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(Seize heures quarante-sept minutes)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Je déclare ouverte la commission parlementaire des affaires
sociales. Nous avons le quorum. Mme la secrétaire, pouvez-vous nous
annoncer s'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. D'abord, les
remplacements pour la durée du mandat. M. Baril
(Rouyn-Noranda--Témis-camingue) sera remplacé par M. Marcil
(Beauharnois), Mme Cardinal (Châteauguay) sera remplacée par Mme
Trépanier (Dorian), M. Lemire (Saint-Maurice) sera remplacé par
M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce).
Pour ce qui est des remplacements pour cette séance, nous avons
M. Chevrette (Juliette) remplacé par M. Gendron (Abitibi-Ouest), M.
Gauthier (Roberval) par M. Filion (Taillon), Mme Juneau (Johnson) par M. Blais
(Terrebonne) ainsi que Mme Vermette (Marie-Victorin) par M. Jolivet
(Laviolette).
Le Président (M. Bélanger): Bien. Une voix:
Pour combien de séances? LaSecrétaire: Pour
cette séance.
Le Président (M. Bélanger): C'est seulement pour
cette séance? D'accord.
M. Rochefort: M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Gouin, est-ce que nous pourrions d'abord
préciser le mandat de la commission?
M. Rochefort: Concernant les remplacements des membres de la
commission, compte tenu du nombre assez important de changements, est-ce qu'on
pourrait nous nommer maintenant les autres membres de la commission pour la
durée de la séance au moins pour qu'on sache avec qui on va
travailler?
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Gouin, nous avons M. Assad (Papineau), M. Marcil
(Beauharnois), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), Mme Trépanier
(Dorion), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Filion (Taillon), M. Gervais
(L'Assomption), M. Joly (Fabre), M. Blais (Terrebonne), M. Laporte
(Sainte-Marie), M. Leclerc (Taschereau), Mme
Legault (Deux-Montagnes), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), M.
Rochefort (Gouin), M. Sirros (Laurier), M. Jolivet (Laviolette) et Mme la
ministre qui est membre d'office de la commission.
M. le député de Laviolette, oui.
M. Jolivet: Avez-vous mentionné M. Rivest?
Le Président (M. Bélanger): Non. Une voix:
Normand Girard, peut-être??
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: M. le Président, vous allez donner le mandat
de la commission et après cela je voudrais avoir la parole.
Le Président (M. Bélanger): La commission
permanente des affaires sociales se réunit aujourd'hui afin de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 142, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et
les services sociaux.
M. le député de Laviolette, vous avez demandé la
parole.
M. Jolivet: Oui, M. le Président, c'est simplement pour
bien clarifier la situation en commençant. Je crois comprendre, comme on
l'a fait à d'autres commissions et à la vôtre la semaine
passée, que nous avons tous et chacun droit à des remarques
préliminaires. Â la fin des remarques préliminaires lorsque
chacun aura utilisé son droit de parole, je vous avertis d'avance que le
représentant de l'Opposition, le porte-parole au dossier, M. le
député de Gouin, aura une motion préliminaire, tel que le
prévoit le règlement.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Terrebonne, sur les remplacements.
M. Blais: Je voulais signaler que je remplace pour toute la
durée et non pas seulement pour la séance d'aujourd'hui.
Le Président (M. Bélanger): Pour toute la
durée du mandat?
M, Blais: Oui.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Alors, cette
précision étant faite nous pouvons donc
commencer. Est-ce qu'il y a des remarques préliminaires? Mme la
ministre.
Remarques préliminaires Mme
Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, très
brièvement, compte tenu du fait qu'il y a à peine une heure que
nous avons terminé le débat en deuxième lecture du projet
de loi 142, j'ai exprimé à cette occasion les objectifs du projet
de loi 142 qui, entre autres objectifs, a celui de modifier la Loi sur les
services de santé et les services sociaux afin de prévoir le
droit à toute personne d'expression anglaise de recevoir dans sa langue
des services de santé et des services sociaux compte tenu de
l'organisation et des ressources des établissements qui dispensent ces
services.
Nous prévoyons également, dans ce projet de loi, les
modalités qui permettront d'assurer ces services. Le projet de loi
prévoit également des modifications touchant les conflits
d'intérêts des représentants aux conseils d'administration.
Deuxièmement, il prévoit une modification quant aux approbations
qui doivent être obtenues par les établissements pour
l'aliénation et la transformation de bâtiments ou d'immeubles.
M. le Président, je n1ai pas d'autres remarques
préliminaires à faire à ce moment-ci, j'entendrai
plutôt les remarques des membres de l'Opposition.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Gouin.
M. Jacques Rochefort
M. Rochefort: Je vous remercie, M. le Président.
Effectivement, je me prévaudrai de mon droit de parole à
l'étape des remarques préliminaires sur le projet de loi 142 qui,
comme l'a dit la ministre, vient tout juste d'être adopté en
deuxième lecture par l'Assemblée nationale.
On remarquera d'ailleurs, M. le Président, que c'est une
manifestation additionnelle de l'urgence avec laquelle le gouvernement souhaite
voir étudier ce projet de loi puisqu'à peine ce projet de loi
voté en deuxième lecture, dans les minutes qui suivent, on nous
demande de venir l'étudier article par article. M. le Président,
c'est de cette façon que ce projet de loi a été
piloté jusqu'à ce jour. Oui, effectivement, il y a environ treize
ou quatorze mois, la ministre de la Santé et des Services sociaux, alors
simple députée de L'Acadie, et ses collègues, notamment
celui de Laurier et de Notre-Dame-de-Grâce, ont pris un engagement
électoral auquel avait été associé l'actuel
député de Marquette. Mais depuis ce temps, M. le
Président, pas un mot, pas de discussion avec quiconque, notamment, en
tout cas, quiconque du réseau du service de la santé et des
services sociaux.
Pour un projet de loi présenté comme un projet de loi de
grande importance, comme un projet de loi faisant partie des priorités,
nous disait-on, de la ministre de la Santé et des Services sociaux, de
son gouvernement et de sa formation politique, on s'est retrouvé avec un
dépôt du projet de loi 142 à la toute dernière
minute prévue par nos règles de procédure parlementaire
pour permettre que ce projet de loi soit adopté selon les voeux du
gouvernement avant l'ajournement pour la période des fêtes, soit
le 19 décembre prochain.
Or donc, ce projet de loi est déposé en catastrophe le 15
novembre dernier malgré une absence totale de concertation avec les
intervenants du milieu et malgré une absence totale d'un geste, d'une
manifestation, d'une volonté d'associer les hommes et les femmes qui,
à chaque jour, dans le réseau de la santé et des services
sociaux, ont la responsabilité - et s'en acquittent admirablement bien -
de donner des sercices de qualité et des services humains à
l'ensemble des Québécois et des Québécoises qui
sont présentement dans un centre d'accueil, dans un centre
d'hébergement pour personnes du troisième âge, dans un
centre hospitalier de soins prolongés, qui sont patients dans un
hôpital de soins aigus, qui sont bénéficiaires d'un service
dispensé par un centre de service social ou par un centre local de
services communautaires, sans, dis-je donc, associer d'aucune façon les
intervenants du milieu, ces hommes et ces femmes qui, à chaque jour,
donnent des services de qualité et des services profondément
humains aux hommes et femmes du Quéhec qui ont des besoins de services
de santé et de services sociaux.
Non seulement ce projet de loi nous est déposé à la
dernière minute, sans aucune concertation, sans aucune association du
milieu à son élaboration ou aux discussions qui ont
précédé ou suivi immédiatement son
élaboration, mais il a été déposé à
l'Assemblée nationale, débattu et maintenant adopté en
deuxième lecture sans qu'aucune commission parlementaire n'ait
été tenue. Cette commission parlementaire a été
rendue impossible par une décision autoritaire de la ministre de la
Santé et des Services sociaux qui a refusé de donner, non
seulement aux intervenants du réseau, mais à tous les groupes et
aux différents individus de notre société qui souhaitaient
s'exprimer, une occasion de venir éclairer les membres de
l'Assemblée nationale quant aux conséquences réelles du
projet de loi.
Non seulement ce projet de loi n'a pas été l'objet d'une
commission parlementaire, mais, dans la précipitation et l'improvisation
qui ont présidé à son élaboration, à son
dépôt et à son étude en deuxième
lecture à l'Assemblée nationale, il a été
qualifié, dans les jours qui ont suivi son dépôt par le
premier ministre lui-même, comme un projet de loi passoire, comme un
projet de loi qui nécessitait des amendements importants, majeurs, pour
éviter - pour reprendre les mots mêmes du premier ministre - qu'il
ne soit une passoire sur le plan linguistique, ce qui, nous disait-il,
n'était pas la volonté de son gouvernement. Pas surprenant que
tout ce processus bâclé, improvisé,
précipité, ait mené è la situation dans laquelle il
a été accueilli, non seulement par l'ensemble des intervenants du
réseau de la santé et des services sociaux, mais par l'ensemble
des différents milieux représentatifs des forces vives du
Québec, que ce soient les centrales syndicales, les associations
étudiantes, les universitaires, les milieux d'affaires, les milieux
économiques. L'ensemble des intervenants représentatifs des
différents secteurs d'activité du Québec est intervenu
pour, tantôt, demander le retrait, tantôt, demander l'interruption
de l'étude du projet de loi, tantôt, en demander carrément
le rejet par l'Assemblée nationale du Québec. L'ensemble de ces
intervenants reconnaissait que ce projet de loi n'était pas opportun au
moment où il était débattu et qu'il constituait un
très mauvais véhicule pour permettre d'atteindre l'objectif
évoqué, énoncé, avoué par la ministre de la
Santé et des Services sociaux.
C'est ce qui a fait dire à l'ensemble des intervenants du
réseau de la santé et des services sociaux, que ce soit
l'Association des hôpitaux, l'Association des centres de services
sociaux, l'Association des centres d'accueil du Québec, la
Fédération des centres locaux de services communautaires du
Québec, qu'ils souhaitaient que ce projet de loi soit retiré par
l'Assemblée nationale, que, dans le cas de l'Association des
hôpitaux du Québec, l'on jugeait que, tout en souscrivant aux
objectifs du projet de loi qui ont l'adhésion de tout le monde, elle
considérait que les moyens retenus n'étaient pas les bons, que ce
projet de loi poserait des problèmes importants, que les
conséquences de l'application de ce projet de loi n'avaient pas
été bien pesées par le gouvernement et par la ministre de
la Santé et des Services sociaux. Dans le cas de l'Association des
hôpitaux du Québec, on demandait carrément le retrait du
projet de loi.
Dans le cas des trois autres associations qui ont demandé de
surseoir, donc, de suspendre l'étude du projet de loi, il faut se
rappeler que ces demandes sont venues, non seulement après que cesdites
associations eurent pris connaissance du contenu du projet de loi, mais
à la suite d'une rencontre avec la ministre de la Santé et des
Services sociaux et un certain nombre de ses collaborateurs, au cours de
laquelle la ministre a tenté tant bien que mal de répondre aux
questions de ces intervenants, a tenté de les convaincre d'appuyer son
projet de loi et ces hommes et ces femmes représentant trois
associations majeures du réseau de la santé et des services
sociaux, après avoir dialogué pendant un moment important avec la
ministre et ses collaborateurs, sont retournés réfléchir
au contenu des discussions qui s'étaient déroulées au
moment de cette rencontre et ils ont décidé, une fois cette
rencontre conclue, décantée, de demander à la ministre de
surseoir à l'étude du projet de loi, d'interrompre l'étude
du projet de loi, en affirmant, d'une part, qu'ils accordent déjà
des services nombreux, de grande qualité et humanitaires, non seulement
aux membres de la communauté anglophone du Québec, mais aux
membres de l'ensemble des communautés culturelles du Québec. (17
heures)
Deuxièmement, ils considèrent que nous n'avons pas besoin
d'un projet de loi comme le projet de loi 142 pour donner ces services
puisqu'ils sont déjà fournis à ces Québécois
et Québécoises, et que, pour les cas qui peuvent subsister, qui
nécessitent que des gestes soient posés pour fournir de
façon satisfaisante les services à ces hommes et è ces
femmes qui demandent des services, on pouvait discuter avec la ministre de la
Santé et des Services sociaux à partir des mêmes
arrangements administratifs, des mêmes organisations de la dispensation
des services de santé et des services sociaux pour permettre de
régler les problèmes qui pourraient subsister.
Elles ont aussi, ces trois associations, noté expressément
qu'elles considéraient que ce projet de loi était un projet de
loi qui portait un jugement négatif sur les efforts nombreux qu'elles
avaient faits jusqu'à ce jour pour donner des services de santé
et des services sociaux aux Québécois des différentes
minorités et qu'elles considéraient que ce n'était pas
reconnaître le travail important qu'elles avaient fait pour bien servir
ces Québécois et ces Québécoises, tout aussi bien
qu'elles servent les autres Québécois et les autres
Québécoises, et que ce projet de loi n'était donc pas
nécessaire pour permettre d'en arriver à ces services. Elles
n'ont reçu, sauf erreur, jusqu'à ce jour, aucune réponse
de la ministre de la Santé et des Services sociaux à leur demande
de participer à une rencontre avec elles au cours de laquelle elles
auraient pu discuter des problèmes qui subsistent et trouver des
façons de solutionner ces problèmes et, donc, de compléter
les services qui sont dispensés à l'ensemble des
Québécois et des Québécoises. Elles ont toutes
aussi évoqué, d'une façon ou d'une autre, à un
moment ou à un autre, que non seulement elles donnent
des services à l'ensemble des Québécois et des
Québécoises, quelles que soient leur langue ou leurs origines,
mais que l'ensemble des exemples qui avaient été cités
jusqu'à ce jour pour justifier la présentation de ce projet de
loi étaient beaucoup plus des problèmes reliés à
une absence de ressources dans le réseau de la santé et des
services sociaux qu'à une absence de services dans une langue ou dans
une autre aux Québécois à qui on veut donner ces
services.
C'est évident, comme je le disais tantôt - et on a de
nombreux exemples de même nature - que, quand, par exemple, la
communauté juive, qui, d'ailleurs, dans son mémoire à la
commission Rochon, reconnaissait posséder une gamme importante,
complète, large d'établissements, d'institutions de santé
et de services sociaux, nous demandait d'ajouter 640 places en centre d'accueil
d'hébergement pour personnes âgées pour satisfaire à
l'ensemble des besoins des membres de sa communauté, ce n'est d'aucune
façon un problème d'accessibilité dans une langue ou dans
une autre à un service, mais bien un problème d'absence de
ressources suffisantes pour faire face à l'ensemble des problèmes
d'accessibilité à des services de santé et des services
sociaux.
Ils ont aussi évoqué, pour bon nombre d'entre eux, et,
d'ailleurs, même pour la Commission de protection de la langue
française il y a quelques années, qu'il existe des
problèmes d'accessibilité au plan linguistique, cette fois, pour
bon nombre de Québécois et de Québécoises de langue
française, notamment dans l'ouest de Montréal. Qu'on pense
à la difficulté qu'ont les francophones de l'ouest de
Montréal de bien se faire servir dans leur langue à
l'hôpital général du Lakeshore. Qu'on pense aux
problèmes d'accessibilité des ressources psychiatriques dans
l'ouest de Montréal, alors qu'on retrouve des ressources dans d'autres
langues que le français dans la plupart des cas. Et, dans la
sectorisation de la psychiatrie, l'ouest de Montréal est rattaché
au Royal Vic, au Douglas, qui sont des hôpitaux anglophones où ce
n'est pas toujours possible d'être bien servi en français. On n'a
pas entendu un seul mot sur cela du côté gouvernemental, et non
seulement de la bouche de la ministre de la Santé et des Services
sociaux qui a un mandat tout aussi important à l'égard de ces
Québécois et de ces Québécoises de la
majorité francophone qu'à l'endroit de tous les autres
Québécoises et Québécois. Mais pas un mot de ces
problèmes réels d'accessibilité freinée,
empêchée pour des considérations linguistiques aux
Québécois de la majorité francophone. Pas un mot de
l'ensemble de ses collègues du Conseil des ministres, pas un mot de
l'ensemble de ses collègues de la majorité ministérielle
qui sont intervenus sur ce projet.
Les associations ont aussi évoqué très clairement
tous les problèmes d'appel de ressources que créera l'adoption
d'un tel projet de loi. Cela fera en sorte que des gens, à la suite de
l'adoption de ce projet, se présenteront devant les tribunaux se
réclamant de la loi 142 pour obtenir des services, pour demander
à un juge de prendre des décisions quant à l'allocation
des ressources, quant à ia répartition des budgets dans le
domaine de la santé et des services sociaux. On sait que, les traditions
étant ce qu'elles sont, les juges interviendront et jugeront, cette
fois, non pas sur les discours de la ministre ou de ses collègues, mais
sur les contenus du projet de loi qui sera devenu une loi. On a aussi
évoqué les conséquences réelles, précises,
claires de l'adoption d'un tel projet de loi quant à l'implantation
réelle d'un réseau parallèle dans le domaine de la
santé et des services sociaux, de la nature de celui qui existe dans le
monde scolaire.
Quand la ministre dit, par exemple, que, par l'adoption du projet de loi
142, le Centre de services sociaux Ville-Marie donnera des services à
l'ensemble des Québécois de la minorité anglophone de
l'île de Montréal, alors que le Centre de services sociaux du
Montréal métropolitain donnera des services sociaux aux
Québécois francophones de l'est de Montréal, c'est le
début du réseau parallèle. Personne dans le monde de la
santé et des services sociaux n'accepte la mise en place d'un
réseau parallèle et ils ont bien raison. Ils ont
évoqué les conséquences très claires quant à
la réorganisation des ressources qu'amèneront l'adoption et
l'application d'un projet de loi comme le projet de loi 142. Ce projet de loi
pourrait faire en sorte que des ressources qui, aujourd'hui, sont
consacrées aux Québécois des minorités culturelles
et ethniques du Québec pour qu'ils reçoivent des services dans
leur langue maternelle qui n'est pas le français ni l'anglais soient
drainées dans le réseau parallèle anglophone et que ces
Québécois qui recevaient des services dans leur langue
maternelle, qui, je le répète, n'est pas le français et
n'est pas l'anglais, se voient retirer de ces services au profit des
conséquences qu'amènera la réorganisation du réseau
à la suite de l'adoption et de l'application du projet de loi 142.
Il faut souligner aussi toute la dimension discrétionnaire qu'on
retrouve dans le projet de loi 142. Partout il y aura du
discrétionnaire. C'est le ministre ou la ministre qui sera en place qui
acceptera ou pas que tel établissement donne tel service, que tel
établissement ait tel statut, que tel programme soit dispensé par
un établissement, que tel programme existe dans telle région
plutôt que dans telle autre. Quand on met du discrétionnaire aussi
large, aussi
ample, aussi profond, aussi important que dans le projet de loi 142,
cela doit laisser craindre à bon nombre de Québécois et de
Québécoises qu'on pourrait se retrouver avec des cycles quant au
type de services qu'on retrouvera dans le domaine de la santé et des
services sociaux pour l'ensemble des Québécois et des
Québécoises, quelle que soit leur langue, quelles que soient
leurs origines.
Quant à ia portée linguistique réelle du projet de
loi, M. le Président, les membres de la majorité
ministérielle pourront prétendre ce qu'ils voudront, mais ces
portées linguistiques n'ont pas été identifiées que
par le Parti québécois, bien au contraire, elles ont
été identifiées par bon nombre d'intervenants du
réseau de la santé et des services sociaux. Quand l'Association
des hôpitaux du Québec dit dans son mémoire à la
ministre que ce projet de loi vient saper ia Charte de la langue
française au Québec, vient mitiger la portée de la Charte
de la langue française au Québec, c'est reconnaître la
portée linguistique de ce projet de loi. Quand l'Association des
hôpitaux du Québec nous dit qu'elle considère que la Loi
pour les services de santé et les service sociaux ne doit pas comprendre
ces dispositions, que, si on veut apporter de telles dispositions dans le droit
québécois, c'est dans la Charte de la langue française que
cela doit être fait, c'est reconnaître la portée
linguistique importante du projet de loi 142.
Quand les éditorialistes, quand les intervenants demandent, pour
des considérations linguistiques, l'interruption de l'étude du
projet de loi ou l'abandon total du projet de loi, selon les cas, c'est
reconnaître une portée linguistique réelle du projet de
loi, et c'est vraiment jouer à l'autruche et tenter de jouer un jeu
politique, un rôle politique, comme aime l'appeler la ministre de la
Santé et des Services sociaux, ce jeu et ce rôle politique de dire
qu'il n'y a que l'Opposition qui voit une portée linguistique au projet
de loi.
Alors, M. le Président, ce sont là les remarques
d'introduction que je souhaitais faire au moment de l'amorce de l'étude
du projet de loi 142, et je veux, M. le Président, immédiatement
déposer une motion, pour votre information, que je souhaite voir
étudier par les membres de la commission immédiatement
après l'étape des remarques préliminaires, et cette motion
se lira comme ceci: "Que la commission tienne, avant d'entreprendre
l'étude détaillée du projet de loi 142, Loi modifiant de
nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des
consultations particulières quant à tous les articles dudit
projet de loi, et qu'à cette fin elle entende l'Association des
hôpitaux du Québec."
Alors, je dépose, pour votre information, M. le Président,
cette motion qui, comme je vous le dis, sera débattue selon mon souhait,
une fois que l'ensemble des membres de notre commission qui voudront faire des
remarques préliminaires auront pu les faire. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais juste
revenir quelques instants sur certaines remarques du porte-parole de
l'Opposition, le député de Gouin.
La première selon laquelle il s'agit d'un projet de loi qui a
été présenté en catastrophe. M. le
Président, les intentions du gouvernement ont été
annoncées officiellement au moment du discours d'ouverture en
décembre dernier, en fait cela fait un an, j'allais dire en mars, mais
c'est en décembre que ce discours d'ouverture a été
présenté, et nous avions fait connaître, à cette
occasion, nos intentions. J'ai eu, à l'étude des crédits,
l'occasion de dire qu'il y aurait un projet de loi. J'ai eu l'occasion
publiquement de le répéter plusieurs fois et j'ai souvent
donné cette réponse, entre autres, à la
Fédération des CLSC qui insistait pour que le transfert du
personnel des centres de services sociaux vers les CLSC se fasse le plus
rapidement possible. Mais on sait bien que l'ancien gouvernement avait
laissé en plan ce transfert de ressources parce qu'il n'avait jamais pu
statuer sur les contestations du CSS Ville-Marie. Une décision et une
action devaient être prises, et je pense que dans ce sens nous en prenons
une. Alors, dire que c'est un projet de toi qui arrive par surprise... Et je
pourrais citer d'autres occasions où il en a été question,
sans compter qu'il était officiellement dans notre programme
électoral et que nous, M. le Président, nous ne rejetons pas
notre programme électoral. Au contraire, nous essayons, dans la mesure
du possible, de réaliser les recommandations qui y sont contenues.
Ce projet de loi a été déposé en Chambre le
13 novembre. Comparons avec tout ce qui a été
déposé par l'ancien gouvernement à la date limite du 13
novembre, et je me réfère au fameux projet de loi 27 que j'ai
déjà eu l'occasion d'évoquer ici en commission
parlementaire, qui était un projet de quelque 200 articles, où
nous avons siégé en commission parlementaire - parce que j'ai
bien voulu donner mon consentement - jusqu'à trois heures du matin,
alors que nos règles ne le prévoyaient pas, et qui finalement fut
adopté avec au moins 150 amendements, alors que ce projet n'avait
été abordé qu'au début décembre.
M. le Président, je pense que,
évidemment, c'est de bonne guerre de dire que le gouvernement
agit dans la précipitation, etc., mais je pense qu'il faudrait
peut-être relativiser les choses.
L'autre argument que le... Et, d'ailleurs, ce n'est pas la
première fois, mais je les reprends et je n'ai pas l'intention chaque
fois qu'on va les affirmer, parce qu'on va assister à une série
d'affirmations semblables à chaque intervention des
députés de l'Opposition... C'est tout à fait leur droit,
M. le Président, mais j'aime mieux les replacer une fois pour toutes.
(17 h 15)
En ce qui a trait à l'Association des hôpitaux du
Québec, que j'ai rencontrée et qui a demandé à me
rencontrer, je l'ai rencontrée et ils m'ont exprimé qu'ils
voyaient des difficultés quant à l'interprétation
juridique qu'ils en faisaient et que nous en faisions, mais qu'en tout cas ils
me feraient parvenir, par écrit, leurs recommandations, ce qu'ils ont
d'ailleurs fait. Ils m'ont dit qu'ils ne sollicitaient pas de commission
parlementaire. Alors, cela répondra peut-être déjà
à la première motion du député de Gouin. Je ne veux
pas relire ici la lettre que j'ai déjà lue en Chambre où
l'Association des hôpitaux du Québec, en date du 12
décembre 1986, nous dit qu'elle veut faire une mise au point sur un
titre à sensation qui est apparu dans un quotidien de Montréal et
qu'elle veut rectifier les choses. "Nous tenons à vous dire que nous
partageons les objectifs clairement exprimés par votre gouvernement
à savoir de mieux adapter les services sociaux aux besoins des
populations en considérant aussi leurs besoins linguistiques. C'est
notamment le cas de l'importante minorité anglophone du Québec,
où qu'elle soit, dans la mesure, évidemment, des
possibilités de nos organisations hospitalières." Et vous verrez,
M. le Président, que notre projet de loi prend bien soin, justement, de
tenir compte des ressources et des possibilités que le réseau
peut offrir. Ils ajoutent: "Non seulement avons-nous affaire à une
question de droit social, mais encore traitons-nous en cette occasion d'un
sujet dont plusieurs volets touchent la dimension humaine des soins et le
respect de la personne malade. C'est là une position que nous avons
soutenue depuis longtemps et que nous avons véhiculée tant au
gouvernement actuel qu'au gouvernement précédent." Ils expriment
dans leur tout dernier paragraphe - parce que c'est là qu'on pourrait
soulever des difficultés: "....Les moyens proposés par certaines
de ces dispositions nous semblent discutables. Nous tenons à
réaffirmer que l'association ne remet nullement en cause l'objectif
poursuivi par le gouvernement."
M. le Président, je pense que cela prend soin de l'Association
des hôpitaux du Québec. Quant aux associations auxquelles on se
réfère continuellement et qu'on a citées tant et plus du
côté de l'Opposition - je comprends qu'ils l'aient fait - soit les
représentations des quatre associations, la Fédération des
CSS, la Fédération des CLSC, les centres d'accueil et
hôpitaux privés, ils ont demandé à me rencontrer el
m'ont indiqué, au moment où nous avons pris contact avec eux,
qu'ils ne voulaient pas de commission parlementaire, mais qu'ils voulaient bien
rencontrer la ministre. Ce que je me suis empressée de faire. Je les ai
rencontrés pendant deux heures et au moment où nous nous sommes
quittés ils m'ont dit qu'ils étaient d'accord avec le principe,
ce qu'ils réitèrent d'ailleurs dans le télégramme
qu'ils ont rendu public quelque 48 heures plus tard. Ils m'ont dit
également qu'ils avaient eu une perception erronée qui s'inscrit
dans les remarques que l'Opposition tient depuis le début, selon
lesquelles c'est un blâme ouvert à tous les intervenants du
réseau mais, au moment où nous nous sommes quittés, cette
impression avait été corrigée. Je leur ai demandé
à cette occasion, à au moins deux ou trois reprises, s'ils
avaient des suggestions à nous faire. Ils n'avaient pas de suggestions
à nous faire. Par la suite, on connaît le reste de l'histoire, 48
heures après, ils ont envoyé ce télégramme
où ils demandent de surseoir à ce projet de loi. Mais je pense
que nous les avions rencontrés.
Le député fait allusion au monde des affaires. S'il relit
bien les journaux, les représentations ou les remarques que le monde des
affaires a faites sont à l'égard de la loi 140 et non pas
à l'égard de la loi 142, puisqu'il reconnaissait que la
minorité anglophone devait avoir droit à des services dans sa
langue dans le réseau de la santé et des services sociaux.
Évidemment, on pourrait ajouter beaucoup d'autres remarques, mais
je pense que ce n'est pas un projet de loi qui cause une surprise. Je ne veux
pas revenir sur chacune des autres objections que le député de
Gouin a soulignées, entre autres le fait qu'il y aurait un réseau
parallèle. Je pense que j'ai réfuté cette objection au
moins deux ou trois fois. Ce qui est prévu dans le projet de loi, c'est
que ce sont des programmes qui seront préparés par les conseils
régionaux et qui devront être soumis pour approbation à la
ministre - c'est exact - pour essayer de mieux coordonner les ressources
existantes afin de rendre accessibles à la population de langue anglaise
les services dans leur langue dans le réseau de la santé et des
services sociaux.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaîtî Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je souligne encore un
peu l'incohérence ou la
contradiction. D'une part, dans le discours qui est tenu par
l'Opposition on dit que c'est un réseau qui va se bilinguiser, surtout
que c'est un réseau parallèle qui va se créer. Dans un
autre souffle, elle nous assure que tous les services sont déjà
rendus. Si tous les services sont déjà rendus, j'imagine que les
programmes d'accès, s'ils sont aussi parfaits qu'on les dit, nous
arriveront en confirmant un état de fait puisque tous ces services sont
disponibles selon ce que l'Opposition prétend.
De fait, un grand nombre de ces services sont disponibles. Les efforts
sont faits. Je l'ai répété à plusieurs reprises.
Mais il reste, et nous le savons tous... Hier, justement, je signais une lettre
au vice-président et directeur général du Comité de
la protection de la jeunesse qui m'indiquait que dans trois régions du
Québec, pas des régions éloignées celles-là,
la 6A, la 6B et la 6C, il n'y avait pas de ressources ou les ressources
étaient très déplorables pour les jeunes anglophones de
ces régions de Montréal. Il y a aussi un manque de ressources
pour les jeunes francophones de la région 6C, ce que nous connaissons
tous. Je dois vous dire que le premier geste que notre gouvernement a
posé, après avoir discuté de la question pendant environ
neuf ans avec l'Opposition, le premier geste que nous posons, et probablement
la première invitation pour des appels d'offres, est justement la mise
en place de ce centre d'accueil pour les jeunes francophones de la
région 6C.
Pourtant, cela faisait neuf ans qu'on attendait. Là où je
suis d'accord avec le député de Gouin, c'est sur
l'évidence de l'insuffisance des ressources tant du côté
anglophone que francophone; du côté de la psychiatrie on sait
qu'il manque des spécialistes et ainsi de suite. Ce n'est pas ce point
que nous discutons. Nous disons que là où les ressources sont
disponibles pour la minorité anglophone, il faut les coordonner de telle
sorte qu'elles soient utilisées au maximum dans le but de leur rendre
des services dans leur langue. Quand nous voyons des cas, par exemple, et non
pas en Gaspésie ou dans les régions éloignées
où j'ai déjà identifié qu'il y a des regroupements
de populations anglophones, mais même dans la région de
Montréal, où on place une personne âgée de langue
maternelle anglaise dans un centre d'accueil francophone, moi je me dis: II y a
peut-être une meilleure coordination qui pourrait se faire. On n'ajoutera
pas de ressources, mais on essaiera peut-être de regrouper ensemble un
certain nombre de personnes de langue anglaise.
Trop d'exemples sont venus à mon attention. J'en ai vécu
moi-même quelques-uns. On peut se dire: II y a de la place pour permettre
cette meilleure coordination des ressources et assurer à la population
anglophone des services dans sa langue, toujours dans le cadre de
l'organisation des ressources qui sont disponibles. Je sais que les mêmes
objections vont revenir à répétition et je comprends cela.
L'Opposition va le faire. C'est sa façon d'exprimer son opposition au
projet de loi. Mais je pense que je veux quand même cadrer les choses
là où elles sont. C'est assez étonnant que, devant cette
supposée opposition extraordinaire qui serait à
l'extérieur du Parlement, les seuls télégrammes que j'ai
reçus, c'est un de la CEQ; peut-être celui de la FTQ m'est-il
parvenu ce matin mais je ne l'ai pas vu.
M. Rochefort: Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Ce sont les deux seuls
télégrammes, à ma connaissance, mis à part celui
des centres dont on vient de parler. Alors, dire que la population est aux
abois dans les rues parce que comme Parlement on veut accorder un droit
à une minorité sans nuire de quelque façon que ce soit
à la majorité, je pense qu'il y a là au moins une certaine
exagération. M. le Président, je voudrais quand même, si
vous me le permettez, non pas présenter des motions dilatoires, je vais
laisser cela à l'Opposition...
M. Jolivet: Cela, c'est une question d'opinion.
Mme Lavoie-Roux: Oui, vous avez raison, on a discuté cela
l'autre soir. Vous avez raison.
M. Jolivet: Mais vous n'avez pas raison de...
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît! Je vous prierais, Mme la ministre, de continuer votre
intervention.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais quand même à ce
moment-ci, vu que l'Opposition en avait exprimé le désir,
présenter trois amendements dont le dernier est davantage un amendement
de concordance qui touche les principaux objets du projet de loi 142
relativement à des services en langue anglaise à la population
anglophone.
M. Jolivet: Je crois comprendre, M. le Président,
que...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette, oui.
M. Jolivet: ...les amendements qui sont déposés
sont pour nos besoins à nous au moment où on étudiera les
articles 1, 2 et 3. Mais...
Mme Lavoie-Roux: On ne peut pas les discuter tout de suite, je
comprends bien
cela.
M. Jolivet: D'accord.
Mme Lavoie-Roux: Mais, pour votre information et pour
l'information de ceux qui sont intéressés, cela me fait plaisir
de les déposer dès maintenant. Si vous en avez et que vous voulez
les déposer, on les examinera aussi avec attention parce que je
réitère l'invitation que j'ai faite en deuxième lecture.
S'il y a des amendements qui peuvent améliorer le projet de loi, nous
sommes, de ce côté-ci, tout à fait disposés à
les examiner avec la plus grande attention possible. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre, je
reçois vos copies d'amendements. Nous en ferons faire des coptes pour
l'usage des membres et elles seront distribuées dans les meilleurs
délais possible.
M. Jolivet: D'accord, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Est-ce qu'il y a
d'autres interventions en ce qui concerne les remarques préliminaires?
M. le député de Taillon.
M. Jolivet: Un instant, M. le Président, avant que mon
collègue ne prenne la parole. Le fait que la ministre ait pris la parole
après mon collègue de Gouin n'a-t-il pas pour effet d'enlever le
droit à l'alternance?
Le Président (M. Bélanger): Non.
M. Jolivet: Cela veut dire que si quelqu'un du pouvoir...
Le Président (M. Bélanger): Elle est intervenue. Je
lui ai donné le droit de parole en fonction de l'article 244 qui permet
au ministre un droit de réplique après chaque intervention.
M. Jolivet: J'ai bien compris cela. Cela veut dire que, si
quelqu'un du côté ministériel voulait prendre la parole
immédiatement, il n'y aurait personne qui l'empêcherait.
Le Président (M. Bélanger): En principe, ce serait
possible, oui.
M. Jolivet: Mais il n'est pas obligé de la prendre.
Le Président (M. Bélanger): Non, absolument
pas.
Mme Lavoie-Roux: On va vous laisser ce plaisir.
Le Président (M. Bélanger): II n'y a pas eu de
manifestation de ce côté-là. M. le député de
Laurier, oui.
M. Sirros: C'est juste pour clarifier pour le
député de Laviolette. On s'attend à ce que l'Opposition
nous amuse, en quelque sorte, pendant... J'interprète...
M. Jolivet: M. le Président...
M. Filion: M. le Président, question de
règlement.
M. Jolivet: ...le député de Laurier...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Taillon, pour une question de règlement.
M. Filion: Oui, pour une question de règlement. Est-ce que
vous pourriez rappeler au député de Laurier notre
règlement...
M. Sirros: M. le Président...
M. Filion: ...notamment à l'effet...
M. Sirros: Quel article, M. le Président"?
M. Filion: Question de règlement, je n'ai pas
terminé.
M. Sirros: Mais quel article, M. le Président?
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaîtl
On peut s'entendre.
M. Jolivet: L'article 35.
Une voix: L'article 35, paragraphe 6.
Le Président (M. Bélanger): Or, M. le
député de Taillon, vous aviez une question de
règlement.
M. Filion: C'est cela.
Le Président (M. Bélanger): Est-ce que vous
pourriez nous mentionner l'article, s'il vous plaît? À l'avenir,
pour toute question de règlement, je demanderais qu'on me dise d'abord
en vertu de quel article on veut intervenir.
M. Blais: L'article 35, paragraphe 7, moi, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Je laisse M. le
député de Taillon intervenir...
M. Filion: L'article 35.
Le Président (M. Bélanger): ...en vertu de
l'article 35.
M. Filion: Je vous demanderais de rappeler... L'article 37.
Une voix: L'article 35.
M. Filion: L'article 35.7. On se comprend.
M. Sirros: M. le Président, est-ce que c'était un
langage violent et injurieux?
Le Président (M. Bélanger): Je regrette, M. le
député de Laurier...
M. Filion: Alors...
Le Président (M. Bélanger): ...la parole appartient
au député de Taillon.
M. Blais: Rappelez-le â l'ordre.
Le Président (M. Bélanger): Vous aussi, M. le
député de Terrebonne. M. le député de Taillon, s'il
vous plaît.
M. Filion: En vertu de l'article 35, paragraphes 6 et 7, M. le
Président, est-ce que vous pourriez rappeler au député de
Laurier qu'il ne peut imputer des motifs indignes a un député
comme c'est le cas présentement lorsqu'il dit: On sait que l'Opposition
nous amusera. Peut-être que c'est le genre d'opposition qu'ils ont
livré pendant dix ans, mais j'aimerais que vous rappeliez au
député de Laurier que ce genre de conclusion auquel il arrive
s'appliquait peut-être dans le cas de l'ancienne Opposition, mais dans
notre cas la commission parlementaire vient de commencer...
Une voix: M. le Président...
Le Président (M. Bélanger): Alors, vous avez fait
votre intervention, M. le député de Taillon. Je vous en remercie.
Je demanderais...
M. Blais M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: Je ne comprends pas comment il se fait que
quelqu'un...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Terrebonne...
M. Blais: ...de souche allophone... Cette loi est contre les
allophones et il est là pour nous narguer. On n'est pas ici pour se
faire narguer. On est là pour défendre une loi qui est
discriminatoire envers les allophones. Vous trouvez cela amusant. C'est un vrai
scandale de vous voir agir.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Terrebonne, personne ne vous avait reconnu le droit de
parole. Je vous demanderais de respecter les règles de procédure
de cette Chambre comme tous les autres membres de la commission, s'il vous
plaît. Je pense que c'est le minimum requis pour que les débats se
déroulent dans un climat qui permettra le meilleur intérêt
de ce projet de loi. Je demanderais donc aux députés des deux
côtés d'être modérés dans leur propos et de
s'en tenir strictement au projet de loi que nous étudions.
M. le député de Gouin... Pardonl M. le
député de Laurier, vous aviez la parole.
Une voix: Quel lapsus! (17 h 30)
M. Christos Sirros
M. Sirros: Merci, M. le Président. S'il vous plaît,
ne nous confondez pas. M. le Président, je pense que ce qu'on a vu tout
à l'heure est une démonstration de ce que je voulais dire. Plus
particulièrement, par rapport à ce que le député de
Terrebonne a dit...
M. Blais: En vertu de quel règlement, monsieur?
M. Sirros: J'ai un droit de parole, M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: Vous parlez, de l'autre côté?
M. Sirros: J'ai demandé la parole, M. le
Président.
M. Rochefort: Je m'excuse, M. le Président, une question
de règlement.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Gouin, sur une question de règlement. M. le
député de Terrebonne, s'il vous plaît! M. le
député de Gouin.
M. Rochefort: Pour le bon fonctionnement, compte tenu que
maintenant, si je comprends bien, M. le député de Laurier veut se
prévaloir de son droit de parole, je crois qu'on va fonctionner selon
l'alternance, M. le Président?
Le Président (M. Bélanger): On avait reconnu tout
à l'heure que le droit de réplique de la ministre n'enlevait pas
le principe de l'alternance. C'était la demande du député
de Laviolette.
M. Rochefort: Je prends bonne note de cette décision. M.
le Président, je m'excuse.
Le Président (M. Bélanger): Le député
de Laurier avait commencé son intervention.
Je le prierais donc de la continuer et, si possible, sans interruption,
messieurs dames.
M. Sirros: Merci, M. le Président. Je comprends que
l'Opposition soit un peu sur le qui-vive ou je ne sais trop quoi.
Face, particulièrement, à ce que le député
de Terrebonne a affirmé, même s'il n'avait pas la parole,
concernant un projet de loi discriminatoire par rapport aux allophones,
j'aimerais faire remarquer à l'ensemble des membres de la commission et
plus particulièrement au député de Terrebonne que c'est
effectivement la première fois que sont incluses, dans un projet de loi
qui parle de l'organisation des services sociaux et de santé, des
considérations socio-culturelles et linguistiques pour organiser les
services qui permettent... Je m'excuse, M. le député de
Terrebonne, pourrais-je terminer?
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laurier, je vous en prie, continuez votre
intervention.
M. Sirros: II y avait certaines remarques que je
n'appréciais pas beaucoup, M. le Président, j'aimerais que vous
demandiez au député de Terrebonne de les garder pour
lui-même, en silence.
Le Président (M. Bélanger): Je n'ai pas entendu ces
remarques, mais je demanderais quand même aux gens des deux
côtés, encore une fois, de s'abstenir de tout commentaire et de
respecter les droits de parole des autres membres de la commission.
M. le député de Laurier.
M. Sirros: J'étais en train de dire, M. le
Président, que c'est la première fois dans la loi qu'on veut
tenir compte des caractéristiques socioculturelles et linguistiques dans
l'organisation des services sociaux et des services de santé, ce qui
permet spécifiquement l'adaptation des services sociaux et de
santé pour des communautés culturelles, avec une base
légale, en quelque sorte. On a souvent utilisé l'exemple du CLSC
Parc Extension pour nous dire combien il y a déjà des services
sociaux et de santé qui sont offerts aux différentes
communautés culturelles. Je dois en savoir quelque chose, M. le
Président, j'étais le directeur général du CLSC
Parc Extension quand cela a été implanté et c'est
effectivement parce que j'ai vécu cette expérience et que par la
suite j'ai travaillé dans le réseau francophone à titre
d'agent des relations humaines au CSSMM, plus particulièrement, encore
une fois auprès des communautés culturelles entre autres, que je
sais fort bien que cela facilite et que cela aide la cause de l'adaptation des
services sociaux et de santé aux communautés culturelles d'avoir
quelque chose qui est inscrit dans un projet de loi et de ne pas simplement
laisser cela à la bonne volonté des intervenants du
réseau, peu importe qu'ils le fassent ou qu'ils aient cette bonne
volonté. Personne n'a jamais remis en cause la bonne volonté des
intervenants dans le réseau, mais je dois vous dire, M. le
Président, pour avoir été un de ces intervenants, que
j'aurais apprécié, à ce moment-là, avoir un projet
de loi sur lequel j'aurais pu m'appuyer afin de faciliter
l'accessibilité aux services sociaux et de santé pour les
communautés culturelles.
C'est pour cela que je dois rejeter absolument toute affirmation qui est
faite de la part des membres de l'Opposition disant que venir adopter un projet
de loi qui parle de tenir compte des aspects socioculturels et linguistiques ou
de donner un droit plus particulièrement à la communauté
d'expression anglaise est nécessairement vu par l'ensemble des
intervenants comme une injure, comme une insulte à ce qu'ils ont fait
déjà, M. le Président. Je pense que cela doit normalement
être vu comme un appui à ce qui se fait sur le terrain et comme
quelque chose qui permettra, à ceux qui veulent vraiment faire des
efforts pour adapter les services de la façon la plus humanitaire ou
efficace et adéquate possible, M. le Président, de trouver un
appui au niveau d'une législation qui est adoptée par le
Parlement et qui n'est pas quelque chose qui est strictement laissé aux
voies administratives, M. le Président. Vous savez aussi bien que mot
que les voies administratives souvent dépendent strictement de la bonne
volonté et des priorités que les gens veulent bien accorder
à l'intérieur de nos établissements ou de nos
réseaux et que cela ne peut certainement pas nuire dans la question de
l'accessibilité des services sociaux et de santé pour les
communautés culturelles dont je parle ici particulièrement. Et je
pourrai en parler pour les anglophones tout à l'heure, si vous voulez,
mais je sais que nous sommes ici pour quelques jours face à de multiples
interventions de toutes sortes, pour ne pas dire d'autres mots, de la part de
l'Opposition. Je vais essayer de faire un minimum d'interventions, M. le
Président, afin de donner aux membres de l'Opposition l'occasion de
s'exprimer aussi souvent qu'ils le veulent en choisissant eux-mêmes la
nature de leurs interventions.
Je tenais à préciser que, particulièrement par
rapport aux communautés culturelles, je ne vois absolument rien dans ce
projet de loi qui soit discriminatoire, qui empêche ou qui mette en cause
ce qui se fait dans le réseau. Au contraire, c'est un projet de loi qui
vise aussi à faciliter l'accessibilité des services sociaux aux
communautés culturelles en tenant compte que l'organisation des services
sociaux et de santé devra dorénavant tenir compte des
aspects socioculturels et linguistiques des clientèles.
Je vous ferai remarquer qu'il n'y a rien dans l'article 1, paragraphe d,
qui parle spécifiquement de la langue anglaise. Si vous le lisez avec
une certaine objectivité, vous pourrez comprendre que cela permettra
effectivement, dans une loi, d'avoir une base sur laquelle l'organisation des
services pourra être adaptée pour plusieurs langues, pour
plusieurs communautés culturelles.
Plus loin, vous trouverez un article qui parle de toute personne
d'expression anglaise. On a eu des discussions sur celui-là aussi. On
pourrait en avoir encore, si vous le voulez. Mais, comme je le disais, je ne
tiens pas plus que cela à intervenir lors de cette commission
parlementaire parce que je sais quelle voie l'Opposition a choisi de suivre et
je lui laisse la responsabilité de cette décision, M. le
Président. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Je reconnais le
député de Taillon.
M. Claude Filion
M. Filion: Je vous remercie, M. le Président. Je pense
qu'on ne peut pas rester indifférent au discours du député
de Laurier qui est quand même organisé dans sa logique interne
d'une façon telle qu'on croirait qu'on va inventer des choses
formidables.
Je tiendrais d'abord à lui rappeler la charte des droits et
libertés qui dit qu'il n'existe au Québec ou qu'il ne doit
exister aucune discrimination autant dans le traitement et dans les soins
à être accordés aux gens que dans l'ensemble de leurs
activités sur le territoire du Québec. La Charte canadienne des
droits et libertés prévoit, d'ailleurs, exactement la même
chose pour tout le territoire du Canada. Or, quand le député de
Laurier parle de la nécessité d'accorder des soins sans
discrimination sur le territoire du Québec, je lui ferai remarquer qu'on
n'a pas eu besoin du projet de loi 142 ou de la volonté politique qu'il
y a derrière le projet de loi 142 pour arriver à cet état
de fait. Mais cela va beaucoup plus loin parce que l'article 4 et l'article 5
de la Loi sur les services de santé et les services sociaux disent
ceci...
Pour le bénéfice des membres de la commission, je pense
que cela vaut la peine de relire tout au moins le premier alinéa des
articles 4 et 5. Le premier alinéa de l'article 4 dit ceci: "Toute
personne a droit de recevoir des services de santé et des services
sociaux adéquats sur les plans à la fois scientifique, humain et
social, avec continuité et de façon personnalisée, compte
tenu de l'organisation et des ressources des établissements qui
dispensent ces services." C'est le permier alinéa de l'article 4 qui, si
ma mémoire est fidèle, faisait partie de la loi 27. On pourra me
corriger là-dessus, mais je pense bien que cela faisait partie de la loi
27.
L'article 5, beaucoup plus précis, ressemble à ce qui
existe à l'intérieur de la Charte canadienne des droits et
libertés: "Les services de santé et les services sociaux doivent
être accordés sans distinction ou préférence
fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, la langue,
l'ascendance nationale, l'origine sociale, les moeurs ou les convictions
politiques de la personne qui les demande ou des membres de sa famille."
Donc, M. le Président, premièrement, il existe, ici, au
Québec, deux textes importants consacrant le fait que les ressources des
services de santé et des services sociaux doivent être
accordées sans distinction fondée sur l'origine ethnique ou sur
la langue. Deux textes qui existent déjà au moment où on
se parle. Deuxièmement - ces textes-là sont des textes
législatifs -qu'est-ce qui est important? L'important, c'est qu'au
Québec les personnes, quand elles ont besoin de traitements, quand elles
ont besoin d'être reçues par des institutions
hospitalières, des centres d'accueil, des CLSC ou des centres de
services sociaux, puissent recevoir le traitement auquel elles ont droit. Cela
se passe partout au Québec. D'ailleurs, on a un régime
d'assurance-hospitalisation, d'assurance-maladie qui est un des meilleurs au
monde.
Bien sûr, il y a des problèmes. Il y a des problèmes
pour des francophones aussi qui peuvent, dans certains cas, faire affaire avec
des institutions qui sont situées sur des territoires à
majorité anglophone. Cela peut être mon cas, à un moment
donné, si, par hasard, je suis appelé à aller à
l'hôpital avec un de mes enfants ou pour moi-même, dans le bout de
l'ouest de l'île de Montréal, comme cela peut être le cas
aussi pour un anglophone, à l'hôpital de Chicoutimi. Bien
sûr, il y aura toujours certains problèmes. Il y en aura pour des
Grecs, s'ils font le tour de la Gaspésie et qu'ils sont, par hasard,
appelés, malheureusement, à recevoir des soins à
l'hôpital de Gaspé. C'est courant, ces choses-là.
Qu'est-ce que l'on a fait au Québec pour pallier cela? On s'est
développé une tradition de générosité, une
tradition d'intelligence dans le traitement et la dispensation des soins. On
s'est développé des habitudes, des comportements qui vont bien
au-delà de tous les textes de loi et de toute garantie que l'on peut
vouloir ou sembler vouloir leur offrir.
En ce sens, M. le Président, après avoir
écouté une bonne partie des discours des membres du parti
ministériel, en Chambre, je suis renversé de voir jusqu'à
quel point cette réalité n'a pas été
appréhendée par eux. Ils nous ont présenté un
projet de toi en catastrophe. Oui, je le dirai... La ministre
nous a quittés, je ne sais pas si elle va revenir. La ministre
est à l'extérieur? Elle nous parlait tantôt...
Une voix: Elle n'est pas à l'extérieur; elle est
là.
M. Filion: Oui, mais j'attends qu'elle m'écoute.
Le Président (M. Bélanger): Vous pouvez continuer
votre intervention, M. le député de Taillon.
M. Filion: Oui? J'aimerais bien qu'elle m'écoute
là-dessus. Elle nous parlait tantôt, M. le Président...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: M. le Président, juste sur le règlement.
Avec tout le respect que je dois au député de Taillon, dans le
règlement, on lui accorde le droit de parler, mais le règlement
ne stipule pas que quelqu'un a l'obligation de l'écouter, à ma
connaissance.
Le Président (M. Bélanger): Affirmatif, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce. Je demanderai au
député de Taillon de continuer son intervention, s'il vous
plaît.
M. Filion: Je pense que c'est important parce que la ministre de
la Santé et des Services sociaux a souvent fait référence
à la loi 27 qui, dit-elle, a été déposée
à la dernière limite, avec plusieurs amendements, etc.
Mme Lavoie-Roux: Êtiez-vous là?
M. Filion: C'est vrai, Mme la ministre, sauf que la loi 27 a
reçu le consentement unanime d'abord de tous les membres de
l'Assemblée nationale, deuxièmement, de tous les intervenants, en
tout cas, d'à peu près tous les intervenants, de la
majorité des groupes d'opposition et également des intervenants
du réseau de la santé et des services sociaux. C'est vrai que
dans certains cas, Mme la ministre, je vous le concède, on peut
déposer des projets de loi le 13 et le 14 novembre; cela peut arriver,
sauf que...
Mme Lavoie-Roux: La responsabilité...
M. Filion: Quand j'aurai fini, cela me fera plaisir.
Le Président (M. Bélanger): Excusez-moi, Mme la
ministre. M. le député de Taillon, je vous en prie.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que je pourrai parler après?
Le Président (M. Bélanger): Oui, vous avez un droit
de réplique après toutes les interventions.
M. Filion: Sauf que, dans ces cas-là, on a pris soin de
créer ce consensus nécessaire à l'adoption d'un projet de
loi dans un secteur aussi important que celui de la santé et des
services sociaux. Ce n'est pas moi qui l'ai dit, c'est la vice-première
ministre, lors du discours inaugural. Je m'en souviens, c'était une des
premières journées en Chambre pour tous les nouveaux
députés. Elle disait: On va légiférer moins et
mieux, pour employer exactement l'expression du discours inaugural. Ce n'est
pas cela du tout qui se produit. Elle nous l'a même claironné non
seulement lors du discours inaugural, mais également pendant la campagne
électorale et tout le mois de décembre. Évidemment, le
discours, on ne l'a pas entendu beaucoup récemment. Je dois remarquer
que ces paroles ont été absentes de la bouche des
députés ministériels. (17 h 45)
C'est évident avec ce que l'on a vu comme planification
législative... Je ne vous blâme pas nécessairement, Mme la
ministre, sauf que votre projet de loi a été déposé
seulement le 15 novembre. C'est tard. Et on se retrouve en commission
parlementaire à six ou sept jours ouvrables de l'ajournement des
fêtes prévu par notre règlement sessionnel. En ce
sens-là, malheureusement, on sera obligés de parler d'un projet
de loi qui a été adopté en catastrophe et sans
unanimité. Des projets de loi, il va s'en adopter probablement d'ici
huit jours, mais ce sont des projets de loi qui reçoivent le consensus
général de tous les intervenants.
Deuxièmement, c'est un projet de loi qui a été
qualifié de passoire, comme l'a bien souligné le
député de Gouin, à plusieurs reprises par le premier
ministre lui-même. Donc, un projet de loi de cette nature, une passoire,
adopté en catastrophe, sans l'unanimité, vous admettrez avec moi
que ce n'est sûrement pas la meilleure façon de
légiférer. Après vous avoir écoutée et
après avoir écouté les intervenants sur la notion
d'urgence, je pense qu'il n'y a aucune urgence à l'adoption de ce projet
de loi. En Chambre, aucun député ministériel
n'était en mesure de poser un argument ou même d'élaborer
une argumentation sérieuse sur le caractère urgent de cette loi.
Au contraire, les députés de l'Opposition ont
démontré que le caractère urgent de cette loi était
complètement absent.
Je voulais dire un mot de l'absence de consultation, mais étant
donné que le député de Gouin nous a déjà
annoncé son intention de déposer une motion tantôt, je vais
garder mes commentaires et je les ferai sur la motion du député
de Gouin.
Je voudrais maintenant attirer
l'attention de la ministre sur le type de discours qu'on a entendu en
Chambre en deuxième lecture sur le projet de loi. Est-ce un projet de
loi humanitaire? Est-ce un projet de loi linguistique? Est-ce un projet de loi
administratif? Pour déterminer quelle sorte de projet de loi c'est, il
faut savoir que l'objectif d'un projet de loi, ce n'est pas la même chose
que les moyens pour atteindre un objectif. Les objectifs de projets de loi
peuvent dans la majorité des cas, je l'espère, être
humanitaires, viser, en fin de compte, les personnes qui seront
affectées, qui vont vivre les situations que l'on veut corriger par un
projet de loi. Dire qu'il s'agit d'un projet de loi humanitaire parce que c'est
dans la santé et les services sociaux, on va toujours parler de projets
de loi humanitaires dans tous les cas. Dans ce cas-ci, la réalité
se situe entre les deux.
D'ailleurs, lorsque le président de l'Assemblée nationale
a accepté la motion de scission de votre projet de loi, que nous avons
présentée il a bien été obligé de la
déclarer recevable. Il a été obligé de dire qu'il y
avait deux parties dans ce projet de loi: une partie de nature administrative
et une partie de nature linguistique. La motion que j'ai déposée
moi-même en Chambre è des heures un peu tardives, à cause
du fait qu'on étudiait ce projet de loi la nuit, a été
déclarée recevable par le président de l'Assemblée
nationale. Donc, vu la motion de scission, ce n'est pas farfelu de
prétendre que le projet de loi 142 contient au moins deux blocs: un bloc
de nature administrative qui concerne les conflits d'intérêts
à l'intérieur des conseils d'administration et qui contient
également tout le bout où le Conseil du trésor... Je ne
sais pas pourquoi, j'ai hâte que vous nous expliquiez cela. Je n'ai pas
entendu vos commentaires là-dessus. Ils doivent être nombreux. Je
sais que vous en avez fait. Je ne les ai pas entendus. J'ai hâte de
pouvoir discuter avec vous là-dessus. Pourquoi le Conseil du
trésor veut-il prendre votre place en ce qui concerne les autorisations
d'actes juridiques? Bref, de toute façon, ce sont des actes de nature
administrative.
Mais la deuxième partie du projet de loi 142 est la partie
linguistique. On n'a qu'à lire les notes explicatives du projet de loi
pour s'en rendre compte. J'en fais la lecture brièvement, Mme la
Présidente. "Ce projet de loi modifie de nouveau la Loi sur les services
de santé et les services sociaux pour tenir compte des
particularités linguistiques d'une région et prévoir le
droit à toute personne d'expression anglaise de recevoir dans sa langue
des services de santé et de services sociaux..."
Deuxième paragraphe: "II prévoit aussi, pour ses
bénéficiaires, les modalités qui assurent
l'accessibilité aux services de santé et aux services sociaux en
langue anglaise."
Je pense que, pour le moins, vous allez admettre qu'une forte partie de
ce projet de loi est de nature linguistique. Du moins, je me demande par quel
tour de force on pourrait arriver à ne pas admettre ce fait. Or, ce que
nous avons prétendu, ce que nous allons continuer de prétendre,
c'est que lorsqu'on touche à des matières linquistiques au
Québec, il faut s'assurer qu'on le fasse de façon
cohérente, globale et sans toucher un morceau de l'édifice pour
éviter que le tout ne s'écrase. Votre gouvernement, Mme la
ministre, est bien placé pour le savoir, puisque depuis un an, vous avez
créé dans le domaine linguistique une situation inqualifiable,
une situation dramatique, me chuchote avec raison la ministre. En un an, le
gouvernement libéral du premier ministre a créé une
situation dramatique où le gouvernement du Parti libéral a
réussi à prendre une situation qui était pacifique,
à prendre une situation où la loi 101 était la loi la plus
consensuellement acceptée au Québec, pour en faire depuis un an
un secteur de turbulence, d'insécurité et d'angoisse. Les
sondages - vous êtes forts là-dessus, les sondages, du moins le
chef l'est là-dessus - le confirment. Juste à titre
d'anecdote...
M. Blais: II y a du relâchement, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaîtï À l'ordre! M. le député de Terrebonne,
s'il vous plaît! Je pense qu'on devrait s'abstenir. J'ai demandé
tout à l'heure qu'on respecte les droits de parole et la parole
appartient au député de Taillon. Je demanderais que, des deux
côtés, on respecte le droit de parole de M. le
député de Taillon.
Une voix: Vous avez raison, M. le Président.
M. Filion: Merci, M. le Président. Comme la
ministre...
M. Blais: Question de règlement. Vous me rappelez à
l'ordre. C'est le même règlement par lequel vous m'avez
arrêté il y a deux minutes et vous n'arrêtez jamais la
ministre qui fait intempestivement des commentaires qui sont un peu saugrenus,
intempestifs et irritants...
Une voix: Désobligeants. M. Blais: ...et
désobligeants.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
La parole appartient au député de Tailton. Je vous demanderais de
continuer votre intervention, M. le député de Taillon. À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Filion: D'habitude, la ministre garde ses commentaires
désobligeants pour ses amis d'en face.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaîtl
M. Filion: À titre anecdotique, je disais donc le genre de
situation créé par le gouvernement libéral depuis un an:
à Radio-Québec la semaine dernière, ils ont posé
aux gens la question suivante: Est-ce que le visage français du
Québec est en péril?
M. Joly: Vous avez téléphoné?
M. Filion: Vous voyez, on me prête des intentions
intéressantes, 1300 auxquels ils...
M. Blais: M. le Président...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: ...voulez-vous demander...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
En vertu de quel article?
M. Blais: Le même article en vertu duquel on n'a pas le
droit de faire des commentaires.
Le Président (M. Bélanger): Nommez-le.
M. Blais: Vous ne le connaissez pas? Nous ne connaissez pas votre
règlement?
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Terrebonne, je vous demanderais...
M. Blais: Demandez au député...
Le Président (M. Bélanger): ...de respecter la
présidence.
M. Blais: De votre côté, on fait des commentaires,
vous ne les arrêtez pas, et nous, dès qu'on nous ouvre la bouche,
vous nous arrêtez. Vous ne pouvez pas être partisan, vous avez un
poste neutre.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Terrebonne, je vous demanderais de retirer ce que vous
avez dit. Faites une motion pour mettre en doute la conduite du
président de l'Assemblée ou retirez vos paroles. Je regrette
infiniment, vous retirez vos paroles ou vous faites une motion pour mettre en
doute l'intégrité du président.
M. Blais: Vous êtes neutre, M, le Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. La
parole appartient au député de
Taillon. Je demanderais qu'on la respecte, s'il vous plaît! M. le
député de Taillon.
M. Filion: Je vous remercie, M. le Président. Le
député de Fabre nous prêtait des intentions en ce qui
concerne l'émission à Radio-Québec. Je vous ferais
remarquer que les intentions, c'est comme de l'argent, pour en prêter il
faut en avoir. Maintenant, juste le résultat brièvement parce que
je veux revenir sur quelque chose de fondamental dans les cinq dernières
minutes qui me restent. C'est 1300 personnes sur 1600 qui croyaient que le
visage français du Québec était en péril.
Une dernière chose, M. le Président, parce qu'il me reste
cinq minutes. Je voudrais souligner à la ministre de la Santé et
des Services sociaux un aspect que nous aurons l'occasion de débattre
lorsqu'elle va nous demander d'adopter l'article 5.1 qui est contenu à
l'article 2 de la loi sur les services sociaux, ainsi que l'article 3, par le
biais de l'article 1. Elle crée une situation où je voudrais
simplement lui signaler qu'elle ouvre la porte à des recours
judiciaires, des recours judiciaires qui peuvent prendre toutes sortes de
formes. Je vois le député de Laurier qui prend cela à la
légère. Il y a une idée, c'est qu'au Québec, il
n'existe, M. le Président, qu'une certaine somme de ressources à
être allouées; je pense que vous le savez, parce que vous avez
oeuvré vous-même dans ces milieux. On ne peut pas faire la
multiplication des pains dans le secteur de la santé et des services
sociaux. Il y a des ressources limitées dans ce secteur comme dans
d'autres.
Ce que fait le projet de loi, ce que risque de faire le projet de loi et
ce à quoi faisait allusion l'AHQ quand elle parlait des
conséquences imprévisibles du projet de loi, c'est que des gens
puissent s'adresser aux tribunaux pour demander des distributions de ressources
à des institutions en fonction des nouveaux articles 3 et 5.1 qu'on
voudrait introduire dans la loi sur la santé et les services sociaux.
Cela pourrait prendre toutes sortes de formes, parce qu'une fois,
évidemment, que le débat et les décisions administratives
de redistribution des ressources seront entre les mains des tribunaux ils
n'appartiendront pas aux dirigeants qui ont été dûment
élus.
Vous me signalez qu'il me reste deux minutes. Pourtant, M. le
Président, j'ai commencé à moins vingt.
Le Président (M. Bélanger): Le chronomètre
est formel sur cela, il vous reste deux minutes, M. le député de
Taillon.
M. Filion: Donc, je veux juste pour le moment, parce que je veux
laisser la parole à mon collègue pour les deux dernières
minutes, signaler à la ministre cette
possibilité de recours judiciaires qui pourraient venir
défaire tout le travail qui se fait au ministère de la
Santé et des Services sociaux, et qui se fait actuellement au CRSSS de
chaque région. En ce sens, si la ministre n'est pas convaincue de
l'impact que pourrait avoir l'intervention judiciaire dans les décisions
administratives d'allocations de ressources, je lui suggère de consulter
quelques-uns de ses sous-ministres qui ont vécu des situations
semblables. Je reviendrai plus tard sur cela, étant donné que je
voudrais laisser les deux dernières minutes à mon
collègue.
Le Président (M. Bélanger): II en reste une. Alors,
M. le député de Gouin.
M. Rochefort: M. le Président, probablement sur une
question de règlement ou une question d'information à Mme la
ministre pour le bon fonctionnement des travaux.
M. Sirros: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laurier, c'est une question de règlement.
M. Rochefort: Non, mais, M. le Président, je pense que
j'avais la parole.
Une voix: ...une directive.
M. Sirros: Question de règlement.
M. Rochefort: Un à la fois.
Une voix: Ce n'était peut-être pas le cas tout
à l'heure.
Le Président (M. Bélanger): Alors, on avait reconnu
le député de Gouin sur une question de règlement. Si vous
voulez continuer, on reconnaîtra ensuite le député de
Laurier.
M. Rochefort: Oui. M. le Président.
M. Sirros: Je pensais qu'il parlait sur le temps qui restait au
député de Taillon.
Le Président (M. Bélanger): Non, non, cela va bien,
c'est avant la suspension. M. le député de Gouin, je vous
reconnais le droit de parole; alors, si vous voulez continuer.
M. Rochefort: M, le Président, une courte question
à Mme la ministre. Elle a déposé trois amendements. Je
veux lui demander si cela fait le tour de l'ensemble des amendements qu'elle
souhaite apporter au projet de loi 142.
Mme Lavoie-Roux: Oui, à moins que vous ne vouliez m'en
apporter.
M. Rochefort: Non, non, mais pour l'instant, en ce qui concerne
la ministre de la Santé et des Services sociaux, il n'y a pas d'autres
amendements que ceux qu'on trouve à l'article 2,
réécriture de 5.1, à 3.18.1, et à l'article 173,
une modification à l'article 5. Ce sont les trois amendements de la
ministre, cela fait le tour de ses amendements.
Mme Lavoie-Roux: En ce qui a trait à la question
linguistique.
M. Rochefort: À 142. En ce qui a trait à la
question linguistique. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): II est maintenant 18
heures, donc, la commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures et
nous les reprendrons dans la même salle.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
(Reprise à 20 h 15)
Le Président (M. Bélanger): Nous en sommes aux
remarques préliminaires et je reconnais le député de
Notre-Dame-de-Grâce qui avait levé la main.
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, sur les
remarques préliminaires.
M. Jolivet: M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette, question de règlement?
M. Jolivet: Oui. Est-ce que le fait que vous donniez la parole au
député de Notre-Dame-de-Grâce fait en sorte que la ministre
ne prenne pas le temps qui lui est imparti en vertu de nos règlements
pour répliquer au député de Taillon? La ministre laisse
tomber cette partie-là. C'est donc l'alternance qui fonctionne.
Mme Lavoie-Roux: À un moment donné,
peut-être, mais pas pour le moment.
M. Jolivet: D'accord.
M. Scowen: Est-ce que je peux proposer que la ministre fasse sa
déclaration parce que... Attendez-vous le député de
Taillon? Est-ce qu'il doit arriver?
Le Président (M. Bélanger): En vertu de l'article
246 du règlement, Mme la ministre a toujours un droit de réplique
de cinq minutes après chacune des interventions.
Mme Lavoie-Roux: Même après le député
de Notre-Dame-de-Grâce.
Le Président (M. Bélanger): Même après
le député de Notre-Dame-de-Grâce; toute intervention.
Une voix: Est-ce qu'elle peut déléguer son droit de
parole à son adjoint?
M. Blais: M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: Je tiens à dire que le député de
Notre-Dame-de-Grâce parle pour rien, comme d'habitude, parce que personne
ne l'écoute.
Le Président (M. Bélanger): II n'a pas
commencé encorel
M. Blais: Non, mais il parlait pour rien.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette, sur une question de règlement.
M. Jolivet: C'est juste pour répondre au
député de Notre-Dame-de-Grâce. Il demande si le
député de Taillon doit être ici. II est effectivement en
Chambre où il a un projet de loi à défendre.
Aussitôt qu'il aura terminé, il va revenir ici de la même
façon que le député de Gouin sera présent lorsque
viendra le temps de prendre son droit de parole.
Le Président (M. Bélanger): D'accord. C'est tout
simplement pour dire qu'on observe la règle de l'alternance et que nous
en sommes aux remarques préliminaires.
M. le député de Fabre.
M. Joly: Je voudrais savoir si Mme la députée de
Marie-Victorin est exclue complètement.
M. Jolivet: Non, c'est moi qui la remplace. La
députée de Marie-Victorin n'est pas ici pour des raisons de
santé, M. le député de Fabre. C'est moi qui la remplace,
si vous avez bien écouté les directives de ce matin. Je pense
qu'on doit être capable, ici à l'Assemblée nationale, de
considérer que des personnes peuvent avoir des raisons de santé
de ne pas être ici et c'est ce qui a été dit à
l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Bélanger): II n'y avait pas de
jugement là-dessus. C'était simplement une demande d'information.
Je pense que le député de Laviolette remplace pour tout le
projet. C'est bien cela?
M. Jolivet: Non, pour la séance d'aujourd'hui.
M. Joly: Est-ce qu'elle s'est fait mal en tombant de la
chaise?
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaîtl
M. Jolivet: M. le Président, je demanderais seulement au
député de Fabre de faire attention à cela. Nous n'avons,
en aucune façon, agi de cette façon lorsqu'il a été
question de décès de personnes du côté
ministériel, pas plus que nous n'avons parlé de ces choses quand
un ministre que vous connaissez, dont la femme est malade, a été
à son chevet. En conséquence, je dois vous dire, M. le
Président, que les propos du député de Fabre sont
déplacés. Il devrait les retirer. II y a une éthique dans
cette Assemblée qui fait que, quand on dit qu'une personne a des
difficultés au point de vue humain, on doit considérer cela et
s'en tenir aux propos du leader de l'Opposition, en Chambre, au moment
où le vote s'est tenu. Je pense que le député de Fabre
devrait regarder cela avec attention.
Le Président (M. Bélanger): Si vous me le
permettez, on va s'en tenir à l'article 211 qui nous ramène
à la pertinence du sujet. Nous avons fait preuve d'une certaine
tolérance depuis cinq minutes, mais on voudrait revenir au coeur du
débat.
M. le député de Terrebonne, une dernière
intervention.
M, Blais: J'aimerais simplement poser une question au
député de Notre-Dame-de-Grâce puisqu'il va parler. Est-ce
qu'il vient en commission parlementaire seulement pour des projets qui sont
discriminatoires et irrationnels ou s'il vient dans d'autres commissions
parlementaires pour défendre le gouvernement?
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Terrebonne, ce n'était pas une question de
règlement. Vous auriez pu la poser en coulisse tout à l'heure,
elle aurait probablement été bien reçue. On s'en tient
donc à l'article 211 et à la pertinence du sujet. Si vous me le
permettez, je serai sévère là-dessus pour éviter
que les débats dévient et nous amènent dans toutes sortes
de méandres lointains.
M. Jolivet: Une question de directive, M. le Président.
Vous avez dit au député de Terrebonne qu'il aurait pu poser sa
question en coulisse. Que voulez-vous sous-entendre par "poser la question en
coulisse"? Est-ce que c'est la même réponse que celle du ministre
responsable des Mines qui nous a dît d'aller discuter en coulisse des
projets qui
doivent se discuter en Chambre? Non?
Le Président (M. Bélanger): Vous en ferez votre
affaire. Vous prendrez votre décision à ce sujet. Là, ce
n'est pas pertinent. Je vous ramène à nos débats et je
cède la parole au député de Notre-Darne-de-Grâce. M.
le député.
M. Scowen: M. le Président, j'avais des commentaires
à faire sur le discours du député de Taillon et parce que
j'ai quelques informations à lui demander, je préfère
attendre son arrivée. Mes commentaires font directement suite à
son discours. Si quelqu'un d'un côté ou de l'autre veut parler, je
suis prêt à...
M. Jolivet: On peut, par alternance...
Mme Lavoie-Roux: Non, il n'y a personne.
Le Président (M. Bélanger): II n'y a personne?
Alors, M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Français Gendron
M. Gendron: Oui, je pense que je voudrais prendre mon droit de
parole et essayer de le faire le plus sérieusement possible dans le
travail qui nous est imparti, c'est-è-dire faire des remarques
préliminaires, avant de commencer l'étude du projet de loi.
Je voudrais juste également, comme remarque préliminaire,
mentionner que, lors du droit de réplique de la ministre de la
Santé et des Services sociaux, elle nous a indiqué qu'on allait
assister à cette commission à une série d'affirmations de
notre part. Je n'en disconviens pas, je veux juste lui indiquer que je vais
quand même essayer, en tout cas en ce qui me concerne, de les appuyer le
plus possible sur, à tout le moins, des prétentions qui sont
largement partagées par d'autres personnes qui sont également
intéressées par un projet de loi comme celui-là.
Dans un premier temps, je pense qu'il y a lieu, dans les remarques
préliminaires, de faire des commentaires que je n'ai pas eu l'occasion
de faire dans mon discours de deuxième lecture puisque ce n'est pas en
20 minutes, sur un projet de loi aussi important, aussi significatif, qu'on
peut faire le tour de l'ensemble de la question.
Je voudrais relever certains aspects qui, en tout cas en ce qui me
concerne, m'inquiètent au plus haut point. Le premier
élément que je voudrais toucher, c'est à savoir si c'est
un projet de loi qui arrive à un moment particulièrement bien
choisi, à un moment opportun en ce qui nous concerne et en ce qui
concerne la société québécoise. Je pense que les
travaux d'une commission parlementaire, à la suite de l'action d'un
gouvernement, doivent être "contextés" quelque part. En ce qui me
concerne, je dois vous dire que non, le projet de loi n'arrive pas du tout
à un moment opportun, à un moment choisi. J'aurai l'occasion
d'essayer de prouver qu'il s'agit bel et bien d'un projet à connotation
linguistique important, majeur - j'essaierai encore tantôt d'en faire la
démonstration - et, en conséquence, il est difficile de vous
croire et il est difficile de croire que le moment est bien choisi quand on
sait qu'il n'y a pas de gouvernement qui, depuis au moins une année, est
autant que cela au banc des accusés concernant le laxisme absolument
sans précédent qui s'est installé au niveau du non-respect
de la langue française, du non-respect du fait français. On aura
beau répéter à satiété, en Chambre ou
ailleurs, que vous êtes des supposés défenseurs du fait
français, j'aime toujours mieux me fier non pas sur ce que j'entends,
mais sur les faits que je peux observer. Ce que je peux observer depuis au
moins une année, c'est qu'il n'y a à peu près personne qui
ne peut pas convenir qu'il y a eu largement, et très largement, à
tous les points de vue, un laxisme - il n'y a pas d'autres termes - qui s'est
installé dans la défense, dans la démonstration, du moins
visuelle, d'une société où prédomine la langue de
la majorité.
Pourquoi je prétends que ce projet de loi arrive à un
moment inopportun, ma! choisi? II n'y a personne qui ne sait pas qu'on est en
fin de session. Il n'y a personne qui ne sait pas, M. le Président,
qu'on a littéralement perdu notre temps pendant des semaines à
l'Assemblée nationale pour toutes sortes de motifs. On pourrait
discourir pendant des heures sur les motifs. De temps en temps,
c'étaient des dissensions au sein de ce gouvernement à cause des
deux ailes de pensées, des deux conceptions: une conception un peu plus
sociale-démocrate -bien limitée, mais un peu - et l'autre
conception de l'État-business, l'État-entreprise. Quand cela a
à se traduire dans un projet de loi, c'est clair qu'à un moment
donné on est obligé d'observer des distorsions.
Inopportun également parce que... et, là-dessus, je pense
que la ministre de la Santé et des Services sociaux a été
correcte, non pas dans la présentation de son projet de loi, mais dans
ce qu'elle a dit: Écoutez, ce n'est pas la première fois que vous
entendez parler de cela en ce qui nous concerne, ce n'est pas la
première fois que le Parti libéral a des intentions - que ce soit
nécessaire ou non, ce n'est pas important pour vous autres - de
légiférer dans le domaine de ce sur quoi on va discourir plus
longuement tantôt, l'offre de services de santé et de services
sociaux sanitaires à la
communauté anglophone et allophone. Gilles Lesage l'a
rappelé dans Le Devoir du 6 décembre en disant: II y a au
moins deux ans que les libéraux se proposent, de retour au pouvoir -
parce qu'ils y pensaient, et c'est normal pour un parti politique de penser
qu'un jour cela peut être son tour -de prévoir de façon
législative le droit à toute personne d'expression anglaise de
recevoir dans sa langue des services de santé et des services sociaux.
Jusque-là, il n'y a pas de problème. On est capables de vivre
avec cela. Cependant, la ministre de la Santé et des Services sociaux a
aussi attendu jusqu'à la mi-novembre... C'est elle-même,
d'ailleurs, qui le mentionnait tantôt. Le projet de loi qu'on a à
étudier, je l'ai noté quelque part, je l'ai ici, a
été déposé en Chambre le 13 novembre. Pourquoi un
projet aussi majeur, aussi significatif - toujours selon votre version -
ultimement requis, ultimement nécessaire, tellement voulu et
souhaité - par personne en ce qui nous concerne - mais par toutes sortes
d'intervenants qui sont, en majorité, des gens plus près de vous
qui auraient voulu un projet de loi dans le sens d'une offre garantie de
services sociosanitaires...
Donc, c'est une chose pour laquelle vous aviez des intentions fort
précises depuis fort longtemps. Comment se fait-il, en termes
d'opportunité, que tout cela nous arrive à la dernière
minute, dans une fin de session où, tout le monde le sait, on travaille
à des heures un peu difficiles? On en a encore la preuve ici même
à cette commission. Notre critique sur ce dossier est obligé,
pendant une demi-heure, une heure, d'aller faire son "pitch" - excusez
l'expression - à l'Assemblée nationale sur un projet qui
l'intéresse comme ancien ministre de l'Habitation.
Si on avait travaillé dans un contexte normal, beaucoup plus
relaxe, beaucoup plus détendu, et que la ministre ait pris la peine de
discuter de son projet de loi, de discuter avec les clientèles
concernées, on ne pourrait pas prétendre qu'il y a des intentions
autres que celles que l'on peut observer dans le projet de loi. C'est vrai,
vous avez rappelé les propos que j'ai tenus en deuxième lecture,
que le projet de loi comme tel, je n'en fais pas un drame. C'est qu'il est
porté par le Parti libéral qui, actuellement, m'inquiète
au plus haut point sur le plan linguistique. Deuxièmement, il donne une
image fausse de la réalité vécue. Règle
générale, un projet de loi, c'est censé venir corriger des
affaires. Un projet de loi, c'est censé être source de droits
nouveaux pour certains. C'est censé corriger des lacunes, des carences.
Cela donne de nouveaux droits, de nouvelles responsabilités, de
nouvelles balises. Lorsque c'est comme cela, il me semble que l'on n'a pas de
gêne, que l'on n'a aucune espèce de honte à vouloir en
discuter largement avec les clientèles qui vont être les plus
concernées, du moins dans la transmission des services qui constitue
l'objectif du projet de loi.
Je pense que pendant des heures on pourrait vous prouver que le moment
est mal choisi. Le moment est très inopportun, comme vous l'avez dit
dans les notes explicatives, mais un peu moins que dans les discours: II s'agit
là d'un projet de loi à caractère humanitaire. Soyez
gentils, ayez énormément de grandeur d'âme pour permettre
que les clientèles anglophones et allophones puissent recevoir d'une
façon consacrée des services dans leur langue en termes de soins
hospitaliers et de services sociosanitaires, ce qu'ils reçoivent, ce
qu'ils ont, en ce qui nous concerne, depuis des années, parce que c'est
normal dans une société ouverte, dans une société
qui a du respect pour ses communautés ethniques. On doit leur dire: On
vous considère des Québécois de plein titre et on va vous
permettre d'avoir des services sociosanitaires dans votre langue. Cela se fait
couramment. C'est exactement ce qui se passe dans les faits. Si on n'avait pas
été si préoccupé de donner suite à quelque
chose qui correspond davantage à un engagement électoral, qui
correspond davantage à une espèce de volonté de la
ministre, indépendamment des avis qu'elle reçoit,
indépendamment d'une certaine confusion qui entoure ce projet de loi
dans sa forme, son libellé, si on avait pris le temps, à tout le
moins, d'en discuter avec les clientèles concernées.
Mon premier point, c'était pour vous expliquer que je suis
convaincu que, lorsque l'on a la prétention que le moment est mal
choisi, inopportun, ce n'est pas une invention, ce n'est pas quelque chose qui
est uniquement partagé par celui qui vous parle et par les membres de
l'Opposition. C'est quelque chose qui est partagé largement par bien des
individus dans la société. Tantôt, je ferai des citations.
On a le temps de se parler, on l'a dit tantôt, on a beaucoup de temps
devant nous. Les principaux agents socio-économiques - cela inclut les
centrales syndicales, bien sûr - ne demandent pas des amendements, ils ne
demandent pas de regarder cela tranquillement, ils disent: On ne veut rien
savoir parce que ce n'est pas le moment, c'est inopportun. La FTO demande au
gouvernement Bourassa de retirer les projets de toi 140 et 142 et elle exprime
pourquoi. Je ne le ferai pas tout de suite, je donnerai les raisons
tantôt.
Donc, premier point: Est-ce que le moment est bien choisi?
Réponse: Non. Deuxièmement, voici ce que je voudrais toucher dans
les remarques préliminaires: Est-ce qu'il s'agit d'un projet de loi de
nature linguistique ou s'il s'agit d'un projet de loi qui n'a pas beaucoup de
référence linguistique, comme je l'ai entendu
malheureusement, abusivement, dans les discours des membres du
gouvernement, lors de la deuxième lecture"? Mme la Présidente,
d'habitude, je n'ai pas peur des mots. Je vais faire cela quand même
calmement, mais, oui, il s'agit bel et bien d'un projet de loi qui a une
connotation très importante du côté linguistique,
même si l'objectif ultime du projet de loi c'est, bien sûr,
d'offrir ce qui se fait depuis des années à la communauté
anglophone et aux communautés allophones, mais d'une façon
différente de ce que l'on connaît par voie législative. (20
h 30)
Je voudrais seulement vous expliquer pourquoi je prétends que
c'est un projet de loi à connotation linguistique. Dans les notes
explicatives on a été obligés de dire: Permettre à
toute personne d'expression anglaise de recevoir dans sa langue des services de
santé et des services sociaux. C'est une loi sur les services de
santé et les services sociaux pour tenir compte des
particularités linguistiques. Première référence
à la connotation linguistique.
La deuxième référence importante, c'est à la
page 2 du discours de deuxième lecture de la ministre ici
présente ce soir. Quand on se donne la peine de regarder cela à
tête reposée - ce qui n'est pas toujours le cas en fin de session
- on trouve effectivement une argumentation qu'elle soutenait elle-même
et qui va complètement à l'encontre de ce que j'ai entendu, entre
autres, de la part de la députée de Dorion qui disait; Que
faites-vous là? II n'y a pas de connotation linguistique dans ce projet
de loi. C'est strictement pour donner des services sociosanitaires aux
allophones et aux anglophones. À la page 2 du discours de la ministre,
voici ce qu'elle disait: "II ne s'agit pas d'un projet de loi linguistique -
écoutez bien le reste - au sens strict du terme." À partir du
moment où on est obligés de faire des nuances sur la notion du
sens linguistique, par définition, elle vient de reconnaître, mais
peut-être d'une façon plus faible, - je comprends cela - que c'est
un projet à caractère linguistique sauf qu'elle s'en sort en
disant: Pas au sens strict du terme. Par la bande, de biais, oui, il s'agit
d'un projet linguistique.
À la page 7, toujours dans le même discours de la ministre:
"Mais la question centrale n'est pas une question linguistique -elle reprend
son même terme - au sens strict du terme. L'enjeu est plutôt la
possibilité pour une personne de recevoir les services de santé
et les services sociaux adéquats et de déterminer comment ce
droit aux services peut recevoir une application concrète et, dans le
présent cas, s'il y a lieu, de reconnaître explicitement une
relation entre la prestation des services de santé et des services
sociaux - jusque-là, il n'y a pas de problème - et la langue dans
laquelle ces services sont dispensés." Cela ne prend pas un gros
quotient pour faire une relation à une connotation linquistique.
À la page 9: "Nous voulons assurer pour nos concitoyens
anglophones... que l'exercice de ce droit ne met nullement en péril
l'avenir de la langue et de la culture française..." Elle nous fait tout
un plaidoyer sur sa conception qu'il n'est pas question de "bilinguiser" le
réseau. Elle nous explique ce qu'elle veut dire par "ne pas bilinguiser
le réseau" et elle fait également un plaidoyer sur une
espèce d'affirmation gratuite qu'ils ont toujours faite de l'autre
côté, qu'ils sont des défenseurs acharnés de la
langue française, sauf que tout ce qui se passe comme affaiblissement
depuis un an, comme par hasard, continue de s'amplifier à une grande
vitesse. Je donnais juste l'exemple de mon petit agenda - et je n'en reviens
toujours pas - pour le Centre de formation professionnelle, payé
à 100 % par des fonds publics du gouvernement du Québec, pour la
première année, qui est imprimé dans les deux langues.
Cela fait sept ans que j'en ai un et cela a toujours été
uniquement en français, parce qu'au Québec c'est censé se
passer en français. C'est un détail, mais cela illustre
exactement ce qui se passe. Cela illustre exactement l'espèce de
conditionnement de la population québécoise.
Ne vous surprenez pas. Même si j'entendais le premier ministre
dire: On va défendre à mort la Charte de la langue
française... Et, une semaine avant, le ministre de l'Énerqie et
des Ressources dit: Non, non, il n'y a pas de problème linguistique.
Où vivez-vous pour voir des problèmes linguistiques au
Québec? II n'y a rien de changé. Qu'un autre collègue un
peu plus loin dise: J'aimerais bien qu'on en finisse une fois pour toutes, de
toute façon, je voudrais parler le plus souvent possible seulement en
anglais parce que c'est ma langue... C'est à peu près le discours
tenu par la députée de Jacques-Cartier. Et multipliez les
exemples. Toute la fonction commerciale à Montréal... Faites-le,
vérifiez avec des grandes compagnies à Montréal par
téléphone. Faites la vérification. Je l'ai faite à
une couple de reprises. Ne vous surprenez pas que vous soyez d'abord
reçu au téléphone en anglais, alors qu'il y a un an la
plupart des qrandes compagnies a Montréal s'adressaient à un
Québécois en français. Mais il n'y a rien de
changé, puis on est des ardents défenseurs de la langue
française! Et on ne serait pas inquiets d'arriver avec un projet de loi
à ce moment-ci de la session alors que l'état d'esprit dans
lequel vous avez réussi à conditionner tout le Québec...
Il n'y a à peu près plus personne qui croit en votre
volonté réelle de poser les gestes requis qui s'imposent pour
réaffirmer davantage le fait français. Vous pensez qu'on n'aura
pas des doutes, qu'on ne sera pas
inquiet? Donc, j'en étais au deuxième point, est-ce qu'il
s'agit d'un projet à caractère linguistique, è connotation
linguistique? Bien sûr, à moins d'avoir je ne sais pas quelle
sorte de capacité visuelle
Le troisième point que je voudrais toucher, c'est encore
là une affirmation de la ministre de la Santé et des Services
sociaux. Quand on regarde le discours de la ministre de la Santé et des
Services sociaux, c'est étonnant que, dès la première
page... Et elle a réaffirmé - c'est cela qu'il y a de plus grave
- dans ses remarques préliminaires qu'elle avait, contrairement à
l'utilisation démagogique que nous en faisions, disait-elle, de l'appui
en notre faveur, pour notre thèse, de l'Association des centres
d'accueil du Québec, de l'Association des services sociaux, de la
Fédération des CLSC... Elle a dit: Je les ai vus, ces gens,
pendant deux heures et ils m'ont dit: Mme la ministre, on est d'accord avec le
principe du projet de loi. Erreur, erreur, complètement erroné,
ces gens n'ont jamais dit dans quoi que ce soit qu'ils étaient d'accord
avec le principe du projet de loi. Ils étaient d'accord avec le principe
de l'offre de services de santé et de services sociaux aux anglophones
et aux allophones dans leur langue. Mais, cela commence à faire une
méchante différence!
Je reprends: Cela fait toute une différence entre dire que ces
gens sont d'accord avec le principe d'offrir des services sociosanitaires dans
la langue des intéressés et affirmer, comme on l'a
réentendu dans ses remarques préliminaires que ces gens sont
d'accord avec le principe du projet de loi. "Ils sont d'accord avec le
principe", je lis son texte: "Nous recevons l'appui de la population et des
différents intervenants du réseau de la santé et des
services sociaux. En effet, il y a consensus sur le principe du projet de loi,
et les différentes associations et établissements nous ont tous
manifesté, sans exception, qu'ils partagent les préoccupations du
gouvernement à l'origine du projet de loi 142."
Ils partagent les préoccupations du gouvernement à
l'origine du projet de loi? Oui. Ils partagent le projet de loi? Non. On peut
le lire ici: Attendu que nous partageons les préoccupations du
gouvernement à l'origine du projet de loi et qui visent à assurer
aux bénéficiaires, et ainsi de suite. Ils finissent pareil
à la fin. Pour toutes ces raisons, on vous demande quand même, Mme
la ministre, de surseoir à l'adoption du projet de loi 142 et d'explorer
avec nous des avenues de solutions plus adéquates. Plus
adéquates? Donc, ils concluent que ce n'est pas cela qui est
adéquat, ce n'est pas cela qui est requis, ce n'est pas cela qui est
voulu, ce n'est pas cela qui est souhaité. Je le disais un peu en
deuxième lecture et je pense qu'on doit le reprendre, j'aimerais que
vous m'identifiiez les dispensateurs du service. Quels sont les dispensateurs
du service qui vous ont harcelée, écrit, pour dire:
Écoutez, cela urge, cela nous prend un projet de loi pour l'offre de
services de santé? Ce à quoi, on le répète, nous ne
nous opposons pas, au contraire. Qui a fourni les crédits
budgétaires requis? Qui a instauré les mécanismes
administratifs qui permettaient cette desserte, cette offre de services pour
lesquels, cela ne fait aucun doute, on est d'accord? C'est l'ancien
gouvernement. Donc, vous n'avez pas à nous convaincre de cela et que
vous vouliez continuer ce qui est légitime d'offrir dans une
société ouverte, comme je le mentionnais tantôt, soit,
c'est réglé. Mais ce n'est pas cela qu'on a dans la figure.
Là, on a dans la figure un projet de loi mal foutu, mal fait,
où les dispensateurs de services, unanimement, ceux qui auront à
vivre avec cela, dans la perspective où c'est accepté...
Unanimement les dispensateurs de services disent: Nous ne voulons rien savoir
de cela. On n'a pas besoin de cela. On aurait un paquet d'éditorialistes
à vous citer. J'aime bien mieux me fier au jugement de Jean-Pierre
Proulx sur certaines questions qu'aux points de vue partisans. Sur ces
questions, Jean-Pierre Proulx n'a pas été d'accord avec vous.
Premièrement, il dit qu'il s'agit d'un projet linguistique et qu'il y a
des écueils importants. Il a mentionné que, effectivement, il
était de notre responsabilité d'exiger, d'abord, des amendements,
parce que pour eux, c'est normal de penser que la seule façon de
bonifier un projet de loi, c'est de l'amender. Nous, on dit: Ce n'est pas le
moment, c'est inopportun, et on ne veut pas l'amender, on est contre ce projet
de loi pour l'instant, on n'a pas besoin de cela. Ce qu'il y aurait lieu, par
exemple, de bonifier, c'est peut-être a l'intérieur de lois plus
majeures: chartes des droits, de la langue française. La Charte de la
langue française présentait des dispositions qui
conféraient des garanties plus serrées que ces gens peuvent avoir
des services socio-sanitaires dans leur langue, y compris les allophones. Oui,
je ne dis pas qu'on ne regarderait pas cela...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît!
M. Gendron: Oui, je conclus, M. le Président, ce n'est pas
une occasion de continuer. Mes derniers mots sont pour dire que nous pensons
qu'il y a tellement de choses à discuter et à préciser. On
aura l'occasion de l'exiger tantôt, en voulant voir des intervenants qui
viendront partager avec nous les inquiétudes que nous avons. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Alors, je
reconnais le député de Notre-Dame-
de-Grâce.
M. Reed Scowen
M. Scowen: Même si les députés de Gouin et de
Taillon ne sont pas ici, je pense que les commentaires qui ont
été faits par le député d'Abitibi-Ouest sont
suffisants pour me permettre de faire les commentaires que je voulais faire et,
peut-être, pour l'inviter à commenter par la suite, s'il peut
obtenir le droit de parole.
Il y a quelque chose, è titre d'information ou
d'éclaircissement, que j'aimerais avoir. Il y a quelque chose que je ne
comprends pas.
Une voix: M. le Président, le député de
Notre-Dame-de-Grâce a fait allusion au fait que le député
de Gouin n'était pas ici. Je dois dire qu'il est en Chambre afin de
faire un discours intéressant.
Le Président (M. Bélanger): La précision
avait été faîte tout à l'heure au début, je
m'en excuse.
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Dans son discours, cet après-midi, au
début de cette commission, le député de Taillon a
répété quelque chose qu'on a entendu assez souvent pendant
le débat en Chambre, à savoir que le côté anglais
n'a pas besoin de ce projet de loi, que ces gens sont bien servis
déjà. On a entendu la liste des institutions de langue anglaise
à maintes reprises. Il n'y a personne qui a refusé les services
de la santé et les services sociaux dans sa langue et on n'a pas besoin
d'installer tout cela dans un projet de loi. Je pense que je
répète fidèlement ce qui a été dit à
plusieurs reprises.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
s'il vous plaît!
Une voix: Le député n'a pas...
M. Scowen: Pourquoi légiférer sur quelque chose qui
existe? Je n'ai pas l'intention, ce soir, d'entrer dans tous les détails
des raisonnements qui ont incité le gouvernement à proposer ce
projet de loi. C'est suffisant de dire, je crois, que les arguments, non
seulement d'Alliance Québec, mais des organismes, des groupes des
Cantons de l'Est, de l'Estrie, de la Gaspésie, du Nord-Ouest du
Québec et de la Côte-Nord, ont fait ces revendications depuis
maintenant plusieurs années. À Montréal, il a
été question surtout de Ville-Marie et des CLSC, et de la
répartition du territoire sur la base territoriale ou socioculturelle.
Dans les régions, il a été question de l'affaiblissement
des institutions établies par les anglophones à cause de la
diminution du nombre d'anglophones qui habitent dans ces régions. Il y
avait toute une argumentation. Cette argumentation nous a convaincus qu'on doit
adopter ce projet de loi. Mais la chose que je ne comprends pas, c'est la
suivante. Il me semble que cette argumentation a également
convaincu...
M. Jolivet: M. le Président...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: Je ne veux pas être désagréable
envers le député de Notre-Dame-de-Grâce, mais vous faites
signe que c'est en vertu de l'article 212. Il devrait poser sa question.
Le Président (M. Bélanger): En vertu de l'article
212.
M. Jolivet: L'article 212 dit... M. Scowen: L'article
212...
M. Jolivet: Oui, c'est cela. Le député semblait
dire...
Une voix: M. le Président...
M. Jolivet: Non, laissez faire. J'ai une question de
règlement. Je vais commencer par la régler.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette, s'il vous plaît, et on entendra le
député de Laurier ensuite.
M. Jolivet: Vous me faites signe parce que je me posais certaines
questions. J'ai cru comprendre que le député de
Notre-Dame-de-Grâce intervenait en vertu de l'article 212.
Le Président (M. Bélanqer): Non, c'est son droit de
parole.
M. Jolivet: C'est moi qui pourrais intervenir en vertu de
l'article 212? Mais je n'ai pas parlé.
Le Président (M. Bélanger): Non, pour chercher une
question de règlement tout à l'heure.
M. Jolivet: Non, non, je n'ai pas... Je m'excuse.
Le Président (M. Bélanger): D'accord. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce. Il y a eu méprise, je
m'excuse. On continue avec le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
Une voix: M. le Président, à l'article 212, est-ce
que c'est a cause des propos brillants parce qu'à l'article 212 cela
bout...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît.
M. Scowen: Je ne reviendrai pas sur tout ce que j'ai dit. Je
pense que la communauté anglophone, pendant cinq ou six ans, a
développé une argumentation assez sérieuse quant à
la nécessité de légiférer. Il me semble que cette
argumentation a déjà convaincu, non seulement le Parti
libéral, mais le gouvernement de M. René Levesque et de M.
Pierre-Marc Johnson. Je le dis parce qu'on constate qu'au mois de mai, dans les
propositions de réforme constitutionnelle, ce n'était pas une
proposition ordonnant l'indépendance du Québec, c'était
une proposition qui faisait partie intégrante d'un plan de
réforme de la constitution fédérale, la signature du
Québec sur le document. Le gouvernement a dit effectivement qu'il
était prêt et qu'il avait compris les revendications des
anglophones, la nécessité de garantir ces droits dans la loi. Ils
ont dit, noir sur blanc, que comme partie intégrante d'une constitution,
ils étaient prêts à accorder ces droits par une loi
à la communauté anglophone. (20 h 45)
Par la suite, M. le Président, au mois de novembre, le chef de
l'Opposition, à l'époque où il était premier
ministre, dans ses engagements électoraux, a détaché cet
engagement des conditions préalables concernant une constitution et il a
transformé cet engagement en promesse électorale. Je cite ce
qu'il a dit: Je pense que nous devrions garantir dans la loi du Québec,
comme des droits fondamentaux, le droit des anglophones de recevoir des
services de santé et des services sociaux en anglais, dans les lois du
Québec. Il l'a dit. Je pense que je peux présumer qu'une
déclaration solennelle sur la constitution et un engagement
électoral ne sont pas des choses improvisées au coin d'une table.
Ce sont des choses qui sont réfléchies, qui sont le fruit d'une
discussion, d'une conversation; il y a quelque chose là. Je pense donc,
M. le Président, que nous avons le droit de présumer que le
gouvernement à l'époque, que M. Pierre-Marc Johnson, le premier
ministre, avait déjà écouté les anglophones,
écouté les arguments selon lesquels ils disaient que la garantie
des services sur le plan administratif n'était pas suffisante et que
cela devait être légiféré, garanti dans une forme
législative.
On arrive au mois de novembre. Le député d'Abitibi-Ouest a
dit que c'était une loi votée à la dernière minute.
Je pense que le gouvernement libéral avait le droit de présumer
que c'était un projet de loi sur lequel les deux parties pouvaient
s'entendre parce que le gouvernement péquiste avait déjà
exprimé son accord sur le fond, que ce soit partie d'une constitution
que M. Johnson, le premier ministre, avait détachée, avait
transformée en promesse électorale, que ce soit partie d'une
constitution québécoise ou ce que vous voulez. Je
répète, je suis persuadé que le gouvernement à
l'époque avait écouté les Anglais, leur raisonnement
dévoloppé au fil des années et avait décidé
qu'il était capable d'appuyer une telle idée, à savoir que
les lois du Québec devaient reconnaître ce droit. La question que
je veux poser est celle-ci et j'espère que le député
d'Abitibi-Ouest peut y répondre: Comment, M. le député
d'Abitibi-Ouest, ou quelqu'un d'autre s'il veut répondre, pouvez-vous
réconcilier vos déclarations, à savoir que ce projet de
loi n'est pas nécessaire, avec les engagements pris dans votre
proposition d'accord constitutionnel et par la suite avec l'engagement
électoral de votre chef de le dégager de l'accord constitutionnel
et de faire de cet engaqement une promesse électorale? Comment
réconcilier vos déclarations disant depuis trois jours que ce
n'est pas nécessaire avec des promesses solennelles qui ont
été faites à deux reprises, dans deux cas? Comment
pouvez-vous expliquer à la population anglophone - et il y en a dans les
comtés de chacun des députés péquistes - le fait
qu'aujourd'hui vous dites que cet engagement n'est plus nécessaire?
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: M. le Président, selon la demande du
député de Notre-Dame-de-Grâce il y aurait consentement
à ce que mon collègue d'Abitibi-Ouest puisse lui répondre,
puisque c'est ce qu'il lui pose comme question, et je donnerais mon accord
entier à mon collègue de lui répondre.
Une voix: M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): M, le
député de Laurier, auparavant.
M. Sirros: Moi, je pense que, jusqu'à maintenant, M. le
Président, l'Opposition n'a pas été très
accueillante quant au...
M. Jolivet: Vous n'êtes pas obligé de faire
pareil.
M. Sirros: Je pense que l'Opposition aura beaucoup l'occasion de
prendre la parole durant les longues heures qui nous attendent pour
l'étude. Quant à moi, je ne donnerai pas mon consentement
maintenant pour revenir sur 20 autres minutes du député
d'Abitibi-Ouest.
M. Jolivet: Non. M. le Président.
M. Sirros: Quoique je trouve que c'est le plus raisonnable de la
"gang".
M. Jolivet: Un instant!
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette. C'est une question de règlement?
M. Jolivet: Oui, effectivement, M. le Président. Il faut
être bien clair. Il n'est pas question de donner au député
d'Abitibi-Ouest 20 minutes additionnelles. Ce n'est pas pour cela que j'ai
demandé. Le député de Notre-Dame-de-Grâce lui a
posé une question et, s'il y a consentement, il peut lui répondre
très brièvement.
Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez...
À fa fin de l'intervention du député de
Notre-Dame-de-Grâce...
M. Jolivet: Je croyais qu'il avait fini.
Le Président (M. Bélanger: ...vous pouvez, en vertu
de l'article 212, vous prévaloir de ce droit et poser des questions. On
va d'abord laisser le député de Notre-Dame-de-Grâce
compléter son intervention et, par la suite, on posera ces questions de
procédure.
M. le député d'Abitibi-Ouest, sur une question de
règlement?
M. Gendron: Oui, M. le Président, très simplement,
c'est ce que je voulais dire au député de
Notre-Dame-de-Grâce. Il s'est adressé à celui qui vous
parle et il m'a paru y avoir non seulement un point d'exclamation, mais un
point vraiment final à son intervention.
Le Président (M. Bélanger): Je vous invite à
vous prévaloir de l'article 213 à la fin de l'exposé du
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Si on propose que le député
d'Abitibi-Ouest ne réponde pas, cela ne me dérange pas, mais
j'aimerais que quelqu'un, dans le commentaire introductif, me donne la
réponse à cette question. II n'est pas nécessaire que ce
soit lui, mais que quelqu'un explique cette incohérence qui me semble
totale.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous platt. La
parole appartient au député de Notre-Dame-de-Grâce.
Avez-vous terminé?
M. Scowen: J'ai terminé.
Le Président (M. Bélanger): Y a-t-il d'autres
remarques? M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: À partir du moment où vous m'avez
indiqué que je pouvais, à la fin de l'intervention - et le
député de Notre-Dame-de-Grâce vient d'indiquer qu'il a fini
son intervention - me prévaloir de l'article...
Le Président (M. Bélanger): C'est une question
très brève.
M. Gendron: Oui. Ce n'est pas une question très
brève, c'est une réponse très brève.
Le Président (M. Bélanger): Une réponse
très brève.
M. Gendron: Une réponse très brève. On va
avoir l'occasion de l'expliquer davantage, mais la réponse très
brève...
Mme Lavoie-Roux: On est convaincu de cela.
M. Gendron: Oui. La réponse très brève,
c'est qu'il y a une distinction majeure, que le député de
Notre-Dame-de-Grâce connaît très bien, entre l'engagement
précis - et moi aussi, je le réfère au texte -du
gouvernement du Parti québécois et du chef de l'Opposition...
Pour ce qui est de la commmunauté de langue anglaise, le gouvernement du
Québec est prêt à s'engager, dans ce cadre nouveau,
à inscrire dans ses lois fondamentales le droit de la minorité
anglophone, et ainsi de suite. Il y a une différence entre ce qu'on
appelle les lois fondamentales du Québec...
Le Président (M. Bélanger): Brièvement.
M. Gendron: ...- oui, brièvement, je finis - et une loi
spécifique qu'on appelle La loi 142. Il me semble que ce n'est pas du
tout pareil. Le député de Notre-Dame-de-Grâce connaît
cela, mais s'il veut que je prenne - j'arrête là - plus tard 20
minutes pour lui expliquer la différence quant aux lois fondamentales
comme la charte des droits, comme une constitution québécoise ou
autre chose dans lesquelles on regarde un ensemble d'éléments, y
incluant la notion d'offre de services sociosanitaires aux anglophones, cela
va. Mais ce n'est pas cela qu'on a devant nous. C'est la loi 142 disant:
Voilà! On n'a pas demandé notre accord.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce, mais très
brièvement et toujours en vertu de Particle 213.
M. Scowen: Est-ce que je peux
comprendre, des paroles du député d'Abitibi-Ouest, que lui
et sa formation sont en accord avec la nécessité de
légiférer pour garantir ces droits et qu'il s'agit plutôt
de la forme que cette garantie doit prendre? Êtes-vous d'accord quant
à la nécessité de légiférer? Est-ce qu'on
s'entend sur ce point?
M. Gendron: On est d'accord pour que ces droits, tes droits
collectifs et non pas individuels des anglophones, soient incorporés
à une loi maîtresse du Québec, soit la charte des droits,
la loi 101 ou une loi sur une constitution québécoise. Oui, on
est d'accord.
M. Scowen: Croyez-vous que les anglophones ont besoin des
garanties législatives dans ce domaine?
M. Jolivet: M. le Président...
M, Gendron: Non, ils les ont. Ils ont les services.
Le Président (M. Bélanger): D'accord. Si vous le
permettez, on va mettre fin au débat puisque cela ressemble
effectivement plus à une période de questions. On s'arrête
là et je cède la parole au député de Terrebonne sur
les remarques préliminaires.
M, le député de Terrebonne.
M. Blais: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
on respecte le député de Terrebonne.
M. Blais: C'est préférable, d'ailleurs.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Terrebonne, la parole vous appartient.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci, M. le Président. Je vais d'abord, pour
ceux qui me connaîtraient moins parce qu'ils sont nouveaux, ou pour ceux
qui ne viennent pas souvent en Chambre, me camper du côté humain
dans le dossier linguistique.
Lorsque nous avons parlé de la loi 58 en Chambre, j'ai
parlé une vingtaine de minutes sur l'endroit où je me situais,
où je me campais dans ma tolérance, dans ma souplesse quant au
dossier linguistique. Je ne suis pas le "Rassoulis" de la francophonie, je
tiens à vous le dire, au départ, le Rassoulis de la francophonie
au Parlement. Le Rassoulis vous comprenez très bien ce que je veux dire.
J'ai un respect jaloux des minorités et de leurs droits. Mon parti a un
respect total des minorités et de leurs droits. S'il en était
autrement, je démissionnerais comme député dans ce
parti.
Vous voyez jusqu'à quel point c'est vrai, contrairement au
député de Notre-Dame-de-Grâce. Si on n'adoptait pas cette
loi qui est discriminatoire, lui, il démissionnerait. C'est exactement
la position contraire à celle du député de
Notre-Dame-de-Grâce que je soutiens. Je suis pour le respect
intégral des droits des minorités.
Pour me camper un peu plus, j'ai écrit un texte, il y a quelque
temps. Je vais le lire pour dire que je me situe comme faisant partie d'une
majorité francophone sur le territoire québécois et que
les anglophones qui sont sur le territoire québécois font partie
d'une minorité sur le territoire québécois; c'est
cela.
Ce projet de loi que nous avons devant nous fait comme si les
anglophones étaient une majorité au Canada, mais habitant le
Québec. C'est cela qui est la différence entre nos raisonnements.
C'est cela qui est notre différence. Ce n'est pas incroyable, c'est cela
qui se sent. Je vais en parler plus tard, je vais en parler une trentaine
d'heures, au moins, juste pour dire: Si, dans ce projet de loi, on respectait
les allophones de façon égale et si l'on n'avait pas un parti
pris pour ceux qui sont parlants anglais de base, on ne serait pas
obligé de mettre dans ce projet de loi ceux qui parlent la langue
anglaise. On écrirait comme on l'a écrit à l'article 1d:
"à mieux adapter les services de santé et les services sociaux
aux besoins de la population en tenant compte des particularités
régionales... linquistiques...", "linguistiques" serait suffisant. Mais,
vu que l'on a un parti pris comme faisant partie d'une majorité
anglophone canadienne, on sent le besoin de remettre le mot du dominant en
nombre, sur le territoire canadien. Je ne suis pas de cette
pensée-là; je suis fier de faire partie d'une majorité
francophone en terre québécoise. Je suis fier et respectueux des
minorités et non pas d'une seule qui se prend pour une majorité
canadienne. Cette loi leur dit une autre fois qu'ils font partie de ce
qroupe.
Pour me camper un peu mieux, je vais tout de même prendre le temps
- cela va prendre trois minutes - de lire un texte que j'ai écrit il y a
quelque temps: II n'y a pas de peuple bilinque, cela n'existe pas dans le monde
entier. Il n'y a aucun peuple bilingue au monde. Commencez par regarder le
Canada si vous ne me croyez pas, on dit que le Canada est bilingue, dans le
livre de géographie. On dit cela, dans le livre de géographie
"Canada: peuple bilingue". Il n'y a pas de peuple bilingue, cela n'existe pas.
Il y a des peuples ou des pays où il y a deux, trois ou quatre langues,
cela dépend. En Suisse, il y en a quatre. Mais il n'y a personne, sauf
une petite élite, qui parle deux, trois ou quatre langues. II y a des
coins de territoires, dans chacun de ces pays, où l'on parle une langue
de façon spécifique.
Ne venez pas me faire croire qu'au Canada -vous avez un sourire narquois
et fatigant, vous - il y a là un peuple bilingue; c'est faux.
M. Sirros: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laurier, une question de règlement.
M. Sirros: Est-ce que j'ai au moins le droit, en commission
parlementaire, de sourire en paix, comme je le veux?
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Terrebonne, vous pouvez continuer votre intervention,
s'il vous plaît.
M. Blais: Vous pouvez faire aller votre risorius tant que vous
voudrez, cela ne me dérange pas du tout. II n'y a pas de peuple bilingue
et c'est cela que l'on semble croire de l'autre côté.
Êtes-vous à ce point sans échine pour vous laisser faire
croire des choses comme celles-là par une minorité agissante!
Quand même! Quand vous traversez les frontières du Québec,
que vous allez en Colombie britannique, est-ce que les "Colombie britanniens" -
le mot le dit, ce n'est pas la Colombie canadienne, mais la Colombie
britannique - ce peuple qui vit sur ce territoire est bilingue? Est-ce qu'au
Manitoba les qens parlent deux langues? N'allez pas dire: Est-ce que cela se
peut, parler ainsi? Est-ce qu'il y a, en dehors de la province de
Québec, un peuple qui serait bilingue? Il y a ici, au Québec, des
gens qui partent deux langues.
M. Jolivet: M. le Président, je m'excuse auprès de
mon collègue; l'article 36, s'il vous plaît.
Le Président (M- Bélanger): L'article 36?
M. Jolivet: II y a des gens, de l'autre côté, qui
dérangent mon collègue en intervenant et qui font du bruit avec
leur langue et leur bouche.
Le Président (M. Bélanger): Bon. (21 heures)
M. Blais: M. le Président, c'est facile à
comprendre, je veux que vous me campiez, parce que je suis tellement
respectueux des minorités et de leurs droits. Pourquoi le suis-je? Parce
que je suis un minoritaire au Canada. Comme minoritaire au Canada, je veux que
l'on me respecte. Alors, je sais ce que c'est que d'être une
minorité. Je sais ce que c'est que d'être partie d'une
minorité. Au Canada, c'est ce que je suis, un minoritaire. Mais, au
Québec, je porte un autre chapeau, je suis majoritaire et, sur mon
territoire, je ne veux pas que les gouvernements fassent des lois qui me
traitent en minoritaire, et cette loi me traite en minoritaire. C'est exact.
C'est certainement épouvantable. Je trouve cela effrayant, effarant,
inacceptable. Il n'y a pas de peuple bilingue, il n'y a que des
minorités en voie d'assimilation ou des peuples unilingues. C'est aux
États-Unis que vit le plus grand nombre de minorités ethniques
dans le monde.
Mme Lavoie-Roux: ...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
on respecte le droit de parole du député de Terrebonne! M. le
député.
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, M. le Président.
M. Blais: Tous les minoritaires aux États-Unis, qu'ils
soient Espagnols, Portugais, Grecs, Allemands, Chinois, Japonais, Russes,
Italiens, Norvégiens, Suédois, Autrichiens, Vietnamiens, et
combien d'autres, deviennent bilingues à leur arrivée dans le
pays et, quelques décennies plus tard, deviennent anglais. Il n'y a pas
là dix provinces dont une a une majorité d'une de ces
minorités qui se défend très bien pour essayer de
résister. C'est la loi de l'assimilation naturelle de la majorité
dominante. Je n'ai absolument rien contre. C'est ainsi que cela se passe
partout dans le monde.
Il ne peut en être autrement pour les minorités
francophones du Québec ou du Canada, à moins de protéger
de façon efficace la langue française en terre
québécoise. Au Québec, on peut être pour le
français, langue officielle, en respectant la langue de la
minorité, ou pour le bilinguisme sélectif ou total qui ouvre
toute grande la porte à l'assimilation lente et sournoise de la
francophonie au Québec. De deux choses l'une, le peuple francophone
vivra et s'épanouira à une seule et unique condition, qu'il
agisse comme une entité majoritaire au Québec. Si le peuple
québécois agit comme une entité majoritaire au
Québec, il vivra et survivra. Ou le peuple francohone du Québec
s'assimilera à la masse anglophone d'Amérique du Nord s'il se
comporte comme une minorité au Canada. Il n'y a rien de blessant dans ce
que je dis, je ne suis jamais blessant. Absolument rien de blessant et je le
répéterai tout le temps de mon discours, tant et aussi longtemps
qu'on fera des murmures qui, eux, sont blessants.
Jusqu'à aujourd'hui, depuis une vingtaine d'années, les
gouvernements successifs à la tête du Québec ont fait le
choix d'un Québec francophone. Pour ce faire, il a fallu mener bataille
pour que commence à s'installer le français, langue
d'éducation, et
surtout le français, langue du travail. Par cette loi 142, Mme la
ministre et son chef choisissent de planifier leur politique linguistique sur
la base du francophone du Québec minoritaire, tandis que, moi,
député péquiste de Terrebonne, et mon parti politique
choisissons que les francophones forment un peuple majoritaire au
Québec. J'opte donc avec tous les défenseurs de notre langue pour
notre survie linguistique en Amérique du Nord et pour le plein
épanouissement de notre culture française sur cette terre
québécoise.
M. Bourassa devrait retenir la leçon qu'il a eue en 1976 et il
devrait savoir qu'on ne brime pas impunément les droits naturels d'un
peuple sans risquer, comme il se doit, de sortir marqué d'un combat
où il se présente perdant avant d'avoir posé le moindre
geste. Alors, en forçant l'Assemblée nationale à voter
cette loi, imaginez-vous la dégringolade que le peuple peut lui
réserver.
La Parti libéral doit reconnaître que le bilinguisme est le
résultat d'un choix individuel. Ce sont des individus qui choisissent
d'être bilingues, pas des peuples. Une élite dans un peuple
choisit à des fins de carrière, autant économique,
culturelle que diplomatique, d'apprendre une autre langue, et c'est une
très bonne chose. Mais c'est un choix personnel et non une imposition
à un peuple, à une collectivité, a une
société distincte, diraient certains autres. Aucun peuple au
monde n'est bilingue et aucun gouvernement ne peut imposer à un peuple
de façon rationnelle, le bilinguisme car il est en soi porteur mortel de
la disparition de la langue de la minorité. C'est simple comme texte.
C'est respectueux des minorités, mais c'est aussi respectueux d'une
majorité.
Au Québec, je fais partie de cette majorité, et c'est la
majorité francophone. Je suis pour qu'on garantisse les droits en
services, je suis pour que les gens d'une autre langue que la langue
française au Québec soient servis dans leur langue, dans les
services sociaux. Je suis prêt à mettre cela dans une loi, dans
une constitution, où vous voudrez, à la condition que cela soit
dans un réseau de base francophone et non pas dans une loi qui pourrait
faire une ouverture â un réseau parallèle. Je n'aime pas
cette loi, je la déteste. Elle m'empêche de dormir depuis qu'elle
est sur la table. C'est curieux, elle m'empêche de dormir. J'ai dit que
je la trouvais discriminatoire, intempestive, inappropriée et imbue de
favoritisme. Je trouve que cette loi brime les allophones. Ceux qui ne parlent
pas la langue anglaise, je trouve qu'on les brime parce qu'on les subordonne
à des budgets qui doivent être coupés, selon la philosophie
de ceux qui gouvernent actuellement. Tandis que nous avons, nous,
installé à travers tout le réseau des gens qui respectent
les allophones dont font partie les Anglais et tous les minoritaires au
Québec. Il faut qu'on accepte le fait que les Anglais sont minoritaires
sur cette terre québécoise. C'est seulement cela la
différence qu'il y a entre nous deux. C'est la seule chose qui nous
sépare. Je suis persuadé que vous respectez la majorité
francophone, mais vous l'appelez d'un nom différent, vous avez des dires
qui ne sont pas égaux à vos agissements.
Je voudrais absolument que l'on conserve ce que, depuis au moins une
décennie, on a implanté dans notre réseau à base
francophone. Je voudrais qu'on respecte ce qu'on a implanté. Et vous
savez tout ce qu'il y a. On parle onze langues au CLSC de Parc-Extension. Si
vous me disiez, comme vous le disiez en Chambre, que votre mère avait un
malaise et allait dans un CLSC, je suis persuadé qu'on lui
répondrait dans sa langue. Tant mieux! Je suis content de cela. Mais
j'ai peur qu'avec cette loi et l'esprit de "businessman" qui habite ce parti au
pouvoir, il y ait des coupures qui privent les allophones de leurs services les
plus primaires dans les services sociaux. J'ai le droit de
m'inquiéter.
Une voix: C'est vrai.
M. Blais: Je ne pense pas que de parler ainsi soit irrespectueux
envers qui que ce soit.
Une voix: Pas du tout.
M. Blais: J'espère que ce n'est pas irrespectueux. Je
regarde et je trouve cela terrible, en fait. Je prends sur mot le plus
possible. J'essaie. J'ai rarement des gouttelettes d'eau au-dessus de la
lèvre supérieure. C'est très rare. C'est quand je suis
horripilé par une situation qui est presque désobligeante. Je
n'ai pas parlé en Chambre sur ce projet de loi parce que je trouvais que
de le présenter seulement, c'était assez pour faire exploser un
Parlement, tellement c'est irrespectueux des gens en place. Tous les agents,
tous ceux qui vont se servir de cette loi, qui vont la subir, devrais-je dire,
sont contre. A-t-on déjà vu un législateur aussi
têtu? Il est vrai que le député de
Notre-Dame-de-Grâce a dit: Si on n'apporte pas des changements au point
de vue linguistique, je démissionne. C'est payer cher pour le garder en
Chambre, M. le Président. C'est payer cher pour un gouvernement.
Mécontenter tout le monde, y compris les allophones, et regardez le
double langage de cette journée, aujourd'hui, et ce qui se passait
aujourd'hui au salon rouge. On rendait un hommage mérité, qu'on a
appuyé, et j'étais heureux de le faire. C'était
peut-être de mauvais aloi parce que ce n'était pas le temps -
parce qu'on l'avait déjà fait -mais cela ne fait rien. Dire
souvent aux gens
qu'on les aime, c'est une bonne chose, et on ne peut pas être
contre la vertu en soi. Mais, dans l'autre salon, on votait en deuxième
lecture la loi 142 qui leur enlevait des privilèges qu'on leur disait
respecter de l'autre bord. Mais quel personnage est devant nous? Est-ce que
c'est le campagnard d'avant le 2 décembre 1985 ou l'élu
d'après le 2 décembre? Lequel des deux parle? Un dans le salon
rouge et l'autre dans le salon bleu. Deux langages différents. Je suis
persuadé que c'est le campagnard qui devrait l'emporter, celui qui
faisait campagne avant le 2 décembre, qui a été
élu. C'est lui qui devrait l'emporter parce qu'il avait de bonnes
idées avant le 2 décembre, des marges de manoeuvre, des budgets
qui ne finissent plus d'être forts, des fonds tant qu'on en veut, des
promesses, des écoles partout, des soins meilleurs, fini le temps de
Beyrouth. En bien, ce n'est pas Beyrouth, c'est la déroute
actuellement.
Personnellement, j'ai dit que je me campe avant de commencer ce projet
de loi. Mais je suis le type... Je l'ai déjà dit en Chambre. J'ai
fierté à l'âme de ce qu'on a fait au Québec pour que
nos minorités aient des écoles, de la maternelle à
l'université. J'ai fierté à l'âme de cela en tant
que majoritaire québécois. Je suis d'une sincérité
à toute épreuve là-dessus. J'ai fierté à
l'âme de cela, j'ai fierté à l'âme de voir que nos
anglophones au Québec ont des postes de radio. C'en est presque
discriminatoire pour nous parce qu'on est en Amérique du Nord et qu'en
plus les postes américains viennent porter ombrage à nos propres
ondes francophones. Mais j'ai fierté à l'âme qu'ils aient
leur réseau. C'est la même chose pour la télévision.
Mais j'ai mal à l'âme, par exemple, quand on adopte des projets de
loi comme la loi 58 qui vient me demander à moi, qui ai respecté
toutes les minorités au Québec et ceux parmi les minorités
qui ne m'ont pas respecté, de passer l'éponge et de leur dire:
C'est très bien. Je n'aime pas cela. Mais, au moins, dans la loi 58,
c'était moins pire que dans celle-là. Dans la loi 58,
c'était passer l'éponge pour un groupe et c'était
terminé, tandis que, là, on vient ouvrir la porte à une
injustice tant qu'on ne reprendra pas le pouvoir. C'est incroyable! On en
demande donc des sacrifices à cette majorité
québécoise! Mais pourquoi nous en demander tant? On vous en a
tant donné avec plaisir, avec joie et avec conviction. Pourquoi venir
nous forcer la main dans des choses inutiles? Pourquoi amener les directeurs
d'hôpitaux, les gens qui sont dans les milieux, dans une espèce de
cul-de-sac où il est impraticable d'appliquer une loi de cette sorte
parce qu'elle est imbue, réactionnaire, primitive? Elle est primitive.
On ne légifère pas le consensus social. On ne
légifère pas la concertation. Ce sont des choses que l'on trouve sur le terrain. On l'avait trouvé dans notre réseau,
des services pour l'ensemble des qens du Québec, quelles que soient
leurs langues, leurs origines et leurs couleurs. On en était fier. Vous
venez leur dire: Tout ce que vous avez fait jusqu'à aujourd'hui, ce
n'est bon à rien. Voici la vérité, le nouvel
évangile des soins sociaux du Québec. Eh bien, pour la passer,
vous allez me passer sur le corps parce que je ne crois pas à cette loi.
Elle m'horripile parce qu'elle n'est pas respectueuse de tout ce qu'on a fait
et de tous les sacrifices qui ont été faits au Québec pour
que les gens aient des services convenables. Merci beaucoup, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député
de Terrebonne. Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Non, je n'ai pas de remarques à faire sur
cette sortie un peu spéciale.
Le Président (M. Joly): Je vais reconnaître le
député de Taschereau.
M. Leclerc: Merci, M. le Président. Sans vouloir vous
mettre dans l'eau chaude avec ma question, je ne suis pas tout à fait
certain que la question que j'ai à poser devrait être posée
à ce moment-ci, mais enfin. À la dernière séance
des affaires sociales, le député de Gouin avait laissé
entendre que j'avais, dans son dos, si ma mémoire est exacte,
parlé du fait qu'il aurait...
M. Rochefort: Question de règlement, M. le
Président.
M. Leclerc: Non, juste me laisser finir. Cela ne sera pas
long.
M. Rochefort: Question de règlement, M. le
Président.
M. Leclerc: Ce sont mes remarques préliminaires.
Le Président (M. Joly); Je m'excuse, M. le
député de Taschereau, je dois le reconnaître.
M. Rochefort: Je voudrais savoir, M. le Président, sur
quoi parle le député de Taschereau. Est-ce qu'il parle sur ses
remarques préliminaires? Est-ce qu'il parle sur une question de
règlement? Parce qu'il nous a dit: J'ai une question à soulever.
Je voudrais savoir sur quoi il parle.
Le Président (M. Joly): Est-ce que c'est une question de
règlement, M. le député de Taschereau?
M. Leclerc: Sur mes remarques préliminaires. C'est que le
député de Gouin avait pris note de ma remarque. J'imagine qu'il
se souvient avoir dit que j'avais, dans son dos...
M. Rochefort: M. le Président, question de
règlement. Est-ce que vous pourriez rappeler le député
à la pertinence du débat?
Une voix: Oui, effectivement. M. Sirros: II n'a encore
rien dit.
M. Leclerc: Non, mais il avait pris avis de la question.
Le Président (M. Joly): Est-ce que...
M. Leclerc: Je veux juste qu'il me réponde.
Le Président (M. Joly): Je pense, M. le
député de Gouin, qu'on se doit d'entendre avant de pouvoir
juger.
M. Leclerc: Le député de Gouin se le rappellera. II
avait dit que j'avais dit, dans son dos, qu'il avait fait des dépenses
pour des photos alors qu'il était ministre...
M. Jolivet: M. le Président, je...
M. Leclerc: J'avais demandé à
l'époque...
M. Jolivet: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît, question de
règlement! M. le député de Laviolette. (21 h 15)
M. Jolivet: Question de règlement. M. le Président,
je sais que vous n'étiez pas présent vendredi soir dernier
à une commission qui traitait de la loi 124. Nous allons avoir
l'occasion, après celle-ci, de passer à la loi... Non, non,
laissez-moi terminer.
M. Sirros: Non, non, vous n'avez pas laissé terminer le
député.
Le Président (M. Joly): En vertu de quel règlement,
M. le député?
M. Blais: Une question de règlement numéro 36. Le
député de Laurier, ce n'est pas lui qui préside. Alors,
pourquoi fait-il des commentaires continuellement?
Le Président (M. Joly): Je m'excuse, M. le
député de Terrebonne, je m'excuse, j'ai donné la parole au
député de Laviolette.
M. Blais: Bien, enlevez-la à ceux qui n'y ont pas
droit.
M. Jolivet: M. le Président, je veux seulement dire une
chose. La question dont il fait mention est une question qui a
été étudiée, qui a été
discutée, lors du projet de loi 124. Si le député veut,
lorsque nous reviendrons, parce que nous avons a étudier la loi 124
à cette commission, s'il veut revenir à ce moment, je suis
sûr que mon collègue, le député de Gouin, pourra y
répondre. Mais, pour le moment, nous sommes sur la loi, si vous vous en
souvenez bien, M. le député, qui traite d'autre chose que de la
loi 142. Donc, je demanderais simplement au député d'être
pertinent.
Le Président (M. Joly): Parfait. Merci, M. le
député de Laviolette. M. le député de Taschereau,
est-ce que vos propos sont en relation avec la loi 142?
M. Leclerc: C'est parce que les accusations n'avaient pas rapport
non plus à la loi que nous étudiions la dernière fois,
mais elles se tenaient à la commission parlementaire des affaires
sociales, et c'est l'endroit - je n'en connais pas d'autre - où je peux
demander au député de Gouin s'il a fait ses vérifications
et s'il entend retirer les paroles qu'il a dites à mon égard.
C'est tout ce que je lui demande. Ne faites pas de débat sur cela.
Est-ce qu'il a vérifié? Est-ce qu'il entend retirer ses paroles?
C'est seulement ce que je demande, ce n'est pas compliqué.
Le Président (M. Joly): MM. les
députés...
M. Jolivet: M. le Président, je vous ramène
à l'article du règlement qui parle de la pertinence et ce n'est
pas pertinent.
M. Leclerc: Mais, comme les accusations...
M. Jolivet: Ce n'est pas pertinent.
M. Leclerc: ...du député n'étaient pas
pertinentes à ce moment...
Le Président (M. Joly): Je m'excuse, messieurs, M. le
député de Taschereau autant que celui de Terrebonne. On dit
à l'article 211: "Tout discours doit porter sur le sujet en discussion."
Alors, s'il n'y a pas d'intervenant du côté ministériel, je
vais reconnaître le député de Laviolette.
M. Leclerc: Juste avant, je vais finir cela assez
brièvement. Je demanderais, s'il vous plaît, au
député de Gouin de faire les vérifications et de retirer
ses paroles qui
étaient inexactes.
M. Jolivet: M. le Président, il est têtu. Il met
actuellement votre décision en discussion, ce qui n'est pas permis par
le règlement.
Le Président (M. Joly): Je m'excuse.
M. Leclerc: J'ai terminé, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député
de Tasehereau.
M. Jolivet:
Donc, M. le Président,
c'était...
Le Président (M. Joly): Je donne donc la parole au
député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président,..oui, M. le
Président.
M. Rochefort: M. le Président, sur la question de
règlement de mon collègue de Laviolette à l'endroit de
l'intervention du député de Taschereau...
Le Président (M. Joly): En vertu de quel règlement,
M. le député de Gouin?
M. Rochefort: Question de règlement, M. le
Président, la même question...
Le Président (M. Joly): En vertu de quel règlement,
M. le député de Gouin?
M. Rochefort: L'article 211, M. le Président. Quant
à la pertinence du débat, je dirai simplement au
député de Taschereau..
M. Sirros: Non, M. le Président, l'article 211, cela n'a
pas de bon sens.
Le Président (M. Joly): II n'y a pas de débat,
c'est terminé, j'ai déjà reconnu le député
de Laviolette.
M. Rochefort: Non, non, mais, M. le Président, je parle de
211.
M. Sirros: Mais l'article 211, vous avez dit: c'est la
pertinence,
M. Rochefort: Non, mais est-ce que vous êtes devenu
président de la commission?
M. Sirros: Non.
M. Rochefort: Non? Bon, bien, parfait.
M. Sirros: Non, mais j'aimerais, M. le Président...
Une voix: Profitez de votre intervention.
Le Président (M. Joly): Je vous entends, M. le
député de Gouin, sur une question de règlement.
M. Sirros: Mais l'article 211, c'est la pertinence, s'il n'y a
pas de discussion...
Le Président (M. Joly): Mais, là, c'est cela, il
n'y a pas eu de discussion.
M. Rochefort: Alors, M. le Président, simplement pour dire
au député de Taschereau que, lorsqu'on abordera la question des
soins dentaires, je ferai ce que j'aurai è faire.
Le Président (M. Joly): D'accord. Je vous remercie.
M. Leclerc: ...répond à ma question.
Le Président (M. Joly): M. le député de
Laviolette, je vous reconnais.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Oui, M. le Président, je vous remercie
beaucoup de me donner cette occasion de revenir sur le projet de loi 142, Loi
modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services
sociaux. Je dois vous dire que j'ai retrouvé ce soir l'ineffable
député de Tasehereau, qui ne pose jamais la bonne question au bon
moment. Ceci dit, M. le Président, j'étais, avec beaucoup
d'attention, à regarder la ministre de la Santé et des Services
sociaux, qui, avant le souper, pour des raisons qui étaient
peut-être techniques, n'avait à sa droite qu'un des bons larrons,
le député de Laurier, et il s'est ajouté un
deuxième bon larron -c'est la première fois que je le vois - le
député de Notre-Dame-de-Grâce, qui semblent être les
parrains.
L'article 36, M. le Président, pour le député de
Taschereau...
M. Leclerc: ...
M. Jolivet: ...lisez-le pour le député de
Taschereau, s'il vous plaît et je reprendrai mon droit de parole ensuite.
L'article 36.
Des voix: ...
Le Président (M. Joly): Je m'excuse, la question de
règlement...
M. Jolivet:
C'est moi qui l'ai posée, l'article 36.
Lisez-le, M. le Président...
Le Président (M. Joly): Bon, d'accord. Alors, je vais
reconnaître votre question, en vertu de l'article que vous aimeriez que
je
souligne. L'article 36. Lequel article 36? D'accord.
M. Sirros: J'aimerais savoir si...
Le Président (M. Joly): "Aucun député ne
peut interrompre celui qui a la parole, sauf pour faire un rappel au
règlement, signaler le défaut de quorum ou attirer l'attention
sur une violation de droit ou de privilège." Alors, j'aimerais que tout
le monde respecte quand même l'article 36, s'il vous plaît! Bon,
maintenant, je reconnais le député de Laurier, s'il vous
plaît!
M. Sirros: J'aimerais simplement savoir en vertu de quoi le
député de Laviolette parle actuellement et si c'est encore sur
les remarques préliminaires.
M. Jolivet: Effectivement, M. le Président, c'est sur les
remarques préliminaires que je parle.
M, Sirros: Est-ce que c'est la deuxième fois?
Le Président (M. Joly): Non, c'est la première
fois; c'est le seul député de l'Opposition qui n'ait pas encore
parlé sur les remarques préliminaires.
M. Jolivet: Est-ce que je peux vous poser une autre question, M.
le Président?
Le Président (M. Joly): Allez-y!
M. Jolivet: C'est à ce moment que commence effectivement
mon temps?
Le Président (M. Joly): Bien, vous en avez
brûlé un petit peu...
M. Jolivet: Je n'ai rien brûlé, on m'a
arrêté. Or, mon temps ne commence qu'à ce moment, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): Je dois vous aviser, M. le
député de Laviolette, que toutes les questions de
règlement qui sont venues interférer dans votre temps ne sont pas
comptabilisées.
M. Jolivet: Je vous remercie, M. le Président. Donc,
j'étais en train de dire que nous avions, avant le souper, un bon
larron. Nous avons maintenant deux bons larrons, parce qu'on a dit un peu
à travers toute l'histoire de ce projet de loi, que deux personnes
avaient été responsables de sa rédaction. J'ai dit, je le
répète et j'ai fait exprès pour le dire ainsi lors du
débat en Chambre, à 23 heures hier soir, que la ministre est "la"
fer de lance - on dit toujours que, quand on parle d'une femme, on devrait
parler au féminin; donc, au lieu de dire "le" fer de lance, je l'ai
appelée "la" fer de lance - d'un projet de loi linguistique. Pourquoi
a-t-on ces prétentions, M. le Président? Parce qu'effectivement
ce projet de loi 142 n'est pas un fait isolé. C'est une accumulation de
faits qui ont été...
M. Sirros: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Joly): Je m'excuse, question de
règlement, M. le député de Laurier.
M. Sirros: II me semble que, tout à l'heure, le
député de Laviolette a invoqué un article quand j'ai
utilisé le mot "amusé".
M. Rochefort: Quel article?
M. Sirros: Je le cherche, M. le Président.
M. Rochefort: Quand vous l'aurez trouvé, vous
soulèverez votre question de règlement.
M. Sirros: Est-ce que vous êtes devenu
président?
M. Rochefort: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Joly): Je mexcuse. S'il vous plaît!
J'ai reconnu le député de Laurier.
M. Sirros: M. le Président, je veux savoir si le mot
"larron" est injurieux.
M. Rochefort: M. le Président, question de
règlement.
M. Sirros: II y a un article dans le rèqlement qui dit que
l'on ne doit pas utiliser des mots...
Le Président (M. Joly): Je m'excusel M. le
député de Gouin, j'ai reconnu le député de Laurier
sur une question de rèqlement. J'entends bien écouter ce que le
député de Laurier a à me dire avant de pouvoir
statuer.
M. Sirros: C'est ça.
M. Rochefort: M. le Président, question de
règlement.
M. Sirros: On a toujours le loisir de demander à la
présidence...
Le Président (M. Joly): M. le député de
Laurier a aussi une question de règlement. Je vais entendre le
député...
M. Sirros: Une question de règlement à la fois, M.
le député de Gouin.
Le Président (M. Joly): Je m'excuse. S'il vous
plaît, M. le député de Laurier!
M. Sirros:
Une question de règlement à la
fois. Je vais terminer la mienne et vous ferez la vôtre. D'accord? M. le
Président.
Le Président (M. Joly): Je m'excuse! J'ai reconnu le
député de Laurier sur une question de règlement.
M. Rochefort: En vertu de quel article, M. le
Président?
M. Sirros: M. le Président, une question de directive.
M. Rochefort: M. le Président, vous demandez...
Le Président (M. Joly): Je ne peux pas lui suggérer
l'article. M. le député est en train...
M. Rochefort: Je ne vous demande pas de le lui suggérer,
mais, lorsque nous soulevons des questions de règlement...
M. Sirros: M. le Président, je suis sur une question de
règlement.
M. Rochefort: ...vous nous demandez de donner le numéro de
l'article au départ, et non à la fin. Alors, on veut que cela
s'applique aussi au député de Laurier.
Le Président (M. Joly): Alors, M. le député
de Laurier...
M. Rochefort: Alors, ou il trouve son article, ou il continue de
chercher.
Le Président (M. Joly): ...quand vous aurez trouvé
le numéro de l'article, il me fera plaisir de vous
reconnaître.
M. Rochefort: Vous soulèverez votre question de
règlement.
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît! Je
reconnais le député de Gouin sur une question de
règlement. Vous aviez une question de règlement, M. le
député de Gouin?
M. Rochefort: M. le Président, le règlement est
clair. Lorsque l'on soulève une question de règlement, il faut
dire en vertu de quel article. Qu'il trouve son article, M. le
Président...
M. Sirros: Question de règlement, monsieur.
M. Rochefort: ...et on sera heureux de l'entendre sur une
question de règlement.
M. Sirros: En vertu de quel article le député de
Gouin interfère-t-il, M. le Président?
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît! M.
Sirros: Une question de directive.
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît! Je vais
reconnaître à nouveau le député de Laviolette...
M. Sirros: D'accord.
Le Président (M. Joly): ...parce que je m'aperçois
que ni l'un ni l'autre n'a le numéro.
M. Jolivet: D'une façon ou d'une autre, M. le
Président, je vous remercie beaucoup, c'est ce que j'attendais. J'ai
droit à mes remarques préliminaires.
Une voix: Avez-vous un article pour parler?
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président (M. Joly): Je m'excuse, mais il a un droit
officiel reconnu par la présidence. S'il vous plaît!
M. Jolivet: Je peux vous dire que j'ai devant moi un article qui
va être intéressant.
Le Président (M. Joly): Cela me fera plaisir de
l'entendre, M. le député de Laviolette.
M. Jolivet: M. le Président, d'abord, je ne pense pas,
jusqu'à maintenant, dans mes propos, avoir utilisé des paroles
injurieuses envers qui que ce soit. Au contraire, je l'ai
répété en Chambre et le Président de
l'Assemblée nationale n'a, en aucune façon, demandé que je
retire quelque parole que ce soit. Il était conscient que la
réalité que j'exposais était la vraie
réalité.
Des voix: ...
M. Jolivet: M. le Président, je m'excuse. Encore une
fois, est-ce que je peux avoir le droit de parole en vertu de l'article 36?
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette, je m'excuse, j'ai été un
petit peu absent. Vous avez le droit de parole et l'on vous reconnaît. Je
demanderai aux deux côtés de respecter le droit de parole du
député de Laviolette. Je pense que
c'est le minimum requis à cette commission. M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: J'ai de la difficulté à parler. Je n'ai
même pas commencé à dire quelque chose.
Le Président (M. Bélanger): Continuez, M. le
député, il n'y a aucun problème.
M. Jolivet: D'accord, merci, M. le Président. Donc, je
dois vous dire que le projet de loi 142, tel que présenté,
à l'article 1, prévoit que toute personne d'expression anglaise a
le droit de recevoir, en langue anglaise, des services de santé et des
services sociaux. Jusqu'à maintenant, dans les discussions, soit ici
à cette commission, soit à l'Assemblée nationale, le
gouvernement allègue que le but du projet de loi est d'accorder un droit
- on me reprendra si je me trompe, j'essaie de bien comprendre - aux membres de
la minorité anglophone. Ce que l'on dit, en fait, c'est que l'on veut
accorder un droit. Les mots "d'expression anglaise", à mon avis, font
beaucoup plus que de nous référer à une notion du mot
"anglophone" au sens de la langue maternelle, ou même de la langue
communément parlée à la maison. Je pense - je peux me
tromper - que cette notion comprend, de façon potentielle, n'importe
qui, toute personne qui est capable de s'exprimer en anglais et qui se
présente soit aux services de santé, soit aux services sociaux,
soit au CLSC, soit à l'ensemble de tous les services accordés
pour recevoir ou même, dans certains cas, réclamer un service. On
l'a continuellement dans chacun de nos comtés: les gens viennent,
reçoivent un service ou réclament un service. On pourrait
même aller jusqu'à dire...
M. Sirros: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laurier, en vertu de quel article?
M. Sirros: L'article 35, M. le Président. Je peux le
lire.
M. Jolivet: M. le Président, je dois vous dire que j'ai un
autre discours à faire en Chambre tout à l'heure.
M. Sirros: "Un député qui a la parole ne peut -
paragraphe 7 - se servir d'un langage violent, injurieux ou blessant à
l'adresse de qui que ce soit." J'aimerais que le député de
Laviolette retire les mots qu'il a utilisés au tout début de son
intervention en parlant d'un larron.
M. le Président, je lis ici la définition du mot "larron";
c'est un voleur, entre guillemets. Je considère cela tout à fait
injurieux et j'aimerais que le député de Laviolette retire ces
mots en vertu de l'article 35.7.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: M. le Président, je vais retirer l'expression
qui, à son avis, signifie "voleur" pour vous dire que dans mon esprit,
quand je l'ai employée, c'était au sens que l'on connaît
dans l'Histoire sainte et que le bon larron est une bonne personne qui s'est
repentie et, comme cette personne s'est repentie, c'est considéré
comme un adjectif, un qualificatif donné à une personne qui a
reçu le salut du Christ lorsqu'il était sur la croix. Donc,
à ce moment-là...
M. Sirros: Retirez-la.
M. Jolivet: Je retire ces mots "bon larron" et je dirai "mauvais
lascar".
M. Sirros: II n'a pas dit "bon larron", il a dit seulement
"larron", M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Alors, vous retirez le
mot "larron". M. le député de Laviolette, si je comprends bien,
vous avez retiré le mot "larron" et je vous prierais de continuer
maintenant votre intervention.
M. Jolivet: Si le député de Laurier avait
écouté ce que j'ai dit, il saurait que j'ai parlé du bon
larron qui se trouvait à la droite de la ministre et, à mon sens,
le bon larron était une personne bonne, juste et équitable. Je
retire le mot "larron" et je laisse le mot "bon".
Le Président (M. Bélanger): Sans commentaire, s'il
vous plaît! M. le député de Laviolette, un
député qui retire ses paroles doit le faire sans commentaire. Je
vous remercie...
M. Jolivet: Parfait, M. le Président, je les retire.
Le Président (M. Bélanger): ...et vous prie de
continuer votre intervention.
M. Jolivet: Ce que j'étais en train de vous dire, c'est
que dans mon esprit toute personne allophone qui pourrait et peut s'exprimer en
anglais... Et même, je vais aller dans l'absurde. C'est important que le
député de Laurier m'écoute parce qu'hier soir il m'a
posé une question à l'Assemblée nationale quand j'ai fait
la preuve par l'absurde. Il croyait que c'étaient mes dires. Quand on
fait la preuve par l'absurde, cela ne veut pas nécessairement dire que
c'est ce que l'on croit, mais on veut faire une preuve en disant: Si j'allais
à l'absurde, c'est telle
chose qui se produirait. Alors, si j'allais à l'absurde, on
pourrait même dire que toute personne francophone qui s'exprime en
anglais pourrait se prévaloir de ce droit prévu à
l'article 2 de la loi présentée, C'est cela qu'il est important
de bien considérer.
Ce que l'on dit, je le répète pour le député
de Notre-Dame-de-Grâce qui a peut-être mal saisi ce qu'on lui
proposait, parce que, parfois, quand on parle, il lit et, quand on lit, on
n'est pas porté à écouter. Il lisait tout à l'heure
un document pendant qu'un de mes collègues parlait. Mais je dois vous
dire qu'effectivement - s'il écoute attentivement - on n'a jamais dit
que les gens avaient tous les services. Je l'ai répété
dans mon discours hier soir et je l'ai même répété
à mon collègue, le député de Laurier, à une
question qu'il m'a posée. On disait qu'il y avait des services et que ce
n'est pas en changeant les structures de façon à les rendre
parallèles dans les services de santé et les services sociaux, au
même titre que ceux que l'on possède dans l'éducation, que
l'on va réqler le problème. Il faut ajouter aux services
déjà existants d'autres services demandés à
l'extérieur des services actuels ou des ressources additionnelles. J'ai
même pris à témoin le président du Conseil du
trésor qui entrait à ce moment-là et je lui ai dit, en
Chambre: Je suis un homme heureux; chaque fois que je dis des choses
semblables, le président du Conseil du trésor se trouve là
et je suis heureux de les dire devant lui. C'est lui qui a forcé la
ministre à être - et je le répète - le fer de lance
des coupures de ce gouvernement dans les services de santé. Si elle a
été le fer de lance des coupures dans les services de
santé - comme le président du Conseil du trésor l'a dit:
C'est ma meilleure coupeuse - il n'est pas nécessaire qu'elle devienne
à nouveau le fer de lance du recul du français au Québec
ou des services donnés pour la majorité du Québec.
(21 h 30)
Je dis, M. le Président, que certains ont allégué
que le concept de personne d'expression anglaise était conforme à
celui de communauté québécoise d'expression anglaise
inséré en 1983 dans le préambule de la Charte de la langue
française. Il ne faut pas oublier qu'il faut interpréter la
phrase du préambule en son entier, non pas en partie. On peut
l'interpréter comme on veut, mais en son entier. Celle-ci parle des
institutions de la communauté québécoise d'expression
anglaise et de celui des minorités ethniques. Il ne faut pas prendre une
partie, l'extrapoler et dire: C'est cela qu'on a dit. Ce n'est pas ce qui est
marqué. Le sens d'expression anglaise dans le préambule, pour
autant qu'il est distinct des minorités ethniques, est donc
complètement différent de celui qui est prévu à
l'article 2 qui comprend véritablement, de façon non
équivoque, les anglophones et les allophones.
Donc, ce que l'on dit et ce que l'on craint, c'est la première
fois qu'un droit à des services en anglais, en bonne et due forme, est
conféré en matière de santé et de services sociaux.
Actuellement, les articles 39 et suivants de la Charte québécoise
des droits et libertés de la personne confèrent des droits
économiques et sociaux, dont... Là, on en a discuté
à la loi 131, avec l'amendement qu'a apporté le ministre de
l'Éducation - j'en ai fait mention dans mon discours hier soir - sur le
droit à la dérogation à la charte québécoise
et à la charte canadienne. Donc, le droit à l'enseignement
religieux ou moral, c'est-à-dire l'article 40; le droit à des
conditions justes de travail, c'est l'article 46, et celui pour les
minorités culturelles à faire progresser leur vie culturelle,
l'article 43. Ces droits économiques et sociaux ne sont cependant pas
prépondérants. La Commission des droits de la personne n'a pas
compétence à leur égard. Donc, nulle part dans la Charte
des droits et libertés ou dans la Charte de la langue française
ne retrouve-t-on un droit strict à des services en langue anglaise. De
plus, ce droit, tel qu'inséré dans la loi statutaire qu'est la
Loi sur les services de santé et les services sociaux, est un droit
individuel, ce qui, è maints égards, peut avoir beaucoup plus de
portée, surtout au niveau de la demande d'un droit formulé de
façon collective. Il faut donc bien se mettre dans la tête... Et
là, je fais appel à ceux qui n'ont peut-être pas la
même connaissance de l'ensemble des lois, pour ne pas avoir
été ici à cette Assemblée pour les adopter et les
discuter. Il faut donc prendre conscience du fait que nous
pénétrons dans un domaine qui est inexploré et faire
preuve de prudence dans n'importe quelle articulation du droit nouveau ou du
nouveau droit, surtout à une époque où il y a des chartes
qui existent.
Je répète, M. le Président, que ce que l'on dit et
ce que l'on répète, c'est qu'il faut faire attention. Nous ne
voulons pas qu'il y ait dans les services de santé et les services
sociaux un réseau parallèle au même titre qu'il y en a un
dans les services de l'éducation. Nous ne nions pas qu'il y a des
services. Nous disons que si les services ne sont pas convenables, que le
président du Conseil du trésor ajoute, donne à la
ministre, au lieu de couper, des montants d'argent additionnels pour donner des
services qui soient des services de qualité, mais non pas en
créant un réseau parallèle.
Je pense qu'il y a peut-être de la part des gens d'en face une
mauvaise compréhension et nous jugeons, comme le disait le
député d'Abitibi-Ouest, que le projet de loi est inopportun. Il
n'arrive pas à un moment où on peut avoir une discussion
correcte, dans les délais nécessaires. J'avais fait, lors d'une
question en Chambre, une
demande à la ministre afin qu'on évite d'étudier
son projet de loi pendant des jours et des nuits. On a étudié son
projet de loi pendant des parties de nuits malgré ce que je lui avais
dit, ce que je lui avais demandé de ne pas faire. Souvenez-vous, ce
n'est même pas elle qui a répondu à la question. C'est le
leader parce qu'il s'est senti offusqué, piqué au vif, comme on
dit, parce que je lui ai dit qu'il avait mal préparé son travail
parlementaire. Je vais le répéter partout, c'est un travail mal
préparé. Regardez un peu partout dans l'ensemble de toutes les
commissions parlementaires. J'en donne un exemple typique auquel je suis, la
loi 150 sur les forêts, qui n'est pas étudiée actuellement
parce qu'on est pris avec la loi 119 sur les relations de travail dans
l'industrie de la construction qui a obligé le leader à reculer
sur la loi 102 et qui, d'après le ministre de l'Énergie et des
Ressources, était essentielle à la loi 150. Et on se retrouve
avec cette loi qui n'est pas là. Elle a été retirée
ou, du moins, on n'en parle plus. Aujourd'hui, on nous dit, dans la loi 150,
que la loi 102 n'est plus essentielle. On n'ose pas dire que le ministre nous a
leurrés en Chambre, mais on croit le comprendre à travers les
lignes, par exemple. La preuve en sont tous les amendements qu'on m'a
apportés, et je pourrais vous sortir les documents de la loi 150, une
pile d'amendements comme cela dans lesquels on retire, dans la loi 150, toutes
les références à la loi 102.
On nous dit que cela reviendra quand on étudiera la loi 102 au
printemps, qu'on fera référence à la loi 150. Mauvaise
organisation du leader! Je l'ai dit et je vais le répéter. Et la
ministre voudrait nous faire travailler dans ces conditions? Elle, la ministre
de la Santé? Je n'accepte pas cela, M. le Président. Je ne
l'accepte pas parce que, ou la ministre est naïve, ou elle ne comprend
pas. Je suis porté à dire qu'elle est les deux à la fois.
Regardez le député de Laurier, il a quitté et il a le
droit de quitter, mais il nous a accusés, au début de la
journée, de vouloir être des gens fanfarons, de vouloir nous
amuser. Je ne suis pas ici pour m'amuser. Je n'accepterai jamais d'être
considéré comme un gars peureux et je n'accepterai jamais, comme
député de cette Assemblée, de me faire piler sur le corps
dans des conditions où notre santé est mise en danger dans
certaines circonstances. Pour une ministre de la Santé, je trouve cela
dur. Elle devrait penser à nos droits individuels ce soir et elle aurait
dû y penser hier soir et avant-hier soir à l'Assemblée
nationale, pendant qu'on étudiait des projets à d'autres
commissions. Tout à l'heure, je vais remonter pour discuter d'autres
documents sur lesquels on n'est pas d'accord. Et nous dire qu'aujourd'hui on
s'amuse! Je ne m'amuse pas. Le député de
Notre-Dame-de-Grâce doit comprendre ces choses-là. Il doit
savoir qu'on ne s'amuse pas quand on défend des droits auxquels on
croit. Et nous croyons que non seulement la loi 142 doit être
amendée, mais qu'elle doit être retirée au même titre
que la loi 140 doit être retirée.
Je pense qu'il y a un peu d'émotivité dans ce que je dis,
mais je le crois. Souvent, on dit, et je suis habitué à ce
rythme-là, qu'on est peut-être meilleur quand on est
émotif. On est émotif parce qu'on y croit; sinon, on ne le ferait
pas. Sinon, on aurait dit dès le début: Laissons passer la loi
142, ils vivront avec. Nous n'avons même pas envisagé cette
possibilité, M. le Président, de dire qu'ils vivront avec leurs
erreurs. Nous croyons que l'erreur est trop grosse, qu'elle sera dure à
réparer si, aujourd'hui, avec une loi comme celle-là, on met en
place au Québec un réseau parallèle qui n'existe pas chez
les anglophones au même titre qu'il existe dans l'éducation depuis
l'époque où cela a été décidé dans la
constitution canadienne. Vous voyez quelles difficultés on a
actuellement de changer l'article 93 de l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique. Le ministre de l'Éducation est conscient qu'il doit le
changer, mais, parce que son caucus ne le veut pas, parce que son gouvernement
ne le veut pas, il ne bouge pas, il ne va même pas en appel. Il ne nous
dit même pas quels seront les appels qu'il va porter. Et on va
aujourd'hui accepter, nous, comme membres de l'Opposition, que ce gouvernement
crée un réseau parallèle dans la santé et les
services sociaux?
M. le Président, il y a quelque chose qui est illoqique dans mon
esprit ou dans l'esprit de ceux d'en face. Je vous dis, M. le Président,
que je ne les comprends pas. On va nous faire brailler en nous disant que c'est
pour des raisons humanitaires qu'on fait cette loi? Je ne le crois pas. Pas
à La Tuque, pas à Parent et pas à Clova. Dans ma
circonscription, dans le nord, les gens n'ont même pas les services
essentiels à Clova parce que le ministre des Transports refuse d'ouvrir
la route. Je vais me battre pour qu'il l'ouvre, pour qu'il donne des services
à ces gens et un centre local de services communautaires. On va nous
dire aujourd'hui que le projet de loi qui nous est présenté n'a
qu'un but humanitaire. Soyez donc humains envers les gens de Clova pour
commencerl
Les membres de cette commission, qui ne sont pas des régions
périphériques, qui ne connaissent pas ces difficultés de
ne même pas pouvoir voyager en train parce que le train ne se rend pas
chez eux... Ces gens-là ne voyagent même pas par avion parce que
le lac n'est pas gelé; en hiver, le seul moyen de se déplacer, ce
sont les skis. Nous ne serons pas humanitaires pour ces gens-là? La
ministre ne répondra-t-elle pas à ces
demandes de services? Ne fera-t-elle pas pression sur le ministre des
Transports pour ouvrir une route à Clova? Pendant ce temps-là, on
va organiser un réseau parallèle pour des gens qui ont
déjà des services alors que les miens n'en ont pas? M. le
Président, dans ces circonstances, je deviens un peu malin. Je
répète ce que les gens de mon coin disent; c'est ce qu'ils
disent. Ils ne comprennent pas que des gens qui ont déjà des
services se plaignent et que, parce qu'ils manquent de ressources, on leur
donne un réseau parallèle.
Vous le savez, M. le Président, vous avez été dans
le réseau. Vous êtes capable de me dire ce que les gens disent
dans les hôpitaux, dans les CSS. Ce que la ministre demande après
avoir essayé de leur tordre le bras, ils l'ont refusé. Ils ont
envoyé des télégrammes pour dire: Non. Des services?
Oui... M. le Président, je n'aime pas la façon dont le
député de Laurier entre dans cette salle, pas plus que l'attitude
du député de Notre-Dame-de-Grâce qui rit.
Le Président (M. Bélanger): Messieurs, à
l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Je
pense que l'on fait preuve... S'il vous plaît! S'il vous plaît!
C'est le temps de parole du député de Laviolette. Je pense qu'il
faudrait faire preuve d'un peu de tolérance. Les gens ont le droit de
circuler de la façon dont ils le veulent. Il ne faudrait pas s'offusquer
toutes les cinq minutes pour toutes sortes de frivolités qui se passent
autour de nous. M. le député, je vous prie donc de revenir
à votre exposé. Je vous remercie. S'il vous plaît, à
l'ordre!
M. Jolivet: Je vous remercie, M. le Président, de dire que
je ne dois pas m'offusquer de frivolités. Je dois vous dire que cela ne
venait pas de notre côté.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette, je vous prie de revenir à votre
intervention, s'il vous plaît!
M. Jolivet: C'est ce que je vais faire, M. le
Président.
M. Sirros: Je n'ai fait qu'entrer dans la salle.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
M. le député de Laurier!
M. Jolivet: M. le Président, je trouve qu'il est essentiel
que ce projet de loi soit retiré. Comme le disait M. le
député de Terrebonne, il n'aurait jamais dû voir le jour.
C'est un projet de loi qui aura un effet boomerang chez les gens qui sont
à la droite de la ministre, qui répondent à des
impératifs électoraux, à des promesses qu'ils ont faites
et dont ils doivent aussi actuelle- ment subir les conséquences. C'est
le député de Taschereau qui parle encore?
Le Président (M. Bélanger): Encore une fois, M. le
député de Laviolette, s'il vous plaît! S'il vous
plaît, messieurs, je vous en prie! S'il vous plaît! Messieurs, je
vous en prie, nous devons respecter le droit de parole du député
de Laviolette.
M. le député de Laviolette, en conclusion, il vous reste
trente secondes.
M. Jolivet: Je vais conclure, M. le Président; j'aurai
d'autres occasions de revenir. J'aurai l'occasion de dire que, comme
Québécois majoritaire et comme Québécois
minoritaire, dans le contexte proposé, je ne me laisserai jamais passer
sur le corps. Je jure, M. le Président, que je prendrai tous les moyens
pour éviter cette chose.
Le Président (M. Bélanger): Est-ce qu'il y a
d'autres interventions concernant les remarques préliminaires? Avant
d'appeler l'article 1, je...
M. Rochefort: M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Gouin.
M. Rochefort: Vous vous souviendrez sûrement que...
Le Président (M. Bélanger): Vous m'enlevez les mots
de la bouche.
M. Rochefort: ...non seulement je vous ai donné un
préavis, mais que j'ai même déposé une motion.
Le Président (M. Bélanger): Vous m'enlevez les mots
de la bouche, M, le député de Gouin.
M. Rochefort: Excusez-moi, M. le Président, je ne voulais
pas vous enlever vos prérogatives.
Le Président (M. Bélanger): J'y arrivais à
l'instant même. Il y a effectivement une motion de sous-amendement...
M. Rochefort: Non, d'amendement.
Motion proposant la tenue de
consultations particulières avec
l'Association des hôpitaux du
Québec
Le Président (M. Bélanger): D'amendement,
excusez-moi. Cette motion se lit comme suit: "Motion pour tenir des
consultations particulières. Que la commission tienne, avant
d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 142, Loi
modifiant de
nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux,
des consultations particulières quant à tous les articles dudit
projet et qu'à cette fin elle entende l'Association des hôpitaux
du Québec." C'est une motion proposée par le député
de Gouin. M. le député de Gouin, vous avez trente minutes pour
présenter votre motion.
Est-ce que la commission souhaite suspendre ses travaux quelques
instants, histoire de s'aérer? Nous suspendons la séance pour
cinq minutes. A la reprise, la parole sera donnée au
député de Gouin pour trente minutes.
(Suspension de la séance à 21 h 45)
(Reprise à 21 h 53)
Le Président (M. Bélanger): A l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous allons reprendre les travaux de la commission et nous en sommes...
A l'ordre, s'il vous plaît! Merci. Nous en étions à la
motion pour tenir des consultations particulières - je l'ai lue tout
à l'heure, je ne la relirai donc pas - et nous demandons au
député de Gouin de faire une intervention sur le sujet. Vous avez
trente minutes pour débattre votre motion, M. le
député.
Une voix: Ce n'est pas beaucoup.
M. Rochefort: Est-ce que je dois comprendre, M. le
Président, que le député de Fabre propose que j'aie
plutôt 60 minutes pour faire mon intervention?
Le Président (M. Bélanger): Quand il sera
président, il fera ses propositions.
M. Jacques Rochefort
M. Rochefort: II a présidé ce soir un peu. M. le
Président, j'ai déposé la motion qui vise à
permettre aux membres de la commission des affaires sociales de recevoir un
certain nombre de groupes en consultations particulières, ici, en
commission parlementaire, avant que nous n'entreprenions l'étude article
par article du projet de loi 142.
M. le Président, comme on a eu l'occasion de le dire, on a devant
nous un projet de loi qui a été déposé à la
dernière minute. La ministre a beau nous dire: Oui, mais c'était
dans mes promesses électorales, oui, j'en avais parlé pendant la
campagne électorale, j'en avais fait état dans un ou deux
discours après le 2 décembre 1985, dans le discours d'ouverture
aussi... C'est le discours où on ne devait pas faire de parlementarisme
la nuit, ce qu'on a fait pour le projet de loi 142 dans le même discours
d'ouverture, me disiez-vous; je me souviens bien de ce discours. Mais, tout le
monde au Québec, M. le Président, est d'avis qu'il s'agit d'un
projet de loi qui, comme contenu législatif... Parce qu'un discours,
c'est une chose; une loi, c'en est une autre, et on en a une bonne illustration
dans le cas qui nous occupe présentement: on nous tient un discours x et
on nous dépose un projet de loi y.
Donc, ce projet de loi a été déposé à
la dernière minute, le 13 novembre, de façon
précipitée, improvisée, comme je le disais, sans que, en
aucune façon, on n'ait associé l'ensemble ou un certain nombre
des principaux intervenants du réseau de la santé et des services
sociaux. Il a donc été élaboré sans consultation,
sans concertation et sans associer les principaux intervenants. L'objectif de
la motion que je présente ce soir a effectivement pour but de corriger
cette erreur de procédure, de processus d'étude d'un tel projet
de loi, et je veux rappeler, M. le Président, justement à la
ministre de la Santé et des Services sociaux qui nous a cité deux
fois ce soir le projet de loi 27, que, d'une part, le projet de loi 27,
étant donné, justement, qu'il avait été
déposé tard dans la session parlementaire, avait
été l'objet d'une commission parlementaire qui a duré
plusieurs jours au salon rouge, qui a duré - je le répète
- plusieurs jours au salon rouge et au cours de laquelle nous avons entendu
l'ensemble des intervenants du réseau de la santé et des services
sociaux. Cela avait permis d'éclairer, non seulement le gouvernement,
mais l'ensemble des membres de la commission parlementaire, de bonifier le
projet de loi en apportant des amendements et, dois-je rappeler à la
ministre de la Santé et des Services sociaux, qui était è
l'époque porte-parole de sa formation dans le secteur de la santé
et des services sociaux, que cela lui avait permis de changer son vote entre
deux étapes législatives parce que, non seulement la
participation des groupes, dans le cadre de l'étude du projet de loi,
mais les bonifications qui ont suivi les auditions des différents
groupes représentant les associations du réseau de la
santé et des services sociaux ont fait en sorte de convaincre la
ministre de voter pour le projet de loi.
Lorsqu'elle nous dit qu'elle a accepté de siéger
jusqu'à trois heures du matin, c'est parce qu'elle était d'accord
avec le projet de loi, qu'elle en appuyait le contenu, les principes... M. le
Président, je vois la ministre rire. J'imagine que, lorsqu'elle vote
pour, c'est parce qu'elle est d'accord. Il n'y a jamais personne qui l'a
obligée è voter pour, è ma connaissance. Si elle regrette
son vote, M. le Président, je ne sais pas s'il y a une procédure
qui lui permette de revenir à cette étape législative,
mais, sauf erreur, jusqu'à preuve du contraire, jusqu'à
nouvel
ordre, que voulez-vous, la ministre a voté pour en
troisième lecture avec sa formation politique. Cela veut donc dire
qu'elle était d'accord avec le projet de loi.
Et cela, c'était parce qu'on avait entendu des groupes en
commission parlementaire, des groupes qui étaient venus compléter
la connaissance qu'avaient les députés de ces questions, des
groupes qui nous avaient permis d'identifier des trous dans le projet de loi,
qui nous avaient permis de mieux connaître la portée réelle
d'un certain nombre de dispositions du projet de loi et qui, par la suite,
avaient permis aux membres de la commission parlementaire de jouer
véritablement leur rôle de législateur et» donc,
d'apporter des amendements au projet de loi. C'est l'histoire de la loi 27 que
je voulais reprendre pour le bénéfice de la ministre qui, non
seulement, semble-t-il, avait oublié qu'il y avait eu une commission
parlementaire, mais elle avait oublié qu'elle avait voté pour, ce
qui justifiait son acceptation de travailler, à quelques reprises,
jusqu'à deux ou trois heures du matin.
M. le Président, la ministre nous dit: Non, non, cela va bien le
projet de loi, les groupes ne sont pas si opposés que cela. Il n'y en a
pas tant que cela, contrairement à ce que le député de
Gouin affirme, qui s'opposent à mon projet de loi. Alors, M. le
Président, raison de plus pour tenir une commission parlementaire. On
pourra les dénombrer ces groupes parce qu'il semble que là aussi
la ministre a de la difficulté à additionner les groupes les uns
aux autres. Non seulement il y a tous les groupes qu'on connaît et qu'on
connaissait jusqu'à ce matin qui s'opposaient à l'adoption du
projet 142, mais, ce matin, un nouveau groupe s'est ajouté, la
Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec,
qui a demandé rien de moins que le retrait du projet de loi 142. Quand
on sait que cette centrale syndicale est présente dans plusieurs
établissements du réseau de la santé et des services
sociaux à différents niveaux, j'imagine qu'ils savent un peu de
quoi ils parlent.
Et, M. le Président, je voudrais citer un nouveau groupe. Ils se
suivent les uns à la suite des autres. Le communiqué de presse
est émis le 10 décembre 1986 - c'est aujourd'hui - la FTQ;
c'était vers 10 h 40 ce matin. Et maintenant un nouveau groupe, à
16 h 28 minutes 17 secondes, cet après-midi. Il s'agit, dans le cas qui
nous occupe, de la Fédération des syndicats professionnels des
infirmiers et infirmières du Québec qui dit non au projet de loi
142. Puisqu'il semble que la ministre n'en ait pas pris connaissance, M. le
Président, vous me permettrez de rapporter un certain nombre
d'affirmations faites dans la prise de position du syndicat professionnel des
infirmières et des infirmiers du Québec. (22 heures)
Et là, j'imagine, M. le Président, que la ministre ne
pourra pas prétendre qu'il s'agit du monde qui ne connaît pas ce
dont il parle, ce sont les hommes et les femmes qui donnent des services de
santé dans les établissements de santé et de services
sociaux aux Québécois et aux Québécoises qui en ont
besoin, dans les différentes langues, en français, en anglais et
dans les langues des différentes minorités culturelles. Ils sont
présents dans tous les établissements ou presque du réseau
de la santé et des services sociaux. Alors, M. le Président,
j'imagine que la ministre doit, au moins, reconnaître que ces gens sont
des professionnels de la santé compétents, efficaces et humains,
et qui connaissent leur métier. À quelques reprises, j'ai entendu
- et j'en étais heureux - la ministre de la Santé et des Services
sociaux souligner l'appréciation qu'elle faisait du travail des
infirmières et des infirmiers du Québec. On sait qu'elle est
présentement en négociation avec eux et qu'elle a même fait
une certaine ouverture dans les dernières semaines pour montrer sa
réceptivité et sa satisfaction du travail qu'ils font dans le
réseau de la santé et des services sociaux.
Or, que nous disent-ils? Je les cite, M. le Président, au texte:
"Avec son projet de loi 142, le gouvernement libéral continue -continue
- d'attaquer l'organisation des services de santé et l'ensemble des
travailleuses et des travailleurs de la santé." Je poursuis ma citation,
M. le Président: "Pour la Fédération des SPIIQ, c'est le
temps que cela cesse. Alors que l'accessibilité et la qualité des
services de santé sont en chute libre et décriés par tous,
Mme Lavoie-Roux et sa complice, Mme Bacon, se lancent tout à coup dans
une amélioration de l'accessibilité des services de santé
et ce, pour les Québécoises et les Québécois
anglophones. Quelle belle façon de faire dévier un débat"
pour la Fédération des SPIIQ. "C'est l'ensemble des
Québécois et des Québécoises qui sont
confrontés avec l'impossibilité de recevoir des soins de
qualité. Cette réalité n'est aucunement liée avec
la loi 101, d'autant plus que nous sommes à même de constater que
les qens qui veulent se faire traiter en anglais peuvent le faire facilement
sans être obligés d'aller en Ontario", disent-ils; toujours ma
citation au texte. D'ajouter la présidente, Hélène
Pelletier: "L'adoption du projet de loi 142 ne fait que soulever de multiples
interrogations. Est-ce l'amorce d'un réseau parallèle de soins de
santé au Québec, comme c'est le cas dans l'éducation?
Comment se traduira dans les faits l'accessibilité à toute
personne d'expression anglaise qui réclamera des services dans sa langue
maternelle? Quels moyens ou budgets utiliseront les conseils régionaux
de la santé et des services sociaux pour mettre en
application ces programmes d'accessibilité? Quelle portée
aura cette législation sur la pénurie d'infirmières et
d'infirmiers dans certaines régions'? Les employeurs verront-ils leur
pouvoir discrétionnaire accru pour tout ce qui concerne l'embauche, les
mutations de personnel et les mises à pied? Non, la
Fédération des SPIIQ ne cautionnera jamais l'adoption d'une loi
cousue d'ambiguïtés et d'équivoques". Je
répète, M. le Président, que ce n'est pas le
député de Gouin qui parle. Je cite mot à mot la
Fédération des syndicats professionnels d'infirmières et
d'infirmiers du Québec.
Poursuivons: "Par la loi 142, le gouvernement Bourassa bafoue le
principe du français comme langue de travail au Québec et cela,
quoi qu'en dise Mme Bacon. De l'avis de la fédération, rien ne
peut justifier l'adoption de cette loi au moment où le Conseil de la
langue française reconnaît qu'il reste beaucoup de progrès
à accomplir avant que le français soit vraiment la langue normale
et habituelle des activités économiques et professionnelles des
Québécois. En voulant adopter - et je cite toujours - à la
sauvette, sans débat public, une loi qui a des répercussions
considérables pour le peuple québécois et les
travailleuses et les travailleurs de la santé, le gouvernement
libéral n'a d'autre objectif que celui de remplir des promesses
électorales. C'est pourquoi la Fédération des syndicats
professionnels d'infirmières et d'infirmiers du Québec, qui
regroupe 18 000 infirmières et infirmiers, exige le retrait du projet de
loi 142."
M. le Président, tous les jours, des groupes s'ajoutent à
cette liste. Or, nous souhaitons donc que la ministre de la Santé et des
Services sociaux accepte de confronter ses opinions à celles de ces
groupes. Elle croit avoir raison, elle croit que c'est elle qui a la
vérité, qui a le pas dans le dossier qui nous occupe: un peu de
courage, qu'elle accepte de confronter ses opinions aux opinions des hommes et
des femmes à qui, hier, aujourd'hui et demain, elle demandait et
demandera de l'aider à bien servir les Québécois dans le
domaine des services de santé et des services sociaux. On ne peut, d'une
part, dire: Non, non, vous ne connaissez pas cela, je trouve que vous
n'êtes pas très compétents dans la matière et vos
opinions ne m'intéressent pas du tout, et de l'autre, en même
temps, demander la collaboration, le "partenariat", l'ouverture d'esprit, une
contribution large, profonde, efficace et dynamique aux mêmes gens. Quand
on est ministre, on doit être responsable et les respecter en tout temps,
y compris lorsqu'ils ne sont pas d'accord avec nous. C'est cela, aussi, le
respect des opinions des autres. C'est cela, aussi, assumer ses
responsabilités d'État et c'est cela, aussi, être
tolérant et démocrate. C'est ce que notre motion demande à
la ministre de la Santé et des Services sociaux.
Dans le cas de la première association que je propose de faire
comparaître ici, l'Association des hôpitaux du Québec, je
pense que tout le monde reconnaît l'importance de cette association, une
association crédible, une association qui regroupe l'ensemble des
hôpitaux du Québec, des milieux francophones comme des milieux
anglophones, et qui a "commis" un mémoire important. C'est, d'ailleurs,
le premier groupe à avoir produit un mémoire dans le dossier qui
nous occupe depuis le dépôt du projet de loi. Que nous disent-ils,
finalement? Ils nous disent et je cite un certain nombre de passages de leur
mémoire: "De plus, tous les centres hospitaliers ont de longue date
fourni des services accessibles aux bénéficiaires d'expression
anglaise, compte tenu de leurs ressources et de leur organisation,
conformément à l'article 4 de la Loi sur les services de
santé et les services sociaux, de même que sans discrimination,
conformément à l'article 5 de cette loi." Ils poursuivent:
"Cependant, l'Association des hôpitaux du Québec est d'avis que le
choix des moyens proposés par les dispositions du projet de loi 142 aux
articles 1, 2, 3 et 9 demeure discutable. Nous soutenons - poursuivent-ils -
que l'insertion de l'article 5.1 dans la Loi sur les services de santé
et les services sociaux porte atteinte à l'économie
générale de la loi et n'ajoute rien de plus à ce que
consacre l'effet combiné des articles 4 et 5 de la loi."
Ils poursuivent toujours et je cite au texte, M. le Président:
"D'ailleurs, une telle insertion risque de saper la portée parapluie de
la Charte de la langue française et vient mitiger la portée
particulière de son application aux établissements de services de
santé. La Loi sur les services de santé et les services sociaux
n'a pas pour objet de supporter la déclaration des droits fondamentaux
généraux, surtout si on les retrouve déjà
suffisamment énoncés et protégés dans d'autres
lois, - je poursuis la citation - comme c'est le cas de l'accès à
des services dans une autre langue que la langue française, par
application de la Charte de la langue française. Il s'agirait la d'une
insertion qui devient inédite dans l'économie du droit
québécois et qui risque de placer les centres hospitaliers dans
une position délicate."
Ils poursuivent leur raisonnement, M. le Président, et ils
concluent en disant: "Pour toutes ces considérations, l'Association des
hôpitaux du Québec se considère justifiée de
demander le retrait des articles 2, 3 et 9 du projet de loi 142." On sait qu'en
plus, M. le Président, ils demandent aussi le retrait, un peu plus loin,
des articles 4, 5, 7 et 8 du projet de loi. Ils demandent des amendements
qui changent du tout au tout la portée et le sens de l'article 6
du projet de loi. Ce qu'ils disent, donc, c'est: Recommencez donc vos devoirs
et retirez ce projet de loi qui ne nous va pas du tout, sous aucun plan et par
rapport à aucun des principes qu'on y retrouve.
Évidemment, la ministre nous dit: Oui, mais ils appuient les
objectifs du projet de loi. Lorsqu'ils disent: "Pour toutes ces
considérations, l'Association des hôpitaux du Québec se
considère justifiée de demander le retrait des articles 2, 3 et 9
du projet de loi 142," ils ajoutent: "Néanmoins, elle -l'Association des
hôpitaux du Québec -réitère qu'elle est d'accord
avec l'objectif d'assurer l'accessibilité des services de santé
aux personnes d'expression anglaise."
Ce n'est écrit nulle part qu'ils acceptent les principes contenus
au projet de loi 142, contrairement à ce que la ministre a
affirmé à quelques reprises en Chambre et ici en commission. Ils
sont d'accord avec l'objectif. Mais oui, ils sont d'accord comme tout le monde
est d'accord avec l'objectif, comme nous sommes d'accord avec l'objectif
puisque c'est ce qui se fait et c'est ce que nous avons favorisé et ce
que nous souhaitons qui se poursuive dans le réseau de la santé
et des services sociaux, mais non pas en prenant de façon aussi
cavalière, malhabile, précipitée et improvisée le
monde de la santé et des services sociaux.
La ministre nous dit: Oui, mais par la suite, l'Association des
hôpitaux du Québec m'a envoyé une lettre. C'est juste.
L'Association des hôpitaux du Québec a envoyé une lettre.
Cette lettre, d'une part, M. le Président, devons-nous le
reconnaître tous et toutes, avait pour but de rectifier ce que je
reconnais être un titre, qui ne correspondait pas au contenu de
l'article, qui coiffait l'article de M. Gilles Lesage dans LeDevoir.
Il était justifié et pertinent que l'Association des
hôpitaux du Québec souhaite que la portée et le sens de ce
titre soient corrigés parce qu'il ne correspondait pas au contenu du
mémoire qu'elle a présenté.
Mais je répète, M. le Président, ce qu'ils disent.
Ils concluent leur lettre en disant: "Ce qui fait l'objet de nos
préoccupations, c'est que le projet de loi 142 nous semble créer
un certain nombre d'imbroglios juridiques - et ils se citent eux-mêmes -
que les choix des moyens proposés par certaines de ses dispositions nous
semblent discutables. Ils réaffirment qu'ils sont d'accord avec
l'objectif...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Gouin, est-ce que la porte ouverte vous incommode?
C'était pour faire un peu d'air, mais on peut la fermer.
M. Rochefort: D'accord, M. le Président, ce n'était
pas la porte ouverte comme les gens qui passaient bruyamment dans le corridor,
mais vous avez raison, c'est bon d'avoir de l'air ici, en commission, et encore
plus autour d'un débat comme celui qui nous occupe.
Or, donc, l'Association des hôpitaux a
réitéré sa position. La ministre nous a dit tantôt:
Oui, mais elle n'a pas demandé de venir en commission. Oui, soit! C'est
évident qu'elle n'a pas demandé de venir en commission, elle a
demandé de retirer le projet de loi. Elle n'a pas demandé de
tenir une commission parlementaire sur le projet de loi; elle a dit: Le projet
de loi, on ne veut plus qu'il existe. Or, ce sont des gens cohérents,
logiques, rationnels, intelligents. Quand on dit qu'on ne veut pas que quelque
chose existe, on ne dit pas: On veut en même temps en discuter. Mais,
puisque la ministre n'a pas accepté, n'a pas reconnu les
représentations de l'Association des hôpitaux du Québec de
retirer le projet de loi, nous, du Parti québécois, nous
souhaitons que les gens de l'Association des hôpitaux du Québec
viennent ici en commission parlementaire. Nous croyons que nous pouvons
être mieux éclairés sur ce qui se fait à l'heure
actuelle et sur les évaluations quant à la portée
réelle de la loi 142 telle que déposée par la ministre de
façon que nous puissions bien connaître les impacts réels
et l'ampleur des conséquences que pourrait générer
l'application du projet de loi 142.
Nous souhaiterions aussi, M. le Président, qu'ils soient parmi
nous en commission parlementaire parce qu'il serait intéressant de voir
comment la ministre peut défendre publiquement son projet de loi devant
ses partenaires d'hier, d'aujourd'hui et de demain, du réseau de la
santé et des services sociaux. La dernière fois où la
ministre a défendu son projet de loi devant ses partenaires, je dois
dire que le succès a été mitigé au point qu'on ne
puisse pas appeler cela un succès parce que la dernière fois
où la ministre a défendu son projet de loi devant des partenaires
qui sont les siens, le résultat, c'est que 48 heures après ils
nous ont dit: Arrêtez tout, cela n'a pas de bon sens, on n'a pas besoin
d'une loi pour faire cela, on ne veut pas d'une loi pour faire cela et on
considère que c'est un jugement d'incompétence et
d'insatisfaction que vous portez sur ce que nous avons fait, alors qu'on a
accordé des services en nombre considérable, de grande
qualité et humanitaires non seulement à la communauté
anglophone, mais a l'ensemble des communautés culturelles et ethniques
du Québec. On pense qu'on peut poursuivre notre travail à partir
des mêmes bases qui nous ont permis d'atteindre des résultats
aussi substantiels et c'est notre fierté, à eux comme à
nous de l'Opposition, d'avoir réussi à faire tout cela
jusqu'à ce jour.
Or, M. le Président, il est absolument
essentiel que les groupes puissent venir ici confronter leur position
à celle de la ministre parce que, je le répète, la seule
fois où la ministre l'a fait, cela a donné un mauvais
résultat. Les groupes ont dit: Non, on n'accepte pas ses arguments, on
n'accepte pas la défense que la ministre a faite du projet de loi et on
considère cela tellement peu convaincant qu'elle ne nous a pas
convaincus du tout. Ce dont elle nous a convaincus, c'est de l'urgence de
retirer et d'interrompre l'étude du projet de loi et de l'absolue
non-nécessité d'avoir une loi en la matière. Là
aussi ils ont dit: Oui, on est d'accord avec les objectifs, comme nous, et je
comprends qu'ils soient d'accord avec les objectifs, c'est ce qu'ils font
depuis longtemps, c'est ce qu'ils souhaitent continuer à faire. Mais la
ministre n'a pas répondu à leur invitation d'aller s'asseoir avec
eux pour discuter de ce qui restait à faire et de la façon dont
on pourrait compléter le travail qui reste à faire pour en
arriver à ce que les problèmes qui peuvent subsister soient
réglés.
Alors, M. le Président, ce sont pour nous des justifications
è la participation de différents groupes à notre
commission parlementaire. C'est la justification de la comparution de
l'Association des hôpitaux du Québec parce qu'elle est un
partenaire de premier plan de la ministre de la Santé et des Services
sociaux. C'est une association qui a un intérêt particulier pour
nous, non seulement à cause des positions prises jusqu'à ce jour
dans ce dossier, mais parce que l'Association des hôpitaux du
Québec regroupe aussi les centres hospitaliers de courte et de longue
durée du secteur anglophone du Québec, que ce soit le Royal
Victoria, le Montreal General, le Montreal Children's, le Lakeshore, le Douglas
et les autres. (22 h 15)
Ces gens savent de quoi ils parlent, peuvent illustrer la nature, la
quantité et la diversité des services qu'ils offrent à la
communauté anglophone, aux communautés culturelles et ethniques
du Québec. Ils peuvent venir en témoigner pour peut-être
convaincre la ministre que, oui, ils ont raison de prétendre qu'ils font
leur boulot, en égard à ces préoccupations, à ces
objectifs. Qui mieux qu'eux, dans le secteur hospitalier, pour venir, ici, en
commission parlementaire tenter une nouvelle fois de sensibiliser la ministre
aux conséquences de l'application d'un tel projet de loi, à la
portée réelle des articles du projet de loi? Qui mieux qu'eux qui
connaissent bien le réseau, qui étaient là avant la
ministre qui sont là pendant qu'elle est là et qui seront
là après que la ministre aura quitté le ministère
de la Santé et des Services sociaux?
Ces gens connaissent non seulement ce qui se passe aujourd'hui, mais
savent d'où cela émane et vers quoi, normalement, tout cela
devrait tendre. Ils connaissent les impacts financiers, ils connaissent les
impacts d'allocation des ressources, ils connaissent les impacts d'organisation
des ressources qu'amènera l'adoption d'une telle loi. Ils ont des
craintes, des craintes justifiées quant à nous, et nous
souhaitons, oui, qu'ils viennent éclairer tous les membres de la
commission. Que tous les membres de la commission puissent confronter leurs
opinions aux opinions de l'Association des hôpitaux du Québec,
puissent débattre les cas qu'ils ont peut-être en tête pour
justifier le projet de loi 142. On verra quelles sont les réponses que
nous fera l'Association des hôpitaux du Québec.
M. le Président, dois-je ajouter non seulement que cette
présence de l'Association des hôpitaux du Québec à
la table des témoins de la commission parlementaire pourrait bien
améliorer la qualité des discussions entourant les articles
à portée linguistique du projet de loi 142, mais aussi, on
pourrait peut-être discuter avec elle des autres dispositions, parce que
la loi 142, c'est un projet de loi omnibus. Là aussi, il y a un message
inaugural du mois de décembre qui n'a pas fonctionné, une autre
promesse rouge qui n'a pas été respectée. On nous avait
dit que c'était fini les projets de loi omnibus, on se retrouve avec un
projet de loi qui n'est pas seulement un double omnibus, c'est un triple
omnibus.
Il y a trois principes, trois types de dispositions différentes
les unes des autres dans le projet de loi. Il y en a une qui traite du Conseil
du trésor et l'Association des hôpitaux du Québec,
évidemment, s'y oppose. Jusqu'à maintenant et jusqu'à
l'adoption du projet de loi 142, c'est-à-dire le plus tard possible, les
établissements du réseau de la santé et des services
sociaux qui voulaient acquérir un autre immeuble, aliéner un
immeuble qui leur appartenait, procéder à certains
aménagements, devaient obtenir l'accord du Conseil des ministres dans
son ensemble, du qouvernement du Québec. Donc, pour ce faire, ils
devaient sensibiliser leur porte-parole qui est la ministre de la Santé
et des Services sociaux, et cette même ministre devait, une fois qu'elle
était d'accord, convaincue, être leur marraine à la table
du Conseil des ministres et saisir cette opportunité de sensibiliser
l'ensemble des membres du Conseil des ministres au cas qui nous occupe, avec sa
portée financière, mais aussi d'amélioration de la
qualité des services que pouvait amener dans certains cas une
décision de dire oui ou non à une volonté d'aliéner
ou d'acquérir un immeuble, par exemple. Là, ce qui va se faire,
c'est que ce ne sera plus la ministre de la Santé et des Services
sociaux qui va porter le dossier en leur nom et ce ne sera plus l'ensemble des
membres du
Conseil des ministres qui aura en à disposer, mais le Conseil du
trésor.
M. le Président, l'Association des hôpitaux du
Québec a des représentations très claires dans le
mémoire qu'elle a présenté à la ministre, mais
nous, nous ajoutons que c'est le point final à la mise en tutelle de la
ministre de la Santé et des Services sociaux par le président du
Conseil du trésor. C'est le Conseil du trésor qui va
décider, avec ou sans l'avis de la ministre, encore moins avec la
nécessité d'obtenir son accord. Il va communiquer directement
avec les établissements du réseau, sans que la ministre sache ce
qui se passe dans le réseau, sans qu'elle puisse apporter un
éclairage sur la dimension services de santé et services sociaux
d'une telle décision.
Quand on sait les positions exprimées par le président du
Conseil du trésor sur les services de santé et services sociaux
au Québec... On a vu encore récemment un autre membre du Conseil
du trésor y aller de déclarations à
l'emporte-pièce. Le ministre délégué aux
Pêcheries a expliqué qu'il fallait mettre fin, couper dans la
demande, qu'il fallait freiner la demande dans les services de santé.
Quand on pense que ce sont ces gens qui vont prendre des décisions qui
affecteront les services de santé et les services sociaux sans
même que la ministre de la Santé et des Services sociaux soit
associée aux réflexions, aux discussions et aux décisions
qui seront prises, nous disons: Là, c'est trop. Cela s'appelle mettre en
tutelle la ministre de la Santé et des Services sociaux. Cela s'appelle
d'autant plus mettre en tutelle la ministre de la Santé et des Services
sociaux que ce qui est prévu dans le projet de loi 142, c'est que, si
jamais le président du Conseil du trésor est de bonne humeur un
matin et que la ministre a fait assez de coupures pour le rendre joyeux pour
une longue période - cela s'en vient, semble-t-il, c'est pas mal bien
amorcé - peut-être que le président du Conseil du
trésor daignera lui confier une partie des responsabilités qu'il
assumera désormais en lieu et place non seulement de la ministre, mais
du gouvernement dans son ensemble. Quelle grandeur d'esprit, quelle ouverture
le Conseil du trésor pourrait avoir à partir des dispositions de
ce projet de loil
M. le Président, il faut absolument que la commission
parlementaire, dans son ensemble, puisse entendre l'Association des
hôpitaux du Québec... Je vous remercie, M. le Président, de
me signifier qu'il me reste deux minutes. Je crois que mon collègue de
Taillon va souhaiter prendre la parole après moi sur ma motion.
M. le Président, oui, il serait souhaitable que l'Association des
hôpitaux du Québec puisse participer à nos débats
non seulement sur la portée des dispositions linguistiques du projet de
loi 142, mais sur les dispositions, disons donc, administratives qui concernent
le réseau de la santé et des services sociaux qui sont comprises
dans le projet de loi 142 et aussi sur les questions relatives aux conflits
d'intérêts. Là aussi, on pense que, si la ministre ne peut
pas nous éclairer sur ce qu'elle souhaite vraiment -cela fait trois ou
quatre fois qu'elle bouge et qu'elle joue dans cela - peut-être que
l'Association des hôpitaux du Québec va nous décrire ce qui
se passe dans le réseau de la santé et des services sociaux et ce
qui nécessite des dispositions additionnelles en matière de
conflits d'intérêts.
Voilà, M. le Président, les raisons qui justifient, pour
nous, la tenue d'une commission parlementaire avec, pour débuter, la
participation de l'Association des hôpitaux du Québec. C'est ce
que nous souhaitons et c'est ce que je suis convaincu que la ministre acceptera
parce qu'elle est démocrate, tolérante, courageuse et qu'elle est
respectueuse de ses partenaires du réseau de la santé et des
services sociaux. C'est à ce prix que nous pourrons vérifier si
les qualificatifs que je viens d'employer sont appropriés dans le cas de
la ministre de la Santé et des Services sociaux. Sa décision de
refuser leur participation à notre commission illustrerait, quant
à moi, une fois de plus, qu'elle n'a pas ces qualités. Je pense
qu'on lui fournirait une occasion, une fois, de manifester sa
disponibilité et ses dispositions personnelles eu égard à
l'ensemble des questions auxquelles elle est confrontée. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Merci. En vertu de la
règle de l'alternance, du côté ministériel, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Reed Scowen
M. Scowen: M. le Président, c'est évident que ce
soir, le 10 décembre à 22 h 25, nous sommes devant un
"filibuster" classique du projet de loi 142. L'Opposition propose d'inviter
pour consultations publiques des personnes qui n'ont même pas
demandé d'être consultées, en l'occurrence, l'Association
des hôpitaux du Québec qui a exprimé tout ce qu'elle avait
è exprimer par la voie de deux lettres dans lesquelles elle s'est
déclarée d'accord avec les objectifs du projet de loi.
Le député de Gouin a également soulevé le
cas de la Fédération des infirmières qui, elles aussi,
n'ont pas demandé à être entendues. Alors, personne n'a
demandé d'être entendu. Donc, il est évident que
l'Opposition ne veut pas étudier article par article le projet de loi,
essayer de le bonifier, agir d'une façon responsable. C'est
évident que la déclaration de M. Jean-Pierre Proulx, ce matin,
dans Le Devoir,
disant que l'opposition du Parti québécois à la loi
142 sera difficile a justifier était trop nuancée. Non, ce
n'était pas vrai. Il n'est pas allé assez loin. C'est une
opposition qui est impossible à justifier. C'est devenu
évident.
C'est bizarre, je le répète, c'est bizarre, mais il y a un
an exactement, après avoir écouté ces mêmes
associations et personnes de la communauté anglaise, après avoir
étudié en profondeur le dossier, on a décidé de
faire une déclaration solennelle disant que le gouvernement du
Québec était prêt à s'engager à inscrire dans
ses lois fondamentales le droit de la minorité anglophone de recevoir
dans sa langue les soins de santé et les services sociaux. Le premier
ministre de l'époque, M. Johnson, a détaché, par la suite,
cet engagement pour le tourner en engagement électoral devant la
population anglophone. Aujourd'hui, la seule chose qu'il peut faire pour
défendre son revirement total, c'est de dire: Écoutez, oui, on
comprend que c'est un besoin fondamental, mais nous préférons
l'inscrire dans une constitution québécoise plutôt que dans
une loi québécoise, une nuance qui est totalement impossible
à comprendre.
M. le Président, la motion qui est devant nous propose que des
consultations particulières soient faites avec l'Association des
hôpitaux du Québec. Je répète que c'est une
association qui n'a même pas demandé d'être entendue. Ce
n'est pas certain qu'ils vont écouter notre invitation et beaucoup moins
certain qu'ils vont accepter de venir.
Cependant, j'imagine que, si le Parti québécois,
l'Opposition croit que c'est une bonne idée d'inviter les gens qui n'ont
pas demandé d'être invités, ce qui est bon pour
l'Association des hôpitaux du Québec est également bon pour
la Fédération des infirmières et toute autre organisation
qui veut se faire entendre. De plus, je constate qu'ils proposent des
consultations particulières sur le projet de loi, mais, tout au long du
débat en deuxième lecture, ils ont répété
que le débat devait se faire d'une façon beaucoup plus large que
le projet de loi 142 qui a des aspects généraux qui sont aussi
importants que les aspects particuliers. Donc, il me semble que, si une
consultation avec l'Association des hôpitaux du Québec est
valable, une consultation avec d'autres personnes est aussi valable. Si une
consultation particulière est valable, une consultation
générale est valable. Je ne comprends pas pourquoi ils veulent la
limiter à une seule association.
J'aimerais proposer un amendement à la motion qui se lirait comme
suit: Après le mot "consultations", à la quatrième ligne,
je propose qu'on ajoute les mots "générales et/ou" et,
après les mots "hôpitaux du Québec", qu'on ajoute les mots
"et/ou toute autre personne physique ou morale qui veut se faire entendre". En
conséquence, la motion amendée va se lire comme suit: "Que la
commission tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée
du projet de loi 142, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de
santé et les services sociaux, des consultations générales
et/ou particulières quant à tous les articles dudit projet et
qu'à cette fin elle entende l'Association des hôpitaux du
Québec et/ou toute autre personne physique ou morale qui veut se faire
entendre." Est-ce que c'est recevable?
Le Président (M. Bélanger): Est-ce que je pourrais
avoir votre texte écrit, M. le député? Un instant. Si vous
le permettez, je vais juste...
M. Rochefort: Pour que l'on se comprenne, avant que vous
disposiez de la recevabilité de l'amendement, je souhaiterais, moi
aussi, avoir un texte...
Le Président (M. Bélanger): Non, j'ai l'intention
d'entendre les deux côtés.
M. Rochefort: ...et pouvoir le consulter pour faire valoir par la
suite mon point de vue.
Le Président (M. Bélanger): Si vous le permettez,
on va suspendre les travaux pour quelques minutes, le temps que je me consulte
et que je puisse...
M, Rochefort: M. le Président.
Le Président (M, Bélanger): M. le
député de Gouin, sur une question de règlement.
M. Rochefort: ...je souhaite effectivement que nous suspendions.
Vous exprimez l'intention de vous consulter, ce avec quoi je suis pleinement
d'accord. Est-ce qu'il serait possible qu'en même temps on nous
dépose un texte par écrit de l'amendement pour qu'on puisse, nous
aussi, en prendre connaissance? Je vous répète, M. le
Président, que je souhaiterai plaider sur la recevabilité de
l'amendement qui, quant à moi, n'est pas recevable.
Le Président (M. Bélanger): Avant de finaliser ma
décision, j'entendrai tous les gens qui voudront se faire entendre sur
la recevabilité et je déciderai par la suite. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce, seriez-vous d'accord qu'on
dise "l'Association des hôpitaux et toute autre personne morale qui veut
se faire entendre"? Parce que "et/ou", c'est un anglicisme. Le "et", en
français, comprend le "et/ou".
M. Scowen: Ah! Je m'excuse.
Le Président (M. Bélanger); Absolument sûr.
Fiche linguistique de l'Université de Montréal.
(Suspension de la séance à 22 h 33)
(Reprise à 22 h 36)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Je reconnais le député de Gouin qui a dix minutes pour
plaider sur le fond du sous-amendement. M. le député de
Gouin.
Des voix: Sur la recevabilité.
Le Président (M. Bélanger): Sur la
recevabilité, oui.
M. Rochefort: C'est moi, M. le Président. Je pense qu'on
ne s'est pas compris.
Le Président (M. Bélanger): Sur la
recevabilité. C'est mon erreur. Je m'excuse.
M. Rochefort: M. le Président, vous me permettrez deux
secondes. Je prends connaissance pour la première fois du texte, tel que
l'a préparé votre secrétaire.
M. le Président, effectivement, à mon sens, il s'agit
là d'une motion qui est irrecevable.
M. Scowen: ...
M. Rochefort: Pardon? M. le Président, est-ce que le
député de Notre-Dame-de-Grâce veut plaider sur la
recevabilité avant moi?
Le Président (M. Bélanger): Le député
de Notre-Dame-de-Grâce sera reconnu après, en vertu de la
règle de l'alternance. Pour le moment, la parole appartient au
député de Gouin. Je vous enjoins donc de continuer votre
intervention, M. le député de Gouin.
M. Rochefort: M. le Président, quand le
député de Notre-Dame-de-Grâce aura la parole et qu'il
plaidera la recevabilité, j'imagine qu'il nous indiquera qu'il votera
pour sa propre motion. Cela nous intéressera d'entendre cela,
évidemment, au moment de sa présentation quant à la
recevabilité.
M. le Président, la motion du député de
Notre-Dame-de-Grâce est, à notre sens, irrecevable. D'une part, si
nous sommes ici, c'est pour remplir un mandat que nous a donné
l'Assemblée nationale tout entière qui est de procéder
à l'étude article par article du projet de loi. En
conséquence, M. le Président, les dispositions qu'on retrouve aux
articles 170 et suivants traitant de consultations générales ou
170 et suivants traitant de consultations particulières, il faut
rappeler que ces deux séries de dispositions sont dans le cadre de ce
qui se fait avant l'adoption du principe d'un projet de loi à
l'Assemblée nationale. Ce que notre règlement prévoit, une
fois l'adoption du principe du projet de loi à l'Assemblée
nationale, c'est l'étape qu'on appelle l'étude
détaillée en commission. Là, c'est aux articles 243 et
suivants qu'on nous dit comment l'étude détaillée en
commission peut se dérouler. D'aucune façon, il n'est fait
mention de possibilités de tenir des consultations
générales une fois le principe adopté et une fois que nous
avons reçu le mandat d'étudier article par article un projet de
loi qui doit se faire selon les dispositions des articles 243, 244, 245,
jusqu'à 251. Nulle part là on n'évoque la
possibilité de consultations générales. Mais le
législateur, qui ne parle pas pour ne rien dire, a parlé
exclusivement de consultations particulières.
D'autre part, M. le Président, je dois aussi souligner que la
motion du député de Notre-Dame-de-Grâce, si elle devait
être retenue, dénaturerait totalement ma motion parce que ma
motion n'a pas pour but de tenir une consultation générale,
ouverte à tous et qui devrait être réalisée selon
les dispositions des articles 166 à 169 qui disent qu'on doit mettre un
avis dans les journaux avec un délai de 30 jours pour produire un
mémoire, qu'on doit, par la suite, tenir une séance de travail de
la commission pour organiser nos travaux et qu'on doit, par la suite, donner un
préavis de sept jours aux groupes pour les convoquer ici à
l'Assemblée nationale. Si je comprends bien ce que le
député de Notre-Dame-de-Grâce nous propose, c'est de
reporter au printemps l'étude du projet de loi 142. C'est pour cette
raison que nous serons heureux d'entendre s'il s'engage à voter pour sa
motion si jamais elle devait être reçue.
Mais on sait, M. le Président, que vous ne pourrez la recevoir
parce que cette motion dénature ma motion, parce que cela a pour effet,
si on l'adoptait - on ne peut pas présumer qu'elle ne sera pas
adaptée par la commission - de reporter dans le temps l'étude du
projet de loi. Nous lui disons: Non, nous sommes d'accord pour
l'étudier, mais, avant de l'étudier, nous souhaitons entendre,
dans le cadre d'une consultation particulière - non pas
générale, mais particulière - de quelques jours, un
certain nombre de groupes où, là, on n'est pas obligé de
respecter le délai de 30 jours de production de mémoire et de
sept jours de convocation pour comparaître ici et tout cela. Donc, je dis
que la motion dénature totalement ma motion et qu'au fond c'est une
contre-proposition. Une fois qu'on aura disposé de ma motion, la motion
du député pourra être apportée dans un autre temps.
M. le Président, j'ajoute que le "et/ou" est
très important. Quand on propose des consultations
générales et/ou particulières, il n'y a rien dans le
règlement qui prévoit cela.
Le Président (M. Bélanger): Et/ou, c'est
anglais.
M. Rochefort: M. le Président, je m'excuse, ce qui est
écrit, c'est "générales et/ou particulières". Il
n'y a rien qui prévoit cela. Il y a ou des consultations
générales dans le règlement, ou des consultations
particulières. Il ne peut pas y avoir les deux en même temps et il
ne peut pas y avoir l'une a la place de l'autre. Je comprends qu'on essaie de
faire une pizza "all dressed", mais que voulez-vous? Il semble que notre
règlement n'ait pas prévu les menus complets. Notre
règlement a prévu des choses spécifiques les unes des
autres.
Or, je conclus en vous invitant à appliquer le règlement
comme vous le faites toujours et à juger irrecevable la motion du
député de Notre-Dame-de-Grâce qui, je dois le rappeler,
nous invite à reporter ce projet de loi qu'il caressait si
chèrement au printemps prochain, ce qui va à l'encontre des voeux
qu'il a exprimés à de multiples reprises, et nous serons heureux
d'entendre de sa bouche et souhaitons qu'à ses premières paroles
il nous indique, si jamais cette motion devait être débattue,
comment il votera lorsque l'appel du vote se fera.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce, sur la recevabilité
de la motion.
M. Scowen: M. le Président, il y a quelques
précisions qui s'imposent. Premièrement, je m'excuse
auprès des membres de la commission d'avoir rédigé le
texte de l'amendement en utilisant les mots "et/ou". Vous me dites que c'est un
anglicisme et que le mot "et" comprend les deux. Je vous demande de me
permettre de transposer cet anglicisme, parce que le fond de l'affaire, c'est
"et/ou". Si le mot français est "et"... C'est le sens clair de mon
objectif. J'espère qu'on ne fera pas un grand débat sur un point
comme celui-là.
M. Rochefort: M. le Président, sur cette question
précise, si le député de Notre-Dame-de-Grâce me le
permet et, vous, M. le Président, puisqu'il pose une question
précise, je dirai que, oui, nous reconnaissons que la motion du
député est tout aussi précipitée, improvisée
et mal rédigée que le projet de loi lui-même et qu'il
aurait pu prendre le temps, comme la ministre aurait dû le faire pour le
projet de loi...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
S'il vous plaît!
M. Rochefort: ...de bien rédiger sa motion, mais nous la
prenons telle qu'elle est rédigée et qu'il vive avec ses erreurs
de rédaction.
M, Jolivet: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Bélanger): On va laisser finir le
député de Notre-Dame-de-Grâce. Question de
règlement, M. le député de Laviolette.
M. Jolivet: M. le Président, je dois vous avertir que,
lorsqu'une motion est déposée et qu'elle est devant vous, elle ne
peut pas être amendée, à moins d'être
votée.
Le Président (M. Bélanger): C'est moi comme
président qui ai ouvert la porte tout è l'heure, mais vous avez
tout a fait raison en vertu du règlement. Donc, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce, ce n'est quand même
pas une faute si grave que cela. Je m'excuse de l'avoir amenée sur la
table.
M. Scowen: Deuxièmement, j'espère que vous acceptez
que je comprenne aussi bien que toute autre personne ici le texte et la
portée de l'article 244 qui dit très clairement que l'on peut
entreprendre des consultations particulières. Mais, dans mes propos d'il
y a quelques minutes, j'ai expliqué le sens des mots
générales et particulières, pas dans le sens de l'article
244, mais seulement dans le sens de permettre aux personnes qui veulent venir
ici de s'exprimer non seulement sur les questions très précises
article par article, mais aussi un peu dans le sens plus vaste et plus global,
comme vous-même l'avez dit a maintes reprises, qui va au fond même
de l'acceptabilité de ce projet de loi.
La première chose que je veux vous dire, c'est que l'expression
"générales et particulières" que j'ai utilisée, ce
n'est pas le même "particulières" que vous trouvez dans l'article
244. Il va de soi qu'une commission parlementaire à ce stade-ci doit
l'être, dans le sens du règlement, à une condition
particulière. Tout ce que je voulais dire, c'est que l'on doit permettre
aux personnes qui témoignent devant nous de s'exprimer d'une
façon un peu plus large, comme vous l'avez fait en deuxième
lecture, comme vous l'avez fait ce soir et comme vous prétendez faire
partie de l'essence même du débat. (22 h 45)
La troisième chose, et cela va dans le même sens, j'ai dits
toute autre personne qui veut se faire entendre. Il est évident que
personne, jusqu'ici, n'a manifesté le désir de se faire entendre.
Les deux exemples qui ont été portés à votre
attention, qui vous ont incités à faire venir les personnes
à cette
commission, ce sont deux lettres qui disaient qu'elles étaient,
en partie, en désaccord avec le projet de loi. Donc, ce que je propose,
le sens de cette partie de mon amendement, c'est tout simplement d'encourager
les personnes qui veulent se faire entendre sur des points précis,
particuliers ou généraux du projet de loi, à venir
à cette commission. On ne veut pas nécessairement se limiter
à ces deux personnes; on va élargir cela pour permettre à
toute personne qui s'intéresse à ce projet de loi, à ce
stade-ci, de se présenter. Je le répète, c'est l'essence
même de mon intervention, tout cela, à l'intérieur de
l'expression, du sens et de la portée de l'article 244. Il va de soi que
tout ce que j'ai proposé doit se faire dans le cadre de cet article 244.
J'espère que je suis bien compris. Je suis certain maintenant qu'il ne
peut pas y avoir d'objection à ma suggestion.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaîtî On ne parle que d'un côté de la table à
la fois. S'il vous plaîtî Je suis donc en mesure de...
M. Jolivet: ...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
M. le député de Laviolette, on ne vous a pas reconnu.
M. Jolivet: Excusez-moi.
Le Président (M. Bélanger): Je suis en mesure de
rendre une décision sur l'amendement proposépar M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Jolivet: ...
Le Président (M. Bélanger): Je comprends, mais je
suis en mesure de rendre une décision actuellement. Je pense qu'il '
serait superflu de faire toute autre intervention. Ma décision est la
suivante: Le sous-amendement est non recevable parce que le mandat que nous
avons reçu de la Chambre, du leader de la Chambre, est de
procéder à l'étude détaillée. Le mandat de
la commission est de procéder à l'étude
détaillée du projet de loi. À l'article 244, la commission
saisie étudie chaque article du projet de loi et les débats
portent sur le détail du projet de loi. Les amendements doivent se
rapporter à son objet et être conformes à son esprit et
à la fin qu'ils visent. Je comprends, M. le député de
Notre-Dame-de Grâce, que le mot "générales", pour vous,
avait un autre sens. Mais, lorsque je lis l'amendement tel qu'il est
proposé - et c'est à cela que je dois m'en tenir - je ne peux
accepter de consultations générales dans le contexte puisque
c'est en dehors du mandat que la commission a reçu. Donc, le
sous-amendement est jugé irrecevable.
Le débat étant terminé - je vous en prie - nous en
sommes rendus à disposer de la motion pour tenir des consultations
particulières du député de Gouin qui se lit comme suit:
"Que la commission tienne, avant d'entreprendre l'étude
détaillée du projet de loi 142, Loi modifiant de nouveau la Loi
sur les services de santé et les services sociaux, des consultations
particulières quant à tous les articles dudit projet et
qu'è cette fin elle entende l'Association des hôpitaux du
Québec." Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Trois mots sur la motion du...
M. Rochefort: Question de règlement, M. le
Président.
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas le droit?
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Gouin, sur une question de règlement.
M. Rochefort: Oui, M. le Président. Il y a un vieux
principe que vous avez appliqué constamment...
Le Président (M. Bélanger): La règle de
l'alternance.
M. Rochefort: ...avec succès jusqu'à ce jour qui
est l'alternance. Il faut se rappeler que le député de
Notre-Dame-de-Grâce a fait sa tentative de motion d'amendement au cours
d'une intervention qu'il faisait sur ma motion.
Mme Lavoie-Roux: Je ne voulais surtout pas vous enlever votre
droit de parole.
M. Rochefort: Non, Mme la ministre. Nous non plus ne voulons pas
vous l'enlever, mais on veut que vous parliez en votre temps pour que l'on vous
écoute encore plus attentivement.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Gouin...
M. Rochefort: Alors, M. le Président, je vous inviterai
à reconnaître un membre de l'Opposition.
Le Président (M. Bélanger): ...vous avez tout
à fait raison. Je reconnais le député de Taillon.
M. Claude Filion
M. Filion: Je vous remercie, M. le Président. Donc, nous
allons revenir à la motion du député de Gouin. Je suis un
peu désolé de n'avoir pu intervenir sur
l'amendement suggéré par le député de
Notre-Dame-de-Grâce qui voulait tenir une consultation
générale alors que la motion du député de Gouin
porte sur des consultations particulières. Cependant, connaissant le
poids du député de Notre-Dame-de-Grâce, adjoint
parlementaire au premier ministre, connaissant le sens de l'amendement qu'il
voulait faire tantôt, je l'inviterais à faire en sorte que son
leader puisse nous rappeler en Chambre et nous donner le mandat de
procéder à une consultation générale sur le projet
de loi 142. Or, je pense que de ce côté-ci - je vois le
député de Gouin qui hoche la tête - en tout cas, sous
réserve -on pourrait...
Une voix: ...consentir.
Le Président CM. Bélanger): S'il vous plaît,
on écoute le député de Taillon.
M. Filion: Je vous remercie, M. le Président. Je pense
qu'on pourrait envisager, d'ores et déjà, que le consentement de
l'Opposition soit facilement obtenu pour qu'une consultation
générale se tienne, consultation générale qui, bien
sûr, ferait l'objet d'une détermination des intervenants par les
membres de cette commission des affaires sociales lorsqu'elle se
réunirait. Quand même, je pense que l'idée du
député de Notre-Dame-de-Grâce est d'autant plus
intéressante que le député de Gouin l'a
suggérée plusieurs fois en Chambre et que l'Opposition l'a
réclamée plusieurs fois en Chambre, lors de l'étude du
projet de loi 142. En ce sens, l'Opposition est cohérente. Si la
ministre est d'accord avec l'adjoint parlementaire du premier ministre, je
pense qu'il y a possibilité d'organiser, rapidement, entre leaders, une
convocation de la Chambre pour procéder à une consultation
générale. On pourrait même faciliter les choses, M. le
Président, et faire en sorte que cette consultation puisse avoir
lieu...
Mme Lavoie-Roux: La semaine prochaine.
M. Filion: ...peut-être la semaine prochaine ou entre
Noël et le Jour de l'an, ou dans les jours suivant le Jour de l'an, mais
sûrement, pour que, si la ministre persiste dans son idée de mener
le projet de loi à bon port, cette consultation générale
puisse être terminée avant l'ajournement du mois de juin, l'an
prochain.
Je retiens cette idée du député de
Notre-Dame-de-Grâce et on en a pris excellente note de ce
côté-ci pour aviser qui de droit de cette volonté
manifestée par l'adjoint parlementaire du premier ministre de faire en
sorte qu'une consultation générale puisse avoir lieu. C'est une
idée qui est tout à fait précieuse, qui rejoint nos
préoccupations depuis le début, qui est fort intéressante
et qui mérite d'être étudiée.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Taillon...
M. Filion: Maintenant, avant que vous m'invitiez à le
faire, je vais revenir quand même sur la motion pour tenir des
consultations particulières déposée par le
député de Gouin.
Vous savez, Mme la ministre, vous y étiez et j'y étais
à un autre titre, celui qui est occupé par un autre jeune avocat
auprès de vous maintenant - j'étais, à cette
époque-là, aussi jeune avocat; on vieillit vite - vous vous
souvenez de la consultation qu'on avait tenue sur la loi 27.
M. Rochefort: II ne s'en souvenait pas, on le lui a
rappelé.
Mme Lavoie-Roux: Sur invitation.
M. Filion: C'était effectivement une consultation sur
invitation où il y avait eu consultation, de part et d'autre, des
intervenants. Et, je me souviens, Mme la ministre, - je vais vous confier
quelque chose ce soir - de l'intensité des rencontres au salon rouge
lorsque nous avons décidé de tenir cette consultation
particulière parce qu'il y avait de l'autre côté des
opinions, des points de vue qui étaient, prétendions-nous a
l'époque, des interprétations erronées, comme vous
prétendez, actuellement, pour l'AHQ quand elle nous écrit, encore
une fois, dans son dernier papier, à la page 2: "Ce qui fait l'objet de
nos préoccupations, c'est que le projet de loi 142 nous semble
créer un certain nombre d'imbroglios juridiques et que le choix des
moyens proposés par certaines de ses dispositions nous semble pour le
moins discutable." C'était à peu près la même
position que tenaient les associations professionnelles à
l'époque de la loi 27, C'était à peu près la
même position que tenait l'AHQ à l'époque: On est d'accord
avec le principe, M. le ministre, disait-on, à ce moment-là,
à l'actuel chef de l'Opposition, mais ce que vous faites ne nous
satisfait pas, il y a des fils qui pendent, tel article va beaucoup trop loin,
ne rejoint pas l'objectif que vous visez, etc.
L'AHQ vous dit la même chose. Il y a des conséquences
juridiques imprévisibles à votre projet de loi. Elle vous avait
dit à l'époque, vous avez raison de le diret Retirez-le, ce
projet de loi. Maintenant, elle ne fait que vous dire: Cela ne marche pas,
voulez-vous nous écouter, nous entendre? C'est aussi simple que cela, la
préoccupation de l'AHQ. Mme la ministre, c'est vrai, dans le fond,
rouvrir votre projet de loi, après tous les efforts et les
énergies que vous y avez mis, ce n'est pas un geste politique
facile. Je connais votre grandeur d'âme et votre
générosité. Surtout, surtout, j'espère que vous ne
les avez pas perdue à côtoyer vos collègues du Conseil des
ministres...
M. Rochefort: M. le Président, cela pourrait faire l'objet
d'une motion...
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président (M. Bélanger); On revient au
député de Taillon, si vous le permettez.
M. Filion: Disons que j'aimerais reconnaître en vous ce
sens de la prudence, parce qu'à titre de chef d'un réseau comme
celui des affaires sociales, auquel a appartenu le président de notre
commission, auquel, à un autre titre, a appartenu le
député de Laurier, auquel, au même titre, a appartenu
l'actuel chef de l'Opposition, et peut-être d'autres personnes autour de
cette table, et sûrement en arrière également, il demeure
que vous ne pouvez pas, Mme la ministre, faire des transformations valables
dans le réseau sans avoir la collaboration des associations, sans avoir
la collaboration de vos associés, et, à ce titre, l'AHQ est
assurément votre première associée. On ne peut pas diriger
un ministère comme cela, surtout en début de mandat, Mme la
Présidente. Il y a d'autres associations également...
Une voix: M. le Président.
Motion d'amendement proposant d'entendre aussi
l'ACAQ
M. Filion: ...M. le Président. Il y a d'autres
associations qui participent également à ce statut que je
qualifierais, ce soir, d'associé; je parle de l'Association des centres
d'accueil du Québec qui est touchée par le présent projet
de loi. À ce moment, j'aimerais déposer à cette commission
la motion suivante, motion pour amender la motion d'amendement de mon
collègue, le député de Rochefort.
Le Président (M. Bélanger): Le député
de Gouin.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Filion: Donc, je répète: motion pour amender une
motion d'amendement...
M. Jolivet: Non, principale.
M. Filion: ...d'une motion pour des consultations
particulières - cela se tient -motion pour amender une motion
d'amendement d'une motion pour des consultations particulières. Que la
motion soit modifiée... Dorénavant, cela sera mieux
rédigé.
M. Jolivet: Motion, pour amender une motion principale.
Le Président (M. Bélanger): Vous présentez
un sous-amendement. Allez-y!
M. Filion: Que la motion soit modifiée en ajoutant,
à la fin, après les termes "Association des hôpitaux du
Québec", les termes "Association des centres d'accueil du
Québec."
M. Jolivet: Bravo!
Le Président (M. Bélanger): Alors, M. le
député de Taillon, votre sous-amendement est recevable et vous
avez trente minutes pour nous le présenter.
M. Claude Filion
M. Filion: Je vous remercie. Alors, je disais donc, en parlant de
l'Association des hôpitaux du Québec, à quel point il est
important, pour la dirigeante du ministère des Affaires sociales, pour
les membres de cette commission, d'entendre les principaux intervenants,
c'est-à-dire ceux qui font vivre le réseau des affaires sociales.
Un réseau, c'est plus qu'un organigramme, c'est plus qu'un
organigrouille, un réseau, c'est du monde, du vrai monde qui oeuvre dans
cela en partant de la ministre, pour descendre jusqu'à la
préposée aux bénéficiaires dans chacun des
hôpitaux, dans chacun des centres d'accueil. Ce sont ces gens-là
qui sont appelés à vivre avec les conséquences et les
effets des lois que la ministre voudrait adopter un peu en catastrophe, en fin
de session, sans consultation; du moins, peut-être changera-t-elle d'avis
avec la motion d'amendement, espérons-le. Quand on présente,
dépose et adopte un projet de loi, il y a toutes sortes d'effets. Il y a
des effets à court terme, il y a des effets à moyen terme et il y
a des effets à long terme. (23 heures)
J'ai soulevé tantôt l'importance de l'aspect judiciaire
contenu dans le projet de loi 142, et l'AHQ, d'ailleurs, quand elle parle
d'imbroglio juridique, a déjà vécu certaines situations,
certains dossiers où elle a dû faire face, avec le
ministère dans bien des cas, a des procédures judiciaires visant
à faire en sorte que les tribunaux appliquent nos lois, mais, en
appliquant nos lois, distribuent les ressources qui sont à
l'intérieur du ministère. Ces ressources sont limitées. Si
on trouvait un puits de pétrole en dessous de l'île
d'Orléans, cela serait différent. On pourrait dire: On va donner
des ressources à tout le monde. Mais les ressources sont
extrêmement limitées. On s'est donné une structure
extrêmement
souple, extrêmement bien faite, dans le cadre des affaires
sociales, de décentralisation, de consultation. On a créé
ces associations sectorielles comme l'AHQ, l'Association des centres de
services sociaux, la Fédération des CLSC, l'ACHAP, etc., qui sont
des associations sectorielles qui, soit dit en passant, sont financées
à même nos taxes, parce que les cotisations sont versées
par les institutions qui font partie du réseau. Ce sont donc, comme je
le disais tantôt, des associations qui ont le statut, en quelque sorte,
d'associés: associés du ministère, associés du
ministre, associés de l'organisation du ministère. À ce
titre, évidemment, elles vivent de beaucoup plus près les
problèmes de chacune des institutions. Elles ont un vécu - un mot
populaire - à faire valoir. Elles ont une expérience à
véhiculer, à communiquer et, en ce sens, leur participation
à nos travaux ne peut être que bénéfique, d'autant
plus qu'il n'y a personne qui a donné son appui au projet de loi de la
ministre. C'est ce qui est fascinant dans ce projet de loi. Il n'y a personne
qui est arrivé et qui a donné son appui, non seulement au
principe, Mme la ministre, non seulement aux objectifs du projet de loi... Tout
le monde est pour la vertu, la tarte aux pommes avec ou sans crème
glacée, tout le monde est pour cela. Quand on dit qu'on va donner des
soins au monde, tout le monde est d'accord avec cela. II n'y a personne qui
peut être contre. Quant aux moyens qui sont proposés par la
ministre, il n'y a personne qui a suggéré directement ou
indirectement que ces moyens constituent des moyens valables. Dans ce sens, M.
le Président, je crois que la motion d'amendement que j'ai
déposée, qui vise à ajouter l'Association des centres
d'accueil à l'Association des hôpitaux du Québec, au
chapitre de nos invités en commission lors de l'étude article par
article, ne peut que recevoir l'assentiment de Mme la ministre et de nos
collègues d'en face. Recevoir les gens, cela peut se faire rapidement.
C'est beaucoup moins long que la consultation générale
désirée par le député de Notre-Dame-de-Grâce.
Cela peut se faire rapidement, ce sont des associations qui sont
habituées d'intervenir en commission parlementaire. On pourrait les
appeler...
Une voix: ...dimanche.
M. Filion: Sûr. On pourrait les appeler ce soir. On
pourrait les recevoir dimanche, samedi, vendredi soir ou lundi matin.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
On écoute le député de Taillon et je voudrais qu'on
respecte son temps de parole des deux côtés. M. le
député de Taillon.
Mme Lavoie-Roux: C'est très intéres- sant.
M. Filion: Donc, cela pourrait se faire rapidement si on
s'entendait. Cela n'a pas besoin d'être long non plus. Ces gens sont
habitués de s'exprimer d'une façon concise, comme nous.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Filion: Donc, je suis convaincu qu'en disposant de quelques
heures ou de quelques jours, M. le Président, on pourrait arriver
è organiser ces consultations particulières. Il ne faut pas avoir
peur de ce qu'ils vont dire. Ils ne seront pas toujours d'accord, mais, au
moins, ils auront compris une partie de ce qu'ils ne comprennent pas
actuellement. Si vous avez raison de vouloir passer ce projet de loi
rapidement, ils ne l'accepteront peut-être pas, mais, au moins, vous le
leur aurez expliqué. Ils auront eu la chance de venir s'exprimer devant
les parlementaires, avec ce que cela implique. J'ai participé -
probablement vous aussi, Mme la ministre, avant d'être ministre -
à des consultations a l'Assemblée nationale. On vient avec nos
mémoires, on fait des représentations, on n'a pas toujours
l'impression que tout ce qu'on va dire va être retenu, mais on a le
sentiment d'avoir été entendu. Cela rejoint un des vieux
principes qui fait maintenant partie de notre charte: audi alteram partem. Dans
ce cas-là, les associations, on ne peut même pas dire que c'est
une partie différente du ministère de la Santé et des
Services sociaux ou du gouvernement du Québec, comme je l'ai
expliqué tantôt. Les institutions font partie de votre
organisation è un degré hautement intime, hautement
élevé. Il n'y a rien qui peut être fait sans... Je ne
voudrais pas que mes propos soient mal enregistrés.
Mme Lavoie-Roux: C'est fait.
M. Filion: Les mots étaient très bien, Mme la
ministre. Je pense que vous les avez interprétés autrement.
Il n'y a pas d'association ni d'intervenant plus impliqué que ces
associations. Comme je le disais tantôt, il y a des effets à court
terme, à moyen terme et à long terme. Ce que l'on craint, dans
votre projet de loi - pour ma part, en tout cas - ce ne sont pas les effets
à court terme, ce n'est pas ce qui va se passer dans trois mois, ni
même dans six mois. C'est peut-être ce qui va se passer dans un an,
deux ans et quatre ans. Les lois, une fois qu'elles sont adoptées, ne
nous appartiennent plus. Mme la ministre, dans deux ans, vous ne pourrez pas
dire à qui que ce soit! Ce n'est pas cela que j'ai voulu dire dans la
loi. La loi va appartenir aux tribunaux, point. Nous, comme
législateurs, et, vous, comme
pilote du projet de loi, n'avons aucun rôle à jouer dans la
loi, une fois qu'elle a été adoptée, d'où
l'importance d'associer le plus possible les intervenants au processus de
législation, ce que l'on avait fait, à l'époque, au moment
de l'adoption du projet de loi 27. Je dois vous dire que, depuis un an, on ne
peut pas dire que votre gouvernement a péché par excès de
consultations sur ses projets de loi. Je trouve cela malheureux parce qu'il n'y
a rien qui urge fondamentalement dans cette loi. Je vois le
député de Laurier opiner négativement à ce que je
viens de dire.
Aucun argument n'a été amené nous disant:
Écoutez, on va se dépêcher, comme c'était le cas
dans le projet de loi 27, Mme la ministre, où, vous le savez, il y avait
des négociations en cours avec les professionnels de la santé. On
ne pouvait pas laisser la situation se détériorer. Il fallait
modifier la structure du cadre des négociations avant d'entamer le
processus final de négociation. À peu près pour toutes les
lois sur la santé où il y avait des intervenants en
désaccord, d'ailleurs, comme dans le secteur de la justice en
général... S'il y a des gens qui ne sont pas d'accord et s'il n'y
a pas urgence, on consulte et on reçoit les gens. Cela permet aussi aux
intervenants de s'exprimer et de "décompenser" un peu, et cela nous
permet de prendre un peu de recul face à votre projet de loi.
L'espèce de solidarité qu'il y a du côté de
l'Opposition, l'unanimité du côté de l'Opposition, plus
celle du côté des intervenants, plus ce que tous les
éditorialistes ont dit sur le projet de loi 142... Franchement, dans le
domaine de la santé, il n'y a pas de bombe atomique qui va nous tomber
sur la tête demain matin si le projet de loi est retiré. On parle
de la santé. C'est un secteur fragile, la santé. Il ne s'agit pas
de modifier une bricole dans une loi. Il ne s'agit pas d'apporter...
Des voix: ...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! On respecte le droit de parole du député
de Taillon.
M. Jolivet: L'article 36.
M. Fllion: II me reste combien de temps?
M. Jolivet: Vingt minutes.
Le Président (M. Bélanger): Dix-neuf minutes.
Mme Lavoie-Roux: Encore dix-neuf minutes! Mais il fait cela
gentiment, M. le Président.
M. Filion: Comme je le disais, il ne s'agit pas de modifier des
bricoles dans un projet de loi. Il ne s'agit pas d'un projet de loi qui
contient des cacahuètes. C'est quand même extrêmement
sérieux, tellement sérieux que l'unanimité existe, mais
contre. En plus de cela, il n'y a absolument aucun appui.
M. le Président, il y a plus que ce que je viens de dire dans le
projet de loi 142 et dans la nécessité d'entendre l'Association
des centres d'accueil. Peut-être qu'il y en a, de l'autre
côté, qui voudraient me répondre en me disant:
L'Association des centres d'accueil, elle est comme ceci ou elle est comme
cela. Je voudrais, pour les membres de cette commission, énumérer
la liste des centres d'accueil que j'ai retracés - peut-être qu'il
y a des erreurs, vous me corrigerez - des centres d'accueil que l'Office de la
langue française a déjà désignés comme
établissements où des soins doivent être donnés en
langue anglaise. On va faire le tour ensemble, vous allez voir que cela
comprend pas mal de monde. L'Association montréalaise pour les aveugles,
le Centre d'accueil Father Dowd, le Centre d'accueil Germain, le Centre
d'accueil juif, le Centre d'accueil Pontiac, le Centre d'accueil pour personnes
âgées Saint-Augustin Enr., Château Suzanne, Extend-Care
Québec Ltée, Foyer de l'âge d'or "Home Sweet Home", Foyer
Régal, Foyer Saint-Paul de Bury Inc., Foyer Wales, Foyer Wheeler Inc.,
Foyer Presbytérien de Saint-Andrew Inc., Griffith-MacConnell Residence,
Havre du crépuscule Inc., Institut canadien-polonais du bien-être
Inc., - je crois que celui-là avait été mis sur pied
à l'occasion de la visite du pape - Maison de santé Roxboro
Ltée, Maison de santé Woodlawn Enr., Maison Jardin rose Enr.,
Manoir Pierrefonds Inc., Manoir Saint-Joseph, Nesbitt Anglican Residence,
Pavillon Mary, Residence ancestrale, Résidence de la chute,
Résidence de Verdun Inc., Résidence du bon-pasteur Inc.,
Résidence Grace Church, Résidence Lokhart, Résidence
Moffat, Résidence Patrician, St. Brigid's Home Inc., St. Margaret's
Home, Villa Mont-Royal.
Ce sont tous des endroits où les soins sont donnés en
langue anglaise, au moment où on se parle, tous des endroits qui sont
représentés par l'Association des centres d'accueil du
Québec. En convoquant cette association en commission parlementaire,
elle pourrait nous donner le point de vue de ces établissements qui ont
vécu dans certains cas des périodes de transition, qui ont
vécu dans certains cas des périodes transitoires où ils
venaient d'être désignés comme étant un
établissement où des soins devaient être prodigués,
où la langue de communication devait être l'anglais. Cela serait
drôlement intéressant pour la ministre de vérifier dans
quelles conditions s'est opérée cette période
transitoire dans des établissements où - je le devine, je
ne voudrais pas par erreur en nommer, dans certains cas je le sais - des
services étaient donnés en langue française, mais
où maintenant les services sont donnés en langue française
et en langue anglaise. Il serait intéressant de voir l'expérience
de ces institutions qui, par le biais de leur association
représentative, pourraient venir en commission parlementaire et nous
faire part de leur point de vue sur le projet de lot 142.
La ministre, M. le Président, va se lever, je le sais, dans une
couple de semaines en Chambre pour souligner probablement une des semaines -
Semaine des centres d'accueil, Semaine des hôpitaux, Semaine des CLSC -
et va nous tenir, pendant huit ou dix ou cinq minutes, un grand discours sur
l'importance, mais vitale, de ces institutions dans le réseau des
affaires sociales. Ce soir, tout ce qu'on lui demande c'est de leur laisser une
petite place à cette commission pour qu'ils puissent être
entendus. Je suis convaincu que cela pourrait se faire aussi rapidement qu'une
des motions non annoncées sur lesquelles la ministre, dans les douze
prochains mois, va se lever pour souligner la semaine de ci ou la semaine de
cela. Je pense que notre demande est loin d'être exagérée.
Je ne voudrais pas reprendre les arguments du député de Gouin sur
l'importance de la convocation de l'Association des hôpitaux du
Québec. Je sais que vous me ramèneriez à l'ordre, en me
demandant de bien vouloir me concentrer le plus possible sur les centres
d'accueil. (23 h 15)
Mais il y a une grande analogie à faire entre ces deux
associations. Dans chacun de leur cas, on réussit à bâtir
à l'intérieur des associations mêmes des expertises pas mal
extraordinaires que le ministère met souvent à profit et
n'hésite pas à consulter dans certains dossiers. Par exemple,
quand vient le temps des budgets, l'AHQ a le droit, j'en suis sûr,
à ses consultations particulières. La ministre n'hésite
pas a faire appel à ses lumières pour vérifier...
M. Jolivet: J'ai l'impression que c'est un vote sur la SHQ.
Le Président (M. Bélanger): Est-ce quelqu'un peut
vérifier s'il s'agit d'un appel...?
M. Filion: On va le savoir. Si cela continue à sonner, ce
sont les députés.
M. Jolivet: Mais je ne voudrais pas manquer mon vote sur la SHQ.
J'ai parlé contre...
Le Président (M. Bélanger): Est-ce que quelqu'un
peut vérifier, s'il vous plaît? Un instant, je vais demander
à la secrétaire de vérifier. Mais on peut continuer quand
même votre intervention. La secrétaire va vérifier
si...
Mme Lavoie-Roux: II ne faut pas que vous perdiez le souffle.
M. Filion: Je parlais du budget des institutions. Quand la
ministre prend le temps, quand arrive le difficile moment d'accorder des
budgets aux hôpitaux ou aux CLSC, je suis convaincu que
l'éclairage...
Le Président (M. Bélanger): On m'informe que la
cloche, c'était pour un quorum et non pour un vote. Alors, on
continue.
M. Filion: Je suis convaincu que la ministre aime, à cette
occasion, recevoir l'éclairage des associations. Mais voila un projet
législatif. C'est au moins tout aussi important que d'accorder un
budget, c'est au moins tout aussi important que si la ministre désire
à un moment donné que des associations mettent sur pied un
programme ou tentent d'améliorer un de ses programmes ou que la ministre
désire que la Fédération des CLSC intensifie son action
dans tel ou tel secteur. À ce moment-là, elle va consulter la
Fédération des CLSC et, si c'est un centre d'accueil, elle va
consulter l'Association des centres d'accueil pour les mettre dans le coup en
quelque sorte, pour les faire participer, pour que ces réformes soient
bien efficaces, bien comprises et menées è bon terme.
Dans ce cas-ci, une simple et modeste consultation particulière
sur un projet de loi qui n'est quand même pas, comme je le disais
tantôt, le dernier des projets de loi dans un secteur aussi important que
celui de la santé, la ministre devrait rapidement consentir à
cette démarche qui ne pourrait que bonifier son projet de loi.
D'ailleurs, c'est une expression qu'elle employait en Chambre, "bonifier" le
projet de loi, l'améliorer, etc.
Vous le savez, Mme ta ministre, qu'un projet de loi est toujours
perfectible. Heureusement qu'il n'y a jamais rien de parfait de pondu. Cela
inquiéterait sur l'identité de ses auteurs. En ce sens-là,
une consultation particulière rapidement menée, avec la
collaboration de l'Opposition - je suis convaincu que le député
de Gouin, qui pilote, du côté de l'Opposition, l'opposition au
projet de lot, pourrait peut-être transformer son opinion
également - pourrait être utile, non seulement d'un
côté, mais de l'autre.
Si vous croyez que le député de Gouin a tort dans tout ce
qu'il dit depuis un mois, si vous croyez que les associations ont tort dans
tout ce qu'elles disent, si vous croyez
que les éditorialistes ont tort, peut-être que ces
consultations vont leur permettre de changer d'idée et faire en sorte
que le projet de loi soit adopté à l'unanimité à
l'Assemblée nationale. C'est intéressant un projet de loi dans le
secteur de la santé adopté à l'unanimité. Il n'y a
pas eu beaucoup de projets de loi qui ont été adoptés sur
division dans le secteur de la santé à l'Assemblée
nationale dans les dix dernières années. Je suis convaincu de
cela. Il y en a peut-être quelques-uns, mais il ne doit pas y en avoir
beaucoup. Je me souviens d'un, mais il ne doit pas y en avoir beaucoup. Il ne
faut pas se presser. Cette idée de vouloir faire cela vite. Pourquoi se
presser tant que cela? Au printemps, c'est aussi bon pour entendre le monde.
C'est plus facile pour eux autres de voyager entre Montréal et
Québec. Les routes sont claires.
En terminant, je voudrais, M. le Président...
Le Président (M. Bélanger): II reste huit
minutes.
M. Filion: II reste huit minutes. Je trouvais que j'avais moins
de temps que tantôt.
En dernier lieu, je voudrais vous rappeler, Mme la ministre, une
pensée du ministre de la Justice français, M. Peyrefitte,
à l'époque, qui disait ceci: "Une loi est toujours un texte
circonstanciel." Cela veut dire qu'une loi qui n'est pas une table de
Moïse, qui n'est jamais là pour la vie, non plus, pour la vie...
Les lois sont là pour être changées. Mais les lois
dépendent des circonstances. Les lois sont là pour corriger des
situations dans certaines circonstances données où on veut
redresser une situation qu'on calcule comme étant injuste. À
partir de cette réflexion, je pense que la première chose qui
vient à l'esprit, c'est que les circonstances actuelles ne s'opposent
pas, loin de là, à ce que ce projet de loi soit
étudié d'une façon sereine, d'une façon
régulière, d'une façon ouverte et d'une façon
généreuse. Il n'y a pas d'implication financière qui va
mettre le gouvernement à terre là-dedans. Deuxièmement,
vous l'avez dit vous-même à plusieurs reprises, les soins sont
donnés en anglais et le réseau s'est organisé pour donner
les services dont tous les Québécois et toutes les
Québécoises ont besoin, peu importent leur origine et leur langue
d'expression. Est-ce que ce n'est pas véritablement, dans ce cas-ci, les
circonstances de l'acte de légiférer qui devraient vous amener
à conclure que le projet de loi est précipité et ne peut
avoir que des retombées négatives à cause de cette
précipitation? C'est ce que voulait dire M. Peyrefitte quand il a...
C'est ce que fait le gouvernement français actuellement quand il recule
sur un projet de loi sur la réforme scolaire qui est mal compris.
Peut-être qu'il est mal compris, peut-être qu'il n'a pas d'allure,
mais il recule parce que les gens ne l'acceptent pas. L'éducation est
aussi un secteur vital. L'éducation et la santé, je pense qu'on
se comprend. Si on enlève cela de l'État, il reste beaucoup
d'autres choses, mais, dans le fond, c'est ce qu'il y a de plus important,
prendre soin du monde qui est malade et éduquer notre jeunesse pour
qu'elle puisse prendre la relève dans l'évolution d'un peuple.
Alors...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
M. le député de Taillon.
M. Filion: Alors, en ce sens-là, étant donné
l'ensemble des circonstances, tout ce qui entoure le projet de loi... Je ne
parle pas du climat linguistique qui existe depuis un an parce que, là,
je n'aurai pas assez des quatre minutes qu'il me reste. Vous savez ce qui s'est
passé depuis un an au Québec. Ce n'est pas votre faute, non plus.
Mais c'est à vous qu'on demande, par exemple, de prendre le projet de
loi 142 et de le traverser. C'est à vous qu'on l'a demandé, Mme
la ministre. Ce n'est pas aux autres qu'on l'a demandé. On a choisi un
secteur - c'est vrai -humanitaire. Tout ce que vous faites est humanitaire.
Tout ce que le gouvernement fait, en bonne partie, j'espère que c'est
humanitaire. Si cela n'est pas humanitaire, il devrait démissionner
parce qu'on fait cela pour les hommes et les femmes qui vivent au
Québec. Mais, quand même, cela n'est pas un hasard si le projet de
loi linguistique, le premier à être étudié par cette
Assemblée nationale, en commission parlementaire, est par la ministre de
la Santé et des Services sociaux. Ce n'est pas un hasard. II y a des
qens ailleurs qui ont pensé que ce serait une maudite bonne
opération de communication, que ce serait une maudite bonne façon
de faire passer leur marchandise. Mais ces gens devraient peut-être avoir
l'audace de venir en commission parlementaire pour le faire au lieu de vous
demander de piloter un projet de loi... Mettons que je vous accorde qu'il n'est
pas entièrement linguistique, mais vous conviendrez avec moi qu'il y a
plus de 50 % de ce projet de loi qui est à portée linguistique.
Je pense qu'on va se comprendre là-dessus. Alors, puisqu'il y a une
aussi forte majorité du projet de loi qui est de nature linguistique,
puisqu'on veut vous faire remplacer ou faire jouer avec une pierre d'un
édifice sans tenir compte peut-être de l'ensemble de
l'édifice qui est très fragile au Québec...
Et vous le savez. C'est une opération qui peut donner à
moyen et à long terme des effets dangereux. J'en suis convaincu, Mme la
ministre, personnellement, et j'espère vous avoir convaincue en partie,
que rien n'empêcherait, avec ces consultations
particulières, qu'on puisse sereinement examiner cela au
printemps avec le député de Gouin, recevoir les gens et se
comprendre pour qu'une loi puisse être adoptée à
l'unanimité au lieu d'être adoptée à toute vapeur,
en catastrophe, des bouts un peu en cachette, pendant la nuit, à la
sauvette, en tout cas, sans entendre les gens. Je n'ose même pas imaginer
ce qui peut se produire dans les jours qui viennent sur le projet de loi 142,
mais je suis convaincu que l'ensemble du réseau de la santé ne
pourrait pas se porter mal d'une petite consultation, d'un peu de temps de
réflexion et revenir au printemps pour adopter doucement, sereinement,
de façon responsable le projet de loi 142.
Or, M. le Président, il me reste deux minutes à peine.
Vous avez bien reçu, j'espère, la motion...
Mme Lavoie-Roux: Un autre amendement?
M. Filion: Moi, je ne peux pas. Mme Lavoie-Roux: Quelle
tristesse!
M. Filion: Vous avez reçu, j'espère, M. le
Président, la motion amendant la motion pour tenir des consultations
particulières. L'avez-vous bel et bien en main?
Le Président (M. Bélanger): Oui.
M. Filion: Je pense que vous l'avez déclarée
recevable.
Le Président (M. Bélanger): Recevable.
M. Filion: Étant donné que certains de mes
collègues d'un côté et de l'autre de cette table ont, je le
sais, le goût, pour ne pas dire l'envie d'intervenir sur cet amendement,
je vais donc terminer mes réflexions là-desssus, et je vous
remercie de votre attention.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, il y a simplement deux
points sur lesquels je voudrais intervenir. Je pense qu'à entendre ces
longs monologues, assez sympathiques dans le cas du député de
Tailion, on est porté à oublier les raisons pour lesquelles on
est ici ce soir. J'entendais le député de Tailion dire:
Écoutez, tous les projets de loi sont perfectibles. Je suis pleinement
d'accord avec lui. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle ils font l'objet
d'études article par article en commission parlementaire. Nous avons
invité l'Opposition à nous faire des suggestions pour, justement,
bonifier ou améliorer ce projet de loi. Tant et aussi longtemps... Je
dis cela d'une façon bien naïve parce que je sais qu'ils vont
continuer aussi longtemps qu'ils le pourront à faire des motions
dilatoires, parce qu'on est, de toute évidence, devant un "filibuster"
en règle, et je ne les en blâme pas. Comme dirait le
député de Laviolette, ce sont nos règles de
procédure, on veut les utiliser au maximum, etc. Mais il reste que, si,
à un moment donné, un jour, une heure, une minute, on abordait le
projet de loi, peut-être qu'il y aurait moyen de l'améliorer.
Il y a un autre point sur lequel je veux revenir. Il disait:
Peut-être même que vous réussiriez, Mme la ministre,
à convaincre le député de Gouin de changer
d'idée.
Une voix: ...le député de Gouîn. M.
Rochefort: ...les conditions.
Mme Lavoie-Roux: C'était une opinion qu'il
émettait, un sentiment.
M. Filion: Juste pour corriger. J'ai dit: Après
consultation, le travail, si on fait cela sereinement, peut-être. (23 h
30)
Mme Lavoie-Roux: J'ai beaucoup de difficulté à
penser que je vais pouvoir convaincre les gens de l'Opposition de changer
d'idée. Je leur ai expliqué les raisons pour lesquelles nous
présentions ce projet de loi. Ils peuvent dire: Cela devrait être
dans la charte, cela devrait être dans la loi 101, cela devrait
être ceci. Nous, nous pensons que c'est un droit qu'on ajoute, qui porte
sur des services de santé et des services sociaux et qui doit être
dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux, mais,
déjà, au point de départ, il semble qu'on ait une vision
tout a fait différente de ces choses-là.
Mais ce qui m'inquiète encore bien davantage, c'est le discours
que j'ai entendu tout à l'heure du député de Terrebonne,
sa vision des minorités au Québec et son long discours sur le
Québec où les francophones sont majoritaires, ce qui est tout
à fait exact, mais où toutes les minorités doivent vivre
selon les règles absolues de la majorité. Qu'on soit anglophone
et qu'on ait des droits historiques, comme, d'ailleurs, le chef de l'Opposition
lui-même l'a signalé avant-hier à l'Assemblée
nationale, dans son intervention: Étant donné qu'ils sont une
majorité aux États-Unis et dans le reste du Canada, il ne faut
pas en tenir compte au Québec. Je pense qu'il a terminé en
disant...
M. Rochefort: Le chef de l'Opposition? Mme Lavoie-Roux:
Non, non, non.
M. Rochefort: Je pense qu'il faut être précis, M. ie
Président.
Le Président (M. Bélanger): C'est le
député de Terrebonne que vous citiez a ce moment-là.
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, c'était le
député de Terrebonne et je disais que même son chef, le
chef de l'Opposition, avait fait référence aux droits
historiques. Si j'ai pu créer une confusion, je m'en excuse.
Je reviens au député de Terrebonne qui disait de toute
façon que, pour lui, il n'y avait pas de raison de reconnaître
quelque droit que ce soit à la minorité anglophone, que la
minorité anglophone et les allophones devaient avoir les mêmes
droits. Je pense qu'il y a là une différence fondamentale entre
votre façon de voir le Québec et la vôtre. Il disait: S'ils
veulent avoir des droits comme anglophones, en tant qu'anglophones de
l'ensemble du Canada et de l'Amérique du Nord, cela va, mais, ici, ils
sont une minorité comme les autres au Québec et il ne voyait
vraiment pas... Je pense que c'est aussi ce que plusieurs des collègues
de l'autre côté de la Chambre - je le pense bien
sincèrement - ont dit et cela reflète vraiment les sentiments que
vous avez, ce qui, d'ailleurs, vient un peu en contradiction - et ce que le
député de Verchères a dit, entre autres - ce qui vient un
peu en contradiction avec ce que le chef de l'Opposition lui-même disait.
Ce qui a été la position du Parti québécois dans
ses manifestes électoraux durant les campagnes électorales, au
moment de son "rénérendum" ou de son référendum, si
vous ne voulez pas que j'utilise un terme qui, d'après M.
Lévesque, est péjoratif - j'ai vu cela dans son livre; moi, je ne
voyais pas cela comme péjoratif, mais, lui, il le voit comme cela -cela
aussi est en contradiction. À l'intérieur de l'Opposition
officielle, il semble qu'il y ait des divergences de vues assez profondes et
que, quoi qu'on fasse sur ce point, il me semble qu'il y aurait un fossé
assez grand à franchir.
On nous dit: II n'y a pas urgence en la demeure. J'ai entendu aussi,
avant le souper, le député de Taillon nous dire que non seulement
il n'y avait pas urgence, mais que, lorsqu'on dépose un projet de loi
à l'intérieur des règles, quant aux dates prévues,
comme dans le cas de ce projet de loi déposé le 13 novembre, si
on n'est pas certain d'avoir l'unanimité, il ne doit pas être
adopté avant Noël. C'est la raison pour laquelle on peut aller de
l'avant avec un projet de loi mais on ne devrait pas, selon ce qu'il nous
disait, adopter un projet de loi qui ne ferait pas l'unanimité si on l'a
déposé seulement le 13 novembre.
Je vous ferai remarquer, M. le Président que nous sommes
arrivés au Parle- ment le 22 octobre. Il me reste deux minutes... Mon
Dieu... Nous sommes arrivés au Parlement le 22 octobre. Ce n'est quand
même pas un délai tellement grand, du 22 octobre au 13 novembre.
Quand on regarde toutes les décisions qui ont été prises
par l'Opposition par les porte-parole officiels, que ce soit le chef de
l'Opposition, l'ancien premier ministre, en ce qui a trait à la
nécessité d'introduire ou de donner des garanties au plan
linguistique dans le domaine de la santé et des services sociaux
à la communauté anglophone, et qu'encore aujourd'hui on
retraite... Ce n'est pas aujourd'hui... Ce sera peut-être encore dans
deux ans. S'il y avait une autre campaqne électorale, on pourrait
peut-être en reparler et peut-être que dans quatre ans le Parti
québécois jugerait peut-être que c'est le temps de le
faire.
M. Scowen: M. le Président, une question de
règlement. J'ai fait beaucoup de commissions parlementaires depuis
longtemps et il y a une tradition ici. Je pense que l'Opposition sera d'accord.
Si la ministre veut deux ou trois minutes additionnelles pour compléter
des commentaires, je pense qu'il ne doit pas y avoir objection à ce
qu'elle termine?
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Gouin. J'interviendrai par la suite.
M. Rochefort: M, le Président, sur la question de
règlement d'abord...
Mme Lavoie-Roux: II me reste une minute.
M. Rochefort: Je suis surpris de l'intervention du
député de Notre-Dame-de-Grâce parce que non seulement nous
ne sommes pas intervenus pour rappeler quiconque à l'ordre, mais, de
plus, M. le Président, sa réaction fait suite à une
indication de votre part. Je pense que le député de
Notre-Dame-de-Grâce a commis suffisamment d'erreurs ce soir pour au moins
respecter la présidence pour le reste de nos travaux.
M, Jolivet: M. le Président, sur une question de
règlement.
Le Président (M. Bélanger): Je pense qu'il ne
s'agit pas d'une... M. le député de Laviolette.
M. Jolivet: Peut-être que le député de
Notre-Dame-de-Grâce a été attiré par le geste que je
faisais. Vous m'avez ramené par une indication à l'article 209.
Comme nous sommes plutôt en étude détaillée en
commission - je n'ai pas voulu arrêter la ministre, je l'ai
laissée aller d'ailleurs - je
voulais vous ramener à l'article 246 qui dit que le ministre ou
le député qui présente un projet de loi, outre le temps de
parole dont il dispose au même titre que les autres, a un droit de temps
de parole de cinq minutes. Vous avez fait mention de dix minutes tout
simplement. Je n'ai pas arrêté la ministre qui parle depuis
à peu près huit minutes.
Le Président (M. Bélanger): Oui. Ce qui se passe,
c'est qu'en vertu de l'article 209 la ministre a le même temps de parole
de dix minutes que tous les autres membres de la commission sur l'amendement.
Alors j'ai présumé que la ministre exerçait son droit de
réplique de dix minutes...
M. Jolivet: C'était ce que je voulais savoir, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): C'est exact, mais cela
n'annule en rien, en vertu de l'article 246, son droit de réplique de
cinq minutes après chacune des interventions.
M. Jolivet: Je veux seulement corriger la situation. Tout
à l'heure, je vous avais fait un signe sans déranger personne
pour indiquer que je pensais que la ministre prenait ses cinq minutes et je
vous avais dit que, si, effectivement, elle prenait ses cinq minutes,
j'étais d'accord que le député de Laurier prenne son temps
de parole. Je crois comprendre qu'ayant pris ses dix minutes c'est moi qui
aurai le droit de parole ensuite. C'est ce que je voulais vérifier.
Le Président (M. Bélanger): Oui. On reconnaît
à Mme la ministre tout le temps qu'il lui faudra pour faire son
intervention. Mme la ministre est suffisamment consciente des règlements
- ayant déjà été elle-même présidente
de commission - pour, je pense, s'y conformer. Alors, Mme la ministre, il vous
reste encore du temps. Je vous en prie.
Mme Lavoie-Roux: II me reste combien de temps?
Le Président (M. Bélanger): Une minute et quelques
secondes. Mais on peut...
Une voix: On peut donner deux minutes. Le Président (M.
Bélanger): Allez-y.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je disais que toutes les
indications que l'Opposition officielle nous a données jusqu'à ce
moment-ci alors qu'au point de départ ils sont censés être
d'accord avec le principe, que ce projet de loi est déposé depuis
le 13 novembre, que nous sommes rendus le 11 décembre, qu'il n'y a pas
eu de demande d'être entendus en commission parlementaire, que la motion
ou l'amendement à la motion qui vient d'être faite, que nous
discutons présentement et qui a été présenté
par le député de Taillon est simplement dans la série des
mesures dilatoires que l'Opposition a décidé de prendre pour
retarder l'adoption du projet de loi et nous indiquer, jusqu'à preuve du
contraire, qu'ils ne sont pas véritablement intéressés
à bonifier ce projet de loi... Alors, nous voterons contre l'amendement
du député de Taillon.
Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le
député de Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. La ministre a
terminé. Je vais prendre ce parti, mais j'aurais d'autres arguments
à apporter à l'effet d'entendre l'Association des centres
d'accueil du Québec, tel que proposé par mon collègue de
Taillon. La ministre vient, encore une fois, de vouloir tenter de faire
accroire au monde qu'on a voté pour le principe, alors qu'il y a eu un
vote majoritaire cet après-midi, à l'Assemblée nationale
auquel l'Opposition s'est opposée unanimement et a perdu. Que la
ministre ne vienne pas nous dire qu'on est d'accord avec le principe, on a
voté contre. Deuxièmement, je suis content que le
député de Taschereau soit revenu - il quitte comme nous de temps
en temps, on a d'autres occupations à cause des commissions, donc, je ne
lui en tiens pas rigueur - et je suis heureux de dire devant lui qu'il a
été encore une fois celui que j'appelle mon ineffable
député de Taschereau, une personne qui a donné un mauvais
pli à la ministre. La ministre prend l'argument du député
de Taschereau, le même argument que, dans une autre commission
parlementaire qui avait trait à la loi sur les étalons, le
député de Saint-Hyacinthe a pris, - vous lui demanderez et je
n'ai pas peur de le dire - et j'ai dit au député de
Saint-Hyacinthe qu'il avait subi ou qu'il était du même niveau en
termes d'"ineffabilité" que le député de Taschereau.
La ministre nous a ressassé le même argument que le
député de Taschereau nous a servi en Chambre jeudi et vendredi en
commission parlementaire: Vous l'avez fait dans le passé, vous n'avez
pas voulu entendre du monde, on va le faire. Voyons donc! Je prends ce
raisonnement, en disant; Mme la ministre, ne faites pas cela, c'est dangereux.
Vous nous dites que, parce qu'on n'a pas fait telle chose, on a
été mis à la porte, vous risquez d'être mis à
la porte si vous ne faites pas telle chose. Ne le faites pas. Chez nous,
à la radio, il y avait un dicton: "Tout le monde le fait, fais-le donc."
Ils ont décidé de l'enlever, parce qu'ils se sont aperçus
que c'était négatif. Ils ont décidé plutôt de
mettre un nouveau slogan à la radio: "Ma région, je l'ai à
coeur et je la développe."
C'était plus positif. Donc, que la ministre ne prenne pas cette
argumentation pour dire: On ne le fait pas parce que vous l'avez fait; on fait
comme vous. Voyons donc, cela n'a pas de bon sens.
Que le député m'amène d'autres sortes d'arguments,
mais pas celui-là. Que la ministre ne vienne pas nous dire qu'on est
d'accord avec le principe, on a voté unaniment contre. Il s'agit de
savoir: Est-ce qu'on doit, oui ou non, entendre des groupes? Le gouvernement
voudrait dire à l'Opposition: Voyons, cela n'a pas de bon sens - la
ministre le répète depuis tout à l'heure - il n'y a
personne qui nous a fait sentir qu'il voulait être entendu en commission.
Je comprends, tout le monde du parti gouvernemental depuis le début dit:
On ne veut rien savoir d'une commission parlementaire. Personne ne va se
pointer le nez, pas plus l'Association des centres d'accueil du Québec
que l'Association des hôpitaux du Québec. Je trouve cette
argumentation "bêbette", parce que d'autres exemples typiques nous ont
donné raison.
Je l'ai dit à la commission sur les étalons, je l'ai dit
lorsqu'on a étudié la loi sur les soins dentaires, je le
répète parce que les arguments que je vais apporter vont
être consignés au Journal des débats dans une partie
de la commission parlementaire du ministère de la Santé et des
Services sociaux. L'exemple typique que j'apporte - et je vais le rapporter
partout - c'est la loi 30 du ministère de l'Éducation,
proposée par le ministre de l'Éducation, qui s'appelait la loi
modifiant la loi sur la commission scolaire du Nouveau-Québec. La
commission scolaire Joutel-Matagami n'avait jamais demandé à
être entendue, l'Opposition a fait son travail, le député
d'Ungava a fait son travail. Il est allé voir la commission scolaire. Il
a dit: Voici, il y a un projet de loi qui est déposé,
êtes-vous d'accord avec cela ou pas? La commission scolaire a dit: Cela
n'a pas de bon sens, M. le député, demandez à votre
formation politique de convaincre le ministre de tenir une consultation
particulière. J'ai fait, avec le député d'Ungava, des
démarches auprès du ministre. Le ministre a finalement
accepté notre proposition. Le ministre a été heureux de
suivre notre suggestion. À la suite de notre proposition, il y a eu
consultation particulière. Le projet de loi, je le répète,
était anodin, quatre articles, dont l'un était la date
d'entrée en vigueur. En fait c'étaient trois articles, trois
articles, quand on les analysait, qui spoliaient la commission scolaire des
fonds qu'elle avait le droit d'avoir. (23 h 45)
Le ministre a compris que les fonctionnaires qui lui avaient
préparé le document à son arrivée au
ministère... Il n'a peut-être pas eu la chance de l'étudier
à fond et il s'est aperçu que, malheureusement, il allait dans la
mauvaise route. Le ministre nous a dit à l'époque, comme il l'a
dit à d'autres places: L'erreur qu'on commet de perpétuer
l'erreur, c'est de la continuer, cette erreur; donc, il faut reculer. Je vais
reprendre. Le ministre a dit une chose: L'erreur qu'on pourrait commettre, ce
n'est pas de corriger l'erreur, mais c'est de la perpétuer. Si on a
commis une erreur, il faut la corriger, si on a à la corriger. C'est ce
qu'il a fait. Effectivement, la loi est revenue sur la table à dessein,
est revenue è l'Assemblée nationale, huit articles, et
finalement, le ministre a accepté nos propositions.
Moi, je pense que la ministre n'a pas à s'entêter à
refuser de recevoir du monde, que ce soit l'Association des centres d'accueil
du Québec ou l'Association des hôpitaux du Québec. Voyons
donc! Le but de la rencontre de consultations particulières, c'est
justement de permettre è ces gens de venir exprimer ce qu'ils disent
dans des lettres, à l'Opposition comme à tout le monde. Ils n'ont
pas dit: On veut être entendu en commission parlementaire parce que,
depuis le début, les gens du gouvernement ne veulent pas les entendre,
mais si on continue les pressions, peut-être qu'ils vont comprendre.
Peut-être qu'ils vont dire: Oui, c'est vrai, cela a bien du bon sens, on
devrait le faire et, avant d'aller trop loin, on devrait peut-être les
rencontrer, prendre le temps qu'il faut. Ce n'est pas parce qu'on est en
session intensive, presque jour et nuit dans certains cas, qu'on va refuser de
faire notre travail, parce qu'on n'a pas le choix, on est enclenché dans
un processus prévu par le règlement sessionnel. On pourrait
donner notre consentement en Chambre demain matin, après la
période de questions aux affaires courantes, aux affaires touchant les
travaux de l'assemblée, les travaux des commissions, en disant: On
suspend, M. le Président, par une motion du leader, la commission et on
entend des qens, à partir, disons, de dimanche, on peut continuer
à faire certaines choses, mais cela ne servirait à rien, il faut
préparer l'invitation de ces gens, les amener à faire telle
action. Peut-être qu'en les rencontrant, en discutant avec eux, on
pourrait, je pense, convaincre la ministre. A-t-elle peur d'être
convaincue par ces gens qu'elle fait fausse route? C'est cela qu'elle ne
recherche pas?
Vous savez, ce matin, j'ai été un peu abasourdi avec le
grand "show" qui a été fait. J'étais d'accord avec
l'ensemble de l'activité, mais je dois vous dire que j'ai
été surpris de voir qu'au moment où la ministre
responsable de l'Immigration et des Communautés culturelles
commençait son exposé tout le monde du Parti libéral a
quitté la place. Il y a des gens qui ont vu cela dans les estrades en
haut. Ils ont dit: Cela n'a pas de bon sens, vous étiez tous
là
cet après-midi. Je comprends, c'est spontané de notre part
de rester là, parce que c'est une motion importante; on nous avait dit
que c'était une motion importante du Parti libéral, on est
resté là, on n'a pas eu besoin d'ordre pour rester là, je
n'ai jamais compris pourquoi les députés libéraux ont
quitté la place...
Une voix: Des ministres.
M. Jolivet: Des ministres, c'est pis encore.
Le Président (M. Bélanger): Pertinence, s'il vous
plaît!
M. Jolivet: Non, mais, je vous donne un exemple, M. le
Président, du fait que, quand on veut écouter les gens, on reste
là. Si on reste là, on est peut-être convaincu par ces
gens, qu'on fait fausse route; c'est cela que je veux vous donner comme
exemple. Mais, étant donné que la ministre ne semble pas vouloir
comprendre, peut-être qu'en lui exposant qu'une autre organisation
pourrait venir elle pourrait être convaincue et en conséquence, M.
le Président, je me fais un devoir de faire un amendement qui s'appelle
sous-amendement à l'amendement...
Une voix: Un sous-amendement.
Le Président (M. Bélanger): Un sous-amendement.
Motion de sous-amendement proposant d'entendre aussi
l'ACSSQ
M. Jolivet: Oui, oui, mais un amendement à un amendement,
cela devient un sous-amendement. Donc, c'est un sous-amendement à
l'amendement proposé par mon collègue de Taillon, en ajoutant,
après "du Québec", les mots "et l'Association des centres de
services sociaux du Québec".
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laurier.
M. Sirros: Si j'ai bien compris, le député de
Laviolette vient de faire un sous-amendement au sous-amendement du
député de Taillon.
M. Jolivet: Non, non. Vous avez encore une fois mal compris.
M, Sirros: Est-ce que cela veut dire... Bon, d'accord. Je vais
réserver cela pour la prochaine fois, M. le Président, parce que
je suis à peu près convaincu qu'il y aura un sous-amendement au
sous-amendement à l'amendement, à la motion...
Des voix: ...
M. Sirros: M. le Président, c'est en vertu de quel
règlement?
M. Rochefort: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Un instant, on va
entendre le député de Laurier et on vous entendra par la
suite.
M. Sirros: M. le Président, je n'ai blessé
personne, j'espère. Je fais des hypothèses que j'ai le droit de
faire...
M. Jolivet: Non, le règlement ne le permet pas.
M. Sirros: Je n'ai pas entendu le numéro du
règlement qui est appelé. M. le Président, mon
intervention...
Le Président (M. Bélanger): S'il voua plaît!
Un peu d'ordre.
Des voix: ...
M. Sirros: ...mon droit de parole...
Des voix: ...
M. Sirros: II a terminé et il m'a donné le droit de
parole.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
je vais diriger la circulation. On va bien s'entendre. Jusqu'à
maintenant, cela a bien été, on va continuer comme cela. M. le
député de Laurier, s'il vous plaît, de façon
concise.
M. Jolivet: Mais, M. le Président.
M. Sirros: M. le Président, j'avais compris.
M. Jolivet: C'est la question de règlement, M. le
Président, il vient de le dire, il parlait sur son droit de parole. Or,
c'est moi qui ai le droit de parole, parce que vous devez d'abord accepter mon
sous-amendement.
M. Sirros: Excusez-nous, excusez-nous, on ne vous le prendra
pas.
M. Rochefort: M. le Président, question de
règlement sur le fonctionnement.
Le Président (M. Bélanger): Question de
règlement, M. le député de Gouin.
M. Rochefort: M. le Président, le député de
Laviolette a parlé pendant...
M. Sirros: II demande cela constamment quand je soulève
une question de règlement.
J'aimerais savoir en vertu de quel article.
M. Rochefort: M. le Président, le député de
Laviolette... M. le Président, sur l'article...
Le Président (M. Bélanger): J'ai reconnu le
député de Gouin et on l'écoute.
M. Rochefort: ...concernant la recevabilité du
sous-amendement du député de Laviolette.
M. Jolivet: J'ai le droit de recevoir ou non le sous-amendemnt
que j'ai déposé.
M. Rochefort: En vertu de l'article 39, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laurier, j'ai accordé le droit de parole au
député de Gouin et je voudrais bien l'entendre.
M. Rochefort: M. le député de Laviolette a
parlé pendant dix minutes, comme le règlement le permet, sur la
motion d'amendement du député de Taillon. À la fin de sa
période de dix minutes, il a déposé une motion de
sous-amendement.
Le Président (M. Bélanger): Exactement et elle est
recevable.
M. Rochefort: Vous devez maintenant, M. le Président,
disposer de sa recevabilité. Dans la mesure où vous jugez que
cette motion est recevable, le premier membre de la commission qui a droit de
parole et pour une période de trente minutes est l'auteur de la
motion...
Une voix: Malheureusement.
M. Rochefort: ...en la personne du député de
Laviolette. Je vous inviterais à le reconnaître, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Vous avez effectivement
raison, M. le député de Gouin. Le sous-amendement est recevable.
Dorénavant, la motion se lirait comme suit: Motion pour amender une
motion pour consultations particulières, alors: l'Association des
centres d'accueil du Québec et l'Association des centres de services
sociaux du Québec.
M. le député de Laviolette, vous avez trente minutes pour
présenter votre sous-amendement.
M. Jolivet: M. le Président, avant de commencer mon
intervention, mon temps de parole, j'aimerais avoir une directive de votre
part. Vu qu'il est près de minuit, vu que nous devons terminer dans six
ou sept minutes, vu que la ministre de la Santé...
Le Président (M. Bélanger): Vous pouvez continuer
votre intervention...
M. Jolivet: Je voulais juste poser une question à la
ministre. Je passe par votre intermédiaire. Je ne peux pas lui poser
à elle. Est-ce que la ministre consentirait à ce que je
débute mon intervention demain matin ou si elle m'oblige à
commencer immédiatement?
Le Président (M. Bélanger): Cela prend un
consentement unanime.
M. Jolivet: Je vous ai posé la question pour que vous la
posiez à la ministre.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre, est-ce
que vous accepteriez que l'on ajourne les travaux jusqu'à demain...
M. Rochefort: Sur cette question, M. le Président...
Le Président (M. Bélanger): ...et que M. le
député de Laviolette commence son intervention demain ou
préférez-vous qu'il continue pendant six minutes et qu'il finisse
son intervention demain?
M. Rochefort: Pour cette question...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Gouin.
M. Rochefort: ...je veux rappeler à la ministre, qui est
une parlementaire...
M. Jolivet: Aguerrie.
M. Rochefort: ...aguerrie, chevronnée, qu'il y a une
pratique dans cette Chambre, et que les pratiques de l'Assemblée
s'appliquent aussi aux commissions. M. le Président, lorsqu'un temps de
parole s'échelonnera sur une plus grande partie à une autre
séance que la part du droit de parole qu'il peut exercer dans la
présente séance, la tradition veut que nous reportions toute
l'intervention à la séance subséquente.
Le Président (M, Bélanger): Je crois qu'il n'y a
pas de précédent admissible à ce sujet.
M. Rochefort: Je parle de traditions.
Le Président (M. Bélanger): II faut le
consentement.
M. Rochefort: C'est un peu comme la constitution canadienne,
d'ailleurs.
Le Président (M. Bélanger): C'est cela.
M. Sirros: Est-ce que c'est un "free for ail"?
M. Rochefort: II y a des traditions.
Le Président (M. Bélanger): Non, je pense que cela
me prendra le consentement unanime des deux côtés. Alors...
Mme Lavoie-Roux: C'est mol qui...
Le Président (M. Bélanger): Auparavant, Mme la
ministre, si vous avez...
Mme Lavoie-Roux: Pour la santé mentale des membres de
l'Opposition, je pense que ce serait mieux d'ajourner maintenant.
Une voix: Cela, c'est un peu trop...
Le Président (M. Bélanger): C'est unanime,
donc...
Mme Lavoie-Roux: C'est pour la nôtre aussi, quant à
cela.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président (M. Bélanger): Nous ajournons les
travaux sine die.
(Fin de la séance à 23 h 54)