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(Quinze heures trente-sept minutes)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît! La commission des affaires sociales se réunit afin de
procéder à l'étude des crédits budgétaires
du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu pour l'année financière 1987-1988, gouvernement du
Québec, Budget 1987-1988, et des crédits pour l'année
financière se terminant le 31 mars 1987. C'est donc l'ordre que nous
avons reçu de l'Assemblée nationale tout à l'heure.
Nous avons quorum. Y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M, le Président. M. Charbonneau
(Verchères) remplacera M. Gauthier (Roberval).
Le Président (M. Bélanger): Bien. Y a-t-il d'autres
remplacements?
La Secrétaire: Non, M. le Président.
Organisation des travaux
Le Président (M. Bélanger): Un petit rappel sur la
procédure avant de commencer. Les temps de parole: chaque membre dispose
d'un temps de parole de vingt minutes pour chaque élément d'un
programme, temps qu'il peut utiliser en une ou plusieurs interventions; ce sont
les articles 209 et 284 du règlement de l'Assemblée nationale. Le
député non membre dispose également de vingt minutes pour
chaque élément d'un programme, temps qu'il peut utiliser en une
ou plusieurs interventions, toujours en vertu des articles 209 et 284 du
règlement.
Le ministre qui répond des crédits de son ministère
peut intervenir aussi souvent qu'il le désire; cependant, il ne peut
parler plus de vingt minutes par intervention, selon les articles 209 et 287.
Évidemment, du consentement unanime, or» peut toujours
déroger, la commission étant souveraine et maîtresse de ses
travaux.
Selon l'entente survenue entre les leaders des deux partis, la
commission dispose de sept heures trente pour procéder à
l'étude des crédits de ce ministère. L'horaire
proposé est donc le suivant: aujourd'hui, de 15 h 30 à 18 heures,
nous avons d'abord les remarques préliminaires, le programme 6 sur les
prestations d'aide sociale, le proqramme 2 sur l'administration
déléguée de programmes en sécurité du revenu
et le programme 7 sur l'assistance-maladie. De 20 heures à 22 heures, le
programme 10, Protection et développement de l'emploi, Régie des
rentes du Québec et Commission des normes du travail.
Mercredi, nous aurons, de 10 heures à 13 heures, le proqramme 9,
Formation professionnelle de la main-d'oeuvre; le programme 4, Allocations
familiales; le proqramme 1, Direction et qestion; le programme 8,
Sécurité du revenu des chasseurs et piéqeurs cris; le
programme 3, Direction et gestion de la Commission des affaires sociales, et le
programme 5, Allocations de maternité. Voilà donc l'horaire pour
l'étude de ces proqrammes.
M. Charbonneau: Juste sur l'horaire.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie, M. le
député.
M. Charbonneau: On avait convenu avec le ministre qu'on
commencerait avec toutes les questions concernant l'aide sociale. C'est
pourquoi on a mis le proqramme 6 en premier. Je voudrais simplement indiquer au
ministre, si jamais il y a des fonctionnaires qui peuvent être
appelés à donner des renseignements, qu'il y a une partie des
questions qui peuvent, en apparence ou selon les crédits, relever du
programme 10, Protection et développement de l'emploi, mais qu'on va
relier à l'aide sociale, c'est-à-dire les mesures de
développement de l'employabilité. Quant aux autres programmes, on
les étudiera au programme 10, mais ces mesures, on va en parler dans le
dossier de l'aide sociale. Je pense que le ministre comprend pourquoi.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.
Le Président (M. Bélanger): Vous êtes
d'accord?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, il y a certainement
interaction entre les deux et, pour une meilleure compréhension des
discussions, je suis d'accord qu'on parle des deux à ce
moment-là.
Le Président (M. Bélanger): Aucun problème,
M. le ministre et M. le député de
Verchères.
Il est à remarquer qu'à la suite de la présentation
de cet horaire, la commission ne peut excéder le temps qui lui est
imparti pour l'étude des crédits de ce ministère. J'invite
M. le ministre, le porte-parole de l'Opposition et les membres de la commission
intéressés à faire leurs remarques préliminaires,
s'il y a lieu.
M. le ministre, avant de commencer, est-ce que vous pourriez identifier
les gens de votre équipe qui auront à répondre aux
questions avec vous ou à vous seconder?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, celles et ceux qui
m'accompagnent à la table, à partir de la droite de la table,
Nicole Dussault, qui est attachée politique à mon cabinet,
responsable des dossiers de l'aide sociale et des dossiers de la condition
féminine; immédiatement à ma droite, M. Jean Pronovost,
sous-ministre en titre au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu; à ma gauche, Jean Larivière,
attaché politique, responsable, entre autres, de la Commission des
normes du travail et des travaux parlementaires.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Je vous invite,
M. le ministre, à procéder aux remarques
préliminaires.
Remarques préliminaires M. Pierre
Paradis
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le président de la
commission parlementaire, madame et messieurs les députés, nous
sommes ici réunis afin de procéder à l'étude des
crédits du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu sur ce qui s'est fait au sein du
ministère et sur ce que j'entends mettre de l'avant dans un avenir plus
ou moins rapproché.
Comme je l'avais indiqué l'an dernier à pareille occasion
- vous vous en souviendrez sans doute - je m'étais fixé trois
objectifs lors de ma nomination comme titulaire du ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Ces objectifs, qui
avaient été pris en regard des mandats et des clientèles
de ce ministère, et ce, dans le cadre du contexte
socio-économique et budgétaire que l'on a connu, consistaient
à assurer une saine gestion financière du ministère,
à orienter nos actions de façon à réaliser les
engagements électoraux relatifs à la réforme de l'aide
sociale et à l'abolition de la discrimination fondée sur
l'âge et, enfin, à accentuer notre appui aux efforts qui doivent
être fournis en matière de formation et de développement de
l'employabilité afin d'aider particulièrement les plus
démunis de notre société et favoriser leur
réintégration au marché du travail.
À partir de ces objectifs, nous avons posé des gestes,
orienté nos actions, bref, nous avons pris nos responsabilités.
Si vous me le permettez, M. le Président, je tracerai brièvement
un bilan de ce qui s'est fait sous notre gouverne au ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu ainsi qu'au niveau des
organismes qui seront sous ma responsabilité au cours de l'exercice
financier 1986-1987. D'autre part, je vous ferai part qlobalement des objectifs
que nous nous sommes fixés pour l'année en cours relativement
à la réforme, aux gestes, aux lois, etc., que nous entendons
faire et qui s'inscriront dans la continuité de nos actions, toujours
conformément aux trois priorités énoncées
précédemment.
Dans le domaine de l'aide sociale, l'an passé, pour aborder le
thème de l'aide sociale, j'utilisais les termes de "dossier majeur et
prioritaire". Ce sont exactement les mêmes qualificatifs qui s'imposent
et qui s'imposeront toujours pour qualifier cet important dossier qu'est l'aide
sociale. Permettez-moi d'abord de vous dresser un portrait, un bilan du
programme de l'aide sociale pendant l'année financière qui vient
de s'écouler. En avril 1986, soit au début de cet exercice, il y
avait 415 093 ménages, soit 692 507 personnes, adultes et enfants, qui
vivaient au Québec des prestations de l'aide sociale. Le gouvernement du
Québec déboursait, pour ce seul mois d'avril 1986, près de
190 000 000 $ en prestations. En avril 1987, on dénombrait, selon les
données préliminaires, 389 600 ménages, soit une baisse
approximative de plus de 26 ménages en un an. Ce sont plus de 43 000
adultes et enfants qui, au Québec, ne dépendent plus des
prestations de l'aide sociale par rapport à avril 1986. (15 h 45)
Avec vous, j'aimerais identifier les principales raisons qui font que,
pour la première fois depuis 1970, le nombre de ménaqes et,
conséquemment, le nombre de personnes vivant de l'aide sociale au
Québec a diminué considérablement. Ainsi, la
clientèle moyenne de l'aide sociale a diminué de 5,6 % en
1986-1987, alors que les experts prévoyaient pour cette même
période un taux de croissance de la clientèle de 1,7 %. Non, il
ne s'agit pas de simples fluctuations, mais d'une véritable diminution
qu'on peut attribuer à différents facteurs, dont celui de la
reprise économique au Québec.
À cet effet, laissons parler les chiffres. Le bulletin mensuel La
Situation de l'emploi au Québec, d'avril 1987, publié par le
ministère de l'Industrie et du Commerce à partir des chiffres de
Statistique Canada, démontre que, d'avril 1986 à avril 1987, le
nombre de personnes ayant un emploi au Québec a auqmenté de 103
000 et que le nombre de chômeurs a diminué de 18 000.
En avril 1987, le taux de chômage est en baisse dans neuf
régions économiques du Québec. Je ne veux pas conclure de
ces chiffres, M. le Président, mais je peux en déduire
très certainement que les efforts du gouvernement libéral pour
améliorer le climat économique et créer un climat propice
aux investissements ont commencé, dès la première
année de notre mandat, à porter des fruits.
Une autre raison importante à cette baisse de clientèle
découle du mandat clair et précis que nous a donné la
population du Québec le 2 décembre 1985, à savoir
rétablir l'ordre dans les finances publiques et gérer sainement
les impôts, car il ne faut jamais oublier que l'argent du gouvernement,
c'est avant toute chose l'argent des contribuables.
Nous avons assumé nos responsabilités, ce qui n'a pas
toujours été facile, mais, contrairement au gouvernement qui nous
a précédés, nous n'avons pas choisi la voie de la
facilité. Nous avons, par différentes mesures de contrôle,
sorti des oubliettes où l'avait reléguée le Parti
québécois la notion de saine gestion des fonds publics. Vous vous
rappellerez sûrement que, lors de notre arrivée au pouvoir, nous
avions appris qu'une expertise interne réalisée par le
ministère en 1985 avait permis d'estimer que 18 % de l'ensemble des
dossiers de l'aide sociale étaient erronés. Partant de ce
constat, en avril 1986, des agents de bureau occasionnels ont été
embauchés dans le réseau Travail-Québec et au service des
affaires sociales de la ville de Montréal pour libérer 200 agents
d'aide socio-économique afin qu'ils effectuent des visites à
domicile chez les bénéficiaires de l'aide sociale.
La revitalisation des visites à domicile a fait l'objet d'une
planification rigoureuse. Un guide d'intervention a été
préparé afin de définir pour les agents d'aide
socio-économique les objectifs de l'intervention, ses limites, de
même qu'un code d'éthique, afin d'assurer le respect des droits
des bénéficiaires. Tous les agents d'aide socio-économique
ont reçu une formation appropriée avant les premières
visites survenues à la fin de mai 1986.
Jusqu'à présent, le programme a très bien
fonctionné et a atteint ses objectifs généraux grâce
à la discipline démontrée par les employés du
ministère dans cette tâche plus que délicate. Sa
légalité a d'ailleurs été confirmée par
l'honorable juge Tannembaum, en décembre 1986, qui
réitérait d'ailleurs ce qui suit, et je cite l'honorable juge:
"II est évident que ceux qui ont vraiment besoin de cette aide devraient
la recevoir sans restreinte, mais il est aussi évident que ceux qui
administrent des fonds publics ont le devoir de s'assurer que la disposition de
ces fonds soit strictement en conformité de la loi et des
règlements." Il concluait de la façon suivante: "Lorsqu'il -
l'agent d'aide sociale - effectue une visite à domicile avec le
consentement de la personne visitée, il ne fait que ce que la loi
l'oblige à faire, soit de s'assurer que ceux qui reçoivent des
prestations de l'aide sociale ont le droit de les recevoir."
Concrètement, M. le Président, les données les plus
récentes nous indiquent que, du 20 mai 1986, date du début de la
revitalisation des visites, au 31 mars 1987, soit au cours de l'exercice
financier 1986-1987, il y a eu 122 752 dossiers où une décision a
été rendue à la suite de visites à domicile. Les
résultats sont les suivants: annulation de l'aide, 10 034 dossiers, soit
8,2 %; demandes refusées, 5343, soit 4,4 %; modifications à la
baisse, 3755, soit 3,1 %; modifications à la hausse, 1745, 1,4 %, sur un
total de 20 877 dossiers qui ont subi des modifications. En d'autres termes,
toutes les visites effectuées auront permis à 122 752
bénéficiaires de l'aide sociale d'avoir la certitude que leur
dossier est conforme à ta loi et aux règlements actuels. Parmi
ceux-ci, il aura été nécessaire d'apporter des
modifications dans une proportion de 17,1 %.
L'année dernière, à la même époque,
les experts du Conseil du trésor et de notre ministère avaient
établi à 68 000 000 % la somme devant être
économisée à la suite de l'accentuation des mesures de
contrôle. Lors du dépôt du livre des crédits du
gouvernement, le 25 mars dernier, les hauts fonctionnaires du Conseil du
trésor avaient alors indiqué que les projections basées
sur les chiffres de janvier 1987 indiquaient qu'au cours de l'exercice
financier 1986-1987 près de 150 000 000 $ avaient été
économisés au chapitre de l'aide sociale. Cette somme de 150 000
000 $, que j'ai confirmée par la suite, démontre de façon
non équivoque que la baisse de la clientèle de l'aide sociale a
eu un impact majeur sur les sommes versées par l'État en
prestations d'aide sociale.
Bien qu'il nous soit difficile de départager clairement les
aspects positifs de la reprise économique et de la création
d'emploi sur les bénéficiaires de l'aide sociale des effets
d'entraînement qu'a pu avoir la revitalisation des visites à
domicile sur la clientèle de l'aide sociale, je suis en mesure de vous
présenter aujourd'hui les données suivantes qui traduisent la
réalité administrative du ministère de la Main-d'Oeuvre et
de la Sécurité du revenu pour 1986-1987. Au niveau de l'aide
sociale, les compressions budgétaires se subdivisent comme suit:
indexation, 31 000 000 $; réglementation, 11 000 000 $; contrôle,
68 000 000 $; total, 110 000 000 $. En crédits périmés, 79
000 000 $. Donc, au niveau de l'aide sociale, pour 1986-1987, un total de 189
000 000 $, soit en compressions budgétaires, soit en crédits
périmés. Les autres programmes du ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu se
subdivisent comme suit: compressions, 35 000 000 $;
périmés, 41 000 000 $; total, 76 000 000 $. Si vous ajoutez
l'aide sociale aux autres programmes, le total des compressions
budgétaires et des crédits périmés à l'aide
sociale ainsi que dans les autres programmes: 265 000 000 $.
Ce n'était pas seulement du laxisme administratif, M. le
Président, c'était une perte de contrôle des finances de
l'État que nous avait léguée l'ancien gouvernement.
Conséquemment aux résultats factuels et tangibles de cette
revitalisation des visites à domicile, il nous est apparu responsable de
consacrer 7 200 000 $ pour le présent exercice financier afin que les
visites à domicile poursuivent le travail amorcé qui vise
à la conformité des dossiers de l'aide sociale à la
réglementation.
Un bilan de l'année qui vient de s'écouler serait
incomplet sans faire le point sur le dossier de la réforme de l'aide
sociale. En effet, à compter de mai 1986, les autorités du
ministère, bon nombre de professionnels et de fonctionnaires de
différents services, en collaboration avec le personnel de mon cabinet,
ont entrepris un travail d'envergure, à savoir l'élaboration de
deux nouveaux programmes, un pour les personnes inaptes au travail, l'autre
pour les personnes aptes au travail, visant à remplacer le programme
actuel d'aide sociale.
Durant l'été 1986, plus d'une centaine d'organismes et
tous tes députés de l'Assemblée nationale ont
été invités par lettre à me faire part de leur
opinion sur le système actuel. Les rapports, commentaires et
recommandations reçus ont été corrigés de
façon à faire ressortir les constantes et les variantes dont nous
avons tenu compte dans le cadre de l'élaboration d'un nouveau
système. Â la fin de l'été 1986, un document
d'orientation était prêt. Je m'apprêtais à le rendre
public à la suite d'un mandat qui m'avait été
confié par le Conseil des ministres lorsque le dépôt, en
novembre 1986, du rapport de la commission d'enquête sur
l'assurance-chômage, le rapport Forget, nous obligeait à retarder
notre projet.
En effet, l'application intégrale de ce rapport risquait d'avoir
de fortes conséquences au Québec permettant le transfert de
près de 60 000 bénéficiaires de l'assurance-chômage
à l'aide sociale. Dès que le ministre fédéral,
Benoît Bouchard, a fait part des décisions qu'il avait prises
quant audit rapport et qu'il n'y avait plus d'interrogations sans
réponse, j'ai aussitôt demandé à mes
collègues du Conseil des ministres qu'ils entérinent les
recommandations que j'avais à leur formuler dans ce dossier et qui ont
été rendues publiques jeudi dernier.
Ainsi, le gouvernement a décidé d'intégrer la
réforme de l'aide sociale à l'intérieur d'une politique de
sécurité du revenu. Ainsi, la nouvelle orientation s'inscrit dans
l'agencement des propositions du discours sur le budqet du ministre des
Finances du 30 avril 1987, lequel annonçait la création du
programme APPORT, Aide aux parents pour les revenus de travail, et des
propositions que j'avais déjà soumises concernant la
création du programme APTE, Actions positives pour le travail et
l'emploi, et du programme Soutien financier.
Par cette décision, nous viserons trois objectifs
spécifiques et atteindrons trois clientèles distinctes. D'abord,
le proqramme APPORT ainsi que d'autres mesures analogues éventuelles
auront comme principal but l'incitation au travail pour les familles à
faible revenu. D'autre part, le proqramme APTE visera à la formation et
à la partipation des bénéficiaires de l'aide sociale
à des mesures qui favoriseront leur réintégration au
marché du travail. Enfin, le programme Soutien financier sera
destiné aux bénéficiaires de l'aide sociale
considérés comme non employables afin qu'ils obtiennent des
conditions de vie plus décentes.
Dans ces circonstances, il va sans dire qu'au ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, en collaboration avec
le ministère des Finances, nous sommes déjà à la
tâche et nous entendons prioriser au maximum les gestes qui conduiront
à l'implantation de la politique de sécurité du revenu.
Déjà, des équipes de travail voient à apporter les
retouches au document d'orientation que nous rendrons public au cours de la
saison estivale. Il est plus qu'important d'arrimer les trois volets afin que
le qouvernement présente une politique de sécurité du
revenu cohérente qui tiendra compte de l'incitation au travail chez les
bas salariés et qui aura également pris en considération
différentes mesures d'ordre fiscal ou autres encourageant les personnes
à demeurer actives au sein de notre société. Il est
également essentiel, à notre point de vue, que le document
d'orientation, qui sera suivi d'une vaste consultation et, par la suite, du
dépôt d'un projet de loi, prévoie la réalisation
d'un engagement électoral qui nous est cher, soit l'abolition de la
discrimination fondée sur l'âge pour les prestataires d'aide
sociale âgés de moins de 30 ans. Pour des raisons de justice
sociale et d'équité, nous avons l'intention d'apporter des
correctifs à un système désuet qui ne répond plus
aux besoins de notre société et qui a trop longtemps
pénalisé l'ensemble des prestataires et des membres de notre
collectivité.
Quant à la formation professionnelle et au développement
de l'emploi, actuellement, en Amérique du Nord, l'analyse du
marché du travail fait ressortir deux grands ordres de problèmes,
soit l'insuffisance des emplois et la nécessité de s'adapter aux
divers
changements amenés par l'implantation rapide de nouvelles
technologies et l'internationalisation de la production et des échanqes
commerciaux. Les modifications structurelles qui affectent actuellement le
marché du travail posent à l'ensemble des intervenants deux
grands défis: premièrement, l'aide au relèvement
socio-économique des personnes qui restent en marge du marché
régulier du travail et, deuxièmement, l'amélioration de la
capacité d'adaptation des entreprises et de la main-d'oeuvre en emploi.
Il s'agit de défis de taille qui supposent une foule d'interventions
dans le domaine de l'emploi et de la main-d'oeuvre.
Des décisions importantes ont été prises.
Mentionnons, entre autres, la rationalisation des interventions du
ministère. Il faut aussi éviter la duplication avec te
fédéral et viser surtout à la
complémentarité: premièrement, réorientation du
placement; deuxièmement, remodelaqe du programme "Bon d'emploi Plus"
dans le cadre des négociations de la planification de l'emploi;
troisièmement, poursuite des négociations avec le
fédéral sur l'accord Canada-Québec et les progrès,
entre autres, ont été réalisés dans le sens de la
complémentarité.
Il nous faut marquer la priorisation de l'employabilité et de
l'emploi des bénéficiaires de l'aide sociale ainsi que de la
formation professionnelle; premièrement, accroissement des budgets des
programmes d'employabilité; deuxièmement, accroissement du budget
du programme de soutien à la formation en entreprise;
troisièmement, renégociation de l'entente avec le
fédéral sur le financement des programmes de développement
de l'employabilité; des gains importants ont été
réalisés pour le Québec; quatrièmement,
renégociation de l'accord Canada-Québec sur la formation
professionnelle à l'avantage du Québec.
Au niveau des objectifs que nous nous sommes fixés, la protection
et le développement de l'emploi ainsi que la formation professionnelle
constituent pour nous une priorité. Ayant injecté une somme de 42
000 000 $ additionnelle à ces programmes, le ministère que je
dirige déboursera donc 275 000 000 $ à ce chapitre pour
l'exercice financier 1987-1988. Par cette volonté politique, par ces
déboursés financiers, nous souhaitons qu'un nombre grandissant de
bénéficiaires de l'aide sociale profitent de ces programmes qui
favorisent leur réintégration au marché du travail.
D'autre part, il ne faudrait pas passer sous silence les gestes qui
devront être posés en ce qui concerne les organismes
gouvernementaux sous ma juridiction. Ainsi, sans vouloir les citer par ordre
d'importance, permettez-moi de vous faire part brièvement des grandes
lignes directrices qui guideront nos gestes dans les prochains mois.
Commission des affaires sociales. Vous vous souviendrez, M. le
Président, que, dans le cadre du même exercice que celui que nous
faisons aujourd'hui, j'avais indiqué l'an dernier qu'à la
Commission des affaires sociales le problème essentiel et auquel il
était impératif de trouver des solutions était celui des
retards dans les délais d'audition à la division des accidents du
travail. J'avais alors indiqué que notre intention était de
mettre en vigueur des mesures correctives afin de pallier cette
déplorable situation dont nous avions hérité à
cause du manque d'intérêt de l'ancien gouvernement. (16
heures)
La première étape de cette réforme administrative a
commencé en septembre dernier, alors que j'annonçais
conjointement avec M. le juge Gilles Poirier, président de la Commission
des affaires sociales, la mise en place de cinq mesures visant au
désengorgement des causes en suspens. Ainsi, depuis ce moment et
contrairement à ce qui existait auparavant, les avis d'audition
parviennent aux parties 90 jours à l'avance, ce qui a l'avantage de leur
permettre de savoir quand elles seront entendues et de se préparer en
conséquence. De plus, aucune cause n'est inscrite au rôle pour
être entendue, à moins que les parties n'aient signifié par
écrit qu'elles sont prêtes à procéder.
Également, afin de favoriser les rèqlements hors cour, toute
nouvelle expertise médicale doit être produite au moins quinze
jours avant la date fixée pour l'audition. Ces mesures ont pour but
d'influencer à la baisse le taux de demandes de remise sur lequel,
d'ailleurs, la Commission des affaires sociales exerce plus de rigueur.
D'autre part, et pour tenir compte des situations qui requièrent
une attention urgente, la Commission des affaires sociales entend en
priorité les parties qui ont motivé par écrit l'urgence
d'être entendues par préférence. Ces nouvelles
règles administratives s'inscrivent dans un processus visant
essentiellement à un meilleur traitement et à une gestion plus
efficace des causes en attente.
Quant à la Réqie des rentes, notre gouvernement s'est
engagé à trouver, au cours du premier mandat, pour le conjoint au
foyer, un mécanisme d'accès au Régime de rentes. J'avais
indiqué, toujours à la même époque, l'an dernier,
que je comptais maintenir le rythme des discussions que j'avais entreprises sur
la question avec les gens du ministère et de la Régie des rentes.
Je suis heureux de pouvoir dire maintenant que non seulement nous avons
maintenu le rythme de travail, mais que, également, mes collèques
des Finances et du Secrétariat à la condition féminine se
sont joints, à ma demande, à ces discussions qui progressent
normalement. Nous avons toujours l'intention de consulter ta population
sur cette importante question dès que nous pourrons proposer des
hypothèses de solution. Il faut d'ailleurs savoir, à propos de
cette question, qu'en plus de notre groupe de travail un comité
fédéral-provincial étudie diverses hypothèses de
réalisation et que nos gens participent également è ce
comité.
Dans un autre domaine, mais toujours en ce qui concerne le Régime
de rentes du Québec, vous vous souviendrez, M. le Président, que
j'ai piloté lors de la dernière session l'adoption de la loi 77
qui a pour objet l'augmentation de deux dizièmes de un pour cent au
cours des cinq premières années du taux de cotisation du
Régime de rentes du Québec. Il était alors essentiel
d'agir afin de conserver la santé financière du
régime.
Enfin, j'ai pris les mesures nécessaires, en collaboration avec
le président de la Régie des rentes, pour que des suites soient
données au rapport du Vérificateur général.
L'Office de la sécurité du revenu des chasseurs et
piégeurs cris. En ce qui concerne cet office, ces derniers avaient
signifié depuis longtemps déjà à l'ancien
gouvernement qu'ils désiraient discuter avec lui d'améliorations
possibles au programme de sécurité du revenu les concernant. Ces
demandes étaient restées sans réponse lors de mon
arrivée au ministère. Je suis aujourd'hui heureux de vous faire
part du fait que non seulement nous avons envisagé positivement leurs
multiples demandes de rencontres, mais que nous avons entrepris avec eux une
négociation de fond et qu'au moment où je vous parle il m'est
possible de penser qu'une entente interviendra sous peu.
Quant à la Commission des normes du travail, en regard de la Loi
sur les normes du travail et de la Commission des normes du travail, il y a
lieu de rappeler que, le 19 juin 1986, dans le cadre d'une déclaration
ministérielle, j'annonçais que le gouvernement avait pris des
décisions importantes relativement au salaire minimum. Tenant pour
acquis qu'il faut agir prudemment lorsqu'il s'agit de toucher au salaire
minimum parce que plusieurs études indiquent qu'un relèvement
peut avoir un impact négatif sur l'emploi, une telle intervention
demeure néanmoins une responsabilité de l'État qui doit
s'assurer que les règles du marché n'engendrent pas de situations
abusives pour une partie importante de la main-d'oeuvre.
Comme les personnes rémunérées au salaire minimum
sont principalement des femmes et des jeunes, dont bon nombre travaillent
à temps partiel, il fallait s'assurer que tout mouvement de politiques
applicables à ces personnes ne vienne faire perdre au Québec ses
avantages comparatifs et, par le fait même, créer du
chômage. C'est dans ce contexte que le gouvernement a pris ses
décisions. Alors que ledit salaire minimum était gelé
à son taux de 4 $ par le précédent gouvernement depuis le
1er octobre 1981, soit depuis cinq ans, notre gouvernement proposait de
hausser, conjointement avec la province de l'Ontario, ce taux de 0,35 $ l'heure
pour le porter à 4,35 $. Cette même hausse s'appliquait aux
salariés au pourboire. Quant au salaire payable au domestique
résidant chez son employeur, il passait de 134 $ à 150 $. De
plus, respectueux des chartes canadienne et québécoise des droits
et libertés, nous éliminions de la réglementation sur le
salaire minimum la discrimination fondée sur l'âge. Par ces
mesures qui sont entrées en viqueur le 1er octobre 1986, non seulement
nous réalisions un engagement électoral, mais nous palliions la
détérioration de la situation financière des personnes
travaillant au salaire minimum par rapport aux autres travailleurs, tout en
évitant de désavantager le Québec dans sa position
concurrentielle.
Une seconde mesure que nous avons mise en application est la baisse du
taux de cotisation à la Commission des normes du travail. À titre
de mesure d'allégement de la parafiscalité, le ministre des
Finances, à l'occasion du discours sur le budget du 1er mai 1986,
annonçait que le taux des prélèvements effectués
par la Commission des normes du travail était réduit de 0,125 %
à 0,08 %. De plus, nou3 avons adopté des modifications au
règlement de régie interne de la Commission des normes du travail
pour te rendre conforme à la Loi sur l'accès aux documents des
organismes publics et sur la protection des renseignements personnels
particulièrement en ce qui a trait à la confidentialité
des délibérations du conseil d'administration. Ces amendements
ont été préparés en collaboration avec la
Commission d'accès à l'information.
Parallèlement au renouvellement du mandat du président
pour une période de trois ans, j'ai revu la composition du conseil
d'administration en ayant à l'esprit d'augmenter la présence
féminine au sein dudit conseil.
Enfin, quant au conseil d'arbitrage, nous avons nommé un adjoint
au président afin de permettre des déblocages dans certains
dossiers, tel te dossier sur la manutention sur les chantiers de construction
qui subissait certains délais, faute de personnel. Dans les prochains
mois, nous poursuivrons le travail amorcé en ayant continuellement
à l'esprit l'amélioration du service et l'efficacité du
fonctionnement du conseil.
En guise de conclusion, M. le Président, c'est avec une certaine
fierté que je trace un bilan de ma première année comme
titulaire du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu et responsable des cinq orqanismes
gouvernementaux qui se rattachent à ma fonction. Je suis bien conscient
que le travail à faire demeure
colossal et que nous ne pouvons nous permettre de demeurer inactifs dans
des dossiers où les attentes de la population sont largement
ressenties.
Cependant, je crois qu'en poursuivant l'atteinte des trois objectifs que
je m'étais fixés à mon arrivée, soit d'assurer une
saine gestion financière, de réaliser les engagements
électoraux relatifs à la réforme de l'aide sociale et
à l'abolition de la discrimination fondée sur l'âge pour
les prestataires de l'aide sociale et, finalement, d'accentuer nos efforts en
matière de formation et de développement de
l'employabilité, j'accomplirai un travail qui continuera de favoriser la
justice et l'équité sociales.
M. le Président, MM. les membres de la commission, je vous
remercie de votre attention.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le
député de Verchères, en réplique.
M. Jean-Pierre Charbonneau
M. Charbonneau: M. le Président, je demande au ministre,
à mes collègues de la commission et aux représentants des
médias d'information de m'excuser, je n'ai pas préparé de
texte écrit. Je pense que ce sera bon quand même - je
l'espère, tout au moins - premièrement, parce que j'ai la
prétention de commencer à bien connaître le ministre et ses
dossiers et, deuxièmement, parce que j'avais surtout l'intention de
réagir aux propos du ministre puisque, de toute façon, c'est le
rôle de l'Opposition. Viendra une autre époque où l'on fera
autre chose.
Ma première réaction, c'est que, finalement, le ministre
nous présente un bilan bien positif de son action depuis un an et demi,
un bilan qui passe beaucoup sous silence les conséquences
négatives de ses actions et, je dirais aussi, de ses inactions. Ce sont
des conséquences graves, dramatiques, pour les centaines de milliers de
personnes concernées par les activités du ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Récemment,
à l'occasion d'une motion à l'Assemblée nationale sur les
plus démunis et les politiques du gouvernement libéral, j'ai fait
la démonstration qu'à cause des décisions, entre autres,
du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu,
l'écart entre riches et pauvres au Québec s'est élargi
depuis que le ministre qui est devant nous aujourd'hui est titulaire du
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu.
Les pauvres ont vu leur situation se détériorer au
Québec. Leurs revenus ont diminué. Les services d'aide du
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
et d'autres ministères qui visent les plus démunis de notre
société ont été comprimés et ralentis dans
leur développement. Le nombre de pauvres est demeuré à un
niveau inacceptable. C'est encore, au moment où l'on se parle - les
chiffres sont difficiles à obtenir - à peu près 20 % de
nos concitoyens et concitoyennes qui vivent sous le seuil de la
pauvreté.
Le ministre a beaucoup insisté tantôt sur sa performance
statistique, c'est-à-dire le nombre de personnes qui ne sont plus
bénéficiaires de l'aide sociale et les économies qu'il a
permis de faire réaliser au Trésor public. Il a attribué
en particulier la baisse du nombre d'assistés sociaux à la forte
création d'emplois due, bien sûr, à l'action extraordinaire
du gouvernment libéral, alors qu'on constate qu'en termes de
création d'emplois, l'an dernier, le qouvernement actuel a
créé moins d'emplois que le gouvernement précédent
au cours des trois dernières années. On pourrait, à la
limite, aller jusqu'à dire que le rythme de croissance économique
s'est maintenu au cours de la dernière année et n'a pas
augmenté au Québec par rapport aux années
précédentes. En fait, on a un rythme de croissance qui est celui
que le Québec a réussi à atteindre au moment de la reprise
économique, mais il n'y a rien actuellement qui nous permette de dire
sincèrement et honnêtement qu'il y a un boum économique ou
une espèce de reprise extraordinaire cette année qui marque une
situation tellement différente. C'est une lancée qui avait
été entreprise, il y a quelques années, depuis
déjà quatre ans, qui se poursuit, bien sûr, mais rien
n'indique que, depuis l'arrivée au pouvoir du Parti libéral, il y
ait une accélération de cette lancée, et je pense que les
statistiques sont très éloquentes à ce sujet. Le ministre
n'a certainement pas fait la démonstration que le nombre
d'assistés sociaux qui ont quitté les listes de l'aide sociale
sont nécessairement maintenant des personnes qui ont un emploi. Faisons
attention! II y a des qens qui ont quitté l'aide sociale à cause
des visites à domicile, mais qui se retrouvent plus pauvres, plus
"pognés" aujourd'hui qu'ils ne l'étaient il y a six mois, il y a
un an, avant que le ministre n'entreprenne son action, et qui n'ont pas
trouvé d'emploi. Le résultat pour eux de l'action du Parti
libéral, du gouvernement libéral et du ministre dans cette
opération de visites à domicile, c'est un appauvrissement. Je
vais d'ailleurs immédiatement, parce que je veux quelque peu
démasquer ce pétage de bretelles du ministre, aller un peu plus
loin et donner des précisions sur cette opération, justement, de
visites à domicile.
On a passablement néqliqé - et le ministre n'en a pas
soufflé mot - tous les effets humains de discréditation et
d'humiliation que son opération a déclenchés, cette
espèce de harcèlement qu'ont subi dans
leur être profond des milliers de gens et, en particulier, des
femmes. Les gens qui rient de cela, en arrière du ministre ou à
côté du ministre, n'ont pas, eux, à boucler leur budget
familial avec les sommes et les revenus que les assistés sociaux ont
entre les mains pour nourrir leurs enfants et rejoindre les deux bouts. Ces
gens-là, pour la majorité, n'étaient pas des fraudeurs
professionnels, ni des gens qui roulaient sur l'or. Le résultat concret
de cette action a été un appauvrissement de gens qui
étaient déjà pauvres, de gens qui vivaient
déjà sous le seuil de la pauvreté et qui se retrouvent
aujourd'hui encore plus pauvres.
Le ministre a bien fait attention de mettre en évidence son
opération de visites à domicile avec ce que le livre blanc sur la
fiscalité des particuliers du précédent gouvernement
disait et avec ce que le rapport Macdonald disait également. Dans le
livre blanc sur la fiscalité des particuliers, à
différents endroits - je pourrais vous référer à
quelques pages pour votre information personnelle, M. le Président,
ainsi que pour celle des membres de la commission - si le ministre
s'arrêtait à lire, par exemple, quelques passages à la page
155, à la page 187 ou à la page 191, il verrait qu'une bonne
partie des comportements illégaux, non réglementaires, frauduleux
dans certains cas, sont causés par des politiques gouvernementales qui
ne sont pas harmonisées. C'était un des principaux constats du
livre blanc sur la fiscalité des particuliers et, plutôt que de
s'attaquer en priorité et d'abord et avant tout à cette
harmonisation des politiques, le ministre, lui, s'est attaqué aux
résultats, aux gens qui s'organisent pour se débrouiller. (16 h
15)
Je vais lui lire à ce propos, M. le Président, un court
passage de la commission Macdonald: "Des abus commis à l'encontre des
programmes de sécurité du revenu résultent bien souvent
d'une conception fautive. On peut y remédier beaucoup plus facilement en
corrigeant la structure du programme qu'en accroissant les effectifs
d'inspection et de vérification. Par exemple, la forme d'abus qui est de
loin la plus courante dans le cas de l'assistance sociale est la
non-déclaration de faibles sommes par les bénéficiaires -
faibles sommes par les bénéficiaires. La commission estime que
quiconque est en mesure de gagner un revenu modique afin de compléter
ses prestations devrait être vivement encouraqé à le faire.
La solution consiste, selon nous, moins à renforcer l'appareil
répressif qu'à modifier les dispositions du programme", ce que le
gouvernement n'a pas encore commencé à faire.
M. Yves Vaillancourt, professeur au département de travail
social, à l'Université du Québec, citant la commission
Macdonald lors d'une analyse au mois d'août dernier, ajoutait: "II ne
s'agit pas ici de nier qu'il y a des cas de fraude à dénoncer et
à démasquer, mais il faut bien reconnaître que, parmi les
personnes soupçonnées de fraude à la loi de l'aide
sociale, un grand nombre sont tout simplement des personnes qui font preuve de
débrouillardise sociale dans le but de rejoindre les deux bouts pour
elles et leurs dépendants. L'explication de ce phénomène
est simple: d'un côté, l'article 3 de la loi affirme que l'aide
sociale doit être proportionnelle aux besoins, mais, de l'autre
côté, les articles du règlement qui établissent les
barèmes généraux ou spéciaux pour les moins de 30
ans contredisent eux-mêmes tes dispositions de la loi relatives aux
prises en considération des besoins en fixant des montants de
prestations qui se situent systématiquement à 55 % ou 60 % sous
les seuils de pauvreté et à beaucoup moins encore dans le cas des
personnes seules de moins de 30 ans considérées comme aptes au
travail et qui, actuellement, vivent avec 170 $ par mois." Les derniers
chiffres que le ministre nous avait donnés, on verra si ce sont ceux qui
doivent être pris en considération. C'était 45 000
personnes de moins de 30 ans qui vivent avec 170 $ par mois. C'est
évident qu'avec 170 $ par mois, on s'organise pour se débrouiller
et qu'on n'adopte pas toujours des comportements réglementaires et,
parfois même, on a recours à l'illégalité et
à la criminalité pour joindre les deux bouts. "Si les
barèmes d'aide sociale se situent systématiquement au-dessous des
seuils de pauvreté, il n'y a plus qu'une seule voie permettant aux
personnes sur l'aide sociale de s'en sortir, elles doivent être
astucieuses. Elles compléteront les revenus de l'aide sociale avec des
dons de leurs proches ou bien avec des revenus du travail. Mais c'est ici que
le règlement de l'aide sociale se révèle le plus
désuet. En effet, l'article 43 du règlement précise que
les revenus de travail autorisés ne peuvent dépasser 25 $ par
mois pour une personne seule et 40 $ par mois pour une personne qui a une
famille. Si un montant supérieur à ce plafond est gagné,
la balance, soit 1 $ sur chaque dollar, doit être remise
intégralement à l'État", et le gouvernement n'a rien fait
pour corriger cette situation alors que c'était une promesse
électorale. Je pourrais poursuivre en citant d'autres passages de ce
texte.
Finalement, on a beaucoup mis l'accent de la part du gouvernement sur
l'alimentation de préjugés dans la population. Bien sûr,
dans les sondages, les gens se sont montrés généralement
plus satisfaits qu'insatisfaits de cette action du gouvernement en oubliant,
par ailleurs, ce que, humainement, les gens, qui ont eu à subir cette
opération, ont eu à vivre. On pourrait ajouter à cela, M.
le Président, l'abolition de
l'indexation trimestrielle de l'aide sociale. L'an dernier, le ministre,
encore à l'étude des crédits, s'était plu à
nous dire que c'étaient uniquement des pertes de fonds administratifs,
alors que, finalement, on lui a fait la démonstration en cours
d'année, à plusieurs reprises, que c'était 31 000 000 $ de
pouvoir d'achat en moins que les assistés sociaux avaient dû
encaisser parce que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu n'avait pas été capable, n'avait
pas eu la force politique nécessaire au Conseil des ministres et au
Conseil du trésor pour ne pas accepter un tel changement des
règles administratives.
La modification à la baisse des barèmes de l'aide sociale
pour plusieurs catégories, le ministre s'en vante aujourd'hui en disant:
Oui, on a atteint notre objectif de 11 400 000 $. Sauf que le résultat
encore, c'est que les barèmes de l'aide sociale pour plusieurs
catégories d'assistés sociaux ont eu comme résultat que
bien des gens qui avaient besoin de l'aide sociale, qui avaient besoin de ces
sommes additionnelles reliées à ces critères d'octroi de
l'aide sociale, ont été privés de sommes importantes.
Encore là, c'étaient des gens qui ne roulaient pas sur l'or, qui
avaient besoin de ces fonds.
M. le Président, on a récemment congédié 50
fonctionnaires - on en a parlé à l'Assemblée nationale -
et on s'apprête à en congédier 540. Le ministre nous a dit
tantôt, a dit aux journalistes: Vous savez, ce ne sont pas de vrais
congédiements parce que les postes restent là. Comme s'il n'y
avait pas de conséquences négatives au congédiement de 540
- près de 600 personnes, si on prend celles qui ont déjà
été congédiées personnes qui ont comme
responsabilité d'accompagner les personnes qui sont sur l'aide sociale
pour faire en sorte que leur passage dans des mesures de relèvement de
l'employabilité soit autre chose que du "cheap labour".
Je vais citer au ministre un document qui lui a été
envoyé par certains de ses fonctionnaires qui faisaient un peu le bilan
et qui disaient au ministre: Faites attention! II y a des conséquences
importantes à ce que vous allez faire à l'égard du
congédiement. On dit, par exemple, ici: "On doit craindre un net
ralentissement de l'efficacité des programmes pour les raisons
suivantes: profonde démotivation des employés avertis à la
date de leur congédiement gratuit; manque de disponibilité des
employés non congédiés qui seront accaparés par le
recrutement et la formation des nouveaux engagés; bris dans le suivi des
dossiers causé par la rotation du personnel; rendement moindre de la
part des nouveaux employés devant se familiariser avec les divers
aspects de leurs fonctions; une baisse de la qualité des services
offerts à la population du Québec; une diminution du nombre de
participants aux divers programmes; une réduction de l'efficacité
de l'État dans cette mission-là et, d'une certaine façon,
un accroissement des risques de faire en sorte que ces mesures de
relèvement de l'employabilité deviennent, quand elles ne le sont
pas déjà, malheureusement, des occasions d'emploi à
rabais."
On ne peut pas totalement vous blâmer de ces mesures-là, on
Ies a mises en place quand on était au gouvernement. Vous les avez
dénoncées quand vous étiez dans l'Opposition, vous les
vantez maintenant. On ne change pas notre langage, on pense qu'effectivement
ces mesures-là sont des mesures à être mises en place, mais
avec, par ailleurs, un encadrement important parce que la performance de ces
programmes-là, ce n'est pas juste une performance statistique de savoir
combien on met de personnes dans ces mesures-là et combien à la
fin de l'année ont passé dans ces mesures-là, mais,
surtout, est-ce que ces personnes-là sont employables au bout du compte
et est-ce que, effectivement, elles réussissent à trouver de
l'emploi.
À cet égard, on peut aussi déplorer, parmi les
actions que le gouvernement a faîtes, l'abolition de la Table nationale
de l'emploi et du Secrétariat à l'emploi et à la
concertation, et le fait que le gouvernement n'a pas élaboré de
stratégie de plein emploi. Je l'ai dit à plusieurs reprises au
ministre et je le redis aujourd'hui, lorsque le gouvernement est arrivé
en fonction il avait en main des instruments qui étaient nouveaux, qui
avaient été mis en place sous l'inspiration de formules qui
fonctionnent dans des pays sociodémocrates en Europe, dans des pays
où le taux de chômage n'est pas de 11 %, 10 % ou 12 %, ou,
réellement, en fait, peut-être de 13 %, 14 % ou 15 %, mais dan3
des pays où le taux de chômage se situe autour de 2 % ou 3 %.
C'est comme si au Québec les recettes qui marchent ailleurs, on ne
devait pas s'en inspirer. Pourtant, on est souvent très portés,
les Québécois, à se comparer aux autres. Et, là, on
avait en place des mécanismes qui commençaient à porter
des fruits et qui auraient pu porter des fruits plus importants encore, surtout
s'ils avaient été orientés par une vision politique non
pas de croissance économique, mais de plein emploi, la croissance
économique étant au service du plein emploi et non pas l'emploi
comme une conséquence. Quand on regarde la réalité des
investissements, on n'a qu'à prendre un exemple qui est très
récent, le premier ministre est allé se "péter les
bretelles" au Saguenay pour un investissement "ré-annoncé"
d'Alcan qui va faire en sorte qu'il y aura moins d'emplois dans cette
région-là, alors que, effectivement, l'appareil de production
d'Alcan va être modernisé et amélioré et sa
capacité concurrentielle également améliorée, mais
avec le résultat net qu'il y aura moins
d'emplois, finalement.
Donc, dès l'entrée en fonction, abolition de la Table
nationale de l'emploi et du Secrétariat à l'emploi et à la
concertation et non-élaboration d'une stratégie de plein emploi,
parce qu'une stratégie, c'est bien différent d'une politique,
ça comprend toute une série de politiques, avec un objectif
politique clair de société, pas juste du gouvernement, qui eat le
plein emploi.
Pas de parité inconditionnelle de l'aide sociale, pas de
parité conditionnelle et pas plus de parité graduelle de l'aide
sociale, nouvelle trouvaille des militants libéraux., On a eu à
déplorer et à assister, depuis un an et demi que le ministre est
en fonction, à une tromperie de langage. Le ministre dit vrai en disant:
Nous allons respecter notre engagement d'abolir la discrimination fondée
sur l'âge à l'égard de l'aide sociale. Le problème,
c'est qu'en campagne électorale, avant la campagne électorale et
depuis la campagne électorale, ce dont on parle surtout, c'est la
parité plus que l'abolition de la discrimination. Or, la parité,
qu'est-ce que cela voulait dire dans l'esprit des gens? C'est que ceux qui ont
170 $ par mois aient le maximum de la prestation. C'est cela qu'ils ont compris
et c'est cela qu'ils attendent.
Quand je regarde les journalistes commenter et tomber dans le
piège encore une fois des propos de la semaine dernière du
ministre en disant, è la suite des nouvelles annonces du ministre, que
les assistés sociaux et les jeunes assistés sociaux devront
attendre en 1988 avant d'avoir la parité, je m'excuse, les journalistes
se sont trompés et toute la population a été
trompée par le ministre. En 1988, il n'y aura pas de parité
nouvelle pour les jeunes assistés sociaux parce que, dans le projet du
ministre annoncé la semaine dernière et dont on a les copies, les
documents, parce que finalement ce sont les mêmes documents, les
mêmes orientations que celles qui ont été
dévoilées il y a à peine quelques semaines et quelques
mois et par la presse et par le front commun des assistés sociaux, que
nous indiquent ces documents? C'est que les jeunes assistés sociaux vont
continuer d'être obligés de participer aux mesures de
relèvement de l'employabilité pour avoir droit à la
prestation maximale. Mais la trouvaille, ce qui est nouveau, ce que le ministre
ne dit jamais, c'est que ce sont les plus vieux qui, eux, ne sont pas
obligés actuellement de participer à ces mesures qui vont devoir
y participer pour avoir droit à la prestation maximale, auquel cas,
s'ils ne participent pas à ces mesures, ils vont voir leur situation se
détériorer, s'appauvrir. C'est cela, la parité de l'aide
sociale qu'on doit attendre.
Ce qu'il y aura en 1988, c'est la parité à l'envers, les
plus vieux qui vont se faire appliquer la même médecine que les
plus pauvres. Voilà le genre de parité dont le ministre ne veut
pas parler. Il dit: Nous allons abolir la discrimination. Mais la parité
attendue, il n'y en aura jamais parce que cette parité existe
déjà pour les jeunes. C'est le statu quo pour les jeunes. Est-ce
que pour une fois le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu va le dire clairement?
Pas de réforme de l'aide sociale. M, le Président, le
ministre a oublié de dire que ses devoirs ont été mal
faits, que le premier ministre lui-même a été obligé
de dire que ce que le ministre lui avait présenté aurait conduit
à un chaos administratif. Le ministre ne s'est pas vanté de cela.
Il a dit: Écoutez, on a bien travaillé au cours de la
dernière année. Il n'a pas parlé du "taponnaqe" à
l'intérieur de son ministère, de son caucus et du Conseil des
ministres. Les données rendues publiques sont tronquées, M. le
Président. Les chiffres qui ont été rendus publics la
semaine dernière comme évaluation du coût de la
réforme sont tronqués. Le ministre, et on va y revenir, estime
à peu près à 100 000 000 $ le coût du programme
APTE. Ce sont là les mesures de relèvement de
l'employabilité. Imaginez-vous que le programme actuellement, selon nos
évaluations, et le ministre pourra... Oui, oui, oui, c'est ce que vous
avez dit. Regardez dans Le Soleil, c'est 250 000 000 $. Les gens citaient le
ministre. Si le ministre nous dit que ce n'est pas lui qui l'a dit, il nous
donnera les vrais chiffres. On se rendra peut-être compte alors que la
réforme de l'aide sociale telle qu'elle est envisagée ne
coûtera pas 250 000 000 $. C'est peut-être plus près du
milliard. À 69 000 000 $ pour remettre dans des mesures
d'employabilité 26 000 personnes, le ministre va devoir nous dire
combien cela va lui coûter pour en remettre 316 000 parce que ses
chiffres mêmes, selon son document présenté au Conseil du
trésor, il y a 316 000 chefs de ménage aptes au travail. Cette
année, on a réussi à en placer à peu près 25
000 ou 26 000. Et cela a coûté presque 70 000 000 $. Imaqinez-vous
combien cela va coûter pour en placer 316 000.
M. le Président, ce que le ministre oublie de dire, c'est que,
quand l'explication des conséquences de la réforme de
l'assurance-chômage sont arrivées, cela faisait déjà
un mois et demi que l'Opposition avait mis en garde le gouvernement, et le
premier ministre et le ministre, sur ces conséquences.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Verchères, en conclusion.
M. Charbonneau: M. le Président, avec la collaboration du
ministre, j'achève. Comme je vous l'ai dit, n'ayant pas de texte, c'est
plus difficile de chronométrer et
d'arrêter. Mais je promets au ministre de ne pas faire durer le
supplice encore trop longtemps. Il y a encore quelques vérités
qui doivent être dites.
Le Président (M. Bélanger): Je vous ferai remarquer
que votre temps est écoulé.
M. Charbonneau: Oui, mais j'ai le consentement du ministre, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Je comprends que vous
ayez le consentement du ministre, mais c'est le consentement de la commission
qu'il faut avoir.
M. Charbonneau: Alors, je présume que...
Le Président (M. Bélanger): Est-ce qu'il y a
consentement pour qu'il continue? Est-ce qu'il y a consentement pour que M. le
député de Verchères continue? Oui, consentement.
Merci.
M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Je remercie mes
collègues qui, malgré le fait que je ne dise pas des choses qui
doivent leur plaire, ont le fair-play d'écouter religieusement.
Lorsque j'avais mis en garde le gouvernement, j'avais notamment dit que
le gouvernement devait évaluer les conséquences d'une
réforme de l'assurance-chômage, sauf que dans les textes qui,
à ce moment, avaient été présentés au
Conseil des ministres, au moment même où moi je rendais public mon
document, il n'y avait aucune référence aux conséquences.
C'est comme si le ministre avait découvert dans le texte de l'Opposition
qu'il y avait une conséquence et que le premier ministre avait saisi
qu'il y avait une réforme de l'assurance-chômage qui pourrait
arriver d'Ottawa. Cela lui donnait un sacré bon prétexte pour ne
pas trop accabler son ministre par rapport à ses devoirs mal faits. (16
h 30)
M. le Président, il n'y a pas eu d'ajustement des barèmes
de l'aide sociale en fonction des besoins réels, sauf l'indexation
annuelle, malgré le diagnostic du livre blanc sur la fiscalité
des particuliers. Le ministre nous annonce dans son projet de réforme
qu'il va augmenter les barèmes de l'aide sociale pour les inaptes au
travail, sauf que, ce qu'on avait promis en campagne électorale aux
assistés sociaux, c'est plus que ce qu'ils avaient. Ce que le livre
blanc sur la fiscalité des particuliers indiquait, c'est que, par
rapport à l'objectif de lutte contre la pauvreté, il est
évident que les barèmes actuels de l'aide sociale ne permettent
pas aux gens de répondre à leurs besoins essentiels.
On se serait attendu à plus du gouvernement, surtout avec la
vantardise, le résultat en termes d'économies que le ministre
nous a livré tantôt. Je pense que, si le ministre avait
été le moindrement sérieux, si ce gouvernement avait eu
comme priorité l'aide aux plus démunis, à la lutte contre
la pauvreté, il aurait fait en sorte qu'une partie importante des sommes
récupérées puisse au moins être affectée aux
gens qui sont plus démunis. Il n'y a pas eu de hausse des allocations
scolaires de 35 $ à 100 $, comme cela avait été promis en
campagne électorale, que les jeunes qui sont sur l'aide sociale
attendent toujours. Il n'y a pas eu d'ajustement non plus des frais de
scolarité accordé aux bénéficiaires de l'aide
sociale qui participent au programme de relèvement de
l'employabitité. Pas de hausse, comme je l'ai dit tantôt, du
revenu de travail admissible. Pas de règlement non plus du dossier du
lait maternisé pour les assistées sociales, comme c'est attendu
depuis encore longtemps. Pas de politique, comme je l'ai indiqué, en
fait, pas de stratégie de plein emploi. Pas de politique de
sécurité du revenu à la retraite. Tantôt, le
ministre fait un peu, dans le cas de sa promesse électorale - en fait,
celle de son gouvernement et de son parti - à l'égard de la
participation des femmes au foyer au Régime de rentes du Québec,
un peu comme à l'égard de l'aide sociale: Cela viendra plus tard
quand nos hypothèses seront prêtes et qu'on aura réussi
à arrimer nos affaires. Cela fait un an et demi! II me semble qu'on
serait en droit d'attendre que les arrimages soient faits maintenant et qu'on
sache si le gouvernement veut respecter son engagement électoral. Si
oui, comment va-t-il le faire? Quand compte-t-il le faire?
On attend encore après. Il n'y a rien qui ait été
fait pour régler le problème des régimes de rentes
supplémentaires et de l'intégration et de l'harmonisation des
régimes de rentes privés et des régimes de rentes publics.
Le ministre nous a dit aux crédits, l'an dernier: Je mets sur les
tablettes le projet de loi 58 que vous aviez préparé, vous,
qouvernement péquiste. Mais le ministre n'a rien fait dans ce dossier.
Non seulement il n'a rien fait, mais on étudie actuellement à
l'Assemblée législative de l'Ontario un projet de loi qui n'est
pas identique au projet de loi 58 préparé par le qouvernement du
Parti québécois mais semblable, à bien des égards,
qui s'y inspire. Ici, on n'a rien sur notre table législative. Ce
dossier traîne encore. Rien non plus sur tout le problème de la
bonification des pensions accordées par le Régime de rentes. Le
ministre sait très bien, parce qu'on a eu l'occasion de s'en entretenir
à quelques reprises, à deux reprises au moins à
l'Assemblée nationale, lors de la présentation de projets de loi
sur les régimes de rentes, qu'il y a ce problème de la
dévaluation,
d'une certaine façon, de la valeur des pensions. Rien n'est sur
la table de travail actuellement.
M. le Président, je pourrais continuer, mais, en conclusion, avec
les crédits qui nous ont été déposés, avec
les projets présentés, avec l'action que le gouvernement a faite
et ce qu'il nous annonce, il n'y a pas lieu, j'ai l'impression,
d'espérer une amélioration substantielle pour les milliers, tes
dizaines, les centaines de milliers de personnes qui vivent sous le seuil de la
pauvreté au Québec et qui s'attendent d'un gouvernement, quel
qu'il soit, à un certain nombre de choses par rapport à la lutte
contre la pauvreté. Un gouvernement doit non seulement établir
une fiscalité plus équitable, qui ne pèse pas
démesurément sur les petits salariés et qui incite au
travail par la création d'un écart assez grand entre les
travailleurs et les personnes contraintes à vivre de prestations de
sécurité sociale. Je conviens que la mesure qui a
été introduite par le ministre des Finances va dans cette
direction qui avait été préparée - le ministre
devrait le reconnaître - par le gouvernement précédent.
Bon! II doit aussi donner des prestations de sécurité sociale
suffisamment élevées pour répondre aux besoins essentiels,
réels, des gens contraints d'y avoir recours, tout en visant un
traitement équitable entre les différents types de
ménages. Il doit aider efficacement les bénéficiaires de
l'aide sociale à devenir plus employables et à intégrer
plus facilement le marché du travail, et à ne pas se faire
exploiter non plus quand ils font un effort pour participer à des
mesures de relèvement. Corollairement, il doit mettre en place des
mécanismes efficaces d'incitation au travail. Il doit faciliter
l'établissement et l'action de suffisamment d'organismes capables de
favoriser l'intégration au travail des bénéficiaires de
l'aide sociale, des chômeurs et des personnes mal préparées
à entrer sur le marché du travail. Quand on regarde ce que le
ministre s'apprête à faire dans le programme SEMO, d'abandonner
toute une catégorie de personnes qui sont en difficultés et de
concentrer son action uniquement sur les assistés sociaux,
catégorie importante mais non pas unique de personnes dans le
besoin...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Verchères, je vous ferai remarquer qu'on
dépasse de quinze minutes et on dispose de sept heures et demie pour les
crédits. Ils doivent tous être adoptés.
M. Charbonneau: Voilà, M. le Président, mais
j'achève. Le gouvernement doit aussi soutenir efficacement les pouvoirs
publics locaux et les organismes privés à but lucratif et non
lucratif afin que les logis en nombre et en qualité suffisants soient
disponibles pour les gens dans le besoin. Je comprends que ce n'est pas la
responsabilité du ministre, mais il y a une relation et il le sait
très bien - le livre blanc sur la fiscalité des particuliers le
disait - entre les politiques d'habitation et les politiques de
sécurité du revenu.
Il doit faire en sorte aussi que les services d'instruction, de
formation professionnelle, de recyclage et d'éducation populaire soient
non seulement adéquats, mais également en nombre suffisant. Il
doit encourager et soutenir adéquatement les actions d'entraide et de
bénévolat afin qu'une plus qrande quantité de services
d'aide de qualité parviennent aux personnes dans le besoin. Il doit
favoriser une plus grande solidarité sociale. II doit lutter contre la
dévalorisation et la déresponsabilisation des personnes
démunies. Il doit aider les personnes plongées dans la
pauvreté à ne pas sombrer dans l'isolement, le désespoir,
la révolte, la violence, le suicide et la délinquance. Je me
demande comment se sentent aujourd'hui les gens qui ont vu leur situation,
à la suite des visites à domicile, se détériorer,
des gens qui ne roulaient pas sur l'or. On doit faire de la lutte contre la
pauvreté, l'établissement d'une plus grande justice sociale, une
priorité politique qui se traduit par des choix budgétaires et
fiscaux appropriés, ce qui n'est pas le cas, ni dans ces crédits
présentés actuellement, ni dans ceux que nous avions l'an
dernier.
Finalement, je me répète, je crois que c'est important de
le faire en conclusion, il doit faire du plein emploi l'objectif premier de
l'ensemble de la société en regard des activités
économiques. En conséquence, il doit impliquer tous les
partenaires socioéconomiques dans l'élaboration d'une
stratégie de plein emploi et dans la mise en oeuvre de politiques et de
programmes orientés vers l'atteinte de cet objectif.
Voilà ce que les propos du ministre m'amènent à
dire maintenant et ce que les crédits que nous avons eu l'occasion
d'éplucher et que nous aurons l'occasion d'approfondir avec le ministre
au cours des prochaines heures. Je vous remercie, M. le Président, de
votre patience, ainsi que mes collègues de la commission.
Le Président (M. Bélanger): Est-ce qu'il y a
d'autres déclarations préliminaires?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Peut-être qu'avec la
permission de la commission je pourrais répliquer très
brièvement, cinq minutes au maximum, à quelques-uns des points
essentiels qu'a touchés le député de Verchères pour
ne pas les laisser sans réponse.
Le Président (M. Bélanger): Est-ce que j'ai le
consentement de cette commission?
Oui, M. le ministre.
M. Pierre Paradis (réplique)
M, Paradis (Brome-Missisquoi): Le premier point que je retiens de
l'intervention du député de Verchères est le suivant:
l'écart entre les riches et les pauvres dans notre
société. Je vous dirai que c'est une question à laquelle
je me suis attaqué dès mon assermentation. Je vous dirai que je
ne peux pas comprendre l'affirmation du député de
Verchères, et je comprends que l'Assemblée nationale ait
rejeté très majoritairement et très massivement sa motion
d'il y a quelques semaines sur ce sujet. Je lui rappellerai tout simplement
que, l'an dernier, alors que dans l'ensemble des conventions collectives au
Québec, les travailleurs et les travailleuses obtenaient des majorations
de revenus de 4 % et moins, l'indexation de leurs revenus qu'ont connue les
assistés sociaux s'élevait à 4,1 %. Quand on parle des
gens qui, dans notre société, travaillent au plus bas salaire,
soit au salaire minimum, je lui dirai que, contrairement à son
gouvernement qui avait complètement délaissé, pour ne pas
dire oublié, ces bas salariés depuis 1980, pendant cinq ans, je
ne sais pas où il était, lui, le député de
Verchères - il ne devait pas faire partie de ce gouvernement ou de sa
députation - mais les augmentations qu'ont connues l'an passé ces
gens par une décision gouvernementale ont été, en ce qui
concerne les gens qui travaillent au salaire minimum, de l'ordre de 8,75 % et,
quant aux gens au pourboire dont le salaire minimum est encore
inférieur, de 10,6 %. Je lui dirai que la considération du
présent ministre pour ces gens n'a pas contribué à un
écart négatif mais a contribuer à faire en sorte que du
rattrapage, qui était socialement juste et justifié, s'effectue
au cours de la dernière année au bénéfice de ces
gens.
Le deuxième point que j'ai relevé, le député
de Verchères dit ne pas comprendre la diminution du nombre
d'assistés sociaux. Il prétend que la croissance de l'emploi
était la même sous le gouvernement péquiste qu'au cours de
la dernière année du gouvernement libéral. Je dirais qu'en
moyenne, lorsque le gouvernement péquiste était au pouvoir,
c'étaient 65 000 emplois qui se sont créés et, pendant la
dernière année, que c'était zéro. D'avril 1985
à avril 1986, si on ajoutait ou si on soustrayait les emplois perdus des
emplois gagnés, on trouverait zéro. Avec le Parti libéral,
la situation a été à l'opposé: 103 000 emplois par
rapport à avril 1986 qu'on avait en avril 1987. Chez les jeunes de 15
à 24 ans, 17 000 emplois additionnels. Je pense que ce sont là
des faits révélateurs qui nous indiquent que, contrairement
à ce qu'il dit, les gens qui ont quitté l'aide sociale ne sont
pas ailleurs que sur le marché du travail et qu'être au travail,
cela n'appauvrit pas nécessairement un individu dans une
société.
Le troisième point, il est capital, M. le Président: les
effets humains des mesures que nous avons prises l'an dernier au
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.
Le député de Verchères tente de prétendre que ces
effets humains sont négatifs, que le statut d'assisté social
s'est dévalorisé au cours de la dernière année.
C'est un point de vue - et je vous le dirai - qui est soutenable dans certains
cas, mais qui est de moins en moins soutenante.
Dans la société, lorsqu'un qouvernement, quel qu'il soit,
laisse déraper un programme social et qu'il administre ce programme
social un peu comme un har ouvert, les gens dans leur vécu quotidien,
dans leur collectivité, dans leur communauté, se rendent
rapidement compte que le proqramme ne sert pas ceux et celles que le programme
est censé servir. C'est à ce moment-là que les effets
négatifs humains, que le statut social d'un groupe d'individus
dérape. Je ne vous dis pas que, présentement, nous avons
réussi à récupérer complètement la situation
que vous aviez laissée à la dérive, mais je vous dirai
qu'aujourd'hui on rencontre de plus en plus d'assistés sociaux dans nos
communautés et qui nous disent que, grâce au travail
effectué par le gouvernement, les gens sont de plus en plus conscients
que ceux et celles qui reçoivent de l'aide sociale dans la
société sont ceux et celles qui ont droit à l'aide sociale
et que, plutôt que de retirer du mépris, lorsqu'on n'administre
pas un progamme comme vous l'aviez fait à votre époque, les gens
ont de la sympathie, de l'encouragement et de l'aide de leur voisinage de
façon à réintégrer le marché du travail. Je
dirai que, sur cela, je partage une opinion complètement opposée
à celle que vous avez émise.
Vous semblez vouloir cautionner d'une certaine façon - et je le
dis prudemment, M. le député de Verchères -
l'illégalité dans les proqrammes, quels qu'ils soient. Je ne vous
dirai pas que les programmes qu'on administre actuellement sont
complètement adaptés aux besoins des gens ou à la
réalité, parce que nous ne les avons pas encore modifiés.
Les proqrammes qu'on administre sont ceux dont on a hérité de
l'ancien gouvernement.
Je vous dirai que, lorsque vous me citez le livre blanc et que vous nous
dites qu'il y a là des pistes intéressantes d'encouragement au
travail, vous avez complètement raison, mais je vous dirai que vous avez
tort lorsque vous dites que le gouvernement n'a pas encore commencé
à suivre ces pistes. Le gouvernement est au travail quant à
l'incitation au travail, est au travail quant au programme APTE, est au
travail quant au programme Soutien financier, le gouvernement actuel est
au travail quant à son programme de sécurité du
revenu.
Le cinquième point, et je serai très bref
là-dessus, M. le Président, les congédiements, pour
utiliser l'expression du député de Verchères, avait
réussi à ameuter à peu près toute la Tribune de la
presse, à savoir qu'il y aurait environ 500 personnes au
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
qui seraient congédiées. Il a même parlé de "cheap
labour"; j'ai vérifié, parce que je ne possède pas toutes
les échelles de salaires, auprès des fonctionnaires qui
m'accompagnent. Vous avez dit cela aujourd'hui, vous n'aviez pas de texte, mais
on retournera à la transcription du Journal des débats.
Les gens sont rémunérés, ce qui est juste et
équitable, je pense, aux alentours de 20 000 $ à 22 000 $ par
année. Les gens de la Tribune de la presse ont compris également
que, dans un cas, il s'agissait d'une prolongation pour nos gens qui sont
bénéficiaires de l'aide sociale de la période de six mois
de façon à, si possible, l'amener à trois ans pour qu'ils
aient les mêmes droits et privilèges que ceux qui ne sont pas ou
qui ne viennent pas sur nos programmes d'aide sociale. Quant aux autres, les
gens ont compris qu'il s'agissait d'occasionnels et qu'un sain roulement
d'occasionnels de la fonction publique, lorsqu'il est bien effectué, ne
pénalise personne et qu'au contraire il permet à plus de nos
concitoyens, spécialement des jeunes, de venir acquérir une
expérience pratique de travail qui facilite leur réinsertion dans
d'autres ministères ou dans le secteur privé.
Je terminerai cette brève réplique en disant que le
député de Verchères joue bien son jeu; il l'a dit au
début en mentionnant: Mon rôle, c'est de m'opposer, je fais partie
de l'Opposition, c'est ce que je fais. C'est ce qu'il a fait. Il avait
également commencé ses propos en disant: Je connais maintenant
mieux le ministre et ses dossiers. Je lui dirai en terminant qu'il serait
peut-être mieux de connaître davantage les dossiers que le
ministre, il aurait été plus précis quant aux citations
qu'il a faites. Merci, M. le Président.
M. Charbonneau: M. le Président, seulement un commentaire.
Si le ministre est... Si vous permettez...
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse.
Écoutez, là, on déroge à la procédure
habituelle. Je veux bien faire des élargissements, mais si on fait cela,
on va faire tout le débat dans les remarques préliminaires et on
ne fera aucun débat dans les programmes.
M. Charbonneau: Tout ce que je peux dire, c'est que, par
tradition, cela se fait souvent, mais que je n'abuserai pas, seulement deux ou
trois minutes.
Le Président (M. Bélanger): Bon. C'est parce que
j'espère...
M. Charbonneau: Je n'ai pas peur...
Le Président (M. Bélanger): ...qu'on
n'établit pas la tradition aujourd'hui; c'est juste cela.
M. Charbonneau: Non, non, il ne s'agit pas d'établir la
tradition, il s'agit de suivre la tradition.
M. le Président, seulement une chose: le ministre a mal compris
et s'il comprend toujours ses dossiers comme cela, je comprends qu'il fasse
faire ses devoirs au Conseil des ministres.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est limité à vos
propos, je tiens à vous rassurer. (16 h 45)
M. Charbonneau: Quand j'ai parlé de "cheap labour"
à l'éqard des congédiements, ce que je voulais dire et ce
que j'ai dit, je pense, c'est que ces personnes ont la responsabilité,
parce qu'elles encadrent les bénéficiaires de l'aide sociale dans
les mesures, notamment dans les stages en entreprise, de faire en sorte,
justement, que les employeurs ne profitent pas des bénéficiaires
de l'aide sociale pour en faire des gens qui travaillent comme une
main-d'oeuvre à bon marché. On se comprend?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...
M. Charbonneau: La deuxième question est importante et
peut-être plus grave. Il ne s'aqit pas pour moi de cautionner
l'illégalité, il s'aqit simplement de reprendre le constat que
deux documents gouvernementaux, fédéral et
québécois, ont tracé et que, à un moment
donné, il faut avoir en tête. Il ne s'agit pas de jouer à
l'autruche, il s'aqit de savoir qui est le premier responsable. Dans le fond,
il s'agit de se rendre compte que le premier responsable, c'est le gouvernement
lui-même. Le qouvernement commence par pourchasser les gens plutôt
démunis plutôt que de corriger son propre comportement qui est la
cause principale de ces comportements de débrouillardise sociale.
Le Président (M. Bélanger): Avec tout ce qui s'est
dit, j'espère qu'il en restera un peu pour discuter chacun des
programmes. Est-ce qu'on peut appeler le programme 6? J'appelle donc le
programme 6, Prestations d'aide sociale.
Prestations d'aide sociale Visites à
domicile
M. Charbonneau: M. le Président, je vais indiquer au
ministre quelle approche je vais adopter. Je vais d'abord commencer par
approfondir un peu tout cet aspect des visites à domicile; dans un
deuxième temps, je voudrais discuter avec lui son projet de
réforme et les éléments du programme, celui de l'aide
sociale et celui de la protection et du développement de l'emploi qui y
sont reliés. Il y a un certain nombre d'autres questions qui touchent
d'autres éléments ou d'autres aspects du programme d'aide
sociale.
D'abord, concernant le bilan des visites à domicile à ce
jour, j'aimerais bien qu'on se comprenne au niveau statistique, juste pour
qu'on sache... Auparavant, j'aimerais parler des statistiques plus
générales sur l'ensemble de la situation au niveau de l'aide
sociale. Le ministre nous a dit tantôt qu'il y avait actuellement 389 600
ménages bénéficiaires de l'aide sociale. C'est combien de
personnes, au total? Quand on parlait de 416 000, on parlait de 694 000
personnes.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): 694 000 ou 695 000.
M. Charbonneau: Donc, si on parle de 389 600, presque 390 000
ménages bénéficiaires de l'aide sociale, combien de
personnes sont-elles concernées par l'aide sociale? Ce ne sont pas
seulement des ménages...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez-moi, mais je pense que
vous avez quand même en main l'énoncé que j'ai fait au
début. Si je vous réfère à la page 3 dudit texte,
vous devriez trouver les réponses.
M. Charbonneau: Vous parliez de 692 000 en 1986, en relation avec
415 000; en fait, 416 000, peut-être.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais vous avez 413 093, ce
sont des ménages, vous le mettez en relation avec les 389 600. Vous avez
une baisse approximative de 26 000 ménages.
M. Charbonneau: Oui, oui, cela va, mais...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Maintenant, quant aux individus
qui dépendent de l'aide sociale, vous aviez, en avril 1986, 692 507, et
maintenant, en 1987, vous soustrayez les 43 000 du paragraphe suivant et vous
avez votre réponse. Je peux le faire pour vous, si vous voulez.
M. Charbonneau: C'est 43 000 de 692 000, je suppose.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Lorsqu'on vous dit: "Ce sont plus
de 43 000 adultes et enfants qui, au Québec, ne dépendaient plus
des prestations de l'aide sociale par rapport à avril 1986", on se
plaçait d'une année à l'autre.
M. Charbonneau: Donc, c'est à peu près 650 000.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais me fier à votre
calcul.
M. Charbonneau: À peu près.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): 648 900.
M. Charbonneau: Bon. Vous avez l'avantage d'avoir des...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez raison. Vous êtes
accompagné, vous aussi?
M. Charbonneau: Je suis accompagné, mais disons que le
"staff" est moins gros.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans quel sens?
M. Charbonneau: Combien de ces personnes, combien de
ménages employables... Regardons les chiffres, notamment les documents
qui ont coulé à un moment donné, on parlait de 98 000
ménages de personnes non employables ou inaptes au travail par rapport
à 318 000 chefs de ménage qui étaient disponibles et
employables.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce qui inclut les plus de 30 ans,
pour qu'on se comprenne bien.
M. Charbonneau: Oui, tout le monde.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Cela, ce sont des
évaluations, pour qu'on se comprenne bien, qui ont été
faites à partir de la clientèle de mars 1986.
M. Charbonneau: Vous n'avez pas une clientèle
adaptée, actuellement. J'imagine que, si vous avez déposé
un document au Conseil des ministres il y a une semaine et demie, c'est parce
que vous avez dû...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, je vous dis qu'il y a des
chiffres qui ont coulé.
M. Charbonneau: Oui, oui, je sais. C'est pour cela que je vous
demande une actualisation de ces chiffres. Combien, actuellement, sur les 650
000... Pour qu'on se comprenne, combien sur les 390 000
ménages y en a-t-il d'employables ou d'aptes au travail et
combien y en a-t-il d'inaptes au travail?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour tenter de faciliter la
compréhension du dossier, vous comprendrez que, pour les moins de 30
ans, les chiffres du ministère quant aux personnes qui sont inaptes, si
je peux utiliser cette expression, sont assez certains et assez précis,
parce que le niveau de la rémunération est directement
affecté sur une base mensuelle et annuelle. Quant aux personnes qui sont
âgées de plus de 30 ans, il s'agit d'une estimation la plus
précise possible qui est faite par le ministère ainsi que par le
secrétariat du Conseil du trésor et, à ce
moment-là, vous pouvez tenir pour acquis que le chiffre de 98 000 qui a
coulé, pour l'arrondir à 100 000, l'an passé est
demeuré pratiquement le même. Ce qui a changé à
l'aide sociale, ce n'est pas le nombre de personnes incapables de travailler ou
inaptes, c'est le nombre de personnes aptes au travail. Donc, les
réductions que nous vous communiquons dans le nombre de
bénéficiaires, vous pouvez les appliquer quasiment à 100 %
aux personnes qui sont aptes au travail.
M. Charbonneau: Je ne suis pas sûr de cela, moi. Je suis
convaincu qu'il y a des gens qui ont eu à subir des visites à
domicile et qui ont perdu leurs prestations d'aide sociale, mais qui pouvaient
être considérés comme des individus inaptes au travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, ce que je vous
dis, c'est que vous pouvez le faire à 95 % et plus. Je ne veux pas vous
donner cela de façon affirmative à 100 %, mais on m'informe que
c'est à 95 % et plus.
M. Charbonneau: Est-ce que vous pouvez nous indiquer si...
À un moment donné, dans vos chiffres...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Disons qu'on continue à
fonctionner, pour les fins des chiffres que nous produisons... Quand les
nouveaux chiffres couleront, vous allez retrouver encore 98 000.
M. Charbonneau: Est-ce qu'on peut s'entendre pour dire que -
peut-être que le sous-ministre pourrait nous donner une
appréciation - dans vos documents qui ont coulé, vous parliez
à peu près de 22 % d'inaptes au travail ou de non employables par
rapport à 78 % d'aptes au travail. Le livre blanc sur la
fiscalité parlait plutôt de 87 % de chefs de ménage aptes.
J'aimerais d'abord comprendre ce qui explique une différence de 10 %.
Par ailleurs, est-ce que votre proportion, dans les documents qui ont
coulé, est restée la même? Mais vous comprendrez qu'il y a
une contradiction entre le livre blanc sur la fiscalité des particuliers
qui dit que c'est 87 % des chefs de ménage qui sont aptes au travail et
vous qui dites que c'est 78 %.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, il y a un préambule
auquel il faut toujours faire attention lorsqu'on cite des chiffres ou des
pourcentages dans ces cas-là. La prémisse, c'est qu'il faut
s'appuyer sur la même définition des mots "apte" et "inapte". Si
on s'appuie sur une définition qui est plus large, plus serrée,
etc., quel que soit le mérite de la définition, les chiffres
peuvent changer assez rapidement.
M. Charbonneau: Si on prend la définition que vous avez
utilisée, celle que le gouvernement appliquerait éventuellement,
est-ce qu'on peut dire que la proportion en rapport avec le nombre exact n'a
pas changé?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai que la proportion
n'a pas changé, mais que le gouvernement a utilisé, dans les
rapports qui ont été soumis au Conseil du trésor, au
ministère des Finances ainsi qu'au Conseil des ministres à
plusieurs reprises, une définition qui a fait l'objet d'une profonde
réflexion. J'ajouterai que, parce que l'exercice de la
présentation d'une réforme de la sécurité du revenu
doit aller en consultation, il ne s'agit pas d'une définition qui est
coulée dans le ciment en ce sens que nous serions - je l'indique pour
cet élément qui est important, comme pour plusieurs autres
éléments... Si nous allons en consultation, ce n'est pas pour
dire aux qens que nous avons arrêté toutes nos décisions,
mais pour leur expliquer que nous avons retenu certaines orientations et que
les motifs qui nous animent ne sont pas coulés dans le ciment. S'il
fallait, en cours de route, modifier - on sait comment cela peut être
sensible, une légère modification dans une telle
définition - s'il fallait chanqer, les scénarios changent et nous
avons préparé plusieurs scénarios.
Le sous-ministre m'indique que la définition du livre blanc est
beaucoup plus stricte que celle que l'on applique, nous, présentement au
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
quant à notre programme d'aide sociale.
M. Charbonneau: Est-ce que le ministre peut ventiler par
catégories les assistés sociaux qui sont en cause? Autrement dit,
qui sont-ils, les gens qui ont quitté l'aide sociale depuis un an?
Est-ce que ce sont des jeunes ou des plus vieux, des femmes ou des hommes, des
célibataires ou des chefs de famille?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, je vais tenter de vous donner
l'information très détaillée que vous demandez avec les
sous-catégories, comme je vous avais fourni des renseignements aussi
détaillés... Je peux vous indiquer qu'en majorité H
s'agissait de jeunes de moins de 30 ans.
M. Charbonneau: De jeunes de moins de 30 ans.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.
M. Charbonneau: Est-ce que c'étaient des jeunes chefs de
famille?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La ventilation comme telle...
M. Charbonneau: Les données qu'on a, en tout cas,
certaines des données qu'on a datent de décembre 1986, dans le
document des crédits. Vous comprendrez que, si on essaie de faire un
bilan de l'année, on devrait faire un bilan à partir des chiffres
de l'année financière, pas juste des trois quarts de
l'année.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais vous donner ce que l'on a
de prêt à vous fournir et les chiffres que je vous donne sont de
décembre 1985 à décembre 1986. C'est également
important de noter les dates pour bien compléter les chiffres que nous
vous avons déjà remis et qui s'arrêtaient quelques mois
avant, si ma mémoire est fidèle, à septembre,
peut-être, les chiffres qu'on vous avait remis.
M. Charbonneau: Ceux de l'automne, c'est-à-dire ceux d'il
y a quelques semaines à l'Assemblée, en réponse aux
questions inscrites à l'automne.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ils allaient jusqu'à
octobre.
M. Charbonneau: Oui, c'est cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce que je peux vous ajouter, c'est
jusqu'à décembre 1986, qui sont nos chiffres validés et
confirmés. Le nombre de ménages de moins de 30 ans est
passé de 146 587 en décembre 1985 è 124 306 en
décembre 1986, tandis que le global est passé de 411 691 è
383 431.
J'ai également les données quant au sexe du chef de
famille: masculin de moins de 30 ans, le chiffre est passé de 67 271
à 55 747, sur un total de 204 179 qui est passé à 188 699;
féminin de moins de 30 ans, le chiffre est passé de 79 316
à 68 559 comparativement à un total de 207 512 sur 194 732.
J'ai également des informations, à savoir s'ils
résidaient chez leurs parents ou pas, pour les moins de 30 ans et les
plus de 30 ans.
M. Charbonneau: Vous utilisez les mêmes chiffres que ceux
qu'on a. Je pense qu'on va se contenter de lire vos tableaux.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pourrais même vous dire
que nous pourrons compléter les informations qu'on vous avait
données, parce que les chiffres étaient validés à
ce moment-là et que votre question portait là-dessus, d'octobre
à décembre, de façon que vous puissiez faire le suivi.
M. Charbonneau: Est-ce qu'on pourrait s'entendre, M. le ministre,
que, sur une base régulière, lorsque vous avez des rapports
statistiques, on puisse les avoir?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Parfois, vous les avez avant
nous.
M. Charbonneau: Pas toujours. Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Charbonneau: Pas toujours. Mais on pourrait s'entendre pour
qu'on les ait toujours en même temps que vous.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous me donnez les
vôtres.
M. Charbonneau: Je peux "dealer" cela, si vous voulez.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je n'ai pas d'objection comme
telle, sauf qu'une fois les chiffres valides, je peux vous les faire
parvenir...
M. Charbonneau: Ce sont des chiffres publics. Ce ne sont pas des
secrets d'État.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, c'est parce qu'on les valide
trois mois après.
M. Charbonneau: Oui, mais j'aime mieux les avoir trois mois
après qu'un an après. Vous comprenez?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.
M. Charbonneau: Si c'est à tous les trois mois, j'ai au
moins ceux des trois mois précédents.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va vous éviter
d'inscrire la question au feuilleton. Dans la mesure du possible, je ne veux
pas faire un engaqement formel, mais je vais tenter de vous les
expédier.
M. Charbonneau: Votre attaché politique étant
habitué à nous donner un bon service, peut-être pourrait-il
continuer si vous en donnez le mandat?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'était ià le seul
objet de mon inquiétude.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Charbonneau: M. le ministre, on a essayé un peu
tantôt - je l'ai dit dans mon exposé - d'aller un peu plus loin
dans les raisons qui expliquent que les gens ont quitté l'aide sociale.
Vous avez identifié le nombre de personnes qui ne sont plus
bénéficiaires de l'aide sociale. Est-ce qu'on peut vraiment dire
combien de personnes ont quitté l'aide sociale à la suite des
visites, combien à la suite de départs volontaires? À un
moment donné, ces gens-là, pour toutes sortes de raisons, ont eu
des revenus additionnels qu'ils ont déclarés, qu'ils ont
été obligés de déclarer à la suite des
visites et qui, finalement, ne les rendait plus admissibles. Combien y en
a-t-il eus? Combien aussi ont dû quitter l'aide sociale parce qu'il y a
eu des modifications aux barèmes qui, dans certains cas, ne les
rendaient plus admissibles? Vous comprenez qu'après la façon dont
vous avez présenté le résultat, vous vous êtes pas
mal vanté que, finalement, vous avez réussi une superperformance.
Je voudrais que vous ventiliez un peu cette performance-là; je voudrais
la comprendre un peu mieux, finalement. (17 heures)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je m'excuse si je vous ai
donné l'impression qu'on s'est vanté de cette
performance-là. Ce qu'on a tenté de faire, c'est d'établir
les chiffres le plus précisément possible dans le cadre de
l'étude des crédits.
M. Charbonneau: ...plus loin maintenant.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai - et j'ai
tenté de donner toutes les précisions possibles - qu'il y a eu
122 752 dossiers de bénéficiaires de l'aide sociale où une
décision a été rendue à la suite d'une visite
à domicile au cours de l'année dernière, que dans 8,2 %
des cas, soit dans 10 034 dossiers, une décision a été
rendue à l'effet d'annuler tout simplement l'aide sociale, qu'il y a eu
4,4 % de demandes qui ont été refusées dès
l'inscription, soit 5343 dossiers, que 3,1 % des dossiers ont subi des
modifications à la baisse, soit 3755 dossiers, que 1,4 % des dossiers a
subi une modification à la hausse, c'est-à-dire 1745
dossiers.
M. Charbonneau: Si je comprends bien, par rapport aux chiffres de
tantôt, c'est-à-dire 43 000 adultes et enfants de moins sur l'aide
sociale au total cette année par rapport à l'an dernier et 10 000
personnes de moins à la suite des visites à domicile, c'est donc
le quart de votre diminution de clientèle qui est dû aux visites
à domicile.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II faut faire la distinction,
là. L'annulation de l'aide, lorsqu'on dit 10 034 annulations, il s'agit
de dossiers de ménages qui ont été annulés.
Même chose quand on dit: Modifications à la hausse. II s'agit,
dans chacun des cas dans ces chiffres-là, non pas d'individus, mais de
ménages.
M. Charbonneau: Donc, si on considère que vous avez une
baisse approximative d'à peu près 26 000 ménages et que
vous en avez 10 000 annulés à la suite des visites à
domicile, c'est peut-être 40 %. Je ne suis pas très bon en calcul,
mais c'est un peu moins de 50 %...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est ça.
M. Charbonneau: ...qui sont dus aux visites à
domicile.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Vous avez l'effet
direct...
M. Charbonneau: Donc, la performance économique... Il ne
faut pas charrier, hein?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On s'est rendu compte qu'il y
avait plusieurs éléments qui faisaient en sorte qu'il y avait une
baisse de clientèle à l'aide sociale et j'ai tenté de vous
l'indiquer. Nous pensons et nous croyons sérieusement, de ce
côté-ci, que la croissance de l'économie... Tantôt,
je vous donnais le nombre d'emplois créés d'avril à avril,
soit 103 000. J'insistais, parce que ça correspond à nos
statistiques, à l'importance chez les jeunes de 14 à 24 ans, du
nombre d'emplois créés. Lorsqu'on compare avec notre diminution
de clientèle, ce n'est pas obligatoirement à la suite d'une
visite à domicile, ça peut être parce que la personne nous
a appelés également pour nous dire: Je me suis trouvé un
emploi, annulez...
M. Charbonneau: Ce que j'appelais tantôt "un départ
volontaire".
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Un départ volontaire. Ca
peut également être un effet d'entraînement des visites
à domicile. On a eu des cas où les gens nous ont dit: Je me suis
trouvé un emploi ou je vais me trouver un emploi demain. On n'est pas
allé vérifier s'ils l'avaient trouvé la veille, etc. La
personne, dans la vie, posait un geste positif et nous ne sommes pas
retournés en arrière.
L'ensemble de cette conjoncture a
donné les résultats que je vous donne en termes de
dossiers, en termes de pourcentages et les résultats que je vous ai
donnés également en termes financiers qui sont facilement
vérifiables en conciliant les crédits déposés par
le ministère des Finances.
M. Charbonneau: Est-ce que le ministre peut nous indiquer combien
de cas de fraude proprement dit par rapport à l'ensemble de ces...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais voua donner une
réponse précise.
M. Charbonneau: Vous avez effectué 122... Comme on disait
tantôt il y a eu 122 752 dossiers où une décision a
été rendue à la suite des visites à domicile.
Combien y a-t-il eu de cas de fraude?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je peux m'engager à vous
donner une réponse précise, si vous la voulez, mais elle va
être coûteuse pour le ministère et je vous dis pourquoi. Les
seuls cas que je suis prêt à considérer comme étant
des cas de fraude sont des cas où la personne a été
condamnée suivant le Code criminel en dernière instance par un
tribunal de droit commun,
M. Charbonneau: Combien...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tous les autres cas ne sont pas
considérés chez nous comme des cas de fraude.
M. Charbonneau: Comme on ne met pas en...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Donc, il faudrait faire le
relevé dans les palais de justice.
M. Charbonneau: Oui. Comme on a laissé courir pendant
toute l'année qu'il y avait 20 % de cas de fraude à l'aide
sociale alors que dans les faits c'était 20 % de modifications à
l'aide sociale...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez! J'insiste... Le
vocabulaire...
M. Charbonneau: Je ne dis pas que le ministre a dit qu'il y avait
20 % de fraudeurs, mais il doit constater que dans les rapports de presse et la
façon dont on a traité ça dans l'opinion publique,
l'impression qui a été laissée, c'est qu'il y avait
beaucoup de cas de fraude. Quand le ministre me dit qu'il est prêt
à ne considérer que les condamnés, je dis qu'il y a aussi
les prévenus, c'est-à-dire ceux qui sont accusés.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Même pas.
M. Charbonneau: Comme on ne parle pas d'individus,
c'est-à-dire comme on ne nomme pas de personnes, il serait
peut-être intéressant de savoir, statistiquement parlant, combien
il y a eu d'accusations et combien il y a eu de condamnations. Cela veut dire
qu'on aurait le nombre de visites, le résultat, le nombre d'accusations
et le résultat, le nombre de condamnations. On pourrait peut-être
se rendre compte que... Je pense que, statistiquement, c'est important, pas
juste le nombre de condamnations, mais le nombre d'accusations. De toute
façon, c'est public. L'action gouvernementale de mettre en accusation
des gens est une action publique. Donc, le ministre ne devrait pas avoir de
réticence à nous donner ces renseignements.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, j'ai des réticences
parce que, pour autant que je suis concerné comme ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, la notion de
présomption d'innocence prévaut et tant que la personne n'a pas
été déclarée en toute dernière instance
coupable par un tribunal - et je dis en toute dernière instance parce
qu'elle aurait pu l'être par la Cour supérieure et aller en Cour
d'appel et même en Cour suprême - tant que le système
judiciaire n'a pas rendu une décision finale quant à la
culpabilité et à la non-culpabilité, je ne peux, ni comme
individu ni comme ministre, parler de fraude.
M. Charbonneau: Dans ce cas, pourquoi n'appliqueriez-vous pas le
même raisonnement? Pourquoi, quand vous avez une décision de
couper et que les gens vont en appel, ne suspendez-vous pas la coupure et
n'attendez-vous pas que la décision d'appel soit rendue? On a beaucoup
de cas qui nous ont été rapportés de gens qui ont
été coupés et qui, par la suite, ont vu leur situation
rétablie.
La présomption d'innocence, c'est bien beau, M. le ministre,
quand on parle de personnes, qu'on identifie des gens et qu'on les nomme. Il
n'y a pas grand danger d'atteinte à la réputation des gens quand
on parle de statistiques. Or, le résultat statistique et ce qu'on a
retenu de tout ce qui a été dit cette année à
l'occasion de cette opération de contrôle particulier du
gouvernement dans l'opinion publique, c'est qu'il y a beaucoup de fraudes.
Si le ministre veut maintenant faire amende honorable et dire:
Écoutez, je n'accréditerais pas cela dans l'opinion publique et
je veux plutôt m'en tenir aux chiffres des condamnations seulement, comme
ancien criminologue je peux vous dire - ou, enfin, quelqu'un qui a une
formation en criminologie - que n'importe quel crimino-
logue qui s'intéresserait au problème de la
criminalité ou de la fraude chez les assistés sociaux serait
intéressé de savoir combien il y a de mises en accusation,
combien il y a de condamnations, combien il y a de visites au total. Cela nous
donne un peu un ordre de grandeur, en fin de compte.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai que je n'ai pas le
goût de faire amende honorable parce que la définition de fraude
que je viens de vous donner est une définition de fraude que j'ai
toujours partagée, avant que j'entre en politique comme depuis que je
suis en politique. Donc, je n'ai pas changé d'idée et
peut-être que la formation légale que j'ai reçue à
l'université m'a permis de l'exprimer beaucoup plus clairement et
beaucoup plus précisément. Tout ce que je note, c'est qu'elle est
plus restrictive que celle que l'Opposition retient, que les prévenus ou
le nombre de dossiers des prévenus devrait faire partie des statistiques
de fraude. Je trouve cela dangereux comme principe.
Quant à la personne qui a une possibilité soit d'aller en
révision sur ie plan administratif, soit de faire appel à la
commission des affaires sociales, si elle fait partie des personnes qui ont
été soit coupées, soit diminuées quant à
leurs prestations d'aide sociale et même augmentées - mais c'est
plus rare que les gens vont en appel lorsqu'ils sont augmentés... Moi
aussi, je vis des cas qui ne sont pas faciles. Je vous dirai que ce n'est pas
juste avec l'aide sociale; avec la Régie de l'assurance automobile du
Québec, avec la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, etc. Lorsqu'on fait du bureau de
comté, qui n'a pas, comme député, reçu dans son
comté quelqu'un qui avait été coupé une bonne
journée, qui va en appel, soit l'appel sur le plan de révision
administrative et à qui on attribue de nouveau... Mais cette
période, entre le moment où la décision est rendue et le
moment où cela a été coupé, c'est une
période qui est difficile à vivre dans plusieurs cas et qui est
même impossible à vivre sur le plan financier dans certains cas.
C'est pourquoi au ministère...
M. Charbonneau: C'est plus grave que ce que le ministre dit. Je
constate que le ministre est sensible à cela. Comme député
de comté, ce serait étonnant qu'il ne le soit pas. Quelqu'un qui
fait du bureau de comté et qui n'est pas insensible, je vais comprendre
un peu, mais...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tous les samedis matins.
M. Charbonneau; Je vais vous donner un exemple. Une femme avec un
enfant qui vivait en pension chez un monsieur. On l'a obligée à
signer une déclaration sous menace. Elle a refusé, en fait, de
signer la déclaration. On lui envoie une réclamation de 36 759
$.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président.
M. Charbonneau: C'était une offre qu'elle ne pouvait pas
refuser et elle a refusé. Elle a été en appel et l'homme
qui la gardait en pension a dû avouer son homosexualité devant la
Commission des affaires sociales pour qu'elle retrouve ses droits sept mois
plus tard. Et le ministre hésite aujourd'hui à nous donner le
nombre de mises en accusation, mais il n'hésite pas à priver des
gens et à réclamer des gens des sommes considérables alors
qu'il y a présomption d'innocence, là aussi.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, j'aimerais
garder mon calme devant un député. Je comprendrais si le
député venait d'arriver à l'Assemblée nationale, si
c'était sa première élection et qu'il n'avait jamais fait
partie d'un gouvernement qui a dirigé la province pendant dix ans. Je
vous dirai qu'une de mes principales préoccupations - je l'ai
souligné dans mes notes l'année passée aux crédits
du ministère, je l'ai souligné à nouveau cette
année - comme ministre responsable de la Commission des affaire sociales
qui a à entendre en dernier ressort les plaintes de ces qens a
été d'installer des rèqles de pratique pour que les causes
soient entendues dans un délai beaucoup plus rapide et que les jugements
soient rendus dans un délai beaucoup plus rapide de façon
à réduire, autant que c'est humainement possible de le faire dans
le temps, les injustices que vous décriez et que vous tolériez
pour des périodes et des périodes et des périodes de temps
démesurées sans poser le moindre geste dans le but
d'améliorer l'appareil administratif.
Après 18 mois, je ne prétendrai pas avoir atteint la
perfection. Je vais prétendre ce qui est vrai, par exemple. C'est
d'avoir été conscient de ce problème, de m'y être
attaqué dès mon assermentation, d'avoir reçu la
collaboration du président et des assesseurs de la Commission des
affaires sociales et d'avoir amélioré en 18 mots un dossier que
vous aviez laissé détériorer pendant plus de dix ans. Je
vous dirai que vous avez raison de vous plaindre, que le cheminement ou la
rapidité de cheminement du dossier n'a pas encore atteint ce que
j'appelle pour le bénéficiaire une vitesse qui est acceptable,
qu'on a créé un rôle d'urgence pour les questions
d'urgence, qu'on
a une clause à l'aide sociale pour les personnes qui sont dans le
dénuement total et que nous continuons à travailler dans ce
sens.
La différence entre notre gouvernement et le gouvernement dans
lequel vous étiez, c'est qu'on est conscient de ces problèmes,
qu'on les améliore depuis les 18 mois que nous sommes là et que
nous continuerons à les améliorer jusqu'à ce qu'on
atteigne, si possible et si elle est de ce monde, la perfection.
M. Charbonneau: M. le Président, on pourrait faire te
bilan ici des dix ans pour voir toutes les améliorations qu'on a
apportées et on se rendrait bien compte que ce n'était pas la
perfection, mais le problème n'est pas là. Le problème,
c'est de savoir: Le ministre qui parle de la présomption d'innocence,
pour ne pas nous donner certaines statistiques, pourquoi n'applique-t-il pas le
même raisonnement pour des gens qui sont déjà dans une
situation démunie? Cela ne prend pas des années; il n'y a
qu'à prendre une décision politique. Pourquoi ne
décidez-vous pas politiquement que quelqu'un à qui on
réclame un montant d'argent, surtout quelqu'un qui voit sa prestation
coupée, ne voie pas l'application de cette mesure tant qu'il n'y a pas
un jugement en appel si la personne va en appel? C'est la présomption
d'innocence, là aussi.
Vous savez, vous qui êtes avocat, que quelqu'un qui est
présumé innocent ne va pas faire son temps en prison pour aller
en appel et à un moment donné en appel se faire dire: Vous
n'auriez pas dû aller en prison. L'appel fait en sorte que la sentence
est suspendue. L'exécution de la sentence est suspendue jusqu'à
ce qu'il y ait décision en appel. Pourquoi, dans votre cas, compte tenu
que c'est votre gouvernement qui met en place cette opération de visites
à domicile avec les conséquences que cela a, plus graves sur la
situation de ces personnes, pourquoi n'adoptez-vous pas une politique ou une
mesure qui ferait en sorte qu'au moins les conséquences ou les
jugements, et l'application des mesures qui privent les gens de fonds
n'interviennent pas en dernier recours quand il a été
établi que, finalement, c'est le ministère qui avait raison?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'avais déjà
poussé ce que j'imagine être l'aspect pédagogique de mon
travail avec le député de Verchères jusqu'à lui
envoyer une définition des dictionnaires du mot "parité" à
un moment donné. Au moment où il me parle, il parle de la
présomption d'innocence. Il applique la présomption d'innocence
de la même façon en droit pénal ou criminel qu'en droit
administratif ou civil. C'est une frontière qui est assez dangereuse
à traverser sur le plan de l'application des définitions, quel
que soit le programme...
M. Charbonneau: Celui qui a à joindre les deux bouts et
à faire vivre ses enfants...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.
M. Charbonneau: ...il se sacre bien de la différence entre
le droit administratif et le droit criminel! (17 h 15)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez complètement
raison. Lui est dans votre bureau de comté et il vous dit: Qu'est-ce que
ça veut dire que ça me prenait tant d'années dans le temps
à être entendu par la Commission des affaires sociales et que
ça s'est amélioré? II ne dit pas qu'il est content encore.
Mais si vous avez un cas urgent - je vous en informe peut-être comme j'ai
informé l'ensemble des députés de cette Chambre - vous
pouvez faire valoir par écrit vos motifs d'urgence au président
de la Commission des affaires sociales et sa cause est entendue par
préséance en ce qui concerne la Commission des affaires sociales.
Il y a beaucoup de députés et d'individus qui se sont
prévalus de cela cette année. J'ai même
vérifié, M. le député, du fait qu'on avait un
pourcentage d'annulations, de demandes refusées et de modifications
à la baisse et à la hausse qui était élevé,
à cause entre autres des visites à domicile, s'il y avait eu
augmentation dans les appels de façon à ce que,
administrativement, nous puissions prendre les mesures de manière
à ne pas pénaliser pendant des années et des années
les gens dont vous nous parlez. J'aimerais vous dire que l'augmentation a
été très légère en ce qui concerne les
appels au cours de l'année, contrairement à ce qu'on aurait pu
s'attendre, à la suite des annulations et des diminutions. Comme
ministre conscient de la problématique que vous nous soumettez, je
continue à travailler avec le président de la Commission des
affaires sociales à encore raccourcir ces délais, à encore
donner un meilleur service à celui ou à celle pour qui on est
supposé tous travailler - je pense qu'on le fait tous autour de cette
table - le bénéficiaire d'un programme qui s'appelle l'aide
sociale ou qui s'appelle un autre programme gouvernemental.
M. Charbonneau: M. le Président, je constate que le
ministre et moi nous ne sommes pas sur le même reqistre. Lui, il fait
valoir les améliorations, moi, je lui parle des problèmes
vécus. Je parle aussi du principe qu'il a lui-même invoqué
pour ne pas nous donner certaines statistiques. De toute façon, on
pourrait tourner en rond longtemps. Je pense que nos différences
d'opinion sont marquées. Je voudrais savoir
de la part du ministre si...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne veux pas que personne
quitte, et surtout pas le député de Verchères, en pensant
qu'au Québec, même dans le cas de refus de l'aide sociale au
premier niveau, une personne est laissée dans le dénuement total
jusqu'à ce que son appel soit entendu, même si les délais
administratifs étaient très courts. Nous avons une clause en ce
qui concerne l'aide sociale qu'en cas de dénuement total nous avons une
obligation légale d'agir. Je ne peux pas vous dire que j'ai
vérifié personnellement chacun des dossiers, mais ce sont les
directives ministérielles et sous-ministérielles qui sont
acheminées à chacun des bureaux. Je le dis pour le
bénéfice des bénéficiaires qui quelquefois
l'ignorent.
M. Charbonneau: II y a beaucoup de gens qui l'ignorent parce que
la dame en question dont je vous parlais tantôt non seulement a vu ses
prestations d'aide sociale coupées pendant sept mois, mais on lui
réclamait 36 000 $ en plus. Pendant sept mois elle n'avait rien pour
vivre. Il y a deux façons quand on n'a rien pour vivre, on peut
s'organiser et puis...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, si la dame
l'ignorait, son député aurait dû l'informer, s'il le
savait.
M. Charbonneau: J'espère que ce n'est pas un
député libéral, M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai dit: s'il le savait. Je
comprends qu'un député qui entre dans cette Chambre ne
connaît pas immédiatement l'ensemble de la législation et
de la réglementation.
M. Charbonneau: ...et tous les droits. Cela m'amène
à vous poser la question. Vous êtes d'accord avec nous pour
constater...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'en apprends encore.
M. Charbonneau: ...que finalement les gens ne sont pas toujours
informés de leurs droits. Pourquoi vous êtes-vous
entêté à ne pas informer les assistés sociaux de
leur droit de refus à la suite du jugement Tannenbaum?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le jugement Tannenbaum a fait
l'objet d'une publicité à peu près dans tous les
médias électroniques et dans toute la presse écrite et
autres. Je pense que, dans les jugements rendus au Québec au cours des
dernières années, sans doute que ce jugement a été
l'un de ceux qui, sur le plan de la communication-média, qu'il s'agisse
des médias électroniques, radio, TV, etc., et de la communication
écrite, a reçu le plus de publicité.
M. Charbonneau: Le ministre qui a fait des sondages...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je tiendrais à vous dire
que j'ai même indiqué aujourd'hui et j'ai même
reparlé dans mes notes du jugement Tannenbaum...
M. Charbonneau: Ah, je sais.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...pour être certain que
personne ne l'oublie.
M. Charbonneau: Sauf que moi, j'aurais le goût de vous
demander: Vous avez fait des sondages pour savoir comment le monde recevrait
votre réforme de l'aide sociale pour pouvoir préparer votre
terrain et votre stratégie de communication, est-ce que vous ne pourriez
pas faire un sondage ou est-ce que vous n'avez pas fait un sondage? Si vous ne
l'avez pas fait peut-être pourriez-vous le faire pour vérifier le
degré d'information des assistés sociaux à l'éqard
de leurs droits. Peut-être que vous vous rendriez compte que la
publicité autour du juqement Tannenbaum malgré le fait qu'on en a
beaucoup parlé... Le taux de pénétration de l'information
ne permet pas à un moment donné au ministre de dire:
Écoutez, je m'en lave les mains. Les médias ont fait mon job. Je
n'ai pas besoin d'aller plus loin.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non, il n'y a pas seulement
les médias qui ont fait le travail. Les médias ont fait un
travail - je pourrais dire - qui a rendu justice à l'importance du
dossier en diffusant cette information, mais également des groupes ont
fait du travail. Je ne sais pas combien de groupes dits
socio-économiques sont intervenus. J'ai vu leur matériel
publicitaire. Il y en avait même de collé dans les ascenseurs au
bureau chez nous. Ils n'ont pas semblé - et c'est peut-être ce que
vous invoquez - manquer de ressources. Ils semblaient disposer sur le plan de
la publicité - en tout cas, je l'ai vu à suffisamment de places -
de ressources dont je ne dirai pas qu'elles étaient
considérables, mais importantes pour, eux aussi, diffuser le
message.
M. Charbonneau: Je comprends que le ministre ne reviendra pas sur
sa position. J'aurais le goût de lui demander, dans une autre question:
Est-il exact, selon les informations qui ont été publiées
au mais de mars, que près du quart des bénéficiaires qui
étaient sortis des rangs de l'aide sociale en raison de
l'opération des visites à domicile ont été
réadmis à l'aide sociale à la suite
d'une révision de leur dossier? Cela a été
publié le 17 mars 1987. Je me demande même si, dans le
défunt Le Matin - il n'a pas duré longtemps - il n'y avait pas un
commentaire de son attaché de presse à ce moment-là.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce qu'on m'indique, sans vous
donner de chiffres précis, mais je pourrai vous Ies fournir, c'est qu'il
s'agissait d'un quart des décisions qui sont allées en appel ou
des gens qui sont allés en appel de la décision. Comme je viens
de vous l'indiquer il y a quelques minutes, le pourcentage d'individus qui est
allé en appel étant très faible, il s'agit d'un quart de
ce pourcentage.
M. Charbonneau: Le quart de ce pourcentage.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais je pourrai, si vous le
désirez, vous souligner combien sont allés en appel et combien
d'individus représentaient ces 25 %.
M. Charbonneau: Sauf que le ministre serait bien avisé,
à mon avis, de... Parce qu'il y a bien des gens qui ne vont pas en appel
pour toutes sortes de raisons, parce que, s'ils se donnaient la peine d'y aller
ou s'ils le savaient, s'ils avaient le courage d'entreprendre des
démarches, en fin de compte, ils seraient avantagés. Il serait
intéressant de savoir si, finalement... C'est un bon
échantillonnage: de tous ceux qui se donnent la peine d'y aller, le
quart sont rétablis dans leurs droits.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez...
M. Charbonneau: En termes de statistiques et de sondages, il
serait intéressant de voir si, finalement...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est inférieur aux
réclamations devant les tribunaux de droit commun.
M. Charbonneau: Peut-être que le ministre - c'est une
suggestion que je lui fais - accepterait de faire un test, quitte à
engager une firme pour le faire, c'est-à-dire de prendre au hasard, et
non pas en fonction des gens qui, pour toutes sortes de raisons,
décident de faire appel, prendre au hasard un échantillon
représentatif des gens qui sont visités et qui ont une
décision négative et de le faire tester par un mécanisme
d'appel. Peut-être qu'on se rendrait compte à ce moment-là
qu'il faut faire plus attention. Cela amènerait le ministre à
changer les directives administratives et la façon de travailler de ses
enquêteurs. Si le quart des...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que je peux vous donner
certains chiffres qui...
M. Charbonneau: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...en tout cas, à
première vue, m'indiquent qu'il y aurait sans doute lieu d'aller dans le
sens où vous dites si les chiffres étaient autres que les
chiffres qu'on me communique? Je vais vous donner un exemple. Je peux commencer
en novembre, en décembre, où vous voulez. Non, je vais commencer
en novembre, vous avez eu les chiffres jusqu'à octobre. En novembre, des
révisions régulières - il faut se comprendre, il ne s'agit
pas des révisions au niveau de la Commission des affaires sociales, il
s'agit des révisions administratives de la décision d'un agent de
bureau - dans le cadre des opérations régulières du
ministère, en novembre, il y a eu 253 demandes d'acceptées soit
24,8 % cela arrive tout près de vos 25 %.
M. Charbonneau: D'accord.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je peux vous le donner pour
décembre et janvier. En décembre, c'était 24,5 % et en
janvier, c'était 23,6 %. Cela se tient autour des 25 % que vous
mentionnez. Cela est dans les révisions régulières des
dossiers. Dans l'opération des visites à domicile pour les trois
mêmes mois: novembre, décembre et janvier 1987, 23,4 %, 24,4 % et
22,7 %; c'est sensiblement la même chose que dans le cas des visites
régulières. C'est un taux qui ne nous apparaît pas causer
une problématique particulière...
M. Charbonneau: Écoutez, je ne suis pas d'accord avec le
ministre. C'est le quart, c'est une personne sur quatre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, oui, mais écoutez
là, des gens qui vont en appel, ce n'est pas si compliqué et si
complexe que cela non plus.
M. Charbonneau: Non, mais...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous savez très bien que
quelqu'un qui vient vous voir à votre bureau de comté parce que
son aide sociale a été soit coupée, soit diminuée,
soit refusée et que cette personne est dépourvue de biens
matériels dans la société, elle est également
admissible à un programme du ministère de la Justice qui
s'appelle l'aide juridique et son dossier est monté par un
spécialiste dans le domaine, etc. Sur le nombre de dossiers qui sont
allés en révision interne, à l'intérieur du
ministère, parce que là, on n'est pas sorti du ministère,
on n'est pas rendu devant l'instance quasi judiciaire
que constitue la Commission des affaires sociales, qu'il y en ait 25 %
qui soient réévalués en faveur du
bénéficiaire, je trouve que c'est une statistique...
M. Charbonneau: Je réagis différemment du ministre.
Je dis au ministre - et je le dis même à ses collaborateurs de
l'appareil administratif - que 25 % m'amèneraient à faire en
sorte que les directives sur la façon de travailler soient
resserrées afin qu'il y en ait moins. C'est beaucoup, c'est le
quart.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je peux vous sortir - je vais
demander à mes gens de le faire - la moyenne sous l'ancien
gouvernement.
M. Charbonneau: Que ce soit plus ou moins, il demeure que c'est
cela, le problème, actuellement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai que ces
décisions...
M. Charbonneau: C'est vous, maintenant, qui avez à
améliorer la situation.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai que ces
décisions, en révision, sont rendues dans les 30 jours. Je pense
que c'est un critère important.
M. Charbonneau: Ce n'est pas de cela que je parle, M. le
ministre.
M, Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai que ces
décisions... On peut resserrer la vis, je ne pense pas que ce soit ce
que vous recherchez. Si on dit à nos agents, qui sont les premiers
à traiter le dossier: Soyez plus larges dans vos interprétations
de la réglementation lorsque vous collez cette interprétation
à un dossier factuel, soyez plus larges, est-ce qu'on va faire en sorte,
à un moment donné, que ce ne sera pas le ministère qui ira
en appel pour l'application?
M. Charbonneau: Mais au moins, dans ce cas, on se rend compte que
le ministère est capable de supporter le coût pour un temps, alors
que les personnes démunies, elles, ont à supporter un coût
pour cette période. Toute proportion gardée, le problème
est beaucoup plus grave pour eux que pour vous.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On s'entend, M. le
député de Verchères: il ne s'agit pas des appels à
la Commission des affaires sociales...
M. Charbonneau: Non, non.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...il s'aqit de décisions
administratives rendues par le ministère après une
première décision, et ce, à ce qu'on m'indique, dans un
délai de 30 jours.
M. Charbonneau: Ce que je vous dis, M. le ministre, pour conclure
là-dessus, c'est qu'il y a des dossiers qui sont révisés,
il y en a d'autres qui ne le sont pas. Je vous dis que l'échantillon de
la révision que vous faites nous indique, finalement, que dans un cas
sur quatre, la décision prise à l'encontre du
bénéficiaire n'aurait pas dû être prise et que le
bénéficiaire n'aurait pas dû être
pénalisé. Je vous dis, dans ce cas, que les cas de
révision que vous faites sont suffisamment nombreux pour dire que c'est
un échantillon qui mériterait que des directives soient
données pour que la façon de travailler soit changée,
à la limite, comme le ministre l'a indiqué, que
l'interprétation soit plus en faveur... En tout cas, quand il y a un
doute, que cela penche plus du côté du bénéficiaire
que du côté du ministère et, à la limite, si le
ministère n'est pas content, qu'il aille en appel. Lui peut supporter
l'attente alors que le bénéficiaire, lui, paie cher pour cette
attente.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai que...
M. Charbonneau: Surtout si ce bénéficiaire ne va
pas en révision, surtout si, par ailleurs, dans son cas, s'il y avait eu
révision, il aurait pu y avoir avantaqe pour lui. Ce n'est pas tout le
monde qui va en révision.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai qu'à
première vue, dans 75 % des cas -je dis bien à première
vue, je le dis avec réserve - il apparaît que le ministère
penche en faveur du bénéficiaire. Il reste 25 %, et je
n'interprète pas ces 25 % aussi strictement que vous les
interprétez, et je vais vous dire pourquoi. Il arrive que quelqu'un
vienne à mon bureau avec une décision -cela arrivait encore plus
souvent au temps où j'étais dans l'Opposition - selon laquelle il
avait été refusé au premier échelon par l'aqent
d'aide socio-économique. À ce moment-là, j'analysais le
dossier et il était possible qu'il manque au dossier une pièce
justificative, qu'il manque au dossier un document qui faisait en sorte que
l'aqent du gouvernement avait raison de dire non, mais qu'en ajoutant cette
pièce au dossier cela changeait la situation. À ce
moment-là, en révision, il obtenait gain de cause.
Il y a également le cas de la personne - cela m'est arrivé
à je ne sais pas combien de reprises - qui était coupée de
l'aide sociale parce qu'elle avait un peu plus de
1500 $ dans son compte: Au moment où l'agent a pris la
décision, le compte en banque indiquait 1650 $, donc, il y avait des
pénalités, etc.
Lorsque la personne venait me voir à mon bureau de comté,
la fin de semaine suivante, le compte en banque était rendu à
1300 $, ce qui changeait l'admissibilité. En révision, l'agent
qui effectuait la révision disait tout simplement: Maintenant, vous
êtes admissible, vous répondez aux critères. Il y a de ces
situations qui changent. Je ne dis pas que cela va réduire vos 25 %
à zéro, mais je vous dirai que, dans les cas qu'on voit souvent,
il y a de ces éléments qui font en sorte que les deux
décisions qui ont été prises étaient de bonnes
décisions parce que soit qu'il manquait des éléments au
dossier quand la première a été rendue, soit qu'il y a eu
changement dans la situation de l'individu entre la première et la
deuxième décision.
Vous avez raison lorsque vous nous demandez de travailler dans un sens
de maximiser l'efficacité des services que nous rendons à cette
partie de la population. (17 h 30)
M. Charbonneau: Une autre question, M. le ministre. L'an dernier,
lors de l'étude des crédits, on disait que les comptes à
recevoir se chiffraient à 167 800 000 $, pour un total de 112 836
comptes. Cette année, avec votre opération de visites à
domicile, vous êtes rendu à combien de comptes à
recevoir?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je n'ai pas le chiffre exact. Je
vais vous le fournir, mais cela a certainement dû augmenter. J'ai
même prévenu...
M. Charbonneau: Je présume.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...le Vérificateur
général, parce que, habituellement et traditionnellement, le
libellé de la recommandation du Vérificateur
général quant à ces comptes à recevoir indiquait
que plus les comptes à recevoir au ministère de la Main-d'Oeuvre
et de la Sécurité du revenu étaient élevés,
moins la gestion était bonne, alors qu'en réalité,
lorsqu'on fait affaire avec des gens qui, dans la société, sont
tout près du minimum vital, c'est è peu près le contraire
qui se produit. Si vous êtes vigilant avec les gens qui obtiennent sans
droit de l'argent du gouvernement, si votre système de
récupération est présent, si vous avez une gestion
efficiente, vos comptes à recevoir augmentent. C'est votre saine gestion
qui fait en sorte qu'à la fin de l'année vous avez pour plusieurs
millions de dollars de comptes à recevoir, souvent de la part
d'individus qui n'auront jamais les moyens financiers au cours de leur
existence de vous rembourser.
Au 31 janvier 1987, pour être plus précis, il y avait au
total 119 476 comptes à recevoir supérieurs à 1 $,
représentant 194 500 000 $. Pour aider à faire la comparaison,
l'an passé, au 31 mars 1986, on dénombrait 112 836 comptes
à recevoir.
M. Charbonneau: C'est le chiffre que je vous ai donné.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est cela, ce qui
représentait 167 800 000 $.
M. Charbonneau: C'est cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Donc, il y a eu une
augmentation.
M. Charbonneau: II y a eu augmentation des montants et du nombre
de comptes, mais plus des montants d'arqent que du nombre de comptes. De 112
000 a combien? À 116 000?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): À 119 000.
M. Charbonneau: Oui, 119 000. Cela fait moins de 7000.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): De 167 000 000 $ à 194 000
000 $.
M. Charbonneau: Oui. Bon, d'accord.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le solde moyen des comptes
à recevoir a augmenté. Il était de 1487,11 $ en mars 1986;
il est maintenant de 1627,94 $.
M. Charbonneau: Je ne sais pas si vous l'avez dit tantôt,
je n'ai pas porté attention. Combien avez-vous d'agents
vérificateurs et est-ce que ce sont des employés occasionnels
comme vos agents encadreurs?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, tantôt, j'ai
tenté d'éclaircir la situation parce que, encore une fois, la
perception qui s'est déqaqée l'an passé, c'est que le
ministère enqageait 150 agents d'aide socio-économique, alors que
ce que le ministre a fait, finalement, pour...
M. Charbonneau: Pour 9 000 000 $, c'était cela, vos
crédits.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela n'a pas coûté
cela. C'étaient les crédits prévus. Cela a
coûté moins que cela.
M. Charbonneau: Cela a coûté moins que cela, mais
combien en avez-vous engagé? Vous en avez combien?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On a engagé 156 personnes
au ministère et la ville
de Montréal, qui est chargée de l'administration de l'aide
sociale sur le territoire de la ville de Montréal, en a engagé
44. Mais on n'a pas engagé ce qu'on appelle des agents d'aide
socio-économique visiteurs; on a engagé du personnel de soutien
qui a fait du travail de bureau, ce qui nous a permis de libérer des
gens ayant une expérience des bénéficiaires de l'aide
sociale, de façon que ces personnes sortent des bureaux et aillent
effectuer des visites à domicile chez nos
bénéficiaires.
M. Charbonneau: Vous avez adopté un code d'éthique.
Ce serait intéressant de savoir combien de cas de contraventions vous
avez enregistrés à ce code d'éthique.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, je vais vous
répondre à titre de ministre. Je vais demander au sous-ministre
de répondre pour le ministère comme tel. Moi, les cas, je ne peux
pas vous les dénombrer comme tels, mais j'en ai peut-être eu une
douzaine qui m'ont été communiqués autant par les
médias d'information que par des lettres que j'ai reçues, soit de
députés, soit de bénéficiaires comme tels. Je vous
dirai que, dans chacun des cas, je me suis assuré que l'on
vérifie chacun des faits invoqués au dossier. Vous comprenez
aisément que, s'il fallait que, dans un cas, un aqent d'aide
socio-économique s'éloigne de l'orientation du code
d'éthique, tant quant à ses mots qu'à son esprit, et qu'il
y ait violation des droits d'un bénéficiaire de l'aide sociale,
c'est l'ensemble du dossier qui en subirait les contrecoups sur le plan humain,
sur le plan de la justice et dans l'opinion publique.
M. Charbonneau: Est-ce que le ministre trouve normal que les
bénéficiaires ne puissent pas être accompagnés de
témoins lors des visites ou lors de leur entrevue au bureau des centres
Travail-Québec?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez! Je vous dirai que
je trouve normal que quelqu'un qui est chez lui puisse choisir, à moins
qu'il n'y ait une ordonnance du tribunal avec mandat de perquisition et autres,
d'ouvrir la porte à qui il veut bien. La résidence d'un individu,
cela demeure, encore une fois, je pense, selon la jurisprudence anglaise que je
pourrais vous citer, son château, son lieu privilégié.
Quand il sort de ce château pour se rendre faire une demande d'admission
à un programme de subventions ou de soutien du revenu...
M. Charbonneau: Ce n'est pas de cela qu'on parle, M. le
ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez-moi.
M. Charbonneau: Même chez lui, est-ce que vous trouvez
normal que vos agents d'aide sociale...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, chez lui...
M. Charbonneau: ...vos visiteurs n'acceptent pas...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Chez lui, il est libre d'ouvrir la
porte à qui il veut.
M. Charbonneau: Oui, mais une fois qu'il...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'imagine que, s'il veut
être accompagné de quelqu'un, il a juste à ne pas ouvrir la
porte tant que l'autre personne n'est pas arrivée. Le jugement
Tannenbaum est très précis et très clair: cela prend le
consentement de l'assisté social pour entrer chez lui. S'il veut
être accompagné de quelqu'un, il n'a qu'à retenir ce
consentement jusqu'à ce qu'il téléphone à quelqu'un
ou qu'il y ait quelqu'un avec lui. Je ne comprends pas.
M. Charbonneau: Écoutez! On nous a signalé des cas.
Je vous le dis et vous vérifierez: II y a des gens qui, après
avoir accepté de recevoir l'enquêteur du ministère,
étaient avec...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous changez d'idée encore
une fois.
M. Charbonneau: Non, mais étaient avec des personnes. II y
avait, je ne sais pas, une belle-mère ou un ami.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Un oncle, une tante.
M. Charbonneau: L'enquêteur se présente et il y a
quelqu'un à la maison. Par hasard ou parce que votre enquêteur
avait pris rendez-vous, l'autre voulait avoir un témoin. Quand
l'enquêteur arrive, il demande à l'autre personne de se retirer
dans une autre pièce. Est-ce que vous trouvez cela normal? Et l'entrevue
ne se déroule pas tant que l'autre personne n'a pas quitté la
pièce.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez! Vous me proposez
des cas...
M. Charbonneau: Je vous propose des cas, beaucoup de cas qui ont
été signalés.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. Écoutezi J'ai vu des
conférences de presse avec des cagoules. J'en ai vu de toutes les sortes
là-dedans.
M. Charbonneau: Ce n'est pas cela que
je vous demande.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non.
M. Charbonneau: Je vous demande si vous trouvez cela normal et
si, comme ministre, vous cautionnez ce genre de comportement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dis que le ministre
cautionne le code d'éthique. Je vous dis - je n'ai pas besoin de le
faire - que le ministre cautionne le jugement Tannenbaum. Le ministère
n'est pas allé en appel du jugement Tannenbaum parce que nous croyons
qu'il s'agissait d'un jugement drôlement bien équilibré qui
répondait aux critères mis de l'avant, entre autres, par le
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.
Je vous dis que les agents d'aide socio-économique ont, dans les
circonstances, un travail qui est délicat à accomplir, comme le
juge l'a indiqué. Ils doivent, en même temps qu'ils s'assurent
qu'en aucun temps les droits des bénéficiaires ne sont
violés, faire également leur devoir de s'assurer que l'argent des
"payeurs de taxes" est bien dépensé. Je suis conscient de la
difficulté du travail de chacun de ces fonctionnaires et je les ai
assurés que, tant et aussi longtemps que les principes du code
d'éthique, le jugement Tannenbaum et les droits et libertés des
citoyens ou des bénéficiaires seraient respectés,
j'appuierais dans leur action tous et chacun de ces agents d'aide
socio-économique. Ils sont également conscients que, s'il fallait
qu'un seul d'entre eux envisage de poser des gestes qui vont à
l'encontre de la lettre et de l'esprit du code d'éthique, du jugement
Tannenbaum des droits des bénéficiaires, de leur obligation de
bien faire leur travail, ils auraient, sur le plan disciplinaire, à
faire face à tout ce que la machine prévoit.
M. Charbonneau: On va arrêter de finasser. Vous avez
adopté un code d'éthique. Il y a eu le jugement Tannenbaum. Je
vous demande si le comportement dont je vous parle est un comportement que vous
considérez acceptable selon votre code d'éthique et selon le
jugement. Si vous me dites non, est-ce que, informé que cette situation
existe, vous allez mettre en place les moyens pour aviser vos enquêteurs
qu'ils n'ont pas à obliger les gens à être seuls quand ils
sont en entrevue et qu'ils peuvent accepter, si tel est leur choix,
d'être accompagnés de témoins? C'est cela que je vous
demande. Ce n'est pas compliqué, cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous comprendrez ma prudence
à répondre à votre question. J'ai été
informé par le biais des médias, je vous le dis comme tel, et
à un moment donné, je pense, par le ministère qu'il y a
présentement une cause, soit devant la Commission des droits de la
personne, soit devant la Cour supérieure à Montréal,
où une personne se plaint de ne pas avoir compris l'intervention de
l'agent d'aide socio-économique ou de l'inspecteur - je ne voudrais pas
mélanger les faits - et que cette non-compréhension a
violé ses droits, etc., que la personne aurait demandé à
être accompagnée d'un interprète, que cela lui aurait
été refusé, etc. C'est devant la Commisssion des droits de
la personne au moment où l'on se parle. Je ne voudrais, par respect pour
le processus quasijudiciaire, émettre au moment où l'on se parle
une opinion qui pourrait préjudicier soit aux droits du fonctionnaire
qui est traduit devant cette commission, soit aux droits de la
bénéficiaire qui est également appelée devant cette
commission.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Verchères, vos 20 minutes sont amplement
écoulées. On est rendu à 22 minutes, Dois-je comprendre la
chose suivante - à ce moment-là, cela me prendrait un
consentement des deux côtés -qu'on veut fonctionner en posant
toutes les questions qu'on a à poser sur le programme, mais qu'on
s'enqage à adopter tous les programmes à la fin?
M. Charbonneau: Moi, je vais vous dire - et ce n'est pas
compliqué et je pense qu'on s'était entendu là-dessus avec
le ministre - que nous avons un certain nombre de sujets et on les a
placés par ordre de priorité, les programmes sur lesquels on
voulait discuter d'abord, on les a mis en premier.
Le Président (M. Bélanger): D'accord.
M. Charbonneau: Je ne sais pas et je ne peux pas dire au ministre
si cela va me prendre une demi-heure ou deux heures sur l'aide sociale. Ce que
je peux vous dire, c'est que, quand j'aurai fini l'ensemble des crédits
du ministère, il est possible que je n'aie pas eu de questions sur
certains éléments des crédits, mais que l'ensemble des
crédits sera adopté, comme le veut la tradition qu'ils seront
adoptés sur division.
Le Président (M. Bélanger): Bon, d'accord.
M. Charbonneau: Au-delà de cela, moi, ce que je veux
avoir, M. le Président, comme la tradition me le permet...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela me va facilement, cette
façon de fonctionner ...
Le Président (M. Bélanger): Parfait.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...sauf une réserve.
À partir du moment où l'on a invité des gens, qu'il
s'agisse de présidents de commissions ou d'organismes, qu'on tente si
possible, en vue d'une saine efficacité -c'est là mon seul souci
- d'examiner les crédits de ces organismes au moment où ces
gens-là ont été prévenus qu'ils seraient
appelés. Le reste là ...
M. Charbonneau: Heureusement, on n'est pas comme dans d'autres
ministères.
Le Président (M. Bélanger): Alors, je comprends la
chose de la façon suivante: on va essayer de respecter dans les grandes
lignes un certain horaire pour ne pas faire venir à
répétition des présidents de régies ou des gen3 qui
sont très occupés ailleurs, d'une part, sous réserve aussi
de se garder une dizaine de minutes à la fin pour l'adoption en bloc des
derniers crédits.
M. Charbonneau: Oui.
Le Président (M. Bélanger): D'accord. Donc, on ne
tiendra pas compte des 20 minutes et on va fonctionner. Alors, allez-y, M. le
député.
M. Charbonneau: Juste une dernière remarque sur la
dernière intervention du ministre. Je vais vous dire bien
honnêtement que je trouve que le ministre s'en sort mal lorsqu'il me dit
que quelqu'un a trouvé que ce n'était pas correct et qu'il s'en
est allé en appel. Moi ce que je dis, c'est lui qui a émis les
directives, qui les a autorisées. Si vous-même, de votre propre
jugement - et c'est vous, l'autorité politique - vous considérez
que oui, et vous êtes avocat, c'est normal que les gens aient droit
à des témoins, si vous ne voulez pas que vos enquêteurs
puissent obliger les gens à ne pas avoir de témoins, vous avez
juste à le dire et vos enquêteurs vont respecter cette
façon de procéder. Vous n'avez pas besoin de la Commission des
droits de la personne ou de n'importe quel organisme pour dire ce qui doit
être fait. C'est vous qui émettez les directives.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je ne peux
pas laisser passer cette remarque du député de Verchères
sans répliquer. Oui, c'est moi qui, en fiducie et pour le temps que cela
dure, ai l'autorité sur le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu. C'est ce qu'on appelle l'autorité
politique dans notre système. Mais il y a également un
système démocratique d'autres autorités qui peuvent venir
dire à l'autorité politique qu'elle est dans son droit ou qu'elle
fait erreur lorsqu'on parle des droits des citoyens. Moi, je vous dis tout
simplement que j'ai beaucoup de respect pour un système
démocratique où un autre niveau de pouvoir peut venir dire
à un ministre, quel qu'il soit, de n'importe quel gouvernement: Ce que
vous avez émis ou ce que vous faites, vos directives, c'est conforme aux
chartes des droits et libertés des personnes, c'est conforme aux droits
humains. Je suis content de vivre dans un tel système parce que cela a
sans doute évité de l'arbitraire dans le passé et cela
contribuera sans doute dans l'avenir à en éviter davantage. Mais
je ne veux pas changer mon autorité passagère comme ministre de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu en autorité
absolue et étendue. (17 h 45)
M. Charbonneau: Je dirais, M. le Président, que, quand le
ministre nous donne ce genre de réponse, c'est que, dans le fond, il est
d'accord avec ce comportement et qu'il essaie de le faire valider par une autre
instance. Ce n'est pas compliqué, n'est-ce pas? Ou vous n'êtes pas
d'accord et vous n'avez pas besoin d'une autre instance pour dire que vous
n'êtes pas d'accord. Ou vous êtes d'accord et vous aimeriez bien
qu'un tribunal, comme dans le cas du jugement Tannenbaum, dise que vous
êtes dans votre droit.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, le jugement
Tannenbaum a dit: Pour autant que le bénéficiaire de l'aide
sociale donne son consentement l'opération des visites à domicile
est léqale. En ce faisant, il a validé l'opération du
ministère et le code d'éthique, si je peux utiliser l'expression.
Mais je suis personnellement - c'est une opinion que je vous donne non pas
comme ministre, mais comme individu - particulièrement content des
balises qu'a souliqnées le juqe Tannenbaum au pouvoir d'un
fonctionnaire, quel qu'il soit, de pénétrer chez un individu et
ce, dans à peu près n'importe quel domaine d'activité. Je
vous dirai que te juqement Tannenbaum a également des effets sur
certains organismes dont je suis responsable comme ministre du Travail, des
organismes d'inspection.
Je vous dirai que le jugement Tannenbaum aura des répercussions
dans d'autres ministères de certains autres collègues qui ont
éqalement des inspecteurs et que le balisement de ces pouvoirs
d'inspection s'est fait à l'avantage des citoyens. Je me réjouis
de ce juqement. J'imagine que peut-être aussi le député de
Verchères s'en réjouit.
M. Charbonneau: M. le Président, après tout ce beau
baratin qui ne dit pas grand-chose, est-ce que le ministre entend suivre
l'exemple de l'Ontario en ce qui concerne les comportements à
l'égard des femmes chefs
de famille monoparentale? En fait, l'Ontario a accepté le
principe d'abolir le règlement qui interdit aux mères
monoparentales de recevoir des prestations d'aide sociale si de temps à
autre elles partagent leur lit avec un partenaire et reçoivent de ce
dernier une aide financière occasionnelle. Ici, au Québec,
dès qu'une femme chef de famille monoparentale,
bénéficiaire d'aide sociale, a une relation sentimentale avec une
personne du sexe opposé, on présume qu'elle est dépendante
financièrement de cet homme, ce qui vient, en définitive, nier le
principe de l'autonomie de ces femmes. Par ailleurs, en ce qui concerne les
gens du même sexe, ils n'ont pas les mêmes genres de
problèmes.
Etant donné que, justement, une bonne partie de l'action et de
l'intérêt que portent vos enquêteurs actuellement lors des
visites à domicile, c'est à ce type de comportement pour
débusquer les conjoints non déclarés, donc les revenus non
déclarés, est-ce que vous entendez suivre l'exemple de l'Ontario
puis, finalement, de laisser tomber cette approche? Finalement, c'est du
harcèlement auprès des femmes.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce que je vous dirai...
M. Charbonneau: On pourrait quasiment dire, parce que c'est non
pas dans la mode, mais dans les moeurs que c'est quasiment du
harcèlement sexuel à l'envers. Après la parité de
l'aide sociale à l'envers.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, je vous dirai que
nous regardons très sérieusement ce qui se passe du
côté de l'Ontario depuis qu'ils ont fait connaître
publiquement leur intention de principe. Je vous dirai que nous avons
également été informés, parce que nous suivons le
dossier de près, que l'application pratique d'une telle
réglementation a été déjà remise à au
moins deux reprises, à ma connaissance, parce que ça posait des
problèmes, j'imagine, d'application pratique. Je vous dirai qu'il s'agit
d'un élément, lorsqu'on parle de l'union maritale, que moi j'ai
regardé avec toute mon équipe très attentivement au cours
de l'année dernière. Personnellement, je serais beaucoup plus
favorable à une approche d'union économique qu'à une
approche d'union maritale. C'est une des choses ou un des positionnements
gouvernementaux qui font l'objet, au moment où l'on se parle, d'une
analyse très serrée de la part des autorités du
gouvernement dans la réforme de la sécurité du revenu.
Vous touchez là un point qui est devenu et qui devient encore un peu
plus sensible chaque jour à cause de l'évolution de la
société dans laquelle nous vivons.
M. Charbonneau: Bon. Par ailleurs, le ministre peut-il nous
donner les résultats de l'enquête qu'il avait commandée
à la suite de la publication d'informations à savoir que les
autorités régionales de la Société des postes
avaient refusé une demande d'une agente du centre Travail-Québec
de Sainte-Croix-de-Lotbinière, qui demandait une certaine collaboration
de la Société des postes pour avoir des renseignements
confidentiels dans le cadre de l'opération des visites à
domicile? Le ministre a dit qu'il ferait enquête. C'est quoi, finalement,
votre question?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Enquête, c'est un grand mot.
Ce sont les vérifications qui s'imposaient dans un cas qui avait
été dénoncé dans les médias. L'article noir
avait paru dans Le Devoir, sous la plume de Laurent Soumis, si ma
mémoire est exacte. Nous avons effectué, à partir du
ministère et du cabinet, des vérifications sommaires qui nous ont
révélé - et je vous le cite de mémoire - à
peu près ce qui suit. Il s'agissait d'une agente d'aide
socio-économique qui avait obtenu d'une bénéficiaire de
l'aide sociale l'autorisation pour que le maître de poste lui divulgue
s'il y avait quelqu'un d'autre qui recevait du courrier dans son casier postal.
C'est à peu près cela les faits, si je m'en souviens. Le
maître de poste avait refusé de divulguer cette information en
prétextant - et je pèse bien mes mots - qu'un individu dans la
société n'a pas le droit de savoir si quelqu'un d'autre
reçoit du courrier dans son casier postal, quel que soit l'individu.
J'ai tenté de me transposer dans les pieds de l'assisté
social et je me suis dit: Ca n'a pas de bon sens. Si quelqu'un reçoit du
courrier à mon casier postal, à Bedford, au bureau de poste,
j'aimerais être capable de le savoir. Il apparaît que je n'ai pas
le droit de le savoir, ni le bénéficiaire de l'aide sociale.
Donc, dans les circonstances, il n'y avait aucun blâme à adresser
à l'agente d'aide socio-économique.
M. Charbonneau: Écoutez, je vous propose...
M, Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai que j'ai
trouvé bizarre le fait qu'un citoyen ne puisse pas savoir - parce qu'on
loue un casier postal au bureau de poste - si quelqu'un d'autre est
sous-locataire ou colocataire du casier postal. Nous avons adressé nos
questions sur le sujet à la Société canadienne des
postes.
M. Charbonneau: Cela complète les questions que j'avais
à poser sur l'opération des visites à domicile. Comme il y
a le président de la République française, qu'on reprenne
les quelques minutes qu'on peut perdre pour se rendre là, je propose au
ministre que, ce soir, on pourrait peut-être dépasser de dix
à quinze minutes et puis...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Six ou sept.
Le Président (M. Bélanger): Compte tenu de l'heure,
la commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures. Nous comprenons
qu'il y aura six minutes à rajouter à 22 heures,
c'est-à-dire que nous finirons à 22 h 6. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 53)
(Reprise à 20 h 13)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
La commission reprend ses travaux afin de procéder à
l'étude des crédits budgétaires du ministère de la
Maîn-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu pour
l'année financière 1987-1988 et des crédits de
l'année financière se terminant le 31 mars 1987. Nous en sommes
au programme 6, Prestations d'aide sociale.
M. le député de Verchères.
Réforme de l'aide sociale
M. Charbonneau: M. le Président, après avoir un peu
décortiqué l'opération des visites à domicile, je
voudrais aborder la question de la réforme de l'aide sociale. Comme je
l'ai indiqué tantôt - le ministre et moi étions d'accord -
on parlera probablement aussi d'un certain nombre de sujets qui sont dans le
programme 10, Protection et développement de l'emploi, et qui sont
liés... Ce sont les mesures de développement de
l'employabilité qui sont liées à la réforme de
l'aide sociale.
Je ne referai pas l'historique, dont on a fait état un peu
tantôt, de toutes les remises du projet de réforme. J'aimerais
savoir quel type de document le ministre prépare actuellement, qui va
être rendu public, on l'espère, dans peu de temps. Est-ce que cela
va être un document gouvernemental, si on utilise le jargon habituel, un
livre blanc, c'est-à-dire une proposition de politique gouvernementale
par laquelle le gouvernement fait son lit, qu'il soumet à la
consultation aux différents intervenants pour recueillir les
commentaires sur cette proposition, ou si on doit plutôt s'attendre
à un document de réflexion, de consultation qui ouvre un certain
nombre de pistes, mais qui n'amèneront pas le gouvernement à se
commettre dans l'étape qui va suivre et qui va finalement laisser le
gouvernement avec différentes options ou avenues possibles à la
suite de la consultation? Quelle est la nature du document ou du projet qui va
être soumis, selon les propos du ministre la semaine dernière?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je ne
répondrai pas au député de Verchères en lui citant
une couleur. Il ne nous semblait pas que ce soit là l'essentiel des
travaux qui nous ont animés. Je lui dirai qu'il s'agira d'un document de
consultation. Je lui dirai également que, sur certains principes, qui
sont bien connus, qui ont fait l'objet des éléments contenus au
programme du Parti libéral à l'occasion de la dernière
campagne électorale, il y a des principes sur lesquels le gouvernement a
une position arrêtée. Quant aux modalités comme telles, je
pense que le député de Verchères l'a dit au début,
il me connaît assez bien pour savoir que, même lorsqu'il y a
dépôt de projets de loi, les principes sont
généralement bien arrêtés, mais, quant aux
modalités comme telles, même au chapitre de la législation,
je ne suis pas du type à refuser une suggestion positive.
M. Charbonneau: Je veux qu'on se comprenne bien. Je ne veux pas
jouer sur les couleurs non plus, mais je pense que le ministre est un
parlementaire assez aguerri pour faire la distinction entre une proposition
gouvernementale et un document qui met différentes options sur la table
sans nécessairement que l'une d'entre elles soit
priviléqiée par le gouvernement.
Si vous nous dites: On va vous présenter un document de
consultation, il y aura différentes options et, bien sûr, dans
chacune de ces options, on retrouvera l'essentiel des principes sur lesquels
nous nous sommes enqaqés politiquement, c'est une chose
différente d'un document qui, finalement, comporterait une proposition
ferme de la part du gouvernement. Selon les propos du ministre, on pourrait
quasiment se demander s'il n'y a pas une troisième possibilité
qui serait liée à l'idée d'un livre blanc,
c'est-à-dire est-ce que le ministre entend déposer à ce
moment-là même un avant-projet de loi ou un projet de loi qui sera
soumis à la consultation?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Nous tentons d'agir le plus
rapidement possible. L'hypothèse que vous évoquez d'un
avant-projet de loi risquerait, à mon avis, connaissant les
échéanciers que je connais, de reporter l'application d'une
réforme de la sécurité du revenu. L'élément
temps commence à prendre de plus en plus d'importance quant à la
réalisation des engagements que nous avons pris à l'occasion de
la campagne électorale, de même que quant aux jeunes de moins de
30 ans qui doivent, présentement, se contenter de prestations de 170 $
par mois et qui sont, comme je l'ai indiqué dans le passé,
nettement insuffisantes pour couvrir les besoins de base.
M. Charbonneau: II faut toujours lire entre lignes avec le
ministre.
Quel est l'échéancier du ministre à ce moment-ci?
La semaine dernière, dans son communiqué de presse, il a
laissé entendre que, si toutes les harmonisations avec le
ministère des Finances allaient relativement bien, on pourrait penser
à cet été comme période de dépôt d'un
document. Quel est l'échéancier précis du ministre
à ce moment-ci?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le communiqué que vous
aviez, dans un premier temps, mal lu, mais que vous avez sans doute eu
l'occasion de bien relire dans un deuxième temps, indiquait la saison
estivale comme période propice.
Sur le plan du temps, il faut analyser la saison estivale, si nous
étions pour rendre public un tel document. Je vais vous donner un
exemple. Pendant les vacances de la construction - c'est un peu un terme
symbolique au Québec où la population, dans à peu
près son ensemble, est en vacances au Québec - je pense que vous
pourriez dire que le gouvernement a peut-être des choses à cacher,
etc. Nous visons à arrimer, sur le plan de la sécurité du
revenu, les trois programmes et possiblement d'autres mesures dont j'ai
parlé: le programme APPORT, le programme APTE et le programme de soutien
financier, de sorte qu'ils soient consignés dans un document de
consultation qui soit rendu public le plus tôt possible, mais pas durant
la période où il passerait inaperçu, si je puis utiliser
cette expression, pour que tout le monde ait le temps d'en prendre connaissance
de façon approfondie, d'organiser une tournée de consultations
où le maximum d'intéressés aura le temps de faire valoir
son opinion, ses impressions, ses recommandations sur le document
gouvernemental. S'il était généralement bien reçu
par l'ensemble de la population et des bénéficiaires, nous
pourrions anticiper le dépôt d'un projet de loi pour la session
d'automne et, avec la collaboration de l'Opposition, escompter son adoption
avant ta fin de la session, le 21 décembre. J'ai indiqué à
une personne des médias qui m'interrogeait sur le sujet que je ne
connaissais pas de façon plus rapide de procéder. Ce
scénario va dans le sens d'une réception par le milieu qui soit
généralement positive.
M. Charbonneau: Est-ce que le ministre entend respecter
l'engagement qu'il avait pris de procéder à des consultations
publiques par le biais d'une commission parlementaire? La semaine
dernière, je lui avais proposé que ce soit une commission
parlementaire itinérante. Il n'a pas fermé la porte, mais il ne
nous a pas dit clairement en Chambre si, finalement, il entendait respecter...
Je ne sais pas s'il se le rappelle, au mois de septembre dernier, il avait
promis publiquement qu'il y aurait commission parlementaire dans le cadre de
cette consultation.
M. Paradis (Brome-Missisquoi); Ce que je peux dire au
député de Verchères, c'est que, quel que soit le
gouvernement, le ministre responsable ou titulaire du dossier, vous ne pouvez
pas, dans une société dite démocratique, mettre de l'avant
un projet de loi qui affectera directement un minimum de 750 000 individus dans
notre société et qui intéressera sans doute à peu
près tous les autres sans procéder à une vaste
consultation et sans recevoir un appui important de l'ensemble des couches de
la population intéressées. Je n'ai pas l'intention de
procéder ni à la vapeur, ni en catimini, ni à la noirceur.
Le projet de loi sera sur la place publique suffisamment longtemps pour que les
intéressés puissent se prononcer. Les stratégies auront
à être ajustées en cours de route. S'il advenait que, pour
bonifier sérieusement un projet de loi, il faille décaler dans le
temps, nous n'excluons pas cette hypothèse. Tout ce que nous souhaitons,
c'est que nos devoirs soient suffisamment bien faits, pour reprendre une
expression qui a été utilisée à maintes reprises
par le député de Verchères, pour que les principes
contenus et l'ensemble des modalités reçoivent un accueil
favorable de la part de tous les intervenants. S'il y a quelques
modalités à changer, nous changerons les quelques
modalités si elles se révèlent positives pour
l'évolution de notre société. Si tout se passe bien, avec
la collaboration de l'Opposition, j'ai encore l'impression qu'il y a des
possibilités pour que la Loi sur la sécurité du revenu,
incluant les programmes APPORT, APTE et le programme de soutien financier, soit
adoptée au cours de la session d'automne, à l'Assemblée
nationale.
M. Charbonneau: Tout cela est bien beau, M. le ministre, mais la
question précise était celle-ci: Le 3 septembre dernier, vous
déclariez que "le projet de réforme d'aide sociale fera
finalement l'objet d'une consultation publique en commission parlementaire". La
question que je vous pose, c'est: Est-ce que vous allez maintenir cet
engagement?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je remercie...
M. Charbonneau: Autrement dit, vous voulez avoir la collaboration
de l'Opposition. Est-ce que vous allez partir tout seul en tournée
à travers le Québec?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au minimum, je vais vous
emmener.
M. Charbonneau: Est-ce que les députés de
l'Assemblée nationale...
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Charbonneau: Est-ce que les membres de la commission
parlementaire ou les députés de l'Assemblée nationale
intéressés vont pouvoir participer à cette consultation
et, surtout, recevoir les commentaires, opinions et réactions des
organismes et des personnes intéressés?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je peux vous indiquer qu'à
ce sujet, M. le député de Verchères, les décisions
ne sont pas arrêtées, et je vais vous dire pourquoi. L'an
passé, lorsque j'ai fait cette déclaration, je connaissais
l'état du dossier et je connaissais les échéanciers que je
m'étais proposés et qui étaient, si vous me permettez
l'expression, moins pressants que les échéanciers auxquels je
suis confronté présentement. Je vous rappellerai que, le 8
octobre dernier... Vous avez parlé d'une déclaration du mois de
septembre?
M. Charbonneau: Le 3 septembre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le 3 septembre. Je vous
rappellerai qu'un mois plus tard, le 8 octobre 1986, le Conseil des ministres
m'autorisait à rendre public un document présentant la
problématique actuelle de l'aide sociale et des hypothèses de
réforme incorporant les principes suivants: entre autres, disparition
plus ou moins rapide de l'écart actuel de l'aide aux moins de 30 ans,
distinction entre les personnes employables et les non employables, garantie
aux personnes non employables d'une prestation suffisante pour subvenir
décemment à leurs besoins, introduction pour les personnes
employables de mesures favorisant leur insertion dans le marché du
travail et de stimulants destinés à les y amener, des
modalités d'implantation et de transition graduelles.
Je vous indiquerai tout simplement que, n'eût été
l'annonce du rapport Forget, nous aurions pu procéder à
l'époque avec un processus qui était adapté - si je peux
utiliser l'expression - aux circonstances de l'époque. Au moment
où nous nous parlons, je vous dirai que je sens l'impatience des jeunes,
entre autres, qui ont fait confiance au gouvernement à l'occasion de la
dernière campagne électorale et qui se retrouvent, 18 mois
après l'élection du gouvernement libéral, dans une
situation identique à celle qui était la leur sous le
gouvernement précédent, et les jeunes n'appréciaient pas
cette situation sous le gouvernement précédent. Je vous
indiquerai donc qu'ils n'apprécient pas la situation qu'ils connaissent
présentement et leurs pressions se font de plus en plus constantes et
persistantes. J'ai déjà indiqué et à
l'Assemblée nationale et à l'extérieur de
l'Assemblée nationale qu'on ne pouvait demander à un individu
dans une société, en 1987, comme la société
québécoise, de vivre avec un montant de 170 $ par mois et je vous
dirai que, comme ministre responsable de cette réforme et de la
réforme de la sécurité du revenu, je sens cette
pression.
M. Charbonneau: Si je comprends bien, vous n'êtes pas
capable de me dire, ce soir, si vous allez respecter votre engagement de
convoquer une commission parlementaire. Vous m'incitez immédiatement
à aller au contenu, à vous parler du contenu.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur la forme, je ne voudrais pas
que vous tiriez les conclusions que vous tirez. Ce que je vous indique, c'est
qu'il y a lieu, dans une réforme de la sécurité du revenu
qui touche trois quarts de million de Québécois et
Québécoises directement, d'aller en processus de consultation le
plus large possible et que je n'exclus pas la solution que vous mettez de
Pavant.
M. Charbonneau: Très bien. Mais je comprends que, par
rapport à l'engagement que vous avez pris au mois de septembre, c'est,
comme on le disait cet après-midi, un petit pas de danse en
arrière. Ce n'est pas nécessairement un recul vers la porte de
sortie, mais...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous ne m'embarquerez ni dans un
cha-cha, ni dans un slow, M. le député.
M. Charbonneau: Je ne veux pas non plus faire le tanqo avec vous,
par exemple.
Au sujet du contenu. Je serais quasiment porté à parler
tout de suite de la parité, mais je vais me retenir, je vais attendre un
peu. J'ai quelques autres questions avant. Je veux savoir, dans le fond, quand
je reqarde le communiqué de presse que vous avez rendu public la semaine
dernière et ce que vous avez dit aux journalistes en conférence
de presse, au moment où vous avez rendu public ce communiqué de
presse, et quand je regarde les documenta qui ont filtré, entre autres,
la partie accessible et la partie qui n'était pas accessible au public,
en fait, le mémoire au Conseil des ministres que vous avez
préparé et que vous aviez signé, que vous aviez
présenté, j'essaie de savoir quelles sont les différences
entre ce qui a été refusé par le Conseil des ministres et
ce qui a été accepté la semaine dernière, et je
n'en vois pas.
Je voudrais que vous m'expliquiez comment vous avez résolu le
problème du
chaos administratif appréhendé, alors que vous nous
représentez finalement les mêmes programmes. La seule chose que
vous avez introduite de plus, c'est le programme APPORT, qui était une
suggestion du précédent gouvernement et de votre humble serviteur
dans le document que j'ai rendu public au mois de septembre dernier, mais,
au-delà de cela, les programmes APTE et Soutien financier, c'est un
document qu'on retrouvait dans La Presse le 31 juillet 1986, qu'on a
retrouvé dans le mémoire que vous avez présenté au
Conseil des ministres et qui a été rendu public par le Front
commun de3 assistés sociaux. Qu'est-ce qui a changé?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais être honnête
avec vous. Je vais tenter de vous replacer un petit peu dans le contexte
historique de ce qui n'avait pas franchi - si vous me passez l'expression -
l'étape du Conseil des ministres. Le document auquel vous faites
référence, c'est un document du mois d'août parce que je me
rappelle vaguement - je ne peux pas vous citer la date -que le document qui
n'avait pas franchi l'étape du Conseil des ministres, c'était
à l'occasion du Conseil des ministres qui s'était tenu tout
près de Québec, aux chutes Montmorency, si ma mémoire est
fidèle, au Manoir Montmorency, alors que la décision à
laquelle je vous référais tantôt du Conseil des ministres,
au moment où le document a franchi l'étape du Conseil des
ministres, c'était la décision du 8 octobre 1986 - je peux vous
donner l'indication pour vos sources - 86-242 du Conseil des ministres,
À ce moment-là, cela avait franchi l'étape du Conseil des
ministres. (20 h 30)
Donc, nous parlons de deux choses. Je vous dirai qu'à ma grande
surprise le document qui avait franchi l'étape du Conseil des ministres,
je ne l'ai, au moment où l'on se parle, pas encore retrouvé dans
les médias.
M. Charbonneau: Non, mais, moi, ce que j'ai retrouvé dans
les médias, la semaine dernière, c'est-à-dire dans votre
communiqué de presse et dans tes propos que vous avez tenus aux
journalistes, c'est l'essentiel du programme APTE, qui était finalement
de faire en sorte que toutes les personnes aptes au travail qui sont sur l'aide
sociale soient obligées, dans un délai à déterminer
- vous aviez fixé, à un moment donné, un délai de
six mois - de participer à des mesures de relèvement de
l'employabilité pour avoir droit à la prestation maximum. Vous
avez vous-même parlé la semaine dernière de 300 000
ménages, de 300 000 familles et, quant au soutien financier,
écoutez, c'est exactement ce qu'on retrouvait dans La Presse du mois de
juillet où l'on disait que vous aviez l'intention de faire un programme
spécial pour les non employables, c'est-à-dire 22 % des
bénéficiaires, et que ces gens-là verraient
peut-être leurs prestations augmenter dans leur cas. C'est exactement ce
que vous avez dit la semaine dernière. Et, moi, ce que j'aimerais
comprendre, c'est comment le ministre peut nous dire encore ce qu'il vient
d'affirmer, c'est-à-dire que les jeunes vont avoir plus que ce qu'ils
ont actuellement.
Que vont-ils avoir de plus, les jeunes? Voulez-vous bien m'expliquer
cela. Après un an et demi, là, arrêtez donc de tourner en
rond. Dites-moi donc ce que les jeunes peuvent attendre de plus quand vous
allez avoir fini votre réforme. Voulez-vous me dire, ce soir, qu'ils ne
seront pas obligés de participer à des mesures de
relèvement de l'employabilité pour avoir droit à la
prestation maximum? Est-ce cela que vous me dites ce soir? Où est-ce que
l'obligation qu'il leur est faite actuellement va être maintenue?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je pense
que je vais être obligé de lever mon chapeau et de saluer bien
haut le député de Verchères qui est passé
maître dans l'art de semer la confusion.
M. Charbonneau: Pas autant que le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Autant, M. le Président,
dans le contexte historique qui entoure cette réforme de l'aide sociale
que dans le fond du dossier de l'aide sociale.
J'ai écouté le député de Verchères
attentivement tenter de résumer le contexte historique et je vous dirai
que, si je me fie à lui, le ministre est allé à plusieurs
reprises au Conseil des ministres se faire dire non sur un projet de
réforme de l'aide sociale et le ministre n'a rien mis sur la table au
moment où l'on se parle. C'est la version ou la doctrine
présentée par le député de Verchères. Je
vais lui demander de tenter un effort, sinon de compréhension, du moins
d'audition, de façon à répéter à l'avenir
à peu près exactement ce qui s'est produit dans le dossier de
l'aide sociale.
M. Charbonneau: Je ne vous demande pas l'historique, je vous
demande de répondre à une question simple.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Moi, je me rappelle... Non, mais
cela va peut-être vous aider, vous allez peut-être...
M. Charbonneau: Qu'est-ce qui va chanqer pour les jeunes? C'est
cela la question.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a une question de contenant
et il y a une
question de contenu. On va régler le contenant et on va
régler le contenu, si vous voulez bien - je sais que vous n'aimez pas
cela, vous aimeriez mieux qu'on parle des deux en même temps, cela
sèmerait un peu plus de confusion - on va parler du contenant comme tel.
Le contenant, si vous vous en souvenez, c'est que, pendant le temps où
votre gouvernement a été là, il a maintenu à l'aide
sociale une discrimination fondée sur l'âge qui a fait en sorte
que les moins de 30 ans ont subi de la discrimination. Vous vous rappellerez
également la campagne électorale de l'automne 1985 où le
Parti libéral du Québec s'est engagé à abolir cette
discrimination fondée sur l'âge et le Parti libéral dans
son programme vous a établi les grands principes du programme APTE,
Actions positives pour le travail et l'emploi. Dès mon assermentation
comme ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu,
je me suis attaqué à cet important programme. Il y a eu des
discussions et, peut-être parce qu'au moment où vous étiez
au gouvernement vous n'avez pas connu tous les rouages, il y a eu des
discussions qui ont passé à travers plusieurs comités
interministériels et autres du gouvernement. Le premier comité
intéressé dans une telle réforme s'appelle et se nomme le
comité interministériel des affaires sociales et culturelles, et
il est composé des ministres qui sont titulaires...
M. Charbonneau: Ne me faites pas l'historique du gouvernement, je
connais cela un peu.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non, mais...
M. Charbonneau: Cela fait dix ans que je suis
député.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je demande juste à vous
croire lorsque vous me le dites.
M. Charbonneau: Épargnez-moi cela. Répondez
à ma question.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais, quand je vous écoute
sur la place publique...
Le Président (M. Bélanger): Un à la fois,
s'il vous plaît! M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quand je vous écoute sur la
place publique, j'ai l'impression que vous n'avez jamais connu ces rouages, que
vous ne comprenez rien à ces rouages, ou je dois vous donner le
bénéfice du doute que vous comprenez ces rouages, mais que,
finalement, vous choisissez, comme je vous l'ai dit au tout début, de
semer la confusion pour tenter de confondre les intéressés. Je
vous dirai tout simplement que le comité...
M. Charbonneau: C'est un bel écran de fumée.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...interministériel des
affaires sociales et culturelles, qui est composé des ministres qui se
voient confier par le premier ministre des portefeuilles à vocation
sociale et culturelle, se rencontre tous les mercredis matin pour
décider des politiques gouvernementales en matière sociale et
culturelle. Je vous dirai qu'un dossier de cette enverqure qui rejoint
l'ensemble de la population du Québec se doit également de
recevoir l'assentiment du comité interministériel sur le
développement économique. Je vous dirai également qu'un
dossier d'une telle enverqure doit recevoir l'assentiment du Conseil du
trésor et du ministère des Finances. Je vous dirai que le dossier
de la réforme de l'aide sociale a cheminé, dès mon
assermentation, premièrement, à l'intérieur du
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu,
par la suite, à l'intérieur du comité
interministériel des affaires sociales et culturelles, puis, au Conseil
du trésor, au ministère des Finances et au comité
interministériel de développement économique. Oui, vous
avez raison de dire que le dossier, une fois acheminé au Conseil des
ministres, a subi ce que je peux appeler techniquement un premier refus
à l'occasion de la rencontre du Conseil des ministres au Manoir
Montmorency parce que la présentation ou l'orientation que nous avions
prise, que nous avions préconisée causait, suivant l'avis de
certaines personnes au Conseil exécutif, des problèmes
d'application administrative. Je suis donc retourné à la planche
à dessin, ayant en tête ces problèmes administratifs, parce
que je ne voulais pas non plus causer de chaos administratif. Je voulais
m'assurer qu'à ce stade nous avions nivelé tout ce qu'il
était possible de niveler.
À partir de ce moment-là, je suis retourné au
Conseil des ministres après avoir représenté le projet
à travers, oui, le comité interministériel des affaires
sociales et culturelles, oui, le Conseil du trésor, oui, le
ministère des Finances, oui, le comité interministériel de
développement économique, et j'ai finalement abouti au Conseil
des ministres le 8 octobre 1986. Le 8 octobre 1986, le Conseil des ministres a
rendu la décision que je vous ai citée tantôt et qui
m'autorisait, comme ministre responsable de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, à rendre public le document
d'orientation sur l'aide sociale qui incluait les grands principes suivants:
disparition plus ou moins rapide de l'écart actuel de l'aide aux moins
de 30 ans, distinction
entre les personnes employables et les personnes non employables,
garantie aux personnes non employables d'une prestation suffisante pour
subvenir décemment à leurs besoins, introduction pour les
personnes employables de mesures favorisant leur insertion sur le marché
du travail et de stimulants destinés à les y amener, des
modalités de transition et d'implantation graduelles. Vous savez ce qui
s'est passé par la suite. Par la suite, les premières fuites
-parce qu'à Ottawa aussi il y a des fuites -sur Je rapport Forget. Par
la suite, dépôt du rapport Forget, possibilité pour le
Québec de se retrouver dans l'obligation d'accueillir dans son programme
d'aide sociale plus de 60 000 personnes au Québec, ce qui affectait
dangereusement, au niveau des crédits et de l'orientation que nous
avions retenue, le programme d'aide sociale que nous avions
déposé au Conseil des ministres.
Vous connaissez la suite, mais vous n'avez pas - je vais vous demander
un petit effort d'honnêteté - été assez
honnête pour le reconnaître au moment où l'on se parle. Le
15 mai, le ministre de l'Emploi et de l'Immigration du gouvernement
fédéral, Benoît Bouchard, a rendu publique la position du
gouvernement d'Ottawa sur le dossier du rapport Forget. La journée
même, je me suis assuré que le dossier de l'aide sociale serait
à l'agenda du Conseil des ministres le mercredi suivant. Le mercredi
suivant, parce que dans l'intervalle nous n'avions pas arrêté nos
travaux au ministère, le mercredi suivant, je me suis
présenté au Conseil des ministres, directement, sans repasser par
le comité interministériel des affaires sociales et culturelles,
sans repasser par le Conseil du trésor ni par le ministère des
Finances, mais à la suite de discussions, dans l'intervalle, avec mes
collègues...
M. Charbonneau: M. le Président, tout ce que je demande au
ministre...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non.
M. Charbonneau: Cela fait dix minutes qu'il parle pour ne rien
dire.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'un vendredi...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Verchères, on va entendre...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On est encore sur la forme, M. le
député.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez tellement accusé
l'actuel gouverne- ment...
M. Charbonneau: Je vous demande ce qui va chanqer pour les
jeunes. Ce n'est pas compliqué, cela!
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaîtl
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez tellement accusé
l'actuel ministre...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît:
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...que je vous dis, en cette
commission, que la vérité a ses droits.
M. Charbonneau: Qu'est-ce qui va changer pour les jeunes, M. le
ministre?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Que le mercredi suivant... Les
crédits sont une occasion en or pour dire à un
député de l'Opposition qui a fait des déclarations non
conformes à la vérité quelle est l'heure juste, quelle est
la vérité. Le mercredi suivant, je suis allé au Conseil
des ministres avec les présentations que vous connaissez, qui ont
été endossées par le Conseil des ministres, et, au moment
où on se parle, les hauts fonctionnaires des ministères des
Finances et de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu en
sont à arrimer les trois programmes de la sécurité du
revenu: le programme APTE, le proqramme Soutien financier et le programme
APPORT.
M. Charbonneau: Bon, ça va faire, là!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La suite des
événements: consultations au cours de l'été. Si le
projet est généralement bien reçu...
M. Charbonneau: On en a déjà parlé, ne
revenez pas sur cela. Ce n'est plus de cela qu'on parle. Un instant, M. le
Président!
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Verchères, on va respecter le droit de parole du
ministre.
M. Charbonneau: M. le Président, ce que j'ai
demandé au ministre... On va aussi respecter, à un moment
donné... On ne veut pas que cela tourne à la farce, là. Je
veux bien croire que le ministre est un maudit bon parlementaire. Il a
été de ce côté-ci, il a appris le métier,
sauf que je ne suis pas un enfant d'école. Ça va faire.
Ce que je demande au ministre: Va-t-il nous dire une fois pour toutes ce
qui va changer pour les jeunes assistés sociaux? Qu'est-ce qu'ils vont
avoir de plus que ce
qu'ils ont actuellement? Est-ce que le ministre maintient toujours
l'obligation pour les personnes aptes au travail, pour les
bénéficiaires, de participer à des mesures de
développement de l'employabilité pour avoir droit à la
prestation maximale, selon la page 4 de son mémoire au Conseil des
ministres? Est-ce que les bénéficiaires vont être tenus
d'accepter les emplois qui vont leur être offerts, faute de quoi ils vont
perdre leurs prestations ou vont voir leurs prestations diminuées?
Est-ce qu'on va tenir compte des situations particulières? Combien de
catégories allez-vous créer?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, est-ce que
le député autoriserait une question? Est-ce qu'il lit à
partir d'un mémoire du mois d'août qui a été
refusé par le Conseil des ministres?
M. Charbonneau: Non. Je lis à partir de votre
communiqué de la semaine dernière. Je ne sais pas si vous vous
rendez compte de ce que vous avez dit aux journalistes. Vous avez
confirmé aux journalistes, la semaine dernière, que plus de 300
000 chefs de ménage aptes au travail devront participer à des
mesures de relèvement de l'employabilité. C'est ce que vous avez
dit. C'est cela le programme APTE.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président. Je
m'inscris en faux contre les propos du député de
Verchères.
M. Charbonneau: Dites-moi aujourd'hui que ce n'est pas cela.
Dites-moi aujourd'hui que le programme APTE a changé d'orientation par
rapport à ce qu'il était l'été dernier.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je dis
tout simplement que le député de Verchères induit cette
commission en erreur.
M. Charbonneau: M. le Président, est-ce que le ministre
peut nous dire, oui ou non, si les bénéficiaires de l'aide
sociale de moins de 30 ans vont pouvoir, après sa réforme, avoir
droit à la prestation maximale, sans avoir l'obligation de participer
à des mesures de relèvement de l'employabilité? Ce n'est
pas compliqué, cela ne prend pas un discours, cela prend
l'honnêteté intellectuelle de dire oui ou non.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, j'aurai
l'honnêteté intellectuelle de dire au député de
Verchères, qui, depuis cinq bonnes minutes, ne fait que colporter des
faussetés, que le mandat que le Conseil des ministres m'a confié
la semaine dernière, avec la collaboration de mon collègue, le
ministre des Finances, quant à la question de la discrimination
fondée sur l'âge qui avait été implantée par
nos prédécesseurs...
M. Charbonneau: Par le Parti libéral, M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...par nos
prédécesseurs...
M. Charbonneau: Par le Parti libéral, dans les
années soixante-dix.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...se lit, à son article 3,
comme suit: "de mandater le ministre des Finances et le ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu pour rédiger un
projet de loi intitulé Loi sur la sécurité du revenu
abolissant la discrimination basée sur l'âge et prévoyant
les éléments concernant la création des programmes APPORT,
APTE et de sécurité financière". Ce que je dis au
député de Verchères, c'est qu'une loi libérale en
matière de sécurité du revenu n'autorisera pas un
gouvernement péquiste à créer de la discrimination
fondée sur l'âge, à moins qu'il n'y ait modification
à la loi par un tel gouvernement.
M. Charbonneau: Voilà, M. le Président, le genre de
démagoqie qu'on a entendue quand le ministre était
député de l'Opposition. C'est une mesure qui a été
introduite par le qouvernement Bourassa dans les années
soixante-dix.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La Loi sur l'aide sociale, vous
avez raison.
M. Charbonneau: Non, la discrimination en fonction de
l'âge. Le critère de l'âge, c'est vous autres, votre chef
actuel...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les 164 $ par mois, c'est le PQ,
et même votre chef actuel, M. Johnson, est contre la parité. (20 h
45)
M. Charbonneau: Je m'excuse! On a maintenu - et on a payé
pour - une politique que vous aviez établie. Ma question, M. le
Président, il semble que le ministre soit incapable de la saisir. En
fait, il est tellement incapable de la saisir que cela fait un an et demi qu'il
refuse de répondre parce qu'il sait très bien que, finalement,
cela dégonfle. Encore, en fin de semaine, Le Soleil rapportait que c'est
un ballon déqonflé. Il n'y a que le ministre maintenant qui tente
de souffler dans sa balloune. Il n'y a plus personne qui le prend au
sérieux.
Je répète ma question au ministre: Est-ce que les
bénéficiaires vont être tenus d'accepter les emplois qui
vont leur être offerts, premièrement? Deuxièmement, est-ce
que le ministre entend tenir compte de situations particulières, en
particulier pour
les plus de 30 ans qui sont aptes au travail? Autrement dit, est-ce
qu'il va mettre sur le même pied la mère de famille de cinq
enfants, qui a 55 ans, qui est apte au travail, en bonne santé, qui n'a
jamais travaillé ailleurs qu'au foyer, et la jeune fille de 25 ans,
célibataire, apte au travail, en bonne santé elle aussi?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La réponse à la
question du député de Verchères, M. le Président,
est non.
M. Charbonneau: Très bien. Alors, combien de
catégories allez-vous créer pour tenir compte de l'ensemble des
différentes situations qui peuvent se produire? À combien de
catégories peut-on s'attendre?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La réponse, si
catégories il y a - j'indique bien - la réponse au
député de Verchères lui viendra dans le document de
consultation, si catégories il y a.
M. Charbonneau: Est-ce que le ministre peut nous indiquer s'il a
toujours l'intention de vérifier l'aptitude au travail et la
disponibilité au travail par des évaluations
médicales?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Selon, comme je vous l'ai
indiqué cet après-midi, la définition finale qui sera
retenue quant à l'aptitude ou l'inaptitude. L'application quotidienne de
cette définition pose le problème pratique de déterminer
qui est conforme ou qui entre dans le cadre de la définition et qui
n'entre pas dans le cadre de la définition. La formule que nous
connaissons présentement est en évaluation. Vous connaissez bien
cette formule: le bénéficiaire qui prétend être
inapte ou incapable de travailler se rend chez son médecin, son
médecin l'évalue, son médecin produit un rapport. Si ce
rapport apparaît, pour ce que j'appelle la machine gouvernementale,
clair, net et précis, la personne est considérée suivant
le résultat du rapport. Si la machine n'est pas d'accord avec le
résultat du rapport, il peut y avoir contre-expertise par un expert de
la santé retenu par le ministère. Si cette contre-expertise va
dans le sens de la première expertise du médecin, il n'y a
généralement pas de problème qui se pose. S'il y a
contradiction entre les rapports médicaux comme tels, la personne a
droit à tout l'appareil administratif et quasi judiciaire jusqu'au
moment d'une décision de la Commission des affaires sociales. Si elle se
qualifie parce qu'elle est démunie, il y a également assistance
de l'aide juridique pour mener sa cause à terme.
M. Charbonneau: Si le ministre nous a dit qu'il ne
considérait pas de la même façon les deux exemples que j'ai
donnés tantôt, autrement dit, que tout le monde ne sera pas
traité de la même façon parce qu'il y a des situations
différentes, est-ce qu'il nous indique aussi par le fait même
qu'il y aura autre chose qu'une seule évaluation médicale?
J'imagine que...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense qu'une seule
évaluation médicale dans le cas où les droits d'un
individu ont à être déterminés est absolument
risquée, si je puis utiliser l'expression, pour autant que cela concerne
le gouvernement, quel que soit le gouvernement, et le
bénéficiaire. Sauf que, lorsqu'il y a des cas qui sont
acceptés d'emblée parce que l'évaluation est tellement
claire et précise, une seule évaluation pourra suffire dans le
cas où elle sera à l'avantage du bénéficiaire, mais
dans le cas où ce sera tellement clair.
M. Charbonneau: Est-ce que le ministre trouve toujours
raisonnable de supposer que la plupart des 318 000 chefs de ménage aptes
au travail réussiront à se trouver un emploi dans un délai
de six mois, comme il l'affirmait dans le mémoire au Conseil des
ministres qu'il a signé lui-même?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bien oui, mais...
M. Charbonneau: Oui, mais vous l'avez signé ce
mémoire-là.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...votre coulage n'est pas
actualisé, si je peux utiliser une expression.
M. Charbonneau: II n'est peut-être pas actualisé,
mais vous l'aviez signé. C'est ce que vous prétendiez au mois
d'août. Qu'on n'ait pas accepté vos affaires, c'est une autre
chose. Mais, moi, je parle a partir de ce que vous... Vous vous êtes
vanté cet après-midi d'avoir beaucoup travaillé. Moi, je
parle à partir de votre travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais vous donner une
donnée que vous ignorez.
M. Charbonneau: Vous feriez peut-être mieux de me donner la
dernière version.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non, pas la dernière
version. Pas tout de suite, j'attends que vous soyez mûr.
M. Charbonneau: Vous êtes mieux de mûrir
vous-même.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous indiquerai tout simplement
que plus de la moitié des bénéficiaires de l'aide sociale
en
ressortent à l'intérieur d'une période de neuf
mois, Je pense que c'est quelque chose qui n'est pas connu sur la place
publique. Une personne sur deux qui se voit dans l'obligation de recourir
à cette ressource gouvernementale de dernier recours en ressort à
l'intérieur des neuf premiers mois.
M. Charbonneau: Est-ce que vous me dites qu'il y a un taux de
roulement tel que la clientèle de l'aide sociale se renouvelle presque
complètement presque tous les ans et demi?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non, ce n'est pas ce que je
vous dis. Il y a des cas qui sont plus difficiles et ce n'est pas
nécessairement la faute de la personne. Je vous parle du cas des
nouveaux arrivants. Des personnes qui arrivent aujourd'hui dans la province de
Québec à l'aide sociale, la moitié de ces
personnes-là, si vous me reparlez dans neuf mois, auront
réintégré une autre fonction, une autre occupation ou un
autre statut dans la société québécoise. C'est ce
que je vous dis.
M. Charbonneau: Est-ce que vous me dites que tous ceux qui sont
aptes au travail actuellement ne sont là, pour une moitié, que
depuis neuf mois?
M. Paradis (Brome-Missisquoi); Non, ce n'est même pas ce
que je vous dis parce qu'il y a des gens qui, dans la vie, sans être des
gens qu'on qualifie d'inaptes ou de non employables sont des gens qui n'ont pas
eu de veine, qui ont souffert d'un environnement qui fait en sorte que le
défi pour eux est beaucoup plus difficile à relever que pour
d'autres personnes dans la société. Les mesures qui sont en place
et qui satisfont les besoins de 50 % des nouveaux arrivés ne sont pas
suffisantes pour satisfaire les besoins des autres 50 % parce que, si les
mesures étaient suffisantes, peut-être que ces personnes
réussiraient aussi à s'en sortir. Il s'agit de cas plus
difficiles, il s'agît de cas plus pénibles et il s'agit de cas sur
lesquels le gouvernement se doit de consacrer plus de ressources, tant humaines
que budgétaires.
M. Charbonneau: Est-ce que le ministre a toujours l'intention de
diminuer les prestations d'aide sociale pour certaines catégories?
Est-ce qu'il a toujours l'intention d'éliminer certaines allocations
spéciales actuellement accordées et, corollairernent, est-ce que
le ministre a toujours l'intention de réduire les allocations des
personnes seules employables et des ménages dont le chef est une
personne employable et qui partagent un logement? Finalement, est-ce que le
ministre a l'intention de conserver la proposition d'une contribution
alimentaire parentale pour juger de l'admissibilité des jeunes et du
niveau d'aide financière qui leur sera accordée? Est-ce toujours
de l'intention du ministre?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je peux vous répondre par
un exemple, M. le député de Verchères.
M. Charbonneau: J'ai posé plusieurs questions, ça
va prendre plus d'un exemple.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais je pense que l'exemple
peut vous aider à situer le créneau des questions que vous avez
posées qui vont un peu toutes dans la même direction et qui ont un
peu toutes la même orientation.
Je me suis aperçu au ministère que, sur le plan des
besoins spéciaux que le ministère couvre pour les
bénéficiaires de l'aide sociale, lorsqu'on effectue certaines
analyses quant aux frais de déplacement qui sont payés dans
certaines circonstances pour les bénéficiaires de l'aide sociale,
que les frais de déplacement per capita, pour les qens qui vivent sur
l'île de Montréal, sont plus élevés pour les
bénéficiaires de l'aide sociale - il faut bien se comprendre -
que pour les bénéficiaires de l'aide sociale qui vivent en
région.
Vous comprendrez qu'à première vue de telles
données statistiques peuvent susciter la curiosité d'un ministre
titulaire. Au moment où on se parle, tant pour cette mesure de frais de
déplacement que pour d'autres mesures, nous sommes à faire des
évaluations qui en sont aux phases finales, mais certaines
données chiffrées font en sorte qu'on est en droit de se poser de
sérieuses questions. Vous savez que les frais de déplacement qui
sont payés le sont généralement pour des questions de
santé, etc., d'accessibilité aux hôpitaux. Suivant les
chiffres qui m'ont été communiqués, je comprends mal
qu'une personne qui est située sur l'île de Montréal, qui a
accès suffisamment à proximité à peu près
à tous les services de santé auxquels on peut penser, à
partir du plus général jusqu'au plus spécialisé,
ait des frais de déplacement de loin supérieurs à un
bénéficiaire de l'aide sociale qui habite en région, . qui
est normalement éloigné ou, en tout cas, moyennement
éloigné des centres superspécialisés, qui est
éloigné des centres spécialisés et qui n'est pas
trop proche des centres généraux. On est en droit, pour les
besoins spéciaux, de se questionner sérieusement sur
l'utilisation qui en est faîte dans certains cas. Les données qui
m'ont été communiquées font en sorte que j'ai
demandé aux fonctionnaires de réviser l'ensemble des besoins.
M. Charbonneau: On disait ici que les
autres allocations spéciales qui favorisaient les
bénéficiaires employables au-delà des conditions dont
jouissent habituellement les personnes à faible revenu seront
éliminées. Écoutez, le ministre me répond encore
d'une façon vague. C'était clair au mois d'août qu'il avait
fait son lit. Ce que je lui demande: Est-ce qu'à l'égard de ces
questions il maintient toujours son opinion? Est-ce que les allocations
spéciales...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez. Je pense que vous lisez
les phrases que vous voulez bien lire.
M. Charbonneau: Non, non. Je lis... Je vous ai lu...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous n'avez pas lu les besoins
spéciaux se rapportant aux frais de santé?
M. Charbonneau: Non, non, non.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne pense pas que c'était
libellé comme cela. De mémoire.
M. Charbonneau: Non, non. Juste avant, on disait que les
bénéficiaires du programme obtiendront aussi gratuitement, par
l'intermédiaire d'une carte-santé, les médicaments
reconnus et autres services de santé autorisés dont ils
pourraient avoir besoin pendant la période d'admissibilité au
programme.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah! Cela va.
M. Charbonneau: Les autres allocations spéciales - pas les
mêmes, les autres - qui favorisaient les bénéficiaires
employables au-delà des conditions dont jouissent habituellement les
personnes à faible revenu seront éliminées. Si on veut
être plus clair, les allocations mensuelles des personnes seules
employables et des ménages dont le chef est une personne employable et
qui partagent un logement seront donc réduites. Plus loin, on
disait...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II est sélectif.
M. Charbonneau: ...les contributions alimentaires...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Lisez à la suite. Vous avez
tout le temps,
M. Charbonneau: Non, non, je parle des choses qui vont
pénaliser. On parlait ici de la contribution alimentaire parentale: "La
législation proposée introduira aussi le principe d'une
contribution alimentaire paren- tale qui viendra dorénavant influencer
l'admissibilité ou, le cas échéant, le niveau de l'aide
versée aux personnes seules considérées comme
dépendantes et aux couples sans enfants dont les deux membres sont
considérés comme dépendants. Seront
considérées comme indépendantes les personnes de 18 ans et
plus qui ont résidé pendant deux ans ou plus en dehors du milieu
familial et qui ont occupé un emploi régulier pendant deux ans.
L'application de ce principe obéira à des règles
semblables à celles qui sont actuellement utilisées dans le
programme des prêts et bourses aux étudiants."
Donc, je vous ai donné trois cas de catégories de
bénéficiaires qui risquent de voir leur situation se
détériorer. Je vous demande: Est-ce que vous avez toujours
l'intention de procéder dans le sens que vous aviez l'intention de le
faire au mois d'août dernier? Vous avez siqné ce document.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je n'en veux pas, M. le
Président, à mon bon ami, le député de
Verchères, d'avoir passé pardessus...
M. Charbonneau: Je ne vous en veux pas de ne pas
répondre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...tout l'aspect du proqramme qui
traitait des individus qui, dans notre société, sont incapables
de travailler, pour qui il y avait plusieurs dizaines de millions...
M. Charbonneau: Je vais revenir à cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non. Je suis certain qu'il y
reviendra, mais pas trop longuement. J'en profite pour le souligner. Je lui
dirai tout simplement qu'au mois d'août 1986 le cadre dans lequel le
mémoire a été présenté était le cadre
que nous connaissions à l'époque et qu'il fallait, comme il nous
faut aujourd'hui, et j'insiste là-dessus, qu'il fallait à
l'époque, comme il nous faut aujourd'hui, tenir compte, dans ce qu'on
appelle au Québec le programme de dernier recours, le proqramme d'aide
sociale, d'un niveau d'incitation au travail qui fasse en sorte que le
père ou la mère de famille qui travaille au salaire minimum soit
quand même incité au moins à ne pas quitter le
marché du travail pour se joindre au rang des assistés
sociaux.
Je vous dirai qu'à l'époque, avec le salaire minimum de
l'époque - il n'avait pas encore été relevé - je
vous dirai qu'à l'époque, sans les programmes de fiscalité
qui ont été annoncés dans le budget Levesque de cette
année et qui font en sorte que les gens à faible revenu, les
familles à faible revenu, n'auront plus d'impôt à payer, je
vous dirai qu'à l'époque, au moment où il
n'y avait pas possibilité d'envisager l'incorporation ou le
mariage des programmes Soutien financier, APTE et APPORT, je vous dirai
qu'à l'époque, M. le député de Verchères,
pour un soutien de famille qui comprenait deux adultes et deux enfants, dans
plusieurs cas, il était financièrement plus avantageux de se
retrouver bénéficiaire de l'aide sociale que travailleur ou
travailleuse au salaire minimum.
M. Charbonneau: Je le sais. C'est le constat du livre blanc sur
ta fiscalité des particuliers. C'est évident. On est d'accord, ce
n'est pas là la question.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bon. Si on est d'accord, on peut
procéder. (21 heures)
M. Charbonneau: La question n'est pas là.. Encore une
fois, je constate que le ministre n'a pas répondu.
Protection et développement de l'emploi
Mesures de développement de
l'employabilité
Je vais lui poser une autre question sur un autre sujet qui est
complémentaire» qui est toujours relié à son
programme APTE. Les mesures de développement de l'employabilité,
celles qui existent d'abord. Est-ce que le ministre pourrait nous dire... Moi,
j'ai fait des calculs et j'aimerais ça, peut-être avec le
sous-ministre, qu'on voie si nos calculs sont précis. Je
préfère me fier au sous-ministre qu'au ministre à certains
égards. J'ai calculé, M. le Président, que l'enveloppe
globale en 1986-1987 était fixée, pour les quatre mesures de
développement de l'employabilité, si on se comprend, qui
étaient travaux communautaires, rattrapage scolaire, stage en milieu de
travail, ou en entreprise, selon le système qu'on utilise, et retour aux
études postsecondaires des chefs de famille monoparentale... On
s'entend? Donc, en 1986-1987, l'enveloppe globale était de 62 042 000
$ Si on ajoutait à cette somme les montants consacrés aux
frais de fonctionnement, employabilité, somme attribuée aux
promoteurs de projets de travaux communautaires, maximum de 125 $ par mois,
soit 7 500 000 $, de laquelle somme on soustrait 1 300 000 $ pour des frais de
téléphonie et des lignes de traitement informatique, qui cette
année seront assumés par le ministère des
Communications, si on ajoute le montant de 6 300 000 $, on arrive avec
des montants globaux de 69 200 000 $. Cette année, quand on regarde les
crédits, pour des montants comparatifs, on arrive au total de 73 700 000
$. C'est donc une augmentation d'à peu près 4 400 000 $ pour les
quatre mesures de développement de l'employabilité.
Je voudrais d'abord savoir si on s'entend sur ces chiffres, d'une
part.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous faites part des chiffres
officiels qui sont connus, oui.
M. Charbonneau: Ça va? S'entend-on sur cela? Pour les
quatre mesures? Autrement dit, on s'entend que, grosso modo, le budget de
développement de l'employabilité, les quatre mesures qui sont
directement liées au programme d'aide sociale, c'était l'an
dernier un budget de 69 200 000 $, et cette année, de 73 700 000 $ -
disons 74 000 000 $, pour arrondir. Si je regarde, M. le ministre...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je peux vous laisser aller avec
vos chiffres. Ils sont raisonnablement honnêtes.
M. Charbonneau: Non, non, mais je vous le demande.
Écoutez, si je fais des erreurs, dites-le-moi, c'est le temps.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sauf que vous ne tenez pas compte,
je dois vous l'indiquer, dans l'ensemble, des proqrammes de
développement de l'employabilité, mais les chiffres que vous
citez se rapportant aux programmes que vous avez énumérés
sont exacts. Sauf qu'il faudrait... Je ne vous dis pas que ce n'est pas correct
ce que vous dites. Je vous dis simplement qu'il existe d'autres mesures
d'employabilité où des efforts sérieux sont faits pour
rejoindre une clientèle de l'aide sociale au sein du ministère de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et que, lorsque vous
tenez compte de l'ensemble des enveloppes qui sont dévolues à
cette clientèle...
M. Charbonneau: On en parlera tantôt, c'est le programme
SEMO.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Jeunes volontaires, Bon d'emploi
Plus, etc. Il y a d'autres programmes. Ce que vous dites, C'est exact, sauf que
ça ne fait pas le portrait.
M. Charbonneau: Si le ministre me dit que je ne suis pas trop
dans la mauvaise ligne, je vais un peu plus loin dans l'explication. Pour les
participants à ces quatre mesures....
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que je peux, pour que vous
ayez une vision plus globale et complète, vous référer
à la page 58 du cahier que nous vous avons fourni?
M. Charbonneau: Bien oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le cahier explicatif. Vous allez
avoir le portrait complet.
M. Charbonneau: C'est un peu de là. Mais, pour le rendre
accessible...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pas juste accessible. Vous allez
à la fois le rendre et accessible et complet.
M. Charbonneau: Je comprends, mais je vulgarisais un peu. C'est
peut-être une vieille déformation de journaliste, vous
comprendrez.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je comprends le devoir.
M. Charbonneau: Ce que je comprends, c'est que le gouvernement
met 70 000 000 $; un peu plus cette année que l'an dernier, c'est
l'ordre de grandeur. On se comprend pour les quatre mesures de
développement de l'employabilité.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous n'êtes pas contre qu'on
augmente les budgets?
M. Charbonneau: Non, mais ce que je constate, c'est que ce n'est
pas de 40 000 000 $ que vous allez augmenter cela, c'est de 4 400 000 $ cette
année, c'est 6,6 %. Il ne faut pas charrier. Ce que je constate, M. le
ministre, c'est que, pour un budget d'à peu près 70 000 000
$...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez. Je voudrais
préciser, pour ne pas induire la commission en erreur, que, lorsqu'on
parle de 42 000 000 $, on parle des programmes 9 et 10. Au moment où on
se parle, lorsque vous parlez du pourcentage dont vous parlez, vous parlez
strictement du programme 10. Cela va?
Une voix: L'élément 3.
M. Charbonneau: Ce dont je parle, c'est des quatre mesures de
développement. Le pourcentage dont je vous parle, c'est des quatre
mesures.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne voudrais pas qu'on laisse
dans le Journal des débats l'impression que, lorsque le ministre
a dit que le gouvernement avait investi plus de 40 000 000 $ en matière
de formation et d'employabilité cette année, additionnels
à ce qu'il y avait l'an passé, je n'ai pas dit la
vérité.
M. Charbonneau: Une partie de la vérité.
M. Paradis (Brame-Missisquoi): À deux, on va être
correct.
M. Charbonneau: Sauf qu'il va falloir qu'ils nous comprennent. On
a de la misère, nous, à se comprendre. Je ne sais pas comment ils
vont faire, mais en tout cas. Je vais un peu plus loin. Je voudrais juste
vérifier...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous, là, c'est
l'élément 3 du programme 10.
M. Charbonneau: Donc, si je regarde bien, et j'aimerais qu'on me
donne les chiffres précis, parce qu'il y avait des chiffres
différents. En 1986-1987, donc, l'an dernier, pour un budget de 69 200
000 $, ces quatre mesures ont rejoint... J'ai un chiffre du ministère
qui me dît 25 978 et un autre qui me dit 29 960. Lequel des deux? On ne
se chicanera pas trop, disons que c'est entre 26 000 et 29 000 ou 30 000; on ne
serait pas loin de la moyenne.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'erreur doit provenir du fait
que, d'une année à l'autre, il y a un cheminement de
clientèle...
M. Charbonneau: Donc, on se comprend bien.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...si erreur il y a.
M. Charbonneau: J'aimerais que le ministre m'explique la chose
suivante: cela lui coûte 70 000 000 $, ou à peu près, pour
remettre dans des mesures de développement de l'employabilité un
peu moins ou autour de 30 000 personnes. Vous avez 318 000, selon votre
mémoire au Conseil des ministres, personnes aptes au travail que vous
voulez obliger à participer à des mesures de développement
de l'employabilité. Combien votre réforme va-t-elle vous
coûter au programme APTE, à l'égard des mesures de
développement de l'employabilité?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, j'aimerais
bien répondre à la question du député de
Verchères, mais, encore une fois, sa prémisse est fausse.
À partir d'une fausse prémisse, apporter une réponse peut
induire les gens en erreur. Je vous dirai que la réforme de la
sécurité du revenu que nous proposons ou que nous proposerons
sous peu à l'ensemble de la population du Québec va coûter
des sous. J'ai indiqué, la semaine dernière, en conférence
de presse, que le programme APPORT va coûter directement plus de 50 000
000 $, qu'indirectement des mesures fiscales l'accompagnant pourraient
être également assez coûteuses ou dispendieuses. J'ai
également indiqué que le programme de soutien financier, qui
s'adressait à ceux de
nos concitoyens qui sont les plus démunis et qui sont
considérés comme inaptes ou incapables de travailler,
coûterait quelque 100 000 000 $. Vous avez là, en coût
direct, quelque 150 000 000 $, sans tenir compte des mesures fiscales qui ont
été annoncées ou qui pourraient être
annoncées, sans tenir compte du coût du programme APTE. J'ai
indiqué et je ne sais pas si vous avez...
M. Charbonneau: Combien ce programme va-t-il coûter?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est celui que j'ai
refusé, après peut-être 20 charges - quelquefois à
l'assaut - de la Tribune de la presse, de quantifier sur le plan
budgétaire. Toutefois, j'ai indiqué la semaine dernière
qu'il était pour être plus coûteux que n'importe quel des
autres programmes mis de l'avant dans le cadre de la politique de la
sécurité du revenu et sur le même paramètre que je
vous indique ce soir.
M. Charbonneau: Écoutez, on prendra notre calculatrice et
on invitera les journalistes à faire la même chose. 70 000 000 $
pour 30 000 placements, et vous en avez 318 000 à placer, c'est un
contrat, celai Cela va coûter des sous.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le député de
Verchères, j'espère que vous n'avez rien contre un gouvernement
qui investit dans ses ressources humaines.
M. Charbonneau: Non, mais j'ai hâte de voir le gouvernement
livrer la marchandise, par exemple, ne pas juste en parler. Cela fait un an et
demi que le ministre nous fait de belles promesses et tient un discours
tellement vertueux...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous voulez que je vous
récite le contexte historique? Je peux vous replacer...
M. Charbonneau: Non. Le chapelet...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, vous êtes certain?
M. Charbonneau: ...je l'ai eu tantôt, je pense que j'ai
même eu le rosaire.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, mais je peux vous
replacer...
M. Charbonneau: Laissez faire! Une fois le rosaire par soir,
c'est assez.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...dans le contexte
historique.
M. Charbonneau: Chez nous, quand on écoutait le cardinal,
on l'écoutait une fois et on en avait assez.
Si je comprends bien, le ministre n'est pas capable de nous dire
exactement... Je ne comprends pas que le ministre, après un an et demi,
ne soit pas capable de nous dire combien cela va coûter. Je vais lui
poser une autre question. Vous avez à peu près...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne veux pas que vous repartiez
d'ici avec l'impression... La semaine dernière, il y a des qens qui ont
demandé: Combien allez-vous économiser avec cela? J'ai clairement
indiqué aux qens de la presse qui m'avaient posé cette question
que ce n'était pas une question d'économiser pour le gouvernement
actuel, que c'était une question d'investir dans ses ressources
humaines.
M. Charbonneau: Le ministre a eu de bons comptes rendus de presse
de mes déclarations au mois de septembre. Le ministre dit cela presque
un an après.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, vos comptes rendus de presse,
je les ai eus sur un rapport du mois d'août refusé au Conseil des
ministres. Est-ce que vous voulez que je revienne sur la décision du
mois d'octobre du Conseil des ministres...
M. Charbonneau: Le rosaire, cela va.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...document qui a
été produit et qui, par je ne sais quelle circonstance, n'a pas
encore coulé?
M. Charbonneau: Attendez, cela viendra. Avec vos
congédiements, cela risque d'arriver plus vite que vous ne pensez.
J'espère bien, j'en fais une invitation pressante d'ailleurs. Je peux
vous dire que, comme journaliste, je protégeais toujours mes sources. Si
cela peut faire l'affaire de vos fonctionnaires, il n'y aura pas de
problème, on va les protéger de la même façon.
Combien de jeunes, au mois d'octobre... Je ne sais pas si le ministre
veut me tirer, comme il y en a un autre...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est une incitation directe
à la délation, mais je dirai, en réponse à ses
propos, que je me fie au sens de responsabilités de l'ensemble de
l'appareil et que, si quelques exceptions ont laissé aller,
momentanément, au cours des derniers mois, leur sens des
responsabilités, j'ai confiance que...
M. Charbonneau: À délation, délation et
demie. Avec les visites à domicile, vous avez une bonne longueur
d'avance sur moi, de toute façon.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je n'ai jamais commis de
délation dans le cadre de ce programme.
M. Charbonneau: Mais vous l'avez encouragé, c'est exact.
Je voudrais bien savoir, M. le ministre, combien de jeunes qui ont actuellement
moins de 30 ans... Souvent, je trouve un peu ridicule de parler de jeunes, car,
à 30 ans, on est jeune, mais on n'est plus des adolescents. L'expression
porte souvent à oublier que ce sont des adultes. J'imagine que, vous et
moi, qui sommes d'une génération qui, à 30 ans,
travaillait déjà depuis un bon bout de temps... Quand j'ai
été élu député à 26 ans, je n'avais
pas trop le goût d'être considéré comme un
adolescent. Donc, combien de personnes de moins de 30 ans vivent actuellement
avec des prestations de moins de 170 $ par mois? Selon les derniers chiffres
que vous m'avez donnés, c'était 45 000.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais tenter de vous le donner
le plus précisément possible, avec les dernières
données validées au ministère.
M. Charbonneau: À partir du 1er janvier, n'est-ce pas?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que votre question porte
sur la clientèle des moins de 30 ans qui, par définition, est
apte au travail?
M. Charbonneau: Oui, c'est évident.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Autrement, ils ne sont pas
à 170 $.
M. Charbonneau: Ils ne sont pas à 170 $ de toute
façon.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous voulez, je vais le prendre
en note. J'ai le nombre de personnes de moins de 30 ans aptes au travail, mais
je n'ai pas soustrait, pour la dernière donnée validée du
mois de décembre, Ies personnes qui participaient à desmesures d'employabilité, donc, qui...
M. Charbonneau: Avaient plus que cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...a ce moment-là, avaient
plus que cela, mais il me fera plaisir de vous le communiquer.
M. Charbonneau: Vous n'avez pas de données plus
récentes que celles de décembre? C'est vrai que...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Nous avons des données non
validées, car, à l'aide sociale, cela nous prend, malgré
tous les efforts que nous y mettons, trois mois à valider nos
données.
M. Charbonneau: Oui, vous aviez expliqué cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je puis vous... Non?
M. Charbonneau: Combien le ministre... J'aurais le goût de
demander au ministre comment il veut qu'on le prenne au sérieux dans son
intention de remettre des dizaines et des dizaines de milliers de personnes
aptes au travail de plus de 30 ans, en plus des moins de 30 ans, dans des
mesures de relèvement de l'employabilité et en faire une des
conditions d'octroi de la parité. Comment le ministre veut-il qu'on le
prenne au sérieux quand il disait lui-même, l'an dernier, aux
crédits, quand on lui demandait, sur les stages en milieu de travail ou
dans l'entreprise: Comment se fait-il que vous ne mettiez pas plus d'argent, il
disait: Écoutez, les entreprises sont incapables d'en donner plus? Je
vais vous donner la citation exacte: "Vous avez raison, me disiez-vous. On vise
à aller en chercher 10 000, mais à un moment où notre taux
de productivité ou d'efficacité, si on rejoint tout le monde,
devient très discutable. Je pense que l'Opposition se ferait un devoir
de mettre en doute notre efficacité si on allait jusqu'où vous
nous invitez à aller." En fait, vous nous disiez que le milieu
était incapable d'en absorber plus. Quand le président du Conseil
du trésor a déposé, il y a quelques semaines, ses
crédits dont on débat aujourd'hui, a dit la même chose aux
journalistes. II a dit: Écoutez, on ne peut pas en absorber plus.
Comment allez-vous réussir à livrer la marchandise avec votre
réforme, alors que ce n'est plus 30 000, c'est 318 000? C'est un
sacré contrat! (21 h 15)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, encore une
fois, je pense que je me retrouve dans l'impossibilité de
répondre à une question dont le préambule est aussi long
et aussi truffé de déclarations. M. le député de
Verchères a commencé sa question ou son intervention, selon le
qualificatif qu'on veut y apporter, en parlant de parité conditionnelle,
comme si le qouvernement avait décidé d'inclure dans un document
d'orientation, qu'il rendra public au cours de l'été, un
phénomène ou un principe de parité conditionnelle.
Accepter de répondre à sa question, ce serait endosser ce
principe. M. le Président, je ne le peux pas, dans les
circonstances.
M. Charbonneau: Est-ce que l'on peut s'entendre sur des chiffres?
Je pense que les gens qui nous écoutent, s'il y en a, ou qui vont nous
relire...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Qui vont nous relire parce qu'il y
a du hockey ce soir.
M. Charbonneau: C'est cela, je ne me fais pas trop
d'illusions.
Le Président (M. Bélanger): Ce n'est pas
télévisé, pour votre information!
M. Charbonneau: Cela aurait été édifiant, M.
le Président, par exemple! J'aurais bien aimé! Mais, on se
reprendra demain à la tribune.
Le Président (M. Bélanger): Je demanderai la
télédiffusion pour la circonstance.
M. Charbonneau: Je promets un beau "party" au ministre.
En 1985-1986, les stages en entreprise, selon les chiffres que j'ai -
est-ce qu'on pourrait juste les valider? - il y en a eu 14 611. Là, j'ai
deux chiffres pour 1986-1987. J'ai un chiffre de 8391 et un autre de 12 182. On
me dit que le premier, c'est au 1er janvier et l'autre chiffre que j'ai, qui,
semble-t-il, vient d'un autre service du ministère et qui m'a
été communiqué par des fuites, est de 12 182.
M, Paradis (Brome-Missisquoi); À quelle date?
M. Charbonneau: Pour celui-là, on disait à la fin
de mars 1987.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous nous donnez votre date,
cela peut nous permettre...
M. Charbonneau: Je peux vous donner la référence,
si vous voulez; attendez une petite seconde.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...de focusser sur notre
fuite.
M. Charbonneau: Attendez une petite seconde, je vais vous donner
cela. Il faut qu'on s'entende.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela aurait du bon sens.
M. Charbonneau: Programme de stages en milieu de travail,
données cumulatives à la fin du mois de mars 1987, année
financière 1986-1987, Service des programmes... C'est ma source, je ne
vous la donnerai pas. Donc, c'est un document du ministère qui totalise
12 182. Je veux juste valider pour savoir si ce sont bien les chiffres que vous
avez.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Question de validation de
chiffres, je demanderais au sous-ministre de les valider.
M. Charbonneau: On va en profiter pour poser de bonnes questions
au sous-ministre.
Une voix: II a peut-être des informateurs, mais il faut
qu'il les valide.
Une voix: En bon journaliste, avant de publier.
Le Président (M. Bélanger): On n'a jamais vu un
journaliste dans l'Opposition.
Une voix: Eux ont le vrai pouvoir.
Le Président (M. Bélanger): C'est M. Jean
Pronovost.
M. Charbonneau: Pendant que vous y êtes, M. Pronovost,
peut-être que vous pourriez aussi valider nos autres chiffres. Pour les
travaux communautaires, pour 1985-1986, j'avais 15 467; là, j'ai le
chiffre pour janvier. Peut-être que si vous aviez celui de mars... Je
n'ai pas eu toutes les informations que je voulais! Pour janvier, cela
arrêtait à 6667. Vous seriez bien gentil de me le donner pour le
mois de mars.
Une voix: M. Paradis n'est pas là, profites-en.
M. Charbonneau: Pour le rattrapage scolaire, j'avais, pour
1985-1986, 15 773 et, pour 1986-1987, j'avais - mais cela, je pense que c'est
encore pour janvier - 13 914. Je ne veux pas dire qu'il y a eu diminution s'il
n'y en a pas eu.
M. Pronovost (Jean): D'accord.
M. Charbonneau: Je ne veux pas faire de démagogie.
M. Pronovost: Je vais vous donner les chiffres...
M. Charbonneau: En dernier lieu, M. Pronovost, pour le retour aux
études postsecondaires, chefs de familles monoparentales, j'avais, pour
1985-1986, 1096 et, pour le mois de janvier, pour 1986-1987, 988.
M. Pronovost: Je vais vous donner un portrait dans le temps,
à une date précise, qui est celle du 31 mars. Il faut faire
attention parce que les chiffres de participation varient dans le cours de
l'année. Par exemple, le rattrapage scolaire, en plein milieu de
l'été, 11 ne s'en fait pas beaucoup.
M. Charbonneau: Un total au 31 mars.
M. Pronovost: Je vais vous donner les chiffres au 31 mars.
M. Charbonneau: D'accord.
M. Pronovost: Rattrapage scolaire, à cette date, on avait
17 187 participants; travaux communautaires, 4420.
M. Charbonneau: Ce qui m'intéresserait dans le cas des
travaux communautaires, c'est le total cumulatif parce que je ne vous rendrais
pas justice avec 4420. Au mois de janvier, j'en avais 6600.
M. Pronovost: Si vous le voulez, je vais vous donner une mesure
du total cumulatif tantôt, un autre portrait sous un autre angle. PSMT,
stages en milieu de travail, on en avait 4472 et retour aux études des
chefs de familles monoparentales, on en avait 856, toujours au 31 mars.
M. Charbonneau: D'accord.
M. Pronovost: Le total est 26 935.
M. Charbonneau: C'est 26...
M. Pronovost: C'est 26 935 participants actifs au 31 mars.
M. Charbonneau: Cela correspond un peu à ce qu'on disait
tantôt. C'est dans l'ordre de grandeur. Je ne sais pas si vous avez ces
chiffres, mais, si vous ne les avez pas, il me semble que cela vaudrait la
peine de prendre le temps de nous les communiquer. Ce qui serait
intéressant, c'est de savoir combien de personnes différentes,
combien de bénéficiaires de l'aide sociale différents -
vous avez des dossiers différents pour chaque personne - ont
participé à quelque mesure que ce soit. Pour rendre justice - si
c'est 30 000, c'est 30 000, si c'est 25 000, c'est 25 000, si c'est 35 000, ce
sera 35 000 - il serait intéressant de savoir, au cours de la
dernière année financière, sur une brève
période ou sur une période moins brève, au total dans
l'année, combien de bénéficiaires de l'aide sociale ont
participé plus ou moins longtemps - il y a des mesures qui durent plus
longtemps que d'autres - à une des quatre mesures de
développement de l'employabilité.
M. Pronovost: On peut vous donner deux chiffres, M.
Charbonneau.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ne choisissez pas, prenez les
deux.
M. Pronovosts Pour l'année 1986-1987, le nombre total de
nouveaux participants par programme se lirait comme suit: En rattrapage
scolaire, 21 327; travaux communautaires, 9859.
M. Charbonneau: Combien?
M. Pronovost: Stages en milieu de travail, 11 608 et puis retour
aux études des chefs de familles monoparentales, 1495. Le total est 44
289.
M. Charbonneau: C'est 44 2...
M, Pronovost: C'est 44 289 pour l'année 1986-1987. Si je
vous donne pour fin de référence le chiffre des participations
distinctes totales depuis le début des mesures qui ne sont pas
très vieilles, cela donne 104 447.
M. Charbonneau: Cela fait combien?
M. Pronovost: C'est 104 447.
M. Charbonneau: Depuis trois ans?
M. Pronovost: Cela dépend des mesures. Elles sont parties
à des moments différents.
M. Charbonneau: Quand la première est-elle partie?
M. Pronovost: Juin 1984.
M. Charbonneau: Depuis juin 1984. Est-ce qu'un
bénéficiaire peut profiter de plus d'une mesure? J'imagine que,
oui. Je présume que dans les 44 000, ce n'est pas nécessairement
des bénéficiaires différents. Il peut y avoir moins de
personnes qui ont fait plus qu'une mesure.
M. Pronovost: Ce que je viens de donner, c'est le nombre de
participants distincts, c'est-à-dire des personnes
différentes.
M. Charbonneau: Durant l'année, 44 000. Donc, si on veut
baliser un peu ce qu'on disait tantôt pour ne pas charrier inutilement,
avec les 70 000 000 % de l'année dernière, vous avez rejoint
d'une façon distincte 44 000 personnes qui ont participé à
vos quatre mesures. Cela va? On se comprend. Cela va.
Est-ce que le ministre pourrait nous dire ce qui arrive de l'entente
Marois-Bégin de mai 1984 sur le partage des coûts des mesures de
développement de l'employabilité?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je tiendrais peut-être
à préciser au député de Verchères que chaque
fois que nous modifions une mesure d'employabilité, une de ces normes ou
que nous envisageons de mettre sur pied de nouvelles mesures
d'employabilité ou des mesures différentes
d'employabilité, nous vérifions avec le gouvernement
fédéral
quant au partage des coûts.
M. Charbonneau: Oui, mais est-ce que l'entente
Marois-Bégin, de mai 1984, qui était valable pour deux ans, a
été renouvelée?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Elle a été
reconduite.
M. Charbonneau: Pour combien de temps?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Deux ou trois ans. Je tiens
à vous indiquer que nous avons tenu le gouvernement
fédéral au courant des diverses modifications ou scénarios
de modifications que nous pourrions apporter à différents
programmes de façon à nous assurer que nous nous maintenions dans
un cadre d'admissibilité aux frais partagés.
M. Charbonneau: Au Régime d'assistance publique du
Canada.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): RAPC, comme on l'appelle
communément.
M. Charbonneau: C'est cela. Est-ce que vous pouvez nous dire,
parce que c'était dans les vérifications que vous deviez faire
dans votre mémoire au Conseil des ministres du mois d'août, si,
effectivement, le gouvernement fédéral a confirmé que vos
projets ou votre projet était admissible au partage des coûts?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne peux pas vous
spécifier s'il s'agissait du mémoire du mois d'août, mais
je peux vous spécifier qu'en ce qui concerne celui qui avait
été accepté par le Conseil des ministres de la province de
Québec à ce moment le fédéral avait donné
son aval de principe quant à la conformité au RAPC.
M. Charbonneau: Les programmes de développement de
l'employabilité. Est-ce que vous avez des évaluations
qualitatives des rendements de ces programmes? Là, on parle
d'évaluations statistiques quantitatives. C'est bien beau, mais cela ne
nous dit pas si les gens sont plus employables après cela qu'avant.
Autrement dit, les 44 000 personnes sont-elles plus employables maintenant
qu'elles ne l'étaient il y a un an? Est-ce que le ministre a des
données sur cela?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On a certaines évaluations
des programmes. Vous comprendrez que, les programmes étant relativement
récents, les évaluations sont en cours au moment où nous
nous parlons. Il y a des évaluations qui sont plus faciles à
déterminer que d'autres. Si vous prenez le programme de rattrapage
scolaire, c'est plus facile à déterminer si quelqu'un a fini son
cours secondaire que s'il ne l'a pas fini, etc. Quant à des
évaluations certaines et qualitatives, comme vous l'entendez ou comme je
présume que vous l'entendez, ces études ne sont pas
finalisées au moment où nous nous parlons, les premiers
programmes ayant débuté, comme nous vous l'avons indiqué,
au milieu de l'année 1984. Nous n'avons pas retrouvé ces rapports
sur les tablettes lorsque nous sommes arrivés, mais nous poursuivons les
analyses.
M. Charbonneau: II y avait des études préliminaires
qui avaient été faites, sauf que c'était des programmes
expérimentaux. Est-ce que le ministre peut nous dire s'il y a des
expériences qui ont été menées pour voir dans
quelle mesure ces programmes, qui avaient été spécialement
conçus pour la clientèle des moins de 30 ans, pourraient
s'adapter à la clientèle plus versatile, plus diversifiée
des plus de 30 ans?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Nous avons mené des
expériences qui sont limitées. Je pourrais peut-être vous
répondre par un exemple. Dans le cas des chefs de familles
monoparentales, nous avons étendu le programme de rattrapaqe
scolaire...
M. Charbonneau: Nous avons étendu.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le gouvernement du Québec.
Je ne sais pas si c'est vous ou mot, mais c'est le gouvernement qui
dépense les deniers des contribuables.
M. Charbonneau: Parce que le "nous" aujourd'hui a tellement
été libéral que je préfère spécifier
quand il ne l'est pas et quand il l'est.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La population
préfère de loin un "nous" libéral.
M. Charbonneau: On se rend compte que ce n'est pas
nécessairement un "nous" libéral. De toute façon,
continuez!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au chapitre du Bon d'emploi Plus,
nous l'avons étendu. Et là, je ne vous vois pas intervenir...
M. Charbonneau: C'est la deuxième version du Bon d'emploi
Plus, celle-là.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...cela doit être nous, de
ce côté-ci.
M.Charbonneau: C'est le "nous" après que nous l'ayons fait
aussi.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): De toute façon, nous
l'avons étendu également. Ce qui compte c'est le résultat
pratique des programmes.
M. Charbonneau: Ce n'est pas la même chose le Bon d'emploi.
Moi, je vous parle de mesures de développement de
l'employabilité. Autrement dit dans les stages en milieu de travail ou
les travaux communautaires, avez-vous fait des expériences
significatives pour les personnes de 50 ans et plus, par exemple?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les programmes de stages en
entreprise et de travaux communautaires n'ont pas été
étendus aux plus de 30 ans.
M. Charbonneau: Merci.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a une problématique
qui se pose chez les moins de 30 ans...
M. Charbonneau: Qui est différente. (21 h 30)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez. Cela
dépend. Et je reviens peut-être à votre question du
début. Je vous ramène assez loin; j'espère que vous allez
vous en souvenir. Je vou3 ramène au moment où vous m'avez
parlé peut-être de la dame de 59 ans, etc., et vous la comparez
peut-être au jeune homme de 19 ans. Vous allez dire: II y a des
différences et, à cela, je vous ai répondu
spécifiquement: Oui, M. le député, il y a des
différences dont il faut tenir compte. Mais si vous prenez le jeune
homme de 29 ans et que vous le comparez au jeune homme de 31 ans, je vous dirai
que la différence, c'est deux ans.
M. Charbonneau: On va s'entendre sur cela. Mais je vous poignerai
bien dans le détour quand vous annoncerez votre programme.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je suis sûr que vous allez
chercher...
M. Charbonneau: Parce que vous m'en avez dit assez pour que je
puisse...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'ailleurs, c'est votre rôle
et je suis sûr que vous allez l'assumer un peu plus que pleinement, vous
allez même déborder.
M. Charbonneau: Merci beaucoup du compliment. Est-ce que le
ministre a des statistiques sur l'intégration au travail, sur le
placement des participants? Combien de personnes dans les 104 000, par exemple,
qui ont passé dans les mesures de développement de
l'employabilité depuis 1984?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Nous avons des statistiques, entre
autres, pour le programme de travaux communautaires. Il me fera plaisir de vous
les communiquer. On en prend note.
M. Charbonneau: On ne considère pas que les gens qui sont
en travaux communautaires sont en emploi.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non, après les travaux
communautaires, quel est le pourcentage de bénéficiaires qui se
sont intégrés au marché du travail?
M. Charbonneau: Après cela. Est-ce que vous pouvez avoir
ces statistiques pour l'ensemble des programmes?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On les a pour les travaux
communautaires. Nous vérifions pour les autres programmes et, si elles
sont disponibles, on pense possiblement les avoir pour les stages en
entreprise.
M. Charbonneau: Est-ce que le ministre ne trouverait pas à
propos, surtout dans le cadre de sa réponse, de mettre en place des
mécanismes de suivi qui vont faire en sorte qu'on puisse avoir
l'évaluation de la performance de ces programmes en ce qui concerne
l'employabilité? Ce que je crains... C'était le reproche que
j'adressais aux mêmes mesures quand on était au pouvoir et Pauline
Marois me disait: Écoutez, je voulais insister sur la qualité et,
à un moment donné, les médias d'information et
l'Opposition me harcelaient pour la quantité. Alors, on s'est rabattu
sur la quantité, c'est-à-dire qu'on a poussé l'appareil
pour qu'il y en ait du monde qui participe. Mais, au bout du compte, les gens
qui ont participé, moi ce que je veux savoir, c'est: Est-ce du "cheap
labor" ou s'ils sont plus employables à la fin?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, M. le
député...
M. Charbonneau: Parce que c'est une des critiques importantes qui
sont formulées par les jeunes.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne blâmerai pas l'ancien
gouvernement de ne pas avoir eu de rapport qualitatif, les premiers programmes
ayant été mis en place à l'été 1984; avec
les échéances que nous avons connues par la suite, je n'en
tiendrai pas rigueur à l'ancien gouvernement. Je vous dirai que la
question que vous posez est une des premières questions que j'ai
posées, à mon assermentation, et que nous serons en mesure de
vous fournir - nous ne les avons pas avec nous ce soir, mais nous les avons au
ministère - les données quant au
programme de travaux communautaires et possiblement - je pense que nous
les avons également parce que je les ai demandées, moi aussi,
lorsque je suis arrivé - en ce qui concerne les stages en entreprise. Et
vous avez raison d'insister sur le fait que non seulement l'aspect quantitatif
est important, mais également l'aspect qualitatif parce que, si nous
investissons dans ces individus, c'est pour les retrouver dans le plus grand
nombre possible ou le plus haut pourcentage sur le marché du travail
après.
M. Charbonneau: Très bien. C'est la raison pour
laquelle...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On me confirme qu'on les a
maintenant pour les deux programmes, M. le député.
M. Charbonneau: Vous les avez?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On les a au ministère.
M. Charbonneau: D'accord. Donc, on me les communiquera le plus
rapidement possible.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On vous les communiquera.
M. Charbonneau: Je suis content d'entendre le ministre dire qu'il
se préoccupe aussi de la qualité. Cela m'amène à
terminer mes questions sur la réforme de l'aide sociale et sur les
mesures de développement de l'employabilité reliées
à cette réforme et au programme APTE, en lui parlant de son
incohérence - en tout cas, à première vue -par rapport au
congédiement des fonctionnaires qu'il s'apprête à faire.
J'ai de la difficulté à comprendre comment le ministre peut
soutenir te discours qu'il a soutenu aujourd'hui en Chambre et devant les
journalistes à savoir que: Bah, ce n'est pas si grave que cela. Vous
savez, on garde quand même les postes. On va donner la chance à
d'autres de prendre de l'expérience dans la fonction publique, gna, gna,
gna. Ce que je constate, c'est que...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je n'ai jamais dit le gna, gna,
gna. J'aimerais...
M. Charbonneau: Non, le gna, gna, gna, c'est pour le rosaire que
vous avez continué d'égrener par la suite. Ces gens-là, ce
sont en bonne partie eux qui font en sorte que ces mesures soient performantes
en termes qualitatifs. Est-ce qu'on s'entend sur cela? L'encadrement est
essentiel: autrement, ces mesures sont de la frime.
Comment le ministre peut-il soutenir que congédier des personnes
qui ont acquis de l'expérience, qui ont acquis de l'expertise dans
l'intervention personnalisée auprès des gens, cela n'aura aucun
impact sur la qualité de l'aide accordée, sur le service
accordé, sur la valeur de ces mesures de relèvement de
l'employabilité? Je vais reprendre ici les critiques ou les mises en
garde que je lui ai indiquées cet après-midi, qui ont
été faites par des fonctionnaires qui lui ont communiqué
leurs motifs de demande de dérogation: une profonde démotivation
des employés est à craindre en regard du fait que ces
employés avertis de la date de leur congédiement gratuit ne
seront pas particulièrement motivés à continuer à
travailler; un manque de disponibilité des employés non
congédiés qui seront accaparés par le recrutement et la
formation des nouveaux enqagés; un bris dans le suivi des dossiers
causé par la rotation du personnel; un rendement moindre de la part des
nouveaux employés devant se familiariser avec les divers aspects de leur
fonction. Je ne comprends pas comment te ministre peut soutenir qu'il n'y aura
pas d'impact néqatif du congédiement. Je ne peux pas comprendre.
Les 50 plus les 540, cela fait quasiment 600 personnes que vous allez
congédier qui ont acquis de l'expérience, qui ont acquis une
habileté. On parle d'au moins 6 mois avant que ces gens soient vraiment
efficaces sur le terrain et dans leur intervention d'aide et
d'accompagnement.
M. Paradis (Brome-Mîssisquoi): II est choqué,
là!
M. Charbonneau: Essayez donc de vous choquer plus que je me
choque. J'ai assez de raisons de me choquer depuis un an et demi pour le peu de
réponses que j'ai eues. Vous pourrez bien faire une sainte
colère, je vais vous la pardonner.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je vais
distinguer encore une fois pour mon bon ami...
M. Charbonneau: Ne me parlez pas des stagiaires sur l'aide
sociale.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...pour mon ex-bon ami, le
député de Verchères, deux dossiers: le dossier des 55
stagiaires bénéficiaires de l'aide sociale et le dossier des 540
occasionnels au ministère.
M. Charbonneau: Je n'ai pas parlé des stagiaires.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non, parce que vous avez
semé la confusion.
M. Charbonneau: C'est vous qui avez semé la confusion
toute la journée.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous
êtes passé maître dans l'art de semer la confusion.
Vous avez semé la confusion à l'Assemblée nationale, dans
les couloirs, dans les médias. Je vais vous tirer les choses au clair et
je vous demande une attention dans le but d'obtenir soit votre
compréhension, soit votre audition.
M. Charbonneau: Je n'aurai pas encore de réponse. C'est
bien de valeur.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quant aux 55, H y a eu, à
l'automne 1985, sous le gouvernement du Parti québécois, des
directives du Conseil du trésor concernant l'emploi des ex-stagiaires
des programmes de développement de l'employabilité. Les
directives, sous l'ancien gouvernement du Parti québécois,
fixaient leur durée de travail à 6 mois. Â mon
arrivée au ministère, j'ai été sensibilisé
à ce problème. J'ai donc demandé au Conseil du
trésor une dérogation pour 55 occasionnels, exstagiaires, et ce
pour un an. Cette dérogation m'a été accordée par
le Conseil du trésor.
M. Charbonneau: Au mois d'août 1986.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Donc, l'échéance de
leur contrat...
M. Charbonneau: On le sait.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ... qui était au mois de
mai 1986 est devenue mai 1987. Ce que j'ai fait, voyant venir cette
échéance de mai 1987, j'ai adressé une nouvelle demande de
dérogation au Conseil du trésor pour permettre à ces
bénéficiaires de l'aide sociale la parité avec nos autres
concitoyens occasionnels dont nous reparlerons dans deux minutes, soit un
contrat d'une durée de 3 ans. Ce qu'on me dit, c'est qu'il n'y a pas de
réponse officielle de rendue - à moins que vous ne l'ayez -par le
Conseil du trésor au moment où nous nous parions, mais que les
premières observations des représentants du Conseil du
trésor vont dans le sens d'une réponse positive que je n'ai pas
encore au moment où nous nous parlons.
M. Charbonneau: Pour vos stagiaires
bénéficiaires.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Exactement.
M. Charbonneau: On se comprend.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Donc, les 55 que nous avions
congédiés ou que nous devrions congédier, ou dont vous
dénoncez le congédiement...
M. Charbonneau: Non, je n'en ai même pas parlé.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...depuis un an et demi...
M. Charbonneau: Je n'en ai pas parlé.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous en avez parlé.
M. Charbonneau: Je n'en ai pas parlé.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous ne vous le rappelez plus.
Vous soulevez tellement de problèmes que vous ne vous en souvenez
plus.
M. Charbonneau: C'est vous qui en avez parlé dans votre
réponse, vous avez mêlé tout le monde aujourd'hui. On ne
vous en a pas parlé de la journée.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que c'est clair pour vous,
cet aspect du dossier?
M. Charbonneau: Oui, mais c'est le ministre qui a
créé la confusion.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai tenté de corriger une
autre injustice du gouvernement péquiste à l'endroit des
assistés sociaux par deux demandes de dérogation au Conseil du
trésor.
M. Charbonneau: Écoutez, vos fonctionnaires vous ont
déjà entendu. Vous n'êtes pas obligé de refaire le
"show" devant eux.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
S'il vous plaît!
M. Charbonneau: Écoutez, c'est vous qui avez... Vous le
savez bien. Quand on vous a posé la question cet après-midi, on
ne vous a pas parlé de vos stagiaires bénéficiaires de
l'aide sociale, on vous a parlé de vos fonctionnaires occasionnels qui
travaillent auprès des bénéficiaires.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez fait poser la question
par le député d'Abitibi-Ouest...
M. Charbonneau: Parce qu'il s'occupe de ces questions.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qui, lui, avait plus
d'informations que vous sur le dossier.
M. Charbonneau: Bien non, c'est moi qui les lui avais
données. Voyons donc!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II les avait mal comprises.
M. Charbonneau: Vous les aviez mal comprises.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Faites donc votre travail
vous-même plutôt que de le faire faire par le député
d'Abttibi-Ouest,
M. Charbonneau: Vous avez mal compris parce que vous avez, dans
votre réponse, induit les gens en erreur, en commençant votre
réponse par les stagiaires alors qu'on ne vous en avait pas
parlé.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que je peux parler des 540
employés occasionnels? Il m'interrompt, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
On pourrait revenir au sujet, c'est-à-dire à l'étude des
crédits. Une période de questions, il y en aura une autre demain,
vous reprendrez ce débat.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quant aux 540 occasionnels, le
Conseil du trésor, par le CT 157308, a décidé de limiter
à trois ans la durée maximale d'emploi pour tous les
employés occasionnels du gouvernement et ce, à compter -
écoutez bien, M. le député, parce que cet
après-midi, vous avez dit le contraire; si vous n'écoutez pas ce
soir, vous allez encore répéter des faussetés demain
à la période de questions - ...
M. Charbonneau: Je vous écoute, mais je n'ai pas besoin de
vous regarder.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...du 18 août 1985. Comme,
à l'époque, on ne voulait pas faire de réglementation avec
des effets rétroactifs, toutes les personnes en place le 15 août
1985 ont débuté leur période de trois ans en même
temps, ce qui explique le nombre important de personnes qui ne peuvent
dépasser août 1988. Au ministère de la Main-d'Oeuvre et de
la Sécurité du revenu, 540 des 796 occasionnels sur projet
spécifique, en mars 1987, devraient être mis à pied en
application de cette décision du gouvernement péquiste et ce, au
plus tard le 15 août 1988. En raison de ce nombre important, le
ministère a planifié des mises à pied effectuées en
quatre temps afin d'assurer une continuité de services et de permettre
le remplacement des personnes mises à pied de façon progressive.
C'est le but visé par la lettre, dont vous avez certainement copie, de
M. Denis Bérubé adressée aux directeurs régionaux
le 19 mars 1987. Pour fixer cette durée à trois ans, le
gouvernement de l'époque a tenu compte de ses préoccupations
d'employeur et de son mandat social. Le gouvernement a un rôle
d'employeur qui l'amène à viser l'efficacité et la
productivité...
M. Charbonneau: M. le Président, je l'ai, le
mémoire. Le ministre n'a pas besoin de me le lire.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...de façon que ces
services soient de qualité et disponibles au meilleur coût. C'est
dans cette perspective qu'il a, d'abord, tendance à conserver le plus
longtemps possible à son service les ressources humaines qui performent
bien. Le gouvernement a, toutefois, en plus, un rôle social qui
l'amène, notamment, à viser l'égalité des
chances...
M. Charbonneau: Ah non! Pas un autre rosaire!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...et des possibilités
concrètes d'accès à tous les citoyens à la fonction
publique dans un contexte...
M. Charbonneau: M. le Président, je l'ai, le document. M.
le ministre, je l'ai.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pas celui-là.
M. Charbonneau: Celui-là aussi.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Celui-là aussi?
Une voix: II les a tous! Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Charbanneau: M. le Président, j'ai ma
réponse.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On m'indique qu'il a
été dactylographié ce matin.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Charbonneau: Laissez faire! M. le Président.
Une voix: II a le brouillon manuscrit. Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Charbonneau: M. le Président, ce que je voulais savoir,
je le sais. Le ministre n'a pas l'intention de maintenir ces fonctionnaires en
activité, enfin, de ne pas les congédier...
Une voix: En action.
M. Charbonneau: En action, oui. Des voix: Hal Hal Hal
M. Charbonneau: II n'a donc pas l'intention de demander une
dérogation. C'est vrai que la directive administrative du Conseil du
trésor avait été présentée sous l'ancien
gouvernement. Vous avez demandé des dérogations. Des ministres,
à l'époque où on était au pouvoir, ont
demandé des dérogations. D'autres de vos collègues ont
demandé des dérogations sur différents sujets, sur des
règles de fonctionnement du Conseil du trésor. Ce qu'on vous a
demandé aujourd'hui, c'est: Avez-vous l'intention de demander une
dérogation? On comprend votre réponse, c'est non. Merci
beaucoup.
M. Paradis (Brome-Mïssisquoi): Non, je pense, M. le
Président...
M. Charbonneau: Et les fonctionnaires sont bien contents de
savoir que c'est non.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qu'il s'agit d'une
décision du Conseil du trésor. Je tiendrais à donner,
à des fins...
M. Charbonneau: Si vous n'avez pas demandé de
dérogation, il ne pourra pas y avoir de demande... (21 h 45)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...non pas de
compréhension, mais à des fins d'audition de la part du
député de Verchères, le deuxième aspect du
rôle du gouvernement dans un tel dossier. Le gouvernement a toutefois, en
plus, un rôle social qui l'amène notamment à viser
l'égalité des chances et des possibilités concrètes
d'accès de tous les citoyens à la fonction publique. Dans un
contexte de relative...
M. Charbonneau: II n'y aura plus de temps pour le
président de la Régie des rentes, je vous avertis.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...rareté des emplois - je
tiendrais à souligner au député qu'on peut continuer six
minutes après 22 heures - il doit donc aménager ses règles
d'embauche de façon à offrir au plus grand nombre possible de
citoyens l'occasion de réaliser une expérience de travail
à l'intérieur de son organisation. C'est en voulant
réaliser un juste équilibre entre ces deux types de
préoccupations que le Conseil du trésor de l'époque et
d'aujourd'hui a fixé à trois ans la durée maximale
d'engagement pour les employés occasionnels. Cette durée assure
une certaine stabilité dans les emplois tout en permettant à
terme leur ouverture à d'autres citoyens qui doivent, eux aussi, avoir
des chances d'accès.
M. Charbonneau: Ah!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je terminerai en disant, pour les
fins du Journal des débats, que, contrairement à l'impression
qu'a voulu créer le député de Verchères, il n'y a
pas eu, au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu, une coupure de 540 postes. Bien au contraire, lorsque le nouveau
gouvernement est entré en fonction et qu'il a gelé les postes
dans la fonction publique, parmi le très petit nombre de
ministères exclus de cette directive du Conseil du trésor du
gouvernement, vous retrouverez, si le document vous est parvenu, le nom du
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu.
M. Charbonneau: Pour ceux qui ne me sont pas parvenus, je pourrai
répéter mon adresse.
Des voix: Hal Hal Hal Une voix: T'en manque-t-il?
M. Charbonneau: Je ne les ai pas encore tous.
M. le Président, d'abord, je n'ai jamais dit... Encore une fois,
le ministre tente de déformer les faits en disant que j'ai parlé
de postes coupés. Je suis assez qrand garçon pour savoir que ce
n'étaient pas des postes coupés, mais des fonctionnaires
conqédiés. Des postes et du monde congédié, ce
n'est pas pareil.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et du monde engagé, non
plus.
M. Charbonneau: Ce ne sont pas les postes qui travaillent
auprès des bénéficiaires de l'aide sociale, c'est du
monde.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est du monde.
M. Charbonneau: C'est du monde qui sera congédié et
c'est du monde qu'on va enqager pour le remplacer et qui n'a pas
d'expérience, alors que ceux qui sont là en ont acquis. C'est ce
qu'on comprend. C'est absolument aberrant, un gouvernement qui dit: Nous aurons
une approche améliorée d'aide auprès des
bénéficiaires de l'aide sociale pour relever et développer
encore plus leur employabilité que le PQ ne l'a fait.
M. le Président, il est presque 21 h 50. On s'est entendu qu'on
ne ferait pas venir certaines personnes pour rien. J'aurais une proposition
à faire au ministre et aux collègues de la commission. J'avais
d'autres questions sur le programme d'aide sociale et d'autres questions sur
les autres éléments du programme 10, Protection et
développement de l'emploi. On n'a pas parlé, par exemple,
des SEMO et tout cela, mais on a touché ce qui était
relié à la réforme de l'aide sociale. Je vous propose que,
demain matin, on termine cela, qu'on revienne sur cela, autrement dit qu'on
suspende à la fois l'aide sociale et la protection et le
développement de l'emploi. On nous dit qu'il nous reste 28 minutes
additionnelles à 22 heures, à la suite des retards et tout. Je
proposerais au ministre, s'il est d'accord...
M. Paradis (Brome-Mïssisquoi): Je m'excuse. Les retards, je
veux être poli envers la commission, mais...
M. Charbonneau: Je ne parle pas du ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi); D'accord. M. Charbonneau: Non,
non.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai été...
M. Charbonneau: Je parle des retards qu'on a pris sur notre
horaire et tout cela. On a une banque de 28 minutes, ce qui pourrait faire en
sorte que...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais vous indiquer bien
sérieusement que j'ai, cette semaine, l'étude des crédits
du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu. J'ai également cette semaine l'étude des crédits
du ministère du Travail et l'administration hebdomadaire des
ministères concernés, des conflits de travail, etc. Je ne peux me
permettre, et je le dis...
Maintenant, quant à ce qui peut s'aménager à
l'intérieur de cet horaire, je suis prêt à faire preuve du
maximum de souplesse: si l'Opposition choisit de traiter principalement et
prioritairement, à cause de cette enveloppe de temps limitée,
d'un dossier qui lui tient à coeur, je n'ai pas d'objection à ce
qu'on y passe tout le temps que l'Opposition veut y passer.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, si je
comprends bien, pour avoir discuté tout à l'heure avec le
député de Verchères, on pourrait continuer jusqu'à
22 h 15 ou 22 h 20 ce soir, si la chose vous est possible. Cela nous
permettrait de reprendre une partie du temps perdu et cela nous permettrait
aussi de passer à M. le président de la régie ce soir et
d'éviter de le déplacer une autre fois demain. À ce
moment-là, on suspendrait les programmes 6 et 10 et on pourrait revenir
les compléter demain.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, c'est bien
simple. J'ai posé, au tout début, deux conditions que je ne pose
pas par plaisir, c'est mon occupation du temps qui fait que je dois les poser.
J'ai posé la première, c'est que cela se passe à
l'intérieur des heures qui étaient prévues; la
deuxième, c'est qu'on tente, par courtoisie pour les gens que l'on a
invités, de procéder en étant suffisamment
disciplinés pour les entendre au moment où on les a
invités. Â part cela, je n'ai pas d'autres représentations
à faire aux membres de la commission. Maintenant, si on me parle
d'ajouter des heures à la commission, je vous dirai que cela me pose des
problèmes. Je ne vous dis pas que c'est impossible, on le verra pour la
semaine prochaine.
M. Charbonneau: II n'y a pas d'abus, jusqu'à maintenant
c'est moins d'une demi-heure, mais le ministre comprendra qu'on a un temps X
pour étudier les crédits.
Le Président (M. Bélanger): II y a sept heures et
demie d'imparties... À cause du petit retard qu'on a pris en cours de
route dans l'échéancier, on a actuellement environ 20 minutes et
quelques d'accumulées. Je propose donc qu'on les reprenne soit en
totalité ce soir, soit par bouts de 15 minutes, aujourd'hui et
demain.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Combien de minutes
d'accumulées a-t-on?
Le Président (M. Bélanger): On en a 28.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Disons 30 pour les fins de notre
bon entendement.
Le Président (M. Bélanger): On peut reprendre 15 ce
soir et 15 demain.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Qu'on reprenne 15 ce soir, 15
demain.
M. Charbonneau: Ce que je vous propose pour...
Le Président (M. Bélanger): Est-ce que j'ai le
consentement là-dessus?
M. Charbonneau: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez. Demain à 13
heures, je ne le peux, je suis au Comité interministériel de
développement économique.
M. Charbonneau: Est-ce que vous pouvez excéder de 15
minutes ce soir?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.
M. Charbonneau: On va faire nos 30 minutes ce soir.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): En
quinze minutes.
M. Charbonneau: Non. Égrenez moins votre rosaire et on va
avoir du temps pour...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non, je m'excuse, mais ce
sont les heures qui avaient été prévues à mon
ordre du jour.
M. Charbonneau: Moi aussi, je m'excuse, mais j'ai sept heures et
demie pour l'étude des crédits de votre ministère.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On retrouvera un ordre de
l'Assemblée. On ira la semaine prochaine, cela ne me dérange
pas.
M. Charbonneau: Cela ne me dérange pas, moi non plus. Pour
quinze minutes, on va avoir l'air fou tous les deux.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'Assemblée a
déjà ordonné des choses pires que cela.
Le Président (M. Bélanger): On procède et
s'il nous manque 15 minutes au bout, on avisera. D'accord? Pour le moment, on
va arrêter parce que cela fera une demi-heure qu'on aura perdue.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On suspendra et on avisera...
M. Charbonneau: Dans le cadre de l'entente qu'on avait convenue
qui convenait au ministre également, je vous indique, M. le
Président, que les questions additionnelles que j'avais sur le programme
6, autrement dit l'aide sociale, et le programme 10, je les reprendrai demain
matin.
Le Président (M. Bélanger): Vous allez les
reprendre demain? D'accord.
Régie des rentes du Québec
M. Charbonneau: Je vais immédiatement plutôt aborder
le programme de la Régie des rentes du Québec et de...
Le Président (M. Bélanger): Pas de
problème.
M. Charbonneau: ...la Commission des normes du travail et
peut-être indiquer dès maintenant au ministre que,
vraisemblablement, aux programmes 4, 8, 3 et 5, il n'y aurait probablement pas
de questions. Ce n'est pas que je n'en aurais pas, mais, compte tenu du temps,
on va mettre les priorités à terminer le dossier de l'aide
sociale et des programmes de protection et de développement de
l'emploi.
Le Président (M. Bélanger): D'accord. M.
Charbonneau: Peut-être juste...
Le Président (M. Bélanger): De toute façon,
on s'était entendu pour les adopter tous; alors, il n'y a pas de
problème.
M. Charbonneau: La seule chose, M. le Président, c'est que
j'aimerais y repenser pour le programme 3 pour savoir si on fait venir ou non
le président de la Commission des affaires sociales. On s'entendra
tantôt.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II est convoqué, à
ce qu'on me dit.
M. Charbonneau: Je le sais.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord.
M. Charbonneau: Mais si on décide de prendre le temps
pour...
Le Président (M. Bélanger): D'accord. Alors, on
procède?
M. Charbonneau: Oui, ça va.
Le Président (M. Bélanger): M. le Président
de la Régie des rentes du Québec, vous êtes le
bienvenu.
M. Charbonneau: Mes salutations respectueuses et amicales, M. le
président. Constatant que vous blanchissez un peu plus à chaque
année!
M. Paradis (Brome-Missisquoi) Est-ce qu'il vous a envoyé
des documents lui aussi?
M. Charbonneau: Je me regardais ce matin dans le miroir et je
trouvais que cela commençait, moi aussi. Pas au même rythme que
vous, mais...
Est-ce que le ministre ou le président de la Régie des
rentes pourrait nous indiquer quel est le pourcentage approximatif des gens
qui, dans les prochaines années, n'auront pour vivre, lors de la
retraite, que les prestations de la retraite publique et n'auront pas d'autres
sources de revenus que les bénéfices des programmes d'assistance
publique, la Réqie des rentes ou les pensions
fédérales?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je comprends le sens de votre
question. Quels sont nos concitoyens qui, une fois...
M, Charbonneau: Arrivés à l'âge de la
retraite.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...arrivés à
l'âge de la retraite n'auront que les régimes d'assistance
publique - si je puis
utiliser l'expression - y inclus les régimes de rentes? Non. Nous
ne sommes pas en mesure de vous fournir cette donnée.
M. Charbonneau: Est-ce que la régie...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, quand je réponds, je
réponds au nom de la régie.
M. Charbonneau: Je comprends. Est-ce qu'éventuellement la
régie pourrait être en mesure de répondre? Est-ce qu'il y a
des études ou des évaluations? Dans les données
actuarielles...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cette situation se modifie sur une
base quotidienne et est largement influencée par la conjoncture
économique.
M. Charbonneau: Qu'est-ce qui se fait actuellement à
l'égard des régimes privés de retraite? Vous avez mis sur
la tablette le projet de loi 58 ainsi que le rapport qui l'accompagnait, qui
l'avait suivi il y a quelques mois, le rapport sur la
transférabilité des régimes complémentaires de
rentes de novembre 1985, qui avait été produit sous la direction
et la présidence de M. Jacques Roy. Qu'est-ce qui se fait actuellement
au ministère et à la Régie des rentes?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce que nous vous avons
indiqué, c'est que dans toute la mesure qui est humainement possible,
l'actuel gouvernement tient à conserver ou à dégager les
marges de manoeuvre de façon à donner suite à son
engagement de la dernière campagne électorale pour rendre
admissible le conjoint ou la conjointe au foyer à la Régie des
rentes du Québec.
M. Charbonneau: Je vais vous en parler tantôt.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Maintenant... Non, non, vous
semblez... Parce que votre gouvernement était contre, parce que les
signataires...
M, Charbonneau: Non, mais écoutez, répondez donc
à la question, je vais revenir sur cette question.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...de la politique
québécoise sur la sécurité du revenu étaient
contre, vous vous offusquez à chaque fois que nous mentionnons cet
important sujet. Je vous indiquerai que l'autre aussi est important et qu'au
moment où nous nous parlons nous suivons de près les
évolutions dans les autres juridictions canadiennes de façon
à nous assurer que le Québec demeure à ce point de vue
également très compétitif.
M. Charbonneau: Écoutez, franchement, c'est le bout... Je
n'ai pas du tout parlé des femmes au foyer, je vais vous en parler
après. Là, ce que je vous demande... Soyez sérieux un peu,
même s'il est 22 heures. Le président de la Régie des
rentes qui est devant nous - on a un rapport de presse - le 24 novembre faisait
une conférence publique et soulevait tout le problème des
régimes privés. Il posait la problématique très
clairement» J'ai ici un rapport de presse. Mise en garde du
président de la Régie des rentes. C'est maintenant qu'il faut
préparer le niveau de vie des retraités de l'an 2000. C'est La
Presse du 25 novembre 1986. Je pourrais vous lire tout l'article,
mais... M. Legault, lors de son discours dont on a obtenu copie, un discours
public, faisait état entre autres des propositions et des actions de
réforme qui se font ailleurs au Canada, entre autres en Ontario. Au
moment où l'on se parle, en Ontario on est en train d'étudier,
semble-t-il, un projet de loi concernant les régimes de retraite
privés. Qu'est-ce que le gouvernement actuel libéral fait? Est-ce
que le ministre va revenir sur sa décision de mettre sur les tablettes
le projet de loi 58 et ce dossier? Est-ce que le ministre a commencé
à s'y attaquer? Si oui, est-ce qu'il a donné un mandat à
la Régie des rentes? Quel est-il ce mandat? Qu'est-ce qui se fait
à la Régie des rentes? Est-ce que la Régie des rentes fait
des choses de sa propre initiative actuellement sur cette question? Est-ce que
ce sont des questions assez claires? Je ne vous parle pas des femmes au foyer
et de leur participation au régime de rentes. Je vais vous en parler
après, ne vous inquiétez pas. De votre promesse
électorale, je vais vous en parler. Parlez-moi donc de ce que je vous
demande.
M. Paradis (Brome-Missiquoi): Les sujets viennent toujours
après.
M. Charbonneau: Cela viendra...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. Le Président, le
député me parle du projet de loi 58 que son gouvernement avait
déposé en juin 1985, qui est mort, suivant l'expression
parlementaire, au feuilleton...
Une voix: Au feuilleton.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Nous avons reçu plusieurs
mémoires critiquant certains aspects du projet de loi 58. D'autre part,
le projet de loi 58 ne traitait aucunement de la question du régime
d'accueil en cas de transférabilité. Un employé quitte une
compagnie avec un régime de retraite pour aller travailler dans une
autre sans régime de retraite, c'est ce qu'on appelle la question
d'accueil. Noua sommes à revoir ce
projet de loi dans son ensemble et plus particulièrement le
pouvoir de surveillance et de contrôle de la Régie des rentes
à l'égard des régimes privés et de ses
administrateurs et également la question de la
transférabilité.
M. Charbonneau: Je m'excuse, j'ai eu une distraction. Est-ce que
le ministre pourrait me*..
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.
M. Charbonneau: De toute façon, il est habitué ce
soir, il a fait cela souvent.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II s'agit... Bien, je suis
habitué de ne pas recevoir votre attention quant aux réponses
qu'on vous donne, ce qui suscite questions après questions, autant dans
ce forum...
M. Charbonneau: Recommencez donc votre dernier petit bout. (22
heures)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qu'à l'Assemblée
nationale. Il s'agit du projet de loi 58, que votre formation politique avait
déposé à l'Assemblée nationale en juin 1985 et qui,
suivant l'expression parlementaire consacrée, est mort au
feuilleton.
Quant à ce projet de loi, nous avons reçu plusieurs
mémoires en critiquant certains aspects. Ce projet de loi, faut-il le
souligner, ne traitait aucunement de la question du régime d'accueil en
cas de transférabilité: le cas typique de l'employé qui
quitte une compagnie avec un régime de retraite et qui se trouve un
emploi dans une autre compagnie qui n'en a pas. Je vous ai indiqué que
nous sommes à revoir ce projet de loi dans son ensemble et plus
particulièrement le pouvoir de surveillance et de contrôle de la
Régie des rentes à l'égard des régimes
privés et de ses administrateurs et également la question de la
transférabilité.
M. Charbonneau: Bon! Je comprends: alors que l'an dernier...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est la même réponse
qu'il y a cinq minutes.
M. Charbonneau: C'est cela, je comprends. Ce qui
m'intéresse, c'est surtout la différence entre cette
réponse et celle de l'an dernier. Donc, l'an dernier, c'était sur
les tablettes. Là, si je comprends bien, le ministre a compris que c'est
un dossier important; c'est une des quatre problématiques majeures
énoncées dans le livre orange.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le ministre n'a jamais nié
qu'il s'agissait d'une question importante.
M. Charbonneau: Non, mais après un an et demi, c'est la
première fois que vous admettez que vous vous penchez sur cette
question, alors que, l'an dernier, vous vous êtes contenté de
répondre après plusieurs questions que ce projet de loi
était sur les tablettes, que vous n'aviez pas l'intention de le
sortir.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous pouvez convenir
que vous ne m'en parlez pas à tous les jours?
M. Charbonneau: Je vous en ai déjà parié au
moins à deux reprises, lors de la présentation de projets de loi
et vous vous êtes contenté, en guise de réplique lors de
mes interventions, de me parler de la pluie et du beau temps sur d'autres
questions, mais pas sur celle-là.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, c'est parce que vous
étiez hors du sujet à l'égard de l'application...
M. Charbonneau: Bon! Bon!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...du règlement de
l'Assemblée nationale.
M. Charbonneau: Quel est votre échéancier à
l'égard de la problématique des régimes privés de
retraite et du problème de la transférabilité?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sauf en cas
d'éléments imprévus, il devrait suivre
l'admissibilité pour la rente du conjoint au foyer.
M. Charbonneau: Cela risque de nous mener loin! Cela veut dire
suivre...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avant le troisième mandat!
Ha! Ha! Ha!
M. Charbonneau: Ha! Ha! Ha! Je remercie le ministre de l'aveu, je
n'en demandais pas tant, vous savez.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, mais vous aurez compris
qu'à l'intérieur du premier mandat, nous nous sommes commis quant
à une réforme envers les conjoints et les conjointes au foyer.
Maintenant, nous ne vivons pas en vase clos au Québec et des actions
prises dans d'autres juridictions que nous surveillons de près peuvent
nous inciter à intervenir, bien que l'ordre des priorités que je
vous ai indiqué soit le plus souhaitable; il n'est pas impossible que ce
soit autrement.
M. Charbonneau: Là, si je comprends
bien, c'est que vous espérez... Cela va venir après
l'autre et l'autre, vous espérez faire cela dans votre premier mandat,
mais il n'y a rien de sûr. Quand on regarde la réforme de l'aide
sociale... Si je comprends bien, ce n'est pas une priorité. Quand un
gouvernement a à l'esprit ou décide qu'une question est
prioritaire...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous n'avez pas compris.
M. Charbonneau: ...il s'organise pour que cela passe
rapidement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous n'avez pas compris. Je dois
vous indiquer qu'encore une fois...
M. Charbonneau: Alors, dites-moi que c'est prioritaire.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...sur le plan pratique, le
libellé d'un projet de loi comme tel devrait normalement être
prêt pour la période des fêtes cette année.
M. Charbonneau: Ah! Cela commence à être plus
précis.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne vous ai pas dit qu'il y
aurait dépôt, ne sautez pas aux conclusions.
M. Charbonneau: Non, je vous avoue... Autrement dit, il y a un
libellé qui va vous être soumis.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, qui est soumis, qui
sera...
M. Charbonneau: Qui sera peut-être présenté
au Conseil des ministres.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Nous verrons à ce
moment-là quel sera le cheminement que suivra le projet de loi. Je peux
vous assurer qu'en temps opportun vous serez informé.
M. Charbonneau: Est-ce que le ministre peut nous indiquer que la
Régie des rentes et lui sont attentifs à ce qui se fait
présentement en Ontario?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je peux assurer le
député de Verchères que nous sommes très attentifs
à ce qui se passe présentement dans la province voisine.
M. Charbonneau: Et est-ce que le ministre peut nous assurer que
les Québécois n'attendront pas plusieurs années
après les Ontariens pour bénéficier de la solution de ce
problème?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, je ne peux pas vous donner
cette assurance. Je peux vous donner l'assurance que nous suivons attentivement
ce qui se fait en Ontario, que nous gardons les yeux ouverts dans les
sociétés qui nous entourent et même dans les
sociétés plus éloignées, qu'un projet de loi, au
cas où nous nous retrouvions dans une situation conjoncturelle où
nous devrions le déposer, devrait normalement être prêt pour
les fêtes. C'est le plus loin que je peux aller et je note que vous
constatez qu'il y a de nets progrès depuis l'an passé.
M. Charbonneau: On me dit que le président de la
Réqie des rentes dans une intervention publique qui avait
été rapportée par des médias d'information aurait
déjà parlé d'une possibilité - en fait, il avait
peut-être émis une suggestion ou ouvert une piste - d'une taxe
à la retraite, d'un système, en tout cas, d'une mesure fiscale
particulière pour...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non: ce que le président de
la Régie des rentes a indiqué à l'époque, c'est
qu'il faut toujours qu'une société prévoie les moyens
nécessaires et suffisants pour financer les régimes de retraite
et, à ce moment, il avait - si sa mémoire est fidèle -
cité en exemple des sociétés qui avaient eu recours
à ce mode de financement ou qui y pensaient et dit que, peut-être,
dans 20 ans le Québec y pensera.
M. Charbonneau: Le ministre, lui, ne pense pas.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pardon? Le Conseil des ministres
n'a pas encore accordé au ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du Revenu, responsable de la Régie des rentes, le
pouvoir de décréter des taxes.
M. Charbonneau: Heureusement, d'ailleurs. Est-ce que le ministre
peut nous indiquer ce qu'il se fait actuellement à la Régie des
rentes et au ministère sur le problème de la bonification du
régime. C'est une des quatre questions majeures qui avaient
été identifiées dans le livre orange; en fait, la
problématique, la ministre la connaît, on remplace de moins en
moins la valeur de la rente et l'indexation ne suffit pas à conserver la
valeur des rentes et finalement, on a un système d'assurance publique et
plus cela va, plus les gens vont devoir la compléter par un
système d'assistance publique. Est-ce que le ministre a l'intention
d'engager des actions pour faire en sorte qu'on puisse bonifier le
régime des rentes - en fait, le système - de telle sorte que,
justement, on cesse d'avoir une dévaluation, finalement, de la valeur
des rentes?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous ai indiqué l'an
passé - ma réponse demeure la même cette année dans
le sens de la continuité - que la première bonification que je
souhaite voir se matérialiser serait la bonification qui donne suite
à l'engagement électoral du Parti libéral à
l'occasion de la dernière campagne électorale, soit celle de
rendre admissibles les conjoints ou conjointes au foyer à la
Régie des rentes. Â ce moment-là, si ma mémoire
m'est fidèle, je vous avais dit que pour le ministre titulaire de la
Régie des rentes, au moment où on se parle,
l'égalité à l'intérieur du régime constitue
la première et la plus essentielle des bonifications.
M. Charbonneau: On ne parle pas de la même chose. Ne jouez
pas sur les mots, on ne parle pas de la même chose. La bonification dont
on parle c'est...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est de rendre le régime
meilleur, la bonification. C'est cela?
M. Charbonneau: Écoutez, relisez donc le livre orange, on
va s'entendre sur le vocabulaire, on ne fera pas de chicane de mots.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On va avoir des difficultés
parce que le livre orange - et vous avez raison, nous allons avoir une
argumentation qui va être longue et s'étendre en soirée -
du Parti québécois rejette justement tout concept
d'admissibilité du conjoint ou de la conjointe au foyer à la
Régie des rentes du Québec. J'aurais beau le lire et le relire je
vais arriver à la conclusion que le Parti québécois est
contre.
M. Charbonneau: Donc, il n'y a rien actuellement sur les tables
de travail pour faire en sorte qu'il y ait une augmentation des prestations, en
fait, des pensions de telle sorte qu'on puisse avoir comblé la perte due
au fait qu'on n'arrive pas même à combler la perte de valeurs avec
l'indexation. Il y a juste l'élargissement de la clientèle
à travers le fait qu'on pourra faire participer les femmes au foyer au
régime de rentes, mais la valeur et le montant qui est accordé
aux gens, c'est cela qui y perd plus cela va. Vous me dites que vous ne faites
rien pour cela. Ce n'est pas une de vos préoccupations, si je comprends
bien. Je comprends; si c'est cela votre réponse, c'est correct.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non. Je vais tout simplement,
encore une fois, pour les fins du Journal des débats et peut-être
pour votre lecture un peu plus tard, dire qu'il est faux de dire qu'il n'y a
rien quant à la bonification.
M. Charbonneau: Dans ce cas-là, si c'est faux, que
faites-vous?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Donc, il est vrai de dire qu'il y
a quelque chose quant à la bonification. Je viens de vous indiquer que
notre première orientation quant à la bonification du
régime de rentes comme tel est de l'étendre suivant l'engagement
que nous avons pris à l'occasion...
M. Charbonneau: Élargissement de la base.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...de la dernière campagne
électorale au conjoint ou conjointe au foyer,
M. Charbonneau: Bien oui. Mais la deuxième question qui
est liée à la bonification qui est le montant que les gens
reçoivent, vous ne vous intéressez pas à cela?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La première marge de
manoeuvre que nous réussirons à dégager dans la
Régie des rentes du Québec servira d'abord et avant tout à
rendre égaux entre eux les citoyens et les citoyennes du Québec
dans le cadre de ce régime.
M. Charbonneau: Très bien. On va attendre que le ministre
livre la marchandise. Est-ce que le ministre peut nous dire où en est le
dossier? Il veut tellement nous en parler, mais cela fait un an et demi que
rien ne bouqe. Où cela en est-il? C'est le temps de patiner. Votre
collèque, la ministre déléguée à la
Condition féminine, l'avait promis pour le printemps; après cela
en septembre. Après cela, c'était l'hiver. Mais on va arriver
bientôt à l'été, à votre deuxième
année de gouvernement. Quand...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je suis assis directement de biais
à l'arrière de ma collègue, la ministre
déléguée à la Condition féminine. Je
tiendrai à lui dire que le député de Verchères est
beaucoup plus loin, ce qui donne peut-être la chance aux propos
d'être moins bien saisis ou moins bien correctement saisis...
M. Charbonneau: Non, non, non. C'est..
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...de Mme la
députée.
M. Charbonneau: Je pourrais vous rapporter les propos de ma
collègue, la députée de Johnson, qui a questionné
votre collègue, la ministre délégué à la
Condition féminine qui s'est engagée aux engagements financiers
à ce que tout cela soit fait avant juin 1987. On est rendu ce soir le 26
mai
1987. On est passé le 15 mai. À ma connaissance, le 15 mai
était la date limite pour présenter un projet pour adoption
avant...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je connais bien votre
collègue, Mme la députée de Johnson, qui est d'ailleurs ma
voisine de comté. Si elle avait des représentations à
faire sur ce sujet, elle les ferait personnellement. Je sais que c'est un
dossier d'ailleurs qui, contrairement à vous, lui tient à coeur.
Elle n'est pas contre comme votre formation politique. Elle est en faveur de la
rente au foyer pour les conjoints ou conjointes. Je vous dis cela après
en avoir discuté avec elle.
M. Charbonneau: Donnez-nous donc votre
échéancier.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Donc, réglez la zizanie sur
cette question encore une fois qui divise votre formation politique et les
élus qui siègent...
M. Charbonneau: Elle a l'air d'être dans vos rangs. Votre
collègue nous dit toutes sortes de choses contradictoires par rapport
à vous.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...au sein de votre caucus. Je
vous dirai pour répondre très sérieusement...
M. Charbonneau: Bon. C'est cela qu'on veut, une réponse
sérieuse.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je pense
que là-dessus je vais m'en remettre à mes notes parce que c'est
un dossier que nous avons trop à coeur au gouvernement pour nous laisser
piéger dans des remarques où nous pourrions émettre des
commentaires sur l'Opposition.
Je dirai au député de Verchères qu'il doit savoir
qu'il existe actuellement un sous-comité
fédéral-provincial qui se penche sur la question de
l'admissibilité des conjoints et conjointes au foyer à la
Régie des rentes et évalue les différentes
hypothèses de solution. Ce comité auquel participent la plupart
des provinces canadiennes est placé sous l'autorité des ministres
des Finances fédéraux et provinciaux et doit faire rapport en
juillet de cette année. Des personnes du ministère des Finances
et de la Régie des rentes participent aux travaux de ce comité
fédéral-provincial. Des personnes du ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, de la Régie des
rentes, du ministère des Finances et du Secrétariat à la
condition féminine siègent à un comité
québécois dont le mandat est de travailler sur l'aspect
provincial de la question afin de dégager les différentes avenues
de solutions et d'évaluer les coûts et le mode de financement. Une
fois cet exercice terminé, il y aura des consultations dont les
modalités, comme je l'ai indiqué récemment en Chambre
à Mme la députée de Maisonneuve, seront définies en
temps et lieu.
Le Président (M. Bélanger): Messieurs, compte tenu
de l'heure, la commission ajourne ses travaux jusqu'à demain, 10
heures.
M. Charbonneau: Un instant, M. le Président! On avait 28
minutes.
Le Président (M. Bélanger): On avait convenu
jusqu'à 22 h 15 ce soir.
M. Charbonneau: Ah non, non! On avait dit après cela
qu'on...
Le Président (M. Bélanger): Oh! Non, non. J'ai pris
la peine de le répéter deux fois.
Une voix: Non, non, non.
M. Charbonneau: Un instant! Ne me faites pas le coup.
Le Président (M. Bélanger): La commission ajourne
ses travaux jusqu'à demain 10 heures. C'est ce qui était
convenu...
M. Charbonneau: Non, M. le Président. Je m'excuse.
Le Président (M. Bélanger): Vous êtes le seul
qui n'avez pas compris cela, je m'excuse. C'est 22 heures.
M. Charbonneau: Non, non. Vous ne me "fourrerez" pas à la
dernière minute. Il nous reste quinze minutes.
Le Président (M. Bélanger): Non, je...
M. Charbonneau: On s'est entendu qu'après 15 minutes on
essaierait de voir ce qu'on ferait.
Le Président (M. Bélanger): Non, non, non.
M. Charbonneau: C'est cela, la décision.
Le Président (M. Bélanger): Non, non, non.
M. Charbonneau: Vous relèverez le Journal des
débats.
Le Président (M. Bélanger): Oui, monsieur, et je
vous le montrerai. Peux-tu me le relever demain pour que je lui mette
sous le nez, parce que je ne me ferai pas obstiner deux fois comme
cela?
M. Charbonneau: Je vais vous dire une affaire, je ne m'obstinerai
pas sur...
Le Président (M. Bélanger): La commission ajourne
ses travaux jusqu'à demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 22 h 16)