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(Seize heures quarante-cinq minutes)
Le Président (M. Lachance): La commission du budget et de
l'administration se réunit avec le mandat de poursuivre le débat
portant sur le discours sur le budget. Tel que prévu dans nos
règles de procédure, il y a quinze heures de débat sur le
discours sur le budget du ministre des Finances qui se font à
l'Assemblée nationale et un maximum de dix heures en commission.
J'aimerais savoir de la part du secrétaire s'il y a des
remplacements.
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Dussault
(Châteauguay) est remplacé par Mme Lachapelle (Dorion). C'est
tout.
Le Président (M. Lachance): Merci. Oui?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. Caron (Verdun) est
remplacé par M. Fortier (Outremont). C'est valable pour aujourd'hui.
Le Président (M. Lachance): Merci. Je voudrais, en
commençant les travaux de la commission, faire un rappel du temps de
parole. Le ministre des Finances peut s'exprimer pendant vingt minutes sur la
politique budgétaire du gouvernement et l'évolution des finances
publiques. Ensuite, c'est au tour du porte-parole de l'Opposition d'avoir droit
à une période de vingt minutes. Après, il y a des
discussions et je devrai tenir compte de la répartition du temps entre
les groupes parlementaires. Les députés peuvent prendre la parole
pendant dix minutes et ce temps de parole est divisible puisqu'il s'agit d'un
débat qui prend la forme de questions adressées au ministre des
Finances. Après chaque question, le ministre des Finances dispose d'un
temps de parole de dix minutes pour répondre à son interlocuteur.
Je laisse maintenant la parole au ministre des Finances et député
de Saint-Maurice. M. le ministre.
Organisation des travaux
M. Duhaime: M. le Président, avant de commencer nos
travaux proprement dits, je sais que les leaders de nos formations politiques
se sont rencontrés et il y aurait eu, paraît-il, une entente afin
qu'on puisse travailler de consentement, si cela va à mon
collègue. Est-ce que cela a été fait?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Cela nous regarde, à ce
moment-ci, je pense, de savoir si on veut dépasser 18 heures
aujourd'hui.
M. Duhaime: On pourrait peut-être régler cela en
partant. On pourrait aller jusqu'à 19 heures, ce soir?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Facilement, oui.
M. Duhaime: Ensuite, on pourrait siéger vendredi matin,
dans le cadre de l'interpellation que vous avez formulée.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): De toute façon, cela ne
nous regarde pas; c'est la Chambre.
M. Duhaime: Mais après, à midi, vendredi, on
pourrait faire de midi à 13 heures, si cela vous convient.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, d'accord.
M. Duhaime: Ensuite, il y aurait mardi matin. Il reste à
savoir si on commence à 7 heures, le matin, à 8 heures, à
9 heures ou à 10 heures, pour aller jusqu'à 15 heures.
N'étant pas un lève tôt, je suggérerais 10
heures.
Une voix: C'est tard!
M. Duhaime: C'est tard? Alors, disons 9 heures. Ça va?
M. Tremblay: Cela ne me fait rien, mais quant à être
ici mardi matin, autant commencer tôt. Pourquoi pas 8 heures?
M. Duhaime: Pour les voyageurs, évidemment, à moins
de réaménager l'horaire de Quebecair ou d'Air Canada...
Une voix: Est-ce que 9 heures vous irait?
M. Tremblay: J'arrive le lundi soir, à ce
moment-là.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je
suis heureux de voir que vous n'avez rien à faire dans votre
comté le lundi soir.
Le Président (M. Lachance): Dois-je en conclure qu'il y
a...
M. Tremblay: Le lundi soir inclut la nuit.
M. Duhaime: Je donne cela à titre d'indication, M. le
Président. Je ne suis pas maître de ces horaires. Il faudra que
j'aie l'accord de notre leader. Même chose pour notre collègue de
Vaudreuil-Soulanges, j'imagine.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Les leaders avaient
parlé de 9 h 30.
M. Duhaime: 9 heures, 9 h 30.
Le Président (M. Lachance): Ce serait plus raisonnable.
Disons que nous nous en tenons à l'entente d'aujourd'hui selon laquelle
on poursuit à partir de maintenant jusqu'à 19 heures.
M. Duhaime: Si Dieu nous prête vie.
Le Président (M. Lachance): Très bien, M. le
ministre. Vous avez la parole.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Excusez-moi...
Le Président (M. Lachance): Oui?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Quitte à dépasser
un peu 19 heures, s'il y a consentement. Nous verrons au fur et à
mesure.
M. Duhaime: Vous voulez dire ce soir?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui. Cela ne m'ennuie
aucunement. Dans la mesure où l'enveloppe est de 10 heures. Je ne vois
pas précisément comment on va atteindre 10 heures avec un horaire
comme celui-là.
M. Duhaime: Je voudrais être le plus accommodant possible,
mais n'allant pas au hockey demain soir à Montréal, je suis
obligé d'y aller ce soir.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Au hockey?
M. Duhaime: Non. Je ne vais pas au hockey demain soir. Je ne peux
pas concilier mes horaires, mais je dois être à Montréal ce
soir. Je dois prendre l'avion et j'ai des rendez-vous qui étaient
programmés pour cet après-midi, que j'ai décalés
à partir de 19 heures. À 19 heures, je pense que les
contribuables vont considérer qu'on a gagné notre
journée.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Vous ne parlez pas pour vous
autres, je présume.
Déclarations d'ouverture M. Yves
Duhaime
M. Duhaime: Je parle toujours en mon nom seulement, en
n'engageant personne.
M. le Président, je voudrais simplement prendre quelques minutes
bien brèves pour engager ce débat d'une dizaine d'heures pendant
les journées qui vont suivre dans le cadre du discours sur le budget et
essayer de faire ressortir quelques-uns des éléments de ce
budget. Je vais devoir parler du réaménagement de la
fiscalité, de l'impôt sur le revenu des particuliers. Dans un
deuxième temps, je vais vous dire de quelle manière ce budget a
été orienté vers le soutien à l'économie et
à la création d'emplois. Troisièmement, je vais vous
indiquer quels sont les équilibres financiers que j'ai retenus pour
boucler ce budget.
Nous avons, le 10 janvier dernier, déposé un livre blanc
sur la fiscalité des particuliers qui est une réforme très
importante. J'avais pris la précaution de dire égalemement,
à ce moment-là, que cela n'empêcherait pas pour autant le
gouvernement de retenir quelques-uns des éléments de cette
proposition de réforme et de faire un début de
réaménagement à l'occasion du discours sur le budget qui,
dès janvier 1985, était d'ores et déjà en
préparation, comme vous pouvez vous en douter.
Il y a peut-être deux choses à dire immédiatement.
La première est qu'au fil des années notre gouvernement, comme
celui qui l'a précédé, comme celui qui a
précédé celui qui nous a précédés et
les autres, ont ajouté des programmes de transfert, ont modifié
la fiscalité des particuliers au Québec, de sorte qu'on se
retrouve aujourd'hui, jusqu'à l'adoption de ce budget, dans une
situation un peu curieuse, pour ne pas dire dans une complication presque
inextricable, en ce sens qu'un contribuable peut se retrouver, à la fois
dans le régime de transfert et dans le régime de
fiscalité; c'est-à-dire que le même individu reçoit
de l'État de la main gauche ce qu'il lui retourne de la main droite sous
forme d'impôt et de taxe de vente.
Une des lignes de force du livre blanc est d'aller vers l'objectif
suivant, qui consisterait à dire que, désormais ou
dorénavant - c'est l'objectif à moyen terme - un contribuable au
Québec se retrouverait ou bien dans le régime de transfert,
c'est-à-dire bénéficiaire de transfert de l'État,
ou encore dans le régime de fiscalité, c'est-à-
dire qu'il serait cotisé sur ses revenus, paierait un impôt
et paierait également sa taxe de vente au moment où il fait
l'achat de biens de consommation.
La deuxième ligne de force est de faire en sorte que le
réaménagement ne permette plus dans notre système de
fiscalité qu'un contribuable ait à payer de l'impôt sur le
revenu au Québec sur la partie de son revenu disponible qui lui est
nécessaire pour faire face à ses besoins essentiels. C'est un peu
mon devoir que de souligner ces aspects très positifs du budget, parce
que je pense que le rôle de l'Opposition consiste à critiquer. Si
elle ne nous critiquait pas, on lui en ferait le reproche.
Je vais donner deux exemples. Je vous renvoie à la page A-6 du
discours sur le budget. Je prends l'exemple d'un couple avec deux enfants, un
conjoint au travail. En 1985, les besoins essentiels sont établis
à 12 690 $ et, en 1985, les exemptions actuelles de ce couple avec deux
enfants avec un revenu de travail sont de 9240 $, ce qui veut dire que sur tout
près de 3400 $ de revenus nécessaires à faire face aux
besoins essentiels de ce ménage avec deux enfants, ces gens paient de
l'impôt sur le revenu des particuliers à Québec.
Je vais en donner un autre: un couple avec un enfant, un conjoint au
travail. Leurs besoins essentiels en 1985, 11 359 $; l'exemption globale
actuelle est de 9240 $, ce qui veut dire que sur 2100 $, en arrondissant, ce
couple avec un enfant, un revenu de travail, paie de l'impôt sur le
revenu des particuliers alors qu'il n'a même pas un revenu disponible
exempté pour lui permettre de faire face à ses besoins
essentiels.
Qu'est-ce que fait le réaménagement qui est proposé
dans le discours sur le budget? Je reviens à mon premier exemple: un
couple avec deux enfants, un conjoint au travail. Ses besoins essentiels sont
évalués, en 1986, à 13 083 $. Le total des exemptions
après réaménagement par le discours sur le budget, 13 080
$.
L'autre exemple que je donnais: un couple avec un enfant, un conjoint au
travail. En 1986, les besoins essentiels sont de 11 711 $; le total des
exemptions après réaménagement, 11 710 $. J'ai
donné ces deux exemples, je pourrais vous en donner six et je pourrais
vous les donner pour 1987-1988.
La première règle de justice et d'équité
fiscale, à ce qu'il me semble, c'est de ne pas prélever
d'impôt sur le revenu des particuliers pour ce qui est de la partie qui
est nécessaire à une famille normale, à un couple sans
enfant ou même à une personne célibataire vivant seule dans
son logement ou encore partageant un logement. En aucun cas, aucun
Québécois ne paiera un traître sou à l'impôt
sur le revenu des particuliers sur la partie de son revenu nécessaire
pour faire face à ses besoins essentiels ce qui a impliqué un
réaménagement des exemptions. Chose importante, j'ai introduit
dans le discours sur le budget l'exemption pour enfants à charge de
moins de seize ans, ce qui n'existait pas auparavant. Alors, c'est 1870 $ pour
le premier enfant, 1370 $ pour le deuxième. Si on fait un simple calcul
sur la base du taux marginal minimal, qui est de 13 %, c'est vite compté
que, par rapport à l'allocation familiale de 7, 05 $ par mois pour le
premier enfant, tout le monde gagne. J'ai également augmenté les
frais de garde, les frais pour aller travailler. Cela veut dire que les
salariés et leurs familles sont très fortement avantagés
par ce budget.
Pourquoi les couples avec enfants sont-ils les plus avantagés? Je
souligne que, sur un montant de 245 000 000 $ qui est retourné à
l'ensemble des ménages, ceux-ci avec des enfants vont
bénéficier de 208 000 000 $ qu'ils vont se partager.
J'ai également aboli les droits de succession, en passant. Il
existe au Québec depuis 1892, le premier droit de succession qui a
été imposé. Tout le monde en parlait, incluant le Parti
libéral, mais personne ne le faisait. Alors, on a décidé
de régler cela. Je pense que, aujourd'hui, personne ne va s'en
plaindre.
Une voix:...
M. Duhaime: Oui, parce que, depuis Louis-Alexandre Taschereau,
des rouges, à Québec, il y en a eu beaucoup et personne n'y a
touché.
J'ajoute, M. le Président, que j'ai modifié la table de
l'impôt. Â partir du 1er janvier 1986, la table de l'impôt va
passer de 33 % à 30 % et, au 1er janvier 1987, de 30 % à 28 %.
À première vue, on peut penser que ce sont les hauts revenus qui
sont favorisés. Mais, je vous rappelle que ceux qui ont un revenu
imposable à partir de 17 160 $ sont visés par cette mesure et
tirent profit de cette diminution du taux maximal d'imposition. À 17 200
$, 17 500 $, il n'y a pas lieu de parler de hauts revenus.
J'ai introduit aussi cette nouveauté, l'impôt minimal. J'ai
toujours été assez scandalisé de lire des manchettes de
presse. Je dois dire que ce nombre de contribuables allait croissant pour des
gens qui gagnent 125 000 $ et qui ont droit aux services comme tout le monde:
les hôpitaux, leurs enfants à l'école, toute la panoplie de
services sociaux, services d'éducation, services aux entreprises, etc.,
que l'État pourvoyeur donne à l'ensemble de la population, et que
ces gens arrivaient à présenter une feuille vierge à
l'impôt. On a introduit l'impôt minimal. Je n'ai pas eu de
félicitations de l'Opposition à cet égard. Je me demande
comment cela se fait.
(17 heures)
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je vous expliquerai pourquoi
tout à l'heure.
M. Duhaime: On a introduit un premier montant de 20 000 $ et
ensuite 40 %.
Maintenant, M. le Président, je voudrais limiter mes remarques
à ce volet du budget pour l'instant et vous dire comment ce budget va au
soutien de l'économie et à la création d'emplois. Je
rappelle essentiellement que, au cas où l'Opposition libérale
l'aurait oublié, en 1981, il y a eu une crise économique et une
récession, pas seulement au Québec. Si c'était
arrivé seulement au Québec, on dirait: Nous sommes un cas
à part. C'est arrivé dans le monde entier. La croissance de la
production a chuté à peu près partout, les taux
d'intérêt ont augmenté beaucoup plus
considérablement ici au Canada, à cause d'une politique
monétaire arriérée, si vous voulez mon opinion. Il y a des
amis du Parti libéral qui étaient à Ottawa à
l'époque et les taux d'intérêt ont monté à
22, 5 % et à 23 %. On a connu cela, dans nos ministères:
rencontrer des hommes d'affaires et des investisseurs et essayer de les
convaincre d'aller de l'avant avec des projets de 200 000 $, de 10 000 000 $
aussi bien que de 200 000 000 $, 300 000 000 $ ou 500 000 000 $. On a donc
perdu aussi beaucoup d'emplois. En 1982, cela a cogné dur aussi. On a eu
une reprise en 1983 et en 1984, de sorte que c'est au Québec que la
récupération des emplois, au sortir de la crise, est la plus
prononcée.
Les membres de l'Opposition, M. le Président, diront ce qu'ils
voudront. Ils sortiront des tableaux avec des zéros, pour s'identifier
tant qu'ils le veulent, le Québec, depuis deux ans, a créé
le tiers des emplois de tout le Canada; c'est un fait, cela ne peut pas se nier
et cela a donné 80 000 emplois, grâce à divers programmes
que le gouvernement avait mis de l'avant. Je ne dis pas que, si les emplois ont
été récupérés, cela dépend
essentiellement des mesures et des politiques du gouvernement du Québec;
ce n'est pas ce que je dis. Je dis que nous avons soutenu cette
récupération par nos programmes - aide aux entreprises, par
exemple - et cela donne des résultats qui ne sont pas encore
satisfaisants, je n'en disconviens pas. Le taux de chômage, dans
l'état où il se trouve aujourd'hui, est trop élevé
et on va continuer de travailler pour le diminuer.
La question très simple qu'il faut se poser, c'est: Qui
crée le plus grand nombre d'emplois au Québec? La réponse:
nos petites et moyennes entreprises. Elles ont créé, en 1984, sur
les 80 000 emplois, 60 % de ces emplois. Il m'est apparu assez évident,
dans la préparation de ce budget, qu'il fallait aider davantage les PME
pour leur permettre de prendre de l'expansion, d'investir, donc de créer
des emplois au cours de leur modernisation. Il fallait donc les aider à
se restructurer financièrement. C'est un problème qui a
été évoqué par le rapport Saucier, je crois, et
cela a été évoqué à peu près par tout
le monde.
Comme première mesure, on a modifié le Régime
d'épargne-actions pour faire en sorte que plus d'argent devienne
maintenant disponible tout en bénéficiant de l'avantage fiscal,
pour que cet argent puisse être mis à la disposition des PME.
Dans le budget, vous allez retrouver aussi la création de
sociétés de placement dans l'entreprise québécoise.
Il y a les nouvelles SODEQ. Vous avez un régime d'investissement
coopératif. Vous avez une formule d'intéressement des
travailleurs. L'ensemble de ces mesures devrait permettre à nos PME d'en
profiter au maximum, de se restructurer, de se retourner ensuite, en ayant
solidifié leur base. Cela augmente leur capacité d'emprunt, donc
d'investissement dans l'expansion.
Sans pouvoir vous dire combien de nouveaux emplois vont découler
de cela - je ne pourrais pas avancer de chiffres - il y a gros à parier
qu'il devrait arriver quelque chose sur le terrain. J'ai pensé aussi
qu'après toutes ces années qui sont derrière nous, qui ont
été plutôt des années, pour un bon bloc,
rattachées à la révolution tranquille, il était
peut-être devenu opportun de se poser un certain nombre de questions sur
la présence de l'État dans l'économie. Je vais être
bref à ce sujet.
J'ai fait deux propositions dans le discours sur le budget: la mise en
vente de tout le réseau de distribution de la SAQ par laquelle on va
pouvoir désengager l'État pour que le secteur privé prenne
le relai et, de la même manière, dans la même foulée,
une proposition d'associer les Québécois à leur grande
entreprise, Hydro-Québec, en leur permettant désormais d'y
détenir des actions privilégiées. Cela va
représenter quelques centaines de millions de dollars qui vont revenir
au gouvernement, l'actionnaire de ces deux entreprises. Cet argent va
être recyclé de la manière suivante: ou être
redéployé dans ce que j'appellerais un fonds de
développement des ressources, ou encore un fonds de développement
des ressources et des technologies. Avec l'ensemble des revenus, dont les
dividendes d'Hydro-Québec, dont les redevances hydrauliques, les droits
de mines, les droits de coupe en forêt et les dispositions d'actifs, on
évalue à une somme d'à peu près deux milliards et
demi de dollars sur cinq ans l'argent qui serait canalisé par ce fonds
et qui serait recyclé exclusivement dans le développement
économique, donc, des ressources, des technologies. Cela veut dire aussi
le développement économique de nos régions.
J'ai également annoncé des mesures pour ce qui est du
secteur minier, du secteur agricole, et à l'avantage aussi des
propriétaires de boisé privé. Cela représente
plusieurs dizaines de millions de dollars qui sont retournés aux
entreprises pour les aider.
Maintenant, c'est mon dernier point, M. le Président, je n'ai pas
voulu m'amuser à faire mentir le député de
Vaudreuil-Soulanges qui nous avait prédit un déficit de quatre
milliards de dollars...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):... sans augmentation de
taxes.
M. Duhaime: J'ai décidé...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): On a eu des augmentations de
taxes.
M. Duhaime:... de ramener le déficit qui était
prévu l'an dernier, l'année en cours, à 3 175 000 000 $...
Nous avons terminé l'exercice financier 1984-1985 avec 3 175 000 000 $
de déficit. Ce qui a donné comme résultat aussi que les
besoins financiers nets qui avaient été prévus à 2
100 000 000 $ ont été ramenés a 2 020 000 000 $ et, une
fois l'année complètement fermée, les besoins financiers
ont été de 2 002 000 000 $. La politique budgétaire du
gouvernement a un fil conducteur qui consiste à utiliser la marge de
manoeuvre du gouvernement et l'extension de son déficit durant les
années difficiles pour aider les entreprises, pour aider aussi les
citoyens à passer à travers cette crise. Mais, lorsqu'on sent que
la reprise économique est là, qu'on sort du rouge -sans jeu de
mots - on ne peut plus se permettre, à mon sens, de continuer d'avoir un
déficit à la hauteur de celui que nous avons connu, parce que
cela entraîne une augmentation de la dette à un rythme qui ne
m'apparaît pas approprié en période de reprise, même
si elle est plus faible en 1985 par rapport à 1984. Cela veut donc dire
qu'avec un déficit ramené à 3 095 000 000 $ les besoins
financiers nets passent de 2 002 000 000 $ à 1 600 000 000 $. Je pense
que cela mérite d'être souligné. Nous allons emprunter
beaucoup moins l'an prochain.
Maintenant, pour en arriver à boucler ce budget, il a fallu lever
des impôts. L'Opposition, M. le Président, dira ce qu'elle voudra,
mais je la mets au défi d'appliquer son programme, d'appliquer votre
programme et de dire que le déficit n'augmentera pas, et de livrer la
marchandise que vous avez annoncée qui consiste à en remettre
pardessus pour les montants suivants. Le programme du Parti libéral est
très amusant.
II me reste trois minutes et je n'en ai pas besoin davantage. La
fiscalité, la dette publique, la résolution no 2, l'orientation
générale: une série de promesses d'abolition de taxes
qu'on dit bien progressivement: les droits de succession, j'avais mis 45 000
000 $ à l'époque; les carburants, on parle de redescendre
l'ascenseur au vingtième étage, 340 000 000 $; la surtaxe de
vente de 9 % à 8 %, c'est 307 000 000 $, tout cela fait 692 000 000 $.
J'ajoute votre engagement à indexer les exemptions de base, ce que vous
n'avez jamais fait pendant sept ans, de 250 000 000 $. Le numéro deux du
Parti libérai, le député de Brome-Missisquoi, a
annoncé qu'il donnerait une allocation de 200 000 000 $ dans les
affaires sociales pour régler, semble-t-il, le problème des
urgences...
Une voix: Vous en avez oublié un.
M. Duhaime:... et la parité des jeunes à l'aide
sociale, une autre somme de 200 000 000 $. Cela fait 650 000 000 $; si je
compte vite, cela fait 1 342 000 000 $...
M. Laplante: Plus 200 000 000 $ de construction de centres
d'accueil, selon ce qu'il a annoncé.
M. Duhaime:... plus 200 000 000 $ de construction de centres
d'accueil, alors, je vais corriger mes chiffres, cela fait 1 542 000 000 $;
plus - là, c'est plus vague un peu - quant à la taxe sur les
assurances, en fin de semaine, on ne savait pa3 trop... Cela ne
m'étonnerait pas beaucoup que M. Bourassa annonce qu'il va s'engager
à l'abolir. Alors, vous allez ajouter environ 350 000 000 $ à la
facture, cela vous donne 2 000 000 000 $ d'engagements et la campagne
électorale n'est pas encore commencée.
Alors, je voudrais, en terminant dire que, oui, effectivement, j'ai
choisi d'imposer une taxe sur les primes d'assurance, parce que c'est un
marché qui a l'air lucratif. Le total des primes perçues au
Québec par les compagnies en 1983 a été de 5 156 600 000
$. L'année 1984 devrait être à peu près dans le
même ordre de grandeur. On parle donc d'un marché de 5 200 000 000
$. Que des compagnies d'assurances soient furieuses et en colère contre
le ministre des Finances, c'est d'accord, on défend son marché.
Mais, j'ai mieux aimé prendre cette mesure plutôt que de
rebâtir le système fiscal qui existait sous M. Bourassa, lequel
consistait à imposer les vêtements qui sont des besoins
essentiels, à imposer les chaussures qui sont des besoins essentiels,
à imposer le textile. Même les patins pour nos enfants
étaient imposés sous M. Bourassa de même que les
cuisinières et les réfrigérateurs. Tout cela ensemble veut
dire à peu près 450 000 000 $. C'est mon choix, M. le
Président, et on est un peu coincé par deux choses: le fait que
nos
prédécesseurs au gouvernement n'ont jamais payé,
commes employeurs, leurs contributions au régime de retraite de leurs
propres employés - on paie, cette année, 360 000 000 $ pour cela
- et la dette olympique, cette année, nous coûte 124 000 000 $. On
a aussi la péréquation où il y a un manque à gagner
très important. J'aurai l'occasion d'y revenir.
Je pense que, quand on a le choix de lever des taxes et des
impôts, on essaie de faire en sorte que cela fasse le moins mal possible.
C'est la décision que, malheureusement, j'ai été
obligé de prendre parce qu'il y a une impossibilité
mathématique. Si on enlève le charriage, les grands discours,
quand arrive le temps de faire l'addition, deux et deux font quatre de ce
côté-ci comme de l'autre côté, M. le
Président.
Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre. Je vous
signale que vous avez pris 23 minutes du temps. Oui, M. le député
de Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, conformément à
notre règlement, j'aimerais demander le consentement de la commission
pour pouvoir intervenir à cette commission.
Le Président (M. Lachance): D'accord, M. le
député. Il n'y aura pas de problème.
M. Duhaime: Apparemment qu'on peut aller...
Une voix: L'enveloppe de temps.
Le Président (M. Lachance): Je ne pense pas que cela cause
des problèmes quant à l'enveloppe de temps.
M. Tremblay: II faudra la réaménager. Non pas que
j'aie une objection, mais je pense qu'on devrait régler cela.
M. Duhaime: Je n'ai pas d'objection, M. le Président. Avec
le consentement, on peut aller très loin.
M. Paquette: Parce qu'il y a ma collègue aussi qui veut
intervenir, bien sûr.
Mme Le Blanc-Bantey: J'imagine que, dans l'enveloppe du temps, il
y a du temps qui a dû être prévu pour moi parce que je
siège d'office à cette commission. On partagera, mon
collègue et moi, le temps qui nous a été
alloué.
Une voix: II faut que vous demandiez cette permission à la
présidence.
Le Président (M. Lachance): II y a deux
députés indépendants qui sont membres de la commission. Si
on calcule la répartition par rapport à l'ensemble des membres de
la commission, cela ferait à peu près un huitième. Donc un
huitième du temps, cela voudrait dire un petit peu plus qu'une heure sur
les heures qui sont consacrées aux travaux de la commission. Je pense
que cela ne devrait pas poser de problème majeur.
M. le député de Vaudreuil-Soulanges, vice-président
de la commission et porte-parole de l'Opposition.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président.
(17 h 15)
M. Fortier: II a bien d'autres titres à part cela.
M. Daniel Johnson
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Député de
Vaudreuil-Soulanges surtout, d'abord et avant tout, à temps plein, M. le
Président.
Je ne sais trop comment aborder cet objet informe que le ministre nous a
présenté à l'occasion de l'étude du budget en
commission, sinon pour déplorer que la seule continuité que je
vois avec la façon dont son précédesseur avait de se
comporter, c'est que le ministre des Finances et député de
Saint-Maurice emploie le verbe "disconvenir". On se souviendra que la marque de
commerce de l'ancien député de L'Assomption était de ne
pas disconvenir de ceci et de ne pas disconvenir de cela. Je vois que c'est un
mot qui fait maintenant partie du vocabulaire, non pas du ministre des
Finances, mais du ministère des Finances.
Par ailleurs, je suis également extrêmement surpris du ton
qu'emprunte le ministre actuel pour discuter de la politique budgétaire
du gouvernement. À l'occasion de l'étude du discours sur le
budget, on nous avait habitués, depuis plusieurs années, avec le
député de L'Assomption - et, j'en suis sûr, avec ses
prédécesseurs que je n'ai pas connus à l'Assemblée
nationale - à discuter de choses de fond quant au plan fiscal que le
gouvernement mettait de l'avant à l'occasion du discours sur le budget,
quant aux raisons de fond, aux raisons philosophiques, aux raisons qu'on
pourrait dire idéologiques même qui président à des
grands choix de réaménagement de la fiscalité au
Québec à l'occasion du discours sur le budget.
Tout ce à quoi on a eu droit ici, c'est à une série
d'affirmations purement gratuites, notamment que personne au Québec,
depuis 1892, n'avait touché aux droits de succession. Les dossiers
démontreraient, noir sur blanc - l'ancien député de
L'Assomption n'aurait pas eu la témérité d'affirmer une
chose comme celle que le député de Saint-Maurice a
affirmée -que M. Raymond Garneau, ministre des Fi-
nances sous l'administration libérale de 1970 à 1976,
avait entrepris un programme de désengagement total et d'abolition
totale des droits de succession, programme qui aurait connu son
résultat, sa fin, probablement en 1978 ou 1979, au rythme où cela
avait été annoncé; cela avait commencé à
être mis en vigueur. C'est le gouvernement actuel qui a
décidé de mettre le holà à cette abolition, de
façon étonnamment servile. La majorité
ministérielle a applaudi à tout rompre le 23 avril, après
avoir applaudi à tout rompre le prédécesseur du ministre
des Finances à l'occasion de l'étude d'une motion du
député de Sainte-Marie, si ma mémoire est bonne,
réclamant l'abolition des droits de succession, ce à quoi M.
Parizeau s'était opposé fermement avec un million de raisons pour
ne pas bouger, pour être applaudi à tout rompre par les
mêmes gens qui sont devant nous, aujourd'hui. Ils se félicitent
d'avoir adopté une des résolutions que le Parti libéral du
Québec met de l'avant depuis plusieurs années.
Un peu la même chose est vraie quant aux commentaires du ministre
sur les besoins essentiels. On sait pertinemment que c'est une notion
relativement volatile et changeante. Il y a un tas de gens, qu'ils s'appellent
Statistique Canada, le Conseil canadien du développement social, le
Montreal Diet Dispensary ou je ne sais trop, et chacun a ses mesures, ses
critères pour évaluer quels sont les besoins essentiels. Il y a
même des gens qui, de longue date, considèrent que, pour une
famille, c'est essentiel de se procurer une couverture d'assurance-vie, au
point de vue de la protection familiale. Je ne semble pas voir, dans la liste
des besoins essentiels qui sont retenus par le gouvernement, que le paiement
des primes d'assurance-vie, d'assurance-maladie, d'assurance-salaire pour ceux
qui sont dans des conditions où ils doivent voir à cette
éventualité, le ministre aurait retenu cela.
Un peu encore le même genre d'étonnement de ma part de voir
le ministre nous expliquer que c'est scandaleux. Il l'a exprimé, il n'a
pas expliqué; justement, c'est cela que je trouve assez particulier. Le
ministre nous a exprimé son étonnement de voir que des gens, qui
font des revenus bruts assez élevés, ne paient pas d'impôt.
Oui, c'est bien évident, on le sait tous. Une des raisons pour
lesquelles les gens y parviennent, c'est qu'il existe des programmes comme le
Régime d'épargne-actions, qui permet de déduire 150 % de
la dépense brute, donc, de diminuer considérablement le revenu
imposable, pour en arriver, en fin de compte, à des gens qui se sont
prévalus des programmes de dépenses fiscales, qui ont
été mis de l'avant par des gouvernements successifs, afin
d'encourager certains secteurs. On peut penser à l'exploration
minière, à la construction domiciliaire, les édifices
classe 31, je pense, comme on les appelle au point de vue fiscal; cela donnait
lieu à des déductions assez considérables, ma foi, en
contrepartie d'un risque très certain que des gens acceptaient de
courir, comme peuvent en témoigner des gens qui ont acheté des
actions admissibles au Régime d'épargne-actions, qui pouvaient
déduire 150 % de leur coût pour se retrouver avec 0 % de la valeur
ou à peu près, dans certains cas qu'il est inutile de mentionner
ici. C'est inutile de faire de la mauvaise publicité à certaines
sociétés québécoises qui ont émis à 8
$, 9 $, 10 $, des actions qui aujourd'hui se transigent à 0, 40 $. C'est
la réalité des choses et, malheureusement, c'est une perte qui
est essuyée par des gens qui ont décidé qu'ils avaient les
moyens d'essuyer ces pertes. Ils ne paient pas d'impôt; c'est bien la
moindre des choses. En attendant, on a permis de capitaliser certaines
entreprises qui en avaient besoin et le gouvernement du Parti
québécois, lui-même, a décidé de donner une
déduction de 150 % à des gens à l'égard d'une
dépense qu'ils feraient s'ils capitalisaient ou contribuaient à
la capitalisation d'une petite ou d'une moyenne entreprise
québécoise. Venir, aujourd'hui, leur reprocher que, en
conséquence, certaines de ces personnes ne paient pas d'impôt,
c'est un peu étonnant; c'est le moins qu'on puisse dire. Le manque de
logique est aveuglant.
La raison pour laquelle on avait ces débats en commission
parlementaire, je le répète, était d'essayer de
concentrer, autrement qu'à l'Assemblée nationale... Les discours
du ministre, comme celui qu'il vient de nous tenir, sont parfaitement les
bienvenus, ils sont la norme, tout autant que sur les estrades de La Mauricie
en temps de campagne électorale. Les discussions que nous avions en
commission étaient plutôt orientées vers une étude
à tête un peu plus reposée, à sentiments moins
échaudés et à partisanerie moins à fleur de peau
des équilibres financiers et des choix budgétaires qui avaient
été faits, de la tendance lourde qu'on peut observer dans les
finances publiques qui, dans certains postes, peut permettre au gouvernement de
se féliciter de ses efforts - je suis sûr que le ministre ne
manquera pas l'occasion de le faire - et qui, dans d'autres cas, éveille
des inquiétudes très certaines quant à l'avenir de la
santé des finances publiques au Québec.
Nous avons évoqué déjà à
l'Assemblée nationale - et nous continuerons à le faire, les
chiffres sont là, quant à nous, pour le démontrer - qu'il
y a, pour le moins qu'on puisse dire, une certaine précarité aux
équilibres budgétaires. Les projections mécaniques que
nous avions utilisées il y a environ un mois pour parler d'un
déficit possible qui pouvait toucher et même
dépasser les 4 000 000 000 $ sans augmentation d'impôt se
sont avérées exactes. Si on redresse - j'ai eu le plaisir de le
faire, à l'Assemblée, le 23 avril - les équilibres
financiers pour tenir compte de la non-indexation, de l'imposition des primes
d'assurances, à ce moment-ci, pour l'année 1985-1986, de la taxe
sur le tabac qui a été également augmentée et d'un
tas de petites choses de cette nature, si des 135 000 000 $ et des 400 000 000
$ sont des petites choses, on en arrive à 4 103 000 000 $ de
déséquilibre budgétaire que le ministre a corrigé
avec des décisions, avec des choix budgétaires comme ceux que je
viens d'énoncer, notamment les augmentations de taxe.
Donc, notre diagnostic de précarité des finances publiques
tient toujours. Il ne tient pas pour cette année avec un déficit
de 3 095 000 000 $ parce que là, on a le discours sur le budget, on a eu
le cadeau des augmentations de taxe et cela balance à 3 095 000 000 $;
ce n'est pas précaire, cela. Les Québécois vont payer
beaucoup plus d'impôt que l'an dernier. Il y a une différence dans
les revenus autonomes de 1 688 000 000 $ par rapport à l'an dernier.
C'est venu de quelque part; c'est 10, 6 % d'augmentation pendant qu'il y a 2, 5
% d'augmentation réelle de la richesse des Québécois. Ne
venez pas nous dire que les impôts sont le fardeau des revenus autonomes.
Le revenu autonome que le gouvernement du Québec fait peser sur les
Québécois ne permet pas de conclure à un alourdissement du
fardeau fiscal. Le revenu autonome, cela vient d'où surtout?
J'aimerais isoler, à ce moment-ci, deux éléments.
L'un qui se répercute directement sur les Québécois: au
titre de l'impôt sur le revenu des particuliers, il y a un manque
à gagner qui, de façon systématique, peut être
observé entre les prévisions que le ministre peut faire des
revenus à venir pour l'année à l'égard de laquelle
il prononce le discours sur le budget, d'une part, et les résultats
réels, en fin de compte, qu'on peut observer. On en a parlé
à l'Assemblée nationale et cela n'a pas été
nié. Enfin, les chiffres, les états financiers et les discours
sur le budget sont là et, quand on compare, on voit qu'il y a une erreur
systématique, toujours dans le même sens, qui est de l'ordre de
250 000 000 $ par année. L'impôt sur le revenu des particuliers
n'arrive jamais, au bout d'une année fiscale, depuis 1977-1978, selon
les prévisions du ministre. Il lui manque toujours environ 220 000 000
$.
Par ailleurs, cela a été équilibré d'une
année à l'autre et c'est absolument frappant. Cela a
été équilibré quand on regarde encore une fois les
discours sur le budget et les prévisions de fonds qui viendraient du
gouvernement fédéral et qu'on compare avec les résultats
réels que le Vérificateur général nous soumet quand
cela est vraiment net, précis et approuvé par tout le monde. Ces
228 000 000 $ qui manquaient ont été équilibrés par
environ 200 000 000 $ de plus qui venaient de transferts du
fédéral. C'est précisément cela, la nature du
fédéralisme canadien. Il y a un ascenseur, un monte-charge:
lorsqu'il y a un côté plus léger, l'autre,
évidemment, fait contrepoids. Cela marche dans les deux sens. On peut se
plaindre que, quand cela va bien au Québec, le fédéral
nous envoie moins d'argent. J'entends les ministres successifs du gouvernement
du PQ nous dire que, depuis 1976, cela n'a jamais été aussi bien
et, en même temps, dénoncer évidemment que la
péréquation les désavantagera pour réaliser, en fin
de compte, à chaque année, qu'il y a eu 225 000 000 $ de plus qui
sont entrés. Donc, cela ne devait pas aller si bien que cela, à
tel point qu'à un moment donné on est obligé de l'admettre
dans toutes sortes de phrases à droite et à gauche.
Si on commence, dans les Renseignements supplémentaires, annexe
II, page 5, évidemment, petit problème quant au revenu de
l'impôt sur les particuliers parce que, je cite: "Ainsi, la progression
des salaires moyens pour l'ensemble des industries a été, en
1984, inférieure à l'évolution de l'indice des prix
à la consommation. " On peut retrouver cela également à la
page 7 du discours sur le budget. On trouve à la page 6, toujours de
l'annexe II des Renseignements supplémentaires, une phrase qui confirme
ce qui peut être observé quand on regarde le Québec tout
seul quant à ses revenus autonomes. Mais, quand on élargit un
petit peu et qu'on regarde ce qui vient du fédéral au titre des
financements des programmes de santé, de l'enseignement postsecondaire,
des autres transferts liés aux accords fiscaux, etc., on peut lire la
phrase qui, pour des non-techniciens, paraît bien mystérieuse, que
les augmentations de transferts du fédéral viennent notamment
d'une révision à la baisse de l'impôt fédéral
de base et, donc, de la valeur des points d'impôt utilisée dans la
détermination du transfert financier à ce titre. C'est une autre
espèce de façon de dire que l'économie ne va pas aussi
bien qu'on pensait. On n'a pas vraiment reçu tout ce qu'on croyait
recevoir et il y a une espèce de compensation qui se perd. Nous en
bénéficions. C'est passager dans le sens que c'est conjoncturel,
mais la réalité est qu'il y a un problème d'érosion
- il y a toutes sortes de façons de le dire - de l'assiette fiscale sur
laquelle on perçoit l'impôt sur le revenu des particuliers.
Il y a des études qui ont été faites. On en a
parlé en Chambre, on va en parler ici parce que le ministre n'a pas
répondu, quant à nous. Quand on regarde par tranches de revenu la
composition du corps des contribuables, il y a de moins en moins de
Québécois bien rémunérés - bien, en
tout cas, en haut de l'échelle quand on fait une distribution. Il y a
moins de Québécois, proportionnellement à la population au
Canada, qui se retrouvent dans les tranches de revenus élevés. On
voit tout de suite, d'ailleurs, qu'à l'intérieur de ce groupe il
y a le sous-groupe des gens qui ont des revenus de placements. Qui sont-ils,
les gens qui ont des revenus de placements? Ce sont les gens d'une entreprise.
Ce sont les gens qui sont des hauts cadres d'entreprises, à certains
égards. Ce sont des propriétaires. Ce sont ceux qui font marcher
l'économie. Ce sont ceux qui ont pris un risque, qui ont investi, qui
ont réussi et qui ont créé des emplois. Ils ont des
revenus de placements. C'est la nature des choses. Ils n'ont pas des salaires,
ils ont des dividendes, des intérêts sur des placements. Cette
part qu'on occupe au Canada, compte tenu de notre population, a diminué.
Il y a un phénomène qui devrait être inquiétant pour
un ministre du Revenu, d'abord et avant tout, parce qu'il ne percevra pas
autant qu'il croyait, mais c'est surtout inquiétant pour un ministre des
Finances parce que, lui, ses équilibres budgétaires
dépendent beaucoup de cette vache à lait qu'est l'impôt sur
le revenu des particuliers. (17 h 30)
II y a également, quand on regarde par tranches de revenu, les
emplois occupés par les gens tout simplement. Si on, associe tranche de
revenu et qualité d'un emploi -on va oublier les revenus de placements -
il y a également ce déplacement depuis une dizaine
d'années, et avec une accélération assez formidable depuis
1978, du mélange, de la répartition des emplois, de la
qualité des emplois au Québec, compte tenu du profil qu'on
observe à l'échelle du Canada. On examine également les
chiffres sous un autre angle, soit celui des emplois à temps complet,
à temps partiel, des emplois temporaires.
On voit que, là aussi, on a plus que notre part des emplois qui
permettent de dire qu'il y a des chômeurs à temps partiel ou des
travailleurs à temps partiel. Autant de choses qui sont observables,
incidemment - je le dis au ministre - dans l'ensemble du Canada, mais dans une
moindre mesure, je dirais même dans l'ensemble de l'Amérique dans
une moindre mesure encore, quand on regarde les États-Unis. Ce sont des
phénomènes qui sont observés un peu partout quant à
la répartition, la qualité des emplois, les tranches des revenus,
pas une égalisation, on n'en est pas encore rendu à une grande
équité dans notre société, une grande
égalité, mais, chose certaine, au Québec, c'est un
phénomène qui est beaucoup plus précis.
On s'attendrait que le ministère des Finances avec tout son
équipement, son appareil ou, alors, par volonté de vouloir faire
cela aurait commencé à regarder pourquoi il y a une
érosion de l'assiette fiscale du côté de l'impôt sur
le revenu des particuliers au Québec. On n'a encore rien.
Cela ne fait pas longtemps qu'on soulève cela, il faut
l'admettre. C'est de la faute de l'Opposition. On ne vous a pas fait remarquer
qu'il y avait des choses qui se passaient. Maintenant qu'on vous le dit,
dites-nous, pour le moins, à partir de quel moment vous allez commencer
à vous pencher sur un phénomène pour lequel, dans
l'Opposition, "sans machine à saucisses", comme disait le
prédécesseur du ministre des Finances, on n'est pas
équipé mécaniquement, on n'a pas les ordinateurs, on n'a
pas les banques de données que le ministère du Revenu a. On n'a
pas l'accès à toutes sortes de documents que le ministère
des Finances a dans le cours normal des choses, si on en croit les
réponses qu'on a eues à l'occasion de l'étude des
crédits depuis quelques années. Il y a des gens à
l'étude des politiques fiscales, etc. Il y a de l'équipement
sophistiqué, il y a des modèles qui se promènent dans le
portrait et qu'on utilise. Cela sert à quoi? Pour savoir comment cela se
fait qu'il y a une érosion de l'assiette fiscale au titre de
l'impôt sur le revenu des particuliers au Québec de façon
systématique depuis plusieurs années. Cela n'a rien à
faire avec le programme du Parti libéral du Québec, cela n'a rien
à faire avec les discours partisans du ministre des Finances ou de ses
collègues, cela n'a rien à faire avec toutes ces choses. C'est
une question qui est du ressort immédiat et concret de la tenue de cette
commission. On aimerait avoir des réponses.
Malheureusement, je suis en train de soupçonner, d'après
la présentation du ministre tout à l'heure, qu'il ne compte pas
du tout parler de choses importantes pour les finances publiques. Il est en
train de se réchauffer pour les discours électoraux.
Présumément qu'il va aller prêter main-forte dans le
comté de Trois-Rivières; c'est dans sa région. Il est le
parrain de la région. Si la colère - pour employer un terme un
petit peu fort - des gens de la région devant les nouvelles taxes qu'il
a imposées n'est pas telle qu'il sera empêché de parler
pendant les assemblées publiques du PQ dans le comté de
Trois-Rivières, là, il pourra faire des discours partisans
à tour de bras.
Mais, ici, on a une bonne occasion de savoir où les finances
publiques s'en vont. On a parlé de l'érosion de l'assiette
fiscale. On va peut-être avoir des réponses. On parle
d'Hydro-Québec comme source considérable de revenus autonomes
pour le gouvernement du Québec à coups de taxes sur le capital,
110 000 000 $, à coups de dividendes de 156 000 000 $ pour 1984-1985 au
lieu des 60 000 000 $ qui étaient anticipés;
100 000 000 $ de plus qu'on pensait de revenus d'Hydro-Québec
pour garnir les coffres du gouvernement du Québec. 100 000 000 $, tant
mieux pour vous autres! Une chance, dans le fond. 200 000 000 $ au titre de la
taxe de vente: les gens qui paient leur électricité. Je serais
curieux de savoir si la taxe sur la vente de l'électricité est
parmi les besoins essentiels des contribuables québécois dans
l'idée du ministre.
Par ailleurs, Hydro alimente, par voie d'"en lieu", etc., les coffres
des municipalités pour 110 000 000 $. C'est 600 000 000 $ plus ou moins
dont il est question. Ce sont les contribuables qui paient cela très
largement quand ils acquittent leur facture d'électricité. Quel
est le rôle de cette société d'État dans
l'équilibre du revenu autonome? C'est considérable. Je serais
curieux d'entendre le ministre féliciter les gens d'Hydro-Québec
qui lui ont sauvé la vie et féliciter son
prédécesseur d'avoir imposé une taxe sur le capital
à Hydro-Québec. Il lui a sauvé la vie également au
titre des équilibres financiers. Je serais curieux de savoir ce que cela
va donner l'an prochain. Quand on parle de précarité des
équilibres financiers, on parle des revenus autonomes. On voit les
erreurs qui ont été faites dans les prévisions, d'une
année à l'autre, depuis sept ou huit ans. On aimerait que vous
nous rassuriez, mais sans nous taxer à 9 %. On parle avec moins
d'assurance - je ne sais pas si mes collègues policitiens l'ont
remarqué -maintenant, cela coûte plus cher. Qu'on nous rassure
donc sur la qualité des prévisions qui sont faites pour l'an
prochain.
Il y a toutes sortes de mystères dans les finances publiques. La
tenue de ces quelques heures en commission est une occasion
privilégiée pour que le ministre nous explique comment il va
lever le voile sur certains de ces mystères parce que, à
l'Assemblée nationale, ce n'était pas faisable. On doit
reconnaître que les dix heures ici plutôt que dix heures à
l'Assemblée, cela pourrait nous permettre d'avancer un petit peu plus.
Je vous dis tout de suite que le discours du ministre de tout à l'heure,
ses 23 minutes, n'a rien fait avancer, il aurait pu le dire à
l'Assemblée nationale. Quand on repose... On va courir le risque, on va
poser des questions de fond: Pourquoi réaménager la
fiscalité sans débat public? En élargissant la taxe de
vente, un impôt à la consommation; pourquoi faire cela sans
débat public, étendre la taxe de vente à ce qui
représente à peu près 8 % ou 9 % de la consommation des
Québécois? Une économie, peut-être 65 000 000 $ ou
70 000 000 $ de consommation, on s'en va, 5 000 000 $ ou 6 000 000 $... Des
milliards, pardon: 65 000 000 000 $ ou 70 000 000 000 $ de consommation, il y a
5 000 000 000 $ ou 6 000 000 000 $ qui sont des primes d'assurances; ce
n'était pas taxé, on va taxer cela.
Cela insère un coin - c-o-i-n-g, de mémoire - dans la
fiscalité, dans les finances publiques, qu'il devient extrêmement
tentant d'enfoncer plus avant, sans même regarder. On va avoir d'autres
occasions, notamment vendredi, de faire remarquer au ministre qu'il est
allé là-dedans en aveugle, littéralement, sans regarder
les effets. On va prendre juste une suite de petites déclarations, sur
une période de 48 heures, qui démontrent que, vraiment, le
ministère des Finances, le gouvernement - il ne faut pas simplement
accuser les gens du ministère des Finances, c'est le gouvernement, le
budget est une décision gouvernementale -s'est avancé sur un
terrain; il n'avait pas vu les mines, les précipices, les crevasses; il
n'a pas senti où était la résistance, il ne savait
même pas s'il était pour y en avoir. Il y a eu un tas de
déclarations qui ont démontré que le gouvernement s'est
avancé là-dedans pas mal vite. C'est juste une illustration de ce
que le manque de consultation, à la suite de la publication du livre
blanc, amène comme problèmes pratiques pour des dizaines de
milliers de gens qui gagnent leur vie dans l'assurance au Québec - un
secteur dont on peut être particulièrement fier quant à sa
contribution au développement économique, quant à la place
qu'il a toujours faite et qu'il fait de plus en plus aux francophones sur toute
la scène canadienne - qui vont payer des impôts de plus,
même s'ils n'en ont pas les moyens, et des millions de
Québécois, essentiellement, qui vont subir les contrecoups d'une
décision que nous trouvons inconsidérée, parce que mal
préparée, vu l'absence de consultation.
Je pense que mon temps est terminé.
Le Président (M. Lachance): Oui, et je me suis même
permis de vous laisser une minute et demie de plus.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Comme le ministre, oui, je vous
remercie. Donc, je pense que j'ai semé dans ces commentaires un tas de
questions. J'ai vu le ministre prendre beaucoup de notes. On va voir si cela a
porté fruit.
Le Président (M. Lachance): À ce moment-ci, le
ministre a eu ses vingt et quelques minutes; le porte-parole de l'Opposition
également. Cela veut dire que, maintenant, nous entreprenons une
période d'échanges avec un maximum de dix minutes. La
façon de procéder pourrait être la suivante: À moins
de consentement des membres de la commission, à partir de maintenant,
l'Opposition peut avoir ses dix minutes, un représentant du parti
gouvernemental, dix minutes également - là, je fais abstraction
des réponses du ministre - ainsi qu'un porte-parole du groupe des
députés
indépendants, dix minutes aussi.
M. Paquette: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): Oui, un premier tour.
M. Paquette: Alors, M. le Président...
Une voix: Premier tour.
M. Paquette:... un premier tour.
Le Président (M. Lachance): Ce serait un...
Une voix: On peut commencer où vous voulez, ce n'est pas
grave.
Le Président (M. Lachance): Si vous le voulez...
Une voix: On est dans un nouveau bloc.
Le Président (M. Lachance): On est dans un nouveau bloc de
temps, il y a eu un premier bloc de vingt minutes au ministre comme
déclaration préliminaire, un premier bloc aussi au porte-parole
de l'Opposition et maintenant on engage le dialogue.
M. Fortier: Question de règlement. M. le Président,
uniquement pour comprendre votre interprétation...
Le Président (M. Lachance): Est-ce que vous êtes
membre de la commission?
M. Fortier: Oui, je le suis. J'espère que vous
appréciez ma collaboration aux travaux de cette commission.
Le Président (M. Lachance): Très bien.
M. Fortier: Comme l'a bien dit mon collègue,
Hydro-Québec fournit assez d'argent pour que je m'intéresse aux
travaux de la commission. Tout à l'heure, je crois que vous avez dit
que, pour les députés indépendants, il y avait une masse
de temps qui leur était réservée. Par ce que vous venez
d'édicter, j'ai de la difficulté à concilier ce que vous
venez de dire avec ce que vous avez dit au début.
Le Président (M. Lachance): J'ai dit qu'il y avait, dans
les dix heures consacrées aux travaux de cette commission, une
période d'une heure ou une heure quinze minutes qui pourrait être
laissée aux députés indépendants. Alors, à
partir de maintenant, dans l'ordre qui est habituellement utilisé en
Chambre... Oui, neuf heures aux autres.
M. Fortier: Dix minutes, dix minutes, dix minutes, si on va
à un tiers, un tiers, un tiers, on ne terminera pas dans cet
ordre-là.
Le Président (M. Lachance): Non, pas du tout. C'est, par
extension, ce qui se passe au salon bleu. Oui, M. le député de
Chambly.
M. Tremblay: Pour clarifier cela, pour qu'on ne parte pas sur une
mauvaise piste et pour ne pas se chicaner...
Le Président (M. Lachance): Surtout pas.
M. Tremblay:... il y a dix heures, cela veut dire que
l'Opposition a cinq heures et que nous, on a cinq heures.
Une voix: Cela ne veut pas dire cela.
M. Johnson (Vaudreuii-Soulanges): Je rejoins le
député de Chambly. Pour commencer, je pense qu'on peut dire cela
et ensuite on regarde ce que l'intervention des députés
indépendants signifie sur ces enveloppes-là. Quatre heures et
demie plus quatre heures et demie, si je comprends bien?
M. Tremblay: Non. Je pensais que l'Opposition était toute
de l'autre côté, là-bas. Donc, l'heure et quinze, cela veut
dire que l'Opposition libérale aurait trois heures et trois quarts et
l'Opposition qu'on va appeler conjoncturelle - comme le premier ministre l'a
dit cet après-midi - une heure et quart. Circonstancielle, je m'excuse,
vous avez le droit de me...
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Chambly, j'ai ici un guide que je suis fidèlement et qui vient du
conseil en droit parlementaire. Il a été approuvé par la
commission de l'Assemblée nationale en mai 1984, pour l'étude du
budget de la commission du budget et de l'administration. Je peux me permettre
d'en faire une sage interprétation, on y dit ceci: "Le président
accorde la parole au député qui la lui demande en assurant une
répartition équitable du temps de parole entre les groupes
parlementaires. " Ce que je considère comme équitable, ce serait
ce qui a été énoncé antérieurement, à
savoir qu'il y a une heure quinze minutes sur l'enveloppe globale de dix heures
qui pourrait être accordée au groupe des députés
indépendants.
M. Laplante: M. le Président, ce n'est pas un groupe
parlementaire. Il ne faut pas faire... C'est pour plus tard.
Le Président (M. Lachance): J'espère qu'on ne fera
pas de problème avec cela.
M. Tremblay: Eux, ils ont une heure et quart...
Le Président (M. Lachance): Oui.
M. Tremblay:... et l'équité, c'est selon le
pourcentage des groupes parlementaires. Présentement, on est à
peu près 50-50, l'Opposition et le gouvernement? Alors, 50 % pour
l'Opposition et 50 % pour le gouvernement.
Le Président (M. Lachance): De toute façon, ne
posons pas de difficulté où il n'y en a pas. Allons-y pour
l'instant selon ce qui a été établi et on verra au fur et
à mesure des travaux de la commission, parce qu'il y en a encore pour un
certain nombre d'heures qui vont dépasser largement le temps
accordé pour aujourd'hui.
M. Tremblay: Deuxième questions Le temps de réponse
du ministre fait partie de l'enveloppe de la personne qui pose sa question?
Le Président (M. Lachance): Non. Le temps de parole du
ministre, c'est bien indiqué ici: "après chaque interrogation, le
ministre des Finances dispose d'un temps de parole de dix minutes pour
répondre à son interlocuteur".
M. Tremblay: Oui, mais dans quelle enveloppe? Là, on a
dépensé 10 heures et on a 10 heures. Le ministre ne parle pas en
dehors du temps.
M. Laplante: C'est des deux côtés, c'est pour tout
le monde.
M. Tremblay: D'accord.
Le Président (M. Lachance): Cela va? Oui, M. le
député de Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, il reste un point qui n'est
pas clair. Est-ce que je pourrais vous suggérer, comme on se limite,
nous, les députés indépendants, à 75 minutes,
à une heure et quart, comme vous l'avez dit, qu'on puisse faire un tour
à trois parce qu'on n'a pas nécessairement la même position
que le Parti libéral, au contraire. Par conséquent,
évidemment, nos interventions... (17 h 45)
Mme Le Blanc-Bantey: On n'est pas plus sympathique mais...
M. Paquette:... devront être moins longues,
forcément, que celles des ministériels ou celles de l'Opposition
officielle, mais, si on pouvait considérer que c'est une table à
trois coins et qu'on fasse le tour comme cela.
Une voix: On va faire une table ronde. Le Président (M.
Lachance): Écoutez, ce que je... Je reconnaîtrai dans l'ordre,
à partir de maintenant, un porte-parole de l'Opposition officielle, un
porte-parole du groupe gouvernemental et un porte-parole des
députés indépendants.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Quand l'heure et quart sera
épuisée pour le groupe de parlementaires indépendants, ils
n'auront plus droit de parole.
Le Président (M. Lachance): À moins d'un
consentement des membres de la commission.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, oui.
Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'il y a quelque chose
qui...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Faites comme d'habitude.
Le Président (M. Lachance): Maintenant, je
reconnaîtrai un député du groupe du...
Une voix: II a droit à une réplique de dix
minutes.
Une voix: Oui, oui.
Le Président (M. Lachance): Non, pas du tout. Ce n'est pas
comme cela qu'on peut le voir.
M. Laplante: Je vais vous en donner la chance, monsieur...
Le Président (M. Lachance): C'était un premier bloc
au ministre des Finances de 20 minutes, déclaration préliminaire.
C'est toujours un premier bloc au porte-parole de l'Opposition officielle et,
à partir de maintenant, ce sont les échanges avec le
ministre.
Alors, si vous voulez ramasser vos munitions.
M. Beauséjour: M. le Président... Le
Président (M. Lachance): Oui.
M. Beauséjour:... dans nos règlements, le ministre
n'a-t-il pas justement en commission parlementaire un droit de réplique
de cinq minutes chaque fois?
Le Président (M. Lachance): De toute façon, je m'en
tiens à ce que je viens de vous indiquer jusqu'à preuve du
contraire, M. le député d'Iberville, à moins que vous ne
m'ameniez les règles de procédure avec les articles et que je ne
me rende compte que je suis dans l'erreur. Je maintiens que ce que j'ai comme
information ici doit
s'appliquer. Alors...
M. Beauséjour: Je vais faire des vérifications, M.
le Président.
Le Président (M. Lachance):... la parole est à un
député de l'Opposition officielle, s'il le désire, pour
une période de dix minutes.
Une voix: Vous l'avouez, mais je demeure...
Le Président (M. Lachance): C'était dans les
déclarations préliminaires.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est cela. C'est un bloc de
dix minutes morcelable, évidemment.
Le Président (M. Lachance): Oui. Cela va être
chronométré avec sévérité.
Impôt sur le revenu des particuliers
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Plutôt que de faire une
autre déclaration de dix minutes, ce sont des échanges,
clairement. J'ai indiqué tout à l'heure avoir parsemé dans
ma présentation certaines questions contrairement au ministre qui lui
n'a pas parsemé sa présentation de réponses
anticipées. Ce que j'ai évoqué tout à l'heure, je
vais lui poser les questions une à la fois. J'ai évoqué la
précarité des équilibres budgétaires. J'ai
attribué cela en partie à l'érosion de l'assiette fiscale
au titre de l'impôt sur le revenu des particuliers. J'ai fait état
de certaines études, du mélange, de la composition du corps des
contribuables qui ne représente pas des tranches de revenu
"intéressantes" pour une économie. J'ai fait état que
cette répartition laisse penser ou conclure à un affaiblissement
de l'assiette fiscale sur laquelle le ministre va chercher l'impôt sur le
revenu. J'ai demandé au ministère des Finances, par
l'intermédiaire du ministre, si des travaux se font, si des
études sont en cours, si le grelot a été attaché
quelque part pour découvrir quelle est la cause, un peu plus profonde
que les grands discours qu'il peut nous faire et qui ne répondent pas
à la question, de cette érosion quant au ministère des
Finances. C'est un phénomène qu'on observe, non pas seulement au
Québec, mais également dans l'ensemble du Canada, à un
titre moindre, on l'observe un peu - on n'est pas des experts là-dedans,
ici autour de la table - me dit-on, aux États-Unis. C'est à cause
peut-être de la crise et de la lenteur de la reprise, je ne sais trop,
peu importe. La réalité est qu'au Québec cela se vit de
façon beaucoup plus aiguë. Est-ce que - c'est ma question au
ministère des Finances - on se préoccupe du
phénomène? J'espère que oui. Deuxièmement, est-ce
qu'on fait quelque chose de précis pour en découvrir les causes?
Troisièmement, en ayant découvert, espère-t-on, les
causes, qu'est-ce qu'on veut faire pour remédier à ce
problème?
Le Président (M. Lachance): Alors, M. le ministre, vous
avez dix minutes pour chaque question que le député de
Vaudreuil-Soulanges vous a posée.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): J'en ai posé une,
n'exagérez pas.
M. Duhaime: Cela ne prendra pas dix minutes pour régler
celle-là, M. le Président.
Une voix: Non, non. Ce n'est pas comme cela.
M. Paquette: M. le Président, me permettez-vous de
parler?
Le Président (M. Lachance): Après chaque
interrogation, le ministre des Finances dispose d'un temps de parole de dix
minutes pour répondre à son interlocuteur.
M. Laplante: C'est une interrogation globale parce
qu'après ses dix minutes il a fini s'il a pris plus de dix minutes. Le
temps du ministre compte dans votre temps.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Bien oui, dans l'enveloppe de
dix heures. Cela, je suis d'accord avec vous, mais pas dans mes dix minutes
toujours.
M. Laplante: Non, non, pour le temps là.
Une voix: C'était cela ma question... M. Laplante:
Une minute là!
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Cela fait combien de temps que
vous êtes député ici, avec le nouveau règlement?
Pour l'amour du ciel!
M. Laplante: Sans cela, vous pourriez prendre cinq heures
d'affilée, vous autres...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): On dirait qu'il faut tout vous
réexpliquer avec des dessins chaque fois.
M. Laplante:... et, nous autres, il faudrait être muets.
Une minute là!
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Cela n'a pas de bon sens.
M. Laplante: C'est dix minutes par député et la
réponse du ministre.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est cela.
M. Laplante: Vos dix minutes...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): J'ai pris deux minutes,
d'accord, M. le député. Il me reste huit minutes encore, huit
minutes de questions que je peux morceler. Je peux faire 40 questions de 20
secondes chacune ou de 15 secondes chacune et le ministre aura dix minutes
chaque fois. Je reconnais cela pleinement. J'ai posé une question
importante quant aux fonds des finances publiques, les équilibres
budgétaires. Le ministre peut-il nous faire l'honneur de commencer
à nous répondre sans être interrompu par ses
collègues sur lesquels il n'a manifestement aucune autorité?
Le Président (M. Lachance): M. le ministre des Finances.
Ce n'est pas une question d'autorité. L'autorité est
incarnée par le président de la commission.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Et le vice-président. Il
n'y a pas de problème avec cela.
Le Président (M. Lachance): Je pense qu'il n'y a pas de
"boss". M. le ministre des Finances, vous avez la parole.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Non, c'est évident de
l'autre côté.
M. Duhaime: Est-ce que je peux parler?
Le Président (M. Lachance): Allez-y, M. le ministre.
Une voix: II n'y a pas de valet non plus.
M. Duhaime: M. le Président, je suis un peu
déçu...
M. Laplante: Vous avez dû avoir l'inspiration, M. le
ministre.
M. Duhaime:... du ton - je voudrais faire une remarque d'ordre
général - très agressif, des remarques très
agressives du député de Vaudreuil-Soulanges. J'avoue que je ne
vous reconnais pas. Je ne sais pas si ce sont les discours de la fin de semaine
de votre chef qui vous emballent à ce point, mais vous faites une
affirmation énorme et vous faites référence à des
études que vous n'avez pas identifiées.
Si je comprends bien, il y aurait eu un déplacement de hauts
revenus vers je ne sais quelle contrée du monde et c'est cela qui serait
l'explication de la diminution des revenus autonomes. Est-ce que je vous ai
dérangé pendant votre intervention? Au contraire, j'ai
essayé de vous écouter et j'ai essayé de comprendre
surtout.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Tout en discutant avec des gens
à l'arrière. Oui, j'ai remarqué.
M. Duhaime: Cela fonctionne. D'abord, on fait un grand drame
parce que, paraît-il, mon prédécesseur à ce
portefeuille aurait eu des marges d'erreurs énormes dans la
prévision des revenus, ils auraient été plus bas que ce
qu'il estimait et les transferts fédéraux ont toujours
été plus élevés que ce qu'il avait lui-même
estimé.
En termes miniers, je prendrais l'exemple du monte-charge. Quand il y a
une plate-forme qui monte, l'autre descend et l'inverse, ce qui veut dire que,
lorsque les revenus autonomes augmentent, automatiquement les transferts
fédéraux diminuent. Je n'ai pas besoin de vous expliquer cela,
jamais je ne croirai cela. Tout le monde sait cela. Une marge d'erreur dans les
prévisions de l'ordre de 250 000 000 $, 262 000 000 $, page IIA
des Renseignements supplémentaires, que vous allez retrouver pour
l'année 1984-1985, mais qui est dans les annexes du présent
budget; 262 000 000 $ sur une masse budgétaire, en 1984-1985, qui
était de 22 000 000 000 $. On va vous donner cela en pourcentage; cela
fait 1, 17 %.
Deuxième chose...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): L'impôt sur le revenu des
particuliers M. le ministre, pour gagner du temps.
M. Duhaime: Vous avez eu votre tour. Je vais vous
répondre. Vous avez le loisir de poser des questions de la
manière que vous voulez, j'imagine, à cette table; comme
parlementaire et comme ministre, j'ai le loisir de vous répondre de la
manière que je l'entends.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Répondez aux questions
de la manière que vous l'entendez, mais répondez à la
question au moins.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Vaudreuil-Soulanges, je voudrais vous faire remarquer aimablement que le
ministre a le droit de parler...
M. Duhaime: Vous êtes très indiscipliné.
Le Président (M. Lachance):... et de répondre comme
bon lui semble. Alors, si vous n'êtes pas satisfait, vous pourrez revenir
à la charge tantôt.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): D'accord.
M. Duhaime: Un autre petit détail. À la page II-4
des Renseignements supplémentaires que vous retrouvez au budget
1985-1986, au chapitre de l'impôt sur le revenu des particuliers, les
variations par rapport au budget, il y a des variations à la baisse de
335 000 000 $. Voulez-vous avoir les chiffres en Ontario, pour la même
année? La variation à la baisse, moins 395 000 000 $ - on n'est
pas tout à fait dans les mêmes ordres de grandeur - sur des
revenus de... Statistiquement, si vous prenez les revenus globaux, en Ontario,
pour 1984-1985, prévisions: 23 672 000 000 $ et dépenses: 26 381
000 000 $, et la part des revenus d'impôt sur le revenu des particuliers
étant plus faible en Ontario qu'ici la marge d'erreur en Ontario est
encore plus forte.
Deuxième chose. Dans le budget 1985-1986 au livre intitulé
Renseignements supplémentaires, à l'annexe I, page 33, vous allez
trouver l'explication de la baisse des revenus autonomes. C'est très
simple, M. le Président. Il ne s'agit pas de chercher midi à
quatorze heures. C'est la chute de l'inflation. Remontons quelques
années en arrière. 1980 sur 1979, l'indice des prix à la
consommation, 10, 3 %; 1981 sur 1980, 12, 4 %; 1982 sur 1981, 11, 5 %. Je vous
rappelle que, pendant ces années-là, pour temporiser les niveaux
d'indice des prix à la consommation, l'exemption de base des
particuliers avait été indexée par notre gouvernement.
Enfin! 1983 sur 1982, 5, 6 %; 1984 sur 1983, 4, 2 % et ainsi de suite. Que
s'est-il produit en 1984-1985? C'est une inflation plus faible... Et j'ai,
cette année, M. le Président, dans le calcul des revenus
autonomes, 1985-1986, retenu comme indice des prix, 4, 1 %. Il est bien
évident que, si l'inflation est au-dessus de ce chiffre, cela a un
impact vers le haut sur l'ensemble des revenus autonomes, et si l'inflation est
plus basse, cela va être plus bas.
Je me demande ce qui peut être si scandaleux, l'inflation
étant moins forte. Je pense aussi devoir ajouter une précision,
même si cela n'a rien à voir avec la question qui a
été soulevée tantôt. D'abord, en
résumé, vous aurez beau mettre tous les péchés du
monde sur le dos de mon prédécesseur à ce
ministère, Dieu ne vous en déplaise, une marge d'erreur de 1, 5
%, et certaines années de moins de 1 %, je pense qu'on devrait
plutôt dire chapeau. Je peux vous ressortir vos budgets des années
1970 à 1976, vous allez y trouver des chiffres qui vont galoper
passablement plus haut que cela. À une époque où
l'inflation était payante, l'indexation n'existait pas pour les
exemptions de base. Vous allez peut-être être surpris. Il faut
aussi comprendre qu'au delà des revenus autonomes, cela semble vous
laisser un peu indifférents, vous autres du Parti libéral, le
fait qu'en 1982 vos cousins germains d'Ottawa ont décidé de
modifier unilatéralement la formule de péréquation. Ce
n'est pas pour rien que j'ai mis cela dans le budget! Vous avez un beau tableau
en deux couleurs, bleu foncé et bleu pâle. Sur la période
de 1982 à 1987, même après le règlement que M.
Wilson a lui-même qualifié de politique et d'arbitraire, notre
manque à gagner sur cette période est de 647 000 000 $. L'autre
jour, tout ce que vous avez trouvé à dire sur ce manque à
gagner est que vous étiez désolés. Cela aussi a un impact
sur les revenus. Il est bien évident qu'à partir du moment
où il n'y a personne, sauf de votre côté, qui pense qu'on
peut maintenir un déficit constant, qu'on peut augmenter les
dépenses et baisser les impôts en même temps, quand on est
dans l'Opposition, on a vraiment le loisir de pouvoir s'étendre sur
différents sujets, mais il faut aussi essayer de garder la
rationalité des chiffres budgétaires que vos discours
entraînent. (18 heures)
Je termine, M. le Président. J'aurais aimé dire un petit
mot au sujet d'Hydro-Québec et j'aurais voulu parler des droits de
succession parce que ce qu'a dit le député de Vaudreuil-Soulanges
tantôt est inexact. J'aurai peut-être l'occasion de me reprendre,
mais je voulais parler du rendement du portefeuille REA par rapport à la
moyenne des actions à la Bourse et je voulais parler aussi de
l'impôt minimal. On va avoir l'occasion de se reprendre.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Vaudreuil-Soulanges.
Érosion de l'assiette fiscale au
Québec
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, mes
pires craintes se sont avérées fondées. Le ministre a
choisi de ne pas répondre aux questions. Je suis d'accord avec lui qu'il
peut répondre aux questions comme il veut, encore faut-il qu'il
réponde à la question. Lorsqu'il nous indique, par exemple, que
l'inflation a été moins élevée l'an dernier que
l'année précédente, et donc, comme tout le monde le sait,
que cela a une influence sur les revenus autonomes, je lui fais remarquer que
la prévision à savoir que l'inflation baisserait l'an dernier par
rapport à l'année précédente s'est
avérée relativement exacte. Tout le monde était à
peu près dans le même "ball park", comme on dit. On est
arrivé avec 4, 2 %; c'étaient les ordres de prévision ou
à peu près. Il n'y a pas eu une chute dramatique et inattendue de
l'inflation à un point tel que les revenus autonomes ont chuté en
conséquence et donc, c'est à cause de la chute terrible de
l'inflation par rapport aux prévisions et non par rapport à
l'année précédente - par rapport aux prévisions, il
y a une grande différence - et j'aimerais que le ministre
comprenne la question.
Donc, ce qui est arrivé malgré des prévisions
relativement justes en ce qui concerne l'inflation, d'une année à
l'autre, se répercutant sur les équilibres financiers à
l'égard des revenus autonomes l'an dernier, pour l'exercice
terminé le 31 mars dernier, ce qu'on a dit s'est avéré
également dramatique en Ontario. Ils se sont trompés de beaucoup
en Ontario. Ils avaient prévu un niveau d'inflation, ils ne se sont pas
trop trompés là-dessus. La prévision s'est
réalisée quant à l'inflation et ils n'ont pas eu de revenu
autonome. On a dit tout à l'heure qu'il y avait des chutes dans
l'impôt sur le revenu des particuliers, non seulement au Québec
mais ailleurs. On cherche la cause. On dit au ministre des Finances: Vous
êtes censé être équipé à l'interne pour
vous apercevoir que ces problèmes sont en train de vous arriver; parce
que cela a une grande influence sur les équilibres financiers, on vous
demande: Êtes-vous en train de regarder cela de près?
Et on nous parle du programme du Parti libéral du Québec.
Cela n'a aucun rapport. C'est, j'oserais presque dire, l'ignorance qui s'ignore
que d'aller nous répondre sur des éléments d'une question
qu'on n'a pas posée parce qu'elle ne se pose pas, la question. Tout le
monde sait que l'inflation chute. Les prévisions étaient
là. Elles se sont du moins réalisées sans grands
écarts épouvantables, mais les revenus autonomes du ministre pour
l'impôt sur le revenu des particuliers ne se sont pas
réalisés. On cherche à savoir quelle est la cause
profonde. On n'a pas eu de réponse.
L'Ontario a connu le même problème; on s'est aperçu
qu'il y a un problème là. Évidemment, le ministre des
Finances de l'Ontario n'est pas ici et cela ne nous concerne pas; qu'il
s'arrange avec ses troubles. S'il y a un service d'étude de la politique
fiscale et un service d'études économiques qui fait le lien entre
l'économie et les rentrées fiscales, qu'on travaille
là-dessus, j'espère. La question est très simple: Est-ce
qu'on travaille là-dessus? Si oui, est-ce qu'on est en train
d'identifier les causes qui expliquent l'érosion de l'assiette fiscale
au Québec? Si on a découvert des causes, qu'est-ce qu'on entend
faire pour y remédier? C'est cela, la question; je me trouve à la
reposer une deuxième fois.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je voudrais peut-être
ajouter, M. le Président, au vu et au su de tout le monde, que j'ai
reçu une petite note qui appelle mon absence pendant quelques minutes
à peine. Cela n'empêche pas le ministre de répondre. Il y a
de mes collègues ici - il y en a au moins un - il y a des gens qui
peuvent prendre des notes qu'on pourra reprendre. Mon collègue
d'Outremont pourra prendre le relais sur un autre volet qu'on a annoncé
dans notre présentation tout à l'heure. Je pense bien que les
travaux peuvent continuer et je m'excuse pour dix minutes.
M. Duhaime: Je n'ai absolument pas d'objection, sauf que je n'ai
pas compris la question, M. le Président.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II n'écoutait pas.
M. Duhaime: Allez à votre appel téléphonique
et on va vous attendre. Pendant ce temps, on va faire autre chose. Vous vous
expliquerez autrement parce que je ne vous suis pas.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Le ministre nous a
répondu: Nous avons exprimé les inquiétudes... Est-ce que
le ministre, pour écouler mon temps, M. le Président - on peut
suspendre la séance - veut me faire répéter cinq fois la
même question pendant deux minutes et me dire que mes dix minutes sont
écoulées?
M. Duhaime: Non.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est cela qui est en train
d'arriver.
M. Duhaime: Non, non, non, on va vous donner un
crédit...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Un crédit d'impôt,
un crédit de temps, c'est bien ressemblant. On a dit tout à
l'heure qu'il y avait érosion, c'est évident. On se trompe dans
les prévisions de rentrées fiscales au titre de certains
impôts. Le ministre nous dit: C'est bien sûr que cela a
baissé, l'inflation a baissé par rapport à l'année
précédente. Moi, je dis que la réponse n'a aucun rapport
avec la question. Tout le monde savait que l'inflation était en baisse,
que cela devait faire partie intégrante des prévisions de
rentrées fiscales, le niveau présumé d'inflation. Le
niveau présumé d'inflation, qui a été nourri
à la machine à prévisions du ministère, s'est
réalisé et, malgré tout, il y a eu une baisse plus
considérable que l'erreur possible de prévision sur l'inflation
qui aurait pu se réaliser. C'est cela, la question. Pour l'avenir, quel
est le rapport entre le taux d'inflation et sa modification par rapport aux
prévisions? Et les rentrées fiscales, comment sont-elles
affectées par les erreurs ou, enfin, les divergences qui peuvent
être observées entre les prévisions et le réel?
M. Duhaime: Là, M. le Président, si je
réponds, je vais être obligé de recommencer quand le
député va revenir.
M. Fortier: On va prendre des notes.
M. Duhaime: Vous allez prendre cela en note? Je ne suis pas
sûr que cela va avoir un gros résultat.
M. Fortier: j'ai un expert à côté de moi, on
va se comprendre.
M. Duhaime: Je ne parle pas de votre expert, vous avez
très bien compris. À l'institut Kahn de New York, on accepte des
candidats à des cours sur la futurologie et la prévision. Il y a
des boîtes comme cela un peu partout dans le monde et la première
qualité de tous ceux qui font de la prévision, c'est de se
tromper. Le député d'Outremont a l'air d'être d'accord avec
cela.
En 1984, par exemple, la prévision de la croissance des salaires
hebdomadaires moyens était de 6 % et le réel a été
de 3, 7 %; moins 2, 3 %. Je ne sais pas si vous le savez, mais il y a un lien
direct avec les revenus autonomes. Il faut lire cela en même temps que
l'évolution de l'indice des prix à la consommation. On avait
prévu, ici au Québec, 4, 6 % et cela a été 4, 2 %;
au Canada, on n'a pas fait beaucoup mieux, on avait prévu 5 % et le
réel a été de 4, 4 %.
Si le Parti libéral du Québec a de grandes et de savantes
études en main qui pourraient bonifier les expertises qui sont faites
non seulement au ministère des Finances, mais un peu partout... Parce
que les modèles économétriques qui sont faits, quant
à la prévision au ministère des Finances, ne sont pas
faits d'une façon isolée. On regarde un peu ce qui se fait aux
États-Unis, par exemple, par la firme Data Resources et ce que de
grandes institutions financières publient régulièrement,
et on essaie de lire là-dedans.
En terminant, M. le Président, si on rebâtissait les
entrées d'argent au chapitre des revenus autonomes, que ce soit
l'impôt sur le revenu des particuliers ou la taxe de vente, en fonction
de ce qui avait été prévu et qui ne s'est pas
réalisé en termes d'évolution de la masse salariale
globale et de l'indice des prix à la consommation, prévisions par
rapport au réel, on serait arrivé à peu près en
ligne avec ce qui avait été donné.
M. Fortier: Je sais que c'est au tour de mon collègue,
mais, si le ministre me le permettait, je finirais cet aspect. La crainte
manifestée par mon collègue de Vaudreuil-Soulanges, qui est
partagée, d'ailleurs, par un autre gouvernement à Ottawa, est que
les hypothèses que vos employés ou vos experts établissent
se sont révélées, sur une période de temps, comme
allant toujours dans la même direction, comme étant fausses dans
une certaine proportion ou, du moins, créant une certaine érosion
sur le revenu autonome du gouvernement. Si on veut oublier le passé,
sans parler de futurologie, la question qui se pose est: Est-ce qu'on peut
trouver des raisons profondes qui expliquent que ces hypothèses sont
fausses, de façon à préciser la prévision de
revenus autonomes du gouvernement? Autrement dit, si on excuse, et je parle
pour moi-même... Je suis prêt à excuser le fait. Je ne crois
pas qu'on impute des motifs ou un manque de compétence de la part des
gens qui sont en place. Il y a des raisons profondes pour lesquelles il y a un
manque à gagner, un écart dans les prévisions. Je ne sais
pas si la question de mon collègue de Vaudreuil-Soulanges était
claire, mais est-ce que le ministère s'est interrogé, non pas
pour pénaliser quelqu'un -je ne crois pas que ce soit une question de
compétence - mais pour s'interroger sur les motifs, sur les raisons
profondes qui font qu'année après année il y a une erreur
systématique qui peut signifier que les hypothèses qui ont
été faites ou que la matrice qui a été
utilisée pour le calcul des revenus était probablement fausse.
Autrement dit, est-ce que le ministère s'est interrogé
là-dessus? Est-ce qu'il a pu détecter des indices qui lui
permettraient dans l'avenir d'en arriver à de meilleurs
résultats?
M. Duhaime: Me permettez-vous d'ajouter un mot, M. le
Président?
Le Président (M. Lachance): Vous avez la parole, M. le
ministre.
M. Duhaime: Je ne sais pas si cela apparaît dans le
discours sur le budget comme tel, mais très certainement en annexe ou
dans les renseignements supplémentaires. Cette année, les
équilibres, la projection des revenus est basée sur un indice que
j'ai retenu de 4, 1 %. Supposons que je me trompe et que cela donne 5, 1 %. La
conséquence de cela, c'est que les revenus autonomes augmentent,
n'est-ce pas? Si cela tombe en bas de 4, 1 %, cela va diminuer. Ce qui me
chicote un peu de ce que j'entends depuis quelques minutes venant de
l'Opposition officielle, c'est que vous avez l'air de trouver qu'au
ministère des Finances on est sous-équipé ou
sous-outillé. J'espère que mon sous-ministre entend cela. Je dois
vous dire que ce n'est pas tout que de mettre des équilibres financiers
sur la table. Lorsque le Québec va sur les marchés financiers
pour placer ses emprunts, n'allez pas penser que ceux que nous allons
rencontrer avec les états financiers du gouvernement, pour les
années passées aussi bien que pour le discours sur le budget et
les équilibres financiers qui sont sur la table, n'examinent pas tout
cela. J'imagine bien
qu'ils ont trouvé que la moyenne au bâton n'était
pas si mal jusqu'à maintenant puisque nous réalisons nos
programmes d'emprunt et que nous arrivons à boucler nos affaires. Si
vous avez une inquiétude de l'autre côté qui serait due
à des faits, disons, ésotériques, de grâce,
apportez-nous l'élément de réponse que vous avez!
L'élément de réponse que je vous fournis, la distorsion
entre la prévision et le réel sur les revenus autonomes est
essentiellement reliée à des niveaux d'inflation et
d'évaluation de la croissance de la masse salariale. Essentiellement
cela.
M. Fortier: M. le Président, est-ce que le ministre me
permettrait simplement une sous-question? Il y a des gens qui s'interrogent sur
les motifs profonds de cet écart entre les prévisions et les
résultats. Certains ont pensé à des hypothèses.
J'imagine que votre ministère s'est penché là-dessus.
Entre autres, il y en a qui disent que, plus il y a d'emplois à temps
partiel, moins il y a des revenus pour l'État dans la mesure où
l'État, pour toutes sortes de raisons... Les gens eux-mêmes s'en
vont vers des emplois partiels, ce qui fait que, par la nature des choses, il y
a des gens qui, pour bénéficier d'une qualité de vie
supérieure, acceptent d'avoir des revenus moindres. Il s'ensuit qu'en
moyenne, progressivement, les revenus de ceux qui gagnent plus que, disons, 30
000 $ ou 35 000 $ par année baissent et que ce faisant l'État
obtient moins de revenus. C'est ce genre de question que nous essayons
d'évoquer pour chercher à savoir, si c'est le cas, s'il va
falloir que l'État réagisse d'une certaine façon et qu'il
prenne en considération ce genre de phénomène. C'est bien
entendu que, si la totalité de la population était en ' emploi
partiel, les revenus de l'État seraient moindres parce qu'en moyenne les
gens gagneraient des revenus ou des salaires beaucoup moins
élevés. Est-ce que le ministère s'est interrogé sur
ce genre de phénomène? (18 h 15)
M. Duhaime: Ce que vous soulevez est toujours pris en compte dans
l'évolution des masses salariales. Je crois vous avoir dit, il y a
quelques minutes à peine, que, si on pouvait techniquement - je ne sais
pas combien d'efforts et d'heures de travail cela pourrait demander sur les
machines et les cerveaux au ministère des Finances - si on pouvait
reconstituer le résultat final de l'année 1984-1985 sur la base
de la prévision qui avait été faite, vous auriez toute
l'explication de l'écart. Si, au ministère des Finances à
Ottawa, on se trompe à la hausse ou à la baisse, suivant les
années, sur l'évolution de la masse salariale - même chose
pour l'indice des prix à la consommation - Mon Dieu Seigneurl ne nous
demandez pas de trouver midi à quatorze heures! C'est exactement la
même question que: Quelle va être la valeur du dollar canadien le
31 décembre qui vient? On peut avoir chacun sa petite idée, mais,
en réalité, on va tous le savoir quand le marché boursier
va fermer le 31 décembre, pas avant. On va parler d'Hydro-Québec
tantôt. La valeur du dollar fluctue de façon très
importante à cause de l'ampleur de la dette en dollars
américains. Sur les taux d'intérêt, c'est la même
chose. Il y a de la place pour une marge d'erreur. La question qu'il faut poser
est: Est-ce qu'un écart de prévision, tel que celui qu'on
identifie autour de 1 %, est un écart raisonnable et acceptable? Si je
vous faisais un budget et que je vous annonçais, par exemple, que
l'inflation sera de 2, 5 %, alors que l'ensemble de toute la prévision
sur le continent situe cela autour de 4 %, vous me diriez que ce n'est pas
sérieux, et vous auriez raison. C'est un peu la même chose pour la
croissance de la masse salariale. On ne peut pas écrire n'importe quoi
dans des budgets. Les équilibres financiers et le scénario qui
est devant vous sur la prévision des entrées d'argent sont
contre-vérifiés par les premiers intéressés, ceux
qui investissent. L'an prochain, on va emprunter 3 000 000 000 $. C'est de
l'argent!
M. Fortier: Les deux ensemble?
M. Duhaime: Non, seulement le gouvernement. Un montant de 3 000
000 000 $ à l'intérieur duquel vous avez compris qu'il y avait
des remboursements, qu'il y a des obligations qui viennent à
échéance, mais, en termes de besoins financiers nets, on l'a
ramené à 1 600 000 000 $; c'est 400 000 000 $ de moins que
l'exercice précédent. Ces scénarios de prévision...
Si vous trouvez une savante explication à travers vos travaux,
communiquez-les-nous. Je vous donne l'explication la plus simple, la plus
claire, la plus franche possible, et on n'en voit pas d'autres. Si vous en
trouvez une autre, vous nous la communiquerez. Cela va aider tous les ministres
des Finances du Canada et, j'imagine, de tout le continent, et peut-être
même d'ailleurs.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont, M. le député de Bourassa m'avait demandé la
parole.
M. Paquette: Tantôt, vous aviez dit qu'on faisait le
tour.
Le Président (M. Lachance): Dans l'ordre que j'ai
indiqué tout à l'heure, c'est un député de
l'Opposition officielle, un député du côté
gouvernemental et, ensuite, un député du goupe des
députés indépendants. Personnellement, je n'ai pas du tout
l'intention de vous brimer. Ce n'est pas mon
désir, mais, tel que je l'ai indiqué, je donne la parole
au député de Bourassa qui, sans doute, pourra apporter sa
collaboration pour vous permettre d'intervenir. M. le député de
Bourassa.
Effets des nouvelles exemptions personnelles
M. Laplante: Sûrement, M. le Président. Je trouve
que les questions de l'Opposition sont curieuses. On dirait que vous venez de
vous inscrire à l'école pour essayer d'avoir quelques chiffres
comme deux et deux font quatre. Vous auriez pu y penser bien avant. Une maudite
chance que M. le premier ministre ne répond pas à votre
désir et ne déclenche pas des élections
générales tout de suite, parce que vous n'êtes pas encore
prêts. Vous ne comprenez pas encore l'essence du budget de 1984-1985, qui
vient d'être présenté, dans le contexte du Québec,
le contexte canadien ou nord-américain, au point de vue de
l'évolution de l'inflation ou de la progression des salaires du
Québec.
Ce à quoi je veux en venir, M. le Président, c'est surtout
à la critique qu'on fait actuellement de la taxe d'imposition d'un
produit de consommation, c'est-à-dire les assurances. Personne ne parle
non plus du fait que cette taxe est faite, en somme, au début d'une
vraie politique familiale. Je pense que, depuis au moins trois ans, il y a des
études, des consultations qui se font là-dessus partout au
Québec et, surtout dans le livre blanc sur la fiscalité, pour
avoir une vraie politique familiale, la taxation va avoir tendance à
aller sur le produit de consommation.
Pour protéger le travailleur à bas revenus, si on regarde
à la page A-ll où le budget accorde des crédits de taxes
à la consommation, ce qui veut dire que ceux qui auront à payer
des taxes à la consommation, les bas salariés pourront les
récupérer pour une bonne part selon cet énoncé de
crédit de taxes à la consommation qui se lit comme suit, pour
être bien compris: "Dans le régime actuel, la consommation de
certains biens essentiels est taxée. En raison des exemptions
personnelles dont ils peuvent bénéficier, les contribuables
à revenus moyens et élevés ne sont pas imposés sur
les revenus affectés à la satisfaction de leurs besoins
essentiels. En ce qui concerne les bénéficiaires d'aide sociale
ou les personnes à faibles revenus bénéficiaires de
transferts, les prestations qu'elles reçoivent incluent les taxes
à la consommation payées à l'égard de leurs besoins
essentiels. Ces taxes sont donc déjà remboursées par
l'État. À l'inverse, toutefois, les contribuables à
faibles revenus ne recevant pas de transferts - donc d'aide sociale ou autres -
n'obtiennent aucun remboursement pour les taxes à la consommation qu'ils
ont payées. Afin de corriger cette situation, un crédit de taxes
à la consommation est introduit en 1986. "Ce crédit de taxes
à la consommation est fixé pour 1986 à 67 $ pour chacun
des conjoints et à 22 $ pour chaque enfant à charge dans le
ménage. " Vous avez déjà un remboursement qui
s'opère même s'il y a eu, pour l'exemption des particuliers, une
table plus élevée. On retrouve ici une addition aux diminutions
d'impôt qui va directement à la taxe à la consommation.
"Afin d'éviter une double prise en compte de cette dépense dans
le régime d'imposition, le crédit sera réduit de 3 % du
revenu total du ménage excédant les exemptions personnelles et
certaines réductions reliées à l'emploi. Le crédit
sera non remboursable tant que l'intégration des régimes de
transferts et de taxation n'aura pas été effectuée.
À titre d'exemple, pour une famille ayant deux enfants à charge,
le montant total de taxes à la consommation reconnues à
l'égard des besoins essentiels en 1986 sera de 178 $. " Il faut en
parler de ces choses-là aussi, il faut parler de ces retours
d'impôt que chaque contribuable pourra recevoir selon un indice de
salaire peu élevé.
Maintenant, M. le ministre, la seule question que j'ai à vous
poser sur ce crédit à la consommation, c'est lorsque vous parlez
de 1986. On dit aussi, au sujet des exemptions personnelles - c'est ce que
l'Opposition décrie actuellement à peu près dans chacun de
ses discours - que le contribuable n'en verra pas les effets avant 1987 sur son
rapport d'impôt. J'aimerais savoir si le crédit de cette taxe,
pour le rapport d'impôt de 1986, peut s'appliquer à une
échelle...
Comme deuxième question, vous dites que, par les nouveaux seuils
d'imposition nulle, il va y avoir 41 000 contribuables de plus à faibles
revenus qui ne paieront plus d'impôt. C'est seulement sur la base que
vous donnez actuellement, sur les 19 700 $ en 1986. Allez-y.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le ministre.
M. Duhaime: Bon, je vais commencer par la deuxième
question. À partir du moment où les exemptions de base augmentent
d'une façon très substantielle pour les ménages avec un
enfant et deux enfants, ceux qui se retrouvent au plus bas de l'échelle
de rémunération se trouvent en quelque sorte à sortir du
champ d'imposition et ne sont plus imposés, cessent de payer de
l'impôt sur le revenu des particuliers, suivant ce que vous avez dit
vous-même tantôt.
Votre première question était: Est-ce que les
contribuables vont pouvoir bénéficier de ce budget en 1987
seulement? La réponse est non. La plupart des contribuables à
l'impôt sur le revenu des particuliers, même
ceux qui ne sont pas imposés à la source par une retenue
sur leurs salaires, qui produisent une formule TP1, je crois, doivent payer le
tiers provisionnel. Toute cette mécanique du réaménagement
de l'impôt sur le revenu des particuliers prend effet à compter du
1er janvier 1986 et a un effet immédiat. Sur la première paie de
janvier 1986, les contribuables seront touchés par le
réaménagement de la fiscalité, tel que je l'ai
annoncé dans le budget. Les frais pour aller travailler, par exemple,
vont être pris en compte dès janvier 1986; les exemptions pour
enfants à charge qui sont ajoutées, les exemptions pour les
enfants de moins de seize ans. Vous avez également l'exemption de base
pour les personnes mariées qui a été ajustée. Toute
cette série d'exemptions de base et d'ajustements des déductions,
de même que les frais de garde, sont comptabilisés lorsque
l'employé et l'employeur, en début d'année d'imposition,
préparent les niveaux de retenues à la source. Règle
générale, dans la pratique courante, qu'est-ce qui se fait?
L'employeur retient, sur une base de 26 périodes, ce qu'il croit
être l'impôt que devra payer cet employé. C'est
complètement faux de dire que cela va entrer en vigueur seulement en
1987. Cela entre en vigueur dès la première période de
rémunération de 1986.
M. Laplante: Combien y a-t-il de citoyens sur les rapports de
1984-1985 - si vous n'avez pas les chiffres, vous devez avoir ceux de 1983-1984
- qui ne payaient déjà plus d'impôt au Québec? Les
41 000 s'additionnent.
M. Duhaime: Ceux qui sont sortis du système,
ceux-là sont définitivement sortis, on ne les reverra pas. Je ne
sais pas si on peut répondre à cette question; j'ai des doutes.
Peut-être qu'on va faire la vérification. J'ai des doutes. Ce
qu'on peut vous dire, c'est qu'une quarantaine de milliers sur l'année
1986 ne seront plus imposés.
M. Laplante: Avec les nouvelles tables de taxation, si on
compare...
M. Duhaime: Ce ne sont pas les mêmes personnes, si
c'était le sens de votre question. Celles qui sont sorties du champ
d'imposition au chapitre de l'impôt sur le revenu des particuliers ne
sont pas comptabilisées à nouveau dans le chiffre que vous
évoquez. Elles sont sorties, elles sont sorties.
M. Laplante: Elles sont sorties. Si vous comparez cette nouvelle
forme de taxation avec celle de l'Ontario, pour le salarié de 0 $
à 30 000 $, avez-vous des tables correspondantes qui pourraient indiquer
les différences que l'on dit bénéfiques pour les
Québécois?
M. Duhaime: II y a deux séries de réponses. Vous en avez
un premier aperçu dans un document qui a été rendu public
au mois de janvier, qui est le livre blanc sur la fiscalité.
Déjà, pour 1985, prenons un exemple... Vous avez cela dans le
document de présentation, aux pages 12 et 13, pour ceux qui, à
nous relire, voudront vérifier ces chiffres, qui démontrent
très clairement que, dans notre système d'imposition, au chapitre
de l'impôt sur le revenu des particuliers, les gens du Québec
paient de l'impôt moins vite qu'en Ontario, pour ceux qui sont à
faibles revenus. C'est toute la structure de l'impôt... C'est ce que je
disais cet après-midi à l'Assemblée nationale en
répondant au député de Vaudreuil-Soulanges - même
s'il ne m'a pas cru - et, au livre blanc, vous allez avoir les tableaux pour
l'année 1983.
Nous sommes à préparer des tableaux pour tous les groupes
de ménage en prenant en compte le réaménagement de
l'impôt sur le revenu des particuliers et on va le comparer avec
l'Ontario. Le problème que j'ai, c'est que, ne connaissant pas quel va
être le prochain budget de l'Ontario, je vais être obligé de
mettre des astérisques partout pour dire dans l'hypothèse
où il n'y a pas de modifications à l'impôt sur le revenu
des particuliers dans le prochain budget. C'est un exercice qu'on va faire. Il
est en marche. Si jamais il y avait quelque modification que ce soit dans le
prochain budget de l'Ontario, on sera obligé de tout modifier. (18 h
30)
Il y a une chose qui est sûre et certaine. La structure
d'imposition ontarienne fait en sorte que ceux qui sont à faible revenu,
que ce soit un couple sans enfant avec un revenu de travail, que ce soit un
célibataire sans personne à charge, une famille monoparentale ou
encore un ménage avec un ou deux enfants, paient de l'impôt plus
vite en Ontario. Et c'est cela qui m'inquiète quand je regarde le
programme du Parti libéral. On va avoir le temps de parler un peu ici
aujourd'hui de la résolution que j'évoquais tantôt.
Même si le député de Vaudreuil-Soulanges n'aime pas cela,
je vais le faire quand même.
C'est marqué: Fiscalité et dette publique,
résolution no 2. Orientation générale. L'engagement du
Parti libéral est de faire la révision - écoutez bien cela
- du régime d'imposition des particuliers pour le rendre comparable
à celui des autres provinces. Quand le Parti libéral parle des
autres provinces, j'imagine bien qu'on ne veut pas parler de
l'Île-du-Prince-Édouard ou de la Colombie britannique ou de
Terre-Neuve, on compare à l'Ontario. La table ontarienne est identique
à la table fédérale. Or, la table fédérale
impose les faibles
revenus beaucoup plus rapidement qu'on ne le fait au Québec. Cela
est clair comme de l'eau de roche.
Aussitôt que j'aurai ces graphiques accessibles - peut-être
qu'on pourra les avoir à notre prochaine séance - on pourra les
distribuer. Mais c'est un peu injuste pour nos amis de l'Ontario de mettre cela
sur la table à ce moment-ci de la discussion, parce qu'on ne
connaît pas le prochain budget en Ontario. Ils peuvent le
réaménager, ils peuvent décider d'imposer une taxe sur les
primes d'assurances, ils peuvent décider d'augmenter l'impôt sur
le revenu des particuliers. Je ne le sais pas du tout.
Une voix: Après les élections, cela ne serait pas
surprenant.
M. Duhaime: Alors, cela ferait un peu de distorsion dans nos
chiffres, et je ne voudrais pas que l'Opposition, ici à Québec,
m'accuse de vouloir extrapoler sur des chiffres qui ne seraient,
essentiellement, que des prévisions quelconques. Il y a assez que
l'Opposition fait le calcul des investissements per capita en intégrant
l'année 1985, de très savants calculs, mais, pour l'année
1985, c'est une prévision. Alors, on va refaire tout le calcul à
la suite de votre brillant discours de l'autre jour et on va exclure
l'année 1985. On va avoir de bons écarts, mais je ne veux pas
faire la même chose.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): On verra.
M. Laplante: Dernière question, M. le ministre. À
la page A-Il, les trois dernières lignes de l'avant-dernier
paragraphe.
M. Duhaime: Page 11.
M. Laplante: De votre discours.
M. Duhaime: E-11?
M. Laplante: A-11.
M. Duhaime: E-11?
M. Laplante: A. A, b, c, d...
M. Duhaime: Oui.
M. Laplante: J'aimerais que vous expliquiez ces trois
dernières lignes qui parlent d'un montant de taxe à la
consommation reconnu à l'égard des besoins essentiels. Quelle est
la base de vos besoins essentiels en 1986? Sur quoi les contribuables vont-ils
pouvoir récupérer ces 178 $ de taxe à la consommation?
Dans votre esprit, c'est quoi la taxe à la consommation? Sur quels
produits peut-on en récupérer? Parce que c'est une
récupération dont il s'agit.
M. Duhaime: Oui, c'est un crédit d'impôt
négatif.
M. Laplante: Oui.
M. Duhaime: II n'est pas négatif à l'heure
actuelle...
M. Laplante: Non, absolument pas.
M. Duhaime: En réalité, il s'agit essentiellement
d'imaginer un système selon lequel il s'agit d'un transfert. Le
crédit d'impôt négatif, lorsqu'il sera remboursable -il ne
l'est pas actuellement - ne sera ni plus ni moins qu'un transfert qui sera
fait. Les chiffres qu'on a identifiés sont de 67 $ pour chacun des
conjoints et 22 $ pour chaque enfant à charge, aussitôt qu'il
deviendra remboursable. J'ai indiqué tout à l'heure, et je l'ai
indiqué aussi dans le discours sur le budget, que ce n'est pas toute la
réforme de l'impôt sur le revenu des particuliers qui a
été annoncée dans le discours sur le budget. Ce n'est
qu'une partie. Il y a beaucoup de choses à concilier, entre autres, les
biens de consommation. Est-ce qu'on va aller plus dans cette direction? Est-ce
qu'on va dégager davantage l'impôt sur le revenu des particuliers?
Il y a une chose que j'ai faite, par exemple, dans la fixation des besoins
essentiels. On a essayé d'aller rejoindre les études qui sont
faites, qui identifient ce que j'appellerais la liste des besoins essentiels
pour une personne seule, pour une personne qui vit en logement avec une autre
personne, pour un couple sans enfant, un couple avec un enfant, enfin, toute la
gamme.
À l'heure actuelle, le crédit de taxe à la
consommation pour 1986 n'est pas remboursable, mais va réduire
l'impôt pour ceux qui en ont à payer dès 1986. Il deviendra
négatif, c'est-à-dire transfert, à partir de 1987.
Le Président (M. Lachance): Cela va, M. le
député de Bourassa? M. le député de Rosemont, vous
avez la parole.
Besoins financiers nets du Québec
M. Paquette: Avant de poser mes premières questions, je
vais me permettre quelques commentaires généraux pour bien situer
notre position. C'est la première fois que l'un ou l'autre membre du
groupe des parlementaires indépendants intervient. Je tiens à
rassurer le ministre des Finances. Je partage son opinion sur le programme du
Parti libéral du Québec, en ce sens que ce programme, s'il
était appliqué, évidemment, nous mènerait soit
à augmenter le déficit d'à peu près 2 000 000 000
$, soit à augmenter les taxes de 2 000 000 000 $, soit faire des
coupures effroyables dans les services qui sont dus à la population.
C'est l'une ou
l'autre de ces trois solutions. Il est, bien sûr, à
prévoir que le Parti libéral, s'il arrivait au gouvernement,
devrait faire comme le Parti conservateur à Ottawa, c'est-à-dire
mettre de côté toutes les promesses qu'il va sans doute faire
à la population pendant la campagne électorale et s'aligner sur
quelque chose de sérieux.
Cela dit, la question n'est pas là. La question est de savoir si
le ministre des Finances est d'accord avec le programme du Parti
québécois qui est son parti. Voilà une bonne question. Je
me rappelle que le ministre avait déjà dit qu'il était un
peu fatigué de parler de l'article 1 sur la souveraineté au
moment où on faisait le débat, et qu'il avait hâte qu'on
passe à l'article 2 et à l'article 3. L'article 2, c'est l'emploi
sera une obsession nationale, ou quelque chose comme cela. L'article 3, c'est
l'équité fiscale et la réduction des
inégalités sociales. Notre opinion, c'est qu'on comprend
maintenant pourquoi le ministre avait hâte de passer aux articles 2 et 3,
c'était pour les mettre de côté.
On n'est pas les seuls à penser cela. M. Alain Dubuc disait qu'il
s'agit d'un budget de droite, austère, très peu
généreux pour les citoyens. D'autres parlent du budget
libéral de M. Duhaime, pas libéral au sens où on vient de
le dire, sûrement. Par conséquent, je pense que la principale
critique qu'on peut faire de ce budget, indépendamment de l'alignement
sur tel ou tel programme politique, c'est qu'il ne répond pas aux
préoccupations de la majorité des citoyens qui veulent
travailler, d'une part et avoir un peu plus d'argent pour joindre les deux
bouts. Notre opinion de ce budget - et on va essayer de voir si on a tort, dans
la discussion avec le ministre - c'est qu'il s'agit d'un budget, d'abord,
restrictif, un budget qui augmente le fardeau fiscal, un budget qui
accroît les inégalités entre les classes de revenus, un
budget où il y a très peu de mesures - qu'on peut difficilement
évaluer d'ailleurs - visant à accroître l'emploi et visant
aussi à faire entrer le Québec dans cette révolution
technologique dont nous parle le ministre dans les trois premières pages
de son discours, mais dont il ne reparle plus, ou si peu, dans les mesures
concrètes qu'il annonce.
Pour ma première série de questions, je vais plutôt
me concentrer sur le premier thème, c'est-à-dire un budget qui
est restrictif, qui fait en sorte que le gouvernement a un impact moins grand
dans l'économie, sans augmenter celui des agents privés de
l'économie, ce qui fait qu'on se demande d'où va venir la
stimulation nécessaire à l'emploi. Dans l'ensemble de la richesse
collective qu'on se partage dans la société
québécoise, si on regarde l'évolution des revenus
budgétaires, le gouvernement va prendre une part plus grande que par le
passé de cette richesse collective. Il va aller en chercher une plus
grande part. Je regarde ses prévisions. En 1985-1986, les revenus
budgétaires augmentent de 8, 1 % pendant que le PIB n'augmente que de 6,
3 %. Pour l'année suivante, les revenus budgétaires augmentent de
5, 7 %, et la progression du PIB est de 5 %. En 1987-1988, les revenus
budgétaires augmentent de 6, 1 % et le PIB augmente de 5, 3 %. Le
gouvernement va donc chercher une plus grande part du gâteau
collectif.
Du côté des dépenses, il dépense moins! De
moins en moins! Si on regarde la part des dépenses, toujours dans le
gâteau collectif, en 1985-1986, c'est 6, 8 % contre 6, 3 %; en 1986-1987,
les dépenses augmentent de 4, 6 % et le PIB de 5 % toujours; et, en
1987-1988, les dépenses augmenteraient de 4, 5 % et le PIB de 5, 3 %.
Cela veut dire que, pendant trois ans, le ministre va aller chercher plus
d'argent dans l'assiette collective, donc chez tout le monde, les
contribuables, les entreprises. Après, on pourra discuter pour savoir
comment sont réparties ces ponctions, mais c'est une autre question!
Mais, il va chercher plus d'argent et il en remet moins, dans le but
évident - et c'est là que se trouve le point, à mon avis -
de réduire ses besoins financiers nets. On constate qu'au sujet des
besoins financiers nets on retombe à peu près à un niveau
antérieur au dernier budget Garneau sous le gouvernement Bourassa, en
1977-1978, alors que les besoins financiers nets étaient de 2, 9 %. Le
ministre, après 2 % l'année passée, nous fait descendre
à 1, 5 %, l'année prochaine à 1, 4 % et la dernière
année à 1, 2 %.
Ma première question au ministre est la suivante. Étant
donné que - et j'aimerais qu'il puisse donner des chiffres
là-dessus -comparativement aux autres provinces et, surtout au
gouvernement fédéral, les finances du Québec face au
déficit, aux besoins financiers nets, ont une assez bonne performance...
J'avais vu les chiffres il y a deux ans. Le Québec avait la meilleure
performance, sauf les provinces de l'Ouest. C'était avant la crise
économique, avant la récession. Depuis la récession, comme
le chômage a augmenté considérablement en Alberta et en
Colombie britannique, plus qu'au Québec, il faut le reconnaître,
en ce qui a trait à l'emploi, la situation s'est
améliorée, relativement, au Québec par rapport aux
provinces de l'Ouest. Probablement qu'au sujet des besoins financiers nets, on
peut supposer que le Québec a une des meilleures performances des
provinces canadiennes. Pourquoi avoir décidé de diminuer les
besoins financiers nets de 2 000 000 000 $ qu'ils étaient l'année
dernière à 1 600 000 000 $ cette année? Si le ministre
avait simplement maintenu les besoins financiers nets dans le PIB au
même
niveau que l'année passée, il n'aurait pas eu besoin
d'imposer une taxe aussi odieuse que celle sur les assurances, qui taxe la
protection que les gens décident de se donner, la responsabilité
qu'ils décident de prendre plutôt que d'être davantage aux
crochets de l'État.
Vu que les emprunts du gouvernement du Québec sont faits aux
trois quarts, je pense, en devises canadiennes, qu'est-ce qui explique cette
espèce de hantise à baisser constamment les besoins financiers
nets? Surtout quand on considère le fait que le gouvernement
fédéral, lui, va devoir y aller encore plus fort que le
gouvernement du Québec et que l'économie américaine donne
des signes de ralentissement. S'il pense que l'emploi doit être une
obsession nationale, comme le stipule l'article 2 du programme de son parti ou
l'article 1 de la social-démocratie, pourquoi le ministre n'a-t-il pas
pensé à compenser? Le grand frère d'Ottawa dit: Mulroney
salue le réalisme du budget Duhaime...
M. Duhaime: II ne l'a pas lu!
(18 h 45)
M. Paquette: Non, mais cela fait probablement son affaire parce
qu'il va être obligé de nous faire un budget encore pire, et les
Québécois risquent d'être doublement taxés, d'avoir
des coupures de dépenses doubles, pour réduire le déficit.
On comprend qu'avec un déficit de 35 000 000 000 $ il faut que le
gouvernement fédéral fasse quelque chose. Mais, encore une fois,
qu'est-ce qui justifiait, dans la perspective d'une politique de plein emploi
et de l'objectif du programme du Parti québécois, de diminuer de
400 000 000 $ les besoins financiers nets cette année?
Le Président (M. Lachance): M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, je me fais un devoir de
prudence en répondant à un ancien collègue, membre du
Conseil des ministres, dans mes propos. Mais, si mon souvenir est bon,
l'article 2 de notre programme parle plutôt de l'accession à la
souveraineté dans la démocratie. J'imagine que vous n'êtes
pas si loin, maintenant, dans le temps, de ces textes pour déjà
les avoir oubliés.
La deuxième chose que je voudrais dire est que le
réaménagement de l'impôt sur le revenu des particuliers qui
va entrer en vigueur le 1er janvier 1986, de toute évidence,
dégage davantage de revenus disponibles. Sur 245 000 000 $, il y en a
208 000 000 $ qui sont affectés aux ménages avec un, deux ou
plusieurs d'enfants. J'ai eu l'occasion d'expliquer cet après-midi que
ces contribuables étaient lésés, en quelque sorte, et sont
toujours lésés dans le système actuel puisqu'ils doivent
payer un montant d'impôt sur le revenu disponible qui est
nécessaire pour faire face à leurs besoins essentiels. J'ai
pensé que c'était là qu'était l'urgence.
Pour ce qui est du développement économique et de la
création d'emplois, je voudrais vous donner des chiffres que j'ai ici.
Depuis deux ans, on a mis sur pied des programmes de relance. Il y en a deux au
moins auxquels vous avez participé vous-même, le plan de relance
du mont Sainte-Anne et celui de Compton. En 1985-1986, ces programmes se
continuent. Ils ont des effets sur les dépenses affectées au
développement de l'économie et au soutien de l'emploi dans
l'exercice 1985-1986. Vous en avez, pour ce qui est du mont Sainte-Anne, et
c'est une... Si vous voulez revérifier ce que je vais affirmer dans les
secondes qui vont suivre, vous n'avez qu'à reconstituer,
ministère par ministère, les différents crédits,
surtout dans les portefeuilles à vocation économique, et au sujet
du mont Sainte-Anne et d'autres iniatives démarrées en 1983-1984,
mais qui continuent sur l'exercice 1985-1986, vous en avez pour 300 000 000 $.
Pour le plan de relance de Compton, en 1984-1985, il y en a eu pour 246 000 000
$ et, cette année, c'est 354 000 000 $. Pour la mission
économique le montant, est de 125 000 000 $. Pour les autres initiatives
-vous pouvez faire vous-même toute la collection de cela - il y a 196 000
000 $. Dans le développement également, dans les portefeuilles
à vocation économique pour 1985-1986, c'est 152 000 000 $. Cela
fait un total de 1 227 000 000 $ répartis dans les différents
portefeuilles. Cela commence à être passablement d'argent.
Maintenant, au sujet de la question très importante que vous avez
soulevée, la dette globale du gouvernement est d'à peu
près de 20 000 000 000 $. Le pourcentage du budget que l'on doit
consacrer à l'heure actuelle au service de la dette est de l'ordre
d'à peu près, je crois que c'est 13, 7 % arrondi à 14 %.
Dans le langage courant, il faut se poser la question: Est-ce que le rythme
d'endettement du Québec correspond à sa capacité de payer,
c'est-à-dire à la croissance de la production? Ma réponse,
M. le Président, est qu'à ce rythme, et je répète
ce que je disais tantôt, en période de crise économique, en
période de récession, les années difficiles de 1981-1982
que nous avons connues, utiliser la marge de manoeuvre qu'un gouvernement peut
avoir pour stimuler l'économie, l'emploi, aider ceux qui sont dans la
misère, cela paraît aller de soi. On ne peut pas maintenir
indéfiniment un niveau d'endettement comme celui-là. Le choix que
j'ai fait est que notre génération à nous, ceux qui vivent
au Québec, qui ont des services paient des taxes, plutôt que
de
refiler la facture à nos enfants. Cela vient vite.
J'aurais très bien pu décider au budget, au lieu de faire
3 095 000 000 $ de déficit, de faire 3 500 000 000 $ et d'emprunter 400
000 000 $ de plus, mais le niveau des dépenses du gouvernement,
malgré ce que vous venez de dire, est en réalité de 5 100
000 000 $.
Certains nous reprochent que le rythme de croissance des dépenses
est encore trop élevé. Vous nous dites, de votre
côté, qu'il est insuffisant. Je n'ose même pas faire quelque
comparaison que ce soit avec ce qui s'est passé du côté
fédéral depuis ces dernières années. Quand on en
est rendu à un déficit fédéral de l'ordre de 35 000
000 000 $, cela commence à faire un fardeau qui est énorme pour
les générations qui viennent. Cela va prendre passablement
d'années, malgré toutes les bonnes intentions que M. Mulroney et
son ministre des Finances ont annoncées, cela va prendre pas mal
d'années avant de le ramener. C'est le même
phénomène aux États-Unis. Quand le président Reagan
a fait sa première campagne électorale présidentielle, le
déficit américain était de 50 000 000 000 $. Il trouvait
que c'était trop haut et il s'est engagé à réduire
cela. Il était conservateur, lui, un vrai, un "right wing". Quand il a
fait compagne pour son deuxième mandat, le déficit
américain était de 220 000 000 000 $ sur un budget global de 979
000 000 000 $ ou 980 000 000 000 $. Cela prouve quoi? Cela prouve qu'un
déficit ne peut pas se ramener d'un exercice financier à
l'autre.
Alors, cela a été mon choix et c'est le choix du
gouvernement de s'assurer que les entrées d'impôt, soit
l'impôt sur le revenu des particuliers ou encore la taxe de vente ou les
différentes formes d'impôt, puissent faire en sorte que nous
payions nous-mêmes, notre propre génération, pour les
services que nous consommons et que nous demandons de l'État. C'est
l'explication que je vous donne.
M. Paquette: Est-ce que le ministre a à sa disposition des
chiffres? Comment se compare le Québec avec les autres provinces quant
à l'ampleur de ses besoins financiers dans le produit intérieur
brut?
M. Duhaime: Je ne sais pas si j'ai cela ici avec moi, mais je les
ai eus récemment à mon bureau. Je pourrais les apporter.
M. Paquette: Vous pourriez nous apporter cela demain ou
après demain.
M. Duhaime: Oui, sûrement.
M. Paquette: Cela m'intéresserait de regarder cela.
D'autre part, je tiens à souligner au ministre que, lorsqu'il nous parle
du fait que les aménagements de l'impôt sur le revenu vont mettre
de l'argent dans l'économie parce que les ménages vont avoir plus
d'argent, en 1985-1986, il remet 112 000 000 $. C'est pas mal moins que ce
qu'il vient chercher avec la taxe de consommation. En 1986-1987, il remet 391
000 000 $; en 1985-1986, il remet 516 000 000 $ d'après son tableau de
l'impact financier du réaménagement de l'impôt des
particuliers. Est-ce qu'on doit en conclure que, même en 1987-1988,
compte tenu des nouvelles taxes qui prennent effet tout de suite, même
là il y aura moins d'argent de retourné aux contribuables et
à plus forte raison en 1985-1986?
Je pense qu'on arrive vers la fin. Au niveau des dépenses, cela
fait deux fois que j'entends le ministre dire qu'il y a eu une
accélération du plan de relance. Dans le budget de l'année
passée, on annonçait des dépenses de 311 000 000 $. Les
dépenses réelles ont été de 246 000 000 $. Pour
l'année prochaine, le budget de l'année passée nous
annonçait des dépenses de 389 000 000 $ et le nouveau ministre
des Finances nous annonce des dépenses de 354 000 000 $. Si je calcule
bien, sur deux ans, c'est 100 000 000 $ de moins dans le plan de relance que ce
qui était prévu l'année passée. Je ne sais pas
comment, à partir de ces deux faits, c'est-à-dire l'impôt
qu'on remet plus tard, mais qu'on prend soin de prendre plus fortement tout de
suite, et le ralentissement du plan de relance et la faiblesse des
investissements publics aussi, on peut en conclure qu'on a un budget qui va
grandement stimuler l'emploi.
M. Duhaime: M. le Président, je voudrais donner une
information additionnelle. Je m'excuse, M. le Président. Je voulais
être sûr d'un six. J'ai mentionné tantôt le chiffre de
20 000 000 000 $ qui est la dette du gouvernement. Il faut ajouter à
cela - ce n'est peut-être pas tout à fait correct de faire une
addition comme celle-là, mais cela va quand même donner une
idée de la dimension - les réseaux, 3 500 000 000 $, les dettes
des sociétés d'État autres qu'Hydro-Québec, 1 500
000 000 $, et les municipalités, 8 000 000 000 $. Si j'ajoute
Hydro-Québec, 18 000 000 000 $, cela fait 49 000 000 000 $, et si
j'ajoute 6 000 000 000 $ aux régimes de retraite, cela fait 55 000 000
000 $. Je considère que cela commence à faire pas mal d'argent
et, d'une manière ou d'une autre, par des tarifs, par des taxes et des
impôts, l'ensemble des Québécois paient cette dette.
Je suis un peu amusé par la remarque du député de
Rosemont parce que, quand on a l'occasion de faire la révision des
ministères qui ont du succès en termes de dépenses sur les
allocations budgétaires qui
leur sont faites, j'ai trouvé deux choses: un programme qui n'a
pas bien fonctionné ou qui aurait dû fonctionner mieux et le
programme d'assainissement des eaux, qui est à l'intérieur du
programme de relance. On en paie 90 %. Pourquoi il a mal réussi? Il y
aurait 57 raisons, dont la réaction des municipalités d'abord.
Dans ma propre région, en Mauricie, les mairies ont été
lentes à réagir à ce programme et demain, vendredi, on va
signer un protocole pour ce qui est de l'assainissement des eaux pour les
villes de Trois-Rivières, Trois-Rivières-Ouest et
Cap-de-la-Madeleine. Au centre de la Mauricie, on va également mettre en
marche des programmes, mais je dois dire que les mairies ont été
lentes. Il y a un autre programme au ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, parce que le programme a
été "attaché" un peu hors saison et mon collègue,
M. Garon, n'a pas pu dépenser toute l'allocation budgétaire qui
lui était faite pour les plates-formes à fumier. Et le
troisième, c'est le ministère de la Science et de la Technologie
sur la mise en fonctionnement des centres de recherche.
M. Fortier: C'est à cause du départ du
ministre.
M. Paquette: Ah! Ah! Ah!
M. Duhaime: II faut bien comprendre que, lorsqu'on fait un plan
de relance...
M. Paquette: Oh! M. le Président, je vais vous demander 30
petites secondes là-dessus.
M. Duhaime: Ce sont des faits, M. le Président. Je peux
apporter les chiffres. Je regrette, mais c'est exactement la stricte
vérité. Cela explique qu'on fait une prévision sur des
montants de crédits à dépenser, et vous savez comme moi
qu'en cours d'année il faut ajuster. Il y a des crédits qui sont
périmés, il y a des réaffectations qui sont faites, mais
je pense vous avoir identifié les trois postes du programme de Compton,
entre autres, qui ont connu un peu de retard, mais ce n'est pas magistral. Ce
n'est pas plus grave que cela.
Le Président (M. Lachance): À ce moment-ci...
M. Paquette: Je voudrais simplement signaler très
brièvement au ministre qu'il devrait demander à mon successeur
pourquoi les centres de recherche...
M. Duhaime: Je ne sais pas pourquoi, mais je sais, en tout cas,
ce qui est arrivé.
M. Paquette:... dont les documents ont été
acheminés ne sont pas encore constitués, je pense, huit mois
après.
M. Fortier: II y a d'autres priorités.
M. Duhaime: Écoutez, M. le Président! Je vais être
très correct avec mon collègue. Je ne dis pas que c'est sa faute
à lui. Je n'ai pas l'explication. Tout ce que je sais, c'est que ces
trois ministères, Environnement, Agriculture, Pêcheries et
Alimentation, et Science et Technologie, cela adonne comme cela. Je m'excuse,
mais c'est vrai.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Mais, en même temps, on
ne peut pas dire cela et se péter les bretelles sur le montant des
crédits périmés. On ne peut pas blâmer...
Le Président (M. Lachance): Tel que convenu...
M. Fortier: Autrement dit, est-ce que le ministre va quitter?
J'avais une couple de questions.
Le Président (M. Lachance):... à moins d'un
consentement unanime, il est 19 heures et on pourrait reprendre...
M. Duhaime: M. le Président, peut-être que le
député d'Outremont pourrait venir nous rejoindre. Je n'ai pas en
mémoire à quelle heure et à quel moment exactement on
reprend les travaux de notre commission.
Le Président (M. Lachance): Ce n'est pas ce soir, M. le
ministre. Probablement, selon l'information que j'ai, que ce sera mardi de la
semaine prochaine.
M. Duhaime: Je suis "bouclé". J'ai un rendez-vous. Des
gens m'attendent à 19 heures.
M. Fortier: On m'avait dit qu'on siégerait jusqu'à
20 heures.
M. Duhaime: Pardon?
M. Fortier: J'étais programmé jusqu'à 20
heures. On m'avait dit jusqu'à 20 heures.
M. Duhaime: On m'avait dit 19 heures.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): On s'excuse. Tout le monde
s'excuse auprès de notre collègue d'Outremont d'avoir
modifié à son insu, hors de sa compréhension, les
règles qui prévalaient...
M. Duhaime: On pourra vous consentir un droit de parole...
M. Fortien Je vais m'organiser pour revenir, M. le ministre.
Le Président (M. Lachance): De toute façon, on s'en
tiendra à un ordre qui viendra de la Chambre demain, un ordre du leader.
Je vous remercie de votre collaboration.
La commission du budget et de l'administration ajourne ses travaux sine
die.
(Fin de la séance à 19 heures)