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Version finale

30th Legislature, 2nd Session
(March 14, 1974 au December 28, 1974)

Thursday, December 26, 1974 - Vol. 15 N° 213

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 87 — Loi modifiant la loi de la Législature et la loi de l'Exécutif


Journal des débats

 

Commission permanente de l'assemblée nationale

Etude du projet de loi no 87

Loi modifiant la loi de la Législature

et la loi de l'Exécutif

Séance du jeudi 26 décembre 1974

(Seize heures dix sept minutes)

M. LAMONTAGNE (président de la commission permanente de l'Assemblée nationale): A l'ordre, messieurs!

Je voudrais d'abord vous faire part des changements dont on m'a avisé concernant les membres de la commission; je nommerai également les membres qui sont déjà là.

M. Bédard (Chicoutimi), M. Bellemare (Johnson), M. Massicotte (Lotbinière) remplace M. Bienvenue (Crémazie); M. Pépin (Sherbrooke) remplace M. Blank (Saint-Louis); M. Brown (Brome-Missisquoi), M. Charron (Saint-Jacques) remplace M. Burns (Maisonneuve); M. Caron (Verdun), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Hardy (Terrebonne), M. Pelletier (Kamouraska-Témiscouata) remplace M. Lacroix (Iles-de-la-Madeleine); M. Carpentier (Laviolette) remplace M. Lamontagne (Roberval); M. Morin (Sauvé) remplace M. Léger (Lafontaine); M. Saint-Pierre (Chambly) remplace M. Lévesque (Bonaventure); M. Ostiguy (Verchères), M. Garneau (Jean-Talon) remplace M. Parent (Hull); M. Roy (Beauce-Sud) et M. Vallières (Richmond).

Le député de Beauce-Sud avait encore une minute relativement à sa motion.

Motion d'amendement de M. Roy (suite)

M. ROY: Merci, M. le Président. On se rappellera que j'avais proposé une motion appuyée par mon collègue de Johnson dans le but d'amender l'article 5 de la loi, de façon à remplacer le montant de $21,000 par $19,000 et, dans la troisième ligne du troisième paragraphe, que le millésime 1975 soit remplacé par 1976.

Pour résumer, je dirais donc, M. le Président, que cette motion respecte un voeu qui avait été présenté par l'Assemblée nationale, un voeu qui avait été émis et qui avait été accepté par tous les membres de l'Assemblée nationale au moment où la loi a été amendée, en 1970, voulant que le salaire du député pourrait comporter une indexation annuelle de 4 p.c. C'est ce qui avait été dit, mais, pour des raisons pratiques, il avait été décidé, à ce moment, de laisser cela en suspens, quitte à y revenir plus tard, lorsqu'il deviendrait nécessaire de réamender la loi.

Or, nous avons devant nous la motion gouvernementale qui propose que le salaire soit porté à $21,000 pour l'année 1974 et qu'il soit indexé, à partir du 1er janvier 1975, ce qui ferait en quelque sorte un salaire de $23,000. Il ne s'agit plus d'une indexation de 4 p.c, il s'agit d'une augmentation moyenne annuelle de 10 p.c. qui nous apparaît beaucoup trop élevée dans les circonstances et qui n'est pas acceptée par la population.

Il faut quand même s'assurer que le salaire de celui qui a le mandat, la fonction de représenter une population, de représenter un comté, respecte certains critères de justice, que ce salaire tienne compte de ce que nous retrouvons vis-à-vis des fonctions ou encore des responsabilités similaires dans d'autres secteurs de l'activité économique.

Lorsque nous parlons d'une augmentation de 10 p.c, il est évident qu'à ce moment nous dépassons tout ce que nous avons vu d'augmentation au cours des années passées.

M. le Président, je termine; seulement trente secondes pour dire que j'ai voulu que cette motion d'amendement respecte un critère de justice à l'endroit de tous les députés de l'Assemblée nationale, qu'ils soient du côté ministériel comme du côté de l'Opposition. On aura beau dire qu'il y a des députés qui ne méritent pas ce salaire, je n'ai pas l'intention de porter de jugement, bien que ce soit reconnu qu'il y en a qui ont plus de zèle, d'autres qui en ont moins pour remplir leur mandat. Comme nous ne pouvons pas avoir deux échelles de salaires, il appartiendra aux électeurs de chacun des comtés de porter le jugement sur la valeur et la façon dont ils ont été représentés par leur député à l'Assemblée nationale. C'est à eux et à eux seuls qu'incombe cette responsabilité. J'ai voulu être très juste à l'endroit de tous les députés de l'Opposition. A ce moment, je ne le dis pas seul, parce que mon collègue, le député de Saguenay est ici, mais il est le seul ou pratiquement le seul dans son parti à ne pas avoir droit à des rémunérations supplémentaires à cause des fonctions qui se rattachent dans les différents partis politiques. C'est un député que je connais personnellement. Je sais que, comme moi et comme bien d'autres, il a un grand comté à représenter et que les dépenses inhérentes à sa fonction lui causent certainement beaucoup de problèmes, comme cela peut causer des problèmes également à d'autres députés.

Je pense que cette motion devrait être acceptée par l'Assemblée nationale par tous les membres de l'Assemblée nationale, parce qu'elle constitue, à mon avis, un compromis qui serait acceptable de part et d'autre, de façon qu'on ne se retrouve pas dans un "filibuster" qui risque de s'étendre dans le mois de janvier. Je dis, en terminant — seulement dix secondes à ce moment — que c'est une mesure qui coûtera $500,000 à la province annuellement. Je trouve tout simplement qu'il serait ridicule de dépenser $1 million pour en discuter.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de Johnson.

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, j'ai eu l'occasion l'autre soir de faire un

exposé assez vaste sur le problème des augmentations de salaire et de donner certains critères de base pour lesquels je croyais simplement qu'un député qui travaille, mérite véritablement une rémunération quand on la compare particulièrement au salaire qui est payé et conditionné depuis la confédération à tous les salaires qui ont été payés aux sous-ministres. De tout temps, depuis les lois de 1928, 1929, 1941, 1946, 1952, 1953, 1956, 1957, 1958, 1959, 1960, 1961, 1963, 1964, 1965, 1971, toutes les lois qui ont ajusté l'indemnité et les allocations des députés correspondaient toujours avec le salaire qu'avait un sous-ministre, soit un sous-ministre adjoint ou un sous-ministre ordinaire.

Quand on compare, M. le Président, depuis tant d'années, l'échelle de salaires qui s'est payée et que l'on constate qu'aujourd'hui, en 1974, un sous-ministre en titre reçoit le salaire de $38,000 par année et qu'un député ordinaire reçoit $15,600, plus l'allocation de dépenses, bien sûr, M. le Président, parce que nous avons toujours, nous, particulièrement, les députés, deux maisons à entretenir ou deux foyers, je dis, M. le Président, que ces statistiques prouvent à l'évidence que nous méritons, et je ne m'en cache pas, une augmentation dans les salaires de base. Je dis, comme M. Diefenbaker vient de le dire à Ottawa, à son retour de la Barbade, qu'il ne faut pas qu'il y ait une exagération non plus. Il faut que cela soit modéré, une augmentation qui soit justifiée.

L'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce nous disait, l'autre soir, qu'après avoir regardé un tableau statistique sur les conventions collectives, les conventions collectives représentaient beaucoup plus que ce que j'avais affirmé. Je pense que l'augmentation qu'on a donnée dans toutes les conventions collectives jusqu'à ce jour a toujours été évaluée entre 16 p.c. et 17 p.c. Je crois que, si on voulait suivre ce barème de 16 p.c. et de 17 p.c. d'augmentation dans les conventions collectives qui ont été négociées durant l'année en cours et l'année précédente, nous arriverions peut-être, comme l'avait dit la loi de l'ajustement des salaires en 1972, à 4 p.c. de prévisions d'indexation à la vie, c'est-à-dire à 16 p.c. A 16 p.c, nous arriverions, je crois, à un chiffre assez raisonnable, celui de la motion de mon collègue, le député de Beauce-Sud, à $19,000 comme base. Je pense, M. le Président, que $19,000 comme base, personne ne pourrait nous en tenir grief, à cause des dépenses énormes que nous avons à subir, à cause, principalement du caractère particulier que doit jouer un député du Parlement et, particulièrement aussi, à cause de notre rang que nous devons occuper.

Je ne pense pas qu'il faille, demain matin, dire que les députés ne font plus partie de l'élite québécoise. Au contraire, je pense qu'un député doit faire partie de l'élite. Mais, par exemple, quand on considère les salaires qui sont payés au président de Bell Téléphone, qui est un membre de l'élite sûrement, et qui a $122,000 par année, quand on compare le salaire qui est payé à un membre de l'élite, le président de l'International Paper, $112,000, et que l'on considère, M. le Président, ce qui est payé à notre dévoué président d'Hydro-Québec, je pense qu'il est raisonnable qu'un député qui donne sa vie, qui met ses talents au service...

Vous irez voir Pierre Laporte où il est, vous demanderez où est Daniel Johnson et vous demanderez où est Jean-Jacques Bertrand ! Ce sont des gars qui ont donné leur vie pour la patrie québécoise. Vous arrêterez de rire après. Quand on n'est pas capable d'assumer ses responsabilités, on n'est pas député. J'en ai trop vu mourir à l'oeuvre pour que vous veniez rire ici à nos nez. Où sont les députés de 1944? Il en reste huit sur 92.

UNE VOIX: Je les porte mes responsabilités aussi.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre! Je voudrais rappeler pour la première et dernière fois qu'on peut être ici à titre d'observateur, mais non pas pour intervenir.

A l'ordre, s'il vous plaît !

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je répète donc que les députés ont des vies plus compliquées que celles des individus ordinaires. On est obligé d'avoir des vies familiales, nous aussi, mais nous passons une grande partie de notre temps dans notre comté à nous dévouer pour des oeuvres sociales, pour être représentés et y être, pour faire du bureau, quelquefois quinze heures par jour. Il y a bien des gens qui ne font pas ça. Les employés, qui travaillent avec des conventions collectives de trente-deux heures et demie par semaine, reçoivent $30,000 à $35,000 et les députés, qui travaillent soixante heures par semaine, en reçoivent $15,700. Je n'ai pas honte, comme député de Johnson, après 30 ans de vie publique, de dire que j'ai une certaine expérience et je ne suis pas un hypocrite. Je suis en faveur d'un salaire raisonnable pour les députés et je pense qu'ils le méritent grandement, sauf les exceptions, comme il y en a partout. Il peut y en avoir dans l'église, il peut y en avoir dans la société, il peut y en avoir au Parlement. L'absentéisme est un mal qui ronge notre société, particulièrement notre parlementarisme.

Je dis et je répète qu'actuellement le salaire que me paye la province représente $0.40 par électeur dans mon comté. S'il y a une augmentation à $19,000, ça représentera $0.50 d'augmentation. Il est temps qu'on le dise et qu'on arrête de faire des jeux de mots sur un salaire que nous gagnons véritablement. Si nous ne sommes pas en Chambre, nous manquons à notre devoir. Si nous ne sommes pas dans notre comté pour s'occuper des besoins de nos électeurs, nous manquons à notre devoir. Si

nous ne répondons pas aux appels qui nous sont faits par toutes les associations afin de souscrire dix fois plus qu'un homme ordinaire, nous manquons à notre devoir.

Il faut vivre la vie d'un membre de la Législature comme je l'ai vécue pendant 30 ans pour savoir qu'un salaire de $15,700 aujourd'hui n'est pas raisonnable et qui si, demain, la Législature se prononce en faveur d'une augmentation, on devrait aussi penser à revaloriser le rôle du député. Qu'on arrête donc dans les journaux et dans les réunions publiques de se moquer d'un député! Qu'on apprenne donc à le respecter plutôt pour son serment d'office et pour le dévouement qu'il donne à sa province!

M. le Président, quand je regarde sur les banquettes qui sont en avant de moi, je ne vois plus un seul député de 1944, je n'en vois plus un seul de 1952. J'en vois quelques-uns de 1956 qui sont restés. Ceci, M. le Président, pour vous dire qu'après l'élection de 1944, nous étions 90 députés assermentés, il en reste huit de mon groupe qui sont encore vivants. C'est une statistique assez éloquente. On a vu Pierre Laporte payer de sa vie parce qu'il était ministre d'un gouvernement. Je ne fais pas ici de politique, M. le Président, je voudrais être le plus objectif possible, mais j'ai vu un Daniel Johnson, par exemple, élu en 1946, mort à l'âge de 54 ans. J'ai vu un Paul Sauvé, qui a eu le courage d'aller à la guerre, qui est revenu siéger dans cette Chambre pendant 30 ans et qui est mort à 52 ans. J'ai vu un Bertrand mourir, parce que certaines personnes lui ont dit qu'il avait été un traître quand il avait voté le bill 63. Ils l'ont accusé d'être traître à sa race, cela a fait mourir Jean-Jacques Bertrand. Il me l'a dit un soir: II n'y a rien de plus cruel que de se faire traiter de traître quand on fait son devoir.

M. le Président, je voudrais vous dire ceci en terminant. Mon intervention a peut-être été un peu plus colorée que d'habitude, parce que je ne voudrais pas que ceux qui nous entendent présentement pensent qu'on est à faire de la "tripouille" ou à jouer avec les deniers publics. C'est plus sérieux que cela. Le rôle d'un député, on passe son temps à la radio, dans les journaux à le dévaluer. Que faisons nous, nous, députés pour aller le dire à la radio comme l'a fait le député de Fabre l'autre jour, et je le félicite? Qu'est-ce qu'on fait pour répondre à toutes ces attaques qui viennent de partout et qui atrophient le cerveau des jeunes? Il pensent que nous ne faisons ici que des balivernes, mais il y en a qui travaillent, M. le Président. Cela devrait être dit publiquement, pas seulement une fois, mais des dizaines de fois, au lieu de se moquer d'un député, au lieu de rire d'un député parce qu'à un moment donné il peut avoir posé un geste qui est peut-être un peu plus drôle qu'un autre, mais dans combien de vies publiques ne voyons-nous pas, nous, répéter la même chose?

Je vois des maires, aujourd'hui, qui gagnent, $12,000, $15,000 et $18,000 par année, qui n'ont pas notre responsabilité. Qui se vote ces augmentations? Est-ce que ce ne sont pas les échevins et le maire? Nous autres, on va être accusé parce que, devant des statistiques bien détaillées, les députés se votent, devant l'opinion publique, même malgré certaines protestations qui sont machinées contre le Parlement, contre le parlementarisme... On veut égaliser tout le monde. En 1792, les sans-culottes ont égalisé tout le monde, les bourgeois, mais la dernière tête qui a tombé, ç'a été celle de Robespierre, l'instigateur de la révolution. Ils l'ont égalisé, lui aussi.

Voulons-nous vivre ça encore? Nous en avons tous la chance, en continuant de déprécier notre Parlement et de rire de nos députés, de s'en moquer. Non, M. le Président, nous devons appartenir à l'élite. Si nous ne sommes pas l'élite, que serons-nous? Je le dis et je le répète pour la milième fois. Un député qui fait son travail, qui entre ici à 8 heures le matin, pas à 10 heures, nous n'avons pas de convention collective, ni personne pour nous surveiller, mais celui qui entre ici à 8 heures et qui en sort parfois après minuit, que ceux qui veulent rire en rient, qu'ils viennent me voir à mon bureau et en voir d'autres qui travaillent jusqu'à minuit! Quand il s'agit de préparer des dossiers, quand il s'agit de préparer certaines revendications ou certaines représentations sur certains projets de loi, il ne faut pas dire n'importe quoi, devant n'importe qui, M. le Président.

Je prétends, par exemple, qu'un député doit être présent en Chambre et qu'il devrait y avoir de sévères pénalités pour ceux qui n'assistent pas aux séances: $100 par jour, je le recommanderais demain matin, M. le Président, pour ceux qui, à l'appel de 4 heures ou à l'appel de 9 heures, ne seraient pas à leur siège, au moins pour faire acte de présence. $100 par jour, le compte devrait lui être envoyé immédiatement par le secrétaire général de l'Assemblée nationale, quitte à lui de se défendre, quitte à lui de faire sa preuve, s'il est malade ou demandé pour des représentations. S'il a une bonne raison, on déchirera l'avis. Mais, le lendemain matin, le secrétaire général devrait envoyer à ce parlementaire une pénalité d'au moins $100 par jour. Celui et ceux qui emploient des expressions malodorantes, des expressions et des épithètes mal venues, dans une Chambre comme la nôtre, devraient être pénalisés immédiatement par le président de $25; $25 pour une épithète, à celui qui dirait: Vous êtes un lâche, vous êtes un bandit, vous êtes un voleur; $25, monsieur, pour avoir dit des choses aussi antiparlementaires ou accuser injustement un de vos collègues.

M. le Président, je regrette infiniment ce ton que j'ai employé, qui devrait être un ton plus serein le lendemain du jour de Noël où on dit: Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté. Bien, mesdames et messieurs, nous en sommes des hommes de bonne volonté.

A 30 ans, j'ai décidé de prendre une orientation particulière, soit celle de devenir député de

mon comté. J'ai subi huit élections générales et je pense que j'ai témoigné, pendant les 30 ans de ma carrière politique, de beaucoup de dévouement et d'attachement à ceux qui m'ont élu. Je suis encore honoré d'être député d'un comté, à l'âge que j'ai, un comté semi-rural, semi-urbain, composé de 27,000 électeurs, mais qui m'ont fait confiance dans des circonstances bien particulières. Je les remercie et j'essaierai, par mon travail, non pas seulement à cause de l'argent qui nous est payé comme indemnité, non, M. le Président... J'ai laissé tomber une pension de $21,000, pension que j'avais acquise par mes années de service et à laquelle j'avais contribué à 10 p.c. de mon salaire. J'ai laissé tomber ma pension de $21,000, que je ne reçois plus aujourd'hui, pour accepter un salaire de $15,600.

L'amour de ma profession et surtout le désintéressement que j'y ai mis jusqu'à aujourd'hui à bien servir les intérêts de mes électeurs m'ont amené sur cette voie que j'ai choisie et à laquelle je me suis ardemment attaché, pour le plus grand bien, je pense, de mes concitoyens, les Québécois.

Il n'est pas question de vouloir faire un tantinet de politique, qu'elle soit rouge, bleue, caille, verte, mais il est temps qu'on discute avec bon sens, raisonnablement. Je pense qu'avec ces deux sanctions — celle de l'absentéisme et celle des quolibets malveillants pour nos collègues qui pourraient être tenus en Chambre — on réussirait à redonner à notre Parlement et aux députés beaucoup plus de prestige. Je vous remercie, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Etes-vous prêts à voter? Nous allons prendre le vote.

M. MORIN: Non. M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Le chef de l'Opposition officielle.

M. MORIN: Je voudrais dire au député de Beauce-Sud que la solution qu'il vient de proposer est certainement meilleure que celle qui est contenue dans le projet de loi. Je n'hésite pas à dire que $19,000, c'est plus raisonnable que $21,000 et, à plus forte raison, est-ce plus raisonnable que le salaire véritable que ce projet de loi va mettre en vigueur dès le 1er janvier, qui n'est pas de $21,000, mais de $23,205.

Dans le premier cas, cela entraîne une augmentation réelle de l'ordre de 50 p.c, comme j'ai tenté de le démontrer l'autre jour, lorsqu'on ne tient pas compte de l'allocation.

Si on ajoute l'allocation, évidemment, cela diminue le pourcentage, mais il faut tout de même constater, M. le Président, que cela fait encore un salaire total de $30,000.

Je n'ai pas l'intention de reprendre toute l'argumentation que j'ai fait valoir l'autre jour, mais de soulever certains points qui me parais- sent pertinents, parce que la motion signifie, en fait, si j'ai bien compris le député de Beauce-Sud, que les collègues toucheraient désormais, à compter du 1er janvier, $26,000, lorsque l'on met ensemble indemnité et allocation, et environ $28,000, à compter de janvier 1976, étant donné qu'il a repoussé la date à laquelle s'appliquerait l'indexation.

M. ROY: M. le Président, si on me permet de préciser, la motion comporte deux volets: premièrement que le montant de $21,000 soit réduit à $19,000 et que, deuxièmement, la formule d'indexation proposée qui devait être effective le 1er janvier 1975 le soit, mais le 1er janvier 1976.

M. MORIN: C'est exactement cela. Je chiffrais la proposition du député de Beauce-Sud.

M. le Président, malgré l'effort que nous reconnaissons de la part de l'Opposition crédi-tiste et unioniste, en ce qui nous concerne, nous préférons nous en tenir à la situation actuelle tant et aussi longtemps que nous n'aurons pas fait l'effort nécessaire pour que l'ensemble des Québécois soient indexés. Ce n'est pas seulement une question de montants, M. le Président, c'est une question de principe. Il serait si facile de faire en sorte qu'immédiatement, dans les semaines qui viennent, le salaire minimum soit porté à $2.50. Il est insuffisant, à l'heure actuelle, pour faire vivre une famille. Ce n'est pas avec $92 par semaine qu'on peut faire vivre une famille. Il n'y a pas un député qui va soutenir cela à cette table.

Ce ne serait pas si difficile, également, de l'indexer, ce salaire minimum. Je ne vois pas pourquoi on se refuse à le faire. En second lieu, nous avons proposé une autre condition. Beaucoup de travailleurs, même parmi ceux qui sont syndiqués et qui sont en meilleure posture pour se défendre devant la hausse du coût de la vie, devant la perte de leur pouvoir d'achat, sont aux prises avec des conventions collectives qui sont en cours, qui ne viennent à expiration que dans un an, dans un an et demi, quelquefois dans deux ans. Dans ces conventions collectives signées à l'époque où l'inflation commençait à faire sentir ses effets, mais où elle n'était pas encore devenue galopante comme elle l'est actuellement, on ne trouve pas, dans la plupart des cas, de clauses d'indexation des salaires.

Plusieurs syndicats ont obtenu des clauses d'indexation, ce qu'on appelle des clauses de vie chère, plusieurs ont même obtenu la réouverture en cours de contrat de leur convention. Pourquoi n'étendrions-nous pas cette règle à toutes les conventions, non pas pour imposer tel ou tel pourcentage d'indexation, mais pour permettre aux travailleurs de négocier avec leur employeur, compte tenu des conditions qui prévalent dans chaque industrie, des clauses d'indexation réalistes?

Nous ne demandons pas plus que cela. Je l'ai dit l'autre jour, M. le Président, et je ne sais pas

si cela a toujours été clair, les députés de cette Chambre ont sans doute droit à une certaine indexation. La vie augmente pour eux comme pour les autres, mais elle augmente d'abord et avant tout pour les Québécois et, en particulier, pour ceux qui sont au bas de l'échelle des salaires.

C'est la raison pour laquelle nous avons dit: Oui, messieurs, d'accord pour l'indexation, mais indexons tous les Québécois. Occupons-nous d'abord de ceux qui en ont bien plus besoin que nous, de ceux qui sont plus fortement touchés par la hausse du coût de la vie, par la perte du pouvoir d'achat. Il ne faut pas oublier que ce qui monte le plus à l'heure actuelle, c'est le prix des denrées alimentaires. Les denrées alimentaires ont augmenté de 17 p.c. au moins au cours de l'année écoulée. On annonce 15 p.c. à 16 p.c. pour l'année qui vient, ce qui est une façon de nous promettre peut-être 18 p.c. ou 20 p.c. La vie monte pour les députés, c'est un fait, mais elle monte aussi pour l'ensemble des Québécois.

Alors, messieurs, est-ce que nous ne vous tendons pas une carotte suffisante? Nous disons: Oui, vous allez l'avoir l'indexation, mais que le gouvernement fasse l'effort d'indexer tous les Québécois. Si c'est bon pour nous, j'ai la conviction que c'est bon pour l'ensemble des Québécois. Si nous faisons ce raisonnement que cela nous est absolument nécessaire pour arriver à joindre les deux bouts, si nous ne sommes pas entièrement bouchés aux réalités sociales, nous devons admettre que c'est encore plus nécessaire pour les bas salariés, pour ceux qui se situent au bas de l'échelle des salaires et qui ont bien plus de difficultés que nous à joindre les deux bouts.

M. le Président, ces deux conditions, je pensais que le gouvernement allait les accepter, je pensais que le premier ministre ou le ministre des Finances allait se lever en Chambre et nous dire: Ah! c'est seulement cela que vous réclamez comme condition, c'est tout naturel, puisqu'il est normal d'augmenter les députés, nous allons considérer également comme normal d'augmenter toute la population, de faire en sorte que tout le monde ait sa part. Ce n'est pas ce que le gouvernement a choisi de faire. Au contraire, il a décidé, semble-t-il, d'aller jusqu'au bout et d'imposer ce projet de loi, coûte que coûte. Même le directeur du Devoir s'interroge sur le moment où ce projet de loi nous est proposé. A mon avis, il ne peut y avoir de temps plus mal choisi. Je me permets de lire un ou deux passages qui sont particulièrement éloquents, qui sont tirés de son editorial du 17 décembre 1974: "On ne saurait trop déplorer — écrit M. Claude Ryan — la détestable habitude, suivant laquelle les gouvernements choisissent presque invariablement le moment le moins opportun pour soulever une question délicate, entre toutes, en démocratie, soit la rémunération des parlementaires. Les jours qui précèdent le congé des fêtes se prêtent moins que toute autre période à un débat sérieux et serein. Pourquoi, si ce n'est parce qu'ils tiennent en estime peu élevée le jugement de leurs concitoyens, Ottawa et Québec choisissent-ils de nouveau ce temps peu propice pour proposer des changements importants du mode de rémunération des députés." Je voudrais que tout le reste de l'éditorial soit à l'avenant, malheureusement, j'imagine que les ministériels voudront en citer d'autres extraits tout à l'heure. J'en retiens un autre en particulier.

M. SAINT-PIERRE: Vous ne pouvez pas le faire vous-même?

M. MORIN: J'en retiens un autre... Oui, oui, effectivement, à l'invitation du ministre de l'Industrie et du Commerce, je vais lire un autre extrait qui me semble, également, fort éloquent. "Si les députés sont actuellement rémunérés selon des barèmes raisonnables, la seule question qui se pose, c'est de déterminer si les hausses qu'on projette de leur accorder sont acceptables. Or, il tombe sous le sens qu'à Ottawa, à tout le moins, on s'apprête à décréter des hausses nettement excessives, parce qu'à ce moment, les hausses outaouaises...

M. SAINT-PIERRE: ... allez donc en bas...

M. MORIN: ... étaient connues, elles étaient de 50 p.c. Or, les hausses québécoises sont maintenant connues. Elles sont également de l'ordre de 50 p.c.

M. SAINT-PIERRE: Vous êtes malhonnête! M. MORIN: M. le Président... M. SAINT-PIERRE: Allez en bas de la... M. MORIN: M. le Président...

M. SAINT-PIERRE: Vu dans cette perspective, ce que propose le gouvernement Bourassa...

M. MORIN: ... le ministre de l'Industrie et du Commerce, tout à l'heure, citera d'autres extraits...

M. SAINT-PIERRE: Ah bon!

M. MORIN: ... du même éditorial.

M. SAINT-PIERRE: Je voulais le laisser pour prouver votre honnêteté intellectuelle.

M. MORIN: Je ne voudrais pas prendre le temps de la commission pour citer les autres extraits. C'est un fait que M. Ryan, dans l'ensemble, avant cependant de connaître les chiffres...

M. SAINT-PIERRE: La loi était déposée...

M. HARDY: La loi était déposée.

M. MORIN: ... mais l'éditorial que je vous cite, il ne connaissait pas les chiffres...

M. HARDY: Voyons donc!

M. MORIN: ... c'est bien évident...

M. SAINT-PIERRE: Ils sont plus bas que ceux du rapport.

M. MORIN: M. le Président, l'augmentation — j'ai hâte d'entendre le ministre là-dessus tout à l'heure — québécoise est bien également de 50 p.c. Ce qui est vrai à Ottawa est également vrai à Québec. Si c'est excessif à Ottawa, c'est excessif à Québec.

M. le Président, le moment ne peut pas être plus mal choisi. Je l'ai dit longuement, l'autre jour, en Chambre. A un moment où le ministre de l'Industrie et du Commerce lui-même, bien que par la suite, il ait tendu à nuancer ses propos, nous a annoncé que l'année 1975 ne serait peut-être pas si rose que cela, que cela allait être une année certainement moins prospère que l'année 1974. A un moment où les économistes et des organismes — que le ministre, j'imagine, ne voudra pas dénoncer — comme la National Conference Board annoncent une mauvaise année sur le plan du produit national brut, une mauvaise année sur le plan du chômage. Le moment ne saurait être plus mal choisi pour proposer une augmentation de cet ordre, parce qu'en réalité c'est une augmentation que nous propose le gouverment, et c'est également une augmentation que nous propose le député de Beauce-Sud, à moins, M. le Président, justement en voyant venir ces temps difficiles, que le gouvernement ne se soit dit: C'est le moment d'augmenter les salaires des députés, parce que d'ici quelques mois, jamais on osera le faire, alors que la conjoncture aura évolué dans un sens défavorable et que les Québécois, jamais, ne nous pardonneraient une augmentation alors que le chômage sera peut-être à 8 p.c. ou 10 p.c, alors que le produit national brut stagnera, alors qu'il sera probablement au point 0, sinon même en dessous du 0, par rapport à l'année dernière. D'ailleurs — le ministre le sait — en ce moment, trimestre par trimestre, dans l'ensemble du pays, nous sommes au 0, en termes de PNB. M. le Président, dans les autres provinces, on n'a pas jugé opportun de décréter des augmentations de cet ordre.

M. SAINT-PIERRE: La Colombie Britannique.

M. MORIN: La Colombie-Britannique...

M. SAINT-PIERRE: La social-démocratie là-bas...

M. MORIN: ... est effectivement la mieux payée avec un total de $24,000, si l'on comprend, à la fois, les indemnités et l'allocation. Une indemnité de $16,000, une allocation de $8,000. Mais le Québec...

M. SAINT-PIERRE: En pourcentage, le gouvernement socialiste a donné combien d'augmentation aux députés en Colombie Britannique?

M. MORIN: M. le Président, je ne sache pas que ce soit le gouvernement soi-disant socialiste...

M. SAINT-PIERRE: Ah oui!

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!

M. MORIN: ... parce que déjà auparavant, en Colombie Britannique du temps de M. W.A.C. Bennett, mieux connu sous le nom de Wacky Bennett, les salaires n'étaient peut-être pas les plus élevés au Canada, mais certainement les plus raisonnables.

M. SAINT-PIERRE: Les plus bas.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!

M. SAINT-PIERRE: Ils ont été augmentés de combien? Cent pour cent.

M. MORIN: Mais je n'ai pas d'objection à lier le dialogue avec le ministre de l'Industrie et du Commerce, sauf que peut-être il pourrait nous faire connaître sa position en long et en large tout à l'heure. Je suis convaincu qu'il voudra intervenir sur cette motion du député de Beauce-Sud.

M. le Président, le Québec vient tout de même au second rang, et que je sache, ce n'est pas la seconde province en termes de PNB et en termes de croissance. Le Québec, sur le plan des salaires déjà payés en ce moment à ses députés, se situe au second rang lorsqu'on fait le total des indemnités et de l'allocation. Cela donne $22,740 à l'heure actuelle. Si l'on considère que l'Ontario voisin, plus riche que nous, Québécois, plus développé et avec lequel l'écart tend à s'accroître en ce moment, en termes de croissance industrielle, plutôt que de se réduire, on doit admettre que l'Ontario vient après le Québec pour ce qui est du salaire des députés. L'Ontario vient en troisième rang avec un total de $22,500 pour une indemnité de $15,000 et une allocation de $7,500.

Pourquoi serions-nous les premiers à donner le mauvais exemple à la population, alors qu'Ottawa a décidé de reculer maintenant et de repenser à son affaire devant la levée de boucliers qui a eu lieu à travers le pays lorsqu'on a annoncé l'augmentation de 50 p.c.

Je comprends pourquoi les fédéraux ont décidé de reculer et je m'interroge et ne

comprends pas que les ministériels, après avoir pris connaissance du sondage Gallup l'autre jour, n'aient pas, eux aussi, décidé de faire marche arrière ou, en tout cas, de proposer quelque chose de plus raisonnable.

M. SAINT-PIERRE: Donnez donc la question sur l'enquête Gallup. C'est l'augmentation de salaire au niveau fédéral. Soyez au moins un petit peu honnête.

M. MORIN: Non, M. le Président, la question était la suivante. Il y avait trois questions.

M. SAINT-PIERRE: Au niveau canadien, pour l'augmentation de salaire des parlementaires, au Parlement d'Ottawa, l'augmentation était beaucoup plus forte et le niveau de rémunération est beaucoup plus fort qu'ici. Citez-moi Ryan, citez-moi Gallup...

M. MORIN: Bon, je voudrais vous demander...

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!

M. SAINT-PIERRE: Soyez honnête!

M. MORIN: ... très modérément de rappeler le ministre à l'ordre et...

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. SAINT-PIERRE: Je vous rappelle à l'honnêteté.

M. MORIN: ... puisqu'il m'a demandé de citer les questions, je m'en vais les citer. Il y avait trois questions.

M. SAINT-PIERRE: Au niveau canadien.

M. MORIN: Croyez-vous que les salaires payés aux députés fédéraux sont trop élevés, pas assez élevés ou insatisfaisants?

Deuxième question: Que pensez-vous des salaires des députés provinciaux? Vous l'aviez vu cette question-là. Alors, ne venez pas soutenir que ça touchait seulement le fédéral.

M. SAINT-PIERRE: Répondez.

M. MORIN: Bon. Au niveau des provinces, on considère dans 41 p.c. des cas que les salaires sont trop élevés et, dans 34 p.c. des cas, qu'ils sont satisfaisants. Si je ne m'abuse, cela fait un total de 75 p.c. Les trois quarts des citoyens estiment qu'au niveau provincial, les salaires sont soit satisfaisants, soit déjà trop élevés. Ce sont quand même des chiffres dont il faut tenir compte. Il n'y a que 5 p.c. de la population qui estime que les salaires ne sont pas assez élevés. Il y a des indécis qui représentent 20 p.c. de l'échantillon.

Si j'étais le gouvernement, si j'étais collègue libéral, je m'interrogerais sur ces chiffres, j'y songerais deux fois avant de proposer une augmentation de l'ordre de celle que nous proposons. Et même, si j'étais le député de Beauce-Sud, je me poserais des questions devant un tel sondage. Les Canadiens...

M. ROY: Je peux me poser des questions et je dois dire, je ne veux pas être désagréable à l'endroit du chef de l'Opposition, mais je suis assez grand et assez vieux pour poser mes questions moi-même.

M. MORIN: J'admets volontiers que le député de Beauce-sud est capable de se poser des questions. Il s'en pose et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle je suis sûr qu'en toute bonne foi il a proposé l'amendement. Et là-dessus, je ne mettrais jamais, sur un tel point, la bonne foi du député de Beauce-Sud en jeu. Il peut en être sûr mais je lui demande s'il n'a pas lieu de s'interroger devant des sondages comme ceux-là qui représentent même l'opinion des Canadiens moyens.

M. le Président, il y a tout de même un argument dont il faut tenir compte. D'ici quelques mois, le ministre des Finances va probablement être appelé à inviter les Québécois à se serrer la ceinture. Il va être obligé de dire aux Québécois: Chers concitoyens, la conjoncture a pris une tournure plus défavorable que nous ne le croyions, cela vient des Etats-Unis... Cela vient toujours d'ailleurs, l'inflation, le chômage; ce n'est jamais typiquement québécois; cela vient des Etats-Unis ou cela vient du monde occidental ou cela vient de l'économie générale. Nous ne sommes jamais responsables. Quand cela va bien, c'est le gouvernement québécois qui fait son devoir, qui fait bien les choses, mais lorsque cela vient de l'extérieur, lorsque la situation tourne mal, jamais il n'est responsable. Ce sont toujours les autres.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît !

M. MORIN: M. le Président, il est bien évident que, si le ministre des Finances, voire le ministre de l'Industrie et du Commerce, sont obligés d'annoncer des restrictions d'ici quelques mois, si le ministre de l'Industrie et du Commerce est obligé de dire: Je regrette, mais les subventions vont devoir se faire plus rares, même au moment où elles seraient plus nécessaires pour relancer l'économie; si le ministre des Travaux publics, si le ministre de l'Agriculture sont obligés de dire: Bien oui, cela va de plus en plus mal, mais nous regrettons, les revenus commencent à baisser parce que l'activité économique baisse et il va falloir se serrer la ceinture, j'entends d'ici le ministre de l'Agriculture ou le ministre de l'Industrie et du Commerce ou l'un quelconque des ministres dire aux Québécois: C'est une situation regrettable, mais

nous n'y pouvons rien et nous sommes obligés, au moment même où il faudrait entreprendre de grands travaux pour relancer l'économie, au moment où il faudrait subvenir aux besoins de ceux qui, de plus en plus nombreux, vont se trouver en chômage ou à l'assistance sociale; nous regrettons, chers concitoyens, mais comprenez que cela va mal, qu'est-ce que les Québécois vont nous répondre, nous qui aurons, à ce moment-là, un salaire de base de $30,000 indexé, qui sera peut-être de $35,000 l'année prochaine, de $40,000 d'ici deux ou trois ans? Qu'est-ce qu'ils vont nous répondre, les Québécois? Je vais dire les choses poliment, M. le Président, parce que j'imagine que les Québécois vont nous parler dans le nez avec les termes qui leur sont propres, mais ils vont nous dire, en gros: Messieurs les députés, si vous vouliez nous demander de nous serrer la ceinture, il fallait donner l'exemple au moment où votre salaire, où vos allocations étaient en cause. Je ne sais pas ce qu'on va pouvoir leur répondre à ce moment-là. Qu'est-ce que nous allons leur dire?

Les Québécois refuseront de se serrer la ceinture; ils refuseront la discipline sociale que nous leur suggérerons, discipline sociale qui sera nécessaire objectivement, mais, subjectivement, ils seront incapables de l'accpeter parce qu'ils nous diront: C'était à vous, messieurs les députés, messieurs les ministres, c'était à vous de donner l'exemple et de vous comporter de façon disciplinée, sachant, comme vous le saviez, que l'économie allait prendre une tournure pour le plus mauvais en 1975.

M. le Président, si, voyant venir ces nuages qui s'accumulent sur l'horizon économique, si, voyant venir ces nuages, nous avions au moins le courage de dire: Servons d'abord les Québécois, ensuite, nous nous servirons, nous, de l'Opposition officielle, nous nous montrerions beaucoup plus réceptifs aux suggestions du gouvernement. Mais comme ce n'est pas le cas, comme, malgré les nuages noirs, nous sommes parmi ceux qui se dépêchent de courir pour se mettre à l'abri en disant: Après nous, le déluge — c'est cela, notre attitude, en ce moment — après nous, le déluge, et les Québécois, eh bien! ils se démerderont comme ils pourront, le moment venu.

M. le Président, nous, de l'Opposition, nous ne saurions partager cette attitude. Encore une fois, nous reconnaissons que les députés ont des besoins comme les autres. Il n'est pas question de nier cela. Il est simplement question de dire que nous ne devons pas être les premiers servis, mais les premiers à servir. Merci, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, en m'opposant à l'amendement qui a été mis de l'avant par le député de Beauce-Sud, je pense que les raisons que je pourrais invoquer pour- raient servir aux deux cousins qui nous ont donné des motifs pour appuyer ou pour s'opposer à l'augmentation de salaire.

M. ROY: Comment avez-vous dit? M. SAINT-PIERRE: Deux cousins.

M. ROY: Voulez-vous préciser?

M. SAINT-PIERRE: Je vais sûrement le préciser. C'est bien connu que, dans la population, il y a quelque chose de commun entre l'argumentation du Parti créditiste et celle du parti séparatiste.

M. ROY: Oui, parce qu'on est en face d'un gouvernement surreprésenté.

M. SAINT-PIERRE: Non, ce n'est pas ça, c'est que, finalement, on sait tous que le parti séparatiste n'est, après tout, que du crédit social pour intellectuels. Lorsqu'on examine...

M. ROY: A quelle heure vous êtes-vous couché hier?

M. SAINT-PIERRE: Très tôt. M. le Président, lorsqu'on examine les motifs qui ont été invoqués par le député de Beauce-Sud, on les comprend. Ce sont les raisons qu'on peut donner directement aux gens dans son comté, pour dire: Ecoutez, mes amis, $21,000 c'est trop, $19,000, ce serait mieux, c'est vrai qu'il faut que le salaire des députés augmente, c'est vrai, il l'a dit lui-même, il en a la conviction, que le salaire ne doit pas rester au même niveau, mais ça ne peut pas aller à $21,000, c'est $19,000. J'ai écouté attentivement ses arguments et je ne les ai pas compris. On a évoqué les 4 p.c. qui avaient été mentionnés dans la loi mais on ne semble pas tenir compte du tout, au niveau des dates et au niveau des taux de croissance, de ce qui s'est passé, soit au niveau de l'inflation, soit au niveau du salaire moyen des ouvriers canadiens. Du côté du chef de l'Opposition, inutile de rperendre toute son argumentation, c'est plus sophistiqué, mais, fondamentalement, c'est peut-être aussi hypocrite que dans le premier cas.

M. MORIN: Jouez donc franc jeu...

M. SAINT-PIERRE: Venons-en, M. le Président, à quatre raisons.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!

UNE VOIX: On veut écouter.

M. ROY: Je vous remercie, j'ai pris la peine de dire, dès le début... M. le Président, question de privilège.

M. DESJARDINS: II n'y a pas de privilège en commission.

M. ROY: J'invoque le règlement d'abord.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Question de règlement, le député de Beauce-Sud.

M. ROY: Je n'ai traité personne d'hypocrite jusqu'à maintenant, M. le Président, j'ai fait une proposition, en toute objectivité, elle m'appa-raissait raisonnable.

M. SAINT-PIERRE: C'est vrai.

M. ROY: Je n'ai pas eu le temps de répéter, parce que le président ne me l'aurait pas permis, l'argumentation que j'ai donnée le 24, avant l'ajournement, mais j'ai dit que c'était en toute objectivité que je le faisais. Je ne l'ai pas fait avec hypocrisie. Je ne me suis pas caché pour dire que je reconnaissais que c'était normal qu'on indexe d'une certaine façon et de façon raisonnable le salaire des députés. Je suis prêt à le répéter devant n'importe qui, n'importe où dans la province de Québec, sans hypocrisie et sans arrière-pensée. J'ai encore la même attitude.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, si le député de Beauce-Sud veut bien m'écouter, je vais tenter de le convaincre une nouvelle fois, j'ai essayé à plusieurs reprises...

M. ROY: Attention à vos termes!

M. SAINT-PIERRE: Je vais être très poli, M. le Président.

La première raison qui se trouve derrière le projet de loi 87 et qui se trouve à combattre les amendements et les sous-amendements qui nous sont soumis par différents membres de l'Opposition, c'est fondamentalement le rapport Bo-nenfant. Il y a eu au Québec une démarche différente. Nous avons confié cette démarche sur une question aussi délicate, à trois personnes de l'extérieur. Les partis d'Opposition, à l'époque, ont été consultés sur le choix de ces personnes, incluant le parti séparatiste. On a donc confié à ces trois personnes, présidées par M. Bonenfant, cette délicate question du salaire des députés. Je rappelle, M. le Président, je l'ai dit, qu'à la page 38 d'un rapport étoffé, le rapport Bonenfant nous disait donc de porter l'indemnité des députés immédiatement de $15,600 à $22,000 et que, si notre système était accepté, nous suggérions qu'il soit en vigueur rétroactivement au 1er avril 1974.

A l'époque, le parti séparatiste, je ne sais pas si c'est parce qu'il y avait moins d'opportunisme à l'époque ou moins de portée électoralis-te, n'a pas confié au rapport Bonenfant le soin de regarder le problème de l'inflation chez tous les gens. On n'a pas demandé au comité Bonenfant de relier le salaire des députés à la pauvreté qui existait dans la province. On a simplement dit, incluant le Parti québécois, aux gens du comité Bonenfant: Regardez cette question délicate et faites-nous un rapport.

Du côté du Parti québécois, on accepte les trois personnes, y compris Mme Rousseau, que vous connaissez bien. Le rapport nous est donné d'une façon unanime, il n'y a pas de divergence de vues entre les trois commissaires, entre les trois personnes formant ce comité et on nous donne le rapport. On se rappelle que le projet de loi du gouvernement sur les deux points, le niveau du salaire et la forme d'indexation, est moins généreux que nous le suggérait le rapport. Ces $22,000 que nous suggérait le rapport Bonenfant sont baissés à $21,000, je vais dire pourquoi dans un instant. Deuxièmement, au niveau de l'indexation, on nous proposait de greffer ça à la croissance des salaires des cadres supérieurs, des cadres IV dans la fonction publique, qui ont connu un taux de croissance de 43 p.c, je vous le rappelle, depuis deux ans et demi. Nous, nous sommes partis des hausses de salaire consenties aux cadres et nous avons tenté de trouver une formule qui m'apparaît plus logique et, je le rappelle pour le chef de l'Opposition, une formule qui est greffée à la croissance future des salaires des ouvriers québécois. Si les salaires n'augmentent pas dans le futur, les salaires des députés n'augmenteront pas.

M. MORIN: M. le Président, des ouvriers canadiens, pardon.

M. SAINT-PIERRE: Des ouvriers canadiens. On pourrait prendre, si vous voulez, pour les besoins des statistiques, les ouvriers québécois, d'ailleurs, faites-le vérifier par vos recherchistes, les salaires québécois, dans les dernières années, ont augmenté plus rapidement que les salaires canadiens, puisque, bien sûr, on parle de taux de croissance, on ne parle pas de niveau.

M. MORIN: Ah oui!

M. SAINT-PIERRE: Faites-le vérifier, et je suis bien prêt à changer la loi. On prend les salaires canadiens simplement parce que, sur le plan de la statistique, il y a un certain avantage, lorsqu'on est intéressé aux taux de croissance, à prendre les salaires canadiens, au lieu de les prendre par région. Enfin, oublions cela.

M. le Président, il y a eu quelques erreurs dans les dates mentionnées par le député de Beauce-Sud. Je vous le dis avec beaucoup de décence. Il faut se rappeler que la loi avait été discutée en 1970, mais qu'elle prenait effet le 1er janvier 1971, à $15,000, et le 1er janvier 1972, à $15,600, c'est-à-dire avec 4 p.c. de plus. Si on revoit les discours à l'époque, il faut se rappeler que lorsqu'en 1971 nous avons mis cela à $15,000 cela partait de $12,000, cinq ans avant, en 1968. Si on regarde les discours faits à l'époque par les distingués membres de l'Opposition, du Ralliement créditiste et même du parti séparatiste — il y en a plusieurs qui ne sont pas parmi nous aujourd'hui, mais même ceux qui y étaient — on remarque que tout le monde s'entendait pour dire qu'il s'agissait là d'un

rattrapage, c'est-à-dire qu'à $15,000 en 1971, il s'agissait de rattraper la perte du pouvoir d'achat que les Québécois avaient eue de 1968 à 1971. Tout le monde à l'époque le disait alors et je recite M. Ryan qui a dit que, dans l'ensemble, cependant, ces montants étaient raisonnables à l'époque où ils furent fixés.

Or, que fait-on depuis ce temps? Justement parce qu'on avait marqué 4 p.c, c'est qu'on indiquait qu'à chaque année, il y avait lieu d'effectuer un certain rattrapage, que les $15,000 valaient pour le 1er janvier 1971. On avait mis dans la loi $15,600 pour le 1er janvier 1972.Par après, il n'y a pas eu d'autre loi votée, donc les salaires sont restés exactement les mêmes.

Je reprends encore un argument que je vous ai fait valoir sur un autre point de vue, puisque cela tourne toujours au même point, pour vous rappeler — malheureusement, les quelques heures que j'ai eues avec ma famille m'ont empêché de mesurer — mais, encore une fois, le chef de l'Opposition me donnera la distinction, elle est marginale.

Si on prend la moyenne, l'évolution des salaires dans le domaine manufacturier, au Canada ou au Québec, ce serait à peu près la même chose, on obtient, depuis le 1er — je demande au député de Beauce-Sud de m'écouter, c'est très important — du 1er janvier 1971 au 1er avril 1974, l'augmentation des salaires des ouvriers a été de 38.4 p.c, d'après Statistique Canada.

C'est donc dire que, si on avait appliqué aux députés la même hausse de salaire qu'a connue l'ensemble des ouvriers du secteur manufacturier, le 1er avril 1974, pas le 26 décembre, le 1er avril 1974, nous nous retrouvions avec un salaire de $20,760; 38.4 p.c. plus $15,000, vous faites le calcul, cela va vous donner $20,760. Donc, si on dit, comme l'a affirmé le député il y a quelques instants: Je suis en faveur que le salaire des députés se maintienne, qu'on ne perde pas le pouvoir d'achat, qu'on soit comme les autres salariés, il est inutile de parler de $19,000. Il faudra au moins admettre que, d'après les chiffres, d'après les statistiques, à la page 87 du volume que je vous ai cité l'autre jour: Salaires et traitements moyens, au 1er avril, c'est $20,760.

Le chef de l'Opposition est au courant que, dans le projet de loi, on réduit — je le souligne — l'indemnité des parlementaires qui baisse de $7,140 à $7,000. Il y a donc un montant de $140 qui est diminué, je tiens à le souligner...

M. MORIN: C'est énorme!

M. SAINT-PIERRE: Un montant de $140 qui est diminué, ajoutez à cela le fait que ce montant...

M. HARDY: En tout, cela fait pas loin de $1,700.

M. SAINT-PIERRE: Ce montant n'était pas imposable et je pense qu'on trouvera que, avec les $20,760, plus ces $140, ce qui donne $20,900, plus la différence, du fait que les $140 n'étaient pas imposables, alors que ce montant est pleinement imposable, on est très près des $21,000 du gouvernement.

D'ailleurs, c'est pour cette raison que le gouvernement n'a pas donné suite au rapport de M. Bonenfant, qui nous recommandait $22,000. C'est que là, effectivement, la hausse aurait été plus forte que pour l'ensemble des ouvriers canadiens. Mais à $21,000, depuis le 1er janvier 1971, elle est exactement, à quelques cents près la même que l'évolution des salaires dans l'industrie manufacturière canadienne.

Permettez-moi, M. le Président, de vous donner d'autres exemples. La question est fondamentale. Pour les gens, en démocratie, que vaut un député? J'ai dit que la seule chose qui est commune entre nous, que nous soyons du Parti libéral, du Parti québécois ou du Ralliement créditiste, la seule chose qui nous permet de dire que nous sommes tous semblables, c'est que nous détenons tous un mandat de nos électeurs, que nous soyons avocats, que nous ayons un cours primaire, que nous soyons serre-freins, avec beaucoup d'expérience, dans un milieu rural ou dans Montréal, c'est cela qui fait la difficulté d'un député, parce que la seule chose qui fait que tous les députés devraient avoir un certain salaire, c'est que tous ont eu ce mandat des électeurs et qu'à l'intérieur de nos institutions ils ont cette responsabilité de pleinement jouer, avec leur bagage intellectuel, avec leur formation, avec leur longue expérience dans certains cas, et avec une faible expérience dans d'autres, parce qu'on est beaucoup plus jeune, et ainsi de suite.

Mais chacun a reçu un mandat. Ce n'est pas l'adversaire qui a reçu un mandat.

Je voyais dans les galeries, tout à l'heure, l'adversaire du premier ministre dans le comté de Mercier. C'est un homme que je respecte beaucoup, mais il n'a pas eu de mandat. Le premier ministre, dans Mercier, a reçu un mandat et c'est cela qu'on tente de fixer aujourd'hui.

Je vous ai donné l'analogie, M. le Président, des étudiants. Rappelons-la. A la baie James, cet été, l'étudiant — pour 37 1/2 heures de travail, d'après le décret de la construction — recevait $5.29. Après 37 1/2 heures — il y en a plusieurs qui ont fait cela — c'était temps double.

J'ai fait de petits calculs, tout à l'heure, M. le Président. Cela donne, pour soixante heures de travail... Tout à l'heure, on s'est entendu, je pense, tous les partis pour dire que, en général — il peut y avoir des exceptions, on pourrait en citer chez les professeurs, on pourrait en citer chez les étudiants — notre boulot, c'est soixante heures de travail.

Or, un étudiant à la baie James, cet été, recevait $437.20 par semaine, pour soixante heures de travail. M. le Président, cela veut dire

que l'étudiant qui travaillait soixante heures à la baie James — rappelons-nous que dans certains cas, il s'agissait de pousser sur un bouton dans un banc de gravier, de prendre les calculs de quantités qui étaient émises d'une place à l'autre, vérifier, prendre des sondages de béton, ce n'était pas un ouvrage qui demandait, soit sur le plan intellectuel, soit sur le plan physique, beaucoup de travail — avait $7.28 l'heure.

Ce que le gouvernement vous dit aujourd'hui, c'est qu'un député — si un étudiant vaut $7.28 — vaut au moins $6.73. C'est cela qu'on vous dit, parce que le petit salaire de $21,000 qui est proposé dans le texte de loi représente, sur une base de soixante heures, $6.73.

Un autre point, M. le Président, que j'aimerais rappeler. C'est le fait que trop souvent — il me semble qu'il y a un peu de mauvaise volonté — on additionne, d'une façon assez à la légère les indemnités avec les allocations de dépenses. Les allocations de dépenses, ce ne sont pas du salaire déguisé. Si c'est du salaire déguisé, je voudrais bien qu'on me le dise, sans cela on va changer la loi et je suis prêt à entendre des arguments pour me dire: Le montant qu'on projette de $7,000 par année, pour les allocations de dépenses, c'est insuffisant ou c'est trop. Je suis bien prêt à l'entendre. Peut-être que, dans certains cas, lorsqu'on est dans un milieu très urbain, finalement, ses électeurs, ce sont quelques pâtés de rues dans le centre de Montréal, que les dépenses sont moindres. Même à cela, je ne serais pas porté à porter jugement. Mais on a combien de nos collègues qui sont obligés de faire 30,000 milles et 40,000 milles par année avec leur voiture. Je rappelle aux gens qu'ils ne sont pas dédommagés pour cela. A l'intérieur de leur comté, ils se présentent, ils ont des repas à l'extérieur et ils n'ont pas un sous noir, ils n'ont pas de compte de dépense. C'est pour cela les $7,000 et, à mon sens, cela me parait malhonnête lorsqu'on ajoute l'allocation de dépenses, qui tient lieu à des dépenses réelles encourues par les députés, avec le salaire.

Le salaire des députés, je le répète, proposé par la loi, est de $21,000, pas un sous de plus. Comme ce serait malhonnête de dire au chef de l'Opposition, dans le moment: Mon cher ami, vous retirez $41,000 de salaire. Je ne serais pas capable de lui dire, parce que je sais que ce n'est pas vrai. Le chef de l'Opposition a un montant total de $41,000. Peut-être qu'il a de la difficulté à comprendre ce que c'est pour mon ami, Glen Brown, avec $15,000 mais, ce qu'on sait, c'est que, dans votre salaire de $41,000, il y a un montant — que vous connaissez plus que moi — qui est prévu pour des dépenses.

D'ailleurs, dans certaines des autres Législatures, si vous poussez plus à fond, dans les autres provinces, vous vous rendrez compte qu'on est beaucoup plus libéral — si je peux employer l'expression — pour les comptes de dépenses des députés, c'est-à-dire qu'en dehors des allocations, il y a une foule de dépenses, c'est-à-dire que si vous recevez un autre parle- mentaire... Je tiens à préciser combien de fois ici on reçoit quelqu'un à un repas et on est obligé de le payer soi-même. Même les ministres, on le sait, j'ai fait une tournée comme ministre de l'Education, je suis allé dans je ne sais pas combien de coins. Inutile de vous dire que mon allocation de dépenses, je l'ai mangée plusieurs fois.

M. le Président, je reviens à un autre point qui a été mentionné: le salaire minimum. Nous avons M. Claude Castonguay qui a un mandat et se penche, depuis quelques mois, sur toute la question du salaire minimum. A la mi-février, il va nous donner un rapport, un rapport substantiel, sur toute la question du salaire minimum. Si M. Castonguay, à la mi-février, dit au gouvernement, comme le rapport Bonenfant, avec un rapport aussi étoffé: Vous devriez porter le salaire minimum à $2.50, j'ai analysé toutes les implications de cela et vous devriez le faire, cela serait une justice sociale de le faire, c'est nécessaire, il n'y a rien qui vous dit que le gouvernement ne le fera pas au mois de février. Mais est-ce que ce ne serait pas prématuré d'entrer dans une espèce de marchandage avec l'Opposition? Tout à l'heure, si on les écoute, on va dire: Pour augmenter le salaire des députés, vous allez être obligés de nous donner l'indépendance, même si les Québécois ne la veulent pas. On dit: "Non à ce chantage, on dit: Non, chaque chose en son temps.

Il y avait la question des députés. On a donné cela au comité Bonenfant et il nous a donné un rapport.

On vous dit pourquoi on va en deça de ce rapport. Il y avait un autre problème, c'était le salaire minimum qui a été augmenté...

M. MORIN: Je ne vous ai pas demandé de faire l'indépendance, M. le ministre, on sait bien que vous ne ferez pas l'indépendance.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!

M. SAINT-PIERRE: A l'ordre! Il y avait un autre problème, c'était le salaire minimum, on a confié cela à un groupe de travail présidé par Claude Castonguay, et à la mi-février, il va nous présenter son rapport. On va agir selon ce rapport. Je tiens à vous rappeler quand même que, pour le salaire minimum, il fut augmenté depuis deux ans — je l'ai donné dans mon texte de deuxième lecture — de 33 p.c, donc beaucoup plus que les 23 p.c. suggérés pour le salaire des députés. Quand je regarde tout cela — je pourrais en parler beaucoup plus longtemps, je ne voudrais pas abuser du temps de cette commission — je suis un peu d'accord avec M. Ryan. Je vais continuer des citations, parce qu'il y a toujours deux côtés de la médaille. C'est un défaut qu'on retrouve...

M. MORIN: M. Ryan...

M. SAINT-PIERRE: M. Ryan va dire et je

cite, éditorial du 17 décembre: Le Parti québécois a décidé dans sa sagesse puritaine et électoraliste qu'il ferait une lutte de principe au gouvernement sur cette question. On a, néanmoins, du mal à comprendre le bien-fondé de sa position. Les députés, en se faisant élire à l'Assemblée nationale, n'ont pas fait, que l'on sache, le voeu de pauvreté. Ils n'ont pas fait davantage le voeu de servir d'otages dans la recherche d'un partage plus équitable de la richesse. Ils se sont, au mieux, engagés à travailler honnêtement, au meilleur de leur connaissance et de leur expérience, à l'amélioration du sort de leurs concitoyens, et à la bonne gestion des affaires publiques. Je termine. Dans la mesure où...

M. MORIN: Faisons-le.

M. SAINT-PIERRE: ... il voudra s'en tenir aux recommandations du comité Bonenfant — je vous rappelle que nous sommes allés en deçà du comité Bonenfant tant sur le niveau du salaire que sur la forme de l'indexation — je continue la citation: ... le gouvernement Bourassa disposera néanmoins, s'il décide d'agir, d'une base solide et impartiale. Le comité Bonenfant a soumis un rapport documenté et judicieux. On ne voit pas, au nom de quel masochisme, il faudrait refuser indéfiniment de donner suite à ses conclusions.

Quand j'analyse l'ensemble de la question, je ne vois réellement aucun fondement solide à la position prise, à la fois par le crédit social réel et par le crédit social pour les intellectuels, à moins bien sûr, que dans les deux cas, on puisse à la fois empocher l'argent et tirer un petit peu d'avantages électoraux.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: M. le Président, je vous demanderai d'abord la même latitude que vous avez accordée, sur cet amendement, au député de Johnson, parce que c'est sur le même terrain que lui que je voudrais faire cette première intervention en commission parlementaire.

J'ai écouté aujourd'hui, encore une fois, très attentivement, comme depuis son retour à l'Assemblée nationale, le député de Johnson. J'ai préféré cette intervention, je dois le dire, à celle qu'il nous a faite en deuxième lecture, mais je pense que ce n'est pas l'endroit pour faire mon appréciation de chacune de ses interventions. Je pense que les larmes qu'il a voulu nous faire tirer l'autre soir sur les malheurs d'un steak au poivre n'ont pas eu beaucoup de succès, j'en ai l'impression. Ce n'est pas l'endroit pour les reprendre.

Chaque fois que j'écoute le député de Johnson, comme à chaque fois que j'écoute des citoyens, je dois dire, de son époque, de son âge, qui ont contribué au Québec dans lequel j'ai vécu, alors que ce dernier était ministre à un moment où je n'étais même pas au monde, j'ai toujours un peu les sentiments mélangés à cet égard. Il y a beaucoup de vrai, d'abord, dans ce que dit le député de Johnson. A chaque fois, c'est cette difficulté de le démêler complètement d'un certain nombre de clichés et de formules passe-partout qui rend la compréhension de ce qu'il veut nous dire particulièrement difficile. Quant à lui, par exemple, le député de Johnson a été député de Champlain pendant 25 ans, je crois; avant même que je ne songe à faire de la politique, la réputation du député de Champlain, à l'époque, était parvenue jusqu'à mes oreilles.

Le député de Johnson disait tout à l'heure, en se basant sur son expérience de député de Champlain, qu'un député peut travailler beaucoup, qu'on ignore parfois la quantité d'heures de travail qu'il peut mettre au service de ses électeurs, que cela lui est souvent dû, qu'on dit toujours qu'il n'en fait pas assez. Je n'ai que cinq ans d'expérience pour vous dire que c'est vrai. Le député de Johnson, pour sa part, est certainement un qui a travaillé beaucoup à ce qu'on m'a dit, et à ce qu'ont même dit les citoyens de Champlain, que je connais maintenant. Donc, ceci est acquis. J'espère que, quelle que soit la conclusion à laquelle je parviendrai dans cette intervention, le député de Johnson ne dira jamais que je lui ai nié ce fait. Je l'affirme, il a travaillé, la preuve, je crois, c'est qu'il travaille encore beaucoup depuis qu'il est revenu à la Chambre.

Ce sont ces formules, ces clichés, autour desquels un véritable monument, auquel on pourrait offrir un hommage, s'emberlificote, finit par tronquer la vérité et nuire à la cause que voudrait défendre le député de Johnson, soit la reconnaissance, par les citoyens, du travail que font les parlementaires qu'ils ont élus.

M. le Président, ce sont ces formules passe-partout de "je sers le bien commun", "je suis au service de la population", que les citoyens ont entendues 1,500 fois par 1,500 couleurs différentes, par 1,500 banderoles différentes, par 1,500 porte-parole officiels différents, qui font qu'à un certain moment elles ne passent plus. Parce que, M. le Président, les députés fainéants, les députés qui sont absents de la Chambre, les députés qui ne disent jamais un mot aux commissions parlementaires, les députés qui s'assoient et qui n'ouvrent jamais un dossier, les députés qui ne font jamais de recherche, les députés qui ne retournent jamais les appels téléphoniques qu'ils ont, les députés qui ne font jamais de bureau le lundi dans leurs comtés...

M. HARDY: Ils se font battre.

M. CHARRON: ... Ce n'est pas vrai! Ils ne se font pas battre. Malheureusement! Ce n'est pas vrai. Ils ne se font pas battre. Ce sont aussi les mêmes députés qui disent: Je sers le bien commun, je fais 60 heures de travail par semaine. Ce sont des députés menteurs. Il y en

a, des députés menteurs, et ces députés, se servant des mêmes arguments que ceux, des députés qui s'en servent pour dire le vrai, dévaluent la formule, à ce point qu'à chaque fois — je suis rendu comme n'importe quel citoyen — que j'entends un député dire, comme, tour à tour, ils défilent à l'émission de Mme Payette, commencer sa réponse en disant: Honnêtement, je vais vous dire... Comme si un député était obligé de mettre l'adverbe "honnêtement" avant de s'ouvrir la trappe, M. le Président. C'est assez curieux, cette utilisation effrénée qu'on a faite de formules passe-par-tout, genre représentants du peuple, je ne vis, je ne dors, je ne mange que pour la population...

M. HARDY: Vous en mettez, vous en mettez!

M. CHARRON: ... et de dire...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: ... cela s'est fait. Le député de Johnson, qui vient d'une époque que je rappelais tout à l'heure, sait très bien que c'était abondamment utilisé, et je me soucierais d'assister à quelques assemblées électorales du ministre des Affaires culturelles, pour voir si elles ne reviennent pas à la surface assez facilement.

M. HARDY: Vous manquez de respect pour mes électeurs.

M. CHARRON: M. le Président, mon intervention, je veux la faire avec la conclusion de mon intervention en deuxième lecture à l'Assemblée nationale. Il est vrai qu'il y a des difficultés dans ce métier. Il est vrai que, par exemple, pour ceux qui ont des familles et qui sont éloignés de Québec, cela constitue un problème majeur qui finit par toucher à l'intérieur plusieurs des membres de l'Assemblée nationale. C'est vrai que cela comporte une partie d'insécurité constante. On ne sait jamais, du jour au lendemain, quand les électeurs qui nous ont élus vont nous retirer cette confiance. Cela peut arriver n'importe où. C'est arrivé dans ce qui s'appelait les pires, les plus forts châteaux forts qu'un député, élu depuis une vingtaine d'années, soit, du jour au lendemain, remercié de ses services. C'est arrivé à d'excellents parlementaires, pour être remplacés par des imbéciles, et c'est, heureusement, arrivé à des imbéciles, pour être représentés pas d'excellents parlementaires.

C'est vrai que nous vivons aussi dans une période d'insécurité. Mais, M. le Président, personne ne nous force à être dans ce métier, personne. Si, à un certain moment, les difficultés deviennent plus nombreuses que les avantages, si les malheurs qu'occasionne un tel genre de métier deviennent insupportables, personne ne nous attache à notre siège et à notre fauteuil. C'est pour cela qu'avant même d'être ici, à l'Assemblée nationale, lorsque j'étais étudiant, et que j'assistais à des interviews d'hommes politiques qui, ipso facto, retombaient sur ce terrain... Parce que c'est un terrain électoralement rentable, M. le Président, c'est un terrain électoralement rentable, dire que je n'ai pas le temps de voir ma famille, je n'ai pas le temps de voir mes enfants. C'est bon, parce que les gens écoutent cela et disent: Ne se dévoue-t-il pas, cet homme? Ne se dévoue-t-il pas? Cela va chercher des votes. Qui n'a pas mis, à un moment ou à un autre, ses sentiments personnels sur la table pour se faire du capital politique? Voyons donc! Et on est encore en train de faire la même chose pour aller se chercher une augmentation de salaires exagérée et inqualifiable dans le montant qui est là, telle qu'elle est présentée actuellement.

Mais, il n'y a pas que des désavantages dans ce métier. S'il n'y avait que des désavantages, il n'y aurait pas un homme autour de la table, ici. Moi, le premier. Et le député de Johnson devrait être celui qui devrait nous le dire au nom de tous, parce qu'il y a aussi une passion dans ce métier. Il y a aussi un plaisir qu'on peut éprouver à être dans un pôle qui détermine l'axe de notre collectivité. C'est aussi un avantage pour moi aujourd'hui d'être peut-être un des premiers de ma génération à être assis en face d'un ministre et être en train de lui donner ma version des choses, de lui faire mes suggestions pour un projet de loi, de travailler avec une équipe qui a été élue par des gens dans un programme précis, pour défendre une philosophie précise. C'est avantageux, c'est gratifiant. Combien de citoyens intelligents, dévoués, honnêtes, mais qui sont incapables de s'astreindre à l'effort électoral, des poignées de main et des "hustings", qui ne sont pas orateurs, qui ne savant pas s'exprimer, mais qui seraient d'aussi excellents serviteurs publics du bien commun et du peuple, mais qui ne seront jamais capables de se rendre à cette table pour donner leur opinion simplement parce que le filtre électoral est tellement chez nous imprégné de traditions, de tabous en même temps, que ça constitue pour ces citoyens-là une épreuve insurpassable et qu'ils doivent se contenter d'être assis devant leur téléviseur, d'être à l'écoute de leur poste de radio pour entendre ce que d'autres, qu'ils ont élus à leur place, ce qu'ils espèrent, disent en leurs nom et place. ;

Mais c'est passionnant le métier que nous faisons et c'est en soi déjà très gratifiant que d'être au coeur d'une collectivité et d'être parmi ceux qui déterminent ces pôles-là. Je ne parle pas juste du rôle que nous jouons ici à l'Assemblée nationale, mais de nous promener dans nos comtés. Pour ceux qui en font du porte-à-porte, pour ceux qui en font des visites dans leur comté, sentir que les gens en confiance en soi, tu rentres chez toi le soir et tu te dis: C'est en moi qu'ils ont confiance, cela te met une pression sur les épaules. C'est vrai, cela te met une responsabilité. Comme disait le député de Johnson, tu ne peux pas dire n'importe quoi, n'importe quand en fonction

de ça. Mais combien de citoyens le mériteraient plus que nous de l'avoir et nous sommes les chanceux qui l'obtenons dans une collectivité d'être un groupe d'hommes dans une collectivité qui déterminent son futur.

J'en ai assez d'entendre parler de notre métier comme s'il était un nid de souffrance et un nid de torture. C'est vrai qu'il y a des côtés... Moi, je suis tanné de voir qu'à chaque fois que je mets le nez dehors, je deviens un homme public, que je suis susceptible d'être questionné et interviewé. J'aimerais bien cela qu'on me sacre la paix aussi quelquefois, mais je l'ai cherché ça, j'ai couru après. J'au couru après deux fois. Si j'en ai encore la force, après les sept ans de politique difficile que j'aurai passés ici, je courrai après une troisième fois jusqu'à ce que j'obtienne ce que j'ai voulu obtenir en adhérant au Parti québécois.

Mais, toutes les interventions que l'on fera sur les malheurs des députés n'éteignent pas le fait que, pour un "an", par exemple, le député de Johnson, n'était plus capable de subir la retraite à $21,000 qu'il avait par année, que de lui-même, comme un artiste qui a besoin de revenir sur scène pour se produire parce qu'il y vivait, parce que c'était sa vie, parce qu'à force d'être public on finit par en prendre tout le moule, il s'ennuierait à mourir, le député de Johnson, s'il n'était pas avec nous à la commission parlementaire. Mais si je n'avais pas été élu le 29 octobre 1973, même si j'avais 27 ans, je me serais ennuyé à mourir également parce que j'ai pris goût à ce métier-là. J'ai pris goût aussi à la sécurité matérielle qu'il m'a toujours accordé. Les $15,600 par année que j'ai reçus m'ont permis de faire le niveau de vie que j'ai et de remplir mon mandat. C'est exactement pourquoi j'ai voté pour la première augmentation de salaire en 1971 parce que j'étais convaincu que cela me la prenait, comme je suis convaincu aujourd'hui également que, dans cette période que traverse la collectivité québécoise, nous avons aussi la même chose à faire, chacun d'entre nous.

Nous avons à penser, tels que nous sommes-là, à la collectivité d'abord. Si les mots qu'a employés le député de Johnson, qui viennent couvrir l'amendement proposé par le député de Beauce-Sud ou la philosophie derrière le projet de loi gouvernemental, s'ils ne sont pas ces mots-là que des clichés ou des formules usuelles quitte à être baladés d'une estrade à l'autre, alors ils doivent avoir un sens, si nous sommes de ces serviteurs du peuple comme vient de le dire le député de Johnson à plusieurs reprises. Alors, commençons donc par y penser ici autour de cette table. Nous avons ce privilège que n'ont pas beaucoup de citoyens dans le Québec de fixer nous-mêmes nos taux de rémunération. Nous disons, nous du Parti québécois, que ce privilège, s'il doit être utilisé — et il le sera incessamment — nous sommes toujours d'accord sur un rajustement ou un modèle d'indexation parce que, comme le dit le chef de l'Opposition, la vie monte pour nous comme pour tout le monde aussi. Mais l'utilisation de cet outil, si particulier que nous avons dans la main, ne doit pas se faire sans condition, sans contrepartie et sans geste concret posé par cette assemblée. Sortons donc, une autre fois, au lieu des sparages éternels à l'Assemblée nationale, avec des résolutions concrètes à partir desquelles nous pourrons finalement faire des formules et des clichés, quelque chose de fondé. Voilà ce que j'avais à vous dire.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Chicoutimi.

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je voudrais seulement remercier le député qui a pris ses 20 minutes sur moi particulièrement.

M. BEDARD (Chicoutimi): Je vais en prendre un autre.

M. BELLEMARE (Johnson): II a été très aimable. Je n'ai pas le droit de réplique, parce que, si j'avais à l'exercer, je pense que je parlerais d'autre chose que du cliché.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, suite à l'amendement qui a été présenté par le député de Beauce-Sud qui recommande que l'article 5 soit amendé de façon à remplacer le montant de $21,000 par $19,000, nous ne pouvons qu'être d'accord à l'effet que c'est une position plus raisonnable, mais, à mon humble avis, ce n'est pas une position plus acceptable.

Je sais très bien que c'est un sujet délicat que celui de parler de l'augmentation du salaire des députés. Nous sommes d'ailleurs un des seuls corps constitués qui a le privilège de pouvoir se voter des augmentations. Si cette situation comporte des privilèges, elle comporte également des responsabilités. Si la population qui nous a élus veut nous garder ce privilège de pouvoir se voter des salaires, je pense qu'en même temps elle fait confiance à ceux qu'elle a élus afin qu'ils s'en servent d'une façon raisonnable et justifiée.

Etre contre l'augmentation du salaire des députés dans la situation actuelle, ce n'est pas une question électoraliste, M. le Président. Je le dis très sincèrement, parce que vous savez très bien — chaque membre de la commission le sait — dans deux ou trois ans, quand les élections arriveront, cela va faire longtemps que l'augmentation que se seront votée les députés aura été oubliée. A ce moment-là, je ne crois pas qu'être présentement contre l'augmentation du salaire des députés soit une position purement électoraliste. Au contraire, personnellement, c'est une question de principe, c'est une question de logique. Il y a moins d'un an, nous avions, nous du Parti québécois, à nous prononcer sur l'augmentation du salaire des juges.

Nous nous sommes prononcés contre l'augmentation du salaire des juges. J'ai ici en main le texte même de l'intervention que j'avais faite à ce moment-là. Nous nous sommes prononcés contre l'augmentation du salaire des juges, non pas en disant d'une façon démagogique que ces derniers n'avaient pas droit à une augmentation, tenant compte du travail et des responsabilités qu'ils avaient au sein de la société, mais en disant essentiellement ceci: Les conditions sociales étaient telles que décemment, à cette occasion, au moment où le projet de loi était présenté, il ne pouvait être accepté — du moins par le Parti québécois — qu'une augmentation leur soit accordée.

Il n'y a pas plus d'un an, M. le Président, que cette situation s'est présentée et je crois sincèrement que la situation sociale dans laquelle nous vivons, les conditions sociales de nos compatriotes, ne sont pas tellement changées depuis ce temps. C'est tout simplement la logique, c'est tout simplement une position sérieuse et logique qu'adopte à l'heure actuelle le Parti québécois et le parti au pouvoir devait le savoir et devait appréhender et devait s'attendre à cette position que nous prenons. Je sais, dès que nous disons, nous du Parti québécois, que nous ne sommes pas en faveur de l'augmentation du salaire des députés tant qu'on n'aura pas haussé le salaire minimum, que nous ne serons pas en faveur de l'augmentation du salaire des députés tant qu'on n'aura pas permis la réouverture des conventions collectives afin de permettre aux travailleurs de pouvoir réclamer rétroactivement les indexations auxquelles ils pourraient avoir droit, je sais que nous nous faisons accuser de faire de la démagogie.

Mais, dans le fond, qu'est-ce que nous faisons présentement, sinon ces deux choses, à savoir hausser notre salaire et, deuxièmement, nous permettre une indexation rétroactive que nous ne permettons pas aux travailleurs du Québec, à moins que ceux-ci acceptent d'entrer dans l'illégalité pour la réclamer? Nous, nous nous permettons un cadre très juridique, très législatif pour nous l'accorder.

M. le Président, je ne crois pas que ce soit de la démagogie que d'apporter ces raisons qui font que nous nous opposons à l'augmentation du salaire des députés. J'ai écouté tout à l'heure avec beaucoup d'attention le député de Johnson. Je me suis rendu compte qu'autant il pouvait être facile de faire de la démagogie en étant contre l'augmentation du salaire des députés, autant il était facile de faire de la démagogie également en étant pour l'augmentation du salaire des députés.

Le discours du député de Johnson nous a permis une chose, en tout cas à moi personnellement, remarquez que je peux être dans l'erreur, mais c'est une constatation qui m'est venue à l'esprit en l'écoutant proposer à cette commission des considérations telles que nous serions très justifiés de nous voter une augmentation de salaire. Entre autres, il parlait des conditions difficiles des députés dans l'accomplissement de leur tâche et il demandait aux membres de cette commission où étaient les députés de 1944. Il en profitait pour faire allusion à Pierre Laporte, qui, selon son expression, est mort au devoir et, il faisait allusion également à Daniel Johnson, qui est mort au devoir.

M. le Président, loin de moi l'idée de vouloir dénier cette réalité qu'il y a des gens, à savoir les députés, qui, après s'être sacrifiés pour ceux qui les ont élus, se placent dans des conditions difficiles; loin de moi l'idée de vouloir dire qu'il n'y a pas de députés qui se sacrifient pour leurs électeurs. Mais je pourrais bien demander au député de Johnson où sont les cuvistes qui travaillaient en 1944 à l'usine d'Arvida et qui sont encore en vie. Je vous assure qu'il n'en trouvera peut-être pas tellement. Au contraire, il va trouver une longue liste de travailleurs qui, en plus d'avoir gagné la vie de leur famille dans des conditions difficiles, se sont ramassés en très bas âge avec des maladies industrielles telles que leur vie a été beaucoup plus courte que celle de l'ensemble de leurs concitoyens. A ce moment-là, je ne trouve pas que des exemples de ce genre soient de nature, personnellement en tout cas, à me faire changer d'idée sur l'opportunité ou non de hausser le salaire des députés dans les conditions sociales actuelles. Ces travailleurs de l'Alcan ont eu, je pense, à déployer autant d'efforts, autant de dévouement, autant d'abnégation que n'importe quel politicien de l'époque, n'importe quel politicien de maintenant, pour assumer leur devoir à ce moment-là, pour assumer la responsabilité du soutien de leur famille et de leurs enfants.

Si on continuait ces comparaisons, il y aurait le cas de tous les mineurs qui vivent dans des conditions aussi difficiles que les députés et qui travaillent à des salaires ne leur permettant pas des voyages de vacances dans les pays chauds quand vient l'hiver, ne leur permettant pas autre chose que d'assurer très difficilement la subsistance de leur famille. Les mesures de sécurité souvent leur font drôlement défaut, ils vivent dans un état de tension constant, autant que le député ou l'homme politique peut vivre dans un état de tension qui, par moments, est très difficile à supporter, j'en conviens.

Le député de Johnson amenait comme arguments des genres de raisonnement à savoir que les députés ont des vies plus compliquées — je l'ai pris textuellement — que les autres. Je ne crois pas que les politiciens aient des vies plus compliquées que les autres. Une chose est certaine, ils ont un privilège, celui de pouvoir sortir de cette vie compliquée s'ils le veulent; alors que les mineurs ou les cuvistes d'Arvida, eux, n'ont pas le choix d'en sortir, s'il veulent continuer à assurer leur subsistance, ils doivent continuer à travailler et à assumer leurs responsabilités.

Il ne faudrait pas oublier non plus que ceux qui sont contre l'augmentation du salaire des députés ont des vies aussi compliquées...

M. HARDY: Ils vont encaisser leurs chèques quand même.

M. BEDARD (Chicoutimi): Etes-vous contre cela?

M. HARDY: Bien! Etes-vous prêts à y renoncer?

M. BEDARD (Chicoutimi): Dans quelles conditions cela mettrait-il les autres députés si ceux-ci commençaient à utiliser cette manière d'agir?

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!

M. HARDY: Me permettez-vous une question? Cela s'est déjà fait.

M. BEDARD (Chicoutimi): Une chose est certaine, c'est qu'ils travaillent au moins autant que les autres, sinon plus, et si le législateur décide d'adopter une loi en ce sens, je ne vois pas pourquoi il y aurait des exceptions. Cela ne m'énerve pas votre...

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est de la démagogie ce que vous faites là. C'est bien beau de dire que les politiciens ont une vie compliquée, mais, je le répète, ceux qui sont contre l'augmentation du salaire des députés, au moment où je vous parle, ont des vies tout aussi compliquées que ceux qui sont pour l'augmentation du salaire des députés. Ils vivent également les difficultés familiales que cette vie peut comporter et je ne vois pas pourquoi on se servirait de cet argument pour inciter ou pour justifier une position qui soit pour ou contre.

Je vais y venir au conseil national puisque vous voulez qu'on y vienne. Je vais y venir, d'accord?

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, je ne consacrerai pas vingt autres minutes au député de Johnson, mais il reste quand même qu'il s'est permis de faire certaines affirmations qui n'ont pas une résonance, à mon avis, qui puisse me faire changer d'idée lorsqu'il prétendait que nous sommes l'élite et qu'en conséquence c'était normal qu'on se vote cette augmentation de salaire. Ce qui fait les élites des sociétés ce ne sont pas les salaires, loin de là, parce que si le travail de député est important ici au Québec, il est important aussi dans les autres provinces du Canada. A moins que je ne me trompe, je pense que les députés peuvent représenter une certaine partie de l'élite, une certaine catégorie de l'élite, dans les autres provinces, comme dans le Québec. Or, on se rend compte très facilement par les chiffres qu'avec les augmentations que nous voulons nous donner, nous serons les deuxièmes parlementaires les mieux payés au Canada.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): Bien, peu importe. Laissez-nous donc tranquille, vous avez choisi. C'est inexact. Nous serons les deuxièmes parlementaires les mieux payés au Canada.

UNE VOIX: II y a un mois de session dans les autres provinces.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): Tenez-vous donc tranquille! Vous avez choisi, c'est inexact. Nous serons les deuxièmes parlementaires, M. le Président, les mieux payés.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): J'inviterais le député de Louis-Hébert à respecter au moins élémentairement...

M. BEDARD (Chicoutimi): On va avoir l'occasion de le dire...

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Si vous voulez intervenir après, vous pourrez, aussi longtemps que vous le voudrez.

M. MORIN: L'élémentaire...

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, le député de Johnson, également, disait que c'est dur, la vie politique, qu'on se fait traiter de tous les quolibets possibles. Entre autres, textuellement, il disait: II n'y a rien de pire que de se faire traiter de traître. Il y a d'autres classes de la société qui se font traiter bien pire que cela et qui sont bien moins bien payés que nous le sommes.

Depuis que je suis ici, à maintes et maintes reprises, on a traité les assistés sociaux de lâches, de paresseux et de gens qui ne voulaient pas travailler. Cela s'est fait d'ailleurs au congrès libéral, lorsqu'il a été question des assistés sociaux.

M. HARDY: M. le Président, j'invoque le règlement.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Le ministre...

M. BEDARD (Chicoutimi): Pourtant, ils n'ont pas voulu leur condition.

M. HARDY: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. BEDARD (Chicoutimi): Pourtant, on se permet de les traiter de lâches.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Question de règlement.

M. BEDARD (Chicoutimi): On va essayer de commencer...

M. HARDY: J'invoque le règlement.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Question de règlement.

M. HARDY: M. le Président, il y a eu une motion, au début de nos travaux, disant que seuls les membres de cette commission avaient droit de parole. Le député de Louis-Hébert, à ma connaissance, n'est pas membre de la commission.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Je ne lui ai pas donné le droit de parole.

M. BEDARD (Chicoutimi): Pourquoi? Cela vous fait mal de m'interrompre présentement?

M. le Président, les assistés sociaux, qui ne veulent pas leur sort, se font souvent traiter de lâches, même dans certains congrès de partis que nous connaissons bien dans tout le Québec. Cela n'est pas si grave que cela que certains députés se fassent traiter de traîtres ou de quoi que ce soit. Ce n'est pas la fin du monde. De toute façon, les assistés sociaux n'ont pas à se présenter souvent devant un tribunal pour expliciter leurs conditions. Au moins, les politiciens ont la possibilité de revenir, à tous les quatre ans, devant le tribunal de la population qui est capable de juger, par "oui" ou "non", du fondé des accusations.

Il y avait une motion que nous avions faite — elle prend tout son sens, à l'heure actuelle — lors du dépôt du projet de loi. Nous avions demandé à l'Assemblée nationale de retarder de six mois ce projet de loi afin de permettre aux députés d'informer la population sur le vrai rôle du député et de voir jusqu'à quel point cette population peut être d'accord. Qu'on le veuille ou non, qu'elle perçoive bien ou qu'elle perçoive mal le rôle du député, une chose est certaine, c'est que la population n'est pas d'accord avec cette hausse de salaires qui est injustifiée et extravagante.

Lorsque ce gouvernement n'arrête pas de nous parler de paix sociale, à toutes les occasions qui lui sont fournies, on peut sûrement lui dire que la paix sociale se paie, qu'elle a un prix et que le petit prix qu'on pourrait payer pour que certaines gens, pour que cette population ne soit pas offusquée, ne soit pas scandalisée par les hausses de salaires que les députés veulent bien se donner, ce serait tout simplement peut-être une campagne d'information qui pourrait durer six mois pour dire à la population quel est ce rôle du député.

M. HARDY: Cela prend du temps à vous faire comprendre.

M. BEDARD (Chicoutimi): En ce qui me regarde, je pense que j'ai compris bien plus vite que vous pensez. Il ne faut pas oublier que nous sommes dans une position tout à fait spéciale. Je l'ai dit tout à l'heure: Nous sommes juge et partie.

Nous sommes le seul corps constitué qui peut se voter à lui-même un salaire. Cela implique des responsabilités. C'est pour cela que le Parti québécois, se voyant dans cette position d'être juge et partie, a cru de son devoir non seulement de tenir compte des considérations de chacun de ses six députés, mais également d'aller consulter d'autres instances du parti, soit l'exécutif national et le conseil national. Quand j'en parle, je veux tout simplement répondre au voeu exprimé par le député de Louis-Hébert. C'est vrai, nous n'avons pas eu peur d'aller consulter le conseil national. Je suis très heureux qu'on l'ai fait. Je le dis, je suis très fier que le conseil national nous ait donné le mandat que nous respectons à l'heure actuelle.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. BEDARD (Chicoutimi): Je sais que les libéraux ne sont pas capables de concevoir qu'une instance en dehors de leur petite personne de député puisse émettre certains voeux concernant des questions de principe, concernant des questions qui ont une importance du point de vue politique. Ceci leur permettra de réaliser qu'un conseil national dans le Parti québécois, c'est une instance décisionnelle beaucoup plus importante qu'elle ne peut l'être dans un Parti libéral où l'on va, non pas consulter, mais à mon sens, manipuler. Dans le Parti québécois et, dans ce sens, je suis très fier de la décision du conseil national, on n'a pas dit non sans avoir discuté, la discussion a été très libre. Oui, et qu'avez-vous contre cela?

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît ! Voulez-vous terminer votre intervention?

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est simplement la preuve que la discussion a été très ouverte, très franche.

M. HARDY: Cela a été chaud !

M. BEDARD (Chicoutimi): II en est sorti une décision très claire et qui est la suivante: D'accord sur l'augmentation du salaire des députés, mais conditionnellement à l'augmentation du salaire minimum, conditionnellement à la permission du gouvernement d'autoriser la réouverture des conventions collectives, afin que les travailleurs du Québec puissent réclamer eux aussi d'une façon rétroactive cette indexa-

tion à laquelle ils ont droit, à mon sens, tout autant que nous, les députés, y avons droit. Dans ce sens, je peux vous dire que je suis fier de la décision du conseil national. C'est une décision prise à partir d'une consultation faite non pas avec quelques représentants en vase fermé, mais qui se situent au niveau des 101 comtés du Québec, des représentants à même de constater le travail énorme que font leurs six représentants, ici, à l'Assemblée nationale. Lorsqu'ils ont imposé cette décision conditionnelle, ils savaient qu'ils l'imposaient non seulement à la majorité libérale...

M. HARDY: Ils vous l'ont imposée.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... mais qu'ils l'imposaient aussi à leurs propres députés, tout en sachant jusqu'à quel point ces six députés pouvaient essayer de travailler avec acharnement, pour remplir adéquatement leur rôle d'Opposition officielle, et en même temps, servir les électeurs de leurs comtés respectifs. Je sais que mes vingt minutes sont terminées.

M.HARDY: Vote!

M. BEDARD (Chicoutimi): Je sais également que nous aurons l'occasion de revenir sur d'autres points qui ont été apportés tout à l'heure.

M.HARDY: Vote!

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Nous allons maintenant voter sur la proposition d'amendement.

Le député de Beauce-Sud?

M. Bédard, Chicoutimi?

M. BEDARD (Chicoutimi): Abstention.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Abstention.

M. Bellemare, Johnson?

A l'ordre, messieurs! A l'ordre, messieurs!

M. Bellemare, Johnson?

M. BELLEMARE (Johnson): Pour.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): M. Massicotte, Lotbinière?

M. MASSICOTTE: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): M. Pépin, Sherbrooke?

M. PEPIN: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): M. Brown, Brome-Missisquoi?

M. BROWN: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): M. Charron, Saint-Jacques?

M. CHARRON: Abstention.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): M. Caron, Verdun?

M. CARON: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): M. Giasson, Montmagny-L'Islet? M. Hardy, Terrebonne?

M. HARDY: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): M. Pelletier, Kamouraska-Témiscouata?

M. PELLETIER: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): M. Carpentier, Laviolette?

M. CARPENTIER: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): M. Morin, Sauvé?

M. MORIN: Abstention.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): M. Saint-Pierre, Chambly? M. Ostiguy, Verchères?

M. OSTIGUY: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): M. Garneau, Jean-Talon?

M. GARNEAU: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): M. Roy, Beauce-Sud?

M. ROY: Pour.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): M. Vallières, Richmond?

M. VALLIERES: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne):

Pour: 2

Abstentions: 3

Contre: 10

La motion d'amendement est rejetée.

M. CHARRON: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: ... je viens d'échapper mon papier.

M. le Président, vous nous ramenez à l'article 5, j'imagine.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): L'article 5, oui.

M. CHARRON: ... dans sa version originale... M. HARDY: Dans sa virginité.

M. CHARRON: Cela, je n'irais pas jusque-là. Ce sont des vierges qui coûtent cher, à $21,000 chacune.

M. MASSICOTTE: II y en a qui ne veulent même pas vivre pour en payer.

M. CHARRON: M. le Président, nous avons décidé de suspendre l'étude des articles 2, 3 et 4, parce que l'un après l'autre faisaient référence à cet article 5 qui est, en fait, le corps du projet de loi, et qui traite de l'indemnité annuelle de chacun des membres de l'Assemblée nationale, chacun des 110.

Or, M. le Président, si vous le lisez avec moi, cet article, non seulement modifie-t-il l'article 92 de la Loi de la Législature, mais ajoute même un paragraphe nouveau, qui s'appellera maintenant 92 a), et qui dit, je le lis dans son texte actuel: Le montant de l'indemnité plus haut mentionnée doit, à compter du 1er janvier 1975, dans six jours, M. le Président, être augmenté annuellement du pourcentage que représente le rapport entre le salaire de base pour l'année précédente et le salaire de base pour l'année antérieure à cette dernière.

Le salaire de base pour une année est calculé d'après la moyenne des traitements et salaires hebdomadaires pour l'ensemble des activités économiques au Canada au cours de chaque mois de l'année, tel que le publie Statistique Canada en vertu de la Loi sur la statistique, loi fédérale d'ailleurs.

Or, M. le Président, je pense que je vais créer un suspense jusqu'à la reprise de la séance, je vous annoncerai mon amendement à huit heures.

M. HARDY: Vous allez nous empêcher de dîner tranquillement.

M. CHARRON: Je présenterai donc mon amendement à la reprise.

M. HARDY: Ce n'est vraiment pas humain de nous gâter comme ça.

LE PRESIDENT (M. Lamontagne): La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 h 15.

(Suspension de la séance à 17 h 56)

Reprise de la séance à 20 h 18

M. GRATTON (président de la commission permanente de l'assemblée nationale): A l'ordre, messieurs!

Au moment de la suspension cet après-midi, l'honorable député de Saint-Jacques avait la parole sur la motion principale à l'effet d'adopter l'article 5 du projet de loi no 87. Le député de Saint-Jacques.

Motion d'amendement de M. Charron

M. CHARRON: Merci, M. le Président. J'étais effectivement, au moment où vous avez suspendu la séance, M. le Président, à six heures, en train d'expliquer l'amendement que j'entends présenter mais que je n'avais pas encore déposé sur la table de la commission.

Je disais, M. le Président, je vous faisais remarquer plutôt que l'article 5 comportait deux volets. Je vous rassure immédiatement, je n'ai pas l'intention de présenter une motion de division, ce serait plus compliqué, mais le bill comprend deux volets. Dans un premier paragraphe, on fixe à $21,000 l'indemnité annuelle des membres de l'Assemblée nationale et, dans un deuxième paragraphe, ce qui est nouveau dans un projet de loi de cette nature, on écarte à toutes fins pratiques de la table publique ce genre de débat. C'est vrai, M. le Président, qu'il est possible que, si la loi 87 devait être adoptée comme elle est là actuellement, plus jamais il n'y aura de débat sur la place publique quant à l'indemnité des parlementaires à l'Assemblée nationale du Québec. C'est peut-être une dimension, M. le Président, qui n'a pas été assez souvent soulignée depuis le début de cette commission et tout le débat autour du projet de loi 87. Si cela se fait avec autant de vigueur actuellement, peut-être que les honorables députés ministériels auront la consolation de savoir que c'est le dernier. Effectivement, une fois que nous aurons fixé notre salaire annuel, si cette Assemblée suit la proposition du ministre de l'Industrie et du Commerce qui a refusé l'amendement du député de Beauce-Sud, une fois que cette Assemblée se sera prononcée sur le salaire annuel de $21,000 en date du 1er avril 1974, cela ne reviendra plus jamais sur le tapis parce que le même article comprend une clause d'indexation qui fait qu'à moins de vouloir exagérer et de façon inqualifiable, les députés n'auront plus jamais à demander d'augmentation de salaire, puisque leur salaire sera indexé selon un barème qu'ils auront eux-mêmes choisi et qui, je le soutiens, M. le Président, leur est plus favorable que ce qu'aucune classe de travailleurs n'a comme barème d'indexation.

C'est exactement le sens de ma proposition. Non seulement l'article 5 nous dit-il que le salaire annuel sera maintenant de $21,000 pour chacun des 110 députés de l'Assemblée nationale, les indemnités pour les ministres, chef de l'Opposition et président de l'Assemblée nationale étant fixés à partir de cette base

de $21,000, mais nous disent aussi que ce salaire sera à compter du 1er janvier 1975, soit dans six jours, indexé. Vous me direz que la demande d'indexation n'est en soi aucunement injustifiée, puisque plus d'un, en cette période d'inflation dont profite le gouvernement, l'ont demandée et l'ont exigée; certains travailleurs ont même été obligés de se rendre à des grèves illégales. Je pense aux travailleurs de la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal qui ont dû se rendre jusqu'à des grèves illégales pour obtenir, pas une augmentation de salaire, une préservation de ce que leurs négociations, en vue d'une convention collective, leur avaient accordée, soit un pouvoir d'achat fixé à un tel montant. Sauf que ce que les gars n'avaient pas prévu au moment où ils négociaient leur convention collective, c'est que le coût de la vie prendrait des proportions aussi gigantesques, en bonds successifs de trois en trois mois au cours de l'année 1974, que l'augmentation qu'ils avaient gagnée se trouvait, à toutes fins pratiques, disparue par la seule augmentation du coût de la vie et que ça ne consisterait en rien à une amélioration de leur niveau de vie, leur augmentation étant littéralement engouffrée dans le fait de rejoindre le lait à $0.50, le pain à $0.46 et toutes les autres denrées alimentaires, 17 p.c. d'augmentation dans ce seul secteur d'alimentation.

Alors, si les travailleurs syndiqués l'ont demandé, pas toujours avec succès, si certains travailleurs syndiqués en sont arrivés jusqu'à se sentir obligés de mener une grève illégale pour obtenir l'indexation, il n'est donc pas surprenant aujourd'hui que le gouvernement puisque c'est à la mode — me pardonnerez-vous cette expression — en vienne, lui aussi, à proposer une indexation du salaire des députés.

Mais — là où est le mais, parce qu 'il y en a toujours un — les députés qui ne font pas les choses en petit et qui n'ont pas l'habitude de se modérer les transports, non seulement s'accordent-ils une augmentation d'un seul coup, comme le dit le chef de l'Opposition, et qui va au 1er janvier, ou prenons sa forme la plus modérée, au 1er avril, de quelque 40 p.c. d'augmentation, de $15,000 à $21,000, mais ils ont choisi pour eux le mode d'indexation le plus bénéfique. Ce n'est pas l'indexation au coût de la vie, non pas celui dont je vous parlais tantôt et qui est celui que tous les travailleurs ont choisi, non, une indexation qui rapporte plus, celle qui est située à l'article 92a de l'article 5, qui dit ceci: Le montant à compter du 1er janvier 1975, sera augmenté annuellement du pourcentage que représente le rapport entre le salaire de base pour l'année précédente — c'est-à-dire 1974 — et le salaire de base pour l'année antérieure à cette dernière, c'est-à-dire 1973.

Qu'est-ce que cela veut dire en langage de tous les jours? Ce que tous les travailleurs syndiqués comprendront — qui ont à faire des grèves, à subir des lock-out, qui ont à subir des injonctions, qui ont à subir des représailles, ce que nous n'avons aucunement à subir — si je l'explique dans ces termes, c'est un genre d'indexation qui dit: Supposons que l'année dernière, en 1973, le salaire annuel au Canada — au Canada, s'il vous plaît, M. le Président, on ne se gêne pas, on étend les frontières, sans problème— était de $8,000. En 1974, il a été porté à $8,800, comme salaire moyen des travailleurs canadiens. Il y a donc eu — $800 sur $8,000, la mathématique est simple — une augmentation de 10 p.c.

Donc, si on se fie au rapport que représente le salaire de base pour l'année précédente et le salaire de base pour l'année antérieure, les députés de l'Assemblée nationale pourront s'augmenter de 10 p.c. Le chiffre que je vous donne n'est absolument pas inventé, parce que j'ai entre les mains les statistiques officielles de Statistique Canada — cela vient du fédéral, ce doit être bon! — qui dit ceci: "Le salaire moyen des dix premiers mois de 1973 était à $159.50 par semaine, pour l'ensemble des Canadiens et, en 1974, de $176.20". Les dix premiers mois de 1974, par rapport aux dix premiers mois de 1973, équivalent à une augmentation de 10.5 p.c. Je dis: 10 p.c. pour fins de calcul oral que je m'apprête à livrer devant vous; 10 p.c. d'augmentation, donc les députés, qui se sont voté $21,000 le 1er avril 1974, obtiendront, dans six jours, une augmentation de 10 p.c. parce que c'est le barème d'indexation qu'ils se sont choisi, qu'ils s'apprêtent à se voter et qui équivaudra donc à $2,100 supplémentaires, d'un seul coup.

Ceci voudra dire, comme le disait, en chiffres très exacts, le chef de l'Opposition, dans son intervention, $23,065 à compter du 1er janvier, dans six jours, M. le Président.

Je dis que ce barème d'indexation en est un, encore une fois, de privilégiés et que, si nous voulons prendre, de l'indexation, ce que les députés du Parti québécois sont prêts à admettre, moyennant des conditions qui étendraient ce privilège de l'indexation à tous les travailleurs québécois, nous, par la suite... Je dis que ce calcul de salaire de base de cette année par rapport au salaire de base de l'année antérieure nous privilégie par rapport à l'indice du coût de la vie.

Or, je dis que si nous sommes prêts à inclure, dans une loi, une clause d'indexation qui fera que, par le fait même, le pouvoir d'achat de $21,000 en date du 1er avril 1974 sera reconnu et reconnu comme devant être maintenu, quels que soient les aléas de la vie économique et de ses insuccès auxquels participe le gouvernement en face, je dis que cette indexation doit être, pour nous, la même qu'elle est pour tous les travailleurs.

Il n'y a pas un travailleur, il n'y a pas eu une grève, il n'y a pas eu une demande, il n'y a pas une réouverture de convention collective, actuellement, qui s'est faite où des gars ont demandé à coups de grèves et à coups d'injonc-

tions sur la gueule que leurs salaires soient indexés à la moyenne de salaires annuels du Canada. Il n'y a personne qui a demandé cela. Tout ce que les gars ont demandé, c'est que leurs salaires soient indexés au coût de la vie. C'est normal. Le gouvernement l'a reconnu. Le gouvernement, je le dis, l'a reconnu pour les travailleurs de la fonction publique et parapu-blique, ceux dont il est le responsable quant aux conventions collectives.

On ne doit pas s'offrir à nous des privilèges qui ne vont pas à d'autres. Je proposerai donc, M. le Président, comme amendement — je vous le libellerai dans sa forme juridique à la fin de mon intervention — que le mode d'indexation qui est dans cette loi soit supprimé et qu'on inclue plutôt un mode d'indexation qui nous met sur le même pied que tout le monde, l'indexation au coût de la vie. C'est fini l'élite, l'élite de demain, l'élite d'hier et l'élite d'aujourd'hui. On n'est pas plus l'élite que mon oeil. Nous sommes des gens qui ont été élus par des citoyens québécois qui ne nous ont pas accordé, par le fait même, le droit de nous indexer d'une façon plus privilégiée et plus favorable qu'eux.

Ils ont à se battre pour l'obtenir, parce que ce gouvernement a refusé les propositions du Parti québécois qui étaient d'ouvrir les conventions collectives en cours pour permettre à tous les travailleurs d'obtenir cette indexation. Je termine, en devançant — mais mes collègues de l'Opposition auront l'intention d'y revenir; c'est seulement pour vous signaler que je ne l'oublie pas — un peu la réponse que le ministre des Finances s'apprête à me poser avec une calculatrice en main.

On me dira que la formule que je propose dans mon amendement est, pour l'année 1974, plus avantageuse que ce qui est proposé dans l'article 92 a). C'est vrai. Exceptionnellement, je dis bien exceptionnellement, en 1974, grâce au silence, à l'immobilisme et à la complicité des gouvernements en place, le taux d'inflation dans l'indice des biens à la consommation a été cette année plus élevé que la hausse moyenne des salaires au Canada. Le ministre des Finances les fournira. S'il ne les fournit pas, nous lui fournirons les chiffres des dix dernières années, par exemple, où la règle normale dans les sociétés économiques, nord-américaines, libérales, comme celles que nous connaissons, veut qu'effectivement la hausse moyenne des revenus soit effectivement plus élevée, habituellement, que l'indice du coût des prix à la consommation.

Ce n'est que cette année, à cause de la gigantesque flambée des prix dans le domaine alimentaire que l'un se rapporte plus qu'à l'autre. Ce qui veut dire — je termine avec cela — que, si on devait prendre — et je ne le nie absolument pas — ma proposition d'amendement et l'inclure au projet de loi, il est vrai que l'ajustement, en date du 1er janvier 1975, se trouverait à faire, cette année, un montant supérieur à ce qu'accorde aux députés l'article 92 a) tel que libellé dans l'article 5 de la loi 87, pour cette année. Puisque cette loi devient permanente et, comme je vous le disais au début, ne ramènera plus jamais ce débat sur la table, je vous assure qu'à longue échéance la progression, la simple fixation à l'indice du coût de la vie, à Montréal — parce que nous avons choisi Montréal; c'est la métropole du Québec — est inférieure à l'augmentation du rapport entre le salaire de base pour une année par rapport au salaire de base pour l'année précédente. Je termine donc en vous donnant le libellé exact de ma proposition.

Je vous propose que l'article 5 soit amendé en remplaçant ce qui suit, après le mot "pourcentage", les mots "d'augmentation de l'indice général des prix à la consommation à Montréal, pour l'année précédente, par rapport à l'année antérieure à cette dernière, tel que publié par Statistique Canada, en vertu de la Loi sur la statistique".

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que la commission comprend bien le sens et le texte de l'amendement proposé par l'honorable député de Saint-Jacques?

M. BELLEMARE (Johnson): Est-ce qu'on pourrait en avoir des copies, M. le Président?

M. CHARRON: J'en aurai dans deux secondes.

LE PRESIDENT (M. Gratton): L'honorable député de Saint-Jacques propose que l'article 5 soit amendé en remplaçant ce qui suit, le mot, "pourcentage" dans la onzième ligne, par ce qui suit: "d'augmentation de l'indice général des prix à la consommation à Montréal, pour l'année précédente, par rapport à l'année antérieur à cette dernière, tel que publié par Statistique Canada, en vertu de la Loi sur la statistique".

Cet amendement sera-t-il adopté?

M. GARNEAU: M. le Président...

M. MORIN: L'amendement est jugé recevable, si j'ai bien compris?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui, je pense. Je n'y vois pas de problème.

M. MORIN: Bon! C'était pour que ce soit clair.

M. GARNEAU: M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): L'honorable ministre des Finances.

M. GARNEAU: La démarche que fait le député de Saint-Jacques a retenu l'attention des membres de ce côté-ci de la table, avant que le projet de loi soit imprimé et présenté à l'Assem-

blée nationale. La démarche est inscrite dans le contexte du rapport Bonenfant qui proposait, dans un premier temps, on se le rappellera, que le salaire des députés soit basé sur la ligne médiane des salaires des administrateurs classe IV, ce qui signifiait, si nous avions accepté cette proposition, que l'augmentation des salaires des députés, au 1er janvier 1975, aurait été indexée de deux facteurs, soit l'augmentation de base plus l'indexation au coût de la vie, à laquelle ont droit ces administrateurs classe IV, ce qui aurait fait, en moyenne, pour l'année 1975, quelque chose comme 20 p.c. d'augmentation pour les députés.

Nous avons considéré cette possibilité et pour les mêmes raisons que nous avons décidé de ramener cela à $21,000 et non pas à $22,000 comme le suggérait le rapport Bonenfant. Nous avons cru bon de choisir une autre forme d'indexation. Le député de Saint-Jacques a mentionné, tout à l'heure, que l'augmentation, si nous l'avions indexée purement au coût de la vie, en 1975, aurait été plus avantageuse que ce que nous proposons dans le projet de loi. Il est vrai qu'en moyenne, au cours des dernières années, cela aurait été un peu différent. Mais, ce que nous avons voulu rechercher, ce n'est pas une formule qui s'alignerait sur la classe des travailleurs qui est la plus avantagée, c'est-à-dire celle des travailleurs qui, pour des raisons de convention collective ou autres ont réussi à obtenir, en plus de leur augmentation statutaire, une indexation au coût de la vie, mais nous avons voulu choisir une indexation qui traduisait la réalité de l'ensemble des travailleurs québécois, c'est-à-dire la réalité de ceux qui ont une indexation de leur salaire au coût de la vie et de ceux qui ne l'ont pas. C'est la raison pour laquelle nous avons cru plus juste qu'à long terme, à moyen terme tout au moins, je ne sais pas ce que feront les Parlements à venir, mais pour les deux, trois, quatre ou cinq prochaines années, nous croyons que l'augmentation des traitements des députés basée sur l'augmentation moyenne des ouvriers canadiens était un indice plus juste qui traduisait davantage la situation de l'ensemble des travailleurs, autant ceux qui bénéficient de formules d'indexation avantageuses que ceux qui n'en bénéficient pas, de telle sorte que notre indexation basée sur la moyenne des salaires et gages hebdomadaires moyens au Canada établissait cette moyenne. Les députés, en quelque sorte, verraient leur salaire augmenté de la même façon que la moyenne d'augmentation donnée à l'ensemble des travailleurs canadiens.

C'est la raison pour laquelle, mettant de côté la recommandation du rapport Bonenfant qui était beaucoup plus généreuse, et celle pour 1975 qui se rapproche de la suggestion du député de Saint-Jacques, nous avons mis ces deux possibilités de côté pour en choisir une troisième qui nous apparaissait plus juste, plus conforme à l'augmentation de la richesse des travailleurs canadiens. Nous avons cru que c'était peut-être la meilleure façon de faire augmenter le salaire des députés., c'est-à-dire une augmentation basée sur celle des travailleurs canadiens. C'est pourquoi nous avons proposé cette formule à l'Assemblée nationale. C'est pourquoi nous voterons contre la motion d'amendement du député de Saint-Jacques.

LE PRESIDENT (M. Gratton): La commission est-elle prête à se prononcer sur l'amendement du député de Saint-Jacques?

L'honorable chef de l'Opposition officielle.

M. MORIN: M. le Président, je voudrais intervenir sur cette question.

En effet, il nous paraît plus réaliste de choisir, comme critère de l'augmentation annuelle, l'indice général des biens à la consommation à Montréal plutôt que le rapport entre salaire de base pour une année, par rapport, ou si on veut, au salaire de base de l'année précédente.

Sur plusieurs années, en effet, le pourcentage est un peu moindre et c'est le seul critère qui nous permette de vraiment relier le salaire du député, du ministre, à l'augmentation réelle du coût de la vie. J'aurais quelques observations à faire sur les critères qui ont été retenus dans l'article 92 a) qui nous est proposé. Je commencerais par quelques remarques sur le salaire moyen qui sert ici de salaire de base. Toutes les statistiques sur le salaire moyen des Québécois reposent sur un échantillon de Statistique Canada qui surévalue le salaire moyen. Je l'ai fait observer hier à deux reprises, je pense, au ministre de l'Industrie et du Commerce qui m'a laissé entendre que cela n'avait aucune importance, mais j'y reviens parce qu'en ce qui me concerne, j'estime que cette façon de calculer peut introduire une distorsion notable dans le calcul du salaire de base.

En effet, M. le Président, l'échantillon de Statistique Canada surévalue le salaire moyen puisque celui-ci découle d'une enquête auprès des moyennes et grandes entreprises, c'est-à-dire les entreprises qui comptent 20 employés et plus. Ces entreprises, chacun le reconnaîtra, sont celles où les travailleurs sont le plus syndiqués, ce sont celles où les travailleurs ont le plus de facilité à défendre leurs intérêts. On ne tient pas compte, dans les statistiques publiées par Statistique Canada sur l'activité économique, sur les salaires hebdomadaires pour l'ensemble des activités économiques, des entreprises de 20 employés et moins. Or, cela peut avoir quelque importance parce que, si l'on ajoutait à la masse des entreprises qui ont 20 employés et plus, la masse considérable de celles qui comportent 20 employés et moins ou 19 employés et moins, M. le Président, les chiffres ne seraient pas les mêmes parce qu'on se trouverait à inclure dans la statistique des tas de travailleurs, des quantités de travailleurs qui ne sont pas syndiqués et qui travaillent dans de toutes petites entreprises où les salaires sont

marginaux et où la plupart du temps c'est tout juste s'ils peuvent obtenir le salaire minimum.

La proposition, donc, dans l'article 92 a), qui nous est faite d'utiliser le salaire hebdomadaire comme salaire de base, fausse les calculs, introduit une distorsion qui fait que les députés seront dans une position plus avantageuse, du point de vue de l'augmentation, que ne le seront la masse des travailleurs.

C'est une distorsion qui m'apparaît importante et qui fausse, au départ, le critère qu'on a retenu. Déjà, c'est un premier argument pour lequel on devrait écarter ce salaire de base, ce soi-disant salaire de base, pour le remplacer par un critère plus réaliste, plus facile à évaluer, qui est celui de l'augmentation de l'indice général des biens de consommation à Montréal.

Je pourrais m'étendre longuement sur les chiffres. Prenons, par exemple, le salaire hebdomadaire moyen au Canada au cours des dernières années. Si, par exemple, je m'amuse à faire le rapport 1972/71, j'ai un rapport de $149.22 sur $137.64, ce qui donne un rapport de 8.4 p.c. Le rapport 1973/72, lui, nous donne $160.16 sur $149.22, donc un rapport de 7.3 p.c. Enfin, utilisant le rapport qui va servir à l'augmentation des députés dès le 1er janvier prochain, soit le rapport 1974/73, utilisant, pour les fins de ce rapport, les chiffres, les moyennes des dix premiers mois, puisque nous n'avons pas encore les chiffres complets pour 1974, cela nous donne $176.20 sur $159.50, c'est-à-dire un rapport, si je ne m'abuse, de 10.5 p.c.

M. le Président, ce rapport, de façon concrète, n'est pas réaliste, n'est pas le véritable rapport, parce que se trouvent exclus non seulement les entreprises de vingt employés et plus, mais aussi des secteurs économiques entiers dans lesquels les revenus sont loin d'être ce qu'ils sont dans l'industrie. En particulier, se trouvent exclus, pour les fins du calcul de ce taux d'augmentation, le secteur de l'agriculture, où l'on sait que les revenus sont bas, le secteur des pêcheries, un autre secteur où les revenus sont loin d'être ce qu'ils devraient être, le secteur de la santé et le secteur de l'éducation qui sont certainement un peu mieux traités que les deux précédents. On ne tient pas non plus compte de l'administration publique. Donc, ce rapport de 10.5 p.c. est un rapport quelque peu factice. En tout cas, ce n'est certainement pas le bon critère à choisir pour servir de base à l'augmentation du salaire des députés.

Comparons maintenant le salaire de base du député au salaire moyen des Québécois. Voilà un autre calcul qui peut nous réserver quelques surprises.

Je le calcule d'abord au 1er avril 1974. Selon l'article 14 du projet de loi que nous avons devant nous, le salaire de $21,000 serait applicable rétroactivement au 1er avril 1974. Le salaire de $21,000 équivalait, le 1er avril 1974, à 2.4 fois le salaire moyen des Québécois. Presque deux fois et demie le salaire moyen au

Québec. Comme base de calcul, je donne tous mes chiffres pour qu'on puisse, éventuellement, me contredire, si on en a le goût. J'ai pris comme base de calcul, premièrement, le salaire du député au 1er avril 1974, rétroactivement, c'est-à-dire $21,000, et le salaire moyen au Québec, le 1er avril 1974, qui était de $8,602. Si je fais la proportion, j'obtiens un rapport de 2.4 p.c.

Tournons-nous maintenant vers 1975, toujours pour comparer, pour faire le rapport du salaire de base du député avec le salaire moyen au Québec, cette fois au 1er janvier 1975. Le salaire de base du député équivaudra, cette fois, carrément à 2.5 fois le salaire moyen des Québécois et j'explique la base de mes calculs. Je prends d'abord le salaire de base des députés en janvier 1975, selon le projet de loi 87, lequel sera, d'après l'article 5, de $21,000; j'ajoute l'indexation au salaire hebdomadaire moyen: 10.5 p.c. qui est décrit par l'article 92 a), cela donne $2,205, ce qui veut dire que le total du salaire perçu par le député, au 1er janvier 1975, sera de $23,205.

Sur la base d'évolution du salaire moyen au cours des dix derniers mois, nous pouvons maintenant essayer de prévoir le salaire moyen des Québécois qui sera, en janvier 1975, environ de $9,300, à très peu de choses près. Si on fait le rapport: $23,205 divisés par $9,300, cela donne bien 2.5. Déjà une première conclusion se dégage. Si l'on fait le rapport salaire de base du député, par rapport au salaire moyen des Québécois au 1er avril 1974, cela nous donne 2.4 fois le salaire moyen des Québécois, et au 1er janvier 1975, cette fois, il y a encore amélioration. Nous serons à 2.5 fois le salaire moyen des Québécois.

Cela est déjà passablement révélateur, mais j'aimerais aborder un autre aspect qui est encore plus révélateur et qui est l'étude de l'évolution des rapports: Salaire de base des députés, par rapport au salaire moyen au Québec.

Lorsque le salaire des députés a été fixé à $15,000, en 1971, ce salaire équivalait, à l'époque, à 2.2 fois le salaire moyen des Québécois, 2.2 fois. Sur la base des rapports du salaire des députés par rapport au salaire moyen, on aurait l'évolution suivante, c'est un point capital; En 1971, le salaire des députés était 2.2 fois plus élevé que le salaire moyen des Québécois. En avril 1974, il était de 2.4 fois plus élevé et, enfin, en janvier 1975, il sera de 2.5 fois plus élevé toujours que le salaire moyen au Québec.

Donc, la conclusion que je tire de cet amas de calculs, c'est que la position du député s'améliore constamment par rapport à celle des Québécois. Le Québécois voit son salaire augmenter certes — il est bien normal qu'il en soit ainsi, surtout en période d'inflation — mais la position du député, au lieu de rester deux fois le salaire moyen ou 2.2 fois le salaire moyen, comme c'était en 1971, cette position s'amélio-

re. C'est-à-dire que nous améliorons davantage notre position relative que nous améliorons celle des Québécois.

Autrement dit, l'écart — c'est un point fort important — entre le salaire moyen des Québécois et le salaire des députés va en s'agrandis-sant. M. le Président, je ne vois aucune raison valable pour justifier une telle augmentation dans l'évolution des rapports. Veut-on des chiffres encore plus probants? Avant de continuer, je vais vous demander combien j'ai de temps encore à ma disposition, M. le Président, c'est parce que c'est une démonstration passablement ardue.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Cinq minutes.

M. MORIN: Pas plus que cinq minutes.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je m'excuse.

M. MORIN: Je voudrais me tourner maintenant vers des chiffres encore plus révélateurs, plus probants, en comparant les taux respectifs d'augmentation, depuis 1971, toujours en comparant le salaire des députés et le salaire moyen au Québec.

Selon nos prévisions, entre 1971 et janvier 1975, le salaire moyen au Québec aura augmenté de 35 p.c, à quelques dizièmes de point de pourcentage près, si nous passons de $6,865, en 1971, à $9,300, en janvier 1975. C'est une augmentation sensible.

Maintenant, tournons-nous vers l'augmentation des députés et nous allons voir qu'elle est beaucoup plus considérable. Si le salaire des députés devait passer de $15,000, en 1971, à $23,205, en janvier 1975, ceci comporterait une augmentation de 55 p.c. par rapport à 1971.

Donc, cette autre façon de calculer démontre exactement la même chose. La position du député va s'améliorer de façon beaucoup plus sensible que celle du Québécois moyen. J'estime que c'est tout de même capital de le faire ressortir. Il faut que les Québécois se rendent comptent de cela. Eux, ils ont progressé de 35 p.c; nous, messieurs, nous allons nous avantager de 55 p.c. pour la même période.

En ce qui me concerne, je trouve que cela est scandaleux, je l'ai déjà dit dans mon discours d'introduction, je n'avais pas donné tous les chiffres à ce moment, je n'avais pas le temps de le faire. Je m'étais bien promis d'y venir en commission. Comment peut-on justifier une telle hausse, messieurs? Si, encore, la hausse que nous nous accordons pouvait se comparer avec celle des Québécois. Mais il y a 20 p.c. d'écart en quatre ans que nous allons chercher de plus que les Québécois. Donc, l'augmentation accordée pour tenir compte des trois dernières années dépasse de beaucoup l'augmentation observée du salaire moyen des Québécois. Cela, je trouve que nous n'avons aucune excuse, nous, qui avons ces chiffres, nous qui les connaissons, nous n'avons aucune excuse de procéder de la sorte. Ou alors, scrutez-les, vos raisons. Pourquoi, messieurs, pourrions-nous nous augmenter de 55 p.c, alors que les Québécois n'ont obtenu que 35 p.c. en moyenne? C'est cet écart qui va aller grandissant, si l'on retient comme critère de base le salaire de base pour l'année précédente par rapport au salaire de base pour l'année antérieure, et si l'on retient les statistiques économiques de l'activité au Canada comme critère.

M. le Président, on pourrait s'étendre encore longuement sur le salaire de base du député par rapport au salaire moyen au Québec. Par exemple, on pourrait — et je terminerai sur ces chiffres, parce qu'ils sont également éloquents — donner les chiffres absolus. Le salaire moyen au Québec était de $6,865 en 1971. Selon l'évolution actuelle, comme je l'ai mentionné, il sera de $9,300 en janvier 1975. D'où une augmentation de $2,465. Tandis que le salaire des députés passerait, si nous approuvons cette loi telle quelle, ce projet tel quel, au cours de la même période, de $15,000 à $23,205, d'où une augmentation de $8,205. Donc, en chiffres absolus, c'est pour le moins aussi révélateur que, sur le plan statistique, mais cela confirme les pourcentages que je donnais à l'instant, en chiffres absolus, nous aurons une augmentation du salaire des députés égale à 330 p.c. de l'augmentation du salaire moyen des Québécois. C'est totalement injustifié, c'est totalement déraisonnable, 330 p.c.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: M. le Président, j'ai terminé pour l'instant. Je reviendrai sur des chiffres encore plus précis tout à l'heure, si l'occasion m'en est donnée. Merci.

LE PRESIDENT (M. Gratton): La commission est-elle prête à se prononcer sur cet amendement?

M. HARDY: Vote.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Chicoutimi.

M. HARDY: Que pouvez-vous ajouter?

M. BEDARD (Chicoutimi): Que puis-je ajouter, sinon essayer de répéter en espérant que les membres de la commission comprendront même si nous commençons à désespérer qu'ils puissent accueillir notre message? D'ailleurs, les membres de cette commission doivent commencer à savoir, une fois pour toutes, les conditions que le conseil national de notre parti a imposées.

M. HARDY: 46.46.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. HARDY: Le député de Chicoutimi a avoué à l'article 46...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. HARDY: Oui.

M. BEDARD (Chicoutimi): Les recommandations auxquelles nous souscrivons de plein droit, sans être forcés, qui se résument â deux conditions qu'il ne me semble pas si difficile humainement parlant d'accepter pour un gouvernement qui se dit social-démocrate. Première condition, la hausse du salaire minimum.

Je pense que cette condition en est une qui devrait être acceptée assez rapidement, puisque nous nous votons, par ce projet de loi, une hausse de salaire non pas minimale, mais une hausse de salaire maximale, tenant compte des circonstances. Egalement, il y avait une autre condition tout aussi importante, qui est celle de permettre la réouverture des conventions collectives, afin de donner l'occasion aux travailleurs du Québec de pouvoir réclamer — pas n'importe quoi, pas des choses exagérées— ce que nous nous accordons présentement, avec le sourire, au niveau de cette commission, à savoir, l'indexation, une indexation rétroactive et à laquelle ils ont, à mon sens, tout aussi droit, si nous, les élus du peuple, la supposée élite qui doit donner l'exemple, nous nous l'accordons.

Nous nous accordons cette indexation dans le calme, M. le Président, sans avoir à faire de grève, sans avoir à crier plus qu'il ne le faut, sans avoir devant nous le danger d'injonction, sans avoir le danger d'outrage au tribunal, sans avoir le danger d'être incarcéré. Alors, M. le Président, je pense que nous nous la votons dans des conditions très faciles, et ce que nous réclamons pour les travailleurs québécois, je pense que non seulement c'est quelque chose de raisonnable, mais c'est quelque chose auquel ils ont droit. Nous, on s'indexe sans danger. Alors, pourquoi ne permettrait-on pas aux travailleurs québécois de s'indexer, d'avoir la possibilité, au moins, de réclamer l'indexation rétroactive, sans se placer dans l'illégalité et dans le danger de faire face à des outrages au tribunal?

Non seulement nous nous indexons, M. le Président, mais nous sommes des choyés en termes d'indexation, tel que l'on fait valoir, avant moi, le député de Saint-Jacques et le chef de l'Opposition; non seulement nous nous permettons de nous indexer, mais, je le dis encore une fois, ce n'est pas n'importe quelle indexation. C'est celle qui est la plus avantageuse, parce qu'on a choisi les meilleurs barèmes d'indexation. D'ailleurs, l'amendement qui a été proposé par le député de Saint-Jacques — c'est là qu'on voit le sérieux du débat, tout au moins le sérieux que nous voulons apporter à ce débat — n'avait pas été fait à l'aveuglette. Le député de Saint-Jacques avait même prévu ce qui s'est réalisé, l'objection ou encore les explications qui seraient apportées par le ministre des Finances, ce qu'il a fait rapidement, mais ce qu'il a fait après que le député de Saint-Jacques eut clarifié la situation.

Effectivement, M. le Président, on peut s'apercevoir, constater que, en ce qui regarde 1974, le pourcentage du salaire hebdomadaire moyen est peut-être plus élevé, c'est-à-dire est moins élevé en 1974 que le pourcentage de la hausse de l'indice général des prix, mais on peut se rendre compte que c'est la seule année où cette situation s'est produite.

Si on revient en arrière, à savoir en 1972, on peut constater que le pourcentage de la hausse du salaire moyen au Canada est beaucoup plus élevé comme indice que ne l'était la hausse de l'indice général des prix à Montréal, à savoir un rapport de 8.4 p.c. par rapport à 3.8 p.c. qui représentent la hausse de l'indice général des prix à Montréal. Egalement pour 1973, une différence très appréciable, puisque le pourcentage de la hausse du salaire moyen au Canada se situe à 7.3 p.c, alors que la hausse de l'indice général des prix à Montréal se situe à 6.7 p.c.

Tel que nous l'avions d'ailleurs explicité au moment de la présentation de l'amendement, il reste que, si on fait exception de l'année 1974, il s'est toujours vérifié une constante qui prouve que la hausse de l'indice général des prix est toujours inférieure à la hausse du salaire moyen au Canada et qu'à ce moment-là, il ne serait que juste de s'indexer sur l'indice le plus bas. D'ailleurs, l'indexation, sans être un expert de la question, je ne commencerai pas à essayer d'en être un ce soir... Il reste quand même que le fait de baser l'indexation sur le salaire hebdomadaire moyen au Canada représente quand même deux difficultés, en ce sens que, si on regarde le projet de loi, on s'aperçoit que ce salaire hebdomadaire moyen est basé sur les entreprises de vingt employés et plus, ce qui exclut toutes les autres entreprises de vingt employés et moins. On sait très bien que c'est souvent dans ce genre d'entreprises que se trouvent les travailleurs les moins bien payés. Egalement, baser l'indexation sur le salaire hebdomadaire moyen équivaut à dire qu'on ne tient pas compte des salaires agricoles.

Or, on sait que la moyenne des salaires agricoles est la plus basse moyenne de salaires et je ne vois pas pourquoi on n'en tiendrait pas compte. Quand on sait les réclamations qui ont été faites par les agriculteurs, il n'y a quand même pas si longtemps, quand on sait jusqu'à quel point leurs revendications se situaient au niveau de la nécessité qu'un salaire convenable, pas un salaire exagéré, simplement un salaire convenable, leur soit accordé, bien, si le barème sur lequel on se base, à savoir le salaire hebdomadaire moyen, a comme conséquence, et cela n'a pas été nié par les membres de l'autre côté de cette table, si ceci a comme conséquence d'écarter toute une catégorie d'em-

ployeurs, à savoir ceux des entreprises de vingt employés et moins, et que cela a également comme conséquence d'écarter la moyenne de salaires des travailleurs agricoles qui, nous le savons, est une des plus basses, eh bien! à ce moment-là, on se fixe un indice qui est très favorable pour nous, les députés, parce qu'il ne tient pas compte des salaires les plus bas.

Egalement, M. le Président, le projet de loi, en fixant ou en basant l'indexation sur le barème des salaires hebdomadaires moyens au Canada, ne tient pas compte du fait que nous vivons au Québec. Je pense que nous sommes solidaires des Québécois et je crois qu'il ne serait que normal que, si la situation du Québec, tant pour les travailleurs que pour les autres classes de la société, devait être moins bonne que la situation qui prévaut dans tout le Canada, il ne serait que normal que les députés se sentent solidaires du sort qui est réservé dans ce pays fédéraliste à la collectivité québécoise. Ce ne serait, à mon sens, qu'un signe de solidarité normal. Peut-être qu'en chiffres absolus, la moyenne des salaires au Québec est sûrement plus basse, mais, concernant le taux de croissance, je n'ose m'avancer sur ce point. Peut-être que le ministre des Finances pourra nous donner des explications.

Tenant compte de ces considérations, je trouve que l'amendement du député de Saint-Jacques est très valable parce qu'il nous invite, nous, les députés, à nous indexer, non pas selon le barème le plus avantageux, mais selon le barème de l'indice des prix.

Pourquoi est-ce le plus juste? Parce que cela représente vraiment et plus sûrement le coût de la vie. Pourquoi veut-on, s'indexer sinon — c'est ce qu'on a entendu du côté ministériel depuis le début — pour essayer de récupérer le pouvoir d'achat que les députés disent avoir perdu depuis la hausse de salaire de 1971.

Je pense, M. le Président, que ce barème qui serait en fonction de l'indice des prix, serait plus juste. D'ailleurs, nous nous indexons, et nous deviendrons, si le gouvernement s'entête à vouloir voter ce projet de loi, une catégorie d'indexés, c'est clair à partir du 1er janvier 1975 et, je le dis encore une fois, parmi les indexés les plus choyés à cause des barèmes que nous choisissons. Je dis aussi les plus choyés parce qu'il y a également... Vous allez avoir l'occasion de répondre à cela. Nous ne demandons pas mieux que d'avoir des explications qui vont nous faire penser le contraire. Alors, tant mieux !

M. HARDY: Allez-vous justifier votre conscience quand vous allez encaisser vos chèques?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs! Le député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): Nous n'avons pas de conscience à justifier. Notre conscience se justifie au moment où nous parlons. L'Opposition est claire.

Je disais justement, M. le Président, que nous allons être une catégorie de citoyens indexés vraiment choyée par rapport à d'autres catégories de citoyens qui sont indexés et je pense à toute une catégorie de citoyens qui ne sont pas indexés. Par exemple, les retraités qui ont des retraites d'accumulées avec des fonds privés. La grande majorité des caisses de retraite privées ne sont pas indexées et ce, malgré que les compagnies qui administrent ces caisses n'ont pas cessé d'en profiter et n'ont pas cessé de profiter d'un rendement majoré sur leurs placements. Nous savons que les compagnies qui administrent les caisses de retraite voient les taux d'intérêt augmenter et leurs profits par le fait même; on s'aperçoit que ce n'est pas la même situation pour ces retraités qui ont des fonds de retraite accumulés avec des entreprises privées qui n'ont pas eu leur fonds de retraite indexé.

Je sais, M. le Président, que c'est un problème complexe et qu'il n'y a pas de solution miracle à ce problème. Cependant, le gouvernement du Québec, je l'affirme, ne se penche même pas sur ce problème de toute une catégorie de citoyens qui ne sont pas indexés, à savoir les retraités avec les fonds privés. Le gouvernement du Québec n'a absolument rien fait pour les revenus de ces retraités qui sont dans une telle situation de manière que leur pension ne soit pas mangée par l'inflation. Le gouvernement n'a rien fait, même pas un petit comité d'étude qui aurait pu étudier la situation, parce que ces retraités, je le soumets, M. le Président, vivent quand même dans une situation pénible, difficile et je crois qu'ils ont travaillé tout aussi fort et avec autant de générosité qu'a pu le faire n'importe quel membre de cette Assemblée nationale pour se donner un fonds de retraite alors qu'ils se rendent compte qu'il n'est pas indexé présentement et que ce fonds de retraite accumulé à coups d'efforts ne leur permet pas de répondre à l'inflation qui frappe tout le monde à l'heure actuelle. L'inflation frappe les députés, les députés pensent à s'indexer. Je pense que le gouvernement devrait penser aussi à ces personnes âgées, à ces gens qui ont travaillé très fort, qui se sont accumulé des fonds et qui, à l'heure actuelle, se réveillent dans la situation de voir ces fonds non indexés alors que les compagnies qui administrent ces fonds, elles, profitent de l'inflation, profitent de la hausse des taux de prêts pour accumuler les bénéfices.

Cela rejoint également, M. le Président, beaucoup plus de gens qu'on ne le pense, entre autres, tous les gens d'Hydro-Québec, tous ceux qui faisaient partie des anciennes compagnies qui ont été fusionnées lorsqu'il y a eu la nationalisation d'Hydro-Québec, également tous ceux qui n'ont pas eu le temps de se payer un fonds de retraite, parce que, lorsque cela a été mis en pratique, le régime de rentes et tout

ça, ils étaient à un âge tel que ça ne leur a pas permis de se payer un fonds de pension qui puisse leur permettre de répondre à la situation maintenant. Encore une fois, les compagnies, pour leur part, jouissent d'un taux de flexibilité qui leur permet d'accumuler des profits alors que les pensionnés qui ont travaillé fort pour accumuler ces pensions n'ont pas la même possibilité.

M. le Président, je trouve que toutes les raisons qui ont été amenées au soutien de son amendement par le député de Saint-Jacques, qui ont été appuyées également avec d'autres arguments de comparaison entre le salaire hebdomadaire moyen au Canada et le salaire hebdomadaire moyen des Québécois, eh bien! ces raisons ajoutées à celles que j'essaie d'apporter sans vouloir poser à l'expert, sont suffisantes pour au moins que les membres de cette commission acceptent que l'indexation que se donnent les députés de l'Assemblée nationale n'en soit pas une de luxe par rapport à celles dont doivent se contenter une grande majorité des citoyens du Québec.

M. GARNEAU: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Johnson avait été reconnu; sur l'amendement.

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, d'abord, le gouvernement de la province a demandé à un comité consultatif sur les indemnités et allocations des parlementaires du Québec de faire un rapport sur le salaire et sur la tâche ingrate que nous avons aujourd'hui de fixer maintenant notre rémunération notre indemnité.

A la page 35, M. le Président, le rapport dit ceci: "II existe un système, c'est celui qui consiste à lier directement la rémunération des parlementaires au traitement d'une certaine catégorie de fonctionnaires. Commentant cette procédure, l'ouvrage Parlement, page 79, dit: "Ce procédé, tout en assurant un traitement convenable aux parlementaires, a l'avantage d'éviter toute discussion démagogique — et vous savez que, depuis quatre heures, on en a entendu de toutes les couleurs — lorsque les circonstances et notamment la hausse du coût de la vie rendent nécessaire un relèvement des traitements. "Le système, tel que nous le recommandons, existe en Autriche, — donc des gens peut-être un peu plus avancés que nous — en Finlande...

Attendez, avant d'applaudir, en arrière, attendez mes vieux clichés.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que je pourrais inviter le député de Johnson à s'adresser au président, s'il vous plaît?

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je m'adresse au micro, si vous êtes devant moi, je tiens ça comme acquis. "En Finlande, M. le Président, en Turquie, en France — vous ne riez plus — pour ne nommer que quelques pays. Nous avons cru que le meilleur exemple était encore celui de la France où, d'après les renseignements que nous avons obtenus, les parlementaires sont généralement satisfaits de leur traitement, où, par ailleurs, l'opinion publique ne semble pas se scandaliser des augmentations réelles que peuvent subir ces traitements. En France — dit le rapport Bonenfant — les deux premiers articles de l'ordonnance no 581210 — un vieux cliché — du 13 décembre 1958, portant loi organique relativement à l'indemnité des membres du Parlement que nous reproduisons à l'appendice 6". Cela veut dire l'appendice, ce qui suit se lisant ainsi. "Article 1er, l'indemnité parlementaire est calculée par référence au traitement des fonctionnaires occupant les mêmes emplois de l'Etat classés dans la catégorie présentement dites hors échelle. Elle est égale à la moyenne du traitement le plus bas et du traitement le plus haut de cette catégorie. Deuxièmement, l'indemnité parlementaire est complétée par une indemnité dite indemnité de fonction.

Le montant de cette indemnité est égal au quart du montant de l'indemnité parlementaire. Le règlement de chaque assemblée détermine les conditions dans lesquelles le montant de l'indemnité de fonction varie en fonction de la participation du parlementaire aux travaux de l'Assemblée à laquelle il appartient.

Pour les fins de notre comité, nous n'avons pas cru nécessaire d'évaluer en argent ces traitements, car ce qui nous intéresse, c'est la procédure et non les résultats pécuniaires en France. Le problème est de trouver à quelle classe de fonctionnaires québécois il faudrait se référer. Nous avons examiné le règlement 620 de la Commission de la fonction publique, concernant le statut particulier du personnel des cadres supérieurs et nous reproduisons le tableau".

M. le Président, c'était une des suggestions qu'a faites un comité qui s'est appelé le comité Bonenfant. Vous allez me dire: C'est un vieux cliché! Durant trois quarts d'heure, les députés de Chicoutimi et de Saint-Jacques ont parlé de vieux clichés!

M. BEDARD (Chicoutimi): Je n'ai pas parlé de cela!

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, ils ont dit que j'étais un membre de l'élite. Ces messieurs aimeraient-ils mieux m'entendre parler de marijuana ou de fumer mon "pot"? Le vieux cliché serait-il de fréquenter le Dave Club à Montréal? Le vieux cliché serait-il de porter des "jeans" et des collets roulés en Chambre? Le vieux cliché serait-il de se promener en nuvite?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BELLEMARE (Johnson): Le vieux cliché

serait-il d'aller passer mes fins de semaine dans des chalets, tout nu? Le vieux cliché serait-il de divorcer, comme c'est si populaire, aujourd'hui, après 35 ans de mariage? Le vieux cliché serait-il de rire de ceux qui vont encore à la messe? Serait-ce de rire de ceux qui veulent transformer nos écoles publiques en amateurs de sexe? Le vieux cliché serait-il, plutôt que d'enseigner l'ordre et la discipline, d'enseigner la révolution aux jeunes? Le vieux cliché serait-il d'aller m'asseoir au festival de Man-seau? C'est cela que vous voulez? M. le Président, le vieux cliché de Bellemare, quand je parle d'une élite, c'est loin de ma pensée !

On aura beau dire du député de Johnson que c'est un vieux! Oui, je suis un vieux, mais j'ai été élevé à une école de respect de l'autorité. J'ai été élevé à une école du respect non des slogans mais de la pratique de certains droits et surtout privilèges qui nous sont donnés en vertu de la loi du Parlement. Ces messieurs parlent de l'indexation avec un grand scrupule. Allons donc voir ce que dit un des meilleurs journalistes de la province, M. Vincent Prince! Je ne crois pas que l'Opposition l'ait encore cité. Il disait ceci, le jeudi 5 décembre 1974: "A notre avis, il faut réagir de façon positive. D'une part, il importe que les députés du peuple reçoivent une rémunération qui corresponde à leurs responsabilités — c'est-à-dire — entre guillemets — de l'élite —. D'autre part, il est moins important de soustraire cette rémunération à un vote périodique de l'Assemblée nationale, où la démagogie danse sur tous les tons". Je continue à citer, M. le Président: "Ce qu'il y a de plus intéressant de toute façon, dans le rapport Bonenfant, c'est la suggestion qu'on y trouve d'ajuster désormais le salaire d'un député sur un barème qui serait établi dans la loi".

Je continue encore de citer M. Prince: "Donc, l'idée d'un barème qui permettrait un ajustement périodique de la rémunération des élus a quelque chose de fascinant. Le problème est de s'entendre sur ce barème".

Le chef de l'Opposition fait grand état de ce que les pauvres et les déshérités, les gens qui ont énormément de misère à avoir un salaire égal au nôtre, peuvent peut-être endurer par les vicissitudes de la vie.

M. le Président, je ne veux pas faire du folklore et faire pleurer mon ami de Saint-Jacques, mais le chef de l'Opposition répète: Dans ma famille, il y a des gens qui gagnent beaucoup moins que nous. C'est bien évident.

Il y a 1,500,000 travailleurs qui ne sont pas syndiqués, qui vivent en vertu des décrets, qui vivent en vertu du salaire "minum", minimum, "minimninum" si vous voulez, du salaire minable, si vous aimez mieux. Il y en a 1,500,000. Quand on fait la proportion et qu'on établit des chiffres pour établir un salaire moyen, cela influence énormément sur la statistique.

J'ai un de mes frères, M. le Président, qui est agent d'assurance. Il fait au-dessus de $22,000 par année, il prend deux mois de vacances, il n'y a pas de fin de semaine qu'il ne travaille pas, il travaille à partir du jeudi. Il est beaucoup mieux que moi.

J'ai un autre de mes frères qui travaille dans l'industrie du papier, à la compagnie St. Maurice Paper, pour la Consolidated Paper. Il travaille peut-être cinq jours par semaine. Il fait au-delà de $22,000 par année.

Je voudrais savoir de ces messieurs ce que gagne, aujourd'hui, dans la construction, un ouvrier ordinaire, non pas un ouvrier spécialisé, un ouvrier ordinaire et le comparer à mon traitement comme député. Je voudrais savoir ce que gagne un électricien, de la profession des électriciens et des maîtres électriciens. Je voudrais savoir ce que gagne un membre de la Corporation des plombiers dans la province.

M. le Président, je ne veux pas faire, ici, de démagogie inutile, mais j'ai cité des hommes qui travaillent dans la construction, dans l'assurance, comme "faiseurs" de papier. Si je voulais me hasarder dans le domaine des professionnels, on a seulement à prendre la statistique annuelle qui nous est fournie par Statistique Canada et nous verrions qu'il y a des ingénieurs qui gagnent jusqu'à $80,000 par année. Il y a des médecins —et cela a été rapporté par l'assurance-hospita-lisation — qui retirent des revenus d'au-delà de $125,000 par année. Il y a des avocats aussi, les maîtres avocats — ils ont de très bons bureaux, je ne leur reproche pas leur profession — et j'en connais très peu qui font des salaires en bas de $22,000 ou $25,000 par année. Il y a aussi des professeurs qui, en vertu de leur dernière convention collective, touchent des rémunérations et des salaires qui approchent sensiblement le nôtre. N'ayant pas les responsabilités que nous avons, je me demande si véritablement on est justifié, aujourd'hui, de ne pas se battre —c'est l'expression qu'il faut employer — devant des gens qui font une obstruction systématique afin d'avoir plus de publicité dans les journaux, passer pour des grands hommes, mais, demain matin, par exemple, ils seront les premiers rendus chez le trésorier pour recevoir leur chèque, pour tendre la main et se faire payer.

M. le Président, le chef de l'Opposition — un exemple parmi bien d'autres — retirera $21,000 de salaire comme tous les députés. Il aura droit, comme chef de l'Opposition, à une indemnité particulière d'environ $20,000 de plus. Cela le portera à $41,000, à part les $7,000 et à part des $3,000, comme frais de représentation. Le chef de l'Opposition va payer, en impôt, 53 p.c. de ce salaire qui va lui être attribué. On va venir chercher, à même son salaire, 53 p.c, en impôt. Personne ne peut contredire cela. Cela donnera donc au chef de l'Opposition, quand il aura payé ses 53 p.c, $23,000.

Un député qui siège à l'Assemblée nationale, qui recevra $21,000, comme indemnité, paiera 40 p.c, c'est-à-dire $8,000 d'impôt. Il les prendront, dans la paye du député, et il lui restera

$13,000. Quel est celui qui peut contredire ces chiffres? Où est-il l'homme qui va venir dire aujourd'hui que je récite des vieux clichés? Est-ce que ce n'est pas vrai? Même le député de Saint-Jacques sera le premier à être imposé, plus qu'un autre, parce qu'il a conservé sa virginité.

M. CHARRON: M. le Président, si on ne l'avait pas, il faudrait l'inventer.

M. BELLEMARE (Johnson): Oui, certainement, parce qu'à mon âge, entre les tentatives et les tentations, il y a une maudite différence. Le député de Chicoutimi dit: C'est affreux d'indexer notre salaire.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ce n'est pas vrai!

M. BELLEMARE (Johnson): Vous avez dit pire que cela. Non?

M. BEDARD (Chicoutimi): Ce n'est pas vrai. Question de règlement, je n'ai jamais dit cela.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): J'ai dit qu'on choisissait le barème le plus avantageux. C'est ce que j'ai dit.

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président,...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je pense que le député pourra rectifier les faits s'il en sent le besoin après l'intervention du député de Johnson.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ce n'est pas cela. Mais plutôt qu'il commence à dire des choses qui ne sont pas correctes...

M. BELLEMARE (Johnson): Je suis bien content de voir que le député va voter avec nous pour l'indexation du salaire.

M. BEDARD (Chicoutimi): L'indexation raisonnable.

M. BELLEMARE (Johnson): Vous avez voté tout à l'heure contre l'indexation raisonnable.

Quand on regarde la liste des députés qui sont retraités, l'on retrouve en particulier l'honorable M. René Lévesque qui a été le plus grand absent de la Chambre. J'ai ici avec moi des statistiques pour constater son absentéisme pendant qu'il était ministre dans le gouvernement de M. Lesage et quand il a été président du MSA, de l'autre côté, dans l'Opposition comme député MSA. M. Lévesque reçoit aujourd'hui, comme moi, comme ancien député, je recevais avant d'être élu député de Johnson, une pension indexée, s'il vous plaît, de $14,070.40. M. Lévesque recommande au conseil national de voter contre l'indexation et contre l'augmentation des salaires.

Je pourrais vous citer d'autres personnes ici dans la province qui ont des pensions indexées. Je pense que c'est un argument de plus pour nous, parce qu'il y a des députés dans cette Chambre qui ne feront peut-être pas un autre mandat. Ils sortiront sans aucune pension. Ils retourneront à leur boulot, ils retourneront à leurs affaires sans recevoir un seul cent de pension, parce que, pour obtenir l'avantage d'une pension, il faut siéger dans deux Parlements, au moins six ans. Je veux vous dire, sans faire de folklore, et sans retourner dans ce qu'on appelle les vieux clichés, qu'il y a des députés qui sont sortis de cette Chambre sans pension. Je pourrais vous en nommer plusieurs qui, à cause d'une situation précaire, ont été obligés d'aller à l'assistance publique. Je peux vous citer des noms, même aujourd'hui, de certaines gens qui font partie du Parti québécois.

M. le Président, il s'agit d'être raisonnable, il s'agit d'adopter des mesures législatives qui ne seront pas trop dépassées par le bon sens. Je dis que l'indexation qui se fait présentement, est une indexation qui devrait être reportée, je le dis, à la suite de mon collègue de Beauce-Sud, en janvier 1976. Je pense que ce serait raisonnable. Qu'on nous accorde une augmentation de salaire, puisqu'on a défait tout à l'heure la motion du député de Beauce-Sud, que j'appuyais, celle d'obtenir un salaire de base de $19,000. On a été battu sur cette motion, on va sûrement être dans l'obligation de suivre la majorité et de recevoir une indemnité de $21,000. Sur les $21,000 que je vais recevoir comme député de Johnson, je vais être obligé d'en payer au moins $8,000 en impôt. Je pense... Pardon?

M. CHARRON: Ce n'est pas vrai.

M. BELLEMARE (Johnson): Ce n'est pas vrai? Je suis taxé à 53 p.c. du salaire. Je suis obligé d'en payer. Certainement et j'espère que vous allez vous taire. Vous allez faire comme moi tout à l'heure, j'ai enduré pendant un quart d'heure, pendant vingt minutes vos allusions sur ma vie publique. Je pense, monsieur, que s'il y a des clichés qui devraient être respectés, cela devrait être celui de l'honnêteté professionnelle. Je dis que je voterai contre cette motion, parce qu'elle est inspirée de la plus verte répugnance que l'on peut avoir vis-à-vis des gens qui, tout à l'heure, vont être les premiers rendus chez le "payeur", rendus chez le trésorier pour recevoir leur augmentation de taxes...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BELLEMARE (Johnson): Leur augmentation de taxes, oui, parce qu'on sera taxé à 50 p.c. du salaire qu'on se donne. M. le Président, il y a un fait que je voudrais invoquer, c'est que les honorables amis, tout à l'heure, ont joué, pendant un certain temps — 45 minutes, M. le Président — sur le vieux député

de Johnson. Le député de Chicoutimi s'est plu à dire que les morts, il y en avait ailleurs. Oui, il y en avait ailleurs, c'est vrai. Les entrepreneurs de pompes funèbres ne fournissent pas, tous les jours, d'en charrier. Mais tant et si longtemps qu'on vivra dans ce Parlement, et qu'on aura comme exemple ceux qui ont laissé ici un nom inattaquable, un prestige d'une grande valeur, je dirai qu'ils s'appellent Pierre Laporte, qu'ils s'appellent Daniel Johnson, qu'ils s'appellent Jean-Jacques Bertrand ou Paul Sauvé, qui est mort au devoir lui aussi, je dirai, M. le Président, qu'on devra arrêter de prendre des députés pour des bouffons et surtout, qu'on devra revaloriser notre rôle de bons législateurs, et véritablement appartenir à cette élite à laquelle nous devons adhérer. Cela peut faire le sujet de quolibets, mais les plus grands bourgeois sont peut-être des anciens révolutionnaires. Il ne faudrait pas se cacher derrière des masques honorables pour paraître des vierges offensées. Je pense, M. le Président, qu'il est temps, plus que jamais, puisque c'est la dernière fois qu'on va toucher à notre salaire, de l'établir sur des bases raisonnables, justes, vis-à-vis d'un assureur, vis-à-vis d'un papetier, vis-à-vis d'un homme qui travaille dans la construction, vis-à-vis d'un électricien, vis-à-vis d'un plombier, vis-à-vis d'un ingénieur, vis-à-vis d'un médecin, d'un avocat, d'un professeur dans nos écoles. Je pense que le député a droit à une certaine indemnité raisonnable, et c'est pourquoi, M. le Président, je voterai contre la motion.

LE PRESIDENT (M. Gratton): L'honorable député de Beauce-Sud sur l'amendement de l'honorable député de Saint-Jacques.

M. ROY: M. le Président, sur l'amendement qui vient d'être proposé, il est évident que, si je veux être logique avec la motion que j'avais proposée le 24 décembre, et logique avec la position que j'ai prise à l'Assemblée nationale, selon laquelle l'indexation ne devait pas débuter avant 1976, je devrai voter contre la motion de l'honorable député de Saint-Jacques. Première raison.

Deuxième raison, M. le Président, c'est que les chiffres qu'on nous a donnés... Je me réfère aux chiffres que nous a fournis le chef de l'Opposition lui-même, lorsqu'il a parlé du taux de croissance du revenu canadien, par rapport à l'augmentation du coût de la vie.

M. le Président, l'augmentation du revenu canadien de 1973 à 1974 a été de 10 p.c, et si je retiens ce montant de 10 p.c, en l'analysant à partir du salaire qui est fixé dans le projet de loi actuel, il s'agira d'une augmentation, pour l'année 1975, de $2,100. J'ai dit que c'était trop, j'ai dit que l'indexation ne devrait pas débuter tout de suite. Mais si je prends le chiffre qui a été retenu par la motion de l'honorable député de Saint-Jacques, alors que tout le monde s'accorde à dire — pas un économiste n'a contesté le chiffre à venir jusqu'à maintenant — que le taux d'augmenta- tion du coût de la vie au Québec sera de 12 p.c. pour les douze mois de l'année 1974, cela veut dire...

M. BELLEMARE (Johnson): Jamais! Jamais! C'est clair, cela?

M. ROY: ... que l'augmentation serait, au lieu de $2,100, si la motion de l'honorable député de Saint-Jacques était acceptée, de $2,520, une augmentation de $420 de plus que celle qui est prévue dans le projet de loi. M. le Président, c'est à n'y rien comprendre, du tout!

Je vais terminer là mes propos, parce que je ne veux d'aucune façon abuser de mon droit de parole pour participer à ce "filibuster", qui est en quelque sorte un "foliebuster", surtout si on considère que nous sommes des gens responsables, qu'on doit agir comme tels, je commense à avoir des doutes. Lorsqu'on considère combien cela coûte, une journée à l'Assemblée nationale, aujourd'hui, à la province, aux Québécois, qui devront en payer les frais, pour discuter d'une loi qui va coûter au trésor provincial, tout au plus un demi-million de dollars, alors que le budget de l'Assemblée nationale est de $15 millions annuellement, que nous avons 100 jours de session, plus une quarantaine de jours de commissions parlementaires en dehors des sessions, on peut dire, pour un chiffre rond, qu'il en coûte un minimum de $100,000 par jour de session.

Pendant que nous nous amusons, je le dis bien, à discuter de cette question, pendant qu'on se cherche des poux, les éléphants passent. Il y aurait beaucoup d'autres choses à faire au Québec, actuellement, il y a des projets majeurs. Il y a des lois majeures qui devraient nous être présentées à l'Assemblée nationale et nous avons des travaux extrêmement importants à faire. Nous sommes ici, présentement, pour discuter pendant combien de jours, pendant combien de semaines pour un projet de loi qui coûte un demi-milion, pour chercher des poux, pour faire le procès, je le dis bien, du pouvoir législatif alors que l'an dernier, à la même date, on a profité de l'augmentation du salaire des juges pour faire le procès du pouvoir judiciaire.

M. le Président, j'ai dit tout à l'heure que j'étais assez grand et assez vieux pour me poser des questions tout seul, mais je m'en pose une à l'heure actuelle. Quelles sont les intentions cachées derrière cette manoeuvre pour un projet de loi qui en coûte un demi million aux Québécois? Je comprends qu'il y a des principes, M. le Président, nous l'avons dit. Mais défendre un principe et prendre position, je pense que c'est manquer à notre devoir de contribuer ou de participer à des dépenses additionnelles qui vont coûter aux Québécois $1 million et peut-être $1.5 million de plus. Pour faire quoi? Pour faire le procès du pouvoir législatif.

Je n'en dis pas plus long à ce moment-ci. Si

c'est nécessaire, j'interviendrai, mais je n'ai pas l'intention d'abuser de mon droit de parole. Je veux être clair, très clair sur cette chose. Je ne peux pas voter en faveur de cette motion parce qu'elle est contraire à l'esprit de la motion que j'ai présentée, parce qu'elle constitue, à mon avis, une augmentation sur l'augmentation proposée par le gouvernement et je n'ai pas l'intention de jouer au fou.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Chicoutimi, à qui il reste deux minutes.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est tout simplement pour relever un point, suite à l'intervention du député de Johnson; lorsque j'ai parlé de Daniel Johnson, j'ai dit que je convenais qu'il était peut-être mort au devoir, et j'invitais le député de Johnson à penser aussi aux travailleurs qui sont peut-être morts au devoir aussi comme Daniel Johnson et d'autres politiciens...

M. BELLEMARE (Johnson): Ce n'est pas honnête cela !

M. BEDARD (Chicoutimi): ... à savoir... Il lira mon intervention, je parlais...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): ... des cuvistes à l'Alcan et des mineurs qui étaient en butte à des maladies industrielles au moment où ils avaient à remplir un devoir qui était tout aussi important que n'importe quel autre, à savoir assumer la responsabilité de faire vivre leur famille, et pas plus que cela.

Egalement, je crois que le problème avec toutes les comparaisons que nous a données le député de Johnson, c'est qu'en calculant l'impôt, si c'est une si petite augmentation qu'on se donne, on serait aussi bien de ne pas se chicana-plus longtemps pour se donner une si petite augmentation, et plutôt, penser à donner l'exemple aux Québécois et de ne pas se voter cette augmentation. Le problème n'est pas de se comparer avec les autres classes de la société. J'ai un frère qui est épicier et qui gagne deux fois mon salaire, cela ne veut pas dire que je dois m'en voter un qui soit deux fois ce que j'ai à l'heure actuelle. Cela ne change rien. Le problème est d'évaluer ce qu'il nous faut comme salaire pour pouvoir bien remplir notre travail. C'est ça le problème, et non pas se comparer avec les fonctionnaires et avec n'importe quelle autre classe. Je pense que le problème est là et laissez faire les comparaisons.

M. le Président, pour terminer les deux minutes qu'il me reste, je voudrais poser une question au ministre des Finances. Je trouve que l'article 92 a), — je peux me tromper, je ne veux pas poser à l'expert — dans sa formulation, ne correspond pas à la réalité qu'il voudrait expliciter. On y lit ceci: "Le montant de l'indemnité visé à l'article 92 doit, à compter du 1er janvier 1975, être augmenté annuellement du pourcentage que représente le rapport entre le salaire de base pour l'année précédente et le salaire de base pour l'année antérieure à cette dernière". Ceci veut dire que, si je prends le salaire de base de 1974 qui serait, comme exemple, de $9,200 et également le salaire moyen de 1973 qui serait de $8,800, ceci donnerait un rapport de 1.5 p.c...

M. HARDY: Cela va être corrigé.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... ce qui veut dire 100 p.c. A ce moment-là, il me semble que ce n'est pas le mot "pourcentage" qu'on devrait employer, mais plutôt le mot "montant".

M. HARDY: Cela va être corrigé.

M. BEDARD (Chicoutimi): Je ferais un amendement.

M. HARDY: J'en ai un qui va tout couvrir cela.

M. BEDARD (Chicoutimi): Laissez-moi finir. Vous êtes bien vite quand vous pensez qu'on a raison...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Votre temps est terminé.

M. HARDY: De toute façon, vous n'avez plus de temps.

LE PRESIDENT (M. Gratton): II est dépassé par une minute.

M. BEDARD (Chicoutimi): Je peux finir ma phrase.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous pouvez résumer, mais ne sautez pas dans les...

M. BEDARD (Chicoutimi): De telle façon, M. le Président, que je crois que si on veut vraiment avoir un texte juridique qui respecte la réalité, qu'on veut voter, c'est que le mot "pourcentage" devrait être remplacé par "être augmenté annuellement du montant..." je finis ma phrase et j'ai fini mon intervention.

M. HARDY: J'invoque le règlement, elle est irrégulière.

M. BEDARD (Chicoutimi): "... pourcentage par montant que représente le rapport entre le salaire de base pour l'année précédente et le salaire de base pour l'année antérieure à cette dernière".

M. HARDY: Qu'est-ce que cela a à voir avec l'amendement qui nous a été soumis?

LE PRESIDENT (M. Gratton): L'honorable ministre des Finances.

M. BEDARD (Chicoutimi): J'ai trois minutes, j'ai droit à des informations.

M. HARDY: J'invoque le règlement, M. le Président. Nous avons déjà un amendement et le député de Chicoutimi ne peut pas proposer un autre amendement actuellement. Il faut d'abord disposer de l'amendement du député de Saint-Jacques.

M. BEDARD (Chicoutimi): Alors, je le soumets tout de suite, M. le Président.

M. HARDY: Un instant.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous ne pouvez pas faire cela, vous le savez fort bien d'ailleurs. Le ministre des Finances.

M. HARDY: Vous prouvez une fois de plus votre malhonnêteté.

M. BEDARD (Chicoutimi): Au contraire, on vient de prouver que...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): ... vous l'aviez mal rédigé.

M. MORIN: Une augmentation de 800 p.c.

M. HARDY: II est tout choqué.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: Cela vous évitera d'encaisser des chèques auxquels vous n'avez pas droit.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): Cela vous montrera à faire des textes législatifs sans savoir quels mots employer.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Voulez-vous avoir cinq minutes de "free for all", comme dirait le chef de l'Opposition? Le ministre des Finances sur la motion d'amendement du député de Saint-Jacques.

M. GARNEAU: M. le Président, dans le débat sur la proposition d'amendement du député de Saint-Jacques, le chef de l'Opposition officielle et le député de Chicoutimi ont longuement fait état d'un indice d'augmentation d'indexation qui était de loin le plus avantageux par rapport à d'autres formules qui ont été utilisées dans d'autres secteurs.

Je voudrais m'inscrire en faux contre cette argumentation. Je l'ai fait en deuxième lecture à l'Assemblée nationale et je veux reprendre très rapidement le procédé ou le processus qui nous a amenés à arriver à cette suggestion qui est contenue dans le projet de loi 87. D'abord, il y avait la proposition du rapport Bonenfant qui suggérait de prendre la médiane du salaire des administrateurs classe IV et voyait une augmentation du salaire de base des députés suivant le même rythme d'augmentation que celui de cette catégorie de fonctionnaires. Or, M. le Président, si nous avions suivi à la lettre la recommandation du rapport Bonenfant, nous aurions prévu pour 1975 une augmentation de base de 6 p.c, qui est l'augmentation de la masse salariale, quoiqu'il y ait des administrateurs classe IV qui peuvent avoir jusqu'à 10 p.c, plus l'indexation qui, pour l'année 19 74/75, dépassera vraisemblablement les 16 p.c, ce qui aurait fait 22 p.c. d'augmentation. Nous avons cru que c'était trop élevé et je pense qu'à ce moment-là l'Opposition aurait pu critiquer le gouvernement de faire une telle formule d'indexation.

Une autre formule, M. le Président, qui est encore et de beaucoup plus avantageuse que celle que nous proposons dans ce projet de loi, c'est celle que ce même Parlement, ce même gouvernement a donnée à l'ensemble du secteur public et parapublic. Je l'ai indiqué en deuxième lecture et je voudrais reprendre rapidement cette argumentation. Si nous prenons l'augmentation moyenne des salariés de la fonction publique et parapublique: en 1972, cela a été 8.6 p.c; en 1973, 10.7 p.c; en 1974, 17 p.c; et d'encaissé ou en caisse au 31 décembre 1974, il y a au moins 8 p.c. Ce qui veut dire que, si nous avions considéré cette formule, non pas en nous servant d'abord pour ensuite servir les autres, mais en nous appuyant sur non pas sur ce que nous pourrions faire dans l'avenir pour les fonctionnaires ou le secteur de l'enseignement ou le secteur hospitalier, mais tout simplement en s'alignant sur ce qui a été fait au cours des dernières années, ce serait une augmentation de 44 p.c. ou 45 p.c. qu'il aurait fallu appliquer au salaire de base en utilisant la même formule d'indexation.

Encore là, nous avons cru que c'était trop élevé et le ministre de l'Industrie et du Commerce, cet après-midi, a donné la rationalité derrière les $21,000, c'est-à-dire que nous avons voulu appliquer, à l'augmentation de base du salaire des députés, ce qui a été l'augmentation moyenne des salaires des ouvriers au Canada. Nous croyons que des députés, sans se prendre pour d'autres, sans se prendre pour plus fins, sans se prendre pour plus fous, peuvent dire que nos salaires et nos traitements de base augmentant de la même façon, au même rythme que celui des ouvriers canadiens, je pense qu'il n'y a pas d'exagération et c'est ce que nous avons fait pour ramener, au 31 décembre 1974, le salaire de base des députés, qui partait de $15,600, pour l'amener à $21,000, tel qu'il sera le 31 décembre 1974. Pour l'avenir, nous avions différentes formules et c'est une des raisons pour lesquelles nous n'avons pas pris la proposition du député de Saint-Jacques, c'est justement qu'elle était plus avantageuse. Il me dira

que c'était pour cette année, mais qui me dit qu'en 1975, au lieu d'être 9.6 p.c, comme la moyenne des salaires des ouvriers au Canada pour les huit premiers mois, qu'en 1975 ou 1976, cela n'aurait pas été 12 p.c. et 13 p.c? Je ne le sais pas.

Une chose est certaine, c'est qu'en appuyant l'augmentation moyenne du salaire des députés, dans l'avenir, à ce qu'est l'augmentation moyenne des ouvriers au Canada, je pense que personne ne pourra blâmer les députés de se servir d'abord. Au contraire, nous allons connaf-tre le même rythme de croisière d'augmentation de traitement que les ouvriers canadiens et je pense que c'est une base solide, qui n'est pas influencée par des groupes de travailleurs qui ont des formules d'indexation plus avantageuses que d'autres parce que dans cette moyenne d'augmentation du salaire des ouvriers canadiens, il y en a qui ont des formules d'indexation au coût de la vie en plus de leur taux d'augmentation de productivité, il y en a qui n'en ont pas.

Alors, en prenant cette base moyenne d'augmentation, nous tenons compte des gens qui ont des formules d'indexation et des gens qui n'en ont pas et nous croyons que c'est beaucoup plus juste de s'aligner uniquement sur l'augmentation du coût de la vie, parce que, même si à moyen terme ça devait être supérieur à l'augmentation du coût de la vie, je ne vois aucune raison pourquoi des députés qui font honnêtement leur boulot, qui occupent honnêtement une fonction, n'auraient pas la même augmentation de traitement, en moyenne, que l'ensemble des ouvriers canadiens.

On ne peut certainement pas nous blâmer d'avoir choisi les classes les plus payées ou les classes les moins payées, mais on prend la moyenne de l'ensemble des ouvriers et si notre salaire augmente comme celui des ouvriers, je pense qu'on est sur du terrain solide, on ne peut pas faire de démagogie avec des augmentations semblables, on ne peut pas dire que nous allons influencer nous-mêmes les décisions qui nous affecteront, ce qui aurait pu être le cas si nous avions suivi à la lettre le rapport Bonenfant parce que c'est l'exécutif qui détermine par règlement le salaire des cadres supérieurs, nous aurions pu dire: Pour que les députés augmentent davantage, on va augmenter le salaire minimum de la classe IV; au lieu d'être $19,000 à $25,000, il va être de $21,000 à $25,000, de telle sorte qu'on aurait pu avoir des augmentations de traitement supérieures et aussi avoir une formule d'indexation nettement plus avantageuse que celle que nous avons, parce que, dans le secteur public et parapublic, la formule d'augmentation, quand on parle, au 1er juillet 1974, une augmentation de 17 p.c. plus les 6 p.c. qu'on a versés le 31 décembre, c'est une formule qui est certainement avantageuse et les employés du secteur public et parapublic au Québec sont certainement parmi les travailleurs qui sont traités avec le plus d'égard, avec le plus de générosité, comparativement à ce qui se passe dans bien d'autres classes de la société. C'est pourquoi je soumets que cette base d'augmentation du salaire des députés qui s'appuie sur l'augmentation des ouvriers au Canada est une base solide, une base qui évite la démagogie, une base qui évite également le tripotage qui pourrait se produire à l'occasion de règlement de convention collective sur lesquelles on a un mot à dire, ou encore des traitements de cadres qui sont déterminés par l'exécutif. Je pense que c'est plus juste, c'est la raison pour laquelle nous avons choisi cette formule et c'est la raison pour laquelle nous allons voter contre la motion d'amendement du député de Saint-Jacques.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Messieurs, sur la motion d'amendement du député de Saint-Jacques à l'effet de remplacer à l'article 5, les mots qui suivent le mot "pourcentage", dans la onzième ligne, par les mots suivants: "d'augmentation d'indice général des prix à la consommation à Montréal, pour l'année précédente, par rapport à l'année antérieure à cette dernière, tel que publié par Statistique Canada en vertu de la Loi sur la statistique.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Bédard, Chicoutimi?

M. BEDARD (Chicoutimi): Pour.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Bellemare, Johnson?

M. BELLEMARE (Johnson): Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Massicotte?

M. MASSICOTTE: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Pépin?

M. PEPIN: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Brown?

M. BROWN: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Charron?

M. CHARRON: En faveur.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Caron?

M. CARON: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Giasson? M. Hardy?

M. HARDY: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Pelletier?

M. PELLETIER: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Carpentier?

M. CARPENTIER: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Morin?

M. MORIN: En faveur.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Saint-Pierre? M. Ostiguy? M. Garneau?

M. GARNEAU: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Roy?

M. BELLEMARE (Johnson): M. Roy m'a demandé d'enregistrer son vote contre parce qu'il est allé en Chambre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que la commission est d'accord?

DES VOIX: D'accord.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Vallières?

M. VALLIERES: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Pour: 3

Contre: 11

La motion d'amendement est rejetée. Le ministre des Affaires culturelles.

Motion d'amendement de M. Hardy

M. HARDY: M. le Président, je propose que les deux paragraphes 92 a) de l'article 5 soient remplacés complètement par une nouvelle rédaction.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre des Affaires culturelles propose... si je comprends bien, il s'agit de biffer...

M. HARDY: II s'agit de rayer complètement l'article 92 a) que l'on retrouve à l'article 5 et de le remplacer par une nouvelle rédaction.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je me demande...

M. HARDY: En partie.

M. BEDARD (Chicoutimi): En grande partie.

LE PRESIDENT (M. Gratton): La commission serait-elle...

M. HARDY: On est en train de le distribuer.

M. CHARRON: A quel endroit cela commence-t-il?

M. HARDY: C'est tout l'article 92 a), les deux paragraphes: "Le montant de l'indemnité visée..." et l'autre paragraphe qui commence par: "Le salaire de base..." Ces deux paragraphes seraient rayés. C'est une toute nouvelle rédaction.

M. CHARRON: D'accord.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Si vous me le permettez, j'aimerais d'abord demander ceci à la commission: L'article qui s'intitule 92 est-il adopté?

M. MORIN: Sur division.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Adopté sur division.

M. CHARRON: M. le Président, pour les fins du journal des Débats, avant d'entamer la discussion, pourriez-vous lire le nouveau texte présenté par le ministre des Affaires culturelles?

LR PRESIDENT (M. Gratton): Oui. Le nouveau texte présenté par le ministre ne touche que l'article 92 a) de la Loi de la Législature, c'est pourquoi j'aimerais disposer de l'article 92, comme tel, en l'adoptant sur division, tel que demandé, pour ensuite passer à l'article 92 a).

M. BEDARD (Chicoutimi): L'amendement porte sur l'article 92 et non sur l'article 92 a).

M. MORIN: Pourrais-je demander au ministre pourquoi il ne nous a pas soumis ce texte avant, quand nous avons abordé l'article 5, plutôt que d'attendre si tard? Nous avons déjà fait des exposés en nous fondant sur l'ancien texte de l'article 92 a), alors que le ministre savait qu'il allait nous apporter un amendement. Cela nous aurait peut-être épargné de longs débats inutiles.

M. HARDY: Je n'en suis pas sûr!

LE PRESIDENT (M. Gratton): De toute façon, je m'excuse...

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous auriez pu courir le risque !

M. MORIN: J'ai posé une question au ministre. Je voudrais bien comprendre pourquoi on nous l'apporte tout simplement comme cela.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Moi-même, je serais très intéressé à écouter la réponse du ministre, mais j'aimerais avoir la réponse de la commission avant sur la question que j'ai posée

moi-même, à savoir adopter l'article 92 sur division, avant de passer à l'amendement. Cela va?

M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté, sur division.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Adopté, sur division. Le ministre des Affaires culturelles propose que les deux alinéas du paragraphe 92 a) soient remplacés par le texte qui suit, c'est-à-dire: "A compter de l'année 1975, l'indemnité visée à l'article 92 est, pour chaque année, égale au montant de l'indemnité pour l'année précédente, multipliée par le salaire de base pour l'année précédente et divisée par le salaire de base pour l'année antérieure à cette dernière. "Le salaire de base pour une année est la moyenne arithmétique des traitements de salaires hebdomadaires pour l'ensemble des activités économiques au Canada, tel que le publie Statistique Canada, en vertu de la Loi sur la statistique, pour chacun des douze mois de la période se terminant avec le mois de juin de l'année. Ces traitement et salaires, pour chacune des deux années précédant celle pour laquelle l'indemnité est calculée, sont ceux apparaissant dans la première publication de Statistique Canada, contenant ceux pour le mois de juin précédant immédiatement l'année pour laquelle l'indemnité est calculée. "Lorsque le produit du calcul, selon le premier alinéa, n'est pas un multiple de $100, le montant de l'indemnité annuelle est porté au plus proche multiple de $100. "L'indemnité annuelle ne peut être inférieure à celle de l'année précédente."

Cet amendement du ministre sera-t-il adopté?

UNE VOIX: Adopté.

M. MORIN: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre voudrait-il donner certaines explications? Le chef de l'Opposition officielle.

M. MORIN: J'aimerais que le ministre réponde à la question que je lui posais. Pourquoi nous apporter cet amendement si tard? Qu'il nous donne aussi les explications techniques.

M. HARDY: Qu'auriez-vous dit si l'amendement était arrivé plus tôt?

M. MORIN: Peut-être aurions-nous d'abord évité tout le débat soulevé par le député.

M. HARDY; J'ai voulu tantôt, et il a refusé.

M. MORIN: Oui, parce que vous l'interrompiez. Il était déjà trop tard, à ce moment.

M. HARDY: M. le Président, la question est absolument inutile.

M. le Président, comme on le verra, la nouvelle rédaction de l'article 92 a) répond d'abord aux problèmes réels soulevés par le député de Chicoutimi. Elle répond aussi à des exigences d'ordre pratique, quant à la publication de Statistique Canada, en précisant d'une façon bien claire le moment où le tout doit se faire. Enfin, il y a aussi une précision d'ordre mathématique, quant au multiple de $100. C'est une nouvelle rédaction qui ne change rien quant à la substance de la rédaction antérieure. Elle ne fait que préciser et clarifier.

M. MORIN: M. le Président...

M. HARDY: M. le Président, si le député de Chicoutimi a besoin de plus amples explications sur cet article, il va prouver à la population que l'augmentation qu'on va lui voter n'est pas méritée.

M. BEDARD (Chicoutimi): En tout cas, j'ai compris votre texte de loi. Il y avait une erreur. Vous allez être obligés de la corriger.

M. MORIN: II y avait effectivement une erreur.

M. HARDY: Oui, M. le Président, il n'y a que les péquistes séparatistes qui croient ne jamais se tromper.

M. MORIN: Voyons!

M. BEDARD (Chicoutimi): Ne changez pas le problème de place.

M. MORIN: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Blank): Le chef de l'Opposition.

M. BELLEMARE (Johnson): Vous êtes aussi un vieux cliché.

M. HARDY: Pardon?

M. BELLEMARE (Johnson): Vous êtes un vieux cliché.

M. HARDY: Ah!

M. BEDARD (Chicoutimi): Avec un peu plus de temps, on va peut-être voir une erreur dans celui-là aussi.

M. MORIN: M. le Président, si l'amendement du ministre répond aux problèmes techniques que nous avions soulevés... Je reconnais que le... Oui, soulevés par le député de Chicoutimi.

M. HARDY: Pas vous.

M. MORIN: A chacun sa tâche. C'est lui qui a été chargé de soulever ce problème et il l'a fait, je pense, avec beaucoup de précision.

M. HARDY: II est rare que vous déceliez les problèmes juridiques.

M. MORIN: C'était à ce point précis que vous l'avez vu venir et que vous l'avez interrompu.

M. HARDY: J'ai dit que c'était inutile.

M. MORIN: Oui, mais, effectivement, M. le Président, je reconnais que...

M. HARDY: C'est un assez bon juriste.

M. MORIN: ... sur le plan technique, l'amendement proposé par le ministre corrige l'erreur qu'il y avait dans la première version, mais, cet amendement ne change rien au problème de fond. Si je ne m'abuse, M. le Président, j'ai une vingtaine de minutes pour commenter cet amendement.

M. le Président, comme j'ai eu l'occasion de le dire déjà à mes collègues, durant mon discours de première lecture...

M. HARDY: De première lecture?

M. MORIN: De deuxième lecture, pardon. Merci de la précision, M. le ministre. L'augmentation qui va être accordée par ce nouvel article 92 a), n'est pas plus justifiée que celle qui allait nous être accordée par l'ancien article 92 a).

Le ministre de l'Industrie et du Commerce qui a participé au débat, cet après-midi, nous a appris, la semaine dernière, que la situation économique au Québec est sur le point de connaître une baisse, un ralentissement dans les indicateurs économiques, ce qui fait que ce nouvel article 92 a) crée autant de problèmes pour les Québécois que l'ancienne version.

On a corrigé un point technique, mais on a laissé intact le problème de fond. Le problème de fond, c'est qu'il va être de plus en plus difficile pour les Québécois de gagner leur vie, en 1975, alors qu'apparaissent déjà, clairement inscrits dans les indicateurs économiques, les signes annonciateurs de ce que nous appelions, hier, la "stagflation", c'est-à-dire le fléchissement jusqu'au point zéro du produit national brut accompagné d'une inflation supérieure à 10 p.c.

M. le Président, cette situation économique ne peut pas être dissociée du problème dont nous traitons à l'heure actuelle. Nous ne pouvons pas, nous, les députés, dire: Quelle que soit la condition économique des Québécois, quel que soit le produit national brut, qu'il baisse ou qu'il augmente, quel que soit le salaire moyen des Québécois, nous, nous allons régler notre problème et, ensuite, s'il reste quelque chose, nous réglerons celui des Québécois.

C'est pourquoi nous avons dit et répété que nous serions prêts à régler le problème des députés à condition que ceux-ci veuillent bien se pencher d'abord sur les problèmes de la masse des Québécois et, particulièrement, des Québécois qui se trouvent au bas de l'échelle des salaires.

Nous avons posé deux conditions et nous les posons toujours à l'égard de ce nouvel article 92 a). Ces deux conditions, c'étaient d'abord un relèvement du salaire minimum, auquel s'ajouterait l'indexation à compter de janvier 1975, et la réouverture des conventions collectives permettant à tous ceux qui n'ont pas de clauses d'indexation, tous ceux qui n'ont pas ce qu'on appelle une clause de cherté de la vie, de pouvoir rouvrir ces conventions, ces contrats de travail et de pouvoir y inscrire après négociation une clause qui leur permette de maintenir leur pouvoir d'achat.

En effet, pour ce qui est du salaire minimum, j'ai fait observer déjà qu'il a augmenté au cours de la dernière décennie, mais à un rythme qui n'est pas satisfaisant. De $0.70 l'heure qu'il était en 1961, il est passé à $1.40 en 1971. Depuis 1972, il a été haussé, en mai et en novembre de chaque année, passant de $1.50 à $1.60, à $1.65, à $1.70, à $1.85 et plus récemment à $2.10 et $2.30, le 1er novembre dernier. Ce qui signifie qu'à l'heure actuelle, pour ne semaine de 40 heures, qui est la semaine normale, le salaire minimum hebdomadaire est passé de $66 à $92, de novembre 1972 à novembre 1974, une augmentation de 39.4 p.c. Cependant, si l'on tient compte de l'augmentation du coût de la vie, l'augmentation réelle du salaire hebdomadaire n'a été que de $10.80 soit non plus 39.4 p.c. mais 16.4 p.c, l'indice des prix à la consommation étant passé pendant cette période de 132.3 p.c. à 162.8 p.c.

J'aimerais beaucoup entendre les précisions du ministre des Finances, qui avait à la main tout à l'heure sa petite calculatrice électronique; s'il pouvait faire la démonstration que je me trompe, je me rangerais volontiers à son avis. Mais je ne pense pas, même avec une calculatrice électronique, qu'il arrive à ébranler ces chiffres. L'augmentation réelle a été de 16.4 p.c. Encore faut-il considérer, comme je l'ai fait déjà observer, que le budget d'une famille qui vit avec $92 par semaine est presque entièrement consacré aux premières nécessités. J'entends par là la nourriture, le logement, l'habillement, toutes choses sur lesquelles on ne peut pas lésiner, toutes choses que tout être humain, qu'il gagne une fortune ou qu'il gagne un bas salaire chaque année, toutes choses qu'un être humain doit avoir à sa disposition. Ces secteurs ont subi des hausses supérieures à celles reflétées par l'indice général des prix à la consommation. Cela singifie que, pour une famille qui dépasse la famille moyenne de quatre individus, l'augmentation réelle du salaire hendomadaire a été encore inférieure à

16.4 p.c. Si l'on tient compte de ce phénomène, on constate donc que l'augmentation a été en réalité plutôt de l'ordre de 5 p.c. à 10 p.c., pas davantage, selon les familles.

Par ailleurs, le maintien pendant des années du salaire minimum à un niveau anormalement bas, que l'on songe qu'il était de $0.64 en 1960, de $1.05 seulement en 1968, encore en 1968, de $1.25 en 1970, tout cela a nécessité et nécessite encore un rattrapage. Avant de parler de rattrapage pour les députés, nous devons, c'est notre devoir, parler de rattrapage pour l'ensemble des Québécois et en particulier pour ceux qui connaissent entre leur salaire et le nôtre le plus grand écart. Dans une société qui se veut social-démocrate, on ne cherche pas à élargir l'écart entre les salaires de ceux qui se trouvent au bas et les salaires de ceux qui se trouvent en haut. On cherche plutôt à rétrécir cet écart constamment. C'est cela une société vraiment social-démocrate, de sorte que ce rattrapage n'est pas terminé à l'heure actuelle.

Les gens qui gagnent $92 par semaine, on ne viendra pas me raconter qu'ils arrivent à se tirer d'affaire. Ils sont en deçà du seuil de la pauvreté. Voilà la réalité! Le seuil, tel qu'il est évalué par les statistiques fédérales.

Si l'on tient compte de l'inflation et de ce nécessaire rattrapage, la hausse du salaire minimum, même si elle a été rapide depuis quelques années, a été absolument insuffisante. La seule véritable question que l'on doit se poser aujourd'hui, est de savoir quel est le minimum nécessaire, en 1974, pour élever une famille. Il nous apparaît qu'il y a là, peut-être, une certaine philosophie qui sous-tend la définition que je viens de donner du salaire minimum. Comme j'y ai fait allusion déjà plusieurs fois en Chambre, je ne devrais peut-être pas revenir trop longuement là-dessus. Mais il est évident que, si on calcule le salaire minimum par rapport à ce que les industries les plus mal placées sont capables de payer, on va constamment tenir ces chiffres en deçà de ce qu'ils devraient être. Selon nous, selon la philosophie sociale dont nous nous inspirons, le salaire minimum, c'est ce qu'il faut à un père de famille, qui a une famille moyenne, pour vivre. Ce n'est pas ce que les industries les plus mal placées peuvent lui payer, c'est ce qu'il lui faut pour vivre.

M. le Président, à l'heure actuelle, il est évident que $92 par semaine, c'est totalement insuffisant. En ce qui nous concerne, nous pensons que le salaire minimum doit être immédiatement porté à $2.50, et indexé dès le 1er janvier, de sorte que même les plus démunis d'entre nous n'auront pas à subir une perte de leur pouvoir d'achat déjà dérisoirement bas.

La seconde condition que nous avons posée, c'est la réouverture des conventions collectives. Au Québec, 40 p.c. de la main-d'oeuvre seulement sont syndiqués. Cependant, en soi, la syndicalisation n'assure pas nécessairement un moyen de défense efficace contre la hausse du coût de la vie. Plusieurs conventions collectives, vous le savez, ont été négociées avant que ne se manifeste, de façon aussi accablante, la hausse du coût de la vie, l'inflation. A l'époque, il y a encore un an, un an et demi, il n'était peut-être pas nécessaire de prévoir des clauses de vie chère dans les conventions collectives. Mais aujourd'hui, on s'aperçoit que cela a été des erreurs de n'en pas inclure, et nombreux sont les travailleurs qui veulent obtenir la réouverture des conventions collectives au moins sur ce point, peut-être pas sur les autres clauses du contrat de travail, mais sur ce point particulier. M. le Président, nous avons consulté les statistiques mises au point par le service d'analyse des conventions collectives de l'université McGill, qui avaient retenu un échantillon de 952 conventions collectives touchant 415,000 salariés, c'est-à-dire en gros, entre 38 p.c. et 42 p.c. de la main-d'oeuvre québécoise. On a constaté, d'après les derniers chiffres que nous avons pu voir, en tout cas, que 94 p.c. des conventions collectives, touchant un peu plus de trois quarts plus précisément 79.8 p.c, oui, c'est cela, 79.8 p.c. des salariés syndiqués n'ont pas de clause de vie chère. On peut dire qu'à l'heure actuelle huit employés syndiqués sur dix n'ont d'autre recours contre l'inflation que de demander la réouverture de leur convention pour négocier une nouvelle formule d'indexation des salaires. Vous savez que les centrales syndicales se sont prononcées dans ce sens. Vous savez qu'elles ont proposé des formules très précises. Elles s'étaient même mises d'accord sur des chiffres que je n'ai pas le temps de citer, puisque je vois que vous indiquez au ministre qu'il me reste quelques minutes à peine... Auriez-vous l'obligeance de me dire, à moi également, combien de temps il me reste?

LE PRESIDENT (M. Blank): Six minutes.

M. MORIN: Six minutes seulement. Ce qu'il y a de frustrant dans ces débats, M. le Président, c'est le peu de temps dont nous disposons.

UNE VOIX: Arrêtez de vous répéter!

M. MORIN: Constamment, M. le Président, il faut écourter ces démonstrations. Il faut se laisser interrompre. Heureusement qu'il y aura d'autres amendements qui nous permettront d'apporter toutes les précisions nécessaires.

Le succès des démarches visant la réouverture des conventions existantes semble varier énormément selon les secteurs. Malgré l'absence de données statistiques précises, à l'heure actuelle, on peut affirmer que les travailleurs des grandes entreprises ont vu leur pouvoir d'achat mieux protégé, en général, que les travailleurs des petites entreprises. Soit dit en passant, c'est justement sur ces moyennes et grandes entreprises que nous axons le calcul du salaire de base. Cela est dû au fait que le syndicalisme a une certaine force de frappe ou, encore, on

peut l'expliquer par la rareté de la main-d'oeuvre dans certains secteurs, je pense en particulier aux mines et aux pâtes et papiers.

Mais il reste, en fin de compte, que la plupart des employeurs ont plutôt adopté une attitude extrêmement légaliste. Ils ont refusé dans la très grande majorité des cas de rouvrir les conventions collectives en s'appuyant sur le fait qui, sur le plan juridique, est indéniable, qu'ils n'avaient aucune obligation stricte de renégocier. Les travailleurs se sont donc trouvés impuissants devant ces raisonnements juridiques qui, à vrai dire, sont exacts. Quand un contrat collectif est signé pour trois ans, il est signé pour trois ans. Mais le malheur, c'est que la situation sociale et la situation économique changent à vue d'oeil pendant ces trois ans et que maintenant nous devons en tout réalisme permettre aux travailleurs d'obtenir la réouverture de leurs conventions. Il y a même des travailleurs qui ont dû avoir recours à des grèves illégales, créant pour la paix sociale un climat dangereux. Je suis le premier à reconnaître que les grèves illégales sont un phénomène qui n'est pas heureux dans une société. Mais il faut constater que, quand il y avait au mois d'août dernier 5,000 travailleurs en grève illégale, il y a là un problème social de fond qu'on ne guérit pas seulement à coups d'injonctions ou en disant tout simplement que c'est une grève illégale et que les travailleurs n'ont qu'à rentrer et à se conformer à la loi. Quand la loi devient injuste, elle est souvent remise en question dans ses bases mêmes. L'illégalité de ces grèves force l'intervention de l'appareil judiciaire. Les injonctions se multiplient, les mépris de cour pleuvent. Menacés par des amendes, parfois même par l'emprisonnement, les dirigeants syndicaux sont placés dans une logique absolument infernale où seules les solutions extrêmes risquent de trouver leur place. Tout cela, simplement parce que des travailleurs, s'appuyant sur une notion de justice distributive que nous ne pourrions pas contester, nous qui, aujourd'hui, sommes prêts à nous redistribuer une partie de la richesse commune, veulent se protéger contre l'érosion de leur pouvoir d'achat.

M. le Président, il faut sortir les travailleurs de cette impasse. C'est la raison pour laquelle nous avons proposé cette seconde condition. Il n'est pas si difficile que cela aux députés membres de cette Assemblée d'obtenir une augmentation de salaire. S'ils la veulent, c'est très simple, nous leur tendons une carotte superbe. Nous leur disons: Oui, d'accord, vous l'aurez votre indexation, mais pensez d'abord aux Québécois, pensez d'abord aux plus démunis. Ensuite, vous serez justifiés de songer à vous-même.

Quittons cette attitude d'après nous le déluge, et permettons la réouverture des conventions collectives dans le but précis de négocier des formules d'ajustement de salaire au coût de la vie. Je ne dis pas que toutes les conventions ont à être rouvertes, certaines contiennent déjà de telles clauses, mais lorsqu'elles n'en contiennent pas, nous devrions avoir l'intelligence, nous devrions avoir le bon sens, avant de nous augmenter, de permettre aux travailleurs de maintenir leur pouvoir d'achat. Au fond, M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Blank): Le temps est écoulé.

M. MORIN: Vraiment? Alors, je m'arrête, M. le Président.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, j'aurais une question de privilège à poser.

UNE VOIX: II n'y a pas de question de privilège en commission.

M. BEDARD (Chicoutimi): Une seconde. Il y en a une qui est permise, M. le Président. Vous me corrigerez, si vous... Une question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Blank): Dérèglement.

M. BEDARD (Chicoutimi): Nous savons tous que cette salle que nous occupons est la seule qui soit climatisée, parmi les salles de commission où nous avons à travailler. Or, on s'aperçoit ce soir que la climatisation ne fonctionne pas. Nous avons à travailler dans des conditions qui sont doublement difficiles, avec une température qui, à mon sens, dépasse les 90 degrés à l'heure actuelle.

LE PRESIDENT (M. Blank): Je ne sais pas si la climatisation fonctionne durant les heures... Je vais m'informer chez le président après la séance.

M. BEDARD (Chicoutimi): II me semble, M. le Président, qu'il faudrait s'informer tout de suite parce que si, en plus on arrête la climatisation, on ne veut pas passer le projet seulement à la vapeur, mais à la double vapeur.

LE PRESIDENT (M. Blank): On va chauffer les débats.

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, il n'y a pas si longtemps, il y avait un ministre des Travaux publics qui s'appelait M. Saint-Pierre; malheureusement, il est décédé. Pendant l'étude de ses crédits, il faisait chauffer le Parlement au mois de juin.

LE PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que cette motion d'amendement est adoptée?

M. ROY: II n'y a rien de nouveau sous la calotte des cieux.

M. BELLEMARE: Les vieux clichés!

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, sur la motion d'amendement...

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, messieurs!

M. BEDARD (Chicoutimi): Pour enchaîner avec ce que nous disions tout à l'heure et surtout la rectification que j'ai faite à l'endroit de certains intervenants, à savoir que nous n'étions pas ici pour comparer notre salaire aux autres classes de la société, mais, en fait, pour l'évaluer de manière à s'en donner une qui puisse nous permettre de répondre aux besoins qui sont nécessités par les tâches que nous avons à remplir, les comparaisons sont toujours fausses. Surtout dans ce domaine, elles peuvent être non seulement tendancieuses mais ne répondre en aucune façon à l'objet du débat que nous avons...

M. HARDY: Une certaine relativité.

M. BEDARD (Chicoutimi): Oui, une certaine relativité, mais dont il faut se méfier. Je parlais entre autres d'un épicier que je connais très bien, qui gagne peut-être deux fois mon salaire. Ce n'est pas une raison pour moi d'exiger le même salaire que cet épicier. Je pense que toute comparaison avec les autres classes de la société est quand même relative, comme l'a dit le ministre des Affaires culturelles, et qu'il faut vraiment situer le débat au niveau qu'il doit avoir, à savoir si, selon l'évaluation qu'on en fait, le salaire que nous nous donnons, que nous avons à l'heure actuelle, en est un qui nous permette de répondre aux tâches que nous avons à assumer. Je soumets, M. le Président, que peut-être, étant donné les conditions actuelles, étant donné l'inflation, étant donné la hausse du coût de la vie, tout cela, peut-être que cela rend plus difficile aux députés de répondre à toutes les obligations financières auxquelles ils ont à faire face. Il reste quand même que, de la même manière qu'il ne faut pas jouer dans les comparaisons, de la même manière, il ne faut pas raisonner en nous disant, comme certains l'ont dit à cette commission, que du fait qu'ils gagnaient un salaire plus élevé avant d'entrer dans la vie publique, à ce moment-là ils se croyaient justifiés d'être d'accord sur une augmentation pour tout simplement récupérer une partie de ce qu'ils perdent en acceptant de remplir leur tâche de députés.

Je crois, M. le Président, que — j'ai suivi tout le débat, s'il y en a qui se sentent visés —

M. BELLEMARE (Johnson): Qui est-ce qui l'a dit?

M. BEDARD (Chicoutimi): Ce n'est pas vous que j'ai visé.

M. BELLEMARE (Johnson): Ce n'est pas vous qui allez me vendre mon chapeau.

M. BEDARD (Chicoutimi): Non. Je ne veux pas vous le vendre non plus.

M. BELLEMARE (Johnson): Parce que je cherche un 6 3/4 et vous, c'est un 7 3/8.

M. BEDARD (Chicoutimi): Je pense que vous êtes assez raisonnable pour décider de quel chapeau vous voulez vous coiffer, M. le député de Johnson.

M. BELLEMARE (Johnson): C'est parce que vous avez peur de l'Union Nationale qui va vous déloger bien vite.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ecoutez, en tout cas...

M. CHARRON: Des fantômes.

M. BELLEMARE (Johnson): Vous allez voir les fantômes, vous allez voir ça tout à l'heure. Vous avez besoin de faire attention à Fantomas.

M. CHARRON: Les fantômes ont eu 600 votes dans Saint-Jacques.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, je serais d'accord pour permettre au député de Johnson...

M. BELLEMARE (Johnson): Attendez à la prochaine élection. J'en ai un pour vous, tout prêt.

M. CHARRON: Cela a fini en arrière des créditistes, c'est loin, ça.

M. BELLEMARE (Johnson): Oui, vous allez voir ça. On va vous payer la traite.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, nous l'avons souligné à plusieurs reprises, c'est clair que la question du salaire des députés est un sujet délicat et, parce qu'il est délicat, il ne doit pas être décidé à la vapeur; parce qu'il est délicat, il ne doit pas être décidé dans des conditions qui font que ça donne toujours une allure hypocrite. Pourquoi les gens n'acceptent pas ce salaire de députés, la plupart du temps? C'est la manière hypocrite avec laquelle on se le donne. Depuis que je suis la politique, j'ai toujours vu les augmentations de salaires de députés se voter à la fin des sessions, comme des gens qui veulent cacher ça à la face de la population. C'est toujours la veille de Noël quand ils sentent que tout le monde est occupé beaucoup plus à fêter, soit Noël ou le premier de l'an...

M. BELLEMARE (Johnson): Est-ce que c'est la motion qui est en discussion devant nous?

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est d'une façon générale sur l'augmentation de salaire des députés.

M. BELLEMARE (Johnson): Je ne pense pas, M. le Président...

M. HARDY: Un discours de deuxième lecture.

M. BELLEMARE (Johnson): ... on doit s'en tenir à ça, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Blank): Indexation maintenant.

M. BEDARD (Chicoutimi): On vient juste de nous apporter un amendement, on va nous demander tout de suite de pouvoir enchaîner seulement sur cet amendement.

M. HARDY: De quoi parlez-vous?

M. BEDARD (Chicoutimi): On parle du salaire des députés. Vous voulez en entendre parler, vous allez en entendre parler. Dans ce sens...

M. HARDY: II me semble que cela avait été adopté.

M. BEDARD (Chicoutimi): Oui. Concernant l'indexation, ça fait partie de la hausse du salaire des députés.

M. HARDY: Etes-vous contre l'indexation?

M. BEDARD (Chicoutimi): Non, je ne suis pas contre l'indexation. Non, M. le Président, je ne suis pas contre l'indexation et ça, le ministre des Affaires culturelles le sait, il n'y a pas un seul intervenant du Parti québécois qui s'est prononcé contre l'indexation. Lorsqu'on a parlé de l'indexation, on a dit qu'on n'était pas d'accord pour se donner l'indexation qui était la plus rentable, la plus avantageuse.

M. HARDY: L'amendement qui est devant nous...

M. BEDARD (Chicoutimi): Bien oui, mais vous parlerez...

M. HARDY: ... ne concerne que l'indexation seulement.

M. BEDARD (Chicoutimi): Je vous parle seulement de l'indexation, quelques minutes...

M. HARDY: Vous prenez tout ce temps pour nous dire que vous êtes en faveur.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, le ministre ne nous posera plus de questions "niaiseuses" comme ça, s'il veut nous écouter une fois pour toutes.

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): II n'y a jamais un intervenant du Parti québécois qui a dit qu'il était contre l'indexation, pas un seul, M. le Président, sauf que l'article que nous discutons, nous avons présenté un amendement voulant que l'indexation qui était accordée aux députés était celle qui était la plus avantageuse et qu'il y aurait avantage non pas à se baser sur la hausse du salaire hebdomadaire moyen...

M. HARDY: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... mais à se baser sur l'indice des prix qui respecte beaucoup plus...

LE PRESIDENT (M. Blank): Question de règlement.

M. HARDY: M. le Président, j'invoque le règlement. M. le Président, vous aurez remarqué que, depuis le début des travaux de cette commission, les interventions du côté ministériel ont été à la fois rares et brèves.

M. BEDARD (Chicoutimi): On sait pourquoi.

M. HARDY: II est arrivé à maintes reprises que nous ayons même laissé les députés qui siègent à votre gauche, je parle de votre gauche immédiate, s'éloigner de la pertinence du débat. Mais il ne faudrait quand même pas exagérer parce que si, par notre silence, nous laissions les députés du Parti québécois ne pas respecter le règlement, on pourrait plus tard nous accuser de participer à leur "filibuster". M. le Président, il y a un amendement qui est très précis et je demanderais au député de Chicoutimi de cesser de nous parler d'amendements sur lesquels la commission s'est déjà prononcée. C'est un principe absolument fondamental en droit parlementaire, soit que l'on ne doit pas revenir sur des choses sur lesquelles soit une commission, soit l'Assemblée s'est prononcée. Qu'il nous dise s'il est en faveur, oui ou non, de l'amendement que j'ai proposé. Mais ne nous parlez plus des amendements dont la commission a déjà disposé. Sans ça, on va recommencer complètement le débat.

M. BEDARD (Chicoutimi): Est-ce que vous nous permettez, à cet article nouveau...

M. HARDY: Je n'ai rien à vous permettre, respectez le règlement.

M. BEDARD (Chicoutimi): Non, pour répondre à votre question, est-ce que vous nous permettez de simplement mettre sur la table le même amendement sur lequel nous avons discuté tout à l'heure? C'est un amendement dans le sens de celui...

M. HARDY: II y a un amendement. M. BEDARD (Chicoutimi): ... a été...

M. HARDY: Nous allons en disposer.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est un amendement qui décide tout simplement d'un taux d'indexation.

M. HARDY: Cela a été rejeté.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est ce que je vous dis. Nous ne sommes pas d'accord avec votre taux d'indexation. C'est un taux d'indexation qui est trop favorable, par rapport à un autre taux d'indexation que vous auriez pu prendre, qui est non pas basé sur le salaire hebdomadaire moyen, mais qui aurait été pris...

M. HARDY: Vous comptez aussi mal que dans votre budget de l'an I.

M. BEDARD (Chicoutimi): Le ministre nous a donné raison tout à l'heure, là-dessus.

M. HARDY: Le ministre vous avait démontré que votre budget de l'an I ne valait pas cinq cents !

M. BEDARD (Chicoutimi): Sauf pour l'année 1974, pour toutes les autres années, il est clair que...

M. GARNEAU: Pour les années à venir, on ne le sait pas.

M. BEDARD (Chicoutimi): Pour toutes les autres années, à venir jusqu'à 1974, n'est-ce pas exact?

M. GARNEAU: II y a eu des petites différences en plus ou en moins, oui.

M. BEDARD (Chicoutimi): II est clair que le pourcentage de la hausse du salaire hebdomadaire moyen a été plus haut que celui de l'indice des prix à Montréal. Le ministre nous a donné raison tout à l'heure. Face à l'amendement que vous apportez, vous ne changez absolument rien au problème de l'indexation, à la manière d'indexer.

M. HARDY: C'est exact.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ce qui veut dire que nos remarques demeurent les mêmes et nous avons le droit de les réitérer, en vertu du règlement, à savoir que nous ne sommes pas d'accord avec ce mode d'indexation qui est le mode d'indexation le plus favorable. J'ai parlé tout à l'heure de toute cette catégorie de gens dont les pensions ne sont pas indexées. Par exemple, les retraités à même les fonds privés, qui, alors que leur pension n'est pas indexée, voient les compagnies, qui administrent les fonds auxquels ils ont contribué, continuer à profiter des hausses des taux, des hausses des pourcentages des prêts qui se font, ce qui permet à ces compagnies qui administrent les fonds de profiter de l'inflation, à l'heure actuelle, alors que les retraités qui ont accumulé ces fonds à coups d'efforts, à coups de travail, à coup de dévouement — autant que les députés peuvent eux-même en donner — ne reçoivent absolument rien de plus pour pouvoir contrer l'inflation à laquelle ils ont à faire face, de la même manière que les députés.

C'est dans ce sens que cet amendement ne changeant absolument rien à la méthode d'indexation, nous ne pouvons faire autrement que d'être en désaccord avec le choix qu'a fait le gouvernement, quant à l'indexation.

M.HARDY: Vote!

LE PRESIDENT (M. Blank): Les députés sont-ils prêts à se prononcer sur cet amendement?

UNE VOIX: Oui.

LE PRESIDENT (M.Blank): Le député de Saint-Jacques a quelques mots à dire.

M. CHARRON: Merci, M. le Président. En présentant son amendement, le ministre des Affaires culturelles...

M. HARDY: A été concis.

M. CHARRON: ... a été concis, trop d'ailleurs, comme ils le sont sur ce sujet, depuis le début, un peu comme des gens qui veulent faire leur coup et que cela disparaisse le plus rapidement possible de la table!

Le ministre des Affaires culturelles, qu'on connaît comme très loquace, volubile à profusion, aligne les clichés par-dessus les formules. On l'a bien connu à l'époque de la loi 22, il a été une précieuse acquisition pour l'équipe de l'Opposition pendant l'étude de la loi 22. Il suffisait de dire un mot pour que le sujet ou l'interjection fasse bondir le ministre des Affaires culturelles qui, pendant vingt minutes, nous haranguait du mieux qu'il pouvait.

Sentant la délicatesse du sujet, le ministre des Affaires culturelles non seulement n'a pas participé au débat depuis que nous l'avons ouvert, ou à peu près pas, contrairement à son habitude qui est de mettre son grain de sel chaque fois qu'il en a l'occasion, mais plus que cela, il s'est trouvé à être le parrain d'un amendement qu'il a refusé, ni plus ni moins, d'expliquer à l'Assemblée.

Je n'avais pas l'intention d'intervenir, mais puisque le ministre des Affaires culturelles a refusé de nous expliquer son amendement, j'essaierai du mieux que je pourrai, et le ministre aura vingt minutes pour me répondre, si j'ai mal compris l'amendement qu'il nous a proposé...

M.HARDY: Comme aspirant ministre des Affaires culturelles?

M. CHARRON: ... de vous expliquer comme je le vois, visiblement dans son texte, l'amendement qu'apporte le ministre des Affaires culturelles.

L'ancien texte de l'article 92 a) était très mal formulé, comme l'a signalé le député de Chicoutimi. En effet, il disait que le montant de l'indemnité visée à l'article 92 doit être augmenté annuellement du pourcentage etc. La commission a déjà disposé de quel pourcentage et de quel barème d'indexation? Savez-vous ce que cela voulait dire, M. le Président?

Cela voulait dire ceci: Les calculs qu'a faits le chef de l'Opposition, qu'il a énoncés en deuxième lecture, qui n'ont jamais été démentis par la suite disaient que, à cause du rapport décrit dans l'article 92 a) entre le salaire de base moyen du Canada, en 1974, par rapport au salaire moyen du Canada, en 1973, portait l'indemnité des députés, non pas à $21,000, comme le disait l'article 92 a) mais à $23,205.

Si le texte était resté semblable, cela voulait dire que, l'année prochaine, le 1er janvier 1976, M. le Président, le calcul allait s'opérer du salaire moyen de 1975 par rapport au salaire moyen de 1974 et, ce rapport ou ce pourcentage allait être ajouté à $21,000, encore, ce qui aurait pu vouloir dire, si jamais ce gouvernement avait déployé des armes contre l'inflation, que le rapport aurait pu être défavorable par rapport à cette année et que, en l'année 1976, au lieu de $23,205, s'il y avait véritablement eu lutte contre l'inflation de la part du gouvernement, cela aurait peut-être été de $22,600 ou de $22,800 que nous aurions eus.

Or, auriez-vous imaginé que les députés libéraux et leurs complices de l'Opposition, dans ce projet de loi...

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je soulève une question de règlement. Je ne permettrai pas au député de nous traiter de complices ou de vendus. Ce n'est pas dans le débat. Nous ne sommes pas des complices. Nous ne sommes pas des vendus. Je voudrais que le député, au moins, s'il voulait faire une discussion honnête, nous épargne ces mots qui ne nous conviennent pas.

M. CHARRON: M. le Président, je...

M. ROY: M. le Président, sur la même question de règlement, le député de Saint-Jacques s'est livré à des déclarations, en deuxième lecture, à l'Assemblée nationale, je n'ai pas à ne pas revenir là-dessus et je n'ai pas l'intention de le laisser faire en commission élue pour la bonne raison que je veux être honnête avec tout le monde. J'ai pris une position. Nous défendons notre position. Je n'ai pas voulu, jusqu'ici, lui dire, au député de Saint-Jacques, que je sais qu'il va prendre son chèque, parce qu'il sait que la loi va être adoptée. Je n'ai pas voulu le lui dire et que le député de Saint-Jacques ne me force pas à embarquer dans ce genre de débat.

M. le Président, je peux prendre mes positions moi-même. Je n'ai besoin de personne pour les prendre et, jusqu'ici, je pense que je les ai prises. Je n'accepterai pas les propos du député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: M. le Président, le mot "complice" n'est pas un mot antiparlementaire, mais si...

M. ROY: Ce n'est pas un mot antiparlementaire, mais c'est un mot qui n'est pas conforme à la réalité.

M. BELLEMARE (Johnson): C'est loin d'être gentil, c'est comme un vieux cliché.

M. ROY: Cela, je ne l'accepterai pas. Si on veut faire un débat là-dessus, on va en faire un ce soir.

M. CHARRON: C'est peut-être vrai, mais ce n'est pas le député de Johnson qui devra me dire que je n'ai pas été gentil. Vous n'avez pas été très gentil à l'égard du petit Boutin, pendant la campagne électorale.

M. BELLEMARE (Johnson): Non, je n'ai jamais prononcé une seule accusation. C'est votre PQ qui s'est promené et qui s'est attaqué...

M. CHARRON: D'accord, M. le Président. Asseyez-vous, asseyez-vous, vous allez maganer votre santé. Asseyez-vous!

M. BELLEMARE (Johnson): Ce n'est pas moi, M. le Président, qui l'ai attaqué. Je l'ai accusé d'accuser Boutin...

M. CHARRON: Asseyez-vous. Asseyez-vous. Asseyez-vous! M. le Président, il a pris ses vingt minutes mille fois.

M. BELLEMARE (Johnson): ... mais, je le défie de me prouver que j'ai eu une parole malheureuse à l'endroit de Boutin, une seule, sauf de l'appeler accusé Boutin.

M. MORIN: Vous vous êtes acharné sur son cadavre, en Chambre.

M. BELLEMARE (Johnson): Quand est-ce que j'ai fait cela?

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre!

M. BELLEMARE (Johnson): Jamais, monsieur, je n'ai présenté une motion afin qu'il soit jugé par ses pairs...

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre! Le député de...

M. CHARRON: Rappelez-le à l'ordre!

M. BELLEMARE (Johnson): Si vous vous rappeliez de cet incident, je pourrai peut-être participer au débat le 14.

M. CHARRON: M. le Président, ce ne sont pas des complices. J'imagine que, si vous n'acceptez pas "complices" le mot "comparses" n'est pas plus parlementaire, je ne l'employerai pas, mais "ces acolytes" de l'augmentation de salaire que sont, pour l'occasion, les deux députés qui, en vertu de l'article 8 — nous y reviendrons, M. le Président, moi aussi j'attends l'article 8 — ne nous l'ont pas signalé, à l'Assemblée nationale, en deuxième lecture.

M. ROY: Ne faites donc pas l'hypocrite, vous allez recevoir l'augmentation de salaire.

M. CHARRON: Ils sont gratifiés d'une augmentation indécente.

M. BELLEMARE (Johnson): ... à l'article 8...

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre!

M. ROY: Vous aurez besoin de l'augmentation de salaire.

M. BELLEMARE (Johnson): On donnera des tableaux pour d'autres députés aussi.

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! On n'est pas encore arrivé à l'article 8.

M. HARDY: C'est cela.

M. BELLEMARE (Johnson): On vous donnera d'autres tableaux pour d'autres députés aussi.

M. CHARRON: Or, M. le Président, j'étais à vous expliquer...

M. BELLEMARE (Johnson): Quatre sur six...

M. CHARRON: ... l'amendement proposé par le ministre.

M. BELLEMARE (Johnson): ... avec 32 employés...

M. CHARRON: Voulez-vous rappeler le député de Johnson à l'ordre, M. le Président?

M. BELLEMARE (Johnson): On va tout vous dire cela.

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre!

M. CHARRON: M. le Président, dans sa première rédaction, l'article 92 a) signifiait que l'indexation allait se faire annuellement sur le taux visé à l'article 92, c'est-à-dire $21,000.

Cette année, c'est un taux de 10.5 p.c; l'année prochaine, cela aurait pu être un taux de 9 p.c. ou ce sera peut-être un taux de 13 p.c. Cela sera peut-être un taux de 7 p.c. ou ce sera peut-être un taux de 20 p.c. Mais toujours par rapport à $21,000. Sentant là qu'il y avait perte de gains, le parti ministériel s'est ravisé et, afin de s'assurer, avec ses acolytes, que la loi allait leur être la plus profitable possible, il a décidé d'apporter cet amendement qui dit bien que l'indemnité visée à l'article 2 est — c'est ce qu'il y a de nouveau — d'abord égale au montant de l'indemnité pour l'année précédente, ce qui veut dire que l'indexation en 1976 partira des $23,205 de 1975, et non pas, comme cela risquait de l'être dans la première interprétation de la loi, $21,000. C'est à partir de ce montant qu'on procédera à une nouvelle indexation surajoutée.

M. le Président, c'est ce qu'il y a de nouveau dans l'amendement. Autrement dit, c'est une garantie de plus qu'on a voulu ajouter dans le dernier paragraphe qui dit très clairement ce que le premier essayait de dire d'une manière compliquée, c'est que l'indemnité annuelle ne peut être inférieure à celle de l'année précédente. C'est une garantie qui m'apparaît un peu superfétatoire. Je n'ai jamais vu le parti ministériel poser autant de garanties autour du salaire minimum ou des accidents de travail, mais celle-là semblait de circonstance. Voici, pour vous montrer comment c'est exagéré et superfétatoire, ce dernier paragraphe.

Pour que l'indemnité annuelle de 1977 puisse se trouver en possibilité d'être inférieure à celle de 1976, ou prenez l'année que vous voudrez, par rapport à l'année précédente, il faudrait que le rapport des salariés moyens, ou, selon l'expression employée par le ministre des Finances, des ouvriers, parce qu'il a voulu nous montrer sa magnanimité en allant chercher le salaire moyen des ouvriers — prenons son expression — du Canada, connaisse une baisse par rapport à l'année d'avant, que le salaire moyen des Canadiens, des ouvriers canadiens, baisse par rapport à l'année d'avant, pour que le rapport soit défavorable, soit négatif, pour que cela affecte l'indemnité annuelle qui se trouverait à être inférieure à celle de l'année précédente. Voyons, depuis combien d'années le rapport est-il favorable? Il l'est dans la règle des choses. Il n'y a pas d'ouvrier, il n'y a pas une boutique syndiquée qui admettrait que, pour une année, dans une convention collective nouvellement négociée, on s'entende sur des offres inférieures à ce qui était acquis. C'est de la folie furieuse. Connaissez-vous des gars qui travaillent à $150 par semaine? Prenons le salaire moyen de 1974. Les dix premiers mois, le salaire moyen au Canada, c'est $176.20. Connaissez-vous des gars qui sont assez caves pour aller signer une convention collective qui leur dirait qu'en 1975 ils vont faire moins que $176.20 par semaine? Personne. Eux-mêmes, ils ont de la difficulté à rejoindre le coût de la vie qui les dépasse et que bénissent nos deux gouvernements en s'emplis-

sant les poches, en prétextant qu'ils n'augmentent pas les taxes parce qu'ils n'ont pas indexé les impôts. C'est certain que le rapport sera toujours positif. Autrement dit, revenons à la simple règle mathématique. C'est que le montant sur la ligne sera toujours plus élevé que le montant sous la ligne, et qu'ainsi, quand on fera le rapport, on arrivera toujours à 1.1 ou à 1.01 au minimum, pouvant aller à l'occasion jusqu'à 1.50. J'imagine que cela peut se produire dans certains secteurs. C'est impossible que le rapport de base soit négatif. Le rapport de base implique automatiquement une augmentation de l'indemnité. Mais, prudents, parce que, de la façon qu'est conduite l'économie du Canada et du Québec, on ne sait jamais quelle espèce de cul-de-sac et de tourbillon peuvent l'emporter, les parlementaires, eux, se sont assurés, à la fin du dernier paragraphe, que l'indemnité annuelle ne sera jamais inférieure à celle de l'année précédente.

Quand on voit les parlementaires s'ajouter cette garantie à la fin d'un amendement présenté par le ministre des Affaires culturelles, c'est exprimer là toute la confiance que les Québécois doivent avoir en ceux qui dirigent l'économie du Québec actuellement. Si on lit la dernière ligne de l'amendement 92 a), c'est qu'il est prévisible, en tout cas, c'est possible parce qu'une loi n'est pas censée comporter des phrases inutiles.

C'est qu'il est désormais possible — dans la galère économique où nous nous trouvons, conduits par les deux capitaines, à chaque bout du bateau, que nous avons dans la galère fédérale — que le rapport entre le salaire de base d'une année par rapport au salaire de base de l'année précédente devienne négatif, et qu'en ce sens on ait à recourir au dernier paragraphe de l'article 92 a) pour nous dire: Ah! nous autres, même si le rapport de base a baissé, nous, on ne peut pas baisser de salaire, à tout le moins, on peut rester à la même place.

M. le Président, c'est largement donner confiance aux contribuables dans le genre d'administrateurs qu'ils se sont donnés. Puis-je ajouter, sans vouloir revenir sur une motion dont cette commission a déjà disposé, que la précision qu'apporte le deuxième paragraphe du nouvel article 92 a) présenté par le député de Terrebonne, n'écarte pas une ambiguïté que nous avons déjà signalée.

Les députés se trouvent, dans ce paragraphe, à se choisir une méthode d'indexation qui leur est largement plus favorable que n'importe quelle méthode d'indexation que les travailleurs organisés, syndiqués ou autres, se sont donnée.

D'autre part, M. le Président, nous n'avons pas eu d'explications suffisantes disant que les parlementaires du Québec ne pourraient pas, si c'est leur intention de s'indexer, par rapport aux traitement et salaires hebdomadaires pour l'ensemble des activités économiques en cause, soient basés sur le territoire du Québec encore une fois. On nous dira, si j'ai bien compris, je ne sais pas si c'est le ministre des Finances ou le ministre de l'Industrie et du Commerce qui a glissé cette information dans son intervention sur une motion précédente, qu'il est plus facile de calculer le salaire moyen et le traitement moyen des Canadiens que celui des Québécois.

M. le Président, si nous sommes en cette situation de dépendance telle que nous ne pouvons même pas être en mesure de calculer, chez nous, quel est le salaire moyen des Québécois, et qu'en ce sens, les parlementaires élus par les Québécois prennent le taux d'indexation ou le taux d'augmentation du salaire moyen des Québécois, parce que ce sont eux, et uniquement eux qui paient les taxes et les impôts à partir desquels nos salaires nous sont versés; or, M. le Président nous sommes donc dans une situation de faiblesse. Mais je ne pense pas que nous le soyons, car l'Opposition officielle, par la voix du député de Chicoutimi et du chef de l'Opposition, a déjà fait preuve — et je pourrais, si je retournais à mon dossier... — qu'il existe de pareilles statistiques du revenu moyen et du salaire moyen des Québécois, de ceux qui du premier cent jusqu'au dernier, versent au coffre public, la totalité des sommes dont nous tirons une partie à nos fins de traitement, aussi bien de nous que de ceux qui travaillent avec nous dans la fonction publique, et qui nous aident à remplir notre mandat.

Pourquoi ce recours aux salaires canadiens, M. le Président? Le chef de l'Opposition a avancé une hypothèse qui n'a pas été démentie. C'est que, voyez-vous, M. le Président, salaire pour salaire, le salaire moyen des Canadiens, et dans le régime où nous nous trouvons, et dans le contexte économique où nous sommes, dont nous sommes largement dépendants, le salaire moyen des Canadiens, dis-je, est supérieur au salaire moyen des Québécois. Donc, quant à s'ajouter des garanties à l'article 92 a), le gouvernement a préféré recourir aux salaires les plus élevés, à partir desquels, évidemment, les rapports seront nécessairement plus favorables, puisque la progression, aussi, au cours des dernières années est nettement plus favorable dans l'ensemble canadien que pour le territoire du Québec en particulier.

Mais il me semble que ce serait une question de simple décence, parce qu'aucun autre travailleur ne peut justifier une augmentation qui soit à ce point étendue sur une échelle aussi vaste, que nous choisissions, nous, puisque nous en sommes largement dépendants, que cette indexation se fasse sur le rapport, puisque c'est le choix du gouvernement, du salaire de base des Québécois d'une année, par rapport à l'autre,

c'est-à-dire la précédente, par rapport à l'antérieure et la précédente.

J'espère que le ministre des Affaires culturelles, avant de procéder au vote sur son amendement, nous expliquera pourquoi le choix du gouvernement s'est porté sur cette statistique plutôt que sur celle des contribuables québécois, celle qui reflète l'ensemble des activités économiques du Québec.

M. HARDY: M. le Président, je n'ai pas l'intention de me livrer aux mêmes acrobaties que celles des membres de l'Opposition officielle et de répéter constamment les mêmes choses. L'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce, le ministre des Finances ont exposé d'une façon brillante les raisons pour lesquelles nous avions adopté ces méthodes de calcul. Je n'ai rien à ajouter.

LE PRESIDENT (M. Blank): Sur une question de règlement, le chef de l'Opposition.

M. MORIN: M. le Président, je crains que la motion du ministre des Affaires culturelles ne soit irrégulière.

M. HARDY: Après avoir parlé tous les trois, ils viennent de s'en apercevoir.

M. MORIN: Oui. Parce que vous étiez au courant que vous nous présentiez une motion irrégulière?

M. le Président, je me réfère à l'article 64 du règlement de l'Assemblée nationale. "Une motion ne peut être présentée que par un représentant du gouvernement après recommandation du lieutenant-gouverneur en conseil lorsqu'elle a pour objet direct, premièrement, l'exécution de travaux publics; deuxièmement, l'allocation de subventions, et, troisièmement, l'imposition d'une charge additionnelle sur les revenus publics ou sur les contribuables." Or, M. le Président, si le lieutenant-gouverneur a recommandé l'adoption de la première version de l'article 5 et du projet no 87 dans son ensemble, il n'a pas approuvé, que je sache, la nouvelle version que le ministre vient de nous fournir. Or, cette version est essentiellement différente et je vais maintenant le démontrer, avec votre permission, de sorte que la motion du ministre est irrégulière. Il aurait dû se présenter en Chambre, d'abord, puisque c'est le seul endroit, comme il le sait, où ce genre de recommandation du lieutenant-gouverneur peut être présenté.

M. HARDY: Où trouvez-vous cela?

M. MORIN: Bien, c'est comme cela puisque c'est le seul endroit où la responsabilité du gouvernement peut être mise en cause.

M. HARDY: Où est-ce écrit?

M. MASSICOTTE: Vous pourriez aussi faire un amendement, dans ce cas-là.

M. MORIN: C'est du droit parlementaire évident.

M.HARDY: Ah oui? M.MORIN: Bien sûr! M. HARDY: Comme l'article...

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre!

M. MORIN: Est-ce que la responsabilité d'un Parlement peut être mise en cause ici, en commission?

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! Je veux me renseigner un peu et, après cela, je rendrai une décision.

M. HARDY: M. le Président, je ne suis pas sûr que vous ayez de très bons renseignements.

M. MORIN; Cela représente une dépense de deniers additionnels. Je pense que, quand j'aurai fini ma démonstration, le ministre des Affaires culturelles, qui n'est pas sans s'être frotté au droit parlementaire et aux règlements, sera obligé d'en convenir.

L'ancien texte n'affectait pas les $21,000 de l'article 92. J'entends l'ancien texte de l'article 92 a) tel qu'il nous était proposé dans le projet de loi 87. On appliquait un coefficient variable à un montant qui demeurait inchangé, d'après l'article 92, c'est-à-dire $21,000. Autrement dit, ce chiffre de $21,000, si vous me suivez bien, demeure constant. Il sera le même en 1980, en 1985 et en 1999 et en 2010 si nous ne le modifions pas, évidemment, si la Législature n'y apporte pas un amendement entre-temps. Annuellement, le salaire des députés aurait connu une variation plus ou moins grande à partir d'un montant invariable de $21,000. Jusque-là, je pense que le ministre me suit. Non seulement cela, mais toutes les indemnités spéciales qui sont prévues dans le reste du projet de loi. Je ne me référerai, pour l'instant, qu'à celles de l'article 2 qui, on s'en souviendra, prévoient que le président de l'Assemblée nationale, par exemple, reçoit annuellement une allocation égale au produit de l'indemnité visée à l'article 92, c'est-à-dire un montant invariable de $21,000, multiplié par le facteur 1.10. Cela signifie que, dans le cas de l'article 2, et le montant de base de $21,000 demeure le même et le facteur de 1.10 demeure constant. Tandis que, désormais, dans la nouvelle version, nous avons une disposition qui modifie d'année en année le montant de l'article 92. Est-ce que le ministre me suit? Le montant, jusqu'ici, était fixe à $21,000. Désormais, d'après la définition, d'après l'amen-

dement qu'il vient d'apporter, à compter de l'année 1975, l'indemnité visée à l'article 92 est, pour chaque année, égale à un montant qui est déterminé selon un certain calcul. Donc, l'indemnité n'est plus de $21,000, elle n'est plus invariable, elle est variable.

Le ministre ne peut pas, au niveau d'une commission, soumettre un amendement qui change l'affectation des fonds publics sans avoir obtenu au préalable la recommandation du lieutenant-gouverneur. M. le Président, le lieutenant-gouverneur a peut-être autorisé la version que nous avons devant nous, la version originale du bill 87, mais, que je sache, il n'a pas recommandé en Chambre, par la voix du ministre responsable, l'amendement que nous avons devant nous ce soir. Cela doit être fait en Chambre, devant toute la Chambre, parce que c'est le seul endroit où la responsabilité du gouvernement peut être mise en cause.

Au- fond, M. le Président, vous recevrez mon point de règlement ou vous ne le recevrez pas, on plaidera ce qu'on voudra, mais je dis une chose, c'est que si cela n'est pas réglé maintenant, la loi pourra être mise en question dès qu'elle aura été votée. C'est donc un point fondamental.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Johnson.

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, à l'article 59 de notre règlement, il est dit: Le président peut ordonner de mettre de côté ou de modifier un avis qu'il juge non conforme au règlement. L'article 66 dit, dans le même chapitre au deuxième alinéa: Un ministre peut toujours agir au nom d'un de ses collègues. Je pense, M. le Président, que c'est clair, le ministre peut agir au nom de ses collègues. Et comme...

M. MORIN: Vous n'avez pas compris, vous.

M. BELLEMARE (Johnson): Non, je n'ai rien compris. J'ai compris pourquoi vous le faisiez, par exemple. Je pense, M. le Président...

M. MORIN: Ecoutez, il faut qu'on se trouve devant une situation nette. Vous ne pourriez pas toucher votre salaire augmenté, M. le député.

M. BELLEMARE (Johnson): C'est pour cela qu'il existe des cours de justice et des confessionnaux dans les églises, c'est parce qu'il y a trop de juristes. Comme président, M. le Président, vous avez le devoir ou la responsabilité de mettre de côté l'avis qu'on vient de vous donner en vertu de l'article 59. Je pense aussi qu'en vertu de l'article 66, deuxième alinéa, un ministre peut toujours agir au nom de ses collègues. Je pense aussi qu'ayant reçu de la Chambre un mandat de siéger en bonne et due forme, on ne peut pas discuter plus que cela.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Terrebonne.

M. HARDY: M. le Président, il est évident que lorsque la Chambre donne le mandat à une commission, comme le dit avec beaucoup de justesse le député de Johnson... Parfois, quand j'entends des gens qui n'ont pas été déformés par des facultés de droit, je me demande s'ils n'ont pas une perception juridique plus valable que ceux qui ont été déformés par certaines facultés de droit.

M. ROY: Vous venez de vous en apercevoir?

M. HARDY: Cela fait longtemps que ce cheminement se fait chez moi.

M. ROY: C'est la première fois que vous l'admettez.

M. HARDY: C'est peut-être la première fois qu'on m'en donne l'occasion.

M. le Président, premièrement la Chambre, l'Assemblée, a adopté le principe de cette loi. Deuxièmement, elle a donné mandat à la commission de l'assemblée nationale de l'étudier article par article et, troisièmement, même si j'ademettais, même si nous admettions la théorie exposée, ce que je n'admets pas, mais même si nous admettons la théorie exposée par le député de Sauvé, il faut bien se rappeler que les amendements que nous pouvons apporter ici en commission doivent nécessairement être ratifiés par la Chambre, c'est-à-dire que, lorsque la commission aura fini de siéger, un rapport sera déposé en Chambre et ce rapport devra être accepté. Or, au moment où la Chambre acceptera les amendements que nous aurons adoptés en commission, la Chambre, par le fait même, ratifiera ces amendements et la loi sera tout à fait valable, tout à fait légale. S'il n'y avait pas cette ratification prévue par nos règlements des travaux de la commission, s'il n'y avait pas cette ratification par l'Assemblée nationale, on pourrait peut-être se poser certaines questions, même si je prétends que le mandat donné couvre le tout. Mais s'il y a quelque inquiétude dans l'esprit du député de Sauvé, mais comme disait bien tantôt le député de Johnson, je pense bien que les motifs — et je ne pense pas lui prêter de motifs indignes, tel que le règlement le prévoit — du député de Sauvé ne sont pas du tout d'ordre juridique en ce moment, ils sont uniquement amenés de façon à faire perdre encore davantage de temps à la commission.

M. MORIN: Répondez à mon point.

M. HARDY: Je vous réponds, je dis que les amendements que nous adoptons ici en commission seront présentés à l'Assemblée nationale et devront être ratifiés par l'Assemblée nationale.

M. MORIN: Vous n'avez même pas présenté votre motion.

M. HARDY: Mais en vertu de quoi?

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président...

M. MORIN: Lisez l'article 64.

M. HARDY: Bien voyons donc!

M. BEDARD (Chicoutimi): J'inviterais le ministre des Affaires culturelles à lire comme il faut l'article 64. Il ne dit pas qu'on peut faire ratifier après une motion qui a été présentée en commission il dit: On ne peut présenter...

M. HARDY: Le raisonnement du député de Sauvé est tellement stupide, il est tellement stupide à sa face même...

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est déjà pas mal comme épithète.

M. HARDY: II n'y a pas de mot plus approprié, non, je pense qu'il n'y a pas d'épithè-te qui convienne mieux à cette situation, il est tellement stupide à sa face même que ça voudrait dire qu'en commission on peut, à toutes fins pratiques, ne pas adopter d'amendement. Cela voudrait dire qu'en commission parlementaire, un membre du cabinet ne pourrait proposer aucune modification à une loi qui implique une dépense d'argent. C'est d'un ridicule consommé. Et il n'y a aucun règlement... ce n'est pas l'article 64 qui dit ça. L'article 64...

M. BEDARD (Chicoutimi): Lisez-le.

M. HARDY: ... s'applique d'une façon bien précise à l'Assemblée. Le lieutenant-gouverneur a recommandé qu'il y ait une dépense d'argent, tout ce que nous faisons avec l'amendement que j'ai proposé, c'est de modifier quelque peu cette dépense d'argent et le tout devra être ratifié par l'Assemblée nationale.

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous savez très bien que les...

M. HARDY: M. le Président, je sais très bien que, quand bien même je plaiderais encore quinze ou vingt minutes...

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre!

M. HARDY: ... cela ne changera rien. Ce que nos honorables amis d'en face veulent, c'est perdre du temps, alors, qu'ils en perdent.

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre! J'ai entendu l'Opposition officielle, je veux maintenant entendre le dépu- té de Beauce-Sud, après ça, je rendrai une décision.

M. ROY: Merci, M. le Président. Je me suis rendu compte que l'esprit juridique du ministre l'a aveuglé, son esprit l'a aveuglé lui-même. Il y a deux points dans la motion présentée par le député de Sauvé. Il y a d'abord la question du lieutenant-gouverneur. Sur cette question de se référer à l'Assemblée nationale, je ne suis pas d'accord avec lui, mais il y a un point, par exemple, dans la motion, c'est qu'au lieu que l'indexation de l'indemnité se fasse à partir de la base annuelle de $21,000, à l'avenir, l'indemnité se ferait, si l'amendement du ministre était accepté, à partir de l'indemnité de l'année précédente. Cela change complètement la question. Alors, c'est...

M. GARNEAU: Dans quel sens...

M. ROY: C'est là qu'est le point. Il ne s'agit plus d'une même augmentation. Il y a deux questions. Si on trouve que l'augmentation annuelle de $2,000 est trop élevée et si on la réfère à partir de l'indemnité de $21,000, à plus forte raison, si on fait l'amendement à partir de l'indemnité augmentée de l'année précédente, il arrive que l'augmentation va se faire dans deux ans, dans trois ans, sur $25,000, sur $26,000. C'est complètement différent de ce qu'il y avait dans la loi.

M. HARDY: Ce n'est pas si sûr que cela.

M. GARNEAU: Non, non, c'était le sens de l'article 92 a)...

M. HARDY: C'est différent quant au montant mais pas quant au principe. Le lieutenant-gouverneur, c'est le principe qu'il recommande.

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre! Le député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): Plutôt que de traiter de stupides continuellement les allégations faites...

M. HARDY: Pour la première fois depuis le début de la commission.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... par le chef de l'Opposition, il me semble que le ministre des Affaires culturelles...

M. HARDY: Je me suis retenu bien longtemps.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... aurait tout avantage à faire preuve d'intelligence en acceptant de lire tout simplement le contenu de l'article 64. De toute façon, les règles qui s'appliquent en commission, normalement, s'appliquent à l'Assemblée nationale, à moins de

dispositions contraires. Vous êtes d'accord au moins sur ça. Il n'y a pas de dispositions contraires en ce qui regarde les règles en commission. C'est très clair. Je peux vous donner un exemple qui s'est produit il n'y a pas tellement longtemps, lorsqu'on a étudié la loi des rentes, j'ai eu à le faire personnellement, au nom de l'Opposition. Je n'étais pas rompu aux règles de procédure à ce moment-là. Remarquez que je ne prétends pas l'être présentement, mais quand même je prends la peine de lire les articles avant de faire mon opinion. Donc, dès le début de la commission, puisque dans la loi amendant la Régie des rentes, ça pouvait comporter des dépenses de deniers publics, le président de la commission a pris la précaution de nous dire qu'en commission on n'avait pas le droit de faire des...

M. HARDY: Comme députés.

M. BEDARD (Chicoutimi): Laissez-nous finir... De faire...

M. HARDY: Des "filibusters"?

M. BEDARD (Chicoutimi): ... quelque amendement que ce soit — non parce que cela on a le droit — qui puisse comporter une dépense de deniers ou encore...

M. HARDY: Aux députés.

M. BEDARD (Chicoutimi): Non, pas seulement aux députés, qui puisse comporter une dépense de deniers. Il y en a un des deux qui se trompe. Soit le président, qui a présidé la commission concernant les Affaires sociales, quand nous avons étudié la Loi des rentes, ou le ministre qui est là. J'attendrai la décision du président.

Il reste qu'il est clair que nous ne pouvons pas, selon les prétentions du ministre des Affaires culturelles, corriger une motion qui aurait été faite et que nous n'avons pas le droit de faire ici. Le principe est de savoir: Avons-nous le droit de la faire ici? Si nous n'avons pas le droit, c'est impensable et illogique de croire que nous pouvons la corriger en la passant ici et en l'acceptant une fois rendus à l'Assemblée nationale. Le point est de savoir si nous pouvons la présenter.

Or, l'article 64 dit très bien: "Une motion ne peut-être présentée que par un représentant du gouvernement. Pas n'importe qui.

M. HARDY: Ah!

M. BEDARD (Chicoutimi): Oui, lisez l'article jusqu'au bout, vous allez avoir avantage, la discussion va être bien moins longue, vous allez voir... "que par un représentant du gouvernement, après — pas dans n'importe quelle condition — recommandation du lieutenant-gouverneur en conseil, lorsqu'elle a pour objet — laquelle recommandation ne peut être faite qu'à l'As- semblée nationale — direct à l'article 3 — pour ne pas allonger les débats — l'imposition d'une charge additionnelle sur les revenus publics ou sur les contribuables.

Il est clair que l'amendement qui nous a été présenté, en toute bonne foi, j'imagine par le ministre des Affaires culturelles, comporte justement une charge additionnelle ou encore affecte les deniers publics d'une façon minime ou plus substantielle, là n'est pas l'importance. Le principe est que vous n'avez pas le droit de le présenter. Vous n'avez même pas le droit.

M. le Président, si vous exercez votre mandat selon nos règlements que j'essaie d'interpréter le mieux possible, vous devriez même retirer l'amendement qui a été présenté par le ministre des Affaires culturelles.

M. HARDY: De toute façon, le chef de l'Opposition sait très bien...

M. BEDARD (Chicoutimi): Argumentez, en droit...

M. HARDY: Oui. Le chef de l'Opposition qui est un grand constitutionnaliste sait très bien...

M. MORIN: Je n'ai pas ces prétentions.

M. HARDY: Non? C'est ce que M. Ryan disait. Ce n'était pas exact?

M. MORIN : Je n'ai pas ces prétentions.

M. HARDY: M. le Président, le chef de l'Opposition sait très bien que, lorsqu'un ministre fait une proposition, en vertu de la solidarité ministérielle, il la fait au nom du lieutenant-gouverneur en conseil. C'est une décision du lieutenant-gouverneur en conseil. Un ministre ne peut pas...

M. BEDARD (Chicoutimi): Pas en commission. C'est ce que vous ne comprenez pas.

M. HARDY: Que ce soit en commission ou non.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est clair.

M. HARDY: Où est-ce indiqué que lorsqu'un ministre parle, il parle au nom du lieutenant-gouverneur en conseil uniquement à l'Assemblée nationale? Où est-ce indiqué?

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est clair. Vous l'avez, lisez votre règlement. Vous êtes un expert là-dedans. Cela ne fait pas longtemps que j'ai ce règlement entre les mains, mais il me semble que c'est clair.

M. HARDY: L'article 64 ne fait pas de différence entre l'Assemblée et la commission.

LE PRESIDENT (M. Blank): Nous sommes assez éclairés sur ce sujet. A l'ordre! A l'ordre!

M. MORIN: De toute façon, M. le Président, avant que vous ne parliez, je voudrais vous faire remarquer...

M. BEDARD (Chicoutimi): Prenez garde! Vous voulez adopter une loi illégalement. Vous n'auriez pas le droit de toucher à vos subventions!

M. MORIN: ... que quelle que soit votre décision, cela ne saurait apporter un recours à un amendement qui aurait été présenté irrégulièrement.

M. HARDY: Vous n'accepterez pas votre chèque, cette fois!

M. MORIN: J'accepte fort bien la décision du président pour ce soir, mais si l'amendement était adopté irrégulièrement, ce n'est pas la décision du président qui pourrait apporter un recours à cela.

M. HARDY: Cela veut dire que vous n'accepterez pas vos chèques.

M. BEDARD (Chicoutimi): N'importe quel contribuable peut contester la loi.

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre! Je ne donne pas une décision légale sur la dernière prétention des deux députés. Pour commencer, je vais parler d'un autre président. Vous refusez le droit de faire une motion...

M. BEDARD (Chicoutimi): Je fais une mise en garde avant le début.

LE PRESIDENT (M. Blank): Un simple député n'a pas le droit de faire cela n'importe quand. C'est la raison. Mais le gouvernement, par un des ministres, a le droit. Ce fameux petit papier que le ministre lit avant la deuxième lecture, qu'est-ce que cela veut dire?

M. CHARRON: "L'honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance du bill et en recommande l'adoption à la Chambre".

LE PRESIDENT (M. Blank): C'est cela, exactement.

M. MORIN: C'est crucial!

LE PRESIDENT (M. Blank): II recommande l'adoption par la Chambre en deuxième lecture. On sait toujours que c'est le principe.

Ici, le lieutenant-gouverneur en conseil a donné à la Chambre le droit de dépenser de l'argent pour ces fins, en principe, mais il n'a pas fixé les montants. Le montant, ce n'est pas le principe, c'est un détail qui peut être changé en commission sur recommandation d'un ministre responsable. Après cela, cela va aller aux autres étapes, le rapport, la troisième lecture et, à part cela, la sanction aussi. Sa Majesté peut refuser, si elle pense que cela n'est pas recommandé d'après son avis.

M. MORIN: M. le Président, nous acceptons...

DES VOIX: Vote.

M. MORIN: ... votre décision, mais il est évident qu'elle ne saurait...

DES VOIX: Vote.

M. MORIN: ... corriger, a posteriori, une motion...

LE PRESIDENT (M. Blank): Peut-être.

M. MORIN: ... qui aurait été présentée irrégulièrement...

LE PRESIDENT (M. Blank): Peut-être.

M. MORIN: ... de sorte qu'il faudra sans doute...

M.HARDY: Le vote.

M. MORIN: ... qu'il y ait des recours ultérieurs contre la motion du ministre.

LE PRESIDENT (M. Blank): C'est possible.

M. HARDY: Les députés de l'Opposition ne prendront plus leur chèque.

LE PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que cette motion d'amendement par le ministre des Affaires culturelles est adoptée?

DES VOIX: Adopté.

M. CHARRON: Voulez-vous appeler le vote, M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Blank): Le vote, d'accord.

M. BEDARD (Chicoutimi): Pour ou contre? Le ministre... M. le Président, vous restez sur l'amendement?

LE PRESIDENT (M. Blank): Oui, sur l'amendement.

M. BEDARD (Chicoutimi): Contre. LE PRESIDENT (M. Blank): Contre.

M. BELLEMARE (Johnson): Pour ou contre l'amendement?

M. BEDARD (Chicoutimi): On ne sait plus si on a l'article principal ou l'amendement.

M. BELLEMARE (Johnson): Je suis pour l'amendement.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Massicotte? M. MASSICOTTE: Pour. LE PRESIDENT (M. Blank): M. Pépin? M. PEPIN: Pour.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Brown? M. Charron?

M. CHARRON: Contre.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Caron?

M. CARON: En faveur.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Giasson?

M. GIASSON: Pour.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Hardy?

M. HARDY: Pour.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Pelletier?

M. PELLETIER: Pour.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Carpentier?

M. CARPENTIER: Pour.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Morin?

M. MORIN: Contre.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Ostiguy? M. Garneau?

M. GARNEAU: Pour.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Roy? M. Vallières?

M. VALLIERES: En faveur.

LE PRESIDENT (M. Blank): Dix en faveur, trois contre. La motion d'amendement sur l'article 92 a) est adoptée. L'article 5 est adopté?

M. MORIN: Un instant! M. le Président. C'était l'amendement, ce n'était pas l'article 5.

LE PRESIDENT (M. Blank): Qu'est-ce qu'il reste à l'article 5?

M. HARDY: Le deuxième paragraphe de l'article 5 est adopté.

LE PRESIDENT (M. Blank): Qu'est-ce qu'il reste à l'article 5?

M. HARDY: Qu'est-ce qu'il reste à adopter?

M. MORIN: Est-ce qu'on ne doit pas maintenant procéder à adopter l'ensemble de l'article?

LE PRESIDENT (M. Blank): Je ne pense pas.

M. HARDY: Oui, je pense que le député de Sauvé a raison.

LE PRESIDENT (M. Blank): Ce sont les quatre lignes en haut.

M. HARDY: Le député de Sauvé est devenu d'une prudence extraordinaire.

M. MORIN: Oui, on apprend à ses dépens avec les gens qu'on a devant soi.

M. HARDY: Si je voulais être méchant, je dirais que le député de Sauvé a appris aux dépens des contribuables.

M. MORIN: Oui, mais les trois ministres et le président aussi semblent avoir appris aux dépens des contribuables.

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! Est-ce que l'article 5 est adopté?

M. HARDY: L'article 5 est adopté.

M. CHARRON: II faudra appeler le vote, M. le Président.

M. MORIN: Un vote, M. le Président, il faut que ce soit clair.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Bédard (Chicoutimi)?

M. BEDARD (Chicoutimi): Contre.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Bellemare (Johnson)?

M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, on avait demandé 1976, au lieu de 1975. Il faut respecter le vote qu'on a donné précédemment. Je suis contre.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Pépin?

M. PEPIN: En faveur, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Charron?

M. CHARRON: Contre.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Caron?

M. CARON: En faveur.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Giasson?

M. GIASSON: Pour.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Hardy?

M. HARDY: En faveur.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Pelletier?

M. PELLETIER: Pour.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Carpentier?

M. CARPENTIER: En faveur.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Morin?

M. MORIN: Contre.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Saint-Pierre? M. Ostiguy? M. Garneau?

M. GARNEAU: Pour.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Roy?

M. ROY: Contre.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Vallières?

M. VALLIERES: En faveur.

LE PRESIDENT (M. Blank): Neuf en faveur, cinq contre. L'article 5 est adopté.

M. HARDY: M. le Président, lorsque nous avons abordé.

M. MASSICOTTE: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Blank): Qui? Oui, Massicotte.

M. MASSICOTTE: C'est parce que je ne l'avais pas dit. Cela me fait plaisir, parce que vous avez deviné ma pensée.

UNE VOIX: M. Massicotte était en faveur.

Article 2

M. HARDY: M. le Président, lorsque nous avons abordé l'étude de l'article 5, nous avions, préalablement, entrepris l'étude de l'article 2, c'est-à-dire que nous revenons à la proposition que j'avais formulée à l'effet d'adopter l'article 2.

Il y avait déjà des membres de la commission qui avaient eu l'occasion de parler sur cet article. Je ne sais pas si tout le monde, si tous ceux qui désiraient parler l'on fait, à l'article 2?

M. MORIN: Nous n'avions pas encore vraiment parlé de l'article 2, M. le Président.

M. HARDY: Je me demande si le député de Sauvé n'avait pas épuisé son droit de parole?

M. MORIN: Pas sur l'article 2. M. HARDY: Non?

M. MORIN: Non, puisque nous avions décidé de le remettre après l'article 5. Donc, aucun de nous n'avait même commencé à éplucher l'article 2.

M. CHARRON: En tout cas, pas moi.

LE PRESIDENT (M. Blank): Est-ce qu'on va discuter l'article 2? Je n'ai aucune...

M. HARDY: On revient à l'article 2. On revient à l'ordre normal.

LE PRESIDENT (M. Blank): L'amendement 48 a). On parle du président maintenant.

M. CHARRON: L'article 2, M. le Président. M. HARDY: Adopté?

M. CHARRON: Non seulement nous parlons du président, mais nous parlons de vous-même.

LE PRESIDENT (M. Blank): C'est pour cela que je me demandais si je devais siéger.

M. HARDY: M. le Président, je vous demande de vous récuser afin d'assurer la parfaite objectivité.

M. CHARRON: Est-ce qu'on peut parler sur la motion du ministre des Affaires culturelles?

M. HARDY: Non, ce n'est pas une motion, j'ai tout simplement demandé...

LE PRESIDENT (M. Blank): Je pense qu'il a raison.

LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 2, paragraphe a)? Le député de Saint-Jacques.

Motion d'amendement de M. Charron

M. CHARRON: M. le Président, à tout seigneur, tout honneur. Nous commencerons à étudier les différents postes que constitue l'Assemblée nationale elle-même entre ses députés par peut-être le plus difficile et le plus ingrat, nous en conviendrons, qui est celui du président de l'Assemblée nationale. A ce chapitre, puis-je affirmer immédiatement deux principes sur lesquels l'Opposition n'entendra aucunement revenir, même si nos amendements, parce que je vous les annonce immédiatement, à cet article en affecteront les modalités.

Le premier, c'est que le président de l'Assemblée nationale, et j'ai presque envie de vous

dire le président de notre Assemblée nationale en particulier, a droit à une indemnité supérieure à celle que chacun des 110 membres, que lui-même donc, en conséquence, reçoit au titre de représentant d'une partie de la population du Québec dans un district électoral donné. S'il pouvait participer à nos débats, si le règlement le lui permettait, j'ai l'impression qu'il serait le premier à nous le dire. C'est une tâche où les responsabilités sont immenses. Non seulement a-t-il à présider chaque jour à la cohue de la période des questions, à cette infime et délicat devoir qu'il a de faire respecter le règlement de l'Assemblée nationale dans des circonstances très difficiles, à ce dénuement de la partisanerie politique auquel sa fonction l'invite obligatoirement chaque jour, mais il doit aussi contribuer, je ne dis pas simplement à la revalorisation de l'Assemblée nationale comme .institution dans le Québec, mais au rôle de chacun des députés. Ces interventions répétées, ces rappels à l'ordre devant la cohue des députés d'arrière-ban, à l'occasion, viennent signaler son intention de faire sa part dans la revalorisation du député. Bien sûr, ce n'est pas lui qui va rendre quelqu'un d'inutile utile, mais c'est quelqu'un qui va rendre le sentiment d'inutilité plus facilement supportable par des députés d'arrière-ban, qui ne sont appelés à aucune responsabilité autre que celles prévues par cette même Loi de la Législature, qui ne sont mis au courant des lois que lorsque les lois sont déposées et encore, qui n'ont à participer aux débats que lorsqu'ils en obtiennent la permission du whip, qui doivent à chaque occasion, bien des fois, ronger leur frein, parce que nécessairement doit se développer la conviction que certaines mesures présentées ne font pas l'affaire de leurs électeurs.

Ces députés doivent donc se soumettre à une ligne du parti qui est excessivement autoritaire, et le député qui devient président de l'Assemblée nationale, un peu comme s'il était issu de ces couches, du fond de l'Assemblée nationale, en tient compte, et c'est une lourde responsabilité pour sa part que d'essayer de maintenir des gens dans le décorum d'une Assemblée nationale. Comme je vous le disais, ce n'est pas lui qui va rendre utile quelqu'un d'inutile comme ce n'est pas lui qui va rendre intelligent un imbécile. Mais il a, au moins, l'occasion, par l'invitation pressante qu'il nous fait de respecter le règlement, de faire que les imbéciles s'expriment le moins abondamment possible, de façon irrégulière, et de leur laisser tous les droits qu'ils ont du fait qu'ils ont été élus, comme lui d'ailleurs, a été élu.

Donc, M. le Président, je ne reviens pas sur le principe qui veut que le président de l'Assemblée nationale, à cause de sa tâche particulière, ait un traitement qui soit supérieur à celui de la majorité de ceux qu'il est appelé à contrôler quotidiennement. Donc, je vous dis immédiatement que ce que je vous proposerai comme amendement, ce n'est pas la suppression de l'article 48. Point.

Deuxième principe, M. le Président, qui est nouveau dans le projet de loi et auquel accepte de concourir l'Opposition officielle, c'est celui de porter l'indemnité, quelle qu'elle soit, du président de l'Assemblée nationale, sur un pied d'égalité à celle des ministres nommés au cabinet, ou du chef de l'Opposition. Il nous semble que ces trois institutions, si vous me permettez cette expression, même si dans deux cas sur trois, elles sont incarnées par un seul homme, sont essentielles à notre vie démocratique — tout le monde en conviendra — mais, à l'exception du premier ministre' — cela aussi, nous en conviendrons — les ministres, Président de l'Assemblée nationale et chef de l'Opposition doivent dans leur traitement même, symboliser l'égalité des droits de l'un par rapport à l'autre, et la consécration de l'égalité de chacun des membres de l'Assemblée nationale lorsqu'ils arrivent ici. Que nous soyons élus par des agriculteurs, par des ouvriers, par des bourgeois, que nous soyons élus par des Anglais ou des Français, lorsque nous arrivons ici, nous provenons tous d'un mandat en vertu de la Loi électorale qui nous est donné par une majorité d'électeurs dans une circonscription qui a été préalablement délimitée. Cette égalité, que nous nous retrouvions, par nos étiquettes politiques, à la droite de M. le Président, ou à sa gauche, fait que nous avons là, par nos porte-parole officiels, à maintenir une égalité officielle également. Les ministres, le président de l'Assemblée nationale, le chef de l'Opposition doivent avoir le même traitement.

Or, M. le Président, actuellement — je vous avouerai bien simplement que c'est en étudiant le dossier pour la préparation à ce débat que je l'ai appris, parce que je croyais que c'était déjà chose faite, et cela m'est apparu invraisemblable que cela n'a pas déjà été fait, justement à cause des principes que je viens de vous énoncer — c'est avant cet amendement à la Loi de la Législature que constitue l'article 2 que vous avez appelé, M. le Président, le président de l'Assemblée nationale ne reçoit pas le même traitement qu'un ministre. Moi, j'étais assuré que oui, mais je pense que je l'apprends au ministre des Affaires culturelles. Moi, je l'ai appris dans la préparation de ce débat. Je ne peux pas faire intervenir des officiers de l'Assemblée nationale, mais on m'a informé du montant, qui est de quelque $3,000, que je crois, actuellement, inférieur à celui d'un ministre responsable d'un portefeuille.

Je ne sais pas si mon affirmation est exacte, mais en tout cas, quel que soit le montant, M. le Président, à l'heure où on se parle, le président de l'Assemblée nationale n'a pas un salaire équivalent, ni à celui du chef de l'Opposition, ni à celui d'un ministre. Or, cela, c'est inacceptable, et quelle que soit l'indemnité que l'on s'apprête à voter — je vous ferai une proposition à cet égard — supplémentaire que lui accorde son poste, le triumvirat — si vous me permettez — du Conseil exécutif, du chef de l'Opposition et de l'espèce de suprême arbitre de nos

institutions qu'est le président de l'Assemblée nationale, ne doit pas comporter d'inégalité. C'est donc, M. le Président, que lorsque tout à l'heure, je vous proposerai un amendement, vous pourrez immédiatement deviner que l'amendement que je vais vous proposer pour la fixation de l'indemnité de M. le Président de l'Assemblée nationale, je proposerai le même amendement lorsque nous traiterons des membres du Conseil exécutif ou, un peu plus loin, lorsque nous traiterons du traitement du chef de l'Opposition officielle.

Sur ces deux principes, M. le Président, droit à une indemnité supplémentaire et droit à une indemnité égale à un membre du Conseil exécutif ou du chef de l'Opposition, le Parti québécois n'a aucune objection et est prêt à se rallier à une proposition gouvernementale qui tiendra compte, par contre, des obligations et du contexte dans lesquels nous nous trouvons. Or, c'est là que l'article 48, tel que proposé comme amendement à la Loi de la Législature, n'atteint pas complètement nos voeux et, à notre avis, fait encore état de la même exagération qui était contenue dans l'article 5 dont nous venons de disposer.

Je suis d'opinion, M. le Président, avec mes collègues qui auront l'occasion d'exprimer la leur à leur tour, qu'une indemnité supplémentaire ne doit jamais doubler l'indemnité de base. Si, par définition, c'est une indemnité supplémentaire à cause d'une charge supplémentaire, elle ne doit jamais atteindre le double, sinon, elle fait apparaître une chose — plus que le double, comme c'est le cas dans la rédaction actuelle de l'article 48 — c'est 'affirmer que la charge supplémentaire est plus valorisante que la charge originale. Or, il faut toujours que la charge originale demeure — la base à partir de laquelle on fait le calcul — celle qui est la plus valorisée, le reste doit s'y greffer. On peut-être large dans ces cas en fonction de la charge.

Mais, M. le Président, lorsqu'on double — par exemple la proposition est de 1.1 p.c., c'est plus que doubler le salaire de $21,000 auquel aura droit le président de l'Assemblée nationale comme simple député — c'est affirmer que son rôle de président de l'Assemblée nationale, en quelque sorte, est plus important que ce qui l'a amené dans cette Chambre, soit son titre de député, dans le cas qui nous occupe, de député de Laval, ce serait de n'importe quel comté. C'est un peu une allégorie boiteuse, j'en conviendrai, mais qui est basée sur un sain principe, un peu comme le principe qui apparaît dans nos lois de l'impôt sur le revenu qui dit qu'aucune allocation de dépenses ne doit totaliser plus que les 50 p.c. de ce qui est calculé comme indemnité. Tout le monde convient de cette chose. Sans cela, qu'est-ce que ce serait? Vous verriez des présidents de compagnie se voter un salaire de $5,000, $6,000, comme leurs employés, mais, par contre, ils se donneraient une allocation de dépenses et de voyages de $25,000 ou $30,000. non taxables.

Dans leur sagesse, les législateurs, lorsqu'ils se sont penchés sur la Loi de l'impôt sur le revenu, ont dit: Une allocation supplémentaire ne doit jamais atteindre la moitié du revenu normal salarial d'un individu dans quelque entreprise qu'il soit. Tout le monde a convenu de cette affirmation.

M. le Président, quand on ajoute une indemnité supplémentaire à quelqu'un qui occupe une tâche supplémentaire, on ne doit pas faire que cette tâche finisse par l'emporter et, à la longue, dévaloriser la tâche première qui l'a amené à l'Assemblée nationale. Or, c'est ce que fait l'article 48. Il propose que monsieur le président de l'Assemblée nationale, non seulement obtienne ses $21,000 ou — parlons en termes réels puisque les $21,000 n'ont que six jours d'existence à faire — prenons le chiffre du 1er janvier, $23,205, qui vient d'être adopté à l'article 5, mais on lui permettra de doubler cette somme parce qu'on multiplie par 1.1 p.c. Donc, rajoutez $23,205 plus le .1 p.c. qui équivaut à — laissez-moi calculer, M. le Président — à $2,320 supplémentaires. Ce qui veut dire que monsieur le président de l'Assemblée nationale aura, comme député de Laval ou, encore une fois, de quelque comté que ce soit, $23,205 et aura, à ce titre de président de l'Assemblée nationale, $25,525, ce qui totalise quelque $48,725.

Le total, encore une fois, n est pas important. Ce n'est pas l'objet du débat. C'est le fait que l'indemnité supplémentaire ne devient plus une indemnité supplémentaire, elle devient une indemnité plus importante que l'indemnité première à partir de laquelle elle s'est greffée.

M. le Président, on ne peut pas permettre que... C'est un peu comme si vous permettiez à une branche de devenir plus grosse qu'un arbre, que le tronc même à partir duquel elle a poussé. C'est un peu comme si on permettait, dans la comparaison que je vous faisais avec le revenu, qu'à partir d'un salaire volontairement comprimé pour fins d'impôt, on permette à des employés du secteur privé ou public de développer des comptes de dépenses qui sont trois fois, quatre fois supérieurs à la dépense réelle bien des fois.

C'est donc dans cet esprit, M. le Président, et, encore une fois, en acceptant les deux principes qui veulent que le président a droit à une indemnité supplémentaire, que cette indemnité doit être égale à celle de n'importe quel membre du Conseil exécutif ou du chef de l'Opposition, que je vous proposerais l'amendement suivant: Que l'article 2 soit modifié dans la sixième ligne en remplaçant le nombre 1.10 par .75 et, pour ce qui concerne messieurs les vice-présidents de l'Assemblée nationale, en remplaçant dans la dernière ligne de cet article 48 qui figure dans l'article 2 de la loi à l'étude, le nombre .50 — parce que c'est ce qui est là — par le nombre .30. L'avez-vous, M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Brisson): Oui, je l'ai. Est-ce qu'il y en a qui veulent se prononcer sur l'amendement?

M. MORIN: Je pense que le gouvernement désire...

M. ROY: Est-ce qu'on peut avoir une copie de l'amendement? Quels sont les deux chiffres?

M. MORIN: Si vous voulez laisser une seconde aux membres de l'Opposition et du gouvernement pour en prendre connaissance, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Brisson): A la sixième ligne, ce qui veut dire qu'au paragraphe a) à la fin, remplacer 1.10 par .75 et, au paragraphe b) à la fin, remplacer .50 par .30. C'est l'amendement.

M. HARDY: M. le Président, on peut épiloguer très longuement à savoir si le rôle de président de l'Assemblée nationale, celui de vice-président, mérite une indemnité de X montant plutôt que de Y. Je pense que le gouvernement en est arrivé à la conclusion que la proposition qui est formulée est valable, qu'elle répond à la réalité actuelle. Quant au principe ou au prétendu principe invoqué par le député de Saint-Jacques à savoir que l'indemnité supplémentaire ne devrait être supérieur à l'indemnité première, là aussi, c'est peut-être un principe qui dans l'abstrait peut peut-être avoir quelque fondement, mais dans la réalité, il ne tient plus. Le député de Saint-Jacques sait très bien, pour ce qui est du Parlement, que le président de l'Assemblée nationale n'agit jamais totalement, entièrement, constamment parce que son rôle de président de la Chambre prend tout son temps. Il ne peut pas participer aux débats lorsque nous siégeons à l'Assemblée nationale et, comme le député de Sauvé s'est élevé avec vigueur l'autre soir parce que le président de l'Assemblée nationale n'a voulu que dire quelques mots, à toutes fins pratiques, le président de l'Assemblée nationale n'agit jamais dans son rôle de député. Il agit toujours comme président de l'Assemblée nationale, soit sur le plan administratif, soit sur le plan législatif. Il ne vote jamais.

Alors, le principe défendu par le député de Saint-Jacques ne tient pas. Dans le cas des vice-présidents de l'Assemblée nationale, le principe invoqué par le député de Saint-Jacques ne tient plus parce que la proportion n'est plus exacte. Alors, cela devient une question d'appréciation. Est-ce que le montant qui est fixé dans la loi actuelle est trop élevé ou pas assez élevé, c'est une question purement d'appréciation, je dirais même subjective. Le gouvernement, le lieutenant-gouverneur en conseil, puisqu'on veut absolument respecter les formes chez ceux qui siègent à votre gauche, M. le Président, en est arrivé à la conclusion que c'était un montant valable, que c'était un montant qui correspondait à la réalité, donc nous ne voyons pas du tout les raisons pour lesquelles nous voterions en faveur de l'amendement du député de Saint-Jacques.

LE PRESIDENT (M. Brisson): L'honorable ministre des Finances.

M. GARNEAU: Je voudrais ajouter aux propos du ministre des Affaires culturelles que, suivant l'ancienne loi ou la loi qui est encore en vigueur jusqu'à ce que la loi 87 soit adoptée, pour que ce qui est du président de l'Assemblée nationale et d'un ministre, l'indemnité additionnelle pour un ministre était de $15,600, c'est-à-dire l'égal du salaire de base d'un député. Mais il avait, en outre, comme c'est le cas pour le chef de l'Opposition, je crois, un montant de $3,060 qui n'était pas imposable et qui faisait, en quelque sorte, partie de cet ensemble de dépenses ou de frais de représentation qui font qu'un ministre ne peut pas avoir de compte de dépenses lorsqu'il exécute son mandat à l'intérieur du Québec. Si on tient compte de ce facteur, dans la nouvelle formule, vous allez voir qu'il n'y a plus d'allocation non imposable pour exercer la fonction de ministre.

Il n'y a plus de frais de représentation, de montant qui était de $3,000, qui n'était pas imposable. Maintenant, tout devient imposable. Cest-à-dire que, si l'on prend l'ancienne formule, il y avait $15,600 d'allocation pour le ministre plus $3,060 non imposables, ce qui veut dire à peu près $4,500 ou $5,000 imposables. Si on fait un chiffre rond, ça voulait dire à peu près $20,000 comme allocation d'un membre du conseil des ministres. Aujourd'hui, on élimine cette allocation non imposable, on l'inclut et tout devient du salaire soumis à l'impôt. C'est la raison pour laquelle, tenant compte qu'il n'y a plus d'allocation de frais de représentation non imposable, le facteur de 1.1 a été calculé suivant la base de la loi 87. Je pense que c'est important de souligner qu'il n'y aura plus, pour les ministres qui exercent la fonction ministérielle, d'allocations de dépenses qui ne seront pas soumises à l'impôt. Tout son salaire — son allocation de député et son allocation de ministre — sera entièrement soumis à l'impôt et c'est la raison pour laquelle nous avons dû apporter le facteur de 1.1 pour tenir compte de ce fait.

C'est la même chose pour le président de l'Assemblée nationale et pour le chef de l'Opposition.

M. BEDARD (Chicoutimi): Voulez-vous dire qu'au bout de la ligne ça représente presque une diminution pour les ministres avec ce...

M. GARNEAU: La situation présente aurait été... bien non... S'il n'y avait aucune espèce d'augmentation... Supposons qu'on aurait dit tout simplement: L'allocation de $3,060 est incluse dans l'allocation de ministre et on la rend imposable pour qu'un ministre, le chef de l'Opposition et le président de l'Assemblée

nationale n'aient pas de diminution de traitement. Il aurait fallu au moins que les $3,060 soient portés à $4,500, probablement un peu plus, à cause du fait que la taxation de 50 p.c. est sur le plein montant, ce qui veut dire probablement aux environs de $5,000. C'est que, sur $5,000, il paye $2,500 d'impôt, il reste $2,500 nets, alors qu'on recevait avant ça $3,060 non imposables. C'est probablement plus que ça, je n'ai pas fait les calculs précis au niveau de la taxation, mais si on prend $6,000 imposables à 50 p.c, c'est à peu près le taux marginal de taxation du chef de l'Opposition, d'un ministre et du président, 50 p.c, le taux marginal, je pense, ce qui veut dire que ça prendrait $6,000 pour avoir un montant non taxé net de $3,000. Les $3,060, antérieurement, pour que ce soit la même chose en termes de traitement, pour le chef de l'Opposition, le président de l'Assemblée nationale ainsi qu'un ministre, il faudrait dire $6,000; ce montant, plus $15,600, ça donne $21,600, ce qui serait l'allocation d'un ministre, sans qu'il y ait eu aucune augmentation de traitement, tout simplement pour garder le statu quo. Evidemment, ça devient $23,000, il y a donc une augmentation de $1,400 prévue par la loi pour le traitement d'un ministre, du chef de l'Opposition et du président de l'Assemblée nationale.

M. CHARRON: Est-ce que je peux poser une question au ministre des Finances, juste pour les chiffres?

M. GARNEAU: Oui.

M. CHARRON: Actuellement, les deux allocations de ministre et de député, $15,600 deux fois...

M. GARNEAU: Oui.

M. CHARRON: ... cela fait donc $31,200, c'est imposable.

M. GARNEAU: C'est ça.

M. CHARRON: Les $7,140 qu'il a actuellement, comme député...

M. GARNEAU: Ce n'est pas imposable.

M. CHARRON: ... plus $3,060 comme ministre...

M. GARNEAU: C'est ça.

M. CHARRON: Cela fait $10,200 non imposables.

M. GARNEAU: C'est ça.

M. CHARRON: Actuellement, le revenu total d'un ministre, en additionnant un et l'autre, sera de $41,400 dont $31,200 imposables.

M. GARNEAU: C'est ça.

M. CHARRON: La nouvelle version, $48,000, telle quelle, ferait en date du 1er janvier 1975, un salaire de $23,205, comme député; indemnité comme ministre: $25,525; c'est 1.1, ce qui se trouve à donner $48,730 imposables, plus $7,000 non imposables.

M. GARNEAU: C'est cela.

M. CHARRON: II va payer de l'impôt sur $48,730, au lieu d'en payer sur $31,200, par contre, il aura $7,000 non imposables, comparativement à $10,200 auparavant.

M. GARNEAU: C'est cela.

M. CHARRON: C'est pour savoir si les chiffres que nous utiliserons sont fondés.

M. GARNEAU: C'est cela. J'écoutais tout à l'heure la démonstration du député de Saint-Jacques sur l'égalité entre l'allocation de député et celle de ministre, de chef de l'Opposition et de président de l'Assemblée nationale. Il faut dire que, dans la situation dans laquelle on se trouve présentement, l'allocation additionnelle se trouve, en fait, plus élevée que l'allocation de base, c'est-à-dire qu'actuellement l'allocation de base est de $15,600 et l'allocation additionnelle pour remplir le rôle de ministre ou de chef de l'Opposition, si on rendait l'allocation de $3,060 imposable, cela voudrait dire $21,600 à peu près, ce qui voudrait dire que l'allocation additionnelle est de $5,000 ou $6,000 plus élevée que l'allocation de base. C'est la situation présente.

LE PRESIDENT (M. Brisson): Y en a-t-il d'autres qui veulent prendre la parole sur l'amendement?

Le député de Sauvé.

M. MORIN: M. le Président, c'est un article fort important que le second, puisqu'il prévoit les émoluments du président et des vice-présidents qui jouent un rôle fort important dans le système parlementaire.

En effet, on peut dire que ces personnages de l'Assemblée nationale ont un triple rôle à remplir, un rôle constitutionnel d'abord, qui est en somme la continuation, l'héritage du rôle constitutionnel du "Speaker" en Grande-Bretagne, en second lieu, une tâche représentative, et, enfin, des fonctions relatives à la régie interne de l'Assemblée nationale.

Ce ne sont pas de minces tâches. Ce sont des rôles éminents dont nous parlons à l'article 2, mais, de là à reconnaître le fait que ces fonctionnaires de l'Assemblée soient payés deux fois plus que les députés, il y a une certaine marge.

A l'heure actuelle, ils gagnent les trois quarts en plus, .75 en gros, en plus du salaire des députés. Nous pensons qu'il n'y a pas lieu de

porter ce .75 à 1.10 pour le président et, dans le cas des vice-présidents, nous pensons qu'il n'y a pas lieu de porter le chiffre à .50, mais, au contraire, de le réduire à .30. Mais ce n'est pas que nous voulons réduire le rôle, minimiser le rôle constitutionnel représentatif du président et des vice-présidents. Bien au contraire.

Cet amendement que nous proposons pour le président et les vice-présidents, nous entendons le faire pour les ministres et pour le chef de l'Opposition tout aussi bien. Il n'y a pas de raison, qu'il s'agisse des fonctions de ministres ou de chef de l'Opposition, il n'y a pas de raison pour qu'ils soient payés deux fois le salaire d'un député.

M. le Président, c'est pourquoi le député de Saint-Jacques a présenté cet amendement. J'aimerais dire deux mots, pendant les quelques minutes qui nous restent avant la fin de la séance, j'aimerais dire quelques mots sur la tâche du président, la tâche des vice-présidents et expliquer les raisons pour lesquelles nous avons proposé cette réduction de l'indemnité.

Le président est certes un personnage considérable dans l'Assemblée. Il a d'abord un rôle constitutionnel qui est d'être, au premier chef, l'arbitre des débats. Qu'il s'agisse d'une Assemblée nationale où les partis sont presque à égalité ou qu'il s'agisse d'une assemblée, comme celle que nous connaissons actuellement, avec la disproportion flagrante entre les suffrages et le nombre de sièges obtenus par les différents partis, ce rôle est toujours délicat, ce rôle est toujours crucial.

Je dois reconnaître que le président actuel, même si quelquefois nous ne sommes pas d'accord sur ses décisions, en général, a fait plutôt honneur à ses fonctions. Tout récemment, j'ai eu, en ce qui me concerne, des griefs contre lui, mais c'est une affaire que nous réglerons en d'autres lieux et en d'autres temps.

Cette tâche constitutionnelle du "Speaker", elle nous vient, en droite ligne, du passé britannique qui fait peser sur l'épaule de ce fonctionnaire parlementaire les plus hautes responsabilités. Vous savez que, en Grande-Bretagne et ici, d'ailleurs, en contrepartie, l'Assemblée ne peut siéger sans la présence du président ou d'un vice-président exerçant ses fonctions déléguées. Le rôle du président est à ce point crucial qu'on a vu, dans le Parlement fédéral, l'Assemblée se retrouver sans président, parce que celui-ci estimait que la tenue des députés était telle qu'il ne pouvait continuer à présider. Plût au ciel que le président de l'Assemblée nationale du Québec agisse de la même façon plus souvent, lorsque le désordre s'installe, que les quolibets et les injures pleuvent; plût au ciel que le président de notre Assemblée soit aussi susceptible que le "Speaker" du Parlement fédéral!

En effet, M. le Président, s'il n'y a plus de président dans une assemblée parlementaire, il n'y a plus d'assemblée; l'assemblée n'existe pas en tant que telle; elle n'a plus de fonction en l'absence du président ou de son vice-président.

UNE VOIX: Tout le monde sait cela. UNE VOIX: II est bon de le rappeler. M. MORIN: Je vois que le député de...

LE PRESIDENT (M. Brisson): A l'ordre, messieurs! Amendement, s'il vous plaît.

M. MORIN: Le député de Laurier sait cela. Je le félicite, c'est une... Le député disait tout à l'heure: Tout le monde sait cela. J'ai distinctement entendu le député dire: Tout le monde sait cela. Je lui donne raison. Tout le monde sait cela.

LE PRESIDENT (M. Brisson): A l'ordre, messieurs! Je prierais le député de Sauvé de s'adresser à la présidence.

M. MORIN: Ai-je la parole?

LE PRESIDENT (M. Brisson): S'il vous plaît.

M. MORIN: M. le Président, voyons donc, je vous donnais raison, arrêtez donc ces folies!

M. MARCHAND: II n'a pas le droit de parole. Vous vous trompez encore une fois.

LE PRESIDENT (M. Brisson): Le député de Sauvé.

M. MORIN: M. le Président, effectivement tout le monde sait cela, mais il est bon de le rappeler au moment où nous parlons de la rémunération qui doit s'attacher à ce poste. Sans président, il n'y a pas d'Assemblée, c'est-à-dire que ce rôle est crucial, constitutionnellement parlant. C'est le président qui assure même la continuité de l'Assemblée, la continuité du parlementarisme. Je me réfère en particulier à ce sujet à l'article 47 de la Loi de la Législature, c'est-à-dire les statuts refondus de 1964, chapitre 6, modifié à plusieurs reprises, comme chacun le sait. A l'article 47, on nous dit que la personne qui remplit la charge de président lors de la dissolution de l'Assemblée nationale, est considérée comme président et en conserve les pouvoirs — on aurait pu ajouter aussi les prérogatives — jusqu'au jour fixé par proclamation pour l'expédition des affaires. Pour les fins de la régie interne de l'Assemblée nationale, elle est considérée comme président jusqu'à ce qu'un président ait été nommé par la nouvelle Assemblée.

Autrement dit, cette fonction constitutionnelle est d'une importance telle qu'elle ne doit pas connaître d'interruption. Les fonctions de députés connaissent des interruptions, mais non celles de président. C'est donc lui qui assure cette continuité essentielle en régime parlementaire. C'est donc un rôle très éminent. C'est déjà un bon motif pour reconnaître que ce personnage doit recevoir des émoluments qui correspondent à l'importance des fonctions.

La deuxième tâche à laquelle j'ai fait allusion, est la tâche de représentation. Effectivement, ce ne sont pas tous les députés qui sont à même de faire de bon présidents, surtout du point de vue de la représentation à l'extérieur. Il faut que le député qui soit choisi par ses pairs, pour exercer ces fonctions, soit vraiment un homme de premier plan. C'est lui qui va être appelé à aller à l'étranger représenter l'Assemblée dans les conférences internationales, les conférences comme celles à laquelle nous participions ensemble, le député de Laurier et moi, il n'y a pas si longtemps.

M. MASSICOTTE: Bruxelles.

M. MORIN: Je dois dire qu'un président qui ne serait pas à la hauteur des circonstances en de telles conférences ne remplirait pas les fonctions que nous attendons qu'il remplisse. Un président qui doit être à la hauteur de ces tâches de représentation, doit être bien rémunéré. C'est bien certain. Mais encore une fois, doit-il pour autant être payé deux fois plus qu'un député ordinaire. C'est la question que soulève l'amendement du député de Saint-Jacques.

M. le Président, il y a un point sur lequel je n'ai peut-être pas suffisamment insisté, qui est le caractère impartial du président, même s'il appartient à un parti politique. C'est un fait que le président de notre Assemblée, comme dans tous les parlements d'inspiration britannique, le président fait partie, se rattache à un parti politique. Il doit, au moment où il entre dans ses fonctions, oublier, en quelque sorte, qu'il appartient à un parti politique. Oh, c'est très difficile, et je ne voudrais pas m'étendre sur cet aspect de la question. C'est très difficile de se départir de ses allégeances politiques. C'est très difficile de donner raison à l'Opposition, quand elle a raison, sur des points de règlement ou des points de privilège. C'est très difficile d'oublier la couleur politique pour se montrer impartial, et intransigeant quelquefois, même à l'égard des collègues qui appartiennent au même parti politique. Aussi les tentations peuvent-elles être fortes pour un président, ou pour des vice-présidents, d'oublier qu'ils doivent assumer ces fonctions de manière impartiale, et l'une des raisons pour laquelle on doit reconnaître qu'un salaire adéquat, idoine, doit être versé à ces personnes, c'est pour leur rappeler qu'en raison de leurs hautes fonctions, elles doivent se montrer impartiales.

M. le Président, le salaire qui est accordé à ces personnages a donc une raison extrêmement importante. C'est de s'assurer, justement, de leur impartialité. Il y a, enfin, des tâches sur lesquelles je n'aurai pas le temps, hélas! de m'étendre, puisque déjà la séance de ce soir touche à sa fin, j'aurais voulu disserter longuement...

UNE VOIX: Demain soir.

M. MORIN: ... sur les tâches qui sont liées à la régie interne de l'Assemblée. M. le Président, il y a plusieurs articles de la Loi de la Législature, le 54e et le 55e notamment, qui nous décrivent...

M. MASSICOTTE: Est-ce possible d'entendre une affaire comme cela!

M. MARCHAND: Récitez-nous une fable de La Fontaine pour finir!

M. MORIN: ... ses fonctions. Oh, je pourrais en citer plusieurs au député de Laurier, mais je préférerais qu'il me laisse terminer.

LE PRESIDENT (M. Brisson): A l'ordre!

M. MORIN: J'en connais une qui s'intitule: Les Animaux malades de la peste, et qui aurait pu s'appliquer admirablement bien ces jours derniers à l'Assemblée.

M. MASSICOTTE: On pourrait vous regarder, vous avez raison !

M. MORIN: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Brisson): A l'ordre! Il reste trente secondes.

M. MORIN: ... est-ce que je puis continuer sans encombre mon exposé durant les 25 secondes qu'il me reste? Bien, mais si tout le monde parle en même temps, je ne pourrai pas continuer...

LE PRESIDENT (M. Brisson): A l'ordre, messieurs! Vous les avez.

M. MORIN: ... à développer les tâches extrêmement importantes qui sont liées à la régie interne. L'article 54 de la Loi de la Législature nous dit que le président de l'Assemblée nationale et trois députés, membres du Conseil exécutif, choisis par le lieutenant-gouverneur en conseil, sont nommés et constitués commissaires aux fins de remplir les devoirs qui leur sont confiés par la présente loi. Voilà des fonctions importantes et auxquelles on ne doit pas manquer lorsqu'on est nommé commissaire de l'Assemblée nationale, lorsqu'on est président de l'Assemblée nationale, on est comptable de ses actes devant la population. Voilà les fonctions fort importantes dont nous allons avoir l'occasion de parler longuement ces semaines-ci.

LE PRESIDENT (M. Brisson): A l'ordre, messieurs! Il est minuit et la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 23 h 57)

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