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Version préliminaire

43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Wednesday, September 20, 2023 - Vol. 47 N° 20

Special consultations and public hearings on Bill 31, an Act to amend various legislative provisions with respect to housing


Aller directement au contenu du Journal des débats


 

Journal des débats

11 h (version non révisée)

(Onze heures dix-huit minutes)

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'aménagement du territoire ouverte. Je vous souhaite la bienvenue à tout le monde, et juste vérifier vos téléphones cellulaires que le son soit bien fermé.

Alors la commission est réunie aujourd'hui afin de poursuivre les consultations particulières du projet de loi n° 31, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière d'habitationMme la secrétaire, est-ce que nous avons des remplaçants?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Ciccone (Marquette) est remplacé par Mme Caron (La Pinière).

Le Président (M. Schneeberger) : Parfait. Merci beaucoup. Alors, ce matin, nous allons entendre de la ville de Gatineau qui sont avec nous en visioconférence et la Fédération des locataires d'habitations à loyer modique du Québec.

Alors, tout de suite, nous allons du côté de la ville de Gatineau. Alors, bonjour à vous trois! Alors, à tour de rôle, vous présenter avec vos titres et par la suite, vous avez un 10 minutes pour présenter votre mémoire et on poursuivra avec une période d'échange avec les députés. C'est à vous.

Mme Bélisle (France) : Merci, M. le Président. Bonjour, à tous et toutes, mon nom est France Bélisle, je suis la mairesse de Gatineau.

Mme Marchand (Catherine) : Je suis Catherine Marchand, directrice générale adjointe au développement durable à la ville de Gatineau.

M. Bisson (Martin) : Bonjour à tous. Je suis Martin Buisson, conseiller politique au cabinet de la mairesse France Bélisle.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, on écoute votre mémoire.

• (11 h 20) •

Mme Bélisle (France) : Parfait. Alors, merci... du temps que vous accordez à la ville de Gatineau pour qu'on puisse vous présenter une synthèse du mémoire qui vous a été déposé. Je vous félicite aussi, comme membre de la commission, de vous pencher sur cette question extrêmement importante.

Il faut rééquilibrer l'écosystème du logement au Québec. Il y a un lien direct entre la pénurie de logements et les crises que vivent non seulement nos populations vulnérables, mais aussi de plus en plus les gens de la classe moyenne. Il m'apparaît crucial qu'on réalise collectivement que la participation financière des gouvernements fédéral, provinciaux et des villes dans le logement social, ce n'est pas une dépense, mais bien un investissement.

J'ai d'ailleurs la conviction que les solutions à court, à moyen et à long terme ne passent pas uniquement par les mains d'une seule ministre. À notre avis, le projet de loi n° 31 doit être vu comme un point de départ. Accueillons notre responsabilité collective de tous faire partie de la solution. Ne nous voyons pas comme des adversaires, mais bien comme des partenaires pour régler cette crise.

Comme Gatineau est frappée durement par une crise du logement...

Mme Bélisle (France) : ...et vous l'avez certainement vu dans l'actualité récente, une crise aussi de l'itinérance. On vous offre, aujourd'hui, bien humblement d'autres pistes à considérer. Nos propositions sont le fruit de discussions nombreuses avec des partenaires du milieu communautaire, associatif, coopératif mais aussi les gens de l'équipe de la ville de Gatineau. Et je vous dirais aussi politiquement ce qu'on a vécu dans les programmes actuels qui ont été déployés. Les propositions qui sont faites commandent aussi de la part du gouvernement l'ouverture de reconnaître les spécificités régionales. On a formulé 15 recommandations et on les considère, vous le comprendrez bien, tous pertinentes. Par contre, on va s'attarder sur certaines d'entre elles pour être dans le temps qui nous est alloué aujourd'hui.

Avec l'arrivée de divers programmes tant au provincial qu'au fédéral, les villes sont de plus en plus sollicitées pour compléter les montages financiers dans le développement du logement. À cet effet, il serait important d'intégrer des dispositions d'aide complémentaire à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Je vous réfère donc à la recommandation numéro 3 que vous voyez dans notre mémoire. La ville de Gatineau recommande d'intégrer des dispositions d'aide complémentaire à la loi avec l'objectif d'accélérer les appuis des villes à des projets en logement social et communautaire, le tout pour optimiser les processus et surtout diminuer les délais pour les mises en chantier.

L'intégration à la loi de dispositions d'aide complémentaire, ça peut prendre différentes formes : des crédits de taxes, des dons de terrains, des interventions pour les infrastructures ou encore d'autres montants en argent additionnel qui donneraient les coudées franches aux villes pour soutenir le développement, mais aussi ralentir le processus administratif. En fait, je devrais dire ralentir la bureaucratie et accélérer les choses. Ça permettrait aux villes d'éviter l'adoption de règlements discrétionnaires visant l'adoption de programmes d'aide complémentaire. Il s'agit aussi d'une mesure qui accélérerait les choses dans notre administration, ça offrirait aussi une flexibilité d'arriver avec d'autres options.

Je vous donne un exemple concret. Hier soir, au conseil municipal, la ville de Gatineau a donné son appui à près de 886 logements dans le cadre de l'appel de projets du programme PHAQ. Si l'ensemble des projets étaient retenus, et j'espère bien qu'ils le seront, ça représenterait pour la Ville en argent sonnant 45 millions de dollars. C'est beaucoup d'argent et c'est difficile dans le cadre actuel de la situation financière. Faire des changements à l'aide complémentaire, ça nous permet d'intervenir autrement.

Il faut aussi aborder l'enjeu du financement ou du sous-financement pour la décontamination des terrains. À la recommandation 6, on propose une bonification des enveloppes. Dans les villes qui ont un passé industriel, il y a des terrains stratégiques qui ont un passé industriel qui sont lourdement contaminés, et le coût pour les décontaminer vient freiner le développement de projets. C'est majeur et c'est une façon autre d'intervenir.

Troisièmement, il faut améliorer la mécanique entourant la contribution fédérale du logement social et communautaire. À la recommandation 7, la Ville recommande au gouvernement de négocier avec le fédéral un programme autoportant et structurant qui pourrait s'inspirer du programme de la taxe sur l'essence et de la contribution du Québec mieux connue sous le nom de la TECQ.

Quatrièmement, il faut modifier les mesures fiscales en lien avec la taxe de vente du Québec. À la recommandation 10, la Ville de Gatineau recommande que le gouvernement du Québec modifie la Loi sur la taxe de vente du Québec afin que les projets de logements sociaux et communautaires hors marché bénéficient d'un remboursement de TVQ à 100 %.

Enfin, à la recommandation 15, la Ville de Gatineau recommande que le gouvernement du Québec... modifie, pardon, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme afin d'introduire le zonage différencié qui vise à bonifier la densification dans le cadre de projets sociaux et abordables.

J'attire votre attention sur la recommandation 4 et 5 qui touchent le milieu communautaire. Malheureusement, étant donné le sous-financement de nombreux organismes au Québec et plus spécifiquement dans notre région, je vous rappelle que l'Assemblée nationale du Québec a voté à l'unanimité, à l'automne, pour reconnaître qu'il y a un sous-financement en Outaouais, ça devient très difficile pour les organismes communautaires de lever la main et de jouer pleinement leur rôle d'alliés sur le terrain.

Enfin, je me permets aussi de souligner la nécessité d'exempter tous les projets de logements hors marché des processus...

Mme Bélisle (France) : ...d'approbation référendaire et que cette mesure soit inscrite dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Ce sont des projets qu'on veut voir dans notre cour. Alors. Il s'agit de notre recommandation 14.

Il faut aussi raffiner la passerelle entre les interventions sur le terrain faite par les partenaires terrain, souvent du milieu communautaire, et l'offre de soins structurée par le gouvernement du Québec dans le réseau de la santé et des services sociaux.

En conclusion, M. le Président et membres de la Commission, je vous dirais que ne pas agir, c'est appauvrir le Québec, c'est mettre un frein à son développement. Ne pas agir, c'est ne pas pouvoir loger correctement nos étudiants, les travailleurs de demain qui sont si importants dans un contexte de pénurie de main-d'oeuvre. Ne pas agir, c'est refuser de créer des conditions de succès pour les nouveaux arrivants. Ne pas agir, c'est tourner le dos au développement et à l'épanouissement des régions du Québec dans leur développement économique, c'est rendre très difficiles l'attraction et la rétention de talents. Ne pas agir, c'est fragiliser des aînés qui ont pourtant contribué à la société québécoise toute leur vie. Agir en logement, ça doit se faire sur tous les fronts. Agir, c'est offrir aux Québécois, peu importe leur situation, des conditions de succès pour qu'ils contribuent pleinement à la société québécoise. On associe beaucoup la crise du logement à son impact sur les plus vulnérables. Il y a un lien direct avec le social, c'est vrai, mais on parle trop peu du frein au développement économique. Ne pas investir en logement et créer des conditions où les gens paient trop cher pour leur logement, c'est freiner la formation des étudiants qui constituent une relève pour nos entreprises et nos institutions publiques. C'est ne pas pouvoir attirer et retenir de jeunes talents. C'est mettre une pression immense sur des entrepreneurs actuels qui voient leurs employés avoir de la difficulté à joindre les deux bouts, qui viennent faire des demandes pour des hausses salariales et, s'ils ne peuvent pas les offrir, qui voient leurs employés tourner, et ça déstabilise nos entreprises. Ça mine également la compétitivité du Québec à attirer des talents et de l'expertise, d'ailleurs, parce que la disponibilité de logements est souvent un frein pour dire oui. Merci beaucoup de m'avoir écoutée.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, merci beaucoup. Alors, nous allons commencer une période d'échange en commençant du côté... ministériel, pardon, avec la ministre. Alors, Mme la ministre, vous avez la parole pour 16 minutes 30.

Mme Duranceau : Merci, merci. Bonjour, Mme Bélisle, bonjour à toute l'équipe. Merci de prendre le temps de nous donner une perspective de l'ouest du Québec.

Mme Bélisle (France) : Merci, Mme Duranceau.

Mme Duranceau : Alors, je vais aller peut-être un petit peu, là, dans l'ordre de vos recommandations, pas que je veux m'étendre indéfiniment sur la notion de cession de bail, mais je me demandais : Avez-vous des données, vous, empiriques, là, qui vous réconfortent dans votre position à cet égard là? Puis je vous fais le parallèle avec la ville de Longueuil qui a dit : Bien, c'est-tu quoi? Moi, je n'ai pas de données qui me disent que ça va améliorer la situation... ce n'est pas tant la cession de bail que le registre des loyers, là, parce que c'est ça, votre recommandation.

Mme Bélisle (France) : Oui, bien, en fait, je vais fournir une réponse, puis j'inviterais soit M. Bisson, dans mon équipe, ou Mme Marchand à compléter, si vous le voulez bien. Il y a, au-delà de la recommandation à laquelle vous faites référence, Mme Duranceau, une préoccupation chez nous parce que... bien, on a une crise du logement avec un taux d'inoccupation de 0,8 %. On fait aussi partie des villes au Québec qui connaissent une croissance fulgurante. C'est un beau problème. Ça fait donc en sorte qu'on... il y a beaucoup de bail dans l'univers gatinois. C'est aussi, aussi, vous le savez très bien, on l'a mis dans le mémoire, où un quatre et demi, ça coûte le plus cher au Québec.

Alors, pour nous, l'idée d'un registre de loyer, c'est une façon, je dirais, respectueuse d'assurer un prix raisonnable aux loyers, une façon aussi d'être transparente dans une ville qui, comme nous, connaît une croissance particulière. Alors, j'inviterais, là, je ne sais pas si c'est M. Bisson ou M. Marchand... Mme Marchand pardon, qui pourrait compléter ma réponse.

• (11 h 30) •

Mme Marchand (Catherine) : J'ajouterais, Mme la ministre, qu'on n'a pas de données probantes qui permettent de faire le lien directement, mais il faut se rappeler que le logement actuel, c'est là où on trouve le logement abordable. Les logements à Gatineau qui ont été construits avant 2005, qui sont des logements locatifs, c'est là qu'il y a du logement abordable, et donc c'est là où l'écart entre le prix de ces logements-là, souvent occupés depuis longtemps, et le prix du nouveau logement, l'écart est le plus grand. Donc, notre réserve de logements abordables, elle est à l'intérieur...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

Mme Marchand (Catherine) : ...des logements qui sont déjà occupés par des gens, parfois depuis plusieurs années.

Mme Duranceau : O.K. Merci. Ensuite, ça, je suis... la recommandation numéro 3, j'aimerais ça, avoir plus de précisions quand vous dites : Bien, on aimerait ça que les villes soient capables d'avoir des participations, là, au-delà de leur participation financière. Peut-être juste préciser les bloquants puis... pour que je sois capable de bien porter votre message s'il y a lieu.

Mme Bélisle (France) : Martin, est-ce que tu souhaites... M. Bisson.

M. Bisson (Martin) : En fait, Mme la ministre, c'est que ces dispositions-là existent déjà, il y a des possibilités de le faire à l'intérieur de la Loi sur la Société d'habitation du Québec, mais ces dispositions d'aide complémentaire là s'appliquent spécifiquement à des programmes. Donc, il faut adopter, les villes doivent adopter des règlements discrétionnaires, un pour, par exemple, AccèsLogis, un autre pour le FAC, un autre pour les fonds fiscalisés. L'enjeu que ça représente, c'est un enjeu pour les villes d'adopter à chaque fois, à chaque nouveau programme, des dispositions d'aide complémentaire pour les différents programmes qui existent.

Il y a aussi d'autres sources de revenus qui commencent à prendre forme pour le logement social et communautaire. Donc, d'inscrire à l'intérieur de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme des dispositions qui automatiseraient ces aides complémentaires là pour éviter que ce soient des règlements discrétionnaires... Par les villes, c'est-à-dire on l'inscrit dans la loi, au même titre, par exemple, qu'on le fait pour la revitalisation des centres-villes. Il y a une durée de temps qui a été mise. Je pense qu'à l'ensemble du Québec ça pourrait être bénéfique.

Surtout, je prends l'exemple de Mme la mairesse, dans l'appel au projet FAC, la ville de Gatineau, d'ailleurs, a déposé 886 logements. Évidemment, vous comprendrez que, demain matin, mêmes les plus petites villes, c'est un enjeu, de sortir du capital. Donc, c'est de l'automatiser dans le but d'accélérer les mises en chantier.

Mme Duranceau : O.K.. Ça, je vous entends. C'est intéressant. Recommandation numéro 4, là, vous faites référence au groupe de ressources techniques. Pour moi, là, les groupes communautaires qui nous aident, là, dans tout ça, puis qui ont porté ces projets-là depuis AccèsLogis, tu sais, c'est des entreprises d'économie sociale, là, si on veut parler avec le jargon de 2023. Puis que ça soit un GRT, que ça soit un OBNL, que ce soient les offices d'habitation, c'est tout du monde qui est impliqué puis qui contribue, là, puis dont on a besoin. Là, de soutenir spécifiquement... Je pense qu'il y en a qui font très bien, là, puis qui n'ont pas besoin d'aide pour être soutenus puis pour rester en vie. Ceux qui ont actualisé leurs pratiques puis leurs méthodes d'intervention puis de financement, bien, ils réussissent à livrer des super beaux projets.

Alors, qu'est-ce que vous suggérez, là, ici? Une aide spécifique pour ces groupes-là, pour ceux qui n'ont pas actualisé leurs affaires puis qui ont de la difficulté?

Mme Bélisle (France) : Bien, je me permettrais un début de réponse, puis M. Bisson, qui est, au cabinet, la personne qui traite notamment avec les GRT, pourrait compléter. Vous avez raison, Mme Duranceau, l'offre des GRT au Québec, elle est parfois asymétrique. Il y a des GRT, selon les marchés, selon, je vous dirais aussi, la stabilité au sein même de leur organisation, qui sont peut-être plus performants que d'autres. Et ça n'a rien à voir avec la compétence ou le désir d'accomplir des choses, ça a juste à voir... où dans certaines régions, il y a plus de roulement. On le vit, nous, à Gatineau, avec certains de nos GRT.

Alors, y a-t-il lieu de soutenir les GRT dans une forme d'attentes, de standards, de professionnalisation des GRT. Et notre recommandation, elle est un peu dans ce sens-là, pour venir vraiment nous donner des outils à la grandeur du Québec pour avoir des GRT qui sont performants parce qu'ils sont aussi soutenus dans leur développement. Alors, M. Bisson pourrait un petit peu compléter puisqu'il est bien au fait des défis qu'on peut avoir.

M. Bisson (Martin) : Mme la ministre, pour les groupes de ressources techniques, un des enjeux qu'on vit à Gatineau, puis, en fait, qui n'est pas vraiment un enjeu... mais mes gros groupes promoteurs, mes gros groupes sociaux n'ont pas de difficulté à faire lever des 100, des 150 portes, des 200 portes. Là où on identifie un risque, nous, au niveau des GRT, c'est vraiment au niveau des clientèles vulnérables. Par exemple, l'itinérance, les déficiences intellectuelles, c'est des plus petits groupes qui portent ces projets-là, et, souvent, les groupes qui portent ces projets-là, ça n'est pas leur mission première, d'offrir du logement, donc c'est des gens, par exemple... je prends l'exemple de la Maison des apprentis, à Gatineau...

M. Bisson (Martin) : ...qui va accueillir une clientèle de gens avec des déficiences intellectuelles, qui... ce n'est pas dans son «core business», de faire du logement social. Lui, il pense qu'en offrant, en ajoutant cette offre de service là pour sa clientèle, ses usagers, ça va être bénéfique. S'il n'y a pas de plus petits groupes de ressources techniques qui aident ces petits organismes là à les développer, ces petits projets... C'est des petits projets, c'est des 15... Des fois, c'est des maisons de femmes violentées, des 15 portes, des 20 portes. Il y a un ajout à garder «légèreté» pour pouvoir aider ces plus petits groupes là, communautaires, à développer du logement pour des clientèles très spécifiques.

On le vit, nous, dans l'Outaouais. On a un GRT qui se spécialise dans le social. Mais un GRT, c'est un peu comme une entreprise, à la limite, plus tu as un volume, plus tu as des rentrées. Je prends l'exemple de nos GRT, qui font des 15, 20 portes, qui n'ont pas nécessairement les rentrées qu'un 150 portes va donner, ça leur cause des enjeux. Et il y a un risque, à l'intérieur de l'écosystème social, à Gatineau, de perdre, puis je suis convaincu que c'est dans d'autres régions du Québec, la capacité de développer des projets pour les plus petites clientèles ou les clientèles les plus vulnérables.

Mme Duranceau : O.K., je vous entends. Je vous entends. Je vous entends.

Pour ce qui est... Il n'y a pas d'enveloppe, là, au niveau de la recommandation six, au niveau de la décontamination de terrain, il n'y a pas d'enveloppe spécifique qui est dédiée aux villes pour ça? C'est ça que vous me dites?

Mme Bélisle (France) : En fait, il y a parfois des enveloppes de décontamination, je vais dire, dans différents programmes gouvernementaux. Puis Mme Marchand pourrait... Puisqu'elle a une grande expérience à la Ville, pourrait le confirmer.

Mais je me permets de vous donner un exemple. Il y a deux ans, alors que je venais d'être élue, votre collègue M. Girard faisait un peu une tournée des nouveaux maires et mairesses du Québec. Puis j'abordais avec son équipe la question de la décontamination. Et il disait, tu sais : Vous savez, les besoins sont tellement grands qu'on pourrait prendre Gatineau, Québec et Montréal puis ces trois villes là, à elles seules, videraient l'enveloppe.

Alors, il y a des enveloppes qui existent, mais clairement, elles sont insuffisantes.

On a un projet, vous êtes venue à Gatineau pour l'annoncer, un projet, clairement, là, d'une dizaine de logis pour des familles à risque d'itinérance à Gatineau, qu'on appelle le projet Saint-Étienne, qui était complètement bloqué parce qu'il manquait 800 000 $ pour décontaminer le terrain. Et ça, ça aurait fait mourir le projet. C'est la Ville de Gatineau, finalement, qui a voté une aide d'urgence pour venir sauver ce projet-là.

Alors, vous comprenez, dans une ville comme Gatineau, puis il y en a plein, là, des villes au passé industriel à travers le Québec, s'il faut toujours intervenir à coup de 800 000 $ ici et là, on n'a même pas fait d'investissements dans des portes, on est juste en train de gérer des terrains, alors on a besoin d'aide et une meilleure intégration puis une bonification de l'enveloppe de décontamination. Ça viendrait vraiment, vraiment nous aider.

Je dirais aussi que ça fait, à mon avis, écho à ce qui a été déposé par Mme Laforest, d'être capables de revitaliser, de densifier des centres-villes, d'agir là où il y a un passif environnemental. Et, dans ce contexte-là, on devrait bonifier et... bonifier les enveloppes, les augmenter, et être capables de les associer plus directement à des projets de logements sociaux et abordables.

Mais, Mme Marchand, si vous voulez compléter ma réponse avec des exemples plus concrets, administratifs, je l'apprécierais. Merci.

Mme Marchand (Catherine) : Très sommairement, l'enjeu, c'est que les programmes gouvernementaux pour la décontamination ne sont pas dédiés, donc c'est des gens qui soumettent ces appels à projets. Et, comme le disait Mme la mairesse, ces enveloppes-là ne sont pas capables de répondre à l'ampleur des problèmes. Donc, le fait qu'il n'y ait pas d'enveloppe dédiée pour de la décontamination, liée, par exemple, à des projets de logements abordables ou à la construction de logements, fait que tous ces projets-là sont en... toutes ces demandes-là sont en concurrence. Et c'est, je pense, la portée de la demande exprimée par la Ville.

• (11 h 40) •

Mme Duranceau : O.K. Non, je vous entends. Puis je me souviens, dans le projet dont vous parlez, justement, de l'enjeu. Ça fait partie des «blocants», justement, pour les projets d'habitation. Ça fait que... O.K., ça, je vois ça.

L'autre chose, bien, au niveau d'UTILE, on les a rencontrés la semaine dernière, je pense. Effectivement, votre recommandation va dans le sens de ce qu'ils proposaient. Je ne sais pas s'il y a d'autres choses que vous vouliez ajouter à ce sujet-là. Non. O.K.

Peut-être... Je vais vous amener sur le zonage différencié versus le zonage incitatif, qui est déjà prévu par la LAU, là, suite aux modifications qui ont été faites. Puis ma compréhension à moi, c'est...

Mme Duranceau : ...pour reprendre l'expression qui m'a été donnée, c'est comme un peu des poupées russes. Puis le zonage incitatif inclurait le zonage différencié, ça fait que vous auriez déjà les pouvoirs pour faire ça. Alors, si je ne comprends pas comme il faut, expliquez-le-moi.

M. Bisson (Martin) : Bien, en fait, Mme la ministre, vous avez raison que le zonage différencié puis le zonage incitatif peuvent être liés. L'avantage... je prends l'exemple de Gatineau où on a une pénurie de terrains et où les entrepreneurs, les promoteurs communautaires puis le promoteur privé compétitionnent pour le même terrain, avoir une disposition de zonage différenciée au moment de l'achat du terrain parce que le zonage incitatif va nécessiter une approbation du conseil municipal, par exemple, au travers des processus comparativement à un zonage différencié qui l'automatiserait. Donc, au moment de la négociation pour un terrain, par exemple, si un OBNL compétitionne contre le privé dans l'achat d'un terrain, l'avantage d'être capable de faire automatiquement plus de logements qu'avec un zonage incitatif pour lequel il y a un retour au conseil municipal, leur permet d'avoir un avantage d'acquérir des terrains, d'être plus compétitifs par rapport au privé.

Mme Duranceau : Mais là vous dites, vous feriez ça «on the spot», là. Chaque fois qu'il y a une transaction, vous pourriez, pour cette transaction donnée là, modifier le zonage?

M. Bisson (Martin) : Non, il serait inscrit dans les grilles de zonage, c'est-à-dire que le zonage incitatif n'est pas inscrit à l'intérieur de la grille de zonage, Mme Marchand pourrait peut-être me corriger là-dessus, mais le zonage différencié, ce qu'il fait, c'est qu'il est inscrit dans la grille de zonage, c'est-à-dire que, pour un OBNL, c'est automatique qu'il peut faire plus de logements, c'est pas au même sens que le zonage incitatif où il faut que ce soit propre au conseil municipal sur des conditions et il y a de la négociation qui doit être faite avec la ville. Ce que ça fait, le zonage différencié, notre compréhension, c'est que ça automatise cette plus-value au niveau du logement abordable, donc rend nos OBNL plus compétitifs dans un marché où le terrain est quand même assez rare. L'exemple de Gatineau, là, c'est particulier.

Mme Bélisle (France) : Mme Marchand, est-ce que vous souhaitez compléter?

Mme Duranceau : O.K.. Bon, bien, parfait, ça me va. Je vais passer la parole à ma collègue députée de Labelle et adjointe parlementaire.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, députée de Labelle, vous avez la parole pour 1 min 50 s.

Mme Jeannotte : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme la mairesse. Écoutez, moi, je suis impressionnée par votre discours, je vous félicite, parce que vous avez beaucoup parlé d'horizontalité. Vous avez un beau discours qui dit qu'il ne faut pas être adversaires puis qu'il faut être partenaires. Puis les efforts que fait la Ville de Gatineau, je vous salue parce que si toutes les villes en faisaient autant, peut être que... En tout cas, c'est ça, il faut travailler en équipe. Ça fait que félicitations.

Puis l'horizontalité, on est là-dedans, hein? Le Tourisme, avec ma collègue, les Affaires municipales, le Travail, avec M. Boulet, qui va travailler au niveau de la CCQ, France Hélène. Donc, on est vraiment en équipe, puis vous avez raison d'en parler. Puis moi, dans mon comté de Labelle, là, je reconnais les mêmes suggestions que vous faites. Je le vis dans mon comté. Donc, c'est intéressant, là. Toutes vos suggestions aussi, un coup de chapeau à vos suggestions. C'est très intéressant. La TEQ qui pourrait venir, là, aider comme modèle avec nos négociations avec le fédéral, j'aimerais vous entendre là-dessus. Et puis, d'ailleurs, avez-vous interpellé, tant qu'à faire, M. Trudeau qui vous a lancé un coup de... un petit cri, ça ne fait pas longtemps? Donc, je voudrais vous entendre sur la TEQ, s'il vous plaît. Merci.

Mme Bélisle (France) : Bien, M. Trudeau n'est pas loin, hein? Je faisais des blagues que je suis prête à aller chercher un chèque pour le gouvernement du Québec, ça me prend 10 minutes de traverser le pont. Peut-être que Mme Marchand pourrait compléter, mais je vous dirais, sur le plan administratif et politique, la TEQ un programme...

Le Président (M. Schneeberger) : 15 secondes...

Mme Bélisle (France) : ...est un programme duquel on peut s'inspirer. Je pense que, quand on est en politique, on ne veut pas toujours réinventer la roue et cette possibilité-là est intéressante. Alors, Mme Marchand ou Martin, je ne sais pas si vous voulez compléter, voir quels sont les liens, là, qu'on voit ou le potentiel de prendre la TEQ comme un modèle qui pourrait aussi s'appliquer en logement.

Le Président (M. Schneeberger) : Malheureusement, on a plus de temps. Alors, peut-être qu'on pourra revenir avec les oppositions là-dessus. Alors, excusez-moi, il faut faire respecter les minutes pour tout le monde. Alors, nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle avec la députée de Mille-Îles, vous avez 10 min 24s qui vous êtes accordé.

Mme Dufour : Merci, M. le Président. Alors, d'abord, merci, Mme la mairesse et les deux personnes qui vous accompagnent d'être présent avec nous ce matin. Je dois vous dire que j'ai beaucoup... j'ai eu à beaucoup insister pour que vous soyez présents. Je tenais absolument à vous entendre, et après plusieurs refus, heureusement, vous êtes ici, donc je suis très heureuse. Et la raison pourquoi je voulais autant vous entendre, c'est que vous êtes à proximité d'une autre province qui a des règles assez différentes des nôtres par rapport à la construction. Et vous vivez une réalité qui est vraiment distincte du reste du Québec...

Mme Dufour : ...donc vous en parlez dans votre mémoire, c'est fort intéressant.

Avant de rentrer dans les détails, je voudrais juste souligner que j'apprécie d'entendre que le logement social, ce n'est pas une dépense mais que c'est un investissement. On l'a vu avec le sommet de l'itinérance la semaine dernière. Donc, merci d'avoir porté ce bâton de pèlerin là, Mme la mairesse, dans les dernières semaines.

Donc, peut-être venir avec... Justement, on a vu, l'Ontario a annoncé qu'ils allaient aller dans le sens, dans le fond, du fédéral pour leur taxe de vente sur les matériaux de construction, et, dans votre mémoire, vous en parlez, là, en page 11, vous aimeriez que le Québec également, dans le fond, modifie la Loi sur la taxe de vente du Québec pour, dans le fond, exempter les logements sociaux et communautaires. Est-ce que vous pourriez en parler un peu plus? Qu'est-ce que vous pensez que ça aurait comme impact chez vous?

Mme Bélisle (France) : Je vais demander à Martin de compléter la réponse, mais merci de me poser cette question-là. Je vais me permettre de dire quelque chose que j'ai entendu justement au sommet la semaine dernière, vous étiez présente. Quelqu'un a dit : «One size fits all fits nobody», c'est-à-dire que, si on fait du mur-à-mur, on ne répond aux besoins de personne. Et, je veux dire, je suis mairesse, vous êtes députée, vous êtes ministre, c'est vraiment plus simple pour une organisation gouvernementale de faire du mur-à-mur. C'est plus facile pour nous sur le plan administratif, mais ça ne répond pas bien aux besoins. Et la région de l'Outaouais et de Gatineau, elle a, oui, des spécificités régionales. Et je comprends bien que les 1 100 mairies et mairesses au Québec vous diraient qu'ils sont tous spéciaux et uniques, mais, si on veut être capables d'atteindre des résultats, il va falloir faire preuve de souplesse et venir mettre des lunettes. Et vous avez complètement raison. Ce que Gatineau vit, dans sa situation frontalière de pression sur le logement, de... Une couverture pour un itinérant, là, c'est une couverture, qu'il soit l'autre côté du pont ou de ce côté-ci. Alors, ça demande une vision comme ça.

Je vais demander à M. Bisson, dans mon équipe, de vous parler parce qu'il est... c'est lui qui a eu des discussions avec les gens de l'ACQ et de l'APCHQ dans ce dossier de la construction puis il pourrait répondre, là, plus précisément à votre question sur les freins que ça engendre, la situation puis la réglementation actuelles.

M. Bisson (Martin) : Oui, par rapport à la région, notre proximité avec Ottawa, autant au niveau du marché locatif privé que du marché... le hors marché, on a... on compétitionne, Gatineau, avec les entrepreneurs d'Ottawa, même au niveau de la main-d'oeuvre, au niveau des talents. Donc, on a cette compétition-là. Si, par exemple, à Gatineau... Puis souvent Gatineau, par les programmes puis par sa proximité avec Ottawa... Je vais vous donner un exemple. La construction à Gatineau est 17 % plus chère qu'à Montréal. Ça fait qu'on pense souvent que le marché de Montréal, c'est où c'est le plus cher au Québec. Construire à Gatineau, c'est 17 % plus cher, puis il y a un impact qui est directement lié avec l'Ontario.

Quand... En octroyant un crédit de taxe au niveau des... du logement social et communautaire hors marché, ça nous permet d'être un peu plus... d'être plus compétitifs, de baisser nos coûts, évidemment, parce qu'au final c'est au même titre qu'au privé ou au social communautaire, bien, c'est une question de chiffres puis de montage financier.

Dans un exemple, puis même pour le marché locatif privé, si l'Ontario adopte un crédit pour sa TVH, bien, l'impact pour nos entrepreneurs de Gatineau, c'est qu'ils deviennent automatiquement 15 % moins compétitifs que le logement qui se construit l'autre côté de la rivière. Je pense que d'inscrire ça, ça permet une certaine compétitivité puis, dans la relance qu'on vit présentement, ça donne un avantage au logement social et communautaire. C'est-à-dire que le temps que les taux d'intérêt descendent, il y a une possibilité pour le Québec de mettre la pédale au fond pour le logement social et communautaire, ça nous donne cette opportunité-là, le temps que le marché se rééquilibre au niveau du marché locatif privé. Donc, c'est une des avenues que nous, on suggérait.

• (11 h 50) •

On a aussi mis dans notre mémoire le fait que, pour le marché locatif privé, ça pourrait être intéressant de le faire aussi, mais, dans le mémoire, ce qu'on inclut, c'est une notion de le faire dans des axes à haut niveau de service de transport collectif et dans des zones densifiées justement pour qu'à court, moyen, long terme, bien, ça... on puisse avoir un retour sur notre... que le gouvernement puisse avoir un retour sur son investissement.

Mme Dufour : Merci beaucoup. Il y a aussi une autre réalité que vos voisins vivent, c'est l'accès aux sommes du fédéral, avec les... Là, il y a eu une sortie, la semaine dernière, du président de l'Union des municipalités du Québec, est-ce que... qui demandait justement que l'entente soit rapidement signée ou que les villes puissent directement aller chercher les sommes au fédéral. J'ai entendu hier...

Mme Dufour : ...je crois, c'était hier, la ministre qui parlait des conditions qui seraient exigées, mais entre ne pas avoir l'argent et attendre versus on perd du temps, qu'est-ce que vous en pensez? Puis est-ce que vous... est-ce que vous voyez un impact, justement, qu'Ottawa ou... et même Toronto vont... puissent avoir accès à cet argent-là et pas vous?

Mme Bélisle (France) : Je vais répondre, parce que la question est peut-être un petit peu plus politique. J'ai... Tu sais, j'ai le goût de vous dire, là : Moi, au final, ça ne me dérange pas c'est quoi, le système, mais il peut-tu marcher? Tu sais, on peut-tu se parler? On peut-tu faire descendre de l'argent? Il y a quelque chose qui est complètement aberrant de vivre une crise comme on vit, en ce moment, et de savoir que cet argent-là ne descend pas sur le terrain, c'est inacceptable. Alors, moi, j'ai le goût de vous dire, au gouvernement du Québec et au gouvernement fédéral : Assoyez-vous, trouvez une solution puis arrangez-vous pour que ça fonctionne. Moi, que l'argent vienne directement aux villes ou qu'elle transite par Québec, bien franchement, ça m'importe peu. Ce qui m'importe, c'est qu'elle arrive le plus rapidement dans ma ville pour qu'elle arrive le plus rapidement avec une pépine sur un terrain qui va faire du logement pour des gens qui en ont besoin.

Mme Duranceau et moi, on a déjà eu cette discussion-là. Moi, je vais vous dire, je fais peut-être partie des mairesses au Québec qui ont des liens plus étroits avec le gouvernement fédéral à cause, justement, de cette proximité où j'ai la chance de voir des ministres fédéraux. Alors, je pense que tout le monde est plein de bonne volonté, je sais que Mme Duranceau a eu des échanges souvent avec le fédéral à cet égard-là. J'ai le goût un petit peu de vous renvoyer la balle puis de dire : Dites-moi qu'est-ce que ça prend, si vous avez besoin d'aide, je vais aller vous aider.

Mme Dufour : Merci. Merci pour ce... Ça venait du cœur. On parlait aussi de la proximité de l'Ontario, là, c'était intéressant, je trouvais. En page 12, vous parlez de la mobilité des travailleurs de la construction. Puis ça, c'est un enjeu, il y a une pénurie de main-d'oeuvre dans le domaine de la construction. On parle de plus en plus, là, d'avoir des gens issus de l'immigration dans ces domaines spécifiques là. Mais, vous, ce que vous demandez, c'est que les 500 Québécois qui travaillent en Ontario, donc juste l'autre bord de la frontière, puissent venir construire chez vous, puis actuellement ce n'est pas possible. Donc, peut-être vous entendre un peu plus là-dessus, s'il vous plaît.

Mme Bélisle (France) : Martin, veux-tu aborder cette question-là de la mobilité de la main-d'œuvre?

M. Bisson (Martin) : Oui, absolument. Il y a une entente qui existe entre le Québec, l'Ontario et d'autres provinces de l'Atlantique, justement, pour la mobilité de la main-d'œuvre. Un des enjeux particuliers de Gatineau, c'est que... bien, puis du Québec, c'est qu'il y a le système de cartes de compétence. Ce qui arrive à Gatineau, c'est que j'ai des travailleurs qui vont acquérir de l'expérience en Ontario, O.K., qui deviennent des charpentiers-menuisiers, des gens de métiers, qui ne peuvent pas, parce qu'ils n'ont pas de carte de compétence, venir travailler au Québec, sauf si, par exemple, le bassin s'ouvre ou s'ils vont faire des formations professionnelles. Ce qu'on considère qui serait avantageux pour l'Outaouais, ce serait, justement, de décloisonner ça et de permettre à ces travailleurs-là, sous des conditions particulières à l'Outaouais, de pouvoir intégrer le marché de la construction à Gatineau, en Outaouais, pour, justement, là, se donner un avantage ou une chance... une condition de succès additionnelle.

Mme Dufour : Oui, et un des enjeux au Québec, c'est, justement, la multiplication des cartes de compétence. Puis, en Ontario, il y en a beaucoup moins. Donc, est-ce que... Dans le fond, c'est sûr qu'on voit que c'est plus efficace. Est-ce que vous voyez des différences dans les temps de réalisation des chantiers entre Ottawa et chez vous?

M. Bisson (Martin) : Donc, cette question-là particulière, Mme la députée, je ne pourrais pas vous... je ne pourrais pas vous répondre à savoir est-ce que c'est plus vite en Ontario ou au Québec, là. Je pense que chacun des marchés a ses particularités. La façon dont les corps de métier, les inspections sont gérés d'une province à l'autre sont trop différentes, je ne pourrais pas me positionner là-dessus.

Mme Dufour : Parfait. Peut-être un dernier point. Vous demandez, là, un taux d'imposition différencié pour les OBNL, les coopératives d'habitation. Dans le fond, ce qu'on comprend, c'est que, comme ville, vous souhaiteriez pouvoir les aider en les taxant sur un taux différencié que le reste du résidentiel qui se compare actuellement, c'est bien ça?

Mme Bélisle (France) : Oui, martin, tu peux ajouter, mais, en fait, l'idée, c'est ce qu'on entend... Ce qu'on entend beaucoup, c'est la capacité ou l'incapacité, parfois, à faire des réinvestissements ou des investissements pour maintenir l'infrastructure.

Le Président (M. Schneeberger) : En terminant.

Mme Bélisle (France) : Donc, s'il y avait une pression moindre, on fait le pari que les organismes pourraient se garder certaines réserves pour faire un meilleur entretien et donc offrir des logements de meilleure qualité pour les gens.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci beaucoup. Alors, nous allons maintenant du...

Le Président (M. Schneeberger) : ...côté de la deuxième opposition, avec le député de Laurier-Dorion. Vous avez 3 min 28 s.

M. Fontecilla : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Bélisle, Mme Marchand et M. Bisson. Écoutez, je vais y aller tout de suite avec votre première recommandation, là, les cessions de bail, là. Vous ne parlez pas de cession de bail, vous parlez de registre des loyers. Donc, on est forcés de faire, comment dire, un raisonnement mental pour se dire que vous préférez... En fait, c'est la question que je vous pose, là. À la lecture de votre mémoire, on dirait que vous préférez nettement le registre des loyers à la cession de bail, là. Est-ce que c'est ça, votre raisonnement?

Mme Bélisle (France) : Martin, veux-tu parler du débat qu'on a eu là-dessus?

M. Bisson (Martin) : En fait, nous, on voit le registre des loyers comme une mesure de contrôle des loyers, mais la cession de bail comme telle, c'est entre le locateur et le locataire. La ville de Gatineau, elle, n'est pas ni un ni l'autre, O.K. Le registre des loyers, ce qu'on trouve, c'est que c'est une opportunité, à notre avis, d'être moins contraignants autant pour le locataire que le locateur, puis qui permet... Un des avantages, au-delà du contrôle du bail, d'avoir des données, en temps réel, du marché, qui peut... qui... À notre avis, ça, c'est un des avantages d'avoir ces données-là, pour savoir ils se dirigent où vers le marché. Si mon parc de logements abordables a une hausse plus significative, par exemple, que mon marché privé, bien, avec un registre de loyers, nous, on a la prétention que ça nous permettrait, puis ça permettrait au gouvernement de pouvoir ajuster le tir en cours de route, et ne pas se retrouver devant des faits accomplis.

M. Fontecilla : Très bien. Je vais aller sur votre recommandation n° 5, donc : «Intégrer, dans le développement des projets d'habitation pour les clientèles vulnérables, les mises à niveau pérennes et suffisantes des ressources humaines». Et donc vous parlez d'une planification des besoins en santé et services sociaux. Bon, on le sait, on a, tous et toutes, entendu votre cri du cœur, Mme Bélisle, la semaine dernière, concernant l'itinérance et la nécessité absolue de s'attaquer à cette problématique-là. Croyez-vous que, dans l'état actuel des choses, le développement du logement social et communautaire n'est pas assez arrimé à de l'accompagnement, de l'assistance en termes de santé et services sociaux, en particulier pour les populations en situation d'itinérance?

Mme Bélisle (France) : Merci, M. le député, de me poser cette question-là. Je reviens à ce que j'ai dit au début de mon mémoire, où je disais que Mme Duranceau ne pourra pas, seule, porter ce dossier. C'est l'affaire de tous, et c'est l'affaire d'autres ministères et d'autres ministères au gouvernement. Je reviens à votre question. Si on ne voit pas les défis de notre réseau de la santé, si on ne voit pas les défis de notre réseau de services sociaux, si, avec nos CISSS, on n'est pas capables de s'asseoir à la table et d'avoir des discussions productives pour voir comment on passe de l'intervention terrain à la phase soins, bien, on fait juste pomper des millions, et on n'est pas dans une réflexion de solutions du système. Et donc j'ai le goût de vous dire que le succès, par rapport, notamment, à l'itinérance, mais aussi à d'autres personnes vulnérables et fragilisées, il repose aussi, en grande partie, sur notre capacité de travailler en équipe sur tous les fronts.

Le Président (M. Schneeberger) : En terminant.

Mme Bélisle (France) : Alors, la faiblesse ou la force, dans un réseau de santé et de services sociaux efficace, a un impact direct sur les clientèles qu'on essaie d'aider.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci beaucoup pour votre réponse. Alors, nous allons maintenant du côté des Îles-de-la-Madeleine. Alors, vous avez 2 min 38 s, M. le député.

• (12 heures) •

M. Arseneau : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme la mairesse, membres de votre équipe. Je voudrais d'abord saluer la teneur puis l'approche de votre mémoire, qui est... je qualifierais d'humaniste et d'holistique, dans la mesure où on veut aborder les problèmes en collaboration avec les autres, mais de façon globale. Vous parlez de santé, vous parlez de logement, les deux sont interreliés, j'imagine que vous pourriez parler aussi d'environnement, et, sous cet angle-là, je pense que c'est une bonne façon de voir les choses. On voit qu'il y a des recommandations pour soutenir les projets de résidences étudiantes. On a aussi des propositions pour soutenir les organismes communautaires. Vous avez aussi votre rôle à jouer, le gouvernement également. Alors, moi, je trouve que l'approche est très intéressante.

Puis, pour entrer dans le vif du sujet, puisqu'on a peu de temps, j'aimerais savoir... On a beaucoup parlé de cession de bail. Vous refusez de vous prononcer là-dessus, en disant : Ce n'est pas nécessairement l'affaire des villes. Mais sur le registre des loyers, vous prenez position. On est d'accord avec vous. La ministre, hier, a semblé suggérer que ce n'était pas le travail du gouvernement, mais plutôt l'affaire de Vivre en ville ou, même, des villes, si elles voulaient en développer un. Quelle est votre réaction à ce point de vue?...


 
 

12 h (version non révisée)

M. Arseneau : ...votre réaction à ce point de vue?

Mme Bélisle (France) : Nous, on estime qu'un registre des loyers à portée, je vais dire, nationale est intéressant. Il est intéressant pour les locataires, je pense aussi qu'il est intéressant dans la collecte de données pour le gouvernement, autant le gouvernement du Québec que pour les villes. Je ne sais pas quelle serait la bonne solution. Vivre en ville a fait une proposition très intéressante que, nous, on a appuyée par rapport à son registre.

Il y a déjà des mécanismes qui existent entre le gouvernement du Québec et les propriétaires. Je vais prendre par exemple le relevé 31, que les propriétaires doivent faire et doivent fournir à leurs locataires. Est-ce qu'il n'y a pas là une façon d'intégrer une nouvelle donnée ou une nouvelle question qui permettrait de colliger le prix des loyers? Alors, je... moi, je pense que cette idée-là, elle est très intéressante pour protéger les locataires, pour tenir aussi les locataires imputables, mais pour permettre aussi au gouvernement du Québec — puis là, je reviens à mon discours économique — de voir comment ça va dans l'économique de ses régions, de voir quel est le profil ou la pression sur certaines populations et villes du Québec par rapport à d'autres, et ça, c'est très important. Je vous dirais, dans une région comme Gatineau, de façon plus granulaire, et vous le voyez dans le mémoire — je n'en ai pas parlé ici aujourd'hui, parce que vous l'avez sous les yeux — mais on est le logement abordable d'Ottawa. On est la ville au Québec où le quatre et demie coûte le plus cher, mais on est presque 400 $ moins cher que le côté d'Ottawa. Alors, il y a une pression immense.

Donc, ce genre de... En fait, ce registre des loyers permettrait peut-être d'aller chercher de la donnée fine autre que seulement propre au logement, mais pour voir et pour moduler, sur le plan économique, qu'est-ce que ça donne dans une population.

M. Arseneau : Merci beaucoup.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci, Mme la mairesse. Alors, merci pour votre précieuse contribution à nos travaux.

Alors, nous allons suspendre quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place. Bonne journée.

Mme Bélisle (France) : Merci, merci à vous.

(Suspension de la séance à 12 h 04)

(Reprise à 12 h 06)

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, nous reprenons la séance. Alors, je souhaite la bienvenue à la Fédération des locataires d'habitations à loyer modique du Québec. Alors, bonjour à vous quatre...

Le Président (M. Schneeberger) : ...bonjour à vous quatre. Alors, dans un premier temps, peut-être juste vous présenter très rapidement, parce que c'est à l'intérieur du 10 minutes qui vous est consacré pour présenter votre mémoire. Alors, je vous laisse la parole.

M. Dubé (Yves) : ...je vais vous présenter les des membres qui sont avec moi. J'ai la vice-présidente, Mme Marie-France Poirier, organisatrice communautaire, Patricia Viannay, notre trésorier, M. Lucien Dionne, et moi-même, le président, Yves Dubé. Alors, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, bonjour. Les présentations sont faites, alors je vais passer à un petit topo de la fédération. Alors, bien, en premier lieu, au nom de la fédération, je tiens à vous remercier pour l'invitation à participer à cette commission parlementaire. La fédération a toujours été une force de proposition et nous sommes contents de pouvoir contribuer avec nos commentaires à l'avancement du droit au logement au Québec.

Il y a 30 ans, la fédération voyait le jour et, aujourd'hui, elle parle au nom de 65 millions de ménages administrés par les 149 offices d'habitation du Québec. Elle regroupe près de 300 associations de locataires et une centaine de comités consultatifs de résidents répartis sur tout le territoire. Depuis sa fondation, notre fédération se soucie d'assurer la bonne gestion et la pérennité du parc de logements publics au Québec, notamment en favorisant l'implication des locataires à la gestion de leur office d'habitation. La fédération est dirigée par un conseil d'administration composé de 18 locataires représentant les différentes régions du Québec.

D'entrée de jeu, ici, il est important pour nous de préciser que nous n'interviendrons pas sur la modification proposée par la ministre concernant la cession de bail et le fonctionnement du Tribunal administratif du logement. Cependant, nous attirons votre attention sur des sujets qui sont très importants pour la fédération et les 65 000 familles que nous représentons. En premier lieu, la préservation du parc immobilier HLM, un patrimoine collectif de plus de 30 milliards de dollars. Ensuite, nous proposerons des solutions à la crise du logement grâce à un nouveau programme HLM et à des mesures législatives pour augmenter l'offre de logements. Finalement, nous aborderons des articles sur la gouvernance des offices. Et, sur ces quelques mots, je vais céder la parole à Patricia Viannay, qui va développer davantage sur le contexte et notre amendement à l'article 19 de la loi 31. Merci.

Mme Viannay (Patricia) : Merci. Donc, en effet, nous, à la fédération, bien, vous l'avez vu à la lecture de notre mémoire, on a choisi de se concentrer sur les articles 19 et 22 directement en lien avec le parc HLM, la gouvernance des offices, et je vous dirais en particulier l'article 19. C'est l'article, donc, qui ouvre la possibilité, en cas d'aliénation d'un immeuble ou d'un terrain, que le produit de cette aliénation serve à reconstruire du logement HLM ou du logement abordable. Donc, c'est plus sur le coût du logement abordable qu'on souhaiterait intervenir. C'est sûr que la vente de HLM, la démolition, la reconstruction, c'est encore quelque chose qui se fait rarement. C'est déjà possible, ça se fait à certaines conditions, c'est encore rare. On lit aussi dans les programmes gouvernementaux que ça ne semble pas être l'intention de diminuer le nombre de logements HLM. On n'a pas l'intention d'en vendre. On l'a bien lu, on aimerait ça, le lire dans la loi aussi. En fait, finalement, c'est ça, notre point.

• (12 h 10) •

Pourquoi on trouve que c'est important que ce soit enchâssé dans la loi et dans l'article 19 actuellement? C'est parce que, bien, la crise du logement a fini par nous rattraper, on ne voudrait pas que le contexte qu'on vit en ce moment en HLM finisse aussi par nous rattraper. Qu'est-ce que j'entends par le contexte HLM? Bien, sans surprise, l'état du parc. On a beaucoup échangé avec le gouvernement à la fédération sur l'état du parc. On sait, on partage tous le fait qu'il y a d'énormes défis à relever par les offices. On a applaudi le programme de rénovation HLM au mois de juin. On est rassurés que le 2,2 milliards soit consacré à ce programme-là, puis on y voit des opportunités de rénovation ou modernisation. On le voit. Mais, la réalité étant ce qu'elle est, le programme va aussi permettre, dans des conditions particulières, de vendre ou de démolir pour reconstruire, tu sais. Puis démolir pour reconstruire... tu sais, démolir, c'est plus facile que reconstruire. Donc, c'est ça qu'on veut vraiment préciser avec l'article 19. Un autre élément du contexte qu'on ne peut pas passer sous silence, c'est, bien, l'appétit plus ou moins grand, hein, des administrations, des...

Mme Viannay (Patricia) : ...d'investir dans le logement social. ODonc, on l'a vu, puis je n'irai pas dans les détails des exemples, mais on peut citer des municipalités qui ont fait le choix de ne pas entretenir leurs parcs HLM et qui ont fait le choix de vendre ensuite, une fois qu'ils étaient barricadés, pour faire place à des condos. Dans certains cas, les locataires ont réussi à bloquer ce mauvais projet. Dans d'autres cas, ils n'ont pas réussi. Donc, ça pourrait être ça, tu sais, c'est ça, le contexte HLM, qui nous dit : On ne peut pas laisser ça ouvert, ah oui, on va démolir, on va reconstruire en HLM ou en logement abordable. Ce n'est pas juste une question de sémantique.

Vous savez ce qu'on pense du logement abordable à la Fédération des locataires de HLM. Ça ne répond pas aux mêmes besoins que les HLM, pas juste en termes de coûts de loyer, mais aussi qui accède au logement abordable. On a fait les vérifications, à date, le Programme de logement abordable ne prévoit pas que la partie abordable soit attribuée en fonction des règlements d'attribution des offices. Donc, ce n'est pas les gens qui sont sur les listes d'attente des offices qui iront dans le logement abordable.

C'est pour ça qu'on propose une reformulation de l'article 19, pour s'assurer que, si c'est l'intention du gouvernement de sauvegarder le parc, de ne perdre aucun HLM, il faut que l'article garantisse que toute démolition entraînera une reconstruction égale ou supérieure en logements à loyer modique, et non pas abordables, et avec l'assentiment des locataires, parce qu'ils ont leur mot à dire, ils sont impliqués dans la gestion, et on veut qu'ils sont impliqués dans ces réflexions-là.

Donc c'est vraiment le cœur de nos changements, l'article 19. Il y a quelques éléments sur la gouvernance des offices qu'on trouve intéressants dans le projet de loi, donc, je vais laisser M. Dionne les préciser.

M. Dionne (Lucien) : Merci, Mme Viannay. Le premier article, l'article 20, qui réfère à l'article de la loi de la CHQ 85.1, on attire votre attention sur l'énoncé suivant : «Les dispositions de la présente section s'appliquent à un organisme d'habitation qui est un organisme sans but lucratif.» Nous autres, on voudrait qu'on insère après qui est», à ce moment-là, «ou un organisme sans but lucratif». Ça donnerait l'occasion, à ce moment-là, d'éclaircir que la loi s'applique également à l'office d'habitation.

L'article 21, lui, concerne la période de mise en tutelle. Alors, on est d'accord avec l'article 21, qui prescrit, à ce moment-là, de passer d'une période de trois mois à une période de 12 mois, de façon à éviter des mandats répétitifs.

L'article 22, qui concerne la période d'inhabilité à siéger, on est d'accord pour une période de trois ans. Cet article-là modifie l'article 85.5 de la CHQ, qui, lui, est imprécis à cet effet.

On aimerait, par contre... L'article 41 du code de déontologie des administrateurs, que ça devrait être la même durée aussi, de façon à demeurer cohérent entre les articles. J'ai terminé. Je passe la parole à notre vice-présidente.

Mme Poirier (Marie-France) : Merci, M. Dion. La crise du logement, la solution, c'est vraiment les HLM. Nous avons des propositions pour cette crise. La... voyons, la colocation entre les locataires peut être proposée, donner le pouvoir aux offices de construire des HLM, les moyens. C'est pourquoi on veut un nouveau programme. En conclusion, le 80-20 pour relancer la construction, c'est un must pour contrer et relancer. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, merci pour votre présentation. Nous allons débuter une période d'échange avec... du côté ministériel, avec Mme la ministre. Vous avez un 16min 30s.

Mme Duranceau : Parfait. Merci. Bien, merci de vous être déplacés pour nous rencontrer. Ça ne fait pas tellement longtemps qu'on s'est rencontrés, mais là on est précisément sur ce sujet-là du projet de loi. Merci bien.

Je comprends vos modifications. Je trouve que vos propositions sont très pertinentes, puis, clairement, l'idée ce n'est pas de réduire le nombre de logements sociaux. Ça fait que, sur ça, je peux vous rassurer d'emblée. Je pourrais... Ça fait que, sur les modifications techniques, là, j'ai bien compris, puis on va les analyser, puis on pourra en reparler en temps et lieu.

Peut-être, on en a parlé brièvement quand on s'est vu l'autre fois, mais tout l'enjeu de colocation, j'aimerais ça qu'on aille un peu plus dans le détail sur cette question-là, colocation à l'intérieur des HLM, pour le bénéfice de tout le monde, puis qu'on voit comment on peut bonifier ça, puis aussi l'impact que ça peut avoir sur les listes d'attente, puis le respect...

Mme Duranceau : ... de la liste d'attente. Ça fait que je vous écoute.

Mme Viannay (Patricia) : Donc, le règlement actuel, vous savez, en HLM, bon, il y a le règlement d'attribution pour entrer dans les HLM et le règlement ne permet pas actuellement à des gens qui ne font pas partie d'une même famille d'habiter un même logement, à moins que la personne soit reconnue comme aidante naturelle. Mais c'est... on parle de logement. La volonté du législateur, à l'époque, j'imagine, on parle de logements familiaux, puis l'intention, c'était vraiment que ces logements soient réservés à la cellule familiale.

Actuellement, ce qu'on constate, c'est qu'il y a à peu près 10 % du parc HLM qui est en sous-occupation. Donc, on parle quand même de plusieurs milliers de logements. Il y a plusieurs raisons. Il y a des... Ça dépend vraiment de la demande, évidemment, mais l'essentiel des situations de sous occupation qu'on retrouve, ça va être, par exemple, souvent une femme qui va avoir élevé sa famille dans son logement en région. Pourquoi dans les plus petits centres? Parce que c'est là où il y a... où l'offre est la moins diversifiée, finalement. On connaît qu'il y a des immeubles, c'est 10 logements, c'est toute la même taille, ou 20 logements, c'est tous les mêmes, le même modèle. Donc, cette personne-là, elle a le droit au maintien dans les lieux, évidemment, elle a encore besoin de son HLM. Mais l'office ne peut pas lui offrir de logement adapté à sa taille. Elle voudrait avoir un trois et demi, mais il n'y en a juste pas, de trois et demi dans la région, donc elle reste dans un quatre, voire dans un cinq et demi. C'est des situations... ça, c'est un exemple de sous occupation.

À Montréal, ça va être une autre raison. Par exemple, il y a des immeubles qui ont été construits avec à chaque bout du corridor des quatre et demi, puis c'est des immeubles qui sont destinés à des personnes âgées. Mais le niveau de revenu actuel ne permet pas à deux personnes âgées de cohabiter. Ils ne sont pas éligibles, ils dépassent les revenus. Donc, on a beaucoup de difficulté à louer certains quatre et demi dans des résidences personnes âgées à Montréal. Donc, on comprend pourquoi ces logements sont vides. Il y a des raisons de programme, de règlement, mais là, les locataires... vous savez, nous, quand on disait qu'on a une force de proposition, c'est venu des locataires, c'est les locataires qui ont dit : Ben nous, on pourrait louer, on pourrait partager ces logements-là...

Mme Duranceau : ...vous interrompre. Est-ce que c'est un enjeu au niveau des règlements du côté HLM ou c'est au niveau de la loi sur la sécurité sociale ou...

Mme Viannay (Patricia) : Non. Là, c'est vraiment le règlement d'attribution qui ne permet pas la colocation. C'est ça qu'il faudrait changer. C'est sûr qu'il y aura des arrimages à faire, parce qu'on sait que, quand il y a partage de logement, ça peut avoir un impact de revenus, un impact sur le revenu en termes de sécurité sociale, la sécurité... le soutien au revenu.

Mme Duranceau : ...

Mme Viannay (Patricia) : Tout à fait. Mais c'est pour ça que nous, on l'amène comme, regardez, il y a 10 % du parc qui est en sous occupation. Il y a aussi 10 % du parc qui est en suroccupation. Mais ce 10 % du parc en sous occupation, il y a des locataires à notre congrès qui ont levé la main, qui ont dit : Mais moi, j'ai des voisins, voisines, ça fait cinq ans qu'ils attendent sur la liste. J'ai un cinq et demi. Je pourrais partager avec eux, donc, mais le règlement ne le permet pas actuellement. Donc, c'est un chantier qu'on pense qu'il faut qu'on travaille ensemble. Il y a quelque chose là, il faut le penser. Il faut que ce soit sur une base volontaire, parce qu'on sait que la cohabitation, on ne veut pas que ça finisse par entraîner d'autres problèmes de vivre ensemble. Donc, c'est un chantier à entreprendre ensemble, mais on y voit au moins une partie de la solution pour loger certaines personnes, en effet, sur les listes d'attente.

Mme Duranceau : Parfait. Je pense, je vais passer la parole à ma collègue de Labelle.

Le Président (M. Schneeberger) : Députée... députée de Labelle? Oui. Allez-y.

Mme Jeannotte : Oui, merci, M. le Président. Dans le fond, j'aimerais vous entendre, parce que vous proposez également, là, que vous seriez capables, dans le fond, de gérer un programme vous-même, c'est ce que je comprends dans une des propositions.

• (12 h 20) •

Mme Viannay (Patricia) : On n'avait pas tout à fait cette ambition, pour être honnête. Non, en fait, le programme qu'on propose, le 80-20, donc, pour nous, pour nous, le logement social, le logement public, c'est une mission du gouvernement. Ça fait... on veut... on a le droit au logement. On reconnaît l'importance du droit au logement au Québec, qu'il soit dans les textes de loi ou pas, là, à la commission ici, on veut tous ce que tout le monde ait un toit sur la tête. On reconnaît de droit là.

Puis, pour certains ménages, les moins fortunés ou les gens qui vivent de la discrimination dans l'accès au logement, c'est le logement public qui permet ceci, ou le logement social et communautaire. Donc, nous, c'est sûr que pour... on mise sur le logement public, il y a des administrations en place, il y a des offices, il y a des locataires impliqués. Les offices sont en lien avec les municipalités. Donc, on y voit... on voit les offices, puis on pense, tu sais, avec la tournée qu'on voit actuellement sur l'optimisation du réseau, qu'on partage ça avec le gouvernement, les offices pourraient développer et gérer les HLM.

Mme Jeannotte : Oui, c'est plutôt ça, dans le fond.

Mme Viannay (Patricia) : Dans le fond, nous, c'est un programme gouvernemental. Ça reste un programme...

Mme Jeannotte : ...est ce que vous pourriez expliquer comment les offices pourraient s'y prendre?

Mme Viannay (Patricia) : C'est ça. Donc, l'idée, en fait, puis ça, c'est des... en tout cas, on est dans différents groupes de travail, de réflexion, on n'a pas pensé ça tout seul, on l'a déjà même discuté un petit peu avec les SHQ, l'idée, en fait, c'est que ce qui était reproché au programme HLM, c'était ses coûts sur le long terme. Des engagements à 35, 45 ans qui engageaient les municipalités et les gouvernements sur du long terme, tout ça. Puis ça, on l'a entendu, on l'entend tout le temps, c'est un enjeu. Donc, on a essayé de penser déjà à un programme qui serait plus à un coût à court terme élevé. Je ne dis pas le contraire, on le sait que ça coûte cher pour faire du logement social. Les premières fois qu'on parlait de ça, on était à 250 000, 300 000 la porte, je pense qu'on est rendu pas mal à 400 000 la porte. Donc, tu sais, on ne nie pas que c'est un investissement qui va coûter de l'argent, mais il va être à court terme, il va être prévisible. 80 %-20 %, pour nous, c'est 80 %, c'est de l'argent gouvernemental, 20 %, c'est la contribution des municipalités. Je sais qu'en ce moment, on le pense plus 10 % quand on pense le programme HLM. 20 % des municipalités, ce n'est pas forcément un chèque, c'est des terrains. Il y en a plein de terrains à développer. On sait qu'on entend tout le temps qu'on manque de terrains, mais il y en a des terrains qui ne sont pas développables parce qu'il faudrait changer la Loi des cités et villes, par exemple. Mais les offices ont des terrains qu'ils pourraient densifier, qui sont des terrains municipaux. Donc, on pense qu'il y a une contribution de commissaire municipale qui pourrait être de l'ordre de 20 %.

Pourquoi ça serait géré par les offices? Parce qu'on veut absolument vider cette liste. On veut s'assurer que les locataires qui bénéficient de ces investissements, ce soit ceux qui en ont le plus besoin, c'est ceux qui sont à plus faible revenu et ceux qui vivent toutes sortes de discrimination quand ils appliquent dans du logement puis les HLM, on ne vit pas ça. Les offices justement règlent ce problème-là. On dit 80 % d'attribution selon le règlement, 20 % selon les besoins municipaux. Parce qu'après tout, c'est vrai que c'est une contribution municipale. Peut-être que dans certaines municipalités, il y aurait un 20 % qui pourrait servir à d'autres besoins. On le voit maintenant, on est obligé de faire des décrets pour dire : Bien, telle municipalité peut augmenter un petit peu son plafond de revenus parce que ça correspond mieux à sa réalité locale, bien, on pourrait le prévoir dans le programme d'avance. C'est sûr que les offices, comme les grandes villes, Montréal, qui ont des listes d'attente interminables, il y a des chances qu'ils utilisent 100 % de leur logement pour vider leur liste, mais il y aurait cette flexibilité-là dans le nouveau programme HLM qu'on voudrait.

Mme Jeannotte : Puis, peut-être, si j'ai encore du temps, est-ce qu'il y a une différence dans ce que vous venez d'expliquer et une deuxième génération de HLM, là, que vous verriez?

Mme Viannay (Patricia) : Pour nous, c'est ça, la deuxième génération? Puis pourquoi on dit deuxième génération? Parce qu'on va apprendre de nos erreurs passées. Entre autres, on pense, tu sais, à des immeubles multigénérationnels, on l'entend beaucoup, c'est une demande qu'on entend beaucoup dans le milieu. Les gens veulent rester dans leur milieu. Il y a toutes sortes d'entraide qui se fait. C'est un exemple, tu sais, de pourquoi on parle de nouvelle génération.

Mme Jeannotte : Est-ce que les loyers seraient encore toutes sortes de grandeurs ou avez-vous réfléchi aussi à ça? Non.

Mme Viannay (Patricia) : Bien, oui... Non, on fait le lien entre un programme 80 %-20 % HLM et le programme PSL, c'est sûr. On veut que les loyers soient à 25 % des revenus. Il n'y a pas de marge de manœuvre budgétaire, malheureusement, dans les ménages avec qui on travaille. Donc, il faudrait que ce ne soit pas abordable, mais à 25 % des revenus.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci. Alors, nous retournons du côté de la ministre. Mme la ministre, c'est à vous.

Mme Duranceau : Oui. Vous mentionnez être d'accord, dans votre mémoire, là, avec la prolongation des délais pour les administrations provisoires. Moi, je vais vous avouer, ça me décourage toujours quand j'ai ça sur mon bureau à approuver, là, je vais les avoir dans une fréquence un peu moins élevée. Mais je voulais vous entendre, je pense qu'à l'égard des offices d'habitation, ce n'est pas applicable, c'est à l'égard des OBNL qui s'occupent des HLM privés, disons, là, ceux qu'on qualifie de HLM privés parce qu'ils sont sous un OBNL. Quelle est votre perspective sur ça, sur le mode de gestion, justement, au niveau des OBNL dans ce contexte-là, versus peut-être les offices d'habitation? Avez-vous des recommandations à formuler?

Mme Viannay (Patricia) : Bien, j'aurais tendance à laisser ça au regroupement des OSBL en habitation.

Mme Duranceau : Vous être bien placée pour commenter.

Mme Viannay (Patricia) : Bien, en fait, on connaît bien le programme HLM. Tu sais, à Ottawa, quand le programme a été pensé, on sait comment il fonctionne, le déficit d'exploitation, les règles... tu sais, toutes les règles d'attribution, ça, c'est pareil, mais la gestion est complètement différente, après, quand c'est un office et quand c'est un OBNL. Un OBNL, on parle vraiment d'un conseil d'administration autonome qui gère ces logements-là. Nous, la beauté, je vous dirais... en tout cas, je pense, les deux répondent à des besoins différents. L'avantage du HLM public, c'est son volume, mais c'est aussi l'implication des locataires dans...

Mme Viannay (Patricia) : ...dans la gestion, je vous dirais. C'est là, nous, qu'on voit la principale différence. L'implication des locataires dans la gestion, quand le HLM, il est public, géré par l'office, bien, l'implication, elle est structurée, elle fait même partie de la loi, maintenant, de la SHQ, elle fait partie du guide de gestion, c'est un chapitre au complet, et ça fait toute une différence. Les locataires sont sur le conseil d'administration. Je sais que sur les OSBL aussi, là, il y a des sièges réservés aux administrateurs. Mais c'est pas facile d'être un administrateur locataire autour, tu sais, quand on gère des HLM. Mais là, en HLM, les administrateurs, ils ont l'appui d'un comité consultatif des résidents. C'est une obligation du gouvernement d'avoir un... imposée par la SHQ, d'avoir des comités consultatifs. Il y a des associations locales.

Donc, il y a toute une prise en charge dans les HLM qui est peu connue. Tu sais, on pense plus... HLM, on ne pense pas prise en charge. On pense prise en charge quand on pense coop, mais on n'y pense pas en HLM. Mais pour avoir travaillé dans toutes les tenures, je peux vous dire que, dans les HLM, il y a une implication qui est énorme, qui fait une différence et qui rend selon nous les offices pas mal plus intelligents, pas mal plus flexibles dans leur gestion, parce que les locataires apportent des idées. Puis on pourrait en parler longtemps. Les locataires ont toutes sortes de propositions, même pour peut-être diminuer le déficit d'exploitation parce qu'ils disent : Bien, nous, il y a une partie des jobs qu'on pourrait faire. Il y a énormément de choses qui se font bénévolement, que si on allait chercher que des intervenants et intervenants de milieux pour faire ce qu'ils font sur le terrain, ça coûterait pas mal plus cher. Donc, en termes de gestion, nous, on trouve que la place centrale que prennent de plus en plus les locataires, c'est une bonne garantie aussi d'une bonne gestion.

Mme Duranceau : Parfait. Merci. Puis, au niveau des listes, évidemment, on parle toujours de la liste d'attente, là, des HLM, puis il faut effectivement que ça diminue. C'est quoi, votre perspective sur la gestion de ces listes-là? Êtes-vous confiants qu'on a les bons chiffres, confiants qu'outre le fait qu'il faut construire plus, la gestion, l'attribution, avez-vous des recommandations à faire sur ça?

Mme Viannay (Patricia) : Bien, la liste d'attente, tu sais... puis on le sait qu'il y a des travaux en ce moment, on pourra revérifier si toutes les personnes qui sont sur les listes sont bel et bien en attente. Moi, je vous dirais qu'il y en a plus qui ne sont pas sur les listes qui ont besoin d'un HLM, qu'il y en a sur les listes qui n'en ont plus besoin. On peut les faire, les appels, mais combien? Il y en a qui vont dire : Ah non, moi, ça ne m'intéresse plus, un HLM, si on le rejoint. Parce que c'est une chose de vider la liste, parce qu'on n'a pas rejoint la personne, c'est une chose de vider la liste parce qu'elle nous a confirmé qu'elle n'en avait plus besoin. Si on se fie aux besoins en logement, la liste, elle, sous-estime les besoins.

Après, en termes de gestion de liste, c'est sûr que mettre de l'énergie pour gérer une liste ne nous semble pas le meilleur choix. Tu sais, si on veut mettre de l'énergie, ce que nous, les locataires nous disent, c'est qu'ils veulent que quelqu'un réponde au téléphone quand ils appellent, ils veulent quelqu'un sur le terrain. Puis les offices ont des budgets limités, donc plus ils mettront d'énergie à gérer la liste, moins ils en mettront à parler aux locataires qui sont déjà en place. Dans la gestion de la demande de logement social, c'est sûr qu'on trouve intéressant, par contre, de fusionner les listes des différentes tenures, parce que c'est là où, des fois, les locataires, c'est moins clair pour eux. Ils ont appliqué dans un OBNL, puis ils croient qu'ils sont sur la liste de logement social, mais, en fait, ils ne sont pas sur la liste de l'office, ou inversement, ils ont appliqué à l'office puis ils ne comprennent pas pourquoi ils n'ont jamais été appelés par le nouvel OBNL. Donc ça, ça peut être... pour les besoins des locataires, ça pourrait être quelque chose...

Mme Duranceau : Un guichet...

Mme Viannay (Patricia) : Un guichet.

Mme Duranceau : ...un guichet unique, peut-être, là, à imaginer. O.K. Parfait. Bien, écoutez, c'est bon, moi ça fait le tour de mes questions. Merci beaucoup.

Le Président (M. Schneeberger) : ...alors, nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle avec 10 minutes 24, Mme. Députée de Mille-Îles, c'est à vous.

• (12 h 30) •

Mme Dufour : Merci, M. le Président, et merci à vous tous d'être ici ce matin, en personne en plus, vraiment un grand plaisir. Et désolée, là, j'ai dû m'absenter juste au début de votre présentation. Par contre, j'ai pris connaissance de votre mémoire entièrement avant. Peut-être, juste préciser que ça fait quand même longtemps que ça se parle de faire un registre central de listes d'attente. Donc, ce n'est pas une nouvelle idée, je pense que vous en avez déjà parlé. Ça a été demandé, là, par les milieux il y a quand même plusieurs années... encore espérer que ça puisse se faire. Parce qu'effectivement, moi, les échos que j'ai sur le terrain, c'est la même chose, c'est que les gens ne s'inscrivent plus sur la liste compte tenu des délais qu'ils voient des gens qui sont déjà sur la liste et qui attendent depuis sept, huit, neuf ans. Donc, donc voilà.

Je vais venir peut-être à votre proposition. Vous parliez, ça, je trouvais ça assez intéressant, bon, le nouveau programme de HLM, vous en avez évoqué un peu avec la ministre, mais c'est en page 7, voilà, et vous parlez, dans le fond, qu'actuellement...


 
 

12 h 30 (version non révisée)

Mme Dufour : ...Les offices d'habitation qui souhaitent faire du développement de nouveaux logements sociaux doivent créer un genre d'OBNL pour être capables de le faire. Puis il y a un groupe qui nous a parlé de ça, c'est, je crois, hier aussi, c'était, je crois, la CMM qui parlait de ça, et... sinon, c'était l'UMQ, mais il me semble, c'est la CMM, puis il demandait un peu sensiblement ce que... j'ai l'impression que c'est la même chose. Vous dites que «la loi de la SHQ doit cesser de cantonner les offices d'habitation au simple rôle de gestionnaire d'immeubles». Et on sait qu'il y a quand même une bonne... Comment dire, une bonne expertise dans les offices. Il y en a qui sont très professionnalisés et qui seraient en mesure de faire du développement, qui le font d'ailleurs, mais par l'entremise, comme vous dites, d'un OBNL. Donc, peut-être vous entendre un peu plus davantage sur qu'est-ce qu'il faudrait qui soit modifié pour ouvrir ça un peu?

Mme Viannay (Patricia) : En fait, actuellement, en effet, il y a quelques offices qui ont fait le choix de développer. Tu sais, ce n'est pas tous les offices, mais il y en a. Sauf qu'il n'y a pas de programme dédié aux offices, tu sais. Le programme HLM, anciennement, comme on le connaissait, lancé par le fédéral, il était pensé pour les offices, puis la loi encadre comment les offices, ensuite, gèrent les immeubles.

Là, maintenant, si un office, il veut développer du logement social, il doit y aller avec les programmes existants. Déjà, un office ne peut pas emprunter par lui-même, tu sais, il ne peut pas... C'est ça, il est lié par la loi, donc il y a des choses qu'il ne peut pas faire. Donc, il ne peut pas se... Dégager lui-même ses propres fonds. Donc, il y a ça, c'est un problème.

Puis, dans les programmes actuels, tous ceux qui ont déposé actuellement, que ce soit anciennement AccèsLogis, le PHAQ maintenant, le programme n'est pas autoporteur, il n'arrive pas à couvrir l'ensemble des coûts. Donc là, les offices qui arrivent à construire font... Mixent toutes sortes de programmes pour que ça sorte de terre, sont obligés de mélanger toutes sortes de programmes, sont obligés, tu sais, avec les fonds fiscalisés, d'aller chercher des entrants, d'aller chercher... Et ça, ils ne peuvent pas le faire, la loi ne le permet pas.

Donc, ils le... pour le faire, il faut qu'ils créent un apparenté, un OBNL, qui, lui, même s'il reste... a... Peut faire ça. Donc là, ça multiplie les structures de gestion, parce que c'est les mêmes salariés, c'est le même monde, mais qui sont à l'office ou dans une structure apparentée. Puis là... Donc ça, ça rend le développement possible, mais ça le complique énormément. Il faut être une structure solide pour commencer à embarquer dans ce genre de développement.

Donc, tu sais, si on veut que les offices aient les coudées franches, vraiment, pour développer, bien, il faut leur donner les coudées franches en, peut-être, assouplissant les choses qu'actuellement ils ne peuvent pas faire, soit par la loi de la SHQ, soit dans la loi des cités et villes aussi, là, qui les restreint de toutes sortes de manières quand ils vont... quand ils doivent faire affaire, afin qu'ils puissent vraiment être des outils de développement.

Mme Dufour : Le groupe que je vous parlais nous parlait aussi des conditions d'appel d'offres qui étaient plus complexes versus un groupe privé qui part et qui va en construction, par exemple. Et donc ça rendait les délais plus longs, de construction, notamment. Donc...

Mme Viannay (Patricia) : C'est en lien avec la loi des cités et villes, notamment, oui.

Mme Dufour : Exact. Et là, vous parlez d'une formule de prêt sans intérêt, peut-être même utiliser l'équité des HLM. Vous avez sûrement entendu parler de plancher, là, ça se discute pour les... Je crois que c'est les OBNL en habitation. Donc, de plus en plus de groupes, UTILE aussi fait ça, donc, vont chercher de l'équité sur les immeubles existants. Mais dans le cas des HLM, j'essaie juste de comprendre. Il y a déjà des déficits d'opération. Est-ce qu'il n'y aurait pas une tentation, dans le fond, de la... Je ne sais pas si c'est la SHQ, mais qui qui va aller garder les loyers, une fois un immeuble libre d'hypothèque, mais est-ce qu'il ne serait pas tenté d'utiliser ça pour, dans le fond, combler les déficits d'opération?

Mme Viannay (Patricia) : Bien, actuellement, ce n'est pas possible de le faire comme ça. Nous, quand on parle d'équité, tu sais... Puis on est bien conscients, on a eu la discussion notamment avec Mme Duranceau, que, tu sais, réemprunter, bien, même si on a la bâtisse, tout ça, pour... à proposer, ça augmente la dette du gouvernement. Mais déjà, si on se concentrait... Vous savez, il y a 19 000 des 65 000 logements HLM, là, ils sont libérés de ça, il n'y a plus d'hypothèque, les... donc ils appartiennent en ce moment aux villes ou aux offices. Il y a 19 000. Ce 19 000... ces 19 000 unités, juste à elles toutes seules, c'est un 5 milliards. Donc, on a déjà... Ça ne va pas augmenter la dette du gouvernement, tu sais.

Donc, on pourrait déjà partir de ça pour réinvestir dans des nouveaux logements, où c'est vraiment en commençant par ça, déjà, qu'on pourrait dégager des possibilités...

Mme Dufour : ...merci beaucoup. Peut-être votre... l'idée du programme 80-20, je sais que vous avez dit, tout à l'heure, que ce serait 20 %, la contribution des municipalités. Puis vous disiez, bien, actuellement, les autres programmes HLM, c'était 10 %, mais, dans les faits, avec les nouveaux programmes comme le PHAQ, c'est beaucoup plus élevé que ça pour les municipalités, là, on est plus dans l'ordre du 30 %, 40 %, donc, et même plus parfois. Donc, je pense qu'ils seraient très ouverts à votre proposition du 80-20, ça, c'est certain.

Peut-être, je voudrais venir sur l'aliénation des HLM. Ça, moi, c'est une clause que j'ai dénoncée dès que le projet de loi est sorti, vous m'avez peut-être entendue là-dessus, parce que ça m'inquiète depuis le début. On semble, actuellement, affaiblir le... vouloir affaiblir le logement social. Et ça, c'est une des mesures qui pourrait contribuer à ça encore davantage. Donc, je sais qu'il y a des exemples que vous avez cités, là, mais peut-être que vous pourriez en parler, là, de... un peu plus davantage, là, de qu'est-ce qui pourrait arriver si cette clause-là était appliquée telle quelle. Et peut-être vous entendre aussi sur la mobilité des projets. Parce que vous, vous demandiez que ça reste dans la même ville, et vous le justifier, bien, là, vous donner l'exemple de Waterloo, là, qui a une liste d'attente et malgré tout qu'on va retirer... je pense qu'on souhaitait retirer de là, le déménager à Granby, si je crois... si je ne me trompe, mais il y a aussi les... la FQM qui est venue nous dire que, dans le fond, ils aimeraient que ça soit géré au niveau de la MRC. Et donc je voudrais vous entendre sur cette proposition-là, là.

Mme Viannay (Patricia) : Bien, sur les exemples, en tout cas, on peut... je ne sais pas lequel est le plus choquant, là, mais on peut prendre, par exemple, l'exemple de Daveluyville, parce que, nous, ça nous a choqués, parce qu'on s'en est rendu compte, c'était démoli. Parce qu'en fait ce qui est arrivé à Daveluyville, c'est que les immeubles, ça faisait des années qu'ils n'étaient plus du tout habités, puis, tu sais, il y avait juste cet immeuble-là. Donc là, tu n'as plus de... C'est ça, le... tu n'as plus d'association, tu n'as plus de locataire, tu n'es plus en contact, il y a juste l'office, tu sais, qui sait qu'est-ce qui se passe. Puis ils n'ont jamais été rénovés, il n'y a jamais eu un investissement dans cet immeuble-là, dans ces immeubles de 32 logements à Daveluyville, ils n'ont jamais été rénovés. Et il est arrivé ce qui finit par arriver, le toit coule, les fondations sont fragilisées. Donc, les immeubles finissent par être barricadés, ils sont non habités. Les gens n'appliquent plus, il n'y en a plus, de logement.

Donc là, à un moment, tu te retrouves avec, apparemment, la situation où tu n'as plus le choix de les démolir. Ils ne sont absolument plus habitables, il n'y a plus personne sur les listes parce que personne ne pense qu'un jour il pourrait être réhabitable. Et on réalise, un jour, un matin, que, bien, il y a un permis de démolition qui a été donné, puis il n'y en a plus, de HLM, puis l'immeuble... le terrain, donc, a été vendu à des promoteurs qui ont fait des condos à la place. Donc, ça arrive. Je l'ai dit au début, ça reste rare pour l'instant, mais, si on se dit que, pour que ça, ça arrive, il a fallu qu'il y ait un déficit d'entretien chronique pendant des années, un désintérêt de la municipalité locale qui ne voulait... qui faisait du pas dans ma cour avec les personnes à faible revenu, c'est des situations qui existent encore en 2023. Donc, c'est ça, notre crainte, tu sais, que ça réarrive.

Mme Dufour : Sur la mobilité à l'intérieur d'une MRC.

Mme Viannay (Patricia) : C'est ça, bien, c'est sûr que nous, on a toujours été en faveur d'offices régionaux. Les premières fusions au début des années 2000, ça a permis d'éliminer beaucoup de petits offices où quelqu'un travaillait quelques heures par semaine puis où ça n'allait vraiment pas bien. Ce n'était pas suffisant, il y a eu un deuxième tour de regroupement, ce n'est pas suffisant, on est content. Il y a une tournée, actuellement...

Le Président (M. Schneeberger) : 30 secondes.

• (12 h 40) •

Mme Viannay (Patricia) : Il y a une tournée de la SHQ, actuellement, qui veut optimiser ce réseau-là. Puis de ce qu'on voit, c'est que les discussions se font à une échelle régionale. Nous, on trouve qu'un office régional, en effet, aurait plus de... aurait plus les coudées franches pour faire une bonne job mais devrait s'assurer de répondre aux besoins de l'ensemble de tout le monde. Puis ça aussi, ça serait un avantage. Parce qu'actuellement les villes où il n'y en a pas, de logement social, bien, les gens, c'est fini. S'il n'y a pas de HLM, ils n'appliquent pas, là. Une vision régionale pourrait permettre, justement, peut-être une meilleure mobilité. Il ne faut pas qu'elle soit forcée non plus. Il ne faut pas qu'on concentre tous les HLM à un endroit. Les HLM, ça a été vraiment une façon de développer des milieux de vie partout au Québec, dans des petits villages, dans des centres-villes.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci beaucoup.

Mme Viannay (Patricia) : On veut garder ça.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci beaucoup. Alors, on a déjà dépassé. Alors, nous allons maintenant du côté de la deuxième opposition. Alors, vous avez un trois minutes 28, M. le député de Laurier-Dorion.

M. Fontecilla : Merci. Mesdames, messieurs, merci beaucoup d'être ici et de vous être déplacés. Écoutez, je vais y aller tout de suite, j'ai été, comment dire, agréablement impressionné par l'affirmation de Mme...

M. Fontecilla : ...qui disait, là : La solution à la crise du logement, c'est les HLM. On n'a pas... C'est la première fois qu'on entend parler de ça ici, à l'Assemblée nationale. On oublie souvent les HLM, là. Et je constate également vos solutions novatrices, là, en termes d'utilisation, par exemple, de l'équité du parc immobilier, là. Et il nous manque un peu d'imagination, peut-être, au Québec, là, pour aller de l'avant, là, et répondre aux besoins des populations les plus défavorisées justement, là, c'est là qu'il faut intervenir en priorité.

Puisque vous vous êtes déjà exprimés sur le sujet, là, je vais aller sur... dans une autre direction, là, la préservation du parc HLM. Oui, tout à fait d'accord avec vous, là, il faut développer les parcs de HLM, là, mais il faut, d'abord et avant tout, je pense, là, conserver ce qu'on a, là. J'aimerais vous entendre parler sur cette nécessité-là.

Mme Viannay (Patricia) : Bien, c'est sûr que le parc HLM... tu sais, en moyenne, les HLM ont entre 38 et 48 ans, O.K.? Donc, comme tout projet immobilier, si tu n'as pas investi au fur et à mesure ce qu'il fallait pour l'entretien, tu te retrouves, après 38 et 48 ans, avec certains immeubles ou certains logements qui ont vraiment des déficits d'entretien énormes. Là, les indices de vétusté sont... peuvent être très gros. Tu sais, je peux vous inonder de chiffres si vous voulez, mais, tu sais, quelques-uns marquants, là, tu sais, même, selon le recensement même du gouvernement, il y a près de 5 000 logements HLM, en ce moment, qui sont vides juste parce qu'ils ne sont pas rénovés... c'est 4 480, juste parce qu'ils ne sont pas rénovés. Une chance, il y a le programme HLM qui a été mis en place pour ça, mais c'est ça, la réalité. On parle de 27 000 ménages qui vivent dans des logements cotés d et e, ce n'est pas juste... C'est beaucoup de monde, là, 27 000 ménages dans des d et e. On parle de... Puis surtout, peut-être, le chiffre le plus alarmant, je vous dirais, c'est que ça ne cesse de se détériorer. En fait, on est passé de 29 % à peu près de vétusté du parc en 2020 à 40 % en 2022. Donc, ça se détériore, puis ça se détériore vite.

Donc, c'est sûr que ça, ça nous inquiète. On a beaucoup... On a parlé presque que de ça, je vous dirais, dans la dernière année. On a documenté ça, on a démontré les besoins. On s'est aussi réjoui en juin 2022. C'est sûr que nous, on est contents qu'il y ait le programme de rénovation HLM. Le programme de rénovation HLM, c'est la garantie que le 2,2 milliards d'Ottawa, il va servir à la rénovation des HLM. Ça ne suffira pas. Il y a encore... on est un peu dans technicalité, mais il y a encore du RAM, là, le budget partagé entre la SCHL et la SHQ qui s'ajoute à ça. Donc, ça nous prenait ce programme-là pour vraiment lancer le message. Tu sais, pour nous, c'est une façon aussi de dire : On va les rénover, les HLM. Nous, maintenant, à nos membres, on parle objectif 2028...

Le Président (M. Schneeberger) : 30 secondes.

Mme Viannay (Patricia) : ...on demande aux associations de locataires de faire la liste de tout ce qu'il faut qu'il soit rénové dans les HLM. Le programme de rénovation va permettre qu'il y ait des projets de rénovation qui s'étalent sur trois, quatre ans. Bien, collectivement, là, donnons-nous l'objectif 2028. Les locataires ont leur liste de travaux, les offices ont les bilans de santé immobiliers, puis allons demander à SHQ les budgets qu'il faut. Le programme doit le permettre, il y a les trois volets qui doivent le permettre. Mais il faut le faire, puis il faut le faire vite. Il faut commencer tout de suite pour ne pas avoir à tout à dépenser en 2027, sinon on va perdre des logements.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci beaucoup. Alors, nous allons maintenant du côté du député des Îles-de-la-Madeleine pour deux minutes 38.

M. Fortin :Merci, M. le Président. Merci à vous d'être là et d'évidemment nous éclairer sur la situation des HLM, qui est quand même assez dramatique selon ce que vous nous présentez, là. Oui, vous représentez 65 000 familles ou personnes, mais il y en a 38 000 qui attendent, presque 39 000 qui attendent des logements et, vous venez de le mentionner, il y en a 5 000 qui sont déserts parce qu'ils ne sont pas salubres ou pas habitables. Vous nous dites : Bon, on est rassurés parce qu'il y a de l'argent puis on va construire. Malgré tout, l'argent, là, il a été débloqué, en fait, il a été annoncé il y a déjà un certain nombre d'années, et pourtant, les deux dernières années, ça n'a cessé de se détériorer.

Alors, ma question est la suivante. Même si vous dites : Bien, on est rassurés parce qu'il y a de l'argent, vous mentionnez quand même qu'il s'agit d'un énorme défi, bon. Quel est votre degré de confiance que, d'ici 2028, on arrive à la fois à rénover le parc des HLM et en construire des nouveaux?

Mme Viannay (Patricia) : On a le goût d'être optimistes. Je vous dirais, de 2018 à 2022, on a déchiré notre chemin sur la place publique, tu sais, on était contents qu'il y ait une annonce dans le cadre de la stratégie canadienne, mais ça a pris, c'est vrai, trop de temps, on est d'accord, pour arriver, en 2022, à ce programme-là. Je ne vous dirai pas le contraire. Puis on le voit, les conséquences, on a accumulé. On espère qu'avec toutes...

Mme Viannay (Patricia) : ...le bruit et toutes les démonstrations qui ont été faites depuis, avant ceci, là, que c'est rendu clair, là, si on n'agit pas tout de suite, il y en aura plus de détériorées dans deux ans, il n'y en aura pas moins. Puis l'objectif, objectif 2028, c'est de rénover l'ensemble du parc et même de le moderniser. C'est sûr que ça va être un gros défi, on le sait, mais nous, on n'a pas le choix d'être optimistes, il faut que cet argent soit dépensé d'ici 2028 puis c'est pour ça, tu sais, on est... nous, on travaille avec la SHQ, les offices, il y a une table des partenaires sur les HLM publics puis nous, je peux vous dire qu'on suit puis on demande à la SHQ c'est quoi les travaux demandés? Combien ont été engagés pour monitorer ça de proche? Puis voir : Bien, regarde, si... pourquoi l'argent n'est pas engagé, pourquoi il n'est pas dépensé? Et c'est là où on rejoint toutes sortes d'autres demandes qui vous ont été présentées pour faciliter ces dépenses.

M. Arseneau : Et dans les propositions que vous faites concrètement pour contribuer, là, à la page sept de votre document, on en a parlé tout à l'heure, mais vous parlez d'aller utiliser, évidemment, là, votre parc actuel pour pouvoir développer de nouveaux projets. Quand vous parlez de formules de prêt sans intérêt, vous pensez à quoi, garanties par le gouvernement, un programme particulier, une caisse particulière du gouvernement, ou allez auprès des banques, mais garantie par le gouvernement du Québec?

Le Président (M. Schneeberger) : 10 secondes.

Mme Viannay (Patricia) : C'est sûr que ce n'est pas... nous, on n'est pas fiscaliste, et tout ça, mais oui, on pense que c'est à partir du gouvernement, la SCHL l'a fait, est-ce qu'elle? Est-ce que c'est la SHQ plutôt? C'est sûr que nous, notre interlocuteur privilégié, ça reste la SHQ, ça reste le gouvernement du Québec qui développe, donc...

Le Président (M. Schneeberger) : Merci beaucoup. Alors, merci beaucoup pour votre contribution à nos travaux. Alors, nous... je vais suspendre la commission jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 48)


 
 

15 h (version non révisée)

(Reprise à 15 h 05)

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, bon après-midi à tous. La Commission de l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Alors, bien, veuillez éteindre vos sonneries, si, des fois, ce n'est pas fait. Alors, nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques du projet de loi n° 31, loi modifiant diverses dispositions législatives en matière d'habitation. Cet après-midi, nous attendons les témoins suivants : L'Association des propriétaires du Québec, en visioconférence, qui sont présents avec nous, le Front d'action populaire en réaménagement urbain, le Regroupement des comités de logements et associations de locataires du Québec et Association des juristes progressistes.

Alors, tout de suite, nous commençons avec l'Association des propriétaires du Québec. Alors, bonjour à vous quatre. Alors, dans un premier temps, juste, vous nommer à tour de rôle ou une personne qui le fait pour les quatre. Et par la suite, vous nous présentez notre mémoire... votre mémoire. Vous avez 10 minutes et il y aura ensuite un échange avec les députés et ministres. Voilà. Allez-y.

M. Messier (Martin A.) :Parfait. Bonjour, M. le Président, Mme la ministre, Mesdames et Messieurs les députés, je suis accompagné aujourd'hui de M. Alain Dion, propriétaire de logements dans la belle région de l'Estrie, de Maître Jean-Olivier Reed, avocat et de Mme Estelle Fabre, directrice développement des affaires...

M. Messier (Martin A.) :...l'APQ, l'Association des propriétaires du Québec représente plus de 7000 propriétaires, gestionnaires immobiliers depuis 1984. On est heureux de pouvoir vous faire part de notre vécu, particulièrement en ce qui concerne le projet de loi no 31, et on est également heureux de voir que le monde locatif se retrouve sur vos planches à dessin, qu'on puisse regarder ensemble pour faire évoluer les choses.

On tient à souligner, évidemment, que, concernant le projet le no 31, on est principalement en accord avec l'article 7 du projet de loi, concernant la réforme des cessions des baux. Donc, cette possibilité-là, qui aurait toujours dû être celle du propriétaire, de pouvoir choisir son locataire, qui redevient mise de l'avant avec le projet de loi. Pour nous, le choix du locataire, c'est essentiel, hein, ça fait partie de la vie de notre immeuble, ça fait partie de nos devoirs de propriétaires de s'assurer de la sensibilité des uns et des autres, de la santé et sécurité, de la jouissance paisible des lieux. Donc, choisir son locataire, c'est vraiment une façon, là, de s'assurer du bon fonctionnement de notre investissement immobilier. Donc, on considère que, par cet article, en fait, on respecte la visée initiale de la cession bail, qui était vraiment de permettre au locataire d'être libéré de son bail, de pouvoir, donc, cesser d'avoir à payer le loyer avant la fin du bail.

On retrouve ça dans la modification proposée et on vient mettre fin à, malheureusement, ce qu'on a vu grandir dans les dernières années, une vente aux enchères, en quelque sorte, du droit au bail, donc, des locataires qui viennent céder leurs baux en disant : Je vais vous le vendre, parce que j'ai un loyer pas cher, et donc ça vaut de l'argent, et donc qui viennent, finalement, bouleverser un petit peu ce que devrait être le marché, particulièrement dans un contexte locatif où on a des contrôles de loyer très sévères, très lourds, trop lourds, d'ailleurs, on va en parler un petit peu plus tard avec d'autres de mes collègues, mais c'est d'autant plus difficile quand on a cette cession de bail là, parce que l'occasion du départ d'un locataire, pour nous, ça va être l'occasion d'un renouveau dans l'immeuble, de renouveau dans le prix du loyer. Et c'est pour cette raison qu'on considère que la clause G devrait également faire partie des modifications, parce qu'on croit qu'elle devrait purement et simplement être abolie, que la protection conférée au prix pendant que le locataire occupe le logement, c'est une chose, mais de maintenir cette protection-là alors que le logement est vide, pour nous, c'est une situation qui devrait cesser.

On voit également, dans les articles sur les modifications en matière de reprise de logement et d'éviction, les articles 2 à 6, un mauvais message lancé aux propriétaires, alors qu'on veut stimuler les réinvestissements puis on veut dire aux gens : L'immobilier, c'est intéressant, ça nous prend des logements, ça nous prend donc des gens qui veulent investir dans ce secteur-là. On vient rendre encore plus difficile les règles et, en fait, on vient en quelque sorte proposer, à la base, que le propriétaire est de mauvaise foi dans sa démarche de reprise, puisqu'il doit se défendre en faisant état de sa bonne foi, il doit prouver sa bonne foi. Donc, c'est un peu comme si on devait prouver son innocence au lieu d'être présumé de bonne foi, qu'on doive la prouver. Pour nous, ça lance un mauvais message, alors que le Tribunal administratif du logement a, selon nous, déjà, les outils et qu'il les a utilisés, il y a plusieurs décisions qui ont été rendues, là, qui ont été très sévères, à juste titre, dans plusieurs cas, avec des propriétaires qui avaient utilisé leur droit à la reprise ou l'éviction d'une façon inadéquate.

• (15 h 10) •

Le montant des indemnités est également important, donc c'est une préoccupation, parce qu'évidemment un immeuble, là, où on prévoit un changement de vocation, un changement d'affectation, c'est souvent un immeuble qui doit être redressé, tant au niveau de son entretien que de sa place dans le marché. Ça demande des investissements importants. Et là, quand on parle d'aller jusqu'à 24 mois d'indemnités, pour nous, c'est beaucoup et ça risque d'encore une fois empêcher ces immeubles-là qui ont besoin d'un redressement.

Je vais passer la parole à Me Jean-Olivier Reed pour la clause F et le dépôt de garantie. Ton micro, Jean-Olivier, je pense...

M. Reed (Jean-Olivier) : Alors, bonjour, M. le Président, Mme la ministre, messieurs et mesdames les députés. Le projet de loi aborde la clause F du bail sur la construction d'immeubles neufs et sur la fameuse clause des cinq premières années. À prime abord, nous appuyons l'adoption de cet article, mais nous souhaitons...

M. Reed (Jean-Olivier) : ...que des précisions soient apportées sur la modification législative. Notamment, étant donné que plusieurs projets sont en construction, déjà planifiés ou en chantier, il serait important que cette loi-là ne soit pas d'application immédiate pour permettre... en cours, et aux futurs projets, que ça soit... que les futurs projets de construction et que la loi soit appliquée à ces futurs projets là. Donc, il serait important pour éviter une confusion avec les propriétaires d'immeubles, pour savoir qu'est-ce qu'on fait avec les baux qui sont actuellement en vigueur et qui disposent d'une clause est actuelle.

Pour finir, nous souhaitons souligner que le projet de loi n° 31 doit être vu comme un grand changement. Et surtout deux éléments primordiaux qui ont été oubliés ici et qui n'ont pas été discutés, c'est le dépôt de garantie et le taux de rentabilité des travaux. Donc, le dépôt de garantie devrait être discuté au niveau de la société québécoise et devrait faire partie à tout le moins des discussions pour permettre aux propriétaires d'immeubles de pouvoir avoir une garantie, puisque ce n'est pas seulement une demande qui profitera aux propriétaires, mais c'est aussi parce qu'il y a... le gros niveau de logements saccagés fait en sorte que les logements saccagés ne sont pas sur le marché, et souvent les propriétaires n'ont pas le moyen de les dépasser rapidement. C'est un... Le dépôt de garantie est un ajout financier supplémentaire. Et la plupart des pays, la France... autres provinces ont, dans certaines circonstances, ce dépôt-là. Il faudrait, dans ces circonstances-là, que le Parlement se penche sur cette possibilité-là pour qu'on puisse améliorer, disons, surtout, par exemple, pour les bungalows, qui est une des choses les plus difficiles à louer en ce moment. Ça fait qu'à travers les exemples des autres pays on devrait pouvoir trouver une solution pour permettre aux propriétaires d'immeubles à revenus de disposer, dans certaines circonstances, d'un dépôt de garantie.

Eh voilà. Donc, pour moi, je vais transférer la parole à M. Alain Dion pour la fin de notre petit exposé. Merci beaucoup...

M. Dion (Alain) : Bonjour, M. le Président, Mme la ministre, M. et Mme les députés. Moi, je suis propriétaire immobilier. Et, la commission, il y a une chose qu'elle n'aborde, c'est la rentabilité et les pourcentages de rentabilité quand qu'on fait des travaux majeurs. Présentement, dans les cinq dernières années, les taux ont été ridiculement bas. Je vais vous donner un exemple. J'ai mis une toiture sur un 12 logements qui m'a coûté 50 000 $. Ça va prendre 50 ans pour récupérer ma dépense, puis la dernière toiture a duré 15 ans. Ça fait que c'est... il n'y a aucun encouragement à faire des travaux. Je trouve ça un peu... pas raisonnable.

Puis aussi, ce que je dénonce, c'est qu'on ne peut même pas... si on fait des travaux vraiment majeurs, on ne peut même pas s'entendre avec le locataire pour le répartir sur trois ans. Moi, quand j'ai un bon locataire, là, je veux qu'il reste. Si je fais des travaux majeurs, je veux m'entendre puis l'étaler. Je pense que ça fait des années qu'on parle de la rentabilité sur les investissements. Il faut qu'il y ait un encouragement. Notre parc immobilier se dégrade, et il faut que ça soit corrigé.

M. Messier (Martin A.) :Oui, parfait merci. Donc, ça met le terme, M. le Président.

Le Président (M. Schneeberger) : Oui, O.K., ça me met fin. Alors, nous allons maintenant passer aux périodes d'échanges. Alors, on commence avec... du côté ministériel avec Mme la ministre. Vous avez un 16 minutes 30.

Mme Duranceau : Merci. Bien, écoutez, merci de prendre le temps de nous rencontrer. Vous avez des positions bien énoncées dans votre document, là. Et je vais vous poser quelques questions. Je vais commencer par la fin concernant le lissage, si on veut des dépenses, là, dans un contexte où il y a des travaux qui sont...

Mme Duranceau : ...vous dites : Bien, on n'a même pas la possibilité d'étaler ça sur un certain nombre d'années, parce que, si on ne fait pas notre argumentation l'année un, bien, dans le fond, après ça, la méthode de calcul de fixation de loyer ne nous permet pas de nous rattraper ou d'ajuster l'année suivante. Mais vous n'êtes pas au fait de situations où, finalement, il y a eu une entente entre le propriétaire puis le locataire, et il y a un loyer qui est fixé à un montant x, mais on accorde un rabais pour tenir compte du fait qu'on ne veut pas, l'année un, imposer toute la hausse, compte tenu des travaux qui ont été faits? Ce n'est pas une alternative, là, de le faire de cette façon-là?

M. Messier (Martin A.) :Ce n'est pas une alternative, malheureusement, Mme la ministre, parce que la loi va prévoir, si j'accorde des rabais, que, dans la méthode de calcul, on va tenir compte des 12 derniers mois réellement payés par le locataire, donc on vient, finalement, faire la moyenne des 12 derniers mois. Donc, actuellement, pour un propriétaire... Et je trouve ça heureux, moi, que des propriétaires viennent nous dire ça. Souvent, on parle des propriétaires, là, qui veulent toujours tout avoir tout de suite. Moi, j'ai souvent des propriétaires, comme M. Dion, qui me disent : Bien là, moi, je voudrais... oui, j'ai une hausse de taxes ou d'assurance, mais je ne veux pas perdre mes locataires. Je suis prêt à absorber une partie, mais je ne veux pas la perdre pour tout le temps. Est-ce que je peux convenir d'un étalement d'un an, deux ans, trois ans? La réponse, malheureusement, c'est non. Si on procédait avec un système de rabais, bien, le locataire pourrait, ensuite, demander le rabattement du coût de son loyer. C'est l'objet de la méthode actuelle, ce qu'on demande, d'ailleurs, de changer, Mme la ministre. Ça permet de voir qu'un propriétaire et un locataire devraient pouvoir s'entendre.

Encore, ce matin, en fait, il y a un propriétaire qui nous a expliqué avoir négocié un bail avec un locataire, il a rempli la clause G, il s'est entendu sur un prix de loyer, puis, quelques heures plus tard, le locataire était au tribunal pour faire réduire le loyer à la baisse, ce qui est permis, actuellement, par la loi. Alors, c'est assez spécial, ça, de dire, propriétaire et locataire, on s'entend sur un prix... Oui, le loyer était payé, je ne sais pas, exemple, 800 $, puis, maintenant on s'entend sur 900 $, je signe avec le locataire, on est tous les deux consentants, et lui, dans les heures qui suivent, il s'en va au tribunal puis il fait ramener ce loyer-là au loyer le plus bas. On pense, Mme la ministre, que ce type de situation là, d'abord, ça nuit aux relations propriétaire-locataire, c'est une mauvaise façon, avouons-le, de décoller la relation, mais également que la place au libre marché, quand le logement est libre, c'est ce qui vient insuffler une certaine vigueur au marché, ce qui permet de combler à d'autres lacunes qu'on a, en termes de taux de rendement, puis de permettre de garder notre parc immobilier en santé.

Mme Duranceau : Vous trouvez que le marché n'est pas assez rigoureux en ce moment?

M. Messier (Martin A.) :Bien, le marché est très rigoureux, le contrôle des loyers est absolument atroce pour les propriétaires. Puis, quand on... On en discutait ce matin, en fait, la méthode donne des rendements qui sont très longs puis elle ne tient pas compte du fait qu'actuellement je vais devoir payer des intérêts pour ça. Donc, quand on parlait tantôt d'un taux de rendement, là, qui varie de, mettons, disons, 26 ans pour l'année dernière à plus de 50 ans, qu'on a déjà vu, bien, ça, c'est un peu comme si on disait : Il faut prendre l'argent qu'on a, si on a l'argent dans un tiroir dans la cuisine, parce que sinon, ça ne tient pas compte du fait qu'il faut que je paie des intérêts pour emprunter cet argent-là ou que je n'en ai pas parce que je dois réinvestir. Donc, ce rendement-là est vraiment à revoir.

• (15 h 20) •

Mme Duranceau : Bien, ça, je vous l'accorde, là, qu'il y a une hausse des coûts pour tout le monde puis que les taux d'intérêt pour... dans un contexte où tu es propriétaire puis que tu finances, effectivement, ça a un impact sur le rendement.

Je vais vous amener sur le dépôt de garantie. Il n'y a rien, actuellement, dans le projet de loi, qui est prévu là-dessus. Je suis bien consciente qu'ailleurs, dans d'autres pays ou même dans les autres provinces canadiennes, c'est monnaie courante, là, d'avoir un dépôt de garantie. Comment vous géreriez ça? Puis moi, je vous le dis, j'ai une préoccupation, là. Il y a des gens qui n'arrivent pas à payer leur loyer, ça fait que de leur demander un dépôt de garantie, à prime abord, ça me semble difficile à réaliser, mais... Donc, comment vous voyez ça, justement, pour des locataires à faibles revenus?

M. Messier (Martin A.) :Bien, j'avoue que ce n'est pas simple comme enjeu. Par contre, c'est important, c'est important de voir que, là, présentement, il n'y a, à toutes fins pratiques, pas d'enjeu pour les locataires qui quittent en laissant le logement en mauvais état. Et c'est le but du dépôt de garantie, c'est de s'assurer que le logement est en bon état puis que le prochain locataire va bénéficier d'un logement en bon état. Donc, on pense, par exemple, à une implémentation graduelle, là, commencer... au lieu de demander un mois de loyer, y aller avec un montant minimal qui s'accumule au fil des mois, au fil des années pour venir constituer un montant. Mais il ne faut pas... je dirais, il ne faut pas s'arrêter, de façon absolue, au fait que, parce qu'on n'en a pas, on ne peut pas...

M. Messier (Martin A.) :...tu sais. Ces mécanismes-là, ils ont débuté partout, dans tous les autres pays, et, bon, en permettant, justement, un étalement des délais, des façons de combler, on réussit à y arriver.

Je pense que l'objectif, c'est de permettre qu'on ait un parc immobilier en meilleur état, avec des gens qui sont conscientisés, qui ont, je dirais, un intérêt direct, là, à respecter les obligations... celle de laisser le logement dans l'état où ils l'ont reçu. Et, pour nous, c'est important. Il faut, à un moment donné, se dire : ce n'est pas parce qu'on ne l'a pas qu'il faut se dire que... Parce que c'est difficile à mettre en place, on ne le mettra jamais.

Mme Duranceau : Non. Vous avez raison, on peut réfléchir, effectivement. Ce n'est pas parce que ce n'est pas là que ça n'a pas de besoin d'être là, mais on a un contexte qui est difficile en ce moment pour ça, je vous dirais. Mais je vous entends bien.

Au niveau de la section trois de votre mémoire, Reprise de logement et éviction, la discussion qui est faite là réfère à des reprises où on devrait compenser les gens, là. Puis vous donnez l'exemple d'une jeune famille qui veut reprendre son logement pour se loger elle-même, puis que, là, elle devrait payer une compensation. Les mesures qui sont proposées, ça vise seulement les évictions dans un contexte où tu veux agrandir, subdiviser ou changer l'usage, ça fait que des projets à la limite commerciaux, là, et non un cas de reprise pour soi-même. Je voulais juste préciser ça, là.

M. Messier (Martin A.) :Oui, bien, je vous remercie de la précision. Il faudrait... Parce que, dans certains cas, la reprise est à double effet, là, donc on reprend possession, parfois, d'un ou deux logements pour en faire un plus grand pour obtenir le nombre de chambres voulu pour loger notre famille. Donc, il faudrait peut-être s'assurer que la distinction soit faite puis, dès lors que c'est la reprise, bien, qu'à ce moment-là, même s'il y a un agrandissement qui est sous-jacent à cette reprise... qu'il n'y ait pas d'impact, là, pour les familles qui agissent ainsi.

Mme Duranceau : O.K. Je vais passer la parole à ma collègue de la Labelle.

Le Président (M. Schneeberger) : Oui, O.K. Alors, députée de Labelle, allez-y.

Mme Jeannotte : Merci, M. le Président. Bonjour. Oui, vous avez raison, hein, c'est un équilibre délicat entre les locataires et les propriétaires. C'est ce que la ministre recherche, bien sûr. Vous nous amenez des bonnes pistes intéressantes pour améliorer les méthodes. J'aimerais revenir... vous dites, les méthodes de calcul lorsqu'on fait des rénovations. Est-ce que vous pourriez être un petit peu plus concrets? Qu'est-ce que vous proposeriez que le TAL change, là, dans... lorsqu'il fait sa méthode de calcul pour des rénovations?

M. Messier (Martin A.) :Bien, en fait, je dirais qu'un des irritants, il y en a plusieurs, plusieurs niveaux, mais l'irritant majeur, c'est vraiment sur les travaux majeurs. Donc, quand on veut, justement, donner de l'amour à notre immeuble, et le permettre de retrouver son sourire, et d'avoir donc des investissements, fenêtres, toit, maçonnerie, ça coûte très cher. Et là on a des rendements qui sont basés sur une méthode qui est désuète, qui nous donne des taux de rendement, là, de 26 ans d'amortissement, de plus de 50 ans d'amortissement, sans tenir compte qu'aujourd'hui la plupart des propriétaires qui vont se financer vont devoir payer du 7 % ou 8 % pour aller chercher l'argent requis pour faire ces transformations-là.

Donc, c'est ce qu'on demande d'être revisé, d'avoir un taux d'amortissement entre 10, 12 ans, 15 ans, ce qui est la durée de vie du toit de M. Dion de tout à l'heure, et qu'on arrive à quelque chose de raisonnable, que je sache que, si j'ai investi dans mon immeuble, je vais pouvoir retrouver cet investissement-là. Puis aussi, à un moment donné, il faut que je puisse me financer, hein? Si je vais voir une institution financière, puis je lui fais part de mon immeuble avec ses revenus, puis je dis : Bien, j'aurais besoin de plusieurs centaines de milliers de dollars, bien, il faut que ça génère un revenu supplémentaire, hein, sinon je ne suis pas en mesure d'aller chercher mon financement, sauf par d'autres sources d'actifs, sources de revenus que j'ai. Donc, c'est important pour le marché, c'est important pour les propriétaires. Puis ultimement je suis fondamentalement convaincu que c'est important pour les locataires. Il faut qu'on puisse avoir ça pour avoir un parc en bon état puis inciter nos propriétaires à investir dans les immeubles.

Mme Jeannotte : Puis vous savez à quel point c'est chaud quand même, politiquement, ne serait-ce que de parler de cession de bail. Ça fait que de parler de dépôt de garantie, vous comprendrez que c'est... ça ne veut pas dire que ce n'est pas... on reçoit bien là, votre recommandation, mais vous comprenez à quel point ça peut être difficile. Donc, entre les deux, entre le dépôt de garantie puis améliorer la méthode du calcul des rénovations, laquelle vous choisiriez?

M. Messier (Martin A.) :C'est un choix pas facile, mais certainement que le fait de pouvoir avoir un rendement sur les investissements qui est plus important, de s'assurer qu'on soit en mesure de redonner au parc immobilier des années qu'il a perdues à attendre cette réforme-là...

M. Messier (Martin A.) :...je pense que M. Dion pourra me corriger s'il n'est pas d'accord, mais je pense, ce serait, pour plusieurs, la priorité.

Mme Jeannotte : Dernière question, si je peux encore. Dans le fond, le TAL, vous suggérez énormément de... On a la chance d'avoir un expert ici derrière, le Tribunal administratif du logement. Vous suggérez plusieurs choses. J'aimerais vous réentendre là-dessus, là. Vous suggérez d'engager plus de juges administratifs. Vous parlez d'un principe basé sur les petites créances. Alors, allez-y, on est là pour vous entendre.

M. Messier (Martin A.) :Bien, certainement. Donc, au niveau du tribunal administratif du logement, on a quelques enjeux qui nous sont soulevés. D'abord, évidemment, les conflits sont souvent plus longs, plus compliqués, particulièrement quand il y a un phénomène de rareté de logements. Les gens, évidemment, n'ont pas le désir de quitter par le biais d'une entente plus rapidement. Oui, ça prend des ressources, ça prend de plus en plus de ressources pour qu'on soit entendus rapidement.

Tu sais, quand on a un problème dans un immeuble à logements, l'enjeu, c'est que j'ai un locataire qui ne s'entend pas avec un autre locataire, alors c'est un enjeu important, ou un ne s'entend pas avec plusieurs. Et là c'est tout le monde qui se voit empêché de vivre finalement dans l'immeuble en attendant que le tribunal puisse intervenir. Donc, d'être capable d'avoir des ressources supplémentaires, je pense que si c'est une bonne idée. Il y a certaines mesures, selon nous, qui seraient plus faciles.

On en a déjà avancé certaines dans le passé, notamment en cas de non-paiement de loyer. Si le locataire ne se manifeste pas, parce qu'il y a plusieurs cas où ces causes là, les locataires ne se présentent pas parce qu'ils n'ont tout simplement pas payé leur loyer, ça fait qu'il n'y a pas grand-chose à dire, donc on puisse procéder par défaut en soumettant le bail, l'état de compte et qu'on puisse tout simplement recevoir la décision, là, sans être obligé de se déplacer au tribunal pour faire valoir cette situation-là.

On a des enjeux en termes de compréhension. Puis je vois toute la correspondance que le tribunal fait parvenir quand on dépose une demande et un délai de 45 jours maintenant, là, la loi a été modifiée, il faut déposer la preuve de notification. Mais finalement, la preuve que j'ai envoyé le document à l'autre partie, au locataire ou au propriétaire, il faut que je dépose ça au tribunal. Il y en a plusieurs qui, malgré que c'est écrit, on dit que c'est écrit noir sur blanc, mais ce n'est pas tout le monde qui est en mesure de bien saisir les écrits et on voit qu'il y a un enjeu avec ça. Il y a des propriétaires et des locataires, on le voit des deux côtés, qui perdent des droits en raison de ça. Donc, je pense que le mécanisme qui permettrait un rappel aux gens avant la fermeture du dossier, donc les propriétaires ou locataires puissent recevoir un rappel : Attention, vous n'avez pas produit votre avis, si on ne le reçoit pas, on va fermer votre dossier, qu'il y ait un mécanisme comme ça qui puisse être établi.

Mme Jeannotte : Merci. Est ce qu'on a... Veux-tu reprendre ou... Non. Est-ce qu'on pourrait entendre M. l'expert là-dessus? Si c'est quelque chose qui pourrait se faire ou si c'est prématuré, je ne sais pas. Est-ce que M. Simard pourrait intervenir, si le président l'accepte? Est-ce que c'est une suggestion qui pourrait être facilement mise en œuvre?

Le Président (M. Schneeberger) : Bien, moi, avec le... si tout le monde a le consentement, il n'y a pas de problème pour prendre la parole.

Une voix : ...

Mme Jeannotte : Bien, la dernière suggestion de monsieur.

M. Messier (Martin A.) :D'avoir un rappel avant la fermeture d'un dossier pour permettre aux justiciables de corriger la situation.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, s'il y a une personne en arrière qui veut intervenir, moi, il n'y a pas de problème, mais avec le consentement des députés ici. Alors, s'il y a consentement, la personne peut intervenir en nommant son nom et son titre, et puis, après ça...

• (15 h 30) •

M. Simard (Patrick) : Bien, merci, M. le Président, je suis Patrick Simard, le président du Tribunal administratif du logement. Alors, à l'égard de cette proposition-là, le législateur a déjà, dans le cadre du projet de loi n° 16 de la première législature, statué sur le délai. Alors, si c'est un élément qui peut être porté à la connaissance des députés pour la commission, M. le Président, on sera là pour participer aux réflexions.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la députée de Labelle.

Mme Jeannotte : Ça semble déjà là. Donc, non, c'est bon pour moi, je n'ai pas d'autre question.

Le Président (M. Schneeberger) : O.K. Mme la ministre.

Mme Duranceau : Oui, alors peut-être, avec le temps qu'il nous reste, il y a plusieurs groupes, là, qui nous ont présenté leur mémoire, là, au cours des deux derniers jours et, à répétition, on me parle de registres de loyers. Alors, tout le monde a le droit d'être entendu sur le sujet, ça fait que j'aimerais avoir votre avis puis en quoi c'est bon ou ce n'est pas bon pour l'écosystème.

M. Messier (Martin A.) :Pour nous, non seulement c'est pas bon, mais, évidemment, comme on demande l'abolition de la clause G, donc on demande de cesser de protéger le logement qui est libre, bien, le registre du loyer, évidemment, on ne peut pas être en accord avec ça, mais...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

M. Messier (Martin A.) :...prenons pour acquis que la clause G est maintenue. De toute façon, je pense que les coûts impliqués pour un registre de loyers, c'est des revenus qu'on pourrait investir ailleurs pour aider nos locataires plus démunis. Je pense que ce n'est pas la bonne méthode.  Puis, fondamentalement, le fait qu'un loyer doive être figé dans la glace ou dans le ciment, si on veut revenir à l'immobilier, bien, ce n'est pas une bonne idée. Il faut permettre au marché d'évoluer. C'est comme ça qu'on va avoir des immeubles en santé puis on va avoir... puis on dit qu'on n'a pas assez de logements qui se construisent, bien, une des bonnes façons d'intéresser les gens qui investissent en immobilier, c'est de leur montrer qu'il y a un espoir, que c'est un marché qui est en vie...

Le Président (M. Schneeberger) : 30 secondes.

M. Messier (Martin A.) :...que, oui, il y a un mécanisme de protection pour des locataires qui sont en place, mais, quand le logement est libre, qu'on puisse fixer le loyer au prix du marché.

Mme Duranceau : Merci.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, merci beaucoup du côté ministériel. Alors, nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. Et c'est la députée de Mille-Îles? Oui, c'est ça. O.K.. Vous êtes deux, alors je le demande. Alors, députée de Mille-Îles, pour un 10 minutes 24.

Mme Dufour : Excellent. Merci, M. le Président. Merci, M. Messier, Dion, Reed et Mme Fabre pour votre présence aujourd'hui. J'aimerais... on va continuer sur le dépôt de garantie. C'est quand même une proposition, là, vous êtes les premiers à proposer ça, un dépôt de garantie progressiste... progressif, pardon. Et là il y a... Dans votre mémoire, il y a un élément qui m'a surprise un peu, mais en... je vais quand même le mentionner, là, pour les... ceux qui nous écoutent, là, que vous proposez qu'il soit payé au gouvernement et non pas que ce soit le propriétaire qui garde ce dépôt de garantie, là progressif. Vous proposez qu'il soit payé par le gouvernement dans le cas où on parle de plus démunis. Et là vous mentionniez que c'est offert par des assurances privées. Et c'est ça que j'aimerais comprendre un peu plus parce que pour moi c'est... je ne saisis pas, là, la nuance.

M. Messier (Martin A.) :Tout à fait. Bien, je vous explique. Ce que vous avez, ce n'est pas une proposition globale, ce sont différents points de réflexion sur ce qui peut être fait. Donc, ce n'est pas un ensemble. Donc, dans les pistes étudiées, pour assouplir la mise en place d'un dépôt de garantie, on se rend bien compte qu'on part de zéro, là, il faut... il faut permettre de bouger.

Et, dans ce contexte-là, il y a plusieurs avenues qui nous semblent être pertinentes à étudier. Une de ces avenues-là, c'est le dépôt... progressif... moi aussi, je suis parti sur le progressiste, et donc le dépôt graduel. Et qu'on ait également la possibilité, là, de voir ce que le marché des assurances peut offrir. C'est le cas dans certains pays où les assureurs vont venir soutenir le dépôt de garantie. Dans certains États, certains pays, c'est le gouvernement qui, pour les plus démunis, va, je dirais, assumer en tout ou en partie le dépôt. Et on a également des provinces où le dépôt est géré par le gouvernement. Donc, les sommes sont versées dans un compte en fidéicommis dont les intérêts servent à payer la gestion de toute cette administration-là liée au dépôt.

Donc, c'est un peu le résumé, là, de différentes pistes de réflexion plutôt qu'une proposition globale. Je suis tout à fait en accord avec vous, là, que, si on essaie de mettre ça bout à bout, là, ça s'enligne mal, oui.

Mme Dufour : Oui. Je voudrais peut-être vous entendre sur les animaux. Il y a eu des collègues autour de la table qui ont proposé... d'un autre groupe d'opposition, qui ont proposé que ce soit interdit de les interdire finalement. D'un autre côté, on voit qu'il y a des fois des enjeux. Vous parlez dans votre mémoire, là, de saccage, puis on a vu des exemples dans les médias, ce n'est pas toujours avec des animaux, mais... Est-ce que le dépôt de garantie peut être une... peut rassurer certains propriétaires d'accepter des animaux, disons, plus... des animaux qui ont l'air un peu plus, disons...

Une voix : ...

Mme Dufour : ...massifs? Oui, c'est ça.

M. Messier (Martin A.) :Bien, en fait, je vous dirais... Je vous remercie de la question. Je veux d'abord préciser qu'on adore les animaux. Moi, je suis un amoureux des animaux. Je m'ennuie de mon petit Max qui nous a quittés. Et il faut être conscient que l'animal en soi est rarement, sinon jamais, la source du problème. C'est vraiment la personne qui devrait s'en occuper adéquatement. J'ai en tête un cas où les locataires sont partis en laissant plusieurs chiens dans le logement pendant plusieurs jours. Ça ne va pas bien, ce n'est pas intéressant ni pour le chien, ni pour le logement, ni pour les autres voisins autour. Donc, c'est cette... Puis je veux faire la différence parce que je ne veux pas lancer le message, là, qu'on a quelque chose contre les animaux. C'est vraiment malheureusement des gens qui devraient en prendre soin, qui n'en prennent pas soin, et ça cause des dommages...

M. Messier (Martin A.) :...quand je parle de catastrophe au logement, là, j'ai vu des situations où... bien, on va utiliser les vrais mots, là, de l'urine animale sur un plancher, là. C'est... le plancher, c'est... le madrier sur le plancher, c'est toute l'odeur, là, qui ne part pas, ça ne se lave pas. C'est des travaux de milliers ou plusieurs dizaines de milliers de dollars. Et ça a l'air inoffensif, là, un très joli petit toutou, mais, si on ne s'en occupe pas, ça peut être catastrophique. Donc, d'interdire d'interdire les animaux, bien, ce n'est pas une bonne idée pour plusieurs raisons, celle-là en est une.

Également, il y a plusieurs locataires qui vont nous le demander. Eux, ils ont été troublés dans le passé par des animaux qui étaient, encore une fois, laissés à... qui aboyaient. On a des gens qui sont nerveux en présence des animaux, les allergies, les croisements, là, dans les espaces communs, dans les corridors. Donc, il y a plusieurs raisons, là, qui militent pour ne pas aller dans ce sens-là.

Et le dépôt de garantie vise à rassurer, vous avez raison. On a fait un sondage qui démontrait que... je n'ai pas les chiffres devant moi, mais, de façon sensible, là, ça augmentait, le nombre de propriétaires qui seraient prêts à accepter des animaux, parce que ça viendrait démontrer que cette personne-là dit : O.K., moi je vais prendre un risque. Moi, je donne l'exemple... Je pense qu'on me donne le chiffre, ici, là... on monterait à la moitié des propriétaires, 50 %, là, qui accepteraient les animaux. Et, moi, je donne souvent l'exemple de quand j'allais à l'hôtel avec mon petit toutou, on me demandait un dépôt de 250 $ pour la chambre, que je payais parce que je comprenais, donc ça fait partie de ça.

Mme Dufour : Tout à fait. Juste, brièvement, parce que le temps passe vite, quand il y a des dommages comme ça, qui sont laissés par un locataire, pour le propriétaire, comment est-ce qu'il arrive à récupérer l'argent s'il ne retrouve plus le locataire ou qu'il est insolvable? Est-ce qu'il peut le remettre dans le loyer, entre guillemets, du prochain dans les règles actuelles? Il doit l'absorber...

M. Messier (Martin A.) :Non. Comment ça fonctionne? C'est des travaux majeurs au logement. Je ne peux pas les récupérer, parce que, malheureusement, bien, je pourrais... techniquement, je peux, je peux obtenir une décision du Tribunal administratif du logement. Si j'en fais la demande, je présente la preuve adéquate, je vais obtenir une décision. Maintenant, cette décision-là, il faut que je l'exécute, et là il faut que je puisse trouver de l'argent quelque part. Quand ce n'est pas...  néglige ses obligations... Et, si je fais des dépenses dans mon logement, mais je me retrouve aux prises avec la méthode qu'on parlait précédemment, où là j'ai un taux d'amortissement qui varie, là, mais qui va jusqu'à 50 ans dans les dernières années.

Mme Dufour : O.K. Je vais vous poser juste une petite question de compréhension. Dans votre mémoire, j'essaie de trouver, mais, à une place, vous parlez de la méthode de fixation de loyers puis vous dites : Des taux négatifs ne doivent pas être pris en compte. C'est quoi, ça, des taux négatifs? C'est en page 9.

M. Messier (Martin A.) :Bien, en fait, ce qu'on voit dans la méthode... Finalement, si on visualise la méthode, c'est un peu comme un tableau Excel. Puis, quand on fait les calculs, on va venir enlever des montants, ajouter des montants... des travaux majeurs dans une année où j'ai une... beaucoup d'énergie, mais je vais venir diminuer le montant de rendement que j'aurais sur mes... parce que, cette année-là, les coûts d'énergie ont diminué... mes travaux majeurs doivent s'appliquer pour toujours. Donc, c'est ce qu'on parle dans ce type de calcul là.

Donc, finalement, les éléments négatifs vont venir annuler les augmentations positives que j'ai eues pour les travaux majeurs.

Mme Dufour : Parfait, merci. Je vais maintenant passer la parole à ma collègue députée de La Pinière.

• (15 h 40) •

Mme Caron : Merci. Alors, j'aurais une question à propos de la clause F. Vous avez mentionné que vous étiez contre des changements à la clause F pour les baux en vigueur et peut-être pour les nouveaux. Alors, dans un premier...  je vais vous demander avec quoi vous seriez à l'aise pour les nouveaux baux. Et je vais, avant, vous amener une situation où j'ai rencontré plusieurs personnes cet été, qui vivent... un couple qui vit dans une plus petite résidence pour personnes retraitées, qui ont cette clause-là qui s'applique et me disait : Bien, ce n'est pas pour finir l'édifice ou pour apporter des améliorations, c'est pour financer la construction d'autres édifices par le même propriétaire.

Et, dans un autre cas, une grande résidence toute construite où les gens savaient qu'il y aurait des augmentations, mais ne savaient pas... Ils ne peuvent pas avoir de prévisibilité, eux non plus, sur la hauteur des augmentations de loyer. Ils me disaient... Une dame dit : Moi, ça fait deux ans que je vis ici. Puis, si l'an prochain c'est la même augmentation, je suis obligée de partir. Alors, quel est... qu'est-ce qui est bon pour le propriétaire dans ce cas...

Mme Caron : ...étant donné que si les gens se mettent à partir parce qu'ils ne peuvent plus payer le loyer, ça ne vous aide pas non plus.

M. Messier (Martin A.) :Effectivement. Puis je pense que vous faites une excellente démonstration de ce mécanisme d'offre et demande qui doit avoir lieu. Le propriétaire qui augmente trop ses loyers, il va se retrouver avec un logement qui est vide. Donc, c'est un mécanisme qui fonctionne partout, y compris dans le logement locatif.

Et donc, ce qu'on souhaite, c'est permettre aux propriétaires qui sont sur la planche à dessins, en ce moment, là, ou qui sont en train de construire...

Le Président (M. Schneeberger) : Oui, on a... monsieur....

M. Messier (Martin A.) :Ceux qui sont déjà construits, là, c'est autre chose, là, mais... déjà en vigueur, mais... permettre à ces gens-là de savoir à l'avance ce que leurs logements...

Le Président (M. Schneeberger) : Oui, il y a des interruptions, je ne sais pas...

M. Messier (Martin A.) :Ça coupe...

Le Président (M. Schneeberger) : Oui, ça coupe, ça fait qu'on n'a pas compris la dernière réponse.

M. Reed (Jean-Olivier) : ...peut-être poursuivre, là, vu que ça coupe, je pourrais peut-être terminer, Martin. Bien, écoutez, il y a aussi le fait que, si vous lisez l'amendement, on parle de si elles sont prévues dans le bail, que si le bail indique le loyer maximum que le locateur pourra imposer. Ça, ça veut dire que, premièrement, c'est que les baux vont devoir être modifiés, et les baux actuels ne prévoiront pas cette clause-là. Donc, il va y avoir un problème d'information. Il va y avoir aussi un problème d'ajustement. Donc, il y a quelque chose qui ne fonctionnera pas avec les anciens baux et... Parce qu'on voit clairement, là, dans la modification, que les baux actuels de format papier devront être modifiés, et les formats papier qui sont déjà signés ne seront pas modifiés, visiblement. Donc, à ce niveau-là, on voit difficilement comment on va pouvoir imposer au propriétaire d'ajouter au bail déjà signé, parce qu'il va falloir, selon ce qui est écrit là, le faire. Donc, ce n'est pas évident de pouvoir gérer cette situation, et c'est pour ça qu'on demande que... pour le futur. Merci beaucoup.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci beaucoup. Alors, nous allons maintenant du côté de la deuxième opposition, et, M. le député de Laurier-Dorion, vous avez un 3min 28s.

M. Fontecilla : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs dames. Concernant la cession de bail, là, est-ce que vous avez des données, d'une part, concernant... parmi vos membres, je ne sais pas, des données concernant le nombre de cessions de bail auxquelles vous assistez, et, d'autre part, le nombre qui ont été monnayées, qui ont été marchandisées, si je peux m'exprimer ainsi?

M. Messier (Martin A.) :Bien, en fait, évidemment, les locataires font ça de façon clandestine, là, ils ne vont pas nous dire qu'ils ont monnayé. On l'entend à travers les branches ou après, quand le nouveau locataire est en place, parfois, il va nous le dire. Donc, il n'y pas de chiffres, mais on voit que c'est un phénomène grandissant. Le phénomène de rareté des logements contribue à ça.

Et les cessions de baux, on en reçoit très régulièrement, donc les propriétaires sont gérés, je dirais que c'est une façon de faire, là, qui a été annoncée par plusieurs groupes, associations de locataires. Il y a des groupes de plusieurs, de dizaines de milliers de personnes sur les réseaux sociaux, là, qui qui surveillent les cessions de baux, donc c'est un phénomène qui est en croissance.

M. Fontecilla : On sait qu'à l'origine la cession de bail, là, les représentants des propriétaires étaient d'accord avec... C'était dans un contexte immobilier complètement différent, avec un taux de disponibilité des logements beaucoup plus grand, mais, à ce moment-là, les propriétaires étaient d'accord pour que les locataires puissent céder leurs baux pour pouvoir avoir des loyers. Est-ce qu'on ne pourrait pas considérer que les propriétaires changent un peu le discours selon la conjoncture économique? Quand les taux de vacance augmentent, on a une position, puis, quand ça descend, on en a une autre?

M. Messier (Martin A.) :Non. Je pense que, de tous les côtés, l'abus qui résulte de la cession de bail, pour être bien franc, puis je n'ai pas fait partie de ces débats-là, à l'époque, là, mais ce que j'en sais, c'est que ça n'a pas été... on ne l'a pas vu venir, en bon français, donc, cette possibilité d'abus, cette imposition d'un locataire souhaitable dans un immeuble qui vient, en quelque sorte, rompre la quiétude et la jouissance paisible des autres locataires. C'est une situation qui n'aurait jamais dû avoir lieu. Je pense que c'est un redressement, là, qui est très positif.

M. Fontecilla : Très bien. On vous a entendu dire que le contrôle des loyers, le contrôle qui...

M. Fontecilla : ...en ce moment est absolument atroce, là, et j'aimerais vous entendre dans un contexte où d'autres intervenants dans le monde du logement nous disent que les profits en immobilier atteignent des sommets stratosphériques. Par exemple, les loyers moyens ont augmenté de 75 % entre 2002 et 2021, alors que, durant la même période, l'inflation liée à l'indice des prix à la consommation est à 43,1 %. Donc, il y a un... On constate les données, si on croit ces données-là, il y a un enrichissement net des propriétaires au cours des 20 dernières années. Mais ce n'est pas le discours qu'on entend de votre part. On dirait que c'est une mauvaise business, l'immobilier en ce moment.

M. Messier (Martin A.) :Ce n'est pas une mauvaise business, mais quand on est propriétaire opérateur... C'est sûr que si j'achète un immeuble, que je le revends, c'est une situation différente. Mais pour un propriétaire opérateur, là, qui voit son bien à long terme, qui a ses locataires à long terme, qui veut bien entretenir son immeuble, lui, il doit fonctionner comme tout le monde, comme toute entreprise, avec un revenu brut, des dépenses, un revenu net, puis des taux d'intérêt, des facteurs de financement. Et pour ça, quand on dit à un propriétaire qu'il doit présenter au Tribunal administratif du logement...

Le Président (M. Schneeberger) : Rapidement, on n'a plus de temps.

M. Messier (Martin A.) :...

Le Président (M. Schneeberger) : Rapidement aussi, le temps est écoulé. Ça fait que je veux juste vous laisser répondre.

M. Messier (Martin A.) :...parce que je conclus en disant qu'un propriétaire qui lui veut bien entretenir son immeuble, c'est cauchemardesque quand on lui dit qu'il a 50 ans, comme M. Dion, avant de récupérer un investissement sur un toit. Ça ne marche pas.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci beaucoup. Alors, nous allons au côté du député des Îles-de-la-Madeleine pour 2 min 38 s.

M. Arseneau : Merci, M. le Président. Écoutez, merci de votre présentation. Je m'attendais à un point de vue assez campé, mais la radicalité de vos propositions me surprend un peu, je dois vous le dire, là. Quand on dit : Abolir la clause F, abolir la clause G, abolir la cession de bail, je me suis demandé si vous n'allez pas demander d'abolir le Tribunal administratif du logement. Mais plus sérieusement, là, est-ce que vous ne trouvez pas que votre plaidoyer pour la déréglementation à peu près totale du logement et du marché locatif au Québec tombe à un mauvais moment alors que vous l'avez mentionné tout à l'heure, il y a une rareté de logements.

Depuis le début de la commission, on essaie de trouver, là, la notion d'équilibre entre le locateur puis le locataire. On n'a pas la même définition que la ministre de ce qui est nécessaire pour garder l'équilibre. Vous, vous prônez un plus grand déséquilibre alors que le marché est déjà complètement déséquilibré en votre faveur parce qu'il y a une rareté de logements, parce qu'il y a une pénurie de logements, parce qu'il y a des gens qui sont dehors et parce qu'on le voyait tout à l'heure avec la mairesse de Gatineau, une augmentation des loyers chez elle, un loyer moyen dans sa ville de 60 % dans les dernières années,

Je me demande comment vous pouvez demeurer à ce point insensible à la situation de ceux que vous logez et ce que vous logerez. Il n'y a pas... il n'y a pas cette notion d'équilibre dans votre façon de voir les choses?

M. Messier (Martin A.) :Bien, pas du tout insensible, au contraire. Ce qu'on représente, c'est le fait que, justement, et vous l'avez dit, on a une rareté de logements et on n'a pas assez de personnes qui construisent. Je pense qu'un plus un égale... il manque d'intérêt pour les investisseurs. Qu'est-ce qu'on a comme situation? On a des contrôles de loyers qui sont omniprésents, que, même quand un logement se libère, il faut maintenir le prix du loyer que quand ton locataire est présent. On a des taux d'amortissement de 50 ans qui ne tiennent pas compte du taux d'intérêt que j'ai en place. Puis dans ce contexte là, on veut intéresser de nouveaux investisseurs. Pour moi, c'est un langage qui doit être modifié. Puis le but, c'est justement d'avoir un marché dynamique, un marché qui évolue. Puis oui, il ne faut pas... il ne faut pas se faire d'illusion. Là, les prix augmentent pour tout le monde, les coûts de construction, les coûts d'assurance, les coûts d'alimentation, tout augmente partout. Dans un contexte comme celui-là, quand on dit : Bien, les propriétaires vous, on veut vous maintenir le plus bas possible, il faut faire un petit peu la différence. Il faut intéresser les investisseurs, puis oui, aider nos plus démunis à se trouver des logements, puis à joindre les deux bouts. Pour nous, c'est très important, mais pas au détriment d'un parc immobilier qui doit être bien entretenu avec les coûts que ça impose.

• (15 h 50) •

M. Arseneau : Mais vous parlez beaucoup de la loi du marché, là, de la libre concurrence, puis l'offre et la demande. Et juste une petite question en terminant : Le droit au logement, vous y croyez?

Le Président (M. Schneeberger) : Le temps est écoulé. Malheureusement, on ne peut pas embarquer sur une autre question. On a déjà le temps écoulé.

Alors, je vous remercie pour votre contribution à nos travaux. Alors, on suspend quelques acheteurs pour laisser au prochain groupe de prendre leur place.

(Suspension de la séance à 15 h 51)

(Reprise à 15 h 53)

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, nous reprenons la séance. Alors, je souhaite la bienvenue à la représentante du Front d'action populaire en réaménagement urbain. Alors, bonjour à vous. Alors dans un premier temps, je vous demanderais de vous présenter, et, par la suite, vous avez 10 minutes pour faire votre exposé, et il y aura un échange ensuite avec les députés. Allez-y.

Mme Laflamme (Véronique) :M. le Président, Mme la ministre, membres de la Commission, bonjour. Donc, mon nom est Véronique Laflamme... J'essaie de partir le chrono, mais ça ne marche pas. Donc, mon nom est Véronique Laflamme. Je suis porte-parole du Front d'action populaire en réaménagement urbain, le FRAPRU, qui est un regroupement comptant 145 organismes de divers horizons à travers le Québec, dont 30 sont au cœur de nos actions. Ce sont des comités de citoyens et citoyennes, des comités logement et des associations de locataires.

Donc, le droit au logement est au cœur du travail du FRAPRU depuis sa naissance, et je vous rappelle que ce droit au logement est reconnu à l'article 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le PIDESC, auquel a adhéré le Québec. C'est en nous basant sur la mise en œuvre progressive de ce droit au logement que le Québec s'est engagé, donc, à respecter, que nous avons analysé le projet de loi n° 31.

Or, au moment où se... J'arrive... Au moment où la situation du logement se détériore et où ce droit subit de nombreux reculs, nous constatons que le projet de loi n° 31 va en sens inverse d'une mise en œuvre progressive. Donc, le projet de loi, rappelons-le, survient dans un contexte bien particulier : rareté de logements locatifs partout au Québec, flambée du prix des loyers, hausse des évictions et des reprises de logements, des centaines de ménages locataires ne réussissant pas à se reloger autour de la période des déménagements et même deux mois plus tard, comme on le sait actuellement, hausse de l'itinérance visible et cachée.

Le projet de loi n° 31 a été présenté comme un projet de loi devant rétablir l'équilibre entre propriétaires et locataires. Or, ce n'est pas le cas. Seulement, l'article deux et, dans une moindre mesure, les articles trois, quatre et cinq du présent projet de loi pourraient contribuer à cet objectif. Pour cette raison, il serait plus avisé, selon nous, de retirer le projet de loi pour le remplacer par un autre plus adéquat et de déposer le plan d'action gouvernemental en habitation avant de déposer ce projet de loi. C'est la raison pour laquelle, dans notre mémoire, vous ne trouverez pas une longue liste de recommandations détaillées, comme nous en avons l'habitude. Nous apportons quelques recommandations qui rendraient le projet de loi plus acceptable si le gouvernement décidait d'aller de l'avant avec l'adoption du projet de loi. Nous pensons que ça prend une vision globale. D'ailleurs, nous proposons l'adoption d'une politique globale basée sur le droit au logement, et c'est une demande qui est portée par 500 organisations sociales au Québec. C'est une demande qui est portée par la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, qui a aujourd'hui déposé aussi à la commission son mémoire. Donc, voilà pourquoi nous avons plusieurs doutes sur la possibilité d'atteindre l'objectif poursuivi ou annoncé du projet de loi n° 31.

Concernant les évictions. D'abord, les collègues du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec qui nous suivent vous en parleront plus longuement probablement. Ils ont fait de nombreux rapports sur le sujet depuis quelques années, mais depuis quatre ans, les évictions de toutes sortes sont en hausse....

Mme Laflamme (Véronique) :...les fameuses rénovictions se sont étendues à plusieurs régions. Les évictions amènent carrément des locataires à l'itinérance, comme certains l'ont appris la semaine dernière. Donc, ça fait quelques années déjà qu'on demande l'adoption de mesures pour mieux protéger les locataires contre les évictions.

Le projet de loi offre une avancée à cet égard là, mais les nouvelles protections offertes contre les évictions et les reprises de logements sous de faux motifs sont insuffisantes. Je vais revenir en fin de l'audience, si j'ai le temps, sur le sujet. Donc, il faut élargir les protections contre les évictions.

Au niveau de la cession de bail dont vous avez entendu largement parler, évidemment, nous demandons... nous demandons aussi le retrait de l'article du projet de loi. Les recours légaux actuels basés sur la section j du bail qui oblige en principe les propriétaires à indiquer le montant le plus bas payé pour le loyer au cours des 12 derniers mois sont insuffisants. Donc, il faut trouver un moyen pour que finalement la loi soit appliquée. Et pour le faire, ça prendrait un registre des loyers, comme plusieurs autres organismes sont venus vous le dire au cours des audiences. Le dernier rapport de la SCHL est clair à ce sujet, les hausses abusives se produisent souvent au changement de locataires.

Au niveau de la clause f, qui a fait couler beaucoup d'encre dans les dernières années, à raison, et qui a occasionné de nombreux appels dans les comités logement, entraînant des hausses de 200 $, 300 $ parfois dans des municipalités où il y a un quasi-monopole. Je pense à Saint-Calixte, qui avait... dont il avait été question dans les médias. Donc, il faut s'attaquer à cet enjeu. Malheureusement, le projet de loi maintient le privilège permettant aux propriétaires de logements construits depuis moins de cinq ans d'échapper aux règles du tribunal administratif du logement.

Je passe rapidement sur ces enjeux pour attirer votre attention sur d'autres enjeux qui ont fait couler beaucoup moins d'encre sur le projet de loi no 31, mais qui nous inquiètent grandement. Il s'agit de modifications à la Loi de la Société d'habitation du Québec et à la Loi de la Communauté métropolitaine de Montréal concernant le logement social. Nous sommes vraiment inquiets de ces modifications apportées dans le projet de loi aux lois de la SHQ et de la CMM, qui semblent écrites pour s'adapter au fait qu'il y a eu au Québec un changement de programme dans les derniers mois et que, finalement, l'abandon du programme AccèsLogis, seul programme destiné spécifiquement au logement social hors marché privé depuis 25 ans au Québec, était abandonné. Mais les modifications finalement apportées au projet de loi élargissent des mesures qui étaient jusqu'ici prévues pour protéger le développement du logement social au marché privé. Et là, je parle des modifications à la loi de la CMM.

Dans le projet de loi no 31, aux articles 8 et 9, notamment, on modifie presque partout le terme «logement social» pour le remplacer par le terme «habitation». Donc, ce n'est pas la même chose et ça peut avoir des conséquences, notamment quand on regarde l'article 153.1 de la loi de la CMM qui prévoit le remboursement par la CMM de la contribution de base pour des projets de logement sans but lucratif, des coopératives, des OBNL et des logements réalisés par les offices d'habitation. Donc, le projet de loi ferait en sorte qu'un tel remboursement pourrait être fait pour d'autres types. Donc, on pense à des condos, des maisons de ville, etc., ça dans un contexte où les besoins sur le territoire de la CMM, vous le savez probablement, sont grands. On parle de plus de 100 000 ménages locataires ayant des besoins impérieux de logements, avec des revenus largement en deçà de 25 000 $. Donc c'est à ces besoins qu'il faut pouvoir répondre en priorité. Et on se désole d'affaiblir les mesures législatives qui avaient été mises en place finalement pour encourager le développement de logement social, être élargi finalement au marché privé.

• (16 heures) •

Donc, deuxièmement, les modifications à la Loi de la Société d'habitation du Québec. L'article 19 donc du projet de loi no 31 modifie l'article 62, et ça nous inquiète. Donc, deux éléments dont vous ont probablement parlé les gens de la Fédération des locataires de HLM du Québec. Donc, rapidement, là, la SHQ pourrait dorénavant permettre à des municipalités ou à des offices d'habitation de procéder à l'aliénation de HLM pour d'autres raisons que celles actuellement prévues. On comprend que c'est fait en cohérence, là, avec la volonté de rénover notamment et le nouveau programme de rénovation des HLM. Par contre, même si on reconnaît que, dans certaines situations, il est admissible que des HLM en très mauvais état puissent être cédés pour être reconstruits ailleurs, on est très inquiets dans le contexte actuel. Et on le sait, malheureusement, il y a des endroits où l'adhésion n'est pas la même que ça puisse représenter un danger pour les...


 
 

16 h (version non révisée)

Mme Laflamme (Véronique) :...des habitations à loyer modique bien situées à proximité des services. Souvent, on le sait, le droit... la mobilité de gens à faibles revenus n'est pas la même. Donc, il pourrait y avoir des effets malheureux, notamment en cédant des terrains bien situés pour leur valeur marchande, là, afin de relocaliser ces immeubles-là plus loin. Donc il faut que ça se fasse aux conditions que la Fédération des locataires vous a énoncées, avec l'accord des locataires, évidemment, et sans perdre des unités, des précieuses unités de logement à loyer modique. On le sait, les listes d'attente s'allongent dans certaines municipalités.

Donc, pour nous, il est inacceptable de perdre une seule unité de logements à loyer modique. Et c'est la raison pour laquelle nous sommes alertés par l'autre élément finalement de ce projet de loi qui permettrait que des HLM puissent être aliénés, donc vendus dans le cadre d'un projet visant la réalisation de logements abordables, hein, la fameuse notion de logements abordables, qui a été finalement introduite, hein, très, très en douce, il n'y a même pas trois ans dans la loi de la SHQ, et ça a eu des conséquences beaucoup plus profondes qu'on le pensait peut-être alors.

Donc, pour nous, ça, c'est inquiétant parce que ça veut dire qu'on va... on pourrait perdre des unités à loyer modique qui s'adressent à des ménages à faible revenu pour des projets qui ne s'adressent pas... qui ne s'adresseraient pas aux mêmes personnes. Donc, ce changement-là n'est pas acceptable, selon nous, même s'il peut y avoir d'autres besoins. Mais, dans le contexte actuel, où il faudrait de nouvelles unités de logement à loyer modique, ce n'est pas le moment d'en perdre. Donc, évidemment qu'on va demander que ce soit retiré du projet de loi pour...

Le Président (M. Schneeberger) : 15 secondes.

Mme Laflamme (Véronique) :Excellent. Donc, en conclusion, au lieu d'affaiblir le logement social, on pense que c'est le moment pour le gouvernement québécois de se doter sans plus attendre d'un plan ambitieux permettant son développement sous différentes formes. Le projet de loi annoncé pour cet automne en fournirait l'occasion. Donc, comme je le disais tout à l'heure, on pense que ça devrait précéder logiquement ce projet de loi là. En conclusion, donc, nos attentes sont énormes à l'égard de ce plan d'action. Nos attentes sont énormes à l'égard de la mise à jour économique et financière. On connaît les solutions, donc on espère que les efforts du gouvernement iront au bon endroit et à très court terme.

Je vais conclure en vous citant ledit mémoire de la Commission des droits de la personne qui insiste sur le fait que toute mesure législative liée au logement et toute mise en œuvre de solutions liées au logement devraient être analysées à la lumière du cadre normatif des droits de la personne. Il faut rééquilibrer le rapport de force pour garantir les droits de la personne. Fin de la citation. Je conclurais en disant que le projet de loi n° 31 ne le fait pas. Merci beaucoup de votre écoute.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci beaucoup, Mme Laflamme pour la présentation. Alors, nous allons débuter une période d'échanges avec Mme la ministre. Vous avez environ 16 minutes.

Mme Duranceau : Merci, Mme Laflamme. Alors, jusqu'à présent, on a toujours eu des bonnes conversations, ça fait que j'imagine qu'on va continuer aujourd'hui. Bien, écoutez, je vous ai lu. Le retrait du projet de loi n° 31. On va continuer de parler comme si le projet de loi allait être déposé, question de maximiser notre temps aujourd'hui, mais je veux vous entendre sur différents éléments, là, puis peut-être d'emblée vous rassurer. On a effectivement eu une conversation avec la Fédération des locataires de HLM. Les préoccupations qu'ils ont soulevées, on les a bien notées, puis j'étais d'accord avec eux, là, sur l'essentiel de tout ça. Donc, ça va être revu, là, subséquemment dans la version finale du projet de loi. L'intention, ce n'est vraiment pas de réduire le nombre de logements pour personnes vulnérables. On a eu cette discussion-là ensemble. Puis on va revenir à ce type de logement là spécifiquement, mais en premier, j'aimerais ça... Bon, je comprends, là, la clause F, tu sais, ce n'est pas quelque chose qui... bon, que vous soutenez. Par contre, j'aimerais ça vous entendre. Qu'est ce que... On en a parlé, hein, il faut augmenter l'offre de logements, là, de tous les types de logements, puis c'est ce qui va ultimement avoir un effet bénéfique, là, sur les prix. Mais vous, qu'est ce que vous proposez pour augmenter l'offre ou pour créer un contexte où on va en avoir des constructeurs qui viennent... autre le fait qu'il faut que le gouvernement le finance, là, comme, le marché, là?

Mme Laflamme (Véronique) :Bien, c'est une grande question. Mais justement, dans le débat actuel, et c'est... La même discussion a lieu à l'échelle pancanadienne, hein, il faut le dire. Il y a des gens qui disent que pour se sortir de cette crise du logement, il faut augmenter l'offre et il faut encourager le privé à construire. Et d'autres qui disent que... et nous en sommes, que seulement s'attaquer à l'offre sans regard à ce qu'on construit ne réglera pas le problème, il va contribuer à augmenter le problème d'inabordabilité...

Mme Laflamme (Véronique) :...et la clause F contribue, mais la partie de la clause F concernant les immeubles construits depuis moins de cinq ans contribue à cet accroissement rapide du loyer moyen du marché, hein, il faut se le dire. Donc, si on inonde le marché de nouveaux logements trop chers en plus que finalement on permet de se soustraire finalement à la fixation... en fait à la fixation des loyers ces logements-là, on va se retrouver avec des logements, peut-être davantage de logements, mais avec des logements trop chers pour la capacité de payer des ménages locataires. Et c'est ça qui se passe actuellement quand on regarde d'autres villes canadiennes, quand on regarde ce qui se passe avec une ville comme Montréal où, dans les deux dernières années, on a eu un taux d'inoccupation en haut du seuil d'équilibre du marché avec un boom immobilier.

Mais les logements construits ne correspondaient pas nécessairement aux besoins. Alors, on avait des taux d'inoccupation plus grands pour ces logements-là que pour les autres types de logements. Donc, il y a des gens qui sont quand même retrouvés sans logement au 1ᵉʳ juillet parce que les logements disponibles ne correspondaient pas à leur capacité de payer. Et c'est pour ça qu'on répète que la crise du logement, ce n'est pas qu'une question de taux d'inoccupation, c'est une question aussi de capacité de paiement, une des composantes du droit au logement. Et donc une autre solution, et c'est la même, on pense que si on inonde le marché de logements sans but lucratif, bien, on va contribuer à augmenter l'offre, mais on va contribuer à augmenter l'abordabilité. Et ça s'est déjà fait, hein?

Avant que le fédéral ne se retire dans les années... en 94, on a déjà construit, au Québec, de 8 000 à 10 000 logements sociaux par année, sous différentes formes : des coopératives d'habitation, des organismes sans but lucratif d'habitation, des habitations à loyer modique. On est capable de faire ça. Et d'ailleurs, on talonne le gouvernement fédéral également pour qu'il fasse descendre l'argent. Mais on est capable de faire ça et on pense que c'est là qu'il faut regarder parce qu'actuellement on craint vraiment les conséquences de l'explosion des loyers dans plusieurs régions. Et déjà, on a un aperçu très inquiétant, notamment quand on regarde la hausse de l'itinérance visible et invisible, mais aussi de la précarité des locataires qui n'ont pas le choix d'aller dans les banques alimentaires, même en travaillant à temps plein parce que le logement est trop cher finalement. Donc, c'est à ça qu'il faut s'attaquer.

Donc, c'est la raison pour laquelle on pense que les ressources publiques dans le fond doivent servir d'abord à ce secteur-là sur lequel personne ne fait de profits. Et ces logements-là qui sont construits, ça vient finalement grossir notre patrimoine collectif. On en a un au Québec, heureusement, il faut le grossir ce patrimoine collectif. Et notre grande solution, c'est qu'on se dote de cette perspective, là, d'augmenter le nombre de logements sociaux hors marché privé pour répondre à la diversité des besoins et avoir une alternative au monopole parce que 90 % des logements locatifs sont des logements privés. Ça ne laisse pas grand-chose finalement pour les gens pour qui ce marché-là ne répond pas aux besoins.

Mme Duranceau : Bien, je vous entends bien sur la l'importance, là, que le gouvernement intervienne où il a à intervenir au niveau du logement pour les personnes en situation de vulnérabilité.

Si on conclut sur la clause F, ça, c'est pour le marché autre, là, privé, puis c'est une mesure qui vise à encourager finalement les propriétaires à construire, puis il en faut de tous les types de logements, je pense. Ça fait que, là, on n'a pas d'autre proposition de votre part, là?

Mme Laflamme (Véronique) :Oui. Bien, en fait, c'est qu'ils ne l'utilisent pas pour la bonne raison. C'est ça qui est malheureux avec la clause F.

Mme Duranceau : Mais les risques, qu'est-ce que vous faites de leurs risques de construction, là, quand ils partent un projet et que tu ne sais pas l'année 1, 2, 3, nécessairement quels vont être tes revenus...

Mme Laflamme (Véronique) :Bien, il faut trouver une façon...

Mme Duranceau : ...et tes dépenses surtout, là?

Mme Laflamme (Véronique) :...que les loyers puissent être fixés par le tribunal et que... C'est de soustraire complètement des logements finalement à la juridiction du tribunal, c'est assez particulier.

• (16 h 10) •

Mme Duranceau : O.K. ça fait que vous gardez la position initiale...

Mme Laflamme (Véronique) :Bien, actuellement...

Mme Duranceau : ...que c'est suffisamment encourageant pour les constructeurs d'aller avec ça?

Mme Laflamme (Véronique) :Bien, les loyers mis en marché sont très chers, hein?

Mme Duranceau : Ils sont fonction des coûts de construction.

Mme Laflamme (Véronique) :Vous pouvez augmenter les coûts comme... comme vous voulez, il faut trouver une façon qu'on ne puisse pas avoir des hausses de 200 $, 300 $, 400 $ dollars comme ça. Et comme je le disais, la raison invoquée, ce qu'on constate dans les dernières années, ça a augmenté peut-être parce qu'il y a eu un boom immobilier dans certaines régions. Mais c'est plus que ça, là, quand on regarde les chiffres le taux d'inoccupation a diminué, les loyers se sont mis à augmenter, puis c'est plus l'appât du gain qui a amené finalement l'utilisation de la clause F que finalement les raisons...

Mme Duranceau : Mais c'est ce qu'on voulait... c'est ce qu'on veut encadrer en obligeant les propriétaires à mettre un pourcentage d'augmentation potentiel, bien, ils annoncent leur couleur. Alors, si ça n'a pas de bon sens... Bien, premièrement, il y a une prévisibilité pour le locataire, puis si ça n'a pas de bon sens, bien, le locataire va dire : Sais-tu quoi, moi, je n'y vais pas à cet endroit-là.

Mme Laflamme (Véronique) :Mais le problème, c'est qu'avec un taux d'inoccupation aussi bas, les locataires n'ont pas tant que ça le choix. Même si c'est annoncé, là, même si on dit je pourrais augmenter, là, de 1 000 $, là, en cinq ans, quand le taux d'inoccupation est à 0,4 %, là, puis là, hein...

Mme Laflamme (Véronique) :...on peut nommer toutes les municipalités, là, Drummondville, Granby, en bas de 1 %, là, est-ce que les gens ont vraiment le choix? Souvent, c'est ça, l'option, ou se retrouver, finalement, sur le divan de la famille, quand tu en as, là. Donc, est-ce que les locataires vont dire : Ah! bien... Moi, je pense que, si j'étais dans la peau de ces personnes-là, je dirais : Je vais prendre une chance. Donc, les gens vont se retrouver avec un problème quand même. Et donc il est là, l'enjeu. Donc...

Et par ailleurs, bien, même si le propriétaire annonce : Je pourrais augmenter jusqu'à 1 000 $, même si, finalement, les coûts ne sont pas plus importants, quand tu dis... Honnêtement, dans le contexte actuel, quand c'est une business, si c'est écrit dans le bail que tu peux aller jusqu'à tant en cinq ans, pourquoi ne pas le faire? Malheureusement, on voit les exemples, là, de propriétaires mal intentionnés à qui...

Mme Duranceau : ...je pense, pas la majorité de tous... De part et d'autre, hein? Les locataires qui ne sont pas des bons locataires puis les propriétaires qui ne sont pas des bons propriétaires, je pense, c'est la minorité, quand même, dans notre écosystème, là.

Mme Laflamme (Véronique) :Bien, sur la clause F, on a vu vraiment des cas effarants, dans les dernières années, se multiplier. Alors, il y a un contexte qui favorise, dans le fond, les abus.

Mme Duranceau : Je suis d'accord. O.K. Alors, on va passer à un autre sujet que la clause F. Vous m'avez parlé, bon, de votre inquiétude face aux logements sociaux puis la... vous avez fait référence, là, à la CMM puis l'utilisation du mot «habitations» versus «logements sociaux», là. On va revoir ça pour calmer... pas calmer, mais être sûr, là, que ça ne crée pas d'effet pervers. Par contre, on en a souvent... on en a parlé ensemble aussi, votre inquiétude, justement, à l'égard du nombre de logements sociaux. Puis, si je voulais répondre à cette inquiétude-là, de quelle manière je pourrais le faire? Mais... Puis là j'aimerais une proposition qui est réaliste. Je sais que vous m'avez écrit 50 000, donc 10 000 sur cinq ans. Réaliste dans un cadre budgétaire où il y a... il n'y a pas... tu sais, il y a plusieurs choses, là, à financer. Qu'est-ce qu'on... Avec quoi on est capable de vivre, là?

Mme Laflamme (Véronique) :Bien, c'est une bonne question. Le 50 000, hein, je dois vous vous rassurer, c'est ce qui est... c'est réaliste parce qu'on l'a déjà fait au Québec.

Mme Duranceau : Oui, mais on n'avait pas de pénurie de main-d'oeuvre comme on l'a en ce moment.

Mme Laflamme (Véronique) :C'est un enjeu.

Mme Duranceau : On n'avait pas une pénurie de logements.

Mme Laflamme (Véronique) :Pour pallier à ça, on pourrait dire que le 50 000 peut inclure également des projets d'achat-rénovation, notamment, donc, dans le fond, d'acquisition. C'est sûr que, dans le contexte de pénurie, pour nous, même si on a compris, là, votre ouverture sur l'acquisition, achat-rénovation pour sortir du marché des immeubles avec des taux d'inoccupation aussi bas pour les raisons que je viens d'exposer dans la réponse précédente, je ne peux pas vous dire qu'il faut aller juste vers l'acquisition, au contraire, si on ne veut pas construire juste du neuf trop cher.

Donc, pour nous, il faut se donner un objectif ambitieux. Notre 50 000 inclut le neuf et l'achat-rénovation sous différentes formes. C'est sûr qu'on pense qu'on est capable, on l'a déjà fait, des 8 000 à 10 000 par année, juste en constructions neuves ou pratiquement. Il y a un contexte particulier, mais nous, on pense que, si on veut donner un grand coup pour préserver une abordabilité au Québec, il faut se donner un objectif de cet ordre-là si on veut répondre aux besoins des ménages à faibles revenus puis aussi aux ménages à revenus modestes dont les revenus dépassent un peu les seuils de besoin impérieux mais qui n'arrivent pas, là, à se loger avec des logements à 2 500 $. Donc, il faut, pour répondre à ces deux types de besoins, avoir une variété de projets qui répondent à ces besoins-là et qu'on ne néglige pas les plus pauvres. Donc, c'est pour ça qu'on dit : Ça prend 50 000. Il faut avoir des coopératives, des organismes sans but lucratif d'habitations qui répondent aux besoins des ménages à faibles et à modestes revenus, mais il faut s'assurer d'avoir un programme de logement social complet, pérenne, qui va nous permettre de s'attaquer aux besoins, finalement, de personnes qui aujourd'hui sont en train, sous nos yeux, de tomber à la rue parce qu'ils sont sur une liste d'attente pendant cinq ans. Donc...

Mme Duranceau : ...l'écosystème, là, ça demeure les organismes à but non lucratif, là, parce qu'avec les chiffres puis les coûts de construction actuels, les taux d'intérêt actuels, ça ne fonctionne pas pour le privé, à moins qu'ils décident d'être dans la philanthropie. Donc, moi, les acteurs, les acteurs présents dans l'écosystème, c'est encore les partenaires pour la suite, là.

Mme Laflamme (Véronique) :Mais, en fait, c'est qu'il faut se poser la question sur le... Là, il reste... il y a un programme en place du côté québécois, qui est le PHAQ. Est-ce qu'il est fait pour permettre à ces projets-là, finalement, de se réaliser rapidement? La réponse, pour nous, c'est non. Vous avez annoncé, on a lu dans la presse ce matin, des modifications, plusieurs modifications qui pourraient se faire rapidement au PHAQ. Donc, c'est sûr qu'il faut aller vers des améliorations pour que, finalement, il y ait une plus grande contribution gouvernementale pour que les projets n'aient pas à cogner à plusieurs portes. Mais on pense qu'il faut s'assurer aussi qu'on donne les moyens...

Mme Laflamme (Véronique) :...de construire des logements qui répondent aux besoins les plus urgents, comme on l'avait avec un programme HLM à l'époque. L'ICRL du fédéral, ça finance 100 % des coûts de réalisation. Pourquoi, si le fédéral peut le faire, on ne peut pas le faire? Là je suis d'accord que ça n'inclut pas le supplément au loyer, ce que faisait le programme HLM, mais je pense qu'on est... en est... Il y a des solutions qui sont mises de l'avant depuis plusieurs mois, puis il faut regarder vers ça parce que, finalement, si on veut s'assurer que ces besoins-là soient répondus puis qu'on ait un filet social, la seule manière d'en être certain, c'est d'avoir un programme finalement social, un programme de logement social qui tient puis qui nous donne ces garanties-là.

Mme Duranceau : Je vous amène sur un autre sujet où, dans le cadre du projet de loi, on permet à toute partie d'être représentée par toute personne, par toute personne de son choix devant le Tribunal administratif du logement. Puis je me demandais si, justement, cette mesure là, ce n'est pas quelque chose qui est intéressant pour une association comme la vôtre, justement, en matière d'aide aux locataires.

Mme Laflamme (Véronique) :C'est une excellente question. Et je pense que vous allez entendre deux points de vue cet après-midi avec le Regroupement des comités logement et associations de locataires qui nous suit et l'Association des juristes progressistes également. Pense qu'il faut faire attention. Ça peut être vu comme une mesure qui favoriserait, augmenterait l'accès à la justice, mais il y a des inquiétudes à avoir sur est ce que ça pourrait être rémunéré, ce type de représentation là? Et surtout, est-ce qu'on s'attend à ce que des groupes, justement, les comités logement et associations de locataires fassent ça alors qu'ils sont... qu'ils sont complètement débordés?

Et on va se le dire, là, les...C'est pratiquement du bénévolat, là, travailler dans un comité de logement ou une association de locataires. Avec les demandes qui augmentent, là, des rénovations qui se multiplient, les appels, les hausses de loyer, les... les groupes, honnêtement, ne pourraient pas faire ça. Donc, nous, on se rallie, là, à la position qui est contenue dans la mémoire du Regroupement des comités logement et associations de locataires sur ce sujet-là. On pense qu'il faut faire attention à cette mesure-là parce qu'on a l'impression que ce ne serait peut-être pas un gage, là, de la meilleure accessibilité à la justice. Et il faudrait voir qui pourrait faire ça.

Mme Duranceau : O.K. Parfait. Bien, écoutez, je pense que, de mon côté, ça... Ah! mais ça va. Première question. Oui.

Mme Laflamme (Véronique) :Puis est-ce que ça se fait de... Là, je ne sais pas si votre temps n'est pas écoulé.

Mme Duranceau : Posez-moi les questions.

Mme Laflamme (Véronique) :Bien, moi, j'ai une question parce que je... Moi, je n'ai jamais réussi à partir mon chrono tout à l'heure, et il y avait un élément sur les modifications à la loi de la SHQ qui était contenu dans notre mémoire et sur lequel je n'ai pas pu intervenir. C'est la... Puis là, bien, c'est vous qui en avez dit plus qu'il y en a dans le projet de loi quand vous avez été interviewé sur le sujet, là, par Le Devoir, quand le projet de loi a été déposé. C'est au niveau des modifications qui feraient en sorte que la SHQ pourrait dorénavant vendre ses services en fournissant à tout intervenant du secteur de l'habitation, moyennant considération et dans un objectif d'autofinancement, l'expertise et les services requis. Et là, en conférence... Lorsque vous avez été interpelée, on disait que ça visait à introduire dans la législation la notion de profitabilité en donnant comme exemple les garanties de prêts, dans le fond, qui étaient accordées par la SHQ. Et là, nous, on se questionnait, puis sur l'objectif parce que peut être qu'on était échaudés, là, par les modifications récentes à la loi de la SHQ. Puis là, bien, on s'est dit : Oh!

Mme Duranceau : On n'aura plus de temps.

Mme Laflamme (Véronique) :O.K.

Mme Duranceau : Pour vous répondre...

Le Président (M. Schneeberger) : 10 secondes.

Mme Duranceau : Pour vous répondre rapidement, c'est pour donner de l'agilité sur le plan financier à la SHQ. Puis on finance déjà les projets. On ne va pas leur rajouter une charge par-dessus parce que, là, on va se surcharger nous-mêmes. Alors, c'est une agilité financière globale quand ce sera pertinent, mais certainement pas pour des projets qu'on finance par ailleurs, là.

• (16 h 20) •

Le Président (M. Schneeberger) : Merci. Alors, nous allons maintenant du côté de la... l'opposition officielle, pardon, je voulais la première opposition, mais l'opposition officielle. Vous êtes la première quand même, mais, bon, c'est l'opposition officielle. Alors, vous avez 10 mi 24 s. Mme la députée de Mille-Îles...

Mme Dufour : Merci, M. le Président. Et Mme Laflamme, merci pour votre exposé. Je peux vous rassurer, je vais poser beaucoup de questions sur l'autofinancement, l'objectif d'autofinancement de la SHQ lors de l'étude détaillée. Donc, il y aura... on aura sûrement plus de détails rendus là. Je vous remercie, comme je vous le disais, pour l'exposé que vous avez fait. J'ai trouvé ça intéressant que vous parliez du droit au logement et que vous disiez : Bien, c'est bien beau d'augmenter l'offre, mais sans regarder ce qu'on construit, on pourrait s'en aller dans le mur. Puis je pense que les chiffres qu'on a vus lors du grand sommet de Centraide il y a quelques mois le montraient. Le taux d'inoccupation à Montréal dans les logements très, très chers est beaucoup plus élevé. Il est bien au-delà du seuil d'équilibre. C'est vraiment dans les loyers les moins chers qu'on trouve le manque de logements le plus criant. Je vais aussi citer la...

Mme Dufour : ...la mairesse de Gatineau qui est venue nous voir ce matin, qui est venue nous parler ce matin virtuellement, puis elle disait : Bien, ce n'est pas une dépense, le logement social, c'est un investissement, puis ça, on l'a bien vu vendredi avec le sommet sur l'itinérance. Donc, je pense que c'est très, très noble ce que vous défendez comme cause, et il faut absolument qu'on soutienne les loyers les plus démunis.

Par contre, il y a une autre réalité qui est les coûts, les coûts d'intérêts qui ont monté énormément, les coûts financiers qui font en sorte que certains propriétaires se ramassent avec des paiements qui vont au-delà de ce que les loyers leur rapportent. Et là on met dans la précarité aussi des propriétaires. Donc, ça, c'est une réalité qu'on doit tenir en compte puis qu'on doit garder, parce qu'on a besoin aussi de gens qui mettent leur logement sur le locatif. Mais on ne peut pas non plus se permettre qu'ils se ramassent à la faillite pour autant. Ça fait qu'il y a tout un équilibre. Ce n'est pas facile.

Je voudrais peut-être vous entendre. Vous avez parlé des reprises au TAL, ça, c'est intéressant, vous avez parlé comment qu'elles avaient augmentées, dans votre mémoire, de 1 500 à 2 500 en quelques années. Est-ce que vous croyez que les pénalités qui sont proposées dans le projet de loi pourraient venir ralentir ça? C'est sûr que les pénalités, je pense, c'est plus pour des évictions, mais, si admettons qu'on avait le même genre de pénalités mais pour des reprises de logements, est-ce que c'est quelque chose qui pourrait venir, disons, ramener un peu d'équilibre là-dedans?

Mme Laflamme (Véronique) :Bien, effectivement, la question des indemnités, c'est une demande, là, qui est portée par les comités logement depuis plusieurs années, donc c'est important. Et c'est... oui, ça a été vu comme une avancée dans le projet de loi n° 31, mais, comme vous l'avez dit, le problème c'est que ça ne concerne pas les reprises, donc... et les reprises... au moment où on se parle, les cas sont plus élevés que, finalement, les évictions, et que, dans le contexte actuel, les reprises sont souvent pratiquées pour de mauvaises raisons. Donc, il faut s'attaquer à ça.

Il y a des propositions qui sont mises de l'avant, là, notamment dans notre mémoire et dans celui-là du RCLALQ et de l'AJP qui vont aussi être entendus aujourd'hui. Mais c'est sûr qu'il faut qu'il y ait une... il faut qu'il y ait un contrôle automatique, là, parce que ce n'est pas nouveau, hein, que cette brèche-là est utilisée depuis longtemps, mais là ça se multiplie. Et, le contexte actuel où le marché est déséquilibré, on voit, dans le fond, la loi... les brèches dans la loi, les façons de contourner finalement. Bien là, quand il y en a, on... le mot se passe, puis, en tout cas, elles sont utilisées.

Donc, c'est pour ça qu'il faut, oui, augmenter les indemnités en cas de reprise. Il faut les augmenter, parce que finalement les gens qui sont victimes de ces reprises et de ces évictions sous de faux motifs, souvent ce sont des personnes... pas toujours par contre, mais souvent ce sont des personnes qui habitent leur logement depuis un peu plus longtemps, qui vont payer un logement un peu moins cher que sur le prix du marché. Mais, quand ces personnes-là se font évincer, ce qu'elles peuvent trouver, là, c'est le prix du loyer moyen des logements disponibles, donc c'est beaucoup plus cher, donc... Et, à cet égard-là également, là, comme c'est indiqué dans notre mémoire, on appui également, là, la position portée aussi par le Regroupement des comités logement et associations de locataires à cet effet-là, qu'il faut appliquer les indemnités aussi aux reprises et s'assurer qu'elles sont augmentées...

(Interruption)

Mme Laflamme (Véronique) :Oh! excusez, c'est le fameux minuteur qui n'a jamais fonctionné. Je m'excuse.

Mme Dufour : Parfait. Je voudrais peut-être vous s'entendre sur... Vous proposez, à la page 10 du mémoire, là, un moratoire sur les évictions pour subdivision. On est en pénurie de logements. Est-ce qu'une subdivision n'amènerait pas plus de logements? Peut-être juste comprendre l'idée du moratoire.

Mme Laflamme (Véronique) :Bien, en fait, c'est qu'encore là, souvent, ce sont des prétextes. Dans le fond, les... souvent, hein, ça a été... par le passé, subdivision, ça a pu être utilisé pour justement transformer des grands logements en petits logements, quand finalement il a commencé à avoir moins de grandes familles, etc. Que ce soit pour agrandissement ou pour subdivision, actuellement, ces évictions-là qui sont permises par la loi sont utilisées plus souvent qu'autrement, là, pour finalement déloger les locataires et augmenter le prix des loyers. Donc, on n'est pas contre d'ajouter des logements, mais il y a un enjeu actuellement, c'est que les évictions, quand elles sont permises, elles sont utilisées comme prétexte pour augmenter le prix des loyers.

Et on pense que ça prendrait un moratoire dans le contexte où il y a un taux d'inoccupation si bas, comme ça a été le cas, hein, pour d'autres types. Par exemple, les transformations des condos divises, dans certains arrondissements, c'est permis, dans le fond, quand il y a... et il y a des moratoires, quand les taux d'inoccupation, par exemple, sont en bas de 3 %. Par contre, un des éléments au niveau des évictions qui est important selon nous, c'est les évictions pour changement d'affectation, même si on demande que l'ensemble, là, des...

Mme Laflamme (Véronique) :...Des évictions permises par la loi et qu'il y ait un moratoire dans le... quand le taux d'inoccupation est en bas de 3 %. Mais l'hébergement touristique, minimum du minimum, il ne faudrait pas que ça soit un prétexte... que ça ne soit pas, dans la loi, prévu qu'on peut changer d'affectation pour un hébergement touristique. Et vous avez, tout le monde, entendu parler de cas, par exemple, dans Hochelaga-Maisonneuve, de locataires évincés pour un Airbnb. Ça fait dur. Et ça, il faudrait que... On pourrait, là, utiliser le projet de loi n° 31 pour modifier ça.

Mme Dufour : Oui, effectivement. Avec la nouvelle loi qui est rentrée en vigueur vers la fin de... dans le fond, au mois de juin, là, est-ce que vous avez, vous continuez à avoir des cas d'éviction pour hébergement touristique?

Mme Laflamme (Véronique) :Bien là, récemment, là, je pourrais difficilement vous répondre avec des chiffres précis, mais on peut quand même procéder au changement d'affectation pour transformer en hébergement touristique. Et le danger, c'est que là, on pourrait prétexter un hébergement touristique à long terme. Et on peut afficher sur Airbnb un logement pour 32 jours. Et là, quand le but, c'est de faire plus d'argent, bien, il y a une fenêtre à utiliser, bien, on peut l'utiliser.

Donc, je... Comme on constate, là, depuis quelques années déjà, là, que tous les trous, finalement, sont utilisés pour, finalement, évincer des locataires pour faire souvent plus d'argent, on pense que la question de... Cette question-là est particulièrement scandaleuse dans un contexte où on perd des logements locatifs d'une part, alors qu'on en a besoin cruellement, et d'autre part, que les prix qui augmentent ne redescendront pas, hein? Ça fait que les anciens Airbnb affichés pour louer sur le marché régulier, là, quand on voit les photos puis les prix qui viennent avec, on en a vu beaucoup pendant la pandémie, là, bien, ils n'étaient pas au loyer moyen du marché, là, ces logements-là.

Mme Dufour : C'est évident. Je vais passer la parole à ma collègue la députée de La Pinière.

Le Président (M. Schneeberger) : ...

Mme Caron : Merci. Alors, il y a une donnée qui m'a interpelée dans le haut de la page quatre de votre mémoire, où vous dites que le nombre d'évictions de locataires, notamment dans des résidences privées pour aînés, donc les RPA, est passé de 249 en 2020 à 1 378 en 2022, donc en deux ans, seulement. Est-ce que... Parce que vous dites «notamment dans les RPA», est-ce que c'est... Les chiffres que vous donnez dans le mémoire, c'est pour l'ensemble ou c'est... Est-ce que... puis, si c'est pour l'ensemble, est-ce qu'il y a une majorité de personnes aînées qui sont concernées par ça?

Mme Laflamme (Véronique) :Je n'ai pas de chiffres sur le sujet. D'ailleurs, je vous invite à questionner le groupe, le regroupement qui passe après nous, qui a réalisé, dans le fond, là, l'enquête la plus récente sur les évictions. Je ne pense pas qu'on ait de données précises sur les locataires aînés, donc...

Par contre, en RPA, d'une part, les changements d'affectation ont un effet très grave, là, sur les locataires. Et c'est un enjeu qui est «touchy» dans le sens où on sait bien, là, qu'il y a tout un contexte, là, autour de ça. Mais on l'a dit, lors de la dernière... L'avant-dernière ou la dernière audience, quand on est venus en commission parlementaire ici, on a dit : il faudrait empêcher, dans le fond, les changements d'affectation. Finalement, la loi n'est pas allée aussi loin, puis on voit que le problème a continué.

Donc, une des raisons pour laquelle on demande un grand chantier de logement social, hein?, en grand nombre, là, c'est notamment parce qu'il faut faire du logement social pour les personnes aînées. Il faut faire des RPA sans but lucratif, mais juste des logements, hein?, autant des HLM pour aînés. Dans plusieurs villages, là, c'est là où les gens ont les moyens d'aller, finalement, et on pense que ça, c'est une façon de s'assurer qu'on va avoir un endroit pour loger décemment les gens.

Mais il faut s'attaquer à la question des évictions de locataires, des changements d'affectation de RPA. Et les locataires aînés, je sais que vous allez recevoir une proposition plus tard.

• (16 h 30) •

Le Président (M. Schneeberger) : 30 secondes.

Mme Laflamme (Véronique) :J'ai lu dans le mémoire de l'Association des juristes progressistes, c'est une demande qu'on a déjà faite. Il faudrait élargir les protections, dans le Fond, législatives sur les... qui s'adressent aux locataires aînés, minimalement, pour diminuer l'âge des personnes qui sont protégées. Mais il faut s'inquiéter de ça. Et elles sont souvent les premières visées en raison de la raison... De la durée pour laquelle elles habitent leur logement et du fait qu'elles habitent dans un logement peu cher.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci beaucoup. Alors, nous allons maintenant du côté de la deuxième opposition, et, député de Laurier-Dorion, vous avez un trois minutes 28 s.

M. Fontecilla : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Laflamme. Merci beaucoup d'être ici.

Écoutez, on sait que le FRAPRU est très actif, là, autour de la crise du logement du 1er juillet, là, où vous êtes dans... Vous êtes très vocaux, là, autour de cette crise-là, des sans-logis. Ça s'apparente un peu à... bien, à des maisons... à des gens qui n'ont pas un toit, là. Et d'autre part, tantôt, vous avez abordé une thématique...


 
 

16 h 30 (version non révisée)

M. Fontecilla : ...l'offre insuffisante versus l'abordabilité. Je ne sais pas si c'est... et je crois que c'est le thème que vous avez utilisé, là, et on vient d'apprendre, la semaine dernière, là, qu'il y a autour de... dans le dénombrement des personnes en situation d'itinérance, il y a 22 % des personnes qui sont devenues en situation d'itinérance suite à une expulsion. Est-ce que la construction de plus de logements privés et à qui on va appliquer la clause F, là, pourrait régler cette... ou, en tout cas, contribuer à régler la crise de l'itinérance qu'on connaît au Québec?

Mme Laflamme (Véronique) :Bien, la réponse est non. Merci pour la question. C'est sûr que nous, on regarde les gens. On parle autour du 1ᵉʳ juillet, du 1er août, du 1ᵉʳ septembre avec des locataires qui se retrouvent, là, en situation de difficulté. C'est sûr que, comme je le disais tout à l'heure, même quand il y a des logements disponibles qui sont trop chers, ça n'aide pas les gens à signer un bail. Donc, et quand on regarde les causes invoquées, là, pour les expulsions des locataires qui étaient devenus, en fait, en situation d'itinérance, lors du dénombrement de 2022, ça va sûrement avoir augmenté en 2024, il y avait la question des évictions frauduleuses, hein, des reprises de possession, mais il y avait aussi les enjeux de non-paiement, et il faut nommer ce problème-là. Il y a des gens qui n'arrivent plus à le payer, leur logement parce que les logements sont trop chers.

Alors, c'est sûr que la clause F, qui... la part qui concerne, là, les logements en fait construits depuis moins de cinq ans, elle a un effet sur finalement la difficulté des ménages à payer le loyer. Effectivement, ça a été mentionné tout à l'heure. Ce n'est probablement pas des ménages à très faibles revenus qui ont les moyens de se payer un logement neuf, mais on contribue à mettre en situation de plus grande précarité des locataires qui avaient peut-être des revenus un peu plus élevés, qui pouvaient se payer le logement neuf à 1 500 $, 2 000 $, 2 500 $ mais que la hausse de 300 $, ça va être de trop. Et on met... on expose ces gens là à se retrouver aussi dans des contextes de non-paiement de loyer.

Pour revenir à l'autre élément de votre question, bien non, les logements nouvellement construits ne régleront pas le problème de ces ménages locataires, finalement, qui tombent en situation d'itinérance. Et on avait mis en lumière déjà ces données-là, là, je ne le sais pas par cœur, mais, pour vous donner une idée, c'est plus de 50 000 ménages, là, locataires qui, lors du dernier recensement, payaient plus de 80 % de leur revenu pour se loger, au Québec, la norme devrait être de 30 %. Donc, c'est... on le répète depuis des années, les gens, s'il arrive une petite hausse de loyer, s'il arrive un frigo qui lâche, un problème dans la famille, une séparation, les gens sont à risque, finalement, de se retrouver à la rue, parce que, quand ils ont besoin d'avoir un logement social, bien, tout ce qu'on peut leur dire, c'est : Mettez-vous sur la liste d'attente. Et je serais curieuse de savoir combien, parmi les personnes qui sont devenues en situation d'itinérance dans les dernières années, il y en a qui sont inscrits sur une liste d'attente...

Le Président (M. Schneeberger) : En terminant.

Mme Laflamme (Véronique) :...quand on sait que la moyenne, c'est cinq ans, à Montréal.

Le Président (M. Schneeberger) : Ça va? Alors, nous allons du côté du député des Îles-de-la-Madeleine pour deux minutes 38.

M. Arseneau : Merci, Mme Laflamme. Bon, je comprends que vous suggérez le retrait du projet de loi n° 31 en disant : Ça ne répond pas à la crise actuelle, puis il faudrait une stratégie beaucoup plus globale pour l'attaquer. La stratégie viendra, on l'espère. Le projet de loi, j'imagine qu'on va devoir continuer à l'étudier, mais j'aimerais... Et j'apprécie le fait que, malgré le fait que vous avez certaines réserves importantes par rapport au projet de loi, vous... quand même vous suggérez des pistes intéressantes. Puisque vous le faites si bien, là, vous maîtrisez si bien le dossier, quand vous parlez du logement social versus l'habitation versus le logement abordable, là, en quelques... sans faire de la sémantique, là, pourquoi c'est si important pour vous de distinguer les choses?

Mme Laflamme (Véronique) :Excellente question, parce que ce débat sémantique là bouge très vite au Québec, hein? Je le disais, la loi de la SHQ a été modifiée en 2020 seulement pour introduire le vocable "logement abordable". Donc, c'est que tout ça est très nouveau. C'était un terme qui était utilisé davantage au fédéral par le passé, donc le logement social, traditionnellement, au Québec, ça a été... ce qu'on considérait comme du logement social, c'est du logement hors marché privé, hein? Dans le fond, la définition, là, c'est du logement sur lequel on ne fait pas de profit, qui n'est pas sur le marché privé. Il est donc social. Parfois, les gens vont comprendre, logement social égale habitation à loyer modique. Ce n'est pas la même chose. Pour nous, l'habitation dans le fond, qui est... est hors marché privé, qui est une coopérative et qui finalement répond à des besoins de ménages à modeste revenu, c'est une habitation sociale, mais donc...

Pour répondre à ce débat sémantique, dans les dernières années, l'utilisation de logement social et communautaire a été utilisée par certains et certaines. Mais nous, quand on parle de logement social, on englobe les trois tenures de logement social telles que reconnues...

Mme Laflamme (Véronique) :...notamment dans le cadre de référence sur le soutien du logement social et communautaire, auquel ont adhéré la SHQ et le MSSS, notamment, donc... Mais une chose est sûre l'habitation, ce n'est pas ça que ça veut dire, et le logement abordable, bien, ça peut inclure du logement social, mais ça ne le garantit pas. Et c'est là la préoccupation qu'on a.

M. Arseneau : D'accord. Vous avez parlé... Rapidement, les évictions forcées, vous dites : Bon, le projet maintient cette possibilité-là d'évincer les locataires pour subdiviser, agrandir et changer d'affectation. Mais il y a aussi un article qui disparaît, les recours du locataire. Ça, j'imagine, ça doit vous inquiéter aussi, là, l'abolition de l'article du Code civil 1965, qui dit que... bien, qui disparaît essentiellement, là, selon l'article 5... l'article 1966, c'est-à-dire, du projet de loi n° 31.

Mme Laflamme (Véronique) :Attendez un peu, je vais...

Le Président (M. Schneeberger) : En 10 secondes parce que...

Mme Laflamme (Véronique) :Attendez un petit peu, il va falloir que vous me rafraîchissiez la mémoire, parce que là je ne vous suis pas sur ce petit bout là. Je suis désolée.

M. Arseneau : Bien, enfin, on aura l'occasion d'y revenir.

Mme Laflamme (Véronique) :Bon, O.K.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors...

M. Arseneau : Le temps est écoulé.

Le Président (M. Schneeberger) : Oui.

M. Arseneau : C'est bon.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, merci beaucoup pour votre présentation. Alors, nous suspendons quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 37)

(Reprise à 16 h 40)

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, nous reprenons la séance. Alors, je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec. Alors, bonjour à vous deux.

Alors, dans un premier temps, veuillez vous présenter avec votre titre, et par la suite, vous pouvez procéder immédiatement à votre présentation. Vous avez 10 minutes. Et il y aura ensuite une période d'échanges avec les députés. Allez-y.

M. Dussault (Cédric) : Bonjour. Cédric Dussault, co-coordonnateur et porte-parole du RCLALQ. Je suis accompagné de mon collègue Martin Blanchard, qui est aussi co-coordonnateur. Je vais y aller tout de suite. Depuis que le contenu du projet de loi n° 31 a été rendu public le 9 juin dernier, son article 7, qui vise à restreindre le droit de cession de bail pour les locataires, a soulevé l'indignation d'une grande partie de la population québécoise. Il y a de très... Il y a eu des très nombreuses manifestations contre le projet de loi n° 31, dont une, le 22 juin, a rassemblé des milliers de personnes. Pas plus tard que samedi dernier, il y a eu des manifestations aux quatre coins du Québec, et des dizaines et des dizaines d'organisations provinciales, régionales et locales de différents secteurs se sont prononcées en faveur de la préservation du droit de cession de bail. Mais l'indignation de la population face au projet de loi n° 31 ne tient pas seulement à la question de la cession de bail, et c'est autant pour ce qu'il contient, soit des reculs majeurs pour les locataires que ce qu'il ne contient pas, soit une réponse à la grave crise du logement...

M. Dussault (Cédric) : ...qui frappe lourdement l'ensemble du Québec, que le projet de loi n° 31 choque autant. Si l'intention de retirer un droit au locataire, aussi limité soit-il, suscite autant la colère, c'est parce qu'il y a déjà un profond déséquilibre dans le rapport de force entre locataires et propriétaires, qui désavantage très nettement les locataires, un déséquilibre que le projet de loi n° 31 ne vient qu'accentuer.

Je dis que le droit de cession de bail est limité. C'est parce que, contrairement à ce qu'on a laissé entendre à cette commission, ce n'est pas un droit qui est très largement utilisé. La cession de bail ne concernerait pas plus que 1 % ou 2 % des baux qui changent de main, chaque année, au Québec, selon une enquête interne auprès des comités logement du Québec. C'est très loin du 25 %, le chiffre avancé par la CORPIQ, dont la méthodologie est douteuse, car c'est un sondage interne auquel ont répondu des propriétaires de plusieurs centaines de logements que sont, pour la plupart, les membres de la CORPIQ. Prenons les chiffres les plus solides que possède le gouvernement. En 2022, seulement 17 causes touchant des cessions de baux ont été entendues au Tribunal administratif du logement. En 2023, nous n'en sommes, actuellement, qu'à 12 causes entendues, donc on aura peut-être une diminution cette année.

Donc, la question à se poser, c'est : Pourquoi est-ce que les locataires tiennent au droit de cession de bail, mais, surtout, pourquoi est-ce que les propriétaires tiennent à ce point-là à s'en débarrasser? Le droit de propriété n'est pas un droit absolu. Il ne donne pas le droit à la discrimination, il ne donne pas le droit d'enfreindre le Code civil du Québec. En effet, le Code civil donne aux locataires le droit au maintien dans les lieux et celui de refuser une hausse de loyer abusive, même lorsqu'il y a un changement de locateur. Tout ça, c'est en théorie, parce qu'en pratique, dans le cadre actuel ces droits-là sont presque systématiquement bafoués. Je vais y revenir.

Réglons une chose tout de suite : si les associations de propriétaires veulent voir disparaître la pratique de la cession de bail, ce n'est certainement pas en raison d'un problème de marchandisation des cessions de baux par les locataires. Cette idée que la marchandisation des baux serait un problème répandu est totalement loufoque. D'abord parce que, je le répète, la cession de bail elle-même n'est pas une pratique à ce point répandue. Ensuite, parce qu'absolument aucune preuve ne vient corroborer cette affirmation des associations de propriétaires voulant qu'un nombre important de locataires monétiseraient leur cession de bail. Ce n'est rien d'autre qu'un écran de fumée, émis pour masquer les véritables motifs pour lesquels le lobby des grands propriétaires souhaite voir disparaître la cession de bail.

En fait, ce que le débat de la cession de bail vient mettre en lumière, c'est l'absence de mécanismes capables de garantir les droits des locataires, qui sont pourtant inscrits dans des textes de loi qui sont adoptés ici même par les élus de l'Assemblée nationale. En l'absence de tels mécanismes, lorsqu'il y a un changement de locataire dans un logement, les propriétaires ont tout le loisir de dicter le montant du loyer. Aussi, l'absence de tels mécanismes engendre un contexte de discrimination rampante. En fait, à l'heure actuelle, à peu près rien n'empêche les propriétaires de refuser un logement à un locataire sur des bases purement discriminatoires. En l'absence de mécanismes pouvant garantir les droits des locataires, pourtant inscrits dans le Code civil et la charte des droits, la cession de bail est devenue, par la force des choses, le seul recours, aussi limité soit-il, qui permet à des locataires d'accéder à un logement dont le loyer n'est pas complètement déraisonnable ou encore à des locataires faisant l'objet de discrimination d'accéder à un logement tout court. En fait, si les associations de propriétaires souhaitent voir disparaître la pratique de la cession de bail, c'est, justement, pour pouvoir continuer de bafouer en toute impunité et sans entrave les droits des locataires inscrits dans le Code civil et la Charte des droits et libertés de la personne, en dictant le montant du loyer et en discriminant à leur guise.

La prétendue libre négociation entre propriétaires et locataires, dans un contexte qui est le nôtre actuellement, elle n'existe tout simplement pas. Il ne peut pas y avoir de libre négociation dans un contexte d'explosion des loyers, dans un contexte où il est presque impossible pour le commun des mortels de trouver un logement qu'il peut se payer sans s'appauvrir, et dans un contexte où bon nombre de locataires vivent sous la menace d'une éviction frauduleuse ou d'une reprise de logement de mauvaise foi. Il ne peut pas y avoir de libre négociation quand vous visitez un logement dont le loyer est beaucoup trop cher pour ce que vous pouvez vous permettre, que le propriétaire n'a pas rempli la clause G du bail... la section G du bail, pardon, mais qu'il y a 60 personnes qui attendent, en arrière de vous, qui n'hésiteront pas à payer ce prix-là, même si, comme vous, elles ne peuvent pas se le permettre, mais que, comme vous, elles n'ont rien trouvé d'autre.

Il ne peut pas y avoir de libre négociation quand ça fait six mois que votre propriétaire vous harcèle et vous menace à chaque jour pour vous forcer à quitter le logement où vous habitez depuis 22 ans, en échange d'une somme d'argent ridicule. Il ne peut pas y avoir de libre négociation quand votre propriétaire vous amène à accepter une hausse de loyer complètement abusive, en vous disant que, de toute façon, si vous n'acceptez pas, il va trouver une façon de vous évincer. Il ne peut pas y avoir de libre négociation, il ne peut certainement pas y avoir d'équilibre lorsque, d'un côté, il y a des personnes qui doivent répondre à un besoin fondamental, celui d'avoir un logement, et, de l'autre, il y a des possédants qui cherchent à maximiser leurs profits, en ayant toute la latitude pour dicter les prix.

Investir dans l'immobilier locatif est un choix, mais un choix que peut se permettre seulement une infime partie de la population québécoise. Par contre, ce n'est pas un choix, pour une mère monoparentale, de payer...

M. Dussault (Cédric) : ...par mois pour habiter dans un sous-sol avec sa fille quand elle dépense déjà une fortune en garderie. Ce n'est pas un choix pour une famille qui a deux revenus de travail à temps plein d'avoir recours au dépannage alimentaire parce que le trois quarts de ces revenus-là passe dans le paiement du loyer. Ce n'est pas un choix de se retrouver à la rue à 63 ans parce que votre propriétaire a décidé de louer votre logement à son fils, un fils qui, étrangement, possède lui-même une belle grande maison à Rosemère. Ce n'est pas un choix de retourner vivre avec un conjoint qui vous a envoyé à l'hôpital plusieurs fois que vous ne pouvez pas aller rester chez vos amies parce qu'elles ont toutes peur de lui, que ça fait déjà plus que deux ans que vous vivez dans une maison deuxième étape, et que des logements dans votre coin. Il n'y en a presque pas, et il n'y en a surtout aucun que vous êtes capable de vous payer. Ce n'est pas un choix de dormir dans son char parce que vous vous êtes fait évincer d'un logement qui va être loin des touristes sur Airbnb, puis que le programme de supplément au loyer, bien, ça ne s'appliquait pas à vous.

Pour tout ce que vous venez d'entendre, le RCLALQ demande non seulement le retrait de l'article 7 du projet de loi n° 31 qui autoriserait les locataires à refuser une cession de bail sans aucun motif, mais aussi l'ajout au projet de loi n° 31 d'articles permettant d'assurer le respect du Code civil du Québec en matière des droits des locataires, notamment en prévoyant la mise en place de mesures de contrôle des loyers comprenant un registre, un registre public obligatoire qui s'appliquerait à l'ensemble des loyers du Québec, ainsi qu'un plafonnement des hausses de loyer annuel qui s'appliquerait même lorsqu'il y a un changement de locataire. En établissant que toute reprise ou éviction de logements doit être soumise au contrôle du Tribunal administratif du logement et que la partie propriétaire doit faire la preuve, après un an, que le projet pour lequel le tribunal a autorisé la reprise ou l'éviction a bel et bien été réalisé.

Le RCLALQ demande également au gouvernement de décréter un moratoire interdisant les évictions et reprises lorsque le taux d'inoccupation des logements est sous la barre des 3 %. Par ailleurs, le RECLAQ croit que les articles 29 et 30 du projet de loi n° 31, qui proposent de modifier l'article 72 de la loi sur le Tribunal administratif du logement afin de permettre aux parties de se faire représenter par un mandataire sans exiger la gratuité infligeraient un sérieux recul aux locataires.

En 2005, la Cour du Québec a obligé la Régie du logement à mettre un frein aux actes juridiques par mandataire avec le jugement Guerrero. La représentation par mandataire avantage les locataires qui peuvent désigner gestionnaires, concierges ou tout autre professionnel pour les représenter et mener la démarche juridique en leur nom. Ces mandats étaient courants avant 2005, et le jugement Guerrero y a mis fin. Ce fut une bonne chose, et il n'est pas désirable de revenir à cette époque. Les locataires n'ont pas les moyens d'embaucher des mandataires professionnels. En conséquence, le RCLALQ demande la modification des articles 29 et 30 afin de n'autoriser le mandat de représentation que par un mandataire membre d'un organisme à but non lucratif, un OBNL à vocation juridique et seulement dans les cas où un tel mandat serait gratuit. Nous demandons aussi que les articles 29 et 30 maintiennent la possibilité que la représentation par mandataire soit effectuée gratuitement par un conjoint, un parent, un allié ou un ami.

Il me reste du temps?

Le Président (M. Schneeberger) : Une minute.

M. Dussault (Cédric) : Une minute, bien, je vais en profiter, justement parce que comme je suis sur le sujet de la représentation par mandataire pour dire que... Répondre à la question comme quoi les comités logement ne sont, dans leur ensemble pour l'instant pas intéressés du tout à prendre ce mandat-là, premièrement, parce que le rôle des comités logement est de défendre l'ensemble des locataires du Québec. Devant un tel mandat, les comités logement devraient avoir à choisir pour... Si les mandats ne sont pas gratuits, les comités logement devraient choisir des locataires qui paient, donc avantager des locataires qui sont plus fortunés. Donc, pour énormément de raisons, on n'a pas encore de position unanime là-dessus, mais on se dirige vers ça. On se dirige vers une position unanime, comme quoi, non, ce n'est pas un mandat la représentation par mandataire qui pourrait être assurée par les comités logement du Québec.

• (16 h 50) •

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, merci beaucoup pour la présentation. Alors, nous allons débuter la période d'échange. Mme la ministre, vous avez 16 min 30 s.

Mme Duranceau : Oui, parfait. Bien, écoutez, merci pour votre présentation. J'aimerais ça savoir si vous avez des statistiques concernant les relations entre locataires, propriétaires parce que ce que vous décrivez, c'est catastrophique, là, ça va mal partout, là. Ça fait qu'est-ce qu'il y a... est-ce qu'on a des pourcentages, là, qui nous disent le nombre de personnes contents versus pas contents?

M. Dussault (Cédric) : Bien, si je suis la méthodologie de la CORPIQ, je peux vous dire que c'est 100 % des locataires qui viennent de voir les comités logement qui sont insatisfaits de leurs relations avec leurs propriétaires.

Mme Duranceau : O.K. Puis ça donne combien de %, ça, de la population locataire au Québec?

M. Dussault (Cédric) : Bien, nous on défend les droits de l'ensemble de la population du Québec. Les associations de locataires sont des groupes citoyens justement de locataires qui se regroupent ensemble pour pouvoir... pour pouvoir se défendre. Les comités logement répondent aux locataires. Il n'y a pas de mouvement citoyen qui est plus représentatif puis il n'y a pas, à l'échelle du Québec...

M. Dussault (Cédric) : ...puis il n'y a pas, à l'échelle du Québec, de groupe qui est plus représentatif que le RCLALQ pour parler au nom des droits... au nom des locataires.

M. Blanchard (Martin) : Si je peux me permettre, on estime qu'il y a environ 100 000 demandes d'information qui sont reçues chaque année par les comités logement et associations locataires du Québec. On ne peut pas prétendre que tous les locataires qui ont des problèmes appellent les comités logement. Donc, on peut dire qu'il y en a au moins 100 000, donc à peu près 10 % des ménages, mais qu'il y en a certainement beaucoup plus en réalité. Ça ne m'étonnerait pas que c'est quelque chose comme un locataire sur trois ou sur quatre qui a des problèmes qui contacte un comité logement ou une association locataires.

Mme Duranceau : Oui. J'imagine, quand ils vous contactent, là, ce n'est pas toujours parce qu'ils veulent s'en aller puis ils veulent... que tout va mal, là.

M. Blanchard (Martin) : C'est une hausse de loyer abusive, c'est d'insalubrité dans le logement, c'est... Ça peut être parfois... Là où ça ne concerne pas nécessairement un propriétaire, c'est lorsqu'il peut y avoir des conflits entre locataires. C'est des situations que l'on constate quand même, malheureusement, dans le domaine locatif, mais ce n'est pas la majeure partie des cas. Au niveau des statistiques qu'on a, sur les compilations, je dirais qu'à peu près facilement la moitié des locataires qui contactent, c'est pour une hausse de loyer abusive, et puis une autre grande partie, c'est des reprises, évictions de logement et des problèmes d'insalubrité.

Mme Duranceau : O.K. Donc, c'est... Pour votre information, le chiffre qui nous a été rapporté par la CORPIQ, sur un sondage fait auprès de locataires et propriétaires, c'est que 88 % de tout ce monde-là s'entend bien.

M. Blanchard (Martin) : Oui. Non, ce n'est pas ça.

Mme Duranceau : Ça fait qu'on est dans... On serait dans le 12 %...

M. Blanchard (Martin) : Ce n'est pas ce que dit le sondage.

Mme Duranceau : Non?

M. Blanchard (Martin) : Ce que dit le sondage, c'est qu'il y en a 88 % qui disent que...

Mme Duranceau : Sont satisfaits.

M. Blanchard (Martin) : Qui sont satisfaits. Mais, même si on va dans les... dans... un peu dans le fond de ça, ce n'est pas exactement ça qu'il a dit. J'espère que le gouvernement ne fonctionne pas par sondages pour ce qui est des relations entre locataires et locateurs. Ce qu'il faut regarder, c'est sur le terrain. Si on regarde au niveau des hausses de loyer, elles dépassent largement le cadre de l'inflation; si on regarde les évictions et les reprises, elles sont nettement en très forte hausse; si on regarde l'insalubrité, on a toujours les mêmes problèmes d'insalubrité, qui ne sont pas nécessairement réglés. Enfin, regardons ces choses-là de face.

Mme Duranceau : Bien, tout à fait, puis c'est ce que j'ai voulu faire d'ailleurs en déposant ce projet de loi là. Mais, d'un naturel positif, là, et généralement, je voulais juste remettre en perspective, là, parce que c'est déprimant pour la population, là, si on dit que ça va mal pour tout le monde. Il y en...

M. Dussault (Cédric) : Bien, la situation, elle est dramatique pour une grande partie des locataires du Québec à l'heure actuelle.

Mme Duranceau : Elle est... Oui, tout à fait, puis c'est pour ça qu'on va retourner au projet de loi. En matière d'évictions... Puis combien de fois mon collègue de l'autre côté de la table m'a interpellée en Chambre pour me parler des évictions puis des situations où des personnes vulnérables se faisaient mettre à la rue, puis ça n'avait pas de bon sens, puis j'en ai convenu avec lui dès les premiers jours en Chambre. Je pense qu'on a des avancées dans le projet de loi en matière d'évictions. Est-ce qu'il y a des choses que vous voulez féliciter?

M. Dussault (Cédric) : Bien, notre proposition, c'est que... Bien, notre proposition, c'est que l'ensemble des reprises et des évictions soient contrôlées par le Tribunal administratif du logement. De cette façon-là, on n'aurait pas de surprises, puis ça réglerait la question de... à savoir si les évictions sont... les reprises de logement sont légitimes ou non. Ça fait que c'est une question de transparence, aussi.

Mme Duranceau : Donc, vous dites : Deux parties peuvent s'entendre entre elles, locataire, propriétaire, dans un contexte d'éviction, avec des nouvelles mesures où on vient donner des compensations financières. Malgré ça, vous dites : Il faudrait que le tribunal vienne par-dessus?

M. Dussault (Cédric) : Essentiellement, là, les locataires n'acceptent pas de quitter un logement, ils sont forcés de le faire. D'autre part, ce que les locataires veulent, ce n'est pas un montant d'argent, c'est un logement. Les locataires ne veulent pas quitter leur logement en échange d'un montant d'argent, puis même une compensation, là, un montant d'argent, ça peut être dilapidé extrêmement rapidement lorsque le montant de votre loyer, il est tout d'un coup doublé, triplé, voire quadruplé, parce qu'il n'y a rien d'autre que vous trouvez de moins cher sur le marché. Donc, les gens... Dans le contexte actuel, je vous dirais que les locataires valorisent bien davantage le fait d'avoir un toit sur la tête qu'avoir... être compensé financièrement.

Puis il y a un précédent dangereux que pourrait entraîner ce projet de loi là, c'est de légitimer les évictions, c'est-à-dire qu'à partir du moment où on compense des locataires, il n'y a pas de problème. Mais il y a un problème : les évictions, c'est censé être un processus exceptionnel, c'est très balisé par le Code civil sur papier. Malheureusement, dans les faits, c'est systématiquement bafoué. Nous, on évalue... La plus longue étude qu'on a qui a été faite, c'est l'étude du Comité logement Petite-Patrie, qui est la plus fiable sur les évictions et les reprises de logement...

M. Dussault (Cédric) : ...les évictions, et les reprises de logement, et les rénovictions, et toutes ces tactiques-là, puis ça a été déterminé que c'était 85 % de tous ces procédés-là qui étaient frauduleux. C'est-à-dire que le motif qui est invoqué au départ, pour lequel l'éviction a été faite, était un faux motif, puis le véritable motif, c'était seulement pour mettre un locataire dehors pour pouvoir augmenter de façon très significative le montant du loyer ou encore de louer sur une plateforme d'hébergement touristique.

Mme Duranceau : O.K. Puis là la notion de fardeau de preuve qu'on renverse puis qu'on met sur les épaules du propriétaire pour, tu sais, qu'il prouve sa bonne foi s'il n'a pas fait ce qu'il voulait...

M. Blanchard (Martin) : Oui, ce dont on parle, là... ce dont vous parlez, c'est l'article lorsqu'il y a une poursuite pour reprise ou éviction de mauvaise foi et que, pour les dommages et intérêts... intérêts matériels et moraux seulement, et non pas les dommages punitifs, il y aurait... le propriétaire aurait à prouver sa bonne foi, sinon il est condamné aux dommages et intérêts matériels et moraux. Oui, c'est une avancée, mais c'est une très... une avancée qui est... disons, c'est le plus petit pas qu'on pouvait faire dans le domaine... dans ce domaine-là.

La première chose à dire, c'est qu'on a à peu près moins d'une cinquantaine de poursuites pour reprise et éviction de mauvaise foi au Québec à chaque année. Les locataires ne retournent pas sur le lieu du traumatisme qu'ils ont vécu. Les locataires qui viennent nous voir, il y en a qui sont... je veux dire, qui perdent leur santé mentale suite à une reprise ou une éviction, qui sont aux portes du suicide. Ils ne veulent pas retourner dans cette histoire-là qui les a traumatisés à vie. Donc, quand bien même on hausserait... ou, en tout cas, on faciliterait le fardeau de preuve, ces locataires-là... ça ne va pas aider la très grande majeure partie des locataires qui ont une éviction, une reprise de mauvaise foi, mais, certes, ça va être plus facile pour les dommages et intérêts matériels et moraux, qui sont beaucoup moins élevés que les dommages et intérêts punitifs. Matériels et moraux, c'est, je ne sais pas, le set de rideaux que vous avez eu à acheter parce que vous avez à déménager, ce genre de choses là. Mais là où il y a vraiment beaucoup de compensation à aller chercher, c'est au niveau des dommages punitifs.

Alors, on demande que le fardeau de preuve soit aussi renversé pour les dommages punitifs, ne serait-ce que pour avoir un peu de cohérence et, en plus, pour ne pas se retrouver face à des locataires qui disent : Bien, je vais juste aller chercher des dommages et intérêts matériels et moraux, ce qui baisserait les compensations moyennes qu'ils ont, qui ne sont pas élevées, en ce moment, c'est environ 5 000 $, en moyenne, de compensation. Ce n'est pas grand-chose quand on est face à une fraude et qui nous a fait perdre notre logement.

Mme Duranceau : O.K. Mais, au niveau... revenons au niveau des évictions, donc, est-ce que... là, je ne vous ai pas entendus dire ça, là, mais c'est déjà dans le Code civil, c'est permis. Vous avez dit : C'est permis puis ça devrait être des situations qui sont exceptionnelles. C'est quoi, vos suggestions pour encadrer ça davantage ou autrement, si vous trouvez que ça, ce n'est pas suffisant?

M. Dussault (Cédric) : C'est dans notre mémoire, c'est que tous les... toutes les évictions et toutes les reprises soient... passent par le Tribunal administratif du logement. À l'heure actuelle, là, pour les gens qui ne sont pas au courant, c'est qu'il suffit d'envoyer un avis... il suffit que le propriétaire envoie un avis au locataire, puis même, dans certains cas, il ne le fait même pas par écrit, il le fait verbalement, puis il y a des gens qui ne connaissent pas nécessairement leurs droits qui se font évincer quand même. Mais ce qu'on demande, c'est qu'il faut que ça passe par le Tribunal administratif du logement, tous les cas de reprise, tous les cas d'éviction, mais aussi qu'il y ait un contrôle. C'est-à-dire qu'au bout d'un an le propriétaire doit revenir au tribunal pour faire la preuve que la raison pour laquelle l'éviction a été accordée, le projet qu'il a invoqué, soit un agrandissement, une subdivision, un changement d'affectation ou, dans le cas d'une reprise, que c'est vraiment un parent ou un enfant qui occupe le logement... il faut que le propriétaire fasse la preuve que cette éviction-là ou cette reprise-là était légitime, au bout d'un an, puis, par défaut, si le locateur n'est pas capable d'en faire la preuve, bien, il y a des conséquences pour ce locateur-là.

• (17 heures) •

Mme Duranceau : Là, vous dites : Il faut qu'il en fasse la preuve au bout d'un an.

M. Dussault (Cédric) : Oui, parce que c'est, actuellement...

Mme Duranceau : Donc, la personne est partie, là.

M. Dussault (Cédric) : Oui. Parce qu'actuellement, là...

Mme Duranceau : Donc, ce n'est pas pour prévenir.

M. Dussault (Cédric) : Bien, c'est pour prévenir aussi au sens où, si on contrôle tous les... toutes les reprises de toutes les évictions, d'abord on a un certain contrôle parce qu'à l'heure actuelle c'est le far west, il n'y a pas de contrôle. Puis, d'autre part aussi, c'est que, si les locateurs qui sont... qui procèdent à des fraudes sont, par la suite, punis, bien, ça va en décourager. Il n'y a pas de système parfait, effectivement, mais, à l'heure actuelle, il n'y a pas de système du tout, là, pour encadrer les reprises et les évictions...


 
 

17 h (version non révisée)

M. Dussault (Cédric) : ...ce qu'on sait, c'est que c'est une majeure partie, puis ça, c'est dans l'ensemble du Québec, qui sont frauduleuses.

Mme Duranceau : O.K. Puis là vous pensez que les mesures actuelles avec, quand même, des compensations financières, là, pour dissuader, là... bien, mieux traiter, premièrement, les locataires ont à être déplacés? Ça, ça ne sera pas...

M. Dussault (Cédric) : Elles ne viennent pas nécessairement dissuader les comportements frauduleux, les mesures actuelles.

Mme Duranceau : O.K. Ensuite, on parle de la limite monétaire qui a trait à la compétence du Tribunal administratif du logement dans des contextes d'insalubrité. Donc, je pense que vous saluez le fait que cette limite-là est plus cumulative, là. Justement, les contextes d'insalubrité, moi, c'est quelque chose qui me préoccupait puis que les gens puissent vivre dans un un environnement qui est décent, là, puis ça, je pense que tout le monde a droit à ça. Est-ce que vous avez des suggestions, à cet égard-là, pour être plus incisifs, peut-être, auprès des propriétaires délinquants?

M. Blanchard (Martin) : Là où je pense qu'on pourrait. Là où je pense qu'on pourrait agir, et ce n'est pas dans le projet de loi, ce n'est pas nécessairement... Ce n'est pas dans notre mémoire non plus. On a eu cette discussion-là. Mais, puisque la question est lancée, un des gros problèmes qui est en hausse depuis la pandémie, c'est la punaise de lit. Et le problème de la punaise de lit est lié fortement à la pauvreté. Il y a un lien qui est à faire et qui est, et on le constate sur le terrain. Les locataires qui vivent dans des logements moins salubres vont accepter le sort qui leur est réservé d'accepter ce logement-là. Ils ne vont pas nécessairement se plaindre, parce qu'ils ont peur de perdre leur logement, ils ont peur du stigmatisme, ils ont peur des représailles. Et, de toute façon, ils ont une expérience de vie qui leur dit que, lorsqu'ils se plaignent, ça va toujours mal se terminer.

Donc là, où il y a réellement une grande avancée à faire, c'est de se pencher sur les punaises de lit et de regarder la réglementation québécoise. Actuellement, pas un... un gestionnaire parasitaire, c'est comme ça qu'on les appelle, n'a qu'à suivre une formation de quelques heures en ligne pour avoir le droit d'avoir une licence. En fait, il y a un immense ensemble de problèmes, je ne peux pas tous les décrire ici. Mais, si jamais le gouvernement voulait agir sur l'insalubrité, la première chose que je dirais, c'est les punaises de lit. Et appelez-nous parce qu'on a réellement une expertise là-dessus et qui a été franchement... qu'on a...

Par exemple, dans La Petite-Patrie, on a des projets pilotes qui ont réussi à réellement se débarrasser de la punaise pour tout un bloc. Et on parle de conciergerie, d'endroits qui ne sont pas faciles à travailler et on a réussi à travailler ces problèmes-là. Donc il y a des avancées à faire.

Mme Duranceau : Bon, bien, ça, j'en prends bonne note, là. On ne pensait pas parler de ça aujourd'hui, mais merci du commentaire. Mais... Puis vraiment, au niveau des inspections en salubrité, comment on peut...

M. Blanchard (Martin) : Il y a une dernière chose à dire, c'est une revendication du RCLALQ, depuis très longtemps, qu'il y ait un code du logement provincial. Actuellement, les codes de salubrité et de sécurité des logements, ça dépend des municipalités. Et les municipalités, bien, il y en a beaucoup qui disent : Bien, on n'a pas les moyens d'avoir un code du logement. Donc, on se retrouve avec une immense inégalité entre les municipalités qui ont un code du logement et celles qui n'en ont pas. Et là-dessus, on a une revendication historique d'avoir un code du logement provincial. Il me semble que, s'il peut en avoir un à Montréal, il peut en avoir un partout au Québec.

Mme Duranceau : Puis qu'est-ce que ça aurait comme impact...  Au niveau de l'application, comment...

M. Blanchard (Martin) : C'est que les locataires auraient, à ce moment-là, des outils, au niveau municipal, pour être capables de...  Des inspecteurs, il pourrait y avoir... Il pourrait aussi y avoir des règlements beaucoup plus appliqués à la situation qu'ils vivent, ne serait-ce que, par exemple, sur les problèmes... les problèmes d'humidité excessive, toutes ces choses-là qui ne se retrouvent pas dans le Code civil actuel. Et, avec un code du logement provincial, bien, il y aurait des règles auxquelles les locateurs seraient tenus. Les propriétaires seraient tenus d'observer ces règles-là. Il peut y avoir une intervention municipale que je verrais un peu plus facile qu'avoir des inspecteurs du Québec, un peu partout dans les municipalités.

Mme Duranceau : O.K. Parfait. Merci. C'est intéressant. C'est bon pour moi.

Le Président (M. Schneeberger) : Oui, ça va? O.K. Alors, nous allons du côté de l'opposition officielle, avec la députée de Mille-Îles. Vous avez 10 minutes 24.

Mme Dufour : Merci, M. le Président. Merci, MM. Dussault et Blanchard, pour votre exposé, votre mémoire. Code du logement, juste une petite parenthèse. J'étais à la ville de Laval avant, et on a eu à le mettre en place, ça a pris quand même plusieurs années. Et Laval, c'est une grande ville, mais, malgré tout, ça a pris pas mal...

Mme Dufour : ...de ressources municipales pour l'écrire. Alors, je trouve que l'idée est fort intéressante parce que je peux imaginer qu'il y a beaucoup de villes de moindre ampleur qui n'ont pas nécessairement les ressources, là, pour mettre ça en place. Puis, par contre, après ça, il faut voir comment l'appliquer, là, parce que, malgré tout, il continue à y avoir des cas d'insalubrité à Laval, malgré le Code du logement. Ça fait qu'il y a une réflexion, je pense, à avoir là-dessus, définitivement, parce que c'est... vous l'avez bien dit, là, les plus vulnérables sont ceux qui sont les plus affectés par ces insalubrités-là, malheureusement.

Je vais peut-être venir sur quelque chose d'un petit peu plus technique. Vous avez parlé de la CMM dans votre mémoire. Le FRAPRU aussi en a parlé, mais je n'avais pas eu la chance de leur poser la question. Alors, je vais vous la poser à vous. Dans le fond, la notion actuellement qui est proposée, c'est de changer « logement social » par le mot « habitation », dans la loi, là, différentes lois où on réfère à la CMM. Et hier, on a rencontré les gens de la CMM. Puis ils nous ont expliqué, dans le fond, que ce qu'ils souhaitaient par ce changement-là, c'était d'être capable de verser une contribution aux municipalités qui investiraient dans des projets communautaires, mais qui sont pas... qui ne rentrent pas dans un programme de la SHQ. Et là, ils nous donnaient l'exemple : UTILE, par exemple, ils ont été approchés pour contribuer à ce genre de projet là. Alors, je leur ai demandé s'il y avait une modification au lieu d'être « habitation », que ça soit plutôt « logement social et/ou communautaire », ils semblaient ouverts à ça. Et je voudrais vous entendre là-dessus, sur cette proposition là, qu'est-ce que vous en pensez.

M. Dussault (Cédric) : Bien, malheureusement, en fait... puis là, je pense que c'est ça, il y a des questions, des fois, qui sont posées, qui sont plus du ressort d'un regroupement ou un autre, de part et d'autre. Mais ce que moi, j'aurais à dire là-dessus, c'est que malheureusement, on a l'impression qu'il y a des municipalités qui s'adaptent comme ça parce qu'on a coupé le financement pour le logement social. Donc, c'est malheureux parce que ça entérine un peu ce qui a été fait au provincial. Donc, on abandonne aussi cette question-là au niveau municipal. Mais malheureusement, c'est ça, c'est... il faut financer le logement social. Le vocable qui était... qui a commencé à être utilisé depuis quelques années, qui est « logement social et abordable », en général, quand on parle de ça, le logement, il finit par n'être jamais social et il n'est souvent pas très abordable.

Mme Dufour : D'accord, merci. Je voudrais aussi vous entendre sur... à la page 10, là, vous parlez des reprises, des évictions. On en a parlé un peu. Vous en avez parlé avec la ministre aussi, mais il y a eu une proposition. Vous, vous proposez, là, que le propriétaire fasse preuve au tribunal après un an. Mais faire preuve au tribunal, ça peut... disons, on peut présenter les preuves qu'on veut bien. Le FRAPRU qui vous a... qui vous a précédés, proposait plutôt une inspection systématique après un an et j'aurais voulu... je n'ai pas eu la chance d'en parler avec eux non plus, mais qu'en pensez-vous de cette possibilité là, où là, on constate sur place la réalité, plutôt que... c'est ça, plutôt que...

• (17 h 10) •

M. Blanchard (Martin) : Bien, pourquoi pas? Mais le mieux est l'ennemi du bien, parfois, c'est-à-dire, là, tant mieux s'il y a des inspecteurs qui vont aller dans tous les logements qui... et je ne serais pas... et je ne pense pas que le RCLALQ et ses membres seraient opposés à ça. Mais, s'il est possible d'opérationnaliser quelque chose sans que ce soit trop lourd, je pense que les propriétaires pourraient avoir à faire preuve de la subdivision ou du... par exemple subdivision ou agrandissement, bien, c'est sur le rôle foncier. On le voit. Donc, à ce moment-là, ils envoient un extrait du rôle foncier, puis il y a une subdivision ou un agrandissement. La reprise, si c'est pour un parent ou un enfant, bien, à ce moment-là, il peut y avoir, là, une série de vérification des identités par rapport au logement, là, c'est quand même une preuve qui... dont on peut aller chercher des documents assez formels à produire et qui serait à la satisfaction. Après ça, est-ce qu'il y aurait des brèches là-dedans? Oui, il y en aurait. Après ça, on va travailler les brèches. Mais s'il faut attendre dans 1000 ans, qu'il y ait des inspecteurs, qu'ils aillent dans chaque logement, je préfère qu'on commence par cette mesure-là.

Mme Dufour : Je comprends. Merci. Je voudrais aussi vous entendre. Vous êtes les seuls qui avez parlé de cet élément là, de tous les groupes qu'on a rencontrés, les dommages-intérêts punitifs versus les dommages-intérêts, matériels et moraux. Donc, peut-être vous entendre sur votre recommandation quatre.

M. Blanchard (Martin) : Oui, bien, les dommages et intérêts matériels et moraux que les locataires peuvent réclamer, lorsqu'il y a eu une... reprise...

M. Blanchard (Martin) : ...ils ont une éviction de mauvaise foi et qu'ils font une poursuite qui va à travers la procédure, très difficile pour les locataires de se rendre à la poursuite, les dommages matériels et moraux, c'est, par exemple, tous les biens qu'ils ont eu à acheter suite au déménagement lorsqu'ils ont eu une éviction forcée. Ça peut être aussi le différentiel de loyer. Donc, il y a eu un différentiel de loyer à payer, et la cour, le tribunal va accorder une année ou peut-être même deux années. Habituellement, c'est un an de différentiel de loyer, on peut aller jusqu'à deux ans. Ça s'arrête à peu près là. Donc, ce n'est pas beaucoup, hein? C'est 3 000 $ ou 4 000 $ qu'on peut réclamer par ça.

Les dommages et intérêts punitifs, c'est lorsque la mauvaise foi des propriétaires fait en sorte qu'elle est punie par la loi, c'est-à-dire on veut punir. Ce n'est pas des dommages compensatoires. On ne va pas compenser les problèmes que les locataires ont eus. On va plutôt dire : On va vous punir d'avoir fait ce geste-là et on va dissuader... on va envoyer un message pour dissuader les prochains à ne pas refaire la même chose. Et là, par exemple, on va y aller parfois sur les profits réalisés lorsqu'il y a eu la revente des appartements ou des immeubles. Donc, là, les jugements qu'on trouve les plus intéressants à ce niveau-là, c'est 20 000 $, 30 000 $, 40 000 $ de dommages punitifs parce que les profits qui ont été réalisés sont immenses.

Mme Dufour : Il y a eu un, cas de mémoire, 45 000$, il y a quelques semaines à peine. Donc c'est ça que vous souhaiteriez, que le fardeau de la preuve soit inversé également?

M. Blanchard (Martin) : Exactement. Le propriétaire a prouvé sa bonne foi aussi dans les cas des dommages punitifs. C'est un peu étrange de séparer les deux. Je ne vois pas trop la logique. Pourquoi est ce que d'un côté, le fardeau de preuve serait sur le propriétaire et de l'autre côté sur le locataire? Il n'y a pas de logique juridique. Je ne vois pas, là, pourquoi on fait cette séparation-là. Et la crainte, c'est qu'on abandonne les dommages punitifs parce que le fardeau de preuve est plus difficile à aller à rencontrer.

Mme Dufour : Je comprends.

M. Dussault (Cédric) : ...c'est un peu ce que je disais tantôt, c'est que si on fait seulement compenser les locataires lorsqu'il y a une éviction, qu'elle soit frauduleuse ou non, bien, en fait, on vient légitimer les comportements frauduleux puis on vient même encourager les comportements frauduleux. Donc, c'est un peu dans ce sens-là.

Mme Dufour : Je comprends, merci. Je vais peut-être vous... Le dernier élément pour moi que je vais vous aborder, c'est la discrimination. Vous êtes aussi les seuls qui en avez parlé et c'était quand même une préoccupation. On a vu beaucoup de cas. En fait, non. Il y a eu un groupe qui est venu en parler, c'était la Fédération des étudiants collégiale qui faisait part de la discrimination envers les jeunes qui essayaient de trouver des logements. On a vu des cas de personnes qui venaient d'ailleurs, des mères de famille qui sont refusées parce qu'ils ont des enfants. Donc... Et j'ai compris ce que vous avez dit, là, le droit à la propriété n'autorise pas le droit à la discrimination, mais, tu sais, dans l'ordre des choses actuel, comment on peut, disons, prévenir la discrimination? Il n'y a pas vraiment de mesures proposées ici, mais je voudrais vous entendre là-dessus.

M. Dussault (Cédric) : Effectivement, on n'en a pas proposé dans notre mémoire. Par contre, on a une revendication au RCLALQ, c'est que les cas de discrimination en matière de logement au Québec passent aussi par le Tribunal administratif du logement. À l'heure actuelle, pour les cas de discrimination, que ce soit en matière de logement ou en d'autres domaines, il faut passer par la Commission des droits de la personne. Nous, ce qu'on réclame, c'est que ça passe aussi par le Tribunal administratif du logement. Puis j'aimerais ça dire que la discrimination, effectivement, elle est très, très problématique au Québec en matière d'accès au logement, elle est très large aussi, elle touche énormément de population. Puis, effectivement, ça a peut-être... malheureusement, ça n'a pas été beaucoup entendu.

Nous, on voulait... la semaine dernière, on a fait une conférence de presse, on a voulu donner la parole à des groupes qui, malheureusement, ne sont pas nécessairement représentés ici, en commission, mais pour qui la discrimination est extrêmement présente, là, dans la recherche de logement puis pour qui... Puis c'est ça qu'on s'est rendu compte, en fait, comme regroupement, on s'est rendu compte qu'il y avait beaucoup de groupes qui avaient recours au droit de cession de bail pour avoir accès à un logement. Donc, ce n'était même pas simplement d'avoir accès à un logement qui était plus abordable, pour certaines personnes, pour certains groupes sociaux, c'est d'avoir accès à un logement tout court. Donc, en enlevant le droit de cession de bail, on vient enlever, pour certaines personnes, même si ce n'est pas...

M. Dussault (Cédric) : ...des millions de personnes, on vient enlever, pour certaines personnes, la possibilité d'avoir accès à un logement, concrètement. Puis effectivement ce n'est pas la cession de bail qui va tout régler, mais... il faut vraiment agir en matière de discrimination, effectivement, mais, à l'heure actuelle, ne pas agir en matière de discrimination et enlever en plus la cession de bail, c'est favoriser la discrimination.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci beaucoup. Alors, nous passons maintenant du côté de la deuxième opposition avec le député de Laurier-Dorion pour trois minutes 28.

M. Fontecilla : Merci, M. le Président, dans les trois minutes 28 qui me sont allouées, j'aimerais ça vous entendre parler de la clause F. Vous n'avez pas... vous vous êtes concentrés sur la cession de bail, là, ce qui est tout à fait légitime, là, mais j'aimerais ça vous entendre, connaître, mieux connaître et comprendre votre positionnement, là, sur la clause F.

M. Blanchard (Martin) : Oui, bien sûr. Bien, la clause F, je veux dire, que des propriétaires qui viennent de construire un immeuble... Moi, j'ai emménagé dans un nouvel immeuble en 2018 et, de 2018 à 2023, bien, j'étais sous la clause F, mais les augmentations de loyer étaient vraiment correctes. Heureusement, mon propriétaire est un propriétaire public, et j'ai eu cette chance-là de ne pas recevoir une hausse de loyer qui m'aurait contraint à quitter mon logement. Mais le fait de ne pas pouvoir contester sa hausse de loyer, quand bien même elle serait inscrite et prévue, le fait de ne pas pouvoir contester sa hausse de loyer est une aberration et un non-sens. Il faut pouvoir avoir le droit de contester sa hausse de loyer et que le tribunal regarde si celle-ci est juste au regard des factures, au regard des pièces justificatives qui sont données. Et, oui, il peut y avoir des coûts non prévus que le propriétaire d'un nouvel immeuble rencontre, mais celles-ci doivent être regardées par un tribunal et non laisser la porte à des abus. Alors, quand bien même si l'abus est inscrit dans une clause dans un bail, elle ne règle pas ce problème-là, qu'il n'y a pas de contestation possible avec la clause F.

M. Dussault (Cédric) : ...aussi, là, à la question de la... la prévisibilité, pardon, des hausses de loyer, dans certaines régions, là, il y a... on est à un taux d'inoccupation qui est à zéro, tout près de zéro. Pour certains locataires, les seuls logements qui sont disponibles, ça va être des logements neufs. Quand bien même qu'on vous dit que, dans un an, dans deux ans, ça va augmenter à tel montant, vous n'avez pas de choix, il n'y a pas d'autre option qui s'offre à vous, il n'y a pas de loyer disponible. Donc, le seul choix que vous avez, c'est de quitter la région. Donc, il y a des gens qui, bon, soit se retrouvent justement avec un fardeau extrêmement important, avec une augmentation de loyer qui est extrêmement importante... puis je pense que Véronique en a parlé aussi, ça... oui, évidemment, ça concerne des gens qui sont à plus faibles revenus, mais il y a des gens qui ont des bons revenus aussi mais pour qui le fardeau d'une augmentation de loyer, là, qui est pour les immeubles qui ont été construits il y a moins de cinq ans, elle peut être extrêmement importante puis elle peut vous faire passer au-dessus du 30 %. Puis c'est ça, dans certaines régions, vous allez avoir des gens qui ont le choix entre payer 60 % de leurs revenus au paiement du loyer ou quitter la région. Puis, même en quittant la région, je vous dirais qu'à l'heure actuelle les taux d'inoccupation sont extrêmement bas aussi partout, les loyers sont extrêmement élevés un peu partout, donc c'est, même en connaissant les prix... C'est comme quand on recherche un logement aussi. À l'heure actuelle, ce n'est pas vrai qu'on peut magasiner un logement puis trouver un logement qui est abordable pour nous. À l'heure actuelle, les loyers qui sont disponibles sont à prix extrêmement élevés.

• (17 h 20) •

M. Fontecilla : Donc, si je comprends bien...

Le Président (M. Schneeberger) : Voilà. Non, on a plus de temps, excusez-moi. Excusez-moi. Alors, nous allons du côté du député des Îles-de-la-Madeleine pour deux minutes 38.

M. Arseneau : Merci beaucoup. Merci pour votre présentation très claire sur la cession de bail. Je pense que votre démonstration est éloquente. J'aimerais aborder la question qui a parfois été discutée ici, à savoir que peut-être que la cession de bail, bien, enfin, c'est la prétention de certains, ne serait pas nécessaire si on avait... par exemple, si tout le monde remplissait de façon obligatoire la clause G. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Dussault (Cédric) : ...plus que ça, il faudrait... puis c'est ce qu'on dit dans notre mémoire, il faudrait un registre des loyers. Il faudrait un registre des loyers universel, obligatoire, public. Il faudrait un plafonnement aussi des hausses de loyer. Parce que, puis c'est ce que je disais un peu tantôt, ce n'est pas vrai qu'il y a une libre négociation. Même si on remplit la clause G...

M. Dussault (Cédric) : ...quand il y a 60 personnes qui attendent en arrière de vous pour louer le logement puis qui vont le payer, ce montant-là, même s'ils ne sont pas nécessairement plus capables que vous de le payer, mais que... parce qu'il n'y a pas d'autre option disponible, ça ne règle absolument pas cette question-là. Quand on est dans un marché qui est complètement déréglé, il n'y a pas de choix qui s'offre aux locataires. Donc, il faut un véritable contrôle des loyers, mais il y a aussi la question de la discrimination dont on a parlé tantôt.

M. Arseneau : J'imagine que vous avez entendu, tout à l'heure, le groupe qui est passé juste avant vous, là, l'Association des propriétaires du Québec, là, qui demande d'aller encore plus loin que la CORPIQ, c'est-à-dire le libre marché incomplet, et tout ça, là. Je n'ose pas imaginer la réaction que vous avez eue. Mais, sur le fond, ils semblaient même dire que la situation que vous décrivez n'est pas réelle. Je veux vous entendre là-dessus. On est dans le déni ou on est vraiment dans l'abus de pouvoir à l'heure actuelle?

M. Dussault (Cédric) : Oui, oui, on est dans l'abus de pouvoir. On peut parler d'abus de pouvoir, mais c'est certain que... Écoutez, évidemment que, quand on profite d'un système, on ne voit pas nécessairement ceux qui sont victimes du système. On a des données extrêmement probantes, là, qui montrent que la situation est dramatique pour les locataires. Tu voulais-tu...

M. Blanchard (Martin) : Oui, juste pour... À peu près toutes les données de recherche, sociologues, géographes, économistes, philosophes, nommez-les, décrient la situation vécue par les locataires comme étant intenable, problématique et que la situation est en recul aussi. Il n'y a à peu près aucune donnée qui dise que ça va mal pour les propriétaires. Ça, on parle des données probantes universitaires.

Le Président (M. Schneeberger) : En terminant.

M. Blanchard (Martin) : Moi, je travaille depuis longtemps à un niveau de haute recherche académique, et ça n'existe pas, cette position-là qui nous est ramenée par les propriétaires.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, merci beaucoup. Le temps était... est écoulé malheureusement. Alors, merci pour votre présentation.

Nous suspendons quelques instants pour permettre au dernier groupe de la journée de prendre place.

(Suspension de la séance à 17 h 23)

(Reprise à 17 h 28)

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, nous reprenons la séance. Alors, nous en sommes maintenant au dernier groupe de la journée. Alors, bonjour à vous trois. Alors... présente. C'est l'Association des juristes progressistes. Alors, dans un premier temps, vous présenter à tour de rôle et enchaîner ensuite avec votre présentation. Vous avez un 10 minutes. Par la suite, on procédera à un échange avec les députés. Allez-y.

Mme Brown (Kimmyanne) : Bonjour, tout le monde. Bonjour chers députés, Mme la Ministre. M. le Président du Tribunal administratif du logement, bonjour. Donc, merci à tous et toutes de nous accueillir et de nous accorder votre temps.

Je me présente. Je m'appelle Kimmyanne Brown, je suis avocate et je suis accompagnée de Me Gabriel Pelletier et de Spencer Nault. Nous sommes membres de l'Association des juristes progressistes, qui est un OBNL, qui compte 200 membres au Québec et qui se veut, en fait, une force politique vouée à la promotion des droits politiques, sociaux et culturels au Québec. En tant que juristes, nous croyons fermement que si le droit peut s'avérer un outil efficace de lutte contre les inégalités sociales, il peut également produire et reproduire de telles inégalités. Et donc c'est dans ce contexte que l'on intervient aujourd'hui dans la commission parlementaire sur le projet de loi n° 31, et nous considérons que les dispositions dans le projet de loi n° 31 ont comme objectif avoué de rétablir l'équilibre entre les propriétaires et les locataires. Si l'on salue certaines de ces modifications législatives qui sont proposées, force est de constater que ce projet de loi ne contient pas de solutions structurantes qui permettent d'assurer à long terme la protection des droits des locataires et un accès au logement pour toute la population québécoise. On considère également que certaines des modifications législatives proposées n'auront que comme conséquence d'accentuer la précarité des locataires, une population qui est constituée des plus vulnérables de la société, en plus de... de fragiliser, pardon, dangereusement le principe du droit au maintien dans les lieux, pierre angulaire du régime de louage résidentiel au Québec.

• (17 h 30) •

Donc, je vais débuter la présentation avec ce qui a fait beaucoup parler aujourd'hui d'ailleurs, le droit à la cession de bail. C'est un des enjeux centraux du projet de loi n° 31. Et l'article 7 propose une modification majeure au régime de la cession de bail, et il est important de nommer que cette modification opère un changement de fond du mécanisme et vient renverser plusieurs années de courant jurisprudentiel en la matière. Il faut comprendre, et c'est très important, que la cession de bail, c'est un corollaire et une dimension essentielle du droit au maintien dans les lieux des locataires. Le droit à la cession de bail, c'est une mesure voulue, désirée et choisie par le législateur afin d'assurer un contrôle des loyers. C'est aussi, et ça a été...


 
 

17 h 30 (version non révisée)

Mme Brown (Kimmyanne) : ...aujourd'hui un moyen qui permet un droit de mobilité des locataires, donc, qui veulent se libérer d'un bail avant la date de fin de... prévue de bail. Et donc plusieurs décisions, depuis plusieurs années, sont venues consolider ce droit à la cession de bail, et le tribunal a même estimé, en 1995 que ce droit était une limitation raisonnable au droit de propriété des locateurs.

Donc, on considère que la proposition dans le projet de loi no 31 met à mal ces éléments, en plus de déséquilibrer de manière significative les rapports entre les locataires et les locateurs. Et, comme le RCLALQ l'a mentionné tout à l'heure, nous sommes en fait concernés que l'on apporte une solution à un problème qui n'existe pas. On se questionne, pourquoi cette mesure est mise en place? Quel est le problème ciblé? La CORPIQ va parler de marchandisation des loyers, de cession de bail de mauvaise foi. À ce jour, il n'y a aucune étude, aucune donnée, aucune analyse scientifique qui nous permet d'en venir à ce constat, tant sur le terrain qu'au niveau académique.

Et donc, pour résumer, mettre en place des solutions législatives pour des problèmes non documentés, c'est, au mieux, travailler à l'envers, et, au pire, mettre à mal des principes qui sont des corollaires du droit au maintien dans les lieux des locataires pour satisfaire un intervenant de l'échiquier politique au Québec.

Et donc c'est la raison pour laquelle nous croyons que les membres de l'Assemblée nationale ne doivent pas donner l'aval à ce retrait du droit à la cession de bail, parce que nous considérons que les modifications faites sont un retrait du droit à la cession de bail pour les locataires. Et notre mémoire vient donc proposer également une pléthore de propositions qui viennent solidifier des mécanismes qui existent déjà en matière de contrôle des loyers, notamment les mécanismes prévus à la clause G et à la fixation de loyers. Donc, je demande votre attention sur ces moyens-là que l'on propose, qui sont des modifications mineures mais qui auront des impacts significatifs pour consolider l'objectif du législateur en matière de contrôle des loyers. Je vais passer la parole à mon collègue, Me Pelletier.

M. Pelletier (Gabriel) : Merci beaucoup, M. le Président de la commission, Mme la ministre, Mesdames et Messieurs les députés du gouvernement et de l'opposition, je vous remercie de nous recevoir. Je vais vous entretenir, là, quelques instants sur les aspects du projet de loi qui touchent au régime des évictions. À l'AJP, là, on accueille favorablement les modifications qui sont proposées à ce régime-là par le projet de loi tel que présenté par le gouvernement. On pense que c'est des pas dans la bonne direction, surtout considérant le contexte de crise du logement. Cela étant, on se permet de proposer un certain nombre d'amendements supplémentaires qu'on pense permettraient de prendre certains pas supplémentaires qui sont tout autant nécessaires. Je vous en lance trois, en rafale, je vous invite évidemment à poser vos questions et à consulter le rapport.

Première des choses, nous proposons de renforcer l'article 1899, qui prévoit des dommages punitifs lorsqu'un locateur, suite à l'exercice d'un droit d'un locataire, agit par représailles en atteignant à son droit au maintien dans les lieux. Donc, il y a des dommages punitifs qui sont prévus dans ces cas-là. On propose d'importer un mécanisme qui existe déjà en droit du travail, dans le Code du travail, dans la Loi sur les normes, qui prévoirait une présomption, où on présume que le locateur qui agit ainsi agit justement en représailles, et ce serait à lui de démontrer que ce n'est pas le cas.

Deuxième des choses, on propose d'élargir la discussion sur les indemnités afin d'inclure les reprises. Évidemment, on est conscients que l'objet des reprises de logement et des évictions, ce n'est pas la même chose. On est donc partis de la base que le gouvernement propose au niveau des indemnités en matière d'éviction, qui est de 24 mois. Nous, on propose plutôt un mécanisme, là, qui serait modulable selon le nombre d'années d'occupation et qui serait maxé à six mois. C'est discutable, mais le principe reste quand même de vouloir l'élargir à la question de la reprise de logement, parce qu'éviction, reprise, pour le locataire, l'effet est le même, c'est une perte de milieu de vie.

Et, en dernier lieu, au niveau de la protection des locataires aînés vulnérables, on attire l'attention du législateur sur l'article 1959.1, qui est, il faut le dire, un très rare exemple dans l'histoire parlementaire québécoise d'un projet de loi de député qui s'est rendu à son aboutissement. C'est un travail de coalition, c'est un travail de conciliation en commission qui a permis à cet article-là d'avoir vie. Il y a eu des compromis qui ont été faits, à cette époque-là, entre autres, sur le seuil, sur l'âge afin d'avoir accès à cette protection-là pour les locataires aînés. À l'heure actuelle, pour en bénéficier, un locataire aîné doit être âgé de 70 ans ou plus. Ce qu'on soumet, et on se base, là-dessus, sur des études assez récentes, entre autres, de l'Observatoire québécois des inégalités, qui datent de 2022, et de l'Association québécoise des droits des retraités, qui fait état d'une situation véritablement épeurante en matière de pauvreté des aînés, au Québec, surtout en région. En sachant, d'ailleurs, que l'âge moyen de la retraite, au Québec, actuellement, la prise de la retraite, c'est 63 ans, 64 ans, en sachant qu'on a presque un aîné sur deux de 65 à 69 ans qui vit en deçà d'un seuil de revenu viable, qui est un seuil d'environ une vingtaine de mille, donc ce n'est pas grand-chose, on s'entend...

M. Pelletier (Gabriel) : ...Nous, ce qu'on soumet au législateur, c'est qu'il y a tout à fait raison d'être d'augmenter ce seuil-là afin qu'un locataire aîné de 65 à 69 ans soit protégé en matière de reprise et d'éviction à même titre qu'un locataire de 70 ans et plus.

Sur ce, je vais passer la parole à mon collègue. Je vous remercie pour votre attention.

M. Nault (Spencer C.) : Merci. Alors, l'Association des juristes progressistes souhaite rappeler que de nombreuses questions juridiques et sociales sont oubliées dans le projet de loi n° 31, et que le gouvernement doit prendre ses responsabilités lorsqu'il est question de la crise du logement.

Comme il est écrit dans notre mémoire, le gouvernement du Québec est lié par plusieurs obligations législatives reconnaissant le caractère fondamental du droit au logement.

En effet, le Québec est lié de façon implicite par sa propre Charte des droits et libertés de la personne, dont l'article 45 indique que «toute personne dans le besoin a le droit, pour elle et sa famille, à des mesures d'assistance financière et à des mesures sociales prévues par la loi susceptibles de lui assurer un niveau de vie décent.»

Selon la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, le droit au logement fait implicitement partie du droit à des mesures sociales et financières.

Soulignons également que le Québec a des obligations de nature internationale puisque le Canada a signé le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, dans lequel il est indiqué, à son article 11, que «les États parties prendront des mesures appropriées pour assurer la réalisation du droit à un logement suffisant.»

Je vous invite à consulter les pages 45 et 50 de notre mémoire pour prendre la mesure des obligations auxquelles le Québec est tenu.

Nous suggérons également au gouvernement d'adopter une approche holistique des droits fondamentaux. En effet, selon la Conférence mondiale sur les droits humains de Vienne, tous les droits de la personne sont universels, indissociables et interdépendants. La communauté internationale doit traiter des droits de l'homme globalement, de manière équitable et équilibrée, sur un pied d'égalité et en leur accordant la même importance.

Pour toutes ces raisons, l'Association des juristes progressistes formule la recommandation numéro 17 : que l'Assemblée nationale ajoute une reconnaissance qui soit explicite du droit au logement dans la Charte des droits et libertés de la personne. Je vous remercie.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons maintenant débuter une période d'échange avec... Du côté ministériel avec la ministre. Alors, vous avez un 16 min 30 s.

Mme Duranceau : Parfait. Merci. Merci pour votre présentation.

Je vais vous ramener tout de suite à un élément dont vous venez de parler, l'âge de... Les locataires aînés, là, 70 ans et plus, qui, bon, selon leur niveau de revenus, peuvent être protégés. Là, vous recommandez 65 ans. Je comprends que c'est parce que les analyses disent qu'à partir de 63, les gens, bon, sont à la retraite, mais là, vous ne pensez pas qu'une fois qu'on va être rendus à 65, là, ça va être 60, puis...

M. Pelletier (Gabriel) : Bien, c'est certain qu'à un moment donné on peut se demander : Bien, où est-ce qu'on va mettre la ligne, est-ce qu'on va mettre à 60, à 55, à 50? J'ai envie de vous dire : mettons-la quelque part où ça vaut la peine de la mettre, et cet endroit-là, c'est 65 ans. Pourquoi 65 ans? Parce qu'il y a un appauvrissement qui est lié avec le fait de prendre sa retraite, parce qu'on a une majorité de Québécois qui ne bénéficient pas de fonds de pension privé qui leur permet d'avoir accès à une rente au-delà de ce que la RRQ ou les pensions de vieillesse du Canada leur garantissent une fois rendus à la retraite, et parce que, de manière générale, les études qu'on voit actuellement font état d'un appauvrissement à partir de 65 ans, le tout dans un contexte d'augmentation du coût de la vie.

• (17 h 40) •

Alors, je vous entends, effectivement, quand on élargit un droit, y a-t-il un risque de l'élargir à une population trop grande?, peut-être. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'on fait confiance au législateur là-dessus. Et on vous soumet qu'avec les éléments qu'on a, c'est 65 ans.

Je me permets une petite anecdote rapide. On a fait le tour de la jurisprudence pour trouver des exemples, justement, où cet enjeu de l'âge là était problématique. Puis ce qu'on se rend compte, c'est que dans un cinquième des cas où la protection du 959.1 a été refusée, c'étaient des cas où les locataires n'avaient pas l'âge nécessaire. Et ça, il y a des cas horribles là-dedans. Il y a des cas de personnes de 69 ans qui habitent dans un logement depuis une vingtaine d'années, qui ont le revenu pour se qualifier un HLM, mais qui, par la force des choses, parce que, beau cadeau d'anniversaire, avant leur 70e, ils ne seront pas tout à fait rendus au seuil de 70, et là, arrive l'éviction. Ils doivent quitter. Bien, ils perdent un droit à un logement, ils perdent un milieu de vie qui leur est propre.

Donc, certainement, écoutez, je suis sensible à ça, je vous entends, mais 65, ça nous semble raisonnable.

Mme Duranceau : O.K. Puis on a parlé de discrimination, là, avec le groupe qui vous précédait. Puis c'est souvent le commentaire qui est fait à l'égard de cette mesure-là, qu'à la limite, bien, si tu as un locataire de 64 ans, là, dans...

Mme Duranceau : ...exemple, qui s'en vient pour louer, bien là, tu... ça risque d'être regardé par le propriétaire, puis dire : Là, je m'embarque-tu là-dedans? Ça ne va pas avoir cet effet-là?

M. Pelletier (Gabriel) : Peut-être, mais, dans tous les cas, ça ne l'aura plus pour ceux de 69.

Mme Duranceau : Ceux qui sont déjà en logement, on va les protéger. C'est ça votre...

M. Pelletier (Gabriel) : C'est ça, mais je vous entends.

Mme Duranceau : Oui, c'est ça, ce n'est pas... Difficile équilibre, hein, tout ça. O.K. Bon, alors je continue vu que c'est ma job. Vous proposez que le locateur qui souhaite augmenter son loyer au-delà du taux indicateur, là, en vigueur doive présenter automatiquement une demande de fixation de loyer au TAL. Et je me demande est-ce qu'on veut calquer un peu sur le régime ontarien ou... Est-ce que vous pouvez élaborer un peu sur ça?

M. Pelletier (Gabriel) : En fait, l'idée, c'est que... On est sensible au fait que des mécanismes de contrôle de loyers au Québec, bon, certains diront le contraire, c'est leur droit, nous, on considère qu'il en manque, surtout si on retire celui de la cession de bail. À nos yeux, l'idée d'aller en matière de fixation, l'idée est la suivante, c'est que, dans les faits, comment ça fonctionne aujourd'hui, le locataire a le poids de l'odieux, disons, d'aller voir son propriétaire puis là dire : Écoutez, moi, cette augmentation-là ne me convient pas. Nous, ce qu'on voit dans la pratique puis avec nos membres, c'est qu'il y a énormément de locataires qui n'osent pas se rendre jusque-là. Pourquoi? Des fois, parce qu'ils ne connaissent pas leurs droits tout simplement, des fois parce qu'il y a une barrière linguistique, mais aussi souvent parce qu'ils se disent : Est-ce que j'ai vraiment intérêt à, disons, m'obstiner pour une augmentation de loyer quand ça pourrait me revenir contre moi plus tard dans mes relations avec mon locateur? Donc, ils veulent maintenir une certaine relation, ou carrément parce que, bien, ils ont peur.

Alors, nous, ce qu'on se dit : Bien, écoutez, ne punissons pas les locateurs qui, effectivement, font vraiment des travaux dans leurs logements. Si tel est le cas et qu'ils peuvent en faire la preuve, c'est assez simple, ils ont des factures, ils ont des contrats, qu'il se rendent à TAL, qu'ils fassent la démonstration devant un greffier, en plus, même pas besoin de passer devant un juge pour faire ça, c'est plus simple, qu'ils en fassent la démonstration. Ça va retirer ce poids-là aux locataires et, on pense, ça va contribuer à faire un certain contrôle de loyer.

Mme Duranceau : Puis je vais vous poser une autre question. Disons que l'augmentation du propriétaire, elle est calquée, là, sur les balises qui sont annoncées par le TAL annuellement, bien, pourquoi... en fait, les locataires peuvent quand même contester cette augmentation-là. Puis est-ce que c'est bénéfique? Est-ce que ça n'embourbe pas le TAL, justement, de demandes qui, finalement, quand les mathématiques vont être refaites, ça va donner la même réponse?

M. Pelletier (Gabriel) : Bien, écoutez, ils ont le droit d'ester en justice, c'est un droit fondamental, ils vont aller là pour perdre leur temps. Moi, je le dis très sincèrement, puis je vous entends, je comprends, mais je connais très peu de justiciables... ou, en tout cas, je me fie sur les clients que moi, je connais, je connais très peu de justiciables qui apprécient l'idée de perdre une journée de travail ou de perdre du temps de réflexion ou du sommeil à l'idée d'aller au tribunal pour rien. Et ça inclut les locataires qui vont en demande en fixation. Donc, est-ce qu'il y a des gens qui vont en abuser? Peut-être, comme dans tout, mais est-ce que ça va être la norme? Sincèrement, j'en doute, j'en doute.

Mme Duranceau : Oui. On a vu une grosse recrudescence des demandes devant le TAL pour des raisons probablement valides, là, compte tenu du contexte, mais, à un moment donné, ce calcul-là, il est très mathématique aussi, là, ça fait qu'il n'y a pas de surprise souvent.

Ensuite... Attendez... Ah! oui, c'est ça. Vous avez parlé de la reprise de logement puis qu'il y a une compensation... dans un cas de reprise et non pas d'éviction, une compensation qu'on pourrait venir prévoir dans la loi puis que vous limitez à six mois. Puis je pense qu'en ce moment c'est le TAL qui... Il y a une compensation qui est déjà prévue, là, de trois, je pense, trois mois.

M. Pelletier (Gabriel) : Le trois, c'est... Excusez-moi, est-ce que je vous ai interrompue? Non?

Mme Duranceau : Oui, non, non, non, mais, en fait, ma question, c'est : pourquoi prévoir six mois et ne pas laisser le TAL, justement, sur cette mesure-là, convenir de quel est le bon montant selon les circonstances?

M. Pelletier (Gabriel) : Ça découle de nos observations. C'est qu'en gros, à l'heure actuelle, le trois mois, c'est vraiment pour les évictions. Au niveau de la reprise, ce qui est prévu dans le moment, c'est des conditions qui apparaissent raisonnables au juge pouvant... y inclus les frais de déménagement. Alors, nous, ce qu'on voit, c'est que... et ça va de soi, il y a une grande marge de manœuvre qui est laissée au juge, mais il y a un certain caractère qui est arbitraire puis il y a une grande fluctuation tout dépendant, disons, dans quel dossier on est. Souvent, il y a des juges qui vont simplement donner l'indemnité de déménagement, qui vont se limiter à ça. Il y a des juges, parfois, qui vont plutôt retenir des décisions de la Cour du Québec qui font état que, par exemple, le déracinement de son loyer, ça mérite d'être indemnisé, donc ils vont moduler l'indemnisation en facteur de ça, mais ça dépend, essentiellement, d'une chose l'une, de sur qui on tombe mais aussi si le locataire est représenté ou connaît suffisamment bien ses droits pour savoir qu'il peut faire cette preuve-là.

Alors, nous, ce qu'on dit, c'est : venons standardiser les choses, mettons en place un mécanisme d'indemnisation...

M. Pelletier (Gabriel) : ...d'indemnisation dont le maximum serait moins bas... serait moins élevé que l'éviction, parce qu'on sait que ce n'est pas la même finalité, on sait que cce n'est pas le même objectif, on sait que ce ne sont pas les mêmes locateurs qui le font en plus. Mais six mois, ça me semble être un compromis qui est acceptable, cela étant un maximum qui est bien en deçà du 24 qui est dans le projet de loi, là.

Mme Duranceau : Oui, le 24 s'applique aux évictions.

M. Pelletier (Gabriel) : Exact, on s'entend tout à fait.

Mme Duranceau : C'est ça. On ne touchait pas les reprises parce que souvent le parc locatif au Québec, si je ne me trompe pas, c'est beaucoup aussi des duplex, puis des triplex, puis des gens qui reprennent et qui veulent l'habiter aussi. On ne voulait pas pénaliser non plus des gens qui, de bonne foi, achètent un duplex puis veulent l'habiter. O.K. Mais je sais, je note ça.

Ensuite, concernant la représentation devant le TAL, vous mentionnez que ce soit nécessaire... que c'est nécessaire que la représentation se fasse à titre gratuit, puis peut être qu'on peut discuter un peu de cette mesure-là, là, qui est proposée, puis vos commentaires là-dessus. On en a parlé avec les groupes qui vous ont précédé un peu. Mais... 

M. Pelletier (Gabriel) : Tout  à fait.

Mme Duranceau : ...comment vous voyez ça?

M. Pelletier (Gabriel) : Puis ma collègue, là, Me Brown, là, complétera certainement.

En somme, écoutez, on entend les comités logement d'une chose l'une, et on entend que nous, pour nous, le fait d'ouvrir le mandat à l'extérieur de la profession d'avocat, c'est une mesure d'accès à la justice, ou du moins ça pourrait être une mesure d'accès à la justice. On trouve ça intéressant.

Cela étant, quand on ouvre ce genre de mandat là, entre autres dans le communautaire, à un milieu dans lequel on sait qu'il y a des enjeux de financement et des enjeux de financement de l'action communautaire autonome. Nous, la question qu'on se pose, c'est : Est-ce qu'on est vraiment en train de donner les moyens aux comités logement de faire cette représentation-là? Est-e qu'ils veulent le faire? Est-ce qu'ils ont les moyens de le faire?

Alors nous, ce qu'on dit, ce n'est pas compliqué, c'est la mesure, on est en faveur, on trouve ça intéressant. Il y a certainement des OSBL qui pourraient être intéressés à le faire, probablement plus si on a augmenté le financement pour aller dans ce sens-là. Mais ce qu'on craint, c'est qu'en ne le limitant pas aux OSBL, aux employés puis aux bénévoles d'OSBL qui feraient ça à titre gratuit, on se retrouverait à recréer ce qui existait au début des années 2000, où on avait des mandataires ou des employés, ou voire même des boîtes, là, de représentants à bon prix, un peu, disons-le en bon québécois, cheap, qui venaient permettre à des locateurs d'être représentés à prix très, très bas. Et là, on se retrouve avec une mesure qui est censée être une mesure d'accès à la justice qu'on trouve intéressante, mais qui vient encore plus augmenter la disproportion des forces entre le locateur puis le locataire, parce que le locataire doit toujours trouver une ressource qui peut le prendre alors que le locateur, lui, a accès à une ressource encore moins dispendieuse que ce qu'il a déjà. Peut-être, Me Brown.

Mme Brown (Kimmyanne) : Oui. Si je peux me permettre de compléter? En fait, le risque avec ça, c'est que souvent, les locateurs, souvent les personnes morales et les entreprises vont avoir accès à une multitude de représentants à leur disposition. Faut noter que les locataires en ce moment, devant le Tribunal du logement, n'ont pas beaucoup de représentations, n'ont pas beaucoup accès à des avocats en droit du logement pour les représenter, soit pour une question de revenus ou de disponibilité de cesdits avocats. Donc, déjà qu'il existe un déséquilibre, ce déséquilibre, je crois, ne serait qu'encore plus qu'amplifié s'il y a des concierges, des mandataires, des gestionnaires d'immeuble qui viennent TAL, à titre onéreux, représenter ces locateurs.

• (17 h 50) •

Mme Duranceau : Donc, je garde mon esprit. Et par contre, dans cette façon de faire là, les modifications qui sont proposées sont alignées avec ce qui se fait au Tribunal administratif du Québec puis le Tribunal administratif du travail. Je me permets des questions plus techniques que juridiques, là.

Mme Brown (Kimmyanne) : Oui. Bien, je pense... et Me Pelletier pourra compléter. Mais qu'il y ait des mandataires, des concierges, des gestionnaires, c'est un phénomène social qui est très propre au marché locatif,  et donc je pense que ça pourrait être une mesure d'accès à la justice en raison des précédents qui existent dans d'autres tribunaux administratifs au Québec. Mais on craint de revenir à la situation qui préexistait, la décision Harvey c. Guerrero en 2005 de la Cour du Québec, et donc on crée un déséquilibre. Donc souvent, hein, on met en place des dispositions législatives qui, on croit, vont corriger certaines problématiques sociales, mais qui vont en générer d'autres. Donc, c'est notre crainte, et je crois que cette crainte est légitime et fondée dans les circonstances.

Mme Duranceau : O.K. Parfait.

M. Pelletier (Gabriel) : Si je peux me permettre?

Mme Duranceau : Oui, oui, allez-y.

M. Pelletier (Gabriel) : J'ai une petite chose supplémentaire que je rajouterais. Il faut comprendre qu'au niveau des autres tribunaux administratifs, puis je me prends, là, les premiers mandats juridiques que j'ai faits, c'était comme édition bac dans le cadre d'un OSBL où on pouvait avoir une représentation devant un tribunal administratif. C'était le tribunal de la Sécurité sociale au Canada pour les dossiers d'assurance-emploi. Mais il faut comprendre que ce soit TSS ou au TAC, très souvent dans plusieurs dossiers, l'adversaire, disons...

M. Pelletier (Gabriel) : ...l'opposant, c'est l'État. Souvent, ça peut être l'État, c'est le gouvernement, c'est une commission. Donc, il n'y a pas ce rapport là, comme Me Brown dit, où est ce que c'est deux particuliers? Évidemment, bon, en matière d'accidents de travail, l'employeur peut se faire représenter, mais il faut comprendre que le contexte est très différent dans ces tribunaux-là à cause des forces en présence.

Mme Duranceau : O.K. Je vais revenir au contexte d'éviction, mais vous proposez en tout cas des suggestions intéressantes au niveau des villes pour la preuve, je pense, au niveau des permis. Est-ce que vous pouvez nous parler un peu de ces recommandations-là?

Mme Brown (Kimmyanne) : Oui. En fait, on a constaté, je pense que ça a été amené aujourd'hui ou hier, là, qu'il y a, dans la foulée de la pandémie, il y a plusieurs arrondissements qui ont pris des décisions innovantes de limiter l'octroi de certains types de permis, particulièrement la subdivision de logement puisqu'il était constaté qu'il fallait... il ne fallait pas plus de logements petits. Il nous fallait des grands logements pour accueillir les familles. Et donc ces décisions sont salutaires, mais on constate qu'il existe... C'est à dire, on pourrait habiter dans Rosemont et ne pas pouvoir être protégé. Et on change... Une rue plus loin, on est dans un autre arrondissement et on n'est pas protégé.

Et donc on se pose la question. On ouvre un peu la discussion, je pense qu'il faut aborder ça, et c'est dans un contexte où ces microdécisions-là qui sont prises dans chaque arrondissement ont des impacts considérables. On protège les droits des locataires, mais on vient à se poser la question : Est ce qu'il y a des données qui existent en matière de crise du logement, de spéculation immobilière? Quels arrondissements permettent la subdivision et ne la permettent pas? Dans quels arrondissements? Donc, il n'y a pas d'étude qui est faite, il n'y a pas de données qui nous permettent de prendre position sur ces éléments-là. Et en contexte d'éviction, dans le contexte où le législateur va modifier des dispositions avec les évictions, je crois qu'il faut avoir cette réflexion-là.

Parce que je fais un petit historique dans le mémoire quand on parle du fait qu'à l'époque, là, il y avait un... C'était supposé être le Tribunal du logement qui devait gérer cette question-là. Et l'Union des municipalités du Québec a dit : Non, c'est notre compétence, on est spécialiste en urbanisme, on va le faire. Donc là, aujourd'hui, on se retrouve dans un contexte où il y a... il y a plein de règlements qui sont adoptés, et donc il faut analyser l'impact que ça a. Est-ce que les locateurs utilisent vraiment le mécanisme de la subdivision?

En ce moment, on le... on ne le sait pas vraiment. Donc, pour prendre position en tant que législateur sur des choses qui ont des impacts majeurs, tant sur les locateurs que sur les locataires, il est fondamental que les données soient mises... soient disponibles pour nous permettre de comprendre la réalité sur le terrain parce que les évictions pour agrandissement, subdivision et changement d'affectation, c'est le cœur de la crise du logement. C'est un droit du locateur, mais c'est un... c'est un moyen qui est mis en place, qui permet l'enrichissement du locateur. Donc il faut analyser ça.

Et d'ailleurs, nous décrions fortement que le rapport annuel de gestion du TAL ne donne pas le nombre d'oppositions aux évictions que les locataires ont déposé. On a noté une grande augmentation des demandes de reprises de logement. Tout à l'heure, on en a parlé avec le FRAPRU, je crois, de mémoire, mais le nombre d'oppositions aux évictions n'est pas quantifié. Et nous nous désolons franchement de ça parce que, sur le terrain, nos avocats membres constatent qu'il y a une recrudescence phénoménale de ce type d'éviction.

Mme Duranceau : O.K. Je comprends que c'est à l'étude de crédits, cette information-là puis c'est une information qui est publique. Ce n'était peut-être pas dans le rapport de gestion, là, mais elle est publique.

Mme Brown (Kimmyanne) : Des avocats membres de l'association ont fait des demandes d'accès à l'information pour obtenir ces données-là. Et il y a plusieurs dossiers devant la Commission d'accès à l'information...

Le Président (M. Schneeberger) : 30 secondes.

Mme Brown (Kimmyanne) : ...en lien avec ça. Donc, en tout cas, ça me fera plaisir d'aider... Mais pour les justiciables, parce que le rapport annuel de gestion, c'est public pour tout le monde, je pense que cette information-là doit être publiée.

Mme Duranceau : Parfait. Bien, merci. Merci pour vos commentaires.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci beaucoup. Alors, nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. Et je crois attendre Mme la députée de Mille-Îles pour 10 min 24 s

Mme Dufour : Merci, M. le Président. Me Brown, Pelletier et Mme Nault, je ne me suis pas trompée, j'ai les bons titres, merci pour votre présence, et votre exposé, et votre mémoire très, très, très détaillé. Il y a beaucoup, beaucoup de propositions. Je vais peut-être juste reprendre, là, où on s'est arrêté par rapport aux demandes de permis dans les municipalités. Vous proposez donc que les municipalités rendent disponible, via un portail public, l'ensemble des demandes de permis d'agrandissement et tous les autres, là, statuts que vous parlez. Ce n'est quand même pas banal comme information. C'est très compliqué à obtenir. Toutes les villes travaillent différemment. Je viens du milieu municipal. Personnellement, quand j'ai vu ça, j'ai dit : Ouf! Je ne vois pas ça demain matin du tout. Ça pourrait prendre même beaucoup de temps. Et pour, finalement, ce que je comprends, votre objectif, c'est plutôt de comprendre et d'avoir une...

Mme Dufour : ...état des lieux, mais est-ce que c'est... en tout cas, je me demande : Est-ce qu'il n'y aurait pas une autre façon d'avoir un état des lieux que de tenter d'harmoniser des systèmes de 1 200 municipalités au Québec? Ce qui n'est vraiment pas fait. Et ils peuvent dire... ils risquent de crier demain matin si on leur demande de fournir ces informations-là tout en même temps. Donc, il n'y aurait pas lieu, peut-être, que vous parliez de l'INRS, ailleurs de faire... peut-être y aller autrement, peut-être par des sondages, des enquêtes avec un chercheur, je ne sais pas, mais je vous pose la question parce que ça me semble assez, assez, assez difficile à atteindre, là, cet objectif-là, la recommandation huit.

Mme Brown (Kimmyanne) : Oui, bien, c'est une recommandation qui est très ambitieuse. Nous faisons confiance aux législateurs, bien entendu, pour répondre à ces problématiques-là. Ce qu'on nomme dans le mémoire, c'est que c'est très difficile pour quelqu'un de savoir ce qui se passe avec une demande de permis, à part de passer par les mécanismes d'accès à l'information. Et les difficultés, bon, inhérentes à... je comprends que les municipalités, c'est des organismes complexes, surtout quand on pense qu'il y a beaucoup d'arrondissements, il y a beaucoup de personnes qui sont impliquées là-dedans, mais on est... Je pense qu'on demeure ouverts à toute possibilité. L'important, je pense, c'est l'accès aux données et de savoir combien de demandes de permis sont faites dans l'arrondissement, par exemple, Rosemont La Petite-Patrie, pour de la subdivision. Tu sais, pour moi, c'est un peu ça qui est important, de connaître, tant pour les justiciables qui souhaitent se défendre ou connaître, ou nous, l'Association des juristes progressistes, ou tout le Québec, en fait.

Je pense que l'important de cette recommandation-là, qui est la recommandation huit, c'est de comprendre qu'en ce moment ces données-là sont très peu accessibles, sont très peu documentées et qu'il faut un peu les mettre sur la table par n'importe quel véhicule. On propose ce portail-là parce qu'on considère que c'est important que les locataires aient accès au statut d'est-ce que... tu sais : J'ai reçu un avis d'éviction, là... avec les propositions du projet de loi, c'est un peu modifié, mais, en ce moment, un avis d'éviction : Est-ce que le locateur a déposé sa demande de permis? Qu'est-ce qu'il en est? Est-ce que je suis évincé? Est-ce que je devrais déposer une demande? Donc, je pense que la publicité des informations en matière de logement, dans un contexte de crise du logement, c'est fondamental. L'information, c'est du pouvoir, et le fait d'avoir accès à cette information-là, ça peut changer les choses.

Mme Dufour : Je vais juste me faire la voix un peu municipalités, là, je peux... Pour l'avoir vécu, l'information concernant une demande de permis qui est active et non octroyée encore, c'est confidentiel. Même les élus n'ont pas cette information-là. Donc, avant qu'elle soit publique, il faudra changer la loi sur la confidentialité des données. On n'est pas là. Donc, il y a un enjeu là, là. C'est pour ça que je vous... peut-être, la réflexion, c'est de voir l'objectif, c'est quoi puis de voir quel moyen. Peut-être que le moyen choisi n'est pas le meilleur moyen pour atteindre le même objectif, peut-être autrement. En tout cas, je veux... je vous lance la réflexion, puis on pourra peut-être en discuter ultérieurement parce que je pense que c'est intéressant, là, sur l'objectif au bout du compte.

Mme Brown (Kimmyanne) : Bien sûr.

Mme Dufour : Je vais peut-être vous amener sur la sous-location, c'est page 27 de votre mémoire, disant... Vous vous faites une... 26 ou 27, vous faites une proposition, dans le fond, d'amendement où vous dites, dans le fond, que... tu sais, pour résilier un bail qui a été sous-loué, là, pendant 12 mois, plus de 12 mois, dans le fond, que la demande soit déposée au Tribunal administratif du logement plutôt qu'actuellement, là, tout simplement signifier au locataire. Et je me demandais pourquoi ne pas avoir choisi une présomption de refus. Parce que ma crainte, quand je lis cette proposition-là, c'est qu'on embourbe le tribunal, tu sais, qui est déjà trop sollicité. Donc, je me demandais pourquoi on n'avait pas été plutôt avec la présomption de refus.

• (18 heures) •

Mme Brown (Kimmyanne) : En fait, je pense que la raison pour laquelle on n'est pas allés avec la présomption de refus, c'est des dossiers qui sont... je n'ai pas le rapport annuel de gestion devant moi, mais ce n'est pas ce qui embourbe le tribunal en ce moment, les dossiers en matière de sous-location de plus de 12 mois. Ce qui embourbe, selon moi, et ce qui constitue un problème social, c'est d'envoyer des avis à des locataires, alors qu'ils n'ont pas sous-loué pendant plus de 12 mois. Et ça, pour moi, c'est aussi un des phénomènes qui sont à l'origine de la crise du logement, et on en parle longuement dans notre mémoire et on salue, en fait, l'initiative de modifier ça pour le régime des évictions. Le fait d'envoyer un avis à un locataire qui n'a pas sous-loué depuis plus de 12 mois, c'est grave.

Nous, ce qu'on propose, c'est qu'étant donné que ce n'est pas... C'est un moyen qui est encore moins utilisé que celui des évictions et des reprises. Que ce soit le locataire qui tout simplement dépose sa demande au Tribunal du logement, c'est sûr que le Tribunal administratif du logement, je crois, a besoin de ressources pour répondre aux besoins actuels. Je pense que nous avons... je le constate, je pense, chaque jour, dès que j'arrive...


 
 

18 h (version non révisée)

Mme Brown (Kimmyanne) : ...au Tribunal admnistratif du logement, au village olympique, je vois les rôles d'audience. C'est incroyable, mais je pense que c'est quelque chose qui n'est pas étranger à la crise du logement et au fait que, grâce aux mécanismes qui existent, de contrôle des loyers, les locataires ont les outils pour pouvoir déposer des types de... donc c'est pour ça. Puis parce que ce n'est pas... 19, 48, la question de la sous-location, ce n'est pas la même chose qu'il y a une une affaire d'éviction, puis c'est un phénomène qui est vraiment moins utilisé, là.

Mme Dufour : Est-ce que la présomption de refus pourrait atteindre, finalement le même objectif de protéger un peu...

Mme Brown (Kimmyanne) : Tout à fait.

Mme Dufour : O.K., parfait. Je vous amène aussi, c'est un peu technique, mais la recommandation 13, je voulais bien juste comprendre. Vous faites une recommandation de modifier... que de modifier, dans le fond, là, la... bien, c'est toujours le même élément, mais on parle... la demande... ah! c'est ça. C'est quand on se rend compte que le prix conclu n'est pas... dans le fond, là, ne suit pas, là, ce qui a été payé dans les derniers 12 mois, qui n'est pas en phase avec ça. Précédemment, c'était que la demande devait être présentée dans les 10 jours de la conclusion du bail proposé, que ce soit dans le mois, donc donner... qu'il y ait plus de journées pour le faire.

Mais, dans le deuxième cas, vous le diminuez, où on dit que ça... elle doit l'être dans les deux mois du début du bail ou de la sous-location... pardon, et là, vous dites : Elle doit l'être plutôt dans le mois de la connaissance du loyer le moins élevé. Pourquoi pas deux mois, là? C'est ça que j'essayais de comprendre pourquoi on l'avait diminué...

Mme Brown (Kimmyanne) : Bien, en fait, la raison pour laquelle on a ramené à 30 jours, c'est parce qu'on harmonise la procédure. Donc, il y a deux délais de 30 jours, ce qui est... ce qui semble plus aisé et simple pour les justiciables, mais aussi parce qu'on le fait courir à partir de la connaissance du fait. Donc là, ça, c'est le cas de la clause G vide, là, donc quand la clause G n'est pas remplie, on trouve ça un peu insensé que le locataire doit déposer sa demande dans les deux mois du début du bail. Parce que, s'il ne connaît pas le loyer, ça devient comme inefficace comme recours. Donc là, ce qu'on dit, c'est qu'il y a 30 jours, mais à compter de la connaissance du fait, donc on rapporte à 30 jours. Et là, ça donne la marge de manœuvre au locataire de trouver l'information. Dès qu'il la trouve, il a 30 jours pour déposer sa demande, ce qui uniformise la procédure et solidifie aussi ce mécanisme-là, qui est un mécanisme vraiment essentiel, là, tu sais, c'est un mécanisme qui est très bon, mais qu'il faut le rendre effectif.

Mme Dufour : Oui. Rapidement, parce que je veux passer la parole à ma collègue, la colocation, vous ne l'avez pas abordée. Est-ce que c'est quelque chose que vous croyez qui devrait être traité dans... éventuellement?

Mme Brown (Kimmyanne) : Il est vrai qu'en ce moment il existe quelques problématiques, je parle au niveau du traitement judiciaire de la colocation et non pas de la colocation elle-même. La colocation, c'est le fait de cohabiter, mais je ne pense pas que le législateur doit intervenir sur cette question. Je pense que le traitement judiciaire actuel de la colocation est très bon. Donc, on vient dire : Des locataires peuvent cohabiter ensemble et un locataire a le droit de donner accès au logement à des personnes qui peuvent l'utiliser à sa guise. Donc, c'est un phénomène social qui existe et qui permet d'ailleurs de partager les coûts du loyer. Donc, je ne pense pas qu'une intervention du législateur est nécessaire et je fais confiance au traitement judiciaire pour ça.

Mme Dufour : Merci. Je laisse la parole à la députée de La Pinière.

Mme Caron : Merci. Alors, la question que j'ai, c'est à propos de votre recommandation neuf. Vous avez... Je pense que c'est dans un but d'équilibre où vous avez... vous proposez que l'âge, ce soit de 65 ans et plus plutôt que 70 ans et plus, à la fois pour les locataires et pour les locateurs. Ma question, c'est : Est-ce que vous pensez que cette modification-là est suffisante pour assurer la protection des aînés contre le phénomène, là, des évictions?

M. Pelletier (Gabriel) : Bien, c'est une excellente question, puis la réponse s'y trouve d'une certaine manière. Moi, ce que je vous dirais, c'est qu'on a voulu se concentrer sur l'âge parce qu'on pensait que c'était une bonne piste de départ. C'est quelque chose qui pouvait être discuté, puis avoir... être porteur de la commission. Mais on a des enjeux où il y a effectivement des demandes qui sont refusées ou des protections sont refusées parce que le revenu est un petit peu trop élevé par rapport à ce qui est déterminé, puis ça... disons-le, le revenu, dans la loi, actuellement, il est très bas, là. L'admissibilité à un HLM, c'est très bas. On peut se demander aussi, peut-être... C'est un peu trop. Nous, on a voulu se concentrer sur l'âge, mais il y a une discussion à avoir sur le revenu maximal. Il y a une discussion à avoir sur le nombre d'années d'occupation, puis on espère que la commission pourra avoir cette discussion-là, effectivement.

Mme Caron : D'accord. Merci. Est-ce que...

Le Président (M. Schneeberger) : On n'a plus...

Mme Caron : ...plus de temps. O.K. Merci.

Le Président (M. Schneeberger) : Désolé. Alors, nous allons maintenant du côté de la deuxième opposition. Alors, M. le député de Laurier-Dorion, vous avez trois minutes 28.

M. Fontecilla : Merci beaucoup, messieurs dames d'être ici, je vous félicite pour votre mémoire...

M. Fontecilla : ...est très, très, très complet. Écoutez, je vous remercie également de soulever la question de la protection des locataires aînés, ce que nous appelons gentiment, dans ma formation politique, la clause Françoise David, là. Mais j'aimerais vous entendre plus particulièrement sur les effets du retrait de la cession de bail sur les femmes victimes de violence conjugale.

M. Nault (Spencer C.) : Oui, tout à fait. En fait, c'est vrai que, dans l'actualité, on nous rappelle que la violence conjugale, c'est une problématique sociale qui est très présente dans notre société, malheureusement. Puis à l'heure actuelle, ce qu'on constate, c'est qu'il y a de nombreuses femmes qui doivent être hébergées en maison d'aide et d'hébergement ou chez des proches, puis ça, c'est en attente d'un HLM qui se libère. Mais on sait aussi que ces places-là sont vraiment rares et voire inexistantes dans plusieurs secteurs et régions du Québec. Donc, pour plusieurs de ces femmes, la possibilité de la cession de bail, ça représente une des rares options existantes pour avoir accès à des logements dont le loyer n'est pas trop élevé pour leurs moyens.

Puis on en parle aussi, quand on parle de femmes, on parle évidemment également des femmes autochtones, des femmes immigrantes, des femmes racisées, qui vivent, en plus, de la discrimination en raison de leur identité, donc ces personnes tiennent énormément au mécanisme de la cession de bail.

M. Fontecilla : Donc, pour avoir accès à un logement dont le bail, il a été cédé?

M. Nault (Spencer C.) : Oui.

M. Fontecilla : Très bien. Donc, ça pourrait aider énormément ces femmes-là.

Je vais passer à une idée plus... beaucoup plus vaste, là. J'ai été étonné. Enfin, on a entendu cette idée-là dans... chez d'autres groupes aussi, là, la question du paradigme dominant, là, comme quoi le problème, c'est l'insuffisance de la production... Dans la production de logements. Vous, vous dites c'est plutôt dans l'absence de contrôle des loyers qu'il faut trouver la cause de la crise du logement. Expliquez-nous votre idée.

Mme Brown (Kimmyanne) : Bien, en fait, on est des juristes, donc, déformation professionnelle, on analyse le Code civil du Québec. Puis on pense que, dans un contexte de crise du logement, il faut une intervention du législateur pour corriger les inégalités. Et on pense que ce sont des moyens plus efficaces que... Construire des logements, ça prend du temps et ça prend des terrains, ça prend de la main-d'oeuvre, c'est des mesures qui sont long terme. Nous, on considère que le législateur peut agir rapidement, efficacement, sur des moyens qui ont des effets assez significatifs sur les locataires.

La question des locataires aînés, de réduire à 65 ans, c'est une intervention mineure qui pourra permettre à des personnes aînées, dans des situations de vulnérabilité graves et critiques, d'être maintenues dans leur logement. Il ne... il Faut continuer de rappeler que le logement, c'est une dimension essentielle du bien-être physique et psychologique de chaque personne.

Et donc c'est pour ça qu'on arrive avec un mémoire qui a plusieurs propositions qui viennent corriger ces inégalités-là et proposer des solutions innovantes pour permettre un meilleur contrôle des loyers, pour permettre de consolider le droit au maintien dans les lieux des locataires, qui est la pierre angulaire du régime de louage résidentiel au Québec.

M. Fontecilla : Je vous remercie.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, merci beaucoup. Alors, nous allons voir du côté de député des Îles-de-la-Madeleine pour un deux minutes 38 s.

• (18 h 10) •

M. Arseneau : Mes Brown, Pelletier et Mme Nault, merci de votre mémoire très riche, plein de pistes fort intéressantes. Je note, notamment, là, la question du droit au logement à inscrire ou la réduction de l'âge pour... En ce qui a trait aux procédures d'éviction.

Je retiens aussi que vous avez mentionné pourquoi réparer ce qui n'est pas brisé, là, lorsqu'il est question de la cession de bail. Mais vous savez que les propriétaires, par exemple, ont fait valoir leur droit de propriété, puis vous l'abordez. J'aimerais ça que vous résumiez un petit peu. J'aurais trois questions à vous poser en deux minutes, donc de petites réponses courtes. Mais pourquoi est-ce que ça n'affecte pas leur droit de propriété, de maintenir le droit de cession de bail?

Mme Brown (Kimmyanne) : Bien, en fait, le droit à la cession de bail constitue une limitation raisonnable du droit de propriété. Donc, la jurisprudence est venue dire, et les tribunaux sont venus dire : c'est une limitation raisonnable dans un contexte où, l'objectif du législateur, c'est de protéger le droit au maintien dans les lieux.

Donc, en ce moment, il faut encore le dire, et le RCLALQ l'a nommé : combien de cessions de bail sont faites par année au Québec? Personne ne peut répondre à cette question. Donc, moi, je considère que ce droit-là est fondamental. Est-ce qu'il est utilisé à 100 %?, je ne peux pas vous répondre. Est-ce qu'il est sous-utilisé?, je ne peux pas vous répondre sans données. Et c'est important, pour moi, ces données-là.

Donc, selon moi, là, ces arguments-là, de droit à la propriété, ont été...

Mme Brown (Kimmyanne) : ...abordé, et d'ailleurs les décisions dont je vous parle, qu'on parle dans le mémoire, il y avait des représentations des associations de propriétaires. Ils ont été entendus. Donc, ces arguments-là ont déjà été abordés et décidés.

M. Arseneau : Et lorsqu'ils font valoir que ça n'avait pas été l'intention du législateur d'utiliser cet aspect-là, là, pour le contrôle des loyers, donc, on pourrait tout simplement l'abandonner aujourd'hui, qu'est-ce que vous répondez à ça?

Mme Brown (Kimmyanne) : Bien, c'est une interprétation erronée, et je pense qu'il y a plusieurs décisions des tribunaux qui viennent consacrer ça et dire que, non seulement c'est un moyen que le législateur a mis en place pour assurer le droit à la mobilité des locataires, parce que, comme on l'a dit si justement, tout à l'heure, les propriétaires étaient en faveur du droit à la cession de bail lorsqu'il a été mis en place, pour favoriser la mobilité des locataires et trouver des nouveaux locataires, mais c'est aussi une mesure de contrôle des loyers. Ça fait partie du sac à dos du législateur, des moyens pour contrôler les loyers. C'est ce que le législateur a décidé. Les tribunaux sont venus confirmer ça à travers le temps, par des années de super belles décisions qu'on doit garder. Il ne faut pas aller contre ça.

M. Arseneau : J'aurais aimé vous poser la question sur la fixation des loyers comme mécanisme de contrôle, mais je pense que le président ne vous donnera pas le temps de répondre.

Le Président (M. Schneeberger) : Eh non, malheureusement.

M. Arseneau : On aura l'occasion de s'en reparler.

Mme Brown (Kimmyanne) : Avec plaisir. Merci.

Le Président (M. Schneeberger) : Parfait. Alors, merci beaucoup pour votre contribution à nos travaux. Alors, avant de conclure les auditions, je procède au dépôt des mémoires des personnes et des organismes qui n'ont pas été entendus en commission, mais, par contre, je peux leur dire qu'ils seront pris en considération par les députés pour l'adoption du futur... du projet de loi.

Alors, à ce moment-ci de la commission ayant accompli sa mission, j'ajourne les travaux sine die. Bonne soirée à tous.

(Fin de la séance à 18 h 13)


 
 

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