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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Friday, June 13, 1986 - Vol. 29 N° 12

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi 85 — Loi sur la vente de la Raffinerie de sucre du Québec


Journal des débats

 

(Onze heures trente-sept minutes)

Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre, s'il vous plaît! Bonjour, mesdames et messieurs. Je déclare la séance de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation ouverte et je rappelle le mandat de la commission qui est de procéder à l'étude du projet de loi 85. Maintenant, je voudrais préciser que, pour toute la durée de l'étude du projet de loi 85, M. Charbonneau (Verchères) va remplacer de façon continue M. Blais (Terrebonne) et ce, en vertu de l'article 130 pour toute la durée de l'étude article par article. Sur ce, nous reprenons les débats là où nous étions...

M. Pagé: M. le Président, pour notre bon fonctionnement, pour qu'il n'y ait pas de questions de règlement ou quoi que ce soit, pourriez-vous nous donner la liste des membres? M. Fortier est bel et bien membre de la commission?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, M. Fortier est bel et bien membre de la commission. M. Fortier (Outremont) et vous-même, M. Pagé (Portneuf), vous êtes membres de la commission pour le temps de l'étude.

M. Pagé: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'autres informations? Nous revenons où nous en étions, hier soir à minuit, au sous-amendement...

M. Pagé: Auparavant, M. le Président, il serait peut-être opportun de souligner la présence et de saluer cordialement votre distinguée épouse qui est ce matin avec nous.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. Merci, M. Pagé. Alors, pour ceux qui n'étaient pas ici tout à l'heure, la jolie personne au fond, c'est mon épouse, la personne qui m'a prêté à l'Assemblée nationale pour quatre ans. Oui, M. le député de Lévis.

M. Garon: Nous aimerions aussi, en tant qu'Opposition, saluer votre épouse et lui dire: Si quatre ans, vous trouvez cela long, on peut vous aider à vous le retourner à la maison.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires à ajouter après ça?

M. Garon: Cela étant dit sans malice!

M. Pagé: M. le Président, il faudrait peut-être entendre madame.

M. Charbonneau: Si le ministre voulait ouvrir des consultations particulières, on pourrait sûrement inscrire l'épouse du président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, nous...

M. Pagé: Allons-y! Oui avait la parole hier soir, M. le Président? Je dois dire que, dès ce matin, c'est avec beaucoup d'intérêt que je me demandais qui j'allais entendre au moment de la reprise des travaux. Je suis heureux d'apprendre que c'est le député de Verchères.

Sous-amendement proposant

d'entendre l'Association des cadres de la RSQ (suite)

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Exactement. On était rendu à l'intervention du député de Verchères sur le sous-amendement qui était, je le rappelle, d'entendre l'Association des cadres de la Raffinerie de sucre du Québec. C'est le dernier intervenant, je crois.

M. Perron: II reste encore le député de Dubuc, M. le Président, sur le sous-amendement.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. M. Jolivet avait parlé - c'était son sous-amendement - ainsi que M. Garon et M. Perron, de Duplessis. Ce sera maintenant le député de Dubuc. Je cède la parole au député de Verchères.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: Merci. Écoutez, on a demandé jusqu'à maintenant, sans réussir à convaincre le ministre et ses collègues, que la direction de la raffinerie de sucre vienne. On a demandé que les producteurs de betterave sucrière soient entendus. On a demandé que la compagnie Lantic, qui a déjà

son représentant ici qui nous écoute attentivement, soit officiellement convoquée à la commission et puisse répondre à nos questions. D'ailleurs, ils sont très intéressés puisqu'ils prennent la peine d'envoyer un représentant qui est payé à l'heure, disait-il, pour nous écouter silencieusement et d'une façon fort intéressée. Il doit savourer sa victoire puisque depuis des années il s'évertue à faire un lobby efficace pour qu'on mette la clé dans la porte de la Raffinerie de sucre du Québec.

M. Garon: M. le député de Verchères, je suis certain qu'il gagne plus cher l'heure que les coupeurs de canne à sucre au mois.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, à l'ordre! Si vous voulez...

M. Charbonneau: La proposition qui a été présentée par mon collègue de Laviolette pour inviter l'Association des cadres est aussi dans cette logique implacable et incontestable. Je vous rappelais hier que le front d'aide pour la Raffinerie de sucre du Québec avait envoyé un télégramme au ministre de l'Agriculture hier après-midi demandant que le front d'aide soit entendu en commission parlementaire.

Le Président (M. Tremblay, Iberville}: S'il vous plaît, messieurs!

M. Charbonneau: Je rappellerai aux membres de la commission que cette Association des cadres de la Raffinerie de sucre du Québec est partie prenante au front d'aide pour la défense et la survie de la Raffinerie de sucre du Québec. Je croîs qu'il serait indiqué, normal, que les cadres également puissent être entendus, d'abord, parce que, comme l'indiquait très judicieusement mon collègue de Duplessis hier, il s'agit de permettre très clairement au gouvernement et au parti ministériel de respecter son engagement électoral. Je suis convaincu que votre épouse va être intéressée à savoir que vous et vos collègues de la Montérégie et que l'ensemble du comité de députés ministériels, vous vous étiez engagés lors de la campagne électorale à ce que la Raffinerie de sucre du Québec ne ferme pas ses portes, qu'elle demeure en exploitation douze mois par année et que les solutions qui seraient trouvées incluent la participation des employés qui connaissent les problèmes réels.

C'est évident que, parmi les employés qui connaissent bien les problèmes de la raffinerie, il y a les cadres de la raffinerie. Pour la bonne conscience et la réflexion des gens de votre côté, M. le Président, qui allez allègrement vers un conseil général dans quelques heures, je pense qu'il est opportun de vous exhiber à nouveau cet engagement électoral et, donc, de vous dire que nous croyons, à ce moment-ci, que les cadres de la raffinerie doivent être entendus. Nous le croyons parce que nous pensons que, parmi les gens qui ont travaillé avec la direction de la raffinerie en étroite collaboration pour préparer les documents, faire les études, contrer les lobbies efficaces de M. Morin et de ses employeurs, il y a l'Association des cadres, les cadres de la raffinerie qui se sont donnés corps et âme également pour cette cause de défendre cette industrie sucrière à partir d'une production locale qui, contrairement à ce que plusieurs ont laissé entendre, entre autres les gens du ministère des Finances, entre autres le lobby du cartel du sucre, est une industrie qui est dans plusieurs pays en pleine expansion.

Quand on pense qu'en France uniquement il n'y a pas moins de 50 entreprises toutes en général plus importantes et plus grosses que la Raffinerie de sucre du Québec, qui, je crois, font vivre plus de 50 000 producteurs. L'ancien ministre de l'Agriculture pourra me corriger si mes chiffres sont erronés, ou le ministre actuel. C'est une industrie impartante. (11 h 45)

La Grande-Bretagne - on sait que c'est un pays colonisateur qui a longtemps entretenu des colonies où on produisait de la canne à sucre - a commencé depuis un certain nombre d'années à développer sur son propre territoire la production de la betterave sucrière.

Les rendements de cette production agricole sont fort intéressants et, pour des pays comme le nôtre où nous sommes préoccupés par la création d'emplois, on se rend compte que c'est un atout important. Il me semble que cela ne prend pas un cours de sciences économiques pour comprendre l'impact économique que peut avoir cette industrie au Québec et au Canada parce que le Québec se priverait, avec la décision du gouvernement, de tous les emplois qui sont liés à la production agricole, donc les producteurs, les transporteurs, les gens qui fournissent les ingrédients nécessaires pour la production agricole, les gens qui transportent cette production agricole vers les usines.

M. le Président, si on suit la logique qui nous est proposée par le lobby des grands du sucre, c'est une logique qui voudrait que ces emplois-là restent à l'étranger et que nous, on se contente des emplois de transformation dans la dernière partie de l'opération manufacturière de production de sucre qui est ia partie de raffinage du sucre brut qu'on importe vers le sucre blanc et l'emballage. Nous, M. le Président, on ne devrait se réserver que cette partie alors que le Canada est autosuffisant à peine à 8 % et que le Québec, je pense que c'est un peu moins, c'est autour de 7 %.

Cela veut dire que, si on voulait avoir une politique de développement économique et de création d'emplois comme le proposent et l'ont proposé les cadres solidairement avec la direction de l'entreprise et le gouvernement du Québec précédent, il faudrait faire en sorte qu'on développe l'industrie de la betterave sucrière au pays. On considère que, finalement, entre choisir les intérêts de la compagnie Lantic et de la compagnie Redpath, les intérêts des actionnaires de ces entreprises et les intérêts de l'ensemble des contribuables du Québec et du Canada et les intérêts de l'ensemble des chômeurs et des chômeuses du Québec et du Canada, on devrait s'engager dans le développement plutôt que dans l'abandon de l'industrie de la betterave sucrière.

C'est ce qu'ont compris bien avant nous les Français, les Britanniques et c'est ce qu'ont compris plusieurs pays qui font le mouvement inverse qui nous est proposé par le lobby du sucre, qui nous est proposé par le ministère des Finances du Québec aujourd'hui qui a réussi à prendre sous sa coupe et sa tutelle le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Je crois que, si on veut faire un débat éclairé, si on veut faire un débat constructif, si on veut faire un débat qui s'attaque et s'attache aussi aux vrais problèmes, aux vrais enjeux actuels à l'égard de ce projet de loi, on devrait acquiescer à la motion que je fais, ainsi qu'aux autres que nous avons faites, M. le Président, qui restent encore en suspens, soit d'inviter les différents groupes, organismes ou entreprises afin que l'on puisse avoir le meilleur éclairage possible.

Encore une fois, M. le Président, je le répète, à l'intention de votre épouse et des autres personnes qui sont ici dans cette salle et de vos collègues, je crois que la parole libérale doit avoir une certaine signification. Quand on prend la peine, avec un agent officiel et les fonds électoraux du Parti libéral ramassés lors de dîners bénéfices et campagnes de financement, de dire: Non, la Raffinerie de sucre du Québec ne fermera pas, parole donnée, je crois qu'on doit respecter sa parole. C'est important, sinon on dévalue la chose politique et on amène les citoyens à être cyniques ë l'égard des engagements politiques et de la parole des politiciens et des politiciennes.

Si on ne veut pas que cette dévaluation s'accentue, on devrait respecter ses engagements et, à cet égard, nous vous offrons la meilleure occasion et la dernière, nous le savons, pour respecter votre parole. Après cela, M. le Président, lorsqu'il ne sera plus possible pour nous de réclamer et d'obtenir du gouvernement des consultations particulières, cela en sera fini de la possibilité que le Parti libéral, que le gouvernement libéral puisse respecter sa parole. M. le Président, le jugement des citoyens de votre comté, entre autres, où il y a des producteurs de betterave, des gens du comté de Saint-Hyacinthe - nous nous en occuperons personnellement, - et sûrement aussi des gens du comté de Verchères sera sans doute implacable.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le député de Verchères. Maintenant, j'ai reconnu le député de Dubuc.

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Merci, M. le Président. Même si les efforts que nous faisons pour tenter de convaincre le ministre de permettre aux membres de la commission d'entendre et de pouvoir évaluer d'eux-mêmes les arguments qui peuvent être évoqués pour ou contre la privatisation ou la liquidation - le terme est plus exact dans le cas présent - de la Raffinerie de sucre du Québec apparaissent inutiles, ils auront au moins servi à mettre en évidence que le gouvernement actuel, qui a pris cette décision de privatisation ou de liquidation, ne semble pas en mesure de pouvoir faire la démonstration et la preuve que, au moins dans le cas présent, cette privatisation est une bonne solution.

C'est le pouvoir, mais c'est aussi le droit du gouvernement libéral actuel de décider d'orientations politiques, c'est bien certain. Il a le pouvoir et le droit de décider de ce qu'il juge, dans son optique, être une orientation heureuse pour l'ensemble des citoyens du Québec. Je ne lui conteste pas cela, mais quand on a le pouvoir et le droit et qu'on prend une décision politique, elle doit porter sur des assises qui permettent de la justifier et qui permettent de démontrer à la population que c'est vraiment la meilleure solution à adopter. Comme sans doute, je le suppose, le gouvernement a étudié le problème et les solutions possibles de la Raffinerie de sucre du Québec, il doit donc être en mesure de démontrer, ici et aussi à la population, que son projet était vraiment la meilleure solution pour régler ce problème.

On a plutôt l'impression, maintenant, que le gouvernement, s'étant engagé dans le domaine de la privatisation et ayant fait des beaux discours sur la privatisation, croit nécessaire de justifier ses discours en prenant la décision de présenter le projet de loi 85 sur la Raffinerie de sucre du Québec. On a l'impression que cela a été le premier du bord qui lui est apparu à l'esprit: La raffinerie, tiens, on va se débarrasser de cela. Cela va montrer que nous autres, on est sérieux avec notre privatisation. Nos engagements et notre discours portaient sur la privatisation; là, il faut faire la preuve au

monde qu'on est des gens d'action, on liquide.

C'est un peu ce qu'on pense devant les refus du gouvernement de venir discuter et de venir faire discuter par les députés membres de la commission, les arguments qui ont permis au gouvernement de pencher vers cette décision, parce que ce n'était pas la seule solution. Mon collègue de Laviolette en a parlé longuement hier soir et je ne reviendrai pas la-dessus, mais il y avait trois solutions d'envisagées. Trois études ont été faites, soit sur la fermeture - la liquidation de la raffinerie - sur le statu quo et sur le développement de la raffinerie pour rendre ses opérations véritablement rentables.

On sait que la thèse qui l'emporte, finalement, c'est celle qui a été défendue par le ministère des Finances. Pourtant, l'argumentation qui nous est la plus accessible démontre, au contraire, que c'était possible - c'est ce que l'ex-ministre de l'Agriculture a démontré dans un mémoire d'avril 1985 au Conseil des ministres - de rentabiliser la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire, à partir des études qui ont été menées par ceux et celles qui ont vraiment participé et qui sont vraiment les experts dans le domaine avec la haute direction, l'Association des cadres de la Raffinerie de sucre du Québec.

C'est pour cela qu'on demande au ministre que ces gens puissent venir ici et qu'on puisse les interroger ou écouter leurs remarques et voir, avec eux, si les recommandations qu'ils ont suscitées auprès du ministre, à l'époque, dans le mémoire qu'il a remis au Conseil des ministres, au gouvernement, si les argumentations qu'il y a là-dedans sont exactes, si elles valent toujours, parce que cela fait déjà un an et, en un an, les choses évoluent. Peut-être que leurs opinions se sont modifiées depuis un an à la lumière de certains renseignements ou d'études supplémentaires qu'ils ont pu effectuer. Peut-être qu'ils viendraient dire aux membres de cette commission: Non, ce n'est plus complètement vrai; on n'est plus aussi certains de ce qu'on avançait, parce qu'on a étudié tel secteur ou tel avancé qu'on avait énoncé et présenté au ministre à l'époque. Maintenant, après un an, étant donné l'évolution de la situation mondiale dans le sucre, je ne sais pas, peut-être qu'il y aurait des choses nouvelles qui viendraient permettre à tous les membres de cette commission de bien comprendre et à nous de l'Opposition, nous faire voir que la vraie solution, la bonne solution, c'est celle que le ministre nous propose.

Mais aussi longtemps que nous n'aurons pas ces renseignements, du moins comme députés de l'Opposition, nous ne pourrons pas accepter et voter en faveur de ce projet de loi. C'est bien évident, on ne le permettra pas. Dans l'état de connaissance qu'on a du dossier, sans obtenir tous les renseignements que l'Association des cadres, entre autres, pourrait nous fournir comme élément de réflexion, accepter ce projet de loi, ce serait voter tes yeux fermés. Je ne pense pas que ce soit le rôle que la population du Québec confie à ses élus. Ce n'est sûrement pas cela que la population du Québec confie à ses élus comme rôle. (12 heures)

C'est, au contraire, de faire des études les plus exhaustives possible pour analyser, comparer, si nécessaire, l'argumentation, les faits, les chiffres afin finalement de prendre des décisions qui correspondent au meilleur intérêt des populations plus restreintes qui sont touchées. Ici, cela n'est pas seulement un comté, l'essentiel porte peut-être sur le comté de Verchères, mais Saint-Hyacinthe est beaucoup touché et, M. le Président, dans votre comté, on compte des producteurs de betteraves. C'est dans l'intérêt de ces populations régionales, mais aussi dans l'intérêt de l'ensemble de la population du Québec.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Votre temps est écoulé.

M. Desbiens: J'aurai sans doute l'occasion d'y revenir; alors, je vous remercie.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le député de Dubuc.

M. Pagé: M. le Président...

Le Président (M. Tremblay, Iberville); Oui?

M. Pagé:... je veux bien réitérer ce que je viens de vous formuler. Je suis encore prêt à donner mon consentement pour cinq autres minutes. Le ministre est très généreux ce matin.

M. Charbonneau: Si mon collègue de Dubuc a terminé, on pourrait passer au vote. S'il n'a pas terminé, on peut toujours se prévaloir de l'offre.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): C'est cela. S'il n'y a pas d'autres interventions, on va procéder à la mise aux voix du sous-amendement.

M. Desbiens: II y a de longues heures qui nous attendent.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Est-ce que le sous-amendement: "et l'Association des cadres de la Raffinerie de sucre du Québec" est adopté?

M. Pagé: Non, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Rejeté.

M. Charbonneau: Vote par appel nominal.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vote par appel nominal. Alors, M. le secrétaire, j'appelle le vote.

Le Secrétaire: M. Messier (Saint-Hyacinthe)?

M. Messier: Vous venez de vous réveiller? Je vote contre la proposition.

Le Secrétaire: M. Camden (Lotbinière)?

M. Camden: Contre.

Le Secrétaire: M. Dubois (Huntingdon)?

M. Dubois: Contre.

Le Secrétaire: M. Beaudin (Gaspé)?

M. Beaudin: Contre.

Le Secrétaire: M. Forget (Prévost)?

M. Forget: Contre.

Le Secrétaire: Mme Legault (Deux-Montagnes)?

Mme Legault: Contre.

Le Secrétaire: M. Pagé (Portneuf)?

M. Pagé: Contre.

Le Secrétaire: M. Tremblay (Iberville)?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Contre.

Le Secrétaire: M. Jolivet (Laviolette)?

M. Jolivet: Effectivement, pour la proposition du député de Saint-Hyacinthe.

Une voix: Question de privilège.

Une voix: S'il vous plaît!

Le Secrétaire: M. Desbiens (Dubuc)?

M. Desbiens: Pour.

Le Secrétaire: M. Perron (Duplessis)?

M. Perron: Pour.

Le Secrétaire: M. Charbonneau (Verchères)?

M. Charbonneau: Pour.

Le Secrétaire: M. Garon (Lévis)?

M. Garon: Pour.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Le sous-amendement est rejeté.

Une voix: Encore?

M. Pagé: Vous en avez pour cinq ans.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, maintenant j'ai reconnu le député de Verchères sur l'amendement.

Reprise du débat sur la motion d'amendement

M. Charbonneau: M. le Président, l'amendement devant nous, c'est l'amendement du député de Lévis qui propose d'entendre la compagnie Lantic, si je ne me trompe pas.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Exactement. Voulez-vous que je le répète?

M. Charbonneau: Oui, M. le Président. Cela va me donner le temps de chercher mes papiers.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, l'amendement est: "Et la compagnie Sucre Lantic Ltée", proposé par le député de Lévis.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: Parfait. C'est bien ce que je pensais, M. le Président. Je veux vous donner un certain nombre d'éléments d'information qui pourraient justifier que l'on vienne devant la commission, M. le Président, et que l'on invite la compagnie Lantic à se présenter devant nous. Dans les documents que j'ai consultés et dont j'ai obtenu copie, à plusieurs reprises il est à la fois question des avantages qu'aurait pour la compagnie Lantic cette transaction et aussi des prétentions de la compagnie Lantic. Je voudrais à cet égard vous indiquer que, si vous me le permettez deux ou trois secondes, lorsque j'ai pris connaissance de la décision gouvernementale et de la façon dont elle a été annoncée, je me suis dit: Cela serait vraiment important que l'on obtienne plus d'informations. Entre autres, cela serait important que l'on vérifie avec la compagnie Lantic s'il est exact que cette compagnie serait contrainte de fermer son usine de Montréal, Sucre Saint-Laurent, si le gouvernement décidait de revenir sur sa décision et de maintenir la Raffinerie de sucre du Québec en opération et même de

lui donner les moyens de jouer le rôle qu'elle devrait et qu'elle pourrait jouer dans l'économie du Québec.

M. le Président, j'ai ici une analyse que tes gens de la compagnie pourraient sans doute commenter de façon intéressante. Elle a été faite par la direction de la raffinerie de sucre et soumise à la suite des commentaires qui avaient été présentés par le ministère des Finances. Le ministère des Finances laissait entendre que le plan proposé par le ministre de l'Agriculture de l'époque et la raffinerie de sucre" pourrait signifier la fin des opérations de Lantic à Montréal. C'est bien sûr, pouvait-on lire dans le document du 17 juin 1985, le dénouement auquel la haute direction de Lantic veut bien laisser croire. Or, l'impact sur Lantic de la réalisation du projet de la raffinerie de sucre est tout autre. En fait, la présence de la raffinerie de sucre sur le marché du sucre raffiné aurait, sur les opérations de Lantic, un effet contraire à celui que prévoient les fonctionnaires du ministère des Finances. "Sans la présence de ta Raffinerie de sucre du Québec, Lantic a pu déménager les activités de Cartier Sugar à St. John et Redpath fermer sa vieille usine de Montréal pour concentrer ses activités à Toronto. Or, l'avènement de la Raffinerie de sucre du Québec imposera un minimum de présence et d'efforts à quelque autre concurrent que ce soit pour se mériter et conserver une part raisonnable des quelque 200 000 tonnes qui continueront d'être accessibles, au-delà des 80 000 tonnes que la Raffinerie de sucre du Québec détiendra sur le marché québécois. "D'autre part, la fermeture de Sucre Saint-Laurent placerait son actionnaire, Steinberg, dans une position précaire (ayant à s'approvisionner de St. John ou de Toronto) face à Métro-Richelieu et à Provigo qui auraient accès à un fournisseur local. Quelle que soit la décision concernant la Raffinerie de sucre du Québec, la fermeture possible de l'usine de Sucre Saint-Laurent à Montréal est, pour des motifs techniques, très improbable. L'usine au Canada qui est la plus susceptible de fermer ses portes est celle de Westcane en Ontario et non celle de Sucre Saint-Laurent, à cause des raisons suivantes. "L'usine ne produit pas toute la gamme des produits Lantic contrairement à Sucre Saint-Laurent; le procédé de fabrication utilise un sucre brut de très haute qualité qui est de plus en plus rare sur le marché mondial, (importé presque exclusivement -ah, c'est intéressant - d'Afrique du Sud et d'Australie); c'est actuellement l'usine la moins flexible de toutes les usines au Canada. "En résumé, la décision de Lantic ne se prendra pas par rapport à la seule usine de Sucre Saint-Laurent qui ne dessert pas principalement le marché du Québec, contrairement à ce qu'on prétend, mais par rapport à la rationalité de la répartition des activités du groupe Lantic dans ses diverses installations".

On poursuit. "Le tableau suivant décrit, en effet, les parts de marché desservies par chacune des usines et leur évolution après la réalisation du plan de rentabilisation de la raffinerie de sucre, è supposer que les 32 000 tonnes supplémentaires qu'elle entend vendre au Québec d'ici à trois ans soient prises au prorata des parts du marché québécois détenues par chacune des usines. Les gains faits aux dépens de Redpath s'élèveraient à quelque 13 000 tonnes; ceux réalisés sur le marché de Lantic è environ 19 000 tonnes. Or, de ce dernier total, quelque 13 000 tonnes vient présentement de J'usine de St. John et 6000 tonnes de l'usine de Saint-Laurent, cette dernière n'alimentant que 17 % du marché québécois (31 %, si on inclut dans sa part les 40 000 tonnes qu'elle raffine pour la Raffinerie de sucre du Québec".

Là, un tableau indique clairement ce que je viens de vous lire, M. le Président, et on le retrouvait dans le rapport. "Il est bien clair, poursuit-on dans ce document, dans les circonstances, que ce n'est pas l'avenir de la raffinerie de sucre qui déterminera le sort de l'une ou l'autre usine du groupe Lantic dont la rationalisation des opérations s'impose à l'évidence après les acquisitions de Westcane, en 1983, et de Sucre Saint-Laurent, en 1984. On sait déjà qu'il y aura une centaine de mises à pied le 1er juillet à l'usine de la rue Notre-Dame, tel qu'il en avait été convenu entre Lantic et Saint-Laurent le 6 septembre dernier, alors qu'une période de grâce de neuf mois était prévue pour effectuer les mises à pied du personnel déjà en surplus, même à cette époque. "Le transfert des opérations de Westcane aura pour effet d'amener l'usine de la rue Notre-Dame bien au-delà du seuil de rentabilité, en dépit de la présence de la Raffinerie de sucre du Québec. Cette rationalisation entraînera la fabrication de près de 200 000 tonnes de sucre à l'usine de la rue Notre-Dame. "

M. le Président, vous voyez à la lecture de ce rapport qu'il est pertinent et important que l'on fasse venir la compagnie Lantic pour savoir exactement ce qu'il en est. Le député de Lévis, quand il était ministre, avait lui-même pris connaissance de ce rapport et il se le rappelait très bien lorsque hier il a fait la proposition de faire venir la compagnie Lantic. Il y a d'autres raisons qui nous motivent à demander que la compagnie Lantic vienne témoigner et nous expliquer un certain nombre de choses. Le ministre de l'Agriculture, lorsqu'il a annoncé sa décision le 10 mars, nous a dit que la compagnie Lantic construirait un siège social à Montréal. Quand on a regardé les

déclarations du président, M. Labrosse, si je ne m'abuse, on s'est rendu compte que ce n'était pas la construction d'un siège social, c'était la location d'un édifice à bureaux qui devait être construit par quelqu'un d'autre.

M. le Président, les investissements que le ministre prévoyait et qu'il présentait comme des investissements de la compagnie Lantic à l'égard de l'établissement, du déplacement de son siège social de Toronto vers Montréal, c'était de la poudre aux yeux. Non seulement il n'y aura pas de construction de siège social, mais, dans les faits, déjà, l'entreprise agit à partir de Montréal; le coeur de ses opérations, de sa direction est déjà à Montréal.

M. le Président, il y a un autre élément qui pourrait être intéressant. La compagnie Lantic, semble-t-il, selon l'entente qui est intervenue et qui a été en partie rendue publique par le ministre le 10 mars, nous indiquait qu'elle ferait des investissements de 25 000 000 $. Or, selon les informations que nous avons et qui ont été colligées par la direction de la raffinerie de sucre et par les gens du ministère de l'Agriculture, cet investissement était déjà prévu dans les projets de la compagnie Lantic. Il n'y a pas d'investissement additionnel à cause de la décision de la compagnie; il y a des investissements qui, de toute façon, avaient été prévus et qui vont probablement se faire. Donc, il y a comme un caractère assez trompeur dans la menace de la compagnie Lantic de quitter Montréal. Il y a aussi un caractère assez trompeur dans le fait qu'on va établir un siège social qui est, déjà, dans les faits, a Montréal et faire une construction qui ne sera pas faite par l'entreprise.

J'indique également une dernière raison qui va introduire un projet de sous-amendement que je vais vous présenter. La compagnie Lantic va être dans une position de quasi-monopole. Compte tenu de cela, une fois que nous aurions entendu la compagnie Lantic, nous souhaiterions également entendre le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions. C'est la raison pour laquelle je présente l'amendement suivant: Que la motion d'amendement du député de Lévis soit modifiée en ajoutant, à la fin, les termes: "et le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions".

Sous-amendement proposant d'entendre le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le député de Verchères. Votre sous-amendement est d'ajouter: "et le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions. "

Une voix: Cela a du bon sens, n'est-ce pas?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Je n'ai pas à dire si elle a du bon sens ou pas, mais je sais qu'elle est recevable.

M. Pagé: On va le voir lorsque vous allez voter, M. le Président. Et la valse continue.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous pouvez y aller maintenant pour présenter votre argumentation en faveur, évidemment.

M. Charbonneau: Maintenant, pour mon collègue, le député de Dubuc, est-ce que vous pourriez relire mon projet de sous-amendement?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Je peux relire le projet de sous-amendement. D'ajouter: "et le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions. "

M. Houde: Si vous l'aviez mis à l'intérieur de la même proposition, cela aurait été plus sérieux, votre affaire. Quand on voit la façon dont vous vous comportez devant des gens qui, je pense, sont sérieux et qui veulent vous entendre sérieusement...

M. Desbiens: Le ministre ne peut pas faire venir tout le monde, il faut bien essayer d'en avoir quelques-uns.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, s'il vous plaît!

M. Houde: Non. J'aurai mon droit de parole tantôt. (12 h 15)

Le Président (M. Tremblay, Iberville): "Et le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions. " On a seulement le texte français. La parole est maintenant au député de Verchères, pour trente minutes.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: M. le Président, je fais cette proposition pour ceci... D'abord, je vais vous dire que, déjà, les transactions de la compagnie Lantic quand celle-ci a fait l'acquisition de Sucre Cartier - Cartier Sugar, je crois - ont fait et, à ma connaissance, continuent de faire l'objet d'une enquête du directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions. Je le sais de bonne source parce qu'à la suite des intentions qui ont filtré au cours des derniers mois j'ai moi-même été contacté par les services du directeur fédéral des enquêtes sur tes coalitions. Comme je l'ai indiqué dans mon discours de deuxième lecture, le 20

décembre dernier, je me rendais au bureau de la firme Buyers, Casgrain, Stewart & Ass. une importante firme d'avocats de Montréal, au 1 Place Ville-Marie. J'étais amené à rencontrer un avocat senior de cette firme qui avait eu le mandat du gouvernement fédéral de procéder à une vérification de la légalité de la transaction que s'apprêtait à faire le nouveau gouvernement du Québec dans le secteur du sucre. À ce moment-là, étaient également présents, outre l'avocat senior de la firme Buyers, Casgrain, Stewart & Ass., deux enquêteurs du directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions, MM. David Wolinsky et Don Mercer. On m'a posé plusieurs questions et, même si je n'étais pas obligé de le faire comme membre de l'Assemblée nationale, j'ai accepté volontiers de collaborer à cette enquête et j'ai donné le maximum d'informations que je pouvais donner. Je le dis très officiellement et très publiquement, je n'ai rien à cacher dans ce dossier. J'ai appris récemment que l'enquête se poursuivait et même peut-être s'intensifiait.

À partir du moment où le gouvernement du Québec s'apprête à poser un geste qui serait considéré comme illégal, qui pourrait être illégal, où il y a une présomption qui pèse actuellement sur le caractère légal de la transaction, je crois qu'il serait approprié, à ce moment-ci, que le gouvernement prenne une précaution élémentaire et que l'on accepte de faire venir devant nous, avec les autres personnes et organismes qu'on veut entendre, le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions.

Quand on regarde le texte même de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions qui date de 1978, on se rend compte de l'importance du dossier en cours. On dit, par exemple, dans certaines définitions: "Le mot "fusion" signifie l'acquisition par une ou plusieurs personnes, soit par achat - ce qui semble être le cas - ou location d'actions ou d'élément d'actifs soit autrement, de tout contrôle sur la totalité ou quelque partie de l'entreprise d'un concurrent. " C'est le cas de la Raffinerie de sucre du Québec qui était un concurrent agaçant pour la compagnie Lantic, puisque cette compagnie et d'autres ont pris la peine d'engager un lobbyiste permanent pour tenter de miner la crédibilité de la Raffinerie de sucre du Québec. Donc, "tout contrôle sur la totalité ou quelque partie de l'entreprise d'un concurrent, fournisseur, client, ou autre personne, ou d'un intérêt dans la totalité ou quelque partie d'une telle entreprise moyennant quoi la concurrence est ou semble devoir être réduite au détriment ou à l'encontre de l'intérêt du public, qu'il s'agisse de consommateurs, de producteurs ou d'autres personnes. "

Plus loin, on donne la définition de "monopole" qui est la suivante: "Monopole signifie une situation dans laquelle une ou plusieurs personnes contrôlent pour une grande part ou complètement, dans tout le Canada ou quelqu'une de ses régions, la catégorie ou l'espèce d'entreprise à laquelle se livrent ces personnes et ont exploité ou semblent devoir exploiter cette entreprise au détriment ou à l'encontre de l'intérêt du public, qu'il s'agisse de consommateurs, de producteurs ou d'autres personnes. " À sa face même, il est clair que la transaction qui est actuellement en attente d'une décision - ce projet de loi va permettre au gouvernement de terminer et de bâcler sa transaction qui pointe à l'horizon car une entente nous a déjà été confirmée entre la compagnie Lantic et le gouvernement, suppose ou présuppose que le gouvernement s'apprêterait à utiliser son pouvoir pour créer, à toutes fins utiles, ou pour accentuer une situation monopolistique. On sait déjà qu'il n'y a que trois compagnies qui actuellement fournissent le marché québécois du sucre: la compagnie Redpath, la compagnie Lantic et la Raffinerie de sucre du Québec.

M. le Président, quand le gouvernement du Québec décide de liquider la Raffinerie de sucre du Québec à l'encontre de l'avis de nombreux experts qu'il refuse d'entendre ces experts, et qu'il va liquider la compagnie en la cédant à la compagnie Lantic, qu'est-ce qu'il fait? Il consolide une situation oligopolistique. L'oligopole, c'est une situation de marché où, finalement, il y a peu d'entreprises qui sont dans ce marché. Il y a déjà des procès qui ont été intentés contre les grands du sucre par un certain M. Austin qui avait, d'ailleurs, été victime d'actes criminels, d'assauts et de tentatives de meurtre. Je pense que les députés du parti ministériel qui ne sont pas au courant de la petite histoire du sucre seraient peut-être mieux de se renseigner. C'est, à bien des égards, une situation assez curieuse qui mériterait sans doute un roman ou une étude journalistique fort intéressant. Peut-être, d'ailleurs, que, quand je ne serai plus député, je m'intéresserai à cette nouvelle filière. Après avoir fait la filière du trafic international des drogues, je ferai peut-être la filière du sucre, M. le Président. Pour le moment, ce que je voudrais, c'est utiliser ma fonction de député pour essayer d'aller plus loin dans cette filière et de comprendre un peu ce qui se passe, et d'empêcher que le gouvernement ne consolide une situation oligopolistique parce que, dans les faits, il s'apprêterait à créer, à toutes fins utiles, un monopole ou un cartel.

M. Garon: Vous pourriez mettre cela en parallèle avec la suffisance béate des fonctionnaires des Finances.

M. Charbonneau: M. le Président, je voudrais vous lire certains passages d'une

étude sur la situation de la raffinerie de sucre et de l'industrie québécoise du sucre, qui accompagnait, d'ailleurs, le mémoire du ministre de l'Agriculture précédent au Conseil des ministres le 18 avril 1985. On y disait, entre autres: "La nature oligopolistique de l'industrie sucrière canadienne permet aux raffineurs de fixer leur marge de profit brut. Malgré les nombreuses fluctuations des cours mondiaux depuis les quinze dernières années, la marge des raffineurs n'a pas cessé de s'accroître. Dans ce système où théoriquement toute fluctuation de prix du sucre brut est répercutée au consommateur, la marge brute des raffineurs est ajoutée au prix du sucre brut pour constituer le prix officiel du sucre raffiné. Cette marge qui s'était maintenue autour de 110 $ par tonne entre 1974 et 1979 s'est depuis accrue constamment pour atteindre 307 $ au début de 1985. Exprimée en pourcentage du prix de revient du sucre brut, la marge des raffineurs est passée de 19 % en 1980 à 128 % en 1985 - M. le Président, 128 %, la marge de profit -(307 $ de marge par rapport au prix de 240 $ la tonne de sucre brut). " Imaginez-vous! "C'est ce système de fixation de prix qui a permis aux raffineurs canadiens de sucre de canne de réaliser des bénéfices nets que l'on a pu évaluer au cours des dernières années à près de 50 000 000 $, représentant un rendement net sur l'avoir des actionnaires - écoutez bien cela - supérieur à 40 %.

M. Garon: C'était l'an passé. Cela a empiré depuis ce temps.

M. Charbonneau: Cela a empiré. "C'est au chapitre des escomptes consentis aux différents acheteurs que le jeu de la concurrence se manisfeste. De façon générale, ces escomptes sont maintenus à un niveau normal tant que les parts de marché de chaque raffineur, membre de l'oligopole, demeurent stables et non menacées. "On comprend que, dans ce contexte d'une chute dramatique des prix du sucre brut et d'une accélération rapide des marges des raffineurs canadiens è partir de 1979, la Raffinerie de sucre du Québec ait estimé essentiel d'entrer dans le marché du sucre raffiné. Or, la venue de la Raffinerie de sucre du Québec dans ce marché en 1983 a provoqué une guerre d'escomptes d'une ampleur sans précédent. Il faut souligner que de semblables guerres d'escomptes s'étaient déjà produites en 1976 lors de l'arrivée dans l'industrie de Cartier Sugar et de Westcane Sugar. "

M. le Président, c'est ce qui a amené, un peu plus tard, le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions à s'intéresser à l'acquisition de la compagnie Cartier Sugar par la raffinerie...

M. Garon: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Est-ce que c'est vraiment une question de règlement? Je vous écoute.

M. Garon: C'est une question de règlement. Il faudrait un peu de décorum. Le député cite des données importantes et les membres de la commission sont là pour étudier le projet de loi. Il ne faudrait pas virer cela en club de cartes.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord.

M. Garon: Alors, il faudrait que les gens qui...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre, s'il vous plaît, messieurs!

M. Pagé: On est a du charriage et non à l'étude du projet de loi. Continuez è charrier et, quand vous aurez fini de charrier, on ira, à nouveau, au projet de loi.

M. Garon: Les données que fournit le député sont des données sérieuses, basées sur des études sérieuses et ce serait peut-être bon que tout le monde écoute.

M. Pagé: C'est soumis en fonction d'une argumentation non sérieuse. Allons-y, continuons.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. S'il vous plaît!

M. Charbonneau: Je voudrais que le ministre soutienne ce qu'il vient de dire.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît:

M. Messier: Sur la même question de règlement...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît!

M. Messier:... que vient de soulever le député de Lévis. On est justement ici pour étudier le projet de loi et on n'a même pas commencé encore.

M. Charbonneau: Ce n'est pas pertinent.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Tout le monde a certainement le droit de faire des motions.

M. Charbonneau: On va, encore une fois, citer le député de Saint-Hyacinthe dans aon propre comté, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît! Messieurs, on va revenir au débat de fond.

M. Charbonneau: M. le Président, je poursuis...

M. Pagé: M. le Président, si le député n'est pas pertinent, est-ce qu'il est impertinent? Non"?

M. Charbonneau: Bien non, il est...

M. Garon: Le député de Saint-Hyacinthe est impertinent.

M. Pagé: Je laisse cela à votre appréciation.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, s'il vous plaîtl À l'ordre, s'il vous plaîtl

M. Houde: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Une question de règlement, oui.

M. Houde: Est-ce qu'on a le droit de ne rien dire ici et de prendre le temps de tout le monde pour rien? On a le droit de faire cela?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Non, sûrement, ce n'est pas à moi...

M. Charbonneau: M. le Président, sur la question de règlement. Si le député de Berthier veut jouer à ce petit jeu, je le défie de lire les documents et de se présenter devant n'importe quelle association de consommateurs et de voir si les gens vont trouver cela ridicule.

M. Houde: Arrivez au sérieux. Il est temps, je pensel Cela fait une journée et demie...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, s'il vous plaît!

M. Charbonneau: M. le Président, on parle de guerre des prix et on parle de consolidation de monopole et le député de Berthier, comme un innocent, ne trouve pas cela important.

M. Houde: Une question de règlement.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît, messieurs, revenons...

M. Houde: M. le Président...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Pardon'?

M. Houde: Est-ce que le député de Verchères veut retirer ses paroles?

M. Pagé: M. le Président, une question de règlement. Je comprends que le...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Je n'ai pas compris exactement les dernières paroles de M. le député de Verchères, mais on devrait revenir.

M. Charbonneau: M. le Président, je suis prêt à retirer le terme "innocent" pour penser que le député de Berthier est un député qui n'a pas l'air de très bien connaître le sujet. Il serait mieux de continuer de se taire; cela nous permettrait d'avancer dans la compréhension de l'importance de ce dossier.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît, messieurs, revenons au débat de fond.

M. Houde: Notre Seigneur a pardonné 33 fois; alors, on va faire la même chose ce matin. Continuez-Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît, messieurs!

M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Je vais continuer: "Mais en 1983...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît, messieurs, on revient au débatl

M. Garon: Notre Seigneur avait également dit: Bienheureux les innocents.

M. Houde: Le député de Lévis peut en

apprendre encore beaucoup!

M. Charbonneau: Le rapport que je cite, M. le Président - cela devrait intéresser le député pour sa bonne compréhension et son instruction, disait: "Mais en 1983, il s'agissait d'une société d'État, en plus d'une sucrerie de betterave, ce qui est encore plus important pour l'avenir. Pour conserver leur part d'un marché aussi lucratif, les raffineurs ont donc exercé des pressions continuelles sur les prix en accordant des escomptes considérables aux différents acheteurs du Québec. Connaissant la situation financière précaire de la Raffinerie de sucre du Québec, Sucre Atlantic Ltée annonçait, en mars 1984, un escompte spécial applicable au Québec seulement de 70 $ la tonne pour ralentir les activités de la raffinerie sur le marché de détail. Cette tactique, imitée par les autres raffineurs, a provoqué un manque à gagner de 4 200 000 $ pour la Raffinerie de sucre du Québec" M. le Président. "On trouvera è l'annexe 1 copie... "

M. Dubois: La guerre des prix a été commencée par le député de Lévis.

M. Charbonneau: Le député de Huntingdon pourra intervenir à son tour. S'il veut continuer...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît, messieurs!

M. Dubois: Vous savez très bien cela. Avec 1 000 000 $ et 400 000 $, de subsides, c'est ce qui est arrivé.

M. Charbonneau: M. le Président, si le député de...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît, messieurs! M. le député de Huntingdon, si vous voulez intervenir, je vais prendre...

M. Charbonneau:... Huntingdon veut faire le rôle de lobbyiste au profit du cartel...

M. Garon: M. le Président, je veux seulement soulever un point.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, s'il vous plaît! Qu'est-ce qui se passe ce matin? Est-ce qu'on peut revenir...

M. Garon: Le député de Huntingdon devrait commencer à... (12 h 30)

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, laissons...

M. Garon: Comme il y a un projet de loi devant le Parlement pour empêcher les gens de fumer dans les lieux publics...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député de Lévis, cela n'est pas opportun.

Une voix: II n'est pas encore sanctionné.

M. Garon:... les députés devraient arrêter de fumer et de nous "emboucaner". Tous les députés ministériels qui fument et qui nous "emboucanent", devraient arrêter de fumer parce qu'il y a un projet de loi devant le Parlement pour nous arrêter de fumer.

Une voix: Votre copain aussi fume.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, s'il vous plaît, si on revient...

M. Pagé: M. le Président, sur la question du député de Lévis, le député de Lévis a-t-il constaté que le député de Dubuc, péquiste, est en train de fumer en cachette'?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, revenons à l'intervention du député de Verchères.

M. Pagé: Comme d'habitude, le député de Lévis fait de la boucane.

M. Desbiens: Le député de Dubuc ne fume jamais en cachette. D'ailleurs, il est allé fumer en commission pour l'étude du projet de loi sur le tabac, tout en proposant l'adoption du projet de loi.

M. Pagé: II s'est étouffé en riant.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): De toute façon, je n'ai rien contre cela.

M. Garon: Je regardais le député de Huntingdon et il me fait penser à quelqu'un qui a subi les ravages de la cigarette et de la boucane.

M. Dubois: L'escompte de 1 000 000 $ et les escomptes de 400 000 $, parlez-en de

cela aussi.

M. Charbonneau: M. le Président, si le député de Huntingdon voulait nous laisser parler.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): C'est cela. Je me demande si c'est la température ce matin ou si c'est autre chose qui fait cela. Messieurs, à l'ordre!

M. Charbonneau: M. le Président, cela continue comme suit: "Malgré cette guerre et les nombreuses mesures de harcèlement à son endroit, la Raffinerie de sucre du Québec a quand même pu prendre position sur le marché et y établir une marque jouissant d'une précieuse notoriété. " Il s'agit de la marque Marie perle.

M. le Président, le député de Huntingdon pourrait-il se la fermer et me laisser lire le rapport?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît, messieurs!

M. Dubois: Un instant! M. le député de Verchères, soyez poli.

M. Charbonneau: Eh bien, taisez-vous et laissez-moi lire.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, s'il vous plaît!

M. Dubois: Allez lire votre document dans le corridor, d'abordl

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît! On n'ira nulle part comme cela. S'il vous plaît, messieurs!

M. Desbiens: La première politesse, c'est de respecter le règlement.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, on revient à l'intervention.

M. Pagé: M. le Président, serait-il possible d'appeler les députés à un peu plus de calme et de sérénité ce matin? Je crois que tout le monde a siégé tard, la fatigue se fait sentir, mais il faudrait que nos travaux puissent se faire dans un meilleur ordre. S'il y a des rivalités entre le député de Huntingdon et le député de Verchères, je les invite à profiter de la suspension pour aller régler cela en face de la porte de l'Amérindien.

M. Dubois M. le Président, je suis prêt...

M. Charbonneau: Le député de...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, messieurs, s'il vous plaît, on va...

M. Charbonneau: Le ministre de l'Agriculture devrait donner quelques informations sur ce qu'il pourrait arriver à la porte avant d'inciter trop son collègue à poser ce geste. M. le Président, je vous rappelle que je n'ai pas intervenu...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, s'il vous plaît, soyons plus sérieux.

M. Charbonneau: Je lisais un document et c'est moi qui ai été interrompu à plusieurs reprises, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît!

M. Charbonneau: C'est un document important, M. le Président. On parle de la guerre des prix; on parle de ia consolidation d'un monopole; on parle de marges de profit considérables qui se sont faites sur le dos des consommateurs. Des marges de profit qui vont s'accroître, parce que les escomptes que l'on a consentis dans cette guerre des prix vont disparaître avec la liquidation de la Raffinerie de sucre du Québec et la vente de cette raffinerie à la compagnie Lantic.

M. le Président, je poursuis quelques paragraphes importants: "Cette guerre d'escompte prendrait fin si la raffinerie de sucre pouvait produire elle-même une quantité raisonnable de sucre raffiné puisque les grandes raffineries manipulent un trop grand volume pour se permettre de maintenir leurs escomptes au niveau actuel sans connaître des pertes considérables. Avec son plus faible volume, la raffinerie pourrait soutenir cette concurrence et demeurer présente sur ce marché" au bénéfice des consommateurs.

On dit plus loin: "D'ailleurs, l'expérience récente de 30 mois de dures négociations avec les raffineurs, qui ont abouti à des tarifs très élevés de raffinage à forfait chez Redpath et d'équivalents de raffinage à forfait encore plus chers chez Lantic - imaginez-vous, Lantic a étranglé la Raffinerie de sucre du Québec, M. le Président, en exigeant des prix exorbitants pour raffiner son sucre - sous la 9eule menace de contrats de raffinage à forfait avec les Américains, montre bien que cette approche ne peut se solder que par une dégradation progressive de la situation de la raffinerie, tant qu'elle ne se trouvera pas en position de lutter à armes égales avec les raffineurs. " C'est la proposition qu'avait faite l'ancien ministre de l'Agriculture: permettre à la Raffinerie de sucre du Québec de lutter à armes égales. "Ces contrats de raffinage à forfait, s'ils permettent à la raffinerie d'améliorer temporairement sa position financière par rapport à celle que lui

permettrait la seule vente de son sucre brut, sont très limités, interdisant en pratique l'accès de la raffinerie à de nouveaux marchés. "

Voilà, M. le Président, des éléments d'un volumineux rapport qui avait été présenté par l'ancien ministre de l'Agriculture et qui avait été préparé par ta direction de la Raffinerie de sucre du Québec et le ministère de l'Agriculture, qui justifiaient nos demandes d'hier. Voilà donc des éléments importants dans le dossier de la constitution d'une situation de quasi-monopole, sinon de monopole tout court et de cartel tout court. Je crois qu'à cet égard on doit demander au directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions de comparaître devant cette commission, d'autant plus que le ministre de la Justice, qui a été interrogé par mon collègue de Lévis il y a quelques semaines a répondu exactement - je pense qu'il lui a fallu deux semaines avant de répondre - le 22 avril dernier que, à sa connaissance, il n'y avait pas d'enquête du service des enquêtes en vertu de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions. C'est ce qu'il a répondu le 22 avril 1986.

M. le Président, je vous indique que j'ai été, le 20 décembre dernier, moi-même interrogé dans le cadre de cette enquête ou préenquête, à la Place Ville-Marie, aux bureaux de la firme Buyers, Casgrain, Stewart & Associates, engagée par le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions, et j'ai donné au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation - je vois qu'il commence à être plus intéressé -les noms des deux enquêteurs, David Wolinsky et Don Mercer, du service des enquêtes fédérales sur les coalitions que j'ai rencontrés.

Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'un dossier est actuellement ouvert et qu'une enquête est en cours. On n'en connaît pas les conclusions. Mais je crois que, è ce moment-ci, avant de laisser le gouvernement aller, en l'amenant peut-être à poser un geste illégal qui contreviendrait à la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions, le ministre doit prendre le minimum de précautions. Je me rappelle les débats sur les clauses constitutionnelles, la morale qu'on nous avait faite sur les précautions qu'on devrait prendre avant de poser des gestes et les jugements qui sont intervenus par la suite devant les tribunaux et qui ont permis à l'Opposition de l'époque, qui forme aujourd'hui le gouvernement, de dire que le gouvernement n'avait pas pris toutes les précautions nécessaires.

Nous invitons le gouvernement à faire ce qu'il préconisait quand il était dans l'Opposition, à prendre toutes les précautions nécessaires et è faire comparaître le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions afin qu'il nous dise où en est son enquête actuellement et afin qu'il nous dise, selon lui, en vertu de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions, s'il y a risque de constitution d'un cartel, s'il y a risque que le gouvernement du Québec se place dans une situation d'illégalité à l'égard de l'entente qu'il a conclue avec la compagnie Lantic et de la transaction qu'il se dépêcherait de bâcler une fois que le projet de lot serait adopté.

M. le Président, sans partisanerie et en toute honnêteté, ne trouvez-vous pas cette proposition logique, sincère, appropriée et à propos à ce moment-ci? On veut aider le gouvernement. On veut qu'il évite de se placer dans une situation où, dans quelques mois, le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions arriverait avec un volumineux document et décréterait que le gouvernement du Québec a agi illégalement. Mais là, M. le Président, on ne pourrait pas revenir en arrière, on aurait liquidé l'entreprise. L'entreprise serait fermée; les employés seraient... On pourrait peut-être faire casser la transaction, mais qu'arriverait-il des employés, des producteurs agricoles, des gens qui s'engageaient, qui gagnaient leur vie, qu'on aura envoyés aux quatre vents, qu'on aura reclassés, je l'espère, en tout cas?

M. le Président, il restera l'édifice, l'immeuble. Mais, quand cette décision ou cet avis nous parviendra, peut-être aurons-nous aussi vidé l'immeuble important de la raffinerie de tous ses équipements. Avant que tout cela se fasse, je pense que le minimum que doit faire le gouvernement, c'est prendre les précautions qui s'imposent pour s'assurer que son projet de loi, sa décision, la transaction qu'il s'apprête à faire soit faite dans toute la légalité, avec toutes les garanties possibles. Il n'y a pas, comme je le disais hier, d'urgence. Il n'y a pas de presse. La seule urgence qu'il y a, c'est l'empressement qu'a la compagnie Lantic d'en finir avec cette affaire.

Je me rappelle, ce n'est pas d'hier que M. Morin nous regarde et fait son lobby, efficace d'ailleurs. Je lui ai dit hier qu'il devait être content parce qu'il a gagné la partie, peut-on présumer, si le gouvernement va de l'avant. Ce n'est pas d'hier qu'il travaille à ce dossier, M. le Président. Cela fait des années.

J'ai cité hier le rapport annuel de la compagnie Steinberg qui indiquait les profits importants que la compagnie déclarait à cause de ses investissements dans la compagnie Lantic. Si on décidait de retarder ou même d'empêcher cette transaction, ce n'est pas cela qui ferait mourir Steinberg et la compagnie Lantic. Mais le gouvernement se placerait peut-être dans une situation où il prendrait non seulement l'intérêt du développement économique du Québec et de la création d'emplois, mais également l'intérêt des consommateurs du Québec.

D'ailleurs, moi, je trouve assez étrange que le ministre responsable de la Protection du consommateur n'ait daigné, à aucune reprise depuis le début de nos travaux, ni dans ce débat, M. le Président, intervenir une seule fois. II n'est pas intervenu à l'occasion de l'étude du principe du projet de loi è l'Assemblée nationale...

M. Garon: II dort sur la "switch".

M. Charbonneau:... le ministre responsable de la Protection du consommateur.

M. Garon: Il n'y a pas de ministre de la Protection du consommateur.

M. Charbonneau: II n'est pas intervenu pour venir débattre des propositions d'auditions particulières que nous faisons depuis hier et il ne vient pas, à ce moment-ci, s'intéresser aux travaux alors que le gouvernement s'apprête à créer un monopole et à consolider une situation de cartel, tout cela au détriment des consommateurs. Ce qui est aberrant et extraordinairement scandalisant, M. le Président, cela devrait même faire rougir un peu M. Morin, c'est que, pendant des années, ces compagnies qui ont bénéficié de la baisse des prix sur le marché international du dumping n'ont pas répercuté cette baisse de prix aux consommateurs. Ce qu'elles ont fait, et ce sont les passages que je vous lisais tantôt, elles ont empoché des profits exorbitants sur le dos des consommateurs. Ce sont les arguments qu'on nous sert continuellement, disant que la situation au Canada est idéale parce que le Canada n'a pas de politique de régularisation des prix et qu'il peut bénéficier des avantages du marché international du dumping, que les consommateurs sont avantagés. Foutaise, M. le Président, foutaise! Les consommateurs du Québec, du Canada, n'ont pas été avantagés.

Il y a des études qui ont été produites par la direction de la Raffinerie de sucre du Québec, par le ministère de l'Agriculture et elles n'ont pas été contredites par M. Paillé et ses collègues du ministère des Finances, qui établissent que les consommateurs québécois et canadiens ont payé leur sucre aussi cher que dans les pays où il y avait régularisation des prix, comme aux États-Unis et en France, alors qu'ici ils auraient dû payer moins cher si on tient compte de l'argument présenté.

Comment se fait-il qu'il n'y a pas eu d'avantages significatifs pour les consommateurs, M. le Président? Comment se fait-il qu'il y ait eu pendant des années exploitation d'une situation de force? Et le gouvernement, actuellement, s'apprêterait à consolider cette situation de force au détriment des consommateurs et on ne voudrait pas entendre le directeur fédéra! des enquêtes sur les coalitions"? On voudrait faire en sorte que le ministre responsable de la Protection du consommateur ne se pointe pas une fois à cette commission, qu'il n'intervienne à aucune reprise dans ce débat qui concerne directement les consommateurs. Le ministre Marx n'a pas eu une intervention, M. le Président, depuis qu'il a été nommé responsable de la Protection du consommateur; il n'y a pas un dossier aussi important pour la protection des consommateurs que celui-ci sur lequel il aurait dû se pencher depuis le 12 décembre dernier.

M. le Président, cette incompétence, cette absence de conscience professionnelle, cette absence de professionnalisme du ministre responsable de la Protection du consommateur font que ce ministre s'est complètement désintéressé du débat du projet de loi que le ministre de l'Agriculture présente avec son collègue délégué à la Privatisation. Aujourd'hui le ministre de l'Agriculture et le ministre délégué à la Privatisation vont présenter et faire adopter un projet de loi qui va permettre au gouvernement de constituer un quasi-monopole, sinon un monopole de fait. Est-ce que c'est la vocation du gouvernement du Québec, est-ce que c'est la vocation sociale, est-ce que c'est la vocation économique du gouvernement du Québec de créer des monopoles? Est-ce que c'est la vocation sociale, est-ce que c'est la vocation économique du gouvernement du Québec de faire en sorte de placer les consommateurs québécois à la merci de compagnies qui ont déjà abusé considérablement de la situation? Est-ce que c'est cela, la vocation du gouvernement du Québec? Deux, cinq, laissez faire. Je vais prendre le temps qu'il faut pour vous dire vos quatre vérités, M. le Président.

C'est absolument aberrant de voir le ministre de l'Agriculture ne pas frémir devant la situation, le comportement de ces entreprises. Si je pouvais rapidement mettre la main sur... Attendez une petite seconde. Non, M. le Président, si je mettais la main sur vous, je vais vous dire une affaire, après cela vous auriez des problèmes. (12 h 45)

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous ne parlez pas au président, n'est-ce pas?

M. Charbonneau: M. le Président, j'ai ici un article de la Gazette du 8 mars 1965 qui s'intitule: "Sugar conspiracy, allegation will be heard. " Pendant des années, on a tenté de faire taire un monsieur qui s'appelle Robin Austin qui avait décidé de s'attaquer de front au cartel du sucre. Cet homme a été victime d'attentats et de sabotages. Son auto "was blown up", si je traduis bien, cela veut dire: a sauté.

M. Messier: C'est parce qu'il a mis du sucre dedans.

M. Charbonneau: C'est ridicule d'entendre le député de Saint-Hyscinthe rire de ce comportement. M. le Président, je lui promets la plus belle bataille électorale qu'il aura jamais eue. Je m'engage à le faire battre personnellement dans son comté.

M. Messier: Cela n'a rien donné la dernière fois.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre, s'il vous plaît! Revenons...

M. Charbonneau: Comment penser que le gouvernement du Québec va s'associer...

M. Messier: Viens donc dans Saint-Hyacinthe. Viens encore.

M. Charbonneau:... à une situation qui a donné des actes de banditisme, M. Je Président? L'histoire de l'industrie du sucre au Québec et au Canada est une histoire qui frise la criminalité...

M. Pagé: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît! Question de règlement. Une seconde. M. le ministre, je vous écoute.

M. Pagé: M. le Président, je n'ai pas abusé du temps de cette commission jusqu'à maintenant, à juste titre, compte tenu des abus nombreux que l'on retrouve de l'autre côté. Est-ce que le député de Verchères pourrait utiliser des propos moins violents en vertu des dispositions de notre règlement et cesser de porter des jugements qualifiant l'industrie de banditisme, etc. ?

M. Charbonneau: M. le Président, je ne porte pas de jugement; je cite des événements, des faits.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, mais quand même, de là à dire que le gouvernement fait une coalition, vous dépassez les bornes.

M. Charbonneau: M. le Président, non, ce que je dis, c'est que l'histoire de cette industrie a donné lieu à des actes de banditisme.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. Vous pouvez citer des exemples, toujours en fonction de votre sous-amendement.

M. Charbonneau: C'est toujours en fonction du sous-amendement. Je demande justement que le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions vienne, parce que quelqu'un qui s'était attaqué à cette situation monopolistique et qui avait dénoncé le monopole et le cartel en a subi des conséquences physiques. Il a été attaqué comme on attaque des gens dans des milieux sordides à Montréal. Ce que je dis, c'est que l'histoire de l'industrie sucrière au Canada et au Québec, c'est une histoire où on est obligé de se rendre compte qu'il y a eu du banditisme. Il y a eu des attentats.

M. Pagé: M. le Président, est-ce pour cela que le député de Verchères semble frémir ce matin?

M. Charbonneau: Je ne frémis pas, M. le Président, parce que je ne tiendrais pas les propos... Avec ce que j'ai de plomb dans les ailes, ce n'est pas cela qui va m'arrêter.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît, oui.

M. Charbonneau: M. le Président, le gouvernement, avant d'aller plus loin dans sa décision et dans sa démarche, doit acquiescer à notre demande. Il doit se donner la peine de vérifier toutes les possibilités qu'il y aurait à l'égard de la constitution d'une situation de monopole. Il doit aussi vérifier quelles seraient les conséquences pour les consommateurs du Québec.

M. le Président, je crois que toutes ces demandes sont légitimes et fondées et que ce sont des demandes tellement minimes par rapport à la situation, tellement réservées, tellement acceptables, que l'on se demande encore comment il se fait que je sois obligé de plaider pendant une demi-heure et de me faire interrompre à certaines reprises par des railleries de députés ministériels pour vous convaincre, convaincre le ministre de l'Agriculture et convaincre ses collègues qu'il y a anguille sous roche. Il y a des choses graves qui doivent être regardées de plus près. L'on ne doit pas faire ce projet de loi à la légère. Il n'y a pas d'urgence à procéder, comme le gouvernement veut le faire, sans entendre toutes les parties concernées, sans entendre les gens qui sont les premiers et les plus au fait de la situation, sans entendre tous les experts.

M. le Président, peut-être que la compagnie Lantic aurait de bonnes explications à donner. Pourquoi ne lui avons-nous pas donné l'occasion de se faire entendre? Pourquoi ne donnerions-nous pas également l'occasion au directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions peut-être de nous rassurer et de nous dire que le gouvernement peut faire ce qu'il fait parce qu'il n'y a pas tellement de danger?

Mais, au moment où on se parle, telle n'est pas la situation. Les présomptions de danger sont considérables; les présomptions de conséquences graves pour les consommateurs sont considérables. Les pré-

somptions d'empirer une situation qui a déjà joué considérablement contre les consommateurs québécois sont considérables et, à cet égard-là, je crois qu'il est normal qu'on fasse appel aux gens que l'on veut convoquer. Comme cela, on aura toutes les versions. Comme cela, M. le Président, la compagnie Lantic pourra aussi, peut-être, réfuter des événements ou apporter un éclairage utile, nouveau, sur la situation qui s'est produite et sur les comportements et la fluctuation des prix.

M. le Président, je répète ce que j'ai dit hier: Je ne peux pas comprendre qu'on va tuer une industrie agro-alimentaire qui existe depuis 40 ans au Québec sans permettre à tous les intéressés d'être entendus. C'est complètement inacceptable, c'est complètement aberrant et je demande, par votre entremise, au ministre qu'il revienne sur sa décision, sur sa position. Ii reste encore plusieurs jours avant la fin de la session. Peut-être le ministre pourrait-il prendre la fin de semaine pour réfléchir. Peut-être que des militants libéraux auront la conscience troublée; peut-être M. Morin aura-t-il la conscience troublée. Peut-être diront-ils au ministre de l'Agriculture, en fin de semaine, au conseil général: Écoutez, il n'y a rien qui presse. Faites donc entendre toutes les parties. Au moins, on pourra faire taire les péquistes parce qu'on aura prouvé que ce qu'ils disaient était faux. Mais faites entendre le monde pour qu'on ait un procès juste et équitable et qu'au moins on puisse se promener dans nos comtés en disant: On a respecté notre parole.

Voilà, M. le Président, ce que j'avais à dire sur la motion de sous-amendement que je vous présente.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le député de Verchères. Maintenant, je cède la parole au député de Lévis. Oui?

M. Pagé: Normalement, je devrais avoir la réplique. Cependant, je vais laisser le député de Lévis intervenir pour ses dix minutes, me réservant le droit d'intervenir au début de nos travaux cet après-midi au cas où le député de Lévis aurait une argumentation plus soutenue, mieux fondée que celle qui, jusqu'à maintenant, a été formulée par le député de Verchères et qui ne semble pas très très convaincante.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, je cède la parole au député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, la proposition d'amendement présentée par le député de Verchères disant que la commission parlementaire de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation du Québec devrait entendre le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions est une proposition importante. Vous savez que la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions fait une infraction criminelle, à l'article 32, de certaines offenses. Je vais lire l'article 32. Évidemment, il y a d'autres offenses ailleurs qu'à l'article 32, mais simplement pour indiquer ce qui est couvert par la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions, on dit: "Est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement de cinq ans ou d'une amende d'un million de dollars, ou de l'une et l'autre peine, toute personne qui complote, se coalise, se concerte ou s'entend avec une autre "a) pour limiter, indûment, les facilités de transport, de production, de fabrication, de fourniture, d'emmagasinage ou de négoce d'un produit quelconque; "b) pour empêcher, limiter ou diminuer, indûment, la fabrication ou production d'un produit ou pour en élever déraisonnablement le prix; "c) pour empêcher ou diminuer, indûment, la concurrence dans la production, la fabrication, l'achat, le troc, la vente, l'entreposage, la location, le transport ou la fourniture d'un produit, ou dans le prix d'assurances sur les personnes ou les biens; ou "d) pour restreindre ou compromettre, indûment de quelque autre façon, la concurrence. "

Il est clair que le mandat du directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions est très vaste. Si nous demandons à la commission parlementaire de l'agriculture du Québec de recevoir ici et d'inviter le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions, c'est parce que nous savons que ceux qui sont responsables des enquêtes sur les coalitions à Ottawa se posent des questions sur ces transactions, pas depuis hier, pas depuis aujourd'hui, mais depuis déjà un bon bout de temps. Il serait important que nous recevions nous-mêmes le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions puisqu'il ne s'agit pas d'un dossier qui n'est jamais allé devant le directeur des enquêtes sur les coalitions. On se rappellera que la direction des enquêtes sur les coalitions avait déjà pris des actions contre les raffineries de sucre au Canada. C'est un dossier qui est ouvert à la section des enquêtes sur les coalitions au gouvernement fédéral.

Je dois dire que c'est une occasion que la commission doit saisir pour faire en sorte que les juridictions québécoises soient exercées. Je dois dire aussi à la commission que, si elle refuse de recevoir le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions, je proposerai moi-même aux membres de l'équipe du Parti québécois de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation d'aller rencontrer le directeur des

coalitions à Ottawa.

Je pense que cette transaction proposée par le gouvernement est contre l'intérêt public, et nous le démontrerons par tous les moyens. C'est un moyen de savoir véritablement ce qui se passe. Qu'on ne pense pas que le gouvernement va nous bâillonner, va adopter une loi à la vapeur, en disant par la suite: C'est fini, on l'a adoptée. Ce dossier sera ouvert, soyez-en certain, jusqu'aux prochaines élections! Ce dossier ne finira pas, parce qu'il est contraire à l'intérêt public. Déjà, les effets néfastes de cette transaction annoncée par le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation se font sentir sur les prix.

Si nous faisons cette proposition, nous ta faisons de bonne foi et surtout pour que, éventuellement, lorsque nous engagerons d'autres démarches, on ne puisse pas nous reprocher de ne pas avoir fait la requête que le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions vienne nous rencontrer, ici à Québec, en commission parlementaire. Par la suite, si la commission refuse d'inviter le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions, nous irons le rencontrer à Ottawa. Ce sujet est trop sérieux. Le sucre est un produit de base pour une multitude d'aliments. De la même façon, ce matin, on dit que l'indice d'inflation au Québec est plus élevé que dans les autres provinces, parce qu'il y a eu augmentation des tarifs de l'électricité à 5, 4 % et qu'il y a eu une augmentation du prix du gaz due principalement à la taxe que le Québec a imposée. Cela a amené une inflation générale sur les prix au Québec parce qu'il s'agit, encore la, d'un produit de base.

De la même façon, dans le secteur agro-alimentaire, le sucre est un ingrédient important pour une foule de produits. On saura, par exemple, que, dans le ketchup, il y a presque autant de sucre que de tomates; dans la crème glacée, il y a presque autant de sucre que de lait. Pour une multitude de produits, le sucre est un ingrédient important. Le gouvernement ne peut pas, d'une façon responsable, limiter la concurrence au Québec pour faire en sorte que cet ingrédient de base connaisse une augmentation de prix, parce qu'il n'y aura plus de concurrence à toutes fins utiles.

Ceux qui ont pensé que c'était un débat stérile vont se tromper; le prix du sucre doit faire l'objet d'un débat majeur pour l'économie agro-alimentaire du Québec, puisque c'est l'ingrédient de base d'une foule de sous-produits. On ne peut pas se laver les mains dans ce dossier. Nous avons prpposé jusqu'à maintenant de rencontrer différentes personnes pourdémontrer toutes les facettes de l'industrie du sucre. C'est une des industries les plus importantes, parce qu'elle est à la base d'une foule de produits dans l'économie agro-alimentaire du Québec. On ne peut pas se laver les mains pour dire qu'on a réduit les dépenses pour boucler le budget à la fin de l'année. Les prix ont triplé depuis quelques mois et, au taux actuel, selon nos prévisions d'installation et de capacité de raffinage au détail, la Raffinerie de sucre du Québec serait rentable. Alors que les prix ont changé, qu'on veuille s'obstiner, sans aucune expertise, sans aucune consultation, sans de véritables études approfondies...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député de Lévis, il reste une minute à la commission, mais il vous reste trois minutes; vous aurez donc deux minutes cet après-midi. Alors, on peut continuer encore une minute et on arrête.

M. Pagé: Ou trois minutes, cet après-midi.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Si vous voulez continuer pendant une minute.

M. Garon: Je termine cette phrase - je continuerai cet après-midi - en disant que les gens ne peuvent pas s'obstiner à vouloir poursuivre envers et contre tous une transaction sans même en regarder les différents aspects. C'est pourquoi nous faisons, en toute connaissance de cause, une proposition a la commission. Si la commission refuse d'entendre le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions, elle supportera l'odieux de cette décision, parce que c'est un dossier qui ne finira pas avec ce vote.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 13)

Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mesdames et messieurs, si vous voulez prendre place, je déclare la séance de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation ouverte et je tiens à dire que, ce matin, on était en train de discuter le sous-amendement qui dit: "et le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions". Le député de Lévis était en train de faire son intervention. Il lui restait deux minutes.

M. Garon: Trois.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Deux au moment où vous vous êtes arrêté. Deux minutes quarante secondes.

M. Garon: D'accord. Deux minutes

quarante secondes.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député de Lévis, on vous écoute. C'est parti.

M. Garon: M. le Président, j'aimerais avoir l'oreille de la députée de Kamouraska-Témiscouata. Si elle veut parler, on a tout le temps voulu. Si elle demande la parole au président, on aimerait qu'elle la demande...

M. Houde: Elle parlait à monsieur.

M. Garon:... pour exposer, pas seulement au député de Berthier, mais à nous tous, ses pensées sur l'avenir du sucre.

M. le Président je terminais mon exposé ce matin en disant que le directeur fédéra] des enquêtes sur les coalitions, c'est un personnage central à Ottawa, d'autant plus qu'il s'agit d'une institution qui a eu dans le passé à analyser à plusieurs reprises l'industrie du sucre. C'est un des domaines dans lesquels on a parlé à plusieurs reprises d'un système de fixation des prix un peu spécial. Si vous aviez l'occasion de voir le type de contrat que signent les raffineries qui vendent du sucre, vous verriez à quel point on prend tous les moyens pour faire en sorte que personne ne puisse savoir exactement quel est le prix de vente. À travers des systèmes d'escompte, de promotion, etc., comportant plusieurs facettes, il n'est pas facile de déterminer le prix. Pour ces raisons, dans le passé, les directeurs des enquêtes sur les coalitions ont eu à intervenir pour vérifier s'il n'y avait pas cartel dans l'industrie du sucre au Canada, dans l'Est du Canada. Nous croyons que la venue du directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions devant cette commission parlementaire permettrait d'éclairer mieux les gens de la commission avant de voter le projet de loi qui est présenté par le ministre de l'Agriculture. Il ne s'agit pas d'une proposition faite par le député de Verchères au hasard. Nous savons pertinemment qu'il y a eu des enquêtes sur l'état de la concurrence dans l'industrie du sucre et que les discussions que nous pourrions avoir avec le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions, qui est responsable de voir à ce qu'il y ait compétition au Canada dans les différents types de produits, permettraient de mieux nous renseigner sur l'état de la question. Cela, d'autant plus que plusieurs personnes savent qu'actuellement il y a des enquêtes qui se poursuivent par le service responsable de l'application de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions. Il serait bon que les membres, avant de voter, sachent...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Le député pourrait-il conclure? Votre temps est écoulé.

M. Garon: C'est cela que je suis en train de faire, M. le Président. Sans dire que je tirais des conclusions, je les tirais. Ce n'est pas que je voulais prendre les membres de la commission par surprise, ayant confiance - peut-être un peu naïvement ou candidement, comme disent les Américains -dans l'ouverture d'esprit des membres de cette commission pour qu'ils acceptent d'être renseignés par celui qui a eu, peut-être, le plus à étudier l'industrie du sucre au cours des dernières années et qui est à même de venir nous dire si la vente que veut faire, pour fins de fermeture et de liquidation de la Raffinerie de sucre du Québec, le gouvernement du Québec est souhaitable ou n'est pas souhaitable dans l'intérêt public. Sachant qu'éventuellement le gouvernement fédéral pourrait casser cette transaction parce qu'étant inéquitable et créant une situation de cartel ou de quasi-monopole ou d'oligopole qui réduit indûment la concurrence dans l'Est du Canada...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le député de Lévis. Maintenant, je cède la parole au ministre.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, M. le Président. J'ai adopté comme attitude, généralement, de laisser aller les honorables députés de l'Opposition qui s'adonnent à une véritable politique, une approche de refus systématique de l'adoption de ce projet de loi. Cependant, je me dois d'intervenir à ce moment-ci, compte tenu des commentaires et des propos qui ont été formulés par le député de Verchères et le député de Lévis, lesquels nous indiquent leur réserve, leur très grande inquiétude concernant l'effet sur le consommateur de la vente des actions de la raffinerie de sucre è la société Sucre Lantic Ltée. On a parlé beaucoup, depuis le début de la matinée, de monopoles, de situations de marchés captifs, d'effets très coûteux pour les consommateurs. On a parlé du poste du directeur des enquêtes sur les coalitions, lequel poste, soit dit en passant, n'existe pas. On aurait pu juger la motion irrecevable, M. le Président, mais on n'a pas voulu jouer avec les virgules. La fonction exacte en vertu de l'article 5 de la loi, c'est le directeur des enquêtes et des recherches, lequel est désigné en vertu de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions.

M. le Président, essentiellement, on s'est convoqués è une analyse assez rigoureuse du dossier de la Raffinerie de sucre du Québec. Je l'ai indiqué longuement lors de l'adoption du principe du projet de loi. On a étudié, dans un premier temps, le scénario du statu quo avec tout ce que cela pouvait impliquer comme investissement de sommes très appréciables prélevées à même

l'impôt et les taxes des citoyennes et citoyens. Cela nous obligeait, comme gouvernement, à continuer de déposer, è chaque fin de mois, des lettres du ministère des Finances garantissant finalement les emprunts de réconfort auprès des banques, parce que l'entreprise était techniquement en faillite depuis un bout de temps. De plus, cela nous obligeait à consacrer 12 000 000 $, 14 000 000 $ ou peut-être même 15 000 000 $ dans le cadre du présent exercice financier pour maintenir la raffinerie ouverte. Donc, le statu quo a été écarté.

Par la suite, on a approfondi la possibilité d'en arriver à un plan d'aménagement qui nous aurait permis de procéder à la dernière phase de fabrication du sucre blanc, tel que formulé et déposé au Conseil des ministres, mais laissé en plan par le gouvernement du Parti québécois. Ensuite, on a envisagé, comme troisième scénario, de vendre purement et simplement les actions de la Raffinerie de sucre du Québec. Nous étions vendeurs. C'est dans cette perspective que des contacts ont été établis avec les producteurs. On leur a vraiment offert et j'ai personnellement formulé cette offre. Les producteurs ont analysé très rigoureusement les états financiers, la viabilité, la faisabilité de l'entreprise. Ils en sont venus aux mêmes conclusions que nous, à savoir qu'il fallait bénéficier d'un apport externe de 15 000 000 $ par année pour un minimum de sept ans afin d'être capables d'exploiter la Raffinerie de sucre du Québec.

M. le Président, sur la foi de cela, les représentants du gouvernement ont eu des rencontres avec la Direction des enquêtes et des recherches en vertu de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions. Ces rencontres se sont faites avant, évidemment, notre énoncé du 10 mars dernier. Je peux vous indiquer que, depuis le 10 mars, on n'a eu aucun signe de vie, aucun suivi, aucun "follow-up", si je peux utiliser le terme, de ce service relevant de la juridiction fédérale. On a fait valoir notre dossier. On a mis en relief le fait que la raffinerie était techniquement en faillite depuis un bon bout de temps. On a eu l'occasion d'échanger avec eux sur ce qu'était la situation actuelle. À certains égards, on peut retenir dans ce dossier que, sur la base stricte de la concurrence, la situation actuelle pouvait être même illégale à cause, entre autres, de cette situation - où les déficits de la raffinerie sont comblés depuis un bon bout de temps par le gouvernement du Québec. Ce qui crée une situation où la concurrence, le libre commerce ne se fait pas sur des bases égales, l'entreprise étant subventionnée de façon très importante si on réfère au montant des engagements financiers du gouvernement à l'égard de la raffinerie. On doit rappeler aux députés de l'Opposition que, pour déclencher une enquête comme telle, il faut que la transaction soit conclue. Aujourd'hui, nous prenons acte de la volonté du Parti québécois de se rendre à Ottawa afin d'intervenir, de dramatiser. Voyant le député de Lévis, je me l'imagine très bien arrivant à Ottawa, capitale fédérale de notre beau pays le Canada, venant demander - lui qui est un indépendantiste convaincu, beaucoup plus que M. Johnson - la protection du gouvernement du Canada par l'administration de ses lois. J'ai bien hâte de voir la photo. Je m'imagine le titre. Garon sous le drapeau du Canada.

M. Garon: Cela permettrait de tester le système fédéral aussi. S'il est efficace, s'il bouge, s'il ne bouge pas, s'il défend les intérêts des consommateurs ou non.

M. Pagé: J'anticipe la satisfaction que j'aurai de voir, encore une fois, jusqu'où le Parti québécois pourrait aller dans ses contradictions.

M. le Président, il faut quand même avoir à l'esprit certains éléments. Dans le cadre du projet de loi qui est actuellement déposé et qui est étudié par la Chambre des communes à Ottawa, il n'y aurait aucun problème - on pourra y référer sous plusieurs aspects - il serait même impossible d'avoir une enquête. Si on veut examiner plus concrètement la vente des actions de la raffinerie a la société Sucre Lantic, on doit constater qu'on respecte la loi. En cédant les actions, en fusionnant le commerce de ces deux entreprises, on ne réduit pas - si je me réfère au libellé de la loi - de façon inacceptable la concurrence. À preuve, la Raffinerie de sucre du Québec s'approvisionne déjà auprès de la société Lantic. Il faut aussi retenir dans cet exercice - et cela n'a pas été évoqué par les députés péquistes - que le marché du sucre au Québec reçoit des volumes de sucre des États-Unis qui pénètrent notre marché. Il faut convenir aussi que Redpath est présente sur le marché du Québec. Cette transaction ne nuit pas à la performance globale de l'économie. On sauve des emplois à l'est de Montréal, des emplois permanents, des travailleurs qui oeuvrent toute l'année. C'est avec beaucoup de réserve que j'entendais les chiffres et on aurait pu soulever beaucoup de questions de règlement, vous le savez. À voir toute la détermination et l'enthousiasme qui les animaient, on a préféré les laisser aller dans leur "filibuster". On a parlé hier de 1500 emplois. Voyons donc!

M. Garon: Est-ce que le ministre me permettrait une question?

M. Pagé: Après, M. le Président. Les emplois à la raffinerie de sucre, c'était 93 employés, 103 producteurs la

dernière année. Je comprends que cela crée des emplois indirects, mais il ne faut pas énoncer des chiffres comme ceux que vous avez formulés. Les gens de Saint-Hilaire qui vous écoutent ou qui vous liront s'interrogeront vraiment sur le caractère sérieux de l'argumentation des députés. M. le Président, les dispositions du projet de loi qui est actuellement étudié devant la Chambre des communes, si ces mesures s'appliquaient, tiendraient compte aussi du fait que l'entreprise dont les actions sont cédées pourrait ou aurait pu se retrouver dans une situation de faillite imminente. Or, il est très clair que déjà la raffinerie est techniquement en faillite depuis un bon moment.

Il faut retenir aussi qu'en ce qui concerne le volet des produits de remplacement on a parlé beaucoup des hausses du prix du sucre ce matin. On a dramatisé. Le marché allait être captif. Les consommateurs allaient payer beaucoup plus cher. Le ministre responsable de la protection du consommateur avait manqué de leadership, etc. Il faudrait retenir que, dans la situation commerciale actuelle dans des pays industrialisés comme le nôtre, comme les États-Unis, toute augmentation du prix du sucre ouvre la porte mais toute grande à l'utilisation de succédanés. Et cela, l'industrie sucrière, ceux qui mettent en marché le sucre qu'on consomme en sont bien conscients. Le meilleur des freins pour les augmentations de prix, c'est définitif, c'est l'utilisation des produits de remplacement. (15 h 30)

Je peux indiquer aux honorables députés de Lévis et de Verchères qui se rendront à Ottawa - je vais leur souhaiter un bon voyage, c'est la capitale de notre pays, c'est un beau coin de pays - qu'ils devraient quand même avoir à l'esprit qu'il n'y a pas eu beaucoup de condamnations et, è ma connaissance, il n'y en a eu aucune depuis 75 ans dans des cas de fusions d'entreprises. Il y a une enquête sur le pétrole qui dure depuis onze ans et la situation a été très évolutive dans le domaine pétrolier depuis onze ans, évidemment. Alors, on vous souhaite un bon et un long voyage. Très probablement qu'il va être long.

Le député de Verchères s'est référé è son audition ou è sa comparution en décembre, à son témoignage ou è sa visite. L'enquête dont il parle, c'est le cas de Sucre Saint-Laurent et de la société Lantic et non celle de la Raffinerie de sucre du Québec, parce qu'il n'y a pas d'enquête.

M. Charbonneau: Non, si M. le ministre me permet...

M. Pagé: Vous parliez de quoi?

M. Charbonneau: Je parlais de la transaction que le gouvernement s'apprêtait à conclure pour la Raffinerie de sucre du Québec.

M. Pagé: Vous y êtes allé?

M. Charbonneau: Certainement!

M. Pagé: D'accord. Est-ce que l'enquête est amorcée?

M. Charbonneau: Ah oui! M. Pagé: Voyons!

M. Charbonneau: Écoutez, j'ai donné des...

M. Pagé: Je comprends que le député de Verchères n'est pas avocat mais, formellement, une enquête n'est déclenchée qu'une fois que la transaction est complétée. Ce sont des échanges préliminaires, saisis qu'ils l'ont été de l'intention du gouvernement de vendre des actions de la raffinerie.

M. le Président, c'est très bien, cette motion. C'est dilatoire; cela occupe le temps de la Chambre en ce beau vendredi après-midi...

Une voix: Pluvieux.

M. Pagé: Le Parti québécois a consacré plusieurs heures, jusqu'à maintenant, sans amorcer l'étude de l'article 1. C'est une procédure de refus systématique d'adoption de la loi. C'est une procédure en vertu de laquelle les députés de l'Opposition démontrent clairement qu'ils ne veulent pas étudier le projet de loi, qu'ils sont plutôt concentrés sur une volonté de faire témoigner beaucoup de gens devant notre commission parlementaire, pour tenter de gagner du temps, de bloquer la transaction et, finalement, de faire plaisir à certaines personnes qui, dans la région de Saint-Hilaire et dans le comté de Verchères, se sentent plus directement concernées et touchées par le geste que le gouvernement s'apprête à poser, un geste réfléchi et qui est le résultat d'analyses rigoureuses et qui témoigne d'une volonté du gouvernement du Québec d'assainir les finances publiques.

Essentiellement, je dirai au député de Verchères qui évoquait hier avec beaucoup d'emphase le plan de développement, la dernière phase, que cela me faisait penser un peu à ceci: Je m'imagine une baignoire qui déborde dans une salle de bains. La proposition des députés de Verchères et de Lévis, c'était, face à cette situation, comme si on prenait une chaudière et qu'on enlevait continuellement de l'eau, une chaudière qui nous aurait coûté près de 50 000 000 $, 30 000 000 $ pour le déficit accumulé et

20 000 000 $ pour la modernisation de l'usine.

Nous, on ferme le robinet. C'est plus sérieux dans les circonstances. C'est ce à quoi nous nous sommes engagés: Mieux administrer les impôts de ces femmes et de ces hommes qui travaillent durement pour les payer et maintenir les emplois. On aura l'occasion de revenir lorsque le projet de loi sera étudié, si jamais on l'étudie article par article, et de dire comment la transaction s'est élaborée, comment le protocole s'est élaboré, vers quelle transaction il se dirige, quels seront les effets pour les travailleurs et les travailleuses, nos programmes d'indemnités pour les producteurs, etc.

Pour tous ces motifs, M. le Président, la motion présentée par le député de Lévis ou de Verchères, peu importe, il y en a tellement - c'est celle du député de Verchères - sera battue purement et simplement, en ce qui me concerne. Merci!

M. Jolivet: M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le ministre. Je cède la parole, maintenant, au député de Laviolette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: M. le Président, j'écoute avec attention le ministre démissionnaire -avec son collègue qui le surveille en arrière, le ministre qui a gagné la partie - nous dire qu'au sujet de ce projet de loi l'hypothèse que faisait l'Opposition, c'était d'enlever un peu d'eau dans une baignoire qui débordait. II a ajouté qu'eux fermaient plutôt le robinet. Il a oublié une chose. Je pense qu'il n'a pas terminé sa pensée, à moins que je ne l'aie mal compris ou que je l'aie mal saisi. Du moins, c'est ce que je crois comprendre du projet de loi, en tout cas. Ce que je crois comprendre, c'est qu'en plus de cela il a fait un autre geste, c'est qu'il a tiré l'eau de la baignoire avec le bébé dedans, tt a fait en sorte que tout le monde s'en aille, s'engouffre dans le fond et parte vers des eaux nauséabondes, malsaines. En fait, ce qu'a fait le ministre c'est - l'expression est bien typique - qu'en plus de tirer la "plug", il a tiré la "plug" avec le bébé dedans.

M. Pagé: La quoi? M. Jolivet: La "plug".

M. Pagé: Vous écrivez cela comment, vous, le professeur de français?

M. Jolivet: Justement, je voulais revenir à cela. J'ai une occasion en or, je vais y revenir. M. le ministre nous a dit que le lieutenant-gouverneur en conseil, en vertu de l'article 5, peut nommer un fonctionnaire appelé directeur des enquêtes et recherches. Je le remercie bien gros de nous avoir fait encore une remarque fort pertinente dans le débat dans lequel nous sommes parce qu'effectivement, ce que nous avons demandé, c'est la venue du directeur fédéral des enquêtes. Donc, s'il est directeur général des enquêtes et recherches, nous disons que ce sur quoi on veut que porte le travail, c'est une enquête sur les coalitions.

Donc, quand on a dit cela... Il me fait penser au moment où j'avais employé le mot "acquéreur" et je me demandais si cela faisait "acquéreuse" au féminin ou "acquéreure". J'ai eu l'occasion, ce matin, de vérifier dans le dictionnaire, parce que j'avais vu le voisin du ministre des Finances en faire autant hier. Je lui avais posé une question mais, comme il n'avait pas le droit de parole, il n'a pas pu parler. Il a finalement dit au ministre que c'est "acquéresse" et que c'est un mot qui est considéré comme un mot judiciaire, juridique...

M. Pagé: "Acquéreure".

M. Jolivet: Non, "acquéresse", féminin. Allez voir dans le dictionnaire, le Petit Robert, vous allez voir que c'est "acquéresse".

M. Pagé: "Acquéresse" peut être utilisé ou "acquéreure", pas "acquéreuse".

M. Jolivet: Le ministre a voulu me faire la leçon hier, mais en réalité il s'est trompé, comme mot. Donc, on est égaux, la partie est nulle pour le moment.

M. Pagé: Je comprends cela.

M. Jolivet: Je veux juste vous dire une chose, c'est qu'effectivement, moi, je suis en accord complet avec mon collègue de Verchères pour faire venir le directeur fédéral responsable des enquêtes sur les coalitions. Je dois vous dire que cela fait suite à beaucoup de demandes. Le ministre dit: Écoutez, on n'approfondit pas un projet de loi qui est bien important. C'est un projet de loi qui a pour but, au bout de la course, de faire une vente selon des transactions normales. Le ministre oublie une chose, c'est que le projet de loi, s'il l'a bien lu, la seule chose qu'il fait, c'est qu'il abroge. Il est tellement technique, ce projet de loi, il abroge une loi déjà existante, il abolit, il liquide la raffinerie pour la transmettre entre les mains d'autres personnes qui risquent de faire en sorte que le système soit de nature - il faut faire attention, c'est un grand mot, l'ex-ministre et député de Lévis est habitué à ce mot-là oligopolistique, ce qui peut risquer de créer un monopole. Je suis un de ceux parmi vous autres qui ont à prendre des décisions

comme législateurs et je ne voudrais pas être pris comme André Ouellet, le ministre fédéral. Il y a quelques années - si je me souviens, ce sont les années 1975-1976 - à la suite d'une enquête sur le sucre, il avait pris la décision de contester le jugement, Qu'est-il arrivé? Vous savez ce qui est arrivé? Il a été obligé de démissionner de son poste de ministre. Je ne voudrais pas, comme législateur, si je n'ai pas l'occasion de faire venir cette personne... Mme la députée de Deux-Montagnes fronce les sourcils, en disant: Est-ce vrai? Bien oui, c'est vrai! C'est vrai, le ministre André Ouellet a démissionné de son poste parce qu'il a mis en doute le jugement d'un juge parce qu'il prétendait qu'il y avait eu coalition et le juge déterminait qu'il n'y en avait pas eu à l'époque.

M. Garon: II n'avait pas assez de preuves.

M. Jolivet: C'est cela. Je ne dis pas qu'il n'y en a pas eu, je dis que c'est ce qui avait été comme détermination. Mais lui croyait dur comme fer qu'il y en avait eu. Vous vous imaginez ce que cela a donné?

Cela a donné qu'il a été obligé de démissionner.

M. Houde: Parlez moins vite.

M. Jolivet: M. le député de Berthier, ne faites pas comme le ministre de l'Éducation.

M. Houde: Parlez moins vite et on va vous comprendre.

M. Jolivet: Ce n'est pas vos affaires, je parlerai au rythme que je veux.

Une voix: Oui, mais si vous voulez qu'on vous écoute...

M. Jolivet: Deuxièmement. Ne faites pas comme le ministre de l'Éducation, ne soyez donc pas arrogant. Le ministre de l'Éducation, parce qu'on se trompe sur un mot, en fait un plat à l'Assemblée nationale à une heure du matin. Ne faites pas comme lui, ne prenez pas exemple sur une personne qui est comme cela. Ce n'est pas bon.

Je vous dis simplement que le ministre Ouellet a démissionné. Or, nous, nous allons avoir à prendre des décisions. Cela est important avant qu'on prenne les décisions et non pas après qu'on aura pris les décisions et après les transactions... On ne veut pas être éclairé après avoir fait un mauvais coup, on veut être éclairé avant pour voir s'il y a des chances, justement, de faire un mauvais coup.

Donc, si le directeur était ici, il pourrait peut-être nous dire que ce que nous nous apprêtons à faire, c'est de donner des tentations à du monde de faire un monopole. Je ne dis pas qu'il y aurait monopole, je ne dis pas que cela va créer un monopole mais il y a des risques d'en créer un. On va me dire: Bien, écoutez M. le député, vous avez du sucre qui vient des États-Unis, vous avez du sucre qui vient par Redpath. Voyons donc, écoutez, pensez-vous qu'il y a des dangers d'avoir un monopole? Le personnage le mieux placé pour venir nous le dire, pour venir nous dire quelles sont les pénalités qu'on peut encourir en vertu de la loi aux articles qui concernent... Dans la loi, à l'article 32, on dît: "Est coupable d'un acte criminel - si vous vous fiez à la Loi sur l'Assemblée nationale, quand un député a fait un acte criminel, il est suspendu; vous savez cela, allez voir la loi - et passible d'un emprisonnement de cinq ans ou d'une amende d'un million de dollars - là, je n'aurais pas d'argent pour payer cela - ou de l'une et l'autre peine, toute personne qui complote, se coalise, se concerte ou s'entend avec une autre - allez voir - pour restreindre ou compromettre, indûment de quelque autre façon, la concurrence... ". Je vous en donne un exemple.

M. Garon: Que la transaction ait lieu ou non.

M. Jolivet: "... pour empêcher, limiter ou diminuer, indûment, la fabrication ou production... " - cela m'inquiète; M. le député de Berthier, écoutez bien cela - se concerte, se coalise, complote ou s'entend avec une autre personne...

M. Houde: Je ne dormais pas.

M. Jolivet: Je n'ai pas dit que vous dormiez, vous parliez avec un autre. Je voulais que vous m'écoutiez. "... pour empêcher, limiter ou diminuer, indûment, la fabrication ou production d'un produit ou pour en élever déraisonnablement le prix... " Écoutez, lisez donc ce qui s'est produit.

M. Houde: Je n'ai pas compris tout à fait, répétez donc la dernière phrase.

M. Jolivet: M. le Président, là, il devient tannant. Je ne m'en occuperai plus. C'est habituel. Pour ceux qui vont me relire et qui vont m'avoir écouté convenablement, cela veut dire quoi? Moi, je veux le savoir. On va vendre une raffinerie qui, elle, va cesser de produire, si j'ai bien compris -qu'on me dise le contraire, si ce n'est pas vrai - et qui va donner à une autre sa capacité de production.

Donc, est-ce que, moi, je n'aurais pas d'une certaine façon un comportement de complot ou de coalition envers la vente, la liquidation à une compagnie qui, elle, va

pouvoir après cela monter les prix? On a juste à regarder les nombreuses fluctuations des cours mondiaux depuis les quinze dernières années, la marge des raffineurs n'a cessé de s'accroître. Elle n'a pas cessé, elle a toujours continué de s'accroître. Dans ce système où théoriquement toute fluctuation du prix du sucre brut se répercute chez le consommateur - déjà? seulement deux minutes? - la marge brute des raffineurs est ajoutée au prix du sucre brut pour constituer le prix officiel du sucre raffiné. Pour terminer, cette marge, qui s'est maintenue pendant cinq années, de 1974 à 1979, à 110 $ par tonne, s'est depuis accrue constamment pour atteindre 307 $ en 19B5. Mais quels sont les dangers que la vente d'une raffinerie comme celle-ci à une usine qui va devenir la seule du groupe qui en fabrique ici au Québec ne puisse pas effectivement augmenter les prix au consommateur? C'est tous et chacun de nous, et mes collègues pourront faire la preuve de l'ensemble des marges d'utilisation du sucre au Québec. Des familles comme celle du député de Prévost et la mienne, six, sept ou huit enfants qui ont du sucre en masse, soit par bonbons, soit par chocolat, soit par sucre utilisé dans les céréales, cela nous coûte quoi à nous?

M. Forget: On pourrait en avoir du ma?s. Avez-vous vérifié cela?

M. Jolivet: Je parle de celui-ci et je vais me contenter de celui-ci.

M. Forget: Faites une vérification, les gars.

M. Jolivet: Vous, pourrez parler tout à l'heure. Je vous dis simplement qu'effectivement c'est cela.

En terminant, comme je dois quitter et vous laisser travailler le reste de la journée, de la même façon que le ministre doit quitter, on va se saluer en même temps et on se reverra lundi. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? M. le député de Dubuc.

M. Jolivet: J'avais bien des choses à dire, pourtant.

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Merci, M. le Président. On a un nouveau ministre pour mener le débat. C'est peut-être le signe qu'enfin le gouvernement comprend notre point de vue et qu'il est prêt a accepter nos propositions. On a un nouveau ministre qui défend le dossier qui...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Non, pas du tout.

M. Jolivet: Non, c'est lui qui a gagné.

M. Fortier: Non, je peux répondre immédiatement. Dans notre gouvernement, les deux ministres sont sur la même longueur d'onde. Alors, vous ne verrez pas beaucoup de différences dans les réponses qu'on va vous, donner.

M. Desbiens: Non? M. Garon:...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît, si vous voulez continuer!

M. Desbiens: J'espérais. M. le Président, c'est parce que cela aurait peut-être été utile si le ministre avait été pour nous dire: Bien oui, on va accepter...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): De toute façon, on ne peut pas en avoir d'autres, c'est un sous-amendement... (15 h 45)

M. Desbiens: M. le Président, évidemment, je souscris à la proposition de sous-amendement de mon collègue de faire venir ici devant nous, pour questionnement et information, le directeur fédéral des enquêtes et recherches sur les coalitions. C'est un autre aspect, je pense, de tout ce dossier qui est fort important. Le ministre de l'Agriculture nous disait tantôt qu'il a fait une étude, que le gouvernement a fait une étude réfléchie, rigoureuse. Je veux bien le croire; je ne peux pas, comme parlementaire, douter de sa parole. Les législateurs, eux aussi, ont besoin de faire une étude réfléchie et rigoureuse avant de voter sur un projet de loi. C'est là, justement, l'objectif de ces demandes répétées que nous faisons depuis hier, de pouvoir recevoir, rencontrer, discuter et obtenir toutes les informations possibles qui nous permettent à nous aussi, comme législateurs, des deux côtés de cette Chambre, d'avoir toutes les informations requises - sur les conséquences aussi - sur ce geste de liquidation qu'a décidé le gouvernement, de façon réfléchie comme il le dit.

Donc, j'imagine qu'il les a envisagées, mais nous, comme législateurs, nous ne sommes pas en mesure de connaître toutes les implications que la Loi fédérale relative aux enquêtes sur les coalitions peut mettre à jour. Peut-être même, le projet de loi que le ministre de l'Agriculture a déposé devant nous sera-t-il considéré illégal. Moi, j'aime bien le ministre de l'Agriculture, pas toujours, mais en règle générale. Comme législateurs, on est habitués de travailler avec lui et je ne voudrais pas qu'il se retrouve dans la situation de son collègue, le

ministre du Revenu, au mois de février quand ce dernier a agi de façon illégale concernant la taxe sur le tabac. On sait tout le "trouble" que cela a causé au ministre du Revenu du gouvernement actuel, cette action illégale de hausses de taxes sur le tabac. Je ne voudrais pas que le ministre de l'Agriculture se retrouve aussi dans cette situation et pour un sujet encore beaucoup plus grave, c'est-à-dire d'avoir participé d'une façon indirecte, bien sûr, mais d'avoir participé, en liquidant ainsi la raffinerie de sucre, è la création possible, sinon probable, d'un monopole du sucre au Québec et au Canada.

Le ministre de l'Agriculture nous soulignait tantôt ce qu'il en coûterait. Le gouvernement actuel, dont il fait évidemment partie, a décidé de liquider la raffinerie de sucre, de fermer littéralement la raffinerie de sucre pour éviter la saignée de fonds publics. Il nous a parlé de 15 000 000 $, je crois, en tout cas, selon les chiffres que j'ai, ce serait 18 000 000 $ qu'aurait coûté le plan de relance proposé par le ministère de l'Agriculture. Finalement, si le gouvernement, par ce projet de loi, par la liquidation de la raffinerie de sucre, malgré le danger que cela entraîne de créer un monopole du sucre, économise - d'accord - pour son budget annuel gouvernemental...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît, un peu d'ordre!

M. Desbiens: Oui, parce que je dis là des choses extrêmement importantes, fondamentales. -.,

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. Alors, procédez...

M. Desbiens: Je suis en train d'essayer, pour le député de Papineau, dont le comté est oublié, semble-t-il, par le gouvernement... J'ai lu cela dans les journaux; je ne sais pas si cela est vrai, M. le député de Papineau. J'essaie de démontrer qu'il y a là un danger de coalition et de monopole possible en fermant ainsi la Raffinerie de sucre du Québec et en la vendant - si on peut appeler cela une vente - à Lantic. Quand il y a une situation de monopole, que ce soit dans le domaine du sucre ou ailleurs... On se souvient très bien, à la fin des années soixante, il y avait, au Québec, dans le domaine de l'alimentation en général, au-delà de 130 marchands grossistes. On sait que cecte concurrence entre cette centaine et plus de grossistes en alimentation a fait que les prix... Je m'en souviens, j'étais au coeur de ma famille, huit enfants, je savais combien cela coûtait pour se nourrir. On a vécu trois, quatre ou cinq ans où les prix de l'alimentation sont restés à peu près stables - il y en a certain, comme le député, qui se souviennent de cette période - jusqu'à ce que, finalement, cette guerre tribale, si l'on peut dire, sauvage, entre les grossistes, a fait disparaître la plupart d'entre eux. On se retrouve aujourd'hui avec - ne soufflez pas le nombre exact - peut-être dix ou quinze grossistes en alimentation, je pense, au Québec. Dès qu'on a réussi à éliminer la majeure partie de ces grossistes, on a vu que les prix de l'alimentation se sont mis à grimper en flèche, comme cela. On a vécu la période d'inflation que vous connaissez.

C'est la même chose dans le domaine du sucre. Je pourrais rappeler exactement l'année, je crois que c'est autour de l'année 1975, 1976, le prix du sucre a grimpé jusqu'à 0, 63 $ la livre. Tant qu'il y a de la concurrence dans le domaine, cela va bien. Si on s'arrange et si on participe - c'est encore plus grave que le gouvernement du Québec lui-même soit participant à cela - si on s'organise pour qu'il y ait une situation de quasi-monopole, il y aura sûrement des conséquences. D'ailleurs, déjà, depuis l'élection du gouvernement actuel, connaissant évidemment son programme politique de privatisation et surtout connaissant ses couleurs à ce sujet, on sait que le prix du sucre a monté et a presque doublé même. Quand le ministre dit qu'il va économiser, qu'il va liquider la raffinerie de sucre, faisant économiser ainsi au budget du Québec 15 000 000 $, 18 000 000 $... M. le Président, je vais terminer avec un calcul très rapide. Sauf erreur, je pense que ta consommation moyenne annuelle de sucre par Québécois, c'est 100 livres, environ. Faisons le calcul très rapidement: 6 500 000 Québécois, 100 livres de sucre, cela fait 650 000 000 de livres. Cela veut dire que, depuis trois, quatre mois, les consommateurs québécois ont payé 20 000 000 $. Seulement la vente de la raffinerie de sucre, cela leur a coûté 20 000 000 $. En tout cas, c'est un des éléments importants, sûrement. C'est plus que le gouvernement dit vouloir économiser en se débarrassant, comme il dit, de la raffinerie de sucre. La réalisation n'est pas encore faite, la situation de monopole ou de quasi-monopole n'est pas encore créée. Alors, les conséquences de cela, c'est que cela va coûter plus cher aux Québécois. Cela coûtera peut-être moins cher de taxes au gouvernement, 18 000 000 $ de moins, mais cela va peut-être nous coûter 36 000 000 $, 50 000 000 $ ou 100 000 000 $ de plus, directement dans nos poches, en achetant les produits à la consommation. C'est pour cela, M. le Président, que je pense qu'il est excessivement important que nous puissions vider la question, en toute connaissance de cause, avec les personnes qui sont en mesure de nous fournir ces renseignements de façon très claire, très certaine, et recevoir ici le directeur fédéral des enquêtes et recherches sur, les coalitions, comme le disait le

ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le député de Dubuc. J'ai reconnu le député de... Oui, vous n'avez pas terminé? J'ai reconnu le député de Saint-Hyacinthe.

M. Charles Messier

M. Messier: J'écoutais, cet après-midi, le député de Verchères et je voudrais l'inviter personnellement à venir, à la prochaine campagne électorale, dans le comté de Saint-Hyacinthe, s'il est encore candidat pour le Parti québécois.

M. Charbonneau: La pertinence, M. le Président!

M. Messier: Non, non, mais je réponds à son invitation de ce matin. Laissez-moi donc terminer. On vous a laissé parler ce matin. Merci.

M. Charbonneau: Le jeunot...

M. Messier: S'il est encore là, parce qu'on connaît la dissension dans le Parti québécois... Advenant l'hypothèse où M. Parizeau deviendrait chef du Parti québécois; on sait le blasphème qu'ont proféré les députés de Lévis et de Verchères face à M. Parizeau. L'hypothèse voudrait qu'un jour M. Parizeau reviendrait. J'ai l'impression que la carrière de M. le député de Verchères viendrait de se terminer.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député de Saint-Hyacinthe, voulez-vous revenir au sous-amendementï

M. Messier: Pour en revenir sur le sous-amendement, je voulais seulement citer que lorsque M. le député de Verchères est venu à Saint-Hyacinthe lors de la campagne électorale, je crois qu'il m'a aidé.

M. Garon:... nommé président-directeur général de la Société nationale de l'amiante avec mandat de la rentabiliser.

M. Messier: Humblement, je pourrais dire qu'il m'a aidé dans ma campagne. Lorsqu'il est venu au cégep de Saint-Hyacinthe, il a quand même été hué et ridiculisé par les Maskoutains. On sait que ses propos ont été plus ou moins décents vis-à-vis des gens de Saint-Hyacinthe et vis-à-vis de l'actuel député.

Pour en revenir à la modification à la motion qui a été présentée par le député de Lévis, je crois qu'elle est irrecevable. Pour dire cela, je veux seulement citer La Presse. de Montréal, du jeudi 13 mars 1986, et là le député de Verchères a fait abondamment référence au prix du sucre. Il est fait mention ici: "Le marché du sucre. Il n'y aura plus de guerre dans les prix. La concurrence américaine exercera une pression sur les prix de détail. " Ce n'est pas tellement long. Je vais vous lire l'article. "La vente de la Raffinerie de sucre du Québec à Saint-Hilaire à la compagnie Sucre Lantic devrait mettre fin aux guerres de prix que les raffineries se livraient de temps à autre sur le marché québécois. Telle est l'opinion de Carl Hébert et Jacques Kavafian, respectivement secrétaire de l'Association des cadres de la Raffinerie de sucre du Québec et analyste en produits de consommation chez Lévesque, Beaubien - je veux seulement vous informer de ce que le spécialiste de la maison de courtage Lévesque, Beaubien mentionnait, Jacques Kavafian. Il estime pour sa part que le prix du sucre devrait demeurer stable. M. Cavafian croit que cette stabilité... "

M. Charbonneau: On va proposer qu'il vienne.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît!

M. Houde:... M. le député de Verchères, je voudrais qu'on l'écoute bien attentivement. C'est important ce qu'il dit.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Laissons aller le député de Saint-Hyacinthe.

M. Messier: Je sais que cela le dérange. Cela va à l'encontre de ses hypothèses. Mais il faudrait qu'il me laisse le temps de terminer.

M. Charbonneau: On voudrait qu'il le fasse venir. Faites une motion pour qu'il vienne.

M. Messier: "M. Kavafian croit que cette stabilité serait essentiellement due à la pression qu'exercera sur le prix de détail la concurrence américaine. " Je crois que cela va directement à l'encontre de l'hypothèse des coalitions si Lantic achetait ici la Raffinerie de sucre du Québec. Il y aurait une mainmise oligopotistique sur le marché du sucre. Je crois que l'analyse de M. Kavafian, qui est membre de la réputée firme Lévesque, Beaubien, est très bien fondée.

Pour revenir sur cette non-recevabilité et sur la non-pertinence de recevoir les gens, peu importent ceux qui viendraient, je voudrais seulement citer une lettre ouverte -et j'en ai fait mention hier - au Courrier de Saint-Hyacinthe, le 7 novembre 1984, alors que les cadres de la Raffinerie de sucre du Québec envoyaient à René Lévesque, premier ministre du temps, une lettre faisant mention

de certains malaises et peut-être un petit exposé qui fait référence au député de Lévis. "Nous ne croyons pas qu'il nous faille recourir à une grève de la faim pour faire entendre nos revendications. M. Garon nous pardonnera d'avoir mentionné un tel moyen de pression qu'il ne prise pas particulièrement. " Et là on fait mention des problèmes qu'il avait eus dans le temps avec l'Office du crédit agricole sur une grève de la faim. On peut voir ici la pertinence des propos lorsqu'on sait pertinemment que le Parti québécois, du temps où le député de Lévis était membre du Conseil des ministres, n'a jamais voulu entendre parler autant du Syndicat des producteurs de betteraves è sucre, ni des cadres de la Raffinerie de sucre du Québec, ni des autres intervenants qui, de près ou de loin, étaient préoccupés par le sucre. Je m'interroge aussi - on peut déborder un peu, les gens du Parti québécois l'ont fait - sur le processus de privatisation. Je vois ici: "Québec a reçu de nombreuses offres d'achat. " C'est un titre assez mirobolant. 3 février 1984. Il y a quand même deux ans. Il est écrit: "Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, Jean Garon, a dit hier que de nombreux groupes avaient déjà fait des propositions d'achat. On peut dire que depuis le 3 février 1984 le processus de privatisation de la Raffinerie de sucre du Québec était déjà enclenché. On pourrait aussi mentionner M. Parizeau, qui a dit qu'on n'aurait jamais dû s'aventurer là-dedans, et le ministre Duhaime qui faisait mention que tout le processus de privatisation était déjà enclenché et que même des ententes avec la firme Lantic avaient déjà été faites pour des offres d'achat sérieuses. . (16 heures)

Pour terminer, comme le ministre de l'Agriculture en a fait mention, je vais voter contre cette motion. Il serait temps qu'on en vienne à l'étude article par article. Je crois que c'est depuis mardi que l'on parle et on n'a même pas encore commencé l'étude article par article, même pas l'article 1. Ce sont strictement des motions pour faire perdre du temps ici aux gens sérieux du côté ministériel. On est des parlementaires et on est ici...

M. Fortier: Question de règlement, M. le Président.

M. Charbonneau: Question de règlement, M. le Président. Je l'ai demandé avant.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Un instant. Oui, j'écoute la vôtre.

M. Charbonneau: M. le Président, ce n'est pas depuis mardi, mais on a commencé hier les travaux de la commission, franchement!

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Le projet de loi 85, c'est depuis hier. Alors, s'il vous plaît!

M. Fortier: Je le comprends, cela lui paraît long.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît, messieurs.

M. Messier: Je ne pensais vraiment pas perdre mon temps comme cela. Cela fait si longtemps. À vrai dire, le leader du gouvernement nous a convoqués ici en commission parlementaire pour faire l'étude article par article du projet de loi sur la vente de la Raffinerie de sucre du Québec. On n'a même pas encore enclenché le processus, on est vendredi, il est 16 heures et on terminera à 17 heures pour reprendre ce soir. J'imagine qu'il y aura d'autres motions. Que va-t-il se passer? On va être obligés de cesser? On n'a même pas encore commencé et on va être obligés de reporter. Je ne sais pas quel est le processus, mais on n'aura même pas la chance d'étudier ces articles-là. C'est vraiment dommage que les députés de Verchères et de Lévis s'obstinent à faire des motions qui, à mon avis, sont non recevables.

M. Garon: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, je vous écoute, M. le député.

M. Garon: Un député n'a pas le droit de contester vos décisions. II vient de dire que les motions présentées et que vous avez toutes déclarées recevables ne sont pas recevables. Je vous demande de demander au député de retirer ses paroles parce qu'il conteste la présidence et il ne peut pas le faire de cette façon, en vertu de notre règlement.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): J'ai l'impression que le député de Saint-Hyacinthe a dit qu'elles étaient irrecevables dans le sens qu'il argumentait sur le type des motions et non sur le fait que je les avais reçues ou pas.

M. Messier: Vous avez absolument raison. Je n'ai pas mis en doute votre décision, mais j'ai dit mon avis. Je ne remets pas en doute votre décision, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. Très bien.

M. Garon: II ne passera pas ses examens du Barreau.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): J'ai reconnu le ministre délégué à la Privatisation.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: M. le Président, il me fait plaisir de me joindre à vos travaux. J'espérais qu'en entrant ici on me dirait que vous étiez rendu à l'article 30 ou 31 et j'ose espérer que très bientôt on va entamer l'article 1 parce qu'ayant été élus par des électeurs de nos différents comtés pour défendre leurs intérêts, mais d'une façon probe, honnête, dans le meilleur intérêt du public, il est bien certain que tous et chacun d'entre nous cherchons à faire le meilleur travail pour nos électeurs, sans prêter d'intentions au parti adverse. Pour ma part, je vais écouter avec beaucoup d'attention les arguments que les gens d'en face voudront nous présenter, mais les faits étant ce qu'ils sont, si vous me le permettez, j'oserais présenter les faits tels que nous les avons vus et tels que d'autres avant nous les ont vus.

Il y a une motion devant nous qui est d'entendre...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Le sous-amendement est "et le directeur général des enquêtes sur les coalitions".

M. Fortier: M. le Président, j'aimerais dire que je ne crois pas que ce soit très efficace et que ce soit le moment, mais j'aimerais vous référer à un document que j'ai devant moi et qui est la réforme de la loi sur la concurrence. Le ministre de l'Agriculture vous a dit tout à l'heure que la loi qui existe présentement n'avait pas été très efficace puisqu'en 75 ans d'existence absolument personne n'avait été condamné dans des circonstances comme celles-là. De fait, si je lis une page sur la nécessité de la réforme, vous allez comprendre, compte tenu du fait que le nouveau projet de loi devant le Parlement fédéral - la loi 91, "Bill 91" -sera adopté bientôt, qu'on a constaté - vous allez le voir lorsque je ferai lecture d'un paragraphe dans un instant - que la loi existante était réellement inefficace et c'est la raison pour laquelle on veut faire des réformes.

Je cite ce document qui provenait du ministère de la Consommation et des Corporations du Canada: "Les décisions rendues récemment concernant les dispositions sur les fusionnements et les complots ont créé trop d'incertitudes et soulevé des questions vraiment sérieuses au sujet de leur applicabilité. De plus, la décision de la Cour suprême dans l'arrêt Southam Inc. concluait que les pouvoirs de perquisition et de saisie prévus par la loi étaient nuls et sans effet, parce qu'ils violaient les garanties contre les perquisitions et les saisies abusives enchâssées dans la Charte canadienne des droits et libertés. L'arrêt Southam Inc. a également soulevé des questions au sujet de la constitutionnalité des autres pouvoirs d'enquête conférés par la loi et des doubles fonctions administratives et judiciaires de la commission sur les pratiques restrictives du commerce. En conséquence, il est urgent de revoir le rôle de la commission et de rendre les pouvoirs d'enquête prévus par la loi conformes aux dispositions de la charte, tout en maintenant leur efficacité. " Fin de la citation.

C'est donc dire, M. le Président, que tout le monde espérait, il y a 75 ans et, par la suite, lorsque la loi fédérale a été modifiée, que cette loi qui existe présentement pourrait permettre d'avoir une certaine efficacité. Mais il faut comprendre que le législateur fédéral est en voie de faire des changements et que, très bientôt, - on me dit que ce sera au mois de juillet ou durant le mois d'août - la nouvelle loi viendra en vigueur.

Ce qu'il faut savoir également, c'est qu'à la lumière de cette nouvelle loi la transaction qui est devant nous est tout à fait légale. Il y a trois tests qui peuvent être faits en ce qui concerne cette nouvelle loi. Il y a un des tests qui a trait, justement, au fait que, lorsqu'une des compagnies est en faillite, il est évident qu'à ce moment la nouvelle loi sera extrêmement indulgente, parce que nul n'est tenu à l'impossible et nul n'est tenu - même pas le gouvernement du Québec - de maintenir en vie une compagnie en faillite depuis deux ans. Dans un cas comme celui-là, la nouvelle loi conclut que, s'il y a fusion pour améliorer la production, il n'y a absolument aucun motif de faire enquête et, de fait, le directeur des coalitions - celui qui aura le nouveau poste -dans un cas où il y a faillite et si la fusion permet d'améliorer la production, selon la nouvelle loi, donnera carte blanche à une opération comme celle qui est devant nous et, cela, d'autant plus qu'il y a un autre test dans la loi en ce sens qu'à la suite d'une telle transaction la compagnie qui fait la fusion et qui acquiert la compagnie en difficulté fait des investissements. C'est exactement le cas qui est devant nous. La compagnie Lantic achète une compagnie en faillite et s'engage à faire 25 000 000 $ d'investissements dans l'est de Montréal. On s'aperçoit, donc, que la demande qui est devant nous est tout à fait inutile, parce que, d'une part, tout le monde admet que la loi existante définie il y a 75 ans n'a pas de dents et que, d'autre part, la nouvelle loi blanchit exactement le genre de transaction que nous sommes en train de faire.

C'est la raison pour laquelle, je crois que, mes collègues et moi-même, nous avons toutes les raisons de rejeter cette demande

qui serait tout à fait inutile, parce qu'à la lumière de la nouvelle loi fédérale l'enquêteur devra conclure que la raffinerie de sucre est en faillite, puisque le ministre des Finances, depuis juin 1984, ou le sous-ministre des Finances, à la demande de la Banque Nationale du Canada, fournit des lettres de confort ou de réconfort - je ne sais trop - pour éviter que la Banque Nationale du Canada mette en faillite technique la raffinerie de sucre. Donc, on se trouve devant un cas patent de faillite, parce que, n'eût été l'appui du ministre des Finances pour aider la raffinerie, elle serait en faillite depuis longtemps. De fait, cette fusion va amener des investissements de 25 000 000 $ dans l'est de Montréal.

M. le Président, à la lumière de ces faits, j'ose espérer que j'aurai convaincu les gens d'en face qu'il serait tout a fait inutile de faire parader ici le directeur des coalitions fédérales, d'autant plus qu'à la lumière de la nouvelle loi C-91 les tests qui pourraient être faits et qui seront faits, une fois que la loi sera adoptée, donneront carte blanche à la transaction que nous sommes en voie de faire et que nous ferons. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le ministre. J'ai reconnu le député de Dubuc.

M. Desbiens: Excusez, il y a quelqu'un d'autre?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député de Lotbnière voulait parler?

M. Fortier: Je peux continuer. Si vous voulez me permettre de faire un "filibuster", je vais le faire avec vous!

Le Président (M, Tremblay, Iberville): M. le député de Dubuc, il faudrait que ce soit une question pertinente, parce que votre temps est complètement écoulé.

M. Desbiens: Non, c'est pour... J'ai droit de...

Une voix: On a demandé le vote. M. Desbiens: M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui.

M. Desbiens: J'ai mon droit de parole sur la motion principale?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): II faut voter le sous-amendement avant d'y revenir.

M. Desbiens: Vous allez me redonner la parole sur la motion principale après le vote?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): C'est ça, après le vote.

M. Desbiens: Merci.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Nous sommes rendus à la mise aux voix maintenant.

M. Fortier: Vote nominal, s'il vous plaît.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le secrétaire, voulez-vous appeler les gens pour le vote?

Une voix: Je suis sûr que le ministre va voter contre.

Une voix: Est-ce sur l'amendement ou le sous-amendement qu'on vote?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Actuellement, on va voter sur le sous-amendement qui dit: "et le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions", présenté par le député de Verchères.

Le Secrétaire: M. Dubois (Huntingdon)?

M, Dubois: Contre.

Le Secrétaire: M. Beaudin (Gaspé)?

M. Beaudin: Contre.

Le Secrétaire: M. Camden (Lotbinière)?

M. Camden: Contre.

Le Secrétaire: M. Forget (Prévost)?

M. Forget: Contre.

Le Secrétaire: Mme Legault (Deux-Montagnes)?

Mme Legault: Contre.

Le Secrétaire: Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata)?

Mme Dionne: Contre.

Le Secrétaire: M. Houde (Berthier)?

M. Houde: Contre.

Le Secrétaire: M. Fortier (Outremont)?

M. Fortier: Contre.

Le Secrétaire: M. Tremblay (Iberville)?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Contre.

Le Secrétaire: M. Desbiens (Dubuc)?

M. Desbiens: Pour.

Le Secrétaire: M. Charbonneau (Verchères)?

M. Charbonneau: Pour.

Le Secrétaire: M. Garon (Lévis)?

M. Garon: Pour.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Le sous-amendement est rejeté.

M. Fortier: On se retrouve devant quelle proposition, M. le Président?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): On se retrouve...

M. Desbiens:... Lantic, vous allez être d'accord?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): C'est ça. On revient justement à l'amendement qui était "et la compagnie Sucre Lantic Ltée". C'est le temps de voter là-dessus aussi parce que le temps est écoulé.

M. Charbonneau: À moins que le ministre...

M. Fortier: Étant donné que nous sommes sur la même longueur d'onde, le ministre de l'Agriculture et moi, je ne vois pas ce que je pourrais ajouter de plus à ce que mon honorable collègue a pu dire.

M. Charbonneau: M. le Président, si le ministre me permet un instant, sinon on y reviendra, s'il permet un instant, il pourrait peut-être nous expliquer ce qu'est cette affaire des 25 000 000 $ d'investissements qui sont déjà de toute façon prévus par Lantic.

Une voix: Pour le moment c'est le vote, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Pour l'instant, cela ne donne rien. Nous devons prendre le vote sur l'amendement.

Je vais vous lire l'amendement, c'est: ''et la compagnie Sucre Lantic Ltée". Â ce moment-ci, je le mets aux voix.

M. Fortier: Même vote, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Est-ce qu'on prend le même vote? Tout le monde est d'accord?

Des voix: D'accord.

Reprise du débat sur la motion principale

Le Président (M. Tremblay, Iberville): L'amendement est rejeté. On revient à la motion principale et la motion principale est "que la commission tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 85, Loi sur la vente de la Raffinerie de sucre du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet et qu'à cette fin elle entende le Syndicat des producteurs de betteraves sucrières du Québec". C'est la motion principale. Il y avait du temps non écoulé.

M. Desbiens: Moi, mon temps n'est pas utilisé.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Non, il n'est pas utilisé. Est-ce que vous demandez à être entendu là-dessus?

M. Desbiens: Oui.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député de Dubuc, on vous écoute.

M. Desbiens: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous avez dix minutes.

Une voix: On va vous écouter religieusement, M. le député.

M. Garon: On va tenter de vous convaincre.

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Dix minutes. On ne reviendra pas sur le vote. M. le Président, la motion principale se lit comme suit: "Que la commission tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 85, Loi sur la vente de la Raffinerie de sucre du Québec, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende le Syndicat des producteurs de betteraves sucrières du Québec. " C'est bien cela?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, c'est exact.

M. Desbiens: M. le Président, je me souviens que mon collègue de Verchères avait, durant la présentation de l'argumentation qu'il a développée concernant la nécessité d'entendre le Syndicat des producteurs de betteraves sucrières du

Québec, fait mention du télégramme que le porte-parole du Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du Québec, M. Bernard Malo, avait adressé à M. Michel Pagé, ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, et qui disait ceci: "M. le ministre, comme porte-parole du Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du Québec, j'aimerais que le regroupement, représentant 24 organismes et qui s'est formé pour défendre la survie de la Raffinerie de sucre du Québec, soit entendu en commission parlementaire. " C'est un télégramme qui a été envoyé au ministre de l'Agriculture, le 12 juin 1986, à 15 h 5 exactement; c'était donc hier. C'était hier, le 12 juin 1986. (16 h 15)

Aujourd'hui, mon collègue, le député de Verchères, recevait, lui, copie d'un télégramme qui a été envoyé à M. Michel Pagé, ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, et qui se lit ainsi: "Dans le cadre des débats de l'éventuelle vente de la Raffinerie de sucre du Québec à l'entreprise Lantic, le Syndicat des producteurs de betteraves à sucre du Québec aimerait être entendu en commission parlementaire afin d'exposer - cela va sûrement intéresser, sans doute, les députés, nos collègues du gouvernement...

M. Fortier: J'écoute, j'écoute, M. le député de Oubuc.

M. Desbiens:... et tous les membres du gouvernement qui sont reliés au monde agricole. Justement, je lisais le télégramme qui a été envoyé aujourd'hui au ministre de l'Agriculture, dont on vient d'avoir une copie, et qui disait ceci: "M. le ministre, dans le cadre des débats de l'éventuelle vente de la Raffinerie de sucre du Québec à l'entreprise Lantic, le Syndicat des producteurs de betteraves à sucre du Québec aimerait être entendu en commission parlementaire afin d'exposer les intérêts agricoles en relation avec la conservation de la production de la betterave à sucre au Québec. " Ce télégramme est signé par M. Simon Guertin, président. Donc, M. le Président, il n'y a pas juste l'Opposition. Ce n'est pas, comme le disait le ministre, pour "filibuster" le gouvernement. Les gens directement intéressés, les producteurs de betteraves a sucre du Québec et le Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du Québec, demandent d'eux-mêmes au ministre de l'Agriculture de les entendre, de faire entendre leurs représentations aux membres de cette commission pour s'assurer que les intérêts de tous les producteurs de betteraves à sucre du Québec soient bien connus des législateurs afin que la décision que nous aurons à prendre soit dans le meilleur intérêt des agriculteurs. C'est le syndicat des producteurs de betteraves à sucre et les 24 organismes qui sont regroupés pour la défense de la Raffinerie de sucre du Québec. Il ne faut pas oublier, M. le Président, que le syndicat des producteurs est un des deux groupes qui ont fait une offre au gouvernement du Québec pour acheter la Raffinerie de sucre du Québec. Cette offre a été faite en deux occasions. À la deuxième occasion, elle a été adressée le 1er avril 1986. Je pense que la date est presque prédestinée pour eux; le ministre de l'Agriculture était en train de leur passer tout un poisson d'avril, parce que leur demande a justement été faite le 1er avril au ministre de l'Agriculture concernant la production des betteraves sucrières, l'offre d'achat du Syndicat des producteurs de betteraves à sucre du Québec. Évidemment, ils exposent d'abord l'offre qu'ils présentent et les conditions - c'est normal, je pense -qu'ils voudraient voir établir pour s'assurer que cette offre soit à l'avantage des producteurs de betteraves sucrières. Il y a eu seulement deux offres d'achat, M. le Président.

On sait qu'il y a eu deux thèses, celle du ministère des Finances, qui n'a même pas payé et qui avait, par une loi - je me souviens qu'on l'a votée ici à l'Assemblée nationale - reçu le mandat de verser des fonds à la raffinerie de sucre. On voit aujourd'hui qu'ils avaient déjà, dès lors, un parti pris concernant la Raffinerie de sucre du Québec. La thèse du ministre de l'Agriculture et des experts de la Raffinerie de sucre du Québec, ceux qui en ont la haute direction, c'est-à-dire le conseil d'administration, a démontré que c'était plus avantageux, et au point de vue financier, et au point de vue de l'emploi, et, on le verra plus tard, à d'autres points de vue, de plutôt mettre en marche le plan de relance prévu et proposé par le ministre de l'Agriculture de l'époque. Tantôt, j'écoutais le député de Saint-Hyacinthe qui disait que le processus de liquidation de ta Raffinerie de sucre du Québec était enclenché déjà depuis 1984, mais, dans l'esprit du député de Saint-Hyacinthe, semble-t-il que ce n'était pas toutefois son point de vue pendant la campagne électorale, ni celui de ses collègues de la région.

Aujourd'hui, le gouvernement vient compléter le processus de liquidation de la Raffinerie de sucre du Québec, mais aussi le processus de liquidation du député de Saint-Hyacinthe, et c'est proprement effrayant. Si j'étais dans la situation du député de Saint-Hyacinthe... Évidemment, le gouvernement en profite, sans peut-être le vouloir, mais le gouvernement est bien chanceux que ce soit un député tout jeune qui, malgré toutes ses belles qualités, ne peut pas avoir l'expérience suffisante pour défendre un tel dossier. C'est sûr que, si cela avait été le gouvernement...

II reste une minute? On sait que, si cela avait été le député de Verchères, la raffinerie de sucre serait encore ouverte et resterait ouverte.

Motion d'amendement proposant d'entendre la FNACQ

M. le Président, il y a des groupes qu'on a demandé d'inviter et, à chaque occasion, le gouvernement a refusé. Il y a au moins un groupe, je pense bien, qu'il ne pourra pas nous empêcher de recevoir - je ne peux pas l'imaginer - et je fais la motion d'amender la motion pour consultations particulières en ajoutant, à la fin de cette motion, les termes suivants: "et la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec".

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, cet amendement est recevable. Le député a 30 minutes.

M. Fortier: Je ne sais pas s'il est capable de les utiliser, mais il a 30 minutes.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, à la suite de la motion qui se terminait par "le Syndicat des producteurs de betteraves sucrières du Québec", on ajoute: "et la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec".

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: M. le Président, je vous remercie. Pour la compréhension de nos collègues, il faut rappeler, pour démontrer la nécessité de faire appel ici, puisqu'il semble que le gouvernement ne s'en soucie guère... Le ministre qui est venu remplacer le ministre de l'Agriculture a décidé de fermer la Raffinerie de sucre du Québec et espérait -si j'ai bien compris ses paroles, mais ce n'était sûrement pas son intention, je connais son grand souci démocratique - que l'Assemblée nationale, d'une certaine façon, soit fermée. C'était dans ses propos tantôt, mais cela ne voulait pas nécessairement... Je l'ai pris plutôt comme une blague de la part du ministre. Je sais que ce n'est pas sa conviction. Il m'a toujours paru être un ministre très respectueux de la démocratie et des membres de cette Assemblée. Alors j'ai pris cela comme une blague de la part du ministre.

On a essayé de démontrer tantôt, dans les minutes ou les heures qui ont précédé, quelles pouvaient être les conséquences de la liquidation et de la fermeture de la Raffinerie de sucre du Québec et les dangers que cela pouvait entraîner face à la création d'un quasi-monopole ou la possibilité sinon la probabilité d'un quasi-monopole dans le domaine du sucre au Québec. Je pense qu'il est important de rappeler certains des arguments qui ont été développés par mon collègue de Verchères à ce sujet. Je lis un passage très instructif du mémoire du ministre de l'Agriculture du gouvernement du Parti québécois à l'époque adressé au Conseil des ministres qui disait ceci: "La nature oligopolistique de l'industrie sucrière canadienne permet aux raffineurs de fixer leur marge de profit brut. Malgré les nombreuses fluctuations des cours mondiaux depuis les quinze dernières années, la marge des raffineurs n'a pas cessé de s'accroître. Dans ce système très particulier où théoriquement toute fluctuation du prix du sucre brut est répercutée au consommateur, la marge brute des raffineurs est ajoutée au prix du sucre brut pour constituer le prix officiel du sucre raffiné. Cette marge, qui s'était maintenue autour de 110 $ la tonne, entre 1974 et 1979, s'est depuis accrue constamment pour atteindre 307 $ au début de 1985. Exprimée en pourcentage du prix de revient du sucre brut, la marge des raffineurs est donc passée de 19 % en 1980 à 128 % en 1985, donc 307 $ de marge par rapport au prix de 240 $ la tonne pour le prix du sucre brut. C'est ce système de fixation de prix qui a permis aux raffineurs canadiens du sucre de canne de réaliser des bénéfices nets que l'on a pu évaluer au cours des dernières années à près de 50 000 000 $ - ils sont payés par les consommateurs, ces 50 000 000 $, ce n'est pas le gouvernement du Québec qui les paie - représentant un rendement net sur l'avoir des actionnaires supérieur à 40 % - je ne sais pas si cela va dans les REAQ, c'est intéressant - on comprend que, dans le contexte d'une chute des prix du sucre brut et d'une accélération rapide des marges des raffineurs canadiens depuis 1979, la Raffinerie de sucre du Québec ait estimé essentiel d'entrer dans le marché du sucre raffiné. "

Je poursuis la lecture du document: "La venue de la Raffinerie de sucre du Québec sur les marchés, en 1983, a provoqué une guerre d'escomptes d'une ampleur sans précédent - guerre d'escomptes qui, en fin de compte, a été profitable aux consommateurs québécois - il faut souligner que de semblables guerres d'escomptes s'étaient déjà produites, en 1976, lors de l'arrivée dans l'industrie de Cartier Sugar et de Westcane Sugar. " On se souvient qu'à ce moment-là le sucre est parti de 0, 063 $ la livre, comme je le mentionnais tantôt, pour baisser au profit des consommateurs que nous sommes, les 6 500 000 consommateurs du Québec - une diminution, un montant faramineux, finalement, du coût de consommation pour les Québécois et les Québécoises. "Mais, en 1983, il s'agissait d'une société d'État et en plus d'une sucrerie de betterave, ce qui est encore plus important

pour l'avenir. Pour conserver leur part d'un marché aussi lucratif, les raffineurs ont donc exercé des pressions continuelles sur les prix en accordant des escomptes considérables aux différents acheteurs du Québec. Connaissant la situation financière précaire de la Raffinerie de sucre du Québec, Sucre Atlantic Ltée annonçait, en mars 1984, un "escompte spécial applicable au Québec seulement" de 70 $ la tonne pour ralentir les activités de la raffinerie sur le marché de détail. (16 h 30) "Cette tactique, imitée par les autres raffineurs, a provoqué un manque à gagner de 4 200 000 $ pour la Raffinerie de sucre du Québec", et cela permet de dire, aujourd'hui, au ministre. Cette raffinerie nous coûte trop cher, on va la fermer. Une fois qu'elle sera fermée, c'est le consommateur qui écopera, parce que ceux qui resteront comme raffineurs de sucre au Québec seront dans une situation qui leur permettra d'augmenter les prix quasi à leur guise. Dès que la Raffinerie de sucre du Québec sera vendue, les raffineurs n'auront plus besoin de faire cette guerre qui sera devenue inutile pour eux. Ces guerres de prix - comme je le disais précédemment - sont toujours profitables aux consommateurs. La situation s'est vécue dans le domaine de l'alimentation en général, de 1968, environ, jusqu'à 1973 ou 1974, aussi longtemps le nombre de grossistes en alimentation du Québec a été autour de 130 au Québec. Il y a eu une guerre d'escomptes qui a pratiquement maintenu stable, pendant cinq ou six ans, le prix du panier d'approvisionnement en alimentation des Québécois et des Québécoises. Mais, au fur et à mesure que les années passaient et que cette guerre d'usure se livrait entre les grossistes en alimentation, les plus petits, d'un mois à l'autre ou d'une année è l'autre, faisaient faillite ou fermaient tout simplement.

Cette guerre s'est poursuivie jusqu'à ce qu'il ne reste plus, comme actuellement, qu'une quinzaine de grossistes en alimentation au Québec, je crois, si mon souvenir est bon. Vers 1974, le consommateur québécois et la consommatrice québécoise ont vraiment ressenti la fin de cette guerre d'escomptes entre les grossistes en alimentation. On se retrouve aujourd'hui avec un nombre très limité et, chaque fois que le nombre de fournisseurs est limité pour un produit, on sait qu'il est leur beaucoup plus facile de s'entendre entre eux, sans même le dire. C'est pour cela que les lois sont si difficiles à appliquer, comme le soulignait le ministre tantôt. Les lois contre les coalitions sont des lois très difficiles à appliquer, parce qu'il n'est pas facile de faire la preuve de cela. Mais il reste qu'on sait que plus le nombre de ces fournisseurs est restreint, plus il est facile pour eux de s'entendre, du moins de façon tacite, pour faire grimper les prix. Je crois que c'est à partir de 1974 qu'on a vu grimper de façon fulgurante les prix du panier de provisions des Québécois et des Québécoises, parce qu'on avait éliminé, par les lois du marché, la grande totalité des grossistes n'en gardant plus au Québec qu'une quinzaine en alimentation.

La même conséquence est prévisible, d'autant plus prévisible qu'il y a, dans le domaine du sucre, un nombre encore plus restreint de producteurs ou de raffineurs. En faisant disparaître cette Raffinerie de sucre du Québec, ce n'est pas une sur cent qui disparaît, c'est une sur quatre. C'est 25 % de la concurrence environ, sauf erreur, qui disparaît. Elle disparaît du décor, tout à coup, au profit des quelques unités qui restent. On comprend que, si à dix et à quinze on réussit à s'entendre dans te marché de l'alimentation, si à une dizaine on réussit très facilement à s'entendre, sans même le dire et de façon tacite dans le domaine des carburants, par exemple, à trois, dans le marché du sucre, cela va être facile, sans avoir besoin même - les lois du marché sont bien connues - des spécialistes... Il va être très facile aussi de s'entendre pour créer une concurrence, concurrence qui joue toujours, en fin de compte, à la défaveur des consommateurs et des consommatrices du Québec. C'est une conséquence excessivement importante de ce projet de loi.

Je poursuis: "Cette guerre d'escomptes qui existe entre raffineurs prendrait sûrement fin si la Raffinerie de sucre du Québec pouvait produire elle-même une quantité raisonnable de sucre raffiné puisque les grandes raffineries manipulent un trop grand volume pour se permettre de maintenir leurs escomptes au taux actuel sans connaître des pertes considérables. "

Tantôt le ministre de l'Agriculture nous rappelait les trois hypothèses qui existent pour régler le problème à la Raffinerie de sucre du Québec, soit celles du statu quo, de la vente ou de la liquidation, tel que le gouvernement l'a décidé, ou l'application du plan de relance prévu par le ministre de l'Agriculture du gouvernement du Parti québécois soutenu et surveillé de près par le député de Verchères. J'en ai eu connaissance depuis quelques années. Le ministre de l'Agriculture, avant de nous quitter, nous a dit: C'est 15 000 000 $ que le gouvernement du Québec, la population du Québec, les contribuables québécois n'auront plus à payer annuellement alors qu'en réalité les chiffres, de façon plus précise, sont de l'ordre de 18 000 000 $ prévus pour la période 1985-1986 jusqu'en 1988-1989, sauf erreur.

M. le Président, je suis heureux de saluer le whip du gouvernement, le député de Richmond. Déjà, je l'ai cité à quelques occasions lors de nos études, très préoccupé de...

Une voix:... la voirie...

M. Desbiens: Oui, de la voirie, sûrement quand il était dans l'Opposition. Depuis qu'il est whip du gouvernement, c'est la première occasion que j'ai de le féliciter de sa nomination et du travail qu'il veut donner à ses députés gouvernementaux. J'ai eu l'occasion de lire ses propos à cet égard. Étant donné que nous sommes à l'étude où l'implication des députés est...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Il faudrait revenir à l'amendement, s'il vous plaît!

M. Desbiens: Vous allez voir que je vais y arriver.

Une voix: C'est comme le Saguenay.

M. Desbiens: Oui, le magnifique Saguenay.

M. le Président, j'aurais pu le dire tout simplement comme ceci. Il y a un caucus qui nous dérange. Je sais qu'il est respectueux des droits des parlementaires, c'est pour cela que je le lui fais remarquer bien aimablement.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît, messieurs, dans l'intérêt de la commission, il faudrait garder le silence. Poursuivez, M. le député de Dubuc, toujours sur l'amendement.

M. Desbiens: Je disais donc, M. le Président, que le ministre de l'Agriculture, avant de nous quitter il y a quelques minutes, nous disait que le gouvernement n'aurait plus à débourser environ 15 000 000 $ pour soutenir la Raffinerie de sucre du Québec. Finalement, le montant que j'ai dans mes notes, c'est le coût pour le plan de relance, de rentabilisation de la Raffinerie de sucre du Québec. Il serait de 18 000 000 $ entre 1985-1986 et 1988-1989. Cela fait à peu près 4 500 000 $ par année, 4 200 000 $, je pense, ou 4 300 000 $. Évidemment, l'argument qu'utilise le ministre de l'Agriculture, c'est le même que celui du gouvernement - le ministre délégué à la Privatisation nous a dit qu'ils étaient sur la même longueur d'onde - c'est d'administrer sainement, je suis bien d'accord, et de permettre finalement, autant que possible, que les montants d'argent payés par les Québécois et les Québécoises soient utilisés de la meilleure façon possible, que les services qu'on accepte de se donner soient le moins coûteux possible. Sauf que, dans le cas de la Raffinerie de sucre du Québec strictement, si le gouvernement économise annuellement de 4 000 000 $ à 5 000 000 $ qu'il n'aura plus à fournir pour assurer le plan de relance, ce qu'il aurait pu faire comme choix, à cause de cette situation, les conséquences - on l'a déjà vu, ce n'est pas réalisé encore - c'est que, dès l'annonce de la possibilité de la vente de Raffinerie de sucre du Québec, il y a quelques mois maintenant, on a vu que le prix du sucre est passé de 0, 035 $ à 0, 079 $...

M. Fortier: Est-ce que je peux donner une précision au député?

M. Desbiens: Oui, d'accord.

M. Fortier: Je vois qu'il est en train de faire une argumentation très laborieuse.

M. Desbiens: Non, cela va, vous allez voir.

M. Fortier: Quand il se réfère au prix du sucre de 0, 03 $ et de 0, 06 $, il se réfère au prix du sucre international; c'est du sucre brut. Cela n'a rien à voir avec le Québec, on parle du sucre brut sur les marchés internationaux. Pour son bénéfice, je lui dirai que, au mois de janvier, le prix du sucre, chez Provigo, était à 1, 59 $ les deux kilos et que, le 4 juin, il était également à 1, 59 $ les deux kilos. Alors, ie prix du sucre n'a pas varié d'un poil depuis le mois de janvier. Il peut continuer son argumentation.

M. Desbiens: Oui, et cela me fait plaisir. Cela a été souligné... Non, le prix du sucre, cette semaine, est de 3, 49 $ les deux kilos; c'est le renseignement qui a été fourni à l'Assemblée nationale, cette semaine même.

M. Fortier: Ah! Chez Steinberg, je peux vous dire que, jusqu'au 4 juin, il était de 3, 39 $ et, chez Provigo, il était plus bas parce que la raffinerie vendait moins cher. Alors, ce sont les contribuables qui payaient la différence.

M. Desbiens: 3, 39 $?

M. Fortier: J'ai dit qu'il était à 3, 39 $ le 4 juin et à 3, 39 $ le 8 janvier. En six mois, il n'y a eu aucun changement. C'était juste pour faciliter votre argumentation.

M. Desbiens: Non, mais excusez... Je suis heureux d'avoir les informations. Vous me dites 3, 39 $ les deux kilos?

M. Fortier: C'est quatre kilos, chez Steinberg.

M. Desbiens: Ah! Quatre kilos! Bon!

M. Fortier: 3, 39 $. Il y a seulement eu une semaine où il est tombé. C'était un rabais consenti pour une période limitée; c'était une vente. Mais c'était 3, 39 $,

3, 39 $ et 3, 39 $...

M. Desbiens: En tout cas, les chiffres que j'avais...

M. Fortier:... et c'est encore 3, 39 $.

M. Desbiens:... c'était 3, 49 $, alors, cela reste...

M. Fortier: Chez Provigo, c'était 2, 99 $, 2, 99 $, 2, 99 $ et cela n'a pas varié en six mois.

Une voix: On vérifiera.

M. Fortier: Je peux vous donner une copie de ce que j'ai.

M. Desbiens: Ceci n'empêche pas que le prix du sucre brut a varié de 0, 03 $ à 0, 0794 $.

M. Fortier: Oui, mais le député acceptera mon commentaire à savoir que le prix du sucre brut international est défini sur les marchés internationaux et cela n'a rien à voir avec la vente de la raffinerie de sucre.

M. Charbonneau: Est-ce que le ministre est d'accord pour dire que le sucre brut a augmenté considérablement depuis le début de l'année?

M. Fortier; Depuis le mois de janvier, il est passé de 0, 0477 $ à 0, 088 $ et il est descendu a 0, 0688 $. Pour que ce soit rentable, il faudrait qu'il se retrouve au moins à 0, 20 $.

M. Desbiens: Voyez-vous, c'est justement des guerres de chiffres que l'on fait. On entreprend des guerres de chiffres.

M. Fortier: II n'y a pas de guerre de chiffres, je vous donne les chiffres.

M. Desbiens: II y a des guerres de chiffres, c'est cela.

M. Fortier: Ce sont des faits.

M. Desbiens; Non, vous dites qu'il faudrait qu'il soit à 0, 20 $. Ce n'est pas ce que prétendent les experts en la matière. Je comprends que le ministre délégué à la Privatisation est un expert dans le domaine nucléaire, mais, dans le domaine du sucre, je ne le considère pas comme un expert. Peut-être qu'il en sait un peu plus long que moi, mais peut-être pas tellement plus. Je suis content qu'il soulève ce point parce que cela nous permet de lui faire valoir que ce serait important, comme vous le voyez, que l'on ait devant nous les experts dans le domaine. C'est cela que l'on cherche à obtenir depuis hier, avoir, devant nous, les thèses contraires ou contradictoires. Ce ne serait pas possible, si on avait les experts qui soutiennent les deux thèses, de ne pas pouvoir faire jaillir la lumière de cela. De la confrontation devant les personnes qui sont appelées, comme députés, finalement, à prendre la décision... Évidemment, cette décision, il est nécessaire qu'elle soit la plus éclairée possible. Alors, c'est cela qu'on essaie de faire entendre au gouvernement, au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Je comprends que le ministre délégué à la Privatisation est sur la même longueur d'onde, donc il faut essayer de le convaincre à son tour. C'est le but de notre argumentation. Peut-être que, en fin de compte, on voterait pour le projet de loi si on pouvait en faire une étude approfondie et obtenir les informations nécessaires des divers groupes concernés. On sait que, pour ce qui est de Lantic, cela a été refusé; on a refusé aussi de recevoir la haute direction qui est composée d'experts dans ce domaine, l'Association des cadres de la Raffinerie de sucre du Québec. Ce sont pratiquement les seuls. C'est une expertise qu'ils ont acquise au cours des années et le ministre ne pourra pas nier que celle-ci est reconnue depuis longtemps. Cette expérience déborde le cadre de la raffinerie et celui du Québec. Ce sont des experts qui auraient pu nous aider, comme législateurs, à bien comprendre la situation, à bien comprendre le projet gouvernemental, à bien voir si le choix qu'a fait le gouvernement est vraiment te bon. Peut-être, au bout de la course, on nous aurait obligés, comme députés de l'Opposition, devant les faits et l'évidence, è voter pour le projet de loi.

C'est cela que je comprends mal de la part du gouvernement. Pour cela je suis particulièrement heureux que le ministre délégué à la Privatisation soit avec nous. J'essaie de ne pas avoir de préjugés, d'oeillères par rapport à la privatisation. Je considère qu'un gouvernement, qu'un parti politique peut avoir des orientations. L'orientation de ce parti politique, dont le gouvernement est issu, consiste à favoriser la privatisation. Le ministre a fait des études, il nous a présenté des rapports et les conclusions de ces études et de ces réflexions. Voilà qu'il y a une première occasion qui est exceptionnelle, il y a un premier cas qui est présenté à la population du Québec, d'une privatisation, d'un élément de sa politique, des effets de cette politique de privatisation. Il pourrait donner l'exemple parfait à tout le Québec: Regardez comme c'est bon, la privatisation. On amène tous ceux qui ont quelque chose à dire, qui ont l'expertise dans le domaine, soit celui de la raffinerie de sucre, on fait la démonstration éclatante, dès le premier cas, aux députés, mais, par voie de conséquence, à la

population, à savoir que la politique de privatisation, c'est quelque chose qui est bon. Je ne comprends pas que le gouvernement, par son ministre délégué à la Privatisation, ne profite pas de cette première circonstance qui s'offre à lui de démontrer combien cela est bon.

M. Fortier: Attendez que je commence à parler.

M. Desbiens: Non, non, attention! Je considère beaucoup le ministre, je sais qu'il a plusieurs qualités professionnelles et tout. Mais je veux dire que pour avoir un éclairage objectif sur la privatisation il faut que les députés et la population puissent comparer les thèses qui sont présentes dans le cas de !a Raffinerie de sucre du Québec. Les deux ministres sont sur la même longueur d'onde, ainsi que tout le gouvernement, semble-t-il. Et, c'est non, on n'entend personne, on est bon, on sait où l'on va, c'est cela qu'on décide. On a beau soulever les doutes qui nous apparaissent très sérieux, jusqu'à preuve du contraire, concernant les conséquences possibles, les conséquences malheureuses pour les producteurs de betteraves sucrières du Québec et pour les consommateurs du Québec, les dangers qu'il peut y avoir de créer un monopole. On soulève un tas de conséquences possibles et probables dans certains cas et même sûres. Bien sûr qu'on va écouter les représentations...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, M. le député de Dubuc, nous allons suspendre les travaux jusqu'à ce soir, 19 heures. Vous pourrez continuer à partir de ce moment-là, il vous reste, maintenant, quatre minutes. Ce soir, à 19 heures, nous commencerons par vous entendre.

Une voix: Et on ajourne à 22 heures.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Nous ajournerons à 22 heures.

M. Desbiens: C'est à 19 heures?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Nous reprenons à 19 heures.

Une voix: Là, il y a une réception pour le président ou le premier ministre d'Italie.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): C'est cela.

(Suspension de la séance à 16 h 50)

(Reprise à 19 h 13)

Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre, s'il vous plaît!

Madame et messieurs, je déclare la séance de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation ouverte.

Avant de débuter, j'aimerais faire accepter, si les gens sont d'accord, que M. Laurier Gardner (Arthabaska) remplace M. Houde (Berthier) ce soir.

M. Fortier: C'est un Irlandais, première des choses, comme M. Ryan.

M. Charbonneau: M. Ryan n'aimera pas cela.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Excusez-moi, messieurs. S'il vous plaît!

M. Charbonneau: Quelle est la différence entre un Irlandais et un Québécois francophone d'origine irlandaise?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député de Verchères, ce n'était pas ma question.

Est-ce que les gens acceptent cela?

M. Fortier: On accepte avec beaucoup de ferveur.

M. Charbonneau: Comme il est d'origine, on va l'accepter.

Le Président (M- Tremblay, Iberville): D'accord. Très bien.

Maintenant, je reviens...

M. Fortier: Tous les Québécois sont d'origine quelconque.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Quelconque? Pas quelconque, d'origine très bien.

Une voix: Quelconque.

M. Fortier: Sauf les autochtones.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs et madame, nous étions cet après-midi sur l'amendement! "et la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec. " La parole était à M. Desbiens et il lui restait quatre minutes sur cet amendement. M. Desbiens, vous avez la parole.

M. Desbiens: M. le Président, je pense que je vais simplement profiter de la reprise pour essayer de rappeler une chose qui m'apparaît, en tout cas, importante. Je disais que le gouvernement libéral a pris comme orientation politique que l'État renonce de plus en plus à une période qu'on a connue au Québec et qui était comme, on a appelé cela, celle de la nationalisation

dans bien des cas. C'est une orientation où l'État est de moins en moins actif, présent, dans le développement direct de l'économie du Québec. Je pense que c'est le droit du Parti libéral et, évidemment, du gouvernement qui en est issu d'agir ainsi, de choisir cette orientation. Je disais que ia privatisation des entreprises peut être à certains égards, sauf que cela reste à démontrer, quant à nous, utile ou nécessaire même.

Une voix: Adopté.

M. Desbiens: Cela ne m'apparaissait pas un souffle de mon bon ange. Le projet de loi 85 portant sur la vente ou sur la liquidation - aussi bien utiliser les mots qui représentent vraiment ce qui se produit dans ce cas-là -aurait été, à mon avis, l'occasion exceptionnelle pour le gouvernement de faire la preuve que cette orientation politique est vraiment la plus valable et la meilleure pour véritablement atteindre les meilleurs objectifs possible pour le peuple québécois. C'est la première fois qu'on a un projet de loi qui est un exemple de privatisation et le gouvernement aurait dû démontrer publiquement, devant tous les députés et avec les députés, le bien-fondé de cette politique dans le cas précis de la Raffinerie de sucre du Québec.

Pour faire une démonstration vraiment efficace, il aurait été important de discuter aussi les thèses qui se sont affrontées et qui s'affrontent dans le cas de la privatisation de la Raffinerie de sucre du Québec, en recevant les différents intervenants et les experts en la matière. Je pense que cela aurait été une occasion unique.

Le seul fait que le gouvernement refuse d'agir ainsi jette des doutes sur l'assurance qu'il a lui-même que sa politique soit vraiment valable. Quand on est assuré de ce qu'on avance et que nos hypothèses sont excellentes et les meilleures, il me semble qu'on ne craint pas de les confronter à la réalité, de les confronter devant la population et d'en faire la preuve une fois pour toutes. Mais, au moins, on a essayé d'amener le gouvernement et le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation à inviter ici les gens qui auraient pu apporter des éclairages exceptionnels sur cette privatisation de la Raffinerie de sucre du Québec.

C'est encore un effort supplémentaire que l'on tente. J'ai tenté, en présentant cet amendement, de faire intervenir la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec. On croit, avec raison, que l'une des conséquences de cette privatisation sera de faire disparaître un concurrent aux entreprises sucrières, ici au Québec et au Canada. En conséquence, cela entraînera des coûts que le gouvernement va peut-être diminuer de son budget, de son bilan, de ses équilibres financiers, mais que les consommateurs devront absorber. Une différence d'un cent la livre de sucre au Québec, c'est 6 500 000 $ par année, alors qu'il en coûterait pour relancer, en plus de toute la création d'emplois que cela suppose, la Raffinerie de sucre du Québec... Chaque sou de différence dans le coût de la livre de sucre représente environ 6 500 000 $ au Québec. À ce moment-là, on aurait vite rejoint et rattrapé... De toute façon, à l'inverse, les consommateurs auront vite fait...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député, vous devriez conclure. Le temps est écoulé.

M. Desbiens: Oui? Alors, les consommateurs auront vite payé, si ce n'est en taxes ou en impôt, ces 18 000 000 $ que le ministre ou le gouvernement pense économiser. Le gouvernement, c'est le peuple, ce sont les mêmes personnes; c'est nous, le gouvernement, ce sont les consommateurs, tous les citoyens du Québec. Ils auront vite payé autrement, par des augmentations du prix du sucre à la consommation, ce que cela aurait coûté pour rentabiliser la Raffinerie de sucre du Québec. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Très bien.

M. Fortier: M. le Président...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Voulez-vous parler maintenant? Oui, je vous écoute.

M. Fortier: Vous allez me laisser parler?

M. Charbonneau: Oui, oui. M. Portier: C'est gentil.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Je vous cède la parole.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: Le député voudrait faire parader la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec. Il faudrait bien se souvenir que les consommateurs, ce sont aussi des "payeurs de taxes". S'il y a une chose qui a été demandée pendant la campagne électorale et c'est ce que nous avons entendu très clairement de ce cûté-ci de la Chambre, c'est que les "payeurs de taxes" nous ont dit: Fini les folies! II commence à être temps que le gouvernement prenne des décisions, des

décisions qui sont parfois difficiles, on le reconnaît, qui affectent d'une façon plus particulière certaines personnes dans certaines régions, on le reconnaît également, et c'est la raison pour laquelle on a mis sur pied différents programmes pour aider ceux qui peuvent être touchés. C'est la raison pour laquelle ce débat, en fait, a été fait durant la campagne électorale puisque ces gens nous ont dit très clairement qu'ils voulaient avoir un gouvernement qui assainisse les finances publiques.

J'entendais dire, lors du discours en deuxième lecture sur le principe du projet de loi qui est devant nous en commission parlementaire, que la privatisation de la Raffinerie de sucre du Québec n'est pas réellement une privatisation. Je suis tout à fait d'accord avec cet énoncé. Je pense que ceux qui ont dit cela, de l'Opposition, avaient parfaitement raison. Il ne s'agit pas réellement d'une privatisation; il s'agit d'une mesure d'assainissement des finances publiques parce que - et ce n'est pas seulement nous qui le disons - trois ministres des Finances d'affilée, des deux partis politiques, ont dit que ce n'était pas rentable et qu'il fallait prendre une décision.

Je dois admettre que, durant les discours de deuxième lecture, il y a des gens de l'Opposition qui ont dit: Ce n'est pas raisonnable. En 1981, certaines sociétés, certaines PME ont eu des difficultés financières. S'il avait fallu que les banques mettent la clé dans la porte immédiatement, cela aurait été une catastrophe. Il aurait été déraisonnable de mettre la clé immédiatement dans la porte, alors que plusieurs PME étaient en difficulté. Dans le cas qui est devant nous et dans tous les cas où une société est en difficulté, que fait-elle? Elle prépare un plan de développement, elle va voir son banquier et elle essaie de convaincre son banquier que son plan de développement va lui permettre de rentabiliser les opérations à court terme. Le député de Lévis, ex-ministre de l'Agriculture, est allé voir le banquier no 1, qui s'appelait Jacques Parizeau. M. Parizeau nous a dit très clairement par des déclarations publiques que c'était une erreur de continuer et qu'il fallait arrêter d'investir dans ce canard boiteux. Le député de Lévis va voir le banquier no 2, M. Duhaime, ex-ministre des Finances du Parti québécois et qu'est-ce que M. Duhaime lui dit? C'est un canard boiteux et il faut à tout prix... et lui-même a entamé les négociations avec Lantic. Un deuxième banquier qui conclut qu'il ne valait pas la peine d'investir, justement, pour protéger les consommateurs, c'est-à-dire pour protéger les "payeurs de taxes".

Le même député de Lévis, promoteur de la Raffinerie de sucre du Québec - là-dessus, je ne lui en veux pas - est convaincu que cela devrait continuer, comme tous les propriétaires de PME qui croient que leur affaire est bien importante. Il est nécessaire d'avoir des promoteurs en ce bas monde. Il va voir le banquier no 3. Le banquier no 3 c'est Gérard D. Levesque et Pierre Fortier, les députés de Bonaventure et d'Outremont. Le troisième banquier dit également qu'il faut mettre la clé dans la porte.

Je crois qu'il est nécessaire, pour un propriétaire de PME, de tenter de convaincre son banquier quand il croit être en difficulté. Il doit mettre sur pied un plan, il doit essayer de démontrer à son banquier que son plan de développement va réussir à court terme. Mais quand cela fait trois banquiers d'affilée de deux partis politiques importants qui disent que cela n'a pas de bon sens et qu'il faut arrêter l'hémorragie, je crois que le propriétaire de la PME doit commencer à se dire: S'il y a trois banquiers d'affilée qui m'ont dit que cela n'avait pas de bon sens, mon affaire, et surtout de toutes couleurs politiques, des deux partis politiques, alors, on peut dire que cela n'a rien à voir avec la formation politique, si ce n'est que, de ce côté-ci de la Chambre, cette fois-ci, nous avons eu le courage politique de passer aux actes.

Mais tel est le jugement porté par trois banquiers d'affilée sur le plan de développement proposé par le promoteur de la Raffinerie de sucre du Québec. Je ne lui en veux pas d'être le promoteur, parce que je crois qu'au Québec, pour développer notre économie, on a besoin de promoteurs. Quand trois banquiers d'affilée, trois années successives, disent: Cela n'a pas de bon sens, je crois que ceux qui nous écoutent vont comprendre que, dans un cas comme celui-là, on doit arrêter d'utiliser des arguments de toutes sortes pour dire que les consommateurs sont affectés, que la décision est arbitraire, qu'on devrait entendre des experts de toutes sortes venus parader devant nous. Je crois réellement, M. le Président, que nous avons étudié à fond les documents. Entre le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et moi-même, je le répète, la coopération a été exemplaire. Ni l'un ni l'autre ministre n'a tenté d'assumer une suprématie sur l'autre. Les deux ont collaboré pour regarder le dossier à froid. Les fonctionnaires du ministère de l'Agriculture et du ministère des Finances ont collaboré justement pour s'assurer que le jugement qui était porté était empreint d'objectivité, dans le meilleur intérêt des contribuables québécois et des consommateurs québécois.

Mes collègues, tout à l'heure, disaient que les prix du sucre avaient augmenté depuis que la décision avait été prise. C'est faux. J'ai fait distribuer la feuille qui inclut les chiffres que j'ai obtenus de Steinberg et de Provigo. Depuis le mois de janvier, les

prix n'ont pas changé et les prix internationaux n'ont rien à voir avec la situation québécoise, puisqu'ils sont déterminés par un marché international et non pas par un marché québécois. M. le Président, c'est la seule précision que je voulais faire à ce moment-ci pour permettre à l'Opposition d'arriver avec une argumentation encore plus articulée, pour qu'ils tentent de nous convaincre, mais je voulais leur donner le bénéfice de l'expérience que j'ai vécue depuis six mois en tant que ministre délégué è la Privatisation.

Il est vrai que nous avons une politique. Je crois que c'est le premier gouvernement qui s'est donné une politique très claire à ce sujet. Il est vrai que les journalistes du secteur économique et à peu près tous les journalistes qui se sont penchés sur le programme que nous avons mis de l'avant ont fait des commentaires plutôt, j'allais dire, élogieux. En tout cas, ils ont appuyé le programme que nous avons mis sur pied. Jean-Paul Gagné a dit: La privatisation est bien engagée. Un autre, Alain Dubuc, parle de la privatisation tranquille. C'est vrai, M. le Président, que cela a été une privatisation tranquille, parce qu'en dépit du "filibuster" que nous subissons il n'y a pas un journaliste qui note un traître mot de ce qui s'est dit aussi en commission parlementaire. De fait, tous les journalistes qui ont suivi le dossier avec quelque peu d'attention sont convaincus que la décision que nous avons prise est la meilleure dans les circonstances. De fait, le gouvernement a pris une décision qui était difficile, je le constate. Je comprends le député de Verchères qui représente les gens de la région en partie et j'ai compris aussi les interrogations du député de Saint-Hyacinthe avant que nous prenions la décision. C'est tout à fait normal, lorsque des gens sont impliqués, sont frappés par une décision comme celle-là, qu'ils s'interrogent sur sa nécessité et sur la rigueur de l'étude qui a prévalu aux choix qui sont faits. En toute honnêteté, une fois qu'on s'est dégagé de l'émotivité qui est peut-être normale pour ceux qui sont concernés et qu'on regarde le dossier avec beaucoup de rigueur, on s'aperçoit qu'en définitive les arguments militaient et malheureusement militent toujours, pour la fermeture de la raffinerie et pour la vente des actifs à Lantic. C'est la raison pour laquelle nous sommes réunis, ici, ce soir, M. le Président. Je vous remercie.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le ministre.

J'ai reconnu le député de Duplessis.

M. Denis Perron M. Perron: Merci, M. le Président. À entendre le député d'Outremont et ministre délégué à la Privatisation, on croirait qu'il est comme l'ancien chef du Parti libéral et qu'il a une ligne directe avec le Saint-Esprit. Je crois que le ministre délégué è la Privatisation et les membres du Parti libéral ont complètement oublié...

M. Charbonneau: II y a confusion de rôles.

M. Perron: Oui, effectivement, c'est une confusion de rôles... l'importance de la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec relativement à un dossier comme celui qui nous touche actuellement. (19 h 30)

Je suis assuré que les représentants et représentantes de cette fédération seraient très intéressés, par exemple, à entendre ce qu'ont à dire le gouvernement et l'Opposition, et à faire en sorte de permettre toutes les questions qui pourraient être posées de part et d'autre, dans le but de discuter dans un sens très général de la question de la Raffinerie de sucre du Québec.

Je suis aussi assuré que ces représentants et représentantes seraient très intéressés à faire allusion à cette fameuse publicité payée qu'a pratiquement réfutée l'actuel gouvernement libéral malgré que le chef lui-même, au cours de la campagne électorale, et ce, avant le 2 décembre dernier, avait endossé entièrement les positions du candidat libéral de Verchères, c'est-à-dire M. Chapdelaine.

Lorsque ce dernier, par exemple, se pose une question qui est la suivante: En quoi l'approche du candidat libéral est-elle nouvelle? on voit que sa réponse touche la question technique qui va inclure, bien sûr, les employés. C'était là la deuxième question qu'il se posait. Mais è la première question qu'il se posait, à savoir pourquoi le candidat libéral, Michel Chapdelaine, veut-il que la raffinerie de sucre demeure en opération, ce dernier s'est répondu et a répondu à la population du comté de Verchères de la façon suivante: Parce que le Parti libéral du Québec est le parti de l'emploi et non pas du chômage. Parce que la raffinerie est un atout important pour la région et le comté de Verchères, elle doit être en opération douze mois par année.

Et, lorsqu'on parle, par exemple, de douze mois par année, c'est une question qui apporte sûrement des bénéfices aux consommateurs du Québec. C'est pourquoi l'Opposition à l'Assemblée nationale a décidé de présenter cette motion d'amendement pour permettre d'entendre les représentants et les représentantes de cette Fédération nationale des associations de consommateurs.

Lorsque j'entends le député d'Outremont et en même temps ministre délégué à la

Privatisation, je ne peux pas faire autrement...

M. Fortier: Rattaché aux Finances.

M. Perron: Bofi Rattaché aux Finances ou non, on ne sait plus où on s'en va dans ce gouvernement, M. le Président. Lorsqu'on entend le député d'Outremont et ministre délégué è la Privatisation mentionner qu'il y a eu trois ministres consécutifs au ministère des Finances qui ont pris telle décision et qui ont fait telle recommandation, je peux vous dire, d'ailleurs, que le député de Verchères lui-même à l'Assemblée nationale a déposé les documents où on faisait effectivement référence à des études et à des recommandations qui avaient été faites aussi en même temps par le ministère des Finances et qui avaient en quelque sorte été endossées par les ministres des Finances successifs qui se sont présentés.

Je peux vous dire, M. le Président, que même si c'est la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation et ses membres qui siègent ici, on s'aperçoit que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et le ministre délégué à la Privatisation... En passant, il représente un gouvernement qui est en fait un gouvernement liquidateur et on comprend très bien le jeu du Parti libéral parce qu'il veut tout liquider en ce qui a trait aux sociétés d'État du Québec. Comme on sait que cela représente des additions de fonds pour le fonds consolidé du Québec, tout le monde doit comprendre autour de cette table que, lorsque de l'argent se ramasse dans le fonds consolidé du Québec, à ce moment, des décisions politiques peuvent être prises par différents ministres de ce gouvernement libéral et être transportées par la suite soit au Conseil du trésor ou au Conseil des ministres pour être endossées pour ensuite entreprendre des objectifs carrément politiques prévus avec l'argent des fonds publics.

Je crois effectivement que la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec serait très intéressée à entendre ce qu'ont à dire le ministre délégué a la Privatisation, ainsi que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation sur cette question précise. Je suis assuré aussi que cette même fédération serait très intéressée à prendre connaissance des documents, autant des ministres des Finances qui se sont succédé que du ministre de l'Agriculture qui était là antérieurement, ainsi que du ministre de l'Agriculture qui est là aujourd'hui, le député de Portneuf. Lui aussi a sûrement préparé un mémoire qu'on ne connaît pas, sinon deux pages dont on a pu prendre connaissance. Oui, c'était conjoint.

Je vous avise d'une chose: Ce gouver- nement libéral n'a pas le monopole de la transparence. Tout le monde le sait. On l'a vu, d'ailleurs, à l'Assemblée nationale, à la façon dont vous avez procédé. Je l'ai mentionné, hier, à l'Assemblée nationale. Lorsqu'on refuse d'entendre des organismes comme le Syndicat des producteurs de betteraves à sucre du Québec, la société Sucre Lantic, la haute direction de la Raffinerie de sucre du Québec, l'Association des cadres de la Raffinerie de sucre du Québec, ainsi que le directeur des enquêtes sur les coalitions, je suis à peu près assuré que, puisque les membres du Parti libéral ont refusé carrément d'entendre ces organismes, cela sera exactement la même chose pour la Fédération nationale des associations de consommateurs.

À partir du moment où il y a aussi un ministre délégué à la Privatisation qui est présent dans ce dossier, puisque le mémoire a été signé autant par lui que par le ministre de l'Agriculture, je puis vous assurer que tout ce qui est connexe au mémoire, c'est-à-dire tout ce qui est connexe à ce qui a été rendu public, soit les deux pages en question, cela n'informe pas vraiment les membres de la commission de ce qui s'est passé dans ce dossier pour qu'on arrive à la décision de carrément saborder une société québécoise qui a été créée il y a une quarantaine d'années pour permettre de l'emploi et pour permettre que, dans une certaine proportion, nous ayons au Québec des choses concrètes en rapport avec le sucre qui est même vendu dans les produits de consommation. Qu'on se rappelle Marie perle. Peut-être que le ministre délégué l'a oublié, mais je peux vous dire une chose: En ce qui a trait au député de Duplessis et à l'ensemble des membres de l'Opposition, on serait parfaitement d'accord pour que cette Fédération nationale des associations de consommateurs puisse venir devant cette commission.

En terminant, je voudrais vous présenter une motion de sous-amendement à la motion pour consultations particulières: "Que la motion d'amendement soit modifiée en ajoutant à la fin les mots "et la Confédération de l'Union des producteurs agricoles, la Fédération de l'Union des producteurs agricoles de Saint-Hyacinthe et le Conseil central Richelieu de la CSN. "

Le Président (M, Tremblay, Iberville): Est-ce que vous l'avez par écrit?

M. Perron: Oui, M. le Président.

M. Dubois: Si vous pensez à autre chose, pourquoi ne l'incluez-vous pas tout de suite?

Une voix: Mgr Grégoire.

M. Perron: La prochaine, cela va être le candidat libérai de Verchères lors des dernières élections.

Une voix: On l'attendait, celle-là!

M. Perron: Je vous avise à l'avance.

M. Fortier: Si on l'accepte, qu'est-ce qui va arriver? Est-ce qu'on va passer à l'étude article par article?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Le sous-amendement è l'amendement est recevable. Quand on sait où on va, il n'y a pas de problème. La parole est au député de Duplessis pour une durée de 30 minutes. Juste une seconde, on va vous la redonner.

M. Desbiens: Est-ce qu'on peut avoir une copie de la résolution?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): On va en faire faire des photocopies.

M. Charbonneau: C'est le Conseil central de Saint-Hyacinthe.

M. Perrons C'est le Conseil central de Saint-Hyacinthe.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): De la CSN de Saint-Hyacinthe, et non de Richelieu.

M. Perron: Oui.

Sous-amendement proposant d'entendre

la CUPAQ, la Fédération de l'UPA de

Saint-Hyacinthe et le Conseil central

Saint-Hyacinthe de la CSN

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, le sous-amendement se lirait ainsi: "et la Confédération de l'Union des producteurs agricoles de la Fédération de l'UPA de Saint-Hyacinthe, ainsi que le Conseil central...

M. Perron: Non, c'est la Confédération de l'Union des producteurs agricoles, la Fédération de l'UPA de Saint-Hyacinthe et le Conseil central Saint-Hyacinthe de la CSN.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Et le Conseil central Saint-Hyacinthe de la CSN.

M. Perron: Exactement, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Très bien.

M. Gardner: Afin qu'il n'y ait pas de confusion, M. le Président, est-ce qu'on peut en avoir une copie?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, on va en faire faire des photocopies.

M. Gardner: II semble que ce soit confus...

Une voix: Est-ce qu'on peut expliquer au député ce que c'est, la CSN?

M. Gardner: Je sais tout ça. Les producteurs agricoles, je les connais.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Si vous voulez le réécrire, je vais le relire. Donnez-le-moi et je vais le répéter.

M. Fortier: M. le Président, on aimerait bien avoir l'amendement avant de commencer la discussion, car on veut faire cela très sérieusement de ce côté-ci.

M. Charbonneau: M. le Président, nous n'avons aucune objection. On va attendre que le secrétaire ait fini ses écritures.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Et on va envoyer quelqu'un faire faire des photocopies.

M. Charbonneau: On peut suspendre quelques instants, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): On peut suspendre quelques minutes. Nous suspendons les travaux de la séance durant quelques minutes afin de permettre d'avoir des copies adéquates concernant le nouveau sous-amendement.

(Suspension de la séance à 19 h 43)

(Reprise à 19 h 51)

Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mesdames et messieurs, la séance de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation est ouverte à nouveau.

Nous avons maintenant chacun une copie du sous-amendement.

M. Charbonneau: M. le Président, vous pourriez le lire pour que tous les membres de la commission le comprennent.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. "Que la motion d'amendement soit modifiée en ajoutant, à la fin, les termes: "et la Confédération de l'Union des producteurs agricoles du Québec, la Fédération de l'UPA de Saint-Hyacinthe, le Conseil central Saint-Hyacinthe de la CSN. "

M. Fortier: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Je vous écoute, M. le ministre.

M. Fortier: Je ne comprends pas pourquoi l'Opposition a mis ces trois groupes ensemble, parce qu'elle aurait pu faire trois sous-amendements de suite. Ils ont gaspillé deux sous-amendements.

M. Garon: Parce qu'on ne veut pas faire un "filibuster".

M. Fortier: C'est cela, je comprends. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous auriez pu, M. le ministre, proposer de scinder le sous-amendement.

M. Fortier: Pour gagner du temps, on va l'accepter tel quel.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord.

M. Garon: Pour raccourcir le temps, vous auriez dû dire oui, tout de suite. Au lieu de discuter pendant deux heures pour essayer de vous convaincre de recevoir ces gens-là, on aurait pu dire: On limite le temps de chacun des groupes à deux heures.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Antiréglementaire.

M. Garon: On aurait entendu tout le monde.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Maintenant, la parole est au proposeur qui est M. le député de Duplessis.

M. Forget: On est très bien informé.

M. Garon: Surtout vous, vous avez l'air d'être bien informé!

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, la parole est à vous.

Messieurs, s'il vous plaît!

M. Garon: Ils recommencent la diffusion du programme "Séraphin" l'an prochain, vous savez cela? Ils vont vous demander de jouer là-dedans j'en suis certain.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, M. le député de Prévost.

M. Garon: Vous allez pouvoir faire un homme du XIXe siècle sans être maquillé.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, s'il vous plaît!

M. Fortier: Allez-vous faire le père Ovide?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous reprendrez les débats après 22 heures. M. le député de Duplessis...

Une voix: On tourne.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): ... vous avez la parole.

M. Denis Perron

M. Perron: Merci, M. le Président. Le ministre délégué à la Privatisation demandait pourquoi nous n'avions pas présenté cette motion de sous-amendement en la scindant pour chacun des organismes. C'est bien simple, M. le Président, la réponse est qu'il y a tellement d'organismes qui veulent se faire entendre sur cette question précise de la Raffinerie de sucre du Québec, surtout è la suite de l'annonce de la décision libérale qui fut prise par le Conseil des ministres sur recommandation des deux ministres que j'ai mentionnés tout à l'heure.

Je pense qu'on ne peut pas faire autrement que présenter cela maintenant par groupe. Vous allez voir ce qui va suivre après cette motion de sous-amendement: il y a d'autres motions qui s'en viennent, mentionnant qu'il y a d'autres groupes qui veulent se faire entendre.

Lorsqu'on parle, M. le Président, de la Confédération de l'Union des producteurs agricoles du Québec, de la Fédération de l'Union des producteurs agricoles de Saint-Hyacinthe, ainsi que du Conseil central Saint-Hyacinthe de la CSN, il faudrait spécifier ici qu'un des membres de la confédération et de la fédération est le Syndicat des producteurs de betteraves.

Une voix: C'est le même groupe.

M. Perron: Bien sûr! Je voudrais informer les membres de cette commission de certaines lettres et de certains télégrammes qui ont été reçus. Je suis assuré qu'en particulier les membres du Parti libéral du côté de cette députation si chère au premier ministre du Québec, vont comprendre le bien-fondé des demandes qui ont été faites dans le courrier que je vais vous présenter.

Dans un télégramme qui a été adressé à M. Jean-Pierre Charbonneau, député de Verchères, dont copie a été envoyée à M. Michel Pagé, actuel ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation...

M. Gardner: C'est l'inverse.

M. Perron: Ce n'est pas l'inverse. Je sgis capable de lire un télégramme.

M. Gardner: II aurait dû faire l'inverse.

M. Perron: Ce n'est pas mes problèmes. Ce sont les problèmes du Parti libéral. Je peux vous assurer que ce télégramme est authentique et il est adressé à M. le député: "Dans le cadre des débats de l'éventuelle vente de la Raffinerie de sucre du Québec à l'entreprise Lantic, le Syndicat des producteurs de betteraves à sucre du Québec aimerait être entendu en commission parlementaire afin d'exposer les intérêts agricoles en relation avec la conservation de la production de la betterave à sucre au Québec. " C'est signé Simon Guertin, président.

M. le Président, dans un télégramme qui a été adressé directement au ministre, cette fois-ci par le Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du Québec, on lit: "M. le ministre, comme porte-parole du Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du Québec, j'aimerais que le regroupement représentant 24 organismes - 24 organismes, ce n'est pas n'importe quoi - et qui s'est formé pour défendre la survie de la Raffinerie de sucre du Québec soit entendu en commission parlementaire. " C'est signé Bernard Malo, porte-parole du Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du Québec, avec copie à Jean-Pierre Charbonneau, député de Verchères.

Dans une lettre dont j'ai reçu copie à mon bureau de Québec en date du 11 juin dernier, dont l'expéditeur était M. Doris Arsenault, secrétaire de la commission, je lisais: "Vous trouverez ci-joint copie d'une lettre qui nous est parvenue le 10 juin 1986. " M. le Président, cette lettre est adressée à M. Michel Pagé. Ce n'est pas n'importe qui, M. Michel Pagé, c'est le député de Portneuf. Il est membre du Parti libérai, il est ministre libéral dans ce gouvernement.

Une voix: Encore!

M. Perron: II a été nommé par son chef.

M. Garon: II n'est pas là!

M. Perron: Le sujet de la lettre, c'est la fermeture de la raffinerie et le fonds de retraite: "M. le ministre, nous désirons par la présente être entendus à l'occasion de la tenue de la commission parlementaire sur la loi...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre, s'il vous plaîtl

M. Perron: Je m'excuse, M. le Président, je recommence parce que les membres du Parti libéral n'ont pas compris. "M. le ministre, nous désirons par la présente être entendus à l'occasion de la tenue de la commission parlementaire sur la loi de la fermeture de la Raffinerie de sucre du Québec, toi 85. Le sujet est la perte de notre fonds de pension. "

Cela concerne les travailleurs et les travailleuses de la raffinerie; je pense que les membres du Parti libéral qui sont devant nous n'y sont pas intéressés du tout et le ministre non plus. Pas plus le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation que le ministre délégué à la Privatisation ne sont intéressés à recevoir ces gens. D'ailleurs, on a vu le résultat par la façon dont vous avez voté toutes les motions d'amendement et la motion principale qui n'est pas encore adoptée, mais qui va le devenir éventuellement. Je trouve dommage que vous n'ayez pas eu le sens des responsabilités en acceptant que ces gens viennent devant cette commission pour se faire entendre.

Les signataires de la lettre poursuivent en disant: "Voici un résumé de la situation. La valeur actuelle des fonds calculée en additionnant nos cotisations, celle de l'employeur et les intérêts accumulés depuis des années - 11 ans dans le cas d'un signataire et 19 ans dans ie cas de l'autre -est de l'ordre de 80 000 $. Pendant nos longues années à l'emploi de l'entreprise, nous comptions sur la pension que ce capital aurait pu générer au moment de la retraite. Par contre, par le fait que ce fonds sera gelé, c'est-à-dire sans intérêt ni indexation pendant 19 ans, sa valeur future sera dérisoire en l'an 2005. Nous trouvons donc inacceptable le fait qu'en plus de perdre notre emploi nous soyons obligés de se laisser confisquer nos fonds de pension. Après tout, la cessation d'emploi a été décidée par l'employeur en dehors du contrôle des employés et le règlement de la CARRA ne prévoit pas ce cas. "Notre suggestion est d'inclure dans la loi de fermeture une clause nous permettant le transfert de la valeur actuelle accumulée dans un régime privé, REER, afin que nous puissions transformer la valeur future en une rente quand l'âge de la retraite sera arrivé. Il est à remarquer que le transfert de fonds est déjà appliqué dans le règlement de la CARRA dans certains cas particuliers. " C'est signé: Antonio Pietrolucci, physicien, chef chimiste de la raffinerie et Nguyendinh Thuan, ingénieur et directeur de l'usine. (20 heures)

Une voix: C'est très sérieux. Ils perdent leur pension.

M. Perron: Lorsqu'on parle d'une pension comme celle-là, je pense qu'il y a lieu d'entendre les représentants et représentantes des travailleurs et, bien sûr, tous les représentants de la Confédération de l'Union des producteurs agricoles et, en plus, la Fédération de l'Union des producteurs agricoles de Saint-Hyacinthe. Dans l'un des

télégrammes, c'est-à-dire celui de M. Simon Guertin, le président du Syndicat des producteurs de betteraves à sucre du Québec, ce dernier, tout en mentionnant Lantic, semblait très inquiet de la façon dont le gouvernement libéral est en train de traiter le dossier de la Raffinerie de sucre du Québec avec le projet de loi 85, c'est-à-dire un projet de loi qui prorogera éventuellement l'existence légale de la société elle-même.

M. Garon: Ils sont en train de les assassiner.

M. Perron: Lorsqu'on parle de l'ensemble des dossiers qui furent discutés soit au ministère des Finances ou au ministère de l'Agriculture, il y a des membres du gouvernement, et en particulier les ministres concernés par cette loi - le ministre délégué à la Privatisation, ainsi que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation - qui se font un devoir d'informer au minimum les membres de la commission d'abord, les gens concernés en plus et la population du Québec ensuite. On n'a qu'à remarquer ce qu'il nous est permis de voir dans la décision ministérielle, on parle d'un document qui a à peu près une vingtaine de pages et qu'on nous dépose publiquement. C'est la seule chose que l'on peut avoir selon la loi sur l'information et on nous en dépose deux pages accessibles au public. Tout le reste n'est pas rendu public et les deux ministres concernés refusent carrément de déposer ici les documents en question. Ce sont des documents qui pourraient sûrement permettre aux membres de la commission, d'un côté comme de l'autre, de prendre une décision plus éclairée et même d'aller jusqu'à recommander aux ministres concernés des choses qui seraient sûrement intéressantes. Lorsqu'on veut entendre les personnes qui représentent des organismes, ce qui est la motion de sous-amendement, je crois que c'est essentiel qu'on le fasse.

Je termine en vous disant qu'il serait peut-être bon que les membres du gouvernement, ceux et celles qui sont assis et assises en face de moi, regardent ce qu'il y a à l'intérieur de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions. Je vous invite à lire attentivement ce qu'on dit de la fusion et du monopole et ce que cela veut dire dans la loi. Et c'est une loi fédérale, ce n'est pas une loi du Québec.

Je termine par cette invitation aux membres du gouvernement. Je voudrais vous dire qu'en ce qui me concerne, peu importe la décision des membres du gouvernement qui font partie de cette commission et qui ont refusé l'ensemble des motions de sous-amendement qu'on a présentées ici, j'espère au moins qu'en ce qui a trait aux représentants du secteur agricole et des travailleurs et des travailleuses, on aura non seulement la décence, mais aussi l'audace de le faire. Parce que ce gouvernement n'est pas audacieux du tout. Lorsqu'il faisait sa campagne électorale, les candidats et candidates de chacun des comtés du Québec, incluant ceux et celles qui sont en face de nous, parlaient de transparence, parlaient de communications avec les citoyens et citoyennes du Québec. Mais ce n'est pas le cas pour le projet de loi 85. Cela n'a pas été le cas pour le projet de loi 58, non plus. Cela n'a pas été le cas pour beaucoup d'autres lois. Ce qui me frappe, c'est de voir les membres du parti ministériel de cette commission refuser carrément d'entendre les représentants des organismes mentionnés dans les motions de sous-amendement.

Je ne comprends pas plus que ces mêmes membres du Parti libéral, par le biais des ministres concernés et du leader du gouvernement, aient permis qu'on entende des mémoires ici même à la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, et vous en étiez témoin, sur la santé des animaux, pendant que, là, on parle du monde en vie qui est dans les usines, pendant que, là, on parle des gens qui vont perdre leur emploi, pendant que, là, on parle de producteurs de betteraves, pendant que, là, on parle de toutes sortes de personnes, y compris les consommateurs qui sont touchés par le dossier.

M. le Président, c'est sûr et certain qu'en ce qui me concerne je vais voter pour ce sous-amendement, sachant très bien, à moins que je me trompe, qu'il n'y aucun membre du Parti libéral en face de moi qui va parler pour ou contre cette motion et sachant très bien aussi que les membres de l'Opposition de cette Assemblée nationale qui sont en commission parlementaire ici aujourd'hui vont voter pour la motion. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le député de Duplessis. Je reconnais maintenant le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, je remarque que le député de Duplessis, à qui tout le monde aurait pu permettre de se désintéresser de cette commission puisqu'il est de la Côte-Nord, loin des activités du sucre, sait à que! point cette décision du gouvernement peut affecter aussi son territoire et il a été plus présent à cette commission, plus actif que le député de Saint-Hyacinthe qui représente la région où l'usine est située. Le député de Duplessis, qui était un travailleur d'Hydro-Québec, membre actif du syndicat, a présenté une motion qui lui tenait à coeur où il demande que la Confédération de l'Union des

producteurs agricoles, la Fédération régionale de Saint-Hyacinthe et le Conseil central des travailleurs de Saint-Hyacinthe de la CSN puissent être entendus. Évidemment, ces gens qui sont dans le milieu du travail ne font pas partie des préoccupations du député d'Outremont.

M. Fortier: Ce n'est pas gentil.

M. Garon: Le député d'Outremont, Outremont-les-Deux-Églises, comme les gens ont l'habitude de dire au Québec...

M. Fortier: Cela, c'est un indépendantiste.

M. Garon:... où demeurent sans doute 15 % ou 20 % des députée du Parti libéral...

M. Fortier: Pierre Marc Johnson. Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Garon:... est très éloigné des préoccupations des gens de la région de Saint-Hyacinthe.

Une voix: Bernard Landry.

M. Garon: C'est pourquoi Ils peuvent rire, s'amuser, boire de l'eau, faire n'importe quoi sans se préoccuper du sort des 1500 travailleurs qui dépendaient de cette usine. Ils sont indifférents également aux préoccupations des consommateurs, des gens qui devront payer leur sucre plus cher. Ils sont indifférents également à l'égard de toutes les usines qui utilisent, comme sous-produit, le sucre et qui vont devoir payer leur matière première plus cher. De la même façon, ce Parti libéral a augmenté de 5, 4 % l'électricité cette année, contrairement à toutes les prévisions de ces fameux experts du ministère des Finances, y inclus le ministre, qui ont prévu, dans leurs prévisions financières de cette année, un taux d'inflation de 3 %, alors que nous, avec deux tiers de recherchistes, nous leur avons démontré que l'inflation ne serait pas à 3 % cette année, mais beaucoup plus entre 4 % et 5 %. Et même, entre 4 % et 5 %, nous avons été modestes. J'ai posé une question au ministre des Finances cette année et il n'était même pas au courant des chiffres de Statistique Canada qui démontrent que, depuis le début de l'année financière, depuis le 1er avril, l'inflation est au-dessus de 5 %. C'est ce genre de "faiseux" qui, actuellement, analysent l'industrie du sucre par un genre d'éclair soudain du Saint-Esprit. Ils ne se sont jamais préoccupés de cette industrie, ils ne connaissent rien de ce secteur. Le ministre de l'Agriculture, qui n'est même pas présent, s'occupait du domaine du travail et, aujourd'hui, le temps de le dire, en quelques semaines, ils ont décidé qu'il fallait fermer l'industrie du sucre au Québec.

C'est cela, le Parti libéral, parti d'improvisation, parti dangereux parce qu'incapable d'approfondir une question, parti non préoccupé des emplois des travailleurs, parti non préoccupé des cultivateurs. Je vais vous dire une chose: Quand les semaines et les mois auront passé, vous allez voir que vous allez finir votre mandat à genoux comme Robert Bourassa l'a fini entre 1973 et 1976. Pourquoi? Parce que vous vous fautez du monde en vie, du monde qui travaille tous les jours.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député de Lévis, je dois quand même vous rappeler à l'ordre. J'aimerais que vous vous en teniez au sous-amendement. Si vous voulez que je vous le lise... Non, vous en avez une copie.

M. Garon: Je vais le lire tout de suite.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous dépassez le cadre dans lequel on se réunit ici.

M. Garon: Ce que je mentionne, c'est que le député de Sept-Îles a présenté un amendement pour faire en sorte que la Confédération de l'Union des producteurs agricoles du Québec puisse être entendue. C'est l'organisme représentatif des agriculteurs. De la même façon que nous avons présenté une motion pour qu'on puisse entendre le Syndicat des producteurs de betteraves a sucre du Québec, de la même façon le député de Sept-Îles a présenté une motion qui inclut la Fédération des agriculteurs de Saint-Hyacinthe et le Conseil central Saint-Hyacinthe de la CSN.

Mais non! Quand on a vu les lobbyistes de Sucre Lantic, après cela, c'est le cap. Les fournisseurs des caisses électorales, c'est suffisant. On n'est aucunement préoccupé du sort des travailleurs et des cultivateurs qui gagnent leur vie dans cette industrie. On n'est aucunement préoccupé, non plus, du sort des consommateurs qui vont payer leur sucre plus cher et qui le paient déjà plus cher parce qu'un ministre originaire d'Outremont a pensé qu'une usine de 1500 travailleurs, on fermait cela et on pensait qu'on agissaitl

Imaginez-vous, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, ex-critique en matière de travail! De travail! Il n'a eu aucune préoccupation pour les 1500 travailleurs. Il dit: Nous, nous ne voulons pas des paroles, mais de l'action. Fermons une usine, arrêtons de faire travailler 1500 personnes. Cela, c'est de l'action! On parle de privatisation. Il n'est même pas question de privatisation. Le député d'Outremont n'est pas le ministre de la privatisation dans le

domaine agricole, c'est le ministre de la liquidation, c'est le ministre des fermetures, c'est le ministre du chômage, c'est le ministre qui va faire en sorte qu'une foule d'entreprises vont devoir payer le sucre plus cher. Quand on sait qu'il y a quasiment 50 % de sucre dans la crème glacée!

Une voix: On va pouvoir vendre notre sirop d'érable.

M. Garon: Je comprends que le Parti libéral continuera à nous parler de la ferme familiale et que le député de Prévost continuera à nous parler de ses 225 vaches. Je ne sais pas combien de porcs, combien d'acrage, mais on sera loin de la ferme familiale.

M. Forget: Si vous n'avez pas eu de chance dans votre vie, ce n'est quand même pas de ma faute.

M. Garon: Et pourquoi? Parce que, essentiellement, c'est la dernière préoccupation du Parti libéral que la ferme familiale. Il s'en fout. Et le ministre qui est en face de nous ce soir, c'est le ministre d'Outremont, mieux qualifié dans les pelouses que dans la betterave, et encore! Et encore, je n'en suis pas certain, parce qu'il y a beaucoup de gens qui se plaignent actuellement qu'on met des herbicides au pistolet automatique, alors que les enfants vont se promener sur les pelouses quelques minutes après sans qu'on établisse aucune réglementation.

M. Dubois: N'en avez-vous pas fait une dernièrement?

M. Garon: Parce qu'il n'y en avait pas avant.

M. Dubois: Un instant! Un instant! Charriez tant que vous voulez.

M. Garon: Non, non. Voyez les résultats. On peut vous donner les chiffres. Il n'y avait pas de chiffres pour les années passées. Cela a augmenté considérablement cette année. Il y a eu même des articles dans le journal Le Soleil.

M. Dubois: Cela n'a pas changé depuis l'an passé et cela n'a pas changé depuis dix ans.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! J'aimerais aussi qu'on revienne à la pertinence du débat.

M. Garon: Le député de Huntingdon peut parler du charriage.

M. Dubois: C'est du charriage.

M. Garon: Hein?

M. Dubois: Cela fait 25 ans qu'on fait cela.

M. Garon: I! fait son argent avec les cultivateurs.

M. Dubois: Cela fait 25 ans qu'on fait cela.

M. Garon: Alors, concernant les pesticides dans les villes maintenant, le député d'Outremont ne dit pas un mot. Les enfants jouent sur les pelouses arrosées quelques minutes auparavant et il n'y a rien. Le ministre de l'Environnement se contente de voeux pieux. Et quand on veut lui demander - lui, il a connu l'Afrique du Sud -qui coupe à la machette les cannes à sucre en Afrique du Sud, il dit: Je ne veux pas en parler. Je suis parti de là depuis 30 ans. On dit: Vous pourriez nous conter votre expérience. C'est le seul qui a connu cela, les pays de canne à sucre, et il ne veut pas en dire un mot.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député, il vous reste une minute et demie.

(20 h 15)

M. Garon: M. le Président, je veux dire essentiellement que le Parti libéral n'a pas de parole. Il disait dans sa brochure: Non, la Raffinerie de sucre du Québec ne fermera pas, parole donnée. C'est un parti qui n'a pas de parole. C'est un parti qui ne respecte aucun engagement, qui n'a respecté aucun engagement. Ceux à qui il fera ses engagements devront estimer que nous ne serons liés par aucune des paroles données par le Parti libéral, parce qu'un parti qui ne respecte pas sa parole ne peut pas estimer que le gouvernement qui va lui succéder considérera que sa parole vaut quelque chose. La parole du Parti libérai, c'est le néant, cela ne vaut rien et cela représente le mépris envers la population du Québec, parce qu'on a un imprimé signé ici: Non, la Raffinerie de sucre du Québec ne fermera pas, parole donnée. Aujourd'hui, on n'est même pas capable de faire entendre, conformément à la proposition du député de Duplessis, la confédération des agriculteurs, la fédération régionale des agriculteurs, non plus que les travailleurs, représentés par leur syndicat la CSN, de Saint-Hyacinthe.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député, vous devriez conclure, parce que le temps est écoulé.

M. Garon: J'ai conclu.

Des voix: Ha! Ha! ha!

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Ah bon! Très bien. Alors, j'ai reconnu le député de Verchères.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: M. le Président, les gens et les organismes qu'on veut inviter à la commission par la motion du député de Duplessis sont des gens et des organismes qui ont demandé à être entendus. Hier, j'ai lu un télégramme du Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du Québec qui représente 24 organismes dont la Confédération de l'UPA, la Fédération de l'UPA de Saint-Hyacinthe, le Conseil central de la CSN de Saint-Hyacinthe. Tous ces organismes et bien d'autres - 21 autres - sont membres du front d'aide. Je crois que ces gens qui ont demandé à être entendus l'ont fait parce qu'ils sont concernés par le projet de loi, parce que c'était leur gagne-pain, parce que, dans bien des cas, on était concerné par la raffinerie de sucre, par cette industrie agro-alimentaire depuis une quarantaine d'années. On ne peut pas penser que, du jour au lendemain, un gouvernement va renier sa parole, comme vient de le rappeler encore une fois le député de Lévis et va, en plus de renier sa parole, avoir l'effronterie de refuser aux gens de se faire entendre en commission parlementaire alors que le gouvernement met un X sur leur emploi. Je voudrais bien voir un des députés ici se faire enlever "sa job", ne rien dire et accepter que les hommes et ies femmes politiques lui enlèvent son emploi et s'attendent à ce qu'on ne dise rien. C'est ce qu'on demande aux gens; Ne dites rien! On vous a promis' quelque chose pendant la campagne électorale, mais ce n'était pas important. C'était juste la parole d'un politicien, d'une politicienne en mal de se faire élire. Maintenant qu'on a le pouvoir, on vous enlève votre job et ce qu'on ne veut pas que vous fassiez, c'est surtout de chialer.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député de Verchères, il faudrait vous en tenir à la pertinence du débat.

M. Charbonneau: M. le Président, je m'en tiens à la pertinence parce que je vous dis que les gens qui devraient être entendus, c'est la Fédération de l'UPA de Saint-Hyacinthe et la confédération de l'UPA centrale. Il y a des gens qui vont bientôt se retrouver assistés sociaux dans certains cas et qui auront peut-être affaire aux "boubou-macoutes" du gouvernement. Des gens à qui on avait promis que le raffinerie de sucre non seulement resterait ouverte mais qu'elle fonctionnerait douze mois par année et è qui le premier ministre du Québec avait promis, à l'ITA de Saint-Hyacinthe, en présence de l'actuel ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, que les gens sèmeraient au printemps cette année. Ce qu'on demande, c'est que ces gens-là soient entendus avant qu'on mette un X et qu'on enterre leur gagne-pain.

M. Forget: Ils ont semé ce printemps.

M. Charbonneau: Pardon? Non, ils n'ont pas semé ce printemps.

M. Forget: Ils viennent de semer. Veux-tu, on va...

M. Charbonneau: Avec quoi, vous allez me le dire?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaîtl

M. Charbonneau: Je voudrais bien entendre le député nous expliquer comment on va transformer les betteraves à sucre.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Après.

M. Forget: Ils ont semé du maïs et de l'orge.

M. Charbonneau: Qu'est-ce qu'ils vont faire?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît!

M. Charbonneau: Bien voyons donc!

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Je vais faire une mise au point. Excusez-moi. Une seconde!

M. Forget: Mais il faut quand même l'informer. Il n'est pas informé.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Une seconde! Un instant! Je voudrais faire une mise au point. Quand quelque chose ne fonctionne pas, prenez des notes et demandez la parole et, ensuite, vous pourrez faire les mises au point nécessaires. D'accord? Ce sont les règles.

M. Garon: M. le Président...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, je vous écoute, M. le député de Lévis.

M. Garon:... question de règlement. J'aimerais, si le député de Prévost a quelque chose à dire, qu'il prenne la parole. On ne l'a pas entendu parler depuis deux jours.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député de Lévis, je viens de faire la mise au point. M. le député de Verchères.

M. Charbonneau; M. le Président...

Une voix: Je vais venir mettre de l'ordre ici.

M. Fortier: On a besoin de toi. Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Charbonneau:... les gens qu'on veut entendre sont des gens qui sont concernés. Les organismes qu'on voudrait convoquer sont des organismes représentatifs de ces personnes, de ces travailleurs de la raffinerie, de ces agriculteurs concernés.

Il y a peut-être des producteurs de betteraves qui ont semé autre chose au printemps, mais que pensez-vous qu'il va arriver? Dans certains cas, il y avait des problèmes dans les productions et ils ont semé. Pensez-vous que le fait d'avoir des producteurs additionnels va régler le problème pour certaines productions? On déplace le problème. Pensez-vous que les travailleurs d'usine, eux, vont pouvoir semer quelque chose?

Il y a des gens qui travaillaient à la raffinerie depuis 30 ans, 25 ans, 20 ans, 15 ans. On met un X sur leur emploi après leur avoir dit qu'il n'y avait pas de danger. Certains ont voté pour le Parti libéral de bonne foi parce qu'ils ont cru à la parole donnée. Aujourd'hui, on ne voudrait même pas donner l'occasion à leurs organismes représentatifs d'être entendus?

M. Garon: On pourra dire qu'ils ont quand même été un peu naïfs.

M. Charbonneau: Ils ont peut-être été un peu naïfs, M. le député de Lévis, mais ils ne doivent pas nécessairement être pénalisés parce qu'ils ont cru Robert Bourassa. Très sérieusement, le député de Duplessis rappelait au ministre délégué à la Privatisation une lettre qui a été envoyée par les représentants de plusieurs employés qui ont des fonds de retraite, qui sont pris avec. Le gouvernement n'a rien inclus dans le projet de loi à cet égard. Il n'a annoncé aucune modification de son projet de loi pour tenir compte de cette situation.

On ne plaide pas pour faire de l'obstruction, on ne fait pas encore de l'obstruction, on n'a pas encore décidé cela. Ce qu'on fait depuis une journée et demie, c'est demander au gouvernement d'entendre les gens concernés. On met un X sur 1500 emplois directs et indirects, on enterre l'industrie agro-alimentaire au Québec et on ne voudrait pas que les gens viennent se faire entendre! C'est cela qu'on vient nous dire. C'est aberrant.

Quand les gens demandent d'être entendus pour expliquer les problèmes qu'ils vivent à l'égard de leur fonds de retraite, que cela n'a pas de sens, peut-être que notre collègue, s'il trouve que ce n'est pas assez sérieux pour lui, pourrait retourner è sa commission. Ces gens veulent qu'on comprenne leurs problèmes, ils veulent pouvoir l'expliquer aux élus, ils veulent pouvoir dire ce que cela représente de se retrouver avec des fonds de retraite qu'ils ne pourront pas utiliser avant des années, quand des gens ont 19 ans, 11 ans, 15 ans de service. Ces gens avaient fait des représentations au gouvernement; on n'en retrouve rien dans le projet de loi. On ne voudrait pas les inviter en commission parlementaire. On nous accuse de faire de l'obstruction systématique alors qu'on demande que ces gens soient entendus. Qu'y a-t-il de déplacé et d'outrancier à demander que des gens qui perdent leur emploi, par une décision d'un gouvernement qui leur avait promis qu'on maintiendrait leur emploi douze mois par année, soient invités a une commission parlementaire pour se faire entendre? Qu'y a-t-il d'immoral et d'inacceptable dans cela? Qu'y a-t-il d'antiparlementaire dans ces demandes? C'est là le fond du problème.

On a beau s'amuser, on a beau tenter de durer et durer, de prendre la vie du mieux qu'on peut, mais n'empêche qu'on a des convictions. J'ai été élu depuis dix ans pour représenter ces gens. En campagne électorale, j'ai fait face à un adversaire politique qui leur a dit, partout dans le comté: Ne vous inquiétez pas, les libéraux, c'est le parti de l'emploi, pas du chômage; la raffinerie va fonctionner douze mois par année. Qu'est-ce qu'on a? Fermeture de la raffinerie de sucre quelques mois après. Cela ne faisait pas six mois qu'ils avaient élu le gouvernement libéral que, paf, la guillotine tombe sur la raffinerie de sucre, sur les emplois, sur la parole donnée. C'est cela qu'on fait. Ce qui est immoral et inacceptable, c'est le comportement du gouvernement, pas le comportement de l'Opposition dans ce débat.

M. le Président, convoquer l'UPA, convoquer la CSN, c'est permettre à des travailleurs d'usine à qui on avait promis des choses, c'est permettre à des agriculteurs à qui on avait promis des choses d'être entendus parce qu'on met leur emploi dans un cercueil et qu'on enterre ce cercueil avec de grands sourires et qu'on va aller se faire applaudir, demain et après-demain, au conseil général du Parti libéral.

C'est cela qui va arriver, M. le Président. Le ministre de l'Agriculture va se flatter les bretelles et le ministre délégué à la Privatisation va arriver devant ses délégués et ses militants, demain et après-demain et va dire. Aie, on est bon! On a

commencé le processus de privatisation. On liquide la raffinerie de sucre. On met notre parole dans la poubelle. On met 1500 emplois directs et indirects dans le cercueil et allons-y pour le développement économique du Québec. C'est cela qu'on va faire. Je vous gage, M. le Président, qu'ils vont se faire applaudir, à part cela. C'est ce qu'il y a de plus épouvantable. Ils vont se faire applaudir pour cela, M. le Président. Comprenez-vous cela?

M. le Président, si c'était cela, s'il fallait, pour faire tout cela, engager des bénévoles à 400 $ par jour, ce n'était pas nécessaire.

M. Garon: Débarquez.

M. Charbonneau: Je ne sais pas combien a coûté ce dépliant électoral. Je sais une chose, par exemple. C'est qu'il était comptabilisé dans les dépenses électorales. C'est marqué ici: "Autorisé et payé par M, Guy Roy, agent officiel de Michel Chapdelaîne, imprimé par Imprimerie Saint-Denis Inc., Saint-Denis-sur-Richelieu. " Ce n'est pas un torchon. C'était votre dépliant électoral et vous crachez dessus, aujourd'hui. Vous dites: Ce n'est pas important. Mais là, le candidat libéral dans Verchères - je ne sais pas s'il va être élu à la prochaine convention parce qu'il a fait un péché grave, lui - a compromis son chef et son parti. Il a amené son chef à dire qu'il était d'accord avec lui et il a amené le président de la commission de l'agriculture d'aujourd'hui à dire, à l'époque, qu'il était d'accord, M. le Président. C'est pour cela qu'on pense qu'on doit entendre ces gens-là et qu'on doit donner à leurs organismes représentatifs...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député, votre temps est écoulé.

M. Charbonneau:... l'occasion - je termine - d'être entendus. C'est le minimun. Quand on condamne une personne à mort, M. le Président, on lui donne au moins la chance de se faire entendre avant de se faire couper le cou. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le député de Verchères.

Je cède la parole à M. le ministre.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: M. le Président, qu'est-ce qu'on ne peut pas entendre dans cette Chambre, des fois, avec un peu de trémolo dans la voix, du côté de l'ex-ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation qui répète des faussetés lorsqu'il nous dit qu'il y a 1500 employés à la raffinerie. C'est drôle, on a fait le compte et il y en avait 93 quand on est arrivés. Il n'y en a jamais eu 1500...

M. Garon: M. le Président, question de privilège.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît! Non, non...

M. Fortier:... à la raffinerie. On vous a laissés parler tous les deux. On a bien le droit de répéter...

M. Garon: Je n'ai jamais dit cela. Arrêtez donc de mentir.

M. Fortier: Maïs voyons, c'est vous qui dites des menteries tout le temps. Vous mentez à plein nez.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Un instant!

M. Garon: J'ai dit...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Un instant! Un instant, messieurs.

M. Garon:... dans les emplois directs et indirects. Arrêtez de mentir!

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs...

M. Garon: Ce n'est pas parce que vous venez d'Outremont...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, s'il vous plaît!

M. Garon:... que vous avez le droit de mentir à tout le monde. Vous mentez.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Charbonneau: M. le Président...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il y a des choses, à un moment donné, vous devez prendre des notes et, quand vous reviendrez, vous ferez les mises au point nécessaires, mais laissez parler...

M. Garon: II a menti au peuple.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît!

M. Fortier: Question de règlement, M. le Président.

J'ai écouté attentivement le député de Verchères...

M. Garon: Ne venez pas nous traiter de fascistes!

M. Fortier:... qui a fait un discours véhément, passionné. Je l'ai écouté avec beaucoup d'attention. J'ai pris des notes et, là, je voudrais répondre. Je voudrais qu'on m'écoute de la même façon que j'ai écouté le député de Lévis et que j'ai écouté le député de Verchères. Je ne l'ai pas interrompu. Je n'aimais pas tout ce qu'il nous disait, mais, au moins, on est en démocratie et, si le député de Lévis veut accepter la démocratie, nous de ce côté-ci, on y croit à la démocratie. On vous laisse parler, mais, quand vient notre temps de parler, écoutez-nous. On a des choses a vous dire et vous allez les entendre même si vous n'aimez pas cela.

M. Charbonneau: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: M. le Président, je suis d'accord avec le ministre. On va l'écouter, mais la seule chose que je voudrais lui dire, à ce moment-ci, c'est qu'on n'a jamais parlé de 1500 emplois à la raffinerie. On a toujours dit qu'il y avait l'industrie du sucre de betterave qui comprend les gens de la raffinerie...

M. Fortier: Bon.

M. Charbonneau:... les producteurs agricoles, les camionneurs, les gens qui sont concernés par cette industrie. C'est cela qu'on a dit. Jamais on n'a prétendu qu'il y avait 1500 emplois dans l'entreprise et la botte qui est près de la Transcanadienne.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord.

M. Fortier: Le point est fait, M. le Président. Si on s'entend qu'il y avait 93 employés à la raffinerie, on s'entend. Sur le décompte, à savoir comment il y avait d'agriculteurs, c'est assez facile à savoir. Il y en avait, je crois...

Une voix: C'était 103.

M. Fortier:... 103 la dernière année. Si vous voulez extrapoler à partir de cela, je vous laisse la responsabilité de le faire à partir de 103 agriculteurs plus 93 employés, ce qui fait 196. Si vous voulez multiplier par 15 après cela, je vous laisse la responsabilité de faire la multiplication.

M. le Président, nous sommes ici de bonne foi autour de la table et je suis d'accord avec le député de Verchères qu'il y a des problèmes humains qu'il faut aborder avec beaucoup de compassion. Je crois que l'intervention du député de Lévis n'est pas à la hauteur de l'expérience qu'il a du fait qu'il a oeuvré à l'intérieur d'un Conseil des ministres, du fait qu'il est un personnage respecté, me dit-on, à l'intérieur de son parti. Je ne comprends pas pourquoi il s'entête à faire des accusations ou des attaques personnelles comme de laisser penser, parce que je viens du comté d'Outremont, que les gens d'Outremont n'ont pas de coeur, que ces gens sont incapables de politiques sociales et de considérations pour défendre l'intérêt public. (20 h 30)

M. le Président, est-ce que le député de Lévis se rend compte que, durant neuf ans, il a oeuvré au Conseil des ministres avec six ministres qui venaient d'Outremont? Ces gens étaient les responsables de la politique sociale et du développement économique du Québec; j'ai nommé des gens comme Bernard Landry, responsable du développement économique. Bernard Landry vit à Outremont. Le docteur Laurin qui était responsable du développement social pour le Parti québécois, lui aussi demeurait à Outremont jusqu'à récemment. M. Léonard qui a été le responsable de l'établissement des MRC et des politiques municipales, lui aussi, habite encore Outremont. Jacques-Yvan Morin, votre expert constitutionnel, demeurait à Outremont et il y demeure encore. Jacques Parizeau, votre ministre des Finances. Il m'en manque un il y en a un sixième.

M. Perron: Est-ce que ce sont vos électeurs?

M. Fortier: Ce sont tous mes électeurs. Des gens qui, je le crois, ont voté pour moi, en toute honnête, des gens qui indiquent qu'il existe à Outremont... Je reconnais le mérite de ces gens-là, mais je n'accepte pas du tout ces accusations personnelles envers le Conseil des ministres. Je vous dirai que j'ai divergé d'opinion avec M. Parizeau, mais j'ai le plus grand respect pour ce grand homme, pour ce bon homme, pour ce professeur d'université.

Je crois qu'on n'ira nulle part si, de part et d'autre, on s'accuse de ne pas être en mesure de s'élever au-dessus de nos partis politiques pour servir la population. Je ne comprends pas pourquoi le député de Lévis s'acharne à faire ce genre d'accusations, d'autant plus que, dernièrement, il a utilisé le même argument en réplique au discours sur le budget du ministre des Finances. Il a eu droit à des critiques acerbes de la part de la presse économique. On a dit que cela ne permettait pas au Parti québécois de s'élever au niveau d'un parti responsable, surtout qu'on s'attend toujours, de la part d'un critique financier, à une certaine rigueur dans l'interprétation des chiffres et dans les critiques qu'il fait.

M. le Président, j'oserais croire que le

député de Lévis qui, pendant longtemps, a fait rire les foules et qui croyait que, parce qu'il était capable d'attaques et de faire rire les foules, on voterait pour lui dans une course au leadership, a dû s'apercevoir lui-même que, si les gens riaient de ses farces, lorsqu'est venu le temps de choisir un chef de parti, ils ont choisi quelqu'un d'autre, parce qu'ils voulaient avoir quelqu'un de responsable pour représenter le parti dont il est lui-même membre.

Ayant dit ces choses, je voudrais aborder un sujet important, celui des fonds de retraite des employés qui, malheureusement, perdront leur emploi à la suite de la décision que nous avons prise. Le député de Lévis disaitî Ce n'est pas réellement une privatisation. Je l'ai dit et je suis tout à fait d'accord avec cela; je ne m'entête pas sur cela. Cette décision fait suite à un assainissement des finances publiques. De fait, je l'ai toujours dit, la première vraie privatisation, c'est la privatisation de SOQUEM et le lancement de Cambior. Nul ne me contestera si je dis que, la privatisation de SOQUEM et le succès, j'en suis sûr, du lancement de ce régime d'épargne-actions et de quelque 150 000 000 $ en actions qui permettront le lancement de Cambior favoriseront le développement économique du Québec et de l'Abitibi en particulier.

C'est certainement ce genre de privatisation que nous avions en tête, mais il est évident que, à la suite de nombreuses décisions malheureuses prises par le gouvernement précédent, je pense en particulier... Vous voulez parler de perte d'emplois? Je vais vous parler de perte d'emplois. Vous avez investi quelque 400 000 000 $ ou 500 000 000 $ dans la Société nationale de l'amiante et, en ce moment, je crois qu'on a perdu entre 1500 et 2000 emplois dans l'industrie de l'amiante, malgré le fait que vous y ayez investi entre 400 000 000 $ et 500 000 000 $. Si vous voulez parler de perte d'emplois, on peut vous en parler. Cela a été pour les contribuables du Québec un coût bien plus élevé que celui dont nous discutons présentement.

M. Garon: Parlez-en à M. Parizeau... M. Fortier: M. le Président...

M. Garon:... mon collègue sur le dossier du sucre.

M. Fortier: Oui, c'est cela. Alors que ces gens-là étaient supposés être solidaires lorsqu'ils faisaient partie du Conseil des ministres, maintenant que les décisions sont prises, l'un qui a quitté le Conseil des ministres dit a, l'autre dit b et l'autre dit c. On se demande de quelle façon ce Conseil des ministres pouvait fonctionner et on s'aperçoit que, bien souvent, le député de Lévis a pu bousculer certains de ses collègues et aller au Conseil du trésor pour obtenir des fonds, alors que le public aurait été mieux servi s'il y avait eu des gens au Conseil du trésor pour dire: Non, M. le député de Lévis. Malheureusement, ils n'ont pas dit non et ce sont les contribuables qui paient.

M. le Président, dans notre politique de privatisation, si vous vous êtes donné la peine de l'étudier - je suis sûr que vous l'avez fait parce que je sais que vous êtes une personne très responsable - nous avons dit très clairement que nous voulions donner un traitement équitable pour ceux qui pourraient souffrir des rationalisations qui seraient le fait des décisions que nous prendrions. En particulier, à la page 35 de notre politique sur la privatisation des sociétés d'État, je lis: "Le gouvernement s'assurera que, dans le cadre des rationalisations qui pourraient s'imposer, les employés, les communautés et, le cas échéant, les fournisseurs seront traités équitablement. "

De fait, c'est ce que nous avons cherché à faire depuis le jour où nous avons pris la décision de fermer la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire. Le député peut bien dire: Mais le projet de loi ne parle pas de ces cas. C'est vrai parce que nous avons indiqué très clairement que c'est notre responsabilité de nous occuper des employés qui vont perdre leur emploi, de leur donner des primes de départ, de régler leur fonds de retraite. C'est la responsabilité du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation de trouver des solutions. Nous avons octroyé des budgets pour cela; je crois que c'est 2 500 000 $ pour recycler les producteurs agricoles dans d'autres types de cultures. Nous avons octroyé 1 500 000 $ pour payer les compensations, les autres primes et régler les autres problèmes reliés au départ des employés de la raffinerie de sucre. Nous avons engagé une firme de spécialistes pour permettre à ces travailleurs mis à pied de pouvoir plus facilement se chercher un emploi en bénéficiant de l'aide d'un conseiller.

Je peux vous dire qu'au moment où on se parle 34 personnes sont è la recherche active d'un emploi, 13 ont pris leur retraite et 14 ont trouvé un emploi. Ce n'est déjà pas si mal, quelques mois après que la décision a été prise. Il est vrai - je le reconnais - que les efforts devront continuer pour trouver des emplois à ces gens et que, de fait, dans les cas où il y a des problèmes avec les fonds de retraite, nous devrons trouver des solutions. De fait, nous avons trouvé des solutions dans plusieurs cas.

À ma connaissance, plusieurs cas ont été réglés, mais il reste deux problèmes à

régler. J'ai une lettre ici qui indique justement que le problème est dans le cas des employés de plus de 45 ans. Si le député connaît la loi, il sait pertinemment que, lorsqu'un travailleur, un employé de quelque compagnie que ce soit a plus de 45 ans, la loi sur les régimes de retraite dit très clairement qu'on ne peut pas reprendre ses avoirs et les investir ailleurs. C'est malheureux, mais c'est ainsi que la loi a été faite. C'est également vrai pour les employés de la Raffinerie de sucre du Québec.

Le problème qui se pose, c'est pour les travailleurs qui ont plus de 45 ans, mais nous avons quand même offert, dans certains cas, de payer certains bénéfices, ce qui a été accepté dans au moins six cas. Il reste deux cas à régler et ce sont les deux cas auxquels vous avez fait allusion, soit celui des employés de 45 ans et plus et celui des employés de plus de dix ans de service. D'ailleurs, il y a 350 000 autres travailleurs qui sont dans la même situation, qui ne peuvent retirer en main propre les investissements qu'ils ont faits dans leur fonds de retraite.

Nous avons fait la proposition que la Raffinerie de sucre du Québec paye comptant les intérêts accumulés. Cela signifie 20 000 $ dans chacun des cas. Nous avons permis de retirer jusqu'à 25 % des cotisations et, en plus, nous leur payons une année de salaire. Pour le reste, c'est-à-dire les 75 % des cotisations qui ont été payées par les employés, nous leur donnerons une pension différée. Il y avait six cas semblables. Dans quatre de ces cas, les employés ont accepté la proposition que nous leur avons faite et dans deux cas, cela a été refusé. J'imagine que les discussions continuent. Ces deux personnes nous font des représentations; Mme la députée nous a fait part d'une lettre qu'elle avait reçue. Nous allons continuer de discuter avec ces gens. C'est certain que la décision devra être prise à la lumière des offres que nous avons faites à tous les employés et aux six personnes qui ont des cas semblables, en particulier. La proposition que nous leur avons faite a été acceptée.

Je le répète au député: La proposition que nous avons faite a été acceptée dans quatre cas sur six. C'est donc dire que la proposition que nous avons faite n'était pas tout à fait inacceptable puisque quatre employés sur six l'ont acceptée. Mais vous comprendrez qu'en dépit de notre volonté pour régler ces problèmes d'une façon satisfaisante - si l'ex-ministre m'écoutait, il comprendrait, il saurait que, dans ces cas, ce n'est pas sur la place publique - même si on faisait venir ces gens ici, aujourd'hui, il n'est pas dans le meilleur intérêt de ces employés, ni dans l'intérêt public, ni dans celui du gouvernement de négocier ces choses sur la place publique.

Contrairement aux allégations du député de Lévis, l'ex-ministre de l'Agriculture, je réponds à la demande de compassion que faisait le député de Verchères en lui disant: Vous avez raison, vous défendez ces gens et je dis que vous faites votre travail. Bravo! Je crois que les députés qui font face à des situations comme celles-là, qui voient dans leur comté des gens qui sont en butte à des difficultés à la suite d'une fermeture, doivent faire des représentations. Le député a fait des représentations et je lui dis bravo. Je lui dis en même temps que nous, du gouvernement, n'avons pas attendu qu'il nous fasse ces représentations. Nous sommes sensibles aux représentations qu'il nous fait, mais d'autres nous en ont fait et nous avons, dans notre politique, cette détermination de régler ces cas de la façon la plus équitable possible. De fait, je dois dire que les avocats, les experts en relations de travail que nous avons conviés à nous aider pour cette fermeture, ont fait un excellent travail.

Dans la plupart des cas, le syndicat et les employés nous ont dit qu'ils étaient satisfaits des services que nous leur avons offerts et des conditions qui leur ont été offertes. Ceci fait justement suite à la politique qui nous inspire et qui veut qu'en dépit du fait qu'il nous fallait prendre une décision difficile il nous faut aussi régler ces cas, les cas individuels, de la façon la plus humaine possible. Là-dessus, je rejoins les représentations du député de Verchères et je voudrais l'assurer que la politique qui nous inspire, la politique du gouvernement, est une politique de développement économique. Même si cela peut être difficile pour certaines personnes, dans une région donnée, qui sont touchées par une telle fermeture, je voudrais l'assurer que notre politique d'ensemble vise, justement, à assurer de meilleures conditions économiques. Je ne crois pas, pour ma part, qu'on doive maintenir en vie artificiellement une compagnie qui est en faillite technique depuis deux ans, selon les évaluations qui ont été faites de toutes parts.

On parle des experts du ministre des Finances. J'ai ici en main un document qui vient du secrétaire associé au Développement économique - il ne faisait pas partie du ministère des Finances - et qui arrivait aux mêmes conclusions. Je peux vous citer ce document qui date de juin 1985. Il a été produit par quelqu'un qui a été l'attaché politique, à un moment donné, de M. Duhaime, mais qui ne travaillait pas pour M. Duhaime au moment où le document a été écrit et qui dit ceci: En termes d'approche...

M. Charbonneau: Qui est-ce?

M. Fortier: C'est M. Ypperciel. Il dit: "En termes d'approche, il ne s'agit plus d'une

politique de support à la production de la betterave, mais d'un projet industriel qui, à l'aide du fonds consolidé, essaie de déplacer un producteur privé de sucre raffiné et où l'approvisionnement en betteraves à sucre sert de mesure d'appoint aux importations de canne à sucre de la Raffinerie de sucre du Québec". Il fait une évaluation du dossier et je cite: "Beaucoup de gens pensaient que le Brésil, Cuba et autres substitueraient de façon massive leur pétrole importé par du méthanol produit à même la canne à sucre, avec comme conséquence une hausse constante de l'ordre de 0, 02 $ par année du prix du sucre et cela, malgré une stagnation de la demande. "

Autrement dit, il nous dit qu'en 1979, lorsqu'on avait lancé le développement de la raffinerie de sucre, certaines personnes avaient fait des hypothèses basées sur le prix du pétrole, croyant qu'à cause du prix élevé du pétrole des pays comme le Brésil, Cuba et autres utiliseraient du méthanol et que ceci pourrait créer un marché pour la betterave à sucre en particulier, pourrait créer un marché pour la raffinerie de sucre. Malheureusement, à la suite de la baisse du prix du pétrole et à la suite d'autres conditions internationales, ces conditions ne se sont pas matérialisées. Il arrive à peu près aux mêmes conclusions que nous en disant que les hypothèses, en 1984, étaient que le prix du sucre raffiné était de 0, 28 $ la livre. Ce n'est pas le cas dans le moment. (20 h 45)

Je crois que, sur le fond du débat, on s'entend pour dire que les conditions ont changé. Peut-être qu'en 1979 les gens escomptaient des conditions favorables au développement de la raffinerie; ce n'est pas le cas. On a fait, à un moment donné, des hypothèses, on a prévu un développement qui devait coûter quelque 35 000 000 $. Ensuite, cela a été 43 000 000 $ et, lorsque la construction a été finie, cela a été 58 000 000 $. Ceci a été ajouté au...

Le Président (M. Tremblay, Ibervïlle): Je m'excuse. Un instant, M. le ministre. Question de règlement. Je vous écoute, M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: Je ne voudrais pas interrompre le ministre. Comme je l'ai dit tantôt, je respecte son droit de parole. Je veux simplement lui demander s'il accepterait de déposer le document à la commission; auquel cas, on n'aurait pas besoin d'avoir recours au règlement. Je pense que cela pourrait être utile.

M. Fortier: C'est une page et quart et ce n'est pas mon document. C'est juste une page d'analyse. Cela me fera plaisir.

M. Charbonneau: Cela me fera plaisir.

M. Fortier: C'est semblable à l'analyse que nous avons faite.

M. Charbonneau: D'accord, mais vous êtes d'accord pour qu'on en ait des copies?

M. Fortier: Oui, oui. Je vais vous le donner.

M. Charbonneau: Très bien.

M. Fortier: Je disais simplement cela pour indiquer que, dans le fond, ce ne sont pas juste les experts du ministère des Finances, c'est le Secrétaire général associé au développement économique, ce sont des gens d'autres ministères. Ce sont des gens qui se sont penchés sur les hypothèses et qui arrivaient à peu près aux mêmes conclusions que nous, quoique eux concluaient... Ils n'avaient pas encore conclu; ils disaient: "Compte tenu de ce qui précède et des analyses faites de part et d'autre dans ce dossier, je pense qu'il est essentiel d'ouvrir des alternatives décisionnelles. Pour le secteur privé, la raffinerie de sucre possède des actifs et un achalandage qui, se monnayent d'autant que l'on se situe dans un marché stagnant. Par contre, si, pour différentes raisons, le ministère responsable de ce dossier refuse toute négociation avec des intérêts privés - je crois qu'on avait en tête que le député de Lévis ne serait peut-être pas enclin à négocier avec le secteur privé - il serait intéressant de demander au promoteur du projet d'évaluer l'opportunité de se départir de certains titres de son portefeuille pour financer les investissements. "

De toute façon, je voulais simplement faire la preuve, M. le Président, que différentes personnes se sont penchées sur le dossier, différents ministres des Finances de deux formations politiques se sont penchés sur le dossier, différents fonctionnaires et, dans ce cas-ci, c'est plutôt un attaché politique d'un ministre qui s'est penché sur le dossier. Ceux qui l'ont fait avaient une tête sur les épaules et, malgré la difficulté d'arriver à des conclusions difficiles, ils l'ont fait et nous avons pris cette décision.

Je rejoins le député de Verchères: lorsque vient le temps de régler des problèmes humains, des problèmes de mises à pied, il faut le faire avec beaucoup de compassion. Je ne crois pas que c'est en faisant parader ces gens ici en commission parlementaire pour discuter de leur cas particulier que nous allons régler leurs problèmes, mais je crois et je veux donner l'assurance à la commission que, dans le moment, c'est surtout le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation aidé des experts du ministère des Finances, qui est en train de régler ces cas-là.

En conclusion, je voudrais simplement assurer les membres de la commission que, malgré le fait que nous refuserons de voter pour la motion, nous allons faire tout notre possible pour régler ces cas qui nous sont présentés de la façon la plus humaine possible et dans le meilleur intérêt du Québec. Je vous remercie.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le ministre. Si vous voulez bien, on va déposer le document à la commission. On va en faire faire une photocopie pour l'intégrer au procès-verbal de la commission.

M. Fortier: Je ne sais pas si c'est pour l'intégrer au procès-verbal de la commission, mais c'est certainement pour...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Normalement, tout document déposé à la commission doit être intégré au procès-verbal de la commission.

M. Charbonneau: Cela me fera plaisir, d'ailleurs, pour les fins du procès-verbal de la commission, de déposer les documents que j'ai déjà offert de déposer à l'Assemblée nationale, mais qui n'ont pas trouvé preneur, M. le Président, sauf chez les députés ministériels. Ce sera pour les archives, M. le Président, pour ceux qui voudront consulter.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Je ne crois pas que ce soit pertinent, des dépliants électoraux concernant...

M. Charbonneau; Non, je ne parle pas des dépliants, M. le Président, je parle des documents gouvernementaux.

M. Fortier: Mais on n'en a pas demandé le dépôt.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous parlez de documents gouvernementaux?

M. Fortier: II n'y a personne qui en a demandé le dépôt. Le règlement dit qu'il faut que cela soit demandé.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Cela, c'est vrai. Personne ne l'a demandé.

M. Charbonneau: On s'arrangera pour que ce soit demandé, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. Vous parlez de quels documents en particulier?

M. Charbonneau: M. le Président, je peux vous les citer: les documents du ministère des Finances, de la direction de la raffinerie de sucre, le mémoire de l'ancien ministre de l'Agriculture, les analyses du ministère des Finances, mais également les contre-analyses du ministère de l'Agriculture et de la raffinerie de sucre.

M. Fortier: II peut bien les déposer.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vu que c'est le président qui décide, j'accepte que vous déposiez les documents.

M. Charbonneau: Très bien, M. le Président. Je vous en ferai faire des copies parce que j'en ai une seule copie pour mon utilisation. Aussitôt que possible, je m'arrangerai pour que les membres de la commission en aient tous des copies.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Très bien. Maintenant, j'ai reconnu le député de Dubuc.

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Évidemment, je n'ai pas grand espoir que le ministre et la députation acceptent davantage le sous-amendement qui a été présenté par mon collègue. Cependant, j'ai écouté le ministre délégué à la Privatisation et j'ai surtout bien entendu sa conclusion: Tous ceux qui ont une tête sur les épaules, on les a écoutés. MM. les députés, parlez! Défendez votre dossier, défendez votre population. Bravo! On trouve que vous parlez bien. Mais nous, nous liquidons! Nous liquidons l'engagement pas seulement d'un de nos candidats, nous liquidons l'engagement d'une série de candidats.

J'ai ici un journal qui est sans doute connu en régions, L'Oeil régional, qui faisait un reportage le 12 novembre 1985. On y voit, d'ailleurs, des photographies des candidats du Parti libéral de Saint-Hyacinthe, de Verchères et de Richelieu.

Dans son article, au fait, dans son reportage, le journaliste Marc Ledoux dit que le chef du parti - c'est M. Bourassa - a lancé le programme global qu'ils entendent mettre de l'avant dans leur région. Plus loin dans l'article, il dit que ce programme libéral a, d'ailleurs, été bâti à la suite d'une longue consultation entre les candidats locaux et les autorités du parti. Il dit que la liste des engagements est contenue dans le document de base du programme libéral, "Maîtrisons l'avenir".

Quel est l'avenir, pour tous ceux et pour toutes celles qui sont touchés par cette fermeture de la Raffinerie de sucre du Québec? Le ministre tente de nous faire croire qu'il s'agit d'un nombre très limité. Ce n'est pas important, plus ou moins important par rapport à leur politique. Le gouvernement va économiser 18 000 000 $ en quatre ans. Les consommateurs, eux, qui sont les mêmes citoyens du Québec, vont en

payer autant par année, par exemple, en augmentation du prix du sucre.

Ces gens, le ministre a tenté de les ramener à 93, selon ce qu'il nous dit. Eh bien, j'ai un document sous les yeux, une déclaration commune des membres du Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du Québec qui comprend, comme mon collègue de Verchères l'a souligné tantôt, 24 organismes différents. Il dit ceci: "Si les associations et les individus qui composent le Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du Québec ont décidé d'unir leurs voix et leurs efforts, c'est beaucoup à cause de la conscience qu'ils ont tous de l'importance dans l'économie régionale et même québécoise de la présence de cette société d'État et de la production agricole qu'elle a fait naître, il y a maintenant plus de 40 ans. La raffinerie de sucre emploie actuellement 93 personnes à temps plein et environ 200 autres durant les quatre mois d'automne, ce qui signifie en fait 50 emplois permanents additionnels. 93 plus 50, cela fait 143. Ces 143 emplois permanents engendrent ailleurs 350 emplois indirects permanents selon le ratio habituellement utilisé de deux à deux emplois et demi indirects pour un emploi direct en usine. Dans ces emplois indirects, se trouvent, entre autres, les emplois dans le camionnage qui, sur une base permanente, se chiffrent à au-delà de 40. " On n'est plus à 93, on est rendu à 143, on est rendu à 413, M. le Président. On est rendu è 453, en fait. "En 1983 - je continue la lecture du document - 368 producteurs agricoles ont produit de la betterave sucrière. Si l'on tient compte qu'un emploi dans la grande culture crée, selon le modèle intersectoriel établi par le Bureau de la statistique du Québec, 1, 73 emploi indirect, on doit donc ajouter aux emplois agricoles 636 emplois additionnels indirects. Au total - ce n'est pas moi qui parle, je lis toujours le document du Front d'aide à la Raffinerie de sucre du Québec - c'est donc environ 1500 emplois directs et indirects qui sont en cause lorsqu'on parle de la fermeture de la raffinerie de sucre et de l'arrêt de la production de betterave sucrière. "

Je poursuis la lecture: "Certains disent que, dans le cas des producteurs de betterave, cela ne serait pas dramatique, puisque ceux-ci se recycleraient dans d'autres productions - j'ai, d'ailleurs, déjà entendu cela ici - mats on oublie alors la situation particulière dans les productions alternatives comme le maïs-grain. Dans ce domaine, entre autres le plus susceptible d'attirer les anciens producteurs de betterave, un afflux trop grand de nouveaux producteurs risquerait d'engendrer des surplus trop importants et, donc, des effets négatifs sur les prix acculant ainsi à la faillite plusieurs agriculteurs. D'autre part, il faut prendre en considération les pertes énormes que subiraient les dizaines de producteurs qui se retrouveraient pris avec des équipements de culture de betterave devenus inutilisables bien que presque neufs. Pour plusieurs, ces pertes signifieraient là aussi la faillite. "

Le document continue: "Parmi les autres données sur l'impact économique de la raffinerie de sucre, notons qu'annuellement l'entreprise de Mont-Saint-Hiiaire paie plus de 8 000 000 $ en salaires et dépenses, en bonne partie dans la région, entre 20 000 000 $ et 25 000 000 $ en achat de biens et services, le tout avec un chiffre d'affaires annuel de 40 000 000 $, et la ville de Mont-Saint-Hilaire perçoit des taxes diverses pour 225 000 $. " Le document dit finalement: "Par ailleurs, rappelons, encore une fois, que la disparition de la raffinerie de sucre provoquerait un effet à la hausse sur le prix du sucre payé par les consommateurs québécois. Le retour de la raffinerie de sucre sur le marché de la commercialisation en 1982 a eu des effets bénéfiques pour les consommateurs québécois qui ont épargné annuellement, depuis, une quinzaine de millions. Ces avantages seraient encore plus appréciables pour l'ensemble du Québec si la raffinerie pouvait opérer à pleine capacité dans une situation normalisée où une politique canadienne de régularisation des prix permettrait la création de milliers d'emplois additionnels tout en garantissant les meilleurs prix aux consommateurs. "

Si ces gens-là ne disent pas la vérité, si ces 24 organismes dont la Confédération de l'UPA du Québec, la Fédération de l'UPA de Saint-Hyacinthe et le Conseil central de la CSN de Saint-Hyacinthe ne disent pas la vérité, si les chiffres qu'ils avancent ne sont pas exacts, il serait facile pour le ministre de leur dire ici en commission parlementaire qu'ils faussent les données. II serait facile pour le ministre d'en faire la démonstration face à leurs prétentions. C'est cela qu'on demande. On a demandé d'entendre les gens qui étaient responsables des deux thèses mises en présence, celle du Syndicat des producteurs de betteraves sucrières et celle de Lantic. On a demandé de rencontrer pour faire la lumière l'association de protection des consommateurs. (21 heures)

On demande maintenant que trois des organismes qui font partie du front d'aide puissent venir exprimer leurs appréhensions, faire part de leur vision de la situation et de ce qu'ils offrent, eux, comme possibilités. Le ministre et les députés disent: Non, nous, on liquide. On liquide parce qu'on va économiser 18 000 000 $ sur quatre ans alors que les consommateurs, ces mêmes Québécois qui vont avoir 18 000 000 $ de moins de taxes, je suppose, vont payer en une seule année ces mêmes 18 000 000 $ en augmentation du prix du sucre puisque je maintiens que la concentration et le quasi-

monopole qu'on va aider à créer par cette privatisation vont entraîner pour le consommateur des augmentations de prix très importantes.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député, il faudrait conclure.

M. Desbiens: Je termine là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord.

M. Desbiens: Je rappelle toujours qu'un cent d'augmentation de la livre de sucre au consommateur, c'est 6 500 000 $ de plus payés par ces mêmes contribuables pour lesquels le ministre nous dit qu'il va économiser 18 000 000 $ en quatre ans, c'est-à-dire que les consommateurs vont payer ces 18 000 000 $, ils vont payer trois fois plus juste dans les quatre premières années et juste pour un cent.

Le Président (M. Tremblay, Iberville); Alors, merci...

M. Desbiens: C'est bien plausible que, si le prix du sucre augmente plus considérablement, les consommateurs et consommatrices du Québec vont se retrouver avec des factures et qu'ils auraient aimé bien mieux payer 18 000 000 $ de taxes pour quatre ans - cela fait environ 4 000 000 $ par année - que de payer l'augmentation sur le sucre, comme on le laisse entendre, et qui va certainement se produire à la suite de cette privatisation.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le député de Dubuc.

Maintenant, nous allons faire la mise aux voix de...

Oui?

M. Garon: Pas sur les consommateurs.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): J'ai cela ici.

M. Garon: Pas sur les consommateurs, là?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): On est sur le sous-amendement.

M. Charbonneau: II y avait l'amendement. Ce que le député de Lévis fait, c'est...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Mais il faut régler le sous-amendement.

M. Charbonneau: D'accord. Mais ce qu'il faisait, c'est qu'il demandait la parole, par la suite, sur l'amendement.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Après. D'accord. Pas maintenant.

M. Charbonneau: Non, c'est cela que je vous ai dit.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Maintenant, c'est la mise aux voix du sous-amendement que vous connaissez tous.

M. Charbonneau: C'est-à-dire...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Est-ce que vous voulez qu'on...

M. Garon: Voulez-vous le lire, M. le Président?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, je vais vous lire le sous-amendement simplement: "Que la motion d'amendement soit modifiée en ajoutant à la fin les termes "et la Confédération de l'Union des producteurs agricoles du Québec, la Fédération de l'UPA de Saint-Hyacinthe et le Conseil central Saint-Hyacinthe de la CSN. " Cela a été présenté par le député de Duplessis.

M. Garon: Un vote enregistré.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Un vote enregistré.

J'appelle le secrétaire pour le vote enregistré.

Le Secrétaire: M. Messier (Saint-Hyacinthe)?

M. Messier: Contre.

Le Secrétaire: M. Assad (Papineau)?

M. Assad: Contre.

Le Secrétaire: M. Beaudin (Gaspé)?

M. Beaudin: Contre.

Le Secrétaire: M. Dubois (Huntingdon)?

M. Dubois: Contre.

Le Secrétaire: Mme Legault (Deux-Montagnes)?

Mme Legault: Contre.

Le Secrétaire: M. Gardner (Arthabaska)?

M. Gardner: Contre.

Le Secretaire: Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata)?

Mme Dionne: Contre.

Le Secrétaire: M. Fortier (Outremont)?

M. Fortier: Contre.

Le Secrétaire: M. Tremblay (Iberville)?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Contre.

Le Secrétaire: M. Desbiens (Dubuc)?

M. Desbiens: Pour.

Le Secrétaire: M. Charbonneau (Verchères)?

M. Charbonneau: Pour.

Le Secrétaire: M. Garon (Lévis)?

M. Garon: Pour.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Le sous-amendement est rejeté.

M. Fortier: Article 1?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): On n'est pas encore rendu à l'article 1, M. le ministre. Maintenant, nous revenons sur l'amendement du député de Dubuc et je cède la parole au député de Lévis.

M. Garon: M. le Président...

Reprise du débat sur la motion d'amendement

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Voulez-vous que je vous lise l'amendement avant ou si vous savez ce qu'il en est?

M. Garon: Je le sais.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous le savez?

M. Garon: C'est la fédération des consommateurs.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Exactement. C'est la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, je savais l'intérêt du député de Dubuc pour les associations de consommateurs. C'est pourquoi je ne suis pas étonné qu'il ait proposé que nous entendions la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec. Après avoir refusé qu'on entende tout le monde, le député de Saint-Hyacinthe, refusant qu'on entende même les travailleurs agricoles et les cultivateurs de Saint-Hyacinthe, les travailleurs de la CSN de Saint-Hyacinthe, votera sans doute contre le fait qu'on entende les consommateurs de son coin également.

Mais il y a plus de 600 000 000 de livres de sucre en jeu et les prix sont actuellement trop élevés. Je vous dirai, M. le Président, que celui qui a apporté le meilleur argument, c'est le ministre de l'Agriculture cet après-midi, inconsciemment peut-être, quand il a dit qu'il se fiait sur la concurrence américaine pour venir établir un niveau de prix raisonnable. Il a démontré, en affirmant cela, qu'il ne connaissait pas le dossier. Aux États-Unis, les prix du sucre sont administrés. À l'été 1985, alors que les raffineurs québécois achetaient du sucre de canne sur les marchés internationaux à 0, 028 $, aux États-Unis, les raffineurs payaient le même sucre 0, 27 $. Je dis au député de Portneuf que, même en le payant 0, 27 $, ils étaient capables de concurrencer les raffineurs canadiens. Pourquoi? Parce que, même s'ils s'approvisionnent à dix fois meilleur marché que les raffineurs américains, ils ne vendent pas à meilleur marché qu'aux États-Unis. Quand on regarde le prix au détail du sucre aux États-Unis et au Canada, on se rend compte...

Le député de Papineau est commerçant et il devrait connaître un peu plus les règles du marché. Le jeune député de Saint-Hyacinthe, qui est encore aux études de droit et qui n'a pas l'expérience d'un commerce complet comme celui du sucre pourra se faire expliquer par le député de Papineau ce que cela signifie lorsque les raffineurs canadiens paient le sucre sur les marchés internationaux, dans les marchés de "dumping", 0, 028 $ la livre alors qu'aux États-Unis les raffineurs américains doivent l'acheter de leurs producteurs à 0, 27 $ la livre. Lorsque les exportateurs canadiens aux États-Unis - c'est pour cela qu'on a dit que le marché américain était payant - vendent au prix du marché administré à 0, 27 $ là livre, les Américains réussissent quand même à venir exporter sur le marché canadien du sucre qu'ils ont payé dix fois plus cher à leurs producteurs américains.

Cela veut dire qu'il n'y a pas de concurrence au Canada. La preuve est aussi simple que cela à faire. Ce n'est pas une règle très complexe. J'espère que le député d'Outremont, spécialiste dans le domaine nucléaire - même genre de spécialité que les spécialistes de Tchernobyl qui avaient fait une centrale nucléaire - pourra comprendre cette règle mathématique qui est très simple, d'une simplicité enfantine, à la condition de ne pas se cacher la tête dans le sable. Je dis que, malgré que les raffineurs canadiens achètent leur sucre sur un marché

de "dumping" international à des prix de 0, 028 $, comme à l'été 1985, et que les raffineurs américains doivent le payer 0, 27 $, le sucre aux États-Unis et au Canada se vend aux consommateurs à peu près au même prix.

On va me dire que ce sont des gouvernements responsables qui donnent de tels avantages à des raffineurs alors qu'ils ne font bénéficier les consommateurs de leur pays d'aucun avantage? Les seuls avantages se retrouvent dans les caisses électorales. Vous remarquerez que les plus gros fournisseurs des caisses électorales sont les raffineries de sucre. Vous n'avez qu'à voir les publications parce que, à un moment donné, on a publié dans les journaux, au moment du référendum, les noms de ceux qui contribuaient aux caisses électorales, et vous verrez à quel point les raffineries de sucre crachent lourd auprès de politiciens - je ne dirai pas véreux, mais innocents - qui ne prennent pas le temps de protéger les consommateurs.

Je dois vous dire que, dans le domaine du sucre, on exploite les consommateurs, si on compare le prix qu'on paie. C'est de l'exploitation dès le départ de la chaîne jusqu'aux consommateurs. Ceux qui pensent que ce dossier, par le vote qu'ils ont pris cette semaine, sera mort et enterré, se trompent. Je vais vous dire que nous allons en parler è tel point que vous allez vous réveiller la nuit, vous aurez des cauchemars à entendre parler de ce dossier. Ne vous trompez pas, nous allons parler de ce dossier et nous allons demander des votes enregistrés pour que les gens sachent quels étaient ceux qui n'ont pas été capables de voir dans un dossier aussi facile à voir.

Une voix: Du chantage?

M. Garon: Non, je ne chante pas, je ne sais pas chanter. Je ne chante pas, sauf que je vous parle du manque de courage des députés libéraux qui ne prennent pas le temps d'approfondir les dossiers. Je vais leur donner une règle très simple; c'est facile de prendre cela en note et de vérifier par la suite. L'an dernier, les raffineurs canadiens ont payé leur sucre, sur les marchés internationaux, 0, 028 $. Le ministère des Finances, ces grands spécialistes béats, candides, sereins, avec lesquels le député d'Outremont doit s'entendre à merveille "over a cup of tea, on a 5 o'clock tea"...

M. Fortier: On n'a pas de problème.

M. Garon: Ils doivent avoir un plaisir féroce à discuter ensemble. Je leur dirai, toutefois, que les vérités réelles sur le marché, c'est que les raffineurs canadiens ne transmettent jamais aux consommateurs canadiens les avantages qu'ils ont à acheter du sucre de dumping. Depuis 75 ans, cette politique sucrière canadienne n'a été utile qu'aux caisses électorales des partis politiques. Ce dossier est un dossier qui commence. C'est un dossier que nous avons eu le temps d'approfondir et que nous connaissons bien. Nous démontrerons à quel point les consommateurs n'en retirent aucun avantage.

Nous demandons que vous puissiez être éclairés. Ce ne sont pas des affirmations. Je pense avoir eu, dans le secteur agroalimentaire, une certaine crédibilité. Pensez-vous que j'affirmerais une telle chose si c'était faux, au risque de me faire démentir publiquement? J'ai été dans ce dossier durant neuf ans. Il n'y a sûrement personne autour de cette table, même au cours des années d'expérience accumulées, exception faite du député de Verchères, qui ait passé le dixième du temps que j'ai passé dans ce dossier. J'accumule même l'expérience de tous les députés libéraux ensemble, incluant les fonctionnaires du ministère des Finances.

Si vous regardez les publications mensuelles dans le domaine du sucre, vous vous rendrez compte qu'il n'y a habituellement pas d'écart entre le prix du marché à la consommation, le prix de vente à la consommation au Canada et aux États-Unis. Occasionnellement, on est un petit peu plus bas, surtout quand il y a des enquêtes du directeur des enquêtes sur les coalitions. On a vu, quand ils étaient devant les tribunaux avec des poursuites du ministère et que M. André Ouellet veillait au grain, que le prix a été un petit peu inférieur. Habituellement, il n'y a pas beaucoup d'écart, il n'y en a pas. Tenant compte du fait que les raffineurs canadiens achètent des surplus de dumping à des prix dérisoires, ils n'en font profiter aucunement les consommateurs canadiens. Et le ministre de l'Agriculture vous a dît cet après-midi en plus que, même en payant dix fois plus cher leur sucre, les raffineurs américains étaient capables de concurrencer les raffineurs canadiens sur le marché canadien. Il considérait que c'était une protection. Belle protection!

C'est évident qu'à ce moment-là le niveau des prix est à peu près égal en Amérique du Nord, sauf que les raffineurs canadiens n'ont pas fait travailler beaucoup de monde au Canada et qu'ils ont acheté du sucre à des prix de famine, dans l'exploitation humaine de la production de canne à sucre qui est équivalente à l'esclavage, selon les déclarations mêmes de la ligue anti-esclavagiste de Londres.

M. le Président, pour éclairer davantage l'Opposition, je vais présenter...

Une voix: Bon!

Sous-amendement proposant d'entendre Landell Mills Commodities Studies et BMA

M. Garon:... un sous-amendement qui se

lira comme suit: "Que la motion d'amendement soit modifiée en ajoutant, à la fin, les termes: "et la firme Landell Mills Commodities Studies, de Londres, de même que les consultants allemands

Braunschweigische Machinenbauanstalt (BMA) responsables du design de l'usine depuis 197B.

Une voix: Fermez les guillemets. Vous avez oublié de fermer les guillemets.

M. Fortier: Ah! Est-ce qu'on peut avoir la copie?

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Est-ce qu'on peut avoir la copie?

M. Charbonneau: On a engagé les meilleurs experts.

M. Gardner: On veut la copie.

M. Charbonneau: On voudrait bien qu'ils soient confrontés aux gens du ministère des Finances, ces experts-là.

M. Gardner: Les connaissez-vous, au moins?

M. Charbonneau: On les a engagés, câline!

M. Gardner: Tabarnouchei

Une voix: Cela a dû coûter cher.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): C'est recevable dans la mesure où on peut convoquer ces gens-là.

M. Garon: Ils sont très convocables, ils connaissent très bien le dossier. Ils ont été consultés à plusieurs reprises par la Raffinerie de sucre du Québec.

M. Gardner: Est-ce qu'ils vont venir à leurs frais, s'ils viennent d'Allemagne?

M. Garon: Non, la commission les défraie.

M. Charbonneau: On va commencer par s'entendre sur leur venue et, après cela, on réglera les détails.

M. Gardner: On ne s'entendra pas.

M. Garon: Cela va coûter beaucoup moins cher que la décision du gouvernement.

M. Gardner: On ne fera pas de folie comme cela.

M. Garon: Cela va coûter moins cher que les bénévoles à 400 $ par jour.

M. Gardner: On ne fera pas de folie comme cela. Vous pouvez être sûr qu'on sera contre.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le ministre, vous avez quelques mots à dire là-dessus? Je vous écoute. (21 h 15)

M. Fortier: Sur la recevabilité, M. le Président. Ce qui m'inquiète dans la proposition qui nous est faite - ils l'ont dit tout à l'heure, ils ne font pas un "filibuster", je crois qu'ils voudraient entendre des gens qui nous permettraient de disposer du sujet le plus rapidement possible - c'est qu'il est bien certain qu'en mettant sur la liste des gens d'Allemagne on ne peut pas convenir très facilement que ces gens pourraient être disponibles prochainement.

Je me pose des questions à savoir si c'est réellement recevable. Les membres de la commission doivent faire des propositions qui nous permettraient d'accélérer les travaux puisque eux-mêmes ont dit qu'ils voulaient faire des propositions pour étudier la dynamique de la fermeture de l'usine, mais sans retarder les travaux indéfiniment. Présentement, on ne peut en avoir l'assurance parce qu'ils n'ont pas pris contact avec ces gens et ce sont des gens d'un autre pays. À cause de cela, je me demande si la motion est recevable puisque ce sont des gens de l'extérieur du Québec et de l'extérieur du Canada. Malgré toute ma bonne volonté, je porte à votre considération ces difficultés qui feraient en sorte que la motion ne serait pas recevable.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député de Verchères, je vous écoute.

M. Charbonneau: M. le Président, sur la recevabilité. Je pense que tes arguments que vient de soulever le ministre n'ont aucun rapport avec la recevabilité. Je pense que la commission doit d'abord s'entendre pour faire venir des organismes et, par la suite, prendre les moyens soit pour qu'ils viennent, soit pour qu'on aille les voir. Dans ce cas, je crois que ces gens, étant donné qu'ils ont collaboré avec la raffinerie de sucre, seraient intéressés et concernés.

Cela n'a aucun rapport, les problèmes de faisabilité de cette nature, avec le fait qu'une motion de cette nature soit recevable ou non à ce moment-ci de nos travaux. On est à l'étape, en vertu de l'article 244, où on peut demander de procéder à des consultations particulières. On peut consulter toutes sortes d'experts ici ou ailleurs. D'ailleurs, je vous signale que les commissions peuvent éventuellement se donner des mandats qui leur permettraient d'aller à l'étranger ou de faire venir des experts étrangers.

Donc, M. le Président, je pense qu'il y

a deux questions et la motion, à sa face même, ne présente pas un caractère différent et irrecevable si on la compare à toutes les autres motions que nous avons présentées jusqu'à maintenant.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. Excusez-moi. Je pense que...

M. Fortier: Je me rends à l'argumentation du député. Je ne sais pas ce que vous allez statuer, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. Je présume que ces firmes existent encore, à ce moment. Étant donné que maintenant la question de savoir si elles peuvent être disponibles ou pas, c'est une question de modalité, je déclare donc le sous-amendement recevable.

Une voix: Cela ne change rien que ce soient ceux-là ou d'autres.

M. Gardner: J'ai hâte de les entendre parler, ces compagnies allemandes. On va vous instruire. On va nous instruire. Allez-y.

Une voix: Si on les demande, c'est pour cela.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): La parole est è celui qui a proposé ce sous-amendement, c'est-à-dire le député de Lévis, pour les trente prochaines minutes.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, il est temps qu'on sorte un peu en dehors de notre petite cour et qu'on décide de voir, sur le plan international, les grands spécialistes de l'industrie du sucre. On risquerait moins de commettre les erreurs que, actuellement, le gouvernement est en train de commettre, qui ne sont pas des cure-dents, mais des madriers.

La firme Landell Mills Commodities Studies est une firme qui publie des analyses à tous les trois mois et qui est reconnue dans toute l'industrie du sucre comme le grand spécialiste. Elle n'est pas un organisme comme ceux qu'a consultés le ministère des Finances, qui préparent des documents pour ceux qui vont revendiquer des prix de soutien; elle prépare plutôt des données économiques pour ceux qui vont déterminer leurs orientations, leurs décisions sur les marchés du sucre.

La firme Landell Mills Commodities Studies est considérée dans le monde entier comme le grand expert sur les études du marché du sucre, à tel point que dans les études qu'elle a fournies au moment où le ministère des Finances consultait ses supposés spécialistes qui disaient que le prix du sucre ne changerait pas pendant quatre ou cinq ans, la firme Landell Mills Commodities Studies nous avait dit exactement ce qui s'est passé depuis ce temps. Depuis l'été 1985 ou le printemps 1985, les prévisions qu'elle a faites ont été parfaitement exactes et pour les raisons qu'elle avait mentionnées, alors que les études qui ont été faites par le ministère des Finances se sont révélées totalement fausses.

D'ailleurs, nos experts de la raffinerie, lors de la réunion de confrontation, lorsque les gens de la raffinerie avaient rencontré les gens des Finances, leur avaient dit: Personne de sérieux dans l'industrie du sucre ne consulte les gens que vous consultez. Il s'agit essentiellement d'études qui sont faites pour la FAO pour tenter de justifier des subventions additionnelles ou des prêts à des bas taux d'intérêt de la part d'entreprises ou de pays où l'industrie du sucre est misérable et n'a aucune vigueur.

Tandis que les gens sérieux, dans le domaine du sucre, consultent Landell Mills Commodities Studies et même l'étude de la FAO, à laquelle référait le ministère des Finances, reconnaît, à la page 29, paragraphe 82, que: "It is not possible to predict the course the market will take between 1985 and 1990 in terms of stocks and prices because this will depend primarily of random weather factors. " L'étude ne contient, d'ailleurs, aucune prévision de prix malgré les affirmations qui ont été faites par les pseudo-spécialistes du sucre du ministère des Finances du Québec.

Il est vrai que le prix de base du sucre utilisé dans les états pro forma est de 0, 06 $ américains et que, l'été dernier, le prix du sucre était à un "bas" historique. À cause de ces fluctuations imprévisibles du marché mondial, c'est à partir de ces prévisions qu'il faut travailler avec une moyenne basée sur plusieurs années. Il ne faut pas essayer, comme on l'a fait aux Finances, de dire: Le prix est bas, ce n'est pas payant, il faut vendre. Il n'y a personne dans l'industrie du sucre qui travaille comme cela quand on sait qu'il y a des cycles, comme il n'y a personne qui travaille dans l'industrie du sport sans consulter les cycles et, comme personne ne travaille dans l'industrie du boeuf sans contrôler les cycles.

Le raisonnement insignifiant qui a été fait par le ministère des Finances est celui-ci: Actuellement, le sucre ne paie pas; donc, il faut vendre. Dans le communiqué même du ministre de l'Agriculture, il est dit que, de 1943 à 1982, sur 40 ans, la Raffinerie du sucre du Québec avait rapporté plus de profits qu'accusé de pertes. Personne ne regarde l'industrie du sucre dans une courte période de temps. Je sais qu'on essaiera de faire n'importe quelle affirmation, sauf que la réalité est là et que le prix du sucre, à 0, 03 $, est un "bas" historique.

Nos spécialistes du ministère des Finances du Québec ont déclaré, à ce moment, que la situation avait changé, que la structure avait changé et que nous étions en face d'un nouveau cycle. Ils me font penser un peu aux pseudo-spécialistes du porc qui avaient, à leur tête, le ministre actuel du Travail et qui venaient me voir à mes bureaux, en 1978, et qui me disaient: II faut absolument que le gouvernement ne touche plus au porc. Les cycles historiques sont terminés. Maintenant, le porc, ce sera toujours payant. J'aurais dû faire ces enregistrements et, aujourd'hui, faire jouer cela pour montrer jusqu'à quel point ces pseudo-spécialistes ne comprenaient rien au domaine économique.

M. Fortier: II n'y a que vous qui comprenez?

M. Garon: Au contraire, il y a beaucoup de gens, sauf qu'il faut prendre les bonnes études, les bonnes analyses et ne pas dire, d'un coup sec, à un moment donné, parce qu'on est au monde à cette époque que les cycles ne jouent plus. Les cycles, dans le domaine agricole, ont joué de tout temps. Le principal responsable, cela a été la température. Si la température fait en sorte qu'il y a des surplus, les prix baissent parce que la demande de beaucoup de produits agricoles est inélastique. Cela veut dire qu'une augmentation ou une baisse dans les quantites amène des changements plus que proportionnels dans les prix. Ce sont les règles de base en économie. On sait pourquoi. Parce que, même si le prix d'un produit agricole diminue, vous n'en consommerez pas beaucoup plus parce que vous êtes saturés.

Quand on a parlé de la demande du sucre au ministère des Finances, on nous a dit qu'elle n'augmenterait pas parce que les gens étaient au régime et qu'aujourd'hui la tendance était plutôt à la baisse parce que les gens voulaient diminuer leur consommation de sucre. Tous les spécialistes dans le monde entier disent que, au contraire, la consommation du sucre dépend de l'augmentation du niveau de vie de la population dans le monde. Quand la population et le niveau de vie augmentent, la consommation de sucre augmente. C'est évident qu'en Amérique du Nord, si le niveau de vie augmente, la consommation n'augmente pas beaucoup plus. L'Amérique du Nord représente seulement, Canada et États-Unis inclus, autour de 250 000 000 à 260 000 000, alors que, dans le monde, la population actuelle est autour de 5 000 000 000 à 6 000 000 000.

Vous savez, j'ai rencontré ces prétentieux fonctionnaires des Finances qui pensent tout savoir dans un domaine qu'ils n'ont jamais étudié profondément, qui, à travers les obligations et les actions, ont regardé et feuilleté quelques études. Sauf que tous les experts du monde disent le contraire de ce qu'ils disent. Tous, ils nous ont dit que la canne à sucre, c'était l'avenir.

Je ne sais pas si vous avez écouté, mais au cours du voyage que je faisais au mois de juin en Europe, j'ai demandé à rencontrer les plus grands commerçants de sucre de l'Europe. Je leur ai dit: Nos gens, au ministère des Finances, prétendent que l'avenir est dans la canne et qu'il n'y a pas d'avenir dans la betterave. Cela a été le fou rire général. On a pu rire tout le temps de l'appéritif, parce que les gens ont dit: Vos experts sont les seuls dans le monde qui pensent ainsi, puisqu'il n'y a pas d'avenir dans la canne.

Pourquoi? Parce que depuis 200, 300 ou 400 ans, sauf qu'on peut peut-être affiler un peu plus les machettes aujourd'hui qu'il y a 200 ou 300 ans, il n'y a aucune augmentation de productivité, tandis que, dans la betterave, il y a des augmentations de productivité considérables, tant dans la cueillette que dans l'ensemencement.

M. Marier qui est président de la raffinerie est même allé au Japon où on réussit à faire une production, en trente jours de plus, en semant des "paper pots", en ensemençant des graines, d'abord, dans des serres, pour prolonger la saison de trente jours et avoir des rendements accrus considérables.

Pourquoi? Parce que la technologie dans le domaine des betteraves s'est accrue de façon incroyable, alors qu'il n'y a pas d'accroissement de productivité dans la canne, parce qu'on la recueille avec la misère humaine, aujourd'hui comme hier, avant-hier ou il y a cinq siècles. C'est la misère, la canne à sucre. La betterave, c'est la machinerie, c'est la productivité.

Le député qui est parti, qui était ici tout à l'heure, le député d'origine française de Lafontaine, pourra vous dire a quel point, au nord de Paris, il y a des milliers d'hectares de betteraves qui sont payants avec une industrie sucrière dynamique. On verra la même chose aux États-Unis et dans tous les pays industrialisés. Mais vous verrez rarement de la canne.

Il y en a encore aux États-Unis, dans le sud, vestige du temps des esclaves. Mais vous ne verrez pas de canne a sucre dans les pays dynamiques comme les États-Unis. Vous ne verrez pas de canne à sucre dans les pays européens modernes; vous n'en verrez pas. Pourtant, du haut des étages du ministère des Finances, nos grands spécialistes fonctionnaires disaient: L'avenir est dans la cannei C'est quelque chose d'entendre cela autour d'une table. Bonne mère! Il va falloir leur démontrer le contraire, alors que, pour eux, c'est un axiome, un postulat, on part de là.

Les grands spécialistes que sont la firme Landell Mills Commodities Studies ont indiqué quel serait l'avenir dans l'industrie du sucre. Cela a été présenté au ministère des Finances. Mais les gens ont dit: C'est mieux de fermer une usine de 150 000 000 $ que d'admettre ses erreurs.

Dans l'industrie du sucre, la firme Landell Mills Commodities Studies, de Londres, est considérée comme le gourou du marché. Sa publication, "Sugar Quarterly", constitue une des références professionnelles les mieux acceptées, avec Connell Commodities et F. O. Licht's, par exemple, des négociants du sucre. Or, les pronostics publiés dans le numéro du 8 avril 1985 de "5ugar Quarterly" font paraître bien conservatrice l'hypothèse de 0, 06 $ US la livre retenue par la raffinerie de sucre, et presque ridicule la prétention des agents du ministère des Finances. Ce sont les spécialistes du sucre qui disent cela. (21 h 30) "The outcome of these conflicting influences is summarized in the first column of table 15. Spot to prices are expected to edge only slowly above 0, 04 $ per pound over the next six months, and to be a little above 0, 05 $ by the end of 1985. This implies an annual average price of only 0, 044 $, which represents, in real terms, the lowest level recorded in living memory. "

Vous savez ce que cela veut dire. Ils établissent les prix, ils établissent comment cela se situe, quelle est l'augmentation annuelle des prix. On dit, quand on parle d'augmentation à 0, 05 $, qu'il s'agit de la plus basse augmentation de mémoire d'homme. "During 1986, the price recovery will be slow until the 1986-1987 crop year approaches, with its promise of significant stock reductions. Therefore, the world price of raws should remain in the 0, 05 $ to 0, 08 $ corridor until the third quarter is well under way, and should only test the 0, 10 $ barrier as 1987 comes into view. "We thought that it would be valuable to consider how these price projections would be affected by plugging lower real interest rates into our forecasting model (this understates the full impact, since lower interest rates will stimulate Third World economic activity, and boost sugar consumption). A 2 per cent per annum lowering of our interest rate projections would raise the forecasts for the final quarter of 1985 by 0, 011 $ per pound to 0, 65 $. "

Vous remarquerez que c'est exactement ce qui s'est produit. On est arrivé à la fin de 1985 à peu près autour de 0, 66 $. "The projection for the second quarter of 1986 would be lifted to 0, 085 $. " Et qu'est-ce que c'était? Tout cela a été dit à l'avance. Au second trimestre de 1986, c'était exactement 0, 085 $, exactement tel que prévu, alors que les spécialistes des Finances disaient: Cela va rester à 0, 028 $ pendant quatre à cinq ans. "The projection would be lifted to 0, 085 $, and that for the final quarter of 1986 would raise 0, 021 $ to 0, 119 $. " Vous savez que les études de la raffinerie démontrent qu'à partir de 0, 06 $ US la raffinerie est rentable, à condition de raffiner elle-même son sucre pour le marché du détail.

M. le Président, vous savez, l'an dernier, on disait aux gens des Finances: On a nos études, vous avez les vôtres, mais on pense que les nôtres... Je me rappelle que c'est, à ce moment-là, que M. Little avait dit à M. Séguin: M. Séguin, les références que vous utilisez, l'industrie ne les utilise pas. L'industrie utilise telle et telle firme pour ses études dans le monde entier. Vous, vous prenez des études à des fins de revendications de subventions ou encore d'aide étrangère aux pays sous-développés, ou encore de demandes d'avantages auprès de la Banque mondiale. Mais l'industrie qui doit vivre avec des profits ne se réfère pas aux études auxquelles vous vous référez. Cela avait été très clair, à ce moment-là, dans la discussion. J'avais eu une discussion interne... Je pense qu'actuellement on n'a pas trop le choix... Le député de Verchères était là, à ce moment-là. C'était cela notre discussion. Aujourd'hui, on est presque un an plus tard, pas tout à fait, mais à peu près un an plus tard et on se rend compte que les études qui se sont révélées à 100 % véridiques, ce sont celles que le ministère de l'Agriculture a fournies en collaboration avec la raffinerie de sucre, et celles que le ministère des Finances a fournies se sont révélées totalement fausses.

M. Fortier: Ce sont les mêmes prévisions que vous aviez faites en 1979 pour justifier votre investissement.

M. Garon: En 1979, vous savez quand les taux d'intérêt...

M. Fortier: Les experts vous avaient tout dit en 1979.

M. Garon: Non, non. Il est arrivé un événement... Oui, les chiffres étaient bons en 1979, mais qui a prévu - et vous non plus, vous n'avez pas prévu - des taux d'intérêt de plus de 20 % à partir de 1981? Et personne dans le monde ne l'avait prévu.

M. Fortier: Et que le prix du sucre baisserait.

M. Garon: Dome Petroleum, une des plus grandes corporations au Canada encouragées par le gouvernement fédéral, est

venue en difficulté financière avec les taux d'intérêt à 20 %. Vous compreniez très bien, et tout le monde a compris qu'un ensemble de firmes ont eu des difficultés avec des taux d'intérêt au-dessus de 20 % en 1981, 1982 et 1983.

M. Fortier: Le prix du sucre a baissé. M. Garon: Oui.

M. Fortier: Vous prévoyiez 0, 28 $, et il a baissé.

M. Garon: Oui.

M. Fortier: Ce sont les mêmes experts qui vous disent qu'il va augmenter.

M. Garon: Oui, puis les mêmes...

M. Fortier: Voyons doncî Soyez donc un peu intelligent.

M. Garon: Comprenez-vous l'anglais? Vous n'avez pas compris ce que je viens de vous dire.

Une voix: S'il vous plaît!

M. Garon: Un changement de taux d'intérêt fait changer le prix de la consommation. Écoutez bien. Je vais vous relire le bout. Il y a toujours des limites, batèche, on n'est pas dans un club de "peewees". Je vous l'ai lu ici, et vous n'avez pas compris ce que je vous ai lu. Regardez ce que je vous ai lu. On dit ici ceci: "understates". Cette affirmation sous-estime le plein impact, "... since lower interest rates will stimulate Third World economic activity, and boost sugar consumption. A 2 per cent per annum lowering of our interest rate projections would raise the forecasts for the final quarter of 1985 by $0, 011 per pound to $ 0, 66. " Je viens de le lire, je pensais que le ministre comprenait et il ne comprend pas. Je vais lui lire en français. Ils disent...

M. Fortier: Vous croyez cela?

M. Garon: Oui, mais la même chose s'est produite dans l'autre sens. Ils vous disent tout simplement que les modèles démontrent que, lorsqu'il y a un changement dans le taux d'intérêt de 2 %, les prévisions peuvent être modifiées en augmentant le prix par 0, 011 $ et que cela va changer la situation, parce que la consommation augmente. Ils nous disent ici: Ceci sous-, estime le plein impact en considérant que des bas taux d'intérêt vont stimuler l'activité économique dans le tiers monde et vont -"boost" - augmenter la consommation du sucre. J'ai dit cela, et la même étude disait la même chose, sauf que personne n'avait prévu que les taux d'intérêt passeraient d'un coup sec en l'espace de quelques mois au-dessus de 20 %.

Quand ils vous disent 2 % par année, c'est un changement considérable. Imaginez-vous si 10 % par année, cela ne fait pas un changement considérable. Ils vous le disent dans leur étude, sauf qu'ils ont prévu des augmentations de prix, une situation, mais ils n'ont pas prévu que le taux d'intérêt augmenterait dans cette proportion-là. Mais ils vous disent qu'on observe sur des années que, lorsque le taux d'intérêt augmente de tant, il y a tel effet sur la consommation mondiale. Quand le taux d'intérêt baisse, l'activité économique est plus basse dans les pays sous-développés et la demande est moins forte. C'est cela l'économie, mais il faut être capable de jongler avec plus de deux variables en même temps pour comprendre cela. Évidemment, si on n'est pas capable de mâcher de la gomme et de marcher en même temps, on ne comprend pas ce raisonnement-là. Il faut être capable de jouer avec un certain nombre de variables pour comprendre ce raisonnement; ce que nous étions capables de faire lorsque nous étions au ministère de l'Agriculture.

Une voix: C'est vrai.

M. Garon: Ceci dit en toute humilité. Je continue. Je n'en dirai pas plus long pour la firme. La firme, c'est l'expert dans le monde. Si vous considérez que notre usine de 150 000 000 $ ne vaut pas une étude, je ne vous demande pas de me croire, mais je vous demande d'être capables d'avoir les yeux ouverts sans qu'on vous mette des cure-dents pour vous tenir les paupières. Cela veut dire quoi? Cela veut dire que je vous demande de rencontrer des gens renseignés pour vous faire éclairer, non pas le lobby du sucre, non pas le Canadian Sugar Institute payé par le quasi-monopole du sucre au Canada a temps plein avec M. Thompson - je ne sais pas si c'est encore lui, mais c'était M. Thompson, il y a quelques années - non pas... M. Morin, qui est payé à temps plein par les entreprises pour défendre leurs intérêts. Je vous demande de rencontrer les experts qui conseillent les firmes dans le monde. J'en ai rencontré un certain nombre. M. Marier en a rencontré un certain nombre. Avez-vous remarqué que M. Marier n'est pas là? Non, il n'est pas là. C'est sans doute celui qui parmi les hauts fonctionnaires au gouvernement connaît le mieux le sucre actuellement, mais Il n'est pas là. M. Little, qui était dans le commerce du sucre depuis 25 ans, autant pour Lantic et Redpath que pour la Raffinerie de sucre du Québec, qui est considéré comme un expert dans la commercialisation du sucre, n'est pas là. Des grands spécialistes du sucre au Québec, il n'y en a pas un qui est là. Non. On dit: On va

faire cela avec nos gens des Finances.

La firme BMA c'est quoi? La firme BMA d'Allemagne c'est la spécialiste de la construction des raffineries. Elle est spécialisée dans la construction des raffineries de sucre et c'est pourquoi la firme BMA, qui était responsable du design de l'usine depuis 1978, est compétente pour déterminer ce que vaut une usine de sucre comme celle-là. Le schéma qui avait été retenu par la firme BMA, on l'a en même temps fait réviser, critiquer par des ingénieurs travaillant pour l'Union coopérative betteravière française, qui est une grande entreprise dans le domaine du sucre. Vous savez, elle exporte je ne me rappelle pas les chiffres exacts, mais je pense que c'est 1 000 000 ou 2 000 000 de tonnes par année, seulement l'exportation de la France. À l'Union coopérative betteravière française, des experts dans le domaine, on a demandé de regarder et d'analyser, d'une façon critique, le plan qui nous a été présenté par BMA pour voir s'il n'y avait pas des choses à améliorer. De plus, ensuite, il y a un grand expert à sa retraite qu'on a engagé à la raffinerie pour faire une troisième contre-analyse pour voir encore s'il n'y aurait pas des améliorations techniques à faire. Il y a eu des analyses de coûts aussi. Combien coûterait une telle usine si on la rebâtissait aujourd'hui à 100 %? Il y a deux ans, le résultat, c'était 135 000 000 $. Ajoutez è ce montant 4 % d'inflation et vous arriverez à peu près aujourd'hui à près de 150 000 000 $. C'est une usine qui est en train d'être vendue pour 10 000 000 $ en contrepartie des actifs réalisables à court terme, à toutes fins utiles, des inventaires et des comptes à recevoir. On la donne, la raffinerie. On ne la vend pas, on la donne. On donne un actif en valeur de remplacement de 150 000 000 $ gratis. C'est cela la transaction. C'est pourquoi les gens des Finances et les ministres ne veulent recevoir personne parce qu'ils vont se le faire dire en pleine face ce que cela vaut. On a déjà demandé combien cela valait et on sait que rebâtir le complexe qu'il y a là actuellement, cela coûterait 150 000 000 $. Mais on ne veut le demander a personne, parce qu'on le donne. 10 000 000 $ contre des actifs réalisables à court terme. Cela aurait coûté meilleur marché de mettre le feu dedans que la transaction que s'apprête à faire le gouvernement. Cela aurait coûté meilleur marché parce qu'actuellement on donne les actifs, à toutes fins utiles, à 10 000 000 $. Ils auraient pu les vendre eux-mêmes pour 10 000 000 $ et Us auraient obtenu le même prix.

Deuxièmement, il y a toutes les dépréciations, les déductions fiscales pour les pertes des trois dernières années. Ensuite, je contrat avec Métro et Provigo est donné, gratis, dans la transaction et on m'a dit dans le temps qu'il valait 25 000 000 $. La valeur actualisée actuelle, 25 000 000 $. On le donne, à part tous les autres avantages, parce qu'on n'a pas vu le contrat. Je vous dis que la transaction que s'apprête è faire le gouvernement est le scandale du siècle au gouvernement du Québec. Jamais on n'aurait fait un tel scandale au gouvernement du Québec de donner gratis une usine qui vaut 150 000 000 $. Et on se dépêche parce qu'on a peur que le prix augmente. Dépêchons-nous, le prix va augmenter. Â 0, 028 $, on va dire qu'on tient compte de la capacité de faire des profits, mais le prix n'est déjà plus de 0, 028 $. Il a augmenté à 0, 08 $. Là, il est è 0, 066 $, il est en train de réaugmenter et on se dit: Dépêchons-nous. Qui vend l'entreprise au prix le plus bas dans le marché? Personne ne fait cela.

Le gouvernement du Québec sous Robert Bourassa a eu des expériences malheureuses. On se rappelle les mines de Gagnon avec des contrats léonins contre le gouvernement. On se rappellera aussi les entreprises sur la Côte-Nord, dans le bois, dans le papier...

Une voix: ITT.

M, Garon: ITT Corporation. Ce même genre de transaction qui est en train de se réaliser actuellement va être un scandale. Je le dis et je n'ai pas peur que, demain matin, on dise: Garon a dit que c'est un scandale parce que, dans un an, deux ans, trois ans, tout le monde se rendra compte, ce sera une évidence criante que c'était un scandale. En plus de donner la raffinerie pour rien à un groupe qui va réussir à former une forme de monopole. C'est le gouvernement qui va faire cela pour faire une fermeture. Je dis: Si le gouvernement ne veut pas faire de sucre, au moins qu'il ne vende pas; cela va lui coûter moins cher de ne pas la vendre que de la vendre. Analysez les revenus et ce que cette transaction va coûter au gouvernement, seulement dans une transaction comptable, et je vous dis que je mets le ministre au défi de mettre le contrat sur la table. C'est quand même un contrat public. C'est une société publique. On devrait mettre le contrat sur la table. Jamais il n'a été question, à ce jour, de mettre le contrat sur la table. Pourquoi? Ils ont honte du contrat. Qu'on mette le contrat sur la table. On vend une raffinerie qui est une société d'État. On demande de faire disparaître, par une loi qu'on nous demande de voter, une société d'État qui appartient au public, mais on ne voudrait pas que le public sache à quel prix on la vend. Depuis quand avez-vous vu un notaire ou un fiduciaire - le gouvernement est pratiquement un fiduciaire actuellement -qui vend les biens de quelqu'un en lui disant: Tu ne sauras jamais le prix? Le public québécois est en droit d'avoir toutes les

données parce que c'est son entreprise. Elle n'appartient pas au député d'Outremont, elle appartient aux Québécois, la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire et ce, depuis 1943 et on va refuser de montrer les chiffres au public? (21 h 45)

M. Charbormeau: C'est aberrant!

M. Garon: C'est un scandale, cela aussi et ces gens vont venir nous parler de la vertu, voyons donc!

M. Fortier:... au Parti québécois.

M. Garon: Oui, parlons de la vertu aux gens qui ont le SIDA; c'est l'équivalent. Qu'est-ce qu'on demande? On demande au public de ne pas connaître le prix de la transaction d'un bien qui lui appartient; c'est la moindre des choses. La première chose que le ministre aurait dû faire, c'est mettre les contrats sur la table, mais il en a peur comme d'une maladie honteuse, de son contrat.

M. Fortier: Combien de fois en avez-vous mis sur la table?

M. Garon: Qu'il le mette sur la table, qu'il nous le montre, son contrat, cela va nuire à qui? Il n'y a pas d'autre entreprise au Québec dans le secteur du sucre que celle à qui il veut vendre. Cela va nuire à qui de mettre le contrat sur la table?

M. Charbonneau: II y a un monopole.

M. Garon: II y a un monopole, un quasi-monopole, en tout cas.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député, est-ce que je devrais vous relire le sous-amendement pour vous rappeler la pertinence?

M. Garon: Je terminerai bientôt là-dessus.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): II vous reste encore quelques minutes, deux minutes et quart.

M. Garon: Je demande que l'on consulte les deux firmes, l'une dans les marchés du sucre, qui est la plus compétente que l'on connaisse, Landell Mills Commodities Studies, et la firme la plus compétente dans la construction de raffineries, la firme BMA, en Allemagne. On prend le risque, nous aussi, que ces firmes viennent nous dire que nous avons tort. Si le gouvernement est sûr de lui, pourquoi craindrait-il que des experts internationaux viennent lui dire qu'il a raison? C'est parce qu'il n'est pas sûr de sa position, il n'est pas sûr du tout de sa posi- tion, il n'est pas sûr de la valeur de son contrat, sinon il l'aurait rendu public depuis longtemps. À qui cela va-t-il nuire?

Nous allons nous quitter tout à l'heure, dans quelques minutes; les députés libéraux auront toute la journée de samedi et de dimanche pour y penser. Certains d'entre vous...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le député, il faut conclure.

M. Garon: C'est ce que je suis en train de faire. Certains d'entre vous vont aller à la messe dimanche, pensez donc un peu au public et aux gens qui vous entourent.

Une voix: Avant le conseil général. Une voix:...

M. Garon: Non, non, non, tout cela se tient. Arrêtons les compartiments, arrêtons d'être honnêtes à l'église et...

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Concluons.

M. Garon:... véreux en politique, arrêtons!

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Concluons, M. le député.

M. Garon: II n'y a qu'une seule conscience dans tout cela. Pensez aux gens qui vous entourent et pensez que vous avez assez de respect pour ces gens afin que les livres soient sur la table et que tout le monde puisse analyser ce contrat. Tout le monde pourra déterminer si ce contrat est bon, d'autant plus si on fait venir des firmes qui connaissent le secteur tant dans le domaine des marchés et de la construction des raffineries de sucre. C'est ce que nous demandons, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le député de Lévis. Je cède maintenant la parole au ministre délégué à la Privatisation.

Une voix: Ce sera plus doux.

M- Pierre-C. Fortier

M. Fortier: J'ai écouté avec beaucoup d'attention l'ex-ministre de l'Agriculture, le député de Lévis, qui possède toutes les vertus qui possède la vérité, qui consulte uniquement les bons experts, et qui, d'après lui, a toujours pris les bonnes décisions, qui est entouré de bons fonctionnaires alors que tous les autres sont des gens véreux, qui acceptent des prêts de banques, qui acceptent des pots-de-vin. Mais vous n'avez

CAPA-63I plus de crédibilité. C'est pour cela que je vous ai laissé parler, vous avez perdu votre crédibilité. Vous faites rire les gens mais quand vient le temps de voter, même dans votre parti, les gens, ne votent pas pour vous dans la course au leadership. Vous avez été surpris, lors de la course au leadership, que les gens n'aient pas voté pour vous.

M. Garon: Vous direz cela à M. Ryan.

M. Fortier: Vous croyiez que, dans votre parti, vous aviez une certaine...

M. Garon: Vous direz cela à M. Ryan.

M. Fortier: M. Ryan a été élu chef de son parti au moins une fois, cela ne vous est pas arrivé encore. Quand cela vous arrivera, vous viendrez me revoir. Il n'y a pas seulement cela, je vous l'ai dit tout à l'heure...

M. Garon: On traite mieux les gens qui ne sont pas chefs dans mon parti que dans le vôtre.

M. Fortier: Laissez-moi parler, je vous ai laissé parler.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaît!

M. Fortier: La seule arme que vous avez développée, ce sont les attaques personnelles. Ce que je trouve indécent, je vais vous le dire, c'est d'attaquer des fonctionnaires du ministère des Finances quand vous savez que ces gens-là ne peuvent pas vous donner la réplique, parce que les seules personnes qui ont droit de parole autour de la table, ce sont des députés élus. Arrêtez donc d'attaquer des gens qui n'ont pas le droit de vous répliquer, c'est indécent, M. le député de Lévis.

M. Garon: Je vous demande de ne pas avoir peur de les confronter à des experts.

M. Fortier: Arrêtez de les attaquer!

M. Garon: C'est cela que je vous demande.

M. Fortier: Ils ne peuvent pas vous donner la réplique et vous passez votre temps à attaquer des gens qui, peut-être, ne pensent pas comme vous. Mais, mot, j'ai appris de mes parents et j'ai appris dans ma profession qu'on respecte l'opinion "des truies"... d'autrui!

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Fortier: Je vous regardais, je m'excuse! On doit respecter l'opinion d'autrui, des gens qui ne pensent pas comme soi. Attaquer les personnalités...

M. Garon: Je n'ai pas employé votre langage.

M. Fortier:... les personnes, les hauts fonctionnaires, ces gens-là, on ne les a pas choisis. Je suis arrivé aux Finances et je ne les connaissais pas, mais j'ai trouvé que c'étaient des gens très compétents au ministère des Finances. Que cela ne fasse pas votre affaire, c'est malheureux pour vous, mais ce sont des gens qui, à mon avis, ne méritent pas que vous les attaquiez personnellement. Que vous disiez - vous avez le droit de le dire - que vous ne pensez pas comme eux, c'est une autre affaire. Mais arrêtez donc de faire des attaques personnelles. Cela vous discrédite, vous perdez votre crédibilité et, ce faisant... Continuez si vous le voulez. Je crois que c'est mieux pour nous. Quand vous continuez à crier comme vous l'avez fait tout à l'heure, il n'y a plus grand monde... Je suis à peu près certain que, dans la Presse de samedi, on ne lira pas une ligne de ce que vous avez dit ce soir.

M. Garon: Vous savez que La Presse est faite depuis six heures, ce soir.

M. Fortier: M. le Président. M. Garon: M. le Président.

M. Fortier: Laissez-moi parler, j'ai la parole. Protégez mon droit de parole.

M. Garon: Question de règlement. Tous les journaux qui vont être publiés demain sont sous presse depuis 18 heures.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous plaîtl

Une voix: Ses dix minutes sont écoulées.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. À l'ordre, s'il vous plaîtl

M. Fortier: M. le Président, M. le député de Lévis nous dit: Tous les experts disent que j'ai raison. Il fait de grands énoncés: Les meilleurs experts que j'ai consultés disent que la betterave à sucre est en progression et que la canne à sucre est en régression. C'est cela que j'ai entendu. J'ai justement devant moi un document du United States Department of Agriculture. S'il y a des gens qui connaissent quelque chose, il me semble que ce sont ces gens-là aussi. Ce sont d'autres experts. J'imagine qu'au ministère de l'Agriculture des États-Unis on connaît quelque chose aussi. Voici ce qu'ils disent - je vais être obligé de lire cela en

anglais; eux aussi écrivent en anglais: "Despite a sugar program, sugar beet production was 20 900 000 tons for the 1982 crop year, the lowest level since 1967. The decline in sugar beet production is largely the result of the recent closing of sugar beet processing plants in several States due to low returns. "

Il me semble que c'est exactement le contraire de ce que le député de Lévis a dit tout à l'heure. Il nous disait: II n'y a pas d'avenir pour la canne à sucre aux États-Unis. J'ai ici l'exemple de deux raffineries de betteraves à sucre qui ont été transformées en raffineries de canne à sucre, la raffinerie de Santa Anna Californie, propriété de Holly Sugar Corporation, et la raffinerie de Freeport, Ohio, propriété de Northern Ohio Sugar Corporation. Il nous disait que c'était juste dans le sud des États-Unis qu'il y avait de la canne; bien, dans le nord des États-Unis, dans l'Ohio, il y a une raffinerie de betteraves à sucre qui a été changée pour de la canne à sucre.

Le député de Lévis dit n'importe quoi. Il pense qu'on va le croire. Il dit n'importe quoi, il n'a plus de crédibilité. On ne vous croit plus, M. le député de Lévis. Arrêtez de nous assommer avec des références d'experts. Moi, je ne suis peut-être pas un expert dans le domaine du sucre, mais je peux vous dire que j'ai suivi les domaines du pétrole et de l'énergie et que, là aussi, il y avait des experts qui ont avisé l'ancien gouvernement libéral fédéral qui nous disait que les prix du pétrole étaient pour augmenter indéfiniment. Il avait consulté un tas d'experts lui aussi. Vous savez où est rendu le prix du pétrole? Il est rendu tellement bas qu'on se demande si cela sera possible d'exploiter les puits de pétrole dans le nord des provinces des Prairies. On se demande si, au large de Terre-Neuve, il sera possible d'exploiter Ibernia, parce que les prix du pétrole sont très bas. Essayer de nous faire croire qu'il y a des experts en Allemagne, en Angleterre, aux États-Unis ou ailleurs qui vont nous dire que le prix du pétrole ou le prix du sucre va être à tel et tel niveau dans un an, deux ans, trois ans, je ne vous crois pas et il n'y a pas grand monde qui va vous croire là-dessus.

Bien sûr qu'on doit consulter des experts, mais l'expérience du pétrole, l'expérience du cuivre, l'expérience de plusieurs "commodities" nous enseignent qu'on doit regarder les prévisions des experts dans tous ces domaines avec un grain de sel, les regarder et nous dire: Oui, ils nous disent cela et cela ne leur coûte pas cher. Je comprends que tous les trois mois ils sortent un feuillet d'explication et un feuillet de prévision. Ces gens-là gagnent leur vie. Je crois que ceux qui suivent un domaine donné - je le fais moi-même - doivent lire les prévisions qu'ils nous donnent. Mais, ensuite, on se dit: Mon Dieu s'ils se trompent comme ils se sont trompés il y a trois ans ou quatre ans dans le pétrole, à quelle place cela mènera-t-il? M. le Président, tout cela pour dire que les experts du député de Lévis je les respecte, je ne les connais pas mais j'imagine que ce sont de bons experts. Bien sûr qu'il peut y avoir des avantages pour chacun d'entre nous à les consulter mais, nous faire accroire que ces gens possèdent la vérité éternelle et qu'à partir de leurs prévisions on va être capable de démontrer que dans deux ans, dans trois ans ou dans cinq ans on fera des profits avec la betterave à sucre à Saint-Hilaire, j'aime autant le jugement de gens qui ont suivi ce dossier et qui nous ont dit qu'en 1979 le député de Lévis avait fait des prévisions et des hypothèses et que ces hypothèses ne se sont pas révélées exactes.

Sur le prix de la transaction, je crois que si on veut citer des experts il y en a à Toronto aussi des experts que l'on peut citer. Après avoir annoncé la vente à Lantic non pas pour 10 000 000 $ mais pour 50 000 000 $, plus le fait que dans l'avenir on pourra reprendre toute la propriété pour un dollar et qu'on pourra assumer cette propriété dans l'avenir une fois que la transaction aura été complétée dans plusieurs mois d'ici... Je cite: "Analysts applauded sale by province of its sugar refinery". C'était dans la Gazette du 11 mars 1986. "In fact the price to be paid for the Governement sugar refinery which is Quebec's third biggest sugar producer is so generous that it raised questions in the mind of one Toronto based analyst. " Il y a au moins un analyste à Toronto qui disait que c'était tellement extraordinaire le prix qu'on avait obtenu qu'il a dit: Je ne le crois pas, cela n'a pas de bon sens que le gouvernement puisse obtenir 50 000 000 $ pour une compagnie en faillite. Ils ont dû avoir de très bons négociateurs. Et, de fait, c'est vrai qu'on avait de très bons négociateurs. Ce sont ces gens du ministère des Finances qui sont allés chercher 50 000 000 $, plus le droit pour un dollar et autres considérations de ravoir la propriété, de l'équipement et des propriétés à Saint-Hilaire.

M. le Président, le député de Lévis, même quand il parle fort, ne nous fait pas peur. Quand il nous dit qu'il a la vérité éternelle, on ne le croit plus. Il nous dit qu'il faudrait consulter un tas d'experts parce que tous ces gens lui ont dit dans le passé qu'il avait raison. Je comprends. Il leur faisait tellement peur qu'à chaque fois qu'il les consultait ils lui cachaient la vérité pour l'encenser et le flatter dans le sens du poil.

M. le Président, nous avons pris la meilleure décision dans les circonstances. L'avenir, personne ne le connaît. Tout ce que je sais c'est que le prix international du sucre dans le moment est à 0, 065 $ et que

pour rentabiliser la raffinerie du sucre il faudrait que le prix du sucre soit au moins a 0, 20 $ américains. On est loin du compte, M. le Président. La situation est telle que dans les circonstances nous avons un déficit et que nous voulons abolir le déficit.

M. Garon: Question de règlement.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Excusez.

M. Fortier: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Tremblay, Iberville); Quel règlement? Ce n'est pas un débat.

M. Garon: M. le Président, en vertu du règlement, un député ne peut pas prêter des intentions malicieuses à un autre député, d'autant plus qu'il ne peut pas me prêter l'intention d'essayer de faire peur à des Allemands et à des gens de Londres.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, si vous voulez poursuivre, M. le député. M. le ministre, excusez.

M. Fortier: Je suis député également. Cela me fait toujours plaisir de me faire appeler député. Je crois que mon rôle de député j'aime bien l'assumer malgré le fait que mes responsabilités comme ministre ne me donnent pas autant de temps qu'avant pour m'occuper de mes électeurs. Je prends toujours plaisir à m'occuper des électeurs. Je crois qu'être député c'est une fonction très honorable. Cela ne m'insulte pas du tout lorsque vous m'appelez M. le député.

Alors, en terminant, l'ex-ministre nous a dit: II faudra mettre le contrat sur la table. J'aimerais demander à l'ex-ministre si l'ancien gouvernement a mis un seul contrat sur la table durant toute la période pendant laquelle ils ont été au pouvoir. C'est une chose qui ne se fait pas. Nous sommes prêts à répondre à un tas de questions. Nous sommes prêts à démontrer que nous avons pris la décision dans le meilleur intérêt du Québec. Nous avons fait une vente privée avec une firme privée. Je crois que nous devons respecter la confidentialité des négociations que nous avons avec la firme Lantic. Je dois répondre que nous n'avons pas l'intention de déposer le contrat de Lantic sur la table. De toute façon, il est 22 heures. Tel que convenu, nous devons ajourner à lundi.

Le Président (M. Tremblay, Iberville): C'est cela. Actuellement, vu qu'il est 22 heures, nous ajournons à lundi 10 heures.

(Fin de la séance à 22 heures)

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