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(Dix heures neuf minutes)
Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous
plaît:
La commission du budget et de l'administration se réunit ce matin
avec le mandat suivant: interpellation du député de
Vaudreuil-Soulanges au ministre des Finances sur le sujet suivant: l'imposition
de la taxe de vente sur les primes d'assurance.
Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Caron
(Verdun) est remplacé par M. Lincoln (Nelligan). C'est tout.
Le Président (M. Lachance): Très bien.
Pour le bénéfice des participants, je répète
rapidement les procédures prévues en cas d'interpellation. Un
premier bloc de dix minutes est réservé au député
de l'Opposition qui a interpellé le ministre. Le ministre a ensuite dix
minutes pour lui répondre. Par la suite, ce sont des alternances qui
durent seulement cinq minutes. Vingt minutes avant la fin, le ministre prend la
parole pendant une durée de dix minutes et, finalement, le
député qui a interpellé termine lui aussi avec une
période de temps de dix minutes.
Je constate que nous avons ce matin la présence de
députés indépendants. Ils pourront intervenir. Cela
n'arrive pas très souvent lors d'une interpellation, mais ils pourront
le faire. Sur la période de temps consacrée, à moins d'un
consentement, un bloc minimum de cinq minutes peut être alloué
dans le temps de parole de l'Opposition.
M. Paquette: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Rosemont.
M. Paquette:... nous avons une entente avec l'Opposition
officielle pour prendre les sept et seize s'il y a lieu, c'est-à-dire
les troisième et seizième questions de l'Opposition.
Le Président (M. Lachance): Je voudrais vous signaler, M.
le député de Rosemont, que la semaine dernière, comme il y
a eu quelques dépassements de temps, le seize est disparu à un
moment donné en cours de route. On va essayer de s'en tenir...
M. Paquette: Le seize est risqué.
Le Président (M. Lachance): Très bien, M. le
député.
M. le député de Vaudreuil-Soulanges, vous avez la
parole.
Exposé du sujet M. Daniel Johnson
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président.
C'est un peu dans le cadre de l'examen du budget qu'à ce moment-ci il y
a une interpellation à l'adresse du ministre des Finances, de
façon plus précise sur l'opportunité d'avoir
inventé une nouvelle façon de taxer les Québécois,
non pas en taxant un bien identifiable comme on le fait partout en
Amérique du Nord, mais bien en innovant, en taxant ce qui est un
service, en l'occurrence un service financier.
Quant à nous, cette décision est d'une portée
considérable quant à la nature de la fiscalité au
Québec. C'est un choix fondamental que le gouvernement a fait sans
discussion préalable, sans consultation aucune. Cela ouvre la porte
à toutes sortes de possibilités pour l'avenir qui sont, à
notre avis, particulièrement inquiétantes, je dirais dangereuses
pour le Québec. C'est le premier volet dont nous traiterons.
Le deuxième volet concerne les aspects injustes de cette taxe -
qui ont été relevés par nombre de commentateurs - dans la
mesure où elle frappe des gens quel que soit leur niveau de revenu, les
taxes dans certains cas dans leurs besoins essentiels, malgré toutes les
grandes déclarations qui semblent sous-tendre le
réaménagement de la fiscalité des particuliers. On taxe
certains besoins essentiels des Québécois. Nous parlons
là, évidemment, de l'assurance, de la prévoyance que les
familles se sont habituées au fil des ans à mettre en oeuvre pour
protéger les leurs. Le gouvernement a choisi de taxer cette
activité parfaitement naturelle, parfaitement recommandable des familles
québécoises.
Le troisième volet, c'est une mesure fiscale qui a
été amenée dans l'improvisation la plus totale. Il s'agit
de regarder les cafouillages, enfarges, trébuchements du ministre et du
gouvernement depuis le 23 avril à l'égard de l'application de
cette taxe, à l'égard non seulement de l'implantation
mécanique dans certains cas de la taxe de
vente sur les assurances, mais à l'égard même de la
définition de l'assiette fiscale sur laquelle cette taxe de vente de 9 %
pèse depuis le 23 avril dernier.
Nous disons donc que c'est une mesure inquiétante. Pourquoi?
Parce que le ministre a choisi le modèle européen - alors que
nous habitons en Amérique du Nord - d'étendre à des
services et non pas à des biens une taxe de vente, une taxe à la
consommation. Elle nous distingue du reste des provinces et États
américains qui nous entourent, et introduit des distorsions très
certaines, comme nous avons l'intention de le démontrer, dans la
position concurrentielle du Québec à l'égard de toutes
sortes d'activités à retombées économiques qui, par
ailleurs, pourraient être positives pour le Québec, mais
deviennent négatives à partir du moment où
l'activité financière d'assurance au Québec est
imposée par la taxe de vente.
C'est inquiétant, parce que c'est un revirement complet de notre
façon de taxer les gens. C'est un revirement complet de la façon
dont le gouvernement du Québec va se chercher des revenus pour financer
les services publics. Quand on fait un revirement de cette nature, on doit
absolument y aller avec prudence. On doit voir les tenants et aboutissants de
cette décision lourde de sens et de conséquences. On doit
consulter les gens. C'était la promesse, je ne dirais pas implicite,
mais explicite du prédécesseur du ministre des Finances, du
ministre des Finances lui-même à l'égard de la consultation
qui devait se dérouler sur les propositions de changements fondamentaux
que certains textes du livre blanc pouvaient laisser soupçonner ou
entrevoir.
C'est donc inquiétant de voir aux rênes des finances
publiques un gouvernement qui a choisi, sans consultation, sans
préoccupation pour les impacts concrets de ses gestes, d'introduire une
taxe de vente sur des services.
Deuxièmement, une taxe injuste, nous y revenons, parce que
régressive, dans la mesure où 9 % sur cette assiette fiscale
qu'est l'assurance sont payables quelle que soit la capacité de payer du
contribuable. C'est injuste au point de vue des individus qui sont
obligés de s'assurer. Ce n'est pas une dépense
discrétionnaire, ce n'est pas un luxe, l'assurance, lorsqu'on est un
jeune foyer, qu'on fait l'acquisition de sa première maison, qu'on
emprunte donc pour financer. Lorsqu'on emprunte sur hypothèque, le
prêteur exige - c'est ce qu'il y a de plus normal à
l'échelle mondiale - une assurance sur la vie de l'emprunteur pour
garantir le remboursement en cas d'accident ou de décès de
l'emprunteur et exige également que le bien sur la valeur duquel
l'hypothèque est levée soit lui-même protégé
contre les sinistres, notamment, évidemment, le feu et la perte de ce
bien.
C'est donc obligatoire pour une jeune famille au Québec de
s'assurer lorsqu'elle fait l'acquisition d'une maison. Et elle est aujourd'hui
taxée à 9 % sur cette prime d'assurance qu'elle doit payer, non
pas qu'elle peut payer, non pas qu'elle a le loisir ou l'option de payer, car
c'est une obligation dans les faits qu'il y a de payer des primes d'assurance
lorsqu'on achète une maison. C'est un des exemples. Nous reviendrons
tout à l'heure avec d'autres exemples.
Troisièmement, une taxe improvisée, une mesure fiscale
improvisée. Nous ne parlerons pas ici de toutes les autres preuves
d'improvisation qui ont parsemé le discours du ministre depuis le 23
avril non seulement à l'égard des assurances, mais à
l'égard des allocations familiales, à l'égard des
exemptions, à l'égard de l'imposabilité ou du
caractère maintenant imposable des allocations familiales, à
l'égard de l'abolition, quant à nous, des allocations familiales
du Québec.
On voit Ies contradictions, on voit les changements de cap. On le voit
notamment en matière d'assurance. Alors que le ministre disait
très clairement le jour du budget que les primes d'assurance au
Québec seraient payées à compter de minuit une seconde, le
24 avril, on voit déjà, si j'en crois mes oreilles quant aux
entrevues que le ministre a données depuis vingt-quatre heures, qu'il y
aura très bientôt des annonces qui seront faites sur des
aménagements concrets, aménagements concrets auxquels
l'Association des courtiers d'assurances a déjà indiqué
à ses membres qu'ils pouvaient donner suite, à la suite de
rencontres que les courtiers auraient eues avec le ministre dans la semaine du
budget. Le 26 avril - pas mardi de la semaine prochaine, vendredi dernier
-l'association des courtiers se sentait confortable pour indiquer à ses
membres qu'ils n'avaient pas à percevoir la taxe de vente sur trois
éléments, contrairement à ce que le budget
annonçait: premièrement, sur les primes payées à
partir du 24 avril sur des contrats entrés en vigueur avant cette date;
deuxièmement, sur les comptes recevables des courtiers d'avant le 24
avril pour les contrats entrés en vigueur avant cette date;
troisièmement, l'exemption également de percevoir la taxe de
vente sur les chèques post datés en possession du courtier en
date du 24 avril, acquittant des contrats entrés en vigueur avant cette
date.
Discours sur le budget où chaque mot doit être pesé,
où chaque conséquence doit avoir été
évaluée, discours sur le budget où, dans les "autres
mesures", entre guillemets -autres mesures qui taxent lourdement les
Québécois - on nous annonce que les primes versées,
payées, perçues à partir du 24 avril seraient sujettes
à une taxe de vente de 9 %. Dans les heures qui ont suivi, le ministre a
indiqué que tel n'était pas le cas.
Improvisation totale. Improvisation quant à l'assiette et j'y
reviendrai. Un régime enregistré d'épargne-retraite qui
est immatriculé au nom d'un contribuable de 68 ans, 70 ans, qui doit
acheter une rente viagère ces jours-ci sera-t-il considéré
comme une prime d'assurance unique pour l'acquisition d'une rente
viagère? On n'en sait rien.
Je reviendrai tout à l'heure avec d'autres exemples qui
démontrent l'improvisation de cette mesure, l'injustice qui pèse
sur les contribuables et le fait qu'elle est particulièrement
inquiétante pour l'avenir des finances publiques au Québec.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre des
Finances.
Réponse du ministre M. Yves Duhaime
M. Duhaïme: M. le Président, je voudrais, dans un
premier temps, informer l'Opposition officielle que cette mesure n'est pas
nouvelle, qu'elle existe déjà ailleurs. Je vais essayer de donner
les informations.
Première chose, je voudrais, d'abord, dissiper une confusion qui
a été lancée à la télévision le
lendemain soir du budget par M. Marcellin Tremblay, vice-président de
l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes Inc. et
président de la section Québec, et qui a été
reprise trois jours plus tard par le chef du Parti libéral, M. Robert
Bourassa. Actuellement, il existe dans notre système de fiscalité
des entreprises ce qu'on appellerait une formule de taxation en trois volets,
qui est la formule à règle trois fois trois. Il existe une taxe
de 3 % sur le capital des entreprises, il existe une taxe de 3 % sur la masse
salariale pour la bonne marche de nos hôpitaux et du financement de tous
les services de la santé, il y a également une taxe de 3 % sur
les profits pour les entreprises qui ont des profits jusqu'à 200 000 $
et de 5, 5 % lorsque c'est plus de 200 000 $. Cela, c'est la règle qui
s'applique à l'ensemble de la fiscalité des entreprises.
Une compagnie d'assurances, c'est une entreprise comme une autre, mais
il y a une complication qui s'est glissée, il y a plusieurs
années, au moment où ces législations fiscales sont
entrées en vigueur, dans le cas des compagnies d'assurances, parce qu'il
n'était pas facile d'appliquer directement une taxe de 3 % sur le
capital des entreprises. Donc - et c'est la loi qui le dit aujourd'hui -dans le
cas des compagnies d'assurances, plutôt que de prélever 3 % sur le
capital et de faire une simple règle mathématique, le
gouvernement à l'époque s'est dit: Cette taxe sur le capital,
plutôt qu'être de 3 %, sera, dans le cas des compagnies
d'assurance- vie et dans le cas des compagnie d'assurance-maladie,
équivalente à 2 % de3 primes d'assurance payées. Dans le
cas des autres primes d'assurance, sur les biens, l'automobile, l'assurance
générale, etc., ce sera 3 %.
Donc, les 2 % sur les primes, dans le cas des compagnies d'assurance-vie
et d'assurance-maladie, n'est pas en réalité une taxe sur les
primes d'assurance, mais l'équivalent de la taxe sur le capital. C'est
le même raisonnement dans le cas des autres compagnies pour ce qui est
des 3 %.
Or, M. le vice-président Tremblay, à la
télévision, calculait 2 + 9 = 31; 3 + 9 = 12, et Robert Bourassa
a fait la même erreur. C'est une erreur qui est importante parce qu'au
lieu de dire 2 + 9 = 11, il faut dire, puisque les 2 % sont déjà
intégrés dans la prime, 2x9 = 0, 18. Alors, la différence
entre 2 et 0, 18 fait 1, 82. Sur une masse de quelques milliards de dollars,
cela commence à faire une marge d'erreur assez appréciable.
De deux choses l'une: si nos amis d'en face - et ce matin, M. le
Président, je vais essayer d'être agréable tout
l'avant-midi -prétendent qu'à partir de maintenant ce n'est plus
2 % ni 3 %, mais 11 % et 12 % sur les primes d'assurance dans la même
logique, cela veut dire qu'il n'existe plus de taxe sur le capital des
entreprises d'assurances, ce qui est faux. Cela mériterait d'être
regardé plus attentivement et même d'être corrigé.
Deuxième chose: en introduisant cette mesure, est-ce que le budget
crée un précédent en Occident? Mais non!
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Pas en Occident; en Europe,
cela ne fait pas de difficulté.
M. Duhaime: Je ne vous parlerai pas de l'Europe.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Quand vous parlez de
l'Occident, l'Europe n'est pas là. Très bien, merci.
M. Duhaime: Ce n'est pas ce que j'ai dit. Vous m'avez
demandé d'être agréable, je vais essayer de l'être.
On n'a pas besoin d'aller en Europe. À Terre-Neuve... Vous riez des
Terre-Neuviens? Depuis 1968, à Terre-Neuve, une taxe de vente est
prélevée sur les primes d'assurance générale; la
taxe a été augmentée à 10 % en 1977, à 11 %
en 1978 et à 12 % en 1982. Il faut ajouter que cette taxe ne s'applique
pas à l'assurance-vie.
M. le Président, l'Europe, c'est à une heure et demie de
vol par Concorde. C'est presque dans notre environnement maintenant. C'est le
même monde, ce sont les gens avec qui nous commerçons, avec qui
nous transigeons presque sur une base
quotidienne. Il ne faut pas exclure l'Europe du champ de nos
réflexions surtout en matière fiscale alors que votre chef
lui-même va chercher les notions de TVA en Europe.
J'ajoute que la question que pose le député de
Vaudreuil-Soulanges et la façon -je ne dirais pas quant à
lui-même, à sa personne - dont sa formation politique traite ce
sujet, c'est absolument délirant. On nous dit: II y a eu improvisation,
mais en même temps le Parti libéral soutient toutes les
démarches des associations de courtiers d'assurances et des associations
de compagnies d'assurances qui ont sollicité des rencontres, que je leur
ai accordées le plus rapidement possible. Ces gens-là nous font
des propositions pour voir quelle sera la mécanique administrative et
comment la perception de cette taxe pourra se faire avec le moins de
distorsions possible. Je suis prêt à admettre, M. le
Président, que c'est nouveau; ce n'est pas un précédent,
au Québec c'est nouveau.
Je dois dire qu'il y a des compagnies d'assurances qui se sont
ajustées très vite: elles ont compris tout de suite, parce que le
texte du discours sur le budget qui définissait le champ d'application
de cette mesure était très très clair: les primes
payées à partir de minuit le 23 avril. Cela définit
l'ensemble du champ de taxation. Une fois que cela est fait, notre
gouvernement, M. le Président, a toujours accepté de dialoguer
avec tout le monde. On n'est pas là pour essayer de créer des
embarras inutiles. On sait que payer des taxes et des impôts, ce n'est
drôle pour personne, ni pour moi, ni pour vous, j'en suis convaincu,
lorsque vous signez votre formule d'impôt chaque année, avant le
30 avril. Il n'y a personne qui aime cela, payer des taxes.
On va donc essayer de continuer nos dialogues, qui vont se poursuivre.
Hier, il y a eu des rencontres, il y en a même encore aujourd'hui. Mais
déjà des compagnies d'assurances, malgré tous les hauts
cris que vous lancez de l'autre côté, se sont ajustées. Je
ne veux pas faire de publicité inutile, elles n'en ont pas besoin, mais
j'ai ici une lettre d'une compagnie d'assurances qui a adressé un avis
à son assuré pour une police d'assurance-vie sur la base d'une
échéance mensuelle. C'est une prime mensuelle de 62, 49 $,
à laquelle on ajoute 5, 63 $ pour un total de 68, 12 $ à partir
du mois de mai. Il n'y a pas de problème avec cela, tout le monde s'est
informatisé aujourd'hui et cela fonctionne.
L'Opposition nous dit qu'il y a eu de l'improvisation. Il n'y a eu
aucune espèce d'improvisation là-dessus, je vous en donne ma
parole. Cependant, j'ai dit au député de Nelligan que, dans le
cas de l'assurance maritime, par exemple, nous allions faire un examen encore
plus poussé de ce que nous avons fait. La première chose dont il
faut nous assurer dans ce secteur-là, c'est de
l'étanchéité de la mesure et, deuxièmement, voir si
vraiment les impacts économiques seraient aussi énormes que ses
propos d'hier le laissaient entendre. (10 h 30)
J'ajoute, M. le Président - je vais terminer là-dessus -
deux brefs exemples, parce qu'on nous dit que la mesure est injuste. J'aurai
l'occasion d'y revenir tantôt pour vous démontrer que non
seulement cette mesure n'est pas régressive, mais qu'elle est
progressive, parce que tout le monde se paie un portefeuille d'assurances en
fonction de ses disponibilités. Je suis prêt à admettre
que, dans le cas de l'assurance automobile, on n'a pas le choix, la loi nous
oblige à nous assurer. Lorsqu'on est locataire ou propriétaire,
on assure son ménage, dans les deux cas. Lorsqu'on est
propriétaire, on assure sa maison.
Prenons le cas d'un propriétaire, quelqu'un de moins de trente
ans, qui a un prêt hypothécaire et qui doit payer une partie de
l'assurance. Pour un moins de trente ans, avec une banque, la Banque Nationale,
il y a 0, 14 $ les 1000 $ par mois de solde de prêt hypothécaire;
plus 9 %, cela va faire 0, 153 $. Cela fait 0, 013 $ par 1000 $, par mois. Dans
le cas d'un plus de trente ans, à l'heure actuelle, c'est 0, 20 $ les
1000 $ par mois. Avec 9 %, cela fait 0, 218 $, donc 0, 18 $.
C'est un peu moins de 400 000 000 $, cette taxe-là. Cela
paraît énorme quand on parle de 400 000 000 $, mais quand on
fractionne les assurances, l'assurance-vie, l'assurance-maladie, l'assurance
générale, l'assurance automobile, etc., on s'aperçoit que
ce montant se dilue énormément. Qui plus est, M. le
Président - je termine là-dessus - avec le nouveau système
qui va entrer en vigueur le 1er janvier 1986, les exemptions de base ayant
été haussées, l'impôt à payer va être
moindre, le revenu disponible va être plus grand et même quand vous
prenez en compte cette hausse les contribuables du Québec vont
être en mesure de rencontrer ces paiements sans casser leur budget.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Vaudreuil-Soulanges.
Argumentation
M. Daniel Johnson
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je vous remercie, M. le
Président, en remerciant le ministre d'avoir confirmé,
finalement, par ses propos ce que nous soutenons de ce côté-ci. Le
ministre invoque l'existence de taxes sur les services en Europe pour nous
comparer aux Européens et
dire: Donc, comme vous voyez, il y a un précédent quelque
part. Je n'ai pas innové.
Là où le ministre a manifestement innové -
c'était là le point fondamental lorsqu'on parlait de changement
inquiétant et dangereux dans la fiscalité - c'était dans
l'absence totale de consultation préalable. Nous n'allons pas dire que
vous auriez dû rencontrer les compagnies d'assurances, les courtiers,
qu'il s'agisse des assureurs-vie ou des gens de l'IARD, les risques physiques
multiples sur les biens, les assocations de consommateurs. Nous disons: Vous
introduisez dans la fiscalité québécoise des mesures qu'on
évoquait très clairement dans le livre blanc sur la
fiscalité qui, lui-même, a fait l'objet d'engagements
extrêmement précis du gouvernement quant à des
consultations qui devaient préalablement être tenues afin
d'arriver à une solution globale, à des perspectives d'avenir qui
permettaient de développer un plan fiscal pour voir ce qui arriverait
aux finances publiques au Québec compte tenu des résultats des
discussions, consultations ou consensus qu'on aurait pu établir sur la
base de toutes sortes d'options, de toutes sortes d'avenues qui étaient
ouvertes dans le livre blanc.
Notamment, lors de ces discussions, par rapport à l'une des
options qui privilégiait l'extension de la taxe de vente à un tas
de denrées autres que celles qui sont imposées aujourd'hui, on
aurait pu découvrir si le choix à faire était, comme l'a
prétendu le ministre, d'ailleurs de réimposer les
vêtements, les chaussures, etc. Le ministre nous dit: Non! Non! Ce sont
des besoins essentiels. Le ministre est en train de nous dire que tous les
achats de vêtements sont des besoins essentiels, que l'ensemble de ce que
représentent les achats de vêtements et de chaussures dans le PIB
fait partie des besoins essentiels des Québécois.
Dans la même logique, on dit: Bien non, on ne reviendra pas en
arrière - c'est une façon de parler - on va plutôt taxer
l'assurance, qui n'est pas un besoin essentiel. Pourquoi n'est-ce pas un besoin
essentiel? On n'a pas eu d'explication de l'autre côté, sauf qu'en
commission on nous dit: Écoutez, ce n'est pas dans la liste des besoins
essentiels dressée par le ministère des Affaires sociales ou par
le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu au point de vue de la détermination des critères
d'admissibilité et des niveaux de prestation qu'on donne aux gens qui
sont bénéficiaires de l'aide sociale. C'est un drôle de
raisonnement de dire: Ce n'est pas un besoin essentiel parce que quelqu'un,
quelque part, a dit que ce n'était pas un besoin essentiel.
J'ai été étonné de voir que le ministre se
servait de l'exemple chiffré qu'il vient de nous donner. On a vu un cas
assez typique, finalement - je pense que le ministre l'a présenté
comme tel - d'assurance pour un particulier, qui représentait une
augmentation de 68 $ au titre de la taxe de vente pour ce particulier. Avec
l'imposition des 9 %, on parle d'environ 5 $ par mois. La prime étant
d'environ 60 $ par mois, cela fait environ 68 $...
M. Duhaime: Par année.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):... selon ce que j'ai entendu,
par année. Qu'est-ce que c'est? C'est exactement le crédit de
taxe de vente qu'un adulte peut réclamer dans le nouveau système.
On a droit, si j'ai bien compris le discours sur le budget, dans le
réaménagement de la fiscalité des particuliers, à
67 $ de crédit d'impôt au titre des achats qu'on a faits et qui
étaient imposés à 9 %, pour les besoins essentiels. Ce
fameux crédit sur la taxe de vente qu'on a introduit à la suite
du livre blanc, je présume, on vient de le manger avec une taxe de 9 %
sur une assurance d'un niveau typique, comme l'a expliqué le ministre,
qui représente une augmentation de déboursé de 68 $ pour
un contribuable. Le gros avantage qu'on faisait miroiter: les 67 $ de
crédit d'impôt pour représenter les besoins essentiels
taxés, on vient de l'annuler en imposant une prime d'assurance-vie
qu'une personne, un particulier, doit se procurer, comme on l'a
démontré. La boucle est complètement fermée.
Le Président (M. Lachance): Si je comprends bien, M. le
ministre, vous sautez votre droit de parole pour le laisser au
député d'Arthabaska.
M. Jacques Baril
M. Baril (Arthabaska): Oui, M. le Président. Comme le
ministre l'a dit tout à l'heure, il est sûr que, s'il avait eu la
chance ou le choix de ne pas imposer cette nouvelle taxe, il l'aurait fait. Ce
n'est sans doute pas de gaieté de coeur qu'un gouvernement impose de
nouvelles taxes. On aurait préféré sans doute enlever les
taxes dans d'autres secteurs, comme on l'a déjà fait au niveau de
la chaussure, du meuble, du textile et autres. Mais il faut voir la cause ou
les raisons qui ont porté le gouvernement à augmenter ses
revenus. J'aimerais faire allusion aux déficits que le gouvernement ou
que l'administration libérale avait faits dans le passé.
Lorsqu'on fait l'addition des trous qui ont été
créés par l'administration du gouvernement libéral, c'est
une des causes directes de l'augmentation de cette taxe. Pour nous renouveler
la mémoire, on dit que, par le biais de cette taxe, le gouvernement ira
chercher environ 350 000 000 $ à 400 000 000 $ de revenus
supplémentaires par année. Si nous n'avions pas eu à
assumer
la mauvaise administration du gouvernement libéral
précédent...
On s'aperçoit que, dans ce même budget 1985-1986, il y a
360 000 000 $ qui servent uniquement à amortir le déficit des
régimes de retraite que n'avait pas payé le gouvernement
libéral, le gouvernement de M. Bourassa. Si ce même gouvernement
avait payé ses dettes comme nous le faisons, tout de suite, cette
taxe-là serait annulée par le fait même, parce que j'ai
bien dit que nous payons 360 000 000 $ pour ce que le Parti libéral n'a
pas payé durant les six années où il a été
au pouvoir et on évalue à environ 350 000 000 $ à 400 000
000 $ les revenus de cette taxe. Donc, juste à cause de la
non-administration, de la mauvaise administration du gouvernement Bourassa, on
ne peut annuler cette taxe.
En plus, il faut additionner à cela dans ce même budget ce
que le gouvernement du Québec paie, soit 144 000 000 $ qui sont dus au
déficit créé dans le réseau de l'éducation
et des affaires sociales. Il y a toutes sortes de trous qui ont
été bouchés maintenant par ce gouvernement, mais il faut
payer, encore une fois, pour la mauvaise administration des autres. À
cela également, il faut ajouter 124 000 000 $ sur le budget 1984-1985 du
fameux déficit olympique dont tout le monde se souvient, mais la
population ne sait plus exactement combien on paie encore aujourd'hui pour
cela; 124 000 000 $ sont alloués dans le budget uniquement pour cela. 66
000 000 $ aussi sont alloués pour payer le déficit d'un
soi-disant magnifique projet lancé par le gouvernement Bourassa, le
gouvernement libéral, soit SIDBEC.
Si je fais l'addition de cela, cela monte à 694 000 000 $ qui
sont prévus dans ce budget pour payer, encore une fois, la mauvaise
administration du gouvernement qui nous a précédés. Je
vais faire aussi allusion aux 183 000 000 $ manquants dans la
péréquation que le gouvernement fédéral a
décidé de couper au Québec. Si j'additionne le tout, je
suis rendu, M. le Président, à 877 000 000 $. Imaginez-vous, si
nous n'avions pas à subir les effets de cette mauvaise administration du
gouvernement qui nous a précédés, le ministre des Finances
aurait eu cette année une marge de manoeuvre de 877 000 000 $. Et
voilà les conséquences de l'administration du gouvernement
Bourassa des années 1970 à 1976.
Actuellement, de l'autre côté, on s'efforce de dire qu'on
va enlever toutes sortes de taxes et d'impôts à l'avenir, mais
sans dire comment on va aller les financer, ce qui veut dire que le Parti
libéral, s'il reprend le pouvoir, va encore marcher sur le pilote
automatique pendant deux, trois ou quatre ans et le gouvernement qui prendra sa
place paiera avec le peuple québécois pour une mauvaise
administration qui sera encore l'héritage de ce cher Parti
libéral qui remettra les crédits du Québec encore dans le
rouge.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Nelligan.
M. Baril (Arthabaska): Non. Les chiffres sont bons.
Vérifiez.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: M. le Président, pour un instant, je ne
croyais pas qu'on était au débat sur la taxe sur les primes
d'assurance. On discute toujours de Robert Bourassa, des Jeux olympiques et de
toute la sauce. Moi, je vais revenir au débat sur la taxe sur les primes
d'assurance.
Compte tenu que le gouvernement est au pouvoir depuis huit ans
maintenant, la première chose que je dirais au ministre, c'est que j'ai
été un peu étonné de sa comparaison avec l'Europe.
Je ne savais pas que nous étions dans un marché commun avec
l'Europe; nous sommes dans un marché commun avec le reste du Canada.
Nous sommes sur le continent nord-américain, nous sommes dans une
enclave compétitive avec le reste du Canada et les États-Unis de
prime abord. Faire des comparaisons avec l'Europe dans le secteur des taxes,
cela ne tient pas du tout debout.
Le ministre a donné Terre-Neuve comme exemple. Moi, je veux
souligner au ministre qu'à Terre-Neuve - peut-être qu'il pourrait
aller vérifier de plus près - on n'exclut pas seulement
l'assurance-vie, on exclut l'assurance-accident-maladie, on exclut l'assurance
maritime et on exclut les bons de cautionnement (surety-bonds). C'est tout
à fait différent de votre affaire.
Pour revenir à toute la question de l'assurance maritime,
puisqu'on a commencé le débat hier, en Chambre, je vais vous
citer quelques chiffres qui, peut-être, vont vous intéresser. Vous
avez dit hier, en Chambre: Ce n'est pas une grosse affaire, ce n'est que 16 000
000 $. 16 000 000 $, c'est peut-être les primes qui sont calculées
par les compagnies résidentes au Québec, mais l'assurance
maritime est une assurance universelle qui se prend n'importe où. Les
compagnies qui sont résidentes au Québec et qui vendent de
l'assurance maritime comme les transitaires, tous les courtiers
spécialisés, etc., cela représente au moins 50 000 000 $,
M. le ministre, pas 16 000 000 $.
De plus, votre argument que la taxe de 9 % après impôt,
etc., est diluée comme dépense ne tient pas debout parce que le
principe même de l'assurance maritime, c'est l'acheteur de nos
exportations qui la paie, c'est celui qui achète qui paie le coût
de l'assurance. Ce coût est passé à l'acheteur et nos
produits deviennent moins concurren-
tiels. Us sont obligatoirement moins concurrentiels par l'effet
même de cette taxe.
Je vous demande une chose. Le principe qui régit le commerce
international est que toutes les exportations, que ce soit ici, en Chine ou en
France, sont non taxables. Est-ce qu'on taxe nos exportations de papier,
d'acier ou autres? Elles sont exemptes de taxe fédérale, elles
sont exemptes de taxe provinciale; c'est pour cette raison même que
toutes nos exportations sortent d'ici sans taxe. Et pourtant, vous, vous
appliquez une taxe sur l'assurance maritime. C'est la raison pour laquelle
Terre-Neuve n'a pas appliqué cette taxe. C'est la raison pour laquelle
vous auriez dû réfléchir avant le coup au lieu de nous dire
aujourd'hui: On va rencontrer les gens et si vraiment les impacts
économiques sont énormes, à ce moment-là, on
changera cela. (10 h 45)
C'est cela qu'on vous reproche. C'est pourquoi on vous dit que c'est une
improvisation complète. Vous auriez dû vérifier s'il y
avait des impacts économiques énormes. Si vous ne pouviez pas le
vérifier, sûrement que votre collègue du ministère
du Commerce extérieur aurait pu s'enquérir un peu plus pour
connaître les impacts que cela pouvait avoir sur notre commerce. Je ne
peux pas croire qu'on impose une taxe et qu'après on dise: On va
rencontrer tous les courtiers d'assurances maritimes, tous les gens qui font du
commerce pour leur demander s'il y a des impacts ou non. S'il y a des impacts
et que vous changez cette mesure ou d'autres mesures, qu'est-ce qui arrive de
votre fameuse prévision de 400 000 000 $? Qu'est-ce qui arrive des 400
000 000 $?
Je vais vous citer un autre exemple, M. le ministre. Vous avez dit que,
pour les compagnies d'assurance-vie, c'est 2 % des primes payées et,
pour les autres compagnies d'assurances, 3 % des primes payées. N'est-ce
pas vrai aussi qu'il y a une différence significative pour les
compagnies d'assurances maritimes, qui ne sont pas taxées à 3 %
sur les primes en gros? Les compagnies d'assurances maritimes paient 5 % sur
les profits qu'elles réalisent sur ces primes, ce qui est tout à
fait différent. Encore une fois, la raison pour laquelle on a fait cela,
c'est pour ne pas pénaliser le commerce. Il y a donc des
différences marquées que vous auriez dû savoir comme
ministre avant d'imposer des taxes qui n'ont aucun sens au point de vue de
notre compétitivité économique.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre des
Finances.
M. Yves Duhaime
M. Duhaime: M. le Président, je voudrais répondre
rapidement à notre collègue de Nelligan qui apporte à
cette commission son expertise en assurance maritime. On va faire un petit
calcul là-dessus. Est-ce qu'on s'entend sur le fait qu'au Québec
le chiffre d'affaires des compagnies d'assurances et des bureaux de courtiers
qui oeuvrent en assurance maritime, la partie assurance maritime, c'est 16 000
000 $. Ce sont les chiffres que j'ai au ministère des Finances. Si vous
avez des chiffres contraires à cela, vous me les donnerez.
Je tiens pour acquis que ces 16 000 000 $ excluent le volet
ré-assurance; 9 % cela fait 1 500 000 $ de plus pour les frais
d'assurance sur des milliards de dollars d'exportation par cargots, par
navires, par bateaux qui quittent les ports de Baie-Comeau, de Sept-Îles,
de Montréal, de Trois-Rivières, de Québec vers d'autres
destinations. À moins que le député de Nelligan n'ait des
chiffres pour soutenir qu'on va mettre en péril toute cette industrie,
je lui réponds, comme je l'ai fait hier, que vous prenez un petit
problème qui est long comme cela et peut-être même plus
court que cela et que vous voulez l'élargir grand comme cela.
Quand j'ai fait référence tantôt à l'Europe,
je n'ai jamais soutenu, M. le Président, que cette mesure était
d'inspiration européenne. L'Opposition nous accuse d'avoir introduit une
nouvelle taxe qu'on n'avait vue nulle part ailleurs. Je n'ai pas eu besoin
d'aller en Europe, cela existe à Terre-Neuve. Je suis d'accord avec vous
qu'à Terre-Neuve l'assurance maritime n'est pas visée.
M. Lincoln: Ah!
M. Duhaime: C'est vrai, il n'y a pas de problème. Quand
c'est blanc, c'est blanc et, quand c'est noir, c'est noir. J'ai voulu
simplement illustrer qu'en élargissant notre champ de taxation aux
primes d'assurance ce n'était pas en soi un précédent.
C'est ce que j'ai voulu dire.
Est-ce que des primes d'assurance constituent un besoin essentiel? Je
crois que oui, M. le Président, et je vais vous expliquer pourquoi.
C'est un besoin essentiel parce qu'il y a une loi qui oblige, par exemple, les
Québécois à être porteurs d'une police d'assurance
pour leur voiture. En ce sens, personne n'y échappe. C'est
peut-être dans ce sens-là que c'est essentiel. C'est probablement
essentiel aussi - et cela va avec le sens commun - vu que, lorsqu'on est
locataire et qu'on a un ménage, peu importe sa valeur, on va vouloir se
protéger. Lorsqu'on est propriétaire d'une maison, même si
on décidait de ne pas s'assurer, le créancier hypothécaire
va nous y obliger, n'est-ce pas?
Je trouve un peu courte l'affirmation du député de
Vaudreuil-Soulanges qui me fait
dire des choses que je n'ai jamais dites. Ce, que j'ai dit tout
simplement à la commission du budget et de l'administration, il y a deux
jours - à moins que vous ne puissiez puiser à des sources que
nous ignorons complètement au ministère des Finances - c'est que
la définition des besoins essentiels à l'aide sociale est faite,
bien sûr, par le ministère des Affaires sociales. Ces
définitions ne sont pas prises dans les arbres. Il y a des maisons
spécialisées qui publient des statistiques là-dessus. Par
exemple, on va tenir compte du coût des aliments pour un ménage.
On va tenir compte du coût des vêtements sur une base annuelle.
Nulle part, dans la liste de l'établissement de ces besoins essentiels,
vous ne trouvez de l'argent qui est identifié comme étant
nécessaire à payer des primes d'assurance. Nous calculons que le
portefeuille moyen d'assurances d'un ménage au Québec est
d'à peu près 1136 $ ou 1140 $ - mettons les chiffres ronds - 1200
$ sur une base annuelle pour un ménage moyen. Cela veut dire que 9 %
là-dessus équivaut à environ 2 $ par semaine. Il ne faut
pas regarder seulement un volet.
Je comprends l'embarras du Parti libéral, embarras bien
légitime, mais aussi sa mission comme Opposition d'essayer de mordre
dans un morceau du budget, parce qu'on refuse de voir l'ensemble de la
problématique fiscale qui fait qu'avec le réaménagement de
l'impôt sur le revenu des particuliers le revenu disponible des
contribuables augmente non pas en 1987 comme l'Opposition le dit, mais
dès la première paie de janvier 1986, parce que les retenues
à la source sur la feuille de paie vont être plus faibles. C'est
tout le temps que j'avais à ma disposition.
M. Claude Lachance
Le Président (M. Lachance): Bon. À ce moment-ci,
comme les règles de procédure me le permettent, je voudrais
intervenir, même si j'agis à titre de président de cette
commission parlementaire. Je voudrais me référer à un
article paru dans le Soleil du samedi 27 avril dont le titre était: "Les
assurances. Bourassa abolirait la taxe. " Cela m'a un peu étonné,
parce que, lorsque quelqu'un fait une déclaration semblable, on se rend
compte qu'il prend une responsabilité importante. Bien sûr, ce
n'est agréable pour personne de se voir imposer une nouvelle taxe.
Personne n'a ri lorsqu'on a entendu cela dans le discours du ministre des
Finances. Je cite un extrait de l'article de M. Michel David: "Reconnaissant,
toutefois, la nécessité de contenir le déficit pour
maintenir la cote de crédit du Québec, M. Bourassa estime qu'il
serait préférable de couper dans certaines dépenses, par
exemple, dans le budget de Radio-Québec ou dans la publicité
gouvernementale. "
Moi, je me suis interrogé, je me suis demandé ce que cela
pouvait représenter comme somme d'argent. Je suis allé
vérifier au livre des crédits budgétaires 1985-1986,
ministère des Communications, programme 8, Société de
radiotélévision du Québec, 60 900 000 $. Concernant la
publicité gouvernementale, on parle d'une somme d'environ 16 000 000 $.
Total: 77 000 000 $. On dit que la taxe devrait rapporter entre 350 000 000 $
et 400 000 000 $. Si je fais la soustraction, il reste un manque à
gagner de 323 000 000 $. Où aller le chercher? Ou bien le chef du Parti
libéral est un incompétent - là-dessus, j'ai des doutes -
ou bien il a une attitude sciemment trompeuse. Il sait que c'est le temps de
faire plaisir à tout le monde, c'est le temps de dire aux gens avant les
élections que, s'il avait été là, il aurait agi de
façon différente. La question qu'on peut se poser, c'est, s'il
est vraiment sérieux, qu'il nous indique donc à quelle place il
irait chercher l'argent pour fonctionner.
Il n'y a pas 56 solutions de rechange. Ou bien on doit taxer ailleurs,
et, à ce moment-là, on aimerait bien savoir à quel endroit
ou bien on doit couper quelque part. Si ce sont des coupures qui sont
privilégiées par le chef actuel du Parti libéral, M.
Bourassa, il faudrait bien qu'il nous indique, en gars responsable, à
quelle place il entend couper. Ou bien on augmente le déficit et ainsi
les emprunts. Je pense que, de la part de quelqu'un qui envisage de diriger le
gouvernement à plus ou moins brève échéance, la
population du Québec a besoin d'en savoir plus. Ce serait très
responsable de sa part s'il nous indiquait à quelle enseigne il
loge.
Si on regarde simplement les exemples qui nous ont été
donnés à propos du déficit fédéral, je pense
que c'est une alternative qu'il faut rejeter quand on considère, par
exemple, qu'au fédéral, actuellement, cela coûte 70 000 000
$ d'intérêts par jour avec un déficit accumulé de
226 000 000 000 $.
Les députés de l'Opposition, nos collègues ici,
c'est tout à fait légitime, peuvent réprouver cette taxe.
J'aimerais bien, que soit le député de Vaudreuil-Soulanges ou le
député de Nelligan, nous indiquent, s'ils étaient dans la
peau du ministre des Finances, ce qu'ils feraient. J'aimerais voir cet exercice
parce que ce serait plaisant d'avoir une alternative. Il me semble que,
normalement, vous devriez être des gens sérieux dans l'Opposition.
Je ne crois pas que la population croie au Père Noël. Elle ne croit
pas aux solutions miracles.
Jusqu'à maintenant, votre rôle a été assez
facile. Vous dites: Ah, c'est une taxe épouvantable, une taxe
régressive! Le chef du Parti libéral parle de taxe odieuse,
injuste, inacceptable. C'est le vocabulaire, en
tout cas, etc. On aimerait bien savoir quelles sont les propositions de
rechange que vous auriez. Moi, en tout cas, personnellement, j'attends. J'ai
bien hâte de savoir ce que vous aurez à proposer. S'il y a une
chose qui aurait été intéressante dans ce Parlement depuis
quatre ans que j'y siège, c'aurait été de voir le chef du
Parti libéral ici en Chambre, chaque fois que les gens du Parti
libéral n'étaient pas d'accord, nous indiquer: Nous, si nous
avions été là, nous aurions fait telle chose à
votre place. Mais là-dessus, malheureusement, on se contente de
critiquer, on se contente de chialer et les solutions de rechange ne viennent
pas souvent.
J'espère que, dans les minutes qui vont suivre, les gens de
l'Opposition, vont nous indiquer quel aurait été leur choix,
à eux, à la place du ministre des Finances s'ils avaient eu
à rédiger le discours du 23 avril dernier.
Je laisse maintenant la parole à la députée des
Îles-de-la-Madeleine.
Mme Denise Le Blanc-Bantey
Mme Le Blanc-Bantey: Merci, M. le Président. Vous me
permettrez de souligner que les députés ministériels, qui
sont deux, ont 25 minutes, que nous sommes deux et que nous avons 10 minutes;
le dernier droit de parole de 5 minutes étant à la fin, on peut
donc supposer que les députés indépendants ont 5 minutes.
Je vais donc essayer de me faire brève.
Je ne vous cacherai pas que cela m'a fait de la peine d'entendre le
député d'Arthabaska tenter de défendre la taxe sur les
assurances, parce que j'ai la conviction qu'il demeure, comme probablement
encore un certain nombre, profondément social-démocrate. De la
même façon, je n'ai pas compris que le ministre des Finances nous
soit arrivé avec cette taxe dans le budget. Je l'ai
fréquenté un certain nombre d'années professionnellement
et je pensais effectivement que le ministre des Finances était
préoccupé par le sort des plus démunis, des familles
moyennes au Québec et qu'il nous arriverait avec des mesures moins
régressives que celle-là.
De la même façon, je croyais aussi que le ministre des
Finances était beaucoup plus ouvert aux idéaux féministes
que son budget ne le laisse supposer. C'est à se demander s'il a eu le
temps de bien analyser les conséquences du budget qu'il nous a
présenté ici à la Chambre.
Cela dit, je pense profondément comme d'autres que la taxe sur
les assurances est une taxe injuste, une taxe régressive, parce qu'elle
frappe de plein fouet les bas salariés, les familles moyennes et qu'elle
frappe tout le monde de la même façon. M. le ministre a admis tout
à l'heure que les assurances étaient un bien essentiel et que, en
conséquence, les Québécois n'ont pas d'autre choix que de
s'assurer.
Par ailleurs, on sait fort bien que cette nouvelle taxe, même si
on essaie de banaliser et de dire qu'elle va coûter en moyenne 100 $ par
année, risque d'avoir comme conséquence que des familles
défavorisées, que des familles moyennes se "désassurent"
sur les assurances qui ne sont pas obligatoires.
Cela dit, il m'apparaît extrêmement dangereux que le
gouvernement introduise le principe de taxer la protection que les individus se
donnent. À la limite, les taxes à la consommation, même si
elles sont dures, sont beaucoup plus justes parce que l'individu, la famille
défavorisée aura toujours le moyen d'acheter un
réfrigérateur moins dispendieux, alors que la taxe sur les
assurances frappe tout le monde de la même façon. On a le choix de
se "désassurer", mais on sait fort bien que, si un sinistre arrive, les
familles défavorisées qui ne sont pas assurées vont se
retrouver dans des situations beaucoup plus dramatiques. Or, on sait que,
même s'il y a taxe sur les assurances, les familles à revenu
élevé vont continuer à s'assurer contrairement à
d'autres familles qui vont considérer qu'elles n'en ont plus les moyens.
(11 heures)
Je vais aller directement aux questions pour permettre à mon
collègue de Rosemont d'en poser quelques-unes sur nos cinq minutes.
Est-ce que le ministre a réfléchi aux conséquences de
cette taxe? Est-ce qu'il a réfléchi au fait que des familles
défavorisées, des familles moyennes pourraient finalement
décider de se "désassurer"? Est-ce que le ministre a
réfléchi au fait qu'il y a une part d'assurance sur le risque qui
fait que ça coûte plus cher, finalement, de s'assurer dans
certains quartiers défavorisés, où les risques d'incendie
et de vol sont plus élevés que dans certains quartiers mieux
protégés? On pourrait songer, par exemple, à la ville de
Québec ou à la ville de Montréal: je pense qu'il doit en
coûter plus cher de s'assurer dans certains quartiers de Québec
que dans Sillery et Sainte-Foy ou encore sur le plateau Mont-Royal et dans le
comté de Maisonneuve que dans Outremont. Est-ce que le ministre a
réfléchi au fait que cela coûte plus cher à ces gens
et que cela aura comme conséquence de faire en sorte, encore une fois,
que des gens pour qui les assurances sont un bien essentiel n'auront d'autre
choix que de se "désassurer"?
Est-ce que le ministre aussi est conscient que, une fois que le principe
de taxer la protection est introduit dans la fiscalité
québécoise, ce principe peut nous amener, finalement, en toute
logique, à commencer à taxer les cotisations que les
gens paient à la Régie des rentes ou toutes les formes de
protection que des gens se donnent dans une société pour essayer
de prévoir non seulement l'avenir des adultes, des parents, mais aussi
l'avenir des enfants en cas de décès, en cas d'incendie, en cas
de toutes sortes de dangers, finalement, qui sont possibles? Je ne sais pas
combien de temps j'ai parlé. Il reste sans doute une couple de minutes
à mon collègue de Rosemont
Le Président (M. Lachance): II reste seulement une
vingtaine de secondes à votre intervention, Mme la
députée. Je voudrais indiquer qu'il n'y aura pas de
problème pour le député de Rosemont si le partage du temps
et la durée des interventions continuent comme c'est parti. Au
numéro 16, il n'y aura vraiment pas de problème. M. le ministre,
oui, c'est à vous.
M. Duhaime: Je voudrais remercier ma collègue des
Îles-de-la-Madeleine pour son intervention. Je vais tenter de
répondre à ses questions et à ses préoccupations.
J'ai dit tantôt que l'assurance automobile, par exemple, c'est un besoin
essentiel dans la mesure où c'est une obligation légale. Avant
que nous mettions en vigueur le régime d'assurance automobile sans faute
qui existe au Québec pour ce qui est des dommages corporels, il n'y
avait pas d'obligation légale de s'assurer. J'ai connu un très
grand nombre de Québécois qui circulaient sur nos routes sans
aucune police d'assurance. Aujourd'hui, c'est une contrainte légale,
c'est une obligation légale, puisqu'on est obligé de payer sa
police d'assurance pour sa voiture, pour les dommages matériels, qu'on
est obligé de payer en achetant son permis de conduire et que, dans
l'immatriculation, il y a une partie d'assurance. La taxe ne porte que sur la
partie assurance. C'est dans ce sens que c'est un besoin essentiel.
Maintenant, vous me dites que c'est tout le monde qui est frappé.
C'est vrai, de la même manière que si, au lieu de cette taxe, on
réintroduisait la taxe sur les vêtements, comme cela existait sous
le régime Bourassa, la taxe sur les chaussures, comme cela existait sous
le régime Bourassa, la taxe sur les textiles, comme cela existait sous
le régime Bourassa, la taxe sur les chambres d'hôtel comme cela
existait sous le régime Bourassa et comme cela existe aussi en Ontario,
soit dit en passant.
Vous dites: Ce sont les familles qui vont être frappées.
Mais ce n'est pas vrai. Je m'excuse, mais ce n'est pas vrai. Est-ce qu'il y a
régressivité dans cette taxe? La réponse, c'est non.
Prenons les choses comme elles se déroulent dans la vie de tous les
jours. J'ai des chiffres ici que je pourrai vous faire parvenir où, pour
un revenu de travail de moins de 10 000 $, la partie de dépenses
moyennes pour les assurances - en excluant l'assurance automobile, parce que
ces chiffres n'ont pas encore été intégrés dans le
calcul que je vais vous donner, mais à partir du moment où
l'assurance automobile est obligatoire, cela ne changera pas beaucoup les
chiffres que je vais vous donner - cela vous donne 1, 7 % du revenu de travail;
pour un revenu de 20 000 $, entre 20 000 $ et 25 000 $, 2, 5 % du revenu de
travail; de 25 000 $ à 35 000 $, 2, 4 %.
Si vous faites exactement le même calcul et que vous ajoutiez
ensemble l'ameublement, les appareils ménagers, les vêtements, les
chaussures, etc., là vous allez vous retrouver vraiment avec une taxe
régressive dans le sens qu'elle va ou bien frapper de façon
égale en termes de dépenses par ménage, le pourcentage
s'appliquant là-dessus étant autour de 8, 5 %, 9 %, ou encore,
lorsque vous montez au niveau de 15 000 $ ou 20 000 $, vous allez aller
jusqu'à 10 %. Ce tableau, M. le Président, je vous l'indique tout
de suite, sera rendu public.
Je n'en reviens pas d'entendre les collègues de l'Opposition, de
toutes les oppositions réunies, faire une affirmation qui consiste
à dire: Cette taxe est régressive. Ce n'est pas tout de
l'affirmer; encore faudrait-il le démontrer. Ce que je vous indique,
c'est que, si j'ai un revenu de 35 000 $ ou de 40 000 $ après
impôt, je sais que j'ai une maison à payer, une automobile
à payer, l'alimentation pour la famille, les vêtements, etc. Dans
la vie de tous les jours, chaque famille budgétise et on protège
sa vie en particulier. On se prend une police d'assurance contre la maladie, on
va prendre un régime supplémentaire de retraite: on fait toujours
ce genre de choses dans la vie de tous les jours en fonction de notre
portefeuille.
Par définition, ceux qui sont les mieux
rémunérés, ce sont ceux-là et celles-là qui
ont les plus grands portefeuilles d'assurances. Je vous ai donné un
chiffre tantôt, on établit, pour la partie assurance, le
coût moyen par ménage - vous prenez un homme, une femme et deux
enfants - autour de 1200 $ par année, mettez 1200 $. Cela ne vous fait
pas une grosse augmentation sur une base hebdomadaire. Cela fait à peu
près 2 $ par semaine.
Une voix: Combien par heure?
Mme Le Blanc-Bantey: On change la réalité.
M. Duhaime: M. le Président, je me suis parlé
à moi-même ce matin et j'ai dit: Ce matin, je vais essayer
d'être agréable toute la matinée. Quand mes
collègues vont intervenir, quoi qu'ils disent, je vais garder
mon humeur égale. Alors, je les inciterais à rester
tranquilles. Je ne les ai pas interrompus pendant les interventions.
Allez à la page A-26 de l'annexe du discours sur le budget et
vous allez voir que, pour un revenu de 15 000 $, le
réaménagement, en tenant compte de tout, augmente le revenu
disponible, bien oui, augmente le revenu disponible de 324 $ pour 15 000 $ de
revenu; pour 30 000 $, 500 $; deux revenus de travail pour deux enfants de six
à onze ans...
M. Paquette: La taxe sur les assurances n'est pas
là-dedans.
M. Duhaime: ... 30 000 $ de rémunération, un gain
net de 533 $, et cela intègre l'ensemble du
réaménagement.
M. Paquette: Non, pas la taxe sur les assurances, justement.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Vaudreuil-Soulanges, vous avez la parole.
M. Paquette: C'est faux, cela. M. Daniel Johnson
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président.
On a eu droit de la part des ministériels, d'abord du
député d'Arthabaska et ensuite du ministre des Finances, à
ce que l'ancien député de L'Assomption appelait de la
finance-fiction, dans le cas du député d'Arthabaska, et je dirais
de l'assurance-fiction dans le cas du ministre des Finances. Finance-fiction
dans le cas du député d'Arthabaska qui a prétendu que
c'était la façon de gérer et de comptabiliser les
régimes de retraite qui expliquerait un trou dans les finances publiques
que le Parti libéral du Québec aurait légué au
gouvernement actuel, ce qui aurait forcé le gouvernement actuel à
imposer une taxe de vente de 9%, un niveau jamais atteint jusqu'à
l'arrivée au pouvoir du gouvernement péquiste, sur les assurances
pour aller chercher de l'argent pour combler un trou. Un jour on expliquera au
député d'Arthabaska que c'est purement comptable, l'exercice
quant aux besoins financiers nets, quant au trou qui serait créé
dans les comptes des régimes de retraite; cela entre dans le
budgétaire et cela ressort dans le non-budgétaire, tout le monde
sait cela, le ministre des Finances le sait. Je vois qu'il a quand même
eu la décence de ne pas contredire son collègue publiquement.
Là, je suis inquiet de voir que le ministre pense que le
député d'Arthabaska avait raison; les finances publiques sont en
bien mauvaises mains.
Assurance-fiction de la part du ministre à l'égard du
caractère régressif: très intéressant. La taxe sur
les assurances ne serait pas si régressive, dit le ministre, parce que
les gens à revenu modeste consacrent 1, 7 % en matière
d'assurance automobile, par exemple, de leur revenu disponible, alors que les
gens à plus haut revenu consacrent 2 %, 2, 2 % 2, 4 % de leur revenu
disponible pour s'assurer. C'est invraisemblable. Ce que cela prouve, c'est que
les gens à revenu modeste n'ont pas les moyens de s'assurer plus que
cela; cela prouve que les gens à revenu modeste n'ont pas les moyens
d'avoir une plus grosse voiture, une plus grosse maison; souvent ilsn'ont pas de maison, ils sont à loyer. La prime d'assurance à
l'égard de la protection contre le feu, le vol, les incendies, le
vandalisme, l'explosion de la fournaise et tout ce que voulez, la foudre, les
inondations et mettez-en, que le propriétaire doit prendre pour
protéger son bien est répercutée sur le locataire via le
loyer. C'est comme cela que ça fonctionne. Aller dire que ce n'est pas
régressif parce qu'il y a une moindre proportion du revenu disponible
qui est consacrée à l'assurance par les gens à revenu
modeste, c'est ne même pas comprendre comment cela fonctionne pour vrai.
Cela, c'est pour les particuliers, le caractère injuste et
régressif.
Arrivons maintenant aux retombées économiques sur les
créateurs d'emplois au Québec, les petites et moyennes
entreprises. Tout le monde s'entend pour dire qu'il y a 60 % à 80 % des
nouveaux emplois, notamment ceux dont les jeunes ont besoin, qui vont
être créés par les PME. Quelle est la réalité
en matière d'assurance pour Ies PME?
La grosse distinction qui existe entre une grosse société
qui a 1000, 2000, ou 3000 employés, peu importe, et une petite
compagnie, c'est qu'en matière de couverture pour les assurances sur les
personnes, les employés: assurance-vie collective et assurances de
toutes sortes, mais notamment assurance-invalidité et assurance-maladie
une grosse société s'auto-assure; elle ne contracte pas avec une
compagnie d'assurances un contrat d'assurance pour couvrir ces gens. Je vois le
ministre qui fronce les sourcils, je lui donnerai des noms. C'est inutile de
commencer à faire des listes de compagnies, ici, en Chambre. Il se
renseignera. Ces sociétés paient des frais d'administration
à une compagnie d'assurances qui administre le régime
d'assurance-maladie qui est auto-assuré. Le ministre devrait le savoir,
il y a un groupe de fonctionnaires à l'égard duquel le
gouvernement s'auto-assure, les cadres. Je suis convaincu... mais le ministre
me fait signe que oui. Donc, cela existe dans un grand ensemble.
Une petite compagnie de 10, 12 ou 15
employés qui décide de donner un peu de couverture
d'assurance-maladie et d'assurance-invalidité à ses
employés, qu'ils soient syndiqués ou pas, cela n'a pas
d'importance, est obligée de contracter un contrat d'assurance,, Elle ne
peut pas faire de l'auto-assurance avec un groupe de risque de onze personnes,
cela n'a pas de bon sens. Il suffit d'une maladie grave chez un des
employés et les profits des dix prochaines années viennent
d'être amputés, quand on parle d'une PME. Or, ce sont ces gens qui
vont à une société d'assurance sur les personnes, qui
paient une prime et qui paient les 9 %, ce qu'une grosse société
n'est pas obligée de payer. Les frais d'administration pour une PME dans
le cadre de cette perception additionnelle des taxes qui est faite, de la tenue
des livres et des moyens à prendre pour s'assurer que les coûts de
revient de son produit répercutent ce coût additionnel, ce sont
des choses qui s'ajoutent. Le ministre aura beau banaliser tant qu'il veut en
disant: C'est 2 $ par semaine que cela coûte pour un ménage moyen,
s'il veut banaliser, je vais lui donner d'autres exemples: 1000 $ d'impôt
par famille québécoise de plus que coûte le budget actuel
cette année, c'est quoi cela? C'est 0, 11 $ l'heure. Il n'y a rien
là, mesdames et messieurs, Québécoises et
Québécois, c'est 0, 11 $ l'heure pour chaque ménage que
nous coûterait le ministre des Finances. On ne peut pas banaliser
indûment ce genre de choses là.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre des
Finances.
M. Yves Duhaime
M. Duhaime: Je vais prendre comme une vaste blague ce qui vient
d'être dit, M. le Président. Je suis prêt à donner
mon temps de parole au député de Vaudreuil-Soulanges pour qu'il
nous explique par quelle vertu de comptabilité budgétaire,
fiscale, financière ou autre il peut affirmer qu'on parle de 1000 $
d'augmentation par famille.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui.
M. Duhaime: Mais vous êtes gravement atteint! Cela
représenterait...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je peux y répondre.
M. Duhaime:... n'importe quoi entre 2 000 000 000 $ et 3 000 000
000 $ de plus.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je peux répondre.
M. Duhaime: Oui, bien, allez-y, éclairez-nousl
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je réfère le
ministre aux revenus autonomes pour 1985-1986 comparés à
1984-1985; il va voir qu'il y a une différence de 1 688 000 000 $.
Divisez cela par le nombre de familles québécoises, c'est
à peu près 1000 $ par famille au titre des revenus autonomes de
plus que l'an dernier que le gouvernement du Québec va aller percevoir
dans les poches des Québécois à toutes sortes de titres.
Cela se défalque par une augmentation d'impôt, taxe sur les
assurances et taxe sur le tabac; la non-indexation -explique une partie du
fardeau fiscal additionnel; et évidemment il y a l'inflation, il y a le
PIB, enfin l'accroissement normal du fardeau fiscal, compte tenu de
l'activité économique.
Ne venez pas nous dire que vous n'avez pas imposé une taxe de 400
000 000 $ sur les assurances cette année, personne ne va vous croire. Ne
venez pas dire qu'il n'y a pas 133 000 000 $ de plus en taxe sur le tabac,
personne ne va vous croire. Et ne venez pas dire qu'on a indexé et que
donc les Québécois ont épargné 250 000 000 $ cette
année, personne ne va vous croire. Vous avez vous-même
annoncé à l'Assemblée nationale que cela coûterait
250 000 000 $ aux Québécois, la non-indexation. Cela s'additionne
vite, ces millions. On touche le milliard à un moment donné et
ensuite on ajoute l'inflation, on ajoute le PIB. On a la facture totale de 1
688 000 000 $. On divise par le nombre de familles québécoises et
cela fait 1000 $. (11 h 15)
Le Président (M. Lachance): M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, à la page A-24 dans le
discours sur le budget: Nombre de ménages, 3 042 000. Je n'arrive pas
à comprendre comment vous pouvez avancer de tels chiffres. Je vous
considère comme un homme sérieux, vous avez dit deux
choses...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Cela peut être des
célibataires, les ménages.
M. Duhaime: 400 000 000 $, 396 000 000 $ sur les assurances,
c'est un fait, 135 000 000 $ de plus pour la taxe sur le tabac, en arrondissant
les chiffres, cela fait 531 000 000 $. Il vous en manque 2 500 000 000 $ pour
vous rendre aux 3 000 000 000 $ que vous venez d'avancer. Soit dit en passant,
tous ceux que j'ai rencontrés, à part les fumeurs
invétérés comme moi-même, me félicitent pour
avoir augmenté la taxe sur le tabac. C'est une économie de
société à long terme. Mon chef de cabinet, qui est
à mes côtés, vient de m'indiquer qu'il a
arrêté de fumer.
Une voix: Je ne paie plus de taxes.
M. Duhaime: Alors, non seulement il ne paiera pas pour le tabac,
mais il ne paiera pas de taxe, et ce sont des économies d'échelle
appréciables que notre société va encaisser plus tard en
économies dans les hôpitaux.
M. le Président, je voudrais revenir à des choses plus
sérieuses, parce que je pense que le député de
Vaudreuil-Soulanges... C'est vrai que c'est vendredi, mais voyons l'impact de
cette taxe sur les entreprises. J'ai eu l'occasion de l'expliquer lors de la
période des questions; ce n'est pas le meilleur endroit pour parler de
chiffres, le moindrement que cela devient compliqué, avec tout ce qu'on
entend en face de nous en Chambre. Prenons une entreprise, une PME, puisque
c'est votre préoccupation, qui aurait à payer, disons, 100 000 $
en prime d'assurance sur une base annuelle. C'est énorme, 100 000 $ de
prime d'assurance, pour une compagnie. On ne parle pas d'une PME de huit ou dix
employés, j'y reviendrai tantôt. Cela veut dire que cela pourrait
représenter, en termes de coût net, un peu plus de la
moitié du brut pour la raison suivante: la taxe sur les assurances
devient, comme tout autre paiement qu'on a à faire en frais
d'exploitation, des frais d'exploitation et diminue d'autant les profits de
l'entreprise. Alors, s'il est imposable au Québec à 5, 5 % ou
à 3 %, il faut faire les calculs. Au niveau fédéral, c'est
36 %. Cela veut dire qu'il y a un manque à gagner au départ et ce
manque à gagner est encaissé par les entreprises de sorte que
vous vous retrouvez, pour une entreprise qui paie 100 000 $ de prime, avec une
charge additionnelle, une augmentation de 5265 $ par année.
Prenons le cas d'une PME - vous ne m'avez donné aucun chiffre,
est-ce qu'on l'a évalué? - qui paie 10 000 $ en prime, cela veut
dire quoi? 10 000 $ en prime, que vous multipliez par 9%, cela fait combien?
Cela fait 900 $ brut. Si vous tenez compte maintenant de l'impôt sur les
profits qui diminue dans les mêmes proportions suivant nos tables, pour
une petite entreprise, l'impôt sur les profits au Québec est de 3
%, l'impôt sur les profits au fédéral est de 15 %, il y a
une partie de la facture qui est refilée en quelque sorte au
gouvernement fédéral, de sorte que vous arrivez à un
coût net de 738 $ de plus par année pour le genre d'entreprise
dont vous avez fait état tantôt. Allez-vous me dire qu'un chef
d'entreprise va se retrouver chez un syndic de faillite parce qu'il a 738 $ par
année de plus à payer? Cela va entrer dans ses frais
d'exploitation.
M. le Président, si j'avais eu le choix de ne pas prendre cette
mesure, je ne l'aurais pas prise. J'ai dû choisir entre cela ou bien
augmenter le déficit de 400 000 000 $, n'est-ce pas, ce qui,
automatiquement, aurait augmenté nos besoins financiers nets de 400 000
000 $, aurait augmenté notre endettement d'un autre montant de 400 000
000 $ Si on est responsable au Québec, ceux qui vivent et qui
travaillent en 1985, hommes comme femmes, est-ce qu'on ne trouvera pas cela
raisonnable alors qu'on veut maintenir intégralement sinon augmenter les
niveaux de services qu'on réclame de l'État: l'assurance dans les
services de santé et l'hospitalisation, les services dans le
réseau de l'éducation, etc?
Il y a à peine trois semaines à l'Assemblée
nationale, l'Opposition a posé onze questions de suite à mon
collègue des Affaires sociales, en réclamant davantage d'argent
pour les affaires sociales. Le député de Brome-Missisquoi, tout
récemment, disait: Si un gouvernement libéral était
formé, nous augmenterions de 200 000 000 $ l'enveloppe budgétaire
du ministère des Affaires sociales. On n'est pas capable de faire cela,
M. le Président, de maintenir et d'augmenter le niveau des services au
Québec, en pensant que, en même temps, cela ne coûtera pas
un sou de plus à quiconque; c'est complètement ridicule. De deux
choses l'une: ou bien on le paie maintenant ou bien je prends cette facture et
je dis à mes deux fils, à mes deux filles ou à mes trois
fils et à ma fille: Je vous garde cette note pour vous quand vous
commencerez à travailler et que vous paierez des impôts; c'est
vous qui allez payer cela. Je pense que ce ne serait pas responsable.
Le Parti libéral, M. le Président, qui va à
vau-l'eau depuis quelque mois, alors que les élections
générales ne sont pas encore commencées, s'est
déjà engagé pour 1 742 000 000 $ en augmentation de
dépenses ou en renoncement à des taxes. Mon Dieu, Seigneur! Un
contribuable qui vous écoute et qui vous regarde a hâte de savoir
comment vous allez financer tout cela. C'est ce genre de réponse que
j'aimerais qu'on me donne. On n'a pas besoin de l'inspiration du Parti
libéral pour équilibrer le budget; on sait ce que vous voulez
faire.
Le Président (M. Lachance): La parole est au
député de Nelligan.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: En écoutant le ministre et le
député de Bellechasse, je réalise la différence
fondamentale qu'il y a entre le Parti libéral et votre parti
d'improvisation. Vous faites toutes sortes de choses au pied levé. La
seule façon de solutionner les problèmes économiques pour
vous, c'est de dire: II manque 400 000 000 $ aujourd'hui; on va faire une taxe
sur les assurances.
Demain matin, ce sera encore 400 000 000 $, on va aller chercher quelque
chose d'autre.
Si le député de Bellechasse avait lu notre programme
politique "Maîtriser l'avenir", il aurait vu dedans que toute notre
pensée économique est axée sur deux choses. Elle est
axée sur la création d'investissements et d'emplois, parce qu'on
dit qu'on va créer 400 000 emplois durant le mandat du Parti
libéral. Pourtant, le député de Notre-Dame-de-Grâce
a montré, sans contradiction de votre côté l'autre jour,
que vous avez créé zéro emploi durant votre mandat. Vous
n'avez qu'à regarder la tranche qu'on paie au Québec pour l'aide
sociale et pour le chômage - des milliards de dollars -et vous
réaliserez que, si on crée 400 000 emplois, on retire
déjà du chômage autant de gens à qui on donne un
emploi; si on crée des investissements, on va aller chercher des revenus
pour le Québec et nos dépenses vont diminuer en
conséquence.
C'est cela, notre pensée économique. Si on ne
réussit pas à faire cela au Québec, on va continuer
à dépenser. On dépense au Québec autant ou plus
qu'en Ontario qui a 2 300 000 habitants de plus. Si on continue à
dépenser, vous allez faire d'autres taxes comme cela. Vous allez taxer
les assurances et, quand vous n'en aurez plus assez avec les assurances, vous
taxerez autre chose. Vous continuerez à taxer. Vous avez taxé
l'essence. Qu'est-ce qui va vous rester à taxer? Vous allez taxer quoi
après? Les cercueils? On ne sait plus où on va s'arrêter de
taxer.
À un moment donné, il faut changer notre philosophie;
c'est ce qu'il faut faire. Le député de Vaudreuil-Soulanges
parlait des PME, par exemple. Le ministre a dit: C'est simple, la PME va payer
10 000 $ d'assurances ou 2000 $ après avoir payé les
impôts. Cela va être une marge calculée après taxe.
Alors, il fait un petit calcul. Cela diminue en conséquence, de 30 %; ce
n'est pas grand-chose. Mais qu'il n'oublie pas que l'imprimeur, qui donne des
services à la PME, lui aussi paie 9 % sur les assurances et va "charger"
un petit peu plus à la PME. Le camionneur va payer plus et va "charger"
plus; en publicité, l'agent de publicité va "charger" plus; les
fournisseurs de matières premières vont "charger" plus. C'est un
coût cumulatif; cela a une espèce de "ripple effect".
J'aurais voulu demander au ministre ce qu'il fait pour les bons de
garantie. Les bons de garantie ne sont pas taxés à Terre-Neuve.
Terre-Neuve a passé par là depuis 1968. Vous allez taxer les bons
de garantie. Qu'est-ce que cela fait dans l'industrie de la construction, par
exemple, où c'est un service essentiel?
Qu'est-ce qui arrive pour les multinationales? Comment
évaluez-vous, dans votre affaire d'improvisation, le risque
réalisé au Québec par rapport, par exemple, à des
multinationales comme le Canadien Pacifique ou CSL, une compagnie, une flotte
de bateaux pour Air Canada? Quels sont les critères par lesquels vous
évaluez le risque au Québec? Quels sont les critères par
lesquels vous contrôlez le risque au Québec? Qu'est-ce que vous
faites pour l'assurance-responsabilité professionnelle de Lavalin ou
SNC, qui ont des ingénieurs qui résident au Québec, mais
qui voyagent à travers le monde pour donner leurs services? Qu'est-ce
que vous faites pour CAE Electronics, qui vend 97 % de sa production ailleurs?
Comment évaluez-vous le risque au Québec? Par une bâtisse?
Par du personnel? Par le chiffre d'affaires au Québec? Comment
évaluez-vous cela? Comment allez-vous contrôler cela?
Cela va vouloir dire plus d'inspecteurs, plus de contrôleurs, plus
de micmac dans l'économie. Vous allez chercher toutes sortes de petites
puces. Comment allez-vous évaluer une compagnie qui, au lieu de
s'assurer à Montréal et de faire circuler des primes d'assurance
ici, va s'assurer à Toronto, comme le Canadien Pacifique qui pourrait
aussi bien faire cela? Je vous donne un petit certificat d'une compagnie
d'assurances ou d'un courtier à Toronto qui vous dit: Notre risque
réalisable à Québec, c'est 2 % de nos primes. Comment
allez-vous vérifier cela? Rentrez-vous cela dans les livres? De quels
critères allez-vous vous servir? Où sont-ils, vos
critères? Quelles sont vos réponses à ces questions?
Vous n'avez même pas pensé à tout cela parce que,
encore une fois, tout ce qui vous a guidé, c'est ce que le
député de Bellechasse a dit: II fallait aller chercher 400 000
000 $. Là, on s'est creusé la tête. Qu'est-ce qu'on n'a pas
taxé déjà? On a tout taxé. Les gens sont
taxés à outrance au Québec. On est surtaxé au
Québec. On est plus taxé que dans n'importe quelle autre
province. Il faut aller les chercher quelque part. Quelle est la comparaison
qu'on fait? On a dit: On a inventé cela en Europe et il faut faire la
même chose. On a fait cela à Terre-Neuve. Je demande au ministre:
Combien de multinationales existent à Terre-Neuve? Peut-on comparer
Terre-Neuve au Québec? Notre compétiteur au Canada ou en
Amérique du Nord, ce n'est pas Terre-Neuve, ce sont l'Ontario,
l'Alberta, les États de New York et du New Jersey. Eux sont nos
compétiteurs. C'est cela qui aurait dû être notre
barème: ces derniers taxent-ils les primes d'assurance? Mais non! Ils ne
taxent pas les primes d'assurance. Terre-Neuve n'est pas notre
compétiteur. Terre-Neuve n'a pas de multinationales; elle n'a pas l'un
des deux plus grands ports du Canada. Montréal est un port
d'entrée principal. Québec est un port d'entrée. Nous
sommes un port de commerce,
un centre international. L'ironie de l'affaire, c'est d'imposer en
même temps une taxe sur les assurances et de créer un centre
financier à Montréal. Vous appelez cela du bon sens
économique? C'est zéro.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre.
M. Yves Duhaime
M. Duhaime: M. le Président, on parlait tantôt du
livre blanc. Il y a des choses intéressantes qui ont été
dites. Le député de Nelligan vient de parler du fardeau fiscal.
Peut-être a-t-il écouté récemment l'émission
"Les surtaxés". Je lui dirai ceci: Lorsque nous avons été
élus le 15 novembre 1976, n'est-il pas vrai que le fardeau fiscal, par
rapport à celui de l'Ontario, était de 20, 1 % plus
élevé au Québec? L'écart a été
réduit. Ce n'est pas lui faire offense de dire que mon
prédécesseur à ce portefeuille a travaillé
très fort, de même que tout le gouvernement, pour essayer de
réduire cet écart fiscal. Celui-ci était de 20, 1 % en
1976. Le député de Nelligan n'était pas là; le
député de Vaudreuil-Soulanges non plus; mais vous êtes dans
la même formation politique, vous en portez l'héritage, n'est-ce
pas?
Cet écart a été réduit en 1978. Lors du
premier budget, pour l'année 1977-1978, si mon souvenir est bon,
l'impôt sur le revenu des particuliers retournait aux contribuables 800
000 000 $. L'écart était de 16 % en 1978; en 1979, de 14, 1 %; en
1980, de 9, 5 %; en 1981, de 8, 4 %. Ensuite, est arrivée la crise
économique - on l'a oublié de l'autre côté -
l'écart est remonté à 15, 3 %; ensuite, réduit
à nouveau, en 1983, à 10 % et, en 1984, à 9 %. On en est
là. Nous avons, depuis que nous sommes au gouvernement à
Québec, réduit de moitié l'écart qui
défavorisait le Québec par rapport à l'Ontario. Personne
de l'autre côté ne pourrait s'aventurer à nier cela.
Vous nous répondez, M. le député de Nelligan: Nous,
du Parti libéral, allons créer des emplois. Là où
vous en promettez 80 000 par année, nous, nous les réalisons.
C'est exactement le "score" de 1984. Vous vous souviendrez de la promesse des
100 000 emplois de votre chef. Comment cela s'est-il concrétisé
dans l'économie? Je vais vous donner la réponse. Cela s'est
concrétisé par exactement 100 000 fonctionnaires de plus. Je
pourrais vous régler cela en un tour de main. Vous voulez qu'on engage
100 000 fonctionnaires? C'est cela, finalement, que vous avez fait.
Je dois féliciter le Parti libéral d'être devenu un
peu plus raisonnable, car le député de Laporte promettait sur une
très longue période 500 000 emplois, selon ce qu'il avait dit,
sur un programme de 20 ans. Cela fait 25 000 emplois par année. Depuis
que cette manchette est parue dans les journaux, le député de
Laporte nous dit que le titre ne correspondait pas à ce qu'il y avait
dans l'article, etc. (11 h 30)
M. le Président, je suis bien prêt à prendre des
reproches de l'Opposition. Je ne nie pas que nous imposons une taxe sur les
primes d'assurance qui va rapporter 396 000 000 $. C'est vrai, mais nous
aurions pu aller chercher le même montant d'argent, exactement le
même, à quelques millions près, en réintroduisant
une taxe sur les vêtements incluant les vêtements d'enfants, sur
les chaussures, sur les patins, sur les meubles, sur les textiles. Tous ces
biens sont imposés en Ontario. On se dit parfois qu'il y a de
l'évasion, que les Québécois vont en Ontario, etc.
Savez-vous qu'à la frontière de Hull, en particulier, il y a un
bon volume d'Ontariens qui viennent acheter leur réfrigérateur,
qui viennent acheter leur cuisinière sans taxe? Au lieu de passer la
nuit à Ottawa, ils passent la nuit à Hull parce qu'il n'y a pas
de taxe sur les chambres d'hôtel. Quant à y être, le
lendemain, on va au restaurant; sur un repas à 3, 25 $, il n'y a pas un
cent de taxe au Québec. En Ontario, le hot-dog est imposé. Pour
faire plaisir à M. Bourassa, on peut bien l'imposer, mais soyons
sérieux. Vous devriez reconnaître que nous vivons dans deux
systèmes qui, sur le plan de la fiscalité, sont
différents. Quand on compare l'un avec l'autre, il faut comparer
l'ensemble. Ce que je vous dis, c'est que nous avons réduit de
moitié depuis 1976 l'écart fiscal qui existait avec les
Ontariens.
M. le Président, est-ce qu'il me reste une minute?
Le Président (M. Lachance): Trente secondes.
M. Duhaime: Tantôt, je vous dirai comment je comprends le
programme du Parti libéral et vous me direz si j'ai tort ou si j'ai
raison. Je n'ai pas fait le petit tableau en couleur, mais vous savez, M. le
Président, que cela a été une constante depuis les huit
dernières années: nous avons voulu faire en sorte au
Québec que la fiscalité soit portée davantage par ceux qui
ont des revenus plus élevés que par ceux qui ont de faibles
revenus. Je vous donnerai les chiffres tantôt en intégrant le
réaménagement à partir du 1er janvier 1986, sous la
réserve que je ne connais pas le prochain...
Le Président (M. Lachance): M. le ministre!
M. Duhaime:... discours sur le budget du gouvernement minoritaire
ontarien.
Le Président (M. Lachance): Bon! Je voudrais bien, avant
de céder la parole au député de Rosemont, réagir un
peu aux propos du député de Nelligan. Le député de
Nelligan, je ne doute pas de sa sincérité, c'est un bon
garçon, mais je le trouve pas mal naïf. Essentiellement, il ne l'a
pas dit, mais cela revient à dire: Tassez-vous qu'on prenne votre place.
Nous autres, on va être bons. Avec nous autres, les gens vont avoir
confiance. C'est une nouvelle philosophie. Avec nous autres, cela va marcher,
les investissements, cela va rentrer.
Cela me fait penser à un langage que j'ai entendu durant la
campagne électorale fédérale au cours de
l'été dernier, en juillet, août et septembre 1984. Nous
sommes à huit mois des dernières élections
fédérales et, quand on regarde ce qui se passe au niveau
fédéral, on constate que, même avec un changement
d'équipe, de gouvernement où la confiance semble vouloir
renaître, l'activité économique ne suit pas cette confiance
différente. J'espère bien que la confiance est un
élément important, mais je pense qu'il n'y a pas de miracle dans
ce domaine-là. Ce n'est pas parce qu'on change une équipe que
l'économie se met à évoluer de façon
carrément différente. Je suis particulièrement heureux que
les propos du député de Nelligan soient enregistrés au
Journal des débats, parce qu'éventuellement, un jour, il y aura
quelqu'un pour lui rappeler ce qu'il a dit aujourd'hui.
M. Lincoln: Ce ne sera pas vous.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Un membre de l'Opposition
péquiste!
Le Président (M. Lachance): On verra bien. M. le
député de Rosemont, vous avez la parole.
M. Gilbert Paquette
M. Paquette: Merci, M. le Président. Je vais commencer par
être en désaccord avec les propos que vous venez de tenir. Je n'ai
pas trouvé le député de Nelligan naïf. Je l'ai
trouvé, au contraire, extrêmement perspicace, puisqu'il a
réussi à trouver une différence entre l'approche sociale
de son parti, le Parti libéral, et celle qui est maintenant
présente dans ce budget du côté du gouvernement. Nous, ici,
on est moins perspicace et on a tendance à trouver que ce budget
ressemble de plus en plus à l'approche largement antisociale à
laquelle le Parti libéral nous avait habitués.
Une voix: Est bonne, est bonne!
M. Paquette: D'abord, ce budget, on aura l'occasion d'y revenir
à la commission sur le budget, je l'ai déjà dit et je dois
le redire au départ avant de commencer à parler des primes
d'assurance, c'est un budget où il n'y a pas grand-chose pour l'emploi.
La principale préoccupation des Québécois et des
Québécoises, c'est de travailler. Or, il n'y a pas grand-chose
pour l'emploi dans ce budget, sauf une approche visant les PME, mais le
ministre - on aura l'occasion de le voir en commission parlementaire - met
moins d'argent, moins d'incitation fiscale pour les PME qu'avant. Même de
ce côté, il n'y a pas grand-chose. Il y a une baisse des
investissements publics et il y a une hausse des taxes. Je le maintiens,
malgré les affirmations du ministre tantôt qui nous adonné des chiffres uniquement sur les primes d'assurance automobile
- il faudrait avoir l'ensemble du tableau - cette taxe sur les assurances est
particulièrement injuste et odieuse socialement.
Prenons une famille qui gagne 15 000 $, par exemple. Le ministre nous
dit de regarder le tableau à la page A-26. Il nous disait cela,
tantôt. Il a dit: Regardez, avec ma réforme de l'impôt des
particuliers, cette famille va faire un gain de 324 $ en 1986. Sauf qu'il
oublie de dire que, dès maintenant, dès 1985 et en 1986 aussi,
cette famille va payer des taxes. L'ensemble des familles
québécoises va payer environ 600 000 000 $ de taxes de plus, de
taxes nouvelles en 1985, en 1986, en 1987, en 1988.
Je référerais plutôt le ministre à son
tableau à la page A-31 où il nous indique lui-même qu'en
1985-1986 il vient retirer 600 000 000 $, d'une part, et remet 112 000 000 $
dans sa réforme de l'impôt des particuliers. Il retire 600 000 000
$ en taxes à la consommation, dont 400 000 000 $ pour la taxe sur les
assurances, et la réforme de l'impôt des particuliers va lui
coûter 112 000 000 $ en 1985-1986, 391 000 000 $ en 1986-1987, 516 000
000 $ en 1987-1988. Même ce qu'il nous promet pour 1987-1988 ne couvrira
pas l'argent qu'il vient chercher tout de suite. Là, ce ne sont pas des
promesses, cela s'applique maintenant. Donc, je maintiens que les
réformes fiscales du ministre sont socialement injustes.
De plus, en ce qui concerne les petits assurés, j'avais
pensé qu'ils pourraient se rattraper comme cela a été le
cas dans le livre blanc sur la fiscalité par le crédit de taxe
à la consommation. Mais voilà, à la page A-11, que le
ministre nous dit que le crédit sera non remboursable tant que
l'intégration des régimes de transfert et de taxation n'aura pas
été effectuée. En clair, cela veut dire que tant que le
ministre n'aura pas complété l'application du livre blanc,
nouvelle version, qu'il a commencé à implanter dans son budget,
les petits salariés, les petits épargnants vont payer la taxe
sur
les assurances et les autres taxes, mais n'auront pas de crédit
puisque certains d'entre eux ne paient pas d'impôt. Donc, le
crédit n'étant pas remboursable, il n'y aura pas cet aspect de
réduction du caractère régressif de la taxe.
J'ai trois questions à poser très rapidement au ministre.
La première: Est-ce que les finances du Québec étaient
aussi malsaines que cela pour qu'on impose une taxe aussi socialement injuste
que celle sur les assurances? Au contraire, je prétends que les besoins
financiers nets du Québec sont parmi les plus bas de toutes les
provinces canadiennes. Ces 400 000 000 $ de taxe sur les assurances, tout ce
qu'ils vont servir à faire, c'est baisser les besoins financiers nets du
gouvernement. Quant à cela, il aurait mieux valu retarder la
réforme de l'impôt sur les particuliers et attendre la
consultation.
Deuxième question: Qu'est-ce qui a amené le ministre,
alors que, lorsqu'il a eu l'autorisation de publier le livre blanc sur la
fiscalité, le gouvernement avait indiqué sa
préférence pour l'option 2 où il n'y avait pas
d'augmentation de taxes à la consommation, à s'inspirer
plutôt de l'option 3 qui est la plus régressive et la plus
socialement injuste?
Troisièmement, le ministre a parlé tantôt des
grandes entreprises qui étaient informatisées et qui n'auraient
pas de problème d'application de la taxe. Mais a-t-il pensé aux
petits courtiers d'assurances, qui ne sont pas riches, qui n'ont pas de
système informatique, eux, et qui se transforment maintenant en
percepteurs d'impôt, et aux coûts que cela va impliquer pour notre
petit courtier d'assurances du coin, qui va devoir percevoir cette nouvelle
taxe?
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le ministre, vous avez
la parole.
M. Duhaime: Je dirai à mon ancien collègue qu'il
n'a pas à s'inquiéter de nos orientations politiques, elles sont
exactement les mêmes, sauf que, dans ce budget-ci, elles sont mises en
application. Quand vous dites qu'il n'y a rien dans ce budget pour le
développement économique ou pour la création d'emplois, je
pense que vous niez l'évidence. En commission du budget et de
l'administration, je vous ai fait la liste par portefeuille, par secteur
d'activité. Il y a dans ce budget, au soutien de l'économie et de
l'emploi, pour plus de 1 000 000 000 $, dans le suivi du plan de relance du
Mont-Sainte-Anne, dans le suivi du plan de relance de Compton. Je prends
à témoin ma collègue des Îles-de-la-Madeleine: On va
investir quelque 20 000 000 $ aux Îles-de-la-Madeleine dans le programme
de relance des pêches. Ça, c'est de la relance, c'est au soutien
de l'emploi et de l'économie. Le programme d'assainissement des eaux, ce
sont des centaines de millions de dollars. Le gouvernement en paie 90 % et les
municipalités en paient 10 %.
J'ai annoncé, en plus de ce qui existait déjà pour
la relance, pour essayer de sortir le plus rapidement de la crise et de la
récession de 1981-1982, une série de mesures. Tous ceux qui
s'intéressent au développement économique, aussi bien les
leaders d'opinion comme le journal Les Affaires, le journal Finance, La Presse,
Le Devoir ont trouvé que ce budget était un solide coup de main
à la PME. La question est celle-ci: Qui crée des emplois au
Québec? Sur les 80 000 emplois créés en 1984, 60 % ont
été créés par les PME. Poursuivons donc le
raisonnement. Si on aide davantage les PME à se solidifier, à se
restructurer financièrement, il y a gros à parier que leur
capacité d'emprunt sera plus forte. Hier, à Montréal,
j'étais en compagnie de mon collègue de l'Industrie et du
Commerce. On a rencontré à peu près 500 dirigeants
d'entreprise. Le ministre de l'Industrie et du Commerce a expliqué
quelle était cette nouvelle proposition qui viendrait bientôt de
la Société de développement industriel qui serait une
formule de prêt à la capitalisation.
J'ai annoncé des mesures dans le secteur de l'agriculture, par
exemple, pour donner une exemption de 300 000 $ pour bonifier le fonds de
roulement des entreprises agricoles. J'ai annoncé trois mesures
très importantes dans le secteur minier: les 166 2/3 qui sont
prolongés jusqu'en décembre 1987, un crédit minier
négatif qui permet aux entreprises d'encaisser immédiatement des
dépenses d'exploration plutôt que d'attendre pendant des
années. On a uniformisé les droits de mine à 18 %: ils
étaient à 30 %, on les a ramenés a 18 %.
Les propriétaires de boisés privés - je me souviens
quand j'étais ministre de l'Énergie et des Ressources - pendant
des années nous ont demandé un traitement. On va leur rembourser
85 % de la taxe foncière qui vise l'imposition des forêts
privées. Cette mesure n'entre pas en vigueur en 1986; elle entre en
vigueur tout de suite et elle peut être réclamée dans les
déclarations d'impôt qui sont en train de se faire.
Pour Montréal, j'ai annoncé une série de mesures
pour activer l'activité économique dans le secteur financier et
principalement le volet international. Ces mesures sont
généreuses, elles sont réalistes aussi pour que
Montréal devienne un grand centre financier international.
J'ai annoncé six ou sept mesures, certaines modifiant le
Régime d'épargne-actions, d'autres permettant la mise sur pied de
sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise, les fonds mutuels, l'intéressement
des travailleurs dans leur entreprise, un régime d'investissement
coopératif. Cela commence à en faire pas mal. Cela aura un impact
positif: le seul problème que j'ai, c'est que je ne suis pas en mesure
de le chiffrer au départ de ces programmes.
Je vais répondre au député de Rosemont. Votre
choix, à vous, aurait sans doute été de prendre le
déficit à 3 095 000 000 $, qui est le déficit de
1985-1986, et de le porter à 3 500 000 000 $. Vous opinez
affirmativement du bonnet. C'est votre choix. Je vous réponds que c'est
un mauvais choix. S'il y a quelque chose d'antisocial-démocrate, c'est
exactement cela: ne pas payer ses comptes maintenant et les refiler aux
générations à venir.
M. Paquette: Laissez les jeunes chômer maintenant.
M. Duhaime: Moi, quand j'ai commencé à travailler,
je trouvais que le fardeau fiscal était déjà trop lourd.
Je raisonne, au sens du Code civil, en bon père de famille, si vous
voulez, et je me dis: Est-ce que cela a du sens qu'on continue de se payer des
services chromés dans certains secteurs de l'activité
gouvernementale et, au lieu d'avoir le courage, la clairvoyance et la
responsabilité de payer nos factures nous-mêmes, de les empiler?
J'ai répondu non à cela. Ce n'est pas une compression de l'ordre
de 1 000 000 000 $ ou de 2 000 000 000 $. On a diminué, on est parti de
3 175 000 000 $ pour ramener le déficit à 3 095 000 000 $.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Vaudreuil-Soulanges.
M. Paquette: Le déficit est au même niveau qu'il
était.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, je
comprends qu'il reste trois ou quatre minutes avant le dernier bloc de vingt
minutes.
Le Président (M. Lachance): C'est bien cela, M. le
député. (11 h 45)
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): De ce côté-ci,
nous avons tenté de démontrer que les décisions du
gouvernement étaient inquiétantes et dangereuses quant au
précédent qu'elles créaient. Le ministre, quant à
lui - on a couvert cela tout à l'heure - a invoqué le
précédent de Terre-Neuve. Ce n'est pas insulter les gens de
Terre-Neuve que de dire: Je refuse de me comparer à son économie.
Je refuse de me comparer à leur gouvernement qui a décidé,
pour des raisons financières beaucoup plus sérieuses que celles
du Québec - on sait que Terre-Neuve est une province très pauvre
- d'aller dans cette voie pour aller chercher de l'argent chez ses
contribuables. Mais, malgré tout, dans la phase d'implantation,
Terre-Neuve a exempté certaines formes de primes d'assurance, notamment
l'assurance maritime. C'est une province maritime, c'est une île et cela
veut dire quelque chose pour eux. Au Québec, les grands ports de mer
qu'on a ne se comparent même pas avec ceux de Terre-Neuve. Quand on parle
d'activité économique, l'aspect des transactions maritimes au
Québec revêt une importance beaucoup plus grande qu'à
Terre-Neuve.
On a parlé tout à l'heure du caractère
régressif du budget. Je pense que, de ce côté-ci, autant
les députés de Rosemont et des Îles-de-la-Madeleine que
nous-mêmes, de l'Opposition officielle, avons démontré
qu'à toutes sortes d'égards c'est très régressif et
que ce sont les gens a revenus modestes qui vont porter cela. On a parlé
d'improvisation et on n'a pas eu de réponse de l'autre
côté. Peut-être que, dans le dernier bloc, le ministre nous
fera part de ses réponses.
Les cotisations au Régime de rentes du Québec sont
éventuellement convertibles en une rente au conjoint survivant. Il y a
donc une partie d'assurance là-dedans. Est-ce que vous avez
regardé vraiment en vertu de quelle loi vous allez exempter cette rente
de la taxe de vente ou, alors, est-ce qu'on va s'apercevoir que, dans le fond,
il y a un facteur d'assurance là-dedans qui est imposable? C'est une
question qui est restée en l'air. C'est pour cela qu'on parle
d'improvisation. Dans la transformation d'un régime
d'épargne-retraite que détient aujourd'hui un citoyen qui l'a
accumulé durant 20 ou 25 ans, qui veut acheter une rente viagère
d'une compagnie d'assurances avant l'âge de 71 ans, comme la loi fiscale
l'y oblige, il a 25 000 $ dans son régime enregistré
d'épargne-retraite et qu'il veut acheter une rente viagère
garantie pour dix ans, est-ce qu'il va se faire dire: Vous nous devez 2 000 $
de taxe de vente là-dessus? On voudrait une réponse. Le ministre
fait signe que non. À ce que j'ai cru comprendre, il y a quand
même une portion d'assurance là-dedans, ainsi qu'une portion
d'épargne. On sait comment cela fonctionne, mais on ne sait pas, au
point de vue de l'implantation, ce que sera l'effet de la taxe de vente sur ces
aspects.
Quelles seront les réactions des États américains,
comme je l'ai mentionné tout à l'heure, qui ont des lois
extrêmement protectionnistes et qui n'aiment pas que des
sociétés venant d'ailleurs, qui ont des régimes assez
spéciaux ailleurs, viennent faire des affaires selon les lois de
l'État américain en question, pour aller chercher de la
clientèle qui, autrement, appartient à des sociétés
d'assurances américaines? Il y a des précédents en
Pennsylvanie, d'une part, et en Ontario, d'autre part. Incidemment, à la
fin
des années soixante-dix, l'Ontario a tenté de modifier le
régime d'imposition des sociétés d'assurances. Il est
arrivé sur le marché américain et a dû reculer
éventuellement à cause des pressions des Législatures des
différents États américains. Ils sont très
protectionnistes, ces Américains: ils ont inventé le terme
"patriotisme" à bien des égards, y compris au point de vue
économique.
Les retombées économiques de cette décision fort
improvisée sont, évidemment, négatives à bien des
points de vue. Lorsqu'on parle de PME et de grosses sociétés,
l'aspect que j'aurais aimé que le ministre comprenne lorsque j'en ai
parlé - je n'ai peut-être pas eu le temps de le faire assez
précisément -c'est que la grande société qui se
lance dans l'auto-assurance plutôt que de faire affaires avec les
services financiers de l'assurance québécoise est
avantagée par rapport à la PME, je l'ai expliqué tout
à l'heure, toutes proportions gardées.
Cela veut dire quoi? Cela veut dire que l'auto-assurance et les grandes
sociétés vont prendre de l'ampleur, qu'il va se perdre des
affaires en matière d'assurance collective dans les
sociétés d'assurances québécoises. Je ne vois pas
comment on peut parler d'une expansion formidable des services financiers au
Québec. Une des grandes dimensions de l'activité
financière au Québec, l'assurance, risque d'être mise en
péril par des décisions parfaitement normales de grandes
sociétés qui vont décider de s'auto-assurer plutôt
que de donner des affaires à des sociétés d'assurances
québécoises.
Le Président (M. Lachance): Bon, je signale aux
intervenants que nous abordons la dernière partie de cette
interpellation. M. le ministre des Finances aura dix minutes et il y aura
finalement dix minutes pour le mot de la fin par le député de
Vaudreuil-Soulanges. M. le ministre des Finances.
Conclusions M. Yves Duhaime
M. Duhaime: M. le Président, je voudrais au départ
indiquer aux membres de cette commission, pour ceux qui veulent l'entendre en
tout cas, que j'avais abordé tout à l'heure la comparaison entre
le fardeau fiscal au Québec et le fardeau fiscal en Ontario. J'ai dit,
et je le répète, que nous avons réduit cet écart de
moitié. Il était de 20 % en 1976. Nous l'avons ramené
même à un seuil inférieur, à 9 %, aujourd'hui, soit
à peu près la moitié.
C'est là la comparaison du fardeau fiscal global. Il faut aller
plus loin que cela dans l'analyse et voir ce qui se produit en Ontario et ce
qui se produit au Québec. Je vais être obligé de faire la
comparaison sous la réserve que je ne peux pas comparer le budget de
1985-1986 et ses effets au budget de l'Ontario, que j'ignore
complètement, puisque l'élection d'un gouvernement minoritaire a
eu lieu hier et que le budget ontarien devrait suivre dans les semaines, sinon
dans les mois qui viennent.
Mais, en 1985, là où les chiffres sont connus des deux
côtés, au chapitre de l'impôt sur le revenu des
particuliers, au Québec et en Ontario, qu'est-ce que cela donne? Les
contribuables du Québec qui gagnent 27 900 $ et moins paient moins
d'impôt sur le revenu des particuliers qu'ils n'en paieraient en Ontario:
27 900 $. Les contribuables qui gagnent au Québec 27 900 $ et moins en
1985 paient moins d'impôt sur le revenu des particuliers que ceux de
l'Ontario.
Par voie de conséquence, cela veut dire que ceux qui sont
au-dessus de 27 900 $ paient plus d'impôt au Québec qu'en Ontario,
c'est-à-dire que notre structure d'imposition quant à
l'impôt sur le revenu des particuliers est beaucoup plus
social-démocrate, au sens où ceux qui sont plus faiblement
rémunérés paient en pourcentage moins d'impôt que
les plus riches. Là-dessus, je pense que le député de
Rosemont va être d'accord avec moi.
Qu'arrive-t-il maintenant avec le budget 1986? Je suis obligé de
faire la comparaison en disant: Si le budget de l'Ontario, pour 1985-1986, ne
touche pas à l'impôt sur le revenu des particuliers, qu'est-ce qui
se produit? Cela donne qu'un Québécois qui gagne jusqu'à
33 200 $, avec le réaménagement du présent budget, va
payer moins d'impôt au Québec qu'il n'en paierait, toujours au
chapitre de l'impôt sur le revenu des particuliers, s'il vivait en
Ontario.
Cela est un choix de société. Nous avons choisi de toucher
le moins possible aux biens essentiels. Les Ontariens, eux, imposent les
vêtements, les chaussures incluant les patins, les textiles, les chambres
d'hôtel et imposent un repas dès les premiers 0, 50 $. Est-ce que
l'Opposition veut nier ces chiffres? Ce qui m'inquiète et ce pourquoi je
vous parle de cela, c'est parce que, dans le programme du Parti libéral,
contrairement à ce que le Journal de Québec écrivait ce
matin - je vais devoir rencontrer cette gentille dame qui a écrit
exactement le contraire de ce que je lui ai dit, je le regrette - on dit qu'on
va réviser le régime d'imposition des particuliers pour le rendre
comparable à celui des autres provinces.
Quand le Parti libéral du Québec parle des autres
provinces, il parle de l'Ontario. Cela veut dire quoi? Cela veut dire que M.
Bourassa veut culbuter en quelque sorte le régime d'imposition au
chapitre de l'impôt sur le revenu des particuliers et augmenter
l'impôt sur le revenu des plus faibles pour baisser la courbe sur les
plus riches. C'est cela, le programme du Parti libéral et je
comprends l'agacement du député de Vaudreuil-Soulanges
chaque fois que j'évoque cette question à l'Assemblée
nationale, parce que c'est cela, le programme du Parti libéral.
Deuxième point: les compagnies d'assurances, si vous voulez mon
avis, avec toute l'amitié et les excellentes relations que j'entretiens
avec la plupart de leurs dirigeants que je connais, certains mieux que
d'autres, quand elles se mettent à défendre les droits des
contribuables, j'avoue honnêtement qu'elles ont de mauvais dossiers. Les
compagnies d'assurances défendent leur marché. Si les compagnies
d'assurances venaient me voir pour me dire: M. le ministre, on pense que vous
allez peut-être déranger notre marché, je vais les
écouter avec une oreille plus attentive que si on vient me voir en me
disant: C'est une mesure antisociale. Vous voulez écraser le pauvre
monde, etc. Voyons donc! J'ai les larmes aux yeux! Les compagnies d'assurances
au Québec, globalement, assurance-vie, assurance-maladie, assurance sur
les biens, assurance automobile, contre le feu, la foudre, le vol, etc.,
assurance collective, tout compris, ont perçu au Québec 5 156 600
000 $ en 1983. On va arrondir le chiffre, on va dire 5 200 000 000 $. Supposons
que ce chiffre est constant en 1984 et en 1985, parce qu'en lisant les journaux
on se rend compte que ce milieu fait de l'argent, on parle d'un montant global
de 5 200 000 000$. Ce que l'on craint, c'est que cette mesure qui se retrouve
au budget du Québec en 1985-1986 n'ait possiblement un effet
d'entraînement ailleurs. Mais, lorsque des compagnies d'assurances ont
augmenté les taux de l'assurance automobile de 52 % en 1981, je n'ai pas
entendu un député libéral crier au meurtre, 52 %.
Je pense, M. le Président, que la mesure qui a été
prise dans ce budget est une contrainte pour un ministre des Finances. Ce n'est
pas de gaieté de coeur qu'on est obligé d'augmenter les taxes et
les impôts, mais il n'y a rien comme être franc, M. le
Président, il n'y a rien comme être clair et dire aux citoyens du
Québec: Nous ne pouvons pas, en même temps, durant la même
année financière, encaisser une perte de 200 000 000 $ sur les
revenus autonomes.
Je vais faire sourire le député de Vaudreuil-Soulanges. Je
survolais hier, en allant à Montréal à une réunion
de travail, le Stade olympique. Quelle merveille et quelle beauté! J'ai
fait une remarque à mon chef de cabinet, qui était à
côté de moi et j'ai dit: Te rends-tu compte, si nous avions ce
milliard dans nos poches pour faire du développement économique,
de l'impact que cela aurait? Je suis obligé de reconnaître, et
l'Opposition le sait aussi, que, cette année, la dette olympique, le
déficit olympique, cela coûte 124 000 000 $. Seulement cela, 124
000 000 $.
Si les libéraux nous attaquent en disant: La taxe sur les
assurances, c'est la taxe du gouvernement Lévesque, on ne niera pas
cela, on va dire que c'est vrai. Vous pourriez peut-être placer dans la
colonne débit sur ce montant une partie des 9 % au compte des folies
olympiques. Je regarde aussi la non-contribution du gouvernement au fonds des
employeurs pendant toutes ces années du régime libéral.
Cette année, la vieille dette de 1970 à 1977 faisait qu'au 31
décembre -excusez, M. le Président, le voilà - 1978 le
déficit à ce compte était de 7 000 000 000 $. Je ne me
souviens pas de mémoire en quelle année mon
prédécesseur a décidé de renflouer ce compte et
cela a augmenté le déficit de 700 000 000 $ ou 800 000 000 $.
Cette année, ce vieux fonds qu'on est obligés de
renflouer, cela représente dans nos équilibres budgétaires
360 000 000 $. C'est vrai que les revenus autonomes vont augmenter de 10, 1 %.
Ce qu'il faudrait ajouter aussi de l'autre côté, c'est que les
revenus de transfert du gouvernement fédéral augmentent, quant
à eux, de 1, 3 %. C'est une perte considérable. J'ai
évoqué à l'Assemblée nationale que c'était
inacceptable et que cela n'avait aucun bon sens que le gouvernement
conservateur fédéral maintienne les folies de l'ancien
gouvernement libéral à Ottawa et nous change et nous chambarde
tout le système de transfert et de péréquation en un tour
de main de sorte que le Québec perd presque 650 000 000 $ sur la
période de 1982 à 1987. Quand on fait le combiné de tout
cela, il manque de l'argent, c'est aussi simple que cela. Il faut donc aller le
chercher. Le choix du député de Rosemont, c'est de dire: Vous
auriez dû laisser se balader le déficit. On l'augmente de 400 000
000 $.
M. Paquette: Le maintenir dans le PIB.
M. Duhaime: II était à 3 175 000 000 $ et je
l'établis à 3 095 000 000 $.
M. Paquette: En proportion du PIB, vos besoins financiers
nets.
M. Duhaime: Ma position: je pense que les services que l'on se
paie comme génération, il faudrait qu'on en assume la
responsabilité aussi. C'est cela, le discours de notre gouvernement, M.
le Président. Ce n'est pas de se bidonner et de penser qu'on peut
dépenser, dépenser et dépenser et ne jamais passer
à la caisse. Le choix du Parti libéral est autre. Probablement
que M. Bourassa aurait réintroduit la taxe sur les vêtements, sur
les chaussures, sur le textile, comme cela existait lorsqu'on est
arrivés.
Nous avons choisi cette voie.
Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre.
Pour les mots de la fin, M. le député de
Vaudreuil-Soulanges. Vous avez dix minutes. (12 heures)
M. Daniel Johnson
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président.
J'ai beaucoup de sympathie pour le ministre des Finances qui a
été obligé, ce matin, de défendre
l'indéfendable. D'ailleurs, on a déjà vu, à
l'occasion d'interpellations, le ministre entouré de beaucoup de
fonctionnaires pour répondre aux questions de l'Opposition. On n'en voit
pas ce matin. Je crois comprendre qu'il y a des gens de cabinets politiques. On
voit souvent un ministre entouré de nombreux membres de la
députation ministérielle qui, chacun son tour, prennent le
relais, viennent expliquer pourquoi tel et tel aspect de la politique
gouvernementale a du bon sens. Sauf votre intervention, M. le Président,
et celle du député d'Arthabaska, je dois constater que le parti
ministériel a décidé de sauter les tours que le
règlement lui permet de s'accorder afin de répliquer aux
arguments de l'Opposition. C'est sûr que c'est difficile de
défendre l'indéfendable. Encore faut-il, au moins,
reconnaître qu'en ce qui a trait au débat - et on a voulu l'amener
sur trois plans - il y a, d'abord et avant tout, un chambardement
considérable de la fiscalité au Québec par le choix qu'a
fait le gouvernement d'imposer des services financiers par le mécanisme
de la taxe de vente de 9 %. On n'a pas eu d'explication de la part du
gouvernement qui justifierait ce choix-là, on reste sur notre
appétit. Il n'y a pas eu de consultation. Chose certaine, le ministre
n'est pas allé jusqu'à faire ce qu'il a déjà dit en
cette Chambre en réponse à nos questions sur la tenue d'une
consultation, la discussion éventuelle sur le livre blanc, sur
l'implantation, enfin toutes ces choses-là. Il nous avait dit: J'ai
parlé devant une association de gens qui font de la planification
fiscale le 11 janvier et j'ai tenu de nombreux discours dans mon comté
depuis le dépôt du livre blanc. C'est un petit peu court comme
consultation. Cela m'apparaît beaucoup de la consultation à sens
unique, cela ressemble à un dialogue de sourds-muets; le ministre, lui,
n'est pas muet, mais, évidemment, il est sourd à ce qui se passe
autour de lui.
Donc, un chambardement considérable qui a dévié
dans le débat tout à l'heure, du côté
ministériel - je l'ai dit - sur de la finance-fiction du
député d'Arthabaska quant à son analyse, n'est-ce pas, des
équilibres financiers depuis quelques années et de
l'héritage, prétend-il, extrêmement lourd d'un gouvernement
libéral précédent. Enfin, on relira dans les galées
précisément ce que le député d'Arthabaska voulait
dire. Moi, je n'ai rien vu de logique, finalement, dans la suite d'arguments
qu'il nous a servis. Je dirais même que cela va à l'encontre de
tout ce que l'ancien député de L'Assomption reconnaissait dans
ses discours à l'égard, par exemple, des régimes de
retraite. Le ministre a repris cela à son compte, il y a quelques
instants, que cela serait grâce au gouvernement actuel qu'on aurait
commencé à régler le problème de capitalisation des
régimes de retraite. On oublie très facilement que c'est M.
Raymond Garneau qui a mis sur pied le RREGOP afin d'entreprendre, justement un
programme de nettoyage d'un héritage de 25, 30, 40 ans qui
traînait dans les finances publiques. Le gouvernement actuel a eu la main
heureuse d'être l'héritier conjoncturel d'une excellente
décision qui avait été prise par le ministre des Finances
du gouvernement libéral qui vous a précédé.
La réalité, c'est quoi, au-delà de tout cela? La
réalité, c'est qu'un choix fiscal comme celui-là a des
impacts économiques. Quand on se soucie de création d'emplois, de
relance et de développement économique, on regarde quelles seront
les répercussions des gestes majeurs que le gouvernement entend poser en
matière de finances publiques. Le geste privilégié par le
gouvernement, il y était peut-être acculé. C'est
essentiellement ce qu'on nous a dit: II y avait un trou béant dans les
finances publiques. On a des parts d'explication, quant à nous, quand on
parle de l'érosion de l'assiette fiscale au Québec. On n'a pas
encore eu de réponse satisfaisante, quant à nous. On peut avoir
une réponse satisfaisante pour l'année dernière. Comment
se fait-il qu'il n'y ait pas eu assez de rentrées d'impôt sur le
revenu des particuliers? On peut avoir une explication qui satisfait
l'année d'avant et l'année d'avant. Mais,
systématiquement, depuis huit ans, il y a une érosion et les
erreurs de prévision vont toujours dans le même sens. Il y a
quelque chose qui se passe. Il y a quelque chose qui a un impact direct sur
l'économie du Québec. On demande au gouvernement de se pencher
là-dessus; il ne l'a pas fait.
On lui demande donc, dans le choix nouveau qu'il fait de
privilégier ce genre de taxation, de regarder les répercussions
de son geste avant de poser des gestes irrémédiables,
irréversibles à bien des égards, parce qu'on vient de
lancer quelque chose dans le portrait. Le gouvernement, en attendant,
s'accroche au pouvoir et accrédite, à la longue, un nouveau
système. Il va falloir - cela va être compliqué, mais je
pense que c'est un engagement qu'il est souhaitable d'entendre de la part d'un
parti
politique - remettre les choses sur la bonne voie. Cela n'est pas la
bonne voie, parce que cela s'ajoute - par exemple, on parle des PME
créatrices de 60 % des emplois auxquels on a pu assister l'an dernier -
aux charges fixes.
L'assurance, pour une PME, c'est une charge fixe. Ce n'est pas variable;
cela dépend des actifs. Finalement, quand on pense feu, vol, vandalisme,
etc., la responsabilité est une charge fixe; c'est un concept qui est
fixe dans le temps; cela ne varie pas avec le chiffre d'affaires. La couverture
d'assurance pour maladie, invalidité, etc., pour les employés,
toutes choses étant égales et si on peut maintenir un niveau
d'activités relativement constant dans une PME, cela aussi devient une
charge fixe.
La taxe de 9 % devient, donc, un autre petit bloc qui s'ajoute à
tous les autres blocs que le gouvernement a mis sur le dos des petites et
moyennes entreprises du Québec en choisissant de les taxer, quelle que
soit leur rentabilité, quels que soient les profits. Là, on parle
de charges fixes. On parle de sociétés qui, peu importe leur
santé financière, sont obligées d'absorber un fardeau que
leur concurrents ne sont pas obligés d'absorber, parce que, en
général, on privilégie, dans les régions qui nous
entourent, un système d'imposition des profits des corporations et on
laisse donc une chance à celles qui ont les moyens de payer de le faire.
C'est une obligation comme citoyen ou citoyen corporatif, mais qu'on fiche la
paix à celles, notamment les petites, qui connaissent de mauvaises
années ou aux nouvelles petites qui, sans connaître de mauvaises
années, sont en phase d'implantation. C'est à ce moment-là
que les demandes, quant à la santé financière, sont
très exigeantes pour une petite ou moyenne entreprise et venir lui
"tapocher" sur la tête avec une taxe comme celle que le ministre
privilégie maintenant, c'est une charge fixe additionnelle.
Quant à l'improvisation, il suffit de voir ce qui se passe dans
la réalité dans les petits cabinets de courtiers. Ce sont des
PME, les sociétés de courtage. Les courtiers d'assurances sont
des gens qui sont soit propriétaires uniques, soit associés
à quelques personnes dans leur milieu, soit quelquefois une petite
entité incorporée qui crée de l'emploi, qui fait avancer -
je pense qu'on peut dire cela en termes généraux - le
degré de sophistication en matière de finances, en matière
économique. Il y a là un aspect d'éducation
économique, il ne faut pas se leurrer, qui fait avancer le
Québec, qui nous fait faire des progrès, qui constitue un
rattrapage quant à notre capacité de nous mouvoir dans un monde
compliqué où la finance et l'économie sont
déterminantes.
On a demandé à ces gens, du jour au lendemain, avec des
petits reculs et une danse hésitation qui démontrent
l'improvisation, de s'adapter à un nouveau système
inusité. On leur a demandé, s'ils avaient le malheur d'être
un peu informatisés, ce qui est à leur avantage et ce qui est
formidable, de changer tous leurs logiciels en 30 jours. C'est impossible. Les
petites boîtes de courtiers, par exemple, qui sont informatisées
ne peuvent physiquement pas - il n'y a pas assez d'heures d'ici 30 jours -
réaliser les changements dans leur système de comptabilité
et de facturation, qui leur permettraient de se conformer aux nouvelles
idées, aux découvertes, à l'originalité
suprême, que le ministre des Finances incarne maintenant, d'imposer au
Québec un genre d'impôt pour boucher des trous qui sont le fait du
gouvernement, un genre d'impôt qui désavantage les entreprises
québécoises, qui introduit des distorsions dans le système
fiscal. On a parlé des cas frontaliers, c'est simplement la pointe de
l'iceberg. C'est dans tout le Québec qu'il y a maintenant dans notre
économie une distorsion attribuable à un choix fiscal inopportun
du ministre des Finances du Québec.
Le Président (M. Lachance): Messieurs les
députés, M. le ministre, la commission s'étant
acquittée de son mandat, elle ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 11)