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Version finale

28th Legislature, 4th Session
(February 25, 1969 au December 23, 1969)

Wednesday, November 26, 1969 - Vol. 8

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Examen du problème de logement et de la construction domiciliaire au Québec


Journal des débats

 

Commission permanente des Affaires municipales

Examen du problème du logement et de la construction

domiciliaire au Québec

Séance du mercredi 26 novembre 1969.

(Dix heures trente-six minutes)

M. SAUVAGEAU (président de la commission permanente des Affaires municipales): A l'ordre, messieurs! Au nom du comité, je veux vous souhaiter la plus cordiale des bienvenues à cette assemblée et je demanderai aux personnes qui ont l'intention d'adresser la parole de bien vouloir s'identifier au micro et de nommer le groupement qu'elles représentent.

M.AUBRY: Pierre Aubry, Comité d'habitation et de rénovation urbaine de la région métropolitaine de Montréal.

M. DAIGLE: Amédée Daigle, directeur général des services à la CSN, du Comité du logement de la CSN.

M. LALONDE: Jean-Louis Lalonde, président de l'Association des architectes.

M. ARCHAMBAULT: Raymond Archambault. Pour autant que mes collègues arriveront de Montréal, j'espère qu'on aura quelque chose à vous présenter. Je représente la Corporation des Urbanistes.

M. SMITH: Ed Smith, de l'ACEF de Montréal.

M. LE PRESIDENT: M. Smith, des Associations coopérative d'habitations de Montréal?

M. SMITH: Coopérative de l'économie familiale.

M. LE PRESIDENT: Maintenant, on a ici un mémoire qui a été présenté par le Montreal Diet Dispensary, qui nous demande — il ne peut pas être représenté — si on peut le déposer pour qu'il soit inscrit au journal des Débats. (Voir annexe A).

M. LUSSIER: Moi, je n'ai pas d'objection. M. CHOQUETTE: Aucune objection.

M. GOLDBLOOM: M. le Président, je pense que c'est un mémoire dont nous avons déjà pris connaissance à la Commission parlementaire de la Famille et du Bien-Etre social et qui est d'une grande utilité.

M. LE PRESIDENT: Bon. Maintenant, M. Daigle. M. Daigle est de la Confédération des syndicats nationaux?

M. DAIGLE: Oui.

M. le Président, M. le Ministre, messieurs les députés, la CSN s'est occupée des questions de logement depuis longtemps, elle travaille pour ses membres à l'intérieur de ces problèmes, mais elle ne s'était jamais donné ce qu'on pourrait appeler une politique de logement.

A son dernier conseil confédéral, le comité qui, à l'intérieur du mouvement, avait étudié ces questions pour et au nom du mouvement, a soumis son rapport qui a été adopté unanimement, devenant ainsi la politique du mouvement. Ce document, nous ne l'avons pas réimprimé — nous n'avons pas eu le temps d'abord — et c'est celui qui a été soumis au conseil qui vous est intégralement soumis ce matin. C'est pour cela que son introduction commence par: "II est inconcevable de penser qu'en 1969 la CSN n'ait pas une politique de logement cohérente." Alors comme elle a adopté cela, nous croyons qu'on pourrait maintenant transposer et arriver à ce qu'il soit nécessaire que le gouvernement de la province ait, lui aussi, une politique de logement.

Or je dirige évidemment la délégation, mais je vais demander, avec votre permission, au confrère Jacques Archambault, qui est du comité qui a préparé la rédaction du document et fait les recherches pertinentes, de bien vouloir vous donner une synthèse de la première partie et ensuite les recommandations qui sont inscrites à la fin du document.

Pardon! Le confrère Trudel est arrivé de Montréal malgré la neige. C'est lui qui devait le faire. Nous allons le lui demander.

M. TRUDEL: Le document que vous avez effectivement est un document qui se présente comme un document interne de la CSN. A ce titre-là, il est difficile de le lire intégralement. Je vais essayer de vous en résumer les parties et vous en lire des extraits, ainsi que les recommandations qui ont été adoptées comme telles par le conseil confédéral.

Je voudrais commencer par deux citations de l'éminent urbaniste conseil, M. Hans Blumenfeld, consultant à Toronto et à Montréal, qui dit: "Ce qu'on appelle le problème des taudis, c'est l'aspect du problème de la pauvreté concernant le logement". Et l'auteur ajoute: "Si des centaines de mille familles au Canada sont mal logées, c'est parce qu'il y a un monde entre le coût du logement convenable et ce que ces familles peuvent ou veulent payer".

Alors nous partons de ce principe-là que, derrière le problème du logement, en particulier le problème du logement inapproprié, le problème des taudis, il y a le problème de la pauvreté. Et c'est, selon nous, une grave illusion

de tenter de résoudre le problème de la pauvreté en s'attaquant isolément au problème du logement.

Pour nous, une politique sociale globale est nécessaire, c'est-à-dire que c'est à l'inégalité sociale qu'il faut s'attaquer. D'autre part, une politique d'habitation qui s'adresse à toute la population, qui tient compte de l'ensemble des besoins est nécessaire, doit s'inscrire dans le cadre d'une politique d'aménagement du territoire et d'aménagement urbain.

Pour une telle politique d'habitation, il est nécessaire de concentrer les moyens de l'Etat et c'est pourquoi notre première recommandation, c'est que le gouvernement du Québec doit réclamer vigoureusement et sans équivoque sa compétence exclusive en matière d'habitat et d'urbanisme.

Dans notre rapport, nous avons d'abord essayé de définir les besoins en logement; c'est l'objet du chapitre 1, à la page 7. Parmi les besoins du logement, il y a tout d'abord l'aspect de la quantité. Une certaine quantité de logements doivent être construits nécessairement chaque année pour remplacer ceux qui sont démolis et faire face à l'expansion démographique.

D'après la Société centrale d'hypothèques et de logement, plus de 250,000 nouveaux logements par année seraient nécessaires pour éliminer, en cinq ans, le surpeuplement et le recours aux logements inappropriés au Canada.

L'évaluation des besoins en unités de logement à construire par année varie, suivant les sources, toujours pour le Canada, de 170,000 à 250,000. Le rapport Hellyer proposait 200,000.

Par comparaison, voici le nombre d'unités construites au cours des dernières années: 135,000 en 1966 - 164,000 en 1967 -196,000 en 1968.

Or il ne faut pas oublier que la construction du logement est soumise aux lois et aux aléas du marché. Les mécanismes du marché font qu'évidemment la demande la plus rentable est la mieux satisfaite. Si l'on considère non plus la demande mais les besoins réels, il demeure qu'il y a manque de logements, puisque beaucoup de gens habitent encore des logements insalubres ou des logements surpeuplés. Pour résoudre ces problèmes, il faut augmenter le nombre de logements, donc en construire de nouveaux.

Les autres aspects des besoins du logement — je vais passer assez rapidement — ce sont d'abord l'espace nécessaire ou, à l'inverse, le problème du surpeuplement. Ensuite, il y a le problème de la salubrité comme tel, le problème de la qualité du milieu, de l'environnement du logement et aussi les qualités du logement, l'équipement, l'entretien et le vieillissement.

En fonction des constations que nous avons faites au chapitre des besoins du logement, nous énonçons les recommandations suivantes: Nous estimons qu'il existe une situation de crise grave du logement au Québec, aussi bien en ce qui concerne la quantité que la qualité du logement. Le comité évalue également à 75,000, soit 30 p.c. de la quantité jugée nécessaire par la société centrale pour le Canada, la quantité de logements qu'il serait socialement nécessaire de construire chaque année au Québec, c'est-à-dire la quantité qui permettrait de résoudre les problèmes du logement dans une période de cinq ans.

Le comité estime urgente, en conséquence, la définition par le gouvernement québécois d'une politique complète de l'habitation; il préconise un vaste programme de construction intensive de logements qui tienne compte de toutes les normes définies dans le présent chapitre en ce qui concerne l'espace nécessaire, le milieu et les qualités essentielles du logement, et est d'avis que ce programme ne saurait être réalisé sans la participation et la consultation systématique des futurs usagers de ces logements.

Le deuxième chapitre porte sur les aspects économiques d'une politique de logement. Sous cette rubrique fort générale se greffe tout le problème de la fiscalité, des coûts sociaux du logement et du financement de la construction de logements.

L'aspect économique du problème du logement constitue l'élément clé et décisif d'une politique du logement.

A partir de cette considération, nous avons étudié les différents aspects du coût du logement au Québec. Et je vais lire, en particulier, une partie de l'article portant sur le coût du logement à la page 15: "La satisfaction du besoin de logement ne peut se faire au détriment des autres besoins; il faut donc pouvoir se loger à un prix abordable. "Or, justement, au Québec, nous payons très cher pour nous loger. C'est là, sans doute, relativement au logement, le problème le plus général, car il touche pratiquement tout le monde.

Les Québécois paient plus cher que d'autres peuples pour leur logement, comme le démontre le tableau suivant."

Et il y a ici un tableau tiré de la revue de l'OCDE qui compare, pour une quinzaine de pays, le pourcentage des dépenses en consommation, c'est-à-dire le pourcentage du budget des consommateurs, consacré au logement. On voit qu'en 1963 le Canada est au premier rang, c'est-à-dire que c'est le pays, parmi ces différents pays, où il en coûte le plus cher pour se loger.

Et on a ici un pourcentage de 16.4 p.c, alors qu au Québec les études démontrent qu'il s'agit de 18 p.c. ou 19 p.c. en moyenne du budget familial consacré au logement. C'est donc un coût très élevé. Si on le compare particulièrement avec la Suède, 9.3 p.c, "la

comparaison est particulièrement significative puisque c'est un pays comparable pour le climat et le niveau de vie et que les gens y sont remarquablement bien logés. "Le coût du logement est tel que, selon le Canadian Welfare Council, 50 p.c. des Canadiens auraient besoin d'assistance pour se loger convenablement. Il n'y a que 1 p.c. de logements publics à prix modique au Canada, la plupart en Ontario. "Le coût du logement est l'une des principales causes des autres problèmes. Ainsi, à Montréal, les 40 p.c. des moins fortunés parmi la population habitent 80 p.c. des vieux logements et 53 p.c. des logements surpeuplés. Le principal problème auquel ont à faire face les gens défavorisés, c'est que la hausse des salaires ne suit pas la hausse des loyers. Dans la ville de Montréal en particulier, la hausse des loyers a été nettement plus forte que la hausse des salaires depuis quelques années. "En particulier entre 1951 et 1961 —les chiffres dont nous disposons — la hausse des loyers a été de 83 p.c. et la hausse des salaires de 66.9 p.c. "Ceci n'est qu'un exemple pour illustrer la situation. On pourrait faire, sans nul doute, les mêmes constatations si on appliquait ces données à l'ensemble de la province. "Si le loyer augmente plus vite que les revenus, il faut ou bien lui consacrer une plus grande part du revenu, ou bien accepter d'être plus mal logé; ceux qui ont un budget limité sont astreints à ce deuxième choix." C'est ce qui explique l'accroissement en gravité du problème du logement durant ces dernières années. Je pense que c'est un des facteurs d'explication. "Mais il est important de le souligner, le problème ne se limite pas aux personnes à faible revenu, pas plus que le problème de la santé n'est uniquement un problème d'assistance médicale. Le problème est général, c'est un manque de logements économiques pour une bonne majorité de la population. "Monsieur Hans Blumenfeld, que nous avons cité plus haut, a calculé qu'il faudrait $300 millions par année pour le Canada, on peut dire peut-être $100 millions au Québec, c'est un fardeau considérable, et surtout c'est un fardeau qui lui-même augmente avec le coût moyen du logement."

A partir de ces constatations, une question s'impose: Pourquoi le logement coûte-t-il si cher? C'est ce que nous avons voulu étudier en examinant les différents facteurs du coût du logement.

Le coût de construction est un des facteurs les plus importants, évidemment, et à l'intérieur du coût de construction, c'est le coût des matériaux qui est l'élément le plus important, surtout avec la taxe de 11 p.c. "L'abolition de la taxe de 11 p.c. sur les matériaux aurait pour effet de diminuer d'environ 5 p.c. le coût d'un logement neuf. "On peut très probablement rechercher une réduction substantielle dans l'industrialisation plus poussée et une utilisation plus rationnelle de la main-d'oeuvre. Actuellement, le morcellement des entreprises et les méthodes artisanales employées augmentent les coûts. Tout en procurant plus de sécurité d'emploi aux travailleurs, la généralisation de la préfabrication et des méthodes industrielles de production en série pourrait, selon les experts, réduire le coût d'environ 15 p.c."

Un autre facteur important dans le coût du logement, c'est le terrain. Alors je vais lire l'article touchant la question du coût du terrain. "Le coût du terrain devient de plus en plus un facteur très important du coût du logement urbain. C'est le facteur dont l'accroissement rapide est le plus responsable de la hausse des dernières années. Ainsi de 1965 à 1966, le coût moyen du terrain résidentiel s'est accru de 12.4 p.c. au Canada, il s'est accru de 5 p.c. en 1967 et de 6 p.c. en 1968. Ce coût représente actuellement plus de 500 p.c. de ce qu'il était en 1949. "N'oublions pas que le coût du terrain existe pour les vieux logements comme pour les neufs, car la spéculation foncière ne s'arrête jamais. On paye toujours, dans son loyer, une rente foncière qui représente la part de la valeur marchande du terrain, dans la valeur de l'immeuble. "La spéculation commence avec tout terrain agricole sur lequel un développement urbain est jugé possible dans les 10 ou 15 ans à venir. La différence entre le prix du terrain agricole — 1/2 cent le pied, en moyenne — et le prix du terrain de la Place Ville Marie - $100 le pied, soit 20,000 fois — illustre le vaste domaine de la spéculation foncière. "Ce qu'il faut bien comprendre, c'est qu'absolument aucune valeur n'est produite par ce processus. Le propriétaire n'a qu'à attendre. C'est le développement environnant et les services fournis par la collectivité qui élèvent la valeur d'un terrain. Le marché du terrain ne fait que jouer le rôle de régulateur économique de l'utilisation du sol, mais exactement le même rôle pourrait être joué par un marché de location de terrain au profit de la collectivité, si celle-ci était propriétaire du sol. "Le coût du terrain pourrait être entièrement soustrait du coût du logement, dont il représente une part appréciable: pour les maisons simples au Canada en 1968, une moyenne de $3,827 sur $19,967, soit 19 p.c. Au Québec, la proportion semble un peu moins forte: environ 12 p.c. à Montréal et à Québec pour des bungalows, dont le coût moyen s'établit à $16,500. "Les sommes dépensées chaque année en pure perte sous forme de rente foncière sont énormes: seulement le terrain consommé pour l'urbanisation nouvelle coûte chaque année $65,000,000 aux Montréalais, suivant le rapport du service d'urbanisme de Montréal, et

ce chiffre laisse de côté la hausse du prix des terrains déjà construits. "On pourrait réduire ce coût sensiblement, simplement par une meilleure planification urbaine, en contrôlant les prix et les périodes de thésaurisation. On pourrait l'abolir complètement par l'abolition de la propriété privée du sol urbain. 'C'est dire que seule la nationalisation du sol urbain pourrait éliminer totalement la spéculation. Or, cette importante mesure pourrait être réalisée sans investissement trop coûteux, si l'on procédait comme suit: — Le droit de propriété serait transféré au pouvoir public à partir d'une date à déterminer. Les anciens propriétaires détiendraient en échange un bail leur garantissant les mêmes droits d'occupation qu'auparavant. — Pour les terrains vacants, ce droit d'occupation serait acquis des propriétaires moyennant une compensation basée sur les prix actuels et financée par des obligations municipales; les terrains seraient ensuite loués aux futurs utilisateurs. Ainsi toute la plus-value serait entièrement récupérée par la collectivité. — Pour les terrains bâtis, le droit d'occupation ne serait racheté qu'au moment du remplacement des édifices qui s'y trouvent. — La nationalisation du sol urbain serait décrétée par une loi québécoise, mais l'application en serait confiée aux gouvernements municipaux dans la mesure de leur capacité de l'appliquer, ou à des organismes régionaux conçus à cette fin."

Parmi les facteurs du coût du logement, l'un prend de plus en plus d'importance, comme on le sait, c'est le taux d'intérêt. La première conséquence de la hausse des taux d'intérêt est que les différentes politiques d'accession à la propriété deviennent inopérantes parce qu'elles s'appliquent à un très petit nombre de gens.

D'ailleurs, en ce qui concerne les politiques d'accession à la propriété, elles sont particulièrement inappropriées pour le Québec où l'attitude des gens face à la propriété du logement est nettement différente de ce qu'elle est dans le reste du Canada, y compris les provinces les moins riches: A titre d'exemple, il y a 67 p.c. de locataires dans la zone métropolitaine de Montréal et 38 p.c. à Toronto. Nous avons différents chiffres également pour les différentes provinces du Canada.

Devant ce phénomène-là, nous sommes plutôt portés à conclure à une différence d'attitude des Québécois plutôt qu'à un problème strictement économique et nous préférons tenir compte de ce choix des Québécois plutôt que de favoriser systématiquement l'accession à la propriété.

La situation déplorable et anormale dans le domaine des taux d'intérêt relève en fait de la politique économique. Pour le logement, faut-il bonifier les taux d'intérêt? Nous allons citer là-dessus également l'urbaniste Hans Blumenfeld qui dit: "Certains gouvernements européens font des prêts pour la construction de logement à un taux d'intérêt bien inférieur à celui qu'ils paient eux-mêmes, c'est-à-dire qu'ils donnent des subsides à un nombre d'habitations. L'expérience générale a été qu'au cours du temps on trouve, parmi les bénéficiaires des subsides, des gens qui disposent d'un revenu bien plus élevé que la majorité des contribuables qui paient ces subsides. Ce n'est donc pas une bonne politique de subventionner des logements spécifiques."

Nous avons adopté à peu près cette attitude vis-à-vis de la bonification du taux d'intérêt.

Un autre facteur du coût du logement est la taxation foncière. "Le logement est probablement le besoin fondamental le plus taxé. Alors que d'autres sociétés s'efforcent de réduire le coût du logement par des subventions généralisées, il est assez paradoxal de voir qu'ici on fait du logement une importante source de revenus fiscaux. "Etablissons au départ le fait que les taxes foncières, municipales et scolaires, et la taxe d'eau sont payées entièrement par l'occupant du logement, qu'il soit locataire ou propriétaire. C'est, si l'on veut, une taxe indirecte payée dans le loyer avec les frais généraux. Elle représente généralement environ 20 p.c. du montant du loyer, c'est une moyenne. Si on consacre 20 p.c. de son revenu au logement, c'est l'équivalent d'un impôt sur le revenu de 4 p.c. "Mais, contrairement à l'impôt, la taxe foncière est une taxe régressive; elle frappe plus durement ceux qui doivent dépenser le plus pour le logement, en particulier les familles nombreuses."

Or des solutions telles que l'évacuation du champ de la taxe foncière par le domaine scolaire sont des solutions qui sont à examiner dans cette optique.

Enfin, un dernier facteur non négligeable dans le coût du logement, les profits. A ce propos, mentionnons seulement ici le fait que dans de nombreux pays on a éliminé le profit de la plus grande partie du domaine du logement par le moyen d'un secteur public étendu ou par la formule des coopératives. "L'une des premières conséquences du coût élevé du logement est l'embarras dans lequel se trouvent souvent les personnes délogées d'un logement à loyer modique. Il faut donc de toute évidence, même si nous renonçons au système de subventions généralisées, prévoir les

cas où les transformations nécessaires du milieu obligent les gens à se reloger à un coût qui dépasse leurs moyens. "Pour ces cas, une allocation de relogement doit être prévue afin de combler la différence entre le coût du nouveau logement et le loyer conforme aux moyens des gens, calculée sur la base des revenus des charges familiales. "Alors, c'est là un des aspects importants de notre politique, c'est la subvention aux personnes plutôt que la subvention attachée au logement. "En conqéquence de ces constatations, le comité de la CSN affirme que le coût du logement est scandaleusement élevé au Québec en particulier et que ce coût pourrait être réduit de 30 p.c. à 50 p.c. si l'on procédait aux réformes suivantes, que par ailleurs nous recommandons. 1- Abolition de la taxe de 11 p.c. sur les matériaux; 2- Généralisation de la préfabrication et des méthodes industrielles de production qui réduirait le coût de la construction d'environ 10 p.c. à 15 p.c; 3- Abolition de la spéculation foncière selon les modalités suivantes; — Que soit décrétée la nationalisation progressive du sol urbain; — Que soient adoptées dans l'immédiat les mesures suivantes, en vue de préparer la nationalisation: contrôle strict sur le prix des terrains, les périodes de thésaurisation, et l'urbanisation du terrain agricole; constitution par les municipalités de réserves de terrains pour toutes fins; interdiction de revendre du terrain devenu propriété publique; création de sociétés publiques pour le développement de villes nouvelles.

Ces mesures appliquées rigoureusement réduiraient progressivement le coût d'un logement d'environ 10 p.c. à 20 p.c. 4—Application d'un taux préférentiel de financement public qui réduirait le coût de 10 p.c. ou plus. (Il s'agit d'un taux préférentiel et non pas d'un taux bonifié, c'est-à-dire le taux auquel les pouvoirs publics obtiennent eux-mêmes l'argent). 5—Mise en place d'un secteur public du logement s'autofinançant ce qui, par conséquent, éliminerait le profit. "Le comité recommande de plus: — Que les personnes qui doivent se reloger en payant un loyer supérieur à leurs moyens reçoivent une allocation de relogement pour combler la différence; -- Que cette allocation soit normalement applicable au secteur public où les personnes délogées auront priorité. Qu'elle soit dans certains cas, également applicable à un logement du secteur privé, pourvu que le montant ne soit pas supérieur et qu'un contrat spécial soit passé avec le locateur. — Qu'une prime couvrant les frais réels du déménagement soit en outre payée par les municipalités ou les exploitants suivant les cas.

Au chapitre 3, nous avons, au passage, mentionné un problème relié au logement: c'est le problème de la main-d'oeuvre face à l'évolution des techniques de la construction.

Au chapitre 4, nous étudions une solution en particulier: c'est la création d'un vaste secteur public du logement. Je vais lire ce chapitre. "Nous avons étudié jusqu'à maintenant diverses composantes du problème du logement. Nous examinons maintenant les solutions qu'on pourrait y apporter et que le mouvement syndical appuierait. "Il y a déjà longtemps que nous entendons parler de "rénovation urbaine" et, depuis, cette notion a considérablement évolué. Une première conception de la rénovation urbaine a fort heureusement été dépassée: celle qui mettait l'accent sur la démolition des taudis et qui provoquait l'expulsion pure et simple des "pauvres", sous prétexte d'opération sociale. "On se préoccupe maintenant davantage de reloger les gens. On commence à respecter un peu plus le milieu social et les besoins véritables de la population. On n'a pas encore appris toutefois à faire une place suffisante à la participation des citoyens et, surtout, on reste pris avec les contradictions du système du logement subventionné pour " personnes à faible revenu". "La structure actuelle des grandes villes donne naissance au phénomène suivant: les quartiers centraux vieillis sont devenus l'habitat de la population défavorisée et de la main-d'oeuvre mobile; d'autre part, les appartements de luxe remplacent progressivement cette ancienne occupation du sol afin de profiter des avantages de la proximité du centre-ville. "La rénovation urbaine actuelle cherche à éviter les conséquences directes et naturelles de la structure de l'économie foncière urbaine: accroissement de la valeur des terrains accompagnant la dégradation physique accélérée des quartiers centraux, éviction de la population défavorisée et rupture de son milieu social, démolition de logements à loyer modique.

"En voulant éviter ces conséquences et reloger les gens dans leur milieu, on aboutit au résultat suivant: L'obligation de reloger les personnes à faible revenu dans un logement très cher: logement familial neuf de qualité supérieure construit sur un terrain cher du centre-ville. "C'est le cas des Ilôts Saint-Martin, dans la Petite Bourgogne, à Montréal. Le coût de telles opérations implique qu'on ne peut reloger qu'un petit nombre de familles et qu'on ne peut s'attaquer à l'ensemble du problème des quartiers détériorés. "L'illogisme de cette formule de rénovation urbaine tient au fait qu'elle ne s'attaque pas aux causes. L'inégalité sociale forte entraîne la ségrégation dans l'habitation, quel que soit le contexte; la propriété foncière augmente les coûts de la rénovation et empêche la réalisation de plans intégrés visant à une localisation sociale optimale de l'habitat. ''Cela nous ramène aux options fondamentales dont nous avons déjà parlé: politique sociale et nationalisation du sol, lesquelles sont à la racine du problème du logement. "D'autre part, il apparaît clairement que le marché privé capitaliste ne peut satisfaire les besoins de la population en logement et surtout assurer la rénovation urbaine. "Une action massive et concertée de l'Etat est donc nécessaire. C'est dans cette perspective, et non pas dans une perspective de subventions, que le secteur public du logement prend pour nous toute son importance. "Le secteur public du logement, tel que nous le concevons, devra en effet s'autofinancer et mettre sur le marché des logements qui en principe seront accessibles à tous. "Le premier objectif de ce secteur public sera de combler la différence entre la quantité de logements nécessaires socialement et ce que le marché privé nous fournit présentement. Nous avons calculé qu'au moins — et c'est un strict minimum — 15,000 logements supplémentaires par année seraient nécessaires au Québec, pour éliminer avant 10 ans le surpeuplement et le recours au logement inapproprié. Rappelons qu'à Montréal seulement, au moins 100,000 logements au minimum ne répondent pas à des normes reconnues d'habitabilité. "Le secteur public permettra également de réaliser des économies dans le coût du logement vieux ou neuf, par l'utilisation d'un financement public au meilleur taux et à long terme, par une production industrielle massive et par la suppression du profit. Le secteur public aura de plus un rôle régulateur sur l'ensemble du marché du logement. Enfin, un autre objectif de ce secteur sera d'améliorer la qualité du logement par des recherches sur les plans et les méthodes de construction. "En somme, nous recommandons la création d'un vaste secteur public du logement qui construira des logements neufs et restaurera des vieux logements (assumant 30 p.c. à 40 p.c. de la production annuelle) dans le cadre de programmes de développement de quartiers nouveaux ou de rénovation de quartiers anciens. "Ce secteur public sera le promoteur d'une véritable rénovation urbaine, qui consistera à transformer et améliorer l'ensemble des conditions de la vie urbaine en respectant le milieu social, la vie communautaire et tous les droits des résidants, y compris celui de participer à l'élaboration et à la gestion des projets. "Les ensembles résidentiels du secteur public comporteront de nombreux services communautaires et seront gérés par les résidants eux-mêmes, de la même façon que des coopératives. Ils pourront également donner naissance à des formules de copropriété. "Parallèlement au secteur public et en collaboration avec lui, le secteur coopératif du logement sera, d'autre part, encouragé à se développer. Nous croyons, en effet, que le mouvement coopératif pourrait jouer un rôle bien plus important qu'il ne l'a fait jusqu'à maintenant dans le domaine du logement, en investissant massivement dans de vastes projets économiques permettant ainsi à un plus grand nombre l'accession à la propriété coopérative."

Le chapitre 5 porte spécialement sur la loi de la Société d'habitation. Ce chapitre a été soumis au groupe de travail qui étudie la réforme de la loi. Je vais le lire également parce qu'il résume assez bien certains aspects de notre politique. "La loi de la Société d'habitation du Québec pèche, selon nous, par sa conception générale: elle crée un organisme dispensateur du subventions qui doit s'employer exclusivement à contrôler et réglementer l'usage des fonds publics dispensés, au lieu d'être lui-même un agent de réalisation d'une véritable politique générale de l'habitation. " A la racine des difficultés que l'on rencontre déjà dans l'application de la loi se trouve le principe désastreux du logement subventionné, c'est-à-dire le "logement à loyer modique pour personnes à faible revenu", qui accompagne la "rénovation urbaine" nord-américaine et explique sa faillite presque totale. "Nous sommes d'avis que le système de logements subventionnés n'est pas une solution appropriée à la crise grave du logement qui sévit d'une façon latente et permanente au Québec. "Il faudrait reprendre ici, pour bien expliciter notre pensée, les considérations essentielles du mémoire que la CSN avait présenté en 1968 au Conseil Supérieur de la famille sur les problèmes du bien-être social et de la santé. Dans ce mémoire, la CSN avait dénoncé cette tendance profondément enracinée dans nos moeurs à considérer toute

politique sociale un peu comme une brigade mobile ou une unité sanitaire qui distribue à droite et à gauche des subsides, des allocations, des subventions. Au lieu d'aller au fond des choses, et de s'attaquer aux racines du mal, on applique des remèdes superficiels, on pratique à fond l'assistance sociale. En d'autres termes, on se débarrasse des importuns, de ceux qui réclament, de ce qui fait honte à la société prospère, spécialement dans le domaine du logement qui est sans doute le plus voyant".

Alors encore une fois, ce que disait Blumenfeld s'applique: "Si des centaines de mille familles sont mal logées au Canada, c'est parce qu'il y a un monde entre le coût du logement convenable et ce que les familles peuvent et veulent payer". "Or la solution à cette incapacité de payer latente et constante ce n'est pas la subvention. Ce sont d'abord des mesures qui constituent des réformes de structures et que le mouvement syndical s'emploie à réclamer: 1- L'augmentation des revenus des travailleurs, spécialement le relèvement du salaire minimum. 2- L'application de réformes de l'impôt visant à dégrever les moindres revenus en tenant compte des charges familiales, tel que suggéré dans l'énoncé de la politique sur la fiscalité adoptée par la CSN. 3- L'augmentation des allocations familiales. 4- L'établissement graduel du revenu minimum garanti, de façon que l'individu et la famille administrent eux-mêmes leur revenu et fassent eux-mêmes les options en face des besoins à satisfaire. "Ce que la CSN recommande fondamentalement, c'est donc une politique sociale complète d'une part, et d'autre part, une politique de l'habitation distincte et s'adressant à toute la population. "Cette politique de l'habitation aurait pour éléments essentiels un vaste secteur public du logement qui s'autofinancerait et serait l'agent par excellence d'une politique générale de rénovation et d'habitation s'adressant à tous; un système d'allocations de relogement accordées aux personnes; et la nationalisation du sol urbain. "Il est à noter que nous recommandons également la reprise en main par le gouvernement québécois de toute la juridiction en matière d'habitation, et en conséquence de l'utilisation de tous fonds publics consacrés à cette fin. "Une nouvelle loi serait de toute évidence nécessaire pour changer aussi profondément l'orientation de la politique québécoise de l'habitation. Mais puisqu'il ne s'agit encore que d'amender la loi actuelle, voici les modifications qui nous paraissent à la fois minimales et essentielles pour nous rapprocher de la conception que nous avons décrite. "En ce qui concerne le logement subventionné: "Nous recommandons principalement de supprimer les dispositions de la loi qui limitent son application aux "logements à loyer modique" et "aux personnes à faibles revenus". "L'inconvénient majeur d'une politique de logements subventionnés vient du fait qu'elle est une politique d'exception, dont la conséquence inévitable est la création de ghettos. Mais il y a plus; le système de la subvention incite à l'irresponsabilité administrative et à l'irrationalité économique en encourageant les organismes requérants à tenter de justifier les demandes de subventions les plus élevées possibles; il rend obligatoire toute la série de contrôles et de procédures complexes qu'on trouve dans la loi et ses règlements, avec les problèmes de délais, de gels, d'incertitude, de conflits d'intérêt et de manque d'information qui s'ensuivent. "Enfin, limitée à la construction de logements pour personnes à faible revenu, l'intervention publique ne peut s'exercer avec assez de latitude et de moyens pour réaliser une véritable rénovation urbaine, soit la transformation et la restructuration des quartiers en vue de l'amélioration générale des conditions de vie urbaine. "C'est pourquoi, même si on maintient encore une politique de logements subventionnés, il est de la plus haute importance que les municipalités, les offices municipaux et la société elle-même ne soient pas limités à ce genre d'activité mais puissent construire tout genre de logements.

Rôle de la société. "Le rôle et les pouvoirs de la société devraient être définis de façon beaucoup plus large, afin d'en faire un organisme d'initiative dans le domaine de l'habitation. Son mode de formation devrait refléter cette orientation différente. "En conséquence, la société devrait pouvoir se livrer à toutes les activités et entreprendre la réalisation de tous projets visant à assurer aux citoyens du Québec un meilleur logement à meilleur coût.

La société devrait aussi encourager les municipalités à oeuvrer dans le même sens. "En particulier, la société devrait pouvoir elle-même construire des logements et faire de la rénovation là où les municipalités ne peuvent ou ne veulent s'acquitter de cette tâche.

Pouvoirs des municipalités "En concordance avec ce qui précède, les municipalités devraient pouvoir prendre toute initiatice d'acquisition foncière et de construction immobilière, notamment construire des logements accessibles à tous et offerts sur le marché. "Il serait utile, d'autre part, de distinguer différentes catégories de municipalités, selon leurs capacités d'effectuer des opérations de rénovation ou de construction de logements. En fonction de cette distinction, les municipalités d'une certaine importance devraient pouvoir

entreprendre des projets et obtenir des prêts, tout en n'étant soumis qu'à un strict minimum de contrôle de la part de la société. "Les municipalités obtiendraient ce droit en démontrant, par exemple, qu'elles possèdent un personnel compétent affecté à la préparation des projets d'habitation.

Offices municipaux "La recommandation qui précède s'appliquerait également aux offices municipaux des villes concernées. Des offices municipaux ou intermunicipaux pourraient, dans certaines conditions, être considérés comme agents de la société. "Quant au fonctionnement de ces offices, nous recommandons qu'ils soient cogérés par des représentants des pouvoirs publics, des organisations populaires et des associations de résidants. Par ailleurs, les ensembles résidentiels du secteur public devraient être autogérés par les résidants eux-mêmes réunis en conseil. "Ces conseils éliraient les gérants et prendraient toutes décisions administratives à l'intérieur d'un budget approuvé par l'office municipal.

Aliénation de terrain public "II serait sans doute approprié d'inclure dans la loi le principe général suivant lequel aucun organisme public ne devrait pouvoir céder la propriété d'un terrain à un acquéreur privé.

Organismes sans but lucratif "A notre avis, les fonds publics ne devraient servir généralement qu'à des fins publiques. Nous ne pouvons concevoir d'autre part que la société et les offices municipaux ne puissent eux-mêmes réaliser la plupart des projets socialement utiles avec plus de compétence, une meilleure coordination et plus de participation des citoyens, que des organismes sans but lucratif, dont les motifs ne sont pas toujours totalement désintéressés. ' C'est pourquoi nous recommandons que l'application de la loi aux organismes sans but lucratif soit limitée de la manière suivante: — Que la loi s'applique exclusivement à des sociétés coopératives répondant à des normes précises d'organisation et de gestion conformes aux principes coopératifs; — Que ces coopératives observent les mêmes normes que les offices municipaux, qu'elles s'autofinancent et offrent des logements accessibles à tous; — Que l'aide apportée par la société à ces organismes ne soit jamais sous forme de subventions, mais sous forme de prêts aux taux chargés aux organismes publics, et sous forme de coopération technique.

Allocation de relogement "Etant donné que nous pensons qu'un système d'allocation aux personnes doit prendre le relai du logement subventionné, nous estimons nécessaire que soit mis sur pied un service ou office central chargé de distribuer ces allocations, suivant les mêmes barèmes que l'échelle des loyers subventionnés. "Nous ne voyons pas pourquoi ces allocations ne seraient pas alors financées par la société, dans la même mesure que le logement subventionné, c'est-à-dire jusqu'à concurrence de 75 p.c. du montant de l'allocation."

Le chapitre 6 traite particulièrement de la question des échelles de loyers. C'est un problème particulier. Je voudrais simplement souligner que, d'après nous, un système d'échelles de loyers peut être transformé en un système d'allocations aux personnes, avec les mêmes barèmes. Et dans cette optique, nous pensons qu'un tel régime, d'abord, doit être établi sur les principes suivants: "Le loyer doit être établi sur la base de la capacité de payer (revenus et charges familiales) pour un logement attribué suivant les besoins (surface et nombre de chambres par personne). "Personne ne doit être expulsé par suite de l'amélioration de sa situation financière."

Le régime que nous proposons, en résumé, c'est un régime sans minimum de loyer, avec des taux de loyer progressifs, variant de 16 p.c. à 28 p.c, avec des rabais, également, pour personnes à charge, des rabais qui seraient inversement proportionnels aux revenus, de manière à aider au maximum les personnes les plus défavorisées.

Le chapitre 7 traite maintenant des droits des locataires; alors, je lirai les recommandations de la CSN à cet effet. "Nous recommandons: — L'application rigoureuse de "codes du logement" du type de celui de Montréal pour obliger les propriétaires à entretenir convenablement les logements; — L'adoption par la loi d'un bail type conforme au code civil et respectant les droits des locataires; — Que ce bail comporte une clause obligeant le propriétaire à assurer le logement contre le feu et les responsabilités publiques; — Que la date d'expiration des baux soit fixée au 1er juillet; — L'abolition des taxes de locataires imposées par certaines municipalités; — L'adoption d'une législation rigoureuse contre toute forme de discrimination; — Que soit pleinement reconnu le droit du locataire à conserver son logement et qu'à cette fin soit supprimé le droit abusif du

propriétaire d'expulser un locataire pour se loger lui-même ou loger sa famille. "Enfin, considérant les particularités du marché du logement les possibilités nombreuses d'abus dans l'établissement du loyer, nous croyons nécessaire que le contrôle des loyers soit étendu et que la loi actuelle soit rendue plus efficace. "C'est pourquoi nous recommandons: — Que la juridiction de la régie des loyers s'étende obligatoirement à tous les logements dans toutes les municipalités, sans considération de la date de construction ou du coût du loyer; — Qu'il incombe désormais au propriétaire de s'adresser à la régie pour toute augmentation de loyer; — Que la régie détermine la valeur locative maximale des logements en tenant compte de l'entretien; qu'elle définisse également l'augmentation exacte qui sera permise pour chaque logement dans les cas de hausse de taxes."

En ce qui concerne le logement des personnes âgées, je lis également les recommandations : — Que dans tout projet de construction ou d'aménagement urbain, l'on tienne compte des personnes âgées et que l'on établisse, après consultation avec les intéressés, leurs besoins de logements individuels et collectifs; — Que dans tout projet de construction pour personnes âgées, l'on tienne compte des facteurs suivants: — Nécessité de conserver, autant que possible, l'indépendance de ces personnes âgées; — Nécessité de ne pas déplacer ces personnes et de les maintenir dans leur cadre familier; — Nécessité d'aide matérielle et médicale adéquate; — Etablissement de primes de déménagement, si nécessaire; — Généralisation de la formule dite des "foyers-résidences", avec conditions optimale d'accueil, d'assistance matérielle et médicale, de facilités récréatives, d'espace d'air, de possibilités de jardinage, etc.,; — Fixation du coût de la pension ou de location qui permette aux personnes âgées qui n'ont comme unique ressource que la pension de vieillesse de demeurer dans ces "foyers-résidences", si elles le désirent.

Et finalement, une attention particulière est recommandée à l'égard du problème du logement des imigrants.

En guise de conclusion, disons que l'ensemble de notre rapport est orienté dans le sens d'une intervention massive, directe et décisive de l'Etat dans le domaine du logement.

Les formes d'intervention que nous retenons ne sont pas toujours les mêmes que celles proposées par d'autres organismes. En particulier, nous avons des réticences vis-à-vis des subventions attachées au logement et des organismes sans but lucratif. Nous préférons les allocations aux personnes et nous favorisons les secteurs publics et coopératifs avec le maximum de participation des citoyens. Mais les objectifs que nous poursuivons sont ceux de la plupart des organisations populaires, c'est de résoudre les problèmes de logement des plus défavorisés, mais aussi de procurer à toute la population un logement de meilleure qualité et à meilleur coût.

M. DAIGLE: Alors, M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, voilà la synthèse de ce qui est notre point de vue sur ce que devrait être une politique du logement. Nous vous remercions de nous avoir entendus et demeurons à votre disposition, si vous avez des questions.

M. LE PRESIDENT: M. le ministre.

M. LUSSIER: Vous me permettrez sans doute quelques questions. Vous avez parlé au tout début de la consultation avec les futurs usagers des maisons construites. D'après votre conception, de quelle façon cette consultation devrait-elle être faite? A quel stade de la rénovation ou de la construction, et comment pensez-vous qu'elle devrait être faite?

M.TRUDEL: Nous pensons que la consultation doit se faire à toutes les étapes. D'abord, à l'étape de l'élaboration des projets. Il serait relativement facile d'accorder aux personnes concernées par des projets de rénovation, dans les services publics de planification, soit municipaux, soit provinciaux, la même attention qu'on accorde aux hommes d'affaires, aux constructeurs, ou aux promoteurs qui s'intéressent à exploiter leurs terrains ou à entreprendre des projets de construction.

Je pense qu'il s'agit d'ouvrir largement les portes aux gens, en particulier aux comités de citoyens qui se forment pour représenter les personnes concernées par des projets de rénovation, de recevoir ces gens-là et de les faire

participer dès le début, dès la première étape de l'élaboration des projets de rénovation urbaine.

Ce serait d'autant plus facile si on éliminait les problèmes reliés à la spéculation foncière particulièrement, qui obligent, dans certains cas, à une certaine discrétion et qui empêchent le public d'être informé en temps opportun et de participer. Donc cette participation-là devrait être appelée au tout début de l'élaboration d'un projet de telle façon que les gens soient d'abord informés de ce qui les attend, soient libérés de l'incertitude et puissent également apporter leur contribution, leur opinion et la conception de leurs besoins.

Ensuite, comme nous le mentionnons d'ailleurs, nous considérons que dans la gestion des projets, les citoyens concernés, les résidants doivent être représentés à tous les niveaux. Ils doivent être représentés au sein des offices municipaux, ils doivent choisir eux-mêmes leurs représentants et d'autre part, au niveau des ensembles résidentiels, au niveau strictement local, nous considérons que les résidants peuvent eux-mêmes élire leur conseil d'administration et prendre les décisions en ce qui concerne l'administration quotidienne des ensembles résidentiels publics, à l'intérieur, évidemment, de normes établies et de budgets établis par les offices municipaux et les services publics concernés.

M. LUSSIER: On entend parler ou l'on emploie souvent le mot "spéculation". Comment la définissez-vous? Quelle est votre conception de la spéculation?

M. TRUDEL: Eh bien, je pense qu'il faudrait dissiper une confusion sur la question de la spéculation. Pour nous, il y a deux choses à distinguer. Il y a la fraude et la spéculation. Pour nous, la spéculation ne veut pas dire la fraude. On emploie habituellement spéculation en parlant de transactions frauduleuses qui ont lieu à l'occasion d'échanges de terrains et qui donnent lieu, à ce moment-là, à des profits absolument incroyables dans le domaine foncier. Cela, nous considérons que c'est de la fraude.

La spéculation pour nous, c'est toute transaction foncière et immobilière. Il y a de la spéculation dans toute transaction foncière et immobilière. Pour nous la spéculation, c'est la plus-value du terrain, un point c'est tout. Alors, c'est dans ce sens-là que nous disons que la spéculation, étant la plus-value du terrain, ne peut disparaître que par la propriété publique des terrains. Nous estimons que tout profit réalisé dans la vente dans les transactions foncières, est illégitime du fait qu'il n'apporte rien, que ces revenus n'apportent absolument rien à la société. Ils ne produisent rien et sont simplement le résultat de l'augmentation automatique de la valeur des terrains par le développement urbain environnant.

En conséquence, nous pensons qu'il s'agit là tout simplement de ressources collectives qui passent dans des mains privées. Et à ce titre, nous demandons l'abolition de la spéculation foncière par la propriété publique du sol.

M. LUSSIER: Alors, si je comprends bien, il y a une spéculation qui est frauduleuse où les profits sont astronomiques et se font dans un laps de temps très court, et il y a aussi une spéculation qui vient du fait de transactions de terrains où il y a un profit raisonnable; et les deux sortes de transactions, de profits, vous les rejetez catégoriquement.

M. TRUDEL: C'est très clairement cela, oui.

M. CHOQUETTE: M. Trudel, je pense qu'il faut féliciter d'abord la CSN pour le travail qu'elle nous a présenté ce matin, et les auteurs en particulier. Je pense que vous admettrez avec nous que le programme que vous proposez au comité du logement de l'Assemblée nationale, n'est-ce-pas, est un programme très ambitieux et qui va très loin.

D'après vous, supposons que nous devions choisir dans vos suggestions celles que vous considérez les plus urgentes, les plus immédiates, les plus nécessaires, dans quel ordre d'idées devrions-nous nous diriger?

M. TRUDEL: Je pense que nous avons établi nous-mêmes certaines étapes. Nous avons proposé, par exemple, des modifications à la loi de la Société d'habitation. Ce sont les modifications qui pourraient intervenir immédiatement. Ensuite, je pense que c'est une question de priorité; d'abord, il y a la question de la politique sociale comme telle qui est autre chose que le logement, mais qui doit recevoir une priorité plus importante, je pense, que celle qu'elle a actuellement. C'est conforme à l'orientation générale de la CSN, qui a toujours réclamé, dans ce domaine-là, une priorité importante accordée à la politique sociale. Donc il y a la question de la politique sociale.

Maintenant, dans le domaine du logement strictement, je pense que la construction d'un plus grand nombre de logements par le secteur public, le développement du secteur public du logement est, pour nous, quelque chose de prioritaire, à la fois pour créer des logements, et à la fois pour permettre au secteur public, au gouvernement et aux pouvoirs publics de commencer à réaliser une véritable rénovation urbaine.

Egalement, les premières mesures en vue de la nationalisation du sol urbain, les premières mesures, que nous énonçons pour préparer la nationalisation du sol urbain, sont des mesures qui sont aussi importantes, parce que la question du sol urbain est une question qui engage l'avenir. Je pense également que la mise sur pied d'un système d'allocations aux

personnes délogées est une chose également extrêmement importante, qui devrait être mise sur pied rapidement.

M. CHOQUETTE: M. Trudel, j'ai noté que vous préconisez, je pense à juste titre, tout au moins dans les limites des capacités financières de l'Etat, une expansion de la fonction de l'Etat et des municipalités, dans le domaine du logement et en particulier du logement public. J'ai noté également que, dans votre rapport, vous insistez — et je crois que c'est à juste titre — sur un rôle beaucoup plus dynamique de la part de coopératives de logements. Je ne vois absolument rien dans votre rapport qui nous parle du rôle du syndicalisme dans le logement parce que je ne suis pas de ceux qui pensent que le syndicalisme a un rôle purement revendicateur et négatif dans la société. Je pense que le syndicalisme pourrait jouer un rôle très concret et très immédiat dans ce domaine-là, en suscitant la construction de logements pour leurs propres membres, en utilisant les moyens financiers qui sont à leur disposition, soit en vertu de la loi de la Société centrale d'hypothèques et de logement, soit en vertu de la législation provinciale, si nous pouvions, évidemment, améliorer la législation de la loi de la Société d'habitation du Québec.

Alors, je me dis: Pourquoi le mouvement syndical semble-t-il réfractaire à une action efficace et concrète dans le domaine du logement pour ses membres? Cela réglerait au moins, peut-être, une partie du problème.

M.TRUDEL: Je pense d'abord qu'on ne peut pas dire qu'il soit négatif d'étudier et de proposer, comme nous le faisons, des politiques dans le domaine du logement. C'est notre rôle, d'abord, de représenter nos membres et de demander, au nom de nos membres, les politiques, que le gouvernement à la responsabilité d'appliquer. Ce que nous voulons éviter, entre autres choses c'est de donner au gouvernement une bonne excuse pour se débarrasser, pour échapper à certaines de ses responsabilités. Nous croyons que, dans le domaine du logement, il y a des responsabilités considérables que le gouvernement, actuellement, n'assume pas.

Maintenant, pour ce qui est des syndicats, je voudrais d'abord mentionner que les syndicats ne sont pas des constructeurs; ce n'est pas notre rôle de constuire des logements d'abord et avant tout. Mais, si certains syndicats s'intéressent à cette question-là, la meilleure formule, d'après nous, ce serait qu'ils forment des coopératives. En fait, la question rejoint un peu notre position sur les organismes sans but lucratif. Nous, nous favorisons une seule forme d'organismes sans but lucratif, c'est la formule coopérative, parce que c'est la seule qui assure la participation — encore une fois, à la condition que les principes de l'organisation coopérative soient respectés — c'est la seule formule qui assure la participation réelle des citoyens.

Pour ce qui est des organismes sans but lucratif en général, nous croyons que ce n'est pas toujours... D'abord il est assez rare de rencontrer un organisme qui n'ait vraiment aucun but lucratif, il y a toujours un but lucratif quelconque, il y a toujours des gens qui retirent des salaires, etc., c'est une occasion également de favoritisme et parfois même de gaspillage. Ce n'est pas non plus une bonne garantie d'administration nécessairement et ce n'est pas une bonne garantie non plus que l'organisme sans but lucratif soit le plus qualifié pour construire du logement, pour faire les recherches et appliquer les meilleures techniques dans le domaine du logement. De plus, ça ne favorise pas nécessairement la participation des résidants et des citoyens que nous désirons voir s'établir à la fois dans le secteur public et dans le secteur coopératif. Alors si un syndicat ou un organisme veut oeuvrer dans le domaine du logement, je pense qu'encore une fois la meilleure formule serait de fonder des coopératives qui soient réellement telles que nous les recommandons, des coopératives qui permettent la participation des citoyens, et à ce titre-là nous encourageons cette formule, la formule coopérative.

M. CHOQUETTE: Est-ce que vous avez des expériences précises à nous citer, dans le monde syndical, de syndicats qui ont formé des coopératives et qui ont agi dans le domaine du logement sous la forme coopérative? On a l'expérience des pompiers et des policiers de Montréal qui, je crois, est très bonne parce qu'enfin là ce n'est pas nécessairement le système coopératif. Je pense qu'on a utilisé une caisse, n'est-ce pas, pour faire des prêts aux policiers et pompiers; c'est une formule de financement.

M. TRUDEL: Justement, c'est qu'on a eu des formules de financement, il faut bien distinguer les choses là; si on parle de financement, rien ne s'oppose à ce que des groupes offrent à leurs membres un financement pour se procurer des maisons; ça, c'est dans le système actuel et ça peut continuer, rien ne s'objecte à ça. En fait, ce que nous recommandons justement, c'est que le mouvement coopératif, entre autres, ou les caisses d'économie, etc., mettent à la disposition de leurs membres des sources de financement. Je veux dire que cet aspect ne résout pas l'ensemble du problème du logement.

M. CHOQUETTE: Maintenant vous avez mentionné et insisté, je crois — et également à juste titre — sur la question de la nationalisation du sol urbain, n'est-ce pas? Or je me souvient

d'un article qui avait été publié dans le Devoir et qui reproduisait une conférence donnée — je ne sais pas si c'était M. Claude Ryan ou enfin peut-être lui ou quelqu'un d'autre — disant que la nationalisation du sol urbain dans la région de Montréal représenterait un coût de $2 milliards. Si nous adoptions la méthode de financement proposée, l'émission d'obligations pour indemniser les propriétaires expropriés, ça voudrait dire que ça représenterait, enfin dans l'immédiat, l'émission d'obligations jusqu'à $2 milliards. Le marché est évidemment totalement incapable d'absorber de telles émissions, enfin du moins dans l'immédiat.

Alors, voyez-vous d'autres formules, d'autres étapes qu'on pourrait suivre pour adopter votre politique de nationalisation du sol urbain? On sait qu'en Europe, dans certaines municipalités, c'est une politique qu'on a pratiquée avec beaucoup de succès. Vous avez mentionné, je pense, la Suède; c'est la même chose en Hollande. Mais ces villes le pratiquent en quelque sorte, je pense, depuis le Moyen-Age. Aujourd'hui, évidemment, nous prenons la situation, enfin une situation nouvelle et dramatique ici au Québec dans ce domaine-là, parce qu'il n'y a rien de fait. Est-ce que vous voyez des étapes possibles à suivre pour mettre en oeuvre une politique comme celle-là, mais qui ne causeraient pas des problèmes financiers absolument incalculables, comme celui de nationaliser immédiatement le sol urbain autour de Montréal, au coût que j'ai mentionné tout à l'heure?

M. TRUDEL: Oui. Sauf erreur, je pense que le coût de $2 milliards, c'est l'ensemble des terrains de la région métropolitaine. D'abord nous disons qu'il s'agirait d'une nationalisation progressive, c'est-à-dire qu'il ne s'agit pas d'acheter tout du jour au lendemain, mais ça pourrait s'échelonner sur une période d'une centaine d'années peut-être, c'est-à-dire au fur et à mesure que les terrains deviennent vacants; évidemment la priorité, ce sont les terrains vacants, les terrains disponibles. Maintenant, il ne faut pas oublier une chose, je pense, en ce qui concerne les sources de financement. Les spéculateurs trouvent un financement pour leur opérations. Effectivement, ils achètent des terrains et ils en revendent en utilisant, pour une très forte partie, des capitaux empruntés.

Nous croyons que les mêmes sources de capitaux qui servent à financer les spéculateurs privés pourraient servir, seraient disponibles pour financer le secteur public qui emprunterait pour acheter des terrains et qui tirerait, par la suite, des revenus de ces terrains. Il ne faut pas oublier que le système s'autofinance largement puisque effectivement, à l'heure actuelle, le système procure des profits considérables aux spéculateurs.

A ce moment-ci, le secteur public aurait deux choix:

D'abord en entreprenant une politique de rachat massif du sol, il pourrait maintenir la valeur marchande des terrains, continuer comme avant à suivre le marché en ce qui concerne la valeur marchande des terrains et, à ce moment-là, récupérer des sommes d'argent qui lui permettraient d'autofinancer constamment le rachat progressif de tout le terrain, à un coût donc qui serait pratiquement nul pour l'ensemble de la société, sauf que la collectivité rachèterait progressivement les terrains et éliminerait progressivement la plus-value foncière.

L'autre système est évidemment de baisser le coût du terrain. Si on baisse le coût du terrain, il y a un avantage immédiat pour les personnes qui doivent se construire, etc., le coût du terrain étant un facteur du coût du logement. Le coût du logement, à ce moment-là, serait diminué. Evidemment cela coûterait plus cher et cela rapporterait moins et peut-être qu'on serait obligé de payer partiellement en taxes ce qu'on récupérerait dans une première étape comme baisse du coût du logement.

De toute façon, dans un cas comme dans l'autre, il est possible, à un coût minime, par un mécanisme de financement, de récupérer le sol au grand bénéfice surtout dans l'avenir des générations futures qui pourront disposer du sol sans avoir à payer la rente foncière ou la plus-value foncière qui existe actuellement et qui va continuer de s'accroître.

M. CHOQUETTE: Est-ce que votre groupe a étudié les incidences de la politique fiscale sur le domaine immobilier? Je veux préciser ma pensée sur ce point-là et vous donner un exemple. Supposons, par exemple, que j'achète une maison aujourd'hui à Montréal, disons un taudis, une maison très vieille de 75 ou 100 ans, et je paie $40,000 pour cette maison où j'ai six ou huit logements que je loue. C'est possible. Les gens paient assez cher pour ces choses-là. Je peux commencer à employer la dépréciation sur cet immeuble-là, qui est très ancien et à utiliser cette dépréciation pour diminuer mes paiements d'impôt sur le revenu. Est-ce que votre comité a étudié la possibilité ni plus ni moins de modifier les lois de l'impôt de façon que la dépréciation ne soit plus une question qui soit presque totalement suggestive, comme le prix qui est payé à l'heure actuelle, mais objective par rapport à l'immeuble même, de façon à inciter soit la construction de nouveaux immeubles ou à faire en sorte que les acquéreurs d'immeubles délaissent l'achat de la vieille propriété qui, au fond, souvent mérite d'être démolie.

M. TRUDEL: Ce point que vous amenez, nous ne l'avons pas examiné; réellement, je pense que je ne pourrais pas vous donner une opinion là-dessus. Il demeure qu'il existe un problème du vieux logement qui se pose

souvent dans les ternies suivants... Je ne sais pas si c'est de cela que vous voulez parler, là. Il y a le phénomène, par exemple, de la démolition prématurée de logements qui seraient encore bons, de bonne qualité, et en particulier avec un meilleur entretien, et qui sont démolis à cause des mécanismes de l'augmentation de la valeur marchande, de la rentabilité plus élevée des appartements de luxe, etc. Il faudrait, selon nous, une politique qui préserve ces logements, assure leur entretien et également empêche leur démolition prématurée qui a pour effet de priver les citoyens de logements à loyer modique et de détruire également le milieu social dans le quartier urbain.

Je ne sais pas si cela touche le problème que vous mentionnez.

M. CHOQUETTE: Oui.

M. LUSSIER: M. Trudel, il est souvent fait mention dans votre mémoire des subventions accordées par le gouvernement aux offices d'habitation et aux municipalités quant à la rénovation et aussi à l'habitation. Vous suggérez plutôt que des allocations-logements soient payées directement aux locataires de certaines maisons, aux locataires de certaines catégories.

Vous savez sans doute qu'il existe une forme d'allocation de logement pour les personnes qui sont déplacées, pendant le temps où elles sont déplacées. Mais je sais fort bien que ce n'est pas cette forme d'allocation de logement dont vous parlez.

Actuellement, des subventions sont payées à des organismes publics. Vous suggérez plutôt qu'elles soient payées — comme je le disais tout à l'heure — à des individus, qui ne sont pas capables de payer le prix modique du loyer. Est-ce que vous êtes bien convaincu que c'est la façon la plus économique, qu'il ne serait pas mieux de payer cette subvention? En fait, si vous parlez d'allocations de logement à des individus, ce sont encore des subventions qui, au lieu d'être payées à un organisme public, sont payées à des individus. Selon votre expérience, dans votre animation sociale, de la façon dont ces gens administrent leur budget, est-ce qu'il serait sage d'acquiescer à une formule telle que celle-là?

M. TRUDEL: Je pense que le problème n'est pas dans la façon dont les gens administrent leur budget. Parce qu'en fait, c'est la même subvention, c'est la même allocation qui s'applique dans un cas comme dans l'autre. Lorsqu'une personne habite dans un logement qu'on appelle subventionné, elle bénéficie d'un rabais par rapport au loyer économique, au loyer qu'elle devrait payer sur le marché. Elle jouit donc d'un certain montant de subventions individuellement, qu'on ne lui donne pas mais qu'on lui attribue par le rabais de loyer, par l'échelle de loyer. Alors, c'est le même montant d'argent qu'on attribuerait aux personnes et le contrôle serait simple. Il suffirait, en fait, que la personne démontre qu'elle habite un logement, tel logement correspondant à ses besoins et qu'elle doit payer tel montant. A ce moment-là, on applique la même échelle des loyers et on lui paye la différence. Le seul contrôle à effectuer est celui portant sur le revenu et sur le fait que la personne habite bien le logement et en défraie bien le coût. Alors, c'est exactement le même montant d'argent, sauf que l'argent est donné aux personnes. La raison en est qu'à ce moment-là on évite deux choses: d'abord on évite l'obligation de créer des ensembles de logements qui s'adressent exclusivement à des personnes à faible revenu, créant donc des ghettos; on évite également que les personnes...

M. LUSSIER: Je vous demande pardon, M. Trudel, je pense qu'il existe d'autres moyens, beaucoup d'autres moyens que celui-là, d'éviter de créer des ghettos.

M. TRUDEL: A ce moment-là, vous êtes obligés de tenir compte de l'administration du loyer. C'est l'administration du projet qui doit tenir compte des différents loyers que ses locataires paient en fonction de leurs moyens. Et à ce moment-là, il y a une relation, si vous voulez, entre les administrateurs du projet et la personne identifiée comme une personne à faible revenu. Sur le plan social, il y a peut-être des inconvénients à cette formule-là, et nous pensons qu'il y a peut-être plus de souplesse dans la formule qui consiste à donner des allocations aux personnes, parce que les personnes, à ce moment-là, sont plus mobiles, elles peuvent choisir peut-être plus facilement les logements qu'elles désirent habiter. C'est un peu le but que nous préconisons. Ensuite, il faut bien dire que, jusqu'à maintenant, les projets de loyers subventionnés étaient quand même réservés aux personnes à faible revenu. Si on arrive à une solution de compromis où l'on aurait quand même des logements où pourraient habiter des personnes de tous revenus, à ce moment-là, nous nous estimerions en grande partie satisfaits. Je veux dire que c'est le principal problème, que celui de la formation des ghettos ou de la politique d'exception comme telle et probablement le problème majeur auquel nous voulons apporter un remède.

M. LUSSIER: Est-ce que ces allocations seraient payées uniquement à ceux qui habitent des logements publics ou également à ceux qui habitent des logements du secteur privé?

M. TRUDEL: Bien, c'est justement une différence. Nous proposons que les allocations de logement s'appliquent en priorité au secteur public, mais qu'il puisse exister une possibilité suivant laquelle les gens puissent employer leurs

subventions à des logements loués dans le secteur privé. A ce moment-là, ça prendrait peut-être un type spécial de contrat avec le propriétaire pour assurer un certain contrôle. Mais il y aurait cette possibilité, que les gens puissent employer leurs allocations à un logement loué dans le secteur privé, qui leur conviendrait.

M. LUSSIER: Et dans votre politique, vous dites que ce sont les gens les plus défavorisés dont nous devons nous occuper d'abord.

M. TRUDEL: Oui.

M. LUSSIER: Comment pouvez-vous concilier votre politique d'élimination de ghettos et favoriser le relogement avec les sommes d'argent dont l'Etat peut disposer? Parce qu'il y a plus d'un besoin prioritaire et l'élimination des ghettos.

M.TRUDEL: Justement, c'est ça qui fait peut-être l'aspect particulier de notre recommandation. C'est que nous distinguons la politique sociale de la politique d'habitation. Dans le domaine de l'habitation, nous pensons que le secteur public doit, d'une façon générale, exercer des activités qui sont sinon rentables, au moins économiquement valables, c'est-à-dire que les opérations puissent s'autofinancer d'une part, et que d'autre part, quand on parle de subventions, de politique sociale, alors là il faut, à notre avis, s'attacher d'une façon très radicale à aider les plus défavorisés.

Et nous le faisons, par exemple, en recommandant dans le système des échelles de loyer ou dans un système de barème d'allocation, par des taux progressifs qui auraient pour effet d'aider beaucoup plus, d'une façon plus marquée, les personnes les plus défavorisées.

Nous recommandons, par exemple, que dans les échelles de loyer, il n'y ait pas de minimum et que les loyers payés par les personnes à très faible revenu, soient encore plus bas que ce qu'on a proposé jusqu'à maintenant.

Alors c'est dans ce sens-là que nous pensons que les plus défavorisés doivent être aidés, ils doivent être aidés en priorité, également par la politique sociale en dehors de la question du logement. Mais d'autre part, dans le domaine de l'habitation comme tel, à ce moment-là les fonds publics doivent être utilisés de la manière la plus rationnelle économiquement.

M. LUSSIER: Une dernière question, je ne veux pas allonger ce questionnaire. Lorsque vous faites ces études-là, est-ce que vous portez une attention spéciale ou un peu d'attention à l'étude des coûts et aux sources de financement, ou si vous nous laissez entièrement cette étude?

M. TRUDEL: C'est une bonne question, mais effectivement c'est votre responsabilité de trouver le financement. Maintenant, il y a une chose qu'il faudrait dire quand même. On n'a pas proposé absolument sans distinction un système général de subventions à tout le monde et en toutes circonstances. Nous avons plutôt cherché à établir des priorités. Il faudrait mentionner quand même un fait, c'est que les gouvernements ont toujours eu des fonds, ont toujours mis des fonds publics assez considérables à la disposition de l'habitation. On a longtemps eu au fédéral une politique qui consistait à mettre des fonds publics à la disposition des citoyens pour l'accession à la propriété, et une certaine quantité d'argent s'est donnée, s'est prêtée de cette façon-là.

Nous, ce que nous recommandons, c'est que l'argent soit utilisé autrement; c'est essentiellement ça. Nous ne favorisons pas le système de prêts pour l'accession à la propriété de la maison unifamiliale. Nous considérons qu'à l'heure actuelle ça ne correspond pas aux besoins. Nous souhaiterions que les mêmes fonds publics soient utilisés pour créer le secteur public du logement, sur une base d'autofinancement. Les mêmes fonds publics permettraient déjà de réaliser une assez grande quantité de logements, pourvu que les fonds publics servent, justement, dans le secteur public.

M. LE PRESIDENT: Dr Goldbloom.

M. GOLDBLOOM: M. le Président, un bref commentaire seulement. La CSN, dans son mémoire qui est très intéressant, insiste beaucoup sur la subvention à la personne plutôt que sur la subvention au logement. Le ministre vient de poser quelques questions là-dessus, et je pense que la réponse — et c'est le commentaire que je voudrais faire — la réponse aux questions du ministre est surtout celle-ci que, si l'on applique la subvention au logement, quels que soient les autres mécanismes qu'on appliquerait pour éviter la création de ghettos, on est obligé d'appliquer des critères pour l'admissibilité des familles à ces logements. On crée quand même une distinction entre ceux qui peuvent entrer et ceux qui sont exclus.

Il est, je crois, dans l'intérêt de la société que les gens de toutes les souches de la société, de tous les niveaux économiques puissent se fréquenter. Et si l'on applique la subvention à la personne, on peut plus facilement intégrer cette aide à l'aide sociale que nous sommes en train de créer ou d'améliorer et à une politique de sécurité sociale comme telle, que nous sommes sur la voie de créer mais qui est encore lointaine. Je crois que, si nous faisons cela, nous pourrons même — et c'est un commentaire que je voudrais faire sur le mémoire lui-même — améliorer toute la situation des gens à faible revenu. Aujourd'hui, une très forte proportion

de notre population peut être considérée comme étant à faible revenu, sans aller nécessairement jusqu'au point de créer un secteur public du logement comme tel. A l'intérieur du système existant, on peut, par l'application des subventions à la personne ou à la famille, améliorer considérablement la situation en ce qui concerne le logement.

M. TRUDEL: Est-ce que c'est une question?

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. TRUDEL: Est-ce que c'était une question ou est-ce qu'on peut ajouter un commentaire à ce qui vient d'être dit?

M. LE PRESIDENT: Oui, oui.

M. TRUDEL: En ce qui concerne le secteur public, je pense qu'il y a quelque chose d'assez important. Nous ne voudrions pas que notre proposition à l'effet de donner des allocations aux personnes soit un prétexte pour ne pas développer le secteur public parce que justement, nous, nous voyons un autre rôle au secteur public.

Nous pensons que le secteur public — comme nous le disons dans notre rapport — peut remplir un certain nombre de rôles, c'est-à-dire, par exemple, construire une certaine quantité de logements qui manquent, à l'heure actuelle, et qui vont manquer si la demande augmente rapidement dans ce domaine; également, pour faire des études, faire des recherches pour améliorer le logement, tant au point de vue de la qualité qu'au point de vue de l'économie du logement.

Nous croyons également — et c'est peut-être l'aspect le plus important — que le logement fait partie de l'aménagement urbain. Lorsqu'on entreprend des opérations de rénovation urbaines, il est nécessaire que les pouvoirs publics disposent du plus grand nombre de moyens pour prendre toutes les initiatives nécessaires et réaliser tous les projets qui permettent de transformer les quartiers, de faire de la rénovation urbaine. Et en cela, je pense que le marché privé n'a pas démontré, nulle part, la possibilité d'effectuer réellement de la rénovation urbaine qui soit véritablement planifiée, conforme à un plan de réaménagement, etc.

C'est dans ce sens-là que nous voyons un rôle au secteur public. C'est un rôle qui permet au pouvoir public de réaliser de la rénovation urbaine d'une manière complète. Egalement, c'est un secteur, jusqu'à un certain point, qui doit être à l'avant-garde dans le domaine de la recherche du logement, des techniques et de la qualité du logement, et aussi dans le domaine de l'économie.

Je pense que ce secteur serait un stimulant à l'ensemble de l'industrie de la construction et nécessaire dans cette optique-là et non pas dans l'optique de construire des logements pour des catégories défavorisées de la population exclusivement.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Trudel. Maintenant, l'Association des architectes de la province de Québec. M. Lalonde.

M. LALONDE: M. le Président, M. le ministre, messieurs les membres de l'assemblée, le mémoire de l'Association des architectes est plutôt un aide-mémoire en comparaison de celui très étoffé que vient de nous fournir la Confédération des syndicats nationaux.

Il y a une explication à ceci, c'est comme vous allez le voir en deuxième page, l'Association des architectes prépare actuellement son congrès annuel pour janvier, et notre sujet sera l'habitation.

Alors, à ce moment-là, je pense que nous serons plus en mesure d'avoir un document plus étoffé. Pour le moment, nous avons jugé utile quand même de nous présenter ici et de rappeler un fait assez bien connu, si vous voulez pour pouvoir apporter aussi notre contribution pour, éventuellement, arriver à le mettre en oeuvre. Alors, rapidement, nous considérons que l'objectif de la notre société semble être de fournir un logis convenable à chacun de ses citoyens et, en même temps, nous constatons que la dégradation dans les villes, surtout dans le milieu urbain dans le moment, est progressive et que les mesures que nous appliquons ne semblent pas suffisantes.

Il y a sûrement à cet état de chose plusieurs facteurs qui contribuent; quelques-uns échappent sûrement à notre action directe ou à l'action directe du gouvernement même québécois, et je me réfère à des questions, par exemple, d'inflation, à la migration vers les centres urbains et aux augmentations de population qui se constatent dans tout notre monde. Mais il y a plusieurs autres causes de détérioration qui peuvent être corrigées à notre avis. Il incombe sûrement aux autorités gouvernementales, au gouvernement du Québec, d'établir des structures pour y arriver.

Nous pensons qu'il faut établir des structures de développement de l'habitat, et non pas simplement de l'habitation, et de former des organismes dotés de moyens et de pouvoirs nécessaires pour identifier les besoins, préparer les programmes et présider à leur exécution.

La Société d'habitation du Québec qui existe déjà depuis quelque deux ans, je crois, a déjà manifesté son action, et nous croyons que, d'une façon générale, c'est positif au chapitre de l'exécution. Cependant, cet organisme, tout dynamique qu'il puisse être, ne peut résoudre le problème que s'il est coiffé d'un office de planification chargé d'analyser les besoins, de déterminer les priorités et d'établir des

programmes en conséquence. L'ampleur du problème est telle qu'une loi de l'habitation et un organisme chargé de la faire respecter ne suffisent pas. Il faut un outil supplémentaire pour entreprendre une analyse globale des problèmes urbains à l'échelle de la province.

Nous constatons, en Europe et en Amérique, depuis le début des années 1950, que la construction de logements isolément ne répond pas au problème. Il faut encore que les logements s'intègrent dans un milieu pourvu de tous les autres équipements. Il faut, pour être logique et efficace, que toutes les décisions relatives à l'habitation, à plus forte raison, si elle est subventionnée, soient prises en fonction d'un plan global d'équipements, répondant aux besoins d'une organisation sociale et économique qui permette d'exploiter intelligemment et au maximum nos ressources humaines et matérielles.

Nous croyons qu'il existe au Québec un réservoir considérable de compétences et de talents qui ne demandent qu'à contribuer à la tâche qui nous occupe. Il incombe à l'Etat de mobiliser ces ressources pour mettre de l'ordre dans notre environnement. Nous croyons que l'occasion s'offre présentement au Québec d'ouvrir de nouveaux horizons en matière de développement urbain et d'habitation; il s'agit de mettre en place les structures et d'établir le cadre dans lequel les efforts individuels et ceux d'organismes déjè dans l'action, comme la Société d'habitation, pourront agir d'une manière positive et efficace.

La Commission provinciale d'urbanisme a remis son rapport il y a près de deux ansdéjà. Ses recommandations sont, à notre avis, positives, et l'organisme provincial de planification qu'elle préconise serait l'instrument tout indiqué pour établir des programmes coordonnés. Nous recommandons donc qu'une décision dans ce sens soit prise dans les plus courts délais pour enrayer la détérioration rapide et progressive de nos actifs.

Alors, enfin, notre recommandation est, à ce moment-ci, uniquement celle-ci: de créer le plus rapidement possible cet office de planification qui pourra chapeauter la société d'habitation et lui permettre d'agir d'une façon plus efficace sur des programmes qui auront été déterminés, non pas simplement en fonction de l'activité, ou de l'efficacité si vous voulez, des différentes municipalités qui peuvent arriver rapidement à développer un projet et pouvoir entrer dans les crédits dont le ministère dispose avant telle date. Enfin, la politique actuelle, je pense, à ce moment-là, risque, en ne s'attaquant qu'à un problème, le problème du logement avec des capitaux limités et du logement subventionné, de créer des problèmes encore plus grands dont nous souffrirons plus tard.

A notre congrès annuel, donc, qui aura lieu en janvier, nous nous proposons d'étudier l'habitation et l'habitation dans le contexte québécois.

Notre but n'est pas réellement d'étudier les techniques, ce qui est peut-être plus du ressort des architectes, mais nous croyons que, d'une façon générale, les techniques d'habitation et de construction d'habitations sont étudiées couramment un peu partout dans le monde et que ce qui se fait ailleurs, les leçons qu'on en tire ailleurs, peuvent être utilisées ici.

On a sûrement besoin dans notre milieu aussi d'avoir des groupes de recherches qui continuent et qui collaborent à cette action dans les recherches de méthodes de construction plus économiques et plus efficaces, mais, à notre avis, le problème n'est pas là.

Je n'ai pas les chiffres exacts en mémoire, mais me souvenant de ce que la CSN nous rappelait tout à l'heure, en fait je pense que d'une façon générale au Canada et au Québec — la variation peut être légère — le coût de la construction même entre pour moins de 50 p.c. dans le coût du logement au Canada entier. Alors, pour réduire ces 50 p.c. de 10 p.c. à 15 p.c, à notre avis, il faudrait arriver 3 faire des miracles et à faire un chambardement extraordinaire dans notre industrie de la construction.

Alors nous voulons donc nous consacrer plutôt à étudier et à analyser les structures qui nous permettraient de coordonner les efforts que nous avons. Et à titre, nous aurons différents sujets qui seront traités, tels que, par exemple, l'évolution de l'habitat dans le Québec en fonction du lotissement, puisque nous vivons avec un patrimoine assez lourd de conséquences en matière de lotissement, qui nous a amenés 3 avoir certaines formes de logement et certaines formes d'environnement dont nous subissons les conséquences dans le moment. Je pense par exemple à la plupart des taudis que l'on détruit à Montréal, si vous voulez, qui sont des duplex ou des triplex qui ont été redivisés en deux et en quatre quelquefois, sur une bande de terrain de vingt pieds de large, avec une fenêtre à l'avant, une fenêtre à l'arrière et puis évidemment, l'insalubrité automatique.

On a aussi, dans les banlieues et un peu en province, des formes de terrain de soixante, soixante-dix pieds de façade qui — ça d'ailleurs on rejoint tout le réseau d'Amérique — nous amènent à construire des longueurs absolument inefficaces et inéconomiques de rues et de services. Tout cela, ça se paie, ça vient aussi dans le coût total du logement, à notre avis.

L'habitation, partie intégrante de l'environnement. Alors je ne m'attarde pas plus longtemps puisque je pense que cela a déjà été très bien souligné par la CSN. Quant aux participants 3 la construction de l'habitation, je pense que ces messieurs aussi en ont parlé. A notre avis, la motivation des participants est peut-être logique dans le moment, dans notre genre d'économie, mais cette motivation-là n'est pas faite pour satisfaire des besoins. Elle a pour objet de satisfaire, d'obtenir un profit. Je

pense que nous serions prêts à endosser les propositions de la CSN qui voudrait que la majorité de ce profit-là revienne à l'Etat, puisque c'est un profit qui n'est pas productif en soi.

Le contrôle des terrains et leur financement. Je pense que nous sommes tout à fait d'accord aussi qu'il y aurait lieu au moins, sinon de nationaliser tout le secteur urbain tout le terrain, au moins de créer des bandes de terrains détenues par les municipalités, comme d'ailleurs cela a été proposé à plusieurs reprises, je pense, dans les différents rapports, y compris dans le rapport de la commission Hellyer. C'était là, je pense, un des aspects positifs de ce rapport à notre avis.

Le coût réel du logement. Je pense que là aussi les chiffres fournis par la CSN nous montrent que le loyer, dans le coût réel du logement, n'est qu'un élément et que tous les autres facteurs, la taxation évidemment, directe et indirecte, les coûts de transport, enfin on n'a qu'à penser au métro de Montréal, qui dans le moment, pour un nombre de milles donnés, satisfait un territoire dont la densité est la moitié de ce qu'elle est à Paris ou à Londres même. Alors c'est un facteur qui vient aussi s'ajouter dans le coût de l'aménagement urbain.

La responsabilité légale et morale de l'habitation publique. Je pense que notre système économique nous oblige à considérer que cette responsabilité-là est la responsabilité de l'Etat. Elle ne peut pas être la responsabilité de l'individu dans le moment. C'est peut-être l'individu en tant que participant à l'Etat, mais ce n'est pas l'individu directement.

La préservation et la rénovation. Je pense que àâ-dessus aussi, nous sommes tous familiers avec les problèmes. Souvent la réponse à un besoin de logement peut être satisfaite plus facilement par la préservation et la rénovation des habitations existantes, même si c'est plus cher.

Parce que la rénovation d'une unité de logement peut sembler coûteuse, mais ses répercussions sociales sont tellement plus économiques, et je pense qu'il faudrait qu'on l'étudie d'une façon plus précise.

En autre lieu, les normes d'aménagement et d'habitation. Là-dessus nous faisons une étude beaucoup plus poussée, nous en venons à la conclusion qu'il y a, dans notre province comme partout dans notre pays, une limite à nos possibilités qui, malheureusement, se confondent continuellement avec les demandes ou les exigences d'individus qui vivent dans un contexte d' "affluent society", ou la société d'affluence — je ne sais pas exactement comment on a pu la traduire — de sorte que les exigences de l'individu en matière de logement sont supérieures au Québec à ce qu'elles sont en Europe, parce que nous sommes habitués au chrome. On nous vend continuellement le chrome; alors on ne peut pas, dans le moment, penser à un logement sans chrome.

Pour vous donner seulement un exemple, j'étais en Allemagne, il n'y a pas tellement longtemps, et on continue à faire en Allemagne des logements où la garde-robe de la chambre à coucher n'existe pas, parce qu'on ne peut pas se le payer; on a l'armoire familiale qu'on transporte avec nous, on a peut-être aussi moins de vêtements, qu'on en a ici à loger, mais c'est un élément mineur si vous voulez, qui fait quand même que, multiplié par le nombre de pieds carrés qu'on intègre dans une unité de logement, cela devient une chose assez considérable.

On a, aussi, je pense, beaucoup de normes d'équipement qu'on fournit dans l'habitation, qu'on demande dans l'habitation, et beaucoup de pays ont appris à vivre sans les avoir. Alors, c'est tout ça que je considère comme des exigences de 1'"Affluent society".

M. CHOQUETTE: Une interruption, M. Lalonde; tout à l'heure, dans le mémoire de la CSN, un tableau très intéressant, à mon avis, s'y trouvait à l'effet que la part du budget qui va dans le logement au Canada, au Québec en particulier, est particulièrement importante par rapport à d'autres économies dans le monde. Alors, est-ce que vous, comme architecte, vous avez des explications à nous donner quant à cet état de chose? Cela résulte de quoi d'après vous?

M. LALONDE: Je pense...

M. CHOQUETTE: Est-ce que c'est parce que le Canadien veut être mieux logé que le Français et que l'Allemand, et qu'il est, par conséquent, prêt à consacrer plus à son logement? Ou, est-ce que c'est parce que le coût est plus élevé ici? Et, si le coût est plus élevé, quelles sont les parties du coût qui contribuent à donner cette proportion à l'importance du logement dans le budget familial?

M. LALONDE: M. Choquette, je pense que nous allons essayer, pour le congrès, d'avoir des chiffres précis, mais, dans le moment, déjà, je pense qu'on peut constater que le fait de cette demande de chrome, si vous voulez, c'est une chose qui doit se payer. La deuxième chose qui vient en ligne de compte, c'est que nous sommes quand même un pays relativement éparpillé ou une province relativement éparpillée. Alors on a, là aussi, des coûts qui indirectement reviennent dans le loyer —à cause de tout notre système de taxation, peut-être — qui sont plus chers. Si à Paris, nous avons huit étages continus, évidemment les coûts d'entretien du secteur public en se répartissant sur les logements seront moindres. C'est sûrement vrai en Suède. Je pense aussi qu'en Suède, surtout, ce coût de 8 ou 9 p.c, dont on a parlé tout à l'heure, n'est pas tout à fait juste. Il est juste comme coût direct de loyer; c'est ce qu'on sort de sa poche une fois

par mois, pour donner, mais il y a une contribution de l'Etat au secteur du logement, soit par les techniques employées pour la construction, etc., qui font que l'investissement au départ, dans le logement, étant moindre, on en demande un moins grand résultat. Il faudrait faire l'analyse complète de la dépense du revenu d'un individu en Suède et voir quelle partie est réellement imputable au logement. A ce moment-là, je pense qu'on se rapprochera de nous, on n'arrivera peut-être pas aux mêmes normes, au même pourcentage que nous sommes au Québec ou au Canada, mais on se rapprochera considérablement.

M. CHOQUETTE: Par exemple, je lisais un livre que vous connaissez peut-être: "Peut-on loger tous les Français". C'est un livre assez bref, mais très à point. C'est incontestable que les Canadiens et les Québécois sont mieux logés que les Français, en général. Je veux dire que, même si on essayait de comparer la situation du Québec par rapport à celle de la France, l'espace, les accommodations à l'intérieur de chaque logement sont supérieurs ici à ce qu'ils sont en France. Alors, chaque situation mérite d'être analysée à son mérite et suivant l'historique des circonstances qui ont mené à cet état de chose.

En France on sait qu'il y a eu démolition d'un grand nombre de logements au cours de la guerre de 1914 et que l'économie française n'a jamais rattrapé ce retard-là.

M. LALONDE: C'est tout à fait vrai. En France je ne connais pas les chiffres exacts, mais je pense que l'Allemagne est encore un cas plus patent puisqu'il y avait 60 p.c. des logements et de l'ensemble des bâtiments à remplacer après la guerre et à remplacer pour les besoins immédiat; de plus, en Allemagne de l'Ouest, 15 millions d'immigrants sont venus s'ajouter et ont augmenté les besoins de 40 p.c. En 15 ans on a réussi à loger tout le monde convenablement. Mais quand on regarde les normes qu'on a prises comme minimum au départ et qu'on les compare à ce qu'on appelle normes minimales ici, il y a tout un monde. Convenablement, c'est toujours en fonction de normes et, à notre avis, dans le Québec comme partout au Canada, on s'est donné des normes qui sont supérieures à notre potentiel...

M. CHOQUETTE: Supérieures à notre...

M. LALONDE: ... à notre potentiel économique. Est-ce qu'on peut faire marche arrière? Ce n'est pas facile évidemment, je pense qu'il s'agit de le réaliser.

M. CHOQUETTE: Que voulez-vous dire par des normes supérieures à notre potentiel? Parce qu'on peut dire peut-être dans le domaine de la maison unifamiliale, le bungalow à $15,000 je suis d'accord avec vous — qu'on s'est peut-être donné des normes supérieures à notre potentiel économique. Mais quand on arrive dans les classes défavorisées, dans les 15 p.c. ou 20 p.c. de la population de Montréal qui vit dans des logements insatisfaisants ou insalubres ou dans des taudis, on ne peut pas dire que nos normes dépassent notre potentiel à ce moment-là.

M. LALONDE: Je pense que ces logements-là ne sont peut-être pas conformes aux normes. Je vais vous donner un autre exemple. Je pense que, d'une façon générale, en Europe, quand on construit une chambre à coucher, on construit une chambre à coucher pour deux personnes, alors qu'ici on a l'optique de la chambre à coucher pour deux personnes, pour le père et la mère, et comme idéal, une chambre par enfant, qu'on n'arrive pas évidemment à fournir dans le logement subventionné. Mais très souvent on arrive à des solutions comme celle-là, où la surface de la chambre à coucher va être conçue pour deux personnes et habitée par une. Ce sont de petits facteurs, peut-être, mais en les additionnant tous, je pense qu'on arrive à pouvoir démontrer cela. Il y a eu autre chose aussi qui a existé en Europe et qui continue d'exister, je pense. Les villes européennes, qui ont été construites 300 ou 400 ans avant nous peut-être, ont été organisées autour de la vie publique, si vous voulez; alors on a la place en Europe, qui est en réalité le living-room où à Paris ce sont des terrasses en bordure des cafés. On vit sur les terrasses le soir, la récréation est d'aller s'asseoir là pour prendre une orangeade ou un demi, et le spectable est dans la rue.

A cause de notre climat peut-être, et surtout à cause de la jeunesse de notre pays, on n'a pas encore connu ça, de sorte que le logement doit fournir l'équipement nécessaire à la récréation. On voit qu'en Europe, encore, la plupart des logements se font avec la salle de séjour, qui est en réalité la salle à manger. Nous, nous avons besoin du living-room, ce qui n'existe pas ailleurs. Là aussi il y a un facteur à considérer. Je pense qu'on a tenté, à quelques reprises de faire des places. Les places, ça nous sert à faire des manifestations en ce moment — mais, à part ça, elles ne servent pas à grand-chose.

Je pense que, par contre, dans les programmes un peu plus sophistiqués que nous voyons apparaître en ce moment, on prévoit de l'équipement collectif qui permettrait de reconsidérer les normes du logement lui-même, puisqu'on fournit ailleurs la possibilité de la récréation, la petite maison avec le sous-sol aménagé pour faire jouer les enfants de six et sept ans; finalement avant six ans ils sont trop petits pour descendre et après sept ans ils vont ailleurs. C'est aussi une chose qu'il faudrait peut-être reconsidérer. Mais quand on parle de strictes normes du logement public en ce

moment, on ne parle pas de sous-sol aménagé. Ce que nous croyons, c'est que la société, d'une façon générale, demande d'être le plus près possible des normes qui sont fournies à ceux qui sont un peu mieux logés et on a tendance à augmenter les normes du minimum, plutôt que de les reconsidérer dans leur absolu.

Je pense que nous serons en mesure peut-être de coordonner tout cela et puis de vous faire parvenir les rapports sur ces sujets-là.

Un dernier point, si vous me le permettez, que nous avons ajouté en annexe à cet aide-mémoire, ce sont quelques commentaires sur une formule qui, en ce moment, se fait jour au Québec, après avoir été utilisée en Ontario et aux Etats-Unis depuis trois ou quatre ans, et qui veut qu'on emploie le système de propositions de développement. D'ailleurs je me souviens d'avoir lu dans les journaux que M. le ministre avait, dans une conférence de presse ou une conférence devant un groupement, s'était félicité de cette nouvelle méthode que nous allions essayer et qui allait répondre à tous nos problèmes.

Cela nous a chatouillés beaucoup, il faut le dire, puisque la tradition veut que le client aille voir l'architecte, lui demande de mettre ses besoins sur papier et qu'avec cela on aille voir dix entrepreneurs ou en soumissions publiques pour obtenir le meilleur offrant... Ensuite nous connaissons tous les vices de ce système.

M. LUSSIER: Si vous me permettez simplement de vous interrompre quelques instants, c'est qu'on ne s'est pas félicité lorsqu'on l'a proposée et je n'ai jamais pensé, j'espère bien que je n'ai pas non plus laissé penser à des gens, que c'était une formule magique pour régler tous les maux de l'habitation que nous connaissons actuellement. Je m'excuse de vous interrompre, mais vous avez dit cela d'un ton badin et dans le journal des Débats, nous ne retrouverons pas votre ton.

M. LALONDE: Alors, je m'excuse, M. le ministre, mais mon intention n'était pas malveillante du tout.

M. LUSSIER: D'accord.

M. LALONDE: En fait, je pense que ce petit rapport que nous avons ajouté, si vous voulez, va clarifier la situation. Alors nous avons considéré le système après avoir discuté d'abord avec des membres de la Société d'habitation du Québec, qui ont marché beaucoup dans notre sens, si vous voulez, parce que pour le moment, je crois que la plupart des demandes de propositions insistent pour que les plans soient fournis par les professionnels, les architectes ou les ingénieurs si c'est le cas. Evidemment, dans ce sens-là, nous ne pouvons que nous féliciter.

Par contre, nous croyons que la formule empêche — et sur cela nous rejoignons peut-être un peu le mémoire précédent — le dialogue direct entre le client et l'architecte. Je ne qualifie pas le client, parce que le client est l'usager ou quelqu'un d'autre, c'est quand même quelqu'un qui représente l'usager s'il ne l'est pas directement. Alors, la formule de proposition de développement donne un programme nécessairement aussi simple que possible pour permettre des propositions aussi diversifiées et le tout se passe dans l'isolement complet. Après, on va retenir un projet, sur la base de ses coûts évidemment, et de sa qualité peut-être, mais ce dialogue entre l'architecte ou l'équipe de conception et le client n'existe plus par définition. Nous croyons que cela risque d'amener des déboires.

Deuxième point, au point de vue légal et administratif, évidemment, l'engagement de l'architecte par l'entrepreneur, se produit à ce moment-là, crée, pour le premier, des liens contractuels qui non seulement peuvent, mais entrent en conflit avec les intérêts du client, puisque notre responsabilité reste conjointe et solidaire; si nous avons des intérêts avec l'entrepreneur, il est assez difficile, en même temps, de pouvoir contrôler pour le client les faits et gestes de ce coparticipant avec lequel nous avons directement des intérêts. Alors, il y a des problèmes de code civil même là-dedans et je ne fais que les soulever pour vous dire qu'ils existent, si vous voulez.

Le troisième point est le fait que de nombreuses équipes d'architectes, d'ingénieurs, d'entrepreneurs et autres travaillent concurremment au même projet. Cela conduit nécessairement à un gaspillage de talents, de connaissances et de temps. Nous suggérons qu'on cherche un moyen plus rentable d'utiliser ces ressources humaines en vue du règlement du problème de l'habitation.

Quatrième point: la plupart des municipalités n'ont pas le personnel compétent requis pour juger de la qualité d'un projet ou du prix qu'on en demande. Heureusement, la Société d'habitation du Québec a des services un peu mieux structurés et peut contribuer beaucoup. Mais là aussi, la loi, je pense, met des limites, si vous voulez.

L'association, en somme, reconnaît que la méthode de proposition de développement offre des avantages, en permettant un certain contrôle des coûts et une économie de temps, due à l'introduction de l'entrepreneur dans le système dès le début de la recherche d'une solution. Cependant, dans l'ensemble, nous ne croyons pas que ce soit la façon la plus appropriée d'obtenir les meilleurs résultats. L'association est d'avis que les objectifs de la Société d'habitation du Québec seraient mieux servis si celle-ci, après avoir établi des listes de compétence ou avoir trouvé d'autres moyens, même sur une base compétitive, de choisir les participants, choisissait avec soin les meilleurs talents qu'elle puisse trouver dans le domaine

du "design", de l'administration et de la construction et formait des équipes unifiées qui seraient directement responsables vis-à-vis d'elles-mêmes et des municipalités pour préparer l'exécution des projets.

Il faut ici souligner qu'environ 85 p.c, et quelquefois plus, du coût de construction d'un projet se repartit en divers sous-contrats.

En somme l'entrepreneur général, dans le moment, n'est qu'un "broker" à toutes fins pratiques. Alors ces 85 p.c, qui se répartissent sur divers sous-contrats, restent toujours sujets à la compétition même si l'entrepreneur général doit être rémunéré sur une base d'honoraires ou une autre base.

Alors cette façon d'utiliser les talents disponibles pour attaquer globalement le problème de l'habitation, permettrait non seulement d'obtenir l'excellence désirée mais assurerait que les normes de la Société d'habitation du Québec seront respectées. Elle encouragerait de ce fait la recherche en construction, et on aurait la possibilité de favoriser au maximum l'exploitation des ressources régionales qui risquent dans le moment d'y perdre beaucoup. Nous savons tous que nos voisins, les Ontariens, ont deux ou trois ans d'avance dans le domaine, je pense bien que nous allons voir apparaître, et déjà c'est arrivé, des propositions qui viendront d'ailleurs. Et à ce moment-là, nous avons des talents locaux qui restent là à regarder. Dans ce sens, je pense que nous pourrions, à l'intérieur de la province, organiser des équipes comme cela. Il y a le problème toujours, qui est faux à notre avis, de la concurrence au moment des offres. Mais, comme 85 p.c. du contenu restent compétitifs, je pense que nous resterions quand même dans des normes de moralité publique qui seraient acceptables.

Merci, messieurs.

M. LUSSIER: Si vous me permettez, d'abord c'est un mémoire et des commentaires qui, à mon avis, sont bien pertinents, mais j'aimerais quand même poser certaines questions à M. Lalonde pour expliciter sa pensée. Tout d'abord, l'Office de planification. Est-ce que votre conception de cet office-là s'apparente directement à l'Office de planification et du développement qui existe actuellement au niveau gouvernemental ou si cet office de planification serait une partie ou un service de la Société d'habitation du Québec?

M. LALONDE: Non, je crois, M. le ministre, que le rapport de la commission d'urbanisme, le rapport Lahaie, a assez bien posé le cas. Sur la question de régionalisation et d'administration centrale, je laisse aux législateurs le soin d'en décider. Mais le champ d'activité, si vous voulez, de cet organisme-là, à notre avis, va analyser les besoins dans le développement urbain. Et cela fait peut-être partie, c'est peut-être un office qui dépendrait ou qui aurait comme répondant, au gouvernement, le ministre des Affaires municipales; mais ce n'est pas directement relié à l'Office d'habitation qui a dans le moment, comme secteur propre, l'habitation.

Et ce que nous préconisons, c'est un office qui ait les pouvoirs et les moyens d'établir un plan de développement urbain à l'intérieur duquel le secteur de l'habitation pourra s'intégrer. Parce que nous croyons, enfin peut-être pour répéter ce que j'ai mal dit tout à l'heure, que s'attaquer seulement aux problèmes du logement, ce n'est pas résoudre le problème. Cela risque même de l'amplifier, puisque nous savons de plus en plus, dans le moment, je pense, que, dans le secteur urbain, le logement ne peut pas être considéré isolément. Seulement, comme exemple pratique, nous voyons à Montréal des secteurs d'habitations avec des surfaces de stationnement assez considérables, qui sont vides le jour, vers le centre-ville la même surface de stationnement est vide la nuit. Alors, dans le moment, on a à Montréal au moins deux endroits de stationnement pour chaque voiture.

Déjà, on se rend compte qu'au point de vue économique, il y aurait intérêt à pouvoir mettre ces choses-là ensemble. De plus, je pense que la société, d'une façon générale, se refuse de plus en plus à vivre isolée la nuit et d'avoir à se déplacer d'un secteur à l'autre; mais elle demande un secteur où elle puisse arriver jour et nuit. Il ne s'agit pas de loger tout le monde sur la Place Ville-Marie évidemment. Mais il s'agit de considérer que le développement urbain ne doit pas prendre seulement en ligne de compte le logement.

Je pense que cet office de planification va un peu plus loin, il pourrait jusqu'à un certain point, permettre une coordination entre les différents ministères pour éviter, par exemple, que le ministère de l'Industrie et du Commerce puisse souhaiter ou obtenir l'emplacement d'une industrie dans un certain secteur sans que le secteur de l'habitation puisse en avoir entendu parler.

M. LUSSIER: M. Lalonde, je pense que ce n'est pas la première fois que vous parlez de ceci. M. Lahaie en parle aussi dans son rapport. C'est une des raisons pour lesquelles nous avons institué, au ministère une direction générale de la Planification qui travaille dans ce sens-là, qui doit évidemment progresser de plus en plus dans ce sens-là. Nous sommes évidemment d'accord avec cette recommandation comme avec d'autres qui existent dans votre mémoire.

Une autre précision. Lorsque vous parlez de planification de l'habitation à réaliser, est-ce

que cette planification doit s'étendre d'une façon très spécifique aussi au secteur de l'habitation privée? Est-ce que, dans votre esprit, c'est uniquement la planification du secteur public qu'on doit déterminer, par exemple, les besoins, les types de logement, etc. et que ceci serait réalisé selon les décisions gouvernementales, soit locales, régionales ou provinciales, et que le secteur privé devrait réaliser ce que les organismes publics ont décidé d'une façon assez claire et catégorique?

M. LALONDE: Ce secteur de planification, je le répète, de développement urbain et non simplement d'habitation qui pourrait établir des plans aussi bien sur la base économique que sur le développement physique, servira nécessairement de ligne de conduite au secteur privé, sans nécessairement lui imposer le domaine dans lequel il doit agir. Mais si on détermine que, dans un tel quartier, il va se passer telle chose, à ce moment-là la Société d'habitation pour sa part peut y implanter son apport, mais le secteur public va aussi pouvoir le faire d'une façon coordonnée.

Je pense que ça peut se faire sans entraver les droits de l'individu ou du secteur privé. Je pense qu'au contraire le secteur privé ne pourrait voir que d'un bon oeil qu'on arrive à pouvoir déterminer d'une façon ordonnée comment développer un coin.

M. CHOQUETTE: M. Lalonde, il ne faut quand même pas être pratiquement naif pour croire que le secteur privé n'essaie pas d'utiliser chaque parcelle de terrain qu'il peut s'approprier légitimement, je n'emploie pas ce mot-là péjorativement, mais qu'il peut acquérir de la façon la plus rentable et la plus économique possible dans les circonstances.

Moi, je crois fort peu à des mesures qui soient purement d'ordre général, qui n'aient pas de force légale dans ce domaine-là.

M. LUSSIER : Pour employer une expression à la mode, c'est plutôt incitatif que coercitif.

M. CHOQUETTE: Eh bien, je ne voulais pas tomber dans un autre débat, mais en somme dans le domaine immobilier, et lorsque l'on touche de près les intérêts économiques des gens, je crois très peu à l'incitation, à la bonne volonté, enfin à toutes ces choses-là. Je crois que le grand problème auquel on est obligé de faire face — enfin il y en a plusieurs grands problèmes — c'est de savoir quelle sorte d'économie on veut avoir dans le domaine immobilier. Est-ce une économie principalement libre, basée sur l'entreprise privée, sur l'initiative individuelle, ou est-ce que l'on veut une réglementation et une action étatique très très prononcée à tel point que l'on soit presque dans une économie socialiste?

Au fond c'est un peu les deux choix qui existent et puis, à un moment donné, il va falloir que les gens choisissent. Maintenant ceci ne veut pas dire qu'on choisisse une politique ou l'autre, il est particulièrement important à mon avis que les politiques soient énoncées clairement et simplement et que les gens sachent à quoi s'en tenir. Parce que tant qu'on nage dans le vague et dans les considérations générales et ci et ça, c'est la confusion, c'est la tour de Babel, personne ne sait exactement à qui se fier ou quelle valeur ou règle de conduite adopter. Alors je crois que c'est un très grand dilemme qui existe actuellement. Nous en avons eu un exemple particulièrement patent ce matin: le mémoire de la CSN, à mon avis, représente une optique que je décrirais comme socialiste de la réalité dans ce domaine-là, tandis que si vous prenez le rapport Hellyer qui a eu une certaine célébrité avant de tomber dans l'oubli, peut-être à cause de la disparition de M. Hellyer lui-même de la scène politique, c'était une optique complètement libre, capitaliste et totalement basée sur l'initiative privée.

M. LUSSIER: C'était une politique de consommation.

M. CHOQUETTE: Oui. Le ministre emploie le terme, je pense bien, exact.

M. LUSSIER: Les maisons étaient comme des autos.

M. CHOQUETTE: Justement.

M. LUSSIER: II comparait toujours cela à des automobiles. C'était la production, c'était pour lui, une société de consommation, et cette société de consommation des biens s'étendait jusqu'à la propirété, à l'habitat.

M. CHOQUETTE: Exactement. Je ne me rappelle plus du terme français, mais ce n'était pas le "fall-out", M. Dion? Les plus riches passent leurs maisons au moins riches au fur et à mesure qu'elles se déprécient.

M. LUSSIER: Filtering...

M. CHOQUETTE: Filtering down process.

Mais enfin, il y a peut-être aussi des solutions intermédiaires, enfin, il y en a peut-être. Mais ce qui est difficile, c'est de préciser quelles sont les politiques réelles que l'Etat québécois ou la société québécoise veut adopter dans ce do-domaine.

M. LALONDE: Oui. En fait, je suis tout à fait d'accord avec vous. Je pense que, même je crois que la réponse est entre le rapport de la CSN, vu dans l'optique que vous avez présentée et les vues de M. Hellyer. Mais il existe dans le moment, dans notre société, un système de contrôle qu'il ne s'agit pas nécessairement de

démolir. Je pense que les urganistes seront peut-être plus en mesure que moi de parler des problèmes de zonage, mais le zonage en soi, c'est un contrôle.

M. CHOQUETTE: Oui.

M. LALONDE: Alors si on fait un plan d'aménagement d'un secteur complet, est-ce que l'instrument de zonage ne peut pas être suffisant comme contrôle des individus qui voudront profiter du système? Peut-être d'autres mesures de ce genre-là peuvent permettre, quand même, de garder un contrôle, tout en laissant aux individus, "l'incentive" qui leur est requis.

Mais je pense que vous l'avez dit: On ne peut pas réellement ordonner les choses si on ne connaît pas les problèmes d'abord, si on ne les a pas déterminés et si on n'a pas programmé en fonction de nos disponibilités.

Je pense que cet Office de planification, c'est surtout son rôle. Le Conseil économique, ou l'équivalent, a eu aussi des intentions dans ce genre-là, je pense. Il a peut-être entrepris un travail positif. Et il nous semble, peut-être parce qu'on n'est pas complètement en connaissance complète de cause, qu'il y a beaucoup d'efforts qui se sont faits d'une façon un peu éparpillée et que, dans le moment, au Québec, sans être isolés, si vous voulez, on a quand même pris conscience un peu plus de notre pouvoir et de notre dépendance directe de nous-mêmes. Je pense qu'il s'agit qu'on coordonne tous ces efforts-là, qu'on prenne tous ces talents qui existent, qu'on les mette en production et qu'on fasse des grands pas en avant.

Je ne veux pas faire un discours politique ici...

M. CHOQUETTE: Non, vous avez absolument raison. C'est qu'il y a beaucoup de gens qui s'intéressent à tout ce domaine, dans beaucoup de milieux, mais il ne semble pas qu'on ait déjà précisé les problèmes que nous avons à résoudre. Il ne semble pas que des solutions claires aient été proposées par les différents protagonistes des écoles de pensée qui peuvent exister. Surtout dans un domaine comme le logement, qui est tellement vaste, qui touche à la vie sous tous ses aspects, que ce soit la vie économique, la psychologie humaine qui dépend de l'histoire, etc., surtout dans un domaine comme cela, on a de la difficulté à appréhender les problèmes et à les situer dans leur contexte.

M. LALONDE: Je pense qu'on pourrait prendre comme exemple, pour ce qu'il vaut, ce qu'on a fait, au Québec, en éducation, où on avait aussi un fouillis extraordinaire, et, par des efforts concentrés, on est arrivé quand même à mettre un certain ordre et à pouvoir déterminer où les efforts devaient se faire. Est-ce que le résultat en valait la chandelle? Cela aussi, je vous laisse en débattre. Mais il y a quand même un exemple d'une action coordonnée. Je pense qu'en logement, on doit, dans le moment, entreprendre la même optique, si vous voulez. Pour cela, il faut, sûrement, n'avoir pas simplement des organismes d'exécution mais des organismes de recherche et de programmation. C'est en fait l'essentiel, si vous voulez, de notre proposition.

M. CHOQUETTE: D'accord.

M LE PRESIDENT: Merci, M. Lalonde. Maintenant, M. Smith.

M. SMITH: M. le Président, M. le ministre, messieurs les députés, avant de vous présenter mes deux confrères de l'Association coopérative d'économie familiale de Montréal, je voudrais seulement souligner un ou deux points au sujet du mémoire que nous avons soumis ce matin.

Comme nous le disons dans l'avant-propos, il s'agit d'abord des généralités préliminaires qui, nous l'espérons, peuvent servir de base de discussion.

A l'heure actuelle, l'ACEF n'a pas eu les moyens et nous commençons seulement maintenant à acquérir une certaine expérience dans le domaine des logements. Mais nous voulions lancer une discussion surtout au sujet de la possibilité qu'a le mouvement coopératif de jouer un rôle de premier ordre dans la résolution de la crise du logement au Québec.

Avec moi ce matin, je voudrais vous présenter M. Gérard Marotte, qui est président de l'ACEF de Montréal, qui est ici pour répondre à vos questions et, notre gérant, M. Pierre Marois, avocat et gérant de l'ACEF de Montréal, qui va indiquer les points principaux de notre mémoire.

M. MAROIS: Si vous permettez, je voudrais faire une lecture assez rapide des principaux passages du mémoire. Je pense qu'au fond c'est peut-être la formule la plus simple et la plus rapide. Comme le disait M. Smith, nous tenons à souligner au départ que les ACEF, évidemment, opèrent avec des moyens techniques et financiers très modestes, si bien que ce que l'on a voulu surtout faire en présentant le mémoire, c'est de retenir à partir de l'expérience concrète qu'on a vécue quotidiennement avec des milliers de consommateurs à travers le Québec, surtout d'attirer votre attention sur un certain nombre d'éléments de base d'une politique du logement social.

L'orientation générale du mémoire. La responsabilité de l'Etat.

L'Etat se veut dans toute société l'ultime responsable du bien commun de ses citoyens. Ceci devrait être aussi vrai dans le domaine du

logement que dans d'autres domaines où il est plus habitué à assumer des responsabilités.

Il est regrettable de constater qu'au Québec, comme ailleurs en Amérique du Nord, l'Etat se préoccupe peu de répondre à ce besoin social absolument fondamental. Nous sommes cependant très heureux que, ces deux dernières années, le gouvernement du Québec se doit donné dans la Société d'habitation du Québec un instrument pour oeuvrer dans ce secteur. Il est de bon augure que cette société désire élaborer ses politiques avec les corps intermédiaires ainsi que toute la population du Québec.

Il est de toute évidence que nous entendons voir l'Etat jouer un rôle majeur dans la résolution de la crise du logement, surtout en ce qui concerne les études, les expériences pilotes par les nouvelles et moins coûteuses méthodes de construction et dans les apports techniques. Plus encore, l'Etat devrait prévoir la nationalisation du sol urbain pour fins d'aménagement rationel et d'utilisation prioritaire à des fins sociales. Il devrait aussi se porter responsable du financement, de sorte que les coopératives et autres corporations à but non lucratif soient accessibles et répondent aux besoins de tous les Québécois. Pourquoi pas des habitations publiques?

Nous souhaiterions que le problème du logement soit confié à des associations coopératives d'habitation et que l'Etat contribue par le biais des taux d'intérêt préférentiels, par l'absorption d'une forte partie des intérêts et par une allocation-logement à tous ceux qui en ont besoin. Ce que nous voulons éviter à tout prix, c'est l'Etat propriétaire. Les expériences connues dans le logement public à travers l'Amérique du Nord furent presque toutes malheureuses; c'est ce qu'ont clairement démontré les audiences publiques et les visites du "Task Force Hellyer" où, partout, les résidants de ces complexes d'habitation se sont plaints d'une administration autoritaire et insensible. La construction et l'entretien laissent à désirer, ajoutons le peu d'équipement communautaire et la ségréation sociale. Notre seule expérience au Québec, les Habitations Jeanne-Mance, devrait être concluante en la matière.

En faveur de petites communautés autogérées.

Nous accordons une importance primordiale à l'utilisation de la formule coopérative dans le domaine du logement. Si l'Etat assume ses responsabilités en rendant accessible à tous la participation dans les coopératives, nous croyons que cette approche évitera les plaintes ci-haut mentionnées. Mais nous souhaitons que les ensembles de logements coopératifs soient plus que des dortoirs. Nous croyons que de ces ensembles devrait émerger une vie collective susceptible de faire renaître le sens communautaire dans les grandes agglomérations urbaines.

Chapitre premier

Nationalisation du sol

Pour un programme d'habitation sociale d'envergure, il nous semble qu'il faut prévoir la nationalisation du sol urbain afin que le coût soit abordable pour la société.

A Montréal par exemple, le pourcentage du coût attribuable à l'achat du terrain représente au moins 10 p.c. et peut aller jusqu'à 25 p.c. du coût total selon le quartier et la densité de la construction. Exemple, dans le projet "Cité Concordia", projet de haute densité, l'achat du terrain représente 10 p.c. du coût total du projet, soit approximativement $15 millions sur un coût total de $150 millions. Le pourcentage du coût total attribuable à l'achat du terrain est nécessairement plus imposant dans la construction des maisons unifamiliales et des maisons en série où la densité est moindre.

La nationalisation du terrain permet également aux autorités une utilisation rationnelle du sol urbain selon les priorités sociales. Effectivement la nationalisation du sol coûtera très peu aux municipalités parce que l'achat se fera par voie d'émissions d'obligations municipales à long terme.

En louant les terrains nationalisés pour fins commerciales, les municipalités vont nécessairement plus que couvrir les intérêts dus sur les obligations. Evidemment les autorités ne devraient pas payer la valeur spéculative des terrains et ainsi devenir partenaires des spéculateurs dans le vol du bien public, mais devraient plutôt indemniser sur la base de la valeur foncière. Les municipalités devraient mettre gratuitement ces terrains à la disposition des sociétés à but non lucratif, telles que les coopératives, puisque ces dernières détiennent une grande part dans la résolution du problème du logement.

Chapitre deux

Coût de la construction et effets de la préfabrication sur les ouvriers de la construction

En plus des épargnes que vont permettre d'accumuler la nationalisation du sol, il faut que la Société d'habitation du Québec expérimente dans le domaine des logements préfabriqués et la construction en béton. Elle devrait monter des dossiers à partir d'expériences faites ailleurs dans ce domaine et mettre cette documentation à la portée de ceux qui prévoient construire. Des reportages et des études déjà parus sur la préfabrication indiquent une possibilité d'épargne dans la construction allant jusqu'à 25 p.c. du coût total.

Il est évident que des unités en série coûteront beaucoup moins cher que la construction de maisons unifamiliales détachées (il est à regretter que plus de 80 p.c. des prêts consentis par la Société Centrale d'Hypothèques et de Logement pour la région montréalaise étaient pour des maisons unifamiliales détachées, ce qui représente un

très mauvais emploi des fonds disponibles pour le logement). Bien que nous souhaitions la construction d'unités en série pour réduire les coûts de construction, il faut souligner qu'une grande variété dans les types de logements demeure possible. En plus des maisons de rapport, il est souhaitable qu'on construise aussi des maisons unifamiliales ou duplex. Dans certaines parties du territoire urbain, il peut être possible aussi de construire des quadruplex.

La préfabrication ou la fabrication en série va nécessairement provoquer des changements radicaux dans la structure des occupations dans le domaine de la construction, mais ils sont presque inévitables. Il faut que les gouvernements aussi bien que les syndicats se penchent sérieusement sur les problèmes des hommes de métier pour éviter que les ouvriers, une fois encore, paient seuls le coût social le coût social et économique apporté par les changements techniques. Pour autant que les syndicats sont organisés par "corps de métiers", il sera difficile pour eux de résoudre ce problème. Beaucoup d'ouvriers pourraient être réembauchés dans le travail de la construction préfabriquée, mais ceci exige une réorganisation à l'intérieur des syndicats mêmes. Il faut aussi prévoir des programmes de recyclage avec salaire garanti et peut-être la retraite à un plus jeune âge pour ceux qui ont un métier devenu désuet. Tous ces changements dans les occupations devraient être contrôlés avec la pleine participation des syndicats intéressés.

Capitre trois

Taux d'intérêt

Des trois éléments qui entrent dans le coût total du logement — coût du terrain, coût de construction et taux d'intérêt — la taux d'intérêt est le plus coûteux. Il est impensable qu'on puisse régler le problème du logement sans s'attaquer au problème du prix de l'argent. Il faut, et au plus tôt, que les gouvernements cherchent à résoudre le problème des prêts à l'habitation. Aux taux d'intérêt s'approchant à 10 p.c. par année pour la location de l'argent, il est impossible pour les Québécois de se loger ou avec leurs propres moyens ou avec une aide gouvernementale. Il fut suggéré antérieurement par les partis politiques de l'opposition à Ottawa que le gouvernement central consente des prêts sans intérêt aux provinces et aux municipalités pour des fins sociales ou que le gouvernement subventionne les taux d'intérêt en les limitant à 3 ou 4 p.c. lorsqu'il s'agit de particuliers ou de corporations à but non lucratif.

A l'heure actuelle, le taux préférentiel consenti par la Société centrale est de 6 et 7/8 p.c, ce qui équivaut aux taux commerciaux d'il y a 2 ou trois ans; ce n'est sûrement pas une réponse adéquate à cet épineux problème.

Il nous paraît évident que les coopératives d'habitation devraient être le moyen privilégié pour la construction et l'administration des habitations, surtout dans les centres urbains. Pour ce faire, il faut que la Société d'habitation du Québec porte une attention particulière au problème de leur financement. A titre d'exemple, nous croyons que la Société d'habitation du Québec devrait étudier la possibilité de se porter garante au-delà du remboursement des prêts consentis par des coopératives d'épargne et de crédit ou d'autres institutions financières, en assumant le paiement de 66.6 p.c. des intérêts. Ceci équivaut à une subvention importante aux coopératives et à d'autres corporations à but non lucratif. Cette subvention que nous jugeons normale et nécessaire pourrait être accordée par le biais de la Société d'habitation du Québec - n'est-elle pas l'instrument principal que la province s'est donné pour répondre sérieusement à ce problème?

Cette aide financière aura un effet bénéfice direct sur chaque coopérateur si, premièrement, la coopérative bénéficie des taux d'intérêt préférentiels et si, deuxièmement, la Société d'habitation du Québec consent à absorber 66.6 p.c. du solde des intérêts. Le solde des intérêts à être acquitté par le coopérateur est ainsi réduit à 2 1/3 p.c. Voyons la différence que cela fait dans le coût mensuel par coopérateur: Présumant que les coopérateurs ont une part de $20,000 à payer sur une période de vingt ans, à 9 p.c, le coût mensuel sera de $180, et à 2 1/3 p.c. le coût mensuel sera réduit à $101 (ceci, bien sûr, étant une approximation).

Avec une subvention de l'Etat aux taux d'intérêts des coopératives et d'autres corporations à but non lucratif, nous ne croyons pas opportun d'étendre la période de remboursement des prêts au-delà de la durée des édifices construits. Des aménagistes urbains prétendent que dans les grandes agglomérations urbaines il est plus rationel de prévoir une durée de 25 ans pour la construction domiciliaire plutôt qu'une période plus longue à cause de changements continuels et de l'évolution des grands centres.

Chapitre quatre

Administration et entretien

Comme nous l'avons signalé plus haut, nous croyons en la formule coopérative pour répondre aux exigences économiques et aux aspirations humaines des Québécois. Il nous semble évident que le mouvement coopératif devrait se donner un instrument pour divulguer la formule coopérative dans ce domaine et que le gouvernement devrait la rendre économiquement possible. Ceci dit, le seul type d'administration possible est l'autogestion des complexes coopératifs de logements par les sociétaires-résidants. Comme dans toute coopérative, les sociétaires vont élire leur conseil d'administration qui se charge d'engager le personnel administratif et autres. Les frais

d'administration et d'entretien devraient être ajoutés aux paiements mensuels faits par les coopérateurs sur l'hypothèque collective.

Chapitre cinq

Service communautaire et équipements collectifs

Les autorités gouvernementales ont la responsabilité de fournir aux résidants certains équipements de base, tels que égoûts, aqueducs, chemins d'accès, etc. Nous croyons qu'en plus, dans des complexes de logements, les autorités publiques devraient aussi se charger de fournir des services communautaires et l'équipement qu'ils exigent, tels que lieux de vie communautaire — salles de réunions, de jeux, de bricolage — des garderies et centres de soins de jours, cliniques et même des écoles primaires si le nombre d'enfants l'exige. La façon la plus simple pour la coopérative serait de fournir et d'administrer elle-même ces services. La municipalité ou la province rembourserait les frais encourus selon le principe de l'achat de services. Nous verrions là un pas vers une saine décentralisation administrative. Cette autogestion communautaire favorisera grandement l'apprentissage de la démocratie et la prise de responsabilités de la part des citoyens.

Chapitre six

L'allocation-logement

A ce jour les coopératives d'habitations, par leur structure, sont offertes à une couche de la population à peu près semblable à celle qui peut emprunter individuellement de la Société centrale d'hypothèques et de logement, c'est-à-dire ceux ayant un revenu supérieur à $8,000. Avec la répartition que nous suggérons dans les taux d'intérêts payés par la coopérative, nous mettons la coopérative à la disposition d'une partie plus importante de la population.

Mais encore là, ce n'est pas la majorité de la population québécoise qui sera capable d'en assumer le coût. C'est pour ça que nous demandons à l'Etat du Québec d'instaurer un programme d'allocation — logement jusqu'à la venue du revenu garanti.

Même si on peut réduire les coûts mensuels à $100 avec la formule proposée dans le troisième chapitre, il reste une partie importante de la population qui se verra interdire l'accès aux associations coopératives si l'Etat du Québec ne met pas sur pied un programme d'allocation-logement.

Emile Gosselin dans la "Troisième Solitude" souligne qu'à Montréal, la région la plus prospère du Québec, 38 p.c. de la population gagne moins de $4,000 par année et seulement 26 p.c. gagne plus de $7,000 (Bureau fédéral de la statistique, 1961). On voit que seulement un quart de notre population est en mesure de se procurer un logement neuf sur le marché privé ou de payer sa part dans une coopérative d'habitation. Un programme étatique de la construction ne peut jamais répondre à ce besoin. Il vaut mieux se pencher sur l'allocation-logement pour permettre à nos citoyens de se loger.

L'allocation-logement devrait être calculée de façon à permettre à tous les Québécois d'accéder aux associations coopératives d'habitation et d'assumer leur juste part des coûts totaux d'opération. Elle est destinée à combler la différence entre le paiement exigé par l'association coopérative et le revenu disponible de l'éventuel coopérateur pour se loger, compte tenu des principes opérationnels ci-dessous cités: 1- L'allocation-logement devrait être disponible à toute personne qui en a besoin pour s'associer en coopérative et cela indépendamment de son revenu brut ou du fait qu'elle reçoive ou non d'autres allocations sociales ou rentes du gouvernement. 2- L'allocation-logement devrait être calculée en fonction du budget de la famille, en tenant compte des dépenses normales des charges familiales, des coûts spéciaux (médicaux ou autres), la hausse du coût de la vie, du chômage occasionnel ou prolongé, de la maladie ou de toute autre. Cette allocation doit être revisée régulièrement selon les changements de la situation de la famille; le récipiendaire devrait avoir le droit d'aller devant la Commission des allocations à n'importe quel moment pour rapporter tout changement dans sa situation qui peut affecter l'allocation qu'il exige. 3- L'allocation devrait s'appliquer aussi bien aux citoyens désireux de se chercher un logement convenable sur le marché privé qu'à ceux qui veulent s'associer en coopératives, mais il faut souligner cependant que l'Etat a tout intérêt à ce que les citoyens s'associent en coopératives, parce que l'allocation exigée ne sera pas gonflée par les profits qu'exigera l'entrepreneur privé. 4- Le plafond permis par la Société d'habitation du Québec en ce qui concerne le loyer qu'elle est prête à subventionner devrait être basé sur les moyens exigés par les associations coopératives dans une région donnée. 5- Avec la promulgation de la loi-cadre d'aide sociale et la réorganisation du ministère en fonction de cela, nous croyons possible que les allocations aux logements puissent être administrées par le ministère de la Famille et du Bien-Etre social, mais en attendant — et on attend

toujours — la réorganisation des allocations sociales, nous croyons piéférable qu'une commission d'allocation-logement soit organisée au sein de la Société d'habitation du Québec.

Chapitre 7

Rôle de la Société d'habitation du Québec

Le rôle de la Société d'habitation du Québec devrait être de rencontrer tous les besoins des Québécois dans le domaine de l'habitation, et c'est un rôle de première importance. Elle devrait se charger de la recherche des besoins et des méthodes les plus modernes et les moins coûteuses de construction et voir à la coordination et au financement des projets dans ce domaine.

Elle devrait aussi, avec les autorités municipales, contrôler l'aménagement du sol urbain pour répondre prioritairement aux besoins des citoyens dans le domaine du logement. Elle aurait la responsabilité d'inventorier les logements existants et leur condition dans tous les centres de la province et garderait continuellement cet inventaire à jour comme instrument de planification. Un de ses rôles principaux serait de financer des projets par l'intermédiaire des coopératives et des corporations à but non lucratif, incluant des subventions aux frais d'intérêt de ces dernières. Comme nous l'avons déjà noté, la Société d'habitation du Québec devrait s'orienter de plus en plus vers le logement collectif et non pas, comme la Société centrale d'hypothèques et de logement l'a fait dans le passé, donner priorité aux maisons privées et unifamiliales. La Société d'habitation du Québec devrait se constituer une équipe de conseillers techniques dans le domaine d'aménagement de la construction, du financement et de l'administration pour les mettre au service des municipalités, des coopératives et d'autres corporations à but non lucratif.

Les coopératives d'épargne et de crédit du Québec constituent un énorme réservoir de fonds. Par exemple, au cours de l'année 1968, ces institutions ont consenti au-delà de $105 millions de prêts hypothécaires. Le terme "institution" englobe également les compagnies d'assurance et la Société de fiducie du mouvement Desjardins. Pour la plupart, ces prêts ont été accordés pour des habitations à caractère privé et unifamilial. Ces mêmes institutions ont effectué des placements pour une somme de près de $69 millions. L'an dernier, les Canadiens ont déposé $1.6 milliard dans des caisses de retraite, ce qui constitue 25 p.c. de toutes les épargnes des Canadiens. En additionnant ces différentes données, nous en arrivons au montant de $1.7 milliard. Nous croyons qu'il est socialement nécessaire qu'une partie importante de ces fonds soit mise à la disposition des associations coopératives d'habitation. C'est pourquoi nous estimons qu'il faudra que les mouvements populaires — coopératives, syndicats ou autres — informent leurs membres des avantages économiques et humains de la solution coopérative dans le domaine du logement.

M. LE PRESIDENT: Merci, messieurs.

M. CHOQUETTE: Pourrais-je poser une question à M. Rodrigue?

M. LE PRESIDENT: M. Marois.

M. CHOQUETTE: M. Marois et M. Smith, je voudrais vous poser une question. Pouvez-vous faire part au comité des expériences concrètes que vous avez dans le domaine de la coopérative d'habitation? Quels sont les projets que vous avez réalisés ou êtes en voie de réaliser dans ce domaine-là?

M. MAROIS: L'ACEF n'est pas une coopérative d'habitation. Je pense qu'il est bon de rappeler rapidement ce que sont les ACEF au Québec. Ce sont des coopératives d'économie familiale qui poursuivent un triple objectif.

D'abord, informer les citoyens sur le plan des problèmes de notre système de consommation.

Deuxièmement, faire une éducation populaire de base en matière de budget familial, d'économie familiale.

Troisièmement, agir comme un agent de changement social et d'organisation des citoyens.

A partir de ces éléments-là, dus au fait que nous travaillons sur la base des problèmes qui sont posés aux citoyens, comme consommateurs, surtout dans les milieux défavorisés du Québec, nous sommes à même... Bien sûr, nous n'avons aucune expérience de réalisation de coopérative d'habitation, ce n'est pas notre rôle de le faire — nous sommes une coopérative d'éducation populaire — l'expérience que nous avons, c'est l'expérience d'accumuler quotidiennement à partir du réel, à partir du contact avec des familles de consommateurs, des indices d'un certain nombre de problèmes qui se posent, de l'état réel de facto quotidien, de l'état du revenu disponible des citoyens du Québec, de l'état et de la situation de l'endettement des citoyens québécois, de l'état et de la situation — si vous me permettez l'expression — véritablement d'exploitation à peu près légalisée des citoyens au Québec, comme consommateurs.

C'est notre champ de préoccupations premières. Et c'est à partir de ces éléments-là, des faits que nous constatons tous les jours, que nous avons été amenés à réfléchir sur le problème de l'habitation et à suggérer un certain nombre d'éléments de base d'une politique du logement social.

M. CHOQUETTE: Je tiens à vous dire que j'aime beaucoup la philosophie qui sous-tend votre mémoire. Mais est-ce que vous êtes en mesure d'apporter à la commission des expériences concrètes, non pas nécessairement vécues par votre propre groupe, mais dans d'autres milieux de coopérative d'habitation?

M. MAROTTE: M. le Président, si vous permettez. M. Choquette, je pense qu'il y aurait peut-être intérêt à ce que le gouvernement se renseigne sur les réalisations offertes par certaines coopératives d'habitation. Je pense entre autres à ce qui s'est fait à Montréal au domaine de Saint-Sulpice, où il s'est construit je ne pourrais dire combien d'habitations unifamiliales et de duplex et de triplex. On a pu se rendre compte à ce moment-là que le coût de la construction était beaucoup réduit. A moins que je fasse erreur, cette coopérative d'habitation a eu l'avantage d'avoir justement des terrains à bon compte parce que ces terrains-là appartenaient à la ville de Montréal et que la ville de Montréal a consenti à les vendre à un prix qui n'était pas spéculatif, si vous voulez.

Il y a eu à Trois-Rivières, par exemple, une coopérative d'habitation qui remonte à plusieurs années. On parle souvent du curé Chamberland, je pense qu'encore là on peut prouver le résultat et la valeur de la formule coopérative dans le domaine de l'habitation. Il y a peut-être eu des expériences malheureuses dans le domaine de l'habitation coopérative, aussi il faudrait les mentionner, mais quand même je pense que c'est peut-être dû au manque d'expérience de certaines coopératives d'habitation, des dirigeants. Mais dans l'ensemble je pense qu'il y a eu de grandes réalisations dans le domaine de l'habitation, au niveau des coopératives.

M. CHOQUETTE: Je pense qu'à un moment donné la commission devrait prendre la décision de se promener et voir ces réalisations-là sur place.

M. LUSSIER: A un moment donné. Si nous avons des budgets pour aller nous promener, nous pourrons aller nous promener.

M. LE PRESIDENT: M. Lévesque.

M. LEVESQUE (Laurier): Evidemment je pense bien que la façon dont vous présentez le mémoire souligne à quel point il s'agit simplement de jalons généraux. Je vais dire comme M. Choquette, ils sont sous-tendus par une philosophie attrayante.

Il y a, au sixième chapitre, l'allocation-logement, dont vous faites un des éléments centraux de la "réalisabilité" de l'ensemble de votre mémoire. Moi, ça m'intéresse beaucoup du côté des personnes âgées, parce que c'est une des choses qui m'a frappé en ce qui concerne les grandes villes. Vous généralisez cette formule-là dans vos suggestions générales. Est-ce que vous pourriez nous donner des exemples? Je n'ai pas de dossier là-dessus; je ne crois pas que le comité connaisse des expériences faites ailleurs. Il me semble que ça existe dans la politique de quelques pays occidentaux; en tout cas, est-ce que vous en avez, peut-être même dans l'expérience américaine?

M. MAROIS: Je connais moins bien l'expérience américaine. M. Smith pourrait peut-être vous en parler. Les deux expériences que je connais un peu mieux, enfin de façon générale, ce sont des expériences française et suédoise où on a établi des politiques d'allocation-logement. En France particulièrement, il existe deux types d'habitation à loyer modique, les fameux HLM; il existe les HLM publics qui sont les logements construits directement par l'Etat et puis il existe les HLM coopératifs. C'est frappant quant on voit ces expériences-là, à quel point les deux types de réalisation sont carrément différents.

D'abord, sur le plan de la qualité des édifices construits, des logements; aussi sur le plan humain. Cela me semble plus important, parce qu'on est quand même dans un domaine social. Sur le plan humain, le gros avantage des coopératives, c'est qu'il n'y a aucune forme de spéculation de quelque nature que ce soit. Spéculation étant entendue et comprise dans le sens que lui donnait la CSN tout à l'heure. On a nettement l'impression que les groupes humains y vivent d'une façon beaucoup plus humaine que dans les HLM publics.

Là, ça serait assez complexe de décrire...

M. LEVESQUE (Laurier): Là, vous parlez évidemment de projets de construction, les uns étant, à toutes fins pratiques, étatiques, les autres étant plutôt sur une base coopérative de gestion ou peut-être même de propriété; mais comment entre l'allocation-logement là-dedans?

M. MAROIS: L'allocation-logement, écoutez...

M. LEVESQUE (Laurier): Est-ce qu'elle est directement versée aux familles?

M. MAROIS: En France, elle est directement versée aux familles, et calculée à partir du revenu de la famille.

M. LEVESQUE (Laurier): C'est plus ou moins en fonction de ce que vous avez dans votre propre définition, je veux dire à partir des besoins, des revenus...

M. MAROIS: Au niveau général, au niveau

de la conception de l'allocation-logement, ça se rejoint passablement. Il y a l'expérience suédoise qui est aussi intéressante. Je pense qu'elle est économiquement beaucoup plus moderne que l'allocation-logement en France.

M. LE PRESIDENT: Merci, monsieur.

M. LEVESQUE (Laurier): Juste une chose. J'ai vu tout à l'heure grimacer un peu du côté des architectes à propos d'un passage de votre mémoire. C'est une question, je pense, sur laquelle tous les profanes peuvent avoir des questions à poser parce que c'est fascinant. C'est qu'on travaille encore de façon artisanale je crois; enfin j'ai entendu dire cela souvent. Je serais curieux de voir la réaction de M. Lalonde. A la page 4 de votre mémoire, vous dites: "Des reportages déjà parus sur la préfabrication indiquent une possibilité d'épargne dans la construction allant jusqu'à 25 p.c. du coût total."

Je sais que comme beaucoup de profanes — je ne suis pas allé plus loin que le profane — j'ai toujours eu cette impression, en lisant des choses là-dessus, que pour toutes sortes de raisons qui sont peut-être reliées aux corps de métiers, à l'habitude des entrepreneurs, peut-être aussi à certains conditionnements des architectes, qu'on travaille encore de façon artisanale du côté de la construction, que c'est peut-être un des derniers domaines où on ne se sert pas des méthodes industrielles modernes. Parce que sans aller jusqu'à dire, nécessairement, que c'est autant un produit de consommation que tout le reste, au point de vue technologique, il n'y a pas de raison, il me semble, que cela ne puisse pas le devenir. Quel est le point de résistance? En même temps, est-ce que les architectes seraient d'accord sur le fait que peut-être il y aurait moyen de réduire d'un cinquième ou d'un quart le coût de construction actuellement basé sur des méthodes que, je crois, l'on peut qualifier d'artisanales?

M. LALONDE: M. le Président, la question est très bien posée et je vous avoue que même les architectes se sentent assez profanes dans toute l'histoire. Par contre, les différentes études que nous avons eu l'occasion de voir, nous font peut-être douter des chiffres qui sont toujours mis de l'avant. Ces chiffres-là sont habituellement mis de l'avant avec des propositions. Il y a assez peu de réalisations de préfabrication qui donnent des résultats économiques équivalant à ce qu'on a proposé au départ.

Pourquoi? Il y a toujours cette différence entre l'étude et la réalisation; cette différence que, en fait, on évite habituellement, dans certains secteurs, en tout cas, dans les méthodes traditionnelles.

En construction scolaire, par exemple, au

Québec, dans le moment, on a la norme de $14.31 qui est fixée et tout le monde entre à l'intérieur avec des variations de 1 p.c. ou 2 p.c. On a trouvé une façon de maîtriser cela. Pourquoi ne peut-on y arriver en préfabrication? Je pense que la préfabrication, probablement, impose une reconception du produit. C'est cette gymnastique qu'on n'arrive pas à faire.

M. LEVESQUE (Laurier): Je vais peut-être vous dire quelque chose de ridicule. Mais une chose qui m'a frappé, moi, j'ai lu quelque chose lâ-dessus — c'est loin un peu — c'est que certains motels de luxe, ou en tout cas, motels pour gens qui ont les moyens de payer — je prends la chaîne des Holiday Inn, par exemple — sont faits en blocs de ciment et en très grande partie préfabriqués. Ils ont reconçu, parce qu'ils trouvaient cela plus rentable.

Les gens paient, au marché actuel de l'hôtellerie, des prix plus que convenables pour un logis temporaire qui est plus que convenable lui aussi.

Or, apparemment, d'après ce que j'ai lu, le coût unitaire de ce genre de logement est incroyablement plus bas que le coût de la fabrication courante. Est-ce que c'est vrai ou faux? Si c'est vrai, si des gens comme cela ont pu reconcevoir, pourquoi est-ce que les autres ne s'en donnent pas la peine?

M. LALONDE: II doit y avoir moyen de trouver des exemples comme celui que vous notez, que je ne connais pas en particulier, qui, peut-être, ont démontré qu'avec certaines mesures on arrivait à quelque chose. Par contre, d'une façon générale, je pense qu'il y a un secteur aux Etats-Unis, dans le moment, où on a réussi à faire de la préfabrication et à la faire d'une façon économique. C'est appelé le Mobile Home, la maison mobile. Mais la maison mobile, elle n'est pas faite selon les normes de notre habitation. Elle a gardé comme normes, si vous voules, la caravane, ou simplement la bicoque qu'on traîne à l'arrière de sa voiture; et on lui permet de s'installer quelque part. On n'a pas les mêmes exigences de salubrité mais surtout d'incendie pour ce genre de bâtiment-là. Alors, à ce moment-là, évidemment, partant de différentes normes, on peut arriver à faire des coûts réduits...

M. LEVESQUE: Vous ne prenez pas le cas de grandes chafnes de motels...

M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous en avez pour longtemps?

M. LEVESQUE: Non, non, non. Non, mais vous ne connaissez pas...

M. LALONDE: Je connais un motel qui a été construit à l'endroit où était l'Expo aux

Etats-Unis, l'année dernière, dans le Texas. Il était préfabriqué et cela s'est avéré intéressant, à cause de la limite de temps. Mais dans l'économie, cela ne l'était pas. On a "Habitat", nous, mais cela n'est peut-être pas le bon exemple.

M. LE PRESIDENT: Je m'excuse, messieurs; c'est parce que nous avons un autre mémoire. Est-ce qu'il y a des représentants du comité des citoyens de Milton Park ici? Si vous n'avez pas d'objection, on pourrait déposer au journal des Débats votre mémoire ou bien, vous aurez à revenir le 17 décembre pour le présenter?

M. GOLDBLOOM: Même si le ministre est obligé de s'absenter, je crois...

M. LE PRESIDENT: Si vous voulez résumer votre mémoire. Si vous voulez venir en avant.

M. LUSSIER: Si vous voulez m'excuser, j'ai un rendez-vous important.

M. LE PRESIDENT: M. le ministre, on doit vous dire que la prochaine réunion de la commission aura lieu le 17 décembre, à 10 h 30, à la salle 81-A. Bon, je dois dire que c'est le dernier mémoire que nous entendrons ce matin et que les autres mémoires devront être présentés le 17 décembre, ici à la salle 81-A.

MME PAQUET: M. le Président, MM. les membres...

UNE VOIX: Voulez-vous vous identifier, madame.

MME PAQUET: Mme Jeanne Paquet de Montréal. M. le Président et M. le ministre, les membres de la commission. Mlle Williamson ne peut pas être ici, alors je vais la remplacer. Je m'appelle Mme Paquet, je l'ai déjà dit. Est-ce que je peux lire? "Projet pour l'élaboration d'une politique d'habitation du Québec" — Par le Comité des Citoyens du parc Milton, 3553 Saint-Urbain, Montréal, Québec.

La pénurie sérieuse de logements à prix modique au Québec requiert l'attention immédiate du gouvernement. Le "Star" de Montréal dans sa livraison du 8 mars 1968 citait les taux d'habitation à prix modique dans cinq villes canadiennes:

TORONTO: 8.6 logements par 1,000 de population

WINDSOR: 8.0 logements par 1,000 de population

HAMILTON: 8.6 logements par 1,000 de population

OTTAWA: 3.6 logements par 1,000 de population

MONTREAL: 3.0 logements par 1,000 de population

L'acuité de ce problème exige l'utilisation de toutes les ressources. On ne peut prétendre le résoudre en bornant les dépenses d'habitation publique à la construction de nouveaux projets à coût élevé, comme l'a fait la Ville de Montréal dans le projet de la Petite Bourgogne, dont les 1,100 logements ont été construits au coût exhorbitant de $40,000 chacun, excluant les frais de démolition, à même les fonds publics.

Le Comité des citoyens du Parc Milton est d'avis que l'emploi le plus efficace des fonds publics dans le secteur limité par les rues Université, Sherbrooke, Saint-Laurent et l'Avenue des Pins est de centrer les efforts sur les logements existants, et ce, de deux façons:

I- L'achat et la rénovation des vieilles bâtisses par des corporations sans but lucratif formées de citoyens (voir document ci-attaché).

II-Subvention directe aux locataires à faible revenu afin d'éviter la création de ghettos.

La gestion coopérative offre de nombreux avantages. La naissance des comités de citoyens dans l'île de Montréal constitue un signe prometteur du désir croissant de la population d'accepter une telle responsabilité. Solliciter l'apport du public, permettre d'assurer que ces projets conviendront aux besoins des citoyens du secteur.

Nous appuyons la législation éclairée du gouvernement du Québec protégeant les droits des locataires. Nous demandons la remise en vigueur de la loi de la Régie des loyers, revisée de façon à inclure les habitations construites depuis 1951. La création de baux uniformes (baux, baux, hein! ) constituerait une autre addition importante à cette loi. De plus, nous recommandons de voir à encourager les propriétaires à rénover leurs propriétés. De même, des contrôles plus fermes doivent être établis de façon à garantir des services satisfaisants aux locataires. Exemple: Prélèvement des déchets, chauffage, eau chaude, éclairage suffisant et autres services essentiels, absents dans plusieurs secteurs de logements à prix modique.

Le Comité de citoyens du parc Milton a adressé un projet détaillé visant à la meilleure utilisation possible des blocs de logement existant dans notre secteur. Nous désirons soumettre ce projet à ce comité comme un exemple d'une solution mieux adaptée aux besoins des citoyens du Québec que les vieilles méthodes traditionnelles.

A moins que les corporations de citoyens

sans but lucratif ne s'intéressent activement à ce genre d'action avec l'appui d'une législation positive, les exploitants commerciaux, qui manquent complètement de conscience sociale, continueront d'occasionner à nos citoyens des difficultés économiques et sociales; fardeau du déménagement, déracienement de leur quartier, problèmes financiers, etc.

Afin d'éviter cette situation, les mesures suivantes doivent être prises:

Premièrement. Le droit des citoyens d'un quartier de participer à tout projet de développement dans ce quartier — qu'il s'agisse d'une entreprise relevant du secteur public ou du secteur privé — devrait être garanti par une loi.

Deuxièmement. Des avantages économiques et d'autres formes d'encouragement devront être prévus pour les exploitants afin qu'ils dirigent leurs projets vers les secteurs ouverts et non occupés dans la ville, c'est-à-dire les droits aériens au-dessus des bouches de métro, des terrains de stationnement, des autoroutes.

Troisièmement. Les exploitants devraient être tenus en loi d'assurer que les personnes délogées puissent retourner dans leur quartier, si elles le désirent, avec l'assistance du gouvernement si nécessaire; assurer un logement de remplacement convenable à un prix équitable particulièrement à ceux dont les revenus sont au-dessous du minimum requis.

Cinquièmement. Assurer des logements aux étudiants par la formation d'une corporation à but non lucratif en vertu de la Loi des compagnies du Québec, et selon les politiques de la Société d'habitation du Québec. Les membres qui m'accompagnent ne parlent pas français complètement, peuvent-ils s'adresser en anglais?

M. LE PRESIDENT: D'accord.

MRS. PAQUETTE: Identify yourselves each one of you.

MR. HIRSH: My name is Murray Hirsh and I am resident of the area.

MISS AWARD: My name is Suzan Award, and I am also a citizen in the Milton Park area.

MR. LAMONOSOF: Alec Lamonosof of Milton Park area.

MISS AWARD: We are willing to answer questions, if you have questions. We decided not to read over the economic feasibilities study that accompagnies the paper.

M. LE PRESIDENT: Dr Goldbloom.

MR. GOLDBLOOM: When you ask that a law be passed to provide that the citizens of an area be entitled to participate in the planning and the development of any future housing programs in that area, to what extent this can be undertaken by public or private authorities? To what extent do you envisage that participation and to what extent do you envisage a control, by the citizens, over the plans being drawn up and the eventual housing being constructed?

MISS AWARD: We do not have an exact plan laid out, you know, an exact knowledge of the law we would like to pass.

But the principal thing we would want behind it is that both citizens and developers, whether they be public or private on a committee for developing, that there should be more citizens than developers so that in effect we can really participate in the decisions that are made for the community in which we live.

MR. GOLDBLOOM: When you say you want to have a control, you want to be in majority on the committee and so on, I can understand perhaps a little more easily when you are relating to public authority that you would say: Public authority is coming in and it is doing something for our benefit; public authority is a non-profit organization; therefore we should have a very particular role in relation to public authority. But when it comes to the private developer who is putting in his own money and taking his risks, do you really feel that you should have an authority over him to say to him what he can and cannot do in your area?

MISS AWARD: Yes I think that this is very important because I think the example of Concordia coming into our area is why we feel so strongly about this. Concordia invited us to participate; but originally all we were asking for was participation in the plan. But we realize, if it is a private developer, if they go into an area, particularly if it is a low income area, they are not going to be interested in really listening and really letting the citizen have his say in the development of their area. All they are going to be interested in is making a profit and it will be expensive to the citizens. That is why we feel that even with a private corporation, because of the social cost, the citizens should have at least a control in majority in the committee.

MR. GOLDBLOOM: What about the government through the laws that you are suggesting be passed, do you not feel that the government has a role to play in establishing certain standards and so on which might override the local considerations that may come up in citizens' minds?

MR. HIRSH: We do recognize that the core of the city is valuable and must be considered on in relationship to the problems of the larger community. But we do feel that in

development, with these considerations that Canada overlook, people who are directly affected by that development and really whether it is this majority control, we feel, is the only way... In a way it is showing government's good faith in the citizens' intentions and certainly the area must be developed considering these larger factors.

We do feel that Center-City land is as much a public resource as, for instance, the Saint Lawrence River is, and that it cannot be treated as a private land when development does effect the surrounding areas to the extent that it does.

MR. GOLDBLOOM: In other words, you are supporting the views expressed by two other groups that came before us this morning about the nationalization of urban lands.

MR. HIRSH: Well, nationalization of land is just a means if they would be an other equally effective means of seeing that development is in the public interest on perhaps nationalization, perhaps that is not the only answer. But it does seem to be the most workable one as it has worked in Scandinavian countries.

MR. GLODBLOOM: Let me just come back for one moment to this question of the distinction between the public initiative and the private initiative in building housing. Where public initiative is concerned, there is no question that we have not in the past involved the citizens of areas which have been redeveloped in the planning and the redevelopment of their areas. I do not think there is any question but the principle of citizens participation is a valuable principle. I am not talking about the exact mechanism for that moment. When we come to the exact mechanism and talk in terms of private development, do you not consider that there would be a danger that the private developer would simply no longer be interested in developing residential areas where he would be subjected to the veto of a majority of citizens? And that he would simply interest himself in commercial properties where he would not have this particular problem? And then, if there were not — and there is certainly not at the present time — a sufficient public sector to take the initiative for developing residential areas, you would simply remain with undeveloped residential areas, some of which, like the Milton Park area, contain housing which, in the view of the citizens who live there, is housing of value which should be retained and preserved and improved. But other areas are not at all in the situation and would very much benefit from the renewal of the housing which is there.

MISS AWARD: Yes, this is something that we consider a lot; but we feel that the Government should take first the initiative in encouraging private developers to go into unused land. I think the City of Montreal is a good city for this to happen because we have talked to city planners into our protect...

I think the City of Montreal is a good seat for this to happen. Because, we have talked to city planners and to architects who have appointed out that there is still lots of unused land in Montreal for private development.

In the areas where there is not need for urban renewal, I think it is absolutely essential that housing be built first before it is renewed. So we do not continue this terrible process of having people forced out of their homes into an ever continuing shortage of low rental units.

MR. GOLDBLOOM: Well, I think that there is something very important in what you say there and this you emphasize in one of your other recommendations. There is available land which is undeveloped, mostly in the periphery of the metropolitan area. In the center where you are particularly concerned, the amount of open land which is undeveloped at the present time is extremely small, so that the problems are very different. It is perfectly true that you are taking people from the central areas of the city and in order to relocate them, the only new housing, which is generally available, is out in the periphery; so that you are pushing people out and they do not always come back to the center of the city where transportation and facilities and services are less of a problem for them. It is perfectly true, but these are different aspects of a very complex problem.

M. LE PRESIDENT: Monsieur, si vous en avez encore pour longtemps, nous allons être obligés de vous faire revenir le 17 décembre. S'il y a plusieurs questions encore à poser, il est une heure et demie et la Chambre... Pouvez- vous limiter ou répondre...

M. LAMONOSOF: Je peux répondre en une minute.

M. LE PRESIDENT: D'accord.

MR. LAMONOSOF: What we are concerned about is the social difficulties and other economic problems created by these private developers. Now, whether these development plans are initiated by the public sector or the private sector, really is of no great relevance to the citizens living there. They are the people that are continuously being uprooted and subjected to all other types of economic hardships.

MISS AWARD: The only thing I would like to add to this, is when we talked to city planners and architects, we were told that there is still much unused land or land that has very few residents, that they are not communities,

they are such of warehouses and that sort of thing?. It is still available to be used in the City of Montreal and the city of Montreal is different than other cities in that respect.

M. LE PRESIDENT: Thank you. Maintenant, juste une seconde, une minute.

M. Aubry, du Comité d'habitation et de rénovation urbaine de la région métropolitaine de Montréal, a demandé s'il pouvait faire inscrire au journal des Débats les 25 premières pages de son mémoire. Est-ce que la commission y consent?

M. CHOQUETTE: Oui.

M. AUBRY: C'est le résumé, en fait, de tout ce qu'il y a dans les annexes qui suivent.

M. LE PRESIDENT: M. Aubry, nous avons le consentement de la commission pour inscrire au journal des Débats les 25 premières pages de votre mémoire. (Voir annexe B).

M. AUBRY: Le 17 décembre, nous nous proposons de revenir pour répondre à des questions, parce que nous nous sommes rendu compte que, en fait, dans nos mémoires, nous répondons à plusieurs questions qui ont été posées ici ce matin.

M. LE PRESIDENT: Très bien. Maintenant, merci mesdames, merci messieurs. La commission siégera à nouveau le 17 décembre à 10 h 30 de la matinée à la salle 81-A, ici.

(Fin de la séance: 13 h 26)

ANNEXE A

SUBMISSION to the Quebec National Assembly's Standing Parliamentary Committee on Municipal Affairs concerning the public hearing on housing for Wednesday, November 26, 1969 at 10.30 a.m. in the Parliament Buildings, Quebec City, P.Q.

BY The Montreal Diet Dispensary 2182 Lincoln Avenue Montreal 108, P.Q. Mrs. Agnes C. Higgins Executive Director

PURPOSE To recommend that the rental scales for subsidized housing be related to the individual needs of families to ensure that sufficient income is available after housing costs are deducted to meet the minimum basic requirements to maintain health.

NEED FOR CHANGE IN THE METHOD FOR PREPARING RENTAL SCALES FOR SUBSIDIZED HOUSING TO PROTECT HEALTH

The Montreal Diet Dispensary, a Red Feather Agency, gives nutrition and budget counselling to low-income families. The purpose of our agency is to improve the health of the individual by improving nutrition. In our work we have found that each individual requires a minimum amount of goods and services in order to maintain health and that when income is insufficient to meet these minimum requirements, health cannot be maintained. Therefore, the Montreal Diet Dispensary urges that the method for preparing the rental scales for subsidized housing which are now determined by gross family income alone (Graduated rental scale for fully serviced accommodation in public housing projects as used by Jeanne Mance Housing Corporation — Appendix I) should include as well consideration of individual needs of the family relative to the size and age of members.

ANNEXE Référer à la version PDF page 3941

ANNEXE Référer à la version PDF page 3942

ANNEXE Référer à la version PDF page 3943

ANNEXE Référer à la version PDF page 3944

ANNEXE Référer à la version PDF page 3945

APPENDIX IV

MONTREAL DIET DISPENSARY

1969 MINIMUM MONTHLY BUDGET FOR RETIRED COUPLE

This minimum budget for a retired couple provides the kinds and amounts of goods and service needed to meet the bare necessities for the maintenance of health. No provision is made for the following: medical nursing, dental care or drugs, new furniture or furnishings, savings, insurance, or repayment of debts, telephone, gifts or holidays.

BUDGET ITEMS MONTHLY ALLOWANCES --------------------- RETIRED COUPLE 1. HOUSING ----------------------------------- Rent,The standard for housing is a three-room cold $ 65.00 water, unheated, unfurnished flat not providing refrigerator or stove. Water tax .This allowance covers present water and 5.74 metro tax in Verdun for above rental.

Electricity & Gas£The standard for this allowance is 7.36 taken from the Minimum Adequate Utility

Requirements prepared by the Montreal Diet

Dispensary and priced June 1969. The standard provides sufficient 1) electrical power for lighting, operating small appliances and refrigerator and 2) gas for cooking and operating a side-arm water heater for casual water heating for bathing and laundry. Fuel «The standard for this allowance is taken from 7.33 the Minimum Adequate Fuel Requirements prepared by the Montreal Diet Dispensary, providing fuel oil for apece heating for a 3-room flat, priced June 1969. 2. FOOD The standard for food covers the cost for the 65.42 most economical kinds and amounts of foods which meet nutritional requirements recommended by the Canadian Council on Nutrition in the "Canadian Dietary Standard 1948". The allowances are taken from the "Individual Minimum Adequate Food Costs" prepared by the Montreal Diet Dispensary, May 1969. It is assumed for this budget that all meals are prepared at home. 3. CLOTHING The standard for clothing includes the kinds 12.73 and amounts of clothing which are required to meet minimum needs for health and self-respect prepared by the Montreal Diet Dispensary in 1961. The allowance is based on the Individual Minimum Adequate Clothing Costs of the Montreal Diet Dispensary brought up to date April, 1969. 4. PERSONNAL INCIDENTALS The standard for personal 5.88 incidentals represents the minimun kinds and amounts of goods and services necessary for the care of the teeth and hair, personal cleanliness, as well as a minimum for dry-cleaning and shoe repair.

This standard was adopted by the Committee on Family Budgeting of Montreal Council of Social Agencies using the New York State standard as a guide in 1961, and repriced by the Montreal Diet Dispensary, June 1969.

BUDGET ITEMS MONTHLY ALLOWANCES -------------------- RETIRED COUPLE 5. READING MATERIAL This item provides for one daily 2.82 newspaper at current prices. 6. RELIGION This allowance is taken from "The Guide to 2.16 Family Spending in Toronto 1949" and provides 25 cents per person per week. 7. RECREATION This allowance covers admissions and 4.12 membership dues, and is taken from the same source as above and brought up to date, June 1969, by the Montreal Diet Dispensary. 8. TRANSPORTATION The allowance of $2.50 was 6.00 suggested by the Family Service Association in 1956 and has been raised to meet present fares. 9. ENTERTAINING This is an allowance toward food 1.35 costs for entertaining family and friends taken from "The Guide to Family Spending in Toronto 1949" and has been brought up to date, May 1969., by the Montreal Diet Dispensary. 10.PERSONAL ALLOWANCE This allowance is taken 6.82 from the same source as above and brought up to date by the Montreal Diet Dispensary, May 1969. It allows for spending money on such things as candy, tobacco, soft drinks, postage and stationery. 11.HOUSEHOLD SUPPLIES This standard provides for 2.36 minimum laundry and housecleaning supplies, home medicinal needs, maintenance of clothing at home, and other household necessities. It was adopted by the Committee on Family Budgeting of the Montreal Council of Social Agencies, using the New York state standard as a guide and repriced by the Montreal Diet Dispensary, June 1961. 12.REPLACEMENTS This allowance covers the 4.06 replacement of only minor and absolutely necessary items such as dishes, utensils, or linen. The figure was supplied by the Family Service Association in 1953 and brought up to date by the Montreal Diet Dispensary,

May 1969. _______

TOTAL: $199.14

Montreal Diet Dispensary 2182 Lincoln Avenue Montreal

June 1969

APPENDIX IVa

1969 MINIMUM MONTHLY BUDGET FOR RETIRED COUPLE USING

MINIMUM RENT OF $32 FROM JEANNE MANCE RENTAL SCALE &

ESTIMATES FOR ELECTRICITY COSTS SUPPLIED BY JEANNE MANCE

Items of Expenditure

Rent $32.00

Electricity 4.00

Food 65.42

Clothing 12.73

Personal Care 5.88

Household Supplies 2.36

Replacements 4.05

Carfare— 6.00

Newspaper 2.82

Religion 2.16

Recreation 4.12

Entertaining 1.35

Personal Allowances 6.82 $149.71

Income

Old Age Pension plus full supplement allowance for two $218.40Items not included in above :

Medical, nursing, dental care or drugs, new furniture or furnishings, savings, insurance or payment of debts, telephone, gifts or holidays.

The Montreal Diet Dispensary 2182 Lincoln Avenue Montreal 108, P.Q.

June, 1969

ANNEXE B MEMOIRE

Ce mémoire a été préparé par le Comité sur l'Habitation et la Rénovation Urbaine de la Région métropolitaine de Montréal en vue de la présentation à la Commission permanente des Affaires municipales de l'Assemblée nationale du Québec, tenue le 26 novembre 1969.

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION

Historique et objectifs.............................. 3951

PRINCIPES ET RECOMMANDATIONS 1. La rénovation urbaine a) Les droits communautaires.................... 3951 b) Ressources professionnelles................... 3952 c) Le dynamisme de la rénovation urbaine........ 3953 d) Secteur privé — Milton-Parc................... 3954 e) Secteur public — Westmount.................. 3955 2. Logement adéquat pour tous les niveaux de revenus et droits des locataires a) Logement adéquat ........................... 3956 b) Abris........................................ 3957 c) Bill 12....................................... 3957 d)Publication des règlements.................... 3957 e) Bail modèle.................................. 3958

INTRODUCTION

Le Conseil des Oeuvres, maintenant connu sous le nom du Conseil de Développement Social de Montréal, et le Montreal Council of Social Agencies, ont chacun de leur côté, exprimé le désir d'appuyer les efforts du Comité sur l'Habitation et la rénovation urbaine.

Ce Comité existe depuis à peu près une année, bien qu'il fonctionnait depuis plusieurs années sous d'autres formes.

Le Comité groupe à peu près 50 membres représentant un éventail varié d'intérêts. Quelques-uns sont des professionnels en matière légale, planification, architecture et travail social; d'autres représentent les organismes de bien-être et de service social; tandis que d'autres représentent le milieu ouvrier, les locataires, les groupements religieux et les services d'habitation, des gouvernements municipal, provincial et fédéral.

Le Comité sur l'Habitation et la rénovation urbaine est un organisme bilingue qui a à sa tâche deux co-présidents dont l'un est d'expression française et l'autre d'expression anglaise. Ce Comité est le plus grand groupement privé, constitué de divers organismes intéressés aux problèmes du logement et de la rénovation urbaine au Québec.

Plusieurs sous-comités ont été formés pour s'occuper d'aspects spécifiques du logement et de la rénovation urbaine. Ce mémoire est le résultat des efforts de ces sous-comités, dont les rapports ont été approuvés par le Comité dans son ensemble.

Pour fin de présentation, les rapports et recommandations des sous-comités sont regroupés dans les grandes catégories suivantes — rénovation urbaine, logement adéquat et droits des locataires. La première partie du mémoire comprend un résumé des exposés et des recommandations, tandis que la deuxième partie donne les textes intégraux de divers documents résumés dans la première partie.

DECLARATION DE PRINCIPE SUR LES DROITS COMMUNAUTAIRES

Notre Déclaration de Principe sur les droits communautaires comprend cinq recommandations portant sur les efforts privés et publics de rénovation urbaine. Cette déclaration fut rédigée par le Comité qui la ratifia en octobre 69. La déclaration a par la suite été approuvée par le Conseil de Développement Social du Montréal Métropolitain, le 19 novembre 1969, et par le Montreal Council of Social Agencies le 17 novembre 1969.

Ces recommandations sont basées sur le fait selon lequel les gens qui habitent un secteur déterminé ont droit à une participation active au projet de rénovation urbaine de ce secteur, étant donné que leurs vies seront affectées intégralement par ce projet de rénovation. Avec la zonage, un précédent a été créé par la loi, selon lequel la communauté doit être protégée contre des initiatives d'individus seuls ou regroupés susceptibles d'apporter des changements qui pourraient s'avérer socialement indésirables pour cette communauté. La rénovation urbaine devrait être permise dans les districts résidentiels existants seulement à la condition qu'elle rencontre les besoins réels des résidents du district.

RECOMMANDATION 1.

Que le but principal de la rénovation urbaine soit d'améliorer la condition de vie des résidents d'une communauté existante et viable, sans pour autant les pénaliser dans leur vie sociale ou économique. Les droits des résidents d'imposer collectivement des modifications ou de rejeter tout plan qui mettrait en jeu la continuité de la vie communautaire de leur quartier, ou qui compromettrait leur droit d'y demeurer devraient être protégés par la loi.

RECOMMANDATION 2.

Que le droit d'un locataire de rester dans sa demeure lui soit assuré au même titre que celui d'un résident qui est propriétaire de son logement, étant donné que ce droit est déjà reconnu implicitement dans la loi de la Régie des Loyers.

RECOMMANDATION 3.

Qu'on garantisse mieux les droits des citoyens, surtout dans la région métropolitaine de Montréal où la majorité des résidents sont locataires, les initiatives gouvernementales devraient encourager et faciliter la propriété collective dans la forme de corporations communautaires, de coopératives domiciliaires ou par d'autres moyens.

RECOMMANDATION 4.

Que tout programme qui contribuerait à augmenter le nombre, l'éventail de choix et la qualité d'unités de logements à coût modique soit encouragé, pourvu qu'un tel programme tienne compte, en même temps des besoins communautaires.

RECOMMANDATION 5.

Qu'étant donné la crise de logements à prix modique qui sévit actuellement, le gouvernement s'oppose de toutes ses forces à tout projet qui aura pour effet de réduire encore le stock actuel de logements à coût modique habités ou habitables (y compris ceux qui seront récupérables à un coût raisonnable) nonobstant toutes justifications économiques. Les autorités municipales devraient adopter comme politique la libération des secteurs où vivent des gens à faible revenu de toute spéculation foncière. Cette politique pourrait s'appliquer par l'élaboration de règlements de zonage appropriés et par la réorientation des initiatives privées vers des secteurs non-résidentiels, vacants ou sous-utilisés.

RESSOURCES PROFESSIONNELLES

L'avenir des communautés à faible revenu, en face des plans d'aménagement par l'entreprise publique ou privée, peut dépendre en grande partie du fait selon lequel les résidents ont la possibilité d'exprimer leurs opinions et de proposer des alternatives viables. Placée en face de groupes d'intérêt très puissants ou d'une bureaucratie très technique, la communauté peut se montrer inconsistente, perdue et frustrée.

Le Comité croit que les ressources professionnelles (planification, architecture, aspect social, aspect légal) devraient être rendues disponibles aux communautés de sorte qu'elles puissent participer à l'amélioration des services existants et à la création de nouveaux.

RECOMMANDATION 1.

Qu'un programme de services professionnels communautaires soit incorporé dans la législation actuelle.

RECOMMANDATION 2.

Que des consultants professionnels soient engagés et rémunérés de la façon suivante: a) le gouvernement au niveau provincial ou municipal ou b) les corps intermédiaires ou c) les fondations privées ou d) les groupes de citoyens.

RECOMMANDATION 3.

Que le support financier pour ces services soit accessible dans des termes similaires à ceux des hypothèques préférentielles.

RECOMMANDATION 4.

Que dans les programmes de rénovation urbaine le rôle des représentants de la communauté soit reconnu comme une partie essentielle de la Loi d'Habitation du Québec (i.e. information publique, relogement, auditions publiques) avec les facilités budgétaires appropriées.

RECOMMANDATION 5.

Que les relations entre les représentants de la communauté, de la corporation ou de la co-opérative et les ressources professionnelles soient celles de consultant à patron. Le professionnel agira comme conseiller plutôt que comme bienfaiteur et agira seulement à la demande de la communauté.

LE DYNAMISME DE LA RENOVATION URBAINE

Le rapport complet sur le Dynamisme de la rénovation urbaine est présenté en annexe. Etant donné que plusieurs aspects de ce rapport ont déjà été commentés dans les deux sections précédentes, nous insisterons seulement, ici, sur l'animation sociale dans sa relation avec le dynamisme de la rénovation urbaine.

Un type de travail bien spécifique s'est développé dans ces dernières années, concernant précisément les personnes impliquées dans le domaine de la rénovation communautaire. Ces personnes impliquées sont reconnues comme des "animateurs sociaux" et leur rôle est suffisamment important pour qu'il soit défini clairement. Leur rôle n'est pas de vendre des plans à la collectivité (ceci relève de l'élément technique). Il s'agit plutôt pour eux de travailler au sein de la collectivité et pour cette dernière. Leur but consiste en la formation d'animateur bénévole, en la création d'une structure qui sera viable pour la promotion d'un processus sociologique interne de rénovation, lequel est nécessaire aux citoyens d'un territoire désigné, afin qu'ils puissent s'intégrer par la suite aux autres éléments impliqués dans la rénovation. a) Un animateur social peut être à la solde d'un gouvernement à quelque niveau que ce soit. Il peut accéder aux renseignements et aux dossiers gouvernementaux. Son statut est alors légalement assuré. Sans tenir compte de la provenance de ses honoraires, il est avant tout imprégné de justice sociale et ses attributions correspondront à ceux de "1'ombudsman" protecteur du peuple. Il peut cependant être ouvert à des pressions de la part de son employeur. Il pourra se retrouver un jour faisant partie d'un engrenage technocratique et bureaucratique, lequel l'empêchera de prendre des décisions adéquates au moment où les citoyens seront prêts à l'action. b) Un animateur social d'autre part peut être employé par une agence privée, tel une institution de bien-être, une institution religieuse ou un centre récréatif communautaire. Bien qu'il soit libéré des contraintes gouvernementales, il devra tout de même subir les pressions de ses supérieurs, des conseils d'administration ou des traditions de service social mises de l'avant instinctivement par ces derniers. On peut lui conseiller par exemple d'éviter la politique ou la pression des groupes du quartier. A l'occasion ses projets peuvent être conctrecarrés par des éléments conservateurs qui ne favorisent pas les prises de position du public. c) Un animateur social peut être aussi employé par des citoyens eux-mêmes, si ces derniers sont suffisamment organisés pour une telle action. Certainement cet animateur recevra un salaire minimal. Il peut lui arriver d'être mêlé dans de petites querelles de quartier qui limiteront son action. Toutefois, il peut aussi avoir la liberté d'influencer les résultats selon le bon vouloir des citoyens. , d) En dernier, encore une alternative l'animateur social peut travailler à son propre compte, tel un "free lance", à cause de son intérêt pour la justice sociale. Ses motifs peuvent être ou ne pas être d'ordre altruiste ou éthique, mais cependant converger vers des buts politiques apparents. Il sera sûrement libre d'agir à sa guise. Ce type d'animateur subira le désavantage de ne s'identifier à aucun milieu en particulier et il aura difficilement accès à l'information disponible pour établir les communications requises.

RECOMMANDATION 1.

Que les divers types d'animation sociale soient reconnus comme légitimes et essentiels à la rénovation communautaire.

RECOMMANDATION 2.

Que le gouvernement provincial prévoit des fonds pour l'engagement d'animateurs sociaux comme partie intégrale de tout programme de rénovation urbaine.

SECTEUR PRIVE MILTON-PARC

Cité Concordia est un exemple de rénovation urbaine par le secteur privé dans une aire de Montréal formée de six pâtés de maisons bornée par l'avenue des Pins, Milton, Ste-Famille et Hutchison. Le projet remonte à 1961 lorsque ce terrain a été acquis ayant comme objectif un développement planifié dans quelques-uns de ces ilôts. Cependant, c'est la vulnérabilité économique qui a déterminé le redéveloppement de cette aire plutôt que les désirs ou les besoins de la communauté existante, ce qui a suscité une opposition des citoyens représentés par le Comité Milton-Parc.

L'investissement initial encourru sur une large échelle d'acquisition de terrain, implique que le développement qui s'ensuit augmentera grandement la densité. Cela implique aussi que les unités à prix modique offertes par des propriétés dont le coût est amorti seront remplacées par des unités à loyer élevé.

Le déplacement forcé des familles à revenu modique du centre-ville les prive des avantages de la vie dans le centre de la ville, ce sur quoi ils sont totalement dépendants — un environnement bien établi, les transports publics et l'accès au travail. Les répercussions de ce développement sur une large échelle sont de loin impliquées dans les conséquences sociales qui en découlent et la manipulation de la communauté urbaine ne peut être laissée à la seule discrétion des individus ou des groupes intéressés.

L'administration municipale ne peut ignorer ses responsabilités dans cette forme de rénovation urbaine. Par des règlements de zonage, elle peut contrôler ou encourager des pressions ou actions spéculatives. Les indices de superficie de plancher admis haussent les valeurs des propriétés, ne stimulent pas à l'entretien et amènent la détérioration. (L'I.S.P. dans Cité Corcordia est 12).

Durant les six dernières années, Montréal a été témoin de la destruction d'environ dix mille unités d'habitations à loyer modique — Radio Canada, l'Autostade, l'élargissement de la rue Dorchester, la route Trans-Canadienne et de beaucoup d'autres améliorations de routes. Des plans de développement privés de l'importance de celui de Concordia à l'intérieur de la Ville accentuera cette situation choquante.

Etant d'abord responsable et redevable à une communauté donnée plutôt qu'à ceux qui cherchent à déplacer ces résidents, l'administration municipale a l'obligation de conférer avec ses citoyens, locataire ou propriétaire. La presque totalité de la possession de Cité Concordia par une partie unique n'est pas une restriction à cette obligation.

RECOMMANDATION 1.

Qu'un amendement de la loi réglementant l'indice de superficie de plancher permis soit fait dans le but d'empêcher les achats spéculatifs des propriétés résidentielles.

RECOMMANDATION 2.

Qu'une législation garantisse les droits des résidents en tenant compte d'un plan de rénovation qui menace l'existence de leur communauté.

RECOMMANDATION 3.

Que la municipalité continue et amplifie ses efforts actuels dans la construction de nouvelles habitations sur les terrains déjà vacants de la Ville (cf. Opération 300-Myriade).

RECOMMANDATION 4.

Que le gouvernement adopte des politiques pour assurer que les groupes de citoyens jouent un rôle majeur dans l'instauration et le contrôle des programmes de rénovation.

RECOMMANDATION 5.

Qu'on encourage les améliorations communautaires par des prêts à bas taux d'intérêt soit à des individus, soit à des coopératives, et en fournissant des services professionnels (architecturaux, sociaux, légaux). Le Comité appuie la proposition du Comité Milton-Parc qui demande à la Société d'Habitation du Québec son assistance dans le but d'acheter, d'améliorer et de louer des propriétés existantes à l'intérieur et dans les territoires adjacents à Cité Concordia.

RECOMMANDATION 6.

Qu'un programme soit élaboré par les autorités provinciales et municipales pour acquérir, et lorsque nécessaire, améliorer des unités existantes à travers toute la ville de façon à préserver et augmenter la quantité d'habitations abordables aux familles à revenu faible et moyen.

RECOMMANDATION 7,

Qu'on encourage les initiatives privées dans l'aménagement des aires urbaines non-résidentielles, vacantes ou sous- développées.

SECTEUR PUBLIC WESTMOUNT

Le programme de rénovation urbaine de la Cité de Westmount couvre une superficie de 90 acres limitée à l'est par Atwater, à l'ouest par Bethume, au nord par Ste-Catherine et au sud par la rue St-Antoine. Après trois ans de préparation, le projet final de rénovation urbaine de Westmount fut soumis à la Société d'Habitation du Québec en avril 1969.

Le souci de reloger les citoyens déplacés par le passage de la route trans-canadienne dans la partie sud de la municipalité fut à l'origine de cette étude de rénovation urbaine. Pourtant le rapport ne contient aucun plan définitif de relogement. En fait, le rapport envisage la destruction de 120 autres unités de logement actuellement occupées par des familles au revenu relativement peu élevé de Westmount. Les résidents de cette zone soupçonnèrent alors que l'objectif de la Cité de Westmount est d'élargir la base de taxation en changeant l'utilisation du terrain plutôt que de répondre aux besoins des citoyens défavorisés.

Le rapport exprime l'intention de la Cité et de la Société d'Habitation du Québec de subventionner pour leur logement, les familles qui le désirent et y ont droit, au cours d'une période initiale, mais ceci ne répond en rien aux besoins de relogement de la communauté déplacée. Plusieurs familles à bas revenu ne seraient pas éligibles pour ces subventions. Elles ont pourtant habité dans cette zone pour des périodes allant jusqu'à 30 ans.

Par suite de leur expulsion, ces familles auront de la difficulté à se reloger dans une municipalité de plus en plus riche; elles seront réduites à se loger dans des zones qui devront être rénovées; elles souffriront de rupture dans leur vie, de perte d'amis et de milieu.

Après avoir étudié la question au point de vue physique, social et économique, le Comité a présenté ses conclusions à l'audition publique tenue le 18 juin par la Société d'Habitation du Québec. Le Comité rejette la remarque du Rapport Sunderland que cette zone serait impropre à l'habitation humaine et divorcée du reste de la communauté de Westmount. De plus, le Comité a présenté une série de propositions visant à améliorer les conditions du milieu par la réhabilitation des incitations existantes à la propriété et l'entretien.

Après avoir présenté son mémoire, le Comité n'a reçu aucune communication de la Société d'Habitation du Québec et l'approbation du programme par la législature fut la seule indication que ses soucis légitimes avaient été écartés. Alors que les objectifs de la Société d'Habitation du Québec sont le bien-être et le logement convenable des citoyens défavorisés de la société, le programme de rénovation urbaine de la Cité de Westmount représente une demande de fonds publics pour le redéveloppement commercial du sol occupé par des familles à bas revenu.

RECOMMANDATION 1

Que les logements existants sur la rue St-Antoine soient conservés. RECOMMANDATION 2

Que les sommes prévues pour l'expropriation dans la subvention provinciale à la Cité de Westmount soient employées au financement de l'amélioration des unités de logements existantes et du territoire où elles sont situées.

RECOMMANDATION 3

Que les fonds de logement supposément disponibles pour le "logement social" à Westmount, soient utilisés pour réintégrer les anciens résidents de la rue Selby déplacés par la route transcanadienne et pour accroître la quantité de logements pour familles à bas ou moyen revenu à Westmount.

RECOMMANDATION 4

Que l'anxiété indue imposée, par la préparation à long terme et l'exécution des programmes de rénovation, aux communautés touchées par ces programmes soit considérée comme une pression pour l'amendement par l'Assemblée nationale de la loi actuelle de rénovation urbaine.

RECOMMANDATION 5

Que la municipalité et la Société d'Habitation du Québec, reconnaissent les droits prépondérants des résidents locaux par rapport à l'instauration et toutes les autres étapes du processus de rénovation urbaine.

RECOMMANDATION 6

Que pour tous les programmes courants de rénovation urbaine, après les auditions publiques statutaires, la Société d'Habitation du Québec communique à tous les résidents et objecteurs, ses décisions, par rapport aux mémoires reçus, avant d'accepter tout amendement aux règlements de rénovation urbaine soumis par une municipalité.

LOGEMENT ADEQUAT

Le logement subventionné s'adresse, à toute famille ou personne qui, à cause de sa situation économico-sociale ne peut satisfaire ses besoins de logement.

Le logement subventionné devra être conçu sous la forme d'allocation-logement intégré à une politique globale de bien-être social, et disponible à toute personne qui pouvait faire la preuve d'un besoin quel que soit son revenu.

RECOMMANDATION 1.

Que l'Assemblée nationale du Québec établisse une législation et fournisse les fonds nécessaires pour créer une réserve d'habitations à prix modique, soit par la construction ou la rénovation, réserve devant atteindre 40 p.c. du total du stock d'habitations futures dans l'aire métropolitaine.

RECOMMANDATION 2.

Que l'Assemblée Nationale du Québec établisse une législation et fournisse les fonds nécessaires pour permettre à des groupes à faible revenu d'acheter et/ou de louer des unités d'habitations. Plus bas serait le revenu, plus élevée serait la subvention. Les sources de financement devraient être: a) Les fonds de pensions des unions, en investissant 30p.c. de leur actif dans des prêts hypothécaires à la condition expresse que cet actif puisse retourner en fonds de pension sans perte, et b) l'assistance gouvernementale soit par le rabattement de 3p.c., soit en déduisant l'intérêt sur l'hypothèque, d'un revenu imposable pour les groupes à faible revenu.

ABRI POUR HOMMES SEULS

Le Comité, après étude, recommande qu'un abri soit mis sur pied sans délai à Montréal pour recevoir les sans-foyer indigents de cette région et qu'un tel abri soit pourvu de services adéquats d'assistance et d'orientation ou de réhabilitation.

RECOMMANDATION.

Que la Société d'Habitation du Québec ainsi que le Ministère de la Famille et du Bien-Etre Social accordent une allocation suffisante pour rencontrer ces besoins.

BILL 12

Durant les deux dernières années, nos efforts furent de convaincre l'administration municipale de Montréal de légiférer adéquatement afin que la protection des locataires stipulée par le Bill 12 soit également en vigueur à Montréal.

Un programme d'information fut entrepris avec les agences sociales, les clubs d'âge d'or, syndicats et autres groupes dans le but d'amener ces organismes à supporter ce bill et à le faire savoir au conseil municipal. Une déclaration conjointe fut préparée par le Montreal Council of Social Agencies, le Conseil des Oeuvres de Montréal, le Conseil du Travail de Montréal, le Conseil Central de Montréal de la C.S.N. et l'Alliance des Professeurs de Montréal. Cette déclaration fut envoyée au Maire, au Président du Comité Exécutif et aux conseillers de la Ville de Montréal. Plusieurs autres agences sociales et organismes leur ont fait parvenir leur propre appui au Bill. Notre démarche ne porta pas fruits mais une étude de la situation nous fut promise après six mois.

Dans les six mois suivants, la Fédération des Travailleurs du Québec et l'Association des Locataires de Montréal procédèrent à une étude scientifique démontrant qu'une population de 50,000 locataires était touchée par des augmentations pour une moyenne de $23.00 par mois. Une conférence de presse fut organisée à la fin d'avril 1968 avec la participation plus nombreuse d'organismes qu'auparavant, c'est-à-dire l'A.C.E.F., la Ligue des Femmes du Québec et plusieurs comités de citoyens. Malgré nos représentations demandant la protection du Bill 12 et les appuis nombreux venant de tous les milieux concernés, notre demande fut rejetée par une forte majorité du Conseil municipal.

RECOMMANDATION.

Que l'Assemblée Nationale croyant en la nécessité du Bill 12 assure à tous les locataires du Québec sa protection nonobstant les obligations des autorités municipales à cet égard.

PUBLICATION DES REGLEMENTS DE LA SOCIETE D'HABITATION DU QUEBEC

Les règlements actuels de la Société d'Habitation du Québec ne couvrent pas partiellement l'ensemble des décisions que la Société doit prendre actuellement. Les critères des certaines décisions impliquant l'approbation ou le rejet de divers projets couverts par la Loi de la Société d'Habitation du Québec semblent souvent être laissés à la discrétion des individus à la Société. Cet état de fait résulte en la possibilité d'inconsistance dans l'application de la Loi.

RECOMMANDATION 1.

Que les règlements de la Société d'Habitation du Québec soient amendés pour inclure en détail les critères d'acceptation ou de rejet de tous les projets couverts par la Loi de la Société d'Habitation du Québec; que ces règlements soient rendus disponibles à tous les intéressés par leur publication dans les journaux locaux aussi bien que dans la Gazette Officielle et que des copies en soient disponibles au public sur demande.

RECOMMANDATION 2.

Que dans toutes les décisions d'acceptation ou de rejet, la Société indique par écrit à toutes les parties soumettant un projet et à toutes les parties impliquées le désirant les raisons de ces décisions en conformité avec la Loi et les règlements de la Société d'Habitation du Québec. Dans le cas de rejet, la Société devrait informer, avec le rejet, les parties des mesures à prendre pour rendre les projets conformes aux exigences de la Loi. (Ceci devrait aussi être fait par des règlements sur la forme et l'organisation des projets, le format des documents et l'échelle des plans).

RECOMMANDATION 3.

Que la Loi de la Société d'Habitation du Québec prévoie une procédure d'appel qui permettrait la révision par une autorité supérieure des cas de rejet, de projets ou d'insatisfaction des décisions des représentants locaux de la Société d'Habitation du Québec.

BAIL MODELE

Depuis quelques années, la plupart des baux en circulation sont devenus progressivement axés sur les droits des propriétaires et les obligations des locataires. La situation actuelle est telle que si le locataire ne signait aucun bail, sauf un contrat stipulant l'endroit, le montant et la durée de la location, il serait beaucoup mieux protégé par les lois provinciales (Code Civil).

Ce bail modèle, qui est loin d'être utopique, est un effort pour restaurer un équilibre dans les rapports entre le propriétaire et le locataire. Cette esquisse de bail sera ensuite présentée aux groupes intéressés tels que les comités de citoyens et les associations de locataires pour leurs commentaires et suggestions avant la rédaction finale.

RECOMMANDATION 1.

Que la version finale de ce bail soit déclarée par l'Assemblée nationale, le seul bail modèle légal au Québec.

RECOMMANDATION 2.

Que tous les autres baux soient retirés des étalages et remplacés par ce document.

CONSEIL DE DEVELOPPEMENT SOCIAL

DU MONTREAL METROPOLITAIN 445 Saint-François-Xavier, Mtl

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