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Version finale

32nd Legislature, 5th Session
(October 16, 1984 au October 10, 1985)

Friday, April 26, 1985 - Vol. 28 N° 15

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Interpellation : L'insuffisance et l'inefficacité des mesures du gouvernement pour résorber le sous-emploi


Journal des débats

 

(Dix heures sept minutes)

Le Président (M. Lachance): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission du budget siège ce matin avec le mandat suivant: Interpellation du député de Notre-Dame-de-Grâce au ministre des Finances et président du Comité ministériel permanent du développement économique sur le sujet suivant: L'insuffisance et l'inefficacité des mesures du gouvernement pour résorber le sous-emploi.

Je fais un rappel des règles qui régissent l'interpellation, les articles 300, 301 et 302: "300. Le député qui a donné l'avis d'interpellation intervient le premier à la séance de la commission, suivi du ministre interpellé. Chacun a un temps de parole de dix minutes. "301. Les membres de la commission ont ensuite un temps de parole de cinq minutes par intervention. Il y a alternance entre les députés de la majorité et ceux de l'Opposition. Le ministre peut intervenir après chaque intervention d'un député de l'Opposition. "302. Vingt minutes avant la fin de la séance, le président accorde un dernier temps de parole de dix minutes au ministre et un droit de réplique de même durée à l'interpellant. "

Alors, nous allons suspendre pendant quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 8)

(Reprise à 10 h 9)

Le Président (M. Lachance): La parole est au député de Notre-Dame-de-Grâce pour un premier bloc de dix minutes. M. le député.

Exposé du sujet M. Reed Scowen

M. Scowen: M. le Président et M. le ministre, bonjour. Le sujet, ce matin, que nous avons choisi - je pense que tout le monde est d'accord que c'est le droit de l'Opposition, aujourd'hui, de choisir le sujet de l'interpellation - c'est la question de l'emploi. Je le rappelle au ministre parce que j'aimerais qu'il se limite aujourd'hui à nous parler de l'emploi. Dernièrement, quand mon collègue de Vaudreuil-Soulanges a posé des questions au ministre en Chambre sur les assurances, il a répondu avec une déclaration au sujet d'Hydro-Québec ou au sujet des REA et on aimerait ce matin, si possible, lui demander de limiter ses commentaires au sujet que nous avons choisi qui est, quant à nous et quant à lui, le sujet numéro un, prioritaire, pour son gouvernement.

Cela fait maintenant huit ans, surtout quatre ans, que le premier ministre, le ministre des Finances et tous les autres ministres disent: Nous voulons accorder la priorité, dans notre gouvernement, à l'emploi. C'est le plus important sujet pour les deux côtés de la Chambre. Je pense donc qu'il n'y a pas de raison de ne pas accorder une petite période de deux heures à l'étude de cette question.

Deuxièmement, nous proposons, ce matin, de demander au ministre de faire avec nous une espèce de bilan sur la performance de la création d'emplois au Québec depuis une certaine période. Nous avons choisi la période du deuxième mandat du Parti québécois, donc, d'avril 1981 à avril 1985. Pourquoi? Parce qu'il arrive que nous sommes aujourd'hui au quatrième anniversaire, à la fin d'un mandat normal pour le gouvernement. Il nous semble donc approprié de regarder la création d'emplois pendant ce mandat. Pendant ces quatre dernières années, on a beaucoup parlé des moyens. On a parlé des investissements. Le gouvernement s'est félicité pour des bons jeux, des bonnes passes, des mises en échec, des changements de ligne qu'il a effectués pour essayer de réaliser de l'emploi.

Aujourd'hui, on ne va pas parler surtout des moyens, on va parler du score. On va parler des résultats. Après tous ces efforts déployés pendant si longtemps, qu'est-ce qui est arrivé en fin de compte? On ne parlera surtout pas de l'avenir parce que vous en parlerez quand vous commencerez votre campagne électorale.

M. Duhaime: L'avenir ne vous intéresse pas, n'est-ce pas?

M. Scowen: Excusez-moi. On va parler de l'avenir quand vous serez prêts a déclencher une élection, quand vous pourrez proposer quelque chose à la population pour

un troisième mandat, et on proposera quelque chose nous aussi. Aujourd'hui, c'est le moment, quant à nous - je le répète, c'est à nous de choisir le sujet - de parler du passé, de regarder le bilan de quatre ans de gouvernement péquiste dans le domaine qui est sa priorité: la création d'emplois.

Je pense qu'on va insister sur quatre ans, parce qu'il y a ceux qui critiquent sur des périodes plus courtes. Le ministre délégué à l'Emploi et à la Concertation, il y a une semaine, a dit: M. Scowen a faussé les chiffres quand il a parlé de la création d'emplois ou de la perte d'emplois pendant un seul mois. Je conviens avec lui que c'est un peu court. Le gouvernement se vante d'avoir réalisé une récupération de quelque 80 000 emplois depuis un an; c'est aussi court, parce qu'il sort d'une récession pendant laquelle il en a perdu beaucoup. Alors, on va parler de quatre ans.

Je vais aussi essayer, M. le Président, de minimiser autant que possible les chiffres. Il faut accepter que, quand vous parlez d'emploi, vous parlez un peu de chiffres - il faut en utiliser - mais on espère qu'on ne va pas se perdre dans une bataille de chiffres.

Je propose de vous en présenter trois ou quatre, mais il y en a un seul qui est pour nous important et sur lequel on veut attirer votre attention ce matin. Je vais vous le montrer tout de suite à l'aide de deux tableaux: un tableau qui est un peu explicatif et un autre qui vous donne le résumé.

Le Président (M. Lachance): En vertu de quel...

M. Duhaime: C'est parce que le député veut se référer à des documents; est-ce que ce sont des documents pour être déposés? Si c'est pour être déposé, cela prend un consentement.

M. Scowen: Je n'ai pas proposé de déposer quoi que ce soit. Je vais vous montrer un tableau, un graphique.

M. Duhaime: C'est la même chose. (10 h 15)

M. Scowen: Je pense que depuis des années plusieurs personnes et certains de vos collègues - je peux mentionner M. Bérubé -ont fait la même chose. Regardez-moi attentivement, M. le ministre, vous allez peut-être apprendre quelque chose.

Voici un tableau qui montre le nombre d'emplois au Québec. En avril 1981, le soir de votre élection pour un deuxième mandat, il y avait au Québec 2 748 000 personnes au travail. Quatre ans après, au mois d'avril 1985, il y en avait exactement le même nombre. Effectivement, il y en avait 1000 de moins, soit 2 747 000 personnes au travail. Autrement dit, pendant cette période de quatre ans, il y a eu une création d'emplois au Québec précisément de zéro. Pour tout ce que vous avez fait pendant cette période de quatre ans de travail, le score c'est zéro. Vous allez me dire, peut-être, que oui, c'est vrai, mais qu'il y avait une récession, une crise économique. Oui, c'est vrai. La crise a duré un an durant ces quatre ans, c'est-à-dire douze mois, mais, pendant le reste de ces quatre ans, on n'était pas en crise, on était soit en prospérité, soit en reprise. Juste pour que cela soit clair, dans le reste du Canada, dans la même période de quatre ans, on a vu la création de 169 000 emplois. Aux États-Unis, on a vu la création de 6 000 000 d'emplois.

Je vous montre maintenant le deuxième et dernier tableau. J'ai l'intention de le laisser ici devant vous pendant les deux heures, parce que je veux vous rappeler continuellement la question. Pour un mandat de quatre ans, avril 1981 à avril 1985, création d'emplois: zéro. J'entends un des députés du gouvernement dire que les zéros, c'est des "Dunkin' Donuts". Je veux revenir sur cette question. À chaque année...

M. Duhaime: M. le Président, je m'excuse. Vous pouvez reprendre votre temps, même de dix minutes, mais cela m'affole de voir deux zéros en face de moi comme cela. Est-ce qu'on pourrait en enlever un au moins selon nos règlements?

M. Scowen: M. le Président, je sais que cela fait beaucoup de mal au ministre de se faire rappeler pendant deux heures que son gouvernement n'a pas créé un seul emploi ici au Québec pendant quatre ans mais, malheureusement, il sera obligé de regarder le tableau pendant deux heures parce que cela est la seule façon de le porter à l'attention de ce gouvernement. Vous allez le regarder pendant deux heures, à moins que le président ne me dise le contraire.

M. Biais: M. le Président, le député va briser les pupitres de l'Assemblée nationale, il faudrait lui dire de modérer ses transports, s'il vous plaît!

M. Duhaime: Cela n'a pas de bon sens!

Le Président (M. Lachance): Allez-y, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, continuez.

M. Scowen: Merci.

Donc, quelqu'un a dit que les zéros, c'est des "Dunkin' Donuts". Cela est la réponse d'un membre du gouvernement. Chaque année, pendant ces quatre ans, sont sorties de nos écoles secondaires, de nos cégeps et de nos universités a peu près 150 personnes qui cherchaient un emploi, soit dans le secteur public, soit dans le secteur

privé, soit dans les manufactures, soit dans les services et elles n'en ont pas trouvé. Ce n'est pas des "Dunkin' Donuts", messieurs. C'est sérieux, ces zéros. C'est la première fois, à ma connaissance, dans l'histoire du Québec qu'un gouvernement a réussi à passer à travers un mandat complet sans ajouter une seule personne à la liste des personnes employées dans la province. C'est un record.

M. Blais: Démagogue!

M. Scowen: Alors, démagogue. Voilà! Cela fait mal, mais vous allez l'écouter, et vous allez l'écouter longtemps, parce qu'on veut des explications. La population active pendant cette période a augmenté de 91 000 personnes; le nombre de chômeurs a augmenté de 93 000 personnes. C'est à peu près égal, comme vous pouvez l'imaginer. Pendant cette période, M. le ministre -j'arrive maintenant à la question principale -je ne peux pas dire que vous étiez inactif. Il y avait des programmes à gauche et à droite, la création d'emplois a été annoncée à maintes reprises. Vous avez annoncé la création de PECEC, 30 000 nouveaux emplois. Il y a eu PRIME, le bon d'emploi, Chantier-jeunesse, les programmes de partage de l'emploi, la retraite anticipée, la politique d'achat. Vous avez fait de grands énoncés sur la politique du virage technologique, le plan de relance, l'énoncé de Compton, l'énoncé du Mont-Sainte-Anne. Vous avez donné des subventions à gauche et à droite. Il y a eu le plan Biron, la SOI, Bell Helicopter, Pechiney. Vous avez créé de nouveaux ministres: au Tourisme, au Commerce international, à la Science et à la Technologie, le ministre délégué à l'Emploi et à la Concertation. Vous avez acheté et investi dans les sociétés d'État, Quebecair, la SNA, SOQUIA. Vous avez tenu je ne sais combien de conférences socio-économiques, des sommets, des tables de concertation. Vous avez développé des slogans à gauche et à droite.

On peut dire, sans risque de se contredire, que, pendant cette période, l'activité économique de la part de ce gouvernement a été à un niveau très élevé. Tout le monde a travaillé. L'activité des fonctionnaires et des ministres pour essayer de régler le problème du chômage était réelle, j'en conviens. Je conviens avec vous que vous avez travaillé, mais le problème, c'est que vous avez travaillé et que vous avez perdu, c'est un échec. Votre part des emplois dans le gouvernement du Canada, dans l'ensemble du Canada, n'a pas diminué...

Le Président (M. Lachance): En terminant, s'il vous plaît.

M. Scowen: Je termine avec une seule phrase. Pendant cette période, votre part des emplois dans l'ensemble du Canada n'a pas diminué, c'est rendu à zéro. On pose deux questions au ministre pour commencer. J'espère qu'il ne conteste pas les chiffres de Statistique Canada, parce que, s'il les conteste, on est prêt à aller jusqu'au bout là-dedans. Devant vous, sur ces tableaux que vous allez regarder d'ici midi, vous avez la vérité. Commencez donc à nous expliquer ce qui s'est passé.

Le Président (M. Lachance}: M. le ministre des Finances, vous avez la parole.

Réponse du ministre M. Yves Duhaime

M. Duhaime: M. le Président, je dois vous dire, au départ, que je ne reconnais pas du tout mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, que j'ai toujours considéré comme un homme qui faisait de la politique sérieusement. Mais, ce matin, je vous regarde. Il y a un zéro à ma droite et il y a un zéro à ma gauche, et cela me fait penser à l'ancien sigle des doubles beignets du temps d'Unité-Québec. Je pense que vous devriez garder votre carton à côté de vous continuellement; il vous va à merveille.

D'autant plus que, à la réflexion, je gagerais davantage sur votre intelligence que sur votre effervescence politique pour relire ce que vous venez de nous dire tantôt. Vous allez vous rendre compte que cela n'a aucun sens. Ce que vous venez de développer est le plus parfait sophisme, pour la raison suivante: Quand on compare des nombres d'emplois, il faut tenir compte de la population. Vous n'en avez pas parlé. C'est le nombre d'emplois pour 1000 de population qui est important et vous venez essayer de faire croire à la population du Québec, aujourd'hui... C'est cela qui est votre propos, le Parti libéral du Québec. Vous dites: On se base sur les chiffres de Statistique Canada et il y a eu zéro de création d'emplois.

J'ai de petites nouvelles pour vous. Statistique Canada, pour l'année 1984, dit: 80 000 emplois créés; 80 000. C'est un chiffre peut-être un peu magique pour vous, parce que cela a inspiré les travaux de votre dernière... Je pense que vous appelez cela, vous autres, un congrès ou un colloque national, quand vous avez fabriqué votre programme politique; je vais vous en parler tantôt un petit peu.

Vous avez donc choisi de proposer aux Québécois la création de 80 000 emplois. C'est exact, c'est dans votre discours, c'est dans vos documents. Au lieu de les promettre, nous, de ce côté-ci, on les a réalisés. C'est cela qui est la différence. Quand vous faites des chinoiseries comme cela, avec le nombre d'emplois, sans tenir compte de la population, c'est-à-dire du

nombre de personnes qui, chaque mois, arrivent sur le marché du travail, ce qui est important de considérer, c'est à quel rythme le Québec a récupéré les emplois perdus depuis la crise de 1981. Je ne répondrai pas aujourd'hui au député de Vaudreuil-Soutanges. Hier, j'ai écouté son argumentation très attentivement et je vais lui répondre. Il ne perd rien pour attendre.

Pour les niveaux d'investissements sur une base per capita, vous avez eu l'heureuse idée d'arrêter vos chiffres à 1982, n'est-ce pas? Oui. J'ai relu la transcription avant d'aller voir le match de hockey - j'ai eu le temps de faire cela - mes notes également, et ce que vous faites ce matin, honnêtement je le regrette, j'appelle cela de la désinformation. J'espère que nos amis de la presse ne s'y laisseront pas prendre, qu'on va aller plus loin que le petit sophisme que vous venez de développer et que vous allez faire les comparaisons - j'ai hôte de vous entendre tantôt - avec le nombre d'emplois par 1000 de population. Vous allez être obligé de conclure que, durant les deux dernières années - c'est ce que j'ai dit avant-hier, mardi, dans mon discours sur le budget - et c'est prouvé aussi, pas seulement affirmé, prouvé, que depuis deux ans, plus du tiers -j'ai mentionné le tiers dans mon discours -pour être plus sûr, mais le chiffre qu'on m'a fourni est 38 % - de tous les emplois créés au Canada ont été créés ici au Québec. II y en a 80 000; l'année précédente, c'était 53 000 ou 59 000, en 1983, et vous autres, vous allez vous promener dans tout le Québec, sérieusement, avec un économiste comme chef... Vous n'en avez pas beaucoup parlé hier de votre chef, ni vous, M. le député de Vaudreuil-Soulanges, ni vous, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je vous ai entendu, soyez sans inquiétude, je peux regarder deux écrans de télévision en même temps.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Vous non plus...

M. Duhaime: M. le Président, le Parti libéral s'est beaucoup amélioré. L'un des grands génies de ce parti, le député de Laporte, M. Bourbeau, parlait dans le Devoir du 5 décembre 1984 de créer 500 000 emplois en 20 ans.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II n'a jamais dit cela.

M. Duhaime: Voulez-vous diviser cela?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est écrit que...

M. Duhaime: Cela fait 25 000 emplois par année. Soit dit en passant aussi - tiens, un petit commercial - "M. Bourbeau n'a pas été très explicite pour préciser - en parlant des dépenses - dans quels genres de dépenses un éventuel gouvernement libéral devrait sabrer. Il en a cité quand même quelques-uns. Nos professeurs sont mieux payés qu'en Ontario - c'est le député de Laporte qui dit cela - nos policiers aussi... " etc. Franchement! Soyez donc sérieux!

M. Bourassa a parlé à un moment donné de créer 100 000 emplois. Savez-vous qu'on les a cherchés et qu'on les cherche encore, ces emplois-là? Mais on ne les cherchait pas à la bonne place, on pensait qu'ils étaient dans le secteur privé. Les 100 000 emplois ont été créés dans l'appareil administratif. Êtes-vous capable de confirmer cela ou de le nier? Ce sont des faits. Vous avez dit tantôt dans vos remarques: On fait un débat ce matin, mais je ne voudrais pas, M. le ministre, que vous nous parliez de l'avenir. Je vous comprends, vous autres, de ne pas vouloir parler de l'avenir. Vous n'avez rien à dire là-dessus. Soit dit en passant, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, ce n'est pas vous qui allez choisir les propos que je vais tenir à partir de cette banquette. Je vais vous parler de l'avenir et je vais vous en parler tout de suite.

Je m'attendais hier qu'en réplique au discours sur le budget, le député de Vaudreuil-Soulanges nous explique comment le Parti libéral allait concrétiser ce projet de 25 000 000 000 $ dont parle son chef. J'aurais pensé que vous aussi... C'est censé déboucher sur de l'emploi. Pourquoi n'en parlez-vous pas ni l'un ni l'autre? J'aimerais vous entendre Là-dessus. C'est parce que vous savez très bien... L'an passé, j'ai dit que c'était fou raide. Le premier ministre a dit cette année: C'est fou braque. Mais, attention! On va s'expliquer là-dessus. Ce que M. Bourassa est en train de faire aux États-Unis est très dangereux pour le Québec et très dangereux pour Hydro-Québec également. Il est en train de se placer sur un marché de vendeurs. Les Américains, vous les connaissez comme moi je les connais.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est formidable se placer sur un marché de vendeursl

M. Duhaime: Le jour où les Américains vont accepter de financer et de payer d'avance un investissement de 25 000 000 000 $, vous allez me faire croire que ce n'est pas eux qui vont choisir à quel endroit cela va se faire, peu importe l'environnement et ses impacts, que ce n'est pas eux qui vont dicter les conditions du financement, les prix d'achat, la durée des baux, etc. On dirait que vous êtes des enfants d'école au niveau... je ne sais pas, moi, vraiment primaire. C'est incroyable! II y en a un qui a compris cela tout de suite, le gouverneur du Massachusetts, un des grands

États de la Nouvelle-Angleterre, l'honorable gouverneur Dukakis: "Not interested". Vous direz à M. Bourassa qu'il aille en parler aussi au gouverneur Sunono du New Hampshire, pour le "fun". Vous lui direz aussi qu'il aille en parler au gouverneur O'Neil du Connecticut, juste pour le "fun". M. Bourassa, ce qu'il est en train de faire, c'est de se mêler des problèmes énergétiques intérieurs des Américains. Cela fait un peu "faiseux" d'aller aux États-Unis rencontrer quatre ou cinq sénateurs - il y en a seulement 500, là, et les membres du Congrès - mais ce qui me frappe, c'est la ligue du vieux poêle: Manger une toast avec Rockefeller, l'ancien Secrétaire d'État à l'Énergie, l'ancien premier ministre de l'Ontario. Soyez donc sérieux! Ne prenez pas le monde au Québec pour des valises, d'autant plus que vous parlez d'un projet de 12 000 mégawatts et que vous parlez de NBR. M. Bourassa est en retard. Le projet de NBR, savez-vous à quel moment M. Bourassa l'a annoncé? Le jour de la Saint-Robert, en avril 1971. Il s'était trompé de quelques centaines de kilomètres en annonçant ce projet. Je n'en reviens pas, franchement! (10 h 30)

J'aime pas mal mieux considérer les choses d'une façon plus sérieuse. Ma position est de dire aux Américains: Vous voulez de l'énergie? Très bien. On va vous en vendre. On va vous la livrer à la frontière. Combien de milliards de kilowattheures voulez-vous? Vous voulez qu'on vous aide à financer au cas où vous manqueriez d'argent? C'est un peu curieux de dire cela aux Américains, mais c'est vrai dans ce secteur. Vous voulez qu'on finance la ligne de transmission de 2000 mégawatts vers le sud? Bien sûr! On va la payer, à part cela. On va l'ajouter sur le prix au kilowattheure, mais on va livrer la marchandise à la frontière, au conditions de prix d'exportation que nous déciderons afin de ne pas laisser partir vers le sud un des solides avantages concurrentiels que le Québec peut avoir. C'est là qu'est notre désaccord. Je félicite le député de Vaudreuil-Soulanges qui s'est tenu debout devant son propre parti. Le grand malheur du Parti libéral, à l'heure actuelle, est de s'être trompé de chef, si vous voulez avoir mon avis. Il y en avait de bons choix, il y en avait un deuxième, il y avait un troisième.

Et je sens votre embarras. Même si vous paraissez très amusé ce matin, je vous sens très embarrassé et je vous mets au défi, d'ici la prochaine demi-heure, de défendre ce projet ici même, à l'Assemblée nationale. C'est le temps, jetez-vous à l'eau.

Argumentation

Le Président (M. Lachance): Le temps de parole des différents intervenants sera par blocs de cinq minutes jusqu'à 11 h 50, alors qu'on aura deux derniers blocs de dix minutes.

M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, cinq minutes.

M. Reed Scowen

M. Scowen: Ce dont la population avait peur est arrivé. On a proposé un débat sur l'emploi et le ministre a décidé de parler de la Baie James. M. le ministre, nous vous proposons d'organiser un débat sur la Baie James et nous serons là pour vous écouter.

Je reviens et je vais continuer de revenir à la question de l'emploi. Le ministre dans sa réplique se trompe royalement en disant que le critère que l'on doit utiliser, c'est par 1000 de population. Je peux lui dire tout de suite que la croissance de l'emploi par 1000 de population au Québec, depuis 1981, est de zéro. Qu'on le calcule par la population totale, par 1000 de population ou par 100 de population, c'est zéro. Il n'y a pas eu d'augmentation de l'emploi au Québec. Donc, que vous le divisiez par 1000 ou 2000, cela revient au même.

Ce que le ministre a dit - il faut que je l'explique - c'est que depuis deux ans, il y a une augmentation des emplois au Québec. Il a raison. Pourquoi? Parce que pendant les deux premières années de ce mandat de quatre ans il y avait eu une baisse importante. C'était un peu comme cela...

Une voix: C'était la crise.

M. Scowen: Oui, c'était la crise. II y a eu la chute et la reprise. C'est cela. C'est arrivé au Québec, c'est arrivé au Canada, c'est arrivé aux États-Unis. Le point que nous soulevons ici ce matin, pour le bénéfice du ministre et pour le bénéfice de tout le monde, est que la reprise ici, au Québec, n'est pas terminée. On n'est pas encore rendu où on était avant la crise tandis que dans le reste du Canada, dans le reste de l'Amérique du Nord, ils ont terminé leur crise et leur reprise il y a fort longtemps. Au Canada, dans les autres provinces, on a vu la réalisation d'au moins 170 000 emplois nouveaux, au-delà de ce qui existait il y a quatre ans.

Le problème, ici, est que nous n'avons créé aucun nouvel emploi en quatre ans. On en a perdu, on en a repris, mais on est retourné, après quatre ans, au point de départ. Donc, M. le ministre, la croissance de l'emploi, la création d'emplois par 1000 de population ou, si vous préférez, par 1000 de population en âge de travailler, parce que c'est essentiellement là le truc qui a été inventé par votre collègue, le ministre de l'Enseignement supérieur, c'est zéro. Vous m'entendez? L'augmentation de la création

d'emplois par 1000 de population, en utilisant votre affaire, pendant ces quatre ans, c'est zéro. Il n'y en a pas eu.

J'aurais aimé, plutôt que de parler de M. Robert Bourassa et de la Baie James, qui sont des sujets fort intéressants et sur lesquels on doit certainement avoir un débat, et ceci dans un proche avenir, que vous acceptiez en ce moment de parler de quelque chose que la population du Québec considère comme beaucoup plus importants la création d'emplois au Québec depuis ces quatre ans. Je ne sais pas combien de fois nous avons entendu des ministres annoncer en conférence de presse un programme qui créerait 30 000 emplois, 10 000 emplois, 7000 emplois avec chaque investissement. Si on additionne les chiffres de chacun des communiqués de presse que vous avez émis depuis quatre ans, on serait porté à croire que vous avez créé 1 000 000 d'emplois au Québec, mais la vérité, c'est zéro. Donnez-nous quelques explications.

Le ministre est aussi au courant que moi et mes collègues qu'il existe une règle ici au Québec qui est de ne pas mentionner, parmi le nombre des personnes sans emploi, les 125 000 personnes au moins qui se sont complètement écartées du marché du travail parce qu'elles sont découragées. Elles ne veulent même pas se présenter sur le marché du travail. Nous avons perdu de la population au profit des autres provinces; nous avons perdu des emplois au profit des autres provinces; nous avons perdu des personnes qui veulent travailler, qui en sont réduites à l'aide sociale et sont en proie à une morosité, un découragement dont on a jamais vu l'égal ici au Québec.

J'aimerais que le ministre profite des prochaines cinq minutes pour faire un peu de réflexion sur les raisons qui sont au fond de ce problème. Qu'est-ce qui a mal fonctionné dans tous les projets développés pendant ces quatre ans? S'il veut parler de l'avenir, quels sont les correctifs qu'on veut apporter cette année? Je ne parle pas de l'année prochaine, je parle de cette année, parce que je pense qu'il peut convenir avec moi que la situation est excessivement grave.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député. En réplique, M. le ministre.

M. Yves Duhaime

M. Duhaime: M. le Président, je serais prêt à laisser mes cinq prochaines minutes au député de Notre-Dame-de-Grâce pour qu'il nous parle du grand projet de création d'emplois de 25 000 000 000 $, si les Américains le veulent. Je suis prêt à donner mon consentement, je suis prêt à lui donner mes cinq minutes à la condition qu'il nous en parle.

Le Président (M. Lachance): Vous avez la liberté de le faire.

M. Scowen: Est-ce possible d'imaginer que le ministre n'a aucune réponse à donner?

M. Duhaime: D'accord, je prends mes cinq minutes, M. le Président.

M. Scowen: Cela me fait plaisir.

M. Duhaime: Je dois donc conclure que le député de Notre-Dame-de-Grâce est en désaccord avec son chef sur ce projet, de même que le député de Vaudreuil-Soulanges.

Je voudrais un peu plus sérieusement en venir au discours sur le budget avec les crédits de 1985-1986. Tantôt, je vous ai parlé de 1983 et de 1984. Le total de la création d'emplois au Québec pour ces deux années équivaut au tiers, est-ce que c'est français, ça?... "One third" de tous les emplois créés au Canada l'ont été au Québec.

M. Scowen: Depuis 1981?

M. Duhaime: Est-ce que vous allez nier ça? Bon! Vous parlez de 1981-1982. Étiez-vous sur la planète Mars ou sur la planète Jupiter en 1981-1982? Il y a eu des chutes dans la croissance de la production, pas seulement au Québec, mais au Canada, aux États-Unis, dans tous les pays membres de l'OCDE. C'était une crise économique. Vous ne viendrez pas nous charrier avec ça ce matin. Êtes-vous inconscient ou si vous êtes en fusée vers une direction inconnue aller-retour?

M. Scowen: Je sais qu'il y a deux crises.

M. Duhaime: M. le Président, je n'ai pas interrompu le député tantôt. Mon Dieu! le vendredi matin, vous n'êtes pas de bonne humeur. Pour moi, vous avez perdu votre match de hockey, je ne sais pas. Non? Ce que je veux dire, M. le Président... Je vais donner le total. Combien d'argent y a-t-il cette année dans les crédits déposés par notre gouvernement pour la création d'emplois? 907 893 400 $, et je vais vous donner le détail. Dans le secteur de la forêt, poursuite du programme de modernisation, 21 500 000 $; réorganisation du sciage en Gaspésie, des investissements totaux de 32 000 000 $, dont 11 500 000 $ l'an dernier et 600 000 $ l'année qui vient; expansion de l'industrie du bois, 3 000 000 $; agriculture, plan triennal, industrie bovine, 5 000 000 $; éleveurs de vison, 600 000 $; Office du crédit agricole, soutien à l'économie agricole, 116 500 000 $; crédits pour l'industrie et le commerce, l'ensemble des crédits pour des

programmes de soutien à l'emploi, 34 852 700 $; la SDI, 68 259 000 $; commerce extérieur 2 200 000 $; science et technologie, 2 000 000 $; Société du Palais des congrès, celui-là, on l'enlève, c'est de l'immobilisation; aide à la production de films, 10 000 000 $; aide à la recherche dans les communications, projets au 24 octobre 1984, 2 000 000 $; politique de ski alpin, 4 000 000 $; gare intermodale à Québec, 3 750 000 $, pour un total de 386 593 400 $ en 1985-1986 au soutien de l'emploi et de l'économie. Le suivi du Mont-Sainte-Anne, notre programme de relance du Mont-Sainte-Anne, cette année encore, on va le continuer, 100 100 000 $. Le suivi du plan de relance de Compton, dans les crédits de cette année, 421 200 000 $. Plus le chiffre de 386 593 400 $ que je vous ai donné tantôt, cela fait 907 893 400 $.

Tout à l'heure, vous avez bien dit, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, que vous ne vouliez pas parler de l'avenir. Vous voulez rester au passé. Je vous comprends, avec le chef que vous avez là. Il est au passé composé, votre chef. Vous le savez, cela. Vous ne faites pas de grands discours, ici à l'Assemblée nationale. Vous, la meilleure chose qui pourrait vous arriver, ce serait de lui laisser votre siège. Ce serait moins dangereux dans Notre-Dame-de-Grâce que dans Bertrand aux élections partielles.

Ce que je veux ajouter, c'est que dans ce budget qui se veut résolument tourné vers la création d'emplois... Je vais vous citer un petit texte et vous allez voir... Je ne sais pas si j'ai assez de temps pour vous parler de cela.

Le Président (M. Lachance): II vous reste 30 secondes, M. le ministre.

M. Duhaime: II me reste 30 secondes. Il y a un journaliste de la Presse qui a parlé dans un éditorial de la révolution de la PME. Si je peux retrouver l'article... Le voilà! La révolution de la PME. Nous avons modifié le régime d'épargne-actions. Il y aura bientôt des SPEQ, des sociétés de placement en entreprises québécoises. Il va y avoir la possibilité d'avoir des fonds mutuels. Il y aura la possibilité pour ceux qui oeuvrent dans le secteur coopératif de participer à un régime d'investissement coopératif et il y aura une formule d'intéressement des travailleurs dans leurs propres entreprises. C'est absolument formidable! Cela va créer des dizaines de milliers d'emplois, je le souhaite, mais je ne peux pas comptabiliser ces chiffres pour l'année 1985-1986, car je ne sais pas exactement quel va en être l'impact. Mais il y a des centaines de millions de dollars qui vont être investis là-dedans. J'aimerais avoir vos commentaires sur ce qu'on appellerait un petit kit économique que j'ai mis dans le discours sur le budget, parce que ni l'un ni l'autre de vous deux n'en a parlé hier.

M. Scowen: La saison prochaine.

Le Président (M. Lachance): Bon. À ce moment-ci, s'il y a un député ministériel qui veut intervenir, c'est le moment de le faire, c'est possible.

M. Blais: Avec plaisir.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Terrebonne, vous avez la parole pour cinq minutes.

M. Yves Blais

M. Blais: Merci, M. le Président. Je regarde les deux députés de l'Opposition qui sont devant moi. Avec les propos qu'ils tiennent depuis quatre ans - cela fait quatre ans que je suis en Chambre - je me demande comment il se fait que ces gens-là puissent encore résider au Québec. Depuis quatre ans, toutes leurs interventions sont des interventions de destruction, des interventions d'éteignoir pour dire au monde que le Québec est une espèce de gouffre où la qualité de la vie, la qualité des investissements est intolérable. Mais, ciel, qu'est-ce que vous faites ici? Déménagez, déménagezl On parle d'une création d'emplois, total, zéro. Encore dans le même esprit de destruction, le même esprit d'éteignoir. On est chanceux que ce ne soit pas les seuls libéraux encore élus dans une Chambre au Canada qui puissent avoir le droit de parole comme cela et que Trudeau soit parti, parce qu'il y avait deux groupes comme cela jusqu'à tout dernièrement. C'est vrai qu'on vient à peine de rejoindre le nombre d'emplois qu'il y avait il y a quatre ans. C'est un fait. Personne ne nie cela. Mais il faut tout de même dire qu'on se relève d'une des pires crises que le monde industrialisé ait connues. Et ce n'est pas une chanson de répéter qu'on sort d'une crise. D'ailleurs, votre discours négatif, destructif, éteignoir, vous le tenez à cause de cette crise. Le député de Notre-Dame-de-Grâce a peine à tenir sur son siège à force de vouloir être encore plus négatif envers ce qui se passe au Québec pour pouvoir dire: Ciel, cela va aller encore plus mal l'année prochaine! On dirait que c'est son ardent désir. Est-il un libéral d'abord, ou un Québécois d'abord? Quand on est un élu du peuple québécois, c'est l'ensemble de la population québécoise qu'on doit défendre et non pas s'accrocher à une couleur politique qui donne comme résultat des discours négatifs insoutenables intellectuellement et indéfendables industriellement et commercialement parlant. C'est incroyable de vous entendre parler. Si la négation n'était pas

née, vous en seriez les auteurs. (10 h 45)

Vous êtes des éteignoirs, de très grands éteignoirs. Vos complices ont été au pouvoir jusqu'à tout dernièrement à Ottawa, vos complices qui ne voulaient participer à aucun plan pour aider le Québec. Or, ces plans, dans les autres provinces, ils les faisaient. On est en plein programme d'épuration des eaux actuellement au Québec. Le zéro, c'est la participation d'Ottawa à notre programme d'épuration. Ils ont accordé zéro au Québec, pendant qu'ils accordaient 16 2/3 % des investissements à l'Ontario. Cela crée des emplois, quand le fédéral donne les 16 2/3 % d'un projet de 6 000 000 000 $.

C'est 6 000 000 000 $, notre projet d'épuration qui, lui, crée des emplois. Mais vu qu'on est obligé d'investir nous-mêmes, qu'on n'a pas d'aide d'Ottawa, de vos complices, de vos participants à ce que votre éteignoir soit plus lourd sur le bout du cierge de l'expansion économique, cela ça aide.

Une autre chose aussi, la péréquation, où nous sommes les seules victimes du système. Cela créerait des emplois si on avait eu notre montant. Si des automobiles se construisaient au Québec plutôt que d'assister à une concentration en Ontario, sachant pertinemment que le député de Vaudreuil-Soulanges sait que nous avons au-delà de 42 % de nos emplois qui sont créés par l'exportation... Enlevez les automobiles de l'Ontario, donnez-leur les 8 % que l'on a, passez-nous les 92 % qu'ils ont, eh! ciel! ciell là, on passerait pour des "créatifs".

On est beaucoup plus créatif que les autres provinces et on fournit un plus grand effort pour soutenir l'emploi, parce qu'il y a un nombre incalculable de petites compagnies qui, malgré que vous soyez des éteignoirs et des négatifs, progressent. Avec tous nos plans, au moins on a obtenu la stabilisation des emplois au Québec. C'est une motion de felicitation que devrait être votre motion, pour avoir été capables, malgré une crise comme cela, malgré le négativisme d'Ottawa et malgré le négativisme du Parti libéral qui est en face de nous, d'avoir une si belle performance du côté de la création d'emplois. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Oui. Maintenant, la parole est au député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Daniel Johnson

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je vous remercie, M. le Président. Manifestement, il y a un gros problème de vocabulaire ce matin et un gros problème pour permettre à tous les députés des deux côtés de la Chambre de parler de la même chose.

Lorsqu'on fait état des résultats nets d'une période de quatre ans en création d'emplois au Québec, force est de constater avec des chiffres, qu'il s'agisse de ceux du Bureau de la statistique du Québec ou de Statistique Canada, qu'il n'y a pas un Québécois de plus à ce moment-ci qui a un emploi, comparativement au nombre de Québécois qui en avaient un il y a quatre ans. Parallèlement à cela, on est obligé de constater en même temps qu'il y a 170 000 Canadiens dans leur ensemble qui ont un emploi et qui n'en avaient pas il y a quatre ans.

C'est cette comparaison qui permet de juger de la faculté des politiques du gouvernement du Québec actuellement de régler le problème de l'emploi. Ce qu'on dit, c'est que le bilan n'est pas attrayant, ne démontre pas que le gouvernement a pris les bons moyens, comparativement à ce qui s'est fait ailleurs, à cause d'une crise budgétaire qu'il a lui-même créée, en partie à cause des ponctions fiscales inopportunes qu'il a faites dans le marché et qui ont empêché une recrudescence de l'activité économique basée sur la demande que les consommateurs auraient pu faire. Dans la région de Québec, la coupure dans la rémunération des employés du secteur public a retiré du marché une demande pour des produits, des biens, des services. Cette coupure s'est plutôt appliquée à réduire un déficit qui commençait à se gonfler de façon inconsidérée.

De la même façon, le vocabulaire doit donc regarder la différence entre créer des emplois, c'est-à-dire s'assurer qu'il y a plus de gens aujourd'hui qui travaillent qu'il n'y en avait il y a quatre ans, et récupérer de l'emploi. On est encore en phase de récupération.

Ce qui est plus inquiétant, c'est que si le chiffre de l'emploi est aujourd'hui le même qu'il y a quatre ans, il est tentant de conclure qu'au moins le gouvernement n'a pas fait de tort à l'économie du Québec. C'est presque ce qu'on a entendu. Il tente d'illustrer cela en disant: Regardez, l'écart de taux de chômage Québec-Canada est de 12 %, maintenant, c'est-à-dire que notre taux de chômage est juste un peu plus élevé que la moyenne canadienne par un facteur de 12 %. C'est se leurrer, c'est poser un mauvais diagnostic, comme quand un médecin dit à son patient qui se plaint d'un mal de ventre: Tu as mal au ventre, mets une bouillotte, cela va passer, alors que le patient souffre d'une appendicite aiguë. Donc, le médecin doit intervenir de façon beaucoup plus précise sur les causes profondes du mal. En continuant à masquer la réalité, le gouvernement s'empêche de prendre de bonnes décisions. Je vais illustrer cela avec deux chiffres bien simplement. La population active au Québec, il y a quatre ans: 3 032 000 Québécois. Ce mois-ci:

3 142 000 Québécois, soit 110 000 Québécois de plus dénombrés comme étant au travail ou a la recherche de travail.

Évidemment, mathématiquement, on arrive à un emploi total qui n'a pas bougé: 2 748 000, 2 747 000. Aucune croissance. Où sont donc les 110 000 personnes de plus qui sont dénombrées comme étant dans la population active? Ils sont chez les chômeurs; il y a 110 000 chômeurs de plus. C'est cela le bilan net après quatre ans. Les taux de chômage, on peut bien en parler tant qu'on veut, mais ils sont eux-mêmes incomplets lorsqu'on examine le sous-emploi. On pourrait s'imaginer, à ce moment, que si l'augmentation de la population active se traduit finalement en nombre de chômeurs, que l'aide sociale au moins se serait stabilisée. Les 110 000 de plus sont des chômeurs, donc, l'aide sociale ne devrait pas augmenter, mais cela a augmenté. Cela a augmenté de 110 000. Le nombre de ménages bénéficiant d'aide sociale était de 302 000, il y a quatre ans. Il en a 410 000 à l'heure où on se parle.

C'est qu'il y a là un phénomène, celui de gens qui ne sont plus comptés dans les statistiques, qui se sont découragés, ceux pour qui une période de recherche d'emploi infructueuse se traduit par un retrait du marché du travail. Toutes les mesures que, par exemple, le Conseil économique du Canada a fait valoir quant au nombre de Québécois qui se retirent du marché du travail après avoir cherché un emploi indiquent très clairement que le Québec est premier de classe, encore champion dans cette catégorie. On n'a pas été capable de créer des emplois, on a créé des gens découragés, qui se sont retirés du marché du travail. Cela est attribuable à un mauvais diagnostic. On ne peut pas se péter les bretelles et dire: Regardez, le taux de chômage n'est pas si mal, parce que cela masque la vraie réalité, qui est le fait que des gens découragés, des jeunes notamment, ne sont plus sur le marché du travail. Le gouvernement ne semble pas s'en soucier en quoi que ce soit. Il se pète les bretelles avec de la récupération, avec de la stabilisation d'emploi, avec une création nette de zéro emploi depuis quatre ans.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Yves Duhaime

M. Duhaime: Je n'ai encore eu aucun commentaire de l'Opposition officielle qui siège ici à l'Assemblée nationale, qui n'est pas en campagne électorale. Il y a des gens qui sont élus. L'un occupe le siège de Vaudreuil-Souianges, l'autre occupe le siège de Notre-Dame-de-Grâce. Mais le grand projet de Bourassa sur la création d'emplois, les 25 000 000 000 $ avec les Américains, cela fait quatre fois, depuis dix heures ce matin, que je demande à l'un ou l'autre de ces deux députés de nous en parler. C'est comme dans Tintin, bouche cousue, motus et bouche cousue. Je vous comprends. Je vous y engage aussi, si vous êtes capables de tenir le fort à l'intérieur de votre propre caucus, à essayer de convaincre M. Bourassa de changer de projet.

Je voudrais parler un peu plus de ce qu'on a souligné dans la Presse du jeudi 25 avril, donc, au surlendemain du budget, dans unarticle de M. Frédéric Wagner. Le titre est: "La révolution de la PME. " Je pense que cela vaut le coût que je vous le lise, en deux paragraphes: "En donnant un avantage aux PME par rapport aux grandes entreprises dans le cadre du régime d'épargne-actions, M. Duhaime modifie un programme fiscal existant de façon à créer plus d'emplois, peut-on espérer, sans que l'État n'ait à diminuer ses revenus ou à augmenter ses dépenses. "On peut aussi voir un souci d'encourager le développement des PME dans la décision de vendre les magasins de la Société des alcools au public. Des magasins privés auront vraisemblablement plus tendance à développer le service à la clientèle que de simplement faire mousser les ventes. En ouvrant ce secteur, le gouvernement encourage des hommes et des femmes de talent à devenir chefs d'entreprise. " "Quand M. Duhaime dit que nous vivons de plain-pied la révolution technologique, il n'en conclut pas qu'il faut lancer de grands programmes à caractère scientifique, mais qu'il faut donner aux Québécois la possibilité de développer eux-mêmes leur imagination, leurs idées et leurs talents. Donner sa chance à la PME est sans doute le premier pas dans cette révolution. "

Je pense, M. le Président, que c'est une analyse qui m'apparaît assez juste, pour une raison très simple: pourquoi est-ce que j'ai modifié et que je propose à l'Assemblée nationale dans ce budget de modifier le Régime d'épargne-actions? L'an passé, 70 % de tous les avantages fiscaux et les avantages fiscaux qui en ont découlé, de tout l'argent qui a été investi grâce au Régime d'épargne-actions l'a été dans des entreprises dont les actifs dépassent 1 000 000 000 $. Je ne vois personne qui va venir me dire, M. le Président, que des entreprises de la taille de la Banque Royale du Canada, qui a 87 000 000 000 $ d'actif, et qui a, de mémoire, je crois, un actif global qui dépasse le total de l'actif de toutes les compagnies d'assurances en même temps - je nomme celle-là parce que c'est la plus grande, c'est une de nos grandes institutions a besoin qu'on consente des avantages fiscaux à des contribuables pour qu'ils

investissent chez elle. La réponse, c'est non, même chose pour la Banque Nationale, même chose pour la Banque de Montréal.

On a modifié le REA, qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire qu'il va y avoir davantage de millions et de centaines de millions pour aider les PME à se restructurer financièrement, à renforcer leurs structures. Une PME qui a des assises financières solides augmente sa capacité d'emprunt, est capable de prendre de l'expansion, est capable de faire des investissements et, en faisant des investissements, cela va créer des emplois. Je pense, M. le Président, que c'est une des bonnes mesures du budget.

Dans le secteur des mines, on a fait des choses - je lisais les journaux, c'est ce matin ou hier, tout le monde est heureux dans ce secteur - quand on a prolongé jusqu'en décembre 1987 les 166 2/3. On a une nouvelle tarification des droits miniers et on a introduit un crédit minier négatif.

Dans le secteur de la forêt, les propriétaires des boisés privés, il y en a 110 000 au Québec, j'en suis bien convaincu, sont heureux qu'on introduise le REA tout de suite. Donc, pour les taxes payées en 1985, ils vont pouvoir récupérer tout de suite 85% des impôts fonciers.

Je pourrais continuer, M. le Président. Dans le domaine agricole, par exemple, il y a la taxe sur le capital-actions des entreprises agricoles corporatives. Cela empêchait les entreprises agricoles d'améliorer leur fonds de roulement, d'envisager des investissements, d'augmenter leur rentabilité, etc. On a exempté la première tranche de 300 000 $. Je pense que ces gens sont contents. Tous ces gestes sont posés dans le sens de la création d'emplois et espérons qu'on va en profiter au maximum.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre. Je cède la parole au député de Nicolet.

M. Yves Beaumier

M. Beaumier: Merci, M. le Président. Je note, comme tout le monde, que le député de Vaudreuil-Soulanges n'a pas parlé du projet de M. Bourassa parce qu'il est contre. Il l'a dit, il le redit et je mets au défi le député de Vaudreuil-Soulanges de nous dire, ce matin, s'il a changé d'idée ou s'il est toujours d'accord pour dire que le projet de M. Bourassa n'a pas de sens.

Le député de Notre-Dame-de-Grâce ne veut parler que du passé. Le ministre a présenté un budget d'avenir. Je vais vous parler, M. le Président, et du passé et de l'avenir. Je vais prendre un exemple - on est toujours un peu plus au courant de ce qui se passe dans nos propres comtés - dans mon comté. En pleine récession, un des plus grands projets qui est devenu une réalisation en cours de construction actuellement, c'est l'implantation de l'aluminerie de Bécancour. En pleine récession, qu'est-ce qui a permis l'implantation de l'aluminerie de Bécancour? Essentiellement, deux choses bien importantes: Premièrement, à la suite de la crise, il y a eu un excès, un surplus d'électricité. Je pense que cela n'est un secret pour personne. Ce n'est pas la Baie James qui a fait le surplus parce que jamais je ne croirais qu'un économiste comme le chef libéral aurait décidé de mettre sur le marché un produit qui serait en surplus: ce serait irresponsable parce que cela fait baisser les prix. Qu'est-ce qui a fait qu'il y a un surplus de l'électricité? Cela a été effectivement la crise que nous avons connue. En pleine crise, le gouvernement du Québec a préparé une politique énergétique qui permettait à ce moment de faciliter l'implantation et l'installation d'entreprises qu'on appelle "énergivores" dans le secteur de l'aluminium. (11 heures)

Un deuxième élément très important a été la loi 10. Qu'est-ce que la loi 10? C'est la loi qui autorisait la Société générale de financement à oeuvrer dans le secteur de l'aluminium et aussi de pouvoir y injecter des fonds. En pleine crise, l'aluminerie de Bécancour a pris la décision de s'installer, a pris la décision de construire entre autres et beaucoup grâce à la loi 10. Savez-vous ce qu'ils ont fait Ies libéraux, M. le Président? C'est un peu dramatique: les libéraux, dont nous avons deux représentants semble-t-il très économiques, ont voté contre la loi 10. Vous vous le rappelez. Non, ce n'était pas sérieux de votre part: effectivement, vous avez voté contre la loi 10 qui facilitait la décision de l'Aluminerie de Bécancour Inc. de venir s'installer dans...

Une voix: Scandalel

M. Beaumier:... le comté de Nicolet. C'est vous qui avez voté contre. Pire que cela, le député de Vaudreuil-Soulanges est venu dire dans mon coté - vous vous rappelez quand vous étiez en campagne contre votre chef...

Une voix: Au leadership!

M. Beaumier:... avec qui vous n'êtes pas d'accord de toute façon...

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Êtes-vous d'accord avec le vôtre?

M. Beaumier: Oui, très certainement. C'est le gouvernement actuel, c'est le gouvernement de M. Lévesque qui a permis une politique énergétique, qui a permis

l'adoption de la loi 10 contre laquelle vous avez voté. Je le dis dans mon comté: le député de Vaudreuil-Soulanges a voté contre la loi 10, qui aurait pu avoir comme effet... Si vous aviez été au gouvernement vous ne l'auriez certainement pas présentée; si vous aviez été majoritaires et s'il y avait eu trop de députés libéraux cela n'aurait pas passé. C'est la loi 10, entre autres, qui a permis un des éléments importants de la décision de l'Aluminerie de Bécancour Inc. de s'installer. Vous avez voté contre, vous allez vivre avec.

M. Duhaime: Ah oui, garanti.

M. Beaumier: Dans mon comté tout le monde sait que les libéraux ont mis en danger - heureusement qu'on était là - une des plus grandes réalisations actuelles. Savez-vous qu'au moment où l'on se parle il y a à peu près 1500 à 1600 travailleurs - des gens de chez nous en plus de cela, oui des gens de la région - on n'est pas chauvin remarquez bien - des gens de toute la région dont la région du ministre, entre autres...

M. le Président, je conclurai en disant: heureusement qu'en pleine crise il y avait un gouvernement du Parti québécois, parce que sans cela il n'y aurait pas actuellement ces travaux. Bientôt, il va y avoir même 2000 personnes qui vont travailler sur le chantier de l'aluminerie de Bécancour. Cela est pour le passé; je reviendrai tantôt pour l'avenir.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, dans le cas des interventions du député de Nicolet, je trouve cela assez extraordinaire qu'on nous indique qu'un projet comme celui qu'il mentionne l'amène à se féliciter, dans la mesure où il faut se rendre compte que ce projet, à même les fonds publics, crée pour une longue période une concurrence à l'endroit des autres alumineries qui sont déjà au Québec.

Il faut regarder cela sous cet aspect aussi: quel est le rôle du gouvernement dans l'économie? Très nettement quand on voit ce que souhaiterait par exemple le député de Terrebonne, on se demande précisément à quelle enseigne loge le gouvernement. D'abord il reproche aux gens qui ne voteront pas pour le PQ... Si j'ai bien compris, il souhaite que les gens qui ne voteront pas pour le PQ quittent le Québec. C'est une façon comme une autre de gagner la prochaine élection: exhorter les gens qui ne sont pas d'accord avec leur gens qui ne sont pas d'accord avec vous déménagent de sorte qu'ils ne pourront pas exercer leur droit de vote aux prochaines élections. J'ai trouvé cela original. Je dois dire que c'est original comme façon de gagner des élections, souhaiter que la population diminue notamment au titre de ceux qui ne sont pas d'accord avec vous.

Les autres déménagements qu'il semble souhaiter, ce sont ceux des diverses industries qu'on retrouve selon la région au Canada. Il y a l'automobile en Ontario. Pour rétablir les choses, le député de Terrebonne aimerait que l'industrie automobile s'installe au Québec pour qu'on ait notre part. Il faudrait, pour être logique, envoyer une large part de nos forêts en Ontario parce que l'industrie de transformation des produits du bois, évidemment, n'est pas là. Il faudrait probablement envoyer une des trois ou quatre alumineries qu'on a au Québec en Ontario parce qu'ils n'ont pas assez d'alumineries, eux, en Ontario. On devrait en considération du marché de l'automobile leur envoyer de l'aluminerie. Ce serait assez spécial comme programme économique que de demander une restructuration globale de l'économie canadienne pour que tout le monde ait sa part de toutes les industries, compte tenu de sa population. Ce que le député de Terrebonne n'a pas compris, c'est qu'on peut se spécialiser. Ce que le député de Terrebonne n'a pas compris, c'est qu'on peut utiliser nos talents particuliers à développer de façon plus efficace les ressources qu'on a et c'est notamment le genre de projets que mettent de l'avant le Parti libéral du Québec et son chef.

Quant au débat sur la création d'emplois, le problème de vocabulaire est toujours présent. On n'a pas encore entendu, de la part du gouvernement, l'énumération des mesures qui... Une fois, par exemple, on s'en vante, on a appuyé certaines de ces mesures-là. On nous a même réclamé, avant même que le rapport Saucier ne soit publié, des mesures pour aider à la formation des petites et moyennes entreprises qui ont des problèmes de capitalisation. Ça, c'est beau! Former beaucoup de monde, c'est bon, on l'a dit ici, on l'a dit avant vous autres. On l'a dit pendant des années que c'est ce qu'il fallait faire au lieu de subventionner à tour de bras. Il n'y a aucune espèce de difficulté avec cela.

Une fois qu'elle est formée cette entreprise-là, quel traitement vos choix fiscaux, entre autres, lui réservent-ils? Cela lui réserve une structure de coûts plus dispendieuse qu'ailleurs, cela lui réserve une capacité concurrentielle moins élevée qu'autrement, compte tenu des structures fiscales qui pèsent sur le fonctionnement des petites et moyennes entreprises dans les autres provinces. C'est à ce titre que l'erreur du gouvernement est lourde de conséquences. C'est pour cela qu'on arrive à zéro de création d'emplois pendant qu'ailleurs on trouve le moyen d'avoir plus de gens au travail qu'il y a quatre ans. C'est à cause de ces choix-là, et l'explication qu'on attend -c'est pour cela qu'on a un débat là-dessus -

c'est: Pourquoi est-ce que la méthode de retirer des revenus pour un gouvernement, les impôts, le genre d'impôt indirect que vous avez privilégié, d'une part, dont tous les consommateurs font les frais, qui introduisent des distorsions dans un système économique très ouvert comme celui dans lequel on vit il y a beaucoup de distorsions, pas juste aux frontières, mais dans tout le système - pourquoi est-ce que ça, c'est à l'avantage de la création d'emplois? J'attends encore une réponse. Pourquoi est-ce que le modèle de taxation des profits, du capital et de la masse salariale des petites entreprises est créateur d'emplois? J'attends une réponse.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre des Finances.

L'électricité de la Baie James

M. Duhaime: M. le Président, je vais inviter l'Opposition libérale officielle pour la cinquième fois ce matin à nous parler du projet de 25 000 000 000 $ de leur chef qui devrait, d'après lui, d'après le Parti libéral, être un mégaprojet créateur d'emplois. Puisque nous parlons ici, ce matin, de création d'emplois, il me semble que cela va ensemble. Je vous offre mon temps de parole. Je voudrais vous entendre. Je vais m'asseoir ici, je vais prendre des notes, je vais vous écouter. Puisque vous avez refusé quatre fois de suite, peut-être qu'au cinquième appel vous allez répondre. Pour vous mettre en situation, je vais vous citer un extrait du journal La Presse du 26 août 1983. Ce n'est pas très loin, cela. On parlait du projet de M. Bourassa. C'est le député de Vaudreuil-Soulanges qui fait cette déclaration dans la Presse et je vais le citer au texte.

Je dis au député de Vaudreuil-Soulanges, que si... C'est la Presse, le journal La Presse qui est la propriété de Power, non? De qui?

Une voix: Argus.

M. Duhaime: Argus, mais en haut, quelque part, il y a Power.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Pas Argus, il ne connaît encore rien là-dedans.

Une voix: Arrêtez donc de dire aux autres qu'ils ne comprennent pasl Soyez respectueux un peul

M. Duhaime: Je cite: "C'est un rêve irréalisable. " Ce que j'ai trouvé très amusant - et cela m'a déçu un peu: "Pierre Fortier était celui de mes collègues de l'Assemblée nationale qui m'avait fourni le plus d'arguments pour démontrer que le projet Bourassa, c'est de la foutaise. C'est ici qu'il faut créer les emplois" disait le député de Vaudreuil-Soulanges.

Une voix: II avait raison.

M. Duhaime: "Pierre Fortier était celui de mes collègues qui m'avait fourni le plus d'arguments pour démontrer que le projet de Bourassa c'est de la foutaise. C'est ici qu'il faut créer des emplois, en transformant nos richesses chez nous. " Cela ressemble à ce que j'ai dit dans le discours sur le budget: Ici, chez nous. "Un mégaprojet, tel que Baie James phase 2, cela ne crée des emplois chez nous que durant un court laps de temps. Après, c'est ailleurs qu'on profite de la création d'emplois nouveaux. Un projet d'une pareille envergure est devenu à peu près impensable de nos jours, à cause de la fluctuation des taux d'intérêt. "

Vous aviez raison, M. le député de Vaudreuil-Soulanges. J'ajoute que vous avez encore raison aujourd'hui. Le seul problème que vous avez c'est que, vu la situation interne dans votre caucus parlementaire et dans votre formation politique, vous êtes un peu gêné de répéter ces propos. Mais dites-vous bien dans votre for intérieur que je partage votre opinion, que vous avez raison et que, moi, je suis prêt à vous supporter, à part cela.

M. le Président, cette déclaration de M. le député de Vaudreuil-Soulanges a quand même eu un effet choc. Il faut se rappeler que c'était dans les semaines qui précédaient la convention libérale. Moi, cela me fait de la peine de voir des amis libéraux se faire passer un pareil sapin dans une convention. M. Bourassa n'avait jamais dit à la convention qu'il irait signer des contrats avant et qu'il construirait ensuite, n'est-ce pas? Vous étiez là, vous.

Dans la Tribune du lendemain, 27 août, le lendemain du 26, vos propos étaient rapportés et, là je mets des guillemets, c'est la Tribune qui parle, la Tribune qui rapporte les propos du député de Vaudreuil-Soulanges. "Je m'attaque à des mythes - pas des mites, de3 bébites - du genre de celui Deux fois la Baie James, car ce sont des trompe-l'oeil. C'est se servir des muscles des Québécois, au lieu de leur tête. " Je vois le député de Vaudreuil-Soulanges qui m'écoute très attentivement: La paternité de ces propos c'est la vôtre. Je comprends, par votre attitude et votre discours d'hier, dont plus de la moitié a porté sur le passé...

Quand M. Bourassa vous dit qu'il est un homme nouveau, vous devriez aller voir de proche, parce qu'il n'a pas annoncé grand-chose de neuf, jusqu'à présent. Il promettait, par exemple, M. le Président, d'abolir les droits de succession, parce que, disait-il, cela crée un traumatisme et cela fait fuir des capitaux. Savez-vous depuis combien d'années il y a des droits de succession au Québec?

1892. Vous compterez le nombre de gouvernements libéraux qui se sont succédé à Québec depuis ce temps-là. Moi, je n'en ai pas parlé pendant des années. J'ai pris une décision et c'est ce que le discours du budget propose: on les abolit tout de suite.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Merci, M. le Président. Je tiens à souligner, moi aussi, M. le ministre, que les gens de l'Opposition ne nous ont pas encore parlé du projet qui est censé être le mégaprojet de création d'emplois si jamais les libéraux prenaient le pouvoir. Je comprends que les deux députés qui sont devant nous, comme plusieurs autres, sont contre ce projet. Je les mets encore une fois au défi de défendre ce projet, ici, en Chambre. (11 h 15)

Écoutez, c'est rare que l'on peut voir dans une démocratie des députés démocratiquement élus, siégeant avec une majorité dans leur comté, représentant la population de leur comté, faire partie d'un parti politique qui a un programme et qui a un argument de taille devant la population pour venir prendre le pouvoir, être assis en Chambre et se faire dire pour la sixième fois: Votre argument numéro un pour dire aux Québécois que vous avez la dignité d'être les membres du gouvernement est un mégaprojet avec les Américains pour développer un complexe hydroélectrique de 25 000 000 000 $. Cela serait censé être votre argument de taille pour la création d'emplois. Pour la sixième fois de ce cûté-ci, nous vous demandons... Si vous voulez qu'on parle sérieusement de création d'emplois, c'est votre hache, c'est votre champ de bataille, c'est votre poignée; elle semble très illusoire, ce n'est qu'une poignée, il n'y a rien dans la valise. Vous n'en parlez pas. Encore une fois, je vous demande de parler de ce projet. Je vous le demande.

Il arrive ceci: Je sais que vous savez que ce projet de 25 000 000 000 $, la première balloune de ce projet de 25 000 000 000 $ était de 55 000 000 000 $. Vous vous souvenez de cela, il y a environ un an et demi ou deux ans. Tous les États américains devaient se liguer et développer l'ensemble des forces hydroélectriques du Québec pour un total de 55 000 000 000 $. De cette façon et après une planification de cinq ans, une construction de quinze ans, ce qui nous menait à l'an 2000, les Américains auraient eu l'exclusivité de l'usage de l'électricité pendant les 25 ou 30 années suivantes. Cela voulait dire qu'avant l'an 2030 - toutes les nouvelles forces hydroélectriques du Québec n'auraient servi que pour le développement industriel et la création d'emplois de la

Nouvelle-Angleterre. C'est de là que cela part. La balloune se dégonfle, le livre est à peu près à la moitié: 25 000 000 000 $. Cela part de là. Pourquoi? Parce que Prudential and Bache, qui est une très grande compagnie que vous connaissez très bien - cela vaut les actifs de la caisse de dépôt qui est extraodinaire au Québec, c'est beaucoup plus fort - dit: Ce ne sont pas les idées souverainistes du Parti québécois qui sont dangereuses pour le développement économique, c'est la façon dont M. Bourassa veut traiter l'énergie du Québec. Cela est dangereux pour le Québec. Vous vous en souvenez? J'attends le texte, je l'ai fait venir. Je ne croyais pas que vous seriez assez "mollustiques" ce matin pour ne pas vouloir parler de votre argument numéro un qui fait que vous fessez sur nous à tour de bras, que vous voulez nous accrocher comme des - je vais le redire - faucons d'argent, mais vous y allez plutôt comme de vrais condors. Vous n'y allez pas comme des oiseaux rapaces qui ont des griffes industrielles bien sises dans leurs mains, vous y allez dans l"'à-peu-prèisme". C'est pour cela que, quand vous arrivez pour le défendre à la caméra, devant les gens qui vous regardent, cela fait des nouilles de plus. Vous n'en parlez pas. Vous ne pouvez pas en parler, vous savez que c'est stupide. C'est sûr qu'Hydro-Québec, dans les dix ou quinze prochaines années, va développer pour 20 000 000 000 $ ou 25 000 000 000 $ de projets, mais à notre façon, pour les besoins du Québec, et non pas accrochés, les mains et les pieds liés avec des gens qui en même temps financeraient ces projets-là et viendraient imposer le rachat d'électricité par la suite.

Je l'ai ici, mais mon temps est terminé. Je vais vous relire la déclaration de la Prudential and Bache de New York. C'est épouvantable comme ce chef, ce René... C'est votre René parce qu'il est déjà venu, il naît de nouveau. Vous n'avez jamais été capables de remplacer Jean Lesage, c'est cela votre problème. Le prochain chef du Parti libéral, ce sera M. Ryan. C'est cela parce que, quand M. Bourassa perd, M. Ryan revient. Cela a été Lesage, Bourassa, Ryan, Bourassa, Ryan, Lesage, Bourassa, Ryan. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

La création d'emplois au Québec

M. Scowen: J'aimerais poser une question très simple au ministre des Finances: A-t-il peur aujourd'hui de défendre la performance de son gouvernement depuis quatre ans? C'est cela le sujet que nous avons choisi. Il y a d'autres sujets importants, dont le projet de M. Bourassa

pour la Baie James, les problèmes dans les salles d'urgence des hôpitaux, toutes sortes de problèmes. Mais nous avons proposé aujourd'hui que le ministre, qui est président du comité ministériel sur l'économie de son gouvernement et qui a la responsabilité pour, s'il y en a un, un projet global de développement économique, on a proposé au ministre des Finances que ce matin il essaie de défendre et d'expliquer la performance de son gouvernement depuis les dernières élections. Nous avons constaté, et je vais le lui démontrer encore, parce que c'est le sujet de la journée, nous avons soulevé le point que depuis quatre ans il n'y a pas eu un seul emploi de créé au Québec. On demandait au ministre de faire une réflexion là-dessus et d'essayer de nous l'expliquer, de l'analyser et de nous dire pourquoi et, par la suite, de nous dire, s'il le veut, ce qu'il pensait devoir faire pour l'avenir pour changer ce qui est, semble-t-il, un programme économique qui ne fonctionne pas. C'est cela le sujet.

Qu'est-ce que nous avons entendu? Premièrement, nous avons entendu une critique d'un projet de notre chef. C'est un peu comme si ces gens se voyaient déjà dans l'Opposition et voyaient M. Bourassa comme premier ministre. C'est eux qui font l'Opposition et c'est nous qui proposons. Je trouve assez drôle d'avoir cet esprit de défaitisme déjà dans vos rangs. Arrêtez pour le moment et défendez ce que vous avez fait juste pendant une heure si vous êtes capable. Après, on va se lancer en campagne électorale et vous aurez tout le temps nécessaire de parler du projet de la Baie James et nous aussi. Mais, ce matin, la population s'attend que vous essayiez d'expliquer comment il se fait que pendant quatre ans, depuis cette nuit glorieuse du 13 avril 1981, avec quatre années d'élèves et de personnes qui viennent sur le marché du travail, vous n'ayez pas été capables de trouver un seul emploi additionnel.

J'ai entendu deux arguments, peut-être trois. Le premier: C'est à cause de la crise. Pendant les deux premières années, il y avait une crise. Oui, je répète au ministre: On a tenu compte de cela. Vous avez perdu de l'emploi pendant les deux premières années. Vous avez commencé à en reprendre dernièrement, et c'est vrai, il y a eu des emplois de récupérés dernièrement, mais le total est de zéro. C'est la même crise qui existait dans le reste du Canada où les mêmes êtres humains que nous ont réussi, non seulement à récupérer les emplois perdus, mais à en créer de nouveaux. Nous sommes en retard. Après, nous sommes moins efficaces dans la création d'emplois que nos voisins canadiens qui, je l'admets, sont beaucoup moins efficaces que nos concurrents aux États-Unis. C'est cela le sujet de ce matin. C'est de cela qu'on demandait que le ministre parle, à moins qu'il ait peur de parler de sa performance depuis quatre ans. Je ne parle pas de ses activités, parce qu'on peut avoir toutes sortes d'activités. Il peut énumérer une liste de toutes sortes de choses qui ont été faites. Il y en a beaucoup, mais comment cela se fait-il qu'avec toutes ces activités, toutes les lois que vous avez adoptées, tous les ministères que vous avez créés, le score, le résultat final soit un échec total?

C'est le genre de questions que l'on voulait poser au ministre ce matin et je lui demande, à moins qu'il ait une peur terrible de parler de sa performance et d'essayer de l'expliquer, qu'il arrête pour le reste de notre interpellation de parler du projet de la Baie James, qu'il ne parle pas du problème des urgences dans les hôpitaux ou de toutes sortes d'autres sujets qui sont très intéressants, mais qui n'ont rien à voir avec le sujet que nous avons choisi et que nous avons le droit de choisir ce matin, qui est d'expliquer à la population comment il se fait qu'après quatre ans de gouvernement péquiste vous n'ayez, non seulement pas réalisé un seul nouvel emploi, mais qu'en plus vous ne l'ayez pas fait dans un contexte nord-américain où tous vos voisins ont réussi à en trouver. C'est cela ta question. Qu'est-ce qu'il y a dans toutes vos activités qui ne marche pas?

Je pense que la population s'intéresse à cette question. Elle trouve que pendant ces quatre ans vous n'avez pas bien fait votre job et elle veut qu'aujourd'hui vous expliquiez à la fin de votre mandat, au quatrième anniversaire, ce qui est arrivé. Alors, je le répète: À moins que le ministre des Finances et ses collègues aient peur, qu'ils arrêtent de parler de choses autres que la performance du gouvernement pendant ces quatre ans.

En terminant, je dirai directement au député de Terrebonne que ses propos démagogiques concernant nos attaques contre le gouvernement sont inacceptables. Le dernier recours des démagogues partout dans le monde au pouvoir est de dire à leurs adversaires que, quand ils critiquent le gouvernement pour sa performance, ils critiquent la population. Ce n'est pas du tout ce que nous faisons. Nous sommes très fiers et très contents de la population du Québec. Le problème du Québec, ce n'est pas la population du Québec, c'est le gouvernement. Là est le problème. Dans quelques pays, on est mis en prison si on critique le gouvernement, parce qu'on est déloyal. Je pense que c'est un peu niaiseux d'écouter les mêmes propos du gouvernement disant: Vous êtes déloyaux, vous ne devez pas nous critiquer. On va continuer de vous critiquer, vous, le gouvernement et votre performance et on vous demande d'essayer de la défendre. Comment se fait-il que toutes ces activités

ne nous aient rien donné pendant quatre ans?

Le Président (M. Lachance): M. le député, je vous signale que j'ai été d'une tolérance un peu plus grande que d'habitude. S'il vous plaît, vous en tenir au temps! On a dépassé d'une minute. M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, vous vouiez que je vous parle de 1981-1984? Je vais vous en parler. Qu'est-ce qui s'est passé au mois de juillet 1981? Quels étaient les taux d'intérêt? 21, 5 %, 22 %. Pourquoi? Partout au Canada et en pleine crise économique, parce que le gouvernement fédéral, vos amis, les libéraux, avec une politique monétaire comme celle que nous avons connue, plutôt que d'aider non seulement l'économie du Québec, mais celle de nos principaux partenaires commerciaux, ceux de tout le Canada, sont restés braqués. Au lieu de mettre leur priorité sur la création d'emplois, ils ont maintenu l'économie canadienne dans le désastre. Le 4 septembre 1984, la population de l'ensemble du Canada et du Québec leur a donné ce qu'on appelle dans le jargon un bleu, n'est-ce pas? La raison pour laquelle cela nous a pris du temps à sortir de la crise économique, pas seulement au Québec, mais dans l'ensemble canadien, c'est parce que ce sont vos amis qui dirigeaient les affaires canadiennes dans ce temps-là. C'était M. Trudeau et compagnie. Ensuite, cela a été M. Turner et on connaît le résultat.

C'est dans un contexte affreux. En 1982, on se rappellera aussi que le gouvernement de M. Trudeau a décidé de nous "clencher" sur la péréquation et de nous faire perdre 750 000 000 $ entre 1982 et 1987. Je l'ai évoqué dans le discours sur le budget. Je ne l'ai pas seulement mis dans les annexes, soit dit en passant. C'est dans le discours sur le budget. Aujourd'hui, on est pris avec ce genre de problèmes. C'est un manque à gagner assez énorme. Je vous donne un petit détail en passant: les 124 000 000 $, par exemple, que je dois affecter cette année dans le budget pour payer la dette olympique, je ne les ai pas pour faire du développement économique. Quand je prends 300 000 000 $ et plus et que je suis obligé de renflouer le fonds de pension parce que durant toutes les années de M. Bourassa et de M. Garneau, jamais le gouvernement libéral n'a mis cinq cents noirs là-dedans - vous le savez - cela fait un demi-milliard par année. Si on avait cet argent pour le mettre dans l'économie... C'est pour cela, M. le Président. Quand on fait le bilan, on se rend compte que durant les deux dernières années nous récupérons nos emplois au sortir de la crise plus vite que partout ailleurs au Canada. C'est ce qu'il est important de souligner.

Un dernier point, M. le Président. En pleine crise économique, avec Hydro-Québec - je me souviens que j'étais alors ministre de l'Énergie et des Ressources - on a décidé de faire une offensive sur l'international. On s'est dit: On est capable de battre les Brésiliens. On est capable de battre les Australiens. On va mettre sur pied une politique tarifaire à long terme, 22 ans et demi. Trouvez-moi un pays dans le monde occidental qui est capable d'avoir un tarif concurrentiel avec Hydro-Québec pour l'implantation d'alumineries dans le monde entier! Il n'y en a pas. Cela a donné quoi, comme résultat? 500 000 000 $ US d'investissements à Baie-Comeau pour l'agrandissement de l'aluminerie; 1 200 000 000 $ à l'Aluminerie de Bécancour et on a fait une entente aussi avec Alcan, qui, soit dit en passant, durant ces années-là, poursuivait ses travaux à l'aluminerie de La Baie. On a signé une entente pour la Péribonka, un bail, et Alcan commence ses travaux pour une troisième aluminerie. Il y a actuellement au Québec trois grandes alumineries en chantier et le Québec, sur une base per capita, est devenu le premier producteur mondial d'aluminium per capita. On a au Québec trois parmi les cinq plus grands producteurs d'aluminium dans le monde.

(11 h 30)

Quand j'entends le député de Vaudreuil-Soulanges venir dire que, parce que la SGF a investi, on a nui à d'autres... Vous n'êtes pas sérieux! Vous rendez-vous compte de l'énormité de ce que vous dites? Je vais vous poser une question très simple: Quel est le plus gros actionnaire d'Alcan à l'heure actuelle? Les Québécois, par le biais de la Caisse de dépôt et placement du Québec. N'est-ce pas? Le marché de l'aluminium, c'est quoi? C'est un marché international. Si on ne prend pas notre part de ces 12 000 000 de tonnes de capacité de production installées dans le monde aujourd'hui, qui va le faire? Les Chinois? Les Russes? Les Brésiliens? Les Argentins? Les Australiens? On a décidé qu'on prendrait notre place. On a travaillé avec HydroQuébec et on a bâti un tarif.

Je suis inquiet. La firme Prudential and Bache de New York, l'an passé, quand M. Bourassa a sorti son mégaprojet dont vous ne voulez pas nous parler, et on vous l'a demandé pour la septième fois ce matin... "L'élection de Bourassa nuirait à la cote d'Hydro. " Oui. "La réélection de M. Bourassa - c'est M. Howard, le vice-président de Prudential and Bache, qui a dit cela -pourrait avoir des effets désastreux sur la cote des titres d'Hydro-Québec, surtout si ce dernier va de l'avant avec ses projets de doubler la capacité de production de la Baie James. " Est-ce assez clair?

M. Biais: Bon, c'est net, clair et franc.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Nicolet.

M. Beaumier: Nous prenons note que le député de Vaudreuil-Soulanges ne veut pas se prononcer et dire s'il est toujours d'accord avec les paroles qu'il a dites ou s'il est d'accord avec son chef. Le député de Vaudreuil-Soulanges aura l'occasion de s'exprimer tantôt, mais j'aimerais qu'il commente une partie de l'article de Jean-Paul L'Allier qui a bien connu M. Bourassa.

M. L'Allier écrivait dans le Devoir du 20 avril 1985, toujours concernant le projet de M. Bourassa, contre lequel est le député de Vaudreuil-Soulanges: "Mais le Québec -écoutez bien, M. le député - est plus, beaucoup plus que le lieu sauvage de ressources inexploitées. C'est mieux que cette arrière-cour gigantesque des États-Unis, gérée par des commerçants - c'est un peu la façon dont il explique l'attitude de M. Bourassa - qui considèrent que la seule façon de le développer est d'en vendre - de vendre de l'électricité. En fait, le projet de M. Bourassa n'est pas nécessairement de vendre de l'électricité, c'est de vendre le Nord québécois. Quand Mme Bissonnette parlait du Don Quichotte du Nord, c'est que M. Bourassa s'apprête à vendre une partie du Québec aux Américains. C'est ce que cela veut dire. Pas vendre de l'électricité, vendre le Québec - suivant la conjoncture du marché - bien sûr - les ressources en vrac comme on l'a fait pour le fer, le bois et maintenant l'électricité. " Je mets au défi le député de Vaudreuil-Soulanges de commenter cette opinion de M. L'Allier qui, lui, a bien connu M. Bourassa.

Je reviendrai tantôt. Je parlais de l'aluminerie de Bécancour et je n'avais pas terminé. Savez-vous ce que les libéraux ont dit en ce qui concerne l'implication du gouvernement par l'intermédiaire de la Société générale de financement? Savez-vous ce que les libéraux ont dit, M. Ciaccia, entre autres? Savez-vous ce qu'ils ont dit? Ils ont dit que c'était dépassé - le député de Vaudreuil-Soulanges aussi, je crois; il pourra le confirmer quand il aura parlé du projet de M. Bourassa - ils disent que c'est dépassé que le gouvernement s'implique dans des projets économiques. En gros, c'était cela. C'est pour cela que vous avez voté contre la loi 10. Or, cela a été démenti presque tout de suite après. M. Marcus, le président d'Alumax, qui est l'un des trois partenaires de la société Aluminerie de Bécancour Inc., disait que l'avenir était dans des sociétés mixtes où étaient le gouvernement et l'entreprise privée.

Pour vous montrer jusqu'à quel point l'argument du Parti libéral était un argument arriéré, il ne faut pas, surtout quand c'est bon et quand c'est enrichissant, que le gouvernement aille dans des choses qui sont enrichissantes. Nous n'avons pas cette perception et M. Marcus non plus. Ce sont des choses qui se réalisent. Pour l'avenir, vous êtes certainement au courant que deux autres projets, il y a à peu près deux ou trois semaines, un mois peut-être, d'implantation dans le parc industriel de Bécancour ont été annoncés. L'un va démarrer cet été, Hydrogénal, avec comme partenaires moitié Hydro-Québec, moitié Air Liquide. C'est 30 000 000 $ d'investissements, c'est 300 - l'emploi vous intéresse, semble-t-il - à 400 emplois de plus au niveau de la construction qui va débuter au milieu de l'été.

Une autre décision d'implantation - pas des projets - qui a été prise c'est OXYCHEM, toujours au Parc industriel de Bécancour. C'est du peroxyde d'hydrogène. C'est 50 000 000 $ d'investissements et ceci devrait commencer autour du mois de décembre, ce qui fait que cela va créer de 400 à 500 emplois dans le secteur de la construction. Je parle de l'avenir.

Si le député de Vaudreuil-Soulanges ne veut pas parler de l'avenir parce que cela ne l'intéresse pas, je m'excuse, quant à nous nous sommes à la fois fiers et du passé et de l'avenir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Merci. M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président. C'est assez étrange, le débat, dans la mesure où, quant à nous, on n'a pas eu de réponse sur une question à laquelle on exhorte le gouvernement de répondre, c'est la performance de création d'emplois. On répète qu'il ne nous répond pas là-dessus et, quant au gouvernement, il s'imagine que le règlement de la Chambre lui permet aujourd'hui, à cette heure-ci, de déterminer qu'on va parler du développement des ressources hydroélectriques du Québec et nous exhorte à parler de cela.

Ce que je peux vous dire entre autres choses, c'est que le 3 juin, normalement, le chef du parti sera député et il va en parler. Cela va faire un interlocuteur de plus, c'est celui qui connaît cela le plus, d'ailleurs. Il pourra en parler. Donc, vous ne perdez rien pour attendre, à ce sujet-là.

Ce que cet échange un peu étrange ou décousu du fait du choix du gouvernement de ne pas parler de ce qui intéresse les Québécois, la création d'emplois, a permis de déceler, c'est que le gouvernement continue à masquer la réalité en arrière des chiffres qu'il nous cite. J'ai indiqué tout à l'heure qu'on devait s'inquiéter de la chute du taux de participation au marché du travail au Québec comparativement à l'ensemble du Canada.

J'ai fait remarquer que les gens dénombrés comme étant au travail ou à la

recherche de travail ayant augmenté de 110 000 personnes depuis quatre ans, cela s'est traduit exactement par 110 000 chômeurs de plus.

On nous rétorque qu'il y a eu de la création d'emplois depuis deux ans. Il y a eu création d'emplois partout depuis que le pire de la crise est passé, c'est bien évident. Ce qu'on soutient, c'est que le rythme de récupération, même s'il peut s'accélérer en fin de période quant au Québec, n'ait pas été tel - et c'est ce qu'il faut regarder -qu'on a finalement atteint une récupération totale de ce qui avait été perdu pendant la crise. On est en train de mesurer sur quatre ans. Il faut concevoir que les pertes d'emplois à l'occasion de la crise ont été considérables au Québec et que c'est à partir de cette perte également qu'il faut regarder où nous en sommes rendus aujourd'hui. Quand on se compare, on n'a pas récupéré, encore une fois, suffisamment des emplois perdus.

Ce que cela cache également, c'est évidemment le phénomène des découragés. Je l'ai évoqué tout à l'heure, j'ai chiffré, à l'aide d'une étude, ce que cela représente mais ce qu'on ne voit pas, c'est ce que cela représente au point de vue de la qualité de vie dont le député de Terrebonne s'enorgueillit. À bien des égards au Québec oui, il n'y a pas de problèmes. Les gens qui habitent ici préfèrent habiter ici, cela ne les empêche pas de critiquer ce que le gouvernement fait pour détériorer certains aspects de la qualité de vie. Mais la marge des découragés au point de vue de la qualité de vie, au point de vue de la motivation de l'ensemble des Québécois, c'est un facteur particulièrement important qui, dans ce cas-là, est négatif. Il faut donc s'attaquer, pas à un mal de ventre qui est le sous-emploi (le dénombrement statistique), il faut s'attaquer à l'état de crise que vivent les découragés. Il faut prendre des mesures particulières. On a demandé à la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu de bien vouloir nous expliquer ce que ces programmes faisaient de si bien, mais la réalité des choses, c'est que le nombre des découragés augmente. Il y a un problème de performance à l'égard des programmes gouvernementaux.

L'autre chose qui est masquée dans les chiffres d'emploi qu'on nous sert... Le ministre des Finances le sait parce que ses rentrées fiscales au titre de l'impôt sur le revenu des particuliers ne sont pas aussi brillantes qu'il le voudrait. C'est toujours vrai pour le ministre des Finances, mais cela a atteint un niveau critique depuis deux ans au Québec. L'autre phénomène masqué, l'autre face cachée de tous ces beaux chiffres qu'on nous sert de l'autre côté, c'est qu'il y a un changement entre les gens qui ont du travail à temps plein et ceux qui travaillent à temps partiel. Le temps partiel, par définition, ce sont des gens qui sont en train de se qualifier pour retourner à un programme de recherche d'emploi, un programme d'aide directe de prestations à l'occasion de la perte d'un emploi. Ce sont des chômeurs à temps partiel. Je veux bien croire que ce sont des travailleurs à temps partiel, mais ce sont des chômeurs à temps partiel. Quand on regarde ce qui s'est passé d'avril 1981 à avril 1985, on voit très clairement que notre nombre d'employés à temps plein au Québec a diminué de 70 000 et que le nombre de travailleurs à temps partiel a augmenté de 70 000. On a remplacé les gens qui travaillaient...

Le Président (M. Lachance): En terminant, M. le député.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):... par des gens qui chôment à temps partiel pendant qu'en Ontario on réussissait à créer 113 000 emplois à temps plein, de plus. Eh oui! 80 000 emplois à temps partiel, mais on voit que c'est très différent de créer deux catégories additionnelles d'emplois plutôt que d'échanger du temps plein pour du temps partiel. C'est ce qui est arrivé au Québec et on aimerait avoir des explications qu'on attend encore.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Duhaime: Oui, M. le Président. Lorsque le Parti libéral décidera d'être sérieux avec les statistiques au lieu de jouer au fou, je répondrai très clairement. Je mets au défi le député de Notre-Dame-de-Grâce de reprendre son argumentation de tout à l'heure en tenant compte du nombre d'emplois par 1000 de population et de l'évolution des quatre dernières années quant à l'emploi au Québec et au Canada et d'en arriver à la même conclusion avec le gros beignet qu'il avait dans les mains tout à l'heure.

Je voudrais dire en terminant, M. le Président, que cette matinée a été décevante. J'aurais cru que, puisqu'on m'interpellait ici sur la création d'emplois par le Parti libéral et que le projet moteur du siècle prochain annoncé par M. Bourassa qui, peut-être, ne survivra pas aux élections partielles dans Bertrand... Moi, je m'étais préparé à vous parler de cela. Et on vous a invités, je crois que c'est à huit occasions consécutives, à partir des tribunes de l'Assemblée nationale... Vous êtes des députés libéraux élus. Vous n'avez même pas ouvert la bouche pour parler et soutenir le projet de M. Bourassa: 12 000 mégawatts, 25 000 000 000 $, si les Américains le veulent, à leur prix, à leurs conditions. Je vous comprends, mais cela ne m'empêchera pas de vous agacer un peu.

Pour ce qui est des jeunes, dans les crédits qui sont déposés pour l'année 1985-1986, on a fait un réel effort et c'est la première fois que cela se fait au Québec. On doit avoir, actuellement, dans les différents programmes, 35 000 inscriptions de gars et de filles du Québec. Je voudrais mentionner ici pour ne pas qu'on l'oublie - parce que les gens d'en face, je le regrette, font de la désinformation en espérant qu'un journaliste va la prendre au bond et va l'imprimer à 50 000 ou encore à 850 000 exemplaires comme on le voit de temps à autre - qu'il y a huit programmes pour les jeunes: Bon d'emploi plus, 10 000 000 $ en 1985-1986; Stages en milieu de travail, 57 000 000 $ cette année, 60 000 000 $ l'an passé; les travaux communautaires, 5 800 000 $ cette année; le rattrapage scolaire, 5 000 000 $; pour le retour aux études postsecondaires pour les chefs de famille monoparentale, on vise 1000 inscriptions. On n'a pas mis de montant. C'est un mot de bienvenue quand on ne met pas de montant. Le sixième programme expérimental de création d'emplois communautaires, 40 000 000 $ cette année; les Jeunes volontaires en 1985-1986, 10 300 000 $. Le huitième programme, les Jeunes promoteurs, 3 000 000 $. (11 h 45)

Ces gens d'en face, M. le Président, disent qu'il n'y a rien dans le budget pour la création d'emplois. Ce que je viens d'énumérer, huit programmes, c'est seulement pour les jeunes de moins de 30 ans. Tantôt, au début, j'ai fait une énumération complète et l'Opposition qui a l'habitude de tout vérifier - elle a une excellente équipe de recherchistes, je l'en félicite d'ailleurs -devrait vérifier si le chiffre que j'ai avancé tantôt, 908 000 000 $ dans le développement économique et au soutien de l'emploi cette année, à part l'ensemble des mesures que j'ai annoncées dans le budget... M. le Président, cela doit peut-être un peu traduire ce dont la population a besoin.

Dans la Presse d'hier j'ai lu un commentaire. Je vais vous laisser deviner son nom. "Je vois beaucoup de points très intéressants là-dedans. C'est en parlant du budget que j'ai prononcé ici mardi après-midi - M. Duhaime est un gars qui a les pieds sur terre, qui a su prendre des mesures difficiles mais importantes qui seront probablement bonnes pour l'économie du Québec. M. Duhaime est un gars extrêmement terre à terre - je m'excuse de vous le dire comme cela mais... - réaliste et compétent à tenir compte de ces réalités. "

Une voix: Et modeste.

M. Duhaime: Qui est-ce qui a dit cela? C'est M. Mulroney qui est premier ministre du Canada. Je veux le remercier. J'espère que cette phrase va être d'une certaine inspiration lorsqu'au niveau fédéral on va réviser les demandes du Québec pour ce qui est du dossier de la péréquation. Si j'ai les pieds à terre dans le budget, peut-être que je pourrai avoir les pieds à terre aussi dans un règlement honorable, raisonnable et équitable du dossier de la péréquation. L'argent que j'irai chercher là, M. le Président, je le remettrai dans le développement économique du Québec.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Terrebonne, vous êtes le dernier intervenant ministériel. Vous avez deux minutes.

M. Blais: Deux minutes. Ah! Mon dieu! Seulement le temps de rappeler pour la neuvième fois aux deux députés de l'Opposition que le support de création d'emplois élaboré par leur chef, édité à peu près partout, lancé aux États-Unis, lancé ici, eux semblent l'avoir lancé dans la poubelle. Ils n'en parlent pas. Cela veut donc dire qu'ils sont contre. Leur mutisme devant le projet d'élaboration des forces hydroélectriques sur 25 000 000 000 $, de la façon que leur chef le voit... Cela mérite d'être lancé dans la poubelle. C'est ce qu'ils disent en n'en parlant pas.

Pour la neuvième fois, je leur demande d'en parler parce que c'est censé être leur point majeur de création d'emplois. Comme on se souvient des 100 000 emplois du temps: ils en ont créé 84 000 dans la fonction publique parce qu'ils étaient inertes. Pour faciliter l'entreprise privée à créer de l'emploi, ils ont dû hypothéquer l'avenir du Québec en ajoutant 84 000 emplois dans la fonction publique. C'est pour cela qu'aujourd'hui on a des problèmes parce qu'on a un peu trop de monde encore dans la fonction publique même si, depuis qu'on est là, c'est une croissance zéro dans la fonction publique. Croissance zéro dans la fonction publique parce que vous avez trop placé de gens. La réélection de M. Bourassa serait une catastrophe pour Hydro-Québec, serait une catastrophe pour la création d'emplois au Québec, serait une catastrophe, point, parce que les gens savent que Bourassa égale zéro, égale catastrophe. Merci.

Le Président (M. Lachance): Pour les deux derniers blocs du temps qui est réservé pour cette interpellation, M. le ministre aura une période de dix minutes et par la suite il y aura le droit de réplique final du député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le ministre des Finances.

Conclusions M. Yves Duhaime M. Duhaime: Merci. Je vais vous dire

tout de suite que je vais prendre seulement cinq minutes et que je vais laisser les cinq autres minutes qui me reviendraient normalement pour qu'elles s'ajoutent aux dix minutes du député de Notre-Dame-de-Grâce. 11 aura donc un bloc de quinze minutes pour conclure. J'aimerais beaucoup que, pendant cinq minutes, seulement cinq minutes, il nous parle du projet de M. Bourassa d'aller emprunter aux États-Unis 25 000 000 000 $ pour investir 12 000 mégawatts. Soit dit en passant, vous êtes en train de vous mêler passablement parce que, quand on parle de 12 000 mégawatts, on ne parie plus de la phase 2 de la Baie James. Ce sont toutes les rivières de la COte-Nord. C'est le complexe KCM, Koksoak, Caniapiscau, Mélèzes, pour 3500 mégawatts dans ce coin. Il y a aussi la puissance additionnelle à Manic-Outardes et il y a de la puissance additionnelle ajoutée à LG 2; 12 000 mégawatts, comme on dit à Hydro, c'est du jus, vous savez cela. Je vous donne cinq minutes pour nous en parler. Je vais vous écouter très attentivement, je vous promets de ne pas vous interrompre et je commenterai votre déclaration dans les jours qui viendront. Je voudrais dire que l'Opposition libérale, ce matin, avec un tableau zéro qui lui va très bien puisque j'ai cela en face de moi, et avec la mise en garde du début de ce débat de vouloir m'interdire de parler de l'avenir... Si vous voulez, vous autres, rester au passé, restez-y! On n'a pas honte de notre bilan.

Au contraire. On en est très fier, M. le Président. Durant les deux dernières années, au sortir de la crise économique et de la récession de 1981-1982, durant les deux dernières années, le Québec a récupéré les emplois qu'il a perdus pendant la crise plus vite que partout ailleurs au Canada. Vous n'avez aucun chiffre. Vous faites des affirmations. On dirait que vous êtes des enfants d'école. Ce n'est pas parce que vous avez affirmé une chose qu'elle est vraie. Il faut le prouver, n'est-ce pas? Cela fait une différence. Deuxième chose, c'est le tiers de tous les emplois créés au Canada durant les deux dernières années; c'est au Québec que cela s'est créé. Vous le savez. Vous pouvez vous bidonner, si vous voulez, je ne vous reconnais pas toujours parce que vous me paraissez un homme plus sérieux. C'est vrai que l'Ontario a récupéré des emplois passablement rapidement, mais pourquoi? 55 % des exportations ontariennes vers les États-Unis d'Amérique, ce sont les bagnoles, les pièces et Dieu sait si les rouges les ont subventionnés, les quêteux dans le secteur de l'automobile, GM, Ford, Chrysler, il y a quelques années! N'est-ce pas?

Au Québec, on a ici 5 % de la capacité de production canadienne et les Québécois achètent 25%. C'est énorme. Il y a des explications à toute chose. Vous ne devriez pas nier ces faits, vous devriez les admettre, regarder les chiffres d'emploi en fonction du nombre d'emplois par 1000 de population. À ce moment on va pouvoir avoir un bon débat. Si vous vous voulez me charrier à tous les vendredis matin, je vais prendre mon abonnement. Vous voulez qu'on parle des assurances vendredi matin prochain, je serai ici à 10 heures, M. le Président. Je voudrais vous faire remarquer qu'à 10 heures pile, j'étais ici à ma banquette; j'ai attendu l'Opposition pendant sept minutes.

M. le Président, le dernier point. Le budget qui a été déposé est un budget résolument tourné vers la création d'emplois de la manière suivante: Premièrement, presque 1 000 000 000 $ dans les crédits des portefeuilles de mes collègues, 908 000 000 $; il y a toujours des rallonges en cours d'année, je suis pas mal certain que cela va aller à 1 000 000 000 $.

Je n'ai pas entendu - il me vient une idée, M. le Président - votre commentaire sur le fonds de développement des ressources encore? 2 500 000 000 $. On va vendre les succursales de la SAQ, les actions privilégiées d'Hydro-Québec, vous avez changé d'idée sur l'histoire des actions d'Hydro-Québec. Votre chef était contre il y a deux semaines; hier, semble-t-il, il était contre les actions privilégiées, il a dit que ce serait mieux des actions ordinaires, je n'en reviens pas. Cet argent, M. le Président, qui nous vient également des droits de mine, des droits de coupe, des redevances hydrauliques des entreprises privées au Québec qui utilisent 3500 mégawatts de puissance sur nos rivières, cette année cela fait environ 250 000 000 $ au total. Cela va s'en aller dans un fonds pour développer les ressources du Québec. Pas pour les Américains: pour les Québécois et leur famille, ici au Québec, comme le disait le député de Vaudreuil-Soulanges au mois d'août 1983.

Je vous en supplie, M. le député de Vaudreuil-Soulanges, ne vous laissez pas intimider par les pressions de votre chef. Ne vous laissez pas intimider par votre caucus, tenez votre bout. Vous avez une occasion en or de vous en débarrasser. C'est vrai! Allez dans Bertrand aux élections partielles, allez-y, allez dans Bertrand - M. le député de Vaudreuil-Soulanges, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous le direz aussi à votre collègue d'Outremont - répéter, durant le courant des mois de mai et juin, les propos que vous avez tenus au mois d'août 1983 concernant ce grand projet. Si vous ne le faites pas, j'irai répéter ce que vous avez dit le 26 août 1983, tel que rapporté dans la Presse.

Car vous n'êtes pas tellement sérieux. Ce que votre chef a fait depuis trois mois, de traduire en anglais... "Power from North", cela ressemble comme un jumeau à "La deuxième Baie James" publié il y a deux ou

trois ans. Avez-vous vu les deux? Vous les comparerez, c'est assez extraordinaire. Cela a donné comme résultat de braquer tout le monde aux États-Unis, et la réponse est venue vite.

L'approche d'Hydro-Québec - qui était aussi la mienne pendant les trois années et plus où j'étais responsable de cette société d'État - a été de rencontrer les gouverneurs, de ne pas faire de tapage. Si vous saviez le nombre de fois où je suis allé aux États-Unis - et j'étais quand même ici présent à l'Assemblée nationale; cela ne prend pas bien des heures aller là et revenir - je les ai tous rencontrés les gouverneurs, non pas les anciens ministres ou secrétaires d'État à l'Énergie, non pas les anciens, la Ligue du vieux poêle, ceux qui sont en poste. Je les connais tous personnellement. On a négocié des contrats avec eux.

Je pense que je retire mon offre je garde mes cinq minutes. Vous ne m'en parlerez pas du projet de M. Bourassa. Je les gardes mes cinq minutes, M. le Président.

On a signé un contrat avec le New York, le PASNY, à l'époque, et le New York Power Authority d'aujourd'hui, on a signé un contrat d'énergie avec le New England Power Pool. Le gouverneur Snelling du Vermont m'apppelle un jour - il ne parle pas beaucoup français le gouverneur Snelling, mais je le comprends - il voulait acheter de l'énergie électrique, 150 mégawatts fermes. Très bien, j'ai pris l'avion et je suis allé avec le président du conseil d'administration d'Hydro-Québec. On s'est rencontrés. Cela a pris deux mois et c'était réglé: 150 mégawatts. La ligne de transmission est en chantier. Vous le savez celai Cela rapporte des centaines de millions de dollars à Hydro-Québec, avec un contrat solide, d'aplomb.

Mais c'est nous qui fixons notre prix à la frontière. Le président d'une des grandes compagnies de distribution électrique dans la Nouvelle-Angleterre que veut-il avoir comme prix? Il dit: "You guys, up North, you get a fair return on your investment and we make the money on it. " J'ai dit: "No, Sir. " On va avoir des clauses d'indexation pour nous protéger, parce que je ne voudrais pas me retrouver un jour dans une chaise terre-neuvienne et être obligé d'aller négocier à nouveau avec les Américains. Quand les contrats sont signés, les contrats sont signésl

M. le Président, j'avoue honnêtement que si les libéraux promettent dans leur programme - on va oublier le député de Laporte, ce n'est pas sérieux - 80 000 emplois par année - c'est cela votre programme - nous, nous l'avons réalisé en 1984. Si les taux d'intérêt peuvent tenir et que les investissements se fassent - je l'ai dit dans mon discours sur le budget - la situation de l'emploi va s'améliorer. Mais il n'y a personne au gouvernement qui va vous dire qu'on est satisfaits de cette situation, on travaille d'arrache-pied à monter des programmes. J'ai mentionné ceux pour les jeunes tantôt, on en a dans les mines, on en a dans les forêts, on en a dans le secteur agricole. Mon collègue, M. Biron, hier, a fait état des interventions de la SDI. On a ajouté des crédits à la SDI pour aider nos entreprises à prendre de l'expansion. Vous devriez au moins reconnaître cela. Votre discours porterait plus si vous disiez: Ce gouvernement-là à Québec est un des meilleurs que le Québec ait eu pour le soutien de l'économie et de l'emploi. Vous devriez dire cela. Et vous devriez nous faire des suggestions, mais vous n'en faites pas. Vous noircissez le Québec à la grandeur, mur à mur, et vous pensez ensuite que vous allez vous aider. Moi, le tuyau que je vous passe: Vous vous nuisezl

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Vous avez la parole pour le dernier bloc de dix minutes.

M. Reed Scowen

M. Scowen: M. le Président, je suis persuadé que la population du Québec va juger très sévèrement le comportement du ministre des Finances et de ses collègues aujourd'hui. Nous leur avons demandé de venir ici nous parler d'un des plus graves problèmes économiques de nos jours. Nous avons indiqué l'essentiel de ces problèmes sur le tableau ici! nous avons indiqué au ministre des Finances que durant les quatre ans du mandat de son gouvernement, il n'y avait pas eu un seul emploi additionnel de créé au Québec. En dépit de tous les discours comme celui qu'on vient d'entendre ce matin, en dépit de tous les programmes, en dépit de toutes les activités dont il a parlé, il n'y a pas eu au Québec, depuis quatre ans, sous le gouvernement péquiste, la création d'un seul emploi nouveau. Cela pendant une crise d'un an et une reprise de trois ans, pendant lesquelles d'autres régions du Canada et d'autres régions des États-Unis ont réussi à créer des emplois importants. (12 heures)

Le gouvernement du Québec n'est pas concurrentiel avec les autres gouvernements. Sa façon d'aborder le développement économique ne fonctionne pas. Tout le monde est capable de le voir quand il regarde le score final de ces quatre années de la ligue - je ne sais pas quoi - la ligue de la concurrence économique des gouvernements d'Amérique du Nord.

Je vais revenir à la charge une dernière fois, parce que le ministre est supposément non seulement le ministre des Finances mais encore le ministre responsable pour la coordination du développement économique au Québec. Il a démontré ici,

non seulement qu'il n'a pas de connaissances dans ce domaine mais qu'il ne s'y intéresse pas. Il a passé son temps dans une attaque à fond de train contre le projet de M. Bourassa.

Je vais mentionner brièvement le projet de M. Bourassa. C'est un très bon projet. C'est un projet appuyé, entre autres, par le premier ministre du Canada, M. Brian Mulroney. Il est appuyé par plusieurs autres personnes. C'est un projet qui vise à essayer de vendre aux Américains des quantités importantes d'électricité dont nous n'avons pas besoin et dont nous n'aurons pas besoin pour les années à venir. Vous êtes contre ce projet, vous êtes contre l'idée d'essayer de vendre des quantités additionnelles d'électricité, de créer un deuxième Baie James, de créer de l'emploi dans le nord du Québec; vous êtes contre cela.

J'espère que vous allez continuer de défendre cette position, parce que je suis persuadé que la population du Québec est de notre côté dans ce projet. C'est un projet positif et intéressant pour l'avenir du Québec. C'est loin d'être le seul projet, mais c'est un projet qui est un vrai défi pour les Québécois. Et ils vont le supporter. J'espère - je le répète - que le ministre et ses collègues vont continuer de dire qu'ils sont contre. J'espère que vous allez dire cela, parce que allez trouver que vous n'avez aucun appui dans la population du Québec.

Pour revenir au sérieux, si le ministre avait le moindre... Pour revenir au fond de cette question, aujourd'hui, - les attaques du gouvernement contre le projet de la Baie James n'étaient pas sérieuses du tout -laissez-moi juste soulever quelques points qui peuvent intéresser le ministre et dont il n'est peut-être pas conscient.

Je lui ai fait parvenir un document, il y a quelques minutes, qui essaie d'analyser la création d'emplois depuis quatre ans par secteurs de l'économie. Il n'en a pas parlé, parce je pense qu'il ne se rend même pas compte que ces chiffres existent. Je vais vous donner juste quelques détails. Nous avons divisé les secteurs de l'économie en secteurs exposés et en secteurs protégés. Il y a certains secteurs ici où il est facile de créer de l'emploi parce qu'on n'a pas de concurrence, entre autres, les gouvernements. Dans le secteur du commerce, la compétition se fait entre les commerçants d'une rue ou d'un quartier, mais avec l'extérieur. Par contre, nous avons des secteurs exposés, comme le matériel de transport. La compagnie Bombardier fait concurrence non seulement avec ses voisins au Québec, mais avec des compagnies partout dans le monde.

Si on analyse la création d'emplois ici au Québec, laquelle est zéro depuis quatre ans, on voit que du côté secteurs exposés, où on est obligé de soutenir la concurrence des compagnies de l'extérieur du Québec, nous avons perdu 40 000 emplois, compensés par la création d'emplois dans les domaines qui sont protégés, comme le commerce de détail.

J'aimerais mentionner juste quelques aspects. Le ministre et ses collègues ont souvent parlé ce matin de l'aluminerie. Dans le domaine de la première transformation des métaux, les sidérurgies et les alumineries, nous avons effectivement une perte nette de 7000 emplois dans ce secteur de l'économie depuis quatre ans. Dans le domaine des pâtes et papiers, l'industrie où le gouvernement a mis beaucoup l'accent, semble-t-il, nous avons une perte nette de 4000 emplois. Dans tous les domaines des produits métalliques, tous les fabricants des produits métalliques, nous avons une perte de 11 000. Dans le matériel de transport, qui comprend Marine Industrie et GM et les compagnies qui fabriquent des avions, une perte de 5000. Dans toutes les industries où le ministre a consacré, d'après lui, ses efforts les plus intenses et le plus de subventions, on voit une perte de vitesse dans la création d'emplois.

Pour compenser, où avons-nous trouvé de l'emploi au Québec depuis quatre ans? 18 000 de plus dans le commerce au détail; 17 000 de plus dans les organisations culturelles; 13 000 de plus dans les soins et les personnes qui travaillent dans le domaine de soins de santé et services sociaux. Ce sont tous des domaines protégés. Le seul secteur de l'industrie où vous avez une augmentation importante c'est le secteur de l'imprimerie. J'ai une grande présomption que c'est en grande partie à cause des projets en communications du gouvernement du Québec.

Pour le reste, dans les secteurs de l'industrie et des richesses naturelles: perte, compensée par une augmentation à peu près équivalente dans les secteurs qui non seulement sont protégés, mais où le gouvernement n'accorde aucune subvention.

Il semble à première vue que la création d'emplois au Québec se fasse en proportion inverse de l'intérêt et de l'appui que le gouvernement accorde à l'industrie. C'est intéressant. Le ministre n'a même pas donné l'impression qu'il est conscient de ces faits. Qu'est-ce que cela veut dire? Est-ce que cela veut dire que les investissements nuisent à l'emploi? Est-ce que les investissements ont pour effet de réduire l'emploi? Qu'est-ce que cela veut dire pour une politique de création d'emplois? Le ministre n'en a pas parlé. Il ne s'en rend même pas compte.

Qu'est-ce que cela veut dire que, dans le domaine des services immobiliers et agences d'assurances, on ait vu la création de 9000 emplois depuis quatre ans? Quel effet le projet de taxe de vente du ministre, annoncé aujourd'hui, va-t-il avoir sur le nombre d'emplois créés dans ce domaine en pleine croissance? Est-ce que le ministre a

une réponse? Pas du tout. Le ministre nous a parlé de quoi, aujourd'hui? Il a parlé de son opposition - et j'imagine qu'il parle au nom du gouvernement - à un projet de l'Opposition - il a parlé en bon chef de l'Opposition - il a parlé de son opposition à l'idée que les Québécois doivent avoir un gouvernement voué à développer le nord du Québec, voué au développement du nord du Québec avec les produits qu'on peut exporter ailleurs; il a parlé contre l'idée que le chef de l'Opposition s'occupe de cela activement ici et à l'extérieur du Québec avant son élection - parce qu'il tient à cela - contre l'idée que l'Opposition sorte un livre épais comme cela et plein de détails sur une proposition que la majorité de la population et les critiques ont déjà trouvé très intéressante.

Ils ont parlé contre un projet concret, parce qu'ils se trouvent aujourd'hui avec un triste bilan de quatre ans qui équivaut exactement à zéro et sans aucun plan, aucun projet, aucun programme pour l'avenir. Demandez à ces gens ce qu'ils proposent comme programme économique pour les quatre années à venir. Qu'ils nous donnent un document, n'importe quel. Ils n'ont même pas tenu un congrès pour essayer de développer un programme parce qu'ils savent que chaque fois qu'ils essaient de tenir un congrès, c'est la confusion et le charriage le plus total entre la gauche et la droite, les orthodoxes et les fédéralistes. C'est un gouvernement qui n'a aucun projet pour les semaines qui viennent et aucun projet pour les années qui viennent» Je pense que le symbole le plus approprié pour le gouvernement, c'est malheureusement, tout à fait, le zéro. Merci.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député. Je remercie le ministre des Finances et les députés qui ont participé aux travaux de cette commission. La commission du budget et de l'administration, s'étant acquittée de son mandat, ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 9)

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