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(Quinze heures vingt minutes)
Le Président (M. Lachance): La commission du budget et de
l'administration se réunit avec le mandat suivant: l'étude
détaillée du projet de loi 37, Loi sur le régime de
négociation des conventions collectives dans les secteurs public et
parapublic. Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président, j'ai quatre
remplacements. M. Blank (Saint-Louis) sera remplacé par M. Pagé
(Portneuf)i M. Caron (Verdun) sera remplacé par M. Paradis
(Brome-Missisquoi); M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges) sera remplacé par
M. Ryan (Argenteuil). Ces trois remplacements se feront en conformité
avec l'article 130 de notre règlement, à savoir que cela sera bon
pour la durée de la commission au complet. J'ai un autre remplacement,
M. le Président, à savoir que M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce) sera remplacé par M. Doyon
(Louis-Hébert) pour cette séance uniquement. C'est tout, M. le
Président.
Le Président (M. Lachance): Merci, M. le
secrétaire.
M. le député de Rosemont, sur une question de
règlement.
Le remplacement d'un député
indépendant à une commission
M. Paquette: Oui, sur une question de règlement, M. le
Président. Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine
qui est membre de cette commission et qui représente notre groupe
parlementaire informel ne peut être ici aujourd'hui. Elle sera ici
demain. Elle aurait souhaité que je la remplace aujourd'hui pour la
durée de cette séance.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Rosemont. Je vais me référer à
l'article 131 des règles de procédures de l'Assemblée
nationale. Je vous lis l'article 131: "Exceptionnellement, lorsqu'une
commission exécute un mandat confié par l'Assemblée, un de
ses membres peut être remplacé pour la durée d'une
séance. La commission doit en être informée dès le
début de la séance. " Cependant...
M. Paquette: Dès le début de la séance.
C'est cet article que j'invoque.
Le Président (M. Lachance):... si je me
réfère aux règles de fonctionnement concernant les
commissions, à l'article 131, cela se lit comme suit: "Lorsqu'une
commission exécute un mandat confié par l'Assemblée - ce
qui est bien le cas ici en ce qui concerne le projet de loi 37 - le
secrétaire annonce, au début de chaque séance, les
remplacements que les whips ou leur représentant lui ont
signifiés. " Or, quand on parle de whips, on parle de formation
politique, par extension, et je crois bien que vous êtes reconnu ici au
Parlement comme des députés indépendants, donc non
reconnus comme une formation politique de façon bien spécifique
comme groupe parlementaire.
M. de Bellefeuille: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Je serais extrêmement
étonné que les auteurs des règles de procédure et
règlements d'application aient eu comme intention de faire de la
discrimination contre les députés indépendants de
façon à les priver de la possibilité de se faire remplacer
ou de remplacer un collègue. Je vous signale que vous pouvez prendre la
question en délibéré et informer le prochain Parlement de
votre décision, mais je vous signale, d'autre part, qu'il y a une autre
solution qui serait de fonctionner par consentement unanime. Si la commission
consentait unanimement à ce que le député de Rosemont
remplace pour cette séance Mme la députée des
Îles-de-la-Madeleine, le problème serait réglé.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Deux-Montagnes, je vous fait lecture de l'article 133 de nos règles de
procédure qui dit: "Tout député indépendant peut
participer sans droit de vote aux travaux d'une commission qui étudie un
projet de loi. " Cependant, pour avoir la conscience bien tranquille, je vais
prendre en délibéré la remarque que vous m'avez faite et
je crois que nous serions en mesure, à la reprise des travaux à
20 heures, de pouvoir vous fournir une réponse plus
détaillée, plus éclairée sur votre
intervention.
M. de Bellefeuille: Vous ne préférez pas, M. le
Président, demander s'il y aurait consentement unanime de sorte que
le
remplacement puisse se faire dès maintenant.
Le Président (M. Lachance): Je préfère ne
pas prendre le risque de faire de la jurisprudence ici, cet après-midi.
Je voudrais être davantage éclairé avant de rendre une
décision sur votre intervention, M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: M. le Président, je ne peux que
m'incliner devant votre sage décision de prendre la question en
délibéré jusqu'à la reprise ce soir, mais cela
représente un inconvénient. C'est que nous ne savons toujours pas
si les membres ministériels de la commission consentiraient à ce
remplacement.
M. Blais: C'est bien malheureux, mais vous ne le saurez pas.
M. de Bellefeuille: Je vais tirer ma propre conclusion
personnelle, M. le Président, que les membres ministériels ne
donnent pas leur consentement.
M. Clair: M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le ministre.
M. Clair: Je pense que...
Le Président (M. Lachance): Sur la question de
règlement ou sur la...
M. Clair: Sur la question de règlement, M. le
Président. Je pense que ce que mon collègue le
député de Terrebonne indique, c'est simplement que, comme...
M. Biais: Pas de Deux-Montagnes parce qu'il n'y en a pas.
M. Clair:... nous n'étions pas conscients de ce
problème avant le début des travaux, nous n'avons pas eu
l'occasion d'en discuter comme membres de la commission et, dans les
mêmes délais où le président sera disposé
à rendre sa décision, nous serons également prêt3
à en indiquer une. Je pense que le député de
Deux-Montagnes errerait s'il prétendait que nous avons d'ores et
déjà adopté une attitude définitive
là-dessus.
M. de Bellefeuille: M. le Président, sur la question de
règlement, je prends bonne note que le ministre n'a pas donné son
consentement.
Le Président (M. Lachance): Je voudrais vous indiquer, M.
le député de... Oui, M. le député de Portneuf.
M. Pagé: Là-dessus, très brièvement,
je comprends que notre règlement a été écrit,
analysé, étudié et, finalement, approuvé en
fonction d'un mode de fonctionnement parlementaire qui s'appuie sur l'existence
et la présence de partis. Comme on le sait, ce règlement a
été réécrit au début de la présente
Législature, il y a quelques années, et on doit constater que, au
moment où on se parle et plus particulièrement depuis quelques
mois, les règles du jeu - si je peux utiliser le terme - doivent
être appliquées en fonction d'une texture différente de la
Chambre parce que nous avons le parti au pouvoir, d'accord, nous avons
l'Opposition officielle, mais il faut aussi retenir qu'on a maintenant plus
d'un député qui siège comme député
indépendant. On a un groupe qui représente un nombre très
appréciable d'électeurs; ces députés ont des
droits, des obligations et aussi des limites.
Or, la question de règlement qui est soulevée, c'est de
voir s'il est possible pour un député - j'espère, M. le
Président, qu'on ne dérange pas le ministre du Revenu, en
arrière - qui n'appartient pas à un groupe politique reconnu
à l'Assemblée nationale d'intervenir et de voter. Or, le
consentement a été demandé. Quant à nous, il nous
apparaît que pour cette commission les députés de Rosemont
et de Deux-Montagnes qui sont avec nous devraient pouvoir intervenir, ou Mme la
députée des Îles-de-la-Madeleine, qui a manifesté
beaucoup d'intérêt, comme M. le député de
Sainte-Marie. Je présume qu'il devrait être possible pour eux -
c'est un droit tout à fait fondamental, surtout compte tenu de l'enjeu
du projet de loi qui est à l'étude - d'être présents
continuellement ou occa- sionnellement aux travaux de notre commission pour
faire valoir leur point de vue. Je comprends que vous craignez de faire
jurisprudence mais je m'attendais à ce que vous reconnaissiez le droit
à mes deux honorables collègues de pouvoir faire oeuvre utile cet
après-midi.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Portneuf, en terminant, puisque vous connaissez bien le règlement qui
dit, à l'article 40, que le président peut autoriser quelques
remarques à l'occasion d'un rappel au règlement et que sa
décision ne peut être discutée, je vous indiquerai qu'il
n'est pas dans mes intentions de président de brimer qui que ce soit,
qu'il soit indépendant, dans l'Opposition ou du parti
ministériel. En vertu de l'article 133, il n'y a pas de problème;
tout député indépendant peut participer aux travaux d'une
commission qui étudie un projet de loi mais, cependant, c'est sans droit
de vote.
Le règlement de l'Assemblée nationale que vous avons,
comme vous le savez, a été adopté le 13 mars 1984, comme
règlement sessionnel d'abord, ensuite modifié à la
séance du 20 juin 1984; le règlement est
devenu permanent en avril 1985, donc, c'est assez récent,
après avoir subi à nouveau quelques modifications. J'ai
demandé qu'on fasse une certaine recherche. Donc, on prend en
délibéré ce qui a été demandé par les
députés de Rosemont et de Deux-Montagnes et j'ai indiqué
que, à la reprise des travaux, à 20 heures, et, si possible,
avant, je pourrai rendre une décision là-dessus.
M. Paquette: M. le Président, si vous me permettez...
Le Président (M. Lachance): En terminant, oui. (15 h
30)
M. Paquette: Sur une question de règlement.
L'interprétation que vous donnez, à savoir que les
députés indépendants ont droit de parole à cette
commission et qu'ils ont le droit également de faire des propositions,
est incontestable. Cependant, malgré nos demandes, je tiens à
vous dire que le fait que la commission ait dû commencer ses travaux
aujourd'hui, ce qui empêche ma collègue des
Îles-de-la-Madeleine d'être présente aujourd'hui, prive
notre groupe, qui n'est pas un groupe parlementaire reconnu mais qui a une
position sur les questions que nous allons débattre, une position
différente de celle du parti ministériel ou du parti de
l'Opposition, laquelle position représente une opinion à
l'intérieur de la société, de pouvoir s'exprimer par le
vote aujourd'hui.
Je sais que nos règles de procédure permettent de
fonctionner par consentement unanime. On l'a fait plusieurs fois à
l'Assemblée nationale. Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas le
faire ici, en attendant; et sans préjuger de la demande que vous avez
prise en délibéré, nous aimerions que l'un d'entre nous
ait droit de vote aujourd'hui, jusqu'à ce que Mme la
députée des Îles-de-la-Madeleine soit ici pour exercer, en
notre nom, son droit de vote.
Le Président (M. Lachance): M. le député, je
vous remercie de vos remarques. Je crois comprendre qu'il n'y a pas
unanimité de toute façon.
M. Paquette: Ils ne donnent pas leur consentement, M. le
Président.
Le Président (M. Lachance): Et je m'en tiens... Oui, M. le
ministre.
M. Clair: M. le Président, lorsque vous rendrez votre
décision, ce que je veux indiquer aux deux députés
indépendants, c'est qu'une des raisons pour lesquelles nous ne donnons
pas notre consentement immédiatement, c'est pour deux raisons: la
première, c'est que j'ai cru comprendre tantôt, dans les
discussions antérieures avec le secrétaire de la commission, que
peut-être il n'était pas suffisant de donner notre consentement;
alors, je voudrais que vous nous éclairiez là-dessus. Est-ce que,
au niveau de la commission, nous pouvons d'un simple consentement donner le
droit de vote à des remplaçants de la députée
indépendante? Deuxièmement, est-ce qu'il est possible que ce
consentement soit donné par séance et non pas
nécessairement pour la durée de tous les travaux de la
commission? J'aimerais que vous nous éclaireriez là-dessus.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre, à la
suite des interrogations que vous posez, comme il subsiste dans mon esprit un
doute sérieux, c'est la raison pour laquelle je voudrais pouvoir rendre
une décision éclairée. C'est ce pourquoi nous allons
attendre que la décision qui sera rendue soit motiviée en bonne
et due forme.
M. Paradis: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis:... je comprends la situation dans laquelle on se
retrouve, mais, s'il arrivait qu'on ait un vote sérieux à prendre
d'ici à ce que votre décision soit rendue et que cette
dernière soit dans le sens de donner un droit de vote à ces
parlementaires, est-ce que vous réalisez que le temps que vous allez
prendre pour délibérer peut devenir très important pour
les parlementaires qui se verront brimés de ce droit de vote? Ils ne
pourront pas agir, à ce moment-là, rétroactivement et la
suspension aura pour effet, dans l'éventualité d'une
décision favorable, de brimer un parlementaire, quel qu'il soit dans
cette Chambre, qui a été élu par des électeurs,
pour représenter des électeurs d'un comté. Cela le brimera
de ce droit d'exprimer un droit de vote.
Dans ces circonstances, est-ce que vous ne trouveriez pas plus sage
peut-être qu'on suspende pour dix minutes, le temps d'aller effectuer des
vérifications au cas où la décision serait positive et de
permettre à ces parlementaires d'exprimer leur droit de vote si c'est
là la décision que vous rendrez? Dans le cas d'une
décision positive, on va se retrouver dans une situation qui va
être injustifiable face aux parlementaires qui auront été
ainsi brimés et face aux gens qu'ils représentent.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Roberval.
M. Gauthier: M. le Président, je suis en désaccord
avec la demande du député de Brome-Missisquoi et c'est pour une
raison
bien simple. La commission a des travaux à faire et je pense
qu'on doit commencer selon l'ordre de la Chambre; on devrait avoir
commencé ces travaux depuis 15 heures. De toute façon, c'est vrai
qu'il peut y avoir quelqu'un qui soit brimé dans sa capacité de
voter ici, en commission. La commission est prévue - ce n'est pas depuis
cinq minutes -depuis un certain temps; il y aurait eu possibilité
probablement de faire les demandes et de s'enquérir avant sur ce fait.
On arrive, aujourd'hui... N'importe quel député pourrait arriver,
théoriquement, avec un problème assez complexe en
commençant une séance et demander une suspension au nom du fait
qu'il ne veut pas être brimé dans son droit de parole ou dans son
droit de vote ou autrement. Je pense qu'il y a des mécanismes en place,
cela aurait pu être demandé avant, on aurait pu demander
même au président de l'Assemblée nationale un avis
là-dessus puisque le député de Rosemont voulait remplacer
la députée des Îles-de-la-Madeleine. Comme cela n'a pas
été fait en temps et lieu, vous rendrez votre décision,
j'imagine, dans le plus bref délai et, en attendant, il faudrait qu'on
procède.
Le député de Rosemont peut toujours participer aux travaux
de la commission de toute façon, que je sache, et peut-être que
son droit de vote sera rétabli dans les minutes ou au plus tard dans une
heure ou deux. À ce moment-là, la situation sera
complètement réglée. En attendant, on doit
procéder, écoutez.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, très
brièvement. Le sujet est important en ce qu'il touche non seulement les
travaux, le déroulement de notre commission et aussi le droit pour un
parlementaire de participer et de voter à nos
délibérations mais cette question-là touche l'ensemble de
la problématique créée par la présence nouvelle et
récente de sept députés qui ne siègent plus avec la
majorité.
De votre décision, M. le Président, va dépendre
bien des choses, entre autres, pour le parlementaire qui a été
élu pour représenter les Îles-de-la-Madeleine, Mme la
députée. Parce qu'elle est assignée à telle
commission parlementaire, est-ce à dire, parce qu'elle n'a pas de whip
pour la représenter, que jamais, mais jamais, elle ne pourra être
réaffectée à une autre commission parlementaire?
M. Gauthier: La décision va être rendue
tantôt. On va le savoir.
M. Pagé: Nous sommes légitimement en droit de
soutenir et de prétendre que M. le président, avec
l'expérience qu'il a, les connaissances qu'il a, l'appui qu'il a - je
parle de l'appui en termes d'interprétation de nos procédures, de
nos règles - peut rendre une décision dans des délais plus
brefs que 18 heures.
J'aimerais bien, M. le Président, que vous puissiez
répondre à ceci: abstraction faite du fond de la question qui a
été abordée par le député de Rosemont, dans
la situation où se retrouve le député de Deux-Montagnes,
qui pourrait demander à la Chambre d'autoriser son changement d'une
commission à une autre, parce qu'il n'a pas de whip, lui?
M. Clair: La personne elle-même est assez grande pour
cela.
M. Pagé: Bon, c'est donc dire que chacun... Vous
confirmez, mais c'est du président que j'aimerais l'entendre. Le
ministre indique que son opinion, quant à lui, c'est que tous les sept
députés indépendants auraient pu ce matin demander au
président de l'Assemblée nationale de les reconnaître
à l'avenir, dans le cadre des travaux de la commission du budget et de
l'administration.
M. Paquette: Cela pourrait se faire demain.
M. Dussault: Jusqu'au prochain vote.
M. Pagé: Demain matin cela pourrait se faire. Comment
régleriez-vous la composition de la commission en ce qui concerne le
nombre de membres siégeant dans l'Opposition et au pouvoir maintenant?
C'est ça le problème.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Châteauguay, non, M. le député de Bourassa.
Une voix: Cela va être bon. Attachez vos ceintures!
M. Laplante: Je comprends bien ce que le député de
Portneuf essaie "d'encarcaner" et j'étais conscient, à la
première intervention qu'il a faite, qu'il y a peut-être une
lacune dans le règlement. Par contre, si le législateur, au
moment où il a voulu faire ces règlements auxquels l'Opposition
et la partie gouvernementale ont participé... Il y a ausi l'expansion
des députés indépendants qui peuvent être sept cet
après-midi ici, faire tous des interventions, faire tous des motions,
sans droit de vote. Il y a cela et ce qu'un député de
l'Opposition n'a pas comme droit...
M. Paquette: On a une partie de nos droits.
M. Laplante:... ce que le député
ministériel n'a pas comme droit non plus... C'est une autre
lacune que cela comporte et il va falloir faire des amendements
là-dessus pour qu'il y ait un choix, un nombre limité de
députés indépendants qui viennent à une commission
avec tous ces droits-là, si on veut refaire le règlement. Vous
avez des droits qu'on n'a pas et nous autres on a des droits que vous n'avez
pas. Coudon, il faut vivre avec cela.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: M. le Président, je pense que pour rendre
votre décision vous devez avoir à l'esprit que le remplacement
d'un député à une commission parlementaire relève
d'une initiative d'une aile parlementaire, pour ce qui est du remplacement, je
dis bien. Pour ce qui est de la participation d'une façon permanente
à une commission, cela relève de l'initiative d'un parlementaire
à l'Assemblée nationale de demander un vote sur un tel
changement. Ici, il ne s'agit pas de savoir si la personne sera membre de
façon permanente de la commission, il s'agit de savoir si, à
cette commission, la personne qui remplacerait Mme la députée des
Îles-de-la-Madeleine pourrait être nommée par une
décision ici. Je pense que l'esprit de nos règlements, c'est que
c'est l'initiative d'une aile parlementaire de le faire en commission
parlementaire. Cela, c'est un premier point.
Deuxièmement, je pense, M. le Président, qu'il faut que
l'Opposition respecte le point de vue d'une aile parlementaire comme la
nôtre qui sait déjà, de par les propos qui ont
été tenus par l'Opposition, qu'il s'agit de faire en sorte que le
rapport de forces évolue. À partir du moment où on nous
dit: Les libéraux ont une position, les péquistes ont une autre
position et les indépendants en ont une autre, on peut donc penser qu'on
nous annonce d'avance que sur certains points il y aura un vote
différent de la part des indépendants par rapport à celui
des péquistes. Donc, on nous annonce d'avance que le rapport de forces
pourrait être appelé à évoluer. Je pense qu'on
devrait être capable de respecter le fait qu'on se dise: Pourquoi est-ce
qu'on ferait évoluer ce rapport de forces puisque de toute façon
le règlement nous protège, à savoir que c'est l'initiative
d'une aile parlementaire qui demande le remplacement? On n'a pas à
concéder quelque chose qui irait à rencontre de nos
intérêts, à moins que pour un tel changement on nous dise
que la personne qui est en cause est une personne d'une si grande
compétence, qu'elle est si spécialisée dans le champ qui
nous concerne qu'à toutes fins utiles tous les membres de cette
commission ne pourraient pas se passer des services d'une telle personne.
Je ne vois pas, dans les propos qui ont été tenus
jusqu'à maintenant, quelque chose qui soit si attrayant pour qu'on se
dise: Lâchons un peu sur le rapport de forces, de toute façon on
va tellement y gagner sur le plan de la qualité. Ce n'est pas comme cela
qu'on est amené à voir les choses. Pour cette raison, M. le
Président, je dis que le seul point d'appui que vous avez, c'est qu'en
commission parlementaire l'initiative relève d'une aile parlementaire de
demander le remplacement d'une personne. Il n'y a que deux ailes parlementaires
présentes ici: celle des libéraux et celle du Parti
québécois.
M. Paquette: M. le Président, si vous me le permettez.
Le Président (M. Lachance): M. le député,
pour ménager du papier et de la salive, nous allons suspendre nos
travaux jusqu'à 16 heures.
(Suspension de la séance à 15 h 43)
(Reprise à 16 heures)
Le Président (M. Lachance): La commission poursuit ses
travaux à la suite de cette suspension. Voici la décision de la
présidence. Il appert que, les règles de fonctionnement n'ayant
pas préséance sur les règles de procédure, ce que
je lisais tantôt, qui faisait référence aux remplacements
que les whips et les représentants indiquaient, ne s'applique pas aux
députés indépendants. Par conséquent, il n'est pas
nécessaire d'obtenir le consentement unanime des membres de la
commission et cela signifie qu'il pourra y avoir remplacement du
député indépendant par un autre député
indépendant. À ce moment-là, ce sera évidemment un
et non pas deux. J'imagine que c'est le député de Rosemont.
M. de Bellefeuille: M. le Président, je voudrais proposer
que ce soit le député de Rosemont qui remplace Mme la
députée des Îles-de-la-Madeleine.
M. Clair: M. le Président, j'accepte volontiers votre
décision. La seule interrogation que j'ai en tête est que si
quelqu'un remplace un parlementaire il le fait avec l'autorisation de la
personne qu'il remplace. Je n'ai aucune difficulté à accepter
qu'à compter de maintenant le député de Rosemont remplace
la députée des Îles-de-la-Madeleine, mais en termes de
précédent il me semble que ce serait normal que la ou le
député indépendant prévienne le secrétaire
de la commission qu'une telle personne, un tel autre parlementaire le
remplacera.
Le Président (M. Lachance): C'est pour la durée de
la séance, M. le ministre, et je tiens pour acquis que la...
M. Pagé: M. le Président, est-ce que je dois
comprendre que l'honorable ministre voudrait qu'on suspende à nouveau,
de façon que la commission et son président puissent communiquer
avec Mme Le Blanc-Bantey?
M. Clair: Non, M. le Président. Je n'ai pas demandé
de commission rogatoire. J'ai dit que je prenais la parole du
député de Rosemont è savoir qu'il remplace effectivement
la députée des Îles-de-la-Madeleine. Mais simplement pour
les fins du droit parlementaire, quand on remplace quelqu'un, normalement,
c'est...
M. Pagé: C'est le minimum de déférence que
l'honorable ministre et les autres collègues doivent à Mme la
députée des Îles-de-la-Madeleine.
M. Clair: Exact.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont.
M. Pagé: M. le Président, je vous remercie. Vous
avez bien entendu notre plaidoyer et votre décision témoigne de
la sagesse qui sera bientôt proverbiale chez vous si cela continue comme
cela.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, je dois simplement dire
à l'intention du ministre que, lorsque nous sommes arrivés ici
pour la commission parlementaire, nous avions d'abord fait, contrairement
à ce qu'a dit le député de Roberval tout à l'heure,
les représentations nécessaires. Nous avions informé le
bureau du leader du gouvernement que Mme la députée des
îles ne pourrait pas être ici aujourd'hui. Nous espérions
qu'on aurait tenu compte de nos représentations.
Maintenant, puisque la commission a été convoquée
quand même pour cet après-midi, la première chose que nous
avons faite a été, avant le début de la séance, de
discuter de cette question avec le président de la commission. Nous
avions supposé que la procédure qui s'applique dans le cas des
députés ministériels ou des députés du Parti
libéral pouvait s'appliquer. Tout à l'heure il y a eu ici des
remplacements de l'un ou l'autre parti, et il n'y a pas eu de document
écrit d'autorisation; cela ne s'est jamais fait à ma
connaissance, ni sous l'ancien ni sous le nouveau règlement, qu'il y ait
eu un document écrit par lequel le député qui est
remplacé autorise le député qui le remplace à le
remplacer. Je n'ai pas d'objection à ce qu'on applique une telle
procédure. Si une telle procédure devait être
appliquée pour les prochaines commissions parlementaires, il faudrait
nous en informer à l'avance. Je pense que c'est très
important.
Le deuxième point que je voulais soulever - et je voudrais avoir
votre avis là-dessus... Je veux d'abord vous dire ma satisfaction. Je
pense qu'on respecte ainsi l'esprit de nos règlements, cela nous assure
du plein exercice de nos droits de députés à cette
commission parlementaire. Cependant, lorsque vous parlez d'un seul
député indépendant ayant le droit de vote à cette
commission, dois-je comprendre que, si mon collègue de Deux-Montagnes
voulait avoir le droit de vote, il faudrait passer par une décision de
l'Assemblée nationale? Vous ai-je bien interprété?
Le Président (M. Lachance): C'est exactement cela, M. le
député de Rosemont.
M. Paquette: Et sur la question soulevée par le ministre,
je voudrais que vous me disiez quelle est la procédure. Est-ce qu'on
doit avoir une procédure différente de celle du parti
ministériel et de l'Opposition officielle?
M. Laplante: Juste une directive avant...
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Bourassa.
M. Laplante:... avant de rendre votre décision. Je ne
voudrais pas que vous me répondiez aujourd'hui là-dessus, mais
qu'est-ce qui arriverait si Mme Le Blanc-Bantey arrivait cet après-midi,
au cours d'une séance, qu'elle disait à ce moment-là
qu'elle n'a jamais donné d'autorisation pour être remplacée
et qu'elle voulait reprendre sa place? J'aimerais que...
Le Président (M. Lachance): Cela ressemble à de la
politique-fiction!
M. Laplante: Non. Allez en consultation sur cela. Qu'est-ce qui
arriverait à ce moment, vu que ce sont tous des députés
indépendants? "Indépendants", le mot est là.
M. Clair: Le député de Rosemont serait confondu, M.
le Président, si une telle hypothèse arrivait.
Une voix: Ce serait terrible, terrible, terrible!
Le Président (M. Lachance): Oui, je voudrais ajouter
avant, M. le député de Portneuf, que nous sommes dans un
système où quand même il doit exister un minimum de
confiance. Jusqu'à preuve du contraire, je
pense qu'on n'a pas à se préoccuper de ce problème
que vous nous soulevez. Je le vois comme problème
hypothétique.
M. Laplante: Cela fait partie...
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Portneuf.
M. Laplante:... de la décision que vous avez rendue.
Une voix: II ne connaît pas son règlement.
M. Pagé: Très brièvement, comme on le sait,
lorsqu'un député intervient à l'Assemblée
nationale, on doit prendre sa parole. On ne peut mettre en doute sa parole.
Lorsqu'un député, à l'Assemblée nationale, de son
siège et même en commission - parce que c'est la prolongation de
la Chambre lorsqu'on est ici - évoque quelque chose, s'il est
démontré qu'il a menti, il est sujet à des sanctions par
ses pairs, auquel cas le collègue pourrait être poursuivi et le
règlement pourrait s'appliquer. Si Mme la députée - c'est
l'hypothèse évoquée par le député de
Bourassa - arrivait cet après-midi et qu'elle nous indiquait que jamais,
mais jamais elle ne voulait être représentée par son
honorable collègue de Rosemont, son privilège à elle
serait attaqué comme parlementaire et elle pourrait se prévaloir
des dispositions du règlement.
Le Président (M. Lachance): Bon, j'espère que c'est
assez. Nous pouvons passer à l'étude du projet de loi no 37.
Est-ce qu'il y a, M. le ministre, une déclaration préliminaire ou
des propos?
Remarques préliminaires
M. Clair: Elle sera très brève, M. le
Président. Elle consistera simplement à indiquer que, en ce qui
concerne l'introduction générale au projet de loi 37, je n'ai pas
l'intention, après tous les débats qui ont eu lieu en
deuxième lecture sur l'avant-projet, de reprendre à une
commission parlementaire le débat sur l'orientation du projet de
loi.
Deuxième point, j'indique que j'aurai des amendements à
proposer à ce projet de loi et que je suis prêt à commencer
immédiatement l'étude de l'article 1 du projet de loi.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Portneuf.
M. Michel Pagé
M. Pagé: M. le Président, nous sommes heureux, mon
collègue de Brome-Missisquoi ainsi que les autres collègues qui
pourront se joindre à nous pendant l'étude en commission
parlementaire du projet de loi 37, soit M. Ryan (Argenteuil), qui est
porte-parole de notre groupe en matière d'éducation, M. Polak
(Sainte-Anne), qui, comme on le sait, est particulièrement
intéressé à tout ce qui concerne les relations du travail,
M. Doyon (Louis-Hébert), qui est un parlementaire avec une
expérience particulièrement intéressante pour nous en
regard des dispositions applicables à la fonction publique, aux
travailleurs des secteurs public et parapublic...
Somme toute, on aborde les travaux de cette commission avec beaucoup
d'intérêt parce que c'est une phase additionnelle dans un
processus important, qui est un processus d'après deuxième
lecture. C'est une phase additionnelle visant ou touchant des modifications
substantielles au régime de négociation dans les secteurs public
et parapublic. Beaucoup d'heures ont été consacrées
à l'Assemblée nationale du Québec, plus
particulièrement depuis quelques années, en regard de cette
dynamique sociale, de cette dynamique gouvernementale, si je peux utiliser le
terme, que constitue la négociation des conditions de travail, des
conventions collectives entre les travailleurs des secteurs public et
parapublic et le gouvernement, l'employeur. Je n'ai pas l'intention ici de
reprendre les commissions parlementaires qui ont siégé les
nombreuses fois où le Parlement a dû se convier à un
exercice de réflexion et d'action concernant de semblables
matières.
Cependant, on doit retenir du processus de consultation enclenché
par le ministre délégué à l'Administration et
président du Conseil du trésor, M. le député de
Drummond, le 1er mai 1984, que plusieurs groupes, des centaines de personnes,
pour ne pas dire des milliers, ont eu l'occasion, depuis quatorze mois, de se
sensibiliser à cette question. On a eu par la suite un avant-projet de
loi qui a été déposé par le ministre au mois de
décembre dernier, au sujet duquel ont eu la possibilité de
siéger dans le mois de février, si ma mémoire est
fidèle, tous les parlementaires, ou presque, qui sont ici aujourd'hui.
Cet avant-projet de loi prévoyait des choses particulièrement
intéressantes, on se le rappellera. Le gouvernement entendait faire en
sorte que les règles du jeu soient différentes à l'avenir.
On a assisté à des propositions concernant la façon
d'établir la politique de rémunération du gouvernement.
Ces éléments se retrouvent toujours dans le projet de loi 37. On
a eu l'occasion d'en discuter avec ceux qui ont témoigné devant
nous, tant en février qu'il y a quelques semaines, et la commission nous
permettra, nous l'espérons, de voir les intentions véritables du
ministre, comment le gouvernement prévoit que pourra
s'articuler le fonctionnement d'un tel institut de recherche.
Toujours sur l'aspect de la rémunération - c'est important
parce que c'est ce qui est le plus contentieux - il suffirait de me
référer aux propos et commentaires du député de
Matane, ex-président du Conseil du trésor et actuel ministre de
l'Éducation supérieure, de la Science et de la Technologie, si ma
mémoire est fidèle. Cela change tellement rapidement qu'on ne me
critiquera pas si je n'ai pas la terminologie exacte en regard de ses fonctions
et de ses responsabilités. Quand on a entendu son discours, lorsqu'on a
entendu ses propos, ses questions adressées aux intervenants il y a
quelques semaines, on a eu tôt fait de constater que, pour lui, la
rémunération c'était bien important.
Le projet de loi 37 se distingue de l'avant-projet de loi en ce que le
gouvernement a réintroduit le droit pour les travailleurs et les
travailleuses du secteur public de recourir à la grève une fois
par trois ans sur la question de la rémunération. Le gouvernement
modifie son attitude. En ce qui nous concerne, nous croyons que des amendements
devront être apportés pour revenir à la situation
annoncée ou prévue dans l'avant-projet de loi.
Il y a toute la question du droit de grève, entre autres dans le
secteur de la santé. Le gouvernement s'est dit préoccupé
par cette question. Le gouvernement a confirmé, par la voix de ses
porte-parole, que c'était un recours qui faisait mal et qui faisait
très mal, dans certains cas, à des citoyens qui étaient en
quelque sorte pris en otage en cas de conflit.
On a pensé, du côté du gouvernement, une formule
nouvelle en vertu de laquelle les risques et les dommages seraient moindres que
ceux vécus antérieurement. Quant à nous, notre position a
été plusieurs fois formulée,
réitérée. Elle est audacieuse, elle est courageuse
lorsqu'un parti politique indique clairement à la population, à
un groupe aussi important que les travailleurs et les travailleuses du monde de
la santé, à quelques mois d'une élection, que ce droit ne
doit plus prévaloir parce que nous croyons fermement que le droit
fondamental des citoyens à recevoir en totalité les services de
santé, les services sociaux auxquels ils ont droit passe avant tout
autre droit qui peut être consenti à des groupes organisés,
même si c'est dans la défense d'intérêts tout
à fait légitimes. (16 h 15)
Je dois vous annoncer d'ores et déjà -le ministre devait
certainement s'y attendre - que nous aurons des modifications bien
précises, des amendements à apporter, en regard de la position
qu'on a adoptée. Dans ce sens, je suis d'ores et déjà
convaincu que la contribution de mon collègue, le député
de
Brome-Missisquoi, porte-parole de notre groupe parlementaire en
matières d'affaires sociales, pourra être importante et
significative, lors de nos travaux. Comme on le sait, celui-ci, dès le
lendemain de sa désignation à ce dossier par notre chef, M.
Bourassa, a entrepris une démarche astreignante mais très
importante et très profitable pour nous, en ce qu'il a eu l'avantage de
visiter toutes les régions du Québec, de s'asseoir sur le terrain
- non pas dans le complexe J, dans le complexe H ou dans le complexe G - avec
les personnes vivant tous les jours le monde des affaires sociales du
Québec, que ce soient les travailleurs et les travailleuses, que ce
soient les administrations locales, que ce soient les structures
régionales, les CRSSS, etc. La lecture des événements ou
des faits qu'il pourra nous donner sera, je l'espère, de nature à
influencer la position de la majorité qui, si elle va dans le sens du
projet de loi 37, risque de créer plus de tort et une
problématique beaucoup plus palpable que celle vécue
antérieurement. D'ailleurs, je présume que, dans ce sens, mon
collègue de Sainte-Marie, lorsqu'il se joindra à nous, sera en
mesure d'abonder dans le même sens, puisque que cela a été
l'un des éléments principaux de son intervention en
deuxième lecture.
M. le Président, nous avons l'occasion, à compter de
maintenant, de discuter, point par point, article par article, de l'ensemble de
cette question. Cependant, on devra toujours avoir l'esprit, en dehors de
l'analyse rigoureuse et à la virgule près du texte, certains
paramètres, soit l'obligation qu'on a comme parlementaires de faire en
sorte que le gouvernement, quel qu'il soit, puisse concilier ce qui peut
paraître pour certains inconciliable: dans un premier temps, l'obligation
que le gouvernement a de dispenser une qualité et une quantité de
services donnés aux citoyens pour qui il administre et qu'il
représente; deuxièmement l'obligation qu'il a, comme employeur,
de bien se comporter avec ceux qui travaillent pour lui; enfin,
troisième élément mais non le moindre, l'obligation de
concilier ces deux premières obligations avec cette troisième
obligation qu'il a de rechercher l'équilibre de ses comptes
budgétaires et de faire en sorte que ceux qui paient pour de tels
services, qui y contribuent par leurs taxes et leurs impôts en aient pour
leur argent, et faire en sorte, ultimement, que notre société ne
s'endette pas un peu plus à chaque matin où le soleil se
lève pour accumuler des déficits qui sont croissants et
exhorbitants et qui risquent de nous faire mal, comme société,
à moyen terme.
M. le Président, pour nous, ce projet de loi, même s'il a
été au départ mal conçu... On se rappellera qu'en
novembre 1984, selon les informations - le ministre nous dira que
c'étaient peut-être des rumeurs, mais il est plus souvent
vrai qu'autrement que des rumeurs s'avèrent fondées - on
était alors sur le point de s'entendre entre le gouvernement et ses
intervenants. Or... M. le Président, le ministre peut aller
répondre au téléphone, on en a pour bien longtemps. Pour
le Journal des débats, le téléphone sonne.
Une voix: Dring!
M. Pagé: J'en étais à dire, M. le
Président, à mes collègues, dont Mme la
députée - qui sera peut-être nommée demain, je
l'espère pour elle - qu'en novembre 1984...
M. Blais: II y a une autre cloche qui sonne, là.
M. Pagé:... on était sur le point d'en arriver
è un règlement. Or, on ne sait pas trop ce qui s'est
passé. Là, le ministre pourrait peut-être profiter du
débat, qu'on veut généralement élargi lors de
l'étude de l'article 1 d'un projet de loi, pour nous indiquer ce qui
s'est effectivement passé. Comment expliquer que le ministre...
Une voix: On ne sait jamais.
M. Pagé: Le ministre devrait profiter du débat
amorçant ce projet de loi, avec l'étude de l'article 1 qui vient
d'être appelé, pour informer cette Chambre, les membres de la
commission et, finalement, le public, par l'intermédiaire des
journalistes qui sont nombreux, qui sont intéressés par un tel
projet de loi, sur ce qui s'est exactement passé en novembre 1984 pour
que vers le 17 ou le la décembre vous déposiez, comme ministre,
de façon peut-être pas improvisée mais tout au moins
précipitée parce que ce n'était pas attendu comme tel, un
avant-projet de loi, alors que le contact semblait être maintenu entre
les intervenants; même le premier ministre avait ajouté non
seulement sa voix mais sa présence au dossier. Ce serait de nature,
très certainement, à nous faire comprendre un peu mieux
l'à-propos de telles dispositions dans le projet de loi, tout comme le
ministre devrait profiter de ce moment-ci pour nous donner sa réaction,
sa perception comme ministre responsable du Conseil du trésor, qui a eu
à passer des périodes pas faciles, j'en conviens, qui a eu
à prendre la responsabilité d'un dossier qu'on dit très
contentieux, qui est placé sur la ligne de feu, il faut en convenir.
À ma connaissance, il n'y a pas beaucoup de ministres membres d'un
gouvernement au Québec qui ont été appelés à
conduire des rondes de négociations et qui se sont vu par la suite
édifier des monuments ou des statuts après de telles rondes.
Or, on sait que votre job n'est pas facile. On sait que le défi
était grand. La commande était lourde. J'aimerais que,
ouvertement, franchement, de façon que votre expérience puisse
être contributive, vous puissiez nous indiquer comment vous avez ressenti
l'effet de l'application des décrets imposés de façon
arbitraire dans les relations État-employés. Ces nombreux
échanges que vous avez eus, plus particulièrement avec les
représentants des syndicats, vous permettent maintenant d'en arriver
à une appréciation. À cet égard, ce serait
certainement utile pour nous de connaître votre perception. Est-ce que le
gouvernement s'est vraiment trompé de façon
exagérée? Est-ce que c'est vrai qu'on découvre,
aujourd'hui, l'effet de l'application de certaines dispositions du
décret? C'est le ministre de l'Éducation, M. Gendron, qui nous
disait, en commission parlementaire, il y a quelques semaines: Cela va de soi
que moi, comme ministre de l'Éducation, je n'ai pas lu l'ensemble des
dispositions de ces millions de pages. On se rappellera que le temps qui
était alloué pour chacun des parlementaires pour étudier
impliquait la lecture, je pense, de 360 pages a la minute. Cela a eu des
effets. On le sent encore aujourd'hui, en termes de méfiance chez les
travailleurs, chez les syndicats.
J'aimerais que le ministre nous donne son appréciation de cela,
comme j'aimerais aussi qu'il nous explique, dans le domaine de
l'éducation, les échanges entre le ministre de l'Éducation
et le représentant de la CEQ qui semblaient conduire à une
entente pour la réouverture de la troisième année du
décret. Nos informations - c'est public - c'est que le ministre de
l'Éducation a formulé une proposition au Conseil des ministres
dans le sens de l'entente de principe qu'il avait conclue avec les syndicats.
Or, sans vouloir être méchant pour le ministre de
l'Éducation, pour qui j'ai beaucoup de respect, force nous est de
constater que son opinion n'a pas fait le poids et n'a pas traversé le
Conseil des ministres.
Ce sont trois aspects, M. le Président, avant d'amorcer nos
travaux, sur lesquels j'aimerais entendre le ministre, ce qui serait de nature,
peut-être, à déblayer plusieurs choses susceptibles de
revenir constamment dans le débat.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont.
M. Gilbert Paquette
M. Paquette: Je pensais que le ministre voulait intervenir, mais
je suis prêt à y aller. M. le Président, j'aimerais en ce
début de nos travaux en commission parlementaire de l'étude
article par article du projet de loi 37, Loi sur le régime de
négociation des conventions collectives dans les secteurs
public et parapublic, vous dire dans quel esprit mes collègues
indépendants - mais là je dois spécifier, puisque nous ne
sommes pas un groupe parlementaire reconnu, mon collègue de
Deux-Montagnes, ma collègue des Îles-de-la-Madeleine, mon
collègue de Sainte-Marie et mon collègue de
Rivière-du-Loup -et moi entendons aborder l'étude de ce projet de
loi. Nous entendons le faire dans un esprit d'abord positif, même si nous
sommes en désaccord avec les principales articulations de ce projet de
loi. Nous pensons que, même si ce projet de loi est mal orienté,
même s'il risque d'être contre-productif, nous devrons en tant que
parlementaires, représentant aussi, je pense, certains courants
d'opinions dans la société, certains courants d'opinions qui ne
trouvent pas ce problème simple... Ce n'est pas un problème
simple lorsqu'il y a des droits aussi fondamentaux qui sont en cause et
lorsqu'on sait que l'avenir de notre société s'y détermine
très largement, puisque c'est tout le budget de l'État qui est en
cause et ce sont surtout les droits fondamentaux à la santé et
à la sécurité des bénéficiaires des services
publics au Québec, les droits des travailleurs de faire connaître
leur point de vue et également de participer en tant que professionnels
responsables à l'amélioration des services publics essentiels
à la population. C'est tout cela qui est en cause.
On est dans un domaine extrêmement délicat où
l'histoire remonte essentiellement au début des années soixante.
On se rappellera qu'un gouvernement libéral avait dit à un moment
donné que la reine ne négociait pas avec ses sujets, pour
finalement reconnaître le droit de négociation. Évidemment,
tout droit de négociation implique qu'il y a un certain équilibre
dans le rapport de forces, donc le droit de grève dans les secteurs
public et parapublic.
En 1966, il faut se rappeler qu'il y a eu débrayage dans 129
institutions hospitalières, qu'il y a eu des hôpitaux mis en
tutelle, qu'il y a eu un conflit très long dans le domaine de
l'enseignement. Si on compare avec la situation récente de la
dernière ou de l'avant-dernière négociation, on a de la
difficulté à imaginer l'ampleur des difficultés à
ce moment-là. Ce sont peut-être des conflits 15 fois, 20 fois plus
durs que ceux que l'on connaît aujourd'hui.
Au début des années soixante-dix, on se rappellera
également qu'il y a eu des conflits extrêmement durs mais beaucoup
moins lourds de conséquences. Petit à petit, les modèles
qu'on essayait de transporter du secteur privé au secteur public
faisaient la preuve de leur inefficacité sociale à tous les
points de vue quels que soient les intérêts, les orientations ou
les projets de société qui étaient parfois en conflit,
parce que ce sont toujours des conflits très politiques. On apprenait
petit à petit, malgré qu'il y avait encore des conflits, à
vivre de façon très différente les négociations
dans le secteur public ainsi que dans le secteur privé. (16 h 30)
Je ne vous ferai pas tout l'historique détaillé, M. le
Président, j'arrive en 1979, qui était le premier conflit que
j'ai vécu personnellement en tant que député à
cette Assemblée nationale. C'est d'ailleurs la première fois que
j'ai eu l'occasion - chose qui est toujours extrêmement difficile
à faire - de voter différemment de la majorité
ministérielle, après des déchirements énormes, des
discussions avec les collègues, puisqu'il y avait tout le principe de la
solidarité avec le côté ministériel qui était
en cause. Quelle était la situation à ce moment-là? Dans
le secteur hospitalier, le 28 mars 1979, on assiste à une grève
d'avertissement du Syndicat professionnel des infirmiers et infirmières
du Québec, le SPIIQ. Cela touche 35 établissements et dure huit
heures. Avec un grand respect, je dirais même avec un respect total -
parce qu'il y a malheureusement toujours des exceptions dans ces conflits dans
les services essentiels - de la population. Donc, de la part des
syndiqués, un exercice responsable de leur droit de négociation.
Les négociations se continuant, le 25 octobre 1979 il y a une autre
grève d'avertissement du front commun qui dure moins de 24 heures et qui
touche 32 000 syndiqués sur un total de peut-être 300 000 dans le
secteur public, 32 000 syndiqués qui débraient moins d'une
journée.
Là, arrive - je pense que c'est important de bien comprendre
l'esprit - une espèce de manque de confiance du gouvernement face aux
gens avec lesquels il négocie. Avant même qu'une grève ne
se déclenche, le gouvernement décide de déposer une loi
spéciale. C'est un pattern qu'on a très bien connu la
dernière fois, puisqu'il y a eu une avalanche de lois spéciales,
avant même que les gens ne débraient. Il n'y a donc pas eu de
grève. Il n'y a pas eu interruption des services essentiels à la
population. Cette fois-là, il n'y en avait pas encore eu. Cette loi a eu
un effet de provocation. Elle a fait en sorte que, le 19 novembre, 38 000
syndiqués du front commun débraient, le lendemain 35 000, 34 000,
32 000 et finalement 10 000. C'était en 1979. Évidemment,
à la dernière négociation, il n'y a pas eu de grève
dans les services hospitaliers puisque les lois spéciales ont
précédé toute possibilité d'exercice des moyens de
pression. Je pense que ce qu'on peut retenir de cette évolution des
négociations dans le secteur public, c'est que de plus en plus se
développe une notion de services essentiels qui, au départ, avait
été proposée par les syndiqués eux-mêmes et
qui est devenue de plus en plus une réalité et qui était
une
réalité en 1979 et qui a été une
réalité lors des dernières négociations. Mais, en
même temps que croissait, que s'améliorait la qualité des
services essentiels, la tension, l'insatisfaction dans la population
augmentaient. Très certainement, un des objectifs de ce projet de loi
doit être d'éliminer la tension et cette crainte que peuvent avoir
les bénéficiaires des services, particulièrement dans le
domaine de la santé au Québec.
Cependant, voici ce qu'il faut retenir. Ce qui est important, ce n'est
pas le cadre, les lois, mais l'esprit qui en découle et les attitudes de
responsabilité que ces lois ou ces règlements permettent de
développer. Chaque fois qu'on a misé sur la
responsabilité, il y a eu des réponses positives de la part des
syndiqués. Il y a eu respect des services essentiels. Autrement dit, le
droit aux services essentiels pour la population et le droit à la libre
négociation de la part des syndiqués sont conciliates, même
si ces droits ne sont pas au même niveau. Je pense qu'on va tous
être d'accord, ici, autour de cette table, M. le Président, pour
accepter que le droit à la santé et à la
sécurité des personnes, particulièrement dans les services
de santé, doit primer le droit de négociation. De là
à dire, comme le disait le député de Portneuf, que sa
formation politique était courageuse parce qu'elle prône
l'abolition du droit de grève dans le secteur de la santé - quel
drôle de courage pour des politiciens qui savent que 90 % des gens
pensent que c'est la barbarie dans les services de santé - c'est faux,
ce n'est pas le cas, M. le Président. En tant que député
à l'Assemblée nationale, j'ai apprécié
énormément votre intervention parce que vous non plus vous ne
partagez pas cette opinion. Il n'y a rien de courageux, c'est même
très rentable politiquement de dire: On va abolir le droit de
grève ou on va l'encadrer tellement qu'il va devenir symbolique.
Peut-être, peut-être, mais non seulement ce n'est pas courageux,
mais c'est totalement inefficace. On sait très bien qu'il y a d'autres
provinces, d'autres pays où le droit de grève est interdit et il
y en a quand même car, à un moment donné, des situations
d'injustice se développent; pas nécessairement des injustices
dues à des considérations égoïstes de la part des
syndiqués qui veulent augmenter leurs émoluments et miner la
santé financière de l'État, mais des injustices aussi dans
le travail.
Actuellement, il n'y a pas de négociation, il n'y a pas de
conflit mais, à l'hôpital Maisonneuve-Rosemont qui dessert mon
comté, les corridors sont encore remplis de malades. J'ai eu l'occasion
d'y aller récemment parce que quelqu'un de ma famille était
hospitalisé et les syndiqués qui m'en ont parlé
n'étaient pas en train de convaincre un député de leur
donner plus d'argent, ils étaient en train de convaincre un
député de leur donner les moyens d'être responsables et
d'être de véritables professionnels auprès des
bénéficiaires, des malades qu'ils desservent.
Alors, je pense qu'il n'y a rien de courageux à abolir le droit
de grève. Au contraire, c'est extrêmement improductif. Il y a des
pays où le droit de grève existe et il ne se produit jamais,
où il y a respect des services essentiels, mais il y a quand toujours
cette pression. Cette pression est-elle nécessaire? Je parle encore
là du point de vue du bien commun, pas du point de vue
d'intérêts particuliers que peuvent avoir les syndiqués,
qui sont aussi légitimes, mais qui doivent passer après le bien
commun. Est-ce que ce rapport de pressions est utile quand on croit à
une société décentralisée, plus personnalisante,
qui respecte les gens qui travaillent et qui reçoivent des services? On
ne peut pas faire autrement que de répondre oui.
Pour avoir vécu dans le système public un certain nombre
d'années dans l'enseignement au niveau collégial et au niveau
universitaire, je peux vous dire qu'il y a toujours une certaine
incompréhension, un certain mécanisme dans un gigantesque
appareil public comme celui qu'on a au Québec. Il suffit de regarder
comment ont été faites les récentes coupures
budgétaires. Le Conseil du trésor dit: On coupe tant. Il donne
son quota à chacun des ministères. Le ministère
répartit cela à ses directions générales, chaque
direction générale répartit cela entre ses services.
À chaque fois, évidemment, les coupures sont
répercutées vers le bas parce que ce ne sont pas les cadres, leur
personnel et l'administration qui écopent beaucoup, c'est
généralement répercuté vers le bas. Cela se rend
dans les réseaux. À l'intérieur des réseaux, vous
avez le directeur général, les directeurs de service, les
directeurs d'unité et, finalement, on arrive au niveau des gens qui
travaillent avec le monde, des gens qui rendent des services. S'imaginer que la
vérité est en haut et qu'elle n'est jamais en bas, M. le
Président, c'est une conception dangereuse, technocratique de la
société. Le seul frein qui existe face à cela, c'est un
syndicalisme responsable, un syndicalisme responsable dans les institutions de
santé, dans les institutions d'enseignement qui est capable de dire:
Nous, on les vit tous les jours, les vrais problèmes. Vous, vous avez
une vision d'ensemble. Les deux visions devraient pouvoir se conjuguer en vue
du bien commun.
C'est pour cela, M. le Président, que, même si nous faisons
primer le droit absolu à la santé, à la
sécurité, aux services essentiels à la population, nous
pensons que le droit véritable à la négociation pour les
employés et leurs associations représentatives
doit être respecté et même valorisé et qu'on
doit avoir un projet qui responsabilise tout le monde, et non pas qui reproduit
les rapports de domination et de hiérarchie à l'intérieur
des services publics très complexes.
M. le Président, nous trouvons que dans ce projet de loi il y a
bien sûr des aspects positifs. Il est important, en ce qui a trait aux
informations sur la rémunération, que les deux parties aient des
données de base sur lesquelles elles peuvent se fier, que le public en
soit informé, qu'on s'assure qu'on ait les meilleurs services possible
au meilleur coût possible et que la rémunération des
employés s'accorde avec ce qui est généralement
consenti.
Cependant, je vous signale qu'il y a eu une évolution des
mentalités. Il y a eu du progrès dans les conditions de travail
aussi, ce qui fait en sorte que les syndiqués, de plus en plus, sont
davantage conscients de questions comme la qualité de vie au travail, la
sécurité d'emploi, les tâches adéquates et le
meilleur service possible que de la rémunération salariale. Je
pense que personne ne peut nier cela.
Les autres aspects du projet de loi nous apparaissent beaucoup moins
positifs. Nous ne pensons pas qu'il y a une réduction de la
complexité qui fait que la bureaucratie publique trouve son
vis-à-vis dans l'organisation pyramidale des syndicats. On se retouve
encore, dans ce projet de loi, avec de multiples tables, de multiples niveaux
qui vont faire en sorte qu'il y aura une certaine provocation. Quand les gens
circulent dans un paquet de niveaux et négocient 24 heures par jour,
l'insatisfaction augmente et c'est à ce moment que les conflits risquent
d'éclater. J'aimerais connaître la position du ministre
là-dessus.
Nous allons faire en sorte qu'autant que possible, même si nous
sommes en désaccord avec l'orientation générale du projet
de loi, on réduise la complexité de façon à
éliminer les irritants, pour prendre un terme à la mode du
côté ministériel. Donc, on se donne de meilleures chances
de négociation, les plus sereines possible, les plus civilisées
possible et les plus productives pour le bien commun.
Également, au niveau de la décentralisation, nous pensons
que ce projet de loi passe complètement à côté de la
question. Je pars de l'hypothèse qu'une décentralisation est
possible alors que l'appareil public est très centralisé,
très hiérarchisé et qu'il y a de multiples droits de
gérance à de multiples niveaux qui vont s'exercer quand
même. On ne risque pas de changer grand-chose à la
réalité tant qu'il n'y a pas une réforme de la fonction
publique à côté. Cette réforme n'a pas
été entreprise, même s'il y a eu une commission de cette
Assemblée, un rapport, notamment, de mon collègue de
Sainte-Marie, qui présidait, et de multiples efforts pour modifier le
fonctionnement de l'appareil public. Que voulez-vous, quand on vient coller une
affaire comme cela là-dessus, de s'imaginer qu'il va y avoir de la
décentralisation, même si c'est souhaitable, c'est une
illusion.
Enfin, quant à l'encadrement des négociations et au
respect des services essentiels, cela devient presque une loi
déresponsabilisante par son technocratisme. On fixe des pourcentages par
institution et on dit qu'il faudra tel pourcentage de salariés par type
d'institution, comme si toutes les institutions étaient semblables et
comme si l'important ce n'était pas que 100 % des services essentiels,
quel qu'en soit le moyen - il faut trouver le bon moyen -soient
respectés. L'important, ce n'est pas le nombre de salariés en
poste, c'est la couverture complète et totale des services essentiels,
si on pense au bien commun. J'ai trouvé que le gouvernement, qui est
très pressé d'adopter ce projet de loi avant la fin de la
session, a mis beaucoup de temps et rejette du revers de la main ce code
d'éthique qui a été élaboré par les
centrales syndicales, qui nous le disent dans leur mémoire. Ce sont 19
organisations syndicales qui représentent 366 000 syndiqués des
secteurs public et parapublic, qui ont fait de multiples réunions
à tous les niveaux, qui ont vendu cela aux salariés - c'est long
avant d'en arriver à un consensus - et qui nous présentent un
document aussi étoffé. On le rejette en disant que ce n'est pas
suffisant, qu'il n'y a pas suffisamment de garanties, sans nous dire en quoi ce
n'est pas suffisant et en quoi il n'y a pas de suffisamment de garanties. (16 h
45)
Voilà pourtant une approche non technocratique, adaptée
aux diverses institutions et responsabilisante pour ces professionnels que sont
les travailleurs et les travailleuses de la santé, qui vaut infiniment
plus qu'une espèce de matraque permanente comme celle qu'on a mise au
niveau du Conseil des services essentiels, qui aura des pouvoirs analogues
à ceux de la Cour supérieure, qui pourra dresser des ordonnances
et appliquer des sanctions, à qui on demande d'être en même
temps un médiateur et un tribunal administratif, de façon
à éviter que le gouvernement et l'Assemblée nationale
puissent prendre leurs reponsabilités.
Le Président (M. Lachance): En terminant, M. le
député.
M. Paquette: En terminant, M. le Président, nous
souhaitons faire une étude sérieuse de ce projet de loi. Nous
pensons que c'est une illusion que de changer le cadre en le resserrant
à ce point sans miser
sur la responsabilité et que c'est une décision qui a
été largement précipitée, qui va être
contreproductive et nous allons essayer de la rendre moins
contreproductive.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre.
M. Michel Clair
M. Clair: M. le Président, j'avais indiqué
dès le départ que je n'avais pas de déclaration
préliminaire à faire. Je serai très bref en
répondant aux quelques questions qui m'ont été
posées puisque, à chaque article, nous aurons l'occasion, je
pense, de reprendre les principaux points qui ont été
soulevés. Je dirai simplement, dans un premier temps, que je suis
heureux que les députés, tant ceux de l'Opposition que les
députés indépendants et mes collègues
ministériels, j'en suis sûr, veulent aborder l'étude de ce
projet de loi en le bonifiant. On verra, au fur et à mesure des
amendements qui nous seront proposés, j'imagine. Les deux
députés qui ont pris la parole juste avant moi ont indiqué
de quelle façon ils pourraient bonifier ce projet de loi; on regardera
ces points un par un.
Je dirai ceci, en réponse aux trois questions qui m'ont
été posées par le député de Portneuf. Que
s'est-il passé en novembre 1984? M. le Président, le
député a sûrement lu les journaux à cette
époque. Ceux-ci, si ma mémoire est bonne, ont rapporté
assez fidèlement ce qui s'est passé. J'ai proposé -le
député de Rosemont s'en souvient sans doute, c'est une initiative
du président du Conseil du trésor au Conseil de ministres -la
signature d'un accord-cadre portant sur un certain nombre de principes pour
tenter de convenir d'une réforme du régime de négociation
plutôt que de la légiférer. Les syndicats des secteurs
public et parapublic, principalement certaines centrales, ont posé,
comme préalable, une réouverture des négociations quant au
contenu des conventions collectives - accords Désilets ou
décrets, peu importe comment on les appellera. Quant à moi, par
honnêteté, j'ai refusé - cela a été ma
recommandation au Conseil des ministres, qui a été
acceptée -de rouvrir des négociations sur le contenu, avant des
modifications au régime de négociation puisqu'il m'apparaissait
qu'on ne peut pas en même temps ouvrir des négociations et
instaurer, comme mécanisme permanent, que, en cours de
déroulement des négociations, on peut changer les règles
du jeu. Je trouvais que ce n'était pas très honnête.
Deuxièmement, ce qu'il me semblait également
évident à ce moment-là aussi, c'était que, compte
tenu de l'évolution de la situation économique,
budgétaire, financière et de la rémunération dans
les secteurs public et parapublic, je ne pensais pas que nous avions les moyens
financiers de bonifier le contenu salarial des négociations. À ce
moment-là, les documents officiels de consultation - qui étaient
publics, si ma mémoire est fidèle - tant par la CSN que par la
CEQ auprès de ses membres, pour dégager des mandats sur des
contenus, nous laissaient voir une demande qui équivalait à
environ 600 000 000 $ ou 700 000 000 $ par année. Sur le plan personnel,
comme comportement, si j'invite quelqu'un à ma table, c'est
généralement parce que j'ai autre chose qu'un apéritif
à lui offrir. Je considérais qu'inviter les centrales syndicales
à rouvrir les négociations sur le contenu alors que tout nous
indiquait qu'il n'y avait pas de possibilité financière, non plus
que d'équité sociale, et réviser à la hausse les
salaires dans les secteurs public et parapublic, cela aurait été
malhonnête, en laissant croire qu'il était possible de bonifier
substantiellement le contenu des conventions collectives actuelles, alors que
dans les faits, quelques mois après, on aurait dû prendre la
position qu'il n'y avait pas de bonification. J'ai considéré que
c'était mon devoir de faire cette recommandation. C'est sur ce point que
les discussions ont achoppé. Les centrales syndicales tenaient à
ce qu'il y ait, en parallèle, réouverture du contenu des
conventions collectives et discussion quant a des modifications
éventuelles du régime de négociation. J'ai toujours
indiqué - cela est vrai - que, quant aux échanges
préliminaires, il y avait beaucoup de points de convergence entre la
position des syndicats et celle du gouvernement sur les sujets qui devaient
être traités dans une réforme du régime de
négociation. Mais, malheureusement, il y a eu ce refus, une nouvelle
tentative de s'entendre quant à des discussions à mener sur la
réforme, puis un nouvel échec, ce qui a amené le
gouvernement qui, tout en préparant cet accord-cadre éventuel
avait fait des travaux en ce qui concerne ses propositions, à
décider de les mettre sur la table de l'Assemblée nationale dans
la forme d'un avant-projet de loi, en décembre.
La deuxième question a été posée par le
député de Portneuf en ce qui concerne ma perception de la
situation actuelle dans les secteurs public et parapublic. S'il fait appel
à mes états d'âme, je vous dirai que, si je veux en parler
une bonne fois, on pourra toujours s'installer et en causer avec n'importe qui
d'autre, mais ce n'est sans doute pas le sens de sa question. Je dirai que,
s'il y a frustration, actuellement, chez un grand nombre de salariés
dans les secteurs public et parapublic, cela résulte du fait que nous
avons un mauvais régime de négociation, qui a engendré
frustration et démotivation, parce que c'est un régime de
négociation théorique qui, on peut le constater, n'a pas
donné des résultats satisfaisants ni pour le gouvernement, ni
pour
les parlementaires, ni pour les structures syndicales, ni, non plus,
pour les employés des secteurs public et parapublic.
J'ai eu l'occasion de le dire et je le répète, le plus
grand défaut et le constat général qu'on peut faire
à l'égard de notre régime de négociation, sous je
ne sais plus combien de gouvernements et dans combien de lois spéciales
que l'Assemblée nationale a adoptées, la plus grande constatation
qu'on puisse faire, dis-je, c'est que ce régime n'a pas de point
d'équilibre en son sein. Le point d'équilibre finit toujours par
se trouver -toujours, entendons-nous - finit trop souvent par se trouver
à l'Assemblée nationale. Ce n'est pas sain pour notre
société que l'on entretienne un régime de
négociation qui conduit à une telle frustration de la part des
employés des secteurs public et parapublic. Il a beau être le plus
beau du monde occidental, le plus libéral au sens noble du terme, notre
régime de négociation, toujours est-il que c'est à peu
près ici qu'il fonctionne le moins bien. C'est ce sur quoi nous avons
travaillé. Nous avons tenté de modifier le régime de
négociation pour faire en sorte que les problèmes se
règlent à l'intérieur du régime de
négociation et non pas dans des lois spéciales
répétitives qui viennent modifier les règles du jeu
à la fin du processus de négociation.
Je prends l'exemple du droit de grève dans le domaine de la
santé. Le député de Rosemont, je partage son point de vue
- ce n'est pas un point de vue - sa constatation plutôt à savoir
que de plus en plus, en ce qui concerne le droit de grève dans le
domaine de la santé, on a vu que la Législature du Québec
est intervenue avant même que puisse s'exercer le droit de grève.
On voit bien que c'est un régime théorique et qu'il faut se
pencher sur ce problème et aller au fond des choses et non pas, je
dirais, en fanfaronnade facile comme le député de Portneuf le
propose. Je partage le point de vue du député de Rosemont
là-dessus. Dire que c'est courageux, actuellement, de proposer
l'abolition pure et simple du droit de grève dans le domaine de la
santé avec un "peut-être" pour substitut, je vais vous dire que je
ne trouve pas cela très courageux. Je trouve que c'est plutôt
démagogique. Démagogique, cela veut dire des choses, si ma
mémoire est fidèle - le député de Deux-Montagnes
est bien meilleur que moi en français - que le peuple aime s'entendre
dire pour le strict objectif de le flatter et non pas de tenter d'apporter des
solutions aux problèmes. L'approche que nous avons a été
plus pratique que simplement une approche de fanfaronnade.
Alors, ma perception, c'est celle-là, M. le Président.
C'est qu'une large partie - je ne dis pas qu'il n'y a que cela - de la
frustration qu'entretient un trop grand nombre d'employés dans les
secteurs public et parapublic provient du fait que nous avons un mauvais
régime de négociation qui est théorique, qui a conduit
à l'illusion, à la frustration et qui doit être
modifié. C'est une des raisons, à mon avis, des problèmes
qu'on peut connaître dans la fonction publique et dans les secteurs
public et parapublic.
Je tiens à dire par ailleurs que je n'endosse aucunement les
propos souvent très sombres que tiennent les députés
libéraux à l'égard du fonctionnement des hôpitaux,
des commissions scolaires, de la fonction publique. Je pense que c'est vrai
qu'il y a un certain nombre de difficultés, inutile de le nier. C'est
vrai que c'est compliqué de gérer un réseau public et
parapublic de 360 000 employés environ; c'est vrai que cela
entraîne des complications et que c'est complexe. Cependant, je pense que
de façon générale le Québec peut être fier de
la façon dont fonctionnent ses services publics. Qu'il s'agisse des
hôpitaux, des services sociaux, des commissions scolaires, des
collèges, de la fonction publique, il y a des gens compétents
qui, dans un contexte budgétaire serré, offrent d'excellents
services à notre population.
Troisième point en ce qui concerne l'entente possible avec la
CEQ. Encore là, il n'y a pas de nouveau. Tout ce que je peux
répéter au député de Portneuf, c'est que ce qui
séparait le gouvernement de la CEQ c'est essentiellement deux points.
D'une part, l'injection permanente de 200 postes d'enseignants de plus dans le
réseau scolaire pour solutionner le problème dit du
septième groupe, alors que nous savions tous qu'au niveau du
comité mixte de la CEQ et du ministère de l'Éducation une
série de moyens ont été conçus et
développés pour éliminer le problème du
septième groupe sans qu'il soit nécessaire d'injecter de nouveaux
enseignants. D'une part il y avait cela et, d'autre part, il y avait le fait
que la CEQ exigeait d'avoir le droit de grève au niveau local sur un
certain nombre de matières, ce qui n'a pas été
agréé par le Conseil des ministres.
Quatrième point en réponse au député de
Rosemont. En ce qui concerne la complexité, je pense que c'est une
donnée de fait. C'est un fait que cela sera toujours complexe et qu'on
doit essayer effectivement de simplifier les rapports entre le gouvernement et
les négociateurs syndicaux. Je pense que même si on veut
simplifier on ne peut pas être simpliste non plus. Je ne dis pas que
c'est ce que le député de Rosemont proposait, mais il y aura
toujours la nécessité d'avoir de multiples tables, cela
m'apparaît évident.
S'il y a une leçon qu'on peut tirer des vingt dernières
années, c'est qu'il y a eu d'énormes avantages à la
centralisation des négociations en termes d'élimination des
disparités régionales, en termes de traitement plus
équitable, d'un meilleur contrôle budgétaire des masses
d'argent engagées dans les services publics. L'inconvénient,
l'envers de la médaille de la centralisation, c'est que les deux
structures syndicale et gouvernementale se sont de plus en plus
éloignées des préoccupations quotidiennes, des
administrations locales et des syndicats au niveau local. On vise par le projet
de loi, à cet égard, à faire en sorte que les instances
locales puissent se réapproprier, dans un contexte moins conflictuel que
celui qui a prévalu au cours des vingt dernières années,
une partie de la négociation.
On pourra dire: On va trop loin, pas assez loin, mais s'il est une
direction que l'on doit prendre, à mon avis, c'est bien celle-là,
celle d'une certaine décentralisation. Les mots que j'ai toujours
employés volontairement, c'est une décentralisation modeste mais
réelle. C'est ce qu'on a tenté de reproduire dans le projet de
loi.
M. le Président, cela étant dit, je suis prêt
à entamer l'étude de l'article 1 au sujet duquel j'aurais
d'ailleurs un premier amendement si vous l'appelez.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Brome-Missisquoi, vous avez la parole.
(17 heures)
M. Paradis: Avant que l'on entame l'article 1, j'aurais quelques
questions à poser au ministre, qui précéderont mes
remarques préliminaires et peuvent même modifier mes remarques
préliminaires. Vous nous avez annoncé des amendements à la
pièce. Est-ce que ces amendements sont prêts au moment où
l'on se parle? Dans l'éventualité où ils seraient
prêts, est-ce qu'il y aurait une possibilité de nous les
déposer? J'imagine que ces amendements font suite à des
représentations, etc., et cela pourrait, dans le cas de certains
amendements - je fais de la spéculation - peut-être
écourter nos débats ou changer notre attitude face à
certains aspects de la loi. S'il y avait des amendements qui étaient
proposés à l'article 87, je crois, qui fixe les pourcentages dans
les hôpitaux, ou si l'approche est changée, cela change la nature
de mon intervention quant à ce qui touche ce secteur. Dans un autre
domaine, cela pourrait changer la nature des interventions du
député de Portneuf, même des députés
indépendants. Si on est pour discuter ce projet de loi à
visière levée, pas en le négociant, finalement, mais en
mettant sur la table ce que le gouvernement se propose d'y mettre, je pense que
cela pourrait faciliter le déroulement de nos travaux.
M. Clair: Est-ce à dire que, si je répondais
affirmativement à la question du député de
Brome-Missisquoi, il accepterait de me remettre également une copie de
tous les amendements qu'il entend proposer?
M. Paradis: Si vos amendements coïncident avec les
nôtres, je ne vois pas pourquoi on ferait un dépôt double,
ce qui serait inutile. On pourrait vous apporter des amendements de substance
qu'on entend déposer et que les amendements que vous auriez
déposés ne couvriraient pas.
M. Clair: Alors, comme je ne peux pas présumer du contenu
de ses amendements, ni lui des miens, je ne vois pas pourquoi je courrais le
risque de lui remettre ma série d'amendements sans qu'il ait pris au
préalable l'engagement de me remettre les siens.
M. Paradis: Si vous pensez que c'est un risque de nous remettre
vos amendements, si vous pensez que le fait de nous les remettre à
l'avance pourrait soulever davantage de débats à la suite des
commentaires que vous avez quand même entendus de la part des
députés de l'Opposition et des députés
indépendants en Chambre, si c'est là votre conception des
amendements que vous vous apprêtez à déposer, cela peut
être compliqué. Mais si vous êtes allé, dans certains
de ces amendements, dans le sens des interventions que vous avez entendues dans
le domaine de l'éducation, de la part du député
d'Argenteuil, dans le domaine de la santé, de ma part et de la part
d'autres collègues qui sont intervenus dans le contexte global, de la
part du député de Portneuf, je pense que cela pourrait faire
avancer le débat sainement.
M. Clair: Est-ce que je peux dire deux choses au
député? La première chose, c'est que les amendements que
j'ai à apporter sont, en termes de substance, à portée
limitée de sorte que, si le député fait
référence, par exemple, au droit de grève dans le domaine
de la santé, j'annonce immédiatement que, non, il n'y aura pas
d'amendements au projet de loi proposant l'abolition du droit de grève
dans le domaine de la santé. C'est clair. Maintenant, la deuxième
chose que je peux dire au député, c'est que je n'en ai qu'un au
tout début qui est un amendement à portée très
limitée, un amendement de concordance avec la loi 29 qui vient tout
juste d'être adoptée, un amendement technique. Et, après
cela, je n'en ai pas avant l'article 28. On pourrait commencer et je pourrais y
penser. Je verrai s'il y a lieu de... Je vous dis tout de suite qu'à
première vue je n'y vois pas...
M. Paradis: S'il s'agit...
M. Clair:... d'objection majeure, mais
j'aimerais avoir le temps d'y penser.
M. Paradis: Surtout s'il s'agit, M. le ministre, d'amendements de
concordance...
M. Clair: Cela m'aiderait beaucoup à prendre une
décision favorable, si le député de Brome-Missisquoi me
donnait tous ses amendements en même temps.
M. Paradis:... et d'amendements qui changent les virgules, etc.
Je pense que le fait de les avoir à l'avance ne peut pas compromettre
les chances du ministre de faire avancer son projet de loi; au contraire, cela
peut l'aider si c'est dans ce sens. S'il m'annonce qu'il n'y a pas d'amendement
de substance en ce qui concerne, entre autres, la santé,
l'éducation, le contexte global, s'il s'agit d'amendements techniques,
cela va mieux de travailler avec le texte final de loi qui est proposé
par le gouvernement que de travailler avec un texte qui n'est pas final et qui
risque dêtre changé lorsqu'on arrive sur l'article. Là, on
est obligés d'avoir des délais additionnels.
M. Pierre-J. Paradis
Dans mes remarques préliminaires, en prenant bonne note que le
ministre nous donnera une réponse, j'imagine, à la reprise des
travaux ce soir, j'aimerais parler de l'approche gouvernementale en ce qui a
trait aux services de santé comme tels. L'approche que vous avez prise,
comme gouvernement, et je vous le soumets très respectueusement, est une
approche très technocratique qui, dans l'application pratique, dans
chacun des établissements, n'améliorera en rien la situation qui
était vécue auparavant, qui risque, au contraire, de
détériorer, pour les travailleurs et travailleuses et pour les
bénéficiaires, la situation qui régnait auparavant.
À ce titre-là, je suis d'accord avec le député de
Rosemont qui vous dit que l'approche, même si elle n'est pas aussi
légale dans son cadre, même si elle n'a pas la même force
d'application, l'approche syndicale de la coalition qui vous a proposé
du cas par cas, établissement par établissement, même si
elle n'est pas parfaite... Oui, c'est du cas par cas qu'on vous a
proposé. On vous a parlé de maintenir les effectifs en place
comme ils étaient maintenus par le gouvernement dans les périodes
les plus creuses de l'année. Cela, c'est du cas par cas. Cette approche
semble, en tout cas, plus applicable, pas satisfaisante, en ce qui nous
concerne, au Parti libéral du Québec, mais supérieure
à l'approche gouvernementale.
Avant de vous cimenter, si je peux utiliser cette expression, dans votre
approche de dire que, dans le cas de centres hospitaliers spécifiques ou
spécialisés, vous allez permettre à 10 % des travailleurs
de ne pas se présenter au travail dans des conflits, des grèves,
dans le cas des centres hospitaliers, à 20 % des travailleurs, dans le
cas des CLSC, à 40 % des travailleurs et que, dans le cas des CSS, 45 %
des travailleurs seraient autorisés à ne pas se présenter
au travail, je vous recommande sérieusement de parcourir le rapport du
Dr Spitzer qu'il a rendu public, il y a environ deux semaines, pour vous rendre
compte, strictement sur l'île de Montréal, dans le cas de sept
centres hospitaliers, combien le phénomène d'engorgement des
urgences peut être différent d'un hôpital à l'autre,
passant d'un hôpital où il n'y a quasiment pas d'engorgement - on
le souligne rarement, mais il y en a, des hôpitaux qui ne vivent pas
cette situation - jusqu'au cas extrême qui est l'hôpital
Maisonneuve-Rosemont. Si vous appliquez le même pourcentage dans ces deux
établissements, cela va être effrayant, cela va être
épouvantable comme résultat! Vous allez placer les travailleurs,
les travailleuses et les malades dans des situations qui sont totalement
intenables, qui vont être impossibles à mener. Cette approche que
vous prenez, je ne sais pas qui vous l'a conseillée. J'hésite
à croire qu'elle vous a été conseillée par le
ministère des Affaires sociales, bien que les ministres se sont
succédé rapidement et qu'ils n'ont pas eu le temps de prendre
possession complètement de leurs dossiers. Mais j'hésite à
croire que c'est le ministre des Affaires sociales qui vous a proposé
d'agir d'une telle façon. Vous avez encore le temps, comme ministre,
d'aller voir la différence entre chacun des centres hospitaliers dans la
grande région de Montréal. II y a un phénomène au
centre de Montréal. Il y a un autre phénomène qui est
complètement différent et qui se produit à l'est de
Montréal. Vous allez retrouver un autre phénomène
complètement différent au nord de Montréal. Si vous allez
à Laval, vous allez retrouver un autre phénomène. Si vous
sortez de l'île de Montréal ou de la grande région
montréalaise, vos pourcentages appliqués dans la région de
Sherbrooke, si on veut prendre cet exemple, comparativement à la
région de l'Abitibi-Témiscamingue... Dans la région de
Sherbrooke, il y a plus de services de santé que dans la région
de l'Abitibi-Témiscamingue, où on est en pénurie avant
même de commencer à appliquer des pourcentages. Si vous appliquez
les mêmes pourcentages en Abitibi-Témiscamingue que dans la
région de l'Estrie, vous allez vous retrouver dans une situation qui va
être intenable et le même processus va reprendre obligatoirement.
On va se retrouver à l'Assemblée nationale du Québec avec
loi spéciale après loi spéciale dans le cas de
débrayage.
Cette attitude que vous avez prise, cette orientation est insoutenable,
cette orientation est inapplicable, M. le ministre, et je vous le dis en toute
humilité, il faut vraiment ne rien connaître au fonctionnement du
réseau de santé au Québec pour proposer une application
uniforme en pourcentage dans toute la province de Québec, uniforme dans
chacun des établissements, qui sont tellement différents les uns
des autres. Cette approche m'apparaît aberrante et j'aimerais que vous me
confirmiez si c'est à la demande du ministre des Affaires sociales que
vous avez utilisé cette approche en cas de conflit.
L'autre point que j'aimerais toucher concerne la possibilité pour
les travailleurs et travailleuses d'effectuer des pressions souvent
justifiées et souvent nécessaires sur le gouvernement, quel qu'il
soit, qui est en place, afin que les bénéficiaires
reçoivent des soins convenables dans les établissements. La
grève a été, à de rares occasions, un moyen
utilisé par ces travailleurs et ces travailleuses. Les moyens de
pression se raffinent. Nous avons vécu dernièrement un moyen de
pression efficace, important, utilisé par un groupe de travailleurs qui
a décidé, au lieu de sortir et de pénaliser le
bénéficiaire, de dévoiler au grand public des anomalies,
les cas de manque de ressources en termes d'équipement et en termes de
personnel humain qui pénalisaient, en fin de compte, le
bénéficiaire. Pour ce faire, au lieu d'aller piqueter devant
l'établissement, de sortir du lieu de travail, ils ont choisi de
sensibiliser l'ensemble de la population et l'ensemble des parlementaires. Cela
s'est fait par la publication, par les travailleurs et les travailleuses du
secteur, d'un dossier noir sur la santé qui s'intitulait "La
santé est malade au Québec". C'est une nouvelle forme de moyens
de pression auxquels ces gens ont recours et qui fait preuve de leur grande
responsabilité et de leur conscience vis-à-vis des
bénéficiaires qui se retrouvent dans les
établissements.
Face à ces nouveaux moyens de pression, à cette
ingéniosité dont font preuve ces travailleurs et travailleuses du
secteur de la santé, vous avez un gouvernement qui nous parle de
maintenir un droit de grève symbolique. On utilise toutes sortes de
termes, mais il n'y a pas un parlementaire qui va dire: Je suis pour la
grève dans le secteur de la santé.
De l'autre côté, lorsqu'une formation politique dit: Dans
le secteur de la santé, nous sommes pour l'abolition du droit de
grève, on dit: Vous êtes démagogiques. Vous avez
tenté, par sémantique, d'expliquer votre raisonnement
là-dessus. Il y a, dans le secteur de la santé, pas une
majorité, mais une minorité importante des travailleurs et des
travailleuses qui oeuvrent dans ce secteur qui sont prêts et qui sont
prêtes volontairement à renoncer à ce droit de
grève. Ce pourcentage va peut-être vous surprendre, M. le
ministre, à moins que vous ne le connaissiez déjà. Il est
supérieur au tiers des travailleurs et des travailleuses qui oeuvrent
auprès des bénéficiaires; ils sont prêts et vous
offrent, à vous qui êtes le responsable, de renoncer gratuitement
à ce droit de grève. Si vous dites à ces gens, parce
qu'ils font cette offre, finalement, parce qu'ils ont acquis cette conviction,
qu'ils sont démagogues, je trouve que vous allez un peu loin dans vos
remarques.
Je les remercie de leur prise de conscience. Je leur dis que cette
renonciation à un droit qui a été considéré
comme un droit acquis, cela ne doit pas se faire, comme dans toute
négociation, par une offre d'un côté et aucune
"contre-offre" de l'autre. Je déplore que vous n'ayez pas, comme
gouvernement, exploré à fond cette avenue. Vous savez que,
déjà, plus du tiers des travailleurs et des travailleuses en sont
convaincus. Vous savez qu'il y a des moyens qui existent, qu'ils peuvent vous
en proposer et que vous pouvez leur en proposer. Il y a des gens qui parlent
d'arbitrage obligatoire, mais il y a de la réticence dans le milieu
lorsqu'on utilise le mot "arbitrage obligatoire" depuis le fameux conflit
à la Sûreté du Québec. On se dit: Ouais!
l'arbitrage, c'est devenu quoi? Qu'est-ce qu'on en a fait du mot "arbitrage"?
Si c'est le style d'arbitrage qu'on a connu dans le dossier de la
Sûreté du Québec, je comprends le travailleur ou la
travailleuse de dire: Je suis pour le moins méfiant, pour ne pas dire
que je refuse.
Il y a toute la question de la clause remorque. Est-ce que vous avez
déjà, comme ministre responsable, discuté avec les
travailleurs et travailleuses du secteur de la santé d'une
possibilité que ces gens, qui n'auraient plus le droit de grève,
puissent se prévaloir d'une clause remorque avec d'autres travailleurs
des secteurs public et parapublic qui conservent ce droit de grève sur
le plan de la rémunération? Est-ce que vous en avez
discuté avec leurs représentants? Est-ce que vous en avez
discuté avec les dirigeants élus localement? Est-ce que vous avez
approché au moins les 37 %, si c'est encore cela, des travailleurs qui
sont prêts à renoncer à leur droit de grève pour
qu'ils puissent avoir des outils pour en convaincre davantage parce que, si
cela peut se faire par conviction, c'est encore beaucoup mieux que par
législation, M. le ministre? (17 h 15)
À travers tout cela, on se retrouve, aujourd'hui, au
Québec, en 1985, dans un système de santé où il y a
des pénuries importantes sur le plan des ressources humaines qui
oeuvrent dans ce secteur. Est-ce que vous avez parlé à ces gens
d'une possibilité d'augmentation de ces ressources
humaines qui donnent des services aux bénéficiaires en
contrepartie de cette renonciation au droit de grève? Est-ce que vous
avez déposé des offres sérieuses sur la table?
À la lecture de votre projet de loi, je retrouve un gouvernement
qui, après avoir coupé dans le secteur de la santé
à un degré où cela fait mal, dit: En cas de conflit de
travail, je suis prêt à couper davantage, 10 %, 20 %, 40 %, 45 %,
selon le type d'institution, et partout dans le Québec, sans tenir
compte des besoins réels de la population. D'un autre côté
- j'étais ici lorsqu'ils sont venus témoigner - j'ai vu la
coalition venir dire au gouvernement: On est prêt, par notre code
d'éthique, à vous garantir 100 % - non 90 %, non 80 %, non 60 %,
non 55 % - des services dans les périodes les plus creuses, par exemple.
C'est là que cela m'inquiète.
M. Clair: Ce n'est pas vrai et tu le liras, tabarnouchel
M. Paradis: Je m'excuse, M. le Président, mais si le
ministre veut la... Je pense que le ministre n'a pas lu le code...
M. de Bellefeuille: Le ministre veut la parole. Consentement.
M. Paradis:... d'éthique qui a été
présenté. C'est cela qu'il a à faire. Le défi pour
le gouvernement...
M. Clair: Le service direct.
M. Paradis:... pourquoi hésitez-vous à le donner? C'est
parce que vous savez que vous exercez - là, ma comparaison est boiteuse
mais je la fais quand même - dans des périodes importantes de
l'année, du lock-out. Vous fermez des services complets: plus de 1000
lits à Montréal l'été prochain, plus de 700 litsà Québec, l'été qui s'en vient. Lorsque vous
effectuez ce genre de lock-out et que les travailleurs et les travailleuses
vous disent: Si vous pouvez vous permettre, comme gouvernement, de prendre la
décision de priver les citoyens de services de santé auxquels ils
ont droit, vous ne pouvez certainement pas nous reprocher à nous, les
travailleurs et les travailleuses, dans un cas de conflit de travail, de donner
100 % de ce que vous donnez dans les périodes les plus creuses. C'est
là que le bât blesse. C'est là que cela vous fait mal comme
gouvernement parce que, à ce moment-là, vous êtes
obligé d'admettre que vous effectuez du lock-out partiel dans les
services de santé et que vous fermez des établissements et des
institutions, alors que les salles d'urgence sont engorgées, alors que
les listes d'attente, pour opérations électives, dans les centres
hospitaliers, s'allongent de jour en jour.
Si vous autorisez, comme gouvernement, 10 %, 20 %, 40 %, 45 % des
travailleurs et des travailleuses à ne pas se présenter au
travail en cas de conflit de travail, j'aimerais que vous me disiez, comme
ministre responsable de ce projet de loi, celui qui prend la décision,
quels sont ces 10 %, ces 20 %, ces 40 %, ces 45 % qui, en 1985, après
les coupures budgétaires que l'on a connues, dans ce secteur, de 1980
à 1985... Quel est cet emploi, quel est ce service aux
bénéficiaires, dans le domaine de la santé, qui n'est pas
un service essentiel? Si vous réussissez à les identifier et si
vous réussissez à dire que dans tel centre hospitalier... Ne le
faites pas dans toute la province, prenez cas par cas. Si vous le faites dans
toute la province, vous allez encore commettre la même gaffe, la
même erreur dramatique. Si vous réussissez à me dire: Dans
les salles d'urgence, il y a trop de personnel, 10 % de moins, cela va suffire;
dans les salles d'urgence il y a trop de personnel, dans tel hôpital, 20
% de moins, cela va suffire à donner des bons soins; sur les
étages, il y a suffisamment d'infirmiers ou d'infirmières, il y a
suffisamment d'infirmiers ou d'infirmières auxiliaires, 20 % de moins,
cela va suffire, si vous êtes capable de justifier cela ici,
peut-être pourriez-vous nous convaincre de vous suivre dans votre
approche et dans votre calcul. Mais, lorsque vous ne réussissez
même pas à nous convaincre de votre approche, comment pouvez-vous
justifier votre calcul? Si vous n'êtes pas capable de justifier ni votre
approche, ni votre calcul, pourquoi ne prend-on pas le temps ensemble de
regarder une autre approche? Cette approche viserait à assurer en tout
temps à notre population des services de santé qui sont des
services essentiels, des services de santé accessibles et de
qualité, tout en offrant aux travailleurs et aux travailleuses qui
oeuvrent dans ce secteur, non pas une rémunération, non pas un
traitement qui soit moindre que celui des autres travailleurs ou des autres
travailleuses des secteurs public ou parapublic, mais quelque chose d'au moins
équivalent. Peut-être que, si ces gens s'aperçoivent qu'on
est prêt à leur offrir encore un peu plus pour qu'ils nous
assurent des services continus, pour qu'ils renoncent justement à faire
cette grève, pour qu'ils choisissent, comme ils l'ont fait
dernièrement, des moyens de pression qui ne se font pas sur le dos des
bénéficiaires mais qui réussissent quand même
à faire bouger des choses parce que cela fait mal dans l'opinion
publique et au gouvernement, peut-être qu'on aura là une avenue de
solution qui nous permettra, comme législateurs, des deux
côtés de la table ou des trois formations ou partis ou groupes qui
sont représentés ici, d'être fiers du travail que nous
allons accomplir. Mais, si on n'a pas de
justification pour l'approche et pour le calcul, cela va être un
débat qui va être dur, M. le ministre.
On a l'intention de ce côté-ci de la table de vous demander
de justifier, de vous faire prendre conscience et de votre approche, et de
votre calcul. Merci, M. le Président.
M. Clair: M. le Président, puisque le député
m'a posé des questions, s'il est aussi intéressé que cela
au projet de loi, on pourrait, déjà depuis une heure et demie,
avoir commencé l'étude, article par article. En fait, comme ces
gens n'ont pas d'idées ils visent à tuer le temps au début
de la commission, cela leur fera moins de travail. Je ne parle pas des
députés indépendants, je parle du député de
Brome-Missisquoi.
Je dirai que le député de Brome-Missisquoi, sans
m'emporter, mais parce que je le pense vraiment, non seulement il est
démagogue, mais, en plus, par les propos qu'il vient de dire, il nous
démontre qu'il est suffisant. Lui a la vérité
révélée! Il a fait le tour des hôpitaux, il a la
solution simple, facile. En plus de cela, je dirai qu'il est incohérent,
parce qu'en même temps qu'il défend un code d'éthique qui
nous était proposé par les syndicats des secteurs public et
parapublic, lequel nous avons accueilli avec intérêt,
effectivement... On a eu des discussions avec eux, même pour avoir des
dispositions dans le projet qui viennent permettre d'introduire et de
reconnaître l'existence de ce code d'éthique. Finalement,
l'orientation qui s'est dégagée, c'est que, comme un code
d'éthique, c'est sur une base volontaire et non pas sur une base
législative, il a été convenu de ne pas introduire un tel
code d'éthique, de ne pas prévoir de disposition
législative le reconnaissant. Quand il défend en même temps
le code d'éthique qui prévoit, s'il l'a lu, 100 % des services
directs et non pas 100 % des services et 100 % des services directs en fonction
du fonctionnement le plus bas d'un hôpital ou d'un centre d'accueil, soit
pendant la fin de semaine ou encore pendant la période
d'été ou la période des fêtes, quand le
député défend en même temps que cela l'abolition
pure et simple du droit de grève, à mon avis - je le dis
simplement et modestement comme je le pense - il est incohérent. Non
seulement il parle des deux côtés de la bouche, mais il dit des
choses contradictoires et sans fondement.
D'où viennent les planchers en termes de services à
assurer dans les centres d'accueil, les centres hospitaliers de longue
durée et toute une série qui est énumérée?
Non, cela ne vient pas de génération spontanée de la
tête du président du Conseil du trésor, ou de ses
fonctionnaires, non plus que du ministre des Affaires sociales, cela vient des
associations patronales du secteur de la santé. Si le
député de Brome-Missisquoi avait suivi les travaux depuis le
début du processus de révision, les associations patronales sont
toutes venues, sauf une dans le secteur de la santé, se prononcer contre
sa solution magique qui s'appelle l'abolition du droit de grève dans le
domaine de la santé. Toutes les associations patronales se sont
prononcées contre, à l'exception, si ma mémoire est
fidèle, de celle des centres d'accueil privés. Les CLSC, les CSS,
les hôpitaux se sont prononcés contre l'abolition du droit de
grève dans le domaine de la santé, premier point.
M. Paradis: Se sont-ils prononcé contre les 80 %?
M. Clair: Au contraire, M. le Président. D'où
proviennent les 90 %, 80 %, 60 % et 55 %? Cela provient de ceux qui,
quotidiennement, gèrent ces établissements; cela vient des
associations patronales. Je pense que, si le député acceptait
d'aborder l'étude de ce projet de loi autrement que par des visions
strictement partisanes, théoriques, peut-être qu'il pourrait
réviser des positions qu'il prend de façon un peu trop à
la légère. Ce dont on parle ici, c'est effectivement de droits
fondamentaux: le droit à la vie, le droit à la santé et un
autre droit important qui s'appelle le droit de grève. Je pense, M. le
Président, que nous avons comme responsabilité non pas d'essayer
de faire des fanfaronnades...
M. Paradis:... symbolique.
M. Clair:... et des déclarations à
l'emporte-pièce, mais de tenir compte de l'avis de ceux-là
mêmes qui sont impliqués dans le domaine de la santé. Quand
on me dit que les représentants d'environ 860 institutions dans le
domaine de la santé se prononcent contre l'abolition pure et simple du
droit de grève, j'accorde une certaine importance à cela; en tout
cas une importance plus grande qu'à des propos démagogiques comme
ceux que tenait le député de Brome-Missisquoi tantôt. Il me
semble qu'on a à en tenir compte. De la même façon, M. le
Président, j'ai eu eu l'occasion de discuter à de nombreuses
reprises avec les centrales syndicales et des syndicats indépendants du
domaine de la santé. Je vais vous surprendre en vous disant
qu'au-delà des positions de principe un grand nombre de personnes disent
privément qu'elles préfèrent effectivement une approche
comme celle-là plutôt que l'approche de l'abolition pure et simple
du droit de grève ou encore une approche de déresponsabilisation
des parlementaires laissant le droit de grève "être
organisé", être géré par les lois
québécoises de la même façon que lorsqu'il
s'agit d'une entreprise privée.
C'est dans ce corridor-là, qui est beaucoup plus étroit
que celui que le député de Brome-Missisquoi décrivait
tantôt, que nous avons tené d'élaborer une solution qui
remette un équilibre entre deux droits, qui tienne compte de l'avis de
ceux qui gèrent quotidiennement les services de santé, de
même que de ceux qui y travaillent quotidiennement. Je pense que nous
avons exploré toutes les autres avenues. On ne réinventera pas le
monde, M. le Président.
M. Paradis: M. le Président, est-ce que...
M. Clair: Je n'ai pas interrompu le député de
Brome-Missisquoi...
M. Paradis: Non, non. Je voulais vous demander la permission de
vous poser une brève question. Vous m'avez parlé de la partie
patronale, de la partie syndicale. Je ne relèverai pas ce que je crois
être des inexactitudes. Je ne veux pas m'embarquer dans un débat.
J'ai une petite question. Est-ce que vous m'avez parlé de l'avis des
représentants des bénéficiaires?
M. Clair: Oui, nous en avons tenu compte, M. le Président.
Le député de Portneuf se souvient que nous avons même tenu
une sous-commission spéciale qui s'est déplacée à
Montréal pour rencontrer les représentants du Comité
provincial des malades - si ma mémoire est fidèle, c'est son
appellation - et, effectivement, le projet de loi est essentiellement
orienté pour tenir compte de l'opinion des bénéficiaires.
Le député aura beau s'étouffer... Oui, il devrait
s'étouffer...
M. Paradis: Vous n'avez pas reçu une lettre de Claude
Brunet, dernièrement?
M. Clair: Oui, il devrait s'étouffer, M. le
Président.
M. Paradis: Oui.
M. Clair: Parce que ses propos ne sont assis sur strictement
rien!
M. Paradis: Voyons donc! On n'a pas le droit de dire n'importe
quoi!
Le Président (M. Lachance): M. le député,
monsieur le ministre a la parole.
M. Paradis: II a reçu une lettre dernièrement du
Comité provincial des malades, voyons donc!
Le Président (M. Lachance): Vous aurez votre tour pour
parler, plus tard.
M. Paradis: Il ne lit pas son courrier! Il ne lit pas son
courrier!
Le Président (M. Lachance}: M. le député,
à l'ordre, s'il vous plaît!
M. Clair: Ce sont ses propositions qui ne sont assises,
premièrement, sur rien d'autre que des préjugés et,
deuxièmement, sur des visions, sur des objectifs purement electoralistes
qu'il entretient. J'aurais souhaité, encore une fois, que le
député de Brome-Missisquoi puisse avoir une attitude beaucoup
plus constructive que celle qu'il a présentement, plus responsable, du
genre que celle que le député de Portneuf a eue tout au long de
ces travaux. On peut ne pas partager le même point de vue sans être
obligé de déformer les faits, de grossir ses arguments
jusqu'à ce qu'ils n'aient plus aucune allure. Cela n'aide pas
l'avancement du débat, non plus que l'avancement du Québec. (17 h
30)
Quant aux autres avenues, oui, on les a explorées. On a
regardé l'hypothèse d'abolir le droit de grève. Je dirais
même au député de Brome-Missisquoi que des syndicats,
membres de la coalition, nous disent privément qu'effectivement certains
d'entre eux préféreraient l'abolition pure et simple du droit de
grève. Il y en a d'autres qui cependant, à l'autre extrême
- chacun pourra poser son jugement sur ce que nous proposons comme moyen terme
- s'opposent vivement à ce que nous proposons et considèrent
qu'il appartient aux travailleurs eux-mêmes de décider quel est le
niveau des services essentiels qu'on doit maintenir dans une institution. Entre
ces deux positions extrêmes, nous avons tenté, M. le
Président, de dégager une approche plus réaliste, plus
pratique et, après avoir considéré toute une série
d'autres avenues, nous avons décidé de retenir celle qui est
proposée dans le projet de loi.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. Pierre de Bellefeuille
M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Je voudrais,
comme notre collègue de Rosemont, vous assurer, M. le Président,
de mon entière collaboration et dire que j'aborde l'étude
détaillée du projet de loi 37 avec une très grande
ouverture d'esprit. Je ne prétends pas posséder de solutions. Je
connais mal les origines complexes de ce projet de loi qui a subi, dans le sens
strict du mot, plusieurs avatars, plusieurs changements de forme avant de nous
parvenir dans son état actuel. Les circonstances ne m'ont pas permis de
suivre chaque aspect de cette démarche et je ne
serais pas étonné que le ministre, s'il continue comme il
a commencé, ait parfois à redire à ce que j'aurai
moi-même à dire, en me disant que je ne connais pas tel ou tel
aspect du dossier. C'est possible, c'est possible.
Mais il s'agit de questions extrêmement importantes. Je suis
sûr que nous ferions l'unanimité autour de la table sur
l'idée que ce projet de loi est extrêmement important, qu'il
touche des matières sensibles et délicates qui sont vitales pour
beaucoup de monde à beaucoup d'égards. Notre rôle de
législateurs, nous devons le remplir durant les jours ou les semaines
qui viendront de façon très consciencieuse pour améliorer
le projet de loi. Je préfère dire améliorer plutôt
que bonifier parce que bonifier, c'est comme si on faisait de petites retouches
cosmétiques, des changements de virgules ou de choix de mots. Je pense
que notre rôle n'est pas seulement de bonifier la loi dans ce
sens-là, mais beaucoup plus de l'améliorer. Je crains que ce ne
soit pas facile de l'améliorer, à la fois parce qu'elle semble
refléter un vilain esprit antisyndical de la part du gouvernement qui en
est l'auteur et à la fois parce que le ministre semble se cabrer
facilement. Non seulement il se cabre facilement, il a l'injure facile.
Je ne doute pas que notre collègue de Brome-Missisquoi soit
capable de se défendre lui-même, alors je ne vous expliquerai pas,
M. le Président, que le député de Brome-Missisquoi n'est
pas un démagogue, qu'il n'est pas suffisant et qu'il n'est pas
incohérent. D'ailleurs, c'est peut-être vrai à certains
égards, cela peut nous arriver à nous tous. C'est
déjà arrivé, j'en suis sûr, au député
de Drummond de tomber dans des pièges comme cela. Mais, quand
même, je fais appel au ministre de modérer son vocabulaire. Ce
n'est pas gentil de se faire injurier comme cela. Ce n'est pas agréable
de se faire injurier comme cela. On aimerait mieux travailler
sérieusement et discuter du projet de loi plutôt que d'avoir
à faire la démonstration qu'on n'est pas un démagogue,
qu'on n'est pas suffisant et qu'on n'est pas incohérent.
Je voudrais faire appel au ministre aussi à propos de cette
question des... Je vais revenir à la première difficulté,
celle de l'esprit antisyndical qui semble animer le gouvernement. Mais, avant
d'en venir à cela, je voudrais faire appel au ministre de nouveau, parce
qu'il y a un de nos collègues libéraux qui l'a fait - je pense
que c'est le député de Brome-Missisquoi - pour lui demander de
porter à notre connaissance, dès maintenant, les amendements
déjà préparés. Je crois que ce serait la preuve la
plus évidente de la bonne volonté du ministre et de son esprit de
collaboration s'il nous présentait ce qui est déjà
préparé. Je ne vois pas quel danger le guette à nous
mettre ainsi dans ce qui n'est pas vraiment une confidence. Nous aurons
à prendre une décision à savoir si nous appuyerons ou non
ces amendements. Alors, c'est tout simplement fonctionner normalement,
puisqu'il y a des choses qui sont déjà prêtes, que de les
porter à notre connaissance pour que nous ayons aussi un peu la
possibilité de les étudier.
Le ministre n'est pas particulièrement dépourvu de
conseillers. Je vois une belle galerie de beau monde derrière lui. Le
ministre n'est pas dépourvu de conseillers. Ces conseillers lui servent
sûrement à quelque chose. Nous aussi nous aimerions bien prendre
conseil, nous aimerions bien réfléchir, nous aimerions bien nous
faire une idée sur la valeur des amendements que le ministre va nous
préparer. Le ministre craint que cela ralentisse les travaux, parce
qu'il semble parfois que les ministres soient pressés quand on arrive
à l'étude détaillée. Le ministre s'est abstenu de
faire une déclaration initiale. C'est peut-être parce qu'il
voulait que nous abordions plus vite l'article 1 du projet de loi. Je ne suis
pas sûr qu'il ait atteint son but à cet égard. S'il craint
qu'en nous communiquant le texte des amendements qu'il a déjà
tout prêts, cela retarde le processus, je pense qu'il se trompe. Je pense
que cela aurait plutôt pour effet d'accélérer le processus.
On peut fort bien imaginer... Je me méfie. Je dis au ministre, lorsqu'il
dit que ces amendements sont tous à portée limitée, que je
me méfie des amendements à portée limitée. On en a
vu dans d'autres cas, dans d'autres commissions, des amendements dont le
ministre avait dit: Vous savez, cela ne touche pas à la substance de la
loi. On s'est aperçu, dans certains cas, que cela avait, au contraire,
une portée très considérable. J'aime mieux juger par
moi-même et faire des consultations pour savoir si la portée de
ces amendements, effectivement, est limitée.
Le ministre a parlé de risque s'il nous livre le texte des
amendements qui sont déjà prêts. Il me semble qu'il y a un
minimum de confiance qui doit régner autour de la table et que le
risque, s'il y en a un, c'est le ministre qui le prend en ne nous communiquant
pas le texte des amendements. À ce moment, si nous recevons un
amendement que nous ne pouvons pas juger au premier regard, qu'est-ce que nous
allons faire? Nous allons vouloir obtenir des avis et, pour obtenir des avis ou
pour simplement y réfléchir à tête reposée ou
plus longuement, qu'est-ce qu'il faut pour cela? Il faut du temps et, à
ce moment, nous demanderons peut-être des suspensions, nous demanderons
peut-être des suspensions de séance ou des suspensions d'articles.
Si le ministre pense que les suspensions de séance et les suspensions
d'articles accélèrent le processus, je pense qu'il se trompe.
Au
contraire, c'est en fonctionnant en confiance, en nous livrant
dès maintenant le texte des amendements qu'il a tout prêts qu'il
pourrait faire sa part pour accélérer les travaux de la
commission, étant donné que le comportement des
représentants du gouvernement est extrêmement important quant
à savoir quel sera le rythme des travaux de la commission.
Je trouve que le ministre se comporte, à certains égards,
comme s'il représentait l'Opposition plutôt que le gouvernement,
parce qu'il a dit qu'il serait peut-être prêt à nous
communiquer le texte de ses amendements si le député de
Brome-Missisquoi en faisait autant. Je regrette, M. le Président, mais,
dans notre régime, qui a l'initiative? Est-ce que c'est l'Opposition ou
si c'est le gouvernement?
Une voix: L'Opposition.
M. de Bellefeuille: Bien oui, alors on va en faire. Si c'est
l'Opposition, on va en faire, un projet de loi. Cela va en être un autre
et, à ce moment, on va demander une suspension indéfinie de
séance sur le projet de loi 37, qui mourra au feuilleton. Alors, si
c'est le gouvernement, comportez-vous en gouvernement. Nos amendements ne sont
pas marqués de la même responsabilité quant à la
conduite des affaires publiques. Ce n'est pas nous qui avons cette
responsabilité. Ni les représentants du Parti libéral ni
encore moins, par définition, les députés
indépendants n'ont la responsabilité de conduire le char de
l'État. Cette responsabilité, en ce qui concerne les travaux de
cette commission, c'est le député de Drummond qui l'a. C'est
à lui, il me semble, de s'en acquitter. Je lui fais donc appel pour
qu'il nous livre le texte des amendements qu'il a déjà fait
préparer.
Je voudrais revenir à ce que je disais à propos de
l'esprit antisyndical qui semble régner dans ce gouvernement. Le
député de Rosemont a parlé de manque dès 1979.
Notre collègue de Rosemont a fait, comme vous vous en souviendrez, un
retour sur le passé de ces questions complexes. Il a affirmé que,
dès 1979, on pouvait noter un manque de confiance de la part du
gouvernement envers les travailleurs. Je crois que c'est exact. Je me souviens
d'avoir moi-même dénoncé certains aspects de cette attitude
du gouvernement en 1982, lorsque la roue avait fait encore un bout de chemin.
En 1982, bien qu'encore député ministériel, j'avais
dénoncé cette mentalité qui envahissait le gouvernement.
Le projet de loi 37 est l'aboutissement de ce processus selon lequel, dans les
officines gouvernementales, ce qu'on a jadis appelé le
préjugé favorable envers les travailleurs... Quel touchant
souvenir! Cela me rappelle l'ancien député de Maisonneuve, Robert
Burns, qui était crédible quand il parlait de
préjugé favorable envers les travailleurs. Personne n'a jamais pu
douter que Robert Burns, effectivement, était un homme sage et averti
qui avait ce préjugé favorable envers les travailleurs,
préjugé nécessaire quand on est à la conduite des
affaires de l'État parce que les travailleurs, les choses étant
ce qu'elles sont, n'ont pas le gros bout du bâton. Il faut que
l'État introduise dans tous ces rapports de forces des
éléments qui permettent d'établir des
équilibres.
Le ministre a parlé de point d'équilibre qui se retrouve
trop souvent à l'Assemblée nationale. Si cela se retrouve trop
souvent à l'Assemblée nationale, c'est justement parce qu'il n'y
a pas cet équilibre. Donc, il faudrait qu'on rétablisse dans les
officines gouvernementales sinon un préjugé favorable envers les
travailleurs, du moins un esprit véritable de justice et qu'on en
banisse l'esprit antisyndical qui est si facile aujourd'hui à observer.
Cet esprit antisyndical, on l'entend parfois s'exprimer sous la forme d'un
certain nombre de simplifications. Les gens du gouvernement, depuis quelque
temps, ont pris conscience -je leur donne raison, puisque je dis qu'ils ont
pris conscience - de l'importance de la croissance économique au
Québec et du rôle que doivent jouer les entreprises dans cette
croissance. Ils ont eu raison de prendre conscience de cela. Ils n'en avaient
pas suffisamment conscience auparavant. Ils ont eu raison d'en prendre
conscience. En particulier, ils ont pris conscience du rôle de ce qu'on
appelle les PME, les petites et moyennes entreprises. (17 h 45)
Mais ce qu'on peut observer, c'est que, trop souvent, les gens du
gouvernement, cédant à une simplication à outrance,
semblent croire que, pour faire toute la place qu'il convient aux entreprises
dans le développement du Québec, il faut restreindre l'action
syndicale, il faut adopter une attitude antisyndicale. Je considère, M.
le Président, que cette simplification est extrêmement
déplorable parce que le Québec a tout autant besoin - je l'ai
signalé à l'Assemblée et à l'attention
particulière du ministre dans le débat sur le principe du projet
de loi - d'un syndicalisme fort et en croissance qu'il a besoin d'entreprises
fortes et en croissance. L'un ne va pas sans l'autre dans une économie
qui se développe de façon saine. L'esprit antisyndical qui est si
répandu, malheureusement, dans l'actuel gouvernement ne peut que mener
à des situations sociales pénibles et nuire au bon
développement économique du Québec.
Cet esprit antisyndical va faire qu'il ne sera pas facile
d'améliorer le projet de loi parce qu'il en a inspiré la plupart
des aspects essentiels. On observe, par exemple, que le gouvernement a voulu
adhérer à l'idée
d'une certaine décentralisation. Pour ce que j'en sais, cette
idée d'une décentralisation dans le domaine des conventions
collectives dans les secteurs public et parapublic est une idée
intéressante. À première vue, à tout le moins, je
suis tout à fait favorable à cette idée de
décentralisation. Mais le projet de loi propose une forme de
décentralisation qui est condamnée au départ parce qu'elle
crée, à l'échelle locale, des conditions dans lesquelles
les travailleurs et les travailleuses syndiqués ne pourront pas
être en confiance parce que le rapport de forces les défavorisera
fatalement. Comme le rapport de forces défavorisera fatalement la partie
syndicale, elle va éviter, autant que possible, d'avoir à
accepter des décisions prises au palier local. Donc, on va en revenir
à une situation où il va y avoir un engorgement à des
tables centrales et on se retrouvera avec le même régime. On aura
peut-être adopté une loi, mais on n'aura pas vraiment
modifié les aspects les plus déplorables du régime
actuel.
Par ailleurs, M. le Président, je me demande si cet esprit
antisyndical n'a pas aussi poussé le gouvernement à
écarter trop rapidement le projet de code d'éthique, projet
impressionnant, projet développé avec soin, projet
résultant d'un très grand effort de la part des syndicats
représentant les travailleurs et les travailleuses. J'ai l'impression
que ce projet a été écarté du revers de la main par
le gouvernement, que ce projet n'a pas été étudié
convenablement, ni par le gouvernement, ni par le Parlement.
En conséquence, je veux présenter une motion pour que
cette commission, en vertu de l'article 150 des règles de
procédure, confie à une sous-commission la tâche
d'étudier le code d'éthique qui a été
proposé par la partie syndicale. Merci, M. le Président.
M. Laplante: M. le Président, au sujet de la
recevabilité...
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Bourassa.
M. Laplante:... je pense que je n'aurai pas à essayer de
vous convaincre très longtemps que le mandat qu'on a actuellement est
d'étudier le projet de loi article par article. Il ne fait aucunement
partie du mandat de la commission d'étudier autre chose, actuellement,
que les articles du projet de loi. On a siégé en commission, on a
reçu les groupes, on a fait tout ce qu'il y avait à faire
jusqu'à aujourd'hui. C'est pourquoi on a le mandat de venir adopter les
articles en commission, de les amender, de les rejeter, en fait, de faire tout
ce que Ies parlementaires jugeront bon de faire à leur sujet.
M. Paquette: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): Sur la motion?
M. Paquette: Sur la recevabilité... Le Président
(M. Lachance): Oui.
M. Paquette:... parce que le député vient
d'intervenir sur la recevabilité.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député.
M. Paquette: L'article qu'a cité mon collègue est
très clair. IL ne s'agit pas de modifier le mandat de cette commission.
Le mandat de cette commission est bien clair, c'est l'étude article par
article du projet de loi. Cependant, notre règlement permet à une
commission de constituer une sous-commission dont elle désigne les
membres pour étudier des questions qui intéressent son mandat
général. Je vous signale en plus, M. le Président, qu'au
sujet de la création d'une telle sous-commission, dans la proposition de
mon collègue de Deux-Montagnes, il n'y a pas de délai, il n'y a
pas de limite. On pourra parler du contenu de la motion si vous la recevez. Il
s'agit de faire siéger une sous-commission sur une question qui, en
plus, n'a pas été vraiment débattue à cette
Assemblée. Quand les centrales syndicales sont venues présenter
leurs propositions, M. le Président, j'étais là. J'ai
écouté très attentivement. Elles ont fait leur plaidoyer
et, en quelques minutes, le ministre et la majorité ministérielle
ont dit: Cela est insuffisant, ce n'est pas une solution et on met cela de
côté. Il n'y a pas eu d'étude. Il y a eu, en quelque sorte,
certaines manifestations d'intérêt, mais un rejet. On les a
renvoyées à leurs oignons.
Nous pensons, au contraire, qu'il y a là une piste
extrêmement intéressante qu'il serait important d'approfondir. Je
pense qu'encore une fois, sur la recevabilité, cela ne contrevient
aucunement au mandat que l'Assemblée nationale a confié à
cette commission. Cette commission peut continuer l'étude article par
article, mais je pense que cette sous-commission, si elle siégeait
rapidement, pourrait nous éclairer, particulièrement sur les
sections qui suivent. On reviendra sur le contenu. Je pense qu'elle est tout
à fait recevable et qu'on devrait débattre de cette proposition
de mon collègue de Deux-Montagnes.
Le Président (M. Lachance): Sur la recevabilité, M.
le député de Châteauguay.
M. Dussault: M. le Président, il m'apparaît que la
motion du député de Deux-Montagnes relève de l'esprit
d'un
mandat d'initiative. La commission pourrait très bien, par les
bons services du président et du vice-président de la commission,
convoquer une séance de travail pour que nous nous penchions sur
l'idée de nous donner un mandat d'initiative de ce type, ce qui, en
fait, est l'objet de la motion du député de Deux-Montagnes. Ce
n'est pas ce qui devrait être débattu actuellement à la
commission. Ce que l'on doit faire comme travail, c'est l'étude article
par article du projet de loi 37. Je ne verrais pas d'objection à ce
qu'on se réunisse en séance de travail dans les prochains jours,
où on se poserait cette question, la question qui est posée dans
cette motion, mais pour le moment, M. le Président, ce n'est vraiment
pas... C'est ce que j'appelerais un revirement de mandat par rapport à
ce qui nous a été demandé par l'Assemblée
nationale.
M. de Bellefeuille: M. le Président, sur la
recevabilité, il me semble que le député de
Châteauguay nous induit en erreur, involontairement, sûrement,
parce que l'article 150 n'est pas du tout limité à des mandats
d'initiative. Au contraire, M. le Président, on lit à l'article
150: "Sur motion d'un de ses membres, une commission peut faire exécuter
un mandat qu'elle a reçu ou qu'elle s'est elle-même donné
par une sous-commission composée de certains de ses membres. " Alors,
c'est un mandat qu'elle a reçu. L'ordre de l'Assemblée nationale,
c'est le mandat qu'elle a reçu. C'est parfaitement conforme.
Le Président (M. Lachance): Quand vous faites allusion
à l'article 150 de nos règles de procédure, vous faites
référence à un mandat que la commission, du budget et de
l'administration a reçu du leader et qui se lit comme suit, j'ai ici une
copie des épreuves: "De 15 heures à 18 heures et,
également aujourd'hui, de 20 heures à 24 heures, la commission du
budget et de l'administration entreprendra l'étude
détaillée du projet de loi 37, Loi sur le régime de
négociation des conventions collectives dans les secteurs public et
parapublic. " Or, il m'apparaît que la motion qu'a
présentée le député de Deux-Montagnes confierait
à la sous-commission une mission différente de celle qui lui a
été confiée par l'Assemblée. Par conséquent,
je rejette la motion du député de Deux-Montagnes, puisqu'il y
aurait une orientation différente de celle qui a été
donnée.
M. de Bellefeuille: M. le Président, vous voulez
sûrement dire que vous la déclarez irrecevable?
Le Président (M. Lachance): Irrecevable. M. de
Bellefeuille: Ah bon!
Le Président (M. Lachance): Vous avez raison.
M. de Bellefeuille: M. le Président, pourriez-vous nous
donner une suspension de 30 secondes, s'il vous plaît?
Le Président (M. Lachance): La suspension...
M. Clair: M. le Président, j'indique simplement que, du
côté ministériel, nous sommes toujours disposés
à entreprendre l'étude de l'article 1 du projet de loi.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Brome-Missisquoi, la question de la recevabilité
de la motion est réglée.
M. Paradis: Oui, c'est réglé, cela va, ce n'est pas
à ce sujet. Il me restait une minute et demie.
Le Président (M. Lachance): II vous restait effectivement
90 secondes sur ce qu'on peut appeler des déclarations
préliminaires.
M. Paradis: M. le Président, j'aimerais les faire
très rapidement en une minute et demie. Tantôt, le ministre s'est
emporté - il avait peut-être oublié les interventions des
intervenants - lorsqu'il a dit qu'il s'appuyait sur la partie patronale pour
fixer ses pourcentages. J'aimerais simplement que, durant son heure de souper,
il vérifie ce qu'a dit l'Association des hôpitaux du
Québec.
Vous allez le retrouver au ruban R-930-B-CBA du 15 mai 1985. Je vous le
cite très brièvement. C'est le directeur général,
M. Nadeau, qui parle: "À notre point de vue, il devrait y avoir 100 %
des effectifs. C'est ce que nous avions dit. Si jamais vous décidez que
ce n'est pas 100 % des effectifs et que vous allez dans le sens de ce que vous
présentez là, je n'ai pas besoin de vous justifier cela, je pense
que, lors de l'avant-projet de loi, on vous a dit pourquoi la grève ne
devrait pas s'exercer dans les services de santé. " Avant de faire les
commentaires qu'il a faits, le ministre aurait peut-être dû
écouter attentivement. Cela concerne l'AHQ.
En ce qui concerne les bénéficiaires, vous avez
reçu une lettre, publiée dans la Presse le 23 mai 1985, de Claude
Brunet, du Comité provincial des malades. Cette lettre s'adressait
à vous personnellement, M. le ministre, et elle traitait de deux sujets:
le retrait total du droit de grève dans le secteur de la santé et
l'inclusion dans la loi de mesures dissuasives qui s'appliqueraient
automatiquement en cas de violation de la loi.
Voilà la position des bénéficiaires. Je vous ai
donné la position d'un représentant très important sur le
plan patronal et, en ce
qui concerne les syndicats, vous avez eu la présentation d'un
code d'éthique qui, lui aussi, parlait de 100 % des services directs
-vous aviez raison d'ajouter le mot "directs" -des services donnés par
le gouvernement dans les périodes peut-être les plus creuses de
l'année, mais c'était quand même là une avenue
intéressante. Ce que j'ai voulu vous dire comme message, c'est que,
lorsque tout le monde parle de 100 %, il y a peut-être là une
avenue intéressante à explorer. Ce n'est pas venu de la
tête ou de l'imagination du député de Brome-Missisquoi.
C'est venu de témoignages de la partie patronale, de témoignages
de la partie syndicale et de témoignages des
bénéficiaires.
Lorsqu'on rejette ces trois témoignages du revers de la main et
qu'on adresse au député qui les rapporte en commission
parlementaire toutes sortes de quolibets, cela peut avoir un effet de boomerang
et je ne souhaite pas engager le débat sur ce ton. Je vous demanderais
simplement de ne pas prendre ce que vous avez pensé dans votre cabinet,
dans votre bureau ou...
Le Président (M. Lachance): En terminant, M. le
député.
M. Paradis:... ce que vous ont livré vos technocrates pour
des choses qui vous ont été dites soit par la partie syndicale,
soit par la partie patronale, soit par les bénéficiaires, parce
que cela a été écrit, c'est transcrit et cela peut se
retourner contre vous.
M. Clair: M. le Président, je voudrais simplement indiquer
au député de Brome-Missisquoi, s'il veut aller au fond de cette
question, qu'il aurait avantage à lire les multiples mémoires,
entre autres de l'AHQ, et non pas se contenter - en parlant de
technocrates...
M. Paradis: Bon, cela va, c'est bien...
M. Clair:... d'une citation d'un extrait très bref d'une
déclaration de M. Nadeau. Il aurait avantage à lire tous les
mémoires soumis par l'AHQ sur cette question...
M. Paradis: Je les ai tous lus...
M. Clair:... de même que l'ensemble du débat qui a
eu lieu en commission parlementaire.
M. Paradis:... et j'étais là.
Le Président (M. Lachance): La partie qu'on appelle
habituellement déclarations préliminaires est maintenant
terminée. Lorsque nous...
M. Ryan: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): Je pense que la
présidence a quand même été assez large et
très tolérante, puisque beaucoup de députés sont
intervenus au départ. Je pense, M. le député d'Argenteuil,
qu'il vous sera possible, quand on aura appelé l'article 1, de passer
votre message.
La commission du budget et de l'administration suspend ses travaux
jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 heures) (Reprise à 20
h 16)
Le Président (M. Lachance): À l'ordre! La
commission du budget et de l'administration poursuit ses travaux avec le mandat
de procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 37, Loi sur le régime de négociation des conventions
collectives dans les secteurs public et parapublic.
M. le député de Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, j'ai dû m'absenter
quelques minutes avant 18 heures et, malheureusement, je suis arrivé
quelques minutes en retard; je m'en excuse auprès de mes
collègues. Je me suis rendu faire une émission d'affaires
publiques, ici à Québec. J'ai, d'ailleurs, une invitation
à formuler au ministre délégué à
l'Administration, M. le député de Drummond, afin de participer
à la même émission où on a eu l'occasion de traiter
du projet de loi 37 et de son application. Alors, vous recevrez, M. le
ministre, une invitation d'ici à quelques jours de M. Bédard, qui
est l'animateur de cette émission dont le titre est
"Réaction".
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Portneuf, lors de la suspension des travaux, j'avais indiqué aux
députés de chaque côté, y compris aux
députés indépendants, que la période
consacrée aux déclarations préliminaires avait
été suffisamment longue pour nous permettre de passer à
l'article 1.
Questions préliminaires
M. Pagé: M. le Président, je suis pleinement
d'accord avec vous que le temps des déclarations préliminaires
peut être épuisé, mais je suis persuadé que le temps
des questions préliminaires n'est pas épuisé. C'est,
d'ailleurs, pourquoi j'ai l'intention, comme on le fait d'habitude, une fois
que les déclarations sont formulées, de poser des questions
d'ordre général ou des questions précises en regard de
dispositions du projet de loi, avant même qu'on y touche article par
article. Un des premiers volets que je voulais voir avec le ministre,
c'était tout l'aspect des services de santé maintenus dans le cas
d'un conflit.
M. Clair: Je m'excuse d'interrompre le député.
C'est tout simplement un renseignement. Je fais distribuer présentement
une bonne petite partie des amendements que nous avons l'intention de proposer.
J'indique, cependant, qu'il est possible que certains amendements soient encore
légèrement modifiés et que quelques autres soient
ajoutés, mais, en gros, c'est une bonne partie des amendements que l'on
proposera.
Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre.
M. Pagé: M. le Président, j'avais l'intention de
vous proposer qu'on puisse passer quelques minutes encore à formuler des
questions au ministre en regard d'aspects majeurs du projet de loi de
façon que, lorsqu'on arrivera à l'étude de l'article
auquel on se référera, cela puisse aller plus vite.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre, est-ce que
cela vous convient?
M. Clair: II n'y a pas de problème.
Le Président (M. Lachance): Allons-y, M. le
député.
Maintien des services essentiels
M. Pagé: Merci, M. le Président. Dans le domaine
des affaires sociales, le gouvernement propose, par le projet de loi 37, que
les travailleurs puissent encore recourir à des moyens de pression,
qu'on dit symboliques au gouvernement; à plusieurs reprises, a cette
commission, les représentants du gouvernement, les députés
de la majorité ont claironné, si je peux utiliser le terme,
qu'à l'avenir les grèves dans le secteur de la santé ne
seraient plus tolérées et que la grève devait être
symbolique seulement.
Mon collègue de Brome-Missisquoi a eu l'occasion d'aborder, cet
après-midi, cet aspect du droit de recourir à la grève,
des dispositions du projet de loi prévoyant qu'un certain nombre de
travailleurs seraient maintenus selon le type d'établissement.
J'aimerais entendre le ministre parce que ni en deuxième lecture, ni en
commission parlementaire, jusqu'à maintenant, on n'a eu l'occasion de le
faire.
Dans le vécu concret par établissement, de façon
à éviter plusieurs questions lorsqu'on arrivera à ces
articles, est-ce que le ministre pourrait profiter du début des travaux
pour nous indiquer, bien concrètement, comment tout cela va fonctionner?
Vous savez, c'est facile d'établir un quantum à 90 % dans le cas
d'un hôpital pour malades chroniques et à 55 % dans le cas des
centres de services sociaux. Des questions ont été posées
par nos intervenants, ceux qui ont comparu ici, qui se demandaient: Est-ce que
l'établissement sera traité en entier, en fonction de son
orientation, des services qu'il donne? Est-ce que ce sont certains services qui
pourront être régis de façon différente à
l'intérieur de l'établissement ou si c'est l'ensemble de
l'institution qui sera considéré comme faisant partie de telle
catégorie? J'aimerais que le ministre nous informe sur la façon
dont tout cela sera défini, dont tout cela sera établi.
Je comprends que le Conseil des services essentiels aura un rôle
important à jouer. Il aura à jouer le râle de marteau
automatique pour intervenir, apprécier, enquêter, juger,
décider et pénaliser. Est-ce que ce sera seulement le conseil qui
sera habilité à vérifier et à surveiller
l'application de telles dispositions? Pour nous, autant que pour les
représentants syndicaux, ces dispositions seront inapplicables dans
certains types d'établissements, dans certains départements.
Finalement, on est porté à croire qu'il faudra probablement
autant de policiers que de travailleurs pour surveiller l'application de ces
dispositions. En fin de compte, la grève ne sera pas que symbolique;
elle sera - c'est un autre aspect de la question - assurément
coûteuse aux prestataires et aux bénéficiaires de cesservices.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre.
M. Pagé: Comment cela va-t-il fonctionner?
M. Clair: Assez simplement, de la façon suivante, M. le
Président: d'abord, en ce qui concerne les niveaux de services à
maintenir, c'est un niveau de services par quart de travail des salariés
habituellement affectés à telle ou telle activité; d'autre
part, vu qu'on ne peut pas parler de 100 % des effectifs - en effet, qu'est-ce
que cela veut dire, 100 % des effectifs en tout temps, quand on sait que cela
peut varier d'un établissement à l'autre? - le fonctionnement
normal des unités d'urgence et des unités de soins intensifs
devra être assuré en tout temps.
La façon dont cela va fonctionner, c'est, en gros, de la
manière suivante: il va y avoir négociation d'une entente. S'il
n'y a pas entente au niveau local, il y a dépôt d'une liste
syndicale au Conseil des services essentiels et celui-ci doit l'évaluer
à la lumière des planchers qui sont prévus. L'article 87,
qui modifie l'article 111. 10 du Code du travail, dit bien: "Lors d'une
grève dans un établissement, le pourcentage de salariés
à maintenir par quart de travail parmi les salariés qui seraient
habituellement
en fonction lors de cette période est d'au moins... " et
là, il y a une variété de pourcentages de services. Qu'il
y ait liste syndicale ou qu'il n'y en ait pas, le Conseil des services
essentiels doit tenir compte de ces critères comme minimums et il peut,
tenant compte des circonstances, aller au-delà de ces minimums, s'il
juge que la situation le justifie. Les mots exacts, je ne pourrais pas les
citer avant d'arriver à l'article, il faudrait que je retrouve l'article
qui prévoit cela, mais le Conseil des services essentiels aurait le
pouvoir d'aller au-delà, compte tenu d'une situation d'urgence
donnée ou d'éléments de sécurité ou de
protection de la santé qui ne seraient pas pris en compte par les
planchers tels qu'indiqués. C'est comme cela que cela va fonctionner, en
résumé.
M. Pagé: Vous indiquez que, dans les hôpitaux qui
dispensent des services de centres d'accueil ou des soins de longue
durée, ce sera 90 % des travailleurs qui devront être disponibles
pour travailler. Comment sera considéré le centre hospitalier de
Québec ou de Montréal, qui a très probablement 20 % de ses
lits affectés à des malades de longue durée, le reste des
bénéficiaires étant là pour recevoir des soins dits
aigus? Dans certains cas, peut-être 15 % ou 20 % de3
bénéficiaires reçoivent des soins
spécialisés. Est-ce qu'ils seront soumis à 111. 10, 1°
ou à 111. 10, 2°?
M. Clair: L'immense majorité de ce qu'on appelle
communément les hôpitaux, que ce soit de courte ou de longue
durée, se retrouvent dans les 90 % puisqu'on dit bien, à
l'article 111. 10, 1° que c'est "90 % dans un établissement qui
dispense les services d'un centre d'accueil - cela couvre tous les cas
où un établissement dispense les services d'un centre d'accueil -
ou des soins de longue durée - ce qu'on appelle souvent les CHSP, les
centres hospitaliers de longue durée - un établissement
spécialisé en psychiatrie, en neurologie ou en cardiologie et un
centre hospitalier doté d'un département clinique de psychiatrie
ou d'un département de santé communautaire. " Les 90 %
s'appliquent non seulement aux départements ou aux secteurs
visés, mais à tout l'établissement.
M. Pagé: Alors, le syndicat sera appelé à
déposer sa liste au conseil. Le conseil aura à juger et à
apprécier si la liste répond aux dispositions de la loi. En cours
de conflit, le conseil a le pouvoir d'intervenir. Il faudra combien de gens au
conseil pour faire acte de police et contrôler l'application de ces
dispositions?
M. Clair: Je pense que, par rapport à la loi telle qu'elle
existe actuellement, on vient faciliter la tâche du Conseil des services
essentiels puisqu'avec les normes prévues par la loi cela devient
beaucoup plus facile pour le conseil de juger de l'appréciation de la
liste qui est fournie eu égard aux critères qui sont
prévus dans la loi. Maintenant, vous dire combien de personnes devront
surveiller l'application de la loi! C'est certain que, quelle que soit la
solution retenue, le député de Portneuf préconise, de son
côté, l'abolition pure et simple du droit de grève. Il a
toujours reconnu la possibilité de l'existence de grèves
illégales. À ce moment-là, le problème demeure le
même. Combien cela en prendrait-il pour surveiller l'application de
services essentiels ou le redémarrage de services dans le cas de
grèves illégales? C'est un problème auquel on fait face
dans toutes les hypothèses. Il n'y a pas une hypothèse où
ce problème peut être exclu complètement.
M. Pagé: On peut prendre une demi-heure, si on veut, pour
parler des grèves illégales dans le secteur de la santé et
on pourrait facilement passer plusieurs minutes sur le dossier de la
grève générale illégale et illimitée qui a
duré trop longtemps à Saint-Ferdinand d'Halifax. Mais je ne crois
pas que le ministre souhaite qu'on en traite aujourd'hui, compte tenu du
précédent qui a été créé par le
règlement de ce conflit, compte tenu de la position qu'a adoptée
le gouvernement dans ce conflit, compte tenu, finalement, du traitement qui a
été fait par le gouvernement ou du peu de considération
qu'a accordée le gouvernement à ceux qui ont la charge
d'administrer un tel centre hospitalier.
Cependant, ma question a pour objectif de voir le fonctionnement.
Comment tout cela sera-t-il articulé? C'est beau de dire ici à
l'Assemblée et au public que la grève ne sera que symbolique et
de croire que les représentants patronaux sont d'accord. Les
représentants de l'Association des hôpitaux du Québec
disaient - c'était clairement exprimé dans leurs commentaires il
y a quelques semaines - que, pour eux, il fallait maintenir 100 % des
travailleurs affectés dans le monde de la santé pour que la
grève demeure purement et simplement symbolique. Il est explicable et
normal qu'on ait des réserves, qu'on se questionne, parce qu'on ne croit
pas que cela puisse être applicable.
J'aimerais bien savoir ce que le législateur entend dire par le
texte qu'il nous propose, quand il dit: "Lors d'une grève dans un
établissement, le pourcentage de salariés à maintenir par
quart de travail parmi les salariés qui seraient habituellement en
fonction... " Est-ce que cela implique une ventilation par département,
dans votre esprit? On sait que, souvent, ceux qui ont à appliquer les
lois doivent rechercher
l'intention du législateur. Le législateur n'étant
pas supposé parler pour ne rien dire, qu'est-ce que cela veut dire?
Est-ce que, dans un établissement où on a quelques centaines, 200
employés, par exemple, la ventilation des 180 employés qui
devront être maintenus en service se fera par département? Comment
cela va-t-il se faire? Comment cela sera-t-il articulé? (20 h 30)
M. Clair: C'est ce que j'ai indiqué, M. le
Président. La norme vaut pour l'ensemble de l'établissement.
Maintenant, je peux indiquer que le Conseil des services essentiels fonctionne
déjà. Il a eu à se pencher sur je ne sais plus trop
combien de centaines de cas dans le domaine du transport, dans le domaine des
services publics autres que ceux qui sont visés au niveau des services
de santé. Il y a actuellement huit membres, quatre enquêteurs.
Dans tous les cas, les décisions du Conseil des services essentiels,
sauf erreur, ont été respectées et, si ma mémoire
est fidèle, le ministre du Travail citait des statistiques l'autre jour:
il n'a pas fallu une armée. Maintenant, on prévoit
également dans le projet de loi la possibilité de nommer des
personnes ad hoc et cela ne nécessitera donc pas l'ajout de centaines
d'effectifs au niveau du Conseil des services essentiels. C'est sûr que,
si on n'a pas confiance dans le mécanisme, on peut penser que cela va
prendre une armée pour le faire respecter.
De notre côté, avec l'expérience vécue du
Conseil des services essentiels, nous avons pleinement confiance que ces
mécanismes donneront des résultats satisfaisants pour les deux
parties et qu'en conséquence on n'aura pas besoin d'embaucher 800
personnes pour surveiller chacun des 800 établissements du réseau
des affaires sociales. Je rappelle qu'il y a la soupape, la possibilité
qu'il y ait une personne ad hoc qui soit nommée.
M. Pagé: Comment le gouvernement réagit-il face
à ce qui nous a été dit? Je pense que tout le monde
convient que, dans le domaine des affaires sociales, les conflits n'ont jamais
duré longtemps parce qu'aussitôt qu'une grève se pointait,
tous les efforts étaient déployés pour tenter de la
régler dans les meilleurs délais. Aussi, le législateur a
eu à intervenir régulièrement. C'est ce qui me faisait
dire, en commission, que le droit de grève dans le secteur de la
santé était pratiquement devenu illusoire, même artificiel,
parce qu'aussitôt qu'il était utilisé, les gouvernements,
quels qu'ils soient, s'empressaient de convier le Parlement à l'exercice
législatif d'une loi spéciale.
Ce que nous soutenons et la conclusion à laquelle on en vient,
c'est de l'abolir plutôt que de maintenir un droit artificiel comme
celui-là, un droit qui, dès le moment où il est
exercé, fait en sorte que le degré d'énervement
très facilement palpable est ressenti chez les élus - et c'est
explicable comme suite des pressions qui sont faites -et que le gouvernement
intervient par voie législative.
Vous remplacez le droit de grève par cette mécanique
nouvelle, mais il y a un élément qui est présent dans le
débat et qui n'apparaît pas ici dans le projet de loi. On sait
que, dans le passé, ce qui faisait souventefois plus mal - c'est une
question d'appréciation - que la grève elle-même,
c'était la grève appréhendée. Là, il y a un
chiffre noir que personne ne peut quantifier, mais quel en a été
l'effet pour notre société, pour des dizaines, des centaines ou
des milliers de bénéficiaires qui auraient été
normalement en droit de recevoir une prestation de santé, qui n'ont pas
pu la recevoir parce que la grève était
appréhendée, ce qui entraînait auprès des
administrateurs d'hôpitaux et d'établissements une modification
des services? On a vu cela souvent, des gens qui devaient recevoir une
prestation médicale et qui ne pouvaient être admis. Leur admission
à l'établissement était retardée parce qu'il y
avait un conflit qui s'en venait. Combien de fois a-t-on vu, et cela
était régulier, quand l'affrontement était sur le point
d'aboutir en conflit, que des gens sortaient de l'établissement
hospitalier, recevaient leur congé beaucoup plus rapidement qu'ils ne
l'auraient normalement reçu? Cela a un effet chez la personne, chez le
citoyen ou la citoyenne qui est en droit de recevoir une qualité et une
quantité de services donnés.
Vous me direz: Ce n'est pas quantifiable. C'est vrai que cela n'est pas
quantifiable. Certains articles de journaux soutenaient que le retard
occasionné par de tels conflits appréhendés avait
même enlevé la vie à des personnes qui devaient subir des
interventions chirurgicales importantes; on pense, entre autres, à la
cardiologie. Je suis d'accord avec vous qu'il y a un chiffre qu'on ne peut pas
quantifier, ce n'est pas palpable. Qu'allez-vous faire comme gouvernement en
cas de conflit appréhendé, ne serait-ce qu'avec des effectifs
réduits à 10 %, dans certains cas, 20 %, 25 %, entre 90 % et 55
%? Quels sont les gestes que le gouvernement entend poser pour pallier cet
écueil que la qualité et la quantité des services soient
réduites, strictement parce que la grève non pas est
déclenchée, mais s'en vient?
M. Clair: Essentiellement, M. le Président, en faisant
obligation par le projet de loi à la direction d'un établissement
de santé de maintenir, malgré une grève
appréhendée, le niveau de services habituel, pour tenter,
justement, de faire obstacle à cette psychose de la grève
appréhendée.
Étant donné le très haut niveau de services
essentiels imposé par l'effet de la loi, nous considérons qu'il
est normal de faire obligation, dans le cas d'une grève
appréhendée, aux directions des établissements de
santé de maintenir le niveau habituel de services.
M. Pagé: Cela veut dire que, dès le moment
où la grève sera déclenchée, le nombre de personnes
hospitalisées ne devrait pas être modifié. Est-ce ce que
vous voulez dire?
M. Clair: Cela veut dire qu'avec des taux de 90 %, notamment,
pour ces établissements nous pensons que les établissements
pourront fonctionner presque à la normale, sinon à la normale,
compte tenu de la possibilité pour l'établissement de recourir
aux cadres et de tenter de gérer avec des effectifs réduits, oui,
mais qui ne viennent pas interrompre la continuité des soins et des
services de santé.
C'est l'objectif et, dans ce sens, on pense qu'on est
légitimé, avec un aussi haut niveau de services essentiels
obligatoires par l'effet de la loi, de faire obligation aux administrations des
hôpitaux de maintenir les services habituels malgré la
grève appréhendée. À 90 % des effectifs - on l'a
dit honnêtement - c'est sûr que la grève ne peut être
que symbolique. Elle demeure très dérangeante puisque personne ne
considère que les hôpitaux sont suréquipés en termes
d'effectifs. En tout cas, personne n'a déclaré cela à ce
jour. C'est sûr que cela crée une pression sur l'employeur, mais
cela ne vient pas interrompre les services.
M. Pagé: Vous avez indiqué qu'il n'y a pas de
surplus de personnel. C'est d'autant plus vrai qu'à la suite des
restrictions budgétaires cela s'est ressenti dans les réseaux de
la santé. L'augmentation de la tâche est devenue très
visible dans plusieurs établissements de santé, dans plusieurs
départements. Ce qu'on analyse tous les deux et tous ensemble ce soir,
c'est beau. C'est toujours facile lorsqu'on est ici. Lorsqu'on est sur le
terrain, cependant, c'est pas mal différent. Qu'on prenne un cas. Par
exemple, dans la région de Québec, il y a un centre pour grands
brûlés, à l'hôpital du Saint-Sacrement. Une dizaine
de personnes sont continuellement à ce département. Le ministre
des Affaires sociales ou le président du Conseil du trésor
devrait se rendre visiter un tel centre. C'est 24 heures par jour de travail
soutenu, constant, continuel et à un niveau où on n'a pas le
temps de prendre de "break" à certaines occasions.
Imaginez-vous l'effet qu'aura - parce qu'il manque déjà de
personnel dans des centres et des services comme ceux-là; les gens
doivent faire plus et même beaucoup plus maintenant, à certains
égards, dans certains centres spécialisés comme
ceux-là -la coupure de 10 % du personnel si, par surcroît,
l'établissement n'a pas le droit de réduire le nombre de
personnes admises! Par exemple, dans un cas comme celui auquel je me
réfère, le centre pour grands brûlés, c'est
évident que la personne n'attendra pas chez elle ou à la porte,
et je ne prétends pas que quiconque pourrait la faire attendre. Il est
très probable que, dans le cas d'un conflit, une personne qui devait
demeurer dans l'établissement ou dans le centre encore trois semaines,
quinze jours ou un mois, reçoive son congé beaucoup plus
rapidement.
Essentiellement, même si on est en désaccord avec la mesure
proposée, nous croyons qu'elle se serait peut-être
expliquée ou justifiée à certains égards si, au
moins, le législateur s'était donné les moyens, dans le
libellé de la loi, pour que les points que j'évoque, les
écueils que j'évoque ne se réalisent pas. Dites-vous bien,
M. le ministre, que c'est toujours beau ici, c'est toujours facile, mais quand
on arrive sur le terrain, c'est parfois moins drôle.
M. Clair: M. le Président, on est conscient de cela. Je
pourrai répondre quand on entrera dans l'étude des articles 82 et
suivants. Si le député veut décomposer la mécanique
de fonctionnement du Conseil des services essentiels et du niveau de services
à rendre par un hôpital, le cas de la grève
appréhendée, le fonctionnement des services, à ce moment,
on pourra entrer dans le détail. Les réponses aux questions du
député de Portneuf s'y trouvent toutes, je l'espère. Si le
député nous fait découvrir des choses qu'on aurait
oubliées, on n'a pas d'objection à les regarder.
M. Pagé: C'est bien, j'aime votre approche. C'est beaucoup
plus constructif que de taxer mon collègue de Brome-Missisquoi
d'irresponsable et de démagogue, ce qui n'est pas du tout le cas, M. le
Président.
M. Clair: M. le Président, on ne reprendra pas ce
débat. Tout ce que je peux dire, c'est que je suis bien heureux que le
député de Portneuf soit là plutôt que...
M. Pagé: Ce n'est pas correct. Je vais m'interroger
moi-même si vous continuez.
M. Clair: Ce que j'indiquais simplement au député,
c'est que les réponses se trouvent dans les articles 85 et suivants.
M. Pagé: Mais pas toutes.
M. Clair: On aura l'occasion de prendre toutes et chacune de ces
questions à ce moment.
M. Pagé: D'accord.
M. Clair: S'il y a des oublis qui ont été faits ou
s'il y a des souplesses qu'on peut ajouter, on l'examinera à ce
moment.
M. Pagé: M. le Président, une autre question qui
est d'ordre général. Supposons que le projet de loi est
adopté par une majorité de députés, même si
la majorité du groupe ministériel est mince actuellement
malgré les pressions qui se font nombreuses auprès non seulement
du ministre et du gouvernement, mais auprès des députés,
je présume, individuellement aussi pour les sensibiliser aux
écueils contenus dans ce projet de loi. Supposons, malgré tout
cela, qu'il est adopté, qu'il est sanctionné, évidemment,
dans les heures qui suivent pour que personne ne change d'idée et pour
être certain que cela passe. Tout le monde va célébrer chez
l'honorable représentant de Sa Majesté et les mesures qui sont
là s'appliqueront au mois d'août prochain parce que les
négociations doivent s'amorcer le 4 ou 5 août, si ma
mémoire est fidèle, selon ce qui a été
évoqué.
Institut de recherche sur la
rémunération
L'Institut de recherche sur la rémunération, les
intentions du gouvernement sont de procéder à sa composition dans
quel délai? On a une ronde qui s'en vient et chacune est toujours aussi
délicate que la précédente. Pourriez-vous nous indiquer
vos intentions en termes de composition, de mandat, de réalisation du
mandat? À quel moment croyez-vous que l'institut pourra remplir son
obligation principale, c'est-à-dire fournir une lecture ou faire rapport
sur la situation factuelle ou le constat qu'il a fait des degrés de
comparabilité des emplois dans les secteurs public et parapublic par
rapport au secteur privé? Essentiellement, le but de ma démarche
et de ma question, c'est que le ministre devrait profiter de cette ouverture
pour nous donner la lecture la plus précise et la plus exacte que lui
fait. Comme proposeur, comment perçoit-il, dans les jours, les semaines
et les mois qui vont suivre l'adoption du projet de loi, toujours s'il est
adopté, que tout cela pourra s'articuler?
M. Clair: Alors, comme le député le sait, les trois
premières personnes à nommer en vertu du projet de loi le seront
par l'Assemblée nationale qui, normalement, ajourne ses travaux le 21
juin. C'est évident que, si l'on veut que l'institut de recherche soit
le plus utile possible pour la prochaine ronde de négociations, il y
aurait avantage à ce qu'il puisse se mettre au travail le plus
rapidement possible. Alors, mon objectif, c'est d'essayer d'obtenir la
nomination de ces trois personnes par l'Assemblée nationale après
l'adoption de la loi; donc, cela veut dire au plus tard le 21 juin si le projet
de loi est adopté et s'il y a une entente quant aux personnes à
nommer par l'Assemblée nationale. À ce moment, nous entrerions en
contact le plus rapidement possible avec les représentants syndicaux et
les associations patronales afin de pouvoir, par la suite, nommer les autres
membres. Ensuite, il y a la constitution du personnel et l'institut pourrait
également donner des mandats de recherche à des universitaires ou
à des organismes existants. Il n'est pas obligé de
procéder lui-même à toutes les recherches. Nous pensons
que, de cette façon, même si c'est sûr que l'institut de
recherche n'aura pas une année complète pour préparer ses
travaux, à partir des travaux existants au CRSMT, Centre de recherche...
(20 h 45)
M. Paquette: Centre de recherche et de statistiques sur le
marché du travail.
M. Clair: Comment dites-vous?
M. Paquette: Centre de recherche et de statistiques sur le
marché du travail.
M. Clair: Exact. C'est là une source qui semble, en tout
cas, avoir une certaine fiabilité par rapport aux associations
syndicales. Vous vous souviendrez que des représentants de la coalition
nous indiquaient que, quant à eux, ils avaient un penchant -c'est le mot
que j'emploierais - à l'égard de...
M. Pagé: Un préjugé favorable.
M. Clair:... un préjugé favorable à
l'égard du...
M. Pagé: C'est ce que vous avez déjà eu.
M. Clair:... CRSMT. Je pense que oui, l'institut de recherche
pourrait faire un travail utile pour la prochaine négociation. Mais de
vous dire que le travail serait aussi complet qu'il pourrait l'être pour
les années subséquentes, je pense que ce n'est pas pour rien
qu'il ne produirait qu'un seul rapport par année. Le travail serait plus
en profondeur.
M. Pagé: Alors, vous nous confirmez, M. le ministre, ce
soir, votre intention que l'institut soit formé et que les dispositions
de la loi s'appliquent dans les meilleurs délais après son
adoption.
M. Clair: Effectivement, c'est l'intention...
M. Pagé: C'est donc dire... M. Clair:... du
gouvernement.
M. Pagé:... que vous créez une pression
additionnelle sur tous les parlementaires en ce disant, parce que si le projet
de loi était adopté le 21 juin à 23 h 45, je ne vois pas
en quoi vous pourriez procéder à la nomination des trois
premières personnes à l'Assemblée nationale, à ce
moment-là.
M. Clair: Je suis conscient de cela, M. le Président.
Maintenant, on a, comme je l'ai dit au député, longuement
évalué la possibilité d'avoir des personnes qui ne soient
pas nommées par l'Assemblée nationale, mais nommées par le
gouvernement ou encore qu'il soit strictement paritaire, auquel cas il y a un
risque de blocage. On a imaginé la possibilité de veto de part et
d'autre pour empêcher qui que ce soit d'imposer son point de vue. Il nous
est apparu, finalement, par rapport à l'objectif de neutralité
recherché à l'égard des personnes qui seraient
chargées de conduire, dans le fond, les destinées de l'institut
de recherche, que celles-ci devaient être nommées par
l'Assemblée nationale, à la majorité des deux tiers, comme
c'est le cas pour un certain nombre de nos institutions, notamment le
Protecteur du citoyen, la Commission des droits de la personne, si ma
mémoire est fidèle, le Directeur général des
élections, le Vérificateur général
également, je pense.
M. Pagé: Vous avez dû...
M. Clair: Maintenant, si vous me demandez si je suis conscient de
la date à laquelle nous sommes et de l'importance du projet de loi, que
le 21 juin est le 21 juin, oui, j'en suis conscient. J'ai des objectifs. Comme
ministre, je considère avoir une obligation de moyens et non pas une
obligation de résultat.
M. Pagé: Ah! La politique est l'art du possible.
M. de Bellefeuille: Je m'excuse, je n'ai pas saisi?
M. Clair: À cet égard-là, quant à
l'adoption d'un projet de loi, j'ai une obligation de moyens, dans le sens de
tenter de le faire adopter; je n'ai pas une obligation de résultat, dans
le sens que, s'il n'est pas adopté, cela ne relève pas de ma
seule volonté. Alors, je ne peux pas garantir le résultat
à l'avance, je peux garantir les moyens que je déploie pour le
faire adopter. Je ne peux pas aller plus loin.
M. Pagé: J'aurais une toute dernière question. Je
sais que le député de Rosemont veut aborder ce sujet et il est
important. Le ministre est libre d'y répondre ou non. Vous avez dû
commencer à magasiner, à regarder les nominations à
effectuer. Si tel est le cas, j'aimerais qu'on me le dise, sans nommer...
Une voix: Cela vous intéresse? M. Pagé: Non,
non, vous savez... M. Clair: Cela vous intéresse?
M. Pagé: Je suis très bien où je suis dans
Portneuf, à représenter le plus dignement possible ces citoyens
qui me donnent le privilège de siéger ici depuis bientôt
douze ans et j'ai l'intention de continuer.
Le ministre fait référence au Centre de recherche et de
statistiques sur le marché du travail, à un mandat à lui
confier. Comme on le sait, le centre de recherche effectue des analyses de
conventions collectives dans le secteur privé pour des entreprises
syndiquées de 500 employés et plus.
M. Clair: De 200.
M. Pagé: De 200? C'est récent, parce que
cela...
M. Clair: II me semble que c'est 200.
M. Pagé:... a été longtemps 500
employés.
M. Clair: CRSMT, 200? Oui, 200.
M. Pagé: Bon, tant mieux! Sinon, on fera une commission
rogatoire et on ira voir cela. Mais cela a été longtemps à
500 employés.
M. Clair: C'était le Bureau de recherche sur la
rémunération qui travaillait sur 500 et plus.
M. Pagé: Ah! C'était le Bureau de recherche sur la
rémunération du Conseil du trésor.
M. Clair: Exact.
M. Pagé: D'accord. Est-ce que c'est l'intention du
gouvernement et du ministre, dans le mandat donné à l'institut,
que le cadre de référence déborde pour que les analyses
puissent être faites auprès des entreprises de moins de 200
employés et aussi auprès, par exemple, de grandes entreprises du
Québec qui ne sont pas syndiquées ou affiliées aux
syndicats que nous connaissons?
M. Clair: M. le Président, le mandat de l'institut ne
serait pas limitatif dans la loi quant à un nombre d'employés de
façon à laisser à l'institut le soin de faire le travail
le plus utile. Je vous indique immédiatement
que, quant à nous, nous n'avons jamais voulu, ni au Bureau de
recherche sur la rémunération, et je ne pense pas que cela ait
été le cas, non plus, au CRM, au CRSMT...
M. Pagé: Centre de recherche et de statistiques sur le
marché du travail, c'est moins compliqué que de dire CRSMT.
M. Clair: Centre de recherche et de statistiques sur le
marché du travail. J'ai de la misère à l'apprendre,
celui-là!
Cela n'a jamais été notre intention d'essayer de comparer
le gouvernement, comme employeur, à la main-d'oeuvre la moins bien
rémunérée au Québec, celle qui a le moins de
moyens. Cela n'a jamais été notre objectif. On pense que le
gouvernement doit continuer à être un employeur équitable
et à traiter correctement ses employés et ne pas se servir de ce
moyen pour chercher, je dirais, à reproduire dans le secteur public les
discriminations qui peuvent exister dans le secteur privé à
l'égard de certains travailleurs. J'indique au député que
quand il met dans ma bouche l'intention de confier un mandat au CMRST, au
Centre de recherche -je vais l'écrire! Centre de recherche et de
statistique sur le marché du travail - je n'ai pas dit cela. J'ai
simplement dit qu'il y avait des travaux qui avaient été faits et
qui pouvaient être utiles à un institut nouvellement
créé. Je ne dis pas que l'institut de recherche devrait en
quelque sorte renoncer à ses fonctions et donner une commande à
ce centre en disant: Pendant une année, je ne fais pas de travail, je
vais me contenter de ces travaux-là. Je dis simplement qu'il y a des
travaux qui ont été faits là et qui peuvent être
utiles à l'institut, comme il y en a sûrement d'autres qui peuvent
l'être ailleurs.
M. Pagé: Je vais céder la parole au
député de Rosemont après la réponse du ministre
à ma question. On a, à quelques reprises, évoqué
l'obligation que commandait l'exercice de comparer nos niveaux de
rémunération avec ceux des autres provinces et peut-être
avec certains États américains. Est-ce que, dans votre esprit, un
des mandat de l'institut serait d'établir des grilles en vertu
desquelles on pourrait comparer des fonctions et des responsabilités
dans le public avec des fonctions et des responsabilités dans le
privé qui ne sont pas nécessairement de même nature? Je
m'explique. Vous savez, comparer une infirmière du secteur public avec
une infirmière du secteur privé, cela peut devenir assez
difficile; comparer la rémunération d'un enseignant dans le
public et dans le privé, là aussi c'est très difficile.
Cependant, certains États américains ont dégagé des
moyens en vertu desquels ils peuvent, de façon raisonnable, assez
équitable, comparer des choses qui, à leur face même,
n'apparaissent pas comme étant comparables et ce, à partir d'une
grille, de plusieurs points de comparaison, que ce soit la formation, le champ
de responsabilité inhérent à la fonction occupée,
l'expérience, le caractère délicat de la prestation, par
exemple, pour des techniciens en radiologie ou des choses comme cela. Est-ce
dans l'esprit du ministre qui nous propose ce projet de loi que l'institut se
convie à un tel exercice?
M. Clair: Dans la mesure où l'institut serait
chargé de comparer la rémunération globale des
salariés du secteur public et du secteur privé, la réponse
est oui, ce serait possible, mais toujours à l'intérieur du
Québec en termes de mandat fondamental et non pas en termes de
comparaison par rapport à l'extérieur. Il y a des
méthodes. C'est faisable en termes d'appariement, d'évolution
historique, de tenir compte d'un paquet d'éléments qui peuvent
permettre de voir évoluer les rémunérations même de
personnes qui n'ont pas, à proprement parler, de vis-à-vis
public-privé tout à fait identiques. Par appariement, oui, c'est
possible, dans un panier d'emplois en quelque sorte...
M. Pagé: Je ne demande pas si c'est possible.
M. Clair:... de le faire.
M. Pagé: C'est certainement possible, c'est ce que je
soutiens!
M. Clair: C'est ce qui va effectivement se faire. Maintenant, en
ce qui concerne la comparaison par rapport à d'autres provinces ou
à d'autres États, nous sommes ouverts à cette
possibilité, mais nous pensons que cela ne doit pas être
l'objectif fondamental de l'Institut de recherche sur la
rémunération, l'objectif premier. Le fondement de la politique
salariale, c'est une évolution comparable des employés du secteur
public -quand on dit secteur privé, dans le fond, le mot n'est pas
juste, c'est plus ceci - et des autres travailleurs et travailleuses de
l'économie québécoise parce qu'on peut tenir compte des
employés tout aussi bien d'Air Canada, du CN, d'Hydro-Québec et
autres. Il ne s'agit pas juste d'isoler trois ou quatre entreprises
privées et de se comparer avec elles. Ce sont des travaux qui sont
beaucoup plus élaborés que cela.
Ce qu'il y a de sous-jacent à cette politique salariale, c'est
que les rémunérations au Québec, qu'elles soient dans le
public ou dans le privé, évoluent en fonction de la
capacité de payer d'une économie dans son entité, dans son
entièreté. L'évolution des salaires à Terre-Neuve,
tant
dans le public que dans le privé, au Québec, en Ontario,
en Colombie britannique ou dans les États américains varie aussi
en fonction de la richesse collective d'une société. On doit
tenir compte de cela. C'est la réalité pure et simple.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, le député de
Portneuf a abordé certaines des questions que je voulais soulever avec
le ministre. Cela va me permettre d'être un peu plus bref. Je pense que
le noeud, particulièrement névralgique, du projet de loi, c'est
la jonction entre le niveau des services essentiels qui doivent être
assurés à la population dans les diverses institutions de
santé, les diverses catégories et les pourcentages que vous fixez
dans la loi. Il y a des pourcentages à certaines périodes de
l'année par rapport à d'autres.
Pourcentages fixés pour les services
essentiels
La première question que j'aimerais vous poser, c'est: Comment
êtes-vous arrivé à ces pourcentages? Comment pouvez-vous
dire qu'un hôpital pour malades chroniques, un hôpital de
cardiologie, cela vaut 90 % et qu'un hôpital général, un
hôpital ordinaire, cela vaut 80 % et qu'un CLSC vaut 60 %, un CSS vaut 55
% de salariés? Comment peut-on arriver à des pourcentages
uniformes comme ceux-là? Qu'est-ce qui vous a amené aussi
à adopter cette approche, c'est-à-dire d'arriver à imposer
des pourcentages uniformes dans quatre catégories
d'établissements?
M. Clair: Essentiellement, je vous dirais qu'on a
procédé par élimination. On a d'abord
procédé à l'élimination de l'hypothèse - et
là, ce n'est pas parce que je veux soulever un débat - de
l'abolition pure et simple du droit de grève. Pourquoi a-t-on
procédé comme cela? Essentiellement pour deux raisons. La
première, c'est que, même sur le plan mécanique, lorsqu'on
vient pour essayer de mettre en oeuvre un substitut au droit de grève en
termes d'arbitrage, d'offre finale, de clause remorque, il nous est apparu que
c'était la première hypothèse à exclure. La
deuxième, c'était, en quelque sorte, de maintenir la
possibilité d'une grève générale illimitée
dans le secteur de la santé avec prédominance de la liste
syndicale et de revenir à l'ancienne formule. C'est une deuxième
hypothèse que nous avons écartée, non pas qu'il n'y ait
pas eu le rapport Picard, entre autres, qui ait fait l'éloge de cette
approche, mais, il nous semble, quant à nous, qu'il y a quelque chose
d'anormal -c'est un peu l'approche également dans le code
d'éthique - à dire, en termes d'encadrement d'un droit: La
présomption de responsabilité et de bonne foi tiendra lieu de
loi. C'est comme si, demain matin, il y avait une association d'automobilistes
qui obtenait l'engagement formel de 2 000 000 des 3 000 000 de conducteurs
d'automobile au Québec. Savez-vous que, plus besoin de limites de
vitesse, plus besoin d'arrêts aux coins des rues, nous nous engageons sur
notre honneur à les respecter. (21 heures)
II nous a semblé que cette approche, si elle faisait appel au
sens des responsabilités des travailleurs et des travailleuses de ce
secteur, cependant déresponsabilisait le Parlement et l'amenait à
agir comme il le fait trop souvent, c'est-à-dire à la
dernière minute, et à prendre des moyens pour interdire la
grève en sortant complètement des règles du jeu convenues
au départ et en retirant le droit de grève avant même qu'il
soit exercé. Pourquoi donc avoir toute cette mécanique si,
à la dernière minute, les Parlements successifs et les
députés décident en Chambre de retirer ce droit? On a donc
écarté cette hypothèse.
M. Paquette: Et là, vous avez le Conseil des services
essentiels...
M. Clair: Oui. Maintenant...
M. Paquette:... qui est là justement pour s'assurer que
les engagements que prennent les syndiqués, et même institution
par institution, soient respectés et, en cas de non-respect, sont connus
du public. S'ils ne le sont pas, le gouvernement a des recours...
M. Clair:... en l'absence de guide...
M. Paquette:... qui correspondent aux contraventions qu'on peut
imposer sur les limites de vitesse. Alors, si vous ne répondez pas
à ma question...
M. Clair: J'essaie d'y répondre et j'arrivais à
dire pourquoi on a retenu cette approche. L'autre hypothèse était
de dire: On maintient les dispositions actuelles du Code du travail qui, sauf
erreur, ont été sanctionnées, mais jamais
proclamées, jamais mises en vigueur. Pourquoi? Parce que, lorsqu'on
regarde le fonctionnement actuel du Conseil des services essentiels, dans le
transport en commun - c'est un gros cas -ce n'est pas le transport dans toutes
les villes du Québec en même temps, par une grève
générale illimitée, qui risque d'être
paralysé.
Autrement dit, telles que les dispositions du Code du travail existaient
-je ne veux engager personne - un grand nombre de personnes concernées
par ces matières considérait que les dispositions
actuelles étaient inapplicables. Comme elles étaient
considérées inapplicables, cela voulait dire que, si on les
maintenait dans notre loi, on acceptait d'avance d'aller, encore une fois, la
prochaine fois à l'Assemblée nationale suspendre le droit de
grève avant qu'il soit exercé.
On a donc fait des travaux à partir des listes des services
essentiels déposées dans certains conflits, à partir des
travaux des associations patronales, des services, je dirais de sens commun,
essentiels qui ne sont pas d'un même niveau dans un établissement
tel un CLSC, dans un hôpital de soins prolongés ou dans un centre
d'accueil. En travaillant avec les associations patronales, nous en sommes
venus à des pourcentages du type de ceux qui apparaissent.
On a voulu conserver de la souplesse au Conseil des services essentiels
qui peut aller au-delà de cela, car on sait, par exemple, que les CLSC
n'offrent pas tous exactement le même type de services et ne sont pas
tous dans un contexte identique. Alors, on a - j'emploie volontairement cette
expression -un plancher, un minimum, ce qui va faciliter le travail du Conseil
des services essentiels, ce qui, quant à moi, était la seule
avenue qui pouvait en même temps permettre de respecter un droit de
grève, dans le domaine de la santé, qui ait valeur de sonnette
d'alarme, sans avoir comme conséquence d'interrompre les services de
santé, respectant ainsi l'équilibre entre deux droits: le droit
à la santé et le droit de grève.
M. Paquette: Pour aller un peu plus loin, le fait de changer le
cadre de négociation et le mécanisme d'encadrement des services
essentiels à chaque ronde de négociations - c'est toujours le
même "pattern"; à chaque ronde de négociations, on n'est
pas complètement satisfait de la précédente, il y a des
tensions et on change le cadre - évidemment, il y a un effet
négatif à cela. L'effet positif est escompté, mais l'effet
négatif est toujours là, c'est-à-dire que des gens qui
s'étaient habitués à fonctionner, et, à mon avis,
malgré les problèmes, de mieux en mieux, d'une ronde de
négociations à l'autre, dans un cadre donné, sont
obligés de s'orienter dans un nouveau cadre qui peut causer un certain
nombre de problèmes.
Donc, avant de changer le mode d'encadrement des services essentiels, je
pense qu'il faut d'excellentes raisons. Je vais vous soumettre une
hypothèse. J'ai l'impression que le ministre a mis des pourcentages pour
des motifs de sécurisation psychologique. Aux dernières
négociations, d'abord, il y a eu le rapport Picard qui a dit que les
services essentiels fonctionnaient quand même assez bien. On a tenu une
commission parlementaire dans le temps de notre ex-collègue, Pierre
Marois. On avait fait le point là-dessus et on se rendait compte qu'il y
avait eu très peu de problèmes à la négociation
précédente, beaucoup moins qu'à l'autre négociation
avant. Toutes les centrales syndicales et tous les organismes patronaux
étaient venus. Je pense que la conclusion générale,
à ce moment, avait été que, finalement, le
mécanisme, peut-être pas au niveau de la tension qui est toujours
créée, comme vous le dites, par les effets
appréhendés d'une négociation chez les malades qui sont,
évidemment, des personnes extrêmement vulnérables, cela se
comprend, mais dans la réalité des choses semblait donner de bons
résultats. Est-ce que le ministre est capable de nous donner des
exemples qui démontrent que, dans les deux dernières
négociations, les services essentiels ont été tellement
mal respectés qu'il faut encore une fois changer le cadre? Avec 90 %, 80
%, 60 % ou 55 %, qu'est-ce que cela va changer dans le fond? Est-ce que ce
n'est pas plutôt une affaire de responsabilisation, d'habitude à
fonctionner dans un cadre donné? Est-ce que les pourcentages du
ministre, ce n'est pas tout simplement, sur le plan politique, pour pouvoir
dire à la population: Regardez, on a quelque chose qui vous garantit la
sécurité psychologique et on se dédouane face à
l'opinion publique de cette façon?
M. Clair: Regardez bien, M. le Président. Â
l'égard du phénomène de la grève
appréhendée, nous ne pouvions pas demander aux directions des
hôpitaux, si on voulait arrêter le phénomène de la
grève appréhendée, de rabaisser, avant même que la
grève se déclenche, au cas où elle serait
déclenchée, le niveau des services. Nous ne pouvions pas, je
pense, en toute honnêteté, exiger des administrations des
hôpitaux de maintenir les services à leur niveau habituel sans
introduire des planchers d'emploi assez élevés, du type de ceux
qu'on retrouve ici. Je pense que cela va de pair et que, dans la mesure
où on veut éviter le premier problème, le problème
de la grève appréhendée, il fallait introduire des
planchers et créer l'obligation aux directions des hôpitaux de
maintenir leurs services habituels, c'est-à-dire 100 % des services
normaux.
Par ailleurs, en ce qui concerne l'exercice du droit de grève
comme tel, le député dit que cela aurait uniquement comme
objectif de sécuriser. Je dis que ce n'est pas uniquement cet objectif
qui est poursuivi. Cela va avoir pour résultat de sécuriser,
c'est évident, de minimiser l'impact psychologique de la grève
appréhendée, de légitimer un peu plus l'exercice du droit
de grève. Finalement, ces pourcentages ne s'éloignent pas
beaucoup de ce que vous et moi, comme citoyens, on peut peut-être
considérer comme tolérable en
termes de listes qui ont été fournies et en termes de
fonctionnement des institutions hospitalières et des autres institutions
des services de santé ou des services sociaux. Alors, que ce soit par un
code d'éthique, par décision du Conseil des services essentiels
ou encore par l'effet de la loi qui est le moyen que nous avons choisi, je
pense que nous ne sommes pas loin de ce qui est, dans l'esprit du citoyen
ordinaire, raisonnable.
Dans ce sens, je pense, quant à moi, que même pour le
travailleur syndiqué dans le milieu hospitalier, quand vient le moment
de prendre la décision d'aller en grève, c'est plus
déchirant pour cette personne que cela ne l'est pour d'autres
employés de l'Etat. La meilleure preuve, c'est que lors du dernier front
commun, si ma mémoire est fidèle, sauf erreur, dans la liste des
moyens de pression, dans la gradation des moyens de pression, les centres
d'accueil, les centres hospitaliers de soins prolongés, les
hôpitaux que j'appelle, quant à moi, les hôpitaux lourds,
névralgiques du système de santé étaient
prévus pour être les derniers.
Je pense qu'on ne peut pas dire que ces niveaux de services essentiels,
je dirais, soient contraires au sens commun, qu'il soit syndical, qu'il soit
patronal ou qu'il soit du point de vue du bénéficiaire. C'est
dans la mesure où on pense, justement, que ces pourcentages se
rapprochent considérablement du sens commun qu'ils vont contribuer
à dédramatiser, d'une part, la grève
appréhendée, d'autre part, la grève réelle et
replacer les choses - dans un équilibre plus équilibré,
cela n'existe pas - dans un équilibre plus certain, plus stable.
M. Paquette: M. le Président, je pense que le ministre
confirme que son objectif est, d'abord, de sécuriser par rapport
à des problèmes appréhendés. Je prends note de
cela. Je soutiens que la meilleure façon de sécuriser des gens,
c'est de voir un gouvernement et des centrales syndicales qui s'entendent et
qui établissent un mécanisme détaillé,
adapté à chaque type d'institution, comme celui qui a
été proposé par les centrales au niveau de leur code
d'éthique. S'il avait pu y avoir entente et s'il pouvait encore y avoir
entente là-dessus entre le gouvernement et les centrales syndicales, ce
serait peut-être pas mal plus sécurisant. Je pense que,
là-dedans, c'est une question de responsabilité. Là, on
parle de la responsabilité des syndiqués. Il serait
peut-être bon de parler de la responsabilité du gouvernement,
à un moment donné, et des directions hospitalières. On
n'en parle pas beaucoup dans la loi et il n'y a pas beaucoup de
mécanismes pour garantir cela.
M. Clair: On leur fait obligation, M. le Président.
M. Paquette: Vous n'avez rien dans votre projet de loi qui
permet, par exemple, d'assurer la population qu'un gouvernement, à un
moment donné, parce qu'elle veut tirer la couverture de son
côté, parce qu'elle veut faire pencher le rapport de forces de son
bord, ne va pas matraquer une loi spéciale alors qu'il n'y a même
pas de conflit. Cela s'est vu dans le passé, en 1979, notamment.
M. Clair: M. le Président, je m'excuse auprès du
député. C'est impossible, le Parlement est souverain. On ne peut
pas. Même si on adoptait, aujourd'hui, une loi qui interdirait au
gouvernement d'adopter des lois spéciales, c'est impossible.
M. Paquette: Non, non.
M. Clair: Ce n'est pas possible. Une question que je lui pose:
Connaît-il un pays où il y a code d'éthique prévu
par l'effet d'une loi et aucun mécanisme de services essentiels? Est-ce
qu'il en connaît?
M. Paquette: M. le Président, je pense que la question
n'est pas là. On parle, évidemment, d'un code d'éthique
qui vise le respect des services essentiels. En présence d'un Conseil
des services essentiels qui a, jusqu'à maintenant, bien fait son
travail, avec également des recours possibles aux tribunaux pour le
gouvernement, qui sont prévus dans nos lois - il y a tout cela dans le
décor - je pense que l'élément sécurisant viendrait
bien davantage de syndiqués qui s'engagent non seulement au niveau des
dirigeants des centrales syndicales, mais au niveau des syndicats locaux
à respecter 100 % des services essentiels que du fait d'assurer tel
pourcentage de syndiqués à tel moment ou à tel autre.
Enfin, je pense qu'on aura l'occasion d'y revenir au moment de l'étude
article par article. Mais je pense qu'il y a là une approche
responsabilisante. Je pense que la sécurité vient de la
responsabilité de toutes les parties, vient d'un changement d'attitude
de chacune des parties, alors que le ministre, lui, a opté pour des
pourcentages mathématiques qui visent essentiellement, si je l'ai bien
compris, à contrer les effets psychologiques, la tension qui peut
exister lorsqu'on appréhende une grève. Là, les gens vont
se dire: On va toujours avoir 90 % des syndiqués, ce qui risque
d'être illusoire, parfois. Mais le ministre a mis ses espérances
dans cette approche un peu technocratique, un peu mathématique.
M. Clair: M. le Président, la discussion est
intéressante. Je pose comme première question au
député: Qu'est-ce qui, selon lui, lui apparaîtrait
être un pourcentage ou un niveau de services essentiels qui doive
être garanti par code d'éthique, par loi, par
décision du Conseil des services essentfels? Il faut absolument
avoir une façon de le déterminer, cela en prend une. Alors, la
façon dont on le traduit, c'est par des pourcentages. (21 h 15)
Maintenant, à mon avis, une approche d'un minimum de services
essentiels assuré, cela ne contredit pas l'exercice d'un droit de
grève, mais, au contraire, à mon sens, dans la mesure où
le Parlement a parlé et où le législateur ne parle pas
pour ne rien dire, cela le légitime. Cela permet qu'il n'y ait pas
interruption des services, mais cela assure la continuité des services.
Troisièmement, cela n'est pas incompatible avec un code
d'éthique. Les deux ne sont pas mutuellement exclusifs, à mon
sens. Mais on ne peut pas, dans une loi, dire: II y a un code d'éthique
et le code d'éthique est absolument cela. L'approche du projet de loi
n'est pas de dire: C'est un code d'éthique. On dit: Ce sont des services
essentiels définis par l'effet de la loi, oui. En parallèle
à cela, qu'il y ait développement d'un code d'éthique, je
pense que c'est une approche positive, effectivement, qui doit être
encouragée, mais ce n'est pas mutuellement exclusif, je ne le pense
pas.
M. Paquette: M. le Président, on a parlé un peu de
la façon dont on est arrivé à ces pourcentages. Donc,
c'est par des consultations avec les organismes patronaux. J'imagine qu'autour
de la table des hôpitaux un directeur d'hôpital a dit - je prends
une catégorie d'hôpitaux, les hôpitaux pour malades
chroniques, par exemple - chez nous cela me prend 100 %, un autre a dit 80 % et
on a fait une moyenne. Est-ce que c'est cela? Est-ce que j'ai bien compris le
ministre?
M. Clair: Je ne sais pas comment le député de
Rosemont travaillait lorsqu'il était ministre, mais ce n'est pas tout
à fait la façon dont on a travaillé. On a tenté,
à partir des travaux qui avaient déjà été
effectués, des expériences antérieures, de voir comment
cela a fonctionné dans le passé, de le voir aussi par
catégories d'établissements de services de santé. Par
exemple dans les CSS, ce que l'on considère être de la nature des
services essentiels, c'est principalement toute la question de la protection de
la jeunesse. Au niveau des CLSC, cela nous apparaît être largement
la question des services à domicile. Il y a moyen de quantifier le
personnel affecté habituellement à ces services. C'est de cette
façon, en faisant le travail le plus professionnel possible, que nous en
sommes venus à déterminer ces niveaux.
M. Paquette: Je voudrais vous poser une question. Le pourcentage
de salariés et les services essentiels, ce sont deux choses. Il reste
à voir si cela va concorder et de quelle façon. Prenons deux
centres hospitaliers de courte durée, ceux qui sont prévus
à 80 % dans le projet de loi. Vous avez des hôpitaux qui ont
d'énormes déficits, qui doivent, donc, faire un effort de
compression de leurs services plus important. Prenons-les dans la même
région: deux hôpitaux à Montréal, un qui a 300 000
000 $ de déficit, qui est obligé de faire des compressions, et un
autre qui, au contraire, a des surplus et tout cela. Est-ce qu'on ne peut pas
supposer que, dans un hôpital en bonne santé financière, on
va peut-être se payer un peu plus de luxe, si vous voulez, de services
gravitant autour des services essentiels, peut-être plus
d'employés dans le bureau, dans l'administration, dans le service des
archives, que dans un hôpital qui est en difficulté et qui doit
vraiment resserrer les choses? À ce moment-là, est-ce qu'on ne
peut pas dire qu'appliquer 80 % à ces deux hôpitaux fait en sorte
que le malade qui a le malheur de tomber sur l'hôpital où il y a
moins de luxe, où il y a moins de marge de manoeuvre, si on veut, va se
retrouver avec 80 % de syndiqués, en règle
générale? Il y a moyen de faire des petites adaptations, mais, en
gros, il va se retrouver avec moins de syndiqués. Est-ce que cela ne
vient pas rompre l'idée que, si les services sont essentiels, ils
doivent être assurés équitablement, quel que soit le hasard
qui fait qu'un malade tombe dans un hôpital bien géré par
rapport à un hôpital mal géré?
M. Clair: M. le Président, comment cette situation
pourrait-elle se produire? D'abord, de façon générale, je
vous dirai que les hôpitaux, qu'ils soient en déficit ou qu'ils
soient en surplus... Quand on dit des déficits énormes,
entendons-nous. C'est une minorité d'établissements qui ont un
déficit supérieur à 1 % de leur budget et un plus petit
nombre encore ont un déficit supérieur à 2 %. Il ne faut
pas exagérer les choses. Je ne pense pas qu'on puisse dire que le
comportement des directions d'établissements à cet égard
soit fonction de leur déficit, je dirais. Je ne pense pas qu'on puisse
dire que, par exemple, les hôpitaux, les centres d'accueil aient une
attitude très différente en termes de catégorie des
hôpitaux généraux de courte durée, alors que les
centres d'accueil sont généralement en équilibre et qu'il
y a plus d'hôpitaux qui sont en déséquilibre financier.
M. Paquette: Deux hôpitaux entre eux?
M. Clair: Pour deux hôpitaux, à supposer que cela
existe, exactement pareils dans la même région, un en
déficit et l'autre en surplus, la loi fait exactement les mêmes
obligations aux deux. Cela protège, je pense,
le bénéficiaire à cet égard, qu'il y ait de
tels planchers qui soient identiques pour les deux établissements en
cause.
M. Paquette: Qu'est-ce qui arrive, M. le Président, si on
se retrouve avec un conflit qui est à cheval sur deux périodes
très différentes de l'année? On sait qu'entre Noël et
le Jour de l'an, dans les hôpitaux, il n'y a pas de problèmes avec
les services essentiels, on coupe, on admet moins de malades, et cela dure
à peu près une semaine, parce qu'il y a un grand nombre de
personnes en vacances. On ne se pose pas de problème de services
essentiels, il y a moins de monde.
Il y a un article qui dit: Le pourcentage s'applique sur le nombre de
salariés normalement en fonction à cette période de
l'année.
M. Clair: Exact.
M. Paquette: Donc, si cela tombe dans une période creuse
où il y a beaucoup de vacances, il va y avoir moins de syndiqués
requis dans l'établissement. Peut-être que, trois jours avant,
c'était la période pleine et l'hôpital fonctionnait
à plein et là, il devait y avoir plus de salariés.
Qu'est-ce qui arrive s'il y a une période de conflit qui est à
cheval sur deux régimes complètement différents? Est-ce
qu'il va falloir faire deux listes de services essentiels?
M. Clair: Le Conseil des services essentiels a le pouvoir
d'apprécier. C'est justement une des raisons pour lesquelles on
maintient le pouvoir du Conseil des services essentiels d'évaluer
à la hausse les demandes prévues. Je pense qu'avec cette
flexibilité le Conseil des services essentiels pourra en tenir compte.
C'est aussi pour tenir compte de la variation en cours d'année des
besoins que l'on mentionne que ce sont les salariés qui seraient
habituellement en fonction lors de cette période. Je pense qu'à
cet égard... Je voulais ajouter un autre point que j'oublie. C'est
oublié, cela reviendra.
M. Paquette: M. le Président...
M. Clair: Je sais ce que je voulais dire au député.
Parce que j'avais cette préoccupation aussi, je me suis fait simuler un
peu comment cela fonctionnait, justement, en fin de semaine, pendant la
période estivale, la période des fêtes, etc. Je dois dire
que c'est un phénomène avec lequel le réseau de la
santé est habitué à vivre depuis qu'il existe
probablement. C'est un phénomène qui m'est apparu comme
étant bien maîtrisé tant par le personnel syndiqué
que par le personnel de maîtrise, les médecins, etc. Cela m'est
apparu beaucoup moins mystérieux et beaucoup moins inquiétant que
ce qu'on pouvait en penser à première vue. Je pense que, tant du
côté des employés que du côté de
l'administration, ils sont habitués à vivre
régulièrement ce phénomène.
M. Paquette: Concernant le Conseil des services essentiels, il y
a toute une série de mesures punitives permanentes au cas où le
conseil constaterait que ses exigences ne sont pas respectées à
tel ou tel endroit. Le conseil peut enjoindre à toute personne
impliquée de faire ce qui est nécessaire pour se conformer
à certaines de ses décisions, il peut exiger une
réparation d'un acte, il peut appliquer des sanctions, il a un pouvoir
d'ordonnance. "Le dépôt de l'ordonnance lui confère la
même force et le même effet que s'il s'agissait d'un jugement
émanant de la Cour supérieure. " Donc, on fait du conseil un
tribunal administratif ou presque.
J'aimerais avoir des précisions du ministre à ce sujet.
Pense-t-il que le conseil, qui a aussi un rôle de médiation
lorsque les parties ne s'entendent pas sur le niveau des services essentiels,
doit donc essayer de rapprocher les parties? Comment pourra-t-il vraiment jouer
son rôle si l'on sait qu'en définitive il peut ordonner et imposer
des sanctions et est-ce qu'il n'y a pas le risque que ce conseil perde toute
crédibilité en tant qu'agent de médiation et de
rapprochement des parties?
M. Clair: Premièrement, la formule, comme le
député de Rosemont le sait sans doute, est non pas
calquée, mais je dirais plutôt inspirée de ce qui est
actuellement fonctionnel dans plusieurs autres provinces canadiennes et
ailleurs, aussi, dans d'autres juridictions. Plutôt que les parties aient
tendance à régler leurs problèmes par recours, comme on
l'a vu trop souvent, aux tribunaux, l'objectif est d'introduire une
étape préalable qui fasse en sorte que, par l'exercice de ces
pouvoirs de redressement, on déjudiciarise les relations du travail, on
les dépolitise aussi et que le Conseil des services essentiels, par son
pouvoir à la fois de médiation, mais aussi de redressement
à l'égard des deux parties, soit muni de moyens plus
expéditifs, plus rapides et moins "judiciarisables" à
l'égard des parties.
On a constaté qu'ailleurs au Canada -et on espère, bien
sûr, que la jurisprudence prendra la même tendance au Québec
-lorsqu'il y a eu des recours en injonction, par exemple, ou tentative de faire
intervenir les tribunaux dans des conflits de travail dans le cas de
non-respect de conventions collectives ou de services essentiels, les tribunaux
de droit commun ont renvoyé les demandes d'injonction en indiquant qu'il
y avait d'autres recours plus appropriés.
C'est sûr, cependant, qu'au Québec notre constitution ne
nous permet pas
d'exclure tout recours devant le tribunal ou d'empêcher les gens
d'y recourir. Si on essayait d'installer une clause privative, selon les avis
juridiques que nous avons, visant à empêcher les gens même
de prendre un recours en injonction, les chances sont qu'ils pourraient quand
même obtenir l'émission d'une injonction à partir de
l'argument qu'une telle clause privative serait anticonstitutionnelle, alors
que, si on fait plutôt confiance aux tribunaux de droit commun à
savoir qu'ils refuseront d'émettre des injonctions avant que le
processus des pouvoirs de redressement ait été utilisé,
nous avons confiance que le moins souvent le conseil sera appelé
à déposer à la Cour supérieure ses ordonnances pour
qu'elles deviennent exécutoires par l'effet d'un jugement de cour,
puisque, à toutes fins utiles, "le dépôt - on l'indique
à l'article 111. 20 - de l'ordonnance lui confère alors la
même force et le même effet que s'il s'agissait d'un jugement
émanant de la Cour supérieure. "
C'est l'esprit de ces dispositions. On a examiné les lois
d'autres juridictions. Il y avait deux approches en ce qui concerne les
pouvoirs de redressement: une approche de libeller de façon assez
générale et étendue les pouvoirs de redressement - les
pouvoirs de "cease and desist" - qui seraient confiés au Conseil des
services essentiels ou encore de les libeller de façon très
précise, par une énumération de pouvoirs très
précis.
L'approche que nous avons retenue est d'accorder des pouvoirs plus
généraux, en faisant confiance, c'est sûr, au jugement des
membres du Conseil des services essentiels qui auront intérêt, eux
aussi, à ce que ces mécanismes soient crédibles, que ses
décisions soient équitables et qu'elles contribuent à
déjudiciariser le processus de négociation des conventions
collectives ou de respect des conventions collectives, plutôt que de les
judiciariser davantage.
On a examiné les deux approches et, finalement, l'approche que
nous avons retenue est celle de libeller de façon large les pouvoirs du
Conseil des services essentiels. Je dois vous dire que, lorsqu'on a
regardé l'hypothèse de les libeller de façon très
précise, si le député trouve qu'il y a beaucoup de
pouvoirs, oui, c'est vrai, mais quand on les énumère un à
un non seulement cela démontre, encore là, qu'il y a beaucoup de
pouvoirs, mais cela en fait une longue liste aussi. (21 h 30)
M. Paquette: M. le Président, le ministre n'a pas
répondu à mon autre question. Ces pouvoirs nouveaux, quasi
judiciaires, ne viendraient-ils pas contredire le rôle de
médiation et de conciliation entre les parties que le conseil doit
exercer? Si on va plus au fond des choses, est-ce qu'on avait vraiment besoin
de cela? Si, comme le dit le rapport Picard, le conseil fonctionne bien et est
perçu comme crédible, si les gens ne prennent pas le Conseil des
services essentiels à la légère, est-ce qu'on avait
vraiment besoin de lui accumuler un tel ensemble de pouvoirs qui peuvent, en
quelque sorte, contredire son rôle de médiation, de conciliation,
d'information du public et tout cela?
M. Clair: Je pense que le député de Rosemont ne
doit pas confondre l'ancienne Commission des services essentiels et le Conseil
des services essentiels tel qu'il existe présentement, d'une part.
D'autre part, loin de penser que le conseil risque de perdre sa
crédibilité, nous pensons, au contraire, compte tenu de la
crédibilité du Conseil des services essentiels ainsi muni d'un
pouvoir de conciliation, de médiation, de rapprochement des parties et
d'un pouvoir d'ordonnance, que les parties vont préférer
effectivement se rendre aux décisions du Conseil des services essentiels
quant à ses pouvoirs de redressement plutôt que de courir
après la judiciarisation du conflit. Cela nous apparaît être
une piste d'avenir. En tout cas, je le répète au
député, cela a considérablement aidé dans d'autres
provinces canadiennes. Il nous semble que c'est loin d'être inutile et
qu'au contraire, cela peut contribuer à améliorer les choses.
Prenez le cas de Saint-Ferdinand d'Halifax; je fais un scénario -
on peut en faire 100 - mais je fais un scénario. Plutôt que de se
retrouver dans un recours en injonction avec des mépris de cour et des
condamnations pour outrage au tribunal et des congédiements, etc., qui
enveniment la situation plutôt que de rapprocher les parties, le Conseil
des services essentiels aurait pu, dès l'annonce d'un débrayage
possible, intervenir, ordonner le respect de la convention collective aux deux
parties, ordonner un arbitrage accéléré des griefs et
prendre des mesures qui auraient évité le recours aux tribunaux
par les deux parties, ce qui vient envenimer le conflit plutôt que le
régler. Quelles auraient été les décisions du
Conseil des services essentiels? À ce moment-là, comme je le dis,
on peut en imaginer, les pouvoirs sont larges et le Conseil des services
essentiels aurait eu des pouvoirs d'intervention rapide. Si les parties y ont
confiance comme elles ont présentement confiance au Conseil des services
essentiels sans ces pouvoirs, je pense que ce sera une amélioration
considérable à notre droit du travail.
S'il avait existé une commission des relations ouvrières
comme cela existe dans d'autres juridictions, je reconnais que cela aurait pu
être intéressant d'envisager la possibilité de lui confier,
plutôt qu'au Conseil des services essentiels, de tels pouvoirs de
redressement. Cela aurait pu être intéressant
de le regarder. Cependant, on se serait privé, à ce
moment, de l'expérience que nous avons déjà avec le
Conseil des services essentiels et du pouvoir moral très grand dont il
dispose déjà. Le fait d'envisager la création d'une
commission des relations du travail uniquement pour les fins du secteur public,
je pense que c'était un pensez-y bien, pour employer l'expression bien
connue.
M. de Bellefeuille: L'expression bien connue'
M. Clair: II nous est apparu préférable,
après avoir évalué le pour et le contre de chacune des
hypothèses, de retenir celle-ci.
Alors, nous sommes prêts, M. le Président, à entamer
l'étude de l'article 1?
Le Président (M. Lachance): Article 1?
M. de Bellefeuille: Non, M. le Président.
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député.
M. de Bellefeuille: Avant l'article 1, sur la même question
qui vient d'être discutée par le ministre et le
député de Rosemont, j'avoue que je n'arrive pas à
comprendre la logique...
Une voix: Cela allait bien.
M. de Bellefeuille:... du ministre lorsqu'il dit que le projet de
loi confie au Conseil des services essentiels des pouvoirs équivalents
à ceux de la Cour supérieure. Comment, dans sa logique, cela
a-t-il pour effet de déjudiciariser le système? Il me semble que
cela a exactement l'effet inverse. Cela judiciarise le système. Le
Conseil des services essentiels acquiert une autorité de type
judiciaire; donc, par conséquent, cela judiciarise le
mécanisme.
M. Clair: M. le Président, quand je dis que cela
déjudiciarise le processus, c'est à l'égard des tribunaux
de droit commun. Le député connaît sûrement toute une
série de cas de conflits qui se sont retrouvés devant les
tribunaux par des recours en injonction. Ce que je lui indique, c'est que, dans
les autres juridictions du Canada, les tribunaux de droit commun ont
refusé l'émission d'injonctions à la demande des parties
parce qu'il y avait un autre recours moins judiciaire, plus approprié
dans le cadre de mécanismes visant à favoriser de bonnes
relations du travail. L'attente à l'égard d'un tel pouvoir de
redressement, ce n'est pas que, dans tous les cas, le Conseil des services
essentiels émette une ordonnance, elle n'est pas respectée et
c'est déposé devant la Cour supérieure. Effectivement,
cela entraîne le processus de judiciarisation, tel qu'on le
connaît. C'est une étape antérieure au processus de
judiciarisation des conflits, tel qu'on le connaît actuellement.
Je dis ceci au député: On n'essaie pas d'inventer la roue
ici. Cela a fonctionné ailleurs, dans le reste du Canada; cela a,
effectivement, contribué à déjudiciariser les relations du
travail, les conflits, c'est sûr! Parce que les tribunaux de droit commun
ont refusé l'émission d'injonctions disant: Il y a un autre
recours plus approprié, qui est plus de la nature des relations du
travail qu'un tribunal de droit commun qui émet des injonctions. Si le
député veut avoir de la jurisprudence à cet égard,
il me fera plaisir de lui en fournir. Mais, encore une fois, il ne faut pas se
mettre des idées en tête et s'imaginer qu'à partir de cela
tout, tout, tout va être réglé; mais c'est un moyen
d'améliorer les relations du travail et de sortir les conflits des
tribunaux judiciaires.
M. de Bellefeuille: M. le Président, je sais que vous
désirez vivement appeler l'article premier. Mais, avant que vous le
fassiez, je voudrais exprimer le regret que vous ayez mis fin à la
période des remarques préliminaires sans que nous ayons eu le
grand bénéfice d'entendre les interventions des
députés de Bourassa, de Terrebonne, de Châteauguay,
d'Iberville, de Roberval, de Mme la députée de Johnson, laquelle,
avant d'être députée, était une
conférencière très prisée. Alors, nous aurions
apprécié l'entendre ici.
M. Beauséjour: Vous en oubliez un.
M. de Bellefeuille: Lequel?
M. Beauséjour: Le député de
"filibuster".
M. de Bellefeuille: Le député de "filibuster"?
C'est vous, sûrement! Je ne blague pas du tout, M. le Président.
Le député de Terrebonne, justement, qui me dit "oh ya", nous
savons qu'il a généralement des opinions sur toutes les
questions. Je m'étonne qu'il ne nous en fasse pas part sur cet important
projet de loi.
M. Blais: J'en ai justement une, monsieur. J'aimerais beaucoup
qu'on passe à l'article 1.
M. de Bellefeuille: Oui. Mais cela nous privera des remarques
préliminaires de ces collègues dont les compétences
pourraient être très utiles à la commission. Par exemple,
le député d'Iberville, qui est devant nous...
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Deux-Montagnes, je voudrais vous
signaler que ce que vous faites actuellement est un genre d'ironie qui
n'a peut-être pas sa place, même si on échange, de part et
d'autre, de façon très cordiale. Alors, il est libre à
tous les participants d'y aller de leurs propos. Comme ils ont choisi de ne
pas, à ce moment-ci, participer aux délibérations, aux
discussions de la commission, je pense que vous n'avez pas à insister
pour qu'ils le fassent.
M. de Bellefeuille: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): Alors, si vous n'avez pas
d'autres propos...
M. de Bellefeuille:... je reconnais leur droit de se taire. Mais
je n'accepte pas que vous me fassiez un procès d'intention et que vous
disiez que je fais de l'ironie. Qui peut nier que le député de
Roberval a acquis une précieuse expérience dans le domaine de
l'enseignement?
M. Paradis: Ce n'est pas moi!
M. de Bellefeuille: Qui peut nier qu'il en va autant du
député d'Iberville et du député de Bourassa? Qui
peut nier - et je me répète - que Mme la députée de
Johnson était une conférencière très
prisée?
M. Pagé: La voici!
M. de Bellefeuille: J'exprime de façon sérieuse et
sincère le regret que la commission n'ait pas eu l'avantage d'entendre
les remarques préliminaires de nos collègues
ministériels.
Le Président (M. Lachance): Cela viendra peut-être
au cours de nos travaux, M. le député!
M. de Bellefeuille: Je le souhaite vivement, M. le
Président.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Brome-Missisquoi.
Déjudiciarisation du système
M. Paradis: M. le Président, j'aurais une question qui m'a
été suggérée par les propos du député
de Deux-Montagnes concernant la judiciarisation ou la déjudiciarisation
du processus dans lequel on s'embarque. Je prenais connaissance d'un document
sur les sommets socio-économiques de 1981. L'ex-ministre des Affaires
sociales, actuel député d'Anjou, ministre de la Justice et des
Affaires intergouvernementales, déplorait à l'époque que
le système de relations du travail, strictement dans le secteur de la
santé au Québec, avait coûté dans l'année qui
précédait son intervention, qui était en juin 1981, plus
de 10 000 000 $. Ce n'était pas en Cour supérieure,
c'était au niveau du Tribunal du travail pour l'ensemble des griefs. Les
propos du député d'Anjou indiquaient que 10 000 000 $
représentaient la mise en place et le fonctionnement sur une base
annuelle de trois centres d'accueil importants. Je ne peux pas citer le nombre
exact de lits qu'il avait cité à l'époque. Il
déplorait que le système soit tellement judiciarisé.
Dans les réponses que vous avez données tantôt
à mon collègue, le député de Deux-Montagnes, vous
avez indiqué que, parce que cela n'allait pas en Cour supérieure,
que cela allait devant un tribunal inférieur à qui on tentait de
donner une juridiction quand même équivalente à celle de la
Cour supérieure, cela allait avoir pour effet de déjudiciariser
le système.
Dans les expériences précédentes, lorsque le
législateur, que ce soit un gouvernement libéral, péquiste
ou unioniste, a créé des régies et des commission de
toutes sortes, on s'est aperçu que cela n'avait pas
nécessairement l'effet recherché. Cela rendait peut-être la
justice plus accessible parce que moins coûteuse, mais que cela n'avait
pas pour effet de déjudiciariser. Au contraire, en rendant la justice
plus accessible à plus de gens, moins coûteuse, en ayant plus de
tribunaux, plus de forums et plus de juges, on avait l'effet contraire: on
judiciarisait, on faisait en sorte que les conflits se multipliaient.
À la dernière commission parlementaire sur les affaires
sociales qui s'est tenue ici la semaine dernière concernant les
effectifs médicaux, j'ai eu à adresser une question aux
représentants de l'Association des hôpitaux du Québec, aux
représentants des centres d'accueil publics et des centres d'accueil
privés. Je leur demandais: À quoi attribuez-vous cette
judiciarisation du processus qui fait en sorte que vous avez à traiter
un tel nombre de griefs dans le domaine des relations du travail par
année, etc? J'ai obtenu des réponses qui variaient, des centres
d'accueil privés aux centres d'accueil publics, à l'Association
des hôpitaux du Québec. J'imagine qu'avant de déposer un
nouveau mode de négociation vous êtes, en tant que
président du Conseil du trésor, très conscient des
coûts que peut amener ce processus de judiciarisation additionnelle, des
problèmes et des coûts importants que cela amène sur le
plan budgétaire et sur le plan social. Quels sont les dossiers que vous
avez étudiés dans le domaine des affaires sociales, quelles sont
les données que vous avez recueillies? À partir des
données recueillies, quelles sont les orientations que vous avez
choisies pour diminuer cette judiciarisation?
M. Clair: M. le Président, si le député
de Brome-Missisquoi lit les articles qui concernent les pouvoirs de
redressement du Conseil des services essentiels, il y verra effectivement toute
une série de nouveaux pouvoirs qui, quant à nous, constituent une
déjudiciarisation. Je dois dire que, sauf erreur, parmi les experts en
relations du travail que j'ai rencontrés, je ne me souviens pas d'en
avoir rencontré un seul qui ait considéré que les pouvoirs
de "cease on desist", qui sont ceux qui seront confiés au Conseil des
services essentiels, aient contribué à judiciariser les conflits
où que cela soit, où que cela ait été introduit,
premier point. Deuxième point, en ce qui concerne les arbitrages de
griefs et les coûts qui y sont associés, je vous rappelle que cela
fait partie du contenu des conventions collectives et non pas du régime
de négociation. (21 h 45)
M. Paradis: Lorsque vous me dites que vous avez consulté
les experts, c'est justement là que je suis porté à vous
poser une question additionnelle. Si vous voulez déjudiciariser un
système et que vous consultez les gens qui y ont un avantage ou qui
vivent, finalement, des retombées de la judiciarisation et de la
complexité du système, je me dis: Est-ce que vous êtes
certain - c'est une question avec strictement un point d'interrogation, ni dans
une direction, ni dans l'autre - que votre approche va vous conduire vers
l'objectif qui vous anime? Vous me dites que vous avez consulté les
experts de ce domaine; à chaque fois que j'ai vu un ministre me
répondre cela, on s'est retrouvé, six mois, un an ou un an et
demi après, avec encore un peu plus de problèmes où les
experts avaient encore à être un peu plus consultés, etc,
etc. Vous comprenez leur intérêt dans ce dossier. Est-ce que vous
avez consulté d'autre3 experts?
M. Clair: Sur la base des experts consultés et des
expériences étrangères, M. le Président, la
réponse à la question est oui.
M. Paradis: Si la réponse à la question est oui,
quels sont ces experts?
M. Clair: Si vous voulez qu'on vous fournisse la liste, on fera
du travail et on vous la fournira d'ici quelques semaines, parce qu'il y a eu
des gens de rencontrés dans à peu près toutes les
provinces canadiennes et dans quelque chose comme dix pays européens. On
vous la fournira, mais quand on aura le temps.
M. Paradis: J'accepte votre réponse que vous êtes
prêt à la fournir, mais, si les rencontres ont eu lieu, j'imagine
que vous savez qui a été rencontré et que la liste est
disponible. J'accepte votre réponse que vous êtes prêt
à la fournir. Je vous en sais gré, de cette réponse. La
partie de la réponse qui dit: Dans quelques semaines, après la
commission, après la loi, après l'Assemblée nationale,
celle-là, je l'apprécie un peu moins, à moins que vous ne
me disiez qu'il y a des difficultés vraiment techniques à dresser
une telle liste. Si ces rencontres ont eu lieu, j'imagine que c'est facile
à compiler, cela se livre sur quelques feuilles de papier, à
moins qu'il n'y en ait eu des milliers et des milliers comme les articles des
décrets. Je ne pense pas que ce que je demande soit tellement
déraisonnable et j'apprécie votre réponse à savoir
que, oui, vous avez consulté ailleurs, oui, vous êtes prêt
à la fournir. Si vous pouviez continuer en me disant: Oui, on vous la
remettra d'ici la fin de semaine ou au début de la semaine prochaine, je
trouverais que c'est une réponse acceptable, M. le ministre. Mais, si
vous me dites: Dans quelques semaines, je comprends que vous ne voulez pas la
fournir.
Une voix: Quand on n'a pas le temps.
M. Clair: M. le Président, si le député lit
le document de M. Jean-Claude Cadieux et Jean Bernier, "Caractéristiques
du régime de relations du travail dans le secteur public de certains
pays industrialisés", il trouvera à l'annexe 2, page 65 et
suivantes, le nom d'un certain nombre d'experts qui ont été
rencontrés. Maintenant, je dis simplement au député deux
choses c'est que, s'il veut une bibliographie sur les relations du travail au
Canada, son service de recherche se fera sûrement un plaisir de lui en
fournir une, d'une part. D'autre part, quant au nombre de personnes qui ont
été rencontrées, je dis honnêtement au
député que la liste qu'on pourrait fournir serait certainement
partielle parce que, oui, il y a eu des dizaines et probablement des centaines
d'experts canadiens, québécois qui ont été
rencontrés. J'en ai rencontré certains personnellement, d'autres
ont été rencontrés par les fonctionnaires du
ministère des Affaires sociales, par les associations patronales qui
nous ont fait rapport. M. le Président, je pense que le
député...
M. Paradis: Si le problème du ministre est de dire: Je ne
peux pas voir, mes conseillers ou d'autres organisations patronales ou
même syndicales ont peut-être rencontré des experts, je
comprends la raisonnabilité de son propos. J'aimerais savoir - c'est lui
qui est le parrain du projet de loi - les experts de l'extérieur que
vous avez consultés, vous, etc. Je ne vous demande pas tous ceux de
votre cabinet, tout cela. Vous exagérez. Mes demandes sont
généralement très raisonnables et je vous demande qui vous
avez rencontré, qui vous avez consulté
et cela me suffira, M. le ministre. Je ne voudrais pas que vous pensiez
que je veux savoir tout le monde, qui l'AHQ a rencontré au cours des
cinq dernières années, pour vous donner un exemple, ou la CEQ,
etc. C'est ne pas cela que je vous demande. Mes propos s'adressent à
vous, M. le ministre; je vous le demande bien simplement et bien humblement
parce que vous avez acquiescé à me fournir la liste. Maintenant,
vous m'avez dit: Je vais vous remettre aux calendes grecques. Je joue sur
l'échéance, je ne joue pas sur d'autre chose. Au lieu des
calendes grecques, je vous demande si vous pouvez nous fournir la liste des
personnes que vous avez rencontrées dans un délai raisonnable, au
début de la semaine prochaine. Cela serait très acceptable, M. le
ministre.
M. Clair: Alors, pour le début de la semaine prochaine, la
réponse c'est non, M. le Président, parce que je vais être
en commission parlementaire et je n'ai pas l'intention d'écrire mes
mémoires pour essayer de retracer toutes les personnes que j'ai
rencontrées là-dessus.
M. Paradis: M. le président du Conseil du trésor,
est-ce que vous vous rendez compte? Vous avez répondu: Oui, on va vous
la fournir et là vous nous avez renvoyé aux calendes grecques.
Là, vous nous dites non. Est-ce que vous vous rendez compte qu'en...
M. Clair: Vous m'avez demandé la liste des experts.
M. Paradis:... argumentant comme vous le faites, M. le ministre -
je m'excuse, je ne vous ai pas interrompu - vous me dites: M. le
député de Brome-Missisquoi, vous aviez raison de conclure que la
réponse était non? Si vous avez eu une telle attitude, tout au
cours de la préparation du projet de loi, dans vos rencontres avec les
représentants des travailleurs et des travailleuses, je comprends qu'on
en soit rendu où on est. Avec des attitudes où on amène
quelqu'un sur une piste, où on tente de le tromper, où on le
renvoie aux calendes grecques, où on le ramène après et
où on lui dit: Ma vraie réponse du début, c'était
pour me moquer de toi. C'était non, tu ne l'auras pas, la liste, je
comprends qu'on ait des problèmes de relations du travail.
M. Clair: M. le Président, la question du
député, au départ, était: Les experts
consultés? Il n'a pas dit les experts rencontrés personnellement
par le ministre. À cela, je lui ai dit que, sans doute, oui, il
était possible de faire une telle liste. Maintenant, je lui indique
également que, dans cette liste d'experts, oui, certainement
figureraient les principaux responsables des syndicats des secteurs public et
parapublic que je considère, oui, comme étant des experts en ces
matières.
Maintenant, je dois dire au député de Brome-Missisquoi que
ni mon nom, ni le sien n'apparaîtraient sur la liste, c'est bien
évident.
M. Paradis: Non, mais, M. le président du Conseil du
trésor, je sais que vous avez entendu et consulté les gens qui
ont été appelés à témoigner ou à
comparaître en commission parlementaire. On dispose déjà de
ces listes. Mais, étant donné, que vous semblez en possession de
tant d'informations qui semblent nous échapper de ce
côté-ci de la table, j'aimerais savoir bien humblement qui,
à part ces gens, vous avez consulté. Vous avez mentionné
des gens d'autres provinces, d'autres pays, etc. Je suis prêt à
vous croire, mais j'aimerais connaître vos sources. Vous m'avez dit: Oui,
je vais vous communiquer mes sources, mais je vais vous les communiquer
peut-être cet été quand j'aurai le temps, etc. Ce n'est
quand même pas un travail incommensurable et, à la fin, vous
m'avez dit: Non, vous ne les aurez pas.
J'ai de la misère à comprendre votre bonne foi. Je suis
prêt à entreprendre l'étude de l'article 1. Je suis
prêt à l'entreprendre, M. le ministre, mais dans une
atmosphère où il y a au moins, s'il n'y en a pas eu ailleurs, de
la bonne foi des deux côtés de la table ici, où l'on peut
poser honnêtement une question à un ministre, où il nous
répond honnêtement et où on y va à visière
levée et non en tentant de s'enfarger ou de se jouer des tours d'un
côté et de l'autre de la table, M. le ministre. C'est aussi simple
que cela.
Le Président (M. Lachance): Cela allait si bien avant que
vous arriviez.
Une voix: Tu es fort, toi.
M. Clair: Je comprends qu'on est prêt à aborder
l'article 1, M. le Président?
M. Paradis: Là, est-ce que ma demande est en suspens ou si
on peut avoir une réponse? Est-ce que c'est la première
réponse aux calendes grecques, c'est-à-dire que je peux
m'attendre à la recevoir peut-être au mois d'août ou au mois
de septembre, ou est-ce votre dernière réponse qui prévaut
sur les autres soit que vous n'en aurez pas "pantoute"? Je veux savoir à
quoi m'en tenir.
M. Clair: Ce que j'indique au député, c'est que je
lui ai dit: Non, je ne ferai pas personnellement une liste de toutes les
personnes que j'ai rencontrées, en ce qui me concerne, parce que cette
liste serait, forcément, basée uniquement sur ma mémoire.
Il n'y a pas eu de compilation de toutes les rencontres que j'ai tenues et
je
serais incapable, sur la base de ma simple mémoire, de donner le
nom de toutes et chacune des personnes que j'ai rencontrées. Je dois
vous dire que les dix secrétaires des dix Conseils du trésor du
Canada, c'est facile de mettre la main là-dessus, mais parmi les
professeurs d'université que j'ai rencontrés à plusieurs
reprises, ce n'est pas facile de savoir qui exactement a participé
à toutes et chacune des rencontres que j'ai eues. Cette liste serait
incomplète et je n'ai pas l'intention de la dresser.
Ce que je peux indiquer au député, par ailleurs, ce sont
des listes qui existent. Je lui indique celle dressée par MM.
Jean-Claude Cadieux et Jean Bernier. Cette liste est déjà
publique et elle a été mise en annexe au travail qui a
été effectué. Du côté des fonctionnaires tant
du ministère des Affaires sociales, de l'Éducation, du secteur
fonction publique, du secrétariat du Conseil du trésor, ces gens
ont également rencontré un grand nombre de personnes. Je doute
qu'ils soient capables d'en dresser une liste complète et
détaillée dans tous les cas, mais...
M. Paradis: Ce n'est pas ce que je demande, M. le ministre. C'est
vous, votre information.
M. Clair: Cela va vous servir à quoi au juste?
M. Paradis: Cela va peut-être me servir à
vérifier, entre autres, un élément qui me préoccupe
et vous avez sans doute pu le sentir dans mon intervention aux remarques
préliminaires. Dans l'orientation que vous avez prise d'établir
des pourcentages de travailleurs et de travailleuses, dans le secteur de la
santé, surtout dans les centres hospitaliers et les centres d'accueil,
qui n'auront pas à se présenter, où avez-vous pu aller les
chercher? Vous m'avez répondu que, possiblement, vous étiez
allé chercher cela auprès des associations d'employeurs. Je
regarde leur témoignage et je m'aperçois que ce n'est pas
là. Chez les bénéficiaires, chez les travailleurs et les
travailleuses, je m'aperçois que ce n'est pas là. Je me dis: II y
a quelqu'un qui vous a conseillé cela. Vous me dites que ce n'est pas le
ministre des Affaires sociales et cela m'aurait surpris, car il commence
à connaître un peu son dossier. Il n'aurait jamais accepté
que 20 % des travailleurs, lorsqu'on est déjà en pénurie
d'effectifs, ne se présentent pas au travail dans de telles
circonstances.
Je cherche, j'aimerais savoir. Si vous me dites que c'est vous qui avez
pensé à cela dans votre bureau, je vais vous dire: Parfait,
très bien, vous avez droit à vos idées. Vous êtes le
ministre responsable, vous avez le droit de les écrire dans les projets
de loi, vous avez le droit de les défendre et tout. J'aimerais savoir
qui, sur cette planète, a pu vous conseiller de considérer comme
étant sur un pied d'égalité, avec un pourcentage uniforme,
les centres hospitaliers quelle que soit leur location sur l'île de
Montréal, quelle que soit leur situation géographique,
I'Abitibi-Témiscamingue sur le même pied que Sherbrooke, etc. Je
cherche votre inspiration, M. le ministre. Si vous pouvez me dire: J'ai
quelqu'un et je vais vous dire qui exactement, vous allez m'éclairer. Si
vous me demandez le but, je n'ai pas de honte à vous dire quel est le
but de ma question; c'est cela, le but de ma question, je cherche une
réponse honnête.
M. Clair: M. le Président, nous avons débattu de
cette question avant que le député nous fasse l'honneur de sa
présence pour nos travaux. Tout compte fait, à bien l'entendre,
M. le Président, je me ravise et je n'ai pas l'intention de fournir
d'autres listes que celle qui est déjà rendue disponible dans le
document. Cela va peut-être nous permettre d'aborder l'étude de
l'article 1.
Le Président (M. Lachance): Je voudrais signaler à
ce moment-ci que l'article 82 de nos règles de procédure est
très clair: "Le ministre auquel une question est posée peut
refuser d'y répondre. "
M. Paradis: Cela va, je prends cela comme un refus. Je ne suis
pas offensé, pas de problème.
Le Président (M. Lachance): Je pense que c'est
légitime de poser des questions, il faut avoir des échanges, mais
je pense que ce n'est pas l'endroit pour prendre le style de l'interrogatoire
en règle comme dans un prétoire.
M. Paradis: M. le Président, je m'offusque de vos
remarques. Si vous me citez l'article du règlement et que vous me dites
que le ministre a parfaitement le droit de refuser, je vous dis que vous avez
raison d'interpréter le règlement de cette façon. Mais je
ne pense pas que, sur la façon dont je pose mes questions, vous ayez,
malgré tout le respect que j'ai pour la fonction que vous occupez,
à me dicter le verbe, le point d'interrogation, etc., que je mets au
bout de mes phrases. Cela, M. le Président, je vous le soumets en toute
humilité et en tout respect pour la fonction que vous occupez. Je pense
que, lorsque vous prêtez de tels propos, vous outrepassez la fonction qui
est vôtre.
Le Président (M. Lachance): C'est une opinion, M. le
député, et je rappelle que l'article 82 dit ceci: "Le ministre
auquel une question est posée peut refuser d'y répondre. Le refus
de répondre ne peut être discuté. "
M. Paradis: M. le Président, si j'ai insisté, c'est
parce qu'il a dit qu'il me répondrait à la fin de
l'été. J'ai essayé de lui faire rapprocher la date et,
à la fin, il a dit non. S'il avait dit non au début, on n'aurait
pas eu tout ce débat et vous auriez eu raison d'interpréter le
règlement comme vous le faites.
M. de Bellefeuille: M. le Président, sur la question de
règlement que vous avez vous-même soulevée, il me semble
que l'article 82 ne s'applique pas parce que ce n'est pas tellement que le
ministre refuse de répondre, c'est qu'il affirme avoir répondu.
Je ne sais pas quel est l'avis du député de Brome-Missisquoi,
mais il arrive que j'ai le sentiment qu'il n'a pas vraiment répondu
à certains aspects importants de cette question,
particulièrement, la question de savoir comment le ministre
considère souhaitable, équitable de traiter sous le même
pourcentage des établissements appartenant à la même
catégorie, mais étant, à toutes sortes d'égards,
très différents les uns des autres.
Je ne me souviens pas que le ministre ait répondu à cette
question qui me semble très importante. Je lui reconnais le droit de ne
pas répondre, que vous lui avez signalé, rappelé, mais il
affirme qu'il a répondu. Là-dessus, il a divergence de vues, M.
le Président.
M. Paradis: Si vous me permettez, M. le Président, sur
cette question, je n'ai pas insisté auprès du ministre parce que
c'est vrai que je suis arrivé une heure et demie après le
début des travaux. Comme le règlement m'oblige à prendre
la parole du ministre lorsqu'il affirme quelque chose, je me suis
conformé au règlement et j'ai pris la parole du ministre.
Maintenant, vous qui étiez ici, si vous me dites que c'est le contraire,
je suis également obligé de prendre votre parole et là
j'ai des problèmes.
Étude détaillée
Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'on peut passer
à l'article 1? J'appelle l'article 1. J'oserai dire, pour utiliser un
slogan bien connu du député de Brome-Missisquoi, enfin! M. le
ministre.
Application
M. Clair: M. le Président, en ce qui concerne l'article 1,
je voudrais proposer un amendement: Je voudrais proposer que l'article 1 du
projet de loi 37 soit modifié: 1° par l'insertion, dans la
première ligne du deuxième alinéa, avant le mot "au", des
mots "ainsi qu'une commission scolaire confessionnelle". 2° par la
suppression dans les deuxième, troisième et quatrième
lignes du quatrième alinéa des mots "un établissement
privé qui a conclu avec le ministre des Affaires sociales un contrat
prévu par l'article 176 de cette loi". (22 heures) "3° par
l'insertion, dans la sixième ligne du quatrième alinéa,
après le mot "établissement", des mots "ou à des
bénéficiaires".
Cet amendement modifie la désignation d'une commission scolaire
pour tenir compte de la loi 29. De plus, cet amendement retranche formellement
de la définition certains établissements privés
subventionnés à taux fixe qui, en fait, n'ont jamais
été assujettis à la loi 55, qui était l'ancienne
loi. Finalement, il en ajoute d'autres qui ont pour mandat de dispenser des
services directement à des bénéficiaires comme, par
exemple, le Service de réadaptation sociale Inc.
M. de Bellefeuille: M. le Président, je voudrais signaler
au ministre que dans le "deuxièmement" il est question des
deuxième, troisième et quatrième lignes mais, lorsqu'on se
réfère au texte imprimé de la loi, ce sont les
troisième, quatrième et cinquième lignes.
M. Clair: Oui, effectivement, vous avez raison.
M. de Bellefeuille: Je voudrais seulement faire observer au
ministre qu'il se peut que nous ayons parfois raison sur des questions plus
substantielles aussi.
M. Paradis: Elles lui apparaissent moins évidentes.
Le Président (M. Lachance): Alors, il faudrait corriger le
papillon et indiquer deuxième, troisième et quatrième?
M. Paradis: Relativement à la procédure,
étant donné que c'est quand même important, est-ce qu'on
tient pour acquis qu'il y a seulement un papillon exact qui a été
déposé ou est-ce qu'on amende le papillon qui est
déjà devant nous?
M. Clair: Je crois que, pour la procédure, on pourrait
tenir pour acquis que je fais mienne la correction du député de
Deux-Montagnes.
M. Paradis: Avec l'autorisation du député de
Deux-Montagnes, qui donne toujours son consentement dans des causes justes.
M. Clair: Sur l'amendement, moi, je n'ai pas d'autres
explications à donner. On voit que c'est assez limité comme
amendement.
Le Président (M. Lachancc): Oui, sur l'amendement. M. le
député de Rosemont.
M. Paquette: Ce n'est pas sur l'amendement, M. le
Président.
M. Clair: Est-ce que l'amendement est adopté?
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est
adopté?
Une voix: C'est un amendement technique.
M. Paquette: M. le Président, tout en déplorant que
la constitution canadienne ait forcé le gouvernement et cette
Assemblée nationale a adopter la loi 29 qui maintient des commissions
scolaires confessionnelles archaïques et tout en déplorant en
même temps que les récentes propositions constitutionnelles du
gouvernement aient oublié de revendiquer cette modification essentielle
à la constitution canadienne à l'article 93, qui aurait permis
d'éviter tout cela, y compris cet amendement...
M. de Bellefeuille: Donc, c'est adopté avec la
modification qui a déjà été mentionnée.
Le Président (M. Lachance): D'accord. Sur l'article tel
qu'amendé?
M. Paquette: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Rosemont.
M. Paquette: J'aurais d'abord un certain nombre
d'éclaircissements à obtenir en ce qui concerne le premier
alinéa, là où on dit à la quatrième ligne:
"Elle s'applique en outre à un organisme gouvernemental mentionné
à l'annexe C dans la mesure prévue par le chapitre IV, et
à la fonction publique dans la mesure prévue par le chapitre V. "
Si on va voir à l'annexe C qui est à la page 34 du projet de loi,
on retrouve 15 ou 20 organismes dont la Commission des droits de la personne,
la Commission des services juridiques, etc., et il y a des choses dans cela qui
étonnent. J'aimerais savoir ce qui a amené le ministre à
arrêter cette liste en particulier. Remarquez qu'on aurait plutôt
tendance à éliminer toute la liste avec un tel projet de loi
puisque cela va, à notre avis, aggraver les chances de conflit
plutôt que d'aider à les réduire, donc on n'aurait pas
tendance à ajouter des organismes, mais plutôt à en
retrancher. Cependant, par exemple, dans la liste des organismes, il y a
Hydro-Québec, qui est une société d'État qui
fournit, on le comprendra, un service essentiel, surtout en hiver. Les gens se
chauffent à l'électricité et il y a eu parfois des
conflits très importants. Hydro-Québec est incluse dans la liste.
Par contre, SOQUIP ou plus particulièrement Gaz Métropolitain ou
Gaz Inter-Cité - je pense que maintenant les deux ont fusionné -
qui fournit le gaz naturel, service tout aussi essentiel, n'apparaissent pas
dans la liste. Comment expliquer cela?
M. Clair: Je vais donner une explication générale,
d'abord, au député de Rosemont. La liste des organismes
gouvernementaux qui apparaît à l'annexe C est exactement, sauf
erreur il y a peut-être un cas de différence - la même que
celle qui était dans l'ancienne loi 55. Les dispositions
régissant le régime de négociation pour ces organismes
sont, à toutes fins utiles, les mêmes que celles qui existaient
dans la loi 55 et qui sont reconduites. Ce qui distingue certaines
régies ou sociétés d'État d'autres, c'est que dans
sa loi constitutive, notamment, Hydro-Québec doit, j'imagine, depuis
qu'elle existe, obtenir des mandats de négociation au Conseil du
trésor alors que SOQUIP, SOQUEM ou d'autres n'ont pas cela dans leur loi
constitutive. À toutes fins utiles, en ce qui concerne ces organismes
gouvernementaux, tant pour la liste que pour les mécanismes, c'est la
reconduction du statu quo. On n'a pas voulu maintenir l'ancienne loi et une
nouvelle avec les dispositions qui continueraient à être
véhiculées dans diverses loi. À toutes fins utiles, c'est
la reproduction du statu quo.
M. Paquette: Est-ce qu'on doit en conclure que dans les grandes
sociétés d'État, où il y a beaucoup
d'employés qui sont syndiqués, à ma connaissance, dans
presque tous Ies cas... Je vois seulement Hydro-Québec ici. Comment le
ministre peut-il justifier que l'on traite différemment une
société d'État qui fournit un service essentiel comme
l'électricité et une société d'État qui
fournit un service tout aussi essentiel et qui remplit les mêmes
fonctions, dans beaucoup de cas, comme une filiale de SOQUIP qui est Gaz
Métropolitain? Comment se fait-il que cela s'applique au
ministère de l'Industrie et du Commerce et que cela ne s'applique pas
à la Société de développement industriel, ni
à la Société nationale de l'amiante, ni à SOQUEM,
ni à REXFOR?
M. Clair: La réponse que j'ai donnée au
député est celle-là: Dans le fond, à l'égard
des organismes gouvernementaux, on reproduit l'histoire, purement et
simplement. Il n'y a pas de modification quant au régime de
négociation, non plus que quant à la liste. Cette liste peut
être raccourcie ou allongée sur décision du gouvernement,
ce qui a été le cas également dans la loi 55. Vous
savez
qu'il existe la commission Beaudry qui se penche actuellement sur les
relations du travail dans le secteur dit privé, dans le secteur de la
production. Nous n'avons pas voulu, à ce moment-ci, modifier le
régime. Les organismes comme Hydro-Québec, notamment, parmi les
sociétés d'État, vous avez raison de dire que c'est la
plus grande et que c'est la seule ou, en tout cas, l'une des rares qui soit
soumise, avec la Société des alcools du Québec, à
la loi 37, comme elles l'étaient à la loi 55. On peut porter
toutes sortes de jugements mais c'est la reconduction du statu quo.
M. Paquette: Est-ce que le ministre peut nous asssurer - si je
l'ai bien compris -qu'on a là exactement et seulement les organismes
publics qui viennent chercher leur mandat de négociation au Conseil du
trésor? Il n'y en a pas d'autres?
M. Clair: Je pense qu'il n'y en a pas d'autres, maintenant... Il
y en a d'autres?
Une voix: Oui. C'est dans la loi qui les forme...
M. Clair: C'est ce que j'indique. Ce sont des organismes qui,
dans leur loi constitutive, doivent obtenir des mandats au Conseil du
trésor. Tous les organismes qui viennent obtenir des mandats
n'apparaissent pas, je pense, dans la liste. Je vais vous dire que c'est
très discutable, effectivement, la question de savoir si
Hydro-Québec devrait continuer à obtenir ses mandats du Conseil
du trésor. Je ne prends pas position, ni dans un sens, ni dans l'autre,
mais simplement c'est très discutable. Le fait qu'Hydro-Québec,
par exemple, fasse partie de cette liste alors que, si je ne fais pas erreur,
SIDBEC ne soit pas soumise à une telle situation, alors que la situation
financière de l'une est florissante et que la situation
financière de l'autre ne l'est pas... On n'a pas voulu vider cette
question par la réforme du régime de négociation. Pour la
continuité, nous avons reproduit substantiellement les mêmes
dispositions que celles qui existaient à l'égard des organismes
gouvernementaux, tant pour les mécanismes que pour la liste, en se
disant que l'objectif visé... Le régime de négociation
dont on parle ici est davantage celui qui concerne le réseau de
l'enseignement, le réseau des affaires sociales et la fonction publique
proprement dite, et non pas les sociétés d'État.
M. de Bellefeuille: M. le Président.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: II me semble que le ministre devrait quand
même pouvoir nous donner certaines explications. Comment se fait-il qu'on
trouve, dans la liste de l'annexe C, le Conseil de la santé et des
services sociaux de la région de Montréal métropolitain,
le Conseil de la santé et des services sociaux de la région de
Québec, le Conseil de la santé et des services sociaux de la
région de Trois-Rivières, le Conseil de la santé et des
services sociaux de la région d'Abitibi-Témiscamingue et aucun
autre conseil régional de la santé et des services sociaux?
M. Clair: Voici la réponse, M. le Président. Je
pense qu'essentiellement c'est parce qu'un certain nombre de ces conseils ou de
ces organismes ne sont pas syndiqués ou, encore, ne constituent pas, au
sens de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Comme
je vous le dis, cette liste a évolué. C'est le résultat
d'une certaine sédimentation, je dirais.
M. Paquette: M. le Président.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: Le ministre nous a dit tout à l'heure que le
gouvernement pouvait allonger ou raccourcir la liste. Cela se fait, j'imagine,
par arrêté en conseil ou par règlement qui est connu du
public, ou par décret.
M. Clair: Je vais vous lire l'article du projet de loi, l'article
76: "Le gouvernement peut retrancher de l'annexe C un organisme qui y figure, y
ajouter tout organisme qu'il a retranché ou tout autre organisme. Il
peut également ajouter ou retrancher une filiale de tout organisme qu'il
désigne. " Je pense que ces dispositions existaient également
dans l'ancienne loi, ce que je vais confirmer. L'ancien article 24 de la loi
disait également: "Le gouvernement peut retrancher de l'annexe un
organisme qui y figure ou ajouter tout autre organisme. Il peut
également ajouter ou retrancher une filiale de tout organisme qu'il
désigne. " C'était l'article 24 du chapitre III, le secteur des
organismes gouvernementaux. Il y a eu des arrêtés en conseil et
des décrets et le plus ancien date de 1978, pour la Régie des
installations olympiques, et le dernier, le Conseil de la santé et des
services sociaux de la région de Montréal métropolitain,
de 1982.
M. Paquette: M. le Président, si je comprends bien, le
ministre nous dit que c'était dans l'ancienne loi et donc aussi dans la
nouvelle, à savoir que le gouvernement peut retrancher ou ajouter des
organismes. Quelles conséquences cela a-t-il du point de vue des
personnes bénéficiaires des services?
Comme je l'ai fait remarquer tantôt, il y a des organismes qui
offrent des services essentiels qui sont dans la liste et il y en a d'autres
qui offrent des services tout aussi essentiels qui ne sont pas dans la liste.
On a parlé de SOQUIP. On pourrait parler de la Société des
transports aussi, une interruption des traversiers trop longtemps, cela peut
être assez embêtant.
M. de Bellefeuille: Le Bureau de la protection civile. (22 h
15)
M. Paquette: Le Bureau de la protection civile n'est pas dedans
non plus. D'une part, du point de vue des services essentiels, il y a certains
services qui ne sont pas soumis à la mécanique compliquée
du projet de loi, si je comprends bien. Est-ce que le conseil a le droit de
regard sur les...
M. Clair: Ces services essentiels? M. Paquette: Oui.
M. Clair: Le Conseil des services essentiels et cette liste de
l'annexe C n'ont rien a voir l'un avec l'autre. Les pouvoirs du Conseil des
services essentiels, à l'égard des autres services, on les
retrouve à l'article 111. 0. 16 du Code du travail qui dit: Dans la
présente section, on entend par "service public", une corporation
municipale et une régie intermunicipale, un établissement et un
conseil régional au sens des paragraphes a et f de l'article 1 de la Loi
sur les services de santé et les services sociaux, une entreprise de
téléphone, une entreprise de transport par autobus, par bateau,
vente de gaz, d'eau, d'électricité, etc. Cette liste n'a rien
à voir avec le Conseil des services essentiels et les dispositions du
Code du travail. C'est simplement pour les fins de l'organisation des
négociations, si on veut, des conventions collectives dans le secteur
des organismes gouvernementaux qu'on retrouve au chapitre IV et qui
reconduisent, comme je l'indiquais, exactement ce que nous avons
déjà comme dispositions.
M. Paquette: Donc, tous les nouveaux pouvoirs du Conseil des
services essentiels s'appliquent à tous les organismes que vous venez de
mentionner...
M. Clair: Exactement.
M. Paquette:... et pas seulement à la liste qui est
à l'annexe C.
M. Clair: Quand on y arrivera au moment de l'étude de ces
articles, on verra dans quelles circonstances et comment s'appliquent les
nouveaux pouvoirs du Conseil des services essentiels à ces organismes.
Je vous rappelle simplement qu'en termes de législation, quand on
modifie les pouvoirs du Conseil des services essentiels, on modifie le Code du
travail. Il y a d'autres dispositions qui se trouvent déjà au
Code du travail alors que la loi sur le régime de négociation, le
projet de loi 37 qui est devant nous, remplace l'ancienne loi 55.
M. Paquette: Sur un autre plan, on va clarifier cette question
par rapport aux services essentiels. Sur le plan des syndiqués qui sont
soumis à la loi 37 dans leur négociation, est-ce que le ministre
ne trouve pas un peu abusif que le gouvernement, par décret ou
arrêté en conseil, unilatéralement et sans passer par
l'Assemblée nationale, puisse décider demain matin que les
syndiqués de SOQUIP ou les syndiqués de la Société
des transports vont être soumis à la loi ou qu'à l'inverse
- je pense qu'il n'y a pas beaucoup de syndiqués qui s'en plaindraient -
les syndiqués d'Hydro-Québec seront exclus de la loi? Est-ce que
cela n'est pas un peu abusif qu'unilatéralement, sans passer par
l'Assemblée nationale, le gouvernement puisse allonger ou restreindre la
liste, donc faire tomber plus ou moins de salariés sous la coupe de la
loi 37?
M. Clair: M. le Président, je pense que le
député de Rosemont n'a pas lu les articles 75 et suivants du
projet de loi parce qu'il verrait qu'à l'égard des organismes
gouvernementaux le fait de pouvoir ajouter ou retrancher à la liste des
organismes gouvernementaux n'a pas comme conséquence de changer les
conditions de travail de qui que ce soit. On lit à l'article 75: "Les
stipulations d'une convention collective liant une association de
salariés à un organisme gouvernemental sont
négociées et agréées suivant les dispositions du
présent chapitre. " Ce n'est pas trop méchant jusque-là.
Le gouvernement peut retrancher - ce que je viens d'indiquer - et ajouter
à cette liste. Les articles de fond disent simplement qu'une
"association de salariés négocie et agrée, par l'entremise
d'un agent-négociateur qu'elle nomme, toutes les stipulations d'une
convention collective la liant à un organisme gouvernemental. " On dit
qu'avant d'entreprendre avec une association de salariés la
négociation d'une convention un organisme gouvernemental soumet au
ministre responsable un projet établissant les paramètres
généraux d'une politique de rémunération et de
conditions de travail. C'est soumis pour approbation au Conseil du
trésor qui détermine, en collaboration avec celui-ci et
l'organisme, les modalités selon lesquelles est assuré le suivi
du déroulement des négociations. La politique de
rémunération et de conditions de travail approuvée avec ou
sans modification par le Conseil du trésor et les modalités
déterminées pour le suivi du déroulement des
négociations lient l'organisme qui est tenu de s'y conformer.
Finalement, on dit qu'un organisme gouvernemental négocie, agrée
et signe une convention collective dans le cadre défini en application
des articles 78 et 79. Le fait qu'un organisme gouvernemental soit soumis ou
non à cette annexe ne vient pas modifier la question des services
essentiels, du pouvoir de décréter ou quoi que ce soit. Ce sont
des articles d'une portée très limitée qui
prévoient l'organisation des négociations en ce qui concerne ces
organismes.
M. de Bellefeuille: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille:... j'essaie de comprendre les allusions que
le ministre a faites à la commission Beaudry. Permettez-moi de poser la
question avant que vous y répondiez et merci de votre empressement, mais
je crois me souvenir que la refonte du Code du travail est un
élément très important du programme du Parti
québécois depuis toujours et c'est encore dans la version de ce
programme.
La commission Beaudry va peut-être permettre commodément au
gouvernement de ne pas agir dans ce domaine avant les prochaines
élections, parce que je n'ai pas l'impression que le gouvernement aura
le temps d'agir. Je ne sais quand la commission est censée remettre son
rapport mais, quoi qu'il en soit, je ne vois pas très bien ce que la
commission Beaudry a à faire là-dedans. Il s'agit ici, de toute
façon, d'organismes publics et il me semble que le mandat de la
commission Beaudry ne concerne pas les organismes publics. C'est cela que
j'aimerais que le ministre clarifie.
M. Clair: Le mandat que j'avais du Conseil des ministres
consistait à proposer une réforme du régime de
négociation dans les secteurs public et parapublic pour le réseau
des services de santé, des affaires sociales, de l'éducation, de
l'enseignement primaire, secondaire et collégial et de la fonction
publique.
Traditionnellement annexés aux lois qui régissaient ces
relations du travail, ces régimes de négociation, apparaissaient
un certain nombre d'organismes ou de sociétés d'État. Je
dis simplement au député que nous les avons reconduits dans leur
statut tels qu'ils sont présentement. Pour ce qui est de la commission
Beaudry, celle-ci est chargée de réviser le Code du travail. Il
nous semble que des sociétés d'État qui sont
opérationnelles dans des services, que ce soit
l'hydroélectricité, l'acier ou autre, sont davantage soumises aux
règles usuelles du Code du travail que les employés de
l'État dans des réseaux comme ceux de la santé, des
affaires sociales et de l'éducation. C'e3t la raison pour laquelle,
avant de bouger, nous avons voulu attendre le rapport de la commission
Beaudry.
Le Président (M. Lachance): Cela va?
M. Paquette: M. le Président, j'ai une autre question.
M. de Bellefeuille: M. le député d'Iberville veut
intervenir, M. le Président.
M. Beauséjour: Vas-y! Vas-y!
M. de Bellefeuille: Vas-y!
Le Président (M. Lachance): Vous avez la parole.
M. Paquette: M. le Président, je me reporte au
deuxième alinéa de l'article 1 où on dit "une commission
scolaire... et tout autre organisme similaire désigné par le
gouvernement pour l'application de la présente loi. " On définit,
en quelque sorte... Dans l'ensemble des organismes visés dans le monde
de l'éducation, on retrouve des organismes publics. Est-ce que les
institutions d'enseignement privées sont incluses dans le champ
d'application du projet de loi?
M. Clair: Non, elles ne sont aucunement concernées. Encore
là, en ce qui concerne les expressions "une commission scolaire" et
"tout autre organisme similaire désigné par le gouvernement pour
l'application de la présente loi", ces deux formulations, dans les deux
cas, se retrouvaient également dans l'ancienne loi 55.
M. Paquette: D'accord. Comment le ministre explique-t-il
qu'à l'alinéa 4 on inclue, par contre, dans le champ
d'application de la loi, les établissements privés
conventionnés au sens de la Loi sur les services de santé et les
services sociaux, donc les établissements privés
subventionnés par le gouvernement, et qu'on n'inclue pas, dans le
secteur scolaire, les institutions d'enseignement privées qui sont
également subventionnées, sauf deux ou trois exceptions, à
80 % ou à 60 % et où on trouve également des travailleurs
syndiqués?
M. Clair: Tantôt, j'ai proposé de retrancher "un
établissement privé qui a conclu avec le ministre des Affaires
sociales un contrat prévu par l'article 176 de cette loi", ce qui exclut
un certain nombre de ces organismes.
En ce qui concerne les établissements dits privés
conventionnés, en fait, on sait que ces établissements offrent
non seulement
des services identiques, mais qu'ils sont, à toutes fins utiles,
entièrement financés par l'État. Je pense qu'ils sont
couverts par le régime de négociation depuis le tout début
alors que les établissements d'enseignement privés ne l'ont
jamais été. Dans un esprit de décentralisation, comme
disait le député tantôt, je ne pense pas qu'il y ait lieu
d'inclure ceux du secteur de l'enseignement privé.
Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 1 est
adopté?
M. Beauséjour: II a été adopté.
Le Président (M. Lachance): L'amendement est
adopté.
M. Paradis: Si vous voulez intervenir rétroactivement, il
pourrait y avoir un consentement.
M. de Bellefeuille: On va rouvrir tout cela pour vous, M. le
député.
Le Président (M. Lachance): Alors, l'article 1 est
adopté. M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: J'aurais quelques questions. Tantôt, à
une des questions d'un de mes collègues indépendants, le ministre
a répondu, quant à la liste de l'annexe C, que c'étaient
des organismes qui étaient déjà là. J'ai
noté l'expression, le ministre a répondu: L'explication, c'est de
la sédimentation. J'ai trouvé cela très bien comme
réponse, mais j'ai comparé une liste - je n'ai peut-être
pas la dernière documentation, j'y vais prudemment, comme on dit, j'ai
celle qui date du 7 février 1985 - avec celle que l'on retrouve à
l'annexe C et, justement, sur la question qui concernait les conseils de
santé, la sédimentation pourrait s'appliquer dans trois des
conseils de santé mentionnés mais elle ne s'applique pas, suivant
le document auquel je vous référais, en ce qui concerne le
Conseil de la santé et des services sociaux de la région
d'Abitibi-Témiscamingue. À ce moment-là, je ne peux pas
appliquer votre réponse de sédimentation. Je suis obligé
de vous poser une question additionnelle: Dans ce cas-là, si ce n'est
pas de la sédimentation, qu'est-ce que c'est?
M. Clair: Le Conseil de la santé et des services sociaux
de la région d'Abitibi-Témiscamingue avait été
inclus à la liste par le décret 2594-83 du 14 décembre
1983; c'est l'information que j'ai. Quand je dis que c'est un processus de
sédimentation, ce que je voulais indiquer au député, c'est
que cette liste s'était allongée avec les années. Je n'ai
pas fait de recherche à cet égard, mais l'une des toutes
premières à apparaître a sans doute été
Hydro-Québec puisque c'est une des plus anciennes sociétés
d'État. Quand j'ai dit que c'est un processus de sédimentation,
j'entendais par là qu'il y avait eu des organismes qui s'étaient
ajoutés au fil des ans et que, aujourd'hui, on avait simplement repris
la même liste et on l'a reproduite dans le projet de loi 37, à
l'annexe C.
M. Paradis: C'est là que j'ai un problème, M. le
ministre.
M. Clair: Oui, quoi?
M. Paradis: À partir du Code du travail annoté du 7
février 1985, dans la première liste, parmi les premières
que vous avez mentionnées - vous avez raison de mentionner
Hydro-Québec - il y avait la Commission des droits de la personne, les
commissions de formation professionnelle de la main-d'oeuvre, la Commission des
services juridiques, les corporations d'aide juridique, la
Société des alcools du Québec, la Société
des traversiers du Québec et la Sûreté du Québec. En
astérisque, suivant l'article 24, d'autres organismes ont
été ajoutés. C'est indiqué dans le texte et il me
fera plaisir de vous le remettre si vous voulez le consulter. On ajoute la
Régie des installations olympiques, la Société des
loteries et courses du Québec, la Société de
radio-télévision du Québec, l'Office de la construction du
Québec, le Conseil de la santé et des services sociaux de la
région de Québec - là, cela va, cela fait partie de la
même annexe - le Conseil de la santé et des services sociaux de la
région de Trois-Rivières - cela va également - et le
Conseil de la santé et des services sociaux de la région de
Montréal métropolitain. Celui-là aussi va, mais je n'ai
pas l'autre; je ne sais pas s'il y a eu une erreur de codification.
L'explication "sédimentation", avec les deux listes que je tente de
coller ensemble, mais j'ai un trou d'un organisme. (22 h 30)
M. Clair: Alors, il semble que cet organisme aurait
été oublié puisque l'information que j'ai... Je vous donne
le numéro du décret, je n'ai pas le décret avec moi; il
porte le numéro 2594-83. Il date du 14 décembre 1983 et concerne
le Conseil de la santé et des services sociaux de la région de
l'Abitibi-Témiscamingue. Il semble que la codification administrative
que vous avez comportait une erreur.
M. Paradis: C'était...
M. Clair: On n'ajoute pas par l'effet de la loi.
M. Paradis:... la vérification que je voulais faire.
Maintenant, si on retient votre
explication de sédimentation et étant donné que
vous parlez de réforme majeure, que vous parlez de réforme
importante, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, pour vous, comme ministre
responsable, soit d'ajouter l'ensemble des autres conseils régionaux,
pour que tout le monde se retrouve dans ce système sur un pied
d'égalité, soit de retrancher les conseils qui y sont
déjà mentionnés? Comment peut-on justifier, s'il
s'agissait strictement de centres urbains... Si on parlait de Québec et
de Montréal et qu'on me disait que c'est différent au niveau de
l'ampleur des conseils régionaux, je comprendrais et je dirais: II y a
peut-être une logique qui sous-tend qu'on ait les grands centres urbains
au Québec, mais, lorsqu'on a Trois-Rivières et
Abitibi-Témiscamingue, et qu'on n'a pas - à titre d'exemple -
Montérégie, je me dis: Est-ce que vraiment on uniformise ce
domaine? Pourquoi avez-vous choisi, dans le cas des conseils de santé et
de services sociaux, la sédimentation plutôt que la progression ou
l'abstention?
M. Clair: Je vous ai donné une indication tantôt, M.
le Président. On ne peut pas couvrir, par le régime de
négociation, des conseils régionaux de santé et de
services sociaux qui ne sont pas syndiqués, où il n'y a pas de
négociation de convention collective.
M. Paradis: Ce que vous me dites, c'est que tous les autres qui
ne sont pas listés là ne sont pas syndiqués et qu'il n'y a
pas de convention collective.
M. Clair: Je ne pourrais pas parler en date d'aujourd'hui, mais
je dis simplement que la liste, à la date à laquelle la
sédimentation s'est terminée, c'était...
M. Paradis: Quelle est cette date?
M. Clair: C'est ce que j'indique. Le dernier qui a
été entré dans les conseils régionaux de services
de santé, il semble que ce soit celui de l'Abitibi-Témiscamingue
au mois de décembre 1983.
M. Paradis: On prend décembre 1933 comme date de...
M. Clair: Non. La date du projet de loi est la date officielle de
ce qu'on reproduit dans la liste, mais je dis simplement que, selon les
informations que j'ai, il semble que les autres conseils régionaux de
santé et de services sociaux n'étaient pas syndiqués.
M. Paradis: Je ne peux pas vous contredire, je vous le dis...
M. Clair: Je ne peux pas dire s'il y en a...
M. Paradis:... bien humblement. S'ils étaient
syndiqués, je ne comprendrais pas la logique. Si vous pouvez m'affirmer
qu'ils ne le sont pas et que c'est différent, cela va, je vais suivre la
logique du ministre.
M. Clair: Alors, après avoir consulté mes gens, M.
le Président, il semble qu'il y en ait deux qui étaient en voie
de syndicalisation récemment, à moins que cela soit très
récent dans le style d'il y a quelques mois, tout au plus, parce que la
pratique était, sur le plan de la gestion de ces organismes, que,
dès qu'un conseil régional de la santé et des services
sociaux était syndiqué et qu'il y avait négociation d'une
convention collective, on l'incluait dans la liste afin que la
négociation... J'ai lu des articles tantôt. À grands
traits, ils disent simplement que l'organisme doit établir une politique
de rémunération, qu'il doit la faire approuver et faire approuver
ses mandats par le Conseil du trésor, et que chaque partie se nomme un
agent négociateur. Ce n'est pas plus sorcier que cela, les dispositions
qui concernent les organismes gouvernementaux.
M. Paradis: Est-ce que c'est correct d'interpréter la
réponse que le ministre vient de me donner comme suit,
c'est-à-dire que, s'il y a un autre conseil de la santé et des
services sociaux qui se syndicalise, pour utiliser l'expression, il va
être ajouté à la liste?
M. Clair: Exact.
M. Paradis: J'aurais une autre question qui touche le paragraphe
4 de l'article 1 qui se lisait ou qui se lit... Je pense que je vais
procéder immédiatement à l'amendement, étant
donné qu'il a déjà été adopté, M. le
Président. Le paragraphe se lit comme suit: Un établissement
comprend un établissement public au sens de la Loi sur les services de
santé et les services sociaux, un établissement privé
conventionné au sens de cette loi, un établissement privé
qui a conclu avec le ministre des Affaires sociales un contrat prévu par
l'article 176 de cette loi et tout organisme qui fournit des services à
un établissement ou des bénéficiaires, suivant
l'amendement qui vient d'être adopté, conformément à
cette loi et est déclaré par le gouvernement être
assimilé pour l'application de la présente loi à un
établissement, tel que l'entend la Loi sur les services de santé
et les services sociaux.
Ma question touche la partie de l'alinéa qui concerne les
établissements qui fournissent des services aux établissements,
si vous pouvez me suivre. Je pourrais vous donner un exemple pratique,
peut-être pour qu'on se comprenne mieux. Dans le cas de certains centres
de santé, dans la région de Sherbrooke, les services de
cafétéria, même
de nourriture pour les malades, sont assurés par le secteur
privé, par des compagnies privées, finalement. Est-ce que vous
les assimilez, à ce moment-là, dans le cadre de ce projet de loi?
Est-ce que vous assimilez ces travailleurs, qu'ils soient syndiqués ou
non?
M. Clair: Ce n'est pas un établissement au sens de la Loi
sur les services de santé et les services sociaux; donc, il n'est pas
assimilé. Les organismes qui sont visés là, ce sont des
organismes... C'est davantage une cafétéria ou un service de
buanderie en commun qui rendent des services. Il arrive souvent qu'il y a des
ententes interétablissements pour regrouper des services, c'est cela que
cela vise. C'est la raison pour laquelle ces établissements peuvent
l'être, comme le dit la loi. Et tout organisme qui fournit des services
à un établissement ou à des bénéficiaires,
conformément à cette loi -c'est-à-dire, la Loi sur les
services de santé et les services sociaux - est déclaré
par le gouvernement être assimilé pour l'application de la
présente loi en établissement, tel que l'entend la Loi sur les
services de santé et les services sociaux. Par exemple, la buanderie
centrale Partagée, c'est un cas d'assimilé.
M. Paradis: Si je comprends bien votre réponse...
M. Clair: Cela ne se prolonge pas au privé.
M. Paradis: Cela ne se prolonge absolument pas au privé,
même si les services... Si au lieu de faire affaires avec Partagec, le
centre hospitalier faisait affaires avec une buanderie privée qui
fournit des services de buanderie - ce sont quand mêmes des services
importants, même en cas de conflit, etc. - ce projet de loi ne se
prolonge pas jusque là.
M. Clair: Je ne pense pas que, par rapport aux fournisseurs
privés des hôpitaux, il y ait beaucoup de fournisseurs qui soient
en situation de monopole et où, s'il y avait une grève ou un
lock-out chez lui, cela rendrait la dispensation des services par
l'hôpital impossible. Je ne pense pas qu'il y ait de telles entreprises
privées qui soient ainsi en situation de monopole.
M. Paradis: Autrement dit, le prolongement se limite aux secteurs
public et parapublic et il ne touche absolument pas tout ce qui pourrait
être des services fournis par le secteur privé?
M. Clair: Non.
M. Paradis: D'accord.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, au premier alinéa, on
a parlé beaucoup de l'annexe C, dans la mesure prévue au chapitre
IV - donc, on a bien compris que c'étaient uniquement les articles du
chapitre IV qui s'appliquaient à ces organismes - et on ajoute: "... et
à la fonction publique, dans la mesure prévue dans le chapitre
V".
Alors, si on va voir dans le chapitre V, on dit: "Les articles 46 - il y
a un seul article au chapitre V, l'article 81 - à 56 s'appliquent,
compte tenu des adaptations nécessaires à une convention
collective liant le gouvernement et une association de salariés reconnue
ou accréditée en vertu des articles 64 à 67 de la Loi sur
la fonction publique. " Cela nous permet de préciser le champ
d'application, car, à l'article 1, on veut savoir qui est visé
exactement par le projet de loi et dans quelle mesure, par rapport à
quels articles exactement.
Je pense que là-dedans il y a tous les employés, toute la
fonction publique, c'est-à-dire tous les employés des
ministères, les professionnels, employés de soutien, tous les
salariés syndiqués. Est-ce que cela couvre d'autres
catégories de salariés? Est-ce que tous les ministères
sont couverts par les articles 64 à 67 de la loi, y compris les bureaux
régionaux, les palais de justice? Parce que si on prend l'exemple du
ministère de la Justice, il y a à peu près 12 000
employés à ce ministère.
M. Clair: Oui. Ce sont tous les employés qui sont couverts
par la Loi sur la fonction publique. Alors, c'est à eux que cela
s'applique. Maintenant, ceux qui ne sont pas couverts par la Loi sur la
fonction publique, si je fais référence aux employés de la
Sûreté du Québec, ils apparaissent en annexe C, et, si l'on
pense aux avocats de l'aide juridique, ils sont couverts aussi dans l'annexe.
Les juges, c'est autre chose. Donc, ce sont tous ceux qui sont couverts par la
Loi sur la fonction publique, c'est donc dire tous les employés des
ministères, qu'ils soient en région ou à
Québec.
M. Paquette: Par exemple, les quelques milliers d'employés
du ministère des Transports, les employés des divers palais de
justice, des bureaux de la Régie de l'assurance automobile du
Québec, etc..
M. Clair: Oui.
M. Paquette:... tout cela est couvert par le chapitre V. Bon.
Maintenant, pour le chapitre V. On dit, à l'article 1 "... dans
la mesure prévue pour le chapitre V... " et, au chapitre V, on nous dit
"... ce sont les articles 46 à 56 qui
s'appliquent... ", donc on peut conclure que ces employés ne sont
visés que par ces articles du projet de loi. Si on va voir ces articles,
on se rend compte, par exemple, que la question du médiateur s'applique;
ensuite, à l'article 47, on décrit comment le médiateur
peut fonctionner en regard des parties; on continue ainsi, à l'article
48, on trouve le recours à un conseil de médiation. Â
l'article 49, on dit ce qu'on fait en cas de différend. Je continue
comme cela. À l'article 51, "Les conditions de travail prévues
par des stipulations négociées et agréées à
l'échelle nationale continuent de s'appliquer, malgré leur
expiration, jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle convention
collective. " Ensuite, il y a tout le chapitre sur les salaires et les
échelles de salaire, qui s'applique aussi à d'autres
catégories de travailleurs, mais qui va s'appliquer également aux
employés de la fonction publique. Cela s'arrête là. Donc,
on exclut toute la section sur les stipulations négociées et
agréées à l'échelle locale ou régionale, les
arrangements locaux. On exclut également toute la question de
l'organisation des parties. Il faut comprendre que ces salariés, si je
comprends bien, vont négocier directement avec le Conseil du
trésor, d'une part et qu'il n'y a pas de décentralisation
possible de prévue dans leur cas, même dans le cas de très
vastes ministères. Je pense au ministère de la Justice, au
ministère des Transports, au ministère de l'Éducation; ce
sont peut-être seulement les bureaux régionaux, mais encore c'est
peut-être moins grave. C'est un peu curieux de voir que certains des
principes que le ministre veut voir s'appliquer dans son projet de loi ne
s'appliquent pas à une aussi vaste catégorie de
salariés.
M. Clair: M. le Président, cela n'empêche pas pour
autant que déjà interviennent des ententes. Par exemple, au
ministère des Transports, je me souviens fort bien qu'à
l'époque où j'étais titulaire de ce ministère, des
ententes ont été conclues entre le Syndicat des fonctionnaires
provinciaux du Québec et le gouvernement concernant les horaires de
travail, par exemple, en ce qui concerne l'entretien des chemins d'hiver, parce
qu'on manquait de flexibilité pour concurrencer l'entreprise
privée dans le secteur public en ce qui a trait aux coûts
d'entretien des chemins d'hiver. Il y a eu des ententes. Cela n'empêche
pas que de telles ententes puissent avoir lieu. Mais la réponse à
la question, c'est: Non, il n'y a pas d'envisagé de processus de
décentralisation des négociations vers les ministères. On
cherche à impliquer de plus en plus les directions de personnel et les
sous-ministres dans la gestion de leurs effectifs, la gestion de leurs
relations du travail. Mais, il n'y a pas, à proprement parler, de
processus de décentralisation du type de celui qui a été
envisagé, qui est proposé c'est-à-dire, pour le secteur
parapublic, soit les réseaux de l'enseignement et de la
santé.
M. Paquette: Lorsqu'on regarde la liste de matières
pouvant être décentralisées, soit dans les secteurs de
l'éducation ou de la santé, règles d'éthique,
reconnaissance syndicale pouvant faire l'objet... Je prends l'annexe Bs
procédures de griefs et d'arbitrage, congés fériés,
l'adaptation face aux vacances et un certain nombre d'autres questions. (22 h
45)
Qu'est-ce qui fait en sorte qu'on a l'air de trouver cela
intéressant que les questions concernant la vie de tous les jours qui
sont le plus près des salariés puissent se négocier avec
les cadres, donc, les patrons locaux dans le secteur de l'éducation,
dans le secteur des affaires sociales et lorsqu'on arrive à des
ministères, particulièrement des ministères qui ont autant
d'employés que le ministère des Transports ou le ministère
de la Justice, là, on a une approche très centralisée?
Cela ne donne pas l'impression qu'on a bien le goût de
"débureaucratiser" un peu la fonction publique et de donner la chance
aux gens, sur le plan local, d'organiser leur vie au travail sur des questions
qui, encore une fois, n'impliquent pas de masse financière. Je pense que
c'est la philosophie générale. Elles sont plutôt des
questions de qualité de vie au travail.
M. Clair: M. le député, la différence, c'est
que dans le cas des employés du secteur parapublic, l'employeur direct
n'est pas le gouvernement, alors que, dans le cas des employés de
l'État, les membres de la fonction publique, ceux-ci le sont et font
face directement à leur employeur, lorsqu'il y a négociations,
d'une part. D'autre part, il y a des pas qui sont franchis, par exemple, avec
le ministère de la Justice. Nous travaillons à faire en sorte que
nous ayons de nouvelles ententes et de nouvelles directives qui ont
été émises en ce qui concerne l'implication du
ministère de la Justice dans les négociations avec les avocats,
les notaires, avec les agents de la paix, les différentes
catégories, parce qu'on voit qu'effectivement il y a un
mini-réseau, si je peux employer l'expression, et qu'il y a avantage
à ce que - je ne dirais pas une décentralisation - une
déconcentration des négociations ait lieu.
C'est ce que nous faisons; c'est une piste que nous suivons. Mais de
là à donner des pouvoirs à chacun des ministères
pour négocier séparément des conventions collectives, je
suis loin d'être sûr que ce serait à l'avantage des
ministères et du
gouvernement, dans son ensemble. C'est plutôt une approche un peu
différente qu'on suit présentement.
M. Paquette: Je constate que dans les articles 46 à 56, il
n'y a pas de comité patronal. Comment le ministre pense-t-il que les
conditions très différentes qui peuvent exister d'un
ministère à l'autre, comme le ministère de la Justice par
rapport au ministère de l'Éducation, avec ses bureaux
régionaux, ou le ministère de l'Industrie et du Commerce, et
certaines questions très particulières vont pouvoir
véritablement s'articuler? On se serait attendu qu'il y ait, au moins,
dans la loi, un comité patronal pour ce secteur très important de
la fonction publique où le Conseil du trésor ne soit pas le seul
maître à bord.
M. Clair: Ce n'est pas nécessaire...
M. Paquette: Est-ce que c'est le fait que le ministre qui
gère cette loi, qui aurait peut-être dû être le
ministre du Travail, est le président du Conseil du trésor?
M. Clair: C'est le responsable de l'application de la loi.
M. Paquette: II veut serrer la vis un peu sur ces
collègues? Qu'est-ce qui explique cela?
M. Clair: Le ministre responsable de l'application de la loi, M.
le Président, c'est effectivement le ministre du Travail.
M. Paquette: Oui, mais ce n'est pas lui qui est devant nous,
aujourd'hui. Ce n'est pas lui qui a mené tout ce dossier du début
à la fin.
M. Clair: Mais, ce que je veux dire, M. le Président, je
pense qu'on n'a pas besoin de dispositions dans la Loi sur la fonction
publique, pour indiquer que le ministre de la Fonction publique et son
sous-ministre consultent les sous-ministres des principaux ministères
dans la définition des contenus de négociation de conventions
collectives pour les employés de la fonction publique. Ce n'est pas
parce que c'est passé au Conseil du trésor qu'on n'en a plus
besoin, au contraire. S'il y a un organisme habitué de travailler avec
les ministères du gouvernement et de tenir compte de leur opinion, c'est
bien le Conseil du trésor; c'est l'organisme central par excellence du
gouvernement avec le Conseil exécutif.
M. Paquette: M. le Président, je constate que l'optimiste,
face au Conseil du trésor, du ministre a peut-être
évolué récemment. Cependant, il y a une différence
entre consulter et établir conjointement avec les principaux
ministères impliqués au sein, par exemple, d'un comité
patronal où pourraient être déterminées, par
exemple, des matières. Si le ministre ne se sent pas prêt à
faire une étape de décentralisation dans la fonction publique au
niveau des gros ministères, par exemple, qu'au moins sectoriellement on
puisse tenir compte de la disparité énorme qui existe d'un
ministère à l'autre, d'un tout petit ministère comme le
Secrétariat des relations avec les citoyens à un énorme
ministère comme celui de la Justice ou celui du Revenu. Qu'on ne soit
pas capable, en négociation avec les syndiqués, de dire:
Voilà, il y a des choses qui sont communes à tous les
fonctionnaires et on va négocier cela avec un comité patronal et
les syndicats de la fonction publique. Il y a un certain nombre de questions
sectorielles qui touchent beaucoup à la qualité de la vie
professionnelle, qui sont peut-être moins lourdes sur le plan financier
et qui vont, à ce moment, pouvoir être laissées
sectoriellement. Là, il y a moyen, peut-être, d'établir
cette attitude de décentralisation que le ministre semble souhaiter et
qu'il essaie de favoriser dans d'autres secteurs.
M. Clair: Ce que j'indique au député, M. le
Président, c'est qu'il y a deux façons de le faire. Il y en a une
qui est déjà en cours: c'est, effectivement, d'avoir une plus
grande implication des ministères à réseaux. Je parlais du
ministère de la Justice, par exemple. Nous sommes présentement
à le faire. Il y a également une autre façon de le faire
qui est d'impliquer plus directement les directeurs du personnel et de
relations du travail des différents ministères. C'est un
organisme qui existe en bonne et due forme, qui conseille le secrétariat
du Conseil du trésor.
Quant à envisager une autre étape, soit de
décentraliser la négociation ou de déconcentrer de la
négociation au niveau des ministères, j'indique, à cet
égard, que déjà de telles ententes surviennent. Je n'ai
pas entendu beaucoup de gens me demander que, dans la fonction publique, les
employés en région soient traités différemment des
employés à Québec, au siège social. Les
différences qu'il y a entre un fonctionnaire à Québec et
un fonctionnaire en région demeurent quand même assez
ténues. Je pense, quant à moi, que la piste que nous suivons
présentement est la bonne.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Toujours dans la même veine, puisque le
premier alinéa de l'article 1 nous renvoie au chapitre V et qu'on voit,
à ce chapitre, que ce sont les articles 46 à 56 qui s'appliquent
aux
travailleurs et aux travailleuses de la fonction publique, je note que
les articles 46 à 56 font partie de la section III, du chapitre II,
n'est-ce pas?... Non... du chapitre III. Dans cette section III qui est
intitulée "Le mode de négociation", il y a d'abord l'article 44.
Le deuxième alinéa de l'article 44 se lit comme suit: "Elles
peuvent prévoir - "elles", si je comprends bien, ce sont des
stipulations - en outre, des modalités de discussion entre les parties
pendant la durée de la convention collective dans le but d'aplanir leurs
difficultés. "
J'ai l'impression de deviner, derrière ces trois lignes, le
fantôme de la négociation permanente dont on nous a souvent
parlé comme étant un des objectifs poursuivis par le
gouvernement. Effectivement, ce serait bien de poursuivre cet objectif de
créer des mécanismes selon lesquels les accords peuvent se faire,
en quelque sorte, au fur et à mesure en cours d'année, en cours
de convention collective et selon lesquels des discussions peuvent avoir lieu
pour aplanir les difficultés qui peuvent apparaître et pour
préparer les prochaines négociations. Cela est d'une excellente
inspiration, sauf que ces trois lignes me paraissent un peu faibles pour
réaliser ces objectifs. Je ne suis pas sûr qu'il n'y ait pas autre
chose dans la loi qui porte plus directement là-dessus. Ce que je veux
faire observer maintenant au ministre, c'est que ces trois lignes, le
deuxième alinéa de l'article 44, ne s'appliqueront pas à
la fonction publique et cela me paraît dommage. Il me semble que dans le
cas des fonctionnaires, pour ce qui est de la possibilité "d'aplanir
leurs difficultés" comme le dit le texte de l'article 44,
deuxième alinéa - pendant la durée de la convention
collective, ce serait très bien que les relations du travail concernant
la fonction publique contiennent aussi ce mécanisme.
M. Clair: M. le Président, ce que je peux indiquer au
député, c'est que la raison pour laquelle on n'a pas besoin...
Une première chose: "Elles peuvent prévoir, en outre, les
modalités de discussion", j'aurais souhaité que ce soit "Elles
doivent prévoir", mais...
M. de Bellefeuille: Un amendement:
M. Clair: Non, je n'ai pas dit que j'annonçais un
amendement, mais simplement qu'il y avait d'énormes résistances
du côté syndical à ce que l'on impose cela. Je pense qu'il
y a pour cela de bonnes raisons, dans la mesure où on veut se donner des
modalités de discussion entre les parties durant la durée de la
convention collective dans le but "d'aplanir leurs difficultés". Si on
commence en les obligeant, peut-être que cela facilitera moins les
choses.
Dans les conventions collectives, en ce qui concerne la fonction
publique, ne pas oublier que la fonction publique est régie par une loi
particulière, la Loi sur la fonction publique, la loi 50, et dans les
conventions collectives de la fonction publique, il y a déjà de
prévu, dans toutes les conventions collectives des employés de la
fonction publique, des comités de relations du travail qui fonctionnent
et qui donnent des résultats. Le fait que cela ne couvre pas les
employés de la fonction publique, cela ne veut pas dire pour autant que
cela ne s'applique pas et que, dans les faits et dans les lois, il n'y a pas
possibilité de mettre en place de tels mécanismes pour les
employés de la fonction publique. Il y en a déjà et ils
fonctionnent.
M. Pagé: M. le Président.
Le Président (M. Lacnance): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. J'avais une
question pour le ministre. Est-ce que j'ai bien compris, dans sa réponse
à la question du député de Brome-Missisquoi, concernant
l'extension possible des dispositions de la loi à des entreprises
privées ou à des organismes privés, que cela ne pouvait
s'appliquer à des organismes privés? Si je lis le
quatrième alinéa de l'article 1, il suffit, pour le
ministère des Affaires sociales, que l'organisme en question soit
déclaré comme étant assimilé et il le devient,
qu'il soit privé ou non.
M. Clair: "Un établissement comprend un
établissement public au sens de la Loi sur les services de santé
et les services sociaux c'est clair - un établissement privé
conventionné au sens de cette loi - on sait également ce que
c'est; on a enlevé "un établissement privé qui a conclu
avec le ministre... " - et tout organisme qui fournit des services à un
établissement ou à des bénéficiaires
conformément à cette loi et est déclaré par le
gouvernement être assimilé, pour l'application de la
présente loi à un établissement tel que l'entend la Loi
sur les services de santé et les services sociaux. " Donc, cela ne nous
permet pas d'aller chez n'importe quel fournisseur de l'hôpital et dire:
On vous assimile à un organisme régi par la Loi sur les services
de santé et les services sociaux.
M. Pagé: Oui. Si le gouvernement décide d'assimiler
un organisme privé il devient régi.
M. Clair: Avez-vous la Loi sur les services de santé et
les services sociaux? Il faut bien comprendre, quand on dit: "Et tout organisme
qui fournit des services à un établissement conformément
à cette loi" -
cette loi fait référence à la Loi sur les services
de santé et les services sociaux - et est déclaré... ".
Cela ne peut pas être n'importe quel organisme.
M. Pagé: Et même un organisme privé. Il
faudrait définir dans l'article 1... (23 heures)
M. Clair: Bien non! Ce que je peux dire au député,
par ailleurs, c'est que cette définition existe depuis la loi 55 et cela
n'a jamais présenté de difficultés.
M. Paradis: Si vous me le permettez, M. le Président,
c'est parce que le gouvernement n'a jamais décidé d'assimiler un
organisme privé. Il est allé dans le sens des propos que vous
nous avez tenus tantôt, M. le ministre. Je ne doute pas des propos que
vous puissiez nous tenir, mais un organisme qui fournit des services à
un établissement ou à des bénéficiaires
conformément à cette loi peut être un organisme public, un
organisme parapublic ou un organisme privé. On sait que lorsque ces lois
sont plaidées on n'a pas le droit - et peut-être à raison -
de citer l'intention du législateur telle que
révélée en commission parlementaire. À ce moment la
seule direction ou la seule indication qu'on a, ce sont des propos que vous
avez tenus ici, mais au texte de loi comme tel on parle d'un organisme et on ne
spécifie pas si cet organisme est public, parapublic ou privé. Il
n'y a ni exclusion, ni inclusion, donc on est obligé de le prendre au
sens générique du terme. Organisme - je vous le souligne bien
humblement sans avoir le Petit Robert à mes côtés - peut
comprendre autant organisme public, parapublic qu'organisme privé. On
cherche simplement un éclaircissement. Si c'est ce que vous voulez dire,
peut-être que vous pourriez proposer un amendement.
M. Clair: Non, comme je n'ai pas avec moi la Loi sur les services
de santé et les services sociaux... Si je peux répondre plus
tard, il me fera plaisir de le faire.
Le Président (M. Lachance): On va suspendre...
M. Paquette: Est-ce que j'ai la parole, M. le
Président?
Le Président (M. Lachance): Oui, M. le
député de Rosemont.
M. Paquette: Dans le même ordre d'idées, on a
examiné plus tôt le cas des organismes gouvernementaux
mentionnés à l'annexe C, dans laquelle se trouve la
Société des alcools du Québec. La Société
des alcools du Québec, comme cela a été annoncé
dans le récent budget va bientôt -et bientôt c'est
même maintenant, c'est en train de se faire - offrir ses magasins en
concession à ce qui va devenir des entreprises privées ou des
coopératives. Comment est-ce qu'on doit interpréter cette loi?
Autrement dit, est-ce qu'elle va s'appliquer uniquement aux employés qui
demeureront au service de la Société des alcools? Du fait que ce
soit des concessions à des entreprises privées ou à des
coopératives, est-ce que la loi va s'appliquer également aux
employés de ces entreprises et de ces coopératives?
M. Clair: Aux employés de ces entreprises et de ces
coopératives, dans la mesure où il s'agira d'entités
juridiques différentes de la Société des alcools et
d'unités d'accréditation différentes, la loi ne
s'appliquera pas.
M. Pagé: Pardon!
M. Clair: Elle ne s'appliquera pas à eux. Je fais
l'hypothèse qu'il s'agit d'une nouvelle entreprise et d'une nouvelle
unité d'accréditation. À ce moment, non, elle ne
s'appliquerait pas.
M. Pagé: M. le Président, le ministre a
suffisamment d'expérience pour avoir à l'esprit la
probabilité que lors de la vente des magasins du centre-ville de
Montréal d'ici à quelques mois, les employés vont
maintenir leur accréditation. Le nouvel acquéreur va prendre feu
et lieu et va se porter garant des obligations contractées par
l'employeur antérieur. Je ne vois pas en quoi la vente de ces magasins
impliquerait, même à titre probable, des changements
d'accréditation.
M. Clair: À ce moment, c'est évident qu'on devra
revoir en termes d'autorisation le mandat de négociation. C'est
sûr que si les employés, à cause de l'article 45 du Code du
travail, traînent avec eux leur convention collective et conservent leur
même unité d'accrédition, s'il n'y a pas d'amendement
à la loi et qu'ils conservent le statut d'employés de la
Société des alcools du Québec et non pas d'employés
de la nouvelle compagnie ou de la nouvelle entreprise, ils continueront
à être couverts par l'annexe C. L'annexe C, c'est la liste des
organismes gouvernementaux. Mais encore une fois il faut bien voir ce que
comporte l'organisation des négociations en ce qui concerne les
organismes gouvernementaux. Si vous lisez les articles 74 et suivants vous
allez voir que c'est assez limité.
M. Pagé: C'est limité, M. le Président, j'en
conviens, mais je présume que le ministre de l'Industrie et du Commerce,
qui est responsable devant l'Assemblée nationale de l'administration de
la SAQ, vous a fait
parvenir un document vous indiquant: Écoutez, vous êtes en
train d'étudier un projet de loi qui concerne indirectement ou qui
risque de concerner directement des travailleurs des magasins de la SAQ. On vit
dans une période particulière où il y a des transferts de
propriétés qui s'effectueront.
J'aimerais demander au ministre s'il a eu des échanges avec le
ministre de l'Industrie et du Commerce là-dessus. Si tel est le cas,
quelles sont les inquiétudes et quelles sont les positions, etc.
M. Clair: Non, M. le Président, quant à moi je n'en
ai pas eu mais je sais que mes fonctionnaires en ont eu, cependant, avec les
gens de la Société des alcools du Québec.
Fondamentalement, le processus va se dérouler conformément aux
lois du Québec telles qu'elles sont présentement et à
compter du moment où il y a un lien d'employés et de
syndiqués à la Société des alcools du
Québec, c'est le statu quo qui demeure. Dans la mesure où ils
deviennent des employés d'une nouvelle entreprise et qu'il y a une
nouvelle unité d'accréditation qui se forme et un nouvel
employeur, c'est évident qu'à ce moment-là, cela se
déroule conformément aux lois du Québec. Il n'y a pas de
mystère là-dedans, à mon avis.
Le Président (M. Lachance): Alors, l'article 1 est
suspendu ou adopté?
M. Paquette: Je pense qu'en attendant la réponse du
ministre au quatrième alinéa...
Institut de recherche sur la
rémunération
Constitution et composition
Le Président (M. Lachance): Bon, il y a suspension de
l'article 1. J'appelle l'article 2.
M. Clair: II n'y a pas d'amendement, M. le Président.
M. Pagé: Est-ce que le ministre pourrait nous indiquer si
le Bureau de recherche sur la rémunération du Conseil du
trésor va demeurer aussi actif?
M. Clair: Le Bureau de recherche en rémunération du
Conseil du trésor a été dissous il y a maintenant trois
ans.
M. Pagé: Trois ans, mais l'organisme du Conseil du
trésor qui a fourni les informations pertinentes, qui met de la chair
sur l'ossature des négociations, va, je présume, poursuivre son
travail malgré que l'institut va avoir reçu le mandat de faire
les études comparatives entre le secteur public et le secteur
privé, syndiqué ou non? On reviendra là-dessus plus tard.
Ce que je veux savoir, c'est: Est-ce que le ministre... Il n'est plus
là.
M. le Président, je fais motion pour qu'on ramène le
ministre.
M. de Bellefeuïlle: On va suspendre la séance. Est-ce
que je pourrais parler sur la motion? Le ministre est fatigué
peut-être?
M. Clair: M. le Président, il reste cinq personnes de l'ancien
Bureau de recherche sur la rémunération. Maintenant, c'est
évident que le Conseil du trésor, quant à lui, va devoir,
pour ses fins propres, continuer d'avoir une équipe d'analyse sur la
rémunération pour être sûr que l'on comprend bien les
résultats des travaux de l'Institut de recherche sur la
rémunération. Comme il y aura une période de
négociation qui continuera à avoir lieu, c'est évident que
le Conseil du trésor va devoir demeurer équipé pour
analyser les rapports de l'institut, dégager des mandats, des
orientations, etc.
Il faut dire aussi que ce ne sont pas tous les employés directs
ou indirects de l'État qui sont couverts par le régime de
négociation. Si je prends, par exemple, les médecins
vétérinaires, les médecins, etc., il y a là aussi
des travaux qui doivent se faire au Conseil du trésor pour des fins de
négociation de la rémunération.
M. Pagé: Alors, c'est donc dire que, malgré
l'abolition du Bureau de recherche sur la rémunération,
même si les activités de l'organisme ont été
suspendues ou sa composition a été annulée, son personnel
est demeuré à l'emploi du Conseil du trésor pour continuer
à effectuer des études qui relevaient généralement
des mandats antérieurement assumés par le bureau. C'est comme le
CAD, le Centre d'analyse et de documentation, c'est aboli, mais ça
continue.
M. Clair: Le député fait de bien drôles de
comparaisons.
M. Pagé: Bien oui.
M. Clair: Je trouve qu'il ne relève pas le plus bel
exemple de démocratie qui a pu exister dans le gouvernement de M.
Bourassa. J'aimerais bien savoir où existe le CAD dans le gouvernement.
C'est une tout autre chose que de dire qu'au Conseil du trésor on doive
conserver une équipe en rémunération. Dois-je comprendre
des propos du député que le Conseil du trésor devrait
être responsable de l'émission des mandats en
rémunération puis ne pas avoir d'expert en ces
matières?
M. Pagé: M. le Président, tout ce que je voulais,
c'est que le ministre nous confirme que parallèlement à
l'institut de recherche, des travaux dans le même sens
seront effectués et continueront à être
effectués par le Conseil du trésor. Je veux que ce soit bien
clairement exprimé. Le ministre me l'a confirmé, je l'en
remercie, mais ce n'était pas comme cela que c'était compris chez
tous les intervenants.
M. Clair: Pardon? Voulez-vous répéter?
M. Pagé: J'étais à vous dire, M. le ministre, alors
qu'on vous dérangeait, que la compréhension que plusieurs ont
donnée aux dispositions de l'article 2 et suivants, c'est que
l'organisme qui sera habilité à faire des recherches, des
analyses, des études, à produire des rapports, ce sera l'institut
de recherche. Tout le monde est d'accord là-dessus. Cependant, beaucoup
de gens se demandaient si, parallèlement au mandat exercé par
l'institut, le Conseil du trésor allait continuer et poursuivre,
parallèlement, de telles analyses ou de telles études pour
justifier ses prises de position. Vous me confirmez que oui, je
l'apprécie et je vous remercie.
M. Clair: C'est avec une équipe infiniment plus
réduite. Le Bureau de recherche sur la rémunération a
compté jusqu'à 40 à 45 personnes. Il n'en reste que 5. Les
équipes d'enquêteurs sont disparues, c'est maintenant le...
M. Pagé: Le CRSTM.
M. Clair:... CRSMT qui fait ce travail. Le député a
l'air à penser qu'il vient de faire une découverte
importante...
M. Pagé: Non, non, on veut seulement...
M. Clair: Je pense que ce serait le contraire qui serait une
découverte importante, si le député découvrait que
le Conseil du trésor, qui va continuer à émettre des
mandats de négociation sur le plan de la rémunération,
n'avait plus aucune capacité en termes d'analyse et de critique de ces
orientations qui seront dégagées à l'institut de
recherche. Mais, par ailleurs, je peux dire au député qu'il n'est
pas question non plus que le Conseil du trésor se bâtisse un
nouveau bureau de recherche en rémunération pour tenter de
contredire l'Institut de recherche sur la rémunération.
M. Pagé: C'est le danger.
M. Clair: Hé bien! je veux dire...
M. Pagé: C'était le danger à partir du
moment où vous nous indiquez qu'un tel mandat va être
assumé par le Conseil du trésor. Là, vous dites qu'il n'y
a pas de problème, que c'est un droit tout à fait légitime
que vous avez. D'accord, mais je voulais...
M. Clair: Cela tombe dans l'ordre des choses mais, encore une
fois, je n'ai aucune difficulté à répéter,
cependant, qu'il n'est pas question d'avoir deux instituts de recherche, un au
Conseil du trésor et un indépendant.
M. Pagé: Merci de nous l'avoir dit.
M. Clair: Est-ce que l'article 2 est adopté?
M. Paquette: M. le Président.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: Oui. On a discuté tantôt du CRSMT, le
Centre de recherche et de statistiques sur le marché du travail qui
existe actuellement au sein du ministère du Travail. Il y a,
semble-t-il, à peu près une vingtaine de professionnels qui
travaillent dans cet organisme et qui ont une expertise. Qu'est-ce qui
amène le ministre à créer en plus un nouvel organisme? Si
je comprends bien, le CRSMT va continuer à exister et on crée en
plus un Institut de recherche sur la rémunération dont les
fonctions, à première vue, n'apparaissent pas radicalement
distinctes. En plus, le ministre se garde quatre ou cinq personnes qui vont
faire un peu le même travail, mais à son compte. Donc, on se
retrouve avec deux organismes et un groupe de personnes au Conseil du
trésor. Est-ce que le ministre peut nous expliquer pourquoi
particulièrement et qu'est-ce qui fait que les fonctions d'un Institut
de recherche sur la rémunération seraient tellement
différentes de celles du CRSMT, ce qui justifierait la présence
de deux organismes dans le même secteur? (23 h 15)
M. Clair: En ce qui concerne le Bureau de recherche sur la
rémunération, son principal "défaut" - entre guillemets -
c'était son manque de crédibilité, parce qu'il
était partie intégrée intégrante. C'était
une partie du Conseil du trésor. L'existence d'un bureau de recherche au
ministère du Travail, qui n'a pas que cela comme fonction, mais qui,
effectivement, s'apparente en termes de responsabilités à celles
qui étaient autrefois assumées par le Bureau de recherche sur la
rémunération, le fait que cela relève du ministre du
Travail, cela ne le rend pas aussi indépendant qu'un institut de
recherche de type mixte, c'est-à-dire à la fois paritaire et
composé de trois personnes neutres. Ce n'est pas du tout la même
dynamique que l'on peut voir, en termes de crédibilité, d'une
part, et, d'autre part, ce que l'on espère à partir de la
création d'un Institut de recherche sur la rémunération
où seront
présents, en permanence, des représentants du gouvernement
et des représentants des syndicats. C'est qu'un certain esprit de
négociation permanente puisse se développer et s'implanter
progressivement au niveau de cet institut de recherche et qu'à partir
d'une compréhension commune et d'analyses conjointes des données
s'enclenche dans les mentalités un processus continu de
compréhension, d'échanges et, éventuellement, de
négociation sur la rémunération, alors qu'unorganisme, à l'intérieur du Conseil du trésor ou du
ministère du Travail ne permet pas d'atteindre un tel objectif, tant
à cause de son "manque de crédibilité" - entre guillemets
- qu'à cause de l'absence de représentants syndicaux dans ces
organismes.
Maintenant, qu'est-ce qu'il adviendra du CRSMT? C'est à
déterminer. Il n'est pas impensable non plus que l'institut, même
si ce n'est pas mon intention de forcer l'institut ou de tenter de le forcer
à aller engager de ces professionnels... Le Québec est une
société de 6 000 000 d'habitants et non pas de 250 000 000. Les
gens qui ont développé une expertise et qui sont
intéressés à aller de l'avant là-dedans... Cela
pourrait être intéressant, éventuellement, je pense - je le
donne comme opinion personnelle - que l'institut de recherche puisse
effectivement tirer profit de l'expertise que des gens ont accumulée
à l'une ou l'autre des deux places.
M. Paquette: M. le Président, on reviendra tout à
l'heure sur la crédibilité de l'institut proposé dans le
projet de loi, en regard du fait que tous les membres, sauf les trois
nommés par l'Assemblée nationale, vont être nommés
par le gouvernement, ce qui en fait un organisme à allure plutôt
patronale que paritaire ou mixte.
M. Clair: Qui voulez-vous qui les nomme? Les martiens?
M. Paquette: M. le Président, je pense que le
ministre...
M. Clair: Parce que c'est à partir d'une liste... Pour les
représentants des syndicats, c'est à partir d'une liste des
syndicats. Pour les représentants patronaux, c'est après une
consultation. Il y a trois membres de nommés par l'Assemblée
nationale. Je ne vois pas comment le député peut affirmer que
c'est un organisme patronal.
M. Paquette: M. le Président, on pourra examiner les
modalités tout à l'heure. Mais, il y a une grande
différence entre un organisme, même à partir de listes
syndicales, dont tous les membres sont nommés par le gouvernement, sauf
trois qui le sont par l'Assemblée nationale, et un organisme paritaire
où une partie des membres est nommée par une partie,
l'autre partie des membres, en nombre égal, est nommée par
l'autre partie. Justement dans cet esprit, si le ministre veut favoriser un
esprit de négociation permanente et de conciliation, l'objectif
étant d'avoir des données crédibles qui vont être
partagées, à chances égales, par les deux parties à
la négociation, bien il y a une grosse différence entre
nommé paritairement par les deux parties, quitte à ce que le
président soit choisi conjointement, et un organisme dont tous les
membres sont nommés par le gouvernement, sauf trois qui le sont par
l'Assemblée nationale. Cela en fait un organisme gouvernemental.
On aura l'occasion d'y revenir lorsqu'on examinera les modalités,
mais je pense que c'est une question extrêmement importante. Si je
comprends bien la réponse du ministre, parce qu'il a devancé ma
deuxième question, le ministre n'a pas prévu mais il laisse
entendre un démantèlement du CRSMT. Donc, si je comprends bien,
si on adopte cette section du projet de loi, on peut prévoir qu'à
brève échéance, le CRSMT va disparaître...
M. Clair: Pas nécessairement...
M. Paquette:... vos employés étant possiblement
intégrés au nouvel institut?
M. Clair: Pas nécessairement à brève
échéance, mais j'indique simplement que dans la mesure où
l'Institut de recherche sur la rémunération fonctionnera et
fonctionnera bien, il y a sans doute une partie du mandat du CRSMT qu'il sera
moins utile de continuer à exercer parce qu'il y aura, par ailleurs, des
données scientifiquement aussi fiables et valides et portant sur le
même sujet. Alors, je n'ai pas annoncé la mort instantanée
du CRSMT par l'adoption de la présente loi.
M. Paquette: Tout à l'heure, le ministre nous indiquait
son espoir, son intention que l'Institut de recherche sur la
rémunération soit sur pied à temps pour la prochaine ronde
de négociation. Il y a une espèce de problème ici. Vous
espérez pouvoir adopter cette loi avant la fin de juin, faire nommer les
trois membres par l'Assemblée nationale avant la fin de juin et ensuite,
probablement pendant l'été, parce que cela commence
sérieusement autour du début d'août, le 5 août,
quelque part par là... Donc, le gouvernement va, pendant
l'été, nommer les membres et, après cela, il va falloir
engager le personnel. Il va falloir mettre un nouvel organisme sur pied. Il va
falloir que ces gens apprennent à fonctionner ensemble. Il va falloir
qu'ils se définissent des mandats. Est-ce qu'il n'aurait pas
été préférable, plutôt
que de créer un nouvel organisme et de dire que l'autre va
disparaître éventuellement, de créer l'Institut de
recherche sur la rémunération à partir du CRSMT tout en le
détachant du ministère du Travail, en lui donnant une
représentativité paritaire qui aurait assuré son
impartialité face aux parties, plutôt que de faire cette
espèce de mouvement de va-et-vient qui va retarder la mise sur pied de
l'Institut de recherche sur la rémunération à un moment
extrêmement critique? On est à la veille d'une ronde de
négociation. Pourquoi le ministre n'a-t-il pas choisi d'inclure le CRSMT
dans le projet de loi et de dire: Voilà, ce n'est plus un organisme du
ministère du Travail, c'est un organisme prévu à cette
loi, dont on change possiblement le nom, qu'on dote d'un conseil
d'administration paritaire et qu'on met sur pied à partir de l'expertise
qui existe au CRSMT, d'autant plus qu'il s'agit d'un organisme qui semble jouir
d'une assez grande crédibilité? Les centrales syndicales qui vous
ont présenté un mémoire, en tout cas, proposent cette
approche. Pourquoi ne l'avez-vous pas retenue?
M. Clair: Essentiellement, M. le Président, parce que cela
n'empêche absolument pas et cela ne retarde aucunement le fonctionnement
de l'Institut de recherche sur la rémunération. Rien
n'empêche que l'Institut de recherche sur la rémunération
ait lui-même un personnel fort réduit et, effectivement, fasse
effectuer ses travaux de cueillette de données, de recherches par le
CRSMT et, à ce moment-là, il n'est même pas besoin de
transférer physiquement des personnes, de les faire relever, de modifier
leur statut d'employés de la fonction publique pour devenir des
employés de l'Institut de recherche sur la rémunération,
etc. Ces travaux pourront être effectués par un simple contrat de
services entre l'institut et le CRSMT. Mais, à ce moment-là, ce
sera sur la base d'une décision de l'Institut de recherche sur la
rémunération et non pas sur la base d'une décision du
gouvernement de dire: Je prends un bloc de personnes qui existent
déjà et, d'ores et déjà, en partant, par le fait de
la loi, je les impose à l'institut de recherche. Je pense qu'à
cet égard la formule retenue offre bien plus de souplesse que celle qui
est proposée par le député et en termes de coût
aussi, je pense qu'il n'est pas utile de modifier la structure d'une
unité de travail qui existe déjà, qui est
opérationnelle, qui est fonctionnelle. Je pense que le rôle, le
mandat de l'institut ne s'effectuera pas nécessairement uniquement par
du personnel permanent à l'emploi de l'institut de recherche. Il y aura
sans doute des mandats qui seront confiés à des universitaires,
au CRSMT et, éventuellement, à d'autres organismes existants
déjà sans qu'il soit nécessaire, pour la première
année en particulier, que ce soit uniquement le travail du personnel
permanent de l'institut de recherche.
Je pense, par rapport à la date à laquelle on est avant la
prochaine ronde de négociations - comment dirais-je? - que l'institut ne
peut qu'améliorer le processus de négociation en donnant plus
d'informations identiques aux deux parties pour que celles-ci aient la
même chose. C'est sûr qu'après quatre ou cinq mois de
fonctionnement, l'institut n'aura pas produit un rapport complet, mais dans la
mesure où il contribuerait, je ne sais pas, à 25 %, à
rapprocher les parties, c'est toujours mieux qu'actuellement; il n'y a
rien.
M. Paquette: Je pense que le ministre oublie un point
extrêmement important. C'est que sous le régime de
négociation actuel, donc avant l'adoption de cette loi, il n'y avait pas
ces mesures de fixation des salaires qui branchent, par la loi, la
rémunération dans le secteur public sur le secteur privé.
Il n'y avait pas non plus cette limitation au droit de grève, qui n'est
pas seulement à ce niveau, qui est ailleurs aussi dans le projet de loi,
mais qui est notamment à ce niveau.
M. Clair: Le député de... Je m'excuse, est-ce que
je vous interromps?
M. Paquette: Allez-y! Je vais reprendre après.
M. Clair: Ce que j'allais dire, le député ne le
sait peut-être pas, mais les deux dernières rondes de
négociations ont été menées sur la base de la
comparaison entre le secteur public et le secteur privé.
M. Paquette: Oui, oui. La question n'est pas là, M. le
Président.
M. Clair: Ce que j'indique simplement, c'est que l'institut de
recherche pourra contribuer à rapprocher les parties. Le fait que pour
la première année il ait moins de temps pour effectuer son
mandat, c'est sûr que les travaux ne seront pas d'une aussi grande
qualité que s'il avait eu une année, mais je rappelle que pour la
première année, le droit de grève est conservé.
Deuxièmement, il n'y a pas de modification quant à la politique
de rémunération du gouvernement qui est la même depuis
1979, c'est-à-dire une évolution et un niveau comparables au
secteur privé pour le secteur public. Finalement, pour les nouveaux
mécanismes qui fonctionneront pour la deuxième et la
troisième année, l'institut de recherche aura eu le temps d'avoir
une année complète de travail.
M. Paquette: M. le Président, le point que je voulais
soulever n'a pas trait aux orientations de la politique salariale, mais au fait
que, maintenant, cette politique salariale est dans la loi et on peut
prévoir que le climat qui va être créé par les
nouveaux mécanismes va rendre d'autant plus essentiel qu'un
mécanisme d'élaboration et de partage des données sur la
rémunération soit le plus crédible possible, vienne
atténuer ces tensions, d'où l'importance de le mettre sur pied
rapidement.
Maintenant, le ministre dit: Voilà, cela va pouvoir se mettre
assez rapidement sur pied parce qu'on va pouvoir confier des contrats à
l'externe.
M. Clair: Si l'institut en décide ainsi.
M. Paquette: Si l'institut en décide ainsi, mais on peut
prévoir que l'institut va probablement en décider ainsi parce
qu'il va être pressé par les événements. Par
conséquent, on revient au problème soulevé initialement.
On va se retrouver avec deux organismes qui vont faire à peu près
la même chose. Qu'on le fasse par contrat ou par personnel
intégré à l'institut, ce sont des modalités, mais
je veux dire que l'argent va être le même et l'ampleur des
ressources va être la même. On va avoir un CRSMT qui, de son
côté, va faire exactement le même travail et l'Institut de
recherche sur la rémunération va fonctionner à contrat. On
va se retrouver avec l'équivalent de deux organismes qui fonctionnent
différemment, mais qui font la même chose.
M. Clair: Non. S'il y a un contrat qui est passé entre
l'institut de recherche et le CRSMT pour dire: Voici un mandat qu'on vous
demande d'exécuter pour nous, j'imagine que l'institut ne sera pas assez
bête pour se virer de bord et faire lui-même le même
travail.
M. Paquette: Là, on touche un autre problème qui
est lié au fait que les syndiqués qui travaillent au CRSMT
risquent de se retrouver un peu en conflit d'intérêts. Ils vont
être en négociation et ils vont avoir à faire des
études confiées par l'Institut de recherche sur la
rémunération qui peuvent modifier leurs propres conditions
salariales. Il y a un problème là. Il est prévisible que
l'Institut de recherche sur la rémunération ne confie pas de
contrat au CRSMT. Il va les confier ailleurs et - je maintiens mon argument -
on va se retrouver avec deux organismes. (23 h 30)
M. le Président, je vois que le ministre reste bouche bée
devant la solidité et la logique de mon argumentation. Il va devoir
convenir qu'on va se retrouver avec deux organismes.
M. Clair: L'Institut de recherche sur la
rémunération et le Centre de recherche et de statistiques sur le
marché du travail sont deux organismes différents qui n'ont pas
exactement le même mandat. L'Institut de recherche sur la
rémunération sera chargé de faire un rapport; on le dit
dans l'article: "L'institut a pour fonction d'informer le public de
l'état et de l'évolution comparés de la
rémunération globale des salariés du gouvernement, des
commissions scolaires, des collèges et des établissements d'une
part et de la rémunération globale des autres salariés
québécois de toute catégorie qu'il détermine,
d'autre part. Il peut faire des enquêtes, des études et des
analyses sur la rémunération de différents corps d'emplois
ou groupes de salariés au Québec. " Il publie un rapport chaque
année. Rien n'empêcherait que l'institut... D'abord, il n'y a pas,
en termes de mandat, de chevauchement intégral du mandat de l'institut
et du centre. C'est inexact; il n'y a pas un tel chevauchement.
M. Paquette: II y en a une section quand même assez
forte.
M. Clair: Le centre de recherche peut recevoir des mandats de
cueillette de données et l'analyse pourrait fort bien être
confiée à des permanents de l'Institut de recherche sur la
rémunération. Je ne vois pas en quoi il y aurait eu avantage, en
partant, d'imposer, par la loi, à l'Institut de recherche sur la
rémunération, un personnel donné, avec une certaine
crédibilité mais une crédibilité qui n'est pas
celle d'un organisme où siègent des représentants, des
parties patronale et syndicale et trois personnes nommées par
l'Assemblée nationale du Québec. Il me semble qu'il n'y a pas de
problème majeur à cet égard et je ne vois pas en quoi
l'institut devrait entraîner la disparition des cinq ou six personnes qui
conseillent le secrétariat du Conseil du trésor sur les mandats
de négociation en matière de rémunération, non plus
que de ce centre de recherche. Tout au plus, pour une partie du mandat qu'il
effectue, peut-être y aura-t-il lieu, dans l'avenir, de procéder
à une certaine intégration des personnels ou encore à un
changement de mandat et à l'élimination d'une petite partie du
mandat du CRSMT.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Est-ce que j'ai
bien compris lorsque le ministre a dit tout à l'heure - je
présume que c'est un lapsus qu'il a fait - que le rapport de l'institut
- même pas... Il a indiqué que l'institut était susceptible
de rapprocher les parties.
M. Clair: Pas l'institut.
M. Pagé: Oh oui'.
M. Clair: Pas l'institut.
M. Pagé: Oui. Ah oui! Vous vous relirez dans le Journal
des débats, M. le ministre. Vous avez dit que l'institut... Le travail
de l'institut, au cours de l'été...
M. Clair: Je ne passe pas mon temps à me relire. Je vais
préciser ma pensée.
M. Pagé: On aime bien passer notre temps à vous
lire.
M. Clair: Je vais préciser ma pensée. Grand bien
vous fassel
M. Pagé: Pas tout le temps!
M. Clair: Si c'est la plupart du temps, c'est déjà
cela de pris. Ce que je dis au député, c'est simplement que le
fonctionnement même de l'Institut de recherche sur la
rémunération va contribuer à rapprocher les parties, d'une
part, en rendant disponible le même type de données. En plus de
cela, dans la mesure où seront présents, au conseil
d'administration de l'institut, des représentants des deux parties, ce
que l'on souhaite, il n'est pas interdit dans la loi qu'interviennent des
ententes; ce n'est pas interdit du tout. Rien n'empêche que, avec le
temps, les deux partenaires étant présents à un même
institut, avec les mêmes données, le goût leur vienne,
s'inspirant de la négociation permanente, a ce niveau, de... Ils ne
pourront pas engager le gouvernement. C'est le Conseil du trésor qui va
continuer à émettre les mandats, mais j'imagine que les personnes
qui vont être là, à partir des données qui vont leur
être fournies, vont commencer à se faire, de part et d'autre, une
idée de ce qui serait raisonnable et cela pourrait arriver qu'elles
commencent à s'en parler.
Dans ce sens, l'institut joue un rôle de rapprochement des
parties. Cela ne veut pas dire que l'institut, une fois qu'il a fait son
rapport, fait venir le président du Conseil du trésor et le
président de la CSN et dit: Venez ici, je vais vous rapprocher; ce n'est
pas cela.
M. Pagé: Votre correction est bonne; vous l'avez bien
amendée, parce que ce n'est pas ce que cela indiquait, de la
manière que vous l'avez dit dans la réponse au
député de Rosemont. Vous avez indiqué que si la loi est
adoptée avant la fin juin, avant le 2l, vous pouviez proposer à
l'Assemblée d'accepter de nommer le président et les trois
membres et que, peut-être, ils allaient pouvoir commencer à
dégager le terrain, si je peux utiliser le terme, de façon
à se rendre utiles, malgré qu'ils arrivent un peu sur le tard
dans la perspective de la négociation qui doit s'amorcer au début
d'août.
Vous avez ajouté que, puisque l'organisme sera jeune, les mandats
qu'il aura à confier n'auront pas tous nécessairement
été donnés, les études, encore plus, ne seront pas
menées à terme pour la présente ronde de
négociations, vous avez indiqué, sur la foi de cela, qu'il
était toujours possible que l'institut transige, donne un contrat au
centre de recherche en rémunération. La négociation
commence au mois d'août. Êtes-vous au courant que les
études, les analyses, dans le cadre des mandats qui ont
été donnés pour cette année par le centre de
recherche en rémunération, ces conclusions et ces rapports ne
seront pas produits avant la fin d'octobre?
M. Clair: Oui, et l'institut doit publier son rapport au plus
tard le 30 novembre de chaque année.
M. Pagé: Je ne parle pas de l'institut, je parle du centre
de recherche du ministère du Travail. Comment pouvez-vous vous appuyer
sur les études et les analyses qui sont faites par le centre de recheche
du ministère du Travail en septembre ou en octobre, alors que les
analyses et les requêtes qui ont été
présentées pour donner des mandats n'entreront pas avant la fin
d'octobre? Ce sont des informations que j'ai du ministère du Travail et
qui, par surcroît, l'année dernière, ont été
produites six mois en retard.
M. Clair: Effectivement, M. le Président, le
député a raison de dire que la deuxième
génération de rapports sera disponible à la fin du mois
d'octobre prochain. En termes de date de dépôt des offres
monétaires, effectivement, dans les amendements, si le
député a eu le temps de les voir, il y en a un qui va reporter la
date de dépôt des offres monétaires pour pouvoir justement
tenir compte du rapport à l'institut de recherche. On s'est
aperçu qu'en maintenant les mêmes dates de dépôt des
mandats des offres salariales et des propositions à cet égard,
à ce moment, on se retrouverait dans une situation où des offres
seraient faites avant le rapport de l'institut de recherche. Effectivement, un
amendement va être proposé à cet égard.
M. Pagé: Votre amendement va proposer quoi, pour le
bénéfice de l'échange qu'on a actuellement?
M. Clair: Dans les documents que vous avez, c'est à
l'article 86, au quatrième alinéa où on dit: "Une
association de salariés
visée dans le paragraphe 1 et le paragraphe 2 et un comité
ou un sous-comité patronal de négociation visé dans le
paragraphe 3 doivent transmettre par écrit à l'autre partie leurs
propositions sur le salaire et échelle de salaire dans les trente jours
qui suivent la date de publication du rapport de l'Institut de recherche sur la
rémunération prévue par l'article 19 de la Loi sur le
régime de négociation des conventions collectives dans les
secteurs public et parapublic. "
M. Pagé: Cela veut dire, M. le Président, que
l'intention du gouvernement, par la modification qu'il entend apporter, c'est
que l'institut de recherche puisse déposer un premier rapport le ou vers
le 30 novembre qui sera le résultat de trois mois d'exercice avec un
mois de juillet en vacances et quelque temps pour s'organiser, se structurer et
commencer à travailler. Je comprends que le rapport ne sera pas
très exhaustif comparativement à ce qu'il pourrait être
s'il avait eu une pleine année pour fonctionner. Cela fait partie de la
composante en regard de la période où le projet de loi sera
adopté, on n'y peut rien.
Cependant, vous indiquez par votre amendement que les offres pourront
être déposées dans les trente jours de la production du
rapport. Cela pourra nous mener au 30 décembre.
M. Clair: C'est cela.
M. Pagé: Avez-vous l'intention de prolonger les
décrets encore une fois?
M. Clair: Non, mais de chaque année il faut prévoir
la situation non seulement pour cette année-ci, mais pour toutes les
années.
M. Pagé: Je veux dire pour cette année... Parce que
la prochaine à régler, c'est celle de cette année.
M. Clair: C'est cela.
M. Pagé: Est-ce à dire que la véritable
négociation pourrait s'amorcer seulement le ou vers la fin de
décembre 1985?
M. Clair: Dans la mesure où sur le salarial, sur la
rémunération, les offres et les demandes seraient produites
trente jours après le dépôt du rapport, cela veut dire que
oui. Maintenant, encore une fois, dans la mesure où on veut modifier le
régime, il y a une transition à faire d'un régime à
l'autre et c'est évident qu'on ne peut pas demander aux parties
d'enclencher la négociation sur la rémunération chaque
année avant même que le rapport de l'institut soit disponible si
on veut que le rapport soit utile.
M. Pagé: Je suis d'accord avec cela.
Est-ce que vous nous dites ce soir qu'il n'y aura pas de
négociation sur la rémunération avant que soit
écoulée une période de trente jours suivant la production
du premier rapport de l'institut?
M. Clair: Sur la rémunération, c'est l'effet de
l'amendement que je proposerai.
M. Pagé: Vous nous confirmez que les négociations
ne peuvent pas véritablement s'amorcer sur la rémunération
au plus tôt à la mi-décembre.
M. Clair: Exact.
M. Pagé: Et les décrets deviennent échus le
31 décembre.
M. Clair: Comment pourrait-il en être autrement?
M. Pagé: D'accord. C'est évocateur pour la
prochaine ronde.
M. Clair: Encore une fois, rien n'empêcherait cependant au
niveau de l'institut, dans la mesure où les membres vont avoir les
données accessibles au fur et à mesure, qu'il y ait des travaux
préparatoires qui se fassent pendant la même période et
qu'au moment où les offres sont déposées et les demandes
sont déposées, l'écart soit beaucoup moins grand que ce
qu'il était traditionnellement.
M. Pagé: D'accord. J'ai indiqué et nous avons
indiqué, dans notre groupe parlementaire, notre intérêt,
notre satisfaction de voir un organisme un peu moins gouvernemental, si je peux
utiliser le terme, un organisme autre que le Conseil du trésor, se
convier à une analyse rigoureuse, scientifique et objective? Pour nous,
c'était et cela demeure des éléments essentiels si on veut
que l'organisme soit crédible.
Ne craignez-vous pas que les premiers pas de l'institut risquent
d'être chancelants en le créant au mois de juin, en
procédant à sa composition complète en juillet et que,
dans un délai de quelques mois il ait déjà à
produire des rapports? S'il fallait - et que Dieu nous en garde - que ces
rapports ne répondent pas à l'objectif qu'on a établi dans
la loi, qu'ils soient évasifs, qu'ils soient discutables, etc., ce ne
serait pas drôle. (23 h 45)
M. Clair: Oui, c'est sûr, M. le Président. Est-ce
une crainte? Il y a certainement un risque. L'idéal aurait
été que l'organisme puisse naître plus tôt.
Maintenant, je crois avoir eu l'occasion amplement d'expliquer en commission
parlementaire le long cheminement que nous avons suivi depuis deux ans pour
aboutir à ce projet de réforme. Tout ce qu'on peut
espérer, c'est que dès leur nomination - si nous pouvons
effectivement procéder en juin - les gens qui seront là
s'activeront à produire les instruments les plus utiles pour les parties
d'ici la fin de la présente année. Je reconnais que les
délais sont courts, c'est un fait, c'est un fait de la vie, comme disait
l'autre.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: Cela implique, si j'ai bien compris le ministre,
presque automatiquement que le rapport étant déposé le 30
novembre avec les délais normaux et ce rapport devant servir de base au
cas de non-entente entre les parties, on doit en conclure que cela ne se
réglera sûrement pas entre le 15 décembre et le jour de
l'an et que, par conséquent, les décrets vont être
prolongés?
M. Clair: Ils sont prolongés, entendons-nous.
M. Paquette: L'application des décrets...
M. Clair: En ce qui concerne l'application. Mais en ce qui
concerne la rémunération, je ne crois pas que ce sera la
première fois où...
M. Paquette: Ah non!
M. Clair:... non mais regardez bien. Je ne pense pas que ce sera
la première fois où le règlement sur la
rémunération interviendrait après l'expiration de la
convention collective. Je ne pense pas que ce serait la première fois
où l'accord Désilets...
M. Paquette: C'est la même coutume.
M. Pagé: M. le Président, c'est bien important ce
que le ministre a dit, c'est vrai; mais c'est partiellement vrai seulement.
M. Clair: M. le Président, c'est juridiquement tout
à fait vrai.
M. Pagé: C'est juridiquement vrai, mais vous savez, au 1er
janvier prochain et au 2 janvier, ce ne seront pas, comme c'était dans
le passé, des conventions collectives qui continueront à courir.
Ce seront des décrets imposés qui continueront à
s'appliquer au-delà de la période pour laquelle ils avaient
été adoptés arbitrairement.
M. Clair: J'emploie régulièrement les expressions
"accord Désilets", "convention collective" ou "décret" mais quand
j'utilise ces trois expressions, j'ai toujours l'impression de prendre un peu
trop de temps de sorte que je peux employer l'expression que vous voudrez, peu
importe celle que vous choisirez. Je ne m'attache pas aux étiquettes
parce que cela ne change pas la réalité de toute
façon.
Pour répondre à la question du député de
Rosemont, notre objectif est de faire en sorte que chaque année le
règlement sur les questions salariales coincide avec les principales
décisions qu'un gouvernement prend et que l'Assemblée nationale
prend annuellement, soit l'adoption du livre des crédits et du discours
sur le budget. Si on voulait que cela coïncide, à ce moment, cela
voulait dire que c'était quelque part à la fin de mars ou au
début d'avril que les décisions se prenaient. Si on voulait
donner préalablement à cette date un certain nombre de mois de
discussions et de négociations, il fallait effectivement
considérer que trois mois ce ne serait pas une trop longue
période, ce qui nous ramenait au premier janvier. Si on voulait que
l'institut puisse produire un rapport qui soit utile, il nous semblait que de
le produire 30 jours avant le début un peu formel des
négociations, soit au début de l'année, en janvier de
chaque année, il fallait le produire vers le 30 novembre. Cela
coïncide également avec les travaux qui sont ceux du CRSMT pour
pouvoir être utile et c'est ce qui nous a amenés dans cet
échéancier. Cela n'a pas de bon sens? Il me semble que oui, cela
a du bon sens. Ce qu'on peut constater aussi là où il y a des
législations annuelles sur les salaires ou les règlements sur les
salaires, généralement, cela coïncide avec les politiques
budgétaires et financières du gouvernement. J'aurais mal vu
qu'après avoir déposé le livre des crédits et
prononcé le discours sur le budget, ce qui se passe
généralement en mars ou en avril, on décide que c'est en
octobre ou en septembre ou en juin de chaque année que la
négociation se fasse. Il me semble que...
Le Président (M. Lachance): L'article 2 est-il
adopté?
M. Paquette: M. le Président...
Le Président (M. Lachance): II n'y a pas d'empressement
à adopter l'article 2.
M. Paquette: Je m'excuse M. le Président, mais je pense
que ce projet de loi mérite une étude sérieuse et
attentive et ce que nous faisons...
Le Président (M. Lachance): Ce n'était pas du
tout...
M. Paquette:... comme vous pouvez le constater.
M. Pagé: Vous êtes le premier à
constater comment ce projet de loi peut être important et compte
tenu de votre carrière antérieure, je pense, vous étiez
enseignant vous?
Le Président (M. Lachance): J'étais dans la
direction de l'école.
M. Pagé: Bien, raison de plus.
Le Président (M. Lachance): Dans l'application de la
loi.
M. Pagé: M. le Président, on a
déblayé beaucoup de travail aujourd'hui, on a avancé. Je
pensais au tout début qu'on allait être convié à un
exercice d'une journée et demie ou presque avant d'aborder l'article 1.
C'est déjà fait. Il aurait pu être appliqué,
adopté. On s'attendait à ce qu'il soit adopté et c'est la
faute du ministre s'il ne l'est pas.
Le Président (M. Lachance): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: Sur l'article 2. M. le Président, compte tenu
de la mécanique complexe de ce projet de loi et en particulier du lien
qui existe entre le rapport de l'institut sur la rémunération et
la fixation de la rémunération, tout le chapitre sur la
rémunération et les salaires, et des délais possibles, de
la prolongation possible des décrets tenant lieu de convention
collective, des accords Désilets ou peu importe comment on appelle
cela...
Une voix: Avec ou sans modification.
M. Paquette: Oui. Il est donc très important que
l'institut puisse remettre son rapport le 30 novembre, comme prévu. Il
est donc important que l'institut existe et soit en mesure de faire un rapport.
On peut douter de la qualité du rapport avec le temps qui va être
mis à sa disposition et la procédure bizarre que le ministre a
décidé d'employer, c'est-à-dire de créer un nouvel
organisme plutôt que de bâtir à partir d'un organisme
existant, ce qui aurait permis de mettre les choses en place beaucoup plus
rapidement.
Il y a un autre problème qui peut se présenter. On lit
à l'article 6: Les autres membres sont nommés par le
gouvernement. Six de ces membres sont choisis parmi les personnes dont les noms
apparaissent sur les listes dressées par les associations de
salariés...
M. Clair: Question de règlement, M. le
Président.
M. Paquette: Non, mais c'est pour éclairer l'article
2.
Le Président (M. Lachance): M. le ministre, sur la
question de règlement.
M. Clair: Écoutez, M. le Président, je pense
m'être prêté assez volontiers au jeu de questions et
réponses normales des députés, mais je constate par contre
qu'on ne cesse de déborder. On étudie à peu près
tous les articles en même temps, on est à l'article 2.
M. Paquette: M. le Président, lorsqu'on aura...
M. Clair: Je dis simplement qu'un organisme est constitué
sous le nom de Institut de recherche sur la rémunération.
Quelqu'un doit être capable de se faire une idée assez vite s'il
est pour ou contre l'appellation.
M. Paquette: M. le Président, sur la question de
règlement.
M. de Bellefeuille: J'ai la permission de mon collègue. Il
y a bien plus que l'appellation dans l'article 2. Il y a le fait de la
constitution de l'organisme et c'est un des pivots de la loi du ministre. Je
m'étonne que le ministre ne reconnaisse pas l'importance essentielle de
l'article 2.
M. Paquette: Mais, M. le Président, dans cet esprit, avant
d'adopter l'article 2, il faut s'assurer que l'institut pourra fonctionner et
que ces difficultés de fonctionnement n'aient pas d'influence
néfaste sur le reste de la mécanique complexe de ce projet de
loi. C'est pour cela que j'évoquais l'article 6: Six de ces membres
doivent être choisis parmi les personnes dont les noms apparaissent sur
les listes dressées par les associations de salariés et
groupements d'associations de salariés visés dans la
présente loi, etc. Qu'est-ce qui arrive, si, compte tenu du
caractère patronal de cet organisme qui a été
dénoncé par les 19 organismes et centrales syndicales et compte
tenu aussi de la façon dont on constitue cet organisme, plutôt que
de le constituer à partir d'un organisme existant, on crée un
nouvel organisme sur pied... Qu'est-ce qui arrive si les associations de
salariés ne soumettent pas de liste?
M. Clair: J'ai toujours indiqué que nous étions
disposés, quant à nous, à ce que l'organisme soit
parfaitement paritaire dans la mesure où les syndicats des secteurs
public et parapublic nous assureraient de leur adhésion et dans la
mesure où ils ne nous en assureraient pas, nous
préférerions que l'organisme soit purement indépendant et
non pas paritaire. C'est la raison pour laquelle il y aurait trois membres
nommés par l'Assemblée nationale et c'est la raison pour laquelle
s'ils ne désignaient personne,
l'organisme pourrait fonctionner...
M. Paquette: Avec trois membres.
M. Clair:... avec seulement les trois membres nommés par
l'Assemblée nationale.
M. Paquette: D'accord.
M. Paquette: M. le Président, on arrive à la
question que le ministre a lui-même soulevée tout à
l'heure, l'appellation, parce qu'on a beaucoup discuté du principe. On
voit que l'organisme peut... M. le Président.
M. Clair: Ce n'est pas important. Une voix: Pas
enregistré.
M. Paquette: M. le Président, je pense que le
député de Terrebonne est intervenu trop souvent dans cette
commission et cela a épuisé ses réserves physiques et
mentales qui sont, par ailleurs, énormes. La somme de travail qu'il a
abattu...
M. Blais: Ne soyez pas narquois, parce que je vais vous
répondre. Cela fait assez longtemps que vous faites perdre du temps ici.
Si vous étiez ministre, cela ferait longtemps que vous auriez
accepté l'article 2.
M. Paquette: M. le Président,, sur la question de
l'appellation...
M. Blais: Ne passez pas votre amertume sur moi.
M. Paquette: M. le Président, je pense que le
député...
Une voix: II fait de la projection.
M. Paquette:... fait une intervention qu'il vaut mieux ne pas
relever à cette heure tardive, parce que cela vous ferait perdre
énormément de temps.
M. Pagé: M. le Président, je voudrais faire motion
pour qu'on dépasse minuit et qu'on laisse aller nos deux
collègues.
M. Blais:... s'il continue à ruminer comme il le fait.
M. Pagé: Je fais motion pour ajourner nos travaux.
M. Paquette: M. le Président, la question de l'appellation
a une certaine importance. Je pense qu'on assiste à la multiplication
des organismes que l'on appelle "de recherche". On a des instituts de
recherche, des centres de recherche, et ce sont très souvent des
organismes qui ne font pas de la recherche. Quand on examine le mandat
proposé de l'institut - c'est à l'article 19 - c'est, d'abord, un
mandat d'information du public de l'état et de l'évolution
comparée de la rémunération, un mandat d'enquête,
d'étude, d'analyse. À l'article 20, on parle un peu de recherche,
mais il ne s'agit pas à proprement parler d'un institut de recherche. Je
pense qu'il y a ce danger de s'illusionner sur les progrès qui sont
faits dans notre société. Je suggère au ministre de
modifier l'appellation de son organisme, soit l'appeler Centre de
données sur la rémunération ou encore Institut
québécois de la rémunération, mais je pense qu'il
est important, si on veut être cohérent dans le système
scientifique québécois, de ne pas appeler, de ne pas
dénommer "institut de recherche" des organismes qui, fondamentalement,
n'en sont pas et qui peuvent faire des recherches indirectement, mais qui ne
sont pas à proprement parler des institutions.
Le Président (M. Lachance): Effectivement, M. le
député de Terrebonne, il est minuit. La commission du budget et
de l'administration ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 23 h 59)