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(Onze heures trente-sept minutes)
Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre,
s'il vous plaît! Bonjour, mesdames et messieurs. Je déclare la
séance de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de
l'alimentation ouverte et je rappelle le mandat de la commission qui est de
procéder à l'étude du projet de loi 85. Maintenant, je
voudrais préciser que, pour toute la durée de l'étude du
projet de loi 85, M. Charbonneau (Verchères) va remplacer de
façon continue M. Blais (Terrebonne) et ce, en vertu de l'article 130
pour toute la durée de l'étude article par article. Sur ce, nous
reprenons les débats là où nous étions...
M. Pagé: M. le Président, pour notre bon
fonctionnement, pour qu'il n'y ait pas de questions de règlement ou quoi
que ce soit, pourriez-vous nous donner la liste des membres? M. Fortier est bel
et bien membre de la commission?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, M. Fortier est
bel et bien membre de la commission. M. Fortier (Outremont) et vous-même,
M. Pagé (Portneuf), vous êtes membres de la commission pour le
temps de l'étude.
M. Pagé: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'autres
informations? Nous revenons où nous en étions, hier soir à
minuit, au sous-amendement...
M. Pagé: Auparavant, M. le Président, il serait
peut-être opportun de souligner la présence et de saluer
cordialement votre distinguée épouse qui est ce matin avec
nous.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. Merci, M.
Pagé. Alors, pour ceux qui n'étaient pas ici tout à
l'heure, la jolie personne au fond, c'est mon épouse, la personne qui
m'a prêté à l'Assemblée nationale pour quatre ans.
Oui, M. le député de Lévis.
M. Garon: Nous aimerions aussi, en tant qu'Opposition, saluer
votre épouse et lui dire: Si quatre ans, vous trouvez cela long, on peut
vous aider à vous le retourner à la maison.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Est-ce qu'il y a
d'autres commentaires à ajouter après ça?
M. Garon: Cela étant dit sans malice!
M. Pagé: M. le Président, il faudrait
peut-être entendre madame.
M. Charbonneau: Si le ministre voulait ouvrir des consultations
particulières, on pourrait sûrement inscrire l'épouse du
président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, nous...
M. Pagé: Allons-y! Oui avait la parole hier soir, M. le
Président? Je dois dire que, dès ce matin, c'est avec beaucoup
d'intérêt que je me demandais qui j'allais entendre au moment de
la reprise des travaux. Je suis heureux d'apprendre que c'est le
député de Verchères.
Sous-amendement proposant
d'entendre l'Association des cadres de la RSQ
(suite)
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Exactement. On
était rendu à l'intervention du député de
Verchères sur le sous-amendement qui était, je le rappelle,
d'entendre l'Association des cadres de la Raffinerie de sucre du Québec.
C'est le dernier intervenant, je crois.
M. Perron: II reste encore le député de Dubuc, M.
le Président, sur le sous-amendement.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. M.
Jolivet avait parlé - c'était son sous-amendement - ainsi que M.
Garon et M. Perron, de Duplessis. Ce sera maintenant le député de
Dubuc. Je cède la parole au député de
Verchères.
M. Jean-Pierre Charbonneau
M. Charbonneau: Merci. Écoutez, on a demandé
jusqu'à maintenant, sans réussir à convaincre le ministre
et ses collègues, que la direction de la raffinerie de sucre vienne. On
a demandé que les producteurs de betterave sucrière soient
entendus. On a demandé que la compagnie Lantic, qui a
déjà
son représentant ici qui nous écoute attentivement, soit
officiellement convoquée à la commission et puisse
répondre à nos questions. D'ailleurs, ils sont très
intéressés puisqu'ils prennent la peine d'envoyer un
représentant qui est payé à l'heure, disait-il, pour nous
écouter silencieusement et d'une façon fort
intéressée. Il doit savourer sa victoire puisque depuis des
années il s'évertue à faire un lobby efficace pour qu'on
mette la clé dans la porte de la Raffinerie de sucre du
Québec.
M. Garon: M. le député de Verchères, je suis
certain qu'il gagne plus cher l'heure que les coupeurs de canne à sucre
au mois.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, à
l'ordre! Si vous voulez...
M. Charbonneau: La proposition qui a été
présentée par mon collègue de Laviolette pour inviter
l'Association des cadres est aussi dans cette logique implacable et
incontestable. Je vous rappelais hier que le front d'aide pour la Raffinerie de
sucre du Québec avait envoyé un télégramme au
ministre de l'Agriculture hier après-midi demandant que le front d'aide
soit entendu en commission parlementaire.
Le Président (M. Tremblay, Iberville}: S'il vous
plaît, messieurs!
M. Charbonneau: Je rappellerai aux membres de la commission que
cette Association des cadres de la Raffinerie de sucre du Québec est
partie prenante au front d'aide pour la défense et la survie de la
Raffinerie de sucre du Québec. Je croîs qu'il serait
indiqué, normal, que les cadres également puissent être
entendus, d'abord, parce que, comme l'indiquait très judicieusement mon
collègue de Duplessis hier, il s'agit de permettre très
clairement au gouvernement et au parti ministériel de respecter son
engagement électoral. Je suis convaincu que votre épouse va
être intéressée à savoir que vous et vos
collègues de la Montérégie et que l'ensemble du
comité de députés ministériels, vous vous
étiez engagés lors de la campagne électorale à ce
que la Raffinerie de sucre du Québec ne ferme pas ses portes, qu'elle
demeure en exploitation douze mois par année et que les solutions qui
seraient trouvées incluent la participation des employés qui
connaissent les problèmes réels.
C'est évident que, parmi les employés qui connaissent bien
les problèmes de la raffinerie, il y a les cadres de la raffinerie. Pour
la bonne conscience et la réflexion des gens de votre côté,
M. le Président, qui allez allègrement vers un conseil
général dans quelques heures, je pense qu'il est opportun de vous
exhiber à nouveau cet engagement électoral et, donc, de vous dire
que nous croyons, à ce moment-ci, que les cadres de la raffinerie
doivent être entendus. Nous le croyons parce que nous pensons que, parmi
les gens qui ont travaillé avec la direction de la raffinerie en
étroite collaboration pour préparer les documents, faire les
études, contrer les lobbies efficaces de M. Morin et de ses employeurs,
il y a l'Association des cadres, les cadres de la raffinerie qui se sont
donnés corps et âme également pour cette cause de
défendre cette industrie sucrière à partir d'une
production locale qui, contrairement à ce que plusieurs ont
laissé entendre, entre autres les gens du ministère des Finances,
entre autres le lobby du cartel du sucre, est une industrie qui est dans
plusieurs pays en pleine expansion.
Quand on pense qu'en France uniquement il n'y a pas moins de 50
entreprises toutes en général plus importantes et plus grosses
que la Raffinerie de sucre du Québec, qui, je crois, font vivre plus de
50 000 producteurs. L'ancien ministre de l'Agriculture pourra me corriger si
mes chiffres sont erronés, ou le ministre actuel. C'est une industrie
impartante. (11 h 45)
La Grande-Bretagne - on sait que c'est un pays colonisateur qui a
longtemps entretenu des colonies où on produisait de la canne à
sucre - a commencé depuis un certain nombre d'années à
développer sur son propre territoire la production de la betterave
sucrière.
Les rendements de cette production agricole sont fort
intéressants et, pour des pays comme le nôtre où nous
sommes préoccupés par la création d'emplois, on se rend
compte que c'est un atout important. Il me semble que cela ne prend pas un
cours de sciences économiques pour comprendre l'impact économique
que peut avoir cette industrie au Québec et au Canada parce que le
Québec se priverait, avec la décision du gouvernement, de tous
les emplois qui sont liés à la production agricole, donc les
producteurs, les transporteurs, les gens qui fournissent les ingrédients
nécessaires pour la production agricole, les gens qui transportent cette
production agricole vers les usines.
M. le Président, si on suit la logique qui nous est
proposée par le lobby des grands du sucre, c'est une logique qui
voudrait que ces emplois-là restent à l'étranger et que
nous, on se contente des emplois de transformation dans la dernière
partie de l'opération manufacturière de production de sucre qui
est ia partie de raffinage du sucre brut qu'on importe vers le sucre blanc et
l'emballage. Nous, M. le Président, on ne devrait se réserver que
cette partie alors que le Canada est autosuffisant à peine à 8 %
et que le Québec, je pense que c'est un peu moins, c'est autour de 7
%.
Cela veut dire que, si on voulait avoir une politique de
développement économique et de création d'emplois comme le
proposent et l'ont proposé les cadres solidairement avec la direction de
l'entreprise et le gouvernement du Québec précédent, il
faudrait faire en sorte qu'on développe l'industrie de la betterave
sucrière au pays. On considère que, finalement, entre choisir les
intérêts de la compagnie Lantic et de la compagnie Redpath, les
intérêts des actionnaires de ces entreprises et les
intérêts de l'ensemble des contribuables du Québec et du
Canada et les intérêts de l'ensemble des chômeurs et des
chômeuses du Québec et du Canada, on devrait s'engager dans le
développement plutôt que dans l'abandon de l'industrie de la
betterave sucrière.
C'est ce qu'ont compris bien avant nous les Français, les
Britanniques et c'est ce qu'ont compris plusieurs pays qui font le mouvement
inverse qui nous est proposé par le lobby du sucre, qui nous est
proposé par le ministère des Finances du Québec
aujourd'hui qui a réussi à prendre sous sa coupe et sa tutelle le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation.
Je crois que, si on veut faire un débat éclairé, si
on veut faire un débat constructif, si on veut faire un débat qui
s'attaque et s'attache aussi aux vrais problèmes, aux vrais enjeux
actuels à l'égard de ce projet de loi, on devrait acquiescer
à la motion que je fais, ainsi qu'aux autres que nous avons faites, M.
le Président, qui restent encore en suspens, soit d'inviter les
différents groupes, organismes ou entreprises afin que l'on puisse avoir
le meilleur éclairage possible.
Encore une fois, M. le Président, je le répète,
à l'intention de votre épouse et des autres personnes qui sont
ici dans cette salle et de vos collègues, je crois que la parole
libérale doit avoir une certaine signification. Quand on prend la peine,
avec un agent officiel et les fonds électoraux du Parti libéral
ramassés lors de dîners bénéfices et campagnes de
financement, de dire: Non, la Raffinerie de sucre du Québec ne fermera
pas, parole donnée, je crois qu'on doit respecter sa parole. C'est
important, sinon on dévalue la chose politique et on amène les
citoyens à être cyniques ë l'égard des engagements
politiques et de la parole des politiciens et des politiciennes.
Si on ne veut pas que cette dévaluation s'accentue, on devrait
respecter ses engagements et, à cet égard, nous vous offrons la
meilleure occasion et la dernière, nous le savons, pour respecter votre
parole. Après cela, M. le Président, lorsqu'il ne sera plus
possible pour nous de réclamer et d'obtenir du gouvernement des
consultations particulières, cela en sera fini de la possibilité
que le Parti libéral, que le gouvernement libéral puisse
respecter sa parole. M. le Président, le jugement des citoyens de votre
comté, entre autres, où il y a des producteurs de betterave, des
gens du comté de Saint-Hyacinthe - nous nous en occuperons
personnellement, - et sûrement aussi des gens du comté de
Verchères sera sans doute implacable.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
député de Verchères. Maintenant, j'ai reconnu le
député de Dubuc.
M. Hubert Desbiens
M. Desbiens: Merci, M. le Président. Même si les
efforts que nous faisons pour tenter de convaincre le ministre de permettre aux
membres de la commission d'entendre et de pouvoir évaluer
d'eux-mêmes les arguments qui peuvent être évoqués
pour ou contre la privatisation ou la liquidation - le terme est plus exact
dans le cas présent - de la Raffinerie de sucre du Québec
apparaissent inutiles, ils auront au moins servi à mettre en
évidence que le gouvernement actuel, qui a pris cette décision de
privatisation ou de liquidation, ne semble pas en mesure de pouvoir faire la
démonstration et la preuve que, au moins dans le cas présent,
cette privatisation est une bonne solution.
C'est le pouvoir, mais c'est aussi le droit du gouvernement
libéral actuel de décider d'orientations politiques, c'est bien
certain. Il a le pouvoir et le droit de décider de ce qu'il juge, dans
son optique, être une orientation heureuse pour l'ensemble des citoyens
du Québec. Je ne lui conteste pas cela, mais quand on a le pouvoir et le
droit et qu'on prend une décision politique, elle doit porter sur des
assises qui permettent de la justifier et qui permettent de démontrer
à la population que c'est vraiment la meilleure solution à
adopter. Comme sans doute, je le suppose, le gouvernement a
étudié le problème et les solutions possibles de la
Raffinerie de sucre du Québec, il doit donc être en mesure de
démontrer, ici et aussi à la population, que son projet
était vraiment la meilleure solution pour régler ce
problème.
On a plutôt l'impression, maintenant, que le gouvernement,
s'étant engagé dans le domaine de la privatisation et ayant fait
des beaux discours sur la privatisation, croit nécessaire de justifier
ses discours en prenant la décision de présenter le projet de loi
85 sur la Raffinerie de sucre du Québec. On a l'impression que cela a
été le premier du bord qui lui est apparu à l'esprit: La
raffinerie, tiens, on va se débarrasser de cela. Cela va montrer que
nous autres, on est sérieux avec notre privatisation. Nos engagements et
notre discours portaient sur la privatisation; là, il faut faire la
preuve au
monde qu'on est des gens d'action, on liquide.
C'est un peu ce qu'on pense devant les refus du gouvernement de venir
discuter et de venir faire discuter par les députés membres de la
commission, les arguments qui ont permis au gouvernement de pencher vers cette
décision, parce que ce n'était pas la seule solution. Mon
collègue de Laviolette en a parlé longuement hier soir et je ne
reviendrai pas la-dessus, mais il y avait trois solutions d'envisagées.
Trois études ont été faites, soit sur la fermeture - la
liquidation de la raffinerie - sur le statu quo et sur le développement
de la raffinerie pour rendre ses opérations véritablement
rentables.
On sait que la thèse qui l'emporte, finalement, c'est celle qui a
été défendue par le ministère des Finances.
Pourtant, l'argumentation qui nous est la plus accessible démontre, au
contraire, que c'était possible - c'est ce que l'ex-ministre de
l'Agriculture a démontré dans un mémoire d'avril 1985 au
Conseil des ministres - de rentabiliser la raffinerie de sucre de
Saint-Hilaire, à partir des études qui ont été
menées par ceux et celles qui ont vraiment participé et qui sont
vraiment les experts dans le domaine avec la haute direction, l'Association des
cadres de la Raffinerie de sucre du Québec.
C'est pour cela qu'on demande au ministre que ces gens puissent venir
ici et qu'on puisse les interroger ou écouter leurs remarques et voir,
avec eux, si les recommandations qu'ils ont suscitées auprès du
ministre, à l'époque, dans le mémoire qu'il a remis au
Conseil des ministres, au gouvernement, si les argumentations qu'il y a
là-dedans sont exactes, si elles valent toujours, parce que cela fait
déjà un an et, en un an, les choses évoluent.
Peut-être que leurs opinions se sont modifiées depuis un an
à la lumière de certains renseignements ou d'études
supplémentaires qu'ils ont pu effectuer. Peut-être qu'ils
viendraient dire aux membres de cette commission: Non, ce n'est plus
complètement vrai; on n'est plus aussi certains de ce qu'on
avançait, parce qu'on a étudié tel secteur ou tel
avancé qu'on avait énoncé et présenté au
ministre à l'époque. Maintenant, après un an, étant
donné l'évolution de la situation mondiale dans le sucre, je ne
sais pas, peut-être qu'il y aurait des choses nouvelles qui viendraient
permettre à tous les membres de cette commission de bien comprendre et
à nous de l'Opposition, nous faire voir que la vraie solution, la bonne
solution, c'est celle que le ministre nous propose.
Mais aussi longtemps que nous n'aurons pas ces renseignements, du moins
comme députés de l'Opposition, nous ne pourrons pas accepter et
voter en faveur de ce projet de loi. C'est bien évident, on ne le
permettra pas. Dans l'état de connaissance qu'on a du dossier, sans
obtenir tous les renseignements que l'Association des cadres, entre autres,
pourrait nous fournir comme élément de réflexion, accepter
ce projet de loi, ce serait voter tes yeux fermés. Je ne pense pas que
ce soit le rôle que la population du Québec confie à ses
élus. Ce n'est sûrement pas cela que la population du
Québec confie à ses élus comme rôle. (12 heures)
C'est, au contraire, de faire des études les plus exhaustives
possible pour analyser, comparer, si nécessaire, l'argumentation, les
faits, les chiffres afin finalement de prendre des décisions qui
correspondent au meilleur intérêt des populations plus restreintes
qui sont touchées. Ici, cela n'est pas seulement un comté,
l'essentiel porte peut-être sur le comté de Verchères, mais
Saint-Hyacinthe est beaucoup touché et, M. le Président, dans
votre comté, on compte des producteurs de betteraves. C'est dans
l'intérêt de ces populations régionales, mais aussi dans
l'intérêt de l'ensemble de la population du Québec.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Votre temps est
écoulé.
M. Desbiens: J'aurai sans doute l'occasion d'y revenir; alors, je
vous remercie.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
député de Dubuc.
M. Pagé: M. le Président...
Le Président (M. Tremblay, Iberville); Oui?
M. Pagé:... je veux bien réitérer ce que je
viens de vous formuler. Je suis encore prêt à donner mon
consentement pour cinq autres minutes. Le ministre est très
généreux ce matin.
M. Charbonneau: Si mon collègue de Dubuc a terminé,
on pourrait passer au vote. S'il n'a pas terminé, on peut toujours se
prévaloir de l'offre.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): C'est cela. S'il
n'y a pas d'autres interventions, on va procéder à la mise aux
voix du sous-amendement.
M. Desbiens: II y a de longues heures qui nous attendent.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Est-ce que le
sous-amendement: "et l'Association des cadres de la Raffinerie de sucre du
Québec" est adopté?
M. Pagé: Non, M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Rejeté.
M. Charbonneau: Vote par appel nominal.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vote par appel
nominal. Alors, M. le secrétaire, j'appelle le vote.
Le Secrétaire: M. Messier (Saint-Hyacinthe)?
M. Messier: Vous venez de vous réveiller? Je vote contre
la proposition.
Le Secrétaire: M. Camden (Lotbinière)?
M. Camden: Contre.
Le Secrétaire: M. Dubois (Huntingdon)?
M. Dubois: Contre.
Le Secrétaire: M. Beaudin (Gaspé)?
M. Beaudin: Contre.
Le Secrétaire: M. Forget (Prévost)?
M. Forget: Contre.
Le Secrétaire: Mme Legault (Deux-Montagnes)?
Mme Legault: Contre.
Le Secrétaire: M. Pagé (Portneuf)?
M. Pagé: Contre.
Le Secrétaire: M. Tremblay (Iberville)?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Contre.
Le Secrétaire: M. Jolivet (Laviolette)?
M. Jolivet: Effectivement, pour la proposition du
député de Saint-Hyacinthe.
Une voix: Question de privilège.
Une voix: S'il vous plaît!
Le Secrétaire: M. Desbiens (Dubuc)?
M. Desbiens: Pour.
Le Secrétaire: M. Perron (Duplessis)?
M. Perron: Pour.
Le Secrétaire: M. Charbonneau (Verchères)?
M. Charbonneau: Pour.
Le Secrétaire: M. Garon (Lévis)?
M. Garon: Pour.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Le sous-amendement
est rejeté.
Une voix: Encore?
M. Pagé: Vous en avez pour cinq ans.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, maintenant
j'ai reconnu le député de Verchères sur l'amendement.
Reprise du débat sur la motion
d'amendement
M. Charbonneau: M. le Président, l'amendement devant nous,
c'est l'amendement du député de Lévis qui propose
d'entendre la compagnie Lantic, si je ne me trompe pas.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Exactement.
Voulez-vous que je le répète?
M. Charbonneau: Oui, M. le Président. Cela va me donner le
temps de chercher mes papiers.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, l'amendement
est: "Et la compagnie Sucre Lantic Ltée", proposé par le
député de Lévis.
M. Jean-Pierre Charbonneau
M. Charbonneau: Parfait. C'est bien ce que je pensais, M. le
Président. Je veux vous donner un certain nombre
d'éléments d'information qui pourraient justifier que l'on vienne
devant la commission, M. le Président, et que l'on invite la compagnie
Lantic à se présenter devant nous. Dans les documents que j'ai
consultés et dont j'ai obtenu copie, à plusieurs reprises il est
à la fois question des avantages qu'aurait pour la compagnie Lantic
cette transaction et aussi des prétentions de la compagnie Lantic. Je
voudrais à cet égard vous indiquer que, si vous me le permettez
deux ou trois secondes, lorsque j'ai pris connaissance de la décision
gouvernementale et de la façon dont elle a été
annoncée, je me suis dit: Cela serait vraiment important que l'on
obtienne plus d'informations. Entre autres, cela serait important que l'on
vérifie avec la compagnie Lantic s'il est exact que cette compagnie
serait contrainte de fermer son usine de Montréal, Sucre Saint-Laurent,
si le gouvernement décidait de revenir sur sa décision et de
maintenir la Raffinerie de sucre du Québec en opération et
même de
lui donner les moyens de jouer le rôle qu'elle devrait et qu'elle
pourrait jouer dans l'économie du Québec.
M. le Président, j'ai ici une analyse que tes gens de la
compagnie pourraient sans doute commenter de façon intéressante.
Elle a été faite par la direction de la raffinerie de sucre et
soumise à la suite des commentaires qui avaient été
présentés par le ministère des Finances. Le
ministère des Finances laissait entendre que le plan proposé par
le ministre de l'Agriculture de l'époque et la raffinerie de sucre"
pourrait signifier la fin des opérations de Lantic à
Montréal. C'est bien sûr, pouvait-on lire dans le document du 17
juin 1985, le dénouement auquel la haute direction de Lantic veut bien
laisser croire. Or, l'impact sur Lantic de la réalisation du projet de
la raffinerie de sucre est tout autre. En fait, la présence de la
raffinerie de sucre sur le marché du sucre raffiné aurait, sur
les opérations de Lantic, un effet contraire à celui que
prévoient les fonctionnaires du ministère des Finances. "Sans la
présence de ta Raffinerie de sucre du Québec, Lantic a pu
déménager les activités de Cartier Sugar à St. John
et Redpath fermer sa vieille usine de Montréal pour concentrer ses
activités à Toronto. Or, l'avènement de la Raffinerie de
sucre du Québec imposera un minimum de présence et d'efforts
à quelque autre concurrent que ce soit pour se mériter et
conserver une part raisonnable des quelque 200 000 tonnes qui continueront
d'être accessibles, au-delà des 80 000 tonnes que la Raffinerie de
sucre du Québec détiendra sur le marché
québécois. "D'autre part, la fermeture de Sucre Saint-Laurent
placerait son actionnaire, Steinberg, dans une position précaire (ayant
à s'approvisionner de St. John ou de Toronto) face à
Métro-Richelieu et à Provigo qui auraient accès à
un fournisseur local. Quelle que soit la décision concernant la
Raffinerie de sucre du Québec, la fermeture possible de l'usine de Sucre
Saint-Laurent à Montréal est, pour des motifs techniques,
très improbable. L'usine au Canada qui est la plus susceptible de fermer
ses portes est celle de Westcane en Ontario et non celle de Sucre
Saint-Laurent, à cause des raisons suivantes. "L'usine ne produit pas
toute la gamme des produits Lantic contrairement à Sucre Saint-Laurent;
le procédé de fabrication utilise un sucre brut de très
haute qualité qui est de plus en plus rare sur le marché mondial,
(importé presque exclusivement -ah, c'est intéressant - d'Afrique
du Sud et d'Australie); c'est actuellement l'usine la moins flexible de toutes
les usines au Canada. "En résumé, la décision de Lantic ne
se prendra pas par rapport à la seule usine de Sucre Saint-Laurent qui
ne dessert pas principalement le marché du Québec, contrairement
à ce qu'on prétend, mais par rapport à la
rationalité de la répartition des activités du groupe
Lantic dans ses diverses installations".
On poursuit. "Le tableau suivant décrit, en effet, les parts de
marché desservies par chacune des usines et leur évolution
après la réalisation du plan de rentabilisation de la raffinerie
de sucre, è supposer que les 32 000 tonnes supplémentaires
qu'elle entend vendre au Québec d'ici à trois ans soient prises
au prorata des parts du marché québécois détenues
par chacune des usines. Les gains faits aux dépens de Redpath
s'élèveraient à quelque 13 000 tonnes; ceux
réalisés sur le marché de Lantic è environ 19 000
tonnes. Or, de ce dernier total, quelque 13 000 tonnes vient
présentement de J'usine de St. John et 6000 tonnes de l'usine de
Saint-Laurent, cette dernière n'alimentant que 17 % du marché
québécois (31 %, si on inclut dans sa part les 40 000 tonnes
qu'elle raffine pour la Raffinerie de sucre du Québec".
Là, un tableau indique clairement ce que je viens de vous lire,
M. le Président, et on le retrouvait dans le rapport. "Il est bien
clair, poursuit-on dans ce document, dans les circonstances, que ce n'est pas
l'avenir de la raffinerie de sucre qui déterminera le sort de l'une ou
l'autre usine du groupe Lantic dont la rationalisation des opérations
s'impose à l'évidence après les acquisitions de Westcane,
en 1983, et de Sucre Saint-Laurent, en 1984. On sait déjà qu'il y
aura une centaine de mises à pied le 1er juillet à l'usine de la
rue Notre-Dame, tel qu'il en avait été convenu entre Lantic et
Saint-Laurent le 6 septembre dernier, alors qu'une période de
grâce de neuf mois était prévue pour effectuer les mises
à pied du personnel déjà en surplus, même à
cette époque. "Le transfert des opérations de Westcane aura pour
effet d'amener l'usine de la rue Notre-Dame bien au-delà du seuil de
rentabilité, en dépit de la présence de la Raffinerie de
sucre du Québec. Cette rationalisation entraînera la fabrication
de près de 200 000 tonnes de sucre à l'usine de la rue
Notre-Dame. "
M. le Président, vous voyez à la lecture de ce rapport
qu'il est pertinent et important que l'on fasse venir la compagnie Lantic pour
savoir exactement ce qu'il en est. Le député de Lévis,
quand il était ministre, avait lui-même pris connaissance de ce
rapport et il se le rappelait très bien lorsque hier il a fait la
proposition de faire venir la compagnie Lantic. Il y a d'autres raisons qui
nous motivent à demander que la compagnie Lantic vienne témoigner
et nous expliquer un certain nombre de choses. Le ministre de l'Agriculture,
lorsqu'il a annoncé sa décision le 10 mars, nous a dit que la
compagnie Lantic construirait un siège social à Montréal.
Quand on a regardé les
déclarations du président, M. Labrosse, si je ne m'abuse,
on s'est rendu compte que ce n'était pas la construction d'un
siège social, c'était la location d'un édifice à
bureaux qui devait être construit par quelqu'un d'autre.
M. le Président, les investissements que le ministre
prévoyait et qu'il présentait comme des investissements de la
compagnie Lantic à l'égard de l'établissement, du
déplacement de son siège social de Toronto vers Montréal,
c'était de la poudre aux yeux. Non seulement il n'y aura pas de
construction de siège social, mais, dans les faits, déjà,
l'entreprise agit à partir de Montréal; le coeur de ses
opérations, de sa direction est déjà à
Montréal.
M. le Président, il y a un autre élément qui
pourrait être intéressant. La compagnie Lantic, semble-t-il, selon
l'entente qui est intervenue et qui a été en partie rendue
publique par le ministre le 10 mars, nous indiquait qu'elle ferait des
investissements de 25 000 000 $. Or, selon les informations que nous avons et
qui ont été colligées par la direction de la raffinerie de
sucre et par les gens du ministère de l'Agriculture, cet investissement
était déjà prévu dans les projets de la compagnie
Lantic. Il n'y a pas d'investissement additionnel à cause de la
décision de la compagnie; il y a des investissements qui, de toute
façon, avaient été prévus et qui vont probablement
se faire. Donc, il y a comme un caractère assez trompeur dans la menace
de la compagnie Lantic de quitter Montréal. Il y a aussi un
caractère assez trompeur dans le fait qu'on va établir un
siège social qui est, déjà, dans les faits, a
Montréal et faire une construction qui ne sera pas faite par
l'entreprise.
J'indique également une dernière raison qui va introduire
un projet de sous-amendement que je vais vous présenter. La compagnie
Lantic va être dans une position de quasi-monopole. Compte tenu de cela,
une fois que nous aurions entendu la compagnie Lantic, nous souhaiterions
également entendre le directeur fédéral des enquêtes
sur les coalitions. C'est la raison pour laquelle je présente
l'amendement suivant: Que la motion d'amendement du député de
Lévis soit modifiée en ajoutant, à la fin, les termes: "et
le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions".
Sous-amendement proposant d'entendre le directeur
fédéral des enquêtes sur les coalitions
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
député de Verchères. Votre sous-amendement est d'ajouter:
"et le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions.
"
Une voix: Cela a du bon sens, n'est-ce pas?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Je n'ai pas
à dire si elle a du bon sens ou pas, mais je sais qu'elle est
recevable.
M. Pagé: On va le voir lorsque vous allez voter, M. le
Président. Et la valse continue.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous
pouvez y aller maintenant pour présenter votre argumentation en faveur,
évidemment.
M. Charbonneau: Maintenant, pour mon collègue, le
député de Dubuc, est-ce que vous pourriez relire mon projet de
sous-amendement?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Je peux relire le
projet de sous-amendement. D'ajouter: "et le directeur fédéral
des enquêtes sur les coalitions. "
M. Houde: Si vous l'aviez mis à l'intérieur de la
même proposition, cela aurait été plus sérieux,
votre affaire. Quand on voit la façon dont vous vous comportez devant
des gens qui, je pense, sont sérieux et qui veulent vous entendre
sérieusement...
M. Desbiens: Le ministre ne peut pas faire venir tout le monde,
il faut bien essayer d'en avoir quelques-uns.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, s'il
vous plaît!
M. Houde: Non. J'aurai mon droit de parole tantôt. (12 h
15)
Le Président (M. Tremblay, Iberville): "Et le directeur
fédéral des enquêtes sur les coalitions. " On a seulement
le texte français. La parole est maintenant au député de
Verchères, pour trente minutes.
M. Jean-Pierre Charbonneau
M. Charbonneau: M. le Président, je fais cette proposition
pour ceci... D'abord, je vais vous dire que, déjà, les
transactions de la compagnie Lantic quand celle-ci a fait l'acquisition de
Sucre Cartier - Cartier Sugar, je crois - ont fait et, à ma
connaissance, continuent de faire l'objet d'une enquête du directeur
fédéral des enquêtes sur les coalitions. Je le sais de
bonne source parce qu'à la suite des intentions qui ont filtré au
cours des derniers mois j'ai moi-même été contacté
par les services du directeur fédéral des enquêtes sur tes
coalitions. Comme je l'ai indiqué dans mon discours de deuxième
lecture, le 20
décembre dernier, je me rendais au bureau de la firme Buyers,
Casgrain, Stewart & Ass. une importante firme d'avocats de Montréal,
au 1 Place Ville-Marie. J'étais amené à rencontrer un
avocat senior de cette firme qui avait eu le mandat du gouvernement
fédéral de procéder à une vérification de la
légalité de la transaction que s'apprêtait à faire
le nouveau gouvernement du Québec dans le secteur du sucre. À ce
moment-là, étaient également présents, outre
l'avocat senior de la firme Buyers, Casgrain, Stewart & Ass., deux
enquêteurs du directeur fédéral des enquêtes sur les
coalitions, MM. David Wolinsky et Don Mercer. On m'a posé plusieurs
questions et, même si je n'étais pas obligé de le faire
comme membre de l'Assemblée nationale, j'ai accepté volontiers de
collaborer à cette enquête et j'ai donné le maximum
d'informations que je pouvais donner. Je le dis très officiellement et
très publiquement, je n'ai rien à cacher dans ce dossier. J'ai
appris récemment que l'enquête se poursuivait et même
peut-être s'intensifiait.
À partir du moment où le gouvernement du Québec
s'apprête à poser un geste qui serait considéré
comme illégal, qui pourrait être illégal, où il y a
une présomption qui pèse actuellement sur le caractère
légal de la transaction, je crois qu'il serait approprié,
à ce moment-ci, que le gouvernement prenne une précaution
élémentaire et que l'on accepte de faire venir devant nous, avec
les autres personnes et organismes qu'on veut entendre, le directeur
fédéral des enquêtes sur les coalitions.
Quand on regarde le texte même de la Loi relative aux
enquêtes sur les coalitions qui date de 1978, on se rend compte de
l'importance du dossier en cours. On dit, par exemple, dans certaines
définitions: "Le mot "fusion" signifie l'acquisition par une ou
plusieurs personnes, soit par achat - ce qui semble être le cas - ou
location d'actions ou d'élément d'actifs soit autrement, de tout
contrôle sur la totalité ou quelque partie de l'entreprise d'un
concurrent. " C'est le cas de la Raffinerie de sucre du Québec qui
était un concurrent agaçant pour la compagnie Lantic, puisque
cette compagnie et d'autres ont pris la peine d'engager un lobbyiste permanent
pour tenter de miner la crédibilité de la Raffinerie de sucre du
Québec. Donc, "tout contrôle sur la totalité ou quelque
partie de l'entreprise d'un concurrent, fournisseur, client, ou autre personne,
ou d'un intérêt dans la totalité ou quelque partie d'une
telle entreprise moyennant quoi la concurrence est ou semble devoir être
réduite au détriment ou à l'encontre de
l'intérêt du public, qu'il s'agisse de consommateurs, de
producteurs ou d'autres personnes. "
Plus loin, on donne la définition de "monopole" qui est la
suivante: "Monopole signifie une situation dans laquelle une ou plusieurs
personnes contrôlent pour une grande part ou complètement, dans
tout le Canada ou quelqu'une de ses régions, la catégorie ou
l'espèce d'entreprise à laquelle se livrent ces personnes et ont
exploité ou semblent devoir exploiter cette entreprise au
détriment ou à l'encontre de l'intérêt du public,
qu'il s'agisse de consommateurs, de producteurs ou d'autres personnes. "
À sa face même, il est clair que la transaction qui est
actuellement en attente d'une décision - ce projet de loi va permettre
au gouvernement de terminer et de bâcler sa transaction qui pointe
à l'horizon car une entente nous a déjà été
confirmée entre la compagnie Lantic et le gouvernement, suppose ou
présuppose que le gouvernement s'apprêterait à utiliser son
pouvoir pour créer, à toutes fins utiles, ou pour accentuer une
situation monopolistique. On sait déjà qu'il n'y a que trois
compagnies qui actuellement fournissent le marché
québécois du sucre: la compagnie Redpath, la compagnie Lantic et
la Raffinerie de sucre du Québec.
M. le Président, quand le gouvernement du Québec
décide de liquider la Raffinerie de sucre du Québec à
l'encontre de l'avis de nombreux experts qu'il refuse d'entendre ces experts,
et qu'il va liquider la compagnie en la cédant à la compagnie
Lantic, qu'est-ce qu'il fait? Il consolide une situation oligopolistique.
L'oligopole, c'est une situation de marché où, finalement, il y a
peu d'entreprises qui sont dans ce marché. Il y a déjà des
procès qui ont été intentés contre les grands du
sucre par un certain M. Austin qui avait, d'ailleurs, été victime
d'actes criminels, d'assauts et de tentatives de meurtre. Je pense que les
députés du parti ministériel qui ne sont pas au courant de
la petite histoire du sucre seraient peut-être mieux de se renseigner.
C'est, à bien des égards, une situation assez curieuse qui
mériterait sans doute un roman ou une étude journalistique fort
intéressant. Peut-être, d'ailleurs, que, quand je ne serai plus
député, je m'intéresserai à cette nouvelle
filière. Après avoir fait la filière du trafic
international des drogues, je ferai peut-être la filière du sucre,
M. le Président. Pour le moment, ce que je voudrais, c'est utiliser ma
fonction de député pour essayer d'aller plus loin dans cette
filière et de comprendre un peu ce qui se passe, et d'empêcher que
le gouvernement ne consolide une situation oligopolistique parce que, dans les
faits, il s'apprêterait à créer, à toutes fins
utiles, un monopole ou un cartel.
M. Garon: Vous pourriez mettre cela en parallèle avec la
suffisance béate des fonctionnaires des Finances.
M. Charbonneau: M. le Président, je voudrais vous lire
certains passages d'une
étude sur la situation de la raffinerie de sucre et de
l'industrie québécoise du sucre, qui accompagnait, d'ailleurs, le
mémoire du ministre de l'Agriculture précédent au Conseil
des ministres le 18 avril 1985. On y disait, entre autres: "La nature
oligopolistique de l'industrie sucrière canadienne permet aux raffineurs
de fixer leur marge de profit brut. Malgré les nombreuses fluctuations
des cours mondiaux depuis les quinze dernières années, la marge
des raffineurs n'a pas cessé de s'accroître. Dans ce
système où théoriquement toute fluctuation de prix du
sucre brut est répercutée au consommateur, la marge brute des
raffineurs est ajoutée au prix du sucre brut pour constituer le prix
officiel du sucre raffiné. Cette marge qui s'était maintenue
autour de 110 $ par tonne entre 1974 et 1979 s'est depuis accrue constamment
pour atteindre 307 $ au début de 1985. Exprimée en pourcentage du
prix de revient du sucre brut, la marge des raffineurs est passée de 19
% en 1980 à 128 % en 1985 - M. le Président, 128 %, la marge de
profit -(307 $ de marge par rapport au prix de 240 $ la tonne de sucre brut). "
Imaginez-vous! "C'est ce système de fixation de prix qui a permis aux
raffineurs canadiens de sucre de canne de réaliser des
bénéfices nets que l'on a pu évaluer au cours des
dernières années à près de 50 000 000 $,
représentant un rendement net sur l'avoir des actionnaires -
écoutez bien cela - supérieur à 40 %.
M. Garon: C'était l'an passé. Cela a empiré
depuis ce temps.
M. Charbonneau: Cela a empiré. "C'est au chapitre des
escomptes consentis aux différents acheteurs que le jeu de la
concurrence se manisfeste. De façon générale, ces
escomptes sont maintenus à un niveau normal tant que les parts de
marché de chaque raffineur, membre de l'oligopole, demeurent stables et
non menacées. "On comprend que, dans ce contexte d'une chute dramatique
des prix du sucre brut et d'une accélération rapide des marges
des raffineurs canadiens è partir de 1979, la Raffinerie de sucre du
Québec ait estimé essentiel d'entrer dans le marché du
sucre raffiné. Or, la venue de la Raffinerie de sucre du Québec
dans ce marché en 1983 a provoqué une guerre d'escomptes d'une
ampleur sans précédent. Il faut souligner que de semblables
guerres d'escomptes s'étaient déjà produites en 1976 lors
de l'arrivée dans l'industrie de Cartier Sugar et de Westcane Sugar.
"
M. le Président, c'est ce qui a amené, un peu plus tard,
le directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions
à s'intéresser à l'acquisition de la compagnie Cartier
Sugar par la raffinerie...
M. Garon: M. le Président, une question de
règlement.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Est-ce que c'est
vraiment une question de règlement? Je vous écoute.
M. Garon: C'est une question de règlement. Il faudrait un
peu de décorum. Le député cite des données
importantes et les membres de la commission sont là pour étudier
le projet de loi. Il ne faudrait pas virer cela en club de cartes.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord.
M. Garon: Alors, il faudrait que les gens qui...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre,
s'il vous plaît, messieurs!
M. Pagé: On est a du charriage et non à
l'étude du projet de loi. Continuez è charrier et, quand vous
aurez fini de charrier, on ira, à nouveau, au projet de loi.
M. Garon: Les données que fournit le député
sont des données sérieuses, basées sur des études
sérieuses et ce serait peut-être bon que tout le monde
écoute.
M. Pagé: C'est soumis en fonction d'une argumentation non
sérieuse. Allons-y, continuons.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. S'il vous
plaît!
M. Charbonneau: Je voudrais que le ministre soutienne ce qu'il
vient de dire.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît:
M. Messier: Sur la même question de règlement...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît!
M. Messier:... que vient de soulever le député de
Lévis. On est justement ici pour étudier le projet de loi et on
n'a même pas commencé encore.
M. Charbonneau: Ce n'est pas pertinent.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Tout le monde a
certainement le droit de faire des motions.
M. Charbonneau: On va, encore une fois, citer le
député de Saint-Hyacinthe dans aon propre comté, M. le
Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît! Messieurs, on va revenir au débat de fond.
M. Charbonneau: M. le Président, je poursuis...
M. Pagé: M. le Président, si le
député n'est pas pertinent, est-ce qu'il est impertinent?
Non"?
M. Charbonneau: Bien non, il est...
M. Garon: Le député de Saint-Hyacinthe est
impertinent.
M. Pagé: Je laisse cela à votre
appréciation.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, s'il
vous plaîtl À l'ordre, s'il vous plaîtl
M. Houde: M. le Président, une question de
règlement.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Une question de
règlement, oui.
M. Houde: Est-ce qu'on a le droit de ne rien dire ici et de
prendre le temps de tout le monde pour rien? On a le droit de faire cela?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Non,
sûrement, ce n'est pas à moi...
M. Charbonneau: M. le Président, sur la question de
règlement. Si le député de Berthier veut jouer à ce
petit jeu, je le défie de lire les documents et de se présenter
devant n'importe quelle association de consommateurs et de voir si les gens
vont trouver cela ridicule.
M. Houde: Arrivez au sérieux. Il est temps, je pensel Cela
fait une journée et demie...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, s'il
vous plaît!
M. Charbonneau: M. le Président, on parle de guerre des
prix et on parle de consolidation de monopole et le député de
Berthier, comme un innocent, ne trouve pas cela important.
M. Houde: Une question de règlement.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît, messieurs, revenons...
M. Houde: M. le Président...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Pardon'?
M. Houde: Est-ce que le député de Verchères
veut retirer ses paroles?
M. Pagé: M. le Président, une question de
règlement. Je comprends que le...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Je n'ai pas compris
exactement les dernières paroles de M. le député de
Verchères, mais on devrait revenir.
M. Charbonneau: M. le Président, je suis prêt
à retirer le terme "innocent" pour penser que le député de
Berthier est un député qui n'a pas l'air de très bien
connaître le sujet. Il serait mieux de continuer de se taire; cela nous
permettrait d'avancer dans la compréhension de l'importance de ce
dossier.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît, messieurs, revenons au débat de fond.
M. Houde: Notre Seigneur a pardonné 33 fois; alors, on va
faire la même chose ce matin. Continuez-Le Président (M. Tremblay,
Iberville): S'il vous plaît, messieurs!
M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Je vais continuer:
"Mais en 1983...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît, messieurs, on revient au débatl
M. Garon: Notre Seigneur avait également dit: Bienheureux
les innocents.
M. Houde: Le député de Lévis peut en
apprendre encore beaucoup!
M. Charbonneau: Le rapport que je cite, M. le Président -
cela devrait intéresser le député pour sa bonne
compréhension et son instruction, disait: "Mais en 1983, il s'agissait
d'une société d'État, en plus d'une sucrerie de betterave,
ce qui est encore plus important pour l'avenir. Pour conserver leur part d'un
marché aussi lucratif, les raffineurs ont donc exercé des
pressions continuelles sur les prix en accordant des escomptes
considérables aux différents acheteurs du Québec.
Connaissant la situation financière précaire de la Raffinerie de
sucre du Québec, Sucre Atlantic Ltée annonçait, en mars
1984, un escompte spécial applicable au Québec seulement de 70 $
la tonne pour ralentir les activités de la raffinerie sur le
marché de détail. Cette tactique, imitée par les autres
raffineurs, a provoqué un manque à gagner de 4 200 000 $ pour la
Raffinerie de sucre du Québec" M. le Président. "On trouvera
è l'annexe 1 copie... "
M. Dubois: La guerre des prix a été
commencée par le député de Lévis.
M. Charbonneau: Le député de Huntingdon pourra
intervenir à son tour. S'il veut continuer...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît, messieurs!
M. Dubois: Vous savez très bien cela. Avec 1 000 000 $ et
400 000 $, de subsides, c'est ce qui est arrivé.
M. Charbonneau: M. le Président, si le
député de...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît, messieurs! M. le député de Huntingdon, si vous
voulez intervenir, je vais prendre...
M. Charbonneau:... Huntingdon veut faire le rôle de
lobbyiste au profit du cartel...
M. Garon: M. le Président, je veux seulement soulever un
point.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, s'il
vous plaît! Qu'est-ce qui se passe ce matin? Est-ce qu'on peut
revenir...
M. Garon: Le député de Huntingdon devrait commencer
à... (12 h 30)
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs,
laissons...
M. Garon: Comme il y a un projet de loi devant le Parlement pour
empêcher les gens de fumer dans les lieux publics...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député de Lévis, cela n'est pas opportun.
Une voix: II n'est pas encore sanctionné.
M. Garon:... les députés devraient arrêter de
fumer et de nous "emboucaner". Tous les députés
ministériels qui fument et qui nous "emboucanent", devraient
arrêter de fumer parce qu'il y a un projet de loi devant le Parlement
pour nous arrêter de fumer.
Une voix: Votre copain aussi fume.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, s'il vous
plaît, si on revient...
M. Pagé: M. le Président, sur la question du
député de Lévis, le député de Lévis
a-t-il constaté que le député de Dubuc, péquiste,
est en train de fumer en cachette'?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, revenons
à l'intervention du député de Verchères.
M. Pagé: Comme d'habitude, le député de
Lévis fait de la boucane.
M. Desbiens: Le député de Dubuc ne fume jamais en
cachette. D'ailleurs, il est allé fumer en commission pour
l'étude du projet de loi sur le tabac, tout en proposant l'adoption du
projet de loi.
M. Pagé: II s'est étouffé en riant.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): De toute
façon, je n'ai rien contre cela.
M. Garon: Je regardais le député de Huntingdon et
il me fait penser à quelqu'un qui a subi les ravages de la cigarette et
de la boucane.
M. Dubois: L'escompte de 1 000 000 $ et les escomptes de 400 000
$, parlez-en de
cela aussi.
M. Charbonneau: M. le Président, si le
député de Huntingdon voulait nous laisser parler.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): C'est cela. Je me
demande si c'est la température ce matin ou si c'est autre chose qui
fait cela. Messieurs, à l'ordre!
M. Charbonneau: M. le Président, cela continue comme suit:
"Malgré cette guerre et les nombreuses mesures de harcèlement
à son endroit, la Raffinerie de sucre du Québec a quand
même pu prendre position sur le marché et y établir une
marque jouissant d'une précieuse notoriété. " Il s'agit de
la marque Marie perle.
M. le Président, le député de Huntingdon
pourrait-il se la fermer et me laisser lire le rapport?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il
vous plaît, messieurs!
M. Dubois: Un instant! M. le député de
Verchères, soyez poli.
M. Charbonneau: Eh bien, taisez-vous et laissez-moi lire.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, s'il
vous plaît!
M. Dubois: Allez lire votre document dans le corridor,
d'abordl
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît! On n'ira nulle part comme cela. S'il vous plaît,
messieurs!
M. Desbiens: La première politesse, c'est de respecter le
règlement.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, on revient
à l'intervention.
M. Pagé: M. le Président, serait-il possible d'appeler les
députés à un peu plus de calme et de
sérénité ce matin? Je crois que tout le monde a
siégé tard, la fatigue se fait sentir, mais il faudrait que nos
travaux puissent se faire dans un meilleur ordre. S'il y a des rivalités
entre le député de Huntingdon et le député de
Verchères, je les invite à profiter de la suspension pour aller
régler cela en face de la porte de l'Amérindien.
M. Dubois M. le Président, je suis prêt...
M. Charbonneau: Le député de...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, messieurs,
s'il vous plaît, on va...
M. Charbonneau: Le ministre de l'Agriculture devrait donner
quelques informations sur ce qu'il pourrait arriver à la porte avant
d'inciter trop son collègue à poser ce geste. M. le
Président, je vous rappelle que je n'ai pas intervenu...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, s'il vous
plaît, soyons plus sérieux.
M. Charbonneau: Je lisais un document et c'est moi qui ai
été interrompu à plusieurs reprises, M. le
Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît!
M. Charbonneau: C'est un document important, M. le
Président. On parle de la guerre des prix; on parle de ia consolidation
d'un monopole; on parle de marges de profit considérables qui se sont
faites sur le dos des consommateurs. Des marges de profit qui vont
s'accroître, parce que les escomptes que l'on a consentis dans cette
guerre des prix vont disparaître avec la liquidation de la Raffinerie de
sucre du Québec et la vente de cette raffinerie à la compagnie
Lantic.
M. le Président, je poursuis quelques paragraphes importants:
"Cette guerre d'escompte prendrait fin si la raffinerie de sucre pouvait
produire elle-même une quantité raisonnable de sucre
raffiné puisque les grandes raffineries manipulent un trop grand volume
pour se permettre de maintenir leurs escomptes au niveau actuel sans
connaître des pertes considérables. Avec son plus faible volume,
la raffinerie pourrait soutenir cette concurrence et demeurer présente
sur ce marché" au bénéfice des consommateurs.
On dit plus loin: "D'ailleurs, l'expérience récente de 30
mois de dures négociations avec les raffineurs, qui ont abouti à
des tarifs très élevés de raffinage à forfait chez
Redpath et d'équivalents de raffinage à forfait encore plus chers
chez Lantic - imaginez-vous, Lantic a étranglé la Raffinerie de
sucre du Québec, M. le Président, en exigeant des prix
exorbitants pour raffiner son sucre - sous la 9eule menace de contrats de
raffinage à forfait avec les Américains, montre bien que cette
approche ne peut se solder que par une dégradation progressive de la
situation de la raffinerie, tant qu'elle ne se trouvera pas en position de
lutter à armes égales avec les raffineurs. " C'est la proposition
qu'avait faite l'ancien ministre de l'Agriculture: permettre à la
Raffinerie de sucre du Québec de lutter à armes égales.
"Ces contrats de raffinage à forfait, s'ils permettent à la
raffinerie d'améliorer temporairement sa position financière par
rapport à celle que lui
permettrait la seule vente de son sucre brut, sont très
limités, interdisant en pratique l'accès de la raffinerie
à de nouveaux marchés. "
Voilà, M. le Président, des éléments d'un
volumineux rapport qui avait été présenté par
l'ancien ministre de l'Agriculture et qui avait été
préparé par ta direction de la Raffinerie de sucre du
Québec et le ministère de l'Agriculture, qui justifiaient nos
demandes d'hier. Voilà donc des éléments importants dans
le dossier de la constitution d'une situation de quasi-monopole, sinon de
monopole tout court et de cartel tout court. Je crois qu'à cet
égard on doit demander au directeur fédéral des
enquêtes sur les coalitions de comparaître devant cette commission,
d'autant plus que le ministre de la Justice, qui a été
interrogé par mon collègue de Lévis il y a quelques
semaines a répondu exactement - je pense qu'il lui a fallu deux semaines
avant de répondre - le 22 avril dernier que, à sa connaissance,
il n'y avait pas d'enquête du service des enquêtes en vertu de la
Loi relative aux enquêtes sur les coalitions. C'est ce qu'il a
répondu le 22 avril 1986.
M. le Président, je vous indique que j'ai été, le
20 décembre dernier, moi-même interrogé dans le cadre de
cette enquête ou préenquête, à la Place Ville-Marie,
aux bureaux de la firme Buyers, Casgrain, Stewart & Associates,
engagée par le directeur fédéral des enquêtes sur
les coalitions, et j'ai donné au ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation - je vois qu'il commence à
être plus intéressé -les noms des deux enquêteurs,
David Wolinsky et Don Mercer, du service des enquêtes
fédérales sur les coalitions que j'ai rencontrés.
Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'un dossier est actuellement ouvert
et qu'une enquête est en cours. On n'en connaît pas les
conclusions. Mais je crois que, è ce moment-ci, avant de laisser le
gouvernement aller, en l'amenant peut-être à poser un geste
illégal qui contreviendrait à la Loi relative aux enquêtes
sur les coalitions, le ministre doit prendre le minimum de précautions.
Je me rappelle les débats sur les clauses constitutionnelles, la morale
qu'on nous avait faite sur les précautions qu'on devrait prendre avant
de poser des gestes et les jugements qui sont intervenus par la suite devant
les tribunaux et qui ont permis à l'Opposition de l'époque, qui
forme aujourd'hui le gouvernement, de dire que le gouvernement n'avait pas pris
toutes les précautions nécessaires.
Nous invitons le gouvernement à faire ce qu'il préconisait
quand il était dans l'Opposition, à prendre toutes les
précautions nécessaires et è faire comparaître le
directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions afin
qu'il nous dise où en est son enquête actuellement et afin qu'il
nous dise, selon lui, en vertu de la Loi relative aux enquêtes sur les
coalitions, s'il y a risque de constitution d'un cartel, s'il y a risque que le
gouvernement du Québec se place dans une situation
d'illégalité à l'égard de l'entente qu'il a conclue
avec la compagnie Lantic et de la transaction qu'il se dépêcherait
de bâcler une fois que le projet de lot serait adopté.
M. le Président, sans partisanerie et en toute
honnêteté, ne trouvez-vous pas cette proposition logique,
sincère, appropriée et à propos à ce moment-ci? On
veut aider le gouvernement. On veut qu'il évite de se placer dans une
situation où, dans quelques mois, le directeur fédéral des
enquêtes sur les coalitions arriverait avec un volumineux document et
décréterait que le gouvernement du Québec a agi
illégalement. Mais là, M. le Président, on ne pourrait pas
revenir en arrière, on aurait liquidé l'entreprise. L'entreprise
serait fermée; les employés seraient... On pourrait
peut-être faire casser la transaction, mais qu'arriverait-il des
employés, des producteurs agricoles, des gens qui s'engageaient, qui
gagnaient leur vie, qu'on aura envoyés aux quatre vents, qu'on aura
reclassés, je l'espère, en tout cas?
M. le Président, il restera l'édifice, l'immeuble. Mais,
quand cette décision ou cet avis nous parviendra, peut-être
aurons-nous aussi vidé l'immeuble important de la raffinerie de tous ses
équipements. Avant que tout cela se fasse, je pense que le minimum que
doit faire le gouvernement, c'est prendre les précautions qui s'imposent
pour s'assurer que son projet de loi, sa décision, la transaction qu'il
s'apprête à faire soit faite dans toute la légalité,
avec toutes les garanties possibles. Il n'y a pas, comme je le disais hier,
d'urgence. Il n'y a pas de presse. La seule urgence qu'il y a, c'est
l'empressement qu'a la compagnie Lantic d'en finir avec cette affaire.
Je me rappelle, ce n'est pas d'hier que M. Morin nous regarde et fait
son lobby, efficace d'ailleurs. Je lui ai dit hier qu'il devait être
content parce qu'il a gagné la partie, peut-on présumer, si le
gouvernement va de l'avant. Ce n'est pas d'hier qu'il travaille à ce
dossier, M. le Président. Cela fait des années.
J'ai cité hier le rapport annuel de la compagnie Steinberg qui
indiquait les profits importants que la compagnie déclarait à
cause de ses investissements dans la compagnie Lantic. Si on décidait de
retarder ou même d'empêcher cette transaction, ce n'est pas cela
qui ferait mourir Steinberg et la compagnie Lantic. Mais le gouvernement se
placerait peut-être dans une situation où il prendrait non
seulement l'intérêt du développement économique du
Québec et de la création d'emplois, mais également
l'intérêt des consommateurs du Québec.
D'ailleurs, moi, je trouve assez étrange que le ministre
responsable de la Protection du consommateur n'ait daigné, à
aucune reprise depuis le début de nos travaux, ni dans ce débat,
M. le Président, intervenir une seule fois. II n'est pas intervenu
à l'occasion de l'étude du principe du projet de loi è
l'Assemblée nationale...
M. Garon: II dort sur la "switch".
M. Charbonneau:... le ministre responsable de la Protection du
consommateur.
M. Garon: Il n'y a pas de ministre de la Protection du
consommateur.
M. Charbonneau: II n'est pas intervenu pour venir débattre
des propositions d'auditions particulières que nous faisons depuis hier
et il ne vient pas, à ce moment-ci, s'intéresser aux travaux
alors que le gouvernement s'apprête à créer un monopole et
à consolider une situation de cartel, tout cela au détriment des
consommateurs. Ce qui est aberrant et extraordinairement scandalisant, M. le
Président, cela devrait même faire rougir un peu M. Morin, c'est
que, pendant des années, ces compagnies qui ont
bénéficié de la baisse des prix sur le marché
international du dumping n'ont pas répercuté cette baisse de prix
aux consommateurs. Ce qu'elles ont fait, et ce sont les passages que je vous
lisais tantôt, elles ont empoché des profits exorbitants sur le
dos des consommateurs. Ce sont les arguments qu'on nous sert continuellement,
disant que la situation au Canada est idéale parce que le Canada n'a pas
de politique de régularisation des prix et qu'il peut
bénéficier des avantages du marché international du
dumping, que les consommateurs sont avantagés. Foutaise, M. le
Président, foutaise! Les consommateurs du Québec, du Canada,
n'ont pas été avantagés.
Il y a des études qui ont été produites par la
direction de la Raffinerie de sucre du Québec, par le ministère
de l'Agriculture et elles n'ont pas été contredites par M.
Paillé et ses collègues du ministère des Finances, qui
établissent que les consommateurs québécois et canadiens
ont payé leur sucre aussi cher que dans les pays où il y avait
régularisation des prix, comme aux États-Unis et en France, alors
qu'ici ils auraient dû payer moins cher si on tient compte de l'argument
présenté.
Comment se fait-il qu'il n'y a pas eu d'avantages significatifs pour les
consommateurs, M. le Président? Comment se fait-il qu'il y ait eu
pendant des années exploitation d'une situation de force? Et le
gouvernement, actuellement, s'apprêterait à consolider cette
situation de force au détriment des consommateurs et on ne voudrait pas
entendre le directeur fédéra! des enquêtes sur les
coalitions"? On voudrait faire en sorte que le ministre responsable de la
Protection du consommateur ne se pointe pas une fois à cette commission,
qu'il n'intervienne à aucune reprise dans ce débat qui concerne
directement les consommateurs. Le ministre Marx n'a pas eu une intervention, M.
le Président, depuis qu'il a été nommé responsable
de la Protection du consommateur; il n'y a pas un dossier aussi important pour
la protection des consommateurs que celui-ci sur lequel il aurait dû se
pencher depuis le 12 décembre dernier.
M. le Président, cette incompétence, cette absence de
conscience professionnelle, cette absence de professionnalisme du ministre
responsable de la Protection du consommateur font que ce ministre s'est
complètement désintéressé du débat du projet
de loi que le ministre de l'Agriculture présente avec son
collègue délégué à la Privatisation.
Aujourd'hui le ministre de l'Agriculture et le ministre
délégué à la Privatisation vont présenter et
faire adopter un projet de loi qui va permettre au gouvernement de constituer
un quasi-monopole, sinon un monopole de fait. Est-ce que c'est la vocation du
gouvernement du Québec, est-ce que c'est la vocation sociale, est-ce que
c'est la vocation économique du gouvernement du Québec de
créer des monopoles? Est-ce que c'est la vocation sociale, est-ce que
c'est la vocation économique du gouvernement du Québec de faire
en sorte de placer les consommateurs québécois à la merci
de compagnies qui ont déjà abusé considérablement
de la situation? Est-ce que c'est cela, la vocation du gouvernement du
Québec? Deux, cinq, laissez faire. Je vais prendre le temps qu'il faut
pour vous dire vos quatre vérités, M. le Président.
C'est absolument aberrant de voir le ministre de l'Agriculture ne pas
frémir devant la situation, le comportement de ces entreprises. Si je
pouvais rapidement mettre la main sur... Attendez une petite seconde. Non, M.
le Président, si je mettais la main sur vous, je vais vous dire une
affaire, après cela vous auriez des problèmes. (12 h 45)
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous ne parlez pas
au président, n'est-ce pas?
M. Charbonneau: M. le Président, j'ai ici un article de la
Gazette du 8 mars 1965 qui s'intitule: "Sugar conspiracy, allegation
will be heard. " Pendant des années, on a tenté de faire taire un
monsieur qui s'appelle Robin Austin qui avait décidé de
s'attaquer de front au cartel du sucre. Cet homme a été victime
d'attentats et de sabotages. Son auto "was blown up", si je traduis bien, cela
veut dire: a sauté.
M. Messier: C'est parce qu'il a mis du sucre dedans.
M. Charbonneau: C'est ridicule d'entendre le député
de Saint-Hyscinthe rire de ce comportement. M. le Président, je lui
promets la plus belle bataille électorale qu'il aura jamais eue. Je
m'engage à le faire battre personnellement dans son comté.
M. Messier: Cela n'a rien donné la dernière
fois.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre,
s'il vous plaît! Revenons...
M. Charbonneau: Comment penser que le gouvernement du
Québec va s'associer...
M. Messier: Viens donc dans Saint-Hyacinthe. Viens encore.
M. Charbonneau:... à une situation qui a donné des
actes de banditisme, M. Je Président? L'histoire de l'industrie du sucre
au Québec et au Canada est une histoire qui frise la
criminalité...
M. Pagé: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît! Question de règlement. Une seconde. M. le ministre, je vous
écoute.
M. Pagé: M. le Président, je n'ai pas abusé
du temps de cette commission jusqu'à maintenant, à juste titre,
compte tenu des abus nombreux que l'on retrouve de l'autre côté.
Est-ce que le député de Verchères pourrait utiliser des
propos moins violents en vertu des dispositions de notre règlement et
cesser de porter des jugements qualifiant l'industrie de banditisme, etc. ?
M. Charbonneau: M. le Président, je ne porte pas de
jugement; je cite des événements, des faits.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, mais quand
même, de là à dire que le gouvernement fait une coalition,
vous dépassez les bornes.
M. Charbonneau: M. le Président, non, ce que je dis, c'est
que l'histoire de cette industrie a donné lieu à des actes de
banditisme.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. Vous
pouvez citer des exemples, toujours en fonction de votre sous-amendement.
M. Charbonneau: C'est toujours en fonction du sous-amendement. Je
demande justement que le directeur fédéral des enquêtes sur
les coalitions vienne, parce que quelqu'un qui s'était attaqué
à cette situation monopolistique et qui avait dénoncé le
monopole et le cartel en a subi des conséquences physiques. Il a
été attaqué comme on attaque des gens dans des milieux
sordides à Montréal. Ce que je dis, c'est que l'histoire de
l'industrie sucrière au Canada et au Québec, c'est une histoire
où on est obligé de se rendre compte qu'il y a eu du banditisme.
Il y a eu des attentats.
M. Pagé: M. le Président, est-ce pour cela que le
député de Verchères semble frémir ce matin?
M. Charbonneau: Je ne frémis pas, M. le Président,
parce que je ne tiendrais pas les propos... Avec ce que j'ai de plomb dans les
ailes, ce n'est pas cela qui va m'arrêter.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît, oui.
M. Charbonneau: M. le Président, le gouvernement, avant
d'aller plus loin dans sa décision et dans sa démarche, doit
acquiescer à notre demande. Il doit se donner la peine de
vérifier toutes les possibilités qu'il y aurait à
l'égard de la constitution d'une situation de monopole. Il doit aussi
vérifier quelles seraient les conséquences pour les consommateurs
du Québec.
M. le Président, je crois que toutes ces demandes sont
légitimes et fondées et que ce sont des demandes tellement
minimes par rapport à la situation, tellement réservées,
tellement acceptables, que l'on se demande encore comment il se fait que je
sois obligé de plaider pendant une demi-heure et de me faire interrompre
à certaines reprises par des railleries de députés
ministériels pour vous convaincre, convaincre le ministre de
l'Agriculture et convaincre ses collègues qu'il y a anguille sous roche.
Il y a des choses graves qui doivent être regardées de plus
près. L'on ne doit pas faire ce projet de loi à la
légère. Il n'y a pas d'urgence à procéder, comme le
gouvernement veut le faire, sans entendre toutes les parties concernées,
sans entendre les gens qui sont les premiers et les plus au fait de la
situation, sans entendre tous les experts.
M. le Président, peut-être que la compagnie Lantic aurait
de bonnes explications à donner. Pourquoi ne lui avons-nous pas
donné l'occasion de se faire entendre? Pourquoi ne donnerions-nous pas
également l'occasion au directeur fédéral des
enquêtes sur les coalitions peut-être de nous rassurer et de nous
dire que le gouvernement peut faire ce qu'il fait parce qu'il n'y a pas
tellement de danger?
Mais, au moment où on se parle, telle n'est pas la situation. Les
présomptions de danger sont considérables; les
présomptions de conséquences graves pour les consommateurs sont
considérables. Les pré-
somptions d'empirer une situation qui a déjà joué
considérablement contre les consommateurs québécois sont
considérables et, à cet égard-là, je crois qu'il
est normal qu'on fasse appel aux gens que l'on veut convoquer. Comme cela, on
aura toutes les versions. Comme cela, M. le Président, la compagnie
Lantic pourra aussi, peut-être, réfuter des
événements ou apporter un éclairage utile, nouveau, sur la
situation qui s'est produite et sur les comportements et la fluctuation des
prix.
M. le Président, je répète ce que j'ai dit hier: Je
ne peux pas comprendre qu'on va tuer une industrie agro-alimentaire qui existe
depuis 40 ans au Québec sans permettre à tous les
intéressés d'être entendus. C'est complètement
inacceptable, c'est complètement aberrant et je demande, par votre
entremise, au ministre qu'il revienne sur sa décision, sur sa position.
Ii reste encore plusieurs jours avant la fin de la session. Peut-être le
ministre pourrait-il prendre la fin de semaine pour réfléchir.
Peut-être que des militants libéraux auront la conscience
troublée; peut-être M. Morin aura-t-il la conscience
troublée. Peut-être diront-ils au ministre de l'Agriculture, en
fin de semaine, au conseil général: Écoutez, il n'y a rien
qui presse. Faites donc entendre toutes les parties. Au moins, on pourra faire
taire les péquistes parce qu'on aura prouvé que ce qu'ils
disaient était faux. Mais faites entendre le monde pour qu'on ait un
procès juste et équitable et qu'au moins on puisse se promener
dans nos comtés en disant: On a respecté notre parole.
Voilà, M. le Président, ce que j'avais à dire sur
la motion de sous-amendement que je vous présente.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
député de Verchères. Maintenant, je cède la parole
au député de Lévis. Oui?
M. Pagé: Normalement, je devrais avoir la réplique.
Cependant, je vais laisser le député de Lévis intervenir
pour ses dix minutes, me réservant le droit d'intervenir au début
de nos travaux cet après-midi au cas où le député
de Lévis aurait une argumentation plus soutenue, mieux fondée que
celle qui, jusqu'à maintenant, a été formulée par
le député de Verchères et qui ne semble pas très
très convaincante.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, je
cède la parole au député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, la proposition d'amendement
présentée par le député de Verchères disant
que la commission parlementaire de l'agriculture, des pêcheries et de
l'alimentation du Québec devrait entendre le directeur
fédéral des enquêtes sur les coalitions est une proposition
importante. Vous savez que la Loi relative aux enquêtes sur les
coalitions fait une infraction criminelle, à l'article 32, de certaines
offenses. Je vais lire l'article 32. Évidemment, il y a d'autres
offenses ailleurs qu'à l'article 32, mais simplement pour indiquer ce
qui est couvert par la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions, on
dit: "Est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement de cinq
ans ou d'une amende d'un million de dollars, ou de l'une et l'autre peine,
toute personne qui complote, se coalise, se concerte ou s'entend avec une autre
"a) pour limiter, indûment, les facilités de transport, de
production, de fabrication, de fourniture, d'emmagasinage ou de négoce
d'un produit quelconque; "b) pour empêcher, limiter ou diminuer,
indûment, la fabrication ou production d'un produit ou pour en
élever déraisonnablement le prix; "c) pour empêcher ou
diminuer, indûment, la concurrence dans la production, la fabrication,
l'achat, le troc, la vente, l'entreposage, la location, le transport ou la
fourniture d'un produit, ou dans le prix d'assurances sur les personnes ou les
biens; ou "d) pour restreindre ou compromettre, indûment de quelque autre
façon, la concurrence. "
Il est clair que le mandat du directeur fédéral des
enquêtes sur les coalitions est très vaste. Si nous demandons
à la commission parlementaire de l'agriculture du Québec de
recevoir ici et d'inviter le directeur fédéral des enquêtes
sur les coalitions, c'est parce que nous savons que ceux qui sont responsables
des enquêtes sur les coalitions à Ottawa se posent des questions
sur ces transactions, pas depuis hier, pas depuis aujourd'hui, mais depuis
déjà un bon bout de temps. Il serait important que nous recevions
nous-mêmes le directeur fédéral des enquêtes sur les
coalitions puisqu'il ne s'agit pas d'un dossier qui n'est jamais allé
devant le directeur des enquêtes sur les coalitions. On se rappellera que
la direction des enquêtes sur les coalitions avait déjà
pris des actions contre les raffineries de sucre au Canada. C'est un dossier
qui est ouvert à la section des enquêtes sur les coalitions au
gouvernement fédéral.
Je dois dire que c'est une occasion que la commission doit saisir pour
faire en sorte que les juridictions québécoises soient
exercées. Je dois dire aussi à la commission que, si elle refuse
de recevoir le directeur fédéral des enquêtes sur les
coalitions, je proposerai moi-même aux membres de l'équipe du
Parti québécois de la commission de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation d'aller rencontrer le directeur des
coalitions à Ottawa.
Je pense que cette transaction proposée par le gouvernement est
contre l'intérêt public, et nous le démontrerons par tous
les moyens. C'est un moyen de savoir véritablement ce qui se passe.
Qu'on ne pense pas que le gouvernement va nous bâillonner, va adopter une
loi à la vapeur, en disant par la suite: C'est fini, on l'a
adoptée. Ce dossier sera ouvert, soyez-en certain, jusqu'aux prochaines
élections! Ce dossier ne finira pas, parce qu'il est contraire à
l'intérêt public. Déjà, les effets néfastes
de cette transaction annoncée par le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation se font sentir sur les prix.
Si nous faisons cette proposition, nous ta faisons de bonne foi et
surtout pour que, éventuellement, lorsque nous engagerons d'autres
démarches, on ne puisse pas nous reprocher de ne pas avoir fait la
requête que le directeur fédéral des enquêtes sur les
coalitions vienne nous rencontrer, ici à Québec, en commission
parlementaire. Par la suite, si la commission refuse d'inviter le directeur
fédéral des enquêtes sur les coalitions, nous irons le
rencontrer à Ottawa. Ce sujet est trop sérieux. Le sucre est un
produit de base pour une multitude d'aliments. De la même façon,
ce matin, on dit que l'indice d'inflation au Québec est plus
élevé que dans les autres provinces, parce qu'il y a eu
augmentation des tarifs de l'électricité à 5, 4 % et qu'il
y a eu une augmentation du prix du gaz due principalement à la taxe que
le Québec a imposée. Cela a amené une inflation
générale sur les prix au Québec parce qu'il s'agit, encore
la, d'un produit de base.
De la même façon, dans le secteur agro-alimentaire, le
sucre est un ingrédient important pour une foule de produits. On saura,
par exemple, que, dans le ketchup, il y a presque autant de sucre que de
tomates; dans la crème glacée, il y a presque autant de sucre que
de lait. Pour une multitude de produits, le sucre est un ingrédient
important. Le gouvernement ne peut pas, d'une façon responsable, limiter
la concurrence au Québec pour faire en sorte que cet ingrédient
de base connaisse une augmentation de prix, parce qu'il n'y aura plus de
concurrence à toutes fins utiles.
Ceux qui ont pensé que c'était un débat
stérile vont se tromper; le prix du sucre doit faire l'objet d'un
débat majeur pour l'économie agro-alimentaire du Québec,
puisque c'est l'ingrédient de base d'une foule de sous-produits. On ne
peut pas se laver les mains dans ce dossier. Nous avons prpposé
jusqu'à maintenant de rencontrer différentes personnes pourdémontrer toutes les facettes de l'industrie du sucre. C'est une des
industries les plus importantes, parce qu'elle est à la base d'une foule
de produits dans l'économie agro-alimentaire du Québec. On ne
peut pas se laver les mains pour dire qu'on a réduit les dépenses
pour boucler le budget à la fin de l'année. Les prix ont
triplé depuis quelques mois et, au taux actuel, selon nos
prévisions d'installation et de capacité de raffinage au
détail, la Raffinerie de sucre du Québec serait rentable. Alors
que les prix ont changé, qu'on veuille s'obstiner, sans aucune
expertise, sans aucune consultation, sans de véritables études
approfondies...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député de Lévis, il reste une minute à la
commission, mais il vous reste trois minutes; vous aurez donc deux minutes cet
après-midi. Alors, on peut continuer encore une minute et on
arrête.
M. Pagé: Ou trois minutes, cet après-midi.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Si vous voulez
continuer pendant une minute.
M. Garon: Je termine cette phrase - je continuerai cet
après-midi - en disant que les gens ne peuvent pas s'obstiner à
vouloir poursuivre envers et contre tous une transaction sans même en
regarder les différents aspects. C'est pourquoi nous faisons, en toute
connaissance de cause, une proposition a la commission. Si la commission refuse
d'entendre le directeur fédéral des enquêtes sur les
coalitions, elle supportera l'odieux de cette décision, parce que c'est
un dossier qui ne finira pas avec ce vote.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, la
commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures cet
après-midi.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 13)
Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre,
s'il vous plaît!
Mesdames et messieurs, si vous voulez prendre place, je déclare
la séance de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de
l'alimentation ouverte et je tiens à dire que, ce matin, on était
en train de discuter le sous-amendement qui dit: "et le directeur
fédéral des enquêtes sur les coalitions". Le
député de Lévis était en train de faire son
intervention. Il lui restait deux minutes.
M. Garon: Trois.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Deux
au moment où vous vous êtes arrêté. Deux minutes
quarante secondes.
M. Garon: D'accord. Deux minutes
quarante secondes.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député de Lévis, on vous écoute. C'est parti.
M. Garon: M. le Président, j'aimerais avoir l'oreille de
la députée de Kamouraska-Témiscouata. Si elle veut parler,
on a tout le temps voulu. Si elle demande la parole au président, on
aimerait qu'elle la demande...
M. Houde: Elle parlait à monsieur.
M. Garon:... pour exposer, pas seulement au député
de Berthier, mais à nous tous, ses pensées sur l'avenir du
sucre.
M. le Président je terminais mon exposé ce matin en disant
que le directeur fédéra] des enquêtes sur les coalitions,
c'est un personnage central à Ottawa, d'autant plus qu'il s'agit d'une
institution qui a eu dans le passé à analyser à plusieurs
reprises l'industrie du sucre. C'est un des domaines dans lesquels on a
parlé à plusieurs reprises d'un système de fixation des
prix un peu spécial. Si vous aviez l'occasion de voir le type de contrat
que signent les raffineries qui vendent du sucre, vous verriez à quel
point on prend tous les moyens pour faire en sorte que personne ne puisse
savoir exactement quel est le prix de vente. À travers des
systèmes d'escompte, de promotion, etc., comportant plusieurs facettes,
il n'est pas facile de déterminer le prix. Pour ces raisons, dans le
passé, les directeurs des enquêtes sur les coalitions ont eu
à intervenir pour vérifier s'il n'y avait pas cartel dans
l'industrie du sucre au Canada, dans l'Est du Canada. Nous croyons que la venue
du directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions devant
cette commission parlementaire permettrait d'éclairer mieux les gens de
la commission avant de voter le projet de loi qui est présenté
par le ministre de l'Agriculture. Il ne s'agit pas d'une proposition faite par
le député de Verchères au hasard. Nous savons pertinemment
qu'il y a eu des enquêtes sur l'état de la concurrence dans
l'industrie du sucre et que les discussions que nous pourrions avoir avec le
directeur fédéral des enquêtes sur les coalitions, qui est
responsable de voir à ce qu'il y ait compétition au Canada dans
les différents types de produits, permettraient de mieux nous renseigner
sur l'état de la question. Cela, d'autant plus que plusieurs personnes
savent qu'actuellement il y a des enquêtes qui se poursuivent par le
service responsable de l'application de la Loi relative aux enquêtes sur
les coalitions. Il serait bon que les membres, avant de voter, sachent...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Le
député pourrait-il conclure? Votre temps est
écoulé.
M. Garon: C'est cela que je suis en train de faire, M. le
Président. Sans dire que je tirais des conclusions, je les tirais. Ce
n'est pas que je voulais prendre les membres de la commission par surprise,
ayant confiance - peut-être un peu naïvement ou candidement, comme
disent les Américains -dans l'ouverture d'esprit des membres de cette
commission pour qu'ils acceptent d'être renseignés par celui qui a
eu, peut-être, le plus à étudier l'industrie du sucre au
cours des dernières années et qui est à même de
venir nous dire si la vente que veut faire, pour fins de fermeture et de
liquidation de la Raffinerie de sucre du Québec, le gouvernement du
Québec est souhaitable ou n'est pas souhaitable dans
l'intérêt public. Sachant qu'éventuellement le gouvernement
fédéral pourrait casser cette transaction parce qu'étant
inéquitable et créant une situation de cartel ou de
quasi-monopole ou d'oligopole qui réduit indûment la concurrence
dans l'Est du Canada...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
député de Lévis. Maintenant, je cède la parole au
ministre.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. J'ai adopté
comme attitude, généralement, de laisser aller les honorables
députés de l'Opposition qui s'adonnent à une
véritable politique, une approche de refus systématique de
l'adoption de ce projet de loi. Cependant, je me dois d'intervenir à ce
moment-ci, compte tenu des commentaires et des propos qui ont été
formulés par le député de Verchères et le
député de Lévis, lesquels nous indiquent leur
réserve, leur très grande inquiétude concernant l'effet
sur le consommateur de la vente des actions de la raffinerie de sucre è
la société Sucre Lantic Ltée. On a parlé beaucoup,
depuis le début de la matinée, de monopoles, de situations de
marchés captifs, d'effets très coûteux pour les
consommateurs. On a parlé du poste du directeur des enquêtes sur
les coalitions, lequel poste, soit dit en passant, n'existe pas. On aurait pu
juger la motion irrecevable, M. le Président, mais on n'a pas voulu
jouer avec les virgules. La fonction exacte en vertu de l'article 5 de la loi,
c'est le directeur des enquêtes et des recherches, lequel est
désigné en vertu de la Loi relative aux enquêtes sur les
coalitions.
M. le Président, essentiellement, on s'est convoqués
è une analyse assez rigoureuse du dossier de la Raffinerie de sucre du
Québec. Je l'ai indiqué longuement lors de l'adoption du principe
du projet de loi. On a étudié, dans un premier temps, le
scénario du statu quo avec tout ce que cela pouvait impliquer comme
investissement de sommes très appréciables
prélevées à même
l'impôt et les taxes des citoyennes et citoyens. Cela nous
obligeait, comme gouvernement, à continuer de déposer, è
chaque fin de mois, des lettres du ministère des Finances garantissant
finalement les emprunts de réconfort auprès des banques, parce
que l'entreprise était techniquement en faillite depuis un bout de
temps. De plus, cela nous obligeait à consacrer 12 000 000 $, 14 000 000
$ ou peut-être même 15 000 000 $ dans le cadre du présent
exercice financier pour maintenir la raffinerie ouverte. Donc, le statu quo a
été écarté.
Par la suite, on a approfondi la possibilité d'en arriver
à un plan d'aménagement qui nous aurait permis de procéder
à la dernière phase de fabrication du sucre blanc, tel que
formulé et déposé au Conseil des ministres, mais
laissé en plan par le gouvernement du Parti québécois.
Ensuite, on a envisagé, comme troisième scénario, de
vendre purement et simplement les actions de la Raffinerie de sucre du
Québec. Nous étions vendeurs. C'est dans cette perspective que
des contacts ont été établis avec les producteurs. On leur
a vraiment offert et j'ai personnellement formulé cette offre. Les
producteurs ont analysé très rigoureusement les états
financiers, la viabilité, la faisabilité de l'entreprise. Ils en
sont venus aux mêmes conclusions que nous, à savoir qu'il fallait
bénéficier d'un apport externe de 15 000 000 $ par année
pour un minimum de sept ans afin d'être capables d'exploiter la
Raffinerie de sucre du Québec.
M. le Président, sur la foi de cela, les représentants du
gouvernement ont eu des rencontres avec la Direction des enquêtes et des
recherches en vertu de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions.
Ces rencontres se sont faites avant, évidemment, notre
énoncé du 10 mars dernier. Je peux vous indiquer que, depuis le
10 mars, on n'a eu aucun signe de vie, aucun suivi, aucun "follow-up", si je
peux utiliser le terme, de ce service relevant de la juridiction
fédérale. On a fait valoir notre dossier. On a mis en relief le
fait que la raffinerie était techniquement en faillite depuis un bon
bout de temps. On a eu l'occasion d'échanger avec eux sur ce
qu'était la situation actuelle. À certains égards, on peut
retenir dans ce dossier que, sur la base stricte de la concurrence, la
situation actuelle pouvait être même illégale à
cause, entre autres, de cette situation - où les déficits de la
raffinerie sont comblés depuis un bon bout de temps par le gouvernement
du Québec. Ce qui crée une situation où la concurrence, le
libre commerce ne se fait pas sur des bases égales, l'entreprise
étant subventionnée de façon très importante si on
réfère au montant des engagements financiers du gouvernement
à l'égard de la raffinerie. On doit rappeler aux
députés de l'Opposition que, pour déclencher une
enquête comme telle, il faut que la transaction soit conclue.
Aujourd'hui, nous prenons acte de la volonté du Parti
québécois de se rendre à Ottawa afin d'intervenir, de
dramatiser. Voyant le député de Lévis, je me l'imagine
très bien arrivant à Ottawa, capitale fédérale de
notre beau pays le Canada, venant demander - lui qui est un
indépendantiste convaincu, beaucoup plus que M. Johnson - la protection
du gouvernement du Canada par l'administration de ses lois. J'ai bien
hâte de voir la photo. Je m'imagine le titre. Garon sous le drapeau du
Canada.
M. Garon: Cela permettrait de tester le système
fédéral aussi. S'il est efficace, s'il bouge, s'il ne bouge pas,
s'il défend les intérêts des consommateurs ou non.
M. Pagé: J'anticipe la satisfaction que j'aurai de voir,
encore une fois, jusqu'où le Parti québécois pourrait
aller dans ses contradictions.
M. le Président, il faut quand même avoir à l'esprit
certains éléments. Dans le cadre du projet de loi qui est
actuellement déposé et qui est étudié par la
Chambre des communes à Ottawa, il n'y aurait aucun problème - on
pourra y référer sous plusieurs aspects - il serait même
impossible d'avoir une enquête. Si on veut examiner plus
concrètement la vente des actions de la raffinerie a la
société Sucre Lantic, on doit constater qu'on respecte la loi. En
cédant les actions, en fusionnant le commerce de ces deux entreprises,
on ne réduit pas - si je me réfère au libellé de la
loi - de façon inacceptable la concurrence. À preuve, la
Raffinerie de sucre du Québec s'approvisionne déjà
auprès de la société Lantic. Il faut aussi retenir dans
cet exercice - et cela n'a pas été évoqué par les
députés péquistes - que le marché du sucre au
Québec reçoit des volumes de sucre des États-Unis qui
pénètrent notre marché. Il faut convenir aussi que Redpath
est présente sur le marché du Québec. Cette transaction ne
nuit pas à la performance globale de l'économie. On sauve des
emplois à l'est de Montréal, des emplois permanents, des
travailleurs qui oeuvrent toute l'année. C'est avec beaucoup de
réserve que j'entendais les chiffres et on aurait pu soulever beaucoup
de questions de règlement, vous le savez. À voir toute la
détermination et l'enthousiasme qui les animaient, on a
préféré les laisser aller dans leur "filibuster". On a
parlé hier de 1500 emplois. Voyons donc!
M. Garon: Est-ce que le ministre me permettrait une question?
M. Pagé: Après, M. le Président. Les emplois
à la raffinerie de sucre, c'était 93 employés, 103
producteurs la
dernière année. Je comprends que cela crée des
emplois indirects, mais il ne faut pas énoncer des chiffres comme ceux
que vous avez formulés. Les gens de Saint-Hilaire qui vous
écoutent ou qui vous liront s'interrogeront vraiment sur le
caractère sérieux de l'argumentation des députés.
M. le Président, les dispositions du projet de loi qui est actuellement
étudié devant la Chambre des communes, si ces mesures
s'appliquaient, tiendraient compte aussi du fait que l'entreprise dont les
actions sont cédées pourrait ou aurait pu se retrouver dans une
situation de faillite imminente. Or, il est très clair que
déjà la raffinerie est techniquement en faillite depuis un bon
moment.
Il faut retenir aussi qu'en ce qui concerne le volet des produits de
remplacement on a parlé beaucoup des hausses du prix du sucre ce matin.
On a dramatisé. Le marché allait être captif. Les
consommateurs allaient payer beaucoup plus cher. Le ministre responsable de la
protection du consommateur avait manqué de leadership, etc. Il faudrait
retenir que, dans la situation commerciale actuelle dans des pays
industrialisés comme le nôtre, comme les États-Unis, toute
augmentation du prix du sucre ouvre la porte mais toute grande à
l'utilisation de succédanés. Et cela, l'industrie
sucrière, ceux qui mettent en marché le sucre qu'on consomme en
sont bien conscients. Le meilleur des freins pour les augmentations de prix,
c'est définitif, c'est l'utilisation des produits de remplacement. (15 h
30)
Je peux indiquer aux honorables députés de Lévis et
de Verchères qui se rendront à Ottawa - je vais leur souhaiter un
bon voyage, c'est la capitale de notre pays, c'est un beau coin de pays -
qu'ils devraient quand même avoir à l'esprit qu'il n'y a pas eu
beaucoup de condamnations et, è ma connaissance, il n'y en a eu aucune
depuis 75 ans dans des cas de fusions d'entreprises. Il y a une enquête
sur le pétrole qui dure depuis onze ans et la situation a
été très évolutive dans le domaine pétrolier
depuis onze ans, évidemment. Alors, on vous souhaite un bon et un long
voyage. Très probablement qu'il va être long.
Le député de Verchères s'est
référé è son audition ou è sa comparution en
décembre, à son témoignage ou è sa visite.
L'enquête dont il parle, c'est le cas de Sucre Saint-Laurent et de la
société Lantic et non celle de la Raffinerie de sucre du
Québec, parce qu'il n'y a pas d'enquête.
M. Charbonneau: Non, si M. le ministre me permet...
M. Pagé: Vous parliez de quoi?
M. Charbonneau: Je parlais de la transaction que le gouvernement
s'apprêtait à conclure pour la Raffinerie de sucre du
Québec.
M. Pagé: Vous y êtes allé?
M. Charbonneau: Certainement!
M. Pagé: D'accord. Est-ce que l'enquête est
amorcée?
M. Charbonneau: Ah oui! M. Pagé: Voyons!
M. Charbonneau: Écoutez, j'ai donné des...
M. Pagé: Je comprends que le député de
Verchères n'est pas avocat mais, formellement, une enquête n'est
déclenchée qu'une fois que la transaction est
complétée. Ce sont des échanges préliminaires,
saisis qu'ils l'ont été de l'intention du gouvernement de vendre
des actions de la raffinerie.
M. le Président, c'est très bien, cette motion. C'est
dilatoire; cela occupe le temps de la Chambre en ce beau vendredi
après-midi...
Une voix: Pluvieux.
M. Pagé: Le Parti québécois a
consacré plusieurs heures, jusqu'à maintenant, sans amorcer
l'étude de l'article 1. C'est une procédure de refus
systématique d'adoption de la loi. C'est une procédure en vertu
de laquelle les députés de l'Opposition démontrent
clairement qu'ils ne veulent pas étudier le projet de loi, qu'ils sont
plutôt concentrés sur une volonté de faire témoigner
beaucoup de gens devant notre commission parlementaire, pour tenter de gagner
du temps, de bloquer la transaction et, finalement, de faire plaisir à
certaines personnes qui, dans la région de Saint-Hilaire et dans le
comté de Verchères, se sentent plus directement concernées
et touchées par le geste que le gouvernement s'apprête à
poser, un geste réfléchi et qui est le résultat d'analyses
rigoureuses et qui témoigne d'une volonté du gouvernement du
Québec d'assainir les finances publiques.
Essentiellement, je dirai au député de Verchères
qui évoquait hier avec beaucoup d'emphase le plan de
développement, la dernière phase, que cela me faisait penser un
peu à ceci: Je m'imagine une baignoire qui déborde dans une salle
de bains. La proposition des députés de Verchères et de
Lévis, c'était, face à cette situation, comme si on
prenait une chaudière et qu'on enlevait continuellement de l'eau, une
chaudière qui nous aurait coûté près de 50 000 000
$, 30 000 000 $ pour le déficit accumulé et
20 000 000 $ pour la modernisation de l'usine.
Nous, on ferme le robinet. C'est plus sérieux dans les
circonstances. C'est ce à quoi nous nous sommes engagés: Mieux
administrer les impôts de ces femmes et de ces hommes qui travaillent
durement pour les payer et maintenir les emplois. On aura l'occasion de revenir
lorsque le projet de loi sera étudié, si jamais on
l'étudie article par article, et de dire comment la transaction s'est
élaborée, comment le protocole s'est élaboré, vers
quelle transaction il se dirige, quels seront les effets pour les travailleurs
et les travailleuses, nos programmes d'indemnités pour les producteurs,
etc.
Pour tous ces motifs, M. le Président, la motion
présentée par le député de Lévis ou de
Verchères, peu importe, il y en a tellement - c'est celle du
député de Verchères - sera battue purement et simplement,
en ce qui me concerne. Merci!
M. Jolivet: M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
ministre. Je cède la parole, maintenant, au député de
Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: M. le Président, j'écoute avec
attention le ministre démissionnaire -avec son collègue qui le
surveille en arrière, le ministre qui a gagné la partie - nous
dire qu'au sujet de ce projet de loi l'hypothèse que faisait
l'Opposition, c'était d'enlever un peu d'eau dans une baignoire qui
débordait. II a ajouté qu'eux fermaient plutôt le robinet.
Il a oublié une chose. Je pense qu'il n'a pas terminé sa
pensée, à moins que je ne l'aie mal compris ou que je l'aie mal
saisi. Du moins, c'est ce que je crois comprendre du projet de loi, en tout
cas. Ce que je crois comprendre, c'est qu'en plus de cela il a fait un autre
geste, c'est qu'il a tiré l'eau de la baignoire avec le
bébé dedans, tt a fait en sorte que tout le monde s'en aille,
s'engouffre dans le fond et parte vers des eaux nauséabondes, malsaines.
En fait, ce qu'a fait le ministre c'est - l'expression est bien typique - qu'en
plus de tirer la "plug", il a tiré la "plug" avec le bébé
dedans.
M. Pagé: La quoi? M. Jolivet: La "plug".
M. Pagé: Vous écrivez cela comment, vous, le
professeur de français?
M. Jolivet: Justement, je voulais revenir à cela. J'ai une
occasion en or, je vais y revenir. M. le ministre nous a dit que le
lieutenant-gouverneur en conseil, en vertu de l'article 5, peut nommer un
fonctionnaire appelé directeur des enquêtes et recherches. Je le
remercie bien gros de nous avoir fait encore une remarque fort pertinente dans
le débat dans lequel nous sommes parce qu'effectivement, ce que nous
avons demandé, c'est la venue du directeur fédéral des
enquêtes. Donc, s'il est directeur général des
enquêtes et recherches, nous disons que ce sur quoi on veut que porte le
travail, c'est une enquête sur les coalitions.
Donc, quand on a dit cela... Il me fait penser au moment où
j'avais employé le mot "acquéreur" et je me demandais si cela
faisait "acquéreuse" au féminin ou "acquéreure". J'ai eu
l'occasion, ce matin, de vérifier dans le dictionnaire, parce que
j'avais vu le voisin du ministre des Finances en faire autant hier. Je lui
avais posé une question mais, comme il n'avait pas le droit de parole,
il n'a pas pu parler. Il a finalement dit au ministre que c'est
"acquéresse" et que c'est un mot qui est considéré comme
un mot judiciaire, juridique...
M. Pagé: "Acquéreure".
M. Jolivet: Non, "acquéresse", féminin. Allez voir
dans le dictionnaire, le Petit Robert, vous allez voir que c'est
"acquéresse".
M. Pagé: "Acquéresse" peut être
utilisé ou "acquéreure", pas "acquéreuse".
M. Jolivet: Le ministre a voulu me faire la leçon hier,
mais en réalité il s'est trompé, comme mot. Donc, on est
égaux, la partie est nulle pour le moment.
M. Pagé: Je comprends cela.
M. Jolivet: Je veux juste vous dire une chose, c'est
qu'effectivement, moi, je suis en accord complet avec mon collègue de
Verchères pour faire venir le directeur fédéral
responsable des enquêtes sur les coalitions. Je dois vous dire que cela
fait suite à beaucoup de demandes. Le ministre dit: Écoutez, on
n'approfondit pas un projet de loi qui est bien important. C'est un projet de
loi qui a pour but, au bout de la course, de faire une vente selon des
transactions normales. Le ministre oublie une chose, c'est que le projet de
loi, s'il l'a bien lu, la seule chose qu'il fait, c'est qu'il abroge. Il est
tellement technique, ce projet de loi, il abroge une loi déjà
existante, il abolit, il liquide la raffinerie pour la transmettre entre les
mains d'autres personnes qui risquent de faire en sorte que le système
soit de nature - il faut faire attention, c'est un grand mot, l'ex-ministre et
député de Lévis est habitué à ce
mot-là oligopolistique, ce qui peut risquer de créer un monopole.
Je suis un de ceux parmi vous autres qui ont à prendre des
décisions
comme législateurs et je ne voudrais pas être pris comme
André Ouellet, le ministre fédéral. Il y a quelques
années - si je me souviens, ce sont les années 1975-1976 -
à la suite d'une enquête sur le sucre, il avait pris la
décision de contester le jugement, Qu'est-il arrivé? Vous savez
ce qui est arrivé? Il a été obligé de
démissionner de son poste de ministre. Je ne voudrais pas, comme
législateur, si je n'ai pas l'occasion de faire venir cette personne...
Mme la députée de Deux-Montagnes fronce les sourcils, en disant:
Est-ce vrai? Bien oui, c'est vrai! C'est vrai, le ministre André Ouellet
a démissionné de son poste parce qu'il a mis en doute le jugement
d'un juge parce qu'il prétendait qu'il y avait eu coalition et le juge
déterminait qu'il n'y en avait pas eu à l'époque.
M. Garon: II n'avait pas assez de preuves.
M. Jolivet: C'est cela. Je ne dis pas qu'il n'y en a pas eu, je
dis que c'est ce qui avait été comme détermination. Mais
lui croyait dur comme fer qu'il y en avait eu. Vous vous imaginez ce que cela a
donné?
Cela a donné qu'il a été obligé de
démissionner.
M. Houde: Parlez moins vite.
M. Jolivet: M. le député de Berthier, ne faites pas
comme le ministre de l'Éducation.
M. Houde: Parlez moins vite et on va vous comprendre.
M. Jolivet: Ce n'est pas vos affaires, je parlerai au rythme que
je veux.
Une voix: Oui, mais si vous voulez qu'on vous
écoute...
M. Jolivet: Deuxièmement. Ne faites pas comme le ministre
de l'Éducation, ne soyez donc pas arrogant. Le ministre de
l'Éducation, parce qu'on se trompe sur un mot, en fait un plat à
l'Assemblée nationale à une heure du matin. Ne faites pas comme
lui, ne prenez pas exemple sur une personne qui est comme cela. Ce n'est pas
bon.
Je vous dis simplement que le ministre Ouellet a
démissionné. Or, nous, nous allons avoir à prendre des
décisions. Cela est important avant qu'on prenne les décisions et
non pas après qu'on aura pris les décisions et après les
transactions... On ne veut pas être éclairé après
avoir fait un mauvais coup, on veut être éclairé avant pour
voir s'il y a des chances, justement, de faire un mauvais coup.
Donc, si le directeur était ici, il pourrait peut-être nous
dire que ce que nous nous apprêtons à faire, c'est de donner des
tentations à du monde de faire un monopole. Je ne dis pas qu'il y aurait
monopole, je ne dis pas que cela va créer un monopole mais il y a des
risques d'en créer un. On va me dire: Bien, écoutez M. le
député, vous avez du sucre qui vient des États-Unis, vous
avez du sucre qui vient par Redpath. Voyons donc, écoutez, pensez-vous
qu'il y a des dangers d'avoir un monopole? Le personnage le mieux placé
pour venir nous le dire, pour venir nous dire quelles sont les
pénalités qu'on peut encourir en vertu de la loi aux articles qui
concernent... Dans la loi, à l'article 32, on dît: "Est coupable
d'un acte criminel - si vous vous fiez à la Loi sur l'Assemblée
nationale, quand un député a fait un acte criminel, il est
suspendu; vous savez cela, allez voir la loi - et passible d'un emprisonnement
de cinq ans ou d'une amende d'un million de dollars - là, je n'aurais
pas d'argent pour payer cela - ou de l'une et l'autre peine, toute personne qui
complote, se coalise, se concerte ou s'entend avec une autre - allez voir -
pour restreindre ou compromettre, indûment de quelque autre façon,
la concurrence... ". Je vous en donne un exemple.
M. Garon: Que la transaction ait lieu ou non.
M. Jolivet: "... pour empêcher, limiter ou diminuer,
indûment, la fabrication ou production... " - cela m'inquiète; M.
le député de Berthier, écoutez bien cela - se concerte, se
coalise, complote ou s'entend avec une autre personne...
M. Houde: Je ne dormais pas.
M. Jolivet: Je n'ai pas dit que vous dormiez, vous parliez avec
un autre. Je voulais que vous m'écoutiez. "... pour empêcher,
limiter ou diminuer, indûment, la fabrication ou production d'un produit
ou pour en élever déraisonnablement le prix... " Écoutez,
lisez donc ce qui s'est produit.
M. Houde: Je n'ai pas compris tout à fait,
répétez donc la dernière phrase.
M. Jolivet: M. le Président, là, il devient
tannant. Je ne m'en occuperai plus. C'est habituel. Pour ceux qui vont me
relire et qui vont m'avoir écouté convenablement, cela veut dire
quoi? Moi, je veux le savoir. On va vendre une raffinerie qui, elle, va cesser
de produire, si j'ai bien compris -qu'on me dise le contraire, si ce n'est pas
vrai - et qui va donner à une autre sa capacité de
production.
Donc, est-ce que, moi, je n'aurais pas d'une certaine façon un
comportement de complot ou de coalition envers la vente, la liquidation
à une compagnie qui, elle, va
pouvoir après cela monter les prix? On a juste à regarder
les nombreuses fluctuations des cours mondiaux depuis les quinze
dernières années, la marge des raffineurs n'a cessé de
s'accroître. Elle n'a pas cessé, elle a toujours continué
de s'accroître. Dans ce système où théoriquement
toute fluctuation du prix du sucre brut se répercute chez le
consommateur - déjà? seulement deux minutes? - la marge brute des
raffineurs est ajoutée au prix du sucre brut pour constituer le prix
officiel du sucre raffiné. Pour terminer, cette marge, qui s'est
maintenue pendant cinq années, de 1974 à 1979, à 110 $ par
tonne, s'est depuis accrue constamment pour atteindre 307 $ en 19B5. Mais quels
sont les dangers que la vente d'une raffinerie comme celle-ci à une
usine qui va devenir la seule du groupe qui en fabrique ici au Québec ne
puisse pas effectivement augmenter les prix au consommateur? C'est tous et
chacun de nous, et mes collègues pourront faire la preuve de l'ensemble
des marges d'utilisation du sucre au Québec. Des familles comme celle du
député de Prévost et la mienne, six, sept ou huit enfants
qui ont du sucre en masse, soit par bonbons, soit par chocolat, soit par sucre
utilisé dans les céréales, cela nous coûte quoi
à nous?
M. Forget: On pourrait en avoir du ma?s. Avez-vous
vérifié cela?
M. Jolivet: Je parle de celui-ci et je vais me contenter de
celui-ci.
M. Forget: Faites une vérification, les gars.
M. Jolivet: Vous, pourrez parler tout à l'heure. Je vous
dis simplement qu'effectivement c'est cela.
En terminant, comme je dois quitter et vous laisser travailler le reste
de la journée, de la même façon que le ministre doit
quitter, on va se saluer en même temps et on se reverra lundi. Merci, M.
le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
député. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? M. le
député de Dubuc.
M. Jolivet: J'avais bien des choses à dire, pourtant.
M. Hubert Desbiens
M. Desbiens: Merci, M. le Président. On a un nouveau
ministre pour mener le débat. C'est peut-être le signe qu'enfin le
gouvernement comprend notre point de vue et qu'il est prêt a accepter nos
propositions. On a un nouveau ministre qui défend le dossier qui...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Non, pas du
tout.
M. Jolivet: Non, c'est lui qui a gagné.
M. Fortier: Non, je peux répondre immédiatement.
Dans notre gouvernement, les deux ministres sont sur la même longueur
d'onde. Alors, vous ne verrez pas beaucoup de différences dans les
réponses qu'on va vous, donner.
M. Desbiens: Non? M. Garon:...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît, si vous voulez continuer!
M. Desbiens: J'espérais. M. le Président, c'est
parce que cela aurait peut-être été utile si le ministre
avait été pour nous dire: Bien oui, on va accepter...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): De toute
façon, on ne peut pas en avoir d'autres, c'est un sous-amendement... (15
h 45)
M. Desbiens: M. le Président, évidemment, je
souscris à la proposition de sous-amendement de mon collègue de
faire venir ici devant nous, pour questionnement et information, le directeur
fédéral des enquêtes et recherches sur les coalitions.
C'est un autre aspect, je pense, de tout ce dossier qui est fort important. Le
ministre de l'Agriculture nous disait tantôt qu'il a fait une
étude, que le gouvernement a fait une étude
réfléchie, rigoureuse. Je veux bien le croire; je ne peux pas,
comme parlementaire, douter de sa parole. Les législateurs, eux aussi,
ont besoin de faire une étude réfléchie et rigoureuse
avant de voter sur un projet de loi. C'est là, justement, l'objectif de
ces demandes répétées que nous faisons depuis hier, de
pouvoir recevoir, rencontrer, discuter et obtenir toutes les informations
possibles qui nous permettent à nous aussi, comme législateurs,
des deux côtés de cette Chambre, d'avoir toutes les informations
requises - sur les conséquences aussi - sur ce geste de liquidation qu'a
décidé le gouvernement, de façon réfléchie
comme il le dit.
Donc, j'imagine qu'il les a envisagées, mais nous, comme
législateurs, nous ne sommes pas en mesure de connaître toutes les
implications que la Loi fédérale relative aux enquêtes sur
les coalitions peut mettre à jour. Peut-être même, le projet
de loi que le ministre de l'Agriculture a déposé devant nous
sera-t-il considéré illégal. Moi, j'aime bien le ministre
de l'Agriculture, pas toujours, mais en règle générale.
Comme législateurs, on est habitués de travailler avec lui et je
ne voudrais pas qu'il se retrouve dans la situation de son collègue,
le
ministre du Revenu, au mois de février quand ce dernier a agi de
façon illégale concernant la taxe sur le tabac. On sait tout le
"trouble" que cela a causé au ministre du Revenu du gouvernement actuel,
cette action illégale de hausses de taxes sur le tabac. Je ne voudrais
pas que le ministre de l'Agriculture se retrouve aussi dans cette situation et
pour un sujet encore beaucoup plus grave, c'est-à-dire d'avoir
participé d'une façon indirecte, bien sûr, mais d'avoir
participé, en liquidant ainsi la raffinerie de sucre, è la
création possible, sinon probable, d'un monopole du sucre au
Québec et au Canada.
Le ministre de l'Agriculture nous soulignait tantôt ce qu'il en
coûterait. Le gouvernement actuel, dont il fait évidemment partie,
a décidé de liquider la raffinerie de sucre, de fermer
littéralement la raffinerie de sucre pour éviter la
saignée de fonds publics. Il nous a parlé de 15 000 000 $, je
crois, en tout cas, selon les chiffres que j'ai, ce serait 18 000 000 $
qu'aurait coûté le plan de relance proposé par le
ministère de l'Agriculture. Finalement, si le gouvernement, par ce
projet de loi, par la liquidation de la raffinerie de sucre, malgré le
danger que cela entraîne de créer un monopole du sucre,
économise - d'accord - pour son budget annuel gouvernemental...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît, un peu d'ordre!
M. Desbiens: Oui, parce que je dis là des choses
extrêmement importantes, fondamentales. -.,
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. Alors,
procédez...
M. Desbiens: Je suis en train d'essayer, pour le
député de Papineau, dont le comté est oublié,
semble-t-il, par le gouvernement... J'ai lu cela dans les journaux; je ne sais
pas si cela est vrai, M. le député de Papineau. J'essaie de
démontrer qu'il y a là un danger de coalition et de monopole
possible en fermant ainsi la Raffinerie de sucre du Québec et en la
vendant - si on peut appeler cela une vente - à Lantic. Quand il y a une
situation de monopole, que ce soit dans le domaine du sucre ou ailleurs... On
se souvient très bien, à la fin des années soixante, il y
avait, au Québec, dans le domaine de l'alimentation en
général, au-delà de 130 marchands grossistes. On sait que
cecte concurrence entre cette centaine et plus de grossistes en alimentation a
fait que les prix... Je m'en souviens, j'étais au coeur de ma famille,
huit enfants, je savais combien cela coûtait pour se nourrir. On a
vécu trois, quatre ou cinq ans où les prix de l'alimentation sont
restés à peu près stables - il y en a certain, comme le
député, qui se souviennent de cette période -
jusqu'à ce que, finalement, cette guerre tribale, si l'on peut dire,
sauvage, entre les grossistes, a fait disparaître la plupart d'entre eux.
On se retrouve aujourd'hui avec - ne soufflez pas le nombre exact -
peut-être dix ou quinze grossistes en alimentation, je pense, au
Québec. Dès qu'on a réussi à éliminer la
majeure partie de ces grossistes, on a vu que les prix de l'alimentation se
sont mis à grimper en flèche, comme cela. On a vécu la
période d'inflation que vous connaissez.
C'est la même chose dans le domaine du sucre. Je pourrais rappeler
exactement l'année, je crois que c'est autour de l'année 1975,
1976, le prix du sucre a grimpé jusqu'à 0, 63 $ la livre. Tant
qu'il y a de la concurrence dans le domaine, cela va bien. Si on s'arrange et
si on participe - c'est encore plus grave que le gouvernement du Québec
lui-même soit participant à cela - si on s'organise pour qu'il y
ait une situation de quasi-monopole, il y aura sûrement des
conséquences. D'ailleurs, déjà, depuis l'élection
du gouvernement actuel, connaissant évidemment son programme politique
de privatisation et surtout connaissant ses couleurs à ce sujet, on sait
que le prix du sucre a monté et a presque doublé même.
Quand le ministre dit qu'il va économiser, qu'il va liquider la
raffinerie de sucre, faisant économiser ainsi au budget du Québec
15 000 000 $, 18 000 000 $... M. le Président, je vais terminer avec un
calcul très rapide. Sauf erreur, je pense que ta consommation moyenne
annuelle de sucre par Québécois, c'est 100 livres, environ.
Faisons le calcul très rapidement: 6 500 000 Québécois,
100 livres de sucre, cela fait 650 000 000 de livres. Cela veut dire que,
depuis trois, quatre mois, les consommateurs québécois ont
payé 20 000 000 $. Seulement la vente de la raffinerie de sucre, cela
leur a coûté 20 000 000 $. En tout cas, c'est un des
éléments importants, sûrement. C'est plus que le
gouvernement dit vouloir économiser en se débarrassant, comme il
dit, de la raffinerie de sucre. La réalisation n'est pas encore faite,
la situation de monopole ou de quasi-monopole n'est pas encore
créée. Alors, les conséquences de cela, c'est que cela va
coûter plus cher aux Québécois. Cela coûtera
peut-être moins cher de taxes au gouvernement, 18 000 000 $ de moins,
mais cela va peut-être nous coûter 36 000 000 $, 50 000 000 $ ou
100 000 000 $ de plus, directement dans nos poches, en achetant les produits
à la consommation. C'est pour cela, M. le Président, que je pense
qu'il est excessivement important que nous puissions vider la question, en
toute connaissance de cause, avec les personnes qui sont en mesure de nous
fournir ces renseignements de façon très claire, très
certaine, et recevoir ici le directeur fédéral des enquêtes
et recherches sur, les coalitions, comme le disait le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
député de Dubuc. J'ai reconnu le député de... Oui,
vous n'avez pas terminé? J'ai reconnu le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Charles Messier
M. Messier: J'écoutais, cet après-midi, le
député de Verchères et je voudrais l'inviter
personnellement à venir, à la prochaine campagne
électorale, dans le comté de Saint-Hyacinthe, s'il est encore
candidat pour le Parti québécois.
M. Charbonneau: La pertinence, M. le Président!
M. Messier: Non, non, mais je réponds à son
invitation de ce matin. Laissez-moi donc terminer. On vous a laissé
parler ce matin. Merci.
M. Charbonneau: Le jeunot...
M. Messier: S'il est encore là, parce qu'on connaît
la dissension dans le Parti québécois... Advenant
l'hypothèse où M. Parizeau deviendrait chef du Parti
québécois; on sait le blasphème qu'ont
proféré les députés de Lévis et de
Verchères face à M. Parizeau. L'hypothèse voudrait qu'un
jour M. Parizeau reviendrait. J'ai l'impression que la carrière de M. le
député de Verchères viendrait de se terminer.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député de Saint-Hyacinthe, voulez-vous revenir au
sous-amendementï
M. Messier: Pour en revenir sur le sous-amendement, je voulais
seulement citer que lorsque M. le député de Verchères est
venu à Saint-Hyacinthe lors de la campagne électorale, je crois
qu'il m'a aidé.
M. Garon:... nommé président-directeur
général de la Société nationale de l'amiante avec
mandat de la rentabiliser.
M. Messier: Humblement, je pourrais dire qu'il m'a aidé
dans ma campagne. Lorsqu'il est venu au cégep de Saint-Hyacinthe, il a
quand même été hué et ridiculisé par les
Maskoutains. On sait que ses propos ont été plus ou moins
décents vis-à-vis des gens de Saint-Hyacinthe et vis-à-vis
de l'actuel député.
Pour en revenir à la modification à la motion qui a
été présentée par le député de
Lévis, je crois qu'elle est irrecevable. Pour dire cela, je veux
seulement citer La Presse. de Montréal, du jeudi 13 mars 1986, et
là le député de Verchères a fait abondamment
référence au prix du sucre. Il est fait mention ici: "Le
marché du sucre. Il n'y aura plus de guerre dans les prix. La
concurrence américaine exercera une pression sur les prix de
détail. " Ce n'est pas tellement long. Je vais vous lire l'article. "La
vente de la Raffinerie de sucre du Québec à Saint-Hilaire
à la compagnie Sucre Lantic devrait mettre fin aux guerres de prix que
les raffineries se livraient de temps à autre sur le marché
québécois. Telle est l'opinion de Carl Hébert et Jacques
Kavafian, respectivement secrétaire de l'Association des cadres de la
Raffinerie de sucre du Québec et analyste en produits de consommation
chez Lévesque, Beaubien - je veux seulement vous informer de ce que le
spécialiste de la maison de courtage Lévesque, Beaubien
mentionnait, Jacques Kavafian. Il estime pour sa part que le prix du sucre
devrait demeurer stable. M. Cavafian croit que cette stabilité... "
M. Charbonneau: On va proposer qu'il vienne.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît!
M. Houde:... M. le député de Verchères, je
voudrais qu'on l'écoute bien attentivement. C'est important ce qu'il
dit.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Laissons aller le
député de Saint-Hyacinthe.
M. Messier: Je sais que cela le dérange. Cela va à
l'encontre de ses hypothèses. Mais il faudrait qu'il me laisse le temps
de terminer.
M. Charbonneau: On voudrait qu'il le fasse venir. Faites une
motion pour qu'il vienne.
M. Messier: "M. Kavafian croit que cette stabilité serait
essentiellement due à la pression qu'exercera sur le prix de
détail la concurrence américaine. " Je crois que cela va
directement à l'encontre de l'hypothèse des coalitions si Lantic
achetait ici la Raffinerie de sucre du Québec. Il y aurait une mainmise
oligopotistique sur le marché du sucre. Je crois que l'analyse de M.
Kavafian, qui est membre de la réputée firme Lévesque,
Beaubien, est très bien fondée.
Pour revenir sur cette non-recevabilité et sur la non-pertinence
de recevoir les gens, peu importent ceux qui viendraient, je voudrais seulement
citer une lettre ouverte -et j'en ai fait mention hier - au Courrier de
Saint-Hyacinthe, le 7 novembre 1984, alors que les cadres de la Raffinerie de
sucre du Québec envoyaient à René Lévesque, premier
ministre du temps, une lettre faisant mention
de certains malaises et peut-être un petit exposé qui fait
référence au député de Lévis. "Nous ne
croyons pas qu'il nous faille recourir à une grève de la faim
pour faire entendre nos revendications. M. Garon nous pardonnera d'avoir
mentionné un tel moyen de pression qu'il ne prise pas
particulièrement. " Et là on fait mention des problèmes
qu'il avait eus dans le temps avec l'Office du crédit agricole sur une
grève de la faim. On peut voir ici la pertinence des propos lorsqu'on
sait pertinemment que le Parti québécois, du temps où le
député de Lévis était membre du Conseil des
ministres, n'a jamais voulu entendre parler autant du Syndicat des producteurs
de betteraves è sucre, ni des cadres de la Raffinerie de sucre du
Québec, ni des autres intervenants qui, de près ou de loin,
étaient préoccupés par le sucre. Je m'interroge aussi - on
peut déborder un peu, les gens du Parti québécois l'ont
fait - sur le processus de privatisation. Je vois ici: "Québec a
reçu de nombreuses offres d'achat. " C'est un titre assez mirobolant. 3
février 1984. Il y a quand même deux ans. Il est écrit: "Le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, Jean
Garon, a dit hier que de nombreux groupes avaient déjà fait des
propositions d'achat. On peut dire que depuis le 3 février 1984 le
processus de privatisation de la Raffinerie de sucre du Québec
était déjà enclenché. On pourrait aussi mentionner
M. Parizeau, qui a dit qu'on n'aurait jamais dû s'aventurer
là-dedans, et le ministre Duhaime qui faisait mention que tout le
processus de privatisation était déjà enclenché et
que même des ententes avec la firme Lantic avaient déjà
été faites pour des offres d'achat sérieuses. . (16
heures)
Pour terminer, comme le ministre de l'Agriculture en a fait mention, je
vais voter contre cette motion. Il serait temps qu'on en vienne à
l'étude article par article. Je crois que c'est depuis mardi que l'on
parle et on n'a même pas encore commencé l'étude article
par article, même pas l'article 1. Ce sont strictement des motions pour
faire perdre du temps ici aux gens sérieux du côté
ministériel. On est des parlementaires et on est ici...
M. Fortier: Question de règlement, M. le
Président.
M. Charbonneau: Question de règlement, M. le
Président. Je l'ai demandé avant.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Un instant. Oui,
j'écoute la vôtre.
M. Charbonneau: M. le Président, ce n'est pas depuis
mardi, mais on a commencé hier les travaux de la commission,
franchement!
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Le projet de loi
85, c'est depuis hier. Alors, s'il vous plaît!
M. Fortier: Je le comprends, cela lui paraît long.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît, messieurs.
M. Messier: Je ne pensais vraiment pas perdre mon temps comme
cela. Cela fait si longtemps. À vrai dire, le leader du gouvernement
nous a convoqués ici en commission parlementaire pour faire
l'étude article par article du projet de loi sur la vente de la
Raffinerie de sucre du Québec. On n'a même pas encore
enclenché le processus, on est vendredi, il est 16 heures et on
terminera à 17 heures pour reprendre ce soir. J'imagine qu'il y aura
d'autres motions. Que va-t-il se passer? On va être obligés de
cesser? On n'a même pas encore commencé et on va être
obligés de reporter. Je ne sais pas quel est le processus, mais on
n'aura même pas la chance d'étudier ces articles-là. C'est
vraiment dommage que les députés de Verchères et de
Lévis s'obstinent à faire des motions qui, à mon avis,
sont non recevables.
M. Garon: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, je vous
écoute, M. le député.
M. Garon: Un député n'a pas le droit de contester
vos décisions. II vient de dire que les motions présentées
et que vous avez toutes déclarées recevables ne sont pas
recevables. Je vous demande de demander au député de retirer ses
paroles parce qu'il conteste la présidence et il ne peut pas le faire de
cette façon, en vertu de notre règlement.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): J'ai l'impression
que le député de Saint-Hyacinthe a dit qu'elles étaient
irrecevables dans le sens qu'il argumentait sur le type des motions et non sur
le fait que je les avais reçues ou pas.
M. Messier: Vous avez absolument raison. Je n'ai pas mis en doute
votre décision, mais j'ai dit mon avis. Je ne remets pas en doute votre
décision, M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord.
Très bien.
M. Garon: II ne passera pas ses examens du Barreau.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): J'ai reconnu le
ministre délégué à la Privatisation.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: M. le Président, il me fait plaisir de me
joindre à vos travaux. J'espérais qu'en entrant ici on me dirait
que vous étiez rendu à l'article 30 ou 31 et j'ose espérer
que très bientôt on va entamer l'article 1 parce qu'ayant
été élus par des électeurs de nos différents
comtés pour défendre leurs intérêts, mais d'une
façon probe, honnête, dans le meilleur intérêt du
public, il est bien certain que tous et chacun d'entre nous cherchons à
faire le meilleur travail pour nos électeurs, sans prêter
d'intentions au parti adverse. Pour ma part, je vais écouter avec
beaucoup d'attention les arguments que les gens d'en face voudront nous
présenter, mais les faits étant ce qu'ils sont, si vous me le
permettez, j'oserais présenter les faits tels que nous les avons vus et
tels que d'autres avant nous les ont vus.
Il y a une motion devant nous qui est d'entendre...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Le sous-amendement
est "et le directeur général des enquêtes sur les
coalitions".
M. Fortier: M. le Président, j'aimerais dire que je ne
crois pas que ce soit très efficace et que ce soit le moment, mais
j'aimerais vous référer à un document que j'ai devant moi
et qui est la réforme de la loi sur la concurrence. Le ministre de
l'Agriculture vous a dit tout à l'heure que la loi qui existe
présentement n'avait pas été très efficace
puisqu'en 75 ans d'existence absolument personne n'avait été
condamné dans des circonstances comme celles-là. De fait, si je
lis une page sur la nécessité de la réforme, vous allez
comprendre, compte tenu du fait que le nouveau projet de loi devant le
Parlement fédéral - la loi 91, "Bill 91" -sera adopté
bientôt, qu'on a constaté - vous allez le voir lorsque je ferai
lecture d'un paragraphe dans un instant - que la loi existante était
réellement inefficace et c'est la raison pour laquelle on veut faire des
réformes.
Je cite ce document qui provenait du ministère de la Consommation
et des Corporations du Canada: "Les décisions rendues récemment
concernant les dispositions sur les fusionnements et les complots ont
créé trop d'incertitudes et soulevé des questions vraiment
sérieuses au sujet de leur applicabilité. De plus, la
décision de la Cour suprême dans l'arrêt Southam Inc.
concluait que les pouvoirs de perquisition et de saisie prévus par la
loi étaient nuls et sans effet, parce qu'ils violaient les garanties
contre les perquisitions et les saisies abusives enchâssées dans
la Charte canadienne des droits et libertés. L'arrêt Southam Inc.
a également soulevé des questions au sujet de la
constitutionnalité des autres pouvoirs d'enquête
conférés par la loi et des doubles fonctions administratives et
judiciaires de la commission sur les pratiques restrictives du commerce. En
conséquence, il est urgent de revoir le rôle de la commission et
de rendre les pouvoirs d'enquête prévus par la loi conformes aux
dispositions de la charte, tout en maintenant leur efficacité. " Fin de
la citation.
C'est donc dire, M. le Président, que tout le monde
espérait, il y a 75 ans et, par la suite, lorsque la loi
fédérale a été modifiée, que cette loi qui
existe présentement pourrait permettre d'avoir une certaine
efficacité. Mais il faut comprendre que le législateur
fédéral est en voie de faire des changements et que, très
bientôt, - on me dit que ce sera au mois de juillet ou durant le mois
d'août - la nouvelle loi viendra en vigueur.
Ce qu'il faut savoir également, c'est qu'à la
lumière de cette nouvelle loi la transaction qui est devant nous est
tout à fait légale. Il y a trois tests qui peuvent être
faits en ce qui concerne cette nouvelle loi. Il y a un des tests qui a trait,
justement, au fait que, lorsqu'une des compagnies est en faillite, il est
évident qu'à ce moment la nouvelle loi sera extrêmement
indulgente, parce que nul n'est tenu à l'impossible et nul n'est tenu -
même pas le gouvernement du Québec - de maintenir en vie une
compagnie en faillite depuis deux ans. Dans un cas comme celui-là, la
nouvelle loi conclut que, s'il y a fusion pour améliorer la production,
il n'y a absolument aucun motif de faire enquête et, de fait, le
directeur des coalitions - celui qui aura le nouveau poste -dans un cas
où il y a faillite et si la fusion permet d'améliorer la
production, selon la nouvelle loi, donnera carte blanche à une
opération comme celle qui est devant nous et, cela, d'autant plus qu'il
y a un autre test dans la loi en ce sens qu'à la suite d'une telle
transaction la compagnie qui fait la fusion et qui acquiert la compagnie en
difficulté fait des investissements. C'est exactement le cas qui est
devant nous. La compagnie Lantic achète une compagnie en faillite et
s'engage à faire 25 000 000 $ d'investissements dans l'est de
Montréal. On s'aperçoit, donc, que la demande qui est devant nous
est tout à fait inutile, parce que, d'une part, tout le monde admet que
la loi existante définie il y a 75 ans n'a pas de dents et que, d'autre
part, la nouvelle loi blanchit exactement le genre de transaction que nous
sommes en train de faire.
C'est la raison pour laquelle, je crois que, mes collègues et
moi-même, nous avons toutes les raisons de rejeter cette demande
qui serait tout à fait inutile, parce qu'à la
lumière de la nouvelle loi fédérale l'enquêteur
devra conclure que la raffinerie de sucre est en faillite, puisque le ministre
des Finances, depuis juin 1984, ou le sous-ministre des Finances, à la
demande de la Banque Nationale du Canada, fournit des lettres de confort ou de
réconfort - je ne sais trop - pour éviter que la Banque Nationale
du Canada mette en faillite technique la raffinerie de sucre. Donc, on se
trouve devant un cas patent de faillite, parce que, n'eût
été l'appui du ministre des Finances pour aider la raffinerie,
elle serait en faillite depuis longtemps. De fait, cette fusion va amener des
investissements de 25 000 000 $ dans l'est de Montréal.
M. le Président, à la lumière de ces faits, j'ose
espérer que j'aurai convaincu les gens d'en face qu'il serait tout a
fait inutile de faire parader ici le directeur des coalitions
fédérales, d'autant plus qu'à la lumière de la
nouvelle loi C-91 les tests qui pourraient être faits et qui seront
faits, une fois que la loi sera adoptée, donneront carte blanche
à la transaction que nous sommes en voie de faire et que nous ferons. Je
vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
ministre. J'ai reconnu le député de Dubuc.
M. Desbiens: Excusez, il y a quelqu'un d'autre?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député de Lotbnière voulait parler?
M. Fortier: Je peux continuer. Si vous voulez me permettre de
faire un "filibuster", je vais le faire avec vous!
Le Président (M, Tremblay, Iberville): M. le
député de Dubuc, il faudrait que ce soit une question pertinente,
parce que votre temps est complètement écoulé.
M. Desbiens: Non, c'est pour... J'ai droit de...
Une voix: On a demandé le vote. M. Desbiens: M. le
Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui.
M. Desbiens: J'ai mon droit de parole sur la motion
principale?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): II faut voter le
sous-amendement avant d'y revenir.
M. Desbiens: Vous allez me redonner la parole sur la motion
principale après le vote?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): C'est ça,
après le vote.
M. Desbiens: Merci.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Nous sommes rendus
à la mise aux voix maintenant.
M. Fortier: Vote nominal, s'il vous plaît.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
secrétaire, voulez-vous appeler les gens pour le vote?
Une voix: Je suis sûr que le ministre va voter contre.
Une voix: Est-ce sur l'amendement ou le sous-amendement qu'on
vote?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Actuellement, on va
voter sur le sous-amendement qui dit: "et le directeur fédéral
des enquêtes sur les coalitions", présenté par le
député de Verchères.
Le Secrétaire: M. Dubois (Huntingdon)?
M, Dubois: Contre.
Le Secrétaire: M. Beaudin (Gaspé)?
M. Beaudin: Contre.
Le Secrétaire: M. Camden (Lotbinière)?
M. Camden: Contre.
Le Secrétaire: M. Forget (Prévost)?
M. Forget: Contre.
Le Secrétaire: Mme Legault (Deux-Montagnes)?
Mme Legault: Contre.
Le Secrétaire: Mme Dionne
(Kamouraska-Témiscouata)?
Mme Dionne: Contre.
Le Secrétaire: M. Houde (Berthier)?
M. Houde: Contre.
Le Secrétaire: M. Fortier (Outremont)?
M. Fortier: Contre.
Le Secrétaire: M. Tremblay (Iberville)?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Contre.
Le Secrétaire: M. Desbiens (Dubuc)?
M. Desbiens: Pour.
Le Secrétaire: M. Charbonneau (Verchères)?
M. Charbonneau: Pour.
Le Secrétaire: M. Garon (Lévis)?
M. Garon: Pour.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Le sous-amendement
est rejeté.
M. Fortier: On se retrouve devant quelle proposition, M. le
Président?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): On se
retrouve...
M. Desbiens:... Lantic, vous allez être d'accord?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): C'est ça. On
revient justement à l'amendement qui était "et la compagnie Sucre
Lantic Ltée". C'est le temps de voter là-dessus aussi parce que
le temps est écoulé.
M. Charbonneau: À moins que le ministre...
M. Fortier: Étant donné que nous sommes sur la
même longueur d'onde, le ministre de l'Agriculture et moi, je ne vois pas
ce que je pourrais ajouter de plus à ce que mon honorable
collègue a pu dire.
M. Charbonneau: M. le Président, si le ministre me permet
un instant, sinon on y reviendra, s'il permet un instant, il pourrait
peut-être nous expliquer ce qu'est cette affaire des 25 000 000 $
d'investissements qui sont déjà de toute façon
prévus par Lantic.
Une voix: Pour le moment c'est le vote, M. le
Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Pour l'instant,
cela ne donne rien. Nous devons prendre le vote sur l'amendement.
Je vais vous lire l'amendement, c'est: ''et la compagnie Sucre Lantic
Ltée". Â ce moment-ci, je le mets aux voix.
M. Fortier: Même vote, M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Est-ce qu'on prend
le même vote? Tout le monde est d'accord?
Des voix: D'accord.
Reprise du débat sur la motion
principale
Le Président (M. Tremblay, Iberville): L'amendement est
rejeté. On revient à la motion principale et la motion principale
est "que la commission tienne, avant d'entreprendre l'étude
détaillée du projet de loi 85, Loi sur la vente de la Raffinerie
de sucre du Québec, des consultations particulières quant
à tous les articles dudit projet et qu'à cette fin elle entende
le Syndicat des producteurs de betteraves sucrières du Québec".
C'est la motion principale. Il y avait du temps non écoulé.
M. Desbiens: Moi, mon temps n'est pas utilisé.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Non, il n'est pas
utilisé. Est-ce que vous demandez à être entendu
là-dessus?
M. Desbiens: Oui.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député de Dubuc, on vous écoute.
M. Desbiens: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous avez dix
minutes.
Une voix: On va vous écouter religieusement, M. le
député.
M. Garon: On va tenter de vous convaincre.
M. Hubert Desbiens
M. Desbiens: Dix minutes. On ne reviendra pas sur le vote. M. le
Président, la motion principale se lit comme suit: "Que la commission
tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet
de loi 85, Loi sur la vente de la Raffinerie de sucre du Québec, des
consultations particulières quant à tous les articles dudit
projet de loi et qu'à cette fin elle entende le Syndicat des producteurs
de betteraves sucrières du Québec. " C'est bien cela?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, c'est
exact.
M. Desbiens: M. le Président, je me souviens que mon
collègue de Verchères avait, durant la présentation de
l'argumentation qu'il a développée concernant la
nécessité d'entendre le Syndicat des producteurs de betteraves
sucrières du
Québec, fait mention du télégramme que le
porte-parole du Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du Québec, M.
Bernard Malo, avait adressé à M. Michel Pagé, ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, et
qui disait ceci: "M. le ministre, comme porte-parole du Front d'aide pour la
Raffinerie de sucre du Québec, j'aimerais que le regroupement,
représentant 24 organismes et qui s'est formé pour
défendre la survie de la Raffinerie de sucre du Québec, soit
entendu en commission parlementaire. " C'est un télégramme qui a
été envoyé au ministre de l'Agriculture, le 12 juin 1986,
à 15 h 5 exactement; c'était donc hier. C'était hier, le
12 juin 1986. (16 h 15)
Aujourd'hui, mon collègue, le député de
Verchères, recevait, lui, copie d'un télégramme qui a
été envoyé à M. Michel Pagé, ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, et qui se lit ainsi:
"Dans le cadre des débats de l'éventuelle vente de la Raffinerie
de sucre du Québec à l'entreprise Lantic, le Syndicat des
producteurs de betteraves à sucre du Québec aimerait être
entendu en commission parlementaire afin d'exposer - cela va sûrement
intéresser, sans doute, les députés, nos collègues
du gouvernement...
M. Fortier: J'écoute, j'écoute, M. le
député de Oubuc.
M. Desbiens:... et tous les membres du gouvernement qui sont
reliés au monde agricole. Justement, je lisais le
télégramme qui a été envoyé aujourd'hui au
ministre de l'Agriculture, dont on vient d'avoir une copie, et qui disait ceci:
"M. le ministre, dans le cadre des débats de l'éventuelle vente
de la Raffinerie de sucre du Québec à l'entreprise Lantic, le
Syndicat des producteurs de betteraves à sucre du Québec aimerait
être entendu en commission parlementaire afin d'exposer les
intérêts agricoles en relation avec la conservation de la
production de la betterave à sucre au Québec. " Ce
télégramme est signé par M. Simon Guertin,
président. Donc, M. le Président, il n'y a pas juste
l'Opposition. Ce n'est pas, comme le disait le ministre, pour "filibuster" le
gouvernement. Les gens directement intéressés, les producteurs de
betteraves a sucre du Québec et le Front d'aide pour la Raffinerie de
sucre du Québec, demandent d'eux-mêmes au ministre de
l'Agriculture de les entendre, de faire entendre leurs représentations
aux membres de cette commission pour s'assurer que les intérêts de
tous les producteurs de betteraves à sucre du Québec soient bien
connus des législateurs afin que la décision que nous aurons
à prendre soit dans le meilleur intérêt des agriculteurs.
C'est le syndicat des producteurs de betteraves à sucre et les 24
organismes qui sont regroupés pour la défense de la Raffinerie de
sucre du Québec. Il ne faut pas oublier, M. le Président, que le
syndicat des producteurs est un des deux groupes qui ont fait une offre au
gouvernement du Québec pour acheter la Raffinerie de sucre du
Québec. Cette offre a été faite en deux occasions.
À la deuxième occasion, elle a été adressée
le 1er avril 1986. Je pense que la date est presque prédestinée
pour eux; le ministre de l'Agriculture était en train de leur passer
tout un poisson d'avril, parce que leur demande a justement été
faite le 1er avril au ministre de l'Agriculture concernant la production des
betteraves sucrières, l'offre d'achat du Syndicat des producteurs de
betteraves à sucre du Québec. Évidemment, ils exposent
d'abord l'offre qu'ils présentent et les conditions - c'est normal, je
pense -qu'ils voudraient voir établir pour s'assurer que cette offre
soit à l'avantage des producteurs de betteraves sucrières. Il y a
eu seulement deux offres d'achat, M. le Président.
On sait qu'il y a eu deux thèses, celle du ministère des
Finances, qui n'a même pas payé et qui avait, par une loi - je me
souviens qu'on l'a votée ici à l'Assemblée nationale -
reçu le mandat de verser des fonds à la raffinerie de sucre. On
voit aujourd'hui qu'ils avaient déjà, dès lors, un parti
pris concernant la Raffinerie de sucre du Québec. La thèse du
ministre de l'Agriculture et des experts de la Raffinerie de sucre du
Québec, ceux qui en ont la haute direction, c'est-à-dire le
conseil d'administration, a démontré que c'était plus
avantageux, et au point de vue financier, et au point de vue de l'emploi, et,
on le verra plus tard, à d'autres points de vue, de plutôt mettre
en marche le plan de relance prévu et proposé par le ministre de
l'Agriculture de l'époque. Tantôt, j'écoutais le
député de Saint-Hyacinthe qui disait que le processus de
liquidation de ta Raffinerie de sucre du Québec était
enclenché déjà depuis 1984, mais, dans l'esprit du
député de Saint-Hyacinthe, semble-t-il que ce n'était pas
toutefois son point de vue pendant la campagne électorale, ni celui de
ses collègues de la région.
Aujourd'hui, le gouvernement vient compléter le processus de
liquidation de la Raffinerie de sucre du Québec, mais aussi le processus
de liquidation du député de Saint-Hyacinthe, et c'est proprement
effrayant. Si j'étais dans la situation du député de
Saint-Hyacinthe... Évidemment, le gouvernement en profite, sans
peut-être le vouloir, mais le gouvernement est bien chanceux que ce soit
un député tout jeune qui, malgré toutes ses belles
qualités, ne peut pas avoir l'expérience suffisante pour
défendre un tel dossier. C'est sûr que, si cela avait
été le gouvernement...
II reste une minute? On sait que, si cela avait été le
député de Verchères, la raffinerie de sucre serait encore
ouverte et resterait ouverte.
Motion d'amendement proposant d'entendre la
FNACQ
M. le Président, il y a des groupes qu'on a demandé
d'inviter et, à chaque occasion, le gouvernement a refusé. Il y a
au moins un groupe, je pense bien, qu'il ne pourra pas nous empêcher de
recevoir - je ne peux pas l'imaginer - et je fais la motion d'amender la motion
pour consultations particulières en ajoutant, à la fin de cette
motion, les termes suivants: "et la Fédération nationale des
associations de consommateurs du Québec".
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, cet
amendement est recevable. Le député a 30 minutes.
M. Fortier: Je ne sais pas s'il est capable de les utiliser, mais
il a 30 minutes.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, à la
suite de la motion qui se terminait par "le Syndicat des producteurs de
betteraves sucrières du Québec", on ajoute: "et la
Fédération nationale des associations de consommateurs du
Québec".
M. Hubert Desbiens
M. Desbiens: M. le Président, je vous remercie. Pour la
compréhension de nos collègues, il faut rappeler, pour
démontrer la nécessité de faire appel ici, puisqu'il
semble que le gouvernement ne s'en soucie guère... Le ministre qui est
venu remplacer le ministre de l'Agriculture a décidé de fermer la
Raffinerie de sucre du Québec et espérait -si j'ai bien compris
ses paroles, mais ce n'était sûrement pas son intention, je
connais son grand souci démocratique - que l'Assemblée nationale,
d'une certaine façon, soit fermée. C'était dans ses propos
tantôt, mais cela ne voulait pas nécessairement... Je l'ai pris
plutôt comme une blague de la part du ministre. Je sais que ce n'est pas
sa conviction. Il m'a toujours paru être un ministre très
respectueux de la démocratie et des membres de cette Assemblée.
Alors j'ai pris cela comme une blague de la part du ministre.
On a essayé de démontrer tantôt, dans les minutes ou
les heures qui ont précédé, quelles pouvaient être
les conséquences de la liquidation et de la fermeture de la Raffinerie
de sucre du Québec et les dangers que cela pouvait entraîner face
à la création d'un quasi-monopole ou la possibilité sinon
la probabilité d'un quasi-monopole dans le domaine du sucre au
Québec. Je pense qu'il est important de rappeler certains des arguments
qui ont été développés par mon collègue de
Verchères à ce sujet. Je lis un passage très instructif du
mémoire du ministre de l'Agriculture du gouvernement du Parti
québécois à l'époque adressé au Conseil des
ministres qui disait ceci: "La nature oligopolistique de l'industrie
sucrière canadienne permet aux raffineurs de fixer leur marge de profit
brut. Malgré les nombreuses fluctuations des cours mondiaux depuis les
quinze dernières années, la marge des raffineurs n'a pas
cessé de s'accroître. Dans ce système très
particulier où théoriquement toute fluctuation du prix du sucre
brut est répercutée au consommateur, la marge brute des
raffineurs est ajoutée au prix du sucre brut pour constituer le prix
officiel du sucre raffiné. Cette marge, qui s'était maintenue
autour de 110 $ la tonne, entre 1974 et 1979, s'est depuis accrue constamment
pour atteindre 307 $ au début de 1985. Exprimée en pourcentage du
prix de revient du sucre brut, la marge des raffineurs est donc passée
de 19 % en 1980 à 128 % en 1985, donc 307 $ de marge par rapport au prix
de 240 $ la tonne pour le prix du sucre brut. C'est ce système de
fixation de prix qui a permis aux raffineurs canadiens du sucre de canne de
réaliser des bénéfices nets que l'on a pu évaluer
au cours des dernières années à près de 50 000 000
$ - ils sont payés par les consommateurs, ces 50 000 000 $, ce n'est pas
le gouvernement du Québec qui les paie - représentant un
rendement net sur l'avoir des actionnaires supérieur à 40 % - je
ne sais pas si cela va dans les REAQ, c'est intéressant - on comprend
que, dans le contexte d'une chute des prix du sucre brut et d'une
accélération rapide des marges des raffineurs canadiens depuis
1979, la Raffinerie de sucre du Québec ait estimé essentiel
d'entrer dans le marché du sucre raffiné. "
Je poursuis la lecture du document: "La venue de la Raffinerie de sucre
du Québec sur les marchés, en 1983, a provoqué une guerre
d'escomptes d'une ampleur sans précédent - guerre d'escomptes
qui, en fin de compte, a été profitable aux consommateurs
québécois - il faut souligner que de semblables guerres
d'escomptes s'étaient déjà produites, en 1976, lors de
l'arrivée dans l'industrie de Cartier Sugar et de Westcane Sugar. " On
se souvient qu'à ce moment-là le sucre est parti de 0, 063 $ la
livre, comme je le mentionnais tantôt, pour baisser au profit des
consommateurs que nous sommes, les 6 500 000 consommateurs du Québec -
une diminution, un montant faramineux, finalement, du coût de
consommation pour les Québécois et les Québécoises.
"Mais, en 1983, il s'agissait d'une société d'État et en
plus d'une sucrerie de betterave, ce qui est encore plus important
pour l'avenir. Pour conserver leur part d'un marché aussi
lucratif, les raffineurs ont donc exercé des pressions continuelles sur
les prix en accordant des escomptes considérables aux différents
acheteurs du Québec. Connaissant la situation financière
précaire de la Raffinerie de sucre du Québec, Sucre Atlantic
Ltée annonçait, en mars 1984, un "escompte spécial
applicable au Québec seulement" de 70 $ la tonne pour ralentir les
activités de la raffinerie sur le marché de détail. (16 h
30) "Cette tactique, imitée par les autres raffineurs, a provoqué
un manque à gagner de 4 200 000 $ pour la Raffinerie de sucre du
Québec", et cela permet de dire, aujourd'hui, au ministre. Cette
raffinerie nous coûte trop cher, on va la fermer. Une fois qu'elle sera
fermée, c'est le consommateur qui écopera, parce que ceux qui
resteront comme raffineurs de sucre au Québec seront dans une situation
qui leur permettra d'augmenter les prix quasi à leur guise. Dès
que la Raffinerie de sucre du Québec sera vendue, les raffineurs
n'auront plus besoin de faire cette guerre qui sera devenue inutile pour eux.
Ces guerres de prix - comme je le disais précédemment - sont
toujours profitables aux consommateurs. La situation s'est vécue dans le
domaine de l'alimentation en général, de 1968, environ,
jusqu'à 1973 ou 1974, aussi longtemps le nombre de grossistes en
alimentation du Québec a été autour de 130 au
Québec. Il y a eu une guerre d'escomptes qui a pratiquement maintenu
stable, pendant cinq ou six ans, le prix du panier d'approvisionnement en
alimentation des Québécois et des Québécoises.
Mais, au fur et à mesure que les années passaient et que cette
guerre d'usure se livrait entre les grossistes en alimentation, les plus
petits, d'un mois à l'autre ou d'une année è l'autre,
faisaient faillite ou fermaient tout simplement.
Cette guerre s'est poursuivie jusqu'à ce qu'il ne reste plus,
comme actuellement, qu'une quinzaine de grossistes en alimentation au
Québec, je crois, si mon souvenir est bon. Vers 1974, le consommateur
québécois et la consommatrice québécoise ont
vraiment ressenti la fin de cette guerre d'escomptes entre les grossistes en
alimentation. On se retrouve aujourd'hui avec un nombre très
limité et, chaque fois que le nombre de fournisseurs est limité
pour un produit, on sait qu'il est leur beaucoup plus facile de s'entendre
entre eux, sans même le dire. C'est pour cela que les lois sont si
difficiles à appliquer, comme le soulignait le ministre tantôt.
Les lois contre les coalitions sont des lois très difficiles à
appliquer, parce qu'il n'est pas facile de faire la preuve de cela. Mais il
reste qu'on sait que plus le nombre de ces fournisseurs est restreint, plus il
est facile pour eux de s'entendre, du moins de façon tacite, pour faire
grimper les prix. Je crois que c'est à partir de 1974 qu'on a vu grimper
de façon fulgurante les prix du panier de provisions des
Québécois et des Québécoises, parce qu'on avait
éliminé, par les lois du marché, la grande totalité
des grossistes n'en gardant plus au Québec qu'une quinzaine en
alimentation.
La même conséquence est prévisible, d'autant plus
prévisible qu'il y a, dans le domaine du sucre, un nombre encore plus
restreint de producteurs ou de raffineurs. En faisant disparaître cette
Raffinerie de sucre du Québec, ce n'est pas une sur cent qui
disparaît, c'est une sur quatre. C'est 25 % de la concurrence environ,
sauf erreur, qui disparaît. Elle disparaît du décor, tout
à coup, au profit des quelques unités qui restent. On comprend
que, si à dix et à quinze on réussit à s'entendre
dans te marché de l'alimentation, si à une dizaine on
réussit très facilement à s'entendre, sans même le
dire et de façon tacite dans le domaine des carburants, par exemple,
à trois, dans le marché du sucre, cela va être facile, sans
avoir besoin même - les lois du marché sont bien connues - des
spécialistes... Il va être très facile aussi de s'entendre
pour créer une concurrence, concurrence qui joue toujours, en fin de
compte, à la défaveur des consommateurs et des consommatrices du
Québec. C'est une conséquence excessivement importante de ce
projet de loi.
Je poursuis: "Cette guerre d'escomptes qui existe entre raffineurs
prendrait sûrement fin si la Raffinerie de sucre du Québec pouvait
produire elle-même une quantité raisonnable de sucre
raffiné puisque les grandes raffineries manipulent un trop grand volume
pour se permettre de maintenir leurs escomptes au taux actuel sans
connaître des pertes considérables. "
Tantôt le ministre de l'Agriculture nous rappelait les trois
hypothèses qui existent pour régler le problème à
la Raffinerie de sucre du Québec, soit celles du statu quo, de la vente
ou de la liquidation, tel que le gouvernement l'a décidé, ou
l'application du plan de relance prévu par le ministre de l'Agriculture
du gouvernement du Parti québécois soutenu et surveillé de
près par le député de Verchères. J'en ai eu
connaissance depuis quelques années. Le ministre de l'Agriculture, avant
de nous quitter, nous a dit: C'est 15 000 000 $ que le gouvernement du
Québec, la population du Québec, les contribuables
québécois n'auront plus à payer annuellement alors qu'en
réalité les chiffres, de façon plus précise, sont
de l'ordre de 18 000 000 $ prévus pour la période 1985-1986
jusqu'en 1988-1989, sauf erreur.
M. le Président, je suis heureux de saluer le whip du
gouvernement, le député de Richmond. Déjà, je l'ai
cité à quelques occasions lors de nos études, très
préoccupé de...
Une voix:... la voirie...
M. Desbiens: Oui, de la voirie, sûrement quand il
était dans l'Opposition. Depuis qu'il est whip du gouvernement, c'est la
première occasion que j'ai de le féliciter de sa nomination et du
travail qu'il veut donner à ses députés gouvernementaux.
J'ai eu l'occasion de lire ses propos à cet égard. Étant
donné que nous sommes à l'étude où l'implication
des députés est...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Il faudrait revenir
à l'amendement, s'il vous plaît!
M. Desbiens: Vous allez voir que je vais y arriver.
Une voix: C'est comme le Saguenay.
M. Desbiens: Oui, le magnifique Saguenay.
M. le Président, j'aurais pu le dire tout simplement comme ceci.
Il y a un caucus qui nous dérange. Je sais qu'il est respectueux des
droits des parlementaires, c'est pour cela que je le lui fais remarquer bien
aimablement.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît, messieurs, dans l'intérêt de la commission, il
faudrait garder le silence. Poursuivez, M. le député de Dubuc,
toujours sur l'amendement.
M. Desbiens: Je disais donc, M. le Président, que le
ministre de l'Agriculture, avant de nous quitter il y a quelques minutes, nous
disait que le gouvernement n'aurait plus à débourser environ 15
000 000 $ pour soutenir la Raffinerie de sucre du Québec. Finalement, le
montant que j'ai dans mes notes, c'est le coût pour le plan de relance,
de rentabilisation de la Raffinerie de sucre du Québec. Il serait de 18
000 000 $ entre 1985-1986 et 1988-1989. Cela fait à peu près 4
500 000 $ par année, 4 200 000 $, je pense, ou 4 300 000 $.
Évidemment, l'argument qu'utilise le ministre de l'Agriculture, c'est le
même que celui du gouvernement - le ministre délégué
à la Privatisation nous a dit qu'ils étaient sur la même
longueur d'onde - c'est d'administrer sainement, je suis bien d'accord, et de
permettre finalement, autant que possible, que les montants d'argent
payés par les Québécois et les Québécoises
soient utilisés de la meilleure façon possible, que les services
qu'on accepte de se donner soient le moins coûteux possible. Sauf que,
dans le cas de la Raffinerie de sucre du Québec strictement, si le
gouvernement économise annuellement de 4 000 000 $ à 5 000 000 $
qu'il n'aura plus à fournir pour assurer le plan de relance, ce qu'il
aurait pu faire comme choix, à cause de cette situation, les
conséquences - on l'a déjà vu, ce n'est pas
réalisé encore - c'est que, dès l'annonce de la
possibilité de la vente de Raffinerie de sucre du Québec, il y a
quelques mois maintenant, on a vu que le prix du sucre est passé de 0,
035 $ à 0, 079 $...
M. Fortier: Est-ce que je peux donner une précision au
député?
M. Desbiens: Oui, d'accord.
M. Fortier: Je vois qu'il est en train de faire une argumentation
très laborieuse.
M. Desbiens: Non, cela va, vous allez voir.
M. Fortier: Quand il se réfère au prix du sucre de
0, 03 $ et de 0, 06 $, il se réfère au prix du sucre
international; c'est du sucre brut. Cela n'a rien à voir avec le
Québec, on parle du sucre brut sur les marchés internationaux.
Pour son bénéfice, je lui dirai que, au mois de janvier, le prix
du sucre, chez Provigo, était à 1, 59 $ les deux kilos et que, le
4 juin, il était également à 1, 59 $ les deux kilos.
Alors, ie prix du sucre n'a pas varié d'un poil depuis le mois de
janvier. Il peut continuer son argumentation.
M. Desbiens: Oui, et cela me fait plaisir. Cela a
été souligné... Non, le prix du sucre, cette semaine, est
de 3, 49 $ les deux kilos; c'est le renseignement qui a été
fourni à l'Assemblée nationale, cette semaine même.
M. Fortier: Ah! Chez Steinberg, je peux vous dire que, jusqu'au 4
juin, il était de 3, 39 $ et, chez Provigo, il était plus bas
parce que la raffinerie vendait moins cher. Alors, ce sont les contribuables
qui payaient la différence.
M. Desbiens: 3, 39 $?
M. Fortier: J'ai dit qu'il était à 3, 39 $ le 4
juin et à 3, 39 $ le 8 janvier. En six mois, il n'y a eu aucun
changement. C'était juste pour faciliter votre argumentation.
M. Desbiens: Non, mais excusez... Je suis heureux d'avoir les
informations. Vous me dites 3, 39 $ les deux kilos?
M. Fortier: C'est quatre kilos, chez Steinberg.
M. Desbiens: Ah! Quatre kilos! Bon!
M. Fortier: 3, 39 $. Il y a seulement eu une semaine où il
est tombé. C'était un rabais consenti pour une période
limitée; c'était une vente. Mais c'était 3, 39 $,
3, 39 $ et 3, 39 $...
M. Desbiens: En tout cas, les chiffres que j'avais...
M. Fortier:... et c'est encore 3, 39 $.
M. Desbiens:... c'était 3, 49 $, alors, cela reste...
M. Fortier: Chez Provigo, c'était 2, 99 $, 2, 99 $, 2, 99
$ et cela n'a pas varié en six mois.
Une voix: On vérifiera.
M. Fortier: Je peux vous donner une copie de ce que j'ai.
M. Desbiens: Ceci n'empêche pas que le prix du sucre brut a
varié de 0, 03 $ à 0, 0794 $.
M. Fortier: Oui, mais le député acceptera mon
commentaire à savoir que le prix du sucre brut international est
défini sur les marchés internationaux et cela n'a rien à
voir avec la vente de la raffinerie de sucre.
M. Charbonneau: Est-ce que le ministre est d'accord pour dire que
le sucre brut a augmenté considérablement depuis le début
de l'année?
M. Fortier; Depuis le mois de janvier, il est passé de 0, 0477 $
à 0, 088 $ et il est descendu a 0, 0688 $. Pour que ce soit rentable, il
faudrait qu'il se retrouve au moins à 0, 20 $.
M. Desbiens: Voyez-vous, c'est justement des guerres de chiffres
que l'on fait. On entreprend des guerres de chiffres.
M. Fortier: II n'y a pas de guerre de chiffres, je vous donne les
chiffres.
M. Desbiens: II y a des guerres de chiffres, c'est cela.
M. Fortier: Ce sont des faits.
M. Desbiens; Non, vous dites qu'il faudrait qu'il soit à 0, 20 $.
Ce n'est pas ce que prétendent les experts en la matière. Je
comprends que le ministre délégué à la
Privatisation est un expert dans le domaine nucléaire, mais, dans le
domaine du sucre, je ne le considère pas comme un expert.
Peut-être qu'il en sait un peu plus long que moi, mais peut-être
pas tellement plus. Je suis content qu'il soulève ce point parce que
cela nous permet de lui faire valoir que ce serait important, comme vous le
voyez, que l'on ait devant nous les experts dans le domaine. C'est cela que
l'on cherche à obtenir depuis hier, avoir, devant nous, les
thèses contraires ou contradictoires. Ce ne serait pas possible, si on
avait les experts qui soutiennent les deux thèses, de ne pas pouvoir
faire jaillir la lumière de cela. De la confrontation devant les
personnes qui sont appelées, comme députés, finalement,
à prendre la décision... Évidemment, cette
décision, il est nécessaire qu'elle soit la plus
éclairée possible. Alors, c'est cela qu'on essaie de faire
entendre au gouvernement, au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation. Je comprends que le ministre délégué
à la Privatisation est sur la même longueur d'onde, donc il faut
essayer de le convaincre à son tour. C'est le but de notre
argumentation. Peut-être que, en fin de compte, on voterait pour le
projet de loi si on pouvait en faire une étude approfondie et obtenir
les informations nécessaires des divers groupes concernés. On
sait que, pour ce qui est de Lantic, cela a été refusé; on
a refusé aussi de recevoir la haute direction qui est composée
d'experts dans ce domaine, l'Association des cadres de la Raffinerie de sucre
du Québec. Ce sont pratiquement les seuls. C'est une expertise qu'ils
ont acquise au cours des années et le ministre ne pourra pas nier que
celle-ci est reconnue depuis longtemps. Cette expérience déborde
le cadre de la raffinerie et celui du Québec. Ce sont des experts qui
auraient pu nous aider, comme législateurs, à bien comprendre la
situation, à bien comprendre le projet gouvernemental, à bien
voir si le choix qu'a fait le gouvernement est vraiment te bon.
Peut-être, au bout de la course, on nous aurait obligés, comme
députés de l'Opposition, devant les faits et l'évidence,
è voter pour le projet de loi.
C'est cela que je comprends mal de la part du gouvernement. Pour cela je
suis particulièrement heureux que le ministre
délégué à la Privatisation soit avec nous. J'essaie
de ne pas avoir de préjugés, d'oeillères par rapport
à la privatisation. Je considère qu'un gouvernement, qu'un parti
politique peut avoir des orientations. L'orientation de ce parti politique,
dont le gouvernement est issu, consiste à favoriser la privatisation. Le
ministre a fait des études, il nous a présenté des
rapports et les conclusions de ces études et de ces réflexions.
Voilà qu'il y a une première occasion qui est exceptionnelle, il
y a un premier cas qui est présenté à la population du
Québec, d'une privatisation, d'un élément de sa politique,
des effets de cette politique de privatisation. Il pourrait donner l'exemple
parfait à tout le Québec: Regardez comme c'est bon, la
privatisation. On amène tous ceux qui ont quelque chose à dire,
qui ont l'expertise dans le domaine, soit celui de la raffinerie de sucre, on
fait la démonstration éclatante, dès le premier cas, aux
députés, mais, par voie de conséquence, à la
population, à savoir que la politique de privatisation, c'est
quelque chose qui est bon. Je ne comprends pas que le gouvernement, par son
ministre délégué à la Privatisation, ne profite pas
de cette première circonstance qui s'offre à lui de
démontrer combien cela est bon.
M. Fortier: Attendez que je commence à parler.
M. Desbiens: Non, non, attention! Je considère beaucoup le
ministre, je sais qu'il a plusieurs qualités professionnelles et tout.
Mais je veux dire que pour avoir un éclairage objectif sur la
privatisation il faut que les députés et la population puissent
comparer les thèses qui sont présentes dans le cas de !a
Raffinerie de sucre du Québec. Les deux ministres sont sur la même
longueur d'onde, ainsi que tout le gouvernement, semble-t-il. Et, c'est non, on
n'entend personne, on est bon, on sait où l'on va, c'est cela qu'on
décide. On a beau soulever les doutes qui nous apparaissent très
sérieux, jusqu'à preuve du contraire, concernant les
conséquences possibles, les conséquences malheureuses pour les
producteurs de betteraves sucrières du Québec et pour les
consommateurs du Québec, les dangers qu'il peut y avoir de créer
un monopole. On soulève un tas de conséquences possibles et
probables dans certains cas et même sûres. Bien sûr qu'on va
écouter les représentations...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, M. le
député de Dubuc, nous allons suspendre les travaux jusqu'à
ce soir, 19 heures. Vous pourrez continuer à partir de ce
moment-là, il vous reste, maintenant, quatre minutes. Ce soir, à
19 heures, nous commencerons par vous entendre.
Une voix: Et on ajourne à 22 heures.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Nous ajournerons
à 22 heures.
M. Desbiens: C'est à 19 heures?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Nous
reprenons à 19 heures.
Une voix: Là, il y a une réception pour le
président ou le premier ministre d'Italie.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): C'est cela.
(Suspension de la séance à 16 h 50)
(Reprise à 19 h 13)
Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre,
s'il vous plaît!
Madame et messieurs, je déclare la séance de la commission
de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation ouverte.
Avant de débuter, j'aimerais faire accepter, si les gens sont
d'accord, que M. Laurier Gardner (Arthabaska) remplace M. Houde (Berthier) ce
soir.
M. Fortier: C'est un Irlandais, première des choses, comme
M. Ryan.
M. Charbonneau: M. Ryan n'aimera pas cela.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Excusez-moi,
messieurs. S'il vous plaît!
M. Charbonneau: Quelle est la différence entre un
Irlandais et un Québécois francophone d'origine irlandaise?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député de Verchères, ce n'était pas ma
question.
Est-ce que les gens acceptent cela?
M. Fortier: On accepte avec beaucoup de ferveur.
M. Charbonneau: Comme il est d'origine, on va l'accepter.
Le Président (M- Tremblay, Iberville): D'accord.
Très bien.
Maintenant, je reviens...
M. Fortier: Tous les Québécois sont d'origine
quelconque.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Quelconque? Pas
quelconque, d'origine très bien.
Une voix: Quelconque.
M. Fortier: Sauf les autochtones.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs et
madame, nous étions cet après-midi sur l'amendement! "et la
Fédération nationale des associations de consommateurs du
Québec. " La parole était à M. Desbiens et il lui restait
quatre minutes sur cet amendement. M. Desbiens, vous avez la parole.
M. Desbiens: M. le Président, je pense que je vais
simplement profiter de la reprise pour essayer de rappeler une chose qui
m'apparaît, en tout cas, importante. Je disais que le gouvernement
libéral a pris comme orientation politique que l'État renonce de
plus en plus à une période qu'on a connue au Québec et qui
était comme, on a appelé cela, celle de la nationalisation
dans bien des cas. C'est une orientation où l'État est de
moins en moins actif, présent, dans le développement direct de
l'économie du Québec. Je pense que c'est le droit du Parti
libéral et, évidemment, du gouvernement qui en est issu d'agir
ainsi, de choisir cette orientation. Je disais que ia privatisation des
entreprises peut être à certains égards, sauf que cela
reste à démontrer, quant à nous, utile ou
nécessaire même.
Une voix: Adopté.
M. Desbiens: Cela ne m'apparaissait pas un souffle de mon bon
ange. Le projet de loi 85 portant sur la vente ou sur la liquidation - aussi
bien utiliser les mots qui représentent vraiment ce qui se produit dans
ce cas-là -aurait été, à mon avis, l'occasion
exceptionnelle pour le gouvernement de faire la preuve que cette orientation
politique est vraiment la plus valable et la meilleure pour
véritablement atteindre les meilleurs objectifs possible pour le peuple
québécois. C'est la première fois qu'on a un projet de loi
qui est un exemple de privatisation et le gouvernement aurait dû
démontrer publiquement, devant tous les députés et avec
les députés, le bien-fondé de cette politique dans le cas
précis de la Raffinerie de sucre du Québec.
Pour faire une démonstration vraiment efficace, il aurait
été important de discuter aussi les thèses qui se sont
affrontées et qui s'affrontent dans le cas de la privatisation de la
Raffinerie de sucre du Québec, en recevant les différents
intervenants et les experts en la matière. Je pense que cela aurait
été une occasion unique.
Le seul fait que le gouvernement refuse d'agir ainsi jette des doutes
sur l'assurance qu'il a lui-même que sa politique soit vraiment valable.
Quand on est assuré de ce qu'on avance et que nos hypothèses sont
excellentes et les meilleures, il me semble qu'on ne craint pas de les
confronter à la réalité, de les confronter devant la
population et d'en faire la preuve une fois pour toutes. Mais, au moins, on a
essayé d'amener le gouvernement et le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation à inviter ici les gens qui auraient
pu apporter des éclairages exceptionnels sur cette privatisation de la
Raffinerie de sucre du Québec.
C'est encore un effort supplémentaire que l'on tente. J'ai
tenté, en présentant cet amendement, de faire intervenir la
Fédération nationale des associations de consommateurs du
Québec. On croit, avec raison, que l'une des conséquences de
cette privatisation sera de faire disparaître un concurrent aux
entreprises sucrières, ici au Québec et au Canada. En
conséquence, cela entraînera des coûts que le gouvernement
va peut-être diminuer de son budget, de son bilan, de ses
équilibres financiers, mais que les consommateurs devront absorber. Une
différence d'un cent la livre de sucre au Québec, c'est 6 500 000
$ par année, alors qu'il en coûterait pour relancer, en plus de
toute la création d'emplois que cela suppose, la Raffinerie de sucre du
Québec... Chaque sou de différence dans le coût de la livre
de sucre représente environ 6 500 000 $ au Québec. À ce
moment-là, on aurait vite rejoint et rattrapé... De toute
façon, à l'inverse, les consommateurs auront vite fait...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député, vous devriez conclure. Le temps est
écoulé.
M. Desbiens: Oui? Alors, les consommateurs auront vite
payé, si ce n'est en taxes ou en impôt, ces 18 000 000 $ que le
ministre ou le gouvernement pense économiser. Le gouvernement, c'est le
peuple, ce sont les mêmes personnes; c'est nous, le gouvernement, ce sont
les consommateurs, tous les citoyens du Québec. Ils auront vite
payé autrement, par des augmentations du prix du sucre à la
consommation, ce que cela aurait coûté pour rentabiliser la
Raffinerie de sucre du Québec. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Très
bien.
M. Fortier: M. le Président...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Voulez-vous parler
maintenant? Oui, je vous écoute.
M. Fortier: Vous allez me laisser parler?
M. Charbonneau: Oui, oui. M. Portier: C'est gentil.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Je vous cède
la parole.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: Le député voudrait faire parader la
Fédération nationale des associations de consommateurs du
Québec. Il faudrait bien se souvenir que les consommateurs, ce sont
aussi des "payeurs de taxes". S'il y a une chose qui a été
demandée pendant la campagne électorale et c'est ce que nous
avons entendu très clairement de ce cûté-ci de la Chambre,
c'est que les "payeurs de taxes" nous ont dit: Fini les folies! II commence
à être temps que le gouvernement prenne des décisions,
des
décisions qui sont parfois difficiles, on le reconnaît, qui
affectent d'une façon plus particulière certaines personnes dans
certaines régions, on le reconnaît également, et c'est la
raison pour laquelle on a mis sur pied différents programmes pour aider
ceux qui peuvent être touchés. C'est la raison pour laquelle ce
débat, en fait, a été fait durant la campagne
électorale puisque ces gens nous ont dit très clairement qu'ils
voulaient avoir un gouvernement qui assainisse les finances publiques.
J'entendais dire, lors du discours en deuxième lecture sur le
principe du projet de loi qui est devant nous en commission parlementaire, que
la privatisation de la Raffinerie de sucre du Québec n'est pas
réellement une privatisation. Je suis tout à fait d'accord avec
cet énoncé. Je pense que ceux qui ont dit cela, de l'Opposition,
avaient parfaitement raison. Il ne s'agit pas réellement d'une
privatisation; il s'agit d'une mesure d'assainissement des finances publiques
parce que - et ce n'est pas seulement nous qui le disons - trois ministres des
Finances d'affilée, des deux partis politiques, ont dit que ce
n'était pas rentable et qu'il fallait prendre une décision.
Je dois admettre que, durant les discours de deuxième lecture, il
y a des gens de l'Opposition qui ont dit: Ce n'est pas raisonnable. En 1981,
certaines sociétés, certaines PME ont eu des difficultés
financières. S'il avait fallu que les banques mettent la clé dans
la porte immédiatement, cela aurait été une catastrophe.
Il aurait été déraisonnable de mettre la clé
immédiatement dans la porte, alors que plusieurs PME étaient en
difficulté. Dans le cas qui est devant nous et dans tous les cas
où une société est en difficulté, que fait-elle?
Elle prépare un plan de développement, elle va voir son banquier
et elle essaie de convaincre son banquier que son plan de développement
va lui permettre de rentabiliser les opérations à court terme. Le
député de Lévis, ex-ministre de l'Agriculture, est
allé voir le banquier no 1, qui s'appelait Jacques Parizeau. M. Parizeau
nous a dit très clairement par des déclarations publiques que
c'était une erreur de continuer et qu'il fallait arrêter
d'investir dans ce canard boiteux. Le député de Lévis va
voir le banquier no 2, M. Duhaime, ex-ministre des Finances du Parti
québécois et qu'est-ce que M. Duhaime lui dit? C'est un canard
boiteux et il faut à tout prix... et lui-même a entamé les
négociations avec Lantic. Un deuxième banquier qui conclut qu'il
ne valait pas la peine d'investir, justement, pour protéger les
consommateurs, c'est-à-dire pour protéger les "payeurs de
taxes".
Le même député de Lévis, promoteur de la
Raffinerie de sucre du Québec - là-dessus, je ne lui en veux pas
- est convaincu que cela devrait continuer, comme tous les propriétaires
de PME qui croient que leur affaire est bien importante. Il est
nécessaire d'avoir des promoteurs en ce bas monde. Il va voir le
banquier no 3. Le banquier no 3 c'est Gérard D. Levesque et Pierre
Fortier, les députés de Bonaventure et d'Outremont. Le
troisième banquier dit également qu'il faut mettre la clé
dans la porte.
Je crois qu'il est nécessaire, pour un propriétaire de
PME, de tenter de convaincre son banquier quand il croit être en
difficulté. Il doit mettre sur pied un plan, il doit essayer de
démontrer à son banquier que son plan de développement va
réussir à court terme. Mais quand cela fait trois banquiers
d'affilée de deux partis politiques importants qui disent que cela n'a
pas de bon sens et qu'il faut arrêter l'hémorragie, je crois que
le propriétaire de la PME doit commencer à se dire: S'il y a
trois banquiers d'affilée qui m'ont dit que cela n'avait pas de bon
sens, mon affaire, et surtout de toutes couleurs politiques, des deux partis
politiques, alors, on peut dire que cela n'a rien à voir avec la
formation politique, si ce n'est que, de ce côté-ci de la Chambre,
cette fois-ci, nous avons eu le courage politique de passer aux actes.
Mais tel est le jugement porté par trois banquiers
d'affilée sur le plan de développement proposé par le
promoteur de la Raffinerie de sucre du Québec. Je ne lui en veux pas
d'être le promoteur, parce que je crois qu'au Québec, pour
développer notre économie, on a besoin de promoteurs. Quand trois
banquiers d'affilée, trois années successives, disent: Cela n'a
pas de bon sens, je crois que ceux qui nous écoutent vont comprendre
que, dans un cas comme celui-là, on doit arrêter d'utiliser des
arguments de toutes sortes pour dire que les consommateurs sont
affectés, que la décision est arbitraire, qu'on devrait entendre
des experts de toutes sortes venus parader devant nous. Je crois
réellement, M. le Président, que nous avons étudié
à fond les documents. Entre le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation et moi-même, je le
répète, la coopération a été exemplaire. Ni
l'un ni l'autre ministre n'a tenté d'assumer une suprématie sur
l'autre. Les deux ont collaboré pour regarder le dossier à froid.
Les fonctionnaires du ministère de l'Agriculture et du ministère
des Finances ont collaboré justement pour s'assurer que le jugement qui
était porté était empreint d'objectivité, dans le
meilleur intérêt des contribuables québécois et des
consommateurs québécois.
Mes collègues, tout à l'heure, disaient que les prix du
sucre avaient augmenté depuis que la décision avait
été prise. C'est faux. J'ai fait distribuer la feuille qui inclut
les chiffres que j'ai obtenus de Steinberg et de Provigo. Depuis le mois de
janvier, les
prix n'ont pas changé et les prix internationaux n'ont rien
à voir avec la situation québécoise, puisqu'ils sont
déterminés par un marché international et non pas par un
marché québécois. M. le Président, c'est la seule
précision que je voulais faire à ce moment-ci pour permettre
à l'Opposition d'arriver avec une argumentation encore plus
articulée, pour qu'ils tentent de nous convaincre, mais je voulais leur
donner le bénéfice de l'expérience que j'ai vécue
depuis six mois en tant que ministre délégué è la
Privatisation.
Il est vrai que nous avons une politique. Je crois que c'est le premier
gouvernement qui s'est donné une politique très claire à
ce sujet. Il est vrai que les journalistes du secteur économique et
à peu près tous les journalistes qui se sont penchés sur
le programme que nous avons mis de l'avant ont fait des commentaires
plutôt, j'allais dire, élogieux. En tout cas, ils ont
appuyé le programme que nous avons mis sur pied. Jean-Paul Gagné
a dit: La privatisation est bien engagée. Un autre, Alain Dubuc, parle
de la privatisation tranquille. C'est vrai, M. le Président, que cela a
été une privatisation tranquille, parce qu'en dépit du
"filibuster" que nous subissons il n'y a pas un journaliste qui note un
traître mot de ce qui s'est dit aussi en commission parlementaire. De
fait, tous les journalistes qui ont suivi le dossier avec quelque peu
d'attention sont convaincus que la décision que nous avons prise est la
meilleure dans les circonstances. De fait, le gouvernement a pris une
décision qui était difficile, je le constate. Je comprends le
député de Verchères qui représente les gens de la
région en partie et j'ai compris aussi les interrogations du
député de Saint-Hyacinthe avant que nous prenions la
décision. C'est tout à fait normal, lorsque des gens sont
impliqués, sont frappés par une décision comme
celle-là, qu'ils s'interrogent sur sa nécessité et sur la
rigueur de l'étude qui a prévalu aux choix qui sont faits. En
toute honnêteté, une fois qu'on s'est dégagé de
l'émotivité qui est peut-être normale pour ceux qui sont
concernés et qu'on regarde le dossier avec beaucoup de rigueur, on
s'aperçoit qu'en définitive les arguments militaient et
malheureusement militent toujours, pour la fermeture de la raffinerie et pour
la vente des actifs à Lantic. C'est la raison pour laquelle nous sommes
réunis, ici, ce soir, M. le Président. Je vous remercie.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
ministre.
J'ai reconnu le député de Duplessis.
M. Denis Perron M. Perron: Merci, M. le Président.
À entendre le député d'Outremont et ministre
délégué à la Privatisation, on croirait qu'il est
comme l'ancien chef du Parti libéral et qu'il a une ligne directe avec
le Saint-Esprit. Je crois que le ministre délégué è
la Privatisation et les membres du Parti libéral ont complètement
oublié...
M. Charbonneau: II y a confusion de rôles.
M. Perron: Oui, effectivement, c'est une confusion de
rôles... l'importance de la Fédération nationale des
associations de consommateurs du Québec relativement à un dossier
comme celui qui nous touche actuellement. (19 h 30)
Je suis assuré que les représentants et
représentantes de cette fédération seraient très
intéressés, par exemple, à entendre ce qu'ont à
dire le gouvernement et l'Opposition, et à faire en sorte de permettre
toutes les questions qui pourraient être posées de part et
d'autre, dans le but de discuter dans un sens très général
de la question de la Raffinerie de sucre du Québec.
Je suis aussi assuré que ces représentants et
représentantes seraient très intéressés à
faire allusion à cette fameuse publicité payée qu'a
pratiquement réfutée l'actuel gouvernement libéral
malgré que le chef lui-même, au cours de la campagne
électorale, et ce, avant le 2 décembre dernier, avait
endossé entièrement les positions du candidat libéral de
Verchères, c'est-à-dire M. Chapdelaine.
Lorsque ce dernier, par exemple, se pose une question qui est la
suivante: En quoi l'approche du candidat libéral est-elle nouvelle? on
voit que sa réponse touche la question technique qui va inclure, bien
sûr, les employés. C'était là la deuxième
question qu'il se posait. Mais è la première question qu'il se
posait, à savoir pourquoi le candidat libéral, Michel
Chapdelaine, veut-il que la raffinerie de sucre demeure en opération, ce
dernier s'est répondu et a répondu à la population du
comté de Verchères de la façon suivante: Parce que le
Parti libéral du Québec est le parti de l'emploi et non pas du
chômage. Parce que la raffinerie est un atout important pour la
région et le comté de Verchères, elle doit être en
opération douze mois par année.
Et, lorsqu'on parle, par exemple, de douze mois par année, c'est
une question qui apporte sûrement des bénéfices aux
consommateurs du Québec. C'est pourquoi l'Opposition à
l'Assemblée nationale a décidé de présenter cette
motion d'amendement pour permettre d'entendre les représentants et les
représentantes de cette Fédération nationale des
associations de consommateurs.
Lorsque j'entends le député d'Outremont et en même
temps ministre délégué à la
Privatisation, je ne peux pas faire autrement...
M. Fortier: Rattaché aux Finances.
M. Perron: Bofi Rattaché aux Finances ou non, on ne sait
plus où on s'en va dans ce gouvernement, M. le Président.
Lorsqu'on entend le député d'Outremont et ministre
délégué è la Privatisation mentionner qu'il y a eu
trois ministres consécutifs au ministère des Finances qui ont
pris telle décision et qui ont fait telle recommandation, je peux vous
dire, d'ailleurs, que le député de Verchères
lui-même à l'Assemblée nationale a déposé les
documents où on faisait effectivement référence à
des études et à des recommandations qui avaient été
faites aussi en même temps par le ministère des Finances et qui
avaient en quelque sorte été endossées par les ministres
des Finances successifs qui se sont présentés.
Je peux vous dire, M. le Président, que même si c'est la
commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation et ses
membres qui siègent ici, on s'aperçoit que le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et le ministre
délégué à la Privatisation... En passant, il
représente un gouvernement qui est en fait un gouvernement liquidateur
et on comprend très bien le jeu du Parti libéral parce qu'il veut
tout liquider en ce qui a trait aux sociétés d'État du
Québec. Comme on sait que cela représente des additions de fonds
pour le fonds consolidé du Québec, tout le monde doit comprendre
autour de cette table que, lorsque de l'argent se ramasse dans le fonds
consolidé du Québec, à ce moment, des décisions
politiques peuvent être prises par différents ministres de ce
gouvernement libéral et être transportées par la suite soit
au Conseil du trésor ou au Conseil des ministres pour être
endossées pour ensuite entreprendre des objectifs carrément
politiques prévus avec l'argent des fonds publics.
Je crois effectivement que la Fédération nationale des
associations de consommateurs du Québec serait très
intéressée à entendre ce qu'ont à dire le ministre
délégué a la Privatisation, ainsi que le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation sur cette question
précise. Je suis assuré aussi que cette même
fédération serait très intéressée à
prendre connaissance des documents, autant des ministres des Finances qui se
sont succédé que du ministre de l'Agriculture qui était
là antérieurement, ainsi que du ministre de l'Agriculture qui est
là aujourd'hui, le député de Portneuf. Lui aussi a
sûrement préparé un mémoire qu'on ne connaît
pas, sinon deux pages dont on a pu prendre connaissance. Oui, c'était
conjoint.
Je vous avise d'une chose: Ce gouver- nement libéral n'a pas le
monopole de la transparence. Tout le monde le sait. On l'a vu, d'ailleurs,
à l'Assemblée nationale, à la façon dont vous avez
procédé. Je l'ai mentionné, hier, à
l'Assemblée nationale. Lorsqu'on refuse d'entendre des organismes comme
le Syndicat des producteurs de betteraves à sucre du Québec, la
société Sucre Lantic, la haute direction de la Raffinerie de
sucre du Québec, l'Association des cadres de la Raffinerie de sucre du
Québec, ainsi que le directeur des enquêtes sur les coalitions, je
suis à peu près assuré que, puisque les membres du Parti
libéral ont refusé carrément d'entendre ces organismes,
cela sera exactement la même chose pour la Fédération
nationale des associations de consommateurs.
À partir du moment où il y a aussi un ministre
délégué à la Privatisation qui est présent
dans ce dossier, puisque le mémoire a été signé
autant par lui que par le ministre de l'Agriculture, je puis vous assurer que
tout ce qui est connexe au mémoire, c'est-à-dire tout ce qui est
connexe à ce qui a été rendu public, soit les deux pages
en question, cela n'informe pas vraiment les membres de la commission de ce qui
s'est passé dans ce dossier pour qu'on arrive à la
décision de carrément saborder une société
québécoise qui a été créée il y a une
quarantaine d'années pour permettre de l'emploi et pour permettre que,
dans une certaine proportion, nous ayons au Québec des choses
concrètes en rapport avec le sucre qui est même vendu dans les
produits de consommation. Qu'on se rappelle Marie perle. Peut-être que le
ministre délégué l'a oublié, mais je peux vous dire
une chose: En ce qui a trait au député de Duplessis et à
l'ensemble des membres de l'Opposition, on serait parfaitement d'accord pour
que cette Fédération nationale des associations de consommateurs
puisse venir devant cette commission.
En terminant, je voudrais vous présenter une motion de
sous-amendement à la motion pour consultations particulières:
"Que la motion d'amendement soit modifiée en ajoutant à la fin
les mots "et la Confédération de l'Union des producteurs
agricoles, la Fédération de l'Union des producteurs agricoles de
Saint-Hyacinthe et le Conseil central Richelieu de la CSN. "
Le Président (M, Tremblay, Iberville): Est-ce que vous
l'avez par écrit?
M. Perron: Oui, M. le Président.
M. Dubois: Si vous pensez à autre chose, pourquoi ne
l'incluez-vous pas tout de suite?
Une voix: Mgr Grégoire.
M. Perron: La prochaine, cela va être le candidat
libérai de Verchères lors des dernières
élections.
Une voix: On l'attendait, celle-là!
M. Perron: Je vous avise à l'avance.
M. Fortier: Si on l'accepte, qu'est-ce qui va arriver? Est-ce
qu'on va passer à l'étude article par article?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Le sous-amendement
è l'amendement est recevable. Quand on sait où on va, il n'y a
pas de problème. La parole est au député de Duplessis pour
une durée de 30 minutes. Juste une seconde, on va vous la redonner.
M. Desbiens: Est-ce qu'on peut avoir une copie de la
résolution?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): On va en faire
faire des photocopies.
M. Charbonneau: C'est le Conseil central de Saint-Hyacinthe.
M. Perrons C'est le Conseil central de Saint-Hyacinthe.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): De la CSN de
Saint-Hyacinthe, et non de Richelieu.
M. Perron: Oui.
Sous-amendement proposant d'entendre
la CUPAQ, la Fédération de l'UPA
de
Saint-Hyacinthe et le Conseil central
Saint-Hyacinthe de la CSN
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, le
sous-amendement se lirait ainsi: "et la Confédération de l'Union
des producteurs agricoles de la Fédération de l'UPA de
Saint-Hyacinthe, ainsi que le Conseil central...
M. Perron: Non, c'est la Confédération de l'Union
des producteurs agricoles, la Fédération de l'UPA de
Saint-Hyacinthe et le Conseil central Saint-Hyacinthe de la CSN.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Et le Conseil
central Saint-Hyacinthe de la CSN.
M. Perron: Exactement, M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Très
bien.
M. Gardner: Afin qu'il n'y ait pas de confusion, M. le
Président, est-ce qu'on peut en avoir une copie?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, on va en faire
faire des photocopies.
M. Gardner: II semble que ce soit confus...
Une voix: Est-ce qu'on peut expliquer au député ce
que c'est, la CSN?
M. Gardner: Je sais tout ça. Les producteurs agricoles, je
les connais.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Si vous voulez le
réécrire, je vais le relire. Donnez-le-moi et je vais le
répéter.
M. Fortier: M. le Président, on aimerait bien avoir
l'amendement avant de commencer la discussion, car on veut faire cela
très sérieusement de ce côté-ci.
M. Charbonneau: M. le Président, nous n'avons aucune
objection. On va attendre que le secrétaire ait fini ses
écritures.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Et on va envoyer
quelqu'un faire faire des photocopies.
M. Charbonneau: On peut suspendre quelques instants, M. le
Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): On peut suspendre
quelques minutes. Nous suspendons les travaux de la séance durant
quelques minutes afin de permettre d'avoir des copies adéquates
concernant le nouveau sous-amendement.
(Suspension de la séance à 19 h 43)
(Reprise à 19 h 51)
Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre,
s'il vous plaît!
Mesdames et messieurs, la séance de la commission de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation est ouverte à
nouveau.
Nous avons maintenant chacun une copie du sous-amendement.
M. Charbonneau: M. le Président, vous pourriez le lire
pour que tous les membres de la commission le comprennent.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. "Que la
motion d'amendement soit modifiée en ajoutant, à la fin, les
termes: "et la Confédération de l'Union des producteurs agricoles
du Québec, la Fédération de l'UPA de Saint-Hyacinthe, le
Conseil central Saint-Hyacinthe de la CSN. "
M. Fortier: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Je vous
écoute, M. le ministre.
M. Fortier: Je ne comprends pas pourquoi l'Opposition a mis ces
trois groupes ensemble, parce qu'elle aurait pu faire trois sous-amendements de
suite. Ils ont gaspillé deux sous-amendements.
M. Garon: Parce qu'on ne veut pas faire un "filibuster".
M. Fortier: C'est cela, je comprends. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous auriez pu, M.
le ministre, proposer de scinder le sous-amendement.
M. Fortier: Pour gagner du temps, on va l'accepter tel quel.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord.
M. Garon: Pour raccourcir le temps, vous auriez dû dire
oui, tout de suite. Au lieu de discuter pendant deux heures pour essayer de
vous convaincre de recevoir ces gens-là, on aurait pu dire: On limite le
temps de chacun des groupes à deux heures.
Le Président (M. Tremblay, Iberville):
Antiréglementaire.
M. Garon: On aurait entendu tout le monde.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Maintenant, la
parole est au proposeur qui est M. le député de Duplessis.
M. Forget: On est très bien informé.
M. Garon: Surtout vous, vous avez l'air d'être bien
informé!
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, la parole
est à vous.
Messieurs, s'il vous plaît!
M. Garon: Ils recommencent la diffusion du programme
"Séraphin" l'an prochain, vous savez cela? Ils vont vous demander de
jouer là-dedans j'en suis certain.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre,
s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À
l'ordre, M. le député de Prévost.
M. Garon: Vous allez pouvoir faire un homme du XIXe siècle
sans être maquillé.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, s'il
vous plaît!
M. Fortier: Allez-vous faire le père Ovide?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous reprendrez les
débats après 22 heures. M. le député de
Duplessis...
Une voix: On tourne.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): ... vous avez la
parole.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, M. le Président. Le ministre
délégué à la Privatisation demandait pourquoi nous
n'avions pas présenté cette motion de sous-amendement en la
scindant pour chacun des organismes. C'est bien simple, M. le Président,
la réponse est qu'il y a tellement d'organismes qui veulent se faire
entendre sur cette question précise de la Raffinerie de sucre du
Québec, surtout è la suite de l'annonce de la décision
libérale qui fut prise par le Conseil des ministres sur recommandation
des deux ministres que j'ai mentionnés tout à l'heure.
Je pense qu'on ne peut pas faire autrement que présenter cela
maintenant par groupe. Vous allez voir ce qui va suivre après cette
motion de sous-amendement: il y a d'autres motions qui s'en viennent,
mentionnant qu'il y a d'autres groupes qui veulent se faire entendre.
Lorsqu'on parle, M. le Président, de la
Confédération de l'Union des producteurs agricoles du
Québec, de la Fédération de l'Union des producteurs
agricoles de Saint-Hyacinthe, ainsi que du Conseil central Saint-Hyacinthe de
la CSN, il faudrait spécifier ici qu'un des membres de la
confédération et de la fédération est le Syndicat
des producteurs de betteraves.
Une voix: C'est le même groupe.
M. Perron: Bien sûr! Je voudrais informer les membres de
cette commission de certaines lettres et de certains télégrammes
qui ont été reçus. Je suis assuré qu'en particulier
les membres du Parti libéral du côté de cette
députation si chère au premier ministre du Québec, vont
comprendre le bien-fondé des demandes qui ont été faites
dans le courrier que je vais vous présenter.
Dans un télégramme qui a été adressé
à M. Jean-Pierre Charbonneau, député de Verchères,
dont copie a été envoyée à M. Michel Pagé,
actuel ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation...
M. Gardner: C'est l'inverse.
M. Perron: Ce n'est pas l'inverse. Je sgis capable de lire un
télégramme.
M. Gardner: II aurait dû faire l'inverse.
M. Perron: Ce n'est pas mes problèmes. Ce sont les
problèmes du Parti libéral. Je peux vous assurer que ce
télégramme est authentique et il est adressé à M.
le député: "Dans le cadre des débats de
l'éventuelle vente de la Raffinerie de sucre du Québec à
l'entreprise Lantic, le Syndicat des producteurs de betteraves à sucre
du Québec aimerait être entendu en commission parlementaire afin
d'exposer les intérêts agricoles en relation avec la conservation
de la production de la betterave à sucre au Québec. " C'est
signé Simon Guertin, président.
M. le Président, dans un télégramme qui a
été adressé directement au ministre, cette fois-ci par le
Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du Québec, on lit: "M. le
ministre, comme porte-parole du Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du
Québec, j'aimerais que le regroupement représentant 24 organismes
- 24 organismes, ce n'est pas n'importe quoi - et qui s'est formé pour
défendre la survie de la Raffinerie de sucre du Québec soit
entendu en commission parlementaire. " C'est signé Bernard Malo,
porte-parole du Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du Québec, avec
copie à Jean-Pierre Charbonneau, député de
Verchères.
Dans une lettre dont j'ai reçu copie à mon bureau de
Québec en date du 11 juin dernier, dont l'expéditeur était
M. Doris Arsenault, secrétaire de la commission, je lisais: "Vous
trouverez ci-joint copie d'une lettre qui nous est parvenue le 10 juin 1986. "
M. le Président, cette lettre est adressée à M. Michel
Pagé. Ce n'est pas n'importe qui, M. Michel Pagé, c'est le
député de Portneuf. Il est membre du Parti libérai, il est
ministre libéral dans ce gouvernement.
Une voix: Encore!
M. Perron: II a été nommé par son chef.
M. Garon: II n'est pas là!
M. Perron: Le sujet de la lettre, c'est la fermeture de la
raffinerie et le fonds de retraite: "M. le ministre, nous désirons par
la présente être entendus à l'occasion de la tenue de la
commission parlementaire sur la loi...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre,
s'il vous plaîtl
M. Perron: Je m'excuse, M. le Président, je recommence
parce que les membres du Parti libéral n'ont pas compris. "M. le
ministre, nous désirons par la présente être entendus
à l'occasion de la tenue de la commission parlementaire sur la loi de la
fermeture de la Raffinerie de sucre du Québec, toi 85. Le sujet est la
perte de notre fonds de pension. "
Cela concerne les travailleurs et les travailleuses de la raffinerie; je
pense que les membres du Parti libéral qui sont devant nous n'y sont pas
intéressés du tout et le ministre non plus. Pas plus le ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation que le ministre
délégué à la Privatisation ne sont
intéressés à recevoir ces gens. D'ailleurs, on a vu le
résultat par la façon dont vous avez voté toutes les
motions d'amendement et la motion principale qui n'est pas encore
adoptée, mais qui va le devenir éventuellement. Je trouve dommage
que vous n'ayez pas eu le sens des responsabilités en acceptant que ces
gens viennent devant cette commission pour se faire entendre.
Les signataires de la lettre poursuivent en disant: "Voici un
résumé de la situation. La valeur actuelle des fonds
calculée en additionnant nos cotisations, celle de l'employeur et les
intérêts accumulés depuis des années - 11 ans dans
le cas d'un signataire et 19 ans dans ie cas de l'autre -est de l'ordre de 80
000 $. Pendant nos longues années à l'emploi de l'entreprise,
nous comptions sur la pension que ce capital aurait pu générer au
moment de la retraite. Par contre, par le fait que ce fonds sera gelé,
c'est-à-dire sans intérêt ni indexation pendant 19 ans, sa
valeur future sera dérisoire en l'an 2005. Nous trouvons donc
inacceptable le fait qu'en plus de perdre notre emploi nous soyons
obligés de se laisser confisquer nos fonds de pension. Après
tout, la cessation d'emploi a été décidée par
l'employeur en dehors du contrôle des employés et le
règlement de la CARRA ne prévoit pas ce cas. "Notre suggestion
est d'inclure dans la loi de fermeture une clause nous permettant le transfert
de la valeur actuelle accumulée dans un régime privé,
REER, afin que nous puissions transformer la valeur future en une rente quand
l'âge de la retraite sera arrivé. Il est à remarquer que le
transfert de fonds est déjà appliqué dans le
règlement de la CARRA dans certains cas particuliers. " C'est
signé: Antonio Pietrolucci, physicien, chef chimiste de la raffinerie et
Nguyendinh Thuan, ingénieur et directeur de l'usine. (20 heures)
Une voix: C'est très sérieux. Ils perdent leur
pension.
M. Perron: Lorsqu'on parle d'une pension comme celle-là,
je pense qu'il y a lieu d'entendre les représentants et
représentantes des travailleurs et, bien sûr, tous les
représentants de la Confédération de l'Union des
producteurs agricoles et, en plus, la Fédération de l'Union des
producteurs agricoles de Saint-Hyacinthe. Dans l'un des
télégrammes, c'est-à-dire celui de M. Simon
Guertin, le président du Syndicat des producteurs de betteraves à
sucre du Québec, ce dernier, tout en mentionnant Lantic, semblait
très inquiet de la façon dont le gouvernement libéral est
en train de traiter le dossier de la Raffinerie de sucre du Québec avec
le projet de loi 85, c'est-à-dire un projet de loi qui prorogera
éventuellement l'existence légale de la société
elle-même.
M. Garon: Ils sont en train de les assassiner.
M. Perron: Lorsqu'on parle de l'ensemble des dossiers qui furent
discutés soit au ministère des Finances ou au ministère de
l'Agriculture, il y a des membres du gouvernement, et en particulier les
ministres concernés par cette loi - le ministre
délégué à la Privatisation, ainsi que le ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation - qui se font un
devoir d'informer au minimum les membres de la commission d'abord, les gens
concernés en plus et la population du Québec ensuite. On n'a
qu'à remarquer ce qu'il nous est permis de voir dans la décision
ministérielle, on parle d'un document qui a à peu près une
vingtaine de pages et qu'on nous dépose publiquement. C'est la seule
chose que l'on peut avoir selon la loi sur l'information et on nous en
dépose deux pages accessibles au public. Tout le reste n'est pas rendu
public et les deux ministres concernés refusent carrément de
déposer ici les documents en question. Ce sont des documents qui
pourraient sûrement permettre aux membres de la commission, d'un
côté comme de l'autre, de prendre une décision plus
éclairée et même d'aller jusqu'à recommander aux
ministres concernés des choses qui seraient sûrement
intéressantes. Lorsqu'on veut entendre les personnes qui
représentent des organismes, ce qui est la motion de sous-amendement, je
crois que c'est essentiel qu'on le fasse.
Je termine en vous disant qu'il serait peut-être bon que les
membres du gouvernement, ceux et celles qui sont assis et assises en face de
moi, regardent ce qu'il y a à l'intérieur de la Loi relative aux
enquêtes sur les coalitions. Je vous invite à lire attentivement
ce qu'on dit de la fusion et du monopole et ce que cela veut dire dans la loi.
Et c'est une loi fédérale, ce n'est pas une loi du
Québec.
Je termine par cette invitation aux membres du gouvernement. Je voudrais
vous dire qu'en ce qui me concerne, peu importe la décision des membres
du gouvernement qui font partie de cette commission et qui ont refusé
l'ensemble des motions de sous-amendement qu'on a présentées ici,
j'espère au moins qu'en ce qui a trait aux représentants du
secteur agricole et des travailleurs et des travailleuses, on aura non
seulement la décence, mais aussi l'audace de le faire. Parce que ce
gouvernement n'est pas audacieux du tout. Lorsqu'il faisait sa campagne
électorale, les candidats et candidates de chacun des comtés du
Québec, incluant ceux et celles qui sont en face de nous, parlaient de
transparence, parlaient de communications avec les citoyens et citoyennes du
Québec. Mais ce n'est pas le cas pour le projet de loi 85. Cela n'a pas
été le cas pour le projet de loi 58, non plus. Cela n'a pas
été le cas pour beaucoup d'autres lois. Ce qui me frappe, c'est
de voir les membres du parti ministériel de cette commission refuser
carrément d'entendre les représentants des organismes
mentionnés dans les motions de sous-amendement.
Je ne comprends pas plus que ces mêmes membres du Parti
libéral, par le biais des ministres concernés et du leader du
gouvernement, aient permis qu'on entende des mémoires ici même
à la commission de l'agriculture, des pêcheries et de
l'alimentation, et vous en étiez témoin, sur la santé des
animaux, pendant que, là, on parle du monde en vie qui est dans les
usines, pendant que, là, on parle des gens qui vont perdre leur emploi,
pendant que, là, on parle de producteurs de betteraves, pendant que,
là, on parle de toutes sortes de personnes, y compris les consommateurs
qui sont touchés par le dossier.
M. le Président, c'est sûr et certain qu'en ce qui me
concerne je vais voter pour ce sous-amendement, sachant très bien,
à moins que je me trompe, qu'il n'y aucun membre du Parti libéral
en face de moi qui va parler pour ou contre cette motion et sachant très
bien aussi que les membres de l'Opposition de cette Assemblée nationale
qui sont en commission parlementaire ici aujourd'hui vont voter pour la motion.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
député de Duplessis. Je reconnais maintenant le
député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, je remarque que le
député de Duplessis, à qui tout le monde aurait pu
permettre de se désintéresser de cette commission puisqu'il est
de la Côte-Nord, loin des activités du sucre, sait à que!
point cette décision du gouvernement peut affecter aussi son territoire
et il a été plus présent à cette commission, plus
actif que le député de Saint-Hyacinthe qui représente la
région où l'usine est située. Le député de
Duplessis, qui était un travailleur d'Hydro-Québec, membre actif
du syndicat, a présenté une motion qui lui tenait à coeur
où il demande que la Confédération de l'Union des
producteurs agricoles, la Fédération régionale de
Saint-Hyacinthe et le Conseil central des travailleurs de Saint-Hyacinthe de la
CSN puissent être entendus. Évidemment, ces gens qui sont dans le
milieu du travail ne font pas partie des préoccupations du
député d'Outremont.
M. Fortier: Ce n'est pas gentil.
M. Garon: Le député d'Outremont,
Outremont-les-Deux-Églises, comme les gens ont l'habitude de dire au
Québec...
M. Fortier: Cela, c'est un indépendantiste.
M. Garon:... où demeurent sans doute 15 % ou 20 % des
députée du Parti libéral...
M. Fortier: Pierre Marc Johnson. Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Garon:... est très éloigné des
préoccupations des gens de la région de Saint-Hyacinthe.
Une voix: Bernard Landry.
M. Garon: C'est pourquoi Ils peuvent rire, s'amuser, boire de
l'eau, faire n'importe quoi sans se préoccuper du sort des 1500
travailleurs qui dépendaient de cette usine. Ils sont
indifférents également aux préoccupations des
consommateurs, des gens qui devront payer leur sucre plus cher. Ils sont
indifférents également à l'égard de toutes les
usines qui utilisent, comme sous-produit, le sucre et qui vont devoir payer
leur matière première plus cher. De la même façon,
ce Parti libéral a augmenté de 5, 4 % l'électricité
cette année, contrairement à toutes les prévisions de ces
fameux experts du ministère des Finances, y inclus le ministre, qui ont
prévu, dans leurs prévisions financières de cette
année, un taux d'inflation de 3 %, alors que nous, avec deux tiers de
recherchistes, nous leur avons démontré que l'inflation ne serait
pas à 3 % cette année, mais beaucoup plus entre 4 % et 5 %. Et
même, entre 4 % et 5 %, nous avons été modestes. J'ai
posé une question au ministre des Finances cette année et il
n'était même pas au courant des chiffres de Statistique Canada qui
démontrent que, depuis le début de l'année
financière, depuis le 1er avril, l'inflation est au-dessus de 5 %. C'est
ce genre de "faiseux" qui, actuellement, analysent l'industrie du sucre par un
genre d'éclair soudain du Saint-Esprit. Ils ne se sont jamais
préoccupés de cette industrie, ils ne connaissent rien de ce
secteur. Le ministre de l'Agriculture, qui n'est même pas présent,
s'occupait du domaine du travail et, aujourd'hui, le temps de le dire, en
quelques semaines, ils ont décidé qu'il fallait fermer
l'industrie du sucre au Québec.
C'est cela, le Parti libéral, parti d'improvisation, parti
dangereux parce qu'incapable d'approfondir une question, parti non
préoccupé des emplois des travailleurs, parti non
préoccupé des cultivateurs. Je vais vous dire une chose: Quand
les semaines et les mois auront passé, vous allez voir que vous allez
finir votre mandat à genoux comme Robert Bourassa l'a fini entre 1973 et
1976. Pourquoi? Parce que vous vous fautez du monde en vie, du monde qui
travaille tous les jours.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député de Lévis, je dois quand même vous rappeler
à l'ordre. J'aimerais que vous vous en teniez au sous-amendement. Si
vous voulez que je vous le lise... Non, vous en avez une copie.
M. Garon: Je vais le lire tout de suite.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous
dépassez le cadre dans lequel on se réunit ici.
M. Garon: Ce que je mentionne, c'est que le député
de Sept-Îles a présenté un amendement pour faire en sorte
que la Confédération de l'Union des producteurs agricoles du
Québec puisse être entendue. C'est l'organisme
représentatif des agriculteurs. De la même façon que nous
avons présenté une motion pour qu'on puisse entendre le Syndicat
des producteurs de betteraves a sucre du Québec, de la même
façon le député de Sept-Îles a
présenté une motion qui inclut la Fédération des
agriculteurs de Saint-Hyacinthe et le Conseil central Saint-Hyacinthe de la
CSN.
Mais non! Quand on a vu les lobbyistes de Sucre Lantic, après
cela, c'est le cap. Les fournisseurs des caisses électorales, c'est
suffisant. On n'est aucunement préoccupé du sort des travailleurs
et des cultivateurs qui gagnent leur vie dans cette industrie. On n'est
aucunement préoccupé, non plus, du sort des consommateurs qui
vont payer leur sucre plus cher et qui le paient déjà plus cher
parce qu'un ministre originaire d'Outremont a pensé qu'une usine de 1500
travailleurs, on fermait cela et on pensait qu'on agissaitl
Imaginez-vous, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, ex-critique en matière de travail! De travail! Il n'a eu
aucune préoccupation pour les 1500 travailleurs. Il dit: Nous, nous ne
voulons pas des paroles, mais de l'action. Fermons une usine, arrêtons de
faire travailler 1500 personnes. Cela, c'est de l'action! On parle de
privatisation. Il n'est même pas question de privatisation. Le
député d'Outremont n'est pas le ministre de la privatisation dans
le
domaine agricole, c'est le ministre de la liquidation, c'est le ministre
des fermetures, c'est le ministre du chômage, c'est le ministre qui va
faire en sorte qu'une foule d'entreprises vont devoir payer le sucre plus cher.
Quand on sait qu'il y a quasiment 50 % de sucre dans la crème
glacée!
Une voix: On va pouvoir vendre notre sirop d'érable.
M. Garon: Je comprends que le Parti libéral continuera
à nous parler de la ferme familiale et que le député de
Prévost continuera à nous parler de ses 225 vaches. Je ne sais
pas combien de porcs, combien d'acrage, mais on sera loin de la ferme
familiale.
M. Forget: Si vous n'avez pas eu de chance dans votre vie, ce
n'est quand même pas de ma faute.
M. Garon: Et pourquoi? Parce que, essentiellement, c'est la
dernière préoccupation du Parti libéral que la ferme
familiale. Il s'en fout. Et le ministre qui est en face de nous ce soir, c'est
le ministre d'Outremont, mieux qualifié dans les pelouses que dans la
betterave, et encore! Et encore, je n'en suis pas certain, parce qu'il y a
beaucoup de gens qui se plaignent actuellement qu'on met des herbicides au
pistolet automatique, alors que les enfants vont se promener sur les pelouses
quelques minutes après sans qu'on établisse aucune
réglementation.
M. Dubois: N'en avez-vous pas fait une dernièrement?
M. Garon: Parce qu'il n'y en avait pas avant.
M. Dubois: Un instant! Un instant! Charriez tant que vous
voulez.
M. Garon: Non, non. Voyez les résultats. On peut vous
donner les chiffres. Il n'y avait pas de chiffres pour les années
passées. Cela a augmenté considérablement cette
année. Il y a eu même des articles dans le journal Le
Soleil.
M. Dubois: Cela n'a pas changé depuis l'an passé et
cela n'a pas changé depuis dix ans.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre,
s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! J'aimerais
aussi qu'on revienne à la pertinence du débat.
M. Garon: Le député de Huntingdon peut parler du
charriage.
M. Dubois: C'est du charriage.
M. Garon: Hein?
M. Dubois: Cela fait 25 ans qu'on fait cela.
M. Garon: I! fait son argent avec les cultivateurs.
M. Dubois: Cela fait 25 ans qu'on fait cela.
M. Garon: Alors, concernant les pesticides dans les villes
maintenant, le député d'Outremont ne dit pas un mot. Les enfants
jouent sur les pelouses arrosées quelques minutes auparavant et il n'y a
rien. Le ministre de l'Environnement se contente de voeux pieux. Et quand on
veut lui demander - lui, il a connu l'Afrique du Sud -qui coupe à la
machette les cannes à sucre en Afrique du Sud, il dit: Je ne veux pas en
parler. Je suis parti de là depuis 30 ans. On dit: Vous pourriez nous
conter votre expérience. C'est le seul qui a connu cela, les pays de
canne à sucre, et il ne veut pas en dire un mot.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député, il vous reste une minute et demie.
(20 h 15)
M. Garon: M. le Président, je veux dire essentiellement
que le Parti libéral n'a pas de parole. Il disait dans sa brochure: Non,
la Raffinerie de sucre du Québec ne fermera pas, parole donnée.
C'est un parti qui n'a pas de parole. C'est un parti qui ne respecte aucun
engagement, qui n'a respecté aucun engagement. Ceux à qui il fera
ses engagements devront estimer que nous ne serons liés par aucune des
paroles données par le Parti libéral, parce qu'un parti qui ne
respecte pas sa parole ne peut pas estimer que le gouvernement qui va lui
succéder considérera que sa parole vaut quelque chose. La parole
du Parti libérai, c'est le néant, cela ne vaut rien et cela
représente le mépris envers la population du Québec, parce
qu'on a un imprimé signé ici: Non, la Raffinerie de sucre du
Québec ne fermera pas, parole donnée. Aujourd'hui, on n'est
même pas capable de faire entendre, conformément à la
proposition du député de Duplessis, la
confédération des agriculteurs, la fédération
régionale des agriculteurs, non plus que les travailleurs,
représentés par leur syndicat la CSN, de Saint-Hyacinthe.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député, vous devriez conclure, parce que le temps est
écoulé.
M. Garon: J'ai conclu.
Des voix: Ha! Ha! ha!
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Ah bon! Très
bien. Alors, j'ai reconnu le député de Verchères.
M. Jean-Pierre Charbonneau
M. Charbonneau: M. le Président, les gens et les
organismes qu'on veut inviter à la commission par la motion du
député de Duplessis sont des gens et des organismes qui ont
demandé à être entendus. Hier, j'ai lu un
télégramme du Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du
Québec qui représente 24 organismes dont la
Confédération de l'UPA, la Fédération de l'UPA de
Saint-Hyacinthe, le Conseil central de la CSN de Saint-Hyacinthe. Tous ces
organismes et bien d'autres - 21 autres - sont membres du front d'aide. Je
crois que ces gens qui ont demandé à être entendus l'ont
fait parce qu'ils sont concernés par le projet de loi, parce que
c'était leur gagne-pain, parce que, dans bien des cas, on était
concerné par la raffinerie de sucre, par cette industrie
agro-alimentaire depuis une quarantaine d'années. On ne peut pas penser
que, du jour au lendemain, un gouvernement va renier sa parole, comme vient de
le rappeler encore une fois le député de Lévis et va, en
plus de renier sa parole, avoir l'effronterie de refuser aux gens de se faire
entendre en commission parlementaire alors que le gouvernement met un X sur
leur emploi. Je voudrais bien voir un des députés ici se faire
enlever "sa job", ne rien dire et accepter que les hommes et ies femmes
politiques lui enlèvent son emploi et s'attendent à ce qu'on ne
dise rien. C'est ce qu'on demande aux gens; Ne dites rien! On vous a promis'
quelque chose pendant la campagne électorale, mais ce n'était pas
important. C'était juste la parole d'un politicien, d'une politicienne
en mal de se faire élire. Maintenant qu'on a le pouvoir, on vous
enlève votre job et ce qu'on ne veut pas que vous fassiez, c'est surtout
de chialer.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député de Verchères, il faudrait vous en tenir à la
pertinence du débat.
M. Charbonneau: M. le Président, je m'en tiens à la
pertinence parce que je vous dis que les gens qui devraient être
entendus, c'est la Fédération de l'UPA de Saint-Hyacinthe et la
confédération de l'UPA centrale. Il y a des gens qui vont
bientôt se retrouver assistés sociaux dans certains cas et qui
auront peut-être affaire aux "boubou-macoutes" du gouvernement. Des gens
à qui on avait promis que le raffinerie de sucre non seulement resterait
ouverte mais qu'elle fonctionnerait douze mois par année et è qui
le premier ministre du Québec avait promis, à l'ITA de
Saint-Hyacinthe, en présence de l'actuel ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche, que les gens sèmeraient au printemps cette
année. Ce qu'on demande, c'est que ces gens-là soient entendus
avant qu'on mette un X et qu'on enterre leur gagne-pain.
M. Forget: Ils ont semé ce printemps.
M. Charbonneau: Pardon? Non, ils n'ont pas semé ce
printemps.
M. Forget: Ils viennent de semer. Veux-tu, on va...
M. Charbonneau: Avec quoi, vous allez me le dire?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaîtl
M. Charbonneau: Je voudrais bien entendre le député
nous expliquer comment on va transformer les betteraves à sucre.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Après.
M. Forget: Ils ont semé du maïs et de l'orge.
M. Charbonneau: Qu'est-ce qu'ils vont faire?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît!
M. Charbonneau: Bien voyons donc!
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Je vais faire une
mise au point. Excusez-moi. Une seconde!
M. Forget: Mais il faut quand même l'informer. Il n'est pas
informé.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Une seconde! Un
instant! Je voudrais faire une mise au point. Quand quelque chose ne fonctionne
pas, prenez des notes et demandez la parole et, ensuite, vous pourrez faire les
mises au point nécessaires. D'accord? Ce sont les règles.
M. Garon: M. le Président...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, je vous
écoute, M. le député de Lévis.
M. Garon:... question de règlement. J'aimerais, si le
député de Prévost a quelque chose à dire, qu'il
prenne la parole. On ne l'a pas entendu parler depuis deux jours.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député de Lévis, je viens de faire la mise au point. M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau; M. le Président...
Une voix: Je vais venir mettre de l'ordre ici.
M. Fortier: On a besoin de toi. Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Charbonneau:... les gens qu'on veut entendre sont des gens qui
sont concernés. Les organismes qu'on voudrait convoquer sont des
organismes représentatifs de ces personnes, de ces travailleurs de la
raffinerie, de ces agriculteurs concernés.
Il y a peut-être des producteurs de betteraves qui ont semé
autre chose au printemps, mais que pensez-vous qu'il va arriver? Dans certains
cas, il y avait des problèmes dans les productions et ils ont
semé. Pensez-vous que le fait d'avoir des producteurs additionnels va
régler le problème pour certaines productions? On déplace
le problème. Pensez-vous que les travailleurs d'usine, eux, vont pouvoir
semer quelque chose?
Il y a des gens qui travaillaient à la raffinerie depuis 30 ans,
25 ans, 20 ans, 15 ans. On met un X sur leur emploi après leur avoir dit
qu'il n'y avait pas de danger. Certains ont voté pour le Parti
libéral de bonne foi parce qu'ils ont cru à la parole
donnée. Aujourd'hui, on ne voudrait même pas donner l'occasion
à leurs organismes représentatifs d'être entendus?
M. Garon: On pourra dire qu'ils ont quand même
été un peu naïfs.
M. Charbonneau: Ils ont peut-être été un peu
naïfs, M. le député de Lévis, mais ils ne doivent pas
nécessairement être pénalisés parce qu'ils ont cru
Robert Bourassa. Très sérieusement, le député de
Duplessis rappelait au ministre délégué à la
Privatisation une lettre qui a été envoyée par les
représentants de plusieurs employés qui ont des fonds de
retraite, qui sont pris avec. Le gouvernement n'a rien inclus dans le projet de
loi à cet égard. Il n'a annoncé aucune modification de son
projet de loi pour tenir compte de cette situation.
On ne plaide pas pour faire de l'obstruction, on ne fait pas encore de
l'obstruction, on n'a pas encore décidé cela. Ce qu'on fait
depuis une journée et demie, c'est demander au gouvernement d'entendre
les gens concernés. On met un X sur 1500 emplois directs et indirects,
on enterre l'industrie agro-alimentaire au Québec et on ne voudrait pas
que les gens viennent se faire entendre! C'est cela qu'on vient nous dire.
C'est aberrant.
Quand les gens demandent d'être entendus pour expliquer les
problèmes qu'ils vivent à l'égard de leur fonds de
retraite, que cela n'a pas de sens, peut-être que notre collègue,
s'il trouve que ce n'est pas assez sérieux pour lui, pourrait retourner
è sa commission. Ces gens veulent qu'on comprenne leurs
problèmes, ils veulent pouvoir l'expliquer aux élus, ils veulent
pouvoir dire ce que cela représente de se retrouver avec des fonds de
retraite qu'ils ne pourront pas utiliser avant des années, quand des
gens ont 19 ans, 11 ans, 15 ans de service. Ces gens avaient fait des
représentations au gouvernement; on n'en retrouve rien dans le projet de
loi. On ne voudrait pas les inviter en commission parlementaire. On nous accuse
de faire de l'obstruction systématique alors qu'on demande que ces gens
soient entendus. Qu'y a-t-il de déplacé et d'outrancier à
demander que des gens qui perdent leur emploi, par une décision d'un
gouvernement qui leur avait promis qu'on maintiendrait leur emploi douze mois
par année, soient invités a une commission parlementaire pour se
faire entendre? Qu'y a-t-il d'immoral et d'inacceptable dans cela? Qu'y a-t-il
d'antiparlementaire dans ces demandes? C'est là le fond du
problème.
On a beau s'amuser, on a beau tenter de durer et durer, de prendre la
vie du mieux qu'on peut, mais n'empêche qu'on a des convictions. J'ai
été élu depuis dix ans pour représenter ces gens.
En campagne électorale, j'ai fait face à un adversaire politique
qui leur a dit, partout dans le comté: Ne vous inquiétez pas, les
libéraux, c'est le parti de l'emploi, pas du chômage; la
raffinerie va fonctionner douze mois par année. Qu'est-ce qu'on a?
Fermeture de la raffinerie de sucre quelques mois après. Cela ne faisait
pas six mois qu'ils avaient élu le gouvernement libéral que, paf,
la guillotine tombe sur la raffinerie de sucre, sur les emplois, sur la parole
donnée. C'est cela qu'on fait. Ce qui est immoral et inacceptable, c'est
le comportement du gouvernement, pas le comportement de l'Opposition dans ce
débat.
M. le Président, convoquer l'UPA, convoquer la CSN, c'est
permettre à des travailleurs d'usine à qui on avait promis des
choses, c'est permettre à des agriculteurs à qui on avait promis
des choses d'être entendus parce qu'on met leur emploi dans un cercueil
et qu'on enterre ce cercueil avec de grands sourires et qu'on va aller se faire
applaudir, demain et après-demain, au conseil général du
Parti libéral.
C'est cela qui va arriver, M. le Président. Le ministre de
l'Agriculture va se flatter les bretelles et le ministre
délégué à la Privatisation va arriver devant ses
délégués et ses militants, demain et après-demain
et va dire. Aie, on est bon! On a
commencé le processus de privatisation. On liquide la raffinerie
de sucre. On met notre parole dans la poubelle. On met 1500 emplois directs et
indirects dans le cercueil et allons-y pour le développement
économique du Québec. C'est cela qu'on va faire. Je vous gage, M.
le Président, qu'ils vont se faire applaudir, à part cela. C'est
ce qu'il y a de plus épouvantable. Ils vont se faire applaudir pour
cela, M. le Président. Comprenez-vous cela?
M. le Président, si c'était cela, s'il fallait, pour faire
tout cela, engager des bénévoles à 400 $ par jour, ce
n'était pas nécessaire.
M. Garon: Débarquez.
M. Charbonneau: Je ne sais pas combien a coûté ce
dépliant électoral. Je sais une chose, par exemple. C'est qu'il
était comptabilisé dans les dépenses électorales.
C'est marqué ici: "Autorisé et payé par M, Guy Roy, agent
officiel de Michel Chapdelaîne, imprimé par Imprimerie Saint-Denis
Inc., Saint-Denis-sur-Richelieu. " Ce n'est pas un torchon. C'était
votre dépliant électoral et vous crachez dessus, aujourd'hui.
Vous dites: Ce n'est pas important. Mais là, le candidat libéral
dans Verchères - je ne sais pas s'il va être élu à
la prochaine convention parce qu'il a fait un péché grave, lui -
a compromis son chef et son parti. Il a amené son chef à dire
qu'il était d'accord avec lui et il a amené le président
de la commission de l'agriculture d'aujourd'hui à dire, à
l'époque, qu'il était d'accord, M. le Président. C'est
pour cela qu'on pense qu'on doit entendre ces gens-là et qu'on doit
donner à leurs organismes représentatifs...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député, votre temps est écoulé.
M. Charbonneau:... l'occasion - je termine - d'être
entendus. C'est le minimun. Quand on condamne une personne à mort, M. le
Président, on lui donne au moins la chance de se faire entendre avant de
se faire couper le cou. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
député de Verchères.
Je cède la parole à M. le ministre.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: M. le Président, qu'est-ce qu'on ne peut pas
entendre dans cette Chambre, des fois, avec un peu de trémolo dans la
voix, du côté de l'ex-ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation qui répète des
faussetés lorsqu'il nous dit qu'il y a 1500 employés à la
raffinerie. C'est drôle, on a fait le compte et il y en avait 93 quand on
est arrivés. Il n'y en a jamais eu 1500...
M. Garon: M. le Président, question de
privilège.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît! Non, non...
M. Fortier:... à la raffinerie. On vous a laissés
parler tous les deux. On a bien le droit de répéter...
M. Garon: Je n'ai jamais dit cela. Arrêtez donc de
mentir.
M. Fortier: Maïs voyons, c'est vous qui dites des menteries
tout le temps. Vous mentez à plein nez.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Un instant!
M. Garon: J'ai dit...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Un instant! Un
instant, messieurs.
M. Garon:... dans les emplois directs et indirects. Arrêtez
de mentir!
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs...
M. Garon: Ce n'est pas parce que vous venez d'Outremont...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Messieurs, s'il
vous plaît!
M. Garon:... que vous avez le droit de mentir à tout le
monde. Vous mentez.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): À l'ordre,
s'il vous plaît!
M. Charbonneau: M. le Président...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il y a des
choses, à un moment donné, vous devez prendre des notes et, quand
vous reviendrez, vous ferez les mises au point nécessaires, mais laissez
parler...
M. Garon: II a menti au peuple.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît!
M. Fortier: Question de règlement, M. le
Président.
J'ai écouté attentivement le député de
Verchères...
M. Garon: Ne venez pas nous traiter de fascistes!
M. Fortier:... qui a fait un discours véhément,
passionné. Je l'ai écouté avec beaucoup d'attention. J'ai
pris des notes et, là, je voudrais répondre. Je voudrais qu'on
m'écoute de la même façon que j'ai écouté le
député de Lévis et que j'ai écouté le
député de Verchères. Je ne l'ai pas interrompu. Je
n'aimais pas tout ce qu'il nous disait, mais, au moins, on est en
démocratie et, si le député de Lévis veut accepter
la démocratie, nous de ce côté-ci, on y croit à la
démocratie. On vous laisse parler, mais, quand vient notre temps de
parler, écoutez-nous. On a des choses a vous dire et vous allez les
entendre même si vous n'aimez pas cela.
M. Charbonneau: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: M. le Président, je suis d'accord avec le
ministre. On va l'écouter, mais la seule chose que je voudrais lui dire,
à ce moment-ci, c'est qu'on n'a jamais parlé de 1500 emplois
à la raffinerie. On a toujours dit qu'il y avait l'industrie du sucre de
betterave qui comprend les gens de la raffinerie...
M. Fortier: Bon.
M. Charbonneau:... les producteurs agricoles, les camionneurs,
les gens qui sont concernés par cette industrie. C'est cela qu'on a dit.
Jamais on n'a prétendu qu'il y avait 1500 emplois dans l'entreprise et
la botte qui est près de la Transcanadienne.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord.
M. Fortier: Le point est fait, M. le Président. Si on
s'entend qu'il y avait 93 employés à la raffinerie, on s'entend.
Sur le décompte, à savoir comment il y avait d'agriculteurs,
c'est assez facile à savoir. Il y en avait, je crois...
Une voix: C'était 103.
M. Fortier:... 103 la dernière année. Si vous
voulez extrapoler à partir de cela, je vous laisse la
responsabilité de le faire à partir de 103 agriculteurs plus 93
employés, ce qui fait 196. Si vous voulez multiplier par 15 après
cela, je vous laisse la responsabilité de faire la multiplication.
M. le Président, nous sommes ici de bonne foi autour de la table
et je suis d'accord avec le député de Verchères qu'il y a
des problèmes humains qu'il faut aborder avec beaucoup de compassion. Je
crois que l'intervention du député de Lévis n'est pas
à la hauteur de l'expérience qu'il a du fait qu'il a
oeuvré à l'intérieur d'un Conseil des ministres, du fait
qu'il est un personnage respecté, me dit-on, à l'intérieur
de son parti. Je ne comprends pas pourquoi il s'entête à faire des
accusations ou des attaques personnelles comme de laisser penser, parce que je
viens du comté d'Outremont, que les gens d'Outremont n'ont pas de coeur,
que ces gens sont incapables de politiques sociales et de considérations
pour défendre l'intérêt public. (20 h 30)
M. le Président, est-ce que le député de
Lévis se rend compte que, durant neuf ans, il a oeuvré au Conseil
des ministres avec six ministres qui venaient d'Outremont? Ces gens
étaient les responsables de la politique sociale et du
développement économique du Québec; j'ai nommé des
gens comme Bernard Landry, responsable du développement
économique. Bernard Landry vit à Outremont. Le docteur Laurin qui
était responsable du développement social pour le Parti
québécois, lui aussi demeurait à Outremont jusqu'à
récemment. M. Léonard qui a été le responsable de
l'établissement des MRC et des politiques municipales, lui aussi, habite
encore Outremont. Jacques-Yvan Morin, votre expert constitutionnel, demeurait
à Outremont et il y demeure encore. Jacques Parizeau, votre ministre des
Finances. Il m'en manque un il y en a un sixième.
M. Perron: Est-ce que ce sont vos électeurs?
M. Fortier: Ce sont tous mes électeurs. Des gens qui, je
le crois, ont voté pour moi, en toute honnête, des gens qui
indiquent qu'il existe à Outremont... Je reconnais le mérite de
ces gens-là, mais je n'accepte pas du tout ces accusations personnelles
envers le Conseil des ministres. Je vous dirai que j'ai divergé
d'opinion avec M. Parizeau, mais j'ai le plus grand respect pour ce grand
homme, pour ce bon homme, pour ce professeur d'université.
Je crois qu'on n'ira nulle part si, de part et d'autre, on s'accuse de
ne pas être en mesure de s'élever au-dessus de nos partis
politiques pour servir la population. Je ne comprends pas pourquoi le
député de Lévis s'acharne à faire ce genre
d'accusations, d'autant plus que, dernièrement, il a utilisé le
même argument en réplique au discours sur le budget du ministre
des Finances. Il a eu droit à des critiques acerbes de la part de la
presse économique. On a dit que cela ne permettait pas au Parti
québécois de s'élever au niveau d'un parti responsable,
surtout qu'on s'attend toujours, de la part d'un critique financier, à
une certaine rigueur dans l'interprétation des chiffres et dans les
critiques qu'il fait.
M. le Président, j'oserais croire que le
député de Lévis qui, pendant longtemps, a fait rire
les foules et qui croyait que, parce qu'il était capable d'attaques et
de faire rire les foules, on voterait pour lui dans une course au leadership, a
dû s'apercevoir lui-même que, si les gens riaient de ses farces,
lorsqu'est venu le temps de choisir un chef de parti, ils ont choisi quelqu'un
d'autre, parce qu'ils voulaient avoir quelqu'un de responsable pour
représenter le parti dont il est lui-même membre.
Ayant dit ces choses, je voudrais aborder un sujet important, celui des
fonds de retraite des employés qui, malheureusement, perdront leur
emploi à la suite de la décision que nous avons prise. Le
député de Lévis disaitî Ce n'est pas
réellement une privatisation. Je l'ai dit et je suis tout à fait
d'accord avec cela; je ne m'entête pas sur cela. Cette décision
fait suite à un assainissement des finances publiques. De fait, je l'ai
toujours dit, la première vraie privatisation, c'est la privatisation de
SOQUEM et le lancement de Cambior. Nul ne me contestera si je dis que, la
privatisation de SOQUEM et le succès, j'en suis sûr, du lancement
de ce régime d'épargne-actions et de quelque 150 000 000 $ en
actions qui permettront le lancement de Cambior favoriseront le
développement économique du Québec et de l'Abitibi en
particulier.
C'est certainement ce genre de privatisation que nous avions en
tête, mais il est évident que, à la suite de nombreuses
décisions malheureuses prises par le gouvernement
précédent, je pense en particulier... Vous voulez parler de perte
d'emplois? Je vais vous parler de perte d'emplois. Vous avez investi quelque
400 000 000 $ ou 500 000 000 $ dans la Société nationale de
l'amiante et, en ce moment, je crois qu'on a perdu entre 1500 et 2000 emplois
dans l'industrie de l'amiante, malgré le fait que vous y ayez investi
entre 400 000 000 $ et 500 000 000 $. Si vous voulez parler de perte d'emplois,
on peut vous en parler. Cela a été pour les contribuables du
Québec un coût bien plus élevé que celui dont nous
discutons présentement.
M. Garon: Parlez-en à M. Parizeau... M. Fortier: M. le
Président...
M. Garon:... mon collègue sur le dossier du sucre.
M. Fortier: Oui, c'est cela. Alors que ces gens-là
étaient supposés être solidaires lorsqu'ils faisaient
partie du Conseil des ministres, maintenant que les décisions sont
prises, l'un qui a quitté le Conseil des ministres dit a, l'autre dit b
et l'autre dit c. On se demande de quelle façon ce Conseil des ministres
pouvait fonctionner et on s'aperçoit que, bien souvent, le
député de Lévis a pu bousculer certains de ses
collègues et aller au Conseil du trésor pour obtenir des fonds,
alors que le public aurait été mieux servi s'il y avait eu des
gens au Conseil du trésor pour dire: Non, M. le député de
Lévis. Malheureusement, ils n'ont pas dit non et ce sont les
contribuables qui paient.
M. le Président, dans notre politique de privatisation, si vous
vous êtes donné la peine de l'étudier - je suis sûr
que vous l'avez fait parce que je sais que vous êtes une personne
très responsable - nous avons dit très clairement que nous
voulions donner un traitement équitable pour ceux qui pourraient
souffrir des rationalisations qui seraient le fait des décisions que
nous prendrions. En particulier, à la page 35 de notre politique sur la
privatisation des sociétés d'État, je lis: "Le
gouvernement s'assurera que, dans le cadre des rationalisations qui pourraient
s'imposer, les employés, les communautés et, le cas
échéant, les fournisseurs seront traités
équitablement. "
De fait, c'est ce que nous avons cherché à faire depuis le
jour où nous avons pris la décision de fermer la raffinerie de
sucre de Saint-Hilaire. Le député peut bien dire: Mais le projet
de loi ne parle pas de ces cas. C'est vrai parce que nous avons indiqué
très clairement que c'est notre responsabilité de nous occuper
des employés qui vont perdre leur emploi, de leur donner des primes de
départ, de régler leur fonds de retraite. C'est la
responsabilité du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation de trouver des solutions. Nous avons octroyé des budgets
pour cela; je crois que c'est 2 500 000 $ pour recycler les producteurs
agricoles dans d'autres types de cultures. Nous avons octroyé 1 500 000
$ pour payer les compensations, les autres primes et régler les autres
problèmes reliés au départ des employés de la
raffinerie de sucre. Nous avons engagé une firme de spécialistes
pour permettre à ces travailleurs mis à pied de pouvoir plus
facilement se chercher un emploi en bénéficiant de l'aide d'un
conseiller.
Je peux vous dire qu'au moment où on se parle 34 personnes sont
è la recherche active d'un emploi, 13 ont pris leur retraite et 14 ont
trouvé un emploi. Ce n'est déjà pas si mal, quelques mois
après que la décision a été prise. Il est vrai - je
le reconnais - que les efforts devront continuer pour trouver des emplois
à ces gens et que, de fait, dans les cas où il y a des
problèmes avec les fonds de retraite, nous devrons trouver des
solutions. De fait, nous avons trouvé des solutions dans plusieurs
cas.
À ma connaissance, plusieurs cas ont été
réglés, mais il reste deux problèmes à
régler. J'ai une lettre ici qui indique justement que le
problème est dans le cas des employés de plus de 45 ans. Si le
député connaît la loi, il sait pertinemment que, lorsqu'un
travailleur, un employé de quelque compagnie que ce soit a plus de 45
ans, la loi sur les régimes de retraite dit très clairement qu'on
ne peut pas reprendre ses avoirs et les investir ailleurs. C'est malheureux,
mais c'est ainsi que la loi a été faite. C'est également
vrai pour les employés de la Raffinerie de sucre du Québec.
Le problème qui se pose, c'est pour les travailleurs qui ont plus
de 45 ans, mais nous avons quand même offert, dans certains cas, de payer
certains bénéfices, ce qui a été accepté
dans au moins six cas. Il reste deux cas à régler et ce sont les
deux cas auxquels vous avez fait allusion, soit celui des employés de 45
ans et plus et celui des employés de plus de dix ans de service.
D'ailleurs, il y a 350 000 autres travailleurs qui sont dans la même
situation, qui ne peuvent retirer en main propre les investissements qu'ils ont
faits dans leur fonds de retraite.
Nous avons fait la proposition que la Raffinerie de sucre du
Québec paye comptant les intérêts accumulés. Cela
signifie 20 000 $ dans chacun des cas. Nous avons permis de retirer
jusqu'à 25 % des cotisations et, en plus, nous leur payons une
année de salaire. Pour le reste, c'est-à-dire les 75 % des
cotisations qui ont été payées par les employés,
nous leur donnerons une pension différée. Il y avait six cas
semblables. Dans quatre de ces cas, les employés ont accepté la
proposition que nous leur avons faite et dans deux cas, cela a
été refusé. J'imagine que les discussions continuent. Ces
deux personnes nous font des représentations; Mme la
députée nous a fait part d'une lettre qu'elle avait reçue.
Nous allons continuer de discuter avec ces gens. C'est certain que la
décision devra être prise à la lumière des offres
que nous avons faites à tous les employés et aux six personnes
qui ont des cas semblables, en particulier. La proposition que nous leur avons
faite a été acceptée.
Je le répète au député: La proposition que
nous avons faite a été acceptée dans quatre cas sur six.
C'est donc dire que la proposition que nous avons faite n'était pas tout
à fait inacceptable puisque quatre employés sur six l'ont
acceptée. Mais vous comprendrez qu'en dépit de notre
volonté pour régler ces problèmes d'une façon
satisfaisante - si l'ex-ministre m'écoutait, il comprendrait, il saurait
que, dans ces cas, ce n'est pas sur la place publique - même si on
faisait venir ces gens ici, aujourd'hui, il n'est pas dans le meilleur
intérêt de ces employés, ni dans l'intérêt
public, ni dans celui du gouvernement de négocier ces choses sur la
place publique.
Contrairement aux allégations du député de
Lévis, l'ex-ministre de l'Agriculture, je réponds à la
demande de compassion que faisait le député de Verchères
en lui disant: Vous avez raison, vous défendez ces gens et je dis que
vous faites votre travail. Bravo! Je crois que les députés qui
font face à des situations comme celles-là, qui voient dans leur
comté des gens qui sont en butte à des difficultés
à la suite d'une fermeture, doivent faire des représentations. Le
député a fait des représentations et je lui dis bravo. Je
lui dis en même temps que nous, du gouvernement, n'avons pas attendu
qu'il nous fasse ces représentations. Nous sommes sensibles aux
représentations qu'il nous fait, mais d'autres nous en ont fait et nous
avons, dans notre politique, cette détermination de régler ces
cas de la façon la plus équitable possible. De fait, je dois dire
que les avocats, les experts en relations de travail que nous avons
conviés à nous aider pour cette fermeture, ont fait un excellent
travail.
Dans la plupart des cas, le syndicat et les employés nous ont dit
qu'ils étaient satisfaits des services que nous leur avons offerts et
des conditions qui leur ont été offertes. Ceci fait justement
suite à la politique qui nous inspire et qui veut qu'en dépit du
fait qu'il nous fallait prendre une décision difficile il nous faut
aussi régler ces cas, les cas individuels, de la façon la plus
humaine possible. Là-dessus, je rejoins les représentations du
député de Verchères et je voudrais l'assurer que la
politique qui nous inspire, la politique du gouvernement, est une politique de
développement économique. Même si cela peut être
difficile pour certaines personnes, dans une région donnée, qui
sont touchées par une telle fermeture, je voudrais l'assurer que notre
politique d'ensemble vise, justement, à assurer de meilleures conditions
économiques. Je ne crois pas, pour ma part, qu'on doive maintenir en vie
artificiellement une compagnie qui est en faillite technique depuis deux ans,
selon les évaluations qui ont été faites de toutes
parts.
On parle des experts du ministre des Finances. J'ai ici en main un
document qui vient du secrétaire associé au Développement
économique - il ne faisait pas partie du ministère des Finances -
et qui arrivait aux mêmes conclusions. Je peux vous citer ce document qui
date de juin 1985. Il a été produit par quelqu'un qui a
été l'attaché politique, à un moment donné,
de M. Duhaime, mais qui ne travaillait pas pour M. Duhaime au moment où
le document a été écrit et qui dit ceci: En termes
d'approche...
M. Charbonneau: Qui est-ce?
M. Fortier: C'est M. Ypperciel. Il dit: "En termes d'approche, il
ne s'agit plus d'une
politique de support à la production de la betterave, mais d'un
projet industriel qui, à l'aide du fonds consolidé, essaie de
déplacer un producteur privé de sucre raffiné et où
l'approvisionnement en betteraves à sucre sert de mesure d'appoint aux
importations de canne à sucre de la Raffinerie de sucre du
Québec". Il fait une évaluation du dossier et je cite: "Beaucoup
de gens pensaient que le Brésil, Cuba et autres substitueraient de
façon massive leur pétrole importé par du méthanol
produit à même la canne à sucre, avec comme
conséquence une hausse constante de l'ordre de 0, 02 $ par année
du prix du sucre et cela, malgré une stagnation de la demande. "
Autrement dit, il nous dit qu'en 1979, lorsqu'on avait lancé le
développement de la raffinerie de sucre, certaines personnes avaient
fait des hypothèses basées sur le prix du pétrole, croyant
qu'à cause du prix élevé du pétrole des pays comme
le Brésil, Cuba et autres utiliseraient du méthanol et que ceci
pourrait créer un marché pour la betterave à sucre en
particulier, pourrait créer un marché pour la raffinerie de
sucre. Malheureusement, à la suite de la baisse du prix du
pétrole et à la suite d'autres conditions internationales, ces
conditions ne se sont pas matérialisées. Il arrive à peu
près aux mêmes conclusions que nous en disant que les
hypothèses, en 1984, étaient que le prix du sucre raffiné
était de 0, 28 $ la livre. Ce n'est pas le cas dans le moment. (20 h
45)
Je crois que, sur le fond du débat, on s'entend pour dire que les
conditions ont changé. Peut-être qu'en 1979 les gens escomptaient
des conditions favorables au développement de la raffinerie; ce n'est
pas le cas. On a fait, à un moment donné, des hypothèses,
on a prévu un développement qui devait coûter quelque 35
000 000 $. Ensuite, cela a été 43 000 000 $ et, lorsque la
construction a été finie, cela a été 58 000 000 $.
Ceci a été ajouté au...
Le Président (M. Tremblay, Ibervïlle): Je m'excuse.
Un instant, M. le ministre. Question de règlement. Je vous
écoute, M. le député de Verchères.
M. Charbonneau: Je ne voudrais pas interrompre le ministre. Comme
je l'ai dit tantôt, je respecte son droit de parole. Je veux simplement
lui demander s'il accepterait de déposer le document à la
commission; auquel cas, on n'aurait pas besoin d'avoir recours au
règlement. Je pense que cela pourrait être utile.
M. Fortier: C'est une page et quart et ce n'est pas mon document.
C'est juste une page d'analyse. Cela me fera plaisir.
M. Charbonneau: Cela me fera plaisir.
M. Fortier: C'est semblable à l'analyse que nous avons
faite.
M. Charbonneau: D'accord, mais vous êtes d'accord pour
qu'on en ait des copies?
M. Fortier: Oui, oui. Je vais vous le donner.
M. Charbonneau: Très bien.
M. Fortier: Je disais simplement cela pour indiquer que, dans le
fond, ce ne sont pas juste les experts du ministère des Finances, c'est
le Secrétaire général associé au
développement économique, ce sont des gens d'autres
ministères. Ce sont des gens qui se sont penchés sur les
hypothèses et qui arrivaient à peu près aux mêmes
conclusions que nous, quoique eux concluaient... Ils n'avaient pas encore
conclu; ils disaient: "Compte tenu de ce qui précède et des
analyses faites de part et d'autre dans ce dossier, je pense qu'il est
essentiel d'ouvrir des alternatives décisionnelles. Pour le secteur
privé, la raffinerie de sucre possède des actifs et un
achalandage qui, se monnayent d'autant que l'on se situe dans un marché
stagnant. Par contre, si, pour différentes raisons, le ministère
responsable de ce dossier refuse toute négociation avec des
intérêts privés - je crois qu'on avait en tête que le
député de Lévis ne serait peut-être pas enclin
à négocier avec le secteur privé - il serait
intéressant de demander au promoteur du projet d'évaluer
l'opportunité de se départir de certains titres de son
portefeuille pour financer les investissements. "
De toute façon, je voulais simplement faire la preuve, M. le
Président, que différentes personnes se sont penchées sur
le dossier, différents ministres des Finances de deux formations
politiques se sont penchés sur le dossier, différents
fonctionnaires et, dans ce cas-ci, c'est plutôt un attaché
politique d'un ministre qui s'est penché sur le dossier. Ceux qui l'ont
fait avaient une tête sur les épaules et, malgré la
difficulté d'arriver à des conclusions difficiles, ils l'ont fait
et nous avons pris cette décision.
Je rejoins le député de Verchères: lorsque vient le
temps de régler des problèmes humains, des problèmes de
mises à pied, il faut le faire avec beaucoup de compassion. Je ne crois
pas que c'est en faisant parader ces gens ici en commission parlementaire pour
discuter de leur cas particulier que nous allons régler leurs
problèmes, mais je crois et je veux donner l'assurance à la
commission que, dans le moment, c'est surtout le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation aidé des experts du
ministère des Finances, qui est en train de régler ces
cas-là.
En conclusion, je voudrais simplement assurer les membres de la
commission que, malgré le fait que nous refuserons de voter pour la
motion, nous allons faire tout notre possible pour régler ces cas qui
nous sont présentés de la façon la plus humaine possible
et dans le meilleur intérêt du Québec. Je vous
remercie.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
ministre. Si vous voulez bien, on va déposer le document à la
commission. On va en faire faire une photocopie pour l'intégrer au
procès-verbal de la commission.
M. Fortier: Je ne sais pas si c'est pour l'intégrer au
procès-verbal de la commission, mais c'est certainement pour...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Normalement, tout
document déposé à la commission doit être
intégré au procès-verbal de la commission.
M. Charbonneau: Cela me fera plaisir, d'ailleurs, pour les fins
du procès-verbal de la commission, de déposer les documents que
j'ai déjà offert de déposer à l'Assemblée
nationale, mais qui n'ont pas trouvé preneur, M. le Président,
sauf chez les députés ministériels. Ce sera pour les
archives, M. le Président, pour ceux qui voudront consulter.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Je ne crois pas que
ce soit pertinent, des dépliants électoraux concernant...
M. Charbonneau; Non, je ne parle pas des dépliants, M. le
Président, je parle des documents gouvernementaux.
M. Fortier: Mais on n'en a pas demandé le
dépôt.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous parlez de
documents gouvernementaux?
M. Fortier: II n'y a personne qui en a demandé le
dépôt. Le règlement dit qu'il faut que cela soit
demandé.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Cela, c'est vrai.
Personne ne l'a demandé.
M. Charbonneau: On s'arrangera pour que ce soit demandé,
M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. Vous
parlez de quels documents en particulier?
M. Charbonneau: M. le Président, je peux vous les citer:
les documents du ministère des Finances, de la direction de la
raffinerie de sucre, le mémoire de l'ancien ministre de l'Agriculture,
les analyses du ministère des Finances, mais également les
contre-analyses du ministère de l'Agriculture et de la raffinerie de
sucre.
M. Fortier: II peut bien les déposer.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vu que c'est le
président qui décide, j'accepte que vous déposiez les
documents.
M. Charbonneau: Très bien, M. le Président. Je vous
en ferai faire des copies parce que j'en ai une seule copie pour mon
utilisation. Aussitôt que possible, je m'arrangerai pour que les membres
de la commission en aient tous des copies.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Très bien.
Maintenant, j'ai reconnu le député de Dubuc.
M. Hubert Desbiens
M. Desbiens: Évidemment, je n'ai pas grand espoir que le
ministre et la députation acceptent davantage le sous-amendement qui a
été présenté par mon collègue. Cependant,
j'ai écouté le ministre délégué à la
Privatisation et j'ai surtout bien entendu sa conclusion: Tous ceux qui ont une
tête sur les épaules, on les a écoutés. MM. les
députés, parlez! Défendez votre dossier, défendez
votre population. Bravo! On trouve que vous parlez bien. Mais nous, nous
liquidons! Nous liquidons l'engagement pas seulement d'un de nos candidats,
nous liquidons l'engagement d'une série de candidats.
J'ai ici un journal qui est sans doute connu en régions,
L'Oeil régional, qui faisait un reportage le 12 novembre 1985. On
y voit, d'ailleurs, des photographies des candidats du Parti libéral de
Saint-Hyacinthe, de Verchères et de Richelieu.
Dans son article, au fait, dans son reportage, le journaliste Marc
Ledoux dit que le chef du parti - c'est M. Bourassa - a lancé le
programme global qu'ils entendent mettre de l'avant dans leur région.
Plus loin dans l'article, il dit que ce programme libéral a, d'ailleurs,
été bâti à la suite d'une longue consultation entre
les candidats locaux et les autorités du parti. Il dit que la liste des
engagements est contenue dans le document de base du programme libéral,
"Maîtrisons l'avenir".
Quel est l'avenir, pour tous ceux et pour toutes celles qui sont
touchés par cette fermeture de la Raffinerie de sucre du Québec?
Le ministre tente de nous faire croire qu'il s'agit d'un nombre très
limité. Ce n'est pas important, plus ou moins important par rapport
à leur politique. Le gouvernement va économiser 18 000 000 $ en
quatre ans. Les consommateurs, eux, qui sont les mêmes citoyens du
Québec, vont en
payer autant par année, par exemple, en augmentation du prix du
sucre.
Ces gens, le ministre a tenté de les ramener à 93, selon
ce qu'il nous dit. Eh bien, j'ai un document sous les yeux, une
déclaration commune des membres du Front d'aide pour la Raffinerie de
sucre du Québec qui comprend, comme mon collègue de
Verchères l'a souligné tantôt, 24 organismes
différents. Il dit ceci: "Si les associations et les individus qui
composent le Front d'aide pour la Raffinerie de sucre du Québec ont
décidé d'unir leurs voix et leurs efforts, c'est beaucoup
à cause de la conscience qu'ils ont tous de l'importance dans
l'économie régionale et même québécoise de la
présence de cette société d'État et de la
production agricole qu'elle a fait naître, il y a maintenant plus de 40
ans. La raffinerie de sucre emploie actuellement 93 personnes à temps
plein et environ 200 autres durant les quatre mois d'automne, ce qui signifie
en fait 50 emplois permanents additionnels. 93 plus 50, cela fait 143. Ces 143
emplois permanents engendrent ailleurs 350 emplois indirects permanents selon
le ratio habituellement utilisé de deux à deux emplois et demi
indirects pour un emploi direct en usine. Dans ces emplois indirects, se
trouvent, entre autres, les emplois dans le camionnage qui, sur une base
permanente, se chiffrent à au-delà de 40. " On n'est plus
à 93, on est rendu à 143, on est rendu à 413, M. le
Président. On est rendu è 453, en fait. "En 1983 - je continue la
lecture du document - 368 producteurs agricoles ont produit de la betterave
sucrière. Si l'on tient compte qu'un emploi dans la grande culture
crée, selon le modèle intersectoriel établi par le Bureau
de la statistique du Québec, 1, 73 emploi indirect, on doit donc ajouter
aux emplois agricoles 636 emplois additionnels indirects. Au total - ce n'est
pas moi qui parle, je lis toujours le document du Front d'aide à la
Raffinerie de sucre du Québec - c'est donc environ 1500 emplois directs
et indirects qui sont en cause lorsqu'on parle de la fermeture de la raffinerie
de sucre et de l'arrêt de la production de betterave sucrière.
"
Je poursuis la lecture: "Certains disent que, dans le cas des
producteurs de betterave, cela ne serait pas dramatique, puisque ceux-ci se
recycleraient dans d'autres productions - j'ai, d'ailleurs, déjà
entendu cela ici - mats on oublie alors la situation particulière dans
les productions alternatives comme le maïs-grain. Dans ce domaine, entre
autres le plus susceptible d'attirer les anciens producteurs de betterave, un
afflux trop grand de nouveaux producteurs risquerait d'engendrer des surplus
trop importants et, donc, des effets négatifs sur les prix acculant
ainsi à la faillite plusieurs agriculteurs. D'autre part, il faut
prendre en considération les pertes énormes que subiraient les
dizaines de producteurs qui se retrouveraient pris avec des équipements
de culture de betterave devenus inutilisables bien que presque neufs. Pour
plusieurs, ces pertes signifieraient là aussi la faillite. "
Le document continue: "Parmi les autres données sur l'impact
économique de la raffinerie de sucre, notons qu'annuellement
l'entreprise de Mont-Saint-Hiiaire paie plus de 8 000 000 $ en salaires et
dépenses, en bonne partie dans la région, entre 20 000 000 $ et
25 000 000 $ en achat de biens et services, le tout avec un chiffre d'affaires
annuel de 40 000 000 $, et la ville de Mont-Saint-Hilaire perçoit des
taxes diverses pour 225 000 $. " Le document dit finalement: "Par ailleurs,
rappelons, encore une fois, que la disparition de la raffinerie de sucre
provoquerait un effet à la hausse sur le prix du sucre payé par
les consommateurs québécois. Le retour de la raffinerie de sucre
sur le marché de la commercialisation en 1982 a eu des effets
bénéfiques pour les consommateurs québécois qui ont
épargné annuellement, depuis, une quinzaine de millions. Ces
avantages seraient encore plus appréciables pour l'ensemble du
Québec si la raffinerie pouvait opérer à pleine
capacité dans une situation normalisée où une politique
canadienne de régularisation des prix permettrait la création de
milliers d'emplois additionnels tout en garantissant les meilleurs prix aux
consommateurs. "
Si ces gens-là ne disent pas la vérité, si ces 24
organismes dont la Confédération de l'UPA du Québec, la
Fédération de l'UPA de Saint-Hyacinthe et le Conseil central de
la CSN de Saint-Hyacinthe ne disent pas la vérité, si les
chiffres qu'ils avancent ne sont pas exacts, il serait facile pour le ministre
de leur dire ici en commission parlementaire qu'ils faussent les
données. II serait facile pour le ministre d'en faire la
démonstration face à leurs prétentions. C'est cela qu'on
demande. On a demandé d'entendre les gens qui étaient
responsables des deux thèses mises en présence, celle du Syndicat
des producteurs de betteraves sucrières et celle de Lantic. On a
demandé de rencontrer pour faire la lumière l'association de
protection des consommateurs. (21 heures)
On demande maintenant que trois des organismes qui font partie du front
d'aide puissent venir exprimer leurs appréhensions, faire part de leur
vision de la situation et de ce qu'ils offrent, eux, comme possibilités.
Le ministre et les députés disent: Non, nous, on liquide. On
liquide parce qu'on va économiser 18 000 000 $ sur quatre ans alors que
les consommateurs, ces mêmes Québécois qui vont avoir 18
000 000 $ de moins de taxes, je suppose, vont payer en une seule année
ces mêmes 18 000 000 $ en augmentation du prix du sucre puisque je
maintiens que la concentration et le quasi-
monopole qu'on va aider à créer par cette privatisation
vont entraîner pour le consommateur des augmentations de prix très
importantes.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député, il faudrait conclure.
M. Desbiens: Je termine là-dessus, M. le
Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord.
M. Desbiens: Je rappelle toujours qu'un cent d'augmentation de la
livre de sucre au consommateur, c'est 6 500 000 $ de plus payés par ces
mêmes contribuables pour lesquels le ministre nous dit qu'il va
économiser 18 000 000 $ en quatre ans, c'est-à-dire que les
consommateurs vont payer ces 18 000 000 $, ils vont payer trois fois plus juste
dans les quatre premières années et juste pour un cent.
Le Président (M. Tremblay, Iberville); Alors,
merci...
M. Desbiens: C'est bien plausible que, si le prix du sucre
augmente plus considérablement, les consommateurs et consommatrices du
Québec vont se retrouver avec des factures et qu'ils auraient
aimé bien mieux payer 18 000 000 $ de taxes pour quatre ans - cela fait
environ 4 000 000 $ par année - que de payer l'augmentation sur le
sucre, comme on le laisse entendre, et qui va certainement se produire à
la suite de cette privatisation.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
député de Dubuc.
Maintenant, nous allons faire la mise aux voix de...
Oui?
M. Garon: Pas sur les consommateurs.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): J'ai cela ici.
M. Garon: Pas sur les consommateurs, là?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): On est sur le
sous-amendement.
M. Charbonneau: II y avait l'amendement. Ce que le
député de Lévis fait, c'est...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Mais il faut
régler le sous-amendement.
M. Charbonneau: D'accord. Mais ce qu'il faisait, c'est qu'il
demandait la parole, par la suite, sur l'amendement.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Après.
D'accord. Pas maintenant.
M. Charbonneau: Non, c'est cela que je vous ai dit.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Maintenant, c'est
la mise aux voix du sous-amendement que vous connaissez tous.
M. Charbonneau: C'est-à-dire...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Est-ce que vous
voulez qu'on...
M. Garon: Voulez-vous le lire, M. le Président?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Oui, je vais vous
lire le sous-amendement simplement: "Que la motion d'amendement soit
modifiée en ajoutant à la fin les termes "et la
Confédération de l'Union des producteurs agricoles du
Québec, la Fédération de l'UPA de Saint-Hyacinthe et le
Conseil central Saint-Hyacinthe de la CSN. " Cela a été
présenté par le député de Duplessis.
M. Garon: Un vote enregistré.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Un vote
enregistré.
J'appelle le secrétaire pour le vote enregistré.
Le Secrétaire: M. Messier (Saint-Hyacinthe)?
M. Messier: Contre.
Le Secrétaire: M. Assad (Papineau)?
M. Assad: Contre.
Le Secrétaire: M. Beaudin (Gaspé)?
M. Beaudin: Contre.
Le Secrétaire: M. Dubois (Huntingdon)?
M. Dubois: Contre.
Le Secrétaire: Mme Legault (Deux-Montagnes)?
Mme Legault: Contre.
Le Secrétaire: M. Gardner (Arthabaska)?
M. Gardner: Contre.
Le Secretaire: Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata)?
Mme Dionne: Contre.
Le Secrétaire: M. Fortier (Outremont)?
M. Fortier: Contre.
Le Secrétaire: M. Tremblay (Iberville)?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Contre.
Le Secrétaire: M. Desbiens (Dubuc)?
M. Desbiens: Pour.
Le Secrétaire: M. Charbonneau (Verchères)?
M. Charbonneau: Pour.
Le Secrétaire: M. Garon (Lévis)?
M. Garon: Pour.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Le sous-amendement
est rejeté.
M. Fortier: Article 1?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): On n'est pas encore
rendu à l'article 1, M. le ministre. Maintenant, nous revenons sur
l'amendement du député de Dubuc et je cède la parole au
député de Lévis.
M. Garon: M. le Président...
Reprise du débat sur la motion
d'amendement
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Voulez-vous que je
vous lise l'amendement avant ou si vous savez ce qu'il en est?
M. Garon: Je le sais.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Vous le savez?
M. Garon: C'est la fédération des
consommateurs.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Exactement. C'est
la Fédération nationale des associations de consommateurs du
Québec.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, je savais
l'intérêt du député de Dubuc pour les associations
de consommateurs. C'est pourquoi je ne suis pas étonné qu'il ait
proposé que nous entendions la Fédération nationale des
associations de consommateurs du Québec. Après avoir
refusé qu'on entende tout le monde, le député de
Saint-Hyacinthe, refusant qu'on entende même les travailleurs agricoles
et les cultivateurs de Saint-Hyacinthe, les travailleurs de la CSN de
Saint-Hyacinthe, votera sans doute contre le fait qu'on entende les
consommateurs de son coin également.
Mais il y a plus de 600 000 000 de livres de sucre en jeu et les prix
sont actuellement trop élevés. Je vous dirai, M. le
Président, que celui qui a apporté le meilleur argument, c'est le
ministre de l'Agriculture cet après-midi, inconsciemment
peut-être, quand il a dit qu'il se fiait sur la concurrence
américaine pour venir établir un niveau de prix raisonnable. Il a
démontré, en affirmant cela, qu'il ne connaissait pas le dossier.
Aux États-Unis, les prix du sucre sont administrés. À
l'été 1985, alors que les raffineurs québécois
achetaient du sucre de canne sur les marchés internationaux à 0,
028 $, aux États-Unis, les raffineurs payaient le même sucre 0, 27
$. Je dis au député de Portneuf que, même en le payant 0,
27 $, ils étaient capables de concurrencer les raffineurs canadiens.
Pourquoi? Parce que, même s'ils s'approvisionnent à dix fois
meilleur marché que les raffineurs américains, ils ne vendent pas
à meilleur marché qu'aux États-Unis. Quand on regarde le
prix au détail du sucre aux États-Unis et au Canada, on se rend
compte...
Le député de Papineau est commerçant et il devrait
connaître un peu plus les règles du marché. Le jeune
député de Saint-Hyacinthe, qui est encore aux études de
droit et qui n'a pas l'expérience d'un commerce complet comme celui du
sucre pourra se faire expliquer par le député de Papineau ce que
cela signifie lorsque les raffineurs canadiens paient le sucre sur les
marchés internationaux, dans les marchés de "dumping", 0, 028 $
la livre alors qu'aux États-Unis les raffineurs américains
doivent l'acheter de leurs producteurs à 0, 27 $ la livre. Lorsque les
exportateurs canadiens aux États-Unis - c'est pour cela qu'on a dit que
le marché américain était payant - vendent au prix du
marché administré à 0, 27 $ là livre, les
Américains réussissent quand même à venir exporter
sur le marché canadien du sucre qu'ils ont payé dix fois plus
cher à leurs producteurs américains.
Cela veut dire qu'il n'y a pas de concurrence au Canada. La preuve est
aussi simple que cela à faire. Ce n'est pas une règle très
complexe. J'espère que le député d'Outremont,
spécialiste dans le domaine nucléaire - même genre de
spécialité que les spécialistes de Tchernobyl qui avaient
fait une centrale nucléaire - pourra comprendre cette règle
mathématique qui est très simple, d'une simplicité
enfantine, à la condition de ne pas se cacher la tête dans le
sable. Je dis que, malgré que les raffineurs canadiens achètent
leur sucre sur un marché
de "dumping" international à des prix de 0, 028 $, comme à
l'été 1985, et que les raffineurs américains doivent le
payer 0, 27 $, le sucre aux États-Unis et au Canada se vend aux
consommateurs à peu près au même prix.
On va me dire que ce sont des gouvernements responsables qui donnent de
tels avantages à des raffineurs alors qu'ils ne font
bénéficier les consommateurs de leur pays d'aucun avantage? Les
seuls avantages se retrouvent dans les caisses électorales. Vous
remarquerez que les plus gros fournisseurs des caisses électorales sont
les raffineries de sucre. Vous n'avez qu'à voir les publications parce
que, à un moment donné, on a publié dans les journaux, au
moment du référendum, les noms de ceux qui contribuaient aux
caisses électorales, et vous verrez à quel point les raffineries
de sucre crachent lourd auprès de politiciens - je ne dirai pas
véreux, mais innocents - qui ne prennent pas le temps de protéger
les consommateurs.
Je dois vous dire que, dans le domaine du sucre, on exploite les
consommateurs, si on compare le prix qu'on paie. C'est de l'exploitation
dès le départ de la chaîne jusqu'aux consommateurs. Ceux
qui pensent que ce dossier, par le vote qu'ils ont pris cette semaine, sera
mort et enterré, se trompent. Je vais vous dire que nous allons en
parler è tel point que vous allez vous réveiller la nuit, vous
aurez des cauchemars à entendre parler de ce dossier. Ne vous trompez
pas, nous allons parler de ce dossier et nous allons demander des votes
enregistrés pour que les gens sachent quels étaient ceux qui
n'ont pas été capables de voir dans un dossier aussi facile
à voir.
Une voix: Du chantage?
M. Garon: Non, je ne chante pas, je ne sais pas chanter. Je ne
chante pas, sauf que je vous parle du manque de courage des
députés libéraux qui ne prennent pas le temps
d'approfondir les dossiers. Je vais leur donner une règle très
simple; c'est facile de prendre cela en note et de vérifier par la
suite. L'an dernier, les raffineurs canadiens ont payé leur sucre, sur
les marchés internationaux, 0, 028 $. Le ministère des Finances,
ces grands spécialistes béats, candides, sereins, avec lesquels
le député d'Outremont doit s'entendre à merveille "over a
cup of tea, on a 5 o'clock tea"...
M. Fortier: On n'a pas de problème.
M. Garon: Ils doivent avoir un plaisir féroce à
discuter ensemble. Je leur dirai, toutefois, que les vérités
réelles sur le marché, c'est que les raffineurs canadiens ne
transmettent jamais aux consommateurs canadiens les avantages qu'ils ont
à acheter du sucre de dumping. Depuis 75 ans, cette politique
sucrière canadienne n'a été utile qu'aux caisses
électorales des partis politiques. Ce dossier est un dossier qui
commence. C'est un dossier que nous avons eu le temps d'approfondir et que nous
connaissons bien. Nous démontrerons à quel point les
consommateurs n'en retirent aucun avantage.
Nous demandons que vous puissiez être éclairés. Ce
ne sont pas des affirmations. Je pense avoir eu, dans le secteur
agroalimentaire, une certaine crédibilité. Pensez-vous que
j'affirmerais une telle chose si c'était faux, au risque de me faire
démentir publiquement? J'ai été dans ce dossier durant
neuf ans. Il n'y a sûrement personne autour de cette table, même au
cours des années d'expérience accumulées, exception faite
du député de Verchères, qui ait passé le
dixième du temps que j'ai passé dans ce dossier. J'accumule
même l'expérience de tous les députés
libéraux ensemble, incluant les fonctionnaires du ministère des
Finances.
Si vous regardez les publications mensuelles dans le domaine du sucre,
vous vous rendrez compte qu'il n'y a habituellement pas d'écart entre le
prix du marché à la consommation, le prix de vente à la
consommation au Canada et aux États-Unis. Occasionnellement, on est un
petit peu plus bas, surtout quand il y a des enquêtes du directeur des
enquêtes sur les coalitions. On a vu, quand ils étaient devant les
tribunaux avec des poursuites du ministère et que M. André
Ouellet veillait au grain, que le prix a été un petit peu
inférieur. Habituellement, il n'y a pas beaucoup d'écart, il n'y
en a pas. Tenant compte du fait que les raffineurs canadiens achètent
des surplus de dumping à des prix dérisoires, ils n'en font
profiter aucunement les consommateurs canadiens. Et le ministre de
l'Agriculture vous a dît cet après-midi en plus que, même en
payant dix fois plus cher leur sucre, les raffineurs américains
étaient capables de concurrencer les raffineurs canadiens sur le
marché canadien. Il considérait que c'était une
protection. Belle protection!
C'est évident qu'à ce moment-là le niveau des prix
est à peu près égal en Amérique du Nord, sauf que
les raffineurs canadiens n'ont pas fait travailler beaucoup de monde au Canada
et qu'ils ont acheté du sucre à des prix de famine, dans
l'exploitation humaine de la production de canne à sucre qui est
équivalente à l'esclavage, selon les déclarations
mêmes de la ligue anti-esclavagiste de Londres.
M. le Président, pour éclairer davantage l'Opposition, je
vais présenter...
Une voix: Bon!
Sous-amendement proposant d'entendre Landell Mills
Commodities Studies et BMA
M. Garon:... un sous-amendement qui se
lira comme suit: "Que la motion d'amendement soit modifiée en
ajoutant, à la fin, les termes: "et la firme Landell Mills Commodities
Studies, de Londres, de même que les consultants allemands
Braunschweigische Machinenbauanstalt (BMA) responsables du design de
l'usine depuis 197B.
Une voix: Fermez les guillemets. Vous avez oublié de
fermer les guillemets.
M. Fortier: Ah! Est-ce qu'on peut avoir la copie?
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Est-ce qu'on peut
avoir la copie?
M. Charbonneau: On a engagé les meilleurs experts.
M. Gardner: On veut la copie.
M. Charbonneau: On voudrait bien qu'ils soient confrontés
aux gens du ministère des Finances, ces experts-là.
M. Gardner: Les connaissez-vous, au moins?
M. Charbonneau: On les a engagés, câline!
M. Gardner: Tabarnouchei
Une voix: Cela a dû coûter cher.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): C'est recevable
dans la mesure où on peut convoquer ces gens-là.
M. Garon: Ils sont très convocables, ils connaissent
très bien le dossier. Ils ont été consultés
à plusieurs reprises par la Raffinerie de sucre du Québec.
M. Gardner: Est-ce qu'ils vont venir à leurs frais, s'ils
viennent d'Allemagne?
M. Garon: Non, la commission les défraie.
M. Charbonneau: On va commencer par s'entendre sur leur venue et,
après cela, on réglera les détails.
M. Gardner: On ne s'entendra pas.
M. Garon: Cela va coûter beaucoup moins cher que la
décision du gouvernement.
M. Gardner: On ne fera pas de folie comme cela.
M. Garon: Cela va coûter moins cher que les
bénévoles à 400 $ par jour.
M. Gardner: On ne fera pas de folie comme cela. Vous pouvez
être sûr qu'on sera contre.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le ministre,
vous avez quelques mots à dire là-dessus? Je vous écoute.
(21 h 15)
M. Fortier: Sur la recevabilité, M. le Président.
Ce qui m'inquiète dans la proposition qui nous est faite - ils l'ont dit
tout à l'heure, ils ne font pas un "filibuster", je crois qu'ils
voudraient entendre des gens qui nous permettraient de disposer du sujet le
plus rapidement possible - c'est qu'il est bien certain qu'en mettant sur la
liste des gens d'Allemagne on ne peut pas convenir très facilement que
ces gens pourraient être disponibles prochainement.
Je me pose des questions à savoir si c'est réellement
recevable. Les membres de la commission doivent faire des propositions qui nous
permettraient d'accélérer les travaux puisque eux-mêmes ont
dit qu'ils voulaient faire des propositions pour étudier la dynamique de
la fermeture de l'usine, mais sans retarder les travaux indéfiniment.
Présentement, on ne peut en avoir l'assurance parce qu'ils n'ont pas
pris contact avec ces gens et ce sont des gens d'un autre pays. À cause
de cela, je me demande si la motion est recevable puisque ce sont des gens de
l'extérieur du Québec et de l'extérieur du Canada.
Malgré toute ma bonne volonté, je porte à votre
considération ces difficultés qui feraient en sorte que la motion
ne serait pas recevable.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député de Verchères, je vous écoute.
M. Charbonneau: M. le Président, sur la
recevabilité. Je pense que tes arguments que vient de soulever le
ministre n'ont aucun rapport avec la recevabilité. Je pense que la
commission doit d'abord s'entendre pour faire venir des organismes et, par la
suite, prendre les moyens soit pour qu'ils viennent, soit pour qu'on aille les
voir. Dans ce cas, je crois que ces gens, étant donné qu'ils ont
collaboré avec la raffinerie de sucre, seraient intéressés
et concernés.
Cela n'a aucun rapport, les problèmes de faisabilité de
cette nature, avec le fait qu'une motion de cette nature soit recevable ou non
à ce moment-ci de nos travaux. On est à l'étape, en vertu
de l'article 244, où on peut demander de procéder à des
consultations particulières. On peut consulter toutes sortes d'experts
ici ou ailleurs. D'ailleurs, je vous signale que les commissions peuvent
éventuellement se donner des mandats qui leur permettraient d'aller
à l'étranger ou de faire venir des experts étrangers.
Donc, M. le Président, je pense qu'il y
a deux questions et la motion, à sa face même, ne
présente pas un caractère différent et irrecevable si on
la compare à toutes les autres motions que nous avons
présentées jusqu'à maintenant.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord.
Excusez-moi. Je pense que...
M. Fortier: Je me rends à l'argumentation du
député. Je ne sais pas ce que vous allez statuer, M. le
Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. Je
présume que ces firmes existent encore, à ce moment. Étant
donné que maintenant la question de savoir si elles peuvent être
disponibles ou pas, c'est une question de modalité, je déclare
donc le sous-amendement recevable.
Une voix: Cela ne change rien que ce soient ceux-là ou
d'autres.
M. Gardner: J'ai hâte de les entendre parler, ces
compagnies allemandes. On va vous instruire. On va nous instruire. Allez-y.
Une voix: Si on les demande, c'est pour cela.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): La parole est
è celui qui a proposé ce sous-amendement, c'est-à-dire le
député de Lévis, pour les trente prochaines minutes.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, il est temps qu'on sorte un peu
en dehors de notre petite cour et qu'on décide de voir, sur le plan
international, les grands spécialistes de l'industrie du sucre. On
risquerait moins de commettre les erreurs que, actuellement, le gouvernement
est en train de commettre, qui ne sont pas des cure-dents, mais des
madriers.
La firme Landell Mills Commodities Studies est une firme qui publie des
analyses à tous les trois mois et qui est reconnue dans toute
l'industrie du sucre comme le grand spécialiste. Elle n'est pas un
organisme comme ceux qu'a consultés le ministère des Finances,
qui préparent des documents pour ceux qui vont revendiquer des prix de
soutien; elle prépare plutôt des données économiques
pour ceux qui vont déterminer leurs orientations, leurs décisions
sur les marchés du sucre.
La firme Landell Mills Commodities Studies est considérée
dans le monde entier comme le grand expert sur les études du
marché du sucre, à tel point que dans les études qu'elle a
fournies au moment où le ministère des Finances consultait ses
supposés spécialistes qui disaient que le prix du sucre ne
changerait pas pendant quatre ou cinq ans, la firme Landell Mills Commodities
Studies nous avait dit exactement ce qui s'est passé depuis ce temps.
Depuis l'été 1985 ou le printemps 1985, les prévisions
qu'elle a faites ont été parfaitement exactes et pour les raisons
qu'elle avait mentionnées, alors que les études qui ont
été faites par le ministère des Finances se sont
révélées totalement fausses.
D'ailleurs, nos experts de la raffinerie, lors de la réunion de
confrontation, lorsque les gens de la raffinerie avaient rencontré les
gens des Finances, leur avaient dit: Personne de sérieux dans
l'industrie du sucre ne consulte les gens que vous consultez. Il s'agit
essentiellement d'études qui sont faites pour la FAO pour tenter de
justifier des subventions additionnelles ou des prêts à des bas
taux d'intérêt de la part d'entreprises ou de pays où
l'industrie du sucre est misérable et n'a aucune vigueur.
Tandis que les gens sérieux, dans le domaine du sucre, consultent
Landell Mills Commodities Studies et même l'étude de la FAO,
à laquelle référait le ministère des Finances,
reconnaît, à la page 29, paragraphe 82, que: "It is not possible
to predict the course the market will take between 1985 and 1990 in terms of
stocks and prices because this will depend primarily of random weather factors.
" L'étude ne contient, d'ailleurs, aucune prévision de prix
malgré les affirmations qui ont été faites par les
pseudo-spécialistes du sucre du ministère des Finances du
Québec.
Il est vrai que le prix de base du sucre utilisé dans les
états pro forma est de 0, 06 $ américains et que,
l'été dernier, le prix du sucre était à un "bas"
historique. À cause de ces fluctuations imprévisibles du
marché mondial, c'est à partir de ces prévisions qu'il
faut travailler avec une moyenne basée sur plusieurs années. Il
ne faut pas essayer, comme on l'a fait aux Finances, de dire: Le prix est bas,
ce n'est pas payant, il faut vendre. Il n'y a personne dans l'industrie du
sucre qui travaille comme cela quand on sait qu'il y a des cycles, comme il n'y
a personne qui travaille dans l'industrie du sport sans consulter les cycles
et, comme personne ne travaille dans l'industrie du boeuf sans contrôler
les cycles.
Le raisonnement insignifiant qui a été fait par le
ministère des Finances est celui-ci: Actuellement, le sucre ne paie pas;
donc, il faut vendre. Dans le communiqué même du ministre de
l'Agriculture, il est dit que, de 1943 à 1982, sur 40 ans, la Raffinerie
du sucre du Québec avait rapporté plus de profits
qu'accusé de pertes. Personne ne regarde l'industrie du sucre dans une
courte période de temps. Je sais qu'on essaiera de faire n'importe
quelle affirmation, sauf que la réalité est là et que le
prix du sucre, à 0, 03 $, est un "bas" historique.
Nos spécialistes du ministère des Finances du
Québec ont déclaré, à ce moment, que la situation
avait changé, que la structure avait changé et que nous
étions en face d'un nouveau cycle. Ils me font penser un peu aux
pseudo-spécialistes du porc qui avaient, à leur tête, le
ministre actuel du Travail et qui venaient me voir à mes bureaux, en
1978, et qui me disaient: II faut absolument que le gouvernement ne touche plus
au porc. Les cycles historiques sont terminés. Maintenant, le porc, ce
sera toujours payant. J'aurais dû faire ces enregistrements et,
aujourd'hui, faire jouer cela pour montrer jusqu'à quel point ces
pseudo-spécialistes ne comprenaient rien au domaine
économique.
M. Fortier: II n'y a que vous qui comprenez?
M. Garon: Au contraire, il y a beaucoup de gens, sauf qu'il faut
prendre les bonnes études, les bonnes analyses et ne pas dire, d'un coup
sec, à un moment donné, parce qu'on est au monde à cette
époque que les cycles ne jouent plus. Les cycles, dans le domaine
agricole, ont joué de tout temps. Le principal responsable, cela a
été la température. Si la température fait en sorte
qu'il y a des surplus, les prix baissent parce que la demande de beaucoup de
produits agricoles est inélastique. Cela veut dire qu'une augmentation
ou une baisse dans les quantites amène des changements plus que
proportionnels dans les prix. Ce sont les règles de base en
économie. On sait pourquoi. Parce que, même si le prix d'un
produit agricole diminue, vous n'en consommerez pas beaucoup plus parce que
vous êtes saturés.
Quand on a parlé de la demande du sucre au ministère des
Finances, on nous a dit qu'elle n'augmenterait pas parce que les gens
étaient au régime et qu'aujourd'hui la tendance était
plutôt à la baisse parce que les gens voulaient diminuer leur
consommation de sucre. Tous les spécialistes dans le monde entier disent
que, au contraire, la consommation du sucre dépend de l'augmentation du
niveau de vie de la population dans le monde. Quand la population et le niveau
de vie augmentent, la consommation de sucre augmente. C'est évident
qu'en Amérique du Nord, si le niveau de vie augmente, la consommation
n'augmente pas beaucoup plus. L'Amérique du Nord représente
seulement, Canada et États-Unis inclus, autour de 250 000 000 à
260 000 000, alors que, dans le monde, la population actuelle est autour de 5
000 000 000 à 6 000 000 000.
Vous savez, j'ai rencontré ces prétentieux fonctionnaires
des Finances qui pensent tout savoir dans un domaine qu'ils n'ont jamais
étudié profondément, qui, à travers les obligations
et les actions, ont regardé et feuilleté quelques études.
Sauf que tous les experts du monde disent le contraire de ce qu'ils disent.
Tous, ils nous ont dit que la canne à sucre, c'était
l'avenir.
Je ne sais pas si vous avez écouté, mais au cours du
voyage que je faisais au mois de juin en Europe, j'ai demandé à
rencontrer les plus grands commerçants de sucre de l'Europe. Je leur ai
dit: Nos gens, au ministère des Finances, prétendent que l'avenir
est dans la canne et qu'il n'y a pas d'avenir dans la betterave. Cela a
été le fou rire général. On a pu rire tout le temps
de l'appéritif, parce que les gens ont dit: Vos experts sont les seuls
dans le monde qui pensent ainsi, puisqu'il n'y a pas d'avenir dans la
canne.
Pourquoi? Parce que depuis 200, 300 ou 400 ans, sauf qu'on peut
peut-être affiler un peu plus les machettes aujourd'hui qu'il y a 200 ou
300 ans, il n'y a aucune augmentation de productivité, tandis que, dans
la betterave, il y a des augmentations de productivité
considérables, tant dans la cueillette que dans l'ensemencement.
M. Marier qui est président de la raffinerie est même
allé au Japon où on réussit à faire une production,
en trente jours de plus, en semant des "paper pots", en ensemençant des
graines, d'abord, dans des serres, pour prolonger la saison de trente jours et
avoir des rendements accrus considérables.
Pourquoi? Parce que la technologie dans le domaine des betteraves s'est
accrue de façon incroyable, alors qu'il n'y a pas d'accroissement de
productivité dans la canne, parce qu'on la recueille avec la
misère humaine, aujourd'hui comme hier, avant-hier ou il y a cinq
siècles. C'est la misère, la canne à sucre. La betterave,
c'est la machinerie, c'est la productivité.
Le député qui est parti, qui était ici tout
à l'heure, le député d'origine française de
Lafontaine, pourra vous dire a quel point, au nord de Paris, il y a des
milliers d'hectares de betteraves qui sont payants avec une industrie
sucrière dynamique. On verra la même chose aux États-Unis
et dans tous les pays industrialisés. Mais vous verrez rarement de la
canne.
Il y en a encore aux États-Unis, dans le sud, vestige du temps
des esclaves. Mais vous ne verrez pas de canne a sucre dans les pays dynamiques
comme les États-Unis. Vous ne verrez pas de canne à sucre dans
les pays européens modernes; vous n'en verrez pas. Pourtant, du haut des
étages du ministère des Finances, nos grands spécialistes
fonctionnaires disaient: L'avenir est dans la cannei C'est quelque chose
d'entendre cela autour d'une table. Bonne mère! Il va falloir leur
démontrer le contraire, alors que, pour eux, c'est un axiome, un
postulat, on part de là.
Les grands spécialistes que sont la firme Landell Mills
Commodities Studies ont indiqué quel serait l'avenir dans l'industrie du
sucre. Cela a été présenté au ministère des
Finances. Mais les gens ont dit: C'est mieux de fermer une usine de 150 000 000
$ que d'admettre ses erreurs.
Dans l'industrie du sucre, la firme Landell Mills Commodities Studies,
de Londres, est considérée comme le gourou du marché. Sa
publication, "Sugar Quarterly", constitue une des références
professionnelles les mieux acceptées, avec Connell Commodities et F. O.
Licht's, par exemple, des négociants du sucre. Or, les pronostics
publiés dans le numéro du 8 avril 1985 de "5ugar Quarterly" font
paraître bien conservatrice l'hypothèse de 0, 06 $ US la livre
retenue par la raffinerie de sucre, et presque ridicule la prétention
des agents du ministère des Finances. Ce sont les spécialistes du
sucre qui disent cela. (21 h 30) "The outcome of these conflicting influences
is summarized in the first column of table 15. Spot to prices are expected to
edge only slowly above 0, 04 $ per pound over the next six months, and to be a
little above 0, 05 $ by the end of 1985. This implies an annual average price
of only 0, 044 $, which represents, in real terms, the lowest level recorded in
living memory. "
Vous savez ce que cela veut dire. Ils établissent les prix, ils
établissent comment cela se situe, quelle est l'augmentation annuelle
des prix. On dit, quand on parle d'augmentation à 0, 05 $, qu'il s'agit
de la plus basse augmentation de mémoire d'homme. "During 1986, the
price recovery will be slow until the 1986-1987 crop year approaches, with its
promise of significant stock reductions. Therefore, the world price of raws
should remain in the 0, 05 $ to 0, 08 $ corridor until the third quarter is
well under way, and should only test the 0, 10 $ barrier as 1987 comes into
view. "We thought that it would be valuable to consider how these price
projections would be affected by plugging lower real interest rates into our
forecasting model (this understates the full impact, since lower interest rates
will stimulate Third World economic activity, and boost sugar consumption). A 2
per cent per annum lowering of our interest rate projections would raise the
forecasts for the final quarter of 1985 by 0, 011 $ per pound to 0, 65 $. "
Vous remarquerez que c'est exactement ce qui s'est produit. On est
arrivé à la fin de 1985 à peu près autour de 0, 66
$. "The projection for the second quarter of 1986 would be lifted to 0, 085 $.
" Et qu'est-ce que c'était? Tout cela a été dit à
l'avance. Au second trimestre de 1986, c'était exactement 0, 085 $,
exactement tel que prévu, alors que les spécialistes des Finances
disaient: Cela va rester à 0, 028 $ pendant quatre à cinq ans.
"The projection would be lifted to 0, 085 $, and that for the final quarter of
1986 would raise 0, 021 $ to 0, 119 $. " Vous savez que les études de la
raffinerie démontrent qu'à partir de 0, 06 $ US la raffinerie est
rentable, à condition de raffiner elle-même son sucre pour le
marché du détail.
M. le Président, vous savez, l'an dernier, on disait aux gens des
Finances: On a nos études, vous avez les vôtres, mais on pense que
les nôtres... Je me rappelle que c'est, à ce moment-là, que
M. Little avait dit à M. Séguin: M. Séguin, les
références que vous utilisez, l'industrie ne les utilise pas.
L'industrie utilise telle et telle firme pour ses études dans le monde
entier. Vous, vous prenez des études à des fins de revendications
de subventions ou encore d'aide étrangère aux pays
sous-développés, ou encore de demandes d'avantages auprès
de la Banque mondiale. Mais l'industrie qui doit vivre avec des profits ne se
réfère pas aux études auxquelles vous vous
référez. Cela avait été très clair, à
ce moment-là, dans la discussion. J'avais eu une discussion interne...
Je pense qu'actuellement on n'a pas trop le choix... Le député de
Verchères était là, à ce moment-là.
C'était cela notre discussion. Aujourd'hui, on est presque un an plus
tard, pas tout à fait, mais à peu près un an plus tard et
on se rend compte que les études qui se sont
révélées à 100 % véridiques, ce sont celles
que le ministère de l'Agriculture a fournies en collaboration avec la
raffinerie de sucre, et celles que le ministère des Finances a fournies
se sont révélées totalement fausses.
M. Fortier: Ce sont les mêmes prévisions que vous
aviez faites en 1979 pour justifier votre investissement.
M. Garon: En 1979, vous savez quand les taux
d'intérêt...
M. Fortier: Les experts vous avaient tout dit en 1979.
M. Garon: Non, non. Il est arrivé un
événement... Oui, les chiffres étaient bons en 1979, mais
qui a prévu - et vous non plus, vous n'avez pas prévu - des taux
d'intérêt de plus de 20 % à partir de 1981? Et personne
dans le monde ne l'avait prévu.
M. Fortier: Et que le prix du sucre baisserait.
M. Garon: Dome Petroleum, une des plus grandes corporations au
Canada encouragées par le gouvernement fédéral, est
venue en difficulté financière avec les taux
d'intérêt à 20 %. Vous compreniez très bien, et tout
le monde a compris qu'un ensemble de firmes ont eu des difficultés avec
des taux d'intérêt au-dessus de 20 % en 1981, 1982 et 1983.
M. Fortier: Le prix du sucre a baissé. M. Garon: Oui.
M. Fortier: Vous prévoyiez 0, 28 $, et il a
baissé.
M. Garon: Oui.
M. Fortier: Ce sont les mêmes experts qui vous disent qu'il
va augmenter.
M. Garon: Oui, puis les mêmes...
M. Fortier: Voyons doncî Soyez donc un peu intelligent.
M. Garon: Comprenez-vous l'anglais? Vous n'avez pas compris ce
que je viens de vous dire.
Une voix: S'il vous plaît!
M. Garon: Un changement de taux d'intérêt fait
changer le prix de la consommation. Écoutez bien. Je vais vous relire le
bout. Il y a toujours des limites, batèche, on n'est pas dans un club de
"peewees". Je vous l'ai lu ici, et vous n'avez pas compris ce que je vous ai
lu. Regardez ce que je vous ai lu. On dit ici ceci: "understates". Cette
affirmation sous-estime le plein impact, "... since lower interest rates will
stimulate Third World economic activity, and boost sugar consumption. A 2 per
cent per annum lowering of our interest rate projections would raise the
forecasts for the final quarter of 1985 by $0, 011 per pound to $ 0, 66. " Je
viens de le lire, je pensais que le ministre comprenait et il ne comprend pas.
Je vais lui lire en français. Ils disent...
M. Fortier: Vous croyez cela?
M. Garon: Oui, mais la même chose s'est produite dans
l'autre sens. Ils vous disent tout simplement que les modèles
démontrent que, lorsqu'il y a un changement dans le taux
d'intérêt de 2 %, les prévisions peuvent être
modifiées en augmentant le prix par 0, 011 $ et que cela va changer la
situation, parce que la consommation augmente. Ils nous disent ici: Ceci sous-,
estime le plein impact en considérant que des bas taux
d'intérêt vont stimuler l'activité économique dans
le tiers monde et vont -"boost" - augmenter la consommation du sucre. J'ai dit
cela, et la même étude disait la même chose, sauf que
personne n'avait prévu que les taux d'intérêt passeraient
d'un coup sec en l'espace de quelques mois au-dessus de 20 %.
Quand ils vous disent 2 % par année, c'est un changement
considérable. Imaginez-vous si 10 % par année, cela ne fait pas
un changement considérable. Ils vous le disent dans leur étude,
sauf qu'ils ont prévu des augmentations de prix, une situation, mais ils
n'ont pas prévu que le taux d'intérêt augmenterait dans
cette proportion-là. Mais ils vous disent qu'on observe sur des
années que, lorsque le taux d'intérêt augmente de tant, il
y a tel effet sur la consommation mondiale. Quand le taux
d'intérêt baisse, l'activité économique est plus
basse dans les pays sous-développés et la demande est moins
forte. C'est cela l'économie, mais il faut être capable de jongler
avec plus de deux variables en même temps pour comprendre cela.
Évidemment, si on n'est pas capable de mâcher de la gomme et de
marcher en même temps, on ne comprend pas ce raisonnement-là. Il
faut être capable de jouer avec un certain nombre de variables pour
comprendre ce raisonnement; ce que nous étions capables de faire lorsque
nous étions au ministère de l'Agriculture.
Une voix: C'est vrai.
M. Garon: Ceci dit en toute humilité. Je continue. Je n'en
dirai pas plus long pour la firme. La firme, c'est l'expert dans le monde. Si
vous considérez que notre usine de 150 000 000 $ ne vaut pas une
étude, je ne vous demande pas de me croire, mais je vous demande
d'être capables d'avoir les yeux ouverts sans qu'on vous mette des
cure-dents pour vous tenir les paupières. Cela veut dire quoi? Cela veut
dire que je vous demande de rencontrer des gens renseignés pour vous
faire éclairer, non pas le lobby du sucre, non pas le Canadian Sugar
Institute payé par le quasi-monopole du sucre au Canada a temps plein
avec M. Thompson - je ne sais pas si c'est encore lui, mais c'était M.
Thompson, il y a quelques années - non pas... M. Morin, qui est
payé à temps plein par les entreprises pour défendre leurs
intérêts. Je vous demande de rencontrer les experts qui
conseillent les firmes dans le monde. J'en ai rencontré un certain
nombre. M. Marier en a rencontré un certain nombre. Avez-vous
remarqué que M. Marier n'est pas là? Non, il n'est pas là.
C'est sans doute celui qui parmi les hauts fonctionnaires au gouvernement
connaît le mieux le sucre actuellement, mais Il n'est pas là. M.
Little, qui était dans le commerce du sucre depuis 25 ans, autant pour
Lantic et Redpath que pour la Raffinerie de sucre du Québec, qui est
considéré comme un expert dans la commercialisation du sucre,
n'est pas là. Des grands spécialistes du sucre au Québec,
il n'y en a pas un qui est là. Non. On dit: On va
faire cela avec nos gens des Finances.
La firme BMA c'est quoi? La firme BMA d'Allemagne c'est la
spécialiste de la construction des raffineries. Elle est
spécialisée dans la construction des raffineries de sucre et
c'est pourquoi la firme BMA, qui était responsable du design de l'usine
depuis 1978, est compétente pour déterminer ce que vaut une usine
de sucre comme celle-là. Le schéma qui avait été
retenu par la firme BMA, on l'a en même temps fait réviser,
critiquer par des ingénieurs travaillant pour l'Union coopérative
betteravière française, qui est une grande entreprise dans le
domaine du sucre. Vous savez, elle exporte je ne me rappelle pas les chiffres
exacts, mais je pense que c'est 1 000 000 ou 2 000 000 de tonnes par
année, seulement l'exportation de la France. À l'Union
coopérative betteravière française, des experts dans le
domaine, on a demandé de regarder et d'analyser, d'une façon
critique, le plan qui nous a été présenté par BMA
pour voir s'il n'y avait pas des choses à améliorer. De plus,
ensuite, il y a un grand expert à sa retraite qu'on a engagé
à la raffinerie pour faire une troisième contre-analyse pour voir
encore s'il n'y aurait pas des améliorations techniques à faire.
Il y a eu des analyses de coûts aussi. Combien coûterait une telle
usine si on la rebâtissait aujourd'hui à 100 %? Il y a deux ans,
le résultat, c'était 135 000 000 $. Ajoutez è ce montant 4
% d'inflation et vous arriverez à peu près aujourd'hui à
près de 150 000 000 $. C'est une usine qui est en train d'être
vendue pour 10 000 000 $ en contrepartie des actifs réalisables à
court terme, à toutes fins utiles, des inventaires et des comptes
à recevoir. On la donne, la raffinerie. On ne la vend pas, on la donne.
On donne un actif en valeur de remplacement de 150 000 000 $ gratis. C'est cela
la transaction. C'est pourquoi les gens des Finances et les ministres ne
veulent recevoir personne parce qu'ils vont se le faire dire en pleine face ce
que cela vaut. On a déjà demandé combien cela valait et on
sait que rebâtir le complexe qu'il y a là actuellement, cela
coûterait 150 000 000 $. Mais on ne veut le demander a personne, parce
qu'on le donne. 10 000 000 $ contre des actifs réalisables à
court terme. Cela aurait coûté meilleur marché de mettre le
feu dedans que la transaction que s'apprête à faire le
gouvernement. Cela aurait coûté meilleur marché parce
qu'actuellement on donne les actifs, à toutes fins utiles, à 10
000 000 $. Ils auraient pu les vendre eux-mêmes pour 10 000 000 $ et Us
auraient obtenu le même prix.
Deuxièmement, il y a toutes les dépréciations, les
déductions fiscales pour les pertes des trois dernières
années. Ensuite, je contrat avec Métro et Provigo est
donné, gratis, dans la transaction et on m'a dit dans le temps qu'il
valait 25 000 000 $. La valeur actualisée actuelle, 25 000 000 $. On le
donne, à part tous les autres avantages, parce qu'on n'a pas vu le
contrat. Je vous dis que la transaction que s'apprête è faire le
gouvernement est le scandale du siècle au gouvernement du Québec.
Jamais on n'aurait fait un tel scandale au gouvernement du Québec de
donner gratis une usine qui vaut 150 000 000 $. Et on se dépêche
parce qu'on a peur que le prix augmente. Dépêchons-nous, le prix
va augmenter. Â 0, 028 $, on va dire qu'on tient compte de la
capacité de faire des profits, mais le prix n'est déjà
plus de 0, 028 $. Il a augmenté à 0, 08 $. Là, il est
è 0, 066 $, il est en train de réaugmenter et on se dit:
Dépêchons-nous. Qui vend l'entreprise au prix le plus bas dans le
marché? Personne ne fait cela.
Le gouvernement du Québec sous Robert Bourassa a eu des
expériences malheureuses. On se rappelle les mines de Gagnon avec des
contrats léonins contre le gouvernement. On se rappellera aussi les
entreprises sur la Côte-Nord, dans le bois, dans le papier...
Une voix: ITT.
M, Garon: ITT Corporation. Ce même genre de transaction qui
est en train de se réaliser actuellement va être un scandale. Je
le dis et je n'ai pas peur que, demain matin, on dise: Garon a dit que c'est un
scandale parce que, dans un an, deux ans, trois ans, tout le monde se rendra
compte, ce sera une évidence criante que c'était un scandale. En
plus de donner la raffinerie pour rien à un groupe qui va réussir
à former une forme de monopole. C'est le gouvernement qui va faire cela
pour faire une fermeture. Je dis: Si le gouvernement ne veut pas faire de
sucre, au moins qu'il ne vende pas; cela va lui coûter moins cher de ne
pas la vendre que de la vendre. Analysez les revenus et ce que cette
transaction va coûter au gouvernement, seulement dans une transaction
comptable, et je vous dis que je mets le ministre au défi de mettre le
contrat sur la table. C'est quand même un contrat public. C'est une
société publique. On devrait mettre le contrat sur la table.
Jamais il n'a été question, à ce jour, de mettre le
contrat sur la table. Pourquoi? Ils ont honte du contrat. Qu'on mette le
contrat sur la table. On vend une raffinerie qui est une société
d'État. On demande de faire disparaître, par une loi qu'on nous
demande de voter, une société d'État qui appartient au
public, mais on ne voudrait pas que le public sache à quel prix on la
vend. Depuis quand avez-vous vu un notaire ou un fiduciaire - le gouvernement
est pratiquement un fiduciaire actuellement -qui vend les biens de quelqu'un en
lui disant: Tu ne sauras jamais le prix? Le public québécois est
en droit d'avoir toutes les
données parce que c'est son entreprise. Elle n'appartient pas au
député d'Outremont, elle appartient aux Québécois,
la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire et ce, depuis 1943 et on va refuser de
montrer les chiffres au public? (21 h 45)
M. Charbormeau: C'est aberrant!
M. Garon: C'est un scandale, cela aussi et ces gens vont venir
nous parler de la vertu, voyons donc!
M. Fortier:... au Parti québécois.
M. Garon: Oui, parlons de la vertu aux gens qui ont le SIDA;
c'est l'équivalent. Qu'est-ce qu'on demande? On demande au public de ne
pas connaître le prix de la transaction d'un bien qui lui appartient;
c'est la moindre des choses. La première chose que le ministre aurait
dû faire, c'est mettre les contrats sur la table, mais il en a peur comme
d'une maladie honteuse, de son contrat.
M. Fortier: Combien de fois en avez-vous mis sur la table?
M. Garon: Qu'il le mette sur la table, qu'il nous le montre, son
contrat, cela va nuire à qui? Il n'y a pas d'autre entreprise au
Québec dans le secteur du sucre que celle à qui il veut vendre.
Cela va nuire à qui de mettre le contrat sur la table?
M. Charbonneau: II y a un monopole.
M. Garon: II y a un monopole, un quasi-monopole, en tout cas.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député, est-ce que je devrais vous relire le sous-amendement pour
vous rappeler la pertinence?
M. Garon: Je terminerai bientôt là-dessus.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): II vous reste
encore quelques minutes, deux minutes et quart.
M. Garon: Je demande que l'on consulte les deux firmes, l'une
dans les marchés du sucre, qui est la plus compétente que l'on
connaisse, Landell Mills Commodities Studies, et la firme la plus
compétente dans la construction de raffineries, la firme BMA, en
Allemagne. On prend le risque, nous aussi, que ces firmes viennent nous dire
que nous avons tort. Si le gouvernement est sûr de lui, pourquoi
craindrait-il que des experts internationaux viennent lui dire qu'il a raison?
C'est parce qu'il n'est pas sûr de sa position, il n'est pas sûr du
tout de sa posi- tion, il n'est pas sûr de la valeur de son contrat,
sinon il l'aurait rendu public depuis longtemps. À qui cela va-t-il
nuire?
Nous allons nous quitter tout à l'heure, dans quelques minutes;
les députés libéraux auront toute la journée de
samedi et de dimanche pour y penser. Certains d'entre vous...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): M. le
député, il faut conclure.
M. Garon: C'est ce que je suis en train de faire. Certains
d'entre vous vont aller à la messe dimanche, pensez donc un peu au
public et aux gens qui vous entourent.
Une voix: Avant le conseil général. Une
voix:...
M. Garon: Non, non, non, tout cela se tient. Arrêtons les
compartiments, arrêtons d'être honnêtes à
l'église et...
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Concluons.
M. Garon:... véreux en politique, arrêtons!
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Concluons, M. le
député.
M. Garon: II n'y a qu'une seule conscience dans tout cela. Pensez
aux gens qui vous entourent et pensez que vous avez assez de respect pour ces
gens afin que les livres soient sur la table et que tout le monde puisse
analyser ce contrat. Tout le monde pourra déterminer si ce contrat est
bon, d'autant plus si on fait venir des firmes qui connaissent le secteur tant
dans le domaine des marchés et de la construction des raffineries de
sucre. C'est ce que nous demandons, M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Merci, M. le
député de Lévis. Je cède maintenant la parole au
ministre délégué à la Privatisation.
Une voix: Ce sera plus doux.
M- Pierre-C. Fortier
M. Fortier: J'ai écouté avec beaucoup d'attention
l'ex-ministre de l'Agriculture, le député de Lévis, qui
possède toutes les vertus qui possède la vérité,
qui consulte uniquement les bons experts, et qui, d'après lui, a
toujours pris les bonnes décisions, qui est entouré de bons
fonctionnaires alors que tous les autres sont des gens véreux, qui
acceptent des prêts de banques, qui acceptent des pots-de-vin. Mais vous
n'avez
CAPA-63I plus de crédibilité. C'est pour cela que je vous
ai laissé parler, vous avez perdu votre crédibilité. Vous
faites rire les gens mais quand vient le temps de voter, même dans votre
parti, les gens, ne votent pas pour vous dans la course au leadership. Vous
avez été surpris, lors de la course au leadership, que les gens
n'aient pas voté pour vous.
M. Garon: Vous direz cela à M. Ryan.
M. Fortier: Vous croyiez que, dans votre parti, vous aviez une
certaine...
M. Garon: Vous direz cela à M. Ryan.
M. Fortier: M. Ryan a été élu chef de son
parti au moins une fois, cela ne vous est pas arrivé encore. Quand cela
vous arrivera, vous viendrez me revoir. Il n'y a pas seulement cela, je vous
l'ai dit tout à l'heure...
M. Garon: On traite mieux les gens qui ne sont pas chefs dans mon
parti que dans le vôtre.
M. Fortier: Laissez-moi parler, je vous ai laissé
parler.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaît!
M. Fortier: La seule arme que vous avez développée,
ce sont les attaques personnelles. Ce que je trouve indécent, je vais
vous le dire, c'est d'attaquer des fonctionnaires du ministère des
Finances quand vous savez que ces gens-là ne peuvent pas vous donner la
réplique, parce que les seules personnes qui ont droit de parole autour
de la table, ce sont des députés élus. Arrêtez donc
d'attaquer des gens qui n'ont pas le droit de vous répliquer, c'est
indécent, M. le député de Lévis.
M. Garon: Je vous demande de ne pas avoir peur de les confronter
à des experts.
M. Fortier: Arrêtez de les attaquer!
M. Garon: C'est cela que je vous demande.
M. Fortier: Ils ne peuvent pas vous donner la réplique et
vous passez votre temps à attaquer des gens qui, peut-être, ne
pensent pas comme vous. Mais, mot, j'ai appris de mes parents et j'ai appris
dans ma profession qu'on respecte l'opinion "des truies"... d'autrui!
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Fortier: Je vous regardais, je m'excuse! On doit respecter
l'opinion d'autrui, des gens qui ne pensent pas comme soi. Attaquer les
personnalités...
M. Garon: Je n'ai pas employé votre langage.
M. Fortier:... les personnes, les hauts fonctionnaires, ces
gens-là, on ne les a pas choisis. Je suis arrivé aux Finances et
je ne les connaissais pas, mais j'ai trouvé que c'étaient des
gens très compétents au ministère des Finances. Que cela
ne fasse pas votre affaire, c'est malheureux pour vous, mais ce sont des gens
qui, à mon avis, ne méritent pas que vous les attaquiez
personnellement. Que vous disiez - vous avez le droit de le dire - que vous ne
pensez pas comme eux, c'est une autre affaire. Mais arrêtez donc de faire
des attaques personnelles. Cela vous discrédite, vous perdez votre
crédibilité et, ce faisant... Continuez si vous le voulez. Je
crois que c'est mieux pour nous. Quand vous continuez à crier comme vous
l'avez fait tout à l'heure, il n'y a plus grand monde... Je suis
à peu près certain que, dans la Presse de samedi, on ne lira pas
une ligne de ce que vous avez dit ce soir.
M. Garon: Vous savez que La Presse est faite depuis six
heures, ce soir.
M. Fortier: M. le Président. M. Garon: M. le
Président.
M. Fortier: Laissez-moi parler, j'ai la parole. Protégez
mon droit de parole.
M. Garon: Question de règlement. Tous les journaux qui
vont être publiés demain sont sous presse depuis 18 heures.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): S'il vous
plaîtl
Une voix: Ses dix minutes sont écoulées.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): D'accord. À
l'ordre, s'il vous plaîtl
M. Fortier: M. le Président, M. le député de
Lévis nous dit: Tous les experts disent que j'ai raison. Il fait de
grands énoncés: Les meilleurs experts que j'ai consultés
disent que la betterave à sucre est en progression et que la canne
à sucre est en régression. C'est cela que j'ai entendu. J'ai
justement devant moi un document du United States Department of Agriculture.
S'il y a des gens qui connaissent quelque chose, il me semble que ce sont ces
gens-là aussi. Ce sont d'autres experts. J'imagine qu'au
ministère de l'Agriculture des États-Unis on connaît
quelque chose aussi. Voici ce qu'ils disent - je vais être obligé
de lire cela en
anglais; eux aussi écrivent en anglais: "Despite a sugar program,
sugar beet production was 20 900 000 tons for the 1982 crop year, the lowest
level since 1967. The decline in sugar beet production is largely the result of
the recent closing of sugar beet processing plants in several States due to low
returns. "
Il me semble que c'est exactement le contraire de ce que le
député de Lévis a dit tout à l'heure. Il nous
disait: II n'y a pas d'avenir pour la canne à sucre aux
États-Unis. J'ai ici l'exemple de deux raffineries de betteraves
à sucre qui ont été transformées en raffineries de
canne à sucre, la raffinerie de Santa Anna Californie,
propriété de Holly Sugar Corporation, et la raffinerie de
Freeport, Ohio, propriété de Northern Ohio Sugar Corporation. Il
nous disait que c'était juste dans le sud des États-Unis qu'il y
avait de la canne; bien, dans le nord des États-Unis, dans l'Ohio, il y
a une raffinerie de betteraves à sucre qui a été
changée pour de la canne à sucre.
Le député de Lévis dit n'importe quoi. Il pense
qu'on va le croire. Il dit n'importe quoi, il n'a plus de
crédibilité. On ne vous croit plus, M. le député de
Lévis. Arrêtez de nous assommer avec des références
d'experts. Moi, je ne suis peut-être pas un expert dans le domaine du
sucre, mais je peux vous dire que j'ai suivi les domaines du pétrole et
de l'énergie et que, là aussi, il y avait des experts qui ont
avisé l'ancien gouvernement libéral fédéral qui
nous disait que les prix du pétrole étaient pour augmenter
indéfiniment. Il avait consulté un tas d'experts lui aussi. Vous
savez où est rendu le prix du pétrole? Il est rendu tellement bas
qu'on se demande si cela sera possible d'exploiter les puits de pétrole
dans le nord des provinces des Prairies. On se demande si, au large de
Terre-Neuve, il sera possible d'exploiter Ibernia, parce que les prix du
pétrole sont très bas. Essayer de nous faire croire qu'il y a des
experts en Allemagne, en Angleterre, aux États-Unis ou ailleurs qui vont
nous dire que le prix du pétrole ou le prix du sucre va être
à tel et tel niveau dans un an, deux ans, trois ans, je ne vous crois
pas et il n'y a pas grand monde qui va vous croire là-dessus.
Bien sûr qu'on doit consulter des experts, mais
l'expérience du pétrole, l'expérience du cuivre,
l'expérience de plusieurs "commodities" nous enseignent qu'on doit
regarder les prévisions des experts dans tous ces domaines avec un grain
de sel, les regarder et nous dire: Oui, ils nous disent cela et cela ne leur
coûte pas cher. Je comprends que tous les trois mois ils sortent un
feuillet d'explication et un feuillet de prévision. Ces gens-là
gagnent leur vie. Je crois que ceux qui suivent un domaine donné - je le
fais moi-même - doivent lire les prévisions qu'ils nous donnent.
Mais, ensuite, on se dit: Mon Dieu s'ils se trompent comme ils se sont
trompés il y a trois ans ou quatre ans dans le pétrole, à
quelle place cela mènera-t-il? M. le Président, tout cela pour
dire que les experts du député de Lévis je les respecte,
je ne les connais pas mais j'imagine que ce sont de bons experts. Bien
sûr qu'il peut y avoir des avantages pour chacun d'entre nous à
les consulter mais, nous faire accroire que ces gens possèdent la
vérité éternelle et qu'à partir de leurs
prévisions on va être capable de démontrer que dans deux
ans, dans trois ans ou dans cinq ans on fera des profits avec la betterave
à sucre à Saint-Hilaire, j'aime autant le jugement de gens qui
ont suivi ce dossier et qui nous ont dit qu'en 1979 le député de
Lévis avait fait des prévisions et des hypothèses et que
ces hypothèses ne se sont pas révélées exactes.
Sur le prix de la transaction, je crois que si on veut citer des experts
il y en a à Toronto aussi des experts que l'on peut citer. Après
avoir annoncé la vente à Lantic non pas pour 10 000 000 $ mais
pour 50 000 000 $, plus le fait que dans l'avenir on pourra reprendre toute la
propriété pour un dollar et qu'on pourra assumer cette
propriété dans l'avenir une fois que la transaction aura
été complétée dans plusieurs mois d'ici... Je cite:
"Analysts applauded sale by province of its sugar refinery". C'était
dans la Gazette du 11 mars 1986. "In fact the price to be paid for the
Governement sugar refinery which is Quebec's third biggest sugar producer is so
generous that it raised questions in the mind of one Toronto based analyst. "
Il y a au moins un analyste à Toronto qui disait que c'était
tellement extraordinaire le prix qu'on avait obtenu qu'il a dit: Je ne le crois
pas, cela n'a pas de bon sens que le gouvernement puisse obtenir 50 000 000 $
pour une compagnie en faillite. Ils ont dû avoir de très bons
négociateurs. Et, de fait, c'est vrai qu'on avait de très bons
négociateurs. Ce sont ces gens du ministère des Finances qui sont
allés chercher 50 000 000 $, plus le droit pour un dollar et autres
considérations de ravoir la propriété, de
l'équipement et des propriétés à Saint-Hilaire.
M. le Président, le député de Lévis,
même quand il parle fort, ne nous fait pas peur. Quand il nous dit qu'il
a la vérité éternelle, on ne le croit plus. Il nous dit
qu'il faudrait consulter un tas d'experts parce que tous ces gens lui ont dit
dans le passé qu'il avait raison. Je comprends. Il leur faisait
tellement peur qu'à chaque fois qu'il les consultait ils lui cachaient
la vérité pour l'encenser et le flatter dans le sens du poil.
M. le Président, nous avons pris la meilleure décision
dans les circonstances. L'avenir, personne ne le connaît. Tout ce que je
sais c'est que le prix international du sucre dans le moment est à 0,
065 $ et que
pour rentabiliser la raffinerie du sucre il faudrait que le prix du
sucre soit au moins a 0, 20 $ américains. On est loin du compte, M. le
Président. La situation est telle que dans les circonstances nous avons
un déficit et que nous voulons abolir le déficit.
M. Garon: Question de règlement.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Excusez.
M. Fortier: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Tremblay, Iberville); Quel
règlement? Ce n'est pas un débat.
M. Garon: M. le Président, en vertu du règlement,
un député ne peut pas prêter des intentions malicieuses
à un autre député, d'autant plus qu'il ne peut pas me
prêter l'intention d'essayer de faire peur à des Allemands et
à des gens de Londres.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): Alors, si vous
voulez poursuivre, M. le député. M. le ministre, excusez.
M. Fortier: Je suis député également. Cela
me fait toujours plaisir de me faire appeler député. Je crois que
mon rôle de député j'aime bien l'assumer malgré le
fait que mes responsabilités comme ministre ne me donnent pas autant de
temps qu'avant pour m'occuper de mes électeurs. Je prends toujours
plaisir à m'occuper des électeurs. Je crois qu'être
député c'est une fonction très honorable. Cela ne
m'insulte pas du tout lorsque vous m'appelez M. le député.
Alors, en terminant, l'ex-ministre nous a dit: II faudra mettre le
contrat sur la table. J'aimerais demander à l'ex-ministre si l'ancien
gouvernement a mis un seul contrat sur la table durant toute la période
pendant laquelle ils ont été au pouvoir. C'est une chose qui ne
se fait pas. Nous sommes prêts à répondre à un tas
de questions. Nous sommes prêts à démontrer que nous avons
pris la décision dans le meilleur intérêt du Québec.
Nous avons fait une vente privée avec une firme privée. Je crois
que nous devons respecter la confidentialité des négociations que
nous avons avec la firme Lantic. Je dois répondre que nous n'avons pas
l'intention de déposer le contrat de Lantic sur la table. De toute
façon, il est 22 heures. Tel que convenu, nous devons ajourner à
lundi.
Le Président (M. Tremblay, Iberville): C'est cela.
Actuellement, vu qu'il est 22 heures, nous ajournons à lundi 10
heures.
(Fin de la séance à 22 heures)