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Etude du projet de loi no 9
(Dix heures quarante-cinq minutes)
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission des affaires sociales est réunie pour poursuivre
l'audition des mémoires concernant le projet de loi no 9, Loi assurant
l'exercice des droits des personnes handicapées.
Les membres de la commission sont M. Boucher (Rivière-du-Loup),
M. Charron (Saint-Jacques), M. Clair (Drummond), M. Forget (Saint-Laurent), M.
Gosselin (Sherbrooke), M. Gravel (Limoilou), M. Grenier
(Mégantic-Compton), M. Lavigne (Beauharnois), Mme Lavoie-Roux
(L'Acadie), M. Lazure (Chambly), M. Marois (Laporte) remplacé par M.
Gagnon (Champlain), M. Martel (Richelieu), Mme Ouellette (Hull), M. Paquette
(Rosemont), M. Saindon (Argenteuil)...
Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi, voulez-vous le remplacer, M.
Goldbloom est censé venir.
Le Président (M. Marcoux): M. Saindon (Argenteuil) est
remplacé par M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Saint-Germain
(Jacques-Cartier), M. Shaw (Pointe-Claire).
Aujourd'hui, nous entendrons les mémoires de la Ligue des droits
de l'homme, de la Fédération provinciale des associations de
parents pour l'aide à l'inadapté Inc., L'Institut national
canadien pour les aveugles, le Mouvement sur les chiens-guides, M. Mario
Bolduc, le Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec, et M.
Gilles Lag range.
Simplement pour une vérification, les représentants de la
Ligue des droits de l'homme sont-ils arrivés? Non. Alors, j'inviterais
la Fédération provinciale des associations de parents pour l'aide
à l'inadapté Inc., à s'approcher, pour nous
présenter son mémoire. Vous êtes monsieur?
Fédération provinciale des associations
de parents pour l'aide à l'inadapté Inc.
M. Lamontagne (Laurent): Laurent Lamontagne, président de
la fédération.
Le Président (M. Marcoux): M. Lamontagne, je vous souhaite
la bienvenue. Vous avez une vingtaine de minutes pour soit lire, soit
résumer ou synthétiser votre mémoire. Ensuite, le dialogue
s'engagera avec les membres de la commission.
M. Lamontagne (Laurent): M. le Président, M. le ministre
Lazure, MM. et Mme les députés, je remercie la commission de nous
avoir invités à participer à la présentation de
notre mémoire.
Ce matin, à cause du temps, et étant donné que
notre fédération groupe un nombre assez grand d'associations dans
toute la province, je re- grette que nous n'ayons pu avoir tellement de
personnes.
J'ai ici Mme Desmeules, de Villa des Lys, Aima, et M. Roch Gadreau, de
l'Association de la paralysie cérébrale du Québec, ainsi
que mon épouse, qui représente l'Association des parents de
l'Institut Monseigneur-Guay, de Lauzon.
Le Président (M. Marcoux): Vous pouvez les inviter
à vous accompagner à la table, s'ils veulent répondre aux
questions avec vous tantôt, et dialoguer, ils peuvent le faire.
M. Lamontagne (Laurent): La fédération existe
depuis environ six à sept ans, par la fondation d'un groupement de
parents qui est devenue une fédération, avec aujourd'hui une
charte. Le siège social est situé à 6, rue Lahaie,
Cap-de-la-Madeleine.
Le fondateur est M. Raymond Harnois, qui est décédé
l'été dernier. Malheureusement, il n'a pu venir participer
à tout le travail qu'il avait mis sur pied depuis nombre
d'années. La fédération groupe présentement
quatorze associations, dispersées dans toute la province. Les
associations sont formées de parents de handicapés de toute
catégorie. Ces parents viennent de toutes les couches de la
société.
Les buts de la fédération sont de grouper, informer et
orienter les associations de parents, pour le bien-être du
handicapé, de favoriser la réalisation de leurs objectifs
communs, d'étudier les problèmes d'éducation, de
santé, de loisir, de bien-être social qui se posent sur le plan
officiel, familial, et faire à ce sujet les recherches
nécessaires pour connaître ces problèmes et apporter les
éléments de solution; éveiller l'opinion publique et
renseigner les organismes intéressés sur les besoins de
l'inadapté dans la société; imprimer, éditer et
distribuer toute publication pour les fins ci-dessus mentionnées;
établir et maintenir les services de consultation et de renseignement;
travailler et collaborer avec les organismes publics, gouvernementaux et
privés, dans la réalisation de ces buts.
Il y a quelques années, M. le ministre Denis Lazure faisait une
citation qui est dans le présent mémoire: "Dans une
société idéale, une loi pour assurer les droits des
personnes handicapées serait parfaitement inutile, inacceptable
même, mais avec notre société, telle qu'elle est
aujourd'hui, nous y sommes obligés."
M. René Lévesque, premier ministre disait: "On juge une
société civilisée à partir de la façon dont
elle traite ses minorités. Les personnes âgées, les
handicapés sont des minorités".
Le présent projet de loi est attendu et espéré
depuis longtemps par tous les organismes intéressés au
bien-être de l'inadapté. Ce projet de loi est une
nécessité parce que nous n'avons pas la société
idéale, nous le savons.
Cependant, cette loi doit être complète et
couvrir tous les handicapés, ce qui ne semble pas être le
cas. Cette loi ne doit pas non plus alourdir la structure de services
actuellement existants, comme elle devrait favoriser l'addition des ressources
qui manquent.
Nous avions présenté un mémoire lors de la
présentation du projet de loi 55, plusieurs articles ont
été modifiés dans le sens de nos revendications, tel le
titre; par contre, nous croyons que certains articles devraient être
modifiés et d'autres ajoutés.
Les lacunes. -Le ministère a toujours insisté sur la
participation des parents... or, dans le présent projet de loi, il n'est
nulle part fait mention de la famille de la personne handicapée... le
mot "parent" n'y apparaît même pas! -La représentation des
personnes handicapées au conseil d'administration de la régie est
insuffisante. -L'actuel projet de loi ne semble être qu'un catalogue des
personnes handicapées... récupérables!
Les handicapés lourds, ceux qui en ont le plus besoin, sont
oubliés...
Par contre, le livre blanc admet leur existence! -L'article qui concerne
les subventions ne parle pas des associations de parents, et rien ne garantit
qu'une fédération provinciale d'associations de parents pour
l'aide à l'inadapté telle que la nôtre ait des chances
d'être subventionnée par la régie... -... les
municipalités ne pourront refuser un permis d'utilisation d'un local
d'habitation par une famille d'accueil ou un foyer de groupe... C'est ce que
dit le livre blanc; le projet de loi n'en parle pas! -Rien non plus pour forcer
les municipalités à assumer leurs responsabilités en
fournissant les installations en loisir pour la personne handicapée.
Les remarques. Ce projet de loi no 9, comme le no 55, a
été présenté avant les vacances estivales en
première lecture; donc, à une période très
défavorable aux réunions pour une fédération
d'associations de parents pour l'aide à l'inadapté sans
ressources comme la nôtre; ajoutez à cela le facteur
éloignement, nos associations couvrent la province.
Nos recommandations: -Que soient décrits dans le texte de loi les
droits de la famille et/ou des parents de la personne handicapée. -Qu'au
conseil d'administration de la régie, siègent un minimum de six
personnes handicapées ou leurs représentants. -Que soient
décrits dans le texte de loi les droits des handicapés lourds et
ceux des handicapés inaptes au travail. -Que soit clarifié dans
le texte de loi le genre d'organismes de promotion admissibles aux subventions
accordées par l'office. -Qu'il soit écrit dans le texte de loi 9
que les municipalités ne pourront refuser d'émettre un permis
d'utilisation d'un local d'habitation par une famille d'accueil ou un foyer de
groupe. - Que soit inscrite dans la loi la responsabilité des
municipalités de fournir des installations en loisir pour la personne
handicapée.
Nous vous présentons ce mémoire soulignant les lacunes
décelées ainsi que certaines recommandations.
Nous désirons vivement nous faire entendre à la commission
parlementaire pour pouvoir élaborer le point de vue des parents des
handicapés.
Je vous remercie.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie. M. le
ministre.
M. Lazure: M. le Président, je veux remercier la
Fédération provinciale des associations de parents pour l'aide
à l'inadapté, et en particulier, son président, M.
Lamontagne, pour avoir préparé ce mémoire qui est un
résumé, en réalité, des réactions de cette
fédération au projet de loi. La fédération est un
organisme relativement jeune, qui a des moyens modestes et qui est
animée principalement par des bénévoles, par des parents.
Je pense qu'il faut reconnaître le travail que fait la
fédération.
Quelques remarques, M. le Président. Si je me
réfère à la page 5 des recommandations du groupement qui
est devant nous, il est exact de dire que le projet de loi non seulement ne
parle pas des parents ou de la famille de la personne handicapée, mais
ne parle pas non plus de ce qu'on peut appeler le représentant
légal de la personne handicapée. C'est une lacune dans le projet
de loi actuel et on a déjà indiqué qu'on allait
remédier à cette lacune.
Quant au nombre de membres du conseil d'administration, j'ai aussi
annoncé la semaine dernière que nous envisagions la
probabilité d'augmenter le nombre de membres du conseil.
Cela me paraîtrait un chiffre assez raisonnable, à
première vue, six personnes handicapées ou leurs
représentants. Dans le cas des handicapés lourds dont vous
parlez, aussi bien qu'inaptes au travail, ma réaction à cela,
c'est encore une fois, quand on dit "personnes handicapées" dans le
projet de loi, qu'il s'agit vraiment de toutes les personnes
handicapées, d'abord quant à l'âge, de la naissance
à la mort, même si on ne l'a pas spécifié avec le
terme "enfant", et je pense qu'il faudra le spécifier pour que ce soit
clair une fois pour toutes. De la même façon pour les
catégories de handicapés, on n'a pas voulu commencer à
spécifier les catégories, mais il est bien évident que ce
sont toutes les catégories de handicapés. Etant donné que
plusieurs groupements nous ont fait valoir que le projet semblait oublier les
handicapés lourds, même si ce n'est pas notre intention,
peut-être faudrait-il nommer de façon précise ces groupes
de handicapés qui sont inaptes au travail. Il est sûr que le
projet de loi, surtout dans sa première version le bill 55
était principalement axé sur l'intégration au monde du
travail. Nous avons voulu l'élargir et il est évident que la
future loi devra s'appliquer autant à ceux qui sont inaptes au travail
qu'à ceux qui sont aptes. Les familles d'accueil ou foyers de groupe
font allu-
sion à des problèmes qui sont survenus dans certaines
municipalités, comme Pointe-aux-Trembles, en particulier. Je vous fais
remarquer que ce problème est réglé, quant à nous,
avec l'adoption du projet de loi no 10, qui apporte des amendements au chapitre
48 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Depuis
l'adoption du projet de loi no 10, une municipalité ne peut plus
maintenant refuser un foyer de groupe ou une famille d'accueil pour la seule
raison que c'est un foyer de groupe ou une famille d'accueil.
Enfin, quant aux loisirs et aux municipalités, vous demandez que
les municipalités prennent plus leurs responsabilités en
matière de loisirs auprès de personnes handicapées. On est
d'accord avec vous là-dessus. Avec l'orientation qui a été
indiquée le premier jour, à savoir qu'au lieu de fournir des
garanties de non-discrimination à la personne handicapée par
notre texte de loi et d'utiliser plutôt la Charte des droits et
libertés de la personne, il me semble qu'une municipalité qui
voudrait faire de la discrimination à l'endroit des personnes
handicapées dans le domaine des loisirs serait susceptible d'avoir
à répondre de ses actes devant la Commission des droits de la
personne. Cela nous paraît le biais par lequel on pourrait garantir la
non-discrimination, légalement parlant. Il reste que, psychologiquement
parlant, il faudra encore beaucoup d'efforts de la part du ministère des
Affaires municipales, autant que du Haut-Commissariat à la jeunesse, aux
loisirs et aux sports, de notre ministère et des groupements comme le
vôtre, il restera encore beaucoup de travail à faire auprès
des municipalités. Je cite, de temps à autre, l'exemple de deux
municipalités de la région de Montréal qui sont des
modèles pour l'intégration des personnes handicapées: les
villes d'Anjou et de Saint-Léonard. Ces municipalités ont fait un
travail fantastique depuis quatre ou cinq ans et on peut dire que presque tous
les handicapés sur leurs territoires sont intégrés dans
les loisirs de ces deux municipalités. Ces deux municipalités ont
démontré qu'il était possible de le faire, sans
pénaliser la population dans son ensemble.
Une dernière remarque, M. le Président. L'occasion m'est
donnée, puisqu'on parle de loisirs dans ce mémoire, de rapporter
à cette commission pour les fins du journal des Débats je
peux faire circuler l'information que les budgets, pour l'année
1977/78 au Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports,
ont été augmentés de façon sensible pour les
personnes handicapées. En 1976/77, le montant total était de $165
000 et, en 1977/78, il est de $1 083 000. Sur la feuille que je peux faire
circuler, on identifie les groupements de loisirs et de sports pour les
handicapés qui ont bénéficié de ces subventions.
Merci.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous avez des
commentaires ou des questions à la suite des propos du ministre?
M. Lamontagne (Laurent): Non. Il y a des choses auxquelles
j'aurais aimé mieux répondre étant donné que, dans
mon groupe où on a préparé le mémoire, il y aurait
peut-être des revendications à faire que je ne connais pas. Je
regrette le temps qu'il fait ce matin. Quant à l'avis de
présentation de notre mémoire ce matin, je ne l'ai appris qu'hier
soir à quatre heures. D'une manière ou d'une autre, je ne sais
pas... Vous, madame, est-ce que vous avez quelque chose à dire à
ce sujet?
Mme Desmeules (Jacqueline): Je n'ai même pas
travaillé au mémoire. J'en ai pris connaissance aussi en
même temps.
M. Lamontagne (Laurent): On n'a pas eu tellement de
préparation. Peut-être que, à partir de certaines questions
des députés de l'Opposition, on pourrait répondre au mieux
de notre connaissance.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je veux également remercier la
Fédération provinciale des associations de parents pour l'aide
à l'inadapté. Je pense qu'on a souligné, lors de la
présentation de certains mémoires, le rôle que les parents
et différents organismes bénévoles ont joué
justement dans la promotion et le développement des services aux
personnes handicapées.
J'aurais une question relative à votre première
recommandation et à cette déception que vous avez de ne pas
retrouver dans le texte de loi les droits de la famille ou des parents. Est-ce
que vous pourriez préciser un petit peu plus de quelle façon vous
auriez aimé le voir dans le projet de loi? Ou est-ce que c'est vraiment
votre désir? Ou avez-vous voulu signaler les carences qui existent dans
les services qui sont mis à la disposition des parents pour
répondre à leurs besoins lorsqu'ils assument la garde, le soin,
l'éducation et toutes les phases du développement d'un enfant
handicapé?
M. Lamontagne (Laurent): Concernant le milieu familial, nous
voyons dans certaines institutions existantes qu'il y a plusieurs handicaps
parmi les enfants qui, surtout si on prend les jeunes, ont un handicap
physique, un handicap mental, il y a même le handicap familial. Il y a
une catégorie d'enfants qui sont tous groupés sous un même
toit; aujourd'hui on parle d'intégration, on est d'accord.
Personnellement, je suis père de deux enfants atteints de paralysie
cérébrale, dont un qui est encore en institution, et on projette
de l'en sortir prochainement, parce qu'on se dit qu'il doit y avoir
possibilité de l'intégrer.
Maintenant, concernant les parents ou la personne handicapée, on
trouve qu'ils ne figurent peut-être pas assez à certains conseils
d'administration d'associations et ces choses-là. Aujourd'hui, on
travaille dans ce but aussi, afin que ce ne soit pas toujours des gens
prétendument normaux qui travaillent pour eux, car on veut les
intégrer pour travailler avec nous. Que les parents travaillent
bénévolement, je pense que cela n'est
pas une mauvaise chose, puisqu'il y a du bénévolat, mais,
financièrement, on n'a pas toujours la possibilité de
gérer une fédération comme une association. Quand vous
vous déplacez dans toute la province, au nom de la
fédération; comme président ou représentant de la
fédération, c'est de l'argent pris à même vos
propres deniers ce n'est pas l'argent d'une association ou d'une
fédération, parce que les montants à exiger sous forme de
cotisation, pour arriver, seraient trop énormes. Il y a des associations
qui n'ont même aucune finance possible. Malgré tout, on a
réussi à mettre sur pied deux nouvelles associations en moins de
deux ans, une à la Tuque et l'autre dans la région de Chicoutimi.
Le travail a été très bien fait, mais a toujours
exigé beaucoup de peine et de labeur de la part des parents
bénévoles. On aimerait que le mérite de ces personnes soit
davantage reconnu.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que votre question est pertinente parce
que j'ai ouï dire et j'aimerais que le ministre le confirme ou l'infirme,
que certaines associations pour handicapés se voient refuser, par
exemple, leur incorporation sous prétexte qu'il y a une autre
association qui rend des services analogues. J'aimerais que le ministre tente
de nous définir ici, du moins dans les grandes lignes, si un tel
problème existe ou quelles balises il propose pour déterminer les
organismes qui pourront justement se prévaloir des subventions que
l'office accordera.
M. Lazure: M. le Président, c'est nouveau pour moi, ce que
Mme le député de L'Acadie présente comme question,
à savoir: Que certains organismes bénévoles
représentant des handicapés verraient leur charte refusée.
Je vais regarder, on ne m'en a jamais parlé.
Mme Lavoie-Roux: Je vous en apporterai un, un cas
précis.
M. Lazure: Au ministère, devant une demande
précise, on ne m'a jamais dit: Bon, est-ce qu'on refuse ou si on
accepte? Quant à moi, les handicapés ne seront jamais trop
représentés. Ce n'est pas une objection, parce qu'il y a
déjà un groupement, si un deuxième groupement veut avoir
des programmes semblables ou complémentaires, je ne vois pas
d'objection. Je pourrai déposer, cet après-midi ou ce soir, la
liste des organismes bénévoles représentant des
groupements de handicapés que nous subventionnons chaque année.
Il y a quand même une liste assez impressionnante. Mais je vais demander
aux fonctionnaires de vérifier cette affirmation que vous faites.
Mme Lavoie-Roux: Maintenant, dans votre esprit, est-ce que vous
avez certaines balises ou certains critères auxquels vous vous
référez quand vous parlez des organismes qui seront
éligibles aux subventions?
M. Lazure: Les critères quant aux sommes annuelles qu'ils
pourront toucher?
Mme Lavoie-Roux: Non-, bien, les sommes, évidemment, cela
pourrait dépendre des budgets mais est-ce qu'il y aura des
critères d'exclusion de ces organismes? Il semble aue ce soit vraiment
un problème et je réalise que, dans des communautés plus
petites où on peut faire appel à moins de gens pour les
souscriptions et ces choses-là, le problème de financement de ces
organismes est quand même très difficile.
M. Lazure: Non. Moi, à première vue, je ne peux pas
concevoir de critères d'exclusion pour des groupements qui feraient une
demande pour obtenir une reconnaissance. On parlait beaucoup la semaine
dernière d'éducation populaire qu'il reste à faire pour
changer les attitudes de la population. Je pense que plus on aura de
groupements qui agiront au nom des personnes handicapées, mieux ce sera
et plus vite on opérera des changements de mentalité. Alors,
à première vue, s'il y a des critères, ce sera des
critères très ouverts de façon qu'on ait le plus grand
nombre possible de groupements.
Mme Lavoie-Roux: A votre point de vue, il ne devrait pas y avoir
de critères d'exclusion, sauf si c'était pour des fins
malhonnêtes ou autres choses?
M. Lazure: Exactement, c'est ma position.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le ministre. Je vous remercie,
M....
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Merci, M. le Président. Je voudrais,
premièrement, remercier l'association pour son mémoire. J'ai
quelques petites questions: Vous avez dit que vous voyez qu'il y a un besoin
démontré pour un projet de loi de cette sorte. Pour quelles
raisons jugez-vous que nous avons un besoin d'un office des
handicapés?
M. Lamontagne (Laurent): Présentement, il n'y a rien ou
pas tellement. Maintenant, je pense que même si on n'est pas d'accord sur
le projet de loi en entier, le fait d'en avoir un, c'est beaucoup. Le modifier
plus tard, c'est encore une bonne chose. Si on ne commence pas avec quelque
chose, on ne commencera jamais avec rien. C'est pour cela que le projet de loi,
nous autres, on ne dit pas qu'on est d'accord sur tous les points. On fait nos
recommandations, on a vu des lacunes. On l'a passé plus ou moins au
peigne fin avec les délais que nous avions et le
bénévolat. Il y a certaines choses qu'on reconnaît et on
trouve que c'est bon qu'elles y soient.
Mme Desmeules (Jacqueline): Je pourrais peut-être ajouter
quelque chose. A propos de l'office, ce que je vois de bien important, c'est
que les handicapés qui demandent des services ont affaire à
plusieurs ministères, soit les Affaires sociales, la
Main-d'Oeuvre, le Travail, l'Education. D'un ministère à
l'autre, ce qui se passait antérieurement en tout cas, c'est qu'on se
lance la balle. Un handicapé va demander un service, on l'envoie au
ministère des Affaires sociales qui dit que cela ne relève pas de
son domaine, que cela relève du ministère du Travail. Finalement,
il n'y a pas de décision de prise. Je vois l'office comme quelque chose
qui va faire la balance entre les ministères et là, les
décisions seront prises.
M. Shaw: Vous avez maintenant une association structurée,
c'est évident. Avez-vous des subventions du gouvernement pour votre
association?
M. Lamontagne (Laurent): Non.
M. Shaw: Aucune. Vous avez une charte?
M. Lamontagne (Laurent): Oui.
M. Shaw: Etablie. Est-ce que vous vous êtes
déjà lamentés pour obtenir des subventions pour vous aider
à...
M. Lamontagne (Laurent): Oui, premièrement ce n'est pas
une association, c'est une fédération qui groupe des
associations. Les associations nouvelles n'ont pas de bureau au niveau
provincial, ne peuvent pas se dépanner elles-mêmes, mais dû
au fait qu'elles sont regroupées, la fédération les aide
beaucoup. Nous n'avons aucun montant d'argent du gouvernement, défrayant
les dépenses tous les ans, mais on a fait la demande. Cela doit faire
trois ans qu'on renouvelle la demande, que c'est remis et remis.
M. Shaw: Et vous êtes plus près du problème
que n'importe quel ministère?
M. Lamontagne (Laurent): Oui.
M. Shaw: Est-ce que vous êtes craintif qu'avec un office
qui, peut-être, peut surveiller, peut même vous déloger de
la place que vous vous occupez maintenant?
M. Lamontagne (Laurent): On n'est pas tellement craintif. C'est
entendu qu'il y a toujours des craintes pour ce qui arrive après coup.
Mais nous autres, notre rêve à la fédération a
toujours été d'avoir une banque d'information pour toutes sortes
de handicaps ou d'associations, au moins pour savoir où aller, pour ne
pas faire ce que madame a dit tout à l'heure, qu'on se lance la balle,
mais après un certain délai, on aboutit avec rien. Tandis que
l'information qu'on voulait donner, on va en avoir une bonne partie, en tout
cas, au niveau de l'office.
M. Shaw: Alors, vous voyez ou vous prévoyez que l'office
peut vous aider...
M. Lamontagne (Laurent): Je le crois.
M. Shaw: ... s'il y a un lien entre vous et l'office...
M. Lamontagne (Laurent): Oui.
M. Shaw: ... pour conserver votre fonction dans le domaine des
services pour les handicapés.
M. Lamontagne (Laurent): Oui, parce que le service que la
fédération donne, je ne crois pas que l'office le donne. Il va
peut-être le compléter, mais il ne donnera pas tous les services
que nous, les fédérations, pouvons donner.
M. Shaw: Alors, est-ce que vous avez demandé d'être
représenté au sein de la direction de l'office
lui-même?
M. Lamontagne (Laurent): Oui.
M. Shaw: C'est cela que vous avez dit, que vous verriez soit six
handicapés ou six représentants; c'est dans ce domaine que
vous...
M. Lamontagne (Laurent): C'est dans ce domaine-là.
M. Shaw: Merci.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce qu'il y a d'autres
membres de la commission qui... M. le député de d'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, j'ai un commentaire et une
question. Je voudrais d'abord me joindre aux autres membres de la commission
pour remercier M. Lamontagne et ses collègues pour ce mémoire.
C'est évidemment un travail de conscientisation qui se fait ici à
la commission parlementaire depuis le début. Le fait pour des
gouvernements, parce qu'il y en a eu plus d'un qui ont mis la main à la
pâte, d'avoir voulu présenter un tel projet de loi, c'est
déjà une preuve d'une sensibilité constructive. Que vous
arriviez maintenant pour souligner des lacunes, c'est normal et essentiel qu'il
en soit ainsi.
Il est aussi évident que, si votre fédération
existe, si elle regroupe de nombreux organismes, et vous en fournissez la liste
dans votre mémoire, c'est qu'il y a un besoin et que ce besoin est
vivement senti par les familles éprouvées, par les parents
concernés.
Quand un enfant est jeune, il a toujours besoin de la constellation
familiale autour de lui, mais avec l'âge, il peut espérer aspirer
à l'autonomie, mais pour la personne handicapée, cette autonomie
est difficile à réussir. Donc, c'est avec justesse que vous
soulignez le rôle de la famille autour de la personne handicapée,
et le ministre, tout à l'heure, a ajouté à cela le facteur
nécessaire de responsabilité légale qui incomberait, dans
certaines circonstances et à certains moments, à d'autres
personnes.
Tout cela m'amène à ma question; vous lui
avez répondu peut-être dans une certaine mesure mais si
vous pouviez expliciter davantage votre pensée, je pense que notre
lanterne serait éclairée d'autant. Votre toute première
recommandation, à la page 5, c'est que soient décrits, dans le
texte de loi, les droits de la famille ou des parents de la personne
handicapée. C'est une recommandation générale. Si vous
pouviez préciser davantage quels sont ces droits dans votre esprit,
qu'est-ce que vous aimeriez que la loi fasse pour les familles? Dans la loi, il
y a des choses qui sont prévues pour la personne handicapée; vous
dites, avec justesse: II faut penser à cette constellation qui entoure
la personne. Mais quels seraient les droits que vous aimeriez voir inscrits
dans la loi à l'égard des familles et des parents en
général?
Mme Lamontagne: Je voulais justement parler de ce sujet. Je
voudrais que la loi favorise l'intégration des enfants dans la famille.
Je ne sais pas de quelle façon vous pourriez procéder, je ne
connais pas beaucoup les moyens techniques. Je veux dire par là qu'il y
a parfois des contradictions dans les gouvernements, pas seulement les
ministères. Je vous donne un exemple: depuis quelques années, on
préconise l'intégration, et cela de plus en plus. Dans le livre
vert du ministère de l'Education, il y a un point qui a
été souligné à savoir que des enfants qui ne
répondraient pas aux normes des écoles, qui ne s'adapteraient pas
aux lois et règlements de l'école seraient intégrés
dans des institutions. Il y a marche arrière, il y a une contradiction
flagrante. D'un côté, on préconise l'intégration et,
d'un autre côté, on défavorise l'intégration, on
veut revenir aux institutions, on revient en arrière. Alors nous, les
parents, nous nous demandons de quel côté le gouvernement penche.
On a l'impression de revenir en arrière. Nous, les parents, nous
cherchons naturellement à garder nos enfants à la maison le plus
possible. Quand on fait le placement, c'est parce qu'on n'a pas le choix, on
n'a pas les services. Un exemple frappant: on a un enfant en institution depuis
huit ans et on s'aperçoit que les services sont plus nombreux. Alors, on
songe sérieusement à le ramener à la maison, mais en ayant
les services. On ne peut pas ramener un enfant à la maison et qu'il ne
fasse rien. C'est dans ce sens que je me demande dans quelle direction le
gouvernement va. Est-ce l'intégration ou non?
M. Lazure: M. le Président, rapidement, ce n'est pas l'un
ou l'autre. C'est, dans le plus grand nombre de cas possible,
l'intégration. Dans le cas d'enfants ou d'adolescents qui ont
été en institution, c'est la réintégration. Il va
toujours rester un certain nombre d'enfants, d'adolescents ou d'adultes
handicapés, soit physiquement ou mentalement, qui sont tellement
dépendants, qui sont tellement dépourvus de capacités,
qu'ils devront demeurer dans des milieux protégés qu'on appelle
des institutions. Cela ne veut pas dire qu'on ne doit pas continuer à
travailler à améliorer les institutions, mais, encore une fois,
idéalement, comme on ne devrait pas avoir besoin de loi,
idéalement aussi la société ne devrait pas avoir besoin
d'insti- tutions, mais surtout avec le genre de vie urbaine qu'on connaît
en 1977, je pense bien qu'il y aura toujours un certain nombre d'individus qui
devront être gardés dans des établissements.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce qu'il y a d'autres
membres de la commission? M. le député de Champlain.
M. Gagnon: Juste un petit mot, M. le Président, pour
remercier et féliciter la Fédération provinciale des
associations de parents pour l'aide à l'handicapé pour le travail
qu'elle fait. Je suis peut-être un petit peu plus au courant puisque
cette fédération a son siège social au
Cap-de-la-Madeleine, dans mon comté. Entre autre, mesdames Harnois et
Aubuchon, en ce qui concerne le travail pour l'intégration des personnes
handicapées dans la société c'est le point que je
voulais souligner font un travail assez extraordinaire; je voudrais les
féliciter très chaleureusement et leur offrir mon aide dans la
mesure du possible.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais simplement réagir à la
remarque de madame Lamontagne, tout à l'heure, quant au livre vert.
C'est peut-être une bonne occasion de souligner au ministre des
Affaires sociales que beaucoup s'inquiètent du fait que, dans le livre
vert, il n'est nullement question des enfants inadaptés, et dans une
société où on veut justement favoriser de plus en plus
l'intégration particulièrement des enfants au système
scolaire régulier, ceci ne manque pas de surprendre. Evidemment, la
réplique du ministre de l'Education a été rapide. Elle a
été: On en aura un autre dans quinze mois sur l'enfance
inadaptée. Mais je pense que le fait que, justement, on ait
divisé les deux groupes d'enfants, alors qu'on veut une approche globale
d'un système d'éducation à l'élémentaire et
au secondaire, c'est une indication, ou c'est un symptôme qui ne manque
pas d'inquiéter beaucoup de gens, tant les parents que les
éducateurs en général. Je pense que c'est bon que vous le
souligniez, parce que... Evidemment, le ministre des Affaires sociales a
beaucoup de boulot et le ministre de l'Education aussi, mais cela
m'apparaît très important que cet aspect soit examiné de
près par le gouvernement.
M. Lazure: M. le Président, rapidement, Mme le
député de L'Acadie a tout à fait raison, et, malgré
son boulot, le ministre des Affaires sociales a écrit au ministre de
l'Education, dès les premiers jours, après que j'ai eu lu le
livre vert et, moi aussi, cela m'a étonné et cela m'a
déçu qu'on ait laissé de côté l'enfance
inadaptée.
La réponse du ministère de l'Education est qu'il y a un an
et demi, deux ans, le gouvernement avait mis sur pied un comité
interministériel, qui a publié, d'ailleurs un rapport dont j'ai
pris connaissance, un rapport en deux tomes, le rapport Copex, sur l'enfance
exceptionnelle, sur l'enfance
inadaptée. Mais cela me paraît une demi-raison. En
dépit de rapports spécialisés comme ceux-là, je
pense qu'il était essentiel et nécessaire d'inclure toute la
population scolaire handicapée dans le rapport fondamental, le rapport
régulier sur l'enseignement élémentaire et secondaire. Je
partage votre inquiétude, Mme le député.
Mme Lavoie-Roux: D'autant plus que le rapport Copex a
été publié immédiatement après
l'arrivée du gouvernement actuel au pouvoir et devait être sous
presse au moment de l'élection précédente. En fait, c'est
avant... Et on aurait pu tenter au moins d'en faire une certaine
intégration. Si vous êtes d'accord, ça va.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous avez d'autres
commentaires à ajouter?
Nous vous remercions de votre participation aux travaux de cette
commission.
J'inviterais maintenant l'institut national canadien pour les aveugles
à venir nous présenter son mémoire. Vous pouvez
peut-être vous placer davantage au centre pour que tous les membres de la
commission vous voient.
Institut national canadien pour les aveugles
M. L'Ecuyer (Bernard): M. le Président, M. le ministre
Denis Lazure, honorables membres de cette commission...
Le Président (M. Marcoux): Voulez-vous d'abord vous
présenter et présenter vos collègues?
M. L'Ecuyer: Effectivement. Permettez-moi de me présenter,
le directeur général, Bernard L'Ecuyer, mes collègues,
Micheline Taillon et Michel Cyr.
L'Institut national canadien pour les aveugles est au service de la
population aveugle et handicapée visuelle du Québec depuis 1931.
A titre d'exemple, j'aimerais signaler qu'en 1976, 7370 aveugles du
Québec étaient inscrits à nos registres et que l'organisme
a rendu plus de 8000 services à 3046 d'entre eux. C'est, en peu de mots,
exprimer l'utilité sociale d'un organisme comme l'INCA.
Nous avons présenté à la commission parlementaire
un mémoire sur le projet de loi no 9. Nous avons réagi de
façon positive, tout en proposant des amendements que nous
considérons nécessaires à l'intégration sociale du
handicapé visuel.
Depuis sa fondation jusqu'à maintenant, l'INCA a mis sur pied des
cliniques de dépistage préscolaires et scolaires, ainsi qu'une
clinique de diagnostic, la Clinique ophtalmologique mobile.
Il a ainsi préparé la voie à la prise en charge de
ces services par divers organismes du réseau des Affaires sociales.
L'INCA a été le pionnier dans le domaine des services sociaux aux
handicapés visuels et dans celui de l'adaptation à la
cécité. Ces services sont maintenant intégrés aux
établissements publics. Par ailleurs, notre rôle de
prévention et de service n'en est pas pour autant terminé, car
chez les handicapés visuels, de nombreux besoins existent encore
auxquels aucun autre organisme ne répond. La population aveugle de plus
de 18 ans doit encore s'adresser à l'INCA pour les services de la canne
blanche, du chien-guide, des aides optiques, du livre parlé, de la
transcription de musique en braille et de l'emploi. Soulignons aussi les
besoins non satisfaits des populations multihandicapées tels que les
aveugles sourds, les aveugles déficients mentaux.
L'INCA se doit donc de demeurer fidèle à sa vocation et de
s'assurer que les handicapés visuels du Québec continuent de
recevoir les services auxquels ils ont droit.
Permettez-nous d'ajouter quelques commentaires au mémoire que
nous avons présenté. Nous recommandons d'ajouter, à
l'article 1.2, chapitre 1 du livre blanc, concernant la définition du
handicapé visuel, ce qui suit: A l'intérieur de cette
définition, nous retrouvons deux sous-groupes. Premièrement, les
aveugles, tels que reconnus généralement à travers
l'Amérique du Nord et nous citons "Une personne est
considérée comme aveugle, lorsque son acuité visuelle,
dans les deux yeux, après correction par usage de lentilles
ré-fractives appropriées, est d'au plus 20/200 (6/60),
d'après l'échelle Snellen ou l'équivalent, ou si le champ
de vision, dans chaque oeil, est d'un diamètre inférieur à
20 degrés. Le diamètre du champ de vision doit être
déterminé au moyen: a) d'un écran tangentiel, à la
distance d'un mètre, avec index blanc de 10 millimètres, ou: b)
d'un périmètre à la distance d'un tiers de mètre,
avec l'index blanc de trois millimètres. Deuxièmement, l'autre
classe réunit les handicapés visuels dont l'acuité
visuelle se situe entre 20/700 et 20/200 et où le champ visuel est
compris entre 20 et 60 degrés." Cette clarification a pour but
d'apporter les bénéfices suivants aux aveugles: Canne blanche,
chien-guide, exemption d'impôt, avantages accordés par
l'Association des voituriers et par les compagnies de téléphone,
exonération des frais de douanes, pour tout équipement
adapté aux besoins des aveugles.
A l'article 4, du chapitre 2, du projet de loi no 9, nous appuyons la
recommandation de l'Association de la paralysie cérébrale du
Québec Inc. qui ce lit comme suit: "En ce qui concerne le symbole
prescrit par règlement, nous invitons le législateur à en
choisir un dont la signification ne sera connue que par les services
d'incendie, pour ne pas identifier inutilement le logement de la personne
handicapée pour toute la population, et nous suggérons, de plus,
qu'un comité de recherche soit formé dans le but de trouver le
symbole le plus anonyme possible".
A l'article 33c, du chapitre 3, section II, nous voulons préciser
que certaines écoles d'entraînement, pour les chiens-guides, aux
Etats-Unis, devraient être reconnues par la législation
québécoise, ces écoles possédant
déjà, depuis plusieurs années, la compétence voulue
dans ce domaine.
Au chapitre 4, article 55, section I et article 66, section II. la
commission des affaires sociales
nous semble quelque peu inaccessible pour les personnes
lésées dans leurs droits en raison de la complexité des
procédures. Nous suggérons donc que les organismes
accrédités servent de représentants légaux
auprès de ladite commission.
Au chapitre 4, article 70, section III, nous recommandons, tel que le
mémoire de l'Association de paralysie cérébrale du
Québec Inc. le stipule, que les travailleurs handicapés, hors des
ateliers protégés, soient rémunérés au
même titre que tous les autres employés. Il nous apparaît
que cette ligne de conduite favorisera l'indépendance, la revalorisation
et l'intégration de l'individu handicapé.
Au chapitre IV, article 74, section IV, après avoir pris
connaissance de l'exposé du ministre des Affaires sociales à
l'ouverture de la présente commission parlementaire, nous
préférons l'idée d'incitation à celle d'obligation
dans le plan d'embauche demandé. Les cas doivent être
orientés en fonction des aveugles, de façon à desservir le
plus de handicapés visuels possible. Si cette procédure n'est pas
respectée, l'employeur peut facilement favoriser l'embauche d'un
handicapé visuel au détriment d'un aveugle qui, à
compétence égale, peut effectuer le même travail. A cet
effet, nous suggérons que les psychologues industriels se penchent sur
les possibilités inexploitées d'emplois et, s'il y a lieu, de
faire les représentations nécessaires auprès des syndicats
concernés.
En conclusion, pour éviter toute discrimination, la
recommandation faite dans le manifeste du front commun de la Ligue des droits
de l'homme, mentionne à la page 5, paragraphe 5, ce qui suit: Que les
droits et libertés des personnes handicapées soient reconnus et
garantis par la Charte des droits et libertés de la personne en
interdisant toute forme de discrimination fondée sur la
déficience des aptitudes physiques et/ou mentales ou l'utilisation d'une
prothèse, orthèse ou autre chose destinée à
compenser à un handicap, et que cela devrait être
inséré à la Charte des droits et libertés de la
personne. Nous ambitionnons que les mêmes droits soient attribués
à tous les citoyens, handicapés ou non. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Lazure: M. le Président, je veux féliciter
l'Institut national canadien pour les aveugles et les responsables de la
division du Québec pour le mémoire qu'ils nous présentent
aujourd'hui. Je note avec une certaine satisfaction, à la
dernière page de votre rapport, à peu près au milieu, ce
qui suit: "La loi no 9, après amendement, nous semble être un
excellent exemple de législation propre à protéger les
droits des individus". Si les gens de la Ligue des droits de l'homme finissent
par arriver, on verra peut-être qu'il y a des divergences d'opinions
là-dessus, mais cela fait quand même plaisir de voir qu'un groupe
de handicapés et non pas des représentants de handicapés,
fort important, les aveugles, considère que c'est un projet de loi qui
est valable. Je le dis en passant, M. le Président, parce que c'est un
son de cloche dont les media, depuis quelques mois, n'ont pas tellement fait
part à la population.
Je crois qu'il y a, dans le mémoire que nous présente
l'Institut aujourd'hui, des recommandations fort pertinentes pour
améliorer notre projet. Je vais en toucher quelques-unes.
A la page 2 de votre mémoire, en ce qui concerne la
définition que vous proposez, nous avons
délibérément voulu nous abstenir de définir les
handicaps, en tout cas dans la loi. Peut-être faudra-t-il, dans les
règlements de la loi, en définir un certain nombre.
Peut-être cela sera-t-il utile, mais il est toujours dangereux de
commencer à définir. Vous savez, l'ancien projet, le projet 55,
par exemple, établissait des critères, des pourcentages
d'incapacité qui faisaient qu'un handicapé pouvait être
reconnu comme un handicapé pour l'office. De mémoire, je pense
que c'était 30% dans le cas des handicapés physiques et 40% dans
le cas des handicapés mentaux ou vice versa. Mais cela nous semble
très arbitraire, ces pourcentages, et un peu trop contraignant. Je pense
qu'il vaut mieux, dans la loi, être plus souple et c'est le même
raisonnement que j'aurais pour la définition que vous proposez. Ce n'est
pas que je sois contre, votre définition me semble excellente, mais je
ne pense pas qu'il soit nécessaire de la placer dans la loi mais
peut-être plutôt dans les règlements.
Quant à l'inscription du symbole, que le propriétaire
n'ait le droit d'afficher que sur demande écrite de la personne
handicapée, nous sommes d'accord sur cette approche. C'est un peu la
position que j'ai énoncée la semaine dernière lors de
l'ouverture de la commission à savoir que, partout où le texte
actuel rend obligatoire la carte, nous allons très probablement rendre
cette carte facultative, même chose donc pour les symboles. D'ailleurs,
le texte sera aussi modifié de façon que ce soit plus large.
On a envisagé l'expression "toute personne dont la
mobilité est restreinte", parce qu'il peut y avoir des cas où
notre mobilité est restreinte temporairement pour des raisons x, y, z
sans qu'on soit nécessairement une personne handicapée.
En ce qui concerne les chiens-guides, j'ai le goût de vous
demander votre opinion quant à l'opportunité de mettre sur pied
une école pour chiens-guides ici au Québec. Je suis conscient que
le nombre d'aveugles ou semi-aveugles qui peuvent bénéficier d'un
chien-guide est peut-être assez restreint ici au Québec. Mais je
suis conscient aussi, en même temps, que c'est un cercle vicieux, parce
que les aveugles doivent aller aux Etats-Unis apprendre, si vous voulez
à se servir d'un chien-guide dans une langue qui n'est pas la leur, pour
les francophones en tout cas, pour la majorité de la population. Les
chiens sont dressés en anglais et c'est très coûteux, les
dépenses qu'occasionne le déplacement, l'individu doit aller
plusieurs semaines dans une ville comme New York ou ailleurs.
Personnellement, je trouve ça un peu anormal et je vous avoue que
j'ai un préjugé plutôt favora-
ble pour qu'on fasse l'impossible pour mettre sur pied une école
d'entraînement de chiens-guides, mais j'aimerais bien avoir votre
réaction. J'aurai d'autres commentaires tantôt.
M. Cyr (Michel): Pour ce qui est du nombre de personnes
handicapées visuelles qui peuvent utiliser un chien-guide, on se base
sur une enquête et des statistiques; à travers la province de
Québec, il y a approximativement 80 personnes qui utilisent un
chien-guide. Il a été prouvé que ça ne serait pas
rentable d'avoir une école de chiens-guides au Québec. A travers
le Canada, il y en a environ 350 qui utilisent le chien-guide.
M. Lazure: Cela a été prouvé comment et par
qui, que ça ne serait pas rentable?
M. Cyr: Cela a été prouvé par une
étude faite par notre bureau national à travers le Canada.
M. Lazure: J'aimerais bien en avoir une copie, si vous aviez la
gentillesse de me l'envoyer.
M. Cyr: D'accord.
M. Lazure: Je vous remercie. Je vais continuer, j'avais quelques
autres commentaires. J'ai l'impression qu'on aura un son de cloche
différent du groupe des chiens-guides tantôt, le mouvement des
chiens-guides que je vois en arrière. Il y aura un peu d'action, je n'en
doute pas.
On a aussi la question de confidentialité des dossiers. Si vous
avez suivi la semaine passée les séances de la commission, je
pense que vous pouvez être rassurés, nous allons réviser le
texte pour que le consentement soit explicite et non pas implicite pour la
transmission d'informations d'un dossier.
Vos remarques sur la Commission des affaires sociales me surprennent un
peu. Si je comprends bien, vous dites que les personnes handicapées ont
du mal à se retrouver, que la Commission des affaires sociales est chose
compliquée et vous proposez que des organismes qui défendent les
droits des personnes handicapées jouent ce rôle. Je dois dire que
la Commission des affaires sociales j'ai rarement entendu des critiques
à son sujet fonctionne par différentes sections et
régionalement aussi, dans toutes les régions du Québec, et
le service en est relativement rapide.
Rien n'empêche un groupement comme le vôtre ou un autre
groupement qui s'occupe de personnes handicapées d'agir comme
intermédiaire ou parrain, si vous voulez, quand une personne
handicapée aura à faire valoir un droit auprès de la
Commission des affaires sociales. Il me semble qu'on a avantage à
utiliser les services d'un organisme qui, très souvent, a eu des
jugements qui allaient dans le sens des revendications, soit de personnes
handicapées ou de personnes bénéficiaires de l'aide
sociale qui se sentaient lésées.
J'aimerais mieux qu'on fasse l'essai, pendant un bout de temps, quitte,
encore une fois, à ce que votre institut et d'autres groupements
agissent comme des intermédiaires entre la personne handicapée et
la Commission des affaires sociales.
Finalement, aux articles 73 et 74, comme vous le savez, il y aura des
changements.
On peut encore se poser la question, dans le cas de congédiement
d'un employé pour cause de handicap seulement. Pourquoi
n'appliquerait-on pas cette clause aux employeurs de moins de cinquante
employés, comme vous le faites remarquer?
Je m'interroge encore moi aussi. La raison pour laquelle on ne l'avait
pas inclus, l'employeur de moins de cinquante employés, c'était
selon l'hypothèse que si un employeur n'a que dix, quinze
employés, et qu'il est obligé d'en garder un parce que la
personne devient handicapée, il a peu de choix d'autres emplois dans son
entreprise, pour relocaliser la personne employée. C'est la raison.
Mais je ne suis pas sûr qu'on doive continuer à exempter
l'employeur de moins de cinquante employés. Nous allons examiner cette
clause de nouveau. Merci.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je veux également remercier l'Institut
national pour les aveugles de son mémoire, et de la démarche
qu'il fait aujourd'hui. Une toute petite question un peu marginale pour faire
suite à la question du ministre. Est-ce qu'il existe ailleurs au Canada,
des écoles d'entraînement des chiens-guides ou s'il n'en existe
qu'aux Etats-Unis?
Mme Taillon (Micheline): Aux Etats-Unis.
M. L'Ecuyer (Bernard): ... présentement, aux Etats-Unis,
qui sont reconnues comme compétentes.
Mme Lavoie-Roux: II n'y en a qu'aux Etats-Unis?
M. L'Ecuyer: A notre connaissance, qui sont reconnues comme
compétentes, oui.
Mme Lavoie-Roux: D'accord. L'autre point que j'aimerais aborder
avec vous, et vous y avez touché un peu lorsque vous avez parlé
de l'emploi, mais pas d'une façon très spécifique. J'ai
l'impression que le problème de placement ou de choix d'occupation de
travail pour les personnes aveugles est extrêmement limité.
Il y a les organismes pour aveugles qui emploient un certain nombre
d'aveugles. Mais à l'extérieur de cela, les aveugles sont
vraiment limités à des occupations un peu traditionnelles comme
la réparation des chaises, la production de balais, et d'autre part, la
gérance de certains casse-croûte.
J'aimerais savoir si votre organisme a fait l'exploration quant à
d'autres ouvertures possibles d'emplois pour les aveugles. Est-ce qu'à
l'occa-
sion de votre présence ici, est-ce qu'il y a des recommandations,
même si elles ne touchent pas directement le projet de loi no 9? Ce n'est
pas tellement souvent que comme groupe, vous pouvez venir devant une commission
parlementaire, faire valoir les préoccupations du groupe que vous
représentez.
La raison pour laquelle je vous pose ces questions, c'est que l'an
dernier, j'ai vécu une expérience avec quelqu'un qui est devenu
aveugle à la suite d'un accident, et qui était une personne qui
avait des qualifications. Le problème d'intégration de cette
personne évidemment il y avait une période d'adaptation
qu'elle devait faire, d'entraînement, etc. mais il reste que cela
me semblait extrêmement limité, comme possibilités
d'ouvertures, dans le monde du travail, pour les personnes aveugles.
M. Cyr: Si on parle de travail réellement manuel, vous
parliez de tressage de fonds de chaises, de montages de balais, ces emplois se
font presque exclusivement en ateliers protégés.
Si on parle d'une population qui est sur le marché du travail
régulier, si on prend la population qui est prête à
travailler, il y en a environ 50% qui travaillent sur des emplois très
différents. On peut parler d'emplois industriels, on peut parler
d'emplois professionnels, on peut parler d'emplois spécialisés.
En fait il y en a dans presque tous les domaines, pourvu qu'on leur donne la
possibilité de s'intégrer et les outils nécessaires pour
s'y intégrer.
C'est peut-être pour cela que, dans le fond, si vous avez pris des
notes sur ce qu'on vous a présenté ce matin, on demande, à
un moment donné, que les plans d'embauche qui sont
présentés, par les entreprises ou par les employeurs, soient
axés un peu plus, pour ce qui a trait au handicap visuel, vers les
personnes aveugles, parce que, dans le fond, je me mets dans la peau d'un
employeur et je me dis: J'ai deux possibilités. J'ai deux personnes
à prendre, une personne qui a une vision moyenne d'à peu
près 20/70 ou 20/80 et une personne qui a 20 et 400 pour faire un
travail. Si je ne connaissais pas le handicapé, ses possibilités,
je serais beaucoup plus porté à prendre la personne qui a 20/80,
c'est normal.
Mais, si à ce moment-là, on demande que les programmes sur
des emplois spécifiques soient orientés beaucoup plus vers
l'aveugle, je pense qu'on peut découvrir beaucoup d'autres
marchés ou d'autres possibilités de travail qui peuvent devenir
très intéressantes.
Mme Lavoie-Roux: Comme association, avez-vous fait ce travail
d'exploration pour essayer d'élargir... peut-être pas de trouver
des emplois, parce que... mais je veux dire du point de vue des
habiletés d'un grand nombre de handicapés visuels, justement
d'avoir un choix d'emplois un peu plus diversifié que celui qu'on lui
offre?
M. Cyr: Oui. Personnellement, je suis conseiller en main-d'oeuvre
pour les handicapés visuels. Nous regardons toutes les
possibilités. On va voir les employeurs. On regarde très
attentivement toutes les sortes de travaux qui peuvent être faits par les
handicapés.
Nous avons aussi mis sur pied des possibilités de formations
spécialisées pour les aveugles, en fait, pour qu'ils puissent
avoir des emplois un peu plus spécialisés ou un peu plus
professionnels. Les recherches d'emplois se font dans le même cadre.
En fait, lorsqu'on met un cours ou une formation en marche, on regarde
aussi les possibilités de travail qui existeront par la suite. Je
pourrais peut-être vous en énumérer quelques-uns. Il y a,
entre autres, l'informatique, la représentation au niveau de
l'information pour le ministère du Revenu. Il y a aussi, dans les
emplois de métiers, présentement une école qui se forme au
niveau de la mécanique automobile pour le handicapé visuel. Ce
sont toutes des possibilités, comme vous voyez, qui sont quand
même assez diversifiées et qui peuvent donner au handicapé
visuel la possibilité de s'intégrer.
Mme Lavoie-Roux: Seulement une remarque quant au symbole sur les
appartements ou sur les habitations des personnes handicapées visuelles.
Je me demande si je comprends votre souhait, à savoir que ces symboles
soient le moins apparents possible ou le moins... Je me demande si ce n'est
peut-être pas un peu irréaliste. Vous dites qu'ils devraient
être familiers uniquement aux personnes qui travaillent pour les services
d'incendie. Enfin, vous avez mentionné quelque chose à cet effet.
Je pense que je serais d'accord avec vous s'il y avait uniquement ces personnes
qui devaient prêter secours en cas de conflagration, mais je pense que,
très souvent, les premiers qui vont porter secours, ce sont des voisins
ou même des personnes justement qui n'ont rien à faire avec les
services d'incendies. Je me demande même si cela peut être un
souhait bien légitime, si au plan du réalisme ce serait une bonne
chose que le symbole soit si ignoré de la population en
général.
Mme Taillon: II pourrait y avoir à ce moment-là
danger. Cela pourrait attirer les voleurs ou les malfaiteurs. Si vous savez
qu'une personne handicapée demeure dans une résidence, cela peut
attirer d'autres malfaiteurs. A ce moment-là, ce n'est pas de la
prudence. Il peut y avoir deux côtés. Il y a deux dangers à
cette misère.
Mme Lavoie-Roux: C'est une possibilité, mais je pense bien
que c'est un peu un dilemme entre les deux. J'ose espérer que, dans
notre société, il va y avoir plus de gens prêts à
prêter secours aux personnes handicapées qu'il va y en avoir
prêts à les exploiter. Enfin, c'est l'espoir que je garde encore
vis-à-vis de notre société. J'espère que je ne me
trompe pas.
Mme Taillon: La personne qui demeure dans un immeuble
d'habitation peut toujours avertir le concierge ou les gens qui demeurent
autour d'elle. Il n'y a aucun signe finalement, pour le savoir, pour les gens
de l'extérieur ou toute autre
personne. Il y a du bon, mais il y a un gros danger, par ailleurs, dans
des grandes villes.
Mme Lavoie-Roux: Une dernière question que je voulais vous
poser. Dans les exercices à la disposition des handicapés visuels
présentement, est-ce que vous avez le sentiment qu'au point de vue du
"counselling", du point de vue des différents services qui doivent
être mis à leur disposition dans le processus d'éducation,
s'il s'agit de personnes plus jeunes, d'éducation et de
réadaptation dans le cas de personnes qui deviennent des
handicapés visuels à un âge plus tardif, à la suite
d'accidents ou autres, avez-vous l'impression que ces services sont
adéquats présentement? Somme toute, les handicapés visuels
sont limités en nombre par rapport à l'ensemble d'autres types de
handicaps. Je me demande jusqu'à quel point on ne les a pas
peut-être un peu oubliés ou est-ce une fausse impression que
j'ai?
M. Cyr: Disons que je pourrais vous répondre ainsi: En
fait, nous, si on parle de main-d'oeuvre et d'orientation professionnelle, on
ne se trouve pas assez nombreux, c'est évident. Il y a le fait aussi de
la mise sur pied du nouveau centre de réadaptation qui devrait rendre
accessibles beaucoup d'autres services qui étaient donnés en
fait, ailleurs et qui seront donnés maintenant par les services de
réadaptation. Si on parle de réadaptation comme telle au niveau
du handicap visuel, si on parle de mobilité, si on parle d'enseignement
du braille ou des appareils électroniques, il est évident que la
population, présentement, en souffre, et que nous autres, au niveau de
la main-d'oeuvre, on n'est pas assez nombreux.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie, messieurs et madame.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Merci, M. le Président. Madame et messieurs, j'ai
deux petites questions. Premièrement, sur le sujet des chiens-guides, on
dit qu'au Québec, nous avons 90 personnes avec des chiens-guides et nous
avons à peu près 10 000 aveugles. Est-ce que ces chiffres sont
exacts?
M. L'Ecuyer: Environ 7300 aveugles sont inscrits à nos
dossiers
M. Shaw: Oui. Il y en a d'autres à part cela qui sont soit
handicapés ou aveugles?
M. L'Ecuyer: Je ne le sais pas exactement.
M. Shaw: Vous avez sur votre liste à peu près 8000
aveugles?
M. L'Ecuyer: Nous avons présentement à nos
registres 7370 dossiers.
M. Shaw: Est-ce que ce sont seulement des aveugles ou est-ce que
ce sont un peu des handicapés visuels aussi?
M. L'Ecuyer: Ce sont positivement des personnes normalement
reconnues comme aveugles selon l'échelle Snellen et également
telles que reconnues normalement en Amérique du Nord,
c'est-à-dire à 20/200 de vision et moins après
correction.
M. Shaw: De ces 7300, quel pourcentage peut employer un
chien-guide avec avantage?
M. Cyr: C'est peut-être difficile d'établir un
pourcentage, parce qu'il y a quand même beaucoup de facteurs qui entrent
en ligne de compte. Si on prend une personne qui a 20/200 de vision, cela veut
dire, grosso modo, qu'une personne qui a une vision parfaite de 20/20 elle voit
une chose parfaitement à 200 pieds, et que la personne qui a un 20/200
va la voir parfaitement à 20 pieds. Une personne qui a 20/200 a quand
même une vision suffisante pour pouvoir se conduire. Je pense que c'est
bien difficile d'établir statistiquement combien de gens ont 20/200,
combien ont 20/300 ou 20/400.
Il reste quand même que dans la population pour ceux qui sont
peut-être aveugles totalement ou presque, il y a tout l'aspect de la
santé et les critères d'admissibilité au chien-guide sont
quand même assez sévères. Il faut d'abord aussi que la
personne qui demande un chien-guide aime les chiens.
Mme Taillon: II y a également 67% des aveugles qui ont
plus de 55 ans, et pour des raisons, parfois, de mobilité, de
vieillissement, ne peuvent pas s'occuper d'un chien, ne peuvent le sortir matin
et soir.
M. Shaw: Alors, quel pourcentage prévoyez-vous? La
moitié peut employer des chiens-guides, un quart, ou quoi?
Mme Taillon: Si vous voyez que 65% des gens ont
déjà plus de 55 ans, je veux dire qu'il faut quand même...
La personne ne pourrait pas...... avoir un chien-guide à 70 ans, je ne
crois pas. Elle n'aurait peut-être pas les capacités physiques. Le
pourcentage actuel est difficile à établir.
M. Shaw: Mais nous avons à Montréal maintenant un
centre d'entraînement pour les chiens, centre qui se spécialise
dans l'entraînement des chiens, qui est prêt à faire une
demande de subvention au gouvernement pour la formation des chiens-guides. Ce
centre s'occupe maintenant de la formation des chiens de garde, des chiens qui
trouvent des drogues dans les aéroports. C'est un centre qui se
spécialise dans l'entraînement des chiens.
Vous venez de dire qu'il n'y aurait pas assez de demandes au
Québec pour les chiens-guides. Est-ce que vous voulez dire que cela n'a
pas de bon sens de continuer d'essayer d'avoir un centre d'entraînement
pour les chiens-guides au Québec?
M. L'Ecuyer: Si vous tenez compte des pro-
portions actuelles, il y a environ 80 personnes qui, jusqu'à
maintenant, utilisent le chien-guide sur une population... Cela vous donne un
ratio un peu supérieur à 1%. Maintenant, c'est selon ce que
l'individu désire aussi. Chaque personne ne désire pas
nécessairement utiliser un chien-guide.
M. Shaw: Est-ce que c'est à cause du coût, à
cause d'autres choses?
M. L'Ecuyer: Pas particulièrement, monsieur.
Effectivement...
M. Shaw: Des subventions sont maintenant disponibles pour avoir
des chiens-guides si vous en voulez?
M. L'Ecuyer: Voici: En ce qui nous concerne à l'INCA, si
on parle en termes de subventions, jusqu'à maintenant, nous avons
aidé un nombre de personnes à se rendre au centre
d'entraînement. L'entraînement ne coûte rien à
l'individu même et, d'autre part, dans une institution de chiens-guides,
l'institution payait le voyage et, dans d'autres cas, nous avons payé,
pour l'utilisateur, son voyage d'aller et de retour. Nous avons
également versé un montant de contribution pour
l'entraîner, pour celui qui était entraîné, avec son
chien-guide.
Cependant, on ne l'a jamais imposé particulièrement
à personne, et si on parle en termes de coût à l'individu
même, il n'y en a pas eu à l'individu même.
M. Lazure: M. le Président, si M. le député
le permet, je veux bien comprendre, d'autant plus que l'INCA est un des
organismes que ce gouvernement-ci subventionne, comme le gouvernement
antérieur le faisait. Est-ce que vous voulez dire, monsieur, que toute
personne aveugle qui veut aller aux Etats-Unis faire l'achat d'un chien-guide
et demeurer le temps qu'il faut pour qu'il s'habitue à son chien-guide,
cette personne aveugle peut faire une demande chez vous et vous lui assurez un
octroi, une subvention, que ça ne lui coûtera rien là-bas
pour vivre à l'hôtel ou en chambre et qu'elle n'aura pas à
débourser pour l'entraînement non plus?
M. L'Ecuyer: Tout d'abord, le chien-guide ne lui coûte
rien.
M. Lazure: Qui va le payer?
M. L'Ecuyer: Le chien-guide lui est donné. Le chien-guide
ne lui est pas facturé. L'institut même, c'est-à-dire non
pas l'Institut national, mais l'école de chiens-guides...
M. Lazure: Le centre d'entraînement... M. L'Ecuyer:
Le centre d'entraînement... M. Lazure:... va lui donner le
chien...
M. L'Ecuyer: ... rend le chien-guide disponible.
M. Lazure: ... moyennant paiement du cours, je suppose, n'est-ce
pas?
M. L'Ecuyer: Le cours n'est pas payé par
l'étudiant, puisque, ces centres d'entraînement, dans un cas
particulier que je connais, le centre est assisté par une fondation,
d'une part. D'autre part, en ce qui nous concerne, nous soumettons des demandes
aux centres d'entraînement, mais ce sont les centres d'entraînement
qui déterminent si le postulant peut aller suivre l'entraînement
et s'occuper subséquemment de son chien.
Or, nous avons payé jusqu'à maintenant, et nous continuons
à payer le prix du voyage, aller-retour, à celui qui
désire et qui est accepté par le centre d'entraînement. Si
le centre d'entraînement demande que des honoraires soient versés,
nous les versons. Je dois vous expliquer que nous avons un fonds
spécial, qui n'est présentement pas très
élevé, mais, à partir de contributions que nous avons
reçues dans le passé et qui étaient spécifiquement
pour les chiens-guides, on a ouvert un compte spécialement à
cette fin, ce sont donc ces fonds qui sont utilisés pour aider celui qui
désire aller s'entraîner en vue de l'obtention d'un
chien-guide.
M. Lazure: Mais, diriez-vous que les conditions peuvent varier
d'un centre d'entraînement à un autre, d'une école
aux Etats-Unis, par exemple, il y a plusieurs écoles à
J'autre, les conditions vont varier?
M. L'Ecuyer: J'en connais présentement deux. Quand vous
parlez de conditions, parlez-vous de conditions d'entraînement ou de
conditions...
M. Lazure: Non, des conditions financières.
M. L'Ecuyer: Les conditions financières, pour l'aveugle,
ne varient pas, ça ne lui coûte rien. Cependant, s'il le
désire, il a la liberté de faire une contribution, mais, en
aucune circonstance, il n'est forcé de le faire.
M. Lazure: Est-ce que vous prenez l'engagement, comme institut,
vis-à-vis des personnes aveugles au Québec, de défrayer le
coût entier du voyage et ensuite le coût du cours, si le centre,
là-bas, charge quelque chose pour ce cours? Est-ce l'engagement que vous
prenez, c'est votre politique?
M. L'Ecuyer: Non seulement c'est un engagement que je peux
prendre ce matin, mais c'est une politique qui a existé jusqu'à
maintenant. Lorsque les postulants sont acceptés, lorsqu'ils
répondent aux critères d'admissibilité qui sont
établis par les centres d'entraînement, à ce moment nous
aidons financièrement le postulant à se rendre suivre son cours
et à revenir, sans qu'il soit forcé de débourser quelque
argent que ce soit.
M. Lazure: Dernière question, M. le Président.
A supposer que ça devienne une chose intelligente que de
créer un centre d'entraînement au Québec, seriez-vous
prêts à continuer la même politique vis-à-vis de ce
centre?
M. L'Ecuyer: Absolument. M. Lazure: Merci.
M. Shaw: Deuxième question, M. le Président. Vous
avez dit, tantôt, que 50% des aveugles qui sont enregistrés chez
vous ont un emploi présentement. Quel pourcentage sont dans des ateliers
fermés, contrôlés ou protégés?
M. L'Ecuyer: Ce n'est pas 50% des personnes qui sont
enregistrées à l'INCA, mais 50% des personnes qui sont
admissibles au travail. C'est quand même très différent. En
fait, sur les quelque 7000 aveugles qui sont enregistrés, il y a, grosso
modo, environ 600 à 700 personnes qui sont admissibles au travail. Sur
ces 600 à 700 personnes, qui sont admissibles au travail, il y a quand
même une catégorie de clientèle en atelier
protégé; on parle d'environ 75 personnes qui peuvent être
inscrites dans les ateliers protégés. Ici, on parle d'ateliers
protégés pour handicapés visuels; il y en a un à
Québec et un à Montréal. Il y a quand même un
pourcentage de personnes qui sont inscrites à court terme,
c'est-à-dire à un programme de formation et de
réadaptation au travail, et il y a les autres qui sont inscrits comme
travailleurs à long terme. Ceux-ci sont, plafonnés ou ont
d'autres problèmes qui les empêchent de répondre aux normes
de la production ou aux exigences du marché du travail, mais par contre,
ces gens peuvent être accessibles aux ateliers.
M. Shaw: Vous dites que seulement 600 personnes sur 7000 sont
aptes au travail?
M. L'Ecuyer: Oui, si vous considérez que 67% de ces
personnes sont presque à l'âge de la retraite, et si vous
considérez le pourcentage assez élevé de personnes qui
sont encore aux études, il reste entre 600 et 700 personnes qui sont
disponibles pour le marché du travail.
M. Shaw: Merci.
Mouvement sur les chiens-guides
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie au nom des
membres de la commission de la présentation de votre mémoire.
J'inviterais maintenant le Mouvement sur les chiens-guides, à venir nous
présenter leur mémoire.
M. Miller.
M. Miller (Gérald): Tout d'abord, à titre
d'information, M. le Président, il est actuellement 12 h 5. Est-ce que
vous pourriez nous informer si la commission a l'intentron d'ajourner à
un moment donné et de reprendre, ou de poursuivre pendant 1 h 5 qui nous
est allouée?
Le Président (M. Marcoux): Nous allons ajourner à
12 h 30. Ce qui donne le temps soit de lire votre mémoire ou d'en
présenter l'essentiel, de le résumer. Normalement, il y a une
vingtaine de minutes accordées à chaque groupe qui
présente son mémoire, et nous reprendrons la discussion à
la reprise de nos travaux vers 3 h 30, le dialogue entre les
députés et vous.
M. Miller: D'accord.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous pourriez nous
présenter vos collègues?
M. Miller: Je vous présente M. Michel Lan-glois,
président du Mouvement sur les chiens-guides ainsi que Mme Louise Laurin
qui nous assistera pour la lecture de certains documents éventuellement.
Mon nom est Gérald Miller, je suis secrétaire du même
mouvement.
M. le Président, M. le ministre, messieurs les
députés, mesdames et messieurs. Le Mouvement sur les
chiens-guides existe depuis déjà trois ans et depuis ce moment,
nous avons eu l'occasion d'élaborer un certain nombre de demandes qui
ont été présentées au gouvernement et au Parlement
à l'aide de divers documents. Nous avons eu aussi l'occasion de faire
certaines représentations orales. Ces représentations et ces
documents, nous les avons produits notamment lors de la présentation
d'un mémoire relativement au projet de loi 55 l'an dernier. Suite
à l'élection d'un nouveau gouvernement à l'automne
dernier, nous avons, en hiver, élaboré un mémoire que nous
avons expédié au ministre des Affaires sociales dans le but de
résoudre de la façon la plus globale possible la situation et la
problématique des utilisateurs de chiens-guides au Québec.
Nos demandes sont explicitées dans ce mémoire de
façon, nous pensons, claire et précise et, suite à
l'ensemble de ces représentations, le gouvernement a
présenté le projet de loi no 9 qui traite de divers
problèmes et notamment de celui de l'utilisation des chiens-guides au
Québec. Il se pose, cependant, un petit problème ici c'est que
nous avons divers documents d'origine gouvernementale entre les mains. Je pense
au livre blanc, je pense au projet de loi, je pense à un document
publié le 4 août dernier, appelé: Bilan de la
tournée de consultations, etc., publié par le bureau du ministre.
Nous avons aussi le texte du discours prononcé par M. Lazure, mardi
dernier, à l'ouverture de la présente commission. Nous constatons
qu'il existe entre ces divers documents certaines difficultés en termes
de concordance.
De plus, nous avons pris connaissance de toutes sortes de rumeurs
d'informations officieuses, à l'effet que le projet de loi no 9,
c'est-à-dire que le texte que nous avons actuellement ne serait plus
vraiment d'actualité. D'ailleurs, il y a eu des articles de journaux,
dans le Devoir, je pense, jeudi dernier qui, en matière de droits de
l'homme, présentait la situation de façon assez
différente, de la façon dont le ministre la présentait
deux jours auparavant mardi dernier.
En somme, il règle une espèce d'atmosphère
de confusion autour de ça, et nous aimerions qu'en guise de
considération préliminaire le ministre précise un peu la
nature de ses intentions relativement à l'utilisation des chiens-guides,
la façon dont elles seraient traitées dans un projet de loi
modifié ou un autre projet de loi éventuellement.
La raison pour laquelle nous demandons ça, M. le ministre, c'est
que nous voulons économiser au maximum le temps de la commission, le
nôtre et celui du public, en ce sens qu'il ne servirait à rien,
à notre avis, de discuter de longues minutes sur des points sur lesquels
nous nous entendons déjà.
M. Lazure: M. le Président, je le fais avec plaisir, en
réponse à la proposition de M. Miller. Je vais me confiner, comme
vous le suggérez, aux chiens-guides. Nous avons, depuis un certain
temps, fait des démarches auprès des experts en rédaction
des lois et notre proposition était de considérer le chien-guide,
comme une prothèse, avec tout ce que cela implique de droit. Parce que
dans l'interprétation légale, quand on parle d'une personne
handicapée, par exemple au point de vue discrimination, la
prothèse est incluse pour ainsi dire dans l'expression "personne
handicapée". C'est l'interprétation que font les légistes.
Autrement dit, si un restaurateur récrimine contre une paire de
béquilles ou une chaise roulante, il se trouve à
récriminer contre la personne handicapée.
En partant de ça, notre objectif était d'avoir la
reconnaissance du chien-guide comme une prothèse. Cela nous semblait la
chose la plus simple. Cependant, les légistes nous affirment que cela
n'est pas possible. Justement, la proposition que le comité de
législation nous fait de façon officieuse je profite de la
circonstance pour avoir votre réaction toujours dans le cadre
général, sortir de notre projet de loi, à la section II,
tout ce qui regarde les droits en abordant plutôt la Charte des droits de
l'homme, nous ferions la même chose pour les chiens-guides. On nous
suggère d'abroger et d'ajouter à l'article 10 de la charte ce qui
suit; encore une fois, c'est sous toute réserve, c'est une suggestion:
"Tout handicapé visuel accompagné d'un chien-guide est titulaire
du droit reconnu à l'article 10 et peut garder son chien à ses
côtés."
En d'autres termes, tout ce qui est liberté et droit de la
personne handicapée je reviens au texte de mardi dernier
je ne comprends pas quand vous dites qu'il y a confusion, pour moi, c'est
très clair. J'ai expliqué, la semaine dernière, que les
experts nous avaient dit il y a x mois que cela n'était pas possible,
qu'il valait mieux l'inclure dans notre propre projet de loi. D'autres experts,
qui sont tout aussi valables, nous disent maintenant, que c'est possible et
nous ne demandons pas mieux que de travailler par l'intermédiaire de la
Charte des droits de la personne. Ceci pour les chiens-guides.
Deuxièmement, la question que je soulevais à propos de
l'école d'entraînement, j'aimerais bien avoir vos réactions
aussi tout à l'heure. Finale- ment, un message important pour votre
groupe comme pour les autres, c'est qu'effectivement, nous avons profité
de cette tournée des fonctionnaires, nous avons profité de la
lecture de ces mémoires, nous avons appris beaucoup de choses, moi j'ai
appris beaucoup de choses. Le texte du projet de loi no 9 sera
révisé, comme cela arrive dans le cas de bien des projets de
loi.
Cela ne m'apparaît pas matière à confusion ou
à panique qu'un projet de loi, après de multiples consultations,
soit révisé, de façon sérieuse, cela ne me
paraît pas anormal du tout.
M. Miller: Vous avez parlé de l'aspect du droit des
utilisateurs de chiens-guides, auquel droit les utilisateurs seraient
admissibles. Cependant vous n'avez pas parlé de l'aspect accès
à ces droits. Dans le projet de loi no 9, il y a différentes
procédures prévues, afin qu'une personne handicapée
visuelle soit autorisée à utiliser un chien-guide. Il y a une
reconnaissance officielle, il y a des médaillons d'immatriculation, des
cartes d'identité, des mentions spéciales sur les cartes
d'identité, etc.
J'aimerais savoir si vous avez des intentions précises
actuellement, à cet effet. Mais, avant d'entendre votre réponse,
j'aimerais préciser ce qui suit: la confusion dont nous parlions tout
à l'heure fait référence surtout à un article de
journal paru jeudi dernier et qui disait que les droits des personnes
handicapées étant reconnus implicitement dans la Charte des
droits et libertés de la personne, il n'y aurait plus lieu d'amender la
charte en question.
M. Lazure: Je ne sais pas qui a dit cela. C'est Mme Marie Laurier
qui a dit cela. C'est une conclusion qu'elle a tirée. Elle
n'était pas ici mardi, à l'ouverture. Elle a vu le texte qui lui
a été transmis, comme aux autres journaux, par le courrier. Mais
ce n'est pas une interprétation correcte de ce que j'ai dit.
M. Miller: C'est donc une erreur journalistique tout
simplement.
M. Lazure: Exactement.
M. Miller: Et vous avez toujours l'intention de modifier la
Charte des droits et libertés de la personne de façon qu'elle
s'applique aux handicapés?
M. Lazure: Sûrement. Et de façon encore plus
précise pour les chiens-guides, un peu dans le sens que je le disais
tantôt.
M. Miller: D'accord. En ce qui concerne cela, je
préférerais qu'on n'engage pas le débat tout de suite et
qu'on s'informe plutôt des intentions de votre gouvernement relativement
à cela, et nous passerions à l'aspect débat dans la
deuxième partie, celle des questions et réponses, commentaires,
etc.
Concernant toute cette affaire des reconnaissances officielles, est-ce
que vous avez des intentions précises à l'heure actuelle?
M. Lazure: Je ne comprends pas très bien votre
question.
M. Miller: Par exemple, à l'article 1, alinéa d),
on parle de reconnaissance officielle des centres d'entraînement pour
chiens-guides. A l'article 33, alinéa c)...
M. Lazure: Je comprends très bien. Ecoutez. C'est un des
exemples où le texte qui a été déposé au
mois de juin, en rétrospective maintenant, devenait un peu
tâtillonneux, allait trop dans les détails. Je ne pense pas que ce
soit nécessaire que l'office reconnaisse. Il y a des ministères
appropriés pour décerner une telle reconnaissance, que ce soit le
ministère de l'Education ou un autre ministère. Là-dessus,
j'aimerais bien entendre vos commentaires.
Mais l'orientation générale que j'ai essayé de
véhiculer depuis une semaine, c'est qu'on va rendre cet office beaucoup
moins exécutant. L'office va surtout s'assurer que quelqu'un est
là pour reconnaître des écoles d'entraînement. Vous
admettrez qu'il faut toujours qu'il y ait une reconnaissance par quelqu'un.
Mais, dans l'optique que nous avons dessinée depuis une semaine,
l'office va principalement être un ombudsman, un coordonnateur et, de
façon très exceptionnelle, il pourra stimuler la création
de services dans des régions où il n'y en a pas du tout.
M. Miller: Cela veut donc dire que toutes ces reconnaissances
officielles demeureraient; qu'elles soient opérationnalisées par
l'office ou par d'autres instances gouvernementales, elles demeureraient.
M. Lazure: Je pense que n'importe quelle école, qu'il
s'agisse de l'entraînement de chiens-guides ou autre chose, une
école de mécanique, doit avoir une certaine reconnaissance de la
part de l'Etat.
M. Miller: Oui.
M. Lazure: Je ne vois pas où vous voulez en venir.
M. Miller: Est-ce que cela s'applique aussi à la
reconnaissance des chiens-guides individuellement, l'article 33c?
M. Lazure: Non, c'est seulement pour l'école. Pas aux
chiens individuellement.
M. Miller: Est-ce que cela veut dire que l'article 33c
tomberait?
M. Lazure: Oui, cela veut dire cela.
M. Miller: La terminaison de l'article 33b tomberait-elle aussi,
c'est-à-dire la reconnaissance des utilisateurs de chiens-guides et la
mention spéciale sur une éventuelle carte d'identité?
M. Lazure: Cela serait seulement sur demande de la personne.
M. Miller: Et il y aurait une mention spéciale sur cette
carte?
M. Lazure: II n'y aurait pas de mention spéciale.
M. Miller: Ce serait une carte comme pour toute autre personne
handicapée?
M. Lazure: Exact.
M. Miller: D'accord. Pour ce qui concerne la modification dont
vous parliez tout à l'heure, que l'utilisateur de chien-guide sera
titulaire, etc., cela implique, je suppose, que les articles 5, 6 et que le
paragraphe a) de l'article 33 tomberaient aussi...
M. Lazure: Un instant!
M. Miller: ... l'article 5 concerne l'accès aux moyens de
transport et aux lieux publics. L'article 6 concerne les clauses antianimales
de baux qui seraient sans effet. L'article 33, paragraphe a) concerne la
catégorisation des lieux publics en trois blocs plus ou moins
accessibles... Cela tomberait?
M. Lazure: La réponse, c'est oui, sauf pour l'article 6,
la clause du bail.
M. Miller: Oui.
M. Lazure: Ce serait plutôt inclus dans le bail type.
M. Miller: D'accord. Je réitère que nous passerons
à l'aspect débat un peu plus tard. Je pense que nous sommes
maintenant prêts à entreprendre notre présentation. Je
pense que le président de notre organisation aurait certaines
considérations dont il aimerait faire part à la commission
concernant l'utilisation pratico-pratique d'un chien-guide quotidiennement.
Le Président (M. Marcoux): Allez-y.
M. Langlois (Michel): Pour ce qui est des chiens-guides, il y a
environ 80 personnes qui utilisent un chien-guide au Québec. Il y a des
raisons à cela. De très grandes difficultés existent pour
les utilisateurs de chiens-guides présentement et cela en
décourage un bon nombre d'aller s'en chercher un. C'est vraiment
pénible d'arriver à la porte d'un restaurant ou à bord
d'un transporteur public, dans d'autres villes que Montréal, parce qu'on
n'a pas de problèmes à Montréal avec les transports
publics, d'engager d'autres personnes, parce qu'on ne se déplace pas
nécessairement seul, et de s'en faire refuser l'accès. C'est
quand même humainement dur à vivre. Les gens ne sont pas
nécessairement prêts à se battre comme on l'a fait chez
nous pour essayer de faire reconnaître ces droits.
II y a probablement aussi un manque d'information sur ce qu'est un
chien-guide, ce que cela fait, ce que cela ne fait pas. Nous sommes
persuadés, au Mouvement sur les chiens-guides, que le chien-guide
demeure la meilleure aide à la mobilité, compte tenu de
l'indépendance qu'il apporte et nécessairement de son autonomie
ainsi que de sa précision au travail. C'est clair qu'un chien-guide voit
plus clair qu'une canne blanche. Nous sommes convaincus que c'est la meilleure
aide à la mobilité. Par contre, il est évident que, dans
la définition légale d'une personne handicapée visuelle,
il y a plusieurs personnes qui conservent un résidu de vision suffisant
pour se conduire et n'ont donc pas la nécessité d'utiliser un
chien-guide.
J'aimerais aussi ajouter que dans la pratique, c'est ce qui
arrive quand on dit que l'utilisation d'une prothèse est
implicite au fait d'être une personne handicapée, les
restaurateurs récalcitrants ne sont pas d'accord. Souvent, ils nous
disent: Laisse ton chien-guide dehors ou dans le portique et tu vas pouvoir
venir manger chez nous ou ils disent: Si on insiste, si on entre, s'ils
appel-len la police et que la police ne nous fout pas dehors, on demeure
là, mais ils ne viennent pas nous servir. Je relève ces ceux
points de cette situation qui a été vécue.
Le premier, c'est que, d'après moi, il faut vraiment
préciser que le chien-guide doit être protégé,
c'est-à-dire qu'on doit être protégés non seulement
du fait d'être handicapés, mais aussi pour le fait d'utiliser un
chien-guide. On nous dit: Ce n'est pas toi que je refuse, c'est ton chien. Il y
a aussi l'aspect de protéger le droit de bénéficier des
services. Quand je vous dis qu'on peut demeurer assis à une table de
restaurant une heure, deux heures, sans que l'on vienne nous servir, c'est le
droit de bénéficier des services offerts. Je veux dire que c'est
encore une revendication qui part de notre vécu à
nous-mêmes et de celui d'autres utilisateurs de chiens-guides.
C'est pour cela qu'on est peut-être bien tatillons, mais disons
que, dans le moment, la situation est très boiteuse et même
condamnable. Cependant, on est convaincu que, si la loi n'accorde pas une
protection complète, on sera soumis à peu près à la
même situation que celle qui existe présentement,
c'est-à-dire la situation de doute, à savoir, s'il y a quelques
exceptions qui subsistent, à quel moment ces exceptions vont nous tomber
sur te dos.
Quand on utilise un chien-guide, cela nous permet d'évoluer dans
à peu près toutes les sphères de la société,
tant dans le domaine du loisir, du travail ce qui est très
important aussi, protéger le travail les transports, etc. S'il y
a des exceptions qui subsistent, on risque de s'y frotter tôt ou
tard.
M. Lazure: M. Langlois...
M. Langlois: Seulement une dernière petite chose.
M. Lazure: Seulement pour régler la question, parce que je
vois qu'il existe encore un peu de confusion. Le chien-guide, dans la
proposition que j'énonçais tantôt, ne serait plus
considéré simplement comme une prothèse. On le nommerait.
Je répète la proposition: "Tout handicapé visuel
accompagné d'un chien-guide est titulaire du droit reconnu à
l'article 10 et peut garder son chien à ses côtés". Est-ce
que vous comprenez la portée de cette phrase?
M. Langlois: Oui, je comprends. D'après moi, il manque
faspect de bénéficier des services offerts.
M. Lazure: Ecoutez, on peut l'ajouter, mais cela va de soi,
évidemment. C'est là que cela deviendrait de la discrimination,
si le service était refusé. Vous avez raison. On ne peut jamais
être trop clair. On prend note de votre suggestion.
M. Langlois: Par rapport à l'âge, je veux seulement
ajouter une toute petite chose. C'est dangereux aussi de faire des
catégories et de dire: Telle personne, à partir de tel âge,
n'utilise plus un chien-guide. Mardi dernier, à l'ouverture de la
commission parlementaire, on avait un exemple vivant de cela. Il y avait une
dame, membre du Mouvement sur les chiens-guides, une jeune dame de 73 ans qui
utilise encore son chien-guide de façon très utile.
M. Lazure: Formidable.
M. Miller: II est maintenant temps de passer à l'aspect
des commentaires précis sur le projet de loi et aussi sur les
modifications dont le ministre nous faisait part précédemment. En
ce qui concerne cette modification centrale dont vous faisiez part, M. le
ministre, à savoir qu'un handicapé visuel accompagné d'un
chien-guide serait titulaire du droit reconnu à l'article 10, nous
préférerions que l'expression "utilisation d'une prothèse,
orthèse ou autre chose destinée à compenser un handicap"
figure à l'article 10, premier alinéa, comme motif de
discrimination interdit, et nous préférerions aussi, de
façon, comme vous le mentionniez, à être clair au maximum
du possible, qu'en plus, il soit précisé clairement qu'un
chien-guide, aux fins de la charte, aux fins de savoir si cela s'applique, soit
une prothèse, ou encore qu'un chien-guide entre dans la notion
"prothèse, orthèse ou autre chose destinée à
compenser un handicap".
Les raisons pour lesquelles nous demandons cela sont les suivantes: Tout
d'abord, la Charte des droits et libertés de la personne mentionne, dans
son premier considérant, que les droits et libertés de la
personne sont intrinsèques à l'être humain. En
conséquence, venir ajouter un alinéa ou un article qui dirait:
Les handicapés visuels accompagnés d'un chien-guide sont
titulaires du droit mentionné à l'article 10, soulèverait
peut-être un doute sur l'existence des droits et libertés
intrinsèques pour les utilisateurs de chiens-guides.
Aussi, nous pensons qu'en ce qui concerne ce dont vous parliez
précédemment, à savoir que
l'utilisation d'une prothèse, etc., cette notion serait incluse
dans la notion de "handicap", c'est possible. Personnellement, je penserais
cela. Les gens du Mouvement sur les chiens-guides penseraient cela aussi,
advenant un conflit à cet effet, et veuillez croire, M. le ministre, que
les conflits ne manquent pas en ce domaine. Il ne fait pas de doute que le
Mouvement sur les chiens-guides soutiendrait une telle interprétation.
Beaucoup de gens sont sans doute aussi d'accord avec cela, sauf que certaines
personnes pourraient bien ne pas être d'accord avec cela, notamment des
juges.
Il existe des gens... Par exemple, au premier alinéa de l'article
10 de la charte, où on dit que la discrimination sera interdite
lorsqu'elle sera fondée sur la race, la couleur et il y a sept autres
motifs de discrimination interdite. Je voudrais me concentrer sur la race et Ha
couleur. Il me semble que la notion de couleur est incluse dans la notion de
race, sauf que, peut-être, certaines personnes pourraient
prétendre que cela n'est pas aussi clair que cela. Justement, parce
qu'en matière de droits de l'homme où les textes doivent
être particulièrement clairs et irréprochables, le
législateur a jugé bon, en 1975, d'inclure les deux, de
façon à dissiper tout doute à ce sujet. Nous demandons
à la commission et au Parlement de faire la même chose en ce qui
concerne les handicapés, même si, et on me pardonnera
l'expression, la discrimination envers les handicapés est, si je puis
dire, une discrimination moins noble que la discrimination raciale, ne
serait-ce qu'en terme d'ancienneté.
M. Lazure: M. le Président. M. Miller, je partage
entièrement votre avis. Je ne sais pas pourquoi les experts en
législation ont toujours une certaine résistance à rendre
les choses très très claires dans les textes, très
spécifiques. En tout cas, je peux vous dire que j'ai un problème:
chaque fois qu'on travaille sur des projets de loi, je suis porté
à adopter le raisonnement que vous venez de présenter. On n'a
rien à perdre à rendre les choses très très
claires, mais dans les habitudes de législation, les coutumes, il semble
que cela n'est pas une tradition que d'être concis, clair et
précis comme cela.
Le Président (M. Marcoux): Vous allez m'ex-cuser, il est
déjà midi trente. Nous reprendrons l'audition de votre
mémoire à la reprise de nos travaux, à la suite de l'avis
que le leader parlementaire donnera, après la période de
questions en Chambre cet après-midi. Nous devrions reprendre nos travaux
vers trois heures quinze, trois heures trente. La commission des affaires
sociales ajourne ses travaux sine die.
(Suspension de la séance à 12 h 35)
Reprise de la séance à 15 h 33
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission des affaires sociales est réunie pour poursuivre
l'examen des mémoires concernant le projet de loi no 9, Loi assurant
l'exercice des droits des personnes handicapées.
Les membres de la commission sont M. Boucher (Rivière-du-Loup),
M. Charron (Saint-Jacques), M. Clair (Drummond), M. Forget (Saint-Laurent), M.
Gosselin (Sherbrooke), M. Gravel (Limoilou), M. Grenier
(Mégantic-Compton), M. Lavigne (Beauharnois), Mme Lavoie-Roux
(L'Acadie), M. Lazure (Chambly), M. Marois (Laporte) remplacé par M.
Gagnon (Champlain), M. Martel (Richelieu), Mme Ouellette (Hull), M. Paquette
(Rosemont), M. Saindon (Argenteuil) remplacé par M. Goldbloom (D'Arcy
McGee), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Shaw (Pointe-Claire).
Nous étions en train d'entendre le mémoire du Mouvement
sur les chiens-guides. La parole était à M. Miller.
M. Miller (Gérald): Peut-être y aurait-il lieu de
passer à la période de questions et de réponses?
Le Président (M. Marcoux): Si cela vous convient, je pense
que, de toute façon, les membres de la commission ont eu votre
mémoire, et ce matin, il y a eu des échanges.
M. le ministre.
M. Miller: Lequel mémoire nous considérons comme
relativement complet, d'ailleurs.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Pour enchaîner
avec l'amorce de discussion de ce matin, je voudrais poser la question au
groupement qui est devant nous, que j'ai posée à l'Institut des
aveugles ce matin, à savoir: Est-il opportun, est-il souhaitable et
est-il réaliste de songera mettre sur pied une école
d'entraînement pour chiens-guides au Québec?
M. Miller: Nous pensons que c'est une chose souhaitable,
certainement; d'ailleurs, nous le recommandons dans notre mémoire.
Cependant, M. le ministre, comme vous l'aurez noté, notre mémoire
se divise au niveau des demandes, des recommandations enfin, on peut
appeler cela de toutes sortes de façons en deux sections
très précises, à savoir, tout d'abord les changements
nécessaires et urgents qui ne coûteraient rien et,
deuxièmement, les réformes à incidences
économiques.
Nous pensons que la première catégorie de suggestions
devrait se voir donner des suites le plus rapidement possible justement parce
que ces problèmes sont extrêmement urgents; cela concerne, en
somme, l'aspect des droits de l'homme. En ce qui concerne la deuxième
section, nous pensons que cela peut se faire à moyen terme ou à
un peu plus long terme, parce qu'il s'agit, de toute façon, de l'aspect
services, si on veut, et il est évident que dans ce domaine, il y a
plein de modalités techniques à définir, à
préciser. Il est évident, par exemple, que la mise sur pied d'un
centre d'entraînement pour chiens-guides demanderait une planification
certaine, parce que cela n'est pas le genre de chose qu'on peut improviser.
De plus, vous aurez noté, M. le ministre, que, dans notre
mémoire, nous ne recommandons pas que la mise sur pied d'un centre
d'entraînement pour chiens-guides, mais plutôt quelque chose d'un
peu plus global, c'est-à-dire un centre national de mobilité qui
comprendrait, entre autres choses, un centre d'entraînenement pour
chiens-guides et qui, en plus, offrirait, par exemple c'est une
énumération qui n'est pas limitative un service de
cartographie en relief et de maquettographie, un service donnant des cours de
maniement de la canne blanche, surtout à l'intention des
handicapés visuels qui conservent un certain résidu de vision,
qui pourrait aussi agir en matière ou d'adaptation du milieu physique;
on pense à des signaux sonores aux intersections les plus
achalandées, etc.; soit que le centre effectue lui-même ses
travaux ou qu'il fasse des recommandations aux autorités
concernées afin que ces travaux soient affectués.
Je laisserais la parole à Michel Langlois pour préciser un
peu tout cela, surtout en ce qui concerne la nécessité d'un
centre de service de cartographie en relief et de maquettographie.
M. Langlois (Michel): Je me demandais comment faire une
précision sur quelque chose qui a été mentionné un
petit peu ce matin. J'aimerais faire une démarcation, à savoir
que pour nous, il n'est pas question de considérer l'entraînement
d'un chien-guide comme quelque chose de similaire à l'entraînement
d'un chien de garde ou un chien pour détecter la drogue. La philosophie
est très antagoniste, si je peux dire. Il nous apparaît
très dangereux ce n'est pas le cas non plus aux Etats-Unis,
où la plupart des écoles sont instituées que la
personne qui entraîne des chiens d'attaque ou des chiens de garde,
entraîne aussi un chien-guide.
Quant à la question du centre de mobilité, on le voit un
petit peu plus dense, parce qu'un chien-guide, c'est une prothèse qui te
conduit dans la rue ou dans un édifice public, qui peut repérer
différentes choses, qui évite les obstacles, qui garde la ligne
droite, etc. Cependant, c'est le maître, c'est l'aveugle qui dirige le
chien; c'est l'aveugle qui donne les commandements au chien; donc, il est
essentiellement impératif que tu connaisses le trajet du chemin que tu
as à faire. Dans ce sens-là, un service de cartographie en relief
ajouterait ou faciliterait beaucoup l'utilisation d'un chien-guide par le
handicapé visuel et serait d'une très grande utilité
également pour les autres handicapés visuels. Dans la même
idée, un service de maquettographie. On peut penser à
première vue aux stations de métro qui sont souvent assez
complexes, qui pourraient être faites sous forme de maquette en relief et
que le handicapé visuel pourrait aller consulter; cela pourrait
faciliter beaucoup le déplacement ensuite soit avec la canne blanche ou
soit avec le chien-guide.
Quand on pense aussi à moyen ou à court terme, ce sont les
mesures. C'est pourquoi on sépare directement dans notre mémoire
les deux genres de demande.
On pense qu'un centre de mobilité, tel celui-là, et
surtout une école d'entraînement pour chiens-guides, cela ne doit
pas s'improviser à la vitesse, dans le sens que la qualité ne
doit pas en souffrir. Je peux donner un type d'exemple que les
entraîneurs américains, pour devenir entraîneurs de
chiens-guides, subissent un entraînement qui dure cinq ans. Il y a aussi
toute la question de la sélection des chiens, qui est très
très sévère, très stricte, etc. Dans ce sens, pour
nous, cela est vraiment important que cela existe un jour, sauf qu'on pense que
la qualité ne doit pas en souffrir; pour nous, c'est pour cela qu'on le
met à moyen ou peut-être à long terme; mais ce n'est pas
parce que cela ne serait pas vraiment nécessaire ou utile.
M. Lazure: M. le Président, je me demande ce que le
groupement penserait d'une suggestion qui a été formulée
depuis quelque temps, à savoir que, jusqu'au jour où existerait
un tel centre au Québec, la possibilité qu'une des écoles
des Etats-Unis puisse, à notre demande et peut-être avec une aide
de notre part, compter au moins un entraîneur francophone dans ses rangs,
de façon que les francophones du Québec qui vont à une
telle école américaine puissent jouir, pour ainsi dire, d'un
chien entraîné en langue française. Que pensez-vous de
cette suggestion?
M. Miller: Ce serait une suggestion intéressante, mais il
faut ici signaler plusieurs choses. Premièrement, cela pourrait
constituer un palliatif temporaire en attendant, qu'à moyen ou long
terme, soit établi un centre d'entraînement au Québec, mais
il ne faudrait pas que ce soit une solution permanente, pensons-nous. En plus,
il ne faudrait pas que ce centre d'entraînement, qui serait en quelque
sorte subventionné par le Québec, le soit en exclusivité
par rapport aux autres centres d'entraînement, de façon à
respecter le libre choix de la personne handicapée dans la
détermination du centre d'entraînement avec lequel cette personne
veut transiger. Chaque centre d'entraînement a un peu son style, a un peu
certaines particularités qui sont plus ou moins
appréciées, dépendant des personnes handicapées
visuelles et aussi dépendant de l'utilisation qu'un handicapé
visuel veut faire de son chien-guide; en ce sens, nous pensons qu'il serait
important de respecter le libre choix des personnes handicapées et
plutôt que de subventionner une école, il y aurait peut-être
lieu de subventionner l'acquisition d'un chien-guide, c'est-à-dire que,
dépendant du centre d'entraînement choisi par un handicapé
visuel, la subvention suivrait chaque personne, si on veut. Je ne sais pas si
c'est assez clair.
M. Lazure: Oui, évidemment, ce que vous
proposez serait plus compliqué et plus coûteux; j'oublie le
chiffre, mais il y a combien de centres d'entraînement aux Etats-Unis
pour chiens-guides?
M. Miller: Neuf.
M. Lazure: Huit, neuf?
M. Miller: Neuf.
M. Lazure: Alors, si on suivait votre recommandation, il faudrait
subventionner la présence d'une personne francophone dans chacun des
neuf, si on veut respecter, comme vous le dites, le libre choix des personnes
handicapées.
M. Miller: Je ne sais pas s'il n'y aurait pas possibilité
plutôt évidemment ce sont des modalités à
étudier de subventionner l'acquisition d'un chien-guide par une
personne, c'est-à-dire que chaque personne se procurant un chien-guide
pourrait en quelque sorte traîner avec elle une subvention de x% du
coût moyen d'entraînement d'un chien-guide. Cette subvention serait
utilisée par le centre d'entraînement pour permettre à un
entraîneur d'acquérir des rudiments de langue française, ou
encore pour défrayer les coûts d'un interprète sur les
lieux. Signalons qu'il existe certains centres d'entraînement qui mettent
des interprètes francophones à la disposition des
handicapés visuels québécois qui se rendent chez eux pour
se procurer un chien-guide, particulièrement s'il arrive que deux ou
trois Québécois s'y rendent en même temps. Alors, il y
aurait peut-être quelque chose à étudier de ce
côté-là.
M. Lazure: M. le Président, pour conclure. J'aime bien
l'approche du mouvement en ce qui concerne le centre national de
mobilité pour handicapés visuels et je pense que c'est une
suggestion assez originale que nous allons regarder de très
près.
Je conçois très bien qu'il faut élargir le cadre de
cela; ce n'est pas seulement pour les chiens-guides, mais c'est aussi pour la
cartographie et aussi pour les maquettes. Je les engagerais à nous
procurer, si cela est possible, plus de détails; s'il y a des
expériences similaires qui ont été faites ailleurs dans la
mise sur pied de centres de mobilité pour handicapés visuels, je
suis sûr que cela nous aiderait beaucoup.
Le Président (M. Marcoux): Merci. Mme le
député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'aimerais demander au
représentant de l'association: Est-ce qu'ils savent combien de personnes
sont servies en moyenne par des centres d'entraînement de chiens-guides
aux Etats-Unis? Ne prenez pas les plus éloignés, mais ceux chez
lesquels les Québécois vont aller le plus souvent; j'imagine que
cela doit être ceux qui sont le plus à proximité quand
même, soit New York ou peut-être Boston. Combien de personnes sont
servies en moyenne par ces centres? Avez-vous une idée du coût de
la mise sur pied d'un tel centre où il n'y a pas de comparaison
possible, compte tenu du nombre de personnes que nous servirions ici au
Québec?
M. Langlois: Quant à la moyenne de personnes qui peuvent
aller dans ces centres, la seule façon que je peux trouver à
répondre à cela, c'est que, à ma connaissance, la plupart
ou la très grande majorité des handicapés visuels
québécois qui ont un chien-guide, les ont obtenus de trois
centres à l'est des Etats-Unis, qui sont bien connus ici au
Québec, soit Seeing Eye Dog à Morris Town, Leader Dog à
Rochester, et Guide Dog Foundation for the Blind à New York. Quant au
coût d'opération d'une école comme telle, ce que j'ai pu
savoir quand je suis allé chercher mon chien, c'est qu'on prend les
dépenses globales de l'école des chiens-guides et on divise par
le nombre de chiens qui sont distribués annuellement; ce qui donne une
moyenne d'environ $5 000 par chien. Cela comprend le dressage, le stage du
handicapé visuel, les dépenses de la ferme d'élevage, etc.
Maintenant, je n'ai pas à l'esprit exactement combien de personnes
annuellement reçoivent un chien-guide, mais c'est variable, cela aussi;
vous avez l'école de Seeing Eye Dog qui est très très
grande, comparée, disons, à Guide Dog Foundation à New
York.
Mme Lavoie-Roux: Quand vous parlez d'un coût de $5 000 par
chien, ceci inclurait toutes les dépenses d'un tel centre, tant la
structure administrative du centre que le personnel et tout. Cela ne serait pas
relié uniquement au dressage du chien, son élevage, etc. Est-ce
que ce serait le coût moyen de toute l'opération?
M. Langlois: Oui, c'est ce qu'on m'a dit. C'est la façon
dont on évaluait le coût d'un chien-guide parce que c'est bien
arbitraire, dire combien vaut un chien-guide? C'est une question qui est
souvent posée. Un chien-guide, c'est un animal; il n'a pas les oreilles
ou les griffes en or.
Mme Lavoie-Roux: Non, non, moi, je parle... M. Langlois:
C'est tout ce qui entoure...
Mme Lavoie-Roux: Je veux dire c'est l'opération d'un tel
centre.
M. Langlois: C'est cela.
Mme Lavoie-Roux: C'est l'ensemble des opérations dans le
fond.
M. Langlois: Oui, madame.
Mme. Lavoie-Roux: L'autre question. A la page 9, vous dites: "Au
Québec les institutions spécialisées...". Vous donnez
diverses raisons pour lesquelles les chiens-guides ne sont peut-être pas
tellement utilisés au Québec, et parmi ces raisons-là,
vous dites: "Les institutions spécialisées dans les services aux
handicapés visuels ont
toujours déconseillé, plus ou moins ouvertement,
l'utilisation de chiens-guides pour des raisons pour le moins discutables, par
ailleurs". Est-ce que vous pourriez énumérer quelques-unes des
raisons qui sont invoquées pour, selon vous, décourager les
handicapés visuels d'avoir recours à des chiens-guides?
M. Miller: Nombre de nos membres nous ont rapporté qu'au
moment où ils ont songé se procurer un chien-guide,
différentes informations leur ont été transmises à
l'effet, par exemple, qu'un chien-guide n'est pas commode; c'est plus une
nuisance qu'autre chose; sur les coins de rue, ils n'aident pas; c'est
dangereux; ils mordent les gens; c'est plein de poils; c'est dur d'entretien;
cela coûte cher, etc.
Là-dedans il existe beaucoup de mythes, beaucoup de
résultats d'ignorance, si on veut, et on pourrait allonger la liste
à l'infini de tous les fléaux qui affectent le pauvre
handicapé visuel qui est susceptible de penser, oser, désirer la
possibilité de se procurer éventuellement un chien-guide.
Mme Lavoie-Roux: C'est une attitude que l'on retrouve dans les
organismes qui ont la responsabilité d'aider les handicapés
visuels, d'après ce que vous dites?
M. Miller: Effectivement.
Mme Lavoie-Roux: Ce ne sont pas des préjugés de la
population auxquels vous faites allusion dans le moment, la population en
général, j'entends.
M. Miller: Non.
Mme Lavoie-Roux: Non.
M. Miller: Non, aucunement, d'ailleurs. Il faut remarquer qu'en
ce qui concerne tous les problèmes de discrimination dans l'utilisation
d'un chien-guide, fondamentalement, c'est cela qui reste prioritaire, les
questions de discrimination, parce que, sous l'aspect service du centre
national des mobilités, etc., on se débrouille jusqu'à
présent assez bien avec les fondations privées aux Etats-Unis;
elles fournissent les chiens gratuitement aux utilisateurs
québécois, comme à toute personne sur la planète
qui veut s'en procurer un d'ailleurs. Dans toutes les questions de
discrimination, les utilisateurs de chiens-guides reçoivent donc l'appui
du public qui se trouve autour d'eux, qu'il s'agisse d'entrer dans un
restaurant, une salle de concert, un théâtre, une salle de
cinéma, un taxi, un autobus, enfin, un commerce, un centre commercial,
une épicerie; on peut imaginer tous les lieux publics. Le public, de
façon constante, appuie les utilisateurs de chiens-guides.
Mme Lavoie-Roux: Vous nous avez dit, au début, ou du moins
j'ai cru comprendre qu'il y avait au Québec environ 80 personnes qui
utili- saient Jes chiens-guides. Est-ce que le chiffre est exact?
M. Langlois: C'est soumis à des variations. Il y a de
nouvelles personnes qui s'en procurent et certaines autres personnes qui, au
même moment, ne se servent plus d'un chien-guide; mais cela tourne autour
de 80 environ. Oui.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous avez des statistiques, par
exemple, disons, au cours des dix dernières années, sur
l'augmentation de l'utilisation des chiens-guides? Est-ce que cela demeure
à peu près toujours le même nombre ou s'il y a vraiment une
progression? Avez-vous, des statistiques là-dessus?
M. Miller: Nous n'avons pas de statistiques précises sur
la question. Cependant, il est sûr et certain que le nombre est en
croissance constante. Il est difficile de faire des recensements
là-dessus parce que le Québec est un bien grand pays et,
évidemment, comme le nombre des utilisateurs de chiens-guides est assez
restreint actuellement, en tous cas, et comme le mouvement sur les
chiens-guides n'est pas une organisation très riche pour les questions
de communication, transport, etc., il est assez difficile de faire un
recensement exhaustif. Cependant, il est sûr et certain que le nombre des
utilisateurs de chiens-guides va croissant.
Mme Lavoie-Roux: Mais vous êtes quand même parvenus
à identifier à environ 80, le nombre de personnes qui les
utilisent. Est-ce que ce chiffre de 80, environ 80, par rapport à 1968,
par exemple, a augmenté ou quel en était le nombre en 1968? Vous
êtes quand même parvenus à identifier le chiffre de 80.
Depuis combien de temps l'utilisation tourne-t-elle autour de ce chiffre de
80?
M. Miller: Le mouvement sur les chiens-guides existe depuis trois
ans seulement, et il nous est difficile de nous référer aux
chiffres d'il y a dix ans, ne serait-ce qu'en raison du fait que ces chiffres
n'ont jamais été compilés.
Mme Lavoie-Roux: D'accord, j'avais oublié que cela faisait
trois ans.
M. Miller: Depuis trois ans, cependant, il est possible de dire
que le mouvement sur les chiens-guides est essentiellement constitué
autour de nouveaux utilisateurs de chiens-guides depuis trois ans,
évidemment, certains utilisateurs de chiens-guides de longue date se
sont ralliés à ce mouvement.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie, monsieur.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Merci, M. le Président. Je suis très
intéressé à votre problème parce que, avant
même la présentation de ce projet de loi, j'ai eu l'occasion de
visiter un centre du comté de Vaudreuil-Soulanges, qui exige de
commencer un programme d'entraînement pour les chiens-guides. J'ai
quelques questions dans ce domaine. Est-ce que vous trouvez qu'il y a des
aveugles qui ont des problèmes, disons, de motivation par rapport aux
chiens-guides ou même des contremotivations? Est-ce que vous croyez que
ceux qui veulent avoir un chien-guide vont avoir la facilité d'en
obtenir un?
M. Langlois: C'est cela, vous touchez un point. Il y a un grand
manque d'information sur les capacités ou l'utilité d'un
chien-guide. Il y a plusieurs handicapés visuels qui pensent se servir
d'un chien-guide deux ou trois fois par jour, et que le reste cru temps ils le
laisseront à la maison; ce qui n'est pas du tout le cas. Il y a certains
handicapés visuels qui surestiment les capacités d'un
chien-guide. C'est un des problèmes.
Il y a aussi, comme on le dit dans le mémoire, la question du
voyage aux Etats-Unis, et de la barrière linguistique; cela
décourage plusieurs handicapés visuels d'aller chercher un chien.
Ce sont les raisons principales qui font qu'il n'y a pas plus de
handicapés visuels qui en ont. Il faut vraiment savoir ce que c'est, un
chien-guide, pour désirer en avoir un. Il y a une autre raison aussi qui
est évidemment la peur de se faire refuser dans les endroits publics.
C'est le plus gros frein aujourd'hui à l'acquisition d'un chien-guide
pour les handicapés visuels. Ils ne savent pas exactement ce qu'est un
chien-guide, mais ils sont au courant que les chiens-guides sont
refusés. Il y a certains cas qui ont fait un peu de publicité. Le
mouvement sur les chiens-guides en a fait aussi. Ils sont plus au courant des
problèmes que de la valeur de l'utilité d'un chien-guide.
M. Shaw: Aussitôt que vous décidez d'aller en
chercher un, vous n'avez pas le problème de trouver les moyens pour
aller le chercher. Disons, dans votre cas personnel, après avoir
décidé d'essayer d'avoir un chien-guide, avez-vous eu un
problème? Vous n'avez pas eu de difficulté du tout?
M. Langlois: II y a les problèmes financiers et il y a
aussi les problèmes d'information. Pour les raisons dont on parlait tout
à l'heure, il est assez difficile d'obtenir des renseignements
honnêtes sur la question. En ce qui concerne le financement, le
problème est assez peu intense, en ce sens que les fondations
privées américaines, qui remettent gratuitement les chiens-guides
aux utilisateurs québécois, défraient aussi tous les frais
de séjour, les frais de nourriture, de pension, etc., et aussi, si on
insiste le moindrement, les frais de transport, les billets d'avion, etc.
M. Shaw: Avec ces points, croyez-vous que la moitié des
aveugles du Québec peut employer un chien-guide? Maintenant, c'est
presque 1%.
Pouvons-nous parler de 25% des aveugles qui peuvent employer un
chien-guide?
M. Langlois: II y a un autre point. Sur cette question, il y a
deux grands facteurs qu'il faut considérer. Le mot aveugle, ou
handicapé visuel, s'applique à toute une échelle de
degrés de vision. Comme je le disais ce matin, il y a des personnes
considérées comme handicapées visuelles qui
possèdent encore un résidu de vision suffisant pour se permettre
de se déplacer sans chien-guide. Il y a toute cette catégorie qui
ne se sent pas motivée d'en avoir un. Il y a aussi la situation, en
général, que vivent les personnes handicapées visuelles
qui peuvent le considérer comme un frein objectif; c'est-à-dire
que ta majorité des personnes handicapées visuelles ne
travaillent pas et elles sont, il faut le dire, très peu
intégrées à la vie sociale. Donc, pour ces personnes qui
sont des professionnels de l'aide sociale depuis X années, leurs besoins
ne sont pas éveillés. Elles n'en sentent pas le besoin. Elles
sont chez elles et se considèrent comme un bon aveugle qui reste chez
lui, avec ses parents, et c'est surtout dans le milieu rural aussi où
c'est le plus flagrant.
En touchant à la question rurale aussi, on peut dire que la
question de transport et des facilités de transport pour un utilisateur
de chien-guide est importante.
Si c'est un cheval-guide, tu peux le monter, ce n'est pas si mal, mais
avec un chien-guide, on prend au moins les autobus. A Montréal, il n'y a
pas de problème, mais, à la campagne les services d'autobus sont
parfois assez déficients. Si tu marches dix ou quinze milles, à
pied, c'est long. Ce sont les deux principales raisons. C'est pour cela que je
ne penserais pas que la moitié des handicapés visuels au
Québec aient un chien-guide; cela m'étonnerait. Même s'il y
en a plusieurs, surtout ici, si on pense aux handicapés visuels
récents, dont la situation est vraiment terrible en termes de choc, ces
gens s'habituent très difficilement à utiliser une canne blanche;
ils ont peur d'avancer; avant, ils voyaient clair; pour eux, c'est la noirceur;
au moindre bruit, aussitôt qu'il y a du tapage, ils deviennent tout
désorientés. J'ai connu de ces gens qui ont obtenu un chien-guide
assez récemment après avoir perdu la vue et cela leur a permis de
reprendre des activités normales. Cela a été parfait pour
eux.
M. Shaw: Je pose ces questions parce que je voudrais savoir le
nombre de chiens-guides qui peuvent être demandés pour un centre
d'entraînement au Québec. Nous savons que vous avez un
problème, si vous parlez seulement français, lorsque vous allez
à des centres d'entraînement de chiens-guides, parce qu'ils sont
tous aux Etats-Unis et tous les cours sont donnés seulement en anglais.
Est-ce que c'est vrai?
M. Miller: II y a cela. Cependant, c'est un problème qui
est un peu tempéré par le fait que certains centres
d'entraînement mettent des interprètes anglais-français
à la disposition des utilisateurs québécois. Il y a aussi
d'autres problèmes.
Par exemple, pour se procurer un chien-guide, il est nécessaire
d'aller faire un stage d'un mois sur les lieux aux Etats-Unis. Or, cela suppose
un certain déracinement. C'est particulièrement important et cela
a des incidences psychologiques certaines, par exemple, pour un
handicapé visuel récent, de faire face à une
cécité qui lui arrive de façon impromptue et, en
même temps, de se déraciner de son milieu, de quitter tous ses
amis, tout son milieu de vie, les lieux physiques qu'il connaît, pour
aller séjourner un mois aux Etats-Unis dans un milieu qui est bien
différent, être enveloppé dans une mentalité
différente, entouré de gens qui parlent un langage
différent. Il me semble qu'il y a des problèmes de
déracinement aussi qu'il faut prendre en considération.
M. Shaw: J'ai entendu des témoins du CNIB qui ont dit
qu'une étude a été faite disant qu'un centre
d'entraînement au Québec n'est pas rentable. Est-ce que vous en
jugez différemment? Est-ce que vous jugez que nous avons besoin au
Québec d'un centre d'entraînement pour les chiens-guides?
M. Miller: Nous pensons que la chose est absolument essentielle,
d'autant plus que l'Etat québécois s'engagerait résolument
dans le domaine de la normalisation et de l'intégration sociale. Nous
pensons, nous soutenons et nous n'hésiterons pas à soutenir que
le chien-guide constitue la meilleure aide à la mobilité qui
existe pour les handicapés visuels qui ont besoin d'une aide à la
mobilité. Nous pensons de plus que, dans une région comme le
Québec, le chien-guide est particulièrement utile en raison de
nos hivers québécois. Vous savez, quand on utilise une canne
blanche, finalement ce qu'on fait: on tâte le terrain, on rampe sur le
sol finalement avec cette canne; avec des bancs de neige qui changent de place
tous les jours, c'est un peu embarrassant. Un chien-guide a l'avantage de voir
clair. Au Québec, c'est particulièrement utile. Nous pensons donc
que, dans la mesure où l'Etat québécois s'engagerait
résolument dans l'intégration sociale des personnes
handicapées, l'existence d'un centre d'entraînement pour
chiens-guides, à l'intérieur d'un centre national de
mobilité, est absolument essentielle, à moyen terme, à
tout le moins. Mais nous pensons cependant qu'à court terme, et avant
même de mettre sur pied de tels services, il est nécessaire de
prévoir les mécanismes juridiques permettant aux utilisateurs de
chiens-guides de profiter adéquatement de ces prothèses vraiment
spéciales, de ces prothèses biologiques, si on veut, qui peuvent
leur procurer une indépendance extraordinaire.
Il est nécessaire de faire en sorte que nul n'ait le droit de
discriminer les utilisateurs de chiens-guides, que nul n'ait le droit de leur
refuser le droit de se déplacer, la liberté de circulation, le
droit d'accès aux moyens de transport, aux lieux publics, le droit au
travail, le droit de se loger, enfin, on pourrait énumérer tous
les droits et toutes les libertés énumérés à
la Charte des droits et libertés de la personne.
M. Shaw: Une dernière question sur le même sujet de
la demande. Même vous, qui avez des chiens-guides maintenant, avez besoin
de temps en temps de les remplacer. Est-ce vrai?
M. Miller: Oui, effectivement, un chien-guide peut servir environ
dix ans, en moyenne. Evidemment, il y a beaucoup de variations individuelles,
mais au bout d'une dizaine d'années, un chien-guide doit être mis
à la retraite et remplacé.
M. Shaw: Alors, cela implique un autre stage d'un mois pour...
parce que vous avez besoin d'être entraîné avec votre chien
dans un centre d'entraînement. Est-ce que c'est vrai? Même si vous
avez eu un chien avant?
M. Miller: Effectivement, il n'y a pas qu'une question de
connaissance de la part d'un handicapé visuel, connaissance à
savoir comment un chien-guide fonctionne. Un chien-guide n'est pas une
béquille inerte; c'est un être qui possède une psychologie
complexe et raffinée. Il est nécessaire que la personne
handicapée se sente en confiance avec son chien-guide et il est
nécessaire que le chien-guide se sente en confiance avec son
maître. Il est nécessaire qu'il y ait une communication entre les
deux de façon absolument constante et une communication
extrêmement raffinée, si on peut dire. Il faut que les deux se
connaissent très bien et forment une équipe indissoluble, en ce
sens qu'il serait imprudent de lancer comme cela, en pleine ville, un
handicapé visuel et un chien-guide qui n'auraient jamais
travaillé ensemble auparavant. C'est pourquoi, même un utilisateur
de chien-guide, qui en est à son troisième, quatrième
chien-guide, doit se prêter à un stage d'environ un mois afin
d'acquérir au moins une connaissance minimale de la personnalité
individualisée du chien-guide avec lequel il fait affaire.
M. Shaw: Même s'il y en a seulement que 80 ou 90 qui
emploient les chiens-guides, cela représente une demande annuelle d'une
dizaine de chiens-guides entraînés au Québec, sans
augmentation du nombre croissant de personnes qui les emploient.
M. Miller: Oui, mais par ailleurs, il ne fait aucun doute que
s'il y avait un centre d'entraînement pour chiens-guides au
Québec, il y aurait beaucoup plus de demandes en ce sens.
M. Shaw: Merci.
M. Langlois: Je pense aussi qu'il y a une question... Pour placer
un chien-guide dans la question globale de la réadaptation ou de
l'intégration à la vie sociale, je pense qu'en ce qui a trait
à la question de déplacement, de mobilité, les
handicapés physiques vivent le problème différemment quand
ils parlent de réclamer du transport. C'est là qu'un centre de
mobilité trouverait sa rentabilité dans le sens que, en
permettant aux handicapés visuels de se déplacer
adéquatement, c'est le premier pas vers toutes les autres
activités de la vie, que ce
soit le travail, les loisirs ou l'éducation. Je pense que c'est
dans ce sens-là qu'il faut voir la rentabilité en
l'utilité d'un tel centre.
M. Shaw: Est-ce que je peux poser une dernière question au
ministre? Est-ce que vous jugez que cela a du sens d'établir un centre
d'entraînement pour les chiens-guides au Québec?
M. Langlois: On l'a demandé.
M. Lazure: Je pense que c'est une chose qu'on devrait faire
éventuellement. Je ne peux pas me compromettre plus que cela, quant a la
date. Mais il me semble que cela doit devenir un jour un service accessible ici
au Québec, dans le cadre surtout d'un centre, comme vous l'appelez, le
centre de mobilité; j'aime bien ce concept qui est beaucoup plus large
que seulement le chien-guide.
Le Président (M. Marcoux): Je remercie le Mouvement pour
les chiens-guides de la présentation de son mémoire ainsi que de
la discussion que ses représentants ont eue avec les membres de la
commission. J'inviterais maintenant M. Mario Bolduc à venir nous
présenter son mémoire. Vous avez la parole.
M. Mario Bolduc
M. Bolduc (Mario): Merci. M. le Président, M. le ministre,
Messieurs les membres de la commission. Je voudrais d'abord vous remercier de
me donner l'occasion de venir dire ici ce que je pense.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que ce serait trop vous
demander de vous déplacer vers le centre parce que tous les membres de
la commission aimeraient, pour mieux dialoguer, vous voir.
M. Bolduc (Mario): D'accord. Comme je le disais, je voudrais
d'abord vous remercier de me donner l'occasion de venir dire un peu ici ce que
je pense du projet de loi et du livre blanc. Je vous dis tout de suite aussi
que je n'ai pas l'intention de répéter mon mémoire parce
qu'en fait ce serait un peu long. J'ai tout simplement l'intention de
résumer très brièvement quelques points qui
m'appa-raissent des plus importants.
Globalement, en fait, je peux dire que je considère le livre
blanc et le projet de loi no 9 comme représentant un grand pas dans le
rattrapage important que le Québec a à faire afin de donner aux
personnes, qui ont une déficience physique ou mentale, une chance de
mener une existence plus normale ou du moins accepble. Je trouve
particulièrement intéressant de voir l'intérêt qu'a
suscité ce projet et les débats qu'il a amenés chez de
très nombreux organismes variés et de tous les milieux. Je pense
que cela marque un progrès qui est très important. Il y a
même trois ans, je pense que cela aurait été impensable de
voir autant d'intérêt soulevé.
Les modifications annoncées par le ministre au début de la
commission, à mon avis, améliorent encore considérablement
le projet. Sur plusieurs points, je pense que ces modifications correspondent
aux demandes principales des groupes concernés. Par exemple, les
modifications apportées aux édifices publics dont les
délais ont été raccourcis, de même que celles
élargies aux édifices du réseau des affaires sociales et
du réseau scolaire, les droits qui ont été
transférés à la Charte, les organismes de promotion dont
les conditions ont été assouplies, etc. Cela nous laisse
cependant soucieux sur certains points. Quand je lisais que le principal, le
premier mandat de l'office serait de faire des recherches, des études,
en vue de l'élaboration d'une politique globale de réadaptation,
j'avoue que je ne comprenais pas très bien parce que, il me semble que
le livre blanc représente en lui-même un peu une politique de
réadaptation, en ce sens qu'il propose une philosophie de base; il a des
objectifs à atteindre qui sont assez précis et il a un mode de
fonctionnement général qui consiste, en fait, en gros, à
modifier les services ou à en créer dans les différents
ministères ou organismes concernés et à chapeauter le tout
par un organisme de coordination. A mon avis, c'est cela une politique de
réadaptation, en gros, et il semble d'ailleurs y avoir une entente assez
générale sur ces choses-là, sinon un consensus. Je pense
donc qu'il faut tenir cela pour acquis, à l'heure actuelle, et aller
plus loin.
Pour ce qui est de la planification précise dans le temps et dans
l'espace de toutes les mesures à mettre en oeuvre, je pense que c'est ce
qu'on pourrait appeler un plan de développement et non une politique de
réadaptation. Il est important de distinguer les deux; ce n'est pas
seulement une chicane de mots; je trouverais dommageable qu'on retombe encore
une fois dans les grandes discussions de fond au cours des prochaines
années, sur les orientations générales. Je pense qu'il ne
faut pas essayer de réinventer la roue; il y a des choses qui sont
acquises et il faut partir de là. Il est important qu'en même
temps qu'on va continuer des études pour préciser un paquet de
choses, on mette en place le plus vite possible un minimum de structures, ne
serait-ce que sur une base réduite, quitte à les rajuster au
besoin.
Pour atteindre les objectifs que la politique s'est donnés, cela
suppose évidemment la concertation entre les ministères et les
organismes. La publication du livre blanc laisse d'ailleurs supposer que cette
concertation existe au niveau gouvernemental. Je passe mon temps à dire
que je suis quand même un peu sceptique sur cette concertation,
même si elle semble bel et bien commencée. Ce qui est un peu
dommage, en fait, à cette commission, c'est de ne pas y retrouver des
représentants, par exemple, d'autres ministères, surtout du
ministère du Travail, pour connaître leurs intentions exactes pour
les prochaines années. C'est important de savoir, par exemple quels
moyens le ministère du Travail entend prendre pour assurer le placement
des personnes handicapées au cours
des prochaines années, comment, entre autres, il entend le
coordonner avec le ministère fédéral de la Main-d'Oeuvre
car, on le sait, c'est lui qui en mène le plus large dans le domaine du
placement. Il y aussi, par exemple, des projets d'extension de main-d'oeuvre
qui ont été développés, au cours des
dernières années, et qui ont déjà apporté
une expertise intéressante dans le placement sur le marché du
travail. Il faut ensuite qu'on commence à prévoir des budgets
dans ces ministères pour développer ces services.
Dans le secteur économique, par exemple, il serait
intéressant de voir comment on entend intégrer un réseau
d'ateliers protégés dans l'économie actuelle. Je pense que
ce sont des choses qu'il serait intéressant de connaître en termes
de concertation.
Je pourrais peut-être vous citer un ou deux cas de
problèmes qui existent encore et qui montrent que la concertation n'est
pas si grande que cela. J'ai actuellement, dans le cadre de mon travail,
à m'occuper d'un projet de logements accessibles et de services; c'est
un projet d'expérimentation financé par le ministère des
Affaires sociales. Dans ce projet, on a besoin, bien sûr, de la
collaboration très étroite de la Société
d'habitation du Québec. Je peux vous dire que, malgré une
attitude très sympathique des fonctionnaires avec qui on a fait
affaires, pour la structure comme telle, cela semble très long. Cela a
pris au moins trois mois d'efforts pour réussir à obtenir un
début de collaboration effective pour réussir à
débloquer des appartements accessibles physiquement et
financièrement aux personnes handicapées, et même encore
aujourd'hui on n'est pas encore sûr que cela va marcher. Je pense que
cela n'est pas terminé, la concertation; il reste beaucoup de choses
à faire.
On peut même dire que des problèmes comme ceux-là ou
de concertation ou de logique de système, pourrait-on dire, cela existe
même au ministère des Affaires sociales. On peut prendre un autre
petit exemple: dans de nombreux cas, pour quelqu'un surtout qui a un peu
d'argent, le système d'aide sociale par rapport au système de
contribution des bénéficiaires en centre hospitalier est souvent
prolongé et cela crée une incitation carrément
financière à demeurer en institution. C'est facile, j'ai eu
l'occasion de le constater à quelques reprises. Cela ne m'apparaît
sûrement pas normal dans une politique de normalisation. Ce sont encore
des choses qu'il faudra ajuster. Une de mes craintes, c'est peut-être
justement que d'autres ministères ou organismes soient tentés de
se défiler en face de leurs responsabilités parce qu'ils veulent
avoir un office; je pense qu'il faudra peut-être voir cela de très
près.
A propos de l'office, j'avais personnellement des craintes, j'avais peur
que cela devienne une grosse structure bureaucratique et inefficace. J'avoue
que ces craintes ont beaucoup diminué depuis que le ministre a
annoncé qu'il y avait des fonctions telles que le plan de service ou
l'aide matérielle, ou le contrat d'intégration professionnelle
qui se feront au niveau régional.
Je trouve cependant que nous avons très peu de détails sur
la façon dont ces services seront organisés, au niveau
régional. Est-ce que ce seront des bureaux régionaux de l'office?
Va-t-on utiliser des organismes du réseau des Affaires sociales ou
va-t-on utiliser les représentants de différents milieux tels que
les commissions scolaires, les centres de main-d'oeuvre, etc?
Personnellement, j'aimerais bien que le ministre collabore un peu
là-dessus, parce que cela me paraît assez important.
Il y a quelques autres choses que je voudrais souligner au niveau de
l'office. Pour ce qui est, entre autres, de la reconnaissance des organismes de
promotion, je suis heureux qu'il y ait eu des assouplissements dans les modes
de reconnaissance, et qu'il y ait eu justement un droit d'appel. Je voudrais
quand même qu'il y ait un assez bon contrôle de tous les organismes
qui peuvent naître dans ce milieu. Maintenant que c'est en train de
devenir une mode d'être une personne handicapée, comme bien
d'autres choses, je suis convaincu qu'il y aura sûrement beaucoup de
personnes qui vont essayer d'en profiter de toutes sortes de façons.
C'est facile d'exploiter la crédulité et la pitié des gens
avec les personnes handicapées; ce sont des méthodes qui sont
connues depuis longtemps.
Et même chez les organismes qui sont très honnêtes,
et qui n'ont pas pour but de faire de l'argent, je pense qu'il faut essayer
aussi par tous les moyens d'éliminer les souscriptions publiques dans la
population. Je suis convaincu que chaque fois qu'on fait cela, on fait plus de
tort aux personnes handicapées qu'on ne leur fait du bien, parce qu'on
souligne l'aspect de dépendance et de charité publique envers
eux.
Pour ce qui est des ateliers protégés, je considère
qu'il y a eu, en principe, en tout cas, des améliorations très
importantes avec le nouveau projet de loi, surtout en ce sens que les personnes
sont maintenant reconnues comme travailleurs à l'intérieur de ces
structures. Je pense qu'il reste quand même des problèmes
importants dans ce domaine, en ce sens qu'on sait que cela va coûter cher
de créer des postes en atelier protégé, et j'ai bien peur
que le gouvernement soit très réservé dans ce domaine, au
cours des prochaines années.
Il serait intéressant d'avoir des indications de la part du
ministre sur le nombre de places que le gouvernement entend créer au
cours des prochaines années, s'il y a des choses à décider
à ce sujet. Il serait intéressant aussi de savoir ce qu'on fera
avec les 40 ou 50 centres de réadaptation pour adultes qui existent
actuellement. Combien vont devenir des ateliers protégés? Sur
quoi se basera-t-on? Qu'est-ce qui s'en vient de ce côté?
Je pense qu'un des problèmes fondamentaux au niveau des ateliers
protégés reste toujours que, tant qu'ils fonctionnent presque
exclusivement avec des sous-contrats non payants, cela coûtera toujours
très cher. Il faudrait, en fait, que les ateliers soient
intégrés dans l'économie, par exemple, en
développant peut-être des productions origina-
les. Le grand défi aussi est de faire cela tout en gardant la
clientèle qui doit rester dans les ateliers protégés,
c'est-à-dire celle qui ne peut réellement pas intégrer le
marché du travail.
Si on passe à l'intégration professionnelle et sociale, il
y a une remarque générale d'abord. C'est bien sûr, et je
pense que tout le monde le sait, que toutes les mesures qu'on prendra pour
intégrer au marché du travail les personnes handicapées,
auront une efficacité relative, tant que la situation économique
sera comme elle est actuellement, parce qu'il est bien sûr qu'avec 12% de
chômage, les lois du marché du travail sont féroces et
elles jouent à ce niveau. Dans ce sens, je pense que les personnes
handicapées ne sont pas marginales, elles sont comme tout le monde,
elles attendent une relance économique. Cela pourrait beaucoup
aider.
En ce qui a trait au projet de loi, il y a plusieurs points positifs que
je voudrais souligner au niveau de l'intégration professionnelle et
sociale, entre autres, la notion de plan de service, au lieu de la notion de
reclassement professionnel qu'on avait avant, ce qui est beaucoup plus large,
ce qui va sûrement permettre beaucoup plus de choses.
L'article 73 tend à garder leur emploi aux personnes qui
deviennent handicapées, cela m'apparaît extrêmement
important; de même que le contrat d'intégration professionnelle,
la subvention et l'adaptation des postes de travail.
Dans le cadre du plan de service, il y a l'aide matérielle.
J'avoue personnellement que je ne comprends pas encore exactement ce qu'on veut
faire avec l'aide matérielle. La loi est assez vague, on ne sait pas ce
que ça va prouver. On dit que ça va compléter un plan de
service. Par exemple, est-ce que ça va couvrir l'adaptation d'un
logement ou le coût d'un appareil tel qu'un "optacon", des choses comme
ça? Est-ce que ça va pouvoir défrayer les coûts de
transport dans les régions rurales où il n'y a pas de
système?
En fait, pour terminer, je voudrais souligner un point qui en
découle. C'est tout le problème de la sécurité du
revenu des personnes handicapées. Une des barrières principales,
un des problèmes numéro un des personnes handicapées,
c'est évidemment la pauvreté. L'aide sociale, pour eux comme pour
bien d'autres, n'est souvent pas suffisante, surtout compte tenu qu'il y a des
frais supplémentaires pour vivre.
Au niveau de l'aide sociale, il y a une chose que je voudrais souligner,
c'est le règlement qui permet, depuis 1975, je crois, d'accorder $100
supplémentaires aux personnes atteintes de paraplégie. Je ne sais
pas quelle intention il y avait derrière cela quand cela a
été institué mais ça crée des situations
très bizarres. On a choisi un critère que je ne comprends pas, la
paraplégie. D'autres personnes qui bénéficient de l'aide
sociale sont dans une situation qui amène tout autant de
désagréments physiques ou financiers que le fait d'être
paraplégique et elles n'y ont pas droit, à moins que le
médecin n'écrive la bonne affaire sur la formule. C'est souvent
une question de guérilla bureaucratique. Je pense que ça devrait
être révisé.
Pour plusieurs personnes, ça représente carrément
la différence entre la possibilité de mener une vie normale et
celle de rester en institution.
Le dernier point que je voulais souligner concerne la régie. Je
pense qu'il serait important d'élargir la couverture de la Régie
de l'assurance-maladie, entre autres, aux adaptations manuelles des
véhicules automobiles et des chaussures orthopédiques. En
terminant, je vous remercie encore et je suis prêt à discuter.
Le Président (M. Marcoux): Merci, M. Bolduc. M. le
ministre.
M. Lazure: M. le Président, je désire remercier
vivement M. Bolduc pour son volumineux mémoire très
intéressant. Je voudrais souligner, au risque d'offenser sa modestie,
que M. Bolduc a contribué, à titre de fonctionnaire au
ministère des Affaires sociales, à l'ébauche de ce qui est
devenu le projet de loi no 9. Je veux l'en remercier. Il fait un travail
admirable actuellement ici dans la région de Québec avec
"Habitation Plus".
Vous avez raison de dire que la première tâche de l'office
n'est pas tellement d'élaborer une politique globale. Effectivement, on
confond souvent politique globale avec plan de développement. Ce dont
les handicapés ont besoin, c'est un plan de développement. C'est
tout à fait pertinent. C'est dans ce sens que je disais mardi dernier
que cet inventaire des ressources de développement qu'il faudra mettre
ensuite en marche. J'aime bien votre approche pratique et réaliste. Je
suis porté aussi à avoir le même genre d'attitude
vis-à-vis des problèmes aussi considérables que ceux du
rattrapage qu'on a à faire pour les personnes handicapées.
Je voudrais relever trois ou quatre points. L'office n'aura pas à
mettre sur pied une succursale régionale dans tous les cas. Je pense
qu'il devra utiliser, que ce soient des services du réseau des affaires
sociales, qui existent déjà dans telle ou telle région,
cela peut être aussi, dans certains cas, l'utilisation du réseau
scolaire, du réseau éducation pu du réseau main-d'oeuvre
Québec, enfin, les réseaux publics et parapublics qui existent
déjà.
Les "incitatifs" pour permettre l'intégration sociale et diminuer
au minimum les séjours en institution, c'est une chose qui revient
constamment. Je crois que la réponse véritable à tout
cela, c'est le revenu annuel garanti. Aussi longtemps qu'on s'en tient à
des mécanismes d'aide sociale, il faut être très vigilants,
pour que ces mécanismes d'aide sociale ne favorisent pas
éventuellement la dépendance, soit en institution ou en foyer,
quant à cela.
On est très sensible à cette mise en garde que vous faites
et, comme vous le savez, nous travaillons d'arrache-pied, pour un jour, en
arriver à un revenu annuel garanti.
La concertation des ministères. Ayant été
fonctionnaire vous-même, vous en êtes bien conscient, là
aussi, on a une importante côte à remonter. Il y a des choses qui
peuvent nous rendre un peu plus optimistes. Je pense au ministère
des Transports qui, depuis un an, pour la première fois, a
contribue parce qu'autrefois c'était seulement le
ministère des Affaires sociales à 50%, nous contribuons
l'autre 50%, dans les subventions pour les villes de Sherbrooke et de
Montréal. Je pense que du côté transport, cela a
été un précédent. C'est la première fois que
le ministère s'impliquait de façon aussi directe. Actuellement
j'ai d'ailleurs vu la première ébauche de leurs plans
ils prévoient pour l'an prochain, dans leurs prévisions
budgétaires, des subventions pour les neuf ou dix principales villes du
Québec.
Mais c'est évident qu'il va falloir travailler. Et cela sera un
des rôles principaux de l'office, de stimuler cette concertation entre
les différents ministères.
Les $100 aux paraplégiques, je vous avoue bien humblement que je
n'étais pas au courant. On va regarder cette question.
Finalement, sur un rôle plus général de l'office
et vous en faites mention dans votre mémoire il faudra que
l'office, non seulement joue ce rôle de coordination entre les
ministères, mais devienne aussi un agent de changement, à la fois
des mentalités et des règlements ou des coutumes qui existent,
autant dans le secteur privé que dans le secteur public.
Je m'en tiens à ceci pour le moment, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous avez des
commentaires à ajouter, suite aux propos du ministre?
M. Bolduc: Cela va maintenant.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Il me fait
plaisir de souligner la qualité de votre mémoire, M. Bolduc. Je
pense que c'est fait avec beaucoup d'objectivité. Vos prises de position
sont toujours très nuancées, quand vous essayez d'examiner les
avantages et les désavantages d'une partie ou de l'autre du
mémoire.
Je n'ai qu'un regret. Le ministre a laissé entendre que vous
aviez participé à l'ébauche de ce projet de loi. Je ne
sais pas si c'est celui-là, le projet de loi 55 ou une série de
projets, auxquels vous faites allusion dans le mémoire, mais j'aurais
aimé qu'on ait une oreille plus attentive à votre point de vue,
en particulier en ce qui a trait à l'office. Il y a un autre groupe, la
semaine dernière qui l'a apporté également. Je partage vos
préoccupations. Je pense qu'on s'entend sur la nécessité
de la création d'un tel organisme. Mais quant à ses pouvoirs, je
pense qu'il y a un danger que cet office devienne une grosse structure
bureaucratique qui a souvent comme résultat, dans la population, de
conclure que les responsabilités sont finalement les
responsabilités des autres et non pas les siennes. Vous avez cette
grosse structure à laquelle on réfère constamment tous les
problèmes, au lieu de trouver sur place, très souvent, des
solutions plus adéquates.
J'aime beaucoup la page 23, alors que vous signalez, dans les pages
antérieures, ce que vous voyez comme certains dangers au sujet desquels
on devrait être vigilants et peut-être penser à modifier le
projet de loi, où vous arrivez à la conclusion qu'il serait
extrêmement bénéfique si l'office parvenait à
dégager un consensus sur les actions à entreprendre, effectuait
une fonction de conseil auprès des différents ministères
et faisait évoluer la mentalité du public. Je pense que c'est
là, en fait, ce que devrait être la vocation véritable de
l'office, au moins les grands objectifs sur lesquels il devrait concentrer son
action. Pour ma part, je regrette qu'on ait tenté
d'énumérer, d'une façon presque exhaustive, un tas de
fonctions qui vont revenir à l'office et qui, finalement, malgré
les bonnes intentions exprimées par le ministre que, d'ailleurs,
je crois très sincère... Mais, une fois que la loi est en vigueur
et que l'office est structuré d'une telle façon, les pouvoirs du
ministre sont tout à coup beaucoup plus restreints quant au
développement de ce type de structure.
Là-dessus, je partage vos préoccupations et, si je reviens
à la charge, c'est que j'espère que, au moment des amendements
que le ministre fera possiblement, nous a-t-on laissé entendre,
même dans la rédaction d'un nouveau projet enfin, un
nouveau projet ou celui-ci amendé on puisse vraiment en tenir
compte.
Vous faites également des recommandations qui sont
intéressantes à l'égard des ateliers
protégés qui devraient faire davantage partie de notre
économie et, là-dessus, ce même groupe, auquel je faisais
allusion tout à l'heure, mentionnait cette possibilité qu'il
relève éventuellement du ministère de l'Industrie et du
Commerce. Est-ce que c'est là la meilleure réponse? Je ne le sais
pas, mais je pense que c'est avec la même préoccupation que la
vôtre. Finalement, tant qu'on reste dans le domaine des sous-contrats, on
risque fort de faire travailler les gens à rabais et de perpétuer
cette idée que, finalement, c'est un service d'assistance sociale qu'on
met à leur disposition, au lieu de vraiment tenter de les
considérer comme des personnes que l'on intègre à tout
point de vue.
Un autre point que vous faites valoir et là-dessus, je
pense que vous nuancez votre pensée c'est le rôle que
l'office va jouer vis-à-vis de la reconnaissance des organismes de
promotion et ce pouvoir discrétionnaire qui va leur revenir. Je pense
qu'on ne saurait être jamais trop vigilant quant au type de
critères qui va être adopté par l'office et quant au
jugement qu'il va porter sur sur leur reconnaissance comme étant des
organismes pouvant promouvoir les intérêts des personnes
handicapées. Je pense que, à un moment donné, dans une
situation de conflit ou peut-être... J'espère que l'office, comme
d'autres, se fera contester; quand c'est fait dans des limites raisonnables, je
pense que c'est un signe de santé et ça doit exister, mais il ne
faudrait pas que, par contre, l'office succombe à une tentation de
boycotter ou peut-être décourager certains mouvements qui
voudraient, justement, s'organiser avec des objectifs qui veulent
vraiment la promotion des personnes handicapées. Il y a une question
plus précise que je vous demanderais peut-être d'expliciter,
compte tenu de l'expérience que vous avez eue à
l'intérieur du ministère et peut-être aussi même dans
vos fonctions actuelles. Même si je sais que vous oeuvrez dans le
territoire de la ville de Québec, vous avez peut-être des contacts
avec des gens de l'extérieur.
C'est à la page 6, où vous dites que le gouvernement ne
devrait pas brusquer l'évolution, compte tenu des différences qui
peuvent exister entre ce qu'on retrouve en milieu urbain et en milieu rural. Je
me demandais si vous pouviez expliquer comment vous concevez la
nécessité de réajustement de certaines orientations du
gouvernement qui tiennent compte des régions rurales. Quels sont les
points les plus précis que vous aviez en tête à ce
moment-là?
M. Bolduc: En fait, toute la politique, je pense, est
orientée vers c'est normal une intégration à
tous les points de vue, au travail, au point de vue social, au niveau de la vie
en appartement ou dans une ressource la plus intégrée possible.
Je pense que toute le monde s'entend en termes d'objectifs, mais comme je
disais dans le mémoire, il faut tenir compte quand même de
l'évolution et de la situation telles qu'elles ont été au
Québec depuis toujours.
On part de vraiment loin, dans les campagnes et même en ville et
il y a quelques années surtout, les personnes handicapées,
c'était clair qu'elles vivaient de façon exclue à tous les
points de vue. Cela allait presque de soi dans la mentalité populaire.
Alors, les personnes handicapées qui ont vécu cela pendant toute
leur jeunesse et pendant une partie importante de leur vie adulte et qui sont
rendues à 40 ou 50 ans aujourd'hui, il ne faut pas s'imaginer que tout
ce monde va changer de cap du jour au lendemain et va se réorienter tout
d'un coup vers une vie intégrée. Il y a des gens qui ne subiront
pas ces changements, qui, à mon avis, ne seront pas bien
là-dedans et je pense qu'il faut les respecter. Ce sont des personnes
qui ne voudront pas s'embarquer là-dedans. Je pense qu'il faudra leur
donner les conditions qu'elles veulent. Il y en a qui vont
préférer demeurer en institution. Il y en a qui vont
préférer des formules beaucoup moins intégrés que
ce qu'on propose. Je pense que nous n'avons pas le choix. Il ne faudrait pas,
autrement dit, brusquer le monde. Il ne faudrait pas forcer les gens à
s'intégrer. Cela se fait, parfois, et je pense que c'est dommage.
Mme Lavoie-Roux: II y a un autre point que vous soulevez en page
44, c'est la question à savoir qui va s'occuper des services de
placement du Québec. C'est-à-dire que ce sont les services du
placement du Québec qui vont s'occuper des personnes handicapées,
mais votre proposition est assez ambivalente. Vous exprimez des doutes à
savoir si le ministère du Travail peut vraiment remplir cette fonction
alors que d'autre part, vous semblez penser que ce serait réellement une
responsabilité du ministère du Travail de s'occuper de ce
service.
Je me demande si le ministre des Affaires sociales pourrait nous dire...
Je demandais, M. le ministre, quels sont, en fait, les contacts que vous avez
eus avec le ministre du Travail ou le ministère du Travail pour
améliorer le service de placement du Québec? Cela a toujours
été une tradition, cela a toujours relevé du
ministère du Travail, mais on sait que cela a toujours été
fort problématique. Ce n'est pas parce qu'il y avait un manque
d'expression de besoins ou une non-reconnaissance des besoins, mais
jusqu'à quel point le ministère du Travail, par exemple, a-t-il
été consulté sur un projet comme celui-ci? Quelle est son
ouverture? Y a-t-il des signes concrets qui nous permettent d'évaluer
cette ouverture?
M. Lazure: M. le Président, il n'y a pas des signes aussi
concrets que dans le cas du ministère des Transports auquel je faisais
allusion tantôt. Evidemment, c'est beaucoup plus complexe, mais le
ministre du Travail a participé à l'élaboration du projet
de loi no 9 depuis un an, dans le cadre du comité pour le
développement social. L'ébauche du projet de loi a
été travaillée au niveau des fonctionnaires et ensuite a
été discutée à plusieurs reprises par fe
comité de développement social. A ce titre, comme membre du
comité de développement social, le ministre du Travail y a
participé, donc il est très conscient qu'il faudra,
éventuellement, améliorer l'expertise de notre personnel dans les
bureaux de Main-d'Oeuvre Québec. Tout le monde constate qu'il y a place
pour énormément d'amélioration de ce
côté-là. Je ne peux pas donner plus de précisions.
Le ministre du Travail, comme le gouvernement, dit: En principe, il faut que
nos bureaux de Main-d'Oeuvre Québec soient aptes, le plus tôt
possible, à fournir ces services aux personnes handicapées.
On espère qu'avec une loi comme celle-ci, avec la création
d'un office, on espère que ce mouvement ira assez rapidement, mais je
peux vous dire qu'il n'y a évidemment pas de blocages au niveau des
principes. Il s'agira de former, comme un bon nombre de mémoires l'ont
souligné, il faudra qu'il y ait une amélioration de
l'entraînement, de la formation du personnel des centres de main-d'oeuvre
du Québec.
Mme Lavoie-Roux: Dans la formation de l'office,
présentement, vous prévoyez onze personnes. Prévoyez-vous
qu'il y aura des représentants des différents ministères
concernés?
M. Lazure: II y a quatre postes qui, dans le texte, sont
réservés à des ministères.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Lazure: Je suis enclin de plus en plus à augmenter,
comme plusieurs mémoires nous l'ont suggéré, le nombre des
membres à l'office, au conseil d'administration de l'office, si on peut
dire.
Le chiffre quinze a été répété
à plusieurs reprises; cela me paraît un bon chiffre au moment
où on se parle.
Il y aurait peut-être lieu, à ce moment-là,
d'augmenter le nombre des ministères représentés, de
l'augmenter à cinq ou à six.
Mme Lavoie-Roux: Merci. Je vous remercie, M. Bolduc.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Merci, M. le Président. Je n'ai pas de question,
je voudrais seulement, pour ma part, féliciter M. Bolduc, parce que son
mémoire était complet. Cela représente une étude
formidable. Je n'ai aucune question.
M. Lazure: Je remercie encore une fois M. Bolduc pour son
excellent mémoire.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie au nom de tous
les membres de la commission. J'inviterais maintenant le Regroupement des
aveugles et amblyopes du Québec à venir nous présenter son
mémoire. M. Larose est-il là? Je vous inviterais à
présenter vos collègues qui vous accompagnent et à nous
résumer ou nous lire l'essentiel de votre mémoire.
Regroupement des aveugles et amblyopes du
Québec
M. Larose (Jacques): M. le Président, M. le ministre,
honorables membres de la commission, nous sommes du Regroupement des aveugles
et amblyopes du Québec. Je suis Jacques Larose, président du
regroupement. A ma droite, se trouvent Claude Chatelain, membre du regroupement
et France Marcotte, conseiller à l'administration.
Le regroupement existe depuis juin 1975. Il est un organisme
composé uniquement de handicapés visuels. Pour l'instant, nous
sommes environ 110 membres et nous sommes en constant recrutement.
Les objectifs du regroupement sont les suivants: Favoriser une
participation à part entière des handicapés visuels
à tous les domaines de l'activité humaine; promouvoir une
meilleure pensée, dans le monde des aveugles et au sujet des aveugles,
par une action dynamique des handicapés visuels et, d'autre part,
promouvoir les meilleurs intérêts des handicapés
visuels.
Nous ne lirons pas notre mémoire, parce que vous en avez
déjà copie. D'autre part, il y a cependant des points que nous
voudrions mieux défendre. Il y aura quelques commentaires que nous nous
permettrons de lire, parce que nous les jugeons plus importants. Nous pensons
expliquer notre mémoire à tour de rôle, selon nos
possibilités.
M. Chatelain (Claude): Dans l'introduction du mémoire,
nous faisons allusion à une contradiction des rôles de l'office
projeté, considérant que l'office pourrait devenir juge et partie
en apportant une confusion entre ce qu'on pourrait appeler la protection ou le
libre exercice des droits des personnes, par rapport aux services que l'office
voudrait donner. Il nous semble qu'il serait arbitraire de prévoir un
mécanisme qui pourrait à la fois porter jugement sur des services
qu'il est destiné à rendre à une catégorie
d'individus. Par contre, nous avons trouvé des choses positives, parce
qu'il faut bien admettre que si on commence par soulever le problème de
la contradiction des rôles, nous avons quand même trouvé que
le projet de loi 9, contrairement au projet de loi 55, avait tenu à
ajouter de nouvelles catégories de participation au niveau du conseil de
l'office, c'est-à-dire le représentant des salariés et des
représentants des milieux des patrons ou des gens qui sont susceptibles
de reconnaître la compétence des personnes handicapées.
Par ailleurs, nous sommes un peu déçus du fait qu'on n'ait
pas augmenté depuis la loi 55 le nombre des représentants
effectifs des personnes handicapées elles-mêmes. Nous avions alors
proposé, à la présentation de la loi 55, d'augmenter la
représentation ou de nous donner une représentation de six
personnes. D'autre part, à cause du caractère global de la
composition de l'office, c'est-à-dire un office qui
représenterait toutes les catégories de personnes
handicapées, nous pensons qu'il serait de mise de développer
à l'intérieur ou parallèlement à l'intérieur
des offices un certain nombre de comités qui se rapporteraient aux
différentes catégories d'individus représentés.
M. Larose: Si on passe à l'étude de certains
articles, par exemple, si on prend l'article 1, paragraphe m), on demande
d'ajouter à la définition des handicapés tout simplement
le mot "sensoriels", parce qu'on pense qu'il y a quand même une
distinction à émettre entre les handicapés physiques, les
handicapés sensoriels et les handicapés mentaux, car on trouve
que ce serait une façon d'enlever un caractère trop global
à l'Office des handicapés. De même, cela nous permettrait
aussi que chaque type d'handicapé soit mieux représenté
à cet office. D'autre part, à l'alinéa 1p, nous demandons
que les textes ou les échanges entre l'office et certains
handicapés, par exemple les handicapés visuels, se fassent par
écrit, et cela pourrait être fait en braille, parce qu'on pense
que c'est un moyen de faciliter aux handicapés un moyen de
communication.
On demande que ce soit en braille ou encore par enregistrement
sonore.
M. Chatelain: Cet article pourrait s'appliquer également
à l'article 30, lorsqu'il est question de la documentation de l'office,
l'article 30, paragraphe d), et aussi à l'article 31, paragraphe e).
Lorsqu'il y a publication des statistiques, les personnes handicapées
pourraient à ce moment, consulter ces documents s'ils étaient
produits dans le mode de lecture qui convient à chaque catégorie.
A l'article 4, identification d'un logement occupé par une personne en
fauteuil roulant, nous ne voyons pas pourquoi cette identification ne pourrait
pas être
accessible à toute personne handicapée qui en ferait la
demande. Nous étions heureux ce matin d'entendre certains organismes
expliquer qu'il faudrait quand même que ce symbole soit suffisamment
discret pour ne pas créer des situations où les handicapés
pourraient être victimes de toutes sortes de choses, de vols, etc.
A l'article 13, au début du texte, nous suggérons treize
membres. J'étais heureux, tout à l'heure, d'entendre le ministre
dire qu'il s'en allait jusqu'à quinze. Moi, ça me réjouit,
et je trouve que c'est déjà... D'ailleurs, ça me permet
aussi de souligner que, pendant toute la matinée, nous avons
été heureux de constater que non seulement les membres de la
commission et les participants, mais que le ministre avait adopté une
attitude très souple face aux recommandations que nous étions en
train de lui proposer par le biais des mémoires.
Cela nous réjouit, parce que nous avions participé,
à l'été, à la consultation qui a été
faite par M. Garcia et, à ce moment-là, on avait drôlement
l'impression, en écoutant parler M. Garcia, que le projet de loi
était déjà écrit et qu'il était
déjà adopté. L'attitude nouvelle que cette commission
semble développer nous fait penser que nous allons éventuellement
trouver un projet de loi qui répondra au moins à l'ensemble des
préoccupations que les handicapés ont.
Le Président (M. Marcoux): Ce qui prouve que M. Garcia
vous a bien écoutés.
M. Chatelain: Oui.
A l'article 13b, pour ce qui est de la représentation des
personnes handicapées, c'est peut-être le paragraphe qui nous
intéresse le plus. Etant donné que le ministre aime les choses
très claires, on l'a aidé un petit peu en lui proposant, dans le
paragraphe m) de l'article 1, de faire trois catégories de
handicapés: sensoriel, physique et mental. A ce moment-là,
ça lui permettrait de mettre deux personnes par catégorie et il
arriverait à six, notre chiffre.
A l'article 18, pour ce qui est du quorum de l'office, nous
considérons important qu'au moins la moitié des
représentants des personnes handicapées soit présente aux
séances de l'office. Pour nous, c'est un prérequis pour une
participation complète des personnes handicapées. On ne voit pas
pourquoi 50% des représentants des personnes handicapées ne
pourraient pas être présents aux séances de l'office. Cela
s'appliquerait également à l'article 24, lorsqu'il est question
du comité exécutif de l'office, parce que nous aimerions,
là aussi, obtenir la garantie d'une participation suffisante des
représentants des personnes handicapées en obligeant le
comité exécutif à se nommer au moins un autre membre en
plus du vice-président, qui devrait être une personne
handicapée.
M. Larose: Nous voulons aussi, à l'article 29, que le
ministre puisse émettre des directives sur les politiques et
l'orientation de l'Office des handi- capés, mais on croit qu'il pourra
le faire après consultation de l'office.
A l'article 30, nous demandons de supprimer l'alinéa a), parce
que, justement comme on le disait au début, on trouve que l'office ne
peut garantir les droits des individus et, à la fois, offrir des plans
de services. On pense que tout ce qui touche le côté plan de
services, intégration sociale, réinsertion au milieu du travail
et tout ça, on pense que ça devrait d'abord relever des centres
de réadaptation pour les divers handicapés, et que l'office, au
fond, deviendrait un organisme où l'individu peut faire appel. Je
devance peut-être un petit peu, mais si, à ce moment, l'individu
n'est pas satisfait du jugement de l'office, il pourrait toujours en appeler de
la Commission des droits de la personne.
M. Chatelain: A l'article 33b, carte d'identité, nous ne
voyons pas pourquoi cet article serait retranché du projet comme il a
souvent été demandé par des organismes.
Evidemment, nous sommes conscients de la nécessité pour
les individus de conserver leur libre droit d'avoir cette carte ou de ne pas
l'avoir. C'est cela qu'il serait important de dire dans le projet de loi, que
la carte est remise à la personne qui en fait la demande seulement. Il y
a peut-être des raisons très concrètes et très
pratiques à cela. C'est que, souvent, comme on l'a entendu dire, et dans
le mémoire de M. Bolduc précédemment, les organismes
soi-disant de promotion font leur promotion et non la nôtre. Et c'est
peut-être nécessaire pour nous, même si c'est marginalisant,
pour employer un mot à la mode, dans le moment, d'être
obligés de prouver au moyen d'une carte que nous sommes des
handicapés, c'est peut-être nécessaire, pour éviter
justement d'être confrontés à des situations qui sont
dégradantes plus que positives.
A l'article 38, pour ce qui est de la consultation des organismes de
promotion, je vais demander à France de lire le commentaire que nous
avions rédigé à ce moment-là.
Mlle Marcotte (France): "II me semble important d'inclure cette
obligation pour assurer que l'office soit toujours au courant des
préoccupations des personnes concernées. L'office pourrait
également consulter les organismes de promotion sur d'autres
questions."
M. Chatelain: C'est que, pour nous, la consultation des
organismes de promotion ne nous semble pas seulement un pouvoir, mais c'est un
devoir, sur les questions relatives aux objectifs de l'office, les
priorités que l'office envisage et les questions de son action.
M. Larose: A l'article 42, sur la question de l'agrément
des ateliers protégés, nous pensons que l'office "doit" accorder
un permis, et non pas "peut", parce que, s'il doit accorder un permis, il devra
aussi l'enlever pour cause. Pour ce qui est de l'embauche, dans les ateliers
protégés et, en
général, pour ce qui est des handicapés, nous
pensons aussi que tout cela devrait relever des centres de réadaptation
et qu'encore une fois, justement à cause de notre position à
l'égard de l'article 30, alinéa a), nous pensons que beaucoup de
ce qu'on veut donner comme fonction à l'office devrait relever des
centres de réadaptation.
M. Chatelain: A l'article 52, admissibilité à un
plan de services, c'est la même chose, cela découle de ce que nous
avons dit au sujet du paragraphe a) de l'article 30; que les centres de
réadaptation... d'ailleurs je ne vois pas pourquoi le ministère
multiplierait des mécanismes qui font la même chose. Si on
demandait au Vérificateur général du Québec de
faire une étude systématique, une analyse systématique des
coûts et du dédoublement, c'est, je pense, ce qu'on dit en
comptabilité, de vérifier comment les dollars qui sont
dépensés pour donner certains services aux handicapés ne
sont pas doublés, je crois que le vérificateur pourrait trouver
les choses assez intéressantes.
A l'article 55, droit d'appel relatif à un contrat de services,
nous voulons apporter une certaine précision au sens du mot
"commission", en nous référant très spécifiquement
à la Commission des droits de la personne. Comme certains groupements
l'ont dit avant nous, les droits relèvent de la Charte des droits et
libertés de la personne et, à ce titre, nous pensons qu'il serait
peut-être préférable que tout appel, que des appels
où l'individu se sent victime de discrimination, devraient se faire
à la Commission des droits de la personne. Nous ne sommes pas tout
à fait certains que la Commission des affaires sociales soit aussi
accessible que le ministre l'a dit ce matin. On ne peut pas apporter de preuves
concluantes, mais, en écoutant parler les gens, on a parfois
l'impression que cela est assez compliqué.
A l'article 57, le plan de services, c'est toujours la même
question, qui relève de l'abrogation du paragraphe a) de l'article
30.
Passons aux articles 60 à 67 inclusivement, en ce qui a trait
à l'aide matérielle. Nous avons un commentaire que France
pourrait lire.
Mlle Marcotte: L'aide matérielle qui est accordée
sous forme de prothèse et orthèse devrait être offerte sans
préjudice et selon les dispositions de la Régie de
l'assurance-maladie du Québec. Dans aucun cas, ces aides
mécaniques ou autres ne devraient être incluses dans le calcul de
l'admission à l'aide financière.
M. Chatelain: Selon nous, d'après le texte, l'aide
matérielle ne semble être disponible qu'aux
bénéficiaires d'un plan de service. Nous posons la question
suivante: Qu'adviendrait-il des besoins des personnes déjà
intégrées au marché du travail, qui ont besoin d'aide
spécifique pour être autonomes dans le type d'emploi dans lequel
elles sont affectées?
M. Larose: Pour ce qui est de l'article 70, ré-
munération d'un bénéficiaire d'un contrat
d'intégration au marché du travail, nous demandons que le salaire
minimum soit accordé, particulièrement dans les ateliers
protégés. Il faut que cela devienne un peu plus valorisant de
travailler en atelier protégé, et ce, pendant toute la
durée d'un contrat de service, et qu'on ne joue pas, comme on a
déjà eu des entretiens avec des handicapés visuels et
qu'on leur dise: On ne peut pas te donner le salaire minimum, parce que tu es
dans un plan de formation. Quand il serait prêt, quand on lui dit: Ta
formation est terminée, il dit: Donnez-moi le salaire minimum, on dit:
Non, on va t'ensei-gner une autre technique, et on ne peut pas te donner le
salaire minimum.
Je trouve que c'est un peu jouer sur les mots et il faudrait que cette
situation change, en permettant que l'office ou les différents
ministères puissent donner des subventions qui permettent d'attribuer le
salaire minimum à ceux qui travaillent en atelier
protégé.
A l'article 73, pour ce qui est du congédiement d'un
employé quand il devient handicapé, on se demande pourquoi les
industries ou les sociétés qui ont 50 salariés et moins
seraient soustraites à ce règlement.
M. Chatelain: On pourrait faire une certaine boutade et dire que
tous les partis de l'Opposition seraient mal pris si un de leurs membres
perdait la vue, parce qu'ils seraient obligés de le congédier. Il
n'y aurait que le parti au pouvoir, actuellement, qui pourrait tolérer
un de ses membres handicapés. C'est peut-être un peu caricaturer
l'article, mais je pense que les députés, les membres de cette
commission, devraient se placer à notre place et se voir un peu
handicapés en essayant d'évaluer ce que cela
représente.
On ne voit pas pourquoi on serait discriminé quand on n'est que
30, 25, 40. Je suis d'accord avec le ministre que, dans certains cas
très particuliers, dans une entreprise de dix à douze personnes,
peut-être n'y a-t-il pas moyen de reclasser, mais il reste qu'il faudrait
tenir compte de la preuve que la personne est apte à fournir de sa
compétence.
M. Larose: Pour ce qui est de l'article 87, le droit à la
scolarisation, on est heureux que l'extension soit portée jusqu'à
l'âge de 21 ans, mais on voudrait aussi que ceci s'applique au niveau de
l'éducation permanente des adultes.
A l'article 88, incapacité pour un handicapé d'occuper un
poste, on pense que c'est quand même très arbitraire de laisser
à la seule foi d'un certificat médical de faire la preuve de
l'incapacité d'un handicapé de continuer d'occuper son emploi. On
pense qu'on devrait laisser une chance à cet handicapé de faire
la preuve qu'il a encore la compétence et la capacité d'occuper
cet emploi.
Aussi, nous avons cru utile de modifier les articles 31, 31e), 32, 33,
35, 38, 40, 42, 50. On voulait que le mot "peut" soit changé par le mot
"doit", "l'office doit", parce que l'office, dans ces cas bien précis ne
devrait pas jouir d'un pouvoir, mais
devrait pratiquer un devoir à l'endroit des personnes
handicapées.
Je vous remercie de nous avoir entendus.
Le Président (M. Marcoux): Monsieur, je vous remercie de
la présentation de votre mémoire. M. le ministre.
M. Lazure: M. le Président, je remercie beaucoup le
Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec de leur mémoire
bien détaillé, bien précis. Commençons d'abord par
l'office. Vous craignez que l'office soit juge et partie dans certaines
situations. Je pense qu'il faudra distinguer avec les amendements que nous
allons apporter, un conflit d'intérêts où les droits de la
personne handicapée seraient en jeu. A ce moment, je pense que le
recours sera la Commission des droits de la personne.
Il y a d'autres situations où la personne handicapée, sur
le plan d'une décision administrative, pourrait se sentir
lésée. A ce moment, je ne pense pas qu'il soit nécessaire
de recourir à chaque fois à la Commission des droits de la
personne. Nous pensons qu'il est plus efficace, plus rapide de recourir
à la commission des affaires sociales. Ce n'est pas sur une position de
principe, c'est une position très pratique, très réaliste.
J'ai eu l'occasion d'en parler un peu ce matin. La commission des affaires
sociales, jusqu'à preuve du contraire pour nous, accomplit, un
très bon travail, et de façon assez expéditive.
Votre suggestion aussi de distinguer trois groupes principaux de
personnes handicapées, soit les personnes handicapées
physiquement, mentalement et, troisièmement, au plan sensoriel, dit que
ce serait plus clair, mais à première vue seulement. L'expression
"handicapé sensoriel" est vraiment incluse dans l'expression
"handicapé physique". Les sept sens font vraiment partie du physique de
l'individu.
Si on isole les handicapés sensoriels, on ouvre la porte à
une série de demandes d'autres sortes de personnes handicapées
qui vont vouloir aussi qu'on identifie leur sous-catégorie de handicap.
Encore une fois, je ne suis pas contre, sur un plan de principe, mais au plan
pratique, cela me paraîtrait très difficile d'accepter votre
suggestion et de ne pas l'accepter ensuite pour d'autres sortes de handicaps
particuliers.
Quant à la carte sur demande, c'est notre position qui a
été exprimée à plusieurs reprises la semaine
dernière. Quant à l'aide matérielle, vous avez raison de
dire que c'est rattaché au plan de service, mais un plan de service,
à la rigueur, pourrait n'inclurequecelade l'aide matérielle. On
peut imaginer des cas où un plan de service serait constitué, de
façon temporaire, seulement d'aide matérielle. Donc, il y a
avantage à ne pas trop préciser le genre de situation où
l'office pourrait dispenser une aide matérielle. Encore une fois, cela
serait toujours fait dans l'optique où il n'y a vraiment personne
d'autre qui serait en mesure d'offrir l'aide matérielle. Il n'y aurait
vraiment aucun autre organisme tei qu'aide sociale, ou organisme exis- tant
je constate que c'est difficile à imaginer, mais c'est quand
même concevable, parce que l'office doit jouer ce rôle de
suppléance en dernier recours seulement.
En ce qui concerne votre demande un peu particulière de
définir ce que les mots "par écrit" signifient. Par cela, vous
voulez vous assurer, au fond, du droit, pour une personne handicapée
visuellement surtout, d'utiliser le braille, ou encore un enregistrement
sonore, comme moyen de communication avec l'office.
Nos légistes, nos experts donnent aux mots "par écrit" une
interprétation très large. A partir du moment où, dans la
Charte des droits et des libertés de la personne, par l'amendement que
nous allons suggérer à l'article 10, on ne peut pas discriminer
contre la personne handicapée, ou sa prothèse, il est
évident que l'office et tout autre organisme public seraient
obligés d'accepter le médium de communication qui est le plus
approprié au handicap de la personne.
Atelier protégé, salaire minimum. Le texte du projet de
loi no 9 dit clairement que le salaire minimum sera versé dans le cas
des personnes en cours d'intégration professionnelle. Ce n'est
peut-être pas dit aussi clairement dans le cas des ateliers
protégés, mais si on retourne à l'article 86 on dit:
"L'article 15 de la Loi du salaire minimum est abrogé". Ceci veut dire
que notre loi enlèverait l'exclusion que fait actuellement la Loi du
salaire minimum pour des emplois du genre des ateliers
protégés.
En d'autres termes, dans l'article où on parle de l'emploi en
atelier protégé, l'article 42b: "L'office qui emploie en
majorité des personnes handicapées, etc.", à ce moment,
dans l'interprétation que les légistes font, il y aurait une
application de la Loi du salaire minimum pour les personnes employées
dans un atelier protégé.
Je pense, M. le Président, que cela complète mes remarques
pour le moment.
Le Président (M. Marcoux): Avez-vous des commentaires
à faire sur les propos du ministre?
M. Larose: II y a seulement sur la subdivision entre
handicapé sensoriel et physique, que nous pourrions en faire. Je pense
qu'il est évident que, même à l'intérieur des
handicaps tels qu'on les conçoit comme visuels et auditifs, on pourrait
faire de multiples distinctions. C'est pour cela qu'on s'en est tenu uniquement
à trois grandes catégories plutôt qu'à deux.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais remercier le Regroupement des
aveugles et amblyopes du Québec de son mémoire. Je pense qu'il a
vraiment étudié attentivement le projet de loi et qu'il fait des
recommandations intéressantes dans un grand nombre d'articles.
La seule question que je voudrais lui poser, parce que je pense que le
ministre a repris plu-
sieurs des interrogations que vous souleviez, est celle-ci: Vous
souhaitez la création de commissions permanentes de l'office. Votre
préoccupation vient du fait que vous croyez que, évidemment,
l'office, étant limité quant au nombre de ses membres, vous avez
l'impression que peut-être certains types de handicaps pourraient
être oubliés ou qu'on ne leur accorderait pas l'importance qu'ils
mériteraient.
Ne croyez-vous pas que la création de ces commissions permanentes
viendrait grossir davantage tout le fonctionnement de l'office et que cela ne
devrait pas demeurer quand même une responsabilité de chacun des
organismes de promotion qui sont reliés à des handicaps
particuliers, de jouer ce rôle de chien de garde auprès de
l'office afin que, justement, même si on ne retrouve pas toutes les
catégories de handicaps dans la formation de l'office, on puisse quand
même répondre aux besoins de ces différentes
catégories?
M. Chatelain: Nous sommes très conscients du fait que la
bureaucratie et tout ce qui en résulte alourdissent et compliquent la
consultation et les échanges nécessaires à une orientation
dynamique de la part de l'office. Nous avons hésité à la
proposer.
La raison pour laquelle nous l'avons fait, c'est parce que dans le
projet de loi no 9, il était question de la possibilité pour
l'office de constituer des comités techniques ou des comités
spéciaux pour faire certains travaux; mais c'était
rédigé un peu dans le style "peut" et nous, nous avons voulu
pousser la chose un peu plus loin pour dire: Ecoutez! Il faudrait
peut-être que ce soit "doit en faire" de temps à autre. Alors, on
serait, nous autres, raisonnablement satisfaits si, dans la future loi, il
était prévu que l'office, chaque fois qu'il est question de
problèmes ou de préoccupations relatifs aux orientations, aux
priorités de l'office, disons ces deux grands éléments
surtout, et les objectifs évidemment, que l'office devait consulter les
organismes de promotion et les groupements intéressés, à
ce moment-là, probablement qu'on serait satisfait.
On a demandé un petit peu plus pour en avoir au moins un peu.
Mme Lavoie-Roux: L'autre question que je voudrais vous poser est
relative à votre recommandation sur l'article 30 d'abroger
l'alinéa a). A votre point de vue, cette fonction revient au centre de
réadaptation, et je pense que la préoccupation que vous exprimez
l'a été par plusieurs organismes, à savoir qu'il ne
faudrait quand même pas substituer aux différents centres de
réadaptation ou aux différentes instances régionales,
locales, soit par le truchement des CLSC ou différents organismes
reliés au ministère des Affaires sociales, on ne devrait quand
même pas substituer l'office a tous ces organismes.
Je me demande si la réponse que le ministre vous a donnée
à ce sujet et j'ai cru comprendre que c'était en dernier
recours que l'office assume- rait de telles responsabilités vous
apparaît satisfaisante. Moi, j'aurais peut-être aimé, pour
ma part, une assurance un peu plus grande de la part du ministre, selon
laquelle peut-être ceci serait spécifié davantage dans la
rédaction finale du projet. Parce qu'on court continuellement ce danger
que l'un se substitue à l'autre et quand on sait qu'il y a une autre
place où on peut aller, finalement, on ne trouve jamais satisfaction
à l'endroit où devraient, le plus normalement possible, se donner
les services.
M. Chatelain: Oui, je pense que c'est pertinent à notre
pensée. Les handicapés visuels et certains autres groupes de
handicapés jouissent de centres de réadaptation depuis tout
dernièrement ils sont officialisés maintenant et
ça nous semblerait un peu du gaspillage de nos investissements sociaux
que de dédoubler ou de faire double emploi dans ce domaine. Mais, par
contre, la préoccupation du ministre ne peut pas être
située au niveau de certaines... Je ne veux pas interpréter. Le
ministre est bien capable de se défendre seul. Mais il y a
peut-être d'autres catégories de handicapés, de personnes
handicapées, qui ne jouissent pas encore de centres adéquats de
services en réadaptation, et c'est peut-être à ce
titre-là que l'office jouerait un rôle. Mais je trouve que c'est
dangereux quand même. On maintient notre point de vue qu'il y aurait
possibilité de conflit...
Le ministre est bien capable de se défendre seul. Mais il y a
peut-être d'autres catégories de handicapés, de personnes
handicapées, qui ne jouissent pas encore de centres adéquats de
services en réadaptation, et c'est peut-être à ce
titre-là que l'office jouerait un rôle. Mais je trouve que c'est
dangereux quand même. On maintient notre point de vue qu'il y aurait
possibilité de conflit...
M. Larose: C'est, en fait, pourquoi on demande aussi cette
abrogation. C'est qu'on se dit que, finalement, l'Office des handicapés,
étant constitué de personnes venant de différents milieux,
ne peut pas avoir la compétence et la connaissance de chaque handicap
qu'un centre de réadaptation peut offrir et d'un handicap bien
spécifique. A ce moment-là, on se dit qu'il vaut mieux laisser
cette fonction aux centres de réadaptation et, évidemment, en
dernier recours, que ce soit l'office qui le fasse, si ce n'est pas fait, mais
il vaudrait mieux qu'un centre de réadaptation soit créé
avant que l'office ne doive le faire.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie, messieurs, madame.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Merci, M. le Président. Premièrement,
votre position sur l'article 18, relativement au quorum de l'office, est
très valable. Vous dites premièrement que la situation qui
concerne les aveugles, le quorum de l'office, en étudiant ce sec-
teur, ces problèmes, doit inclure une moitié des
représentants de ces groupes. Est-ce ce que vous dites?
M. Chatelain: Oui, c'est-à-dire que les personnes
handicapées qui sont concernées soient là. Ce n'est pas
nécessairement parce qu'on va discuter des handicapés visuels
qu'il faut que ce soient seulement eux, mais que les représentants des
handicapés, globalement, soient au moins représentés
à 50%.
M. Larose: Pour que les décisions qui seront prises soient
quand même en accord avec les handicapés qui sont à
l'office. C'est pour cela qu'on demande un quorum de 50% composé de
handicapés ou de leurs représentants, dans certains cas.
M. Shaw: Vous nous avez souvent dit que vous voulez faire changer
le mot "peu" pour le mot "doit". Vous exigez peut-être quelque chose qui
est trop difficile pour le gouvernement pour le moment, parce que cela implique
une dépense incroyable quand on dit: Le gouvernement "doit", dans chaque
secteur de loi que vous prévoyez.
Vous avez parlé tantôt de gaspillage de temps par les
fonctionnaires, en faisant double emploi, mais, en même temps, vous dites
que vous voulez faire changer le mot "peut" par le mot "doit". Est-ce que vous
avez des...
M. Larose: On trouve que c'est une nécessité. Si on
a un office, on veut qu'il exerce ses fonctions et, à ce moment, on ne
veut pas lui laisser une possibilité, mais on veut lui en faire une
obligation, un devoir. Si on a un office, on veut qu'il s'applique ou qu'on
n'en ait pas du tout.
M. Shaw: Oui...
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Lazure: Si vous permettez, M. le Président, j'aimerais
demander au groupement qui est devant nous ce qu'il pense de la discussion que
nous avons eue avec deux autres groupes, aujourd'hui, sur la possibilité
de mettre sur pied une école pour chiens-guides.
M. Chatelain: Sur cette question, je pense que le groupement des
chiens-guides est sûrement mieux placé que nous, sur le plan
spécifique du problème, pour faire des suggestions dans ce sens.
Nous sommes aussi d'accord avec ce groupe que beaucoup de mythes ont longtemps
été véhiculés dans le Québec au sujet des
chiens-guides. De plus, je pense qu'on pourrait ajouter à cela qu'il y a
deux prérequis à l'acquisition d'un chien-guide par un individu,
c'est d'abord d'aimer les animaux et aussi d'être suffisamment mobile et
en mesure de s'en occuper. C'est peut-être simplifier, mais c'est quand
même, je pense, être réaliste que de penser dans ce
sens.
Les études statistiques dont on dispose sur la question sont
très incomplètes et je pense que, quand on parle, par exemple, de
20, 30 ou 40 chiens par année, c'est peut-être pensable,
prévisible que ce soit ça, mais en tant que regroupement, nous
appuyons toute recommandation en vue de l'établissement futur d'une
école pour le dressage, l'entraînement, etc., de chiens-guides,
mais, pour nous, il y a quand même une étude de rentabilité
et de planification qui tienne vraiment compte des besoins; qu'on fasse faire
les statistiques, s'il le faut, et qu'on se donne les outils nécessaires
pour vraiment avoir l'image complète de la situation.
M. Lazure: Je vous remercie, madame et messieurs du
regroupement.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie, au nom de
tous les membres de la commission, d'être venus, par cette journée
de tempête, présenter votre mémoire.
J'aimerais maintenant inviter M. Gilles La-grange à venir nous
présenter son mémoire.
M. Gilles Lagrange
M. Lagrange (Gilles): M. le Président, messieurs les
membres de la commission, M. le ministre, plusieurs organismes ont
présenté des correctifs dans les articles de la loi. Je n'ai pas
voulu faire cela, parce que j'ai pensé que cela allait être fait
par d'autres et je me suis permis d'apporter quelque chose de beaucoup plus
spécifique en ce qui touche le quotidien des aveugles. Je vais parler un
peu de la mobilité, quelques correctifs que je voudrais voir
apportés aux articles de la loi. Je parlerai aussi des barrières
architecturales et du logement. Je vais vous lire quelques points que je
considère assez importants dans ce mémoire-ci et après, je
vais lire des suggestions que je fais pour apporter des correctifs. Mais c'est
surtout dans les règlements de son application que je voudrais avoir
cela, parce que c'est plutôt spécifique ce mémoire, en ce
qui concerne le quotidien des handicapés visuels.
D'abord la canne blanche. Sauf dans le livre blanc, chapitre 5,
formation et réadaptation, disponibilité des orthèses et
prothèses payées par i'assurance-maladie du Québec,
à ma souvenance, on ne parle pas spécifiquement de la canne
blanche. Selon des statistiques de l'INCA, il y a environ 7400 aveugles dont la
vision est moins de 20/200. La canne blanche étant
considérée comme un objet utile à la mobilité, dans
aucun article du projet de loi no 9 en fait-on référence,
à la canne blanche. Parmi les handicapés visuels qui ont besoin
d'une aide, pour faciliter leur déplacement, 98% d'entre eux utilisent
la canne blanche. Donc, la canne blanche peut être encore
considérée comme un instrument de travail essentiel pour
l'orientation en ce qui concerne la mobilité des aveugles.
Le chien-guide. D'autre part, on a judicieusement prévu, dans le
projet de loi 9, diverses mesures pour faciliter l'acceptation et
l'accès de pres-
que tous les lieux publics aux aveugles accompagnés de
chiens-guides. Je crois qu'il est important de se rappeler qu'il n'y a que 90
utilisateurs de chiens-guides au Québec. Il n'en demeure pas moins qu'il
faut être très habile pour utiliser adéquatement un
chien-guide et en retirer des avantages sérieux.
En ce qui concerne les barrières architecturales. Inclinaison des
trottoirs. Dans les différentes mesures prévues, on convient
qu'il faudrait donner des directives aux entrepreneurs publics pour planifier
les trottoirs et édifices publics pour faciliter l'accès aux
fauteuils roulants. Aider ces handicapés et fort louable, mais il est
suggéré de construire des trottoirs dont la bordure
extérieure serait inclinée pour favoriser les fauteuils roulants.
Il faudrait aussi prendre en considération que les aveugles se dirigent
avec une canne blanche. Par conséquent, ils ont besoin de structures
à angles droits pour servir de points de repère. Serait-il
possible de prévoir des aménagements qui accommoderaient les
utilisateurs de fauteuils roulants et de cannes blanches.
Des voies d'accès pour auto à la propriété
privée. Souvent, il est à remarquer que les trottoirs adjacents
aux garages et aux édifices publics ont leur bordure extérieure
inclinée sur une très grande longueur. Il faut considérer
que lorsqu'un aveugle est muni de sa canne blanche et traverse ces espaces, il
faudrait penser que cela représente de grands risques d'accident parce
que ceux-ci n'ont aucun point de repère et peuvent s'en aller vers la
rue. Ici, je parle des escaliers. C'est assez complexe que dans une commission
semblable je parle de cela, mais c'est parce que, pour l'environnement d'un
aveugle, c'est très important. Il est question d'escaliers dont le
sommet est au même niveau que le trottoir et qui descendent vers les
sous-sols ou autres endroits semblables. J'aimerais qu'on prévoie des
choses dans ces cas-là pour que les aveugles n'aient pas d'accidents. Je
parle ici en plus des poteaux, des utilités publiques. On devrait penser
à situer les poteaux et les utilités publiques sur la bordure
extérieure des trottoirs, probablement à quelques pouces.
Je pense que ceci permettrait aux aveugles de pouvoir mieux circuler et
ne pas avoir besoin de les contourner, éviter les risques qu'on se
frappe dessus.
Maintenant, j'arrive au logement. Le logement prévoit des
modifications pour améliorer la situation des aveugles. On parle
d'aménagement, de réadaptation, de subventions spéciales
pour permettre d'augmenter leur nombre et leur disponibilité. Cette
implication sociale est d'excellent augure.
Pourrait-on favoriser, par des avantages spéciaux, l'achat de
maisons pour le handicapé qui le désire? J'arrive à mes
suggestions: La mobilité, la canne blanche. La canne blanche sera
défrayée par I'assurance-maladie du Québec. Pourrait-on,
dans le futur projet de loi sur les personnes handicapées du
Québec, consacrer un article spécifique concernant la canne
blanche ou au moins un paragraphe référant à la Loi de la
canne blanche.
Les chiens-guides. L'article 33, étant consacré en grande
partie aux chiens-guides, dans le projet 9, pourrait-on ajouter un paragraphe
quant à la vérification des critères
d'admissibilité pour l'obtention de chiens-guides. Dans les
règlements de l'interprétation de l'article, il y aurait lieu de
préciser que des spécialistes jugeront si le requérant
d'une telle aide est adéquatement préparé et peut s'en
servir utilement.
Les barrières architecturales maintenant. Inclinaison des
trottoirs. Afin d'aider les personnes circulant en fauteuils roulants et les
handicapés visuels, il faudrait prévoir un aménagement
urbain qui tienne compte de ces deux groupes. Les aveugles ont besoin de
bordures extérieures d'un trottoir carré et à angle droit.
Afin de tenir compte des deux handicaps mentionnés, je suggère
qu'on laisse les trottoirs tels qu'ils sont, en référence
à ce qu'on proposait dans le livre blanc, de mettre des trottoirs
inclinés dans toutes les nouvelles planifications urbaines.
Je suggère aussi qu'on fasse des bordures extérieures
inclinées d'une longueur de cinq pieds, mais à une certaine
distance des intersections. Je suggère à environ cinq pieds;
ça permettrait aux aveugles de se réenligner avant de traverser
les rues, c'est-à-dire de conserver sa direction rectili-gne.
J'ai diverses suggestions dans ce mémoire sur les voies
d'accès pour autos à la propriété privée,
les garages, les stationnements, les édifices commerciaux. Dans bien des
cas, à ces endroits, l'entrée est inclinée sur une
très grande longueur. Je suggère qu'on restreigne l'espace de la
longueur inclinée à douze pieds afin de permettre aux aveugles
qui ont une canne blanche de reprendre leur direction. Cela nous aiderait
énormément.
Dans les escaliers descendants dont le sommet est à
égalité du trottoir, je suggère qu'on oblige les gens
à installer une marche supplémentaire pour montrer qu'il y a un
obstacle ou qu'on oblige les gens à installer une barrière de
sécurité.
Dans les poteaux et les utilités publiques, je suggère
qu'on espace toutes ces utilités d'au moins quatre pouces en dehors des
trottoirs afin de permettre plus de facilité dans notre circulation,
parce que lorsqu'on est muni d'une canne blanche, on est beaucoup plus nombreux
munis d'une canne blanche que munis de chiens-guides. Je pense que ça
vaudrait la peine d'y penser sérieusement dans la planification urbaine
future et dans celle qu'on va réaménager avec les anciennes
facilités qu'on a actuellement.
Au chapitre du logement, l'article 90, modifications sur les droits de
l'habitation, pourrait-on y inclure: plans spéciaux pour achats de
maisons pour les handicapés? En plus de favoriser la
disponibilité du logement pour handicapés, il serait probablement
possible d'encourager ceux-ci à l'achat de leur propre maison. Dans les
règlements, on devrait y inclure des arrangements spéciaux pour
faciliter aux handicapés l'acquisition d'une maison. Je verrais la
Société d'habitation du Québec qui serait probablement en
mesure d'offrir de tels plans spéciaux, tels que rabais
d'intérêts.
Je me réfère à une ancienne loi gouvernementale
canadienne qui fut établie en 1942, qui s'appelle la Loi sur les terres
destinées aux anciens combattants.
En ce qui me concerne, j'ai terminé l'exposé de ce
mémoire et je serais prêt à répondre aux questions
des membres de la commission.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Lazure: M. le Président, je veux remercier M. Lagrange.
C'est là qu'on voit l'avantage de rencontrer des personnes qui
connaissent toutes les difficultés quotidiennes de la vie d'un
handicapé, dans votre cas, d'un handicapé visuel.
Effectivement, on a eu plusieurs mémoires, comme vous le savez,
au-delà d'une soixantaine en tout, dont un bon nombre par des
groupements qui s'occupent de handicapés visuels, mais aucun, à
part le vôtre, n'a fait de suggestions aussi précises.
On en prend bonne note, surtout celles qui ont trait aux
municipalités, aux règlements municipaux. En somme, il faut
concilier les intérêts des personnes handicapées qui se
déplacent en chaise roulante avec les intérêts des
personnes handicapées visuellement, dans le cas des trottoirs, par
exemple, de même que dans le cas des poteaux destinés au service
téléphonique ou au service d'électricité.
Je vais écrire au ministre des Affaires municipales pour lui
faire part de ces suggestions pour que lui en fasse part, ensuite, aux
municipalités.
C'est un peu la même chose pour les autres remarques que vous
faites concernant, par exemple, les escaliers descendants. Quand vous nous
l'expliquiez, on se rendait bien compte que c'est une source d'accidents
probablement assez fréquents. Là aussi on va alerter le ministre
responsable du Code du bâtiment, qui est le ministre du Travail. On va
lui faire part de vos suggestions.
Quant au logement, on a mis l'accent sur l'adaptation des logements, des
appartements. Vous nous faites la suggestion intéressante qu'il y ait un
taux d'intérêt préférentiel, un taux
d'intérêt à rabais pour les personnes handicapées
qui voudraient se procurer une maison. On prend note de cette suggestion.
Celle-là aussi c'est la première fois que je la vois
apparaître dans un des mémoires.
Je vous remercie beaucoup, M. Lagrange. C'est tout ce que j'ai pour le
moment.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je veux remercier M. Lagrange pour ses
suggestions qui, pour autant que je peux juger, m'apparaissent très
concrètes. Je peux simplement lui accorder mon appui.
Déjà, le ministre semble montrer d'excellentes dispositions pour
qu'elles soient examinées par des personnes qui ont vraiment plus de
compétence que je ne saurais en avoir dans ce domaine, pour que soient
mis en application les correctifs qui s'impo- sent, particulièrement en
ce qui touche les barrières architecturales.
Il y a juste une question que je voudrais poser au ministre d'abord, et,
en deuxième lieu, à M. Lagrange. Je sais que dans les projets de
construction de loyers a prix modique, on prévoit maintenant un
appartement par étage réservé et aménagé de
telle façon qu'il puisse servir à des personnes
handicapées. Souvent, on les limite à un ou deux par maison
à appartements.
J'aimerais demander si, à votre point de vue, il serait bon d'en
prévoir un plus grand nombre pour que les gens puissent obtenir un
appui, les uns à l'égard des autres, si plusieurs
handicapés se retrouvent à l'intérieur d'une maison
à appartements ou s'il est préférable de les limiter
à un ou deux et que ces gens se sentent beaucoup mieux
intégrés dans une maison à appartements
régulière. Est-ce que vous voyez une limite au nombre
d'appartements prévus pour les personnes handicapées à
l'intérieur d'une conciergerie?
M. Lagrange: Est-ce le ministre ou moi qui répond?
M. Lazure: Je peux répondre tout de suite. Ensuite, je
vous céderai la parole, M. Lagrange. En ce qui concerne les habitations
à loyers modiques, les règles de la Société
d'habitation du Québec ne sont pas exactement un logement par plancher;
c'est plutôt par pourcentage, c'est entre 5% et 10% du nombre total des
appartements.
Effectivement, cela peut revenir à une répartition de un
par plancher, mais c'est un pourcentage de 5% à 10% du nombre total des
appartements dans l'immeuble.
L'autre organisme qui intervient, c'est le Code du bâtiment. Dans
le premier cas, les 5% à 10%, on parle de logements adaptés,
tandis que, dans le cas du Code du bâtiment, pour ce qui est des gros
édifices surtout, privés, qui ne sont pas nécessairement
à loyers modiques, le règlement demande que ces appartements
soient accessibles aux personnes handicapées. Il s'agit
d'accessibilité et non pas d'adaptation.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Lazure: Je vous remets la parole, M. Lagrange.
M. Lagrange: Je suis très d'accord avec le ministre
là-dessus. Je me permets de souligner que, si on veut faire face
à l'intégration de façon adéquate, il serait
peut-être bon de ne pas trop prévoir catégoriser des
handicapés dans un endroit spécifique dans le sens de faciliter
leur intégration à travers la société. C'est comme
cela que je le vois, parce que je prévois que, si on les regroupe trop
dans un seul milieu, à un moment donné, il sera plus difficile de
faire l'intégration. De cette façon, je verrais qu'il y aurait
beaucoup plus d'avantages, quand les services urbains sont bien
planifiés, à déconcentrer les habitations où
résident des handicapés pour que ces gens soient
en mesure de pouvoir vivre avec la population; que les handicapés
soient à l'écoute de cette population et que, d'autre part, la
population soit à leur écoute. L'intégration va être
beaucoup plus facile dans le domaine vers lequel on s'en va. Je crois que c'est
très appréciable. Je penserais que ce serait une mesure
très logique de déconcentrer ce phénomène de
logements, parce que cela donnerait la chance à tout le monde de
s'intégrer beaucoup plus facilement.
Mme Lavoie-Roux: Ma question n'était pas dans le sens de
faire une concentration de personnes handicapées à
l'intérieur d'immeubles d'habitation; je suis tout à fait
d'accord avec vous. C'était simplement pour savoir que, si vous en
trouviez plus qu'un à un étage, par exemple, vous y voyez quelque
avantage. Il semble que vous préférez que les normes soient le
plus limitatives possible quant au nombre de logis à l'intérieur
d'un immeuble d'appartements qui soit adapté pour des personnes
handicapées. C'est ce que je crois comprendre.
Merci, M. Lagrange.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Premièrement, une question au ministre. Quand
vous parlez des logements désignés pour les handicapés,
avez-vous eu l'occasion de faire la comparaison avec les normes qui sont
établies en Suède dans les édifices?
M. Lazure: Non, pour être franc, je ne connais pas par
coeur les normes en Suède. Je sais qu'ils en ont beaucoup. Ils ont une
proportion de logements adaptés qui est très
élevée; c'est la plus élevée au monde probablement.
Dans d'autres domaines aussi d'accessibilité aux personnes
handicapées, la Suède est un modèle; tout le monde en
convient, mais je ne connais pas leurs pourcentages.
M. Shaw: Peut-être une deuxième question au
témoin. J'appuie votre position sur une Loi de la canne blanche, mais
vous pouvez aussi constater que cela implique peut-être de nouvelles
constructions pour l'avenir. C'est comme cela que vous parlez, n'est-ce
pas?
M. Lagrange: C'est qu'il y a une Loi de la canne blanche qui a
été adoptée ici au Québec en 1968. A moins que
j'aie mal vu l'affaire ce qui peut arriver je ne crois pas qu'on
y réfère de façon... sauf en ce qui concerne les
prothèses et or-thèses payées par l'assurance-maladie du
Québec... Je me suis demandé s'il ne serait pas judicieux,
à un moment donné, de parler de cette loi, au moins d'en faire
mention pour montrer son existence au point de vue légal.
Si on veut traiter, au sujet des handicapés, d'un mémoire
qui parle de toutes les fonctions que la loi régira, je pense qu'il
serait important, parce qu'il y a à peu près 98% des aveugles qui
se servent de prothèses ou de chiens-guides ou de quoi que ce soit pour
se conduire, et ils utilisent encore des cannes blanches... C'est une chose
importante. Il me semble qu'il faudrait la mentionner, en ce qui me concerne;
je ne sais pas ce que dirait M. le ministre là-dessus.
M. Lazure: M. le Président, j'en ai parlé
tantôt avec les collaborateurs du ministère. Je ne vois aucun
inconvénient, au moins, à mentionner dans le projet de loi 9,
quand il sera amendé, l'existence d'une Loi de la canne blanche. C'est
une loi très sommaire qui a seulement quelques articles et sur laquelle,
apparemment, nous n'avons pas de plainte. On prend bonne note de cette autre
suggestion. Vous êtes aussi le seul à nous avoir fait cette
suggestion. Je pense que c'est positif. On va essayer de trouver un moyen de
faire apparaître cette loi dans le projet de loi 9, au moins de la
reconnaître.
M. Shaw: Je n'ai pas d'autres questions, M. le
Président.
Le Président (M. Marcoux): Je remercie M. Lagrange de la
présentation de son mémoire et d'avoir bien voulu répondre
aux questions des membres de la commission. Tout simplement pour
vérifier, à tout hasard, est-ce que la Ligue des droits de
l'homme, ou est-ce que des représentants de la Ligue des droits de
l'homme seraient présents?
M. Lazure: M. le Président, nous avons eu une
communication téléphonique avec la Ligue des droits de l'homme
à l'heure du midi. C'est à cause des conditions
atmosphériques à Montréal que ces gens n'ont pu se rendre
à Québec. Cependant, la Ligue des droits de l'homme a voulu
informer la commission... Je cite, de mémoire, l'expression de leurs
réactions vis-à-vis des commentaires que j'ai faits mardi dernier
à l'ouverture de la commission. Ils se disent heureux des changements
que nous avons l'intention d'apporter au projet de loi. Ils n'insistent pas
pour venir présenter leur mémoire. Nous en avons pris
connaissance, tous les membres de la commission.
Le Président (M. Marcoux): Je vais d'abord donner la liste
des mémoires que nous entendrons normalement à notre prochaine
séance de jeudi. Je vais vous donner les numéros: 20, 3, 47, 55,
7, 34, 18.
Mme Lavoie-Roux: Sept. Il y en a un qui n'est pas venu.
Le Président (M. Marcoux): Nos audaces d'aujourd'hui nous
permettent d'être optimistes.
M. Lazure: Statistiquement, il y a des chances qu'il en manque
aussi.
Le Président (M. Marcoux): J'inviterais tous les membres
de la commission à être, suivant l'ordre du leader de la Chambre,
présents dès 10 heures jeudi matin, en cette même salle,
pour entendre les mémoires que je vous ai énumérés.
La commission ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la commission à 17 h 54)