrante, M. le
Président, que je me dois de souligner entre les propos du
député de Shefford et la position officielle de la ville de
Montréal.
L'administration de la ville de Montréal a fait connaître
publiquement son très grand intérêt pour les questions
d'habitation. Elle est sans cesse en demande auprès du gouvernement pour
des pouvoirs lui permettant de s'impliquer dans le domaine de l'habitation.
Nous lui avons récemment accordé des unités d'habitation
pour des familles à faible revenu dans le programme de supplément
au loyer sur le marché locatif privé. La ville de Montréal
semble tout à fait intéressée par ce programme-là
et nous attendons, ces jours-ci, sa décision définitive. Je
souligne que le gouvernement du Québec est tout à fait
disposé à collaborer avec la ville de Montréal dans tous
les programmes d'habitation et que nous reconnaissons la
spécificité de la ville de Montréal, les problèmes
particuliers qui existent à Montréal en matière
d'habitation et nous tentons de répondre à ces
problèmes-là par des programmes et une attention tout à
fait particulière.
Alors, je suis d'accord avec le député de Shefford que
l'article 51 est un article important. Je dis simplement quelle est la
situation que nous avons prévue et que la formule que nous avons
avancée est à l'image du Québec. Elle tient compte de la
réalité différente, de la problématique du logement
à Montréal relativement au reste de la province. Cette
solution-là répond aux demandes spécifiques du milieu,
soit de la ville de Montréal ou de la CUM, d'une part, et du reste de la
province, d'autre part. Je lui dis que le Québec n'est pas pareil
partout, les régions du Québec ne sont pas toutes semblables,
elles ont leur spécificité propre, les solutions mur-à-mur
sont de moins en moins acceptables à l'ensemble des régions du
Québec et je pense que nous avons ici une solution qui tient compte de
la réalité différente de toutes les régions du
Québec. Quant à moi, je pense que cette solution est tout
à fait susceptible d'apporter un remède
approprié à tous les maux qui pourraient exister dans le
domaine de l'accession à la propriété par voie de
conversion sur le territoire du Québec.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le
député de Gouin.
M. Rochefort: M. le Président, d'abord, je dirais au
ministre responsable de l'Habitation que je serais heureux que le ministre des
Affaires municipales ait cette même ouverture en droit des distinctions
qui doivent exister quant au régime qu'on doit poser à
Montréal par rapport aux autres villes du Québec.
Je voudrais lui poser une question. Pourquoi simplement les
municipalités de la Communauté urbaine de Montréal,
pourquoi? Pourquoi arrêter cela là? Ou pourquoi ajouter ces
municipalités? Il y a Montréal, la ville, qui aurait
demandé un pouvoir. Vous retendez à la Communauté urbaine,
pourquoi, et pourquoi s'arrêter là?
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Bourbeau: Alors, je corrige le député de Gouin
en lui disant qu'il n'y a pas que la ville de Montréal qui a
demandé un régime semblable. Il y a d'autres
municipalités, entre autres la ville de Côte-Saint-Luc est venue
spécifiquement devant la commission parlementaire signifier son
opposition à la proposition visant à libéraliser la
conversion. D'autres municipalités de la ville de Montréal
également nous ont officieusement transmis des préoccupations
semblables.
M. Rochefort: D'accord, mais juste pour vous permettre... il y a
peut-être d'autres municipalités qui m'ont échappé
pendant la commission. Au-delà de cela, pourquoi formaliser cela
à toute la communauté urbaine et pourquoi en même temps
l'arrêter là?
M. Bourbeau: C'est parce que la problématique n'est pas la
même à Montréal et - quitte à insulter quelques
municipalités adjacentes - dans ses banlieux immédiates, si je
peux dire, dans les quartiers limitrophes des banlieues de Montréal, la
situation n'est pas la même que celle qui se présente dans le
reste de la province de Québec. Montréal a des problèmes
d'habitation qui sont différents et le projet de loi reflète
justement cette situation différente.
M. Rochefort: Quelle différence faites-vous, par exemple,
entre Sainte-Anne-de-Bellevue, l'île Bizard, Senneville, Laval et
Longueuil? Dans le dossier qui nous préoccupe, ce n'est pas une question
philosophique que je vous adresse. (12 h 45)
M. Bourbeau: Bien sûr, le député va chercher
des cas extrêmes, des municipalités qui sont à la
périphérie de la CUM et dont l'aspect est plutôt
rural...
M. Rochefort: Je suis prêt à...
M. Bourbeau: Je réfère, entre autres, à
l'île Bizard.
M. Rochefort: Je peux prendre les villes de Saint-Laurent, si
vous voulez, ou d'Anjou.
M. Bourbeau: Si le député va chercher les cas
extrêmes et qu'il les compare aux cas des municipalités les plus
urbanisées, hors CUM, on pourrait dire qu'il y a une certaine
similitude. A ce moment-là, la proposition gouvernementale pourrait
être modifiée. Cependant, quand on prend une décision comme
celle que nous avons prise, il faut arrêter quelque part, il faut
ériger des frontières, il faut choisir. On aurait pu choisir
uniquement la ville de Montréal et s'arrêter là. Si on
avait fait cela, on aurait créé un problème. On n'aurait
pas résolu le problème qui se pose à la
périphérie immédiate de la ville de Montréal, par
exemple, des municipalités adjacentes à Montréal qui
présentent le même caractère que la ville de
Montréal elle-même. Verdun, par exemple, ou les quartiers de
Côte-des-Neiges qui ne sont pas dans le territoire de la ville de
Montréal. Reconnaissant la similitude entre ces situations et celle qui
prévaut à la ville de Montréal même, nous avons
étendu le régime à l'ensemble des municipalités de
la CUM. On aurait pu, j'en conviens, soustraire certaines municipalités
qui font partie de la CUM, qui n'ont pas exactement le même
caractère. Il faut qu'on décide quelque part à un moment
donné. On doit décider d'un territoire qui est bien
homogène et qui est connu. Il nous est apparu que le territoire de la
CUM constituait un territoire homogène et facilement identifiable.
M. Rochefort: M. le Président, mes questions sont pour
faire ressortir... Je m'oppose au fait qu'il y ait deux régimes sur le
territoire du Québec, dans le cas qui nous occupe. Je m'y oppose
d'autant plus que dans une partie du Québec fortement urbanisée -
pensons à la rive sud immédiate de Montréal, Longueuil, et
tout ce qu'il y a autour - on se retrouve à cause de la dynamique que
crée le projet de loi, avec une situation où les locataires de
ces municipalités fortement urbanisées, beaucoup plus que la
plupart des municipalités de la communauté urbaine, exception
faite de Montréal, Montréal-Nord et quelques autres... on va se
retrouver avec une pression sur Montréal pour les logements locatifs.
Des locataires vont être massivement expulsés par les
conséquences de l'adoption du projet de loi, y compris par la protection
du maintien dans les lieux. On voit très bien venir ce qui va se
produire; on l'a vu dans Loginov, dans d'autres programmes. On va concentrer
à Montréal les locataires, donc les populations les plus
démunies du Québec. Cela va avoir des
conséquences sociales majeures, sur lesquelles le gouvernement
devra intervenir un jour ou l'autre, à cause du fait qu'il n'a pas vu
venir cela aujourd'hui.
Je pense que poser un geste qui va créer ce type de pression et
ce type de dynamique et de problématique sociale sur l'île de
Montréal n'est pas responsable socialement. À partir du moment
où on choisit de distinguer deux régimes sur le territoire du
Québec - ce que je n'aurais pas choisi - une fois qu'on est dans cette
logique on devrait absolument, au moins, faire en sorte que tout le territoire
fortement urbanisé de la grande région de Montréal soit
sur un même pied, et non que simplement la traversée du fleuve
distingue deux régimes juridiques dans le domaine du logement locatif,
par exemple, entre Montréal et Longueuil. Je vous rappellerais que c'est
plus facile à un Montréalais d'aller à Longueuil - ou
l'inverse, dans le cas qui nous occupe - que pour un citoyen de ville de
Saint-Laurent, de Rivière-des-prairies, de Senneville. Il y a là
une absence de logique qui devrait primer dans ce type de discussion avec la
préoccupation très importante des conséquences sociales
qu'on va rencontrer sur le territoire de Montréal où il y aura
une pression pour de plus en plus de locatif de la part de locataires qui
auront perdu leur logement dans des coins fortement urbanisés de la
grande région de Montréal et qui n'auront d'autres
réflexes et d'autres possibilités que de venir à
Montréal.
M. Bourbeau: M. le Président, le député de
Gouin dit que, s'il avait été à ma place, il n'aurait pas
choisi un double régime, mais un seul régime. Je lui signale
qu'il a eu amplement l'occasion de choisir et qu'il a choisi de ne rien faire
du tout. C'était plus facile, bien sûr, de ne rien faire du tout.
Il a joué avec l'idée de lever le moratoire et il est
resté sur des voeux pieux. Je rappellerai au député que la
ville de Montréal a dit, dans son mémoire, que ça prenait
une bonne dose de courage pour lever le moratoire. Et, dans ce sens-là,
je prends, bien sûr, les remarques négatives, je dirais même
peut-être les blâmes de l'Opposition pour la décision que
nous avons prise, mais, au moins, nous en avons pris une.
Peut-être qu'elle ne répond pas aux souhaits ou qu'elle
n'obtient pas l'adhésion de tout le monde, mais je pense qu'on veut
quand même s'assurer qu'il y a une certaine ouverture vers la conversion,
dans la mesure où toutes les municipalités en dehors de la CUM
ont demandé, par la voie de leurs organes officiels, les deux unions
municipales, de lever le moratoire et de permettre la conversion. Je dirai
cependant au député, que les maires de ces deux villes
populeuses, hors CUM, que sont Longueuil et Laval, siègent tous les deux
au conseil d'administration de l'Union des municipalités du
Québec. Et quand l'Union des municipalités du Québec est
venue nous demander de permettre la conversion, les maires de ces grandes
villes-là ont été, au premier chef, impliqués dans
cette décision-là puisqu'ils sont, dans le cas du maire de
Laval-membres de l'exécutif et, dans le cas du maire de Longueuil,
membre du conseil d'administration de l'Union des municipalités du
Québec.
Donc, c'est en connaissance de cause que ces municipalités hors
CUM nous ont demandé de permettre la conversion. Et, non seulement
l'UMQ, mais même l'UMRCQ qui représente, elle, 1200 des
municipalités rurales du Québec, les plus petites, a aussi
demandé de pouvoir permettre la conversion. La ville de Québec
est également venue carrément, en son nom propre, nous le
demander. Donc, je dis simplement au député de Gouin que nous ne
faisons que refléter, dans la décision que nous avons prise, la
réalité de ce qu'est le Québec actuellement.
Maintenant, le problème n'est pas le même quand on parle
des banlieues comme Longueuil et Laval que si on parle, par exemple, de
Montréal ou d'Outremont ou des villes de la CUM. Il y a, dans les villes
de banlieue comme Longueuil et Laval, par exemple, beaucoup de terrains
vacants, des terrains viabilisés qui sont utilisés pour
construire des condominiums à coût très modeste, de sorte
que l'attraction de la conversion dans ces endroits-là ne sera pas la
même que dans le centre-ville de Montréal où il n'y a pas
de terrains vacants et où il n'y a pas d'autre solution. Il y a des
solutions dans les banlieues immédiates parce qu'il y a beaucoup de
terrains, de sorte qu'on ne peut pas, je crois, penser qu'il va y avoir,
à ces endroits-là, une ruée vers la conversion. D'autant
plus - et je termine là-dessus - qu'il ne faut pas oublier que les
municipalités de la rive sud de Montréal ou de Laval ont le
pouvoir d'intervenir rapidement et de limiter, sinon pratiquement interdire, la
conversion sur leur territoire pour se placer exactement dans la même
situation que les municipalités de la CUM. Il n'y a donc pas
péril en la demeure. Aucun locataire n'est menacé. La loi
prévoit actuellement toutes les possibilités de protéger
les locataires, non seulement de la CUM, mais hors de la CUM. Quant à
moi, je pense qu'on brandit là des épouvantails qui ne se
traduiront pas dans la réalité des faits par les
conséquences néfastes que croit y déceler d'avance
l'Opposition ou le député de Gouin.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Gouin.
M. Rochefort: M. le Président, j'ai un certain nombre de
commentaires à faire à la suite de ceux du ministre. D'abord,
puisqu'il choisit, encore une fois, de se comparer et d'essayer de
personnaliser ses questions, je lui rappellerai que j'ai été
ministre responsable de l'Habitation pendant à peu près quatorze
mois et que je ne pense pas qu'il ait pris de décision.
non plus, dans les quatorze premiers mois de son . mandat comme ministre
responsable de l'Habitation sur cette question et que, s'il veut nous comparer,
c'est pour nous dire qu'il n'a pas plus agi que je ne l'ai fait pendant les
quatorze premiers mois de son mandat.
Deuxièmement, M. le Président, il est faux de
prétendre que j'ai jonglé avec l'idée de lever le
moratoire. J'ai tenu une consultation sur un livre vert qui avait
été déposé avant mon arrivée au
ministère de l'Habitation et qui contenait, dans les 127
hypothèses d'action gouvernementale, une hypothèse de
levée du moratoire. Je ne suis pas allé consulter à
moitié les Québécois sur ce livre vert, je les ai
consultés sur les 127 propositions d'action, y compris celle-ci.
J'espère qu'il a au moins lu et compris cela dans le document.
M. le Président, je dirai au ministre que c'est sympathique sa
philosophie. Je comprends que son expérience de deux ans au
ministère des Affaires municipales lui fait comprendre qu'il devrait
écouter un peu plus le monde municipal, sauf que je lui dirai qu'il y a
des situations où l'intérêt collectif des
Québécois doit aller au-delà des demandes
spécifiques d'une municipalité ou d'une autre. Par exemple, tout
ce problème que j'évoque et que je soulève au sujet de la
pression qu'on connaîtra dans la grande région de Montréal
sur Montréal et ses municipalités environnantes pour loger des
locataires à faible revenu qui auront été les grands
perdants de l'opération levée du moratoire dans ces
municipalités, c'est certain qu'on ne peut pas demander à
Longueuil de venir expliquer au ministre de l'Habitation: Faites attention, M.
le ministre, cela va avoir des conséquences graves sur Montréal!
C'est pour cela qu'au-dessus des municipalités au Québec, il y a
un gouvernement qui est celui du Québec et qui, des fois, doit prendre
des décisions qui vont peut-être à l'encontre des besoins,
des objectifs et des désirs d'une municipalité au nom de grands
principes pour lesquels aucune municipalité ne peut intervenir par
rapport aux autres et que c'est une autorité supérieure qui doit
le faire. Je pense que cela aussi fait partie des responsabilités du
ministre des Affaires municipales. Je pense que, dans le cas qui nous occupe
actuellement, c'était son obligation de prendre les
responsabilités sur le plan national du Québec et de voir les
conséquences qu'aurait sur la ville de Montréal ce type de
situation, ce qui s'est vérifié ailleurs en Amérique du
Nord dans certains cas.
Finalement, quand le ministre nous reparle de cette belle ouverture
qu'il voulait quand même pouvoir créer par la levée du
moratoire quant à l'accession à la propriété, je
dirai: Oui, M. le ministre, mais mettez donc en place des programmes
d'accession aux propriétés si vous voulez vraiment que du monde y
accède plutôt que de faire en sorte que cela se fasse sur le dos
des plus petits locataires du Québec.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Gouin. Cela conclut. M. le ministre, je vous
cède la parole.
M. Bourbeau: M. le Président, il m'est impossible de ne
pas relever les mots du député de Gouin, qui dit que les
locataires sont les grands perdants de l'opération que nous faisons
présentement. Vraiment, je pense que le député de Gouin
est trop occupé, présentement, à faire autre chose et il
n'a pas lu le projet de loi, c'est évident. S'il y a un projet de loi
qui vient consolider les droits des locataires et qui est à l'avantage
des locataires, c'est bien celui que nous avons devant nous. Je ne reprendrai
pas la réplique que j'ai faite en Chambre, l'autre jour, mais les gens
qui ont pris le temps d'étudier le projet de loi et qui l'ont
regardé d'une façon attentive - contrairement au
député de Gouin qui, manifestement ne l'a pas lu - sont unanimes
pour dire que c'est un projet de loi dont les gagnants sont les locataires et
non pas les perdants. Je cite la Gazette: Tenants welcome condo Bill." Je peux
le traduire. Montréal est satisfait du projet de loi Bourbeau sur la
copropriété.
M. Rochefort: Oui, c'est à Montréal.
M. Bourbeau: Dans un autre article, on dit que le ministre des
Affaires municipales est le grand champion des locataires. Ce n'est
certainement pas que les locataires...
M. Rochefort: Faites encadrer celai
M. Bourbeau:...sont perdants. Je pourrais continuer comme cela.
Il y en a partout La presse est unanime, M. le Président, pour dire que
les mesures sont des mesures excellentes. Ici, dans Le Devoir: "Une politique
pour locataires," titre l'éditorialiste. Je ne comprends pas le
député. Enfin, je suis convaincu que le député de
Gouin regrette un peu ses paroles excessives de tout à l'heure lorsqu'il
a dit que les locataires étaient les grands perdants, parce que tous les
observateurs sont unanimes à dire que les locataires ne sont pas les
perdants, mais les grands gagnants du projet de loi que nous avons devant
nous.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre.
Est-ce que l'article 51, tel qu'amendé est adopté?
Une voix: Sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): Sur division. Comme il est
maintenant 13 heures, la commission suspend maintenant ses travaux
jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 14)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'aménagement et des équipements reprend
ses travaux pour poursuivre l'étude du projet de loi 87, Loi modifiant
la Loi sur la Régie du logement et le Code civil.
Au moment de notre suspension, nous en étions à l'article
52. Je cède maintenant la parole à M. le ministre.
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Ce nouvel article
introduit d'abord l'avis d'intention de convertir. C'est par cet avis que le
propriétaire devra commencer les démarches de conversion. Il
devra être donné à chacun des locataires, avant que le
propriétaire ne s'adresse à la municipalité pour obtenir
soit une dérogation sur l'immeuble situé dans une
municipalité de la Communauté urbaine de Montréal, soit un
certificat ou un consentement dans les autres municipalités qui auront
adopté un règlement pour contrôler la conversion. Si le
propriétaire n'a pas à s'adresser à la
municipalité, l'avis d'intention devra être donné avant la
demande d'autorisation de convertir à la régie.
Dans tous les cas, le propriétaire ne pourra faire visiter le
logement à un acquéreur éventuel, ni faire effectuer des
relevés ou d'autres activités, par exemple, celles de
l'arpenteur-géomètre, avant d'avoir donné son avis
d'intention. Avant ces visites ou ces activités, le propriétaire
devra donner un préavis de 24 heures. Cet avis est similaire à
celui présentement prévu au Code civil, à l'article 1654.1
et qui vise à informer à l'avance le locataire des visites que le
propriétaire désire effectuer dans le logement. L'avis
d'intention devra être fait selon le modèle prévu à
l'annexe 1 de la loi. Afin que le locataire dispose de toute l'information
nécessaire et qu'il soit sécurisé quant à son droit
au maintien dans les lieux, une copie de l'avis d'intention sera transmise
à la Régie du logement. La régie pourra ainsi savoir
où se trouvent les projets de conversion. Elle disposera d'un guichet
spécial, accessible à tous les locataires dont l'immeuble est en
voie de conversion et elle pourra ainsi prendre en charge l'information des
locataires. On notera d'ailleurs, lorsque nous étudierons plus tard
l'annexe 1 de la loi, que l'avis indique au locataire qu'il peut, au besoin,
consulter la Régie du logement.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre.
Est-ce qu'il y a des interventions? M. le député de Shefford.
M. Paré: Oui, une petite question. On dit: "donner
à chacun de ses locataires un avis de cette intention conforme au
modèle à l'annexe I". Pourquoi n'est-ce pas l'obligation
d'utiliser une formule? Là, on dit que c'est un avis conforme, donc qui
se rapproche, qui va selon les grandes orientations. Pourquoi est-ce qu'on ne
s'organise pas pour qu'il y ait un avis officiel obligatoire?
M. Bourbeau: Vous voulez savoir pourquoi ce n'est pas exactement,
à une virgule près, le texte qui est dans l'annexe I?
M. Paré: Pourquoi n'est-ce pas une formule standard
obligatoire?
M. Bourbeau: On me dit que c'est l'équivalent d'une
formule standard obligatoire.
M. Paré: Je vais relier d'abord l'article 52 à un
autre, parce que mon interrogation vient justement de la lecture du projet de
loi. Si c'est une formule standard obligatoire à l'article 52, pourquoi
à l'article 54.2, deuxième paragraphe, on dit: La régie ne
peut refuser l'autorisation pour le motif que l'avis d'intention comporte un
vice de forme? Pourquoi, si c'est conforme?
M. Bourbeau: L'article 54.2 dit que si l'avis d'intention a
été envoyé et qu'il y a des modifications à la
formule de base qui ne sont pas importantes, dans ce sens que le locataire n'a
subi aucun préjudice, la régie n'invaliderait pas le processus
s'il est prouvé qu'il n'y a eu aucun préjudice de subi et qu'on
n'a pas suivi à la virgule près le modèle de l'avis
d'intention.
La réponse à la question du député à
l'article 52, c'est que l'avis envoyé doit être conforme au
modèle. Donc, il doit reprendre les points essentiels du modèle.
Est-ce que les paragraphes peuvent être invertis? Est-ce qu'il peut y
avoir des mots additionnels d'ajoutés et des compléments
d'information? Je pense que c'est ce genre de choses que l'on veut
prévoir et non pas l'essence même de ce que doit contenir
l'avis.
Il peut arriver des cas où le propriétaire peut juger
opportun d'ajouter au contenu obligatoire, pour des raisons qui ont trait
à des conditions spéciales dans un immeuble donné, et d'en
donner plus que la loi en demande. Le député voudrait qu'on s'en
tienne, rigoureusement à une virgule près, au texte de l'annexe
I. Ce n'est pas ce que nous avons retenu comme façon de faire.
Je pense que c'est assez facile à comprendre. Nous avons
l'intention de faire en sorte que tous les locataires reçoivent un avis
qui contienne l'essentiel, sans quoi, le processus serait vicié. On m'a
dit que le bureau des lois et la légistique actuelle privilégient
la façon de rédiger que nous avons présentement, où
on emploie les expressions qui ressemblent à celles qu'on a là,
un avis conforme au modèle.
Dans les lois qu'on fait maintenant, on ajoute toujours, selon ce que
mes conseillers juridiques me disent, que le texte de l'article
54.1, dont parlait le député de Shefford tout à
l'heure, fait également partie des us et coutumes en légistique
présentement, à savoir qu'on n'invalide pas et on prévoit
que ne soit pas invalidée une formalité, parce qu'on n'a pas
suivi chaque mot prévu dans un modèle - ce n'est pas l'article
54.1; c'est l'article 54.2 à condition que le propriétaire ou une
des parties, en tout cas, n'ait subi aucun préjudice.
Alors, dans le cas présent, c'est la formule qui a
été retenue d'un avis qui doit être envoyé et qui
est conforme au modèle avec la clause accessoire à l'effet que le
fait de ne pas suivre le modèle à la lettre n'invaliderait pas la
procédure, si la partie qui le reçoit ne subit aucun
préjudice.
Évidemment, il s'infère de ce que je viens de dire, a
contrario, que si une partie essentielle du modèle manque ou si le fait
de ne pas suivre le modèle a pour effet de causer un préjudice au
locataire, la régie va invalider la démarche et refuser la
conversion.
M. Paré: Donc, il n'y a pas de formule obligatoire. Je
vais être bien clair, parce que dans ce qui a été dit au
début, moi, je suggérais qu'il y ait une formule. Vous m'avez
dit: C'est exactement ce qu'on dit pour ensuite revenir et dire: On va
suggérer une formule.
Très clairement, est-ce que la formule qu'on retrouve à
l'annexe I, serait celle qu'on retiendrait à l'annexe I? Est-ce qu'il y
a une formule obligatoire? L'avis doit-il être fait sur une formule
obligatoire qui sera contenue dans la loi?
M. Bourbeau: M. le Président, je ne crois pas m'être
contredit. Ce que j'ai compris de la question du député, c'est
que le contenu est obligatoire. Maintenant, il y aura une formule à
l'annexe I. Cependant, on pourra...
Une voix: L'annexe C.
M. Bourbeau: L'annexe I. Cependant, un individu ne sera pas
obligé de suivre mot à mot la formule pourvu que le contenu de
l'annexe I soit repris dans l'avis d'intention donné par un
propriétaire, étant entendu que toute différence ne devra
pas avoir pour effet d'induire en erreur le locataire et que le locataire,
selon le texte de l'article 54.2 dont parlait le député, n'en
aura subi aucun préjudice.
M. Paré: Je comprends, mais pourquoi ne prévient-on
pas et n'apporte-t-on pas une simplification en ayant l'obligation d'utiliser
une formule? Puisque la formule va y être, de toute façon, pour
qu'on puisse la suivre, pourquoi n'émet-on pas l'obligation que ce soit
un avis qui doive être utilisé? La preuve, à mon avis, que
c'est une bonne idée, c'est qu'on se sent obligé d'avoir un autre
article qui dit que, si cela comporte un vice de forme, ce ne sera pas
finalement retenu comme matière à refus de l'autorisation, si
cela ne porte pas préjudice. Mais la meilleure façon qu'il n'y
ait pas de vice de forme, c'est qu'il y ait une formule statutaire obligatoire.
Pourquoi n'accepte-t-on pas cela, puisqu'on dit déjà ce qu'elle
va contenir? On dit déjà qu'il y en aura une qui devra être
suivie. Au lieu de dire qu'il y en a une qu'on pourra copier ou, en tout cas,
qu'il faudra suivre ce qui y apparaît de façon très proche,
pourquoi ne dit-on pas qu'on utilise la formule?
M. Bourbeau: Le député de Shefford a une approche
très bureaucratique et même très technocratique en cette
matière-ci. Il y a un désavantage à procéder comme
cela. Si on en fait une formule sacro-sainte sine qua non à
l'égard de chaque virgule, il s'ensuit qu'on risque, de bonne foi, que
des gens qui s'entendent parfaitement entre propriétaires et locataires
et qui se comprennent parfaitement puissent voir un processus invalidé
pour des peccadilles.
L'autre façon de voir les choses, c'est de dire que le contenu
est obligatoire et qu'on laisse à l'intelligence humaine le soin de
développer la formule qu'ils veulent, à condition que tout le
contenu soit repris. Cela apporte plus de souplesse, cela permet de s'adapter
à certaines situations en en ajoutant davantage. C'est également
ce qui se fait actuellement dans les lois. Prenez, par exemple, l'avis de 60
jours qu'on doit envoyer, en vertu du Code civil, à quelqu'un qui est en
défaut, par exemple, de payer une balance de vente sur un immeuble, la
loi donne le contenu, mais le texte lui-même peut varier d'un avocat
à l'autre ou d'un individu à l'autre. Celui qui s'écarte
trop ou qui voudrait s'écarter de la formule qui est proposée
prend des risques de voir un jour sa formule ou son avis invalidé, de
sorte que la marge de manoeuvre est très restreinte et qu'un
propriétaire ne prendra pas grand risque de s'éloigner de la
formule qui sera à l'annexe I et qui sera préparée par la
Régie. Je signale au député que c'est très
fréquent dans les lois, c'est toujours comme cela maintenant. On n'a pas
de formule sacro-sainte, c'est... On me signale que la Loi sur la protection du
consommateur est dans le même sens, que c'est un contenu qui est
obligatoire, mais qu'il y a une certaine marge de manoeuvre sur le
libellé de l'avis.
M. Paré: À moins que je ne me trompe, au moment
où on se parle, il y a un bail type concernant la location de
logements.
M. Bourbeau: M. le député, mes experts me disent
que, pour le bail, c'est la même chose: le contenu est obligatoire, mais
il y a une marge de manoeuvre sur le libellé. La régie fournit un
bail type qu'on peut utiliser, comme on peut en avoir un autre qui reprend,
pour l'essentiel, tous les points mais qui pourrait les dire d'une autre
façon.
M. Paré: Ne trouvez-vous pas que ce serait une bonne
occasion justement d'avoir des choses... On dit toujours que c'est la
complexité qui finit par amener des problèmes. Quand on a une
formule sur laquelle non seulement les gens de la régie s'habituent
à travailler, quand c'est toujours la même formule qui revient,
c'est beaucoup plus simple pour les gens, plus simple pour les fonctionnaires.
Et, quand je parle des gens, ce sont autant ceux du municipal, et autant les
locataires que les locateurs. On a une formule à laquelle on s'habitue
et sur laquelle on sait d'avance ce qu'il va y avoir, est-ce que ce n'est pas
une bonne raison, justement, quand on sait d'avance l'ensemble des
détails qui vont y être inclus, de faire en sorte que la formule
soit obligatoire? (15 h 30)
M. Bourbeau: M. le Président, c'est une façon de
voir les choses. Je ne nie pas que la façon de voir du
député de Shefford a ses vertus. Je ne veux pas lui dire que
c'est moins bon que ce qui est proposé ici. Je voudrais lui dire que ce
que nous proposons maintenant, c'est la façon traditionnelle de
légiférer, le gouvernement de son propre parti faisait des lois
de la même façon, le contenu du bail procède
également de la même façon. Il y a un désavantage
d'avoir une formule coulée dans le béton, c'est qu'à la
moindre erreur, non pas erreur de fond, mais une erreur de forme, au moment
où le propriétaire ferait une erreur de transcription, mettrait
une virgule au mauvais endroit ou invertirait des paragraphes, il viendrait
d'invalider tout un processus. Une des conséquences de ce
processus-là, c'est que le locataire qui se voit conférer le
droit au maintien dans les lieux, à partir du moment de réception
de l'avis, verrait aussi ce droit-là mis en péril si on pouvait
mettre en péril le processus.
Donc, je pense que la façon dont on procède ici est
acceptable. Elle a l'avantage de ne pas invalider, pour des peccadilles, un
processus qui serait bien engagé et elle ne donnera certainement pas
lieu à des abus parce que le propriétaire qui engage des fonds
importants dans un processus de conversion ne se mettra pas dans une position
où il peut se faire invalider le processus pour manque de
conformité de son avis avec le contenu obligatoire de la loi.
M. Paré: Je ne veux pas pousser la discussion. Mais ma
crainte était exactement celle-là, c'est de ne pas risquer qu'il
y ait invalidation ou problème pour une des parties dû Justement
au fait qu'en n'ayant pas une formule détaillée et
complète, on risque - comme dans l'exemple que vous venez de me donner -
d'intervertir des paragraphes ou d'oublier des points, alors que, s'il y avait
une formule toute faite avec tous les points dedans, juste à
compléter, je ne suis pas sûr qu'on ne viendrait pas de faire en
sorte d'empêcher d'exempter certaines erreurs, certains oublis.
M. Bourbeau: De toute façon, si les propriétaires
ne veulent pas courir de risque, ils prendront la formule que la régie
va préparer qui est une formule qui reprend tout le contenu et, s'ils
veulent faire leur propre formule, si leur notaire veut rédiger leur
propre formule, ils la prendront et s'arrangeront pour ne pas faire d'erreur.
Maintenant, il pourrait aussi y avoir des oublis dans la sacro-sainte formule.
Quelqu'un pourrait mal la copier, mal la reproduire et, là, l'erreur est
fatale. Tandis que, dans la façon dont nous l'avons, nous, l'erreur
n'est pas fatale si elle est minime. Si elle est de moindre importance.
M. Paré: Si on reproduit à coups de millions une
formule, j'espère qu'on va en faire une vérification à
toute épreuve. La dernière argumentation, je ne la retiens pas
parce que c'est bien plus dangereux si, chaque fois, on décide d'en
faire même des différentes pour un même bloc, ça
pourrait être ça. Un simple oubli peut être la
différence entre un droit acquis ou pas. Vous me dites: Pour autant que
le locataire n'en subit aucun préjudice. Sauf qu'il y a
l'évaluation du préjudice. Oui, il peut avoir perdu son logement
pour un oubli de paragraphe, quelque chose, sur les droits du locateur. Mais de
là à prouver que c'est un vice de forme... C'est une
procédure de plus. Ce sont des délais ou finalement ce sont des
poursuites que les locataires laissent tomber très souvent. Moi, ce que
je veux exempter, ce sont des problèmes. Vous avez vu, à la
commission parlementaire, quelque chose qui revenait très souvent pour
les locataires et les associations de locataires, c'est la complexité,
les coûts, les délais, le peu d'utilisation que font les gens de
la Régie du logement, toute proportion gardée du nombre de
locataires et du peu de gens qui, même quand ils sont au courant de leurs
droits, ne se rendent pas à la Régie du logement parce qu'ils ont
la perception que c'est un débat, que c'est une lutte qui n'en finit
plus. Moi, tout ce que j'essaie de faire, c'est de simplifier et de m'assurer
que le deuxième paragraphe de l'article 54.2 ne devienne même
inutile. Si vous ne voulez pas...
M. Bourbeau: M. le Président, ce n'est pas que je ne veux
pas. Le député ne s'en rend peut-être pas compte. Le
député pense que la régie pourrait imprimer un million
d'avis qui auraient été passés au crible de tous les
conseillers juridiques de la régie et de tous les régisseurs pour
être certains qu'il n'y a aucune erreur. Les propriétaires
n'utiliseront pas la formule comme telle, physique, préparée par
la régie parce qu'un propriétaire, quand il envoie un avis
à ses locataires, il veut l'avoir sur sa papeterie à lui. Il va
reprendre le texte sur une papeterie soit du propriétaire, si c'est une
compagnie sur la papeterie de la compagnie, soit peut-être d'un bureau
d'avocats pour envoyer un
avis au locataire. Il va alors y avoir une retranscription et c'est dans
la retranscription qu'il peut y avoir des oublis. Et, si on prend une formule
sacro-sainte, sine qua non, là, dès qu'il y a une petite virgule
qui manque, c'est une erreur fatale qui entraîne l'annulation du
processus. C'est dans ce sens-là que je dis au député
qu'on est peut-être mieux avec la formule qu'on a maintenant, qui est
plus souple et qui fait la différence entre une erreur importante et une
erreur qui ne l'est pas.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Gouin.
M. Rochefort: M. le Président, juste pour taquiner le
ministre un peu, j'avoue que je suis surpris d'entendre le champion des
locataires nous parler des problèmes que ça va poser aux
propriétaires.
Une voix: Champion des propriétaires.
M. Rochefort: M. le Président, tout le discours que le
ministre vient de nous tenir, c'est qu'il ne faudrait pas que, par l'omission
d'une virgule, d'un mot, d'une phrase, d'une expression, on fasse en sorte que
la procédure très coûteuse que viendrait d'engager un
propriétaire tombe à l'eau. Évidemment, le locataire
perdrait son droit de maintien dans les lieux. Bien non! Si la formule de
conversion n'est pas bonne, il n'y a pas de danger qu'il perde son droit de
maintien dans les lieux, il va le rattrap-per quand la formule sera bonne.
Je lis un paragraphe, seulement un, de votre formule: "Le locataire a
droit au maintien dans les lieux et ne peut être évincé de
son logement par voie de reprise de possession, sauf s'il est cessionnaire du
bail et que la cession a eu lieu après l'envoi de l'avis ou s'il devient
locataire après que la Régie du logement ait autorisé le
propriétaire de l'Immeuble à procéder à la
conversion."
Est-ce que je peux vous dire que, pour bon nombre de locataires du
Québec, tel quel, ce sera compliqué à suivre en
"tabarnouche"! Je pense que, dans ce cas, on devrait avoir une formule unique.
Et quant à votre idée du papier à en-tête... Ils
couvriront cela d'une petite lettre de chez Pierre, Jean, Jacques disant: Vous
trouverez ci-joint une formule d'intention de conversion d'immeuble locatif en
copropriété. D'autre part, il faut modifier substantiellement le
contenu de cette annexe, de cette formule, pour le rendre digestible et
compréhensible pour le monde ordinaire. Sinon, on va transformer cela,
cette fois-ci, en bureaucratie et en technocratie, cela impliquera que les gens
devront aller voir des avocats et que cela leur coûtera de l'argent et,
ultimement, cela coûtera de l'argent au public parce que certains d'entre
eux devront faire affaire avec des avocats de l'aide juridique.
Je vous le répète, oubliez votre formation de juriste et
relisez le paragraphe que je viens de lire. Ce n'est pas exactement ce qu'il y
a de plus accessible, comme formulation, pour quelqu'un qui, dans sa vie,
reçoit un papier de l'importance de celui-là. Je m'excuse, mais
je considère qu'effectivement on a avantage à avoir un contenu
unique et uniforme et à ce que ce contenu soit réécrit par
des gens capables d'écrire des choses accessibles à des citoyens
qui n'ont pas étudié le droit, de façon à bien les
protéger. Le formulaire n'a pas pour but de protéger le
propriétaire. Le but du formulaire - j'imagine, pour le champion des
locataires - est de bien protéger le locataire. En ce sens, je pense
qu'il faut qu'on retrouve un contenu extrêmement facile à
comprendre.
L'autre chose qui m'inquiète un peu, c'est qu'au minimum, si on
veut prévoir la possibilité d'ajouter des éléments
à l'annexe, je pense qu'il devrait y avoir, là aussi, un article
ou une phrase de mise en garde pour le locataire précisant que les
éléments qui suivent cette phrase n'ont pas été
vérifiés quant à leur conformité avec la loi et
qu'il n'est pas impossible qu'il y ait, dans cela, des choses qui soient
illégales. Justement, pour attirer l'attention du locataire sur le fait
qu'il doit bien vérifier s'il n'y aurait pas des clauses additionnelles,
dans la formule, qui pourraient réduire ses droits et qui sont
illégales.
Le ministre faisait tantôt allusion à son avis de 60 jours.
Je vous dirai que, dans mon esprit, on parle de deux choses d'une importance
fort différente. Je le répète, quand un locataire recevra
cet avis, il faut qu'il comprenne cela facilement, qu'il retrouve tous ses
droits clairement exprimés et qu'il soit bien protégé
quant au contenu que pourrait comprendre cet avis au-delà de ce qu'on
retrouve à l'annexe. En ce sens, je ne vois absolument pas pourquoi on
n'aurait pas un formulaire unique que la Régie du logement rendrait
disponible. Je ne vois pas au nom de quel principe on s'opposerait à
cela, d'autant plus que - je vous le répète - déjà,
le formulaire, eu égard à ses mentions obligatoires, selon moi,
est trop compliqué pour être vraiment un instrument qui
protège les locataires et qui leur fournisse une information essentielle
de base pour qu'ils puissent bien se défendre et bien se
protéger.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, le député de
Gouin a interrompu ses travaux pour nous faire valoir son point de vue. Je
présume que les travaux auxquels s'adonnait le député de
Gouin avant son intervention portait sur un contenu unique et, semble-t-il,
répétitif et que le député, ayant continuellement
devant les yeux des textes qui se ressemblent, veut faire le transfert, dans le
projet de loi, des documents qu'il a devant
lui présentement.
M. le Président, adopter un projet de loi, ce n'est pas comme les
cartes de Noël, c'est différent. Dans le cas présent, la
situation qui va prévaloir dans les avis n'est pas la même que
celle qu'on peut avoir dans des situations plus simples. Ce que je veux dire
par là, c'est qu'on a, actuellement...
M. Rochefort: Ah! Vous voulez dire quelque chose par
là!
M. Bourbeau: Oui.
M. Rochefort: Alors, là, on va essayer de comprendre.
M. Bourbeau: Si le député n'a pas compris,
M. le Président... Ce que je veux dire, c'est qu'on devrait se
concentrer sur une chose à la fois, M. le Président, et ne
pas...
M. Rochefort: C'est pour les gens qui ne sont pas capables de
faire deux choses en même temps. Je pense que le ministre parte pour
lui-même, si on respecte cela. Mais, par ailleurs, il peut permettre
à la commission de poursuivre ses travaux. On l'écoute.
M. Bourbeau: Est-ce que je peux reprendre mon droit de parole, M.
le Président? Je ne voudrais pas interrompre le député de
Gouin...
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Bourbeau: ...dans ses travaux qu'il poursuit à l'heure
actuelle et dont il a de la difficulté, d'ailleurs, à se
sortir.
M. Rochefort: À sortir de sa sortie, oui.
M. Bourbeau: M. le Président, les mentions obligatoires
dont on parle sont contenues à l'annexe I. Je signale au
député de Shefford et au député de Gouin, s'il
m'entend, que le propriétaire n'a pas le choix. Il doit absolument
reprendre, dans son avis, les mentions obligatoires. C'est quand même
assez important comme mention.
Je ne sais pas si le député de Shefford a eu l'occasion de
consulter les mentions obligatoires. Quand le propriétaire, dans ses
termes à lui, aura dit au locataire, dans l'avis, qu'il "a droit au
maintien dans les lieux", qu'il "ne peut être évincé de son
logement par voie de reprise de possession", que "seuls les travaux d'entretien
ou les réparations urgentes et nécessaires... peuvent être
effectués sans autorisation de la régie", que "la régie
autorise, etc. - tout est marqué dans le contenu obligatoire - que
"l'interdiction pour le locateur de reprendre possession d'un logement de
même que celle de faire des réparations cessent si le
propriétaire avise par écrit le locataire qu'il n'a plus
l'intention de convertir", qu'il doit y avoir un avis de 24 heures de donner au
locataire, quand le propriétaire aura dit tout cela, M. le
Président, dans ses mots à lui, quand il aura été
obligé de reprendre chacun des éléments essentiels de ces
mentions obligatoires, je pense que le locataire sera très bien
informé.
Je ne vois pas pourquoi on lirait "le propriétaire" à
chaque virgule de ce texte, étant entendu que, de toute façon, il
prend un risque s'il veut s'adonner à du "ad lib" un peu trop loin,
parce qu'il pourrait éventuellement voir le processus invalidé.
Je suis d'accord que c'est une loi qui est un peu plus complexe qu'une petite
loi ordinaire. C'est un problème qui est d'ailleurs tellement complexe
que l'ancien gouvernement n'a pas réussi à trouver la solution
pendant les neuf ans qu'il a été là. Même le
député de Gouin, qui a été là pendant
quatorze mois, n'a même pas été capable de faire une seule
déclaration publique sur le sujet.
M. le Président, tout ce que je peux vous dire: c'est vrai, le
député de Gouin a raison, c'est une loi compliquée. Mais
comme le dit l'éditorialiste de La Presse: II est rare qu'une loi
compliquée soit une bonne loi. Celle que vient de proposer le
gouvernement est cependant une exception.
M. Paré: Je dois vous dire...
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que vous avez fini
votre intervention? M. le député de Gouin.
M. Rochefort: M. le Président, je dirai au ministre qu'il
devrait appliquer à sa personne ses propres conseils: ne pas lire des
éditoriaux en même temps qu'il légifère. Je vois que
cela lui pose des problèmes, après cela, il a de la misère
à poursuivre sa discussion en tenant compte des arguments avancés
par les députés et il ne tient compte que des arguments
avancés par les éditorialistes.
M. le Président, je soulignerai aussi au ministre, parce qu'il a
l'air d'y tenir, que s'il me reproche de ne pas avoir été capable
d'aboutir en quatorze mois, imaginez-vous ce qu'il est, lui, alors que cela lui
en a pris vingt-deux.
M. Bourbeau: Mais au moins, j'ai commencé avant quatorze
mois, M. le Président.
M. Rochefort: Vivez avec cela.
M. Bourbeau: J'ai commencé au bout de six mois.
M. Rochefort: II a tellement commencé, M. le
Président, qu'il a mis en place un comité qui a dû mettre
fin à ses travaux, pour ensuite embaucher une équipe qui a
dû mettre fin à ses travaux, pour finir par confier le dossier
à la Régie du logement. J'ai au moins économisé
des
sommes au trésor public.
Je vous le répète, M. le ministre, si vous voulez vous
engager là-dessus, continuez. Si je ne suis pas bon parce que je n'ai
pas agi en quatorze mois, imaginez-vous ce que vous êtes alors que cela
vous en a pris vingt-deux pour aboutir avec un produit comme celui qu'on
retrouve sur notre table.
M. le Président, je ramène le ministre à ses
propres paroles. Il vient de nous dire dans sa présentation, dans sa
réplique, dans sa réaction: Quand le propriétaire aura
expliqué dans ses propres mots à lui, ajoutait-il, pour
être sûr que le "ses" était bien un s-e-s et non pas le
"ces" de l'annexe I, que le locataire a droit au maintien dans le lieu et
patati et patata... Ce que je viens de lui dire justement, c'est que le contenu
même de sa propre annexe, élaboré par ses propres
fonctionnaires, n'est pas un contenu facilement accessible pour des locataires
qui n'ont pas une formation juridique. Je crois qu'il y en a quelques-uns au
Québec. Imaginez si, en plus, le propriétaire, dans ses propres
mots à lui, communique au locataire son intention de.
M. le Président, j'ajoute que, pour ma part, il faut justement
faire en sorte que, par cette vraie préoccupation de bien
protéger le locataire, lorsqu'elle est réelle, on mette de
côté toutes les possibilités d'avocasserie. On sait
très bien, et ce serait se cacher la tête dans le sable, qu'il y a
des entreprises suffisamment importantes, suffisamment grosses qui ont les
moyens de se payer des avocats, qui vont utiliser ce qu'on retrouve à
l'article 52, qu'on étudie actuellement, avec la possibilité de
tenir compte uniquement de l'esprit qu'on retrouve à l'annexe I et se
servant, deuxièmement, de l'article 54.2: "La régie ne peut
refuser l'autorisation pour le motif que l'avis d'intention comporte un vice de
forme ou n'a pas été donné au locataire, si le
propriétaire démontre que le locataire n'en a subi aucun
préjudice." (15 h 45)
Là, on tombe dans les avocasseries, du monde qui découvre,
six mois ou un an plus tard, qu'il y avait peut-être un vice de forme ou
quelque chose qui n'était pas clair. Là, il faut qu'il aille voir
un avocat et il dit: Oui, mais, M. le député, cela va
coûter trop cher, un avocat. Je n'ai pas le moyen de le payer. Oui, mais
allez à l'aide juridique. Et là, il apprend qu'il y a un billet
modérateur et qu'il gagne peut-être 1 000$ de trop par
année pour être éligible à l'aide juridique. Il va
retourner voir un avocat. Que va faire le locataire? Il va lâcher. Et la
loi du champion des locataires aura été une loi qui aura nui au
locataire.
Si c'est vrai que vous voulez défendre les locataires, pourquoi
ne pas avoir une annexe claire, simple, facilement accessible et à
contenu et à forme obligatoires, pour justement bien protéger les
locataires? Et pourquoi maintenir l'article 54.2, deuxième paragraphe?
Je ne comprends pas, si c'est cela votre intention?
M. Bourbeau: M. le Président, le député de
Gouin peut avoir son point de vue sur la question. Je lui signale qu'au moment
où l'avis sera envoyé, au tout début, une copie doit
obligatoirement être envoyée à la Régie du logement.
Alors, la Régie du logement va recevoir une copie de l'avis, dès
le début. Et s'il apparaissait, dans la phase initiale du processus, que
l'avis n'est pas conforme, la régie pourra signifier, dès ce
moment-là, au locataire que le processus est vicié et que l'avis
n'est pas conforme.
De toute façon, je ne vois pas, par expérience, en tout
cas, comment un propriétaire pourrait prendre le risque, étant
donné les coûts énormes que comporte le processus de
conversion, en termes de rédaction de documents, en termes d'arpentage,
etc. Un propriétaire pourrait-il prendre le risque d'envoyer un avis qui
ne serait pas conforme ou serait déclaré, éventuellement,
non conforme, et de voir invalidé tout le processus.
Je suis convaincu, quant à moi, que les avocats dont vous parlez
vont conseiller à leurs clients d'y aller avec une grande
limpidité et comme, de toute façon, un document va être
disponible à la régie comme modèle pouvant être
suivi par les propriétaires, j'ai la forte certitude qu'on va suivre
cette formule-là, dans la majorité des cas. Si, jamais, il y a -
comme on le dit à l'article 54.2 - une modification ou un changement
mineur de forme, à ce moment-là, cela n'aurait pas pour effet
d'invalider un avis, pour la simple raison qu'il manque deux ou trois
virgules.
Maintenant, le député de Gouin vient d'abandonner ses
cartes de Noël, je présume qu'il va reprendre encore la parole. Il
peut bien dire ce qu'il veut, mais je pense que la façon qu'on propose
présentement est raisonnable et va certainement permettre de
régler les cas qui sont devant nous.
M. Rochefort: Alors, M. le Président, je réponds au
ministre en lui disant que j'essaierai de lui faire parvenir sa carte de
Noël avant le 25 décembre. Deuxièmement, quand le ministre
nous dit: La régie va recevoir copie de l'avis. J'aimerais qu'il nous
dise où, dans la loi, la régie pourra d'elle-même, à
partir d'une connaissance prima facie de l'avis, décider que cet avis
n'est pas conforme à la loi et l'invalider. Je voudrais qu'il nous dise
où, dans sa loi, la régie aura cette responsabilité et non
seulement ce pouvoir, mais cette obligation.
Troisièmement, M. le Président, je pense que le ministre
devrait nous écouter, parce que, lui, il nous prouve qu'il a de la
difficulté à faire deux choses en même temps. Je ne parle
pas seulement de conformité, je lui parle d'accessibilité, de
compréhension, de simplification pour le citoyen locataire qui va
recevoir l'avis. Je vais permettre au ministre, M. le Président, de
compléter ses consultations...
M. Bourbeau: Alors, M. le Président, j'écoutais les
remarques de quelqu'un, près de moi. Dans sa fonction de...
M. Rochefort: Je vais seulement terminer, M. le Président.
J'ai arrêté pour vous permettre de...
M. Bourbeau: Ah, bon!
M. Rochefort: ...faire une chose à la fois.
Mais, puisque vous avez arrêté de faire une deuxième
chose, je vais continuer la mienne pour que vous puissiez n'en faire qu'une
à la fois sans problème.
M. Bourbeau: SI M. le député veut continuer
à signer ses cartes de Noël, je n'ai pas d'objection.
M. Rochefort: Alors, M. le Président. Non, je comprends
que cela ferait votre affaire, d'ailleurs. Ce que je dis au ministre, c'est
qu'il n'y a pas seulement une question de conformité, il y a une
question d'accessibilité. La régie n'aura quand même pas un
mandat de vérifier si c'est en langage assez simple et assez clair.
De ce point de vue-là, je le répète: SI c'est vrai
et s'il est sincère, dans sa démarche, de vouloir fournir aux
locataires une protection blindée, pour reprendre ses propres propos, de
leur donner tous les instruments dont ils ont besoin pour bien se
protéger, pour bien faire face à la loi telle qu'elle sera, il
n'a aucune raison pour faire en sorte qu'on ne simplifie pas,
premièrement, son annexe et, deuxièmement, une fois
simplifiée - on s'aperçoit que c'est compliqué à
simplifier, le premier jet n'est pas simple - que nous nous assurions que ce
soit un contenu et une forme obligatoires, pour nous assurer justement que le
locataire qui, lui, n'a pas les services de contentieux, n'a pas de services
juridiques ni les moyens de s'en payer, ni un accès facile et simple,
sera bien protégé par le contenu de base lui-même et non
pas par une consultation répétée de juristes.
M. Bourbeau: M. le Président, en réponse au
député, je n'ai jamais dit que la régie devait...
M. Rochefort: Je n'ai pas dit cela, j'ai dit où
dites-vous... Même, quand vous dites: La régie pourrait, je vous
dis: mais en vertu de quoi, dans votre propre loi, la régie pourrait
prima facie quand elle reçoit un avis, dire: II n'est pas légal?
En vertu de quoi?
M. Bourbeau: Mais, M. le Président, le
député sait fort bien que la Régie du logement a...
M. Rochefort: Ne me dites pas: Je sais fort bien. Parlez-moi d'un
article.
M. Bourbeau: M. le député veut entendre la
réponse ou il ne veut pas l'entendre.
M. Rochefort: Oui, mais on fait des lois.
M. Bourbeau: Bon, si le député veut entendre la
réponse, qu'il me laisse le droit de parole sans quoi, M. le
Président, on passera à autre chose. Alors, j'ai dit au
député que, dans la loi sur la Régie du logement, il est
Indiqué que la régie a des fonctions d'information, elle peut
agir comme conciliateur, elle peut informer les locataires. Donc, si le
régisseur, prenant connaissance de l'avis, se rend compte que l'avis
n'est pas conforme, le régisseur ou la personne, ce n'est
peut-être pas un régisseur, mais la personne qui est à la
régie qui reçoit ces documents-là peut fort bien utiliser
son pouvoir d'information pour informer les parties. D'ailleurs, dans le projet
de loi, il est dit également que le locataire qui désire plus
d'information pourra communiquer avec la régie, alors, le locataire qui
reçoit l'avis communiquera probablement avec la régie pour avoir
des renseignements et la régie pourra l'informer du problème que
vient susciter la réception de l'avis. Je ne dis pas que cela va se
passer de cette façon dans tous les cas, je dis que c'est une
possibilité.
M. Rochefort: M. le Président, je reviens. Le ministre a
nuancé largement ses propos. Il dit: C'est une possibilité. Je
lui demande en vertu de quoi la régie pourrait faire cela
d'elle-même, derechef. Il me dit que c'est en vertu de son pouvoir
d'information et de conciliation dans le domaine des relations
locateur-locataire. Je dis non, ce n'est pas vrai, ce n'est pas à partir
de cela qu'un régisseur ou un fonctionnaire de la régie appellera
un propriétaire et dira: M. le propriétaire, vous venez de
commettre un avis d'intention de convertir qui n'est pas légal, qui
n'est pas conforme à nos lois et il faut le réviser. Sa
réponse, c'est: Le locataire pourra toujours consulter ou se
référer à la régie, mais j'ai dit: En vertu de
quoi? Je veux simplement montrer que c'est une situation qui n'a pas de bon
sens. Quand il nous dit que la régie le fera d'elle-même, je pense
qu'on n'aura pas besoin de demander à la régie de le faire
d'elle-même à partir du moment où on aura une annexe qui
sera simple, accessible et qui aura un contenu qui devra être
respecté dans sa forme et dans sa lettre.
M. Bourbeau: M. le Président, à l'article 54.2,
dont on parlait tantôt, on dit que la régie ne peut pas refuser
l'autorisation pour le motif que l'avis d'intention comporte un vice de forme,
mais a contrario, si la régie est d'avis qu'il y a un vice de fond, elle
doit refuser l'autorisation. À ce moment-là, si la régie
recevant l'avis se rend compte qu'il comporte un vice de fond, on en conclut,
cela s'infère du texte, qu'elle a
obligation de refuser l'autorisation et, à ce moment-là,
elle en avisera les parties.
M. Rochefort: M. le Président, je réagis en disant
ceci au ministre. Si la logique veut cela, puisqu'on fait des lois et non pas
de la logique, pourquoi ne pas écrire que la régie doit regarder
chaque avis et vérifier sa conformité avec la loi?
Deuxièmement, cela répond simplement à une partie de ce
à quoi je veux sensibiliser le ministre. Je suis revenu trois fois
là-dessus, j'y reviens une quatrième fois. Il n'y a pas qu'une
question de conformité juridique, il y a une question de formulation
accessible, simple pour les citoyens ordinaires et cela, la régie ne
pourra quand même pas aller au-delà de dire: Oui, c'est conforme
ou ce n'est pas conforme, c'est légal ou ce n'est pas légal.
C'est pour cela qu'il faut imposer un contenu simple, facilement accessible et
qui ne requière pas, pour le comprendre, la consultation d'un avocat
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai répondu à
cette question-là à deux ou trois reprises. C'est une question de
philosophie. Le député voudrait qu'on ait un contenu obligatoire,
la camisole de force pour tout le monde et la solution mur à mur sine
qua non. J'ai dit qu'il y avait des problèmes à procéder
de cette façon parce qu'il pourrait éventuellement y avoir
invalidation d'un processus pour des virgules qui manquent. Nous n'avons pas
choisi de retenir cette formule. Maintenant, c'est un choix de
gouvernement.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions?
M. Paré: Oui.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Shefford.
M. Paré: Simplement pour dire que, si j'ai amené
cet argument, ce n'est absolument pas par philosophie, je ne me prends pas pour
un philosophe, mais c'est par efficacité et par sécurité.
Ce n'est pas du tout la même chose. On sait à quel point les gens
font très peu affaire avec la Régie du logement,
premièrement, à cause des délais et, deuxièmement,
à cause de la complexité. Ils sont venus nous le dire en
commission parlementaire. Maintenant, on se retrouve avec une formule qui
pourra varier pour autant que le contenu sera conforme au modèle. Plus
le ministre donne des explications, plus cela m'inquiète. Il a
parlé à plusieurs reprises du danger de virgules mal
placées et de paragraphes mal disposés. C'est l'article qui est
là qui pourrait permettre cela et non pas ce qu'on demande. S'il y avait
une formule obligatoire, le danger des virgules mal placées, on
viendrait de l'éliminer, au moins dans la description et dans les normes
qui y apparaissent. C'est tout à fait le contraire.
Plus le ministre donne des explications, plus il m'inquiète parce
qu'en plus, il parle de formules personnalisées, des formules de
compagnies, des formules avec toutes sortes de dispositions où - je l'ai
écrit à mesure parce que cela m'inquiète beaucoup - il dit
que le propriétaire, pour autant qu'il sera conforme au modèle,
pourra utiliser ses propres termes, ses propres mots. Donc, chacun pourra dire
en ses mots comment il interprète ou comment il définit ses
obligations légales. On n'a qu'à se rappeler très
rapidement des formules de compagnies, des formules d'assurances, des gros
caractères et des petits caractères. Ce n'est pas parce qu'on va
mettre en petits caractères les droits des locataires qu'on ne sera pas
conforme au modèle. Mais on aura fait en sorte que ce soit complexe
à la lecture, difficilement accessible pour l'Interprétation et
en petits caractères pour qu'on ne le lise pas. On sera conforme, mais
on aura personnalisé. C'est la meilleure façon de diversifier et
de compliquer, et c'est ce qu'on veut éviter.
Il faut une loi simple pour permettre aux gens de l'utiliser et pour que
ce soit clair pour tout le monde. La meilleure façon pour que ce soit
clair, c'est que ce soit uniforme. Je ne demande pas que l'avis soit uniforme,
mais que des formules soient uniformes pour des gens qui auront à
appliquer une même loi à des personnes différentes,
à des groupes différents. C'est tout simplement une question de
simplification et non pas de philosophie. C'est assez compliqué comme
cela, toutes les fois qu'on fait quelque chose au gouvernement, là, on
aurait l'occasion d'amener quelque chose qui soit simple. Pourquoi n'en
profite-t-on pas? On semble déjà tellement convaincus - je ne
sais pas si c'est par expérience ou par inquiétude - que cela va
se produire que l'article 54.3 suit l'article 52 en disant que, si ce n'est pas
conforme, on ne refusera pas l'avis quand même, pour autant que cela
n'affectera pas le locataire. Mais, connaissant très bien la
complexité, combien de locataires, à la suite des
expériences passées et non pas des inquiétudes futures, se
rendront jusqu'à la régie, surtout si la formule est
compliquée? On sait combien c'est énervant. Les gens sont venus
nous le dire en commission, je suis allé en visiter et vous aussi,
probablement, entre autres, à Pointe Saint-Charles. On sait comment les
gens réagissent lorsqu'ils reçoivent une formule
d'éviction pour réparations majeures ou tout autre chose, je les
comprends: c'est la panique. Il y a des gens qui sont là depuis
longtemps et qui se font dire: Vous, vous êtes dehors, il faut que vous
partiez pour deux, six, huit mois ou même, il faut que vous partiez, tout
court, et on en a des cas. À Montréal, on se dit: Tant qu'ils
n'auront pas amené une dérogation, cela semble moins
inquiétant. Mais, pour le reste du Québec, quand la loi sera
adoptée... Cela se passe déjà ici, on en a la preuve, des
gens viennent nous voir.
Pourquoi, au moins, comme gouvernement, on ne les aiderait pas en
simplifiant? C'est simplement une demande qu'on fait. Je dis que,
là-dedans, on a l'occasion d'avoir une formule unique. Y a-t-il quelque
chose de plus simple? Ce n'est pas le bout du monde qu'on est en train de
demander. C'est même probablement une économie pour l'État.
SI on fait une formule, cela ne nous revient pas bien cher à imprimer,
je pense. Mais d'obliger les gens de la Régie du logement, comme vous
avez interprété le deuxième paragraphe de l'article 54.2,
à faire l'étude de toutes les formules qui pourraient arriver
à des milliers d'exemplaires différents, avec les paragraphes
placés dans l'ordre qu'on voudra bien, pour autant qu'on va respecter la
norme en nos mots, on vient rendre cela plus complexe pour les gens de la
régie et ensuite, les gens viendront dire que ce n'est pas efficace
à la régie. (16 heures)
Est-ce que ce ne sera pas justement à cause des décisions
qu'on est en train de prendre si c'est moins efficace, parce qu'ils vont
être "poignés" avec des formules différentes, dans des mots
différents, parce que chacun va pouvoir utiliser son papier, son
en-tête, ses caractères, ses propres mots et ses termes? C'est ce
que vous avez dit. Si c'est ce qu'on appelle de la simplification, moi, je dis:
A problèmes complexes, on est en train de se donner des formules
complexes.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre. Est-ce qu'il
y a d'autres interventions à l'article 52? Est-ce que l'article 52 est
adopté?
M. Bourbeau: Adopté.
Une voix: Adopté.
M. Paré: Oui, sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): Sur division. J'appelle
maintenant l'article 53 et j'attire l'attention des membres de la commission
sur le fait que nous avons un papillon.
Jouissance paisible des lieux en cours de
conversion
M. Bourbeau: M. le Président, avant de présenter le
papillon, j'aimerais donner une explication d'ordre général sur
l'article 53. C'est un article qui vise à assurer aux locataires la
jouissance paisible des lieux en cours de conversion et à empêcher
que l'initiative de travaux autres qu'urgents et nécessaires à la
conservation de l'immeuble soit laissée au propriétaire
convertisseur. On évite ainsi l'emballement des dépenses et
l'évacuation temporaire des locataires au cours du processus de
conversion. On favorise ainsi le locataire qui désire acheter son
logement, le prix de vente demeurant sans doute plus abordable en l'absence de
travaux d'amélioration et de répara- tions dont l'utilité
n'est pas immédiate. Le locataire qui continuera d'occuper les lieux
à ce titre, dis-je, sera également favorisé par cette
mesure qui limitera les augmentations de loyer. En effet, la présence
d'une majorité de copropriétaires occupants devrait éviter
qu'on effectue des améliorations somptuaires étant donné
qu'ils participent au coût de ces améliorations. Il est toutefois
nécessaire de laisser à la régie le soin d'accorder la
permission d'effectuer des travaux dont l'utilité immédiate est
démontrée. Dans les cas d'évacuation temporaire, la
régie appliquera les règles prévues à l'article
1653 du Code civil, que nous modifions également pour prévoir une
indemnité aux locataires.
M. le Président, comme vous le disiez, je voudrais
présenter une modification à l'article 2 introduisant l'article
53 de la Loi sur la Régie du logement. "Remplacer, à la fin du
dernier alinéa, les mots "elle lui accorde une indemnité payable
à la date d'évacuation" par les suivants "elle fixe une
indemnité payable par le locateur à la date
d'évacuation".
Vous aurez compris, M. le Président, que cette modification
technique est nécessaire pour clarifier le texte et indiquer que
l'indemnité est payable par le locateur.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre.
Est-ce qu'il y a des interventions sur le papillon? Est-ce que l'amendement est
adopté?
M. Paré: Un instant. Non, cela va aller pour le
papillon.
Le Président (M. Saint-Roch): Alors, est-ce que
l'amendement est adopté?
M. Paré: Non, là, j'ai quelques petits
commentaires.
Le Président (M. Saint-Roch): Sur l'amendement?
L'amendement est adopté?
M. Paré: Oui, d'accord pour l'amendement.
Le Président (M. Saint-Roch): Nous revenons à
l'article 53. M. le député de Shefford.
M. Paré: Oui, l'article 53 est un autre point majeur qui a
été discuté par bien des gens en commission et je pense
que c'est important d'en discuter encore une fois. C'est beau de parler de
protection des locataires et de dire que, finalement, il ne se fera plus de
rénovation, sauf que vous allez bien reconnaître qu'on peut bien
dire, dans le discours, qu'on va arrêter de faire des transformations
majeures et qu'on va protéger davantage le locataire avec le droit de
préemption et le droit de premier acheteur, et tout cela, mais
là, on dit qu'ils n'auront pas le droit de faire des travaux n'importe
quand, et on ne parle pas, par exemple... On parle de l'utilité
des
travaux là-dedans, de la possibilité de les faire. Vous
allez admettre qu'on le permet avant l'avis. Donc, le message est lancé
pour les gens qui le veulent. Les travaux, on les fait avant d'envoyer l'avis.
Donc, des travaux, il va s'en faire encore. Oui, il va s'en faire encore. Mais
vous allez me dire: La loi dit que ce sont des travaux qui ont
été effectués avant... dans le but de..., sauf que ce sera
approuvé.
Connaissant le peu de gens qui vont à la Régie du
logement, ne sachant même pas, au moment où on se parle, les
dérogations des villes de la Communauté urbaine de
Montréal ou la réglementation des autres villes à
l'extérieur de la Communauté urbaine de Montréal, il va
s'en faire et quand les locataires seront partis - parce qu'on sait qu'il n'y
en a même pas 4 ou S % qui reviennent une fois qu'ils ont
été évincés pour des travaux majeurs et rien nous
dit que cela va changer - donc que des travaux soient faits quand on sait que
je demandais justement, si je me rappelle bien dans un article
précédent, qu'il y ait enregistrement des baux... Ce qu'on
refuse. Il n'y a pas enregistrement des baux, vous le disiez vous-même ce
matin lors d'une discussion sur un autre article. Comment pourrait-on savoir si
les travaux ont été effectués? Quand je vous disais qu'on
devrait empêcher la conversion dans les immeubles privés
rénovés grâce à des subventions gouvernementales,
c'était impensable, c'était aberrant, c'était
inapplicable. Comment pouvait-on savoir qu'un tel avait profité de tel
programme? I! y a certainement des chiffres gouvernementaux; habituellement, on
a des listes des montants qu'on donne. Mais, cela semblait tout à fait
incontrôlable, inapplicable, non fonctionnel. Maintenant, on dit que les
travaux vont être faisables avant. On n'est pas inquiets parce que
là on aurait probablement un contrôle là-dessus, même
si les gens sont déménagés.
Donc, on va permettre que cela se fasse déjà, avant que
l'avis soit envoyé, et cela sera permis aussi quand on aura
déjà une majorité de propriétaires
résidents, en place. Donc, il s'en fera aussi. Mais ce que cela veut
dire en soi: il va s'en faire. Avec des articles comme cela, n'ayons pas peur,
il va s'en faire encore de la rénovation et les gens, avant d'envoyer
l'avis, pourront entreprendre les travaux. Et cela, là-dessus, ce n'est
pas bien contestable. C'est une chose.
Ensuite, quand on enverra l'avis, on entreprendra la démarche
pour obtenir l'autorisation et tout cela et on vendra ensuite. On vendra et
quand il y aura une majorité, à ce moment-là, on
entreprendra des travaux. De toute façon, même si les travaux
majeurs dans les parties communes ne sont pas entrepris, ceux qui seront
déjà propriétaires résidents pourront entreprendre
des travaux dans leur logement.
C'est donc un peu toute la complexité et l'inquiétude qui
était soulevée en commission parlementaire, de la présence
d'une multitude de situations en tant que locataires, locateurs,
propriétaires occupants. On s'en vient donc avec une diversité en
termes de résidents dans le même bloc. Mais on sait, au
départ, que dès qu'il y a vente, dès que cela commence,
les unités deviennent, en ce qui concerne la fiscalité
municipale, des entités en soi. Donc, une première augmentation
est amenée. Il y a déjà une première augmentation
à ce chapitre, les frais de conversion et de rénovation qui sont
permis pour les gens déjà en place. Quand ils sont en
majorité, là c'est permis partout. Cela veut dire des
augmentations considérables. On sait ce qui va arriver au locataire qui,
déjà, consacre un montant important, un pourcentage important de
ses revenus pour se loger. Donc, des rénovations vont continuer et on
sait ce que cela va avoir comme effet: exactement ce qu'on a
dénoncé en commission parlementaire. Les rénovations, les
transformations, ce que cela amène comme augmentation du logement, cela
veut dire transformation et départ des locataires. Finalement, l'article
qui est là ne vient pas empêcher les rénovations. Il y a
des gens qui ont utilisé cela en disant que cela vient les civiliser,
cela vient peut-être même les légaliser d'une certaine
façon, étant donné qu'on vient de donner un ordre de
présentation. On vient de dire: quand on peut le faire sans danger, sans
problème et on ne l'interdit pas, mais on est en train de le
légaliser ou l'expliquer d'une certaine façon. Mais là on
ne se donne pas le droit... La régie est habilitée à
donner son autorisation sur les travaux majeurs et urgents. Sauf que, comme on
ne peut pas contester la nature... Ça c'est encore permis, sur les
travaux on peut y aller sauf si... Urgents, on peut y aller n'importe quand
mais comme on ne peut pas contester la nature, bien des travaux peuvent
être considérés comme urgents.
À ce moment-là on n'apporte pas de définition ici
en termes de travaux majeurs, de travaux urgents. Sur le terrain, on sait ce
que ça veut dire. Ce qui se fait présentement, dans la
majorité des cas, ce ne sont pas des travaux urgents, ce ne sont pas des
travaux majeurs. Des travaux majeurs, quand il n'y a pas d'eau et pas
d'électricité, les locataires ne sont pas fous, ils les demandent
et ce sont eux qui crient. Avec les saisons qu'on connaît au
Québec, on n'a pas le choix de se chauffer. Ça nous prend des
moyens. Mais, les travaux qu'on effectue présentement,
réellement, ce ne sont pas des travaux urgents, ce sont des travaux
qu'on pourrait bien plus qualifier de travaux de modernisation. On en profite
pour changer les tuyaux, mais on change quoi, finalement? On enlève le
prélart pour mettre de la marqueterie, on change la grandeur des
fenêtres, ou bien donc, - et ça c'est courant - on change les
armoires pour en mettre en mélamine. On peut bien dire que c'est plus
beau, sauf que c'est ça qui est considéré comme des
travaux majeurs présentement. On utilise ça.
Selon votre idée, M. le ministre, par le fait qu'au lieu de faire
des travaux majeurs, urgents et nécessaires on fasse de la
modernisation, ne vient-on pas de briser, finalement, un contrat qui s'appelle
un bail, parce qu'on vient de changer la nature de l'entente initiale? Une
personne qui est dans un logement et qui n'a pas les moyens de payer plus de
250 $ à 300 $ dans un quartier central de Montréal ou de
Québec, qui consacre 40 % de ses revenus pour un logement avec des
petites portes d'armoire en languettes de contre-plaqué, un plancher
recouvert de linoléum, c'est loin d'être chic mais au moins c'est
chauffé, c'est éclairé, il y a l'eau courante et il y a
l'eau chaude, c'est central et la personne a décidé d'aller vivre
là moyennant 250 $ à 300 $ de loyer... Elle a signé un
contrat, un bail. Elle acceptait les conditions qui lui étaient offertes
pour le montant qu'elle paie d'une façon mensuelle. C'est un contrat.
C'est un bail. Il faut que ce soit respecté, à mon avis, de la
part des deux parties. Donc, le locataire a à faire son paiement
mensuel. Le proprétaire a à s'assurer que le locataire a l'usage
paisible des lieux. Donc, c'est ainsi que ça devrait fonctionner
normalement.
Si, en cours de route, avant l'avis ou même après, quand on
vient faire accroire que ce sont des travaux urgents ou majeurs, on vient
changer la nature de l'appartement, cela deviendra un appartement que jamais le
locataire en place actuellement n'aurait loué s'il avait
été dans la situation où va se retrouver l'appartement
après les rénovations, la restauration. Est-ce qu'on ne vient pas
briser une entente en cours d'année, changer la nature du bail,
étant donné que le logement loué par l'individu est
transformé complètement? Ce n'est plus le même. Donc, en
n'étant plus le même, ça veut dire que le bail n'est pas
respecté. Est-ce que nous devons accepter des choses comme
ça?
Je vais y revenir un peu plus loin, parce que ça touche aussi la
nature des travaux. Les travaux maintenant, au-delà de la nature
présentement, on a le droit d'en faire et l'article 53 ne vient pas dire
qu'on empêche ça. Ça vient dire dans quel ordre, à
quel moment on peut les faire. Donc, on peut en faire encore avant l'avis. On
peut en faire après l'avis si on dit que ce sont des travaux urgents,
nécessaires et qu'en plus on les fait dans toute la bâtisse
dès qu'il y a une majorité de propriétaires
résidents. À ce moment-là, c'est la transformation qui
arrive. C'est là que ça va briser tout ce que vous vouliez dire
dans vos beaux principes de départ de maintien du stock de logements
locatifs parce qu'à ce moment-là, c'est une transformation qui
s'effectue. Donc c'est au détriment du stock de logements locatifs et
c'est au détriment des locataires en place. C'est évident - et
ça ce n'est pas contesté par personne - qu'il va y avoir une
augmentation des loyers. C'est automatique. Ça ne peut pas faire
autrement dès qu'il y a conversion à cause, entre autres, de
l'évalua- tion foncière qui amène une augmentation des
taxes. L'augmentation des taxes se répercute immédiatement sur le
loyer mensuel. C'est déjà une première. Vous savez que les
frais de transformation en copropriété sont des frais
légaux, mais ce sont des frais qui sont amenés aussi, qui se
répercutent déjà sur l'ensemble des locataires. (16 h
15)
Quand il y aura une majorité ce copropriétaires,
même si on dit: maintien illimité dans les lieux, dès
qu'une majorité décidera d'entreprendre des travaux majeurs
à l'intérieur de l'ensemble de la bâtisse, bien là,
ce sera l'expulsion pour permettre de rénover l'ensemble de la
bâtisse. Donc, je pense que les craintes qui étaient
apportées à la commission parlementaire au-delà du
discours, les mêmes craintes sont maintenues. Quand on regarde la
différence entre "La levée du moratoire, une décision qui
s'impose" et les modifications qui sont apportées par la loi 87, oui, il
y a quelques améliorations, mais cela ne vient pas enlever les dangers
qui sont énormes.
Je dois vous dire, pour avoir rencontré dernièrement des
groupes de locataires dans Montréal, soit la semaine passée,
après une étude plus approfondie, les gens ne voient vraiment pas
que les avantages soient bien importants au point de dire que... Un exemple que
je pourrais vous donner, les gens avaient peur de se faire tuer. Finalement, on
leur dit: On vous a coupé juste les deux jambes. Vous pouvez encore vous
promener en chaise roulante. C'est un peu cela qui arrive. Pour les locataires,
on vient leur donner un peu d'espoir, leur dire que cela va se faire d'une
façon un peu plus civilisée, un peu plus lente, qu'il va y avoir
des recours avec les articles comme l'article 53 en disant: N'ayez pas peur.
C'est comme s'il n'était plus pour y avoir de rénovations ou
d'améliorations, de restaurations. Ce n'est absolument pas ce que dit
l'article ici. Cela dit qu'il va y en avoir encore et on indique même aux
gens de quelle façon il sera possible d'en effectuer. Quand cela sera
fait, on se ramassera avec des locataires évincés qui devront
quitter et, connaissant en termes de pourcentage l'utilisation faite par les
locataires des services de la Régie du logement, il n'y a rien qui dit
qu'on va les utiliser plus. Après l'étude qu'on vient de faire de
l'article 52, où on n'amène pas une simplification des formules,
cela n'incitera pas les gens à les utiliser davantage. Même si la
régie a un pouvoir et, suite à lavis, pourrait intervenir d'une
façon plus importante à condition qu'elle soit
sensibilisée, il n'y a rien qui nous dit que les gens vont l'utiliser
davantage. On pourrait peut-être même dire: au contraire. Quand un
projet de loi donne au départ la permission de lever le moratoire, pour
les gens, c'est comme s'il y avait moins de protection. Je ne pense pas que ce
soit le genre de geste ou de décision qui amène une
simplification et qui empêche les travaux. En n'empêchant pas
les
travaux, cela veut dire que la conversion va se faire quand même
parce que, finalement, les gens vont quitter parce qu'il va se faire des
travaux. Rien n'est changé dans les inquiétudes qui ont
été apportées à la commission parlementaire au
mois d'août à Montréal et ici à Québec. C'est
pour cela que si c'est vrai qu'à compter de l'avis d'intention et
jusqu'à ce que l'assemblée des copropriétaires soit
majoritairement formée de copropriétaires occupants, les seuls
travaux qui peuvent être effectués sans l'autorisation sont des
travaux urgents et nécessaires, on peut le dire. Mais cela va être
comme avant parce que c'était cela qui se passait. On disait qu'il ne
fallait pas faire de travaux et expulser des gens pour rien parce que la
transformation en copropriété était défendue, mais
cela se faisait quand même. À mon avis, cela va se faire quand
même, mais en plus, on vient de donner... Je pose une question: Est-ce
que vous reconnaissez que, finalement, avant l'avis, cela peut se faire? Les
gens n'ont qu'à ne pas se presser pour envoyer l'avis. Cela va se
faire de toute façon. Juste le fait maintenant qu'on le permette
lorsqu'il va y avoir une majorité, cela amène déjà
des augmentations de coûts pour les locataires, et ceux qui arrivaient
à peine à payer leur logement ne le pourront plus. Donc, on
pourrait leur tenir n'importe quel beau discours et essayer de leur faire
accroire que, finalement, ils ont un maintien dans les lieux, les travaux vont
se faire quand même et il n'y aura pas de maintien parce qu'il va y avoir
augmentation des coûts du loyer.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, le député de
Shefford pose une question fondamentale, à savoir: Est-ce que, oui ou
non, on devrait permettre à des propriétaires de faire des
travaux dans leur immeuble? C'est à peu près la question qu'il
pose. Quand il dit: Est-ce qu'il va se faire des travaux avant l'avis de
conversion? Je prétends que tous les immeubles qui sont
présentement construits au Québec, sont tous dans cette
situation-là. Je suis en train de dire au député de
Shefford que tous les Immeubles au Québec, sans exception, vont
être dans la situation d'immeubles avant l'avis de conversion. Le
député reconnaît cela que, tant qu'il n'y a pas d'avis
d'envoyés, tous les immeubles sont dans cette situation.
Donc, si je comprends le sens de la question du député, il
ne voudrait pas que des travaux d'amélioration ou de réparations
soient faits dans des immeubles, parce que, un jour ou l'autre,
peut-être, le propriétaire décidera d'envoyer un avis de
conversion. À ce moment-là, on va se retrouver exactement comme
dans certains pays, entre autres l'Angleterre, qui est un exemple typique,
où l'on a fait tellement de problèmes aux propriétaires,
on a tellement mis de réglementations que, pendant 50 ans, on a
pratiquement empêché le stock locatif d'être
restauré, d'être amélioré.
Aujourd'hui, on se retrouve avec une situation extrêmement
pénible où il devient tellement difficile, tellement
onéreux de restaurer des immeubles, que l'État
préfère donner les HLM aux propriétaires. Cela coûte
moins cher de les donner que de les réparer. Et, les locataires,
à qui on offre de donner ces HLM, se retrouvent avec des logements
désuets, non salubres dont ils n'ont pas les moyens, de toute
façon, de payer les réparations.
Moi, je pense que s'il y a une erreur qu'une société peut
faire, c'est d'inciter les propriétaires à ne pas réparer,
à ne pas restaurer les immeubles. Il ne faut pas tomber dans ce
panneau-là. Et, nous n'avons pas voulu aller jusqu'à, par
exemple, donner à la régie, le pouvoir de statuer sur
l'opportunité de faire les travaux. Cela, c'est une
responsabilité, un droit qui appartient au propriétaire. Je ne
crois pas qu'il soit opportun d'interdire à un propriétaire de
faire des travaux ou de lui dire quels travaux faire à son immeuble.
Évidemment, tous les immeubles peuvent être
restaurés et ils sont toujours dans la situation "d'avant un avis
d'intention". Maintenant, je signale au député que si un
propriétaire fait des travaux, avant d'envoyer un avis et que,
subséquemment, après avoir fait ces travaux, il décide
d'envoyer un avis, il va être confronté à l'article 54.2,
qui dit que la régie doit - pas, peut...mais, doit - refuser
l'autorisation de convertir, lorsque l'immeuble a déjà fait
l'objet de travaux, en vue de le préparer à la conversion et
d'évincer un locataire ou, lorsqu'un logement a déjà fait
l'objet d'une reprise de possession illégale, dans ces cas, une nouvelle
demande ne peut être produite qu'après un délai de trois
ans du refus.
C'est une pénalité importante, parce que le
propriétaire qui décide de faire des travaux dans le but,
justement, d'évincer des locataires et, donc de convertir, va se frapper
à la régie, à un refus de conversion et là, il va
être obligé de relouer ses logements à d'autres locataires.
A ce moment-là, il va être pris, au moment où il voudra
convertir, avec d'autres locataires qui auront aussi le droit au maintien dans
les lieux. Donc, cela aura été totalement inutile de faire tous
ces frais et toutes ces dépenses de conversion, dans le but
d'évincer des locataires, puisqu'il sera pris avec d'autres locataires
qui auront aussi le droit au maintien dans les lieux.
Je pense que cet article va, à toutes fins utiles,
décourager le propriétaire qui voudrait utiliser les travaux
majeurs comme un truc ou une "gimmick", pour employer l'expression, visant
à convertir son immeuble. Dans ce sens-là, je pense qu'on bloque,
effectivement, le trou qui existe dans la législation et qui permet
à un propriétaire de convertir son immeuble en
évinçant les locataires. Il n'aura plus d'intérêt,
dorénavant, à évincer les locataires pour obtenir
le droit de convertir. Plus aucun intérêt
pécuniaire, certainement pas. Cela va même être ruineux
d'utiliser ce truc-là.
Maintenant, un propriétaire pourra toujours faire des travaux.
C'est bien évident et j'espère que le député de
Shefford ne s'oppose pas à ce que le stock locatif
québécois soit constamment amélioré. Maintenant,
à la fin et un jour, lorsque les copropriétaires seront
majoritaires dans un immeuble converti, bien, évidemment, on ne pourra
pas indéfiniment interdire des réparations majeures, non plus,
parce que, à ce moment-là, le propriétaire ne
contrôlera plus l'Immeuble. On ne peut pas présumer qu'il va
utiliser le truc des réparations majeures pour évincer les
locataires, puisqu'il n'a plus de contrôle sur l'immeuble, comme tel,
l'ayant perdu.
Alors, je pense que ce que nous proposons est une façon
raisonnable et efficace de contrer les problèmes qu'a
évoqués le député. Je signale au
député qu'il n'y a absolument rien de changé avec la
situation actuelle, dans ce régime instauré par son gouvernement.
Les gens font des travaux, ils en font parfois en abusant des locataires, en
les intimidant, en les harcelant à quelques reprises, on le voit, et ce
harcèlement-là actuellement, la régie et les locataires
sont bien mal pris pour tenter de le combattre. Dans la situation actuelle, les
propriétaires peuvent évincer des locataires pour des travaux
majeurs sans avoir à donner autre chose qu'un préavis de 30
jours, ce qui est très peu avec un fardeau de la preuve, fardeau de la
démarche qui se fait sur le dos du locataire. Tout cela se fait
présentement et on réussit quand même à convertir.
Le député admettra que la situation qui va prévaloir
après l'adoption d'une loi en 1987 sur une situation nettement
améliorée en faveur des locataires. Je ne sais pas à quel
groupe de locataires il parle, mais ceux à qui on parle se
déclarent très satisfaits du projet de loi.
M. le Président, cela dit et en admettant que rien n'est parfait
en ce bas monde et qu'on peut toujours imaginer des situations catastrophiques,
théoriques où, dans certains cas particuliers, il pourrait
arriver que quelqu'un réussisse à faire un abus. Je ne nie pas
que ce soit possible, mais le député conviendra, en tout cas, que
ce que nous avons devant nous est un projet de loi qui améliore d'une
façon importante la situation des locataires et qui permettra
éventuellement l'accession de la propriété à
certains locataires sans pour autant brimer le droit des autres au maintien
dans les lieux.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions? M. le député de Shefford.
M. Paré: Je ne puis pas être d'accord avec la
conclusion que vous venez d'apporter M. le ministre. En disant que cela va
favoriser l'accès de la propriété à certains
locataires, sans brimer les autres, cela ne peut pas être sans brimer les
autres. Juste quelques petits points pour vous montrer comment on aurait pu
aller plus loin, si on avait vraiment voulu protéger les locataires.
Premièrement, vous allez admettre que les coûts de modernisation -
parce que c'est ce qui se produit quand on transforme en
copropriété - sont beaucoup plus élevés que les
coûts de remise en état quand c'est pour des travaux majeurs. On
ne se contente pas de changer les tuyaux, on change tout et cela coûte
bien plus cher. Cela sera permis, parce qu'on ne permet pas ici aux locataires
de pouvoir contester la nature des travaux. Donc, les véritables travaux
qui s'effectuent depuis quelque temps et qui, à mon avis, vont se faire
d'une façon encore plus importante, ce ne sont pas des travaux de remise
en état, ce sont des travaux de modernisation et spécialement
dans un édifice où l'avis sera envoyé, où
l'intention est manifestée. Ce qu'on veut faire finalement, c'est une
transformation en copropriété. C'est évident que ceux qui
vont acheter et qui vont vouloir faire des travaux, ce sera des travaux de
modernisation dans le but de vendre et non pas de ramener de la
salubrité ou de la sécurité là où c'est
nécessaire. Quand vous dites qu'il ne faudrait pas aller plus loin que
le reste du monde et qu'il faudrait faire attention, Montréal, c'est
quand même au Québec, même si on veut la traiter de
façon différente dans le projet de loi, Montréal, si je ne
me trompe pas, a son code du bâtiment. Montréal accepte de donner
une aide à un propriétaire d'édifice dans ses programmes
de rénovation, si c'est bien spécifié que c'est seulement
pour la remise en état.
Montréal est capable d'appliquer quelque chose d'aussi
fondamental, d'aussi important alors que c'est là que se passe le plus
gros des transformations et que se retrouve la plus grande population du
Québec. Selon le code du bâtiment, quand on fait de la
rénovation, il faut que ce soit seulement pour des rénovations
qui sont reliées à de la remise en état. Cela porte sur la
nature des travaux. On peut le faire à Montréal mais, on ne peut
pas le faire nous, à l'échelle du Québec alors qu'il y a
un code du bâtiment à Montréal. Pourquoi n'est-on pas
capable de se donner un code du bâtiment pour être capable de faire
une différence entre ce que sont des travaux de remise en état et
des travaux de modernisation? Comment peut-on penser que changer des armoires,
ce sont des travaux urgents? il ne faut quand même pas prendre les gens
pour des nouilles, ce n'est pas cela qui se passe. Les gens sont bien
conscients que quand on transforme, et surtout, pour être capable de
tranformer en copropriété, on ajoutera une valeur en plus, une
valeur en plus veut dire une augmentation considérable qui coûtera
cher pour les travaux. Cela veut dire que ce sera une augmentation
considérable pour les locataires. Que les locataires ne se laissent pas
leurrer par cela. C'est évident qu'ils vont devoir partir s'ils ont
déjà des des difficultés à payer leur loyer,
c'est automatique. On tiendra les discours qu'on veut, avec des articles
comme cela, on va se retrouver avec le départ des locataires.
M. Bourbeau: M. le Président, encore là j'ai de la
difficulté à suivre le député de Shefford. Il est
bien évident que Montréal ne peut pas empêcher les travaux
de modernisation. Je ne sais pas où le député de Shefford
prend cela. Il n'y a aucune municipalité qui peut obliger un
propriétaire à ne pas faire certaines choses. Si le
propriétaire décide que, dans ses travaux, il va plus loin qu'une
remise en état minimale et qu'il décide de faire des travaux de
modernisation, le propriétaire peut faire ce qu'il veut. Le
député, je présume, veut dire que Montréal ne
subventionne pas autre chose que la remise en état. Nous ne faisons pas
non plus autre chose au gouvernement du Québec. Que le
député ne s'imagine pas que le PARCQ, par exemple, va
subventionner les armoires de cuisine. Nous venons en aide uniquement pour les
travaux de base, de la même façon que la ville de Montréal.
Dans ces conditions, que le député ne dise pas que c'est le
gouvernement qui incite ou finance les propriétaires à en faire
plus que ce qui est subventionné. Le député ne semble pas
avoir compris l'économie générale de la loi. Je lui
répète qu'un propriétaire, qui voudrait faire des travaux
majeurs qui iraient dans le sens d'ajouter beaucoup de luxe au logement, va
devoir, probablement, s'il veut aller dans des travaux compliqués,
procéder à une évacuation des locataires. Or, le
député dit que le propriétaire va le faire dans le but de
convertir. C'est justement là que cela ne passera pas. Cela va bloquer
à la régie. La régie va faire l'enquête, elle va
s'informer auprès des locataires. Elle va obtenir les renseignements.
C'est un tribunal qui peut convoquer des parties, qui peut envoyer des
subpoenas et qui va faire la preuve que justement le propriétaire a
procédé comme le dit le député. Le
propriétaire va frapper un mur de béton. Il va avoir fait tout
cela pour rien. Comme ce sont des gens d'affaires, ils vont savoir d'avance
qu'ils vont faire cela pour rien. C'est pour cela qu'on interdit les travaux
pendant la conversion. C'est justement pour faire ce que le
député nous dit: pour que le locataire qui pourrait possiblement
devenir propriétaire ne se retrouve pas devant des dépenses
importantes. Il va être interdit de faire des travaux majeurs pendant le
processus de conversion. Alors, le locataire, s'il demeure locataire, n'aura
pas d'augmentation de loyer Importante, puisqu'il n'y aura pas de travaux
importants. S'il y a des travaux, ce sont des travaux qui auraient
été faits de toute façon, parce qu'ils étaient
urgents ou encore des travaux d'entretien. Tout cela se serait fait de toute
façon. Il n'y en aura pas de travaux majeurs pendant le processus de
conversion pour s'assurer que le locataire ne se verra pas frappé par
des augmentations de loyer ou encore, s'il veut devenir un locataire acheteur,
qu'il ne soit pas confronté à des augmentations de coût
d'achat qui rendraient le logement hors de la portée de ses moyens
financiers. Nous recherchons exactement cet objectif de permettre à des
locataires, à moyens faibles ou à moyens financiers peu
importants, d'accéder à la propriété parce que les
logements ne seraient pas trop chers. C'est l'objectif que nous recherchons, le
député ne peut pas nous en blâmer. Nous recherchons le
même objectif que lui et c'est ce que nous allons atteindre avec le
processus qui est là.
M. Paré: On s'entend sur les objectifs, sauf que je suis
convaincu qu'on n'arrivera pas aux résultats que vous escomptez. C'est
cela qu'on essaie de faire corriger pour essayer d'amener des moyens qui vont
nous permettre d'atteindre les objectifs. Je vous dis qu'avec la loi qu'on a
là, on ne réussira pas et cela va se faire au détriment
des plus démunis. En commission parlementaire, à cela, vous vous
rappellerez quels étaient les tableaux amenés par ceux qui
étaient les plus favorables à la levée du moratoire. C'est
que finalement un loyer de 350 $ passe automatiquement à 500 $ pour
être capable d'accéder à la propriété. On
sait très bien que c'est la majorité des gens qui ne pourront pas
et qui ne pourront donc même pas absorber l'augmentation de leur loyer
à la suite des transformations, ils vont devoir
déménager.
Le Président (M. Saint-Roch): La commission suspend ses
travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 35) (Reprise à 16 h
37)
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions à l'article 53?
M. Paré: Non.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'article 53 tel
qu'amendé est adopté?
M. Bourbeau: Adopté.
M. Paré: Sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): Sur division. J'appelle
l'article 54.
Conditions du droit au maintien dans les lieux
M. Bourbeau: Alors, cet article établit le droit au
maintien dans les lieux pour une période illimitée qu'aura le
locataire dont l'immeuble est converti en copropriété.
Il est important que le propriétaire ne puisse plus reprendre
possession d'un logement dès que l'avis d'intention est donné,
puisque le
processus de conversion peut se dérouler sur plus d'une
année. Le locataire doit être protégé durant toute
cette période. Le Code civil définit le locataire comme
étant celui qui détient les droits et les obligations du bail
vis-à-vis du propriétaire. Ainsi, un sous-locataire n'aura pas le
droit au maintien dans les lieux pour une période illimitée,
puisqu'il ne détient pas les droits et les obligations du bail. Par
ailleurs, le conjoint du locataire ou, s'il habite avec lui depuis au moins six
mois, un parent, un allié ou son concubin qui acquiert envers le
locateur les droits et obligations résultant du bail, tel qu'il est
prévu à l'article 1657.2 du Code civil, aura droit au maintien
dans les lieux pour une période illimitée. Il en va de même
pour la personne qui occupe les lieux lors du décès du locataire,
si elle acquiert envers le locateur les droits et les obligations du bail tels
que prévus à l'article 1657.3 du Code civil.
Deux exceptions au droit au maintien dans les lieux sont par ailleurs
prévues. Premièrement, le cessionnaire d'un bail après
l'avis d'intention. Afin d'éviter qu'un locataire qui a droit au
maintien dans les lieux pour une période illimitée cède ou
vende ce privilège en cédant son bail, il est prévu que le
cessionnaire du bail n'ait pas droit au maintien dans les lieux pour une
période illimitée si la cession a lieu après l'avis
d'intention de convertir. Il faut se rappeler que le locateur ne peut refuser
la cession d'un bail sans motif valable.
Deuxièmement, le nouveau locataire. Le nouveau locataire qui
entre dans l'immeuble après l'autorisation de convertir n'acquiert pas
le droit au maintien dans les lieux pour une période illimitée.
Ce privilège est réservé au locataire en place entre
l'avis d'intention et l'autorisation de convertir en copropriété
donnée par la régie. Le nouveau locataire saura qu'il loue un
logement converti en copropriété. Il bénéficiera de
la protection qui existe actuellement, soit le renouvellement du bail, fixation
de loyer, etc., mais saura que son logement pourra faire l'objet de reprise de
possession. À cet égard, il sera sur le même pied que le
locataire d'un duplex avec propriétaire unique.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a des
interventions?
M. Paré: Oui.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Shefford.
M. Paré: On dit à 54: "À compter de l'avis
d'intention, le droit à la reprise de possession d'un logement ne peut
être exercé à rencontre d'un locataire, etc." À
compter de l'avis d'intention, cela veut dire - comme je le disais tantôt
pour les travaux majeurs ou rénovations - que ça peut se faire
avant. Vous allez me dire que c'est comme la situation actuelle. Je suis d'ac-
cord, sauf que ce qu'on essaie de faire, c'est de donner plus de pouvoirs -
comme on le dit - au locataire. Quel est le recours qu'aura le locataire s'il y
a une reprise de possession qui s'effectue avant, avant l'avis?
M. Bourbeau: Avant?
M. Paré: Avant l'avis d'intention, il n'a aucun
recours?
M. Bourbeau: Si un locataire reçoit un avis de reprise de
possession avant l'avis d'intention...
M. Paré: Oui.
M. Bourbeau: ...c'est le système actuel qui
prévaut. S'il s'agit d'un propriétaire unique, il a droit de
reprendre un logement pour lui-même dans quelque immeuble que ce soit.
Que ce soit dans un immeuble de moins de quatre logements ou de plus de cinq
logements, un propriétaire unique a toujours le droit de reprendre
possession pour lui-même partout en vertu de la loi actuelle.
M. Paré: Peu importe que ce soit dans le but de
convertir?
M. Bourbeau: Mais cela ne change rien. Il n'y a pas de notion de
conversion dans la reprise de possession. Évidemment, il y a toujours
l'exception. Si c'est une reprise de possession illégale, cela
empêche la conversion éventuelle. Mais si le propriétaire
reprend possession pour lui-même d'un logement, on n'empêche pas la
reprise de possession pour un propriétaire actuel. C'est très
clair. On l'a dit d'ailleurs.
M. Paré: La reprise de possession actuelle pour lui ou
quelqu'un reconnu par la loi, donc...
M. Bourbeau: On ne change rien à la loi actuelle sur la
reprise de possession, sauf qu'on l'interdit dans l'indivision.
M. Paré: D'accord. Cela veut dire que, pour la
copropriété divise, telle que le projet de loi est
rédigé, quelqu'un qui a dans son idée de convertir peut,
avant d'envoyer l'avis, utiliser son droit de reprise de possession pour lui ou
quelqu'un de sa famille et, ensuite, convertir.
M. Bourbeau: Le système qui prévaut
présentement s'applique. Évidemment, on dit toujours: avant qu'il
y ait eu envoi d'un avis de conversion. Alors, le propriétaire peut, de
bonne foi, envoyer un avis et reprendre possession d'un logement, l'occuper
lui-même. Si tout cela se fait normalement et de bonne foi, il n'y a pas
de problème. Mais s'il appert éventuellement que cela a
été une reprise de possession dite illégale, que cela a
été fait dans le but de faciliter la conversion ou dans le but
d'évincer des locatai-
res pour éventuellement revendre les logements avec profit, etc.,
la régie va pouvoir Juger de la situation et décider comme elle
l'entend, selon la preuve qui sera faite devant elle.
M. Paré: Est-ce qu'on peut...
M. Bourbeau: Je vais donner un exemple au député.
Supposons qu'on soit dans un "siplex", un immeuble à six logements, et
qu'un propriétaire reprenne possession pour lui-même, reprenne
possession pour sa mère, pour sa belle-soeur, pour son
beau-frère, en invoquant qu'ils sont tous, etc., et que, tout à
coup, quand tous les locataires sont partis, il demande de convertir et qu'il
s'apprête à revendre tous les logements à des tiers, la
régie va faire enquête. Elle va se rendre compte qu'il s'est
passé quelque chose d'inhabituel et va bloquer le processus de
conversion. Les anciens locataires auront même un recours en dommages et
en dommages exemplaires.
M. Paré: Quand vous dites que, jusqu'à l'avis, ils
ont le droit d'utiliser la loi actuelle, il n'y a rien d'illégal et de
répréhensible à ce que cela se produise, même si
c'est dans l'intention de convertir. De toute façon, les locataires vont
être partis. Donc, si la régie reçoit une demande sans
plainte, sans critique et si tout s'est passé selon la loi avant l'avis,
ce sera en vertu de quel article ou en vertu de quel principe que la
régie pourra demander réparation ou changement de situation pour
des locataires qui n'y sont plus? Il n'y a rien qui l'autorise. Donc, ma
crainte là-dessus, je vous l'exprime, parce que c'est le temps qu'on
aille au fond des situations qui peuvent se produire. Supposons qu'il y ait
dans un trois logements le propriétaire dans le logement du bas et deux
locataires en haut. En utilisant le droit de reprise de possession pour
quelqu'un de sa famille dans les deux logements d'en haut, si cela s'effectue
selon les normes et qu'après arrive l'avis de conversion, tout s'est
passé dans les normes. Les locataires sont partis. Donc, la
transformation se fait sans problème. La conversion peut être
entreprise, la régie n'a aucune raison - c'est ce que je veux me faire
confirmer pour que cela soit clair - d'intervenir ou de refuser. Tout s'est
fait dans les délais avant l'avis. Tout s'est fait conformément
à la loi actuelle. La transformation peut être entreprise. Il n'y
a plus de locataires de toute façon pour contester quoi que ce soit. Ils
sont partis. Donc, si la situation que je viens de vous exposer a lieu, c'est
correct en vertu de l'esprit de la loi actuelle. Si c'est cela, je veux juste
le clarifier.
M. Bourbeau: M. le Président, le député me
demande si la régie peut être saisie d'une demande de conversion
dans un immeuble où il n'y a pas de locataires - donc, ce sont des
propriétaires indivis - ou encore un seul proprié- taire qui a
des locataires et que les locataires sont tous d'accord - je présume que
c'est ce que le député nous dit - pour la conversion.
Évidemment, il va y en avoir des cas comme cela. J'espère qu'il
va y en avoir des cas où un propriétaire va faire
l'unanimité parmi ses locataires, va leur offrir de vendre les logements
à des conditions tellement intéressantes que les locataires vont
vouloir accepter.
Je n'ai jamais caché que l'accession à la
propriété, c'était un de nos objectifs et, si jamais nous
pouvions offrir un système ou une formule de financement, un programme
de financement tellement intéressant que tous les locataires du
Québec seraient intéressés à s'acheter leur
logement, cela se produira peut-être beaucoup. Mais, à ce
moment-là, la régie va quand même donner au processus une
certaine publicité. L'article 70 de la loi sur le logement locatif dit:
"Dès que la régie est saisie d'une demande visée dans la
section II du chapitre III, elle doit faire afficher, sur l'Immeuble
visé dans la demande, un avis facilement lisible pour les passants. De
plus, elle peut faire publier un avis public de la demande, en la
manière prévue par les règlements de procédure."
Alors, il y aura une certaine publicité qui sera faite de la demande.
Et, si les locataires qui ont été évincés sur de
fausses représentations voient qu'on les a évincés dans le
but, justement, de convertir, ils ont droit de demander des dommages et
mêmes des dommages exemplaires. Alors, le propriétaire sachant
cela... Encore-là, je le dis au député, les
propriétaires vont savoir qu'ils sont passibles de ces demandes, de ces
dommages-intérêts exemplaires. Ils vont y penser deux fois avant
de se lancer dans des procédures qui, éventuellement, pourraient
faire en sorte que la demande soit bloquée et qu'en plus de cela ils
soient sujets à des dommages-intérêts exemplaires.
M. Paré: Bon, c'est important, la discussion qu'on tient
ici, en espérant qu'à un moment donné ceux qui vont avoir
à appliquer la loi vont prendre connaissance de ce qui a
été dit ici, dans le sens de l'interprétation qu'ils vont
y donner. Ce que vous dites est important, parce que...
M. Bourbeau: Tout ce que je dis est toujours important.
M. Paré: Oui, je n'en doute pas. Mais moi, je dis que la
loi telle qu'elle est là, il y a des moyens de la contourner. Ce que
j'essaie de vous montrer dans ce cas-ci comme dans le cas
précédent, c'est qu'avant l'avis il y a des moyens et vous me
dites que c'est la loi actuelle qui se maintient. Il y a des moyens, pas
illégaux, mais permis, de contourner la loi. Et, dans
l'interprétation qu'on va en donner, ce sera probablement
l'interprétation qui va être retenue, si de telles situations se
produisent. Je veux seulement qu'on soit bien clair. Je vous donne l'exemple de
ce
que j'ai dit tantôt et de ce que vous avez dit, juste pour qu'on
le confirme et qu'on s'entende sur la même chose et que les gens
l'interprètent de la même façon.
Il y a un triplex. Le propriétaire du bas est résident. Il
y a deux logements qui sont loués en haut. Le propriétaire
décide de reprendre possession des deux logements d'en haut pour des
membres de sa famille, donc permis par la loi. Quand tout est fait, le
propriétaire décide, en attendant un certain laps de temps, s'il
le veut ou pas, mais lorsque, en suivant la loi actuelle, les
règlements, tout s'est produit conformément à la loi en
place... Maintenant, on se retrouve avec un propriétaire résident
dans le logement du bas; deux locataires, membres de la famille, en haut.
L'avis d'intention, maintenant, est envoyé. C'est publicisé. Le
panneau est posé, comme vous dites. Donc, les anciens locataires
pourraient passer devant et s'en apercevoir, ou n'importe qui et les aviser.
Comme tout s'est passé légalement, que les membres de la famille
ont effectivement emménagé et sont résidents, maintenant
ils sont consentants et prêts à acheter la partie dont ils sont
maintenant locataires pour devenir propriétaires occupants. Est-ce que
c'est acceptable et sinon, quels sont les recours, à votre avis, que
possèdent les locataires, en vous disant que ce que vous pouvez dire ne
sera pas retenu contre vous - je ne suis pas un avocat - mais pourrait servir
à l'interprétation de l'esprit qu'on veut donner à la loi,
advenant que le cas se produise et qu'à la régie on doive statuer
là-dessus?
M. Bourbeau: M. le Président, je suis toujours... Le
député de Shefford n'a pas fini de m'étonner. Le
député de Shefford essaie, avec une grosse loupe, d'aller
chercher quelque part une punaise et, là, il tente de monter cela en
épingle pour dire qu'on pourrait... C'est sûr que l'on pourrait,
théoriquement, en faisant des pirouettes, des acrobaties telles que le
député de Shefford est en train d'en rêver, trouver une
situation où quelqu'un pourrait un jour convertir. Il faut que le
député de Shefford réalise une chose. Si un
propriétaire veut faire ce qu'il dit: premièrement, il doit aller
chercher sa belle-mère, son cousin, une cousine ou je ne sais trop qui
et envoyer un préavis de six mois à un locataire; après
cela, il doit faire déménager sa belle-mère et, là,
il doit prouver à la Régie du logement que cette
personne-là est "à son crochet". Pour pouvoir obtenir la reprise
de possession, il faut que toute autre personne dont il est le principal
soutien... Je laisse tomber le principal soutien, mais, s'il veut loger un
autre parent que celui dont je viens de parler, il faut qu'il prouve en plus de
cela qu'il en est le principal soutien.
Dans le cas des membres de sa famille qui sont plus près, il doit
quand même faire en sorte de les faire partir du logement d'où ils
sont présentement et les faire emménager dans le triplex. Il doit
ensuite envoyer un préavis à un autre locataire, faire la
même chose, aller chercher la personne X qui est dans sa famille, celle
dont il n'a pas besoin d'être le principal soutien, et la faire entrer
dans l'immeuble. Une fois qu'il a fait toutes ces dépenses-là, il
doit passer par la municipalité, demander la permission de convertir et
aller à la Régie du logement qui, elle, fera enquête,
prendra des moyens pour faire savoir au public en général que
l'immeuble fait l'objet d'une conversion. Si, à un moment donné,
il arrive qu'un locataire se rend compte qu'on est en train de faire la
conversion par la porte d'en arrière, cela donne la possibilité
à tous les recours dont je parlais tout à l'heure. Je dis au
député qu'il y a une façon bien plus facile de convertir
dans le système actuel. Ce que le propriétaire a à faire,
c'est de reprendre possession, par exemple, en indivis, parce que cela est
permis actuellement et, une fois les locataires partis, de laisser l'immeuble
vacant, puis de dire en Cour supérieure qu'il n'y a plus un seul
locataire dans l'immeuble et convertir. On peut convertir présentement
d'une façon beaucoup plus facile que les pirouettes auxquelles fait
allusion le député de Shefford. Il y a actuellement des
façons de convertir qui sont énormément plus faciles que
celles-là. Évidemment, si le propriétaire se place dans
une situation où il rencontre exactement les prescriptions de la loi, ce
n'est certainement pas moi qui vais l'en empêcher, sauf que le
député avouera que ce ne sera pas très facile.
M. Paré: Quand vous me parlez de la situation actuelle,
les possibilités qui sont en cause, je ne les conteste pas. La preuve,
c'est qu'elles ont été dévoilées, elles sont
connues et cela justifie que l'on doive légiférer pour changer
cela. Ce dont je vous parle, c'est pour le futur. Je dis que, pour la
régie, en fonction de la loi telle qu'elle est libellée ici,
à compter de l'avis d'intention, le droit de reprise de possession est
défendu. Donc, cela veut dire que la régie n'a pas de recours
avant. Moi, j'interprète cela comme ça et, quand vous me dites
qu'on peut peut-être donner l'Impression de charrier en prenant des cas
particuliers, puis des choses qui n'arriveront pas, je vous dis que ce sont des
choses non seulement qui vont arriver, mais ce sont des choses qui sont
courantes. J'en connais personnellement, mais je ne les dénoncerai pas.
Cela se passe au moment où on se parle et, à mon avis, cela
risque de se passer encore davantage, parce que maintenant cela amènera
l'autorisation ou la possibilité de conversion, maintenant que cela sera
permis à l'extérieur de Montréal. J'en connais à
Québec qui utilisent présentement la formule que vous dites. On
remplace par des membres de la famille, on s'en va en indivise, puis en divise,
selon tous les trucs légaux que vous connaissez. Cela sera encore plus
facile maintenant, parce que l'autorisation, à Québec, va
être donnée de transférer,
de convertir. L'intérêt est donc encore plus
marqué.
Je vous ai donné l'exemple d'un trois logements, mais je pourrais
vous en donner de plus de trois logements, pour autant qu'il y ait une
majorité de gens à l'intérieur qui deviendront
propriétaires de cette façon-là et ensuite que cela
justifie les travaux de modernisation, les travaux majeurs, les travaux dans
toute la maison, parce qu'il y aura une majorité de propriétaires
occupants. Quand vous dites que cela semble être impossible et difficile
de déplacer des gens, moi, je vais vous dire que ce n'est pas difficile
de déplacer des gens quand c'est pour des profits intéressants.
Là, cela va être intéressant. Vous savez très bien
que, dans des quartiers centraux - prenez ici les rues du vieux Québec
et celles avoisinant le Parlement - des maisons peuvent voir leur prix
d'évaluation multiplié par trois, quatre ou cinq. Cela n'a rien
d'impossible. Au contraire, on voit déjà à quel point la
spéculation est forte. Les gains financiers justifient amplement des
déménagements. C'est ce que je vous dis, et j'essaie de vous y
sensibiliser et surtout de le clarifier pour que cela soit bien connu que c'est
cela. Malgré les réponses que vous m'avez données, je
continue à être convaincu que c'est un moyen de conversion, qu'on
a encore une possibilité pour autant qu'on le fasse avant l'avis
d'intention. Je ne vois pas de quelle façon la Régie pourrait
venir contester ou amener des changements ou même des
dommages-intérêts à quelqu'un.
Si c'est cela, on va juste le clarifier et ce sera connu à quel
point elle a un recours pour la reprise de possession qui s'effectue avant
l'avis d'intention. Donc, si cela s'est fait, que l'avis arrive après et
que les locataires s'en apper-çoivent et vont contester, il faut prouver
l'intention manifeste. Au départ, il n'y a pas
d'illégalité du geste, parce qu'en fonction de la loi existante
il y a le droit de reprendre possession pour des gens qui sont
énumérés dans la loi. Il n'y a pas
d'illégalité à ce chapitre. S'il n'y a pas
d'illégalité et que l'avis arrive après, comment prouver
que l'intention était là avant et que ce n'est pas arrivé
à un moment donné en disant: Maintenant que c'est ma famille qui
est ici, j'ai décidé que j'aime mieux ne pas payer les
réparations, chacun va payer ses réparations et je lui vends sa
partie de maison? Prouver qu'il y avait intention avant l'avis d'intention, ce
n'est pas nécessairement facile. Je suis convaincu que cela va se
produire, parce que, au moment même où on se parle, alors qu'il y
a interdiction, cela se produit déjà.
Là-dessus, je vous avais dit qu'il y avait déjà un
truc qui était trouvé pour garder, même après la
loi, la possibilité de faire des transformations, même à
Montréal, même s'il n'y avait pas dérogation. L'exemple que
je vous ai donné, c'est ce qui se passe à Montréal pour se
lancer maintenant en compagnie. J'aimerais que vous me donniez votre point de
vue là-dessus. Supposons qu'il n'y ait pas de mesure dérogatoire
à Montréal apportée par la ville pour permettre la
conversion en copropriété divise, cela veut dire qu'il n'y a pas
de possibilité maintenant, c'est totalement fermé. On n'a plus le
droit de convertir. Est-ce que c'est vrai, pour autant qu'on forme une
compagnie, qu'on peut acheter et que cela ne tombe pas sous la loi
régissant la copropriété divise et indivise? Une compagnie
peut donc être formée, des gens achètent des actions et
l'action donne droit à un espace dans la bâtisse. Je dois vous
dire que cela existe déjà. Il y a des jugements qui ont
été rendus, il y a des gens qui ont été
expulsés. Je suis allé en visiter, les blocs se vident un en face
de l'autre ou un à côté de l'autre. C'est presque
l'ensemble d'une rue de Montréal, la rue Decelles. Les gens voient cela,
les gens contestent, mais il n'y a rien qui se passe. Et on dit que,
finalement, il n'y a pas de problème. Ce n'est pas de la
copropriété divise, pas de la copropriété indivise,
c'est tout simplement une compagnie qui se porte propriétaire de la
bâtisse et elle loue cela. Mais cela donne le droit aux actionnaires
d'occuper un espace. Est-ce que, dans votre idée, c'est quelque chose
qui est faisable et sinon, comment pensez-vous être capable de contester
cela dans la loi qui est déposée ou dans la loi actuelle? (17
heures)
Ce n'est une cachette pour personne, je pense que c'est public ou que
cela doit l'être. Cela se produit énormément
présentement pour des blocs sur les rues Decelles, Sainte-Catherine,
Saint Kevin à Montréal. Je ne parle pas de petits blocs,
là où ça se produit et où les gens sont
expulsés. Ce sont des 15, 16, 17 et 18 logements. Ça, ce sont des
gens qui sont expulsés et il semble n'y avoir aucun recours, parce que
ce n'est pas de la copropriété divise, ce n'est pas de la
copropriété indivise, c'est tout simplement une compagnie qui est
actionnaire, qui est propriétaire d'une bâtisse. Ça se
produit actuellement et il ne semble pas y avoir de recours possible.
Est-ce que, à votre avis, la loi 87 va corriger cette situation?
Et, si oui, comment?
M. Bourbeau: M. le Président, deux choses avant d'en
arriver aux compagnies. Le député, dans l'échafaudage
qu'il a monté pour prétendre qu'il y a aura des problèmes
avec le projet de loi qu'on a présentement, oublie une chose. Quand le
député dit: On va acheter un triplex et le propriétaire va
y mettre ses parents immédiats et après ça va convertir,
il oublie une chose importante, très importante. C'est l'article 54.2.
Le député semble oublier que cet article-là existe.
L'article 54.2 dit - peut-être que je n'ai pas le bon numéro: "La
Régie doit refuser l'autorisation de convertir lorsque l'immeuble - je
saute quelques mots - a déjà fait l'objet d'une reprise de
possession illégale."
Imaginez-vous que le propriétaire arrive à la Régie
du logement pour demander une conver-
sion, parce qu'il a réussi à flanquer à la porte
deux locataires et qu'il a mis à la place sa belle-mère et son
père. Déjà, en arrivant là, la régie va
trouver ça étrange qu'on ait trois propriétaires de la
même famille. Ça va être assez facile pour le
régisseur de poser des questions et de s'informer de ce qui est
arrivé des anciens locataires. On a déjà là une
apparence de contournement de la loi. On va demander: Est-ce qu'il y a eu des
reprises de possession dans les deux ans qui ont précédé?
Est-ce que cela a été fait de bonne foi? On peut convoquer les
anciens locataires, etc. Ce sont justement ces cas-là qu'on va pouvoir
bloquer. Le député oublie qu'on a exactement prévu ces
cas-là et que, si le propriétaire s'est adonné à ce
petit jeu-là, il risque d'avoir de sérieux problèmes avec
la Régie du logement
Maintenant, pour ce qui est des compagnies qui achètent des
immeubles, je signalerai au député que ce n'est pas nouveau. Cela
se fait depuis 25 ans au Québec. Un des immeubles, enfin peut-être
pas le premier, parce qu'à ma connaissance ça se fait depuis les
années quarante ou cinquante - des immeubles sont achetés comme
ça en propriété par une compagnie et après
ça les actionnaires de la compagnie font une convention d'actionnaires -
un des immeubles qui me reviennent à la mémoire, c'est le
Port-Royal qui est un immeuble très prestigieux sur la rue Sherbrooke et
qui a été longtemps dans cette situation-là. Il y a
d'autres immeubles aussi sur la rue Sherbrooke à Montréal qui
sont comme ça depuis très longtemps.
Je dirai au député qu'en France, avant l'avènememt
de la copropriété, c'était le système qui
était utilisé continuellement pour faire de la
copropriété. On utilisait le système de la compagnie par
actions jusqu'à ce que la loi éventuellement permette la
copropriété. Ce n'est pas de la copropriété. Ce
sont des actionnaires d'une compagnie qui conviennent entre eux par une
convention d'actionnaires qu'un bloc d'actions donné ou une action
donnée aura vocation à un logement donné et se donnent un
droit d'habitation. Mais ça n'enquiert aucun droit à l'encontre
des tiers, aucun droit à rencontre des locataires et en aucune
façon un actionnaire ne peut reprendre possession d'un logement
légalement à l'endroit d'un locataire.
Maintenant, si le député dit que ça se fait, il n'y
a rien qui empêche qu'un logement vacant soit loué à
l'actionnaire de la compagnie, mais il n'y a rien qui donne pouvoir à un
actionnaire d'une compagnie ou à une compagnie elle-même de
reprendre possession d'un logement à l'endroit d'un locataire pour le
bénéfice d'un actionnaire. Il n'y a aucun lien entre les deux.
L'actionnaire n'a pas plus droit de reprendre possession du logement qu'un
propriétaire indivis en aura dans notre système après que
nous aurons adopté le projet de loi 87.
M. Paré: Deux choses là-dessus. Vous confirmez, et
je trouve cela bien correct - je ne dis pas que je suis content que ça
arrive -qu'effectivement c'est une façon qui existe à
Montréal - peu importe maintenant les dérogations qui seront
apportées par la municipalité - et c'est même - comment
dirais-je ça? - l'embryon ou le foetus pour en arriver finalement
à la copropriété. Vous reconnaissez que c'était ce
qui se passait en France et que c'est ce qui se passe à Montréal.
C'est ce qui va se passer de plus en plus en disant aux gens de Montréal
que, si la municipalité décide de ne pas fonctionner par
dérogation, il y a cette façon de procéder. Vous le
reconnaissez tout simplement.
M. Bourbeau: Je voudrais dire simplement au député
que ce n'est pas une façon de contourner la loi. Les gens qui sont
actionnaires n'ont aucun droit de déloger les locataires. Ce n'est
vraiment pas une façon. Le député dit que c'est une
nouvelle façon qui a été trouvée. Ce n'est pas une
façon qui a été trouvée. Les actionnaires n'ont
aucun droit. C'est uniquement dans la mesure où un logement devient
vacant qu'on choisit d'y loger un actionnaire locataire plutôt qu'un
autre locataire. Mais il n'y a aucun droit de conféré aux
actionnaires et ce n'est pas une trouvaille. Le député n'a rien
trouvé de nouveau. On ne peut pas utiliser légalement cette
formule-là pour déloger des locataires. C'est ce que je veux
faire comprendre au député. Si les locataires reçoivent -
je le dis pour ceux qui pourraient lire le Journal des débats -
des avis d'éviction ou de reprise de possession d'un actionnaire d'une
compagnie ou d'une compagnie, ils peuvent s'opposer et je les enjoins à
s'opposer, parce qu'il n'y a aucun droit à la reprise de possession dans
ces cas-là.
M. Paré: Bon. Je dois vous dire que les informations que
j'ai sont de bonne source et je les crois. Même le député
d'Outremont serait allé rencontrer les deux messieurs, Bertrand et
Langlais, pour leur dire qu'il trouvait tout à fait inacceptable cette
façon de faire. Donc, cela se produit peut-être, sauf qu'un
député et ministre aussi important en ce qui concerne, entre
autres, la privatisation et les finances, qui dénonce cette façon
de faire, même si vous dites que cela ne leur donne pas le droit de
reprendre en copropriété, mais on sait la façon dont cela
fonctionne. C'est qu'eux autres, avec cette façon de devenir
propriétaires de bâtisses, ne sont pas liés par ce qu'on
retrouve dans la loi ici. Cela veut dire qu'ils peuvent entreprendre ce que
j'appelais tantôt non pas des travaux de remise en état, mais des
travaux de modernisation. Donc, les gens sont expulsés - en sachant
qu'il n'y en a pas 5 % qui reviennent - pour des travaux de modernisation.
Allez voir les blocsl Ce sont des transformations esthétiques majeures.
Ce n'est pas vrai qu'on les remet en état, ils sont déjà
en état. Ce sont des travaux d'esthétique
majeurs, de modernisation. Donc, c'est ce que je vous disais
tantôt, on change la nature même du contrat Le bail qui
était signé pour un loyer de - je n'aime pas catégoriser,
mais pour faire une image et simplifier les choses: un loyer serait de
catégorie 1 à 5, en disant que de 1 à 5 plus on approche
de 5 plus c'est de qualité - catégorie 1 à 200 $ par mois,
lorsque les travaux de modernisation et d'esthétique ont
été faits dans les blocs, on se retrouve dans la catégorie
4 ou 5, parce qu'on est dans Outremont ou dans des quartiers quand même
assez huppés, et avec des loyers qui viennent de passer de 250 $
à 500 $ par mois. On vient déloger les gens et la loi actuelle
qui est proposée, qui est devant nous, ne vient pas changer cette
situation, mais absolument pas. Cela veut dire qu'on va continuer à
déloger dans ces quartiers-là des gens. On peut bien dire que
c'est légal. On peut bien dire qu'on ne peut rien y faire. Mais c'est
cela que je vous dis, M. le ministre. La loi ne vient pas empêcher des
choses comme cela, il faut en être bien conscient. Cela n'empêche
pas cela.
Juste un autre point. Vous disiez que la régie pourra intervenir
dans le cas que j'ai utilisé: on place la famille dans les deux
logements d'en haut. C'est une question que je vous pose. La régie
pourra Intervenir "lorsqu'un logement a déjà fait l'objet d'une
reprise de possession illégale". Donc, les pouvoirs de la régie,
c'est s'il y a eu reprise de possession illégale? Moi, je vous disais
tantôt que, quand les locataires ont été renvoyés
pour une reprise de possession en vue de mettre deux personnes de la famille
dans les logements supérieurs, ce n'était pas en soi une reprise
de possession illégale, c'est en fonction de la loi actuelle. Est-ce
que, selon votre interprétation et l'esprit que vous voulez donner
à la loi, l'exemple que je vous ai donné tantôt donne un
pouvoir à la régie d'intervenir, en évaluant qu'il
s'agissait d'une reprise de possession illégale, puisqu'au moment
où elle a été effectuée c'était dans la
légalité?
M. Bourbeau: La compagnie qui fait des travaux, disons le
propriétaire, que cela soit une compagnie ou un individu, qui
décide de faire des travaux - le député appelle cela ainsi
- de modernisation, des travaux urgents, non des travaux majeurs, mais qui ne
sont manifestement, dans le cas dont parle le député, ni urgents
ni nécessaires, cette compagnie-là a et aura le droit de faire
des travaux. Tout individu, toute compagnie, tout propriétaire peut
faire des travaux à son Immeuble sauf que, dorénavant, on devra
donner un préavis de trois mois plutôt qu'un préavis d'un
mois. C'est ce que j'appelais civilisé.
De plus, si ces travaux impliquent l'évacuation du locataire, on
devra donner des indemnités et le fardeau de la démarche devant
la régie sera transféré au propriétaire. Ce sont
des améliorations sur le système actuel. Il n'y a absolument rien
de changé avec autrefois, sauf qu'on civilise le processus.
On n'interdit pas à des propriétaires de faire des travaux
pour améliorer leur immeuble mais le processus est civilisé.
Évidemment, cela ne donne pas le droit de convertir. Si des locataires
ont été évincés et que, subséquemment, le
propriétaire ou la compagnie se présente pour convertir, la
régie va refuser de convertir. Mieux que cela, les locataires pourront
même avoir des recours en dommage. Il n'y a rien d'autre que cela.
Si les locataires sont partis, ne veulent pas revenir et que les
logements sont vacants, le propriétaire ne pouvant convertir, va relouer
ses logements. À qui va-t-il les relouer? Je ne sais pas. Il peut les
louer à des locataires en mettant une annonce dans le journal. Un ou des
locataires seront possiblement des actionnaires de la compagnie. C'est
possible, mais cela ne donne pas ouverture à la
copropriété.
Dans ce sens, le projet de loi que nous avons devant nous ne favorise
pas le contournement du moratoire existant et la formule en question n'aide pas
non plus les propriétaires. Chacun des propriétaires ou des
actionnaires ne pourra pas devenir individuellement propriétaire d'un
logement, ce qui est l'objectif recherché dans la conversion.
M. Paré: II ne devient pas copropriétaire en
fonction de la loi qu'on discute en ce moment, sauf que, dans l'entente qui est
signée - cela se fait publiquement par des annonces dans les journaux
l'achat d'actions donne droit à l'utilisation d'espaces d'une
façon individuelle et restrictive; c'est limité à eux
seuls. C'est de la copropriété.
C'est une façon différente et légale - je ne dis
pas qu'elle n'est pas légale, la preuve, vous venez de me le confirmer -
de devenir propriétaire d'un espace, d'en avoir l'achalandage et la
jouissance exclusive en étant actionnaires d'une compagnie qui est
propriétaire de l'immeuble.
M. Bourbeau: M. le Président, l'individu, l'actionnaire
est un vulgaire locataire, je regrette. Je dis le mot, pas pour dire que les
locataires sont vulgaires, mais qu'il s'agit de locataires normaux. Dans le
sens le plus régulier, le plus normal, c'est un locataire comme les
autres, il n'a pas de statut différent. Il a un droit d'habitation dans
un logement en vertu d'une convention qu'il a signée avec d'autres et il
est l'actionnaire d'une compagnie.
Cet actionnaire n'a pas un droit de propriété dans le
logement. Il habite un logement en vertu de la convention qu'il a
signée, il a un droit d'habitation, mais il n'a pas le
bénéfice de la propriété exclusive des parties
réservées qu'a un copropriétaire dans la
copropriété. Il est aussi mal pris, d'une certaine façon,
que le propriétaire indivis au manoir Barrington qui est pris avec 35
autres dans la copropriété indivise de son
logement. Il ne peut revendre son logement. Il ne peut pas aller voir le
député de Shefford et lui offrir tel appartement en
propriété absolue. La preuve en est que, si ce locataire essaie
de vendre son logement, ce qu'il va vendre c'est un paquet d'actions de
compagnie. Il ne pourra pas mettre d'hypothèque sur son logement. Il n'a
pas la possibilité de l'hypothéquer. Supposons qu'il voulait le
vendre le logement, il ne pourra même pas permettre à l'acheteur
d'emprunter sur un logement. Il n'a pas de droits réels sur le logement.
Il est obligé de donner des actions en garantie collatérale.
C'est un système tout différent - le député
a peut-être fait des études de droit, je ne sais pas - qui ne
donne pas à l'acheteur la flexibilité et la
sécurité que peut avoir un propriétaire d'un logement
détenu en copropriété.
Je peux assurer le député que les gens, qui sont dans ce
système ont autant de problèmes à long terme que les
propriétaires individuels. Peut-être pas autant, parce que
juridiquement c'est un peu moins compliqué, mais ils n'ont pas
l'avantage qu'a un propriétaire d'un immeuble, d'un condo, de pouvoir
hypothéquer, acheter, revendre sans consulter ses
copropriétaires. Il n'a pas la flexibilité sur le plan
pécuniaire de pouvoir offrir une hypothèque. Tout ce qu'il peut
offrir, c'est un lot d'actions avec la probabilité qu'un gérant
de banque va hésiter longtemps avant de prêter 80 000 $ sur une
action de compagnie. (17 h 15)
C'est vraiment un système, sur le plan juridique, qui est
nettement inférieur au système de la copropriété.
C'est un pis-aller qui est utilisé depuis très longtemps, ici
comme ailleurs, et qui ne donne, en tout cas, certainement pas droit à
la reprise de possession. Je peux en assurer le député.
Maintenant, est-ce qu'il se passe des abus? Est-ce que des gens tentent
de décevoir les locataires, de leur raconter des histoires, de leur
faire croire qu'ils ont droit à la reprise de possession? C'est
possible. J'espère que les locataires ne se feront pas leurrer et qu'ils
vont s'adresser à la Régie du logement
Je suis content de voir que mon collègue, le député
d'Outremont, s'est intéressé à la chose. Je peux lui dire
que si on me consulte sur la question, je n'hésiterai pas à
condamner, non pas l'achat d'un immeuble par une compagnie, mais le subterfuge
qui consisterait à faire croire aux locataires qu'ils peuvent être
délogés ou que, légalement, on peut reprendre possession
de leur logement.
M. Paré: Étant donné qu'ils n'entrent pas
dans la copropriété divise, cela leur permet d'entreprendre des
travaux majeurs d'esthétique et de modernisation, comme je le disais,
sans émettre d'avis d'intention. Les travaux se font et, ensuite, arrive
l'augmentation considérable du loyer. Juste pour vous prouver
l'interprétation que les gens donnent aux gestes qu'ils posent et le
qualificatif qu'ils donnent au genre d'habitations qui se créent par
cette formule, retrouvez des annonces dans le journal.
Le journal La Presse, samedi 5 septembre 1987 - cela ne fait pas
longtemps et on connait toute la démarche qui s'en vient chez nous
puisque la commission parlementaire a déjà eu lieu - dans
Condominiums, copropriétés-Côte-des-Neiges - on l'annonce
comme une copropriété - 5835, Place Decelles, rue paisible et
paysa-gée, 3 1/2, 4 1/2, près de l'Université de
Montréal, hôpitaux, centres d'achats, 15 minutes du centre-ville.
Prix de 45 000 $ à 89 500 $.
Là, on explique qu'un 2 1/2 au sous-sol, c'est 45 000 $. On le
vend sous forme d'actions avec un droit exclusif rattaché aux actions.
Donc, c'est de la copropriété. Les autres sont des4 1/2 à
89 500 $.
Quand cela est fait, l'évaluation sort à la ville et cela
amène des loyers... Oui, on peut dire que les locataires ont des droits
mais étant donné la rénovation faite - l'esthétique
et la modernisation, comme je vous le disais tantôt - il y a une
augmentation. Comme les travaux sont faits, cela veut dire que la régie
est obligée d'augmenter le prix des loyers.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Shefford. M. le ministre.
M. Bourbeau: Je corrige le député. Ce n'est pas,
contrairement à ce qu'il indique, de la copropriété. C'est
une compagnie par actions. La compagnie est propriétaire. Il n'y a pas
de co... Il y a un seul propriétaire. C'est la compagnie. Il n'y a aucun
copropriétaire là-dedans. Il y a une compagnie et des
actionnaires.
Maintenant, le député vient de dire: À cause de la
tenure, cela implique une augmentation d'évaluation. Je lui dis non. Il
n'y a pas d'augmentation d'évaluation possible en regard de cette tenure
parce que la municipalité n'a qu'une seule évaluation municipale;
elle ne reconnaît qu'un seul propriétaire, la compagnie X, Y, Z et
c'est un immeuble qui est tenu sous le mode locatif. S'il y a eu des travaux
d'amélioration, de modernisation de faits, ces améliorations
physiques vont bien sûr, entraîner une augmentation
d'évaluation comme dans toute autre propriété
détenue par un individu ou par un groupe d'individus. Mais les
augmentations d'évaluation ne proviendront que de la modernisation
physique de l'immeuble et non pas du changement de tenure qui serait
passée d'une tenure locative à une tenure de
copropriété.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions?
Est-ce que l'article 54 est adopté?
M. Bourbeau: Adopté. M. Paré:
Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): Adopté. J'appelle
l'article 54.1.
M. Bourbeau: M. le Président, je vous demanderais, avec la
permission de la commission, de suspendre l'étude des articles 54.1,
54.2 et 54.3 étant donné que nous avons l'intention de faire des
modifications à certains autres articles et que ces modifications
apporteraient des concordances avec les articles dont je viens de demander la
suspension.
Le Président (M. Saint-Roch): Consentement?
M. Paré: Oui.
Le Président (M. Saint-Roch): Les articles 54.1, 54.2 et
54.3, sont maintenant suspendus. J'appelle l'article 54.4.
M. Bourbeau: M. le Président. Ce nouvel article prescrit
le délai dans lequel le propriétaire doit procéder
à l'enregistrement de la déclaration de
copropriété, soit dans l'année de l'autorisation de
convertir l'immeuble, donnée par la régie.
Il prévoit que cette autorisation devient sans effet après
ce délai. Il introduit la possibilité, pour le
propriétaire, de demander une prolongation de ce délai.
Cet élément de souplesse est essentiel si l'on pense aux
délais qui surviennent régulièrement dans la
préparation, par exemple, des plans de cadastre et des approbations de
ces plans.
Il oblige l'annexion de l'autorisation de la régie pour pouvoir
enregistrer la déclaration. Ainsi, l'officier public ou le
régistrateur devra s'assurer qu'elle y est. L'enregistrement de la
décision de la régie assure que les futurs acquéreurs
seront informés de la présence de locataires ayant droit au
maintien dans les lieux pour une période illimitée et dont le
logement ne peut faire l'objet d'une reprise de possession.
M. Paré: Pas de problème sur l'article 54.4.
Le Président (M. Saint-Roch): Alors, est-ce que l'article
54.4 est adopté?
M. Paré: Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): L'article 54.4 est
adopté.
J'appelle maintenant l'article 54.5.
M. Bourbeau: M. le Président, j'aimerais introduire un
papillon qui tiendrait lieu d'article 54.4.1.
Le Président (M. Saint-Roch): C'est un nouvel article.
Avis de conversion
M. Bourbeau: Alors, M. le Président, à l'article 2,
modifiant la Loi sur la Régie du logement, j'aimerais insérer,
après l'article 54.4, le suivant: "54.4.1 L'interdiction de reprendre
possession d'un logement, de même que celle de faire des travaux cessent
si le propriétaire avise par écrit le locataire qu'il n'a plus
l'intention de convertir l'immeuble si aucune demande n'est produite à
la régie dans le délai requis ou si la déclaration de
copropriété n'est pas enregistrée dans le délai
prévu à la loi ou fixé par la régie."
Cette modification, M. le Président, a pour but de remettre les
parties dans l'état où elles étaient avant le début
du processus de conversion, si cette dernière n'a pas lieu le
propriétaire ayant décidé de ne pas y donner suite.
On comprendra qu'on ne peut rester indéfiniment dans un processus
de conversion si, à un moment donné, le propriétaire
décide de renoncer au processus ou s'il n'a pas enregistré sa
déclaration de copropriété dans l'année suivant
l'autorisation de la régie, ou encore si, dans le troisième cas,
il n'a pas produit sa demande à la régie, dans le délai
qui était imparti pour produire la demande.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a des
interventions? M. le député de Gouin.
M. Rochefort: Je comprends l'explication que nous donne le
ministre et, ainsi, le sens qu'il veut donner à son amendement. Cela
dit, est-ce que cela ne peut pas être un article qui permet, au fond,
à un propriétaire, de se prévaloir de nouveau des
dispositions qui existaient et qui lui étaient applicables avant qu'il
enclenche le processus que l'on sait, devant, par exemple, le refus ou
l'entêtement d'un locataire d'accepter de partir, moyennant une somme ou
refusant d'acheter lui-même le logement?
Est-ce que cela ne peut pas exposer le locataire à un retour
rapide d'un statut juridique qui l'expose à des représailles? Je
comprends ce que vous nous avez présenté.
Compte tenu qu'il y a déjà un processus qui a
été enclenché avec une dynamique bien particulière,
je pense que remettre simplement comme cela tout le monde selon ce qu'il
était avant que le processus ne soit enclenché - comme si rien ne
s'était passé, ce n'est pas neutre. C'est mettre les locataires
dans une situation délicate et même permettre aux
propriétaires d'utiliser les dispositions de 54.4.1 dans ses
négociations avec ses locataires. J'aimerais que le ministre
réagisse ou bien que...
M. Bourbeau: On n'introduit évidemment pas des articles
pour ne rien dire. On tente de clarifier la situation qui prévaudrait si
le propriétaire, ayant envoyé un avis de conversion,
renonçait à convertir ou décidait de ne pas donner suite.
Il ne faut quand même pas laisser
les locataires dans les nuages d'une façon indéfinie.
Il est bien préférable à ce moment-là que
l'immeuble reprenne rapidement son statut locatif et que le nuage, si je peux
dire, qui flottait au dessus de l'immeuble soit dissipé dans les
meilleurs délais. Maintenant, si un propriétaire voulait s'amuser
à envoyer de tels avis régulièrement...
M. Rochefort: M. le Président, on va permettre au ministre
de lire sa note parce qu'il ne peut pas faire deux choses en même
temps.
M. Bourbeau: Si un propriétaire voulait jouer à ce
petit jeux-là, envoyer des avis, renoncer, envoyer des avis, le jour
où il voudra convertir, la Régie sera au courant de cette
situation parce qu'elle aura reçu copie des avis, à chaque
fois.
Si elle se rend compte que c'est la troisième fois que le
propriétaire s'amuse à envoyer des avis, cela va allumer une
lumière rouge et cette lumière dira à la Régie
qu'il y a peut-être abus, mauvaise foi, et mauvaise foi impliquerait un
refus en vertu de l'article 54.2.
M. le Président, on me convoque en Chambre pour une
réplique sur un projet de loi. Je présume que je peux?
Le Président (M. Saint-Roch): À ce
moment-là, M. le ministre, il est certain que nous devons continuer nos
travaux sans votre présence.
M. Paré: C'est avec plaisir qu'on va aller vous
écouter.
M. Rochefort: Le ministre pourrait peut-être nous dire pour
combien de temps il en a. S'il en a pour vingt ou vingt-cinq minutes,
plutôt que de suspendre, on va ajourner.
M. Bourbeau: Le règlement ne m'autorise pas à plus
de vingt minutes. Alors, ce sera au maximum, vingt minutes.
M. Rochefort: En réplique en troisième lecture,
vous avez droit à plus de vingt minutes, voyons.
M. Bourbeau: Le député devrait comprendre, M. le
Président, lui-même a fait la même chose tantôt.
M. Paré: M. le Président, je pense...
Le Président (M. Saint-Roch): À ce moment-ci, M. le
ministre, nous allons ajourner nos travaux. J'aimerais rappeler...
M. Rochefort: Est-ce qu'on reprend là-dessus à
vingt heures?
Le Président (M. Saint-Roch): J'aimerais rappeler aux
membres de la commission, suivant l'ordre stipulé pour nos travaux, que
nous devons demeurer disponibles et que, suite à l'adoption possible des
projets de loi 73 et 76 - si le tout se passait immédiatement
après vingt heures ce soir - nous serions convoqués pour
siéger sur les projets de loi 73 et 76.
M. Rochefort: Est-ce que nous avons des indications pour 87?
Le Président (M. Saint-Roch): Pour 96, nous n'avons aucune
indication, à moins de...
M. Rochefort: Non, pour 87. Quand cela devrait-il se
poursuivre?
Le Président (M. Saint-Roch): Nous n'avons pas
d'indication. Nous aurons besoin d'un autre ordre de l'Assemblée.
M. Rochefort: D'accord.
Le Président (M. Saint-Roch): Sur ce, la commission
suspend maintenant ses travaux.
(Suspension de la séance à 17 h 28) (Reprise à 20 h
26)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, mesdames
et messieurs!
La commission de l'aménagement et des équipements reprend
maintenant ses travaux pour procéder à l'étude du projet
de loi 82, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale et la Loi
concernant les droits sur les divertissements en matière de taxes
fiscales.
Sur ce, M. le ministre, est-ce qu'il y a des remarques
préliminaires?
Projet de loi 82
M. Bourbeau: M. le Président, je pense que toutes les
remarques importantes ont été faites à l'Assemblée
nationale, au salon bleu, lors de l'étude du principe du projet de loi.
Quant à moi, je serais bien disposé à passer
immédiatement à l'étude article par article.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre.
M. le député de Shefford.
Remarques préliminaires M. Roger
Paré
M. Paré: Quelques notes préliminaires certainement,
étant donné que je n'ai pas eu le plaisir d'aller entendre le
ministre lorsqu'il a fait
son intervention en deuxième lecture, cet après-midi.
J'étais occupé ailleurs. Je vais, au moins, lui donner le plaisir
d'entendre quelques commentaires pour qu'il sache en partie le questionnement
qui va lui être soumis ce soir.
Sans vouloir faire un historique, le projet de loi dont on va discuter
ce soir - même si, en soi, c'est technique - touche quand même le
fonctionnement régulier des citoyens dans leur vécu. Il fait
suite à notre discussion entreprise depuis le matin sur l'habitation, en
partie en tout cas. Vous permettrez, pour deux secondes, de faire un
parallèle, au moins à deux chapitres, avec la loi 87 où,
ce qu'on dénonce, c'est que, finalement, on y va à la
pièce au lieu d'encadrer cette question par une loi
générale sur l'habitation.
Ici, on touche à quelque chose de fondamental: la
fiscalité municipale. Votée en 1979, entrée en vigueur au
1er janvier 1980, cette loi finissait par reconnaître aux
municipalités la compétence, la responsabilisation, le choix des
décisions arrêtées. Elle évitait que, finalement,
les élus municipaux aient, pour une grande partie de leurs
investissements et de leur fonctionnement, à faire des
pélerinages à Québec et à procéder d'une
façon discrétionnaire. C'est venu régler cela. Nous, nous
disons que des hommes et des femmes qui sont élus, que ce soit au palier
municipal, à celui du Québec ou à d'autres paliers sont
des gens qui sont responsables. Il faut donc leur donner les moyens des
décisions qu'ils prennent. C'est ce qu'on faisait en 1980 avec la
fiscalité municipale qui finissait par rendre les municipalités
autonomes à 95 %, 97 % et 98 %.
Les gens des municipalités ont prouvé qu'ils avaient la
compétence et la détermination de bien gérer les
municipalités. On s'en est rendu compte pendant la crise
économique. Finalement, c'était probablement les instances qui
traversaient le mieux la crise économique et pouvaient, grâce
à des programmes qui étaient apportés par le gouvernement,
faire des investissements qui nous permettaient de générer
d'autres investissements très importants grâce à l'aide des
municipalités.
Encore une fois, c'est le parallèle que je faisais avec la loi 87
sur l'habitation, cette loi majeure, on ne la touche pas en profondeur mais on
vient plutôt régler les problèmes ponctuels par des mesures
ponctuelles. C'est exactement, encore une fois, le parallèle avec
l'autre loi. En habitation, on essaie de faire plaisir à tout le monde:
deux poids, deux mesures. La ville de Montréal, on la considère
d'une certaine façon parce qu'en commission parlementaire elle a dit
quelque chose mais, on considère, encore, en fonction des pressions,
des demandes qu'on a eues des groupes, en fonction de leur prise de position et
de l'importance de ce qu'ils veulent.
Ce sont des mesures ponctuelles sur quelque chose de fondamental. Mais
ce qu'il faut se poser comme question, en tant que législateurs, c'est:
est-ce que, lorsque l'on touche à quelque chose d'aussi fondamental que
la fiscalité municipale par des mesures ponctuelles, on ne vient pas,
à un moment donné, ébranler toute la structure et faire en
sorte que ça n'a plus la valeur et l'importance que ça avait?
Cela fait en sorte que, à un moment donné, ce tout qui
était global, en le modifiant à la pièce, ce sont souvent
des lignes directrices ou, finalement, des fondements mêmes qui sont
touchés. Dans cette loi sur la fiscalité municipale, par ce
projet de loi qui a été présenté, je ne suis pas
sûr qu'on ne vient pas toucher des fondements ou, en tout cas, des
valeurs aussi fondamentales que la neutralité, la simplification
administrative. Nous en avons parlé, cet après-midi.
Vous vous rappelez, on a parlé de simplification. On vous disait
que, finalement, cela amenait des complications en ce qui a trait aux formules
de la Régie du logement. Est-ce qu'on ne risque pas d'amener la
même chose?
C'est sûr qu'on répond à des demandes de gens, qu'il
faut essayer de solutionner des problèmes. On va le faire comme on le
fait pour plusieurs lois déposées à l'Assemblée
nationale, depuis quelque temps, c'est-à-dire, en essayant de faire le
moins de vagues possible. Donc, on ne fait pas de vagues.
SI quelque chose, quelque part lève, on essaie d'aplanir. On
essaie de satisfaire. On essaie de faire en sorte qu'il n'y ait pas de
réforme majeure.
C'est important, même si c'est plus prenant, c'est plus difficile.
Cela prend plus de temps, plus de réflexion, plus de consultation, plus
de concertation. Et tout cela, c'est plus compliqué. Au bout du compte,
je ne suis pas sûr qu'on ne soit pas regagnant comme
société plutôt que d'y aller comme cela, à la
pièce, comme c'est le cas pour plusieurs projets de loi.
Là, on est obligé. On n'a pas le choix, je pense, à
un moment donné, d'amener des correctifs au chapitre de la taxation. Il
en a été question, aussi, cet après-midi, en disant que la
spéculation n'avait plus de bon sens. On a vu cela dans les journaux,
comment la spéculation foncière augmente à une vitesse
presque apeurante, effrénée, à quel point le prix des
maisons augmente.
Quand cela augmente, on sait très bien qu'il y a des gens qui
sont gagnants et il y a des gens qui sont perdants. Et, les gagnants dans des
spéculations comme celles qu'on connaît présentement
à Montréal, ce sont les spéculateurs, les gens qui ont les
moyens de jouer avec l'argent. Ce ne sont certainement pas les locataires. Ce
ne sont certainement pas les petits propriétaires.
Le locataire ne bouge pas, il ne peut pas bouger. Il a juste à en
prendre plus pour payer la taxe qui est due, l'augmentation de
l'évaluation occasionnée par la spéculation. Le petit
propriétaire qui ne veut pas déménager est "pogné"
avec le même problème, exactement. Il a sa maison. Il n'a rien
bougé. Il n'a pas restauré.
.II n'a pas rénové. Il n'a pas bougé. La seule
chose qu'il sait c'est qu'à un moment donné, dans son quartier,
il y a beaucoup de spéculations. Parce que, globalement, les
spéculateurs font en sorte que... Bon, il y a des profits qu'on veut
faire. Tout ce qui compte, ce sont les profits.
Quelqu'un disait justement dans un colloque en fin de semaine: On veut
quoi comme politique, une politique plus humaine pour les citoyens ou une
politique pour les profits?
La spéculation, comme je vous le disais, ce n'est pas le petit
propriétaire qui en profite. Sa maison, il n'y a pas touché, lui.
La seule chose qu'il sait, c'est que cela lui coûte plus cher parce que
l'évaluation globale augmente. C'est le spéculateur qui fait de
l'argent. Le spéculateur... Vous connaissez certainement des cas qui ont
été rendus publics où les mêmes maisons sont vendues
trois, quatre et même cinq fois en l'espace de 12, 18 et 24 mois mais
toujours en augmentant et en augmentant. Ce sont ces gens qui vendent et
rachètent - cela prend de l'argent pour le faire - et qui font de
l'argent. Là, on nous amène des mesures qui sont à deux
volets, finalement: l'étalement. On va certainement avoir des questions
là-dessus, quand on va y arriver, article par article. Que l'on permette
aux gens de pouvoir répartir l'étalement sur trois ans, oui, cela
peut avoir un avantage pour le citoyen, comme tel, mais, au bout de trois ans,
que va-t-il arriver? Il y a, en plus, le plafonnement, qui a été
dénoncé par des organismes. Est-ce que le fait de plafonner n'est
pas encore à l'avantage des plus riches? Est-ce que ce n'est pas
toujours la politique qui favorise celui qui en a le plus?
Si on plafonne, ce sont de grosses augmentations. S'il y a une
bâtisse - et là, j'essaie de penser en termes municipal, parce que
c'est une loi, la fiscalité municipale - de 1 000 000 $ qu'on la
plafonne et si on plafonne une bâtisse de 50 000 $, à 10 %, c'est
sûr que la marge est terriblement différente. Un, c'est 5000 $ et
l'autre, c'est 100 000 $. Quand on plafonne globalement, comme cela, il arrive
que pour la municipalité, il en manque moins. Il y a des gens qui
doivent payer.
Si le fait de faire cela nous permet de répartir encore une fois
sur l'ensemble, c'est que cela coûte moins cher aux plus riches et plus
cher aux plus pauvres. SI ce n'est pas cela, vous nous le direz, mais moi ce
sont des inquiétudes que j'ai et il n'y a rien qui me prouve le
contraire jusqu'à maintenant. Donc, est-ce que le plafonnement ne vient
pas pénaliser encore une fois les plus petits et est-ce que les
municipalités - question que je veux aborder aussi - sont prêtes
à absorber finalement ce manque à gagner qui risque de se
répercuter?
Pour les autres, je les prends un peu dans les notes explicatives. Comme
je vous l'ai dit, c'est mon discours de deuxième lecture que je n'ai pas
pu faire et j'essaie de vous faire valoir mon point de vue là-dessus.
Pour le mouvement coopératif, j'en suis. La preuve, c'est que vous savez
à quel point je l'ai défendu en habitation, maintenant qu'on
vienne le rembourser par une loi sur les taxes d'affaires en 1985-1986, cela
vient régler, je pense, une situation qui fait consentement. Mais,
est-ce que les municipalités avaient prévu globalement des sommes
comme cela, parce que cela peut représenter, à un certain moment
donné, des sommes qui vont être passablement importantes?
Quand on parle de taxe d'amusement - c'est un autre point du projet de
loi, concernant les entrées basées sur le théorique - je
vous le retourne en question, puis on reviendra plus en détail lorsqu'on
abordera l'étude article par article - si, finalement, il y a moins de
taxes perçues par le municipal à l'entrée, on sait bien
que le gouvernement n'y perdra pas, encore une fois. Ce sont des taxes
municipales. Pour le gouvernement, cela voudra dire que, s'il y a des profits
à faire quand c'est à l'intérieur, eh bien, il les fera
ces profits-là. Que ce soit dans les bingos, les parties, sur la
boisson, sur tout ce qui génère une taxe de vente à
l'intérieur, il n'y a pas de problème. Le gouvernement n'en sort
pas du tout perdant, et même peut-être gagnant parce que, si on
réussit à économiser sur les prix d'entrée au
détriment des municipalités, peut-être que les
organisateurs pourront se permettre de charger plus cher, d'autres prix
à l'intérieur. Donc, il y aura d'autres prix avec une taxe de 9 %
ou 10 %, quand ce sont des repas, et finalement, on se retrouvera avec plus de
revenus pour l'État et moins pour les municipalités. C'est
souvent comme cela. On ne s'inquiète pas tellement des autres, on essaie
de ne pas faire de vagues, on règle des choses à la suite de
demandes, mais, comme question, j'aimerais savoir si... Moi, j'en achète
en tout cas des billets de saison. Quand j'achète des billets de saison,
j'ai l'impression que la taxe est incluse à l'intérieur. Le fait
qu'on modifie cela maintenant, qu'est-ce que cela changera au niveau de la
perception pour la municipalité comme telle et les organismes qui, eux,
vendent les billets?
Il y a un article, je dois dire, qui nous concerne encore plus. C'est au
moins de la constance, pas au niveau des numéros des projets de loi,
mais au moins au niveau des discussions qu'on a depuis ce matin. Le projet
permet, dans le cas d'un immeuble possédé en
copropriété indivise, que le compte de taxes foncières
soit expédié à un seul copropriétaire plutôt
qu'à tous. On voit un peu que c'est dans la ligne de ce qu'on a
discuté tout l'après-midi et sur cela aussi on pourra revenir.
Donc, le questionnement que j'ai là-dessus - on n'a pas grand temps et
mon temps achève probablement - ce sont encore les craintes que j'ai
exprimées au sujet d'autres lois. Je n'étais malheureusement pas
là pour vous entendre, mais j'aurais probablement plus d'arguments
à vous apporter quant aux points sur lesquels vous avez insisté.
Pour l'évaluation
foncière, entre autres, quand on se sent obligé
d'intervenir, c'est souvent à cause des gestes qu'on a posés
comme gouvernement. Vous vous rappellerez qu'on disait que le fait d'annoncer
la levée du moratoire était pour causer presque un déluge
d'augmentations et, à ce moment-là, vous aviez dit: Non, cela ne
changera rien, le député fait de la démagogie et il en met
toujours plus que ce qui va arriver effectivement. Les chiffres nous prouvent
maintenant le contraire. La spéculation, les taux d'augmentation qu'on
connaît présentement et qui nous amènent à
légiférer, c'est à cause de gestes qui ont
été posés et, parmi ceux-là, il y a cela. C'est
d'encourager la conversion qui a fait en sorte qu'il y a des quartiers
où cela a été accéléré, au point
où la Régie du logement nous a fourni des chiffres que vous avez
même reconnus dans le document "La levée du moratoire, une
décision qui s'impose". Donc, s'il y a plus de demandes, c'est qu'il y a
plus de conversions, s'il y a plus de conversions, c'est qu'il y a plus de
transformations et cela implique des augmentations. On ne peut pas dire que
cela n'en implique pas. La preuve, c'est qu'on se retrouve avec la loi 82 qui
dit qu'il y a tellement d'augmentations et tellement considérables qu'il
faut maintenant répondre aux demandes des municipalités,
spécialement de Montréal, pour essayer de corriger une situation
qui devient pour certains Intolérable. Donc, ce sont des augmentations
qui sont vertigineuses. Là, on va les régler sans
nécessairement régler le problème de fond encore une fois,
mais en y allant d'une façon plutôt très ponctuelle,
modérée, en essayant de répondre favorablement à
des demandes qui règlent des problèmes ponctuels.
Je ne sais pas si vous avez l'intention de retoucher comme telle et de
façon globale, à un moment donné, à la
fiscalité municipale, mais je veux juste vous rappeler, dans un domaine
si complexe qui touche tant de personnes, parce que c'est à toutes les
corporations municipales du Québec et, par la suite, à l'ensemble
des contribuables municipaux, de prévoir que, plutôt d'y aller
à la pièce comme cela, on y aille d'une consultation, avec des
échanges pour aboutir à un ajustement de la fiscalité
municipale qui date déjà de huit ans et cela de façon
qu'on ne vienne pas toucher au fondement même. Dès qu'on touche
à quelque chose qui est fondamental, on risque d'ébranler et de
changer des choses. Je ne voudrais surtout pas que cela vienne justifier qu'on
revienne là où on en était auparavant. Les
municipalités ont prouvé que, plus on leur donne de pouvoirs,
mais bien déterminés avec les responsabilités, la
compétence, sans ingérence et sans sollicitation indues, cela
leur permet des développements qui sont plus harmonieux et, finalement,
qui permettent aux citoyens d'être plus proches d'elles, même
si...
À ce propos, j'ai deux dernières petites remarques. Cela
permettrait aussi peut-être d'aller plus profondément à
l'intérieur d'une révision et de répondre davantage aux
demandes des citoyens.
Je prends seulement un exemple. On parle des coopératives. Ici,
ce ne sont pas les coopératives d'habitation, c'est le mouvement
coopératif comme tel, sauf qu'il y a une demande qui a été
faite et qui devra, si jamais vous la trouvez intéressante, être
considérée à l'intérieur de la fiscalité
municipale. C'est le mouvement des coopératives d'habitation qui demande
que ses coopératives soient considérées pour la taxe
foncière non pas comme immeuble privé, mais comme logement
social. Je dois vous dire que cela mérite d'être drôlement
considéré à la lumière de ce qu'on a discuté
cet après-midi quand, dans le projet de loi 87, on fait une
différence fondamentale entre le logement coopératif, les
organismes sans but lucratif et le logement social par rapport à
l'entreprise privée locative ou la propriété privée
de logements. Si, dans un projet de loi, on décide de considérer
qu'on ne traite pas de façon égale les deux genres de maisons, de
logements, en ce qui concerne la conversion en copropriété,
pourquoi, dans un autre projet de loi qui est directement relié aussi -
ce serait un facteur pour permettre qu'il y ait plus de coopératives
d'habitation - ne pas considérer le logement coopératif comme du
logement social? Cela aurait pour effet de favoriser le développement
coopératif et, en même temps, de modérer la
spéculation; parce que, plus on va retrouver de logements sociaux et
coopératifs dans un quartier, plus il est probable que la
spéculation soit moins forte et augmente moins. Donc, si on veut
répondre à cela, à un moment donné, cela va
être dans la loi fiscale. La demande est là. Est-ce que nous
serons intéressés, comme législateurs, à en tenir
compte? Je pense qu'on devrait commencer immédiatement a
considérer cela. Ce serait une façon de modérer la
spéculation. Ce serait une façon de permettre plus de logements
sociaux.
C'est sûr qu'il y a des municipalités qui vont s'opposer.
Mais, comme gouvernement, on a une responsabilité face à cela,
une responsabilité face au logement, même si, face à ce
secteur, on prend de moins en moins de responsabilités et on en
transfère de plus en plus aux municipalités. Si on trouve
important de faire la différence dans certaines lois, il faudrait, en ce
qui concerne la mentalité, la philosophie et la ligne de conduite, que
la ligne directrice du gouvernement ne soit pas limitée à un
secteur, quand on a une intervention face au logement coopératif, mais
que ce soit à l'ensemble de la législation qu'on apporte de
reconnaître qu'il y a une différence. (20 h 45)
Donc, en gros, c'est cela. On a dit qu'on serait d'accord, parce qu'il
faut corriger des lacunes qui nous ont été apportées par
les municipalités. On aura des interrogations lors de l'étude
article par article pour demander des éclaircissements et nous
apporterons nos inter-
rogations, notre vision des choses dans le sens d'aider les
muicipalités. mais aussi de penser en fonction d'une politique globale
de la fiscalité.
Je vous disais que les municipalités font de plus en plus preuve
de compétence au point où vous ne vous gênez pas pour leur
transférer des choses aussi fondamentales que presque tout l'ensemble de
l'habitation. Donc, si on accepte ça, il ne faudrait pas se retrouver
à un moment donné où, parce qu'on a touché à
des choses fondamentales, que l'on a ébranlé toute la structure,
l'on revienne à ce qu'on était avant et que l'autonomie presque
totale des municipalités soit rapetissée. C'est une question de
respect pour ces gens-là qui, tout comme nous, sont élus et, en
plus - on sait ce que ce sont les conseils municipaux - plus faciles de contact
pour les citoyens. Venir à Québec pour rencontrer l'ensemble des
députés, ce n'est pas facile pour la plupart des gens qui sont en
région, même si je pense que nous sommes aussi accessibles dans
nos comtés qu'un conseiller municipal, mais pour l'ensemble en tout cas,
rencontrer un ministre, c'est plus difficile que de rencontrer le maire ou de
se présenter chaque lundi soir ou premier mercredi du mois,
dépendamment des conseils municipaux, d'aller recontrer l'ensemble du
conseil, de faire valoir son point de vue et d'organiser une petite rencontre.
Ces gens-là ont un boulot très important. Ce sont des gens qui se
font élire démocratiquement, comme nous. C'est évident
qu'ils sont contraints et limités par les lois qu'on passe Ici à
Québec. Si on leur transfère des choses, il faudrait les leur
transférer avec les fonds nécessaires, avec les capacités
et les responsabilités pour les prendre, et non pas que nos lois leur
donnent des responsabilités sans les avantages qui y sont directement
rattachés et qu'ils soient contraints par des choses qui vont
déplaire à leurs citoyens, tout en leur donnant plus de pouvoir.
Mais le pouvoir, on sait ce que c'est, il faut être capable de l'exercer
correctement. Cela veut dire avec les moyens et l'argent, les moyens techniques
et l'argent. Trop souvent, je me rends compte qu'on transfère
présentement aux municipalités des responsabilités, mais
que les fonds ne suivent pas nécessairement.
Alors, moi, je serais prêt, M. le Président, à ce
qu'on attaque l'étude du projet de loi 82 article par article.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: M. le Président, quelques minutes seulement
pour féliciter le député de Shefford de sa brillante
intervention et de sa brillante entrée dans le merveilleux monde des
affaires municipales. Je dois dire que, pour un coup d'essai, c'est un coup de
maître. Il a pratiquement réussi à faire 20 minutes, comme
ça, à brûle-pourpoint en remplacement du critique
régulier. Je félicite le député de Shefford d'avoir
choisi de rester au pays et de venir défendre les couleurs des affaires
municipales. Nous lui en savons gré, M. le Président. Sinon, nous
aurions été obligés d'ajourner jusqu'à la semaine
prochaine. Le député fait ça tellement bien qu'il peut se
rendre compte finalement qu'il y a moyen d'être critique à temps
plein aux affaires municipales et d'être critique à temps plein
à l'habitation. Je ne lui ferai pas l'injure de lui dire qu'il critique
à mi-temps à l'habitation et critique à mi-temps aux
affaires municipales. Je pense qu'effectivement, c'est très bien
parti.
Évidemment, ce n'est pas très compliqué de
procéder comme il le fait, parce qu'il prend les mêmes cassettes
qu'il utilise à l'habitation et il nous les sert aux affaires
municipales. Par exemple, le député nous dit avec ça prend
une politique globale... Forcément, il nous dit toujours la même
chose en matière d'habitation. Donc, il n'y a qu'à transposer les
mêmes phrases et ça fait toujours de la belle prose. Maintenant,
je dois dire quand même, en matière de fiscalité
municipale, que c'est facile de parler d'une politique globale en
matière de fiscalité municipale. Mais le député
sait fort bien que la fiscalité, cela évolue tous les jours dans
notre société. S'il fallait que le ministre des Finances du
Québec ou d'Ottawa fasse une réforme de la fiscalité
à chaque fois qu'il annonce de nouvelles mesures, je pense bien qu'il
ferait une réforme à chaque six mois, parce qu'à chaque
six mois il y a toujours de nouvelles mesures fiscales qui sont
annoncées par les gouvernements et on s'ajuste en
conséquence.
C'est la même chose dans le milieu municipal. Le milieu municipal
évolue continuellement. La conjoncture n'est pas la même d'une
année à l'autre et on doit continuellement s'ajuster. Sans
ça, si on disait: Non, on ne s'ajuste pas, parce qu'on attend de faire
une réforme globale, les municipalités auraient le temps de
crever avant qu'on puisse accoucher d'une réforme globale. Pendant ce
temps-là, on n'aurait pas l'impression ni la sensation de faire votre
travail et de rendre service à la population.
Maintenant, est-ce que nous légiférons à la
pièce avec un projet comme ça? Je ne pense pas. Je pense que nous
ne faisons que nous ajuster à une situation qui s'est
développée surtout au cours de la dernière année et
nous venons donner aux municipalités un outil qui, dorénavant,
sera disponible non seulement au cours de l'année qui vient, mais pour
les années à venir.
Le député semble dire qu'on arrive avec une modification
comme celle-là un peu comme un cheveu sur la soupe et qu'on n'a pas
consulté. Alors là, je dois dire que le député
n'est pas vraiment... On ne peut pas le blâmer de s'exprimer ainsi, parce
qu'il n'est pas à l'année longue
critique aux affaires municipales. Il est peut-être mal
Informé. Mais le député devrait savoir - enfin, il ne ne
le sait peut-être pas, mais on va lui dire - que ces mesures ont fait
l'objet d'études et de consultations avec le milieu municipal, depuis au
moins huit ou neuf mois. Il y a eu comité technique sur comité
technique; rencontres de la table Québec-municipalités à
de nombreuses reprises; les assises Québec-municipalités au mois
d'août. Tout cela a été brassé et rebrassé
à l'infini, pratiquement, jusqu'à ce que nous en arrivions
à ce consensus qui fait, je dois le dire, l'unanimité dans le
monde municipal sur les mesures de plafonnement et d'étalemment que nous
proposons présentement. Maintenant, une dernière remarque. Le
député nous parle de son souhait de voir les coopératives
évaluées sur le même plan que le logement social.
Là, je dois dire que le député s'avance sur une pente un
peu savonneuse. Si l'on devait voir les coopératives
évaluées au même niveau que les HLM, là, les
coopératives auraient une surprise, parce que c'est une
sur-évaluation qu'elles subiraient et non pas une
sous-évaluation. Le député sait fort bien qu'il est de
commune renommée que les HLM sont surévalués au
Québec. À telle enseigne que la Société
d'habitation du Québec est obligée, pour bien s'acquitter de son
rôle de bon gestionnaire, de contester les évaluations
foncières des HLM et le résultat de ces contestations, c'est
qu'elle réussit dans tous les cas à obtenir des réductions
d'évaluation, étant entendu que les évaluateurs ont
nettement exagéré dans le cas du logement social. Je pense qu'il
ne faut pas toucher à l'évaluation foncière. Les
immeubles, quels qu'ils soient, doivent représenter la valeur marchande
et, si on commence à introduire dans le système
d'évaluation, des exceptions à l'égard de certains types
d'immeubles, tous les citoyens, tous les groupes de citoyens vont vouloir faire
partie des groupes d'exception et, finalement, il n'y aura plus aucune
équité dans le système.
Dernière remarque. Le député nous dit que la
spéculation foncière augmente, que l'évaluation globale
augmente et que donc, catastrophe, les citoyens doivent payer plus cher. Alors,
ce n'est pas comprendre très bien le système que de dire cela. Ce
n'est pas parce que l'évaluation globale augmente que les comptes de
taxes augmentent. Il n'y a aucune espèce de relation entre
l'augmentation de l'évaluation du rôle d'une municipalité
et la charge qu'ont à payer les citoyens comme comptes de taxes. Si
l'évaluation augmente de 50 %, cela ne signifie absolument rien si l'on
garde un budget constant. La municipalité va diminuer son taux de taxe
de 50 % et les contribuables vont payer exactement la même chose.
Deux choses font augmenter le compte de taxes d'un citoyen: ou bien
c'est l'augmentation du budget annuel et les municipalités, en
général, sont assez prudentes et assez bonnes gestionnaires pour
ne pas augmenter le budget de plus que 4 % ou 5 % en règle
générale, donc, c'est quand même une augmentation qui n'est
pas excessive; et le seul autre cas où un contribuable peut se plaindre,
c'est quand son évaluation personnelle augmente beaucoup plus que la
moyenne. Évidemment, cela peut arriver, parce qu'une moyenne est
formée d'un certain nombre d'intrants qui fait que certains sont plus
bas et d'autres plus hauts. Mais il reste que ceux qui verraient leur
évaluation personnelle augmenter beaucoup plus que la moyenne, ce sont
ceux-là qui sont frappés. Mais maintenant, ils sont
frappés et c'est pour cela que nous proposons des mesures pour tenter
d'amenuiser leur brusque hausse.
Le député nous dit que c'est une mesure qui va profiter
beaucoup plus aux riches qu'aux pauvres, que ceux dont l'évaluation
personnelle est très importante vont en bénéficier plus
que ceux dont l'évaluation est plus modeste. Bon, une observation
là-dessus. Le système marche en fonction des proportions, des
pourcentages et il n'y a absolument rien qui justifie de penser qu'une maison
modeste va subir moins d'augmentation en pourcentage que la maison de quelqu'un
qui est plus à l'aise financièrement. On n'observe pas
généralement ce genre de distinction. Les catégories
d'immeubles augmentent autant en pourcentage, que ce soient des immeubles plus
modestes que des immeubles évalués plus haut. Le montant du gain
peut être plus important, c'est évident. Quelqu'un qui se fait
plafonner et dont l'évaluation foncière est très
importante fera une économie plus importante que celui dont
l'évaluation est plus basse. Cependant, je pose au député
la question suivante: Qui paiera pour cette économie-là? La
facture totale de la municipalité, le coût total pour la
municipalité de ce plafonnement est payé par qui? Il est
réparti sur l'ensemble des contribuables moyennant une hausse du taux de
taxation, une hausse de 0,02 $, 0,03 $ ou 0,05 $ du taux de taxation. Or, cette
hausse, elle est payée par qui? Elle est payée par les
contribuables, tous les contribuables, et celui qui a une évaluation
foncière très élevée paiera beaucoup plus que celui
qui a une petite évaluation foncière, de sorte que le gain que
font les contribuables qui ont des immeubles très importants est
réparti dans la même proportion entre tous les contribuables. Ce
sont donc les contribuables qui ont des immeubles qui sont
évalués plus chers qui paieront la grosse partie de la facture de
la prime d'assurance, si je peux m'exprimer ainsi, de sorte qu'à mon
avis, le système est totalement équitable et profite autant
à ceux dont l'évaluation est peu importante qu'à ceux dont
l'évaluation est plus importante.
M. le Président, je pense que cela clôt pour l'instant mes
remarques.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le
député de Gouin.
Discussion générale
M. Rochefort: Oui. Je n'ai pas l'intention de refaire le discours
que j'ai fait en fin d'après-midi en deuxième lecture, mais je
voudrais quand même adresser deux questions très précises
au ministre, puisque cela concerne des choses qu'il a décidé de
ne pas inclure dans le projet de loi. Je voudrais justement lui demander de
nous dire pourquoi il n'a pas donné suite aux demandes des
autorités de Montréal quant au crédit d'impôt
foncier et quant au taux de taxes variable.
M. Bourbeau: Je dirais au député que ces demandes
de crédit d'impôt, de taxes variables, on les entendait surtout au
printemps et au début de l'été. Si le député
a bien écouté, on ne les entend plus depuis quelques mois ces
demandes-là en provenance de la ville de Montréal. Enfin, on les
entend peut-être provenant de certains conseillers, dans les quartiers
moins bien informés, mais, au niveau des principaux dirigeants de la
ville qui sont au courant du dossier, on ne les entend plus. La raison en est
simple. La ville de Montréal a Initialement demandé des taux de
taxes variables et des crédits d'impôt en supposant qu'il y avait
eu un déplacement du fardeau fiscal à partir du secteur non
résidentiel vers le secteur résidentiel. En conséquence,
elle demandait des taux de taxes variables pour compenser le
déplacement.
Mais, à la suite des nombreuses réunions que nous avons
eues et des travaux du comité technique, la preuve a été
faite qu'il n'y a pas eu de déplacement de l'évaluation
foncière, du fardeau fiscal à partir du secteur non
résidentiel vers le secteur résidentiel, ce qui, à toutes
fins utiles, a enlevé à la ville de Montréal le fondement
de sa réclamation. Il aurait été injuste d'imposer des
taux de taxes variables s'il n'y avait pas eu de déplacement fiscal.
Nous avons prouvé que, pour la période de 1980 à 1987,
soit à partir de la réforme de la fiscalité municipale
jusqu'à l'an dernier, jusqu'à cette année
plutôt...
M. Rochefort: Inclusivement?
M. Bourbeau: 1987 inclusivement, il n'y a pas eu, pour
l'ensemble, de déplacement du fardeau fiscal. Je dirais au
député que, si on considère l'ensemble des recettes
fiscales de la ville de Montréal, pour la période de 1980
à 1987, le ministère des Affaires municipales, sur la base des
données budgétaires de la ville de Montréal a
constaté que le secteur résidentiel n'a pas subi un
alourdissement de son fardeau fiscal. Il était de 38,12 % du budget de
la ville de Montréal en 1980 et les revenus provenant du secteur
résidentiel en 1980 étaient de 38,12 % du budget. En 1987, il
compte pour 39,8 %, soit à toutes fins utiles à peu près
la même chose. (21 heures)
Le secteur industriel et commercial, pour sa part, qui apportait 58,7 %
des recettes totales de la ville de Montréal en 1980 compte, en 1987,
pour 58,9 % de ses recettes, donc, à toutes fins utiles, exactement le
même pourcentage. Les représentants de la ville de
Montréal, en ayant recours à d'autres méthodes de calcul
que les nôtres, en sont arrivés à des résultats
compatibles avec ceux-là.
M. Rochefort: M. le Président. Je veux bien et je prends
bonne note de ce que vous me dites, mais cela ne règle pas totalement le
débat du taux de taxe variable. Rappelons-nous vos propres arguments
l'an dernier, en plein coeur de la crise entourant l'augmentation faramineuse
des comptes de taxe municipale à la suite de l'augmentation de
l'évaluation. Vous nous disiez, je me souviens très bien vous
avoir entendu nous répondre cela: La ville n'a qu'à baisser son
taux de taxe.
M. Bourbeau: Non, non.
M. Rochefort: Ah oui, vous nous avez dit cela. Certainement! Si
la ville diminuait son taux de taxe dans la mesure où
l'évaluation augmentait, il n'y aurait pas d'augmentation
proportionnelle à l'augmentation du taux d'évaluation des
immeubles et, en conséquence, le problème ne serait pas le
même. Sauf que, compte tenu justement de ces deux secteurs
d'activité qui n'avaient pas connu, notamment l'année
dernière - je ne sais pas si vous aviez des chiffres
spécifiquement pour l'an passé - un rythme de croissance de leur
évaluation comparable, c'est évident que cela faisait en sorte
qu'il y avait un seuil en deçà duquel on ne pouvait pas baisser
les taux de taxe, sinon il y avait carrément un problème de
disproportion et un problème de rentrée de fonds. Je pense que,
de ce point de vue-là, il ne faut pas rejeter du revers de la main
l'idée du taux de taxe variable à partir simplement de
l'argumentation que vous venez de développer. Il y a un autre volet qui
doit être pris en considération et qui, à mes yeux,
justifie toujours qu'on étudie sérieusement la demande pour un
taux de taxe variable.
M. Bourbeau: M. le Président, si on devait adopter les
taux de taxe variables, pourquoi les adopterions-nous, sinon pour discriminer
en faveur ou contre une catégorie de contribuables?
M. Rochefort: Oui, parfait, là-dessus on se suit.
M. Bourbeau: L'objectif visé était clair.
C'était de faire en sorte d'imposer à une catégorie de
propriétaires, notamment la catégorie des secteurs commerciaux et
industriels, un taux de taxe plus élevé que la catégorie
résidentielle, dans le but de contrer de présumés
déplacements du fardeau fiscal. À partir du moment où on
a
prouvé qu'il n'y a pas eu déplacement du fardeau fiscal,
il aurait été inique d'imposer des taux de taxe variables. L'an
dernier, lorsque...
M. Rochefort: Donnez-moi donc 1987.
Comment l'augmentation du taux d'évaluation s'est-elle
comportée en 1987 pour les deux secteurs?
M. Bourbeau: Le député a dit que l'augmentation,
l'an dernier, des comptes de taxes était provoquée par
l'augmentation de l'évaluation.
M. Rochefort: Bien, oui.
M. Bourbeau: Je soumets au député,
premièrement, ce que j'ai dit aux députés l'an dernier. Le
premier conseil que j'ai donné aux municipalités, c'est de se
serrer la ceinture et de restreindre leurs dépenses comme le fait le
gouvernement. C'était un conseil qui était, je pense, bien
indiqué dans les circonstances.
M. Rochefort: Le deuxième?
M. Bourbeau: La deuxième observation que j'ai faite, c'est
que ce n'est pas parce que l'évaluation foncière augmente - j'ai
fait cette observation aussi ce soir - que les comptes de taxe vont augmenter.
Si, à la ville de Montréal, l'évaluation augmente de 30 %,
elle n'est pas justifiée d'augmenter ses dépenses de 30 %. Donc,
une augmentation de l'évaluation ne veut rien dire au départ,
tant qu'on n'a pas vu le taux de taxe que demande la municipalité. La
preuve, c'est que cette année, la ville de Montréal a
indiqué qu'elle ferait passer son taux de taxe de 2,54 $ à 2,12
$, je pense, quelque chose comme cela.
M. Rochefort: 2,17 $, je pense.
M. Bourbeau: Enfin, je n'ai pas les chiffres devant moi. Ce qui
prouve donc que l'augmentation de l'évaluation ne signifie rien tant
qu'on n'a pas vu le compte de taxes. L'an dernier, la ville de Montréal
- le député de Gouin le sait fort bien - a obtenu du gouvernement
la possibilité d'annuler la taxe d'eau pour le secteur
résidentiel et uniquement pour le secteur résidentiel.
M. Rochefort: Si vous voulez en parler...
M. Bourbeau: Cette mesure-là, en elle-même, a fait
transférer des millions et des millions de dollars du secteur
résidentiel vers le secteur non résidentiel, bien sûr. La
ville de Montréal percevait, l'année précédente, 26
000 000 $.
M. Rochefort: Ce ne sont pas des millions et des millions...
M. Bourbeau: Ce ne sont pas des millions et des millions que 26
000 000 $, mais c'est plus que...
M. Rochefort: Vous trouvez cela important. Vous allez voir que
vous allez me répondre par un autre chiffre dans dix secondes.
M. Bourbeau: ...des millions et des millions totalisant
jusqu'à 26 000 000 $, l'an dernier, en taxe d'eau que la ville de
Montréal a cessé de prélever du seul secteur
résidentiel. Évidemment, cela a eu pour effet de répartir
sur le secteur commercial et industriel une bonne partie de cette somme et cela
a été un des facteurs qui a permis, encore une fois,
d'équilibrer le fardeau entre les secteurs résidentiel,
commercial et industriel, de sorte qu'on peut affirmer - la preuve est faite -
qu'il n'y a pas eu de déplacement fiscal.
M. Rochefort: M. le Président, je reviens à ma
question précise et, après cela, j'aurai deux autres
commentaires. En 1987, est-ce que vous ou vos collaborateurs avez entre les
mains la distinction quant à l'augmentation de l'évaluation entre
le secteur résidentiel et le secteur non résidentiel à
Montréal? Quel a été le taux d'augmentation dans les deux
secteurs en 1987?
M. Bourbeau: Selon les renseignements provenants de la ville de
Montréal elle-même, pour la période 1986-1987, le
rôle total a augmenté l'an dernier de 13 % et, pour le secteur
résidentiel, de 16,6 %.
M. Rochefort: Et pour le secteur non résidentiel?
M. Bourbeau: L'an dernier, pour le secteur commercial, 9,8 %;
pour le secteur industriel, 9,1 %; pour les terrains vacants, 26,6 %.
M. Rochefort: C'est correct, M. le ministre. Vous m'en avez assez
dit. Est-ce qu'on se comprend donc qu'à partir de données comme
celles que vous venez tout juste de me fournir, l'idée, la notion, le
concept de taux de taxe variable est toujours vrai, colle toujours à une
réalité et a une problématique qui existe dans la vraie
vie du monde de tous les jours? Je comprends que vous pouvez peut-être
vous rattraper en essayant d'établir des courbes sur toute la
durée de la réforme, c'est-à-dire de 1980 à 1987
inclusivement. J'ai confiance dans les chiffres que vos collaborateurs nous ont
fournis tantôt, c'est évident. Mais quand on prend une
année qui est l'année "peak" de l'affaire, pour bien se
comprendre, là, cela ne fonctionne plus. On a un écart de 7 %
entre les deux secteurs et donc, là, l'idée d'un taux de taxe
variable prend tout son sens, toute sa valeur. Je veux simplement, M. le
ministre, à partir de la discussion qu'on a, que vous nous disiez qu'au
minimum, vous maintenez ouverte la porte à l'introduction d'un taux
de
taxe variable et que vous vous engagez à le regarder avec les
autorités montréalaises. Là-dessus, je vous dirai que tout
le monde aurait avantage...
M. Bourbeau: M. le Président...
M. Rochefort: ...à parler aux autorités de
Montréal, je pense.
M. Bourbeau: ...le député de Gouin n'a qu'une vue
partielle du problème. Je ne peux pas le blâmer, M. le
Président, ce n'est pas un expert en fiscalité ni en affaires
municipales, évidemment. Il s'amène aujourd'hui ici, au milieu
d'autres travaux qu'il est en train de faire...
M. Rochefort: M. le Président...
M. Bourbeau: ...et il nous fait un discours sur la...
M. Rochefort: M. le Président... M. Bourbeau:
...fiscalité municipale. M. Rochefort: M. le
Président...
M. Bourbeau: Mais pourquoi est-ce que vous m'interrompez? Vous
n'êtes pas satisfait de la...
M. Rochefort: M. le Président. Oui, je veux simplement
donner un conseil au ministre. Si le ministre a des arguments de fond, on est
prêt à les entendre.
M. Bourbeau: Oui, mais c'est ce que j'allais faire, M. le
Président.
M. Rochefort: S'il a du placotage. du "fafinage", qu'il le dise.
On va aller se chercher du travail et on va lui organiser sa soirée. Si
c'est ce qu'il veut faire, on peut vous organiser cela, il n'y a pas de
problème. Parlez donc du fond, le débat est intéressant
jusqu'à maintenant.
M. Bourbeau: M. le Président, le député de
Gouin ne semble pas particulièrement apprécier les remarques
qu'on lui fait, mais il devrait comprendre que, s'il peut se permettre d'en
faire aux autres, il devrait être capable d'en encaisser un peu.
M. Rochefort: Mon Dieu!
M. Bourbeau: Quand on est en politique, M. le Président,
il ne faut pas seulement donner, il faut savoir recevoir un peu aussi.
M. Rochefort: Oui, j'avoue que, dans votre cas...
M. Bourbeau: Je dirais au député...
M. Rochefort: ...vous parlez avec éloquence.
M. Bourbeau: Je dirais au député de Gouin
que...
Le Président (M. Saint-Roch): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bourbeau: ...la question de l'évaluation
foncière des immeubles est un aspect seulement de l'ensemble des
recettes d'une municipalité, soit les taxes foncières. Quand on
regarde la question du déplacement du fardeau fiscal, on ne parle pas
uniquement de la taxe foncière. C'est ce que le député de
Gouin ne comprend pas. Il faut regarder la totalité des revenus d'une
municipalité et se demander s'il y a un déplacement sur la
totalité des revenus entre le secteur résidentiel et le secteur
non résidentiel. Je répète au député que,
sur l'ensemble des revenus de la ville de Montréal pour la
période de 1980 à 1987, il n'y a pas eu, a quelques dollars
près, de déplacement du fardeau fiscal du secteur non
résidentiel vers le secteur résidentiel parce que la
municipalité a utilisé des outils qui ont été mis
à sa disposition pour contrer le déplacement théorique qui
aurait pu exister. Par exemple, la taxe d'eau qu'on a cessé d'imposer au
secteur résidentiel, ce qui a fait économiser 26 000 000 $
à ce secteur, la taxe d'affaires qui est imposée uniquement au
secteur non résidentiel...
M. Rochefort: On parle de la surtaxe?
M. Bourbeau: ...et qui rapporte 194 000 000 $ par année,
la surtaxe sur les immeubles de 200 000 $ et plus, uniquement imposée au
secteur non résidentiel, qui a rapporté 6 500 000 $. L'ensemble
de ces outils-là qui ont été mis à la disposition
de la ville de Montréal a fait en sorte d'annuler totalement toute
possibilité de déplacement fiscal.
M. Rochefort: Y compris exclusivement 1987?
M. Bourbeau: Pour la période de 1980 à 1987.
M. Rochefort: Je parle de 1987, je pense que c'est clair, depuis
le début de mon intervention.
M. Bourbeau: J'ai expliqué tout à l'heure au
député que la ville de Montréal perçoit en 1987 -
prenons l'année 1987 puisque c'est l'année qui l'intéresse
le plus - du secteur non résidentiel, 58,9 % de ses recettes et qu'en
1980, sept ans plus tôt, elle percevait 58,7 % de ses recettes. Il n'y a
eu donc aucune espèce de déplacement, sur une période de
sept ans. Elle perçoit toujours la même proportion de ses recettes
du secteur non résidentiel et du secteur résidentiel.
M. Rochefort: 1966 par rapport à 1987.
M. Bourbeau: C'est l'immuabilité totale. Bref, la ville de
Montréal elle-même s'en est déclarée satisfaite.
M. Rochefort: 1986 par rapport...
M. Bourbeau: Je ne vois pas pourquoi le député de
Gouin vient faire une bataille d'arrière-garde, alors que les propres
intéressés s'en déclarent satisfaits.
M. Rochefort: Voulez-vous me dire quelle est la différence
entre 1986 et 1987?
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai expliqué au
député qu'entre 1986 et 1987, il y a eu l'abolition de la taxe
d'eau à Montréal, qui a fait économiser 26 000 000 $ au
secteur résidentiel.
M. Rochefort: On a tous compris cela, mais il n'y a pas que
cela.
M. Bourbeau: M. le Président, je renonce à
expliquer au député de Gouin des choses qu'il semble ne pas
vouloir comprendre ou ne pas pouvoir comprendre.
M. Rochefort: Écoutez, M. le Président, si c'est
l'attitude du ministre, on va commencer à étudier sa loi. On va
essayer d'avancer ce soir.
Le Président (M. Saint-Roch): Alors, ceci met une fin aux
remarques préliminaires, j'appelle maintenant l'article...
M. Rochefort: On comprend ce soir, M. le Président, quand
le monde municipal sent qu'il manque de compréhension chez le ministre
des Affaires municipales. Je les comprends de plus en plus.
Le Président (M. Saint-Roch): Sur ce, nous allons
maintenant passer à l'article 1.
Étude détaillée
M. Bourbeau: L'article 1 abroge la disposition qui prévoit
qu'une personne doit payer la taxe d'amusement sur la base du prix
d'entrée normal dans le lieu d'amusement même si elle obtient le
privilège d'y entrer gratuitement ou à prix réduit. Ainsi,
la personne qui paye un prix d'entrée réduit paiera une taxe
d'amusement basée sur ce prix et celle qui entre gratuitement ne paiera
aucune taxe. C'est plus conforme au principe de loi concernant les droits sur
les divertissements.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a des
interventions?
M. Paré: Oui.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Shefford.
M. Paré: Avant de parler directement là-dessus -
tantôt vous m'avez dit que mon temps de 20 minutes était fini et
que je ne pouvais pas - dans les quelques minutes que j'ai à ma
disposition, je vais revenir avec quelques commentaires concernant les
commentaires du ministre.
Le Président (M. Saint-Roch): En respectant la pertinence,
M. le député de Shefford.
M. Paré: Oui, mais la pertinence concerne finalement
l'ensemble de ce qu'on est en train d'étudier. Je vais vous dire
seulement un petit commentaire qui va peut-être vous paraître non
pertinent, mais je pense que c'est bon de le rappeler. Je ne trouve pas
très correct d'avoir fait allusion à mon collègue qui est
absent, qui est à l'extérieur, en sachant très bien qu'il
est en délégation, quand on sait que le premier ministre a
été obligé d'émettre une directive pour
modérer et éliminer un peu les voyages des ministres qui sont
toujours en trotte à l'extérieur du Québec. Cela dit,
quand on parlait aussi...
M. Rochefort: On en a les conséquences devant nous.
M. Paré: Quand vous avez parlé
d'équité tantôt, M. le ministre, une des plus belles
équités dont vous avez parlé est qu'il faut que les
immeubles soient basés sur la valeur réelle et que c'est normal
qu'il y ait égalité pour tout le monde. La première
égalité qu'on devrait respecter comme gouvernement, ce serait de
payer nos taxes totales aux municipalités et de faire les pressions
nécessaires pour que le gouvernement fédéral fasse la
même chose. Ce serait peut-être une aide acceptable, correcte et
équitable pour l'ensemble de nos municipalités. Vous allez
reconnaître, quand vous avez dit tantôt que la seule chose qui fait
en sorte qu'il y ait une augmentation, c'est l'augmentation du taux ou
l'augmentation d'un édifice par sa rénovation, vous allez
admettre, dis-je, qu'une des façons de faire augmenter plus que tout le
reste ou en tout cas considérablement, c'est, entre autres, la
transformation en copropriété. Je pense que c'est clair et net.
Un dernier petit point, en toute équité aussi - parce que vous
l'avez utilisé à plusieurs reprise, en toute équité
- quand on parle de plafonnement, je pense que c'est là qu'il faut faire
attention à l'équité. Quand on parle de plafonnement, si
on dit qu'on plafonne - vous avez dit cela: On plafonne - c'est pour tout le
monde. Et, si la municipalité a moins de gains ou décide de
répartir le manque, elle augmente de façon générale
et globale de 2 % à 3 %. Sauf que, si tout le monde n'est pas
plafonné, l'augmentation n'est pas la même pour tout le monde.
Et, c'est pour les petites maisons non rénovées, dans des
quartiers peut-être plus pauvres, qu'il n'y a pas cette augmentation,
donc, qu'il n'y a pas le plafonnement. Cela veut dire qu'eux ne sont pas
plafonnés, mais, par contre, ils vont écoper du 2 % à 3 %
imposé de façon globale et générale.
Donc, il faut faire attention à l'équité
au-delà du discours, il faut aller, je pense, au fond des choses.
Mais...
M. Bourbeau:...
M. Paré: Oui, allez-y!
M. Bourbeau: ...peut-être de dire. Là-dessus, le
député a dit que les petites maisons n'étant pas
rénovées, l'évaluation n'augmente pas. Je signale au
député que les améliorations physiques qui sont
amenées aux maisons ne font pas partie de la mesure de plafonnement.
Autrement dit, si l'évaluation de quelqu'un augmente de 50 % et que,
là-dessus, il y a la moitié de l'augmentation de
l'évaluation qui provient d'améliorations physiques qui ont
été faites à l'immeuble, cette augmentation de
l'évaluation n'est pas comptabilisée pour les fins de la mesure
de plafonnement. Ce sont uniquement les évaluations foncières qui
sont dues à la spéculation ou à l'inflation qui sont
comptées et non pas la plus-value apportée par des
améliorations physiques.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions à l'article 1?
M. Paré: Non. L'article 1.
M. Blais: Moi, j'en aurais, s'il vous plaît, si vous
permettez.
Le Président (M. Saint-Roch): Alors, M. le
député de Terrebonne, en conformité avec l'article 132 de
notre règlement et de nos procédures, l'aurais besoin d'un
consentement pour que nous puissions avoir le plaisir de vous entendre.
M. Blais: Non, c'est sur le droit de vote, mais n'Importe quel
député peut venir à la commission. Je m'excuse.
Le Président (M. Saint-Roch): 'Le député qui
n'est pas membre d'une commission peut, avec la permission de cette
dernière, participer à ses délibérations, mais ne
peut y voter ni y présenter de motion."
Alors, M. le député, sur ce, est-ce qu'il y a consentement
pour que nous puissions accorder le droit de parole à M. le
député de Terre-bonne?
M. Bourbeau: M. le Président, est-ce qu'on peut suspendre
pour 30 secondes? Je voudrais avoir une discussion avec le député
de Terre-bonne.
Le Président (M. Saint-Roch): Alors, la commission va
suspendre ses travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 21 h 17)
(Reprise à 21 h 18)
Le Président (M. Saint-Roch): A l'ordre s'il vous
plaît! J'ai bien dit, M. le député de Gouin, que cela
prenait le consentement unanime de la commission. Est-ce que nous avons votre
consentement?
M. Rochefort: Oui, M. le Président. Je suis un homme
différent du ministre des Affaires municipales.
M. Bourbeau: M. le Président...
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre est
consentant.
M. Bourbeau: ...le député de Terrebonne a tellement
de bonnes interventions à faire, il m'a donné un aperçu de
ce qu'il voulait nous dire, que je crois qu'on ne peut pas faire autrement que
de l'entendre.
Le Président (M. Saint-Roch): Alors, sur ce consentement,
je vais reconnaître M. le député de Terrebonne.
M. Rochefort: M. le Président, c'est un consentement pour
toute la durée de nos travaux?
M. Blais: M. le Président, j'aurais quelques questions
à poser sur la taxe d'amusement. L'article 1, en fait, concerne le
porteur d'un billet de faveur, d'un billet de saison ou d'un billet pour un
soir. Dans l'ancien règlement, le propriétaire, même s'il
donnait un billet gratuit à une personne, se voyait obligé de
payer la taxe d'amusement ou de la réclamer à la personne qui
recevait un billet gratuit. En soi, je suis complètement d'accord avec
le fond de la chose. J'aurais une question à poser au ministre. De
quelle façon maintenant, les inspecteurs qui passent... On arrive et on
regarde une salle de trois cent places, la salle est pleine, l'inspecteur
passe, c'est plein, il a fait son boulot, il part. Le lendemain ou c'est
à tous les mois que la plupart des salles de spectacles ou des lieux
d'amusement font des rapports aux villes et ce soir-là, le
propriétaire peut déclarer, à l'avenir, le nombre de
billets gratuits comme bon lui semblera. La ville perd tout contrôle sur
la perception si c'est écrit de cette façon-là. Je n'ai
rien contre, c'est une façon détournée de permettre au
propriétaire de "déclarer" entre guillemets - c'est une
porte ouverte - de faux billets gratuits.
Et cela est conséquent parce que, deuxièmement - j'ai une
deuxième question qui se rapporte à cela de façon directe
- les villes qui ont des conseils des arts comme Montréal, de
façon générale, remettent l'équivalent de la
perception des taxes d'amusement comme subvention aux institutions culturelles.
Si la perception, à l'avenir, par cette loi-là, est
tronquée à sa base, automatiquement, par ricochet, les
institutions culturelles recevront moins de subventions. Ce sont les deux
volets de la question.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, il va appartenir au
percepteur de la taxe d'amusement, par exemple, l'exploitant d'un parc
d'amusement ou d'une boîte à chansons, sur demande, de
démontrer à la municipalité que des personnes ont obtenu
le privilège d'entrer dans le lieu d'amusement gratuitement ou à
prix réduit. Cette démonstration que le percepteur fera nous
permettra d'expliquer que ces personnes n'ont pas payé de taxe ou ont
payé une taxe moins élevée et qu'ainsi, les sommes remises
à la municipalité en sont affectées. Si le percepteur
n'est pas capable de faire cette démonstration, il devra remettre
à la municipalité les sommes qui correspondent aux taxes qui
auraient été perçues si toutes les personnes admises dans
le lieu d'amusement ou ayant obtenu un billet d'admission avaient payé
le plein prix d'entrée. Évidemment, cela va imposer au percepteur
des contraintes, mais il faut bien endurer quelques épines si on veut
jouir des roses.
M. Blais: Comme propriétaire de salle, de façon
égoïste et égocentrique, je tiens à vous dire que
c'est excessivement plaisant de voir une chose comme celle-là et que
cela nous laissera la liberté de déclarer ce que l'on veut comme
personnes qui ont payé. C'est automatique, il n'y a pas assez
d'inspecteurs sur les routes pour venir dans chacune des salles de spectacle de
Montréal, disons, tous les soirs. D'accord? Pensez au nombre de
sièges que nous avons à Montréal. Il y a le forum pour le
sport et toutes les salles de spectacle et de divertissement et toutes ces
salles sont obligées, par la loi... Car, depuis la loi 125, ce sont les
villes qui gardent cette perception. Elles ne le remettent plus à la
province pour compenser ce que le gouvernement a pris sur la taxe de vente.
D'accord? Je sais que l'intention du législateur est bonne, mais la
façon de l'appliquer est inopérante parce que la ville va se
faire - entre guillemets - "voler" des sommes au détriment de l'ensemble
de la population et au détriment aussi, indirectement, des institutions
culturelles parce que ces sommes étant versées aux conseil des
arts de façon générale et remises en subventions aux
institutions, des deux côtés, les citoyens y perdront et les
propriétaires auront une meilleure... D'abord, ils seront
exemptés de l'impôt. Leur déclaration sera moins forte
parce que leurs revenus seront moins forts et parce qu'ils auront omis de
déclarer des entrées, ce que la loi permet maintenant. Je ne dis
pas que je sais comment faire pour corriger cette chose. Je ne le sais pas.
Mais, malgré les inconvénients de l'ancien système pour la
perception et pour le bien de l'ensemble des citoyens, je trouve cet article
moins bon que l'ancien système, bien que je le trouvais difficile
à appliquer aussi.
M. Bourbeau: M. le Président, je reconnais la très
grande compétence du député de Terre-bonne en cette
matière et on écoute avec beaucoup d'intérêt son
intervention. Je lui dirai cependant que cet article a été inclus
dans le projet de loi à la demande spécifique des
municipalités, de l'Union des municipalités du Québec, du
maire de Québec et du maire de Montréal...
M. Blais: Je ne comprends rien.
M. Bourbeau: ...qui nous ont demandé spécifiquement
de le faire. D'ailleurs, ce sont eux-mêmes qui en paient la facture,
forcément. Ils ont même comptabilisé, dans leur budget, les
manques à gagner de ces sommes. Nous avons établi avec eux la
formulation. Nos conseillers juridiques ont consulté les leurs. Ils se
font fort de trouver des systèmes pour faire en sorte de contrôler
la perception. Ce sera à eux de faire en sorte de trouver justement les
méthodes pour éviter qu'ils, comme dit le député,
ne se fassent avoir par les percepteurs de taxes et ceux qui exploitent les
salles d'amusement ou les salles de spectacle.
M. Blais: En tout cas, M. le ministre, je souhaite bonne chance
aux élus municipaux dans l'application de cette loi. Je n'ai plus de
salle à Montréal. Si j'en avais une, je vous jure qu'ils
regretteraient l'article 1.
M. Bourbeau: M. le Président, je vais omettre de dire
certaines choses qui me viennent à l'esprit rapidement, mais je dirai
aux municipalités que si elles ont besoin d'expertise, je les enverrai
voir le député de Terrebonne qui pourrait probablement leur
donner certains conseils.
M. Blais: Je peux vous conter une anecdote à ce sujet. Je
suis allé en cour et j'ai gagné. La loi était plus
serrée que cela et j'ai gagné. Il faut qu'on me fasse prouver que
j'ai tort. On le dit et vous me l'avez dit dans votre réplique
tantôt. Je me souviens que, dans l'ancienne loi qui était plus
corsée que celle-là, j'avais droit à 292 personnes au
Patriote, à l'époque. C'était Sol qui était chez
nous et il y en avait 417. Alors, à 292, j'arrêtais de donner des
billets. Je n'étais
pas pour m'accuser moi-même. Alors, ils sont venus et ils ont
compté le monde. Donc, ils ont dit que j'avais omis de donner des
billets de perception de taxe aux personnes qu'il y avait au-delà de
292. Le spectacle n'était pas commencé et on m'a obligé
à faire sortir le monde. C'est une anecdote qui est réellement
arrivée. Alors, je suis monté sur scène et j'ai dit aux
gens: Je m'excuse, il y en a 190 qui doivent sortir. Ce n'était pas
plaisant de leur remettre leur argent. Ils sont sortis parce que les gens qui
venaient dans mes institutions étaient d'une très grande
éducation et d'une coopération reconnue.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Blais: Alors, les gens sont sortis. J'ai été
accusé d'avoir permis à des gens d'assister à un spectacle
sans permis. Je suis allé moi-même en cour, je n'ai même pas
pris d'avocat. Je suis allé me défendre moi-même.
M. Bourbeau: Vous êtes d'ailleurs le meilleur avocat qu'on
puisse trouver.
M. Blais: Cela arrive très souvent que, pour se
défendre soi-même... Je suis arrivé en cour et ils
étaient plusieurs, ils étaient cinq. Ils ont dit: Voici, il y
avait 190 personnes qu'on a fait sortir, on avait compté, il y en avait
417. L'accusation se lisait comme suit, M. le ministre: D'avoir permis à
des gens d'assister à un spectacle...
M. Bourbeau: Ils n'avaient pas assisté au spectacle, donc
vous n'avez pas été condamné.
M. Blais: ...sans payer de taxe d'amusement. Bon, ils les ont
fait sortir, ils n'ont pas assisté. Donc, je n'ai pas
été...
M. Bourbeau: Ha, ha, ha!
M. Blais: Voyez-vous! Ce sont toutes des choses comme cela. C'est
toujours la ville qui perd. Cela a coûté une fortune à la
ville. Dans un cas comme celui-là, imaginez, on a le droit de laisser
entrer des gens, selon cette loi, à un spectacle sans avoir perçu
la taxe d'amusement pour ces gens. Après, c'est moi, comme
propriétaire de salle, qui vais déclarer combien j'en avais dans
ma salle qui avaient droit de ne pas payer la taxe. J'ai l'impression que c'est
un cul-de-sac. J'arrête mon intervention là. Mais c'était
pour vous prouver que c'est très difficile pour les municipalités
maintenant d'appliquer l'article 1 de la façon dont il est
rédigé. Cela va leur prendre un nombre effarant d'inspecteurs.
Mais si jamais les municipalités reviennent et vous disent l'an
prochain: On veut faire modifier cet article 1, je vous aurai prévenu,
parce que je suis persuadé qu'on reviendra avec cela.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
député de Terrebonne. Est-ce qu'il y d'autres interventions
à l'article 1?
M. Rochefort: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Gouin.
M. Rochefort: Le ministre nous a dit tantôt que les villes
avaient déjà prévu, dans leur budget, l'application de
l'article 1. Est-ce que le ministre pourrait nous dire, pour des villes comme
Montréal et Québec, puisqu'il s'agit de deux villes qu'il a
nommées, combien cela peut représenter à leur budget? De
combien parle-ton?
M. Bourbeau: M. le Président, je n'ai pas devant m oi le
budget de la ville de Montréal. Je peux dire au député
cependant que la ville de Québec estime à plus de 250 000 $ la
perte des revenus potentiels qu'occasionnerait pour elle l'amendement
législatif, en tenant compte seulement des détenteurs de billets
de saison. En ce qui concerne la ville de Montréal, je n'ai pas le
chiffre devant moi, mais si ma mémoire est fidèle, cela
excède le million de dollars.
M. Rochefort: En quoi cela est-il lié aux billets de
saison spécifiquement?
M. Bourbeau: C'est parce que, justement, la ville de
Québec, qui a été un des instigateurs, un des demandeurs
de cette modification, nous faisait remarquer que, lorsqu'il y a des billets de
saison, les billets sont imprimés individuellement au...
M. Rochefort: Ah oui!
M. Bourbeau: ...prix maximum, alors que le coût total
d'achat n'est pas le coût total indiqué sur les billets.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions à l'article 1?
M. Paré: C'est pour dire qu'on retrouve dans la revue
URBA, de novembre 1987, que la ville de Montréal perd 1 000 000 $
effectivement.
M. Rochefort: Est-ce qu'il y a d'autres secteurs que celui-ci qui
profiteront de cela?
M. Bourbeau: II y a toutes les salles d'amusement, les billets de
saison de hockey, les billets de saison de l'opéra, tous ceux qui paient
la taxe d'amusement.
M. le Président, on m'indique que les revenus de la ville de
Montréal, en ce qui concerne la taxe d'amusement, sont d'environ 15 000
000 $ par année.
M. Rochefort: Donc, cela représente un
quinzième.
M. Bourbeau: Exact.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions à l'article 1? Est-ce que l'article 1 est
adopté?
M. Paré: Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): J'appelle maintenant
l'article 2. (21 h 30)
M. Bourbeau: M. le Président, comme je l'ai dit tout
à l'heure, l'article 2 établit une règle qui permet
d'éviter que le changement apporté par l'article 1
n'entraîne des fraudes. C'est le percepteur de la taxe d'amusement qui
doit, sur demande, démontrer à la municipalité que des
personnes ont obtenu le privilège d'entrer dans un lieu d'amusement
gratuitement ou à prix réduit. Si le percepteur n'est pas capable
de faire cette démonstration, il doit remettre à la
municipalité les sommes qui correspondent aux taxes qui auraient
été perçues si toutes les personnes admises dans un lieu
d'amusement ou ayant obtenu un billet d'admission avaient payé le plein
prix d'entrée.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a des
interventions?
M. le député de Shefford.
M. Paré: À titre d'exemple, comment le percepteur
peut-il prouver cela? De quelle façon peut-il faire la preuve?
M. Bourbeau: Premièrement, la municipalité pourra
passer un règlement municipal pour établir la méthode qui
sera appliquée aux fins de contrôle. Cela pourrait consister
à produire la liste des individus qui auront reçu des billets
gratuits à chaque spectacle, le nombre de billets, les noms. Cela
pourrait âtre la liste des gens qui ont des billets de saison. Ce sont
des listes qui sont connues. Cela pourrait être des billets avec des
numéros spéciaux, des séries de billets avec des
numéros spéciaux qui seront distribuées à ceux qui
auraient des billets de saison ou des billets de faveur. Enfin, il y a toute
une série de possibilités.
M. Paré: Quel est l'intérêt d'apporter cela,
quand on dit que cela va faire perdre un quart de million à la ville de
Québec, un million à la ville de Montréal, que cela va
prendre une réglementation? Donc, c'est moins simple. C'est plus
compliqué. Quel est l'intérêt d'apporter une telle
chose?
M. Bourbeau: Le député doit comprendre que cette
fiscalité appartient aux municipalités. Ce sont leurs propres
revenus et le gouverne- ment ne perçoit pas de somme d'argent à
ce titre-là. L'article 5 de la loi actuelle précise que le
détenteur d'un billet de faveur ou de saison ou celui qui est admis
gratuitement dans un lieu d'amusement doit payer le droit sur le prix
réel du billet d'entrée. Or, cet article que nous avons
présentement cause certains problèmes d'application aux
municipalités. Il irrite de nombreux organismes culturels qui doivent
rembourser ces droits pour des billets à escompte ou des billets de
faveur émis gracieusement ou à des fins de promotion.
Le député comprendra qu'à l'occasion, quand un
organisme donne des billets de faveur et que non seulement il ne perçoit
rien pour son billet, mais qu'en plus, il doit rembourser la taxe
lui-même, cela devient un peu difficile à accepter. On a fait
cadeau d'un billet à quelqu'un et non seulement on ne reçoit
rien, mais on doit soi-même payer la taxe. Alors, les
municipalités nous ont fait valoir que c'était un peu injuste et
inique que de percevoir une taxe sur un montant d'argent qui, lui-même,
n'est pas perçu.
M. le Président, j'aimerais simplement rappeler au
député que, quand un marchand vend des skis 200 S la paire et
décide de faire une vente et de les vendre 100 $ la paire, il ne facture
pas la taxe de vente sur 200 $, le prix affiché, mais il la compte sur
le prix réellement exigé à l'acquéreur. Il est
reconnu, dans notre système, que la taxation est appliquée sur le
prix réellement payé et non pas sur le prix affiché
originellement. C'est le même principe qu'on va appliquer ici, dans le
domaine de la taxe d'amusement.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: Sur ce point, M. le ministre, je vous donne
parfaitement raison. Prenons comme exemple les théâtres
d'été. Dans les théâtres d'été, on
fait imprimer nos billets, disons 15 $le billet, mais, pour les groupes, on ne
demande que 12,50 $ ou 10 $ selon les circonstances et on leur remet des
billets à 15 $. Selon l'ancienne loi, on se devait, nous, comme
propriétaires, de payer 1,50 $ plutôt qu'un dollar sur le billet
à 10 %. C'est 9,87564 %, mais, tout de même, mettons-le à
10 % pour les besoins de la discussion. En réalité, cette
loi-là nous permet maintenant de payer le prix réel que la
personne nous a versé. Là-dessus, je suis complètement
d'accord et les institutions culturelles dont je fais encore partie, nous nous
plaignons de cette chose-là. Ce que je vous dis, c'est qu'en mettant
cette ouverture, vous donnez aux propriétaires, une ouverture
illimitée, si l'inspecteur n'est pas là, le soir même
où les choses se déroulent. Est-ce qu'il y avait dans une salle
de 1000 personnes, 300 personnes, qui avaient un prix de groupe à 10 $
ou s'il n'y en avait que 100?
Il faut que l'inspecteur soit là, chaque soir. Les villes ne
peuvent pas se payer le nombre
d'inspecteurs nécessaire, parce que les dépenses seulement
de salaires pour ces gens-là, seraient inférieures au montant
supplémentaire perçu. Mais, cela ouvre la porte au
propriétaire, s'il n'y a pas quelque chose - je ne sais pas où,
je ne sais pas comment - à une falsification des prix réels
illimitée. Et, vu que la nature humaine, c'est la nature humaine bien,
moi, jamais, je n'oserais faire cela. Mais, j'en connais qui, peut-être
à l'occasion, pourraient le faire.
M. Bourbeau: M. le Président, le député de
Terrebonne nous dit que lorsqu'il exerçait ce glorieux métier, il
recevait des groupes dans son théâtre d'été, leur
remettait des billets qui étaient libellés 15 $, mais qu'il leur
vendait 12 $.
M. Blais: Cela arrive.
M. Bourbeau: Alors, si l'on décidait, pour appliquer la
nouvelle réglementation, d'avoir des billets de 12 $ pour les groupes et
des billets de 10 $ pour d'autres groupes plus nombreux et des billets à
0 $ pour les billets de faveur, à ce moment-là, si l'on avait des
séries de billets différentes pour des types de clients
différents, je présume qu'on pourrait exercer un meilleur
contrôle et qu'on ne pourrait pas dire que le billet de 15 $ a
été vendu 12 $. On pourrait dire simplement que c'était un
billet à 12 $ et, donc que la taxe s'applique sur le 12 $.
M. Blais: Bon. C'est une façon, mais c'est une
façon prima facie, qui semblerait de bon aloi à la personne non
avisée. Mais, je tiens à vous dire, M. le ministre, que c'est
impossible, parce qu'on serait obligés de faire imprimer 3, 4 ou 5
séries de billets, pour le même siège, qu'on ne sait pas
où le groupe sera assis, quand il arrivera ou quand il viendra les
acheter. Donc, les propriétaires se refuseraient à faire imprimer
quatre séries de billets, par soir, pour les mêmes sièges,
parce que ce serait trop onéreux. On n'a pas trouvé le moyen.
Mais, c'était un bon essai.
M. Bourbeau: À ce moment-là, M. le
Président, si les propriétaires ne sont pas capables de trouver
une façon de démontrer à la municipalité qu'il y a
eu des prix réduits, ils paieront la taxe sur le plein prix. C'est ce
qui est marqué dans le projet de loi. Mais, je leur fais confiance, M.
le Président, s'ils sont tous aussi ingénieux que le
député de Terrebonne, ils vont trouver des façons de
satisfaire la municipalité.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions à l'article 2?
M. Paré: Non.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'article 2 est
adopté?
M. Paré: Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): L'article 2 est
adopté. J'appelle maintenant l'article 3.
M. Bourbeau: L'article 3, M. le Président, permet aux
municipalités et aux communautés responsables de
l'expédition des comptes de taxes, de réduire quelque peu le
nombre de documents qu'elles ont à transmettre. Dans le cas où
une unité d'évaluation est inscrite au rôle, au nom de
plusieurs personnes, c'est-à-dire dans le cas d'une
copropriété indivise, le fonctionnaire compétent peut
n'expédier le compte de taxes foncières, qu'à une seule
d'entre elles, en indiquant que ce compte s'adresse collectivement à
l'ensemble de ces personnes.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a des
interventions à l'article 3?
M. Paré: Non. En accord avec cela.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'article 3 est
adopté?
M. Paré: Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): J'appelle l'article 4.
M. Bourbeau: L'article 4 précise que les lois
constitutives des établissements du mouvement coopératif n'ont
pas pour effet d'empêcher que la taxe d'affaires leur soit applicable.
Ces lois constitutives prévoient que l'activité de ces
établissements ne constitue pas un commerce ou un moyen de profits.
L'article 4 règle donc un conflit qui existe depuis plusieurs
années, quant à l'assujettissement du mouvement coopératif
à la taxe d'affaires. Il faut lire l'article 4 avec l'article 8, qui
règle sa prise d'effet.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a des
interventions à l'article 4?
M. Paré: À l'article 4, les municipalités
ont été consultées, là-dessus. C'est unanime. C'est
quoi? C'est une demande qui vient de qui?
M. Bourbeau: Cette demande provient du fait que les
municipalités, d'une part, et les caisses populaires du Mouvement
Desjardins, d'autre part, étaient en cour de justice, pour un certain
nombre de poursuites intentées par des municipalités, à
l'encontre de caisses populaires, pour percevoir des comptes de taxes
d'affaires. Les jugements n'étaient pas rendus, ils ne le sont pas
encore, d'ailleurs. Mais, de part et d'autre, on n'était pas très
heureux d'avoir à se quereller devant les cours de justice pour une
question semblable. À la demande de l'Union des municipalités du
Québec, je suis intervenu auprès
du président du Mouvement Oesjardins pour savoir si le Mouvement
Desjardins accepterait de payer la taxe d'affaires. Le président du
Mouvement Oesjardins m'a dit d'emblée que oui, les Caisses populaires du
Mouvement Desjardins estimaient que même si dans leurs lois
constitutives, semble-t-il, on affirme que les activités de ces
établissements ne constituent pas un commerce ou un moyen de profit, en
pratique, on admet quand même que ces activités-là sont du
même genre que celles que font d'autres organismes du mouvement non
coopératif et, dans ce sens-là, ils profitent autant que les
autres des services rendus aux municipalités. C'est donc de bonne
grâce que le Mouvement Desjardins a accepté de se soumettre au
paiement de la taxe d'affaires rétroactivement, je dois dire, au 1er
janvier 1987. La contrepartie de cela, c'est que les municipalités ont
également accepté d'annuler les comptes de taxes pour les
années 1985-1986. Le Mouvement Desjardins et l'Union des
municipalités du Québec ont fait ratifier par leurs membres -
enfin, les deux présidents m'ont affirmé qu'ils étaient
autorisés, par écrit d'ailleurs, à négocier au nom
de leur groupement respectif - de sorte que le ministre des Affaires
municipales a joué ici le rôle de médiateur qui mettra fin
éventuellement à plusieurs poursuites judiciaires pour le
bénéfice de tous les intéressés.
M. Paré: Est-ce que vous avez une idée à
combien s'est évaluée cette décision concernant le
remboursement?
M. Bourbeau: Selon les données actuellement disponibles,
la ville de Montréal serait la principale débitrice des
remboursements pour une valeur d'environ 3 500 000 $, soit près de 80 %
des remises totales possibles aux organismes du Mouvement Desjardins de la part
des villes et des communautés. Il faut bien réaliser que la
position juridique des municipalités n'était pas très
solide et que, dans les discussions qui ont eu lieu au sein même des
municipalités, on a évalué également les
possibilités qu'elles puissent ou non avoir des succès en cour de
justice. Je crois qu'elles ont estimé qu'il valait mieux faire un
sacrifice à court terme pour un gain à long terme que de prendre
un risque qui aurait peut-être pu leur coûter beaucoup plus
cher.
M. Paré: Là, on se rend compte tantôt que
Montréal perd un 1 000 000 $ concernant la taxe d'amusement, 3 500 000 $
maintenant, est-ce que le commentaire de Montréal sur cette mesure est
spécifique? On dit qu'il y a eu consultation, l'Union des
municipalités est favorable, Montréal particulièrement,
est-ce que c'est le même son de cloche?
M. Bourbeau: M. le Président, les discussions de nos
fonctionnaires avec ceux de la ville de Montréal sont à l'effet
que la ville de
Montréal est parfaitement d'accord avec la mesure, d'ailleurs
moi-même j'en ai traité avec le maire de Montréal. Il faut
bien penser que le député dit que la ville de Montréal,
perdrait 3 500 000 $. Mais, si les jugements de la Cour n'avaient pas
été en faveur de la ville de Montréal, il semble qu'il y
avait de bonne chances que les Caisses populaires auraient gagné leur
cause devant les tribunaux. À ce moment-là, la ville aurait
été obligée de rembourser avec intérêt,
toutes les taxes perçues depuis le début, depuis 1985. À
ce moment-là, elle aurait perdu beaucoup plus que 3 500 000 $, cela
aurait été le montant en capital plus les intérêts.
En plus de cela, elle aurait dû prévoir une autre perte pour 1987,
une autre pour 1988, enfin, cela aurait été un manque à
gagner constant sur toutes les années à venir. Donc, je crois que
ce règlement-là est éminemment intéressant et pour
la ville de Montréal et pour les autres municipalités parce qu'il
met fin à une situation d'ambiguïté où les chances
étaient assez problématiques pour la ville de Montréal et
pour les municipalités du Québec de gagner leur procès et
règle d'une façon définitive un problème qui aurait
subsisté. La dame qui m'accompagne ici, à ma gauche, qui
était jusqu'à récemment vice-présidente du
Mouvement Desjardins, section juridique, Mme la sous-ministre Bédard,
pourrait corroborer mes dires parce qu'elle était justement là,
il y a quelques mois. (21 h 45)
M. Paré: Cela vient corriger pour les années 1985
et 1986. Est-ce qu'il y a des causes pendantes antérieures à
1985?
M. Bourbeau: On me dit qu'il n'y aurait pas de causes pendantes
pour 1984 et les années précédentes. De toute
façon, s'il y en avait, le projet de loi devant nous n'affecterait pas
ces causes-là.
M. Paré: Non, c'est cela. Le projet de loi est clair
là-dessus, mais s'il y avait eu des causes pendantes, j'ai l'impression
que cela aurait été le temps. Si on corrige, on corrige la
totalité de ce qu'il y a en cause.
M. Bourbeau: On me dit qu'au moment où les
négociations ont eu lieu avec le Mouvement Desjardins, le Mouvement
Desjardins a fait les vérifications d'usage et cette solution-là
le satisfaisait.
M. Paré: Ça va.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'article 4 est
adopté?
M. Paré: Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): J'appelle maintenant
l'article 5 et, s'il est de l'avis de la commission, nous pourrons
procéder sous-article
par sous-article, pour clarifier les débats. À l'article
5, le sous-article 253.1.
Dégrèvement applicable aux taxes
foncières en cas de forte hausse de la valeur
imposable
M. Bourbeau: M. le Président, à 253.1, l'article 5
introduit deux mesures visant à contrer l'effet des hausses brusques de
la valeur imposable des immeubles sur les comptes de taxes foncières
municipales: le dégrèvement lié à un plafonnement
de la hausse de cette valeur et l'étalement du paiement des taxes
foncières.
Alors, le nouvel article 253.1 établit le pouvoir de toute
municipalité d'appliquer par règlement la mesure de
dégrèvement II s'agit donc d'une mesure facultative et non pas
automatique. En pratique, seules les municipalités dont le rôle
d'évaluation a connu une forte hausse d'un exercice à l'autre,
à la suite d'une révision, auront avantage à instaurer
cette mesure. Le nouvel article 253.1 laisse voir un autre
élément important. Le dégrèvement ne s'applique
qu'aux taxes foncières basées sur la valeur imposable. Il n'est
pas question de dégrèvement pour les taxes foncières
basées sur la superficie ou pour les taxes personnelles comme la taxe
d'eau, par exemple. Cela s'explique par le fait que la mesure est
instaurée pour contrer les hausses brusques du compte de taxes dues aux
soubresauts de la valeur foncière.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a des
interventions?
M. Paré: Oui, mais très rapidement. Cela reprend
effectivement ce que je disais au tout début. La mesure de plafonnement
va effectivement avoir des conséquences. C'est sûr et c'est
relevé par certains organismes, dont la CSN qui trouve que c'est une
mesure injuste. Pour plafonner, il faut plafonner des choses qui sont
semblables. On peut bien plafonner à certains pourcentages, mais, s'il y
a des propriétés dont la valeur augmente moins vite, cela veut
dire que le plafonnement ne touche pas de façon équitable tout le
monde. Le meilleur exemple qu'on pourrait probablement prendre, c'est que, si
cela touche passablement de gens, l'ai l'impression que cela va toucher moins
le gouvernement que beaucoup d'autres citoyens. Je ne sais pas si le ministre
est en mesure de nous dire si, effectivement, le gouvernement, ses organismes
et ses ministères vont économiser par une semblable mesure de
plafonnement, parce qu'il semblerait qu'on n'y goûtera pas tous de la
même façon, mais que le gouvernement pourrait en profiter car,
justement, il y a la valeur des bâtisses. Le ministre pariait des HLM
pour lesquels on sait qu'il y a contestation de la part de la SHQ et il y a
contestation par la SIQ pour les édifices gouvernementaux. Comme
il y a un plafonnement, je le disais tantôt, ceux qui vont en profiter
sont ceux qui ont les plus grosses augmentations, ceux qui ont les plus grosses
enveloppes, le plus grand capital finalement.
C'est sur l'exemple que je prenais que je voudrais que le ministre me
donne ses commentaires. N'y aurait-il pas un transfert fiscal sur les petits
propriétaires? Je reprends l'exemple que je donnais tantôt. Si on
plafonne, parce qu'il y a des augmentations considérables
spécialement dans certaines villes - il risque d'y en avoir encore plus
dans les années à venir, je prends l'exemple de Québec
où maintenant on permet la copropriété - je disais que
l'une des façons d'amener une augmentation considérable de la
valeur des bâtisses, ça va être de les comptabiliser par
logement à partir d'une transformation en copropriété.
Donc, il va y avoir des augmentations considérables. Est-ce que
ça ne risque pas, étant donné qu'on plafonne et qu'il va y
avoir augmentation considérable de la valeur foncière, qu'ils
soient avantagés par rapport à ceux dont l'augmentation va
être minime? Donc, le plafonnement va toucher ceux qui vont au maximum de
l'augmentation. Ceux-là vont être favorisés.
Vous me donniez tantôt deux façons possibles d'augmenter
l'assiette fiscale d'une municipalité. On augmente le taux. Donc,
l'évaluation, je vais dire comme vous, c'est juste un barème. Le
deuxième barème qui est important, c'est le pourcentage qu'on
impose. Il y a cela et il y a l'augmentation de la valeur. SI l'augmentation de
la valeur ' n'est pas égale pour tout le monde, le pourcentage n'est pas
le même, mais on plafonne. Cela veut dire qu'il y en a qui vont payer
moins. Ils vont profiter de cet avantage-là.
La municipalité maintenant. C'est parce que le plafonnement lui
enlève des revenus et qu'elle doit aller chercher la même assiette
pour donner les mêmes services à ses citoyens, qu'il faut qu'elle
aille la chercher d'une certaine façon. Est-ce que c'est de faire, comme
vous le donniez en exemple au tout début, une augmentation de 1 %, 2 %
ou 3 % - c'est très relatif, disons, 1 %, ce qui compte, c'est l'image -
donc une augmentation ailleurs, autrement, d'une autre façon ou alors
une augmentation du taux pour aller chercher le manque à gagner à
cause du plafonnement? Si elle augmente tout le monde de 1 %, elle vient
augmenter ceux qui ne sont pas plafonnés. Donc, on vient de donner une
charge spéciale additionnelle à ceux qui ne sont pas
plafonnés, à ceux qui normalement sont de petits
propriétaires, à ceux qui n'ont pas nécessairement, mais
possiblement profité d'une augmentation de l'évaluation due
à la spéculation ou à autre chose et qui ont
l'équité. Si la formule actuelle est équitable,
basée sur l'évaluation, si maintenant on plafonne et si on
répartit autrement le manque à gagner, peu importe qui, il y a
quelqu'un qui paie, alors qu'il ne devrait pas payer parce qu'il y a un manque
d'équité.
Est-ce que je suis correct dans le jugement que je suis en train de
porter? Il y a quelqu'un
qui va faire en sorte d'avoir un transfert fiscal que l'autre aurait
dû payer si on s'était basé sur le même principe
d'évaluation foncière. Le plafonnement vient faire un transfert
fiscal chez certains citoyens. Là, je parle du principe. Un transfert
fiscal, est-ce que je me trompe quand j'interprète ça de cette
façon-là?
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, c'est un transfert fiscal,
oui, mais pas sur le dos d'une catégorie de contribuables. Ou si c'est
sur une catégorie de contribuables, c'est sur une catégorie de
contribuables dont l'augmentation personnelle a été
inférieure au seuil qui sera fixé par les municipalités.
Mais, à l'intérieur de cette catégorie-là, il n'y a
rien qui justifie de dire que certains contribuables dont les maisons, dont les
immeubles sont de valeur plus modeste, vont être mis à
contribution plus que d'autres. Lorsque la spéculation foncière
s'empare du marché immobilier, elle frappe ou elle
bénéficie, cette spéculation-là, autant aux petits
propriétaires qu'aux gros. On pourrait même prétendre que,
dans certains cas, les petits voient leurs immeubles augmenter plus rapidement
que les gros, parce que pour quelqu'un dont l'immeuble est évalué
à 50 000 $ ce n'est pas long d'obtenir une augmentation de 10 000 $.
Ça peut venir très rapidement et ça constitue une
augmentation de 20 %, ce qui est énorme comme augmentation. Et
rapidement il atteint le seuil où il pourra plafonner. Mais les
individus dont la maison est évaluée à 150 000 $, une
augmentation de 10 000 $, la même augmentation les met drôlement en
bas du seuil. Cela prend une augmentation beaucoup plus élevée en
montant d'argent pour se rendre au seuil à partir duquel il pourra
bénéficier de la mesure de plafonnement. On peut fort bien
trouver des spéculateurs qui vont être beaucoup plus
intéressés à se diriger et à faire porter leurs
assauts sur les immeubles dont l'évaluation est inférieure, parce
qu'il y a moins de risques de revente. Il y a un meilleur marché pour
les petits immeubles que pour les gros. En cas de récession, les petits
immeubles ne voient pas leur évaluation diminuer de beaucoup, parce que
ce sont des immeubles qui sont disponibles à tout le monde. Il y a toute
une série de raisons qui pourraient justifier que les petits immeubles
sont un meilleur placement que les gros, d'une certaine façon, parce que
c'est un placement moins risqué. Et, moi, je dis au député
qu'il n'y a rien qui justifie de penser qu'un immeuble de 50 000$ va subir une
augmentation d'évaluation, d'une façon générale,
inférieure à un immeuble de 200 000 $.
Il n'y a pas de preuves de cela, au contraire. Je ne crois pas que,
selon mon expérience personnelle de l'immobilier, cet
énoncé puisse être vérifié.
M. Paré: Mais, avec l'énoncé que vous venez
de faire, par exemple, - on va certainement en parler dans d'autres projets de
loi - vous amenez, finalement, ce qu'on dénonce et ce qu'on craint quand
on parle d'habitation: la spéculation qui va frapper
énormément. Vous êtes en train de confirmer
spécialement aux petits propriétaires de petites
propriétés, finalement, que pour eux, la spéculation n'est
pas finie. Je me rends compte, et vous avez raison, qu'on est en train de
déplacer peut-être l'intérêt d'achat des
spéculateurs. C'est une déduction tout à fait logique. Je
vous écoutais et...
M. Bourbeau: Bref, je vous ai convaincu.
M. Paré: ...j'avais... Cela fait longtemps que je le dis.
On a vécu la spéculation et cela s'est
accéléré depuis quelques mois, quelques années.
Cela va être de pis en pis et vous êtes en train de confirmer nos
craintes ou nos vues là-dessus. Effectivement, il faut s'attendre
à des augmentations qui vont être encore considérables.
Le fait de venir maintenant plafonner témoigne certainement de
votre crainte dans ce sens-là, de votre crainte ou de votre
intérêt tout dépendant si on trouve que c'est une
très bonne chose pour les spéculateurs. Effectivement, cela veut
dire que c'est une très bonne mesure, spécialement pour les
spéculateurs. Cela vient plafonner. S'ils s'y prennent,
spécialement, dans des quartiers un peu plus...
Vous dites que les spéculateurs ou ceux qui veulent faire de
l'argent vont augmenter là où il y a le moins de risques et des
bâtisses avec des évaluations moins élevées.
À 50 000 $ ou 60 000 $, il y a moins de risques. Finalement, c'est vrai
qu'un 10 000 $ est plus facile à faire là qu'avec un
investissement de 1 000 000 $ où on va chercher seulement 50 000 $, ce
qui n'est pas suffisant. Pour un spéculateur qui va dans un quartier
plus populaire où il y a de petites maisons, le plafonnement vient faire
en sorte que ce soit encore plus profitable parce que les profits qu'il va
faire vont être encore limités par le plafonnement.
M. Bourbeau: II y a peut-être quelques spéculateurs
qui pourraient en profiter, mais d'une façon générale,
c'est quand même un très petit nombre d'immeubles qui sont vendus
par année. La très grande majorité des immeubles demeurent
la propriété de leur propriétaire original de sorte que
tous les petits propriétaires vont avoir autant de chances, sinon plus -
c'est de cela qu'on parle - d'avoir accès à la mesure de
plafonnement. Et, pour un spéculateur, peut-être, qui en
bénéficiera, il y aura peut-être 50 petits
propriétaires qui en bénéficieront, aussi.
M. Paré: Mais vous admettez quand même qu'il y a un
risque, non seulement un risque, mais il va y avoir un certain transfert
fiscal, même minime, comme je vous le mentionnais,
tantôt. S'il y a plafonnement, que celui-ci n'est pas égal
à cause de l'augmentation qui n'est pas uniforme partout, s'il y a
plafonnement et que l'assiette fiscale doit demeurer la même, on doit
ajuster, y compris ceux qui ne sont pas plafonnés. Est-ce qu'il y a ce
risque effectivement?
M. Bourbeau: La mesure est une mesure de transfert. Elle
transfère l'excédent du coût de la mesure à
l'ensemble des contribuables. Le député appelle cela un transfert
fiscal... C'est un transfert, mais qui est fait sur la totalité des
citoyens. Donc, c'est un coût pour la municipalité qui est
réparti dans le budget de la municipalité comme les autres
coûts que la municipalité peut encourir aux services de la police,
des pompiers ou de l'enlèvement de la neige.
M. Paré: Selon l'évaluation qui est faite, le
transfert va se faire au détriment de qui? Est-ce qu'on a
déjà évalué qui seront les victimes de ce
transfert?
M. Bourbeau: Le député emploie le mot
"détriment". Je n'aime pas tellement le mot. Au détriment de tous
et chacun des contribuables de la municipalité, y compris tous ceux qui
vont bénéficier de la mesure puisque c'est une taxe qui est
imposée à tout le monde. Tout le monde va la payer, y compris
ceux qui bénéficient de la mesure. Plus l'évaluation est
importante, plus le montant à payer va être important,
forcément, parce qu'un sou de taxe imposé sur un Immeuble de 1
000 000 $ coûte plus cher en argent qu'un sou de taxe imposé sur
une maison de 50 000 $.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Gouin. (22 heures)
M. Rochefort: S'il veut poursuivre sur cet aspect-là...
C'est un autre aspect de la question que je veux aborder.
M. Paré: Juste une ou deux petites questions.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Shefford.
M. Paré: J'essaie de comprendre. S'il y a un transfert, ce
n'est pas juste transféré sur le même compte, d'une colonne
à l'autre, c'est transféré d'individu à individu ou
de propriétaire à propriétaire. Surtout si
l'évaluation ne demande pas également... S'il y a quelqu'un qui
doit payer, il y a un transfert.
Le transfert devrait être, à mon avis... Les victimes...
quand je parle de victime, je parle de quelqu'un qui paiera plus. Dans ce
sens-là, il n'y aura personne qui sera tué. S'il y a un transfert
d'un citoyen à l'autre, celui qui n'atteint pas le plafond, cela veut
dire qu'il va payer. Supposons qu'il y a une augmentation de 5 % de son
évaluation, le plafond, est de 10 %, il paie la totalité et on
lui ajoute 1 % ou 2 % parce qu'on en a plafonné d'autres. Il y a des
victimes. Ces gens qui ne sont pas plafonnés totalement auront en
compensation l'augmentation globale imposée.
Si ce principe est vrai, est-ce que l'on peut déjà
évaluer qui seraient les gens ou les clientèles cibles qui auront
à absorber cette augmentation par rapport à d'autres qui seront
plafonnés et auront à payer moins puisqu'il y aura un transfert
fiscal à d'autres?
M. Bourbeau: M. le Président, je trouve un peu drôle
que le député emploie le mot "victime" Je poserais la question au
député: Qui sont les citoyens du Québec qui sont victimes
du paiement du salaire du député de Shefford? Tous les citoyens
du Québec paient par leurs taxes le salaire du député de
Shefford. C'est exactement la même chose qui va se produire ici. Voici
une dépense de la municipalité. Elle est mise dans le budget de
la municipalité et est répartie sur l'ensemble des contribuables,
sur tous les contribuables, sans exception. Si le député cherche
à savoir qui paie pour la mesure, c'est 100 % des contribuables de la
municipalité qui paieront pour la mesure, au pro rata de leur
évaluation foncière. Il n'y a pas d'exception. La seule
exception... Il n'y a pas d'exception, tout le monde paie.
M. Paré: Oui, tout le monde paie. Je reconnais que tout le
monde doit payer des taxes. Vous m'avez dit tantôt que s'il y a un
plafonnement, il devrait y avoir un transfert fiscal et que cela risque
d'amener une augmentation du taux. Mais ceux qui n'ont pas atteint le
plafonnement, ceux-là ne sont-ils pas pénalisés en payant
plus pour ceux qui sont plafonnés? N'y a-t-ii pas un transfert quelque
part? Quand je parle de victime... Oui, tout le monde paie, mais le fait qu'il
y ait ce transfert n'en amènera-t-il pas certains à payer
davantage que s'il n'y avait pas eu ce plafonnement?
M. Bourbeau: Dans une municipalité, il y a un coût.
La mesure entraîne un coût pour la municipalité lequel est
réparti à l'ensemble des contribuables. Tous les contribuables
vont payer sur leur compte de taxes un sou, deux sous ou trois sous de plus et
c'est chargé à tout le monde, à 100 %. Donc, tout le monde
paie.
De plus, le député le sait, tous les contribuables
admissibles à la mesure de plafonnement vont recevoir... Ils ne
recevront pas un chèque de la municipalité, mais ils verront leur
compte de taxes plafonné. Ils ne paieront pas la totalité du
compte de taxes qu'ils auraient payé si la mesure de plafonnement
n'avait pas été mise en vigueur par la municipalité. Dans
ce sens-là, il y a des contribuables qui sont gagnants en payant moins
de taxes.
Qui seront-ils, ces contribuables? On ne peut pas le savoir d'avance. Ce
sont tous ceux
dont l'évaluation personnelle sera plus importante que le seuil
de plafonnement.
On a peut-être des tableaux ici. Par exemple, Je peux dire au
député: II y a devant moi le cas de la ville de
Saint-Léonard qui, en vertu du projet de loi que nous étudions
présentement, pourrait plafonner. Le seuil minimum de plafonnement
serait à 35 % - une augmentation de 35 %. Elle a probablement un
rôle d'évaluation qui augmente de 23 % ou 24 %. C'est cela ?
Une voix: C'est exact.
M. Bourbeau: Une fois et demie, le rôle. Il y aurait, dans
Saint-Léonard, 453 bénéficiaires d'immeubles d'un
logement. Il y aurait 620, d'immeubles de deux et trois logements; 615,
d'immeubles de quatre logements et plus; terrains vacants: zéro, parce
qu'ils ne sont pas admissibles, 228 commerces, 76 industries.
Voilà un exemple de ceux qui verraient leur immeuble plafonner
sur le nombre de propriétaires. Le coût de la mesure pour la
municipalité serait de 0,04 $' de taxe les 100 $ d'évaluation. La
municipalité, pour pouvoir accorder ce plafonnement dont ]e viens de
parler, augmenterait son taux de taxe de 0,04 $.
M. Paré: Je vous félicite, M. le ministre, vous
êtes un gars très optimiste. Je vous ai demandé qui
seraient les perdants et vous m'avez répondu: Je vais vous donner la
liste des gagnants. C'est correct. C'est le côté de la
médaille que vous avez le droit de choisir, mais cela veut dire que s'il
y a des gagnants, il y a certainement des perdants.
M. Bourbeau: Cela fait plusieurs fois que je le dis au
député.
M. Paré: Oui, mais...
M. Bourbeau: Les gens qui paient pour la mesure, c'est l'ensemble
des contribuables. Ici, à Saint-Léonard, chaque contribuable de
la ville de Saint-Léonard va payer 0,04 $ de plus de taxe pour permettre
la mesure. C'est une police d'assurance. La prime ici est de 0,04 $ des 100 $
d'évaluation et les prestations seront payées à un
ensemble de contribuables de toutes catégories. Donc, c'est assez
équitable, c'est distribué sur l'ensemble des contribuables.
Je dirai au député que l'an prochain, en 1989, si la ville
de Saint-Léonard a un autre rôle d'évaluation qui augmente,
il est bien probable que les bénéficiaires soient d'autres
contribuables, que ce ne soit pas les mêmes. Il est assez rare que la
même propriété subisse une très importante hausse
d'évaluation deux années de suite. Ce sera probablement un autre
groupe de propriétaires qui pourra bénéficier de la
mesure.
Probablement que dans trois ans ce sera un troisième groupe de
sorte que sur une période d'années, tout le monde va finir par
bénéficier de la mesure. Cela aura eu l'effet d'une police
d'assurance.
M. Paré: Quand vous me donnez la liste des gagnants - cela
veut dire des gens qui paient moins grâce à cette formule - est-ce
que vous avez la liste des perdants, ceux à qui cela va coûter
plus cher que s'il n'y avait pas eu de plafonnement?
M. Bourbeau: Je dois répéter encore. Les perdants
sont ceux qui ne reçoivent pas la mesure de plafonnement.
M. Paré: C'est cela.
M. Bourbeau: Tous les autres contribuables ne sont pas perdants.
Ils paient exactement le compte de taxe qu'ils paieraient normalement,
sauf...
M. Paré: Plus les 0,04 $.
M. Bourbeau: ...que chaque contribuable paie 0,04 $ de prime
d'assurance.
M. Paré: S'il n'y avait pas eu de plafonnement, il n'y
aurait pas eu l'augmentation de 0,04 $ que certains paient sans profiter du
plafonnement.
M. Bourbeau: Exactement. Si le député de Shefford,
ce matin, passait au feu chez lui, M. le Président, et qu'il n'avait pas
de police d'assurance, il serait le grand perdant; il devrait payer de sa
poche. J'ai déjà passé au feu, M. le Président, et
je peux vous dire que quand on passe au feu, tous les concitoyens, les voisins,
vérifient leur prime d'assurance pour être sûrs qu'ils sont
eux-mêmes assurés. Quand j'ai perçu mes prestations
après mon feu, tous les autres ont payé pour moi.
Forcément, c'est mutuel, une assurance.
Depuis ce temps-là, je paie encore mes primes d'assurance et,
chaque fois qu'un de mes voisins passe au feu, je suis un de ceux qui contribue
à payer pour les prestations qu'il reçoit. Je suis très
satisfait de l'affaire parce que j'en ai déjà profité une
fois. Je présume qu'à la longue, tout le monde finit, à ce
jeu, un jour, par recevoir quelque chose.
M. Paré: Mais, c'est ce que je disais au début.
L'équité et les fondements même de la fiscalité
municipale veulent que tous paient en fonction d'une norme unique qui est
l'évaluation municipale. L'équité vient d'être
rompue sur ce principe - légèrement, vous allez me dire - mais
c'est un commencement, c'est une première.
J'aurais une autre question, avant de laisser la parole à mon
collège de Gouin. Qu'est-ce que vous pensez des commentaires des
évaluateurs municipaux qui disent que les rôles
d'évaluation seront tous déséquilibrés dans
quelques années
avec des mesures semblables?
M. Bourbeau: M. le Président, je ne peux pas souscrire
à ce point de vue des évaluateurs. J'ai discuté avec
certains d'entre eux. Il m'appa-rait que cette remarque-là provient
peut-être d'un manque de compréhension de la formule. La remarque
a été faite très tôt, avant que le projet de loi ne
soit connu.
Dans certains milieux on s'est imaginé qu'on allait commencer
à jouer avec l'évaluation foncière. Or, la mesure que nous
proposons n'est pas une mesure d'évaluation; c'est une mesure fiscale.
Cela n'a rien à voir avec les principes d'évaluation.
Les évaluateurs municipaux vont continuer à évaluer
les immeubles selon les mêmes méthodes qu'auparavant. Ils vont
procéder de la même façon. Ils vont faire en sorte que
chaque Immeuble soit évalué à sa valeur marchande,
à sa valeur réelle. Nous n'intervenons aucunement dans le
processus de confection des rôles d'évaluation. Les
évaluateurs devront procéder exactement comme ils
procédaient auparavant, à la seule différence que les
municipalités, si elles le veulent, choisiront temporairement de ne pas
utiliser, pour des fins de calcul du compte de taxes, la pleine valeur qui a
été identifiée par l'évaluateur.
Cela, c'est un choix politique de la municipalité qui a
été élue par ses contribuables pour prendre des
décisions. Elle ne dit pas à un contribuable dont la maison vaut
100 000 $: Je décide arbitrairement qu'elle vaut 75 000 $ ou 80 000 $;
on ne joue pas avec l'évaluation. La municipalité va continuer de
dire au contribuable: L'évaluateur nous indique que votre immeuble vaut
100 000 $, nous confirmons qu'il vaut 100 000 $; cependant, pour des fins
administratives, nous décidons de n'utiliser, pour cette année,
qu'une proportion de l'évaluation pour les fins de calcul du compte de
taxes.
C'est une décision politique prise par une municipalité.
C'est une mesure fiscale qui, en aucune façon, n'a pour effet de changer
le rôle d'évaluation. La municipalité continuera à
avoir son rôle d'évaluation. Ce sera le rôle
préparé par les évaluateurs et celui dont on tiendra
compte pour toute autre fin que le calcul d'un compte détaxes.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Gouin.
M. Rochefort: M. le Président, je voudrais, moi aussi,
parler des gagnants. Quand le président du comité exécutif
de la ville de Montréal a rendu public le budget...
Une voix: C'est un auditif.
M. Rochefort: Qui? Non, non, c'est parce qu'il a de la
difficulté à faire deux choses en même temps. Je ne veux
pas le forcer à consa- crer plus d'énergie...
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Gouin.
M. Rochefort: M. le Président, je voudrais parler de l'un
des grands gagnants de la mesure de plafonnement. Quand le président du
comité exécutif de la ville de Montréal a rendu public le
budget de l'année qui vient, il a annoncé que, parmi les grands
gagnants de l'application de la mesure de plafonnement, il y aurait les deux
gouvernements. Sauf erreur - je cite le chiffre de mémoire et je peux me
tromper - il me semble avoir dit que, pour le gouvernement du Québec, il
s'agissait là d'un gain de 16 500 000 $ à la suite de
l'application de cette mesure de plafonnement. Est-ce que c'est conforme aux
chiffres que vous avez?
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, il faudrait faire la
distinction entre l'évaluation foncière et la mesure de
plafonnement. Il est exact que l'évaluation des immeubles du
gouvernement du Québec augmente beaucoup moins rapidement, cette
année, au rôle de la ville de Montréal par exemple, que le
reste des immeubles du rôle. Le pourcentage est moins
élevé. Dans ce sens, le gouvernement du Québec va faire
une économie parce que sa proportion d'augmentation de
l'évaluation est moins importante que celle de la moyenne du
rôle.
Comme nous payons des "en lieu" de taxes basés sur une formule
qui tient compte de la moyenne, la part du gouvernement va baisser. Mais ce
n'est pas la...
M. Rochefort: Ce n'est pas par l'application de la mesure de
plafonnement.
M. Bourbeau: Ce n'est pas par l'application de la mesure de
plafonnement. C'est l'application de la formule en vigueur depuis 1980 et qui a
fait en sorte que le gouvernement paie des "en lieu" de taxes.
M. Rochefort: Pour tout le Québec, cela représente
une diminution de combien? (22 h 15)
M. Bourbeau: En ce qui concerne la diminution des "en lieu" de
taxes à Montréal et à Québec qui sont les deux
endroits les plus importants, j'ai ici les chiffres. Le manque à gagner,
selon nous, est de l'ordre de 9 000 000 $ pour la ville de Montréal et
serait d'environ 4 400 000 $ pour la ville de Québec.
M. Rochefort: Ne pensez-vous pas, M. le ministre, quand on est
dans des années de vaches grasses et que la contribution du gouvernement
du Québec sur ces immeubles n'a pas encore
atteint 100 % qu'on aurait une belle occasion, au moins, de l'augmenter
de 13 000 000 $?
M. Bourbeau: Pour une fois que la conjoncture favorise le
gouvernement, on nous dit: vous êtes un mauvais contribuable parce que
vos immeubles augmentent moins rapidement. Ce n'est peut-être pas le
député de Gouin qui dit cela, mais certains nous l'ont dit.
Dans d'autres circonstances où l'inverse se serait produit et
où le gouvernement aurait voulu réduire sa contribution, on nous
aurait dit: le gouvernement doit être un contribuable comme les autres et
qu'il paie sa contribution. Les règles ont été
établies au début et le gouvernement, chaque année, paie
ses "en lieu" de taxes selon la formule convenue avec le monde municipal.
Pour cette année, il semble que la formule favorise le
gouvernement. C'est une année où il y a eu beaucoup d'inflation
et beaucoup de spéculation foncière. On sait que la
spéculation foncière est un peu moins virulente sur les
hôpitaux, les écoles et sur les cégeps qu'elle peut
l'être sur les immeubles à logements multiples.
Je signale au député que lors d'autres années de
récession où l'inflation est nulle, ou la spéculation est
nulle ou à peu près, comme par exemple, dans les années
1977-1978 qui ont suivi la prise du pouvoir par le Parti
québécois ou les années 1981-1982 à la suite de la
deuxième élection du Parti québécois. Là,
c'est l'inverse qui s'est produit parce que les immeubles, de façon
générale, subissaient des baisses d'évaluation à
cause de la non-inflation, je dirais même de la déflation.
Les immeubles gouvernementaux, eux, qui sont évalués selon
des formules différentes, des formules de remplacement, continuaient
leur petit train-train d'augmentation annuel qui était peut-être
moins spectaculaire, mais qui va toujours en augmentant de sorte qu'il y eu des
années où le phénomène n'était pas du tout
le même que cette année. Évidemment, les villes ne se sont
pas plaintes dans ces années-là, au contraire, mais aujourd'hui,
on frappe une année particulièrement active en spéculation
foncière et, bien évidemment, la formule aide un peu le
gouvernement.
Je signale en terminant au député qu'en ce qui concerne le
plafonnement, le gouvernement sera eligible, bien sûr, à la mesure
de plafonnement concernant ses Immeubles propres où il paie 100 % de ses
"en lieu" de taxes. Pour ce qui est des immeubles du réseau où
nous ne payons pas d'"en lieu" de taxes, nous avons convenu de ne pas nous
donner le bénéfice de la mesure de plafonnement puisque le
gouvernement ne paie pas à 100 % de ses "en lieu" de taxes sur ces
immeubles-là.
M. Rochefort: Je reviens quand même, M. le ministre. Est-ce
que, justement, le fait que votre contribution soit tout à coup
réduite substantiellement, tantôt vous parliez de 26 000 000 $ -
c'est une parade de millions, j'imagine que 13 000 000 $ c'est au moins une
demi-parade - vous ne considérez pas que vous avez là une belle
occasion de compléter justement la réforme de la fiscalité
pour payer 100 % pour les immeubles du réseau de la santé, des
services sociaux et de l'éducation? Ne pourriez-vous pas, au moins,
faire un pas équivalent, proportionnellement en pourcentage, à ce
13 000 000 $ de réduction de votre contribution?
J'avoue que j'accepterais totalement le raisonnement que vous venez de
développer à l'effet qu'il faut que le gouvernement soit
traité comme n'importe quel contribuable: quand cela monte, il monte,
quand cela baisse, il baisse. Pas de situation particulière. Compte
tenu, cependant, que vous êtes dans une situation particulière
pour les réseaux de l'éducation, de la santé et des
services sociaux, ne considérez-vous pas qu'au minimum, vous ne devriez
pas encaisser le 13 500 000 $ pour les deux grandes villes du Québec?
Accepter au moins, d'augmenter d'autant la proportion de votre contribution
dans le réseau de la santé et dans le réseau de
l'éducation complèterait la réforme et finirait
effectivement à vous mettre, un jour, sur un même pied
d'égalité avec les contribuables.
M. Bourbeau: M. le Président, c'est toujours
intéressant d'entendre un député d'Opposition,
ex-ministre, dont le gouvernement n'a pas réussi, au cours de ses neuf
années de pouvoir, à se mettre justement... à faire en
sorte que le gouvernement soit un contribuable comme les autres, maintenant que
l'administration est passé à d'autres, on exhorte
évidemment le gouvernement a faire ses devoirs alors qu'on ne l'a pas
fait soi-même. Le député sait fort bien que, lors de la
réforme de la fiscalité municipale, il avait été
convenu que le gouvernement ne paierait qu'une partie des "en lieu" de taxes
sur les immeubles des réseaux scolaires et des affaires sociales et que
ce n'est qu'à long terme que le gouvernement finirait par payer 100 %.
Or, le député sait certainement que, actuellement, le
gouvernement du Québec ne boucle pas ses budgets. Nous avons
prévu, au cours de l'année courante, un déficit de 2,4
milliards de dollars dans le budget du gouvernement du Québec. C'est une
nette amélioration sur ce qui se faisait avant. Mais, il reste quand
même que 2,4 milliards, ce n'est pas peu de chose.
Du côté municipal, on boucle les budgets. Aucune
municipalité n'a fait de déficit. Je dirais même que,
actuellement, on estime que les surplus accumulés dans les budgets des
municipalités du Québec tourne autour de 300 000 000 $ et
peut-être plus.
Les municipalités, dont la ville de Montréal, se
retrouvent avec des surplus de l'ordre de 200 000 000 $ à 400 000 000 $.
Enfin, cela
tourne autour de 300 000 000 $, 350 000 000 $, alors que le gouvernement
du Québec a un déficit annuel d'au-delà de 2 000 000 000
$.
Avant de jouer au Père Noël avec les fonds publics, on va,
pour un certain moment, tenter de faire en sorte que le budget du Québec
puisse présenter une situation un peu plus intéressante sur le
plan des équilibres budgétaires. En temps et lieu,
peut-être un jour, le gouvernement du Québec fera un effort
additionnel.
M. Rochefort: M. le Président, un certain nombre de
commentaires. D'abord, je dirai au ministre qu'on ne lui demande pas de jouer
au Père Noël, on lui demande justement de ne pas demander au
contribuable d'être son Père Noël. Il va sauver 13.5
millions, cette année, dans les deux grandes villes du Québec.
Alors, on est loin de lui demander de jouer au Père Noël, ce sont
les autres qui vont être son Père Noël.
Tous les contribuables vont accrocher un petit bas de Noël dans
quatre semaines pour permettre au ministre des Affaires municipales d'encaisser
13.5 millions de plus, selon les chiffres même qu'il nous a fournis.
Non, je ne veux pas vous empêcher...
Je sais que c'est toujours le même problème... M. le
Président, quelques commentaires additionnels. Lorsque le ministre nous
dit que nous sommes mal placés pour lui demander de contribuer à
100 % de la valeur d'imposition des immeubles des réseaux de la
santé et de l'éducation parce qu'on ne l'a pas fait pendant neuf
ans, je lui dirai qu'on s'est rendus, nous autres, à 100 % des immeubles
dont nous étions propriétaires, et à 80 %, 90 % dans
certains Immeubles du réseau.
On ne lui demande pas d'en faire autant. On lui demande seulement de
compléter le 10 % ou 20 %. Il parle de long terme, mais mon Dieu! cela
fait 7 ans. Lui-même, nous tient le même discours depuis à
peu près un an et demi à savoir que la réforme a atteint
un rythme de croisière qui justifie qu'enfin nous la révisions
pour l'ajuster. Et patati! et patata!
Parmi ces ajustements, on pourrait donner suite à cette
amélioration essentielle pour que la réforme se tienne
totalement, en soi. Quant au déficit, M. le Président, c'est
certain qu'il n'y a pas de déficit dans les municipalités. La loi
les en empêche. Alors, on ne peut pas comparer la situation du
gouvernement du Québec et la situation des municipalités de ce
point de vue-là.
Un dernier commentaire qui est une question. Est-ce que je dois
comprendre que le ministre des Affaires municipales prend le relais du
président du Conseil du trésor et qu'à son tour, il
prônera "déficit 0" pour le gouvernement du Québec?
M. Bourbeau: M. le Président, ce serait vraiment...
M. Rochefort: Est-ce que c'est...
M. Bourbeau: Ce serait vraiment...
M. Rochefort: Est-ce que c'est en prévision du remaniement
du printemps?
M. Bourbeau: Ce serait vraiment une situation idéale, si
l'on pouvait, M. le Président...
M. Rochefort: Ah, c'est idéal, vous pensez? C'est
épouvantable de parler ainsi.
M. Bourbeau: ...en arriver à un "déficit 0". Est-ce
que le député est opposé à des budgets
équilibrés?
M. Rochefort: Oui, M. le Président Pour un État, un
gouvernement, au Québec comme au Canada, c'est une erreur d'avoir un
budget avec "déficit 0".
M. Bourbeau: M. le Président, je laisse...
M. Rochefort: Je suis très clair là-dessus.
N'importe quel spécialiste en finances publiques est capable d'appuyer
cela, M. le Président.
M. Bourbeau: M. le Président, en tant que ministre des
Affaires municipales qui interdit aux municipalités d'avoir autre chose
qu'un "déficit 0", je ne peux me faire le propagandiste des budgets
à déficits. Maintenant...
M. Rochefort: Votre propre collègue du Conseil du
trésor a dû changer de cap parce qu'il a compris que cela n'avait
pas de bon sens. Au moins, vous devriez tenir compte de ce qu'il a fait.
M. Bourbeau: M. le Président, le premier ministre a dit
récemment qu'il souhaitait que le déficit du Québec passe
en dessous de 2 000 000 000 $, dès la prochaine année
fiscale.
M. Rochefort: Oui, mais, il y a une marge entre en dessous de 2
000 000 000 $ et zéro.
M. Bourbeau: Quand on est parti de 4,2 milliards, il y a à
peine 2 ans, M. le Président, encore deux autres années et on
sera rendus à un budget équilibré. M. le
Président...
Une voix:...
M. Rochefort: Bien, oui.
M. Bourbeau: M. le Président, afin de conclure sur les
propos du député de Gouin, je lui dirai que la ville de
Montréal qui, malheureusement pour elle, a un manque à gagner de
9 000 000 $ sur les "en lieu" de taxes du gouvernement du Québec, a
quand même réussi à déposer un budget
intéressant. Dans un communiqué, ici, elle se targue d'avoir
réduit à 4,6 %
les augmentations de dépenses par rapport à l'année
précédente. Elle nous annonce qu'elle a réussi à
réduire le taux de taxes de 0,37 $ des 100 $ d'évaluation, la
plus importante baisse depuis plusieurs décennies et tout cela, sans les
9 000 000 $ que le député voudrait qu'on envoie à la ville
de Montréal.
M. Rochefort: Ah là, M. le Président, par exemple,
le ministre devrait être beau joueur.
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît! J'aimerais entendre la réponse de M. le ministre.
M. Bourbeau: Elle dit également: Aucun compte de taxes
foncières n'augmentera de plus de 15 % en 1989 dans le secteur
résidentiel...
M. Rochefort: C'est cela.
M. Bourbeau: ...ainsi, les contribuables récoltent les
premiers fruits des efforts entrepris par l'administration municipale
auprès du gouvernement du Québec - là, elle se donne pas
mal de crédit, je dois dire - en vue d'en arriver à une
révision de la fiscalité municipale. En effet, dans son projet de
budget pour 1988, la ville de Montréal tient compte de la mesure de
plafonnement contenue dans le projet de loi 82 qui doit être
adopté sous peu par l'Assemblée nationale du Québec.
M. le Président, je dois dire que dans la lettre que M. Michael
Fainstat, président du Comité exécutif, me faisait
parvenir le 23 novembre, il me disait: Le budget fait état des
changements annoncés à notre régime fiscal, lesquels
témoignent des résultats des bons rapports de collaboration entre
votre ministère et notre administration municipale.
M. Rochefort: Je répète que vous ne pouvez pas
faire deux choses en même temps et, pendant que vous étiez ici, je
faisais, cet après-midi, mon discours sur la loi 82 et je vous dirai:
Oui, vous avez raison, mais un an plus tard. Et durant cette année, des
contribuables ont payé des sommes faramineuses parce que vous vous
êtes traîné les pieds pendant un an, notamment sur la mesure
de plafonnement. Je dirai au ministre, M. le Président... Non, c'est une
réalité pour les citoyens de Montréal et aussi pour les
locataires dont vous vous dites le champion, parce que les augmentations de
taxes répercutent un jour sur le prix des loyers.
Que le ministre ne nous fasse pas pleurer en disant que Montréal
a réussi à réaliser un grand budget. D'abord,
effectivement, oui, c'est un bon budget, mais ce n'est pas à cause du
ministre. Quand il a complété la lecture du communiqué, il
a effectivement mis le doigt dessus: pour réaliser un budget de cette
qualité en tenant compte d'une diminution de la contribution de 9 000
000 $ du gouvernement du
Québec, il y a des gens qui paieront 15 % de plus que
l'année passée et ce sont des petits propriétaires. C'est
sympathique que le ministre soit bien heureux que la ville ait un beau budget
et que cela lui coûte 9 000 000 $ de moins. Oui, sauf qu'il y a des gens
qui seront des Pères Noël à 15 % de plus que l'an
passé. Je répète au ministre que je suis très
sympathique au projet de loi 82, mais il aurait peut-être pu arriver un
an plus tôt.
M. Bourbeau: Là, je lance la serviette. Je renonce
à le convaincre.
M. Rochefort: Oui, vous avez bien raison parce que vous manquez
d'arguments.
Le Président (M. Saint-Roch): MM. les membres de la
commission, si on veut réaliser le voeu de l'administration de la ville
de Montréal d'adopter sous peu le projet de loi 82, j'aimerais vous
suggérer que nous revenions à l'article 253.1.
M. Rochefort: Non, mais, M. le Président...
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a des
commentaires sur l'article 253.1?
M. Rochefort: M. le Président, avec tout le respect que je
vous dois, on était en plein dedans, parce que c'est à partir de
cet article que tout cela s'est produit à Montréal.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur...
M. Rochefort: Et il faut qu'il soit adopté pour que tout
cela puisse se réaliser.
Le Président (M. Saint-Roch): Je pense qu'on va être
d'accord...
M. Rochefort: Y compris la diminution de 9 000 000 $ du
ministre.
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît! Est-ce qu'il y a d'autres interventions à l'article
253.1?
M. Rochefort: Non, je n'ai pas d'autres interventions.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'article 253.1
est adopté?
M. Bourbeau: Adopté. M. Paré:
Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): J'appelle maintenant
l'article 253.2.
M. Bourbeau: M. le Président, l'article 253.2
détermine quelles sont les unités d'évaluation
admissibles au dégrèvement. Essentiellement, ce sont celles dont
la valeur imposable pour l'exercice considéré augmente par
rapport à leur valeur imposable pour l'exercice précédant
d'un pourcentage supérieur au seuil d'admissibilité fixé
par la municipalité. On verra, au nouvel article 253.4, ce qu'on entend
par seuil d'admissibilité. Retenons simplement pour le moment que les
unités d'évaluation admissibles sont celles qui connaissent une
hausse de valeur imposable considérablement plus forte que la moyenne et
dont les propriétaires, en conséquence, sont susceptibles de
subir une hausse de taxes plus marquée que les autres. Il faut noter
qu'un terrain vague n'est jamais admissible au dégrèvement parce
que les politiques fiscales municipales, depuis plusieurs années, vont
dans le sens d'encourager l'élimination des terrains vagues. Par
ailleurs, toute unité résultant de la division d'une plus grande
unité n'est pas admissible parce qu'il est impossible de comparer sa
valeur imposable d'un exercice à l'autre. (22 h 30)
M. Paré: Dans votre esprit, M. le ministre, quelles sont
les unités dont la valeur imposable pourrait augmenter plus fortement
que la moyenne? Est-ce que, dans votre esprit, on fait référence
directement à la copropriété par cet article?
M. Bourbeau: Quand on dit que les unités 'dont la valeur
imposable... augmente, par rapport à... d'un pourcentage
supérieur au pourcentage d'augmentation fixé", ce sont tous les
immeubles dont la valeur, au cours d'une année, augmenterait d'une
façon plus importante que la moyenne des autres. Je ne peux pas
catégoriser un immeuble en particulier. Cela peut être des
immeubles en copropriété. Cela peut être des immeubles
unifamiliaux. Cela peut être des commerces. Cela peut être des
industries. Cela dépend. On n'a qu'à regarder les budgets des
municipalités. On voit qu'il y a une dispersion infinie des
augmentations dans les rôles.
M. Paré: Mais, quand on lit le deuxième paragraphe
de l'article 253.2, on dit: "Dans le cas où une unité inscrite au
rôle de l'exercice considéré résulte du regroupement
de plusieurs unités entières inscrites au rôle de
l'exercice précédent..."
C'est là où on fait référence probablement
à la copropriété. Est-ce que j'ai raison de déduire
cela?
M. Bourbeau: M. le Président, ce paragraphe-là
voudrait prévoir le cas où des immeubles adjacents, en cours
d'année, par exemple, seraient regroupés sous la
propriété d'un seul propriétaire, des immeubles
identiques, et constitueraient une seule unité d'évaluation dans
l'année suivante. L'article prévoit ces cas-là.
M. Paré: Si cela concerne des regroupements, est-ce que
cela concerne aussi la copropriété de plusieurs unités, ce
qui vient changer l'évaluation en termes d'unités pour l'ensemble
de l'édifice? L'édifice vient de changer d'évaluation
à cause de son fractionnement en unités individuelles. Est-ce que
c'est inclus dans cet article-là?
M. Bourbeau: Si le fractionnement... Dans le cas du
fractionnement, c'est l'inverse. Par exemple, un terrain qui est
subdivisé en plusieurs terrains. À ce moment-là: "Ne sont
pas admissibles au dégrèvement l'unité qui est un terrain
vague et celle qui résulte de la division d'une unité..."
Alors, si le terrain est fractionné ou subdivisé en
plusieurs terrains, on ne peut pas faire de comparaison des nouvelles
unités avec l'année précédente parce qu'il
n'existait pas d'unité fractionnée l'année
précédente, donc ils ne sont pas admissibles pour cette
année-là à la mesure de dégrèvement.
M. Paré: J'essaie de comprendre parce que... Un exemple,
c'est souvent par un exemple qu'on peut se comprendre le mieux. Il y a une
bâtisse qui est évaluée. C'est la première
année d'imposition qui sert de comparaison ou de mode de calcul. La
première année, c'est une bâtisse ordinaire, c'est un
immeuble à logements. En cours d'année, il y a transformation en
copropriété, donc l'évaluation vient de changer en valeur
et dans la façon aussi, puisque maintenant, c'est à titre de
logement. Est-ce qu'il y a un calcul pour le plafonnement qui s'applique dans
ce cas-là?
M. Bourbeau: Dans le cas où un immeuble serait
fractionné, soit un terrain ou un immeuble, à ce
moment-là, on m'indique que c'est le troisième paragraphe qui
s'appliquerait: "Ne sont pas admissibles au dégrèvement - pour
cette année-là, en tout cas - l'unité... qui
résulte de la division d'une unité inscrite au rôle de
l'exercice précédent."
Donc, si en cours d'année, on fractionne une unité en
plusieurs unités, on ne peut pas faire la comparaison pour
l'année précédente; donc, la mesure ne serait pas
applicable pour l'année précédente, mais l'année
suivante, dès qu'on a deux années de suite où la nouvelle
unité a été indiquée individuellement, à ce
moment-là, s'il y a une hausse d'évaluation importante, elle
pourrait effectivement devenir admissible à la mesure de
plafonnement.
M. Paré: Donc, la crainte que l'on avait en disant que,
dès qu'il y aura transformation, il y aura augmentation très
importante du coût du logement, qui est la répercussion directe de
l'augmentation de l'évaluation, donc de la taxe, c'est un fait parce
qu'il n'y a aucun plafonnement. C'est directement la valeur de
l'évaluation
du logement.
Si vous me dites: Ce le sera la deuxième ou la troisième
année, je suis bien d'accord, sauf que le coût majeur retenu pour
la fixation du loyer le sera au moment de la transformation, la première
année, ensuite, ce sera le calcul automatique.
M. Bourbeau: Le député semble tenir pour acquis
que, lors du fractionnement, il y a une augmentation d'évaluation
automatique. Il n'y a rien de cela qui est prouvé. Si vous avez un
immeuble de 20 logements qui vaut 1 000 000 $, donc, 50 000 $ par unité
de logement et qu'il est fractionné, il n'y a rien au départ
qui... On verra à l'usage. Qui nous dit que l'évaluateur
évaluera chaque logement individuel à plus de 50 000 $? Le
député dit: Automatiquement, il va y avoir une évaluation
augmentée. On verra, mais il n'y a rien qui dit que ce sera cela. Il
faudra voir.
M. Paré: J'avais cru que vous m'auriez trouvé un
seul exemple où ce fractionnement a amené une diminution.
M. Bourbeau: Je ne dis pas cela non plus.
M. Paré: D'accord, heureusement. Malheureusement, c'est
une façon de parler, on ne peut pas affirmer une chose semblable, sinon
il n'y aurait pas de transformation. Pourquoi vendrait-on à perte? Il
faut que l'évaluation suive ou soit relative à un avantage de
vente, donc cela veut dire une augmentation. Sans vouloir utiliser le terme
"spéculation", il faut qu'il y ait profit et, à ce
moment-là, cela amène augmentation d'évaluation. C'est
automatique, sinon la propriété, entre vous et moi, vous savez
très bien que cela n'aurait pas d'avantage.
Une dernière question sur ce sujet-là, étant
donné que cela concerne la copropriété, sur les mesures
fiscales. Vous avez été sollicité par l'association des
copropriétaires du Québec. Je m'excuse, je ne suis pas sûr
que j'ai le bon nom, mais le regroupement des propriétaires de
condominiums du Québec se plaint justement qu'il est très
pénalisé sur le plan de la taxe, en tout cas. L'exemple, c'est
que la même bâtisse est évaluée à x et,
dès qu'il y a transformation, tous ceux qui sont en
copropriété, et il y en a peut-être parmi nous, savent
qu'on a une augmentation globale pour la bâtisse. Dès que l'on
transforme, cela veut dire qu'il y a multiplication à cause
d'enregistrement au rôle d'évaluation. Donc, la même
bâtisse avec souvent moins d'occupants à l'intérieur, parce
que très souvent, quand on rénove, c'est la modernisation,
finalement, on passe de deux chambres à coucher à une, on fait un
petit salon ou une bibliothèque - on voit le phénomène de
"gentrification" - la même bâtisse qui ne prend pas plus de
terrain, qui est occupée par moins de monde, donc il risque d'y avoir
moins de consommation d'eau et de tout le reste, fait en sorte, et c'est le
discours que tiennent ces gens-là, basé sur la
réalité, que, pour la municipalité, il n'y a pas
d'augmentation des coûts," mais qu'il y a une augmentation
considérable des revenus. Envisagez-vous quelque chose dans le sens des
demandes des propriétaires de condominiums qui disent: La marge
d'augmentation de taxes à payer pour l'immeuble est beaucoup trop
considérable, comparativement à l'immeuble lorsqu'il était
en logements. Donc, un édifice de quatre logements qui étaient
loués à quatre familles, dès qu'il est transformé,
ce sont encore quatre familles et quatre logements. La seule modification qu'il
y a, c'est que c'est souvent rénové. Mais même si ce
n'était pas rénové parce que c'est transformé en
copropriété, on risquerait de voir le coût des taxes
annuelles à payer multiplié par deux, trois et même quatre.
Est-ce que vous avez envisagé quelque chose dans ce sens? Est-ce que
vous avez déjà donné une réponse à la
demande de ces gens? Est-ce qu'on pourrait savoir dans quel sens?
M. Bourbeau: M. le Président, les gens qui nous
demandent d'intervenir en matière d'évaluation pour les
condominiums nous demandent effectivement de commencer à tripoter
l'évaluation foncière. C'est ce qu'ils veulent. Ils voudraient
que le gouvernement décide arbitrairement que certains immeubles ne
valent pas ce que les évaluateurs nous disent. Les gens qui sont
propriétaires de condominiums nous disent: On est
surévalués, nos immeubles ne valent pas ce qu'ils valent. Mais,
ils ont une façon de se plaindre. S'ils estiment qu'ils sont
surévalués par rapport à la valeur marchande, ils ont le
droit d'aller devant le Bureau de révision de l'évaluation
foncière comme tous les contribuables, comme la Société
d'habitation du Québec d'ailleurs l'a fait avec succès, et de
démontrer qu'ils sont surévalués. Ce droit leur appartient
au même titre que tous les propriétaires d'immeubles du
Québec, que ce soit une maison unifamiliale, un duplex, un triplex, un
commerce ou une Industrie.
Les évaluateurs n'ont qu'une façon d'évaluer, c'est
de rendre la valeur marchande, la valeur réelle: ce que cet immeuble
rapporterait s'il était mis en vente dans un marché normal par un
propriétaire qui n'est pas obligé de vendre à un acheteur
qui n'est pas obligé d'acheter. C'est la définition classique. Je
ne peux pas aller dire à des évaluateurs: Vous ferez votre
travail professionnellement à l'égard de tous les contribuables
du Québec à l'exception d'une catégorie qui s'appelle les
propriétaires de condominiums qui voudraient être traités
différemment des autres. Ce serait tout à fait inéquitable
pour les propriétaires de maisons unifamiliales ou de duplex qui sont
évalués à la pleine valeur, à la valeur
réelle, la valeur marchande.
De deux choses l'une, ou bien ces gens sont actuellement
maltraités par les évaluateurs qui donnent une évaluation
qui est fausse et je les
enjoins, à ce moment-là, d'aller protester devant le
Bureau de révision d'évaluation foncière, où il y a
des experts qui vont certainement leur donner raison rapidement s'ils ont
raison, ou bien ils vont se rendre compte, s'ils mettent leur condominium en
vente, qu'ils vont effectivement retirer comme prix de vente les montants qui
apparaissent sur leur rôle d'évaluation.
Maintenant, je dirai au député que j'ai devant moi un
sommaire des augmentations du rôle de la Communauté urbaine de
Montréal, augmentations en pourcentage par quartier, par
catégorie d'immeubles. Il s'agit du rôle de la ville de
Montréal, extrait du rôle de la CUM pour l'année 1988.
Alors, la moyenne des augmentations totales de tous les quartiers de la ville,
pour la maison unifamiliale, est de 24,3 %; pour le duplex, 32,7 %; pour le
triplex, 34,1 %; pour les immeubles de quatre à onze logis, 42.1 %; pour
les conciergeries, 29,6 %; pour les condominiums, 19,1 %. Ce sont les
condominiums qui subissent la hausse la moins élevée de tous les
immeubles dont je viens de parler. On sait que l'augmentation moyenne du
rôle est de 23.2 %. Donc, les condominiums sont en bas de la moyenne du
rôle. Alors, les statistiques que j'ai devant moi, le
député en conviendra, ne vont pas dans le sens de prouver que les
condominiums augmentent plus vite que les autres. Donc, cela vient
défaire toute l'argumentation du député de Shefford.
M. Paré: Absolument pas. Ce que contestent les
propriétaires de condominiums, ce n'est pas l'augmentation de la taxe
des condominiums existants, c'est le coût généré par
la transformation. Je vais prendre l'exemple qu'on a utilisé cet
après-midi et que ces gens utilisent. Vous avez l'exemple que je vous
donnais sur la rue Decel-les, à Montréal, où c'est un
immeuble, un seul édifice avec un seul compte de taxe parce qu'il est en
compagnie. Donc, il y a une évaluation globale qui fait en sorte qu'on
ne considère pas chaque appartement Individuellement. Il n'y a pas sept,
huit ou dix inscriptions au rôle d'évaluation, mais une seule avec
un montant X. Tant qu'ils vont rester en compagnie, il n'y a pas de
problème. (22 h 45)
Mais on sait que dès qu'il y a transformation en
copropriété et qu'on arrive avec le nombre d'inscriptions au
rôle égal au nombre de logements, on a multiplication de la valeur
de l'ensemble de l'immeuble sur le plan de l'évaluation. Ce sont des
chiffres qui sont confirmés - malheureusement, je n'ai pas le dossier
devant moi - des chiffres qui ont été apportés par ces
gens-là qui montrent que, par rapport à l'évaluation de
l'immeuble, l'évaluation des unités maintenant incluses dans
l'immeuble est multipliée par des chiffres qui sont souvent
astronomiques, simplement parce qu'on a changé le mode de
propriété. Ce que disent ces gens-là, c'est: On n'a pas
agrandi la bâtisse. On n'a rien changé.
C'est toujours du logement et, très souvent, il y a moins de gens
à l'intérieur parce que souvent on a remplacé en
modernisant: au lieu d'être des familles, ce sont des individus. Donc, on
utilise moins, peut-être, les services municipaux, mais on paie plus
cher. C'est l'argumentation qu'amènent ces gens. Ce n'est pas
l'augmentation annuelle des taxes par rapport aux autres catégories,
c'est l'augmentation qui se répercute par la transformation en
copropriété. Là-dessus, je me demandais si vous aviez des
commentaires.
M. Bourbeau: Écoutez, je ne dis pas que le
député a tort. Ce que je lui ai dit, c'est que
l'évaluation foncière de l'immeuble avant conversion était
une évaluation qui correspondait à sa valeur marchande. Si le
propriétaire, à ce moment-là, avait vendu l'immeuble
à un autre propriétaire, un autre acheteur, sur la base de son
statut locatif, il aurait dû normalement recevoir comme prix de vente le
montant de l'évaluation foncière, enfin, normalisée
à la valeur marchande. Si le statut de l'immeuble change et qu'on passe
d'un statut locatif à un statut de propriétaire et que chacun des
propriétaires d'une fraction de l'immeuble, d'un logement, décide
de mettre son logement en vente, il est possible que la somme totale du prix de
vente excède la somme de l'immeuble avant conversion. C'est possible.
Mais cela reflétera, à ce moment-là, la valeur marchande
de chaque unité. C'est parce que le fait de convertir aura possiblement
fait augmenter individuellement chaque unité. Je ne dis pas que cela se
passe ainsi. Le député, lui, l'affirme. Je n'ai pas de cas
précis devant moi, mais je ne serais pas surpris que cela se
produise.
Il y a toutes sortes de raisons qui peuvent justifier cela:
peut-être que chaque propriétaire a fait des travaux dans son
logement individuel, peut-être que le fait d'avoir des logements
individuels crée un marché différent. Il est plus facile
d'acheter un logement de 80 000 $ qu'un immeuble de 2 000 000 $. Il y a moins
d'acheteurs pour des immeubles de 2 000 000 $ qu'il y en a pour des logements
de 80 000 $. Le bassin des acheteurs potentiels est plus grand donc,
possiblement que cela crée une plus-value sur les unités
individuelles. Je ne nie pas que ce soit possible, mais c'est la
réalité des faits et l'évaluation traduit toujours la
valeur du marché. C'est la base même de notre système que
les immeubles doivent être évalués selon la valeur
marchande, la valeur réelle, quelle qu'elle soit.
M. Paré: En tout cas, on va procéder à
l'autre article mais, simplement en concluant, je dois vous dire qu'en me
basant sur la réalité je constate, je n'ai pas besoin d'affirmer,
je constate. Quand je vous disais tantôt: Est-ce que vous seriez
même en mesure de me donner un seul exemple où cela a amené
une diminution? Je serais curieux de le voir. J'irais visiter cela.
M. Bourbeau: Comme je l'ai dit au député, je serais
moi-même surpris d'en trouver un.
M. Paré: Donc, on pourrait maintenant aller au-delà
de la constatation, on pourrait confirmer que c'est ce qui se produit.
D'accord, pour l'article...
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'article 253.2
est adopté?
M. Paré: Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): J'appelle maintenant
l'article 253.3.
M. Bourbeau: Cet article explique comment calculer le pourcentage
d'augmentation de la valeur imposable d'une unité d'évaluation
aux fins de déterminer si elle est admissible et, le cas
échéant, de calculer le montant du dégrèvement qui
lui est applicable. Pour ce faire, on compare les deux rôles successifs
pris à des dates biens précises. Le rôle de l'exercice
considéré est pris comme il existe au moment où la
municipalité ou la communauté chargée de la perception des
taxes confectionne le compte général des taxes foncières
pour cet exercice. Quant au rôle de l'exercice précédent,
on le prend comme il existait le dernier jour de celui-ci, compte tenu de
toutes les modifications qui lui ont été apportées
à la date de la confection du compte susmentionné.
Une règle fondamentale est exprimée au deuxième
alinéa du nouvel article 253.3. Il ne faut pas considérer, dans
la valeur imposable de l'unité, pour l'exercice considéré,
la partie de cette valeur qui est imputable à une nouvelle construction
ou à une transformation des bâtisses existantes
reflétée dans une modification au rôle de l'exercice
considéré.
Cela s'explique par le fait que la mesure du dégrèvement
est basée sur un plafonnement de la hausse de la valeur imposable due
à l'évaluation du marché immobilier et non pas de la
hausse due à un changement physique de l'unité
d'évaluation. Il est en effet normal et justifié qu'une hausse de
valeur et une augmentation de taxes survienne d'un exercice à l'autre si
l'unité d'évaluation a profité d'une amélioration
physique. Si la modification a également effet sur le rôle de
l'exercice précédent, le problème ne se pose pas parce
qu'alors, l'unité n'est pas censée avoir profité d'une
amélioration physique d'un exercice à l'autre. Cette
amélioration existait également l'année
précédente, de telle sorte qu'il est justifié de comparer
la valeur imposable de l'unité améliorée selon les deux
rôles modifiés et successifs.
Il est important d'ajouter maintenant une mise en garde. Comme nous le
verrons au nouvel article 253.5, il est possible que la valeur imposable de
l'unité inscrite au rôle de l'exercice considéré
soit comparée non pas à sa valeur imposable inscrite au
rôle de l'exercice précédent, mais plutôt à sa
valeur imposable plafonnée qui a servi au calcul du
dégrèvement pour cet exercice précédent.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a des
interventions?
M. Paré: Très logique! Bonne explication!
Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): L'article 253.3 est
adopté. J'appelle maintenant l'article 253.4.
M. Bourbeau: M. le Président, j'aimerais que l'on suspende
l'article 253.4. On pourra y revenir un peu plus tard, avec le consentement de
la commission.
Le Président (M. Saint-Roch): Y a-t-il consentement?
M. Paré: Oui.
Le Président (M. Saint-Roch): L'article 253.4 étant
maintenant suspendu, j'appelle l'article 253.5.
M. Bourbeau: Cet article prévoit la façon
d'établir le montant du dégrèvement applicable à
une unité d'évaluation admissible. En fin de compte, ce montant
doit être suffisant pour faire en sorte que les taxes foncières
payables à l'égard de l'unité, pour l'exercice
considéré, soient égales à celles qui seraient
payables si la valeur imposable de l'unité était une valeur
fictive qu'on appelle la valeur plafonnée. Cette valeur fictive se
calcule en prenant la valeur imposable de l'exercice précédent,
établi conformément au nouvel article 253.4, et en l'augmentant
d'un pourcentage égal au seuil d'admissibilité fixé par la
municipalité - c'est-à-dire en vertu du nouvel article 253.4. Ce
système où l'on utilise la véritable valeur imposable de
l'exercice précédent est appelé le plafonnement non
répétitif.
Le nouvel article 253.5 permet à la municipalité
d'utiliser un autre système qu'on appelle le plafonnement
répétitif. Dans ce second système, au lieu d'utiliser la
véritable valeur imposable de l'exercice précédent, on
utilise la valeur fictive qui a servi au calcul du dégrèvement
pour l'exercice précédent. C'est cette valeur fictive de
l'année précédente que l'on augmente d'un pourcentage
égal au seuil d'admissibilité pour établir le montant du
dégrèvement pour l'exercice considéré. Le cas
échéant, la valeur fictive utilisée l'année
précédente peut être remplacée par la valeur fictive
qui aurait dû être utilisée si on avait connu, à
l'époque, les modifications pertinentes au rôle de l'exercice
précédent qui ont été apportées
rétroactivement après le jour où on a calculé le
dégrèvement pour cet exercice.
Ce second système, si la municipalité décide de
l'appliquer, vaut non seulement aux fins de calculer le
dégrèvement, mais aussi aux fins de déterminer si
l'unité d'évaluation est admissible. Cela signifie qu'au lieu de
comparer la valeur imposable de l'unité pour l'exercice
considéré avec sa valeur imposable réelle pour l'exercice
précédent, on la compare avec la valeur Imposable fictive qui a
été ou aurait dû être utilisée lors de
l'exercice précédent.
Il est important de noter que le second système, dit de
plafonnement répétitif, ne peut s'appliquer à une
même unité d'évaluation pendant plus de trois exercices
consécutifs. Cela signifie que, lors du quatrième exercice, si la
municipalité continue d'offrir la mesure de plafonnement,
l'admissibilité de l'unité et, le cas échéant, le
montant du dégrèvement seront établis en fonction de la
valeur imposable réelle de l'exercice précédent et non de
la valeur fictive de cet exercice et ce, même si la municipalité a
décrété qu'elle appliquait encore le second
système.
Un exemple illustrant la différence entre les deux
systèmes. Je prends comme hypothèse que la valeur imposable
réelle, pour 1988, serait de 100 000 $, que la valeur imposable
réelle, pour 1989, serait de 200 000 $ et que la valeur imposable
réelle, pour 1990, serait de 220 000 $, avec un seuil
d'admissibilité de 30 %, pour les années 1989 et 1990. Dans le
premier système, qui est le plafonnement non répétitif, la
valeur fictive de 1989 serait la valeur imposable réelle de 1988, soit
100 000 $, multipliée par le seuil d'admissibilité 1989, soit 30
%, c'est-à-dire 130 000 $. Pour l'année suivante, la valeur
fictive 1990, la valeur imposable réelle de 1989 est de 200 000 $, le
seuil d'admissibilité est toujours de 30 % pour l'année 1990, ce
qui ferait 260 000 $.
Le second système est le plafonnement répétitif.
Pour l'année 1989, nous avons toujours le même système: la
valeur imposable, 100 000 $, le seuil d'admissibilité 30 %, ce qui fait
une valeur de 130 000 $. Pour l'année suivante, on plafonne à
partir de la valeur fictive 1989, c'est-à-dire de 130 000 $, on applique
le seuil d'admissibilité de 30 %, ce qui fait une valeur
plafonnée de 169 000 $.
M. le Président, c'est un peu compliqué, mais je pense que
le député comprend que, dans un des systèmes, on plafonne
l'année suivante sur la valeur imposable réelle, alors que, dans
le deuxième système, on plafonne sur la valeur déjà
plafonnée l'année précédente.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a des
interventions? M. le député.
M. Paré: En termes clairs, ce n'est pas facile, c'est vrai
que cela prend des calculs. Qu'est-ce qui fait qu'on choisisse une valeur
fictive par rapport à la valeur réelle? Qu'est-ce qui justifie
que le calcul soit basé sur une valeur fictive?
M. Bourbeau: La valeur fictive, c'est la valeur qui a
été utilisée l'année précédente, en
utilisant le plafonnement. Une municipalité décide une
première année de plafonner un immeuble donné. Cet
immeuble est taxé à une évaluation plafonnée.
L'année suivante, on peut recalculer le nouveau compte de taxe à
partir de l'évaluation plafonnée de l'année
précédente et non pas de son évaluation réelle.
Évidemment, c'est un choix politique que fait la municipalité.
Quand elle plafonne pendant trois ans sur l'évaluation plafonnée
de l'année précédente - qu'on appelle ici la valeur
fictive - cela permet à un immeuble de rattraper tout doucement, pendant
trois ans, son évaluation réelle, en procédant avec une
courbe ascendante qui fera en sorte qu'au bout de trois ans l'immeuble se sera,
j'espère, drôlement rapproché de son évaluation
réelle. C'est une mesure qui vise à éviter les hausses
brusques de comptes de taxes et à permettre le rattrapage sur une
période de trois ans, plutôt que de le faire sur une
période d'un an.
M. Paré: Ce n'est pas clair. Je dois reconnaître que
ce n'est pas de la simplification administrative, ce que je disais au tout
début. C'est de la complication dans mon cas et j'aimerais que ce soit
plus clair. On dit qu'on favorise deux formules d'aide à la taxation, le
plafonnement et l'étalement. Sur le plafonnement, je vous disais
tantôt, quand on a étudié l'article
précédent, 253.1, on a eu une bonne explication, claire, facile
à comprendre, on voit la façon dont se fait le calcul. Donc, on
se base sur des chiffres réels. On dit qu'on conserve
l'équité, on garde toujours l'évaluation. On a un
plafonnement sur la taxation, c'est une mesure fiscale et non pas une mesure de
changement du mode d'évaluation. Jusque-là c'est clair. Ce qu'on
explique à l'article précédent, cela va. C'est le
plafonnement.
On va retrouver plus loin une autre mesure qui est l'étalement.
On y reviendra à ce moment. Cela va jusque-là. C'est toujours du
plafonnement, mais basé sur une valeur fictive. Là, vous me dites
que c'est une façon d'étaler.
M. Bourbeau: Écoutez, je pense que je vais reprendre
l'explication.
M. Paré: Oui, j'aimerais cela. (23 heures)
M. Bourbeau: Prenons un immeuble évalué à
100 000 $. L'année suivante l'évaluateur décide que
l'immeuble vaut 200 000 $. Cet immeuble a donc connu une augmentation de 100 %.
C'est arrivé dans plusieurs cas, cette année à
Québec. Au-delà de 10 % des immeubles ont connu plus de 100 %
d'évaluation. Alors, la municipalité décide de plafonner
et elle peut plafonner à 30 %. Disons que le rôle a
augmenté de 20 %. Alors, l'évaluation moyenne du rôle
était de
20 %. Elle a droit d'ajouter 10 % ou une fois et demie le rôle.
Dans les deux cas, elle se retrouve à 30 %.
Alors, l'immeuble de M. Tremblay, qui valait 100 000 $ la
première année, plafonnement à 30 %. C'est donc dire que
la municipalité va calculer le compte sur 130 000 $. L'année
suivante, elle a le choix d'utiliser les 200 000 $, qui est la vraie valeur et
d'utiliser cela comme mesure de départ. Elle peut dire, l'année
suivante: Votre immeuble vaut 200 000 $, je plafonnerai uniquement si vous
augmentez encore de 30 %, en admettant que le rôle augmenterait encore de
20 %, ou bien, la municipalité peut dire, l'année suivante: Je
calcule mon compte de taxes pour les immeubles que J'ai plafonnés,
l'année précédente, sur la valeur plafonnée de
l'année précédente, donc, sur 130 000 $. Elle pourrait
dire: M. Tremblay, l'année dernière, j'ai calculé sur 130
000 $, cette année, je pars de 130 000 $, et non pas, je pars de 200 000
$ et je vous applique encore la mesure de plafonnement, une autre fois. Elle
peut le faire, comme cela, pendant 3 ans. Alors, M. Tremblay va passer de 130
000 $ à 165 000 $, à 195 000 $ et au bout de 3 ans, il va avoir
rattrapé cette évaluation de 200 000 $. C'est ce qu'on appelle le
plafonnement répétitif. Elle peut aussi choisir de ne plafonner
qu'une seule année et, l'année suivante, utiliser les 200 000 $
comme évaluation de départ. Je ne sais pas si je me fais
comprendre?
M. Paré: Oui. Donc, dans le plafonnement, on amène
une autre façon qui est le plafonnement répétitif pour des
cas extrêmes, disons.
M. Bourbeau: En fait, non. Je signale au député que
si la municipalité décide que c'est répétitif,
c'est répétitif pour tout le monde, pour tous les citoyens et les
propriétaires. Elle ne peut pas dire que c'est répétitif
pour certains et non répétitif pour d'autres. Elle choisit le
mode répétitif. C'est donc pour tout le monde.
M. Paré: Donc, après avoir établi le
principe dans l'article précédent, on vient donner une
deuxième possibilité, qui est le plafonnement
répétitif. Une deuxième façon de le faire, s'il y
avait à l'intérieur d'une municipalité, - parce que ce
n'est pas du cas par cas c'est globalement - une augmentation qui soit plus
forte que prévu, pour toutes sortes de raisons, on peut choisir le
plafonnement répétitif. C'est un deuxième choix que l'on
donne à la municipalité, sur une base globale.
M. Bourbeau: Exactement. La municipalité a le choix de
prendre l'une des deux formules.
M. Paré: Bon. Une question qui me vient, face à
cela, sur la base de l'équité. Quand on choisit l'un par rapport
à l'autre, au lieu de le prendre toujours sur le même montant, qui
est censé être l'évaluation, puisqu'on dit qu'on ne touche
pas à la norme d'évaluation, comme telle, la mesure est fiscale
au niveau du plafonnement et du taux, mais pas de l'évaluation.
Si, l'on choisit de changer la norme et de prendre un nouveau
plafonnement, la mesure de plafonnement répétitif, en fonction
d'une valeur fictive, est-ce qu'on ne risque pas, à ce moment-là,
qu'il y ait, contrairement à ce qu'on disait tantôt, des cas
extrêmes? Quand vous m'avez donné le cas de Saint-Léonard,
la liste des gagnants, c'était votre côté optimiste qui
sortait à ce moment-là. Est-ce que cela ne risque pas de faire en
sorte qu'il y ait moins de gagnants et plus de perdants, parce qu'on va adapter
le plafonnement répétitif à tout le monde, que cela va
être une mesure globale? On va décider cela. Quand vous me dites
qu'il y a des résidences qui ont vu leur évaluation doubler, ce
ne sont que quelques-unes, pas des centaines, pas des milliers. Mais, par
rapport à l'ensemble du stock de maisons, ce n'est certainement pas une
majorité, ce qui va faire que la municipalité va décider
de prendre cela en fonction des cas. Dans votre idée, sur quoi le choix
sera-t-il basé? La disparité, les augmentations trop grandes, des
exceptions? Qu'est-ce qui peut justifier qu'on donne la permission aux
municipalités, d'avoir une deuxième façon de le faire et
que ce ne soit pas calculé sur l'outil de base qu'est
l'évaluation municipale? Mais, ce sera sur une évaluation
fictive. Qu'est-ce qui fait en sorte que l'on donne cette permission? C'est
cela que j'aimerais comprendre. Je comprends le système, mais le
but...
M. Bourbeau: Le député revient avec des questions
fondamentales. Je croyais qu'on avait un peu vidé cela tout à
l'heure. C'est un choix politique que la municipalité fait d'instaurer
un système d'assurances contre les hausses brusques des comptes de
taxes. C'est un choix politique et il n'y a aucune autre justification que
celle-là. De la même façon que la municipalité
décide qu'elle assure les contribuables contre les risques d'incendie
sur ses propres immeubles et qu'elle répartit à l'ensemble des
contribuables la prime d'assurances contre l'incendie, dans ce cas-ci, elle
décide de répartir, sur l'ensemble des contribuables, le risque
contre les hausses brusques des comptes de taxes.
M. Paré: Donc, si je déduis, votre dernière
parole c'est de répartir les risques sur l'ensemble des contribuables
pour les hausses brusques, mais qui ne sont pas
généralisées normalement, qui ne toucheront pas toute la
population. En termes d'équité, cela m'inquiète. La
première façon ou le plafonnement général qu'on
avait reconnu, c'était déjà en soi, des gagnants et des
perdants. Maintenant, on amène une mesure qui permet à la police
d'assurance de faire un partage encore plus large, de diminuer la facture pour
des gens qui pourraient être, en termes
spéculatifs, les plus grands bénéficiaires. Je ne
sais pas si je me fais bien comprendre. C'est que s'il y a des augmentations de
100 % qui sont dues à cela, on décide de répartir
davantage la police d'assurance. C'est celui-là qui a profité de
l'évaluation considérable de son avoir qu'on veut
protéger, en fait, en répartissant l'assurance sur l'ensemble qui
n'aura pas connu cette augmentation de son avoir propre. Ai-Je raison de donner
cette interprétation?
M. Bourbeau: Je crois qu'on fait exactement le même
débat qu'on a fait il y a une demi-heure. Je croyais avoir convaincu le
député qu'il y avait autant de chances que les petites
évaluations subissent les hausses importantes d'évaluation et
donc de comptes de taxes que les grosses évaluations. Je pense que le
député refait exactement le même raisonnement
M. Paré: Sauf que, dans ce que je viens de dire, ce
n'était pas en termes globaux d'avoir de l'individu. C'était en
termes de ceux qui augmentent. Oui, cela peut être un plus petit
édifice, non pas un édifice de 1 000 000 $ qui va doubler.
Là, je me réfère à vos paroles de tantôt,
l'intérêt peut être porté davantage, parce que c'est
là où il y a le plus de gain à faire sur des maisons de 40
000 $, 50 000 $ et 60 000 S. Donc, ce n'est pas en termes de valeurs
effectives, mais c'est en termes d'augmentations. Alors, la personne qui voit
son avoir doublé, même si c'est 50 000 $ qui passe à 100
000 $, c'est elle qui sera protégée davantage par cette mesure,
même si son gain est plus fort que les autres. En faisant plus de gains,
elle économisera par la répartition de la police d'assurance sur
l'ensemble des autres. J'essaie de ne pas...
M. Bourbeau: Oui, de la même façon que si le
député a une résidence de 350 000 $ et qu'il passe au feu,
il aura une prestation d'assurance plus importante que si moi, qui ai une
propriété de 50 000 $, je passe au feu. Si nos deux maisons sont
complètement rasées par l'incendie, le député
percevra 350 000 $ de la compagnie d'assurances et moi, 50 000 $. C'est
simplement parce que son immeuble valait plus cher. Maintenant, la prime
d'assurance payée par tout le monde est souvent en comparaison, bien
sûr, du risque. Mais, je signale au député que la prime
d'assurance aussi sera plus importante pour la maison de 300 000 $ que pour la
maison de 50 000 $ parce que, puisque la prime d'assurance est calculée
à raison de tant du 100 $ d'évaluation, celui dont
l'évaluation est de 300 000 $ paiera une prime d'assurance plus
élevée que celui dont l'évaluation est de 50 000 $. Donc,
c'est le même principe et c'est équitable de la même
façon.
M. Paré: Mon inquiétude du début sur les
grands principes justement de l'équité et de calcul basé
sur l'évaluation, je trouve que cela en mange une claque. Quand on paie
pour des services municipaux ou quand on paie des taxes municipales qui doivent
être basées sur l'évaluation foncière, c'est cela le
principe, ce n'est pas une police d'assurance effectivement. On ne met pas
quelque chose en commun pour aborder un coût parce que la
propriété, c'est un bien, non pas collectif, mais personnel. Cela
veut dire que quelqu'un qui a un édifice et qu'il va chercher 200 % de
profit dans la même année parce qu'il est dans un coin où
se développent, je ne sais pas, un édifice important et des
services, cela fait qu'il a finalement eu une augmentation considérable.
Peu importe la raison, il y a une augmentation, l'individu voit ses avoirs
doublés ou multipliés par quatre. Il profite d'une situation, il
vient de s'enrichir. Comme société, on vient dire: Parce que tu
as eu un avantage personnel, on va te donner un autre avantage en te partageant
l'augmentation, en faisant payer ton augmentation de taxes par les autres. Je
ne sais pas si j'ai raison dans ce que je suis en train d'interpréter,
mais si c'est cela, il y a iniquité, ce qui fait que ce n'est pas
respecté. En plus de l'Iniquité, je dois dire qu'on se base de
moins en moins sur l'évaluation foncière. On prend un chiffre
fictif pour empêcher une augmentation considérable en certains
cas. Je peux me tromper, mais si c'est cela, je dois vous dire... La formule du
début, à 253.3, me semble acceptable parce que c'est basé
sur du réel et non pas du fictif. Je vous repose la question. Si c'est
basé sur une valeur fictive, est-ce qu'on va baser un cas particulier
sur une valeur fictive ou si cela veut dire que tout le rôle
d'évaluation devient fictif?
M. Bourbeau: Le député comprendra que, lorsqu'on
emploie les mots "valeur fictive", c'est la valeur plafonnée de
l'année précédente. C'est ce qu'on a appelé, pour
les fins de la discussion, la valeur fictive. On comprend que ce n'est pas la
valeur réelle inscrite au rôle, c'est la valeur qu'on a
utilisée l'année précédente pour des faits
après le plafonnement. On l'a appelée la valeur fictive soit la
valeur plafonnée de l'année précédente.
M. Paré: Pour quelles raisons ne conser-ve-t-on pas la
valeur qu'on avait tantôt en changeant... Vous avez dit tantôt que
la façon d'augmenter les revenus municipaux, c'est soit d'augmenter la
valeur des résidences ou d'augmenter le taux. Là, on ne veut pas
tenir compte des augmentations de la valeur des bâtisses, donc cela veut
dire que c'est le taux qui va encore augmenter. On va finir par faire augmenter
un peu plus, d'une façon automatique, par ces mesures, le taux de base
presque d'année en année.
M. Bourbeau: C'est-à-dire que, si la municipalité
décide d'utiliser la méthode de plafonnement pour les
évaluations, il y a un coût pour la
municipalité comme le service de police entraîne un
coût, comme l'enlèvement de la neige, comme les ordures
ménagères. La municipalité absorbe ce coût et le
répartit dans son budget comme une dépense au même titre
que les autres postes dont je viens de parler. Forcément, cela
coûte des cents d'évaluation, 0,04 $, 0,05 $, on l'a vu
tantôt. À Saint-Léonard, c'est 0,04 $, à la ville de
Montréal, je crois que c'est 0,12 $ selon ce qu'on me dit. Mais, cela
dépend à quel niveau la ville veut plafonner. Si la ville
décide de plafonner à un niveau très élevé,
par exemple, au lieu de plafonner à 10 % en haut du rôle ou
à 1,5 %, si elle décide de plafonner à 30 % en haut du
rôle de façon à ne vraiment venir en aide qu'à ceux
qui sont frappés d'une façon très importante, à ce
moment-là, la mesure ne coûtera pas cher du tout. Cela va
être minime.
M. Paré: Je dois vous dire... J'ai l'impression, non pas
que cela se complique, mais en tout cas, cela m'inquiète parce que vous
venez de dire: façon de protéger ceux qui ont une augmentation
trop considérable...
M. Bourbeau: De leur évaluation foncière. M.
Paré: ...de leur évaluation foncière.
M. Bourbeau: Pas en termes de dollars, mais en termes de
pourcentage. Cela vaut autant pour le petit propriétaire que pour le
gros. On peut avoir un petit propriétaire d'une maison minuscule, je ne
sais pas, de 35 000 $ qui subit une augmentation de 100 %. Cela peut
arriver.
M. Paré: Vous dites que c'est une police d'assurance qu'on
veut répartir sur l'ensemble, là où il y a des
augmentations trop considérables.
M. Bourbeau: En termes de pourcentage.
M. Paré: En termes de pourcentage. Donc, je vois le
problème. Il est évident que l'augmentation d'évaluation
en termes de pourcentage affecte l'individu en ce qui a trait à ses
taxes municipales à payer, mais qu'en même temps, comme citoyen,
cela l'enrichit énormément. (23 h 15)
M. Bourbeau: Éventuellement, peut-être, s'il y a une
augmentation d'évaluation importante, oui, probablement.
M. Paré: S'il y a une augmentation de l'évaluation,
ses avoirs viennent d'augmenter. Il va vendre plus cher, il est plus riche.
C'est évident. Donc, parce qu'il est plus riche sur le principe de
l'équité, ses avoirs ont augmenté.
M. Bourbeau: Potentiellement.
M. Paré: Donc, ses avoirs ont augmenté...
M. Bourbeau: II le verra le jour où il mettra son immeuble
en vente, il aura peut-être une surprise si c'est dans une période
de temps difficiles. On a vu une maison évaluée à 250 000
$, que les propriétaires ne réussissaient pas, en période
de récession en 1982-1983, à vendre au prix de
l'évaluation. Souvent, ils obtenaient beaucoup moins que
l'évaluation. Cela dépend des époques.
M. Paré: Par exemple, une municipalité où un
quartier subit une augmentation énorme de l'évaluation pour
toutes sortes de raisons, et dans le reste de la municipalité, c'est une
augmentation raisonnable à 75 %, ou, en tout cas, de beaucoup
inférieure à celle du quartier concerné, comment cela se
produit-il, a ce moment-là? Si on prend le plafonnement
répétitif, on prend pour l'ensemble de la municipalité,
peu importent les quartiers, l'évaluation de l'an passé. À
ce moment-là, et c'est là où l'équité peut
finalement ne pas être respectée, cela veut dire que dans le
quartier, ceux qui ont eu une grosse augmentation et en profitent d'être
plus riches comme individus ont la police d'assurance collective qui fait en
sorte qu'ils n'auront pas à payer plus cher que les autres où
l'augmentation a été plus petite. Le plafonnement fait en sorte
que l'on n'augmente pas. Le plafonnement, on va le rendre raisonnable pour tout
le monde. Donc, pour eux, cela dépasse. Cela veut dire que l'on augmente
encore le taux de base pour être capable de récupérer ce
que l'on plafonne et qu'on ne va pas chercher, on le répartit sur
l'ensemble du territoire. Donc, ces gens voient leurs avoirs augmenter moins
vite qu'eux voient leurs taxes augmenter, parce qu'ils sont partie prenante de
l'assurance, ce que vous appelez l'assurance collective.
M. Bourbeau: Oui, mais tout à coup, plutôt que de se
produire dans un quartier cossu, ce phénomène arrive dans un
quartier de maisons modestes, il y a une ruée spéculative sur un
quartier le plus modeste de la ville de Granby. Tout à coup, il y a une
espèce de lancée des spéculateurs sur ces maisons, parce
qu'elles sont plus proches d'un centre sportif que la ville de Granby veut
construire et cela donne une plus-value à l'ensemble. Ce quartier voit
ses augmentations d'évaluation individuelles progresser plus rapidement
que la moyenne du rôle. Les citoyens de ce quartier, dont les immeubles
verront une augmentation supérieure au seuil, profiteront de la mesure
et le coût de cette mesure sera réparti sur l'ensemble des
contribuables. Mais, l'année suivante, toujours dans la même ville
de Granby que connaît bien le député, les
spéculateurs pourraient s'attaquer à un autre quartier pour
d'autres raisons. On vient de dépolluer la rivière Yamaska, cela
donne un attrait particulier aux maisons situées près de cette
rivière. Tout à coup, ce quartier voit une ruée de
spéculateurs, enfin, voit une augmentation plus importante de ses
évaluations. L'année
suivante, c'est un quartier qui verra peut-être ses
évaluations augmenter au-delà du seuil fixé par les
muncipalités et à ce moment-là la police d'assurance
jouera en faveur de ces gens-là, de sorte que sur une période de
temps, il est fort probable que l'ensemble des contribuables aura à la
fois payé la prime et aussi retiré les prestations.
M. Paré: Le citoyen qui a l'avantage d'être sur le
bord de la rivière Yamaska, qu'on est justement en train
d'aménager grâce à un programme Berges neuves, verra son
quartier devenir effectivement très populaire et l'évaluation de
sa maison passer de 50 000 $ à 100 000 $. Heureusement, il est
embarqué dans la police d'assurance et fait une économie de taxes
selon le grand principe que l'on paye en fonction de l'évaluation de sa
bâtisse.
M. Bourbeau: La municipalité de Granby n'est pas
obligée d'utiliser la formule de plafonnement si elle estime qu'elle a
des circonstances particulières qui font en sorte que ce n'est pas
souhaitable de l'utiliser, elle n'a qu'à ne pas l'utiliser elle n'y est
pas obligée. Les élus municipaux sont éminemment
responsables et capables de prendre ces décisions.
M. Paré: Mais cela vient bonifier davantage le
plafonnement de l'année précédente.
M. Bourbeau: Cela ne le bonifie pas. Cela continue la mesure de
rattrapage amorcée par la municipalité pour que ces
propriétaires soient taxés, sur une période de trois ans,
à leur pleine évaluation.
M. Paré: En tout cas, je doute que, par cette mesure, on
ait vraiment à l'esprit le respect de l'équité. On la
compare à une police d'assurance et on est en train de dire qu'on se met
une police d'assurance collective pour des biens personnels et individuels.
M. Bourbeau: C'est comme l'assurance résidentielle et
l'assurance automobile, ce sont des biens personnels.
M. Paré: Oui, si on le prend dans ce sens-là, c'est
vrai qu'on doit payer collectivement l'ensemble des biens d'une
municipalité et des services qui y sont donnés. Mais on avait
accepté que tout soit basé sur quelque chose de défini,
soit l'évaluation municipale. Maintenant, on le considère plus
comme un partage. L'exemple je le reprends en faisant une petite coche de plus.
La personne dont la maison valait 50 000 $ et qui voit sa maison monter
à 100 000 $ n'a pas à payer de taxes sur l'ensemble. Si elle paie
son compte de taxes pour le mois suivant, sur une évaluation de 70 000 $
au lieu de 100 000 $ à cause du plafonnement, et, le mois suivant, elle
vend sa maison 100 000 $, tant mieux, elle aura profité de
l'évaluation et de l'économie de taxes parce qu'on dit que, dans
son quartier, elle a eu la chance d'être dans une bonne période et
elle a eu la chance de vendre à un bon prix. Tant mieux, mais la police
d'assurance fait en sorte que, plus cela a augmenté pour elle, plus elle
a épargné de taxes, mais plus elle est riche, en même
temps.
M. Bourbeau: Oui, mais elle a payé la prime. Si son
immeuble valait cher, elle a payé une prime plus élevée,
puisque la prime est proportionnelle à son évaluation, qu'un
voisin dont la maison est évaluée moins cher qui, lui, aurait
payé moins cher.
M. Paré: Pas nécessairement proportionnelle
à son évaluation et à son voisin. Supposons que le
plafonnement répétitif soit de 30 %. La personne qui a
augmenté de 30 % ou de 20 %, alors que celle dont vous me donnez
l'exemple augmente de 100 %, je vous jure qu'il y en a qui n'ont pas les
mêmes taux d'assurance à payer. Ils n'ont pas les mêmes
coûts d'assurance à payer ou ils n'ont pas les mêmes
économies par rapport à ce qu'ils en retirent en
bénéfices.
M. Bourbeau: Évidemment, il est possible... De toute
façon, chaque fois qu'un individu subit une hausse d'évaluation
importante, s'il met sa maison en vente, il a des chances de réaliser le
profit dont parle le député. Mais ce profit est disponible
à tout le monde. Dès qu'un immeuble a pris une plus-value, on
peut encaisser la plus-value en le mettant en vente, c'est évident.
M. Paré: Oui, mais si c'est pour des quartiers plus
spéculatifs, le profit n'est pas pour tout le monde, mais pour ceux qui
sont là.
M. Bourbeau: Oui, mais les quartiers les plus spéculatifs
peuvent aussi bien être des quartiers défavorisés que des
quartiers de maisons cossues. Il n'y a pas de discrimination là-dedans.
C'est équitable. C'est un peu venir en aide à toute personne et
la prime est distribuée équitablement entre tous les
contribuables.
Écoutez, je comprends les préoccupations du
député. C'est intéressant et je dois d'ailleurs dire que
cela fait un exercice mental excellent, sauf que beaucoup de
municipalités se sont penchées là-dessus longtemps et les
experts des comités techniques de toutes les communautés urbaines
des grandes villes, de l'UMRCQ et de l'UMQ, ont regardé cela et,
finalement, je dois dire que la mesure fait le consensus du monde municipal.
Cela ne veut pas dire qu'on soit obligé de l'accepter, mais il reste
quand même que cette mesure n'est pas improvisée, cela fait des
mois et des mois qu'elle est à l'étude.
Je puis assurer le député que cela a été
scruté à la loupe par des dizaines et des dizaines d'experts en
la matière, parce qu'il y avait dans ce comité les meilleures
têtes en termes d'éva-
luation, des représentants des grandes villes, Québec,
Montréal, Laval et Longueuil, des deux communautés urbaines, de
la communauté régionale de l'Outaouais, de l'UMQ, de l'UMRCQ, du
ministère des Affaires municipales et un peu du ministère des
Finances du Québec à l'occasion. On a fait un "melting pot" de
pas mal de gens qui connaissent un peu ces milieux-là, ces
sujets-là et ce comité technique élargi a accouché
de cette mesure-là qui a été testée et
testée sur l'informatique. Probablement que si on sortait les feuilles
et les passes d'informatique qui ont été utilisées pour en
venir à ces conclusions-là, il y en aurait probablement pour
remplir la salle. Chaque municipalité en a fait, repartait faire ses
devoirs et revenait avec ses calculs. Le ministère en a fait aussi.
C'est le résultat d'un travail considérable, je dois dire.
M. Paré: Je n'en doute pas. Comme je vous le disais, ce
n'est certainement pas quelque chose de simple. À preuve, c'est notre
discussion. C'est évident que la fiscalité en soi, c'est
complexe. Essayer de l'adapter à des situations qui sont changeantes, ce
n'est pas facile. En tout cas, c'est évident qu'on va suivre ça
de près pour s'assurer que, dans la pratique, il n'y aura pas de
déception. Vous nous dites qu'il faut le tester pour le savoir,
peut-être, sauf que ça m'inquiète quand même qu'on
prenne maintenant le compte de taxes, la façon de calculer la taxe comme
si c'était une assurance alors que la taxe foncière, je n'ai
jamais considéré ça comme de l'assurance.
M. Bourbeau: Tout change.
M. Paré: À ce chapitre-là quand on
décide de répartir ça - je vais conclure là-dessus
pour cet article-là - si c'était juste l'exemple de Granby, mais
qu'on pourrait répartir sur l'ensemble des municipalités du
Québec, pour empêcher que le petit propriétaire qui subit
ou qui est victime d'une augmentation de l'évaluation de sa maison parce
qu'il y a une autoroute ou un centre commercial qui se bâtit de l'autre
bord de la rue, il ne l'a pas voulu, mais à un moment donné il y
a une augmentation malgré lui. Il a de la misère à
arriver. Il passe ses fins de semaine à tondre le gazon et passe ses
vacances sur la galerie ou en arrière; pour lui l'augmentation de 100 %
ne lui apporte rien d'autre qu'une augmentation de taxes. Il ne veut pas vendre
parce qu'il est bien chez lui et ça va lui coûter plus cher de
s'en aller ailleurs. SI ça protège ces gens-là, je dois
dire que c'est le genre de police que je ne hais pas du tout. C'est bien clair
là-dessus. Je suis capable de considérer ça et si c'est
dans l'esprit de toutes les personnes que vous avez nommées
tantôt, je comprends que c'est une mesure et que ça prend une
police d'assurance pour protéger le petit propriétaire, y compris
ses locataires s'il a deux, trois logements en plus dans sa maison.
Mais il n'y a rien qui nous dit qu'au contraire, là où il
va y avoir augmentation considérable, ce ne sera pas justement des
spéculateurs. À ce moment-là c'est encore l'argent de
l'ensemble des payeurs de taxes qui va bénéficier à ceux
qui font de la spéculation. Quand on regarde sur le Plateau-Mont-Royal,
ce qui s'y passe, ce sont des gens qui veulent faire de l'argent avec des
maisons et non pas des gens qui subissent des augmentations. En ce
sens-là, la police d'assurance, je ne suis pas sûr qu'elle aide
ceux qu'on veut aider. C'est ça mon inquiétude. Ce n'est pas que
la formule en soi ne mérite pas d'être appliquée mais,
à l'exemple de ce qui se passe et en regardant froidement ce qui se
passe sur le terrain, là où il y a le plus d'augmentation,
à l'heure actuelle, c'est dans les quartiers très
spéculatifs. Et, à ce moment-là, ce sont eux qui vont
bénéficier de la police d'assurance dont vous parlez
présentement, à mon avis.
M. Bourbeau: Un dernier mot. Le député doit faire
confiance aux élus municipaux qui ont les mêmes
préoccupations que nous. Je ne veux pas présumer de ce que les
élus municipaux vont faire mais il est possible que les élus
municipaux, en regardant les augmentations d'évaluation des diverses
catégories d'immeubles, en viennent à la conclusion que dans
certains cas, dans certaines municipalités, utiliser la méthode
de plafonnement viendrait en aide à des groupes, des secteurs ou des
catégories que la municipalité ne voudrait pas
particulièrement voir bénéficier et, à ce
moment-là, la municipalité peut ne pas utiliser la mesure.
Par exemple, si une municipalité estimait que le secteur
industriel ne doit pas bénéficier de la mesure... Supposons, par
exemple, que ce soit le secteur industriel qui ait les plus grandes
augmentations d'évaluation, la municipalité pourrait
décider qu'elle n'applique pas la mesure, qu'elle ne l'utilise pas pour
ne pas défavoriser les petits propriétaires, les
propriétaires résidentiels. Le cas échéant, elle se
priverait de la mesure. (23 h 30)
M. Paré: Au moment où on se parle, sur l'ensemble
du territoire québécois, les citoyens peuvent contester leur
évaluation. Est-ce qu'on leur donne un moyen de contester une valeur
fictive, ou la façon de la municipalité d'utiliser... Supposons
qu'il y ait dans une municipalité le tiers qui profite vraiment. Je
prendrai un exemple près d'ici, la Haute-Ville profiterait d'une vague
spéculative très Importante, mais pas la Basse-Ville. Que la
municipalité décide qu'elle utilise le plafonnement
répétitif, avec la valeur fictive de l'an passé, cela veut
dire qu'elle va augmenter le taux de base sur l'ensemble des autres, y compris
ceux de la Basse-Ville qui ont moins les moyens. Si je comprends bien, c'est
cela qui arrive. Est-ce que les deux-tiers de la Basse-Ville qui se voient une
charge supplémen-
taire de taxes pour les riches en haut de la ville ont un moyen de
contester cela? Ou, est-ce que, dans la loi, c'est une décision
strictement municipale, pas contestable, alors que sur notre propre
évaluation on peut contester, mais sur notre police d'assurance
collective, on ne peut pas?
M. Bourbeau: Non, les citoyens peuvent toujours contester
l'évaluation en se rendant au bureau de révision de
l'évaluation foncière, et la décision politique d'utiliser
ou non la mesure de plafonnement, ils peuvent la contester le premier dimanche
de novembre, tous les quatre ans.
M. Paré: C'est une bonne réponse politique, M. le
ministre, sauf que, vous savez très bien que c'est tellement complexe.
Ce n'est pas simple et ça l'est de moins en moins. Contester tous les
quatre ans, c'est une élection, on sait très bien ce qui arrive,
sauf que, au cours de l'année si la décision est le plafonnement
répétitif, les gens ne pourront pas savoir exactement - à
moins de s'y intéresser et d'avoir de bonnes explications - que c'est
à cause d'un quartier en particulier que cette année on utilise
la deuxième formule de .5 et non pas de .3, qui, elle, était
très simple. Dans ce cadre, que les municipalités qui veulent se
donner plus de pouvoir soient d'accord avec cela, je ne le conteste pas, comme
je l'ai dit tantôt j'ai confiance dans les élus municipaux. Mais
cet article, parce que c'est considéré comme une police
d'assurance, donc un partage de la richesse de quelques-uns... non ce n'est pas
cela, c'est le partage des taxes payées à cause de la richesse
accumulée de quelques-uns par rapport aux autres. Cet article va
être adopté sur division, juste pour sensibiliser le milieu
municipal qu'à mon avis la fiscalité municipale ne respecte pas.
C'est un risque, cela voudra dire qu'on suivra et si ce n'est pas le cas, tant
mieux... J'espère que ce ne sera pas le cas. Ma préoccupation est
qu'on se méprenne sur des principes de base d'équité, de
simplification et de justice. A cause de cela, cet article sera adopté
sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'article 253.5
est adopté?
M. Paré: Adopté, sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): J'appelle maintenant
l'article 253.6.
M. Bourbeau: Cet article précise que l'on doit tenir
compte du dégagement accordé, lorsqu'une modification au
rôle de l'exercice concerné... ou la confection d'un nouveau
rôle en remplacement d'un autre qui a été cassé ou
déclaré nul a pour effet d'entraîner le paiement d'un
supplément de taxes ou le remboursement d'un trop-perçu. Il
s'agit, en fait, du cas prévu à l'article 245 de la Loi sur la
fiscalité municipale, où la valeur imposable d'immunité
des dévaluations est modifiée rétroactivement,
après la confection du compte de taxes original, pour l'exercice
concerné.
Le nouvel article 253.6 précise également que l'on doit
tenir compte, lorsqu'on établit le montant du supplément ou du
remboursement, du fait que la modification ou la confection du rôle peut
avoir eu pour effet de rendre admissible une unité qui ne l'était
pas, ou de rendre non admissible une unité qui l'était. En somme,
le nouvel article 253.6, prescrit de refaire les calculs pour établir
quelle aurait été la situation, si le rôle avait
été modifié ou remplacé en temps utile.
M. Paré: Juste une petite explication, pour clarifier. Le
deuxième paragraphe: "II en est de même lorsque la modification ou
la confection du rôle a pour effet de rendre admissible une unité
ou de lui faire perdre ce caractère." Qu'est-ce que c'est, en
ternies...
M. Bourbeau: C'est que l'on prévoit le cas où un
rôle est modifié à la suite d'un nouveau rôle. Enfin,
on dit dans l'article: d'un nouveau rôle ou, en remplacement d'un autre
qui a été cassé ou déclaré nul, lorsqu'une
modification au rôle a pour effet de modifier la valeur imposable de
l'unité d'évaluation admissible.
Si, rétroactivement, on voit la valeur de l'unité
modifiée, on doit refaire les calculs pour savoir si cette unité
aurait été admissible ou non. Et, s'il appert que, à la
suite de ces calculs, l'unité aurait été admissible, il
faut faire ce qu'il faut pour la rendre admissible. Si la modification a pour
effet de rendre l'unité inadmissible, parce que c'est une diminution
d'évaluation, à ce moment, elle perd le caractère
d'admissibilité et on refait les calculs.
M. Paré: Cela va.
Le Président (M. Saint-Roch): L'article 253.6 est
adopté. J'appelle maintenant l'article 253.7 et j'attire l'attention des
membres de la commission que nous avons un papillon.
M. Bourbeau: M. le Président. L'article 253.7 de la Loi
sur la fiscalité municipale, proposé par l'article 5 du projet de
loi 82, est amendé par le remplacement, dans les quatrième,
cinquième et sixième lignes du premier alinéa, des mots,
et je cite: ", ou d'identifier les unités d'évaluation qui
seraient admissibles au dégrèvement selon tout seuil
d'admissibilité, au sens du premier alinéa de cet article,
qu'elle indique" par ce qui suit: ". Elle peut, de la même façon,
lui demander d'identifier les unités d'évaluation qui seraient
admissibles au dégrèvement selon toute hypothèse qu'elle
lui indique quant au seuil d'admissibilité, au sens de l'article 253.4,
et quant à la façon d'établir le pourcentage
d'augmentation de la valeur de l'unité, conformément aux deux
pre-
miers alinéas de l'article 2S3.3 ou au deuxième
alinéa de l'article 253.5"
L'amendement proposé au nouvel article 253.7 de la Loi sur la
fiscalité municipale a pour but de rendre plus complet l'éventail
des hypothèses que la municipalité soumet à son
évalua-teur, lorsqu'elle lui demande d'identifier les unités
d'évaluation qui seraient admissibles à la mesure du
dégrèvement dans tel ou dans tel cas. Déjà, le
nouvel article 253.7, tel qu'imprimé, permet à la
municipalité de soumettre à l'évaluateur
différentes hypothèses quant au seuil d'admissibilité
qu'elle pourrait fixer.
L'amendement proposé lui permet, en plus, de demander à
l'évaluateur de lui fournir les résultats selon que l'on applique
le système du plafonnement répétitif ou celui du
plafonnement non répétitif. Le premier système,
rappelons-le, est celui où l'on compare la valeur imposable de
l'immeuble pour l'exercice considéré avec la valeur fictive qui a
été utilisée dans le calcul du dégrèvement
de l'exercice précédent.
Le second système est celui où on la compare avec la
véritable valeur imposable pour l'exercice précédent. Sans
l'amendement proposé au nouvel article 253.7, l'évaluateur serait
obligé, dans tous les cas, d'effectuer son travail d'identification des
unités admissibles, en fonction des deux systèmes possibles. Avec
l'amendement, la municipalité pourra lui éviter du travail
inutile, si elle lui dit de ne faire ces simulations que selon un seul des deux
systèmes.
M. Paré: Facile, facile.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce -que ceci signifie
qu'il n'y a aucune intervention?
M. Paré: Juste un instant. Dans l'amendement, c'est 1 et
2, sur la totalité même si vous ne l'avez pas tout lu.
Heureusement, qu'elle est là. Cela permet de savoir, au moins que... On
essaiera d'informer... Mais dans le calcul, l'on réfère aux deux
modes dont on a parlé à 253.3, 253.5.
Il y a une chose que je me demande. Dans l'amendement qu'on apporte
présentement à l'article 253.7, on réfère à
l'article 253.3 et 253.5 au niveau du type de mode qu'on veut utiliser, mais on
dit, au milieu du paragraphe: ". Elle peut, de la même façon, lui
demander d'identifier les unités d'évaluation qui seraient
admissibles au dégrèvement selon toute hypothèse qu'elle
lui indique quant au seuil d'admissibilité, au sens de l'article
253.4..." Ma question est: Est-ce qu'on peut voter celle-là maintenant
quand on a reporté l'étude de 253.4?
M. Bourbeau: C'est une bonne question. M. le Président, la
question vous est adressée.
Le Président (M. Saint-Roch): Nous pouvons approuver
l'amendement à l'article 253.7, M. le député de Shefford
et, pour l'article 253.4, après que nous aurons pris connaissance des
amendements, s'il y a lieu, on pourra toujours rouvrir l'article 253.7
amendé et le rendre conforme.
M. Paré: Avant de pouvoir décider sur l'article
253.7, de ce que cela pourrait avoir comme effet, est-ce que je pourrais avoir
une idée de ce qu'il y aura d'inclus dans l'article 253.4?
M. Bourbeau: L'article 253.4 ne devrait pas changer. On veut
simplement faire les dernières vérifications en ce qui concerne
le seuil d'admissibilité qui est fixé à 1,5 fois du
pourcentage de l'augmentation globale du rôle. Il y a des pourparlers,
depuis un certain temps, avec certaines municipalités, avec les unions
municipales, pour peut-être modifier le 1,5 qui pourrait passer à
1,4 ou quelque chose comme cela. Les consultations ne sont pas tout à
fait terminées avec le monde municipal et c'est pour cela que je veux
suspendre l'article pour voir si on ne modifiera pas le 1,5 à la baisse.
Il y a encore des simulations, des passes d'ordinateur qui se font au moment
où l'on se parle dans certaines villes du Québec, mais pour
l'essentiel, c'est le même article.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a des
interventions sur l'amendement?
M. Paré: Je trouve bizarre qu'on l'accepte, mais je ne
veux pas contester votre décision, M. le Président, sauf que cela
voudrait dire adopté sous condition. Cela ferait quoi? Vous me dites: il
y a des échanges avec les municipalités présentement ou
des études qui sont en train de se faire sur un point qui est un chiffre
finalement. Les chiffres sont aussi importants que les principes, mais si vous
avez décidé d'amener une modification, c'est 1,4 qui pourrait
être là à la place de 1,5. Cela n'a l'air de rien en sol,
mais quand on joue avec des chiffres importants, on sait ce que c'est quand on
amène des changements concernant les rôles d'évaluation ou
les calculs de taxation ou d'impôt. Le petit pourcentage est important et
je dois vous dire, à la lumière de tout cela, qu'il pourrait y
avoir des effets plus importants que cela ne le laisse entendre. Là, on
réfère a trois articles qui sont importants dont un qui est en
suspens. (23 h 45)
M. Bourbeau: De toute façon, il va y avoir un article
253.4 qui sera substantiellement le même que maintenant. La seule
différence qu'il pourrait y avoir c'est qu'on pourrait modifier le
chiffre de 1,5. Mais, en ce qui concerne les principes de l'article 253.7, cela
"ne change strictement rien. La municipalité peut toujours demander,
c'est de cela qu'on parte ici, à son évaluateur, de lui
préparer - quelle expression emploie-t-on? - d'identifier les
unités d'évaluation qui seraient admissibles selon l'une ou
l'autre des deux formules. Cela ne change
absolument rien, il y aura encore deux formules.
M. Paré: Étant donné qu'on est obligé
de parler de l'autre - de toute façon, c'est tout à fait normal
parce que l'article 253.4 est cité dans l'amendement, on peut s'y
référer - au moment où on se parle, qui demande ou
qu'est-ce qui fait qu'à la suite de l'étude de ce projet de loi
on se sente obligé de réévaluer cela? Qui demanderait
d'évaluer cela et pourquoi? Y a-t-il une raison spéciale?
Qu'est-ce que cela a comme effet?
M. Bourbeau: Je pourrais, en parlant privément au
député, lui donner les noms des municipalités qui sont
actuellement en train de regarder les effets, sur leur rôle
d'évaluation, d'un plafonnement à 1,5. Il y a des
municipalités, . principalement celles qui n'ont pas
déposé de rôle d'évaluation depuis plusieurs
années et qui subissent des augmentations moyennes très
considérables du rôle d'évaluation, des
municipalités dont le rôle d'évaluation augmente de tout
près de 50 % par rapport au rôle précédent, qui
estiment qu'à 1,5, cela fait un plafonnement à un degré
très élevé. Elles craignent que, finalement, les citoyens
ne puissent pas en profiter beaucoup. Il y a quelques municipalités qui
sont dans ce cas.
Pour d'autres, c'est tout à fait l'inverse. Elles ont une
dispersion tellement totale dans leur rôle d'évaluation
qu'à 1,5, personne n'est admissible à la mesure de plafonnement,
ou à peu près, et elles voudraient qu'on baisse. Je n'aurais pas
d'objection à dire au député de qui il s'agit, mais je ne
pense pas que ce soit d'intérêt public de nommer des
municipalités.
M. Paré: D'accord. On n'a pas d'autres questions sur
l'amendement.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'amendement
à l'article 253.7 est adopté?
M. Paré: Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'article 253.7
tel qu'amendé est adopté?
M. Paré: Juste un instant! Au deuxième paragraphe,
on dit: "Le cas échéant, la transmission de la copie de la
résolution à l'évaluateur doit être faite par
l'intermédiaire de la municipalité." C'est une résolution
municipale, est-ce que je comprends bien?
M. Bourbeau: Cela veut dire que si la municipalité n'est
pas elle-même responsable de l'évaluation, sa demande à
l'évaluateur doit passer par l'intermédiaire de l'autre
municipalité ou de la communauté qui a cette
responsabilité. Il y a des municipalités qui ont confié
à des communautés urbaines l'évaluation foncière ou
d'autres qui ont confié à une autre municipalité, par voie
d'entente intermunicipale, la confection d'un rôle
d'évaluation.
Le député notera qu'à l'article 253.7 on emploie
deux termes. On emploie les mots "la corporation municipale" et, un peu plus
loin, les mots "la municipalité". Selon la loi, la corporation
municipale désigne la municipalité cliente, celle qui fait faire
son rôle d'évaluation, la municipalité locale. Alors qu'on
emploie le terme "la municipalité" pour la municipalité qui
confectionne le rôle d'évaluation, soit la municipalité, la
communauté urbaine ou la MRC, celle qui a le mandat de préparer
le rôle d'évaluation.
M. Paré: Donc, c'est la résolution de la
corporation municipale qui est transmise à l'évaluateur par
l'intermédiaire de la municipalité exécutante. Est-ce que
c'est bien cela?
M. Bourbeau: Oui, exactement.
M. Paré: C'est la corporation municipale cliente qui doit,
par résolution, prendre la décision. Le calcul est fait par la
municipalité qui, elle, est exécutante. C'est pour cela que c'est
celle-là qui doit transmettre directement à
l'évaluateur.
M. Bourbeau: Soit directement, soit par l'intermédiaire de
la municipalité, qui a le mandat de faire préparer le rôle
d'évaluation.
M. Paré: D'accord, cela va pour celui-là.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que l'article 253.7,
tel qu'amendé, est adopté?
M. Paré: Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): J'appelle maintenant
l'article 253.8.
M. Bourbeau: Cet article prévoit que le montant du
dégrèvement doit apparaître sur le compte de taxes
foncières. Il faut toutefois noter qu'en vertu du deuxième
alinéa de l'article 9 du projet de loi, pour 1988, cette mention peut
apparaître sur un document joint au compte. Quant à l'explication
du montant du dégrèvement, elle doit être donnée
à l'occasion de l'expédition du compte, mais pas
nécessairement sur celui-ci. On pourra éviter ainsi d'inscrire
sur le compte une autre valeur, soit la valeur imposable fictive, soit la
valeur dite plafonnée. Le compte, on le sait, indique déjà
la valeur inscrite du terrain, du bâtiment et de l'unité
d'évaluation, la valeur uniformisée de celle-ci et, le cas
échéant, la valeur imposable du terrrain, du bâtiment et de
l'unité lorsqu'elle est différente de la valeur inscrite.
M. Paré: Oui, c'est correct. On espère qu'on va
être capable d'avoir une explication simple, courte et claire pour
quelque chose qui est
complexe. Quand cela concerne... J'ose espérer que les gens vont
comprendre facilement parce que, lorsqu'il s'agit de taxes à payer, dans
notre évaluation personnelle, Je pense qu'on a un intérêt
particulier et on sort notre crayon et nos lunettes. Cela va pour cet
article.
Le Président (M. Saint-Roch): L'article 253.8 est
adopté?
M. Bourbeau: Adopté. M. Paré:
Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): J'appelle maintenant
l'article 253.9.
M. Bourbeau: Cet article prévoit que la mesure du
dégrèvement s'applique non seulement aux unités
d'évaluation dont la valeur imposable correspond à leur valeur
inscrite au rôle, mais également à celles dont la valeur
Imposable est inférieure à leur valeur inscrite. On vise les
terrains de golf, les fermes, les presbytères appartenant
personnellement à certains ministres du culte et les biens culturels
classés. Si la valeur imposable spéciale de ces immeubles
augmente tellement d'un exercice à l'autre que son pourcentage
d'augmentation dépasse le seuil d'admissibilité, ils
bénéficient de la mesure comme n'importe quel immeuble pleinement
imposable.
Cependant, si la valeur imposable de ces immeubles connaît une
hausse brusque en raison du fait que, d'un exercice à l'autre, ils ont
cessé de bénéficier de leur régime fiscal
spécial, cette hausse ne sera pas plafonnée. Il en est de
même dans le cas d'une ferme qui, à la suite de son exclusion de
la zone agricole, voit monter d'un exercice à l'autre le plafond de sa
valeur imposable en vertu de la règle prévoyant la perte
progressive de ses privilèges fiscaux.
Une voix: Adopté.
M. Paré: II ferait un bon job d'opposition.
M. Bourbeau: Parce qu'on parle des terrains de golf... Ha, ha,
ha!
M. Paré: Cela voudrait dire que ce serait une formule
différente par rapport... Non?
M. Bourbeau: Non. C'est la même formule. Si ces immeubles
qui ont un régime spécial voient leur évaluation
augmentée d'un pourcentage tel qu'ils deviendraient normalement
admissible à la mesure de plafonnement, ils deviennent admissibles
à la mesure de plafonnement.
M. Paré: D'accord. Donc, c'est le contraire. On vient les
inclure dans le même calcul. C'est cela. D'accord. Donc, j'ai bien
compris. Étant donné que ce sont des cas un peu particuliers, on
fait en sorte de venir confirmer par cet article qu'ils sont inclus dans le
calcul des autres bâtiments...
M. Bourbeau: Exact.
M. Paré: ...ou des autres propriétés. Cela
va. Adopté.
Le Président (M. Saint-Roch): L'article 253.9 est
adopté. J'appelle l'article 253.10.
M. Bourbeau: Cet article prévoit que la mesure de
plafonnement s'applique non seulement aux immmeubles totalement ou
partiellement imposables, mais également aux immeubles totalement
exempts de taxes foncières pour lesquels le propriétaire ou le
gouvernement du Québec verse des compensations tenant lieu de taxes.
Sont donc visés, notamment, les immeubles, les organismes
municipaux et les organismes sans but lucratif pour lesquels le
propriétaire paie une compensation pour services municipaux, en vertu de
l'article 205 de la Loi sur la fiscalité municipale, les immeubles de la
Couronne occupés par des tiers qui paient des taxes foncières
à leur égard, article 208 de la Loi sur la fiscalilté
municipale, les immeubles des gouvernements étrangers pour lesquels le
gouvernement du Québec paie une somme tenant lieu de toutes taxes ou
compensations - article 210 de la Loi sur ' la fiscalité municipale - et
les immeubles du gouvernement québécois lui-même pour
lesquels il paie une compensation tenant lieu des taxes foncières -
article 254 de la Loi sur la fiscalité municipale.
Ne sont pas visés, notamment, les immeubles du gouvernement
fédéral et de ses mandataires, de même que les immeubles
des établissements des réseaux québécois de
l'éducation et des affaires sociales. Dans le premier cas, l'exemption
s'explique par le fait que le gouvernement fédéral fixe
lui-même l'évaluation de ces immeubles servant à calculer
les compensations qu'il paie ainsi que le taux applicable à cette fin.
Une hausse brusque de l'évaluation municipale quant à ces
immeubles ne risque donc pas de l'affecter.
Dans le second cas, l'exemption s'explique par le fait que la
compensation payable à l'égard des immeubles des
établissements des réseaux n'est pas calculée à
partir du taux réel des taxes foncières, mais à partir du
taux global de taxation. Comme ce taux n'est pas appelé à varier
sensiblement à la suite de l'application de la mesure de plafonnement,
contrairement au taux de la taxe foncière générale qui va
augmenter, il n'aurait pas été juste de faire profiter ces
immeubles de la mesure. Tout immeuble non imposable autre que celui admissible
au dégrèvement ne devient pas admissible du fait que sa valeur
passe d'un exercice à l'autre, de non imposable à imposable,
parce que la disposition
législative que lui accordait l'exemption de taxes a cessé
de s'y appliquer.
M. Paré: Bon. On parle de plusieurs groupes qui sont
finalement un peu tous raccordés aux organismes bénévoles
et gouvernementaux, sur les plans fédéral et provincial. On sait
que les municipalités demandent que les gouvernements paient la
totalité des "en lieu" de taxes. On sait que le Québec - et il
faut le reconnaître - paie beaucoup plus que le gouvernement
fédéral, énormément plus. On peut multiplier par
des chiffres imposants la valeur payée par le gouvernement
québécois. Est-ce que vous avez fait des démarches, des
pressions, des demandes ou avez-vous l'intention d'en faire auprès du
gouvernement fédéral pour qu'il augmente sa contribution aux
immeubles qu'il possède en "en lieu" de taxes au Québec?
M. Bourbeau: Je n'ai pas compris la question.
M. Paré: Je reprends très rapidement sur la fin.
Les municipalités demandent que tous les ministères donnent
l'exemple et soient des citoyens corporatifs, des citoyens contribuables en
totalité. On sait que le gouvernement du Quéfbec en paie
énormément, plus que le gouvernement fédéral. Il
s'agirait d'un petit ajustement pour que ce soient des sommes importantes et ce
serait une façon de décentraliser et de donner plus d'aide aux
municipalités au lieu d'y aller peut-être d'une façon,
comme elles le veulent, sur les trottoirs et sur d'autres programmes où
cela va prendre votre accord. Est-ce que vous avez déjà entrepris
des démarches, des pressions, des demandes ou avez-vous l'intention d'en
faire auprès du gouvernement fédéral pour qu'il en paie
davantage, sinon la totalité, en tout cas pas maintenant? Est-ce que des
démarches sont entreprises pour qu'il y ait une contribution, une
participation plus importante d'Ottawa à ce sujet?
M. Bourbeau: M. le Président, disons que ce n'est pas un
dossier très actif par les temps qui courent.
M. Paré: Cela me déçoit, M. le ministre. Une
des bonnes façons par laquelle le Québec n'aurait pas eu à
débourser davantage pour aider les municipalités, cela aurait
été d'aller en chercher plus à Ottawa, mais d'une
façon directe et d'une façon bien acceptable.
Autrement, vous savez qu'ils vont s'ingérer d'une certaine
façon, même si cela prend votre consentement. Mais vous savez
déjà qu'on parle des programmes des rues principales ou des
nouveaux programmes qu'on veut lancer pour ce qui est de l'aide aux
municipalités directement pour la construction de trottoirs.
Cette aide est pratique, mais elle est sporadique et, en plus, c'est de
l'ingérence dans un domaine de compétence provinciale, La
meilleure façon pour le gouvernement fédéral, en
même temps, de faire ce qu'il veut faire, c'est aider les
municipalités, mais respecter les champs de compétence, clarifier
les choses et que ce soit sur une base non pas discrétionnaire ou de
budget, mais d'équité. Je vous invite à entreprendre des
démarches pour lesquelles vous aurez notre appui total.
M. Bourbeau: À l'instant même, M. le
député.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que cela termine les
discussions sur l'article 253.10?
M. Paré: Adopté sur division.
Le Président (M. Saint-Roch): L'article 253.10 est
adopté sur division. J'aurais besoin maintenant d'un consentement pour
poursuivre nos travaux.
M. Paré: II n'en est pas question, puisque le leader ne
veut absolument pas. Mais je vais prendre quand même le même
discours de mon collègue en disant qu'il est minuit et, comme il reste
quelques articles... J'aurais aimé ça, je dois vous dire. Mais
comme, malheureusement, il est minuit et qu'on sait qu'on va veiller au moins
tous les soirs et qu'on recommence de bonne heure, qu'on s'est couché
tard, comme il s'agit d'un projet très important, très technique,
qui nous demande beaucoup d'attention, je suis sûr que le ministre est
aussi fatigué et il va avoir envie de recommencer à tête
reposée.
M. Bourbeau: Le député de Shefford, je dois dire,
n'est pas tellement plus rapide que le député de
Jonquière. Mais, d'une certaine façon, je dois avouer que son
discours est assez intéressant et la soirée a passé assez
rapidement. Je ne sais pas ce qu'en pensent mes collègues.
Le Président (M. Saint-Roch): Constatant qu'il n'y a pas
consentement, la commission de l'aménagement et des équipements
ajourne maintenant ses travaux sine die.
(Fin de la séance à minuit deux minutes)