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(Quinze heures six minutes)
Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission du budget et de l'administration se réunit avec le
mandat de procéder à une consultation générale
portant sur l'avant-projet de loi traitant du régime de
négociation des conventions collectives dans les secteurs public et
parapublic.
Les membres de la commission pour la séance d'aujourd'hui sont:
M. Leduc (Fabre), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Biais (Terrebonne), M. Page
(Portneuf), M, Beaumier (Nicolet), M. Ryan (Argenteuil), M. Gauthier
(Roberval), M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Mme Juneau (Johnson), M. Lachance
(Bellechasse), M. Laplante (Bourassa), M. Polak (Sainte-Anne), M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce), M. Tremblay (Chambly) et M. Clair (Drummond).
M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, est-ce que vous accepteriez
que, selon la même formule qu'hier, le ministre de l'Éducation,
mon collègue François Gendron, puisse être intervenant
à cette commission et partager mon droit de parole?
Le Président (M. Lachance): Certainement, M. le ministre,
tel que nous le permettent nos règles de procédure, il n'y a
aucune objection, au contraire, à ce que M. le ministre de
l'Éducation soit présent à cette table pour nos
délibérations. Cet après-midi, vous réalisez qu'il
y a eu, à la suite d'une entente entre les leaders de nos deux
formations politiques, un déplacement de l'horaire et, donc, nous
entendrons des représentants de la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec, à qui je souhaite la
bienvenue, nous faire part de leur point de vue. J'invite immédiatement
le président, M. Jacques Chagnon, à bien vouloir nous
présenter les personnes qui l'accompagnent.
Fédération des commissions scolaires
catholiques du Québec
M. Chagnon (Jacques): M. le Président, d'abord, je vous
remercie de ce mot de bienvenue que vous nous avez adressé. Je tiens
à vous présenter immédiatement le directeur
général de la fédération, M.
Fernand Paradis, le directeur des relations du travail, M. Jean-Pierre
Tessier et le président du comité des relations du travail qui
est un comité fonctionnel, un comité ad hoc du conseil
d'administration de la fédération, M. Jacques
Lafrenière.
Le Président (M. Lachance): Merci, M. Chagnon. Nous en
sommes maintenant à l'exposé de votre mémoire et, afin de
permettre aux députés de chaque côté de pouvoir
faire part de leurs commentaires et d'échanger avec vous, si vous
pouviez vous restreindre à une période approximative de 25
minutes environ - ce n'est pas quelque chose de parfaitement rigoureux - ce
serait souhaitable.
M. Chagnon: Merci, M. le Président. Vous aurez
remarqué que l'exposé écrit que nous avons formulé
et que nous avons envoyé aux députés membres de la
commission parlementaire était relativement court. Si vous me le
permettez, je pourrais en faire la lecture. Il n'y a finalement que 21 pages
pour tirer la conclusion.
Le Président (M. Lachance): Allez-y, M. Chagnon, on vous
écoute.
M. Chagnon: Je vous remercie, M. le Président. La
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
représente 216 commissions scolaires du secteur catholique et
détient des contrats de service, notamment en matière de
relations du travail avec les commissions scolaires Crie et Kativik. La
fédération est membre du comité patronal de
négociation des commissions scolaires pour catholiques, mieux connu sous
le vocable de CPNCC et a participé aux diverses rondes de
négociation depuis 1969. Auparavant, la fédération a
conseillé les commissions scolaires au niveau local lors de
négociations spécifiques.
Dès mai 1983, la fédération amorçait une
réflexion sur le régime de négociation dans le secteur
public. En janvier 1984, elle soumettait à ses membres une étude
du système de négociation et diverses propositions visant
principalement à dépolitiser le débat, à permettre
à chaque secteur spécialisé - éducation, affaires
sociales - de débattre leurs problèmes, à mieux
définir le rôle des parties, à impliquer davantage les
responsables directs des
personnels - commissions scolaires et hôpitaux - et à
encadrer finalement la discussion du dossier salarial.
Afin de préciser davantage la position des commissions scolaires,
la fédération a aussi procédé à une
consultation sur des points spécifiques en octobre 1984. À partir
de ces divers éléments, il nous est donc possible de vous faire
connaître le point de vue des commissions scolaires sur les
transformations à effectuer au régime de négociation du
secteur public.
La position des commissions scolaires. Il nous faut tenir compte de
divers facteurs qui nous permettront de situer la position des commissions
scolaires dans le contexte de 1985. Dans sa recherche d'une solution au
problème de la négociation dans le secteur public, le milieu
scolaire se devait de composer avec les réalités des
années quatre-vingt. Au cours des dernières années, il a
connu certains bouleversements. Pensons au problème de
décroissance, aux nouveaux programmes, aux contraintes
budgétaires, aux changements sociaux nécessitant plus
d'encadrement de l'élève et plus de stabilité du
système.
En ce sens, les solutions avancées sont le fruit d'un compromis,
d'étalement des objectifs et d'un souci de maintenir la stabilité
du système scolaire. À partir d'un objectif ultime qui se voulait
une reprise en main de la négociation par chacune des commissions
scolaires, la fédération a soumis dès le départ le
postulat que le dossier salarial ne serait pas décentralisé.
Dans le milieu scolaire, ce préalable traduit le vécu des
quinze dernières années où, dès 1968, les notions
d'équité, d'égalité des chances en éducation
à travers tout le Québec amenaient les commissions scolaires
à renoncer à leur pouvoir de négociation pour
établir une équité salariale qui, par la suite, a
englobé les grands bénéfices d'emploi, tels que les
vacances, les assurances, les droits parentaux, le quantum des tâches et
la sécurité d'emploi.
Ces éléments influencent inévitablement les
commissions scolaires dans l'établissement d'un nouveau mode de
négociation. Partagées entre une volonté d'implication
locale dans la négociation de conditions de travail adaptées
à leur milieu et le besoin, par souci d'équité et de
stabilité, de se regrouper pour la négociation de certains grands
dossiers normatifs, les commissions scolaires ont choisi un mode de
négociation qui débouche sur deux paliers de discussion.
Afin de permettre à chaque palier d'exercer pleinement ses
responsabilités, le mode de négociation recherché devra
tenir compte, et cela est extrêmement important, de leur
étanchéité. C'est en ce sens que nous retrouvons dans les
propositions qui suivent une méthode de négociation et un mode de
règlement des conflits adaptés à chacun des paliers.
Relativement au déroulement, les propositions que nous y faisons
sont les suivantes: Favoriser les modalités qui permettront de centrer
le débat sur le contrat de travail et identifier les enjeux pour chacun
des groupes de salariés. Deuxièmement, ramener la conduite des
négociations dans chacun des secteurs spécialisés.
Troisièmement, regrouper certains grands dossiers au niveau provincial.
Quatrièmement, a) permettre aux commissions scolaires et aux syndicats
locaux d'établir des conditions de travail propres à leur milieu;
b) pour la discussion de ces dossiers, rejeter la formule traditionnelle de la
négociation locale avec droit de grève et de lock-out et
favoriser un encadrement des discussions, soit par des arrangements locaux,
soit par la possibilité de modifications des conditions de travail
locales; c) la négociation de ces points pourrait être
encadrée par des formules telles que la médiation, l'arbitrage,
le maintien du texte antérieur en cas d'impasse.
Les motifs. Il est évident que de vouloir régler dans un
même temps et par un même décideur les conditions de travail
de 300 000 syndiqués de divers secteurs d'activité conduit
inévitablement à compliquer le débat. De même, une
modification significative du gouvernement relativement au rôle d'agent
négociateur qu'il s'était attribué au fil des
années, permettrait de dépolitiser le débat et de ramener
les enjeux sur le contrat de travail.
Compte tenu des sommes impliquées pour maintenir une certaine
équité au niveau provincial et pour éviter une
déstabilisation du système, il nous paraît
inévitable dans le contexte de 1985 de devoir regrouper certains grands
dossiers au niveau provincial. Pensons notamment à la
sécurité d'emploi, aux droits parentaux, au quantum de
tâches et aux assurances.
Parallèlement, les commissions scolaires, comme employeurs
directs de leurs personnels, doivent être en mesure d'établir avec
les syndicats locaux des conditions de travail propres à leur milieu.
Nous pensons à des matières telles que la distribution des
tâches, l'aménagement des horaires de travail, les
mécanismes de consultation et de participation, les mouvements de
personnel, les congés, les absences, les prérogatives syndicales
et l'organisation du travail en général. (15 h 15)
Je tiens ici à vous mentionner que les annexes en pages 25, 26 et
27 sont des sujets de négociation locale qui pourraient aussi bien
toucher non seulement les enseignants mais les professionnels non-enseignants
et les personnels de soutien. Selon notre proposition, le milieu local a
l'entière responsabilité de la négociation de ce
dossier. Il faut éviter, comme ce fut le cas au cours des
dernières années, que les négociations locales constituent
un match revanche des négociations provinciales. En ce sens, il faut
éviter que des dossiers n'interfèrent les uns sur les autres. Le
mode de négociation choisi au niveau local doit empêcher qu'il y
ait intervention des parties provinciales - c'est ce qu'on appelait
l'étanchéité - en cas d'impasse.
Il s'avère qu'au cours des dernières années
l'exercice du droit de lock-out ou du droit de grève au niveau local a
conduit inévitablement à l'intervention gouvernementale: loi
spéciale, tutelle, règlement du protocole de retour au travail,
sessions intensives dans les hôtels de Québec, etc.
Les interventions du pouvoir central n'ont souvent servi qu'à
désabuser et frustrer tant le syndicat local que la commission scolaire
concernée. Ces considérations ne sont pas sans expliquer le
comportement des milieux locaux où les assemblées syndicales
refusent d'utiliser la grève comme moyen de pression et celui des
commissions scolaires qui, plutôt que de décréter un
lock-out, préféreraient soumettre le litige soit à la
médiation ou à l'arbitrage.
Dans le même sens, par notre proposition 4, nous réclamons
l'établissement d'un nouveau mode de règlement des conflits au
niveau local.
Nous sommes d'accord avec les, articles 20 à 39 de la loi
relativement au mode de négociation. Cependant, nous tenons dès
à présent à préciser que le groupement de
commissions scolaires doit détenir une voie prépondérante
au sein du comité patronal et ce, sur un certain nombre de sujets,
notamment les matières sur lesquelles portent les stipulations locales.
Nous reviendrons plus loin sur la composition et le rôle des clubs
patronaux, ainsi que sur les amendements qu'il faut apporter au projet de
loi.
Relativement au dossier des salaires, nous proposons, d'une part,
d'encadrer la discussion du dossier relatif aux salaires; deuxièmement,
de favoriser la mise sur pied d'un bureau de recherche indépendant et,
troisièmement, de permettre au gouvernement de jouer un rôle
déterminant dans l'établissement des salaires en y associant des
organismes patronaux.
À chaque ronde de négociation, le dossier salarial
monopolise une grande partie du temps de négociation. C'est
immédiatement après un constat d'échec sur le dossier
salarial que le front commun annonce une grève. Il s'ensuit
généralement une guerre de chiffres entre les parties et un
débat politique sur la capacité ou la volonté de payer de
l'État. En ce sens, la création d'un bureau de recherche
indépendant s'avère un outil nécessaire à la
conduite des négociations.
Compte tenu que la masse salariale représente des sommes
considérables, il nous apparaît inévitable que le
gouvernement joue un rôle déterminant dans l'établissement
des salaires. Doit-on écarter ce dossier totalement de la
négociation? Doit-on procéder par arbitrage? Doit-on
développer des mécanismes nouveaux pour la négociation de
ce dossier? Doit-on maintenir le mode actuel? À notre avis, il
appartient au gouvernement d'arrêter un choix en cette
matière.
Selon la fédération, il nous apparaît possible
d'encadrer la négociation du dossier. Évidemment, cela suppose
que les parties acceptent de discuter en prenant pour base les acquis actuels
et en formulant des propositions pour l'avenir.
Nous possédons des éléments importants sur la
composition du dossier salarial: rangement des emplois, mécanisme
d'indexation, correction à la grille salariale pour les bas
salariés, enfin, la comparaison avec le marché privé.
Ces divers points ont-ils fait partie des discussions privées que
le gouvernement a tenues avec les centrales syndicales à l'automne 1984?
Le gouvernement a-t-il cherché à imposer ses vues sur
l'encadrement du dossier salarial? A-t-il offert des garanties aux centrales
syndicales? Ça, personne ne le sait encore.
Il est nécessaire de reprendre les discussions sur ce dossier
dans le cadre d'un forum élargi impliquant les organismes patronaux tant
du secteur public que du secteur privé.
Commentaires par rapport à l'avant-projet de loi: L'avant-projet
de loi ne comporte aucune définition du terme
"rémunération". Selon nous, la rémunération se
limite aux échelles ou au taux de traitement.
Compte tenu de l'importance de cette matière de
négociation, le gouvernement devrait prévoir une période
de discussion impliquant un forum représentatif d'intervenants visant
à déterminer un protocole de fonctionnement, à convenir de
certains paramètres relatifs à la détermination des
salaires et permettant d'établir certaines garanties relativement aux
acquis des conventions collectives actuelles au chapitre des salaires.
Ces garanties devraient-elles être annexées à la
loi? Devraient-elles faire partie d'un protocole? La mécanique
proposée aux articles 68 et suivants, accompagnée de garanties
sur les acquis, pourra-t-elle supplanter le mode traditionnel de
négociation en cette matière? Nous serons mieux en mesure de nous
prononcer sur le sujet à la suite de la tenue du débat que nous
réclamons.
Relativement au rôle des parties, les
propositions que nous y faisons sont les suivantes: d'une part, la
responsabilité des négociations du normatif lourd appartient aux
commissions scolaires, mais le gouvernement doit y être associé
comme responsable de l'établissement et du contrôle des
paramètres du normatif lourd.
Deuxièmement, il existe un lien entre le salarial et le normatif
lourd, d'où la nécessité de concertation entre le
gouvernement et les associations patronales dans la discussion de ces
dossiers.
Troisièmement, il doit y avoir des discussions entre le
gouvernement et les associations patronales sur les paramètres du
normatif lourd préalablement à toute modification de la masse
salariale.
Quatrièmement, la fédération doit maintenir son
rôle d'agent négociateur.
La fédération a toujours admis la responsabilité du
gouvernement à l'intérieur du processus de négociation
comme contrôleur des deniers publics et, notamment, sa juridiction en ce
qui a trait au dossier salarial. Ce que nous avons toujours rejeté comme
fédération, c'est son empressement, dès qu'il y a blocage
ou apparence de conflit, à se substituer immédiatement aux
employeurs véritables.
Tout le problème provient de cette intense confusion entre les
notions d'État-gouvernement et d'État-employeur. De fait, c'est
l'État-employeur qui a pris le pas sur l'État-gouvernement en
occupant un champ d'activité tellement vaste que les négociations
dans le secteur public sont devenues l'occasion de convenir d'un contrat social
pour l'ensemble de la société québécoise
plutôt que de s'entendre sur un contrat de travail. Et, si
l'État-employeur n'arrive pas lui non plus à sortir des
culs-de-sac où il s'est lui-même embourbé, il peut toujours
faire appel à l'État-législateur qui l'a servi plus de 30
fois depuis 1967.
Partant du fait que les personnels des commissions scolaires ne sont pas
des employés de l'État, chaque commission scolaire étant
en soi une entité juridique selon la Loi sur l'instruction publique dont
l'une des fins est précisément d'administrer les ressources
humaines, il importe de redéfinir le rôle que l'État s'est
lui-même attribué à l'intérieur du processus de
négociation.
Il doit se retirer de la conduite des négociations. Cette
assertion ne signifie pas qu'il doit s'abstenir. Il doit participer au
processus, mais dans le sens de l'État-gouvernement dont le mandat ne
devrait être axé que sur sa responsabilité d'administrer
les fonds publics, de définir les grands paramètres en
éducation et de s'assurer que l'ensemble des régions du
Québec profiteront d'une équivalence tant au niveau des services
éducatifs qu'au niveau de leur qualité. Il appartient donc aux
associations d'employeurs d'exercer le rôle d'agent négociateur.
Cette négociation peut se faire par l'intermédiaire d'un
comité de liaison, association-gouvernement, où chacun exerce un
rôle spécifique.
La section II de la loi relative à l'organisation patronale doit
être modifiée, notamment sur les points suivants. À
l'article 10, premier paragraphe, on devrait y biffer les mots "sous
l'autorité du ministre de l'Éducation". Chaque comité
relève des deux parties, organisme patronal et ministère. Il a
pour fonction de négocier.
L'article 10, deuxième paragraphe, devrait se lire comme suit:
"À cette fin, ils élaborent les projets de propositions de
négociation, en informent le Conseil du trésor, organisent,
dirigent et coordonnent les négociations de la partie patronale avec les
groupements d'associations de salariés ou, suivant le cas, avec les
associations de salariés. Les comités doivent obtenir du Conseil
du trésor les autorisations nécessaires sur les matières
ou éléments qu'ils auront convenu au préalable comme
étant d'intérêt gouvernemental, au sens de l'article 18,
paragraphe 2. "
On devrait lire à l'article 11: "Les stipulations
négociées et agréées par un comité sont
signées par un représentant désigné par le
groupement des commissions scolaires, par le ministre de l'Éducation
ainsi que par le président et le vice-président du comité.
"
Relativement au rôle du Conseil du trésor, l'article 18
devrait être modifié comme suit: "Le conseil autorise les mandats
de négociation des comités et des sous-comités patronaux
dans les matières ou éléments qu'il a indiqués
comme étant d'intérêt gouvernemental. Cependant, cet
intérêt gouvernemental ne peut s'exercer sur les matières
ou éléments identifiés comme étant de
prépondérance des groupements de commissions scolaires ou
d'établissements au sens de l'article 9. " À moins qu'il n'en
soit convenu autrement, les ententes ou coutumes établies avant le 1er
janvier 1985 au niveau des comités patronaux sont maintenues.
Relativement aux paliers de négociation, nous proposons, d'une
part, de prévoir deux paliers de négociation: le palier local,
pour la modification des textes locaux et les arrangements locaux; le palier
national, au niveau des grands dossiers normatifs. D'autre part, au plan
national, les parties - gouvernement, organismes patronaux, syndicats
-devraient se retrouver au niveau de deux pôles de négociation
spécifiques: la table de discussion du dossier des salaires; la
structure de négociation sectorielle du normatif. Il doit y avoir
étanchéité entre chacun des paliers de
négociation.
Le choix de regrouper certains dossiers d'une part et de permettre aux
parties
locales de déterminer les conditions de travail sur certaines
matières spécifiques suppose l'établissement de deux
paliers de négociation: l'un, local ou régional et l'autre,
national.
Les discussions au niveau salarial se situent au plan national. Comme
nous l'avons indiqué précédemment, le lieu de discussion
dépendra de la mécanique établie ultérieurement par
le gouvernement.
Un des aspects essentiels de l'implication des parties dans la
discussion des dossiers locaux réside dans
l'étanchéité entre les paliers de négociation.
Comme nous I'avons exposé précédemment, le palier
local doit fonctionner selon un modèle de négociation qui lui est
approprié sans qu'il puisse y avoir l'intervention des parties
nationales en cas d'impasse. Cette mécanique suppose au préalable
que les matières locales échappent totalement au contrôle
des parties nationales, tant dans leur élaboration qu'au niveau du
déroulement des négociations.
L'intervention d'un médiateur sur simple demande de l'une des
parties, la production d'un rapport public et la possibilité d'arbitrage
peuvent exercer une pression suffisante sur l'une ou l'autre des parties
locales et leur permettre de régler leurs dossiers.
Sous réserve des pourparlers à intervenir sur le mode de
discussion du dossier salarial et des commentaires que nous avons
formulés sur le rôle des parties, les paliers prévus dans
l'avant-projet de loi correspondent à nos orientations.
Quant aux matières d'intérêt local, nous retrouvons,
annexée à ce mémoire, une liste des objets qui devraient
être identifiés comme relevant des parties locales.
Relativement à la grève, nous proposons de permettre
l'exercice du droit de grève sous réserve de limitations dans les
cas d'institutions spécialisées; deuxièmement, de
favoriser des formules différentes dans le cas des négociations
locales et d'encadrer les discussions du dossier salariat.
L'interruption de l'enseignement doit toujours être
considérée comme un inconvénient sérieux, car elle
perturbe l'apprentissage de l'élève. Par ailleurs, il faut
être conscient du fait que le milieu scolaire ne peut être
coupé de la réalité quotidienne et que le
déroulement d'une année scolaire peut subir certaines
modifications.
Considérant l'aspect actuel dès relations du travail au
Québec, la position du milieu scolaire confirme le maintien du droit de
grève dans le secteur scolaire, tout en réclamant que ce droit
soit encadré et réglementé davantage pour certains
établissements.
Il est indéniable cependant que, selon les catégories
d'élèves et l'époque de l'année scolaire, un
arrêt prolongé des activités de l'enseignement provoque des
dommages. Pour ces raisons, il faut faire en sorte de développer des
mécanismes de négociation susceptibles de retarder ou même
d'éviter le recours à la grève.
Ainsi, le recours à la conciliation, à la médiation
ou même à l'arbitrage sur certains aspects du normatif pourrait
s'avérer être un mécanisme valable dans le cadre d'une
négociation davantage décentralisée où les enjeux
seraient plus facilement identifiables. C'est cette formule que nous proposons
dans les enjeux locaux.
Nous sommes d'accord pour que, dans le secteur scolaire, le droit de
lock-out et de grève puisse s'exercer dans le cadre de la
négociation du normatif lourd. Le débat reste à faire sur
le dossier salarial, avant d'arrêter des positions
définitives.
Le mécanisme de médiation et la possibilité
d'arbitrage au niveau du palier local nous apparaissent comme des moyens
valables et adaptés à ce type de dossier.
Selon notre compréhension du texte de l'avant-projet de loi, la
section IV permet au Conseil des services essentiels d'intervenir dans le cas
d'institutions spécialisées du secteur scolaire. Toutefois, le
projet de loi devrait préciser ce sujet. (15 h 30)
Relativement au Code du travail, nous proposons qu'il y ait refonte dans
une section spécifique du Code du travail des dispositions
particulières applicables aux secteurs public et parapublic; de viser la
création d'un service de conciliation autonome pouvant desservir les
parties oeuvrant dans les secteurs public et parapublic; de favoriser le
recours, soit à la conciliation, soit à la médiation, soit
à l'arbitrage.
Compte tenu des travaux déjà en cours sur le régime
de négociation dans le secteur public et des travaux de la commission
Beaudry sur le Code du travail, nous ne croyons pas opportun de relancer le
débat sur la création d'un code particulier pour le secteur
public.
Une refonte des dispositions applicables au secteur public dans une
section spécifique du Code du travail faciliterait cependant le travail
des différents intervenants du milieu.
Dans les suites à donner à cette recommandation, ainsi que
sur l'ensemble des dossiers de relations du travail, le gouvernement devrait
reconnaître les organismes patronaux du secteur public comme intervenants
privilégiés. Trop souvent, au cours des dernières
années, les commissions scolaires ont été
écartées des sommets sociaux et économiques, des
consultations sur le Code du travail pour être supposément
représentées par le ministère responsable de leur
secteur.
En ce qui regarde le service de conciliation ou de médiation,
compte tenu de
l'utilisation plus répandue que nous réclamons, il
conviendrait de lui accorder un statut plus autonome.
Nous comprenons qu'il n'est pas de l'essence du présent projet de
loi de traiter de refonte du Code du travail. En ce sens, notre proposition se
veut une recommandation au gouvernement pour des travaux ultérieurs.
Cependant, nous croyons nécessaire que le gouvernement prenne
dès à présent des engagements précis visant
à assurer une plus grande autonomie au service de conciliation et de
médiation, afin de permettre l'intervention de conciliateurs dans les
secteurs public et parapublic.
Nos commentaires généraux sur la loi. Il est
nécessaire de permettre à chacun des secteurs de s'impliquer dans
le processus de la négociation et de débattre son dossier.
Il faut renforcer le rôle des commissions scolaires au palier
national dans la négociation des dossiers du normatif lourd.
Les amendements que nous réclamons visent à modifier le
rôle des parties et à définir les responsabilités de
chacun. Ces modifications représentent une étape essentielle
favorisant l'implication de notre organisme dans le déroulement des
prochaines rondes de négociation. Il est important de permettre aux
responsables locaux de s'impliquer dans la préparation des conditions de
travail et d'établir une mécanique étanche qui leur
permette de débattre des problèmes relatifs à leur milieu
sans intervention des parties nationales.
Un point sérieux d'accrochage subsiste relativement au dossier
salarial. Plusieurs organismes syndicaux ont refusé de se
présenter devant la commission parlementaire. Selon leurs propos, les
travaux en rencontres privées avaient permis un certain
déblocage.
Le gouvernement doit prendre les moyens pour favoriser une reprise du
dialogue dans ce dossier en impliquant, cette fois-ci, les divers intervenants
du secteur public.
La Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec a réclamé des changements au mode de
négociation du secteur public. On a même été le
premier organisme public à écrire une proposition complète
et articulée sur ce dossier depuis un an. Ces changements doivent
transparaître dans les structures, oui, mais aussi bien dans les
attitudes et les mentalités de chacune des parties. Sous réserve
de certaines modifications et de la poursuite des discussions sur le dossier
salarial, l'avant-projet de loi va dans le sens des positions
véhiculées par les commissions scolaires.
Voilà, M. le Président, l'essentiel de notre propos. Nous
sommes, évidemment, à votre disposition pour répondre aux
questions des parlementaires.
Le Président (M. Lachance): Merci, M. Chagnon, de votre
exposé. Je cède immédiatement la parole au ministre
délégué à l'Administration et président du
Conseil du trésor. M. le ministre.
M. Clair: Oui, M. le Président. Mes premiers mots seront
pour remercier M. Chagnon et la Fédération des commissions
scolaires catholiques du Québec d'avoir présenté un
mémoire sur l'avant-projet de réforme du régime de
négociation et également de s'être prêtés
à diverses rencontres avec celui qui vous parle, les gens du
secrétariat du Conseil du trésor et le personnel de la
Fédération des commissions scolaires au cours des derniers mois,
à la suite de la publication du document "À la recherche d'un
nouvel équilibre. " Vous vous souviendrez, M. le Président, que
j'avais souhaité obtenir le point de vue de tous les organismes,
associations patronales et syndicales du secteur public et je dois dire que la
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
est certainement l'un des organismes qui a accepté cette invitation avec
le plus d'empressement, non seulement avec empressement mais aussi en
effectuant elle-même une longue démarche de consultation
auprès de ses membres. Comme le président, M. Chagnon,
l'indiquait, au mois de mai 1983, soit à peu près au même
moment où le gouvernement a amorcé lui-même sa
démarche, la Fédération des commissions scolaires
amorçait la sienne.
À la lecture du mémoire, de manière
générale, je pense que je puis dire que la
fédération des commissions scolaires appuie l'avant-projet de loi
du gouvernement. Il reste maintenant plusieurs interrogations qui sont
présentes, semble-t-il, dans la tête des dirigeants de la
fédération des commissions scolaires et j'aimerais obtenir
quelques éclaircissements également.
Je voudrais donc aborder trois sujets: la question de la
décentralisation et de la négociation locale, la question de la
rémunération, ainsi que la question du droit de grève.
Pour le premier sujet concernant ia décentralisation au niveau
local, la fédération des commissions scolaires se montre
intéressée à ce que, effectivement, il y ait une
décentralisation importante de sujets au niveau local, donc, au niveau
de la commission scolaire et que le mécanisme de règlement des
différends soit différent -avec un "t" - de ce qu'il est
présentement, c'est-à-dire avec une possibilité de
médiateurs arbitres, tel que le prévoit l'avant-projet de loi.
Quant à la mécanique de décentralisation, vous avez
soumis, en annexe à votre mémoire, une liste de sujets qui
devraient faire l'objet de
décentralisation. Je n'ai pas eu l'occasion d'en faire une
comparaison point par point par rapport à celle que nous avons
distribuée au cours des derniers jours mais, à première
vue, il me semble que cela coïncide assez largement. Ma question ne porte
pas sur les sujets mais sur la façon de décentraliser ces sujets.
Plusieurs intervenants sont venus nous dire, dans le domaine des affaires
sociales par exemple, qu'il serait préférable que l'annexe
à la loi soit en quelque sorte un catalogue à l'intérieur
duquel les parties, au niveau local, pourraient choisir de puiser pour des fins
d'arrangements locaux ou, éventuellement, de négociations
locales. L'approche prévue par le projet de loi n'est pas
celle-là, c'est celle de forcer, par l'effet de la loi, la
décentralisation, au niveau local, d'un certain nombre de sujets dont on
pourrait convenir parce que je reconnais que notre liste était une
avant-liste également. Votre position sur cette question est-elle de
dire, en termes d'orientation pour la décentralisation, un catalogue
plus large dans lequel chaque commission scolaire et syndicat pourra puiser ou
si, par l'effet de la loi, il vous apparaît utile d'imposer en quelque
sorte, de forcer la décentralisation afin d'être bien sûr
qu'elle se fasse? Quelle est votre position là-dessus?
M. Chagnon: D'abord, au niveau local, puisqu'on parle de niveau
local lorsqu'on parle de décentralisation, nous estimons ceci: il y a
certaines craintes dans les milieux des commissions scolaires, non pas à
l'égard de la décentralisation mais à l'égard de la
forme que prendra cette décentralisation. Tout le monde est à peu
près unanime pour souhaiter une véritable décentralisation
sauf que nous avons vécu 13 années de
déresponsabilisation, et des commissions scolaires donc des institutions
publiques, et des gens qui y participaient. On a connu des conflits locaux qui
ont été essentiellement une poursuite de conflits nationaux
ramenés à un niveau local. On a connu aussi, d'autre part, des
interventions de tiers et plus particulièrement de gouvernements dans
des conflits locaux. Donc, d'une part, les gens se disent: Si on doit
décentraliser, oui, mais ayons des garanties, premièrement,
d'étanchéité, et deuxièmement, des garanties
d'être capables d'avoir des moyens pour négocier. Là, on en
vient à un autre problème qui est celui du financement.
Troisièmement, la décentralisation est une volonté ferme
et dure des commissions scolaires, mais nous croyons qu'il doit y avoir une
pédagogie de la responsabilisation. On doit cheminer cette
décentralisation par étapes. L'étape que nous vous
proposons aujourd'hui, nous croyons - et les commissions croient - qu'elle en
est une qui fera en sorte de permettre un nouveau contact entre les commissions
scolaires et les syndicats locaux sur la liste qui est annexée au
rapport. Pour une première fois depuis 1966, nous y incluons une liste
de sujets locaux à être négociés avec les
professionnels non-enseignants et les personnels de soutien. Cette
décentralisation, nous y croyons. Nous pensons que c'est un des moyens
de permettre à chacun des groupes, qu'ils soient commissions scolaires
ou syndicats, de pouvoir régler des problèmes locaux, à la
dimension des besoins, dans chacun des milieux. Comment articuler cette
décentralisation? Il va falloir que l'État fasse confiance aux
institutions qu'il a lui-même créées.
M. Clair: Quand vous parlez d'étanchéité
entre les paliers de négociation, c'est donc dire, si je comprends bien,
qu'à ce moment-là, sur les matières
décentralisées, comme le prévoit d'ailleurs l'avant-projet
de loi, il n'y aurait pas de mandat à obtenir du Conseil du
trésor d'une part et que, d'autre part, les commissions scolaires ne
pourraient pas faire remonter vers le haut les sujets
décentralisés. Elles auraient la responsabilité de
s'entendre au niveau local.
M. Chagnon: Je vous dirais que vous avez fort bien compris.
Effectivement, il n'y aurait pas de mandat du Conseil du trésor mais,
pour les fins de la discussion, j'ajouterais qu'il n'est pas évident que
les commissions scolaires ont tenté de faire régler leurs
problèmes dans le pansé par le gouvernement du Québec.
Plusieurs discussions de corridor ont eu lieu parfois lors de conflits locaux
mais probablement que pour permettre une garantie supplémentaire aux
commissions scolaires, il serait sage d'inclure dans une loi certains des
éléments de négociation locale.
M. Clair: Pour qu'elle soit obligataire.
M. Chagnon: Pour qu'elle soit obligatoire.
M. Clair: Et qu'ils ne puissent pas remonter comme sujets
à prépondérance patronale au niveau du club patronal.
M. Chagnon: Voilà. Ce sera aux commissions scolaires et
aux syndicats, localement, de donner les mandats de négociation
là-dessus.
M. Clair: D'accord.
M. Chagnon: Ce qui n'empêche pas un regroupement tant
régional que national sur certaines clauses.
M. Clair: Quand on parle de niveau local, il peut y avoir
regroupement au niveau
régional.
M. Chagnon: L'important c'est que les commissions scolaires aient
le contrôle des mandats de négociation sur les sujets qu'elles
auront à disposer.
M. Clair: Parfait. Puisque j'ai le plaisir de partager mon temps
de parole avec mon collègue de l'Éducation, M. François
Gendron, je vais y aller rapidement. Sur la question salariale, vous faites
référence aux discussions "privées", entre guillemets, que
le gouvernement a tenues avec les centrales syndicales à l'automne 1984.
Vous posez des questions et vous concluez que personne ne le savait. Ce que je
peux vous indiquer là-dessus, c'est qu'il y a eu des rencontres
privées avec les centrales syndicales comme il y a eu des rencontres
privées avec la Fédération des commissions scolaires et
d'autres associations patronales. Le discours gouvernemental a
été le même dans tous les cas. Nous poursuivions un certain
nombre d'objectifs. En termes de rémunération, les objectifs
n'ont pas été modifiés. Nous visons des ajustements
annuels. Nous tenons à ce que la rémunération
évolue de manière comparable à ce qui se fait dans le
secteur privé. Nous croyons que la négociation de la
rémunération doit s'asseoir sur un consensus social plutôt
que sur un rapport de forces.
Vous indiquez qu'à votre avis il serait nécessaire de
reprendre les discussions sur ce dossier dans le cadre d'un forum élargi
impliquant les organismes patronaux tant du secteur public que du secteur
privé. C'est à la page 9. Dans vos commentaires
généraux et en conclusion vous indiquez que le gouvernement doit
prendre des moyens pour favoriser une reprise du dialogue sur ce dossier en
impliquant cette fois-ci les divers intervenants du secteur public.
Je vous dirai qu'il n'y a rien que je souhaite davantage dans ce dossier
qu'on puisse effectivement reprendre le dialogue de manière publique
avec l'ensemble des principaux intervenants sur la question de la
rémunération et de l'ensemble de la réforme. Maintenant,
qu'est-ce que vous avez derrière la tête - je vous pose la
question de cette manière-là - quand vous faites cette
proposition au gouvernement? Je vous dis que je ne suis pas fermé. Je
l'ai indiqué. Il sera toujours temps jusqu'au dernier moment que les
centrales syndicales acceptent de venir en commission parlementaire. Le Parti
libéral en a fait une motion qui a été adoptée par
cette commission-ci. J'ai indiqué que le gouvernement était
toujours disposé à en discuter. Qu'est-ce qui se cache
derrière cette ouverture ou cette proposition que vous faites? Comment
voyez-vous cela?
M. Chagnon: Évidemment, on ne peut pas présumer de
la mauvaise foi de l'une ou l'autre des parties au départ. Vous saurez
que cela n'a jamais été une idée que nous ayons pu avoir
derrière la tête ou ailleurs. Fondamentalement, nous aurions
effectivement souhaité aussi que les associations syndicales se
présentent devant la commission parlementaire parce que, d'abord, il
s'agit d'un avant-projet de loi. Nous avons toujours souhaité un
débat public sur la question. L'avant-projet de loi et la commission
parlementaire, dans le forum des institutions démocratiques, apportent
la possibilité d'un débat public. (15 h 45)
Ceci étant dit, évidemment, une des craintes que nous
avons, c'est la suivante: Si, publiquement, les centrales - et c'est là
une décision qu'elles ont prises et que l'on se doit de respecter - ont
décidé, à l'exception de la CSN, de ne pas se faire
entendre devant la commission, nous souhaiterions, évidemment, pouvoir
éviter des types, je ne dirais pas de rencontres, mais d'arrangements
privés faits avec l'une ou l'autre. Nous aurions souhaité un
débat public sur cette question parce que, à notre avis, elle
touche, d'une part, 300 000 syndiqués mais aussi 6 600 000 de
Québécoises et de Québécois sur l'ensemble du
territoire.
D'autre part, en ce qui concerne le salarial, je vous rappellerai que
nous avons, depuis un an et quelques mois, soulevé l'idée
d'objectiver l'ensemble du dossier salarial par la création d'un bureau
de recherche sur la rémunération. Je vous mentionne ici que la
composition de ce bureau de recherche sur la rémunération
pourrait être amélioré par rapport à ce que nous
trouvons dans l'avant-projet de loi en permettant aux associations patronales
d'avoir le même choix de sièges qu'il est prévu pour les
associations syndicales et permettre aussi - parce que c'est l'une de nos
craintes et on veut être associé de très près au
dossier salarial -d'une part aux commissions scolaires - mais ce sera
certainement aussi vrai pour toutes les autres associations patronales - de
savoir comment va le dossier salarial. Comme vous le savez, M. le
président du Conseil du trésor, en finances publiques, on parle
beaucoup et souvent - et on nous en a parlé souvent - du principe des
vases communicants qui fait en sorte que les sommes d'argent ou la masse
monétaire investie dans le salarial, qui devient une masse salariale, ne
peut évidemment pas être investie dans le monétaire
lourd.
Or, comme vous le savez, cette année, il y a pour 2 180 000 000 $
uniquement dans notre réseau de masse salariale. Un différentiel
ou un écart de 1% ou un demi de 1% en plus ou en moins est autant
d'argent de moins investi dans le niveau normatif lourd. Il peut avoir des
effets directs importants sur le restant de la négociation, qu'elle soit
au niveau national
ou au niveau local.
M. Clair: Toujours sur la rémunération, à la
page 15 de votre mémoire, vous indiquez: "Nous sommes d'accord pour que
dans le secteur scolaire le droit de lock-out et de grève puisse
s'exercer dans le cadre de la négociation du normatif lourd. Le
débat reste à faire sur le dossier salarial avant d'arrêter
des positions définitives. " Sans être vilain, je serais
tenté de vous dire que le débat est ouvert sur cette question
comme sur les autres; c'est l'un des enjeux fondamentaux de la réforme.
J'ai indiqué que quant à nous il nous semblait qu'il y avait
trois objectifs, que j'ai énumérés tantôt, que le
gouvernement poursuivait en termes de rémunération dans les
secteurs public et parapublic. L'avant-projet propose des moyens pour atteindre
cet objectif et je pense qu'il serait intéressant pour la contribution
de votre fédération au débat public sur cette question que
vous nous indiquiez si depuis que le document a été écrit
le cheminement a été fait au niveau de la
Fédération des commissions scolaires et si vous en venez à
une conclusion quant à la question du droit de grève et de
lock-out, oui ou non, sur la question du dossier salarial, de la
rémunération. Là-dessus, je rappelle qu'effectivement,
quand on parle de l'Institut de recherche sur la rémunération,
quand on parle de rémunération, on entend le salaire et
l'échelle de salaire; quand on parle de rémunération
globale, on englobe tout le reste.
M. Chagnon: Le problème, ce n'est pas tellement le droit
de grève, c'est la grève. Pour nous, le droit de grève, on
peut difficilement s'y opposer. La grève comme telle, nous
présumons et nous pensons quant au salarial, entre autres par la
mécanique d'un bureau de recherche sur la rémunération,
que cela permettrait, d'une part, d'objectiver le débat suffisamment et
d'encadrer aussi la discussion suffisamment pour que les syndiqués
puissent accepter un niveau de rétribution, un niveau de
rémunération qui soit correspondant à celui versé
dans des institutions semblables au secteur privé, quand c'est possible
de faire la comparaison.
La grève sur le salarial pourrait présumer d'autres
objets. D'une part, il faudrait établir aujourd'hui - ce pourrait
être l'objet même de la première recherche de ce bureau de
recherche en rémunération - s'il y a un rattrapage à faire
entre le secteur public et le secteur privé. À notre avis, le
secteur public n'a pas non plus à être la locomotive du secteur
privé sur le plan de la revendication des relations du travail ou des
objets touchant les relations du travail. Il y a cependant des comparaisons
à faire avec, par exemple, d'autres provinces canadiennes, avec des
États du Nord-Est des États-Unis. À ce moment-là,
on pourrait comparer des choses comparables. Malheureusement, je pense que
l'avant-projet de loi ne permet pas cette ouverture au bureau de recherche sur
la rémunération à une définition plus large de son
mandat de recherche et, sauf erreur, le centre exclusivement sur des objets
relatifs à ce qu'on peut retrouver au Québec. Je pense qu'il y
aurait lieu de l'élargir. La majorité de nos comparaisons, M. le
ministre de l'Éducation le sait fort bien, généralement
dans le secteur de l'éducation, se font Québec-Ontario. On serait
un peu bête de ne pas permettre au bureau de recherche sur la
rémunération de pouvoir jouir de la même étendue de
données que celle qui nous sert, par ailleurs, justement à
permettre un débat sur des questions du type de celle de la
rémunération.
M. Clair: Je vous indique là-dessus que la politique de
rémunération du gouvernement à la dernière
négociation, à la précédente également et
celle sous-tendue par l'avant-projet de loi, c'est la comparabilité
secteur public-secteur privé québécois. Le danger toujours
présent dans des comparaisons secteur public-Québec par rapport
à d'autres provinces canadiennes ou à d'autres États
américains, c'est toujours une question aussi d'état de
développement économique, de situation économique,
d'indice de richesse de ces collectivités et ça risque toujours
d'être un peu piégé pour l'une ou l'autre des parties,
selon qu'on prend une province ou un État plus riche ou plus pauvre.
Ma dernière question là-dessus sera celle-ci: Vous dites,
même si vous n'avez pas insisté la-dessus, si je comprends bien,
qu'un bureau de recherche en rémunération paritaire où les
patrons du secteur public sont représentés, oui, ça va
contribuer à rétrécir les écarts et objectiver le
débat. Quant à la question du droit de grève c'est un
accessoire. Qu'on enlève le droit de grève ou qu'on ne
l'enlève pas, ça ne vous apparaît pas une question
fondamentale. Est-ce ça votre position?
M. Chagnon: Nous estimons qu'on pourrait rediscuter de cette
question-là peut-être davantage. Dans notre esprit, le droit de
grève devrait être maintenu, à l'exception des institutions
spécialisées. Lorsqu'on parle des institutions
spécialisées, on parle d'écoles pour handicapés,
d'écoles pour élèves en troubles d'apprentissage ou
d'adaptation sérieux; ces écoles qui sont tout à fait
spécialisées.
Comme on ne souhaite pas la grève, cependant, on dit: travaillons
donc plutôt sur les mécanismes qui feront en sorte d'éviter
ce processus enclenché à peu près de façon
triennale depuis 1968, qui nous amène dans une situation conflictuelle
qui devient comme
un écheveau mélangé et qui finit toujours, de toute
façon, par aboutir dans le salon bleu pour être
réglé par une loi spéciale.
M. Clair: Je vous remercie, M. le président. Je vais
laisser du temps à mon collègue.
M. Chagnon: Peut-être que le directeur des relations du
travail, M. Tessier, voudrait ajouter quelque chose.
M. Tessier (Jean-Pierre): Peut-être sur les
éléments du salarial. On voit qu'il y a eu des discussions; le
président de la fédération a fait allusion à des
rencontres avec le gouvernement. On notait, dans la Presse du 17 novembre, des
propos des représentants syndicaux qui disaient: "En fait, les trois
porte-parole syndicaux déclarent publiquement: Bien que des points de
désaccord significatifs subsistent, des éléments
d'ouverture à notre endroit se trouvent en nombre suffisant sur les
questions de fond, pour poursuivre les discussions avec le gouvernement. Ils
espèrent en venir à un accord d'ici le printemps. "
Évidemment, on était à ce moment-là au 17 novembre.
Quelles étaient les discussions? Est-ce qu'on parlait d'enlever le droit
de grève au niveau des salaires? De créer un bureau de recherche
ou de suspendre le droit de grève contre une expérience qui
pouvait se faire sur deux ou trois ans d'avoir une mécanique
différente pour négocier, d'avoir des déclarations
annuelles sur les salaires, d'avoir peut-être des garanties
annexées à la loi que le gouvernement se baserait sur tel et tel
type de paramètre pour prendre ses décisions et que si le
gouvernement, une année, renonce à ces
paramètres-là à cause de problèmes
budgétaires ou autres et dit: II y aura une piscine ou il y aura autre
chose qu'on a déjà connu. Le mécanisme ne vaut plus et,
à ce moment-là, n'étant plus là, il ne vient plus
se substituer au droit de grève qui était suspendu et on tombe
dans une négociation traditionnelle où il y a une
déclaration gouvernementale sur des propos. Qu'est-ce qui est en
discussion? Les commissions scolaires ne le savent pas. Il y a peut-être
encore des choses à faire là-dessus. À ce
moment-là, ce serait plus adéquat de se prononcer après
qu'il y aura eu un débat public là-dessus. Est-ce qu'il fallait
suspendre le droit pour permettre l'application du mécanisme? Si le
mécanisme n'est pas respecté, est-ce que le droit de grève
se retrouve? Il y a bien des imprécisions à ce moment-ci.
M. Clair: Je veux simplement vous indiquer, parce que je ne
voudrais pas prendre trop de temps, que la base de la discussion,
c'était la lettre du 11 octobre dont vous vous rappelez sans doute
puisque j'en avais envoyé copie. Ce que je voulais surtout faire
ressortir, c'était votre position dans ce débat public sur cette
question.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre de
l'Éducation.
M. Gendron: Bonjour, M. le Président et M. le
président de la fédération. J'aurais effectivement une
couple de questions. Je ne veux pas prendre trop de temps afin de partager le
débat. Il est possible que je revienne aussi. Dans la section II de
l'avant-projet de loi, la section relative à l'organisation patronale,
il y a un article 10 où, précisément, dans votre
mémoire, vous indiquez très clairement que vous souhaiteriez
qu'on biffe les mots "sous l'autorité du ministre de
l'Éducation". Je n'ai pas d'objection à être tassé.
Je sais que ce n'est sûrement pas contre la personne. C'est le
ministre.
M. Chagnon: On a été habitués à cela
assez souvent. Chacun son tour.
Des voix: Ah!
M. Gendron: C'est le ministre de l'Éducation que vous
voulez tasser et non la personne. Pour être plus sérieux, j'essaie
de comprendre exactement, parce que vous avez été très peu
explicite là-dessus, si ce n'est que le dire, vous voudriez qu'on
enlève "sous l'autorité du ministre". Mais, d'aucune
façon, à moins que j'aie mal compris votre mémoire, vous
indiquez à quelle place on redonnerait la précision, à
savoir de qui relèvent les deux comités que vous évoquez.
Sous quelle autorité seront-ils? L'autorité
générale du gouvernement, l'autorité du président
du Conseil du trésor? Mais de qui relèvent-ils puisque, dans
votre recommandation, vous ajoutez simplement: "Chaque comité
relève des deux parties, organisme patronal et ministère, et il a
pour fonction de négocier", ce dont on convient tous? Mais, dans les
perspectives de mésentente ou de désaccord, règle
générale, il est important de savoir qui a la
responsabilité de ces comités. J'aimerais avoir un peu plus
d'éclairage concernant les raisons sur lesquelles vous vous êtes
appuyés pour prétendre qu'il y aurait lieu de biffer ce bout de
phrase.
M. Chagnon: Parce que ces comités, à notre avis,
devraient fonctionner sous l'autorité des commissions scolaires et du
ministère de l'Éducation, donc du ministre de l'Éducation
et, dans le cas qui nous préoccupe, du président de la
fédération. Fondamentalement, l'organisation même du CPNCC
ou du CPNCP ou n'imparte quel CPN fonctionne conjointement entre
l'association patronale désignée et le ministère
désigné. Cette formule d'organisation permet, devra ou devrait
permettre suffisamment de souplesse dans la réorganisation des mandats
pour s'assurer d'une chose. C'est que les mandats non seulement arrivent, mais
sont aussi opérationnels, dans le champ.
M. Gendron: M. Chagnon, je croyais qu'il y avait une
corrélation avec l'article 8, au préalable, où on disait:
Le ministre nomme les différents porte-parole aux comités. Je
comprends qu'il y ait un comité patronal pour les commissions scolaires
protestantes et catholiques de même qu'un comité patronal de
négociation pour les collèges. Pour les personnes qui composent
les comités, vous n'avez pas suggéré de modifications
à l'article 8 en disant: Cette ratification des nominations devrait
être sous l'autorité de chacune des instances composant le
comité patronal. C'est un peu là que je voulais savoir si vous
faites une relation entre l'article 10 où on dit que le ministre de
l'Éducation, c'est sous son autorité que ces
comités-là travaillent. Est-ce à dire qu'à
l'article 8 il y aurait également une correspondance à faire?
M. Chagnon: C'est évident qu'il y a un corollaire à
faire, tout comme on a précisé aussi dans le texte que les
articles 20 à 39 nous convenaient. Mais il faut savoir que l'article 18
a un lien direct avec l'article 20 et l'article 18 ne nous convient pas.
M. Gendron: C'est clair. Deuxièmement, vous avez
insisté...
M. Ryan: Voulez-vous répéter la dernière
partie de votre déclaration? Vous avez dit que l'article 18 vous
convient.
M. Chagnon: Pas. Une voix: Pas.
M. Chagnon: Particulièrement l'article 18, paragraphe 2.
C'est normal. (16 heures)
M. Gendron: D'accord. Aux pages 10, 11 et 12 de votre
mémoire - ce n'est pas nécessaire d'y faire
référence - vous insistez à plusieurs reprises sur une
responsabilité plus grande jouée par la fédération.
Clairement, vous dites: La fédération doit maintenir son
rôle d'agent négociateur. Un peu plus loin, vous dites:
L'État au sens... Peu importe l'État-employeur ou
l'État-législateur. Pour l'instant cela n'a pas d'importance Vous
dites: II doit se retirer de la conduite des négociations et vous
prétendez toujours que par le lien de l'employeur direct la
fédération devrait jouer un plus grand rôle. Objectivement,
je ne porte pas de jugement là-dessus pour l'instant.
À partir du moment où cela est évoqué
à plusieurs reprises, plaçons-nous dans une situation
concrète où on présumerait qu'à partir de demain
c'est effectivement la fédération qui est l'agent
négociateur. En cas d'échec du normatif lourd et qu'il y aurait
éventuellement un déclenchement, une grève
générale, généralisée ou partielle - cela
n'a pas d'importance - j'aimerais que vous me précisiez comment vous
voyez le rôle de l'État dans un cas où, effectivement,
c'est la fédération qui est l'agent négociateur. Quel est
le rôle précis que l'État aura à jouer dans un cas
pratique comme celui que je viens d'exposer?
M. Chagnon: Je tiens d'abord à vous rappeler qu'on a
parlé d'organisations conjointes.
M. Gendron: Oui.
M. Chagnon: Et non pas uniquement la fédération
comme agent négociateur. La fédération sera
évidemment l'agent négociateur des commissions scolaires mais
comme il y a une conjonction de l'organisation patronale, la formation avec
deux entités de la formation patronale, le problème que vous
soulevez aura à se régler d'abord par le biais d'une
négociation et sinon, par le biais de solutions telles que celles que
nous préconisons: médiation, conciliation ou,
éventuellement, arbitrage, selon le sujet.
M. Gendron: Oui, je comprends qu'aux pages 10, 11 et 12, vous
avez insisté sur cette nécessaire complémentarité
entre l'État - parce que vous venez de dire que c'est conjoint - sauf
que c'est quand même assez clairement affirmé que la
fédération doit maintenir son rôle d'agent
négociateur. Nous devons jouer une place peut-être un peu moins
prépondérante dans la conduite même des
négociations. À partir du moment où la relation est
très étroite entre le normatif lourd et les impacts que cela peut
avoir sur tout ce qui est relié aux salaires et, effectivement, ce qu'on
appelle toujours cette masse salariale globale, j'ai de la difficulté
-c'est peut-être moi qui ne l'ai pas assez approfondi - à voir
comment on peut prétendre que cela va être en lien de très
étroite complémentarité, l'État et nous, mais qu'il
y a un espèce de prépondérance clairement affirmée
sur la responsabilité de la conduite des négociations.
M. Chagnon: II faut savoir qu'il y a déjà des
sujets de prépondérance qui relèvent de la
fédération dans les protocoles d'entente que nous avons eus
découlant de la loi 55. Cela existe déjà.
M. Gendron: Mais, relatifs au normatif lourd?
M. Chagnon: Relatifs au normatif. M. Gendron: Au normatif
lourd?
M. Chagnon: Relatifs au normatif lourd effectivement et qui ne
touchent pas, par exemple, la masse salariale et particulièrement sur
certains dossiers - M. Tessier pourra en parler un peu plus longtemps -cette
formule-là. C'est une des raisons pour lesquelles on cherche à
avoir des poignées un peu sur le dossier, une police d'assurances sur
l'ensemble du dossier parce que... Dans le passé, on a eu des
problèmes d'organisation patronale à ce niveau où, pour
une raison ou une autre, le bulldozer de l'intérêt gouvernemental
passait dans une trajectoire et tout ce qu'il y avait devant sautait. On a
vécu cela et on veut éviter de le revivre une autre fois. Ce
n'est pas un problème qui était inné lors de la
dernière négociation mais cela s'est aussi réalisé
depuis plusieurs négociations.
Grosso modo, on a rapetissé, négociation après
négociation, la capacité de contrôle de décision des
intérêts locaux par l'agent négociateur local. C'est
là une chose qu'il nous faut changer. Il faut responsabiliser davantage
non seulement l'organisation locale mais ses représentants.
Peut-être que, M. Tessier, vous pourriez ajouter là-dessus.
M. Tessier; De fait, c'est toute notre thèse sur
l'étanchéité des matières. Je vais vous donner une
matière tels les droits parentaux, par exemple. Est-ce qu'on peut dire
que c'est du monétaire lourd? Oui. Est-ce qu'on peut dire qu'il y a du
normatif d'application là-dedans? Oui. Cette matière est donc des
deux. Dans un club patronal conjoint, il est évident que s'il y avait un
blocage, par exemple, sur le nombre 17 ou 18 semaines, entre le fait que les 17
semaines se prennent après les vacances d'été plutôt
que d'amputer sur les vacances d'été et que la commission n'ait
à payer que pour 13 ou 15 semaines, parce que cela tombe au moment des
vacances d'été, il pourrait y avoir conflit là-dessus.
Qu'il y ait un intérêt gouvernemental qui dise: Cela va
peut-être coûter un peu plus cher, mais les 17 semaines comptent
à partir du mois de septembre, englobant les vacances
d'été, ce qui fait que cela couvre un peu plus long, qu'il y ait
un coût, qu'il y ait un intérêt du gouvernement, on y
va.
Concernant le mécanisme, y revient-on n'importe quand durant
l'année? Y a-t-il des conditions d'avis, etc. ? Peut-on laisser sa
classe n'importe quand? Dans ce mécanisme, on dit qu'il y a une
prépondérance d'association. Si le blocage était tel sur
un tas de choses comme cela, le gouvernement jouera son rôle
d'État-législateur pour la grève, cette fois-là,
mais il fera un débat là-dessus et il dira pourquoi il intervient
et ce ne sera pas par une réunion ou dans un CT préparé
rapidement. On s'entend un peu les principes d'une chambre d'hôtel. Cela
passe dans la machine et on fait...
Une voix: Faire des arrêtés.
M. Tessier:... un arrêté en conseil et, le
lendemain, dans l'arrêté en conseil, on dit: Cela va, pour tout le
mécanisme de prise de congés, c'est d'intérêt
gouvernemental de savoir quand les congés doivent être pris ou
non, quand tu dois quitter l'école ou non. C'est là-dessus qu'on
dit que c'est un club où les deux sont associés. Les deux ont
aussi à jouer leur rôle de force au niveau du comité et, si
cela doit dépasser ce cadre, n'étant pas ni sous
l'autorité du ministre seul ni sous l'autorité de la
fédération seule, cela devient une autre autorité qui va
intervenir en cas de conflit, mais non pas par le jeu des CT qui doivent
être émis, et il devra le faire publiquement,
évidemment.
M. Gendron: II y a un autre point que j'aimerais soulever. Dans
une perspective d'impasse sur un sujet dit normatif lourd encore une fois et
sur lequel la fédération, selon votre proposition, pourrait avoir
un vote prépondérant, comme pourrait-on situer une proposition,
par exemple, qui débloquerait cette impasse? Le sujet sur lequel
porterait l'impasse serait un sujet dit normatif lourd, donc à incidence
monétaire importante. La proposition provenant du Conseil du
trésor, éventuellement, débloquerait cette impasse. On
devrait faire la relation avec le rôle de mandataire financier du
gouvernement du Québec. Vous faites toujours la demande d'un vote
prépondérant. J'ai de la difficulté à voir la
logique de cette situation.
M. Chagnon: Je voudrais rassurer immédiatement le ministre
de l'Éducation, au moins sur le point suivant: À la
fédération, il y a des gens qui savent compter. Le monopole de la
capacité de comptabiliser des coûts sur le normatif lourd n'est
pas unique au ministère de l'Éducation. Je sais que le Conseil du
trésor s'intéresse un peu à la question aussi.
M. Gendron: Nous pensons que c'est le Conseil du trésor
qui pense avoir le monopole, la vérité là-dessus. À
l'Éducation, on sait qu'on ne l'a pas.
M. Chagnon: Chez nous, en tout cas, on a évidemment...
Une voix: On sait qu'on ne l'a pas, mais on sait que cela en
prend un qui paie
en fin de compte.
M. Chagnon:... comme tout le monde, la capacité de
comprendre jusqu'où on peut aller dans le normatif lourd pour certaines
parties. Il s'agira de se convaincre mutuellement l'un et l'autre dans une
association patronale afin de déterminer quelles sont les
priorités du normatif lourd dans lesquelles on peut s'aligner. Cela
implique des discussions préalables à la négociation,
préalables finalement au dépôt d'offres patronales. C'est
comme cela que je pense que cela va fonctionner.
M. Gendron: Oui, mais ma question était plus dans la
perspective effectivement, vous savez bien compter, bien évaluer les
choses - de ne pas pouvoir envisager de régler une clause relative
à du normatif lourd et qu'il faille dégager l'impasse dans
laquelle on se trouve. Le dégagement provient du Conseil du
trésor, sauf que, selon ce que vous demandez, c'est la
fédération qui aurait un vote prépondérant sur la
détermination de ce normatif lourd. C'est ma question.
M. Chagnon: Je vous inviterais, à ce moment-là,
à rencontrer le président du Conseil du trésor.
M. Gendron: Dernière question concernant les services
essentiels. Dans votre mémoire, peut-être par choix, vous avez
été passablement silencieux Ià-dessus, dans le sens que
vous n'avez pas énoncé de théorie concernant le Conseil
des services essentiels sur les matières de l'éducation. Est-ce
à dire que vous ne croyez pas, effectivement, qu'il y ait lieu que le
Conseil des services essentiels soit amené à statuer sur les
parties relevant du ministère de l'Éducation?
M. Chagnon: Au contraire, je vous invite à lire le dernier
paragraphe au bas de la page 15: "Nous estimons que l'avant-projet de loi n'est
pas assez clair sur cette question-là. " Nous avons des institutions
spécialisées qui, à notre humble avis, doivent
s'intégrer dans le réseau des services essentiels à
être donnés a l'ensemble de la collectivité. Nous pensons
que ces institutions doivent être intégrées à titre
de services essentiels pour ces institutions spécialisées. Vous
comprendrez que nous ne sommes pas tout à fait dans la position des
hôpitaux pour malades chroniques - généralement, notre
clientèle est un peu plus jeune - et on n'a pas exactement la même
problématique sauf que, pour les institutions
spécialisées, une grève entraîne une perturbation
qui risque d'être épouvantable dans certains cas. C'est pour cela
qu'on veut les intégrer dans le cadre des services essentiels.
M. Gendron: Je reconnais que cette partie m'avait
échappé. Dans l'argumentation que vous apportez quant aux
institutions spécialisées du secteur scolaire, vous dites que
l'avant-projet de loi devrait être plus précis quant à ce
qu'il entend exactement.
M. Chagnon: Cest cela. On insiste pour que cela soit fait, parce
qu'on doit présumer que c'est inclus. Au lieu de le présumer, on
dit: Incluons-le. Comme cela, on ne se chicanera pas dans trois mois, dans six
mois, dans un an ou dans dix ans pour savoir ce que le législateur
voulait dire à ce moment-là. Disons-le clairement et cela va
Être réglé.
M. Gendron: Je vous remercie.
Le Président (M. Lachance): Je voudrais préciser
à ce moment-ci à l'intention des parlementaires que nous avons
utilisé un premier bloc de temps d'une durée de 40 minutes,
messieurs les ministres. L'Opposition a maintenant une durée comparable,
en vertu de nos règles de l'alternance avant de pouvoir revenir ensuite.
M. le député d'Argenteuil, vous avez la parole.
M. Clair: Est-ce que la comparabilité s'applique?
M. Ryan: M. le Président, je vous remercie. J'entendais le
président du Conseil du trésor dire que le principe de la
comparabilité s'applique. J'espère qu'il ne voulait pas dire que
le gouvernement est la partie publique et l'Opposition, le secteur
privé. Nous faisons tous les deux partie du secteur public,
évidemment, avec autant de fierté.
Je voudrais tout d'abord saluer les dirigeants de la
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
et leur dire que c'est pour moi et pour mon collègue de
Vaudreuil-Soulanges un plaisir de les retrouver en commission parlementaire
à l'occasion de cet avant-projet de loi dont les conséquences
peuvent être extrêmement importantes pour l'avenir de
l'administration publique au Québec et pour les conditions de travail de
milliers de salariés des secteurs public et parapublic.
Personnellement, j'aurais souhaité - je ne prétends pas
parler au nom de tout le monde du côté de l'Opposition sur ce
point particulier - qu'on arrive à distinguer encore plus clairement le
problème de la négociation des conditions de travail dans le
secteur de l'éducation et le problème de négociation de
travail dans les autres secteurs de l'administration publique et parapublique.
Je crois qu'un des vices les plus graves du système de
négociation que nous avons bâti au cours des années au
Québec a été l'extrême centralisation qui en est
la
caractéristique majeure. Extrême centralisation à
peu près à tous les points de vue: au point de vue de la
détermination des unités de négociation; au point de vue
du regroupement forcé de secteurs qui, par leur nature même, sont
très différents; au point de vue, évidemment, de la
concentration des pouvoirs décisifs dans les mains du gouvernement.
C'est à ces questions de fond que je souhaitais trouver des
réponses satisfaisantes et durables en examinant l'avant-projet de loi,
en écoutant également la Fédération des commissions
scolaires catholiques du Québec. Et, sans prétendre que la
vérité réside davantage du côté de
l'Opposition que du gouvernement, je dois constater que nous sommes encore
à pied d'oeuvre sur beaucoup d'aspects de ce problème
fondamental.
Une autre question qui a été source de confusion au cours
des années, c'est celle du dédoublement de rôles auquel
s'est vu astreint par les circonstances le gouvernement, surtout en ce qui
regarde, comme vous l'avez souligné dans votre mémoire, sa
fonction d'État administrateur et employeur et, d'autre part, sa
fonction d'État législateur. Il est très important de
tirer ces choses au clair. Personnellement, je n'ai pas l'impression qu'on les
tire au clair tellement dans l'avant-projet de loi; j'en donnerai quelques
preuves tout à l'heure. Mais ce sont deux points sur lesquels il faut
absolument que nous arrivions à une clarté plus grande au cours
de la période qui s'annonce. Autrement, je crois que, même si nous
avions modifié quelque peu la mécanique, nous risquerions de nous
retrouver en fin de compte avec les mêmes problèmes que nous avons
eus au cours des rondes de négociation précédentes. C'est
dans cet esprit que j'ai écouté le mémoire qu'on nous a
soumis tantôt. (16 h 15)
II faudrait dire que, à première vue, les propositions
fondamentales contenues à la page six du document de la
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
sont, du moins pour celles qui sont vraiment essentielles, des propositions qui
sont facilement acceptables. Par exemple, quand on dit qu'il faut favoriser des
modalités devant permettre de centrer le débat sur le contrat de
travail et d'identifier les enjeux pour chacun des groupes de salariés,
j'adhère à cette proposition avec une réserve qui doit
être inscrite dans le débat quelque part, je pense, en ce qui
touche les parlementaires. C'est vrai que, d'un côté, les
travailleurs du secteur public ne sont pas les plus défavorisés
dans l'ensemble de ta société actuellement mais c'est vrai, par
contre, que la négociation collective a été,
historiquement, dans toutes les sociétés industrielles,
l'instrument dont se sont servis les travailleurs pour poser très
souvent des problèmes qui dépassaient de beaucoup le cadre
immédiat de leurs conditions techniques de travail. Je pense que c'est
un corollaire du principe de la libre négociation.
Si nous allions, comme Parlement, décréter que la
négociation portera uniquement sur des petites questions techniques et
qu'elle laissera de côté les autres questions que voudra soulever
l'une des parties à la négociation, je pense qu'on aurait
faussé complètement le principe de la libre négociation
des conditions de travail et je m'inscrirais personnellement en faux contre une
orientation comme celle-là. Cette formulation, je comprends l'esprit
dans lequel elle est faite. Il y a eu des abus dans le passé dont je
pense que chacun doit porter la responsabilité, dans la mesure où
il a été impliqué dans ce dossier et cela n'exclut pas les
parlementaires, loin de là. Je voudrais affirmer à l'état
de principe, pour l'attention de M. le ministre et de son collègue, le
ministre de l'Éducation, que jamais l'Opposition, je l'espère, ne
souscrira à un principe selon lequel tout cela devrait être
rigoureusement circonscrit à des matières qui seraient comprises
dans l'annexe A ou dans l'annexe B du projet de loi. C'est à la partie
patronale, à la table de négociation, de défendre ce
qu'elle juge devoir être inaliénable. C'est la prérogative
de la partie syndicale de toujours chercher à élargir le domaine
de choses qu'elle veut négocier. Je pense que le ministre de
l'Éducation a déjà été négociateur
syndical, si mes renseignements sont exacts; il sait très bien que c'est
un axiome absolument fondamental en relations du travail. Je tiens à le
dire avec toute la sincérité et la fermeté dont je suis
capable à ce stade-ci et je pense que c'est important de le dire
clairement.
Cette réserve étant faite, le premier objectif
m'apparaît tout à fait défendable. Tôt ou tard,
à la table de négociation, il faut qu'on se retrouve autour de
choses concrètes aussi. On ne peut pas négocier toujours pour
savoir si la lune devrait tourner à telle vitesse ou à telle
autre. "Ramener la conduite des négociations dans chacun des secteurs
spécialisés", je pense que plus cela va pouvoir être fait,
mieux ce sera pour tout le monde. J'avais été bien frappé
quand nous avons eu la commission parlementaire sur les décrets, il y a
un an et demi, de constater combien nous ignorons au Québec ce qui se
fait dans la province voisine, l'Ontario. Le gouvernement passait son temps,
à l'époque, à nous asséner des comparaisons
statistiques - de valeur très douteuse d'ailleurs - sur les conditions
existantes dans chacune des deux provinces mais jamais il ne nous a
parlé du régime de négociations collectives qui existe en
Ontario, dans le secteur de l'éducation, qui est un régime,
à mon point de vue, beaucoup plus intéressant, pratique et
pondéré que ce que nous avons connu au
Québec, depuis une vingtaine d'années. J'aurais
aimé qu'il en fut question à propos de cette proposition du
mémoire de la fédération des commissions scolaires.
À défaut de précision, dans le mémoire, je vais
vous adresser une question là-dessus tantôt. Par
conséquent, je suis fondamentalement d'accord sur cela et je crois que
nous pouvons et devrions aller plus loin dans cette voie que ne le fait
l'avant-projet de loi et regrouper certains grands dossiers au niveau
provincial. Dans la perspective évolutive dont vous avez parlé,
on ne peut pas redresser, dans l'espace de six mois, une évolution qui
remonte au temps où l'ancien ministre des Finances qui a
démissionné il y a quelque temps, servait de conseiller au
gouvernement, était le plus grand centralisateur dans ces choses qu'a
connues le Québec. Il s'en vantait lui-même d'ailleurs, à
ce moment-là. On ne peut pas corriger tout cela dans l'espace de six
mois, c'est évident. Mais à cause de cela, j'admets volontiers
que certains grands dossiers doivent être négociés au
niveau national. Tantôt, on aura l'occasion de parler de la nature de ces
dossiers qui devraient rester au niveau national.
La quatrième proposition à savoir de laisser de la place
pour la détermination des conditions de travail de caractère
local ou régional, je pense que tout le monde est d'accord
là-dessus. Du côté du gouvernement, je pense que
l'avant-projet de loi l'indique assez. Du côté de l'Opposition,
nous l'avons dit à maintes reprises dans le passé. Il y a le
droit de grève dont on parlera également.
En principe, je pense qu'il est très heureux que l'avant-projet
de loi maintienne le principe de l'exercice du droit de grève dans le
secteur de l'éducation. Je ne pense pas qu'il y aurait des raisons
suffisantes pour dire qu'on va le bannir complètement, comme cela peut
être envisagé dans le secteur de la santé, des
hôpitaux, parce que ce n'est pas la même sorte de problème
auquel doit s'employer chacun de ces deux secteurs.
Mais est-ce qu'on peut dire qu'on le permet ici et qu'on ne le permet
pas là, qu'on le permet autour de ceci, qu'on ne le permet pas autour de
là? Là, il y a matière à discussion. Je pense que
le mémoire que vous nous présentez demanderait peut-être
certaines précisions. Qu'on veuille préciser des
mécanismes médiateurs soit sous la forme de la conciliation ou
soit sous la forme de la médiation, cela me paraît
nécessaire également. Nous avons vu, à l'époque des
décrets, un gouvernement se situer complètement au-dessus de ces
choses-là. Il a fallu le tirer par la "queue du coat", comme on dit,
pour l'amener à accepter une conciliation post factum, une conciliation
après que les décrets eussent été imposés
à l'état de loi. La conciliation a donné des
résultats bienfaisants à l'époque mais c'était une
chose, je m'en souviens parce qu'il a fallu qu'on passe cinq ou six
journées à essayer de convaincre le ministre de
l'Éducation du temps et le président du Conseil du trésor,
votre prédécesseur, du caractère tout à fait
élémentaire de cette procédure pour
l'État-administrateur comme pour n'importe quel autre corps
d'administrateurs dans notre société. Je suis content de voir
qu'on insiste de part et d'autre. Dans l'avant-projet de loi, il y a des choses
là-dessus, dans le mémoire de la Fédération des
commissions scolaires catholiques également.
De ce point de vue-là, je pense que vous pouvez compter que
l'Opposition va appuyer tout ce qui pourra être fait dans le sens
d'introduire des dispositions législatives qui contraindront les parties
à recourir aux procédures de conciliation et de médiation
afin de réduire les aires de conflits qui pourront exister entre elles
et d'empêcher le recours aux moyens extrêmes qui ont fait tant de
tort au secteur public au Québec, au cours des 20 dernières
années.
Ceci étant dit, je voudrais vous poser quelques questions sur des
aspects plus précis de l'avant-projet de loi et de votre mémoire.
À l'article 10 et aux articles suivants, il est question des organismes
qui vont regrouper les membres de la partie patronale, pour les fins de
négociation. Il y a une chose qui m'avait frappé lorsque j'ai
fait une première lecture de l'avant-projet de loi. J'aurais dû
commencer à partir de l'article 7, évidemment. À l'article
8, on dit: Les comités patronaux se composent de personnes
nommées par le ministre de l'Éducation et de personnes
nommées, selon le cas, par le groupement de commissions scolaires
catholiques ou protestantes ou par le groupement des cégeps. Je crois
avoir noté dans votre texte, mais je n'ai pas la page précise
où j'ai trouvé vague la manière dont on définit la
composition de ces comités. Je m'attendais à trouver une
proposition d'amendement précise là-dessus que je ne trouve pas
dans vos propositions.
La question que j'avais inscrite à côté de l'article
8 était: Nombre de membres de chaque catégorie? J'avais inscrit
un point d'interrogation, à prépondérance.
Déjà, au mois de décembre, quand j'ai pris connaissance de
l'avant-projet de loi pour la première fois, je me disais: Voici une
chose qui n'est pas claire. "Ces comités se composent de personnes
nommées... " Combien y en aura-t-il de nommées par le ministre?
Combien seront nommées par l'autre secteur? Voulez-vous me dire comment
vous avez compris l'avant-projet de loi de ce point de vue-là? Quelles
améliorations, s'il y a lieu, voudriez-vous suggérer à ce
sujet?
M. Chagnon: Tout à l'heure, je disais que la modification
qui apparaît à l'article 8
devrait être le corollaire de ce que nous avons dit à
l'article 10, c'est-à-dire: "Ces comités ont pour fonction, sous
l'autorité déléguée par le gouvernement au ministre
de l'Éducation, de négocier et agréer les stipulations
visées dans l'article 20. " Je ne peux pas être d'accord avec cela
pour les raisons que je mentionnais tout à l'heure. Dans notre esprit,
ces comités se composent des personnes... D'une part, l'article 9 parle
d'un président et d'un vice-président dont l'un est choisi parmi
les membres nommés par le groupement et l'autre parmi les membres
nommés par le ministre.
Actuellement, on a comme carte de référence la CPMCC
où, ministère et fédération, nous avons chacun un
vote et on finit par s'entendre. Les deux ensemble nomment le président,
les deux ensemble nomme le vice-président. Alors, le CPM...
M. Tessier: Chez nous, il y a six représentants. Vous
notez, à l'article 9, deuxième paragraphe, par exemple, que les
comités conviennent par écrit des modalités de
fonctionnement. Le comité, par exemple, avait convenu de la règle
du consensus pour prendre des décisions du fait que chacune des parties
avait un vote. À ce moment-là, le nombre de membres était
moins important qu'une partie à nommer. Il devait y avoir quatre
personnes d'un côté et de l'autre, trois; il y a un vote de chaque
côté. Alors, cela ne changeait rien, mais on arrivait à
conclure des règles de fonctionnement.
Ce qui peut déranger la règle, c'est quand on revient
à l'article 18 où on dit: Tout est d'intérêt
gouvernemental, même les matières qui doivent être locales.
Cela pose certains problèmes. c
M. Ryan: Vous autres, si je comprends bien, vous acceptez en
principe que ce comité soit paritaire, composé d'un nombre
égal.
M. Chagnon: C'est exact, avec un vote de chaque
côté.
M. Ryan: Est-ce que je peux poser une question au ministre?
Est-ce que c'est cela, l'esprit de l'article 8, M. le ministre?
M. Clair: C'est dans l'esprit de l'article 8. J'avoue que je ne
suis pas familier avec le contenu des protocoles d'entente, mais ce que j'en
comprenais, ce que j'en ai toujours compris, c'est que peu importe le nombre de
personnes qui représentent le ministre ou l'association patronale, c'est
en termes de prépondérance de vote, en quelque sorte. On ne parle
pas de vote, mais... "Ont une voix prépondérante. ", à mon
sens ne s'entend pas seulement par combien il y a de personnes d'un
côté et combien de l'autre, c'est davantage en termes de savoir
laquelle des deux parties a le dernier mot, dans le fond. Cela ne fait pas
référence au nombre de personnes comme tel. Je ne pourrais pas
dire si c'était paritaire en termes de nombre; habituellement, est-ce
que cela l'était? Oui? On m'indique que généralement,
c'était paritaire en termes de nombre dans le secteur de
l'éducation, mais que cela ne l'était pas dans le secteur de la
santé. C'est plus en termes de prépondérance qu'en termes
de nombre ou de parité en termes de nombre.
M. Ryan: Très bien, la réponse me satisfait pour
l'instant. Ce que je me permettrais d'ajouter à ceci, c'est que pour
s'entendre, conformément à ce qui est dit à l'article 9,
sur les matières qui seront de prépondérance
gouvernementale ou de prépondérance de porte-parole sectoriel, en
cas de partage égal des voix, qu'est-ce qu'on fait?
M. Chagnon: Cela prend un peu plus de temps pour s'entendre, mais
généralement...
M. Clair: Dans l'hypothèse qui est soumise par la
fédération, c'est cela?
M. Ryan: Oui, dans l'hypothèse que je soumets
moi-même, ici.
M. Chagnon: Peut-être que le modèle de...
M. Ryan: Je pose la question à la
fédération.
M. Chagnon: Pour l'instant, nous fonctionnons avec un vote-un
vote. Quand il y a des problèmes ou des questions qui sont plus
fluctuantes, il y a finalement discussion et l'une des deux parties emporte le
morceau.
M. Tessier: Si vous me le permettez, nous avons mentionné,
au bas de la page 12, un nota bene. On dit: À ce stade-ci, c'est un
avant-projet de loi, peut-être que si on ne s'entend pas sur
l'avant-projet de loi, il faudrait que ce soit inscrit dans la loi. On dit:
À moins d'entente, à moins qu'il n'en soit convenu autrement, les
ententes ou coutumes établies avant le 1er janvier 1985 au niveau des
comités patronaux sont maintenues. Nous avons signé à deux
reprises des protocoles de fonctionnement disant que la
fédération avait prépondérance sur tel sujet, le
gouvernement sur d'autres. Évidemment, il restait des zones grises et,
dans le temps, on n'avait pas, par exemple, dans le premier protocole,
identifié des droits parentaux ou des congés de maternité.
Alors, quand vient une matière comme celle-là, est-ce qu'elle est
en partie de prépondérance gouvernementale sur le
quantum, sur le coût, et en partie de prépondérance
des fédérations sur ia mécanique? C'est à
établir à chaque fois. (16 h 30)
Dans les éléments nouveaux ça pose des
problèmes. On a déjà des acquis. Les coutumes et les
acquis qu'il y avait là, on dit: les protocoles nous semblent
suffisants. Si le gouvernement dit: Dans l'avant-projet de loi, je suis
prêt à respecter ça, il n'est pas besoin de l'inscrire dans
la loi, il signera son protocole avant de faire sa loi. S'il ne veut pas
respecter ça, il faudrait que ce soit inscrit dans la loi. Pour nous
c'est important.
M. Ryan: Je vais vous dire un petit peu pourquoi je pose cette
question-là. Je crois me souvenir que dans la dernière ronde de
négociation, il est arrivé des étapes où nous avons
eu, à tort ou à raison, l'impression que la
fédération des commissions scolaires ou les porte-parole des
commissions scolaires avaient été laissés pratiquement de
côté par le gouvernement pour les moments très très
importants dans le déroulement des négociations.
Est-ce que cela s'était fait à l'encontre de ces
protocoles dont vous parlez ou si les protocoles n'existaient point pour ces
étapes précises?
M. Chagnon: Cela n'a pas été une impression. II y a
eu une commission parlementaire sur les relations du travail il y a deux ans.
On a été, comme toutes les autres associations patronales,
tassées, évacuées du décor à cause de ce que
j'ai appelé tout à l'heure le bulldozer d'intérêt
gouvernemental.
M. Ryan: Dans l'avant-projet de loi, est-ce qu'on a les garanties
que ça n'arrivera pas?
M. Chagnon: II y a des choses à éviter. On
mentionne l'article 10; je mentionnais tout à l'heure l'article 18,
paragraphe 2 qui peut appeler, d'un coup de sifflet, le train. Cet article est
encore plus clair lorsqu'il dit: "Conformément aux orientations
déterminées par le gouvernement, le Conseil du trésor
autorise les mandats de négociation des comités et des
sous-comités patronaux dans les matières qu'il juge
d'intérêt gouvernemental", on ne trouve pas ça fort comme
protection.
M. Ryan: Je trouve qu'il n'y a pratiquement pas de protection,
pour être franc avec vous autres.
M. Chagnon: C'est ce qu'on dit.
M. Ryan: Là, il y a une affaire à double
clé. Il y a le ministre de l'Éducation d'un côté et
il y a le Conseil du trésor ou le président du Conseil du
trésor. Cela veut dire qu'à peu près à n'importe
quel moment qui devient crucial dans l'esprit du gouvernement, les parties
patronales, commissions scolaires vont se faire "squeezer" comme cela a
été le cas dans le passé. C'est ça qu'on veut
éviter.
M. Chagnon: C'est pour ça qu'on dit qu'il faut corriger
ça.
M. Ryan: Très bien! Vous proposez une correction à
l'article 18. Puisque vous l'avez cité, on va prendre ça tout de
suite, ça va régler l'affaire. Vous aimeriez qu'on écrive
au paragraphe 2, plutôt que ce qui est dans le texte de l'avant-projet de
loi: "Le Conseil du trésor autorise les mandats de négociation
des comités et des sous-comités patronaux dans les
matières ou éléments qu'il a indiqués comme
étant d'intérêt gouvernemental. Cependant, cet
intérêt gouvernemental ne peut s'exercer sur les matières
ou éléments de matière identifiés comme
étant de prépondérance des groupements de commissions
scolaires ou d'établissements, au sens de l'article 9. " "Qu'il a
indiqués" quand, à quel moment et comment cela devrait-il se
faire, d'après vous autres? Est-ce que ça peut être juste
avant de dire: Ça va être ceci; il a indiqué ça ou
bien si, à un stade dans le cheminement de la démarche, il doit
faire ça et qu'ensuite il soit contraint ou astreint à suivre ce
qu'il a déjà dit.
M. Chagnon: En principe, dans la négociation du protocole
de fonctionnement du conseil, c'est là où on doit établir
la liste des sujets de prépondérance de l'un ou de l'autre.
M. Ryan: Très bien! Qu'il a indiqués lors de
l'établissement du protocole. C'est déjà une
précision qui m'apparaîtrait extrêmement utile, qui
donnerait une sécurité plus grande.
À l'article 10, vous demandez qu'on laisse tomber les mots "sous
l'autorité déléguée par le gouvernement ou le
ministre de l'Éducation. " Je pense que c'est à la page 11 de
votre mémoire. Les articles 10 et 18 se relient très
étroitement comme vous l'avez dit, c'est pour ça que je passe
tout de suite à l'article 10. Pourriez-vous expliquer pourquoi vous
voudriez que ces mots-là tombent? Je sais que ce n'est pas tout à
fait conforme à nos règles mais si, après que nous aurons
entendu la réponse des commissions scolaires, le ministre voulait me
dire pourquoi il tient à ce que ce soit là-dedans, ça me
rendrait service comme personne qui intervient dans ces débats pour la
première fois. Je ne tiens cependant pas à vous mettre dans
l'embarras mais je voudrais élucider ce point-là qui m'avait
moi-même
frappé. La raison pour laquelle ça m'a frappé c'est
bien simple c'est qu'il est déjà représenté au
comité, il a des représentants qui sont là. Si, en plus,
ils font tout ça sous son autorité continuellement, il me semble
qu'ils sont sous son autorité habituelle. Pourquoi tient-on à le
mettre dans la loi et pourquoi ne voulez-vous pas qu'il soit là?
M. Tessier: En fait, on a identifié que le gouvernement
pouvait être présent au comité, mais devait jouer un
rôle moins prépondérant dans la conduite des
négociations, accepter la collégialité ou le fait d'y
aller conjointement dans la conduite des négociations. Par exemple, sur
un sujet tel la prise de congé, la réglementation d'absence, la
surveillance, l'horaire de travail, le gouvernement pourrait bien dire: Je sais
que vous êtes prépondérant là-dedans; cependant, le
comité étant sous l'autorité du ministre, je conduis la
négociation, j'arrive à une entente et je viens vous revoir
ensuite pour vous dire: Voulez-vous accepter cette entente vu que c'est votre
matière? Mon autorité me permet de convoquer les gens, de
conduire la négociation. Cela ne reflète pas l'entité qui
était sous l'autorité des deux et, à ce moment-là,
étant sous l'autorité de l'un et de l'autre, celui qui conduit la
négociation voit à ce que celui qui est au volant soit celui qui
est davantage... Que les deux soient toujours dans la même voiture, mais
que celui qui amorce, prend l'initiative des rencontres et des propos sur des
sujets ou des ouvertures sur des matières, soit celui qui a la
priorité dans cette matière. Il y a des sujets normatifs, il y a
un "blitz" à faire, il y a des choses. On dit que c'est l'organisme qui
y va. L'autorité, on risque de s'en servir indûment pour dire:
Très bien, vous avez la prépondérance; je vais conduire
toute la négociation et, à la fin, je viendrai vous voir pour
vous faire approuver ou désapprouver des affaires.
M. Ryan: Terminez. M. Tessier: Cela va.
M. Ryan: Vous avez terminé. Je veux voir cela clairement
d'un point de vue logique. On dit, au début, quand on dresse le
protocole d'entente, que le président du Conseil du trésor ou le
Conseil du trésor indiquera les sujets sur lesquels il se
réserve. Il dira sur quels sujets il faut absolument l'autorisation du
Conseil du trésor pour procéder. Je pense qu'il n'y en a pas
beaucoup qui ne seront pas d'accord là-dessus. Je suis porté
à être d'accord là-dessus. Ensuite, vous vous en allez dans
la conduite des négociations. Là, c'est ie comité patronal
qui va faire la conduite de la négociation. C'est un comité
paritaire. Cela veut dire que vous autres, vous acceptez, comme partie qui
revendique le droit de diriger la négociation, d'être soumis
à tout moment au veto du gouvernement. C'est ça que cela veut
dire, le principe paritaire, si je comprends bien, mais dans toutes les
matières autres que celles qui ont été
réservées par le Conseil du trésor. Est-ce que je lis
correctement vos propositions?
M. Chagnon: En fait, c'est un double veto» C'est un veto
sur les matières organisées dans le protocole d'entente qui
seraient d'intérêt ou de prépondérance
gouvernementale ou du ministère et c'est aussi un veto sur des objets
d'intérêt, de prépondérance locale. C'est vrai dans
les deux sens.
M. Ryan: Comme décentralisation de pouvoirs, ce n'est pas
la réalisation la plus miraculeuse...
M. Chagnon: Ah non, ce n'est pas...
M. Ryan:... qu'ait conçue le gouvernement. Cela veut dire
qu'il y a...
M. Chagnon:... sur ce bout-là qu'on pense que l'aspect de
la décentralisation est le plus fort, évidemment. L'aspect de la
décentralisation dans l'avant-projet de loi, on peut le retrouver, par
contre, sur un retour de négociations plus locales, sur des objets qui
touchent directement le cadre des relations du travail, le cadre du milieu de
travail, et nous, on l'ajoute. On dit qu'il doit y avoir les personnels de
soutien et les personnels professionnels non enseignants qui devraient aussi
faire en sorte de négocier une partie de leur convention localement. Je
reprends le commentaire que vous aviez, fort à propos, avancé
tout à l'heure - et avec raison - concernant la différence qui
existe entre le cadre de négociation du Québec dans le secteur de
l'éducation et le cadre de négociation qui existe en Ontario. En
Ontario, il y a la "School Board and Unions' Law", quelque chose comme
cela.
M. Ryan: II y a une "Teachers' Collective Negotiations Act".
M. Chagnon: Voilà. Par contre, il ne faut pas oublier une
chose. En Ontario, le modèle fiscal ne se compare pas du tout avec celui
du Québec. On est bien prêt à dire demain matin qu'on va
faire la négociation localement, mais donnez-nous les outils pour qu'on
puisse, fiscalement, se débattre. On ne peut pas être
compressé au point où nous le sommes actuellement dans les
règles budgétaires et, en même temps, limité sur le
plan de la taxation locale et penser qu'on va avoir une marge de manoeuvre
importante ou intéressante pour faire une négociation locale. Nos
membres
nous disent; Oui, d'accord, reprenons-le, étapes par
étapes, mais n'oubliez pas qu'il y a un financement au bout et qu'il
faut ramasser le financement, et avec raison. C'est tout à fait logique
et cela ne peut pas se séparer, les parties de ce puzzle.
M. Ryan: Oui. Je reconnais que c'est là une réserve
importante que vous avez d'ailleurs inscrite dans votre mémoire. C'est
évident qu'on ne pourra passer à un régime aussi
décentralisé que celui-ci tant qu'on n'aura pas examiné
également la dimension des pouvoirs de taxation et du mode de
financement. Je suis d'accord sur cela.
Vu que le temps est limité, je voudrais continuer. Dans la
question des paliers de négociation, si j'ai bien lu l'avant-projet de
loi, j'ai cru comprendre qu'il y aurait négociation à
l'échelle provinciale d'un grand nombre de matières sauf celles
qui auraient été laissées pour la négociation
locale en vertu des ententes qui seraient faites mais que même sur un
certain nombre de matières qui auraient été
négociées à l'échelle provinciale il pourrait y
avoir des ententes locales ou des arrangements locaux qui permettraient
d'adapter certaines conditions au plan local.
La question qui m'est venue à l'esprit est la suivante: Est-ce
qu'il serait désirable, en principe, que le plus grand nombre de
matières possible soit réglé, à l'état de
modèle en tout cas, au niveau natipnal? Et qu'ensuite la latitude
demeure aux niveaux local et régional pour les arrangements qui
pourraient être adaptés aux conditions locales? Je crois lire dans
le projet gouvernemental une espèce de biais qui favorise en principe un
règlement du, plus grand nombre possible de choses au niveau national
et, après cela, dans la mesure du possible, le règlement d'un
certain nombre de choses au niveau local.
D'abord, est-ce que vous avez la même lecture du projet de loi et
est-ce que vous trouvez que c'est la façon la plus désirable de
procéder dans le contexte actuel?
M. Chagnon: En principe, je pense que la lecture que vous faites
est juste. Les objets, que ce soit le salarial ou le normatif lourd, sont
généralement négociés au premier palier et les
objets d'ordre dit organi-sationnel sont négociés au
deuxième palier. Est-ce que c'est un principe de fonctionnement qui,
dans le cadre actuel, a une certaine allure? Je répète que nous
avons tellement de contraintes à l'heure actuelle, on est
harnaché de toutes parts, que ce soit sur le plan financier, sur tous
les plans. On ne peut tellement prétendre être capable d'aller
plus loin sur le plan de la décentralisation pour cette fois-ci. Ce
n'est pas là l'idéal.
L'idéal, c'est de décentraliser et de permettre de
responsabiliser davantage ces institutions et les gens qui y travaillent et de
permettre aussi à l'ensemble des citoyens de comprendre les enjeux de
négociation localement lorsqu'il y a un conflit. Mais il ne faut pas
oublier une chose c'est qu'il y a un historique des relations du travail au
Québec qui a fait en sorte que lorsque les gens ont
négocié localement, très généralement, cela
a bien été. Mais lorsqu'il y a eu des conflits locaux, on s'est
emparé du conflit puis on l'a réglé soit par le biais
d'une tutelle du ministère de l'Éducation vis-à-vis une
commission scolaire, soit par le biais d'une négociation d'un protocole
de retour au travail en dehors de la commission scolaire qui faisait en sorte,
par exemple, en cas de grève ou de lock-out, de financer les
journées de grève ou de lock-out des enseignants ou d'autres
types de personnels. Finalement, le décideur local avait l'air d'un
dindon. Il y a eu des exemples de ce type plus récemment dans d'autres
secteurs que l'éducation.
Évidemment, cela appelle une déresponsabilisation locale.
Le gens se disent: À quoi cela nous sert de prendre des décisions
ou de faire en sorte de négocier un aspect plus particulier pour chez
nous si on est mis en tutelle ou si on se fait imposer un protocole de retour
au travail avec lequel on peut difficilement vivre? M. Tessier.
M. Tessier: En fait, M. Ryan, vous faites allusion aux
arrangements locaux par rapport à des matières qui sont
entreprises localement. Nous disons qu'il est essentiel d'avoir des sujets
locaux étanches où le texte est présenté par la
partie locale. Si on dit qu'une question de réglementation d'absence,
c'est local, la partie provinciale n'a pas à écrire une seule
ligne là-dessus. Sinon, si on tombe dans le piège de dire qu'on
peut toujours faire quelques pas provincialement, laissons aux parties locales
le soin d'adapter les choses. Ce qui arrive souvent, c'est qu'on donne d'une
main en demandant aux autres de limiter ce droit.
Par exemple, on pourrait fort bien dire que les gens ont droit à
des horaires brisés de travail sujets cependant à des
modalités locales dont les gens conviendront. Donc, à ce moment,
cela va bien pour les parties nationales situées à Québec
ou à Montréal, n'importe où. C'est sensé être
plus intelligent à ce niveau. Ils donnent d'une main: Vous pouvez avoir
des horaires brisés. Maintenant, si cela s'en vient localement, la
partie locale de dire: Bien, non, cela dépend des conditions; on cherche
à restreindre cela et on est pris dans un cul-de-sac avec cela. (16 h
45)
Ce que nos membres nous disent: Si vous touchez à un sujet, si
vous touchez aux congés de droits parentaux, partez cela de la
conception jusqu'à ce que l'enfant entre à
l'école mais, en tout cas, occupez-vous-en jusqu'au bout et, si
on veut adopter des textes, on les adoptera après. Ne nous donnez pas
certains droits dans une partie, on doit adopter cela localement. On admet
cependant qu'il puisse y avoir des arrangements locaux. C'est possible qu'on
n'ait pas pu vider un sujet totalement au niveau provincial et qu'il doive y
avoir des arrangements, mais cela ne peut pas remplacer le fait d'admettre
qu'on n'a pas à toucher à une matière de juridiction
locale comme la réglementation d'absences ou autres. On dit: Nous n'y'
toucherons pas. Cela ne sert à rien de quémander, d'aller voir le
ministre ou un autre, on dit: La loi est ainsi, et on n'y touchera pas.
À la prochaine ronde, vous en ferez une matière provinciale si
vous voulez qu'on écrive un petit bout là-dessus. On verra, mais
on n'y touchera pas. Cela permet l'étanchéité.
M. Clair: Oui. M. le Président, je ne peux pas
résister à l'invitation que m'a faite le député
d'Argenteuil pour me permettre d'intervenir. Je vais essayer d'éclaircir
un peu les choses.
M. Ryan: Question de règlement. M. Clair: Oui.
M. Ryan: Si le président voulait allonger mon temps en
fonction de celui que vous allez prendre, parce que j'ai deux autres points
importants à soulever.
M. Clair: Je n'ai pas d'objection.
M. Ryan: Si vous n'avez pas d'objection, si cela va dans le fond
des choses, cela va me faire bien plaisir de vous écouter.
M. Clair: Pourvu que le président fasse un partage
équitable du temps. Premier point. À quelle condition pourrait-on
retenir un modèle de décentralisation aussi poussé que
celui de l'Ontario? Je pense que l'Association des commissions scolaires
protestantes l'a bien indiqué hier. Si on voulait atteindre un tel
niveau de décentralisation, effectivement, il faudrait revoir non pas
les règles budgétaires, mais je dirais même le fond de la
question du financement des commissions scolaires. On se souvient qu'en
moyenne, je pense que ce sont 53% du financement des commissions scolaires de
l'Ontario, qui proviennent de sources financières locales, de la
taxation foncière locale, si ma mémoire est fidèle.
D'autre part, il faut dire que l'inconvénient d'un tel
modèle de décentralisation aussi poussé, c'est
effectivement de recréer des disparités régionales dans un
sens ou dans l'autre. Il y a toujours un risque à cet égard.
Donc, M. le député d'Argenteuil, on ne pourrait pas implanter le
niveau de décentralisation qui existe en Ontario sur le plan des
négociations sans envisager tout un autre bloc qui s'appelle "le
financement" et l'avant-projet de loi ne se situe pas dans ce cadre-là.
Je ne dis pas qu'il ne faudrait pas le faire, mais je dis simplement que c'est
un autre débat. J'aimerais que le député d'Argenteuil
comprenne bien ce qu'on propose de faire par l'avant-projet de loi.
En ce qui concerne la décentralisation, j'ai déjà
employé les mots "que je souhaitais que la décentralisation soit
peut-être modeste, progressive, mais réelle". En
conséquence, c'est la raison pour laquelle l'avant-projet de loi repose
sur trois thèmes: l'organisation du travail, les mouvements de
personnels et les droits syndicaux, pour qu'il y ait une
décentralisation réelle au niveau local, qu'il n'y ait plus de
mandats à obtenir du Conseil du trésor ni de la
Fédération des commissions scolaires ou d'un club patronal sur
ces questions, pour que ce soit une vraie décentralisation, dans
l'esprit d'une décentralisation progressive.
Par ailleurs, ce que l'on indique par l'article 22 de l'avant-projet de
loi, c'est que, si en plus de cela, en plus de ce qui est obligatoire de
négocier localement, les parties à une convention collective
veulent négocier à l'échelle locale, elles peuvent le
faire à certaines conditions dont la principale serait que l'encadrement
au moins fasse l'objet d'un mandat du côté du Conseil du
trésor. C'est l'esprit de l'avant-projet de loi.
L'autre débat, c'est celui de la négociation sectorielle
ou sous-sectorielle. La position de la Fédération des commissions
scolaires, je la résume, c'est de dire: Que le gouvernement fasse son
choix une fois pour toutes au moment où il signe le protocole d'entente.
On souhaite nota bene que ce soit substantiellement ce qu'il y avait avant le
1er janvier 1985. Mais que le gouvernement fasse son choix une fois pour toutes
sur ce qu'il considère être d'intérêt gouvernemental,
que la négociation ne soit plus menée sous l'autorité
déléguée du gouvernement au ministre de l'Éducation
qui, en quelque sorte, est le leader et le porte-parole principal du club
patronal. C'est lui qui serait invité et qui l'est par le Conseil du
trésor - dans la loi, ce sont des dispositions qui existent
déjà - qui, en quelque sorte, défend le point de vue
patronal. Ce que l'avant-projet de loi fait à cet égard - je le
reconnais - il modifie peu de chose. Il prévoit que ce soit concernant
les matières à prépondérance
Fédération des commissions scolaires ou à
prépondérance gouvernementale, en tout état de cause, une
première paire - une ceinture ou une bretelle - que le comité
doit venir chercher un mandat au Conseil du trésor: la deuxième
paire de bretelles ou la ceinture
après les bretelles, c'est la possibilité comme on le dit
à l'article 18 - pour le Conseil du trésor d'autoriser les
mandats de négociation des comités et des sous-comités
patronaux dans les matières qu'il juge d'intérêt
gouvernemental. C'est cette porte d'en arrière qui a été
utilisée à la dernière négociation pour
déclarer, finalement, tout ou à peu près tout
d'intérêt gouvernemental. En conséquence, en plus d'avoir
la ceinture, les bretelles sont venues, mais - passez-moi l'expression - les
culottes ont remonté et c'est le gouvernement qui a tout
déclaré d'intérêt gouvernemental. Nous voulons
éviter cela, mais le premier pas que nous franchissons, c'est celui
d'une décentralisation au niveau local. Est-ce qu'il est
nécessaire que les négociations se déroulent toujours sous
l'autorité du ministre de l'Éducation? Encore là,
au-delà des personnes que nous sommes, je pense qu'en principe, il y a
d'énormes avantages à ce que cela soit fait, principalement la
coordination que le ministre de l'Éducation peut faire comme
représentant, comme porte-parole du comité patronal auprès
du Conseil du trésor et ainsi assurer que les déblocages des
mandats peuvent se faire plus rapidement que s'il n'y avait pas de points de
contact entre le Conseil du trésor et le club patronal.
Par ailleurs, en ce qui concerne le pouvoir d'autoriser des mandats, je
pense que - vous allez me dire que la pratique ne l'a pas prouvé...
Comme le mentionnait le ministre de l'Éducation tout à l'heure,
qu'est-ce qui se produit quand, dans une matière à
prépondérance patronale, le patron est dans un cul-de-sac et
n'est plus capable de bouger à l'intérieur de ce qu'il
possède? Inévitablement, cela doit revenir quelque part devant le
gouvernement. Pourquoi situer le Conseil du trésor dans un rôle,
je dirais, d'intervenant a posteriori plutôt que de le faire intervenir a
priori afin qu'il soit impliqué dans tout le déroulement, dans la
coordination de la négociation? Remarquez qu'il y a des avantages et des
inconvénients dans les deux orientations. Pour l'instant, le pas que
nous franchissons est principalement un pas de décentralisation au
niveau local. Est-ce qu'on pourrait se contenter, à défaut
d'autoriser des mandats, de pouvoir simplement utiliser, de conserver un peu
comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête des
clubs patronaux santé-éducation, la possibilité en tout
temps de sortir quelque chose et de le déclarer d'intérêt
gouvernemental? Le débat est ouvert, comme l'a dit le président
de la Fédération des commissions scolaires.
M. Chagnon: J'aurais deux petits commentaires à faire
très brièvement en réponse à ceux du ministre, si
on me le permet. Le nota bene en bas de la page 12 est là tout
simplement pour éclairer la lanterne de la commission. C'est un nota
bene, ce n'est pas un souhait. J'ajouterais même que c'est un plancher.
Le reste sera à discuter et à négocier.
M. Clair: C'est comme cela que je l'avais compris.
M. Chagnon: Voilà! Quant au financement, M. le ministre,
je tiens à vous souligner qu'au mois de mars, nous serons prêts
à déposer un cadre de financement qui nous paraîtrait plus
à-propos dans le sens d'une fiscalité locale qui aurait un
certain bon sens et d'organisation de l'ensemble des paramètres de
financement des commissions scolaires. À ce moment-là, on pourra
discuter d'un modèle qui ne sera pas celui de l'Ontario, mais qui pourra
certainement être élargi par rapport à la situation
actuelle.
Le Président (M. Lachance): Je voudrais indiquer à
ce moment-ci que l'intervention du ministre a duré sept minutes.
J'additionne sept minutes au temps du député d'Argenteuil. Il lui
restait cinq minutes. M. le député d'Argenteuil, vous avez douze
minutes à votre disposition.
M. Ryan: Magnifique! C'est magnifique! À propos de ce que
vient de dire le ministre, je ferai deux brèves remarques avant d'en
venir à un autre aspect de l'avant-projet de loi. En ce qui touche
l'Ontario, je voudrais signaler à l'attention du ministre qu'à ma
connaissance, la négociation est également
décentralisée dans le secteur hospitalier et que les
problèmes financiers qu'il a invoqués ne se posent pas du tout
dans les termes. Ce qui montre que, du moins en réalité, ce n'est
pas une chose impensable, contrairement à ce qu'il a laissé
entendre en parlant du secteur de l'éducation.
M. Clair: Je ne voudrais pas que le député
d'Argenteuil pense qu'on est contre la décentralisation. Au contraire,
l'avant-projet de loi propose d'aller plus loin...
M. Ryan: Ce n'est pas cela. C'est correct.
M. Clair:... et ce sont les associations patronales du secteur de
la santé qui résistent.
M. Ryan: C'est cela. Je pense que j'ai fait mon point et que vous
n'y avez pas répondu.
Le deuxième point: quand vous soutenez qu'il faut qu'en cas de
litige insoluble, comme l'a souligné tantôt le ministre de
l'Éducation et comme vous l'avez signalé aussi, il y ait
quelqu'un qui décide et que ce
soit le ministre de l'Éducation, je pense que c'est tout le
principe de l'économie de la négociation qui est mis en cause;
c'est aboslument fondamental. Je ne veux pas m'attarder là-dessus
davantage, mais je vais y réfléchir de mon côté
parce que je ne prétends pas avoir de solution ce soir. J'attire votre
attention sur l'inquétude que cela pose chez moi quant aux changements
réels qui seraient apportés au projet de loi. J'ai l'impression
qu'on revient exactement à la même logique qu'on a eue
jusqu'à maintenant et qui risque d'entraîner l'écrasement
pur et simple des commissions scolaires dans les moments névralgiques
d'une ronde de négociations. Je pose la question, je n'affirme pas,
j'énonce une inquiétude.
J'en viens à un autre aspect, la question salariale. Il faut bien
parler de la question salariale qui est absolument fondamentale. D'abord, j'ai
une brève remarque sur l'avant-projet de loi, comme il se
présente. J'ai l'impression que ce qu'on a dans l'avant-projet de loi,
c'est un exemple assez éloquent de confusion entre l'État
administrateur et l'État législateur. Il me semble que
l'État administrateur comprend l'État employeur,
évidemment, ce qui lui incombe de mettre au point des propositions en
matière salariale, d'exercer son autorité normale de ce
côté, je pense que nous en conviendrons tous. Je regarde le
processus qui est proposé. On nous dit: Cela va se faire comme ceci, il
y a un bureau indépendant. Nous l'avons demandé au cours de la
dernière ronde de négociations du côté de
l'Opposition, nous ne sommes pas du tout opposés à cela, au
contraire. Le bureau produit son rapport, ensuite, le président du
Conseil du trésor dépose devant l'Assemblée nationale, ou
en dehors d'elle si elle ne siège pas, un projet de règlement
fixant les stipulations relatives à la rémunération; il y
a des discussions autour de cela. En l'absence d'un règlement
négocié, un mois plus tard, la deuxième ou la
troisième semaine d'avril, le gouvernement décide que le
règlement entre en vigueur à la date de son adoption.
Je vais vous dire comment j'avais cru comprendre que cela devrait se
passer. Peut-être que je suis attardé dans un respect
désuet du parlementarisme, j'avais pensé que le gouvernement
mettait ses propositions au point, sur la table publique, et vous autres, vous
suggérez qu'il y ait un débat un peu plus large. Je crois
comprendre que c'est déjà une amélioration que vous
proposez à l'avant-projet de loi. Je me disais: S'il n'y a pas d'entente
nulle part, on va au moins discuter à l'Assemblée nationale, on
va avoir au moins une commission de l'Assemblée nationale qui va
examiner cela en profondeur. Ici, je ne vois pas. On dit: Si l'Assemblée
nationale ne siège pas au cours de la deuxième ou de la
troisième semaine de mars, le président du Conseil du
trésor devra publier le projet au cours de ces semaines. Il n'y a rien
qui dit que le gouvernement devra le soumettre à la discussion, à
l'Assemblée nationale et faire approuver son projet là. Je ne
sais pas, vous pourrez me contredire tantôt, cela me fera bien plaisir
d'entendre vos explications, mais je crois qu'il faudra au moins avoir cette
sauvegarde qu'on aura la garantie. Si nous l'avons, je pense qu'une grosse
partie de l'argumentation que je fais sur ce point tombe et j'en conviendrai
avec plaisir d'ailleurs, à la condition que vous m'assuriez d'une
formulation plus claire, dans une version retouchée.
Deuxièmement, je crois que cette période n'est pas
très longue pour tout l'exercice des débats publics qu'on veut
avoir. J'aimerais demander aux commissions scolaires comment elles voient cela
et qu'est-ce que veulent dire les considérations que l'on retrouve dans
leur mémoire - je ne sais pas trop à quelle page - quand vous
dites que vous voulez avoir un forum public. Voulez-vous me rappeler, M. le
président, à quelle page de votre mémoire il est question
des salaires? À la page neuf. Vous dites: "Compte tenu de l'importance
de cette matière de négociation, le gouvernement devra
prévoir une période de discussion impliquant un forum
représentatif d'intervenants visant à déterminer un
protocole de fonctionnement, à convenir de certains paramètres
permettant d'établir certaines garanties, relativement aux acquis. "
Vous dites: "Ces garanties devraient être annexées à la
loi... ". "Devraient-elles faire partie d'un protocole?" etc. Vous laissez le
tout au gouvernement, vous lui dites: Prenez vos décisions,
arrangez-vous avec cela. Est-ce que vous trouvez que l'avant-projet de loi, de
ce côté, offre les garanties nécessaires, à la fois
quant à tous les prolégomènes, à toute la
préparation, à toutes les dispositions de sauvegarde et quant
à la garantie qu'on va avoir un débat vraiment
éclairé là-dessus? J'aimerais avoir votre conception
à savoir comment se présente le rôle de l'Assemblée
nationale dans la lecture que vous faite du texte. (17 heures)
M. Chagnon: C'est un débat qui, évidemment, touche
directement le gouvernement puisqu'il s'agit pour lui de déterminer son
budget, fatalement. Il y a 50% des dépenses gouvernementales qui vont en
masse salariale. Dans le cas du système d'éducation, ce chiffre
monte à 72%, 73%. Même si on ajoute les hors cadres, cadres et
directeurs, on monte à 80%. Il est éminemment important dans
l'organisation d'un budget de l'État que le gouvernement puisse
déterminer ce qu'il est capable de financer objectivement. Pour rendre
le débat objectif, nous disons de créer un bureau de
recherche sur la rémunération pour éviter
l'espèce de pédagogie de la feuille volante -c'est un vocable
utilisé ailleurs - par rapport aux chiffres qui nous sont donnés
par le Conseil du trésor en plein milieu de ronde de négociations
où les paramètres de ces chiffres demeurent flous et obscurs.
Nous disons de rendre le dossier objectif. Donnons à ce bureau de
recherche, d'une part, la chance d'être indépendant et,
deuxièmement, d'être paritaire. Troisièmement, permettons
à ce bureau de faire justement l'établissement des données
non seulement, comme je le disais tout à l'heure,
québécoises d'organisation salariale dans les secteurs
privé et public, mais élargissons aussi son cadre pour qu'il
puisse faire ses recherches toujours en tenant pour acquis les niveaux de
richesse collective de chacune des sociétés dans lesquelles il va
piger ses sources et donnons-lui la chance de voir ailleurs qu'au Québec
pour pouvoir regarder ce qui s'y fait.
Deuxièmement, il nous paraît assez évident que si,
par hypothèse, pour les années 1985-1986 et 1986-1987, un bureau
de recherche sur la rémunération indépendant et paritaire
tirait la conclusion que l'augmentation ou les prévisions d'augmentation
du traitement des employés du secteur public par rapport à ce qui
se fait un peu partout, dans le privé chez nous et dans le public, dans
le public qui est privé à l'extérieur, autour de chez
nous, tirait la conclusion, dis-je que l'ordre de grandeur, qui pourrait
être celui versé aux employés de l'État et aux
employés dans le secteur parapublic, devrait être de 4, 3%,
disons, cela amènerait certainement une discussion politique assez
spéciale si l'État n'en offrait que 2% ou encore s'il offrait 5,
6%. Il va falloir se poser la question et c'est une des choses qui nous
inquiètent. C'est que s'il offre 5, 6%, on se dit que compte tenu de la
croissance du PIB qui est un des paramètres, compte tenu de l'ensemble
des paramètres, 4, 3% s'avérerait être un chiffre possible.
Mais s'il offre 5, 6%, le 1, 3% entre les deux sera pris où? Il va
être pris dans le normatif lourd. C'est un peu inquiétant. Parce
que le normatif lourd est notre possibilité ensuite de pouvoir
négocier le restant de la convention.
Par contre, on se dit que cela demeure inévitablement un enjeu
politique. Si un gouvernement quel qu'il soit reçoit - je ne dirai pas
la commande - le message que c'est 4, 3% qu'il doit donner, s'il veut donner
plus ou moins, il va être obligé de s'expliquer. Que ce soit
à l'Assemblée nationale ou en commission parlementaire ou que ce
soit dans l'une ou l'autre des institutions démocratiques que la
société se donne, il ne peut pas être mauvais que ce
débat se fasse.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre, vous avez la
parole. Là, vous empiétez sur votre période de temps, M.
le ministre. Le premier bloc est terminé. Nous irons maintenant avec des
blocs plus restreints pour continuer le dialogue.
M. Clair: Oui.
M. Chagnon: L'étanchéité du temps entre le
parti ministériel et le parti de l'Opposition va être comme
l'étanchéité des paliers, je présume, entre le
niveau local et le niveau national.
M. Clair: M. le Président, je voudrais expliquer encore
là au député d'Argenteuil comment nous avons prévu
l'implication de l'Assemblée nationale dans le processus de fixation de
la rémunération. Une première hypothèse que nous
avons explorée était celle qu'on appelle une loi annuelle des
salaires, laquelle serait survenue normalement avant le dépôt du
livre des crédits et avant le discours sur le budget, si on veut que
cette loi annuelle des salaires soit efficace. Sans partisanerie aucune, mais
en étant lucide quand même par rapport aux débats qui
peuvent avoir lieu à l'Assemblée nationale, le gros
inconvénient d'une loi annuelle des salaires était qu'elle devait
être adoptée et conclue au moins un mois, à
l'Assemblée nationale, avant la date d'impression du livre des
crédits puisque c'est, en gros, le temps qu'il faut pour imprimer le
livre des crédits qui, lui-même, doit être
déposé avant le 31 mars de chaque année, en vertu de la
Loi sur l'administration financière. Je ne pense pas qu'on envisage,
personne, de revoir le cycle budgétaire, les dates du 1er avril au 31
mars, qu'on a depuis une tradition séculaire, j'ai l'impression, pour
penser, je ne sais pas, budgéter du 1er juillet au mois de juin.
C'était le premier inconvénient. Autrement, si c'est un
débat qui se déroule à l'Assemblée nationale sur
les salaires et qu'il n'y a pas de conclusion, ce ne sera pas une vraie loi
annuelle des salaires.
Deuxième inconvénient, risquer un "filibuster" à
l'Assemblée nationale sur l'adoption d'une loi avec comme
conséquence de retarder éventuellement, je ne vous prête
pas d'intention, je dis que techniquement, c'est possible... Dans la mesure
où cela est possible, il faut être prêt à faire face
à cette éventualité et, selon les autres priorités
du gouvernement, il pourrait arriver que le débat ne soit pas
appelé et que, finalement, les employés de l'État voient
traîner la fixation de leur rémunération.
Ce que l'on a retenu plutôt, c'est une procédure par
laquelle le président du Conseil du trésor doit déposer
sur la table de l'Assemblée nationale le résultat de l'entente,
s'il en est une, ou ses conclusions qui prendront la forme d'un
règlement sur les salaires qui interviendrait - je ne me
souviens plus - trois semaines ou un mois après la date du
dépôt sur la table de l'Assemblée nationale. C'est
là que cela ouvre toutes Ies possibilités. Le débat est
public, le président du Conseil du trésor dépose son
projet de règlement sur la table de l'Assemblée nationale et il
peut y avoir convocation d'un débat spécial par l'Opposition, il
peut y avoir convocation d'une commission parlementaire, l'audition et la
déposition des parties; là, il y a beaucoup plus de
flexibilité quant aux moyens.
La seule et unique raison pour laquelle nous avons prévu que le
document ne puisse être rendu public, c'est au cas où surviendrait
une élection pendant cette période du mois de mars, ce qui est
peu probable. On sait historiquement qu'à ce moment-là
l'Assemblée nationale ne siège pas et il est très rare,
historiquement, que l'Assemblée nationale ne siège pas au mois de
mars pour la bonne et simple raison que, encore une fois, le président
du Conseil du trésor est obligé, lui, avant le 31 mars, de
déposer le livre des crédits et d'en faire adopter un
douzième ou les trois douzièmes, la loi annuelle sur les
subsides. À ce moment-là, on voit qu'il y a coïncidence,
simultanéité en termes de mois, au moins, en ce qui concerne le
dépôt à l'Assemblée nationale du livre des
crédits, le dépôt du projet de règlement du
gouvernement, l'adoption ultérieure du livre des crédits.
Généralement, encore là, c'est entre le mois de
mars et le mois de mai que la tradition veut que le ministre des Finances fasse
son discours sur le budget. Donc, on voit qu'il y avait d'énormes
avantages à procéder de cette façon. Dans la mesure
où on voudrait que l'Assemblée nationale en fasse un débat
annuel plus important que celui-là, la seule autre alternative qu'il
reste est une loi annuelle des salaires. Maintenant, je ne sais pas ce qu'en
dit la Fédération des commissions scolaires, quand elle souhaite
un débat plus large, un forum plus large et c'est la question que je lui
pose en finissant de répondre au député d'Argenteuil. Dans
votre esprit, quand vous souhaitez un débat plus large, est-ce que cela
va dans le sens d'une loi annuelle des salaires? Ce n'est pas ce que j'en avais
compris. C'était plutôt qu'on trouve une façon
d'élargir le débat et l'avant-projet de loi permettrait fort bien
qu'une commission parlementaire soit convoquée et que la
Fédération des commissions scolaires vienne nous dire: Nous, on a
fait des comparaisons ou, à partir des comparaisons menées par
l'institut de recherche, on pense qu'il y a ceci et cela dont on doit tenir
compte.
M. Chagnon.
M. Chagnon: On estime que le débat devrait être
public dans le sens suivant. De toute façon...
M. Clair: Les conséquences sont très publiques, en
tout cas.
M. Chagnon: C'est cela. D'abord, les conclusions du bureau de
recherche sur la rémunération ne peuvent pas être autrement
que publiques. Deuxièmement, elles ne peuvent pas non plus faire
autrement que d'apporter un débat et, troisièmement, ce
débat, parce qu'il sera politique, va se faire entre le parti
ministériel et l'Opposition, dans le public, chez les syndicats, chez
les associations patronales, et le gouvernement tranchera parce que,
après tout, c'est 50% de son budget.
M. Clair: Je voudrais revenir à la question de l'Institut
de recherche sur la rémunération. Vous souhaitez, comme plusieurs
autres et comme le souhaite également l'avant-projet de loi, qu'il soit
indépendant et paritaire. Or, on sait qu'en commission parlementaire
ici, la centrale syndicale qui est venue nous soumettre un mémoire nous
a indiqué que, quant à elle, il lui apparaissait que ce ne serait
qu'une source différente de données et que, déjà
d'autres organismes, comme le Conference Board, font de telles comparaisons et
que cela ne lui apparaissait pas très pertinent.
Dans votre esprit, qu'est-ce qui vous apparaît
préférable? Est-ce de maintenir une proposition dans un projet de
loi éventuel de fonctionnement paritaire de l'organisme de recherche en
rémunération ou si, comme plusieurs autres, vous souhaitez que
cet organisme soit un organisme indépendant, où les personnes qui
y sont nommées le sont pour leur crédibilité personnelle,
leur neutralité et leur connaissance de ces matières et qu'il ne
soit pas représentatif, c'est-à-dire qu'il ne soit pas là
pour représenter ni le gouvernement ni le syndicat?
Je vous indique que la préférence que nous avons
manifestée pour un organisme paritaire c'est que finalement, ce que nous
souhaitions, c'était qu'à l'usage et à l'usure, la
négociation permanente en vienne à se faire par la mise en place
d'un tel mécanisme au niveau même de l'institut. Quelle est votre
position là-dessus?
M. Chagnon: Premier volet: l'Institut de recherche sur la
rémunération devrait être non seulement, à notre
avis, paritaire, mais aussi indépendant. On ne parle pas de la
même chose lorsqu'on parle de l'indépendance du bureau. Notre
conception de ce bureau de recherche sur la rémunération fait en
sorte de le rendre indépendant comme l'est, par exemple, le bureau de
l'ombudsman. Donc, assuré d'avoir des crédits et,
financièrement, pouvoir faire ses recherches, et finalement,
organisé et relevant directement de l'Assemblée nationale, comme
la loi créant
l'ombudsman est faite. L'ombudsman, c'est un poste qui permet une
liberté d'action à son titulaire et qui lui permet aussi
l'indépendance requise pour faire le genre de boulot qu'il a à
faire. Ce bureau de recherche sur la rémunération devrait relever
de l'Assemblée nationale et, deuxièmement, devrait être
paritaire.
Selon nous, je l'ai indiqué tout à l'heure, sa composition
devrait être modifié en ce qui concerne les associations
patronales. En ce qui concerne ce qu'on retrouve dans l'avant-projet de loi, le
ministre nomme les représentants de la partie patronale. Nous disons que
les parties patronales s'entendent pour déterminer qui y siégera.
Un peu de la même façon qu'il est prévu dans l'avant-projet
de loi que les associations syndicales pourront déléguer leurs
représentants.
Troisièmement, on ajoute ceci. On dit: Ne restreignons pas le
champ de possibilité de ce bureau de recherche en
rémunération de travailler sur des objets ou des
paramètres financiers exclusivement situés à
l'intérieur du Québec. Ouvrons ça quand même. Il y a
des États en Nouvelle-Angleterre, il y a l'Ontario, il y a le
Nouveau-Brunswick, on ne vit pas isolé. Il y a un tas de voisins qui ont
des problèmes à peu près du type du nôtre et pour
lesquels on est capable sans se creuser les méninges bien longtemps de
faire la différence entre le niveau, par exemple, de produit
intérieur brut de l'Ontario par rapport à ce qu'elle peut offrir
à ses salariés. Donc, être capable de faire la
corrélation avec le Québec. La même chose pour
l'État de New York ou du New Hampshire.
J'ajouterais à cela, pour le deuxième volet de votre
question, la négociation permanente. C'est un beau principe, un beau
schème, mais on n'est pas là, quoique nous, dans
l'éducation, on fasse ça quasiment à temps plein, on vit
de moratoire en moratoire et on a déjà une expérience un
peu spéciale sur l'organisation de comités mixtes et sur
l'organisation de comités de négociation qui sont devenus
à peu près permanents. C'est là une toute autre question
que de développer le concept de la négociation permanente, parce
qu'il appelle aussi d'autres corollaires qui seront ceux du droit de lock-out
ou du droit de grève permanent, même pour le normatif lourd. Cela
m'apparaît une autre question. (17 h 15)
Je pense que toutes les conventions collectives doivent prévoir
des mécanismes de réouverture. Dans la convention collective des
enseignants, même si elle compte 285 pages, il y a l'article 9. 4 qui
permet, lorsque les deux parties s'entendent, de rouvrir une partie de la
convention pour signer une entente, faire une modification de convention en
cours de route. Mais de là à enclencher un processus de
négociation permanente sur l'ensemble d'une convention, que ce soit fait
par le bureau de recherche sur la rémunération, je pense qu'on
passerait à côté de l'objet central pour lequel le bureau
de recherche doit être mis sur pied, c'est-à-dire mettre
objectivement sur la table la liste des possibilités, des choix, la
liste de ce à quoi on peut s'attendre comme possibilités de
modifications sur les termes de revenus, tant privés que publics, chez
nous comme un peu partout ailleurs, autour de chez nous. Ce doit être
essentiellement cela le travail du bureau de recherche sur la
rémunération. C'est de faire la "paramétrisation",
définir les paramètres; d'abord, ce sera une joyeuse partie de
plaisir que de définir les paramètres à être
étudiés. Déjà cela, ces gens-là vont en
avoir certainement pour un bout de temps avant de se comprendre
là-dessus. Deuxièmement, établir et fournir au
gouvernement les conclusions des études auxquelles ils seront
arrivés en suggérant au gouvernement d'augmenter, de tant pour
cent par année, la rémunération globale des
employés qui sont financés par l'État. Mais ne
mélangeons pas les concepts du bureau de recherche sur la
rémunération et de négociation permanente en pensant
qu'éventuellement ce bureau de recherche sur la
rémunération pourrait aussi convenir pour devenir
l'opérateur de la négociation permanente. Pas tout de suite en
tout cas. Ce n'est pas clair.
M. Clair: Est-ce que j'ai encore du temps, M. le
Président?
Le Président (M. Lachance): II vous reste à peu
près 45 secondes, M. le ministre.
M. Chagnon: Je suis prêt à vous offrir du temps.
M. Clair: Alors, j'en fais don au député
d'Argenteuil ou au député de Vaudreuil-Soulanges.
Le Président (M. Lachance): C'est M. le
député de Vaudreuil-Soulanges qui prendra maintenant la
relève.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je vous remercie, M. le
Président. D'abord, quelques commentaires quant à la
réponse du ministre sur le débat public élargi auquel
donneraient lieu des mécanismes qu'il propose ici, du dépôt
à l'Assemblée de la liste annuelle des salaires, si on veut, sur
une base annuelle. L'expérience - le ministre le sait - je n'ai pas,
finalement, de réponse à cela, mais je lui fais remarquer que,
dans notre système, l'Opposition est limitée à la demande
d'un débat d'urgence, d'une part, ou alors à sa motion du
mercredi, deux mercredis de suite; quant à la convocation
des commissions parlementaires, de large consultation, la porte n'est
pas tellement ouverte, une fois que le gouvernement a fait son lit, à
l'Opposition.
M. Clair: Des commissions d'initiative. Une voix: Oui, on
connaît cela.
M. Johnson (Vaudreuil- Soulanges): II y a des discussions. Oui,
le ministre évoque les mandats d'initiative dont peuvent se doter les
commissions. Encore là, l'expérience n'est pas bien longue, mais
elle n'est pas concluante - c'est le moins qu'on puisse dire - quant à
la capacité des parlementaires non gouvernementaux, non au pouvoir,
d'enclencher la consultation très large que le ministre
évoquait.
Je reviendrai, quant à mes questions aux représentants de
la fédération, un peu sur des questions qui ont été
traitées tout à l'heure sur la décentralisation. Le
ministre indique qu'il y a une tentative de décentralisation
réelle, oui; modeste et progressive, indique-t-il, à mon sens
c'est presque un pléonasme. Si c'est progressif, il y a des pas modestes
qui sont faits par étapes. Je reviendrai sur la question plus large. Si
c'est cela l'objectif de tout l'exercice, décentraliser, parce qu'on a
diagnostiqué que là réside la solution à la baisse
du niveau de tension probablement triennal, ou même annuel, qu'on
à connue dans le secteur public, que là est une voie de
responsabilisation du niveau local, ce sur quoi on commence à s'entendre
très largement. Tout le monde s'est toujours entendu là-dessus,
mais le gouvernement ne l'a pas fait; distinction Utile à faire ici. La
décentralisation, c'est cela l'objectif. Est-ce que cela ne passe pas -
contrairement à ce que le ministre disait et, à mon sens, cela ne
rejoint pas non plus ce qu'on nous a dit tout à l'heure -
nécessairement par une modification fondamentale des règles de
financement ou des modes de financement locaux? Je m'explique.
Il existe, au point de vue de l'administration publique, des options,
des modèles de gestion, des modèles d'administration qui
permettent au gouvernement, soit sur une période donnée, de
déterminer une enveloppe pour certaines missions gouvernementales, soit
sur une base anuelle au niveau des choix politiques qui se font de
déterminer quelle enveloppe va dans quelle région ou quelle
enveloppe va dans quel secteur d'activité. Une enveloppe dans une
enveloppe, si vous voyez un peu la description que j'en fais. Enveloppe qu'on
pourrait - c'est la question que je pose -peut-être confier aux niveaux
locaux, sachant pertinemment, vous l'avez dit tout à l'heure,
qu'à peu près les trois quarts des disponibilités
financières sont expropriées pour la rémunération,
le traitement des ressources humaines, une enveloppe quand même qui
souffrirait des changements dans cette répartition de la masse globale
ou, au niveau local, on ferait ce que les économistes appellent des
"trade-offs" nécessairement, ce qu'on investit dans les ressources
humaines et/ou dans les équipements et services connexes, etc.
N'est-il pas concevable que, dans une commission scolaire, on offre au
corps enseignant, en échange d'une rémunération
peut-être moins élevée, des conditions de travail plus
"modestes" - entre guillemets -que la tâche à l'égard du
nombre d'élèves, à l'égard de la qualité des
locaux, à l'égard de la variété des
équipements, à l'égard de la possibilité pour le
corps enseignant constitué très largement de gens
qualifiés, la possibilité donc pour ces gens de se livrer
à du travail de consultation, assurer la jonction avec le milieu, avec
les entreprises du milieu, avec le commerce, avec les autres institutions du
secteur public, publiciser donc la ressource humaine qui existe à
l'intérieur de l'école, dans son milieu?
J'en parle un peu en connaissance de cause. Il y a des efforts dans ce
sens de cégeps dans ma région qui ont des liens extrêmement
étroits avec les entreprises, avec le milieu municipal, au point de vue
des consultations, contre rémunération dont
l'établissement scolaire bénéficie en partie et dont
l'enseignant bénéficie aussi, pas seulement
pécuniairement, mais quant à la motivation, la satisfaction au
travail, l'utilisation de sa formation de façon pratique. Il me semble
qu'il y a là un champ pas mal large pour laisser au pouvoir local un
ordre de décision considérable quant à l'attribution de
cette masse, cette enveloppe qui serait déterminée sur une base
politique - c'est bien évident; c'est un choix politique qui se fait -
par le gouvernement sur cette base mais appliquée et utilisée de
façon assez autonome finalement par le pouvoir local.
Il y a une différence de nature dans la proposition que je fais
avec ce qu'il y a dans l'avant-projet de loi, je m'en rends bien compte, mais
ce n'est ni modeste, ni progressif. C'est objectif et si c'est là
l'objectif, compte tenu du diagnostic qu'on a posé, allons dans cette
direction. C'est ce que je suggère à ce moment-ci. Vos
commentaires, le cas échéant.
M. Chagnon: Certainement. C'est l'objectif que nous poursuivons.
Pour nous l'avant-projet de loi dans ce sens, dans notre esprit, est un pas
vers cet objectif, fondamentalement, effectivement.
Si on pouvait être capable de décider, à partir de
la masse monétaire et du normatif lourd localement... Par exemple,
prenons le cas des enseignants. Si, par
exemple, les enseignants préfèrent avoir un
élève de moins par classe, disons, cela a une incidence
pécuniaire assez importante. Par contre, un élève de moins
par classe doit se passer de services professionnels: orthopédagogues,
psychologues, orthophonistes, etc., ou le contraire.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Ou de 3% de leur salaire.
M. Chagnon: Pardon?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Ou de 3% de leur
rémunération.
M. Chagnon: Ou de 3% de leur rémunération ou...
Enfin... Le marché est là. Mais à ce moment,
évidemment, on parle d'une prémisse. C'est qu'on n'est pas
capable de disséquer la négociation de la
rémunération du restant du normatif lourd.
Pour l'instant, en tout cas, nous sommes arrivés à la
conclusion qu'en ce qui concerne la rémunération il est trop
tôt pour tirer la conclusion que vous faites et qu'on n'est pas capable
à l'heure actuelle de décider que du jour au lendemain on va
relancer le débat sur la négociation salariale dans les
différentes régions du Québec. Il y a comme une
espèce de commune volonté de faire en sorte qu'un enseignant qui
enseigne à Vaudreuil, à Boucherville, à Rigaud ou à
Sherbrooke, s'il a le même niveau d'ancienneté et le même
niveau d'expérience, soit rémunéré de la même
façon.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
J'ajoute que c'est vrai, même s'il ne travaille pas dans le
même milieu, même si ces conditions de vie dans son milieu ne sont
pas les mêmes, même si la qualité des lieux mêmes de
l'école n'est pas la même, même si la variété
d'équipements n'est pas la même. Cela me paraît, d'une
façon globale, un peu faux quant à moi. Je vous remercie d'avoir
deux exemples sur quatre dans mon comté, soit dit en passant, mais je ne
crois pas que ce soit une réponse à la question de fond que je
pose. Effectivement, c'est une vue plus globale. Je me permets de dire qu'il y
a, oui, une volonté commune de ne pas remettre cela en cause, de ne pas
reprendre cela en main, plutôt que de ne pas remettre cela en cause. De
la façon dont je lis ou je décode votre réponse, vous ne
semblez pas souhaiter le faire. Je ne sais pas à cause de qui. On sait
peut-être à cause de qui en partie. Il me paraît que vous ne
vous sentez pas prêt, décidé à le faire aujourd'hui.
Est-ce parce que vous n'êtes pas convaincus que c'est cela qu'il faut
faire au point de dire: II faut commencer tout de suite, il faut commencer
quelque chose tout de suite. Je ne crois pas - c'est à cause de cela que
j'ai dit qu'il y a une différence de nature entre la proposition et ce
qu'il y a ici - que ce soit une réponse et que l'avant-projet de loi
soit un début de réponse globale aux problèmes que j'ai
décrits, mais, évidemment, à la lumière de votre
expérience...
M. Chagnon: Je vais vous donner une réponse
peut-être plus poétique. On est en 1985. Depuis 25 ans, le
Québec a écrit des pages de l'histoire qu'on a appelé "La
révolution tranquille" qui sont écrites en lettres d'or, parce
qu'elles ont fait en sorte de sortir le Québec d'une dimension et d'une
situation qui étaient peut-être moins acceptables sur le plan de
l'ensemble de la société. On s'aperçoit, depuis quelques
années, qu'il n'est plus possible de suivre la tangeante
révolution tranquille dans laquelle on a tout centralisé et on a
fait de l'État le levier économique par excellence, le levier
social, le levier dans tous les domaines. De plus en plus, aujourd'hui, il va
falloir pour nous tourner la page de la révolution tranquille et en
écrire une autre. Pour en écrire une autre, il n'y a pas beaucoup
de constats. Il faut partir des acquis sociaux que la révolution nous a
amenés. Dans le cas de l'éducation, cela s'appelle la
gratuité scolaire, la capacité d'un État à faire en
sorte que l'ensemble de ses citoyens puissent au moins étudier jusqu'au
secondaire V et, possiblement, jusqu'à la fin du cégep. C'est un
acquis social. Dans le domaine des hôpitaux, il y a d'autres acquis
sociaux. Mais pour arriver à garder le niveau d'acquis, il n'y a qu'une
voie possible, à mon humble avis, c'est de faire en sorte de
responsabiliser davantage, premièrement, les citoyens et,
deuxièmement, leurs institutions. La conclusion que vous tirez est
bonne, mais on ne fera pas changer le cap au paquebot dans lequel on est
embarqué en dedans de six mois ou en dedans de trois mois. C'est un
objectif souhaitable sur le plan du fond, celui que vous mentionnez. C'est un
objectif qui demande à faire en sorte qu'il y ait une concertation plus
grande dans les différents milieux, entre, d'une part, les agents
patronaux et, d'autre part, les agents syndicaux, le monde, le vrai monde dans
le champ, mais il va falloir y aller par étapes, parce qu'on ne peut
pas, après avoir fait en sorte d'engendrer des générations
l'une après l'autre, de gens qu'on a "déresponsabilisés"
localement pour centraliser les décisions dans le lieu où nous
sommes et faire en sorte que, du jour au lendemain, on revire la machine de
bord et qu'on dise au monde: Maintenant, on a trop de problèmes en haut.
On vous les envoie. Il y a une pédagogie de la responsabilisation qui
devra être inculquée non seulement dans le secteur de
l'éducation, mais dans tous les secteurs de l'administration au
Québec, et qui devront tirer les conclusions que vous avez tirées
vous-mêmes et que nous avons tirées. Nous
ne sommes pas prêts à tirer la conclusion sur la
rémunération à l'heure actuelle. Je vous avoue que, dans
cinq ans, ce sera fait, parce qu'entre les deux, il faudra qu'il y ait une
discussion de fond et non pas une opération du type de celle qui a
été connue en 1978-1979, mais une opération de fond sur
l'organisation du financement des commissions scolaires. Là, je reviens
au monde scolaire. C'est aussi vrai dans le monde hospitalier; c'est aussi vrai
dans les autres secteurs de l'activité publique ou parapublique et
même péripublique. II faudra arriver à faire en sorte qu'on
puisse avoir un mode d'allocation des ressources qui donne à chacun des
milieux une capacité de financement local suffisante pour opérer
aussi des changements. (17 h 30)
À l'heure actuelle, le taux de taxation local sert presque
exclusivement à financer des objets conventionnés ou
réglementés ailleurs que localement. Au point où nous en
sommes, en 1992-1983, le surplus annuel accumulé cette
année-là a fait en sorte de permettre 18 000 000 $ de surplus
accumulés dans les commissions, en comptant les surplus du transport
scolaire, en comptant tout ce qu'on voudra. Une somme de 18 000 000 $ sur un
budget de 3 500 000 000 $. Pour l'année 1983-1984, on peut s'attendre
à avoir un déficit. Pour l'année 1984-1985, on aura
certainement un déficit. Veux veux pas, il va falldir qu'en quelque
part, on puisse faire en sorte de déterminer les modèles
d'organisation sur le plan financier plus près de la base pour qu'ils
collent plus à une réalité, pour être aussi plus
près d'une réalité économique, j'entends. Qu'ils
puissent être plus près aussi d'un certain financement que
certains milieux voudront bien se donner.
Quant au modèle de rémunération qui se fait
à l'échelle du Québec, je ne sais pas, vous avez
peut-être discuté, à l'occasion, du modèle de
rémunération des députés. Avez-vous
déjà pensé à rémunérer les
députés différemment, peu importe la région dans
laquelle ils se situent au Québec?
Le Président (M. Lachance): Selon la grandeur des
circonscriptions.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): En 30 secondes...
Le Président (M. Lachance): Oui, rapidement, M. le
député, parce que...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):... avec votre permission, M. le
Président, saisissant l'occasion que nous avons aujourd'hui de recevoir
les représentants de la fédération, je n'ai pas souvenance
que vous ayez réagi aux propositions de la CEQ de rouvrir la
troisième année des décrets, voulant déboucher sur
une nouvelle convention, une vraie. Est-ce qu'on pourrait avoir vos
commentaires à ce moment-ci?
M. Chagnon: Certainement. Parlez-vous du troisième
moratoire, après le premier et le deuxième, le futur
troisième moratoire possible, peut-être demandé - pas
peut-être -très demandé par la centrale concernant
l'augmentation du quantum de tâche? Vous voyez justement un sujet qui a
une incidence financière extrêmement importante. Cela veut dire 40
000 000 $. Si on met 40 000 000 $ d'argent neuf sur la table, je dis bien neuf
- qu'on n'essaie pas de tripoter nos règles budgétaires pour
aller retirer 40 000 000 $ quelque part qui va faire en sorte de financer ce
moratoire - là, on pourra commencer à se parler. Mais tant et
aussi longtemps que sur la table il n'y aura pas 40 000 000 $ d'argent neuf,
comment voulez-vous qu'on puisse discuter sérieusement de cela lorsque
les trois articles des règles budgétaires touchant le financement
des commissions scolaires sont tous les trois sous-financés? Il y a un
sous-financement de l'article 1, un sous-financement de l'article 2 et un
sous-financement de l'article 3. L'argent ne tombe pas des arbres. À
partir de cela, réglons ce problème et ensuite, on verra si on
peut effectivement faire en sorte et si on doit faire en sorte de garder le
moratoire pour l'année 1985-1986. Je vous dis tout de suite que, peu
importe le gouvernement, peu importe l'avenir, s'il y a un troisième
moratoire dans le secteur de l'éducation, calculez que c'est là
la tâche définitivement globale, finie, fermée des
enseignants. C'est le. maximum qui ne sera jamais atteint. C'est une question
qui mérite d'être étudiée un peu plus en profondeur.
Il faudra regarder aussi tous les impacts que cela peut avoir, d'une part, sur
l'évolution et, d'autre part, l'organisation scolaire et aussi
l'organisation et le développement du régime
pédagogique.
Le Président (M. Lachance): Merci. Je cède la
parole au ministre délégué à l'Administration.
M. Clair: Oui. M. le Président, je veux simplement
indiquer que, de notre côté, je pense qu'il n'y a pas d'autre
question. Quant à moi, je n'en ai pas. Je remercie sincèrement la
Fédération des commissions scolaires d'être venue nous
présenter son mémoire. Si d'autres collègues ont des
questions...
Une voix: Oui.
M. Clair:... je pense que, de notre côté, nous n'en
avons plus. Peut-être que le député d'Argenteuil en a.
Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre. M. le
député d'Argenteuil m'a indiqué qu'il voulait intervenir
à nouveau.
M. Ryan: Oui. Il y aurait quelques questions qu'on voudrait
préciser davantage sur la demande que la CEQ a déposée
auprès du gouvernement. Si je comprends bien, la demande a
été présentée au ministre de
l'Éducation?
M. Gendron: Oui.
M. Ryan: Le président de la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec a déclaré que
le moratoire que la CEQ demande pour la troisième année des
décrets entraînerait des dépenses additionnelles de l'ordre
de 40 000 000 $ et, qu'à moins d'indication claire du gouvernement quant
à la disponibilité des fonds impliqués, la
fédération des commissions n'éprouve pas de disposition
à s'engager dans cette voie. Je voudrais poser quelques questions
additionnelles là-dessus. Tout d'abord, est-ce que cette démarche
de la CEQ a fait l'objet d'approches auprès de la
fédération ou de débuts de conversations ou si c'est une
démarche qui a été faite directement auprès du
gouvernement et que vous en auriez été informés par la
voie des journaux ou par les voies communes aux citoyens ordinaires? Est-ce
qu'il y a eu des rapports entre vous et la CEQ là-dessus, si je ne suis
pas indiscret?
M. Chagnon: Ce n'est pas une indiscrétion. Nous avons eu
une rencontre de quelques heures avec la centrale, cette semaine d'ailleurs et
cela a été un des sujets mentionnés. On a fait le tour de
plusieurs questions. Il y aura probablement d'autres approches que la centrale
fera avec nous sur ce dossier comme elle en fera aussi avec les
ministères. Je présume qu'il y a eu des rencontres entre les
ministères et la centrale.
M. Ryan: Si j'ai bien compris le sens de cette démarche,
il était double. Tout d'abord, la CEQ vise à obtenir la
modification d'un certain nombre de conditions qui sont définies dans le
décret, pour la troisième année du décret et,
deuxièmement, elle voudrait accrocher à cette première
partie de la démarche la recherche d'une entente pour la période
devant suivre l'expiration des décrets. Est-ce que la
fédération des commissions scolaires, sur cette question
précise, est de l'avis du gouvernement, lequel, si j'ai bien compris, a
indiqué qu'il ne voulait pas ouvrir de négociation pour la
période future, tant que les modifications qu'il envisage au
régime de négociation n'auront pas été faites en
bonne et due forme?
M. Chagnon: II faut se souvenir que dans ce débat, il a
été question pendant un bout de temps de négocier
parallèlement le modèle de négociation et le contenu des
négociations. Nous avons toujours tiré la conclusion qu'il
fallait d'abord déterminer le modèle et, ensuite, négocier
le contenu. Il faudrait qu'on puisse savoir dans quel type de maison on voulait
habiter - un duplex ou un chalet suisse - avant de déterminer quelle
sorte de meubles on aurait, quelle serait la couleur des mûrs et de
quelle couleur serait le papier peint qu'on veut acquérir.
Définissons le modèle et, ensuite, on travaillera sur les
contenus. Quant à l'hypothèse d'une réouverture des
négociations, nous avons dit: C'est une hypothèse regardable,
à quelques conditions près. À la condition que,
premièrement, on puisse s'entendre sur qui fait quoi dans cette
négociation, deuxièmement, quels sont les paliers de
négociation et, troisièmement, qu'on puisse s'entendre aussi sur
le fait que cette négociation devrait nous amener un contrat de travail
qui se poursuivrait pour au moins trois ans, après le 31 décembre
1985. À l'heure actuelle, je ne vois pas tellement d'autres
possibilités que de s'entendre ou que de faire en sorte de, d'abord,
définir le modèle de négociation avant de commencer
à négocier.
M. Ryan: Très bien.
Le Président (M. Lachance): Cela va? Je tiens, à
titre de président de la commission, à vous remercier, messieurs
de la Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec pour votre présence aux travaux de cette commission. Je
pense que les échanges de vues entre les différents
côtés de la table ont permis de clarifier certaines des positions
que vous avez avancées dans votre mémoire. Merci beaucoup de
votre présence.
J'invite maintenant un quatrième groupe du secteur de
l'éducation à bien vouloir prendre place pour terminer les
discussions de cette journée, soit la Commission scolaire des
Laurentides.
M. Chagnon: Vous me permettrez, M. le Président, de vous
remercier à notre tour du temps que les parlementaires ont
accepté de prendre pour écouter la position que la
fédération défend et a défendu depuis
déjà à peu près un an et demi dans le dossier des
relations de travail pour faire en sorte, justement, d'éviter qu'un
cirque à tous les trois ans vienne ramener un chaos social comme ceux
qu'on a vécus depuis douze ou quinze ans dans le dossier des
négociations dans les secteurs public et parapublic. Nous ne pouvons
faire que souhaiter que le gouvernement ait le courage politique de trouver,
premièrement, les consensus et,
deuxièmement, de faire en sorte de nous ramener dans un
modèle de négociation qui soit plus approprié pour
diminuer peut-être sa capacité d'État négociateur et
se ramener un peu plus à sa force comme État
législateur.
Le Président (M. Lachance): Merci. M. le
député d'Argenteuil, vous vouliez intervenir.
M. Ryan: Oui, juste quelques mots pour remercier la
Fédération des commissions scolaires catholiques du soin qu'elle
a mis à préparer son intervention devant la commission
parlementaire. C'est une démarche qui s'est échelonnée sur
toute la dernière année et dont on a pu suivre le cheminement par
la publication de documents de travail et de consultation qui étaient
substantiels, qui se sont rendus jusque dans les unités constituantes de
la fédération et qui ont donné lieu à des
débats en assemblée générale.
Je pense qu'on a pu constater dans le cheminement de la démarche
qu'il y avait des opinions très partagées sur plusieurs des
sujets qu'implique l'avant-projet de loi. Je pense qu'on a un exemple de
cheminement démocratique dans le bon sens du terme qui a
été suivi dans ce cas-ci.
Je voudrais ajouter que, du côté de la partie syndicale,
j'ai toujours été étonné de constater combien il y
avait un processus de consultation très élaboré aussi sur
les mêmes questions, qui était suivi et dont la population n'est
peut-être pas suffisamment informée. Je ne veux pas dire que
j'endosse tout ce qui ressort de ces consultations, autant d'un
côté que de l'autre, mais je pense que, pour le législateur
qui veut agir sur les modèles qu'on doit suivre, il est bien important
qu'il soit très conscient, nos concitoyens également, que, du
côté des parties immédiatement intéressées,
tant du côté syndical que du côté patronal, tout cela
donne lieu à des discussions très détaillées et
qu'avant de jouer là-dedans comme s'il s'agissait d'une chose facile, il
est très important d'essayer de comprendre la démarche qui est
suivie de chaque côté. C'est dans cet esprit que nous avons
été très intéressés à discuter avec
la fédération des commissions scolaires et que nous regrettons
évidemment que le même genre d'échange de vues ne semblent
pas pouvoir se produire avec d'autres éléments tout aussi
importants dans la solution des problèmes que nous discutons.
Le Président (M. Lachance): Merci, M. le
député. M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, je me sens le devoir d'ajouter
mes remerciements avant que MM. Chagnon et Tessier nous quittent.
Je voudrais ajouter aussi que le gouvernement a vivement
apprécié le processus de consultation auquel a accepté de
participer la commission scolaire, tant avec le gouvernement qu'à
l'égard de ses propres instances. Je ne voudrais pas que s'infère
des propos du député d'Argenteuil que le président du
Conseil du trésor serait en train de jouer dans les modèles de
négociation sans consultation et en prétendant que ces organismes
qui sont venus ou qui ne sont pas venus devant nous n'ont pas eu toutes les
occasions de faire valoir leurs points de vue. Je suis convaincu que la
fédération des commissions scolaires elle-même pourrait
témoigner du contraire.
M. Ryan: Vous savez bien que je parlais d'une perspective
beaucoup plus large.
Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre, MM.
Chagnon et Tessier.
M. Clair: Maintenant, M. le Président, avant que nos
autres invités arrivent, Mme Bérubé et M. Myette, qui
représentent la commission scolaire des Laurentides, je vais devoir
m'excuser car vous savez que j'ai d'autres responsabilités
également. Mon collègue, le ministre de l'Éducation, me
remplacera pour l'audition de ce mémoire. Je m'en excuse. Ce sont des
contraintes de temps qui m'en empêchent.
Le Président (M. Lachance): Très bien, M. le
ministre. Vous êtes excusé. J'inviterais maintenant les
représentants de la commission scolaire des Laurentides à prendre
place à la table. À titre de président de cette
commission, je leur souhaite la bienvenue. Vous êtes la seule commission
scolaire qui se fait entendre de façon autonome, à
l'extérieur du groupement que l'on vient d'entendre, la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec.
Mme Denise Bérubé est la présidente, je crois, et
M. Bernard Myette, directeur général. Comme nous avons un temps
assez limité, une période d'une heure, si vous pouviez nous faire
un exposé restreint, cela permettrait des échanges de vues plus
nombreux d'ici à la fin de la période de temps qui nous est
allouée.
Je vous laisse la parole, Mme Bérubé.
Commission scolaire des Laurentides
Mme Bérubé (Denise): D'accord. Je pense que le
mémoire n'est pas suffisamment lourd pour ne pas nous permettre de le
lire assez rapidement.
M. le Président, membres de cette commission parlementaire, il me
plaît de vous déposer le mémoire de la Commission scolaire
des Laurentides sur l'avant-projet de loi intitulé "Loi sur le
régime de négociation
des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic". (17
h 45)
Nos réflexions et positions n'ont d'autre source que le souci
d'une éducation de qualité, en quantité pour tous les
élèves du Québec et leur droit à des services qui
leur assurent cette éducation. Nous remercions donc les membres de cette
commission parlementaire de bien vouloir nous écouter.
En guise de préambule, c'est avec satisfaction que nous
accueillons votre avant-projet de loi intitulé "Loi sur le régime
de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et
parapublic". En effet, le vécu d'affrontement des vingt dernières
années au Québec nous oblige à revoir le régime de
négociation. Le Québec ne peut se retrouver à la merci
d'un front commun de plus de 300 000 travailleurs de l'État et de ses
sociétés qui a pour conséquence de
déséquilibrer les finances du gouvernement et ainsi influer sur
la vie de tous les citoyens.
Les centrales syndicales ont abusé dans leurs revendications, ont
bafoué les lois en vigueur et, en conséquence, ont mis en danger
l'équilibre entre le secteur privé et le secteur public. Les
gouvernements, depuis vingt ans, à l'exception de 1981, ont
cédé devant le chantage et la pression des centrales syndicales
qui sont formées à plus de 50% de travailleurs de la fonction
publique et parapublique québécoise. Il est temps d'assurer au
Québec une stabilité dans ce domaine, il est temps qu'on assure
les prestations de services auxquelles ont droit les citoyens du Québec.
C'est pourquoi, en plus d'être satisfaite de voir ce projet de loi, la
commission scolaire se dit favorable dans son ensemble à son contenu,
sauf quelques modifications mineures.
Concernant la rémunération, la Commission scolaire des
Laurentides reconnaît au gouvernement responsable des finances publiques
le droit et le devoir de fixer les conditions de rémunération
pour les employés de l'État et de ses sociétés qui
tiennent compte de la rémunération dans le secteur privé
et de ses autres obligations financières. Qui plus est, la Commission
scolaire des Laurentides considère que la sécurité
d'emploi totale consentie aux employés de l'État a un prix.
À notre connaissance, aucun autre État ou province en
Amérique du Nord n'a octroyé une telle sécurité
d'emploi. Cette sécurité d'emploi a une contrepartie; pour la
Commission scolaire des Laurentides, cette contrepartie est le retrait du droit
de grève dans la négociation de la
rémunération.
Dans l'ensemble, la commission scolaire est en accord avec les
dispositions prévues à l'avant-projet de loi. Cependant, elle
désire émettre certains commentaires et avoir réponse a
une interrogation. À l'article 63, lorsqu'on parle de
rémunération globale, parle-t-on également des
régimes de retraite, des régimes d'assurance-vie, salaire et
maladie? Nous vous soumettons que la réponse devrait être oui. En
effet, pour la commission scolaire, ces éléments font partie
intégrante de la rémunération globale. Il est d'ailleurs
temps que l'on règle la fameuse question des journées de maladie
non monnayables chez les enseignants. Prévues comme assurance en cas
d'invalidité, elles sont devenues un droit de convention qui permet
à des enseignants de priver de services des élèves pour
toutes sortes de raisons qui n'ont rien à voir avec la maladie.
Cependant, nous considérons très important l'article 70
qui stipule que le Conseil du trésor, en collaboration avec les
comités patronaux, négocie avec les groupements d'associations de
salariés. Cela suppose, et nous insistons pour qu'il en soit ainsi, des
relations harmonieuses entre les membres de la partie patronale et, cela va de
soi, du respect de l'un envers l'autre.
Les décisions du Conseil du trésor et du gouvernement ne
doivent pas être parachutées à ces partenaires. Le mot
"collaboration" de l'article 70 doit donc trouver son véritable sens et
se vivre pleinement.
M. Myette poursuivra la lecture du mémoire.
M. Myette (Bernard): L'organisation des parties à la
négociation. La Commission scolaire des Laurentides est d'accord dans
l'ensemble avec les articles 3 à 19 concernant l'organisation des
parties à la négociation. Notre réserve se situe
principalement à l'article 10. Nous considérons que la
responsabilité de négocier et d'agréer les stipulations
visées dans l'article 20 doit relever d'une responsabilité
partagée avec prépondérance de l'une ou l'autre des
parties patronales, le tout dépendant du sujet.
Tout objet ayant une incidence monétaire, telle que le nombre
d'enseignants ou le nombre d'élèves par groupe, le nombre de
périodes par groupe, etc., devrait être de la
responsabilité ultime du ministère de l'Éducation.
Par contre, tout objet concernant le vécu des écoles, tel
que la semaine de travail, les éléments de la tâche, la
mécanique de la sécurité d'emploi, devrait être de
la responsabilité du groupement de commissions scolaires.
Tout en reconnaissant à l'État une responsabilité
première dans toute question d'ordre monétaire, nous lui
demandons, par contre, de reconnaître les responsabilités des
commissions scolaires, entités juridiques reconnues et véritable
employeur. C'est dans ce cadre qu'en tant qu'employeurs, les groupements de
commissions scolaires doivent avoir prépondérance et
autorité sur les objets
à négocier et à agréer qui n'ont peu ou pas
d'incidence monétaire.
Nous accueillons favorablement l'article 18 et reconnaissons au Conseil
du trésor le rôle qui lui est dévolu. Maintenant, une loi,
si elle est adoptée, le spécifiera clairement.
Cependant, nous nous interrogeons sur l'utilité du pouvoir de
déléguer un observateur aux séances de négociation.
Est-ce là vraiment un de ses rôles? L'inscrire dans la loi
à ce stade-ci peut-il être interprété comme une
marque de non-confiance à l'endroit des partenaires du ministère
de l'Éducation et des groupements de commissions scolaires?
Quant à nous, nous ne voyons pas l'utilité de la
présence de cet observateur. Au contraire, permettre la présence
d'un tel observateur peut entraîner des conflits quant au rôle
à être joué par chaque membre de la partie patronale. Les
matières à négocier et leur palier. La Commission scolaire
des Laurentides a toujours revendiqué le retour à la
négociation locale pour toutes les clauses des conventions collectives
ayant trait au vécu quotidien des écoles. Cette demande
traditionnelle de la commission scolaire s'inscrivait dans la conception que
chaque milieu a ses particularités, sa couleur locale, ses façons
de vivre, et qu'on ne pouvait, de Québec, statuer pour l'ensemble des
commissions scolaires. Le vécu de la Gaspésie ou de toute autre
région du Québec est différent du vécu des
Laurentides, et il en est bien ainsi. C'est donc avec grande satisfaction que
nous accueillons cette volonté de faire en sorte que chaque milieu se
prenne en main et négocie localement son quotidien.
L'article 21 répond donc aux attentes de la commission scolaire.
L'annexe A devrait contenir, en plus des 21 objets que l'on nous a
identifiés, tout le chapitre ayant trait au perfectionnement à
l'exception de la détermination de la masse salariale relative au
perfectionnement.
Par contre, Ies articles 33 et 34 suscitent chez nous certaines
interrogations. Pourquoi demander à un médiateur arbitre de
statuer sur la question faisant l'objet du désaccord? Pourquoi laisser
le soin à l'arbitre médiateur de juger de l'improbabilité
d'un règlement et ainsi se donner le mandat de statuer? Les
expériences vécues à la Commission scolaire des
Laurentides nous laissent perplexes quant à l'efficacité de ce
médiateur arbitre, à moins que l'on nous assure que ces
médiateurs arbitres connaîtront bien la question scolaire et
qu'ils proviendront d'une banque agréée par les parties à
la négociation dans le domaine scolaire. En d'autres mots, nous doutons
de l'efficacité du médiateur arbitre nommé par le
ministère du Travail. Quant au jugement du médiateur arbitre sur
un règlement ou pas, nous préférons que la
négociation suive son cours d'autant plus que les clauses d'une
convention demeurent en vigueur tant qu'il n'y a pas d'accord entre les
parties. Un vieux proverbe est fort explicite sur le sujet: un tien vaut mieux
que deux tu l'auras.
Grève et lock-out. La Commission scolaire des Laurentides est
d'accord avec le retrait du droit de grève et de lock-out pour les
dispositions des conventions collectives touchant la
rémunération, telles que nous l'interprétons, et celles
à être négociées à l'échelle locale.
Les 20 dernières années n'ont pas permis de faire la preuve que
les syndicats de la fonction publique et parapublique savaient utiliser
intelligemment ce droit. Trop d'abus ont été commis privant ainsi
des milliers d'élèves et de citoyens de leur droit à des
services.
L'élève né en 1964 qui a vécu les quinze
dernières années dans le système d'éducation au
préscolaire, primaire, secondaire et collégial, a perdu combien
de jours de classe? Pour nous la réponse est claire: Beaucoup trop.
D'autant plus qu'au-delà de ces jours perdus, il a dû subir tous
les moyens de pression tels que refus de remettre ses notes, absences
régulières de ses enseignants, refus des enseignants de
participer à ses activités, etc.
Mme Bérubé: Enfin, la partie V: Les services
essentiels. La commission scolaire des Laurentides, tout comme la
fédération vient de le mentionner d'ailleurs, est d'accord avec
les articles qui donnent au Conseil des services essentiels de nouvelles
responsabilités. Cependant, nous vous soumettons qu'il existe dans le
monde de l'éducation des institutions spécialisées pour
perturbés affectifs graves, pour débilités graves ou
moyennes où des services essentiels doivent aussi être reconnus.
Nous espérons que les articles 111. 16 et autres s'appliqueront aussi
à ce type d'institutions.
En conclusion, à l'exception de quelques modifications mineures
à y apporter, la Commission scolaire des Laurentides se dit en accord
avec l'avant-projet de loi déposé par le ministre. Nous croyons
qu'il répond aux attentes d'une vaste couche de la population du
Québec fatiguée de vivre ce qu'elle a dû vivre pendant les
15 ou 20 dernières années. Nous invitons le gouvernement du
Québec à faire preuve de leadership et à aller sans retard
dans la bonne direction en faisant de cet avant-projet un projet de loi qui
sera adopté par l'Assemblée nationale.
L'ensemble de la population québécoise, malgré
certaines voix discordantes qui ne manqueront certes pas de se faire entendre,
lui en saura gré surtout si le monde de l'éducation retrouve la
stabilité qui lui a tant fait défaut.
Le Président (M. Lachance): Merci, Mme
Bérubé. Avant de permettre au ministre
de l'Éducation d'amorcer la période d'échanges
d'opinions, est-ce que vous pourriez, pour le bénéfice des
membres de la commission, nous donner quelques informations, quelques
précisions concernant la taille de votre commission scolaire?
Mme Bérubé: C'est une commission scolaire de 7500
élèves intégrés, qui regroupe donc les
élèves du primaire et du secondaire, intégrée
depuis 1972 sur un territoire de 100 milles de long sur 50 à 60 milles
de large. Elle est composée d'une vingtaine d'institutions
réparties sur l'ensemble du territoire. Nous avons également un
service d'éducation des adultes qui donne des services également
sur l'ensemble du territoire. Cela donne un bon portrait quand même.
Le Président (M. Lachance): Merci. M. le ministre.
M. Gendron: M. le Président, Mme la présidente de
la commission scolaire ainsi que M. le directeur général de la
commission scolaire des Laurentides, je voudrais très rapidement vous
remercier d'avoir accepté de venir nous donner votre point de vue sur
l'avant-projet de loi concernant un nouveau cadre de négociation. Je
suis heureux que vous l'ayez fait pour une raison très simple. Bien
sûr, jusqu'ici, on a eu l'occasion d'entendre des intervenants qu'on dit,
en règle générale, plus majeurs, plus impliqués. Ce
n'est pas péjoratif pour vous de dire cela et cela nous permet quand
même d'avoir le point de vue d'une commission scolaire de taille
plutôt petite - je pense seulement en termes de référence
à la clientèle scolaire -dans une région un peu
éloignée des grands centres. C'est intéressant d'avoir
votre contribution à cet égard, et je vous en remercie.
Je pense qu'on ne ferait pas erreur de prétendre que,
globalement, vous êtes favorables à 'avant-projet de loi
présenté, au contenu. J'ai surtout noté une phrase, en ce
qui me concerne, qui m'intéresse - c'est également votre
préoccupation - celle dans laquelle vous avez indiqué qu'il
était temps de prendre les moyens nécessaires pour assurer au
Québec un certaine stabilité dans ce domaine et il est
également temps qu'on assure des prestations de services
éducationnels auxquels les jeunes et les citoyens et citoyennes du
Québec ont droit.
Je pense que, comme j'ai eu l'occasion de le dire hier, au niveau de
l'analyse et de la problématique de tout le contexte concernant les
négociations, il ne fait aucun doute qu'on est assez largement d'accord
sur le consensus, à savoir que cela s'est traduit trop souvent par des
lois spéciales, par des conflits qui nous paraissaient être
peut-être prématurés dans te temps et trop longs, en termes
de durée. Ce ne sont pas des objectifs que nous devrions poursuivre si,
effectivement, on est tous intéressés par une plus grande
stabilité.
Je veux en profiter pour relever quelques points avant de poser des
questions précises. Dans votre mémoire, vous avez demandé,
à un moment donné, lorsqu'on parle de rémunération
globale: Est-ce qu'on veut parler également des fonds de pension, des
régimes d'assurance-vie, d'assurance-salaire, d'assurance-maladie, etc.
? Vous nous avez indiqué la réponse. Vous dites: En ce qui nous
concerne, ce serait oui. Vous avez mentionné que vous voudriez une
précision là-dessus en ce qui concerne le gouvernement. Cela a
été mentionné, je pense, par le président du
Conseil du trésor. Il ne fait aucun doute que nous aussi, quand on parle
de rémunération globale, cela implique tous ces
éléments. (18 heures)
Pour ce qui est de l'organisation des parties, en termes d'objets
à être partagés, je pense que vous avez été
assez clair en convenant que les objets à incidence pécuniaire
sont ultimement de la responsabilité du ministère de
l'Éducation, au-delà de la structure chapeau que l'on pourrait
avoir.
Vous avez indiqué aussi qu'au niveau du vécu des
écoles, ce devrait être une responsabilité des commissions
scolaires. Je pense que là-dessus, vous avez tout à fait raison.
La démarche proposée par rapport à une véritable
décentralisation dans l'avant-projet de loi, je ne pense pas que ce soit
la prétention du gouvernement de dire que c'est un avant-projet de loi
qui fait des négociations futures des négociations hautement
décentralisées, sans pour autant, par exemple, ne pas convenir de
ce que vous avez évoqué, qu'au niveau du quotidien, comme on
l'appelle, le vécu quotidien, je pense qu'il faudrait ajouter en annexe
A des éléments qui pourraient davantage traduire cette
possibilité qu'il y ait plus de contenu à caractère
relié au quotidien et au vécu des écoles qui fasse partie
de négociations locales. En tout cas, en ce qui me concerne, je n'ai pas
d'objection à vivre avec cela.
J'aurais quelques questions à poser au-delà des
commentaires que je viens de faire. Ma première question serait plus une
précision. À la page 7 de votre mémoire, vous vous
déclarez favorable au rôle dévolu au Conseil du
trésor en vertu de l'article 18 de l'avant-projet de loi. Par contre,
vous aviez des réticences, pour le moins, sur le fait que nous ayons
indiqué dans la suite de l'article 18 que le Conseil du trésor
puisse déléguer un observateur aux séances de
négociation. Vous laissez voir que c'est peut-être un jugement de
non-confiance. J'aimerais vous entendre un peu plus explicitement
là-dessus. Pourquoi, autrement
dit, ne croyez-vous pas un peu normal que le Conseil du trésor
puisse - on ne dit pas que le Conseil du trésor délègue,
on dit précisément dans l'article: le Conseil du trésor
peut - déléguer un observateur aux séances de
négociation?
Avant que vous me donniez les raisons pour lesquelles vous êtes
très inquiets là-dessus, je veux juste préciser dans une
phrase que nous croyions qu'il était convenable d'envisager la
possibilité d'en déléguer un. Cela ne veut pas dire qu'on
va l'exercer. Il arrive assez souvent qu'à un moment donné,
puisque les mandats sont donnés par le Conseil du trésor, les
membres du Conseil du trésor souhaitent avoir ce qu'on appelle dans le
jargon un "feeling" plus exact de ce qui se passe véritablement aux
tables. Dans ce sens, il nous paraissait opportun de pouvoir
déléguer quelqu'un. Est-ce comme cela que vous le voyez ou si
vous avez d'autres inquiétudes qui vous ont fait exprimer ce que vous
avez dit dans votre mémoire?
M. Myette: En fait, l'interrogation que l'on a se base, bien
sûr, sur le vécu des dernières années, en fait, la
ronde de 1979 à aujourd'hui, et également sur tout le cadre du
projet de loi tel qu'il est déposé. Je m'explique. Il est clair
dans ce projet de loi que l'on reconnaît au Conseil du trésor la
responsabilité ultime en fait de la défense des deniers publics
et dans ce sens, de libérer des mandats qui ont incidence
pécuniaire par rapport à l'ensemble des ministères, que ce
soit l'Éducation ou les Affaires sociales.
On dit même, à l'article 19 - on n'a pas voulu, dans le
mémoire, aller plus loin -"le Conseil du trésor invite le
ministre de l'Éducation et le ministre des Affaires sociales... "
Remarquez bien qu'on aimerait mieux ne pas voir le mot "invite" et qu'il soit
dit clairement que le ministre de l'Éducation et le ministre des
Affaires sociales sont présents au Conseil du trésor et qu'ils
n'ont pas besoin d'invitation pour aller assister aux débats.
Quand on dit qu'en plus on peut déléguer un observateur,
on a appris dans le passé que celui qui a la décision ultime,
lorsqu'il est assis à une table, finalement, c'est celui qui
décide. Dans ce sens, on y voit un conflit de rôles qui peut se
produire où, à un moment donné, les négociateurs
mandatés, en présence d'un observateur du Conseil du
trésor, deviennent les conseillers du représentant du Conseil du
trésor qui devient le négociateur. On dit que, tel que le projet
de loi est libellé, les mandats sont clairs, ils viennent du Conseil du
trésor et, avant d'aller négocier, ils sont validés au
Conseil du trésor. Alors, on ne voit pas l'utilité de permettre
ensuite au Trésor de déléguer un observateur.
M. Gendron: Je vous comprends. Je voudrais simplement ajouter -
encore là, j'ai eu l'occasion de vivre quelques négociations -que
c'est de pratique courante que, de toute façon, qui que ce soit qui soit
mandaté pour faire véritablement les échanges à une
table de négociation, en règle générale, chacune
des parties a toujours, de toute façon, des observateurs. C'est
clairement connu des négociateurs de qui proviennent leur mandat. Le
mandat ne vient pas du Conseil du trésor au sens de l'observateur
délégué par le Trésor. Je ne sais pas si je me fais
bien comprendre. Au Trésor, il y a toujours eu le secrétariat du
Conseil du trésor avec ce qu'on appelle les élus du
Trésor. L'observateur du Conseil du trésor, c'est quelqu'un du
secrétariat du Conseil du trésor qui assiste aux échanges
lorsque les élus du Conseil du trésor ont à retenir ou
à ne pas retenir le mandat qu'il faille dégager. Dans ce
sens-là, je ne vois pas du tout comment vous voyez ce que vous m'avez
donné comme réponse, l'espèce de conflit de rôles ou
d'interprétations des mandats de chacun. D'aucune façon, cela
change le modèle traditionnel. Ce sont les élus du Trésor
qui ratifient les mandats et les confient au négociateur pour la partie
gouvernementale, et ils s'en vont à la table de négociation.
Qu'il y ait un observateur là; c'est familier d'abord, c'est
régulier, et cela ne peut pas être interprété comme
un conflit de rôles. À la suite des explications que je vous
donne, je veux savoir si je vous rassure ou si vous avez les mêmes
inquiétudes.
M. Myette: C'est-à-dire que les inquiétudes
demeurent parce que, précisément, l'expérience des
dernières années nous a amenés, pour ceux qui ont
vécu de plus près la négociation, à constater que
dans le feu de l'action, lorsqu'un observateur du Trésor est
présent, rapidement le leadership est pris par cet observateur et ce ne
sont plus les gens qui ont les mandats de négocier qui mènent la
négociation, qui élaborent des solutions ou des
contre-propositions à la table. Mais c'est repris en main par le
Trésor. Pour nous, vraiment, le rôle du Trésor, cela doit
être un rôle de dégager des mandats et, une fois que les
mandats sont dégagés, de permettre aux gens qui ont la
responsabilité de négocier de pouvoir le faire facilement et a
l'aise.
M. Gendron: D'accord. Je vous comprends. Je considère
votre réserve. Cependant, je vous dis tout simplement que, en
règle générale, cette disposition devrait être
exercée avec énormément de vigilance et d'attention dans
le sens que je serais plus attentif à retenir votre commentaire si,
effectivement, l'article disait "doit" et le Conseil du trésor
délègue automatiquement
un observateur. Il y a toutes sortes d'analyses qui doivent être
faites et, effectivement, si l'on pouvait faire la même lecture dans le
sens de vos inquiétudes, il y a peut-être une logique qui nous
commanderait de dire: On n'exerce pas notre pouvoir de le faire. À
l'article, ce n'est pas "doit"; c'est "peut" avoir un observateur, dans la
perspective où ce serait contributif pour, finalement, parfois engager
une phase finale de règlement. En tout cas, j'ai entendu vos
arguments.
J'ai une autre question relativement à la page 9 de votre
mémoire. J'ai été un peu étonné de cette
partie parce que la plupart des intervenants qui se sont exprimés
là-dessus, et il y en a eu plusieurs, trouvaient que les
mécanismes de médiation proposés dans l'avant-projet de
loi n'étaient sûrement pas parfaits, mais assez satisfaisants pour
les faire exprimer un commentaire positif. Dans votre esprit - vous avez le
droit d'avoir ce point de vue - vous manifestez énormément
d'inquiétude et de réticence à cette formule à la
suite d'expériences vécues. Est-ce à dire que, dans votre
esprit, si on devait quand même retenir cette formule, il faudrait
envisager d'avoir une autre banque, un autre groupe de professionnels qui
feraient de la médiation comme arbitres, mais qui ne viendraient pas du
ministère du Travail? Est-ce que c'est cela votre recommandation
précise?
M. Myette: En fait, dans un premier temps, je dois vous dire que
le libellé de l'avant-projet de loi, tel qu'il est, nous cause des
problèmes et on vous le dit. Pourquoi? Parce qu'on dit qu'après
au moins trois séances de négociation,, ce ne sont pas les deux
parties. On dit: Une partie peut requérir les services d'un
médiateur-arbitre. On dit, dans l'autre article, qu'après 30
jours de sa nomination, les parties peuvent demander au médiateur de
statuer sur la question. L'article 34 - et c'est celui-là qui cause le
plus de problèmes - on dit: "S'il estime improbable". Cela veut donc
dire qu'on donne un mandat très fort au médiateur-arbitre. On
dit: Si le médiateur-arbitre estime improbable un règlement, il
statue et c'est réputé être une clause de convention
collective. C'est un pouvoir que nous trouvons très fort, d'autant plus
que l'appel du médiateur-arbitre n'est pas, par les deux parties,
mêlé à la demande de l'une ou l'autre des parties. C'est le
premier argument.
Le deuxième argument, là-dessus, c'est qu'effectivement,
de l'expérience que nous avons eue à vivre à la commission
scolaire des Laurentides à une convention collective, à une
négociation, on s'est retrouvé en 13 jours de séance de
conciliation à changer trois fois de conciliateur parce qu'il ne
connaissait pas les enjeux et il avouait candidement que c'était devenu
trop complexe. À ce moment, on parlait de la répartition des
fonctions et responsabilités. On a changé trois fois de
conciliateur et le dernier conciliateur s'est avoué incapable de
concilier les parties et c'est à l'interne qu'on a réglé
la question.
Maintenant, je dois vous dire également qu'à la commission
scolaire, en 1976, compte tenu de la lenteur des tribunaux d'arbitrage, on
avait convenu, au niveau local, de la nomination d'une espèce de
médiateur sur toute clause d'application de convention collective, un
médiateur nommé par les deux parties. On a fait
l'expérience et je peux vous dire qu'après une sentence - c'est
la seule expérience, d'ailleurs, que nous avons eue - qui avait
été favorable à la commission scolaire, le syndicat local
ne voulait plus de ce médiateur-arbitre.
On regarde cela et j'oserais vous dire, en plus, comme interrogation, je
vous la retournerais: Qu'est-ce que le gouvernement aurait fait si, dans le cas
de la Sûreté du Québec, il avait eu les mêmes
clauses? Pourquoi les remettre au niveau local?
M. Gendron: C'est une bonne question. M. Ryan:
Commentaire.
M. Gendron: Non, je n'ai pas de commentaires à formuler
sur le renversement. Je veux juste savoir, par exemple, si on ajoutait "avec le
consentement des parties" est-ce que cela vous agréerait ou si vous
auriez les mêmes réticences?
M. Myette: Si c'est vraiment avec le consentement des deux
parties et que les médiateurs-arbitres sont des gens qui connaissent la
question scolaire, agréés par les deux parties, autant syndicale
que patronale, déjà c'est plus acceptable.
M. Gendron: D'accord. Là-dessus, je veux juste vous
indiquer que je ne Ies connais pas tous, mais je veux dire, effectivement,
qu'il y en a plusieurs qui ont une très bonne connaissance du milieu de
l'éducation au niveau du Tribunal du travail. C'est sûr que dans
la nomination d'un médiateur-arbitre, à ce niveau, je pense que
le ministère de l'Éducation serait sûrement, en tout cas,
à consulter en termes de suggestions que le ministère du Travail
déléguerait comme médiateur-arbitre et, effectivement,
essayer de viser à ce que des gens aient une bonne connaissance de ce
milieu si on leur permet, toujours tel que décrit aux articles qu'on
vient de citer, un pouvoir, quand même, assez important puisqu'on dit
qu'après les délais et ainsi de suite, cela a la
réputation d'être considéré comme une clause
réglée. Dans ce sens, je
pense que vous avez raison.
Ma dernière question porterait sur tes négociations
locales, mais surtout par rapport au fond puisque c'est une position qui semble
être exprimée par plusieurs, particulièrement dans le
domaine scolaire. J'aimerais que vous nous précisiez si, dans votre
esprit, il y a d'autres éléments de négociation locale que
ceux indiqués dans l'avant-projet de loi qui devraient être
l'objet de négociation locale?
M. Myette: En fait, sans faire la liste... (18 h 15)
M. Gendron: Non, sans faire la liste. Je parle juste de donner
les grandes pistes.
M. Myette: Nous, en fait, je vous résumerai cela en disant
que les grands encadrements sont fixés au palier national et que le
reste est fait strictement au niveau local. À titre d'exemple, qu'au
niveau national on dise qu'il y a tant d'enseignants et que les enseignants
doivent travailler tant d'heures par semaine, on dit: Le niveau local
s'organisera avec le reste, s'organisera pour déterminer quelle sera la
tâche de chaque enseignant, quel sera son horaire de travail; est-ce
qu'il y aura des activités dans sa tâche? Est-ce qu'il y aura
ceci? En d'autres mots, la latitude est complète au niveau local, une
fois que les grands encadrements sont fixés, cela sans faire la liste.
C'est dans ce sens-là que, à titre d'exemple, on vous dit: Le
perfectionnement, on reconnaît que cela a un aspect monétaire au
départ. Mais une fois que l'aspect monétaire est fixé,
l'articulation du perfectionnement, on dit qu'on ne voit pas pourquoi on
réglerait au niveau national pour l'ensemble des commissions scolaires,
à savoir comment devrait se traiter le perfectionnement dans les
milieux.
M. Gendron: D'accord, je vous remercie, monsieur et madame.
Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre.
M. le député d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, il me fait plaisir de saluer les
membres de la commission scolaire des Laurentides, la présidente et le
directeur général, avec qui j'ai eu l'occasion, à quelques
reprises, d'échanger de la correspondance sur des points de vue dont ils
nous avaient saisis de manière très utile.
Avant d'entrer dans d'autres sujets, je voudrais revenir sur celui qui a
fait l'objet des principaux échanges entre le ministre et vous,
l'affaire du médiateur-arbitre. J'aurais peut-être besoin d'une
interprétation de la part du ministre et de ses conseillers. On lit,
à l'article 38 de l'avant-projet de loi: "À défaut
d'entente sur le remplacement, la modification, l'addition ou l'abrogation
d'une stipulation portant sur une matière définie comme
étant l'objet de stipulations locales ou régionales, les
stipulations en vigueur continuent d'avoir effet. " Est-ce que je dois
comprendre que c'est pour toute la durée d'une convention collective
à venir ou jusqu'à l'intervention du médiateur-arbitre?
Est-ce que cela représente une pensée nouvelle de la part du
gouvernement? Parce qu'on nous a déjà soutenu la thèse
contraire, en matière de relations du travail, vous vous souvenez, M. le
ministre.
M. Gendron: Si vous n'aviez pas d'objection, M. Ryan...
M. Ryan: Oui.
M. Gendron:... parce que je veux être certain de
répondre adéquatement aux questions, je les prendrais, vous
pourriez faire votre commentaire et tantôt, au retour, je vais
répondre aux questions.
M. Ryan: Bien oui. Au retour, est-ce qu'il y a un retour ce
soir?
M. Gendron: Non, non, pas au retour, mais je veux dire dès
que vous aurez terminé vos questions...
M. Ryan: Très bien, très bien. M. Gendron:
D'accord?
M. Ryan: Très bien. Je pense que sur cela, ce serait
important d'avoir une réponse précise à ceci. Je vais vous
dire pourquoi.
M. Gendron: C'est ce que je veux vous offrir.
M. Ryan: Parce que si cela doit s'appliquer pour toute la
durée d'une convention à venir, cela veut dire qu'on donne
à l'une des deux parties un droit de veto sur tout changement à
venir dans une convention qui a été établie une fois. Cela
me paraît abusif et présomptueux. D'ailleurs, on avait des clauses
dans notre loi du travail qui parlaient dans ce sens-là, mais qui ont
donné lieu à des interprétations différentes parce
qu'on voyait qu'on était conduit à des conclusions assez absurdes
si on soutenait ces clauses de manière absolument littérale.
J'aimerais avoir une interprétation sur ce point et, à ce
moment-là, je me permettrai d'émettre une opinion. Parce que si
ceci devait aboutir, là il y a une impasse, dans une hypothèse ou
l'autre. Si c'est l'interprétation large, cela veut dire que c'est un
droit de veto qu'on donne à l'une des deux parties sur tout changement
à une convention qui a pu intervenir une fois. Et si ce n'était
pas cela, cela veut dire que c'est
l'arbitrage obligatoire. À ce moment-là, dans un cas comme
dans l'autre, il y a un problème. Est-ce qu'on doit introduire
l'arbitrage obligatoire pour toutes ces clauses qui sont de l'ordre de la
négociation locale ou régionale? Cela veut dire que le droit de
grève, on le coupe par les deux bouts. On le coupe sur le salarial,
défini de manière élargi, comme vous l'avez dit
tantôt, comprenant le salaire, les polices d'assurance, les
journées de maladie, le régime de retraite et peut-être
quelques autres affaires. Si on le coupe sur toutes les choses d'importance
locale ou régionale, il va rester la possibilité de grève
sur le petit groupe de clauses normatives, négociables à
l'échelon national. Cela fait un régime assez boiteux, à
mon point de vue. Je pose la question, en tout cas, cela ne m'apparaît
pas trop satisfaisant du point du vue d'une politique logique dans ce domaine.
j'en viens à un autre sujet, étant donné que le ministre
va nous donner des explications tantôt sur la question que j'ai
posée. Vous parlez, à la page 4 de votre mémoire, de la
question des journées de maladie non monnayables qui étaient
monnayables autrefois, qui ne le sont plus maintenant. Vous dites que vous
souhaitez que ce problème se règle rapidement. On pourrait
toujours dire: Est-ce que c'est dans le champ d'intérêt de la
commission? C'est peut-être douteux, mais comme vous l'avez
soulevé dans votre mémoire, je voudrais vous poser une question
à ce sujet. Pourriez-vous nous dire, dans le cas de votre commission
scolaire, à quel montant vous estimez les coûts additionnels qui
ont découlé pour vous autres de l'application de cette clause des
décrets au cours de la dernière année? Quel réponse
avez-vous reçu du gouvernement aux représentations que vous avez
faites auprès de lui à ce sujet, au cours des derniers mois?
Ceci, M. le Président, je vais me passer d'explications puisque
vous ne m'en demandez pas.
Mme Bérubé: Là encore, je
préfère laisser la parole à M. Myette,
là-dessus.
M. Ryan: Pardon?
Mme Bérubé: J'ai dit: Je laisserai M. Myette vous
répondre sur ce dossier-là.
M. Ryan: Très bien, madame.
M. Myette: De mémoire, le coût des congés de
maladie, du régime d'assurance maladie des enseignants incluant le
coût du salaire de l'enseignant absent et le coût du
suppléant, a totalisé, 1 200 000 $ au cours de la dernière
année, soit 400 000 $ de plus que l'année
précédente et, de par les règles de financement du
ministère de l'Éducation, notre évaluation est à
l'effet qu'il y a un manque à gagner - je vous dis cela de
mémoire - de l'ordre d'environ 280 000 $. Ce qui a créé et
qui crée encore des problèmes majeurs au sein du budget de la
commission scolaire puisqu'on a dû déplacer des montants d'argent
pour l'achat des manuels, des matériels didactiques en vertu des
nouveaux programmes pour le financement de ces fameuses journées qui
sont devenues non monnayables. Les statistiques que l'on a établies, en
fait, si on fait le total des jours, arrivent pile à sept jours par
enseignant, ce qui veut donc dire, et on l'a vérifié par
enseignant que, systématiquement, les enseignants vident les sept jours
de maladie non monnayables.
Maintenant, dans les nouvelles règles, on n'a pas terminé
l'analyse dans le projet. Il y une nouvelle modalité de financement, je
ne peux pas aller plus loin, nous sommes en train d'analyser. Est-ce que cela
sera couvert dans le financement, dans les nouvelles règles? Je ne peux
pas vous le dire.
Mme Bérubé: Si je pouvais compléter, c'est
qu'en termes de coût, c'est pourquoi je ne voulais pas répondre
à cette question, je ne me souvenais pas précisément. Je
savais que c'était de l'ordre de 1 000 000 $. En termes de coût,
c'est important et en termes de qualité de service, c'est aussi majeur.
Au niveau de l'ensemble des écoles de la commission scolaire, ce
problème a été abordé.
M. Ryan: Je suis content que vous ayez souligné ce point
dans votre mémoire, pour la raison suivante, qui se relie à un
autre passage de votre mémoire. C'est que si mes souvenirs sont bons, le
changement dans le régime des journées d'assurance, des
journées de maladie des enseignants a été fait dans les
décrets à la suite de la conciliation de M. Désilets.
Là, on a pris une décision rapidement pour régler un
problème. On n'a pas eu le temps d'en mesurer sérieusement
l'impact sur le fonctionnement des commissions scolaires et en particulier, sur
la qualité des services éducatifs. Là, vous venez nous
dire que cela vous a obligés à contremander les achats de
manuels, d'instruments pédagogiques qui sont nécessaires pour la
mise en application de nouveaux programmes dans certaines disciplines, je pense
que c'est important qu'on comprenne très bien quand vous dites que
même pour les réponses qui doivent être apportées au
plan monétaire, au plan de la rémunération. C'est
important que les commissions scolaires soient dans le coup
véritablement, que cela se fasse dans une collaboration authentique. Je
pense que l'on a un bon exemple qui montre que lorsque cela se fait dans la
précipitation et l'improvisation, cela peut permettre
d'accrocher une signature au niveau national, mais cela risque de
créer des problèmes au niveau provincial. C'est pour cela, dans
ce projet de loi-ci, qu'il faut que les vis soient assez serrées de
manière à éviter que des trous s'ouvrent comme cela dans
les résultats des négociations ou des conversations plus ou moins
privées qui entourent une négociation.
Dans la même ligne, je voudrais vous poser une question. À
propos de l'article 10, vous dites, à la page 6 de votre mémoire:
"Notre réserve se situe principalement à l'article 10. " Ensuite,
vous n'êtes pas aussi clair que je l'aurais souhaité. Vous dites:
Nous, ce qu'on aimerait, c'est que, en ce qui regarde le vécu quotidien
de l'école, cela soit réservé à la
négociation locale ou régionale et tout ce qui a une incidence
monétaire devrait être entouré de la
prépondérance de la partie gouvernementale. Voudriez-vous que ce
soit mis clairement dans la loi ou bien voulez-vous qu'on reste dans le vague
qu'on a actuellement? Je trouve, comme vous, que l'article 10, comme il est
formulé, ne donne pas cette garantie que vous demandez.
M. Myette: Effectivement, et c'est pourquoi nous soulevons cette
réserve. La lecture que nous faisons de l'article 10, c'est que tout est
sous l'autorité déléguée par le gouvernement au
ministre de l'Éducation. À titre d'exemple, si on dit: Au niveau
du financement, au Conseil du trésor et au ministère de
l'Éducation on a tant de millions de dollars ou tant de milliards de
dollars, on autorise - disons - 50 000 enseignants pour le primaire et le
secondaire, dans la province. Une fois que cela est dit, déterminer le
nombre d'heures de présence à l'école, est-ce tout le
temps horaire de l'élève, est-ce une partie du temps horaire de
l'élève? Nous disons: Une fois que le ministère de
l'Éducation et le gouvernement a statué sur le nombre
d'enseignants, cela devrait être la responsabilité des commissions
scolaires. Au même titre, quand on donne l'exemple de la
sécurité d'emploi, en disant que, au niveau de la
sécurité d'emploi, il y aura un financement de tant par le
gouvernement, la façon dont on déterminera quel enseignant ou
enseignante sera déclaré en disponibilité ou en surplus -
en d'autres mots, ce qu'on appelle "la mécanique" - on dit: Cela devrait
être la responsabilité prépondérante des commissions
scolaires. C'est ce qu'on appelle le vécu quotidien. Si on note la
réserve, effectivement, c'est qu'on estimerait important que ce soit
indiqué aussi clairement dans la loi.
M. Ryan: Très bien. La réponse est claire et
satisfaisante pour moi. Dans la même veine, il y a une chose que j'ai
moins bien comprise, c'est ce que vous dites à propos de l'article 18.
Vous étiez ici, cet après-midi, si j'ai bien observé,
lorsque la Fédération des commissions scolaires du Québec
a comparu. Elle a dit que l'article 18, comme il est formulé, ouvre la
porte trop grande à une prépondérance écrasante,
voire totale du président du Conseil du trésor sur la marche des
négociations et elle a demandé en particulier que le paragraphe
deuxième de l'article 18 soit modifié de manière à
empêcher qu'il puisse changer à tout moment les règles du
jeu en déclarant: Telle matière, je regrette infiniment, c'est
jugé gouvernemental et on est obligé de vous donner cela comme
ceci. Avez-vous eu le temps de noter la suggestion que la
Fédération des commissions scolaires catholiques a faite sur ce
point précis? Je peux vous la rappeler au besoin. Elle dit: Cela devrait
être formulé comme ceci: "Le conseil autorise les mandats de
négociation des comités et des sous-comités patronaux dans
des matières ou éléments qu'il a indiqués - qu'il a
indiqués - comme étant d'intérêt gouvernemental. "
On a précisé cela, cet après-midi, dans les
réponses à des questions qui étaient posées par
votre serviteur. On l'a précisé au moment où on
établissait les protocoles, en disant: II faut qu'il l'ait
indiqué; après cela, il ne pourra pas revenir patauger
là-dedans et dire: Ce n'était pas cela qu'on voulait dire et on a
rencontré d'autres éléments de la partie adverse ou de la
partie syndicale, la nuit dernière, et on change tout. Ensuite, elle
dit: "Cet intérêt gouvernemental ne peut justement s'exercer sur
les matières ou éléments de matières
identifiés comme étant de prépondérance des
groupements de commissions scolaires et d'établissements, au sens de
l'article 9. " Je voudrais vous demander, nonobstant le commentaire
plutôt favorable, en général, que vous faites au sujet de
l'article 18, ce que vous pensez de la proposition d'amendement qui a
été mise de l'avant par la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec. (18 h 30)
M. Myette: En fait, par la lecture que nous faisons de
l'avant-projet de loi, nous avons toujours compris que l'intervention du
Conseil du trésor est toujours dans les clauses à
caractère financier. En d'autres mots, là où il est
question de masse monétaire. Dans ce sens, le deux, étant
postérieur aux articles qui précèdent - je ne me rappelle
plus lesquels - on fait lecture que le deux, "les mandats qu'il juge
d'intérêt gouvernemental", c'est toujours relativement à la
masse monétaire.
M. Ryan: Est-ce que je dois comprendre que vous n'auriez pas
d'objection à l'amendement proposé par la
Fédération des commissions scolaires catholiques?
M. Myette: Non.
M. Ryan: Très bien. Je vais vous poser une sous-question.
Est-ce qu'il serait de nature à donner des garanties plus fortes quant
au respect de la prépondérance des commissions scolaires dans les
matières qui sont d'ordre pédagogique?
M. Myette: Si cela l'est, tant mieux. Si vous faites lecture du
mémoire, pour nous, il est important qu'on reconnaisse le rôle des
commissions scolaires dans la négociation tout en reconnaissant - je ne
me rappelle plus à quelle page du mémoire on le dit - au
gouvernement un rôle prépondérant dans ce qui touche la
détermination de la masse monétaire, non pas seulement au niveau
de la rémunération, mais aussi au niveau du nombre de
salariés inclus à l'intérieur d'une convention collective.
Cela doit se faire dans le respect de l'une et l'autre des parties et
même au niveau de la rémunération, quand on dit que le
Conseil du trésor, à un moment donné - je pense que c'est
à l'article 10 ou je ne me rappelle plus - le fait en collaboration avec
les organismes et groupements de commissions scolaires. Nous disons, au
départ, que cela se fait dans le respect mutuel de l'un et de l'autre.
On ne doit pas arriver et parachuter des choses, il faut que cela soit vraiment
une démarche commune et que l'un et l'autre se respectent afin d'avoir
une partie patronale unie.
En tant que commission scolaire, n'étant pas à
Québec constamment,, on a eu dans le passé trop souvent
d'exemples de parties patronales plus ou moins unies, ce qui a fait le jeu de
la partie syndicale qui en a profité pour s'infiltrer à
l'intérieur d'une partie patronale qui n'avait peut-être pas la
cohésion qu'elle aurait dû, avoir.
M. Ryan: Maintenant, une autre question. Je reviens au sujet des
médiateurs-arbitres. Vous n'êtes pas trop favorables à
cela, d'après ce que vous avez dit. Vous êtes favorables, d'autre
part, à la négociation d'un certain nombre de sujets au niveau
local, 21, qui sont déjà contenus dans l'annexe
déposée par le gouvernement il y a quelques jours, plus un sujet
que vous mentionnez dans votre mémoire: le perfectionnement des
maîtres.
Dans le cas d'impasse, qu'est-ce qui arrive? Suivant votre conception
à vous, à supposer que les parties ont commencé à
négocier et qu'elles ne s'entendent pas, qu'est-ce qu'on fait? Comment
cela se règle-t-il? Là, c'est la négociation au sens
véritable du terme que vous demandez, ce n'est pas seulement des
conversations amicales.
M. Myette: Ce qu'on demande effectivement, c'est la
négociation et, en cas d'impassse, nous disons qu'il peut y avoir
présence d'un médiateur-arbitre. On ne rejette pas la
présence d'un médiateur-arbitre, mais on ne veut pas de
décision d'application obligatoire de la décision d'un
arbitre.
M. Ryan: Oui, mais s'il n'y a pas de droit de grève,
qu'est-ce qui arrive? Est-ce que vous êtes favorables au droit de
grève au plan local, vous autres?
M. Myette: Non plus, mais la lecture qu'on fait - aux
interrogations que vous posez, je ne sais pas si on fait une bonne lecture de
l'avant-projet de loi - de l'avant-projet de loi dit que les dispositions
actuellement en vigueur demeurent; qu'il y ait négociation au moment
jugé par les parties sur ces clauses en vigueur; s'il y a entente, elles
sont valables pour deux ans, à moins que les deux parties veuillent en
modifier le contenu; s'il n'y a pas entente, les dispositions en vigueur
s'appliquent.
Le Président (M. Lachance): Merci. M. le ministre de
l'Éducation.
M. Gendron: Je serais en mesure de donner la précision
à l'article 38. Je pense qu'on vient d'y toucher un peu. Moi non plus,
je n'avais pas compris qu'ils étaient en désaccord avec la
suggestion des médiateurs-arbitres dans la perspective où,
effectivement, il y aurait une modification et qu'on l'ajouterait suivant le
consentement des deux parties.
Pour ce qui est de l'article 38 comme tel, non pas
l'interprétation, mais ce que l'on me dit que cela signifie, c'est qu'on
introduit un concept de négociation permanente. Vous aviez raison de
dire que c'est une forme de compensation à l'absence du droit de
grève pour les matières négociées localement, mais
qui garantit non pas un vide, mais qui garantit un statu quo dans le sens qu'il
y a possibilité, pour les parties, de conférer un
caractère de pérennité et une possibilité
d'échange et de discussion en tout temps sur les clauses de
matières locales, de stipulations locales, qu'on appelle, en sachant de
toute façon, cependant, que s'il n'y a pas entente ce sont les anciennes
clauses qui continuent de s'appliquer. Donc, on ne demeure pas avec un vide
nulle part. On pense, effectivement, que c'est une compensation
intéressante comme mécanisme à l'absence du droit de
grève pour les matières négociées localement. C'est
ce que cela signifie.
Le Président (M. Lachance): Oui, est-ce que vous avez
quelque chose à ajouter?
M. Myette: Non, je réalise qu'on avait fait une bonne
lecture des articles de l'avant-projet de loi. En fait, c'est ce qu'on avait
convenu de la lecture. C'est que
c'était la négociation permanente et, au lieu d'avoir,
comme dans le passé, eu à ajouter une clause dans le chapitre IX
ou X qui disait que les clauses actuelles sont reconduites tant et aussi
longtemps qu'il n'y a pas signature d'une nouvelle convention, les conventions,
jusqu'à ce jour, étant à termes, soit de trois ans ou
trois ans et demi, actuellement, on dit: II y a négociation permanente.
Ce qui existe demeure. Les parties peuvent, en tout temps, convenir d'en
modifier le contenu. S'ils conviennent de modifier le contenu, c'est valable
pour deux ans, mais même à cela, ils peuvent reconvenir à
l'intérieur des deux ans d'en modifier le contenu. À
défaut d'entente, les clauses s'appliquent sauf que c'est ce petit bout
où on disait, d'ailleurs... C'était autant problématique,
d'ailleurs, pour la partie syndicale ou la partie patronale parce qu'une
décision d'un médiateur-arbitre exécutoire n'est pas
nécessairement toujours dans un sens ou dans l'autre.
Le Président (M. Lachance): Alors, s'il n'y a pas d'autres
observations, je tiens à remercier M. Myette ainsi que Mme
Bérubé pour leur apport aux travaux de cette commission
parlementaire. Nous vous en sommes très reconnaissants d'avoir pris la
peine, d'abord, de rédiger le mémoire et de venir nous le
présenter. Ceci étant dit, nous terminons, également, les
travaux de la commission parlementaire pour la journée. Demain, nous
reprendrons à 10 heures avec la Fédération des
cégeps. La commission du budget et de l'administration ajourne ses
travaux à demain 10 heures.
(Fin de la séance à 18 h 38)