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(Dix heures neuf minutes)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
La commission des affaires sociales se réunit afin de poursuivre
l'étude des crédits du ministère de la Main-d'Oeuvre et de
la Sécurité du revenu concernant l'année financière
1986-1987. Les points à l'étude ce matin seront, dans l'ordre...
D'abord, est-ce qu'il y a des remplacements ce matin?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président, M. Rochefort
(Gouin) sera remplacé par M. Charbonneau (Verchères).
Le Président (M. Bélanger): D'accord.
Le Secrétaire: Mme Harel (Maisonneuve) agira en
remplacement de Mme Juneau (Johnson). C'est tout.
Le Président (M. Bélanger): De l'autre
côté, il n'y a pas de remplacement. Nous avons le quorum.
À l'ordre du jour, ce matin, nous procéderons de la
façon suivante: premièrement, la Régie des rentes du
Québec, c'est-à-dire le programme 4, Allocations familiales; le
programme 2, Administration déléguée de programmes en
sécurité du revenu; le programme 3, Direction et gestion de la
Commission des affaires sociales, est-ce bien cela?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La CAS.
Le Président (M. Bélanger): La CAS, d'accord.
Ensuite, la Commission des normes du travail; le programme 5, Allocations de
maternité et le programme 8, Sécurité du revenu des
chasseurs et piégeurs cris.
Régie des rentes du Québec
Donc, j'appelle le premier programme, la Régie des rentes du
Québec, programme 4 Allocations familiales. M. le député
de Verchères.
Sécurité du revenu à la
retraite
M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Comme je l'avais
indiqué au ministre, je crois qu'on s'est entendu à cet
égard. Le programme 4, Allocations familiales, nous permet d'aborder un
peu plus largement toute la problématique de la sécurité
du revenu à la retraite autant que des autres programmes de
sécurité du revenu qui sont administrés par la
Régie des rentes. Je voudrais commencer par le système
québécois de la sécurité du revenu à la
retraite. Il y a un an, presque jour pour jour, M. le Président, le 25
avril 1985, le gouvernement du Parti québécois publiait un projet
de réforme du système québécois de
sécurité du revenu à la retraite qui s'intitulait "Agir
maintenant pour demain", que le ministre a sans doute vu. Je ne sais pas s'il a
eu la chance d'en prendre connaissance. C'était une politique
québécoise de sécurité du revenu à la
retraite qui, finalement, évoquait quatre volets principaux d'une
réforme majeure du système québécois de
sécurité à la retraite, c'est-à-dire la question du
financement du Régime de rentes du Québec, deuxièmement,
le problème des régimes privés de retraite; le
troisième volet, c'étaient les femmes et les régimes de
retraite et le quatrième volet, la bonification du Régime de
rentes. Autour de ces quatre volets, il y avait une série de
problèmes majeurs qui étaient clairement exposés et mis
sur la table de l'opinion publique et de la société
québécoise. D'abord, je l'avais indiqué la semaine
dernière dans mes remarques préliminaires, il faut se rappeler
que la caisse se vide à cause, entre autres, de notre structure
démographique et du vieillissement de la population relié au fait
que notre taux de natalité n'est pas particulièrement mirobolant.
Si cela continue ainsi, au tournant du siècle, la réserve va
être complètement épuisée.
Par ailleurs, relié à cette réalité, il y a
aussi le fait que, si on ne change rien, les jeunes d'aujourd'hui autant que
les jeunes de demain vont avoir à subir un fardeau financier
inacceptable pour assurer à leurs aînés,
c'est-à-dire à nous, entre autres, au ministre et à moi
qui sommes à peu près du même âge, une retraite
convenable. Encore là, quand on regarde le coût qu'on leur ferait
porter, on peut penser que c'est un coût qui est carrément
inacceptable et qui serait difficile à assumer.
Un deuxième élément qui était abordé
très franchement dans ce projet de réforme globale et
fondamentale, c'était le problème du faible remplacement de la
valeur de la rente, avec la réalité qui est la suivante. En
fait, on remplace de moins en moins la valeur de la rente et cela oblige
de plus en plus de retraités à avoir recours à des
programmes d'assistance publique, entre autres, le système de
sécurité des rentes du fédéral, le SRG, si je ne me
trompe pas dans les vocables. C'est un problème important parce que,
finalement, on oblige de plus en plus les gens à avoir recours à
des systèmes d'assistance publique. Dans ces cas-là, dans les
faits, ce sont les contribuables québécois qui, en fin de compte,
sont amenés à payer la note par leurs taxes et leurs impôts
pour faire en sorte que ces systèmes d'assistance publique puissent
avoir les ressources nécessaires pour donner les fonds, les aides et les
assistances prévus par les lois.
Il y a un troisième type de problème, c'est le
problème des régimes privés supplémentaires aux
régimes publics qui existent, qui sont insuffisants à bien des
égards pour assurer un revenu adéquat aux retraités.
Encore là, cela a un peu la même conséquence que le
problème de la bonification, c'est qu'on oblige de plus en plus de
retraités à avoir recours aux programmes d'assistance publique
qui sont finalement puisés à même les fonds publics.
Le quatrième ordre de problème, c'est le nombre de femmes
qui atteignent l'âge de la retraite et dont les revenus sont
insuffisants, précaires. Ce nombre de femmes dans des situations
pénibles va en s'accroissant.
Si on regarde ces problèmes-là, qui sont majeurs et
complexes, on se rend compte que le gouvernement précédent avait
fait des propositions précises et enclenché un débat
d'envergure. On pourra toujours dire que cela a pris du temps, c'est vrai que
cela a pris du temps. C'est un problème complexe. D'ailleurs, certains
nous ont reproché, à un moment donné, de n'avoir pas agi
ou réagi suffisamment rapidement, mais qu'importe. L'important c'est que
les démarches préliminaires avaient été faites, de
telle sorte qu'on se retrouve globalement pour l'ensemble des dossiers du
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu,
dans le secteur de la sécurité è la retraite, avec
plusieurs projets majeurs en chantier. Le document qui avait été
préparé et présenté par le précédent
gouvernement avait aussi donné lieu à la préparation de
deux projets de loi particuliers dont l'un a été
déposé à l'Assemblée nationale, le projet de loi 5B
sur les régimes supplémentaires de rentes, pour rendre les
régimes de retraite privés plus accessibles, plus rentables et
transférables. On avait également amorcé une
révision en profondeur de la Régie des rentes du Québec,
particulièrement pour avoir le financement des prestations et le
renflouement de la caisse. Il y a eu, avec ces deux projets de loi qui ont
été préparés, dont l'un a été
présenté à l'Assemblée nationale, des consultations
publiques qui ont été amorcées. Des discussions avec le
gouvernement fédéral et les gouvernements des autres provinces
ont aussi été enclenchées, des mandats spéciaux ont
été donnés, entre autres, à la Régie des
rentes, pour la préparation de ces deux projets de loi dont on a fait
état. Il y a eu également un troisième projet de loi,
j'imagine, un projet de règlement, qui concernait un programme
d'allocations de retraite pour personnes au foyer qui ont ou qui ont eu charge
d'enfants. Relié à la préparation et à la
présentation du projet de loi 58 sur les régimes
supplémentaires de rentes, il y a eu également un rapport
spécial qui a été demandé par un groupe d'experts,
de spécialistes, sur "l'opérationnalisation" de la
transférabilité, finalement.
Face à cela, M. le Président, du côté
libéral, à l'exception d'un engagement électoral qu'on
pourrait dire électoraliste et un peu irréaliste dont on n'a
même pas parlé, à aucune reprise, dans le programme
politique du parti - c'est un engagement qui est arrivé à la
dernière minute pendant la campagne électorale, alors qu'on n'en
avait jamais fait état dans le programme politique du Parti
libéral, sur l'accès des femmes au foyer au régime des
rentes - à l'exception de cet engagement électoral, ce qu'on doit
dire, c'est que cela a été le silence complet pendant dix ans, M.
le Président. Le gouvernement précédent de M. Bourassa
avait commandé un rapport et celui-ci avait été
publié en 1977. Il s'appelle Cofirentes plus. Il n'y a pas eu de
réactions particulièrement flamboyantes de l'Opposition
libérale à l'époque et il n'y a pas eu non plus de
réactions à la suite du projet de réforme qui a
été présenté, il y a un an, en avril 1985.
Aujourd'hui, M. le Président, je pense qu'on va profiter de
l'occasion qui nous est offerte pour connaître les positions du
gouvernement, du ministre et du Parti libéral, d'abord sur le
financement, sur les hausses des cotisations que ce financement
nécessite. Je ne sais pas si le ministre a vu ce matin la
déclaration du président de la Caisse de dépôt dans
La Presse - le ministre m'exhibe sa revue de presse - j'ai l'original de
la Presse... Donc, finalement, c'est évident - le gouvernement
précédent l'avait indiqué dans son projet - qu'on doit
procéder à une hausse. Il y a une espèce de consensus qui
est intervenu avec les autres provinces également pour que cette hausse
intervienne le 1er janvier 1987. Il y a des divergences d'opinions quant
à l'augmentation de la hausse. Pour -certains, c'est 0,2 %; au
gouvernement du Québec, 0,4 %; mais ce qui était clair, c'est
qu'on s'entendait tous, semblait-il, aux niveaux fédéral et
provincial, pour ce qui est des provinces, pour qu'il y ait une augmentation le
1er janvier 1987.
Voici ce que je voudrais savoir d'abord du ministre en rapport avec le
financement. Je vais les prendre un à un pour qu'on puisse se comprendre
et avoir une discussion qui soit à la fois logique et cohérente,
si le ministre n'a pas d'objection.
J'aborderai d'abord le problème du financement et, ensuite, le
problème de la bonification, le problème des régimes
supplémentaires et, finalement, le problème des femmes au foyer.
Dans l'immédiat, à l'égard du financement et des hausses
de cotisations que le renflouement de la Caisse nécessiterait, quelle
est la position du ministre à ce moment-ci? Est-ce que le ministre
entend donner suite au projet de loi qui était en préparation au
moment des dernières élections? Est-ce que des discussions se
poursuivent à cet égard entre les provinces et le gouvernement
fédéral? En regard de l'échéance du 1er janvier
1987, pour les hausses de cotisations, qu'est-ce qui arrive?
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.
Financement
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sans vouloir en faire mes
remarques préliminaires, je voudrais vous présenter les gens qui
m'accompagnent, les attachés politiques qui étaient là la
semaine dernière: Jean Larivière, Jacques Dupuis, M. le
président de la Régie des rentes du Québec, M. Claude
Legault.
Deuxièmement, pour les fins du Journal des débats, je
pense que je puis dire qu'il y a eu entente entre le représentant de
l'Opposition et le ministre pour qu'on réserve dix ou quinze minutes
vers la fin pour donner les réponses aux questions dont on avait pris
avis lors de séances précédentes, de façon qu'il
apparaisse dans le Journal des débats qu'il y a eu des réponses
è ces questions.
Sur le sujet comme tel, ce matin, et quant à
l'élément financement - je suis prêt à suivre le
plan d'action qu'a fixé l'Opposition sur le sujet - il y a
peut-être quelques petites remarques qui valent la peine d'être
prises en considération avant de parler des gestes à poser.
Quelle est la situation actuelle? Est-ce qu'à la Caisse de
dépôt et placement, actuellement, on est dans une situation
fragile ou dans une situation assez solide, au moment où l'on se parle?
Là, je dirai au député de l'Opposition qu'il avait raison
de s'inquiéter, vers l'an 2000, des courbes que l'on peut faire à
partir du niveau de financement actuel, du nombre de
bénéficiaires qui arriveront à cause de la courbe de
vieillissement, etc., et de la courbe démographique.
Présentement, notre régime des rentes vaut environ 12 % et
on y paie 3,6 %. Cela nous place dans une situation comparable à ce qui
se passe ailleurs au Canada, sauf qu'il faut tenir pour acquis qu'au
Québec on a peut-être une courbe de vieillissement ou une
démographie différente de celle des autres provinces, ce dont il
faut tenir compte dans notre planification future.
Quant à l'augmentation des cotisations, dont on a fait
état ce matin dans le journal La Presse, j'indiquerai au
député qu'au lendemain de l'assermentation du présent
cabinet, si ma mémoire est exacte, le ministre des Finances, le
député de Bonaventure, a quitté en direction de Toronto
où un accord a été signé entre l'ensemble des
provinces et des ministres des Finances qui étaient là,
prévoyant une augmentation des cotisations, au cours des cinq prochaines
années, de 0,2 % chaque année. De sorte que, en 1991 - et cela
commence le 1er janvier 1987 - notre taux ne sera plus à 3,6 %, mais se
retrouvera augmenté à 4,6 % à ce moment-là.
M. Charbonneau: Je constate qu'il y a une divergence, dès
le départ. Le ministre des Finances et, je présume, le ministre
de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu ont
modifié la position qui était celle que le Québec
défendait à ce moment-là. Dans le document de Mme Marois
et la proposition que le gouvernement avait mise sur la table avant les
élections, c'était 0,4 %, ce qui, de l'avis de plusieurs,
était le minimum, si l'on voulait faire en sorte que la Régie des
rentes, autant que la Caisse de dépôt et placement, mais plus
particulièrement la Régie des rentes, soit en mesure de faire
face à ses obligations et de tenir compte aussi du problème du
fardeau qui ne doit pas être excessif pour la génération
qui nous suit.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense que ces
éléments ont été pris en considération. S'il
y avait divergence - et, là, vous m'informez que c'était 0,4 %,
etc., mais cela n'a pas été déposé sur la table
devant l'ensemble des ministres des Finances - en tenant pour acquis que le
cabinet a été assermenté le 12 et que l'entente fut
signée le 13, je dirais que l'input des fonctionnaires qui ont servi
sous l'ancien gouvernement et qui ont servi sous le nouveau gouvernement, avec
toute la transition qui s'est faite dans la nuit du 12 au 13, devait être
un input équivalent. Pour en arriver à une entente -je ne sais
pas si, dans les négociations antérieures, il avait
été question de 0,6, 0,4 ou de 0,3 - tout ce que je sais, c'est
que 24 heures après l'assermentation du nouveau gouvernement, une
entente pancanadienne se signe à 0,2. Là, j'imagine que, bien
qu'il ait une expérience énorme de la vie politique -c'est
peut-être le doyen de nous tous - le
nouveau ministre des Finances a dû effectuer, dans un temps
très restreint, de larges et profondes consultations chez les
fonctionnaires qui avaient préparé les dossiers pour l'ancien
gouvernement. Dans sa sagesse et dans le but d'en arriver à une entente
pancanadienne, c'est le chiffre 0,2 qui a été retenu. Â ce
qu'on nous indique, le danger que vous soulignez ne serait pas présent
au cours des prochaines années parce qu'on augmente essentiellement les
taux de cotisation de 1 % au cours des cinq prochaines années. Cela
place le Québec, au moment où l'on se parle, dans une position
concurrentielle et compétitive face à ces voisins des autres
province.
Nous retenons que la courbe démographique n'est pas la même
au Québec qu'ailleurs; lorsque l'on pourra prétendre que les
augmentations ne seront pas suffisantes ou qu'elles seront trop
élevées, il faudra faire des réajustements. Mais, les
experts, les conseillers, à la suite des études que vous avez
commandées comme gouvernement è l'époque, nous disent que
l'entente qui a été signée est suffisante pour assurer une
équité, c'est-à-dire ne pas pénaliser davantage un
groupe de citoyens par rapport à un autre groupe quant au financement.
Cela manque d'équité ailleurs.
M. Charbonneau: M. le Président, je ne sais pas de quelle
étude le ministre parle. J'ai consulté plusieurs documents pour
préparer nos travaux de ce matin. J'ai consulté, entre autres,
une bonne partie des documents qui ont servi à la préparation du
livre vert qui est en fait un livre blanc; c'est un projet de politique
québécoise sur la sécurité du revenu à la
retraite. Ce que je constate, c'est que partout la proposition qui avait
été retenue par le précédent gouvernement
était 0,4. J'aimerais bien connaître les études... Quels
sont les études ou les avis différents qui seraient intervenus,
auquel le ministre fait allusion, qui ne sont pas portés à ma
connaissance, lesquels seraient survenus dans les derniers jours du
régime politique du Parti québécois?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais peut-être...
M. Charbonneau: Parce que, écoutez...
M. Paradis (Brome-Missisquoi); ...vous éviter bien des
phrases. Je vais vous dire que j'ai été assermenté le 12,
que l'entente a été signée le 13 par le ministre des
Finances et que, dans la nuit du 12 au 13, je n'ai pas consulté les
études auxquelles vous faites référence, car ce
n'était pas moi qui m'en allais a Toronto pour signer au nom du
gouvernement du Québec. Mais, j'ai suffisamment confiance au ministre
des Finances, député de Bonaventure, à sa vaste
expérience, ainsi qu'aux fonctionnaires qui l'ont conseillé dans
ce domaine pour vous dire que cette proposition n'a pas été
tirée des nuages et que s'il y avait une autre proposition, qui
était tellement loin de celle qui a été signée,
c'était peut-être celle-là qui était tirée
des nuages.
M. Charbonneau: M. le Président, j'aimerais bien que le
ministre nous donne un peu plus d'information. Je veux bien croire qu'il
était nouveau, mais son collègue des Finances aussi. Dans la
mesure où on me dit s'appuyer sur les opinions des fonctionnaires qui
étaient là et qui continuent d'être là, c'est
très bien. Mais quelles sont ces opinions, ces avis ou ces documents qui
ont amené la position gouvernementale à changer alors que
personne n'en avait entendu parler?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense qu'il vous manque un
élément. Ce n'est pas le Québec seul qui prend une
décision dans ce domaine, c'est une décision pancanadienne. On
peut prétendre... Je peux faire des scénarios, je n'étais
pas à Toronto. Mais il y a peut-être des provinces qui sont
arrivées là et qui ont dit: Écoutez, à cause de
notre courbe démographique, à cause de telle situation, on ne
veut pas d'augmentation. Peut-être que d'autres ont dit: Nous voulons
0,5; et d'autres ont peut-être dit autre chose. C'est de la
négociation. C'est un élément... Vous avez tellement
décrété du temps où vous étiez là,
que je ne sais pas si vous vous souvenez de la signification du terme
"négociation". Et lorsque vous négociez sur le plan pancanadien,
quelquefois vous obtenez ce que vous avez demandé dans votre position de
départ, quelquefois vous obtenez davantage, quelquefois vous obtenez
moins. Mais, est-ce que dans ce cas, si nous avions obtenu davantage, nous
aurions obtenu davantage pour la progression de l'économie
québécoise et la création d'emplois, au sortir d'une crise
économique, ou si on aurait obtenu moins dans l'ensemble de
l'économie? Ce sont des discussions philosophiques que je suis
prêt à avoir avec vous tout l'avant-midi. (10 h 30)
M. Charbonneau: Écoutez, si le ministre me parle de
négociations, je veux bien. Mais, dans les négociations, tu en
gagnes et tu en perds. On vient de nous dire que, finalement, quant è la
position du Québec, on a dû reculer de moitié par rapport
à notre position initiale qui avait été publiquement
énoncée dans le document gouvernemental. Qu'est-ce qu'on a
gagné en échange par rapport à nos demandes?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que je peux vous poser une
question de précision?
M. Charbonneau: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous me dites que le
livre que je tiens ici, qui s'intitule: "Agir maintenant pour demain",
était la position de l'ancien gouvernement ou n'était-ce pas
plutôt une position ministérielle?
M. Charbonneau: C'était une position signée par
deux ministres qui ont eu l'autorisation du Conseil des ministres.
C'était une politique qui était présentée par le
gouvernement...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai posé une question
très précise parce qu'il y a une différence. Il y a
plusieurs ministres dans l'ancien cabinet qui vont vous dire qu'il y a une
différence fondamentale. Est-ce que c'était une position
ministérielle ou une position gouvernementale?
M. Charbonneau: M. le Président, si le ministre veut
commencer à jouer sur les mots, c'est son problème. Ce que je
vous dis, c'est que ce document a été publié par deux
ministres du gouvernement du Québec...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Position ministérielle.
M. Charbonneau: Non, non, un instant! Après autorisation
du Conseil des ministres. Pensez-vous qu'un document... Ça ne fait pas
assez longtemps que vous êtes au Conseil des ministres, je vais vous
donner quelques petites leçons. Un document comme celui-là ne
peut pas sortir et être publié avec la signature de deux ministres
sans que, d'abord, le Conseil des ministres l'ait autorisé.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez! Le Conseil des ministres
a autorisé à sortir le document pour fins de consultation. Mais,
il ne s'agit pas d'une position gouvernementale, à ce qu'on me dit. Je
voudrais qu'on soit clair. II a autorisé deux ministres à le
publier pour obtenir un débat.
M. Charbonneau: Justement, dans la mesure où, finalement,
le gouvernement pense que les propositions qui sont... Un livre blanc, c'est
cela. Ce n'est pas juste...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord, c'est cela. C'est un
livre blanc.
M. Charbonneau: Un livre blanc, on s'entend sur ce que c'est. Un
livre blanc, c'est une position gouvernementale sujette à
discussion.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II est orange, mais pour les fins
de la discussion, disons qu'il est blanc.
M. Charbonneau: Les livres orange... Dans le jargon, il est
orange parce que c'est la couleur de la couverture des "marketeurs" ou des gens
qui ont conçu la présentation publicitaire ou graphique. Ce qu'on
entend, dans le jargon gouvernemental, par livre blanc, c'est une politique
gouvernementale qui est soumise à la consultation, mais qui fait
état des positions du gouvernement. Positions qui, éventuellement
- bien sûr, M. le Président - peuvent être sujettes à
des modifications dans la mesure où le gouvernement soumet sa
proposition de politiques à une consultation publique. À cet
égard, peut-être que le ministre, avant d'aborder une autre
question, pourrait nous indiquer globalement, sur l'ensemble du document dont
on parle, quelle est sa position? Est-ce qu'il entend donner suite à la
consultation qui avait été amorcée?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour être certain qu'on
s'entend bien, est-ce que le livre orange est un livre blanc ou un livre vert?
Je veux qu'on se comprenne bien. Si c'était un livre blanc, ce serait la
position gouvernementale. Si c'est un livre vert, c'est pour fins de
consultation.
M. Charbonneau: Le ministre semble avoir oublié que c'est
maintenant l'Opposition qui pose des questions et qu'il n'est plus à sa
place, c'est la mienne.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, mais je voudrais savoir. Je
voudrais qu'on s'entende. Autrement, je peux vous répondre n'importe
quoi.
M. Charbonneau: Je crois que ce document-là,
c'était la proposition gouvernementale soumise à la discussion
publique. Ce que je demande maintenant au ministre, c'est ce qu'il entend faire
de la consultation qui devait avoir lieu sur l'ensemble des
problématiques et des solutions qui étaient avancées dans
le document. Il nous indique qu'une partie de la proposition gouvernementale
était dans ce document-là. Elle a été
modifiée par une entente fédérale-provinciale ou
interprovinciale, dès le 13 décembre et ce fut l'objet de
négociations. Qu'est-ce qui a avantagé le Québec dans ces
négociations, dans la mesure où la position qui était
énoncée dans le document gouvernemental n'est pas celle qui a
été signée par le gouvernement du Québec dans un
processus de négociations que le ministre connaît bien? En
échange, qu'est-ce que le gouvernement du Québec a obtenu comme
gain ou comme assurance de la part de ses partenaires de la
fédération?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Premièrement, j'aimerais -
et en cela, on va peut-être réussir à s'entendre sur le
vocabulaire - référer le député de
l'Opposition à la page 6, où il est dit très clairement
que le document auquel on a fait référence, le livre orange,
publie le présent énoncé d'orientation pour fins de
consultation. Donc, il s'agit d'un énoncé d'orientation qui est
publié pour fins de consultation.
Quant à la question précise sur te financement...
Pardon?
M. Charbonneau: C'est ce que j'ai dit.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est ce que vous aviez dit.
Excusez-moi. C'est parce que vous aviez dit que c'était une politique
gouvernementale.
M. Charbonneau: C'est marqué: "Politique
québécoise de sécurité du revenu à la
retraite". Ce n'est pas moi qui l'invente, c'est le titre du document.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, on en a vu des
titres avec le Parti québécois. Cela ne dit pas toujours ce que
c'est exactement. Je lis ce que M. Chevrette a signé et ce que Mme
Marois a signé. Eux, ce qu'ils disent, ils ne disent pas que c'est le
titre, ils ne se contentent pas de ça. Ils nous expliquent, pour ceux et
celles qui suivent et qui veulent les lire, que "le présent document est
un énoncé d'orientation pour fins de consultation". Je les prends
au mot.
M. Charbonneau: Ce que je demande...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne m'arrêterai pas au
titre, même si le député veut que je m'arrête au
titre.
M. Charbonneau: Si le ministre ne veut pas s'arrêter au
titre, dans ce cas, qu'il réponde aux deux questions suivantes. Je les
répète:
Premièrement: Dans cet énoncé d'orientation soumis
è la consultation - je vais prendre le vocabulaire du ministre
-publique, il y avait à l'égard du problème du financement
du régime des rentes une proposition qui était, je
présume, suffisamment endossée par le gouvernement pour qu'elle
puisse permettre à des ministres de se lancer sur la place publique et
de l'évoquer. Or, le ministre nous informe, ce matin, que le 13
décembre, il y a eu une entente fédérale-provinciale ou
interprovinciale, ce n'est pas clair dans mon esprit, mais, peu importe, qui
modifie à la baisse la proposition sur la table publique soumise par le
gouvernement précédent. Le ministre nous a indiqué que
c'était dans un processus de négociation que cette entente
était intervenue. Je le veux bien. Dans ce cas, dans la
négociation, qu'est-ce qu'on a eu en échange comme garantie ou
comme gain?
Deuxièmement: Quel que soit le titre du document qu'on utilise -
le ministre nou9 a cité que c'était soumis à la
consultation publique - quelle est l'intention du nouveau gouvernement à
l'égard de cette problématique globale qui a été
élaborée? Est-ce que le nouveau gouvernement entend donner suite
a la consultation qui avait été amorcée autour de ce
document? Est-ce que cette consultation va se poursuivre, ou plutôt
s'amorcer, parce que les élections ont pas mal bouleversé le
calendrier. Est-ce que le débat public, la grosse discussion de famille
entre Québécois sur l'avenir de notre système de
sécurité du revenu à la retraite aura lieu sur la base de
la problématique énoncée et des pistes de solutions
élaborées dans ce document?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais tenter de répondre
le plus précisément passible à deux ou trois
questions.
Premièrement: S'agit-il d'une entente interprovinciale ou
fédérale-provinciale? La réponse est
fédérale-provinciale, et ces négociations ont
été pilotées par le ministre fédéral des
Finances, M. Wilson. Qu'est-ce que le Québec a obtenu dans ces
négociations? Le Québec a obtenu une augmentation de 2% et il a
obtenu d'être dans une position concurrentielle, face à ses
voisins. Je pense que c'est important comme élément, le gain que
le Québec a obtenu au cours de ces négociations.
Est-ce qu'on va continuer les consultations? J'ai, è ce jour,
rencontré, sur ce sujet, les grandes centrales syndicales, les grandes
organisations patronales, les gens de la Régie des rentes du
Québec sur te financement. Si vous me demandez; Est-ce que vous l'avez
autour du livre orange? Lorsque ça s'adonnait que ça tombait dans
le livre orange, ça tombait dans le livre orange. Quand ça
tombait à côté du livre orange, ça tombait è
côté du livre orange. Je ne me suis pas limité au livre
orange. Je suis arrivé en position et j'ai demandé aux gens:
Quant au financement de la Régie des rentes du Québec, qu'est-ce
que vous en pensez? Je ne leur ai pas dit: Je voudrais limiter vos
réflexions à un livre qui a été écrit, parce
que je n'en ai pas écrit de livre sur le sujet. J'ai demandé au
président: Qu'est-ce que vous en pensez? J'ai demandé aux
représentants des centrales syndicales: Quelles sont vos suggestions?
J'ai demandé aux représentants des parties patronales: Quelles
sont vos suggestions? II y en a qui recoupent des éléments
contenus dans le livre orange et il y en a qui en sortent. On tient compte des
suggestions des gens.
Car 5 ans, c'est vite passé et on va se retrouver en
négociation. Il ne faut pas attendre d'être rendu à la
cinquième année pour dire: Quant au financement futur, qu'est-ce
qu'on fait? On est déjà en
consultation sur ce sujet. Et si vous avez des idées lumineuses
quant au financement de la Régie des rentes à nous communiquer,
on est prêt à les recevoir. On est tout oreilles.
M. Charbonneau: M. le Président, relativement à la
discussion qui a été amorcée, le ministre a l'air de
vouloir minimiser l'importance de la discussion publique qui devait avoir lieu
autour de l'avenir...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Un aboutissement.
M. Charbonneau: ...du système de sécurité du
revenu. J'ai rappelé au début de mon intervention qu'il y avait
quatre volets. On va les prendre un à un.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez-moi, M. le
Président, je ne minimise rien. Il y a quatre volets et c'est le
député qui m'a demandé de rester sur le premier volet. Si
on veut parler des autres volets, qu'on le dise, mais qu'on ne m'accuse pas de
ne pas répondre sur l'ensemble des quatre volets quand on me demande de
répondre spécifiquement sur un volet, par exemple! Cela est un
peu filou comme approche.
M. Charbonneau: Je n'accuse pas le ministre, c'est lui,
d'ailleurs, qui a introduit la discussion sur le livre orange et j'en ai
profité pour lui demander globalement ce qu'il entendait faire à
l'égard de la consultation.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je
m'excuse.
M. Charbonneau: S'il préfère parler de...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne veux pas abuser... Je ne
veux pas interrompre le député, mais je n'ai pas introduit la
discussion sur le livre orange. Je ne peux pas, moi...
M. Charbonneau: ...procédure, M. le Président, cela
ne me tente pas ce matin et je pense que les sujets que l'on a à aborder
sont suffisamment importants pour qu'on ne perde pas notre temps sur des
virgules, des parenthèses ou des éclats de voix que le ministre
pourrait avoir.
Dans ce cas-là, ce que l'on doit comprendre de la réponse
du ministre, c'est que sur le financement, pour le moment, il n'y a plus rien
à dire avant les prochaines années. Le ministre va consulter en
privé, comme il l'a fait au cours des dernières semaines, mais le
débat public qui devait avoir lieu sur le financement du Régime
de rentes du Québec et le renflouement de la caisse n'a pas eu lieu,
parce qu'à un moment donné est intervenue une entente et le
ministre présente un gain comme étant quelque chose d'acquis. Je
rappellerai qu'en 1981 il y avait une entente entre les autres provinces
à l'égard de ce qui a été convenu au mois de
décembre 1985, alors que la position du Québec, c'était
plutôt d'aller un peu plus loin. Et là, on me dit que le
Québec a dû ou a décidé de se rallier à la
position des autres provinces. Très bien, mais qu'a-t-on eu en
échange? On n'a rien gagné, c'était la position des autres
il y a quatre ans avant. Qu'a-t-on gagné dans une optique d'amener les
autres partenaires de la fédération à notre point de vue
initial qui était que cette augmentation des cotisations n'était
peut-être pas suffisante pour faire face aux obligations qui attendent la
Régie des rentes au tournant du siècle et qui va permettre aussi
aux générations qui nous suivent de ne pas porter un fardeau trop
élevé pour assumer la retraite du ministre, la mienne et celle
des gens de notre génération, ceux que certains ont
qualifiés de parvenus de la Révolution tranquille?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, moi, je suis
prêt à vous dire que le Québec, ce qu'il a gagné,
c'est une augmentation. Maintenant, pourquoi ne parle-t-on pas d'une
augmentation de 25 % si on veut régler le problème, une fois pour
toutes? C'est parce que sur le plan économique...
M. Charbonneau: De quoi parle-t-on?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur le plan économique, on
doit se maintenir dans une position concurrentielle, si on veut attirer ici les
investissements qui sont créateurs d'emplois. Il y a un équilibre
à garder. La position que vous prenez, c'est de dire: Qu'est-ce que le
Québec a gagné? Le Québec, son Régime de rentes, il
peut décider qu'il sera complètement disparate, ne pas tenir
compte de ce qui se passe ailleurs sur la planète et dire que la
priorité fondamentale de l'actuel gouvernement n'est pas la
création d'emplois au Québec, mais d'assurer votre retraite, M.
le député, et la mienne. Bien, cela fait partie des
priorités du gouvernement, mais la priorité fondamentale que l'on
a présentée à l'électorat, pendant la campagne
électorale, c'était la création d'emplois permanents au
Québec. Et lorsqu'on parle de création d'emplois permanents, il
faut être très attentif à ce qui se passe dans notre
environnement. Ce que le Québec a gagné, c'est un environnement
compétitif et concurrentiel avec une augmentation raisonnable - et ce
n'est pas le député qui vous le dit, ou le ministre, ce sont les
actuaires - des cotisations pour assurer un financement sain.
Maintenant, le débat est-il clos? Je vous dirai que, pour les
cinq prochaines années, la signature du gouvernement du Québec
est apposée et, en tout cas, pour le gouvernement actuel, pour les
libéraux, une signature, cela veut dire quelque chose.
M. Charbonneau: Attention! Vous ne dites pas cela au bon
député.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On ne fera pas ce que vous avez
fait lorsque la signature du gouvernement du Québec a été
apposée au bas du contrat des fonctionnaires et dire que la signature ne
vaut rien.
M. Charbonneau: Non, non, M. le ministre, ne dites pas cela au
député de Verchères. La signature du Parti libéral
ne valait rien, aux dernières élections, quand on a promis aux
gens de la raffinerie de sucre...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous parle de la signature, M.
le député, du gouvernement du Québec. La signature du
gouvernement du Québec, lorsqu'elle a été apposée
par un gouvernement libéral, a toujours été
respectée et quand elle a été apposée sur un
contrat par un gouvernement péquiste, elle n'a pas été
respectée. On entend la respecter. Est-ce que cela veut dire...
M. Charbonneau: Que le ministre ne commence pas ce
débat-là ce matin, parce qu'il est très mal placé
pour le faire avec le député de Verchères.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que cela veut dire que le
débat...
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que cela veut dire que le
débat est clos? Bien, pour les cinq prochaines années... On vous
les a donnés jusqu'en 1991, les taux d'augmentation. J'ai
également indiqué que -et là je vous demanderais de bien
comprendre ce que j'ai dit - si vous avez des suggestions, si d'autres groupes,
parce qu'on a consulté les groupes qui sont très
intéressés à ce sujet-là, veulent nous faire
parvenir, pour la prochaine négociation, leurs points de vue, nous
allions les considérer à leur mérite. Nous avons
été élus, non pas pour fermer les dossiers et attendre
d'être au pied du mur, dans cinq ans, sans entreprendre de
négociations. Présentement, nous sommes intéressés
à recevoir tous les avis éclairés qu'on peut avoir sur le
sujet, quant à l'augmentation, la diminution, la stabilisation des taux
pour les années 1991 et suivantes. (10 h 45)
M. Charbonneau: M. le Président, ce que je constate, c'est
que le ministre essaie de nous faire croire qu'on va se contenter ici, dans
l'Opposition et peut-être dans l'opinion publique, de consultations en
catimini. Ce qu'on a souhaité... Je crois que le sujet est suffisamment
important pour qu'on exige que ce genre de discussion puisse être
débattu sur la place publique. Ce n'est pas tout de donner des petits
avis et des petits mémos confidentiels au ministre, ce qu'on lui dit
c'est que, nous, on avait amorcé une consultation publique. Je lui
rappellerai simplement une phrase...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le député...
M. Charbonneau: Si le ministre me permet de terminer...
M. Paradis (Brome-Minsisquoi): M. le député, est-ce
que vous me suggérez de renier la signature du Québec qui est
apposée pour cinq ans et de donner suite à autre chose? C'est
cela, oui?
M. Charbonneau: Ce que je dis au ministre, c'est que la signature
a été donnée, mais que cela ne règle pas le
problème. À cet égard, je lui rappellerais une phrase de
l'éditorialiste du Devoir, Jean Francoeur, qui est probablement un des
journalistes qui s'est le plus penché sur cette question au cours des
dernières années. Il disait: Le moment est venu de dire
clairement aux Québécois que ce Régime des rentes
coûte en réalité trois fois plus cher que le taux actuel de
cotisation et que, finalement, s'il coûte trois fois plus cher, la hausse
que le gouvernement a acceptée à la vitesse... Une journée
après son élection, il n'y avait rien qui l'obligeait à
aller si vite que cela. Il aurait pu dire à ses partenaires;
Écoutez, on arrive, laissez-nous le temps de regarder un peu le dossier.
Qu'est-ce qui vous a obligés à agir aussi rapidement? Une
journée après l'assermenta-tion du cabinet, le ministre des
Finances se précipite à Toronto, se dépêche de
signer, pendant qu'il y avait un document gouvernemental sur la table qui
proposait d'emprunter une autre direction.
C'est vrai, le ministre a raison de rappeler qu'il y a aussi dans la
balance la problématique de l'impact d'une hausse sur la
compétitivité des entreprises. C'est évident. Personne ne
nie cela. Ce que je dis au ministre, c'est qu'on s'est pas mal pressé,
d'une part, et que cela ne règle pas le problème
complètement, d'autre part. Qu'est-ce qu'il entend faire au cours des
prochaines années, maintenant que le gouvernement a signé
à la hâte un document qui nous lie pour les prochaines
années? Qu'est-ce qu'il entend faire pour faire en sorte que le
problème soit regardé dans son ensemble, eu
égard au financement? On nous disait, il y a à peine un an
- j'imagine que les experts ne se sont pas contredits en l'espace d'un an, que
les problèmes qu'on nous signalait il y a un an sont toujours les
mêmes - que, dans le fond, le régime coûte trois fois plus
cher que le taux actuel, que ce qu'on paie. J'imagine que l'action que le
gouvernement a prise l'automne dernier en précipitation ne règle
pas complètement le problème.
À cet égard, l'importance du sujet nous commande de
demander au ministre ce qu'on entend faire. Il y a un débat
éclairé sur comment on doit se comporter comme
société à l'égard du financement de notre
système de sécurité à la retraite. Est-ce qu'on
préfère remettre le problème aux générations
qui nous suivent et leur laisser le fardeau d'assumer, finalement, des
retraites correctes, par le biais de programmes d'assistance publique? Parce
que c'est cela, dans la mesure où on a un mauvais système
d'assurance, où on a un système d'assurance qui ne réussit
pas à donner suffisamment de revenu à la retraite pour permettre
aux gens de faire face à leurs obligations, la conséquence, c'est
que les gens sont obligés d'avoir recours à un système
d'assistance publique. Et le système d'assistance publique, que
voulez-vous, il est financé par les taxes et les impôts, alors que
le système d'assurance, lui, est financé, comme n'importe quel
système d'assurance, par un prélèvement.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela prenait peut-être
l'éditorialiste du Devoir, M. Francoeur, pour qu'il y ait entente au
moins sur un sujet entre l'Opposition et le ministre. Je pense que j'ai
indiqué très clairement -ce furent à peu près
certainement les premiers chiffres que j'ai cités au début de
cette intervention - que notre régime valait 12 % et qu'on payait 3,6 %
et je pense que M. Francoeur a raison de dire que ce qui vaut 12 % devrait
être payé 12 % sur le plan de la pure mathématique, pour
arriver à se financer. Mais je l'ai indiqué au
député, il y a des choix à faire sur le plan
gouvernemental, et le choix a été fait en fonction de la
situation concurrentielle du Québec sur le plan économique de
façon à attirer ici des investissements qui seront
générateurs d'emplois permanents. Peut-être que, avec des
emplois permanents, on peut percevoir des impôts et des taxes qui nous
permettent de boucler le budget. Cela a été un choix politique
qui a été fait.
Vous nous reprochez, par exemple, de ne pas avoir appliqué ce
document sur le plan du financement. Je vous dirai que je reconnais là
le langage du Parti québécois. On nous lance des documents de
consultation et on nous dit: Pourquoi ne les appliquez-vous pas
intégralement? Ce n'est plus de la consultation. Il y a eu, le 2
décembre, n'en déplaise à certaines gens, des
élections. La population a choisi la création d'emplois
permanents au Québec et elle a mandaté le gouvernement pour qu'il
crée ce climat. Dans une entente, nous avons négocié une
augmentation qui, en vigueur à compter du 1er janvier, fait en sorte que
la situation sera plus saine que s'il n'y avait pas eu entente ou que s'il n'y
avait pas eu augmentation.
C'est sûr qu'on peut toujours rêver d'une situation
idéale. La situation idéale, je vous le répète,
c'est 12 %. M. le député, est-ce que vous pouvez me dire, s'il y
avait eu une augmentation de 12 %, quel aurait l'impact de cette augmentation
sur les investissements créateurs d'emplois permanents au Québec?
Là, on aurait abandonné notre dialectique en disant: II est
certain que les fardeaux vont être répartis équitablement
et que tout le monde va payer sa part.
Il y a eu des inéquités, au cours des années, en ce
qui concerne le Régime de rentes. Je dirais que les premiers
bénéficiaires, ceux et celles qui ont payé pendant
très peu d'années pour récolter des fruits pendant
beaucoup d'années, ont été beaucoup plus
gâtés que ceux et celles qui se retrouvent à l'autre bout
du système. Personne ne s'en est plaint. Pourquoi personne ne s'en
est-il plaint? Parce que, de façon pratique, le citoyen retirait plus
qu'il ne déposait. Il est certain, quand on se retrouve dans une
situation où le citoyen récolte plus qu'il ne paie, que c'est
bien rare qu'on a des argumentations sur le plan de l'équité. On
tente au maximum - et je pense que c'est la volonté de tout le monde
-d'éviter qu'il y en ait qui paient beaucoup plus qu'ils ne recevront.
Le point d'équilibre, c'est que les gens reçoivent ce qu'ils
paient. Cela, c'est la situation idéale. Si vous l'avez, cette
formule-là, livrez-la-nous; vous n'avez pas le droit de garder cela dans
votre poche.
M. Charbonneau: M. le Président.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous seriez
considéré comme traître à la société
québécoise si vous aviez cette formule et que vous ne la rendiez
pas publique...
M. Charbonneau: M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...cette formule qui permettrait
le point d'équilibre parfait à la Régie des rentes...
M. Charbonneau: Le ministre est un...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qui ferait en sorte que ceux et
celles...
M. Charbonneau: M. le Président.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qui ont payé peu, dans
le passé, et qui ont récolté beaucoup, se voient
rééquilibrés, je ne sais pas trop...
M. Charbonneau: Le ministre s'emporte, ce matin.
M. Paradis (Brome-Missisquoi); II faudrait avoir un impôt
rétroactif pour les faire contribuer, etc.
M. Charbonneau: Le ministre s'emporte un peu. Calmez-vous.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, mais, M. le
député de Verchères...
Le Président (M. Bélanger): ... M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne saborde pas, je tente de
mener votre logique à son point de finalité...
M. Charbonneau: Vous n'êtes pas obligé
d'exagérer dans le vocabulaire.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...et j'ai beaucoup de
difficulté à le faire sans tomber dans l'absurde, vous m'en
excuserez.
M. Charbonneau: Sans tomber dans l'exagération du
vocabulaire. Quand on est rendu à utiliser le mot "traître",
franchement... Je trouve que le ministre pourrait faire un peu attention
à ses propos et je lui rappellerai que, s'il voulait des suggestions, il
n'avait qu'à lire son document. Sauf que, s'il avait fait son devoir, il
aurait peut-être pu, dès qu'il a été
assermenté, quand il a appris que son collègue se
précipitait à Toronto, lui dire: Un instant, j'ai, dans mes
cahiers, des choses à regarder avant que vous alliez signer une entente
avec vos collègues des autres provinces. Ce n'est pas vrai, pour que
cela entre en vigueur le 1er janvier 1987, qu'il fallait que le 13
décembre 1985, cela soit signé, à la hâte, à
la précipitation.
Je pense que ce que j'ai dit au ministre, c'est que ce n'est pas
nécessairement la position qui était dans le document
déposé par Mme Marois en avril 1985 qui devait être la
position finale. Ce que j'ai dit, c'est qu'il y avait un document qui
était soumis à la consultation publique, qu'il y avait une
argumentation qui était développée et qui tend à
démontrer que l'augmentation de la proportion de la nature qui
était proposée dans le document aurait été plus
susceptible de permettre à la régie de faire face à ses
obligations.
Le gouvernement a choisi une autre voie, très bien, mais ce que
je constate, c'est que cela ne règle pas le problème, et, en
conséquence, plutôt que de nous demander des petits avis,
peut-être que le ministre pourrait revenir à la lecture. S'il n'a
pas eu le temps de lire, je comprends qu'il est ministre du Travail, de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, cela lui en fait
beaucoup, mais je lui rappellerai une autre citation de M. Francoeur, dans le
même éditorial qui disait, un peu plus loin... Parce que la
thèse du gouvernement fédéral, à un moment
donné, cela a été longtemps la répartition pure,
c'est-à-dire, finalement, on paie et on retire ce qu'on paie, pas plus.
Cette répartition pure est valable dans un contexte de stabilité
démographique où chaque génération reste à
peu près du même nombre que celle qui la précède et
celle qui la suit. Or, ce n'est pas du tout le cas. Le Canada dans son entier
et singulièrement le Québec devront traverser une période
où il y aura un afflux extraordinaire de personnes âgées a
la retraite. Les prestations qu'il faudra leur verser exigeront une hausse
brutale du taux des cotisations payées par la génération
alors au travail.
L'entente que le ministre endosse maintenant et qui a été
signée à la hâte -et c'est là le reproche qu'on fait
au gouvernement - ce n'est pas nécessairement de ne pas avoir
accepté complètement la proposition qui avait été
soumise à discussion publique, c'est de s'être
précipité, au lendemain de son assermentation, pour signer une
entente, alors que rien ne l'obligeait à le faire et qui ne règle
pas tout le problème.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que je peux
répondre?
M. Charbonneau: Ce n'est pas terminé, M. le ministre. Et
qui ne règle pas tout le problème.
Ce que je demande maintenant au ministre, une fois qu'il nous a dit que
cela est fait et que c'est valable pour les cinq prochaines années:
Quelles possibilités aurons-nous pour évaluer publiquement la
problématique du financement de notre système de
sécurité du revenu à la retraite, du Régime de
rentes du Québec, pour éviter que les générations
qui nous suivent ne soient poignées dans un étau étouffant
et insurmontable, elles et les entreprises de demain, qui sont peut-être
celles d'aujourd'hui, entreprises qui sont en expansion et qui, dans certains
cas, ne sont pas encore nées? C'est cela, finalement, le
problème. Maintenant que vous avez signé le document du 13
décembre - on ne refera pas l'histoire - pour les années qui
viennent, quelle est votre intention?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On ne refera pas l'histoire, mais
vous m'avez fait
des aveux qui m'ont un peu surpris, en tout cas, qui m'ont fait
sursauter. Vous m'avez dit: En 1981, on l'avait le 0,2 %... Ah! Excusez,
allez-y.
M. Charbonneau: Ce n'est pas cela que j'ai dit. M. le ministre,
ce que j'ai dit, c'est qu'il y avait une entente entre les autres provinces
parce que leur système est différent du nôtre et que,
dès 1981, elles s'entendaient pour le 0,2 %, mais que le gouvernement du
Québec, en 1985, lui, proposait 0,4 %. S'il a accepté 0,2 %,
c'est qu'il a dû, à la précipitation, changer d'opinion en
cours de route.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense que vous commencez
è comprendre. Vous dites: En 1981, on l'avait, le 0,2 %, mais on ne
pouvait pas l'appliquer parce qu'on avait une série d'excuses. Vous en
avez mentionné quelques-unes; si on avait parlé à d'autres
membres du cabinet ou peut-être à Mme Marois, ou en aurait eu
d'autres. Je sais que vous n'avez pas appliqué ce que vous aviez. Ou
vous l'aviez, ou vous ne l'aviez pas. Vous ne l'avez pas fait. Cela change le
portrait et on a hérité d'une situation.
Quand vous dites que cela a été signé en
catastrophe...
M. Charbonneau: Le ministre n'est pas clair, là.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pardon?
M. Charbonneau: La réponse du ministre n'est pas
claire.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On peut la préciser. Vous
me dites qu'en 1981 vous l'aviez, le 0,2 %, que c'était entendu entre
toutes les provinces. Quelque chose a dû achopper dans la
négociation quelque part pour que cela ne s'applique pas, non?
M. Charbonneau: Ce n'est pas ce que j'ai dit.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah bon!
Répétez-le.
M. Charbonneau: Ce que j'ai dit, c'est qu'il y a eu ce qu'on a
appelé le consensus de 1981, consensus auquel n'adhérait pas le
Québec parce que, s'il y avait adhéré, il ne serait pas
arrivé avec une proposition différente qu'il l'aurait
peut-être signée en 1981. Il y avait un consensus, semble-t-il,
dans les autres provinces.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais, si vous aviez
adhéré au consensus en 1981, il y aurait eu, en 1981, une
augmentation de 0,2 % et cela aurait fait progresser le système
toujours. Mais ce que vous avez fait, vous avez choisi, peut-être parce
que c'était pancanadien et que vous aviez des idées autres sur le
plan constitutionnel - en tout cas, en partie, à votre caucus, et c'est
divisé là-dessus aussi - vous avez dit: On ne signe pas.
Là, on a pris du retard. On aurait pu adopter la même attitude que
vous et dire: Nous non plus, on ne signe pas. Mais, finalement, qui paie pour
cet entêtement quand on dit qu'on ne signe pas et qu'on ne signe
rien?
Je reviens au lendemain de l'assermentation du cabinet. Vous dites: Ce
qu'on vous reproche, c'est d'avoir été assermentés la
veille et d'avoir signé cela le lendemain. Vous ne le pouviez pas, etc.
On n'était pas tout seul là-dedans. Il n'y a pas eu
d'élection au gouvernement fédéral ni dans toutes les
autres provinces canadiennes à la même date. Tout le monde des
autres provinces canadiennes... L'article de M. Francoeur s'adresse au
gouvernement canadien et aux gouvernements des autres provinces aussi.
J'imagine, à vous écouter parler, que personne, au gouvernement
fédéral ou dans les autres provinces, ne sait compter ou est
suffisamment responsable pour prendre des décisions. Je vous dis que M.
Francoeur a raison d'alerter l'opinion publique à cet effet, mais,
lorsque des décisions ont été prises, les autres provinces
avaient une certaine continuité sur le plan des gouvernements, sur le
plan des consultations, quand est arrivé un accord, pas seulement celui
de 0,2 %, 0,2 % durant cinq ans... C'est ce que vous n'avez peut-être pas
retenu. Cela ne fait pas une augmentation mirobolante, cela fait une
augmentation uniforme. (11 heures)
M. Charbonneau: C'est sur cette base que je lui demande: Comme ce
n'est pas une augmentation mirobolante et comme, selon les données que
nous avons, cela ne suffirait probablement pas... Je ne suis pas un actuaire,
je ne suis pas un expert et je présume que le ministre non plus. On a
à peu près le même temps de connaissance dans ce dossier,
lui et moi. Donc, n'étant pas un expert et vous non plus...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La qualité peut être
différente.
M. Charbonneau: ...ce qu'on peut dire, c'est qu'il semble, selon
les études qui ont été produites, que cela ne serait pas
suffisant pour régler le problème parce que... Et sur le
fondement de mes interventions, ce matin, à partir du moment où
le ministre nous dit... Je lui fait un reproche, c'est d'être allé
trop vite parce qu'il n'y avait rien qui l'obligeait à signer cela le 13
décembre, premièrement. M. le ministre peut différer
d'opinions, c'est son droit. Mais ce que je lui demande maintenant, c'est ce
qu'il
entend faire pour soumettre dans quelques années une proposition
qui va permettre aux Québécois d'avoir un système de
sécurité du revenu à la retraite, qui va leur permettre
d'avoir les rentes qu'ils doivent avoir et qui ne fera pas porter un fardeau
exagéré aux jeunes qui ne sont pas encore nés. C'est
ça le problème. Qu'est-ce qu'on va faire...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est la vraie question.
M. Charbonneau: ...au cours des prochaines années? Est-ce
que cela va être le même type de consultation, c'est-à-dire
pas de consultation ou en catimini, ou si le ministre est d'accord pour qu'il y
ait un débat public, des discussions publiques et que des
hypothèses soient soumises par son gouvernement autour desquelles il y
aura des opinions pour ou contre d'émises et à partir desquelles
on pourra tracer une voie et établir la position du Québec,
à l'avantage aussi des citoyens du Québec d'aujourd'hui et de
demain?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense que vous venez de poser
la vraie question. Je vais peut-être...
M. Charbonneau: Je la pose.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...faire un petit peu... Vous
venez de la poser. Je vous le dis quand vous la posez. C'est rare que je vous
lance des fleurs, alors, profitez-en. En 1981...
M. Charbonneau: Une fois par séance.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...vous avez décidé
de ne pas bouger. Nous autres, à la fin de l'année 1985, on a
décidé de bouger. C'est peut-être la différence qui
caractérise fondamentalement les gouvernements qui se sont
succédé. Maintenant vous me dites...
M. Charbonneau: ...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qu'est-ce que vous allez faire
au cours des prochaines années pour faire en sorte que cela se... Est-ce
que vous allez consulter? La réponse est oui. Mais je vous dirai que les
consultations que j'ai effectuées à ce jour me donnent des
grandes orientations. Si vous consultez celui qui paie, il vous dit: Je veux
payer le moins possible et retirer le maximum. Excusez, est-ce que je vous
dérange?
M. Charbonneau: Non, vous ne me dérangez pas. Je suis
capable de faire cela, vous savez.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La consultation...
M. Charbonneau: Je suis un peu comme vous de temps en temps.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...auprès des individus
donne la réponse suivante: Moi, je veux payer le moins possible et
retirer le maximum. C'est une vérité...
M. Charbonneau: Tout le monde veut aller au ciel et personne ne
veut mourir.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...de La Palice, vous pouvez la
faire. Maintenant, si vous voulez consulter les groupes d'intervention, il y en
a qui ont telles orientations sociales qui sont connues, etc, CSN, FTQ, CSD,
CEQ. On peut aller du côté patronal et on connaît les
orientations également. On les connaît moins parce que c'est plus
difficile à comprendre et plus difficile d'accessibilité. La
position d'un groupe déterminant là-dedans, ce sont les
actuaires. Je pense que vous savez que les études actuarielles sont
suffisamment complexes et compliquées et lorsqu'on consulte ces
gens-là, c'est bien rare qu'ils nous arrivent avec un chiffre
très précis. Ils sont tout le temps un peu prudents dans les
fonds de réserve des compagnies d'assurances, etc. C'est leur obligation
et leur devoir de l'être. On peut faire une consultation très
large et très populaire. Je n'ai pas d'objection.
On a de la difficulté, je pense, depuis le début de cette
commission parlementaire, à s'entendre sur ce que veut dire la
véritable consultation. Pour l'ancien gouvernement, la véritable
consultation consistait à mettre sur pied une multitude de tables, de
forums, de comités, de sommets, etc., et on appelait cela de la
consultation. J'ai rarement vu un gouvernement qui, après avoir entendu
- je ne dirais même pas écouté - les représentations
des divers intervenants ne s'en est pas tenu à son idée qui
était déjà faite avant d'aller entendre le monde. J'ai
préféré ne pas rendre officielles à ce jour, et
pour le moment, les consultations que j'ai menées sur ce sujet. Je
n'exclus pas la possibilité de le faire si c'est le voeu de ceux et de
celles que j'ai déjà entendus et de ceux et de celles qui
désireraient se faire entendre, Mais lorsque ces gens-là ont
été rencontrés, ce n'est pas en catimini, M. le
député. Ils sont accompagnés de leur attaché de
presse, généralement, lorsqu'on a des échanges. Il y a
généralement des communiqués de presse qui sont
émis sur les sujets qui ont été traités. Il y a un
ordre du jour, ces choses-là. Ce n'est pas fait en cachette. J'ai
rencontré les représentants des centrales syndicales sur une
variété de sujets et je
n'ai pas l'impression de l'avoir fait en catimini. Vous pouvez appeler
ces présidents ou les gens qui étaient présents aux
réunions - les présidents étaient toujours là - et
leur demander de quoi il a été question. Ce n'est pas fait en
catimini. C'est simplement une façon de fonctionner...
M. Charbonneau:Oui, mais...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ....qui est efficace...
M. Charbonneau: ...ce que je comprends...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...et qui gagne du temps. Mais il
n'y a rien de fait et je n'accepte pas cela.
M. Charbonneau: ...c'est que, premièrement, il n'y a pas
eu de consultation...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, c'est faux...
M. Charbonneau: ...pour la décision du 13
décembre...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...si vous comprenez...
M. Charbonneau: Écoutez, le 13 décembre, vous
n'avez pas eu de consultation, vous nous l'avez dit tantôt.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bien non, vous avez mal
compris.
M. Charbonneau: Premièrement...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous ai dit tantôt, M. le
député...
M. Charbonneau: Vous l'avez faite quand?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qu'à l'occasion des
rencontres avec les dirigeants des centrales syndicales, de même que les
représentants des associations....
M. Charbonneau: Quand? Dans la nuit du 12 au 13?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, je tente de
répondre à votre dernière question.
M. Charbonneau: Ah oui, mais...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je tente, honnêtement, de
répondre à votre dernière question.
M. Charbonneau: Moi, j'essaie de comprendre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous ne voulez pas avoir de
réponse à votre dernière question, mais que vous voulez
avoir une réponse à une autre question, vous la poserez et j'y
répondrai.
M. Charbonneau: Ce que le ministre...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je tente honnêtement de
répondre. Depuis que j'ai été assermenté...
M. Charbonneau: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...je vous dis que j'ai
mené des consultations auprès des organisations plus
structurées. J'ai même rencontré des actuaires à ce
sujet. J'ai rencontré le président de la régie à
moult occasions. Vous dites que nous n'avons pas mené de
consultations!
M. Charbonneau: Ce n'est pas cela que je dis.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah!
M. Charbonneau: Seigneur! Est-ce qu'on va finir par se
comprendre, ce matin!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne sais pas.
M. Charbonneau: Ce que je dis, c'est que, premièrement,
vous n'avez pas consulté pour la décision que votre gouvernement
a prise avec précipitation et que, deuxièmement, ce que je
constate de la réponse du ministre, pour la suite...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Qu'est-ce que c'est cela?
M. Charbonneau: ...du problème du financement que nous
avons reconnu - le ministre vient de me dire que le problème a
été bien posé par votre humble serviteur -c'est qu'il a
commencé ses consultations, que lui peut en bénéficier
alors que, dans l'opinion publique, c'est un débat qui n'a pas cours
parce que le ministre a décidé de faire des consultations
privées. Par exempte, M. Francoeur qui suit ce dossier, d'autres
journalistes ou d'autres gens qui sont intéressés au débat
public sur l'avenir du financement de la Régie des rentes ne peuvent pas
y participer. Premièrement parce que la décision est prise pour
les cinq prochaines années et deuxièmement, pour ce qui est de la
suite, le ministre a commencé des consultations privées et il ne
nous dit pas, jusqu'à maintenant, qu'il a l'intention de les ouvrir, de
mettre ces propositions sur la table, de soumettre lui-même des
proposi-
tions et de les soumettre au débat. C'est ce que je dis au
ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais tenter d'essayer de suivre
votre logique, M. le critique. J'ai beaucoup de difficulté. J'essaie de
trouver la date du rapport de Mme Marois. C'était en avril...
M. Charbonneau: Le 25 avril 1985.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Je vais vous faire un
scénario, vous me direz si c'est plausible ou complètement
dépassé.
Mme Marois et M. Chevrette, parce qu'ils sont cosignataires, avant
d'écrire un livre sur la consultation, sont allés consulter.
À partir des consultations qu'ils ont menées auprès des
divers intervenants de la société -dans ce domaine de
spécialistes, je dirais même d'ultra-spécialistes...
M. Charbonneau: C'est vrai.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est ce que je suis en train de
faire.
M. Charbonneau: Bon!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela fait... C'est ce que je vous
dis et je ne vous dis pas que je vais écrire un livre au bout de tout
cela. Mais je suis en train de me faire une idée et j'ai des principes
en arrière de l'idée. Maintenant, nous parlons du financement. Il
y a d'autres principes qui sont évoqués dans le livre, lesquels
ont été évoqués également en campagne
électorale par le Parti libéral du Québec. Il y a des
engagements auxquels nous entendons donner suite.
M. Charbonneau: Bon!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je fais des consultations
là-dessus aussi. Mais je ne peux pas arriver demain matin et vous
écrire un livre comme si j'étais tombé des nues...
M. Charbonneau: Ce n'est pas cela que je demande au ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...mettre cela sur la place
publique ou reprendre le même livre. Il y a des choses avec lesquelles je
suis en accord et il y en a d'autres avec lesquelles je suis
profondément en désaccord. Si j'avais été
consulté, je l'aurais dit.
M. Charbonneau: La dernière question que je vais poser au
ministre à ce sujet: Est-ce qu'il a l'intention, quand il aura fait son
lit, de le rendre public, sous une forme ou sous une autre car c'est son
problème et non pas le mien? Ce qui m'intéresse, c'est de
savoir...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quant au financement...
M. Charbonneau: ...à un moment, quelle sera l'opinion du
gouvernement sur le problème du financement afin de pouvoir en discuter.
Ce qui m'intéresse, c'est de savoir quand je peux m'attendre à
avoir cette opinion du ministre et du gouvernement actuel.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais vous la donner si vous la
demandez. On s'est donné des priorités au ministère;
imaginez-vous donc qu'on fonctionne par priorités. Le problème du
financement...
M. Charbonneau: La trouvaille du siècle.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...on l'a regardé.
Savez-vous pourquoi? Parce que lorsqu'on parle de rendre le conjoint ou la
conjointe au foyer admissible à la Régie des rentes du
Québec, vous ne vous imaginez pas que cela peut se faire sans qu'il y
ait une incidence sur le financement.
M. Charbonneau: Je le sais.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Donc, la priorité qu'on
s'est donnée...
M. Charbonneau: On va en parler tantôt.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, mais vous essayez de
m'encarcaner dans un coin...
M. Charbonneau: Non, non, non.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...je vous explique ce qu'on a
fait, la façon dont on a procédé. Lorsque je suis
arrivé au ministère, il y avait la parité de l'aide
sociale sur laquelle j'ai posé une commande très urgente et il y
avait l'engagement du Parti libéral de rendre le conjoint ou la
conjointe au foyer admissible à la Régie des rentes, ce sur quoi
j'ai passé une commande très urgente.
Si vous me demandez quel a été le résultat des
consultations, cela a été très rapide comme
réaction. J'avais même été un peu suspect. Je
l'avais anticipé. Ils m'ont dit: Si vous parlez de cela, cela va toucher
le financement. J'ai dit: Oui, cela va toucher le financement? On s'est mis
à regarder l'ensemble du financement: l'ensemble du financement sans
réaliser l'engagement; l'ensemble du financement en réalisant
l'engagement et l'ensemble du financement en retirant ou en continuant de
piloter le projet de loi qui était déjà
déposé. On a regardé tout cela. Ne vous imaginez pas qu'on
a pris des décisions en l'air, comme
cela. On a tenu compte des priorités que nous avions
émises face à la population durant la campagne électorale
et pour lesquelles la population nous a élus. On s'est dit: Comment
peut-on réaliser cela? On fait des hypothèses. Si on maintient le
projet de loi déposé par Mme Marois, en termes de financement,
cela gruge tant. Autrement dit, la transférabilité ou ces
choses-là, cela peut gruger tant en termes de financement. L'engagement
du Parti libéral, dépendant des scénarios de A a Z, peut
gruger tant. On a fait ces hypothèses de financement là.
L'augmentation de 0,2 %, pendant cinq ans, apporte tant. Quelle est notre marge
de manoeuvre et quelle est notre priorité? La priorité que j'ai
indiquée, cela me fait plaisir de vous la répéter
publiquement et à mes attachés politiques responsables du dossier
et au président de la Régie des rentes du Québec. La
priorité, c'est de placer l'ensemble des individus, dans la
société québécoise, sur un pied
d'égalité face à la Régie des rentes du
Québec, face aux rentes, pour avoir un meilleur partage.
Je me suis dit: Si on règle notre problème
d'égalité, on sera tous ensemble, les Québécois et
les Québécoises, pour régler nos problèmes et de
financement et de transférabilité.
Une fois ce grand principe établi, j'ai demandé - je
m'excuse de ne pas vous l'avoir demandé à vous - à des
experts dans le monde actuariel et à la Régie des rentes du
Québec de me préparer les différents scénarios et
le financement possible. Mais, on n'arrêtera pas notre choix sur une
méthode sans la soumettre à une vaste consultation populaire
où les gens pourront se prononcer sur les façons de
réaliser et de matérialiser l'engagement électoral du
Parti libéral du Québec quant à l'accessibilité
à la rente pour le conjoint ou la conjointe au foyer.
M. Charbonneau: Écoutez...
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
M. Charbonneau: ...je voulais juste...
Mme Harel: Je vais peut-être laisser terminer mon
collègue de Verchères mais j'aimerais introduire...
M, Charbonneau: Non, juste après.
Mme Harel: ...la question, justement, de la rente au foyer
immédiatement après.
Le Président (M. Bélanger): Pas de
problème.
M. Charbonneau: Le ministre m'amène sur son terrain. Cela
ne me dérange pas d'y aller. Je pense qu'on est prêt à y
aller.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Allez-y!
Rente du conjoint au foyer
M. Charbonneau: On parlera de la bonification et des
régimes supplémentaires après. À l'égard de
la problématique des femmes au foyer, le ministre nous a rappelé
son engagement électoral. Je voudrais seulement lui rappeler que son
engagement électoral, il n'a jamais été chiffré. Il
y a un mandat qui est confié à la Régie des rentes, mandat
un premier jet avait été initié au ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu pour les rentes des
conjoints ayant charge d'enfants, majoritairement des femmes, bien entendu.
Dans ce mandat, on avait élaboré certaines hypothèses.
Uniquement pour les personnes ayant charge d'enfants, quand on regarde les
hypothèses, si on voulait suivre le principe du ministre et
élargir cela à tout le monde, ou juste pour celles qui ont charge
d'enfants, selon les deux hypothèses, qui étaient
soulevées, soit une alternative au régime actuel ou un
système complémentaire, c'était 312 300 000 $ ou 392 600
000 $. C'étaient des hypothèses à travailler, mais cela
nous donne un ordre de grandeur. Cela nous permet aussi de voir que si on
l'élargit à l'ensemble des conjoints au foyer, plus
particulièrement aux femmes au foyer qui n'ont pas droit au
régime des rentes, on se retrouve avec des coûts astronomiques.
Qu'est-ce qui arrive du mandat qui a été confié à
la Régie des rentes à l'égard du dossier et de
l'alternative qui n'avait pas été retenue par le
précédent gouvernement? Qu'est-ce qui arrive de
l'hypothèse des coûts? (11 h 15)
M. le ministre, on est à la veille du budget. On nous chante des
coupures partout, qu'on est dans la pire crise financière depuis 50 ans.
Tout à coup, le ministre nous rappelle ce matin qu'une de ses deux
priorités fondamentales, c'est de faire accoucher un engagement
électoral pris à la hâte, sur lequel on n'avait jamais
entendu parler le Parti libéral au cours des dernières
années, dont on ne parlait nullement dans le programme politique du
Parti et qui va coûter, au bas mot, plusieurs centaines de millions de
dollars. Entre l'utopie et la réalité, qu'est-ce que le ministre
entend faire, concrètement? Par la suite, sur ce sujet - je pense qu'on
pourrait passer quelques minutes sur le sujet - je vais laisser la parole
à ma collègue et responsable à la Condition
féminine, Mme la députée de Maisonneuve, et je reviendrai
par la suite sur les deux autres éléments des
problématiques que j'ai mentionnées au ministre,
précédemment.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On a un choix fondamental à
faire au ministère, et même comme société parce que
ça implique toute la société. En ce qui concerne le
conjoint ou la conjointe au foyer, est-ce qu'on prend une orientation ou une
attitude de lutte contre la pauvreté, dans certains cas, ou est-ce qu'on
prend une orientation ou une attitude orientée vers la reconnaissance de
l'apport social du travail? J'ai demandé différentes
études, différents scénarios et les coûts,
également. Lorsque vous dites que c'est astronomique - j'ai retenu le
terme -je craignais, je vous l'avoue bien honnêtement, j'anticipais avec
appréhension les coûts de matérialisation d'une telle
approche. J'étais tellement convaincu, sur le plan du principe, qu'on
n'en sortira pas, comme société, tant qu'on ne se sera pas
retrouvé dans une situation d'égalité, on n'arrivera pas
à régler nos autres problèmes parce qu'on ne sera pas tous
sur un même pied d'égalité, que j'ai demandé la
préparation de plusieurs scénarios chiffrés. Je ne vous
dirai pas qu'on en est, au moment où on se parle, à des
scénarios avec des coûts modestes - je ne suis pas assez modeste
pour vous dire ça -mais je vous dirai qu'on a quitté la
sphère astronomique en s'orientant vers un meilleur partage dans la
société, avec différents scénarios. On est encore
dans des coûts très élevés.
M. Charbonneau: ...le ministre de sa franchise...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. On est encore dans des
coûts très élevés, mais on est parti d'une
sphère astronomique, on se rapproche de la planète,
tranquillement. Si on a, comme société, tout le monde ensemble,
vraiment à coeur, la volonté politique et sociale de
réaliser l'égalité, j'ai la ferme conviction qu'on va y
arriver. Mais, pour cela, il va peut-être falloir faire quelques
sacrifices pour y arriver, chez ceux et celles qui considèrent certaines
choses comme étant de l'acquis. Il va peut-être falloir faire un
meilleur partage des choses qui sont considérées comme acquises.
Il va peut-être falloir remettre à un peu plus tard - et c'est
là qu'on va vraiment identifier notre sens des priorités - des
questions de transférabilité et d'amélioration des
régîmes, parce qu'on aura décidé d'utiliser toute la
marge de manoeuvre. Je vous prie de croire que je n'ai pas vu de
scénarios, jusqu'à maintenant, qui ne l'utilisaient pas pour
créer l'égalité, dans la société. Cela va
demander beaucoup d'échanges, beaucoup de consultations, beaucoup de
dialogues dans la société. Mais je pense que - on est en 1986 -
on est peut-être rendu au moment où on peut se placer comme des
égaux dans la société, utiliser notre marge de manoeuvre
et, après, on reprendra les dossiers de transférabilité
et, après, on reprendra l'ensemble des dossiers de financement. On n'est
pas seul, on ne fait pas cavalier seul, le Québec, lorsqu'on parle d'un
meilleur partage des revenus è la retraite. Il y a d'autres
gouvernements qui ne sont pas tellement loin de chez nous et qui commencent
à s'intéresser à ces sujets. Sur le plan du
développement social, je pense que le Québec a toujours
joué un rôle de leadership et le Québec entend continuer,
sous le gouvernement qui le dirige présentement, à assurer
pleinement ce rôle de leadership sur le plan des grands principes
d'égalité dans notre société.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. On sait combien le
ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu a manifesté de sensibilité à l'égard de la
distinction fondée sur l'âge. J'aimerais, ce matin, en commission
parlementaire, obtenir un engagement de sa part. Je considérerais comme
prématuré, certainement, d'entrer dans toutes les
modalités de ce que deviendra le programme d'accès au
Régime de rentes des femmes au foyer. J'aimerais obtenir de sa part
l'engagement qu'il entend écarter et, donc, ne pas confier de mandat qui
irait dans le sens d'une discrimination en fonction du statut matrimonial
puisque cette discrimination est entièrement révolue, au
Québec, on le sait. J'attends donc que le ministre nous dise clairement
ce matin que toute discrimination qui serait fondée sur le statut
matrimonial serait non admissible à ses yeux.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, madame, vous pouvez avoir cet
engagement.
Mme Harel: Bon. Cela veut donc dire, M. le ministre, que, quand
on parle des exclus au Régime de rentes...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais l'engagement se limite
au ministre qui vous parle, pour autant que je sois là. Dans le dossier
que je piloterai, si j'en suis encore le pilote à ce moment, on ne
retiendra pas les éléments de discrimination que vous
mentionnez.
Mme Harel: De discrimination en fonction du statut
matrimonial.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est cela.
Mme Harel: Je dois donc conclure que le mandat que vous confiez
à la Régie des rentes, quant à l'étude de ce
dossier, évidemment, comprendra aussi cette
clarification.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cette interdiction de discriminer,
sur le sujet que vous mentionnez. Également, j'en profite pour le
mentionner, parce que les gens sont ici, j'indiquerais que la Régie des
rentes travaille au dossier et que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu également travaille à ce
dossier, au moment où on se parle.
Mme Harel: Donc, ce grand principe d'égalité dont
vous nous parliez tantôt doit et devra s'appliquer aux exclus du
Régime de rentes. Les exclus du Régime de rentes sont
également les mères monoparentales. On sait qu'actuellement
près de la moitié des mères monoparentales de 25 à
54 ans sont exclues du Régime de rentes, de même que près
de 30 % des femmes seules de 35 à 54 ans, du fait qu'elles ne sont pas
sur le marché du travail. Est-ce à dire que le mandat qui est
confié à la Régie des rentes va également devoir
s'intéresser à l'ensemble de ces exclues du marché du
travail, donc, de ces exclues de la Régie des rentes, non pas seulement
celles qui ont un conjoint...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous voulez, je vais
répondre sur les grands principes parce que je ne suis pas allé
dans la multitude des détails.
Mme Harel: Parce que tantôt...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour ce qui est des grands
principes d'orientation, je n'ai pas attendu la commission parlementaire. Le
principe de l'égalité, je l'ai confié dès mon
arrivée, non pas à l'exclusion, mais en priorité sur les
autres avenues qui étaient anticipées. Il y avait la question de
la discrimination que vous avez mentionnée, à cause du statut
matrimonial. J'ai indiqué que je voulais que l'orientation qui soit
prise s'applique à: conjoint marié, conjoint de fait et
monoparental.
Maintenant, vous me demandez un autre détail et j'ai mal saisi.
C'est pour cela que j'aimerais que vous le répétiez.
Mme Harel: D'accord. C'est un détail qui a son importance
pour 30 % des femmes seules de 35 à 54 ans qui sont également
exclues du Régime de rentes, n'étant pas sur le marché du
travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce qu'on m'indique, c'est
qu'à la régie présentement -il faudrait que je
vérifie avec le ministère pour voir si c'est la même chose
- on travaille dans le sens que vous venez de mentionner. Cela ne veut, pas
dire que ce seront les solutions qui vont être retenues au bout de tout
cela, j'ai dit qu'on s'en allait en consultation. Sur les grands principes...
C'est la même chose au ministère? On me dit qu'on travaille sur la
même longueur d'onde au ministère. Sur ces grands principes, ce
sont les orientations qu'on a privilégiées. Une fois les
études ou les avenues explorées, nous allons les rendre publiques
de façon que les gens et les intéressées puissent se
prononcer afin d'éviter qu'on oublie, soit sur le plan de la lutte
contre la pauvreté, soit sur le plan de l'apport social, quelque
individu que ce soit dans notre société.
Encore une fois, je le répète, on part du grand principe
de l'égalité et on se dit qu'en appliquant tous les autres
principes qui ont été énumérés il y a des
coûts. Les coûts sont, dans les scénarios que nous avons
développés présentement, non pas astronomiques, mais
très importants pour une société.
Mme Harel: Ces principes s'appliquent évidemment
indépendamment du sexe, homme et femme, et valent également pour
les hommes, je pense en particulier à 20 % des hommes de 50 à 54
ans qui ne participent plus au régime et qui en sont donc exclus du fait
de ne pas être sur le marché du travail. Je vous repose la
question, le critère de maternité est-il le critère
actuellement utilisé dans l'étude qui est...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non.
Mme Harel: ...poursuivi à la Régie des rentes?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez. La Régie
des rentes ne fait pas l'étude sur la réforme de l'aide sociale.
Il y a une réforme de l'aide sociale, et la clientèle que vous
mentionnez, on en tient compte dans la réforme de l'aide sociale. Quant
au mandat que j'ai confié à la régie à ce sujet,
c'est non.
Mme Harel: Le critère de maternité n'est donc pas
un critère qui est retenu aux fins de l'étude qui est
actuellement poursuivie par la Régie des rentes.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pas dans la présente
étude qui est faite, mais je n'exclus pas la possibilité qu'il y
ait d'autres études qui soient commandées et qui nous soient
acheminées par d'autres intervenants, mais dans les études qu'on
a commandées, pour le moment, la réponse est non.
Mme Harel: Ces études se poursuivent actuellement, et
j'aimerais obtenir du ministre la confirmation de la date et également
la date de la consultation qui a été annoncée sur cette
question par le gouvernement libéral. On nous a parlé d'une
consultation cet été. Est-ce que c'est
confirmé?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ma collègue à la
Condition féminine était à mes bureaux la semaine
dernière et on faisait le tour des dossiers. Si les études sont
suffisamment avancées et concluantes à l'été, ce
sera à l'été. Si elles le sont à l'automne, ce sera
à l'automne. On veut qu'il y ait consultation mais que les gens aient
quand même quelques éléments d'information. Parce qu'il y a
beaucoup de gens qui, comme votre collègue de Verchères le
mentionnait tantôt, à première vue, disent que c'est
impossible, cela va être astronomique, donc laissons cette idée de
côté. D'ailleurs, c'est ce que Mme Marois avait fait je pense dans
"Agir maintenant pour demain", le livre orange. En page 52, on concluait
quasiment à l'impossibilité de l'égalité. Je veux
bien croire que c'est un document de consultation, mais tantôt on nous
l'a présenté un peu comme une position gouvernementale. Je dis
qu'il s'agit de priorités, il s'agit de placer les priorités
là où on le veut bien, comme gouvernement, en tenant compte de
l'évolution de notre société. Comme priorité, nous
avons placé cet engagement pour la Régie des rentes.
Mme Harel: M. le Président, est-ce qu'il y a un
échéancier? Vous nous dites que si c'est prêt à
l'été, ce sera à l'été, si c'est prêt
à l'automne, ce sera à l'automne. Si c'est prêt dans deux
ans, ce sera dans deux ans. II faut croire qu'il n'y a pas un
échéancier avec une date è laquelle on peut s'attendre
à la consultation dans de brefs délais.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y avait un
échéancier de départ. Mais cela a été une
commande qui a été placée, soit à la toute fin de
décembre ou au tout début de janvier, mais je n'avais pas fini
d'aménager dans mes bureaux que j'ai placé la commande.
C'était l'échéancier de départ. Donc, il s'agissait
pour le ministre de quelque chose de très prioritaire. Maintenant, vous
me demandez quel va être l'échéancier; est-ce qu'il y a des
dates arrêtées? Les gens travaillent sérieusement, les
efforts qui ont été déployés au moment où on
se parle et les documents qui m'ont été transmis par !e
ministère et par la régie m'indiquent qu'on a pris la commande
très au sérieux au ministère et à la régie.
Maintenant, c'est à l'état encore une fois de projet, on le
révise régulièrement. Je ne suis pas en mesure de vous
donner un calendrier fixe, mais je connais les aléas de la vie
politique, et nous avons des échéanciers, certes, qui sont
électoraux. Nous avons des échéanciers possibles, et
là je l'évoque comme cela, non pas parce qu'il y a des rumeurs de
remaniement ministériel qui peuvent arriver en cours de mandat, etc. Et
le sujet est suffisamment important pour qu'on fasse le maximum pour que ce
soit en vigueur dans les meilleurs délais.
Mme Harel: Dans les documents qui vous sont transmis, on doit
donc tenir pour acquis que, le critère de maternité
n'étant pas utilisé dans les études qui sont poursuivies,
est-ce qu'il y a une distinction entre les travailleuses au foyer temporaires,
celles qui retournent sur le marché du travail, et les travailleuses au
foyer à temps plein? (11 h 30)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce sont des variantes de
scénarios que vous mentionnez là.
Mme Harel: Les travailleuses au foyer temporaires jouissent
déjà d'une exclusion à leur avantage dans le calcul des
années de cotisations. C'est une disposition d'exclusion volontaire pour
prendre soin d'enfants qui est déjà prévue par le
Régime de rentes et qui avait été introduite par l'ancien
gouvernement.
On sait qu'actuellement - et j'aimerais vérifier les chiffres aux
fins de la poursuite de notre réflexion - il y a un fort pourcentage de
femmes qui sont sur le marché du travail et qui ont des enfants
d'âge préscolaire. Je pense qu'entre 1974 et 1985 le pourcentage
est passé de 29 % à presque 50 %. C'est donc dire que la
majorité des femmes sur le marché du travail a des enfants et,
d'une certaine façon, les femmes qui sont au foyer et qui ne sont donc
pas sur le marché du travail sont celles qui, pour la plupart, n'ont pas
d'enfant d'âge scolaire ou préscolaire et ont parfois des enfants
qui sont de grands adolescents ou des adultes.
Est-ce que le président de la régie peut me confirmer
l'état de la situation actuelle?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On vous confirme que c'est
l'état de la situation.
Mme Harel: Donc, les travailleuses au foyer à temps plein
sont, pour la majorité d'entre elles, des conjointes dont les enfants ne
sont plus d'âge scolaire.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je suis en train de discuter des
chiffres avec le président de la régie, car ce n'est pas aussi
clairement majoritaire que vous l'avez exprimé.
Vous comprendrez qu'on ne peut pas vous donner une réponse sur un
scénario arrêté, parce qu'on en aurait un
d'arrêté et on vous le dirait et on consulterait ce
scénario qui est arrêté. Mais on tient compte des
préoccupations de la condition féminine et nous travaillons
à ce dossier en étroite
collaboration avec Mme la ministre qui est responsable de ce dossier.
Ces préoccupations sont constantes chez Mme la ministre, chez le
ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, chez le
président de la Régie des rentes du Québec et chez les
fonctionnaires qui travaillent à ce dossier au sein du ministère
de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.
Mme Harel: Pourtant, vous n'êtes pas obligé de les
nommer un par un pour manifester la préoccupation qui honore tout ce
monde. J'aimerais savoir si l'étude qui est poursuivie actuellement
prend en considération la demande pressante d'élargir la
période d'exclusion des femmes qui sont au foyer, des travailleuses au
foyer de façon temporaire.
Est-ce que vous êtes à faire cette étude sur
l'élargissement possible de la période d'exclusion pour soins aux
enfants et êtes-vous également en train de poursuivre cette
étude de manière à pouvoir examiner la possibilité
de couvrir celles qui s'occupent d'un conjoint gravement handicapé? On
sait que c'est une demande qui est pressante, d'élargir la
période pour couvrir non seulement les soins aux enfants de moins de
sept ans, mais également, possiblement... Allez-vous pouvoir
déposer ces études sur les coûts défrayés par
tous les participants au régime?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quant aux deux scénarios
que vous avez évoqués, aucun ne m'a été
présenté au moment où l'on se parle, mais on m'indique
qu'on y travaille.
Mme Harel: Oui.
M. Charbonneau: Pendant qu'on est sur les études, un
mandat avait été confié à la Régie des
rentes pour l'ébauche d'un régime de transfert pour les personnes
âgées qui se sont occupées de jeunes enfants. Est-ce que le
mandat est terminé? Est-ce que le projet a été remis au
gouvernement?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais vous répondre bien
candidement. Ce que j'ai fait, c'est passer la commande d'égalité
et ce qui en découlait, en toute priorité. Sur le reste, le
président de la régie m'indique qu'il n'y a pas eu de
développement.
M. Charbonneau: Mais qu'est-ce qui arrive, dans ce cas-lè,
du mandat qui avait été confié? J'ai des copies des
projets...
M. Paradis (Brome-Missisquoi); Posez votre question comme il faut
et on va...
M. Charbonneau: Mais je la pose clairement. Qu'est-ce qui arrive
du projet d'un régime de transfert pour les personnes âgées
qui se sont, occupées de jeunes enfants? Ce mandat avait
été confié, je pense, au service des politiques et
recherche du ministère et, ensuite, un autre mandat avait
été donné pour vérifier les projets à la
Régie des rentes, si mes informations sont bonnes. Je veux savoir si la
Régie des rentes a soumis un avis, un contre-projet ou un projet
modifié.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La difficulté de
répondre à votre question vient que le mandat n'était pas
adressé, à ce qu'on me dit, à la Régie des rentes.
C'est la Régie des rentes qui est présentement interrogée.
Je vais vous donner l'heure juste quand même. Le sous-ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, qui est
également dans la salle, vient de m'indiquer qu'il travaille au
ministère à ce dossier. Maintenant, si vous voulez qu'on le fasse
revenir, on peut le faire revenir.
M. Charbonneau: Mes informations, M, le ministre, étaient
qu'on avait demandé à la Régie des rentes d'émettre
une opinion sur les projets qui avaient été
élaborés par le ministère.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pas sur celui-là. Vos
informations ne seraient pas exactes, suivant le président de la
régie.
M. Charbonneau: Dans ce cas-là, est-ce que le ministre
peut nous indiquer - et je passerai la parole à ma collègue pour
terminer le dossier - si son ministère a complété
l'étude de l'ébauche du régime de transfert pour les
personnes âgées qui se sont occupées de jeunes enfants et,
si oui, est-ce qu'il serait possible d'avoir une copie de ces
études?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Attendez un peu, je vais aller
demander au sous-ministre - parce que ce n'est pas lui qui était
à la table - si cela est complété au ministère.
On m'indique que, dans les papiers qui avaient été faits
sous l'ancien gouvernement, dont vous devriez probablement avoir copie, on
continue à effectuer des scénarios au ministère, et non
à la régie, à partir des éléments dont vous
avez fait mention.
M. Charbonneau: Je signale au ministre que, selon mes
informations - je voudrais que le président de la Régie des
rentes vérifie comme il faut - un mandat avait été
confié à la Régie des rentes concernant un programme
d'allocation de retraite pour les personnes au foyer qui ont charge d'enfants.
Franchement!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II semble qu'il y ait divergence
d'interprétations de
mandat. En tout cas, de la façon dont le député de
Verchères l'exprime et selon la compréhension qu'en a le
président de la régie, les réponses sont maintenues, suite
à une vérification.
M. Charbonneau: Si le ministre dit "sujet à une
vérification", qu'il le demande au président.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je n'ai pas dit "sujet à
une vérification", j'ai dit "suite à une vérification". On
vient de le faire.
M. Charbonneau: En tout cas, je voudrais que le ministre
vérifie comme il faut parce que mes informations, j'en suis convaincu,
sont très... Ceci dit, de toute façon, je pense que ma
collègue de Maisonneuve a quelques autres questions sur le dossier des
femmes au foyer et on va revenir par la suite sur les autres
problèmes.
Mme Harel: C'est tellement une aubaine d'avoir à la fois
le président de la Régie des rentes et le ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu que je reviendrai sur
la question des travailleuses au foyer temporaires parce que j'aimerais obtenir
quelques pourcentages pour que nous puissions poursuivre notre propre
étude sur cette question.
M. le ministre, lorsque l'engagement a été annoncé,
cet engagement d'assurer l'accès au Régime de rentes à 800
000 femmes au foyer, c'était là, en fait, le propos du premier
ministre lui-même qui soulignait, lorsque cet engagement a
été pris, qu'il s'agissait d'une soirée historique, qui
fera époque quant au progrès de la condition féminine dans
l'histoire du Québec. Pour cet engagement, il semblait que l'option de
financement retenue par les porte-parole du Parti libéral était
la transformation de l'exemption accordée à l'homme pour
l'épouse au foyer, disait-on, l'exemption de personne mariée
actuellement consentie au contribuable dont l'épouse reste au foyer.
C'est bien le cas. En fait, tous les articles de journaux sans exception - donc
les médias n'ont pas pu se tromper à ce point - font état
d'un point de vue exprimé par les porte-parole du Parti libéral,
enfin Mme Lavoie-Roux et quelques autres, M. Bourassa lui-même, quant
à cette option de financement, qui s'appelait le crédit
d'impôt.
Si tant est que le statut matrimonial n'est pas retenu comme
critère, c'est donc dire que les femmes ne seraient pas couvertes a
titre seulement de personnes mariées, mais autant les veuves que les
célibataires, par ce crédit d'impôt. Quel en serait le mode
de financement, d'une part? Comment, I ce moment-là, prévoir le
financement, notamment de contribuables dont l'épouse n'est pas sur le
marché du travail, lesquels -25 % d'entre eux - avaient, en 1983, un
revenu inférieur à 12 000 $ et qui, pour un très grand
nombre d'entre eux, j'imagine, ne déboursent pas le maximum de la
cotisation annuelle à la Régie des rentes? Les contribuables qui
n'ont pas déboursé le maximum de la contribution à la
régie, il y en a quel pourcentage, si c'était possible de
l'obtenir? D'autre part, on sait qu'il y a quand même 25 % des
contribuables qui déclarent un revenu inférieur à 12 000
$.
Donc, pour les veuves, les personnes séparées, qui ne sont
pas des personnes mariées, qui ne sont pas dépendantes, puisque
ce n'est pas ce critère que vous avez retenu et pour les personnes qui
sont mariées, qui ne sont pas sur le marché du travail mais dont
le mari déclare un revenu inférieur, quelle est l'option de
financement que vous projetez ou que vous étudiez?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous venez de souligner
quelques-unes des complications d'applicabilité...
M. Charbonneau: ...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non, pas du programme, d'une
approche fiscale, qui n'est pas exclue au moment où l'on se parle, mais
cela pose des problèmes d'application.
Maintenant, je me souviens très bien -même si je
n'étais pas critique à la main-d'oeuvre lors de la campagne
électorale -d'avoir suivi ce dossier de très près car il
est très important pour notre société
québécoise. J'étais, à l'époque, critique
aux affaires sociales et cela a des incidences également dans le domaine
social. L'engagement a été pris, quant au principe; quant aux
modalités - je me souviens très bien d'en avoir discuté
avec quelques journalistes - d'application, ils ont dit: Quels pourraient
être les moyens d'application? Parmi ces moyens d'application, on a
donné l'exemple que vous avez bien cité, à partir des
médias: Le conjoint, finalement, qui "déduit", - si je peux
utiliser cette expression entre guillemets, - de son rapport d'impôt son
autre conjoint qui serait à la maison, etc. c'est une approche pour
assurer un meilleur partage. Maintenant, vous avez raison, cette approche ne
pose peut-être pas de problème dans le cas où les gens sont
mariés et qu'il y a un des conjoints qui est à la maison; cela ne
pose peut-être pas le même problème parce que je pense que,
sur le plan fiscal - je ne vous donne pas un avis fiscal en le disant, il
faudrait que je vérifie avec le ministère du Revenu - on peut
faire la même chose avec son conjoint, même si on n'est pas
marié, sur le plan de la déduction. Cela pose certainement un
problème pour les foyers monoparentaux. C'est assez évident
que cette approche fiscale leur pose un problème. C'est pourquoi
nous n'avons pas arrêté nos réflexions strictement à
l'approche fiscale, mais la dernière que vous avez mentionnée,
comme d'autres approches fiscales, fait partie des scénarios qui sont
présentement è l'étude.
Problèmes des femmes sur le marché du
travail
Mme Harel: M. le ministre, je pense que ce serait une grave
lacune si, à ce moment-ci, nous ne parlions pas également des
travailleuses qui sont sur le marché du travail, souvent à des
salaires les plus bas de la société. J'avais un chiffre encore
récent, à savoir que l'écart de revenu moyen d'emploi
entre les hommes et les femmes se situait toujours à 57 %. À ce
moment-ci, je pense que j'ai à vous demander quelles sont les intentions
ministérielles à l'égard des femmes qui sont sur le
marché du travail à temps partiel - vous savez qu'il y avait un
engagement de votre parti - et, également, sur tout le problème
de la transférabilité. Vous nous avez dit à l'ouverture de
la commission que vous n'aviez pas l'intention de légiférer en
matière de régimes de retraite privés. (11 h 45)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah! excusez!
Mme Harel: Je vais laisser à mon collègue de
Verchères le soin, peut-être, de revenir sur cette question, mais
il y a une réalité qui explique en grande partie la
pauvreté des femmes. Même celles qui sont sur le marché du
travail ne répondant pas aux exigences des régimes de retraite
privés et celles qui sont sur le marché du travail ont le droit
de réclamer l'attention à leur égard. On sait que 72 % des
travailleurs au salaire minimum sont des travailleuses. On sait que le travail
à temps partiel augmente. Je pense que la moitié du travail est
à temps partiel présentement. Les critères en usage pour
la participation est à 45-10 c'est-à-dire 45 ans d'âge et
10 années pour le même employeur. Puisque les femmes, pour toute
sortes de raisons connues, changent souvent d'emploi ou ont à trouver de
nouveaux emplois après quelques maternités, je pense, M. le
ministre, que vouloir s'attaquer à cette question de ta pauvreté
des femmes c'est aussi une intervention sur toute cette question des
régimes de retraite privés pour en assurer la
transférabilité.
M. Paradis (Brome-Missisquoi); Ce que vous soulignez traduit - et
je vous le dit bien humblement - simplement en partie l'énormité
des problèmes que j'ai retrouvés sur le bureau du ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. J'ai tenté dans
une première approche - de façon à assurer de l'avancement
que l'on puisse mesurer dans le concret - de priorîser certaines avenues.
J'ai parlé de l'égalité, quant aux conjoints et conjointes
au foyer, de l'admissibilité à la Régie des rentes. J'ai
également dit, lorsque le rapport Beaudry a été rendu
public, que comme ministre j'avais trois priorités personnelles dans
l'application de certaines recommandations. Ces priorités vont du droit
au travail à l'accès à l'égalité une fois
que l'on est sur le marché du travail et les plus bas salariés.
Je suis conscient qu'en mentionnant ces trois éléments, de droit
au travail, d'égalité au travail et de plus bas salariés,
la clientèle à laquelle on s'adresse à cause de
l'état de la situation est une clientèle qui est composée
majoritairement, au Québec en tout cas, de femmes. Je pense que cela est
connu. Il y a, dans les priorités que je me suis fixées, celles
qui découlent d'une expérience de bureau de comté de plus
de cinq ans. C'est pénible de voir arriver à son bureau de
comté une femme d'un certain âge qui n'est admissible à
aucun programme, sauf le programme d'aide sociale, et qui a contribué
toute sa vie a l'évolution de la société
québécoise. À chaque fois que je tournais les pages des
cahiers gouvernementaux pour l'ensemble des programmes je ne trouvais rien,
comme député de comté, à répondre à
cette dame que de lui dire qu'il y avait l'aide sociale. C'est une chose que
j'ai déplorée.
Maintenant que j'occupe le fauteuil de ministre de la Main-d'Oeuvre et
de la Sécurité du revenu, j'espère que lorsque je serai
muté ailleurs les députés qui recevront ce même type
d'individu n'auront pas la même chose à déplorer. Pour
accomplir ces réalisations, j'aurai besoin du soutien et de l'apport de
tous les membres de l'Assemblée nationale du Québec.
Il y a un autre élément de discrimination. C'est toute la
question des travailleurs et des travailleuses au pourboire dans le domaine de
la restauration qui sont en bas du salaire minimum. Encore là, il s'agit
d'un domaine qui est composé, très majoritairement, de femmes.
Ils ne travaillent pas au salaire minimum, ces gens-lè, ils travaillent
en bas du salaire minimum. Quand ils travaillent dans un certain institut
d'hôtellerie ou certains grands restaurants, avec les pourboires, ils
réussissent à obtenir le salaire minimum et parfois plus. Quand
ils travaillent dans des petits kiosques, petits restaurants, etc., ils ne s'en
tirent même pas avec le salaire minimum. Là nous avons un
problème. Je l'ai déjà indiqué - je ne sais pas si
c'est à cette commission parlementaire ou à celle du travail -
j'ai un problème de deux ordres. J'ai deux séries de
représentations de la part de ces gens. Certains nous disent:
Donnez-nous le salaire
minimum, comme gouvernement, ou modifiez votre législation de
façon que, comme travailleuses au pourboire, on obtienne le salaire
minimum. D'autres nous disent: Vous pouvez laisser une différence quant
au salaire minimum, à cause de notre type d'emploi, mais, s'il vous
plaît, ne venez pas nous harceler avec le ministère du Revenu
quant à nos pourboires ou à nos gratifications. Si on
réussit à les obtenir, c'est parce qu'on donne un service
à la clientèle et on considère que c'est pour cela.
M. Charbonneau: M. le ministre, je ne voudrais pas vous
interrompre, mais on avait prévu parler des normes du travail un peu
plus tard. Le temps file et le président vient de m'indiquer que
l'entente qu'on avait, c'était de finir à 13 heures. Il semble
qu'on ait fait un mauvais calcul de temps et on aura moins de temps que
prévu. Donc, à cet égard, je voudrais bien qu'on puisse
terminer le dossier des rentes. Je n'ai pas d'objection à ce qu'on
aborde - c'est notre prochain sujet - le problème des normes du travail.
Mais mon habitude quand on commence l'étude d'un dossier, j'aimerais
bien...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pensais tenter de
répondre bien honnêtement à la question de Mme la
députée, qui était assez vaste sur le plan social.
M. Charbonneau: C'est vrai, mais ce que Mme la
députée...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais je ne voudrais pas...
M. Charbonneau: ...de Maisonneuve voulait savoir à
l'égard des régimes de retraite pour les travailleuses à
faible revenu, et en particulier les travailleuses à faible revenu a
temps partiel - et cela pourrait nous conduire au prochain sujet - ce sont ies
régimes supplémentaires. Il y a un problème là. Il
y a un problème pour ces personnes et un problème pour les autres
aussi. Le ministre, la semaine passée, nous a annoncé que le
projet de loi 58, il l'avait mis sur les tablettes. En plus, il nous a dit: Je
ne vois pas quand je vais arriver avec une nouvelle loi.
Ce que je voudrais lui demander - un peu en continuité - c'est:
 l'égard des personnes dont parlait la députée de
Maisonneuve et de l'ensemble des personnes qui sont concernées par les
régimes privés de retraite, qu'est-ce que le ministre entend
faire? Il y a eu un rapport d'experts qui lui a été remis sur la
transférabilité. Est-ce que le ministre entend le rendre public,
d'une part? Je lui rappelle qu'il y a un engagement électoral - le
ministre l'a peut-être oublié -à la page 83 du programme
politique, sur la transférabilité. Donc, les deux partis
s'entendent sur le problème de la transférabilité. Nous,
on avait amorcé, on avait même déposé un projet de
loi. Ce qui est inquiétant pour nous» c'est de voir que le
ministre a, premièrement, décidé de mettre ce projet de
loi sur les tablettes. Mais ce qui est plus inquiétant encore, il ne
nous a pas indiqué quelle était son intention pour régler
le problème de la transférabilité. Va-t-il nous
présenter un autre projet de loi? Il nous a dit que non. Il nous a dit
qu'il n'avait pas l'intention...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense que pour qu'on s'entende
bien comme il faut, ce que le ministre vous dit, c'est qu'il a l'intention de
prioriser de façon absolue la question de l'égalité dans
la société. Il entend mettre à contribution, à
profit, à apport, toutes les marges de manoeuvre possibles sur le plan
du financement pour atteindre cette égalité. Cela sous-entend
qu'une fois qu'on s'est donné comme but de prioriser
l'égalité, on va la réaliser avant toutes les autres. Le
ministre, en disant ceci, est également bien conscient de l'engagement
du Parti libéral quant à la transférabilité.
J'espère être en mesure d'accomplir les deux. Mais vous me
demandez: Si vous avez un choix ou s'il y a un coût, est-ce que vous
allez utiliser le coût à la transférabilité? Ma
réponse immédiate est: Présentement, toutes les marges de
manoeuvre s'en vont à l'égalité.
M. Charbonneau: Est-ce que vous avez conscience, que quand vous
nous dites cela, vous allez à l'encontre de l'objectif politique que
vous venez d'énoncer? Parce que la transférabilité est
liée à l'objectif d'équité dont vous nous parlez si
généreusement aujourd'hui. Vous ne pouvez pas atteindre cet
objectif et laisser de côté le problème de la
transférabilité.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense que ce que le
député ne comprend pas, c'est qu'il s'agit d'un engagement
électoral - la transférabilité - qui a des incidences.
Mais, lorsqu'on est ministre, il faut choisir des priorités. On ne peut
pas dire comme quand on est dans l'Opposition - je m'en rappelle, cela ne fait
pas tellement longtemps -: Pourquoi ne faites-vous pas tout en même
temps. Je tente d'être clair avec vous. Je vous dis que moi, comme
ministre, ma priorité, c'est premièrement l'accès à
l'égalité et de matérialiser l'engagement du Parti
libéral du Québec de rendre ie conjoint ou la conjointe au foyer
admissible à la Régie des rentes du Québec.
Pour ce faire, j'ai besoin... Parce que j'aimerais être capable de
vous dire qu'en même temps on va faire plusieurs autres affaires. Pour ce
faire, j'ai besoin de toutes les marges de manoeuvre, sur le plan
financier, qui peuvent exister dans toutes les réformes qu'on
pourrait être appelés à présenter
immédiatement.
Maintenant, si vous me demandez: Est-ce que vous avez également
l'intention de réaliser l'engagement du Parti libéral quant
à la transférabilité qui, elle aussi, a des incidences
quant à l'égalité? La réponse est oui.
Le Président CM. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, nous allons avoir,
certainement, et le plus tôt possible, nous l'espérons, l'occasion
de discuter de toutes ces options de financement. Il demeure qu'il serait
absolument impossible d'envisager qu'on puisse discuter de l'accès au
Régime des rentes des travailleuses au foyer, qui peuvent l'être
temporairement ou à temps plein, il n'y a pas d'engagement formel au
moment où la personne l'est; il y a un va-et-vient entre le foyer et le
marché du travail... On sait d'ailleurs qu'un mariage sur trois aboutit
à un divorce, présentement. C'est donc dire qu'il peut y avoir
une ou deux épouses concernées par cette réforme. Mon
propos est le suivant: II serait impossible d'envisager qu'on puisse examiner
cette question sans, aussi, concurremment, examiner le dossier des
travailleuses sur le marché du travail, qui, elles, pourraient
bénéficier de rentes plus faibles que celles qui seraient
contenues dans des hypothèses de travailleuses au foyer. Donc, des
rentes plus faibles pour des personnes qui ont la double charge, à la
fois, des responsabilités...
M. Charbonneau: Les mêmes responsabilités.
Mme Harel: ...familiales, parentales et, à la fois, un
emploi sur le marché du travail et qui pourraient, théoriquement,
si on n'harmonisait pas l'ensemble, bénéficier de rentes plus
faibles que celles dont pourraient bénéfier,
éventuellement... Posons l'hypothèse d'une travailleuse au foyer
qui jouirait d'une rente plus élevée, compte tenu du revenu
élevé de son mari, donc de son exemption élevée. Il
faut prendre en considération que tout ça sera harmonisé,
sinon ce qu'on va introduire c'est une énorme discrimination.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les questions que vous venez de
soulever ont déjà été soulevées à la
régie.
M. Charbonneau: On a surtout hâte de voir...
Mme Harel: La confiance...
M. Charbonneau: ...dans ce cas, le résultat de toutes les
élaborations autour des beaux principes que le ministre nous a
présentés ce matin. Je voudrais juste lui rappeler une chose. La
réponse qu'on m'a donnée tantôt, à savoir qu'il n'y
avait pas eu de mandat de confié à la Régie des rentes
concernant un programme d'allocation de retraite pour personnes au foyer qui
ont charge d'enfants, je voudrais être bien sûr que le ministre m'a
répondu comme il faut, tantôt.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tantôt, vous avez
parlé de personnes âgées au foyer.
M. Charbonneau: Non. De personnes au foyer qui ont charge
d'enfants.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. Tantôt - vous relirez
la transcription - vous avez dit: des personnes âgées.
M. Charbonneau: J'ai corrigé.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La réponse était
non. Maintenant, personnes au foyer, je vais revérifier.
M. Charbonneau: J'ai corrigé, parce que j'ai lu un texte
tantôt, après.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tantôt, on avait noté
votre question, parce que vous l'avez répétée à
maintes reprises.
M. Charbonneau: Je l'ai répétée et j'ai
lu.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tantôt, il s'agissait de
personnes âgées; la réponse était non.
Reformulée comme vous venez de la formuler, la réponse est
oui.
M. Charbonneau: Je dois vous dire que, la dernière fois,
je l'avais bien formulée. Le ministre vérifiera, parce que j'ai
le texte ici et je lisais le texte. À cet égard, ce que je
voudrais savoir, c'est qu'il devait y avoir un rapport de la régie qui
devait être prêt pour le mois de mars. Est-ce qu'il est prêt,
ce rapport?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II n'y a pas de rapport de
terminé au moment où on se parle.
M. Charbonneau: Quand la régie compte-t-elle terminer ce
rapport?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Il n'y a pas de date
arrêtée, au moment où on se parle.
M. Charbonneau: Je comprends qu'il n'y ait pas de date, mais
comment se fait-il que la régie ait dit au ministre, au mois de janvier,
que ça devait être terminé pour le
mois de mars et que, là, on nous dise que ce n'est pas fait et
qu'on ne sait pas quand ce sera fait?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II n'y a jamais eu
d'échéance comme telle de fixée. Des
échéances ont été discutées, mais aucune n'a
été fixée, à ce qu'on me dit.
M. Charbonneau: Dans ce cas, je vais lire au ministre le document
de la Régie des rentes en date de janvier 1986 sous la rubrique dont on
vient de parler: "Mandat confié à la Régie des rentes
concernant un programme d'allocation de retraite aux personnes au foyer qui ont
charge d'enfants, suite au mandat confié par la ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu en novembre dernier. La
régie procède actuellement à l'analyse de cette question,
clientèle visée, évolution des besoins, coûts et
financement, afin de recommander des solutions possibles qui tiennent compte
des éléments ci-haut mentionnés. À cette fin, un
rapport devrait être disponible en mars 1986." C'est clair,
ça.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le président m'indique
qu'il a priorisé mes commandes.
M. Charbonneau: Ah! Très bien. On comprend. Cela veut-il
dire que cette étude est sur les tablettes, pour le moment? C'est ce
qu'on doit comprendre?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, mais les
échéances sont modifiées, évidemment. (12
heures)
M. Charbonneau: Mais le ministre est-il conscient qu'hier il y a
eu un document d'élaboré sur une politique familiale et que,
deuxièmement, ce document dont on parle est relié è ce
dont le ministre nous a parlé depuis tantôt, les personnes au
foyer qui ont charge d'enfants; cela fait partie, entre autres, du
problème de la sécurité du revenu à la retraite des
femmes au foyer.
M. Paradis (Brome-Missisquoî): Oui, il y a des incidences
et c'est pourquoi les études et consultations faites pour l'un peuvent
servir pour l'autre.
M. Charbonneau: Le ministre n'a pas répondu à la
dernière question de Mme la députée de Maisonneuve.
L'échéancier, c'est quoi? Quand peut-on s'attendre à avoir
des documents?
M. Paradis
(Brome-Missisquoi); Aussitôt qu'ils vont
être disponibles.
M. Charbonneau: Le ministre s'engage-t-il à les rendre
publics aussitôt qu'ils vont être prêts?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Lorsque les documents finaux me
seront transmis, que je serai satisfait et qu'ils seront prêts à
être rendus publics, ils le seront immédiatement.
M. Charbonneau: Qui dirige le dossier, le ministre ou la ministre
è la Condition féminine?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Comme ministre titulaire ou
responsable de la Régie des rentes, je le fais. Maintenant, chez nous,
on a la tendance à travailler en collégialité et comme je
partage, sur ce dossier, les préoccupations de Mme la ministre à
la Condition féminine, vous pourriez parler d'un copilotage.
Bonification du Régime de rentes
M. Charbonneau: Très bien. Une dernière question
sur le problème de la bonification: Qu'est-ce que le ministre entend
faire sur toute la problématique de la bonification du Régime de
rentes?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'orientation que nous avons
donnée au dossier, à notre avis, une fois appliquée, va
bonifier le régime.
M. Charbonneau: Bien, voyons donc! Vous n'êtes pas
sérieux en disant cela?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pardon? Autrement, s'il ne le
bonifie pas, il va le détériorer, et ce n'est pas l'objectif que
l'on vise.
M. Charbonneau: Écoutez, je pense que, si vous relisez les
documents qui existent, vous allez vous rendre compte qu'il y a une
différence entre le financement qui nécessite un type de
hausse...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On m'indique, on m'indique...
M. Charbonneau: ...et la bonification. On parle, là, du
fait que...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): À la suite de votre
réaction, on n'a peut-être pas la même définition de
la bonification. C'est améliorer la...
M. Charbonneau: Dans ce cas-là, on va prendre un
dictionnaire.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Qu'est-ce que cela veut dire pour
vous, bonification?
M. Charbonneau: Bonification, c'est que dans le Régime de
rentes actuellement, les
prestations qui sont versées ne sont pas suffisantes pour
permettre aux gens... Il se dévalue, d'une certaine façon; elles
ne sont pas suffisantes pour permettre un niveau de revenus suffisant et cela
oblige de plus en plus les retraités à avoir recours à
l'assistance publique. Et plus cela va aller, si le régime n'est pas
bonifié, on va se retrouver finalement avec des rentes qui n'auront
presque plus de valeur et une obligation d'avoir de plus en plus recours
à des programmes d'assistance publique. Et, dans les faits, on
décide maintenant de préparer une facture de taxation à
nos enfants et à nos petits-enfants qui va être énorme,
parce qu'eux autres vont devoir payer des programmes d'assistance publique
importants pour pouvoir faire en sorte qu'il y ait des rentes acceptables.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, je tente de suivre
votre raisonnement, je pars de la bonification; c'est un programme qui est
indexé sur une base annuelle. Est-ce qu'il l'a toujours
été sur une base annuelle? Depuis nombre d'années, sur une
base annuelle. Et là, je m'en vais à la fin de votre question et
je retombe dans ce que l'on avait discuté au début où l'on
avait haussé le ton, de part et d'autre, quant au financement. Si vous
voulez reprendre tout ce dossier du financement, nous allons repartir de votre
pseudo-entente interprovinciale de 1981 à aller jusqu'à la
signature, passer à travers les augmentations qui sont prévues
pour les cinq prochaines années, discuter du taux que cela
représente, en étant d'accord, tous les deux, que, quand on est
à 3,6 % et que cela vaut 12 %, on ne paie pas complètement, mais
en vous disant que l'on va augmenter de 1 % au cours des cinq prochaines
années, puis en vous indiquant de nouveau que toutes les marges de
manoeuvre que l'on peut dégager seront dégagées en
fonction de l'égalité dans la société. On pourra
recommencer, si vous voulez.
M. Charbonneau: Ce que je vous dis -et vous consulterez vos
experts - c'est que vous allez vous rendre compte que le problème de la
bonification est différent du problème du financement de la
caisse qui se vide. Ce sont deux problèmes distincts.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez-moi?
M. Charbonneau: Ce sont deux problèmes distincts.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Lesquels?
M. Charbonneau: Le problème de la bonification et le
problème de la caisse qui se vide. C'est clair que, dans les deux cas,
la solution est une hausse des cotisations, mais dans un...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, le problème
de financement et le problème de la bonification, si vous ajoutez une
clientèle à la Régie des rentes, vous affectez le
financement...
M. Charbonneau: Je ne parle pas du... Je pense qu'on ne se
comprend pas.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et, en même temps, tu
bonifies ton régime. C'est un choix que tu fais. Tu peux choisir, comme
gouvernement, que la Régie des rentes ne s'applique qu'à un
faible pourcentage de la population. À ce moment-là, cela
coûte moins cher.
M. Charbonneau: Ce n'est pas la même chose, M. le
ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tu peux choisir de le bonifier en
l'appliquant de façon plus diversifiée.
M. Charbonneau: Ah! on ne parle pas de la même chose, dans
ce cas-là! Ce que je vous disais...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce n'est pas le seul cas, je
pense.
M. Charbonneau: Non, mais il serait peut-être temps qu'on
se comprenne un petit peu. Ce dont je vous parle, c'est du problème de
la dévaluation des rentes. C'est cela, le problème dont je vous
parle. Il me semble que ce n'est pas difficile à comprendre. De moins en
moins les rentes gardent leur valeur.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, on va retomber
dans le débat sur l'aide sociale. Elle est indexée, la rente,
chaque année. Non?
M. Charbonneau: Écoutez, moi, je vous propose une
chose...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Moi, c'est l'information qu'on m'a
donnée, je n'en reçois pas, mais M. le président de la
régie...
M. Charbonneau: Je me rends compte que le ministre n'a pas eu le
temps de lire cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...m'indique que la rente est
indexée de façon annuelle. Vous me dites qu'elle diminue à
chaque année; cela veut dire qu'elle ne sera pas indexée. C'est
une grosse déclaration!
M. Charbonneau: Je vous suggère deux choses, un petit
programme de lecture simple. Lisez donc le livre orange et lisez donc la revue
de presse qui a accompagné le livre orange, vous allez vous rendre que
les commentateurs, eux, ont bien compris la distinction.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La rente n'est pas indexée.
Voyons donc!
M. Charbonneau: Ce n'est pas cela que je vous dis, je vous dis
que le ministre essaie de nous faire croire que le problème de la
bonification, il va le régler et il est réglé. Ce n'est
pas cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On ne s'entend pas sur la
définition de bonification.
M. Charbonneau: Je comprends qu'on ne s'entend pas parce
que...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On peut choisir de bonifier en
restreignant la clientèle. On peut choisir de bonifier en rendant
admissible une clientèle plus vaste et, là, le régime est
bonifié. Il n'est pas bonifié quant au montant d'argent
reçu, mais il est bonifié sur le plan social quant aux individus
qui, dans la société...
M. Charbonneau; Depuis ce matin que je vous parle de la
bonification comme étant un problème relié à la
dévaluation des rentes.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Comment pouvez-vous
dévaluer quelque chose qui suit l'inflation?
M. Charbonneau: Vous, vous me parlez de l'élargissement.
Écoutez, je ne vous ferai pas de dessin.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, donnez-moi une réponse, ne me
donnez pas de dessin.
M. Charbonneau: II ne nous reste pas grand temps, vous ferez vos
devoirs et vous allez vous rendre compte qu'il y a un problème, que de
moins en moins les rentes suffisent et gardent leur valeur réelle et
que, dans les faits, de plus en plus les retraités sont obligés
d'avoir recours à des programmes d'assistance publique. Encore
là, je ne suis pas un expert, mais le ministre non plus, de toute
évidence ce matin.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous êtes
bénéficiaire d'une rente cette année et que vous obtenez
une fois par année - vous me direz ce serait peut-être mieux si
c'était trimestriel, hebdomadaire, quotidien l'indexation à la
fin de l'année, comme bénéficiaire, vous n'avez pas perdu
votre pouvoir d'achat. Vous avez maintenu votre pouvoir d'achat au même
titre que le travailleur qui, dans sa convention collective, a droit à
l'inflation à la fin de l'année n'a pas augmenté son
pouvoir d'achat, mais il n'a pas diminué son pouvoir d'achat. Il
récupère l'indexation de l'augmentation du coût de la vie.
Est-ce que vous voulez qu'on donne plus que l'augmentation du coût?
Est-ce que c'est votre proposition?
M. Charbonneau: Ce que je vous dis, c'est qu'il y a un
problème. Ce problème avait été abordé dans
le document gouvernemental de l'an dernier et le ministre, aujourd'hui, nous
parle comme si ce problème s'était évaporé dans la
nature.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez, il y a des
problèmes majeurs, je ne dis pas qu'ils se sont évaporés,
au contraire, nous avons hérité d'une situation qui, là
aussi, est très difficile. J'ai indiqué tantôt que M.
Francoeur avait été juste d'indiquer clairement qu'un
régime qui vaut 12 % et pour lequel on paie 3,6 %, à un moment
donné, on va frapper un mur. Je pense que tout le monde s'entend
là-dessus. Je ne vous dis pas qu'il n'y a pas de problème, mais
pour faire face à ce problème et à d'autres
problèmes je vous ai également indiqué l'orientation de
l'actuel gouvernement, qui est de tenter, au meilleur de nos capacités,
de placer l'ensemble de la population sur un pied d'égalité, sans
faire de discrimination dans la question de la rente. Une fois qu'on sera sur
un pied d'égalité comme population, cela va être difficile
de faire face au problème que vous soulevez, mais on sera tous
égaux pour y faire face. Je pense que c'est une orientation que ne
détestait pas, en tout cas, votre collègue de Maisonneuve qui
était ici tantôt. Vous, cela ne semble pas vous plaire, cette
"priorisation"-là. Vous en aviez des priorités quand vous
étiez au gouvernement...
M. Charbonneau: Moi, je suis pour la vertu.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On les a critiquées, on
n'était pas...
M. Charbonneau: Moi, je suis pour la vertu, M. le ministre, mais
je suis aussi pour le réalisme et la franchise. On jugera finalement des
actes. De toute façon...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous nous dites qu'on est
irréaliste...
M. Charbonneau: Ce que je vous dis, c'est qu'on va voir cela
quand cela va être le temps. Vous nous faites toutes sortes
d'affirmations ce matin...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous pouvez nous accuser
d'être irréalistes si vous le voulez mais, s'il vous plaît,
ne nous accusez pas de manque de franchise, on vous le dit comme on le
pense.
M. Charbonneau: On va terminer avec la Régie des rentes ce
matin sur une autre question. Je pense que les commentateurs et ceux qui
connaissent un petit peu le problème de la sécurité du
revenu à la retraite vont bien évaluer les réponses du
ministre ce matin.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ils ont surtout
évalué vos questions jusqu'à maintenant.
Programme d'allocations familiales
M. Charbonneau: En regard du programme d'allocations familiales,
est-ce que le ministre peut nous donner l'assurance que ce programme sera
maintenu?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai de sérieux
problèmes. Dans sa forme actuelle, à la suite du budget Duhaime
de l'an dernier, ce programme nous apporte d'énormes difficultés.
Nous avons commencé - je pense que c'est un secret de polichinelle -
à recevoir des gens qui nous renvoyaient leurs chèques
d'allocations familiales au bureau. Dans sa forme actuelle, il va falloir que
des modifications soient apportées. On ne peut pas...
M. Charbonneau: Quelles sont les modifications envisagées
actuellement?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai souligné le
problème parce que je suis le ministre responsable de la paie. Je vous
ai indiqué qu'une des causes du problème se retrouvait au
ministère des Finances. J'ai même fait allusion au budget Duhaime
de l'an dernier. Il semble qu'il y ait des choses - j'ai beaucoup de respect
pour mon excollègue, le député de Saint-Maurice - qui
n'avaient pas été prévues, j'ai l'impression, dans le
budget de l'an passé.
J'ai fait des représentations, au même titre que vous
pouvez le faire en tant que député, lorsqu'un problème
vous apparaît aussi évident. Je me souviens à
l'époque, au lendemain du budget Duhaime, que le député de
Vaudreuil-Soulanges avait prévenu le gouvernement de ce qui est en train
de se produire présentement, si vous retournez dans la critique, dans le
discours...
M. Charbonneau: La question est simple, M. le ministre. Vous nous
dites, si je comprends bien les paroles que vous prononcez, que le programme ne
peut pas demeurer comme il est. Très bien.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bien, il y a des gens qui nous
retournent des chèques.
M. Charbonneau: Vous nous dites que vous avez envisagé des
changements. Je vous demande si le programme sera aboli ou maintenu? Je
comprends qu'on soit à la veille du budget, mais nous ne sommes pas des
enfants d'école.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pratiquement parlant, j'imagine
que pour les gens qui retournent leur chèque il est plus qu'aboli car
ils doivent payer le timbre pour nous retourner le chèque. Il est plus
qu'aboli pour ces gens. Maintenant, vous me demandez si, jeudi, il y aura
quelque chose dans le budget. Si j'étais ministre des Finances, je
n'aurais pas le droit de vous répondre...
M. Charbonneau: Non, mais là je...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...je suis ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et je ne le sais
pas.
M. Charbonneau: Quelle est votre opinion à vous? Est-ce
que le ministre peut nous dire s'il est en faveur du maintien ou de l'abolition
du régime? C'est une réponse qu'il peut nous donner,
lui-même, comme un grand garçon.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'an passé, lorsque votre
gouvernement, dans son budget, a aboli - et c'est ce qu'on utilisait comme
vocabulaire - les allocations familiales pour une partie de la population, nous
nous sommes prononcés contre.
M. Charbonneau: Etes-vous d'accord avec l'ancien
gouvernement?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si j'avais été
d'accord avec l'ancien gouvernement...
Le Président (M. Bélanger): Si vous le permettez,
avant de continuer, une précision au sujet du temps. Vous saviez que
nous avions une enveloppe totale de neuf heures pour l'étude des
crédits du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu. Nous avons déjà fait une
première session de sept heures et demie.
Une voix: Six heures quarante-cinq.
Le Président (M. Bélanger): De six heures
quarante-cinq. Il nous reste donc aujourd'hui techniquement une heure et demie,
plus les 45 minutes.
Contrairement à ce que j'avais affirmé ce matin et comme
l'a corrigé tantôt le député de Verchères,
sur la feuille que j'ai ici, on avait corrigé ce temps et on avait
ajouté les 45 minutes, d'où la confusion. Normalement,
nous devrions terminer à 12 h 15. Eu égard au fait que nous avons
commencé un petit peu en retard ce matin, il reste encore une douzaine
de minutes. Alors je propose à la commission de continuer jusqu'à
12 h 30 et de terminer, dans la mesure du possible.
M. Charbonneau: Écoutez, ce que je propose au ministre,
s'il est d'accord, pour qu'on puisse avoir une discussion - c'est dommage qu'il
y ait plusieurs sujets qu'on ne pourra pas aborder - comme j'avais
organisé un peu ce matin le début de mes interventions et la
façon dont on a abordé la discussion avec le ministre, en toute
bonne foi, en pensant que c'était jusqu'à 13 heures, si le
ministre est d'accord, on pourra filer jusqu'à 12 h 30 sur les questions
que j'avais à poser et, après cela, on pourra prendre cinq ou dix
minutes pour les réponses qu'il voulait nous fournir.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Jusqu'à 12 h 30, cela va,
mais après, j'ai des petites complications. J'ai de la
législation à passer au peigne fin.
M. Charbonneau: Je comprends. Écoutez, je ne sais pas
combien de temps le ministre voulait... D'abord, c'est consigné au
Journal des débats que le ministre a ses réponses. II peut
très bien nous les donner dans ce cas.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est encore annoté. J'ai
encore des notes personnelles. J'ai de mauvaises habitudes.
M. Charbonneau: Dans ce cas, ce que je propose au ministre,
étant donné qu'au Journal des débats tout le monde sera
témoin que le ministre voulait donner les réponses et qu'il les
avait en main... Est-ce qu'il peut nous les faire parvenir en enlevant ou en
censurant ses notes? Cela nous permettrait de prendre les quinze minutes qui
nous restent pour poser des questions. (12 h 15)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...quant à vos questions
à vous. Maintenant, j'avais également des questions et je
voudrais avoir l'accord du député de Taschereau. Est-ce qu'on
pourrait vérifier avec lui s'il est satisfait de cette méthode ou
de cette procédure?
M. Charbonneau: Je pense que...
Le Président (M. Bélanger): Oui. Il est absent.
Selon le proverbe, les absents ont tort. Alors, on présume qu'il sera
satisfait de la réponse, pour autant que le document sera remis à
la commission, à Mme Lamontagne, qui l'acheminera à tout le
monde. On s'entend donc pour maintenir la séance jusqu'à
12 h 30. Est-ce que j'ai le consentement unanime?
Des voix: Oui.
Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Je veux remercier
le ministre. Je voudrais aller plus loin un peu dans les intentions du
ministre. Je ne le sais pas, mais je présume qu'il n'a pas eu trop le
temps de prendre connaissance de la recommandation 3 du Rapport du
comité de la consultation sur la politique familiale qui recommandait
que le gouvernement du Québec regroupe en un programme de transfert
unique les programmes actuels d'allocations familiales, d'exemption pour les
enfants de 0 à 18 ans et d'allocations de disponibilité. Je
voudrais savoir si le ministre, dans la réponse qu'il nous a
donnée, nous laisse entendre que, finalement, le gouvernement a
décidé d'abolir le programme d'allocations familiales.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bien non, absolument pas! Ce que
je vous dis, c'est que comme ministre qui a la responsabilité des
chèques, si je peux utiliser cette expression-là, je connais des
problèmes d'application qui me viennent de l'ancien gouvernement et dont
j'ai hérité. Je ne m'en plains pas, cela fait partie de
l'héritage, En fait, on a dit, au lendemain du budget Duhaime, que le
gouvernement du Parti québécois avait, dans les faits, aboli
l'allocation familiale pour une partie de la population, mais il a fait
même pire. Dans l'éventualité où le gouvernement
fédéral... Je me le rappelle, ce sont des propos qui avaient
été prononcés par le critique financier du Parti
libéral, le député de Vaudreuil-Soulanges, aujourd'hui
ministre de l'Industrie et du Commerce, que, dans les faits, il y aurait
même une partie de la population qui serait financièrement
pénalisée de recevoir des allocations familiales. Je constate
aujourd'hui, comme ministre responsable de l'émission des
chèques, qu'il me revient des chèques. Les gens ne veulent pas
avoir le chèque. Pourquoi? Parce qu'on me dit qu'on a fait le calcul et
que cela coûte de l'argent à cause de la fiscalité du
budget Duhaime de recevoir ces chèques. Ce que je fais comme ministre
responsable de l'émission des chèques, c'est que je fais part -
c'est mon devoir de le faire - au ministre des Finances de ce problème.
Maintenant, si vous me posez de la question: Est-ce que le ministre des
Finances, dans son budget, a tenu compte de vos échanges, etc., je n'en
ai aucune idée, je ne l'ai pas demandé au ministre des Finances
et il n'aurait jamais
violé le secret budgétaire.
M. Charbonneau: Je vais vous poser une question encore plus
directe. Vous nous dites que vous avez soumis un problème d'application
de la conséquence de la décision budgétaire de l'an
dernier. Vous dites que, dans les faits - et c'était l'opinion de
l'Opposition libérale du temps - c'était une abolition. Vous avez
rappelé au député de Bonaventure, qui se souvenait sans
doute du débat, cette prétention libérale de
l'époque. Je vous demande aujourd'hui, suivant cette prétention
si vous avez fait la recommandation au ministre des Finances de maintenir sous
cette forme ou sous une autre l'abolition ou si vous avez recommandé au
ministre des Finances de maintenir le programme d'allocations et de suspendre
l'abolition dont vous vous plaignez et que vous dénoncez.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai...
M. Charbonneau: ...et de garder l'universalité du
programme.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...souligné au ministre des
Finances les problèmes d'applicabilité que j'éprouve comme
ministre responsable de ce qu'on peut appeler l'émission des
chèques.
M. Charbonneau: Je n'ai pas très bien saisi, je
m'excuse.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai informé le ministre
des Finances des problèmes pratiques que posait l'application du budget
Duhaime.
M. Charbonneau: D'accord. Comme responsable du programme
d'allocations familiales, vous n'avez pas d'idée sur cela. Vous n'avez
pas fait de suggestion, vous n'avez pas émis d'opinion
particulière au ministre des Finances. Vous ne me ferez pas accroire
cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous me demandez si j'ai des
idées...
M. Charbonneau: Vous ne me ferez pas accroire cela à moi.
Je comprends et je ne veux pas que le ministre viole le secret du budget. Je ne
veux pas lui tirer un "scoop". Mais cela fait neuf ans que je suis
député, presque dix ans, et j'étais aussi journaliste
avant, donc, je connais un peu le tabac et on ne me fera pas accroire des
affaires. Je ne prends pas le ministre pour un imbécile et je
présume que le ministre a dû émettre des opinions. Je ne
veux pas connaître l'opinion que le ministre des Finances va nous livrer
demain, je veux savoir la sienne, comme ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, quelle est son opinion sur les allocations
familiales. Est-il en faveur du maintien ou est-il en faveur de l'abolition,
c'est-à-dire de maintenir l'abolition si on s'en tient au discours
libéral, ou de l'abolir carrément, si on pouvait prendre la
prétention péquiste, mais peu importe, est-il en faveur de
l'abolition ou du maintien du caractère universel? Le ministre...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai souligné à mon
collègue des Finances les difficultés inhérentes, non
seulement à l'abolition, pour une partie de la population, des
allocations familiales par le gouvernement du Parti québécois, je
lui ai également souligné que je recevais des chèques -
lorsqu'il y a abolition, les gens gardent les chèques, j'imagine, et ils
les paient en impôts - mais que je recevais, comme ministre...
M. Charbonneau: Le ministre nous a dit cela tantôt. Ce que
je veux savoir, c'est ce qu'il a dit après cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ... Il y a une partie de ce que
j'ai dit qui vous a échappé. Vous avez raison pour ce bout. La
partie qui vous a échappé, c'est que je recevais des
chèques comme ministre, et là cela doit venir de gens à
qui il en coûte de l'argent de recevoir des chèques d'allocations
familiales. J'ai souligné à mon collègue des Finances que
cela posait, prima facie, des difficultés.
Maintenant, de quelle façon mon collègue des Finances
disposera-t-il des difficultés que je lui ai soulignées? Je pense
que vous allez être parmi nous jeudi soir. Si le ministre des Finances
donne suite aux inquiétudes que je lui ai manifestées, il y
donnera suite de la façon qu'il jugera la plus appropriée dans sa
grande sagesse, mais j'espère...
M. Charbonneau: Je pense que le ministre ne veut pas nous donner
l'opinion qu'il a émise au ministre des Finances.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qu'il tentera...
Le Président (M. Bélanger): Laissez le ministre
répondre, s'il vous plaît!
M. Charbonneau: M. le Président, est-ce que...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
on va laisser la parole au ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous savez, le ministre des
Finances a trente ans d'expérience parlementaire. Il a occupé
presque tous les portefeuilles ministériels au gouvernement.
J'avais affaire à un individu qui avait suffisamment d'expérience
pour que je considère, comme ministre et comme député, une
fois que je lui avais souligné les difficultés, que je pouvais me
fier à son bon jugement.
M. Charbonneau: D'accord. Le ministre n'est pas obligé de
faire comme au hockey, de "toffer" le temps jusqu'à la fin. On a
compris, premièrement, qu'il ne voulait pas nous donner publiquement
l'opinion qu'il avait émise au ministre des Finances et,
deuxièmement, qu'il ne voulait pas nous assurer que le programme sera
maintenu. On le comprend. On n'a pas besoin de nous faire de grands dessins. Il
ne nous reste pas grand temps, M. le ministre. Avant de clore malheureusement
l'étude des crédits, je voudrais aborder un peu les normes du
travail, si vous n'avez pas d'objection. J'espère que les leaders
prévoiront plus de temps, l'an prochain, pour la Main-d'Oeuvre et la
Sécurité du revenu, car c'est un secteur vaste et important.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce qu'on peut, M. le
Président, selon la procédure, demander le vote sur les
programmes 2 et 4 de façon à libérer M. Legault?
Le Président (M. Bélanger): Oui. J'appelle le vote
sur les crédits du programme 2, "Administration
déléguée de programmes en sécurité du
revenu", et du programme 4, Régie des rentes du Québec,
allocations familiales. Est-ce que les crédits sont adoptés?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Bélanger): Adopté. Merci,
M. le président de la régie.
M. Charbonneau: Merci, M. le président, et j'espère
que nous aurons l'occasion de vous voir dans des consultations publiques que le
ministre déclenchera prochainement.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Verchères.
Normes du travail
M. Charbonneau: Merci, M. le Président. J'avais tellement
de questions à poser au ministre sur les normes du travail. Il y a la
question du salaire minimum et la question des promesses électorales
à l'égard des travailleuses à temps partiel et celle de
l'amélioration de leurs normes de travail. L'ensemble des amendements
réclamés par différents groupes de notre
société à l'égard des normes minimales du travail,
si l'on pense par exemple aux congés de maladie qui ne sont pas
possibles actuellement, si l'on pense simplement à la diminution de la
semaine de travail et du temps de travail pour une journée, si l'on
pense aux dispositions relatives au temps supplémentaire, si l'on pense
aux droits a l'ancienneté pour les travailleuses régies par la
Loi sur les normes du travail lors d'une mise à pied ou d'un rappel, si
l'on pense à l'augmentation du nombre de congés
fériés ou de vacances annuelles, si l'on pense au licenciement ou
à la protection de l'emploi face aux changements économiques et
technologiques, si l'on pense aussi à la demande du Conseil du patronat
de modifier la Loi sur la fête nationale...
En vrac, trois questions. Je comprends que ce sont des
questions-fleuves, mais le ministre comprendra que, si on avait eu la
demi-heure qu'on pensait avoir, on aurait peut-être pu les aborder un peu
plus en détail. À l'égard du salaire minimum, le ministre
nous a déjà indiqué que ce n'était pas clair si le
gouvernement était pour ou contre. Le premier ministre, durant la
campagne électorale, nous a dit qu'il était pour, à
Télé-Média, au cours du débat des chefs. Le
ministre de l'Industrie et du Commerce et le ministre aux PME nous ont dit
qu'ils étaient contre. Le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu nous a dit qu'il consultait l'Ontario pour
voir s'il n'y a pas moyen d'arrimer cela avec eux. L'an dernier, probablement
lors de l'étude des crédits, au mois de mai, Mme Marais avait
indiqué qu'une série d'études étaient en cours sur
le salaire minimum au ministère de la main-d'oeuvre. Les études,
j'imagine, sont complétées. Premièrement, est-ce que le
ministre peut les rendre publiques?
Deuxièmement, est-ce que le ministre peut nous dire où en
sont les discussions avec l'Ontario? Qui mène ces discussions et quelle
est la position du gouvernement du Québec dans ces discussions avec
l'Ontario? Est-ce que le ministre est d'accord avec l'introduction d'un
principe de mécanisme d'ajustement périodique?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous me permettrez, avant de
répondre sur le fond à la question du député, de
vous présenter M. Paul-Emile Bergeron, qui est le président de la
Commission des normes du travail. Il est ici pour faciliter ou compléter
les réponses sur le plan du détail. Sur le plan du principe du
salaire minimum...
M. Charbonneau: Je veux rassurer le président que si nous
prenons quelques minutes à peine, ce n'est pas parce que nous
considérons le travail de l'organisme comme peu important. J'imagine
qu'il connaît un peu les aléas de cette période de...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...procédure
parlementaire.
M. Charbonneau: C'est ça.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quant au salaire minimum, vous
nous demandez: Est-ce que vous êtes en faveur de l'augmentation du
salaire minimum? La réponse est positive. C'est oui, je suis en faveur
de l'augmentation du salaire minimum.
Vous avez demandé: Est-ce que les études en cours au
ministère, qui avaient été commandées...
M, Charbonneau: Est-ce que c'est la position du gouvernement?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. C'est la position qui a
clairement été énoncée par le premier ministre a
l'occasion - et vous l'avez évoquée - de la campagne
électorale. J'ai eu des discussions avec mes collègues des
ministères è vocation essentiellement économique et, ce
qui les concerne, c'est la même chose qui nous concerne chez nous: la
situation concurrentielle ou compétitive du Québec.
J'ai eu - et j'attire votre attention là-dessus - l'occasion de
tomber, tout à fait par hasard, un vendredi matin, il y a à peu
près trois semaines, sur un tableau publié dans le journal The
Gazette, qui donnait l'état du salaire minimum dans chacune des
provinces canadiennes avec le taux de chômage moyen. On discernait
clairement le taux de chômage chez les plus jeunes travailleurs. Je pense
que c'étaient - je ne veux pas citer de mauvais chiffres - les 18-24
ans. On s'apercevait que la province canadienne qui avait le taux de salaire
minimum le plus élevé avait un taux de chômage relativement
moyen, sauf que chez les plus jeunes le taux de chômage était ce
qu'il y avait de plus haut au pays. Je pense que c'était même plus
haut qu'au Québec. Il y a cet incident dont il faut tenir compte.
J'ai dit: D'accord, on va le faire. Vous nous dites: Où en
êtes-vous rendus. J'ai dit que nous étions en consultation avec la
province de l'Ontario. Je tiendrais à vous dire que c'est rendu au plus
haut niveau. Vendredi de cette semaine, j'aurai une rencontre avec le ministre
du Travail de l'Ontario pour tenter d'en arriver à une augmentation du
salaire minimum, sans nous désavantager sur le plan concurrentiel. Si
vous me demandez: Est-ce que c'est un sine qua non, c'est-à-dire, si
l'Ontario ne fait rien, est-ce que vous ne ferez rien non plus? Notre position
n'est pas intimement liée à ce point. C'est un effort de bonne
volonté pour atteindre à la fais l'objectif d'une augmentation du
salaire minimum et l'objectif de position concurrentielle, je n'irais pas
jusqu'à dire favorable, mais, à tout le moins, non
défavorable pour le Québec sur le plan de la création
d'emplois.
M. Charbonneau: ...un échéancier de quel ordre de
grandeur, pour trancher, si avec l'Ontario ça ne finit pas par
aboutir?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je suis pressé, parce que
ça fait depuis 19B1 que ces gens n'ont pas eu d'augmentation du salaire
minimum, que les gens qui sont à l'aide sociale sont indexés -
quoique vous en pensiez - sur une base annuelle et qu'il y a eu au cours de
cette période...
M. Charbonneau: ...pas que leur pouvoir d'achat, a baissé,
mais nous avons fait le débat et nous avons gagné.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...un rétrécissement
entre la marge qui sépare le bénéficiaire de l'aide
sociale plus ses besoins spéciaux et celui ou celle qui, dans notre
société, travaille au salaire minimum. Il y a un niveau - je
pense que c'est M. Parizeau qui, à l'époque, l'avait
mentionné dans un de ses livres...
M. Charbonneau: Incitation au travail. Il y a un problème
d'incitation au travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Exactement. Le problème de
l'incitation au travail. Il faut que cette incitation au travail demeure dans
notre société, parce que, s'il n'y a plus d'incitation au
travail, tout le monde est assez intelligent pour comprendre que cela ne vaut
pas la peine de travailler, on peut se faire vivre par l'État.
M. Charbonneau: Je pense qu'on est d'accord. Nous autres aussi,
on était d'accord pour augmenter le salaire minimum. Ce qu'on avait
entrepris, ce sont des consultations avec la Table nationale de l'emploi, mais
le ministre a mis cela sur les tablettes. Au-delà de cela, le
gouvernement, le 19 juin 1985, avait pris une décision à cet
égard. Si on est d'accord, ce qui aiderait tout le monde, parce que le
ministre convient que, même dans son groupe, il y a des gens qui ruent
dans les brancards - on a vu deux ministres qui ont fait des
déclarations contre, mais on a dit que c'est la parole du premier
ministre qui est la loi. Très bien! Mais on sait que tout le monde n'est
pas nécessairement d'accord, ni au gouvernement ni dans la
société. Ce qui serait utile, et utile pour tout le monde, dans
ce dossier, c'est que les études qui ont été menées
soient rendues publiques.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous comprendrez aisément
que ces études sont actualisées de façon quasiment
quotidienne. La situation change sur le marché et ces
études sont actualisées.
M. Charbonneau: La situation change, mais ce à quoi je
fais allusion, ce sont des études au ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du Revenu qui faisaient
état de la problématique de hausser ou non le salaire minimum et
des conséquences. Je sais qu'il y a des modifications, mais,
globalement, il y a des études. Vous ne viendrez pas me faire accroire
qu'à un moment donné, dans les études, il n'y a pas un
point final, un "30", dans le jargon journalistique, et qu'elles ne sont pas
remises au ministre pour consultation.
Le Président (M. Bélanger): Avant d'accepter la
réponse du ministre, je veux vous prévenir que c'est la
dernière réponse et, ensuite, nous devrons ajourner nos
travaux.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais être bref, parce que
votre question est quand même importante. Les études qu'on m'a
communiquées sont, au moment où on se parle, des études
qui n'ont pas le degré de précision qu'on souhaiterait. On n'a
même pas le nombre exact de personnes qui travaillent au salaire minimum.
Ce sont des études qui donnent une certaine, ce qu'on appelle en anglais
un "ballpark figure", finalement. L'augmentation du salaire minimum repose,
oui, en partie, sur ces études, mais elle repose aussi sur un
problème social ou une volonté politique. Ces études font
partie des éléments qui peuvent nous amener à conclure
dans un sens plutôt que dans l'autre. Je crains toujours de mettre sur la
place publique des études qui n'ont pas un certain degré de
précision. Mes conseillers m'indiquent que ces études n'ont pas
un degré de précision qui ferait en sorte qu'on pourrait vraiment
vous aider. On s'est parlé des grands principes, oui pour
l'augmentation, l'incitation au travail. L'incitation au travail, c'est
important dans la société. Cela fait quatre ans, cinq ans
même, depuis 1981, qu'il n'y a pas eu d'augmentation du salaire minimum.
Des pourparlers ont eu lieu entre les hauts fonctionnaires sur le plan
québécois et sur le plan ontarien. Il y a une rencontre de
prévue vendredi prochain des deux ministres en titre. Je pense que ce
n'est pas un dossier qu'on néglige.
M. Charbonneau: Une dernière...
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse. Le temps
est vraiment écoulé. Nous avons même dérogé
à l'entente.
M. Charbonneau: M. le Président, je comprends...
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: S'il y a consentement, M. le Président,
juste pour terminer là-dessus. Une minute.
Le Président (M. Bélanger): Nous avons
dépassé de quatre minutes. M. le ministre nous avait dit qu'il
devait terminer à 12 h 30.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Peut-être 30 secondes.
M. Charbonneau: 30 secondes, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Consentement unanime?
Consentement.
M. Charbonneau: C'est pour rassurer les gens qui
s'intéressent è la question et qui envoient des demandes au
bureau du ministre et à tous les bureaux de comté...
Le Président (M. Bélanger): Et du beurre de
"pinottes".
M. Charbonneau: ...pour aider le ministre à avoir moins de
beurre de "pinottes" dans son armoire. Est-ce qu'on peut penser que le ministre
a l'intention de présenter une proposition et une décision finale
avant la fin de la session, avant la fin du mois de juin?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce n'est pas exclu.
M. Charbonneau: Mais ce n'est pas garanti.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous savez, les garanties, dans ce
bas monde... Ce que je vous dis, c'est que ce n'est pas exclu. S'il y avait
possibilité de le présenter demain en ayant toutes les garanties
que je ne pénaliserais pas la création d'emplois surtout chez nos
jeunes, je le ferais. Je l'aurais fait hier matin s'il y avait eu une
possibilité de le faire hier matin. Tous les éléments pris
en considération, je vous réponds très sérieusement
que ce n'est pas exclu que cela soit fait d'ici à la fin de la
présente session. Je le souhaiterais même.
Le Président (M. Bélanger): Je remercie tous les
membres. Je vous prierais aussi, M. le ministre, de remercier tous les membres
de votre équipe.
M. Paradis {Brome-Missisquoi): Sur la question de la
procédure, est-ce que l'ensemble des programmes a été
adopté?
Le Président (M. Bélanger): On y vient dans un
instant.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je m'excuse.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Verchères, est-ce qu'on peut adopter globalement
l'ensemble des programmes ou si vous émettez des réserves sur les
programmes qu'on n'a pas vus?
M. Charbonneau: Je préférerais émettre des
réserves sur les programmes qu'on n'a pas vus, M. le Président,
par prudence élémentaire.
Le Président (M. Bélanger): D'accord. Nous
accepterions donc les crédits... Les programmes 4 et 2 ont
été faits tout à l'heure. Il nous reste donc l'acceptation
des programmes 3, 5 et 8. Il resterait les programmes 3, 5 et 8 à
adopter, les autres ayant été adoptés tout à
l'heure. Est-ce que c'est bien cela?
M. Charbonneau: Oui, je pense qu'il y aura des réserves
sur les programmes qu'on n'a pas vus. Deuxièmement, ce qu'on peut faire,
c'est adopter sur division l'ensemble des crédits du
ministère.
Le Président (M. Bélanger): Bon. Alors, est-ce que
l'ensemble des crédits du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu sont adoptés?
M. Charbonneau: Sur division.
Le Président (M. Bélanger): Sur division? Bien.
Alors, M. le ministre, je vous prierais de remercier tous les gens de votre
équipe qui ont assisté à nos débats et qui nous ont
permis beaucoup d'efficacité. On les en remercie, on les remercie de
leur patience et on vous remercie, vous aussi. M. le député de
Verchères, vous vouliez...
M. Charbonneau: M. le Président, je voudrais moi aussi
joindre ma voix a la vôtre et, sans doute, à celte du ministre,
par la suite, pour d'abord remercier les fonctionnaires du ministère de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu ainsi que les
responsables des organismes qui relèvent de ce ministère pour
leur collaboration et leur présenter nos excuses si, dans certains cas,
on les a fait attendre inutilement ou si 0n ne leur a pas donné
l'impression qu'on évaluait au mérite, qu'on accordait
suffisamment d'importance à leurs tâches et à leurs
fonctions. Je l'ai indiqué, je considère que le secteur de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, c'est un secteur
important et j'espère que, peut-être l'an prochain et dans les
années à venir, on aura encore plus de temps pour passer en revue
l'ensemble des problèmes concernés par les mandats qui sont ceux
du ministre.
Je voudrais néanmoins, non pas lancer trop de fleurs au ministre,
mais le remercier. On n'a pas eu toutes les réponses qu'on voulait, mais
je crois, néanmoins, qu'on a fait cela - peut-être à
l'exception de ce matin, un peu - sur un ton qui nous a permis de faire un
travail utile. J'espère juste que l'année prochaine le ministre
sera moins surchargé par ses tâches de ministre du Travail et que
cela lui permettra de connaître un peu mieux ses dossiers et d'avoir des
réponses un peu plus précises, M. le Président, sur un
certain nombre de questions. Ceci dit...
Le Président (M. Bélanger): Si vous voulez que le
ministre du Travail vous consacre du temps, vous n'avez qu'à faire la
grève, cela devient une priorité.
M. Charbonneau: Ne nous donnez pas des idées! Ne nous
donnez pas des idées! Ne nous donnez pas des idées! Vous savez
qu'à Ottawa ils ont déjà fait cela, des grèves
parlementaires.
Le Président (M. Bélanger): La commission ayant
rempli son mandat, elle ajourne ses travaux sine die.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tous mes remerciements à
l'endroit de ceux et celles qui m'ont accompagné, à l'endroit des
membres de cette commission parlementaire et à l'endroit de la
présidence et du personnel qui est attaché à la
présidence. On fait du travail administratif, politique, au bureau,
etc., mais notre responsabilité ultime est de faire en sorte que
l'institution qu'est l'Assemblée nationale ait le dernier mot et sur les
crédits du ministère et sur la législation du
ministère. Nous savons gré à cette commission d'avoir fait
montre de patience et de compréhension. Je suis certain que, l'an
prochain, les questions étant plus précises, les réponses
pourront également être plus précises.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le
ministre.
(Fin de la séance à 12 h 38)