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Version finale

31st Legislature, 2nd Session
(March 8, 1977 au December 22, 1977)

Tuesday, December 6, 1977 - Vol. 19 N° 273

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 9 — Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 9

(Dix heures quarante-cinq minutes)

Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission des affaires sociales est réunie pour poursuivre l'audition des mémoires concernant le projet de loi no 9, Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées.

Les membres de la commission sont M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Charron (Saint-Jacques), M. Clair (Drummond), M. Forget (Saint-Laurent), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Gravel (Limoilou), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Lavigne (Beauharnois), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Lazure (Chambly), M. Marois (Laporte) remplacé par M. Gagnon (Champlain), M. Martel (Richelieu), Mme Ouellette (Hull), M. Paquette (Rosemont), M. Saindon (Argenteuil)...

Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi, voulez-vous le remplacer, M. Goldbloom est censé venir.

Le Président (M. Marcoux): M. Saindon (Argenteuil) est remplacé par M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Shaw (Pointe-Claire).

Aujourd'hui, nous entendrons les mémoires de la Ligue des droits de l'homme, de la Fédération provinciale des associations de parents pour l'aide à l'inadapté Inc., L'Institut national canadien pour les aveugles, le Mouvement sur les chiens-guides, M. Mario Bolduc, le Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec, et M. Gilles Lag range.

Simplement pour une vérification, les représentants de la Ligue des droits de l'homme sont-ils arrivés? Non. Alors, j'inviterais la Fédération provinciale des associations de parents pour l'aide à l'inadapté Inc., à s'approcher, pour nous présenter son mémoire. Vous êtes monsieur?

Fédération provinciale des associations de parents pour l'aide à l'inadapté Inc.

M. Lamontagne (Laurent): Laurent Lamontagne, président de la fédération.

Le Président (M. Marcoux): M. Lamontagne, je vous souhaite la bienvenue. Vous avez une vingtaine de minutes pour soit lire, soit résumer ou synthétiser votre mémoire. Ensuite, le dialogue s'engagera avec les membres de la commission.

M. Lamontagne (Laurent): M. le Président, M. le ministre Lazure, MM. et Mme les députés, je remercie la commission de nous avoir invités à participer à la présentation de notre mémoire.

Ce matin, à cause du temps, et étant donné que notre fédération groupe un nombre assez grand d'associations dans toute la province, je re- grette que nous n'ayons pu avoir tellement de personnes.

J'ai ici Mme Desmeules, de Villa des Lys, Aima, et M. Roch Gadreau, de l'Association de la paralysie cérébrale du Québec, ainsi que mon épouse, qui représente l'Association des parents de l'Institut Monseigneur-Guay, de Lauzon.

Le Président (M. Marcoux): Vous pouvez les inviter à vous accompagner à la table, s'ils veulent répondre aux questions avec vous tantôt, et dialoguer, ils peuvent le faire.

M. Lamontagne (Laurent): La fédération existe depuis environ six à sept ans, par la fondation d'un groupement de parents qui est devenue une fédération, avec aujourd'hui une charte. Le siège social est situé à 6, rue Lahaie, Cap-de-la-Madeleine.

Le fondateur est M. Raymond Harnois, qui est décédé l'été dernier. Malheureusement, il n'a pu venir participer à tout le travail qu'il avait mis sur pied depuis nombre d'années. La fédération groupe présentement quatorze associations, dispersées dans toute la province. Les associations sont formées de parents de handicapés de toute catégorie. Ces parents viennent de toutes les couches de la société.

Les buts de la fédération sont de grouper, informer et orienter les associations de parents, pour le bien-être du handicapé, de favoriser la réalisation de leurs objectifs communs, d'étudier les problèmes d'éducation, de santé, de loisir, de bien-être social qui se posent sur le plan officiel, familial, et faire à ce sujet les recherches nécessaires pour connaître ces problèmes et apporter les éléments de solution; éveiller l'opinion publique et renseigner les organismes intéressés sur les besoins de l'inadapté dans la société; imprimer, éditer et distribuer toute publication pour les fins ci-dessus mentionnées; établir et maintenir les services de consultation et de renseignement; travailler et collaborer avec les organismes publics, gouvernementaux et privés, dans la réalisation de ces buts.

Il y a quelques années, M. le ministre Denis Lazure faisait une citation qui est dans le présent mémoire: "Dans une société idéale, une loi pour assurer les droits des personnes handicapées serait parfaitement inutile, inacceptable même, mais avec notre société, telle qu'elle est aujourd'hui, nous y sommes obligés."

M. René Lévesque, premier ministre disait: "On juge une société civilisée à partir de la façon dont elle traite ses minorités. Les personnes âgées, les handicapés sont des minorités".

Le présent projet de loi est attendu et espéré depuis longtemps par tous les organismes intéressés au bien-être de l'inadapté. Ce projet de loi est une nécessité parce que nous n'avons pas la société idéale, nous le savons.

Cependant, cette loi doit être complète et

couvrir tous les handicapés, ce qui ne semble pas être le cas. Cette loi ne doit pas non plus alourdir la structure de services actuellement existants, comme elle devrait favoriser l'addition des ressources qui manquent.

Nous avions présenté un mémoire lors de la présentation du projet de loi 55, plusieurs articles ont été modifiés dans le sens de nos revendications, tel le titre; par contre, nous croyons que certains articles devraient être modifiés et d'autres ajoutés.

Les lacunes. -Le ministère a toujours insisté sur la participation des parents... or, dans le présent projet de loi, il n'est nulle part fait mention de la famille de la personne handicapée... le mot "parent" n'y apparaît même pas! -La représentation des personnes handicapées au conseil d'administration de la régie est insuffisante. -L'actuel projet de loi ne semble être qu'un catalogue des personnes handicapées... récupérables!

Les handicapés lourds, ceux qui en ont le plus besoin, sont oubliés...

Par contre, le livre blanc admet leur existence! -L'article qui concerne les subventions ne parle pas des associations de parents, et rien ne garantit qu'une fédération provinciale d'associations de parents pour l'aide à l'inadapté telle que la nôtre ait des chances d'être subventionnée par la régie... -... les municipalités ne pourront refuser un permis d'utilisation d'un local d'habitation par une famille d'accueil ou un foyer de groupe... C'est ce que dit le livre blanc; le projet de loi n'en parle pas! -Rien non plus pour forcer les municipalités à assumer leurs responsabilités en fournissant les installations en loisir pour la personne handicapée.

Les remarques. Ce projet de loi no 9, comme le no 55, a été présenté avant les vacances estivales en première lecture; donc, à une période très défavorable aux réunions pour une fédération d'associations de parents pour l'aide à l'inadapté sans ressources comme la nôtre; ajoutez à cela le facteur éloignement, nos associations couvrent la province.

Nos recommandations: -Que soient décrits dans le texte de loi les droits de la famille et/ou des parents de la personne handicapée. -Qu'au conseil d'administration de la régie, siègent un minimum de six personnes handicapées ou leurs représentants. -Que soient décrits dans le texte de loi les droits des handicapés lourds et ceux des handicapés inaptes au travail. -Que soit clarifié dans le texte de loi le genre d'organismes de promotion admissibles aux subventions accordées par l'office. -Qu'il soit écrit dans le texte de loi 9 que les municipalités ne pourront refuser d'émettre un permis d'utilisation d'un local d'habitation par une famille d'accueil ou un foyer de groupe. - Que soit inscrite dans la loi la responsabilité des municipalités de fournir des installations en loisir pour la personne handicapée.

Nous vous présentons ce mémoire soulignant les lacunes décelées ainsi que certaines recommandations.

Nous désirons vivement nous faire entendre à la commission parlementaire pour pouvoir élaborer le point de vue des parents des handicapés.

Je vous remercie.

Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie. M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, je veux remercier la Fédération provinciale des associations de parents pour l'aide à l'inadapté, et en particulier, son président, M. Lamontagne, pour avoir préparé ce mémoire qui est un résumé, en réalité, des réactions de cette fédération au projet de loi. La fédération est un organisme relativement jeune, qui a des moyens modestes et qui est animée principalement par des bénévoles, par des parents. Je pense qu'il faut reconnaître le travail que fait la fédération.

Quelques remarques, M. le Président. Si je me réfère à la page 5 des recommandations du groupement qui est devant nous, il est exact de dire que le projet de loi non seulement ne parle pas des parents ou de la famille de la personne handicapée, mais ne parle pas non plus de ce qu'on peut appeler le représentant légal de la personne handicapée. C'est une lacune dans le projet de loi actuel et on a déjà indiqué qu'on allait remédier à cette lacune.

Quant au nombre de membres du conseil d'administration, j'ai aussi annoncé la semaine dernière que nous envisagions la probabilité d'augmenter le nombre de membres du conseil.

Cela me paraîtrait un chiffre assez raisonnable, à première vue, six personnes handicapées ou leurs représentants. Dans le cas des handicapés lourds dont vous parlez, aussi bien qu'inaptes au travail, ma réaction à cela, c'est encore une fois, quand on dit "personnes handicapées" dans le projet de loi, qu'il s'agit vraiment de toutes les personnes handicapées, d'abord quant à l'âge, de la naissance à la mort, même si on ne l'a pas spécifié avec le terme "enfant", et je pense qu'il faudra le spécifier pour que ce soit clair une fois pour toutes. De la même façon pour les catégories de handicapés, on n'a pas voulu commencer à spécifier les catégories, mais il est bien évident que ce sont toutes les catégories de handicapés. Etant donné que plusieurs groupements nous ont fait valoir que le projet semblait oublier les handicapés lourds, même si ce n'est pas notre intention, peut-être faudrait-il nommer de façon précise ces groupes de handicapés qui sont inaptes au travail. Il est sûr que le projet de loi, surtout dans sa première version — le bill 55 — était principalement axé sur l'intégration au monde du travail. Nous avons voulu l'élargir et il est évident que la future loi devra s'appliquer autant à ceux qui sont inaptes au travail qu'à ceux qui sont aptes. Les familles d'accueil ou foyers de groupe font allu-

sion à des problèmes qui sont survenus dans certaines municipalités, comme Pointe-aux-Trembles, en particulier. Je vous fais remarquer que ce problème est réglé, quant à nous, avec l'adoption du projet de loi no 10, qui apporte des amendements au chapitre 48 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Depuis l'adoption du projet de loi no 10, une municipalité ne peut plus maintenant refuser un foyer de groupe ou une famille d'accueil pour la seule raison que c'est un foyer de groupe ou une famille d'accueil.

Enfin, quant aux loisirs et aux municipalités, vous demandez que les municipalités prennent plus leurs responsabilités en matière de loisirs auprès de personnes handicapées. On est d'accord avec vous là-dessus. Avec l'orientation qui a été indiquée le premier jour, à savoir qu'au lieu de fournir des garanties de non-discrimination à la personne handicapée par notre texte de loi et d'utiliser plutôt la Charte des droits et libertés de la personne, il me semble qu'une municipalité qui voudrait faire de la discrimination à l'endroit des personnes handicapées dans le domaine des loisirs serait susceptible d'avoir à répondre de ses actes devant la Commission des droits de la personne. Cela nous paraît le biais par lequel on pourrait garantir la non-discrimination, légalement parlant. Il reste que, psychologiquement parlant, il faudra encore beaucoup d'efforts de la part du ministère des Affaires municipales, autant que du Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports, de notre ministère et des groupements comme le vôtre, il restera encore beaucoup de travail à faire auprès des municipalités. Je cite, de temps à autre, l'exemple de deux municipalités de la région de Montréal qui sont des modèles pour l'intégration des personnes handicapées: les villes d'Anjou et de Saint-Léonard. Ces municipalités ont fait un travail fantastique depuis quatre ou cinq ans et on peut dire que presque tous les handicapés sur leurs territoires sont intégrés dans les loisirs de ces deux municipalités. Ces deux municipalités ont démontré qu'il était possible de le faire, sans pénaliser la population dans son ensemble.

Une dernière remarque, M. le Président. L'occasion m'est donnée, puisqu'on parle de loisirs dans ce mémoire, de rapporter à cette commission pour les fins du journal des Débats — je peux faire circuler l'information — que les budgets, pour l'année 1977/78 au Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports, ont été augmentés de façon sensible pour les personnes handicapées. En 1976/77, le montant total était de $165 000 et, en 1977/78, il est de $1 083 000. Sur la feuille que je peux faire circuler, on identifie les groupements de loisirs et de sports pour les handicapés qui ont bénéficié de ces subventions. Merci.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous avez des commentaires ou des questions à la suite des propos du ministre?

M. Lamontagne (Laurent): Non. Il y a des choses auxquelles j'aurais aimé mieux répondre étant donné que, dans mon groupe où on a préparé le mémoire, il y aurait peut-être des revendications à faire que je ne connais pas. Je regrette le temps qu'il fait ce matin. Quant à l'avis de présentation de notre mémoire ce matin, je ne l'ai appris qu'hier soir à quatre heures. D'une manière ou d'une autre, je ne sais pas... Vous, madame, est-ce que vous avez quelque chose à dire à ce sujet?

Mme Desmeules (Jacqueline): Je n'ai même pas travaillé au mémoire. J'en ai pris connaissance aussi en même temps.

M. Lamontagne (Laurent): On n'a pas eu tellement de préparation. Peut-être que, à partir de certaines questions des députés de l'Opposition, on pourrait répondre au mieux de notre connaissance.

Le Président (M. Marcoux): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je veux également remercier la Fédération provinciale des associations de parents pour l'aide à l'inadapté. Je pense qu'on a souligné, lors de la présentation de certains mémoires, le rôle que les parents et différents organismes bénévoles ont joué justement dans la promotion et le développement des services aux personnes handicapées.

J'aurais une question relative à votre première recommandation et à cette déception que vous avez de ne pas retrouver dans le texte de loi les droits de la famille ou des parents. Est-ce que vous pourriez préciser un petit peu plus de quelle façon vous auriez aimé le voir dans le projet de loi? Ou est-ce que c'est vraiment votre désir? Ou avez-vous voulu signaler les carences qui existent dans les services qui sont mis à la disposition des parents pour répondre à leurs besoins lorsqu'ils assument la garde, le soin, l'éducation et toutes les phases du développement d'un enfant handicapé?

M. Lamontagne (Laurent): Concernant le milieu familial, nous voyons dans certaines institutions existantes qu'il y a plusieurs handicaps parmi les enfants qui, surtout si on prend les jeunes, ont un handicap physique, un handicap mental, il y a même le handicap familial. Il y a une catégorie d'enfants qui sont tous groupés sous un même toit; aujourd'hui on parle d'intégration, on est d'accord. Personnellement, je suis père de deux enfants atteints de paralysie cérébrale, dont un qui est encore en institution, et on projette de l'en sortir prochainement, parce qu'on se dit qu'il doit y avoir possibilité de l'intégrer.

Maintenant, concernant les parents ou la personne handicapée, on trouve qu'ils ne figurent peut-être pas assez à certains conseils d'administration d'associations et ces choses-là. Aujourd'hui, on travaille dans ce but aussi, afin que ce ne soit pas toujours des gens prétendument normaux qui travaillent pour eux, car on veut les intégrer pour travailler avec nous. Que les parents travaillent bénévolement, je pense que cela n'est

pas une mauvaise chose, puisqu'il y a du bénévolat, mais, financièrement, on n'a pas toujours la possibilité de gérer une fédération comme une association. Quand vous vous déplacez dans toute la province, au nom de la fédération; comme président ou représentant de la fédération, c'est de l'argent pris à même vos propres deniers ce n'est pas l'argent d'une association ou d'une fédération, parce que les montants à exiger sous forme de cotisation, pour arriver, seraient trop énormes. Il y a des associations qui n'ont même aucune finance possible. Malgré tout, on a réussi à mettre sur pied deux nouvelles associations en moins de deux ans, une à la Tuque et l'autre dans la région de Chicoutimi. Le travail a été très bien fait, mais a toujours exigé beaucoup de peine et de labeur de la part des parents bénévoles. On aimerait que le mérite de ces personnes soit davantage reconnu.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que votre question est pertinente parce que j'ai ouï dire et j'aimerais que le ministre le confirme ou l'infirme, que certaines associations pour handicapés se voient refuser, par exemple, leur incorporation sous prétexte qu'il y a une autre association qui rend des services analogues. J'aimerais que le ministre tente de nous définir ici, du moins dans les grandes lignes, si un tel problème existe ou quelles balises il propose pour déterminer les organismes qui pourront justement se prévaloir des subventions que l'office accordera.

M. Lazure: M. le Président, c'est nouveau pour moi, ce que Mme le député de L'Acadie présente comme question, à savoir: Que certains organismes bénévoles représentant des handicapés verraient leur charte refusée. Je vais regarder, on ne m'en a jamais parlé.

Mme Lavoie-Roux: Je vous en apporterai un, un cas précis.

M. Lazure: Au ministère, devant une demande précise, on ne m'a jamais dit: Bon, est-ce qu'on refuse ou si on accepte? Quant à moi, les handicapés ne seront jamais trop représentés. Ce n'est pas une objection, parce qu'il y a déjà un groupement, si un deuxième groupement veut avoir des programmes semblables ou complémentaires, je ne vois pas d'objection. Je pourrai déposer, cet après-midi ou ce soir, la liste des organismes bénévoles représentant des groupements de handicapés que nous subventionnons chaque année. Il y a quand même une liste assez impressionnante. Mais je vais demander aux fonctionnaires de vérifier cette affirmation que vous faites.

Mme Lavoie-Roux: Maintenant, dans votre esprit, est-ce que vous avez certaines balises ou certains critères auxquels vous vous référez quand vous parlez des organismes qui seront éligibles aux subventions?

M. Lazure: Les critères quant aux sommes annuelles qu'ils pourront toucher?

Mme Lavoie-Roux: Non-, bien, les sommes, évidemment, cela pourrait dépendre des budgets mais est-ce qu'il y aura des critères d'exclusion de ces organismes? Il semble aue ce soit vraiment un problème et je réalise que, dans des communautés plus petites où on peut faire appel à moins de gens pour les souscriptions et ces choses-là, le problème de financement de ces organismes est quand même très difficile.

M. Lazure: Non. Moi, à première vue, je ne peux pas concevoir de critères d'exclusion pour des groupements qui feraient une demande pour obtenir une reconnaissance. On parlait beaucoup la semaine dernière d'éducation populaire qu'il reste à faire pour changer les attitudes de la population. Je pense que plus on aura de groupements qui agiront au nom des personnes handicapées, mieux ce sera et plus vite on opérera des changements de mentalité. Alors, à première vue, s'il y a des critères, ce sera des critères très ouverts de façon qu'on ait le plus grand nombre possible de groupements.

Mme Lavoie-Roux: A votre point de vue, il ne devrait pas y avoir de critères d'exclusion, sauf si c'était pour des fins malhonnêtes ou autres choses?

M. Lazure: Exactement, c'est ma position.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le ministre. Je vous remercie, M....

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: Merci, M. le Président. Je voudrais, premièrement, remercier l'association pour son mémoire. J'ai quelques petites questions: Vous avez dit que vous voyez qu'il y a un besoin démontré pour un projet de loi de cette sorte. Pour quelles raisons jugez-vous que nous avons un besoin d'un office des handicapés?

M. Lamontagne (Laurent): Présentement, il n'y a rien ou pas tellement. Maintenant, je pense que même si on n'est pas d'accord sur le projet de loi en entier, le fait d'en avoir un, c'est beaucoup. Le modifier plus tard, c'est encore une bonne chose. Si on ne commence pas avec quelque chose, on ne commencera jamais avec rien. C'est pour cela que le projet de loi, nous autres, on ne dit pas qu'on est d'accord sur tous les points. On fait nos recommandations, on a vu des lacunes. On l'a passé plus ou moins au peigne fin avec les délais que nous avions et le bénévolat. Il y a certaines choses qu'on reconnaît et on trouve que c'est bon qu'elles y soient.

Mme Desmeules (Jacqueline): Je pourrais peut-être ajouter quelque chose. A propos de l'office, ce que je vois de bien important, c'est que les handicapés qui demandent des services ont affaire à plusieurs ministères, soit les Affaires sociales, la

Main-d'Oeuvre, le Travail, l'Education. D'un ministère à l'autre, ce qui se passait antérieurement en tout cas, c'est qu'on se lance la balle. Un handicapé va demander un service, on l'envoie au ministère des Affaires sociales qui dit que cela ne relève pas de son domaine, que cela relève du ministère du Travail. Finalement, il n'y a pas de décision de prise. Je vois l'office comme quelque chose qui va faire la balance entre les ministères et là, les décisions seront prises.

M. Shaw: Vous avez maintenant une association structurée, c'est évident. Avez-vous des subventions du gouvernement pour votre association?

M. Lamontagne (Laurent): Non.

M. Shaw: Aucune. Vous avez une charte?

M. Lamontagne (Laurent): Oui.

M. Shaw: Etablie. Est-ce que vous vous êtes déjà lamentés pour obtenir des subventions pour vous aider à...

M. Lamontagne (Laurent): Oui, premièrement ce n'est pas une association, c'est une fédération qui groupe des associations. Les associations nouvelles n'ont pas de bureau au niveau provincial, ne peuvent pas se dépanner elles-mêmes, mais dû au fait qu'elles sont regroupées, la fédération les aide beaucoup. Nous n'avons aucun montant d'argent du gouvernement, défrayant les dépenses tous les ans, mais on a fait la demande. Cela doit faire trois ans qu'on renouvelle la demande, que c'est remis et remis.

M. Shaw: Et vous êtes plus près du problème que n'importe quel ministère?

M. Lamontagne (Laurent): Oui.

M. Shaw: Est-ce que vous êtes craintif qu'avec un office qui, peut-être, peut surveiller, peut même vous déloger de la place que vous vous occupez maintenant?

M. Lamontagne (Laurent): On n'est pas tellement craintif. C'est entendu qu'il y a toujours des craintes pour ce qui arrive après coup. Mais nous autres, notre rêve à la fédération a toujours été d'avoir une banque d'information pour toutes sortes de handicaps ou d'associations, au moins pour savoir où aller, pour ne pas faire ce que madame a dit tout à l'heure, qu'on se lance la balle, mais après un certain délai, on aboutit avec rien. Tandis que l'information qu'on voulait donner, on va en avoir une bonne partie, en tout cas, au niveau de l'office.

M. Shaw: Alors, vous voyez ou vous prévoyez que l'office peut vous aider...

M. Lamontagne (Laurent): Je le crois.

M. Shaw: ... s'il y a un lien entre vous et l'office...

M. Lamontagne (Laurent): Oui.

M. Shaw: ... pour conserver votre fonction dans le domaine des services pour les handicapés.

M. Lamontagne (Laurent): Oui, parce que le service que la fédération donne, je ne crois pas que l'office le donne. Il va peut-être le compléter, mais il ne donnera pas tous les services que nous, les fédérations, pouvons donner.

M. Shaw: Alors, est-ce que vous avez demandé d'être représenté au sein de la direction de l'office lui-même?

M. Lamontagne (Laurent): Oui.

M. Shaw: C'est cela que vous avez dit, que vous verriez soit six handicapés ou six représentants; c'est dans ce domaine que vous...

M. Lamontagne (Laurent): C'est dans ce domaine-là.

M. Shaw: Merci.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui... M. le député de d'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, j'ai un commentaire et une question. Je voudrais d'abord me joindre aux autres membres de la commission pour remercier M. Lamontagne et ses collègues pour ce mémoire. C'est évidemment un travail de conscientisation qui se fait ici à la commission parlementaire depuis le début. Le fait pour des gouvernements, parce qu'il y en a eu plus d'un qui ont mis la main à la pâte, d'avoir voulu présenter un tel projet de loi, c'est déjà une preuve d'une sensibilité constructive. Que vous arriviez maintenant pour souligner des lacunes, c'est normal et essentiel qu'il en soit ainsi.

Il est aussi évident que, si votre fédération existe, si elle regroupe de nombreux organismes, et vous en fournissez la liste dans votre mémoire, c'est qu'il y a un besoin et que ce besoin est vivement senti par les familles éprouvées, par les parents concernés.

Quand un enfant est jeune, il a toujours besoin de la constellation familiale autour de lui, mais avec l'âge, il peut espérer aspirer à l'autonomie, mais pour la personne handicapée, cette autonomie est difficile à réussir. Donc, c'est avec justesse que vous soulignez le rôle de la famille autour de la personne handicapée, et le ministre, tout à l'heure, a ajouté à cela le facteur nécessaire de responsabilité légale qui incomberait, dans certaines circonstances et à certains moments, à d'autres personnes.

Tout cela m'amène à ma question; vous lui

avez répondu peut-être dans une certaine mesure mais si vous pouviez expliciter davantage votre pensée, je pense que notre lanterne serait éclairée d'autant. Votre toute première recommandation, à la page 5, c'est que soient décrits, dans le texte de loi, les droits de la famille ou des parents de la personne handicapée. C'est une recommandation générale. Si vous pouviez préciser davantage quels sont ces droits dans votre esprit, qu'est-ce que vous aimeriez que la loi fasse pour les familles? Dans la loi, il y a des choses qui sont prévues pour la personne handicapée; vous dites, avec justesse: II faut penser à cette constellation qui entoure la personne. Mais quels seraient les droits que vous aimeriez voir inscrits dans la loi à l'égard des familles et des parents en général?

Mme Lamontagne: Je voulais justement parler de ce sujet. Je voudrais que la loi favorise l'intégration des enfants dans la famille. Je ne sais pas de quelle façon vous pourriez procéder, je ne connais pas beaucoup les moyens techniques. Je veux dire par là qu'il y a parfois des contradictions dans les gouvernements, pas seulement les ministères. Je vous donne un exemple: depuis quelques années, on préconise l'intégration, et cela de plus en plus. Dans le livre vert du ministère de l'Education, il y a un point qui a été souligné à savoir que des enfants qui ne répondraient pas aux normes des écoles, qui ne s'adapteraient pas aux lois et règlements de l'école seraient intégrés dans des institutions. Il y a marche arrière, il y a une contradiction flagrante. D'un côté, on préconise l'intégration et, d'un autre côté, on défavorise l'intégration, on veut revenir aux institutions, on revient en arrière. Alors nous, les parents, nous nous demandons de quel côté le gouvernement penche. On a l'impression de revenir en arrière. Nous, les parents, nous cherchons naturellement à garder nos enfants à la maison le plus possible. Quand on fait le placement, c'est parce qu'on n'a pas le choix, on n'a pas les services. Un exemple frappant: on a un enfant en institution depuis huit ans et on s'aperçoit que les services sont plus nombreux. Alors, on songe sérieusement à le ramener à la maison, mais en ayant les services. On ne peut pas ramener un enfant à la maison et qu'il ne fasse rien. C'est dans ce sens que je me demande dans quelle direction le gouvernement va. Est-ce l'intégration ou non?

M. Lazure: M. le Président, rapidement, ce n'est pas l'un ou l'autre. C'est, dans le plus grand nombre de cas possible, l'intégration. Dans le cas d'enfants ou d'adolescents qui ont été en institution, c'est la réintégration. Il va toujours rester un certain nombre d'enfants, d'adolescents ou d'adultes handicapés, soit physiquement ou mentalement, qui sont tellement dépendants, qui sont tellement dépourvus de capacités, qu'ils devront demeurer dans des milieux protégés qu'on appelle des institutions. Cela ne veut pas dire qu'on ne doit pas continuer à travailler à améliorer les institutions, mais, encore une fois, idéalement, comme on ne devrait pas avoir besoin de loi, idéalement aussi la société ne devrait pas avoir besoin d'insti- tutions, mais surtout avec le genre de vie urbaine qu'on connaît en 1977, je pense bien qu'il y aura toujours un certain nombre d'individus qui devront être gardés dans des établissements.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission? M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Juste un petit mot, M. le Président, pour remercier et féliciter la Fédération provinciale des associations de parents pour l'aide à l'handicapé pour le travail qu'elle fait. Je suis peut-être un petit peu plus au courant puisque cette fédération a son siège social au Cap-de-la-Madeleine, dans mon comté. Entre autre, mesdames Harnois et Aubuchon, en ce qui concerne le travail pour l'intégration des personnes handicapées dans la société — c'est le point que je voulais souligner — font un travail assez extraordinaire; je voudrais les féliciter très chaleureusement et leur offrir mon aide dans la mesure du possible.

Le Président (M. Marcoux): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais simplement réagir à la remarque de madame Lamontagne, tout à l'heure, quant au livre vert.

C'est peut-être une bonne occasion de souligner au ministre des Affaires sociales que beaucoup s'inquiètent du fait que, dans le livre vert, il n'est nullement question des enfants inadaptés, et dans une société où on veut justement favoriser de plus en plus l'intégration particulièrement des enfants au système scolaire régulier, ceci ne manque pas de surprendre. Evidemment, la réplique du ministre de l'Education a été rapide. Elle a été: On en aura un autre dans quinze mois sur l'enfance inadaptée. Mais je pense que le fait que, justement, on ait divisé les deux groupes d'enfants, alors qu'on veut une approche globale d'un système d'éducation à l'élémentaire et au secondaire, c'est une indication, ou c'est un symptôme qui ne manque pas d'inquiéter beaucoup de gens, tant les parents que les éducateurs en général. Je pense que c'est bon que vous le souligniez, parce que... Evidemment, le ministre des Affaires sociales a beaucoup de boulot et le ministre de l'Education aussi, mais cela m'apparaît très important que cet aspect soit examiné de près par le gouvernement.

M. Lazure: M. le Président, rapidement, Mme le député de L'Acadie a tout à fait raison, et, malgré son boulot, le ministre des Affaires sociales a écrit au ministre de l'Education, dès les premiers jours, après que j'ai eu lu le livre vert et, moi aussi, cela m'a étonné et cela m'a déçu qu'on ait laissé de côté l'enfance inadaptée.

La réponse du ministère de l'Education est qu'il y a un an et demi, deux ans, le gouvernement avait mis sur pied un comité interministériel, qui a publié, d'ailleurs un rapport dont j'ai pris connaissance, un rapport en deux tomes, le rapport Copex, sur l'enfance exceptionnelle, sur l'enfance

inadaptée. Mais cela me paraît une demi-raison. En dépit de rapports spécialisés comme ceux-là, je pense qu'il était essentiel et nécessaire d'inclure toute la population scolaire handicapée dans le rapport fondamental, le rapport régulier sur l'enseignement élémentaire et secondaire. Je partage votre inquiétude, Mme le député.

Mme Lavoie-Roux: D'autant plus que le rapport Copex a été publié immédiatement après l'arrivée du gouvernement actuel au pouvoir et devait être sous presse au moment de l'élection précédente. En fait, c'est avant... Et on aurait pu tenter au moins d'en faire une certaine intégration. Si vous êtes d'accord, ça va.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous avez d'autres commentaires à ajouter?

Nous vous remercions de votre participation aux travaux de cette commission.

J'inviterais maintenant l'institut national canadien pour les aveugles à venir nous présenter son mémoire. Vous pouvez peut-être vous placer davantage au centre pour que tous les membres de la commission vous voient.

Institut national canadien pour les aveugles

M. L'Ecuyer (Bernard): M. le Président, M. le ministre Denis Lazure, honorables membres de cette commission...

Le Président (M. Marcoux): Voulez-vous d'abord vous présenter et présenter vos collègues?

M. L'Ecuyer: Effectivement. Permettez-moi de me présenter, le directeur général, Bernard L'Ecuyer, mes collègues, Micheline Taillon et Michel Cyr.

L'Institut national canadien pour les aveugles est au service de la population aveugle et handicapée visuelle du Québec depuis 1931. A titre d'exemple, j'aimerais signaler qu'en 1976, 7370 aveugles du Québec étaient inscrits à nos registres et que l'organisme a rendu plus de 8000 services à 3046 d'entre eux. C'est, en peu de mots, exprimer l'utilité sociale d'un organisme comme l'INCA.

Nous avons présenté à la commission parlementaire un mémoire sur le projet de loi no 9. Nous avons réagi de façon positive, tout en proposant des amendements que nous considérons nécessaires à l'intégration sociale du handicapé visuel.

Depuis sa fondation jusqu'à maintenant, l'INCA a mis sur pied des cliniques de dépistage préscolaires et scolaires, ainsi qu'une clinique de diagnostic, la Clinique ophtalmologique mobile.

Il a ainsi préparé la voie à la prise en charge de ces services par divers organismes du réseau des Affaires sociales. L'INCA a été le pionnier dans le domaine des services sociaux aux handicapés visuels et dans celui de l'adaptation à la cécité. Ces services sont maintenant intégrés aux établissements publics. Par ailleurs, notre rôle de prévention et de service n'en est pas pour autant terminé, car chez les handicapés visuels, de nombreux besoins existent encore auxquels aucun autre organisme ne répond. La population aveugle de plus de 18 ans doit encore s'adresser à l'INCA pour les services de la canne blanche, du chien-guide, des aides optiques, du livre parlé, de la transcription de musique en braille et de l'emploi. Soulignons aussi les besoins non satisfaits des populations multihandicapées tels que les aveugles sourds, les aveugles déficients mentaux.

L'INCA se doit donc de demeurer fidèle à sa vocation et de s'assurer que les handicapés visuels du Québec continuent de recevoir les services auxquels ils ont droit.

Permettez-nous d'ajouter quelques commentaires au mémoire que nous avons présenté. Nous recommandons d'ajouter, à l'article 1.2, chapitre 1 du livre blanc, concernant la définition du handicapé visuel, ce qui suit: A l'intérieur de cette définition, nous retrouvons deux sous-groupes. Premièrement, les aveugles, tels que reconnus généralement à travers l'Amérique du Nord — et nous citons — "Une personne est considérée comme aveugle, lorsque son acuité visuelle, dans les deux yeux, après correction par usage de lentilles ré-fractives appropriées, est d'au plus 20/200 (6/60), d'après l'échelle Snellen ou l'équivalent, ou si le champ de vision, dans chaque oeil, est d'un diamètre inférieur à 20 degrés. Le diamètre du champ de vision doit être déterminé au moyen: a) d'un écran tangentiel, à la distance d'un mètre, avec index blanc de 10 millimètres, ou: b) d'un périmètre à la distance d'un tiers de mètre, avec l'index blanc de trois millimètres. Deuxièmement, l'autre classe réunit les handicapés visuels dont l'acuité visuelle se situe entre 20/700 et 20/200 et où le champ visuel est compris entre 20 et 60 degrés." Cette clarification a pour but d'apporter les bénéfices suivants aux aveugles: Canne blanche, chien-guide, exemption d'impôt, avantages accordés par l'Association des voituriers et par les compagnies de téléphone, exonération des frais de douanes, pour tout équipement adapté aux besoins des aveugles.

A l'article 4, du chapitre 2, du projet de loi no 9, nous appuyons la recommandation de l'Association de la paralysie cérébrale du Québec Inc. qui ce lit comme suit: "En ce qui concerne le symbole prescrit par règlement, nous invitons le législateur à en choisir un dont la signification ne sera connue que par les services d'incendie, pour ne pas identifier inutilement le logement de la personne handicapée pour toute la population, et nous suggérons, de plus, qu'un comité de recherche soit formé dans le but de trouver le symbole le plus anonyme possible".

A l'article 33c, du chapitre 3, section II, nous voulons préciser que certaines écoles d'entraînement, pour les chiens-guides, aux Etats-Unis, devraient être reconnues par la législation québécoise, ces écoles possédant déjà, depuis plusieurs années, la compétence voulue dans ce domaine.

Au chapitre 4, article 55, section I et article 66, section II. la commission des affaires sociales

nous semble quelque peu inaccessible pour les personnes lésées dans leurs droits en raison de la complexité des procédures. Nous suggérons donc que les organismes accrédités servent de représentants légaux auprès de ladite commission.

Au chapitre 4, article 70, section III, nous recommandons, tel que le mémoire de l'Association de paralysie cérébrale du Québec Inc. le stipule, que les travailleurs handicapés, hors des ateliers protégés, soient rémunérés au même titre que tous les autres employés. Il nous apparaît que cette ligne de conduite favorisera l'indépendance, la revalorisation et l'intégration de l'individu handicapé.

Au chapitre IV, article 74, section IV, après avoir pris connaissance de l'exposé du ministre des Affaires sociales à l'ouverture de la présente commission parlementaire, nous préférons l'idée d'incitation à celle d'obligation dans le plan d'embauche demandé. Les cas doivent être orientés en fonction des aveugles, de façon à desservir le plus de handicapés visuels possible. Si cette procédure n'est pas respectée, l'employeur peut facilement favoriser l'embauche d'un handicapé visuel au détriment d'un aveugle qui, à compétence égale, peut effectuer le même travail. A cet effet, nous suggérons que les psychologues industriels se penchent sur les possibilités inexploitées d'emplois et, s'il y a lieu, de faire les représentations nécessaires auprès des syndicats concernés.

En conclusion, pour éviter toute discrimination, la recommandation faite dans le manifeste du front commun de la Ligue des droits de l'homme, mentionne à la page 5, paragraphe 5, ce qui suit: Que les droits et libertés des personnes handicapées soient reconnus et garantis par la Charte des droits et libertés de la personne en interdisant toute forme de discrimination fondée sur la déficience des aptitudes physiques et/ou mentales ou l'utilisation d'une prothèse, orthèse ou autre chose destinée à compenser à un handicap, et que cela devrait être inséré à la Charte des droits et libertés de la personne. Nous ambitionnons que les mêmes droits soient attribués à tous les citoyens, handicapés ou non. Merci.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, je veux féliciter l'Institut national canadien pour les aveugles et les responsables de la division du Québec pour le mémoire qu'ils nous présentent aujourd'hui. Je note avec une certaine satisfaction, à la dernière page de votre rapport, à peu près au milieu, ce qui suit: "La loi no 9, après amendement, nous semble être un excellent exemple de législation propre à protéger les droits des individus". Si les gens de la Ligue des droits de l'homme finissent par arriver, on verra peut-être qu'il y a des divergences d'opinions là-dessus, mais cela fait quand même plaisir de voir qu'un groupe de handicapés et non pas des représentants de handicapés, fort important, les aveugles, considère que c'est un projet de loi qui est valable. Je le dis en passant, M. le Président, parce que c'est un son de cloche dont les media, depuis quelques mois, n'ont pas tellement fait part à la population.

Je crois qu'il y a, dans le mémoire que nous présente l'Institut aujourd'hui, des recommandations fort pertinentes pour améliorer notre projet. Je vais en toucher quelques-unes.

A la page 2 de votre mémoire, en ce qui concerne la définition que vous proposez, nous avons délibérément voulu nous abstenir de définir les handicaps, en tout cas dans la loi. Peut-être faudra-t-il, dans les règlements de la loi, en définir un certain nombre. Peut-être cela sera-t-il utile, mais il est toujours dangereux de commencer à définir. Vous savez, l'ancien projet, le projet 55, par exemple, établissait des critères, des pourcentages d'incapacité qui faisaient qu'un handicapé pouvait être reconnu comme un handicapé pour l'office. De mémoire, je pense que c'était 30% dans le cas des handicapés physiques et 40% dans le cas des handicapés mentaux ou vice versa. Mais cela nous semble très arbitraire, ces pourcentages, et un peu trop contraignant. Je pense qu'il vaut mieux, dans la loi, être plus souple et c'est le même raisonnement que j'aurais pour la définition que vous proposez. Ce n'est pas que je sois contre, votre définition me semble excellente, mais je ne pense pas qu'il soit nécessaire de la placer dans la loi mais peut-être plutôt dans les règlements.

Quant à l'inscription du symbole, que le propriétaire n'ait le droit d'afficher que sur demande écrite de la personne handicapée, nous sommes d'accord sur cette approche. C'est un peu la position que j'ai énoncée la semaine dernière lors de l'ouverture de la commission à savoir que, partout où le texte actuel rend obligatoire la carte, nous allons très probablement rendre cette carte facultative, même chose donc pour les symboles. D'ailleurs, le texte sera aussi modifié de façon que ce soit plus large.

On a envisagé l'expression "toute personne dont la mobilité est restreinte", parce qu'il peut y avoir des cas où notre mobilité est restreinte temporairement pour des raisons x, y, z sans qu'on soit nécessairement une personne handicapée.

En ce qui concerne les chiens-guides, j'ai le goût de vous demander votre opinion quant à l'opportunité de mettre sur pied une école pour chiens-guides ici au Québec. Je suis conscient que le nombre d'aveugles ou semi-aveugles qui peuvent bénéficier d'un chien-guide est peut-être assez restreint ici au Québec. Mais je suis conscient aussi, en même temps, que c'est un cercle vicieux, parce que les aveugles doivent aller aux Etats-Unis apprendre, si vous voulez à se servir d'un chien-guide dans une langue qui n'est pas la leur, pour les francophones en tout cas, pour la majorité de la population. Les chiens sont dressés en anglais et c'est très coûteux, les dépenses qu'occasionne le déplacement, l'individu doit aller plusieurs semaines dans une ville comme New York ou ailleurs.

Personnellement, je trouve ça un peu anormal et je vous avoue que j'ai un préjugé plutôt favora-

ble pour qu'on fasse l'impossible pour mettre sur pied une école d'entraînement de chiens-guides, mais j'aimerais bien avoir votre réaction. J'aurai d'autres commentaires tantôt.

M. Cyr (Michel): Pour ce qui est du nombre de personnes handicapées visuelles qui peuvent utiliser un chien-guide, on se base sur une enquête et des statistiques; à travers la province de Québec, il y a approximativement 80 personnes qui utilisent un chien-guide. Il a été prouvé que ça ne serait pas rentable d'avoir une école de chiens-guides au Québec. A travers le Canada, il y en a environ 350 qui utilisent le chien-guide.

M. Lazure: Cela a été prouvé comment et par qui, que ça ne serait pas rentable?

M. Cyr: Cela a été prouvé par une étude faite par notre bureau national à travers le Canada.

M. Lazure: J'aimerais bien en avoir une copie, si vous aviez la gentillesse de me l'envoyer.

M. Cyr: D'accord.

M. Lazure: Je vous remercie. Je vais continuer, j'avais quelques autres commentaires. J'ai l'impression qu'on aura un son de cloche différent du groupe des chiens-guides tantôt, le mouvement des chiens-guides que je vois en arrière. Il y aura un peu d'action, je n'en doute pas.

On a aussi la question de confidentialité des dossiers. Si vous avez suivi la semaine passée les séances de la commission, je pense que vous pouvez être rassurés, nous allons réviser le texte pour que le consentement soit explicite et non pas implicite pour la transmission d'informations d'un dossier.

Vos remarques sur la Commission des affaires sociales me surprennent un peu. Si je comprends bien, vous dites que les personnes handicapées ont du mal à se retrouver, que la Commission des affaires sociales est chose compliquée et vous proposez que des organismes qui défendent les droits des personnes handicapées jouent ce rôle. Je dois dire que la Commission des affaires sociales — j'ai rarement entendu des critiques à son sujet — fonctionne par différentes sections et régionalement aussi, dans toutes les régions du Québec, et le service en est relativement rapide.

Rien n'empêche un groupement comme le vôtre ou un autre groupement qui s'occupe de personnes handicapées d'agir comme intermédiaire ou parrain, si vous voulez, quand une personne handicapée aura à faire valoir un droit auprès de la Commission des affaires sociales. Il me semble qu'on a avantage à utiliser les services d'un organisme qui, très souvent, a eu des jugements qui allaient dans le sens des revendications, soit de personnes handicapées ou de personnes bénéficiaires de l'aide sociale qui se sentaient lésées.

J'aimerais mieux qu'on fasse l'essai, pendant un bout de temps, quitte, encore une fois, à ce que votre institut et d'autres groupements agissent comme des intermédiaires entre la personne handicapée et la Commission des affaires sociales.

Finalement, aux articles 73 et 74, comme vous le savez, il y aura des changements.

On peut encore se poser la question, dans le cas de congédiement d'un employé pour cause de handicap seulement. Pourquoi n'appliquerait-on pas cette clause aux employeurs de moins de cinquante employés, comme vous le faites remarquer?

Je m'interroge encore moi aussi. La raison pour laquelle on ne l'avait pas inclus, l'employeur de moins de cinquante employés, c'était selon l'hypothèse que si un employeur n'a que dix, quinze employés, et qu'il est obligé d'en garder un parce que la personne devient handicapée, il a peu de choix d'autres emplois dans son entreprise, pour relocaliser la personne employée. C'est la raison.

Mais je ne suis pas sûr qu'on doive continuer à exempter l'employeur de moins de cinquante employés. Nous allons examiner cette clause de nouveau. Merci.

Le Président (M. Marcoux): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je veux également remercier l'Institut national pour les aveugles de son mémoire, et de la démarche qu'il fait aujourd'hui. Une toute petite question un peu marginale pour faire suite à la question du ministre. Est-ce qu'il existe ailleurs au Canada, des écoles d'entraînement des chiens-guides ou s'il n'en existe qu'aux Etats-Unis?

Mme Taillon (Micheline): Aux Etats-Unis.

M. L'Ecuyer (Bernard): ... présentement, aux Etats-Unis, qui sont reconnues comme compétentes.

Mme Lavoie-Roux: II n'y en a qu'aux Etats-Unis?

M. L'Ecuyer: A notre connaissance, qui sont reconnues comme compétentes, oui.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. L'autre point que j'aimerais aborder avec vous, et vous y avez touché un peu lorsque vous avez parlé de l'emploi, mais pas d'une façon très spécifique. J'ai l'impression que le problème de placement ou de choix d'occupation de travail pour les personnes aveugles est extrêmement limité.

Il y a les organismes pour aveugles qui emploient un certain nombre d'aveugles. Mais à l'extérieur de cela, les aveugles sont vraiment limités à des occupations un peu traditionnelles comme la réparation des chaises, la production de balais, et d'autre part, la gérance de certains casse-croûte.

J'aimerais savoir si votre organisme a fait l'exploration quant à d'autres ouvertures possibles d'emplois pour les aveugles. Est-ce qu'à l'occa-

sion de votre présence ici, est-ce qu'il y a des recommandations, même si elles ne touchent pas directement le projet de loi no 9? Ce n'est pas tellement souvent que comme groupe, vous pouvez venir devant une commission parlementaire, faire valoir les préoccupations du groupe que vous représentez.

La raison pour laquelle je vous pose ces questions, c'est que l'an dernier, j'ai vécu une expérience avec quelqu'un qui est devenu aveugle à la suite d'un accident, et qui était une personne qui avait des qualifications. Le problème d'intégration de cette personne — évidemment il y avait une période d'adaptation qu'elle devait faire, d'entraînement, etc. — mais il reste que cela me semblait extrêmement limité, comme possibilités d'ouvertures, dans le monde du travail, pour les personnes aveugles.

M. Cyr: Si on parle de travail réellement manuel, vous parliez de tressage de fonds de chaises, de montages de balais, ces emplois se font presque exclusivement en ateliers protégés.

Si on parle d'une population qui est sur le marché du travail régulier, si on prend la population qui est prête à travailler, il y en a environ 50% qui travaillent sur des emplois très différents. On peut parler d'emplois industriels, on peut parler d'emplois professionnels, on peut parler d'emplois spécialisés. En fait il y en a dans presque tous les domaines, pourvu qu'on leur donne la possibilité de s'intégrer et les outils nécessaires pour s'y intégrer.

C'est peut-être pour cela que, dans le fond, si vous avez pris des notes sur ce qu'on vous a présenté ce matin, on demande, à un moment donné, que les plans d'embauche qui sont présentés, par les entreprises ou par les employeurs, soient axés un peu plus, pour ce qui a trait au handicap visuel, vers les personnes aveugles, parce que, dans le fond, je me mets dans la peau d'un employeur et je me dis: J'ai deux possibilités. J'ai deux personnes à prendre, une personne qui a une vision moyenne d'à peu près 20/70 ou 20/80 et une personne qui a 20 et 400 pour faire un travail. Si je ne connaissais pas le handicapé, ses possibilités, je serais beaucoup plus porté à prendre la personne qui a 20/80, c'est normal.

Mais, si à ce moment-là, on demande que les programmes sur des emplois spécifiques soient orientés beaucoup plus vers l'aveugle, je pense qu'on peut découvrir beaucoup d'autres marchés ou d'autres possibilités de travail qui peuvent devenir très intéressantes.

Mme Lavoie-Roux: Comme association, avez-vous fait ce travail d'exploration pour essayer d'élargir... peut-être pas de trouver des emplois, parce que... mais je veux dire du point de vue des habiletés d'un grand nombre de handicapés visuels, justement d'avoir un choix d'emplois un peu plus diversifié que celui qu'on lui offre?

M. Cyr: Oui. Personnellement, je suis conseiller en main-d'oeuvre pour les handicapés visuels. Nous regardons toutes les possibilités. On va voir les employeurs. On regarde très attentivement toutes les sortes de travaux qui peuvent être faits par les handicapés.

Nous avons aussi mis sur pied des possibilités de formations spécialisées pour les aveugles, en fait, pour qu'ils puissent avoir des emplois un peu plus spécialisés ou un peu plus professionnels. Les recherches d'emplois se font dans le même cadre.

En fait, lorsqu'on met un cours ou une formation en marche, on regarde aussi les possibilités de travail qui existeront par la suite. Je pourrais peut-être vous en énumérer quelques-uns. Il y a, entre autres, l'informatique, la représentation au niveau de l'information pour le ministère du Revenu. Il y a aussi, dans les emplois de métiers, présentement une école qui se forme au niveau de la mécanique automobile pour le handicapé visuel. Ce sont toutes des possibilités, comme vous voyez, qui sont quand même assez diversifiées et qui peuvent donner au handicapé visuel la possibilité de s'intégrer.

Mme Lavoie-Roux: Seulement une remarque quant au symbole sur les appartements ou sur les habitations des personnes handicapées visuelles. Je me demande si je comprends votre souhait, à savoir que ces symboles soient le moins apparents possible ou le moins... Je me demande si ce n'est peut-être pas un peu irréaliste. Vous dites qu'ils devraient être familiers uniquement aux personnes qui travaillent pour les services d'incendie. Enfin, vous avez mentionné quelque chose à cet effet. Je pense que je serais d'accord avec vous s'il y avait uniquement ces personnes qui devaient prêter secours en cas de conflagration, mais je pense que, très souvent, les premiers qui vont porter secours, ce sont des voisins ou même des personnes justement qui n'ont rien à faire avec les services d'incendies. Je me demande même si cela peut être un souhait bien légitime, si au plan du réalisme ce serait une bonne chose que le symbole soit si ignoré de la population en général.

Mme Taillon: II pourrait y avoir à ce moment-là danger. Cela pourrait attirer les voleurs ou les malfaiteurs. Si vous savez qu'une personne handicapée demeure dans une résidence, cela peut attirer d'autres malfaiteurs. A ce moment-là, ce n'est pas de la prudence. Il peut y avoir deux côtés. Il y a deux dangers à cette misère.

Mme Lavoie-Roux: C'est une possibilité, mais je pense bien que c'est un peu un dilemme entre les deux. J'ose espérer que, dans notre société, il va y avoir plus de gens prêts à prêter secours aux personnes handicapées qu'il va y en avoir prêts à les exploiter. Enfin, c'est l'espoir que je garde encore vis-à-vis de notre société. J'espère que je ne me trompe pas.

Mme Taillon: La personne qui demeure dans un immeuble d'habitation peut toujours avertir le concierge ou les gens qui demeurent autour d'elle. Il n'y a aucun signe finalement, pour le savoir, pour les gens de l'extérieur ou toute autre

personne. Il y a du bon, mais il y a un gros danger, par ailleurs, dans des grandes villes.

Mme Lavoie-Roux: Une dernière question que je voulais vous poser. Dans les exercices à la disposition des handicapés visuels présentement, est-ce que vous avez le sentiment qu'au point de vue du "counselling", du point de vue des différents services qui doivent être mis à leur disposition dans le processus d'éducation, s'il s'agit de personnes plus jeunes, d'éducation et de réadaptation dans le cas de personnes qui deviennent des handicapés visuels à un âge plus tardif, à la suite d'accidents ou autres, avez-vous l'impression que ces services sont adéquats présentement? Somme toute, les handicapés visuels sont limités en nombre par rapport à l'ensemble d'autres types de handicaps. Je me demande jusqu'à quel point on ne les a pas peut-être un peu oubliés ou est-ce une fausse impression que j'ai?

M. Cyr: Disons que je pourrais vous répondre ainsi: En fait, nous, si on parle de main-d'oeuvre et d'orientation professionnelle, on ne se trouve pas assez nombreux, c'est évident. Il y a le fait aussi de la mise sur pied du nouveau centre de réadaptation qui devrait rendre accessibles beaucoup d'autres services qui étaient donnés en fait, ailleurs et qui seront donnés maintenant par les services de réadaptation. Si on parle de réadaptation comme telle au niveau du handicap visuel, si on parle de mobilité, si on parle d'enseignement du braille ou des appareils électroniques, il est évident que la population, présentement, en souffre, et que nous autres, au niveau de la main-d'oeuvre, on n'est pas assez nombreux.

Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie, messieurs et madame.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: Merci, M. le Président. Madame et messieurs, j'ai deux petites questions. Premièrement, sur le sujet des chiens-guides, on dit qu'au Québec, nous avons 90 personnes avec des chiens-guides et nous avons à peu près 10 000 aveugles. Est-ce que ces chiffres sont exacts?

M. L'Ecuyer: Environ 7300 aveugles sont inscrits à nos dossiers

M. Shaw: Oui. Il y en a d'autres à part cela qui sont soit handicapés ou aveugles?

M. L'Ecuyer: Je ne le sais pas exactement.

M. Shaw: Vous avez sur votre liste à peu près 8000 aveugles?

M. L'Ecuyer: Nous avons présentement à nos registres 7370 dossiers.

M. Shaw: Est-ce que ce sont seulement des aveugles ou est-ce que ce sont un peu des handicapés visuels aussi?

M. L'Ecuyer: Ce sont positivement des personnes normalement reconnues comme aveugles selon l'échelle Snellen et également telles que reconnues normalement en Amérique du Nord, c'est-à-dire à 20/200 de vision et moins après correction.

M. Shaw: De ces 7300, quel pourcentage peut employer un chien-guide avec avantage?

M. Cyr: C'est peut-être difficile d'établir un pourcentage, parce qu'il y a quand même beaucoup de facteurs qui entrent en ligne de compte. Si on prend une personne qui a 20/200 de vision, cela veut dire, grosso modo, qu'une personne qui a une vision parfaite de 20/20 elle voit une chose parfaitement à 200 pieds, et que la personne qui a un 20/200 va la voir parfaitement à 20 pieds. Une personne qui a 20/200 a quand même une vision suffisante pour pouvoir se conduire. Je pense que c'est bien difficile d'établir statistiquement combien de gens ont 20/200, combien ont 20/300 ou 20/400.

Il reste quand même que dans la population pour ceux qui sont peut-être aveugles totalement ou presque, il y a tout l'aspect de la santé et les critères d'admissibilité au chien-guide sont quand même assez sévères. Il faut d'abord aussi que la personne qui demande un chien-guide aime les chiens.

Mme Taillon: II y a également 67% des aveugles qui ont plus de 55 ans, et pour des raisons, parfois, de mobilité, de vieillissement, ne peuvent pas s'occuper d'un chien, ne peuvent le sortir matin et soir.

M. Shaw: Alors, quel pourcentage prévoyez-vous? La moitié peut employer des chiens-guides, un quart, ou quoi?

Mme Taillon: Si vous voyez que 65% des gens ont déjà plus de 55 ans, je veux dire qu'il faut quand même... La personne ne pourrait pas...... avoir un chien-guide à 70 ans, je ne crois pas. Elle n'aurait peut-être pas les capacités physiques. Le pourcentage actuel est difficile à établir.

M. Shaw: Mais nous avons à Montréal maintenant un centre d'entraînement pour les chiens, centre qui se spécialise dans l'entraînement des chiens, qui est prêt à faire une demande de subvention au gouvernement pour la formation des chiens-guides. Ce centre s'occupe maintenant de la formation des chiens de garde, des chiens qui trouvent des drogues dans les aéroports. C'est un centre qui se spécialise dans l'entraînement des chiens.

Vous venez de dire qu'il n'y aurait pas assez de demandes au Québec pour les chiens-guides. Est-ce que vous voulez dire que cela n'a pas de bon sens de continuer d'essayer d'avoir un centre d'entraînement pour les chiens-guides au Québec?

M. L'Ecuyer: Si vous tenez compte des pro-

portions actuelles, il y a environ 80 personnes qui, jusqu'à maintenant, utilisent le chien-guide sur une population... Cela vous donne un ratio un peu supérieur à 1%. Maintenant, c'est selon ce que l'individu désire aussi. Chaque personne ne désire pas nécessairement utiliser un chien-guide.

M. Shaw: Est-ce que c'est à cause du coût, à cause d'autres choses?

M. L'Ecuyer: Pas particulièrement, monsieur. Effectivement...

M. Shaw: Des subventions sont maintenant disponibles pour avoir des chiens-guides si vous en voulez?

M. L'Ecuyer: Voici: En ce qui nous concerne à l'INCA, si on parle en termes de subventions, jusqu'à maintenant, nous avons aidé un nombre de personnes à se rendre au centre d'entraînement. L'entraînement ne coûte rien à l'individu même et, d'autre part, dans une institution de chiens-guides, l'institution payait le voyage et, dans d'autres cas, nous avons payé, pour l'utilisateur, son voyage d'aller et de retour. Nous avons également versé un montant de contribution pour l'entraîner, pour celui qui était entraîné, avec son chien-guide.

Cependant, on ne l'a jamais imposé particulièrement à personne, et si on parle en termes de coût à l'individu même, il n'y en a pas eu à l'individu même.

M. Lazure: M. le Président, si M. le député le permet, je veux bien comprendre, d'autant plus que l'INCA est un des organismes que ce gouvernement-ci subventionne, comme le gouvernement antérieur le faisait. Est-ce que vous voulez dire, monsieur, que toute personne aveugle qui veut aller aux Etats-Unis faire l'achat d'un chien-guide et demeurer le temps qu'il faut pour qu'il s'habitue à son chien-guide, cette personne aveugle peut faire une demande chez vous et vous lui assurez un octroi, une subvention, que ça ne lui coûtera rien là-bas pour vivre à l'hôtel ou en chambre et qu'elle n'aura pas à débourser pour l'entraînement non plus?

M. L'Ecuyer: Tout d'abord, le chien-guide ne lui coûte rien.

M. Lazure: Qui va le payer?

M. L'Ecuyer: Le chien-guide lui est donné. Le chien-guide ne lui est pas facturé. L'institut même, c'est-à-dire non pas l'Institut national, mais l'école de chiens-guides...

M. Lazure: Le centre d'entraînement... M. L'Ecuyer: Le centre d'entraînement... M. Lazure:... va lui donner le chien...

M. L'Ecuyer: ... rend le chien-guide disponible.

M. Lazure: ... moyennant paiement du cours, je suppose, n'est-ce pas?

M. L'Ecuyer: Le cours n'est pas payé par l'étudiant, puisque, ces centres d'entraînement, dans un cas particulier que je connais, le centre est assisté par une fondation, d'une part. D'autre part, en ce qui nous concerne, nous soumettons des demandes aux centres d'entraînement, mais ce sont les centres d'entraînement qui déterminent si le postulant peut aller suivre l'entraînement et s'occuper subséquemment de son chien.

Or, nous avons payé jusqu'à maintenant, et nous continuons à payer le prix du voyage, aller-retour, à celui qui désire et qui est accepté par le centre d'entraînement. Si le centre d'entraînement demande que des honoraires soient versés, nous les versons. Je dois vous expliquer que nous avons un fonds spécial, qui n'est présentement pas très élevé, mais, à partir de contributions que nous avons reçues dans le passé et qui étaient spécifiquement pour les chiens-guides, on a ouvert un compte spécialement à cette fin, ce sont donc ces fonds qui sont utilisés pour aider celui qui désire aller s'entraîner en vue de l'obtention d'un chien-guide.

M. Lazure: Mais, diriez-vous que les conditions peuvent varier d'un centre d'entraînement à un autre, d'une école — aux Etats-Unis, par exemple, il y a plusieurs écoles — à J'autre, les conditions vont varier?

M. L'Ecuyer: J'en connais présentement deux. Quand vous parlez de conditions, parlez-vous de conditions d'entraînement ou de conditions...

M. Lazure: Non, des conditions financières.

M. L'Ecuyer: Les conditions financières, pour l'aveugle, ne varient pas, ça ne lui coûte rien. Cependant, s'il le désire, il a la liberté de faire une contribution, mais, en aucune circonstance, il n'est forcé de le faire.

M. Lazure: Est-ce que vous prenez l'engagement, comme institut, vis-à-vis des personnes aveugles au Québec, de défrayer le coût entier du voyage et ensuite le coût du cours, si le centre, là-bas, charge quelque chose pour ce cours? Est-ce l'engagement que vous prenez, c'est votre politique?

M. L'Ecuyer: Non seulement c'est un engagement que je peux prendre ce matin, mais c'est une politique qui a existé jusqu'à maintenant. Lorsque les postulants sont acceptés, lorsqu'ils répondent aux critères d'admissibilité qui sont établis par les centres d'entraînement, à ce moment nous aidons financièrement le postulant à se rendre suivre son cours et à revenir, sans qu'il soit forcé de débourser quelque argent que ce soit.

M. Lazure: Dernière question, M. le Président.

A supposer que ça devienne une chose intelligente que de créer un centre d'entraînement au Québec, seriez-vous prêts à continuer la même politique vis-à-vis de ce centre?

M. L'Ecuyer: Absolument. M. Lazure: Merci.

M. Shaw: Deuxième question, M. le Président. Vous avez dit, tantôt, que 50% des aveugles qui sont enregistrés chez vous ont un emploi présentement. Quel pourcentage sont dans des ateliers fermés, contrôlés ou protégés?

M. L'Ecuyer: Ce n'est pas 50% des personnes qui sont enregistrées à l'INCA, mais 50% des personnes qui sont admissibles au travail. C'est quand même très différent. En fait, sur les quelque 7000 aveugles qui sont enregistrés, il y a, grosso modo, environ 600 à 700 personnes qui sont admissibles au travail. Sur ces 600 à 700 personnes, qui sont admissibles au travail, il y a quand même une catégorie de clientèle en atelier protégé; on parle d'environ 75 personnes qui peuvent être inscrites dans les ateliers protégés. Ici, on parle d'ateliers protégés pour handicapés visuels; il y en a un à Québec et un à Montréal. Il y a quand même un pourcentage de personnes qui sont inscrites à court terme, c'est-à-dire à un programme de formation et de réadaptation au travail, et il y a les autres qui sont inscrits comme travailleurs à long terme. Ceux-ci sont, plafonnés ou ont d'autres problèmes qui les empêchent de répondre aux normes de la production ou aux exigences du marché du travail, mais par contre, ces gens peuvent être accessibles aux ateliers.

M. Shaw: Vous dites que seulement 600 personnes sur 7000 sont aptes au travail?

M. L'Ecuyer: Oui, si vous considérez que 67% de ces personnes sont presque à l'âge de la retraite, et si vous considérez le pourcentage assez élevé de personnes qui sont encore aux études, il reste entre 600 et 700 personnes qui sont disponibles pour le marché du travail.

M. Shaw: Merci.

Mouvement sur les chiens-guides

Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie au nom des membres de la commission de la présentation de votre mémoire. J'inviterais maintenant le Mouvement sur les chiens-guides, à venir nous présenter leur mémoire.

M. Miller.

M. Miller (Gérald): Tout d'abord, à titre d'information, M. le Président, il est actuellement 12 h 5. Est-ce que vous pourriez nous informer si la commission a l'intentron d'ajourner à un moment donné et de reprendre, ou de poursuivre pendant 1 h 5 qui nous est allouée?

Le Président (M. Marcoux): Nous allons ajourner à 12 h 30. Ce qui donne le temps soit de lire votre mémoire ou d'en présenter l'essentiel, de le résumer. Normalement, il y a une vingtaine de minutes accordées à chaque groupe qui présente son mémoire, et nous reprendrons la discussion à la reprise de nos travaux vers 3 h 30, le dialogue entre les députés et vous.

M. Miller: D'accord.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous pourriez nous présenter vos collègues?

M. Miller: Je vous présente M. Michel Lan-glois, président du Mouvement sur les chiens-guides ainsi que Mme Louise Laurin qui nous assistera pour la lecture de certains documents éventuellement. Mon nom est Gérald Miller, je suis secrétaire du même mouvement.

M. le Président, M. le ministre, messieurs les députés, mesdames et messieurs. Le Mouvement sur les chiens-guides existe depuis déjà trois ans et depuis ce moment, nous avons eu l'occasion d'élaborer un certain nombre de demandes qui ont été présentées au gouvernement et au Parlement à l'aide de divers documents. Nous avons eu aussi l'occasion de faire certaines représentations orales. Ces représentations et ces documents, nous les avons produits notamment lors de la présentation d'un mémoire relativement au projet de loi 55 l'an dernier. Suite à l'élection d'un nouveau gouvernement à l'automne dernier, nous avons, en hiver, élaboré un mémoire que nous avons expédié au ministre des Affaires sociales dans le but de résoudre de la façon la plus globale possible la situation et la problématique des utilisateurs de chiens-guides au Québec.

Nos demandes sont explicitées dans ce mémoire de façon, nous pensons, claire et précise et, suite à l'ensemble de ces représentations, le gouvernement a présenté le projet de loi no 9 qui traite de divers problèmes et notamment de celui de l'utilisation des chiens-guides au Québec. Il se pose, cependant, un petit problème ici c'est que nous avons divers documents d'origine gouvernementale entre les mains. Je pense au livre blanc, je pense au projet de loi, je pense à un document publié le 4 août dernier, appelé: Bilan de la tournée de consultations, etc., publié par le bureau du ministre. Nous avons aussi le texte du discours prononcé par M. Lazure, mardi dernier, à l'ouverture de la présente commission. Nous constatons qu'il existe entre ces divers documents certaines difficultés en termes de concordance.

De plus, nous avons pris connaissance de toutes sortes de rumeurs d'informations officieuses, à l'effet que le projet de loi no 9, c'est-à-dire que le texte que nous avons actuellement ne serait plus vraiment d'actualité. D'ailleurs, il y a eu des articles de journaux, dans le Devoir, je pense, jeudi dernier qui, en matière de droits de l'homme, présentait la situation de façon assez différente, de la façon dont le ministre la présentait deux jours auparavant mardi dernier.

En somme, il règle une espèce d'atmosphère

de confusion autour de ça, et nous aimerions qu'en guise de considération préliminaire le ministre précise un peu la nature de ses intentions relativement à l'utilisation des chiens-guides, la façon dont elles seraient traitées dans un projet de loi modifié ou un autre projet de loi éventuellement.

La raison pour laquelle nous demandons ça, M. le ministre, c'est que nous voulons économiser au maximum le temps de la commission, le nôtre et celui du public, en ce sens qu'il ne servirait à rien, à notre avis, de discuter de longues minutes sur des points sur lesquels nous nous entendons déjà.

M. Lazure: M. le Président, je le fais avec plaisir, en réponse à la proposition de M. Miller. Je vais me confiner, comme vous le suggérez, aux chiens-guides. Nous avons, depuis un certain temps, fait des démarches auprès des experts en rédaction des lois et notre proposition était de considérer le chien-guide, comme une prothèse, avec tout ce que cela implique de droit. Parce que dans l'interprétation légale, quand on parle d'une personne handicapée, par exemple au point de vue discrimination, la prothèse est incluse pour ainsi dire dans l'expression "personne handicapée". C'est l'interprétation que font les légistes. Autrement dit, si un restaurateur récrimine contre une paire de béquilles ou une chaise roulante, il se trouve à récriminer contre la personne handicapée.

En partant de ça, notre objectif était d'avoir la reconnaissance du chien-guide comme une prothèse. Cela nous semblait la chose la plus simple. Cependant, les légistes nous affirment que cela n'est pas possible. Justement, la proposition que le comité de législation nous fait de façon officieuse — je profite de la circonstance pour avoir votre réaction — toujours dans le cadre général, sortir de notre projet de loi, à la section II, tout ce qui regarde les droits en abordant plutôt la Charte des droits de l'homme, nous ferions la même chose pour les chiens-guides. On nous suggère d'abroger et d'ajouter à l'article 10 de la charte ce qui suit; encore une fois, c'est sous toute réserve, c'est une suggestion: "Tout handicapé visuel accompagné d'un chien-guide est titulaire du droit reconnu à l'article 10 et peut garder son chien à ses côtés."

En d'autres termes, tout ce qui est liberté et droit de la personne handicapée — je reviens au texte de mardi dernier — je ne comprends pas quand vous dites qu'il y a confusion, pour moi, c'est très clair. J'ai expliqué, la semaine dernière, que les experts nous avaient dit il y a x mois que cela n'était pas possible, qu'il valait mieux l'inclure dans notre propre projet de loi. D'autres experts, qui sont tout aussi valables, nous disent maintenant, que c'est possible et nous ne demandons pas mieux que de travailler par l'intermédiaire de la Charte des droits de la personne. Ceci pour les chiens-guides.

Deuxièmement, la question que je soulevais à propos de l'école d'entraînement, j'aimerais bien avoir vos réactions aussi tout à l'heure. Finale- ment, un message important pour votre groupe comme pour les autres, c'est qu'effectivement, nous avons profité de cette tournée des fonctionnaires, nous avons profité de la lecture de ces mémoires, nous avons appris beaucoup de choses, moi j'ai appris beaucoup de choses. Le texte du projet de loi no 9 sera révisé, comme cela arrive dans le cas de bien des projets de loi.

Cela ne m'apparaît pas matière à confusion ou à panique qu'un projet de loi, après de multiples consultations, soit révisé, de façon sérieuse, cela ne me paraît pas anormal du tout.

M. Miller: Vous avez parlé de l'aspect du droit des utilisateurs de chiens-guides, auquel droit les utilisateurs seraient admissibles. Cependant vous n'avez pas parlé de l'aspect accès à ces droits. Dans le projet de loi no 9, il y a différentes procédures prévues, afin qu'une personne handicapée visuelle soit autorisée à utiliser un chien-guide. Il y a une reconnaissance officielle, il y a des médaillons d'immatriculation, des cartes d'identité, des mentions spéciales sur les cartes d'identité, etc.

J'aimerais savoir si vous avez des intentions précises actuellement, à cet effet. Mais, avant d'entendre votre réponse, j'aimerais préciser ce qui suit: la confusion dont nous parlions tout à l'heure fait référence surtout à un article de journal paru jeudi dernier et qui disait que les droits des personnes handicapées étant reconnus implicitement dans la Charte des droits et libertés de la personne, il n'y aurait plus lieu d'amender la charte en question.

M. Lazure: Je ne sais pas qui a dit cela. C'est Mme Marie Laurier qui a dit cela. C'est une conclusion qu'elle a tirée. Elle n'était pas ici mardi, à l'ouverture. Elle a vu le texte qui lui a été transmis, comme aux autres journaux, par le courrier. Mais ce n'est pas une interprétation correcte de ce que j'ai dit.

M. Miller: C'est donc une erreur journalistique tout simplement.

M. Lazure: Exactement.

M. Miller: Et vous avez toujours l'intention de modifier la Charte des droits et libertés de la personne de façon qu'elle s'applique aux handicapés?

M. Lazure: Sûrement. Et de façon encore plus précise pour les chiens-guides, un peu dans le sens que je le disais tantôt.

M. Miller: D'accord. En ce qui concerne cela, je préférerais qu'on n'engage pas le débat tout de suite et qu'on s'informe plutôt des intentions de votre gouvernement relativement à cela, et nous passerions à l'aspect débat dans la deuxième partie, celle des questions et réponses, commentaires, etc.

Concernant toute cette affaire des reconnaissances officielles, est-ce que vous avez des intentions précises à l'heure actuelle?

M. Lazure: Je ne comprends pas très bien votre question.

M. Miller: Par exemple, à l'article 1, alinéa d), on parle de reconnaissance officielle des centres d'entraînement pour chiens-guides. A l'article 33, alinéa c)...

M. Lazure: Je comprends très bien. Ecoutez. C'est un des exemples où le texte qui a été déposé au mois de juin, en rétrospective maintenant, devenait un peu tâtillonneux, allait trop dans les détails. Je ne pense pas que ce soit nécessaire que l'office reconnaisse. Il y a des ministères appropriés pour décerner une telle reconnaissance, que ce soit le ministère de l'Education ou un autre ministère. Là-dessus, j'aimerais bien entendre vos commentaires.

Mais l'orientation générale que j'ai essayé de véhiculer depuis une semaine, c'est qu'on va rendre cet office beaucoup moins exécutant. L'office va surtout s'assurer que quelqu'un est là pour reconnaître des écoles d'entraînement. Vous admettrez qu'il faut toujours qu'il y ait une reconnaissance par quelqu'un.

Mais, dans l'optique que nous avons dessinée depuis une semaine, l'office va principalement être un ombudsman, un coordonnateur et, de façon très exceptionnelle, il pourra stimuler la création de services dans des régions où il n'y en a pas du tout.

M. Miller: Cela veut donc dire que toutes ces reconnaissances officielles demeureraient; qu'elles soient opérationnalisées par l'office ou par d'autres instances gouvernementales, elles demeureraient.

M. Lazure: Je pense que n'importe quelle école, qu'il s'agisse de l'entraînement de chiens-guides ou autre chose, une école de mécanique, doit avoir une certaine reconnaissance de la part de l'Etat.

M. Miller: Oui.

M. Lazure: Je ne vois pas où vous voulez en venir.

M. Miller: Est-ce que cela s'applique aussi à la reconnaissance des chiens-guides individuellement, l'article 33c?

M. Lazure: Non, c'est seulement pour l'école. Pas aux chiens individuellement.

M. Miller: Est-ce que cela veut dire que l'article 33c tomberait?

M. Lazure: Oui, cela veut dire cela.

M. Miller: La terminaison de l'article 33b tomberait-elle aussi, c'est-à-dire la reconnaissance des utilisateurs de chiens-guides et la mention spéciale sur une éventuelle carte d'identité?

M. Lazure: Cela serait seulement sur demande de la personne.

M. Miller: Et il y aurait une mention spéciale sur cette carte?

M. Lazure: II n'y aurait pas de mention spéciale.

M. Miller: Ce serait une carte comme pour toute autre personne handicapée?

M. Lazure: Exact.

M. Miller: D'accord. Pour ce qui concerne la modification dont vous parliez tout à l'heure, que l'utilisateur de chien-guide sera titulaire, etc., cela implique, je suppose, que les articles 5, 6 et que le paragraphe a) de l'article 33 tomberaient aussi...

M. Lazure: Un instant!

M. Miller: ... l'article 5 concerne l'accès aux moyens de transport et aux lieux publics. L'article 6 concerne les clauses antianimales de baux qui seraient sans effet. L'article 33, paragraphe a) concerne la catégorisation des lieux publics en trois blocs plus ou moins accessibles... Cela tomberait?

M. Lazure: La réponse, c'est oui, sauf pour l'article 6, la clause du bail.

M. Miller: Oui.

M. Lazure: Ce serait plutôt inclus dans le bail type.

M. Miller: D'accord. Je réitère que nous passerons à l'aspect débat un peu plus tard. Je pense que nous sommes maintenant prêts à entreprendre notre présentation. Je pense que le président de notre organisation aurait certaines considérations dont il aimerait faire part à la commission concernant l'utilisation pratico-pratique d'un chien-guide quotidiennement.

Le Président (M. Marcoux): Allez-y.

M. Langlois (Michel): Pour ce qui est des chiens-guides, il y a environ 80 personnes qui utilisent un chien-guide au Québec. Il y a des raisons à cela. De très grandes difficultés existent pour les utilisateurs de chiens-guides présentement et cela en décourage un bon nombre d'aller s'en chercher un. C'est vraiment pénible d'arriver à la porte d'un restaurant ou à bord d'un transporteur public, dans d'autres villes que Montréal, parce qu'on n'a pas de problèmes à Montréal avec les transports publics, d'engager d'autres personnes, parce qu'on ne se déplace pas nécessairement seul, et de s'en faire refuser l'accès. C'est quand même humainement dur à vivre. Les gens ne sont pas nécessairement prêts à se battre comme on l'a fait chez nous pour essayer de faire reconnaître ces droits.

II y a probablement aussi un manque d'information sur ce qu'est un chien-guide, ce que cela fait, ce que cela ne fait pas. Nous sommes persuadés, au Mouvement sur les chiens-guides, que le chien-guide demeure la meilleure aide à la mobilité, compte tenu de l'indépendance qu'il apporte et nécessairement de son autonomie ainsi que de sa précision au travail. C'est clair qu'un chien-guide voit plus clair qu'une canne blanche. Nous sommes convaincus que c'est la meilleure aide à la mobilité. Par contre, il est évident que, dans la définition légale d'une personne handicapée visuelle, il y a plusieurs personnes qui conservent un résidu de vision suffisant pour se conduire et n'ont donc pas la nécessité d'utiliser un chien-guide.

J'aimerais aussi ajouter que — dans la pratique, c'est ce qui arrive — quand on dit que l'utilisation d'une prothèse est implicite au fait d'être une personne handicapée, les restaurateurs récalcitrants ne sont pas d'accord. Souvent, ils nous disent: Laisse ton chien-guide dehors ou dans le portique et tu vas pouvoir venir manger chez nous ou ils disent: Si on insiste, si on entre, s'ils appel-len la police et que la police ne nous fout pas dehors, on demeure là, mais ils ne viennent pas nous servir. Je relève ces ceux points de cette situation qui a été vécue.

Le premier, c'est que, d'après moi, il faut vraiment préciser que le chien-guide doit être protégé, c'est-à-dire qu'on doit être protégés non seulement du fait d'être handicapés, mais aussi pour le fait d'utiliser un chien-guide. On nous dit: Ce n'est pas toi que je refuse, c'est ton chien. Il y a aussi l'aspect de protéger le droit de bénéficier des services. Quand je vous dis qu'on peut demeurer assis à une table de restaurant une heure, deux heures, sans que l'on vienne nous servir, c'est le droit de bénéficier des services offerts. Je veux dire que c'est encore une revendication qui part de notre vécu à nous-mêmes et de celui d'autres utilisateurs de chiens-guides.

C'est pour cela qu'on est peut-être bien tatillons, mais disons que, dans le moment, la situation est très boiteuse et même condamnable. Cependant, on est convaincu que, si la loi n'accorde pas une protection complète, on sera soumis à peu près à la même situation que celle qui existe présentement, c'est-à-dire la situation de doute, à savoir, s'il y a quelques exceptions qui subsistent, à quel moment ces exceptions vont nous tomber sur te dos.

Quand on utilise un chien-guide, cela nous permet d'évoluer dans à peu près toutes les sphères de la société, tant dans le domaine du loisir, du travail — ce qui est très important aussi, protéger le travail — les transports, etc. S'il y a des exceptions qui subsistent, on risque de s'y frotter tôt ou tard.

M. Lazure: M. Langlois...

M. Langlois: Seulement une dernière petite chose.

M. Lazure: Seulement pour régler la question, parce que je vois qu'il existe encore un peu de confusion. Le chien-guide, dans la proposition que j'énonçais tantôt, ne serait plus considéré simplement comme une prothèse. On le nommerait. Je répète la proposition: "Tout handicapé visuel accompagné d'un chien-guide est titulaire du droit reconnu à l'article 10 et peut garder son chien à ses côtés". Est-ce que vous comprenez la portée de cette phrase?

M. Langlois: Oui, je comprends. D'après moi, il manque faspect de bénéficier des services offerts.

M. Lazure: Ecoutez, on peut l'ajouter, mais cela va de soi, évidemment. C'est là que cela deviendrait de la discrimination, si le service était refusé. Vous avez raison. On ne peut jamais être trop clair. On prend note de votre suggestion.

M. Langlois: Par rapport à l'âge, je veux seulement ajouter une toute petite chose. C'est dangereux aussi de faire des catégories et de dire: Telle personne, à partir de tel âge, n'utilise plus un chien-guide. Mardi dernier, à l'ouverture de la commission parlementaire, on avait un exemple vivant de cela. Il y avait une dame, membre du Mouvement sur les chiens-guides, une jeune dame de 73 ans qui utilise encore son chien-guide de façon très utile.

M. Lazure: Formidable.

M. Miller: II est maintenant temps de passer à l'aspect des commentaires précis sur le projet de loi et aussi sur les modifications dont le ministre nous faisait part précédemment. En ce qui concerne cette modification centrale dont vous faisiez part, M. le ministre, à savoir qu'un handicapé visuel accompagné d'un chien-guide serait titulaire du droit reconnu à l'article 10, nous préférerions que l'expression "utilisation d'une prothèse, orthèse ou autre chose destinée à compenser un handicap" figure à l'article 10, premier alinéa, comme motif de discrimination interdit, et nous préférerions aussi, de façon, comme vous le mentionniez, à être clair au maximum du possible, qu'en plus, il soit précisé clairement qu'un chien-guide, aux fins de la charte, aux fins de savoir si cela s'applique, soit une prothèse, ou encore qu'un chien-guide entre dans la notion "prothèse, orthèse ou autre chose destinée à compenser un handicap".

Les raisons pour lesquelles nous demandons cela sont les suivantes: Tout d'abord, la Charte des droits et libertés de la personne mentionne, dans son premier considérant, que les droits et libertés de la personne sont intrinsèques à l'être humain. En conséquence, venir ajouter un alinéa ou un article qui dirait: Les handicapés visuels accompagnés d'un chien-guide sont titulaires du droit mentionné à l'article 10, soulèverait peut-être un doute sur l'existence des droits et libertés intrinsèques pour les utilisateurs de chiens-guides.

Aussi, nous pensons qu'en ce qui concerne ce dont vous parliez précédemment, à savoir que

l'utilisation d'une prothèse, etc., cette notion serait incluse dans la notion de "handicap", c'est possible. Personnellement, je penserais cela. Les gens du Mouvement sur les chiens-guides penseraient cela aussi, advenant un conflit à cet effet, et veuillez croire, M. le ministre, que les conflits ne manquent pas en ce domaine. Il ne fait pas de doute que le Mouvement sur les chiens-guides soutiendrait une telle interprétation. Beaucoup de gens sont sans doute aussi d'accord avec cela, sauf que certaines personnes pourraient bien ne pas être d'accord avec cela, notamment des juges.

Il existe des gens... Par exemple, au premier alinéa de l'article 10 de la charte, où on dit que la discrimination sera interdite lorsqu'elle sera fondée sur la race, la couleur et il y a sept autres motifs de discrimination interdite. Je voudrais me concentrer sur la race et Ha couleur. Il me semble que la notion de couleur est incluse dans la notion de race, sauf que, peut-être, certaines personnes pourraient prétendre que cela n'est pas aussi clair que cela. Justement, parce qu'en matière de droits de l'homme où les textes doivent être particulièrement clairs et irréprochables, le législateur a jugé bon, en 1975, d'inclure les deux, de façon à dissiper tout doute à ce sujet. Nous demandons à la commission et au Parlement de faire la même chose en ce qui concerne les handicapés, même si, et on me pardonnera l'expression, la discrimination envers les handicapés est, si je puis dire, une discrimination moins noble que la discrimination raciale, ne serait-ce qu'en terme d'ancienneté.

M. Lazure: M. le Président. M. Miller, je partage entièrement votre avis. Je ne sais pas pourquoi les experts en législation ont toujours une certaine résistance à rendre les choses très très claires dans les textes, très spécifiques. En tout cas, je peux vous dire que j'ai un problème: chaque fois qu'on travaille sur des projets de loi, je suis porté à adopter le raisonnement que vous venez de présenter. On n'a rien à perdre à rendre les choses très très claires, mais dans les habitudes de législation, les coutumes, il semble que cela n'est pas une tradition que d'être concis, clair et précis comme cela.

Le Président (M. Marcoux): Vous allez m'ex-cuser, il est déjà midi trente. Nous reprendrons l'audition de votre mémoire à la reprise de nos travaux, à la suite de l'avis que le leader parlementaire donnera, après la période de questions en Chambre cet après-midi. Nous devrions reprendre nos travaux vers trois heures quinze, trois heures trente. La commission des affaires sociales ajourne ses travaux sine die.

(Suspension de la séance à 12 h 35)

Reprise de la séance à 15 h 33

Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission des affaires sociales est réunie pour poursuivre l'examen des mémoires concernant le projet de loi no 9, Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées.

Les membres de la commission sont M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Charron (Saint-Jacques), M. Clair (Drummond), M. Forget (Saint-Laurent), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Gravel (Limoilou), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Lavigne (Beauharnois), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Lazure (Chambly), M. Marois (Laporte) remplacé par M. Gagnon (Champlain), M. Martel (Richelieu), Mme Ouellette (Hull), M. Paquette (Rosemont), M. Saindon (Argenteuil) remplacé par M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Shaw (Pointe-Claire).

Nous étions en train d'entendre le mémoire du Mouvement sur les chiens-guides. La parole était à M. Miller.

M. Miller (Gérald): Peut-être y aurait-il lieu de passer à la période de questions et de réponses?

Le Président (M. Marcoux): Si cela vous convient, je pense que, de toute façon, les membres de la commission ont eu votre mémoire, et ce matin, il y a eu des échanges.

M. le ministre.

M. Miller: Lequel mémoire nous considérons comme relativement complet, d'ailleurs.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Pour enchaîner avec l'amorce de discussion de ce matin, je voudrais poser la question au groupement qui est devant nous, que j'ai posée à l'Institut des aveugles ce matin, à savoir: Est-il opportun, est-il souhaitable et est-il réaliste de songera mettre sur pied une école d'entraînement pour chiens-guides au Québec?

M. Miller: Nous pensons que c'est une chose souhaitable, certainement; d'ailleurs, nous le recommandons dans notre mémoire. Cependant, M. le ministre, comme vous l'aurez noté, notre mémoire se divise au niveau des demandes, des recommandations — enfin, on peut appeler cela de toutes sortes de façons — en deux sections très précises, à savoir, tout d'abord les changements nécessaires et urgents qui ne coûteraient rien et, deuxièmement, les réformes à incidences économiques.

Nous pensons que la première catégorie de suggestions devrait se voir donner des suites le plus rapidement possible justement parce que ces problèmes sont extrêmement urgents; cela concerne, en somme, l'aspect des droits de l'homme. En ce qui concerne la deuxième section, nous pensons que cela peut se faire à moyen terme ou à un peu plus long terme, parce qu'il s'agit, de toute façon, de l'aspect services, si on veut, et il est évident que dans ce domaine, il y a

plein de modalités techniques à définir, à préciser. Il est évident, par exemple, que la mise sur pied d'un centre d'entraînement pour chiens-guides demanderait une planification certaine, parce que cela n'est pas le genre de chose qu'on peut improviser.

De plus, vous aurez noté, M. le ministre, que, dans notre mémoire, nous ne recommandons pas que la mise sur pied d'un centre d'entraînement pour chiens-guides, mais plutôt quelque chose d'un peu plus global, c'est-à-dire un centre national de mobilité qui comprendrait, entre autres choses, un centre d'entraînenement pour chiens-guides et qui, en plus, offrirait, par exemple — c'est une énumération qui n'est pas limitative — un service de cartographie en relief et de maquettographie, un service donnant des cours de maniement de la canne blanche, surtout à l'intention des handicapés visuels qui conservent un certain résidu de vision, qui pourrait aussi agir en matière ou d'adaptation du milieu physique; on pense à des signaux sonores aux intersections les plus achalandées, etc.; soit que le centre effectue lui-même ses travaux ou qu'il fasse des recommandations aux autorités concernées afin que ces travaux soient affectués.

Je laisserais la parole à Michel Langlois pour préciser un peu tout cela, surtout en ce qui concerne la nécessité d'un centre de service de cartographie en relief et de maquettographie.

M. Langlois (Michel): Je me demandais comment faire une précision sur quelque chose qui a été mentionné un petit peu ce matin. J'aimerais faire une démarcation, à savoir que pour nous, il n'est pas question de considérer l'entraînement d'un chien-guide comme quelque chose de similaire à l'entraînement d'un chien de garde ou un chien pour détecter la drogue. La philosophie est très antagoniste, si je peux dire. Il nous apparaît très dangereux — ce n'est pas le cas non plus aux Etats-Unis, où la plupart des écoles sont instituées — que la personne qui entraîne des chiens d'attaque ou des chiens de garde, entraîne aussi un chien-guide.

Quant à la question du centre de mobilité, on le voit un petit peu plus dense, parce qu'un chien-guide, c'est une prothèse qui te conduit dans la rue ou dans un édifice public, qui peut repérer différentes choses, qui évite les obstacles, qui garde la ligne droite, etc. Cependant, c'est le maître, c'est l'aveugle qui dirige le chien; c'est l'aveugle qui donne les commandements au chien; donc, il est essentiellement impératif que tu connaisses le trajet du chemin que tu as à faire. Dans ce sens-là, un service de cartographie en relief ajouterait ou faciliterait beaucoup l'utilisation d'un chien-guide par le handicapé visuel et serait d'une très grande utilité également pour les autres handicapés visuels. Dans la même idée, un service de maquettographie. On peut penser à première vue aux stations de métro qui sont souvent assez complexes, qui pourraient être faites sous forme de maquette en relief et que le handicapé visuel pourrait aller consulter; cela pourrait faciliter beaucoup le déplacement ensuite soit avec la canne blanche ou soit avec le chien-guide.

Quand on pense aussi à moyen ou à court terme, ce sont les mesures. C'est pourquoi on sépare directement dans notre mémoire les deux genres de demande.

On pense qu'un centre de mobilité, tel celui-là, et surtout une école d'entraînement pour chiens-guides, cela ne doit pas s'improviser à la vitesse, dans le sens que la qualité ne doit pas en souffrir. Je peux donner un type d'exemple que les entraîneurs américains, pour devenir entraîneurs de chiens-guides, subissent un entraînement qui dure cinq ans. Il y a aussi toute la question de la sélection des chiens, qui est très très sévère, très stricte, etc. Dans ce sens, pour nous, cela est vraiment important que cela existe un jour, sauf qu'on pense que la qualité ne doit pas en souffrir; pour nous, c'est pour cela qu'on le met à moyen ou peut-être à long terme; mais ce n'est pas parce que cela ne serait pas vraiment nécessaire ou utile.

M. Lazure: M. le Président, je me demande ce que le groupement penserait d'une suggestion qui a été formulée depuis quelque temps, à savoir que, jusqu'au jour où existerait un tel centre au Québec, la possibilité qu'une des écoles des Etats-Unis puisse, à notre demande et peut-être avec une aide de notre part, compter au moins un entraîneur francophone dans ses rangs, de façon que les francophones du Québec qui vont à une telle école américaine puissent jouir, pour ainsi dire, d'un chien entraîné en langue française. Que pensez-vous de cette suggestion?

M. Miller: Ce serait une suggestion intéressante, mais il faut ici signaler plusieurs choses. Premièrement, cela pourrait constituer un palliatif temporaire en attendant, qu'à moyen ou long terme, soit établi un centre d'entraînement au Québec, mais il ne faudrait pas que ce soit une solution permanente, pensons-nous. En plus, il ne faudrait pas que ce centre d'entraînement, qui serait en quelque sorte subventionné par le Québec, le soit en exclusivité par rapport aux autres centres d'entraînement, de façon à respecter le libre choix de la personne handicapée dans la détermination du centre d'entraînement avec lequel cette personne veut transiger. Chaque centre d'entraînement a un peu son style, a un peu certaines particularités qui sont plus ou moins appréciées, dépendant des personnes handicapées visuelles et aussi dépendant de l'utilisation qu'un handicapé visuel veut faire de son chien-guide; en ce sens, nous pensons qu'il serait important de respecter le libre choix des personnes handicapées et plutôt que de subventionner une école, il y aurait peut-être lieu de subventionner l'acquisition d'un chien-guide, c'est-à-dire que, dépendant du centre d'entraînement choisi par un handicapé visuel, la subvention suivrait chaque personne, si on veut. Je ne sais pas si c'est assez clair.

M. Lazure: Oui, évidemment, ce que vous

proposez serait plus compliqué et plus coûteux; j'oublie le chiffre, mais il y a combien de centres d'entraînement aux Etats-Unis pour chiens-guides?

M. Miller: Neuf.

M. Lazure: Huit, neuf?

M. Miller: Neuf.

M. Lazure: Alors, si on suivait votre recommandation, il faudrait subventionner la présence d'une personne francophone dans chacun des neuf, si on veut respecter, comme vous le dites, le libre choix des personnes handicapées.

M. Miller: Je ne sais pas s'il n'y aurait pas possibilité plutôt — évidemment ce sont des modalités à étudier — de subventionner l'acquisition d'un chien-guide par une personne, c'est-à-dire que chaque personne se procurant un chien-guide pourrait en quelque sorte traîner avec elle une subvention de x% du coût moyen d'entraînement d'un chien-guide. Cette subvention serait utilisée par le centre d'entraînement pour permettre à un entraîneur d'acquérir des rudiments de langue française, ou encore pour défrayer les coûts d'un interprète sur les lieux. Signalons qu'il existe certains centres d'entraînement qui mettent des interprètes francophones à la disposition des handicapés visuels québécois qui se rendent chez eux pour se procurer un chien-guide, particulièrement s'il arrive que deux ou trois Québécois s'y rendent en même temps. Alors, il y aurait peut-être quelque chose à étudier de ce côté-là.

M. Lazure: M. le Président, pour conclure. J'aime bien l'approche du mouvement en ce qui concerne le centre national de mobilité pour handicapés visuels et je pense que c'est une suggestion assez originale que nous allons regarder de très près.

Je conçois très bien qu'il faut élargir le cadre de cela; ce n'est pas seulement pour les chiens-guides, mais c'est aussi pour la cartographie et aussi pour les maquettes. Je les engagerais à nous procurer, si cela est possible, plus de détails; s'il y a des expériences similaires qui ont été faites ailleurs dans la mise sur pied de centres de mobilité pour handicapés visuels, je suis sûr que cela nous aiderait beaucoup.

Le Président (M. Marcoux): Merci. Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'aimerais demander au représentant de l'association: Est-ce qu'ils savent combien de personnes sont servies en moyenne par des centres d'entraînement de chiens-guides aux Etats-Unis? Ne prenez pas les plus éloignés, mais ceux chez lesquels les Québécois vont aller le plus souvent; j'imagine que cela doit être ceux qui sont le plus à proximité quand même, soit New York ou peut-être Boston. Combien de personnes sont servies en moyenne par ces centres? Avez-vous une idée du coût de la mise sur pied d'un tel centre où il n'y a pas de comparaison possible, compte tenu du nombre de personnes que nous servirions ici au Québec?

M. Langlois: Quant à la moyenne de personnes qui peuvent aller dans ces centres, la seule façon que je peux trouver à répondre à cela, c'est que, à ma connaissance, la plupart ou la très grande majorité des handicapés visuels québécois qui ont un chien-guide, les ont obtenus de trois centres à l'est des Etats-Unis, qui sont bien connus ici au Québec, soit Seeing Eye Dog à Morris Town, Leader Dog à Rochester, et Guide Dog Foundation for the Blind à New York. Quant au coût d'opération d'une école comme telle, ce que j'ai pu savoir quand je suis allé chercher mon chien, c'est qu'on prend les dépenses globales de l'école des chiens-guides et on divise par le nombre de chiens qui sont distribués annuellement; ce qui donne une moyenne d'environ $5 000 par chien. Cela comprend le dressage, le stage du handicapé visuel, les dépenses de la ferme d'élevage, etc. Maintenant, je n'ai pas à l'esprit exactement combien de personnes annuellement reçoivent un chien-guide, mais c'est variable, cela aussi; vous avez l'école de Seeing Eye Dog qui est très très grande, comparée, disons, à Guide Dog Foundation à New York.

Mme Lavoie-Roux: Quand vous parlez d'un coût de $5 000 par chien, ceci inclurait toutes les dépenses d'un tel centre, tant la structure administrative du centre que le personnel et tout. Cela ne serait pas relié uniquement au dressage du chien, son élevage, etc. Est-ce que ce serait le coût moyen de toute l'opération?

M. Langlois: Oui, c'est ce qu'on m'a dit. C'est la façon dont on évaluait le coût d'un chien-guide parce que c'est bien arbitraire, dire combien vaut un chien-guide? C'est une question qui est souvent posée. Un chien-guide, c'est un animal; il n'a pas les oreilles ou les griffes en or.

Mme Lavoie-Roux: Non, non, moi, je parle... M. Langlois: C'est tout ce qui entoure...

Mme Lavoie-Roux: Je veux dire c'est l'opération d'un tel centre.

M. Langlois: C'est cela.

Mme Lavoie-Roux: C'est l'ensemble des opérations dans le fond.

M. Langlois: Oui, madame.

Mme. Lavoie-Roux: L'autre question. A la page 9, vous dites: "Au Québec les institutions spécialisées...". Vous donnez diverses raisons pour lesquelles les chiens-guides ne sont peut-être pas tellement utilisés au Québec, et parmi ces raisons-là, vous dites: "Les institutions spécialisées dans les services aux handicapés visuels ont

toujours déconseillé, plus ou moins ouvertement, l'utilisation de chiens-guides pour des raisons pour le moins discutables, par ailleurs". Est-ce que vous pourriez énumérer quelques-unes des raisons qui sont invoquées pour, selon vous, décourager les handicapés visuels d'avoir recours à des chiens-guides?

M. Miller: Nombre de nos membres nous ont rapporté qu'au moment où ils ont songé se procurer un chien-guide, différentes informations leur ont été transmises à l'effet, par exemple, qu'un chien-guide n'est pas commode; c'est plus une nuisance qu'autre chose; sur les coins de rue, ils n'aident pas; c'est dangereux; ils mordent les gens; c'est plein de poils; c'est dur d'entretien; cela coûte cher, etc.

Là-dedans il existe beaucoup de mythes, beaucoup de résultats d'ignorance, si on veut, et on pourrait allonger la liste à l'infini de tous les fléaux qui affectent le pauvre handicapé visuel qui est susceptible de penser, oser, désirer la possibilité de se procurer éventuellement un chien-guide.

Mme Lavoie-Roux: C'est une attitude que l'on retrouve dans les organismes qui ont la responsabilité d'aider les handicapés visuels, d'après ce que vous dites?

M. Miller: Effectivement.

Mme Lavoie-Roux: Ce ne sont pas des préjugés de la population auxquels vous faites allusion dans le moment, la population en général, j'entends.

M. Miller: Non.

Mme Lavoie-Roux: Non.

M. Miller: Non, aucunement, d'ailleurs. Il faut remarquer qu'en ce qui concerne tous les problèmes de discrimination dans l'utilisation d'un chien-guide, fondamentalement, c'est cela qui reste prioritaire, les questions de discrimination, parce que, sous l'aspect service du centre national des mobilités, etc., on se débrouille jusqu'à présent assez bien avec les fondations privées aux Etats-Unis; elles fournissent les chiens gratuitement aux utilisateurs québécois, comme à toute personne sur la planète qui veut s'en procurer un d'ailleurs. Dans toutes les questions de discrimination, les utilisateurs de chiens-guides reçoivent donc l'appui du public qui se trouve autour d'eux, qu'il s'agisse d'entrer dans un restaurant, une salle de concert, un théâtre, une salle de cinéma, un taxi, un autobus, enfin, un commerce, un centre commercial, une épicerie; on peut imaginer tous les lieux publics. Le public, de façon constante, appuie les utilisateurs de chiens-guides.

Mme Lavoie-Roux: Vous nous avez dit, au début, ou du moins j'ai cru comprendre qu'il y avait au Québec environ 80 personnes qui utili- saient Jes chiens-guides. Est-ce que le chiffre est exact?

M. Langlois: C'est soumis à des variations. Il y a de nouvelles personnes qui s'en procurent et certaines autres personnes qui, au même moment, ne se servent plus d'un chien-guide; mais cela tourne autour de 80 environ. Oui.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous avez des statistiques, par exemple, disons, au cours des dix dernières années, sur l'augmentation de l'utilisation des chiens-guides? Est-ce que cela demeure à peu près toujours le même nombre ou s'il y a vraiment une progression? Avez-vous, des statistiques là-dessus?

M. Miller: Nous n'avons pas de statistiques précises sur la question. Cependant, il est sûr et certain que le nombre est en croissance constante. Il est difficile de faire des recensements là-dessus parce que le Québec est un bien grand pays et, évidemment, comme le nombre des utilisateurs de chiens-guides est assez restreint actuellement, en tous cas, et comme le mouvement sur les chiens-guides n'est pas une organisation très riche pour les questions de communication, transport, etc., il est assez difficile de faire un recensement exhaustif. Cependant, il est sûr et certain que le nombre des utilisateurs de chiens-guides va croissant.

Mme Lavoie-Roux: Mais vous êtes quand même parvenus à identifier à environ 80, le nombre de personnes qui les utilisent. Est-ce que ce chiffre de 80, environ 80, par rapport à 1968, par exemple, a augmenté ou quel en était le nombre en 1968? Vous êtes quand même parvenus à identifier le chiffre de 80. Depuis combien de temps l'utilisation tourne-t-elle autour de ce chiffre de 80?

M. Miller: Le mouvement sur les chiens-guides existe depuis trois ans seulement, et il nous est difficile de nous référer aux chiffres d'il y a dix ans, ne serait-ce qu'en raison du fait que ces chiffres n'ont jamais été compilés.

Mme Lavoie-Roux: D'accord, j'avais oublié que cela faisait trois ans.

M. Miller: Depuis trois ans, cependant, il est possible de dire que le mouvement sur les chiens-guides est essentiellement constitué autour de nouveaux utilisateurs de chiens-guides depuis trois ans, évidemment, certains utilisateurs de chiens-guides de longue date se sont ralliés à ce mouvement.

Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie, monsieur.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: Merci, M. le Président. Je suis très intéressé à votre problème parce que, avant même la présentation de ce projet de loi, j'ai eu l'occasion de visiter un centre du comté de Vaudreuil-Soulanges, qui exige de commencer un programme d'entraînement pour les chiens-guides. J'ai quelques questions dans ce domaine. Est-ce que vous trouvez qu'il y a des aveugles qui ont des problèmes, disons, de motivation par rapport aux chiens-guides ou même des contremotivations? Est-ce que vous croyez que ceux qui veulent avoir un chien-guide vont avoir la facilité d'en obtenir un?

M. Langlois: C'est cela, vous touchez un point. Il y a un grand manque d'information sur les capacités ou l'utilité d'un chien-guide. Il y a plusieurs handicapés visuels qui pensent se servir d'un chien-guide deux ou trois fois par jour, et que le reste cru temps ils le laisseront à la maison; ce qui n'est pas du tout le cas. Il y a certains handicapés visuels qui surestiment les capacités d'un chien-guide. C'est un des problèmes.

Il y a aussi, comme on le dit dans le mémoire, la question du voyage aux Etats-Unis, et de la barrière linguistique; cela décourage plusieurs handicapés visuels d'aller chercher un chien. Ce sont les raisons principales qui font qu'il n'y a pas plus de handicapés visuels qui en ont. Il faut vraiment savoir ce que c'est, un chien-guide, pour désirer en avoir un. Il y a une autre raison aussi qui est évidemment la peur de se faire refuser dans les endroits publics. C'est le plus gros frein aujourd'hui à l'acquisition d'un chien-guide pour les handicapés visuels. Ils ne savent pas exactement ce qu'est un chien-guide, mais ils sont au courant que les chiens-guides sont refusés. Il y a certains cas qui ont fait un peu de publicité. Le mouvement sur les chiens-guides en a fait aussi. Ils sont plus au courant des problèmes que de la valeur de l'utilité d'un chien-guide.

M. Shaw: Aussitôt que vous décidez d'aller en chercher un, vous n'avez pas le problème de trouver les moyens pour aller le chercher. Disons, dans votre cas personnel, après avoir décidé d'essayer d'avoir un chien-guide, avez-vous eu un problème? Vous n'avez pas eu de difficulté du tout?

M. Langlois: II y a les problèmes financiers et il y a aussi les problèmes d'information. Pour les raisons dont on parlait tout à l'heure, il est assez difficile d'obtenir des renseignements honnêtes sur la question. En ce qui concerne le financement, le problème est assez peu intense, en ce sens que les fondations privées américaines, qui remettent gratuitement les chiens-guides aux utilisateurs québécois, défraient aussi tous les frais de séjour, les frais de nourriture, de pension, etc., et aussi, si on insiste le moindrement, les frais de transport, les billets d'avion, etc.

M. Shaw: Avec ces points, croyez-vous que la moitié des aveugles du Québec peut employer un chien-guide? Maintenant, c'est presque 1%.

Pouvons-nous parler de 25% des aveugles qui peuvent employer un chien-guide?

M. Langlois: II y a un autre point. Sur cette question, il y a deux grands facteurs qu'il faut considérer. Le mot aveugle, ou handicapé visuel, s'applique à toute une échelle de degrés de vision. Comme je le disais ce matin, il y a des personnes considérées comme handicapées visuelles qui possèdent encore un résidu de vision suffisant pour se permettre de se déplacer sans chien-guide. Il y a toute cette catégorie qui ne se sent pas motivée d'en avoir un. Il y a aussi la situation, en général, que vivent les personnes handicapées visuelles qui peuvent le considérer comme un frein objectif; c'est-à-dire que ta majorité des personnes handicapées visuelles ne travaillent pas et elles sont, il faut le dire, très peu intégrées à la vie sociale. Donc, pour ces personnes qui sont des professionnels de l'aide sociale depuis X années, leurs besoins ne sont pas éveillés. Elles n'en sentent pas le besoin. Elles sont chez elles et se considèrent comme un bon aveugle qui reste chez lui, avec ses parents, et c'est surtout dans le milieu rural aussi où c'est le plus flagrant.

En touchant à la question rurale aussi, on peut dire que la question de transport et des facilités de transport pour un utilisateur de chien-guide est importante.

Si c'est un cheval-guide, tu peux le monter, ce n'est pas si mal, mais avec un chien-guide, on prend au moins les autobus. A Montréal, il n'y a pas de problème, mais, à la campagne les services d'autobus sont parfois assez déficients. Si tu marches dix ou quinze milles, à pied, c'est long. Ce sont les deux principales raisons. C'est pour cela que je ne penserais pas que la moitié des handicapés visuels au Québec aient un chien-guide; cela m'étonnerait. Même s'il y en a plusieurs, surtout ici, si on pense aux handicapés visuels récents, dont la situation est vraiment terrible en termes de choc, ces gens s'habituent très difficilement à utiliser une canne blanche; ils ont peur d'avancer; avant, ils voyaient clair; pour eux, c'est la noirceur; au moindre bruit, aussitôt qu'il y a du tapage, ils deviennent tout désorientés. J'ai connu de ces gens qui ont obtenu un chien-guide assez récemment après avoir perdu la vue et cela leur a permis de reprendre des activités normales. Cela a été parfait pour eux.

M. Shaw: Je pose ces questions parce que je voudrais savoir le nombre de chiens-guides qui peuvent être demandés pour un centre d'entraînement au Québec. Nous savons que vous avez un problème, si vous parlez seulement français, lorsque vous allez à des centres d'entraînement de chiens-guides, parce qu'ils sont tous aux Etats-Unis et tous les cours sont donnés seulement en anglais. Est-ce que c'est vrai?

M. Miller: II y a cela. Cependant, c'est un problème qui est un peu tempéré par le fait que certains centres d'entraînement mettent des interprètes anglais-français à la disposition des utilisateurs québécois. Il y a aussi d'autres problèmes.

Par exemple, pour se procurer un chien-guide, il est nécessaire d'aller faire un stage d'un mois sur les lieux aux Etats-Unis. Or, cela suppose un certain déracinement. C'est particulièrement important et cela a des incidences psychologiques certaines, par exemple, pour un handicapé visuel récent, de faire face à une cécité qui lui arrive de façon impromptue et, en même temps, de se déraciner de son milieu, de quitter tous ses amis, tout son milieu de vie, les lieux physiques qu'il connaît, pour aller séjourner un mois aux Etats-Unis dans un milieu qui est bien différent, être enveloppé dans une mentalité différente, entouré de gens qui parlent un langage différent. Il me semble qu'il y a des problèmes de déracinement aussi qu'il faut prendre en considération.

M. Shaw: J'ai entendu des témoins du CNIB qui ont dit qu'une étude a été faite disant qu'un centre d'entraînement au Québec n'est pas rentable. Est-ce que vous en jugez différemment? Est-ce que vous jugez que nous avons besoin au Québec d'un centre d'entraînement pour les chiens-guides?

M. Miller: Nous pensons que la chose est absolument essentielle, d'autant plus que l'Etat québécois s'engagerait résolument dans le domaine de la normalisation et de l'intégration sociale. Nous pensons, nous soutenons et nous n'hésiterons pas à soutenir que le chien-guide constitue la meilleure aide à la mobilité qui existe pour les handicapés visuels qui ont besoin d'une aide à la mobilité. Nous pensons de plus que, dans une région comme le Québec, le chien-guide est particulièrement utile en raison de nos hivers québécois. Vous savez, quand on utilise une canne blanche, finalement ce qu'on fait: on tâte le terrain, on rampe sur le sol finalement avec cette canne; avec des bancs de neige qui changent de place tous les jours, c'est un peu embarrassant. Un chien-guide a l'avantage de voir clair. Au Québec, c'est particulièrement utile. Nous pensons donc que, dans la mesure où l'Etat québécois s'engagerait résolument dans l'intégration sociale des personnes handicapées, l'existence d'un centre d'entraînement pour chiens-guides, à l'intérieur d'un centre national de mobilité, est absolument essentielle, à moyen terme, à tout le moins. Mais nous pensons cependant qu'à court terme, et avant même de mettre sur pied de tels services, il est nécessaire de prévoir les mécanismes juridiques permettant aux utilisateurs de chiens-guides de profiter adéquatement de ces prothèses vraiment spéciales, de ces prothèses biologiques, si on veut, qui peuvent leur procurer une indépendance extraordinaire.

Il est nécessaire de faire en sorte que nul n'ait le droit de discriminer les utilisateurs de chiens-guides, que nul n'ait le droit de leur refuser le droit de se déplacer, la liberté de circulation, le droit d'accès aux moyens de transport, aux lieux publics, le droit au travail, le droit de se loger, enfin, on pourrait énumérer tous les droits et toutes les libertés énumérés à la Charte des droits et libertés de la personne.

M. Shaw: Une dernière question sur le même sujet de la demande. Même vous, qui avez des chiens-guides maintenant, avez besoin de temps en temps de les remplacer. Est-ce vrai?

M. Miller: Oui, effectivement, un chien-guide peut servir environ dix ans, en moyenne. Evidemment, il y a beaucoup de variations individuelles, mais au bout d'une dizaine d'années, un chien-guide doit être mis à la retraite et remplacé.

M. Shaw: Alors, cela implique un autre stage d'un mois pour... parce que vous avez besoin d'être entraîné avec votre chien dans un centre d'entraînement. Est-ce que c'est vrai? Même si vous avez eu un chien avant?

M. Miller: Effectivement, il n'y a pas qu'une question de connaissance de la part d'un handicapé visuel, connaissance à savoir comment un chien-guide fonctionne. Un chien-guide n'est pas une béquille inerte; c'est un être qui possède une psychologie complexe et raffinée. Il est nécessaire que la personne handicapée se sente en confiance avec son chien-guide et il est nécessaire que le chien-guide se sente en confiance avec son maître. Il est nécessaire qu'il y ait une communication entre les deux de façon absolument constante et une communication extrêmement raffinée, si on peut dire. Il faut que les deux se connaissent très bien et forment une équipe indissoluble, en ce sens qu'il serait imprudent de lancer comme cela, en pleine ville, un handicapé visuel et un chien-guide qui n'auraient jamais travaillé ensemble auparavant. C'est pourquoi, même un utilisateur de chien-guide, qui en est à son troisième, quatrième chien-guide, doit se prêter à un stage d'environ un mois afin d'acquérir au moins une connaissance minimale de la personnalité individualisée du chien-guide avec lequel il fait affaire.

M. Shaw: Même s'il y en a seulement que 80 ou 90 qui emploient les chiens-guides, cela représente une demande annuelle d'une dizaine de chiens-guides entraînés au Québec, sans augmentation du nombre croissant de personnes qui les emploient.

M. Miller: Oui, mais par ailleurs, il ne fait aucun doute que s'il y avait un centre d'entraînement pour chiens-guides au Québec, il y aurait beaucoup plus de demandes en ce sens.

M. Shaw: Merci.

M. Langlois: Je pense aussi qu'il y a une question... Pour placer un chien-guide dans la question globale de la réadaptation ou de l'intégration à la vie sociale, je pense qu'en ce qui a trait à la question de déplacement, de mobilité, les handicapés physiques vivent le problème différemment quand ils parlent de réclamer du transport. C'est là qu'un centre de mobilité trouverait sa rentabilité dans le sens que, en permettant aux handicapés visuels de se déplacer adéquatement, c'est le premier pas vers toutes les autres activités de la vie, que ce

soit le travail, les loisirs ou l'éducation. Je pense que c'est dans ce sens-là qu'il faut voir la rentabilité en l'utilité d'un tel centre.

M. Shaw: Est-ce que je peux poser une dernière question au ministre? Est-ce que vous jugez que cela a du sens d'établir un centre d'entraînement pour les chiens-guides au Québec?

M. Langlois: On l'a demandé.

M. Lazure: Je pense que c'est une chose qu'on devrait faire éventuellement. Je ne peux pas me compromettre plus que cela, quant a la date. Mais il me semble que cela doit devenir un jour un service accessible ici au Québec, dans le cadre surtout d'un centre, comme vous l'appelez, le centre de mobilité; j'aime bien ce concept qui est beaucoup plus large que seulement le chien-guide.

Le Président (M. Marcoux): Je remercie le Mouvement pour les chiens-guides de la présentation de son mémoire ainsi que de la discussion que ses représentants ont eue avec les membres de la commission. J'inviterais maintenant M. Mario Bolduc à venir nous présenter son mémoire. Vous avez la parole.

M. Mario Bolduc

M. Bolduc (Mario): Merci. M. le Président, M. le ministre, Messieurs les membres de la commission. Je voudrais d'abord vous remercier de me donner l'occasion de venir dire ici ce que je pense.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que ce serait trop vous demander de vous déplacer vers le centre parce que tous les membres de la commission aimeraient, pour mieux dialoguer, vous voir.

M. Bolduc (Mario): D'accord. Comme je le disais, je voudrais d'abord vous remercier de me donner l'occasion de venir dire un peu ici ce que je pense du projet de loi et du livre blanc. Je vous dis tout de suite aussi que je n'ai pas l'intention de répéter mon mémoire parce qu'en fait ce serait un peu long. J'ai tout simplement l'intention de résumer très brièvement quelques points qui m'appa-raissent des plus importants.

Globalement, en fait, je peux dire que je considère le livre blanc et le projet de loi no 9 comme représentant un grand pas dans le rattrapage important que le Québec a à faire afin de donner aux personnes, qui ont une déficience physique ou mentale, une chance de mener une existence plus normale ou du moins accepble. Je trouve particulièrement intéressant de voir l'intérêt qu'a suscité ce projet et les débats qu'il a amenés chez de très nombreux organismes variés et de tous les milieux. Je pense que cela marque un progrès qui est très important. Il y a même trois ans, je pense que cela aurait été impensable de voir autant d'intérêt soulevé.

Les modifications annoncées par le ministre au début de la commission, à mon avis, améliorent encore considérablement le projet. Sur plusieurs points, je pense que ces modifications correspondent aux demandes principales des groupes concernés. Par exemple, les modifications apportées aux édifices publics dont les délais ont été raccourcis, de même que celles élargies aux édifices du réseau des affaires sociales et du réseau scolaire, les droits qui ont été transférés à la Charte, les organismes de promotion dont les conditions ont été assouplies, etc. Cela nous laisse cependant soucieux sur certains points. Quand je lisais que le principal, le premier mandat de l'office serait de faire des recherches, des études, en vue de l'élaboration d'une politique globale de réadaptation, j'avoue que je ne comprenais pas très bien parce que, il me semble que le livre blanc représente en lui-même un peu une politique de réadaptation, en ce sens qu'il propose une philosophie de base; il a des objectifs à atteindre qui sont assez précis et il a un mode de fonctionnement général qui consiste, en fait, en gros, à modifier les services ou à en créer dans les différents ministères ou organismes concernés et à chapeauter le tout par un organisme de coordination. A mon avis, c'est cela une politique de réadaptation, en gros, et il semble d'ailleurs y avoir une entente assez générale sur ces choses-là, sinon un consensus. Je pense donc qu'il faut tenir cela pour acquis, à l'heure actuelle, et aller plus loin.

Pour ce qui est de la planification précise dans le temps et dans l'espace de toutes les mesures à mettre en oeuvre, je pense que c'est ce qu'on pourrait appeler un plan de développement et non une politique de réadaptation. Il est important de distinguer les deux; ce n'est pas seulement une chicane de mots; je trouverais dommageable qu'on retombe encore une fois dans les grandes discussions de fond au cours des prochaines années, sur les orientations générales. Je pense qu'il ne faut pas essayer de réinventer la roue; il y a des choses qui sont acquises et il faut partir de là. Il est important qu'en même temps qu'on va continuer des études pour préciser un paquet de choses, on mette en place le plus vite possible un minimum de structures, ne serait-ce que sur une base réduite, quitte à les rajuster au besoin.

Pour atteindre les objectifs que la politique s'est donnés, cela suppose évidemment la concertation entre les ministères et les organismes. La publication du livre blanc laisse d'ailleurs supposer que cette concertation existe au niveau gouvernemental. Je passe mon temps à dire que je suis quand même un peu sceptique sur cette concertation, même si elle semble bel et bien commencée. Ce qui est un peu dommage, en fait, à cette commission, c'est de ne pas y retrouver des représentants, par exemple, d'autres ministères, surtout du ministère du Travail, pour connaître leurs intentions exactes pour les prochaines années. C'est important de savoir, par exemple quels moyens le ministère du Travail entend prendre pour assurer le placement des personnes handicapées au cours

des prochaines années, comment, entre autres, il entend le coordonner avec le ministère fédéral de la Main-d'Oeuvre car, on le sait, c'est lui qui en mène le plus large dans le domaine du placement. Il y aussi, par exemple, des projets d'extension de main-d'oeuvre qui ont été développés, au cours des dernières années, et qui ont déjà apporté une expertise intéressante dans le placement sur le marché du travail. Il faut ensuite qu'on commence à prévoir des budgets dans ces ministères pour développer ces services.

Dans le secteur économique, par exemple, il serait intéressant de voir comment on entend intégrer un réseau d'ateliers protégés dans l'économie actuelle. Je pense que ce sont des choses qu'il serait intéressant de connaître en termes de concertation.

Je pourrais peut-être vous citer un ou deux cas de problèmes qui existent encore et qui montrent que la concertation n'est pas si grande que cela. J'ai actuellement, dans le cadre de mon travail, à m'occuper d'un projet de logements accessibles et de services; c'est un projet d'expérimentation financé par le ministère des Affaires sociales. Dans ce projet, on a besoin, bien sûr, de la collaboration très étroite de la Société d'habitation du Québec. Je peux vous dire que, malgré une attitude très sympathique des fonctionnaires avec qui on a fait affaires, pour la structure comme telle, cela semble très long. Cela a pris au moins trois mois d'efforts pour réussir à obtenir un début de collaboration effective pour réussir à débloquer des appartements accessibles physiquement et financièrement aux personnes handicapées, et même encore aujourd'hui on n'est pas encore sûr que cela va marcher. Je pense que cela n'est pas terminé, la concertation; il reste beaucoup de choses à faire.

On peut même dire que des problèmes comme ceux-là ou de concertation ou de logique de système, pourrait-on dire, cela existe même au ministère des Affaires sociales. On peut prendre un autre petit exemple: dans de nombreux cas, pour quelqu'un surtout qui a un peu d'argent, le système d'aide sociale par rapport au système de contribution des bénéficiaires en centre hospitalier est souvent prolongé et cela crée une incitation carrément financière à demeurer en institution. C'est facile, j'ai eu l'occasion de le constater à quelques reprises. Cela ne m'apparaît sûrement pas normal dans une politique de normalisation. Ce sont encore des choses qu'il faudra ajuster. Une de mes craintes, c'est peut-être justement que d'autres ministères ou organismes soient tentés de se défiler en face de leurs responsabilités parce qu'ils veulent avoir un office; je pense qu'il faudra peut-être voir cela de très près.

A propos de l'office, j'avais personnellement des craintes, j'avais peur que cela devienne une grosse structure bureaucratique et inefficace. J'avoue que ces craintes ont beaucoup diminué depuis que le ministre a annoncé qu'il y avait des fonctions telles que le plan de service ou l'aide matérielle, ou le contrat d'intégration professionnelle qui se feront au niveau régional.

Je trouve cependant que nous avons très peu de détails sur la façon dont ces services seront organisés, au niveau régional. Est-ce que ce seront des bureaux régionaux de l'office? Va-t-on utiliser des organismes du réseau des Affaires sociales ou va-t-on utiliser les représentants de différents milieux tels que les commissions scolaires, les centres de main-d'oeuvre, etc?

Personnellement, j'aimerais bien que le ministre collabore un peu là-dessus, parce que cela me paraît assez important.

Il y a quelques autres choses que je voudrais souligner au niveau de l'office. Pour ce qui est, entre autres, de la reconnaissance des organismes de promotion, je suis heureux qu'il y ait eu des assouplissements dans les modes de reconnaissance, et qu'il y ait eu justement un droit d'appel. Je voudrais quand même qu'il y ait un assez bon contrôle de tous les organismes qui peuvent naître dans ce milieu. Maintenant que c'est en train de devenir une mode d'être une personne handicapée, comme bien d'autres choses, je suis convaincu qu'il y aura sûrement beaucoup de personnes qui vont essayer d'en profiter de toutes sortes de façons. C'est facile d'exploiter la crédulité et la pitié des gens avec les personnes handicapées; ce sont des méthodes qui sont connues depuis longtemps.

Et même chez les organismes qui sont très honnêtes, et qui n'ont pas pour but de faire de l'argent, je pense qu'il faut essayer aussi par tous les moyens d'éliminer les souscriptions publiques dans la population. Je suis convaincu que chaque fois qu'on fait cela, on fait plus de tort aux personnes handicapées qu'on ne leur fait du bien, parce qu'on souligne l'aspect de dépendance et de charité publique envers eux.

Pour ce qui est des ateliers protégés, je considère qu'il y a eu, en principe, en tout cas, des améliorations très importantes avec le nouveau projet de loi, surtout en ce sens que les personnes sont maintenant reconnues comme travailleurs à l'intérieur de ces structures. Je pense qu'il reste quand même des problèmes importants dans ce domaine, en ce sens qu'on sait que cela va coûter cher de créer des postes en atelier protégé, et j'ai bien peur que le gouvernement soit très réservé dans ce domaine, au cours des prochaines années.

Il serait intéressant d'avoir des indications de la part du ministre sur le nombre de places que le gouvernement entend créer au cours des prochaines années, s'il y a des choses à décider à ce sujet. Il serait intéressant aussi de savoir ce qu'on fera avec les 40 ou 50 centres de réadaptation pour adultes qui existent actuellement. Combien vont devenir des ateliers protégés? Sur quoi se basera-t-on? Qu'est-ce qui s'en vient de ce côté?

Je pense qu'un des problèmes fondamentaux au niveau des ateliers protégés reste toujours que, tant qu'ils fonctionnent presque exclusivement avec des sous-contrats non payants, cela coûtera toujours très cher. Il faudrait, en fait, que les ateliers soient intégrés dans l'économie, par exemple, en développant peut-être des productions origina-

les. Le grand défi aussi est de faire cela tout en gardant la clientèle qui doit rester dans les ateliers protégés, c'est-à-dire celle qui ne peut réellement pas intégrer le marché du travail.

Si on passe à l'intégration professionnelle et sociale, il y a une remarque générale d'abord. C'est bien sûr, et je pense que tout le monde le sait, que toutes les mesures qu'on prendra pour intégrer au marché du travail les personnes handicapées, auront une efficacité relative, tant que la situation économique sera comme elle est actuellement, parce qu'il est bien sûr qu'avec 12% de chômage, les lois du marché du travail sont féroces et elles jouent à ce niveau. Dans ce sens, je pense que les personnes handicapées ne sont pas marginales, elles sont comme tout le monde, elles attendent une relance économique. Cela pourrait beaucoup aider.

En ce qui a trait au projet de loi, il y a plusieurs points positifs que je voudrais souligner au niveau de l'intégration professionnelle et sociale, entre autres, la notion de plan de service, au lieu de la notion de reclassement professionnel qu'on avait avant, ce qui est beaucoup plus large, ce qui va sûrement permettre beaucoup plus de choses.

L'article 73 tend à garder leur emploi aux personnes qui deviennent handicapées, cela m'apparaît extrêmement important; de même que le contrat d'intégration professionnelle, la subvention et l'adaptation des postes de travail.

Dans le cadre du plan de service, il y a l'aide matérielle. J'avoue personnellement que je ne comprends pas encore exactement ce qu'on veut faire avec l'aide matérielle. La loi est assez vague, on ne sait pas ce que ça va prouver. On dit que ça va compléter un plan de service. Par exemple, est-ce que ça va couvrir l'adaptation d'un logement ou le coût d'un appareil tel qu'un "optacon", des choses comme ça? Est-ce que ça va pouvoir défrayer les coûts de transport dans les régions rurales où il n'y a pas de système?

En fait, pour terminer, je voudrais souligner un point qui en découle. C'est tout le problème de la sécurité du revenu des personnes handicapées. Une des barrières principales, un des problèmes numéro un des personnes handicapées, c'est évidemment la pauvreté. L'aide sociale, pour eux comme pour bien d'autres, n'est souvent pas suffisante, surtout compte tenu qu'il y a des frais supplémentaires pour vivre.

Au niveau de l'aide sociale, il y a une chose que je voudrais souligner, c'est le règlement qui permet, depuis 1975, je crois, d'accorder $100 supplémentaires aux personnes atteintes de paraplégie. Je ne sais pas quelle intention il y avait derrière cela quand cela a été institué mais ça crée des situations très bizarres. On a choisi un critère que je ne comprends pas, la paraplégie. D'autres personnes qui bénéficient de l'aide sociale sont dans une situation qui amène tout autant de désagréments physiques ou financiers que le fait d'être paraplégique et elles n'y ont pas droit, à moins que le médecin n'écrive la bonne affaire sur la formule. C'est souvent une question de guérilla bureaucratique. Je pense que ça devrait être révisé.

Pour plusieurs personnes, ça représente carrément la différence entre la possibilité de mener une vie normale et celle de rester en institution.

Le dernier point que je voulais souligner concerne la régie. Je pense qu'il serait important d'élargir la couverture de la Régie de l'assurance-maladie, entre autres, aux adaptations manuelles des véhicules automobiles et des chaussures orthopédiques. En terminant, je vous remercie encore et je suis prêt à discuter.

Le Président (M. Marcoux): Merci, M. Bolduc. M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, je désire remercier vivement M. Bolduc pour son volumineux mémoire très intéressant. Je voudrais souligner, au risque d'offenser sa modestie, que M. Bolduc a contribué, à titre de fonctionnaire au ministère des Affaires sociales, à l'ébauche de ce qui est devenu le projet de loi no 9. Je veux l'en remercier. Il fait un travail admirable actuellement ici dans la région de Québec avec "Habitation Plus".

Vous avez raison de dire que la première tâche de l'office n'est pas tellement d'élaborer une politique globale. Effectivement, on confond souvent politique globale avec plan de développement. Ce dont les handicapés ont besoin, c'est un plan de développement. C'est tout à fait pertinent. C'est dans ce sens que je disais mardi dernier que cet inventaire des ressources de développement qu'il faudra mettre ensuite en marche. J'aime bien votre approche pratique et réaliste. Je suis porté aussi à avoir le même genre d'attitude vis-à-vis des problèmes aussi considérables que ceux du rattrapage qu'on a à faire pour les personnes handicapées.

Je voudrais relever trois ou quatre points. L'office n'aura pas à mettre sur pied une succursale régionale dans tous les cas. Je pense qu'il devra utiliser, que ce soient des services du réseau des affaires sociales, qui existent déjà dans telle ou telle région, cela peut être aussi, dans certains cas, l'utilisation du réseau scolaire, du réseau éducation pu du réseau main-d'oeuvre Québec, enfin, les réseaux publics et parapublics qui existent déjà.

Les "incitatifs" pour permettre l'intégration sociale et diminuer au minimum les séjours en institution, c'est une chose qui revient constamment. Je crois que la réponse véritable à tout cela, c'est le revenu annuel garanti. Aussi longtemps qu'on s'en tient à des mécanismes d'aide sociale, il faut être très vigilants, pour que ces mécanismes d'aide sociale ne favorisent pas éventuellement la dépendance, soit en institution ou en foyer, quant à cela.

On est très sensible à cette mise en garde que vous faites et, comme vous le savez, nous travaillons d'arrache-pied, pour un jour, en arriver à un revenu annuel garanti.

La concertation des ministères. Ayant été fonctionnaire vous-même, vous en êtes bien conscient, là aussi, on a une importante côte à remonter. Il y a des choses qui peuvent nous rendre un peu plus optimistes. Je pense au ministère

des Transports qui, depuis un an, pour la première fois, a contribue — parce qu'autrefois c'était seulement le ministère des Affaires sociales — à 50%, nous contribuons l'autre 50%, dans les subventions pour les villes de Sherbrooke et de Montréal. Je pense que du côté transport, cela a été un précédent. C'est la première fois que le ministère s'impliquait de façon aussi directe. Actuellement — j'ai d'ailleurs vu la première ébauche de leurs plans — ils prévoient pour l'an prochain, dans leurs prévisions budgétaires, des subventions pour les neuf ou dix principales villes du Québec.

Mais c'est évident qu'il va falloir travailler. Et cela sera un des rôles principaux de l'office, de stimuler cette concertation entre les différents ministères.

Les $100 aux paraplégiques, je vous avoue bien humblement que je n'étais pas au courant. On va regarder cette question.

Finalement, sur un rôle plus général de l'office — et vous en faites mention dans votre mémoire — il faudra que l'office, non seulement joue ce rôle de coordination entre les ministères, mais devienne aussi un agent de changement, à la fois des mentalités et des règlements ou des coutumes qui existent, autant dans le secteur privé que dans le secteur public.

Je m'en tiens à ceci pour le moment, M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous avez des commentaires à ajouter, suite aux propos du ministre?

M. Bolduc: Cela va maintenant.

Le Président (M. Marcoux): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de souligner la qualité de votre mémoire, M. Bolduc. Je pense que c'est fait avec beaucoup d'objectivité. Vos prises de position sont toujours très nuancées, quand vous essayez d'examiner les avantages et les désavantages d'une partie ou de l'autre du mémoire.

Je n'ai qu'un regret. Le ministre a laissé entendre que vous aviez participé à l'ébauche de ce projet de loi. Je ne sais pas si c'est celui-là, le projet de loi 55 ou une série de projets, auxquels vous faites allusion dans le mémoire, mais j'aurais aimé qu'on ait une oreille plus attentive à votre point de vue, en particulier en ce qui a trait à l'office. Il y a un autre groupe, la semaine dernière qui l'a apporté également. Je partage vos préoccupations. Je pense qu'on s'entend sur la nécessité de la création d'un tel organisme. Mais quant à ses pouvoirs, je pense qu'il y a un danger que cet office devienne une grosse structure bureaucratique qui a souvent comme résultat, dans la population, de conclure que les responsabilités sont finalement les responsabilités des autres et non pas les siennes. Vous avez cette grosse structure à laquelle on réfère constamment tous les problèmes, au lieu de trouver sur place, très souvent, des solutions plus adéquates.

J'aime beaucoup la page 23, alors que vous signalez, dans les pages antérieures, ce que vous voyez comme certains dangers au sujet desquels on devrait être vigilants et peut-être penser à modifier le projet de loi, où vous arrivez à la conclusion qu'il serait extrêmement bénéfique si l'office parvenait à dégager un consensus sur les actions à entreprendre, effectuait une fonction de conseil auprès des différents ministères et faisait évoluer la mentalité du public. Je pense que c'est là, en fait, ce que devrait être la vocation véritable de l'office, au moins les grands objectifs sur lesquels il devrait concentrer son action. Pour ma part, je regrette qu'on ait tenté d'énumérer, d'une façon presque exhaustive, un tas de fonctions qui vont revenir à l'office et qui, finalement, malgré les bonnes intentions exprimées par le ministre — que, d'ailleurs, je crois très sincère... Mais, une fois que la loi est en vigueur et que l'office est structuré d'une telle façon, les pouvoirs du ministre sont tout à coup beaucoup plus restreints quant au développement de ce type de structure.

Là-dessus, je partage vos préoccupations et, si je reviens à la charge, c'est que j'espère que, au moment des amendements que le ministre fera possiblement, nous a-t-on laissé entendre, même dans la rédaction d'un nouveau projet — enfin, un nouveau projet ou celui-ci amendé — on puisse vraiment en tenir compte.

Vous faites également des recommandations qui sont intéressantes à l'égard des ateliers protégés qui devraient faire davantage partie de notre économie et, là-dessus, ce même groupe, auquel je faisais allusion tout à l'heure, mentionnait cette possibilité qu'il relève éventuellement du ministère de l'Industrie et du Commerce. Est-ce que c'est là la meilleure réponse? Je ne le sais pas, mais je pense que c'est avec la même préoccupation que la vôtre. Finalement, tant qu'on reste dans le domaine des sous-contrats, on risque fort de faire travailler les gens à rabais et de perpétuer cette idée que, finalement, c'est un service d'assistance sociale qu'on met à leur disposition, au lieu de vraiment tenter de les considérer comme des personnes que l'on intègre à tout point de vue.

Un autre point que vous faites valoir — et là-dessus, je pense que vous nuancez votre pensée — c'est le rôle que l'office va jouer vis-à-vis de la reconnaissance des organismes de promotion et ce pouvoir discrétionnaire qui va leur revenir. Je pense qu'on ne saurait être jamais trop vigilant quant au type de critères qui va être adopté par l'office et quant au jugement qu'il va porter sur sur leur reconnaissance comme étant des organismes pouvant promouvoir les intérêts des personnes handicapées. Je pense que, à un moment donné, dans une situation de conflit ou peut-être... J'espère que l'office, comme d'autres, se fera contester; quand c'est fait dans des limites raisonnables, je pense que c'est un signe de santé et ça doit exister, mais il ne faudrait pas que, par contre, l'office succombe à une tentation de boycotter ou peut-être décourager certains mouvements qui

voudraient, justement, s'organiser avec des objectifs qui veulent vraiment la promotion des personnes handicapées. Il y a une question plus précise que je vous demanderais peut-être d'expliciter, compte tenu de l'expérience que vous avez eue à l'intérieur du ministère et peut-être aussi même dans vos fonctions actuelles. Même si je sais que vous oeuvrez dans le territoire de la ville de Québec, vous avez peut-être des contacts avec des gens de l'extérieur.

C'est à la page 6, où vous dites que le gouvernement ne devrait pas brusquer l'évolution, compte tenu des différences qui peuvent exister entre ce qu'on retrouve en milieu urbain et en milieu rural. Je me demandais si vous pouviez expliquer comment vous concevez la nécessité de réajustement de certaines orientations du gouvernement qui tiennent compte des régions rurales. Quels sont les points les plus précis que vous aviez en tête à ce moment-là?

M. Bolduc: En fait, toute la politique, je pense, est orientée vers — c'est normal — une intégration à tous les points de vue, au travail, au point de vue social, au niveau de la vie en appartement ou dans une ressource la plus intégrée possible. Je pense que toute le monde s'entend en termes d'objectifs, mais comme je disais dans le mémoire, il faut tenir compte quand même de l'évolution et de la situation telles qu'elles ont été au Québec depuis toujours.

On part de vraiment loin, dans les campagnes et même en ville et il y a quelques années surtout, les personnes handicapées, c'était clair qu'elles vivaient de façon exclue à tous les points de vue. Cela allait presque de soi dans la mentalité populaire. Alors, les personnes handicapées qui ont vécu cela pendant toute leur jeunesse et pendant une partie importante de leur vie adulte et qui sont rendues à 40 ou 50 ans aujourd'hui, il ne faut pas s'imaginer que tout ce monde va changer de cap du jour au lendemain et va se réorienter tout d'un coup vers une vie intégrée. Il y a des gens qui ne subiront pas ces changements, qui, à mon avis, ne seront pas bien là-dedans et je pense qu'il faut les respecter. Ce sont des personnes qui ne voudront pas s'embarquer là-dedans. Je pense qu'il faudra leur donner les conditions qu'elles veulent. Il y en a qui vont préférer demeurer en institution. Il y en a qui vont préférer des formules beaucoup moins intégrés que ce qu'on propose. Je pense que nous n'avons pas le choix. Il ne faudrait pas, autrement dit, brusquer le monde. Il ne faudrait pas forcer les gens à s'intégrer. Cela se fait, parfois, et je pense que c'est dommage.

Mme Lavoie-Roux: II y a un autre point que vous soulevez en page 44, c'est la question à savoir qui va s'occuper des services de placement du Québec. C'est-à-dire que ce sont les services du placement du Québec qui vont s'occuper des personnes handicapées, mais votre proposition est assez ambivalente. Vous exprimez des doutes à savoir si le ministère du Travail peut vraiment remplir cette fonction alors que d'autre part, vous semblez penser que ce serait réellement une responsabilité du ministère du Travail de s'occuper de ce service.

Je me demande si le ministre des Affaires sociales pourrait nous dire... Je demandais, M. le ministre, quels sont, en fait, les contacts que vous avez eus avec le ministre du Travail ou le ministère du Travail pour améliorer le service de placement du Québec? Cela a toujours été une tradition, cela a toujours relevé du ministère du Travail, mais on sait que cela a toujours été fort problématique. Ce n'est pas parce qu'il y avait un manque d'expression de besoins ou une non-reconnaissance des besoins, mais jusqu'à quel point le ministère du Travail, par exemple, a-t-il été consulté sur un projet comme celui-ci? Quelle est son ouverture? Y a-t-il des signes concrets qui nous permettent d'évaluer cette ouverture?

M. Lazure: M. le Président, il n'y a pas des signes aussi concrets que dans le cas du ministère des Transports auquel je faisais allusion tantôt. Evidemment, c'est beaucoup plus complexe, mais le ministre du Travail a participé à l'élaboration du projet de loi no 9 depuis un an, dans le cadre du comité pour le développement social. L'ébauche du projet de loi a été travaillée au niveau des fonctionnaires et ensuite a été discutée à plusieurs reprises par fe comité de développement social. A ce titre, comme membre du comité de développement social, le ministre du Travail y a participé, donc il est très conscient qu'il faudra, éventuellement, améliorer l'expertise de notre personnel dans les bureaux de Main-d'Oeuvre Québec. Tout le monde constate qu'il y a place pour énormément d'amélioration de ce côté-là. Je ne peux pas donner plus de précisions. Le ministre du Travail, comme le gouvernement, dit: En principe, il faut que nos bureaux de Main-d'Oeuvre Québec soient aptes, le plus tôt possible, à fournir ces services aux personnes handicapées.

On espère qu'avec une loi comme celle-ci, avec la création d'un office, on espère que ce mouvement ira assez rapidement, mais je peux vous dire qu'il n'y a évidemment pas de blocages au niveau des principes. Il s'agira de former, comme un bon nombre de mémoires l'ont souligné, il faudra qu'il y ait une amélioration de l'entraînement, de la formation du personnel des centres de main-d'oeuvre du Québec.

Mme Lavoie-Roux: Dans la formation de l'office, présentement, vous prévoyez onze personnes. Prévoyez-vous qu'il y aura des représentants des différents ministères concernés?

M. Lazure: II y a quatre postes qui, dans le texte, sont réservés à des ministères.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Lazure: Je suis enclin de plus en plus à augmenter, comme plusieurs mémoires nous l'ont suggéré, le nombre des membres à l'office, au conseil d'administration de l'office, si on peut dire.

Le chiffre quinze a été répété à plusieurs reprises; cela me paraît un bon chiffre au moment où on se parle.

Il y aurait peut-être lieu, à ce moment-là, d'augmenter le nombre des ministères représentés, de l'augmenter à cinq ou à six.

Mme Lavoie-Roux: Merci. Je vous remercie, M. Bolduc.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: Merci, M. le Président. Je n'ai pas de question, je voudrais seulement, pour ma part, féliciter M. Bolduc, parce que son mémoire était complet. Cela représente une étude formidable. Je n'ai aucune question.

M. Lazure: Je remercie encore une fois M. Bolduc pour son excellent mémoire.

Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie au nom de tous les membres de la commission. J'inviterais maintenant le Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec à venir nous présenter son mémoire. M. Larose est-il là? Je vous inviterais à présenter vos collègues qui vous accompagnent et à nous résumer ou nous lire l'essentiel de votre mémoire.

Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec

M. Larose (Jacques): M. le Président, M. le ministre, honorables membres de la commission, nous sommes du Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec. Je suis Jacques Larose, président du regroupement. A ma droite, se trouvent Claude Chatelain, membre du regroupement et France Marcotte, conseiller à l'administration.

Le regroupement existe depuis juin 1975. Il est un organisme composé uniquement de handicapés visuels. Pour l'instant, nous sommes environ 110 membres et nous sommes en constant recrutement.

Les objectifs du regroupement sont les suivants: Favoriser une participation à part entière des handicapés visuels à tous les domaines de l'activité humaine; promouvoir une meilleure pensée, dans le monde des aveugles et au sujet des aveugles, par une action dynamique des handicapés visuels et, d'autre part, promouvoir les meilleurs intérêts des handicapés visuels.

Nous ne lirons pas notre mémoire, parce que vous en avez déjà copie. D'autre part, il y a cependant des points que nous voudrions mieux défendre. Il y aura quelques commentaires que nous nous permettrons de lire, parce que nous les jugeons plus importants. Nous pensons expliquer notre mémoire à tour de rôle, selon nos possibilités.

M. Chatelain (Claude): Dans l'introduction du mémoire, nous faisons allusion à une contradiction des rôles de l'office projeté, considérant que l'office pourrait devenir juge et partie en apportant une confusion entre ce qu'on pourrait appeler la protection ou le libre exercice des droits des personnes, par rapport aux services que l'office voudrait donner. Il nous semble qu'il serait arbitraire de prévoir un mécanisme qui pourrait à la fois porter jugement sur des services qu'il est destiné à rendre à une catégorie d'individus. Par contre, nous avons trouvé des choses positives, parce qu'il faut bien admettre que si on commence par soulever le problème de la contradiction des rôles, nous avons quand même trouvé que le projet de loi 9, contrairement au projet de loi 55, avait tenu à ajouter de nouvelles catégories de participation au niveau du conseil de l'office, c'est-à-dire le représentant des salariés et des représentants des milieux des patrons ou des gens qui sont susceptibles de reconnaître la compétence des personnes handicapées.

Par ailleurs, nous sommes un peu déçus du fait qu'on n'ait pas augmenté depuis la loi 55 le nombre des représentants effectifs des personnes handicapées elles-mêmes. Nous avions alors proposé, à la présentation de la loi 55, d'augmenter la représentation ou de nous donner une représentation de six personnes. D'autre part, à cause du caractère global de la composition de l'office, c'est-à-dire un office qui représenterait toutes les catégories de personnes handicapées, nous pensons qu'il serait de mise de développer à l'intérieur ou parallèlement à l'intérieur des offices un certain nombre de comités qui se rapporteraient aux différentes catégories d'individus représentés.

M. Larose: Si on passe à l'étude de certains articles, par exemple, si on prend l'article 1, paragraphe m), on demande d'ajouter à la définition des handicapés tout simplement le mot "sensoriels", parce qu'on pense qu'il y a quand même une distinction à émettre entre les handicapés physiques, les handicapés sensoriels et les handicapés mentaux, car on trouve que ce serait une façon d'enlever un caractère trop global à l'Office des handicapés. De même, cela nous permettrait aussi que chaque type d'handicapé soit mieux représenté à cet office. D'autre part, à l'alinéa 1p, nous demandons que les textes ou les échanges entre l'office et certains handicapés, par exemple les handicapés visuels, se fassent par écrit, et cela pourrait être fait en braille, parce qu'on pense que c'est un moyen de faciliter aux handicapés un moyen de communication.

On demande que ce soit en braille ou encore par enregistrement sonore.

M. Chatelain: Cet article pourrait s'appliquer également à l'article 30, lorsqu'il est question de la documentation de l'office, l'article 30, paragraphe d), et aussi à l'article 31, paragraphe e). Lorsqu'il y a publication des statistiques, les personnes handicapées pourraient à ce moment, consulter ces documents s'ils étaient produits dans le mode de lecture qui convient à chaque catégorie. A l'article 4, identification d'un logement occupé par une personne en fauteuil roulant, nous ne voyons pas pourquoi cette identification ne pourrait pas être

accessible à toute personne handicapée qui en ferait la demande. Nous étions heureux ce matin d'entendre certains organismes expliquer qu'il faudrait quand même que ce symbole soit suffisamment discret pour ne pas créer des situations où les handicapés pourraient être victimes de toutes sortes de choses, de vols, etc.

A l'article 13, au début du texte, nous suggérons treize membres. J'étais heureux, tout à l'heure, d'entendre le ministre dire qu'il s'en allait jusqu'à quinze. Moi, ça me réjouit, et je trouve que c'est déjà... D'ailleurs, ça me permet aussi de souligner que, pendant toute la matinée, nous avons été heureux de constater que non seulement les membres de la commission et les participants, mais que le ministre avait adopté une attitude très souple face aux recommandations que nous étions en train de lui proposer par le biais des mémoires.

Cela nous réjouit, parce que nous avions participé, à l'été, à la consultation qui a été faite par M. Garcia et, à ce moment-là, on avait drôlement l'impression, en écoutant parler M. Garcia, que le projet de loi était déjà écrit et qu'il était déjà adopté. L'attitude nouvelle que cette commission semble développer nous fait penser que nous allons éventuellement trouver un projet de loi qui répondra au moins à l'ensemble des préoccupations que les handicapés ont.

Le Président (M. Marcoux): Ce qui prouve que M. Garcia vous a bien écoutés.

M. Chatelain: Oui.

A l'article 13b, pour ce qui est de la représentation des personnes handicapées, c'est peut-être le paragraphe qui nous intéresse le plus. Etant donné que le ministre aime les choses très claires, on l'a aidé un petit peu en lui proposant, dans le paragraphe m) de l'article 1, de faire trois catégories de handicapés: sensoriel, physique et mental. A ce moment-là, ça lui permettrait de mettre deux personnes par catégorie et il arriverait à six, notre chiffre.

A l'article 18, pour ce qui est du quorum de l'office, nous considérons important qu'au moins la moitié des représentants des personnes handicapées soit présente aux séances de l'office. Pour nous, c'est un prérequis pour une participation complète des personnes handicapées. On ne voit pas pourquoi 50% des représentants des personnes handicapées ne pourraient pas être présents aux séances de l'office. Cela s'appliquerait également à l'article 24, lorsqu'il est question du comité exécutif de l'office, parce que nous aimerions, là aussi, obtenir la garantie d'une participation suffisante des représentants des personnes handicapées en obligeant le comité exécutif à se nommer au moins un autre membre en plus du vice-président, qui devrait être une personne handicapée.

M. Larose: Nous voulons aussi, à l'article 29, que le ministre puisse émettre des directives sur les politiques et l'orientation de l'Office des handi- capés, mais on croit qu'il pourra le faire après consultation de l'office.

A l'article 30, nous demandons de supprimer l'alinéa a), parce que, justement comme on le disait au début, on trouve que l'office ne peut garantir les droits des individus et, à la fois, offrir des plans de services. On pense que tout ce qui touche le côté plan de services, intégration sociale, réinsertion au milieu du travail et tout ça, on pense que ça devrait d'abord relever des centres de réadaptation pour les divers handicapés, et que l'office, au fond, deviendrait un organisme où l'individu peut faire appel. Je devance peut-être un petit peu, mais si, à ce moment, l'individu n'est pas satisfait du jugement de l'office, il pourrait toujours en appeler de la Commission des droits de la personne.

M. Chatelain: A l'article 33b, carte d'identité, nous ne voyons pas pourquoi cet article serait retranché du projet comme il a souvent été demandé par des organismes.

Evidemment, nous sommes conscients de la nécessité pour les individus de conserver leur libre droit d'avoir cette carte ou de ne pas l'avoir. C'est cela qu'il serait important de dire dans le projet de loi, que la carte est remise à la personne qui en fait la demande seulement. Il y a peut-être des raisons très concrètes et très pratiques à cela. C'est que, souvent, comme on l'a entendu dire, et dans le mémoire de M. Bolduc précédemment, les organismes soi-disant de promotion font leur promotion et non la nôtre. Et c'est peut-être nécessaire pour nous, même si c'est marginalisant, pour employer un mot à la mode, dans le moment, d'être obligés de prouver au moyen d'une carte que nous sommes des handicapés, c'est peut-être nécessaire, pour éviter justement d'être confrontés à des situations qui sont dégradantes plus que positives.

A l'article 38, pour ce qui est de la consultation des organismes de promotion, je vais demander à France de lire le commentaire que nous avions rédigé à ce moment-là.

Mlle Marcotte (France): "II me semble important d'inclure cette obligation pour assurer que l'office soit toujours au courant des préoccupations des personnes concernées. L'office pourrait également consulter les organismes de promotion sur d'autres questions."

M. Chatelain: C'est que, pour nous, la consultation des organismes de promotion ne nous semble pas seulement un pouvoir, mais c'est un devoir, sur les questions relatives aux objectifs de l'office, les priorités que l'office envisage et les questions de son action.

M. Larose: A l'article 42, sur la question de l'agrément des ateliers protégés, nous pensons que l'office "doit" accorder un permis, et non pas "peut", parce que, s'il doit accorder un permis, il devra aussi l'enlever pour cause. Pour ce qui est de l'embauche, dans les ateliers protégés et, en

général, pour ce qui est des handicapés, nous pensons aussi que tout cela devrait relever des centres de réadaptation et qu'encore une fois, justement à cause de notre position à l'égard de l'article 30, alinéa a), nous pensons que beaucoup de ce qu'on veut donner comme fonction à l'office devrait relever des centres de réadaptation.

M. Chatelain: A l'article 52, admissibilité à un plan de services, c'est la même chose, cela découle de ce que nous avons dit au sujet du paragraphe a) de l'article 30; que les centres de réadaptation... d'ailleurs je ne vois pas pourquoi le ministère multiplierait des mécanismes qui font la même chose. Si on demandait au Vérificateur général du Québec de faire une étude systématique, une analyse systématique des coûts et du dédoublement, c'est, je pense, ce qu'on dit en comptabilité, de vérifier comment les dollars qui sont dépensés pour donner certains services aux handicapés ne sont pas doublés, je crois que le vérificateur pourrait trouver les choses assez intéressantes.

A l'article 55, droit d'appel relatif à un contrat de services, nous voulons apporter une certaine précision au sens du mot "commission", en nous référant très spécifiquement à la Commission des droits de la personne. Comme certains groupements l'ont dit avant nous, les droits relèvent de la Charte des droits et libertés de la personne et, à ce titre, nous pensons qu'il serait peut-être préférable que tout appel, que des appels où l'individu se sent victime de discrimination, devraient se faire à la Commission des droits de la personne. Nous ne sommes pas tout à fait certains que la Commission des affaires sociales soit aussi accessible que le ministre l'a dit ce matin. On ne peut pas apporter de preuves concluantes, mais, en écoutant parler les gens, on a parfois l'impression que cela est assez compliqué.

A l'article 57, le plan de services, c'est toujours la même question, qui relève de l'abrogation du paragraphe a) de l'article 30.

Passons aux articles 60 à 67 inclusivement, en ce qui a trait à l'aide matérielle. Nous avons un commentaire que France pourrait lire.

Mlle Marcotte: L'aide matérielle qui est accordée sous forme de prothèse et orthèse devrait être offerte sans préjudice et selon les dispositions de la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Dans aucun cas, ces aides mécaniques ou autres ne devraient être incluses dans le calcul de l'admission à l'aide financière.

M. Chatelain: Selon nous, d'après le texte, l'aide matérielle ne semble être disponible qu'aux bénéficiaires d'un plan de service. Nous posons la question suivante: Qu'adviendrait-il des besoins des personnes déjà intégrées au marché du travail, qui ont besoin d'aide spécifique pour être autonomes dans le type d'emploi dans lequel elles sont affectées?

M. Larose: Pour ce qui est de l'article 70, ré- munération d'un bénéficiaire d'un contrat d'intégration au marché du travail, nous demandons que le salaire minimum soit accordé, particulièrement dans les ateliers protégés. Il faut que cela devienne un peu plus valorisant de travailler en atelier protégé, et ce, pendant toute la durée d'un contrat de service, et qu'on ne joue pas, comme on a déjà eu des entretiens avec des handicapés visuels et qu'on leur dise: On ne peut pas te donner le salaire minimum, parce que tu es dans un plan de formation. Quand il serait prêt, quand on lui dit: Ta formation est terminée, il dit: Donnez-moi le salaire minimum, on dit: Non, on va t'ensei-gner une autre technique, et on ne peut pas te donner le salaire minimum.

Je trouve que c'est un peu jouer sur les mots et il faudrait que cette situation change, en permettant que l'office ou les différents ministères puissent donner des subventions qui permettent d'attribuer le salaire minimum à ceux qui travaillent en atelier protégé.

A l'article 73, pour ce qui est du congédiement d'un employé quand il devient handicapé, on se demande pourquoi les industries ou les sociétés qui ont 50 salariés et moins seraient soustraites à ce règlement.

M. Chatelain: On pourrait faire une certaine boutade et dire que tous les partis de l'Opposition seraient mal pris si un de leurs membres perdait la vue, parce qu'ils seraient obligés de le congédier. Il n'y aurait que le parti au pouvoir, actuellement, qui pourrait tolérer un de ses membres handicapés. C'est peut-être un peu caricaturer l'article, mais je pense que les députés, les membres de cette commission, devraient se placer à notre place et se voir un peu handicapés en essayant d'évaluer ce que cela représente.

On ne voit pas pourquoi on serait discriminé quand on n'est que 30, 25, 40. Je suis d'accord avec le ministre que, dans certains cas très particuliers, dans une entreprise de dix à douze personnes, peut-être n'y a-t-il pas moyen de reclasser, mais il reste qu'il faudrait tenir compte de la preuve que la personne est apte à fournir de sa compétence.

M. Larose: Pour ce qui est de l'article 87, le droit à la scolarisation, on est heureux que l'extension soit portée jusqu'à l'âge de 21 ans, mais on voudrait aussi que ceci s'applique au niveau de l'éducation permanente des adultes.

A l'article 88, incapacité pour un handicapé d'occuper un poste, on pense que c'est quand même très arbitraire de laisser à la seule foi d'un certificat médical de faire la preuve de l'incapacité d'un handicapé de continuer d'occuper son emploi. On pense qu'on devrait laisser une chance à cet handicapé de faire la preuve qu'il a encore la compétence et la capacité d'occuper cet emploi.

Aussi, nous avons cru utile de modifier les articles 31, 31e), 32, 33, 35, 38, 40, 42, 50. On voulait que le mot "peut" soit changé par le mot "doit", "l'office doit", parce que l'office, dans ces cas bien précis ne devrait pas jouir d'un pouvoir, mais

devrait pratiquer un devoir à l'endroit des personnes handicapées.

Je vous remercie de nous avoir entendus.

Le Président (M. Marcoux): Monsieur, je vous remercie de la présentation de votre mémoire. M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, je remercie beaucoup le Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec de leur mémoire bien détaillé, bien précis. Commençons d'abord par l'office. Vous craignez que l'office soit juge et partie dans certaines situations. Je pense qu'il faudra distinguer avec les amendements que nous allons apporter, un conflit d'intérêts où les droits de la personne handicapée seraient en jeu. A ce moment, je pense que le recours sera la Commission des droits de la personne.

Il y a d'autres situations où la personne handicapée, sur le plan d'une décision administrative, pourrait se sentir lésée. A ce moment, je ne pense pas qu'il soit nécessaire de recourir à chaque fois à la Commission des droits de la personne. Nous pensons qu'il est plus efficace, plus rapide de recourir à la commission des affaires sociales. Ce n'est pas sur une position de principe, c'est une position très pratique, très réaliste. J'ai eu l'occasion d'en parler un peu ce matin. La commission des affaires sociales, jusqu'à preuve du contraire pour nous, accomplit, un très bon travail, et de façon assez expéditive.

Votre suggestion aussi de distinguer trois groupes principaux de personnes handicapées, soit les personnes handicapées physiquement, mentalement et, troisièmement, au plan sensoriel, dit que ce serait plus clair, mais à première vue seulement. L'expression "handicapé sensoriel" est vraiment incluse dans l'expression "handicapé physique". Les sept sens font vraiment partie du physique de l'individu.

Si on isole les handicapés sensoriels, on ouvre la porte à une série de demandes d'autres sortes de personnes handicapées qui vont vouloir aussi qu'on identifie leur sous-catégorie de handicap. Encore une fois, je ne suis pas contre, sur un plan de principe, mais au plan pratique, cela me paraîtrait très difficile d'accepter votre suggestion et de ne pas l'accepter ensuite pour d'autres sortes de handicaps particuliers.

Quant à la carte sur demande, c'est notre position qui a été exprimée à plusieurs reprises la semaine dernière. Quant à l'aide matérielle, vous avez raison de dire que c'est rattaché au plan de service, mais un plan de service, à la rigueur, pourrait n'inclurequecelade l'aide matérielle. On peut imaginer des cas où un plan de service serait constitué, de façon temporaire, seulement d'aide matérielle. Donc, il y a avantage à ne pas trop préciser le genre de situation où l'office pourrait dispenser une aide matérielle. Encore une fois, cela serait toujours fait dans l'optique où il n'y a vraiment personne d'autre qui serait en mesure d'offrir l'aide matérielle. Il n'y aurait vraiment aucun autre organisme tei qu'aide sociale, ou organisme exis- tant — je constate que c'est difficile à imaginer, mais c'est quand même concevable, parce que l'office doit jouer ce rôle de suppléance en dernier recours seulement.

En ce qui concerne votre demande un peu particulière de définir ce que les mots "par écrit" signifient. Par cela, vous voulez vous assurer, au fond, du droit, pour une personne handicapée visuellement surtout, d'utiliser le braille, ou encore un enregistrement sonore, comme moyen de communication avec l'office.

Nos légistes, nos experts donnent aux mots "par écrit" une interprétation très large. A partir du moment où, dans la Charte des droits et des libertés de la personne, par l'amendement que nous allons suggérer à l'article 10, on ne peut pas discriminer contre la personne handicapée, ou sa prothèse, il est évident que l'office et tout autre organisme public seraient obligés d'accepter le médium de communication qui est le plus approprié au handicap de la personne.

Atelier protégé, salaire minimum. Le texte du projet de loi no 9 dit clairement que le salaire minimum sera versé dans le cas des personnes en cours d'intégration professionnelle. Ce n'est peut-être pas dit aussi clairement dans le cas des ateliers protégés, mais si on retourne à l'article 86 on dit: "L'article 15 de la Loi du salaire minimum est abrogé". Ceci veut dire que notre loi enlèverait l'exclusion que fait actuellement la Loi du salaire minimum pour des emplois du genre des ateliers protégés.

En d'autres termes, dans l'article où on parle de l'emploi en atelier protégé, l'article 42b: "L'office qui emploie en majorité des personnes handicapées, etc.", à ce moment, dans l'interprétation que les légistes font, il y aurait une application de la Loi du salaire minimum pour les personnes employées dans un atelier protégé.

Je pense, M. le Président, que cela complète mes remarques pour le moment.

Le Président (M. Marcoux): Avez-vous des commentaires à faire sur les propos du ministre?

M. Larose: II y a seulement sur la subdivision entre handicapé sensoriel et physique, que nous pourrions en faire. Je pense qu'il est évident que, même à l'intérieur des handicaps tels qu'on les conçoit comme visuels et auditifs, on pourrait faire de multiples distinctions. C'est pour cela qu'on s'en est tenu uniquement à trois grandes catégories plutôt qu'à deux.

Le Président (M. Marcoux): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais remercier le Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec de son mémoire. Je pense qu'il a vraiment étudié attentivement le projet de loi et qu'il fait des recommandations intéressantes dans un grand nombre d'articles.

La seule question que je voudrais lui poser, parce que je pense que le ministre a repris plu-

sieurs des interrogations que vous souleviez, est celle-ci: Vous souhaitez la création de commissions permanentes de l'office. Votre préoccupation vient du fait que vous croyez que, évidemment, l'office, étant limité quant au nombre de ses membres, vous avez l'impression que peut-être certains types de handicaps pourraient être oubliés ou qu'on ne leur accorderait pas l'importance qu'ils mériteraient.

Ne croyez-vous pas que la création de ces commissions permanentes viendrait grossir davantage tout le fonctionnement de l'office et que cela ne devrait pas demeurer quand même une responsabilité de chacun des organismes de promotion qui sont reliés à des handicaps particuliers, de jouer ce rôle de chien de garde auprès de l'office afin que, justement, même si on ne retrouve pas toutes les catégories de handicaps dans la formation de l'office, on puisse quand même répondre aux besoins de ces différentes catégories?

M. Chatelain: Nous sommes très conscients du fait que la bureaucratie et tout ce qui en résulte alourdissent et compliquent la consultation et les échanges nécessaires à une orientation dynamique de la part de l'office. Nous avons hésité à la proposer.

La raison pour laquelle nous l'avons fait, c'est parce que dans le projet de loi no 9, il était question de la possibilité pour l'office de constituer des comités techniques ou des comités spéciaux pour faire certains travaux; mais c'était rédigé un peu dans le style "peut" et nous, nous avons voulu pousser la chose un peu plus loin pour dire: Ecoutez! Il faudrait peut-être que ce soit "doit en faire" de temps à autre. Alors, on serait, nous autres, raisonnablement satisfaits si, dans la future loi, il était prévu que l'office, chaque fois qu'il est question de problèmes ou de préoccupations relatifs aux orientations, aux priorités de l'office, disons ces deux grands éléments surtout, et les objectifs évidemment, que l'office devait consulter les organismes de promotion et les groupements intéressés, à ce moment-là, probablement qu'on serait satisfait.

On a demandé un petit peu plus pour en avoir au moins un peu.

Mme Lavoie-Roux: L'autre question que je voudrais vous poser est relative à votre recommandation sur l'article 30 d'abroger l'alinéa a). A votre point de vue, cette fonction revient au centre de réadaptation, et je pense que la préoccupation que vous exprimez l'a été par plusieurs organismes, à savoir qu'il ne faudrait quand même pas substituer aux différents centres de réadaptation ou aux différentes instances régionales, locales, soit par le truchement des CLSC ou différents organismes reliés au ministère des Affaires sociales, on ne devrait quand même pas substituer l'office a tous ces organismes.

Je me demande si la réponse que le ministre vous a donnée à ce sujet — et j'ai cru comprendre que c'était en dernier recours que l'office assume- rait de telles responsabilités — vous apparaît satisfaisante. Moi, j'aurais peut-être aimé, pour ma part, une assurance un peu plus grande de la part du ministre, selon laquelle peut-être ceci serait spécifié davantage dans la rédaction finale du projet. Parce qu'on court continuellement ce danger que l'un se substitue à l'autre et quand on sait qu'il y a une autre place où on peut aller, finalement, on ne trouve jamais satisfaction à l'endroit où devraient, le plus normalement possible, se donner les services.

M. Chatelain: Oui, je pense que c'est pertinent à notre pensée. Les handicapés visuels et certains autres groupes de handicapés jouissent de centres de réadaptation depuis tout dernièrement — ils sont officialisés maintenant — et ça nous semblerait un peu du gaspillage de nos investissements sociaux que de dédoubler ou de faire double emploi dans ce domaine. Mais, par contre, la préoccupation du ministre ne peut pas être située au niveau de certaines... Je ne veux pas interpréter. Le ministre est bien capable de se défendre seul. Mais il y a peut-être d'autres catégories de handicapés, de personnes handicapées, qui ne jouissent pas encore de centres adéquats de services en réadaptation, et c'est peut-être à ce titre-là que l'office jouerait un rôle. Mais je trouve que c'est dangereux quand même. On maintient notre point de vue qu'il y aurait possibilité de conflit...

Le ministre est bien capable de se défendre seul. Mais il y a peut-être d'autres catégories de handicapés, de personnes handicapées, qui ne jouissent pas encore de centres adéquats de services en réadaptation, et c'est peut-être à ce titre-là que l'office jouerait un rôle. Mais je trouve que c'est dangereux quand même. On maintient notre point de vue qu'il y aurait possibilité de conflit...

M. Larose: C'est, en fait, pourquoi on demande aussi cette abrogation. C'est qu'on se dit que, finalement, l'Office des handicapés, étant constitué de personnes venant de différents milieux, ne peut pas avoir la compétence et la connaissance de chaque handicap qu'un centre de réadaptation peut offrir et d'un handicap bien spécifique. A ce moment-là, on se dit qu'il vaut mieux laisser cette fonction aux centres de réadaptation et, évidemment, en dernier recours, que ce soit l'office qui le fasse, si ce n'est pas fait, mais il vaudrait mieux qu'un centre de réadaptation soit créé avant que l'office ne doive le faire.

Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie, messieurs, madame.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: Merci, M. le Président. Premièrement, votre position sur l'article 18, relativement au quorum de l'office, est très valable. Vous dites premièrement que la situation qui concerne les aveugles, le quorum de l'office, en étudiant ce sec-

teur, ces problèmes, doit inclure une moitié des représentants de ces groupes. Est-ce ce que vous dites?

M. Chatelain: Oui, c'est-à-dire que les personnes handicapées qui sont concernées soient là. Ce n'est pas nécessairement parce qu'on va discuter des handicapés visuels qu'il faut que ce soient seulement eux, mais que les représentants des handicapés, globalement, soient au moins représentés à 50%.

M. Larose: Pour que les décisions qui seront prises soient quand même en accord avec les handicapés qui sont à l'office. C'est pour cela qu'on demande un quorum de 50% composé de handicapés ou de leurs représentants, dans certains cas.

M. Shaw: Vous nous avez souvent dit que vous voulez faire changer le mot "peu" pour le mot "doit". Vous exigez peut-être quelque chose qui est trop difficile pour le gouvernement pour le moment, parce que cela implique une dépense incroyable quand on dit: Le gouvernement "doit", dans chaque secteur de loi que vous prévoyez.

Vous avez parlé tantôt de gaspillage de temps par les fonctionnaires, en faisant double emploi, mais, en même temps, vous dites que vous voulez faire changer le mot "peut" par le mot "doit". Est-ce que vous avez des...

M. Larose: On trouve que c'est une nécessité. Si on a un office, on veut qu'il exerce ses fonctions et, à ce moment, on ne veut pas lui laisser une possibilité, mais on veut lui en faire une obligation, un devoir. Si on a un office, on veut qu'il s'applique ou qu'on n'en ait pas du tout.

M. Shaw: Oui...

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Lazure: Si vous permettez, M. le Président, j'aimerais demander au groupement qui est devant nous ce qu'il pense de la discussion que nous avons eue avec deux autres groupes, aujourd'hui, sur la possibilité de mettre sur pied une école pour chiens-guides.

M. Chatelain: Sur cette question, je pense que le groupement des chiens-guides est sûrement mieux placé que nous, sur le plan spécifique du problème, pour faire des suggestions dans ce sens. Nous sommes aussi d'accord avec ce groupe que beaucoup de mythes ont longtemps été véhiculés dans le Québec au sujet des chiens-guides. De plus, je pense qu'on pourrait ajouter à cela qu'il y a deux prérequis à l'acquisition d'un chien-guide par un individu, c'est d'abord d'aimer les animaux et aussi d'être suffisamment mobile et en mesure de s'en occuper. C'est peut-être simplifier, mais c'est quand même, je pense, être réaliste que de penser dans ce sens.

Les études statistiques dont on dispose sur la question sont très incomplètes et je pense que, quand on parle, par exemple, de 20, 30 ou 40 chiens par année, c'est peut-être pensable, prévisible que ce soit ça, mais en tant que regroupement, nous appuyons toute recommandation en vue de l'établissement futur d'une école pour le dressage, l'entraînement, etc., de chiens-guides, mais, pour nous, il y a quand même une étude de rentabilité et de planification qui tienne vraiment compte des besoins; qu'on fasse faire les statistiques, s'il le faut, et qu'on se donne les outils nécessaires pour vraiment avoir l'image complète de la situation.

M. Lazure: Je vous remercie, madame et messieurs du regroupement.

Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie, au nom de tous les membres de la commission, d'être venus, par cette journée de tempête, présenter votre mémoire.

J'aimerais maintenant inviter M. Gilles La-grange à venir nous présenter son mémoire.

M. Gilles Lagrange

M. Lagrange (Gilles): M. le Président, messieurs les membres de la commission, M. le ministre, plusieurs organismes ont présenté des correctifs dans les articles de la loi. Je n'ai pas voulu faire cela, parce que j'ai pensé que cela allait être fait par d'autres et je me suis permis d'apporter quelque chose de beaucoup plus spécifique en ce qui touche le quotidien des aveugles. Je vais parler un peu de la mobilité, quelques correctifs que je voudrais voir apportés aux articles de la loi. Je parlerai aussi des barrières architecturales et du logement. Je vais vous lire quelques points que je considère assez importants dans ce mémoire-ci et après, je vais lire des suggestions que je fais pour apporter des correctifs. Mais c'est surtout dans les règlements de son application que je voudrais avoir cela, parce que c'est plutôt spécifique ce mémoire, en ce qui concerne le quotidien des handicapés visuels.

D'abord la canne blanche. Sauf dans le livre blanc, chapitre 5, formation et réadaptation, disponibilité des orthèses et prothèses payées par i'assurance-maladie du Québec, à ma souvenance, on ne parle pas spécifiquement de la canne blanche. Selon des statistiques de l'INCA, il y a environ 7400 aveugles dont la vision est moins de 20/200. La canne blanche étant considérée comme un objet utile à la mobilité, dans aucun article du projet de loi no 9 en fait-on référence, à la canne blanche. Parmi les handicapés visuels qui ont besoin d'une aide, pour faciliter leur déplacement, 98% d'entre eux utilisent la canne blanche. Donc, la canne blanche peut être encore considérée comme un instrument de travail essentiel pour l'orientation en ce qui concerne la mobilité des aveugles.

Le chien-guide. D'autre part, on a judicieusement prévu, dans le projet de loi 9, diverses mesures pour faciliter l'acceptation et l'accès de pres-

que tous les lieux publics aux aveugles accompagnés de chiens-guides. Je crois qu'il est important de se rappeler qu'il n'y a que 90 utilisateurs de chiens-guides au Québec. Il n'en demeure pas moins qu'il faut être très habile pour utiliser adéquatement un chien-guide et en retirer des avantages sérieux.

En ce qui concerne les barrières architecturales. Inclinaison des trottoirs. Dans les différentes mesures prévues, on convient qu'il faudrait donner des directives aux entrepreneurs publics pour planifier les trottoirs et édifices publics pour faciliter l'accès aux fauteuils roulants. Aider ces handicapés et fort louable, mais il est suggéré de construire des trottoirs dont la bordure extérieure serait inclinée pour favoriser les fauteuils roulants. Il faudrait aussi prendre en considération que les aveugles se dirigent avec une canne blanche. Par conséquent, ils ont besoin de structures à angles droits pour servir de points de repère. Serait-il possible de prévoir des aménagements qui accommoderaient les utilisateurs de fauteuils roulants et de cannes blanches.

Des voies d'accès pour auto à la propriété privée. Souvent, il est à remarquer que les trottoirs adjacents aux garages et aux édifices publics ont leur bordure extérieure inclinée sur une très grande longueur. Il faut considérer que lorsqu'un aveugle est muni de sa canne blanche et traverse ces espaces, il faudrait penser que cela représente de grands risques d'accident parce que ceux-ci n'ont aucun point de repère et peuvent s'en aller vers la rue. Ici, je parle des escaliers. C'est assez complexe que dans une commission semblable je parle de cela, mais c'est parce que, pour l'environnement d'un aveugle, c'est très important. Il est question d'escaliers dont le sommet est au même niveau que le trottoir et qui descendent vers les sous-sols ou autres endroits semblables. J'aimerais qu'on prévoie des choses dans ces cas-là pour que les aveugles n'aient pas d'accidents. Je parle ici en plus des poteaux, des utilités publiques. On devrait penser à situer les poteaux et les utilités publiques sur la bordure extérieure des trottoirs, probablement à quelques pouces.

Je pense que ceci permettrait aux aveugles de pouvoir mieux circuler et ne pas avoir besoin de les contourner, éviter les risques qu'on se frappe dessus.

Maintenant, j'arrive au logement. Le logement prévoit des modifications pour améliorer la situation des aveugles. On parle d'aménagement, de réadaptation, de subventions spéciales pour permettre d'augmenter leur nombre et leur disponibilité. Cette implication sociale est d'excellent augure.

Pourrait-on favoriser, par des avantages spéciaux, l'achat de maisons pour le handicapé qui le désire? J'arrive à mes suggestions: La mobilité, la canne blanche. La canne blanche sera défrayée par I'assurance-maladie du Québec. Pourrait-on, dans le futur projet de loi sur les personnes handicapées du Québec, consacrer un article spécifique concernant la canne blanche ou au moins un paragraphe référant à la Loi de la canne blanche.

Les chiens-guides. L'article 33, étant consacré en grande partie aux chiens-guides, dans le projet 9, pourrait-on ajouter un paragraphe quant à la vérification des critères d'admissibilité pour l'obtention de chiens-guides. Dans les règlements de l'interprétation de l'article, il y aurait lieu de préciser que des spécialistes jugeront si le requérant d'une telle aide est adéquatement préparé et peut s'en servir utilement.

Les barrières architecturales maintenant. Inclinaison des trottoirs. Afin d'aider les personnes circulant en fauteuils roulants et les handicapés visuels, il faudrait prévoir un aménagement urbain qui tienne compte de ces deux groupes. Les aveugles ont besoin de bordures extérieures d'un trottoir carré et à angle droit. Afin de tenir compte des deux handicaps mentionnés, je suggère qu'on laisse les trottoirs tels qu'ils sont, en référence à ce qu'on proposait dans le livre blanc, de mettre des trottoirs inclinés dans toutes les nouvelles planifications urbaines.

Je suggère aussi qu'on fasse des bordures extérieures inclinées d'une longueur de cinq pieds, mais à une certaine distance des intersections. Je suggère à environ cinq pieds; ça permettrait aux aveugles de se réenligner avant de traverser les rues, c'est-à-dire de conserver sa direction rectili-gne.

J'ai diverses suggestions dans ce mémoire sur les voies d'accès pour autos à la propriété privée, les garages, les stationnements, les édifices commerciaux. Dans bien des cas, à ces endroits, l'entrée est inclinée sur une très grande longueur. Je suggère qu'on restreigne l'espace de la longueur inclinée à douze pieds afin de permettre aux aveugles qui ont une canne blanche de reprendre leur direction. Cela nous aiderait énormément.

Dans les escaliers descendants dont le sommet est à égalité du trottoir, je suggère qu'on oblige les gens à installer une marche supplémentaire pour montrer qu'il y a un obstacle ou qu'on oblige les gens à installer une barrière de sécurité.

Dans les poteaux et les utilités publiques, je suggère qu'on espace toutes ces utilités d'au moins quatre pouces en dehors des trottoirs afin de permettre plus de facilité dans notre circulation, parce que lorsqu'on est muni d'une canne blanche, on est beaucoup plus nombreux munis d'une canne blanche que munis de chiens-guides. Je pense que ça vaudrait la peine d'y penser sérieusement dans la planification urbaine future et dans celle qu'on va réaménager avec les anciennes facilités qu'on a actuellement.

Au chapitre du logement, l'article 90, modifications sur les droits de l'habitation, pourrait-on y inclure: plans spéciaux pour achats de maisons pour les handicapés? En plus de favoriser la disponibilité du logement pour handicapés, il serait probablement possible d'encourager ceux-ci à l'achat de leur propre maison. Dans les règlements, on devrait y inclure des arrangements spéciaux pour faciliter aux handicapés l'acquisition d'une maison. Je verrais la Société d'habitation du Québec qui serait probablement en mesure d'offrir de tels plans spéciaux, tels que rabais d'intérêts.

Je me réfère à une ancienne loi gouvernementale canadienne qui fut établie en 1942, qui s'appelle la Loi sur les terres destinées aux anciens combattants.

En ce qui me concerne, j'ai terminé l'exposé de ce mémoire et je serais prêt à répondre aux questions des membres de la commission.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, je veux remercier M. Lagrange. C'est là qu'on voit l'avantage de rencontrer des personnes qui connaissent toutes les difficultés quotidiennes de la vie d'un handicapé, dans votre cas, d'un handicapé visuel.

Effectivement, on a eu plusieurs mémoires, comme vous le savez, au-delà d'une soixantaine en tout, dont un bon nombre par des groupements qui s'occupent de handicapés visuels, mais aucun, à part le vôtre, n'a fait de suggestions aussi précises.

On en prend bonne note, surtout celles qui ont trait aux municipalités, aux règlements municipaux. En somme, il faut concilier les intérêts des personnes handicapées qui se déplacent en chaise roulante avec les intérêts des personnes handicapées visuellement, dans le cas des trottoirs, par exemple, de même que dans le cas des poteaux destinés au service téléphonique ou au service d'électricité.

Je vais écrire au ministre des Affaires municipales pour lui faire part de ces suggestions pour que lui en fasse part, ensuite, aux municipalités.

C'est un peu la même chose pour les autres remarques que vous faites concernant, par exemple, les escaliers descendants. Quand vous nous l'expliquiez, on se rendait bien compte que c'est une source d'accidents probablement assez fréquents. Là aussi on va alerter le ministre responsable du Code du bâtiment, qui est le ministre du Travail. On va lui faire part de vos suggestions.

Quant au logement, on a mis l'accent sur l'adaptation des logements, des appartements. Vous nous faites la suggestion intéressante qu'il y ait un taux d'intérêt préférentiel, un taux d'intérêt à rabais pour les personnes handicapées qui voudraient se procurer une maison. On prend note de cette suggestion. Celle-là aussi c'est la première fois que je la vois apparaître dans un des mémoires.

Je vous remercie beaucoup, M. Lagrange. C'est tout ce que j'ai pour le moment.

Le Président (M. Marcoux): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je veux remercier M. Lagrange pour ses suggestions qui, pour autant que je peux juger, m'apparaissent très concrètes. Je peux simplement lui accorder mon appui. Déjà, le ministre semble montrer d'excellentes dispositions pour qu'elles soient examinées par des personnes qui ont vraiment plus de compétence que je ne saurais en avoir dans ce domaine, pour que soient mis en application les correctifs qui s'impo- sent, particulièrement en ce qui touche les barrières architecturales.

Il y a juste une question que je voudrais poser au ministre d'abord, et, en deuxième lieu, à M. Lagrange. Je sais que dans les projets de construction de loyers a prix modique, on prévoit maintenant un appartement par étage réservé et aménagé de telle façon qu'il puisse servir à des personnes handicapées. Souvent, on les limite à un ou deux par maison à appartements.

J'aimerais demander si, à votre point de vue, il serait bon d'en prévoir un plus grand nombre pour que les gens puissent obtenir un appui, les uns à l'égard des autres, si plusieurs handicapés se retrouvent à l'intérieur d'une maison à appartements ou s'il est préférable de les limiter à un ou deux et que ces gens se sentent beaucoup mieux intégrés dans une maison à appartements régulière. Est-ce que vous voyez une limite au nombre d'appartements prévus pour les personnes handicapées à l'intérieur d'une conciergerie?

M. Lagrange: Est-ce le ministre ou moi qui répond?

M. Lazure: Je peux répondre tout de suite. Ensuite, je vous céderai la parole, M. Lagrange. En ce qui concerne les habitations à loyers modiques, les règles de la Société d'habitation du Québec ne sont pas exactement un logement par plancher; c'est plutôt par pourcentage, c'est entre 5% et 10% du nombre total des appartements.

Effectivement, cela peut revenir à une répartition de un par plancher, mais c'est un pourcentage de 5% à 10% du nombre total des appartements dans l'immeuble.

L'autre organisme qui intervient, c'est le Code du bâtiment. Dans le premier cas, les 5% à 10%, on parle de logements adaptés, tandis que, dans le cas du Code du bâtiment, pour ce qui est des gros édifices surtout, privés, qui ne sont pas nécessairement à loyers modiques, le règlement demande que ces appartements soient accessibles aux personnes handicapées. Il s'agit d'accessibilité et non pas d'adaptation.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Lazure: Je vous remets la parole, M. Lagrange.

M. Lagrange: Je suis très d'accord avec le ministre là-dessus. Je me permets de souligner que, si on veut faire face à l'intégration de façon adéquate, il serait peut-être bon de ne pas trop prévoir catégoriser des handicapés dans un endroit spécifique dans le sens de faciliter leur intégration à travers la société. C'est comme cela que je le vois, parce que je prévois que, si on les regroupe trop dans un seul milieu, à un moment donné, il sera plus difficile de faire l'intégration. De cette façon, je verrais qu'il y aurait beaucoup plus d'avantages, quand les services urbains sont bien planifiés, à déconcentrer les habitations où résident des handicapés pour que ces gens soient

en mesure de pouvoir vivre avec la population; que les handicapés soient à l'écoute de cette population et que, d'autre part, la population soit à leur écoute. L'intégration va être beaucoup plus facile dans le domaine vers lequel on s'en va. Je crois que c'est très appréciable. Je penserais que ce serait une mesure très logique de déconcentrer ce phénomène de logements, parce que cela donnerait la chance à tout le monde de s'intégrer beaucoup plus facilement.

Mme Lavoie-Roux: Ma question n'était pas dans le sens de faire une concentration de personnes handicapées à l'intérieur d'immeubles d'habitation; je suis tout à fait d'accord avec vous. C'était simplement pour savoir que, si vous en trouviez plus qu'un à un étage, par exemple, vous y voyez quelque avantage. Il semble que vous préférez que les normes soient le plus limitatives possible quant au nombre de logis à l'intérieur d'un immeuble d'appartements qui soit adapté pour des personnes handicapées. C'est ce que je crois comprendre.

Merci, M. Lagrange.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: Premièrement, une question au ministre. Quand vous parlez des logements désignés pour les handicapés, avez-vous eu l'occasion de faire la comparaison avec les normes qui sont établies en Suède dans les édifices?

M. Lazure: Non, pour être franc, je ne connais pas par coeur les normes en Suède. Je sais qu'ils en ont beaucoup. Ils ont une proportion de logements adaptés qui est très élevée; c'est la plus élevée au monde probablement. Dans d'autres domaines aussi d'accessibilité aux personnes handicapées, la Suède est un modèle; tout le monde en convient, mais je ne connais pas leurs pourcentages.

M. Shaw: Peut-être une deuxième question au témoin. J'appuie votre position sur une Loi de la canne blanche, mais vous pouvez aussi constater que cela implique peut-être de nouvelles constructions pour l'avenir. C'est comme cela que vous parlez, n'est-ce pas?

M. Lagrange: C'est qu'il y a une Loi de la canne blanche qui a été adoptée ici au Québec en 1968. A moins que j'aie mal vu l'affaire — ce qui peut arriver — je ne crois pas qu'on y réfère de façon... sauf en ce qui concerne les prothèses et or-thèses payées par l'assurance-maladie du Québec... Je me suis demandé s'il ne serait pas judicieux, à un moment donné, de parler de cette loi, au moins d'en faire mention pour montrer son existence au point de vue légal.

Si on veut traiter, au sujet des handicapés, d'un mémoire qui parle de toutes les fonctions que la loi régira, je pense qu'il serait important, parce qu'il y a à peu près 98% des aveugles qui se servent de prothèses ou de chiens-guides ou de quoi que ce soit pour se conduire, et ils utilisent encore des cannes blanches... C'est une chose importante. Il me semble qu'il faudrait la mentionner, en ce qui me concerne; je ne sais pas ce que dirait M. le ministre là-dessus.

M. Lazure: M. le Président, j'en ai parlé tantôt avec les collaborateurs du ministère. Je ne vois aucun inconvénient, au moins, à mentionner dans le projet de loi 9, quand il sera amendé, l'existence d'une Loi de la canne blanche. C'est une loi très sommaire qui a seulement quelques articles et sur laquelle, apparemment, nous n'avons pas de plainte. On prend bonne note de cette autre suggestion. Vous êtes aussi le seul à nous avoir fait cette suggestion. Je pense que c'est positif. On va essayer de trouver un moyen de faire apparaître cette loi dans le projet de loi 9, au moins de la reconnaître.

M. Shaw: Je n'ai pas d'autres questions, M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): Je remercie M. Lagrange de la présentation de son mémoire et d'avoir bien voulu répondre aux questions des membres de la commission. Tout simplement pour vérifier, à tout hasard, est-ce que la Ligue des droits de l'homme, ou est-ce que des représentants de la Ligue des droits de l'homme seraient présents?

M. Lazure: M. le Président, nous avons eu une communication téléphonique avec la Ligue des droits de l'homme à l'heure du midi. C'est à cause des conditions atmosphériques à Montréal que ces gens n'ont pu se rendre à Québec. Cependant, la Ligue des droits de l'homme a voulu informer la commission... Je cite, de mémoire, l'expression de leurs réactions vis-à-vis des commentaires que j'ai faits mardi dernier à l'ouverture de la commission. Ils se disent heureux des changements que nous avons l'intention d'apporter au projet de loi. Ils n'insistent pas pour venir présenter leur mémoire. Nous en avons pris connaissance, tous les membres de la commission.

Le Président (M. Marcoux): Je vais d'abord donner la liste des mémoires que nous entendrons normalement à notre prochaine séance de jeudi. Je vais vous donner les numéros: 20, 3, 47, 55, 7, 34, 18.

Mme Lavoie-Roux: Sept. Il y en a un qui n'est pas venu.

Le Président (M. Marcoux): Nos audaces d'aujourd'hui nous permettent d'être optimistes.

M. Lazure: Statistiquement, il y a des chances qu'il en manque aussi.

Le Président (M. Marcoux): J'inviterais tous les membres de la commission à être, suivant l'ordre du leader de la Chambre, présents dès 10 heures jeudi matin, en cette même salle, pour entendre les mémoires que je vous ai énumérés. La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la commission à 17 h 54)

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