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(Dix heures vingt minutes)
Le Président (M. Vailières): À l'ordre, s'il
vous plaît!
La commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation
entreprend ses travaux afin de procéder à l'examen des
orientations, des activités et de la gestion de l'Office du
crédit agricole du Québec.
Les membres de la commission pour cette séance sont les suivants:
M. Baril (Arthabaska), M. Beaumier (Nicolet), M. Beauséjour (Iberville),
M. Dubois (Huntingdon), M. Dupré (Saint-Hyacinthe), M. Houde (Berthier),
Mme Juneau (Johnson), M. Laplante (Bourassa), M. Le Blanc (Montmagny-L'Islet),
M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Maltais (Saguenay), M.
Mathieu (Beauce-Sud) remplacé par M. Assad (Papineau), M. Picotte
(Maskinongé) et M. Vailières (Richmond).
Là-dessus, je voudrais indiquer aux représentants de
l'Office du crédit agricole que nous avons convenu de leur accorder
environ une heure pour la présentation de leur document. À ce
moment-ci, je demanderais aux parlementaires de chaque côté de la
table s'ils ont une courte déclaration d'ouverture.
M. le député d'Arthabaska.
Déclarations d'ouverture M. Jacques
Baril
M. Baril (Arthabaska): Oui, merci, M. le Président.
J'aimerais d'abord souhaiter la bienvenue au président de l'Office du
crédit agricole ainsi qu'à tous les gens qui l'accompagnent. On
sait que l'Office du crédit agricole, depuis une année, entre
autres, n'a peut-être pas passé, aux yeux de l'opinion publique,
la meilleure année. J'aimerais que l'on puisse profiter de cette
commission parlementaire pour obtenir de l'information supplémentaire.
Malgré tout ce qui se véhicule, le système financier
agricole au Québec est l'un des meilleurs systèmes financiers. Il
est évident qu'il y a toujours place pour de l'amélioration et il
est dans l'intention de tout le monde d'essayer d'améliorer ce
système.
Il faut se souvenir aussi qu'il est beaucoup plus facile de critiquer un
système que de le féliciter. Nous, dans nos bureaux de
comté, aidons beaucoup de gens, mais il n'y en a pas beaucoup qui
viennent nous remercier parmi ceux qui sont heureux. Ce sont toujours ceux qui
sont insatisfaits ou ceux qui n'ont pas réussi à obtenir quelque
chose qui reviennent. À la longue, c'est évident que cela
devient, je dois le dire, tannant de toujours travailler pour des gens qui font
montre d'une certaine insatisfaction. Avec toute l'information ou de la
façon dont cela s'est déroulé au cours des
dernières années quant au système financier agricole au
Québec, cela n'a pas dû être toujours facile tant pour vous
que pour l'ensemble de vos officiers dans le champ. J'aimerais, lors de cette
commission parlementaire, qu'on puisse clarifier ou informer encore
peut-être davantage ta population sur le travail de l'office, non
seulement sortir les côtés négatifs, mais sortir les
côtés positifs; il y en a sans doute, des côtés
positifs, à l'office. Donc,, il nous fera plaisir de vous entendre
d'abord et, ensuite, d'essayer d'échanger des propos avec vous.
Le Président (M. Vailières): Très bien! M.
le député de Maskinongé.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, M. le Président. Au nom de notre
formation politique, bienvenue aux gens de l'Office du crédit agricole
et à son président qui sont venus discuter des différents
problèmes inhérents à l'exercice de leurs fonctions. Je
pense que nous allons avoir une bonne journée de discussion avec les
membres de l'office. J'ai l'impression qu'elle sera malheureusement trop
courte. En tout cas, ce n'est qu'un début. Cela nous permettra
peut-être de nous ajuster davantage pour les autres années.
Nous avons beaucoup de questions à poser en ce qui concerne les
programmes de l'office et aussi des cas qui ont été
soulevés par le passé et qui ont été portés
à notre connaissance. Tout ce que nous souhaitons, c'est d'obtenir des
réponses claires, nettes et précises. Je ne doute pas que cet
échange se déroulera avec tout le sérieux et toute la
clarté nécessaires pour que les élus du peuple puissent,
dans l'avenir, continuer à parler de l'Office du crédit agricole
comme d'un office qui doit rendre des services à tous les agriculteurs
du Québec. Bienvenue.
Le Président (M. Vailières): Merci, M.
le député de Maskinongé.
Je voulais indiquer aux membres de la commission - et connaître
leur point de vue là-dessus - que nous pourrions nous entendre pour
terminer à midi, puisque les travaux de la Chambre reprennent à
14 heures et qu'il y a un caucus de notre formation politique. S'il n'y avait
pas d'objection, on pourrait terminer cette première tranche à
midi pour reprendre après les affaires courantes, cet après-midi.
Cela va?
M. Picotte: Adopté.
Le Président (M. Vallières): M. Moreau, je vous
prierais d'identifier les gens qui vous accompagnent avant de faire la lecture
de votre document, s'il vous plaît.
Audition du président de l'office M. Camille
Moreau
M. Moreau (Camille): J'ai, è ma droite, M. André
Saint-Aubin, directeur adjoint à la Direction du financement agricole
et, à ma gauche, M. Julien Burns, directeur du Service de recherche et
de planification.
Le Président (M. Vallières): Vous pouvez y aller,
M. Moreau.
M. Moreau: M. le Président, je voudrais tout d'abord
exprimer mon appréciation à l'endroit de la commission de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation pour avoir
arrêté son choix sur l'Office du crédit agricole du
Québec dans l'exercice de son pouvoir de surveillance lui permettant
d'examiner les orientations, les activités et la gestion d'un organisme
public.
Notre participation aux travaux de la commission devrait contribuer, du
moins je l'espère, à dissiper certaines équivoques qui ont
eu cours récemment, à rétablir certains faits et à
corriger une perception parfois fort injuste tant de l'office que des
programmes dont l'administration lui ressortit.
Avec votre permission, je m'emploierai, dans un premier temps, à
faire état des orientations de l'office à la lumière, en
particulier, de l'évolution du régime de financement agricole.
Dans un deuxième temps, je ferai un survol des activités tant au
chapitre des prêts qu'à celui des subventions en regard de chacun
des programmes dudit régime englobant la situation des arrérages
et des abandons. Enfin, je tenterai de décrire le plus exhaustivement
possible la gestion de l'office au sein dudit régime.
Avant de dégager les lignes de force, les orientations proprement
dites du régime de financement agricole, il me paraît opportun de
définir le rôle de l'office et de le situer dans
l'évolution dudit régime.
L'Office du crédit agricole du Québec est probablement
l'un des doyens des organismes gouvernementaux au Québec, son existence
remontant au mois de novembre 1936, et se situe au coeur même du
régime québécois de financement agricole
présentement constitué d'un éventail de huit lois, sans
compter l'administration de la banque de terres arables. Viennent s'ajouter
à ces responsabilités la gestion du régime de financement
forestier et l'application imminente de la loi sur le crédit
aquacole.
Ces régimes sont complétés par la Loi sur
l'assurance-prêts agricoles et forestiers dont l'administration ressortit
à une autre corporation gouvernementale étroitement reliée
à l'office, soit le fonds d'assurance-prêts agricoles et
forestiers.
Essentiellement, l'office vise à favoriser le
développement des entreprises agricoles par le biais de la ferme
familiale et leur fonctionnement optimal en s'inscrivent dans la poursuite des
objectifs définis par le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation en concertation avec les agents du milieu.
Il n'appartient donc pas à l'office de faire de la promotion, de mousser
des projets, mais bien de procéder à l'analyse des projets qui
lui sont soumis, d'en évaluer l'impact et la faisabilité et de
voir à leur financement lorsque possible. L'office constitue, en quelque
sorte, une banque spécialisée en matière de financement
à l'agriculture et doit rigoureusement répondre à des
impératifs d'ordre économique.
En somme, l'office constitue le dossier du requérant ou de la
requérante en ce sens qu'il procède à l'expertise
complète en vue de l'émission du certificat, qu'il évalue
les biens pouvant être offerts en garantie, qu'il jauge le candidat ou la
candidate, évalue le risque, vérifie la structure
financière pour enfin émettre un certificat sur la foi duquel le
requérant ou la requérante peut obtenir un prêt
auprès d'une institution financière de son choix. L'office verse,
au surplus, la contribution gouvernementale au paiement de
l'intérêt et assure le bon fonctionnement du régime.
De son côté, le prêteur autorisé consent le
prêt dans les limites et conditions établies sur le certificat et
assure l'administration normale du prêt. La réalisation des
garanties du prêt en cas de défaut peut même être
confiée à l'office par le prêteur.
L'annexe I vous permettra de vous référer à une
description sommaire du régime québécois de financement
agricole. Vous serez à même d'observer qu'il offre
présentement une gamme complète et articulée de types de
prêts - à long, à moyen et à court termes,
crédits spéciaux -axés sur les vrais besoins des
agriculteurs, depuis l'achat d'une unité complète
d'exploitation en plein fonctionnement jusqu'au paiement des frais de
subsistance, en passant par la construction de bâtiments, l'achat
d'animaux, de machineries et d'équipements de toutes sortes, l'achat de
semences, d'engrais, de moulée, le paiement des primes d'assurance, des
salaires, bref, de toutes les dépenses reliées à la
production agricole.
Outre les subventions à l'intérêt dont sont assortis
les prêts à long et à moyen termes» le régime
permet de payer une portion d'intérêt sur les prêts
consentis par la Société du crédit agricole Canada ainsi
que sur les prêts destinés à l'établissement de
jeunes agriculteurs. Des subventions de mise en valeur des exploitations
agricoles peuvent également être consenties dans le cas de
l'établissement de jeunes agriculteurs ou à la suite de
l'agrandissement d'une ferme.
L'une des principales caractéristiques de l'office fut
précisément son souci d'adaptation, au fil des ans, à la
réalité agricole. Les modifications qui furent
systématiquement apportées en 1969, en 1972, en 1975, en 1978, en
1982 et en 1984 au régime de financement agricole témoignent de
cette préoccupation. On a successivement ouvert la porte aux
exploitations sans sol, aux exploitations de groupes, puis à la location
des fermes. Le recours à un nantissement agricole et l'avènement
des marges de crédit s'inscrivirent également dans ce courant
évolutif. (10 h 30)
J'ajouterais que cette ouverture aux changements a permis au
régime de financement agricole d'être à l'écoute des
productions dites nouvelles et d'en assurer, dans une large mesure, le
développement à telle enseigne qu'il a ouvert la gamme la plus
diversifiée des productions depuis l'élevage du faisan à
la production des endives, en passant par l'élevage des reines
d'abeilles, du sanglier, des cailles, etc.
Point n'est besoin de reculer bien loin dans le temps pour mesurer
l'importance des changements apportés. Il y a à peine quinze ans,
le maximum des prêts à long terme que pouvait consentir l'office
s'établissait à 15 000 $ en regard de 250 000 $ pour l'individu
et 450 000 $ pour les groupes, aujourd'hui. Le maximum des prêts à
moyen terme était de 7000 $ comparativement à 200 000 $
présentement. Des marges de crédit peuvent maintenant atteindre
100 000 $ et même 500 000 $ pour la production de céréales
ou de bovin d'engraissement, cependant que de telles marges étaient
inexistantes avant 1972.
Un rappel des principales étapes du régime de financement
agricole permettra de mieux percevoir son évolution et de mesurer le
dynamisme qui a marqué une période importante dans l'histoire de
l'agriculture du
Québec qui s'étend sur près d'un
demi-siècle. Il nous faut remonter à 1936 pour assister, avec la
création de l'Office du crédit agricole du Québec,
à la mise en place du régime québécois de
financement à l'agriculture par l'entrée en vigueur, le 12
novembre de la même année, de la Loi du crédit agricole du
Québec.
Au lendemain d'une crise économique qui n'avait pas
épargné le secteur agricole, les besoins croissants au chapitre
des investissements ne pouvaient être adéquatement satisfaits par
le système canadien de crédit agricole d'alors, administré
par la Commission du prêt agricole canadien avec une certaine
collaboration des provinces participantes, dont celle de Québec, qui
avait alors adopté à cette fin, en 1928, la Loi du prêt
agricole du Québec. Cette loi, toujours en vigueur sous le nom actuel de
Loi sur le prêt agricole, autorise, entre autres, l'office à payer
une portion d'intérêt sur les prêts consentis par la
Société du crédit agricole Canada.
La loi de 1936, mieux connue aujourd'hui sous le nom de Loi sur le
crédit agricole, a permis à l'office de consentir lui-même
des prêts aux agriculteurs.
D'abord, exclusivement axé sur des prêts
hypothécaires à long terme, le régime de financement
agricole a constamment évolué par la suite, de pair avec les
changements qui se sont opérés dans ce secteur. C'est ainsi que
le phénomène de mécanisation devait entraîner, dans
les années soixante, l'adoption de la Loi de l'amélioration des
fermes (juin 1961) prévoyant le consentement par les institutions
privées de prêts à moyen terme garantis par nantissement
agricole ou par cession en vertu de la Loi sur les banques et assortis de la
garantie gouvernementale pour les prêteurs.
Le mouvement de consolidation des fermes des années soixante-dix
et les impératifs persistants d'une relève dans le secteur ont
provoqué l'adoption de la Loi favorisant la mise en valeur des
exploitations agricoles (octobre 1969) exclusivement destinée à
la poursuite de ces deux objectifs.
L'année 1972 allait, pour sa part, ouvrir la voie au
crédit à court terme (Loi favorisant le crédit à la
production agricole) grâce à la participation, encore une fois,
des institutions privées, puis à l'établissement d'un
crédit spécial (Loi favorisant un crédit spécial
pour les producteurs agricoles au cours de périodes critiques) pour
redresser des situations critiques affectant un certain nombre de
producteurs.
Mentionnons en passant que c'est le 31 décembre 1975 qu'entrait
en vigueur la Loi sur le crédit forestier qui autorisait, pour la
première fois au pays, la mise en place d'un régime de
financement forestier.
L'entrée en vigueur, le 1er août 1978,
de la Loi favorisant le crédit agricole à long terme par
les institutions privées a sans doute constitué un tournant dans
l'évolution du régime québécois de financement
agricole. La d'ores et déjà fameuse formule tandem devait alors
susciter un véritable engouement chez tous les intéressés,
tant chez les utilisateurs eux-mêmes que chez les prêteurs
autorisés.
Ce fut également le 1er août 1978 qu'entra en vigueur la
Loi sur l'assurance-prêts agricoles et forestiers. Cette loi
prévoyait la création du fonds d'assurance-prêts agricole
et forestiers, ayant pour fonction d'assurer le remboursement des pertes
résultant des prêts consentis en vertu des lois de financement
agricole et forestier administrées par l'office.
Laissée en veilleuse jusqu'à la fin de 1984, pour des
raisons de priorités gouvernementales, la banque de terres arables,
constituée par la Loi modifiant la Loi sur le ministère de
l'Agriculture, sanctionnée le 21 décembre 1979 et maintenant
opérationnelle, permettra l'achat, la location et la revente de terres
non utilisées ou sous-utilisées mais propices à la culture
céréalière.
Le 1er septembre 1982, entrait en vigueur la Loi favorisant
l'établissement de jeunes agriculteurs prévoyant l'octroi d'une
subvention d'intérêt pouvant atteindre la totalité de
l'intérêt net à payer sur les premiers 50 000 $ d'un
prêt à long terme sur une période de cinq ans.
Le mois de juin 1984 devait marquer la sanction de la Loi sur le
crédit aquacole et l'entrée en vigueur de la Loi favorisant le
crédit forestier par les institutions privées.
En somme, l'évolution du régime de financement agricole
nous a conduits à la mise en place, à la faveur des. ans, d'un
éventail de mesures visant à couvrir la gamme complète des
besoins en investissements en agriculture. Encore que cette évolution
est loin d'être terminée, puisque nous prévoyons
prochainement une refonte des lois sur le financement agricole.
Après ce survol des principales étapes du régime de
financement agricole, nous pourrions en dégager les poins saillants, les
orientations qu'il a suivies dans son cheminement, ses lignes de force.
Le maintien et le développement de la ferme familiale ont
constitué, à n'en point douter, une préoccupation
viscérale du régime de financement agricole. Le concept de la
ferme familiale a, bien sûr, évolué, de pair, du reste,
avec une agriculture qui a connu une véritable métamorphose
depuis quelques décennies: évolution dans le mode de vie,
évolution dans les techniques de production, évolution dans les
structures d'exploitation, évolution dans la mise en marché des
produits. Bref, l'agriculture est probablement le secteur d'activité
où les changements furent les plus marquants.
Sans s'impliquer dans le débat en cours sur la ferme familiale,
depuis le tenants d'une miniaturisation folklorique des exploitations jusqu'aux
tenants du "mastodontisme", le régime du financement agricole s'est
inscrit dans ce processus évolutif. Il suffit de se
référer à la définition de la ferme rentable,
sous-jacente è l'application de tous les programmes de financement
agricole, pour s'en convaincre. Il s'agit d"'une ferme susceptible de produire,
compte tenu de l'ensemble de ses resssources, un revenu permettant è
celui qui l'exploite d'en acquitter les frais d'exploitation, y compris
l'entretien et la dépréciation, de remplir ses obligations et de
faire vivre sa famille convenablement. "
On a vite remarqué une nette référence à la
famille et un concept de rentabilité qui confine à celui de
viabilité. En pratique, le critère de la capacité de
remboursement s'avère le seuil minimal que doit franchir le
requérant ou la requérante pour l'accès aux programmes de
financement agricole. Aussi, l'office s'assure-t-il, pour l'autorisation des
prêts, que subsiste un équilibre entre les ressources de
l'exploitation et la mobilisation des ressources de la famille.
De même que certaines demandes de prêts se voient
refusées parce que la capacité de paiement n'est pas
démontrée, de la même façon d'autres demandes seront
refusées parce que l'implication des membres de la famille
s'avère une incidence dans l'ensemble des activités de
l'exploitation et ce, nonobstant le fait que la rentabilité soit
acquise.
La relève en agriculture constitue également une
préoccupation constante dans l'application du régime de
financement agricole. Outre les programmes conventionnels accessibles aux
jeunes qui s'établissent, la Loi favorisant le crédit agricole
à long terme par les institutions privées prévoit
l'autorisation de prêts dont le maximum peut atteindre 90% de la valeur
foncière de la ferme dans leur cas. La Loi favorisant la mise en valeur
des exploitations agricoles et la Loi favorisant l'établissement de
jeunes agriculteurs prévoient des subventions de mise en valeur et des
subventions à l'intérêt en regard desquelles les
requérants ou les requérantes peuvent exercer une option. Enfin,
le premier objectif de la banque de terres arables n'est autre,
précisément, que celui de favoriser la relève en
agriculture.
Est-il nécessaire de mentionner que 12 609 personnes se sont
établies, soit sur une base individuelle ou au sein de groupes, au cours
des dix derniers exercices financiers se terminant le 31 mars 1984, en faisant
appel aux divers programmes favorisant l'établissement? Il s'agit d'un
nombre de 1261, en moyenne, par année. Le tableau 1
de l'annexe II illustre bien la répartition des
établissements au cours des douze derniers exercices financiers.
Au cours de l'exercice financier 1983-1984 de l'office, par exemple, 38,
3% du nombre des prêts totalisant 51, 1% des montants
prêtés, ont été consentis à l'occasion d'un
établissement. Il est également intéressant de signaler
que les établissements se répartissent sensiblement suivant le
même profil dans tous les types de production, tout en respectant
l'importance relative des diverses productions.
Ce mouvement, il fallait s'y attendre, s'est accompagné d'une
tendance marquée pour le rajeunissement de la population active en
agriculture. Ainsi, l'âge moyen de l'ensemble des emprunteurs de l'office
au cours des trois derniers exercices financiers de ce dernier n'a guère
dépassé 34 ans. Quant à l'âge moyen de ceux qui
s'établissent, il se situait à 27 ans pour le même exercice
financier. En 1966, par exemple, les personnes âgées de moins de
24 ans qui s'établissaient en agriculture étaient de l'ordre de
19, 2%, et celles de 35 ans et plus de 29, 3%, alors qu'au cours de l'exercice
1983-1984, ces proportions sont respectivement de 39, 4% et de 13, 2%, comme
l'illustre le tableau 2 de l'annexe Il.
Il va de soi que le taux d'intérêt qu'est appelé
à payer la personne qui s'établit dans le cadre du régime
de financement agricole est fort intéressant, particulièrement
depuis l'adoption de la Loi favorisant l'établissement de jeunes
agriculteurs. Ainsi, le taux préférentiel des banques
était de 11, 5% le 1er mars 1985; le prêt moyen était de
108 131 $ pour un individu et de 156 264 $ pour un groupe. Ce qui veut dire que
la personne qui s'établit en vertu de ladite loi ne paie
présentement que 4, 31% sur un tel prêt, en qualité
d'individu, et 6, 03% lorsqu'il s'agit d'un groupe, pour les premiers cinq ans
de l'établissement.
Nonobstant l'éventail des mesures visant à favoriser
l'établissement des jeunes et nonobstant le fait que des contingents
imposants de jeunes s'établissent effectivement en agriculture, il
demeure que l'envergure des actifs à transférer ne rend pas la
tâche facile au jeune qui s'établit. Le coût très
élevé des quotas, par exemple, s'avère un facteur
limitatif ou tout au moins fort contraignant dans certains cas.
La consolidation des exploitations, particulièrement par le biais
des améliorations foncières, constitue une constante dans
l'évolution du régime de financement agricole. Il va de soi que
l'accent aille en priorité à la consolidation verticale, surtout
par le biais de drainage souterrain, avant de recourir à la
consolidation sur le plan horizontal par l'agrandissement de fermes.
Outre les prêts à long terme dont le maximum peut
atteindre, dans ces cas, 90% de la valeur foncière, au moins 50% du
montant des subventions de mise en valeur doit être affecté
prioritairement à la réalisation de travaux d'amélioration
au fonds de terre. On retrouve une préoccupation analogue dans divers
programmes pour les conversions d'exploitations.
Également, les prêts à moyen terme consentis en
vertu de la Loi favorisant l'amélioration des fermes peuvent atteindre
une durée de 15 ans dans les cas d'agrandissement de fermes ou de
réalisation de travaux de drainage souterrain alors que les prêts
consentis pour toutes autres fins ne peuvent excéder la durée de
10 ans.
Le régime de financement agricole s'est également inscrit
dans le phénomène important des exploitations de groupe. Les
sommes prêtées en faveur de ces exploitations au cours de
l'exercice financier 1983-1984 de l'office représentaient 39, 4% de
l'ensemble des sommes prêtées à long terme. Par ailleurs,
le nombre des exploitations de groupe s'établissait à 31, 4% des
emprunteurs pour le même exercice. Pour l'exercice en cours, ce nombre a
atteint 34, 6%. Le tableau 3 de l'annexe II illustre l'évolution de ce
mouvement au cours de la dernière décennie.
On sait que les maxima, dans le cadre du crédit à long
terme peuvent atteindre 450 000 $ pour les exploitations de groupe
comparativement à 250 000 $ dans le cas d'un emprunteur à titre
individuel.
Pour leur part, les subventions totalisant 8000 $ pour
l'établissement et 4000 $ pour l'agrandissement des fermes en vertu de
la Loi favorisant la mise en valeur des exploitations agricoles peuvent
atteindre jusqu'à cinq fois ces montants au sein d'un groupe.
Dans le cadre du régime de financement agricole, la
Société d'exploitation agricole, la Corporation d'exploitation
agricole, la Coopérative d'exploitation agricole et les emprunteurs
conjoints constituent les groupes admissibles pour fins de prêts et de
subventions.
Enfin, la participation de plus en plus intense des institutions
privées constitue une autre ligne de force du régime du
financement agricole. Grâce à une collaboration étroite et
soutenue de tous les intéressés, l'expérience du tandem
État-institutions privées s'est révélée,
jusqu'ici, des plus bénéfiques pour les agriculteurs du
Québec.
Cette formule tandem est en mesure d'offrir plusieurs avantages à
tous les intéressés. Elle permet, en premier lieu, d'atteindre
une certaine rationalisation des rôles, tant du gouvernement que des
institutions privées dans le secteur de l'agriculture. Les institutions
privées sont, en effet, bien implantées dans le milieu. Elles
offrent tous les services de banque, elles sont préparées
et destinées à exercer ce rôle de bailleur de fonds, elles
s'approvisionnent en grande partie des ressources du milieu. Bref, elles
assument alors une attribution qui vient logiquement et pratiquement
compléter l'éventail de leurs activités auprès
d'une importante partie de leur clientèle. La catégorie de
prêts ainsi consentis assure, en outre, une diversification de leurs
opérations et leur évite des hiatus dans la structure
financière de leurs clients.
De son côté, le gouvernement du Québec maintient,
comme il se doit, sa présence dans les secteurs du crédit
à l'agriculture. À lui revient, en effet, la
responsabilité de s'assurer que les investissements consentis en
agriculture concourent aux orientations générales et
spécifiques, selon le cas, qu'il a lui-même tracées dans la
poursuite des objectifs globaux et sectoriels dans ce domaine. Il lui
appartient de favoriser une certaine standardisation dans le processus
d'autorisation des prêts, indépendamment de la nature ou de
l'envergure des institutions prêteuses, au niveau de la
disponibilité de fonds, par exemple. II lui incombe enfin de maintenir
le lien avec la gestion agricole dont on peut difficilement dissocier le
crédit. La formule tandem permet du même coup d'assurer le
fonctionnement optimal des structures en place en évitant
l'établissement de systèmes parallèles qui
s'avèrent toujours onéreux avec les inconvénients que
signifie toute duplication. (11 h 45)
Point n'est besoin d'insister sur les bénéfices que peut
retirer l'agriculteur de la formule tandem. Tout en lui facilitant
l'accès dans les institutions tous services avec les avantages
significatifs que cela comporte du point de vue de la liquidité, de la
rentabilité et de la possibilité de péréquation du
risque. On favorise du même coup une certaine déconcentration des
services étant donné le nombre considérable d'institutions
réparties sur le territoire québécois. Sans s'immiscer
dans le fonctionnement des institutions prêteuses qui demeurent tout
à fait autonomes et libres quant au consentement des prêts dans le
cadre des programmes, il est bien sûr que la grande préoccupation
de l'État demeure l'accessibilité pour les agriculteurs à
un financement adéquat et articulé en termes de qualité
des services, en termes de liquidités suffisantes, indépendamment
des régions, en termes de célérité dans les
transactions.
Bref, la formule tandem permet de réaliser une véritable
synthèse entre l'État et les institutions privées dans le
développement d'une ressource vitale au Québec; expérience
qui permet également de réaliser une synthèse entre
l'institution spécialisée que constitue l'Office du crédit
agricole du Québec et les institutions tous services; une
synthèse enfin entre le secteur des banques è charte et celui de
la mutualité, principalement représenté par les Caisses
populaires Desjardins et les Caisses d'établissement du
Québec.
Depuis quelques années, nous recourons de plus en plus à
une approche globale et intégrée dans l'étude de la
structure financière des entreprises agricoles et l'expérience
nous démontre journellement la pertinence et
l'impérativité de la généralisation d'une telle
approche. Nous examinerons de plus près cette approche dans la
troisième partie de notre exposé, lorsque nous traiterons du
fonctionnement du régime de financement agricole.
Évidemment, le régime québécois de
financement agricole comporte des limites, il présente certaines
contraintes, il n'est pas exempt de déficiences; aussi devrait-il
prochainement faire l'objet d'une révision qui contribuera,
espérons-le, à y apporter les améliorations et les
correctifs souhaités.
Il n'en demeure pas moins que globalement, il peut fort avantageusement
se comparer à ce qui existe dans ce domaine au pays et même sur le
plan international. Il suffit de participer à des rencontres
d'agriculteurs ou d'agents du milieu agricole sur le plan canadien pour
réaliser l'ampleur de l'intérêt que provoque le
régime québécois de financement agricole. Bien sûr,
les autres provinces se sont dotées de certains programmes,
particulièrement au cours des dernières années, mais elles
ne semblent pas disposer d'un éventail aussi complet, aussi avantageux
et aussi articulé.
Le régime québécois a même suscité un
intérêt dans d'autres pays et le journal du Département
d'économie politique de l'Université Luigi Bocconi de Milan lui
consacra un article important dans le numéro de novembre-décembre
1979 sous la plume de M. Roberto Ruozi, secrétaire général
de la Confédération internationale du crédit agricole.
Nous tenterons maintenant de décrire sommairement les
activités de l'office tant en amont de l'autorisation des prêts et
du consentement des subventions qui se traduisent parfois en refus qu'en aval
desdits consentement et autorisation qui débouchent parfois aussi sur
des arrérages et, éventuellement, dans certains cas, sur la
réalisation des garanties.
Qu'il me suffise de mentionner qu'au-delà de 350 000 prêts
de toutes sortes ont été consentis ou autorisés, selon le
cas, par l'office pour l'ensemble des programmes du régime de
financement agricole pour un montant de près de 3 900 000 000 $ depuis
les origines respectives de chacun des dix programmes jusqu'au 28
février 1985. L'encours des divers prêts s'établit à
la
même date à 1 600 000 000 $ alors que les montants de
subventions à l'intérêt sur ces prêts pour les six
derniers exercices financiers de l'office s'élèvent à
près de 500 000 000 $.
Il suffit de jeter un coup d'oeil sur la masse des capitaux mis à
la disposition des agriculteurs en regard de chacun des programmes pour mesurer
l'impact que revêt le régime dans le développement de
l'agriculture. Ainsi, plus de 837 000 000 $ avaient été mis
à la disposition des agriculteurs par la Loi sur le crédit
agricole, du 1er novembre 1936 au 28 février 1985, pour un total de 99
813 prêts. Depuis le 1er août 1978, on s'en souvient, l'office ne
joue qu'un rôle de suppléance à ce chapitre.
Quant à la Loi favorisant le crédit agricole è long
terme par les institutions privées, signalons que 16 611 certificats
furent émis par l'office pour un montant global de près de 1 600
000 000 $ du 1er août 1978, date de son entrée en vigueur, au 28
février 1985. Pour sa part, la Loi favorisant l'amélioration des
fermes a permis le consentement aux agriculteurs d'un crédit global d'un
peu plus de 1 000 000 000 $ du 1er novembre 1962 au 28 février 1985. De
son côté, l'application de la Loi favorisant le crédit
à la production agricole a contribué à l'injection de 287
000 000 $ au chapitre du crédit à court terme, du 1er octobre
1972 au 28 février 1985.
Quant à la Loi favorisant un crédit spécial pour
les producteurs agricoles au cours des périodes critiques, elle a
favorisé la mise à la disposition des agriculteurs d'un montant
de 44 500 000 $ du 1er juillet 1972 au 28 février 1985.
Le montant total des subventions accordées en vertu de la Loi
favorisant la mise en valeur des exploitations agricoles s'établissait
à 95 500 000 $ au 28 février 1985 pour l'ensemble des
activités de l'office dans le cadre de cette loi depuis le 1er janvier
1970.
Par ailleurs, la partie du montant global des prêts assujettis
à la subvention à l'intérêt accordée en vertu
de la Loi favorisant l'établissement de jeunes agriculteurs a atteint,
depuis le 1er septembre 1982 au 29 février 1985, un montant de 59 200
000 $.
De son côté la contribution gouvernementale au chapitre du
subventionnement d'une partie d'intérêt sur certains prêts
fédéraux en vertu de la Loi du prêt agricole
représentait, au 28 février 1985, un montant global de 68 100 000
$ pour l'ensemble des subventions ainsi payées depuis 1931.
Le tableau 1 de l'annexe III permet d'observer l'évolution des
activités du régime de financement agricole au chapitre des
prêts consentis en regard de chacun des programmes et ce, depuis leur
entrée en vigueur respective, tout en indiquant leur encours.
Pour l'exercice financier en cours, le volume des refus
s'établissait, au 28 février 1985, à 17, 7% de l'ensemble
des demandes traitées par l'office au chapitre du crédit à
long terme. Ce volume s'élevait à 22, 3% pour l'exercice
1983-1984, à 25, 2% pour l'exercice 1982-1983 et à 20, 2% pour
l'exercice 1981-1982.
Bien que les ressources de l'office soient limitées pour
appliquer un programme de suivi de prêts mieux structuré, il n'en
demeure pas moins que les conseillers ou conseillères en financement
rencontrent annuellement plus de 6900 emprunteurs relativement à des
demandes diverses qui comportent une bonne part de suivi. Ces activités
nécessitent plus de 10 800 visites à la ferme et quelque 4800
visites de ces agriculteurs à nos bureaux. Cela ne comprend pas le
travail d'expertise relié au premier prêt de ceux qui
s'établissent ainsi que les rencontres nombreuses qui se produisent dans
le cadre de la réalisation des garanties des prêts dans les cas
où la situation financière a atteint un point de non retour.
Ce suivi se pratique particulièrement à la faveur du
contrôle du déboursement des prêts; du contrôle des
prêts consentis avec nantissement; du contrôle des versements; du
déboursement des subventions de mise en valeur; du rapport des encans et
des ventes de quotas; des activités inhérentes à un
prêt - transfert, mainlevée, cession, substitution de garantie,
affectation des fonds en fidéicommis, modifications aux contrats,
locations, etc., et d'études spéciales en raison d'une
conjoncture économique ou des hasards climatiques.
La conjoncture économique des dernières années,
fortement marquée par la hausse des taux d'intérêt, n'a pas
épargné le secteur agricole. Cette conjoncture fut
aggravée par la chute des prix de certaines productions,
particulièrement par la crise dans la production porcine qui fut fort
sévère et beaucoup plus longue que prévue, d'autant plus
que nous venions tout juste d'assister à une phase d'expansion dans ce
secteur.
Avec le résultat que nous avons connu des faillites et des
abandons au cours des dernières années. Depuis le 1er avril 1979,
par exemple, nous avons dénombré chez nos emprunteurs à
long terme, 376 abandons volontaires ou forcés dont 186 faillites; pour
l'exercice en cours, ces nombres furent de 105 et 36 respectivement, ce qui
représente 0, 5% de l'ensemble de nos 20 521 emprunteurs à long
terme dénombrés le 12 mars 1985. Le tableau 2 de l'annexe III
indique la répartition des divers abandons des emprunteurs à long
terme de l'office au cours des six derniers exercices financiers.
Permettez-moi d'attirer votre attention
sur le fait que 171 des 376 emprunteurs, soit 45, 5%, qui ont
abandonné l'agriculture au cours des derniers exercices financiers de
l'office étaient des producteurs de porc qui sont récemment
sortis d'une crise très sévère qui avait duré un
peu plus de quatre ans. De ce nombre de 376 emprunteurs, celui des producteurs
de bovins s'établit pour sa part à 39, soit 10, 4%, ce qui
représente 1, 7% de l'ensemble des emprunteurs s'adonnant à cette
production.
De leur côté, les emprunteurs qui accusent du retard dans
leurs versements -les arrérages - dans le cadre des programmes de
crédit à long terme administrés par l'office ont vu leur
nombre diminuer par rapport au 31 mars 1984. En effet, de 1627 qu'il avait
été identifié à ce moment-là, leur nombre
s'établissait à 1068 au 12 mars 1985, soit 5, 2% de l'ensemble
des emprunteurs à long terme dénombrés à cette
date, comme en fait foi le tableau 3 de l'annexe III. À ce chapitre,
l'expérience de l'office révèle que nombre d'emprunteurs
qui font défaut de payer à échéance leurs
versements, acquittent généralement ces versements dans le cours
du semestre suivant.
Dans la première partie du présent exposé, nous
avons traité de l'office quant à son rôle et à ses
orientations. Il nous paraît opportun, avant d'en aborder sa gestion, de
bien le situer dans son contexte et, également, dans son
évolution.
Outre les cinq régisseurs qui composent l'office, on
dénombre trois directions générales et six services
administratifs ayant pour fonction de fournir à l'office le support
technique nécessaire pour la régie interne et les
activités extérieures. En plus de son siège social
situé à Sainte-Foy, où sont regroupés ses
directions générales et ses services, l'office compte 22 bureaux
répartis sur l'ensemble du territoire agricole du Québec dont 9
sont des bureaux régionaux. De plus, l'office tient
régulièrement des journées d'entrevues dans 12 autres
localités.
J'insisterai en particulier sur les exigences que nous avons en regard
de la formation de notre personnel affecté au financement agricole.
L'office exige comme prérequis à l'engagement de ses conseillers
et conseillères en financement agricole une formation de base en
sciences agricoles sanctionnée par une maison d'enseignement
spécialisée reconnue - agronomes et technologistes agricoles.
Dès leur entrée en fonction, les nouveaux conseillers et
conseillères en financement reçoivent une formation en
évaluation comprenant les principes de base et les techniques pour
déterminer scientifiquement la valeur des biens meubles et des
immeubles.
Tous les conseillers et conseillères possèdent
également une formation en gestion financière acquise avant leur
entrée en fonction ou prise par la suite lors de cours intensifs
dispensés par l'Université Laval.
De plus, l'office a inséré dans son programme de formation
des cours en technique d'entrevue pour favoriser le développement des
aptitudes en relations humaines et ainsi améliorer son service à
la clientèle.
Par ailleurs, en plus de cette formation de base, l'office favorise le
développement de ses ressources humaines en permettant aux conseillers
et conseillères de suivre une variété de cours pertinents
è leur tâche et s1 insérant dans le cadre de
leurs activités.
Il me paraît essentiel de procéder à un certain
recul dans le temps si nous voulons avoir une idée des changements
réalisés depuis moins de quinze ans. Loin de moi l'intention de
porter un jugement de valeur sur les administrations qui se sont
succédé depuis la création de l'office. Nos
prédécesseurs ont donné le meilleur d'eux-mêmes avec
les ressources dont ils disposaient à l'époque et à la
lumière du contexte du temps. Il n'est pas besoin d'aller très
loin en arrière. Retournons au début des années
soixante-dix, par exemple.
Les bureaux régionaux et locaux réflétaient alors
une organisation rudimentaire. Quelques-uns de ces bureaux étaient
localisés à la résidence du directeur régional ou
du conseiller en financement.
On ne comptait absolument pas de personnel de soutien dans les bureaux
extérieurs de l'office. Parfois, pouvions-nous bénéficier
d'une aide relativement ténue du ministère de l'Agriculture. Les
conseillers en financement et les directeurs régionaux devaient donc
assumer une foule de tâches qui n'avaient aucune incidence
professionnelle.
Les délais de traitement des demandes de prêts
étaient inaccepables. Un relevé effectué en 1973
constatait un délai moyen de 385 jours englobant, à ce
moment-là, la séquence de déboursement des
prêts.
Même au siège social, les structures ne favorisaient pas le
traitement efficace des dossiers et certains rouages administratifs manquaient
littéralement alors que d'autres étaient déficients. Les
structures facilitaient la compartimentation.
Paradoxalement, pendant qu'on manquait de services de soutien pour les
effectifs de l'extérieur, on déplorait un manque de
professionnalisation dans certains services à l'intérieur.
L'informatisation des programmes était embryonnaire et le
système de circulation et de contrôle des dossiers laissait
vraiment à désirer.
Une réforme en profondeur s'imposait et nous nous y sommes
résolument engagés; réforme marquée au coin d'un
souci d'efficacité administrative doublé d'une
préoccupation d'assurer un meilleur service à la
clientèle.
Nous avons procédé à plusieurs modifications pour y
parvenir. Songeons à la chaîne de production pour le traitement
des dossiers au siège social, à la constitution -dans la mesure
où nous pouvions y parvenir avant la refonte des lois - du dossier
unique, à la révision de nos procédés
administratifs, à la fusion de services, etc.
Un réaménagement des structures, particulièrement
à la faveur de la fusion de trois services, conjugué à un
remaniement des effectifs ont permis de réaliser une réduction
substantielle des effectifs au siège social de l'office pour renforcer
les équipes régionales et locales directement en relation avec la
clientèle. C'est ainsi qu'au cours de l'exercice 1979-1980, l'office a
pu procéder à une ponction de 34 postes à son siège
social pour en ajouter 24 dans ses bureaux extérieurs tout en absorbant
une coupure de 10 postes imposée la même année par le
Conseil du trésor. (11 heures)
Des efforts considérables ont été
déployés pour décloisonner et favoriser le travail
d'équipe à la faveur surtout d'une plus grande motivation
à tous les niveaux. Le travail d'équipe facilite également
l'exercice de la polyvalence et de la multidisciplinarité.
Par ailleurs, une révision des procédés
administratifs a contribué à réduire
considérablement les délais, même s'il reste beaucoup
à faire à ce chapitre. Il demeure que le délai moyen est
présentement de 104, jours englobant tant le travail dans les bureaux
régionaux que celui du siège social. Grâce à une
réorganisation des bureaux régionaux et à une nouvelle
répartition des tâches des conseillers et des conseillères
en financement, les entrevues des requérants ou des requérantes
peuvent maintenant s'effectuer tous les jours de la semaine au lieu
d'être confinées à la traditionnelle journée du
lundi, assurant ainsi un meilleur service à la clientèle.
On a également marqué un pas important dans la voie de la
constitution du dossier unique en regroupant, dans un seul contenant portant un
seul numéro pour chaque emprunteur, et en acheminant vers un centre de
traitement les dossiers d'un même emprunteur reliés aux divers
programmes et jusqu'alors traités par des unités
différentes.
Cette réforme nous faisait du même coup progresser dans le
sens de l'approche globale et intégrée qui nous apparaît
une orientation fondamentale de tout régime de financement moderne. Il
suffit de songer à la complexité de plus en plus grande des
dossiers de demandes d'emprunt en raison de la taille plus importante des
exploitations, de la diversification des productions, du nombre croissant des
exploitations de groupe et des montants plus élevés qui sont
impliqués, sans compter les problèmes que soulève dans
bien des cas le partage des garanties entre l'office et la
Société du crédit agricole Canada, pour nous convaincre de
l'importance d'une telle approche, qui s'avère en somme l'aboutissement
normal de l'évolution d'un régime de financement agricole.
On peut donc, à la faveur d'une telle approche, considérer
l'ensemble des besoins de crédit pour une période
prévisible et, compte tenu de la nature des investissements, stratifier
le financement selon les divers modules de crédit, contribuant du
même coup à une répartition plus judicieuse de
l'éventail des garanties que peuvent offrir les requérants ou les
requérantes. On assure alors un meilleur équilibre dans la
structure financière de l'entreprise et une plus grande cohérence
dans la poursuite des objectifs de financement.
Malheureusement, au fur et à mesure que sévissait la crise
que nous avons traversée, les dossiers devinrent de plus en plus
complexes. Les problèmes auxquels il fallut accorder priorité au
niveau de certaines productions se multiplièrent. Pensons à la
crise très sévère de plus de quatre ans qu'ont connue les
producteurs de porcs, celles qu'éprouvèrent les producteurs de
visons, les producteurs de céréales et même les producteurs
maraîchers qui mobilisèrent à la limite nos ressources.
Mais ce qui demeure le plus frustrant dans tout ce contexte et le plus
paradoxal tout à la fois, c'est que les impératifs croissants de
ces crises s'accompagnèrent de contraintes administratives très
rigoureuses au chapitre des budgets et des coupures d'effectif de sorte que nos
efforts en vue de remporter la fameuse guerre des délais, même si
nous arrivions presque au but, furent pratiquement annihilés.
Il demeure que nous avons, malgré tout, repris en décembre
1983 la phase II de la réforme administrative qui avait
été, par la force des choses, interrompue à la fin de
l'année 1981.
La phase II de la réforme en question est en voie de
parachèvement, mais elle n'atteindra vraiment son impact optimal
qu'à la suite de la refonte prochaine des lois de financement agricole.
Il demeure que nous la considérons, cette réforme administrative,
comme un prérequis à ladite refonte, en ce sens que nous aurons
mis en place l'infrastructure pour assurer les meilleurs résultats de la
refonte en question.
Quoiqu'il en soit, dans le cadre de la phase II de notre réforme
administrative, nous avons procédé à un
réaménagement de certaines activités de nos directions
générales. Nous sommes à mettre en place une unité
de gestion des systèmes informatiques de même qu'une unité
de vérification interne.
Nous avons amorcé une déconcentration
des services par l'affectation d'un notaire dans certains bureaux
régionaux.
Nous avons procédé à une restructuration du
processus de révision des dossiers et nous sommes à parachever la
révision des procédures et formulaires en vue du cheminement
uniforme des diverses interventions dans les dossiers, via notre conseiller ou
conseillère en financement.
L'approche globale et intégrée pour le traitement des
dossiers nous permet d'ores et déjà d'accroître la
personnalisation des dossiers en vue d'assurer un meilleur service à
notre clientèle en accroissant du même coup notre
efficacité administrative.
Fort heureusement, les efforts déployés par l'office pour
améliorer son efficacité administrative n'avaient pas
échappé au Conseil du trésor qui, après une
étude conjointe de notre fonctionnement, nous proposa un protocole
d'entente qui, tout en nous délestant de compressions budgétaires
et de certaines contraintes administratives, nous permettra de rétablir
un meilleur équilibre dans l'aménagement de nos ressources et,
partant, de réaliser nos objectifs d'efficacité administrative
tout en optimalisant nos services à l'endroit de notre
clientèle.
Le protocole en question, concernant un programme expérimental
d'amélioration de productivité, fut donc signé par le
secrétaire du Conseil du trésor et le président de
l'office le 27 juin 1984, après avoir été approuvé
par le Conseil du trésor le 19 juin 1984.
Nous avons complètement modifié la base
d'appréciation de nos besoins en ressources, particulièrement
pour les conseillers et conseillères en financement. Le dossier-client
devient le centre d'intérêt névralgique de notre
cheminement et le recrutement d'effectifs additionnels est déjà
amorcé dans cette perspective.
La refonte des lois de financement agricole, conjuguée à
notre réforme administrative, devrait nous permettre, dans un avenir
prochain, de réaliser une plus grande déconcentration des
services, tout en les humanisant davantage, auprès de la
clientèle. Ainsi, à la faveur de l'approche globale et
intégrée, l'appréciation des besoins en crédit pour
une période prévisible, disons cinq ans, par exemple, permettrait
à l'office de statuer sur un cadre assez rigoureux qui laisserait aux
conseillers et conseillères en financement, au niveau de l'exploitation,
toute la latitude pour autoriser les avances de crédit au rythme des
besoins de l'exploitation, conformément à la planification de
départ.
Entre-temps, le fonctionnement de l'office a tout de même connu
des améliorations substantielles. Il m'apparaît important d'en
faire état dans le cadre du présent exposé, étant
donné que c'est sur cette base qu'on peut porter un jugement dans le
contexte actuel.
Il m'apparaît important au départ de décrire le
cheminement d'une demande d'emprunt à l'office depuis son acceptation
jusqu'à l'émission du certificat. Au niveau local, le conseiller
ou la conseillère en financement agricole procède à
l'expertise complète sur la ferme du requérant ou de la
requérante et formule une recommandation. Le directeur régional,
sur le plan de la région, prend connaissance du dossier et formule sa
recommandation. Au siège social, la division de la révision de la
direction du financement agricole procède à une révision
technique du dossier et formule sa recommandation. Enfin, le bureau de
direction examine le dossier et statue sur la demande au cours de son
assemblée quotidienne.
Je m'en voudrais de ne pas préciser ici que, dans presque tous
les cas, notre conseiller ou conseillère en financement, avant
d'acheminer son dossier au siège social, en discute abondamment avec te
requérant ou la requérante et lui fait part, la plupart du temps,
de la recommandation qu'il entend formuler en regard de la demande en question.
Même si cette pratique, dans les cas de refus éventuels, peut
alourdir le processus de traitement des dossiers, il demeure qu'elle s'inspire
d'une préoccupation d'ouverture d'esprit à l'endroit du
requérant ou de la requérante pour assurer le meilleur
cheminement possible des deux parties au dossier.
Les diverses étapes franchies dans le cheminement d'une demande
offrent, à nos yeux, une garantie contre l'arbitraire et le
discrétionnaire tant à l'endroit de ceux qui traitent la demande
qu'à l'endroit des requérants ou des requérantes.
Il m'apparaît également important de souligner les
critères d'admissibilité à un prêt dans le cadre des
diverses lois de financement agricole. Le requérant ou. !a
requérante doit d'abord démontrer le besoin du prêt et,
s'il ou si elle dispose de ressources suffisantes, il ou elle sera
appelé à recourir prioritairement à ses ressources de
sorte que le prêt qui peut lui être consenti ne vient alors que
combler ses besoins en crédit.
L'occupation principale constitue également un critère de
base pour être admissible à un prêt agricole. Il s'agit du
fait pour une personne de consacrer la majeure partie de son temps à son
exploitation agricole compte tenu de la nature de cette dernière, d'en
tirer la plus grande part de son revenu, d'y contrôler l'emploi de son
temps et l'ensemble de ses décisions et d'être reconnu dans son
milieu comme s'adonnant principalement à l'agriculture.
La rentabilité prend également une place importante dans
l'évaluation d'un
projet. Pour les fins de nos prêts, la ferme rentable est la ferme
susceptible de produire, compte tenu de l'ensemble de ses ressources, un revenu
permettant à celui qui l'exploite d'en acquitter les frais
d'exploitation, y compris l'entretien et la dépréciation, de
remplir ses obligations et de faire vivre sa famille convenablement.
Reste la capacité de remboursement, qui constitue un
critère essentiel, une condition sine qua non au consentement d'un
prêt, faute de quoi nous serions en présence d'une subvention
déguisée. C'est là du reste une règle d'or à
laquelle ne saurait déroger un prêteur sérieux dans quelque
secteur d'activité qu'il se trouve.
Ainsi, on établit la capacité de remboursement à la
faveur d'une analyse détaillée des coûts de production et
des revenus d'exploitation visés a partir des informations comptables
des douze derniers mois d'exploitation.
À défaut de données comptables fiables, je me
permettrai d'ajouter que les coûts de production qui nous servent de
guide dans le calcul de la rentabilité sont établis par un
comité quadripartite composé de spécialistes du
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, de
l'Office du crédit agricole du Québec, de la
Société du crédit agricole du Canada ainsi que de la
faculté de l'agriculture et de l'alimentation de l'Université
Laval, comité doté d'une structure permanente et des effectifs
nécessaires pour assurer le suivi et la mise à jour continue
desdits coûts, qui sont finalement consignés dans un recueil
communément appelé "Recueil des données
technico-économiques". Chacun des organismes désigne, pour
chacune des productions, les ressources les plus compétentes et les plus
rompues avec les exigences des productions concernées, avec le
résultat que les données en question collent vraiment à la
réalité.
Il s'agit là bien sûr d'indications, en ce sens que ces
données peuvent subir des ajustements lorsque les ressources de
l'entreprise accusent une performance au-delà ou en deça de la
moyenne ou encore que des impératifs régionaux commandent une
différence.
Les critères énoncés jusqu'ici sont en règle
générale quantifiables et permettent passablement de rigueur.
C'est une tout autre chose que d'évaluer un candidat ou une candidate
à un prêt agricole; nous sommes là confrontés avec
la complexité de l'humain. Même si nous ne pouvons recourir
à des critères nous permettant d'apporter un jugement
infaillible, nous en retenons quand même quelques-uns susceptibles de
nous assurer le plus de chance de succès. Ainsi, au chapitre de la
formation, le nombre d'années de scolarité, le nombre
d'années de formation professionnelle en agriculture et les
connaissances pertinentes dans le domaine sont un atout considérable. De
leur côté, les succès antérieurs du requérant
ou de la réquérante, les résultats obtenus, sa structure
financière, sa réserve accumulée, le nombre et la nature
de ses emplois antérieurs sont autant de facteurs qui nous permettent de
jauger son expérience.
Enfin, plusieurs aptitudes et qualités personnelles contribuent
à orienter notre jugement. L'habileté de gérer des
ressources, l'aptitude au management, le réalisme et la
prévoyance dans l'élaboration des projets, la capacité
physique en regard de la nature et de l'envergure de l'entreprise, le
comportement en regard des obligations financières et de l'utilisation
du crédit et la réputation dans le milieu, tant auprès des
créanciers que des proches, permettent également
d'apprécier la valeur morale du requérant ou de la
réquérante. Enfin, l'attitude et les aspirations du conjoint et
de la famille face à l'exploitation et au développement de
l'entreprise sont loin d'être négligeables dans
l'évaluation du candidat à un prêt agricole.
Est-il nécessaire de signaler que la rigueur avec laquelle ces
différents critères sont observés explique en très
grande partie le fait que nous ayons, bon an mal an, un volume aussi
substantiel de demandes d'emprunt ou de subvention qui sont refusées,
avec le fardeau considérable de travail que nécessite ces refus,
particulièrement lorsqu'on doit procéder à la
révision du dossier pour une quatrième ou une cinquième
fois?
Avant de procéder à la réalisation des garanties,
l'office explore les diverses possibilités pour convenir
d'accommodements avec les emprunteurs, soit sous forme de
réamortissement du prêt sur toute la période restant
à courir, de versements spéciaux, sans modifier la cédule
normale de remboursement du solde, de report de versements à la fin du
terme du prêt et de refinancement pour englober les versements non
payés, dans certains cas exceptionnels.
Lorsque aucun accommodement n'est possible, l'office tente d'obtenir la
collaboration de l'emprunteur pour procéder à la vente de
certains actifs, quand la situation le permet, aux fins de sauver l'entreprise,
ou alors de minimiser les pertes éventuelles, minimiser les
dégâts sans toutefois porter préjudice aux autres
créanciers.
Lorsqu'une telle approche n'est pas possible, nous amorçons les
procédures légales, généralement par voie d'action
hypothécaire, qui débouchent, après des délais
d'environ six mois, sur la vente par le shérif, alors que le
prêteur autorisé ou l'office, selon le cas, se porte
généralement adjudicataire et procède par la suite
à des appels d'offres par la voie des journaux en vue de la vente de la
ferme au meilleur prix
possible. Il nous faut parfois recourir à deux ou trois appels
d'offres pour réaliser un prix acceptable.
Précisons que ce n'est qu'après avoir tenté tous
les efforts et lorsqu'il devient évident qu'aucun espoir n'est
prévisible que l'office amorce le processus de réalisation des
garanties. Encore qu'il le fasse de la façon la plus humaine et
civilisée qui soit et dans le respect des droits de tous les
intéressés.
En guise de conclusion, je me permettrai d'insister sur le fait qu'un
régime de financement agricole, si avantageux et articulé
soit-il, ne saurait être considéré comme une panacée
en mesure de résoudre tous les problèmes qui existent en
agriculture. On ne remplacera jamais les revenus par du crédit, quelle
que soit la qualité de ce dernier. On ne remplacera jamais les prix et
un système de mise en marché par un régime de financement
agricole. Tout système a ses limites, ses contraintes, ses lacunes.
Notre régime de financement n'échappe pas à cette
règle. Aussi nous apparaît-il important que tous les efforts de
concertation soient déployés pour y apporter les
améliorations indiquées. Je vous remercie. (11 h 15)
Le Président (M. Vallières): Nous vous remercions,
M. le président. Il nous reste environ 45 minutes en matinée. On
pourrait convenir de répartir ce temps entre les membres des deux
côtés de la table. J'ai une première demande d'intervention
du député d'Arthabaska.
Questions des membres
M. Baril (Arthabaska): Merci, M. le Président. Je pense
que votre dossier résume assez exactement le fonctionnement de l'office.
Pour une meilleure compréhension, si vous me permettez, j'aimerais qu'on
commence par le début, soit lorsque l'emprunteur va rencontrer son
conseiller pour faire une demande d'aide financière. Si le temps
m'empêche de continuer, peut-être qu'on reviendra là-dessus
cet après-midi, si on ne se rend pas jusqu'à l'acceptation du
prêt.
D'abord, quand l'emprunteur se présente à un des
conseillers de l'office, j'aimerais que vous puissiez nous décrire un
peu quelle est la formule. Est-ce que le conseiller lui remet un formulaire
qu'ensuite l'emprunteur remplit sa demande et prépare lui-même son
dossier? Est-ce que le conseiller financier, ou la conseillère, peut
aider ou aide le demandeur à préparer son projet ou à le
corriger afin qu'il soit conforme aux exigences de l'office?
M. Moreau: Bon. Nous apportons le meilleur encadrement possible
quant à l'orientation, mais nous n'allons pas jusqu'à remplir la
demande et à formuler le projet pour lui. Vous allez comprendre
pourquoi. Notre conseiller ou conseillère en financement, qui a à
faire une recommandation, va recommander son beau petit projet si c'est lui ou
elle qui le fait. Je pense que c'est normal, et il serait en conflit
d'intérêts. Alors, nous procédons à des explications
sur l'ensemble de nos programmes et sur les orientations, par exemple, au
niveau de son engagement dans telle production, au niveau de son
expérience, des acquis qu'il peut avoir. Nous lui remettons un
dépliant, en plus de ceux qui portent sur tous nos programmes - je parle
de la première entrevue, celle du tout début - qui est un
formulaire officiel, dans lequel nous cochons les documents qui seront requis
et qu'il devra nous remettre. Au passage, j'en profite pour mentionner... Vous
me permettrez, M. le Président, de le mentionner, parce que, à
chaque fois qu'on rencontre des groupes d'agriculteurs, on nous reproche
encore, après des années, faisant toujours le même grief,
le point 15. On nous dit: Vous favorisez l'intégration en agriculture.
Je profite de l'occasion... Dans ce dépliant, si je lis le point 15, on
dit ceci à l'agriculteur: "Si vous détenez un contrat
d'intégration ou si vous avez Pîntention d'en obtenir un, veuillez
produire une copie dudit contrat ou du projet de contrat pour que l'office
puisse juger de votre degré d'autonomie. " On ne lui demande pas de s'en
aller en intégration, on dit "si"; le "si" commence la phrase. Si vous
êtes déjà dans l'intégration ou si vous voulez y
aller, donnez-nous un projet. Je vous mentionne cela et j'insiste
là-dessus parce que je pense que votre commission est probablement une
occasion exceptionnelle pour nous permettre de corriger certaines choses. Il y
a eu un cahier complet dans la Terre de chez nous, en 1972 et en 1978,
où on a expliqué clairement - voici les termes que j'utilisais
à ce moment-là - les conditions avantageuses relativement au
crédit à la production et à l'intégration. On y
donnait les avantages, pour les intérêts en les payant comptant,
tout en lui offrant "l'opportunité de rompre le cordon ombilical avec
certaines formes d'intégration à outrance, voire même
parfois en le dégageant de l'emprise de certains prêteurs peu
scupuleux". Alors, on l'a réitéré et
répété, mais j'ai cru comprendre que c'était revenu
encore tout récemment. C'est pour cela que dans mon introduction je
mentionnais que je considérais que nous étions très
heureux d'avoir l'occasion que nous avons aujourd'hui. Cela va nous permettre
de corriger certaines situations qui ont été mises de l'avant et
qui ne sont absolument pas fondées à mon point de vue.
Alors, si je reviens à votre question, M. le député
d'Arthabaska, disons que nous
remettons à l'agriculteur ce document et il nous retourne la
documentation qui est requise avec sa formule de demande d'emprunt. Sa formule
de demande d'emprunt, on considère que c'est son document au dossier et
on ne l'altère pas non plus. C'est son document à lui. C'est sa
formulation sous serment de ses dettes, de son projet; c'est une
déclaration assermentée. C'est un document de base dans le
dossier. Nous commençons à procéder avec sa demande
dès qu'il nous retourne ces documents. Â ce moment, nous
enregistrons sa demande officiellement et c'est là que le délai
commence à courir. Pour répondre à votre question, les
délais commencent à courir le jour où, officiellement,
nous estampillons sa demande d'emprunt.
À partir de là, notre conseiller ou conseillère en
financement - lorsque son tour est arrivé parce que nous
procédons rigoureusement suivant la date d'entrée, suivant la
date de l'estampille sur la demande - appelle l'agriculteur pour convenir avec
lui d'une date pour le rencontrer et va faire l'expertise sur la ferme.
L'expertise sur la ferme est fort importante. Vous allez comprendre
qu'il nous faut avoir tous les éléments au dossier: ce qui touche
l'humain, comme je l'ai mentionné dans mon document, et ce qui touche
l'ensemble de l'exploitation, ce qui veut dire l'évaluation du fonds de
terre, des bâtisses, tout en sauvegardant ou en observant l'entretien.
C'est important parce que cela va lui coûter beaucoup plus cher s'il
entretient mal, vous comprenez, les bâtisses ou la machinerie. C'est
important, c'est une indication au dossier qui va nous permettre de dire si le
cas est marginal à Savoir si on peut, a ce moment, avoir des
réserves ou non.
On va évaluer le fonds de terre, les bâtisses. On va
évaluer l'équipement, la machinerie, les animaux, toujours
suivant une base scientifique, suivant des grilles prévues à
l'avance, ajustées suivant les circonstances. C'est toujours du cas par
cas.
On va essayer, comme je le mentionnais dans le document, dans la mesure
du possible - on est dans l'humain, ce n'est pas facile - d'évaluer son
expérience, sa formation, son habileté, son management et,
à la suite de cela, qu'on essaie d'avoir le plus parfait possible - on
est dans l'humain toujours - on essaie d'obtenir le portrait de notre
requérant ou notre requérante. À la suite de cela...
M. Baril (Arthabaska): Me permettez-vous?
M. Moreau: Oui.
M. Baril (Arthabaska): Pour l'information de la commission, au
sujet de l'évaluation du fonds de terre, pourriez-vous nous dire comment
ils font pour évaluer une terre qui est à Saint-Norbert ou
à Princeville, si je me réfère à mon comté?
Est-ce que c'est le même prix partout?
M. Moreau: Le règlement relié à notre loi
prévoit, au niveau de l'évaluation, une corrélation entre
la valeur marchande et la valeur productive de l'exploitation. Une
corrélation; nous y reviendrons si vous le permettez. Nous avons une
équipe, comme je l'ai mentionné dans le document, qui est rompue
à la technique de l'évaluation, qui a eu des cours
structurés, et au-delà de 50% de cette équipe est membre
de la Corporation des évaluateurs agréés du Québec
ou membre de l'Institut canadien des évaluateurs. Ce n'est pas un
travail d'amateurs. Ce ne sont pas des cours de quinze heures. Il faut
comprendre qu'on a des spécialistes en évaluation.
Comment on procède pour le dossier de monsieur X? Nous avons,
dans chacun des dossiers, ce que nous appelons des comparables. Nous
procédons par les transactions. Le relevé est fait
périodiquement, à jour, par nos conseillers, de toutes les
transactions qui ont lieu dans le milieu, de sorte que nous ayons des
comparables pour toutes les régions, si c'est possible. On verra tout
à l'heure comment on procède s'il n'y a pas de comparable.
Il y a trois comparables dans chacun des dossiers. Comparables,
entendons-nous, ce sont des transactions de fermes, même production,
même type d'exploitation. Si on parle de comparables, il faut être
capable de les comparer. Cela s'applique même à la maison. Si
c'est une maison de pierre, il faut faire des ajustements parce qu'à ce
moment vous allez comprendre que la valeur sera différente d'une ferme
à l'autre. On prend bien des comparables et, à partir de ces
comparables, on établit la valeur chez notre requérant. Nous,
à partir de la valeur... J'en profite, si vous le voulez, pour, au
passage, détecter la valeur du quota en regard de cela. On nous pose
souvent la question à savoir comment on fait, parce que le quota fait
partie de l'ensemble.
Nous décortiquons, toujours suivant une technique très
spécifique, la valeur des biens meubles, la valeur des animaux, la
valeur du quota; reste la valeur du fonds de terre et des bâtisses. Nous
disons à ce moment-là que cela vaut $600 l'acre, 650 $ l'acre,
etc. On procède par modules et, ensuite, nous les intégrons pour
faire un prix ou indiquer la valeur de l'ensemble de l'exploitation. Toujours
à partir de comparables parce que, autrement, on serait injuste. On ne
tiendrait pas compte, si vous voulez, du marché. En parlant de
marché, il faut tenir compte de ces transactions et c'est pourquoi nous
avons au moins trois comparables par dossier.
Je parlais d'une corrélation. La corrélation avec la
valeur productive nous permet de rendre justice à l'agriculteur, et je
m'explique. Elle ne joue pas dans tous les cas, mais, dans certains cas, elle
joue. Je prends des exemples. Vous avez eu, à un moment donné, un
phénomène d'étrangers qui sont venus acheter des terres,
qui exerçaient une pression sur un milieu donné. S'il nous avait
fallu dire que cette sorte de transaction était la transaction type,
nous aurions contribué à une inflation systématique des
terres par le rôle que nous jouions dans l'évaluation. À ce
moment-là, le règlement nous indiquait qu'il fallait tenir compte
d'une pondération, d'une corrélation entre cette valeur marchande
et la valeur productive parce qu'on sait bien que ce bonhomme, c'est du lait
qui va sortir de sa ferme, ce n'est pas de l'or, nécessairement,
à moins d'être situé dans un lieu où on peut faire
de la prospection. Là, c'est une autre affaire.
Généralement, ce sera du lait, du maïs-grain. C'est cela la
valeur productive de la ferme. Cette corrélation nous permet de
maintenir quand même des prix réalistes.
Un autre exemple: des régions qui, avant la Loi sur la protection
du territoire agricole, étaient situées à la marge et
pouvaient avoir une valeur anticipée qui leur donnait un
caractère artificiel, d'une certaine façon, pour l'agriculture,
toujours. Il nous fallait pondérer à ce moment-là parce
que la personne qui achetait devait produire du lait et qu'il y avait une
question de capacité de remboursement et de rentabilité.
Cela peut jouer à l'inverse, cette fameuse corrélation.
J'ai donné deux exemples à la hausse, j'en donne un à la
baisse. Un bonhomme qui commence dans une nouvelle production n'a pratiquement
pas d'acquis, il n'a pas de tradition. Cela va lui prendre deux ou trois ans
pour l'implanter. Il nous faut donc prévoir - on lui donne une
espèce de plus-value de cette façon - tenir pour acquis
qu'après deux ans ou trois ans, en mettant toutes les chances de notre
côté, la technique, etc., cela va avoir telle valeur. Cette
corrélation peut donc jouer dans les deux sens. Mais je dirais que dans
90% des cas, c'est strictement relié, sauf les exemples que je vous ai
donnés, au marché, à partir des comparables dont je vous
parlais.
M. Baril (Arthabaska): Vous avez parlé de
l'évaluation des quotas. Souvent, on nous dit que l'office prend le
quota en garantie, mais ne l'évalue pas. Vous comprenez ce que je veux
dire.
M. Moreau: Je vous ai expliqué tout à l'heure
comment nous le prenions. Il y a deux questions là-dedans. Il y a la
question de l'évaluation, et je vous ai expliqué comment nous
l'évaluons. Le quota, on l'évalue. Le quota, d'une certaine
façon - et vous le savez comme moi - est monnayable alors, on
l'évalue. Il y a un autre aspect à la prise des garanties, cela
nous a posé plusieurs problèmes, je ne le cache pas. Bien
sûr, vous êtes tous conscients qu'une ferme qui n'a pas de quota -
on a eu des déboires substantiels dans certains dossiers - cela ne vaut
pas grand-chose. On sait fort bien qu'une ferme, c'est pour aller avec un
quota. Je pense à une ferme laitière ou à d'autres
productions; qu'il s'agisse des "broilers", des oeufs, s'il n'y a pas de
quota... On a la production d'oeufs d'incubation où la ferme se vend
à peu près pour une chanson si on n'a pas de quota relié
à cette ferme. (11 h 30)
Mais nous ne prenons pas le quota en garantie. Malheureusement, le
quota, juridiquement parlant, présentement, on ne peut le situer nulle
part présentement. Ce n'est pas un bien meuble, ce n'est pas un bien
immeuble, de sorte qu'on ne peut prendre le quota lui-même en garantie.
Nous obtenons un transport de créance sur le produit éventuel de
la vente du quota. Nous avons un engagement de l'agriculteur dans le dossier
à savoir qu'il consent que le produit de la vente, les sommes provenant
de la vente du quota, le cas échéant, soient versées au
créancier hypothécaire ou au créancier tout court, en
l'occurrence la banque ou la caisse qui a consenti le prêt.
Donc, nous ne prenons pas le quota en garantie, mais nous obtenons un
transfert ou un produit du transport éventuel de la vente du quota. Il
est arrivé dans certains cas que certains syndics ont contesté ce
type de transfert. Ils ont considéré que le quota... Avec le
transport nous avions un lien privilégié sur le produit de la
vente. Le syndic a dit: C'est un bien à venir, cela entre dans la masse
des créanciers ordinaires, et nous perdions à ce moment-là
nos droits. Cela est arrivé dans quelques cas de faillite. Je ne vous
dis pas que tous les syndics agissent de la même façon. Il y a
deux écoles de pensée et dans certains cas des syndics ont
réagi de cette façon-là. Avec le résultat que nous
avons eu des pertes considérables dans certains dossiers. C'est un point
qui serait à étudier, je pense, à savoir la nature
juridique du quota et ce' qu'on fait pour le prendre en garantie.
On peut même acheter des quotas par nos prêts et on l'a
fait. C'est également dans les fins des prêts, les quotas.
M. Baril (Arthabaska): Souvent les producteurs nous disent:
l'office refuse parce que je n'ai pas assez de valeurs à donner en
garantie, mais il prend mon quota et ne l'évalue pas. C'est ça
que je vous ai expliqué.
M. Moreau: Je regrette, le quota est
évalué.
M. Baril (Arthabaska): On était rendu au conseiller ou
à la conseillère qui était allé faire le tour de la
ferme.
M. Moreau: À la suite de ce que j'appelle le portrait de
l'exploitation au total, le conseiller ou la conseillère rédige
son rapport et fait une recommandation. Le directeur régional, qui est
le senior au niveau de la région, qui connaît
généralement fort bien sa région, regarde le dossier. Ce
n'est pas une révision, il regarde le dossier pour voir si cela se tient
au niveau des valeurs, etc., et il donne son "feeling". C'est une
recommandation, c'est un petit peu son appréciation parce qu'il
connaît fort bien la région. Ensuite le dossier s'en vient au
siège social où vous avez une révision technique.
J'entends par "technique" que même les calculs sont faits pour être
sûr qu'il n'y a pas eu d'erreur. Le dossier est révisé en
profondeur après quoi il est acheminé au bureau de direction qui
siège chaque jour et statue sur les dossiers en cours.
C'est ça le cheminement du dossier. À la suite de la
décision du bureau de direction un certificat est émis.
L'original est envoyé à l'agriculteur, une copie du certificat
est envoyée au notaire instrumentant, qui est le choix de l'agriculteur
- il nous l'a indiqué sur sa demande d'emprunt - et une copie du
certificat est également envoyée au prêteur éventuel
qui a également été indiqué sur la demande
d'emprunt de l'agriculteur.
M. Baril (Arthabaska): Comment avez-vous de conseillers et de
conseillères dans le champ?
M. Moreau: On en a 85. J'ai mentionné tout à
l'heure que nous sommes à recruter présentement et, à la
faveur d'un protocole dont j'ai fait état également, nous avons
d'ores et déjà changé la base de l'appréciation.
Historiquement parlant, nous procédions à l'engagement des
ressources suivant le volume et le flot des demandes, avec le résultat
que c'était très conjoncturel et que nous avions beaucoup de
difficulté à maintenir un équilibre stable au niveau des
resssources. Nous procédons différemment en vertu du protocole
que nous avons signé avec le secrétariat du Conseil du
trésor, c'est-à-dire de la façon suivante: comme je l'ai
mentionné dans le document c'est le dossier-client qui devient le coeur
de toute notre attention, de nos activités. On considère que les
conseillers en financement doivent, si on veut, personnaliser le dossier,
être rattachés à un certain nombre d'agriculteurs - la
même chose se fait aux États-Unis, je pense à la Federal
Land Bank, par exemple - à un certain nombre de clients» On
développe une relation plus personnelle, plus humanisée entre le
conseiller en financement et le client et le travail est beaucoup plus
efficace.
À partir de cette base du dossier-client, c'est bien
différent. Cela veut dire que nous allons parvenir à un
équilibre beaucoup plus stable. C'est pourquoi nous allons prochainement
- nous avons même déjà commencé à le faire -
intensifier notre recrutement pour établir cet équilibre qui va
nous permettre de réduire les délais. Je pense que le jour
où on aura un bon équilibre au niveau de nos ressources et que
nous aurons parachevé notre réforme administrative à
l'intérieur, on aura, une fois pour toutes, gagné la guerre des
délais. En tout cas, c'est une probabilité très grande et,
à moins qu'il y ait un accident de parcours comme on en a connu il y a
quelques années avec la crise qui a été très
intense, je pense que, dans un contexte normal, nous devrions réaliser
notre objectif au niveau de l'efficacité administrative et de la
réduction des délais.
M. Baril (Arthabaska): Au sujet du conseiller ou de la
conseillère - cela revient souvent - est-il exact que le demandeur n'a
pas le choix du conseiller ou de la conseillère? Je dirais qu'ils se
sont partagé des secteurs ou des districts - je ne connais pas la
définition exacte. Mais si le demandeur en fait la demande, est-ce
possible...
M. Moreau: C'est possible. Écoutez, mettez-vous à
notre place. Admettons qu'il y ait un conflit de personnalité, qu'un
gars ne veuille rien savoir de notre conseiller, ce ne serait pas faire preuve
de psychologie de notre part que de lui dire: Vas-y quand même. Il ne
faut pas nous prendre... Ce qui arrive, c'est qu'à défaut
d'indication au dossier, on envoie le conseiller préposé à
ce territoire. Maintenant, cela arrive qu'on nous dise: Votre gars ou votre
fille, pour telle ou telle raison, je ne veux pas le ou la voir. Dans ce cas,
on lui envoie un autre conseiller. C'est la même chose pour les
révisions. Lorsque l'agriculteur n'est pas satisfait du conseiller
à la première visite, s'il nous l'indique, au moment de la
révision, on va lui envoyer un autre conseiller pour lui donner justice.
Je pourrais vous citer des cas où on a fait trois ou quatre
révisions et où on a envoyé deux ou trois conseillers
différents. Il s'agit de faire en sorte de donner satisfaction à
la clientèle. C'est ce qu'on vise sauf qu'il peut arriver qu'il y ait
des cas problèmes et qu'il y ait des frictions. C'est humain et c'est
possible que cela se produise. Mais le choix du conseiller, cela deviendrait,
administrativement parlant, très difficile. Imaginez si tout le monde
choisit le même conseiller, pour des
considérations X, il y en a quelques-uns qui vont tricoter dans
leur bureau et d'autres qui vont être surchargés. Je pense
qu'administrativement parlant, on ne peut quand même pas... Ce serait
difficile de planifier sur une base vraiment efficace, sauf qu'on peut assurer
un service très articulé et très personnalisé,
comme je l'ai mentionné.
Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'efforts à faire de ce
côté. C'est pour cette raison qu'on s'emploie, tel que
mentionné dans le mémoire, à donner des cours en technique
d'entrevue pour améliorer la relation. Ce n'est pas facile, vous savez.
C'est un dossier qui est fichtrement complexe et il y a des sommes d'argent
importantes qui sont en cause. Il faut admettre que ce ne sont pas des dossiers
faciles à traiter. De plus, on a une équipe qui est
relativement jeune. Alors, je pense bien que, là aussi, il y a place
à amélioration. Jusqu'à maintenant, je pense que tous les
efforts ont été faits pour essayer d'atténuer l'impact
dans ces relations, sauf que, comme je vous le disais tout à l'heure,
sur les milliers de dossiers que nous traitons par année, je pense que
c'est tout à fait normal qu'il y ait quelques cas d'exception qui
viennent confirmer la règle.
M. Baril (Arthabaska): Vous avez dit tout à l'heure qu'il
y avait 85 conseillers ou conseillères en régions. De ce nombre,
connaissez-vous la proportion des femmes conseillères?
M. Moreau: Dans l'ensemble de nos professionnels, nous avons 18,
4 % de femmes. C'est la même chose au niveau, par exemple, des agronomes
qui vont traiter les demandes d'emprunt, de nos conseillers en financement.
Mais, pour l'ensemble des professionnels, c'est 18 % de femmes; au niveau des
avocats, c'est 22, 2 %. Je pourrais vous donner le nombre total, si vous
voulez. Par exemple, les notaires et avocats c'est 18 au total. Vous avez 4
femmes. Les autres c'est 98 et vous avez 18 femmes, ce qui fait 18 % ou 19 % de
femmes...
M. Baril (Arthabaska): Est-ce que...
M. Moreau:... pour l'ensemble de l'office. Ce qui veut dire que,
si ma mémoire est bonne, à la fin de 1984, pour l'ensemble de la
fonction publique au niveau professionnel, c'était 17, 73 % et nous
avons 18, 4 %, je pense. Cela veut dire qu'on est au-dessus de la moyenne, pour
l'ensemble du gouvernement, si on parle de l'élément
féminin au niveau des professionnels.
Quant aux agents de bureau, agents vérificateurs, agents
agricoles, préposés aux services d'imprimerie, etc., tous les
autres, on a 56 % d'élément féminin et, pour l'ensemble de
l'office, c'est un peu plus de 36 %, pour l'ensemble de tous nos
employés, professionnels, cadres, pour tous les employés, cadres
supérieurs, cadres moyens, agents de maîtrise, etc. M. Baril
(Arthabaska): Avec les années, est-ce qu'il y a plus de femmes qui
font des demandes à l'office. Ce que je veux savoir, c'est si les femmes
prennent plus leur place sur le marché agricole.
M. Moreau: Du travail ou sur les prêts agricoles?
M. Baril (Arthabaska): Les prêts agricoles.
M. Moreau: Oui. C'est tangible d'une année à
l'autre. J'en profite pour mentionner ici au passage, M. le Président,
que l'office n'a jamais fait de sexisme et n'en fait pas encore, nonobstant ce
qui a été véhiculé. On pourra revenir tout à
l'heure à l'article 23 de la loi sur la mise en valeur. Ce n'est pas de
la discrimination sexuelle, c'est une - si on peut encore parler de
discrimination et qu'on peut s'interroger là-dessus, on pourra y revenir
- une situation de fait et on pourra revenir sur ce point. Mais si vous voulez
discuter strictement au niveau des prêts agricoles, en 1982-1983, je vais
prendre l'exemple de la LEJA, les fameux 50 000 $ sans intérêt. Si
on prend les personnes établies en vertu de cette loi, en 1982-1983, 24
femmes, 9, 6 %; en 1983-1984, 82 femmes, 14, 1 %; en 1984-1985, au 28
février, pour 11 mois de notre exercice - il reste un mois à
venir - 93 femmes, 17, 2 %.
Maintenant, si vous parlez de la présence des femmes dans les
groupes, en 1982-1983, elles représentaient 41, 5 % des groupes; en
1983-1984, elles représentaient 42, 5 % des groupes et en 1984-1985,
elles représentent, pour 11 mois, 46, 1 % dans les groupes.
Il n'y a pas de discrimination chez nous, au contraire, vous voyez. Je
peux même vous sortir des chiffres qui datent de 1960, par exemple. La
Loi favorisant l'amélioration des fermes date de 1962, l'application on
l'a vue dans le document que j'ai mentionné au départ. Si nous
prenons les femmes qui ont obtenu des prêts à ce moment à
l'office, de 1962 à 1974, il y a eu 832 prêts consentis à
des femmes en vertu du programme de la Loi favorisant l'amélioration des
fermes. Des femmes empruntaient elles-mêmes à ce moment. Si vous
retournez, par exemple, à l'article favorisant la mise en valeur
où on dit que les époux... Bon, ce sont les époux. En
fait, si on peut parler d'une discrimination, ce serait à l'endroit des
époux. Cela peut être le mari comme la femme parce que dans
certains cas, c'est le mari qui est pénalisé
et dans d'autres c'est la femme.
Cette loi n'est pas une discrimination sexuelle. C'est une
discrimination, si vous voulez parler de discrimination, encore que
j'hésite à parler de discrimination, parce que si vous prenez la
loi LEJA - je viens de parler de la Loi sur la mise en valeur - le
législateur dit que c'est une subvention par exploitation. S'ils sont
deux frères, trois frères, c'est donc dire qu'il y a de la
discrimination contre les autres. À mon point de vue, le mot
"discrimination" n'est pas approprié dans ce cas.
C'est comme si je disais: Â 65 ans, vous allez recevoir un
chèque de pension. Pourquoi pas à 64 ans? Est-ce que je suis
discriminé à 64 ans de ne pas recevoir un chèque? Bon, il
y a des restrictions dans des lois, des législations et des
comportements sociaux. Historiquement, à l'Office du crédit
agricole comme à la Société du crédit agricole
comme dans un tas de programmes étudiants, etc., il y a eu des
paramètres, il y a eu un corridor et on a dit que c'était une
exploitation agricole. (11 h 45)
Effectivement, traditionnellement, je vous ai démontré
qu'on a fait des prêts à moyen terme, qu'on en a fait à
long terme à des femmes parce que les femmes empruntaient. Elles
étaient moins nombreuses que les hommes, il faut reconnaître que
c'est une question de fait, mais elles avaient des prêts de la même
façon que les hommes. Nonobstant ce qui a été
véhiculé - il y a eu des cas célèbres dans
l'histoire - les femmes étaient considérées selon les
mêmes critères, les mêmes paramètres que les hommes
par l'Office du crédit agricole sauf que, comme je vous le mentionnais
tout à l'heure, l'éventail était moins ouvert.
C'était un prêt pour une unité qui était
l'unité familiale, dans le temps. Aujourd'hui, avec les modifications
intenses au niveau des groupes, de la location de fermes, cela a ventilé
bien des choses et on a ouvert davantage. Mais je ne crois pas qu'on puisse
parler de discrimination et surtout pas de discrimination sexuelle.
M. Baril (Arthabaska): C'est important et c'est significatif, les
chiffres que vous nous donnez là. Je ne voudrais pas que vous pensiez
que je cherche des bibites, mais à la page 17, vous donnez le nombre de
refus pour les différentes années. Le nombre de refus de
prêts était de 22, 3 % pour l'exercice 1983-1984. Est-ce que ce
sont des refus qui ont été décidés... Le dossier
a-t-il suivi son cours, est arrivé ici à Québec et il y a
eu un refus ou si vous êtes capable de nous fournir les chiffres du
conseiller financier local qui aurait dit: Bien, ton dossier, cela ne donne
rien de le monter, de le présenter en haut parce qu'il ne passera pas de
toute façon?
M. Moreau: Là-dessus, on va bien se comprendre parce que
je sais que dans le passé, on a eu des griefs sur ce point. À la
première entrevue - à laquelle je faisais allusion au
départ, après votre question - à ce moment-là, si
on s'aperçoit que le projet est vraiment irréaliste, qu'il est
fantaisiste, à la limite, on va dire au requérant ou à la
requérante: Écoutez, mûrissez votre projet. Pour nous, cela
n'est pas acceptable dans le cadre de nos lois, mûrissez votre projet. On
ne lui remet même pas, normalement, de demandes d'emprunt parce qu'on
sait bien que s'il y a une demande, cela alourdit la machine administrative. Si
le requérant insiste, on lui en remet une quand même. Mais une
fois la demande retournée, suivant la forme que je vous mentionnais tout
à l'heure, elle est enregistrée, et à ce moment-là,
elle débouche sur un refus.
Ou bien le requérant, dans le cours du cheminement - cela arrive
- dit: Arrêtez ma demande, j'ai d'autres éléments nouveaux,
je ne suis pas intéressé. Il l'annule. Cela peut arriver. Cela
s'appelle les annulations volontaires. Les refus que nous vous donnons ici, ce
sont les refus qui ont fait l'objet d'une décision de l'office,
d'accord. Puis, on nous a taxés dernièrement d'avoir
été laxistes pendant des années et d'être plus
serrés - c'est l'expression que j'ai vu dans les journaux - que les
banques actuellement. Je ne sais pas ce que cela vient faire là-dedans
parce que nous travaillons en étroite collaboration... En tout cas, j'ai
vu cela dans les journaux. Si vous prenez les statistiques de refus, les
véritables refus après une décision de l'office, en
1981-1982, c'était 20, 2 %; en 1982-1983, c'était 25, 2 %; en
1983-1984, c'était 22, 3 % et en 1984-1985, 17, 6 %. Si nous
étions plus serrés, je ne vois pas qu'il y ait moins de refus,
toutes proportions gardées, que par les années passées. Je
peux vous assurer qu'il n'y a eu aucune consigne à l'office pour dire
à nos gens de changer nos critères, changer notre comportement.
Aucune. Je peux vous assurer de cela, jamais, en aucune façon. Je vous
défie de trouver une directive, une consigne qui a été
donnée à nos employés pour dire: On va serrer la vis, cela
n'a pas d'allure ce qu'on a connu. Non, parce qu'on a toujours
été de véritables professionnels, on a toujours
respecté rigoureusement les critères que le législateur a
mis dans notre loi et dans notre règlement. Je ne vois pas pourquoi il y
aurait un changement de cap là-dessus. Je peux vous assurer de cela.
Avec le résultat que reflètent les refus ici, c'est vraiment la
réalité, cela veut dire que les demandes... C'est peut-être
les agriculteurs qui sont plus prudents et qui font qu'il y a plus de projets
qui sont sérieux et qui débouchent. C'est peut-être de ce
côté-là aussi, mais du côté de l'office, cela
vous démontre que ce qu'on a dit récemment, ce
qu'on a véhiculé n'est pas fondé.
M. Baril (Arthabaska): Vous dites qu'il y a annuellement plus de
6900 emprunteurs qui présentent différentes demandes. Est-ce 6900
demandes d'emprunts ou si... C'est à la page 17.
M. Moreau: Ce sont les cas de suivi, M. le député
d'Arthabaska. Vous avez la nomenclature des suivis au bas de la page 17; vous
avez le contrôle du déboursement des prêts, du
contrôle des prêts consentis avec nantissement, etc. On pourrait
vous la ventiler, mais je n'ai pas cru opportun de le faire dans le
document.
M. Baril (Arthabaska): Non, ce n'est pas nécessaire. C'est
peut-être quelque part dans votre document, mais je voudrais savoir
combien il y a eu de demandes d'emprunt pour la dernière année,
1984.
M. Moreau: Au moment où nous nous parlons, en 1985-1986,
il y a 1889 demandes; évidemment, il manque ie mois de mars. L'an
dernier, à la même date, nous avions 2088 demandes. Depuis trois
ans, c'est sensiblement le même nombre de demandes. En 1982-1983, vous en
aviez 2241; en 1983-1984, 2278 et cette année, 1889 et il manque un
mois. Cela veut dire que cela va se rapprocher de cet ordre de grandeur.
M. Baril {Arthabaska): C'est à peut près toujours
le même nombre, même avant la crise?
M. Moreau: Non, non, cela a été beaucoup plus
élevé.
M. Baril (Arthabaska): Oui, c'est cela.
M. Moreau: Si je prends pour 1978-1979, avant le tandem, vous
aviez 2776; en 1979-1980 - il y a vraiment eu un déblocage - 4404; 4453
en 1980-1981; 4208 en 1981-1982. Il y a eu à ce moment la crise du porc.
On a arrêté de prêter pour le porc, en 1980; bien sûr,
cela a paralysé un certain nombre de dossiers. Cela a été
un peu la même chose par la suite pour ie vison. Ces productions ont
été au ralenti pendant un certain temps. La crise est
arrivée et cela a inspiré à d'aucuns une certaine
prudence. On le voit dans les dossiers. Les gens se disent: Avant de faire tel
investissement, on va attendre, on va différer. Il est assez difficile
d'interpréter tout cela d'une façon, je dirais, exhaustive, mais
on peut quand même avoir certaines indications.
M. Baril (Arthabaska): Dans le pourcentage de refus - je reviens
sur cela -qui est de 17% lors de la même année, avez-vous les
statistiques pour ces 17%?
Quel est le pourcentage des refus pour les demandes d'emprunts des
femmes?
M. Moreau: Oh! Oh! Attendez un peu!
M. Baril (Arthabaska): C'est un détail, n'est-ce pas?
M. Moreau: Je dirais que cela devrait être sensiblement...
Je vous ai déclaré formellement tout a l'heure qu'on
respectait les mêmes critères pour les femmes. Partant de
là, je conclurais que c'est sensiblement le même profil, mais
là je ne peux pas statistiquement vous le donner. On pourra faire de la
recherche si vous voulez et vous l'envoyer.
M. Baril (Arthabaska): On nous dit -c'est peut-être vrai,
je ne le sais pas - que c'est toujours plus difficile pour une femme d'obtenir
un prêt à l'office ou è la société -c'est la
même chose - ou dans une banque en général, une institution
prêteuse. C'est pour cela que je voulais le savoir.
M. Moreau: Chez nous, en tout cas, on ne fait pas la distinction.
L'office n'est pas sexiste; je ne pense pas que l'Office du crédit
agricole en soi puisse être sexiste. Cela peut être perçu
comme cela pour toutes sortes de raisons, remarquez que ce sont des
prétextes parfois. En tout cas, je peux vous assurer que chez nous, il
n'y a pas de sexisme à ce niveau-là.
M. Baril (Arthabaska): Lorsque le requérant ou la
requérante a obtenu un refus, quels sont les recours qu'il peut... ?
M. Moreau: II y a toutes sortes de recours possibles. Remarquez,
c'est son choix. On respecte tous les recours. Quelquefois il va appeler notre
conseiller, notre directeur régional ou, parfois, son
député. Cela fait partie du cheminement. C'est aussi le
rôle du député. Je ne blâme pas non plus
l'agriculteur pour cela, il choisit la voie qu'il veut bien. Le
député nous appelle ou nous écrit et nous demande:
Pourriez-vous réviser le cas de M. Untel? Soit! Nous révisons le
cas. C'est comme cela que ça fonctionne la plupart du temps. Il appelle,
par exemple, pour venir au siège social; il appelle pour me rencontrer
dans certains cas. Cela se présente de toutes sortes de façons.
Disons que ce que nous faisons, nous réexaminons le dossier; nous voyons
s'il y a des éléments nouveaux; on voit s'il y a des changements
qu'on peut apporter à la faveur du requérant pour lui permettre
d'obtenir un prêt. On y va avec une très grande ouverture
d'esprit. On fait une révision deux, trois et même quatre fois,
à la suite d'éléments nouveaux dans le dossier.
M. Baril (Arthabaska): Comme je vous le disais tout à
l'heure, celui qui vient au bureau du député ou celui qui essaie
de trouver une solution à son problème, c'est toujours celui qui
a essuyé un refus; celui pour qui cela va bien, il ne vient même
pas te voir et heureusement, parce qu'on ne fournirait pas.
M. Moreau: II ne vient pas nous voir.
M. Baril (Arthabaska): Qu'est-ce que j'allais dire? Dans le refus
que l'office accorde, c'est une lettre qui est générale, c'est
toujours la même. Tout à l'heure, vous avez dit que le conseiller,
habituellement, informe l'emprunteur de la recommandation qu'il fera à
Québec. Selon plusieurs témoignages que j'ai eus, le conseiller
ou la conseillère au niveau local ne dit pas au gars ou à la
fille: Ton dossier, je le recommande, il n'y a pas de problème. À
plusieurs reprises, j'ai vu - à moins que cela se fasse et que le gars
ne nous dise pas toute la vérité, il n'est pas à la
confesse, aujourd'hui, il y en a plusieurs qui n'y vont plus... Est-ce que
l'office ne pourrait pas expliquer davantage le pourquoi du refus au gars?
M. Moreau: La consigne chez nous - je vais vous dire la consigne,
c'est peut-être l'idéal, et je vais essayer de vous montrer ce qui
se fait - c'est: En arrivant chez le requérant ou la requérante,
c'est de s'assurer - on insiste auprès de notre personnel
là-dessus - qu'il y ait un cheminement qui se fasse, de part et d'autre,
que ce soit un refus ou une acceptation; que les deux cheminent ensemble dans
le dossier. En d'autres termes, que les éléments que va chercher
notre représentant ou notre représentante... Tous les
éléments se bâtissent dans le dossier avec la collaboration
du requérant ou de la requérante. On parle d'un cheminement au
vrai sens du mot.
Dernièrement, j'ai fait une tournée. J'ai
été surpris du temps - c'est pour cela que je le mentionne dans
mon dossier - énorme consacré à cela, mais je pense qu'il
faut en payer le coût. Cela demande une certaine ouverture d'esprit, je
pense qu'on se doit de le faire. Il y en a qui passent jusqu'à deux et
trois heures à expliquer de A à Z le dossier, dans tous ses
éléments, à discuter des dépenses et des revenus,
à expliquer exhaustivement tous les éléments du dossier et
à lui dire: Écoute, je m'aligne sur telle recommandation, je t'ai
expliqué pourquoi. On m'a dit, dans certaines régions, que cela
peut aller, dans des dossiers, jusqu'à deux ou trois heures; dans
certains cas, c'est quasiment autant de temps de consacré que celui de
la cueillette proprement dite. On me dit que c'est dans la plupart des
dossiers.
Maintenant, vous allez comprendre comme moi, que si notre homme ou notre
conseillère en financement s'amène chez un requérant ou
une requérante et que, au départ, cela clique plus ou moins, que
chaque élément du dossier accroche, il n'y aura peut-être
pas une grande propension après trois heures de cheminement, à
dire: Écoute, on va s'asseoir ensemble et on va recommencer à
zéro ce que l'on vient de faire. Il faut s'entendre sur le plan humain,
c'est peut-être plus, je dirais, stratégique pour lui, tout en
étant très poli, de partir avec son dossier; à ce
moment-là, il ne faut quand même pas qu'il développe une
altercation avec le client.
Sauf les cas d'exceptions, il y aura toujours des cas-problèmes.
On m'assure -cela a été ce que j'ai constaté dans une
tournée que j'ai faite le printemps dernier -que partout, une bonne
partie du temps employé est consacrée à la discussion, au
dialogue avec le requérant, pour lui expliquer tout le contenu du
dossier, même lui expliquer - je pense que c'est dans la plupart des cas
- la recommandation qu'il s'apprête à faire. Je pense que c'est
difficile d'aller plus loin que cela.
M. Baril (Arthabaska): Oui. Remarquez bien que c'est
objectivement que je vous fais cette remarque. A quelques reprises, les gens
qui ont essuyé un refus viennent nous voir; j'appelle chez vous à
Québec, on me donne les chiffres. C'est clair, deux et deux, cela fait
quatre; si le gars avait prévu que c'était six, cela ne peut pas
marcher. Je me souviens, entre autres, d'un éleveur de lapins qui avait
calculé - je ne connais pas grand-chose dans le lapin - neuf lapereaux
par portée et je ne me rappelle plus combien de portées. En tout
cas, les chiffres prouvent que ce n'était pas cela du tout, même
pour les meilleurs producteurs au Québec. Quand je lui ai
expliqué exactement cela, remarquez bien qu'il n'était pas plus
heureux parce qu'il avait eu un refus, mais au moins il savait pourquoi et il
comprenait. C'est pour cela que je dis - ce n'est pas un blâme - que dans
certains cas il devrait y avoir plus d'informations fournies à
l'individu sur le refus. Comme je vous le dis, il ne sera pas plus content,
mais au moins il va savoir pourquoi il a eu un refus.
M. Moreau: Cet aspect, on l'a amélioré un petit peu
depuis peut-être un an et demi. J'avoue qu'avant cela nos lettres
étaient laconiques, stéréotypées, pour la bonne
raison que je vous mentionnais tout à l'heure. Tout avait
été échangé, expliqué; alors on se disait:
Envoyons une lettre simplement pour confirmer. Mais à la suite de
certaines remarques qui nous ont été faites, on élabore
davantage, surtout dans les cas plus complexes, mais ce n'est peut-être
pas à la satisfaction. L'idéal - c'est ce qu'on
s'apprête à faire et c'est possible que nous le fassions
très prochainement - c'est que toute la documentation que notre
conseiller a, on en laisse une copie sur le champ au requérant.
Prochainement, c'est vers cela qu'on va se diriger.
M. Baril (Arthabaska): On va s'arrêter parce que le temps
est limité, mais au retour, quand la parole reviendra de ce
côté-ci, j'aimerais que vous nous expliquiez où est rendue
la refonte des lois parce que vous en faites mention è plusieurs
reprises dans votre mémoire, votre présentation en tout cas. Vous
dites que cela simplifierait, cela raccourcirait les délais. Cela fait
longtemps qu'on en entend parler. Peut-être qu'on aura l'occasion, durant
la journée, de savoir pourquoi et de quelle façon cela
raccourcirait les délais, cela arrangerait la chose et où en est
rendue cette fameuse refonte des lois.
Le Président (M. Vallières): Merci. Cela veut dire
que nous commencerons nos travaux après la période des affaires
courantes cet après-midi. Nous commencerons avec le député
de Maskinongé. La commission suspend donc ses travaux jusqu'à cet
après-midi après la période des affaires courantes.
(Suspension de la séance à 12 h 2)
(Reprise à 15 h 48)
Le Président {M. Vallières): À l'ordre, s'il
vous plaît! La commission de l'agriculture, des pêcheries et de
l'alimentation reprend ses travaux. Quand nous nous sommes quittés, ce
midi, j'avais indiqué que nous allions commencer l'après-midi
avec la demande d'intervention du député de Maskinongé. M.
le député de Maskinongé.
Problèmes avec le personnel
M. Picotte: Merci, M. le Président. J'ai
écouté avec beaucoup d'attention, ce matin, les commentaires de
M. Moreau concernant certaines questions posées par mon collègue
d'Arthabaska. Je voudrais tout simplement, en guise de préambule, lui
rappeler peut-être un passage de la Terre de chez nous de cette semaine,
qui fait état un peu des discussions que nous avons eues en commission
parlementaire. C'est intitulé "Préjugés sexistes". "Le
Comité provincial des femmes en agriculture est également venu
dire aux députés que plusieurs officiers du crédit,
comptables et autres fonctionnaires du gouvernement, avaient à l'endroit
des femmes des préjugés sexistes. Bien que ces professionnels
connaissent très bien tout le travail effectué par les femmes,
a-t-on souligné, Ils se conduisent souvent comme si nous n'étions
que des "helpers". La liste des tracasseries, des mesquineries, des propos
déplacés, des mauvaises blagues, des manifestations de mauvaise
volonté est longue. Plusieurs femmes peuvent en témoigner.
Voilà pourquoi elles demandent à l'Office du crédit
agricole d'embaucher un plus grand nombre de femmes à titre de
conseillères; comme plusieurs autres, le comité réclame le
libre choix de l'officier avec qui elles travailleront".
Tout simplement, M. le Président, c'est pour vous souligner qu'il
semble y avoir - en tout cas, dans les discussions que nous avons eues, cela a
semblé, quand même, assez général - un
problème. Lorsque le dossier est rendu au niveau de l'office, qu'il est
traité en haut lieu ou en dernière instance, où on n'a pas
de contact nécessairement avec la femme qui veut aller en agriculture,
il n'y a peut-être pas là de décisions à
caractère sexiste qui se prennent, disant: C'est une femme, on
n'étudie pas ce dossier ou on le laisse en suspens. Mais il semblerait
que c'est sur le terrain que les problèmes sont. C'est là-dessus
que vous n'avez pas tellement parlé ce matin et, pourtant, c'est une
remarque d'ordre général. À moins que toutes celles qui
sont venues ici ne nous aient bourrés de menteries ou ne nous aient dit
des choses qui n'étaient pas conformes à la
réalité. Remarquez bien que ce ne serait pas la première
fois qu'on aurait eu une commission parlementaire avec des versions
différentes, depuis qu'on en a. Quand même, je pense que cela a
été une remarque d'ordre général.
La deuxième demande d'ordre général a
été faite par tout le monde, sauf les gens des banques et des
caisses populaires; tous les intervenants ont demandé le libre choix de
l'officier qui travaille au dossier. En tout cas, cela m'accroche que tout le
monde le demande, qu'il y ait des problèmes d'ordre humain au niveau des
discussions. S'il y avait eu un ou deux intervenants qui nous avaient
souligné cela, à ce moment-là, j'aurais trouvé,
comme représentant du peuple, que c'était quantité
négligeable. C'est dans l'ensemble des dossiers. Tout le monde nous a
demandé d'avoir le libre choix. Ne trouvez-vous pas qu'il doit y avoir
des choses à vérifier, même si vous dites que vos services
sont parfaits?
M. Moreau: Je m'excuse, M. le Président, je n'ai pas dit
que les services étaient parfaits. J'attire votre attention sur deux
passages, dans mon document, où j'ai démontré qu'il y
avait des lacunes, des limites et des contraintes et qu'une refonte devait
venir. Je pense bien que je n'ai jamais dit, ce matin, que nos services
étaient parfaits.
M. Picotte: M. Moreau, n'analysons pas tous les services comme
tels. Quand on a parlé de sexisme, vous avez rejeté cela du
revers de la main. Il ne semble pas, en tout cas, que ce soit un
problème particulier et, pourtant, partout où on en a
parlé et pour tous ceux qui sont venus nous en parler, c'est le
problème numéro un. Évidemment, je veux bien vous croire
et je ne mets pas en doute du tout... Je veux savoir personnellement qui
dois-je croire. Est-ce que ce sont les gens qui disent être victimes de
cela? Les femmes, en général. Pour appuyer leurs dires, à
une certaine occasion, elles étaient plusieurs dans la salle -
près d'une centaine - qui sont venues nous visiter. J'ai eu l'occasion
de parler avec elles par la suite et cela a été une
doléance passablement insistante de la part des femmes en agriculture.
Je me demande, à ce moment-là, si pour vous cela n'allume pas une
lumière - je ne sais pas de quelle couleur - pour être capable de
scruter cela davantage. C'est impossible que tout le monde nous parle de cela
et qu'il n'y ait pas de problème.
M. Moreau: J'avoue que cela m'a surpris, M. le Président,
parce qu'on n'a pas eu de doléance antérieurement. Cela m'a
surpris. Cela arrive comme une espèce d'explosion. Remarquez bien qu'il
y a peut-être une analyse socio-économique à faire
là-dedans. Cela m'a surpris moi-même, la réaction que j'ai
vue dans les journaux. On va regarder, chez nous, pour voir jusqu'à quel
point cela est fondé. Vous avez lu le texte vous-même, on parle
des comptables au sein du gouvernement, de tous les services gouvernementaux,
du ministère de l'Agriculture et de l'Office du crédit agricole.
Là, on profite d'une commission qui siège sur l'office. C'est
bien sûr qu'on parle de l'office. Jusqu'à quel point c'est
décanté? Jusqu'à quel point cela vise l'office
spécifiquement et non le reste? Jusqu'à quel point c'est
généralisé chez nous? Si c'était un
phénomène vraiment ancré et très grave, on en
aurait entendu parler depuis un bon bout de temps. Cela me surprend, mais je
suis tout à fait disposé à analyser en profondeur ce
phénomène et à voir jusqu'à quel point, de ce
côté, on peut avoir des lacunes. On va prendre les moyens pour les
corriger. Je ne vous dis pas que c'est faux et qu'on est parfaits. Je ne l'ai
jamais dit; on a des limites.
Je vous ai parlé, ce matin, des efforts que nous faisons pour
essayer d'avoir un personnel, des effectifs à la hauteur de la
situation. Bien sûr, c'est de l'humain. C'est possible qu'il y ait des
accrochages, c'est passible qu'il y ait des perceptions qui soient
différentes. Je n'essaie pas de vous convaincre que notre système
est parfait; je pense qu'il n'y en a pas ici-bas, tout est perfectible, sauf
que, comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, j'ai
été surpris de voir cette réaction. Nous allons essayer de
la mesurer et de voir si c'est tellement généralisé. C'est
ce que je pense. Avant de passer à des remèdes, il faut au moins
avoir la problématique exacte et on va essayer de voir, dans les
prochains jours ou dans les prochaines semaines, ce qui ne va pas de ce
côté pour voir quel est le meilleur remède à
suggérer.
M. Picotte: En fait, je le ramène à votre attention
parce qu'il me semble qu'il y a là un point d'interrogation un peu
spécial. Peut-être que vous n'avez jamais eu de plaintes
jusqu'à maintenant, ce que je ne suis pas en mesure de vérifier,
de toute façon, mais je prends note de votre remarque là-dessus.
Il me semble qu'on a insisté beaucoup et je prends à
témoin tous ceux qui ont assisté à la commission tout au
long de ces discussions. Cela a été un point principal et majeur
et cela a été fait avec insistance.
Cela aussi m'accroche. J'aimerais savoir si, effectivement, il y aura
des correctifs à apporter ou si vous songez à cette
possibilité, même si cela semble difficile administrativement.
Tout le monde demande qu'il y ait un libre choix du conseiller. Même
l'UPA provinciale nous a mentionné avoir eu plusieurs doléances
de ce côté, plusieurs demandes de ce côté parce qu'on
a dit que trop souvent les relations humaines sont difficiles, peut-être
plus précisément dans certaines régions que d'autres. On
aura l'occasion d'examiner cela tantôt.
M. Moreau: Oui.
M. Picotte: II me semble que, au moment où tout le monde
demande qu'on ait le libre choix dans le choix d'un fonctionnaire quelconque au
niveau de l'office, il y a là quelque chose qui accroche. Je ne sais pas
si l'office a l'intention de se pencher sur ce dossier et d'essayer de trouver
une solution parce que c'est impossible que tout le monde se trompe en
même temps ou que tout le monde demande des choses qui ne sont pas
conformes à la réalité.
M. Moreau: On va s'y pencher.
M. Picotte: À moins que tout ce beau monde ne se soit
concerté, ce dont je doute fort.
M. Moreau: Je ne sais pas.
M. Picotte: II y a un autre point que je voudrais examiner avec
vous. J'aimerais savoir, à la suite de l'adoption de la loi 65, Loi sur
l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection
des
renseignements personnels, quelle est la politique d'accès aux
renseignements que pratique l'office dans les dossiers des agriculteurs.
Accès aux renseignements
M. Moreau: Jusqu'ici, on a fait parvenir aux agriculteurs qui
l'ont demandé tous les documents qu'il y avait au dossier, sauf
certaines parties du narratif qui, conformément è la loi,
pouvaient être retenues par l'office et les documents, également,
qui étaient reliés ou qui avaient trait ou impliquaient des
tierces personnes. Dans le cas de ces derniers documents, je sais que la
commission a suggéré de demander l'autorisation des personnes
impliquées. Notre attitude là-dedans est très ouverte.
C'est parce qu'il y a une loi qui nous empêche de donner des documents
à un moment donné et qui nous impose de donner des documents
à un moment donné et c'était relativement nouveau. C'est
ce qu'on est en train de regarder actuellement.
On n'a absolument aucune objection. Je peux même vous dire que,
tout récemment, j'ai eu une réunion avec mes principaux
conseillers et nous, pour autant qu'on est concerné, on s'oriente
vraisemblablement dans cette voie pour donner à l'agriculteur,
même sur-le-champ, toute la documentation à laquelle on travaille.
Il n'y a pas de cachette là-dedans. On va essayer, par ailleurs, ce qui
est très important, de maintenir la spontanéité chez nos
conseillers et conseillères en financement. Ils sont payés pour
aller faire la cueillette et pour nous donner une photo de l'exploitation telle
qu'elle est vraiment, en réalité. Alors, il faut que ces gens, en
bons professionnels, puissent garder toute la latitude d'exprimer ce qu'ils
pensent parce qu'on leur demande une opinion, leur "feeling". Il faut qu'ils
soient en mesure, je pense, d'exprimer exactement, rigoureusement, ce qu'ils
pensent. Il faut également leur donner l'occasion d'avoir toute la
spontanéité possible dans l'expression de leur opinion et dans la
formulation de leurs recommandations.
C'est ce que nous allons essayer de concilier. Nous sommes très
ouverts de ce côté et, comme je le mentionnais, il n'y a pas de
cachette là-dedans, sauf qu'on a une contrainte, il y a certains genres
de documents qui, de par la loi, doivent être conservés à
l'office.
M. Picotte: Précisez-moi donc quel genre de document;
donnez-moi une couple d'exemples. (16 heures)
M. Moreau: Par exemple, des décisions du bureau de
direction; je sais qu'il y a des délais... La décision
même, disons. Le débat sur la décision. Il y a le point que
je vous mentionnais tout à l'heure, lorsque des tiers sont
impliqués. C'est très technique. Nous avons une politique
là-dessus et je pourrais vous faire parvenir ce que le responsable de
l'accès à l'information, chez nous, fait parvenir à nos
cadres pour les diriger dans cette voie. Je pourrais vous en faire parvenir une
copie si cela vous intéresse. Je n'ai aucune objection. Comme je vous le
disais tout à l'heure, c'est une loi relativement récente et on
chemine, nous aussi, de ce côté, comme bien d'autres services au
gouvernement du Québec.
M. Picotte: Quand vous parlez de tiers, en ce qui concerne les
prêts tandems, ce sont des documents de certaines sociétés
prêteuses ou de certaines sociétés bancaires, par exemple,
qui pourraient être joints au dossier et, à ce moment-là,
vous ne voulez pas...
M. Moreau: Cela pourrait être cela. Je prends un exemple en
passant, nous sommes mandataires, dans la réalisation des garanties,
pour une banque et c'est la banque qui est le prêteur, en l'occurrence.
Elle nous désigne comme mandataire et cette banque n'est pas assujettie
è la loi 65. Voyez-vous le problème qui se pose? Nous, on va
fournir la documentation que la banque n'est pas obligée de fournir de
son côté. On est mandataire, ce n'est pas nous, le prêteur,
et ce n'est pas nous, le vendeur. C'est une question de droit qui se pose dans
cela. On va essayer prochainement d'avoir un éclairage plus formel
là-dessus.
Je vous expose simplement au passage, un problème d'une tierce
personne impliquée. Par exemple, une personne a été
menacée, nous avons un affidavit au dossier. On lui a dit: Ce serait
dommage, à votre âge, de vous promener les jambes brisées,
etc. La personne a peur, elle signe un affidavit et, par la suite, dit: Ne
parlez pas de cela, il ne faut pas que cela sorte du dossier. C'est un exemple
concret. C'est une tierce personne qui, le jour où elle va apprendre que
cet affidavit se promène, n'en dormira plus. Elle a des droits, je
pense. Si la loi protège des individus, elle en protège d'autres
et je pense que ces tierces personnes doivent être
protégées. Peut-être pourrions-nous tenter un effort pour
essayer d'avoir leur consentement? C'est une autre chose. Je vous donne, dans
le cheminement d'un dossier, les diverses facettes et les complications qui
peuvent se présenter. Il y a des dossiers où c'est plus complexe.
Là-dedans, on va essayer de rendre justice à tout le monde, de
protéger, d'une part, les gens qui doivent l'être, tout en donnant
accès, le plus libéralement possible, suivant l'esprit de la loi,
à ceux qui demanderont de la documentation.
M. Picotte: En parlant de cela, est-ce qu'il y a beaucoup de
demandes qui ont été acheminées à l'office, de la
part de personnes, afin d'obtenir leur dossier, en vertu de la loi 65 sur
l'accès à l'information?
M. Moreau: Oui, il y en a eu, je dirais, à ce jour,
peut-être une quinzaine. Je donne cela sous toute réserve, cela
peut être treize ou dix-sept, c'est aux alentours de cela.
M. Picotte: II y a eu environ une quinzaine de personnes qui se
sont adressées à vous pour obtenir le dossier. Il y a combien de
demandes qui ont été acceptées chez vous? Est-ce qu'on les
a toutes acceptées?
M. Moreau: Dans tous les cas, elles sont acceptées sauf
que, là où surgissent les difficultés au niveau de
l'interprétation, c'est sur la nature de certains types de documents
dans tout cela. Je pense à un dossier où il y a 497 documents qui
ont été remis et il y en avait quelques-uns de retenus. A la
commission, on nous a dit, par exemple, qu'il y avait deux brouillons non
signés pour bâtir une recommandation et la recommandation a
été faite in extenso. Elle a été reproduite et les
brouillons n'avaient pas été produits. On a dit: Fournissez
également les brouillons. Je ne sais pas ce que cela ajoute, mais la
décision est là, en tout cas. Je donne des exemples qui se
présentent dans les dossiers, tout simplement. On va se conformer,
évidemment, à l'esprit du législateur, dans ce domaine. Je
vous donne cela sous toutes réserves. Si vous voulez avoir des chiffres
plus précis, je pourrai voir le responsable de cette loi à
l'office et vous donner des renseignements très précis, le nombre
de pages de documents qui ont été remis et le nombre de
contestations que nous avons eues, etc.
M. Picotte: Vous n'êtes pas capable de me dire combien il y
a eu de contestations au moment où on se parle?
M. Moreau: Je crois que c'est trois ou quatre, à ce jour,
qui ont demandé la révision par la commission. Si je ne m'abuse,
c'est de cet ordre-là, peut-être cinq.
M. Picotte: Trois ou quatre contestations.
M. Moreau: C'est-à-dire contestations, entendons-nous. Le
cheminement est le suivant: on s'adresse d'abord au responsable, dans chaque
organisme, pour obtenir les documents. La décision devient la
décision du responsable, à ce moment-là, et cette
décision du responsable fait l'objet par la suite d'un appel à la
commission. Alors, on révise en quelque sorte la décision rendue
par le responsable de l'organisme. C'est ce qu'on appelle - excusez la
redondance -l'appel à la commission. Alors, si je ne m'abuse, ce sont
quatre ou cinq cas d'appel actuellement.
M. Picotte: Si je ne m'abuse, il y a eu une décision de la
Commission d'accès à l'information concernant un dossier ou
certains dossiers; quelle suite avez-vous donnée à cette
décision-là?
M. Moreau: Nous sommes à étudier la
possibilité d'un appel à la Cour provinciale, tel que le
prévoit la loi, parce qu'il y a des ambiguïtés. Je dois
avoir la réponse finale de notre contentieux d'ici à quelques
jours là-dessus.
M. Picotte: Ce qu'on se fait dire quand on discute avec des
agriculteurs lors de commissions parlementaires - probablement à tort,
mais, en tout cas, on se le fait dire et moi, ici, je veux être
éclairé là-dessus -c'est ceci: Évidemment, si on ne
veut pas nous donner nos dossiers, si on ne veut pas nous informer, c'est parce
qu'il doit y avoir des choses que l'office a à cacher. C'est la remarque
d'ordre général que l'on fait. Vous êtes en train de me
dire aussi que vous êtes en train de songer à la
possibilité d'aller en appel de la décision de la Commission
d'accès à l'information. J'ai drôlement l'impression que
cela va accréditer cette rumeur auprès des gens, mais j'aimerais
connaître de vous les raisons exactes. Puisque vous décidez
d'aller en appel, vous devez avoir des raisons précises. C'est ce que
j'aimerais entendre de vous: Quelles sont les raisons précises qui font
que l'OCAQ décide d'aller en appel de cette décision puisqu'il
s'agit d'un dossier et je pense que la Commission d'accès à
l'information a rendu une décision qui nous semble réaliste?
M. Moreau: Elle vous semble réaliste. M. Picotte:
À moi.
M. Moreau: Tant mieuxl Mais, je vous donnais l'exemple tout
à l'heure des tiers qu'il fallait clarifier. L'exemple de la banque, que
j'ai donné, qui n'est pas assujettie à la loi, etc., ce n'est pas
à moi de trancher. Tant mieux si vous êtes en mesure de trancher,
mais ce n'est pas à l'office de s'ériger en législateur
là-dedans, de donner une interprétation officielle et de trancher
la question. Il y a des tribunaux et tout un cheminement de prévu pour
cela et je pense que c'est normal pour le fonctionnement de la loi 65 et pour
le bien de tous les Québécois. Il ne faut pas charrier ni d'un
côté ni de l'autre là-dedans. Il y a la protection de tout
le monde là-dedans. C'est
cela, l'esprit du législateur également. S'il a
prévu un mécanisme d'appel pour clarifier et se donner certaines
interprétations, je pense que c'est normal. Maintenant, je ne vous dis
pas que nous allons appeler; je vous dis que nous sommes en train
d'étudier présentement l'opportunité d'appeler. Je vais
avoir une opinion de mes conseillers juridiques là-dessus.
Deuxièmement, vous allez comprendre que ce n'est peut-être pas la
place aujourd'hui pour bâtir notre requête en appel. Ce serait un
peu délicat - vous allez le comprendre - qu'ici je déballe les
raisons pour lesquelles nous allons entrer dans tel dossier, etc. Je vous ai
donné un exemple général et qui fera l'objet d'une
étude approfondie chez nous dans les prochains jours.
M. Picotte: Je voudrais faire ressortir le fait que vous avez eu
en date du 22 février 1985...
M. Moreau: Si vous me permettez de dire qu'on a eu 48 demandes et
4 appels jusqu'à maintenant.
M. Picotte: D'accord.
M. Moreau: Alors, j'ai dit que c'était sous toutes
réserves et c'était effectivement sous toutes réserves,
comme vous pouvez le voir.
M. Picotte: Vous avez eu en date du 22 février 1985 une
décision de la Commission d'accès à l'information
signée par M. Marcel Pépin, président. Dans le dossier
portant le numéro 840109, de M. M., parce que, évidemment, on ne
l'identifie pas, versus l'Office du crédit agricole du Québec, on
vous demande de remettre certains documents - entre autres, je me permettrai de
vous en lire quelques passages - non pertinents à la demande de
révision, catégorie A, 1 à 169. La commission a
analysé les 169 documents de cette catégorie; ils ne concernent
pas le demandeur puisqu'ils sont relatifs à la revente de son ancienne
terre après la reprise de possession par l'office. Donc, cette partie du
dossier n'entre pas, à proprement dit...
M. Laplante: M. le Président, est-ce que les règles
ici sont les mêmes qu'à l'Assemblée nationale sur des
causes qui sont en cours actuellement, en justice? Je trouve cela un peu
délicat de nommer un numéro de dossier. La presse a accès
à ce numéro de dossier. Actuellement, c'est sujet à appel.
Je me pose beaucoup de questions sur cela.
Le Président (M. Vallières): Sur la question de
règlement.
M. Picotte: Sur la question de règlement, M. le
Président, je vous ferai remarquer que non seulement le dossier n'est
pas en appel, mais que M. Moreau m'a dit il y a quelques instants encore qu'il
n'y a même pas de décision de prise, à savoir si cela doit
aller en appel ou pas. J'ai justement un dossier auquel je fais
référence en certaines parties. Si M. le président juge
nécessaire de ne pas me répondre, il ne me répondra pas,
mais il me semble qu'il y a une décision qui est claire et j'aimerais
avoir certaines précisions en ce qui concerne certaines choses. Je dis
que l'Office du crédit agricole est ici pour éclairer les
parlementaires sur ses agissements, sur sa façon de procéder sur
des dossiers. C'est un dossier parmi tant d'autres. Il y en a
déjà 48 et, quand cela sera plus connu, il y en aura
peut-être 348 et il y en aura peut-être 1048. J'imagine que c'est
important que les gens sachent et que nous sachions, nous, parlementaires, de
quelle façon l'office va procéder dans ces dossiers. Ils se
bâtiront un appel s'ils veulent aller en appel après cela. On
n'est pas obligé de me livrer tout ce qu'on doit me livrer pour
bâtir un appel comme ils veulent le bâtir, mais il y a certaines
choses que j'aimerais voir éclaircir sur une décision rendue par
la Commission d'accès à l'information du Québec en date du
22 février 1985.
Le Président (M. Vallières): Même si cette
chose n'est pas devant les tribunaux au moment où l'on se parle, je
trouve pertinente la remarque du député de Bourassa nous invitant
à exercer un peu de prudence. J'invite M. Moreau à faire part des
nuances qu'il jugera nécessaires dans ses réponses.
M. Moreau: J'ai seulement à ne pas faire de commentaires
sur les points qui n'appellent pas de commentaires pour le moment.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: Je faisais référence au fait que la
Commission d'accès à l'information du Québec a
analysé les différents documents qu'il peut y avoir dans un
dossier que je ne connais même pas, mais dont j'ai uniquement les
numéros, qui peuvent ne pas être les mêmes numéros
que vous avez à l'office. La commission a analysé les 169
documents de cette catégorie, dans la catégorie A. Ils ne
concernent pas le demandeur puisqu'ils sont relatifs à la revente de son
ancienne terre après la reprise de possession par l'office. Cette partie
du dossier n'entre pas à proprement parler dans la demande et la
commission n'a donc pas à statuer sur son caractère accessible.
Donc, on dit que les
169 premiers documents, vous n'êtes pas obligés de remettre
cela au gars parce que, forcément, ce n'est pas pertinent. Là, il
n'y a toujours bien pas de problème, ce n'est pas sur cela que vous
allez en appel, j'imagine...
M. Moreau: Non.
M. Picotte:... si jamais vous y allez. Les documents qui doivent
être remis en entier au demandeur sont les documents 170 à 482.
Dans la réponse au demandeur et au cours de l'audition, l'office a
soumis que des documents ne pouvaient être transmis car c'étaient
des notes de brouillons ou des notes préparatoires et il justifiait son
refus en alléguant l'article 9 de la loi sur l'accès à
l'information et plus particulièrement le deuxième paragraphe:
"Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents
d'un organisme public. "Ce droit ne s'étend donc pas aux notes
personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches,
brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même
nature. "
La commission est d'avis que l'expression "notes personnelles" vise les
annotations sur un document pour l'usage personnel de celui qui les y appose
comme aide-mémoire ou instrument utile à sa propre
réflexion. Le mot "brouillon" n'est pas défini dans la loi sur
l'accès à l'information et il est possible alors, en vertu des
règles d'interprétation des lois de rechercher le sens commun des
mots, lequel se trouve dans le dictionnaire et, là, on définit
brouillon, etc. Il semblerait que finalement la commission dise: Bon, en ce qui
concerne les documents 170 à 482, vous devez remettre, normalement,
selon la décision de la commission, ces notes à celui qui en fait
la demande puisque c'est son propre dossier, puisqu'on additionne et on
vérifie certaines choses pour être capable d'analyser sa
capacité de remboursement, sa possibilité d'avoir net ce qu'il
doit, etc. Cela semble être bien clair du côté de la
commission.
Les documents C doivent être remis au demandeur après que
l'office a eu la possibilité de soustraire certaines parties, et
là on dit: De 483 à 493, 494 à 499, 500 à 509.
Encore là, après avoir examiné les différents
documents, on dit tout simplement qu'il y a certains documents que vous devez
garder et que d'autres doivent être remis. Je pense que cette
étude est faite de façon exhaustive et vient tout simplement
ajouter à ce que vous nous disiez tantôt, qu'il y a certains
documents qui ne sont pas pertinents. La commission le reconnaît. Il y a
d'autres recommandations là-dessus. (16 h 15)
J'aimerais savoir, compte tenu de tout ce qui est marqué dans ce
document-là, ce qui vous chatouille tant dans la décision de la
Commission d'accès à l'information qui fait que vous puissiez
même songer à aller en appel? Qu'est-ce qui vous chatouille tant?
On l'a examiné et on trouve que c'est d'intérêt public, que
c'est dans l'intérêt du monsieur.
M. Moreau: On vous en enverra une copie. Si on va en appel, on
vous enverra une copie des raisons que j'ai citées à notre
appel.
M. Picotte: Mais vous n'êtes pas capable de...
M. Moreau: Au moment où l'on se parle, je regrette, je
préfère ne pas faire de commentaire.
M. Picotte: Alors, n'importe qui pourrait penser que vous avez
quelque chose à cacher et il ne se tromperait pas tellement.
M. Moreau: En tout cas, on pensera ce qu'on voudra. Je ne peux
pas empêcher les gens de penser. Écoutez! C'est bien dommage, je
pense qu'en hommes sérieux qu'on doit être, il y a le respect des
droits des gens aussi. C'est pour cela que la, loi est là. Je pense que
moi, je dois m'abstenir de commentaires sur certaines parties de ce que vous
lisez dans ce document, et c'est tout à fait normal. Pourquoi
demanderais-je une opinion juridique si moi-même, je donne mon opinion
formellement à ce jour? C'est pour cela que nos gens sont payés,
pour justement nous donner l'éclairage voulu et, par la suite, nous
verrons quelles décisions prendre, en regard de cette
décision-là, en tant qu'office. Il y en a qui sont
nuancées, il y en a qu'on accepte, d'autres qu'on peut contester. Ce
n'est pas une question de s'arc-bouter et de cacher quoi que ce soit; c'est une
question de protéger, en fonction de la loi - c'est une question
d'interprétation - les droits des individus dans un sens ou dans
l'autre. Je pense que tout citoyen du Québec doit être
protégé à ce niveau, c'est l'esprit de cette loi. Je pense
que, si on n'allait pas, nous autres, en notre âme et conscience,
à la limite de ce qu'on pense être notre interprétation,
notre approche, on ne serait pas sérieux. Alors, si vous le permettez,
je vais m'abstenir de commentaires sur ces parties de la décision de la
commission et je vous enverrai, dans les prochains jours, les raisons pour
lesquelles on va en appel, si, effectivement, on va en appel.
M. Picotte: Vous allez me clarifier certaines choses puisque j'ai
eu droit à certains documents. Lors de l'étude des
grévistes de la faim, par exemple, j'ai eu droit à certains
documents de la part de
l'office et les gens autour de la table y ont eu droit aussi. Entre
autres, j'ai pu remarquer que, dans un dossier de l'office, il y avait des
coupures de presse de toutes sortes de choses. Pour vous donner un exemple bien
précis - je pourrais en choisir d'autres, mais je vais choisir celui-ci,
entre autres - dans le dossier de Marcel Talbot, il y avait du "clipping" qui
ne le concernait pas du tout, mais qui portait sur les
démêlés policiers d'un candidat à l'élection
fédérale du 4 septembre dernier. C'était dans le dossier
de Marcel Talbot, entre autres. Mot, je me demande encore ce que cela faisait
dans le dossier de Talbot, l'arrestation du candidat créditiste de
Drummond, par exemple, et ses démêlés avec la justice.
C'était dans le dossier de Marcel Talbot. C'est ce que vous nous avez
fourni; c'était un cas, entre autres.
Il y avait aussi un autre dossier, si ma mémoire est bonne; je
pense que c'est M. Robidas. Ce matin, après nous avoir dit que vos
dossiers étaient révisés, que vos services
révisaient cela une fois ou deux - au moins deux fois - j'ai cru
remarquer, en tout cas, dans le dossier de Robidas dont j'avais copie, que les
dettes de l'emprunteur sur l'un de vos documents se chiffraient à 42 500
$; on devait soustraire, par exemple, son avoir net, moins les dettes. On
s'était justement trompé dans le dossier, on n'avait pas
soustrait les dettes, mais on avait soustrait le paiement qu'il devait faire
d'une façon annuelle, ce qui faisait un avoir net au gars de 20 000 $
supérieur à ce qu'il avait exactement. Ce sont des dossiers qu'on
nous avait fournis, qui sont annotés, qui devaient être
révisés une fois, deux fois, trois fois par votre
comptabilité, par vos gens qui font la comptabilité, qui sont
à l'intérieur de ce dossier et sur lesquels vous avez pris des
décisions. Vous avez pris des décisions sur ces "clippings", sur
ces calculs-là.
M. Moreau: Je ne connais pas les dossiers; les comptes à
payer et les comptes à recevoir, c'est bien clair qu'on les soustrait.
Il faudrait revoir le dossier.
M. Picotte: Moi aussi, je sais cela que les comptes à
payer et les comptes à recevoir, on les soustrait, mais il faut prendre
les bons chiffres pour les soustraire.
M. Moreau: Ah! C'est possible, il faudrait avoir le dossier. Je
n'ai pas d'objection à en discuter.
M. Picotte: Ce sont des dossiers qui existent. Est-ce que c'est
pour cela que vous ne voulez pas remettre les dossiers aux gens?
M. Moreau: Non, non, je pense que...
M. Picotte: Non, mais on se pose des questions. Vous dites que
vous ne voulez pas les remettre, alors que la Commission d'accès
à l'information vous suggère de le faire.
M. Moreau: La loi 65, vous t'avez adoptée. Ce n'est pas
moi qui l'ai adoptée. Il y a un truc dedans pour un appel, d'accord?
Nous autres, on suit la loi. Alors, j'aimerais qu'on respecte notre conscience,
qu'on nous permette d'observer la loi.
M. Picotte: Êtes-vous en train de me dire qu'on a
adopté la loi et qu'on vous oblige à aller en appel? C'est ce que
vous êtes en train de me dire?
M. Moreau: Non, je vous dis que dans la loi 65 il y a un recours
qui est prévu pour aller en appel.
M. Picotte: Mais c'est votre choix d'aller en appel. Ne nous
dites pas que c'est la loi qui vous oblige à aller en appel.
M. Moreau: Non, non, la loi le prévoit.
M. Picotte: Elle le prévoit, oui. C'est votre choix.
M. Moreau: On peut l'exercer. C'est un choix qu'on peut
exercer.
M. Picotte: Oui, oui, je suis bien d'accord avec cela.
M. Moreau: Bon, alors, allons-y.
M. Picotte: Mais ne venez pas nous dire ou essayer de nous faire
croire aujourd'hui que la loi vous oblige à aller en appel.
M. Moreau: Non, je vous demande de respecter aussi le droit des
autres, en toute bonne conscience, de se faire une idée sur la
question.
M. Picotte: Mais est-ce pour les raisons que je viens de vous
énumérer que vous voulez aller en appel pour faire renverser la
décision?
M. Moreau: Non, non, je vous dis que je ne le sais pas. J'attends
l'éclairage -pourriez-vous, s'il vous plaît, respecter ce petit
bout-là? - de mes conseillers juridiques. C'est tout simplement cela que
je vous demande. C'est le respect du professionnalisme et de la conscience de
tout le monde. Cela fait partie de l'esprit de cette loi.
M. Picotte: Ce que je veux vous dire, c'est qu'il y a des erreurs
dans vos
dossiers...
M. Moreau: II y a une commission qui a siégé...
M. Picotte: Voulez-vous me laisser finir et vous aurez le droit
de parole tantôt? Je vais terminer ma question et, après, on
pourra dialoguer. Je vais vous laisser répondre tout le temps que vous
voudrez.
M. Laplante: M. le Président.
Le Président (M. Vallières): Question de
règlement, M. le député de Bourassa.
M. Laplante:... est-ce qu'on peut pousser jusque-là avec
des témoins? Est-ce qu'on peut les interroger sur un dossier
précis quand on sait qu'une commission a peut-être 20 000 à
30 000 dossiers? On sort, à un moment donné, un dossier et on
leur pose des questions sur des présumées erreurs dans un dossier
et alors qu'ils n'ont rien devant eux pour pouvoir vérifier si le
député dit la vérité lui-même. Cela ne
m'apparaît pas juste actuellement pour les témoins qu'on a
à entendre. Ce n'est pas parce qu'on est député qu'on va
écraser tout le monde qui vient ici à la barre comme
témoin. C'est faux. Il y a un minimum de décorum qu'il faut avoir
afin que ces gens-là puissent donner des réponses suivant des
documents qu'ils auraient en main. C'est pousser un peu loin, ce que le
député de Maskinongé fait actuellement.
Le Président (M. Vallières): Sur la question de
règlement.
M. Picotte: M. le Président, j'ai des questions à
poser. J'ai dit à M. Moreau et je le lui répète: II aura
le temps nécessaire pour répondre, je vais te laisser
répondre. Il va me laisser poser mes questions ici pour éclairer
la commission. Je pense qu'on va très bien s'entendre finalement. On va
réussir chacun à avoir certains éléments
additionnels dans les dossiers. C'est tout simplement cela.
M. Laplante: Des dossiers hypothétiques.
M. Picotte: S'il ne veut pas répondre, il ne
répondra pas, mais ce ne sont pas des dossiers hypothétiques.
M. Laplante: C'est cela que je ferais. On ne lui en tiendra pas
rigueur. Donnez-lui une copie de ce dossier.
M. Picotte: De toute façon, vous n'étiez pas ici
dans ce temps-là. Je fais référence aux dossiers. Il les
connaît très bien, d'ailleurs, les dossiers. Quand il est venu
nous rencontrer, il nous les citait quasiment par coeur. M. Moreau
connaît très bien ses dossiers. Si c'était le
député de Bourassa qui était assis là, j'aurais des
doutes en ce qui concerne la connaissance de ses propres dossiers, mais, en ce
qui concerne M. Moreau, je n'ai pas de doute, d'aucune façon.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Maskinongé, vous me permettrez sur la question
de règlement d'indiquer à M. Moreau qu'il est libre des
réponses qu'il donne. Il peut en prendre note également pour
répondre ultérieurement si les documents ne sont pas devant lui.
Je voudrais faire remarquer aux membres de la commission, de même
qu'à ceux qui agissent comme témoins, avant de prendre la parole,
d'attendre que le président la leur donne, ce qui évitera des
échanges ou un dialogue qui, des fois, peuvent paraître un peu
impromptus ou des débats vers lesquels on ne veut pas se diriger.
M. le député de Maskinongé.
M. Picotte: Merci, M. le Président. Alors, je fais
référence, comme je le faisais à deux autres reprises
tantôt, à des calculs faits par l'office qui ne reflètent
pas les chiffres qui sont exacts à l'intérieur des dossiers
d'individus. J'imagine que, si j'étais à la place de l'individu
concerné, s'il y avait eu des erreurs de chiffres dans mon dossier,
j'aurais bien aimé au moins vérifier ces erreurs pour être
capable de défendre ma cause, ce qui n'a pas toujours été
le cas et ce qui n'est pas nécessairement le cas, parce qu'on n'a pas
nécessairement accès aux dossiers. J'ai vu qu'il y avait du
"clipping" de fait qui était complètement étranger
à ces dossiers. Pourquoi cela a-t-il abouti là?Pourquoi cela n'y aboutit-il pas? Pourquoi y a-t-il des annotations ou
pas? Encore là, c'est à l'intérieur du dossier comme
tel.
Je remarque même dans le dossier d'un individu - et je peux bien
le nommer, c'est M. Robidas, de Saint-Félix-de-Kingsey, du comté
de Drummond - que l'emprunteur fait une demande qui est signée le
huitième jour de mai 1980 et dont l'acceptation du certificat
émis par l'officier chez vous a été faite le 3 avril 1980.
Avant que le gars fasse sa demande, on a accepté son dossier.
Écoutez, je me pose quand même des questions. J'ai le droit de
m'en poser parce que c'est daté. Ce sont des documents qu'on a, qui
existent, qui sont vérifiés et contrevérifiés. Je
me dis: Ne serait-ce qu'à cause de quelques erreurs qu'il peut y avoir
dans ces dossiers, ne serait-il pas opportun que vous fassiez toute la
lumière et qu'on remette au moins les dossiers à ces gens pour
lesquels même la commission vous a dit de remettre certains dossiers,
pour que les personnes puissent vérifier si les renseignements sont
exacts et s'il n'y a pas
eu d'erreurs pour lesquels elles ont pu être
lésées?
C'est tout simplement le but de ma question. Il y a des erreurs dans les
dossiers, et c'est normal. On ne vous imputera pas le fait qu'il y a des
erreurs dans des dossiers. Vous savez, on a vu qu'un dossier d'un individu a
600 documents. Ce n'est pas surprenant que cela prenne du temps pour
étudier cela. Je comprends parce qu'avec 600 ou 700 documents, c'est
sûr que cela peut être long et que cela ne peut pas être fait
dans la même journée. On ne vous tiendra pas rigueur de cela, mais
on vous dit: Au moins, qu'un individu ait la possibilité de
vérifier la véracité de ce que vous mettez au dossier, de
ce que vous calculez dans le dossier et ce que vous émettez comme
opinion. C'est dans ce sens que je vous pose la question. Je me demande si,
à partir de ce moment, le fait de vous soumettre à une
décision de la commission de l'information ne serait pas de nature
à éclairer davantage les gens qui font affaires avec vous et
n'enlèverait pas de sérieux doutes que les gens ont face à
certains documents à l'intérieur des dossiers. Ce n'est pas plus
compliqué que cela.
Le Président (M. Vallières): M. Moreau.
M. Moreau: M. le Président, c'est qu'on s'érige en
tribunal d'appel de la décision de la commission pour nous dicter:
Faites ce que la commission vous dit et ensuite... Écoutez une minute!
Je ne peux pas me rallier à cela. Je le regrette infiniment. En mon
âme et conscience, je pense qu'on va étudier pour voir si nous
sommes en train de bafouer les droits des individus ou de les respecter.
Laissez-nous au moins cette latitude!
Deuxièmement, M. le Président, je me suis abstenu
formellement, depuis qu'une séance s'est tenue de la commission de
l'agriculture, en octobre dernier, de faire des commentaires par respect pour
la commission parce que la commission devait faire son rapport et devait le
déposer à l'Assemblée nationale. Le feuilleton mentionne,
justement, qu'il a été déposé. On en a pris
connaissance, je pense, aujourd'hui. Je ne sais pas quand aura lieu le
débat.
Je considérais la question sub judice. Je me suis abstenu de
faire des commentaires et l'office s'est abstenu de poser des gestes dans ces
dossiers par respect pour l'autorité souveraine qu'est
l'Assemblée nationale. Là, une fois que le rapport de la
commission a été soumis à l'Assemblée nationale, on
essaie de revenir sur ces dossiers pour nous faire nous prononcer sur des
dossiers qui ont été étudiés par la
distinguée commission ici et qui ont connu un rapport. On essaie de nous
ramener dans ces dossiers pour connaître notre perception. Je peux vous
dire au passage: Vous vous trompez de loi, c'est la LCAIP. C'est le
crédit à court terme, la date du 3 avril par rapport à
l'autre, mais c'est à regret que je le fais parce que, pour moi, par
respect pour nos institutions, c'est sub judice et, tant et aussi longtemps que
le débat n'aura pas lieu à l'Assemblée nationale, il me
semble, M. le Président, que nous devons nous abstenir de faire des
commentaires sur ces dossiers. C'est pourquoi nous nous sommes abstenus
jusqu'ici - vous -pourriez le demander à certains journalistes qui nous
ont demandé nos commentaires -rigoureusement de faire des commentaires
par respect pour la commission qui a siégé là-dessus et
par respect pour l'Assemblée nationale. Alors, vous comprendrez que je
sois très réticent à faire des commentaires sur ces
questions.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: M. le Président, j'aimerais porter à
votre attention que la seule chose qui est sub judice, c'est ce qui est devant
les tribunaux. Devant l'Assemblée nationale, il n'y a rien de sub judice
et cela va être étudié. Cela a été
déposé, d'ailleurs, au mois de décembre. Cela va
être discuté demain. Si vous avez le temps d'écouter cela,
vous écouterez cela. Cela va être demain, dans l'avant-midi, que
vont être discutées ces choses.
Je prends les dossiers et mon but n'est pas de vous faire vous prononcer
sur ces dossiers en aucune façon. Ces dossiers, de toute façon,
vous savez où vous les avez mis. On n'a pas besoin de vous poser la
question. Vous savez où ils sont rendus, vous savez où vous les
avez mis, l'Office du crédit agricole? Je ne Veux pas vous faire vous
prononcer là-dessus. Ces dossiers sont complètement hors de
question présentement, parce que les gars ne sont plus en production;
ils sont sur le BS dans certains cas et tout cela.
Je ne veux pas revenir sur ces dossiers, mais je vous dis: Puisque dans
les dossiers que vous nous avez fournis à nous, les
députés de l'Assemblée nationale, on a
repéré un paquet d'erreurs, par mesure de prudence et compte tenu
qu'il y a une décision de la Commission d'accès à
l'information, ne serait-il pas préférable, au moins, que les
individus qui font affaires avec vous aient toute cette transparence,
c'est-à-dire la transparence aussi de l'office, et qu'ils puissent au
moins vérifier leur propre dossier dans la mesure du possible? C'est
là-dessus que je veux surtout, avant même que vous preniez votre
décision, si c'est encore possible, de vous influencer de ce
côté dire: II y a déjà une décision de la
Commission d'accès à l'information, est-ce qu'il ne serait pas
préférable que? C'est cela
que je veux vous faire réaliser. (16 h 30)
C'est normal qu'il y ait des erreurs et it va y en avoir d'autres; il n'
y en a pas plus chez vous qu'ailleurs. Je veux que vous vous sentiez bien
à l'aise de ce côté. Quand on traite des dossiers avec 400,
500, 600, 700 et 800 documents, c'est normal qu'il y ait des erreurs. Dans les
erreurs que l'office fera ou que n'importe quel autre organisme pourra faire,
si quelqu'un pouvait au moins nous souligner qu'il y a des erreurs de commises
et qu'il viendrait sauver ne serait-ce qu'un seul agriculteur, pas des
centaines, ce serait déjà une grosse "job" de faite. C'est dans
ce sens que je vous fais la remarque.
M. Beauséjour: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Vallières): M. le
député d'Iberville, sur une question de règlement.
M. Beauséjour: Oui. C'est sur la façon dont le
député de Maskinongé procède. Il emploie souvent le
"on": On ne vous tiendra pas rigueur, on a repéré des erreurs.
Ordinairement, le "on" exclut la personne qui parle. Si c'était le cas
et qu'il nous inclut dans ses affirmations, j'aimerais qu'il soit plus clair et
qu'il mette des "nous", de telle façon que, de notre côté,
on puisse changer s'il le faut. Ou bien qu'il mette des "je" au lieu des
"on"...
Le Président (M. Vallières): Merci.
M. Beauséjour:... de telle façon qu'on sache de
quelle façon il parle.
Le Président (M. Vallières): Merci, M. le
député d'Iberville.
M. Picotte: J'espère que, lorsque l'on va imprimer le
Journal des débats de la commission, à côté du "on",
on ne mettra pas le député d'Iberville puisque c'est le
député de Maskinongé qui parle. Cela dit, j'espère
que c'est assez clair dans votre esprit, mon cher collègue...
M. Beauséjour: Vos "on", ce sont des "je".
M. Picotte:... et que cela va se rapporter aux paroles qu'a dites
le député de Maskinongé.
M. Beauséjour: D'accord.
M. Picotte: J'ai fait référence tantôt
à du "clipping" à l'intérieur du dossier. En faites-vous
souvent, à l'office, du "clipping" de presse?
M. Moreau: D'abord, M. le Président, je m'inscris en faux
contre le fait qu'on laisse entendre qu'il y a des erreurs dans nos dossiers et
qu'il s'en est glissé dans ces dossiers. S'il y a un manque
d'interprétation, un manque de connaissance des choses qu'il y a
là, il me fera plaisir d'être à la disposition de la
commission pour les expliquer en temps opportun. Je m'inscris en faux contre
cela, au départ.
Quant aux "clippings", il y en a qui sont pertinents et d'autres qui ne
le sont pas. Il y avait tout le contexte de la cour des miracles; si ce
"clipping" est allé là-dedans, c'est probablement dans le
contexte de la cour des miracles. Je pense que c'est normal qu'on relie les
personnes qui, officiellement, disent appartenir à un mouvement X. Je
pense que c'est un peu normal qu'on ait ce type de relation sur le "clipping".
Je pense que c'est normal. Ce n'est pas un document qu'on a écrit, c'est
un document qu'on découpe et qu'on met dans un dossier. Je ne pense pas
qu'il y ait de quoi en faire un drame,
M. Picotte: Qu'est-ce que vous faites, à ce
moment-là, du droit des individus?
M. Moreau: Le droit des individus? De quels individus,
voulez-vous parler?
M. Picotte: Le droit des individus d'appartenir à une
association plutôt qu'à telle autre.
M. Moreau: Oui, oui, ils ont le droit.
M. Picotte: De militer où ils le veulent.
M. Moreau: Ils ont le droit et je n'ai pas besoin de leur envoyer
un "clipping" pour cela, ils le savent. S'ils appartiennent à une
association, ils doivent le savoir, il n'y a pas de découverte
là-dedans. C'est un droit qu'ils ont, je suis d'accord là-dessus.
Je n'ai pas d'objection. Le droit d'association, c'est fondamental en vertu de
la Charte des droits et libertés de la personne.
M. Picotte: Cela ne peut pas les pénaliser dans leur
dossier, d'aucune façon.
M. Moreau: Je ne le pense pas. On ne s'attache pas à une
coupure de journal là-dedans. Cela peut être une information, mais
ce n'est pas pertinent pour juger si l'on doit accorder un prêt agricole
ou pas.
M. Picotte: Cela vient...
M. Moreau: Sauf que là, on se réfère
à des dossiers problèmes, où il peut y avoir une certaine
pertinence en relation avec des mouvements qui ont causé des
déboires à
l'office pour toutes sortes de raisons. Encore une fois, je suis
très mal à l'aise pour discuter de cela, parce que j'ai
l'impression de ramener sur le tapis des choses qui ont été
discutées. J'ai bien dit tout à l'heure que je les
considérais sub judice, je n'ai pas dit que c'était sub judice.
Je pense que je suis en mesure de faire la nuance entre ce qui est sub judice
et ce que je considère sub judice. C'est par respect encore une fois
pour l'Assemblée nationale que je me suis permis cette attitude, ce
comportement.
Pour ce qui est de la question du jugement d'accès à
l'information, ce que nous étudions, c'est le jugement comme tel. S'il
est bien fondé en droit, l'interprétation est-elle correcte, tout
simplement? Après cette étude, l'office verra s'il exerce ses
droits d'appel, mais non après étude du contenu des documents
à produire. C'est bien sûr qu'on ne changera pas le contenu en
tant que tel. C'est de l'interprétation, comme je vous l'ai
mentionné tout à l'heure, par exemple, à savoir si une
banque qui est mandante, alors que l'office est mandataire, n'est pas
assujettie; cela devient un point de droit. Je vous donne un exemple. Ce que la
loi 65 prévoit, c'est précisément un appel sur des points
de droit. C'est exactement ce que nous allons faire si nous en venons à
cette conclusion. Je pense qu'il faut, quand même, avoir la latitude
d'étudier cette question à fond avant de nous prononcer.
M. Picotte: M. le Président, quand nous sommes
allés à Sherbrooke en commission parlementaire, on nous a
parlé, probablement à tort encore une fois, mais j'aimerais vous
entendre, là-dessus et vous faire dire au moins que cela n'existe pas,
parce que je ne crois pas que cela existe, d'une liste noire à l'Office
du crédit agricole. C'est de la fabulation, j'imagine.
M. Moreau: De la fabulation. Parce que cela fait
déjà quelques années que je suis à l'office et je
n'ai jamais entendu parler de liste noire. Je ne connais pas de liste noire
à l'office. Il n'y en a pas de liste noire à l'office, je ne
crois pas, parce que je pense que j'en saurais quelque chose s'il y en avait
une. La preuve, c'est que vous avez des gens qui ont fait faillite, qui ont
occasionné des pertes à l'office, à qui on a
reprêté par la suite et ils se sont réinstallés.
S'il y avait des listes noires, comme on le prétend... C'est bien
sûr qu'il se véhicule un tas de choses; il y en a qui sont
très fondées et d'autres pas. Je vous dis qu'il n'y a pas de
liste noire à l'office. Chaque dossier est étudié à
son mérite, à la lumière des éléments qui
s'y trouvent, dans son contexte très particulier à ce moment.
M. Picotte: Tant mieux si on peut rectifier certaines choses.
M. Moreau: Cela me fait bien plaisir.
M. Picotte: C'est le but de la commission. M. le
Président, je reviendrai plus tard.
Le Président (M. Vallières): D'accord. Une demande
d'intervention du député de Bourassa, suivi du
député de Huntingdon.
M. Laplante: Merci, M. le Président. Vous parlez beaucoup
de l'évolution du régime du financement agricole. Vous devez
peut-être trouver curieux qu'il y ait un député de
Montréal qui siège à cette commission. J'ai voulu en
être membre comme ancien rural, né dans une région rurale,
agricole, aussi à cause de la transformation des produits qui peut se
faire à l'intérieur des villes, tels que le porc, le boeuf, et
à cause des marchés agricoles qu'on retrouve dans notre entourage
dans les grands centres.
Pertes à la suite de prêts
Maintenant, je suis fier de l'orientation que l'office prend au point de
vue de l'aide aux agriculteurs. Vous dites que près de 3 300 000 000 $
ont été prêtés jusqu'à maintenant à
des fermes. Je voudrais savoir, dans les 3 000 000 000 $ qui ont
été prêtés depuis le début - je ne sais pas
si vous avez cela comme statistique - combien de perte a pu subir l'office
là-dessus.
M. Moreau: M. le Président, si nous décortiquons
les quelque 3 600 000 000 $, vous avez du long terme, du moyen terme, du court
terme; vous avez des crédits spéciaux dont la durée
variait selon leur nature, car le crédit spécial pouvait
être de deux, quatre, sept ans, etc. Si je prends l'ensemble des pertes,
cumulativement depuis le début, nous avons 18 753 112 pertes...
Une voix: Dollars.
M. Moreau: Je m'excuse, 18 753 112 $.
M. Laplante: Depuis l'instauration?
M. Moreau: Pertes cumulatives de 1936 à nos jours.
M. Laplante: Dans ce cas, cela dénote une
santé.
M. Moreau: Oui, assez exceptionnelle. Je vous avoue que
là-dedans il y a la production du porc qui a connu une crise -comme je
l'ai mentionné dans mon document de quatre ans, très profonde,
sans précédent, et c'est 50 % pratiquement de nos
cas-problèmes. Si vous isolez le porc, c'est une performance assez
exceptionnelle.
M. Laplante: Si on prend seulement le porc, qu'elles ont
été les pertes depuis quatre ans?
M. Moreau: Ce n'est pas facile d'isoler cela.
M. Laplante: À peu près, un aperçu. Je sais
que vous ne pouvez pas donner des chiffres...
M. Moreau: En termes de nombre, c'est quasiment 50% dans les
dossiers. Depuis les cinq ou six dernières années, les
cas-problèmes, cela a été à peu près
50 %, 46 %, 48 %. En termes de montant - il faudrait faire une étude
là-dessus - je ne pense pas l'avoir en tant que tel. Au total,
c'est 3 900 000 000 $ consentis ou autorisés. Le montant que je viens de
vous donner, c'est par rapport à ce montant global cumulatif, ce qui
représente un montant de 49, 16 $ par 10 000 $ prêtés. En
ce qui concerne le porc, j'aime mieux ne pas vous donner un chiffre parce que
je pourrais vous induire en erreur, car cela dépend de l'envergure des
prêts dans les productions.
M. Laplante: Vous pouvez nous l'envoyer, ce chiffre; je serais
intéressé à regarder cela.
M. Moreau: Oui, on va essayer de le décortiquer et de vous
l'envoyer.
M. Laplante: Maintenant, c'est une autre information qui peut
être personnelle, c'est peut-être par manque de connaissance de
l'organisme. Lorsque vous reprenez une ferme pour non-paiement, est-ce qu'il y
en a, actuellement, que vous exploitez vous-mêmes ou qui sont
prêtes à vendre ou à louer?
M. Moreau: Lorsque c'est possible, nous louons, lorsqu'on peut
synchroniser, disons. Notre préoccupation, c'est de vendre dans les
meilleurs délais pour ne pas connaître de désuétude
économique, de détérioration. Surtout, on a du vandalisme
dans certaines régions; alors, il faut éviter cela. Le plus
rapidement possible on peut la revendre, mieux c'est.
Prenant comme postulat cette donnée, nous voulons aussi minimiser
les dégâts et atténuer les pertes. Ce que nous faisons,
à ce moment-là, c'est louer, lorsque c'est possible, mais
synchroniser te bail pour que, le jour où il y aura vente, le bail ne
soit pas un handicap à un acheteur éventuel.
M. Laplante: Dans la nouvelle politique qu'on a mise en
application depuis 1984 sur la récupération ou sur une banque de
terres agricoles, est-ce qu'il vous est possible d'établir cette banque
ou de l'accentuer par ces reprises, en gardant les terres?
M. Moreau: Ce qui pourrait arriver, c'est ceci. Les terres dont
nous sommes propriétaires - terres reprises - nous pourrions les
tranférer à la banque de terres éventuellement. Ce serait
dans les possiblités. Pour revenir aux délais, bien sûr,
dans la réalisation des garanties, il y a des délais; on parlait,
dans le document, d'environ six mois. Ce sont les délais des tribunaux
qui sont tout à fait normaux, qu'il faut respecter avant la
réalisation complète des garanties. Il y a des
délais à respecter -la vente de shérif, etc. Alors, on
estime que c'est une moyenne de six mois. C'est pourquoi je vous disais tout
à l'heure que, si on loue, on doit faire en sorte que ce bail ne soit
pas un handicap lorsque nous procéderons à la vente.
M. Laplante: Le malheureux qui perd sa ferme, quelle que soit la
raison - bien souvent, ce sont des malchances qui vont contre la volonté
de ces gens, c'est toujours triste, ces histoires - a-t-il la
possibilité de remettre lui-même la terre à l'office avec
un droit qui pourrait être accordé par l'office d'au moins louer
sa terre pour quelques années pour essayer de reprendre le dessus, afin
de reprendre possession de sa terre? Est-ce que c'est possible de prendre des
arrangements comme celui-là?
M. Moreau: Théoriquement, c'est possible. Mais, pour nous,
cela dépendrait du dossier et s'il y a des pertes substantielles en
perspective. On n'est pas un prêteur comme d'autres. On est, disons, au
centre de tout un régime, comme je l'ai expliqué dans mon
document. On est le moteur, d'une certaine façon, qui
génère un tas d'activités dans le régime. Vous
comprendrez que, si nous devions passer l'éponge et dire à un
agriculteur: On efface ta dette, les autres agriculteurs, quels incitatifs
auraient-ils à faire leurs paiements? (16 h 45)
M. Laplante: Non, on ne se comprend pas. Je ne veux pas des
dettes effacées. Ce que je prends comme exemple, ce sont des
cultivateurs qui ont des terres ancestrales et cela fait des
générations et des générations qu'ils sont
là. J'écoutais hier des commentaires sur l'histoire de Mirabel.
Il y a un monsieur qui m'a drôlement touché. Je ne pouvais pas
m'imaginer qu'une terre ancestrale pouvait saisir aux tripes aussi fort ces
gens. Et cela venait du coeur, à part cela. Â un moment
donné, dans sa vie, il y a une chute qui est arrivée et il est
pris avec le crédit agricole. Ce type ne demandera certainement pas une
annulation de dette, mais il va peut-être vouloir avoir un peu plus de
chances pour essayer de récupérer cette terre avec les
années. En
remettant sa terre pour votre protection au crédit agricole, il
faudrait que lui puisse la relouer et que, dans cinq ans - il pourrait y avoir
un minimum - il puisse racheter sa terre pour la dette qu'il aura
contractée. Est-ce qu'il y a une telle possibilité d'arranger
cela pour ces gens?
M. Moreau: Je pense que les chances sont minimes. Encore une
fois, cela dépendrait du fardeau de la dette. Vous allez comprendre que
les taux d'intérêt continuent à courir. Par exemple, s'il y
a une créance de 300 000 $, à 12 % ou 13 % pendant trois
ans, il va la tripler et la quadrupler et il ne sera jamais capable de voir le
jour. Ce qu'on essaie de faire dans ces cas, comme je l'ai expliqué dans
le document à la page 30, c'est de lui consentir des accommodements.
Lorsque les quatre accommodements qu'on a prévus ne sont pas possibles,
on fait une tentative de réaliser avec sa collaboration certains actifs
pour diminuer sa dette. Il y a des cas où on peut
rééquilibrer - comme je vous le disais cela dépend des
dossiers - sa structure financière et lui permettre de repartir en
consolidant son affaire ou de vivre une période de consolidation pendant
un certain de temps. Mais si vraiment il est trop endetté et qu'il n'y a
plus aucun espoir, à ce moment, très malheureusement, nous devons
procéder à la réalisation.
M. Laplante: D'accord. J'ai une autre question sur cela.
Lorsqu'un cultivateur a une terre comme cela qu'il est obligé de
remettre à l'Office du crédit agricole, vous êtes
obligés de la revendre par shérif. Est-ce que vous recevez
toujours le montant que vous avez prêté? Est-ce que vous rentrez
dans votre argent?
M. Moreau: Si vous me le permettez, je vais vous donner des
chiffres. On a analysé 73 ventes effectuées en 1983-1984 et en
1984-1985. Dans 42 cas, on a eu des informations assez complètes pour
nous fournir les indications que je vais vous donner. Le prix de vente par
rapport à l'hypothèque originale au moment où on a
consenti le prêt. Pour les ventes de 1983-1984, on a
réalisé un prix de 69 % de l'hypothèque originale.
Lors des ventes de 1984-1985, on a réalisé un prix de 75 % de
l'hypothèque originale. Je parle de l'hypothèque originale; cela
peut faire cinq ans, sept ans ou neuf ans. Ce qu'on fait avant de
procéder à une vente, on effectue une nouvelle évaluation
avec la technique d'évaluation que j'ai mentionnée ce matin. Le
prix de vente de ces 42 fermes en rapport avec l'évaluation
préalable se situait au niveau suivant: pour les ventes de 1983- 1984,
on a obtenu 97 % de l'évaluation précédant la vente; pour
les ventes de 1984- 1985, on a obtenu 87 % de l'évaluation
précédant la vente, toujours pour la ferme visée qui avait
fait l'objet de l'hypothèque au départ.
M. Laplante: Sur 69 %, vous avez récupéré
votre créance hypothécaire; il demeure 31 % où vous avez
été au-dessous de votre créance hypothécaire. C'est
cela, si je ne me trompe pas? Les pertes ont été de combien dans
ces 31 %? Sur les 73 ventes, 69 % ont été au prix de votre
hypothèque, mais il reste 31 %, ce qui veut dire à peu
près 25 fermes qui ont été vendues au-dessous du prix de
l'hypothèque?
M. Moreau: C'est la moyenne. Il y en a qui ont été
plus et d'autres qui ont été moins.
M. Laplante: Non, mais je voudrais savoir...
M. Moreau: Je ne sais pas si on a cette dimension-là. On
vous donne une moyenne, il faudrait sortir les dossiers.
M. Laplante: J'aimerais savoir, à ce niveau-là, de
combien sont les pertes pour les 73 fermes qui ont été vendues en
bas du prix de l'hypothèque?
M. Moreau: II faudrait décortiquer, aller plus loin dans
cette projection parce qu'on ne s'est pas rendu jusque-là.
M. Laplante: II serait peut-être bon de vous rendre
jusque-là. C'est pour revenir un peu sur ma première idée
qui est de garder ces gens-là. Un gars a une "bad luck" une fois, mais
peut-être pas deux fois. Si déjà vous êtes en perte
à vendre une terre, peut-être que le "gambling" serait bon de
faire continuer ces gens-là avec leur fierté, avec leurs bras
pour garder leur terre, leur donner des chances avec un plan quinquennal ou
d'autres choses. Parce que, lorsque vous parlez de l'intérêt
à 11, 5 %, si je me fie ici, quelqu'un qui paie 11, 5 % en somme, il
paie seulement 4 % d'intérêt. On ne peut pas l'évaluer sur
les 11, 5 %. Corrigez-moi si je me trompe, c'est par un manque
d'expérience.
M. Moreau: C'est le cas du jeune qui s'établit en vertu de
la loi favorisant l'établissement.
M. Laplante: Oui, mais il y a de ces fermes-là que vous
prenez parfois aussi. Cela diminue les chiffres un peu.
M. Moreau: Ce doit être très rare. Cette
loi-là existe depuis le 1er septembre 1982 et les cas doivent être
très rares. Pour votre information, depuis cinq ans, le jeune qui
s'établit, qui a 18 à 24 ans, est sept fois
moins vulnérable que celui de 35 ans et plus qui
s'établit.
M. Laplante: Bonne nouvelle.
M. Moreau: Je donne cela comme exemple en passant. Les meilleurs
établissements sont ceux des 17 à 24 ans, statistiquement
parlant.
M. Laplante: Maintenant, vous avez parlé aussi de la
refonte de la loi. Je sais que vous ne pourrez pas nous donner en
détail, article par article, dans les lois existantes, ce que vous
n'aimez pas et ce que vous aimez. Si les lois étaient à refaire,
pouvez-vous nous sensibiliser sur les articles, sans les nommer, que vous
seriez moins d'accord de garder et qu'il faudrait remplacer par d'autres qui
feraient avancer, en somme, l'agriculture au Québec? Parce que vous avez
dit, au début ce matin, que vous aviez déjà des
idées bien arrêtées là-dessus. Peut-être qu'en
commençant par là, nous autres, on pourrait travailler autour des
idées que vous allez nous énoncer pour essayer de travailler tous
dans la même direction.
M. Moreau: D'abord, si vous me le permettez, M. le
Président, je voudrais dire qu'en vertu de la Loi favorisant
l'établissement de jeunes agriculteurs il n'y a aucune reprise qui a
été faite depuis 19B2, ce qui veut dire que cette loi-là
est encore tout à fait intouchée.
M. Laplante: J'en suis fier.
M. Moreau: C'est une information en passant. Deuxièmement,
sur ce que vous me demandez, c'est vrai, j'ai des idées bien
arrêtées. Arrêtées est peut-être un mot fort,
j'ai des idées, disons, là-dessus. Ce n'est pas
arrêté pour autant qu'on peut cueillir...
M. Laplante: Remarquez que je ne voudrais pas, par exemple, par
cela, refaire le programme du Parti libéral, parce qu'ils n'ont rien
encore là-dedans actuellement. On a des idées, nous autres aussi,
déjà dans un programme, mais on voudrait encore les
améliorer, les raffiner. Peut-être que c'est le temps, si on s'en
va en élection au mois de juin, au mois de septembre, cela va nous
donner quelque chose de bien.
M. Moreau: M. le Président, je vais vous le dire
sincèrement, moi, je me limiterais à une problématique, si
vous me le permettez. Vous savez sans doute qu'il y a un sommet qui a
déjà été annoncé sur le crédit
agricole. Je pense que je serais très malvenu, comme président de
l'office, d'aller me prononcer sur des orientations à venir. Je pense
que tout bonnement les gens qui seront appelés à être
consultés diraient: Écoute les dés sont pipés.
Regarde, le président de l'office a une idée bien
arrêtée dans tel sens ou dans tel sens.
M. Laplante: Ce n'est pas de vous prononcer; c'est une suggestion
que j'ai demandée.
M. Moreau: Même une suggestion, je trouve cela
délicat. Seulement, je peux fort bien vous illustrer certaines
problématiques qui appellent des changements. De quelle nature seront
les changements, vous allez comprendre que c'est extrêmement
délicat pour moi de me prononcer là-dessus étant
donné la conjoncture.
M. Laplante: Je le comprends. Je vous remercie, M. Moreau.
Création d'une commission d'appel
Le Président (M. Vallières): Très bien.
Alors avant de passer la parole au député de Huntingdon, j'aurais
une question à poser au président de l'office. Comme vous le
savez, la commission a déposé son rapport en décembre
à l'Assemblée nationale et une des recommandations importantes
qu'on a jugé bon de faire, c'est la création d'une commission
d'appel pour le producteur qui se verrait refuser une demande auprès de
l'office. Or, récemment, on est allé dans les régions et,
de façon très générale, qu'il s'agisse de - je peux
vous en nommer - la Coopérative des travailleurs agro-forestiers de La
Métis, de la Fédération de la relève agricole du
Québec, de l'UPA de Lanaudière, de l'UPA de Sherbrooke, de
l'Union des producteurs agricoles du Québec, de la
Fédération de l'UPA de Saint-Hyacinthe et de l'UPA des
Laurentides, tous ces organismes ont indiqué qu'ils trouveraient cela
très important et, dans l'ensemble des mémoires, on retrouve
cette proposition. Ma question est la suivante. Compte tenu que cela fait
partie du rapport et que tantôt vous avez dit que vous considériez
cela sub judice, je vous laisse la latitude d'y répondre ou pas.
J'aurais aimé connaître votre point de vue sur la création
éventuelle d'un pareil organisme, dans un premier temps. Dans un second
temps, j'aimerais que vous m'indiquiez, compte tenu, selon les données
que vous nous avez apportées ce matin, du nombre relativement faible de
refus, comment il se fait que, de façon générale, les gens
veulent se voir attribuer ce droit d'appel à un organisme
indépendant de l'office.
M. Moreau: M. le Président, notre opinion
là-dessus, nous l'avons donnée en octobre dernier dans le cadre
de cette commission. Je me sens bien à l'aise pour en
reparler étant donné qu'à ce moment-là je
l'ai donnée explicitement avec certains commentaires. Nous sommes tout
à fait en faveur d'une telle commission. J'ai expliqué, à
ce moment-là, si vous vous en souvenez bien, que c'était tant
à l'avantage des individus concernés qu'à l'avantage de
l'office. Au lieu de retourner quatre ou cinq fois chez un agriculteur pour
faire des révisions, comme on le fait actuellement, on va simplement lui
donner l'adresse de la commission d'appel et on va lui souhaiter bonne chance.
Administrativement parlant, nous allons être beaucoup plus efficaces
parce que nous allons, si vous voulez, passer moins de temps à
réviser, réviser et réviser des dossiers. Cela mobilise
énormément notre équipe. À ce moment-là, la
commission d'appel sera dotée d'un personnel minimum qui pourra
procéder à ce travail. Cela libère nos ressources pour
d'autres fins et pour les nouveaux cas qui se présentent. C'est
même administrativement souhaitable et je l'ai mentionné en
octobre dernier. C'est bien sûr, et je pense que c'est tout à fait
normal, qu'un requérant désire être jugé par ses
pairs. Je le souhaite vivement. Comme je l'ai, d'ailleurs, mentionné en
octobre dernier, je pense que je ne dévoile rien de nouveau aujourd'hui.
C'est pour cela que je me permets d'en parler; autrement, j'aurais
été dans une situation un peu délicate. Mais étant
donné que je l'ai déjà fait, on n'a qu'à sortir les
notes à ce moment-là. Alors, je suis tout à fait d'accord
là-dessus.
Votre deuxième question, c'était?
Le Président (M. Vallières): Vous y avez quand
même répondu partiellement. C'est que le fait qu'autant de gens
vous le demandent semblait ne pas coïncider avec le faible taux de refus
dont vous nous faisiez part ce matin.
M. Moreau: C'est une chose qu'un refus. Remarquez, au sujet des
gens qui vont aller en appel, je dirais que le nombre de refus n'a pas
nécessairement une relation avec la volonté d'aller en appel. Ce
sont ceux qui sont refusés qui vont vouloir aller en appel, mais vous
savez, 17 %, c'est moins que 25 %, mais c'est encore beaucoup de monde. Mais il
ne faut pas oublier une chose: vous avez en agriculture plusieurs milliers
d'agriculteurs, ou se disant agriculteurs, si vous voulez, qui ne
répondent pas à nos définitions. Ces gens-là
aimeraient avoir accès à nos programmes. Alors, il ne faut pas se
surprendre que l'office soit à certains moments pris à partie.
Vous avez plusieurs agriculteurs qui désireraient avoir accès
à nos programmes. Ils sont par milliers parce que nos programmes sont
avantageux. C'est bien sûr, il faut être bien conscient de cette
dimension. (17 heures)
Par ailleurs, vous avez les agriculteurs qui ont été
refusés. Dans certains cas, ils n'ont même pas eu de demandes,
comme je l'expliquais ce matin, parce que leur projet était trop
fantaisiste; dans d'autres cas, le projet pouvait avoir beaucoup de
vraisemblance, mais il ne répondait pas aux critères
d'admissibilité quant à l'occupation principale ou à la
capacité de remboursement ou à la définition de ferme
rentable, que sais-je. À ce moment, il ne faut pas se surprendre qu'il y
ait des gens qui soient malheureux de tout cela et la commission d'appel va
leur donner, à mon point de vue, une occasion d'être jugés
par leurs pairs. Je pense que c'est sain, c'est tout à fait normal.
Le Président (M. Vallières): Je vous remercie. Pour
la commission, c'est important, je pense, d'avoir votre point de vue
là-dessus parce que, d'une façon un peu exceptionnelle, c'est
assez rare que les gens en viennent à un consensus sur une idée
et cette idée est très généralement
répandue, généralisée. Alors, je vous remercie de
m'avoir donné votre point de vue là-dessus.
J'ai une demande d'intervention du député de
Huntingdon...
M. Dubois: Je vais laisser passer mon collègue pour
quelques minutes.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Maskinongé, suivi du député
d'Iberville.
Accès aux renseignements (suite)
M. Picotte: Merci, M. le Président. Je voudrais tout
simplement revenir pour être bien sûr que j'ai bien compris,
tantôt, quand on a parlé de la Commission d'accès à
l'information. Vous m'avez dit que vous attendiez un avis juridique avant de
procéder à l'appel dans (a cause que je vous ai citée
tantôt.
M. Moreau: Je vous ai dit que j'attendais un avis juridique sur
l'opportunité d'appeler. Je ne vous ai pas dit que j'attendais un avis
avant d'appeler. Cela veut dire qu'on aurait décidé d'aller en
appel. Ce n'est pas cela que j'ai dit. J'ai dit qu'on aurait une étude
en profondeur faite par nos avocats pour nous indiquer si c'est opportun ou non
d'aller en appel pour protéger les droits de tout le monde.
M. Picotte: Pourriez-vous me dire si, effectivement, le 14 mars
il n'y a pas un avis d'appel qui a été signifié tel que
prévu?
M. Moreau: C'est possible. Remarquez que le 14 mars...
M. Picotte: Vous n'y êtes pas allés ou vous y
êtes allés? C'est quoi?
M. Moreau: Non, une minute!Avez-vous lu la loi 65? Je le
présume, comme législateur.
M. Picotte: Oui.
M. Moreau: On inscrit un avis d'appel et c'est par la suite qu'on
se présente à la Cour provinciale pour plaider, pour, si vous
voulez, justifier notre appel. Vous inscrivez l'avis parce qu'il y a des
délais qui pourraient nous pénaliser. C'est une chose que
d'inscrire l'avis et c'est une autre chose que de dire: On va en appel.
Comprenez-vous? L'avis, c'est une intention d'aller en appel pour ne pas perdre
nos délais et cela suspend la décision, mais, si nos conseillers
juridiques disent: Laissez tomber, on ne va pas en appel, on laisse porter.
S'ils nous disent qu'on va en appel ou s'ils suggèrent d'aller en appel,
on prendra notre décision à ce moment.
M. Picotte: Pourriez-vous me dire si, effectivement, ce matin, il
n'y aurait pas eu une requête qui aurait été entendue par
le juge Philippe Bouchard qui a pris cet appel en
délibéré?
M. Moreau: C'est possible. Il faudrait que je vérifie.
Oui, on me dit que c'est vrai.
M. Picotte: Écoutez, si vous êtes en train d'avoir
un avis juridique pour aller...
M. Moreau: C'est la requête pour permission d'appeler qui a
été plaidée ce matin, selon ce qu'on me dit. Il y a
d'abord l'avis d'appel, ensuite la requête pour permission d'appeler et
l'appel. Ce matin, c'est frais, vous avez raison. C'est tout à fait
récent. Maintenant, on va statuer là-dessus cette semaine,
probablement, ou la semaine prochaine. On va statuer à savoir si on
donne suite à cette demande. Cela va dépendre si on a
l'autorisation d'appeler ou non. En tout cas, pour autant qu'on soit
concerné, on veut tout simplement obtenir un avis sur
l'interprétation qui a été donnée de certains
volets de la décision. C'est tout simplement cela qui est en cause et on
va voir là-dedans - c'est ce qui est prévu dans la loi - ce que
la Cour provinciale statuera.
M. Picotte: Mes remarques sont en ce sens que vous comprendrez
sans doute que cela devient pour le moins un peu nébuleux parce que,
tantôt, j'avais tenu pour acquis qu'évidemment la décision
n'était pas prise d'aller en appel. Les informations que je viens de
vérifier m'indiquent que, le 14 mars, il y avait eu un avis d'appel
signifié, que la requête pour permission d'en appeler avait
été déposée le 19 mars en Cour provinciale, par
l'office, et que finalement, ce matin, la requête a été
entendue par le juge Philippe Bouchard qui l'a prise en
délibéré. À ce moment, vous accepterez avec moi
qu'il y a une légère nuance par rapport à ce que vous
m'avez dit tantôt. J'aurais aimé, tantôt, que vous me disiez
cela.
M. Moreau: Je leur ai demandé de procéder pour ne
pas perdre les délais. Maintenant, le contenu de l'appel, c'est une
chose qui reste à voir. Comme je vous le dis, il y a trois étapes
à franchir et, d'ici à ce temps, on va voir. C'est comme dans
tout procès; vous savez, dans tout procès, vous pouvez retirer
votre cause si vous vous apercevez, à un moment donné... Je pense
que c'est normal et c'est la même chose là-dedans.
M. Picotte: J'aurais aimé que vous me disiez cela
tantôt, par exemple, que vous aviez demandé qu'on
procède.
M. Moreau: Ce matin, j'avais d'autres préoccupations,
notamment la commission. Il ne faut pas trop avoir de rigueur
là-dessus.
M. Picotte: Vous connaissez bien vos dossiers,
habituellement.
M. Moreau: Écoutez, disons que, ce matin, cela m'a
échappé. Je me suis levé peut-être un petit peu plus
tard, je ne le sais pas, mais cette dimension m'a échappé.
Il y en a qui se lèvent plus tôt que moi, à
l'office.
M. Picotte: C'est malheureux!
M. Moreau: À 5 heures au lieu de 6 heures; voyez-vous, ils
sont levés avant moi.
M. Picotte: En tout cas, je ne veux pas en faire un plat, mais il
reste que, là, j'ai une version un peu différente. Je ne vous
cacherai pas que cela me déçoit un peu, mais, en tout cas,
disons...
M. Moreau: Je m'excuse. Je suis très vexé que vous
soyez à ce point...
M. Picotte: Non!
M. Moreau:... touché; je m'en excuse à l'avance. Je
ne voudrais pas induire la commission en erreur, loin de là; j'ai trop
de respect, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, pour cette
distinguée commission.
M. Picotte: C'est parce que, tantôt, certains de mes
collègues trouvaient que j'allais un peu trop loin. Je pense que je ne
suis pas encore allé assez loin. Si je n'étais pas allé
vérifier, je ne l'aurais pas su.
M. Moreau: C'est bien.
M. Picotte: Malheureusement! En tout cas, passons
là-dessus.
À la lecture de votre rapport, vous dites, à un moment
donné, que l'Office du crédit agricole n'a pas
échappé au Conseil du trésor en regard de son
efficacité administrative. J'aimerais savoir, d'abord, combien de temps
les inspecteurs du Conseil du trésor ont passé à l'office.
Est-ce qu'ils ont été là longtemps? Qu'est-ce qu'ils sont
allés faire exactement? Quelles sont les recommandations qu'ils vous ont
faites? Est-ce qu'il y a eu un rapport qui a été fait à
l'office à la suite de cela? Qu'est-ce que cela contenait? Qu'est-ce que
voulait dire ce rapport?
M. Moreau: J'ai exprimé, dans le document de ce matin, que
c'était une étude conjointe. Ce n'est pas une enquête
royale qui a été faite; c'est tout simplement une étude
conjointe sur notre fonctionnement, l'office et les membres du
secrétariat du Conseil du trésor. On a eu, je ne sais trop,
peut-être cinq ou six réunions. Nos gens faisaient la cueillette
à l'extérieur, dans le champ. Ils ramassaient les données.
On en discutait, ceci pour retenir des indicateurs de productivité, en
collaboration avec les membres du secrétariat du Conseil du
trésor. Nous en sommes venus, comme je le mentionnais ce matin, à
un protocole d'entente avec le Conseil du trésor, pour justement retenir
certains indicateurs, partant d'un jour J, à ce moment-là le
début du protocole, pour voir comment, dans le temps, on va
améliorer nos délais, notre productivité et nos services
à la clientèle, etc.
Ce n'est pas plus malin que cela. Cela nous permet, en collaboration
avec le Conseil du trésor, de rencontrer les organismes centraux pour
essayer d'avoir, dans certains cas, certaines dérogations, pour voir
comment on peut obtenir plus d'efficacité jsutement à la faveur
de certaines dérogations - il y en a qui sont souhaitables. C'est ce
qu'on va tenter de faire. Il y a une expérience qui se fait dans ce
sens. Ce n'est pas plus malin que cela, ce qui s'est fait. Comme je vous le
disais, cela nous a amenés à repenser notre fonctionnement,
l'équilibre de nos ressources, en nous basant toujours sur le dossier
client. C'est ce que nous avons réalisé jusqu'à ce jour.
À partir de là, cela va nous permettre d'avoir, je dirais, un
travail plus régularisé et d'être également plus
efficaces.
M. Picotte: Est-ce qu'il y a eu, effectivement, un rapport ou des
recommandations?
M. Moreau: Un rapport ou des recommandations? Je ne sais pas ce
que vous entendez par là. C'est une étude conjointe, on en est
venu à une conclusion. On a débouché sur un protocole
d'entente.
M. Pîcotte: Est-ce qu'il y aurait possibilité que
vous nous déposiez ici, à la commission, ce rapport ou cette
étude?
M. Moreau: On pourrait vérifier avec le Conseil du
trésor; personnellement, je n'ai pas...
M. Picotte: Vous n'avez pas d'objection à ce qu'il soit
déposé.
M. Moreau: Ce que j'allais dire, c'est une marque de confiance.
C'est que le Conseil du trésor - quand je dis qu'on n'a pas
échappé au Conseil du trésor - a réalisé les
efforts que nous faisions depuis un certain nombre d'années afin
d'être de plus en plus efficaces. Ils se sont aperçus,
effectivement, que certaines contraintes nous handicapaient, dans une certaine
mesure, dans ces efforts. C'est dans ce sens-là qu'ils ont dit:
Écoutez, allons voir si, au niveau d'une expérience sur la
productivité, on ne pourrait pas tenter certains efforts. C'est cet
effort qui a été tenté tout simplement avec l'aide du
Conseil du trésor.
M. Picotte: M. le Président, vous comprendrez que
j'insiste sur le dépôt de ces recommandations ou de ce rapport,
ou, en fait, de ce protocole d'entente.
M. Moreau: Tout ce qu'il y a, c'est un protocole d'entente de
quelques pages. Je ne vois pas d'objection à déposer le protocole
en question.
M. Picotte: M. le Président, je vais me remettre de mes
émotions et je vais passer la parole à un autre.
Le Président (M. Vallières): M. le
député d'Iberville.
M. Beauséjour: Merci, M. le Président. À la
page 6, en bas, il est question de la banque de terres et, de la façon
dont le texte est écrit, c'est maintenant opérationnel;
"permettra l'achat", cela veut dire à l'avenir. Est-ce que cela veut
dire que, dans votre banque, vous avez déjà des pièces
justificatives, c'est-à-dire des terres ou des parties de terres qui
peuvent être disponibles?
M. Moreau: Elles ne sont pas disponibles actuellement, mais on
est en tractation. Il y a des évaluations qui ont été
faites dans deux régions. Il y a des contre-propositions de faites sur
les questions de prix, et des transactions pourraient se
réaliser dans les prochaines semaines.
M. Beauséjour: Est-ce que vous voulez dire que ce sont des
terres qui sont propriété gouvernementale maintenant, ou si ce
sont des terres qu'il est question " d'acheter?
M. Moreau: Non, ce sont des terres d'individus. Dans certains cas
ce sont des terres déstructurées, dans d'autres cas ce sont des
terres pas tellement déstructurées mais qui pourraient avoir une
vocation pour les céréales; elles appartiennent, je pense, dans
les deux cas à des compagnies. Ce sont des étendues assez
considérables, des blocs de terres. C'est là-dessus,
actuellement, que nous avons procédé à certaines
évaluations et nous sommes en train d'évaluer la
possibilité d'une transaction.
M. Beauséjour: Est-ce qu'il est question que d'autres
ministères vous refilent des parties de terres - que ce soit les
Transports ou peut-être les Terres et Forêts qui pourraient
être propriétaires de parties - qui puissent être utiles
plutôt à l'agriculture? Est-ce qu'il est question de vous refiler
cette responsabilité?
M. Moreau: C'est possible, il en a été question
à quelques reprises, mais depuis un an et demi disons que de ce
côté... Au ministère, ils travaillent sur la gestion des
terres, ils travaillent dans une concentration à ce niveau,
peut-être qu'éventuellement ce sera plus facile. Je sais que le
ministère se chargeait d'agglutiner des lots pour que ce soient des lots
potables. Alors, peut-être qu'après cette opération on
verra que ce sera plus facile à réaliser.
Problèmes avec le personnel (suite)
M. Beauséjour: Merci. À la page 20, on dit: "De
plus, l'office a inséré dans son programme d'information des
cours en technique d'entrevue pour favoriser le développement des.
aptitudes en relations humaines et ainsi améliorer son service à
la clientèle. " Depuis quand existent ces cours et à qui sont-ils
offerts? Est-ce que c'est au personnel qui est là actuellement ou
à de futurs...
M. Moreau: Comme on le mentionne ici, "dès leur
entrée en fonction" ces cours sont disponibles et, par la suite, on
continue à leur en donner. Je pourrais vous donner une Idée du
nombre d'heures de cours, par exemple, chez nos conseillers, pour les
dernières années.
M. Beauséjour: Depuis combien de temps cela
existe-t-il?
M. Moreau: Les cours en évaluation existent depuis des
années, je dirais depuis... ■ M. Beauséjour: De
technique d'entrevue?
M. Moreau: La technique d'entrevue, c'est relativement
récent. Cela peut faire quatre ou cinq ans. J'ai ici une liste
très élaborée de tous les cours et je pense que, au total,
il y a eu, si je prends pour les sept dernières années, 1400
journées - depuis 1977-1978, disons - de cours qui ont été
suivis par nos conseillers ou conseillères en financement. J'ai toute la
nomenclature ici. Il y en a dans tous les domaines, des symposiums, des cours,
des colloques, etc., qui sont considérés comme du
perfectionnement.
M. Beauséjour: Par expérience personnelle, dans ma
région, je ne sais pas si ces cours ont eu des effets, mais j'ai
ressenti que l'approche de certains conseillers auprès d'agriculteurs me
semble avoir changé favorablement. Bien sûr, il reste de
l'amélioration et, quand on parle du libre choix du conseiller - c'est
revenu souvent dans les mémoires - cela vient peut-être du fait
aussi qu'on a relevé - des groupes de dames entre autres - des
expressions de conseillers qui étaient déplorables. Dans mon
milieu, j'ai eu, dans le passé, des remarques sur la façon...
Comment puis-je dire? Parfois, cela prend seulement un sourire pour être
accueillant. Cela n'existait pas toujours.
Je remarque que - cela fait un certain temps que je suis dans le milieu
- ces réflexions déplaisantes au sujet des conseillers ont
diminué. C'est pour cela que, quand j'ai lu qu'il existe des cours en
technique d'entrevue, je ne sais si c'est le résultat mais, en tout cas,
je dirais que c'est tout à l'honneur de ceux qui les ont suivis.
Possiblement que les résultats que j'ai pu remarquer peuvent, entre
autres, venir de techniques comme celles-là, qui sont toujours utiles.
Tout ce que je peux souhaiter, c'est que cela se poursuive de telle
façon que les agriculteurs et agricultrices qui reçoivent des
services de conseillers soient... Au point de vue de la compétence, il
ne semble pas y avoir de problème mais, au point de vue de l'accueil et
de l'entrevue, je souhaite que cela s'améliore toujours. Je vous
félicite, je dirais même, d'encourager d'autres à
poursuivre ces cours. (17 h 15)
M. Moreau: Merci bien.
M. Beauséjour: II y a un autre aspect. Vous parlez,
à la page 22, des délais - c'est 104 jours - en nous donnant tous
les chiffres de prêts qui se font et qui ont augmenté
énormément. Je comprends qu'à la fois il a fallu concilier
le nombre de prêts qui a
augmenté et le besoin de raccourcir les délais. Je vois
que vous avez indiqué toute une politique pour en arriver là.
Cela va répondre à un grand désir du monde agricole de
réduire les délais.
Le Président (M. Vallières): Je m'excuse. Vous avez
terminé, M. le député d'Iberville? M. le
député de Huntingdon.
M. Dubois: Je voudrais vous saluer, M. le Président, ainsi
que les personnes qui vous accompagnent. Je voudrais traiter tout d'abord du
problème du refus que les demandeurs reçoivent, la lettre type
qui est quand même assez froide. C'est une douche d'eau froide quand on
reçoit cette lettre.
Vous aviez mentionné, ce matin, que vous aviez pris une attitude
différente, enfin, vous étiez pour prendre une attitude
différente.
M. Moreau: Depuis un an et demi, deux ans.
M. Dubois: C'est parce que j'ai des cas assez récents
où la lettre n'a pas changé, en ce qui me concerne, en tout cas.
J'ai lu exactement la même chose que je lisais il y a deux ans ou
trois ans.
Une voix: Ah bon!
M. Dubois: Le manque de capacité de remboursement; cela
arrête là.
M. Moreau: C'est laconique, c'est vrai.
M. Dubois: La question que je veux poser là-dessus: Est-ce
qu'il serait possible que les officiers en financement puissent discuter des
raisons fondamentales du refus avec les familles?
M. Moreau: lis le font.
M. Dubois: II semble ne pas y avoir un contact qui
s'établisse entre les officiers et les demandeurs lors d'un refus.
M. Moreau: Comme je l'ai expliqué ce matin, ils le font
couramment dans la très, très grande majorité des cas,
d'après mes informations, et ils passent quelques heures même,
dans certains cas, à expliquer tous les points du dossier et pourquoi on
s'achemine vers un refus. Par la suite, l'agriculteur n'a qu'à appeler
notre conseiller ou conseillère, il n'a qu'à appeler notre
directeur régional et il va avoir toutes les informations additionnelles
qu'il désire. S'il le veut, il peut nous écrire; on va lui donner
plus de détails sur le refus et on peut le rencontrer comme on le fait
couramment au siège social pour lui expliquer la raison du refus.
M. Dubois: Comme vous le savez, la région que je
représente est très développée au plan de
l'agriculture. Alors, je reçois assez souvent des gens
mécontents, à mon bureau, qui m'indiquent un manque de
collaboration après le refus. Il semblerait -enfin, selon ce que
j'entends - que les officiers en financement sont un peu réticents
d'aller expliquer à fond les raisons fondamentales du refus. Je ne sais
pas si c'est un cas fréquent, mais je l'entends assez souvent chez nous
dans le comté, à savoir qu'une fois le refus envoyé, la
lettre envoyée, c'est au point mort. Il n'y a plus de discussion qui
s'établisse.
Je pense qu'il y aurait lieu d'améliorer cet
élément, en tout cas. Cela serait quand même à la
faveur du demandeur qui reçoit un refus, et je pense que la personne
serait pas mal plus heureuse, au moins, de connaître les raisons
fondamentales. Je pense que dans maints cas ils n'ont pas la possibilité
de savoir à fond tous les points qui peuvent être négatifs
à leur dossier et qui ont amené un refus. Dans ce sens, je pense
qu'il y a encore des améliorations à faire.
M. Moreau: II y aurait possibilité de vous fournir toutes
les visites, les appels téléphoniques, les lettres qui ont
été envoyées à la suite de refus. Je peux vous
assurer que c'est très facile pour le requérant d'obtenir toute
l'information pertinente à son refus. Encore faut-il qu'il s'adresse au
bon endroit, remarquez bien. S'il ne va pas voir notre conseiller en
financement ou notre conseiller régional ou notre... Là-dessus,
on reçoit couramment des lettres et on reçoit des gens à
notre bureau, au siège social, et notre directeur régional en
rencontre énormément lui aussi de son côté.
Maintenant, comme je vous le mentionnais tout à l'heure, au
départ, notre politique, la consigne pour tous nos employés
à l'extérieur, en même temps qu'ils vont faire l'expertise,
c'est de faire cheminer le requérant pour que justement chaque
élément du dossier soit partagé par les deux. C'est ce
qu'on essaie de faire et, par la suite, on discute de ce dossier - comme je le
mentionnais - abondamment _ avec le requérant. Ce n'est peut-être
pas satisfaisant, et, bien sûr, il faut se placer dans la situation d'un
requérant qui est refusé. Il y en a qui obstinément - et
on ne peut pas les en blâmer non plus - vont vouloir... Cela ne veut pas
dire qu'il n'y a pas d'information, mais l'information, ils ne l'acceptent pas,
et c'est un peu normal aussi. Alors, à ce moment, on a beau revenir et
revenir, il faut admettre qu'il peut y avoir une certaine détermination
à vouloir à tout prix obtenir un prêt et, sur cela, je
dirais que c'est de bonne guerre.
M. Dubois: J'aimerais soulever un point, et c'est loin
d'être une accusation envers l'Office du crédit agricole. Dans une
région horticole, par exemple, comme celle de Huntingdon, les revenus
d'un agriculteur ne sont pas toujours comptabilisés, comme vous le
savez. Il y a des ventes au Marché central métropolitain et
à d'autres marchés publics qui se font en argent. Les gens ne
sont pas payés par chèques comme pour des paies de lait. C'est
pas mal plus facile d'analyser les revenus d'une ferme laitière ou d'une
ferme, par exemple, de production d'oeufs qu'évaluer les revenus d'un
horticulteur quand 25% ou 50% des ventes -cela joue dans cela - se font en
argent comptant. Quand l'officier visite le fermier, c'est bien sûr qu'il
va se fier à la comptabilité de l'année
précédente ou des années précédentes sur ses
revenus, il n'y a pas bien des choix, même si l'agriculteur, des fois,
aurait des capacités supérieures à ce que ses états
financiers peuvent démontrer. J'ai constaté, à certaines
reprises, qu'il y a un problème quand il s'agit de comptabiliser le
revenu d'un agriculteur dans l'horticulture où il se vend plusieurs
choses en argent sonnant, comme on dit. Cela semble soulever un problème
chez certains horticulteurs parce que, dans maints cas on me dit: Pourtant je
suis capable de payer, j'ai les revenus pour. Je leur dis: Es-tu capable de le
démontrer sur papier? Bien, j'ai vendu pour 25% ou 35% en argent
comptant. Cela cause un problème. Je ne sais pas si cela est pris en
considération au niveau de l'Office du crédit agricole, les
ventes qui ne seraient pas comptabilisées. Ce n'est pas parce que je
veux favoriser cet état de choses, mais il reste que c'est un fait connu
et existant.
M. Moreau: Je ne dis pas que c'est facile, mais il y a moyen, je
pense, de pallier cette difficulté par les rendements à l'acre,
par les rotations des cultures, etc. Il y a moyen quand même par d'autres
façons de cerner cette réalité et d'être en mesure
avec la parole - il faut quand même se fier aussi au requérant
dans cela - de l'agriculteur de corroborer par le rendement et par d'autres
données si c'est vraisemblable ou pas. Cela m'apparaît possible et
je pense qu'on le fait en pratique, sauf qu'en disant que cela est possible je
ne dis pas que c'est facile nécessairement.
Approche globale et intégrée
quant aux prêts agricoles
M. Dubois: Un autre point que j'aimerais soulever, c'est le
fameux prêt tandem, institution financière-office. Selon votre
mémoire de ce matin, on laisse entendre que c'est quelque chose
d'inusité, le fait... Il existe des prêts tandem depuis 1979 ou
quelque chose comme cela... M. Moreau: 1978.
M. Dubois: 1978. Si l'on retourne dans le passé, il y
avait des prêts d'amélioration des fermes accordés par la
banque qui se faisaient un peu dans le même sens et garantis par l'Office
du crédit agricole; ce n'était pas des prêts à long
terme. Le concept était déjà établi dans le sens
que les institutions financières fonctionnaient avec l'Office du
crédit agricole sur une garantie de prêt. C'est à peu
près le même concept.
M. Moreau: Oui. Globalement, on peut dire que c'est le même
concept, bien sûr. La meilleure preuve, c'est qu'on s'est inspiré
de cette performance qui était tout à fait exceptionnelle au
niveau de la Loi favorisant l'amélioration des fermes pour bâtir
l'autre, mais ce que le prêt tandem offre de plus, c'est qu'il y a un
réservoir de ressources mis à la disposition des agriculteurs
pour procéder à l'expertise, comme je l'ai mentionné dans
le document. On ne pouvait pas faire cela avec la Loi favorisant
l'amélioration des fermes ni avec le crédit à la
production, sauf la partie du crédit à la production en haut de
25 000 $ qui parle de l'autorisation préalable. La Loi favorisant
l'amélioration des fermes telle que conçue à venir
jusqu'à tout récemment, en haut de 50 000 $ on a une autorisation
préalable. Si vous vous souvenez de l'époque du début de
l'amélioration des fermes à laquelle vous faisiez allusion tout
à l'heure, c'est de l'a posteriori que nous faisions à l'Office
du crédit agricole. Le prêt était consenti, nous examinions
si c'était conforme au règlement, et le tour était
joué. Alors que le prêt tandem, ce n'est pas cela. Toute
l'expertise est faite par l'Office du crédit agricole, etc. Cela change
sensiblement la formule. C'est la grande différence entre les deux
modules, le moyen terme et le long terme, et c'est essentiellement ce qui fait
l'originalité de la formule tandem chez nous.
M. Dubois: Pour le fermier, que son chèque provienne d'une
banque qui reçoit un certificat ou qu'il provienne directement de
l'office, cela ne change pas sa situation.
M. Moreau: II y a quand même tout un conseil, qui va
s'améliorer, comme je le mentionne dans le document, qui lui est
accessible présentement et qu'il n'y avait pas avec la Loi favorisant
l'amélioration des fermes. Cela déborde le cadre des prêts
qu'on a connus avec la Loi favorisant l'amélioration des fermes à
partir de 1962 en montant.
M. Dubois; On peut remarquer, dans les états financiers du
ministère de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation, qu'avant 1978 il y avait des
masses d'argent impliquées pour répondre à la demande de
prêts, dans le temps où vous envoyiez directement les
chèques aux agriculteurs. Cela a été une façon pour
le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
de se libérer d'une masse d'argent en l'envoyant aux banques. Il reste
que les responsabilités sont les mêmes ainsi que les garanties,
mais là où je le considère plus comme une innovation,
c'est sur le plan projection des dépenses publiques d'un gouvernement ou
des coûts de fonctionnement. En réalité, que l'argent
vienne de l'office ou qu'il vienne d'une banque directement, je ne vois pas
beaucoup de différence. Il reste une chose, pour les états
financiers gouvernementaux, on enlève cette partie - elle n'existe plus
- qui était empruntée pour répondre aux demandes de
prêts.
Cela a été, d'après moi, plutôt - c'est ma
conception - une façon déviée de la part du
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation de
se sortir de ce problème en renvoyant aux banques le pouvoir de
prêter sur un certificat. Vous n'avez plus à comptabiliser les
montants prêtés, seulement les déficits, pas les
déficits, mais les remboursements d'intérêts et les pertes
accumulées sur des faillites, quelque chose comme cela.
M. Moreau: II y a plus que cela. Vous mettez en cause toute la
philosophie.
M. Dubois: Je ne la mets pas en cause. C'est parce que M. Garon,
le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, se
plaît à nous dire: J'ai inventé cette affaire. Il y avait
des raisons fondamentales là-dedans que je vois sur le plan
budgétaire.
M. Moreau: C'est un avantage - vous avez absolument raison -
substantiel, mais il y a beaucoup d'autres avantages. Il ne faut pas oublier
une chose, c'est que vous avez des institutions, sur place, qui
s'approvisionnent dans le milieu; c'est normal que ces sommes retournent dans
le milieu. Vous avez des institutions qui connaissent très bien les
agriculteurs. Sur nos listes, il y a environ 1450 prêteurs, je pense,
dont 1100 ou 1200 actuellement, et d'autres potentiels, qui viennent
sporadiquement. C'est quand même toute une armée de prêteurs
qui ont la vocation de prêter, qui ont les ressources voulues pour
prêter. Pourquoi le gouvernement leur ferait-il concurrence, alors qu'ils
sont précisément dans le secteur pour ce faire? II y a toute la
question du réservoir de la ressource avec l'optimisation que cela
apporte au niveau du fonctionnement. Il n'y a pas de dédoublement. Vous
avez une équipe spécialisée qui est au service de tous ces
prêteurs. C'est quand même une certaine originalité et ce
n'est pas facile à réaliser, parce qu'il y a beaucoup de gens qui
sont impliqués dans le système, dans le régime.
Cet avant-midi, j'ai parlé de l'intérêt. Il y a
certains pays qui ont manifesté beaucoup d'intérêt pour le
tandem. Je pourrais vous dire, pour connaître quelque peu le
système de ces pays, que ce ne serait pas facile à
réaliser chez eux. On a peut-être chez nous, au Québec,
à cause d'une saine concurrence entre les secteurs banquiers, les
caisses populaires, par exemple, et les caisses d'établissement, un
tissu socio-économique qui se prête très bien à ce
genre de formule. Je pense que cette formule s'est épanouie chez nous
justement à cause de ce climat, cette situation qui n'est pas facile
à recopier, même ailleurs.
Il faut admettre qu'il y a beaucoup de points forts dans le tandem.
C'est vraiment une synthèse - comme on le disait - tous services. Vous
donnez à un agriculteur l'occasion d'avoir tous les services au lieu
d'être limité à un organisme spécialisé,
exclusif, comme par le passé. Il y a beaucoup d'avantages, notamment un
très important, celui que vous avez soulevé, c'est bien
sûr. II y a une disponibilité de fonds quasiment
instantanée sur place, alors qu'avant il y avait des délais
reliés à l'obtention des fonds. Il y avait des coupures dans
l'obtention des fonds. Déjà, de ce côté, vous
soulevez un avantage nettement substantiel, mais ce n'est pas le seul, il y en
a beaucoup d'autres. (17 h 30)
C'est vrai que c'est une formule originale, je pense, si vous comparez
ce qui se fait au pays avec ce qui se fait à l'étranger. Moi,
cela fait depuis 1971 que je suis membre du comité centra! de la
Confédération internationale du crédit agricole. J'ai des
contacts avec beaucoup de pays, des collègues dans d'autres pays et je
puis vous dire que les pays manifestent beaucoup d'intérêt pour la
formule tandem. Cela ne veut pas dire que cela va être réalisable
chez eux et que cela se ferait facilement, mais il demeure que cela a
suscité un intérêt. Je pourrais parler du congrès de
Munich, par exemple, du congrès d'Athènes. Je pourrais vous
parler de la correspondance avec l'Irlande, par exemple, qui est
intéressée à notre système. Je pourrais vous parler
du Portugal, qui nous a invité à aller lui expliquer notre
système et à étudier le sien en contrepartie. S'il y a un
intérêt comme celui-là, c'est quand même qu'il y a
une certaine singularité dans la formule.
Je pense qu'il faut analyser l'ensemble, bien sûr, de ce dossier.
Mais l'argument que vous apportez est très réel, je ne conteste
pas cela, loin de là.
M. Dubois: Je ne conteste pas non plus le fait que le prêt
tandem existe et je ne le mets pas en cause non plus, loin de là. Je
sais que cela fonctionne bien. Tout ce que je voulais mettre en relief
c'était l'aspect politique du dossier, parce qu'avant cela on devait
accumuler ces montants dans le budget global. Sur le plan politique, cela a
été, je pense, un coup heureux pour les agriculteurs, heureux
pour les banques, heureux pour les institutions financières; cela a
été un coup politique brillant, je pense, et je le constate. Je
ne mets pas en cause la formule, remarquez bien.
Au niveau des réserves pour pertes, cela s'élève
à combien? La réserve, par exemple, 1984-1985, la réserve
indiquée pour pertes, c'est de quelle grandeur?
M. Moreau: On va vous donner ce qu'on a dans le rapport du fonds
d'assurance-prêts agricoles et forestiers, les pertes prévisibles.
Vous avez, dans le rapport annuel qui vous a été
distribué. Vous voulez savoir, en d'autres termes, ce qu'on
prévoit comme pertes. Au cours de l'exercice, le fonds a
déboursé près de 5 000 000 $ des quelque 29 000 000 $
qu'il estimait devoir rembourser aux prêteurs au 31 mars 1983. Cela n'a
pas été au rythme qu'on avait prévu que cela irait
finalement, à cause des délais dans la réalisation des
garanties, voyez-vous.
Selon une analyse des prêts assurés au 31 mars 1984, le
montant estimé de pertes que le fonds sera appelé à
rembourser aux prêteurs a été majoré pour le porter
à 53 000 000 $. Le déboursement s'étalera sur plusieurs
exercices. En d'autres termes, si on prend toutes les pertes prévisibles
dans les dossiers pour peut-être quatre à cinq ans à venir,
c'est l'ordre de grandeur qu'on prévoit. Maintenant cela s'ajuste d'une
année à l'autre, comme je vous le mentionnais; il y a eu un
ajustement au départ et cela se peut qu'il y ait d'autres ajustements
à la baisse comme à la hausse suivant que la conjoncture se
consolidera ou empirera.
M. Dubois: C'était pour en venir à discuter de
réalisation de garanties. Je ne parle pas de fonds de terre, parce que
c'est sûr que cela peut varier, cela a varié quand même
depuis quelques années dans certaines régions, mais de
l'équipement vendu par shérif. Vous donnez, à un certain
moment, le mandat à l'institution financière de réaliser
les garanties, je pense, et d'autres fois c'est l'office qui le fait. C'est
cela?
M. Moreau: C'est-à-dire qu'on ne donne pas de mandat,
c'est la loi qui autorise l'institution à procéder et à
nous confier le mandat. C'est l'inverse. Alors, si elle ne nous confie pas le
mandat de réaliser, c'est elle qui réalise.
M. Dubois: Est-ce qu'il y a un pourcentage de cas où c'est
l'office et un pourcentage de cas où c'est l'institution
financière?
M. Moreau: On va vous donner cela. Si vous permettez, cela ne
sera pas long.
M. Dubois: En tout cas, je vais continuer parce que tout cela
c'est pour m'emmener à la gérance de la réalisation des
garanties. J'ai pu constater que dans trois cas bien précis il y a eu -
je pense en tout cas, c'est mon opinion - une très mauvaise
gérance dans l'administration de la réalisation des garanties,
par exemple au niveau des équipements. Ceux-ci se seraient vendus
à 10%, 15%, 20% de leur valeur réelle et la publicité ne
se serait pas faite autour de l'encan. J'ai constaté même que dans
un cas précis un équipement d'un an s'est vendu à 3% de sa
valeur réelle. Moi, je trouve qu'il y a beaucoup de pertes; cela ne
représente peut-être pas des millions, mais il y a beaucoup de
pertes dans la gérance de la réalisation des garanties. Je ne
sais pas si vous avez une opinion là-dessus, mais je pense qu'il y
aurait certainement une amélioration à apporter à cette
gérance. Il y a des cas précis que je pourrais vous indiquer
à huis clos, si on veut, parce que j'aime autant ne pas citer de noms,
mais où les fonds publics ont perdu beaucoup, selon mon
évaluation. Étant dans l'équipement, sur le plan
personnel, je peux vérifier et savoir combien vaut une pièce
d'équipement; quand je sais que cela s'est vendu à 10% ou
à 20% de sa valeur marchande, il y a quelque chose qui ne marche
pas.
Je ne sais pas si dans ces cas-là c'est l'office qui s'est
occupé de réaliser les garanties ou si c'est l'institution
financière. Je ne peux pas vous le dire. C'est pour cela que je vous
demandais quel pourcentage est réalisé par l'office et quel
pourcentage est réalisé par l'institution financière. Si
c'est l'institution financière, je ne veux quand même pas mettre
l'office en cause.
M. Moreau: On me dit à peu près un tiers-deux
tiers, et deux tiers à l'office.
M. Dubois: Deux tiers à l'office.
M. Moreau: Là-dessus, M. le Président, j'aimerais
simplement faire un commentaire. C'est bien sûr que la crise a pris tout
le monde par surprise. Des pertes, on n'en a jamais eu à venir jusqu'au
début de la crise. Alors, c'était nouveau pour tout le monde et
puis l'administration - je pense qu'à certains égards vous avez
raison - ce n'est pas nécessairement égal d'une région
à l'autre. Ce ne sont pas tous nos représentants qui
étaient fin prêts au moment de la crise. Bien sûr qu'avec le
temps on leur a donné
des instructions. On leur a fait donner également des... Par
exemple, on a eu à un moment donné une réunion avec un
spécialiste pour leur apprendre ce qui arrive dans tous ces
cas-là, l'éventail de la réalisation des garanties, qu'il
s'agisse de faillite, de dation en paiement ou de tous les moyens qui peuvent
être utilisés. Évidemment, notre contentieux leur fournit
toute l'information voulue. Ce que je veux dire par là, c'est qu'au
départ c'est possible qu'on ait eu des hésitations parce qu'on
n'était pas spécialisés là-dedans, c'est bien
sûr, et on a tellement été pris par surprise. Mais je pense
qu'il y a beaucoup d'accidents de parcours qu'on a corrigés depuis ce
temps-là. Dans bien des dossiers on a une expertise qu'on n'avait pas au
départ mais qui, aujourd'hui, est nettement à la hauteur de la
situation. Je le croirais.
M. Dubois: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vallières): Alors, M. le
député de Huntingdon, avant de remettre la parole au
député d'Arthabaska, j'aurais une autre question à poser
à M. le président. Si ma mémoire est fidèle, vous
m'avez mentionné qu'au cours du traitement d'un dossier il n'y avait pas
de changement qui intervenait sans qu'il y ait consultation avec le producteur.
Lors de nos auditions en région, il y a au moins trois groupes, soit
l'Association de la relève agricole de Saint-Hyacinthe, la
Fédération de la relève agricole du Québec et
l'Union des producteurs agricoles du Québec, qui ont prétendu
qu'il y a des modifications. Je veux vous citer M. Blanchette, de l'Union des
producteurs agricoles, qui dit à un moment donné dans son
exposé: "Très fréquemment, l'employé de l'office
modifie la demande de prêt sans en informer l'agriculteur. C'est cette
demande modifiée qui est envoyée à Québec pour
approbation. L'agriculteur reçoit quelques mois plus tard une offre de
prêt qui ne correspond pas à sa demande. Il a alors le choix
d'accepter ce prêt ou de reprendre à zéro une
procédure qui dure plusieurs mois. " Un peu plus loin, dans les
recommandations que fait l'Union des producteurs agricoles, on dit à
l'article 8: "Ne jamais modifier les modalités d'une demande de
prêt sans que l'agriculteur n'ait été consulté, pour
éviter que l'agriculteur ne se retrouve avec des offres de prêts
qui ne correspondent pas à sa demande et avec lesquelles il n'est pas
nécessairement d'accord. " Les propos de M. Blanchette font suite
à une question du député de Maskinongé, reprise par
M. Proulx, qui est président de l'organisme et qui dit: "J'aimerais
ajouter à cela que ce n'est pas sporadique et que ce n'est pas
isolé. Il y en avait assez pour que cela vaille la peine qu'on le mette
dans nos recommandations. "
Alors comment expliquer... ?
M. Moreau: J'ai bien mentionné ce matin que c'était
le document de la demande qui était le coeur du dossier. On ne modifie
pas la demande de l'agriculteur, à moins que lui-même la modifie
et l'initiale. Je ne parle pas de son projet en cours de route. Vous me disiez
tout à l'heure que j'avais dit qu'il n'y avait jamais de modifications
dans son dossier. Entendons-nous bien, il y a des modifications dans le
dossier. Je vous parle de son document proprement dit, de la demande d'emprunt.
C'est son document. On respecte cela. On ne le corrige pas et on ne le change
pas sans qu'il l'initiale, sans avoir son accord là-dessus, c'est
évident. Cela lui appartient, c'est son document. Ceci étant dit,
c'est bien sûr qu'il y a un cheminement dans le dossier. J'en ai
parlé ce matin, j'en ai reparlé cet après-midi, il y a un
cheminement dans le dossier. On a une définition, par exemple, de la
ferme rentable, que j'ai citée à deux reprises dans
l'exposé. C'est bien sûr que, partant de cette définition,
il y a des cas où on ne peut absolument pas anticiper une
capacité de remboursement. Qu'est-ce qui arrive? On discute avec le
requérant et on modifie le projet, en accord avec le requérant.
Écoutez, d'autorité, on n'est pas qualifié pour dire au
bonhomme: Écoute, on modifie ton projet dans tel sens. Sauf qu'on fait
des calculs avec lui, c'est le cheminement dont je vous parlais tout à
l'heure. On dit: II faut que tu arrives à la rentabilité; avec 20
vaches, ce n'est pas possible, dans ton cas, compte tenu de son endettement et
d'un tas de facteurs. Alors, pour que ce soit rentable, il faudrait que tu aies
un revenu plus substantiel. C'est bien sûr que, à ce
moment-là, de part et d'autre, il y a discussion sur un projet. On en
vient à un compromis. Ce qui m'étonne, c'est qu'on dise que le
bonhomme n'est pas du tout au courant et qu'il apprend, par la réponse,
que son projet a été changé. J'aimerais qu'on cite des
noms, qu'on apporte des cas concrets. Cela est trop facile à dire.
Remarquez bien, je ne conteste pas la véracité des faits, mais
qu'on nous apporte quelque chose de concret pour qu'on puisse vérifier
les dossiers.
Le Président (M. Vallières): D'accord. C'est parce
que c'est quand même dit par des gens qui ont...
M. Moreau: Oui, justement.
Le Président (M. Vallières):... la
responsabilité d'un des principaux organismes...
M. Moreau: Oui.
Le Président (M. Vallières):... re-
présentant les producteurs agricoles. Je trouve que ce serait
important qu'on éclaircisse le point. Parce que, comme vous le
mentionnez ce matin, il y a des choses qui sont véhiculées...
M. Moreau: Oui.
Le Président (M. Vallières):... et le but de la
commission, à un moment donné, c'est peut-être de faire la
lumière sur ce genre de choses.
M. Moreau: Oui.
Le Président (M. Vallières): Là,
malheureusement, on ne peut pas... Enfin, je vais probablement écrire
à M. Blanchette ou à M. Proulx, pour qu'ils nous précisent
des cas.
M. Moreau: Oui.
Le Président (M. Vallières): On pourra
peut-être vous les référer afin que vous vérifiiez
la véracité de ces faits. Ils ont vraiment insisté. Cela
me surprenait, venant de gens qui ont des responsabilités comme les
leurs, qu'ils puissent avancer des choses comme cela.
M. Moreau: Je serais très heureux que nous ayons des noms,
pour que nous puissions vérifier les dossiers, M. le
Président.
Le Président (M. Vallières): Je vous remercie. M.
le député d'Arthabaska.
M. Baril (Arthabaska): Merci. Sur le même sujet, ne
pensez-vous pas que l'ambiguïté au niveau de demandeurs qui disent
que l'office, en cours de route, modifie la demande... Souvent, on entend dire,
par certains demandeurs, que l'office les oblige à grossir plus qu'ils
ne le voudraient. C'est là qu'intervient la notion, je crois, de
rentabilité. Vous avez déjà eu la chance de l'expliquer
à cette commission. Vous avez résumé très
brièvement. Vous avez dit: Si avec 20 vaches tu n'arrives pas,
peut-être qu'avec 30 vaches tu vas arriver.
M. Moreau: Absolument.
M. Baril (Arthabaska): J'aimerais cela que vous...
Peut-être que c'est vous demander de vous répéter, mais je
pense que c'est fondamental, dans l'acceptation ou dans le refus d'un
prêt, de dire aux nouveaux agriculteurs qu'on les force à
s'embarquer dans une production. Vous leur suggérez qu'avec 30 vaches
cela peut aller mieux, mais vous ne les obligez pas.
M. Moreau: Non, on ne les oblige pas. Ce qu'on fait, c'est des
calculs avec eux, tout simplement. On dit: Voici, pour que ce soit rentable,
suivant la définition, pour payer les frais des emprunts - on a
insisté dans le document sur la capacité de remboursement - il
faut que tu aies telle nature de revenu. C'est très simple, finalement.
Les revenus moins les dépenses, il reste ce qu'on appelle un solde
agricole disponible. À la suite de cela, on calcule ce que cela lui
coûte pour ses emprunts, emprunts personnels ou emprunts dans le giron du
régime de crédit agricole; finalement, ce qui lui reste, c'est
son revenu, qui lui permet de vivre. S'il ne vit pas avec cela, on lui dit:
Écoute, c'est dommage, cela ne peut pas fonctionner. Là, on fait
des scénarios avec lui. On lui dit: Si tu avais tant de vaches de plus,
tel quota, peut-être que tu serais en mesure de payer ton quota dans tant
de temps, tes vaches... On fait un scénario avec lui. On dit: Par
ailleurs, avec ton économie d'échelle, tu as l'infrastructure, ta
terre te le permet, tes bâtisses te le permettent, allons-y;
peut-être qu'il y a une économie d'échelle que tu peux
aller récupérer là. C'est lui qui prend la
décision. On n'a pas à se substituer au demandeur, comme je le
mentionnais; on accepte des projets, on les considère. Je pense que
c'est le rôle d'un conseiller en financement de voir la
faisabilité du projet, comme on le mentionne dans le document. (17 h
45)
Alors, on étudie avec lui divers scénarios. Finalement,
c'est à lui de prendre la décision. S'il accepte le projet
modifié, à ce moment-là, le dossier continue à
cheminer suivant ce projet modifié. Mais c'est bien sûr qu'on ne
va jamais se substituer à l'agriculteur. Ce n'est pas notre dossier.
C'est son dossier à lui. C'est vraiment son exploitation. C'est à
lui qu'il appartient, dans tous les cas, de prendre la décision. C'est
trop facile de repousser cela, trouver un bouc émissaire quand cela va
plus ou moins bien et dire: C'est eux qui ont changé mon affaire, ce
n'est pas cela que je voulais, etc. Une minute! C'est facile à faire,
mais je pense qu'en pratique ce n'est pas cela qui arrive. En pratique - comme
je vous le mentionnais - il y a divers scénarios qui sont
étudiés pour voir s'il y a une faisabilité en ce qui
concerne sa demande d'emprunt.
M. Baril (Arthabaska): Vous nous avez dit ce matin qu'en moyenne,
par année, il y avait entre 1900 et 2000 nouvelles demandes.
M. Moreau: À long terme seulement.
M. Baril (Arthabaska): À long terme seulement?
M. Moreau: À moyen terme, ce sont 5000 ou 6000 et à
court terme, 1500, 1800.
M. Baril (Arthabaska): Vous avez 85 conseillers et
conseillères en financement en région. Dernièrement, quand
on a rencontré les gens de la Société du crédit
agricole -malheureusement, je n'ai pas les notes que j'avais prises, mais je ne
me tromperai pas de beaucoup - ils me disaient qu'ils avaient environ 65
conseillers en financement dans le champ. Je peux me tromper de quelques-uns,
mais c'était aux alentours de cela. Ils étudiaient annuellement -
cela m'a étonné, je vous le dis - entre 115 et 120 nouvelles
demandes. Évidemment, ils mettaient beaucoup l'accent sur le fait qu'ils
font beaucoup de suivi, qu'ils donnent beaucoup de conseils en dehors de tout
cela. Je veux en arriver au délai. Les gens de la société
nous disaient qu'il y avait environ 30 jours de délai. Donc, on est
porté à vanter la société. Tant mieux, je n'ai rien
contre cela, absolument pas.
Si on compare le nombre de dossiers et le nombre de conseillers de la
société avec le nombre de dossiers que vous étudiez et
votre nombre de conseillers, il me semble que cela doit être
avantageusement comparable - même vous, avec 99 jours, disons 3 mois et
demi, quatre mois - avec la société. Je ne sais pas si vous avez
des chiffres sur cela.
M. Moreau: Je pense, si ma mémoire est bonne, que c'est
entre 35 et 40 conseillers en financement qu'ils ont dans le champ. L'an
passé, pour l'année en cours, c'est-à-dire au 28
février, ils avaient 75 prêts. Maintenant, la
société n'a, à toutes fins utiles, que du long terme. Ils
ont la Loi sur les syndicats agricoles, mais c'est quelques prêts par
année, alors que nous avons les crédits spéciaux, le long
terme, des autorisations préalables pour plus de 50 000 $ pour le moyen
terme, des autorisations préalables pour plus de 25 000 $ pour le court
terme. C'est nettement différent.
Vous avez l'application de la Loi favorisant l'établissement de
jeunes agriculteurs, vous avez l'application de la Loi favorisant la mise en
valeur des exploitations agricoles, la LMV comme on l'appelle, vous avez
l'application de la Loi sur le prêt agricole. Nous avons toute une
panoplie de programmes. Nous sommes rendus à onze ou douze au total
alors que la société en a véritablement un. Le fardeau de
travail est complètement différent, c'est la raison pour laquelle
je vous mentionnais ce matin qu'il y a un espoir, pour autant que cela nous
concerne, et c'est d'essayer de songer au dossier-client comme un tout, avec
une approche globale et intégrée.
De cette façon, on procède à l'inverse,
pratiquement, traditionnellement, de ce qu'on faisait. On ne blâme
personne en faisant cela. C'est l'histoire, c'est la tradition. Nous, jusqu'en
1962, nous ne faisions que du long terme. De 1936 à 1962, on n'avait pas
autre chose. Cela a suivi l'évolution de l'agriculture. Le moyen terme
est venu se greffer en 1962. En 1972, le court terme est venu se greffer, un
nouveau module. Qu'est-ce qui arrivait? Nous étions des
créanciers essentiellement hypothécaires. On avait strictement
l'esprit du créancier hypothécaire à long terme par la
force des choses. On ne faisait que cela à ce moment.
Je vais vous illustrer l'importance de l'approche globale en ce faisant.
Qu'est-ce qui arrivait en pratique? On ne se préoccupait pas du reste du
dossier. On disait: Tu demandes un prêt à long terme de tant, tu
as une valeur hypothécaire de tant, on va te faire un prêt sur
hypothèque. On dormait tranquille pour la bonne raison qu'avec
l'inflation la terre prenait de la valeur. C'était des prêts de
tout repos. On ne pouvait pas avoir de perte, ce n'était pas possible,
je l'explique dans le document.
On ne faisait que du long terme. Avec les années, le moyen terme
et le court terme sont arrivés. Or, en ne faisant que du long terme, on
ne se préoccupait pas du moyen terme et du court terme. Notre
requérant retournait chez lui et il se disait: Oui, demain matin, cela
va me prendre du court terme, cela va me prendre une marge de crédit
pour financer mon affaire. Là, il allait à sa banque, puis nous
autres on avait saturé à peu près toutes les garanties
possibles, sans mauvaise foi, parce qu'on s'occupait de long terme. Il nous
demandait un prêt à long terme sur hypothèque, on le lui
accordait. On a changé. Aujourd'hui, nous procédons par cette
approche globale, depuis 1979. On dit au bonhomme qui vient nous voir: Tu es
dans telle production, demain matin, cela te prend combien pour nourrir tes
vaches? Pour ensemencer ton sol, demain matin, tu as tant de maïs-grain,
cela veut dire quoi comme préparation du sol? Quels sont les coûts
auxquels tu as à faire face pour l'exercice en cours pour aller chercher
ta récolte? Nous partons du court terme. Â la suite à cela
on dit: Compte tenu de l'envergure, de la nature de ton exploitation, quel est
le type de tracteur, par exemple, que cela te prend? Quels sont les
équipements pertinents à ce type d'exploitation? On va au moyen
terme et, en dernier lieu, on passe au long terme avec l'évaluation
à laquelle je faisais allusion ce matin.
On procède à l'inverse, c'est beaucoup plus pratique, on
est sûr qu'il n'y a pas de hiatus, comme on l'explique dans le document,
dans sa structure financière. On est sûr d'utiliser à
l'optimum ses garanties, on est sûr d'avoir une meilleure stratification
de ses crédits à long terme, à moyen terme et à
court terme. Bien sûr, on n'est pas pour financer par hypothèque
une marge de crédit.
Avec l'expérience, on réalise une chose dans les dossiers:
C'est que le bonhomme qui fait de mauvais investissements avec une marge de
crédit, il se coule. La marge de crédit, c'est un crédit
de fonctionnement à court terme; il ne peut servir à financer des
améliorations à l'étable ou des améliorations au
sol. C'est pourquoi notre rôle devient vraiment un rôle de
conseiller, à ce moment-là. C'est pourquoi l'approche globale, en
1985, comme on le mentionne dans le document, avec l'ordre de grandeur des
prêts, la complexité des dossiers, devient une condition sine qua
non, mais ça, c'est déjà engagé depuis 1979. Si
vous regardez les certificats de prêts, vous avez à l'endos des
conditions touchant le moyen terme et touchant le court terme.
J'expliquais dans mon dossier qu'avec le temps, si on réalise la
réforme administrative en voie de parachèvement, cela va nous
permettre précisément de fonctionner en vertu de cette approche
globale. La refonte va nous aider parce que les lois deviennent excessivement
complexes. Cela va nous permettre de considérer un seul crédit,
finalement, articulé de façon qu'il y aura une séquence ou
un montant à long terme, un montant à moyen terme, un montant
à court terme, suivant l'utilisation de chacun des modules. À ce
moment-là, cela va être beaucoup plus simple, beaucoup plus
limpide, beaucoup plus facile à administrer, beaucoup plus facile
à vulgariser pour les prêteurs, pour l'office, pour nos
conseillers en financement ou pour les agriculteurs également.
C'est une tout autre approche, c'est une tout autre perspective et je
pense que c'est tout à l'avantage de la clientèle. C'est ce qu'on
appelle notre approche globale et intégrée. Je vous explique
pourquoi on doit aller là. C'est que justement on brise avec une
certaine tradition, si je me reporte à ce qu'on faisait en 1936, bien
sûr, par la force des choses, mais je pense qu'on n'a plus le choix en
1985 que de procéder de cette façon.
M. Baril (Arthabaska): Avec la refonte des lois, croyez-vous que
vous allez diminuer les délais entre la demande et l'acceptation?
M. Moreau: Je le croirais. Évidemment, tout va
dépendre, bien sûr... Vous savez, c'est difficile de
prévoir des années à l'avance ce qui peut nous arriver,
parce qu'on a eu un accident de parcours. Je vous ai expliqué ce matin
que notre réforme administrative a dû être interrompue
à cause de la crise économique qui nous a mobilisés
à la limite. Suivant tout ce qu'on peut prévoir, il nous
apparaît que nous serions beaucoup plus efficaces si nous pouvions
parachever notre réforme administrative et la conjuguer, comme je le
mentionnais dans le document, avec la refonte des lois. On parle de 30 jours
à la société; il n'y a pas de raison pour que chez nous on
ne réalise pas cela en 30 jours, peut-être cinq semaines. Je pense
que cela serait quelque chose auquel l'agriculteur peut s'attendre.
Si vous vous rappelez l'expérience de Montréal, en 1979,
on a obtenu un délai moyen de 14, 7 jours, dont 1, 7 jour au
siège social. C'est donc dire que la faisabilité est là,
que c'est possible. C'est justement une approche que nous avons utilisée
à ce moment pour pousser à la limite - c'est pratiquement une
expérience in vitro - la façon de traiter un dossier dans un
ordre idéal et nous avons réussi. 1033 dossiers ont
été traités avec un délai moyen de 14, 7 jours,
englobant les fêtes, la période de l'été, la
Saint-Jean-Baptiste, plusieurs autres fêtes et les fins de semaine, dont
1, 7 jour au siège social. Ce qui veut dire qu'on a fait
l'expérience. On a essayé de transposer cela au siège
social par la suite pour tous les autres dossiers mais malheureusement comme je
l'expliquais dans le document ce matin - la crise économique a
interrompu nos efforts dans ce sens. Nous avons recommencé par la suite
et quelques mois devraient nous permettre de parachever notre réforme
administrative. Comme je le mentionnais également, cette réforme
va obtenir son optimalisation grâce à la refonte des lois, qu'on
anticipe également. Compte tenu de ces deux facteurs nous devrions
être en mesure d'être très efficaces et de réduire
les délais à quelque chose comme quatre, cinq ou six semaines au
maximum. Si vous regardez de par le monde, aux États-Unis, en France et
ailleurs, les délais que cela prend, on serait nettement dans la course
à ce moment.
M. Baril (Arthabaska): Avez-vous des chiffres? C'est quoi la
moyenne?
M. Moreau: En France, c'est environ un mois et demi ou deux mois.
Ce n'est pas facile, vous savez. C'est à discuter avec les gens et cela
varie avec les régions, ce n'est pas facile. Aux États-Unis,
c'est à peu près la même chose, trois semaines ou un
mois.
M. Baril (Arthabaska): Je reviens juste sur la...
Le Président (M. Vallières): En terminant.
M. Moreau: Aux États-Unis c'est la Federal Land Bank, cela
dépend de la FHA et je n'ai pas de statistiques sur la FHA (Farm Home
Administration). Excusez-moi.
M. Baril (Arthabaska): Je reviens sur la mission - je vais
l'appeler comme ça -d'efficacité que vous vous étiez
donnée au
siège social. Vous avez parlé de quatorze jours point
quelque chose. Juste une allusion en passant. Il y a des gens qui ont
profité de l'occasion pour vous accuser d'être trop rapides. Ce
n'est pas facile pour vous.
M. Moreau: Vous avez vu, par les données que je vous ai
fournies sur les refus, que ce n'était pas fondé. Écoutez,
on ne peut pas empêcher - comme on le disait tout à l'heure - les
commentaires.
M. Baril (Arthabaska): Est-ce que mon temps est
terminé?
Le Président (M. Vallières): Oui. Il vous
reste environ une minute, puis je vais passer la parole au député
de Berthier pour trois minutes.
M. Baril (Arthabaska): II ne me reste qu'une minute. Toujours en
parlant de l'efficacité et du nombre de personnes que vous avez de
disponibles pour analyser et étudier tous les dossiers, avec ce que vous
avez vécu depuis un an, avec la préparation de dossiers et de
mémoires et le temps que vous avez dû prendre pour venir ici
devant la commission lors d'une fameuse commission qui restera dans les
annales, combien de temps avez-vous pu mettre à préparer cette
fameuse commission?
M. Moreau: C'est incroyable!
M. Baril (Arthabaska): Vous et votre personnel?
M. Moreau: Je ne sais pas si on pourra un jour calculer ce temps.
C'est invraisemblable! Les bons agriculteurs sont pénalisés parce
que, effectivement, le temps qu'on passe sur cela on ne peut l'employer pour
autre chose. C'est invraisemblable! II faudrait faire une étude sur
cela. Je me demande jusqu'à quel point on pourrait rigoureusement y
parvenir, mais c'est incroyable, c'est bien sûr, à tous les
niveaux: au niveau local, au niveau régional et au niveau du
siège social également.
M. Baril (Arthabaska): Je reviendrai après...
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Berthier.
M. Houde: Est-ce qu'on y va après le souper ou si on y va
tout de suite?
Le Président (M. Vallières): Vous auriez trois
minutes.
Les faillites en agriculture M. Houde: Merci, M. le
Président. On peut dire quasiment bonsoir tout le monde, à
l'heure où on est déjà rendu.
Je regarde le tableau 2. La crise qui s'est passée dans les
années que vous avez mentionnées ce matin est attribuée
à quoi? Aux taux d'intérêt ou quoi?
M. Moreau: En partie aux taux d'intérêt, en bonne
partie. Maintenant, vous avez eu la crise du porc qui s'est
insérée à l'intérieur de cela, pour d'autres
raisons. Vous avez eu la crise du vison qui est peut-être
générée... Bien sûr, quand on a des choix à
faire, à un moment donné, on laisse tomber le vison, dans les
achats, plutôt qu'autre chose. Remarquez que ce n'est pas facile à
décortiquer, mais je dirais qu'en bonne partie ce sont les taux
d'intérêt. Il ne faut pas oublier une chose aussi, c'est que la
crise était internationale, elle n'était pas seulement chez
nous.
M. Houde: Si on se reporte au cahier que vous nous avez
présenté ce matin, au tableau 2, si on regarde en 1979-1980 les
faillites, les ventes forcées ou par abandon, il y en a eu 7. En
1980-1981, il y en a eu 24. En 1981-1982, il y en a eu 77. À quoi
attribuez-vous une aussi forte et aussi rapide augmentation? Si on se reporte
aux taux d'intérêt, ils ont commencé en 1982-1983, à
peu près?
Une voix: C'est...
M. Houde: Tenez-vous donc tranquille!
Une voix: Le tableau, c'est celui-ci?
M. Houde: L'avant-dernière page. Est-ce que M.
Moreau...
Une voix: Celui-ci? M. Houde: Oui, oui.
Le Président (M. Vallières): En terminant.
M. Houde: Vous voyez, en tout, 7 faillites et ventes
forcées; l'année suivante, 24 puis 77 et 78. Cela a monté
en flèche. Est-ce que vous attribuez cela aux taux
d'intérêt? Cela ne devrait pas.
M. Moreau: II y a la crise du porc, comme je le mentionnais ce
matin. Si vous prenez le même tableau, regardez l'incidence de la crise
du porc. En 1979-1980, vous avez sept faillites; cinq dans le porc.
M. Houde: Oui, c'est cela.
M. Moreau: En 1980-1981, 24 faillites; 17 dans le porc.
M. Houde: Oui.
M. Moreau: 77 faillites en 1981-1982; 39 dans le porc. Vous voyez
l'importance de la crise du porc qui était différente, qui
était vraiment un module tout à fait particulier, singulier,
à l'intérieur de la grande crise qu'on a connue.
M. Houde: Ceci pour vous amener à la question suivante. Il
est dix-huit heures, oui? Je vais juste terminer et on continuera après
le souper?
Le Président (M. Vallières): Oui.
M. Houde: D'après ce qu'on peut voir au sujet du porc, on
aurait dû ralentir plutôt que d'augmenter parce que, si on prend
les données qui sont ici, cela serait dû à une augmentation
trop forte dans la production du porc.
M. Moreau: Je sais que nous, à l'office, on a cessé
toute activité au niveau de nouveaux prêts dans le porc en
1980.
M. Houde: En 1982? M. Moreau: En 1980. M. Houde: En
1980, d'accord.
M. Moreau: En 1980. Après 1980, on nous a reproché
de ne pas ouvrir, et on n'a pas ouvert encore en dépit de toutes ces
récriminations, mais on a arrêté en 1980. Maintenant, il
faudrait se reporter à ce qu'on a connu en 1978, 1979, 1980. Même
quand il y avait des soubresauts dans les prix, on disait: Écoutez, il
faut prendre notre place sur le marché canadien, il faut prendre notre
place au niveau de l'exportation. Ce n'est pas facile de prendre les
décisions. Après, c'est relativement facile de dire ce qu'on
aurait dû faire, mais, à ce moment, ce n'était pas facile
de prévoir. Il ne faut pas oublier non plus que le porc, au
Québec, par rapport à ce qui se produit aux Etats-Unis, c'est une
goutte d'eau. Finalement, on n'avait pas une grande influence sur les prix.
C'est pour cela qu'on était mal placé pour contrôler, je
pense, cette crise.
M. Houde: On va continuer après le souper.
Le Président (M. Vallières): Merci. Compte tenu
qu'on doit libérer la salle pour 18 heures, nous suspendons les travaux
jusqu'à 20 heures ce soir.
(Suspension de la séance à 18 h 5)
(Reprise à 20 h 10)
Le Président (M. Vallières): La commission de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation reprend ses travaux.
Nous en étions à une intervention du député de
Berthier. C'est là-dessus qu'on continue. M. le député de
Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. J'aimerais poser la
question à M. Moreau, en ce qui concerne la vente de quotas. Lorsqu'une
vente de quotas est faite par un producteur, par un huissier ou par votre
agence, est-ce que vous tenez compte du coût du quota ou si vous tenez
compte de ce qu'il a été vendu? Par exemple, si le quota vaut 23
$ la poule pondeuse et que le type l'a vendu 15 $, que faites-vous?
Essayez-vous de faire une enquête pour savoir s'il a été
vendu réellement 15$ ou s'il l'a été 23 $ et 8 $ sous la
table? Cela peut être dans n'importe quoi. Cela peut aussi bien
être dans le domaine laitier, dans le barbecue ou, encore, dans la poule
pondeuse.
M. Moreau: Cela ne se vend-il pas par la
fédération?
M. Houde: Oui, oui, seulement, je peux bien le vendre à M.
X à 15 $, mais le quota en réalité se vend 25 $ ou 23 $.
On en a déjà discuté lorsque je suis allé à
votre bureau parce que c'était un problème que le type puisse
vendre à un prix moindre parce qu'il y a un montant d'argent qui va
passer en dessous et qui ne paraîtra pas. Acceptez-vous le montant
d'argent qui paraît ou si vous allez faire enquête, advenant le cas
qu'il serait vendu bien meilleur marché, pour vous payer?
M. Moreau: On prend le prix officiel. Que voulez-vous que l'on
fasse? À ce moment-là, s'il y a un prix caché, on ne le
sait pas plus que les autres.
M. Houde: II n'y a pas d'enquête qui se fait?
M. Moreau: II n'y a pas d'enquête qui se fait. Quelle sorte
d'enquête? Cela prendrait une enquête policière pour...
M. Houde: Par exemple, pour le gain de capital, lorsque quelqu'un
vend une ferme et qu'il vend son quota moitié moins cher que le prix
normal, les percepteurs d'impôt vont faire enquête...
M. Moreau: Mais c'est un encan public fait par la
fédération. À ce moment-là, on prend...
M. Houde: Non, non, les quotas ne sont pas tous par encan public.
Les "broilers" se vendent par encan public, mais la poule pondeuse, pas encore.
Non? D'accord, c'est
correct.
M. Moreau: S'il y a une contre-lettre, c'est une chose qu'on ne
peut pas déceler. Cela prendrait une enquête dans chaque cas pour
voir si c'est vraiment le prix payé. Prima facie, on tient pour acquis
que c'est le prix qui apparaît sur le contrat.
M. Houde: D'accord. Merci.
M. Moreau: On ne peut pas admettre au départ que les gens
sont malhonnêtes. Il faut avoir une preuve, au contraire.
M. Houde: À la page 24 de votre mémoire, en bas, au
dernier paragraphe, vous avez dit: Nous avons amorcé une
déconcentration des services par l'affectation d'un notaire dans
certains bureaux régionaux. Est-ce que cela veut dire que vous allez
avoir des notaires dans tous les bureaux régionaux?
M. Moreau: On va y aller par étapes. C'est possible.
M. Houde: Oui? Et ils vont relever du gouvernement?
M. Moreau: Bien oui. Ce sont des conseils relativement à
l'admissibilité dans nos dossiers. Alors, au lieu de les situer, comme
actuellement, au siège social, on a fait l'expérience pilote dans
deux régions et cela fonctionne très bien. Alors, on devrait de
cette façon-là être plus efficaces, en ce sens que
l'admissibilité serait déterminée dans le dossier avant
que le dossier soit acheminé pour révision au siège
social. Alors, l'expérience est concluante à ce jour et on songe
à l'élargir ou à la prolonger encore un certain temps pour
voir ce que cela va faire dans d'autres régions et pour prendre une
décision finale quant au reste de la province.
M. Houde: Merci beaucoup.
Le Président (M. Vallières): M. le
député d'Arthabaska.
M. Baril (Arthabaska): J'aimerais revenir sur le fonds
d'assurance-prêt. Vous avez expliqué tout à l'heure au
député de Huntingdon le dernier exercice financier. Cela doit
être l'année 1983 qu'il y a eu 5 000 000 $ de remboursés -
je ne sais pas si on dit remboursés - sur 29 000 000 $ de prévus.
Pour l'année 1984, vous avez prévu 53 000 000 $, potentiellement.
Ces évaluations-là sont causées par quoi? De quelle
façon les faites-vous?
M. Moreau: Ce sont des évaluations que l'on espère
les plus rapprochées possible de la réalité. Mais combien
cela se vendra dans un an, deux ans ou trois ans? Il y a peut-être des
cas qui vont se régler dans cinq ans là-dedans. Alors, c'est une
prévision que l'on fait, que l'on espère le plus juste possible,
mais ce n'est pas facile de prévoir quels seront le marché et la
conjoncture à ce moment-là. Alors, on essaie avec les moyens du
bord de faire les meilleures prévisions possible.
M. Baril (Arthabaska): C'est quand même surprenant, parce
que vous avez pratiquement prévu presque le double du montant de
l'année précédente.
M. Moreau: Oui, mais c'est cumulatif, en fait. C'est dans ce
sens-là.
M. Baril (Arthabaska): Cela ne veut pas dire que cela peut vous
coûter 53 000 000 $.
M. Moreau: Les réalisations se font moins vite que
prévu. C'est pour cela. Il y a des cas d'il y a deux ans qui peuvent
être dans ce "bulk", finalement. C'est cumulatif et c'est réparti
dans le temps et, comme on le mentionne, cela va prendre plusieurs
années et cela va s'étaler sur plusieurs exercices financiers.
C'est pour cela que cela a l'air d'un montant considérable, mais, si on
avait payé au fur et à mesure et si cela s'était
réalisé tout d'un coup au moment où les déboires
ont été subis, à ce moment-là, on aurait
peut-être payé 10 000 000 $ par année pendant cinq ans
tandis que là, étant donné les délais dans la
réalisation, cela s'accumule, si vous voulez, et cela fait un montant
plus élevé au bout de la cinquième ou de la
troisième année.
M. Baril (Arthabaska): Cela ne veut pas nécessairement
dire que cela va plus mal en agriculture que cela allait dans les...
M. Moreau: Non, toute proportion gardée, par rapport aux 3
900 000 000 $ dont on a parlé cet après-midi, c'est encore
très mince, finalement. Il demeure que même ce montant peut
être réduit suivant la conjoncture, si cela se bonifie. C'est ce
qu'on peut prévoir, suivant toutes les données dont on dispose
présentement, mais qui peuvent changer avec la conjoncture et qui
peuvent changer avec une consolidation du secteur, disons, etc.
M. Baril (Arthabaska): Si on compare les pertes dans le secteur
agricole aux pertes dans le secteur industriel, est-ce que vous avez des
chiffres? Est-ce plus risqué? Est-ce moins risqué?
M. Moreau: Évidemment, ce n'est pas une comparaison qui
est facile à faire, j'ai des chiffres pour les deux secteurs. Je
vais
vous donner les chiffres dont je dispose. Je m'excuse, M. le
Président, je vais vous donner cela, ce ne sera pas long.
Si on prend l'année 1983-1984, il y a eu 7561 faillites
personnelles alors qu'il y en a eu 6269, en 1984. L'année 1983 - je
m'excuse - c'est l'année civile et non pas les exercices financiers:
alors, en 1983, 7561; en 1984, 6269. Dans le domaine des affaires, c'est, en
1983, 3879 et, en 1984, 3337. Cela veut dire que, pour les deux secteurs
ensemble, c'est 11 440 faillîtes en 1983, en regard de 9606, en 1984. Si
vous prenez l'agriculture seule, dans le secteur primaire, si vous l'isolez,
vous arrivez, pour l'année 1983, à 125 faillites et, pour
l'année 1984, à 162, pour l'ensemble du Québec. Je dis
bien l'ensemble du Québec parce que, dans le débat sur les
faillites, il n'y a pas tellement longtemps, il y a eu une
interprétation reliée à cela, c'est bien sûr. Si
vous prenez celles de l'office, là-dedans, pour ces deux mêmes
années - je vais vous donner celles de l'office - pour la période
1983, il y a eu 41 faillites et, pour l'année 1984, 37. Vous voyez que
c'est relativement restreint.
Il y a des explications à cela. Les données qu'on a
toujours révélées "révélées", le mot
est grand - dont on a fait état constamment, ce sont les données
chez nos emprunteurs à long terme. Nos clients à long terme, chez
nous, qui étaient près de 21 000 l'an passé, sont au
nombre de 25 500 ou 25 600 cette année, comme je l'ai mentionné
dans mon rapport ce matin. Ce qui arrive, c'est la façon de compter les
faillites. Je donne un exemple qui est vécu. Vous avez une compagnie,
qui a quatre actionnaires; ces derniers ont cautionné la compagnie. Pour
se libérer de leur caution, ils ont fait quatre faillites personnelles
et la compagnie n'a même pas fait faillite. L'emprunteur à
l'office, ce ne sont pas les quatre individus, ils sont cautions, c'est la
compagnie. Alors, on compte quatre faillites en agriculture, mais,
effectivement, notre emprunteur à long terme, c'est la compagnie; c'est
cette dernière qui, pour nous, est emprunteuse et agricultrice au sens
de notre loi, qui répond à la définition de principale
activité: l'agriculture. Les autres sont simplement des gens ayant une
activité agricole dans le secteur, mais qui ont fait une faillite
personnelle et non pas une faillite agricole au sens où on l'entendrait.
Je peux avoir des actions de l'Alcan et je fais faillite; cela n'influence pas
Alcan. Alcan va faire faillite, je ne pense pas que je dirai que j'ai fait une
faillite dans l'aluminium.
Entendons-nous bien, la faillite personnelle, c'est une chose pour se
libérer d'une caution; c'est une autre chose, la faillite d'un
emprunteur chez nous. Chez nous, ce que nous calculons, ce sont les faillites
de nos emprunteurs, qui sont des faillites agricoles en regard de nos
programmes.
Autre facteur dans les faillites. Si vous lisez le rapport, par exemple,
de l'Association des banquiers canadiens... Lors de la réunion de l'ABC,
en octobre dernier, je pense, au plan national, on nous disait que la grande
majorité des agriculteurs dont il était question, statistiquement
parlant, étaient des gens qui avaient des revenus extérieurs plus
importants que le reste, que le revenu provenant de la ferme. Dans le sondage
qu'a fait la Société du crédit agricole, l'année
dernière, vous aviez la même chose: le groupe à faible
revenu dépend davantage du revenu hors exploitation. Ce groupe
représentait 11 188 exploitations au Québec en 1984 - c'est dans
le sondage que la Société du crédit agricole a fait - avec
un revenu extérieur net moyen de 11 705 $, en regard de ventes agricoles
brutes moyennes de 11 215 $. Ceci veut dire que ces 11 188 personnes tiraient
un revenu hors agriculture plus important, plus substantiel que leur revenu
provenant de l'agriculture. Avec le résultat qu'il y a des faillites
là-dedans, qui sont considérées comme des faillites
agricoles, mais ce sont des cas qui ne seraient pas admissibles chez nous, vu
la définition de la principale occupation. On sait que ces gens, dans
une crise économique comme celle qu'on vient de traverser, sont
vulnérables parce qu'ils travaillent à l'extérieur;
souvent, cela va être le chômage qui les frappe, ce qui
entraîne la faillite dans leur secteur agricole, l'incidence agricole est
entraînée dans l'autre. Ce n'est pas l'agriculture qui fait
faillite dans ce cas-là, c'est-à-dire que ce n'est pas une
faillite agricole, c'est une faillite personnelle qui entraîne le reste
et on dit que c'est une faillite agricole.
Pourquoi y a-t-il tant de différence entre nos chiffres, nos
données? Parce que notre définition, à la base, de
principale occupation vient limiter l'éventail des personnes qui,
éventuellement, peuvent faire faillite. J'explique parce que la question
s'est posée à maintes reprises. Il y a plusieurs raisons qu'on
peut donner en regard de cela pour, justement, démontrer que toute une
clientèle qu'on considère comme agriculteurs - qui peuvent
l'être, je ne discute pas ce point - cette dernière, dis-je, chez
nous, nous ne la considérons pas pour les fins de faillites, parce que
ce ne sont pas des gens admissibles à long terme chez nous. Nous parlons
strictement de nos emprunteurs. C'est pourquoi il y a tant de
différence.
M. Baril (Arthabaska): C'est intéressant parce que cela
fait bien des fois que vos chiffres sont contestés, parce qu'on dit
qu'il y a beaucoup plus de faillites que cela, en réalité, en
agriculture.
M. Moreau: Sont-ce des agriculteurs?
M. Baril (Arthabaska): Oui. Je pense que votre explication est
impartante. Je reviens au fonds d'assurance-prêt. Est-ce qu'il se suffit
lui-même? On sait que l'agriculteur en paie une partie; est-ce le
gouvernement qui paie l'autre partie, ou l'office? Les institutions
prêteuses n'investissent pas là-dedans, n'est-ce pas?
M. Moreau: Le fonds ne se suffit pas à lui-même dans
le sens suivant: c'est que les 10 000 000 $ vont toujours demeurer, la loi le
prévoit. Sauf, c'est bien sûr... Si vous me permettez je vais
reculer de quelques années. Le fonds a été
constitué d'une dotation de 10 000 000 $ par le gouvernement, payable 3
333 000 $ pendant trois ans. 1978, 1er août, première tranche de 3
333 000 $ et 1979, 1980, les autres tranches. Les sommes du fonds sont
placées à la Caisse de dépôt et placement du
Québec pour apporter un rendement X suivant le taux du
marché.
Ce qui s'est passé, c'est que la crise est arrivée avant
que le fonds ait eu le temps de générer des revenus comme on
l'avait prévu, de sorte que l'expérience du fonds n'a pas eu le
temps de vraiment se réaliser. Le fonds n'ayant pas
généré suffisamment, la loi prévoit qu'à ce
moment nous avons accès au fonds consolidé du revenu.
Étant donné qu'on déborde les revenus
générés par le fonds, il nous faut avoir accès au
fonds consolidé et, éventuellement, dans le cas de la refonte des
lois, c'est une loi qui devrait être révisée pour apporter
les ajustements qui s'imposent, pour faire en sorte que le fonds soit suffisant
pour faire face aux éventualités dans l'avenir.
M. Baril (Arthabaska): C'est seulement depuis 1978 que vous
m'avez dit que cela existe?
M. Moreau: Ce fonds existe depuis 1978.
M. Baril (Arthabaska): Avant cela, comment est-ce que cela
fonctionnait?
M. Moreau: Avant cela, on avait un accès direct au fonds
consolidé du revenu.
M. Baril (Arthabaska): Si, éventuellement, il en manque,
qu'est-ce que cela fera?
M. Moreau: On va aller au fonds consolidé du revenu, c'est
ce que la loi prévoit. En d'autres termes, la loi prévoit que le
fonds ne peut jamais baisser en bas des 10 000 000 $ prévus pour la
dotation. S'il n'a pas pu générer assez de fonds lui-même,
de revenus, les fonds qui manquent, excédant les 10 000 000 $, sont
compensés par l'accès au fonds consolidé du revenu. Ceci
veut dire que, éventuellement, si les prévisions dont nous avons
fait état dépassent les 10 000 000 $, à moins que le fonds
ne soit amendé rapidement et qu'il ait le temps de
générer, il faudra, à défaut de cette solution,
vraisemblablement recourir au fonds consolidé du revenu.
Taux d'endettement des agriculteurs
M. Baril (Arthabaska): On parle, on discute, tout le monde
cherche des chiffres. On dit qu'en agriculture cela va mal, cela va moins mal,
d'autres disent que cela ne va pas trop pire. Actuellement, quel est le taux
d'endettement des agriculteurs si on compare cela aux autres années?
Est-il plus haut, moins haut, se maintient-il; comment est-il?
M. Moreau: Je pense que vous avez dans votre document - on va
commencer par cela si vous le voulez - un tableau qui est très
éloquent sur les arrérages. C'est le tableau 3 de l'annexe III.
Comme vous pouvez le voir, surtout si nous comparons avec le niveau
fédéral et si nous comparons avec les États-Unis, je
pourrai vous donner des chiffres du Farm Home Administration, je pense...
Commençons par chez nous, si vous le voulez. Les arrérages qui
étaient de l'ordre de 7, 78% en 1983-1984, en 1984-1985, sont de l'ordre
de 5, 20%.
M. Beauséjour: Ce n'est pas le tableau 3.
M. Moreau: Comment? Le tableau 3 de l'annexe III.
M. Beauséjour: Ah bon!
M. Moreau: Maintenant, si vous comparez ces chiffres avec ceux de
la Société du crédit agricole, Canada et Québec,
vous arrivez, pour 1983-1984, à 12, 2% et je crois que, pour 1983-1984,
c'est 12%.
Maintenant, si je prends la situation aux États-Unis, des
chiffres que je n'ai pas malheureusement pu confirmer... (20 h 30)
M. Baril (Arthabaska): Est-ce que je peux vous arrêter?
M. Moreau: Oui, oui.
M. Baril (Arthabaska): Je ne suis pas un comptable, j'aimerais
avoir plus d'information. Si j'en fais l'interprétation, si je compare
1981-1982 avec 1984-1985, cela part de 7, 97% à 5, 20%. Est-ce que cela
veut dire que le taux d'endettement est moins élevé ou quoi?
M. Moreau: II est mains élevé et la situation est
meilleure qu'elle ne l'était. Parce que le bonhomme, quand la situation
va mal - évidemment, il a beaucoup d'engagements à
différents endroits - retarde de payer, quelquefois. Des
arrérages, cela ne veut pas nécessairement dire que c'est un
mauvais cas. L'expérience nous démontre que la grande partie de
ceux qui sont en arrérages paie finalement. Et vous avez des gens qui
sont en arrérages de façon chronique. Il ne faut pas trop s'en
faire avec les arrérages, mais c'est quand même une indication de
la santé du secteur. Comme vous pouvez le voir, il y a eu une
bonification depuis le dernier exercice.
Pour simplement vous donner un exemple, si je reprends un rapport des
États-Unis, que j'avais récemment, on disait qu'il y avait 65%
des 10 200 000 000 $ prêtés par la Farm Home Administration comme
aide d'urgence qui étaient en arrérages; 32% des 4 100 000 000 $
prêtés comme fonds de roulement étaient en
arrérages; 26% des 6 800 000 000 $ prêtés pour l'achat de
terres étaient aussi en retard. Ce sont des chiffres que j'ai eus
dernièrement; maintenant, je n'ai pas de confirmation officielle, c'est
ce que j'ai vu par la voie des journaux.
M. Baril (Arthabaska): Quand vous dites qu'il y a 65%, est-ce sur
les prêts à long terme?
M. Moreau: Non, non, ils sont disséqués: 65% des 10
200 000 000 $ prêtés comme aide d'urgence, ce sont des cas de
dépannage...
M. Baril (Arthabaska): D'accord.
M. Moreau:... des cas comme nos crédits spéciaux;
52%, c'est le fonds de roulement, c'est du crédit à court terme;
26% sont prêtés pour l'achat de fermes, cela veut dire que c'est
du long terme.
M. Baril (Arthabaska): Donc, on est beaucoup inférieur
à...
M. Moreau: Sur le plan canadien et, je dirais, si on compare avec
les États-Unis; maintenant, je vous donne cela sous toutes
réserves, j'ai pris cela dans les journaux. Je n'ai pas de confirmation
officielle.
M. Baril (Arthabaska): Oui. On a parlé, cet
après-midi, de la revente des terres par l'office. Vous-même avez
dit...
M. Moreau: Je m'excuse.
M. Baril (Arthabaska): Oui?
M. Moreau: Vous m'aviez parlé de l'endettement, tout
à l'heure, ou des arrérages. J'ai donné les
arrérages comme première dimension. Si vous permettez... Je
m'excuse, vous aviez demandé tout à l'heure l'endettement,
n'est-ce pas?
M. Baril (Arthabaska): Oui, c'est cela. M. Moreau: C'est
parce que...
M. Baril (Arthabaska): Ah! ce n'est pas la même chose; bien
oui.
M. Moreau: L'endettement. Je vais vous faire part d'un sondage
que nous venons à peine de terminer. Nous avons examiné
l'endettement dans 603 dossiers, ce qui représente 3% de nos emprunteurs
è long terme. Nous avons examiné ces dossiers à jour, si
vous voulez. Nous sommes en mesure de vous donner le pourcentage d'avoir net
moyen dans ces cas. Nous allons les prendre en deux époques, parce qu'on
s'est fait accuser souvent, à l'office, d'endetter les agriculteurs.
C'est revenu très souvent. On nous a accusés d'endetter les
agriculteurs et d'aller à l'encontre, en fait, de leur
développement, tellement on le faisait.
Alors, notre sondage nous donne les résultats pour deux
époques: l'endettement actuel, au moment où l'on se parle - le
sondage est du mois de mars, il est encore tout récent - et
l'endettement il y a douze ans, lors de son premier prêt à
l'office ou lors de son établissement. Je tiens à préciser
immédiatement, M. le Président, qu'il s'agit des emprunteurs de
l'office et non pas de l'ensemble des agriculteurs. Il s'agit des emprunteurs.
Donc, un bonhomme qui vient d'emprunter est plus endetté, bien
sûr, que celui qui n'a pas besoin d'emprunter. Parce que, sur le plan
canadien, d'après le sondage de la Société du
crédit agricole - nous pourrons y revenir - c'était 80% pour
l'ensemble du Canada et 75% pour le Québec. Si vous le permettez, tout
à l'heure, on pourra vous expliquer pourquoi c'est 75% pour le
Québec, II n'y a rien de mal dans cela, c'est tout è fait normal;
parce que la population agricole est beaucoup plus jeune, on a
procédé à un rajeunissement, cela s'applique par les
statistiques. À l'âge des agriculteurs, on pourra revenir.
Revenons à notre propre sondage. Je reviens sur la dimension
qu'il s'agit d'emprunteurs chez nous. Il y a douze ans -il s'agit toujours
d'une moyenne, bien sûr, c'est le pourcentage d'avoir net moyen - le
pourcentage était de 49, 6%. Actuellement, en 1985, le pourcentage
d'avoir net est de 63, 9%. Si nous prenons les producteurs de lait, il y a
douze ans, le pourcentage d'avoir net était de 53, 5%. En 1985, le
pourcentage d'avoir net est de 67, 9%. Maintenant, si nous prenons ces
données et si nous essayons de voir en distribuant tiers, tiers, tiers
les 600
cas de 185 000 $ et moins, de 185 000 $ à 335 000 $ et de 335 000
$ et plus, un tiers, un tiers, un tiers, cela arrive pas mal, 33, 5%, 32, 8% et
33, 7%; nous en arrivons à la conclusion que ceux qui ont 185 000 $ et
moins de dette à l'Office du crédit agricole ont un avoir net
moyen de 73, 2% et le nombre d'années moyen depuis
l'établissement est de 18, 7 ans. Cela est bien important, parce que
vous allez voir que plus il est âgé, ou l'inverse, plus il est
jeune, plus il est endetté, cela est normal et cela prouve ce que je
vous disais sur le plan canadien. Cela est 185 000 $ d'actifs et moins.
Prenons le deuxième tiers, 185 000 $ à 335 499 $, l'avoir
net moyen de 63, 5%, alors que le nombre d'années moyen est de 13 ans.
Prenons le troisième tiers. Ceux qui ont un actif moyen de 335 500 $ et
plus, le pourcentage de leur avoir net moyen est de 62, 2% pendant que le
nombre d'années est de 12, 3%. Ce qui veut dire que les jeunes, ceux qui
ont moins d'années dans le secteur, ont un avoir net - ce qui est tout
à fait normal - moyen inférieur; quand vous prenez l'âge
sur le plan canadien et vous comparez, dans le sondage de la
Société du crédit agricole, le Québec par rapport
au reste du pays, vous allez faire la même constatation et vous allez
voir que les plus jeunes sont plus endettés. Vous allez
réaliser, étant donné que l'âge de la moyenne
des agriculteurs du Québec est inférieur à l'âge sur
le plan canadien, que c'est tout à fait normal qu'on ait 75% d'avoir net
chez nous pendant que c'est 80% sur le plan national. Je pourrais vous donner
l'âge, si cela vous intéresse, sur le plan canadien.
Je prends un exemple. Vous vous souvenez que le sondage de la
Société du crédit agricole stratifiait en trois
catégories les agriculteurs. Si je prends la troisième
catégorie - je pourrais les prendre toutes les trois, mais je donne un
exemple - chez nous en 1981, la moyenne d'années comme exploitant
était de 16 ans et 15 ans en 1984. Sur le plan canadien, 22 ans en 1981
et 20 ans en 1984; 5 ans, c'est très important à ce niveau. Il ne
faut pas se surprendre qu'on ait 75% chez nous comme résultat et qu'on
ait 80% sur le plan canadien. Ce qui veut dire que, dans quelques
années, à toutes fins utiles, nos agriculteurs seront sur le
même pied au niveau de l'endettement que les autres quand ils les auront
rejoints au point de vue de l'âge.
M. Baril (Arthabaska): Juste une précision sur le
pourcentage qu'on nous avait donné en 1985 et il y a douze ans, est-ce
que vous avez pris le même âge des agriculteurs en
considération?
M. Moreau: Ce sont différents âges. On a pris
l'âge dans chacun des dossiers et, finalement, on a établi
un âge moyen. Ce qu'on vous donne ici, ce sont des moyennes; 12 ans,
c'est l'âge moyen. L'établissement, dans certains cas, est un peu
plus loin parce qu'il y a des candidats qui ont pu emprunter à la
société et sont venus chez nous par la suite, alors qu'ils
étaient déjà établis; ces choses arrivent. Alors,
ce qui arrive, c'est que, si vous prenez les années
d'établissement, au lieu de 12 ans, c'est 14, 7 ans. Par exemple, si
vous prenez l'expérience, le nombre d'années depuis le premier
prêt de l'office, nous avons considéré le premier
prêt chez nous et son état actuel dans le dossier, 12 ans
après. La moyenne du premier prêt chez nous, c'est 12 ans; la
moyenne de l'établissement effectif en agriculture, c'est 14, 7 ans.
Mais on s'est basé sur une coupe de son dossier au moment où on a
fait le premier prêt, et une coupe au moment où nous nous parlons,
en mars 1985; ce qui donne la différence que vous avez vue. Cela veut
dire qu'on est loin d'endetter et de surendetter les agriculteurs. La situation
de tous ces agriculteurs s'est bonifiée pour autant qu'on puisse le
constater. C'est 3% de notre clientèle, je pense que c'est quand
même un sondage très rigoureux au point de vue de
l'échantillonnage et fort intéressant au point de vue des
résultats.
M. Baril (Arthabaska): Vous avez parlé des producteurs de
lait, avez-vous fait seulement ce sondage au niveau des producteurs de lait?
Est-ce que cela reflète à peu près l'image de
l'agriculture au Québec dans toutes les productions?
M. Moreau: On l'a fait ici pour les fins de la cause. Comme c'est
tout récent, ces jours derniers, effectivement, on n'a pu avoir les
résultats que la semaine dernière, on n'a pas eu le temps de les
décortiquer, peut-être qu'il y a d'autres dimensions du sondage
qu'on pourrait sortir, c'est fort intéressant. Actuellement, on les a
pour l'ensemble des agriculteurs, les producteurs de lait et les autres. Si
vous isolez les producteurs de lait, c'est encore intéressant, de 42, 3%
ils passent à 54%. Si vous isolez la meilleure catégorie qui
représente les producteurs de lait, vous arrivez avec les autres.
Maintenant, si vous prenez l'ensemble, c'est 49, 6% qui est passé
à 63, 9%.
M. Baril (Arthabaska): Peut-être pas ce soir, mais est-ce
qu'il serait possible de déposer ces statistiques? Si ce n'est pas
possible ce soir, vous pourriez nous les faire parvenir, mais je pense que cela
serait intéressant pour la commission.
M. Moreau: On en a une copie, on peut vous les laisser.
Le Président (M. Vallières): Oui, on va
les examiner et on pourra les considérer comme documents
déposés, une fois examinés. M. le député de
Maskinongé.
M. Picotte: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir
sur deux courtes questions avant d'en commencer une autre série sur un
autre sujet. À la page 24 de votre rapport, vous faites mention que vous
avez amorcé une déconcentration des services par l'affectation
d'un notaire dans certains bureaux régionaux. D'abord, j'aimerais savoir
s'ils sont tous choisis ou dans combien de régions ils sont choisis
présentement. Est-ce que cela se fait par un concours de la fonction
publique?
M. Moreau: Bien, vous savez comment cela fonctionne dans la
fonction publique pour l'engagement, le recrutement; il n'y a pas moyen de
passer à côté. Je pense que c'est la norme partout dans la
fonction publique quand nous recrutons. Maintenant, dans ce cas-là, nous
n'avons pas recruté, étant donné que c'était une
expérience pilote, afin de minimiser les dépenses. On a pris ceux
qui étaient au siège social et on a fait l'expérience dans
notre bureau régional à Québec et à Lévis;
alors, on a minimisé les dépenses. Ce sont des choix volontaires,
les deux notaires concernés, cela a été un choix
personnel. Ils ont dit: D'accord, on accepte de faire cette expérience
pilote. Ils sont très heureux de cela; alors, à l'avenir, nous
allons voir, nous allons procéder avec d'autres régions, comme je
le mentionnais tout à l'heure, par étapes, jusqu'à ce que
nos neuf régions soient couvertes.
M. Picotte: II y a deux régions qui sont faites
présentement, mais quelles sont les prochaines régions qui
devraient l'être? (20 h 45)
M. Moreau: J'ai un rapport sur mon bureau qu'il faut
étudier, c'est tout récent. L'expérience de six mois s'est
terminée dans le temps des fêtes ou un peu après. J'ai un
rapport du directeur du service juridique sur mon bureau. On va
l'étudier incessamment pour savoir quelle serait la stratégie
à développer, quelles raisons on suggère et laquelle on
retient finalement pour continuer l'expérience.
M. Picotte: Quels sont les noms de ces deux notaires
présentement? Vous pouvez nous faire parvenir cela.
M. Moreau: Ah oui! Ce sont deux notaires qui travaillent à
l'office depuis des années et qui sont prêtés dans ces
régions-là pour faire des expériences. Il s'agit du
notaire Diane Amyot et du notaire Patrick Gagnon, à Lévis. Je
peux vous donner l'adresse.
M. Picotte: De toute façon, ce sont des notaires qui
exerçaient leur profession à l'office qui ont été
prêtés dans les régions.
M. Moreau: Ils étaient déjà chez nous au
siège social. C'est pour cela que l'on parle de
déconcentration.
M. Picotte: On a aussi parlé tantôt du fameux fonds
de prêt de 29 000 000 $. Vous disiez qu'au 31 mars 1984 il y avait une
prévision de 53 000 000 $. Au moment où l'on se parle, en 1985,
on est tout près du 31 mars, il y a combien d'argent jusqu'à
maintenant dans les prévisions? Qu'est-ce qui a été
engagé?
M. Moreau: Les prévisions ou les engagements?
M. Picotte: Les prévisions.
M. Moreau: Elles sont en train de se compléter.
M. Picotte: II y avait 53 000 000 $ de prévus au 31 mars
1984. Au 31 mars 1985, vous aviez prévu combien?
M. Moreau: On est en train de les compléter. Le 31 mars
1985, c'est la semaine prochaine. On travaille là-dessus.
M. Picotte: Vous n'avez pas d'idée?
M. Moreau: Cela va être aux alentours de cela. Remarquez
bien que tout dépend du rythme. Il va falloir relever les dossiers. On
est en train de faire la réalisation des garanties pour voir ce qui se
fait et dans combien de temps. Comme je vous le disais tout à l'heure,
s'il n'y avait pas de délai, ce serait tout payé. Ce serait
réparti par 10 000 000 $ par année peut-être depuis trois
ou quatre ans, mais, étant donné les délais et les
pépins que l'on rencontre dans la réalisation des garanties,
à un moment donné, c'est refoulé. Cela fait un montant
plus substantiel qui sera à payer un jour; si ce n'est pas l'an
prochain, ce sera dans deux ans ou dans trois ans. Comme on le mentionne dans
le document, c'est réparti sur quatre ou cinq exercices financiers.
M. Picotte: Alors, cela veut dire que c'est environ 50 000 000 $
encore...
M. Moreau: Non, non, pas additionnels. M. Picotte:
Non?
M. Moreau: Écoutez une minute. Ce seraient peut-être
quelques millions de plus tout simplement, parce que c'est une consolidation,
comme je l'expliquais tout à l'heure. Ce sont des choses cumulatives,
mais
effectivement quantifiées par les prévisions.
M. Picotte: Quand ces chiffres-là vont être
disponibles, vous allez pouvoir les faire parvenir au président de la
commission.
M. Moreau: Comme vous le voyez, c'est public. Le chiffre, vous
l'avez dans le rapport annuel. Alors, il n'y a pas de cachette
là-dedans.
M. Picotte: M. le Président, j'aimerais maintenant revenir
sur une question. On se souviendra que, lors de notre passage en région
- nous étions allés à Sherbrooke, entre autres - il y a un
dossier sur lequel j'avais indiqué d'ores et déjà en
région que nous allions essayer d'avoir un peu plus de
lumière.
Vous êtes sans doute au courant de ce dont je veux parler et du
genre de questions que je veux poser, puisque M. Saint-Aubin qui est à
vos côtés était là, si je ne m'abuse, et il vous a
sans doute informé de certaines de nos doléances.
Nous avons entendu un mémoire qui provenait de M. Patry. Je cite
le Journal des débats, parce que c'est exactement ce qui s'est dit
là-bas et je ne voudrais en aucune façon déformer les
faits, je cite ce que j'ai dit, à un moment donné. J'ai dit: II y
a un nom qui me revient. J'ai déjà entendu parler de M. Daoust,
entre autres. Il faut que je le nomme par son nom puisqu'il est dans votre
mémoire et on en avait entendu parler dans une commission parlementaire.
Je disais: J'hésite un peu à croire et je ne peux pas mettre en
doute votre parole, mais qu'un homme ait autant de force dans une
région, je me demande si effectivement c'est exact le bobo sur lequel on
peut mettre le doigt. À moins que vous ne puissiez élaborer un
peu là-dessus, cela m'apparaît... M. Patry a dit: Dans mon cas, ce
que je veux dire, c'est que, quand je faisais partie de la
Fédération des syndicats de producteurs de boeuf, on avait
envoyé une lettre au ministre Garon et à M. Moreau, disant que M.
Daoust ne faisait pas son travail. Il a dit: J'ai la lettre ici. Si on avait un
peu plus de temps, je pourrais vous la lire.
Est-ce que, effectivement, vous avez eu quelques plaintes concernant le
M. Daoust en question en région?
M. Moreau: Non. Des plaintes de ce sens-là... Et
même cette lettre - on reçoit des centaines de lettres - je n'en
ai même pas souvenance. Remarquez bien, je ne dis pas que je ne l'ai pas
reçue. Peut-être qu'à la lecture je pourrais m'en souvenir,
mais je ne me souviens vraiment plus si j'ai reçu cette lettre.
Maintenant, dans ce sens-là, moi, je n'ai pas souvenance non plus
qu'il y a eu des plaintes.
M. Picotte: Venant de la région de Sherbrooke, plus
particulièrement, où, à quelques reprises, on a fait
allusion au cas Viateur Daoust, entre autres, vous n'avez pas souvenance que
des plaintes ont été acheminées à l'office?
M. Moreau: Les plaintes que j'ai eues, cela a été
dans le cadre des dossiers dont on a discuté ici, à la
commission. Vous vous souvenez, M. Daoust était ici et on a parlé
des encans. On a parlé de différentes affaires. Ce que j'ai
appris je l'ai appris, ici, à la commission et je l'ai appris par les
mêmes personnes à l'extérieur de la commission. Mais, ce ne
sont pas des plaintes comme celles que vous mentionnez, la lettre à
laquelle vous faites allusion. Moi, je ne me souviens vraiment pas; la lettre,
il faudrait que je la lise.
M. Picotte: Avez-vous déjà eu l'occasion de
discuter, soit par conversation téléphonique ou lors d'une
rencontre, avec le M. Patry en question de ce problème?
M. Moreau: Pas de ce problème-là. Mais, je me
souviens, je pense, qu'une fois, M. Patry m'avait appelé - je vous dis
ça de mémoire; c'est très vague; ça fait un bon
bout de temps - il me semble qu'il m'a déjà appelé,
justement. Je ne sais pas si c'était pour avoir un délai, je ne
sais pas trop quoi, je ne me souviens plus. Mais, je me souviens que M. Patry
m'avait appelé, mais je ne peux pas vous dire que c'était pour se
plaindre de Viateur Daoust.
Il faut voir le nombre d'appels et la correspondance qui entrent, depuis
quelques années, pour avoir une idée. Quand vous avez 21 000
dossiers seulement à long terme, à part le moyen terme et le
court terme, il faut comprendre que c'est assez difficile de se rappeler le
contenu des conversations téléphoniques et de se rappeler aussi
les lettres qui entrent.
Mais, si vous me parlez de griefs ou de doléances,
particulièrement contre M. Daoust, dans ces choses-là, je n'ai
pas... Si ce n'est, comme je vous dis, le contexte qu'on a connu en regard de
la première commission qui a siégé, etc. On en parlait,
à ce moment-là. Il était lui-même dans ta salle. Il
était prêt à partir. Il est même venu en avant
s'exprimer et essayer de s'expliquer. Mais, en dehors de ça, je n'ai pas
de...
M. Picotte: Je me permettrais, M. le Président, de lire un
passage, parce que je voudrais qu'on clarifie cette question. Je cite à
ce moment le Journal des débats, le ruban 586, à la page 2, au
nom de M. Patry, d'ailleurs. C'est M. Patry qui parle dans ce que je vais
citer. Moi, je lui dis: Parlez-vous uniquement de votre cas comme tel? parce
qu'il faisait référence à son cas.
M. Patry me répond ceci: Non, à cette
époque, la lettre n'était pas signée en mon nom personnel.
Elle était envoyée au nom du Syndicat des producteurs de boeuf de
l'Estrie, disant qu'on avait eu des plaintes que les producteurs de boeuf
allaient le voir, que ce n'était jamais rentable. Il n'y avait pas de
boeuf qui était supposé se faire en Estrie, d'après
lui.
On a envoyé ces lettres et on a eu une rencontre. Puisque
plusieurs disent que j'ai le crayon facile, M. Daoust n'avait pas trop
aimé ça et c'est moi qui ai écopé. À cette
époque, on nous a dit: Nous, on a fait ça, parce qu'à
chaque fois qu'on te demande quelque chose ça ne marche pas.
Je continue de citer. Il me reste encore quelques lignes. Après
ça, il y a autre chose. Quand j'allais voir M. Daoust, on avait toujours
des rapports de comptable. Je veux bien croire qu'un producteur ne peut pas
être qualifié partout. On avait deux comptables qui travaillaient
pour nous et ils ont quinze ans d'expérience. On arrivait avec ça
sur le bureau de M. Daoust, et on disait: C'est comme ça qu'il faut
marcher, parce que, de tel côté, ce ne sera pas rentable et, de
tel autre côté, ça va être rentable.
Pour quelle raison a-t-il été se vanter à tous les
agronomes du MAPAQ qu'il me dompterait? Je ne sais pas. Ce serait à lui
de répondre à la question et je serais bien content s'il
était ici, lui aussi, aujourd'hui, et je serais bien content si les
agronomes venaient témoigner aussi.
Après, il a dit à d'autres qu'il avait eu des ordres d'en
haut et que, dans le dossier, il n'avait rien à se reprocher.
Effectivement, il n'y a pas eu de plainte qui a été
déposée.
M. Moreau: Je comprends ce que vous me racontez là. Je
peux bien faire enquête; je peux bien m'informer rétroactivement
pour savoir ce qui s'est passé à ce moment-là. Mais, vous
me demandez si j'ai des plaintes, si je suis au courant de ces faits-là,
etc. C'est possible, peut-être, de faire enquête pour savoir ce qui
s'est passé auprès des intéressés.
M. Picotte: De la région même, est-ce que vous avez
eu d'autres plaintes, jamais d'autres plaintes du côté des gens
qui oeuvrent à l'office?
M. Moreau: Le même groupe dont je parlais tout à
l'heure, les grévistes de la faim, et, dans un contexte de contestation,
c'est évident, mais je n'en ai pas eu d'autres vraiment. Je ne me
souviens pas de dossiers qui ont accroché et où il y a eu des
récriminations contre cet homme en dehors de ces dossiers. Cela a fait
l'objet de discussions à la commission parlementaire. M.
Daoust est venu lui-même répondre à vos questions,
sous la foi du serment. En dehors de cela, je ne vois vraiment pas ce qu'il y a
de...
M. Picotte: Est-ce que vous pourriez me donner, si vous les avez
ici même ou si vous pouvez nous les faire parvenir si vous ne les avez
pas, pour la région, en ce qui concerne M. Daoust - ce serait
intéressant -des données statistiques telles que, par exemple, le
nombre des demandes de prêt qui sont faites dans cette région, le
nombre des acceptations, le nombre des refus, le nombre des cas
propulsés dans le domaine du porc ou du veau de grain et le nombre des
faillites? Est-ce que c'est possible d'obtenir cela?
M. Moreau: On a cela dans le rapport annuel. Vous devez avoir
cela par région probablement, dans le rapport annuel, sinon on va vous
!e3 produire. Je me demande si je ne les ai pas ici, dans l'explication de
refus par région. On va vous les fournir. Ici, j'ai les régions
du ministère et il y a une distorsion pour ces douze régions et,
chez nous, on a neuf régions. On va prendre cela en note et on va vous
fournir.
M. Picotte: Très bien. Quand il arrive, dans certains
dossiers, un cas de revente, de quelle façon l'office
procède-t-il généralement?
La renvente des fermes
M. Moreau: Dans le cas d'une revente, lorsqu'on se porte
adjudicataire, on a une procédure qui a été fournie dans
le livre noir qu'on vous a remis lors de l'autre commission parlementaire, le
document de référence sur l'office. Vous avez là toute la
procédure, l'organigramme, l'ordinogramme, la politique, la directive et
on a même des avis de vente. Suivant les délais - on respecte les
délais, bien sûr - on met des avis dans les journaux
systématiquement, la Terre de chez nous et la plupart des journaux
régionaux également, pour que les gens envoient leurs
soumissions. Il y a une procédure de prévue dans ce sens; ils les
adressent au secrétaire de l'office. Le bureau de direction, avec le
secrétariat, la direction de la gestion des prêts ouvrent à
une heure précise, tel que précisée sur l'avis, les
enveloppes, les cotations; elles sont étudiées par l'ensemble des
personnes présentes et on statue généralement sur la
demande, lorsqu'elle est acceptable. Si les prix ne sont pas acceptables, on
procède à un deuxième, parfois à un
troisième appel d'offres et c'est comme cela que cela se réalise.
Généralement - vous le verrez par la directive - on revend
à un candidat qui répond aux critères
d'admissibilité pour un
prêt agricole, pour s'assurer que ces fermes restent dans le giron
de l'agriculture et des agriculteurs.
M. Picotte: Est-ce que cela va toujours en soumissions
publiques?
M. Moreau: Oui.
M. Picotte: C'est toujours vendu en soumissions publiques.
M. Moreau: Un instant, entendons-nous, vous me parlez de fermes
dont on est propriétaire, nous. D'accord? Il y a trois choses qu'on peut
distinguer. Je vous ai expliqué, cet après-midi - et je l'avais
fait en octobre - que, à un moment donné, on peut discuter avec
l'agriculteur, pour minimiser les dégâts, vendre des actifs, cela
peut être des biens meubles, un morceau de terre ou la terre. C'est pour
lui permettre, pendant qu'il a encore un avoir net - il y a des gens qui
peuvent avoir 15% d'avoir net -étant donné ses engagements et les
problèmes qui sont dans le dossier, d'améliorer et de bonifier sa
situation. On n'est pas propriétaire de la ferme, on est simplement
conseiller dans le dossier, conseiller ou garant également, parce que le
fonds garantit les pertes éventuelles. Alors, on minimise les
dégâts. Bien souvent, c'est à son avantage et c'est pour
cela qu'on lui demande sa collaboration. S'il ne veut pas collaborer, on
continue le processus. C'est le premier élément du processus de
réalisation des garanties. Il le fait de lui-même sur une base
volontaire, pourvu - on le dit bien dans le document - qu'on ne le fasse pas au
détriment d'autres créanciers. Parce que, comme organisme
d'État, je pense qu'on serait vulnérable. Cela, c'est un premier
cas qui peut arriver. (21 heures)
Maintenant, quand la ferme est vendue par le syndic, il se peut qu'on
n'ait pas besoin de se porter adjudicataire. Le syndic va nous demander, par
exemple, si on accepte la transaction; c'est une chose qui arrive. Si on
s'aperçoit que la perte éventuelle est trop substantielle, on
refuse, ni plus ni moins, et on va se porter acquéreur à la vente
au shérif éventuellement. Ce sont des choses qui peuvent
arriver.
La troisième étape. Une fois qu'on s'est porté
acquéreur, que la vente a été faite par le shérif,
jusque-là on n'a rien à foutre là-dedans; on suit le
processus judiciaire. On n'a rien à foutre, en ce sens que, si on a le
mandat de la banque ou de la caisse, bien sûr qu'on va procéder,
mais pour et au nom de la banque et non pas en notre nom personnel.
On devient adjudicataire; même là, c'est au nom de la
banque ou de la caisse et, lorsqu'on est adjudicataire, on devient
propriétaire, bien sûr - à ce moment, on est
propriétaire - et on procède suivant la procédure que je
vous ai mentionnée: avis dans les journaux, appel d'offres au plus haut
enchérisseur. On pourrait vous donner des cas où il y a eu trois
et quatre appels d'offres. Pourquoi? Parce qu'on veut obtenir le meilleur prix
et minimiser les dégâts. Je pense que vous avez vu les
données que nous avions cet après-midi, quand même, par
rapport à l'évaluation. Cela veut dire que, dans certains cas, je
pense, on fait bien de ne pas précipiter les choses parce qu'on obtient
généralement un meilleur prix.
M. Picotte: Est-ce que vous pourriez me dire - peut-être
que vous n'avez pas l'information, mais vous pourriez me la faire parvenir -
dans le cas des Serres Vincent si, effectivement, elles avaient
été reprises par l'Office du crédit agricole au moment
où il y a eu revente?
M. Moreau: Je n'ai pas toute l'information. On me dit que c'est
le prêteur qui a agi là-dedans. Ce n'est pas nous qui avons agi
là-dedans. En tout cas, il faudrait que j'aie plus d'information pour
vous la faire parvenir.
M. Picotte: C'est parce que cela a déjà
été souligné en commission parlementaire, je ne sais pas
trop où, ni par qui, ce cas des Serres Vincent. J'aimerais que vous me
donniez des détails par le retour du courrier, à une prochaine
occasion.
Maintenant, avant de poursuivre, mon collègue d'Arthabaska me dit
qu'il aurait quelques questions additionnelles. Je n'ai pas d'objection.
M. Baril (Arthabaska): Merci bien. Sur le même sujet. Dans
combien de dossiers avez-vous été les premiers à
procéder è la saisie ou à la liquidation, je ne sais pas
comment vous appelez cela?
M. Moreau: Je dirais dans très peu de dossiers, parce que
ce n'est pas nous, en fait, les prêteurs, c'est la banque ou la caisse;
sauf que la banque peut nous donner le mandat, comme on l'a vu cet
après-midi, un tiers, deux tiers environ. Dans les deux tiers des cas,
on nous donne le mandat, mais on n'agit pas au nom de l'office, à ce
moment. On agit pour et au nom du prêteur.
M. Baril (Arthabaska): C'est vous qui allez être
obligés de le faire. Pourquoi est-ce que ce n'est pas la banque ou la
caisse qui procède elle-même?
M. Moreau: C'est prévu comme cela dans le règlement
et souvent c'est au niveau des ressources disponibles. Il y en a qui
préfèrent que cela se fasse de même. Remarquez bien,
cela peut parfois alourdir, je ne sais trop, mais disons que c'est la
situation. Le règlement le prévoit comme tel. Il y a
peut-être de petites caisses qui seraient plus défavorisées
au point de vue des ressources à ce niveau.
M. Baril (Arthabaska): Donc, c'est dans très peu de cas
que cela arrive, que c'est l'office qui intervienne le premier
lui-même.
M. Moreau: II y a les anciens prêts LCA, c'est pour cela
que je vous disais qu'il y a très peu de cas. Les anciens prêts
LCA, c'est parce que ce sont, je dirais, des vieux prêts et des
prêts qui sont plus solides étant donné que ce sont de
petits prêts. Je vous ai expliqué, cet après-midi, qu'il y
a X années, les montants des prêts étaient de 15 000 $ et
de 25 000 $. Les risques étaient peu importants à ce moment; on
était sur hypothèque seulement. C'étaient des prêts
qui étaient de tout repos. Ces prêts sont très rares. C'est
très rare qu'on soit obligé d'y aller personnellement en vertu
des anciens prêts que nous avions faits. Cela arrive occasionnellement,
mais c'est plutôt rare.
M. Baril (Arthabaska): Maintenant, la façon dont vous
procédez - vous l'avez dit et j'en vois passer souvent - vous allez en
appel d'offres è deux ou trois reprises et, dans l'appel d'offres, dans
les avis publics, vous fixez un montant. Vous dites à peu près,
je vais vous dire un chiffre: Toutes les offres inférieures à 100
000 $ ne seront pas considérées. Donc, l'acheteur éventuel
se base sur le prix minimum que vous voudriez avoir parce qu'il faut qu'il
dépose un chèque certifié, je ne sais pas, 10 %, en tout
cas. Il faut qu'il aille à la banque et voir s'il est capable d'avoir
l'argent, faire l'emprunt, parce que tu ne trouves pas toujours cela "cash"
dans tes poches. Quand vous dites - je vais dire un chiffre - 100 000 $ et
qu'un gars dit 105 000 $, vous ne lui vendez pas quand même, vous
retournez en appel d'offres. Pourquoi ne dites-vous pas que c'est 125 000 $ ou
130 000 $ qu'on veut avoir? Vous faites faire des déplacements et des
démarches à l'agriculteur, que je considère
peut-être inutiles, parce qu'il se base sur le prix minimum que vous
fixez. En cours de route, vous dites: On veut avoir plus.
M. Moreau: C'est une mise à prix, qu'on appelle
là-dedans. C'est qu'avant de faire cela on avait des prix ridicules. On
a même eu un bonhomme, pour une ferme de 180 000 $, qui nous a
envoyé 1 $. C'était simplement ridicule, mais c'est
arrivé. Il y a du monde comme cela. À ce moment-là, ce que
l'on fait, c'est qu'on s'est dit: Arrêtons de perdre du temps et d'en
faire perdre à tout le monde. On a tout simplement mis une mise à
prix pour éviter ces abus, parce qu'on faisait perdre du temps à
tout le monde. La mise à prix reflète,
généralement, l'évaluation ou s'approche de celle-ci. On
se dit: En bas de cela, on n'est pas intéressé à discuter
là-dessus. Ce qui arrive, lorsqu'on retourne, c'est parce que
souventefois les agriculteurs vont nous dire: On va donner 105 000 $ à
condition d'avoir un prêt de l'office. On étudie le dossier et on
s'aperçoit que ce n'est pas possible, on ne peut pas le lui donner; ou
bien il est trop endetté, ou bien ce n'est pas rentable, il ne
répond plus à nos critères, etc. À ce moment, on
recommence à zéro et on procède à un
deuxième appel d'offres. Je pense que c'est normal, toujours pour
minimiser, comme je vous le mentionnais, autant que possible les pertes.
M. Baril (Arthabaska): Je suis d'accord avec la mise à
prix, ce n'est pas sur cela que...
Une voix: C'est sur le refus.
M. Baril (Arthabaska): Comme j'ai dit, vous fixez 100 000 $; le
gars vous dit 105 000 $, il a la garantie de sa banque qu'il est capable
d'avoir ce montant; vous, à un moment donné, vous retournez en
appel d'offres. C'est là-dessus, disons, que j'en avais et que je me
pose des questions. On fait faire des démarches inutiles aux
agriculteurs.
M. Moreau: II s'agit de savoir, d'abord, s'il répond aux
critères d'agriculteur en vertu de nos lois. Deuxièmement,
lorsqu'il accompagne sa mise à prix ou son offre d'une condition, qu'il
l'assortit d'une condition, à savoir, généralement,
d'obtenir un prêt de l'office, il faut savoir s'il peut être
emprunteur chez nous, etc. À ce moment, si on en arrive à la
conclusion qu'on ne peut pas éventuellement lui prêter, c'est
normal que le plus tôt possible on retourne les chèques et qu'on
recommence l'appel d'offres.
M. Laplante: Est-ce que cela voudrait dire... Je suis de
Montréal, je vois cette terre à vendre. Je décide, tout
à coup, de me faire cultivateur. J'ai 105 000 $ comptant; je n'ai pas
besoin de l'Office du crédit agricole, j'ai de l'argent. La terre
pourrait m'être refusée?
M. Moreau: Cela va dépendre de ce que vous allez inclure
dans votre offre; il y a un formulaire. Si vous dites que vous voulez cultiver
vous-même cette terre...
M. Laplante: Oui.
M. Moreau:... là, on pourrait la vendre, parce qu'elle
reste dans le giron de l'agriculture et que vous voulez faire de l'agriculture.
Mais si, par exemple, vous êtes...
M. Laplante: Spéculateur.
M. Moreau:... spéculateur, ou agent d'immeubles...
M. Laplante: D'accord.
M. Moreau:... ou médecin, on va refuser tout simplement.
On va refaire un nouvel appel d'offres pour attirer de véritables
agriculteurs, qui vont l'exploiter.
M. Laplante: Comme cela, vous me la vendriez.
M. Moreau: Possiblement. Il y a d'autres facteurs à
considérer, par exemple.
Le Président (M. Vallières): Nous revenons...
Une voix: C'est parce que vous ne le connaissez pas.
M. Picotte: Le problème, ce sont les 105 000 $.
Le Président (M. Vallières):... au
député de Maskinongé.
M. Picotte; Oui, M. le Président. On a parlé du
dossier Patry tantôt. Est-ce qu'il vous a été donné
de discuter avec le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, à un moment donné, du dossier ou de son projet
expérimental en ce qui concerne la ferme de M. Patry?
M. Moreau: Je me souviens vaguement qu'il y avait une
étude qui était en cours au ministère, à ce
moment-là, ou quelque chose de même. Mais c'est bien vague, je ne
sais même pas si c'est dans ce dossier. Je sais que, à un moment
donné... Oui, oui, une étude par nous, mais il dit par le
ministère. Je ne me souviens plus, je ne pourrais pas dire. Est-ce qu'il
y a eu une étude de faite par le ministère? Je ne me souviens
plus. La discussion...
M. Picotte: II n'y a pas eu de discussion, de toute façon,
entre vous et M. Garon là-dessus.
M. Moreau: Je ne me souviens pas de cela.
M. Picotte: En ce qui concerne une autre question que je voulais
poser, c'est concernant le crédit spécial à la production,
au cours des périodes critiques. Combien d'agriculteurs se sont
prévalus de ce crédit spécial? Est-ce que vous êtes
en mesure de me donner le nombre? Dans quelle situation étaient ces
agriculteurs? Combien sont encore en production au moment où on se
parle?
M. Moreau: Les crédits spéciaux, nous en avons eu
depuis 1972 huit; en 1972, il y a eu les oeufs, les récoltes, dans 34
comtés. En 1974, il y a eu les pluies excessives; en 1975, les tornades,
les glissements de terrain et la sécheresse; en 1980, le porc; en 1981,
le crédit supplémentaire pour le porc et, en 1983, les
céréales. Si nous reprenons les crédits un à la
suite de l'autre, prenons celui des oeufs, il y a eu 89 prêts consentis
pour 1 196 963 $ et il y a eu un dossier de pertes pour 1983. Les
récoltes, en 1972, il y a eu 3555 prêts de consentis pour 12 110
000 $, il y a eu 13 pertes pour 15 712 $. Les pluies excessives, en 1974, le
règlement no 3, il y a eu 243 prêts pour 615 357 $, il y a eu deux
pertes pour 12 922 $. Les tornades et glissements, en 1975, il y a eu 46
prêts pour 301 753 $ et aucune perte. La sécheresse, en 1975, il y
a eu 106 prêts pour 797 414 $ et aucune perte. Dans le domaine du porc,
en 1980, il y a eu 892 prêts pour 22 726 625 $, il y a eu 63 pertes au
total pour 1 697 490 $. Le deuxième règlement dans le secteur du
porc, en 1981, ce sont les mêmes dossiers, cela veut dire qu'il y a eu
210 prêts supplémentaires, mais le nombre des pertes est le
même parce qu'elles sont englobées dans le premier. Les
céréales, il y a eu 143 prêts pour 4 513 156 $ et aucune
perte.
Si vous faites le cumulatif de tout cela, vous en arrivez à 5041
prêts avec 107 dossiers de pertes, ce qui veut dire 2, 1% de cas de
pertes par rapport à l'ensemble, dans des cas de crédits
spéciaux où on est, au départ, bien sûr, dans des
crédits de dépannage vulnérables.
Si nous isolons le secteur du porc qui est un cas assez spécial,
comme je l'ai mentionné à quelques reprises aujourd'hui, vous
avez 4182 prêts pour 16 pertes, ce qui veut dire 0, 003%.
M. Picotte: Est-ce qu'il vous est possible de déposer ces
chiffres à la commission?
M. Moreau: On pourra vous envoyer des tableaux, les miens sont
tous maculés, je m'excuse.
M. Picotte: D'accord, dans les jours subséquents...
M. Moreau: Je pense que j'en ai une copie additionnelle.
M. Picotte: D'accord, (21 h 15)
Une autre question, M. le Président. En novembre dernier, le
ministre, M. Garon, annonçait que le gouvernement allait venir en aide
à une catégorie d'agriculteurs qui avaient un prêt à
la Société du crédit agricole. D'abord, est-ce que vous
avez eu des demandes de transfert depuis ce temps? Quel nombre? Combien en
avez-vous eu? Combien prévoyez-vous de demandes si vous avez une
prévision de faite? Â combien d'agriculteurs, à peu
près, cela peut-ii s'adresser?
M. Moreau: Actuellement, les demandes traitées chez nous
en regard de cette politique, il y en a une vingtaine. Maintenant, les
cas qui avaient été prévus...
M. Picotte: II y a une réponse que j'ai omise ou que je
n'ai pas entendue.
M. Moreau: Ah bon!
M. Picotte: Quelle est la réponse que vous m'avez
donnée?
M. Moreau: Voici...
M. Picotte: Moi qui pensais que vous étiez en train
de...
M. Moreau: J'attendais. Vous aviez l'air très
occupé.
M. Picotte: Non, non.
M. Moreau: Je m'excuse. C'est un imbroglio impardonnable. On
avait prévu 450 cas et, effectivement, la société, depuis
ce temps, quelques jours après, a annoncé une politique de rabais
jusqu'à 12, 75%, je pense. Cela veut dire que cela changeait le ratio
qu'on avait prévu, les prévisions, de sorte que cela baisse
à 120 cas, possiblement.
Il y a 20 cas qui ont fait l'objet d'étude, chez nous,
jusqu'à maintenant. C'est cela la situation. Dans les montants qui
avaient été prévus, il y a eu un changement substantiel
là-dessus parce qu'on part de 450 à 120; il y avait, la
première année, nil à cause de la question
budgétaire, le chevauchement? la deuxième année,
c'était 454 000 $; la troisième année, 1 340 000 $ et la
quatrième année... Nil au début; en 1984-1985,
c'était nil; 1985-1986, 454 000 $; 1986-1987, 1 140 000 $; 1987-1988, 1
362 000 $. C'est ce qui avait été prévu.
Maintenant, il y a un changement de la politique de la
société et on étudie vraiment ce qu'on peut faire à
l'intérieur du budget qui avait été prévu, si on
peut trouver des éléments pour changer la politique. C'est ce
qu'on est en train d'évaluer actuellement.
M. Picotte: Finalement, est-ce que la différence
était si grande que cela? Je pense qu'il y avait trois mois de
pénalité prévus à l'agriculteur pour le
transfert.
M. Moreau: À la société, probablement. Je ne
pense pas que ce soit chez nous. À la société, je pense
qu'ils avaient jusqu'au 15 mars pour faire leur demande. Je vous donne cela
sous toutes réserves. Le processus n'est même pas
complété encore. Avant d'établir une politique
définitive, je pense qu'il faudrait voir exactement combien il va rester
de cas, de ces cas qui vont être étudiés par la
société. Je ne peux pas vous le dire actuellement. On devrait
prochainement avoir l'heure juste à ce niveau.
M. Picotte: Dans un autre ordre d'idées, l'Office du
crédit agricole aurait pris des dossiers de la Société du
crédit agricole fédéral depuis 1978. Avez-vous un tableau
du nombre de dossiers qui ont été repris, c'est-à-dire en
1978, 1979 et 1980?
M. Moreau: On pourra vous le faire parvenir. On doit avoir les
montants et le nombre de dossiers qui ont été remboursés
à ce moment.
M. Picotte: Quelle était la différence des taux
d'intérêt qui existaient à ce moment entre l'office et la
société?
M. Moreau: Je peux vous dire cela, j'ai les taux ici, un instant.
Chez nous, pour un individu, c'était 2, 5 % sur les premiers 15 000 $ et
8 % pour les 135 000 $ suivants. Pour un groupe, c'était 2, 5 % pour les
premiers 15 000 $ et 8 % pour les 185 000 $ suivants. Maintenant, la
Société du crédit agricole... À ce moment, vous
référez-vous à 1978?
M. Picotte: Oui, depuis 1978.
M. Moreau: À la Société du crédit
agricole, en mai 1978, le taux était de 9, 5 %; en novembre 1978, le
taux était de 10 %; en 1979, 10, 75 %; 12 %, 13 %, 12, 75 %, 14 %, 16,
75 %, 16, 50 %, 15, 75 %, 12, 75 %, 13, 50 %, 14 %, 13, 25 %. Cela va de six
mois en six mois et mon tableau finit en novembre 1984.
M. Picotte: Est-ce qu'il a déjà été
envisagé ou discuté, avec vos vis-à-vis de la
Société du crédit agricole, un genre de prêt tandem
ou quelque chose qui ressemblerait à cela?
M. Moreau: Cela est arrivé à quelques reprises. Je
pense que, du côté de la société, cela aurait
été un voeu d'être considérée
accréditée comme prêteur dans le tandem au
même titre qu'une caisse populaire ou une banque.
Évidemment, cela devient une politique gouvernementale. Ce n'est pas
nous qui allons prendre une décision dans des cas comme ceux-là.
Si jamais la question devient plus précise, à ce moment, ce sera
au gouvernement de décider ce qu'il fera dans un dossier comme
celui-là.
M. Picotte: Si je ne m'abuse, je pense que, lorsque la
société est venue présenter un mémoire à la
commission, on avait fait part qu'elle était ouverte à ce genre
de prêt et à ce genre d'entente s'il y avait une volonté
politique ou une volonté de la part de l'office.
M. Moreau: Je pense que je lui ai répondu à ce
moment, j'en ai discuté, c'est arrivé à quelques reprises,
c'est un voeu, mais jusqu'à quel point cela se
matérialiserait-il? Si vous voulez avoir mon opinion personnelle,
à ce moment, je me disais: Le gouvernement du Québec se retire
d'une certaine façon du rôle de bailleur de fonds pour y laisser
les institutions privées. Comment allons-nous laisser le gouvernement
fédéral venir faire concurrence aux institutions privées
au sein du tandem, dans le giron du tandem? Cela m'apparaissait un peu
surprenant. Ce n'est pas moi qui ai la décision à prendre dans
cela; je vous donne une opinion purement personnelle.
C'était un peu mon "feeling", à ce moment, pour avoir
procédé ou avoir travaillé à la mise en place du
tandem depuis le tout début. Je me dis que le rôle a quand
même... En arrière de cela, le tandem, comme je l'expliquais cet
après-midi, a toute une philosophie, il y a les orientations. On parle
des structures en place, des institutions qui ont vocation de prêter,
etc. Je vois mal que le Québec dise: On ne joue plus le rôle de
bailleur de fonds, mais, par contre, si le fédéral veut venir
à ma place jouer le rôle de bailleur de fonds et faire concurrence
aux institutions privées, soit. C'est un choix, s'il veut le faire. Je
vous donne mon opinion purement personnelle. Je me pose quelques questions
là-dessus.
M. Picotte: On se souvient qu'il y a eu une guerre de chiffres,
à un moment donné, le fédéral avait parlé de
127 faillites agricoles au Québec. M. le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation avait mentionné, en
conférence de presse, qu'il mandaterait des fonctionnaires - je ne sais
pas si c'est de l'Office du crédit agricole - pour examiner cette
situation et voir si, effectivement, le nombre de 127 était réel,
alors que lui prétendait que c'était bien moins que cela. Est-ce
vous qui avez été appelés à faire un rapport sur
cela ou à étudier les cas? Non.
M. Moreau: Je n'en ai pas d'écho, c'est peut-être au
bureau du ministre ou au ministère, je ne le sais pas. Chez nous, on n'a
pas de chiffres sur cela. Comme je vous l'ai dit cet après-midi, les
chiffres que nous avons donnés ont toujours été des
chiffres de nos dossiers et des données à partir de nos
emprunteurs à long terme, strictement.
M. Picotte: Vous parliez d'une autre question où vous
faisiez référence à des contrats d'intégration.
C'est encore une chose qui a été soulignée souvent et vous
faisiez la distinction en disant: intégration à outrance. Dans
votre esprit, c'est quoi l'intégration à outrance dont vous
parlez et quel genre de contrat était exigé, à ce moment,
de la part de l'Office du crédit agricole, en ce qui concerne certains
producteurs à qui l'on disait, par exemple: Va te chercher un contrat
d'intégration, si ceia s'est passé?
M. Moreau: Je ne dis pas que cela ne s'est pas dit il y a 40 ans,
je ne le sais pas. Mais je peux vous dire que cela fait un bon bout de temps
que je suis à l'Office du crédit agricole et que cela a
été une consigne de ne jamais favoriser un secteur plutôt
qu'un autre. C'est le choix personnel de l'agriculteur, et je vais expliquer ce
que nous faisions. C'était de vérifier les contrats afin de
s'assurer - notre règlement pour la principale occupation prévoit
des critères -de l'un des critères, soit
précisément qu'il ait son autonomie de gestion. Si vous me
permettez un instant, je vais vous donner le texte. Comment voulez-vous
vérifier s'il y a l'autonomie de gestion si vous ne vérifiez pas
le contrat? Cela ne veut pas dire qu'on l'envoie en intégration, on veut
savoir s'il est intégré, comme je vous l'ai lu cet
après-midi.
Regardez le critère en question. Il y a quatre critères
pour établir la principale occupation. Le troisième des
critères, c'est: Contrôler l'emploi de son temps dans la mesure
où le requièrent les opérations normales de ladite
exploitation. Pour savoir s'il est maître de son affaire, si c'est lui
qui est le boss sur sa ferme, il nous faut savoir jusqu'à quel point il
est intégré. Il y a des contrats où c'est strictement un
ouvrier de l'intégrateur, un employé de l'intégrateur. Ils
ne participent pas aux profits. Nous ne les acceptons pas pour consentir des
prêts parce que c'est ce qu'on appelle une intégration à
outrance. Par ailleurs, s'il participe aux profits, ce qui est une
intégration acceptable, à ce moment, on dit: C'est son choix. On
va lui prêter parce qu'on considère qu'il a une autonomie relative
qui répond à nos règlements.
Par ailleurs, en marge de ces programmes, nous avons mis sur pied, comme
je l'ai dit cet après-midi, le crédit à la
production; et c'est là qu'on dit qu'à ce moment
l'agriculteur qui le désire peut opter pour le crédit à la
production pour couper le cordon ombilical et devenir complètement
autonome. Je sais que, pour les producteurs de porcs, par exemple,
c'était l'orientation de la Fédération des producteurs de
porcs depuis un an, je pense, de favoriser le naisseur-finisseur et de
favoriser aussi une plus grande autonomie de la part des producteurs. Je sais
qu'on a eu un accroissement de demandes de crédit à la production
des producteurs déjà établis - on ne fait pas de
prêts à long terme dans le porc - qui voulaient continuer
l'exploitation de leur ferme, non pas assujettis à un contrat
d'intégration, mais en volant de leurs propres ailes. On les a
favorisés au moyen du crédit à la production, et c'est
pour cela que le crédit à la production, depuis deux ans, a pris
un essor considérable comme on n'en avait pas connu jusque-là.
Cela veut dire que, de notre côté, ce n'est pas notre rôle
de mousser une formule plus qu'une autre, mais notre rôle, c'est de
laisser le choix à l'agriculteur. S'il veut être
intégré de façon à répondre quand même
à nos critères, il peut l'être; et, s'il veut sortir de
l'intégration pour être complètement autonome, il peut le
faire avec les programmes dont nous disposons.
M. Picotte: Ce à quoi l'on faisait
référence, à ce moment, quand on nous en a parlé
à quelques reprises en commission parlementaire, ce n'était pas
le fait que, dans vos critères, c'est bel et bien indiqué, mais
plutôt qu'on semblait nous dire qu'en région, souventefois,
c'était l'incitation que certains recommandaient d'aller se chercher des
contrats d'intégration pour être capable de devenir producteurs.
(21 h 30)
M. Moreau: II y a une question de perception. Je l'ai lu cet
après-midi et c'est très clair, et cela est donné à
tous les requérants. C'est très clair et on l'écrit, on le
dit, mais la perception peut être différente.
Demandes de prêts
M. Picotte: M. le Président, peut-être une
dernière question en ce qui me concerne pour l'instant. On nous a fait
part finalement, encore là, dans certaines de nos discussions, que des
demandes d'agriculteurs étaient modifiées en cours de route sans
le consentement de ces derniers, c'est-à-dire que les gens faisaient une
demande au point de départ et que, finalement, quand on arrivait
à l'office, en tout cas au moment d'accorder un prêt, les gens
disent: Il y a eu des modifications faites à notre demande sans qu'on
ait été consultés, sans qu'on nous en ait parlé. On
nous dit: Bien, si tu veux accepter, c'est cela, sinon on ne peut pas embarquer
dans ce que tu dis. Est-ce que ce sont des pratiques qui ont été
portées à votre attention?
M. Moreau: Ce que j'ai entendu, je l'ai entendu à
la radio par des personnes, notamment un député entre autres, qui
a déjà déclaré à la radio qu'on faisait
cela. Ce n'est pas la perception que nous en avons de l'intérieur, nous
autres. Cela a été perçu à l'extérieur comme
cela, remarquez bien, cela fait quelquefois que j'entends cela, je l'ai
entendu, sauf que j'ai expliqué cet après-midi comment nous
procédions. J'ai expliqué longuement cet après-midi
comment nous procédions quant à la formule de demande
elle-même et quant au processus, par la suite. J'ai expliqué,
à l'intention du président de la commission qui a posé une
question identique, que la formule en soi était le document de base qui
apparaissait au dossier, qui est intouchable. On ne modifiait jamais la formule
sans avoir les initiales, si vous voulez, de la personne concernée.
Pour ce qui est du cheminement, j'ai expliqué longuement cet
après-midi qu'on essayait de faire cheminer l'agriculteur selon la
demande et le député d'Arthabaska a posé une couple de
questions reliées à cela parce qu'on parlait justement de
rentabilité. C'est bien sûr que, si le bonhomme vient nous voir et
nous dit: J'ai vingt vaches, nous autres, on lui dit: Tu ne peux pas
répondre, avec ce que tu offres comme potentiel, à un
critère de ferme rentable chez nous. Cela te prendrait 30 vaches,
peut-être. Ta ferme te le permet, il y a une économie
d'échelle, disons, où ta ferme te le permet, tu as
l'exploitation, tu as les bâtiments pour le faire, tu n'as pas
d'investissement additionnel à consentir là-dedans. Je prends un
exemple très concret. À ce moment-là, on va faire des
scénarios avec l'intéressé et on va en venir à une
conclusion. S'il est d'accord, on y va; s'il n'est pas d'accord, c'est lui qui
prend la décision. Jamais nous ne nous substituons à la
décision de l'emprunteur, c'est-à-dire qu'on ne prend pas de
décision à sa place. Il signe ses documents, il a le choix de son
notaire, il a le choix de son prêteur, il a des documents à
signer, cela le regarde, à ce moment-là. Il ne faut quand
même pas signer à sa place et lui tordre le bras. Vous savez, on a
assez de dossiers et assez de dossiers en attente et de délais qu'on ne
fait pas le tour des rangs, comme je l'ai déjà expliqué,
pour essayer de vendre du crédit agricole et de tordre le bras des
agriculteurs pour qu'ils empruntent plus qu'ils n'ont besoin.
Si c'est arrivé qu'il y ait eu des changements dans le
cheminement du dossier, c'est tout simplement parce que la discussion sur des
scénarios a débouché sur un nouveau projet, finalement.
J'aimerais que vous
veniez voir les changements dans les dossiers, vous verriez que, dans un
grand nombre de projets, cela arrive très souvent qu'il y a des
ajustements. C'est normal parce qu'en cours de route ils s'aperçoivent
que cela serait plus avantageux de procéder de telle façon
plutôt que de telle autre.
Vous allez voir également que, dans les cas de révision,
il y a toujours des éléments nouveaux d'apportés au
dossier. Parfois, le projet est substantiellement modifié après
une deuxième, une troisième révision, et c'est pourquoi on
nous dit parfois: Écoutez! le bonhomme a eu son prêt. Oui, il a eu
son prêt, mais ce n'est pas du tout le même projet que celui qu'il
avait au départ. Bien sûr, il y a eu une deuxième
révision, une troisième révision, et finalement, à
force de modifier son projet, il en arrive à un scénario qui est
acceptable, qui répond à notre définition de ferme
rentable en vertu de notre loi. Les révisions se font avec l'agriculteur
et, comme je vous le mentionnais cet après-midi, on essaie - c'est la
consigne chez nous - de faire cheminer le requérant au même rythme
que notre conseiller. En d'autres termes, il développe des
scénarios, il explique tous les éléments dans le dossier
et il essaie d'obtenir son adhésion. Il y a peut-être des cas
d'exception, comme je le mentionnais, qui viennent confirmer la règle,
mais, en général, il y a un cheminement des deux personnes dans
le dossier qui s'entendent sur une conclusion. Maintenant, parfois cela va mal
après; là, c'est toujours l'office. Haro sur le baudet de tous
côtés, vous l'avez vu depuis des mois.
Il ne faut pas se surprendre, vous savez, tout ce qui est crédit
agricole au Québec ou presque tout - faisons une petite
parenthèse pour la Société du crédit agricole -
tout ce qui est crédit agricole au Québec, finalement, je pense
que c'est la fédération du Québec de l'UPA qui le disait
récemment: Cela a une connotation avec l'office. On en prend large,
c'est bien sûr, on est, à certains égards, on vit dans une
tour de verre, on est vulnérable. Il y a des milliers de dossiers. Je ne
dis pas cela pour essayer de m'excuser, mais il y a des milliers de dossiers.
En avez-vous une idée? À moyen terme, c'est 5000 ou 6000 dossiers
par année; à court terme, 1500 ou 1800, à part tous les
dossiers à long terme. Des milliers de dossiers; ce n'est pas la loi de
mise en valeur, ce n'est pas la LEJA, ce ne sont pas les autres programmes
qu'on a. On en est rendu à une douzaine de programmes. Alors, c'est
complexe. Il faut bien voir ça et tout le monde, bien sûr, je l'ai
expliqué cet après-midi... Il y a ceux qui sont refusés,
d'une part, qui ne sont pas heureux, et vous avez plusieurs agriculteurs qui
aimeraient avoir accès à nos programmes très avantageux et
qui, ne pouvant pas y avoir accès, encore là, eux aussi sont
malheureux.
Il faut bien situer dans son contexte tout ce climat de contestation et,
quand on vient de traverser une crise économique, il faut bien
être conscient que les gens qui, dans un contexte comme celui-là,
ont une décision à prendre sur des deniers, sur des dollars dans
une crise économique, vous comprenez qu'il y a des résonnances
è ça. Alors, ça ne m'étonne pas, ça ne me
surprend pas; il y a des fois que ça fait mal. Je pense que c'est
normal. On réagit, parce qu'on est des humains, surtout quand on prend
à coeur le rôle qu'on joue. Il y a des fois que ça fait
mal, mais il faut rationaliser le plus possible et être en mesure de
transcender tout ça, finalement, pour se dire: Écoutez, l'office,
le crédit agricole, c'est synonyme d'Office du crédit agricole au
Québec, présentement. Et on va essayer, comme je le mentionnais
dans le document, à la faveur du parachèvement de la
réforme et, on l'espère, la refonte des lois, d'améliorer
le système, tout simplement, pour être moins vulnérable. Je
ne vous dis pas que c'est parfait - je l'ai mentionné aujourd'hui - mais
on va essayé d'être moins vulnérable à l'avenir.
M. Picotte: À la lumière des explications que vous
me donnez, je dois conclure que, finalement, les gens qui viennent ici, en
commission parlementaire, exprimer ou donner certaines opinions ou nous dire,
à nous qui sommes les élus du peuple, qu'il y a eu telle ou telle
chose dans tel et tel dossier, ne font jamais de plainte où ils
devraient en faire, c'est-à-dire acheminer une plainte officielle
à l'office, parce que des cas semblables n'ont pas été
portés à votre connaissance.
En ce qui nous concerne, M. te Président, comme je ne reviendrai
pas avant la fin de la séance, je voudrais vous remercier de votre
collaboration et, de même, remercier tous ceux qui étaient ici, en
espérant que les choses qu'on a voulu démontrer ou les choses
qu'il y aurait à améliorer vont l'être dans le meilleur
esprit possible.
Le Président (M. Vailières): Merci. M. le
Président, j'aurais une question pour vous, à la suite de ce
qu'on a entendu en région, lors de notre récente tournée.
Il y a plusieurs organismes, dont l'Union des producteurs agricoles du
Québec et la Fédération de la relève agricole, qui
nous ont indiqué que l'office, pour garantir ses prêts, prenait
beaucoup plus que ce qui était nécessaire de prendre en garantie.
En tout cas, il y a cinq ou six organismes qui, à tour de rôle,
nous ont répété ça.
On rencontre aussi dans nos comtés, à un moment
donné, des gens qui nous disent, par exemple, que, pour acheter un
quota
additionnel... J'avais, cette semaine, quelqu'un à mon bureau qui
me disait que, pour acheter un quota additionnel d'une valeur de 65 000 $, on
lui demandait des garanties de 300 000 $ à l'office. Des situations
comme ça, est-ce que c'est possible que ça se produise? Si oui,
pourquoi?
M. Moreau: Je doute fort que ça se produise. Mais, je suis
prudent ici, M. le Président - vous allez comprendre - parce qu'il y
a une part de subjectivisme. Ma maison a une valeur exceptionnelle
à mes yeux. Probablement que, pour mon voisin, c'est une maison comme
les autres. Quand chacun apprécie la valeur de son propre bien, il y a
inévitablement une part de subjectivisme et il y a des biens qui ont
tellement de valeur que cela n'a plus de valeur, tellement cela a de la valeur,
finalement.
Vous savez, nous autres, on s'est toujours, ou à peu près
toujours, fait taxer de ça. Si telle était la situation, M. le
Président, vous comprendriez qu'on n'aurait pas de pertes. 5i on prenait
une valeur de 300 000 $ pour garantir un prêt de 15 000 $, on n'aurait
pas de pertes. Comment se fait-il que nous ayons des pertes? C'est parce que,
effectivement, il manque des garanties. Cela m'apparaît très
concluant. On était taxés de ça et ça restera
toujours, je pense bien, discutable. Il y a une question de valeur et il y a
une question de garantie.
On peut contester les valeurs, bien sûr. Chacun apprécie
ça à sa façon; il y a une part subjectiviste. Et les
garanties, on aimerait toujours en avoir en réserve. On veut avoir le
plus d'argent possible en donnant le moins de garanties possible. Cela, c'est
normal, je pense. C'est de bonne guerre. Là-dessus, je n'ai pas
l'impression -il y aurait peut-être des exceptions, mais ça
m'étonnerait - qu'on a exagéré de ce
côté-là. On s'est fait taxer de cela souvent, mais je ne
crois pas que nous ayons exagéré de ce
côté-là, en ce sens que la loi prévoit un type
d'évaluation qui est très bien structuré, qu'il s'agisse
des biens meubles, des immeubles ou des animaux, avec des grilles et qui est
à jour constamment. On en a mentionné à profusion cet
après-midi.
En plus de cela, la loi prévoit des maximums. On ne peut pas
dépasser 90 % de la valeur foncière; on ne peut pas
dépasser 80 % de la valeur des animaux, etc. Alors, on joue dans ce
corridor-là finalement, et je n'ai pas l'impression que l'on
exagère de ce côté-là parce que, comme je vous
expliquais, l'approche globale intégrée cet après-midi, la
façon dont nous procédons, nom nous assurons de couvrir, avec
cette approche globale, tous les modules et de stratifier justement les
garanties de façon qu'il y ait le meilleur impact. On n'a pas
intérêt à geler ces garanties de façon qu'il ne
puisse éventuellement pas développer son affaire. Je ne crois pas
que ce soit arrivé, mais, encore une fois, on, en sera toujours à
discuter là-dessus parce que toute la question des valeurs est
très subjective.
Le Président (M. Vallières): La prochaine fois que
l'UPA nous parlera de cela, il faudrait exiger des cas précis, des
preuves à l'appui.
M. Moreau: Je l'apprécierais. M. le Président,
c'est une chose qui m'a frappé. Il y a eu beaucoup de cas
d'énoncés; il y a même eu des questions posées sur
des cas précis, mais il n'y a pas eu tellement de réponses sur de
tels cas, d'après ce que j'ai vu dans les journaux et ce qui m'a
été dit. Je déplore cela parce que ce n'est pas tout
d'attaquer et de démolir. Je pense qu'on devrait être en mesure de
prouver noir sur blanc, cas par cas, ce que l'on reproche finalement à
un organisme.
Le Président (M. Vallières): D'autant plus quand
cela vient d'organismes à caractère aussi important ou provincial
comme l'UPA, par exemple, ou la Fédération de la relève
agricole.
Alors, on retient cela comme suggestion parce qu'on s'aperçoit
qu'on a de la difficulté à vérifier certaines choses.
Quand les gens font des affirmations, il faudrait peut-être leur demander
des cas précis, des faits bien précis et des preuves qui nous
permettraient ensuite de vérifier avec l'office certaines
déclarations.
Je passe maintenant la parole au député d'Arthabaska.
M. Baril (Arthabaska): Oui, M. le Président. En terminant,
je dirai qu'au fil des discussions de la journée j'ai noté
différents sujets que nous avons abordés et j'aimerais y revenir.
Donc, cela se peut que mes affaires apparaissent décousues, mais c'est
volontaire. Je vais essayer d'être court dans mes questions pour faire le
tour. Premièrement, dans l'évaluation d'un dossier, est-ce que
vous tenez compte de la formation de l'agriculteur?
M. Moreau: Nous avons insisté là-dessus dans le
document. Je ne me souviens plus à quelle page on en tient compte. Mais
dans la Loi favorisant l'établissement de jeunes agriculteurs, on a
même un prérequis, on demande deux ans d'expérience et,
à défaut de deux ans d'expérience, un an
d'expérience et deux ans de formation professionnelle dans le secteur.
C'est pour couvrir... J'ai le texte ici, si vous le voulez. C'est pour la LEJA
et, au niveau des autres lois, nous avons des dispositions qui sont moins
rigoureuses que celles-là, mais nos politiques convergent dans
le même sens. Par exemple, j'ai ici le dépliant sur la
subvention à la relève: il doit posséder une
expérience agricole pertinente d'au moins deux ans ou une
expérience agricole pertinente d'au moins un an, pourvu que, dans ce
dernier cas, il ait suivi pendant au moins deux ans des cours de formation
professionnelle compatibles avec le type principal de production de la
ferme.
M. Baril (Arthabaska): Selon vous, est-ce que c'est suffisant ou
si on devrait être encore plus sévère, selon
l'expérience?
M. Moreau: J'ai pris, comme vous, connaissance qu'il y a des
lacunes de ce côté-là et dans la formation au niveau de la
relève. D'ailleurs, cela fait quelques années qu'on en parle sur
la place publique. Je pense qu'on ne sera jamais trop exigeant de ce
côté-là. Maintenant, je pense qu'il faut y aller par
étapes. Il ne faudrait pas être rigoureux au point où il y
ait un hiatus, à un moment donné, et un no man's land à
cause d'exigences qui pourraient être trop rigoureuses. Je pense qu'il
faut y aller par étapes, mais qu'on devienne exigeant, ce serait
essentiel pour l'avenir de l'agriculture.
M. Baril (Arthabaska): Devrait-il y avoir un suivi plus
serré des prêts?
M. Moreau: Oui. Nous l'avons formulé dans notre document -
je ne me souviens plus à quelle page - où, en plus du suivi dont
on fait état ici on espère un suivi mieux structuré.
À la faveur de l'informatique, nous pourrions aider beaucoup
l'agriculteur à ce chapitre-là avec des outils modernes qui nous
permettraient d'être plus efficaces, qui nous permettraient pratiquement
l'instantané et qui nous permettraient d'éviter, bien
sûr... Cela aiderait l'agriculteur à mieux suivre sa situation
financière.
M. Baril (Arthabaska): Actuellement, vous n'avez pas de suivi,
n'est-ce pas?
M. Moreau: Oui, on a le suivi.
M. Baril (Arthabaska): Quel genre de suivi?
M. Moreau: On n'en a pas autant... Je vous l'ai mentionné
dans mon rapport. Vous avez le nombre de visites qui se font par la force des
choses.
M. Baril (Arthabaska): Oui, mais ces visites-là consistent
à quoi? (21 h 45)
M. Moreau: C'est un type de suivi; ce sont des conseils. Vous
avez l'énumération. Vous avez le contrôle du
déboursement des prêts, à la page 17. Ces activités
nécessitent plus de 10 800 visites à la ferme et 4800 visites de
ces agriculteurs à nos bureaux. Alors, là-dedans, on parle de sa
situation, de son endettement, on peut lui donner des conseils au passage. Vous
avez, au bas de la page 17, les divers modules où ce suivi s'exerce,
particulièrement au niveau du champ. On aimerait en avoir un mieux
structuré et plus intense. C'est ce qu'on formule comme voeu et on a
engagé ce processus, sauf qu'on va le conjuguer avec l'informatique pour
être plus efficace au point de vue pratique, pour qu'on devienne
pratiquement instantané.
M. Baril (Arthabaska): J'ai vu des chiffres - ce doit être
dans le cours de notre tournée sur la relève agricole - selon
lesquels les 8000 $ à l'établissement étaient plus
populaires que les 50 000 $ sans intérêt pour 5 ans. Pouvez-vous
me dire la cause de cela?
M. Moreau: Évidemment, dans les 8000 $, il y a un
multiple. Alors, trois jeunes ou quatre jeunes vont chercher trois fois ou
quatre fois 8000 $. C'est probablement plus intéressant dans
l'immédiat que d'attendre la subvention d'intérêt qui est
étalée sur cinq ans, si on actualise. Mais je dirais que cela
dépend des dossiers, du projet de l'intéressé. Sur le plan
individuel, il n'y a peut-être pas tellement de différence suivant
la structure des taux d'intérêt. Quand le taux
d'intérêt est très élevé, il y a
peut-être avantage à aller plutôt à la LEJA, mais
cela est un choix, c'est pour cela que je mentionne dans mon document que cela
devient un choix. C'est à lui à exercer ce choix et on regarde
s'il répond aux critères pour chacune des lois concernées.
C'est quasiment moitié-moitié actuellement. C'est réparti.
Vous avez 628 personnes établies dans le cadre de la loi favorisant la
mise en valeur et 542 en vertu de la LEJA, la Loi favorisant
l'établissement de jeunes agriculteurs. Alors, il n'y a pas beaucoup de
différence.
M. Baril (Arthabaska): Sur le multiple de 8000 $, que faudrait-il
corriger pour que l'épouse qui est à part entière dans
l'entreprise ait droit à ces 8000 $ elle aussi? C'est comme si
j'achetais une ferme avec mon frère ou ma soeur; elle aurait droit
à ses 8000 $, j'aurais droit à 8000 $, mais ma femme n'y aurait
pas droit. Que faudrait-il corriger?
M. Moreau: C'est un texte, ce n'est pas là qu'est la
difficulté. Ce n'est pas de corriger le texte, c'est qu'il faut bien
comprendre que la loi de mise en valeur, si vous vous souvenez, si nous
reculons de quelques années, devait être remplacée par la
Loi favorisant l'établissement de jeunes
agriculteurs. La Loi favorisant l'établissement de jeunes
agriculteurs avait une disposition qui prévoyait qu'elle
remplaçait la loi favorisant la mise en valeur qui devait prendre fin le
31 décembre 1983, avec le résultat que vous savez: il y a eu des
pressions d'exercées pour maintenir la loi favorisant la mise en valeur
et un amendement a été apporté pour prolonger de deux ans
l'application de la loi de mise en valeur jusqu'au 31 décembre 1985.
Entre-temps, nous nous sommes dit: La refonte des lois s'en vient
- vous vous reportez toujours dans le temps - et l'étude sera faite
à la suite du sommet pour savoir quelles conclusions on tire de cette
situation. La refonte étant en devenir, la disposition est restée
dans la loi. Mais, comme je l'ai expliqué cet après-midi, ce
n'est pas de la discrimination sexuelle. Les conjoints sont dans la même
situation. On s'entend là-dessus, sauf que: Pourquoi est-ce
demeuré? C'est la seule disposition dans la douzaine de programmes que
nous administrons qui reste dans ce sens-là, parce que cette loi
était appelée à disparaître. Elle a
été effectivement remplacée par la LEJA. Mais, comme elle
a été prolongée, la disposition est demeurée et la
refonte est en devenir. Alors, c'est un concours de circonstances, pour ne pas
dire un accident de parcours, qui fait en sorte que la disposition est
restée dans cette loi avec le résultat que vous savez.
M. Baril (Arthabaska): Mais je comprends qu'il y a...
M. Moreau: Sauf qu'il y a une implication financière, pour
répondre...
M. Baril (Arthabaska): Ce n'est pas une discrimination voulue,
mais les femmes doivent être beaucoup plus touchées par cette
mesure que les hommes. Je sais que les deux peuvent...
M. Laplante: C'est une discrimination, en somme, maritale. Ce
n'est pas...
M. Moreau: C'est une unité, c'est l'unité familiale
qui était le concept tant au fédéral que chez nous. On
faisait un prêt à une unité et, depuis ce temps-là,
on en est arrivé à des multiples et l'unité est
demeurée, mais, comme je vous le disais tout à l'heure, il
demeure que cette disposition était appelée à
disparaître. Pour répondre à votre question, c'est non
seulement le changement d'un texte, mais il y a des implications
financières. Ce sera au Conseil du trésor... Il y a l'incidence
politique qui ne relève pas de nous, finalement.
M. Laplante: C'est une mesure qui affaiblit quand même la
famille. Tu n'as plus besoin de te marier...
M. Beauséjour: Cela ne vient peut-être pas de
là.
M. Laplante: Tu ne peux pas prendre cela...
M. Moreau: Par contre, la LEJA, c'est une subvention par
exploitation, nonobstant le nombre d'exploitants qui s'établissent;
c'est une subvention par exploitation de 50 000 $ sans intérêt.
Est-ce qu'elle est discriminatoire pour des frères, des
beaux-frères?
M. Baril (Arthabaska): C'est discutable. Les refus - je l'ai ici
- en 1985, il y en a eu 17, 7%. Les années antérieures, cela a
remonté d'environ 3% ou 4%. Dans ce pourcentage de refus, est-ce qu'il y
a des agriculteurs qui, se sentant lésés par ce refus de
l'office, ont quand même utilisé certains recours auxquels ils
doivent avoir droit, même s'il n'y a pas de commission d'appel ou de
comité de... appelons-le comme on voudra? Est-ce que quelqu'un qui se
sent lésé dans ses droits peut quand même en appeler au
Protecteur du citoyen? S'il est encore plus lésé, il peut aller,
probablement, devant la cour. Si quelqu'un est capable de prouver que son
dossier est rentable et que vous dites qu'il ne l'est pas, est-ce que le
Protecteur du citoyen vous a déjà fait un rapport disant que vous
devriez lui prêter? Avez-vous déjà été
poursuivis en cour pour des questions semblables?
M. Moreau: On n'a pas eu de poursuites en cour. Il faut bien
remarquer qu'on ne peut jamais forcer un prêteur à prêter et
l'office n'est même pas prêteur, il accrédite par le
cheminement du certificat. Il y a une incidence économique. Je n'ai
jamais vu de précédent dans ce sens.
Maintenant, pour ce qui est du Protecteur du citoyen, on suggère
à des emprunteurs, on leur dit: Si vous pensez, mon cher monsieur ou ma
chère madame, si vous croyez que vous avez été
lésé dans le cheminement de votre dossier, qu'au point de vue
administratif vous n'êtes pas satisfait, vous avez le Protecteur du
citoyen, c'est son rôle, n'hésitez pas à faire une demande.
Effectivement, à ma connaissance, il est arrivé quelquefois, je
me rappelle quelques cas où - par exemple, dans les subventions de mise
en valeur - l'interprétation, à cause de délais, avait
contribué à faire perdre une subvention et le Protecteur du
citoyen suggérait que... On a accordé la subvention sur
recommandation du Protecteur du citoyen. C'est la chance au coureur,
finalement, et l'interprétation était différente. Je pense
que c'est normal, c'est
la raison pour laquelle on a un Protecteur du citoyen.
Est-ce que cela arrive souvent? On a un rapport mensuel du Protecteur du
citoyen et je dirais qu'il y a un ou deux cas par mois, mais la plupart du
temps c'est non fondé. Je pourrais vous sortir les rapports du
Protecteur du citoyen: c'est très rare qu'il ait suggéré
de procéder - comme je vous le mentionnais tout à l'heure - en
disant: Vous devriez verser telle subvention pour telle ou telle raison, par
exemple, des délais ou des choses irrégulières qui se sont
glissées dans le dossier.
Comme le mentionne mon collègue, il n'y a jamais eu de changement
au niveau des prêts. On reconnaît la discrétion qu'on peut
avoir au niveau du consentement d'un prêt. C'est au niveau des
subventions, soit la subvention à l'intérêt... Quand, par
exemple, il y a un changement de statut, si quelqu'un n'est plus admissible et
qu'il y a une question de date pour laquelle il se sent lésé,
alors, il va y recourir et, si on a une suggestion dans ce sens, on va
l'accepter de bon gré. C'est la même chose pour les subventions de
mise en valeur. C'est très rare, on pourrait vous sortir des
pourcentages, que le Protecteur du citoyen ait autorisé ou
suggéré, parce que ce sont des recommandations qu'il fait de
changer la décision de l'office.
M. Baril (Arthabaska): Est-ce que vous avez un système
d'évaluation de vos conseillers et conseillères en
financement?
M. Moreau: II y a le système qui existe dans la fonction
publique. Vous avez des fiches de notation qui sont remplies
périodiquement; nos gens ainsi que nos cadres sont
évalués. Au niveau des cadres, depuis quelques années,
depuis trois ans, on est encore plus rigoureux, en ce sens qu'il y a tout le
système des attentes, l'attente qui est signifiée dans
l'année et qui est suivie. Je sais, pour autant que je suis
concerné, que, d'année en année, j'intensifie ce
processus, en ce sens que, mensuellement, je fais un relevé des cadres
pour voir si j'ai des choses a pointer pour le mois en cours, de sorte
qu'à la fin de l'année c'est plus facile de faire une notation
à la suite de ces attentes.
Alors, c'est le système officiel qui existe actuellement dans la
fonction publique. Bien sûr, on peut y aller plus ou moins rigoureusement
avec toute l'intensité qui peut varier d'un organisme à l'autre,
mais je pense que chez nous, quand même, on a un système qui
fonctionne assez bien et on le fait d'une façon très
professionnelle, je dirais, très engageante pour l'organisme.
M. Baril (Arthabaska): Je voudrais poser une dernière
question. Quelle est votre opinion - si vous ne voulez pas me répondre,
je vous laisse bien libre - sur l'éventualité que l'Office du
crédit agricole, un jour -c'est possible - se transforme en une vraie
banque agricole? Les agriculteurs pourraient investir dans leur propre banque
avec des avantages fiscaux pour que l'argent de l'agriculture puisse être
réinvesti dans la même agriculture. Est-ce que cela serait
avantageux, moins avantageux, plus avantageux? Avez-vous des idées
là-dessus?
M. Moreau: J'ai des idées, oui. Est-ce qu'elles peuvent
être perçues comme arrêtées? C'est une question
importante. Je ne voudrais pas donner l'impression... Vous savez - je l'ai
mentionné cet après-midi -c'est extrêmement délicat
parce qu'il y a un sommet qui, en principe, a été annoncé
et qui devrait être réalisé, je l'espère,
prochainement. Il a déjà été annoncé, je
n'annonce rien ici, je pense bien. Il y a également la refonte qui s'en
vient, bien sûr. Je ne voudrais pas donner l'impression que, de notre
côté... Si je donne une opinion sur ce sujet, on va dire:
Écoutez! le président de l'office est en faveur ou il est contre
une banque agricole. Il a donné son opinion officiellement en commission
parlementaire. Alors, c'est extrêmement délicat.
Ce que je peux vous dire à partir de faits, c'est
qu'actuellement, dans le cadre de nos lois, si nous voulions emprunter, nous
avons tout le pouvoir de le faire. Cela prendrait simplement un
arrêté en conseil. On pourrait même emprunter, par exemple,
comme les caisses d'établissement le font actuellement, sur des
prêts à terme, des certificats è terme, comme on les
appelle, on pourrait le faire si on le voulait. Cela prendrait simplement un
arrêté en conseil. On a le pouvoir dans notre loi de le faire. Il
s'agirait, dans nos bureaux régionaux, de dire: Voici, les agriculteurs
qui veulent investir, allez à l'office et on va convenir avec vous de
certificats à terme. On va emprunter pour 5 ans, 10 ans, 15 ans, etc.,
on a le pouvoir de le faire. Ce n'est pas parce qu'on a pas le pouvoir, on n'a
pas à tourner la province à l'envers pour faire cela. Si on
voulait le faire, on aurait le pouvoir de le faire. Il s'agirait simplement
d'une volonté de dire: On y va avec telle intensité, etc.
Maintenant, c'est une autre chose que de dire: On fait une banque agricole avec
tous les pouvoirs des banques. Si on pense, par exemple, à la CNCA en
France, c'est une tout autre affaire.
Alors, tout dépend de ce que l'on veut. Quand on parle d'une
banque agricole, c'est quoi? Jusqu'où peut-on aller? Disons qu'il y a un
système qui existe avec les institutions privées, qui sont des
institutions tout service. Est-ce que nous, on fait une ouverture ou, en
pratique, on y va dans une proportion X, pour des agriculteurs qui seraient
intéressés
en vertu d'une institution spécialisée qu'est l'office, ou
si on développe des institutions tout service? À ce
moment-là, vous avez des structures en place parce qu'il ne faut pas
oublier que l'aspect de la mutualité, vous l'avez dans le secteur des
caisses au Québec qui représentent sensiblement ce que la CNCA
peut représenter en France. Alors, c'est extrêmement complexe,
remarquez bien. La CNCA, en France, il y a tout un historique qui part de, je
ne sais pas, 1889-1890, il y a tout un périple qui a été
suivi pour sa situation, telle qu'elle est actuellement. Aujourd'hui, la CNCA
est devenue pratiquement, avec la nationalisation... Elle ne l'a pas
été parce qu'elle c'est une mutuelle, mais les autres banques ont
à peu près les mêmes avantages du point de vue du
crédit agricole que la CNCA en a elle-même, avec le
résultat qu'il n'y a plus tellement de marge entre la CNCA et les autres
banques françaises. Disons que tout cela a évolué
énormément, notamment en France qu'on est porté à
prendre comme prototype le plus souvent. C'est une question très
complexe et j'aimerais mieux, si vous le permettez, ne pas aller plus loin et
me contenter d'attendre les événements et les orientations
politiques.
M. Baril (Arthabaska): Je vous remercie, M. le Président.
Au nom de ma formation politique, j'aimerais vous remercier pour la
journée que vous nous avez consacrée. De ce côté-ci,
en tout cas, nous avons essayé de poser des questions pour faire
connaître ou essayer d'améliorer la compréhension au niveau
de la population du fonctionnement de l'Office du crédit agricole du
Québec. Nous avons essayé de faire ressortir le travail de vos
fonctionnaires comparativement au secteur public, comparativement à la
Société du crédit agricole. Espérons que cela
pourra être positif et je tiens à remercier votre équipe
pour le temps, la patience que vous avez pu mettre à répondre
à toutes nos questions et à nous fournir certaines statistiques,
certains dossiers qui sont, pour nous, une source d'information
remarquable.
Le Président (M. Vallières): Merci. Je voudrais
immédiatement indiquer à la commission que j'ai pris connaissance
du document que M. Moreau nous a présenté tantôt et qui
porte le titre: "Relevé sur l'endettement des emprunteurs è long
terme, résultats provisoires, mars 1985. Ce document est
considéré comme déposé officiellement. Nous
pourrions convenir de quelques minutes additionnelles qui seraient
accordées au député de Huntingdon.
M. Dubois: Merci, M. le Président... Moi, j'ai 21 h 56.
Alors, je serai très bref.
Je voudrais revenir sur la subvention à l'établissement
pour les jeunes de 8000 $. J'ai eu un cas, récemment, où le jeune
m'a dit: J'ai loué la terre de mon père pendant quelques
années, je décide de l'acheter et on me dit que je ne suis pas
admissible à la subvention à l'établissement. Est-ce que
c'est possible? Est-ce qu'il y a des cas semblables?
M. Moreau: Est-ce qu'il était déjà
établi?
M. Dubois: II a loué la ferme de son père pendant
quelques années.
M. Moreau: Parlez-vous de la Loi favorisant la mise en valeur des
exploitations agricoles, la subvention de 8000 $, ou si vous parlez des 50 000
$ sans intérêt?
M. Dubois Non, de la subvention de 8000 $.
M. Moreau: 8000 $, il a le droit de louer la ferme.
M. Dubois: Même après avoir loué la
ferme?
M. Moreau: II n'y a plus de délai. J'aimerais voir le
dossier parce que je ne peux pas voir qu'il serait écarté
simplement pour cette raison parce qu'il n'y a plus de délai,
maintenant, depuis un bon bout de temps, dans la loi sur la mise en valeur et
la location de ferme est prévue.
M. Dubois: C'est tout récent, il y a quelques semaines. Il
m'a dit: Je ne peux pas avoir mes 8000 $ parce que j'ai été
producteur agricole.
M. Moreau: II ne pourra pas avoir la LEJA, la Loi favorisant
l'établissement de jeunes agriculteurs, mais il pourrait avoir les
avantages de la Loi sur la mise en valeur des exploitations agricoles. Par
ailleurs, c'est peut-être pour la question de la rentabilité.
Là, il y a la définition de ferme rentable comme dans nos autres
lois. Il s'agirait de savoir véritablement la raison pour laquelle il a
été refusé.
M. Dubois: C'est parce que je me demandais s'il y avait des cas
particuliers où un jeune producteur n'était pas admissible
à la subvention à l'établissement de 8000 $, s'il y avait
des cas prévus. S'il n'y en a pas de prévus... D'ailleurs, je
vais le revoir à ce sujet. C'est la seule question que j'avais à
poser et j'aimerais, au nom de ma formation politique, vous remercier, M.
Moreau, ainsi que vos collègues et tout le personnel qui s'est
déplacé aujourd'hui. Pour nous, cela a été une
journée d'information très
intéressante et cela va nous aider à porter un jugement
beaucoup plus précis, je dirais, sur le processus administratif de votre
société... pas la société, je m'excuse, de votre
office, parce que des fois je mélange les deux. De toute façon,
je vous remercie infiniment au nom des mes collègues et de
moi-même.
Le Président (M. Vallières): Je tiens
également à remercier autant les parlementaires que les
représentants de l'Office du crédit agricole d'avoir
participé à nos travaux. La commission a donc
procédé à l'examen des orientations, des activités
et de la gestion de l'Office du crédit agricole du Québec.
Là-dessus, notre commission ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 22 h 4)