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(Onze heures vingt et une minutes)
Le Président (M. Kehoe): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Je constate qu'il y a quorum. La commission des affaires sociales se
réunit afin de procéder à des consultations
particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi 97, Loi
modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Je
demande à Mme la secrétaire s'il y a des remplacements.
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M.
Bélanger (Laval-des-Rapides) est remplacé par M. Kehoe
(Chapleau). M. Leclerc (Taschereau) est remplacé par M. Audet
(Beauce-Nord).
Le Président (M. Kehoe): Merci. Je constate aussi que
c'est la deuxième journée de consultation. À l'ordre du
jour, pour aujourd'hui, deux groupes seront entendus: la
Fédération des centres locaux de services communautaires du
Québec, ainsi que le Regroupement des fondations hospitalières
francophones.
Je demande au premier groupe, la Fédération des CLSC, de
s'avancer et à leur président, M. Pierre Ippersiel, de nous dire
qui l'accompagne. Bienvenue, M. Ippersiell
Auditions Fédération des CLSC
M. Ippersiel (Pierre): J'aimerais vous présenter M.
Maurice Charlebois, directeur général de la
Fédération des CLSC du Québec, et Claude Malboeuf,
directeur des ressources humaines à la fédération.
M. Chevrette: Est-ce que vous nous permettez de féliciter
le nouveau président et de lui souhaiter un bon règne?
Le Président (M. Kehoe): Bonne chancel M. Ippersiel:
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Kehoe): Vous connaissez les règles
du jeu. Vous avez environ 20 minutes pour faire un résumé de
votre mémoire, quitte à ce qu'il y ait des questions des deux
côtés de la salle sur votre mémoire. La parole est à
vous, M. Ippersiel.
M. Ippersiel: Merci, M. le Président. En premier lieu,
j'aimerais vous remercier d'avoir invité la Fédération des
CLSC à déposer un mémoire. Nous savons que vous avez
procédé sur invitation et nous sommes donc heureux de
déposer un mémoire.
Permettez-nous de rappeler que la Fédération des CLSC
représente 154 établissements répartis sur l'ensemble du
territoire québécois, dont la mission est de procurer à la
population des services de santé de première ligne tant au plan
médical qu'au plan psycho-social. Nous voulons également nous
excuser de ne pas avoir déposé plus tôt notre
mémoire. Compte tenu des délais assez brefs, nous le
déposons séance tenante.
Le mémoire que nous déposons a été
étudié sérieusement par le conseil d'administration de la
Fédération des CLSC et nous intéresse en premier lieu
parce qu'il s'agit de responsabilités des conseils d'administration dans
la gestion des établissements et, d'autre part, parce que la question
traite de la capacité de ces employeurs à se prendre en charge.
Nous avons l'intention de commenter la plupart des articles du projet de loi
qui concernent directement les établissements, mais nous entendons, au
préalable, formuler des considérations d'ordre
général qui constituent la trame de fond de notre position sur le
sujet.
Nous voulons, dans un premier temps, souligner notre accord avec
l'intention du projet de loi qui est d'établir des règles plus
précises concernant toutes les questions de conflits
d'Intérêts et de prestation de travail des directeurs
généraux. Si la Fédération reconnaît
l'existence de problèmes d'éthique dans la gestion de certains
établissements et le bien-fondé de l'introduction de nouvelles
règles d'encadrement, il lui est cependant difficile d'accepter le
caractère parfois excessif des mesures proposées. Ainsi, elle ne
peut adhérer à un projet de loi qui projette l'image d'un
réseau où des agissements fort contestables seraient le lot de
tous les gestionnaires du secteur des affaires sociales. Elle demeure
persuadée qu'il s'agit ici de contrevenants qui sont minoritaires et
qu'un projet de loi mieux adapté résoudrait les
problèmes.
Les événements récents démontrent, bien
sûr, la nécessité de baliser certains champs afin que la
population soit assurée de l'intégrité de la gestion dans
les établissements publics. Le gouvernement a une responsabilité
en cette matière et, à ce titre, il est tout à fait
justifié de légiférer. Cette loi devrait toutefois tenir
compte de l'économie générale de la
délégation de responsabilités dans la gestion actuelle du
système de santé et des services sociaux. Nous croyons en effet
qu'il y va de la responsabilité d'un conseil d'administration d'assurer
un caractère de probité à l'établissement qu'il a,
en vertu de cette même loi, la responsabilité de gérer. Le
conseil a tous les pouvoirs pour agir contre ses officiers, lorsque que c'est
nécessaire, et le ministre a, pour sa part, tous les pouvoirs
pour agir contre un conseil d'administration qui, à son avis, ne
s'acquitterait pas de ses responsabilités. Il s'agit ici de
l'imputabilité et du partage des rôles et fonctions de chacun.
Agir autrement équivaudrait à mettre en doute l'existence
même du conseil d'administration et de ses pouvoirs comme corporation.
Encore une fois, la fédération croit en la
nécessité d'apporter un certain encadrement et nous en
préciserons la portée en commentant les articles du projet de
loi. On remarquera notre préoccupation d'assurer le respect des champs
de juridiction des conseils d'administration.
Dans la suite de notre mémoire, nous procéderons article
par article. Abordons tout de suite l'article 6 sur les conflits
d'Intérêts. Nous comprenons l'assouplissement apporté aux
dispositions actuelles par le premier alinéa et nous sommes heureux de
cette précision. Nous sommes également d'accord avec le principe
voulant qu'une situation de conflit d'Intérêts puisse
entraîner une peine de déchéance de charge. Nous sommes
d'avis, cependant, qu'un conseil devrait être en mesure
d'apprécier la situation et d'agir avec le discernement qui s'impose. Il
ne nous semble pas judicieux d'inclure l'automaticité du recours en
déchéance de charge, alors que, dans des cas bénins, des
correctifs moins radicaux seraient plus appropriés. La loi actuelle
laisse cette discrétion au conseil d'administration qui, en
définitive, est le mieux placé pour jauger ces situations. Le
ministre, ne l'oublions pas, dispose toujours du pouvoir de mettre en tutelle
un établissement coupable de manquements graves à ses
obligations. En conséquence, nous recommandons que te troisième
alinéa de cet article soit modifié pour laisser l'initiative et
l'autorité au conseil d'administration dès qu'il constate que son
directeur général se trouve en situation de conflit
d'intérêts. Il reviendra au conseil d'apprécier la
gravité et la nature des faits et d'appliquer, s'il le juge à
propos, une sanction appropriée pouvant aller jusqu'au recours en
déchéance de charge.
Sur l'exclusivité des fonctions, l'article 7. Tout en faisant
nôtres les principes qui visent à ce qu'un directeur
général assume pleinement ses responsabilités dans son
poste, nous croyons que s'il est un devoir dont l'exécution
relève exclusivement d'un conseil d'administration, c'est bien celui de
définir la charge de son directeur général, d'en assumer
le contrôle et d'effectuer les suivis qui s'imposent. En d'autres termes,
il peut se révéler Intéressant et tout à fait
acceptable pour un conseil d'administration que son directeur
général assume d'autres fonctions sans que cela ne nuise,
évidemment, à son mandat premier. Ces situations devraient
toujours se produire non seulement à la connaissance du conseil
d'administration, mais avec son autorisation. Les conseils d'administration
pourraient, d'ailleurs, adopter un règlement à cet effet. Il
s'agit, en somme, d'une question de régie interne qui ne devrait pas
être traitée dans la loi.
Incidemment, si un directeur général contrevient à
une politique Interne, il appartient au conseil d'administration de
sévir selon les pratiques usuelles. Le recours en
déchéance de charge nous apparaît totalement
inadéquat et excessif en la circonstance, alors qu'il peut l'être
pour les conflits d'Intérêts. En conséquence, nous
demandons le retrait de cet article dans sa facture actuelle et le maintien du
statu quo. Si cette recommandation n'était pas agréée, il
faudrait tout au plus Introduire des dispositions obligeant les conseils
d'administration à adopter une politique sur le sujet dans le cadre des
règlements sur l'organisation et l'administration des
établissements.
Dans un autre ordre d'Idées, les termes "emploi", "charge",
"fonction", "service" introduits dans le projet de loi ont une portée
tellement vaste que cela peut conduire à des excès
législatifs. Serait-Il interdit à un directeur
général d'un établissement d'occuper la charge de
président d'une association patronale ou autre du simple fait qu'une
rémunération symbolique est attachée à cette
charge? Donc, nous croyons que l'introduction de ces termes peut conduire
à des mesures excessives. (11 h 30)
Pour abréger un peu, lisons notre recommandation: En
conséquence, les amendements à la toi portant sur
l'exclusivité de la fonction de cadre ne devraient viser que les
ententes de services Interétablissements desquelles ces derniers
tireraient un bénéfice direct ou Indirect.
Sur les états financiers, l'article 8. L'obligation faite au
deuxième alinéa de cet article à chacun des membres du
conseil d'administration de présenter ses états financiers est
nettenent excessive. On peut deviner les difficultés qu'on aurait alors
à recruter des membres pour siéger à nos conseils. Par
ailleurs, nous sommes d'accord pour que les établissements annexent
à leurs états financiers des renseignements particuliers qui
seront précisés éventuellement par voie
réglementaire et nous espérons être consultés sur
leur élaboration.
En conséquence, nous recommandons d'enlever l'obligation faite
aux membres des conseils d'administration de fournir des renseignements sur
leurs états financiers personnels et d'harmoniser ces dispositions avec
des dispositions similaires qui pourraient exister dans les autres
réseaux du secteur public et parapublic.
Les cadres supérieurs et Intermédiaires. À ce
point, nous reprenons l'essentiel de ce que nous avons dit plus haut, mais nous
comprenons encore moins que le ministère puisse déborder ou
passer par-dessus les conseils d'administration et Intervenir au niveau des
cadres intermédiaires et supérieurs.
Sur l'intervention du ministre en matière de recours en
déchéance, l'article 12. Pour les motifs que nous avons
décrits précédemment et qui se résument à
une question d'imputabilité, il appartient au conseil d'administration
d'exercer
sa juridiction en cette matière, en ce qui a trait aux cadres, et
non au ministre, qui dispose amplement de moyens, qui lui sont d'ailleurs
accordés par la loi, pour s'assurer de la saine administration des
établissements puisqu'en vertu de cette même loi, le ministre peut
demander au conseil d'administration de lui rendre compte de sa gestion, il
importe, dans les circonstances, d'éviter des amendements qui aient pour
unique objet de créer des pouvoirs spécifiques pour disposer de
problèmes qui peuvent être autrement réglés.
En conséquence, nous demandons le retrait de cet article.
L'article 3, la répartition rationnelle des ressources
médicales. D'une façon générale, nous souscrivons
à l'objectif poursuivi par cet article. D'ailleurs, toute
l'opération sur l'élaboration des plans d'effectifs
médicaux est déjà, à notre avis, une orientation
qui va dans ce sens.
La date de l'assemblée des usagers. Nous accueillons
favorablement les changements apportés à la date de la tenue de
l'assemblée, en ce sens qu'elle permet une plus grande souplesse et
permet ainsi de s'adapter aux situations locales. La situation Idéale
serait cependant de ne pas se limiter à la journée du dimanche,
ce qui, selon nous, pourrait permettre une plus grande participation des
usagers, les dimanches étant assez souvent des journées plus
propices assez souvent à autre chose que des assemblées.
En conséquence, nous recommandons que l'article 5 soit
modifié en faisant référence à une journée
du mois de mai sans la préciser.
Voilà l'essentiel des commentaires que la
Fédération des CLSC tenait à faire sur le projet de loi
97. Ces commentaires se situent dans la lignée de ceux qu'elle a
déjà prononcés à l'encontre du caractère
excessif de plusieurs réglementations et d'une Ingérence de plus
en plus grande dans la gestion courante des établissements. La
fédération est préoccupée par les limites
apportées aux diverses responsabilités des conseils
d'administration. La fédération espère que son point de
vue sera entendu et que le projet de loi 97 sera amendé en
conséquence. Elle ne demande pas un traitement de faveur pour les
établissements qu'elle représente, elle demande tout simplement
qu'on leur reconnaisse le caractère d'employeurs autonomes et
responsables au même titre que les autres employeurs du secteur public et
parapublic.
Le Président (M. Kehoe): Merci, M. Ippersiel. La parole
est maintenant à Mme la ministre...
Mme Lavoie-Roux: De la Santé et des Services sociaux.
Le Président (M. Kehoe): Oui, Mme la ministre.
M. Chevrette: La ministre des trois S.
Mme Lavoie-Roux: Des trois S.
Le Président (M. Kehoe): Des trois S.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président, je veux remercier
les représentants de la Fédération des centres locaux de
services communautaires d'avoir accepté notre invitation. Je vais
procéder rapidement parce que je sais que mon collègue, le chef
de l'Opposition, a des responsabilités autres. Je vais essayer de sauver
quelques minutes.
M. Chevrette: Je pensais que vous étiez pour me faire
sauver autre chose.
Des voix: Ha, Ha, Ha!
M. Chevrette: Je vous en remercie.
Mme Lavoie-Roux: Les recommandations que vous nous faites se
situent un peu dans la même veine que d'autres. Je voudrais simplement
vous poser la question suivante: Vous avez raison de dire qu'on fait une loi
qui semble indiquer que l'ensemble des établissements aurait eu des
difficultés particulières qu'on veut corriger, alors que, dans le
fond, c'est pour un nombre limité, Dieu merci. D'ailleurs, les
questionnaires que nous colligeons présentement nous permettront
probablement de dire: Écoutez, on a colligé les questionnaires
et, dans 90 ou 98 % des cas, on verra, il n'y a pas de problème, les
choses sont telles qu'elles doivent être. Il reste que, quand le
gouvernement doit intervenir, que ce soit par voie législative ou par
voie réglementaire, pour corriger des abus, ce n'est évidemment
pas quand la presque totalité connaît des carences ou est en
difficulté, c'est vraiment pour corriger des abus, qui ne se comptent
pas par un ou deux, qui peuvent représenter un nombre un peu plus
important, mais qui, à l'intérieur de nos quelque 900
établissements, restent quand même heureusement minoritaires.
Vous dites: Laisser aux conseils d'administration leurs
responsabilités le plus possible; je suis d'accord. D'un autre
côté, je pense que vous connaissez mieux que moi parce que vous le
vivez, le fonctionnement des conseils d'administration. Pour une foule de
raisons dans lesquelles je ne veux pas entrer, souvent, ces
événements échappent au contrôle du conseil
d'administration. Vous savez, la réponse toujours finale de la tutelle:
Bien, mettez-le en tutelle, c'est aussi une opération délicate
dans le sens que, souvent, la majorité et, dans certains cas, la
totalité des membres du conseil d'administration n'ont pas
été capables de percevoir tes difficiles qui existaient à
l'intérieur. On sait que, dans des cas particuliers, souvent, les
décisions se prennent entre le directeur général et le
président du conseil d'administration. Vous allez me dire: Corrigez
d'autre chose pour corriger cela, vous avez peut-être raison, mais il
reste que c'est la
réalité qu'on vit et qui a donné lieu à
certains abus.
Notre Intention n'est pas de limiter tes pouvoirs du conseil
d'administration. Je vous concéderai que, quand je dis: Le directeur
général qui veut occuper une fonction additionnelle devra avoir
le consentement de la ministre et du conseil d'administration, mais, hier, on
en a discuté longuement et je peux très bien vivre sans cela,
vous savez. Il reste que ce qu'on veut donner au conseil d'administration, ce
sont de meilleurs outils pour justement empêcher que tes
difficultés qui sont survenues dans un certain nombre de cas ne se
répètent ailleurs. C'est vraiment dans cet esprit-là que
c'est fait.
J'aimerais que vous répondiez à cela. Vous êtes
quand même conscients de cela. Comment peut-on, sans Intervenir, laisser
tes conseils d'administration remplir leurs responsabilités? Je suis
d'accord avec vous, mais, par contre, II s'est présenté des
difficultés et fi n'y a aucune catégorie d'établissements
qui est à l'abri de ce type de difficulté. Je pense qu'on n'a pas
à se lancer de pierres réciproquement, on le sait J'aimerais
connaître votre réaction.
M. Charlebois (Maurice): Je pense que vous avez raison, II n'y a
aucune catégorie d'établissements qui soit à l'abri de
telle situation. C'est un fait que les conseils d'administration, compte tenu
de la façon dont les choses se vivent, n'ont pas nécessairement
toute l'information au jour le jour de ce qui peut se produire. Pour ma part,
je suis heureux d'entendre que vous revenez beaucoup plus à l'esprit et
à l'Intention du projet, à savoir mieux outiller les conseils
d'administration.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
M. Charlebois: C'est dans ce sens qu'on fait une suggestion
particulièrement sur la question de l'exclusivité de l'emploi,
qui, en réalité, est peut-être confondue avec une question
de conflit d'intérêts. Les problèmes qu'on veut
régler, qui se sont posés et qui manifestement posaient un
problème d'éthique, c'est lorsque des directeurs
généraux pouvaient bénéficier ou être partie
à des ententes - enfin, pas uniquement des directeurs
généraux, mais des cadres aussi - de service
interétablissements. En ce sens-là, ce qu'on suggère pour
outiller les conseils d'administration, c'est d'amener les conseils à
adopter un règlement sur cette question, un règlement de
régie Interne, et d'obliger les établissements à ne
contracter qu'au niveau des conseils d'administration. Si des cadres sont
impliqués, cela se fait nettement à la connaissance des
autorités et il appartient aux autorités de consentir ou non
à de telles ententes, à des prêts de services, à des
collaborations ou à de la consultation qui peuvent être faits et
qui, dans certaines circonstances, sont intéressants.
Nous l'avons vécu dans le réseau des CLSC. C'est un
réseau qui est en développement. Depuis un certain nombre
d'années, presque tous les ans, de nouvelles unités sont
implantées. On a, à la fédération, entre autres,
tenté d'éviter que chacun ne réinvente le bouton à
quatre trous, si vous me prêtez cette expression. On a essayé
d'établir une espèce de système d'entraide - enfin, le
terme anglais qui me vient à l'esprit c'est "coaching" - où des
directeurs, des coor-donnateurs ou des adjoints administratifs
expérimentés, connaissant les règles du jeu, peuvent aider
un nouvel établissement qui est en train de s'Implanter. Je pense que ce
sont des pratiques qui sont tout à fait saines et tout à fait
à l'avantage d'une implantation plus rapide des unités. J'imagine
que, dans d'autres réseaux, des situations semblables se produisent lors
de l'ouverture d'un centre d'accueil ou d'un nouveau département dans un
hôpital, ou peu importe.
Mme Lavoie-Roux: II n'y a rien dans la loi qui empêche
cela.
M. Charlebois: II n'y a rien dans la loi qui empêche
cela.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Charlebois: II n'y a rien dans la loi qui devrait
l'empêcher non plus, à notre avis.
Mme Lavoie-Roux: Bien non!
M. Charlebois: Et, tel que le projet est libellé à
l'heure actuelle, il pourrait empêcher cela, à la limite.
Mme Lavoie-Roux: Mais dites-mot donc de quelle façon.
M. Charlebois: Lorsqu'on parie d'exclusivité de fonction,
de charge...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Charlebois: ...et de tâche et que,
éventuellement, cela peut s'appliquer à l'ensemble des cadres du
réseau.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais quand on parie d'exclusivité
d'emploi, vous avez quand même passablement de latitude à
l'Intérieur de la loi. Ce qui est important, c'est qu'on obtienne
l'autorisation du conseil d'administration pour des charges ou fonctions
additionnelles, que, même, on puisse, pour une période de temps
donnée, être directeur de deux établissements, surtout
quand ce sont de petits établissements; c'est d'ailleurs ce qui se
passe. Je vois difficilement... Il y en a quelques autres qui ont dit ceci:
Écoutez, vous allez eniever les efforts de complémentarité
qu'on fait Je ne vois vraiment pas, dans la loi, ce qui empêche les
efforts de
complémentarité. Vous savez, si l'institution x demande
à l'institution y: Vous êtes bien bons pour organiser votre
système d'Information, on aimerait cela que quelqu'un vienne nous
conseiller. Il n'y a rien qui empêche le conseil d'administration de
dire: Oui, on est d'accord, vous aurez notre collaboration pour telle ou telle
chose. Il n'y a rien qui empêche cela dans la loi.
M. Charlebois: Dans la loi actuelle, il n'y a rien qui
l'empêche. Dans le projet de loi finalement, je pense que c'est le choix
des mots. La loi actuelle parie du directeur général qui doit
travailler à temps plein et quant au reste, on est muet,
c'est-à-dire que ce sont les conseils d'administration qui peuvent...
Là, on a changé les mots pour dire que le directeur
général doit se consacrer exclusivement à sa tâche.
Je ne retrouve pas les mots, mais on parle d'exclusivité de fonction, de
charge. C'est le choix des mots qui laisse entendre qu'on va introduire des
restrictions. Un peu plus loin dans le projet, on dit que toute
dérogation à cela exige l'autorisation du ministre.
Mme Lavoie:Roux: Bien...
M. Charlebois: Vous avez dit un peu plus tôt que vous
pourriez vivre sans...
Mme Lavoie-Roux: ...sans cela.
M. Charlebois: ...donner des autorisations quotidiennes. Alors,
on en est bien heureux.
M. Chevrette: On a un amendement d'assuré.
M. Charlebois: Mais, en fait, quand...
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais revenir, M. Chariebois... C'est une
question de perception. J'ai dit qu'on allait l'examiner pour être bien
sûrs qu'on comprenne tous la même chose. Je vais vous dire comme
j'ai dit aux gens hier: L'exclusivité d'emploi, c'est ce qui a
été la règle du système de 1971 aux années
quatre-vingt, alors que là, on est passés à la notion de
temps plein qui est Interprétée par nos services juridiques comme
de l'exclusivité d'emploi aussi. Mais on ne se chicanera pas
là-dessus.
Je voudrais quand même revenir sur une chose qui a
été soulevée par vous et par d'autres. Les gens semblent
limiter les problèmes qu'on a rencontrés à une question de
conflit d'intérêts. C'est un peu comme l'oeuf et la poule; la
poule et l'oeuf. Souvent, le fait de ne pas occuper ses fonctions à
temps plein, ou autant à temps plein qu'il aurait été
souhaitable, a créé des situations de conflit
d'intérêts; ou encore des intérêts particuliers ont
fait qu'on n'a pas occupé son emploi en exclusivité. Lequel vient
avant l'autre? Les gens ont eu tendance hier à tout relimiter ou
redéfinir cela à l'intérieur du cadre des conflits
d'intérêts. Moi, je pense que ce serait plus simple si
c'était strictement cela, mais je peux vous dire que, dans plusieurs
situations, c'est difficile de savoir lequel est venu le premier. Je pense que
c'était cela au point de départ l'esprit du législateur.
(11 h 45)
Au point de départ, je regarde les règlements du temps:
"Le directeur général de tout centre hospitalier, de tout centre
de services sociaux, de tout centre local de services communautaires et de
réadaptation doit s'occuper exclusivement du travail de
l'établissement et des devoirs de sa fonction. Une personne peut
toutefois être directeur général de plus d'un
établissement public si les règlements du conseil
d'administration ne s'y opposent pas." C'est évident qu'avec
l'approbation du conseil d'administration ou à la demande du ministre,
on peut occuper une autre fonction dans le réseau de la santé et
des services sociaux. En tous les cas, je ne m'étendrai pas
là-dessus, mais je pense que ce n'est pas strictement une question de
conflit d'intérêts. Comme je vous le dis, je ne sais pas lequel
entraîne l'autre.
M. Charlebois: Sur cette question, effectivement, entre la poule
et l'oeuf, c'est souvent difficile à déterminer, mais en
introduisant dans les amendements éventuels l'idée qu'un conseil
adopte une politique à cette fin et que le cadre d'un
établissement, lorsqu'il est partie à une entente avec un autre
établissement - cela demande l'autorisation des conseils
d'administration...
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
M. Charlebois: Cela apporterait une espèce d'encadrement
nouveau qui serait plus précis, qui, à notre point de vue,
permettrait de mettre à jour des situations qui ont été
difficiles à vivre et qui respecterait l'autonomie des corporations.
Mme Lavoie-Roux: Vous avez insisté tout à l'heure
sur la question... Vous n'avez pas insisté, mais vous avez dit: que les
établissements fassent des règlements, etc. Vous seriez
peut-être étonné de savoir combien
d'établissements... Peut-être que maintenant il y en a qui l'ont
fait, parce que toute la fièvre qu'on a vécue, les questionnaires
qu'on a envoyés et d'autres facteurs ont eu pour effet, je pense, que
certains établissements l'ont fait plus sérieusement. Mais,
strictement sur les règlements de la loi 27 que les conseils
d'administration devaient faire, je ne vous donnerai pas de statistiques parce
que je ne les ai pas en main, mais je dois vous dire que cela n'a pas
été ta majorité, loin de là, qui les ont faits ou,
encore, ils en ont fait un petit bout et ils n'ont pas terminé. Vous
savez, dans le fond, la boite marche et ce n'est pas parce qu'on ne veut pas
les faire, mais il y a d'autres
préoccupations, Il y a l'administration quotidienne, etc.
Même s'il est requis que ces règlements soient faits, qu'ils
soient de cette nature ou d'une autre, ce n'est pas toujours comme cela que
cela fonctionne. Ce que je veux que vous compreniez, c'est que, si on veut
donner de meilleurs outils aux établissements, c'est justement parce que
le ministre et ceux qui travaillent avec le ministre veulent le moins possible
être obligés d'intervenir dans ce genre de
problème-là.
Un dernier mot avant de vous donner la parole concernant une
Interprétation des médecins en régions
éloignées. Est-ce que notre formulation était tellement
vague que vous avez eu l'Impression que c'était une mesure pour mieux
répartir les effectifs médicaux? Ce n'est pas l'objet de
l'article. Vous êtes peut-être au courant qu'il y a eu un jugement
de la Cour d'appel à la suite de la requête d'un immigrant, qui
n'avait même pas encore obtenu un poste d'Internat rotatoire, pour faire
juger non conforme à la charte le fait d'être obligé
d'aller pratiquer en région éloignée parce qu'il
était immigrant et qu'il obtiendrait un poste d'Internat rotatoire. Le
jugement qui a été rendu est le suivant - je vous le donne dans
mes propres mots: que le gouvernement n'avait pas le droit d'imposer, par une
décision du Conseil des ministres, par exemple, les 50 postes
supplémentaires de résidence accordés en 1986-1987 et
1987-1988, pas plus que les conditions imposées aux Immigrants, qui,
d'ailleurs, nous l'avalent demandé et qui ont accepté librement
d'aller en régions éloignées. Ils ont dit: Vous avez
besoin d'une assise juridique pour cela. Alors, l'objet de cet article est
vraiment de corriger, parce que, dans le fond, quand le gouvernement a
accepté, disons, 80, parce qu'il n'y en a pas eu 100, mais disons 80
postes en sus pour des postes de résidents, c'est, comme
société, un problème qu'on a voulu corriger, des
dépenses supplémentaires qu'on a faites et des choix libres que
les gens ont fait. On risquerait de se faire dire, si les gens ne voulaient
pas, strictement au plan moral, tenir leur parole: Je regrette, mais,
maintenant, j'ai mon poste de résident et j'irai pratiquer où je
voudrai. C'est vraiment l'objectif. Si on devait faire des changements plus en
profondeur, c'est à la table de concertation dont vous faites partie,
les centres d'accueil, les hôpitaux, etc., où se discute toute la
question des effectifs médicaux, entre autres, et de leur
répartition. Il semble que les gens l'interprètent, et
peut-être qu'à sa face même ils ont raison de
l'interpréter comme vous le faites, mais ce n'est pas l'objectif de cet
article.
Le Président (M. Kehoe): Merci, Mme la ministre. La parole
est au député de Joliette.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais tout d'abord
indiquer aux représentants des CLSC que je considère que c'est un
des meilleurs mémoires qu'il nous a été donné
d'entendre ou de lire. Je considère que l'analyse est rationnelle et
rapide, mais cohérente. Je voudrais vous Informer que, nous, comme
Opposition officielle, avons à peu près les mêmes
perceptions. Il y a une perception que vous n'avez pas donnée, ou que
n'aviez pas à donner parce que vous avez la réponse sur un projet
de loi, mais que, nous, on va donner. Je vais vous Informer, si vous ne l'avez
pas été, que nous considérons que ce projet de loi
n'aurait pas dû être exclusivement axé sur le secteur de la
santé. Cela aurait dû être une loi-cadre globale pour
l'ensemble du secteur public et parapublic.
On pense, on soutient, on maintient qu'il y a des gens qui ont beaucoup
plus d'occasions d'être en conflit d'intérêts que dans le
secteur de la santé. On pense, par exemple, à des
sociétés d'État qui jouent avec des centaines de millions
de dollars et qui sont en position de conflit d'Intérêts parce
qu'il y a beaucoup plus de pouvoir discrétionnaire au chapitre des
décisions à prendre que dans le domaine de la santé, qui
administre des programmes normes, encadrés, avec des
vérifications annuelles serrées et sévères. On
pense qu'il y a un risque à mettre le focus, dans un projet de loi, sur
les conflits d'Intérêts uniquement dans le secteur de la
santé. C'est ternir un peu la réputation des professionnels de ta
santé qui oeuvrent depuis des années dans ce secteur.
Qu'à partir de deux, trois ou quatre scandales, on s'empresse
d'adopter une loi, à mon avis, c'est peut-être aller vite et
vouloir donner l'Impression que c'est terrible au ministère de la
Santé et des Services sociaux. Ce sont seulement les mauvais coups qui
sortent. "Bad news is good news", sauf que, sur le nombre d'institutions qu'on
a, 154 CLSC, je ne sais pas combien de CSS...
Mme Lavoie-Roux: II y en a 900 en tout.
M. Chevrette: 900 quelque institutions. Qu'il y en ait 3 ou 4 qui
fassent des écarts, ce n'est quand même pas un scandale en soi.
Moi, j'aurais préféré que le gouvernement, je le
répète, prenne position dans une loi-cadre face aux conflits
d'Intérêts pour l'ensemble du secteur public et parapublic. Cela
aurait été gouverner avec une vision plus globale des choses et
aurait eu moins l'air de céder à la panique. Cela aurait moins
l'air de gouverner en fonction des coups de vent. Personnellement, je tiens
à le répéter à peu près à tous les
groupes qui passent. Je sais que la ministre n'aime pas tellement cela, mais,
que voulez-vous, c'est mon rôle de te faire.
Mme Lavoie-Roux: Cela ne me traumatise pas du tout
M. Chevrette: Cela ne la traumatise pas. mais je sais qu'elle est
pelnée de piloter ce
dossier. Cela aurait dû être la "Job" ou l'emploi du
ministre des Finances ou du président du Conseil du trésor, ou un
projet de loi de l'Exécutif comme tel sous le nom du premier ministre.
C'est ce que cela aurait dû être.
Ceci dit, je pense que nous pourrons apporter des amendements assez
concrets, entre autres, quand vous parlez d'un amendement à l'article 6
pour laisser l'initiative et l'autorité au conseil d'administration.
Mol, je pense que, si l'on veut atteindre un objectif, si la ministre veut
atteindre un objectif, il faudrait que les cadres ou les directeurs
généraux aient une certaine crainte face au travail qu'ils ont
à faire. Je retiens une chose de ce que vous dites - et je la lance tout
de suite pour permettre à la ministre de mettre ses avocats à
l'oeuvre - on pourrait Indiquer que tout écart jugé tel par te
conseil d'administration peut aller jusqu'à la déchéance,
mais laisser véritablement le rôle premier aux conseils
d'administration en leur donnant le pouvoir de peser et soupeser les gestes. Si
l'on met seulement la déchéance comme pénalité et
qu'il n'y a pas autre chose, on va se retrouver dans le domaine de la
santé avec une situation de fait: Si tu commets la moindre gaffe, tu es
dehors: déchéance! Alors que dans d'autres secteurs du secteur
public et parapublic, fais-en un peu plus et ce n'est pas sûr que tu
seras suspendu sans traitement, seulement, ce qui m'apparaît un non
sens.
Vous avez absolument raison dans l'analyse que vous faites à la
page 4. Mol, je pense qu'on doit introduire cette notion de
pénalité ultime et l'appliquer aux conseils d'administration,
qu'elle dit d'ailleurs vouloir responsabiliser et revaloriser. Donc, quand on
veut responsabiliser et revaloriser, on donne la chance de porter un jugement.
La meilleure analyse, c'est de voir s'exercer le jugement des membres du
conseil d'administration ou des directions générales qui veulent
se valoriser et se responsabiliser.
En ce qui regarde l'exclusion de tâches, je vous avoue que je n'ai
pas compris l'analyse juridique de Mme la ministre concernant le plein emploi
et l'exclusivité de la charge. Les enseignants au Québec ont le
plein emploi, mais ils n'ont pas d'exclusivité de charge. Ils peuvent
travailler le soir, même dans les CLSC. Ils peuvent aller donner des
cours aux adultes dans d'autres institutions scolaires ou au cégep. Mol,
j'étais directeur du syndicat, j'enseignais aux adultes, au
cégep, le soir, et à l'université du Québec deux
soirs par semaine. Pourtant, j'étais à temps plein. Il y a une
différence entre exclusivité de charge, sur le plan juridique, et
temps plein. La notion de temps plein, c'est que, si on vous demande 30 heures
de travail, vous faites 30 heures de travail et les 40 autres, cela ne regarde
pas la ministre, cela ne regarde personne, cela ne regarde même pas votre
directeur général. L'exclusivité de tâche ou de
charge vous exclut de la possibilité d'avoir d'autres
responsabilités. C'est nettement diffé- rent. Je pense qu'on
pourrait parler de notion de temps plein, si on veut te garder. Dès
qu'on met exclusivité de charge, c'est là qu'on place tes
personnes en possibilité de conflit d'intérêts. C'est ce
que je voudrais dire à la ministre. La notion d'exclusivité de
charge, dès qu'un Individu de bonne foi va poser un geste, un jaloux -
dans la société, il y en a - va le dénoncer. Il y aura une
dénonciation. L'individu sera face à une déchéance.
Regardons le projet de loi tel qu'il est. C'est courir après les
problèmes, parce qu'on ne tient pas compte de la réalité,
du pragmatisme vécu du monde. Si on dit "exclusivité de charge",
un D.G. va aller donner une conférence, il aura 300 $ de cachet. S'il a
oublié de demander à son conseil d'administration avant - c'est
ce qu'elle va me répondre, je connais assez la loi maintenant - et qu'il
y a deux ou trois "fricoteux" à l'intérieur du conseil qui
demandent: Lui avez-vous donné l'autorisation? Non? Il vient de sauter,
déchéance de charge, il n'y a pas d'alternative. C'est ce que dit
le projet de loi. Il me semble que bâtir un projet de loi de cette
façon, c'est provoquer des événements, des situations
inutiles, et moi j'achète ce que vous dites, j'irais plutôt vers
le plein emploi. Vous allez voir qu'on n'est pas loin les uns des autres.
Sur les états financiers, je suis plutôt perplexe lorsqu'on
parle de la divulgation des états financiers des membres des conseils
d'administration. Je suis ambivalent là-dessus. Quand on sait qu'on
court après les bénévoles...
Mme Lavoie-Roux: Les états financiers des
établissements, je m'excuse. Pas des individus. des
établissements.
M. Chevrette: Pas des établissements, je m'excuse,
l'obligation faite aux membres. Je m'excuse, c'est à la page 7: "En
conséquence, nous recommandons d'enlever l'obligation faite aux membres
des conseils d'administration de fournir des renseignements sur leurs
états financiers personnels et d'harmoniser ces dispositions avec des
dispositions similaires..."
Mme Lavoie-Roux:...
M. Charlebois: Si vous me permettez..
M. Chevrette: C'est votre recommandation, page?.
M. Charlebois: Oui, si vous me permettez, on a relevé ce
point. Je pense que l'intention vise les états financiers des
établissements.
M. Chevrette: Des établissements, oui.
M. Charlebois: Mais, tel que c'est écrit, et c'est une
modification par rapport à la loi actuelle, la loi actuelle parle des
états financiers des établissements et l'amendement parle de
"leurs" états financiers, strictement...
M. Chevrette: Hier, vous l'avez clarifié.
M. Charlebois: Une lecture simple du texte parle des états
financiers des individus et non pas des états financiers des
établissements.
M. Chevrette: On pourrait le clarifier. M. Charlebois: On
tenait..
M. Chevrette: Je ne comprenais pas. Après l'explication
que la ministre en a donnée hier, j'ai été surpris de
l'analyse que vous faisiez.
M. Charlebois: On tenait à le signaler parce que, tel que
c'est écrit, c'est probablement une coquille mais qui peut avoir des
répercussions importantes.
M. Chevrette: Je vous comprendrais.
Sur l'intervention du ministre en matière de
déchéance. Étant donné les pouvoirs
généraux du ministère, je partage un peu le point de vue
de la ministre là-dessus. Le processus des tutelles, Je vous avoue, pour
avoir été ministre de la Santé, qu'il faut avoir de fortes
présomptions avant de flanquer une tutelle. Avoir une forte
présomption, cela veut dire faire une enquête à l'interne
par au moins une ou deux personnes. Ce ne sont pas toujours des choses simples,
les choses financières, qui peuvent se découvrir, ce sont des
rumeurs et j'en ai entendu. (12 heures)
Je prends le cas du CSSMM. J'ai fait faire une enquête interne.
L'enquête est arrivée en Janvier et j'ai su par la suite qu'il a
fallu que la ministre demande à une firme spécialisée de
refaire l'enquête. Ordinairement, dès qu'un ministre... En tout
cas, dans le domaine de la santé, on joue à - comment dirais-je -
dans le domaine de la santé, on sait que les gens sont plus sensibles
que dans d'autres secteurs. Dès qu'on apprend quelque chose, on
déclenche le processus, mais cela prend souvent trois mois, six mois,
quand cela n'est pas plus. Je vous avoue que, là-dessus, j'aimerais bien
qu'on scrute, qu'on cherche une formule qui permette une intervention plus
rapide et moins odieuse que celle de la tutelle. Je ne sais pas si cela
pourrait être un administrateur délégué, un
observateur ayant un pouvoir d'intervention, je ne te sais pas, mais II va
falloir creuser et faire preuve d'imagination parce que la tutelle n'est pas le
remède à tous les maux. Tu tasses du monde de bonne foi. Tu te
fais critiquer. Je me souviens-- j'en ai décrété une
couple - et le résultat de l'enquête finale a été
qu'on a tassé du monde et il y en a parmi ceux-là qu'on n'aurait
peut-être pas dû tasser, mais on a été obligé
de le faire parce qu'on ne prend pas de risque. Je ne sais pas si vous pourriez
commenter cet aspect et voir comment on pourrait trouver une formule, qui ne
soit peut-être pas la tutelle à l'extrême, mais pas non
plus, par exemple...
M. Charlebois: La tutelle est la mesure extrême que le
ministre peut employer. Mais, à moins que je ne me trompe, te ministre
peut aussi faire des enquêtes ou demander des enquêtes. Il me
semble qu'il y a une gradation dans les moyens actuels que le ministre...
Mme Lavoie-Roux: Je prends de l'expérience. Tout le temps
que vous faites des enquêtes, vous êtes sur la corde raide. Par
contre, recourir à la tutelle, il faut bien se dire, comme je le disais
tout à l'heure, que même le président du conseil
d'administration peut être tout à fait de bonne foi et que ceux
que vous mettez en tutelle, c'est le conseil d'administration. Ce n'est pas
encourager la participation à l'administration de nos
établissements. Il y a d'abord les enquêtes internes, comme le
député de Joliette le soulignait, ce n'est pas simple.
M. Chevrette: Vous n'avez pas pensé à une formule
nouvelle qui permettrait à l'État de jouer son rôle
correctement, mais qui permettrait aussi de ne pas tasser comme vous te
dites,.. De la manière que vous vous êtes exprimée
là-dessus, vous dites au ministre: Oui, mais vous l'avez, votre pouvoir
de tutelle. C'est cela que j'ai compris de vos propos.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Chevrette: C'est vrai qu'elle l'a.
M. Charlebois: Le ministre a le pouvoir de tutelle et le pouvoir
d'enquête aussi. Enfin, ce qu'on introduit comme idée, c'est de
demander au conseil d'administration de se donner des règles de
conduite. À propos des règlements, effectivement, les
statistiques n'étaient peut-être pas encourageantes au mois de mai
dernier. Elles le seront au mois de mai l'année prochaine en ce qui
concerne le réseau des CLSC, on peut vous l'assurer. Je pense aussi que
les événements qui se sont produits récemment dans le
réseau vont certainement alerter et stimuler beaucoup de conseils
d'administration. Mais est-ce qu'on ne peut pas dire, somme toute, que te
réseau fonctionne quand même, tel qu'on le connaît depuis 15
ans, avec la Loi...
M. Chevrette: Depuis 1964.
M. Charlebois: ...sur les services de santé et les
services sociaux? Depuis à peu près 15 ans, près de 1000
établissements; bon an mal an, autour de 4 000 000 000 $, 5 000 000 000
$ OU 6 000 000 000 $. Le nombre d'écarts, bien sûr, est
spectaculaire à certains moments, mais cela ne témoigne-t-il pas
quand même d'un réseau sous contrôle et d'un réseau
qui, finalement, est à son affaire?
M. Chevrette: Je suis d'accord avec vous et c'est pour cela que
Je trouve que c'est un petit
peu odieux d'avoir à adopter une loi à partir de quelques
cas d'exception. Je pense que cela aurait été moins
pénalisant pour l'ensemble du réseau si le projet de loi avait
été présenté d'une façon plus globale. Cela
a été mon premier réflexe. Mais c'est difficile
d'être contre un projet de loi qui vise à la saine gestion. Ce
n'est pas sur le fond, c'est beaucoup plus sur les conséquences de la
forme que j'en ai.
Cela dit, il y a peut-être une dernière question...
Oui?
M. Charlebois: Toujours sur la question que vous posiez
tantôt, il y a un autre élément qui me vient.
M. Chevrette: Allez-y!
M. Charlebois: II y a un amendement qui est proposé disant
que le ministre peut préciser les Informations à transmettre aux
assemblées. Ce serait un outil de plus.
Mme Lavoie-Roux: C'est évidemment l'extension dont j'ai
parlé à plusieurs reprises, soit l'extension du mandat des
vérificateurs externes.
M. Charlebois: C'est un outil de plus qui sera entre les mains du
ministre.
Mme Lavoie-Roux: Mais ce qu'il y a d'incroyable, c'est que le
réseau s'était donné des outils. Il y avait les
vérificateurs externes, entre autres. Là, on peut se demander ce
qui s'est passé. Oublions les scandales les plus frappants et tout cela,
c'est facile qu'un laxisme s'introduise et c'est pour cela qu'on va être
obligé d'intervenir de cette façon. D'autres facteurs entrent en
jeu: l'emploi de la firme, les renouvellements de contrats et un tas d'autres
facteurs.
M. Chevrette: Il y a peut-être un point à
éclaircir. Quand vous pariez de l'obligation qui serait faite au conseil
d'administration d'établir les règles du jeu, est-ce que vous
demandez, à toutes fins utiles, un amendement à la loi qui vous
obligerait à le faire par l'intermédiaire des conseils? Est-ce ce
que vous demandez?
M. Charlebois: À la limite, oui. On préfère
le statu quo, mais, si le statu quo n'est pas retenu, il existe à
l'heure actuelle un règlement sur l'organisation et l'administration des
établissements qui prévoit que chaque catégorie
d'établissements doit adopter un certain nombre de règlements.
Dans le cas des CLSC, si je ne m'abuse, c'est neuf règlements...
Une voix: Treize.
M. Charlebois: Treize règlements. On pourrait
préciser un quatorzième règlement qui porterait sur toute
cette question de l'exclusivité de la fonction ou du plein emploi, et
sur les règles à suivre lorsqu'un cadre supérieur ou un
directeur général est sollicité par un autre
établissement. À toutes fins utiles, des politiques types
pourraient être envoyées aux établissements.
M. Chevrette: Est-ce que les treize règlements existant le
sont à partir d'une base juridique?
M. Charlebois: Oui, ils viennent de la loi 27.
M. Chevrette: De la loi 27. Donc, je retiens cela. C'est un filon
intéressant si on veut trouver un compromis.
Le Président (M. Kehoe): Merci, M. le député
de Joliette. Je cède la parole au député de
Sainte-Anne...
M. Laporte: De Sainte-Marie.
Le Président (M. Kehoe): ...Marie, excusez-moi.
M. Laporte: Merci, M. le Président. Je profite de
l'occasion pour saluer les membres...
Mme Lavoie-Roux: ...Sainte-Anne? M. Laporte: Sainte-Anne,
c'est... Le Président (M. Kehoe): La mère. Mme
Lavoie-Roux: La mère de Marie.
M. Laporte: ...de la fédération. Pour ma part, je
vais faire une observation. C'est la première fois que j'interviens sur
le projet de loi 97 déposé ici. On a entendu plusieurs groupes
depuis hier matin qui nous ont donné leurs arguments concernant ce
projet de loi. Je tente d'évaluer en fonction de la loi et des arguments
qui nous ont été présentés ce que pourrait
être cette forme de juste équilibre. On dit toujours que ce n'est
pas facile à trouver, mais, à tout le moins, Je trouve quand
même intéressants les arguments qui ont été
donnés. Une personne me disait, à un certain moment - et c'est
d'ailleurs ce que vous avez dit tantôt - que, d'une façon
générale, dans les établissements, cela va bien. Mais il
s'agit seulement de un, deux ou trois cas qu'on ne règle pas pour que
cela déboule en cascade. On sait que les bruits courent très
rapidement. C'est sûr que ce qu'on ne sait pas ne nous fait pas mal, mais
je pense qu'une forme d'intérêt public, c'est Important.
Par expérience personnelle, avant d'être
député, comme beaucoup de gens qui se sont impliqués dans
différents milieux et ont fait partie des conseils d'administration de
différents
établissements, que ce soient des centres d'accueil et tout le
reste, ce que j'ai trouvé le plus pénible, j'ai trouvé
cela agréable dans son ensemble, mais le plus pénible, c'est
d'essayer d'assimiler en quatre heures une réunion du CA et tout ce
qu'on nous lance à ce conseil d'administration, pas simplement pour
voter, mais pour en saisir les tenants et aboutissants. Ce n'est pas que ma
motivation n'y était pas, mais il y a bien des choses qui se passent
là. Ne me demandez pas aujourd'hui ce qui en était Ce n'est pas
facile d'avoir une gestion décentralisée et d'avoir, d'une
façon générale, un cadre qui nous permette de baliser un
peu tout cela. Ce qui me faisait dire à un certain moment que ce qui
était important, c'était la libre circulation de l'Information,
mais aussi l'assimilation de cette information. Donc, à
l'intérieur de cela, comment fait-on pour essayer d'avoir une bonne
gestion?
Dans votre mémoire, vous dites, à la page 4, qu'un conseil
d'administration devrait être en mesure d'apprécier la situation
et d'agir avec le discernement qui s'impose. C'est ma première question.
Avez-vous des exemples à nous fournir où c'est déjà
arrivé? Cela semble banal, mais vous dites qu'actuellement un conseil
d'administration devrait être en mesure d'apprécier la situation
et d'agir avec le discernement qui s'impose. J'aimerais savoir s'il y a
déjà eu des agissements qui ont prévalu ou, à tout
le moins, qui ont déjà existé, ne serait-ce que de par
cette formulation-là? Avez-vous des exemples à nous donner
là-dessus d'intervention où on a agi avec discernement?
M. Charlebois: Moi...
M. Laporte: Est-ce que cela a déjà eu lieu?
M. Charlebois: ...d'après mon expérience dans le
réseau des CLSC, je me souviens de cas - que je ne voudrais pas nommer
ici - où, effectivement, il y a eu des problèmes à la
direction générale et où les conseils d'administration ont
procédé. Dans certains cas, c'étaient des situations
apparentes de conflit d'intérêts.
M. Laporte: C'est déjà arrivé à
plusieurs reprises.
M. Charlebois: Je me souviens d'un cas particulier, mais
j'aimerais ne pas...
M. Laporte: Non, je ne veux pas de cas particuliers; ce n'est pas
cela. À partir du moment où l'on cite quelque chose, c'est qu'on
a déjà eu l'expérience d'une situation où on a agi
avec diligence. Cela m'amène à la deuxième question
où je sollicite vos commentaires. Comme avocat, on a toujours cette
propension à s'enfarger dans les virgules et les points- virgules.
M. Chevrette: C'est un gros défaut!
M. Laporte: Je suis d'accord avec vous, M. le chef de
l'Opposition, mais, parfois, cela peut être agréable de participer
à ces discussions. J'essayais de voir, à fa suite de votre
proposition sur la déchéance de charge... Et plusieurs groupes
nous l'ont dit ici. Il n'y a pas de solution mitoyenne, c'est d'un
extrême à l'autre. Au début, dans mes commentaires, |e
disais que ce n'était pas facile, ne serait-ce que pour les personnes
qui sont impliquées - j'essaie de penser aux représentants des
usagers - d'essayer de se faire une idée de ce que peut être un
écart de conduite, d'évaluer cela objectivement. A des endroits,
on dit souvent: gagner 15 000 $, c'est très normal, mais, 30 000 $, ce
n'est pas normal. Ce sont des appréciations et des jugements de valeur,
mais c'est quand même là et c'est quand même vrai. On sait
que pour des Infractions de moins de 200 $, c'est ta poursuite sommaire; plus
de 200 $, c'est poursuivable suivant le Code criminel. On peut le quantifier
précisément parce que c'est une somme d'argent. Mais un
écart de conduite, c'est une évaluation, entre guillemets, un peu
morale. J'essaie de voir concrètement, dans un conseil d'administration,
tout en ayant la perspective d'une gestion décentralisée qui est
fort Importante, comment faire pour que tous les participants puissent avoir
une évaluation face à cela. Compte tenu du fait que, d'un
extrême à l'autre, on n'a pas ce juste milieu, j'aimerais savoir
si vous avez réfléchi plus longuement à des formes de
propositions alternatives ou à des guides directeurs. Je sais que ce
n'est pas facile et qu'on n'aura pas de réponse aujourd'hui, mais
j'aimerais seulement en discuter.
M. Charlebois: On n'a pas songé à des guides. Pour
nous aussi, cela a été beaucoup plus une discussion entre membres
du conseil en essayant d'imaginer des situations. Ce qui est frappant dans ie
projet de loi tel que présenté, c'est que, quelle que soit la
situation de conflit d'Intérêts, c'est la peine capitale
Immédiatement, Prenons un exemple anodin: un conseil d'administration
fait venir un dîner et le dîner vient du restaurant appartenant
à la belle-soeur du directeur général. Cela a
coûté 46,95 $. Est-ce un conflit d'intérêts? En soi,
c'est tout à fait anodin, on passe par-dessus. Cela fait un an que cela
dure, un membre s'en aperçoit et le signale au directeur
général, ou le conseil le lui signale en disant: Écoutez,
mettez fin à cette pratique, point. Ou bien, dans un autre cas, on ne
peut pas mettre fin à la pratique. La situation vécue est grave
en soi et le conseil peut dire: Écoutez, on vous demande de
démissionner ou de partir. Il peut se présenter toutes sortes de
situations. Tel que c'est libellé à l'heure actuelle, on trouve
que cela crée une obligation au conseil.
M. Laporte: Je sais que le guide d'évaluation n'est pas
facile à établir, mais, parfois, ce n'est pas
nécessairement relié à un montant
d'argent ou à un service; ce sont parfois des questions de
principe. Le public en général - |e pense qu'on est bien
placé pour le savoir - nous demande toujours un peu plus qu'être
un bon père de famille. Il y a des gens, des groupes qui nous
soulignaient hier cette notion qu'on devrait peut-être se baser sur le
principe du bon père de famille. (12 h 15)
Dans la gestion publique, en général, on nous demande
toujours un peu plus. Je dirais même extrêmement plus que cela. Je
pense que, dans la perception des gens, c'est Important qu'il n'y ait pas
qu'apparence, pas simplement que cela ne se fait pas, mais qu'il n'y ait pas
apparence que cela puisse se faire. C'est sur ce principe... Je comprends avec
vous que la loi ne mentionne pas cette... Vous dites la peine capitale...
M. Charlebois: C'est cela, il y a une espèce de soupape ou
de souplesse qui pourrait être introduite.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais demander ceci à M. Charlebois
ou au président. Il me semble qu'il y a des règles
d'éthique qui ne s'écrivent pas parce qu'à ce
moment-là on entre dans une multiplicité de détails et on
en oublie.
M. Charlebois: C'est cela.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que quelqu'un qui occupe un poste de
directeur général, un poste de leader, qui est responsable de
l'administration d'une boîte et surtout de donner des services à
la population, même le cas du bonhomme qui a fait venir le dîner du
restaurant de sa belle-soeur, je me dis qu'on doit savoir, quand on occupe un
poste comme cela que... Michel parle de l'apparence des choses et je pense
qu'on ne peut pas le mesurer en termes de petit, moyen ou grand. Je me dis que
c'est un poste de responsabilité, qu'il y a des règles que, comme
je vous le dis, on ne peut pas toutes écrire quand même on
essaierait, mais je pense que cela fait partie ou que cela devrait faire partie
de l'éthique personnelle d'une personne et aussi d'un
établissement
M. Charlebois: C'est une question de jugement et...
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
M, Charlebois: ...on sait que ce n'est pas également
partagé.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais sommes-nous obligés de payer
pour tes manques de jugement des personnes qui occupent un poste de
responsabilité?
M. Ippersiel: Mais dans ce sens-là, justement, comme il y
a une question de jugement, je vous dis: Quelle que soit la loi qui sera
adoptée, II y aura probablement toujours possibilité de la
contourner, de la déjouer, et l'essentiel de notre mémoire est un
peu de dire: Même avec une loi plus sévère, ce n'est
peut-être pas sûr qu'on va régler tous les problèmes.
Travaillons peut-être plus la réglementation qui est
déjà disponible et définissons davantage ce qu'on appelle
des conflits...
Mme Lavoie-Roux: Je vais vous donner un exemple de
réglementation. Les établissements sont censés envoyer au
ministre - entre guillemets - les contrats d'engagement de leurs directeurs
généraux. Je pense qu'on envoie le contrat initial, mais on a
plusieurs exemples où, quelque temps après, je ne sais pas si
c'est une semaine, un mois ou deux, mais il y a des addenda; de cela, on
n'entend jamais parler. Il y a des renouvellements de contrats, ils n'arrivent
pas. S'il fallait se mettre à réglementer, c'est un paquet de
détails. Je ne dis pas que c'est fait de mauvaise foi, pas du tout, mais
parce que, comme on dit, on s'embarque dans le quotidien et on est pris dans le
quotidien et tout cela. C'est un exemple de règlement où on a
modifié parfois avec des avantages importants des contrats initiaux.
C'est par la suite; parce qu'il se présente une difficulté
particulière, que finalement on en a connaissance. D'ailleurs, il n'y a
rien qui empêche les conseils d'administration de faire les
règlements internes qu'ils veulent, en plus des règlements de la
loi 27, si vous jugez que sur une chose... Il n'y a rien qui vous empêche
de le faire.
Une voix: C'est exact.
Le Président (M. Kehoe): M. le député de
Sainte-Marie
M. Laporte: Juste une dernière observation. Vous soulignez
- c'est un peu vrai dans ce sens-là - que plus on va être
spécifique, plus on va trouver le moyen de passer à
côté; ou cela va nous permettre, à tout le moins, de mieux
identifier... Si je fais une espèce de résumé, vous
demandez une définition tellement large qu'il n'y a rien qui peut se
passer.
M. Charlebois: Qu'il n'y a rien qui peut se passer?
M. Laporte: Oui.
M. Charlebois: Non. Finalement, on ne demande pas une
définition très large, on suggère certains resserrements
à la situation actuelle, mais des resserrements qui laissent au conseil
d'administration l'initiative en premier lieu d'apprécier la situation
et de prendre les mesures qui s'imposent, mais il y a certains resserrements
qu'on suggère. Notamment, en ce qui a trait aux conflits
d'intérêts, on est d'ac-
cord avec ce que vous introduisez et, en ce qui concerne
l'exclusivité d'emploi, on suggère que les établissements
adoptent un règlement.
Le Président (M. Kehoe): Avez-vous un mot de la fin, Mme
la ministre?
Mme Lavoie-Roux: Oui. Cela a l'air qu'on est rappelé
à l'ordre, écoutez, je veux vous remercier et je pense qu'il y a
des éléments intéressants, on partage vos
préoccupations. C'est un défi qui n'est pas facile à
relever parce qu'on a quand même des obligations comme gouvernement et,
quel que soit le gouvernement on a la même obligation de protéger
le public, les fonds publics, et ainsi de suite. Comment dosons-nous cela pour
que, d'une part, on ne touche pas trop à l'autonomie des administrations
et qui, d'un autre côté, on donne à ces gens tes outils
dont ils ont besoin? Vous avez raison de dire... Vous savez, les vrais bandits,
n'Importe quelle loi, ils passent à côté. On ne fait pas
cela pour cela, on fait... Il y a des lacunes qui sont reliées à
un manque d'encadrement ou des balises qui sont mal définies et c'est
dans ce sens-là qu'on veut essayer de corriger. Je vous remercie.
Le Président (M. Kehoe): M. le député de
Joliette.
M. Chevrette: Oui. Je voudrais vous remercier, c'est un excellent
mémoire et je m'en inspirerai dans mon travail et à
l'étude article par article. On vous fera même parvenir nos
amendements, messieurs.
Le Président (M. Kehoe): Merci, bonjour. Je demande au
prochain groupe, le Regroupement des fondations hospitalières
francophones, et à son porte-parole, Roger Larose, de venir tout de
suite présenter son mémoire sans Interrompre les travaux.
M. Chevrette: M. le Président, me permettrez-vous, le
temps qu'ils s'Installent, de m'excuser tout de suite? Je devrai quitter au
moins cinq à dix minutes au cours de l'exposé de M. Larose.
Mme Lavoie-Roux: Je pourrais même permettre au
député de Jdiette de poser les questions en premier, s'il le
veut
M. Chevrette: Parce qu'à 12 h 35 il faut que je sois
en...
Mme Lavoie-Roux: Ah bon, d'accord.
M. Chevrette: Donc, vous m'excuserez, je vais revenir poser mes
questions quand même. Je veux tout de suite que vous ne preniez pas ce
geste pour un geste de manque d'intérêt, mais j'ai une obligation
à remplir.
Le Président (M. Kehoe): M. Larose, je vous souhaite la
bienvenue. Vous parlez au nom du Regroupement des fondations
hospitalières francophones. La parole est à vous.
Regroupement des fondations hospitalières francophones
M. Larose (Roger): Merci. M. le Président, Mme la
ministre, M. te chef de l'Opposition, membres de la commission, je suis
accompagné de M. Richard Marion, directeur des finances de
l'hôpital Saint-Luc et de ta Fondation de l'hôpital Saint-Luc.
J'avais soumis ces quelques notes à Mme Léger, présidente
de la Fondation de l'hôpital Notre-Dame, une fondation extrêmement
Importante, et à M. John H. Sullivan, président de la Fondation
de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont. Tous les deux m'ont exprimé
leur accord, mais, en même temps, ont dû s'excuser de ne pouvoir
être avec mol ce matin.
Sans préambule, je voudrais vous lire ces quelques notes dont le
but, en fait, est exclusivement d'essayer de sauver nos fondations qui,
à mon point de vue, sont menacées.
L'Association des hôpitaux du Québec vous a
présenté hier un mémoire sur le projet de loi 97. Elle a,
dans ce mémoire, donné son accord aux articles se rapportant aux
fondations et aux corporations, un mémoire dont on m'a dit ce matin, en
passant, qu'il a été bien reçu.
L'Association des hôpitaux du Québec représente,
comme elle vous l'a dit, la totalité des centres hospitaliers de la
province de Québec et la partie de son mémoire traitant des
fondations traduit l'opinion très majoritaire de ses membres; certains -
vous en avez entendu trois très importants hier soir - voudraient
cependant que la rémunération des cadres supérieurs soit
soumise aux seules lois du marché; d'autres voudraient que l'État
Ignore les fondations des centres hospitaliers et leur laisse entière
liberté dans l'utilisation de leurs fonds.
Je voudrais vous exposer brièvement comment la fondation de
l'hôpital Saint-Luc et toutes tes fondations qui partagent la position de
l'Association des hôpitaux du Québec volent ta législation
projetée.
Rappelons que la présentation du projet de loi fait suite
à des révélations de journalistes. La substance de ces
révélations a été corroborée par les
institutions visées, avec explications toutefois et justification. Les
révélations ont donné lieu à des enquêtes
poursuivies par le gouvernement de même qu'à la distribution de
questionnaires aux centres hospitaliers, dont l'objectif était de
vérifier l'étendue des pratiques révélées
par les journalistes. Tout cela est connu du public.
Les articles du projet de toi 97 portant sur la
rémunération des cadres et les fondations accompagnent d'autres
articles sur les conflits d'intérêts, l'exclusivité de
fonction et la transparence, ce qui constitue dans l'optique du gouver-
nement, sans doute, une réponse aux circonstances
précitées.
Ce projet de loi est-il punitif ou contient-il pour tes
établissements des lignes de conduite qui les aideront à garder
leur réputation et à protéger la crédibilité
de leurs fondations?
Les fondations deviennent de plus en plus importantes pour le
développement des centres hospitaliers. Il ne faut pas croire que toutes
tes fondations sont importantes et qu'elles pourraient toutes suppléer
aux carences budgétaires des hôpitaux. Il ne serait d'ailleurs pas
équitable que les hôpitaux soient contraints de suppléer
à la rémunération insuffisante des cadres par
l'utilisation des ressources obtenues par le truchement d'une fondation de
l'hôpital. Les fondations doivent cependant toutes avoir des objectifs
précis que connaissent les souscripteurs; elles doivent avoir un
mécanisme Impeccable d'octroi et de gestion des fonds et des ressources;
elles doivent rendre compte. Les plus gros souscripteurs exigent habituellement
que les fondations ne financent pas des objectifs qui sont des
responsabilités de l'État. Cela vaut pour les universités,
pour les hôpitaux également, on se fait dire cela très
souvent par les grandes Institutions.
Dans cette optique, il nous faut nous poser la question: Est-Il de ta
compétence des fondations d'améliorer la
rémunération des cadres? Si cette fonction est bien connue des
souscripteurs et s'accomplit selon un mécanisme impeccable d'octroi et
de gestion des ressources et si la fondation rend compte de ses actes, on
pourrait être disposé à répondre dans l'affirmative,
mais il manque à cette analyse un élément important: cet
élément est le caractère de fiduciaire que cumulent les
gestionnaires des centres hospitaliers.
Les conseils d'administration des centres hospitaliers gèrent des
fonds publics dont la gestion leur est confiée par l'État et ce
même Etat établit tes barèmes de rémunération
des cadres, barèmes que doivent respecter les administrateurs. Il faut
d'ailleurs ajouter que, même si l'administration hospitalière
respecte toutes les règles, sauf celle-ci, elle reste sujette, non
seulement à la réprobation populaire, mais même à
l'Indignation; et on l'a vu dans les dernières semaines. Les fondations
des hôpitaux sont interdépendantes. Les pratiques
controversées de l'une rejaillissent sur la crédibilité
des autres fondations du réseau.
Que faire dans un milieu compétitif où les administrateurs
hospitaliers sont à prime? Il faut négocier avec l'État et
non avec la fondation et cela se fait. L'Association des hôpitaux du
Québec a d'ailleurs exprimé le voeu qu'une
réévaluation des barèmes de rémunération des
cadres soit entreprise au plus tôt.
Notons bien que, dans l'article 134.1 de la loi 97, on ne s'adresse
qu'à une fondation qui sollicite du public te versement de sommes ou de
dons dans le domaine de la santé et des services sociaux La loi 97 ne
défend pas aux hôpitaux d'utiliser leur fondation pour aller
chercher, dans le secteur privé, des suppléments de ressources.
L'État ne se veut restrictif que vis-à-vis des barèmes de
salaires et exige, c'est important, la transparence.
Les lois restrictives semblent toujours odieuses à moins qu'elles
ne soient dans l'Intérêt public; sur le volet des fondations,
celle-ci est sans aucun doute dans l'intérêt des contribuables et
dans l'intérêt de tous ceux qui souscrivent aux fondations des
hôpitaux. Je vous remercie.
Le Président (M. Kehoe): La parole est maintenant à
Mme la ministre. (12 h 30)
Mme Lavoie-Roux: Je veux remercier M. Larose de son
mémoire qui, évidemment, porte strictement sur la question des
fondations. Je dois vous dire que, sur toute cette question où vous
disiez au point de départ que les fondations étaient
menacées, cela a été pour nous très difficile de
savoir comment intervenir dans tout ce problème des fondations qui a
été porté à l'attention publique parce que, d'une
part, je pense que le gouvernement est fort conscient* et la population est
aussi fort consciente que les fondations apportent une contribution
extrêmement importante au réseau de la santé et des
services sociaux, d'une façon moindre, parce que la tradition a
été en regard des hôpitaux, mais c'est important. Il se
développe d'ailleurs dans l'ensemble du Québec - et c'est asse2
étonnant même dans des petites villes de 8000, 10 000 ou
même 1000 âmes - déjà des initiatives dans le sens
d'aller chercher dans ta communauté des ressources
supplémentaires. Surtout, ce qui m'apparaissait important, c'est de ne
pas s'ingérer dans le fonctionnement de la fondation. Je vous avouerai
Ici qu'au point de départ on avait mis les fondations. J'ai dit: Non,
laissons les fondations de côté et intervenons plutôt sur le
plan des Individus qui pourraient "profiter" - peut-être que le mot
"profiter" est un mauvais terme, je vais le mettre entre guillemets -
d'avantages venant des fondations.
Je pense qu'on a réussi cela, mais le problème qui nous a
été posé hier soir - je sais que vous êtes au
courant puisque vous y avez fait un peu allusion - c'est vraiment de modifier
une pratique qui existait, me semble-t-il, peut-être depuis quinze, vingt
ou vingt-cinq ans, je l'ignore, et qui n'avait jamais attiré l'attention
publique. Lorsque l'attention publique a été attirée sur
des faits précis, comme vous le dites, à la limite, elle s'est
même indignée et cela a fait l'objet d'une réprobation qui,
je pense, était justifiée, surtout en relation avec la
non-transparence qui peut-être, elle non plus, n'avait pas
été voulue parce qu'on fonctionnait comme cela.
Je voudrais vous poser une question parce que dans votre mémoire
vous faites bien ressortir que les lois restrictives sont odieuses et ne
sont
pas faciles pour un ministre. Mais vous faites ressortir que,
malgré cet aspect-là, il s'agit du bien général, de
l'intérêt public et qu'il faut agir. Vous avez situé le
problème au chapitre de la rémunération, qui est une
responsabilité gouvernementale et qui ne doit pas être une
responsabilité des fondations parce que, de toute façon, on
rentrerait dans une situation d'inéquité.
Je ne sais pas si c'est Injuste de vous poser cette question-là,
mais vous êtes un administrateur d'hôpital, vous êtes un
administrateur de fondation. Alors, vous devez être un de ces
bénévoles qui consacrez beaucoup de temps à cela. Ce qu'on
nous a fait valoir hier, c'est que, compte tenu de la situation des
hôpitaux anglophones qui, elle, se situe peut-être davantage dans
le contexte nord-américain, davantage dans le contexte Interprovincial,
cela devenait un frefn au recrutement d'administrateurs compétents pour
leurs institutions et c'était là que le bât blessait
finalement. Si ma question est injuste, sentez-vous bien libre de ne pas y
répondre. Vous avez quand même une expérience en ce qui
concerne les administrateurs. Est-ce que vous croyez qu'il y a là
vraiment une difficulté Insurmontable?
M. Larose: Pas insurmontable, mais il y a là une
difficulté, sûrement Au départ, je séparerais
complètement la question de la rémunération des cadres des
fondations. Autrement dit, d'abord, il faudrait juger de l'incapacité de
l'hôpital d'obtenir, aux barèmes qui sont fixés par le
gouvernement, des cadres suffisamment compétents pour gérer les
établissements dont on parle. Si oui, la première solution serait
peut-être, mais il faudrait être vraiment sûr... Il y a des
expertises possibles, cela vaudrait la peine, d'ailleurs, parce que les sommes
d'argent dont on parie sont assez considérables... On peut faire une
expertise pour voir si, vraiment, il n'y a pas moyen de trouver autre chose. Je
pense qu'il faudrait peut-être faire des exceptions. Mais, quand on en
est rendu à faire des exceptions de cette nature, il faut être
tellement sûr qu'il faut y aller très prudemment. Il ne faudrait
surtout pas ériger cela en système. Le danger de régler le
problème par l'utilisation des fonds des fondations, c'est que cela
crée un régime d'inéquité qui est Inacceptable. Il
y a peut-être des situations ailleurs qu'à Montréal ou
qu'à Québec, par exemple, où, pour avoir un cadre
supérieur,il faut payer au-delà du barème. Il est
possible, précisément parce que c'est là où se
trouve le problème, qu'ils n'aient pas de fondation pour
suppléer. Alors, on ne peut pas dire: On va se
désintéresser de ce cas et, là où elles sont
abondantes, on va laisser les fondations régler le problème. Je
pense que c'est un mauvais point de départ. Je pense que le
problème peut exister, mais je ne suis pas sûr qu'il existe. Il
peut exister dans un hôpital disons-le de langue anglaise,
par exemple, où les cadres supérieurs sont sur un marché
extrêmement compétitif, beaucoup plus large que le nôtre et
où, sûrement, une personne compétente pourrait gagner
beaucoup plus cher ailleurs, c'est sûr.
Mme Lavoie-Roux: II y a une deuxième question que je
voudrais vous poser. Vous connaissez au moins les plus grosses fondations
francophones. Dans quelle mesure fait-on appel, pour le fonctionnement des
fondations, à du personnel des différents établissements?
On va se limiter aux hôpitaux parce que c'est plus votre champ
d'intérêt. Dans quelle mesure fait-on appel à du personnel
qui fonctionne dans les établissements...
M. Larose: Vous voulez dire pour la collecte de fonds?
Mme Lavoie-Roux: Pour la collecte de fonds. Par exemple, je sais
qu'on demande à un directeur général de s'adresser - je ne
sais pas - au Club Kiwanls pour Interpréter les besoins de
l'hôpital; je pense que c'est normal, c'est une ressource qui doit
être utilisée dans ce sens.
M. Larose: Cela fait partie de sa tâche.
Mme Lavoie-Roux: Oui. J'ai cru comprendre, à tort ou
à raison, que, là où un problème s'est
créé, c'est quand du personnel d'hôpitaux s'occupait d'une
fondation et était rémunéré par la fondation. Et,
là, on vient mettre un frein à cela. Ce n'est pas une
rémunération supplémentaire qui est accordée
à un directeur général, mais c'est vraiment une
reconnaissance, je suppose, de services ' que le directeur
général rend à la fondation. Quelle est votre connaissance
de ce... La loi va empêcher cela, de la façon qu'on se parle.
M. Larose: Je vais vous dire ce que je pense personnellement.
Dans les fonctions du directeur général d'un hôpital, je
dirais qu'il y a celle d'aider la fondation de son hôpital parce que, si
les ressources sont importantes et bien utilisées, ta fondation peut
aider considérablement l'hôpital à atteindre beaucoup plus
rapidement des secteurs de pointe que ceux qui n'ont pas ces ressources
additionnelles. Par conséquent, je considère que le D.G. a cela
dans sa fonction. Et, par conséquent, cela...
Mme Lavoie-Roux: Cela fait partie de sa fonction habituelle.
M. Larose: ...ne comporte pas de rémunérations
additionnelles pour mol.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Larose: Pour moi, un D.G., c'est responsable de sa fonction 24
heures par jour, sept
jours par semaine. C'est comme cela que je comprends le poste d'un D.G.,
non seulement d'un D.G., mais d'un chef d'entreprise. De la même
façon, il est responsable de son entreprise tout le temps. Par
conséquent, qu'il aille parler au Club Kiwanis ou qu'il aide un
brancardier à transporter un malade, c'est à l'Intérieur
de sa fonction.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie, M. Larose.
Le Président (M. Kehoe): M. le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: J'ai cru comprendre que vous ne favorisiez pas
tellement la compensation d'un manque de salaire par une fondation qui
comblerait. Je vous donne un exemple théorique. À l'hôpital
Saint-Luc, votre D.G. gagne 100 000 $; comme vous voulez aller en chercher un
bon, cela prendrait 120 000 $ et c'est la fondation qui donne les 20 000 $ pour
compenser pour la limite de 100 000 $ permise par le ministère. J'ai cru
comprendre que vous étiez plus ou moins d'accord avec cela.
M. Larose: C'est hypothétique, votre... M. Chevrette:
Oui, c'est hypothétique.
M. Larose: J'espère qu'il ne vous entend pas.
M. Chevrette: C'est très hypothétique. Vous dites
dans votre mémoire - contrairement aux dernières phrases que
j'avais comprises en entrant tantôt - que, si c'est connu, cela pourrait
se faire, à toutes fins utiles. Si ces faits sont connus des
souscripteurs, cela pourrait se faire.
M. Larose: Oui.
M. Chevrette: Est-ce que J'ai mal interprété votre
mémoire?
M. Larose: Oui, mais on Ignore un fait important. L'argent que
nous administrons, c'est de l'argent public, c'est de l'argent que nous
administrons en fidéicommis et, par conséquent, nous devons
respecter les barèmes de rémunération qui font partie de
ce fidéicommis. On pourrait théoriquement, si toutes les autres
règles étaient observées, mais on ne peut pas à
cause de cela. A moins que le gouvernement, après négociation
avec un hôpital, n'accepte...
M. Chevrette: Mais vous, seriez-vous d'accord avec cela?
M. Larose: Je serais très hésitant, mais je ne peux
pas écarter cela d'emblée, il peut y avoir des situations. Si on
va fonder pour des raisons particulières - c'est arrivé dans le
passé - un hôpital universitaire dans une région
éloignée d'un grand centre universitaire, c'est tellement
difficile d'avoir du personnel que c'est possible qu'on soit obligé de
le faire. Cela s'est fait.
M. Chevrette: Oui, je sais. Il y a quatorze mesures Incitatives
ou dix-sept. Prenez, par exemple, deux hôpitaux dans la ville de
Montréal, un hôpital anglophone qui a une fondation et un
hôpital francophone qui n'aurait pas sa fondation. Est-ce que c'est
acceptable qu'une fondation transforme ses dons en salaire pour un D.G. dans un
hôpital et que l'autre, qui n'a pas les moyens, mais qui voudrait aussi
une ressource des plus compétentes... Ce n'est pas parce qu'on n'a pas
de fondation qu'on ne veut pas avoir les meilleurs éléments de
gestion, les meilleurs administrateurs. Je comprends l'objectif de Mme la
ministre, d'autant plus que ce n'est pas toujours clair - pour ce que j'en ai
lu - que c'est permissible pour une fondation de payer du salaire.
M. Larose: Non. ma réponse, que vous n'avez pas entendue,
c'est non.
M. Chevrette: Ce n'est sûrement pas l'objectif premier
d'une fondation de verser un traitement.
M. Larose: J'ai déjà répondu non à
cela. J'ai même dit: II faut dissocier cette question de
rémunération additionnelle et la question de fondation. Les
hôpitaux peuvent avoir besoin d'une rémunération
additionnelle pour leur D.G. et ne pas avoir de fondation. Par
conséquent, on ne peut pas considérer cela comme une ressource
supplémentaire pour le paiement des salaires des cadres. Il ne faut pas.
C'est inéquitable si on te fait.
M. Chevrette: Donc, vous êtes d'accord sur le projet de
loi, si je comprends bien, qui ne le permettrait plus, d'aucune
façon.
M. Larose: Je suis tout à fait d'accord.
M. Chevrette: Les fondations joueraient donc leur rôle
exclusivement d'évolution sur le plan de l'amélioration de la
santé, soit en équipement, dans la construction,
l'Immobilisation.
M. Larose: C'est cela. C'est ce qu'on fait à Saint-Luc. Je
ne le donne pas en exemple, mais cela fonctionne très bien chez nous.
D'ailleurs, il y a des sommes assez substantielles. On n'achète que de
l'équipement de pointe, des choses qu'on peut voir, qu'on peut toucher,
qu'on peut voir fonctionner. Il n'y a pas de problème. On sait ce qu'on
a perçu, on sait ce que cela coûte, et on
n'a qu'à faire l'équation des deux. Cela
s'équilibre.
M. Chevrette: Pour la négociation, vous avez
apporté une nuance. Vous dites: Peut-être que cela pourrait
être admissible si le gouvernement négociait éventuellement
une formule et que cette formule permette... Dès que vous faites cela,
cela va à rencontre du principe que vous donnez au départ (12 h
45)
M. Larose: Oui, sauf que, voyez-vous, déjà dans tes
barèmes il y a des échelles, tes barèmes ne sont pas
fixes. Parlons d'une prime d'éloignement, par exemple. Cela peut exister
encore...
M. Chevrette: Exactement. Cela existe d'ailleurs.
M. Larose: ...dans un grand pays comme le nôtre, une prime
d'éloignement.
M. Chevrette: Cela existe.
M. Larose: Là, c'est mieux de négocier cela avec le
gouvernement que d'aller chercher de l'argent dans des ressources qui ne sont
pas prévues pour cela.
M. Chevrette: Je pense que c'est très clair.
Peut-être une dernière petite question. Vous dites que les
fondations sont... D'abord, les objectifs des fondations sont clairement
Identifiés dans leur charte comme telle. Je pense qu'on a discuté
pas mal hier soir, c'est-à-dire aux petites heures ce matin, parce qu'on
a débordé largement minuit hier - je pense que c'est
partagé des deux côtés de la table - au danger de permettre
à des fondations ou à une fondation en particulier d'Injecter des
sommes dans la rémunération; c'est que tous les hôpitaux,
à ce moment-là, qui ont une fondation puissent demander une
extension de leur charte pour essayer de vivre la compétition à
ce moment-là. On va se retrouver, à mon point de vue...
M. Larose: C'est cela.
M. Chevrette: ...avec une surenchère au niveau
salarial...
M. Larose: Oui.
M. Chevrette: ...et on arrivera - je vous le dis - avec des
situations où les citoyens du Québec trouveront
exagérées certaines rémunérations. Je n'en reviens
pas que la publication cette semaine de certains salaires scandalise la
population. Quand tu interroges des gens, par exemple, sur le salaire des
députés, ils disent: C'est effrayant, 43 000 $. C'est effrayant
43 000 $ pour 80 heures par semaine. Est-ce normal? Si on posait la question:
Est-ce que c'est normal qu'un D.G. d'hôpital, d'un centre hospitalier,
ait 127 000 $? C'est plus que le salaire du premier ministre du Québec.
À un moment donné, il va falloir qu'il y ait une prise de
conscience collective au Québec, qu'il doit y avoir une
hiérarchisation dans tes salaires, mats qu'elle ne doit pas être
démesurée au point où toute valeur n'est pas prise en
compte dans la détermination de cela. C'est le danger fondamental que je
vois si les fondations commencent à suppléer au cadre
monétaire, au cadre de rémunération du gouvernement Je
vous avoue que vous auriez peut-être un très bon D.G., mais je
pense que vous ne rempliriez pas votre mission première qui est d'abord
d'améliorer non seulement la qualité administrative - je pense
que c'est le devoir de l'hôpital - mais la qualité même des
services de santé par de l'équipement et par de l'Immobilisation.
Je vous remercie infiniment de votre point de vue.
Le Président (M. Kehoe): Merci, M. le
député. M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Thuringer. Merci, M. le Président. C'est bien
évident qu'entre le groupe qu'on a entendu hier soir et vous il y a un
écart
M. Larose: On n'est pas d'accord?
M. Thuringer Oui c'est bien clair. Je me pose la question:
Même avec le financement de l'équipement, par exemple, on peut
privilégier un groupe culturel, linguistique ou quoi que ce sort quand
même, ce n'est pas seulement le fait d'avoir un D.G. qui est
rémunéré à un niveau plus élevé. Vous
ne pensez pas qu'il y a le même...
M. Larose: La loi ne touche pas à cela du tout. Vous
pouvez vous servir de l'argent des fondations pour acheter de
l'équipement et pour construire avec, cependant, l'autorisation du
ministère, mais c'est pour une autre raison, parce que, si vous achetez
une grosse pièce d'équipement ou si vous construisez, vous
ajoutez à votre budget de fonctionnement des dépenses qui n'y
étaient pas avant. Il faut donc avoir une autorisation, mais c'est
permis. La loi 97 ne touche que la rémunération des cadres.
M. Thuringer: Je comprends bien cela, M. le Président,
mais que ce soit permis ou non, le fait à la fin peut être te
même, dans le sens qu'on peut privilégier un hôpital...
M. Larose: Oui.
M. Thuringer: ...pour donner de l'argent pour une technologie qui
est bien avancée et les autres hôpitaux n'ont pas cela.
M. Larose: Oui.
M. Thuringer: Comment faire face à cette chose-là?
Comment agir dans cette affaire-là?
M. Larose: Oui, Je comprends votre point de vue. Mais ça,
c'est une saine concurrence, parce qu'un hôpital qui, par exemple, par
ses ressources de fondation peut acheter une pièce d'équipement
longtemps avant ses voisins, peut aussi servir ses voisins. Et c'est ce qui se
fait. Par exemple le lithotriteur chez nous, on a déjà des
patients en attente, non seulement dans l'hôpital, mais dans les
hôpitaux environnants. Et ils sont des patients qu'on va favoriser.
Ça rejoint le principe de rationalisation des équipements et des
ressources. On ne peut pas avoir dans chaque hôpital, au Québec,
tous les équipements dont on a besoin. Il faut qu'il y en ait comme
ça Ici et là qui puissent desservir la région. Les
fondations aident ça.
Le Président (M. Kehoe): M. le député de
Sainte-Marie. Je comprends que vous avez une courte question.
M. Laporte: Ce n'est pas nécessairement dans le même
sens que le député de Notre-Dame-de-Grâce. Vous voulez
continuer?
M. Thuringer: II y a une chose qui me frappe aussi. Très
brièvement, M. le Président. On parle de transparence. Mais
ça, c'est aussi une question d'habitude. Les fondations, de par leur
histoire, sont pas mal privées et ça va prendre une mosus
d'éducation pour ouvrir - Je ne dis pas ça dans un mauvais sens -
mais elles sont tellement privées... Elles ne sont pas là
pour...
M. Larose: C'est intéressant, ce que vous soulevez
là. Vous savez, fa transparence, ce n'est pas par rapport aux dons,
c'est par rapport à l'utilisation.
M. Thuringer: C'est ça.
M. Larose: Que vous disiez, par exemple... il y a des fondations,
J'en connais... Une des plus grosses au Canada préfère ne pas
être connue. Alors, vous pouvez très bien dire: Don anonyme d'une
fondation, 1 000 000 $. Cela, c'est de ta transparence. Vous dites: J'ai
reçu cet argent-là. Vous ne pourriez probablement pas faire
ça dans un parti politique, mais on peut le faire dans un
hôpital.
M. Chevrette: Dans les partis politiques, vous ne pouvez
même pas faire deux chèques.
M. Larose: Mais, si vous dépensez de l'argent, il faut
dire pourquoi. C'est ça, la transparence. C'est dire pourquoi vous avez
dépensé l'argent, voyez-vous? Parce que c'est ce que les gens
veulent savoir, en fait. Et celui qui donne 5 $ est beaucoup plus exigeant que
celui qui en donne 100 000 $.
Le Président (M. Kehoe): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Laporte: C'était juste pour avoir un peu votre
réaction. On parle aussi dans le projet de lof de l'exclusivité
de la tâche. Je pense que vous avez présenté
tantôt... C'est M. Marion...
M. Larose: Oui, c'est ça.
M. Laporte: ...qui fait à la fois partie comme directeur
des finances de la fondation et...
M. Larose: Oui. Quoiqu'il y ait des états financiers
complètement séparés et une comptabilité à
part. Mais on n'a pas les moyens d'avoir un directeur des finances pour la
fondation.
M. Laporte: Mais est-ce que...
M. Chevrette: ...des finances de l'autre bord.
M. Laporte: Est-ce que vous associez cela au fait qu'une
fondation soit plus petite en termes de gestion, si on peut s'exprimer ainsi,
le fait d'avoir cette forme de duplication ou de double mandat? Advenant
l'éventualité... On essaie de voir... On a eu une autre
fondation, aussi, dont le montant est assez surprenant, merci. Dans ma
perception - c'est un peu une Interrogation à haute voix que j'ai - je
ne sais pas où se retrouverait un directeur des finances qui serait
à la fois directeur des finances dans un hôpital en termes de
temps et directeur d'une fondation qui serait soit plus grosse ou même
plus petite. Des fois, c'est une question de principe. Quelle est votre
réaction par rapport à ça?
M. Larose: Disons que ça ne me gêne pas parce que,
si ça me gênait, je ferais en sorte que ça n'existe pas
chez nous. Mais qu'est-ce que vous voulez? La comptabilité de l'un et
celle de l'autre sont deux opérations séparées, faites
sous la surveillance d'un CA qui, en l'occurrence, est le directeur des
finances de l'hôpital. Les vérificateurs, d'ailleurs, sont les
mêmes. Les vérificateurs de l'hôpital sont aussi les
vérificateurs de la fondation.
M. Chevrette: ...fonction unique pour les...
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous me permettez juste de poser une
question? Évidemment, l'image qu'on a eue des fondations dans les
débats récents, c'est-à-dire une partie de l'image
ç'a été sur les suppléments de salaires qui
étaient versés.
M. Larose: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Mais il y a d'autres problèmes aussi qui
me tracassent, évidemment, qui ont été moins
spectaculaires, par exemple, créer - on a vu cela - un fonds de retraite
pour un directeur général, à même la fondation.
C'est un peu pour cela qu'on dit: Aucune forme de rémunération de
la part des fondations. Je suis sûre que ce n'est pas la pratique
à Saint-Luc. Est-ce que vous pensez que la loi, à l'article 9 ou
10, va complètement nous mettre à l'abri de tout cela, d'autres
formes d'abus qui ont pu...
M. Larose: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Et puis, on a aussi...
M. Larose: Moi, je le pense, parce que voyez-vous, la loi de
l'impôt sur le revenu détermine ce qui, dans des
bénéfices - marginaux, je ne peux pas parier de
bénéfices sociaux, là - constitue du salaire. Par
conséquent, les deux lois se recoupent. Si vous donnez un
supplément de salaire sous une forme déguisée que vous
êtes obligé de déclarer à l'Impôt comme du
salaire, c'est couvert par la loi.
M. Chevrette: Bien, prenez l'inverse. Vous permettez? Prenez
quelqu'un qui fait un don d'envergure à une fondation, c'est
déductible d'impôt.
M. Larose: Oui.
M. Chevrette: Ce sont donc les citoyens du Québec, en
général, qui sont privés d'une forme de revenus. À
partir de là, si cette même fondation, la fondation à qui
il donne, pour qui il a eu un rabattement d'impôt, constitue, d'une
façon Indirecte, des avantages à certains citoyens, au lieu des
avantages qui retombent sur l'ensemble des citoyens, c'est extrêmement
dangereux. Cela fausse complètement le sens des... Et je suis d'accord
avec la ministre depuis le début sur cette partie-là, parce que
cela fausse complètement le rôle d'une fondation qui doit avoir
des retombées collectives, parce que déjà, pour l'Individu
qui donne, il y a un revenu Individuel, II y a une retombée
Individuelle, d'une certaine façon.
M. Larose: Oui.
M. Chevrette: Et, s'il faut qu'une fondation avantage un
individu, ce serait manquer le bateau par rapport au rôle premier d'une
fondation. Moi, je pense que cela, là-dessus...
Mme Lavoie-Roux: II y a une partie de l'argent qui vient du
public, Inévitablement, par le truchement du rabattement d'impôt
et qui est d'ailleurs voulu parce que c'est une forme d'incitation...
M. Chevrette: Oui.
Mme Lavoie-Roux: ...que les gens contribuent aux fondations.
Écoutez, M. le Président, je voudrais remercier M. Larose, M.
Marion. J'espère que, ceci terminé, ce que vous avez
qualifié peut être de menaces pour les fondations... J'imagine que
vous faisiez strictement allusion aux événements récents
qui se sont produits. Je pense qu'on a voulu, en tout cas, protéger les
fondations et...
M. Larose: C'est ce qu'on a compris, d'ailleurs.
Mme Lavoie-Roux: Oui. Ce qui a pu - pas accidentellement - pour
une courte période, peut-être, créer certaines
difficultés pour les fondations, je pense qu'une fois la loi
adoptée, cela devrait s'estomper et, en tout cas, vous allez
peut-être dire: Vous avez des intérêts directs, vous aussi,
dans les fondations. Mais je pense que, comme collectivité, on a des
Intérêts aux fondations. Et on sait que, de plus en plus, te
gouvernement ou quelque gouvernement que ce soit a besoin de cette contribution
de la communauté. Je veux vous remercier et j'aimerais, si vous avez
l'occasion, que vous transmettiez nos remerciements et notre reconnaissance
pour le travail qui se fait à l'Intérieur des fondations...
M. Larose: Merci.
Mme Lavoie-Roux: ...qui est considérable. Aller chercher
des millions ou des centaines de milliers de dollars - vous faisiez allusion,
tout à l'heure, aux partis politiques - ce n'est pas une
opération facile, quoique c'est peut-être plus facile pour vous
autres que pour nous autres. Mais...
M. Larose: Peut-être.
M. Chevrette: Mais quand vous regardez notre cote de
crédibilité dans l'opinion publique...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Chevrette: ...les politiciens, en général...
Mme Lavoie-Roux: Mais c'est...
M. Chevrette: ...c'est pas mai plus faible que la
vôtre.
Mme Lavoie-Roux: ...important que cette cote-là, on la
garde haute pour les fondations et je veux vous remercier d'être venus
devant la commission.
M. Larose: Cela m'étonne, Mme la ministre, que le chef de
l'Opposition ne vous ait pas dit que c'est parce que, eux, ils ont une bonne
cause.
Le Président (M. Kehoe): Un autre mot...
Mme Lavoie-Roux: Mais cela s'applique aux deux côtés
de la Chambre.
M. Larose: C'est cela
Le Président (M. Kehoe): Avez-vous un autre mot à
dire, M. le député de Joliette?
M. Chevrette: Je vous remercie Infiniment et bonne chance!
Le Président (M. Kehoe): Je vous remercie pour votre
travail. La commission ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 13 heures)