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Version finale

30th Legislature, 3rd Session
(March 18, 1975 au December 19, 1975)

Tuesday, April 8, 1975 - Vol. 16 N° 26

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère des Affaires sociales


Journal des débats

 

Commission permanente des affaires sociales

Etude des crédits du ministère des Affaires sociales

(Vingt heures trente-trois minutes)

M. Pilote (président de la commission permanente des affaires sociales): A l'ordre, messieurs! Sont membres de cette commission des affaires sociales Mme Bacon (Bourassa), MM. Bédard (Chicoutimi), Bellemare (Johnson), Bellemare (Rosemont), Bonnier (Taschereau), Charron (Saint-Jacques), Dufour (Vanier), Boudreault (Bourget), Forget (Saint-Laurent), Fortier (Gaspé), Lecours (Frontenac), Massicotte (Lotbinière), Samson (Rouyn-Noranda) et Saint-Germain (Jacques-Cartier).

Si la commission n'a pas d'objection, M. Dufour, de Vanier, serait le rapporteur de cette commission.

La commission est réunie ce soir pour étudier les crédits des affaires sociales. Nous allons laisser, comme l'habitude en a été créée, le ministre faire un tour d'horizon sur son ministère, quitte à accorder la parole aux partis de l'Opposition et à revenir article par article. Je ne sais pas si les membres sont d'accord sur ce procédé.

La parole est au ministre des Affaires sociales.

Exposé de M. le ministre M. Claude Forget

M. Forget: Merci, M. le Président. J'aimerais, avant de commencer, présenter aux membres de la commission les différents officiers supérieurs du ministère et des régies qui sont présents ici. Je commencerai à ma droite: Le Dr Brunet, sous-ministre en titre; M. Marier, président de la Commission des affaires sociales et de la famille; M. Gill Fortier, président de la Régie de l'assurance-maladie. Il y a aussi différents sous-ministres adjoints: M. Nepveu, à l'extrémité, là-bas, responsable de la programmation; M. Jean-Guy Houde, responsable de l'administration et de l'aide sociale; M. Ré-jean Larouche, responsable de la gestion professionnelle, et le Dr Martin Laberge, responsable de l'agrément. Il y a un ou deux absents. Il y a aussi M. Gabriel Savard, secrétaire général du ministère. Je ne veux oublier personne. Il y a M. Colpron, qui est directeur de l'aide sociale; M. Grenier, du personnel, M. Garcia, de la planification de la sécurité du revenu; Mme Valois, de l'aide sociale; M. Larochelle, de la Régie de l'assurance-maladie, et M. Guy Dumas, de la Direction de l'action communautaire.

M. le Président, avant de commencer l'étude de nos crédits et sans anticiper sur les explications détaillées qui seront probablement plus à leur place dans l'étude de chacun des postes du budget, j'aimerais profiter de cette occasion pour brosser très sommairement un tableau des réalisations de l'année qui vient de se terminer, l'exercice financier 1974/75, à la fois sur le plan du développement des programmes et sur le plan législatif pour, ensuite, aborder une description générale de l'ordre des grandeurs des différents programmes du ministère et de leur taux d'accroissement pour l'année à venir et peut-être, en terminant, donner quelques aperçus sur les développements qui sont envisagés pour l'exercice 1975/76.

Si l'on porte notre regard sur les développements de l'année écoulée, et au risque d'en oublier quelques-uns, on doit noter un développement très considérable, un très grand nombre de mesures, un éventail très large de mesures en commençant par les mesures de sécurité d u revenu q ui ont fait l'objet, commedans le passé, d'ailleurs, de nombreux développements, de nombreux ajustements et de bonifications assez importantes. En particulier et s'ajoutant aux majorations du régime d'aide sociale et des allocations familiales qui étaient entrées en vigueur dans l'exercice financier précédent, c'est-à-dire 1973/74, le régime de l'aide sociale a subi deux améliorations durant l'exercice financier qui vient de s'écouler, c'est-à-dire une majoration de 4% des barèmes qui est intervenue en juin I974, et une modification des barèmes de logements, modification à la baisse, puisque l'on sait que ces barèmes sont non pas des barèmes de prestations mais des barèmes de calcul des besoins, et qui est intervenue en novembre dernier.

En janvier I975, intervenait, en vertu des dispositions à cet effet, dans les règlements, une indexation des prestations de l'aide sociale de l'ordre de 10.4% qui correspond au taux d'accroissement de toutes les mesures sociales et qui correspond d'ailleurs à l'indice des rentes tel que déterminé en vertu des nouvelles règles de détermination de cet indice qui font suite aux modifications législatives de 1973 et de 1974.

L'aide sociale a donc été majorée en janvier, de même que les allocations familiales par le même pourcentage. Egalement, le 1er janvier, prenait effet une extension de la couverture du régime d'assurance-maladie par une couverture nouvelle des personnes âgées de 65 ans et pi us, qui reçoivent une partie seulement du maximum du revenu garanti, c'est-à-dire environ 150,000 bénéficiaires nouveaux qui s'ajoutent aux 150,000 qui avaient été les premiers bénéficiaires du régime d'assistance-médicaments en janvier 1974 et, bien sûr, q ui s'ajoutent également aux autres bénéficiaires que constituent les bénéficiaires de l'aide sociale.

Du côté de la sécurité du revenu, ces mesures de majoration ou de bonification des régimes en place sont accompagnées de la poursuite des discussions sur le plan de l'élaboration d'un régime de sécurité du revenu intégré, qui intégrerait dans un ensemble cohérent l'ensemble des mesures de sécurité du revenu, tel que ce travail a été amorcé par une série de conférences fédérales-provinciales et le comité conjoint fédéral-provincial qui a élaboré, durant le cours de l'année, des propositions de plus en plus détaillées pour en arriver finalement, à la conférence du mois de novembre, à une série de trois possibilités qui ont été soumises à la considération de tous les gouvernements canadiens et qui

ont fait depuis, d'ailleurs, l'objet d'autres travaux et d'autres rencontres. Je reviendrai tantôt sur les modifications qui ont été introduites au régime de rentes, mais qui font aussi partie des mesures de sécurité du revenu; je le ferai dans le contexte de la législation adoptée durant le dernier exercice financier.

D'autre part, dans le secteur des services de santé, particulièrement des services communautaires, nous avons vu, durant l'année 1974/75, des développements fort significatifs par la mise sur pied, de manière effective, des 31 centres de santé communautaire qui avaient été désignés dès 1972 en annexe aux règlements adoptés en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

A la fin de l'exercice financier, il était possible d'affirmer, que les 31 centres étaient dotés enfin de directeurs, dans chacun des cas, et que, pour un certain nombre d'entre eux, ils étaient en plus en voie de fonctionnement, ce qui avait permis d'amorçer de façon importante, durant le cours de l'exercice, l'intégration des ressources humaines et des ressources matérielles précédemment utilisées par les unités sanitaires, transfert qui s'y est effectué durant tout le cours de l'exercice financier, qui n'est pas entièrement terminé, mais qui a déjà été encore une fois, substantiellement amorcé durant cet exercice.

Il y a eu également, au cours de l'automne I974, la création d'une direction de l'action communautaire et une amorce d'un processus de consolidation, de définition, d'évaluation de l'expérience acquise dans la mise en place des CLSC et, encore une fois, la consolidation de la position et du rôle de ces nouveaux organismes dans l'ensemble des services de santé et des services sociaux de notre réseau.

Il y a eu en plus, durant l'année, une intégration de certains services de santé municipaux, intégration qui a procédé à des degrés différents, selon les cas, mais qui a été amorcée dans chacun des cas et qui a été complétée dans un certain nombre d'entre eux, mettant ainsi un terme à un engagement pris il y a déjà quelques années, par le gouvernement, à l'effet d'assumer de façon complète, la responsabilité pour tous les services de santé au Québec, sur le plan financier comme sur le plan de l'organisation.

Dans d'autres domaines, les services ont connu également des développements significatifs. Pour ce qui est de l'enfance et des services à l'enfance, il y a eu entre, autres développements, une majoration substantielle des prestations versées aux foyers nourriciers faisant suite à la majoration instaurée au début de l'année I974, les taux versés aux foyers nourriciers ont été majorés d'un pourcentage de 20% au début de I975 et donc d'un pourcentage qui était de près du double du taux de majoration qu'aurait provoquée une simple indexation des prestations.

Il y a eu, dans l'ensemble de l'exercice, des développements importants du côté des services de garde d'enfants. Il y a eu l'élaboration d'un avant-projet d'une politique pour la garde des enfants, une consultation assez large, l'application d'un projet modifié dès l'été I974. Sur la base de l'expérience des quelques premiers mois, il y a eu une révision et, tout dernièrement, l'annonce d'un régime élargi.

Il y a eu, sur le plan des services aux personnes âgées, une série d'initiatives dont la première consiste dans l'organisation d'une tournée de sensibilisation des centres d'accueil et des centres hospitaliers pour personnes âgées de manière que les services donnés à ces clientèles soient marqués d'un plus grand caractère d'humanisation, que I on vérifie auprès des clientèles visées les hypothèses utilisées par le ministère dans l'élaboration d'un programme de développement de services pour les personnes âgées, développement qui mette l'accent sur l'accessibilité à des services de centres de jour, à des services à domicile et sur le maintien, dans toute la mesure du possible, des personnes âgées dans leur milieu naturel de vie.

Il y a eu également, sur le plan des réalisations concrètes, l'amorce de plusieurs projets de construction de centres d'accueil, en particulierdans les régions du Québec qui sont les moins richement pourvues de ces ressources, et plusieurs projets ont été officiellement autorisés et ont vu s'amorcer les travaux nécessaires à leur construction, à leur réalisation.

Sur le plan des services hospitaliers, le développement le plus notable est sans doute l'élaboration plus détaillée, plus raffinée d'un plan quinquennal d'immobilisation qui fut soumis, à la toute fin de l'exercice financier, aux organismes de contrôle du gouvernement, au Conseil du trésor et qui concrétise plusieurs mois et même plusieurs années de travail pour préciser certains paramètres de développement du réseau hospitalier et perfectionner les critères et les bases de l'approbation gouvernementale des projets de développement dans ce secteur.

Il y a eu également dans le secteur des services de santé, des services hospitaliers, à la suite de nombreuses études, d'élaboration d'une politique relative aux services d'urgence et aux services ambulanciers. Les consultations se sont poursuivies quant aux règlements qui doivent être adoptés, en vertu de la Loi de la santé publique, relativement aux services ambulanciers. Une politique de garantie des services ambulanciers, d'accessibilité aux services ambulanciers dans les régions peu densément peuplées a été mise en application. Son application a fait l'objet de discussions et de consultations avec les milieux intéressés. Et avec les conseils régionaux, les grandes dimensions d'une politique de soins d'urgence ont également fait l'objet d'un début d'application.

Enfin, sur le plan législatif, je crois que l'année qui vient de s'écouler a été extrêmement bien remplie, puisque nous avons vu l'Assemblée nationale approuver pas moins de cinq projets de loi, dans la session qui s'est terminée en décembre. Un projet de loi a créé une commission des affaires sociales qui sera bientôt l'objet d'une promulgation, regroupant ainsi, en une seule instance, différentes procédures d'appel ou de recours, de nature administrative qui étaient auparavant dispersées et qui étaient laissées à différents organismes, parfois créés sur une base purement ad hoc.

Le projet de loi no 4I a également introduit, après trois ans d'expérience dans son application, une très nombreuse série de modifications d'amen-

élements à la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

Le projet de loi no 64 a introduit des modifications au régime de rentes du Québec auquel j'ai fait allusion tantôt et dont l'effet était de fournir une formule permanente, pour ainsi dire, d'indexation du maximum des gains admissibles, de même qu'une formule d'indexation des prestations basées sur un calcul beaucoup plus rapproché dans le temps de l'évolution de l'indice des prix à la consommation que ce n'était le cas dans le passé et introduisant aussi dans l'administration du régime de rentes le principe de l'égalité des sexes.

Le projet de loi no 90 nous a permis, également à la lumière de l'expérience d'une année et demie dans l'utilisation de cette nouvelle mesure législative, de modifier certaines modalités d'application de la Loi de protection du malade mental de manière à corriger certaines inadvertances ou certaines situations qui n'avaient pu être adéquatement prévues lors de l'adoption originale de la loi et qui favorise son fonctionnement.

Enfin, le projet de loi no 93, modifiant le régime d'assurance-maladie, prévoyait également toute une série de modifications dont je crois qu'il serait peut-être opportun de vous faire grâce ici de façon à ne pas prolonger indûment cet exposé. Mais malgré tout, je rappellerai certaines dispositions essentielles, en particulier une série de dispositions visant à favoriser l'accessibilité géographique aux ressources médicales, à la main-d'oeuvre médicale par différentes mesures qui sont prévues dans ce projet de loi pour favoriser l'accès aux ressources médicales, aux médecins, dans certaines régions du Québec qui en sont moins richement pourvuesqued'autres, prévoyant également un régime de bourses de recherche et prévoyant la préparation de données relatives à l'utilisation des services par les bénéficiaires du régime.

Voilà, très rapidement brossé, le tableau des développements qui se sont produits dans le secteur des affaires sociales au cours du dernier exercice. Nous croyons que le budget, qui vous sera soumis lors des séances de cette commission, permettra d'abattre un travail comparable au cours du prochain exercice financier puisque les projets de développement, les nouvelles initiatives sont non moins nombreuses pour le prochain exercice qu'elles ne pouvaient l'être pour l'exercice précédent.

J'aimerais, dans un deuxième temps, comme je l'ai indiqué tantôt, donner quelques indications sur l'évolution des principaux programmes du budget du ministère des Affaires sociales et rappelerque le budget de l'exercice 1975/76 totalise $2,788,000,000.

Il représente, par rapport au budget initial de 1974/75, un accroissement de presque $638,000,000 et de $362 millions par rapport au budget définitif de l'exercice financier qui vient de s'écouler, en tenant compte non seulement du budget initial, mais aussi des budgets supplémentaires et des mandats spéciaux qui ont été émis durant la période, ainsi que des transferts effectués au bénéfice du secteur des affaires sociales à même les crédits à la disposition du ministère des Finances et qui ont servi, comme on s'en souviendra, pour le paiement des versements forfaitaires accordés aux employés du secteur.

Les dépenses probables, après onze mois d'activité, sont évaluées à $2,402 milliards, ce qui laisse subsister des crédits périmés de $24.5 millions.

L'évolution en pourcentage du budget 1975/76 par rapport aux dépenses probables de 1974/75 est de 16.1%. L'augmentation est de 14.9% lorsque la comparaison est effectuée avec le budget modifié de 1974/75, c'est-à-dire tenant compte des mandats spéciaux et des budgets supplémentaires de même que des virements.

Ces taux diffèrent de celui de 15.3% qui paraît aux notes explicatives sur les crédits de 1975/76 qui ont été déposés récemment à l'Assemblée nationale par le ministre des Finances. Dans le premier cas, c'est-à-dire dans le cas des chiffres que je viens de vous donner, le taux de 16.1% résulte d'une comparaison de données différentes, mais, de toute manière, les données de base sont semblables. Nous avons tout simplement pu tenir compte, dans ces derniers calculs, des modifications postérieures à celles qui sont incorporées dans les documents du budget tels qu'imprimés, quoiqu'il soit intéressant de noter que la variation en pourcentage de la moyenne mobile de trois ans, calculée à compter des données de l'exercice 1966/67, a évolué à la baisse, soit de 16.9% à 10% au cours des huit premiers exercices de cette période. Cependant, cette moyenne augmente à 14.5% et à 15.8% au cours des quatre derniers exercices financiers. Je parle ici encore de la moyenne mobile de trois ans.

Une autre donnée intéressante est constituée par l'évolution de chacun des secteurs du budget de 1975/76 par rapport aux dépenses probables de 1974/75. Ainsi, les régimes de compensation du revenu subiront une variation de 13.4% cette année par rapport à l'année qui vient de se terminer; le programme de prévention et d'amélioration, une augmentation de 33.8%; le programme de réadaptation sociale, une augmentation de 22.7%; le programme de recouvrement de la santé, une augmentation de 13.8%, alors que l'administration et les services connexes affichent une augmentation de 24%.

Il est sans aucun doute intéressant également, si nous tournons notre attention vers les développements prévisibles durant la prochaine année, de faire la distinction, pour chacun de ces programmes ou chacun de ces secteurs, entre l'augmentation qui est attribuable à des facteurs qui sont largement en dehors du contrôle du ministère comme tel, c'est-à-dire qui reflètent la hausse générlie des prix et des rémunérations, et cette partie qui reflète, au contraire, une augmentation réelle, en quelque sorte, en termes réels, dans le total des ressources mises à la disposition de chacun des secteurs.

Ainsi, dans les régimes de compensation du revenu, évidemment, cette distinction-là est moins applicable puisqu'il s'agit de chiffres en termes monétaires de toute façon, les prestations d'aide sociale absorbent la quasi-totalité de l'augmentation, soit 97.3% ou $67 millions.

Une tranche de $14 mi liions résulte des modifi-

cations dont nous aurons l'occasion de reparler dans la politique de contribution des adultes en établissement, de même que l'intégration à l'aide sociale des adultes en foyers affiliées.

Il s'agit donc là d'un transfert d'un poste du budget à un autre, non pas d'une augmentation réelle en quelque sorte, mais d'une augmentation simplement comptable pour cette partie-là.

Le solde de l'augmentation, c'est-à-dire la différence entre $67 millions et $78 millions, est constitué principalement par le coût de l'indexation des prestations, indexation qui, comme je l'ai indiqué tantôt, continue de se faire en fonction de l'indice des rentes et qui prendra effet le 1er janvier 1976, puisque l'augmentation de janvier 1975 paraît, évidemment, dans la comptabilité de l'exercice précédent.

Dans le secteur de la prévention et de l'amélioration, la plus grande partie de l'accroissement de $38 millions, c'est-à-dire les 33.8% que je soulignais tantôt, soit $24 millions, s'explique par le développement des ressources.

En effet, une somme de $13.1 millions s'applique au développement de l'exercice 1975/76 et $11 millions représentent le coût additionnel du développement de l'exercice précédent, c'est-à-dire la traduction sur la base d'un exercice financier complet des développements qui n'ont effectivement été faits que pour une partie de l'année durant l'exercice précédent.

Le développement en 1975/76 a lieu, dans les centres hospitaliers, en services ambulatoires, départements de santé communautaire, cliniques dentaires; dans les CLSC, en réorganisation de l'urgence, des services de soins à domicile et tout particulièrement dans les services sociaux de santé en milieu scolaire dont le budget affiche une augmentation de plus des deux tiers.

Dans le secteur de la réadaptation sociale, un montant de $77 millions constitue l'augmentation de 22.7%. Le développement des ressources, $12.6 millions et l'annualisation du coût du développement des ressources de l'exercice précédent, $18.7 millions, absorbe donc, au total, 40% de cette augmentation.

Comme je l'ai indiqué tantôt, le solde de l'accroissement s'explique par des facteurs sur lesquels nous n'avons pas le même degré de contrôle, c'est-à-dire l'augmentation générale des rémunérations et du prix des services et des fournitures.

Pour ce qui est du secteur de recouvrement de la santé, l'accroissement de ce secteur, soit $182,589,000 ou 13.8%, est constitué principalement de l'accroissement dans la base.

Il s'agit des traitements, conventions collectives, prix, etc. et aussi une provision pour l'augmentation probable des rémunérations. Enfin, un montant de $23.7 millions s'applique au développement des ressources de l'exercice 1975/76, soit $ll.4 millions pour les nouveaux développements et une somme additionnelle de $12.3 millions pour l'annualisation des développements effectués pour une partie de l'année durant l'exercice précédent.

Du côté de l'administration et des services, il y a une majoration qui, en chiffres absolus, s'élève à $10 millions et sur laquelle nous reviendrons en temps et lieu.

Alors, M. le Président, voici les ordres de grandeur des accroissements qui interviendront en termes financiers et également en termes réels dans les principaux secteurs qui sont confiés à l'administration du ministère des Affaires sociales. Il y a, bien sûr, beaucoup plus de détails qu'il sera nécessaire, dans chacun des programmes, de donner sur l'envergure et la nature des développements envisagés. Nous poursuivrons, sans aucun doute, dans plusieurs secteurs les actions que j'ai soulignées et qui ont été amorcées l'an dernier. Les secteurs en croissance correspondent, je crois, de façon assez fidèle, aux priorités que le ministère des Affaires sociales s'est données depuis quelques années, c'est-à-dire les activités de prévention, le développement des services de réadaptation à l'enfance et aux adultes, où l'on trouve des taux d'augmentation relativement élevés, et une stabilisation, une consolidation qui n'est malgré tout pas synonyme de stagnation puisque des développements, en termes absolus, malgré tout très considérables sont prévus, une somme de $36 millions est prévue pour les développements dans l'ensemble des secteurs, ce qui est équivalent à une valeur annualisée de $50 millions pour l'ensemble d'un exercice financier complet. Plusieurs mesures vont voir un développement se parfaire durant le prochain exercice financier, c'est-à-dire celui qui est désormais commencé, la poursuite du travail de développement des départements de santé communautaire, en particulier l'intégration des unités sanitaires, qui devrait toucher à sa fin, un développement très substantiel des services à domicile, qui affiche également un taux de développement très considérable, et également la mise à terme de l'intégration des services de santé municipaux et des services analogues.

Il y a, sur le plan des régimes, des développements également, soit sur le plan de l'aide sociale, des développements qui affecteront plutôt les règlements actuellement en vigueur, qui essaieront de les rendre plus faciles d'application, plus accessibles, plus compréhensibles et qui, par la même occasion, permettront d'introduire certaines améliorations dans un certain nombre de mesures.

Le régime des soins dentaires, pour les enfants de 0 à 8 ans, qui est entré en vigueur au début de mai 1974, fera l'objet d'une extension aux enfants de neuf ans, de manière à assurer une continuité dans la couverture de ceux qui sont déjà assumés par le régime.

Il y aura, dans le domaine des services de santé et des services sociaux, d'autres développements, mais je crois qu'il serait probablement oiseux de les exposer ici, tous ensemble. Je pense qu'il vaut beaucoup mieux le faire dans le cadre de l'étude détaillée de chacun des programmes.

Alors, voilà l'essentiel de ce que je voulais dire à ce moment-ci. Je crois que nous aurons l'occasion de voir plus en détail la plupart des autres questions que j'ai laissées de côté pour vous.

Le Président (M. Pilote): Le député de Saint-Jacques.

M. Claude Charron

M. Charron: Merci, M. le Président. Je veux remercier le ministre, d'abord, de l'exposé historique qu'il a fait de la dernière année du budget que l'Assemblée lui avait octroyé l'année dernière comme charge à administrer, et aussi des quelques grandes lignes qu'il a tracées mais que nous retrouverons secteur par secteur, lorsqu'il les exposera.

M. le Président, ce n'est pas la première fois que j'examine les crédits des affaires sociales, mais c'est la première fois que je suis officiellement chargé par l'Opposition d'assumer ces dossiers au cours des deux dernières années, j'espère, qu'il me reste à faire au cours du mandat que m'ont donné mes concitoyens.

Je ne voudrais pas embêter la commission parlementaire ni, encore moins, les hauts fonctionnaires qui accompagnent le ministre par une espèce d'énoncé de principe oiseux, pour reprendre un mot que vient d'employer le ministre des Affaires sociales, ou absolument théorique qui ne collerait aucunement à la réalité.

Je veux simplement exprimer, au tout début, les raisons qui m'ont fait militer pour que le transfert des responsabilités à l'intérieurde l'Opposition s'effectue comme il s'est fait au cours des dernières semaines et que je prenne charge, au nom de l'Opposition officielle, du secteur des affaires sociales, raison très terre à terre, M. le Président. D'abord il y avait ce que le directeur de la Régie de l'assurance-maladie connaît certainement: une espèce de fatigue, à l'occasion, dans certains dossiers, la certitude que, faute du partenaire d'en face ou non, je ne ferai pas de commentaires là-dessus, mais que certaines suggestions, certaines remarques et certaines conceptions fondamentales n'obtiennent jamais de résultat, tombent lettre morte et donnent envie, surtout quand on est encore assez loin de la pension de vieillesse, d'essayer ailleurs, de chercher ailleurs. Mais j'ai l'intention de chercher ailleurs, c'est-à-dire maintenant aux affaires sociales, la même chose que j'ai cherchée depuis que je suis à l'Assemblée nationale.

Je travaille ici avec un objectif de libération des Québécois, libération collective, bien sûr, parceque je suis convaincu qu'elle est essentielle à la libération individuelle de chacun des citoyens du Québec, mais aussi la possibilité, pour chacun des Québécois, d'être le maître de sa vie, autonome dans la gestion de ses affaires et dans la construction de son propre bonheur, selon son propre choix, ses propres convictions, sans en imposer aucune à personne, la liberté, pour chacun, de vivre selon les valeurs qu'il a choisies.

Dans le milieu de l'éducation c'était, je crois, beaucoup plus intellectuel. Il s'agissait de travailler à ce que le contenu de l'éducation qui s'adresse essentiellement à l'esprit soit facteur de libération, que l'éducation et la transmission des connaissances, la façon dont les connaissances étaient transmises et le genre de connaissances qui étaient transmises travaillent effectivement à l'épanouissement spirituel des citoyens

Cela ne fait que deux semaines que j'ai la res- ponsabilité des affaires sociales. J'ai quand même eu l'occasion de pacager un peu dans le Québec, de me rendre dans le Bas-du-Fleuve, en Gaspésie, au Saguenay-Lac-Saint-Jean au cours de cette période, d'entrer en premier contact avec ce milieu tout à fait différent en mentalité, j'en ai déjà la conviction, en façon de procéder, en façon de s'exprimer qu'est le milieu dit des affaires sociales que connaît le ministre et que connaissent certainement bien, encore, les hauts fonctionnaires qui l'accompagnent. J'ai l'impression que la même lutte pour la libération se fera maintenant sous des conditions beaucoup plus matérielles, beaucoup plus palpables, beaucoup plus touchables que la discussion plus proprement intellectuelle que nous tenions à l'occasion — et c'est normal — dans le secteur de l'éducation.

C'est bon, dans un sens, de retrouver cette approche-là, mais qui contribue, qui va vivre, qui va véhiculer le même objectif, encore une fois. Il ne faut pas oeuvrer longtemps dans ce secteur pour savoir très bien que cette libération de la personne humaine pour laquelle nous travaillons a des assises proprement matérielles, a des assises qui exigent un minimum de confort. Déjà, le mot nous amène dans des distinctions que nous aurons à établir en travaillant. Il est difficile d'être une personne libérée en pleine capacité d'établir le bonheur selon sa conception quand on a mal quelque part, quand on a faim, quand on a froid, quand les gens à qui on voudrait offrir de l'affection, à qui on voudrait offrir le meilleur de la sécurité, pour que ces mêmes personnes connaissent le même épanouissement que soi-même, sont dans des conditions matérielles qui ne leur permettent pas de décoller sur le plan spirituel.

Je n'arrive pas dans ce secteur — je tiens à le dire au départ — avec des doctrines, avec des conceptions absolument stéréotypées, ce genre d'improvisations que, puisées à gauche ou à droite, j'aurais l'intention de voir le ministère catapulter sur la tête des Québécois. Au contraire, j'arrive avec le goût de chercher mais aussi avec des convictions que je m'étonnerais beaucoup d'abandonner en m'en allant, des convictions qui me sont données par les citoyens que je représente, d'abord. Je suis député d'un des comtés les plus pauvres, dits pauvres de Montréal. Si je regarde la nouvelle carte électorale qui nous a été présentée aujourd'hui, je suis député pour longtemps de ce secteur qui est le mien depuis cinq ans, maintenant. C'est ces convictions que j'ai l'intention de défendre férocement alentour de cette table comme à l'Assemblée nationale.

Au fond, je le disais l'autre jour en intervenant dans le débat sur le discours inaugural, une fois qu'on a décortiqué l'ensemble des grands principes, souvent, les convictions fondamentales qui nous conduisent sont d'une paradoxale banalité, une fois qu'on leur a enlevé toute l'étiquette et la façon de l'exprimer. Par exemple, j'aborde ce secteur qui touche proprement les conditions matérielles d'existence de Québécois avec une certitude qu'il me sera difficile d'arracher de la tête. Nous vivons dans un pays extrêmement riche.

S'il en prenait la décision lui-même, quel que soit le statut politique de cette société, ce qui est une autre question, mais qui n'est pas non plus absente de ce débat, serait capable de faire que le niveau de vie moyen des Québécois et celui d'un grand nombre de citoyens, dont ceux que je représente, serait différent, serait meilleur. Autrement dit, revenons, à ces clichés vous me direz, mais à ces réalités, à mon sens. Le partage des richesses de cette collectivité pourrait être fait sur d'autres principes, avec d'autres moyens, avec d'autres valeurs, avec d'autres orientations, des fois pas totalement différentes de celles qui président au partage des richesses actuelles, à d'autres occasions qui ne nécessiteraient qu'un aménagement de l'imagination, qu'une volonté concrète au niveau politique de combattre ces inégalités. Nous sommes une société qui les a, ces moyens. Je n'ai qu'à prendre, M. le Président, les statistiquesque me fournit ce gouvernement — lorsque sa mission économique s'exprime sur la hausse du niveau de vie, sur la croissance du produit national brut, sur la croissance du revenu moyen des citoyens au Québec — pour savoir qu'effectivement, quant à ces richesses, ces possibilités, nous ne sommes pas, lavons-nous dit à plusieurs reprises sur des estrades ailleurs qu'ici, une des colonies d'Afrique. Celles-ci arrivent avec un certain nombre de richesses naturelles extrêmement limitées, avec des ressources humaines extrêmement dépourvues pour utiliser, canaliser ces richesses naturelles du mieux qu'elles le peuvent et au hasard des séquelles du colonianisme dont elles parviennent avec beaucoup de difficulté à se libérer pour effectuer un changement. Nous sommes une société qui, si elle le voulait, si elle le décidait, si elle s'en donnait la peine, si elle s'organisait au point de vue bureaucratique, au point de vue de sa technocratie, qui est aussi puissante que celle de n'importe quelle autre société moderne, civilisée occidentale, serait capable de travailler à un partage des richesses différent. Elle serait même capable d'innover dans ce qui s'appelle la responsabilité des citoyens quant à l'organisation de ce partage des richesses.

M. le Président, on me dira bien souvent, au cours des remarques que nous ferons programme par programme, l'obstacle à la réalisation de certaines suggestions qu'à l'occasion je ferai, qui ne seront pas nécessairement miennes, dont je me ferai le porte-parole à cette table de la commission, qui viendront d'autres citoyens qui les ont déjà formulées, qui se sont déjà rendues jusqu'à la table du sous-ministre ou du ministre des Affaires sociales. On me dira très souvent comme argument final qu'il s'agit des ressources financières limitées de cette collectivité, qu'on comprend très bien l'intention, qu'il ne s'agit que de ce problème financier, de limites budgétaires à l'intérieur desquelles on doit fonctionner; l'élan du coeur nous y conduirait tout naturellement. C'est une "excuse" valable à l'occasion, lorsque les programmes proposés sont effectivement d'une certaine audace, que n'importe quel esprit rationnel est capable de considérer, et cela exige donc une certaine planification à long terme; j'en conviendrai, M. le Président. J'utiliserai à cette occasion mon expérience de cinq ans ici pour l'ad- mettre, mais à d'autres occasions, on en conviendra également, M. le Président, et vous avez la même expérience que moi à cette Assemblée, ce ne sont que des paravents, ce ne sont que des excuses, parce qu'est possible un aménagement différent, un choix — parlons-en, nous sommes dans un budget — de priorités différent. Cela mettrait ces ressources financières disponibles à la réalisation de ce programme, mais ferait que ces ressources financières affectées à ces fins ne le seraient plus à d'autres que ce gouvernement a choisies. Et. lorsque nous abordons la question d'un budget, c'est comme cela que je l'entends toujours, on peut me dire ceci à certaines occasions. Prenons cet exemple qui nous vient nécessairement à l'esprit: on réaliserait probablement un programme de garderies qui, s'il n'en était des difficultés financières, serait probablement plus large, plus vaste, plus démocratique, plus ouvert, mais on ne s'en tient aux contingences et à l'espèce de partialité de programmes auxquelles s'en tient Mme le ministre d'Etat actuellement que pour des raisons financières. M. le Président, le gouvernement est prêt, par exemple, à cautionner une aventure olympique.

Un gouvernement qui est prêt à cautionner presque les yeux fermés les initiatives qui engouffrent des fonds publics, ne peut pas par la suite se dire que telle disponibilité financière, qui lui échappe, lui échappe absolument hors de son contrôle, quand il a accepté à d'autres endroits qu'un gouffre financier de $250 millions s'ouvre et opère sous ses pieds et qu'il s'apprête à combler presque sans difficulté et sans mot dire.

Je crois que lorsque nous abordons ces questions, nous devons nous dire que le montant qui figure, par exemple, à la réadaptation de l'enfance et des adultes, qui est aujourd'hui de $158,575,000, l'est par choix de ce gouvernement, qu'il aurait pu être plus comme, bien sûr — soutiendra le ministre avec raison — il aurait pu être moins.

Nous avons là l'indication financière de la tension politique et de la décision sociale qu'un homme, entouré d'une équipe, a prise. Il est absolument de notre loisir de dire que cette somme nous paraît, par exemple, à ce chapitre, à l'occasion, insuffisante quand on sait qu'à d'autre ministère ou dans d'autres préoccupations on a accordé, à des fins parfois proprement de propagande, proprement de politiques de grandeur, des sommes qui, adoptées ici, nous permettraient d'obtenir ce que j'appelais tantôt un partage des richesses de cette collectivité qui soit plus équitable entre chacun des citoyens.

J'arrive donc avec des convictions très sommaires mais, en même temps, très fermes. Je n'ai pas l'intention de faire l'étude des crédits du ministère des Affaires sociales à la manière tâtillonne de l'ancien député de Chicoutimi, que vous avez bien connu, et d'exiger que l'on dépose devant moi chacun des achats, avec chacune des factures, que l'on a effectués dans le secteur des affaires sociales. J'ai toujours, au ministère de l'Education, et je le ferai au ministère des Affaires sociales également, procédé d'une façon globale, laissant au ministre élu de le faire, mais qui sera jugé un jour pour l'avoir fait, et

aux hommes compétents qui l'accompagnent, en qui j'ai confiance et desquels je ne pense certainement pas ce que la commission jeunesse du Parti libéral a voté au congrès de Magog en fin de semaine, au dévouement desquels je crois et à l'administration honnête et désintéressée des sommes publiques qu'ils ont à administrer sous la direction du ministre des Affaires sociales.

Je crois donc que nous ferons encore une fois l'abandon d'un certain nombre de tracasseries administratives pour simplement nous en tenir, j'espère, au développement et à la lutte contre la pauvreté et contre un partage inégal des richesses de cette collectivité, toujours dans le but que ce partage équitable, un jour, idéalement bien sûr, hypo-thétiquement, soit fait et donne l'occasion à plus de Québécois d'arriver à leur libération et à leur bonheur, tel que chacun d'entre eux a le droit de concevoir la façon dont il doit se faire.

J'arrive dans ce dossier. Je me souviens l'avoir fait à pied levé l'année dernière pendant quelques jours, avant que mon collègue de Chicoutimi reprenne la place qu'il avait à ce moment-là à la table de cette commission. Mais je dois dire que dans la préparation de l'étude de ces crédits, attentive, j'espère, comme je l'ai faite, j'ai été étonné de revenir et de retrouver certaines des suggestions que moi-même, au nom de l'Opposition, j'avais faites à cette commission, sans constater de progrès, ou même plus, de retrouver des engagements qu'avait pris le ministre des Affaires sociales à cette même table il y a un an, engagements fermes, à l'occasion, engagements prudents de politicien qu'il était en train de développer à ce moment-là, ou à d'autres occasions, disons pas nécessairement engagements mais intérêts marqués, que je croyais sincères, et qu'il me garantissait comme devant se produire avec les crédits que nous nous apprêtions à lui voter.

Or, je ne crois pas procéder ici par préjugé ou encore déformation maisj'ai l'impression de retrouver un ministère que j'avais, à l'occasion, surveillé, que j'ai eu l'occasion, à cause du comté dont je suis député, de surveiller de plus près, mais de Montréal cette fois, de trouver un ministère qui, au cours de l'exercice financier, a roulé au neutre, a peut-être reçu, il faut le dire, sur le plan budgétaire com me sur le plan politique, au cours des trois premières années du régime libéral, une poussée, une erred'aller assez marquée, le capitaine en tête et le reste du navire l'épaulant de façon très solide.

Il est vrai que ce ministère avait pris, dès le moment de sa création, au moment où il rassemblait les restes de deux anciens ministères, une véritable poussée qui n'était pas commune dans ce gouvernement, vous en conviendrez avec moi, M. le Président, mais cette poussée semble bien être chose du passé. Je ne sais pas si, encore une fois, c'est le capitaine qui fait défaut ou si c'est l'effort qui avait été trop grand et qui demeure un peu difficile à maintenir, mais, à chacun des chapitres, à chacun des secteurs qu'a énumérés le ministre dans son intervention première, il faut constater que l'on n'a fait que maintenir, à peine, à certaines occasions et à d'autres — je le signalerai programme par pro- gramme — ralentir l'élan qui avait été donné à ce ministère au cours des deux ou trois premières années du régime libéral.

J'avais soutenu, M. le Président, lors de l'étude des crédits du ministère de l'Education, à un moment où j'avais fait cette constatation également au chapitre de l'éducation, que lorsqu'on avait opté pour la réforme scolaire, il y a maintenant une dizaine d'années — est-il nécessaire de le rappeler — dans le Québec, ce n'était pas un choix de deux ou trois ans que l'on faisait. C'était un engagement pour une génération où à peu près. Il ne s'agissait pas de prendre une génération, de la parquer dans un nouveau système scolaire et de dire: En sortira ce qu'il en sortira! C'est malheureusement ce que bien des parents du Québec sont en train de constater aujourd'hui.

La même chose s'adapte aux affaires sociales. La pousséeque l'on avaitdonnée, le développement vers certains principes, vers certaines politiques, la décision d'installer une nouvelle conception du partage des richesses, aussi modérée qu'elle fût, M. le Président, n'était pas une décision d'un ou deux ans et que, par la suite, il s'agissait de contenir. On a aujourd'hui, dans l'éducation, le constat tragique de ce que c'est d'avoir lancé quelque chose que, par la suite, on s'est contenté de contenir ou de soutenir ou même, à l'occasion, si on regarde le ministre en place, de contredire. La même chose s'applique aux affaires sociales et, je pense, avec d'autant plus d'acuité qu'elle touche les gens dans leur peau, qu'elle touche, à l'occasion, les gens dans leur corps, qu'elle les empêche, dans une société civilisée, d'obtenir des services auxquels ils ont droit, qu'on leur a promis, qu'on leur a fait miroiter, à certaines occasions, et pour lesquels il faut travailler aujourd'hui.

Or, M. le Président, on attend encore, aujourd'hui, malgré les engagements de l'année dernière ou malgré ce que l'évolution subite du début des années soixante-dix avait pu laisser croire, par exemple — on aura l'occasion d'en parler dès le premier programme — des mesures concrètes pour établir, au Québec, une politique familiale. En dehors des affirmations qui étaient contenues à l'origine de la vaste réforme qu'on a opérée dans le domaine social, on attend encore des décisions aussi matérielles, aussi concrètes, aussi — vous me direz — anodines, lorsqu'on parle de politique familiale, à l'égard des congés de maternité, à l'égard de l'aide familiale, à l'égard des garderies, qui devraient toucher plus que I, 500 personnes, M. le Président, à l'égard du logement social. Ces promesses qu'on nous avait faites, ces grandes lignes d'orientation, ce rapport qui devait être, à un moment donné, l'espèce de pierre d'assise, comme un autre rapport avait été la pierre d'assise d'une autre réforme, de réformes, qui, nous disait-on devaient venir, bien sûr, personne ne pensait que tout cela allait se réaliser en même temps, mais personne, non plus, n'allait croire que certaines des réformes les plus simples à faire allaient mettre autant de temps à venir, une fois qu'on avait dit que c'était dans cette ligne qu'on s'en allait.

Le revenu minimum garanti, M. le Président,

dès I967, faisait l'unanimité de ceux qui oeuvraient dans ce secteur et faisait dire, dès ce moment, en I967, que c'était une politique — facilement, peut-être pas, M. le Président — réalisable dans les prochaines années, au Québec. Nous sommes à huit ans de ce rapport, de ces énoncés, de ces voeux politiques qui avaient été exprimés, qui avaient été à l'occasion, M. le Président, soutenus par tous les partis qui occupaient le parquet de l'Assemblée nationale, à ce moment-là.

Nous sommes encore à l'attendre. Nous sommes encore, aujourd'hui, malgré ce qu'on nous avait fait promettre — c'est à se demander si ce ministère, comme je vous le disais tout à l'heure, roule au neutre — à attendre l'établissement d'un réseau de soins et de services à domicile pour les personnes âgées.

Le ministre visitait, je crois, lundi dernier, Place Vermeille, dans le comté de Saint-Jacques, qui est une institution des plus merveilleuses dans ce sens-là, M. le Président. Il a dû avoir l'occasion de peser comment cette lenteurqu'on a à obtenir le développement de ce réseau de soins et de services à domicile constitue dans un quartier comme celui que je représente, mais à la grandeur du Québec également, M. le Président, une difficulté croissante pour répondre à des services et à des besoins essentiels exprimés par la population.

La hausse de l'aide sociale également, en dehors de ce rattrapage normal en fonction du coût de la vie qu'on présente toujours comme un don généreux, mais qui ne constitue pour ces personnes au revenu extrêmement faible qu'une façon de subsister suite à la hausse du coût de la vie qui touche tout le monde, une hausse véritable de l'aide sociale, un revenu minimum garanti qui ferait que ces 175,000 enfants de bénéficiaires de l'aide sociale puissent, un jour, espérer sortir du cercle vicieux de la pauvreté, comme vient de le décrire avec beaucoup d'emphase le Conseil du bien-être du Canada, l'extension de l'assurance-maladie à des soins qu'il nous paraît immédiatement possible de donner et de couvrir, la lenteur qu'on y met ou, encore une fois, la lenteur qu'on met à réaliser des engagements pris, repris, réaffirmés à force de propagande, répétés de discours inaugural en discours inaugural. Par exemple, les prothèses orthopédiques pour les personnes qui en ont besoin, annoncées l'année dernière, au moment où le ministre des Affaires sociales venait d'avoir en main le rapport Girard qui lui était présenté, au moment où il s'engageait devant moi. Je lui citerai le journal des Débats, s'il ne se souvient pas que c'est au cours de l'exercice financier en cours que ce droit que l'Assemblée nationale lui avait octroyé devait se réaliser. Les possibilités financières étaient là, il nous avait fait voter les crédits pour le faire. Comment se fait-il qu'on attend encore après ça? Pourquoi ce ministère est-il soudainement au neutre au moment où il s'est lancé lui-même, s'est placé lui-même, parfois en bousculant du monde, contre le gré de certains citoyens, mais je ne lui en fais pas reproche? Mais c'est pour montrer comment, à un certain moment de son histoire — qui est courte à ce ministère, il n'a même pas cinq ans — on sentait chez lui la volonté de tailler du coude, de procéder à des réformes, d'obtenir un tant soit peu ce partage nouveau des richesses. Comment se fait-il que des décisions annoncées, garanties, dont le budget a été voté, ne sont pas encore implantées, qu'on les attend encore?

C'est ce genre de petites décisions à la base qu'il nous faut maintenant attendre et palper. Il y a une responsabilité politique là-dedans, non seulement dans le partage des ressources fiscales que les citoyens remettent aux mains de ce gouvernement pour qu'il administre, dans l'intérêt du bien commun, bien sûr, mais ces hommes, en face, ont cautionné un régime également où le partage fiscal ne se fait pas nécessairement à l'avantage des Québécois.

Chacun d'entre eux a été élu en prônant un régime où, semble-t-il, une réforme était possible à obtenir. Ces hommes ont maintenant promesses à tenir, mandat à rendre à la population de dire qu'effectivement ce partage des ressources fiscales en deux, remettant une partie, une moitié de nos ressources fiscales aux mains d'un autre gouvernement dont nous ne serons jamais les maîtres et détenteurs, comme Québécois, allait quand même servir à la lutte contre la pauvreté et au partage équitable des richesses. Il y a cinq ans qu'ils sont là maintenant. Nous devrions commencer à en toucher au moins quelques unes des racines. Cela ne devrait pas être un obstacle à la réalisation de certaines choses qui, comme je vous l'ai dit, tout à l'heure, nous ont été maintes fois promises, qui nous sont expliquées comme étant maintenant réalisables, que ce gouvernement nous a dit qu aucunement la constitution ou quoi que ce soit ne l'empêcherait de réaliser. Mais alors, qu'attendent-ils finalement? C'est ce que se disent bien des citoyens en bas. Je dis en bas parce qu'eux ne connaissent du ministère bien souvent que les services t^tillons; eux ne connaissent du ministère bien souvent que les mesures parcimonieuses qu'on annonce bien sûr à partir d'ici avec grand renfort de tambours.

Nous nous préoccuperons longuement, j en ai l'impression, de la mise sur pied des centres locaux de services communautaires, qui eux aussi, ai-je besoin de le dire, connaissent une période de cogitation, j'en ai davantage l'impression, qui se situe plus au niveau du ministère des Affaires sociales que de ceux qui oeuvrent dans les CLSC eux-mêmes, une espèce de frein, de ralentissement, parfois, occasionné par des créations nouvelles du ministère des Affaires sociales qui, sans s'en apercevoir ou en s'en apercevant très bien, nous le verrons, se trouve à contrecarrer certaines dispositions qui avaient jadis été votées, si je me souviens bien, à l'unanimité de cette Assemblée. Il nous faudra recevoir, au cours de l'étude de ces crédits, les explications sur cette situation.

Je crois donc, M. le Président, je vais terminer avec cela, que, si nous regardons attentivement les ressources collectives de la société québécoise, nous avons en mains, non pas la possibilité de faire ici un paradis terrestre, je ne crois pas. non pas non plus la possibilité de battre ou d'écraser ce que d'autres pays plus audacieux que nous ont mis plus

de temps à réaliser. Mais je crois que nous avons effectivement entre les mains la possibilité d'offrir sur le plan social, à l'ensemble de nos concitoyens, des services meilleurs que ceux qu'ils reçoivent actuellement, des services plus adéquats que ceux qu'ils reçoivent actuellement, un revenu minimum à chacun de nos concitoyens qui lui permette de vivre d'une façon un peu plus épanouie et un peu plus libre que le régime actuel lui permet de le faire. C'est donc uniquement dans cet objectif que nous devrons travailler au cours des prochains jours à l'étude du budget des Affaires sociales. Je garde, comme le ministre également, les commentaires plus particuliers sur l'ensemble de certains programmes lorsque, M. le Président, vous les appellerez à notre attention. Merci.

Le Président (M. Pilote): L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. Camille Samson

M. Samson: M. le Président, la reprise des travaux à l'Assemblée nationale et le début de l'étude des crédits du ministère des Affaires sociales coincide, à quelques jours près, avec la publication, en fin de semaine dernière, du manifeste des évê-ques du Québec, dans lequel on déplorait, bien sûr, certains problèmes, dont la hausse du taux des divorces au Québec, la baisse du taux de natalité, etc.

Je n'ai pas l'intention, évidemment, de relire le manifeste des évêques, d'ailleurs je ne l'ai pas avec moi. Mais ceux qui en ont pris connaissance se rappelleront que, parmi les revendications, les propositions faites par les évêques du Québec, on demande au gouvernement de présenter le plus possible des politiques visant à protéger davantage la famille, qui, je n'ai pas besoin de le dire, M. le Président, tout le monde le sait très bien, est la cellule de base de la société. Quand j'ai pris connaissance de ce manifeste, je me suis demandé de quelle façon réagirait le ministère. Parce que, bien sûr, ces gens parlent au nom d'une population également, peut-être à un titre différent du nôtre, mais ils sont bien au fait des problèmes de la société.

Quant à nous, en tant que députés à l'Assemblée nationale, je pense que la meilleure expérience qu'on peut avoir du domaine des affaires sociales nous provient surtout des différentes rencontres que nous avons avec la population, mais plus spécifiquement en tant que députés représentant une circonscription électorale, des rencontres que nous avons régulièrement avec les gens de notre milieu. Je ne veux pas que l'on croie que je suis le seul député au Québec à vivre cette expérience. Tous les autres députés vivent également le même genre d'expérience.

Ce que nous retrouvons généralement, une fois la semaine dans nos comtés, en rencontrant les gens qui ont divers problèmes à nous soumettre, on pourrait considérer que près de 60% des problèmes qui nous sont soumis par nos électeurs, sont des problèmes qui relèvent de l'administration publique, mais plus spécifiquement du ministère des Affaires sociales.

J'ai pris sur moi de faire quelques petits calculs, quand j'ai pris connaissance du manifeste des évêques, et je pense qu'il est important d'en prendre connaissance, pour ceux-là qui n'en ont pas pris connaissance. Mais je ne m'adresse pas aux officiers du ministère qui, eux, savent très bien ce à quoi je veux faire allusion. Les politiques du revenu familial ou du minimum de revenu, si on veut, sont telles que, volontairement ou non — je dis ou non parce que je veux évidemment laisser le bénéfice du doute à ceux-là qui mettent de l'avant les politiques du ministère des Affaires sociales — dans les faits, si on veut, ces politiques sont susceptibles de décourager l'unité familiale en ce sens que pour une famille qui n'a pas de revenu possible, soit par le commerce, soit par le moyen d'un emploi ou autre, pour les familles qui n'ont comme seul revenu l'aide sociale que l'on n'appelle pas encore, M. le Président, revenu minimum garanti, pour ces familles, la vie n'est pas trop rose.

Bien sûr, on nous annonce souvent, à grand renfort de publicité, des indexations, des augmentations d'un tel pourcentage, mais la réalité est telle que le tout n'est pas conforme aux besoins réels de la population. Quand on annonce une augmentation, parexemple, de 10.4%,cequi normalement coïncide avec l'augmentation du coût de la vie pour une période donnée, il demeure que le tout part d'un barème de base qui était déjà trop bas. Alors, même si on augmente, en pourcentage, proportionnellement à l'augmentation du coût de la vie pour la période donnée, cela ne règle pas le problème, parce qu'au début de cette période donnée c'était déjà trop bas.

Si vous prenez comme point de comparaison une famille de deux adultes et trois enfants, suivant lesnouveaux barèmes annoncés dernièrement par le ministère, le revenu familial de cette famille se chiffrerait par $362 par mois plus, évidemment, les allocations familiales. Mais si l'on tente l'expérience, c'est-à-dire de voir ce que ça donnerait si l'on brisait cette famille, par exemple que l'un des deux adultes quitte le foyer, que la mère de famille se retrouve avec les trois enfants et que le père s'en aille tout simplement rester ailleurs, suite à une séparation quelconque, à ce moment-là, au lieu de débourser $362 le ministère en déboursera $390.

Mais, si on poursuit ce raisonnement un peu plus loin, et si par malheur, la famille se démentèle davantage, et que les trois enfants sont en foyer nourricier, que le père et la mère sont séparés, demeurent chacun de leur côté et n'ont aucune autre espèce de revenu que l'aide sociale

A ce moment-là, le gouvernement, le ministère des Affaires sociales devra débourser $378 par mois seulement pour les trois enfants, plus $195 par mois pour chacun des deux adultes, ce qui ferait un total de $768 par mois. Si on transpose cela en chiffres annuels, cela veut dire que la famille unie, dans de telles conditions, aurait un revenu de base de $4,344. Je n'inclus pas les allocations familiales parce que je ne les inclus pas, non plus, dans mon point de comparaison. Il reste que la famille complètement désunie coûterait au gouvernement $9,216 par année. Il y a un écart considérable et c'est à se demander... Je vous dis immédiatement que je

laisse le bénéfice du doute à ceux qui pensent les politiques du ministère des Affaires sociales. Je ne crois pas que cela soit fait dans l'intention de désunir les familles, mais, dans les faits, la réalité, c'est que cela coûte plus cher au gouvernement pour une famille désunie que pour une famille unie. Donc, cela n'encourage pas la famille à demeurer unie.

J'ai poussé un peu plus loin ma comparaison. Si vous prenez la même famille type, dont le père occuperait un emploi au taux à venir du salaire minimum, soit $2.60 l'heure, tel qu'annoncé par le premier ministre dernièrement, qui prendra effet, si je me rappelle bien, le lerjuin prochain, pour45 heures par semaine de travail à $2.60 l'heure, 52 semaines par année, cette famille recevrait un revenu de $6,084. Je voudrais faire ressortir et bien faire comprendre ceci: le revenu familial de l'ouvrier qui, à la sueur de son front, gagne sa vie, de celui qui se lève tous les matins pour aller travailler, se situe entre le revenu d'une famille unie dont la seule source de revenu est le bien-être social et celui de la famille désunie dont la seule source de revenu serait également le bien-être social. Autrement dit, le travailleur, dans de telles circonstances, gagnerait $1,700 de plus par année qu'une famille sur le bien-être social unie, mais$3,300de moins parannéeque ce que le gouvernement a à payer pour une famille désunie.

Je pense que ces chiffres doivent nous porter à la réflexion. C'est ce qui fait, à mon sens, qu'actuellement nous sentons, dans la population, qu'il y a, de la part des travailleurs petits salariés, un peu de frustration. Même je dirais peut-être, dans certains cas — et cela commence à se faire sentir davantage — que certains travailleurs regardent les gens qui sont défavorisés par la société un peu d'un oeil, en voulant dire: Moi qui travaille, moi qui paie des impôts, je paie ma part pourcelui qui est mon voisin et qui n'a pas à se déranger tous les matins.

Ce raisonnement du travailleur, on peut le comprendre. Par contre, un fait demeure toujours: le défavorisé n'est pas responsable de sa situation. Il est pris dans cette situation. Nous devons faire comprendre, même au travailleur qui a un faible revenu — ce ne devrait pas l'être en tout cas — que ce n'est pas à son désavantage que nous permettons au défavorisé de pouvoir vivre le moindrement décemment.

Tout ceci pour vous dire que les politiques du ministère des Affaires sociales, qu'on le veuille ou non, sont, dans les faits, des politiques qui sont susceptibles de générer une lutte des classes, entre les défavorisés de la société et les travailleurs à petits salaires. Or la réalité est la suivante: c'est que je considère, M. le Président, que ces deux types, ces deux catégories de personnes dans notre société sont, à des titres différents peut-être, mais sont quand même deux catégories de victimes dans un système qui permettrait, suivant les capacités physiques, suivant les capacités de la province, qui devrait normalement permettre à tous d'avoir un minimum vital.

Je ne parlerai pas tellement, M. le Président, en termes de revenu minimum garanti. Je pense que nous devons plutôt, en 1975, parler en termes de pouvoir d'achat minimum garanti. Parce qu'un revenu minimum garanti qui serait fixé à un certain montant, aujourd'hui, pourrait, dans notre contexte inflationniste actuel, se retrouver désuet demain matin. C'est pourquoi nous devons plutôt parler en termes de pouvoir d'achat minimum garanti. Si le pouvoir d'achat doit permettre à la famille de nourrir tous les membres de la famille, de les loger décemment, de les vêtir convenablement, ce pouvoir d'achat doit être maintenu de la même façon en permettant, d'une période à une autre, d'acheter l'équivalence, au moins. Quand la livre de beurre passera de $1 à $1.12, qu'on ne soit pas enfargé dans des barèmes et dans des études, mais qu'on permette à celui qui est à la base de l'échelle sociale, qui est en bas, d'acheter le même nombre de livres de beurre, une fois qu'il est augmenté, qu'on pouvait lui permettre d'acheter avant l'augmentation. C'est dans ces termes, M. le Président, je pense, qu'il nous faut entrevoir les solutions.

Bien sûr, je n'ai pas la prétention de croire que le ministre des Affaires sociales va nous apporter tous les correctifs durant les jours qui vont suivre. Pour apporter les solutions qui sont nécessaires, il faut changer tout un système. Mais à l'intérieur du système actuel, qui est très imparfait, il demeure que certains correctifs peuvent être apportés pour éviter au moins le pire, en attendant d'avoir mieux, en attendant d'avoir un système plus complet et qui répondrait plus aux besoins réels de la personne humaine.

Quand je parlais, tantôt, de l'augmentation de 10.4% qui a été annoncée, conformément à l'indice du coût de la vie, pour une période donnée, j'ai oublié de vous dire que si l'on recule quelques années en arrière, ce n'est pas 10.4% c'est 31% à peu près, depuis 1971, l'augmentation du coût de la vie. Même si on avait eu l'équivalence absolue depuis ce temps, en termes d'augmentation, il reste qu'en 1971, nous étions en-deçà du niveau raisonnable des besoins essentiels et du minimum vital.

Cela veut dire que le gouvernement doit se pencher sur l'éventualité d'un système qui garantirait un pouvoir d'achat minimum et basé sur le minimum vital. Nous avons eu, au cours de l'année —j'étais également présent à l'occasion des derniers crédits — certains changements qui ont ramené le test du logement à un certain prix qui n'a pas réglé tout à fait la situation.

Le ministre est sûrement de ceux qui savent que les assistés sociaux, étant dans leur situation, sont ceux qui ont le plus de difficultés à se trouver un logement quand ils en ont besoin parce que, c'est évident, leur niveau de vie, leurs sources de revenus ne sont pas susceptibles d'endosser facilement pour eux les besoins devant ceux qui ont des logements à louer.

A ce chapitre, bien qu'il y ait certains logements à prix modique à certains endroits, il n'y en a pas partout. Il demeure que la location de ces logements à loyer modique se fait sur une base sélective et qu'encore là il y a beaucoup de mécontentement parce qu'on ne peut, évidemment, donner satisfaction à tout le monde et remplir tous les besoins.

Il se trouve que les assistés sociaux sont des

gens qui doivent presque se mettre à genoux pour trouver un logement et, quand ils en trouvent un finalement, ils doivent presque cacher leur situation s'ils veulent obtenir une possibilité de location.

Dans certains bureaux de l'aide sociale au Québec, suivant mes informations, on tente, avec les moyens à la disposition des dirigeants de ces bureaux, de venir en aide à ces gens. Mais, malheureusement, les officiers ne peuvent pas toujours tenir parole parce qu'ils sont pris dans les cadres d'une loi et d'une réglementation. Alors quand un propriétaire — c'est arrivé récemment, j'ai un cas type en main — hésite à louer un logement à quelqu'un qui est sur le bien-être social, lorsqu'il communique avec un bureau et qu'on lui dit: Vas-y, on va te garantir le paiement, le propriétaire utilise cette caution pour engager sa propriété. Deux mois après...

Le Président (M. Pilote): Est-ce que le député de Rouyn-Noranda me permettrait une remarque?

M. Samson: Oui.

Le Président (M. Pilote): Est-ce que vous pourriez attendre...

M. Samson: Non, M. le Président.

Le Président (M. Pilote): ... au programme no 2...

M. Samson: Non.

Le Président (M. Pilote): ...d'aide sociale?

M. Samson: Non.

Le Président (M. Pilote): Deuxièmement, après entente avec le ministre, avec l'Opposition officielle, après entente également avec les commissions qui siègent, on ajournerait nos travaux à vingt-deux heures pour reprendre à dix heures demain matin.

M. Samson: Bien, M. le Président....

Le Président (M. Pilote): Je m'excuse de ne pas vous avoir consulté, vous étiez en train de parler.

M. Samson: ... je comprends que si on m'avait consulté, peut-être qu'on aurait pu s'entendre mieux.

Le Président (Ml. Pilote): Je suis parti à dix heures moins dix minutes pour aller voir aux autres commissions ce qui se passait. A ce moment-là vous parliez. Alors, je n'ai pas voulu vous interrompre pour vous demander votre opinion, c'est pour cela que je ne l'ai pas fait.

M. Samson: M. le Président, m'interrompra à ce moment-là ou m'interrompre à ce moment-ci, cela ne change pas grand-chose.

Le Président (M. Pilote): Je ne savais pas ce qui se passait...

M. Samson: Vous m'avez quand même interrompu.

Le Président (M. Pilote): Oui. Je ne savais pas alors ce qui se passait aux autres...

NI. Samson: Et puisque c'est fait, puisque j'ai beaucoup de respect pour vous et pour les gens que nous avons dérangés ce soir, si on acceptait de me laisser le droit de parole en reprenant les travaux, demain matin, j'accepterais...

Le Président (M. Pilote): Bien sûr.

M. Samson: ...M. le Président, de continuer le brillant exposé dont vous bénéficiez présentement.

Le Président (M. Pilote): La séance ajourne ses travaux à demain, dix heures.

(Fin de la séance à 22 h)

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